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I
EUX cérémonies, d'un
caractère à la fois laïque
et religieux, tenaient
jadis une place à part
dans les rites de l'É-
'a remise de
Épée d'honneur ( le
« stocco benedetto ») (") et celle de la Rose
d'or ; la première avait lieu le jour de Noël;
l'autre, le quatrième dimanche de carême.
L'histoire des roses d'or, pendant le
moyen âge ou les temps modernes, a donné
lieu à une longue série de monographies :
de quoi composer toute une bibliothèque (^).
1. V. sur l'Épée d'honneur, La Revue de F Art chrétien,
de 1889-1890.
2. Je me bornerai à citer les principaux de ces travaux:
Cartari, La Rosa iforo fontificia. Racconto istorico. Rome,
1681. — Ducange, Glossaire, sub verbo : « Rosa aurea »,
éd. Favre, t.VII,pp. 214-215. — Rechemberg, Exercitalio
de Rosa aurea. Leipzig, 1686. — Grapiiis, Schediasma
Itistoricum de Rosa aurea... Leipzig, 1696. — Ciampini,
De Sacris Aedi/îciis,pp. 120-121. — Baldassari, La Rosa
d'oro clie si benedice nella IV Doiiienica di quarisima.
Et cependant, est-il un seul de ces mé-
moires qui nous fasse connaître, pour la
période ancienne , les circonstances dans
lesquelles ces joyaux ont été distribués ou
même qui nous renseigne sur leur forme !
Sur certains points, les auteurs sont en
contradiction flagrante ; sur d'autres et —
des plus importants — ils n'ont même pas
essayé de faire la lumière. Tout au plus, si
le dernier d'entre eux a connu la destina-
tion d'une dizaine de roses distribuées
pendant le XIV^ siècle, dont sept par les
papes d'Avignon ('). Pour comble, un
archéologue allemand célèbre affirme que
Venise, 1709. — 'R^\.%c\i\wi,Comtiteniatio de Rosa aurea...
1728. — Busenelli, De Rosa aurea Episto/a.Vadoue, 1759.
— Cancellieri, Descri::io/ie délie Cappelle-pontificic e carat-
nalizie, pp. 247-254. Rome 1790. — Moroni, Disionario di
Erudisione storico-ecclesiastica, l. LIX. — Le Magasin
pittoresque, 1841, p. 326. — Mgr Barbier de Montault,
Œuvres complètes, t. I, pp. 76-78. — Girbal, La Rosa de
oro. Noticias historicas acerca de esta dadiva pontificia.
Madrid. 18S0. — Joret, La Rose dans l'antiquité et au
moyen âge ; Paris, 1892, pp. 432-434.
I. Moroni, Disionario di Erudizione storico-eccle-
siastica, LIX.
KRVUE DE l'art CHKÉTIEN.
19OI, — l'*^ LIVRAISON.
Bc\)ue De r^rt cl)rctien.
l'on ignore si une seule rose du moyen âge
est parvenue jusqu'à nous (').
C'est à combler de telles lacunes, que je
m'appliquerai dans le présent essai.
Pour résoudre des problèmes si dignes
d'intérêt, je me suis attaqué aux Archives
du Saint-Siège. Non pas toutefois aux re-
cueils compulsés par mes prédécesseurs ;
bulles, brefs, régestes de toute nature, mais
bien à la section financière, aux « Came-
ralia», aux « Introituset Exitus », jusqu'ici
universellement dédaignés. En combinant
le témoignage de ces pièces comptables
avec celui d'anciens inventaires, il m'a été
facile d'éclaircir la plupart des doutes. C'est
ainsi que l'on ne connaissait jusqu'ici, pour
le XIV^ siècle, que les destinataires d'une
dizaine de roses d'or : je suis en mesure
d'en faire connaître une quarantaine. De
même, sur la forme, le poids, la valeur de
ces insignes, sur les artistes auxquels nous
devons des merveilles de goût et de fini,
et jusque sur le caractère des papes qui les
ont commandées, l'exploration des Archives
vaticanes a fourni une ample moisson d'in-
formations nouvelles.
Je me hâte d'ajouter que mes recherches
ne porteront que sur la période comprise
entre le XI V^ siècle et le XVI^. A d'autres le
soin d'élucider l'histoire de cette cérémonie,
soit pendant la première partie du moyen
âge, soit pendant les temps modernes.
II
L
ES rites auxquels donnait lieu la re-
mise de la rose d'or sont connus dans
I. Otte, Handbuch dcr kirchlichen Kunst-Archàoloj(te
des deuischen Miltclalleis ; Leipzig, 1883, t. I, p. 364.
< Davon, ob sich irgendvvo eine goldeiie Rose ans dem
Mittelalter bis auf unsere Zeit erlialten hat, veilautet
nichts ; ein Exeniplar angeblich aus den XV'II Jahrh.,
dem Herzoge von Lucca geliorig, befand sich im J. 1855
bei einen Goldarbeiter in Uresden. T> {Deulsckes Kuiist-
biatt, 1855, pp. 119, 166.)
leurs moindres détails (on en trouvera le
détail dans le MusiBum italicumàiÇ. Mabillon
(t. II, pp. 135, 176, 236, 470-472) : la céré-
monie n'a guère varié pendant une période
qui embrasse près de huit cents ans (').
Tout au plus si une fois, une seule fois,
un souverain pontife, impatient de tout
joug, — le fougueux Jules II délia Rovere,
— éprouvala tentation de rompre avec une
tradition consacrée par tant de siècles. On
juge de la surprise de la Cour pontificale !
Le maître des cérémonies, Paris de Grassis,
ayant demandé la raison du changement,
on lui répondit qu'il n'y en avait point
d'autre que la volonté du pape, qui jugeait
à propos qu'on en usât ainsi par la suite.
Paris fut obligé de s'incliner, mais après
avoir décrit le cérémonial nouveau, il se
permit d'adresser à Dieu cette prière
bizarre : « Seigneur, en l'honneur de qui se
font les cérémonies, dirige-les en inspirant
des idées plus saines à ceux qui les prati-
quent, de sorte qu'elles ne dégénèrent point
en vanités et en ridicules (''). »
En principe, la remise de la rose devait
avoir lieu une fois l'an. Mais il arrivait que
la cérémonie était différée certaines années
et que, dans d'autres, au contraire, on distri-
buait deux roses. Ce n'était là toutefois
qu'une exception assez rare.
A la rose était régulièrement joint un
bref relatant les circonstances dans les-
quelles la distinction était accordée et
célébrant les vertus ou les mérites du desti-
nataire. Beaucoup de ces pièces nous sont
conservées, quoique la série des brefs ne
commence véritablement qu'avec le XVl^
1. Dans son Raliotiale, Guillaume Durand, le célèbre
évêqiie de Mende (►{< 1296) disserte longuement sur la
signification de la rose d'or.
2. Uurchard, Dùirium ; éd. Thuasne, t. 111, p. 419. —
Mgr Barbier de Montault, Œuvres compiles, t. I,
P- 342-
3le0 ro2;e0 D'or pontificales.
3
siècle. (Pour la période antérieure, les
registres-copies font défaut (").) Il serait
à souhaiter que l'on publiât le recueil com-
plet de ces documents : il ne manquerait
pas d'offrir de l'intérêt pour l'histoire de la
diplomatie du Saint-Siège. Que de commen-
taires curieux n'ajouterait-il pas au témoi-
gnage de nos pièces comptables !
Si, laissant de côté les questions de litur-
gie, suffisamment élucidées, nous essayons
de saisir l'esprit même de cette distinction;
si nous nous demandons quels mobiles
dictaient les choix faits par les souverains
pontifes ; et même si nous cherchons, tout
simplement, à déterminer la forme des
joyaux qui comptaient parmi les chefs-
d'œuvre de l'orfèvrerie, nous nous heurtons
aune masse de difficultés.
La première conclusion qui s'impose à
nous, c'est que l'envoi de la rose d'or à tel
ou tel prince ou chevalier n'impliquait pas
seulement une série d'imposantes céré-
monies ecclésiastiques : le plus souvent,
cette distinction se rattachait à des négocia-
tions politiques de la dernière conséquence.
Il appartient aux historiens de rechercher
quels graves intérêts, quelles savantes com-
binaisons, se cachaient derrière des actes en
apparence de pure courtoisie. L'art n'était
ici qu'un prétexte, qu'un masque ; derrière
la façade officielle, l'on finit par découvrir les
ressorts qui ont provoqué des choix, à coup
sûr longuement débattus dans les consis-
toires secrets.
Pendant la période des papes d'Avignon,
il a pu arriver que la piété du destinataire
pesât seule dans la balance. Mais plus sou-
vent des considérations d'un ordre fort dif-
I. Nous en avons pour preuve l'existence, à la Biblio-
thèque nationale de Florence, du registre-copie des années
1481-1482. Comment ce document, qui n'aurait pas dû
quitter les Archives vaticanes, est-il allé échouer sur les
bords de l'Arno ?
férent guidèrent les grands hommes d'État
qui s'appelaient Jean XXII, Benoît XII,
Urbain V, Clément VII. Leur sollicitude
s'étendait jusqu'aux confins du monde ca-
tholique. L'un deux ne donna-t-il pas,
en 1383, la Rose d'or au roi d'Arménie ! En
octroyant ce joyau, ils entendaient récom-
penser des services rendus ou provoquer à
de nouveaux actes de dévouement envers le
Saint-Siège.
Tactique, somme toute, des plus natu-
relles et qui ne pouvait que rehausser le
prestige d'une si haute distinction.
Tel était dès lors le prix qu'y attachaient
les plus grands princes, que le choix du
titulaire donna plus d'une fois naissance à
de graves conflits. C'est ainsi que, lors de la
visite simultanée faite en 1368 par le roi
de Chypre et la reine de Naples à Urbain V,
de passage à Rome, toute la Cour pontifi-
cale s'attendait à voir le pape donner la
préférence au roi. Les prescriptions du Pro-
tocole étaient, sans exception aucune, en sa
faveur. Ce fut la reine, au contraire, qui l'em-
porta. Grand émoi parmi les prélats : plu-
sieurs cardinaux blâmèrent ouvertement le
pape, et allèrent jusqu'à lui dire en face que
jamais princesse n'avait été l'objet d'une
telle faveur au détriment d'un prince du
même rang. Urbain V répondit que jamais
non plus on n'avait vu un simple abbé de
Saint- Victor de Marseille, — c'était son cas,
— s'asseoir sur le trône pontifical. En réa-
lité, il n'avait fait que constater la préémi-
nence du royaume de Naples sur celui de
Chypre (').
A tout instant aussi le caractère et le goût
des souverains pontifes se reflètent dans
la commande de ces joyaux : les uns les
veulent simples et sobres; d'autres, portés à
l'ostentation, y prodiguent les ornements.
I. Baluze, Vilœ Faparuni avenionensiuiii, t. I, pp. 38 1-
382, 408.
3Rebue îie T^rt chrétien.
Au XlVe siècle, le pape d'Avignon, Clé-
ment VII, auXVe, le pape Paul II, si célè-
bres tous deux parleur faste, ont distribué
des roses d'une richesse hors ligne.
III
DES origines mêmes de la rose d'or, je
ne dirai rien : la matière est contro-
versée et il n'entre pas dans mes vues de
m'attaquer à un problème si ardu. 11 me
suffira de rappeler que, depuis un temps
immémorial, les papes avaient l'habitude de
donner une rose le dimanche Lœtare Jerji-
salcin, c'est-à-dire le quatrième dimanche
de carême : d'où le nom de Dominica Rosœ
ou Rosata dominica, parfois donné à cette
fête (■).
D'ordinaire on fait remonter l'idée de la
cérémonie en question à saint Léon IX
(1049-1054). Les RR. PP. Cahier et Mar-
tin affirment que la châsse de Charlemagne
(exécutée en 1215), au dôme d'Aix-la-
Chapelle, représente ce pontife tenant delà
droite la rose d'or (').
Toutefois la mention la plus ancienne de
la remise d'une rose remonte, d'après
Moroni, au pontificat d'Urbain II, et à
l'année 1096. Cela se passait pendant les
préparatifs de la première croisade ; la
rose, auparavant réservée, ce semble, aux
préfets de la ville de Rome, fut solennelle-
ment remise par Urbain II au comte
Foulques d'Anjou et associée ainsi aux dé-
buts de la plus grande expédition militaire
du moyen âge. Autres temps, autres mœurs.
Aujourd'hui la rose d'or est l'apanage de
la princesse la plus pieuse; autrefois elle
servait à récompenser le chevalier le plus
vaillant.
Quelle forme les roses d'or revêtirent-
elles au début ?
1. Voy. Giry, Manuel de Diplomatique, pp. 267, 271.
2. Mélanges, t. I, pp. 1819.
La réponse n'est pas aisée. En effet, si
c'est par centaines que se sont chiffrés ces
insignes, à peine si une demi-douzaine
d'entre eux sont parvenus jusqu'à nous. Ils
ont partagé le sort de tant d'autres orne-
ments en métal précieux : à tout instant, on
les envoyait au creuset pour les convertir
en numéraire. Les chances de destruction
sont, en pareil cas, en raison directe de la
valeur intrinsèque.
Plusieurs érudits affirment que ce joyau
se composa, jusque vers le XV"" siècle,
d'une rose montée sur un pied et garnie de
feuilles; dans la suite seulement on y aurait
ajouté plusieurs fleurs, de nombreuses
feuilles et épines, accompagnées des armes
pontificales, d'un aigle, etc. (').
Moroni également rapporte que la rose
pontificale n'était à l'origine qu'une simple
fleur, dont l'or était colorié en rouge, afin
d'imiter la couleur naturelle ; plus tard on
aurait abandonné ce système pour placer
au centre un rubis destiné à donner plus
de prix au joyau ; après Sixte IV, pro-
bablement, on aurait substitué à la rose un
rosier, c'est-à-dire une branche garnie
d'épines, de feuilles et de fleurs, dont une,
celle du milieu, était plus grande que les
autres. Au centre de celle-ci se trouvait,
ajoute Moroni, un petit godet muni d'une
sorte de couvercle ou d'une plaque (« la-
mina ») percée, où le pape plaçait le baume
et le musc destinés à imiter le parfum
de la rose.
Le pied différait également selon les épo-
ques : il fut tour à tour triangulaire, carré,
octogonal. D'ordinaire, sur ce piédestal, se
développait un vase contenant le rosier.
Parfois le socle était orné des armoiries
du pape qui offrait la rose (').
1. Cartari, La Rosa li'nro pon/ijicia, pp. 17-18.
2. Moroni, Dizionario, t. L IX, p. Il 2.
3le0 roses D'or pontificales.
Pour la première partie du moyen âge
ces différents auteurs ont raison.
En effet, si l'on en juge par la statue du
comte Raymond-Bérenger IV, autrefois
placée sur son tombeau, dans l'église Saint-
Jean d'Aix (remplacée par une copie mo-
derne), la rose était, au XI II' siècle encore,
d'une extrême simplicité : c'était une fleur
épanouie, sans accessoires aucuns. (On sait
que Raymond-Bérenger avait reçu la rose
du pape Innocent IV, en 1244 (').)
Telle semble avoir aussi été une autre
rose d'or, donnée par le même pape, et qui
figura, jusqu'au siècle dernier, dans le trésor
de la cathédrale de Lyon; ce joyau était en
outre enrichi d'une pierre gravée : « Rosam
auri cum repositorio, que monstralur in
quadragesima. » ( I nventaire de la cathédrale
de Lyon ; 1448.) La description de Lyon
en 1761 donne ce renseignement: « Cette
rose est d'or et renferme une cornaline pour
tenir lieu du portrait du pape; c'est une
pièce antique qui représente une tête
d'Hercule; on la conserve encore dans le
trésor de Saint-Just; elle a été donnée par
Innocent IV, lorsqu'il se réfugia dans ce
I. « L'église Saint-Jean-d'Aix renferme une copie mo-
derne, exécutée par M. Bastiani Pesetti, d'après les des-
sins de l'ancien mausolée détruit pendant la Révolution.
On y voit la statue de Raymond-Bérenger IV, couvert
d'une cotte de mailles et tenant d'une main la rose d'or.
(Millin, Voyage da/ts les Départements du Midi de la
France, t. II, p. 287. — Cf. Aix ancien et moderne, p. 169.
Ai.x, 1833.)
Les manuscrits de Peiresc, conservés à la Bibliothèque
de Carpentras, contiennent un croquis de ce monument,
ainsi qu'une note qui a son prix : « La rose benicte d'Aix
et le tombeau de R. Bérenger. — La rose bénicte dans la
sacristie de l'église Saint-Sauveur. — A costé du tombeau
de Raymond Bérenger, qui est à Saint-Jean du faubourg
d'Aix, il y a une statue de ce prince armé de mailles selon
le temps et tenant son grand escusson de la main gaui lie
et de la droite une Rose que l'on void et qui est celle que
le Pape lui donna au concile de Lyon, fort approchanie
de celle de Saint-Just de Lyon et au contraire un peu
différente de celles qui restent suspeudues au reliquaire
de Saint-Sauveur. > — (Jean Schopfer, Documents relatifs
à l'art dn moyen âge. Extrait du Bulletin archéologique,
1899, p. 22.)
couvent. La bulle suivante en fait foi :
« Cum igitur, dum Lugduni traheremus in
claustro ecclesiee vestrse, in dominica qua
cantatur Lsetare Hierusalem,rosam auream,
quam propter diei solemnitatem more solito
in nostris manibusgestabamus, eidemeccle-
sifE vestrse duxerimus concedendam ('). »
Vers le début du XIV" siècle, une branche
de rosier fut substituée à la rose propre-
ment dite.
C'est ainsi que la rose donnée par
Benoît XI (1303- 1304) à l'église Saint-
Etienne (Saint-Dominique) de Pérouse,
consistait en une branche de rosier (« un
ramo di rose d'oro »), garnie de cinq roses
ouvertes et de deux roses fermées, avec un
saphir et un pied en bronze doré, le tout
d'une valeur de 70 ducats. Cette rose fut
vendue par les moines, probablement au
poids du métal (').
Pendant cette première période, c'est-à-
dire jusqu'à la fin du XI 1 1^ siècle, les roses
semblent avoir été relativement légères.
o
L'inventaire du trésor pontifical, rédigé en
1295, en mentionne deux ne pesant, l'une
que trois onces, et l'autre un peu plus de
deux onces seulement. « Item, II rose
auri que portantur a Domino in Dominica
de Letare ; quarum una est ponderis III
unciarum scarsas (sic), alia vero est pon-
deris duarum unciarum et dimid. gr. ['). »
Mais il se pourrait fort bien qu'il s'agît
d'une rose centrale détachée de la branche
et restée en souffrance chez le trésorier du
Saint-Sièee.
Quant à la rose décrite dans l'inventaire
de 131 I, elle provenait d'un crucifix et ne
semble pas rentrer dans la catégorie dont
nous nous occupons.
1. Niepce, Les Trésors des églises de Lyon, pp. 25-30. —
Mgr Barbier de Montault, Œuvres complètes, t. I, p. 77.
2. Cartari, La Rosa d'oro, pp. 58-59.
3. Molinier, Inventaire du Trésor du Saint-SUge sous
Boni/ace VIII, Paris, i8gS, p. 44.
îRcbue lie V^xt cl^vcticu.
« Inventarium thesauri Ecclesie Ro-
mane apud Perusium asservati, jussii dé-
mentis V factum anno 131 i. Item unam
rosam pulcram de auro, de opère fili, et
habet folia, que fuit in medio magne crucis;
et habet in medio unum magnum, grossum
et quadrum saphirum incastonatum et rele-
vatum; et per circuitum liabet duas exme-
raldas pulcras et quadras et duas alias
exmeraldas oblongas, et II II balatia, om-
nes incastonatos et relevalos. Et in fundo
est una plata de ère, ponderis totum — unius
libre, trium unciarum et unius quarti. —
Ligata est per se ('). »
Les documents tirés des Archives du
Vatican me permettent d'affirmer que le
poids et les ornements de la rose variaient
selon le caractère ou le rang du personnage
à qui elle était destinée.
Pendant le grand schisme, le pape Clé-
ment VII, qui connaissait les goûts du duc
de Berry, le plus raffiné, sans contredit,
parmi les amateurs d'avant la Renaissance,
fit exécuter à son intention une rose d'une
richesse inusitée, ornée d'un gros saphir
percé et de deux rubis balais, également
percés. Le total de la dépense s'éleva à
plus de 300 florins, soit au moins une ving-
taine de mille francs au pouvoir actuel de
l'argent.
La différence du prix de revient tenait,
non pas à la différence du poids, mais à
l'addition de pierres précieuses.
IV
APRÈS ces détails préliminaires, j'étu-
dierai, pontificat par pontificat, l'his-
toire des roses distribuées pendant le XI V^
siècle.
CLÉMENT V (1305-1314).
La rose de 1309, exécutée par l'orfèvre
Rose donnée par Clément V à la cathédrale de Bûle (iMusée de Cluny).
I. Regesti Clementis papœ V, Appendix, t. I, p. 405.
3Le0 roses d'or pontificales.
Tauro de Sienne, coûta loo florins d'or (').
Elle a disparu.
Une autre rose de Clément V, celle qu'il
donna soit à l'évêque, soit à la cathédrale
de Bâle, a été mieux partagée. Elle se
trouve, comme on sait, au musée de Cluny.
C'est une branche de rosier garnie d'une
rose épanouie, de quatre roses entr'ouvertes
et de deux boutons. La rose épanouie
l'y emporte sensiblement sur ses com-
pagnes, tandis que celles-ci, dans les monu-
ments postérieurs, luttent d'importance
avec elle.
Dans les dernières années, il est vrai, on
a révoqué en doute et l'antiquité et la pro-
venance de cette pièce : on est allé jusqu'à
l'attribuer au XVI r, voire au XVI II^
siècle, sous prétexte qu'elle ne figure pas
sur le catalogue de la vente du trésor de la
cathédrale de Bâle, d'où elle est censée
provenir {"). Mais cette opinion ne soutient
pas l'examen. En effet, dès 151 1, l'inven-
taire du trésor en question mentionne une
rose de tout point analogue à celle du musée
de Cluny, sauf pour le nombre des feuilles,
dont plusieurs ont disparu depuis lors :
« rosa aurea, cum triginta octo foliis,
quinque parvis rosis, duobus nodis et tribus
clipeis )) (^). Il résulte de cette dernière
mention que les trois écussons faisaient
partie, dès le début du XVI" siècle, de ce
monument en miniature. Seul le pied a pu
être remanié.
Les pièces comptables conservées aux
Archives du Vatican confirment le témoi-
gnage que nous apporte la rose du musée
de Cluny. Ils nous montrent qu'au XI V^
1. Faucon, Les Arts à la Cour d'Avignon sous Clé-
ment V et Jean XXII, pp. 7-8.
2. Bulletin de la Société nationale des Antiçuaires de
France, 18S9, pp. 274-276.
3. Miltlieihiiigen der Gesellscliaft fiir vater. A lier t II li-
mer in Basel, t. IX, p. 21. —
Otte, t. I, p. 364.
siècle, ces joyaux comprenaient, non une
rose unique, comme on l'a prétendu, mais
une branche portant plusieurs fleurs ou bou-
tons.Contrairement à l'opinion commune ('),
la rose était presque invariablement enri-
chie de saphirs, et non pas de rubis. Ceux-
ci ne venaient d'ordinaire que comme acces-
soires. On ajoutait en outre des grenats,
parfois aussi des perles (1372).
La rose qui figure dans l'inventaire de
Charles V (1380) était conforme à ce type :
c'était un « rosier d'or, à tenir en sa main,
auquel a deux pomellez rons » (^). Elle est,
ajoute l'inventaire, « la rose que le pape
donna le jour de la Mykaresme au plus
noble ».
JEAN XXII (1316-1334).
Au temps de Jean XXII, la rose pesait
en moyenne une dizaine d'onces et coûtait,
avec les accessoires et la main-d'œuvre, une
centaine de florins, soit au moins de 6000 à
8000 francs de notre monnaie. Ces joyaux
étaient généralement enrichis d'un ou de
plusieurs saphirs, parfois aussi de grenats.
La plupart des roses d'or distribuées
pendant ce pontificat venaient de la Tos-
cane et étaient fournies par un marchand
italien fixé à Avignon, Richo Corboli. En
1328, pour la première fois depuis plusieurs
lustres, la rose fut exécutée à Avicrnon
même, d'ailleurs par un artiste italien, Do-
menico di Jacopo de Sienne, qui eut désor-
mais le monopole de cette fabrication.
Voici, d'après M. Maurice Faucon (^), la
liste des roses distribuées de 1318 à 1334.
1318. La rose, fournie par Richo Corboli,
pèse 89 florins d'or ; elle est enrichie d'un
1. Voy. le Diziotiario de Moroni, sub verbo.
2. Labarte, Inventaire du Mobilier de Cliarles l\ roi de
France. Paris, 187g.
2. Les Arts à la Cour d'Avignon sous Clément V et
Jean XXII, pp. 45, 10 1, 103.
8
9^cl)ue Dr l'Svr cbrcticu.
saphir clu prix de i6 florins. Le tout coûte
109 florins.
1320, 21 avril. — Une rose d'or, non
donnée lors du carême précédent, du poids
de loi florins, avec un saphir de 20 carats,
est mise en réserve par Jaufre Isnard, pré-
vôt d'Aix.
1323. Le destinataire est Amédée V,
comte de Savoie. Cette rose coûte 100 du-
cats d'or et 26 florins.
1 324. Henri de Souillac. Cette rose coûte
113 florins d'or, 5 sous et 4 deniers de
petits tournois.
1325. Aymar de Poitiers, comte du
Valentinois. Cette rose, payée 100 florins
d'or, était ornée de trois saphirs et pesait
1 1 onces I denier.
1326. Le comte de Comminges (100
florins).
1328. Henri de Boeto, seigneur alle-
mand. Cette rose, exécutée par Domenico
di Jacopo, portait un saphir et deux gre-
nats ; elle pesait 12 onces, 3 deniers.
1329. Le comte de Comminges (pour la
seconde fois). Cette rose, ornée d'un saphir,
et pesant 13 onces et 1 1 deniers d'or, de 20
carats, fut exécutée par Domenico di Jacopo.
1330. Le comte de Nimbourg.
133 1. Le comte de Boeto (pour la se-
conde fois). Cette rose coûte 72 doubles
d'or et demi pour la matière et 8 florins
pour la façon.
1332. Le seigneur d'Avaugourt.
1334. Louis de Poitiers.
BENOIT XII (1334-1342).
1335 ou ^33^- La rose, du poids de 11
onces 1/2, est exécutée par Dominicus
(Minutius ou Manuchius) Jacobi et donnée
au duc Louis de Bourbon. Elle coûte 89
florins d'or, non compris la valeur d'un an-
neau d'or orné d'un saphir.
1338. Dominicus livre la rose, du poids
de 12 onces, 3 deniers, et du prix de 95
florins d'or, 5 sous, non compris un anneau
d'or orné d'un saphir. Le destinataire est
Stefano Colonna.
1338 (?). Le même artiste fournit la rose,
du poids de 12 onces un demi-quart, l'once
calculée à raison de 6 florins et demi. Il
reçoit pour la main d'œuvre 10 florins. Le
prix total s'élève à 96 florins, 9 deniers
tournois, non compris un anneau d'or orné
d'un saphir et d'un grenat.
1 34 1 . La rose, du poids de 1 2 onces et 3
deniers, à raison de 7 florins d'or, i denier
d'argent par once, est exécutée par le même
artiste. Elle est ornée d'un saphir et de deux
grenats. La dépense totale s'élève à 103
florins d'or, 5 deniers tournois. Le destina-
taire est un chevalier du roi de Portugal.
1342. La rose, du poids de 12 onces trois
quarts, 2 deniers d'or, est exécutée par le
même artiste. Elle est donnée au comte de
Comminges (« Comes Convenarum »). La
façon coûte 10 florins.
CLÉMENT VI ()342-I352).
1346. La rose est exécutée par Domi-
nicus Jacobi. (Faucon, p. 110.)
1347. La rose est fournie par l'argentier
Johannes Menuchii (.''). Reg. 248, fol. i 20 v".
1348. — La rose est donnée au roi
Louis I^f de Hongrie (Moroni).
A une époque que je n'ai pas pu déter-
miner. Clément VI donne la rose au comte
Guy VI du P'orez. Cette rose, offerte en 1372
à l'église collégiale de Notre-Dame de
Montbrison par Jeanne de Bourbon, com-
tesse douairière du Forez, veuve de Guy,
fut détruite au XVI^ siècle par les Hu-
guenots. (La Mure, Histoire des ducs de
Bourbon, édit. Chantelauze, t. III, p. 135.
Paris, 1860.)
3les ro0e0 d'or pontiôcaïes.
INNOCENT VI (1352-1362).
1353. La rose est exécutée par Marcus
Landi. Elle est enrichie d'un rubis et de
douze perles.
1360. La rose est donnée à Nicolas
Acciajoli, grand sénéchal du royaume de
Naples (Moroni).
URBAIN V (1362-1370).
•365, 1366, 1367. Les roses sont exécu-
tées par le Siennois Johannes Bartoli.
1368. La rose, confiée au même artiste,
est donnée à la reine Jeanne de Sicile.
Cette rose, du poids de 14 onces et 12
deniers d'or de 20 carats, est enrichie de
trois saphirs. Certains auteurs affirment
que la reine reçut en outre l'épée d'honneur,
mais le fait est contesté et avec raison (").
1369. La rose est donnée à la basilique
de Saint-Pierre à Rome. — Cette rose fut
détruite en 1527, lors du sac. (Torrigio, Le
Sacre Grotte vaticane, p. 4/2.)
Date inconnue. Le roi VValdemar IV de
Danemark (Moroni).
GRÉGOIRE XI (1370-1378).
La plupart des roses distribuées sous ce
pontificat furent exécutées par l'orfèvre
siennois Giovanni di Bartolo (').
Celle de l'année 1372 était particulière-
ment riche : elle pesait i marc, 5 onces,
4 deniers, et était ornée d'un saphir et de
deux perles. Elle coûta en tout 1 14 florins.
1374. La rose, exécutée par Johannes
Bartoli, pèse i marc, 4 onces et i denier
d'or de 20 carats, correspondant à 78 florins
et 12 sous ; elle est enrichie d'un saphir et
de deux grenats d'une valeur de 12 florins;
au total 105 florins, 12 sous.
1. Cartari, p. 62.
2. V. mon mémoire sur Giovanni di Bartolo da Siena,
orafo délia corte di Avi}^none 7iel XIV secolo. (Extr. de
\'Archivio storico italiano de iSSS.)
La même année il est question d'une
rose pesant i marc, 2 onces et 1 1 deniers
d'or, correspondant à 69 florins.
1375. Johannes Bartoli reçoit 100 florins,
2 sous, 8 deniers pour la rose qui est don-
née au fils du duc d'Andria.
Ce joyau pesait r i onces, 2 i deniers ; il
était enrichi d'un saphir et de deux grenats.
La main-d'œuvre coûta, comme à l'ordi-
naire, 15 florins.
1376. La rose, exécutée par le même
artiste, est donnée au vicomte de « Villa-
muro » (Villanova ?). Elle pesait i marc et
3 onces et fut payée 93 florins, 12 sous.
URBAIN VI (1378-1389).
En 1389, la rose est donnée à Raimondo
Orsini (d'après Moroni).
BONIFACE IX (1389-1404).
Je dois me borner, pour ce pontificat, à
rapporter, d'après Moroni, la liste des des-
tinataires des roses d'or.
1391. Albert d'Esté.
1393. .'Vstorre da Bagnacavallo.
1398. Ugol. Trinci da Foligno.
Date indéterminée. Benuttino Cima da
Cingoli.
CLÉMENT VII 0(1378-1394).
1379. La rose, exécutée à Fondi, pèse 9
onces, 1 obole d'or, à raison de 24 carats.
Cette rose est mise en réserve et le pape
en donne une autre envoyée de Naples par
l'évêque de Genève.
1381. La rose pèse i marc, i once, 2 de-
niers d'or, du prix de 60 florins de la
Chambre, 2 sous. On y ajoute un saphir et
deux grenats. La main-d'œuvre n'est comp-
tée que I 2 florins.
I. V. mon mémoire intitulé L'Antipape Clément VII,
p. 19.
REVUE DE L AKT CHRETIEN.
1901. — I^*^ LIVRAISON.
lO
3Rebuc lie V^xt thxtîmx.
1382. La rose pèse i marc, 5 onces, 8
deniers, 3 grains ; elle est enrichie d'un sa-
phir, du prix de 80 florins de la Chambre,
de deux rubis balais du prix de 107 florins
de la Chambre, 4 sous, et de deux autres
saphirs, du prix de 20 florins. Le total de
la dépense s'élève à 328 florins de la
Chambre, 18 sous, 4 deniers.
1383. Giovanni di Bartolo exécute la
rose destinée au roi d'Arménie. Cette rose,
du poids d'un marc, 3 onces et 18 deniers,
au titre de 20 carats, coûte 93 florins.
1385. La rose, exécutée par le même
orfèvre, coûte 107 florins, 4 sous. Elle
est donnée à Jean de Serre, parent du
préfet de la ville de Rome. (« Consan-
guineo prefecti Urbis »). Son poids s'élève
à 8 onces et 8 deniers; son prix à 1 27 florins,
4 sous,
1386. La rose, exécutée par l'argentier
Johannes Maurini et destinée au duc de
Brunswick (.-'), pèse 8 onces, 4 deniers, 16
grains, d'une valeur de 76 florins courants,
3 sous, 4 deniers. Elle revient au total à
93 florins courants, 3 sous, 4 deniers.
1887. La rose est exécutée par Johannes
Maurini.
1389. La rose, donnée à Johannes Cavi-
lone (Jean de Cavaillon ?), pèse 10 onces,
à raison de 8 florins d'or chaque once
de 20 carats. On y ajoute deux balais
percés, du prix de 5 florins courants. La
main-d'œuvre représente 1 5 florins de la
Chambre, soit au total, 88 florins de la
Chambre, i i sous.
1390. La rose, fournie par Cathalamus
de Rocha, coûte 85 florins de la Chambre,
27 sous.
1391. Particulièrement riche est la rose
donnée au duc de Berry; elle pèse i marc,
2 onces, 10 deniers, représentant 83 florins
courants et 8 sous. La main-d'œuvre est
comptée 15 florins de la Chambre de 29
sous. Un saphir percé, du prix de 125 florins
courants, et 2 rubis balais percés, du prix
de 93 florins courants, 18 sous, y sont
ajoutés. Le total de la dépense s'élève au
chiffre inusité de 320 florins courants, 5
sous, soit 274 florins de la Chambre, 4 sous.
BENOIT XIII (1394-1424).
Plus encore que Clément VII, l'antipape
Benoît XIII éprouva le besoin de recourir
aux distinctions honorifiques pour conso-
lider son autorité battue en brèche de toutes
parts.
Pendant la première partie de son ponti-
ficat, il ne négligea pas, même au milieu
des épreuves les plus dures, d'envoyer la
rose d'or aux personnages qu'il avait intérêt
à se ménager.
Je ne suis malheureusement pas en état
de donner la liste complète des destinataires
de ces insignes et dois me borner à quelques
indications sur les artistes qui furent chargés
de les exécuter, ainsi que sur leur prix de
revient.
En 1394, la rose est donnée à l'infant du
Portugal.
En 1 396, l'exécution de la rose est confiée
à l'argentier Johannes Martini ou Marini
ou Maurini, qui reçoit 68 florins de la
Chambre pour le métal et 15 florins pour
la façon. On y ajoute un saphir du prix
de 4 florins.
En 1397, la rose est fournie par le chan-
geur Thomas de Podio. Elle semble desti-
née (mais ce n'est là qu'une présomption),
au roi Martin d'Aragon qui se préparait à
visiter Avignon.
En 1398, Johannes Morini (qui mourut
cette même année) reçoit 80 florins pour
l'or nécessaire à la confection de la rose.
Celle-ci est enrichie de cinq rubis.
En 1405, on emploie 6 onces, 12 grains
d'or de 2 doublons, et 5 onces, 23 deniers
3Les roses ti'or pontificales.
1 1
d'or de florins, soit un marc et demi (d'une
valeur de 80 florins, 4 sous, 8 deniers de la
Chambre), pour la rose, qui est donnée à
Jean le Maingre, maréchal de Boucicaut,
gouverneur de Gênes. L'argentier Rubinus
de Anelha y ajoute trois saphirs et reçoit
10 francs, soit 17 florins de la Chambre,
24 sous, pour la main-d'œuvre.
En 1405, le changeur Martin Pamperati
livre pour la rose un saphir du prix de 15
florins courants, trois bons rubis balais du
prix de 41 florins courants et 6 sous, et
trois rubis moins bons, du prix de 13 florins
courants, i 2 sous (J).
L'inventaire du roi Charles V (13S0)
mentionne un certain nombre de roses d'or.
C'est d'abord, « ung rosier d'or, à tenir en
sa main ouquel a deux pommelez rons ; et
est la rose que le Pape donne le jour de la
mykaresmeau plus noble.» (Voy. ci-dessus).
Ailleurs (n" 3138) figure « une roze d'or,
où est esmaillé le Roy à genoulx devant
monseigneur saint Denis, et l'évangile
saint Jehan escripte au dos ; pesant cinq
onces d'or. »
Je doute fort que la « roze d'argent,
blanche, niellée, à ung escuçon de Bour-
gogne, pesant deux onces » (n° 3129) ait
quelque chose de commun avec la rose
pontificale (').
L'inventaire de Charles le Téméraire, de
son côté, enregistre plusieurs roses, dont
l'une ou l'autre pourrait bien remonter au
XlVe siècle.
2977. « Item, une rose d'or esmaillée de
blanc, garnye d'une fleur de dyamant de
cinq pièces et d'une grosse perle au dessus.
1. Notes sur quelques artistes avi^nonais du pontificat
de Benoît XIU, p. 3.
2. Labarte, Inventaire du Mobilier de Charles V. N"*
2156, 3129, 313S.
2978. — Item, une autre rose d'or es-
maillée de blanc, garnye d'une grosse table
de dyamant et de deux grosses perles pen-
dans en faceon de poires avec une petite
chaynecte.
2979- — Item, une autre rose d'or es-
maillée de blanc, à tout une chaynecte
garnye d'un gros rubis.
3101. — Item ung arbre d'or en manière
d'un rosier, où il y a audessus une rose
et dedens un saphir, qui poise ensemble :
I™, VII o. » Cf. n" 3367 (').
Si nous essayons de combiner les témoi-
gnages divers qui viennent d'être rapportés,
nous arrivons à la conclusion que, pendant
le XlVe siècle, le poids des roses pontifi-
cales était de dix à douze onces en moyenne.
L'évaluation des poids indiqués par les
pièces comptables donne lieu, il est vrai, à
quelques difficultés. On sait que l'ancien
marc avignonais, subdivisé en 8 onces, pe-
sait environ 223 grammes, et l'once par con-
séquent un peu plus de 27 grammes ('').Sans
entrer dans un examen, qui, pour le moment,
nous entraînerait trop loin, je me bornerai
à constater que, comme le florin d'or de la
Chambre apostolique pesait environ 3
grammes et demi et que certaines roses
équivalaient à 100 florins, nous obtenons
un poids moyen de 300 à 350 grammes
par rose. Or, c'est là justement le poids
de la rose du musée de Cluny. Les textes
sont donc d'accord avec le témoigfnasfe
des monuments.
Eugène Muntz.
(A suivre.)
1. Le comte de Laborde, Les Ducs de Bourgogne, t. II,
pp. III, 123.
2. Voy. la Revue des (Questions historiques de iSgg, t. II,
p. 7.
fe'f A^^ a'^-X \^A A,^^ K^-A \^^ iS^A jMa iSÎA\^A A^X \^-A A^-X ^'^^ a"^'A ^'
ciTiTTiria^xixiTiiiiiiixixiiiJixxiiirriiKTixixiTriirirrixriJiiiirTiiirLii^
nciiurmcn nrxir
^ § Ha Couronne ht fer, au trésor De ffîon5a (liomùarDic) '■. 1^
5f fîiii:iiT-;iiiiïiixiiiiTiiiiiiiiiritiiriiiJirriiriiixiiiiiiiïniTiii:ciiiiriiT,iiiiiii:[iiiiiii:iiiriiiiiiiiiiit;, iii^iiiiLiiiiiiiiiiiiiiiKiiriTTnri
^A ^S:"" ''iû^ *AtI^^ *ièl-^ ^^'f ^iâ^ ^iii'f ^iil^ ^iil'f ^Ail-^ *Ail^ ^Aa-'f ^iû'' ^iÔ-* ^Atl-^ \
X. — Hrmoiries De caon?a.
bbfaVpbWii>WTOWo'rin^ U A N D Charles-Ouint
voulut se faire couron-
ner de la couronne de
fer, la vraie couronne
n'existait déjà plus : on
improvisa donc pour la
circonstance la cou-
ronne actuelle, grâce à cette interprétation
vraiment hardie qu'elle contenait du fer à
l'intérieur (=). La prétendue couronne de fer
que nous connaissons n'a donc fait son
entrée dans l'histoire qu'en 1530. Cette
erreur s'est ensuite propagée fatalement, et
il est à propos d'en citer deux applications.
Les armes de Monza, gravées en tête
de l'ouvrage de Frisi, portent pour meubles
héraldiques la croix du royaume et la cou-
ronne de fer, avec cette légende: est sedes
ITALIAE REGNI MODOETIA MAGNI. Ce VerS,
avec sa rime intérieure, dénote le moyen
âge, mais je doute qu'il ait été fait spéciale-
ment pour servir d'exergue au blason de
la ville. Il importe donc de savoir à quelle
1. Deuxième partie (fin), voyez la 5'"" livraison, p. 377.
2. Le Cérémonial romain, parlant de la couronne de
fer, non de celle de Monza, mais de celle qui servait au
premier couronnement, dit qu'à son sommet existait une
lame de fer : or l'inférieur et le miiieit n'étant pas le som-
met, il y avait donc, au moyen âge, une autre couronne
distincte de celle-ci. « (2u;e quidem corona ideo appella-
tur ferrea, quod laminam quamdam habeat ferream in
summitate, alioquin area et prétiosissima 2> (Cœrem.
Roman, seu rituum ecciesiasiic. sive sacr. cœremoii.
S. S. Rom. Eccl., lib. 1, sect. 5, De tripliciimperat. corona,
Venise, 15 16). Ce livre était donc imprimé avant le cou-
ronnement de Charles-Quint.
Albert, duc d'Autriche, fut couronné ,\ Rome par Ni-
colas V', le 16 mars 1452, pujs trois jours après il reçut la
couronne impériale. Le pape, sur la plainte des ambassa-
deurs de Milan, déclara dans une lettre qu'il avait agi
ainsi à cause de la peste qui sévissait en Lombardie, mais
qu'il n'entendait par là préjudier en rien aux droits ac-
quis : cependant il ne se servit pas de la couronne de
Monza.
époque précise la croix et la couronne ont
été substituées au croissant de la lune,
attribué comme emblème par les papes.
Les armes gravées par Frisi au frontis-
pice de son tome L ont paru pour la pre-
mière fois, en 161 3, dans les Trc o/oi'ie di
Monza, de Bartolomeo Zucchi. Giulini n'a
pu citer un monument plus ancien. M. Aguil-
hon a écrit sur les armes de Monza une
dissertation spéciale, où il démontre que le
premier meuble de l'écusson fut une cou-
ronne, avec la d&v\sç. Est sedes liaiiae regjii
Modoetia niagiii, par allusion au couronne-
ment des empereurs. Aussi Landolphe a-
t-il pu, en I 128, appeler M.on7.a. priiims locus
coronœ (coronationis ?) regù Italiœ. Plus
tard apparut sur fond rouge le croissant
blanc de la lune. La couronne et le crois-
sant furent gravés sur le sceau de la com-
mune, dont les bannières portaient la croix
blanche sur fond rouge ou la croix rouge
sur fond blanc. Ces emblèmes dateraient
des guerres nationales contre les Frédérics,
car Milan donnait des armes symboliques
à ceux qui se rangeaient de son côté.
Monza ayant conquis son indépendance
politique, elle ne garda dans son sceau que
l'effigie de S. Jean, ainsi qu'on peut le voir
dans ses Statnti, qui datent de (336.
II n'y a donc pas lieu d'invoquer les
armoiries de Monza comme preuve du culte
de la couronne de fer.
XL — couronnement OcX^apolcon X".
NAPOLÉON tint, comme roi d'Italie,
à ceindre la couronne de fer. Ce fut
l'occasion d'une fête, ainsi racontée par un
auteur contemporain :
« Quand Napoléon voulut se couronner
lui-même du diadème le plus ancien et le
îliî Couronne ùe fer, au trésor de £@on3a.
13
plus féodal de l'Europe, il donna à la céré-
monie toute la splendeur et la majesté dont
elle était susceptible. Son voyage à Milan
fut semblable au triomphe d'un empereur
romain ; et la description des processions,
des pompes de tous genres, préparées pour
cette occasion, remplit un assez gros volume.
Les décorations, depuis le Palais-Royal jus-
qu'à la cathédrale de Milan, tiennent plu-
sieurs pages. Le cortège qui apporta la
couronne de Monza, était singulier : il était
conduit par une garde d'honneur à cheval,
composée d'un corps de la garde italienne ;
une voiture contenait la municipalité de
Monza ; une autre, les ouvriers employés à
transporter la couronne ; les chanoines, le
syndic et l'archiprêtre de Monza suivaient
dans une autre ; enfin venait celle dans la-
quelle le grand-maître des cérémonies de
la cour impériale portait la couronne sur
un coussin de velours. Vingt-cinq soldats
de la vieille garde de Bonaparte entouraient
l'honorable relique, qui fut reçue à Milan
au bruit des cloches et des salves d'artil-
lerie, et, à la porte de la cathédrale, par
l'archevêque de Milan, qui la porta à tra-
vers l'église, et vint la déposer sur un autel.
Des gardes veillèrent autour d'elle pendant
toute la nuit.
« Les rois sont tous comédiens : ils aiment
les représentations théâtrales ; mais aucun
n'en a mieux connu Xeffet(\MÇ. l'usurpateur ;
aucun ne les a plus fréquemment appliquées
à la folie, à la vanité, à la duperie de ses
sujets. )) (Lady Morgan, L'Italie, t. \,
pp. 283-284.)
Dans la chapelle du Saint-Clou, on voit
trois inscriptions commémoratives qu'il est
utile de reproduire. Elles se réfèrent au
couronnement de Napoléon L'en 1S05, de
Ferdinand L' en 1838 et enfin au retour de
la couronne en 1866. Je passe sous silence
les inscriptions antérieures qu'on trouvera
dans Frisi.
CORONA FERREA
ITALIAE REGVM INSIGNE
NAPOLEON! I
IMP • GALL • REGI ITAL •
MEDIOLANI IMPOSITA
VU KAL. IVN • MDCCCV '
PERENNE MODOETIAE DECVS
FERDINANDVM I
AVSTRIAE IMPERATOREM
CORONA FERREA
IN REOEM LONGOIÎ ' ET VENET "
RITE INAVGVRATVM MEDIOLANI
POSTR • NON • SEPT • MDCCCXXXVIII •
POSTERIS TRADVNT
MODOETIENSES
REGIO PALLIO ET ENSE
GRATIA CAESARIS AVCTI
FESTIVAM FELICEMQVE DIEM
VIII • ID • DEC • AN ■ MDCCCLXVI
QVA DIE VENETIA ITALO REGNO RECEPTA
ET CORONA FERREA SEPTENNIO EXVL
PROPRIAM REPETEBAT SEDEM
VICTORIO EMMANVELE II
VINDICE • RESTITVTORE
DIADEMATIQVE lAM STRENVE SVO
PRISTINVM DECVS ET NOiMEN REPARANTE
MODOETIENSES
OMNIA FAVSTA AVSPICATI
HOC MONVMENTO
PROROGABANT IN AEVVM
Le chapelain Aguilhon, qui savait tant
de choses, m'écrivait : « Je possède deux
médailles en bronze, frappées à Milan en
souvenir du couronnement, qui eut lieu le
26 mai, l'une à la date du 23 mai 1805 et
l'autre de 1 809. Si la première porte 2j mai,
c'est qu'il y a eu pour la cérémonie un re-
tard imprévu. Dans celle-ci Napoléon a la
couronne de laurier ; mais, au revers, on
voit l'Italie, sous la figure d'une femme,
poser la couronne de fer sur la tête de l'em-
pereur, donnant au royaume sa constitution.
Sur la seconde médaille, Napoléon porte
encore la couronne de fer. »
En 1812, Longhi a exécuté une superbe
gravure qui représente « Napoléon à la
couronne de fer ». « Ce rare portrait », dit
14
9^e\)uc lie V^vt cbvctim»
un amateur, M. Geoffroy, atteint dans le
commerce le prix de 20 francs.
Malte-Brun, dans sa Géop-aphie univer-
selle, a imprimé cette phrase qui n'est pas
exacte, car il n'y a sur la couronne, en aucun
endroit, trace d'inscription : « Napoléon
plaça la couronne de fer sur sa tête en disant:
Dieu me la donne, gare à qui hi touclic. Al-
lusion à l'inscription qu'elle porte : Guai a
chi la tocca. »
M. Aguilhon, consulté à cet égard, m'a
répondu : « îl n'y a pas de doute que Napo-
léon l*^' ait prononcé les paroles qui lui sont
attribuées. La certitude résulte d'un manus-
crit autographe d'un chanoine de Monza,
Jean-Baptiste Castelfranco, l'un des deux
qui, avec l'archiprêtre, accompagna à Milan,
le 23 mai 1805, la couronne de fer et qui,
ayant assisté à la cérémonie du 26, en a fait
une description détaillée en témoin oculaire.
Or il déclare avoir entendu Napoléon,
tenant la couronne dans ses mains et se la
posant sur la tête, dire assez haut : Dio vie
[ha data, guai a chi vie la tocchera. »
En souvenir de son couronnement
comme roi d'Italie, Napoléon fit remettre
au trésor de Monza, par le cardinal Caprara,
les pains d'or et d'argent offerts pendant la
cérémonie. Ces pains y sont encore ; mais
j'estime, contrairement à l'opinion de Valéry
{l^oyag. en Italie, t. 1, p. 198), que si l'em-
pereur les avait présentés au moment de
l'offertoire, il ne pouvait plus en disposer,
et que l'envoi par le cardinal légat fait sup-
poser qu'ils sont un don au cardinal du
pape Pie Vil qui les avait reçus, lors du
sacre, à Paris.
La couronne de fer vint à Paris en 1797,
par droit de conquête ; portée par les Au-
trichiens dans la citadelle de Vérone en
1859, elle fut réintégrée à Monza en 1866.
M. Aguilhon, à la demande du syndic,
a consigné ce fait historique dans une ins-
cription, apposée le long du mur dans la
chapelle du Saint-Clou.
XII. — «ccm De la s. G. Des Hites.
IE serai aussi bref que possible sur le der-
nier point, à savoir que la Congrégation
des Rites, par son décret rendu sous le
pontificat de Clément XI, en 1713, ne
tranche pas la question, qui reste intacte.
Voici le fait qui donna lieu au débat : « En
1656, les chanoines de Monza firent une
nouvelle croix, et y placèrent dans le milieu
la couronne de fer, en y joignant plusieurs
autres reliques de la Passion. Cette innova-
tion obtint, dans l'origine, l'agrément de
l'archevêque, qui autorisa une procession
solennelle, où la croix en question fut portée
avec pompe ; mais, peu d'années après, à
l'occasion d'une superbe chapelle destinée
à recevoir l'insigne relique, un visiteur ar-
chiépiscopal interdit le culte qu'on lui ren-
dait depuis tant de siècles, en ordonnant au
chapitre de prouver devant le cardinal-ar-
chevêque en vertu de quelle autorisation la
couronne de fer avait été extraite du trésor,
où elle s'était trouvée jusqu'à cette époque,
pour être mise dans la nouvelle croix d'or,
conjointement à d'autres reliques. Il défen-
dit de l'exposer publiquement sans l'autori-
sation du vicaire-général.
« Contre le décret du visiteur, les
chanoines et les habitants de Monza recou-
rurent au cardinal-archevêque, Frédéric
V'^isconti, qui jugea l'affaire trop importante
pour ladécider sans consulter le Saint-Siège;
il prescrivit ultérieurement que le recours
au pape aurait lieu dans le laps de six mois,
après lesquels la couronne de fer serait
séparée des autres reliques, et replacée dans
le lieu qu'elle occupait avant l'année 1650.
Il fallut se soumettre à la décision du prélat,
mais les recourants sollicitèrent d'abord la
JLà Couronne De fer, au trésor tie £©on5a. 15
prorogation du terme de six mois pour
porter la question au jugement du Saint-
Siège, ensuite une enquête juridique sur le
culte rendu de temps immémorial à la
couronne de fer, afin que les dépositions
authentiques des témoins et l'examen juri-
dique des titres pussent servir de base à la
sentence que l'autorité suprême du Saint-
Siège devait prononcer.Conformément à la
requête, l'archevêque délégua deux juges
et un notaire qui se transportèrent à la col-
légiale de Monza. Ils dressèrent les articles
de l'interrogatoire que devaient subir les
témoins ; ils nommèrent des experts qu'ils
chargèrent de reconnaître la matière de la
couronne de fer. Une multitude de témoins
furent successivement entendus et dépo-
sèrent de la persuasion publique et de la
tradition, comme quoi la couronne de fer
contenait un des clous de la Passion du
Sauveur ; que, pour cette raison, elle fut
l'objet de la vénération publique depuis un
temps immémorial ; qu'elle était exposée
dans l'église le jour de S. Jean-Baptiste
avant d'être placée dans l'intérieur de la
croix ; qu'on la porta processionnellement
plusieurs et plusieurs fois ; que Dieu avait
daigné opérer des iniracles ; enfin que S.
Charles Borromée et autres archevêques
avaient donné l'exemple du culte public
envers cette précieuse relique. — Après
l'examen des témoins, le notaire se trans-
porta aux lieux circonvoisins et y reçut de
nouvelles dépositions, qui confirmèrent
celles déjà faites par les habitants. Enfin
on présenta aux délégués les écrivains
anciens et modernes rendant témoignage
delà tradition commune sur le clou renfermé
dans la couronne ; ainsi que les anciens cata-
logues des reliques conservées dans la
collégiale (catalogues qui furent toujours
exposés en public) et dans lesquels on
trouve constamment la couronne de fer avec
mention expresse du saint clou.
« Toutes ces choses constent du procès
dressé devant les juges délégués par le
cardinal Visconti ; mais ceux qui suivaient
cette affaire étant venus à mourir, le procès
ne fut pas envoyé à Rome, et la question
fut assoupie. Le chapitre et la population
de Monza la réveillèrent en 1 7 1 3, en recou-
rant au pape Clément XI, qui remit la
cause à la Sacrée Congrégation des Rites.
Le vicaire capitulaire de Milan reçut com-
mission d'envoyer copie du procès fait en
1688 et 1689. S'étant transporté à Monza
pour cet effet, il reconnut la couronne,
même à l'aide d'experts, fit examiner des
témoins sur son identité, c'est-à-dire pour
établir que c'était réellement celle qui exis-
tait en 1688. Ayant ainsi formé un nouveau
procès et extrait les actes faits en 1688, il
transmit le tout, en forme publique, à la
Sacrée Congrégation des Rites, qui se
prononça favorablement» [Anakc/a, t. I,
col. 323-324).
Tout le dossier de l'affaire a été résumé
par Mgr Chaillot dans un article intitulé :
Cti/le de la cotironne de fer et publié par lui
à Rome, en 1855, dans les Analecta j'ui-is
Pontificii, t. I, col. 321-340. J'ai lu très
attentivement toutes les pièces produites et
les preuves fournies. Elles se réduisent à
trois : les auteurs, les catalogues et les
témoins. J'ai discuté plus haut les textes
des auteurs et conclu à l'impossibilité de les
appliquer d'une manière adéquate à la
couronne actuelle. J'ai cité textuellement
les inventaires et j'ai démontré que la
tradition se forme très tard, mais n'existe
pas au moyen âge : il y a à cette date une
lacune tellement considérable que l'on est
étonné de voir qu'on ne s'en soit pas ému
davantage.
Qu'ont attesté les témoins i' qu'ils ont vu
i6
3Rcbuc tir l'art djrctien»
exposer, porter en procession ('), encenser,
vénérer la couronne. Leur âge varie de
64 ans à 90 et 100. Prenons le plus âgé.
Que prouve t-il, sinon qu'en 1588, c'est-à-
dire cent ans auparavant, ce culte existait ?
Or, comme il est certain pour nous qu'il
n'a commencé qu'en 1530, on voit qu'il y a
encore un écart de cinquante-huit ans pour
lesquels ne se produit d'autre témoignage
que celui de S. Charles. Il ne faudrait pas
s'arrêter là, mais franchir encore cette date,
pour montrer que l'on n'a rien inventé alors
et qu'on a continué purement et simplement
la tradition. Ceci n'a pas été fait, et là est
vraiment le côté défectueux de ce procès,
qui ne prouve que pour un peu plus des
cent dernières années, c'est-à-dire une pos-
session centenaire et l'immémorabilité, au-
cun homme ne se souvenant alors d'avoir
vu établir ce culte, que tous disent au con-
traire avoir été en pleine vigueur. La
Congrégation a accepté le fait tel qu'on le
lui présentait et, en conséquence, elle a
autorisé l'exposition et la procession de la
couronne de fer, s'appuyant sur ce décret de
la S. Congrégation du Concile, rapporté
sous cette forme dans Delbene, De officio
sanctœ Inçitisiiioitis, part. 2, diib. 234, sect.
4 : « Lorsqu'une église possède des reliques
qui y sont vénérées depuis longtemps, on
peut les exposer publiquement, car la
Sacrée Congrégation a décidé formellement
que les anciennes reliques doivent jouir de
la même vénération qu'autrefois. »
Mgr Prosper Lambertini, qui était alors
I. « Cette déposition est contredite par la visite du
cardinal Frédéric Borromée, de l'an 162 1, dans laquelle
il est affirmé qu'on ne portait en procession que la croix
du royaume. Fontanini (XI, II) cherche à dissiper l'objec-
tion dont il sent le poids, mais à sa manière, en rodoniont
littéraire. Pourquoi ne reproduit-il pas le texte de la
visite? Les chanoines sont invités à montrer les reliques
auxquelles on prête un culte particulier et ils ne montrent
que la croix susdite, passant sous silence la couronne v>
(Lettre du ch. Aguil/ion, iSfévr. iSSo).
promoteur de la foi ('), a laissé passer cette
maxime : <<: Le fait ainsi constaté de cette
persuasion commune, de cette tradition im-
mémoriale, aurait suffi pour légitimer la
continuation du culte religieux et public,
car le Concile de Trente n'exige d'approba-
tion formelle que pour les nouvelles reliques;
ne faisant aucune prescription au sujet des
anciennes, il est censé leur conserver le
culte dont elles ont été toujours entourées. »
Sans doute la possession vaut titre en
droit ; mais, dans la pratique, avec les pro-
grès de la science, celte théorie n'est plus
soutenable ; autrement, nous serions trom-
pés à chaque instant sur une foule de choses
dont l'authenticité est très contestable. Le
regretté cardinal Altieri me disait un jour
que la Congrégation des Rites devrait
compter dans son sein des archéologues,
sinon comme membres, au moins comme
consulteurs. Voilà le moment venu de réa-
liser ce vœu si légitime. La Congrégation
reviendra sur sa décision première, comme
elle l'a fait en mainte autre circonstance,
quand elle sera mieux éclairée et qu'elle
n'aura pas seulement consulté des juristes,
mais des savants : il y a, dans l'espèce.ainsi
que cela se rencontre fréquemment, une
matière qui est du ressort exclusif de l'ar-
chéologie. Ce sera toujours un honneur
pour la science d'intervenir dans de pareilles
discussions et de pouvoir.dans l'intérêt de la
religion, formuler un avis motivé. Les bon-
I. Tels sont, d'après la table de son ouvrage sur la béa-
tification et la canonisation, les points traités par Benoit
XIV: « Corona,in oppido Modoetix' conservata,ylv7-crt di-
citur, quod in ea unus ex clavis Christi a S. Helena inser-
tusfuerit. — Hanccoronam S. Gregorius M. regin;L'Theo-
dolindit dono dédisse dicitur. — Hac corona Bononiam
e Modoetiensibus allata, Carolus in eadem civitale coro-
nalus fuit et alii imperatores eadem aliisque coronis in
diversis locis coronari consueverant. — Corona ha:c fer-
rea, in cruce aurea coUocata, inter alias instrumentorum
l'assionis Christi reliquias Modoelia: colitur, perniitlente
Sacrorum Riluuin Cnngregatione, apud tpiam, uti et Mo-
doelire, plura de ejus cultuet identitate actasunt. >
ILa Couronne îie fer, au trésor de £©on5a.
n
nés gens de Monza, appelés en témoignage,
n'ont fait que répéter machinalement ce
.qu'ils avaient entendu ou appris de leurs
ancêtres ; actuellement, on veut des déposi-
tions plus complètes, plus accentuées et
surtout visant au cœur même de la difficulté,
qu'ils ont à peine effleurée et, en tous cas,
qu'ils n'ont même pas soupçonnée.
XIII. — Bibliograpbie.
JE n'ai fait qu'effleurer la question, mais
ceu.x qui voudraient en savoir plus
long pourront se renseigner auprès des
auteurs suivants, dont la liste a été dressée
avec beaucoup de soin par Mgr Chaillot
dans les Analecta juris pontificii, t. I, col.
334. 335. 336 et que je reproduis avec
quelques variantes :
1. Gaspard Bugati, dominicain, dans le
volume intitulé Additiones ad ziniversales
histoi'ias reriiin,Medioiain,'\m\)r\mè en 1587.
2. François Collio, livre 3 De sanguine
Christi, imprimé à Milan en 161 7.
3. François Besozzi dans sa Storia ponti-
ficale di Milano, dédiée au cardinal Frédé-
ric Borromée, imprimée à Milan en 1596.
Cet auteur dit la même chose dans un autre
livre : Brève storia délia invenzione délia
santa Croce e dei sacri Chiodi, imprimé en
1603 à l'imprimerie épiscopale de Milan (').
4. Paul Morigia, Sanctuaire de la ville et
du diocèse de Milan (en italien). Milan, 1603.
5. L'auteur du livre intitulé Le Dô/ne de
Milan, réimprimé en 1642 avec permission
des supérieurs, chap. 19, De la Couronne de
fer.
6. Barthélémy Zucchi, dans sa Storia
délia corona ferrea, imprimée à Milan en
1609, avec l'approbation des supérieurs.
I. D'après Besozzi, pag. 143, des quatre clous de la Pas-
sion, deux auraient été employés au mors du cheval de
bataille de Constantin, le troisième aurait formé la couron-
ne de fer, et le dernier aurait été jeté dans l'Adriatique
pour en apaiser les tempêtes.
7. Le P. Fabius Corona, barnabite, dans
le livre intitulé Sacri tenipi, Rome, 1625,
part. III, chap. 12, p. 118.
8. Joseph Ripamonti, Histoire de l'église
de Milan.
9. Jean- Baptiste Villa, chanoine de S.
Bubila, puis maître de chœur à la métro-
pole de Milan. dans le livre intitulé Zé?.s- .j^//
églises (en italien), imprimé à Milan, avec
permission, en 1627, p. 335.
10. Jean-Pierre Paricelli, archiprêtre de
St- Laurent à Milan, dans l'ouvrage intitulé
Basilicœ Anibrosianœ iiiomnnenta. Milan,
1645.
11. Alexis Ledesma, Vie de la reine
Théodelinde. Foligno, 1689 ; Vie de S. Gé-
rard, Bologne, 1697.
12. Marien Moroni, franciscain. Terra
santa nuovaincnte illustrata. Plaisance, 1669.
13. Jean-Baptiste Cornet, // sao^o Chiodo,
tesoro del duonio di Milano ('). Milan, 1 67 1 .
14. Mabillon, dans Xlter Italiaim, t. 1,
p. 212, édition de Paris, 1687.
15. Gretser, De sancta cruce, part. 3,
pag. 2639; Ingolstadt, 1616.
16. Eustache de St-Ubald, augusiin ré-
formé. De Metropoli Mediolanensi, p. 319;
Milan, 1699.
17. Gualdus Prioratus, Relatio urbis et
statîis Mediolani, pp. 221 et 260.
18. Le P. Jean Grégoire de Jésus-Marie
de Naples, dans le livre intitulé Ultima
scola di sottigliezza cristiana fatta nel Cal-
vario. Naples, 1651.
I. La cathédrale de Milan possède un clou de la Pas-
sion, qui est conservé au fond du chœur, sous la voiite,
dans une grande auréole dorée ; une lampe btùle constam-
ment devant. « Tous les ans, le 3 mai, anniversaire de la
terrible peste de 1576, le saint clou est porté procession-
nellement par l'archevêque de Milan, à l'e.xeniple de
S. Charles, après avoir été retiré de la voûte par quelques-
uns des dignitaires du chapitre, hissés théâtralement jus-
que-là dans une machine peinte,ayant la forme d'un nuage
et mêlée de petits anges » (Valéry, Voyages historiques et
littéraires en Italie. Paris, 1S31, p. 106).
KHVUE DE l'art CHRÉTIEN.
190I. — 1^*^ LIVRAISON.
i8
3Rt\)ue lie rSrt c!)vcticn»
19. Donat Calvo, Proprinomio Evange-
lico, resohit. 25.
20. Antoine Masini, ouvrage intitulé
Distretto délia passione dcl Noslro Signore.
Bologne, 17 13.
21. Louis Tatti, de la Congrégation des
Somasques, Martyrologium Novocoinensc,
P-75-
Cette liste peut être utilement complétée,
ce que je vais faire.
22. Muraton, A necdola litteraria, tom. 1 1 ;
Annali d' Italia, t. IV, p. 8 ; Reruiii Itali-
carum scriptores, t. I, p. 460 ; Comment a-
rium de Corona ferrea.
« Il faut compter principalement (parmi
les manuscrits de l'Ambrosienne), ceux
dont Muratori a fait usage dans ses mé-
langes : Anecdota ex Bibliothecce Ambro-
sianœ codicibus, 1697, in-40, 2 vol., dont le
premier contient quatre poèmes de saint
Paulin, évêque de Nola ; et le second,
beaucoup de pièces historiques, dont la
plupart sont relatives à la couronne de fer »
(Millin, Voyage dans le Milanais, t. 1,
p. 201).
Pour Muratori, le couronnement avec la
couronne de fer n'aurait pas eu lieu avant le
IX^ siècle, ce qui ferait concorder parfaite-
ment l'histoire avec la donnée archéolo-
gique. Dans ses Annali d' Ilalia, il assure
que Bérenger, duc de Frioul, ayant été
élu roi d'Italie en 888, il est permis de
croire que c'est à cette date qu'il faut se
tenir : « e permesso di credere che allora si
cominciasse ad usare la corona ferrea ». Ce
serait une hypothèse des plus probables
si M. Labruzzi ne contestait le fait en disant
que Bérenger « ne fut pas le premier qui
se fît couronner en Lombardie » [Il Btcona-
rotti, 2^ sér., t. XII, p. 83), et qu'il ne se
crut obligé de faire remonter la couronne
de fer plus haut que les rois d'Italie (p. 125).
Muratori, racontant le couronnement de
Charles-Ouint à Bologne, en 1530, dit posi-
tivement qu'à cette époque on ignorait-
encore l'existence du clou dans la couronne
de fer, argument d'une grande valeur
historique contre son authenticité : « Vien
descritta essa corona, portata cola da Mon-
za, non meno dal Giovio che dal maestro
délie cérémonie del papa, presso il Rinal-
di senza che alcuno sognasse allora
quel ferro essere un chiodo délia Passione
del Signore Ne alcuno di essi scrive
che si mostrasse alcuno seenodi venerazione
a quella corona, come cento anni dopo im-
magino il Ripamonti nella sua Storia di
Milano. »
23. Un volume in-f° de la bibliothèque
du chapitre, resté à l'état de manuscrit, a
pour titre : De corona ferrea, qiue asservatnr
in templo perinsigni sancti Johannis Bap-
tistœ Modoetiœ, disputatio cum responsione
ad D. Lîcdovicnni Antonium Muratorium,
auctore Petro Paulo Bosca, ex sodalitio Obla-
iortini, protonotario apostolico, et archipres-
bitero Modoetiœ ('). Voici le sommaire des
principaux chapitres: Cap. III. Qualis sit
Corona ferrea ; qiiid de illa senserit Pan-
vinius, Blondus et Volateraniis, quorum
opinio confutatur. Cap. V. ^In corona ferrea,
quce asservalur Modoetice, tnstituta fuerit a
Maximiano imperatore, an a Carolo Magno;
eam institîitain ftiisse a Tàeodelinda, l'egina
Longobardorum, affr)namus, et, data occa-
sione, obi ter agimus de corona ferrea Ilenrici
septimi. Cap. VI. Ati reges Longobardortmi
corona ferrea fuerint redimiti, et an regni
insignia caperent, tradita sibi hasta. Cap.
VII. Fidèles venerantur coronani ferream,
quod in ea inclnsus stt unus ex clavis, quibus
I. Mgr Bosca fut archiprêtre de 1680 à 1699. « L'dcriture,
dit Ajjuilhon, en est très décolorde. D'ailleurs, tous les
apologistes de la couronne en ont fait très peu de cas. »
3La Couronne De fer, au trésor tie ®on5a.
19
est Jésus crucifixus. Cap. VIII. Solvuntur
argumenta adversantia (').
24. Giusto Fontanini, Dissertatio de
corona fcrrea Lo7igobardorum, Rome, 1 7 1 7,
in-4° de 132 pag., avec planches.
L'ouvrage est adressé à la Sacrée Con-
grégation des Rites au nom de l'archiprêtre,
des vingt-deux chanoines et de tout le clergé
de l'insigne et royale basilique, ainsi que du
préposé de la fabrique, du magistrat et de la
population de Monza.
2^.Sacra Congregatione Rituum, Etnin'^'^'^^
et Rev'^'^ D. Card. Ptolomeo ponente. Medio-
lanen. Sjiper cultu Coro7iœ Ferreœ, pro
Reverendissimo Capitula Insignis CoUegiatœ
S. Joaiinis Baptistœ Modoetiœ et Communi-
tate ejusdeiu oppidi, eottfra D. Promotorem
fiscalem cîiriœ archiepiscopalis Mediola^ii,
Responsio (Rome), 1 7 1 7. Ce voturn est signé
« Guglielmus Ricca ».
26. Lamberiini, De servorum Dei beatifi-
catione, 1747, lib. IV, pars II, cap. 25.
27. Solenne trasporto délia sacra corona
ferrea con croce del regno da Â'Ionza alla
metropoli di MilaJio, seguito il giorno 22
maggio 180^, colla deputazione superiormente
dele^ata adoo'Setto dell' incoronasione di
Napoleone primo, imperatore dé francesi in
re d'Italia. Q^ in-8° de 14 pag., sans date
ni lieu d'impression.
28. De Murr (Theophilus), Dissertatio
de corona regnin Italiœ vidgo ferrea dicta.
Monachii, 1808, in-4° de 54 pages, avec
deux mauvaises gravures.
29. Bellani (Antonio), chanoine de
Monza. La corona ferrea del Regno d' Itaha,
considerata 7° corne monumento d'arte, 2'^
corne monumento storico, j° co7ne monumento
sacro. Milan, Sirtori, 1819, in-4'i de 210
pag., avec une mauvaise vignette au fron-
tispice.
I. Frisi, t. III, p. 251.
30. L'extrait du Giornale dell' Italiana
letteratura, où la « Memoria apologelica »
fut publiée la première fois (Padoue, 1819,
sér. II, t. XXI) forme un in-8° de 45 pag.
31. Martorelli, Rivista delf Apologia di
Bellani, apud Giornale Arcadico di Roma,
tom. IX.
32. Articolo sulla corona ferrea, estratto
dal Giornale dell' Italiana letteratur-a, Pa-
dova, settembre et ottobre 1S19, con note cri-
tiche, Venise, 182 i, in-4° de 65 pag.
C'est la réimpression de la première
édition du n° 30.
2,1- Francesco Antolini, Dei re d'Italia
inaugurati 0 no colla corona ferrea da
Odoacre fine a Ferdinando I . Milan, 1838.
34. Marimonte, Memorie storiche délia
città di Monza, Monza, 1841, in-8°.
35. Corona ferrea, Monza, sans date
(mais postérieur à 1859), in-f'^ d'une page.
36. Bianconi, avocat, Memoria intorno
la corona di ferro Longobarda; Milan, 1 860,
in- 8" d'une feuille.
Ty"]. Oreste Raggi, Délia corona di ferro,
Firenze, Barbera, 1861, in-8'' de 36 pages.
38. Bombelli, Storia délia corona ferrea,
Florence, 1870.
39. Zerbi (Luigi), La corona ferrea ai
funebri nazionali di Vittorio Emmanuelle
II, re dltalia: considerazioni storiche docu-
mentale; Monza, 1878, in-80 de 68 pag.,
avec une gravure de la couronne.
40. Labruzzi di Nexima, Délia origine
italiana délia corona ferrea, studio storico-
critico, apud // Buonarotti, Roma, 1 898,
t. XII.
De Mély, La couronne de fer et la dona-
tion Constantinie7tne, Paris, 1897, in-8*^ de
4 pag, Extr. de la Gazette des Beaux- Arts,
viP du i" mai.
20
3Bi.t'ti\K lie rSvr tljvfttcn.
M°:
XIV. — Fontanini.
ONSEIGNEUR Fontanini, camé-
er d'honneur de Clément XI,
comme il s'intitule dans sa dissertation {A
cubiculo liono7'ario Sanctissimi,, Domini
Nostri Clcnientis papce XI), puis évoque
titulaire, tient une place trop considérable
dans la bibliothèque de la Ste Couronne,
pour que je ne cherche pas à exposer sa
thèse, quelle qu'elle soit. Voici le résumé
qu'en a fait Léon Palustre :
Dans sa préface, il dit que l'on a voulu
récemment détruire le culte rendu à la cou-
ronne de fer « avant S. Charles, par
S. Charles et après S. Charles ». Il paraît
que les théologiens se sont prononcés à ce
sujet, et dès lors la question est tranchée,
puisque S. Augustin a écrit : « Ouid adhuc
quaeris examen, quod jam factum est apud
Apostolicam Sedem ? »
« C'est ainsi qu'au XV! 1 1" siècle, on fai-
sait de l'archéologie. Il faut avouer que la
tâche était facile.
« P. 2. Fontanini attribue les doutes éle-
vés sur l'authenticité de la couronne de fer
à la jalousie des Milanais (').
« P. 5. Il cite les fragments suivants du
discours de S. Ambroise De obiiu Tlieodosii
iiiagni : « Ouctsivit clavos etc. » ('), « de
ALTERO diadema intexuit (nempe intiis
texîiit) ».
« Corona de cruce (ideo de clavo crucis). »
« Fontanini ajoute :« Libuillongiusculum
Ambrosii testimonium recitare, ut diadema
ab oratore sanctissimo pro Corona directe
sanctum patefieret. Ouare vox diadematis
ab Ambrosio usurpaia levé est argumentum
1. Labarte .en a parlé, disant que cette opinion a été
combattue par le cardinal Tolomei, l'ierre Paul Rosca, le
P. .Mlegranza, Giusto Fontanini, archevêque d'Ancyre, et
Frisi. De Linas rapporte ce jugement dans son Orfèvre-
rie chnsonnce, publiée dans la Revue de l'Art chrétien.
2. Le texte étant reproduit plus haut, je n'en retiens ici
cjue les deux passages commentés par l'auteur.
adversus Coronam fei'ream Modoetiensem.
Si enim clavus in circulum seu rotundam
laminam versus, et coronrc imperiali ab
Helena intextus, vertici Constantiniano
aptari potuit, cur hanc laminam ferream co-
ronse Modoetiensi regum italicorum inser-
tam.a corona seu diademateConstantiniano,
qure promiscue usurpavit Ambrosius, ab-
horrere putabimus ? Hoc idem ab Helena
çevDuis ijisignitnui testatur Ambrosius.
Gemmis et auro ibidem insignita est corona
Modoetiensis. Utraque regiis capitibus cin-
gendis extructa, ita ut unam ab altéra di-
versam haud temere quispiam existimet. »
« P. 22, il dit :« Hac ex parte clavi Domi-
nici munus Theodolindae factum a Magno
Gregorio verisimile omnino videtur. »
« Mais à cette époque le clou ne faisait
donc pas partie de la couronne ou il s'agit
alors d'un second clou. N'y a-t-il pas oppo-
sition entre la p. 5 et la p. 22 ? Il parle de
constans fama et de rerttin vetttstas qui,
d'après Baronius, valent mieux que des
scripta.
« Une nouvelle couronne de fer fut faite
pour l'empereur Henri VIII. Qu'est elle
devenue ? »
Je continue personnellement la critique
de l'ouvrage :
Mgr Fontanini, p. 16 de sa dissertation,
a écrit ceci avec beaucoup trop d'assurance :
« In sacello ad Levani majoris Basilicai
Modoetiensis etiamnum spectatur egregia
in rem nostram pictura A. I). 1444 confecta,
ubi arca sacrorum pignonim reserata coram
Theodolinda et Adalwaldo regibus, Medio-
lanensi antistite aliisque Ecclesiœ et aulae
ministris, noniiulli sacra vasa et crucem ma-
nibus gerunt, sanclo Gregorio pontifice co-
ronam regiam preeferente, qure a ferrea non
discrepat, quamvis pictor pro sua audendi
potestate in ea efformanda ingenio nonnihil
indtilserit. Nullam porro coronam per Gre-
iLa Couronne De fer, au trésor de £©on3a.
21
gorium ad Theodolindam missam fuisse
legimus prseter ferream. Ouid clarius ad
evincendum A. D. 1444 coronam Modoe-
tiensem inter sacra lipsana publiée recensi-
tam. »
L'archéologie a au moins cela de bon
qu'elle apprend à voir clair et donne la
possibilité de réfuter les plus mauvais argu-
ments. D'abord, où lit-on que S. Grégoire
ait envoyé la couronne de fer à Théode-
linde ? Fontanini a-til cité un seul auteur
contemporain ou à peu près du fait ? Jamais.
Il s'étaie de textes postérieurs à la fresque
elle-même et surtout de l'autorité « de Si-
gonio, qui, selon l'érudit Aguilhon, n'en
parle que d'une manière tout à fait induc-
tive ». De plus, la fresque en question ne
représente que les objets du trésor, nulle-
ment les reliques ; la scène de la donation
de celles-ci est à part. Or Fontanini fait ici
allusion, à ne pas s'y méprendre, à un ta-
bleau que j'ai décrit dans mon ouvrage sur
Monza et qu'il n'a pas du tout compris. En
effet, il transforme l'archiprêtre en S. Gré-
goire, celui qui reçoit en celui qui donne.
Et à qui donnerait-il ? Non pas à un ecclé-
siastique, mais à un serviteur. Et que donne-
t-il ? Non pas une couronne quelconque,
mais la poule et les poussins! Quant à l'ar-
chevêque de Milan, ce ne peut être qu'un
des chanoines ashistants, peut-être celui qui
est chape.
Aguilhon poursuit: « Il y a un autre
moyen de réfuter le prélat, c'est la disposi-
tion elle-même des divers tableaux qui
composent la fresque. Les gestes de la reine
sont, en efiet, figurés en plusieurs zones
superposées, qui se déroulent de gauche à
droite, comme dans un livre. Nous voyons
d'abord la reine, se reposant dans une iorêt
avec ses dames, et contemplant la colombe
qui lui désigne le lieu où elle devra bâtir
l'église qu'elle a vouée à S. Jean ; puis les
ouvriers travaillant, par ses ordres, à briser
l'idole d'or à laquelle Agilulf rendait hom-
mage, avant sa conversion ; les orfèvres,
dans leurs ateliers, exécutant les divers
objets destinés au culte ; l'acte de donation,
dicté par la reine à un notaire qui écrit sur
ses genoux ; enfin la remise elle-même du
trésor à l'archiprêtre et au chapitre. » Cette
scène fait donc une suite naturelle aux
précédentes et les complète. Fontanini a
mal vu ou il s'est fié à des correspondants
mal renseignés, peut-être même prévenus
et interprétant de parti pris.
Je termine par cette considération : Fon-
tanini, p. 44 et suiv., cite deux textes qui ne
prouvent pas la thèse impossible qu'il sou-
tient : l'un est la lettre de l'empereur Hen-
ri VII ("), demandant en 13 10 qu'on le ren-
seigne exactement sur la cérémonie du cou-
ronnement : « Committimus vobis et man-
damus ut archipresbyter cum tribus aliis
senioribus qui sciunt quid opus sit ad coUa-
tionem coronai ferrea;, sine ulla dilatione ve-
niant ad nos, portantes omnia privilégia et
instrumenta quct apud vos Modoeti^e asser-
vantur. » Le cardinal Arnaud de Pellegrue,
légat du Saint-Siège,écrit aussi aux religieux
du monastère de Saint-Ambroise à Milan :
« Sane quum idem Dominus rex ad exqui-
rendum ubi et in quo loco sit corona ferrea
quam habiturus est suique habuerunt prœ-
decessores, necnon ad perscrutandum.scien-
dum et se plenius informandum de modo
et forma tenendis in coronatione jam dicta.
I. Le chroniqueur Rolandino de Padoue, qui écrivait
dans la seconde moitié du XI II'' siècle, atteste comme
un fait public le couronnement à Monza avec la couronne
de fer : « Burgum Modiciani attentavit (Henricus VII)
intrare, volens eam privare forsitan illa nobili dignitate
corouEp ferrea:, quas illic est ab antiquis nostris in hono-
rem Lombardicœ libertatis hac de causa reposita.ut scili-
cet quandocumque fuit Romanorum imperator electus
légitime, posl electioneni de se factam in regem Alaman-
norum, hic idem corona ferrea primitus coroiietur,deinde
pergens Romam sumat coronam auream ab Apostolica
dignitate ». (Rer. Italie. Script., t. VIII, p. 347.)
22
îRcbuc ïie ran chrétien.
mittatad vos venerabilem virum magistrum
Galassum de comitibus de Mangone, cano-
nicum Cameracensem, domini papecappel-
lanum, ipsius domini régis consiliarium et
familiarem mandamus quatenus eidem
magistro Galasso ubi sil corona praedicta et
scripta quaelibet necessaria ad modum et
formam tenenda et quidquid scitis vel scire
potestis per vos et alios, circa coronationem
eamdem referatis eumque informetis plena-
rie, ut in reditu suo sciât dicto domino régi
referre per ordinem, nullo dimisso, omnia
quœ circa coronam et coronationem hujus-
modi sint agenda. 5»
Ainsi la couronne était perdue et la tra-
dition interrompue. L'orfèvre Lando, de
Sienne, fut chargé en conséquence de fabri-
quer une nouvelle couronne ('), « coronam
ferream lauream », qu'un chroniqueur sem-
ble avoir vue, car il la décrit minutieuse-
ment : « Ex nitido chalybe fabricatam in-
star serti laurei quo triumphatores augusti
olim coronabantur et lapillis pretiosis orna-
tam. )> Si c'est une couronne laurée à la
façon de celles de l'antiquité, il faut avouer
que nous n'en avons plus le type ; mais
peut-être ces paroles pourraient-elles con-
venir à la couronne figurée sur le bas-relief.
En effet, nous y voyons des gemmes au
bandeau et, au-dessus, des feuillages qui
suffisent à indiquer des lauriers. Il ne faut
non plus demander aux textes une précision
trop rigoureuse.
I. Luigi de Angelis, dans ses Osservazioni critiche so-
pra una crw^ r// rawc (Sienne, 1814, pag. 29), attribue
cette couronne à « Maestro Lando, orafodi Enrico III >,
cité par l'abbd Cristofano Amaduzzi, dans ses I.ettere
Sanesi, t. II, fol. 12. L'empereur, après son couronnement
comme septième roi d'Italie, fit porter « par ses deux
médecins la couronne de fer,exécutée par Lando, à Astol-
phe de Lampignano, abbé du monastère de St-Ambroise
de Milan, voulant qu'on l'y conservât en perpétuel souve-
nir de son couronnement >.
Frisi, I, 173, cite ce texte qui nomme Maître Lando
lors de la remise faite .'i l'abbé Astolfe : « Pr;csente
magistro Lando de Sennis, aurifabro qui priudictam
coronam propriis manibus fabricavit ».
XV. — Opinion De ffi. KonDakoto.
/"^ETTE notice était écrite depuis plu-
^-^ sieurs années, quand a paru le splen-
dide ouvrage de M. Kondakow sur les
émaux byzantins. Comine il n'est pas dans
le commerce et qu'il n'a été tiré qu'à un
nombre très limité d'exemplaires, je crois
utile d'en donner ici un long extrait, qui
justifiera pleinement ma manière de voir.
« Labarte essaie d'appuyer son hypothèse
sur la couronne de fer italienne (fig. 68), à
laquelle nous donnons, nous aussi, bien en-
tendu, la première place parmi les couron-
nes émaillées, puisqu'elle est le plus ancien
monument byzantin de cette espèce ('). Elle
consiste en un bandeau d'or circulaire ou
plutôt ovale (0,53 m. de haut sur 0,15 et
0,17 m. de diamètre), qui se compose de
six parties (plaques) mobiles, réunies par
des charnières. A l'intérieur, il est doublé
d'un cercle en fer qui, suivant la tradition,
serait forgé d'un clou de la Vraie Croix, d'où
ce nom curieux de Couronne de fer ('). On
lui donne aussi le nom de Conronne lombarde,
en vertu de celte autre tradition, consi-
gnée dans les chroniques, d'après laquelle
elle serait, avec les autres richesses de
Monza, un don de la reine des Lombards
Théodelinde (fi^ 625), fondatrice de la cathé-
drale de Monza. La tradition assure, en
outre, que cette reine reçut, à titre de pré-
sent, différentes saintetés (sic) du pape Gré-
goire le Grand qui, lorsqu'il était encore légat
du pape Pelage H, les avait reçues, de son
côté, de l'empereur grec Constantin Tibère.
1. « Elle est conservée dans une chapelle de la cathé-
drale de Monza, près Milan ; on la garde d.ins un reli-
quaire spécial du XVI 11° siècle. Muratori et Frisi en
donnent une reproduction inexacte ; la chromolithogra-
phie de Fr. Bock est assez bonne (voyez son ouvrage :
Klcinodien des Hciligcn Roinischcn Reiches Dcutscher Na-
tion. Wien, 1SS4, gr. in-fol., planche XXXI II, 49. >
2. < D'après Bock, l'expression corona ferrca apparaît
pour la première fois dans une chronique de la fin du
XIII' siècle. »
îLa Couronne tie fer, au trésor tie £©on3a.
23
Labarte se borne à montrer l'analogie de
cette couronne avec celle qui figure dans un
bas-relief au-dessus de la porte d'entrée de
la même cathédrale (bas-relief qu'il attri-
bue d'ailleurs faussement au VI^ siècle), et
il est convaincu de cette haute ancienneté
de la couronne qui nous occupe. Fr. Bock
fait observer, non sans raison, que le petit
diamètre laisserait supposer plutôt un ex-
voto qu'une véritable couronne ('), qui, tou-
tefois, ne daterait pas d'avant le IX^ siècle,
et qui, selon toute probabilité, provient de
la chapelle construite par le roi Bérenger
(►î< 924) à la collégiale de Monza.
« Tout en admettant les principales idées
de Bock, qui est un profond connaisseur
du moyen âge, nous ne pouvons cepen-
dant partager son opinion sur un point. Ce
savant considère cette couronne comme un
travail byzantin, très semblable au reli-
quaire grec de la cathédrale d'Aix-la-Cha-
pelle ; nous croyons, au contraire, en raison
de sa grande analogie avec le retable de
Milan, qu'elle est d'origine lombarde. En
ce qui concerne le reliquaire du trésor de la
cathédrale d'Aix, il ne date que d'avant le
XI^ siècle et ne peut, comme nous le ver-
rons plus loin, entrer pour nous en ligne de
compte. L'ornementation de cette couronne
est extrêmement simple, même pauvre ;
elle correspond parfaitement au style lourd
romano-chrétien des VI^ et VII^ siècles, tel
qu'il domine dans les sculptures de Ra-
venne. Au milieu de chaque plaque de la cou-
ronne brille un gros cabochon (émeraude,
améthyste ou grenat); de là partent quatre
I. C Bock compare cette couronne à deux bracelets {ar-
millœ) (fig. 69 et 70) en or, ornés d'émaux et qui ont été
trouvés en 1730 près de Kazan (voyez Bayer, De duobtis
diadematibus^ dans les Cominentaf ii Académies Petropo-
litanœ, t. VI 11, 1736). Mais il est probable que ces
deux cercles étaient des couronnes votives, comme toutes
celles du fameux trésor de Guarrazar, près ToIède,offertes
aux églises d'Espagne par les rois Wisigoths. »
rosettes à sept feuilles ; leur dessin et leur
gravure sur or assez grossiers rappellent
les diptyques et les ouvrages d'or barbares.
De cette espèce sont, par exemple deux
boucles d'or trouvée^s à Ravenne et qui
avaient appartenu à une cuirasse gothique
complètement détruite {'). Une sorte d'en-
taille qui termine les traits de ciselure rap-
pelle beaucoup cette facture barbare que
l'on rencontre depuis le V^ jusqu'au VI I^
siècle dans toute la Russie méridionale, sur
les bords du Danube, en Hongrie, comme
aussi dans l'Italie du Nord. Les pierres
fines sont serties dans de simples alvéoles
ou chatons bien polis, tout entourés de
branches de palmier ciselées ou d'ornements
pareils à ceux du reliquaire d'Herford.Dans
les intervalles, ou plutôt sur le fond entre
les rosettes, on voit (comme autant d'émaux
de plique) de petites plaques aux bords sail-
lants et repliés toutes couvertes d'émail. Ces
plaques sont fixées au cercle au moyen
de crochets spéciaux [^). Le dessin de cet
émail correspond aux rosettes qui ont des
ramifications de perles (émail blanc) ou de
lierre (émail bleu clair). Le fond est vert
émeraude translucide. Les bandelettes très
épaisses représentent des feuilles, pousses et
bourgeons etse terminentpardes points d'or,
comme ?,\xx\ç.Paliotlo de Milan. Toute la fac-
ture, le type général et l'extrême simplicité
de ces émaux indiquent qu'ils sont du IX^
ou bien du commencement du X^ siècle. L'é-
mail blanc sur fond émeraude se distin-
gue par un ton assez criard. 11 n'y a d'émail
bleu cendré que sur les baies ; partout ail-
leurs on ne voit que l'émail brun pourpre
1. « Voyez Charles Diehl, Ravenne, Paris, 1886, p. 79.
Voyez ibidem les rosettes sur le siège de l'évêque Maxi-
mien, du VI" siècle (p. 151). »
2. « Il y avait peut-être en dessous des dessins ciselés,
et ces petites plaques appartiennent peut-être au IX'= siè-
cle, tandis que le cercle lui-même, beaucoup plus ancien,
n'avait primitivement aucune décoration d'émail. »
24
Bcbuc De ravr cbvctinu
ou écaille, toujours transparent. La cou-
ronne de fer lombarde n'a rien de commun
avec les couronnes impériales, royales ou
ducales: les petits trous, percés de dislance
en distance au bord du bandeau, prouvent
d'ailleurs d'une manière irréfutable que
nous sommes en présence d'une couronne
votive, qui fut ornée d'émaux au IX'^ siècle,
à l'occasion de quelque sainte relique con-
tenue dans son intérieur. Il n'y a du reste
aucune raisoa pour mettre en doute cette
croyance très ancienne que le cercle de fer
intérieur avait un sens sacré ; cependant il
est hors de doute que dans le principe ce
cercle avait été uniquement destiné à con-
solider et à maintenir les plaques mobiles
du bandeau d'or. »
[Hisloirc et viomunents des émaux hyzan-
ti'ns, par Kondakow, Francfort, 1892, pages
222-225.)
M. Kondakow donne, de grandeur natu-
relle, une bonne gravure de la couronne de
Monza et il ajoute, en confirmation de
son opinion, deux autres gravures des cou-
ronnes de Kazan, qui ont avec elle une
grande analogie de style et qui, comme elle,
ont leurs plaques reliées à l'intérieur par
un cercle de fer.
Page 86, il écrit : « Le monument émail-
lé translucide le plus ancien est \ç. paliotto
de l'église de St-Ambroise de Milan. Puis
vient la couron le de fer. » Et page 108 :
« Le monument le plus ancien de l'émail-
lerie cloisonnée byzantine qui porte une
date est le paliotto ou retable de San Am-
brogio de Milan, dont l'inscription contient
le nom de l'évêque Angilbert (environ 835
après Jésus-Christ) Le dessin le plus
caractéristique est celui des panneaux Il
y a quelque chose d'analogue sur la fameuse
couronne de fer .»
Mgr X. Bariiif.r de Montault.
i
A^%< A^^ViU >M*. a'^-* Jt^-A *^ *^^ JC^ W^ K^A A^>A A^^ A^ ;t^^ A^^ ^
-1.- ~ ■- - .^r-,*»»!. nrTTTTT I I IITITtT»^ITT-|TT"rT^TTTTTTrirTrTTTTTYTTTTTTT»TTTTTTTTTTTTTrT f I T I I T 1 I f T T TT T T T~rTT T T T T rVTTTm r^m: I
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*;i5^ ^Afcl-* ^i^-^ *i^î^ *Atl^ ^i^-^ ^itl-^ "^"^ ^^"^ *^^ *Aèl-* ^^^ ^Ai^"' *Aii-^ ''^^ *
EPRENONS la suite intein-om-
pue des ornements végétaux com-
binés. Nous avons fait connaître
la guirlande, dont voici (fig. §j)
un nouvel exemple. Nous avons cité la
chute, assemblage analogue suspendu par
un bout, comme le montre la figure 54, qui
n'a pu trouver place à la fin de notre
premier article.
Le rinceau (v. plus haut, fig. 43) est une
F'g- 53-
branche enroulée et courante. Le rinceau a
pris son origine dans l'art grec ; l'acanthe
en a fourni les premiers emplois. On le
voit aussi comme élément courant dans quel-
ques frises; il se développe surtout dans les
frises romaines (/ig. §§). Il subsiste au
Fig. 54. — Chute.
moyen âge comme à la Renaissance, et
constitue un des motifs les plus constants,
les plus riches et les plus aisés à déve-
lopper de l'art décoratif.
I. Voyez la i" partie, p. 481, igoo.
Uni»'"' Wi,
^i&' 55- — Corniche du théâtre d'Arles.
La figure 56 nous montre une bande de
bouquets.
\-! arabesque (fig. ^y) désigne une combi-
naison de branches végétales mêlées parfois
de motifs vivants et d'objets artificiels. Ces
ornements furent imités des
décorations sarrasines, per-
sanes et arabes. Ce nom a été
donné assez improprement
par les traducteurs deVitruve,
au XVI*^ siècle, aux motifs
qui garnissent les frises et
montants des peintures gré-
co-romaines et les panneaux
de stuc ; il est appliqué aux
mosaïques byzantines, où des
rinceaux grecs à volutes alter-
nent avec des vases, des
médaillons, des bestioles. A
la Renaissance en Italie, ce
nom se confondit avec celui
de ^r^^é?.y^?^^i' donné aux imi-
tations des rinceaux mêlées de génies,
trouvés dans les grottes d'où furent ex-
Fig. 56.
Bande de bouquets.
REVUE DE L ART CHRETIEN.
igoT. — l'"* LIVRAISON.
26
3Re\)ue lie T^rt cbvctien.
^v.^
humées les ruines du palais de Titus à
Rome.
Pabnettes. — La fleur, dans son
mode en quelque sorte impersonnel
et de convention, se présente encore
sous l'allure de la palmette.
Le mot palmette, en terme de
décoration, vient non de palmes
(palniitis), branche de palmier,
comme on le croit, mais àç. paliua
(-aXajjiy.), paume de la main, et par
extension, main ouverte.
En réalité ce terme s'applique
surtout à des fleurons, dont les
tifjes radient d'un pied unique.
Suivant son développement plus
ou moins grand, la palmette va de
la roue complète à l'éventail, à la
huppe et jusqu'à la simple aiguille.
La palmette est symétriquement
construite par rapport à un axe ver-
0 '-i I
Pi
'M
:Jj!)^\ tical. Elle comprend des branches
^'g-57- dont les axes rayonnent d'un cen-
Tombeau -v ^ i i
romain de tre. Cc Centre peut être a la base
de la figure (4) (Jïg. S^), ou plus
bas (2), ou plus haut que la base (3). De là,
trois types de palmettes correspondant à
Al/
aIa
> xM// y.<_ y/-^
')
âié ê\\ â& ^^ ^^
.Wl,
1
10
11
iX
Fig. 58.
trois réseaux différents. Dans le second
cas la palmette part d'une sotuhe (2).
Considérons le réseau (i). Il donne di-
verses variétés de types, selon que les rais
sont rectilignes, ou à crosse enroulée exté-
Fig. 59-
rieurement (5), ou intérieurement (6), ou
courbés, cintrés soit extérieurement (8), soit
intérieurement (9) ou en S (7).
Telles sont les principales variétés du
réseau simple.
On forme ainsi six réseaux du premier
genre ; on en formerait six autres avec le
centre plus bas que la base
(ou à souche) (8 et 9), et en-
core six avec le centre plus
haut.
A côté des palmettes
doubles et symétriques il y
a des demi-palmettes (fig. 60).
Des palmettes plus complexes dérivent
de la superposition de deux réseaux sem-
blables (10) de rayons différents,
et, dans le décor peint, de cou-
leurs consonnanles ou contras-
tantes. Si les deux palmettes
ont un nombre égal de rais, l'effet
est plus sévère; s'il est différent
(ij), il en résulte parfois une
eurythmie moins absolue, qui
suffit à garder la cadence mais
donne plus de silhouette à cha-
cune séparément, sans rompre
le lien qui les unit. Cette sorte
de consonnance est plus gaie.
On peut faire alterner les rais
des deux réseaux (12) au lieu
de les superposer.
Axe. — L'axe est un des rayons domi-
nants, mais pas autre chose que le prin-
cipal des rayons. Il doit
donc rester pareil aux au-
tres, tout au plus être un
peu plus important, plus
riche ou plus développé. Il
en est de lui comme de la
clef d'une voûte. Parfois Fig. 61.
on l'a constitué de la réu-
nion de deux éléments latéraux (fig. 62)^
Fie. 60.
6ssat 0ur la décoration arcl)itectontque.
27
ou bien on l'a quelque peu épanoui. La li-
mite de ce développement consiste à faire
Fig. 62.
de cet élément central la fleur d'une plante,
dont les autres rayons sont les feuilles.
Fig- 63.
Centre, — Le centre de la palmette ne
coïncide pas toujours avec le centre de
Fig. G4.
rayonnement de ses rais. Dans le cas des
palmettes à souche il est au milieu de la
souche.
Le centre, où l'œil se porte naturelle-
ment, qui est le point le plus en vue, est
souvent occupé par quelque motif intéres-
Fig. 65.
sant. Il est marqué par une rose, un disque,
un fer de lance (fig. ^ç), une feuille (fig. 61),
Fig. 65.
67.
un culot (fig. 6j), un médaillon, un masque
(fig. 68), etc.
Fig. 68. — Antéfixe.
La souche peut être marquée par une
combinaison de volutes accouplées (fig- 62
et 6§) ou formée par les rampants d'un
fronton, une bague, etc.
28
^tWt te rart cbvctieii.
g III. — OBJETS ARTIFICIELS.
Les œuvres de l'homme sont introduites
dans le décor principalement à titre d'aJ-
tribîits. Alors que les formes expressives et
symboliques simples marquent le début des
sociétés, il semble que la profusion des at-
tributs en caractérise la décadence. L'art
des belles époques cherche plutôt à accuser
la perfection de la forme et à faire jaillir
de l'œuvre elle-même sa vertu et l'impres-
sion qu'elle doit produire sans avoir re-
cours à la voie détournée des emblèmes. La
profusion de ces emblèmes et leur emploi
comme pur décor se voit aux plus mauvaises
époques de l'art; les Romains, peuple fas-
tueux et peu artiste, les prodiguent comme
les Français des deux derniers siècles,
Fig. 70.
Baguette à ruban.
Fig. 6g. — Ruban ou spirale.
qui les groupent en trophées
et en remplissent les pan-
neaux. Après les grandes con-
quêtes, sous les Césars et
sous Louis XIV, ce ne sont qu'emblèmes
de la guerre et de la victoire : casques,
épées, boucliers, quadriges, palmes et cou-
ronnes, couvrent les arcs de triomphe et
les portiques des édifices.
Le moyen âge, comme l'époque grecque,
s'en montre avare. Les martyrs sont figurés
avec leurs palmes, les souverains avec leurs
couronnes, les saints avec leur « caracté-
ristique » iconographique, etc., mais les
emblèmes isolés ne se promènent point par-
tout sur les murs.
La renaissance italienne reprend tous
les oripeaux antiques et mêle aux attributs
païens les pièces du mobilier liturgique et
du costume sacerdotal.
En France les attributs et les trophées
font leur entrée sous Henri II et enva-
hissent sous Louis XIV tous les édifices ;
avec les amours apparaissent les arcs, les
carquois, les cornes d'abondance, les flam-
beaux, les instruments de musique et des
arts : lyre et clairon, palette et chevalet,
maillets et ciseaux, livres et rouleaux, torses
et masques, équerres et compas, fil à plomb
et plans déroulés, tables et balances, etc.
L'attribut nous inonde. Les corps de
métier, les sciences, le droit, le commerce,
l'agriculture, les beaux-arts, nous offrent à
l'envi leurs emblèmes, qui deviennent trop
souvent des énigmes, et leurs groupements,
des rébus incompris (i).
j,,! :ni;nil»il0Mlll««il|«}i;!M*:'g|3i:iliJM
Fig. 71.
Parmi les produits de l'industrie humaine
qui ont fourni au décor des types (nulle-
ment emblématiques d'ailleurs), citons d'a-
bord comme un des plus simples le ru-
ban (fig. 6g). Les moulures antiques com-
portent des baguettes à ruban (fig. jo). On
dit: un fût de colonne rnbannée; les bouquets
sont liés avec des rubans (fig. yi).
Le ruban s'enroule en spire sur des
baguettes et des tores (fig. jo) ; il se replie
en nœud aux points d'attache des guir-
landes (fig. 53).
Les bandelettes sont de larges rubans,
qui servent à rattacher les guirlandes, à
serrer la tête des bucranes, etc.
Quand le ruban est lui-même orné, il
prend le nom de galon ; le galon est sou-
vent garni de perles (fig. J2).
I . V. G. Guicestre, Encyclopédie ifarchitectuie,\. 1 1, p. 92.
€Q&ai sur la tiécoration arcl)itectoiuque.
29
Les galons, dans le décor, forment ordi-
nairement des entrelacs, qui abondent dans
le style romano-byzantin (JΣ: jy et /2).
La cordelière, lien banal du décor, est
employée ici (fig. yj), comme attribut hip-
pique, parfois comme
emblème du veuvage ;
c'est à ce dernier titre
qu'elle sert d'emblème à
Anne de Bretagne.
La torsade est l'imita-
tion d'un double câble
Fig. 72.— Galon perlé et tCndu (fig, 'J4).
entrelacé. T a ; /
Le cable est une mou-
lure à baguette ornée de saillies imitant les
torons de la corde.
La tresse, l'image de deux mèches de
cheveux croisées, est un motif décoratif
Fig. 73. — La frise en grès éraaillé.
essentiellement oriental ; cette décoration
provient de Ninive ; elle a été propagée en
Occident au temps des croisades. Au moyen
Fig. 74. — Câble.
âge la tresse est employée dans le décor des
manuscrits.
Les tctes de clou constituent l'élément
bien modeste d'un ornement employé avec
beaucoup de succès par les romans, dans
des décors inspirés de la charpenterie ; par-
fois ils étaient globuleux et ornés.
Il en est de même du fitscaii. On orne
les moulures creuses d'ornements dits fu-
selés, reproduisant une série de fuseaux
de fileuse soudés bout à bout.
Les matières précieuses servant à re-
hausser les œuvres d'orfèvrerie ont été imi-
tées dans le décor architectonique avec une
certaine prédilection, à cause de l'idée de
noblesse qui leur est inhérente. Telles sont
\ç.?, gemmes, \qs pierreries, les cabochons, les
piastres (fig. js).
La strigile était une sorte d'étrillé, à la-
Fig. 75. — Gemmes, cabochons.
nières de cuir, dont les athlètes se servaient
pour essuyer la poussière qui les couvrait
après la lutte. La ligne ondulante de la
lanière donna l'idée des stries ou cannelures
en S, figurées, chez les Romains du Bas-
Empire, sur des sarcophages, sur les frises
des entablements (fig. yô), etc.
Le fiabellnm, l'éventail antique, est un
signe de respect, un attribut auguste.
L'artiste imite jusqu'aux constructions
elles-mêmes pour décorer la construction.
C'est ainsi que l'ornement essentiel des
voûtes mauresques est une sorte de petites
voûtes, nommées pendentifs à stalactites,
multipliées à l'infini sous l'intrados des cou-
poles et constituant comme une aggloméra-
tion d'alvéoles, d'un effet très puissant, (^/v^.
77. 7Set 7ç.)
Dans un autre ordre d'idées nous avons
à signaler les draperies. On les voit imitées
30
3Rcbuc tie r^vt £j)vtticiu
en sculptures sur les parois du soubassement
de la cathédrale de Paris et de celle de
Reims (fig. So). Elles servent surtout très
couramment comme motif de décor du bas
de murs intérieurs dans la décoration mu-
rale.
C'est une sorte de draperies, que la ser-
viette imitée dans les panneaux de menuise-
rie gothique et que l'on remplace parfois
Fig. 76. — Entablement romain. Frise à strigiles.
par l'imitation d'un parchemin ou d'un cuir.
La médaille, qui fut à l'aurore de la re-
naissance italienne un produit d'art fort cul-
tivé, devint en quelque sorte un commode
véhicule des conceptions artistiques. Copiée
à l'envi par les sculpteurs,
les médailles engendrèrent
les médaillons qui, en mul-
titude, ornent les pan-
neaux des façades de la
première renaissance dans
le Nord de l'Italie et en
France ;et ce \ViO\!\{(fig.8i)
Fig. 77. - stalactites ^^-^^^ ^^^i^^ ^^ désué-
arabes. ^
tude. Ce n'est pas qu'il
fût inconnu des Gothiques, mais ceux-ci
ne l'employaient qu'exceptionnellement.
Toutefois il faut rapprocher des médaillons,
les ornements encadrés dans un champ cir-
culaire ou quadrilobé qui garnissent souvent
les tympans de leurs arcades ; comme par
exemple au cloître de Saint-Jean des Vignes
à Soissons.
Le vase et Vurne jouent dans le décor
moderne un rôle exagéré ; très souvent le
vase figure comme acrotère à la base des
pignons comme on le voit à la cathédrale de
Versailles (//g. 82), ou bien il surmonte les
bahuts interrompant les attiques. Uurne
Fig. 78. Fig. 7g.
stalactites.
funéraire est un emblème très expressif sur
les tombeaux. La torche (fax) (fig. 8j) sym-
bolise fréquemment la lumière intellec-
tuelle. La lampe (fig. Sj), le candélabre
(fig. Sj), peuvent avoir un sens analogue.
Fig. 80. — Reims, détail du grand portail de la cathédrale.
La panse du vase, les moulures annelées
du candélabre se retrouvent dans une mul-
titude d'organes d'architecture (fig. 86)^
depuis le grand porte-mât de la place St-
Marc de Venise jusqu'au plus modeste
essai sur la tiécoration arcl)ttrctoiuque.
31
montant de rampe d'escalier; on les retrouve
dans les colonnettes de la Renaissance
(fig. 102), les pieds de table, etc.
Fîg. 81. — Médaillon.
Notons encore les treilles qui garnissent
les fonds et les faisceaux (fig. 84), bottes
Fig. 83.
Fig. 84.
de baguettes liées par une courroie, qu'on
portait devant les magistrats romains.
Les paroles attri-
buées aux person-
nages dans les com-
positions symboli-
ques du moyen âge
sont souvent inscri-
tes sur des bandero-
les placées près des
lèvres ; d'une ma-
nière moins naïve
on met aussi dans
leurs mains un phy-
ladère portant le
texte qui leur est
attribué. Parfois en-
Fig. 85.
fin des inscriptions explicatives d'un sujet
Bottent ou se déroulent d'une manière orne-
mentale autour de l'objet à expliquer (fig.
88, 8ç), ou s'inscrivent dans des médaillons
(fig. ço) ou des panneaux (fig. çi ). Le bla-
son a de même employé la banderole pour
y marquer des devises, des cris de guerre,
etc. Quand elle est utilisée comme pur
Candélabres.
Fig. 87. — Torche.
ornement, plissée, contournée, ondulée, par-
fois échancrée, la banderole se confond avec
le ruban et avec la courroie (fig. çj).
V\c. 88. — Banderole ou phylactère.
Panneaux. — Dans l'antiquité les ins-
criptions lapidaires étaient logées très sou-
vent dans des registres rectangulaires tra-
ditionnellement encadrés d'une moulure à
Banderoles.
Fig. 90.
Cl ossettes rappelant le chambranle des baies
ou garnis de deux appendices en queue d'a-
ronde. Cette forme semble consacrée soit
pour les plaques de pierre ou de métal, soit
pour les écriteauxportés au bout d'une hasle.
Lesuns disent que ce sont des tenons à l'aide
desquels la plaque était scellée, d'autres, que
l^tWt ïje rSvt cljvctten.
ces ajoutes rappellent la hache du licteur
portée à titre d'insigne du pouvoir.
Parfois encore le cadre était agrémenté
de deux paires de volutes.
L'espace mis en évidence et destiné à
recevoirune inscription ou un attribut prend
surtout la forme du cartouche
ou cartel, qui est un panneau
de forme variée, générale-
ment ovale, dont \ç. champ est
plane ou bombé. Chez les
Égyptiens le cartouche était
dessiné par un ovale encadré
dans un roseau et placé dans
le sens vertical ; chez les
'g- 91- Grecs, c'était un dessin imité
du bouclier; chez les Romains, il affectait la
forme de la table dont nous avons parlé ;
chez lesByzantins, c'était une bande horizon-
tale encadrée d'un galon entrelacé et sans
fin, tourné circulairement à son bout. Au
moyen âge, c'est un disque, un quatre-feuil-
les (Jig. Ç2), ou plus souvent il se confond
avec l'écu. A la Renaissance, le cadre du
cartouche imite une pièce de cuir découpé
Fia
Panneau.
(fig. ç§), avec des échancrures et des bords
contournés, enroulés, rappelant la targe
des tournois exposée au soleil et gauchie.
Le nom lui-même du cartouche, dérivé de
cartuccio, signifie cuir roulé et tortillé (fig.
ç6). Les découpures engendrent de vraies
Fig. 93. — Panneau entouré de lanières.
lanières entrecroisées (fig- ç6); les enroule-
ments prennent parfois l'allure de volutes ;
les cuirs sont modelés et garnis d'ornements
Fig. 94. Fig. 93.
Cartouches.
agrémentés de figures, doublés d'un cartel
en arrière-plan. En Allemagne et en Flan-
dre les formes sont découpées à l'excès,
véritablement déchiquetées. Finalement le
Fig. 96. Fig. 97.
Cartouches.
champ se bombe, se bossue jusqu'à imiter
€ssat sur la Décoration arcl)ttectomque.
33
un globe (fig. çy). Sous Louis XIV les
Fig. 9S.
formes architecturales se greffent au car-
touche ; les moulures
et les volutes classi-
ques, les acanthes et
les écailles, les chutes,
les palmes, les rubans,
les aigrettes, les mas-
ques s'y ajoutent. L'é-
poque Louis XV voit
éclore des cartouches
rocaille, dissymétriques,
aux courbes tourmen-
tées. Le cartouche oublie
sa fonction, qui est celle
d'un cadre et devient un
pur ornement au champ
vide; on en a fait jusqu'à
des pieds de table.
Parmi les ornements
tirés des armes et armu-
res, le bouclier est un des
plus usités parmi les plus
nobles. Il est souvent
rond dans les monu-
ments grecs (Jio-. 55^,
parfois allongé comme
celui qui a donné nais-
sance à Véc7i. \J uinbo est
Fig. 100. -Rinceau et écus. UU CÔne OCCUpant Ic
centre du bouclier ; cette partie centrale,
dans les armes de parade, était ornée d'un
motif spécial, tel qu'une tête de Méduse.
De \écu dérivent les armoiries propre-
ment dites, avec tous leurs accessoires.
Fig. loi. — Écu avec cimier et lambrequins.
meubles héraldiques, portants {fig. 102),
cimiers (fig loi ), lambrequins, etc., pour
lesquels nous nous contenterons de ren-
voyer aux traités spéciaux.
Insistons cependant sur le parti que tire
JllLIIIi: I .1 . \\\\ r ... I ' ; li-t-ll 1 i|il^3w"-'l l
Fig. 102. — Écu couronné et portants,
(Hôtel des princes de Longueville à Neucliatel.
l'architecture de cet ornement expressif au
plus haut point.
Un accessoire important de l'écu est le
heaume avec son lambrequin (fig. loi et
/07), c'est-à-dire la coiffe de cuir qui recouvre
le heaume et dont les décorateurs anciens
KKVUe DE L ART CHRËTIEN.
1901. — I^^ LIVRAISON.
34
Bcbuc ïjc ra^vt cbrctten.
ont eu le talent de développer d'une manière
admirable le bord festonné. Par une exten-
sion tout artistique, ils ont donné à ce feston
ou lambrequin plus d'importance qu'à l'objet
lui-même et ses festons ont été transformés
en bandes redentées.contournées, enroulées,
Fig. 103. — Écu avec cimier.
(Jouée de stalle à Heinsberg.)
feuillagées, se ramifiant, se répondant dans
le champ réservé aux armoiries à l'instar
d'un ornement végétal.
Le bouclier était chez les Grecs un simple
disque; \^\pelte des Romains était elliptique
avec deux échancrures demi circulaires; il a
Fig. loç.
Mutule à pelte.
donné lieu à un ornement classique très
usité reproduit ci dessus (fig. 104 et JO§).
Le trophée est un assemblage pittoresque
d'armes disposées avec art de manière à
garnir un panneau. Le trophée monumental
est l'imitation d'un assemblage décoratif
d'armes ou attributs divers (Jig. 106) grou-
pés dans un panneau. Les Romains ornè-
rent leurs arcs de triomphe de trophées de
bronze et de marbre. Le pilastre composite
Fig. 106. — Trophée.
de l'arc dit des orfèvres à Rome était orné
de trophées comprenant une « chute » d'ai-
gles, de casques, de cuirasses, de carquois.
Fig. 107.
etc. Remarquables sont les trophées en bas-
relief du piédestal de la colonne Trajane.
Au moyen âge le trophée fut remplacé par
les éléments du blason. Ce n'est qu'à partir
(!B00at sur la Décoration arcl)(tectontquc.
35
d'Henri IV que les trophées sont en hon-
neur en France. Casques et cuirasses imités
de l'antique fournissent de vigoureuses
silhouettes aux Lemercier, aux Mansart,
aux Lepautre. On voit un beau type de
trophée à la porte de Saint- Denis. Le
siècle des t''ophées est naturellement celui
de Louis XIV (').
Les rostres, imitation ornementale d'une
proue antique avec éperon constituent le
principal emblème naval. Les colonnes ros-
trales sont celles qui sont ornées d'éperons.
Les couronnes interviennent fréquemment
dans les compositions héraldiques et symbo-
liques. On distingue dans l'antiquité des
couronnes trioviphales, à feuilles de laurier,
ovatiles, ornè&s de myrte, ^zz^z^/z^jr, garnies de
feuilles de chêne, obsidionales ou couronne
de gazon, navales, nnirales, garnies de cré-
neaux et tourelles, etc., au moyen âge,
celles des rois, des princes, des ducs, des
barons, des comtes, des marquis.
A côté des ornements héraldiques pren-
nent place les sujets symboliques, tels que
les monogrammes et les atlributs person-
nels, dont le nombre est infini (Jig. iç).
Dans l'antiquité, le trident, fourche à
trois dents, est l'emblème de Neptune, le
dieu des eaux, la talonnière est la chaussure
ailée de Mercure, dieu du commerce. Le
I. V. E. Rivoalen, Eîicyclopcdic cTarcIiitect. de Plavatj
t. VI, p. 659.
Caducée à.^?, Phéniciens ('), attribut du même
dieu, est en outre le symbole de la paix ;
c'est une verge ailée autour de laquelle
s enlacent deux serpents.
Apollon fit don à Mercure
d'une verge de coudrier qui
avait pour vertu de récon-
cilier les hommes et avec
laquelle Mercure touche
les hommes ; il fit de leur
commerce leliendu monde.
Voici une composition
relative aux arts mécani-
ques et marchands où l'on
a groupé des objets emblé-
matiques tels que l'engre-
nage, le balancier régula-
teur, l'ancre etc., avec d'au-
tres symboles d'une ex-
pression plus intellectuelle,
une paire d'ailes rappelant
la vitesse des transports,
des cornes d'abondance fai- ^'S- 'o^-
sant allusion aux richesses engendrées par
la navigation à vapeur, le tout bien appro-
prié à l'ornementation d'un bureau de com-
merce (').
(A suivre.) L. C LOQUET.
1. V. Goblet d'Alviella, La Jiiigration des symboles.
2. Auteur M. Enriqiie Repullès, d'après Ragiienet,
Monographie d'un bâliDunt moderne.
Fig. 109. — Arbre mystique des Assyriens
en forme de palmette.
&v >Ma a^^ a^x a^a a^»>a :t^»-^ A^v:^ ;t^^ ;t^vU a^^ a'^a A^viU j>^î^ a'^vI^ \^^
imTnmxrTTiTxiiiiTi rrrKiiiiiiitirriTTixTTrrrrrxiiiTiirJiTriiiiiiirriTixiiiiiiiriiiTiiixiiiixiiiiiiiiiririJiririiiiiiirjiiixri
^ m^^m Jxà tat{)ctirale lie liaon.
V^V^^ ^Ail^ ^^^ ^:^-^ ^iiï^ ^S^ ^iiî* ^itl^ ^i^ *iî^ ^X^^ *ï*J* ^J*î^ *il^* *^^
I. — Origine De !a catbéorale.
;^^aî:';jïœîiittg 'ORDONNANCE de
la cathédrale de Laon
révèle un art primitif
dont cet édifice est une
des plus belles créations.
Sa longue suite de pi-
j:p3pnH+'«'-i^"M'Wî^ Ijers et d'arcs brisés qui
commence avec la nef pour finir au mur
droit qui termine le chœur, la coupure du
transept disparaissant dans la perspective,
rappelle la simplicité pleine de grandeur
des premiers monuments grecs dont les
colonnades sont tant admirées. On sent que
le constructeur de Notre-Dame de Laon,
comme tous les maîtres d'un art à son ori-
gine, n'avait en vue que le ôcau dans toute
sa pureté, et ne pensait à aucune recherche,
à aucune disposition visant à l'effet. Si l'on
considère ensuite la galerie qui surmonte
ces grandes arcades, le triforium qui vient
après, les hautes fenêtres et la voûte, on
voit que tout, malgré certaines dissemblan-
ces qui s'effacent dans l'ensemble, s'har-
monise en une telle justesse de proportions,
que, par suite de cette harmonie, la voûte
dont la hauteur ne dépasse pas vingt-quatre
mètres, paraît en avoir beaucoup plus, la
longueur et la largeur du vaisseau étant
calculées de façon à ne pas nuire à son
élancement, ce qui est capital dans les
églises gothiques.
L'e.Ktérieur de la cathédrale, avec ses
quatre tours ajourées, n'est pas moins
saisissant que son intérieur. Posé à l'extré-
mité d'une montagne isolée, cet édifice, vu
de loin, fait penser à l'Acropole d'Athènes,
avec cette différence qu'au lieu de dominer
les flots bleus de la mer Egée, il domine
une des plus belles plaines de la vieille
Gaule.
Ainsi que beaucoup d'autres cathédrales,
celle de Laon nous a caché la date de sa
naissance. Parlant d'elle en 1851, M. de
Caumont disait qu'elle était un mystère en
pierre. Aujourd'hui le mystère commence
à s'expliquer et on est certain que l'édifice
date du milieu du XI I^ siècle, bien qu'il ne
soit pas possible de préciser l'année de sa
fondation. Quicherat, il est vrai, lui donnait
pour date initiale 1170, mais M. l'abbé
Bouxin(')a démontré d'une façon très claire
que la fondation de la cathédrale remontait
soit aux dernières années de l'épiscopat de
Barthélémy de Vire, qui occupa le siège
de Laon de 1113a 1 1 50 ; soit à l'épiscopat
de Gautier de Saint- Maurice, qui siégea
de I I 5 I à 1 1 55 ; soit sûrement au commen-
cement de l'épiscopat de Gautier de Mor-
tagne qui siégea de i i 55 à 1 1 74. Son suc-
cesseur Roger de Rozoy, qui fut évêque de
Laon de 1174a 1207, vit commencer le
nouveau chœur à chevet carré, qui rem-
plaça une abside circulaire élevée sous son
prédécesseur. D'ailleurs pour dater Notre-
Dame de Laon, il existe un point de
comparaison d'une indéniable valeur : ce
point, c'est Notre-Dame de Paris. Or,
quand on compare les deux cathédrales,
tant au point de vue de la construction,
qu'au point de vue de l'ornementation, il
semble bien que celle de Laon est d'environ
dix ans plus ancienne que celle de Paris.
Cette dernière ayant été commencée en
1163, il en résulte que Notre-Dame de
Laon pourrait avoir pour date initiale 1153,
alors que siégeait Gautier de Saint-Mau-
I. Abbé Bouxin, La catlMrale de Notre-Dame de
Laon, i8go.
3La catl)éîirale tie ilaon.
37
rice. Il esl vrai qu'un texte dit que Gautier
de Mortagiie vit commencer cet édifice.
Mais comme ce personnage faisait déjà
partie du chapitre de Laon sous Barthélémy
de Vire, il put voir en 1 153 jeter les fonde-
ments de la cathédrale.
Maintenants! Notre-Dame de Paris peut
nous aider à dater Notre-Dame de Laon,
celle ci, à son tour, nous fait comprendre
l'existence du croisillon sud du transept de
la cathédrale de Soissons, croisillon qui est
antérieur au reste de l'édifice. Nous avons
dit, en étudiant ici cette cathédrale ('), que
ce croisillon fut l'œuvre première de l'édifice,
et que les constructeurs, voulant ensuite
donner à la cathédrale de plus grandes
proportions, le raccordèrent assez habile-
ment avec la nef et le chœur plus élevés
que lui. Toutefois, malgré les explications
fournies à l'appui de cette assertion, on pou-
vait persister à trouver singulier que l'on
eût commencé la cathédrale par un bras du
transept. Eh bien! M. l'abbé Bouxin nous
montre, avec sa science et sa clarté d'ex-
position, que les parties les plus anciennes
de la cathédrale de Laon sont, précisément,
le transept et les trois premières tiavées
du chœur qui faisaient partie de l'abside
primitive remplacée, au commencement du
XI 11^ siècle, par le chœur actuel, ainsi que
nous venons de le dire ; et, selon nous,
lorsqu'on étudie le transept, on voit que le
croisillon nord a un caractère encore plus
ancien que le croisillon sud et les trois
premières travées du chœur. Donc la ca-
thédrale de Laon a dû être commencée par
le croisillon nord du transept, et peu après,
lorsque furent jetées les fondations de celle
de Soissons, on éleva d'abord le croisillon
sud de son transept. C'est ainsi que par
l'étude comparée des édifices, on arrive à
I. Revue de F Art chrétien, t. I.X, 6" livraison, 1898.
expliquer des choses qui, à première vue,
paraissaient inexplicables. En résumé la
cathédrale de Laon date de i 1 53 ou i i 55;
son transept, sa nef et son portail, sauf les
deux tours, sont du XI I^ siècle; son chœur,
à part les trois premières travées, est du
commencement du XI 11^ siècle, ainsi que
les tours du portail ; et les deux tours du
transept sont de peu d'années moins an-
ciennes que les premières. Ceci dit, péné-
trons dans l'édifice.
II. — Intérieur De la catbcDrale.
Nef.
LA nef de la cathédrale est précédée
d'un porche n'ayant qu'une travée, et
limité par ses deux piles. Cette travée est
soutenue par un grand arc très surbaissé.
Au fond de la tribune, contre le mur inté-
rieur du portail, on aperçoit une galerie
formée de cinq arcades, et au-dessus la rose
brillant du plus vif éclat.
Alors commence cette nef merveilleuse
formée de onze travées régulières qui cou-
rent jusqu'aux piles du transept. Les piliers
des arcades sont monocylindriques. Ils
portent alternativement des chapiteaux à
tailloirs carrés, avec saillie de même forme
sur la partie regardant la nef, et des cha-
piteaux à lailloirs octogonaux. Leurs bases
répondent à leurs chapiteaux et sont alter-
nativement aussi carrées et octogonales.
Les bases carrées ont des pattes ou feuilles
recourbées à leurs angles. La corbeille de
tous les chapiteaux est couverte de feuil-
lages que nous essayerons plus loin de
déterminer. Les septième et neuvième
piliers, à droite et à gauche, sont accom-
pagnés de cinq colonnettes détachées, dont
quatre s'élèvent des angles de la base aux
angles du tailloir du chapiteau ; la cinquième
est posée un peu en saillie sur le milieu de
la face du pilier regardant la nef Ces colon-
38
3Rebue lie T^rt cbrctien.
Laon. — Intérieur de la cathédrale, nef et chœur.
nettes sont annelées. Cette disposition louée
par les uns, a été blâmée par les autres.
Nous la trouvons gracieuse en elle-même,
et ne nuisant en rien à l'harmonie de l'en-
3La côtl)éîirale tie ilaon.
39
semble, à la netteté des lignes. Sur les
chapiteaux carrés portent cinq colonnettes ;
et sur les chapiteaux octogonaux, trois
colonnettes, qui toutes s'élèvent jusqu'à la
voûte pour recevoir sur leurs petits chapi-
teaux les retombées de ses arcs. Ces colon-
nettes ont cinq anneaux entre le chapiteau
qui les supporte et la voûte. Cela, croyons-
nous, ne se voit pas ailleurs. Les grands
arcs qui surmontent les piliers sont des arcs
brisés équilatéraux fort simples. Ils ont pour
tout ornement un plat, un cavet et un tore.
On est frappé de la ressemblance de ces
arcs avec ceux du chœur de Notre-Dame
de Paiis. Les arcs des cinq dernières tra-
vées, qui sont les plus proches du transept,
ont un peu moins de hauteur que ceux des
sept premières ; mais cette différence est si
petite qu'il faut savoir qu'elle existe pour
s'en apercevoir. Il est à remarquer que les
piliers accompagnés de colonnettes déta-
chées font partie de ces cinq travées, évi-
demment construites aussitôt après le
transept. 11 y a donc là certaines précautions
prises en vue d'assurer la solidité de la
construction, et qui furent abandonnées
lorsque l'architecte, hésitant d'abord, se
trouva maître de lui-même.
Au-dessus des grandes arcades vient la
galerie, large et belle, ayant deux élégantes
arcades par travée, et rappelant en tout
point celle de Notre-Dame de Paris. Aussi,
plus on étudie la cathédrale de Laon, et plus
on est persuadé que le constructeur de la
cathédrale parisienne a dû connaître les
plans et les dessins de cet édifice, attendu
que de pareilles ressemblances ne peuvent
être l'effet du hasard. Un triforium, présen-
tant trois petites arcades par section, règne
au dessus de la galerie. Arrivent ensuite
les hautes fenêtres formées, chacune, d'une
seule verrière. Enfin s'élève la voûte, svelte
et élégante. Chacune de ses sections com-
prend deux travées de la nef. Par suite de
cette disposition, la section a non seulement
ses deux arcs ogives, et les deux arcs-dou-
bleaux qui l'encadrent, mais encore un
doubleau de recoupement séparant les deux
parties ou travées de la section. Là où
retombent les arcs ogives, les doubleaux
d'encadrement et les formerets des fenêtres,
sont les cinq colonnettes qui portent sur
les chapiteaux carrés des piliers, et là où
retombent seulement le doubleau de recou-
pement et les formerets des fenêtres, sont
les colonnettes qui portent sur les chapi-
teaux octogonaux de ces mêmes piliers.
Cette nef a deux bas-côtés dont la lar-
geur n'est ni trop grande ni trop petite.
Au XIV'= siècle on fit à Laon comme dans
plusieurs autres cathédrales, on ajouta des
chapelles à ces bas-côtés. A la Renaissance
elles furent closes de claires voies dont
quelques-unes ne sont pas sans mérite.
Toutefois, comme le style de ces clôtures
se trouve en désaccord avec celui de l'édi-
fice, il est heureux qu'elles disparaissent un
peu dans la perspective.
Transept.
Le transept, en harmonie parfaite, comme
largeur et comme hauteur, avec la nef et
le chœur, a neuf travées. Chaque croisillon
en compte quatre. Sur la cinquième, celle
du milieu, s'élève une tour évidée, de forme
carrée, dite lanterne, dont la voûte est
suspendue à 40 mètres du sol. Un collatéral
contourne ce transept sur toutes ses faces.
Nous avons dit que cette partie de la
cathédrale était la plus ancienne. Aussi
présente-t-elle encore l'arc plein cintre mêlé
à l'arc brisé. Le transept de Laon fait pen-
ser à la cathédrale de Noyon. Quand on
étudie les monuments de la période de
transition, il semble bien que les construc-
teurs romans ont gardé le plus lontemps
40
3Rcbur De rSrt cljvcticu.
possible l'ancienne tradition. En effet, leur
action se retrouve avec persistance dans
la forme des arcs et dans l'ornementation.
Il en est ainsi à Laon. Les deux pre-
mières travées de chaque croisillon du
transept, ont l'arc brisé aux grandes arcades
et aux voûtes, mais l'arc plein cintre à la
galerie, au triforium et aux fenêtres ; les
autres travées ont l'arc brisé partout. Sur
chacune des travées, placées aux deux
extrémités est du transept, s'ouvre une jolie
chapelle construite en hémicycle. Cette
chapelle se répète dans la galerie. La lan-
terne a une galerie intérieure comptant
vingt-quatre arcades, c'est-à-dire six par
côté. Huit fenêtres, deux par côté, éclairent
Laon.
Intérieur de la cathédrale, chœur et nef.
la lanterne au-dessus des arcades. La voûte
présente huit nervures réunies à leur som-
met par une clef ornée de feuillage. Quatre
de ces nervures retombent sur des colonnet-
tes élevées au milieu de chaque face de la
lanterne, entre les fenêtres, et supportées
par des figures. Les quatre autres, qui sont
les nervures d'angle, retombent sur des
colonnettes faisant partie des piles du tran-
sept et du chœur. Ces colonnettes qui parient
du sol et s'élancent d'un seul jet jusqu'à la
voûte sont admirables de grâce et de har-
diesse. On a souvent dit que la tour carrée
placée sur le milieu du transept, était un des
caractères particuliers du gothiquenormand.
La tour carrée de Laon nous montre qu'il ne
3La catl)éDrale de JLaon,
4'
faut pas prendre cette assertion trop à la
lettre, vu qu'elle est à peu près du même
temps que celle de Lisieux. En réalité, à
chacune de ses périodes, le gothique ne
diffère guère d'une province à l'autre.
Au-dessus de la porte du croisillon nord,
existe un rang de fenêtres que surmonte une
fort belle rose du XI 1^ siècle, et au-dessus
de la porte du croisillon sud on voit une
haute et large fenêtre du XIV" siècle, sur
laquelle sont jetés des trèfles, des quatre-
feuiiles, des roses, le tout ajouré et du plus
riche dessin.
Chœur.
Le choeur de la cathédrale présente,
sauf pour le chevet, l'ordonnance de la nef.
Les trois premières travées formaient la
partie droite du chœur primitif dont la
partie circulaire fut démolie au XI 11*^ siècle
pour faire place à sept travées qui vinrent
s'ajouter aux trois premières, pour finir au
mur droit qui termine l'édifice. Selon M.
Anthyme Saint-Paul ('), ce travail s'exécuta
entre 12 15 et 1225 environ. La conserva-
tion de ces trois travées n'est pas douteuse,
car le socle du 3^ pilier de droite, et celui
du 3<= pilier de gauche ont une légère flexion
qui indique que la courbe de l'abside com-
mençait à ces piliers. Les vestiges de cette
courbe ont été retrouvés. Ils décrivent un
demi-cercle qui, partant des deux piliers,
s'arrondit jusqu'à la 6' travée actuelle. Le
chœur a donc dix travées rectilignes, faisant
suite à celles de la nef, et formant avec le
mur droit un magnifique carré de pierre. Ce
mur est percé de trois immenses lancettes,
qui en occupent toute la largeur et qui
montent jusqu'au petit triforium. Elles sont
encadrées par trois arcades dont les arcs
brisés retombent sur les chapiteaux de
minces colonnettes partant du sol et s'éle-
I. Anthyme Saint-Paul. Laon. Dictionnaire géogra-
phique de la France de A. Joanne.
vant, d'un seul jet, jusqu'à ces arcs. Les
arcades ont une épaisseur très prononcée
qui leur donne de la solidité et leur permet
de soutenir la partie supérieure du mur
occupée par une superbe rose qui regarde
à cent onze mètres de distance celle du
grand portail, dont elle reproduit le dessin.
La saillie des arcades, à la base de la rose,
forme un passage naturel faisant communi-
quer les deux parties du triforium. Ce
chevet plat de Laon est certainement le
plus beau qui existe ; il a une originalité
indiscutable. Une disposition du chœur de
Laon qui, peut-être, n'a pas été assez
remarquée, c'est que les bases de ses piliers
reposent sur un socle continu, en suréléva-
tion du sol des collatéraux, ce qui donne à
la construction un aspect de force semblable
à celui des monuments antiques. Six chapi-
teaux de la construction primitive ont été
réemployés au XIII" siècle, et couronnent
les piliers des 4^ 5'= et 6' travées. Ceux des
7^ 8^ et 9' travées sont bien du XI I L siècle,
de sorte que sur les dix-huit piliers mono-
cylindriques du chœur, douze ont des
chapiteaux du XI L siècle, et six des chapi-
teaux du XI I Y.
Les collatéraux de cette partie de l'édifice
vont jusqu'au mur droit du chevet, mais la
dernière travée du chœur n'étant pas prise
par le sanctuaire, il en résulte que cette
travée est libre et permet de passer derrière
le sanctuaire, comme dans les édifices à
absides circulaires. Ces collatéraux ont des
chapelles dont les clôtures sont semblables
à celles de la nef. Toutefois au départ des
collatéraux, les chapelles ordinaires sont
remplacées par deux grandes salles à deux
travées, qui vont rejoindre, dans la lon-
gueur du transept, les deux chapelles en
hémicycle qui le terminent.
La cathédrale est magnifiquement éclai-
REVUE DE L ART CHRÉTIEN,
igOI. — l'*^ LIVRAISON.
42
ISitWt lie ravt cf)rctieu.
rée par la rose du grand portail, les lancettes
et la rose du chevet, la rose dii portail nord,
les verrières du portail sud, et les fenêtres
de la nef, des galeries, du chœur, des
chapelles, au nombre total de cent-cinquante!
La rose de la grande façade, les lancettes
et la rose du chœur, ainsi que la rose du
portail nord ont seules des vitraux de cou-
leur. Le bleu qui nous semble dominer dans
ces vitraux, inonde le vaisseau d'une clarté
vraiment céleste. La rose du portail, qui
est moderne, mais fort belle cependant.
chapiteau de nénuphai'.
donne X^:. Jugement dernier ; ceW^ du portail
nord les Arts libéraux ; celle du chœur est
consacrée à la Glorification de la Vierge,
et dans les trois lancettes qu'elle surmonte,
on voit : dans celle du milieu la Passion, la
Résurrection et X Ascension du Saîivetir ;
dans celle de droite le Martyre de saint
L tienne, et la légende de Théophile, et dans
celle de gauche les principales Scènes de la
vie de Marie. Ici nous avons encore un
rapprochement à faire. Le dessin des roses
de Notre-Dame de Laon a dû certainement
inspirer celui des petites fenêtres rondes ou
rosaces qui existèrent primitivement à
Notre-Dame de Paris audessousde courtes
lancettes, et qui furent supprimées au
XII L' siècle quand on voulut allonger ces
lancettes. On voit encore ces rosaces, dans
la grande cathédrale, à l'intersection de la
nef, du transept et du chœur.
Les dimensions principales de Notre-
Dame de Laon sont :
Longueur totale à l'intérieur 1 1 1 mètres.
Largeur totale, nef, bas-côtés et chapelles 30 m. 65 c.
Hauteur sous voûte 24 m.
Hauteur de la lanterne 40 m.
Tel est, rapidement esquissé, l'intérieur
de la cathédrale de Laon, et M. Cloquet est
absolument dans le vrai lorsqu'il dit : «Que
« cet édifice crucifère, magistral en ses
« lignes simples et pures, s'imposant par
« ses nefs à étages et sa longue série de
« piliers, est un des plus admirables monu-
« ments de l'architecture française au
« XII' siècle ('), ))
1 1 1. — ertériciir De la catbcDralc.
Grand PortaiL
S'IL faut admirer sans réserve l'inté-
rieur de Notre-Dame de Laon, et
l'effet que cet édifice produit à distance, nous
disons nettement que son grand portail est
loin de produire sur nous une pareille im-
pression. Villard de Honnecourt a dit :
«J'ai esté en mult de tieres et aucun lieu on-
ques tel tore ne vi come en celé de Laon.»
Traduites en français moderne ces paroles
signifient : «J'ai été en beaucoup de terres,
et en aucun lieu je n'ai vu des tours comme
celles de la terre de Laon. » On s'est ap-
puyé sur ce texte pour dire que la façade
de notre cathédrale était en tout point
I. Cloquet, Les grandes Cathédrales du Monde catho-
lii/ue, p. 148.
3La catl)éDrale tie Haon.
43
remarquable. A notre avis on a eu tort :
d'abord parce que Villard de Honnecourt
ne parle que des tours ; ensuite parce que
si ces tours sont effectivement très belles,
ainsi que la rose et les fenêtres qui l'accom-
pagnent, la partie basse de cette façade
laisse beaucoup à désirer.
La porte centrale et les deux portes laté-
rales sont précédées de profondes voussures
dont les parois restent lisses sur plus de la
moitié de leur profondeur. Aux portes se
voient de secondes voussures, décorées de
cordons de statuettes, les tympans qu'elles
encadrent, et les grandes figures qui se
dressent dans les ébrasements. Les arcs des
premières voussures sont des arcs brisés,
évasés à leurs reins. Nous les avons déjà si-
gnalésauportail de Soissons(').Des frontons
triangulaires, mais très courts, les surmontent.
Or, la forme de ces arcs, l'exiguïté de leurs
frontons et les parties lisses des voussures
donnent un ensemble lourd, disgracieux et
que ne relèvent pas les quatre clochetons
posés entre les arcs. De tous les portails de
cathédrales que nous avons vus, celui-ci est
certainement le moins séduisant. La porte
centrale et la porte gauche sont consacrées
à la Vierge dont elles racontent toutes les
gloires, depuis \' Annonciation jusqu'à son
Couronnement dans le ciel. La porte droite
est consacrée au Christ et présente le Juge-
ment dernier. Nous n'entrerons pas dans le
détail de cette sculpture : d'abord, parce
que les sujets qu'elle met sous les yeux des
fidèles sont ceux que l'on trouve aux por-
tails de toutes les cathédrales, ensuite parce
que,ayant été presque complètement refaite,
elle n'a plus d'intérêt archéologique. Il faut
dire qu'au moment où fut décidée la restau-
ration de la cathédrale, le grand portail
était dans un pitoyable état. La tour du
I. Revue de l'Art chrc/ien, t. XI, 6' liv., 1898.
Nord, en particulier, avait l'aspect d'une
ruine. Quant aux grandes statues des portes,
elles n'existaient plus ; et les statuettes des
voussures étaient décapitées. Une photo-
graphie du portail, prise dès le commence-
ment des travaux, ne laisse aucun doute à cet
égard. II fallait donc tout refaire. Malheureu-
sement l'inspiration manquant à nos artistes
pour créer des figures originales dans le style
du XI Ile siècle, on s'imagina de copier, en
les modifiant quelque peu, certaines statues
de Reims et de Chartres. Ce singulier tra-
vail n'a rien donné de bon, et le portail avec
son gothique du XIX^ siècle, est loin de
charmer le spectateur. Derrière les frontons
ou gables des voussures on aperçoit un
rang de fenêtres. Puis une première frise de
feuillage, courant dans toute la largeur de la
façade, en termine cette première partie.
Au-dessus de la frise s'épanouit la grande
rose, et de chaque côté de cette rose se
trouve une élégante lancette. Il est regret-
table que rose et lancettes soient au fond de
voussures lisses, profondes, rappelant celles
des portes, d'autant plus que les voussures
proprement dites des fenêtres sont ornées
de sculptures remarquables qui ont échappé
au marteau révolutionnaire. Dans la vous-
sure de la lancette gauche il faut signaler
spécialement dix statuettes représentant les
Arts libéraux, et dans celle de la lancette
droite la Création du monde qui leur fait
pendant. Une deuxième frise de feuillage
limite cette seconde partie du portail. En-
suite vient une galerie formée de jolies
arcades et portant quatre clochetons. Elle
occupe toute la largeur de la façade et offre
cette particularité que la section posée au-
dessus de la rose est plus élevée que les
sections posées au-dessus des lancettes.
Cette disposition n'était pas déjà très heu-
reuse lorsque, pour achever de rendre cette
galerie désagréable à l'œil, l'architecte
44
3Rebuc lie r^^rt cbiétieu»
restaurateur s'est amusé à construire sur la
section du milieu, celle qui se trouve entre
les deux tours, une seconde galerie, très
petite et portant une statue de la Vierge
entre deux anges. Cette adjonction que rien
ne motivait, a eu pour unique résultat de
diminuer la largeur du portail. Au-dessus
de la première galerie s'étend une troisième
frise de feuillage, qui indique que dans la
pensée du premier constructeur, c'était là
Chapiteau de plantain.
que devait finir la troisième partie du por-
tail. Cette frise justifie notre critique. Arri-
vons aux tours.
Ces tours .sont des chefs-d'œuvre. A
partir du point où elles se détachent de la
masse de la façade, elles ont deux étages.
L'étage inférieur est sur plan carré. Il est
percé de chaque côté de deux lancettes
géminées et llanqué de quatre contreforts
qui montent seulement jusqu'à l'étage supé-
rieur. Une petite frise souligne ce premier
étage ou plutôt le couronne. L'étage supé-
rieur est sur plan octogonal. Chacune de ses
quatre faces principales est percée d'une
lancette, partant de la petite frise qui vient
d'être indiquée, pour s'élancer d'un seul jet
jusqu'à la seconde petite frise qui couronne
la tour au-dessous de la balustrade termi-
nale. Ces lancettes font penser à celles que
nous avons admirées au clocher de Senlis(').
Les quatre autres côtés, correspondant aux
contreforts de l'étage inférieur, sont égale-
ment percés de longues baies, mais devant
ces baies s'élèvent les tourelles à jour qui
font l'originalité des tours. Ces tourelles
se divisent elles-mêmes en deux parties
dans la hauteur de ce second étage. Les
arcades de la partie inférieure portent sur
le sommet des contreforts du premier étage
de la tour, et les arcades de la partie supé-
rieure portent sur le petit entablement
surmontant celles de la partie inférieure.
Dans les tourelles de la partie supérieure,
on aperçoit des bœufs de taille colossale,
huit pour chaque tour, qui avancent leur
tête cornue en dehors des arcades. Avant
la Révolution, la tour droite avait sa flèche;
nous le savons par d'anciens dessins. Pour-
quoi cette flèche fut-elle démolie? Peut-être
en vertu du principe de l'égalité qui défen-
dait à une tour de dépasser l'autre. Les
hommes de i 793, ceux que l'on appelle pom-
peusement les grands ancêtres, étaient bien
capables de se laisser diriger par cette sotte
idée. Il est certain que la flèche a disparu,
et c'est probablement en la démolissant
que la tour droite a été à moitié ruinée.
Quatre autres tours, placées dans les angles
du transept, devaient, avec celle du milieu,
si elle avait été achevée, compléter la déco-
ration extérieure de la cathédrale. De ces
quatre tours, les deux qui se trouvent aux
angles de la nef et du transept ont été ter-
minées, les deux autres, posées aux angles
du transept et du chœur, ne dépassent pas la
I. Revue lie P Art chrétien, t. I.X, 4= liv., 1898.
3La catl)éDrale De 3Laon.
45
masse de l'édifice. A part des différences de
détail dans la construction, les deux tours
terminées, celle du Nord, dite toiir Saint-
Pa7il, et celle du Midi, dite tour de l' Horloge,
ont été élevées sur le modèle de celles du
grand portail. Elles les dépassent même en
hauteur. Aussi, quand on arrive le matin, par
un temps clair, au bas de la montagne de
Laon, et que l'on voit, à son sommet, se
dresser ces quatre tours dont les longues
baies semblent tapissées par le bleu du ciel,
on s'arrête pour admirer ce tableau unique.
On peut dire avec assurance que si la cathé-
drale de Laon n'est pas un colosse qui
étonne, elle est du moins un édifice dans
lequel l'art du moyen âge a déployé toute
la simplicité, toute la grâce et toute la
délicatesse de son premier printemps.
Ici une question se pose. Pour quel motif
a-t-on mis au haut des tours de Notre-Dame
de Laon, comme à la place d'honneur, ces
bœufs d'un effet tout à la fois si étrange et
si pittoresque ? La réponse à cette question
nous semble facile, et toute idée de sym-
bolisme ou de commémoration d'un miracle,
c'est-à-dire d'un fait particulier, doit être
écartée. Les constructeurs de la cathédrale
en mettant à cette hauteur autant de bœufs
que l'ordonnance des tours le permettait,
ont voulu témoigner de leur gratitude en-
vers ces bons et robustes animaux qui,
pendant tant d'années, les avaient aidés à
transporter au sommet de la montagne les
pierres et autres matériaux nécessaires à la
construction de l'édifice; et vu les difficultés
énormes que présentait ce transport, l'hom-
mage n'a rien d'excessif Aussi, est-ce avec
la plus vive sympathie que du pavé de la
place nous avons salué ces nobles bêtes.
Portails latéraux.
Le portail du croisillon nord du transept
offre un caractère archaïque qui irappe au
premier abord. On comprend que l'on est là
en présence de la partie la plus ancienne de
la cathédrale. On y accède par un large esca-
lier dont les marches très peu hautes sont
douces à monter. La première partie du
portail se compose de deux grandes portes
semblables, s'ouvrant l'une à côté de l'autre,
et divisées, chacune, par un trumeau. Leurs
voussures sont simples et retombent sur
les chapiteaux de minces colonnettes. Deux
arcs brisés tracés sur leurs tympans en sont
l'unique ornement. Une frise de feuillage
surmonte ces portes. Puis viennent les
fenêtres surmontées d'une deuxième frise,
et la belle rose dont il a été question plus
haut. Sur la droite de la rose existe un
commencement de travail indiquant qu'au
XIV" siècle on voulut faire subir à ce por-
tail une transformation semblable à celle
qui eut lieu au portail du croisillon sud.
Heureusement que des circonstances res-
tées inconnues ne permirent pas de réaliser
ce projet. Au-dessus de la rose court une
troisième frise. Enfin ce beau portail se
termine par une galerie richement sculptée
que couronne un quatrième cordon de
feuillage.
Le portail du croisillon sud, dépouivu
d'escalier, est loin d'avoir le grand air du
précédent. Cependant il a sa valeur. Sa
première partie se compose, comme celle
du portail nord, de deux grandes portes
juxtaposées. Elles ont également des vous-
sures simples retombant sur les chapiteaux
de fines colonnettes. Sur ces voussures sont
deux frontons. Les tympans des portes
sont découpés à jour. Au-dessus des portes
se trouve la haute et large fenêtre déjà
décrite. Ce portail, refait au XIV' siècle, a
conservé quelques vestiges de sa construc-
tion primitive. Il finit par une galerie dont
les arcades sont très élancées.
46
3Rebue îje r^vt cljrétieu.
Chevet.
Le chevet plat de la cathédrale, soutenu
à droite et à gauche par de solides contre-
forts, est fort pittoresque. Sa partie basse et
sa partie moyenne sont prises par les trois
grandes lancettes. Puis vient une frise de
feuillage. Au-dessus s'étale la rose et sur
cette rose est posée une jolie galerie limi-
tée à ses extrémités par deux clochetons.
Le tout finit par un pignon triangulaire au
milieu duquel existe une niche portant une
petite flèche.
L'extérieur de la cathédrale, ainsi que
l'on peut s'en rendre compte par ce simple
Chapiteau de fougère.
coup d'œil, possède une grande originalité.
Le côté sud, masqué par les bâtiments
de l'ancien cloître jusqu'à son portail, et
après ce portail par des maisons particu-
lières, est peu visible ; mais le côté nord
est dégagé jusqu'à son portail, et après
ce portail on le voit bien de la cour de
l'ancien évêché qui est aujourd'hui le palais
de justice de Laon. Or, rien n'est beau
comme cette longue file de contreforts et
d'arcs boutants encadrant symétriquement
les hautes fenêtres qui de loin semblent
serrés les uns contre les autres. Ici encore
nous ferons une remarque que nous prions
nos lecteurs de ne pas oublier. On a souvent
dit qu'au point de vue de l'esthétique, les
contreforts et les arcs boutants étaient le
côté défectueux de l'architecture gothique.
Or, cette doctrine est absolument fausse.
En effet, prenez une cathédrale, enlevez-
lui, par la pensée, ses contreforts^ ses arcs
boutants, ses clochetons, et vous verrez
quelle figure elle fera ! Ce sera comme un
aigle gigantesque auquel vous aurez coupé
les ailes. L'aspect de la Sainte-Chapelle de
Paris produit un peu cette impression. Le
plan de l'édifice ne comportant pas de col-
latéraux, l'architecte a pu lui donner son
élévation avec de simples contreforts ap-
pliqués aux murs de clôture et sans arcs
boutants. Eh bien ! nous le disons franche-
ment, au risque de soulever des protesta-
tions, la Sainte-Chapelle, malgré son indis-
cutable beauté, nous semble incomplète, et
nous enlève moins que certaines églises de
campagne présentant avec leurs collatéraux,
leurs contreforts et leurs arcs boulants un
ensemble parfait.
IV. — XTa Flore De la catbcDrale.
LA flore de Notre- Dame de Laon est très
intéressante à étudier, parce qu'elle est
du commencement de la première période
de la flore gothique, période dite de l'inter-
prétation. Puis au feuillage de la seconde
moitié du XI I" siècle et des premières
années du XIl I^ viennent s'ajouter, dans les
parties refaites au XIV'', les feuilles ondu-
lées,plissées,de la deuxième période de cette
flore. Elles sont toutefois peu nombreuses
dans l'intérieur de l'édifice et disparaissent
dans la masse du feuillage primitif.
La flore de Laon est aussi très variée.
ILa catl)éDrale îie 3laon,
47
On y voit l'acanthe aux dents pointues de
l'époque purement romane, c'est-à-dire du
XI" siècle ; l'acanthe aux dents rondes du
XI 1° siècle, laquelle, ainsi que nous l'avons
dit plusieurs fois, paraît être un premier
essai de vigne, précédant la vigne primor-
diale et indiscutable du même siècle. Pour
rendre l'idée avec concision, on peut donner
à l'acanthe ronde le nom d'acanthe-vigne.
Ensuite viennent les plantes purement
gothiques : le nénuphar, le plantain, la fou-
gère, la vigne primordiale et le chêne. Ce
dernier n'apparaît ici qu'au XI V" siècle.
Sur les chapiteaux des gros piliers de la
nef, du transept et du chœur, on ne trouve
que du nénuphar et du plantain. Un seul
chapiteau, appartenant au chœur, présente
de la fougère. Ces feuilles de nénuphar et
de plantain sont alignées sur deux rangs,
mais leur extrémité inférieure n'existe pas,
sauf pour quelques-unes seulement. Cette
coupure des feuilles a un inconvénient, celui
de jeter le doute sur celles du plantain. En
effet, il est assez étrange que l'arum, cette
feuille du gothique naissant, qui existe à
Notre-Dame de Paris, n'ait pas été repro-
duit à Laon. Serait-il confondu ici avec le
plantain.'* C'est peu probable, bien que l'ex-
trémité supérieure des deux feuilles ait une
certaine ressemblance, surtout lorsqu'elles
sont sculptées. A Soissons ('), où la disposi-
tion des feuilles des gros chapiteaux a été
évidemment copiée sur celle de Laon, nous
nous sommes trouvé, par suite de la coupure
des feuilles, en présence de la même diffi-
culté.Cette feuille pointue à trois ou quatre
nervures, était-elle une l'euille d'arum ou
une feuille de plantain .'' Nous avons conclu
en faveur de l'arum. A Laon nos hésitations
ont redoublé, mais étant donné que les feuil-
les complètes, c'est-à-dire non coupées, qui
I. Revue de l'Art chrdlien, t. IX, 6"= livraison, 1S9S.
apparaissent sur deux ou trois chapiteaux,
sont bien des feuilles de plantain, nous pen-
sons que toutes les autres sont également
du plantain. On peut ajouter que les artistes
de Laon et de Soissons, qui étaient indé-
pendants, ont pu ne pas reproduire l'arum,
malgré la préférence qu'eurent pour lui les
sculpteurs de l'Ile-de-France aux premiers
jours du gothique.
Chapiteaux et iiiice.iu de vigne
On ne trouve pas sur les chapiteaux de
Notre-Dame de Laon ces compositions si
savamment étudiées qui se voient à Notre-
Dame de Paris, ainsi que dans beaucoup
d'édifices procédant de la grande cathédrale.
Mais, devant ces larges et fortes feuilles qui
s'étalent sur la corbeille, on sent que l'on est
là en face d'un art nouveau, art robuste,
plein de sève et de vie, qui donne, dès son
éclosion.des œuvres d'une ampleur et d'une
vigueur remarquables.il y a, en effet, parmi
48
Ee\)uc tjc r^lvt djvctien
les gros chapiteaux de nénuphar et de plan-
tain de Notre-Dame de Laon, plus d'un
chef-d'œuvre. La sculpture de Notre-Dame
de Paris n'est peut-être, en réalité.que celle
de Notre-Dame de Laon arrivée à sa per-
fection sous l'incomparable coup de ciseau
des artistes parisiens.
Dans la galerie et dans le triforium, on
aperçoit, avec le nénuphar et le plantain,
l'acanthe pointue, l'acanthe-vigne, la fou-
gère et la vigne primordiale. La section de
la galerie appartenant au croisillon nord du
transept, possède des chapiteaux historiés
présentant des personnages étranges, des
animaux fantastiques enlacés dans des
branches d'acanthe, sujets qui indiquent
que ce croisillon, ainsi qu'il a été dit plus
haut, est bien la partie primitive de la
cathédrale.
Il convient de dire ici qu'il existe dans
Chapiteaux de fougère et de vigne.
l'édifice un certain nombre de chapiteaux
d'acanthe qui, eux aussi, sont des chefs-
d'œuvre, ils sont disséminés dans les colla-
téraux de la nef, du transept, du chœur et
dans la galerie. La beauté de ces chapiteaux
n'a rien qui puisse surprendre. Au moment
où fut construite la cathédrale, la sculpture
ornementale de l'époque romane était
arrivée à son apogée, et dominait partout.
Aussi semble-t-il que les artistes romans
ont lutté longtemps avant de céder le ter-
rain aux gothiques ; et il faut leur rendre
cette justice, c'est qu'avec lafeuille d'acanthe
(]ui fut presque la seule qu'ils reproduisirent,
surtout dans le Nord de la France, ils ont
créé des merveilles.
Et maintenant que dire de la flore exté-
rieure du monument, ilore qui se compose
des feuilles ou de la plupart des feuilles
déjà indiquées ? Détailler les frises qui
marquent les divisions des portails, les
rinceaux qui encadrent les fenêtres et qui
sertissent les roses, toutes ces compositions
d'un art qui est arrivé ici à son épanouis-
5La catl)éîirale de Haon,
49
sèment, nous entraînerait trop loin. Une
cathédrale est tout un monde, monde de
statues, de feuillages surtout, et Ion ne
s'imagine pas ce qu'il existe de sculpture
floralesur Notre- Dame de Laon! Le tableau
qui suit en fera connaître au moins les
grandes lignes.
Les plantes désignées dans ce tableau
comme formant crochet sont celles qui s'en-
roulent sur elles-mêmes à leur extrémité
supérieure, car il n'y a pas, croyons-nous,
à Laon, de crochet formé d'une plante
piquée sur une autre. La feuille désignée
comme simple, est celle qui ne s'enroule
pas en crochet.
iPâbleau ûe la Pore De la cat^éûrale ûe liaon.
INTÉRIEUR.
Nef.
Piliers de gauche. Piliers de droite.
1. Plantain formant cro- i. Nénuphar formant cro-
chet à sa partie supé- chat à sa partie supé-
rieure, rieure.
2. Plantain avec bandes 2. Nénuphar simple.
de nénuphar formant
crochet à leur extré-
mité.
3. Nénuphar et plantain. 3. Plantain formant cro-
chet.
4. Plantain simple et 4. Plantain formant cro-
plantain formant cro- chet et plantain simple,
chet.
5. Plantain simple. 5. Nénuphar simple et
petites feuilles de plan-
tain.
6. Nénuphar formant cro- 6. Plantain sur 3 rangs
chet. exceptionnellement.
7. Nénuphar formant cro- 7. Nénuphar formant cro-
chet, chet.
8. Nénuphar formant cro- 8. Nénuphar simple.
chet.
9. Plantain simple. g. Nénuphar formant cro-
chet.
10. Nénuphar simple. lo. Nénuphar et plantain.
Transept.
Croisillon gauche. Croisillon droit.
Piliers dit côté de la nef. Piliers du côté de la nef.
1. Nénuphar simple et i. Nénuphar s'enroulant
nénuphar s'enroulant en arrière.
en arrière ; plantain.
2. Plantain simple. 2. Plantain simple.
Piliers du côté du chœur. Piliers du côté du chœur.
1. Nénuphar simple. i. Nénuphar simple.
2. Nénuphar en branche. 2. Nénuphar simple.
Pilier faisa7ii face au mur Pilier faisant face au mur
de clôture. de clôture.
Plantain formant crochet. Nénuphar formant crochet
sur les cinq colonnettes.
Chœur.
Piliers de gauche. Piliers de droite.
1. Nénuphar formant cro- i. Nénuphar simple avec
chet. bandes de nénuphar
s'enroulant à leur ex-
trémité.
2. Fougère. 2. Nénuphar en branche.
3. Nénuphar simple. 3. Nénuphar formant cro-
chet.
4. Nénuphar s'enroulant 4. Nénuphar simple,
en arrière.
5. Nénuphar simple. 5. Nénuphar en branche.
6. Plantain simple. 6. Plantain formant cro-
chet.
7. Plantain formant cro- 7. Plantain formant cro-
chet, chet et nénuphar sim-
ple.
8. Plantain formant cro- 8. Plantain simpleetplan-
chet. tain formant crochet.
9. Plantain formant cro- 9. Plantain formant cro-
chet, chet et nénuphar.
Chapiteaux remarquables en dehors des grandes lignes
de l'édifice :
1" Chapiteaux d'acanthe-vigne, de plantain et de
nénuphar des piliers de la chapelle des Fonts dans le
collatéral droit de la nef.
2" Chapiteau d'acanthe-vigne du pilier placé à gauche
de la chapelle du croisillon sud du transept.
3° Chapiteaux d'acanthe-vigne et chapiteaux de vigne
et de chêne du XIV^ siècle de plusieurs piliers situés du
côté de la nef dans le croisillon nord du transept.
4° Chapiteaux de fougère et de vigne du XI 1" siècle du
pilier séparant les deux portes de ce même croisillon
nord.
5" Chapiteaux historiés de plusieurs colonnettes de la
galerie du transept.
6° Chapiteaux d'acanthevigne et d'acanthe pointue de
plusieurs piliers du pourtour du chœur.
EXTÉRIEUR.
Grand Portail.
Grands rinceaux surmon-
tant les trois portes.
Frise courant au-dessus des
portes.
Rinceau encerclant la rose.
Rinceaux encadrant les
deux fenêtres.
Vigne du XI P' siècle.
Fougère.
Fougère.
Fougère.
KKVUE DE L'aKT CHUéTIEN.
1901. — I*^^ IIVRAISON.
50
Bebue ïic rart cbvctten.
Grands rinceaux surnion- Fougère,
tantlaroseet les fenêtres.
Frise au-dessus de la rose; Nénuphar découpé en for-
sous la galerie. me de trèfle.
Frise au-dessus de la gale- Même feuillage.
rie.
Cette sculpture se reproduit sur les tours et sur les
parties de la cathédrale qui n'ont pas été refaites au
XIV= siècle.
Portail nord.
Chapiteauxdes colonnettes
de la porte droite.
Chapiteauxdes colonnettes
de la porte gauche.
Acanthe, vigne et fougère.
Acanthe, vigne, fougère et
vigne du XIV siècle.
Cette sculpture dont le caractère est tout à fait ar-
chaïque vient encore confirmer ce qui a été dit sur l'an-
cienneté du croisillon nord.
Portail sud.
Chapiteaux des colonnettes
de la porte droite.
Chapiteaux des colonnettes
de la porte gauche.
Chapiteaux des colonnettes
de la tour de l'Horloge.
Rinceaux de cette même
porte.
Vigne et chêne ondulés du
XIV siècle.
Vigne et chêne ondulés du
XIV'= siècle ; vigne et
chêne simples du XIII =
siècle.
Acanthe, vigne et fougère.
Armoise ou vigne pointue
du XIV' siècle ; rosier
et feuilles de renoncule
découpés comme du
chardon.
Cette sculpture est du XIV'' siècle, mais on y retrouve
quelques vestiges des feuillages primitifs.
Conclusion.
L'ARCHITECTE qui a donné le plan
de Notre-Dame de Laon est resté
inconnu, ainsi que celui qui modifia le chœur,
et le fit semblable à la nef. Mais bien que
leurs noms ne soient pas parvenus jusqu'à
nous, il faut reconnaître qu'ils furent des
hommes de génie. Le premier commença
l'œuvre, et, chose rare, le second l'acheva,
lui donna la perfection, en reprenant préci-
sément l'idée de son prédécesseur. Il sut
comprendre tout ce qu'il y avait de beau
dans la création de la nef, et il continua
cette création jusqu'au point terminal. En
construisant ces deux longues files de
piliers et de grands arcs qui font de la
cathédrale une des œuvres les plus pures
du gothique à son origine, on se demande
si, du haut de leur montagne, ces deux
constructeurs n'ont pas eu la vision de
l'Hellade, et n'ont pas voulu élever sur le
sol gaulois un édifice pouvant rivaliser pour
l'ordonnance, en mettant à l'intérieur ce
qui dans les monuments grecs se trouve à
l'extérieur, avec ceux de la patrie de
Périclès.'* Telle est pour nous l'impression
qui se dégage de cette étrange et merveil-
leuse cathédrale.
Emile Lambin.
&»A^»?^ ^^mU K^^ A^-^ A^^ A^V?^ A^Vk A^^ ;t^ K^*U A^^ A^y^ A^Vihc X^U A^-A '
irirTTTnrriTTrirrriTïTTiglliiiIIIilIIïTixiiiiiiTiiiiiJiiriiiiriritJi:
?SK©^@s@^s)®^§)^^ ffîélanges. m^^më^mMmBm
ntnmnxi^^^mi-ii 1 1 1 1 1 ixixxjux^ximxit
ITl 1 I iTTIXrmntTTTTnrTTTTTTnf 1 1 1 1 T tm H I I T iTTTTTTTTTTTTTT-IXmHIIILl:
TTTTTTTTI 1 1 I r tlTTTTTTTI
A Semaine du fidèle, 1898, p. 572,
donne le texte de l'inscription fondue
sur la cloche de l'église de Challes, au
" diocèse du Mans :
le dimanche de la sainte-trinité
j'ai Été bénite par m.- le chanoine gouin vicaire général
[honoraire.
j'ai EU POUR PARRAIN, M. ROBERT CHASTENET COMTE DE
[puységur,
et pour marraine, madame félix roche, née félicie
[gizolme.
j'ai ÉTÉ nommée : YVONNE-MARIE-JEANNE-FÉLICIE-ANTOINETTE-
[SUZ ANNE-CLÉMENTINE.
— M. MÉTAIS ÉTANT MAIRE DE CHALLES, M. L'ABBÉ CLÉMENT
[BAUCHÉ, CURÉ.
Cette rédaction provoque de ma part quel-
ques observations, qui pourront profiter à d'au-
tres ; en conséquence, je crois devoir signaler ses
irrégularités, afin qu'on les évite à l'avenir.
N'est pas épigraphiste qui veut, et on aurait
tort de s'imaginer qu'une prose correcte suffit
pour exprimer sa pensée ; il y faut bien aussi,
sinon de la science, au moins quelque expé-
rience.
La croix initiale était de rigueur autrefois.
Pourquoi s'en dispense-t-on si facilement ?
On ne saurait être trop précis quand il s'agit
de commémorer un fait. Z? dimanche de la Ste-
Trinité <tiXh\ç.n vague et n'apprendra rien aux
générations futures, quand il eût été aussi utile
que facile d'ajouter la date de la bénédiction,
qui a eu lieu le 5 juin de cette année.
Je proteste contre l'emploi de bénite : le par-
ticipe du verbe /;/«/;■ réclamait bénie ; bénite ne.
convient, exceptionnellement, que pris adjective-
ment. Il n'y a pas lieu d'étendre outre mesure
les irrégularités de la grammaire.
M. le chanoine Gouin. Monsieur n'est pas un
titre ecclésiastique. La seule formule du pro-
tocole est Très Révérend.
Gouin tout court, sans nom de baptême, est
du pur gallicanisme, formellement réprouvé par
Pie IX.
. ^S."" ^S^ ^S^ *i^^ ^ië^ ^S^ ^S^ ^S^ ^S^ ^sB^ ^S^ *À^^ »AiI^ ^é^ y^à^
CInC inscription De ClOCfjC. vicaire générai honoraire flattera l'officiant,
mais ne remplace pas la mention de la délégation,
car le chanoine n'a pu agir qu'en vertu d'une
délégation spéciale de son évêque; l'un et l'autre
étaient à mentionner, comme acte épiscopal.
f ai été (bis) et j'ai eu peuvent être bons pour
un procès-verbal : en épigraphie, on parle autre-
ment et surtout on ne se répète pas.
Comme ce sont les parrain et marraine qui
nomment, il y avait moyen d'abréger : il eût
été moins encombrantde formuler ainsi -.J'aiéte
nommée par.... et Les honneurs étant
pour la cloche, à elle de figurer au premier rang,
avant ceux qui la patronnent et présentent.
Sept noms, n'est-ce point trop quand un seul
eût suffi, deux au plus ; un pour la marraine ;
deux pour le parrain et la marraine, qui, d'ordi-
naire, assignent leurs prénoms ? Tenons-nous à
Yvonne.
La cloche est-elle municipale ? Alors je con-
çois l'introduction du nom du maire. Mais l'ar-
ticle dit qu'elle est le produit d'une « souscrip-
tion paroissiale », faite exclusivement par « le
digne et zélé curé de Challes », qui a été trop
humble en la circonstance, puisqu'il n'intervient,
quoique chez lui, qu'après un fonctionnaire de
l'ordre civil, qui n'a que faire ici. Le président
de la fabrique y eût été mieux à sa place et la
générosité de la paroisse valait au moins une
mention.
La rédaction est franchement laïque. Le curé
est non seulement Monsieur '^]'a.ôÀ?, on disait en
France Messire), mais encore Yabbé, ce qui, de-
puis la constitution civile du clergé, équivaut
à citoyen. Curé est une désignation très vague ;
le contexte suppose comme complément de
Challes, mais en style ecclésiastique on ne doit
pas omettre le saint titulaire de l'église.
Autre effet de la laïcisation à outrance : pas
la moindre sentence religieuse, allusive aux
vertus surnaturelles de la cloche. Nos anciennes
cloches nous révèlent qu'on n'y manquait jamais
aux temps de foi.
La conclusion pratique est que toute inscrip-
tion doit être préalablement soumise à l'appro-
52
Bcbue De V^xt t\)xititn.
bation de l'évêque, qui, pour la contrôler effica-
cement, aura près de lui un ecclésiastique com-
pétent en la matière, lequel, au besoin, fournira
un avis motivé.
X. Barbier de Montault.
Xià Dalmatiquc Du trésor De St^fiierre.
ANS son rapport sur le 11*^ Congrès
d'archéologie chrétienne, avril 1900,
Mgr A. Battandier parle de la soi-
disant dalmatique de Charlemagne
du trésor de Saint-Pierre de Rome, et il rapporte
l'opinion de M. Colasanti, qui date le vêtement
des dernières années du XI« siècle. Me trouvant
à Rome, il y a deux ans, je me suis attaché à
une étude particulière de la dalmatique vaticane,
dont j'ai publié le résultat inattendu dans un
article de la Revue allemande des Pères Jésuites
Die Stiminen ans Maria-Laacli, année 1889,
vol. 2, p. 575 et ss.
Quatre points sont en question concernant
la dalmatique :
. i) A-t-elle appartenu à Charlemagne?
2) A-t-elle été du moins, comme on l'a pré-
tendu, en usage chez les empereurs allemands au
jour de leur sacre et à l'occasion de leur assis-
tance à la messe solennelle à Saint-Pierre ?
3) Quel a été le caractère primitif du vêtement?
4) A quel siècle doit-on attribuer la dalmatique?
Voici les réponses qu'il convient de faire à ces
questions.
I. La dalmatique de Saint-Pierre n'a jamais
été portée par Charlemagne. Pour établir ce
point, je ne veux pas m'en rapporter à la forme
et aux autres particularités de l'ornement, tout
à fait étrangères aux dalmatiques romaines du
commencement du IX^ siècle, bien connues
par les mosaïques de ce temps et les descriptions
de Raban et d'Amalaire. Cela ne me paraît pas
nécessaire ; les inventaires de la Basilique vati-
cane prouvent à l'évidence que la dalmatique n'a
fait partie du trésor de Saint-Pierre qu'à partir
de la seconde moitié du XV^ siècle (').
i. Les inventaires ont i\.è publiés par MM. E. Muntz et A. L.
Frothingham clans \Archivio delta Sociela Komnna diStorla Patria
vol. VI. p. I sv, (Rome, 1883) sous le titre: // Tesoro délia Basilka
di S. Pietro in Vaticxno dal XI U al XV secolo.
Ni l'inventaire de 1361, ni celui de 1436, ni
celui de 1454-55 ne mentionnent la dalmatique,
quoiqu'ils enregistrent d'une manière exacte et
fort détaillée les vêtements qui se trouvaient
alors dans la sacristie de Saint-Pierre, surtout
l'inventaire de I36r, dont les descriptions com-
prennent quelquefois de treize à quinze lignes.
Si la dalmatique avait déjà existé à Saint-Pierre,
l'inventaire de 1361 l'aurait certainement men-
tionnée.
Cet inventaire nomme et décrit à la vérité
une « dalmatica imperialis sollemnissima, que
dicitur Constant(ini) de dyaspero albo laborato
ad rotas de auro et serico, in quibus sunt grifo-
nes et pappagalli et aquile cum duobus capiti-
bus, crucibus in medio de auro et serico cum
fimbriis et manicis deauratiscum figuris in rôtis
ad perlas et cum duobus cordis de perlis circum-
circa. Cum armato ad collum et ad spatulam ad
filum ornatum de perlis, foderat (sic) de sindone
rubeo (i). » Mais évidemment ce vêtement est
entièrement différent de la soi-disant dalma-
tique de Charlemagne.
C'est dans l'inventaire de 1489, que nous ren-
controns pour la première fois ce célèbre orne-
ment. Sous le titre « Paramenta asurrea, gailla
(galla), pavonachia et viridia 1> nous y lisons :
« Una dalmatica de colore celesti contexta cum
figuris aureis et arge/iieis, que in una parte habet
figurain dei et pluriunt aliorum sanctoriim, in
altéra parte ?,\m\\\\.&x h^het figura m Xti sedentis
in throno cum angelis circunicirca et cum criice
super caput ex opère Grèce cum stola if). » Il
n'est pas difficile de reconnaître dans cette des-
cription la dalmatique du trésor de Saint-Pierre.
Cette description n'est pas complète, mais elle
est suffisante pour ne laisser aucun doute sur
l'identité de la dalmatique de Charlemagne et
celle décrite dans l'inventaire de 1489.
Il est très remarquable que l'inventaire
n'ajoute pas le moindre mot pour attribuer l'or-
nement à Charlemagne, quoiqu'il indique dans
beaucoup d'autres cas le nom de ceux auxquels
on assignait certains parements, p. e. planeta
Pape Nicolai V, pluviale Sixti IV, etc., et même
1. Le., p 38. Peut-6tre la dalmatique est appelée « imperialis »
parce qu'on l'attrilitiait à l'empereur Constantin.
2. L. c. , p. 117.
£0élanges.
53
pallhnn Cojistnntini. C'est la preuve évidente
qu'alors on ne connaissait pas encore la légende,
qurveut que la dalmatique ait été portée par
Charlemagne le jour de son sacre.
2. La dalmatique n'a jamais été employée
comme ornement par les empereurs allemands.
La dernière fois que le sacre d'un empereur alle-
mand a eu lieu à Saint-Pierre, — c'était celui de
Frédéric III en 1452, — le vêtement en question
ne se trouvait pas encore dans la sacristie de
Saint-Pierre. Peut-être quand Frédéric III est
venu à Rome pour la deuxième fois, en 1468,
la dalmatique s'y trouvait-elle déjà. Mais nous
savons par le récit que fait Patritius du séjour
de l'empereur à Rome, que celui-ci, chantant
l'évangile à la messe solennelle, n'était revêtu
que de l'aube, de l'étole et de la chape, et non
d'une dalmatique.
C'est le docteur Bock principalement qui a
appelé la dalmatique de Saint-Pierre « dalma-
tique impériale», et c'est à cause de cette pré-
tendue attribution qu'il l'a reproduite et décrite
avec les ornements impériaux dans son célèbre
ouvrage : Die Kleinodien des heiligen rœniischen
Reiches deiitscher Nation. Il pensait que l'orne-
ment avait été apporté à Saint-Pierre vers le com-
mencement du XIII<= siècle, c'est-à-dire après la
prise de Constantinople par les Latins. L'opinion
du docteur Bock, cent fois répétée par d'autres
auteurs, ne peut plus être maintenue aujour-
d'hui. La dalmatique est venue à Saint-Pierre
entre les années 1454 et 1489, c'est-à-dire après
la prise de Constantinople par les Turcs, sans
doute par des fugitifs grecs, dont un grand
nombre, ayant quitté leur patrie, vint en Italie,
l'enrichissant de nombreux manuscrits et d'ou-
vrages d'art byzantins.
3. Les scènes brodées sur la partie antérieure
et postérieure ainsi que sur les épaules de la dal-
matique prouvent qu'elle a été faite pour servir
d'ornement liturgique.
Le docteur Bock et d'autres savants ont ex-
primé l'opinion que le vêtement a été un saccos
grec, alors privilège des patriarches et des métro-
polites. L'inventaire de 1489 rend cette hypo-
thèse certaine. Car après avoir décrit la dalma-
tique il ajoute immédiatement : Scapulare iinuni
si7niliier coniextum. Qe scapulaire, qui apparte-
nait sans doute comme complément à la dalma-
tique, de laquelle l'inventaire vient de parler, ne
peut être un autre ornement que l'omophorion
c'est-à-dire, le pallium épiscopal grec. Mais si le
« scapulaire » doit être considéré comme l'omo-
phorion grec, la dalmatique de l'inventaire est
certainement le saccos grec.
Il est vrai que dans l'inventaire le vêtement
est nommé dalmatique, mais il n'en faudrait pas
conclure qu'il a été une dalmatique latine. La
soi-disant dalmatique de Charlemagne n'a pas
de manches; on y a substitué des pièces d'étoffe,
qui couvrent les bras. Cependant, dans la seconde
moitié du XV« siècle, la dalmatique avait encore
partout en Occident de véritables manches. Ce
n'est qu'au XVI 1*= siècle, qu'on les a transfor-
mées en France, en Espagne et en Allemagne —
mais pas en Italie, où on a conservé les manches
jusqu'à présent, — en pièces d'étoffe rectangu-
laires. Le vêtement est appelé dalmatique dans
l'inventaire, parce qu'il n'existe pas d'autre
terme latin et qu'il y a une certaine ressemblance
entre le saccos grec et la dalmatique occi-
dentale.
4. On sait que l'art byzantin n'a subi que fort
peu de changements depuis le XI^ siècle jusqu'à
la fin du moyen âge. Il est donc extrêmement
difficile de fixer la date des monuments grecs
et on peut y appliquer bien souvent le proverbe :
Quot capita tôt sensus. Il serait à souhaiter
qu'on fût un peu plus circonspect en fixant
l'âge des monuments grecs. En général on
incline trop à leur assigner des dates aussi
reculées que possible.
La dalmatique de Saint-Pierre a été attribuée,
à diverses époques, par les uns au IX"^, les
autres au XI^, au XI I^ ou au commencement du
XlIIe siècle.
Cependant il n'est pas possible que la dalma-
tique soit l'ouvrage du IX« siècle. Le caractère du
vêtement, qui n'était pas encore alors en usage,
aussi bien que le style des broderies s'y op-
posent catégoriquement. Je n'oserai pas même
l'attribuer simplement au XI« ou au XI I^ siècle.
Je ne veux pas nier absolument la possibilité
d'une telle date, mais d'autre part je ne vois pas
de raison péremptoire pour l'adopter. Ni la forme,
ni l'étoffe de la dalmatique, ni la technique, ni
54
Bcbuc tic r2lit (Ijvcticu.
l'exécution parfaite des broderies, ni le style, ni
l 'iconographie des scènes représentées n'exigent
qu'on attribue le vêtement à une époque si recu-
lée. En ce qui me concerne, j'incline à penser que
la dalmatique n'est guère antérieure anKY*" siècle.
Il n'est pas inutile de remarquer que l'inven-
taire n'a pas placé la dalmatique sous le titre :
antiqua oinaineiita, ni lui a ajouté la note
« antiquum », comme à d'autres vêtements (•)•
Jos. Braun, s. J.
I. Ayant écrit ces lignes, je vois, après coup, que dans la revue
allemande Repertorium fiir Kiinstgeschichte, vol. XV, p. 515, la
dalmatique est attribuée au XV» ou au XVI= siècle. Malheureuse-
ment on n'en donne pas de raisons, mais on s'en rapporte simple-
ment à deux livres russes, qui ne sont pas à ma disposition, Pro-
choroff. Antiquités chrétiennes et Archéologie chrétienne ( iSS^j.
1. 3, p. 47 et VoV.xo\^^\,L' Évangile, p. 284. Évidemment le vêtement,
existant déjà en 1489, ne peut pas être daté du XVI"= siècle, mais
j'accepte bien volontiers le XV=. Je suis bien aise de trouver que
mon opinion a été applaudie aussi dans la revue Byzantinische
Zcitschrijt, vol. IX (1900), p. 607.
i^^^ ^^. :^ ^^ ^^. ^^. ^ ^, ^ ^. ^^. ^^. ^^ ^^. ^ ^s^.^.^. ^^. ^^. ^. ^. ^ ^ ^
wwwwwwwwwwww^wwwwwwwwwwwww
Italie.
Xta peinture murale à l'huile en Italie au xv= Mt\i.
ORSQU'ON habite l'Italie et qu'on la
parcourt en tous sens, on éprouve
maintes surprises en rapprochant les
' œuvres d'art des écrits qui les concer-
nent.
Je ne parle pas, bien entendu, des divergences
d'opinions sur la valeur d'un ouvrage, mais des
méprises sur des faits matériels.
Je viens d'avoir un nouvel étonnement à la
lecture d'un travail de M. Fierens-Gevaert (').
Dans une partie de l'article, l'auteur montre
l'influence que la couleur à l'huile, inventée ou
perfectionnée par Van Eyck, a exercée sur les
peintres italiens.
Cette influence est connue et n'a jamais été niée
sérieusement, mais dans le but fort honorable
d'augmenter encore la gloire qui en rejaillit sur
les peintres de son pays natal, M. Fierens-Gevaert
a avancé des faits dont je me permets de contes-
ter l'exactitude.
Parlant de la couleur à l'huile et du peintre
Alessio Baldovinetti (1427- 1499), il écrit: «De son
côté Baldovinetti l'applique, le premier, avec
succès à la peinture murale. »
Il est regrettable que l'auteur n'ait pas indiqué
dans quelle peinture murale disparue ou encore
existante Baldovinetti a si bien réussi.
La mode d'affirmer un fait, sans fournir de
preuves, ou tout au moins des présomptions, se
généralise dans la critique d'art française et étran-
gère ; je pourrais en citer de nombreux exemples;
elle est fort commode, sans doute, mais inad-
missible.
Les seules décorations murales de Baldovinetti
qui subsistent se trouvent à Florence.
Ce sont :
— L' Annonciation sur un mur droit, et les
I. Revue des Deux Mondes, 15 juin 1900. De Van Eyck à Van
Dyck.
La Revue de l'Art chrétien de septembre 1900 a donné un extrait
de cet article.
Évangélistes, Prophètes et Anges sur le plafond de
la chapelle du cardinal de Portugal à San Mi-
niato.
— La Madonna délia Cintola à l'église San
Niccolo.
— n Adoration des Bergers dans l'atrium de
l'église de la Santissima Annunziata.
— La Résurrection du Christ dans la chapelle
dite du tombeau, près de San Pancrazio.
— Quelques traces de paysage au haut du
chœur de l'église de la Santa Trinità.
Dans aucun de ces ouvrages il n'y a de couleurs
à l'huile. C'est l'opinion, à Florence, de ceux qui
s'occupent de la technique des fresques, et on ne
peut méconnaître que cette cité est exception-
nellement pourvue d'artistes, de praticiens, et de
cultori dell'arte ayant acquis, soit par profession,
soit par goût, une compétence en cette matière.
Non seulement Baldovinetti n'a pas peint sur
mura l'huile, mais aucune de ses fresques n'a été
ultérieurement recouverte de couleurs à l'huile,
comme cela est arrivé pour d'autres fresques du
XV"^ siècle; on observe sur quelques-uns de ses
tableaux, comme sur d'autres de la même époque,
une légère couche de vernis posée sur la détrempe,
longtemps après coup, mais dans aucun le vernis
n'a été mélangé avec la couleur.
La couche de peinture à l'huile sur les fresques,
comme aussi le vernissage sur la tempera avaient
un but de préservation ; mais le calcul n'a pas
été bon, et il s'en est suivi des écaillages.
Lorsque l'occasion se présente, et que la chose
est possible sans danger, on a soin maintenant de
débarrasser les peintures de ces couvertes.
A défaut de la peintuie murale à l'huile exé-
cutée par Baldovinetti, il semble que M. Fierens
aurait pu indiquer sur quels témoignages écrits
il s'est appuyé: il ne le fait pas.
Il y a cependant dans feu J. Burckhardt ('), à
l'article Baldovinetti, une indication à noter.
De ce peintre et des couleurs à l'huile l'éminent
professeur à l'université de Bâle, écrit :
« Il cherche à appliquer les nouveaux procé-
« dés jusque dans la peinture murale. L'exemple
i. Le Cicérone, guide de l'art antique et de l'art moderne en Italie.
56
3^ct)ue lie V^xt djrétien.
« le plus connu et le plus intéressant à cet
« égard est la fresque de X Adoration des Bergers
« (1460) dans le vestibule de \' Aiuninziata. Les
« figures, il est vrai, sont très laides et tellement
« éparses qu'il n')^ a pas de composition propre-
« ment dite. »
Remarquons que Burckhardt va beaucoup
moins loin que M. Fierens-Gevaert; il ne dit pas
que Baldoviiietti a employé avec succès les nou-
veaux procédés, il se contente de marquer qu'il a
cherché à les appliquer; il ajoute même que les
figures sont laides.
Comme dans aucune de ses peintures Baldo-
vinetti n'a fait de figures laides, il est fort proba-
ble que Burckhardt a voulu dire que dans les
figures de l'Annunziata, le peintre n'avait pas
réussi avec ses essais.
Cela saute aux yeux. A l'Annunziata la place
des visages est seulement marquée ; sous un très
léger frottis on voit l'enduit ; les figures ne sont
ni laides ni belles elles n'existent pas pour ainsi
dire; visiblement l'ouvrage a été laissé inachevé
intentionnellement.
Pourquoi ?
Je vais essayer de le montrer.
Ici il me faut entrer dans le détail. Depuis plu-
sieurs années, j'ai fait de la technique des fres-
ques une de mes études préférées ; je ne me suis
pas contenté de compulser les écrits, mais j'ai
fréquenté les opérateurs sur leurs échafaudages.
Les occasions ne m'ont pas manqué ; il y a pres-
qu'en permanence en Toscane des artistes occu-
pés sur d'anciennes fresques, soit pour enlever la
poussière et les impuretés, soit pour les débar-
rasser du badigeon qui les recouvre, soit pour
consolider l'enduit sur lequel elles sont peintes,
soit enfin pour les déplacer tout à fait.
Je me suis d'autant plus attaché à ces travaux
que j'ai souvent constaté qu'en France, la tech-
nique des fresques était assez peu connue, et que
les écrits sur la matière renfermaient des erreurs
et étaient très en retard sur les progrès réalisés
en Italie de notre temps.
Notre indifférence à l'égard des fresques est
telle, que nombre de nos écrivains ont dénaturé
le sens du mot; on trouve constamment l'expres-
sion : la fresque du Panthéon de Paris, alors qu'au
Panthéon il n'y a pas de fresques, mais des
peintures sur toile appliquées contre le mur par
marouflage.
La fresque, le buon frcsco, comme on dit en
Italie, est une peinture exécutée sur un enduit
frais, au moyen de couleurs préparées à l'eau.
Il arrive parfois que la peinture, étant sèche,
ne donne pas entière satisfaction au peintre,
en ce cas, il la retouche, sur l'enduit sec, à tempera,
c'est-à dire avec des couleurs préparées au jaune
d'œuf, ou à la colle, ou avec d'autres matières
agglutinatives.
Si la tempera donne des facilités au peintre,
elle présente en revanche de graves inconvé-
nients,si bien que parfois il fallait pour l'employer
une convention spéciale. Dans le traité passé, en
1483, entre le patricien Tornabuoni et Domenico
Ghirlandaio pour la décoration du chœur de
l'église Santa Maria Novella, à Florence, il est
spécifié que le peintre pourra travailler a tempera.
Du reste, quelques couleurs, certains rouges et
verts et surtout le bleu d'outre-mer, ne pouvaient
être employés qu'à tempera.
Les tons de la tempera sont plus ternes que
ceux du buon frcsco, mais ceci est, en somme,
assez secondaire ; le défaut capital, c'est que la
tempera déteint à l'eau, alors que le buon fresco
résiste.
On sent le danger, surtout lorsque la fresque
est exposée à la pluie, comme dans les taberna-
cles sur rues, et dans les cloîtres ouverts, si fré-
quents en Italie.
Il y a aussi les risques que l'ignorance peut
faire courir à la fresque ; ceux qui s'intéressent
particulièrement au genre ont souvent observé,
à côté de parties encore en bonnes colorations,
d'autres où l'enduit est apparent. A la Char-
treuse de Pavie notamment, le fond bleu des
grandes fresques, exécutées vers 1490 par Am-
brogio Borgognone, a presque complètement
disparu à la suite d'un lavage inconsidéré, ce qui
nuit beaucoup à l'harmonie de l'ensemble.
A cette occasion, j'ai remarqué avec peine que
plusieurs écrivains français distingués protes-
taient contre les restaurations et qu'ils ont été
jusqu'à dire que restaurer c'est détruire.
Il y a cependant des restaurations indispen-
sables, aux édifices surtout qu'on ne peut pas
abandonner à une ruine certaine, et aussi aux
Correspontiance,
57
peintures. Me trouvant à Padoue, il y a quelques
années, j'ai vu avec plaisir des praticiens repren-
dre le fond bleu des fresques de Giotto à la
chapelle de la Madonna de l'Arena ; tout en étant
à l'abri des intempéries, la couleur, après six
siècles, avait fini par s'écailler et tomber par
endroits ; le devoir strict était de remédier au
mal, autrement les fresques se seraient enlevées
sur des fonds blancs, ce qui eût été contre le
parti adopté par Giotto.
Il n'est pas besoin de dire que de tout temps,
les peintres de fresques ont été frappés de
l'inconvénient de la tempera et qu'ils ont cher-
ché à la rendre aussi résistante à l'eau que l'est
le buoH fresco.
Toutes les tentatives ont été jusqu'à présent
infructueuses ; les inventeurs n'ont pas manqué,
on le pense bien, mais aucun des procédés pré-
conisés n'a donné de résultats satisfaisants.
Parmi ces inventeurs se trouve précisément
Baldovinetti. C'est Vasari (1511-1574) qui nous
l'apprend (').
Peintre médiocre, excellent architecte, écrivain
d'art hors ligne, Vasari a fait dans les Vite des
erreurs biographiques et a montré de la partialité
pour les peintres toscans, mais il a une qualité
incontestée : dans les arts qu'il a exercés, il
connaît la technique. Il a bâti très solidement
et a peint à fresque, a tempera, à l'huile sur
murailles, d'une façon très pratique ; ses décora-
tions à l'huile sur les murs des chambres du Vieux
palais de Florence, dites quartier de Léon X, en
sont le témoignage ; depuis plus de trois siècles,
elles sont là bonnes comme au premier jour.
Vasari raconte que Baldovinetti fut chargé de
peindre quelques scènes de l'Ancien Testament
dans l'église de la Santa Trinità à Florence ; il
commença à biion fresco et termina à tempera
avec des couleurs au jaune d'œuf mélangées con
vernicc fatta a fuoco avec un vernis fait au feu ;
il pensait par ce moyen mettre la tempera à l'abri
des atteintes de l'eau ; mais la peinture craquela
et le peintre, qui croyait avoir trouvé un raro e
bellissimo segreto, resta avec son erreur riinase
délia sua opinione ingannato.
Il n'y a pas de discussion et d'interprétation
possibles.
I. Vasari, Le Vite dei pik ceUbri pittoriy scultûri e arckiit-tti,
(première édition en 1550).
Les termes sont formels ; ici Vasari ne pro-
nonce pas le mot /utile qu'il emploie ailleurs
lorsqu'il y a lieu ; il dit vernice et pas autre
chose. Dans le reste de la bibliographie de Bal-
dovinetti, on ne trouve pas la moindre allusion
à un usage quelconque qu'il aurait fait des cou-
leurs à l'huile.
Baldovinetti était un lutteur obstiné et tenace ;
il est infiniment probable qu'à l'Annunziata il a
recommencé ses expériences de la Trinità,
d'autant plus que son Adoration des Bergers éX'sXX.
alors dans un portique ouvert ; n'ayant pas
réussi, il a tout lâché.
Baldovinetti n'ayant pas employé l'huile dans
les peintures murales, on ne peut lui donner la
priorité que lui accorde M. Fierens.
A qui appartient-elle en Italie?
Je n'en sais rien, et ce que j'ai lu m'a laissé
dans l'incertitude.
Ce qu'il y a de certain, c'est que, vers 1499,
époque présumée où Léonard de Vinci acheva,
à peu près, sa Cène au couvent de Santa-Maria
delleGrazieà Milan, les procédés de la peinture
à l'huile étaient mal connus. Par malheur, Léo-
nard s'obstinait dans cette pratique ; aussi moins
de cinquante ans après, la peinture fut presque
entièrement perdue ; personne aujourd'hui ne
peut plus soutenir que la dégradation a pour
cause l'humidité du réfectoire, puisqu'en face
du Cenacolo, la médiocre Crucifixion de Monto-
farno, peinte à fresque, a résisté.
M. Fierens-Gevaert nous ménage encore d'au-
tres surprises.
«J'ai dit, écrit-il, que les primitifs italiens,
comme les miniaturistes et les gothiques fla-
mands, peignaient leurs tableaux au moyen
d'un pinceau très fin et traçaient, pour indiquer
les reliefs lumineux ou certaines ombres dans
les plis des étoffes, ces virgules colorées que les
hommes du métier appellent hachures. Ce pro-
cédé est constant chez les Cimabue, Giotto, Duc-
cio, Memmi, Lippi, les Ambrogio, Sano di Pietro,
jusqu'à Fra Angelico, chez tous les peintres
italiens qui peignaient à la couleur à l'œuf ou à la
gomme. Or, à partir du moment où la peinture à
l'huile pénètre en Italie, les hachures disparais-
sent peu à peu des tableaux. Au commence-
REVUE UE L AKT CHRETIEN.
1901. — l'*^ LIVRAISON.
58
3Rebur De V^xt cl^rctien.
ment du XVI<^ siècle la méthode primitive est
complètement abandonnée par les Italiens, tandis
que les Flamands, Quentin Matsys entre autres,
en font encore parfois usage. »
Que les hachures aient été pratiquées en Ita-
lie, surtout pour passer du clair à l'obscur, ce
n'est pas douteux et pas n'est besoin d'être grand
clerc en peinture pour le constater.
Que cette pratique ait été constante chez
Giotto, Memmi, Lippi, c'est exagéré, car il y a
des tableaux de ces peintres avec hachures et
d'autres qui n'en ont pas.
Que c'est à l'introduction de la peinture à l'huile
en Italie qu'on doit attribuer la suppression pro-
gressive de la hachure, ce n'est pas soutenable.
Même au XIV« siècle, on a peint en Italie
des tableaux à pleine brosse, sans hachures.
En voici quelques exemples pris seulement à
la Galerie des Offices et à l'Académie de Flo-
rence.
— Giotto (►!< 1337).
Jésus aujatdin des Oliviers (Offices, n°8).
La Madone et r Ettfani {A.caLàém\e, n° 103).
Faits delà vie de Jésus (Académie, n° 104 et
suite).
— Daddi (Bernardo) (►{< 1348).
La Madone avec l' Enfant (Offices ii° 26).
— Lorenzetti (Ambrogio) (►j^ 1350).
La Madone et l Enfant (Offices, n° 15).
La Présentation au temple (Académie n° 134).
— Lippo Memmi ((j^ 1357).
L'Annonciation (Offices, n° 23).
— Gaddi Taddeo (►J<i366).
Jésus W(?r/ (Académie, n° 116).
Il serait facile de multiplier ces preuves et de
les pousser jusqu'au moment où la peinture à
l'huile a été connue en Italie, mais c'est inutile.
Les peintres que je viens de citer ayant tra-
vaillé avant la naissance de Jean Van P^yck,
qu'on met entre 1381 et 1395, la démonstration
est suffisante.
Florence octobre. GeRSPACH.
DEPUIS la publication de la note sur cinq
cloches du centre de la France pourvues de
l'inscription MENTEM SANCTAM SPONTANEAM
{Revue de F Art chrétien, année 1900, p. 428),
M. Camille Enlart a eu l'obligeance de nous
signaler deux autres inscriptions analogues :
l'une se lit sur un bassin conservé au musée
d'Amsterdam. Ce bassin porte une légende en
lettres gothiques qui paraît avoir été défigurée
par l'artisan qui l'a gravée. En voici le texte :
« MENTEM SANCTA SPONTANIA ONOREM DEI
PATREM LIBERATIONIS. » L'autre se trouvait
sur une cloche de l'abbaye cistercienne de Valvi-
sciolo en Italie et sa description nous est conser-
vée dans la Chronique manuscrite de Pantanelli
sur SerJHoneta. « On lisait, dit-il, sur la robe de
cette cloche l'oraison à S. Michel contre la
foudre : MENTEM SANCTAM SPONTANEAM HO-
NOREM DEO ET PATRIE LIBERACIONEM. » Cette
cloche était datée de 1244 et signée 'S F (^).
N. Thioluer.
Cléry,.iS juillet 1900.
Monsieur le Secrétaire,
Si je connaissais l'adresse exacte de Monsieur
Emile Lambin, qui a écrit une admirable étude
sur la cathédrale de Rouen dans la livraison de
juillet 1900 de r^r/f/^/vV/^;/, j'oserais lui faire une
remarque sur ce que je lis à la page 304 de cette
livraison : « Il est fort douteux que le chou frisé
fût connu en France au XV^ siècle. >
Notre basilique, construite sous Louis XI, de
1460 à 1480, possède une flore assez riche et le
chou /;■«/, très tourmenté même, y abonde ; il y
est en bien plus grande quantité que le houx,
le houblon, le chardon, la vigne et le chêne.
Je me permets bien humblement cette remar-
que par amour pour la vérité que cherche et
qu'aime votre excellente Revue.
Veuillez agréer, Monsieur, l'expression de mes
dévoués sentiments.
L. Saget,
Curé-Doyen de Notre-Dame
de Cléry (Loiret).
I. Cf. d'Allemagne, Notice sur un bassin en cuivre exécuté pour
Hugues I V de Litsi^^nan, roi de Chypre ffj2^-f^6ij. parue en
appendice au travail de M. Enlart : L'art gothique et la /Renais-
sance en Chypre, Paris, 1899, pp. 755-756.
Corre0pontiaitce.
59
Clamart, le 6 octobre 1900.
Monsieur le Secrétaire,
Je vous remercie d'avoir bien voulu me com-
muniquer la lettre de M. l'abbé Saget, Curé-
Doyen de Notre-Dame de Cléry. Je suis heureux
que mon étude sur la cathédrale de Rouen ait
obtenu son suffrage : cela prouve qu'aujourd'hui
encore il existe des personnes qui voient dans
une cathédrale autre chose qu'une œuvre pure-
ment architecturale. Maintenant je dois ajouter
que ce modeste travail est loin de mériter le qua-
lificatif dont M. !e Curé-Doyen de Notre-Dame
de Cléry a cru devoir l'honorer.
En ce qui touche le chou frisé considéré comme
une des plantes reproduites dans nos églises par
les artistes du XV° siècle, voici ce que je puis
dire :
Le chou frisé, d'après les botanistes, paraît
être originaire de Sibérie, et n'a pu venir en
France qu'au XVI I^ siècle. En effet, on ne le
trouve mentionné ni dans le capitulaire de Char-
lemagne ayant pour titre De Villis, ni dans les
plus anciens livres français traitant de botanique.
Il est donc hors de doute que la plante repro-
duite par les sculpteurs du XV<^ siècle et que l'on
nomme le chou frisé, n'est pas cette plante. C'est
très probablement la chicorée ou le chou ordi-
naire dont les premières feuilles s'enroulent un
peu sur elles-mêmes, et dont les grosses côtes
semblent reproduites dans les crosses du XV«
siècle.
M. le Curé-Doyen de Notre-Dame de Cléry
nous dit que le chou frisé très tourmenté abonde
dans son église construite de 1460 à 1480. Je
n'ai pas eu l'avantage de voir cet édifice, mais
d'après une photographie mise sous mes yeux,
j'ai reconnu que dans la partie de l'édifice don-
née par cette photographie, se trouvait la plante
sculptée partout pendant la dernière période de
l'époque gothique. Il faut donc, je crois, renoncer
à voir dans Notre-Dame de Cléry, comme ail-
leurs, le fameux chou frisé. C'est une erreur évi-
dente et d'autant plus difficile à déraciner qu'elle
a pour auteurs, ainsi que cela arrive souvent, des
hommes que leur science et leurs travaux ont
rendus justement célèbres.
Agréez, je vous prie, Monsieur le Secrétaire,
l'hommage de mes sentiments les plus dévoués.
Emile Lambin.
■^ :^ ^ ^, :^, ^, :^ ^, ^ ^ ^ ^^ ^ ^ ^ ^^ ^ ^ ^ ^^ ^^^ ^^^^ ^^ -^^^
i
Trabau): lies JSocictés savantes. €^iis
Société des Antiquaires de France. —
Scattce du 7 novembre içoo. M. Blanchet entre-
tient la Société de diverses pierres gravées an-
tiques considérées comme préservatifs contre les
maladies.
M. Omont présente un fac-similé du manuscrit
de Phèdre de St-Remi de Reims exécuté au
XVI IP siècle, récemment acquis par la Biblio-
thèque Nationale. Le manuscrit original a été
brûlé en 1774.
Séance du 14. novembre. — M. Germain Bapst
fait une communication sur deux bustes de
Pigalle représentant l'un le M-i' de Saxe, l'autre,
le M'^' de Lôwendal, qui se font pendant.
M. Mowat communique les inscriptions de
deux tablettes commémoratives de la fondation
et de la réparation d'édifices publics par les
préfets de Rome Albinus, Basilius et Annius
Symmachus, dont il a trouvé le dessin dans le
recueil manuscrit de Bascas de Bagaris.
M. Mowat signale ensuite les restes d'une
inscription gravée au bas de la statue du Mer-
cure gaulois de Lezoux exposée dans une galerie
du Petit Palais.
Séance du 21 novembre. — Lecture est donnée
de la lettre par laquelle M. Pallu de Lessert pose
sa candidature à la place laissée vacante par la
mort de M. Samuel Berger.
M. Henri Stein, membre résidant, communique
la photographie d'un dessin exécuté en 1621
d'après une tapisserie représentant la bataille de
Formigny et qui ornait, au début du XVI I*= siècle,
la chambre de S. Louis et la pièce voisine au
château de Fontainebleau.
M. Vitry, associé correspondant, propose d'at-
tribuer à Lemoyne le buste du Maréchal de Lô-
wendal du musée de St-Jean à Angers dont
M. Germain Bapst avait entretenu la Société
dans la dernière séance et qui était jusqu'ici attri-
bué à Pis7alle.
Académie des Inscriptions et Belles-Let-
tres. — Séance du 7 septembre içoo. — La stèle
des Vautours. — M. Ileuzey entretient l'Académie
d'un travail de reconstitution du grand bas-
relief historique du roi Eannadou, découvert en
Chaldée par M. de Sarzec, et connu sous le
nom de « stèle des Vautours ».
Grâce à cette restitution matérielle, établie
avec des moulages, la place des sept fragments
jusqu'ici retrouvés a pu être déterminée avec
certitude.
Un petit fragment, dont le moulage a été
envoyé très obligeamment par le British Muséum,
a contribué à cette confirmation. Il donne, en
effet, le pied droit de la grande figure de la divi-
nité qui tient les prisonniers enfermés dans une
sorte de cage. Or, en rétablissant le tracé des
losanges qui forment le treillis de cette cage, on a
obtenu, géométriquement, la hauteur de la figure
principale.
Sur la face opposée, le même fragment est
venu compléter une des scènes les plus curieuses:
la représentation des funérailles après le combat.
A côté de la pyramide de cadavres humains, on
voit maintenant un entassement d'animau.x im-
molés, sur lesquels un homme complètement nu
était monté pour procéder au rite de la libation.
Cet acte religieux s'accomplit suivant le rite
chaldéen, c'est-à-dire que la libation, au lieu de
se perdre à terre, est versée sur des bouquets de
branches de palmiers, avec leurs régimes de
dattes. Ces gerbes végétales sont placées dans
deux grands vases auprès du taureau couché,
qui est la principale victime offerte.
L' « Enfant à l'oie ». — M. S. Reinach com-
munique un mémoire sur l'Enfant à l'oie.
Suivant lui, le groupe bien connu, copie d'un
bronze du sculpteur grec Boéthos, que possède
le nuisée du Louvre, n'est pas une simple œuvre
de fantaisie, ni la représentation d'une lutte
espiègle entre un enfant et une oie. Il est fondé
à croire qu'il s'agit d'Esculape enfant qui, attaqué
par une oie sauvage, en a raison et en fait par la
suite son animal familier. M. Reinach s'appuie
sur ces différents faits qu'il y avait des oies gué-
risseuses dans les temples d'Esculape, que celui
de l'île de Cos renfermait le groupe de Boéthos,
et, enfin, que ce sculpteur lui-même est nommé,
dans une inscription grecque, comme l'auteur
d'une statue célèbre d'Esculape enfant.
L'Hermès de Théodoridas. — M. Héron de
Villefosse annonce qu'il vient de retrouver, au
musée du Louvre, une base en marbre portant
une inscription grecque où se lit le nom de
Théodoridas, fils de Laistratos ; le monument
était connu depuis la découverte à Milo de la
fameuse Vénus par le dessin d'un officier de
marine, nommé Vautier, qui avait assisté à la
trouvaille de ladite Vénus et de deux Hermès,
l'un imberbe, l'autre barbu, tous deux conservés
au Louvre. La base avait été malencontreusement
séparée de l'Hermès barbu, et l'importance capi-
Cra^au;r Des Sociétés savantes.
6i
taie de la communication de M. Héron de Ville-
fosse consiste en ce fait qu'elle doit en être rap-
prochée. La mémoire de Vautier se trouve donc
lavée du reproche d'inexactitude dont on l'avait
chargée, et les historiens de l'art tireront de cette
constatation un réel profit.
C'est ce que M. S. Reinach s'empresse de
mettre en lumière, en félicitant M. Héron de
Villefosse de sa communication. « Désormais,
dit-il, il faut écarter l'opinion de M. Furtvvœngler,
qui datait la Vénus de Milo de l'an loo avant
J.-C, et voir se confirmer l'hypothèse qu'il a mise
en avant, à savoir que la Vénus et le Neptune
de Milo datent de 380 environ avant J.-C. Ce
Neptune, en effet, a été offert par le même Théo-
doridas qui a consacré la base de l'Hermès
retrouvée par M. de Villefosse, laquelle, d'après
les caractères de l'inscription est antérieure à
l'année 350. »
Séance du 20 septembre. — ^ M. Homolle
rend compte des travaux de l'École française
d'Athènes dont il est, comme on sait, directeur,
au cours de l'année 1900. Il rend hommage au
zèle dont ont fait preuve les membres et entre-
tient la Compagnie des fouilles faites ou con-
tinuées en Thrace, en Crète, à Delphes.
M. Héron de Villefosse lit un rapport du
P. Delattre sur les dernières fouilles pratiquées
par ce savant à Carthage.
Séance du 2S septembre. — M. E. Babelon
présente à l'Académie deux disques ou rondaches
en argent doré, de travail oriental, ornés sur leur
surface de scènes de chasse en relief, au repoussé,
qui rappellent la décoration de certaines coupes
sassanides.
Ces deux disques étaient probablement des
umbo de boucliers. Sur celui qui est le mieux
conservé, on lit deux inscriptions grecques :
Sanctuaire d'Artémis et Des offrandes du roi
Mitliridate. Ce roi Mithridate est probablement
Mithridate le Grand, le terrible adversaire des
Romains. Quant au temple d'Artémis, il s'agit de
la déesse Ma ou Emyo, de Comana, dans le Pont,
où ces deux monuments ont été découverts.
Séance du iç octobre. — Fouilles de Tunisie. —
M. Cagnat, au nom de M. Gauckler, communique
à l'Académie le résultat des fouilles entreprises
par M. le lieutenant Gombeaud dans le poste
romain de Ksar-Rhelân, dans le Sahara tunisien.
Le déblaiement de ce poste a amené la décou-
verte de toute la série des chambres qui consti-
tuaient la caserne, d'un réduit central réservé au
commandant du poste et de constructions an-
nexes situées à quelque distance du fortin. De
plus, on y a trouvé une inscription donnant le
nom antique de la localité : Tisavar.
Les Types féminins de Lysippe. — Dans une
communication sur les types féminins de Ly-
sippe, M. S. Reinach remarque d'abord que les
historiens de l'art grec ne s'occupent habituel-
lement que des types virils créés par Lysippe,
tandis que les textes antiques lui attribuent
aussi les figures de femmes et que, dans l'œuvre
immense qu'il a laissée, ces figures doivent
occuper une place importante.
Prenant pour point de départ la copie de
X "i poxyomcne de Lysippe du Vatican, qui est
admirablement conservée, M. Salomon Reinach
essaye d'établir que les caractères particuliers de
cette sculpture, notamment la forme et les dimen-
sions relatives des traits du visage, se retrouvent
dans plusieurs têtes de femmes en marbre, no-
tamment dans la prétendue Oniphale d'une col-
lection anglaise et les statues drapées du musée
de Dresde, qui ont été découvertes à Hercula-
num. Il exprime l'avis que ces trois statues
représentent Mnémosyne accompagnée de deux
Muses et sont les copies exactes d'un groupe en
bronze de Lysippe, qui était conservé à Megare.
Au sujet des copies en marbre des statues de
bronze, M. Salomon Reinach croit pouvoir poser
en principe que les statues de bronze seules
étaient moulées dans l'antiquité, celles de marbre
étant soustraites à cette opération, qui en aurait
gâté la polychromie. Donc, toutes les fois qu'on
trouve deux ou plusieurs répliques exactement
concordantes d'une figure antique, il faut admet-
tre que l'original était en bronze.
Ce principe entraîne des conséquences impor-
tantes pour l'histoire de l'art. Il oblige, notam-
ment, à rapporter à un original en bronze, et non
à un marbre, d'Alcamène ou de Pra.vitèle, le
beau type dit de la Vénus genitri.v, dont il existe
de très nombreuses répétitions.
Séance du 2J octobre. — L'illustration des
œuvres de Pétrarque. — M. Muntz lit un nouveau
chapitre du travail considérable auquel il s'est
consacré sur l'illustration des œuvres de Pé-
trarque, du XIV<^ au XV siècle. Cette fois, il
s'occupe du traité De remediis utriusquc fortunœ.
A la différence des Triomphes, ce traité n'est
pas interprété par ses nombreux illustrateurs
avec esprit d'unité, Les plus remarquables
compositions auxquelles il ait donné lieu en
France sont une série de miniatures du temps
de Louis XII, conservées dans un manuscrit de
la liibliothèque Nationale.
En Allemagne, le traité des Remèdes inspira
plus d'artistes, grâce aux illustrations d'un gra-
veur de l'école de Burgkmair, qui parurent à
Augsbourg en 1532 et furent réimprimées une
dizaine de fois jusqu'au milieu du XVI I-^ siècle.
62
9Rc\)uc lie rSrt cbrctieu.
Congrès des Sociétés savantes et réunion
des Sociétés des Beaux-Arts des Départe-
ments. — Le mardi 5 juin s'est ouvert, à la
Sorbonne, pour se clôturer le 9 juin, le Congrès
des Sociétés savantes. Voici la nomenclature des
travaux qui ont été lus dans la section d'archéo-
logie.
Mardi ^ juin. — M. l'abbé Hamard lit un mé-
moire sur'une statue équestre romaine en pierre
qu'il a découverte, brisée, dans les fouilles de
Hermès (Oise) et sur une bague antique en or
trouvée dans les mêmes fouilles.
Lecture d'une étude de M. Barrière-Flavy sur
l'industrie des barbares alamans.
M. l'abbé Brune fait une communication sur
plusieurs statues anciennes conservées dans quel-
ques églises de villages du Jura.
M. Pilloy lit un mémoire sur divers objets
découverts dans les cimetières romains ou francs
du département de l'Aisne et sur lesquels on lit
de courtes inscriptions.
Lecture d'un mémoire de M. de Rouméjoux
contenant la description d'une maison de cam-
pagne sise dans un faubourg de Cahors et qui a
appartenu à la famille Issala.
M. Guignard rend compte des dernières fouilles
opérées à Averdon (Loir-et-Cher).
Mercredi 6 juin — M. Joubin communique
une série de photographies de monuments grecs
inédits de l'ancienne collection Radowitz, acqui-
ses en 1894, par le musée de Constantinople.
M. Bousrez signale l'abside polygonale de la
petite chapelle Saint-Genest à Perrusson (Indre-
et-Loire).
M. Jules Gauthier lit une étude archéologique
sur la cathédrale de Saint-Étienne de Besançon,
— puis sur les pièces d'honneur et les jetons de
la cité de Besançon frappés dans l'atelier moné-
taire de la ville et destinés aux co-gouverneurs
et administrateurs.
M. Jules Pilloy lit une étude sur l'orfèvrerie
cloisonnée de la période barbare des Gaules.
Lecture d'un mémoire de M. Robert Roger
sur les églises fortifiées de l'Ariège.
Lecture d'un travail de M. Henry Corot, con-
sacré à la description des vases de bronze préro-
mains, cistes et œnochoés, trouvés en France.
M. Julien Feuvrier rend compte des fouilles
qu'il a opérées dans un cimetière burgonde dé-
couvert à Chevigny (Jura), en 1899.
M. Léon Coutil rend compte des fouilles qu'il
a exécutées à Pitres (l'Lure).
M. le vicomte de Rochemonteix donne lecture
d'un important mémoire sur les caractères qui
distinguent les églises romanes des arrondisse-
ments de Saint-Flour et de Murât des églises
romanes de l'arrondissement de Mauriac.
Séance du jeudi y Juin. — M. Louis Bousrez
décrit une série de tronçons de colonnes décorés
d'imbrications qui ont été convertis en bénitiers
et qui se trouvent en Touraine.
M. Gaston Gauthier fait un rapport sur les
fouilles gallo-romaines de Champvert (Nièvre),
qu'il dirige depuis 1896.
M. Masfrand rend compte des fouilles qu'il
poursuit depuis plusieurs années à Chassenon
(Charente).
M. Alphonse Gosset présente un ouvrage orné
de quarante planches, consacré à la description
de l'église Saint-Remi de Reims. Nous en ren-
drons coinpte.
M. le commandant Bordier expose le résultat
des fouilles qu'il a faites en Tunisie sur l'empla-
cement des villes antiques de Siagu et de Pupput.
M. Gaston Bonnery entretient la section d'une
trouvaille de monnaies gauloises faite en novem-
bre 1899 à Francueil (Indre-et-Loire).
M. Alphonse Martin lit une étude archéolo-
gique sur le château-fort d'Orcher (arrondisse-
ment du Havre).
M. Emile Perrier communique des notes sur
deux sceau.x inédits et très intéressants des
XII F' et XV<= siècles.
M. Joseph Poux lit une étude sur les fortifi-
cations de la ville de Foix et le quartier de
r.Arget, de 1446 à 1790.
M. L. Quarré-Reybourbon lit un mémoire sur
Martin Doué, peintre, graveur, héraldiste et gé-
néalogiste lillois.
M. l'abbé Bossebceuf présente quelques consi-
dérations sur les constructions militaires du
Mont-Saint-Michel.
M. Eugène Thoison communique des frag-
ments de poteries romaines recueillies à Larchant
(Seine-et-Marne).
Congrès des Sociétés savantes à Nancy en
1901. — C'en est fait : La tentative de décentra-
lisation du Congrès des Sociétés savantes qui a
si bien réussi en 1899, grâce au chaleureux
accueil fait à ces Sociétés par la population
toulousaine, se continue et, en 1901,1e Congrès
se tiendra à Nancy, ville au reste admirablement
choisie à cet effet.
Le programme du Congrès vient d'être édicté
par le Comité des travaux historiques et scienti-
fiques: il comprend à côté des questions d'his-
toire, d'archéologie, de sciences et d'économie
Cratjaujc Des Sociétés satianteô.
63
sociales proposées par le Comité, des sujets de
communications proposés par les Sociétés sa-
vantes de Nancy et de la région.
Au nombre de ces sujets, nous relevons, en
archéologie, le classement des anciennes églises
de la région, d'après leur style, et, en économie
sociale, le mode d'habitation en Lorraine et dans
les Vosges.
Dans les questions posées par le Comité, il
faut surtout citer en archéologie, les questions
toujours maintenues au programme et relatives
aux caractères qui distinguent les écoles d'archi-
tecture religieuse à l'époque romane, question
qui, si l'on s'attache à répondre aux desiderata
du programme, doit amener avec le temps la
monographie de toutes les églises romanes
encore existant en France.
En économie sociale, une question du plus
haut intérêt pour le développement des loge-
ments salubres des travailleurs est ainsi libellée:
Exposer dans quelles mesures et sous quelles
conditions il est permis en France et à l'étranger
d'employer les fonds et la fortune personnelle
des Caisses d'Epargne à la construction d'habi-
tations à bon marché.
Enfin dans la section des sciences oîi sont de
plus en plus traitées les questions d'hygiène, il
faut relever les questions relatives à la salubrité
dans les milieux habités et à la loi de la santé
publique, loi votée il y a plusieurs années déjà
par la Chambre des députés, mais à la suite
d'études insuffisantes, et à laquelle une Com-
mission sénatoriale propose d'apporter d'impor-
tants amendements (i).
Commission diocésaine des monuments.
— Mgr Fallières, évéque de Saint-Brieuc, vient
de créer dans son diocèse une Commission qui
devrait exister partout en France. Aucune con-
struction, aucune restauration, nulle démolition,
pas la moindre aliénation de mobilier religieux
ne pourront avoir lieu sans l'avis de cette Com-
mission, composée d'archéologues et de lettrés
bretons.
Pareilles Commissions fonctionnent également
dans les diocèses belges.
La Commission royale des monuments de
Belgique a tenu en octobredernier,sonas.semblée
générale annuelle, sous la présidence de M. La-
gazse-de Locht, auprès de qui avaient pris place
au bureau M. Van der Bruggen, ministre de
l'agriculture et des beaux-arts ; M. le gouverneur
de la Flandre orientale ; MM. Helbig, vice-pré-
sident, et Massaux, secrétaire, MM. Reusens,
I. La construction tnoderne.
Van Ysendyck, Bordiau, Van Wint, Blomme,
Van Assche, Acker et Verlant.
M. van der Bruggen ouvre la séance, et déplore
la perte de M. Albrecht de Vriendt.
Il est donné lecture du rapport annuel de la
Commission centrale, rendant compte des tra-
vaux accomplis pendant l'exercice écoulé. Elle
a tenu 48 séances et a fait 127 inspections. Il
exprime le regret que l'on ne soumette pas à
l'examen de la Commission les projets des mo-
numents, dépendant de l'administration des
chemins de fer. Il demande qu'on s'occupe de
conserver les ruines de l'abbaye d'Orval et qu'on
rédige une monographie de l'abbaye de Villers,
que restaure en ce moment M. Licot.
L'assemblée entend ensuite les rapports des
Comités de province. Celui d'Anvers, par l'organe
de M. Donnet, regrette la disparition inévitable
de la tour de la vieille église d'Arendonck, contre
la démolition de laquelle le Comité s'était pro-
noncé.
M. l'architecte provincial Dumortier, rappor-
teur du Comité du Brabant, développe la question
de la conservation des monuments publics. Le
rapport fait allusion aussi à l'inventaire des
objets d'art de la province.
M. Bethune, rapporteur de la Flandre occiden-
tale, étant indisposé et son rapport n'étant point
parvenu au président, la parole est donnée à
M. De Ceuleneer, rapporteur de la Flandre orien-
tale, qui parle de la restauration des tableaux
d'église.
L'orateur se prononce contre l'organisation
d'expositions jubilaires ou commémoratives des
maîtres anciens, comme l'exposition Van Dyck,
à cause de la détérioration des toiles causée par
le transport, ou de la destruction possible par
l'incendie de tout l'œuvre d'un artiste.
On entend encore M. Tandel, rapporteur du
Luxembourg ; M. Hubert, rapporteur du Hai-
naut ; M. Lohest, rapporteur de la province de
Liège ; M l'abbé Daniels, rapporteur du Lim-
bourg ; M. Boveroulle, rapporteur de la province
de Namur.
La question principale inscrite à l'ordre du
jour : « Conditions et circonstances dans lesquel-
les est recommandé l'emploi : a) de la mise du
verre en plomb ; b) du vitrail incolore ; c) de la
grisaille ; (^/) du vitrail coloré,» est renvoyée à
l'assemblée prochaine, afin de permettre à M.
Bethune d'achever le travail qu'il prépare sur
cette question — et la séance est levée après
quelques communications diverses.
Académie royale d'archéologie de Bel-
gique. — Séance du y octobre içoo. — M. l'in-
génieur Louis Siret, qui dirige en Espagne une
64
3Rcbue De V^xt cbvctieu.
importante exploitation minière, profite de son
passage à Anvers pour faire part à ses collègues
de ses dernières trouvailles archéologiques, com-
plément heureux à celles qu'il avait faites autre-
fois avec tant de succès, de concert avec son
frère, M. Henri Siret.
M. F. Donnet fait connaître et commente
quelques lettres inédites relatives à Hélène Four-
ment, la femme de Rubens.
M. le chan. Van Caster développe ensuite
la thèse que dans les monuments du moyen âge
les peintures murales n'étaient pas exécutées
d'après un plan d'ensemble conçu par l'architecte
de l'œuvre. Il prouve qu'il est naturel d'orner les
murs de décorations polychromes et que cet
usage a été universel. Il fait toutefois des distinc-
tions entre la peinture murale proprement dite
et la polychromie. Il fait remarquer qu'en général
les artistes n'ont pas cultivé simultanément et
avec un égal succès diverses branches ; rarement
ils excellent en plusieurs à la fois, mais bien
souvent au contraire ils doivent recourir à l'aide
de confrères.
L'orateur s'efforce ensuite de prouver que lors
de l'édification des monuments, les architectes
ne se sont pas préoccupés des peintures et que
celles-ci ont été exécutées sans plan d'ensemble
et au fur et à mesure des circonstances.
M. Helbig est d'avis que la thèse précédente
comporte de nombreuses réserves. D'après lui
les décors picturaux s'imposent, ce sont les der-
niers revêtements de l'architecture. Il fait remar-
quer que dans leur conception il y a lieu de tenir
compte de l'élément religieux, puisque dans
beaucoup de cas la décoration s'effectue sous la
direction de prêtres et de théologiens. Enfin, il
cite de nombreux exemples empruntés surtout
aux monuments religieux allemands et italiens,
par lesquels il prouve que des peintures murales
ont été exécutées d'après un plan d'ensemble.
M. le chan. van den Gheyn fait remarquer
que les deux orateurs trahissent dans leurs
opinions de nombreux points de contact, et que
malgré leurs conclusions contraires ils pourraient
arriver à une solution commime. Si les peintures
murales, dans beaucoup de cas, ont été exécu-
tées d'après un plan d'ensemble, rien ne prouve
que ce plan émane de l'architecte du monument.
L'orateur rencontre l'adhésion unanime quand il
propose, vu l'importance de la question, de con-
tinuer dans une prochaine séance cette intéres-
sante discussion avec tous les développements
qu'elle comporte. P.
^
i^WWW^WWWWWWWWWWWWW^WWWWWWW
RACCOLTA DI DIVISE O MOTTI ARALDICI,
par G. PiETRAMELLARA ; Roine, Propagande, in 8" de
94 pag.
^^^^^f*'E recueil sera fort utile à consulter-
W II contient, par ordre alphabétique,
j^ toutes les devises que fournit le
\\î; blason italien. A la fin, une table,
iSfWWî^^ii également alphabétique, donne les
noms des familles citées.
Les devises sont généralement en latin, très
souvent en français, moins fréquemment en
italien et rarement en espagnol ; le grec et
l'allemand sont l'exception.
D'ordinaire, elles sont courtes, consistant en
deuxou trois mots. En latin, elles procèdent soit
de l'Écriture sainte, soit des poètes : parfois on
abrège la citation.
Amat, en Sardaigne, emprunte ce texte aux
Psaumes de David : « Loquebar de testimoniis
tuis in conspectu regum >. Noto, de Palerme, dit
avec Virgile : « Avulso uno non déficit alter ».
La phrase est écourtée pour Franchi, de Turin :
« Audio, video, taceo donec », le sens exige
pour finir loquar ipse.
La liturgie a fourni: « Virga Jesse floriiit,Auyi
Palasco, de Côme ; Te Démit laudaviiis, aux
Maggi, de Crémone ; In labore feç!eùs,ai\K délia
Valle, en Piémont.
Certaines devises,consistant en lettres initiales,
sont énigmatiques : il eût été bon de les accom-
pagner d'un commentaire. « M, Mellini, di Vel-
letri » ; « A. V. L S. A. dell' Isola, di Chivasso ».
On trouve même les premières lettres de l'alpha-
bet : <•< A. B. C. D. E. F., Orseninghi, di Treviso »,
devise qui conviendrait bien à un maître d'école.
La devise se règle sur le nom : « Arcliiniea
laus, Archinto, di Milano » ; « Et inundo corde,
Alimonda, di Genova » ; « Laboraiite oiiinia,
Laboranti » ; « Gradatini, Scala, di Firenze »,
Il eût été bon d'indiquer le pourquoi de cer-
taines devises. Les Montalto, de Sicile, qui se
rattachent aux Montault de France, portent, non
pas Duriora conco.xit, mais Diiriora decoxi, car
c'est le griffon du cimier qui parle, montrant le
biscaïen qu'il tient dans une de ses pattes.
Les devises ne sont pas toujours uniques : il
y a lieu de rechercher qui a commencé et qui a
copié. Au XVI'= siècle, l'amiral de Bonnivet avait
pris Festina lente, qui, actuellement, est revendi-
qué par les Malpenga, les Vallesa et les Vitulo.
A la même date, les de Gouffier inscrivaient sur
leur superbe château d'Oiron (Deux-Sèvres) le
virgilien Teiinimis Iiœret, que je retrouve chez les
Claretti, de Nice.
L'opuscule est clos par la liste des devises des
ordres chevaleresques, anciens et modernes.
X. B. DE M.
BIBLIOGRAPHIE DES INVENTAIRES.
1. — • MOBILIER DE DEUX CHANOINES,
ET BIBLIOTHÈQUE D'UN OFFICIAL DE
NEVERS, EN 1373-1382, par René DE LespinaSSE,
dans le Bulleiiri de la Société Nivernm'se, 1899, pp. 44-71.
Ces deux inventaires peuvent être considé-
rés comme n'en faisant qu'un, car ils se rap-
portent l'un et l'autre à des chanoines de
Nevers et datent du XIV^^ siècle. Précédés d'une
excellente introduction et d'un résumé substan-
tiel, ils ont leurs articles numérotés, un peu
trop parcimonieusement toutefois, car les n°s
se rapportent à des séries et non à des objets
séparés, ce qui eût mieux valu pour les citations.
Cherchons-y des mots qui sont de nature à
compléter le Glossaire arcliéologique.
Acerine, hachette : « une acerine de fer ».
Andier, d'où latidier, en y incorporant l'arti-
cle. V. Gay s'arrête au XIII'^ siècle : « une père
de andiers ».
Atarge, bourse : « en une atarge maille, qui
estoit emmurée en la cheminée de la dicte
estude ».
Beuverie, cellier ; « En la beuverie dessus la
cave ».
Cerf : « Une corne de cerf. Une corne de cerf
pendue àchainnes de fer.» Ce bois devait entrer
dans la composition d'un candélabre, comme
on en voit dans le Nord.
Chape. Le costume canonial complet compor-
tait à Nevers la chape ou manteau, qui couvrait
le corps ; le cauiail, qui couvrait les épaules,
et Y au musse, qu'on portait au bras ou sur la tête.
La chape des Dominicains, avec son chaperon,
donne une idée exacte de la chape et du camail
réunis.
Chapelle : « En la chappelle,ung chétif autel. »
Chaque chanoine avait la sienne dans sa maison,
il en était ainsi à Angers.
Garde manger. « Ung garde manger de cuir
ferré ». Gay le définit « une bouteille de cuir».
Est-ce bien exact ?
KKVUH UE L AKT CHKETIEN.
I9OI. I^*^ LIVRAISON.
66
9Elet)uc lie V^vt t^vétten.
Robbe de cardinal, soutane que portent encore
les chanoines de Nevers, aux solennités ; « La
robe du cardinal entière et forée (fourrée) ».
More, boisson d'eau de miel : « II mourez de
despanse »,quede Ste-Falaye appelle « breuvage
de dépense » ou piquette.
Roue, bibliothèque tournante : « En l'estude,
une roe, avecque la chère de l'estude ».
2. — INVENTAIRE DU CHATEAU D'AN-
NECY EN 1393, par M.Max BRUCHET,dans le Bulletin
archéologique, 1S9S, pp. 369-371.
Cet inventaire, précieux en lui-même, devient
encore plus intéressant par la façon dont il est
publié. Je n'ai que des éloges à décerner à l'au-
teur pour son introduction, qui résume et ex-
plique le document et les annotations dont sont
accompagnés les articles, tous numérotés : leur
total se monte à 209. Comme tout a été dit et
bien dit, je n'ai plus aucune observation à pré-
senter, sinon sur le mot orfroi, interprété dans
le sens de « bordure » et de « galon » : ce
n'est pas cela, mais une bande riche, qui fait
valoir l'ornement et varie d'aspect suivant la
pièce. « Unam capellam parvam portativam, de
panno sericis rubeo, offroisiato offroisiis de Luca
(n° 122). » Il s'agit d'une chapelle d'ornement
en soie rouge, avec orfrois de drap d'or de Luc-
ques, car, plus haut, au n° 102, une autre cha-
pelle est dite « de panno auri de Luca ».
J'appellerai l'attention sur certains termes :
Burettes, elles ont deux noms : « Duas parvas
canetas capelle argenti. Duo paria parvarum
vinagiarum argenti albarum » (no^ 100, 193).
Camelot de Reims : « Curtine de cameloto de
Remis » (n»» 4, 8, ii).
Chandelier de cristal : « Duo parva candela-
bra de cristali, quorum unum est de duobus
peciis et habent pedes argenti operati » (no 91).
Épée de Bordeaux : « Unum gladium Burde-
galis » (n" 200).
Œuvre d'Afigleierre : « de opère Anglie
terre » (n° 28); ce sont des broderies dont M. de
Farcy a parfaitement déterminé le genre en
citant les chapes de St-Jean de Latran, d'Anagni,
de Pienza, de St-Hertrand de Comminges, etc.
Œuvre de Naples : « Culcitram pictam operis
de Neapoli » (n° 13).
Os, dont on fait une selle : « Unam sellam
equi, factani et operatam ossibus albis » (n° 82).
On l'employait par économie, à défaut d'ivoire.
Ser,§-e d'Allemagne, « Sargia de Alamania »
(n° 161) et de Reims, <i quatuor pecias sargie
Remensis » (n° 186). On l'emploie à clore des
fenêtres sans vitrage : « Quatuor sergias anti-
quas, fuerunt tradite pro capella Domini,... pro
coperiendo altare et faciendo verrerias » (n° 62).
Toile de Bourgogne : « Quatuor mappas
grossas de tela Burgundie » (n" 191).
3. — COMPTE DES FOURRURES DES ROBES
DU COMTE ET DE LA COMTESSE D'ANGOU-
LÈME, DE M«"' D'ALBRET ET DE MADE-
LEINE DE GÉRIS, EN 1481, dans le Bulletin men-
suel de la Société archéologique de la Charente, 1900,
n° 8, pp. 7-8.
Les fourrures, énumérées dans ce compte, sont
au nombre de huit : « Aigneaulx blancs »,
« Aigneaulx noirs », « Fouynes », « Gennetes »,
« Gris », « Martres subelines », « Menu ver » et
« Rampans ». '
4. —FRAGMENT D'UN INVENTAIRE ESTI-
MATIF DU TRÉSOR ROYAL DE FRANGE
(\" tiers du XV^ siècle), par LAliANliE, dans le Bulletin
archéologique du Comité des travaux historiques, 1878,
pp. 126-129.
Les articles, peu nombreux, ne sont pas nu-
mérotés et guère annotés. Voici les mots les
plus saillants :
Cage à oiseaux. « Une cage d'or quarrée à
broches, oij dedens sur la perche sont deux
oiseaulx, laquelle est garnie de perles, esmeraul-
des et saphirs. »
Cure-dents. « Deu.x ongles à furgier dens,
dont l'un est blanc et l'autre noir, garniz d'ar-
gent esmaillez de blanc et pendant chacun à
un lacet de soye,oii pend en chascun ung noyau
de perles. »
Escliiquetle, manque dans le Glossaire : « Un
viel coffre de soye vieille escluquette, à une
petite serreure d'argent. »
Encrier: « Ung encrier d'argent doré, carré,
ouvré à la façon de Venise, pendant à ung ias-
set vert haiclié à fleurs de lis. »
Lanterne : « Une lanterne de cuir noir camos-
syé (chamoisé), garnie d'or par dehors et dedens
d'argent. »
Saphirs du Puy : « Ung camahieu, enchâssé
en «r en fasson de Damas, bordé d'or à IIII
perles, IIII grenatz et IIII saphirs du Puy, pen-
dant à ung las de soye. »
5. — LE TRÉSOR DES ÉGLISES DE GASSE-
NEUIL ET DE TOURNON (Lot-et-Garonne), AU
Xvr SIÈCLE, par M. (leorges Thoi.in, dans le Bul-
letin archéologique du Comité des travaux historiques,
1898, pp. 444-449-
Il y a là deu.x documents. Le premier, posté-
rieur à [550,donne« l'Inventaire des reliques de
Bibltograp{)te.
67
l'esglise de Sainct Barthélémy de Tournon )),où
figure en tête « un reliquaire de cuivre, dans le-
quel il y a de la peau de Sainct Barthélémy »,
car il fut écorché. « Et sur le dict christallin a
une petite image, ayant un Pater noster blanc
sur la teste» (n° i). Serait-ce une couronne de
perles ?
Le « procès verbal de remise du trésor de
l'église de Casseneuil, par les consuls de cette
ville aux desservants de la dite église » date du
6 août 1559. Il compte neuf numéros, qui décri-
vent des reliquaires gemmés et contiennent plu-
sieurs relicques «dans un sacquet », mot qui
équivaut à la bourse de l'inventaire précédent.
6. — L'HABILLKMENT D'UN GENTIL-
HOMME CAMPAGNARD, A LA FIN DU XVI'
SIÈCLE, SES ARMES, SON MOBILIER, par
Le Clert, dans le Bulletin archéologique du Comité des
travaux historiques, 1898, pp. 58-65.
Le document date de 1590, il est précédé
d'une bonne introduction, mais ses articles ne
sont pas numérotés. M. Saglio, vice-président de
la section d'archéologie du Comité, y a ajouté des
notes très utiles.
Je m'arrête au mot colletin, diminutif de
collet, parce qu'il n'est pas dans Victor Gay :
« Ung colletin de camelot de Turquie, doublé
de taffetas et de futaine » et à un jeu se faisant
sur un échiquier : « Un tablier, avec un jeu de
limasson et de renart » ; il y aurait lieu d'ex-
pliquer en quoi il consistait.
7. — VISITE D'UNE COMMANDERIE DE
MALTE AU XVII' SIÈCLE, PAR JEAN DE
SAINT VIANCE, COMMANDEUR DE LIMO-
GES, PROCUREUR GÉNÉRAL EN 1685, par IJ.
DE BoYSSON, dans le Bulletin de la Société archéologi-
que de la Corrèse, 1899, pp. 11 5-1 57.
La commanderie visitée était à Ste-Anne, en
Limousin. La visite est seulement analysée,
ce qui n'est pas suffisant. J'en réclame le texte
intégral, conservé aux archives du département
du Rhône. Nous avons seulement les ordonnan-
ces rendues par le visiteur. On y relève des
détails intéressants, comme la modification de
l'autel qui sera à la romaine, c'est-à-dire appli-
qué le long du mur latéral, et par conséquent
désorienté, la diminution systématique des vi-
traux par la partie inférieure, le blanchissage
des églises, le ciboire disposé à recevoir le soleil,
etc., toutes choses qui caractérisent l'époque :
« Remettre les deux autels contre les pentes
de l'église, à la Romaine » (p. 151).
« Faire remurer par le bas de la chapelle la
fenêtre à 2 pieds et demi d'en bas, de sorte
qu'elle soit restreinte de 2 pieds yi ', faire raccom-
moder la vitre et se servir des verres qui seront
superflus pour cela » (p. 152).
« Obliger les paroissiens à réparer la voûte
de la nef et le pignon et à reblanchir l'église
dans toute la nef » (p. 154).
« Changer le ciboire qui y est pour un plus
grand et faire que sur le pied on puisse monter
un soleil d'argent que les habitants et !e vicaire
ont promis de donner » (p. 153).
« Plus fournira d'un soleil d'argent, que l'on
montera sur le pied d'un calice, moyennant que
le vicaire donne un écu, comine il l'a promis »
(p. 154J.
Les ordonnances fourniraient matière à de
nombreuses annotations.
8. — FRAIZ FUNÉRAIRES DE FEU S^
ANTOINE PECONNET, 1685, par L. GuilîERT
(Bull, de la Soc. arch. du Limousin, 1898, p. 2S5-288).
Il y a là de curieuses observances : le son de
l'agonie, ailleurs dit glas : « Pour les coups des
Agonisants, S s. » ; l'annonce de la mort par les
rues: « Pour les clochettes par ville, 3 1. » ; le
réveillez-vous âz la nuit : « Pour le revelier, 2 s. ».
Au luminaire, je note : « Pour le candélabre,
I 1. » En quoi consistait-il } Était-ce ce cierge
orné qui, en certains lieux, accompagne la bière?
9. — MÉMOIRE DES FRAIZ QUE J'AY
FAICT2 POUR LE MARIAGE DE MA SŒUR
DAM'" LÉONARDE PECONNET, ARRESTÉ
AVEC M' MICHEL S' DE LA BACHELERIE
(1689), par L. GuiBERT [Bull, de la Soc. arch. du
Limousin, 1898, pp. 288-290).
On voit en détail tout ce qui a été consommé
au « déjeuner », <i disner » et « souper », y com-
pris « les tambours qui sont venus à la porte
le matin » et qui ont reçu dix sols. Les pâtis-
series mangées avec les « confitures » sont des
« bisquis », « retortilions, »« massepains fains »,
« gaufres ».
10. — INVENTAIRE DES MEUBLES ET
AUTRES CHOSES TROUVÉES DANS LES
BASTIMENS DU CHASTENET, LE 15 JAN-
VIER 1694, par L. Guihert {Bull, de la Soc. arch.
du Limousin, 1S98, t. XLVI,pp. 291-296).
Cet inventaire a des alinéas fréquents, mais
les articles n'y sont pas numérotés. On y re-
marquera la faïence, qui commence à se vulga-
riser : « Trois bouteilles ou brocs de fayance; un
vinaigrier aussy de fayance, une petite esguière
aussy de fayance. »
Notons certains termes particuliers : « Une
poivrette de bois », « \\\\ giiimbelet pour percer
68
Hebue iJC ravt cbvcticu.
les barriques »,« un payre de petites tenailles
pour arracher les dûiiails ou faussetz », « 3 lin-
ceux de boiradis (chanvre) »,« un chandelier en
placard àe fert blanc, sur le haut de la porte »,
« deux eyssoles ou planes de charpentier ».
11. — INVENTAIRE AU DÉCÈS DE JEAN
PECONNET, 31 OCTOBRE 1679, par L. GuiBERT
{Bull, de la Soc. arch. du Limousin, 1S98, pp. 277-284).
Je ne trouve qu'un défaut à cette reproduc-
tion d'un manuscrit qui connaît à peine les
alinéas: pour la clarté, il eût importé de distin-
guer et numéroter les nombreux articles. Quel-
ques mots méritent une mention :
Pots de Lorraine : « Quatre potz de fert, de
diverses contenances, dont l'un est de Loraine;
plus, deux platz d'airain, plus un petit pot
de Loraine, contenant une éculée, son couver-
cle d'airain » Ces pots devaient être fabriqués
par les fondeurs de cloches.
Paire d'armoires. « Un grand payre d'armoy-
ses, bois de noyer, à quatre portes et deux
tiroirs ». Paire s'entend de volets opposés deux
à deux.
Pistolets de Fore.':. « Un payre pistoletz de
forest », provenant de la célèbre manufacture
deSt-Etienne en Forez.
12. — COMPTES DE L'ÉGLISE DE CHA-
ZELLES, DE 1705 A 1741, dans le Bulletin de la
Société archéologique de la Charente, 6" sér., t. VII, pp.
41-43.
« Fait recouvrir l'esglise et blanchir et fait
griffonner de chaux et de sable la fassade de la
dite esglise, a cousté 28 1.
«, Fait renfermer de balustre les fonds bap-
tismaux de l'esglise, 15 1.
« Un petit surplis pour porter le Saint Sa-
crement, I 1.
« Cierges blancs pour jours solennels, 16 1.
« Six cierges pour le grand autel pour les
jours solennels, 3 1. »
X. Barbier de Montault.
LES RELIQUES DE L'ABBAYE DE BAUME-
LES-MESSIEURS (Jura), par M. l'abbé Bkunk.
Paris, Imp. nat., 1899.
NOUS avons signalé naguère cette notice
parue dans le Bull. archéoL, et qui fait
l'objet d'une brochure enrichie de planches repré-
sentant les intéressantes étoffes dans lesquelles
sont contenues les reliques de Beaune.
STATUES DE L'ÉCOLE DIJONNAISË DANS
L'ÉGLISE DE MIÈGES (Jura), par le même. Lons-
le-Saulnier, Declume, 1900.
M. Brune a découvert dans une modeste église
les deux figures d'une intéressante Annonciation
du XVe siècle, tout à fait analogues à celles que
nous avons jadis signalées dans l'église de Ste-
Marie-Madeleine à Tournai.
LES ÉGLISES ROMANES ET L'ARCHITEC-
TURE RELIGIEUSE DANS LE JURA, par le
même. Caen, Delesques, 1894.
Ce mémoire, déjà résumé dans nos colonnes,
constitue une page instructive de l'histoire des
écoles romanes d'architecture.
LA RELIQUE ET LE RELIQUAIRE DE
SAINT-JUSTE A CH ATEAU-GHALON, par le
même. Lons-le-Saulnier, Declume, 1900.
Deux reliques insignes sont conservées à
Château-Chalon: une sainte épine enfermée dans
une monstrance du XVI'" siècle et la jambe de
saint Juste, contenue dans une curieuse boîte
toute couverte de polychromie et de fine pein-
ture historiée de la fin du XV*" siècle.
LE MOBILIER ET LES ŒUVRES D'ART DE
L'ÉGLISE DE BAUME - LES - MESSIEURS
(Jura), par le même. Inip. nationale.
Dans cet important mémoire bien illustré se
trouvent décrits un retable sculpté et peint
d'origine flamande d'une extrême richesse, de
fort jolies stalles gothiques, vrais modèles pour
églises de second ordre, une série de tombeaux
remarquables et de bons morceaux de sculpture.
On le voit, M. Brune est un archéologue actif;
ses notices sont écrites avec entente et érudition.
L. C.
MONUMENTS DU VELAY, p.ir A. TlIIOLLIKU.
M. Thiollier a inauguré une bien louable en-
treprise de vulgarisation art héologique, en don-
nant dans un (juotidien de la Haute-Loire (')de
courtes et substantielles monogia[)hies desinonu-
nients féodaux et religieux que l'Auvergne pos-
sède si nombreux, et spécialement de ses vieilles
églihcs parmi lesquelles plusieurs remontent à
l'époque romane.
Signalons celle de Chamalières-sur- Loire, la
plus intéressante du Velay après la merveilleuse
I. l.c Mimoiuil de la Loire à Saint-Ltienne.
BibUograpl)(e.
69
cathédrale du Puy, avec son chœur en conque
plus iar^e que la nef et ses bas-côtés réunis; on y
admire une curieuse porte en bois du XII*^^ s. et
des peintures murales relevées par M. Yperman.
Celle de Champ-Dieu, église fortifiée, avec tran-
sept et voûtes en coupole possède une curieuse
crypte. Romane aussi et intéressante est celle de
Beausac, sous laquelle une crypte a été décou-
verte en T 847. Celle de Riotord est un monument
assez connu de la fin du XI<= siècle, avec une
belle tour cariée à deux étages de lumières et des
absidioles aux croisillons du transept, rareté que
des archéologues abusés ont signalée comme
ancienne. Du XI^^ siècle également est l'église
des Rosiers-Côtes-d'Aurec. Bien conservée est
l'église romane des Dunières ; moins entière est
la collégiale romane de Saint-Paulin, toute
décorée d'incrustations de pierres multicolores ;
un des bras du transept était, comme à Briosède
et au Puy, divisé en deux étages et surmonté
d'une salle. La Chaise-Dieu est assez connue.
Citons encore les églises gothiques de Périgueux,
de Maroles, de Saint-Symphorien-sur-Loire, etc.
L. C.
LA STATUE DE TONNERRE — LA VIERGE
ET LE BUISSON ARDENT, par le chan. Mar-
SAUX. Beau vais, Avonde et Bachelier, 1900.
Le buisson ardent a été pris pour symbole de
la Virginité Immaculée de Marie. Cette tradition
iconographique, ancienne et poétique, M. Mar-
saux vient la confirmer par un monument sécu-
laire et authentique, la Vierge de Tonnerre,qui se
voit accostée de la figure biblique en question.
Encore un service rendu à l'iconographie chré-
tienne par notre éruditami.
L. C.
LES SECRETS DU COLORIS RÉVÉLÉS PAR
L'ÉTUDE DU SPECTRE, par G. DE LeSCLUZE,
1886. In-8° 200 pp. Roulers, de Meester, 1900.
Une couleur est une sensation du nerf optique
causée par la vibration de l'éther. La qualité essen-
tielle d'une couleur est sa irfraiigibilite â\si'\nz\.e;
ses qualités accidentelles sont la saturation ou la
désaturation, et l'état vif ou rompu d'une teinte.
L'auteur établit une échelle de 12S couleurs, ran-
gées sous les numéros i2Sà 255, lesquels corres-
pondent proportionnellement aux nombres de
vibrations qui donnent lieu aux couleurs respec-
tives ; il les définit par les nombres exprimant
leur degré; il ajoute des noms littéraires tirés des
fleurs ou des désignations du commerce.
Chose extrêmement intéressante, il est permis
d'énoncer cette règle: tel le rapport entre les nom-
bres, telle r harmonie entre les coiilejirs; chaque fois
que les nombres sont en rapport simple, les cou-
leurs forment un accord. M. De Lescluze ajoute :
les couleurs qui correspondent aux nombres qui
sont en rapport simple se tiennent sur un même
plan;et,dans un tableau nommé Table cf harmonie,
il fournit la réalisation complète de ces rapports
simples. « Jamais, assure-t-il, peintre n'a créé,
jamais peintre ne créera un accord élémentaire
simple qui n'y soit indiqué ». Il admet des gammes
de couleurs, qui comportent des dissonances à côté
des consonnances. Une gamme est une série de
nuances dont le nombre de vibrations se suivent
cotnme 32 est à 33 à 3^; à 35, etc. jusque 64. Les
gammes employées par les grands peintres ont 32
degrés ou 32 nuances au grand complet. Il y a
en tout 128 gammes. Les principales sont celles
qui sont développées sur un des chiffres 12S-256
pris de quatre en quatre, ce qui donne 32 gammes
principales. Parmi ces 32 gammes l'art n'en con-
naît que cinq, savoir :
1° La tonalité espagnole obtenue en disant,
i6o est à sa gamme comme 32 : 33, etc.
2° La tonalité Rubens (224 est à sa gamme
comme 32 : 33, etc.)
3° La tonalité Jordaens (144 est à sa gamme,
etc.)
4° La tonalité Rembrandt (20S est à, etc.)
5° La tonalité italienne (166 est à, etc.)
L'auteur ajoute à cette liste la tonalité vert
192, qu'il a cru observer dans les vestiges de
l'ancien art gothique.
Nous avons voulu reproduire les principaux
principes qui servent de bases à la curieuse théorie
de l'abbé D' Lescluze; nous n'avons pas la compé-
tence voulue pour les apprécier à fond ; le lecteur
en sera juge lui-même pour autant qu'il soit
initié à cette terminologie un peu spéciale. Nous
sommes convaincu qu'il seia enchanté de voir
se soulever à ?es yeux un coin du voile qui couvre
l'attachante question des lois de l'harmonie des
couleurs, et, disons plus, d'y voir une lumière
nouvelle. Les coloristes qui interprètent la nature
seront satisfaits de pouvoir, à l'école de notre
savant auteur, se rendre compte des effets dus
à leur talent ; peut-être le décorateur tirera-t-il
de cette théorie une utilité plus immédiate ; en
réglant ses gammes d'après des lois si positives
et si simples, il pourra éviter des écueils et régler
l'expression de son inspiration.
Il y a d'autres résultats pratiques de cette
théorie ; au moyen des gammes de M. De L. il
est possible d'écrire la coloration d'un tableau et
de la faire revenir de son analyse à peu près aussi
exactement qu'une épreuve photographique.
Comme exercice curieux, signalons la transpo-
sition qu'on peut faire d'un tableau d'une gamme-
dans une autre.
70
Bcbue De V^xt t\)xttm\.
L'analyse qu'on peut ainsi faire des œuvres
des maîtres est du plus grand intérêt.
Rarement nous avons lu, sur les matières qui
confinent aux Beaux-Arts, un ouvrage d'un si
vif intérêt que l'Étude de M. De Lescluze, lequel
est présenté sous le patronage compétent du
D'' A. Charpentier, professeur à l'Université de
Nancy.
L. C.
MONOGRAPHIE DE L'ÉGLISE DE RÉTHEL
(ARDENNES), par H. Jad.\rt et P. Demaison. —
In-S" de loopp. illustré. Paris, Picard, 1899.
La Bibliothèque des monographies des an-
ciennes églises françaises se constitue par un
travail spontané, lent mais continu, de nos ar-
chéologues de province, et les meilleurs s'atta-
chent à cette méritoire besogne : tels MM. Jadart
et Demaison. Celle de Réthel est loin d'être de
premier ordre, mais elle offrait au.x auteurs un
beau sujet, car, chose rare, son histoire est bien
documentée.
L'église de Réthel est d'ailleurs vaste et riche-
ment décorée. Elle est formée de la juxtaposition
de deux églises presqu'égales, ayant chacune
une nef principale avec une abside et un colla-
téral, l'un du XIIL" siècle, l'autre du XVP. Bien
qu'orientée, elle ouvre son portail flamboyant au
Midi, vers la ville; à l'angle S.-O. se dresse une
tour monumentale du XVI I*^ siècle. L'église con-
tient des pierres tombales et un intéressant mobi-
lier. Le tout est décrit avec la précision que savent
y mettre les paléographes distingués auteurs de
cette excellente monographie.
L. C.
INSTRUCTIONS ET CONSTITUTIONS DE
GUILLAUME DURAND LE SPÉCULATEUR,
par Jos. Berthelé et M. Valmary, publiées d'après le
manuscrit de Cessenon. — Montpellier. Delord-Boe-
lin, 1900. In-8°de 150 pp. et phototypies (Extrait des
Mémoires de l'Acud. des Sciences et Lettres de Montpel-
lier).
La savante étude ci-dessus intitulée ne con-
cerne que bien indirectement l'art chrétien ; ce-
pendant il n'est guère d'archéologue chrétien qui
ne s'intéresse à la liturgie et ne connaisse l'auteur
du célèbre Pontifical. C'est un de nos callabora-
teurs, qui, de concert avec son disciple M. Val-
mary, nous fait connaître un manuscrit ignoré
(non inédit) du grand évêque, naguère découvert
fortuitement parmi les parchemins du village de
Cessenon. Les prescriptions qu'il contient sont à
l'usage du clergé de Mendc. Les Instructions
se rapportent aux Sacrements, aux Constitutions
à la discipline ecclésiastique.
L. C.
REPRÉSENTATION PRÉSUMÉE DE
JEANNE D'ARC SUR UNE TAQUE DE FOYER,
par M. I-. Germain. — UNE TAQUE SYMBO-
LIQUE DU XVII'' SIÈCLE, par M. F. Donnet.
— Broch. Anvers, De Backer, 1900. — (Extrait des
Annal, de l'Acad. royale d^arch. d'Anvers.)
M. Germain, à la suite de M. le baron de Ri-
vières, a signalé une prétendue représentation de
Jeanne d'Arc figurant sur des taques de foyer
rencontrées en diverses contrées de la France, et
il y voit une imitation de la Liberté hollanJaise.
M. Donnet vient confirmer cette interprétation
et la précise d'après des exemplaires flamands.
La pucelle hollandaise est coiffée d'un chapeau;
cet emblème de liberté rappelle le chapeau de
l'homme libre que portait l'esclave libéré sur la
tête rasée en signe d'affranchissement. Elle
est assise dans une enceinte clayonnée, repré-
sentation du patrimoine national de la patrie
hollandaise. A sa droite se dresse le lion néerlan-
dais armé d'un glaive et serrant de l'autre patte
un faisceau de 5 flèches correspondant aux 5 pro-
vinces qui les premières se fédérèrent après avoir
secoué le joug espagnol : la Gueldre, la Hollande,
la Zélande, Utrecht et la Frise.
Voilà du beau symbolisme s'il en est. Les
notices de MM. Germain et Donnet sont de na-
ture à raviver singulièrement l'intérêt d'une série
d'objets restés dans l'ombre jusqu'ici.
L. C.
LA TOURAINEETLE PETIT PALAIS, parle
C'° Ch. DE Beaumont, brochure, Tours, Dubois,
1900.
M. le comte de Beaumont a voulu que la Tou-
raine profitât de l'exhibition faite à Paris de ses
chefs-d'œuvre d'art ancien, et que l'intérêt admi-
ratif qu'ils ont inspiré au public international eût
son retentissement dans la province même de leur
origine. C'est pourquoi il a décrit dans un pério-
dique local ce qui formait le contingent de cette
région dans cette revue des joyaux nationaux.
Il ne s'est du reste pas borné à des extraits du
catalogue ; son travail en est au contraire un
commentaire érudit, intéressant et parfois très
piquant.
L. C.
Bibliograpl)ie.
71
LA BELGIQUE ILLUSTREE, ses monuments,
ses paysages et ses œuvres d'art, publiée sous la direc-
tion de M. E.Bruylant. Bruxelles. 3 vol. grand in-40.
Prix : 100.00 fr.
La Belgique est richement partagée en beautés
naturelles, en œuvres artistiques et en richesses
industrielles. Il ne lui manque rien de ce qui peut
rendre une terre enviable : industries prospères,
villes opulentes, monuments magnifiques anciens
et modernes, sites pittoresques, plages riantes, etc.
Il n'est guère dans le monde un aussi petit pays
égal en opulence. De toutes ces merveilles,
M. Briiylant a formé un recueil artistiquement
édité, qui chante la gloire de la patrie et remé-
more les beautés de la nature et de l'art répandues
Musée de Bruxelles. — Memliug:. — Portrait d'homme.
dans ses villes et jusque dans ses villages les
plus reculés. Une cohorte d'érudits distingués
lui ont prêté leur plume et lui-même, s'adressant
aux maîtres de la gravure plutôt qu'au-x photo-
graphes, a semé leurs textes d'une multitude de
vignettes artistiques telles, que de longtemps l'on
ne vit semblable recueil aussi richement illustré.
Parmi les écrivains qui ont prêté leur talent à
cette œuvre, M. E. Leclercq se distingue surtout
par le vif sentiment des beautés monumentales,
la sagacité de la critique et la vivacité du style ;
il s'est chargé de mettre eil valeur les beautés
du Brabant et de sa brillante capitale, aidé de
MIVI. Van. Bemmel, H. Hymans, G. WiUame,
E. de Taye et M. Fétis, qui présente aux lecteurs
les joyaux des musées bruxellois. M. Van Even
décrit Louvain et ses environs et raconte en éru-
dit l'histoire de ses vieux édifices. M. L. Thooris
72
îRcbuc ÏJC l'^vt cbrcticn.
passe en revue les incomparables rues de Bruges;
M. A. Vandenpeereboom, l'iiistoriographe des
monuments yprois, nous en donne un aperçu.
Les petites villes de la Flandre Occidentale sont
Louvain. — Église St-Pierre. — Stalles du chœur.
A, 4^
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■:■■ ^ -,t. 1." .'P
"^' ■ H'' Il '^'in w^
Nivelles. ■— Châsse de sainte Gertrude.
présentées par M. Van Heerswynghels et le
littoral, par M. M. Heins. Ce sont deux écrivains
de marque, MM. Wagener et Fredericq, qui
s'occupent de Gand, et feu H. Van Duyse, de la
Bîbltograpl)ie.
73
province flamande orientale. Mons est l'apanage
de M. Dommartin, le Borinage, celui de M. A. du
Bois ; Tournai et ses environs sont célébrés par
feu J.-B. Delmée le chansonin'er journaliste. M.
Th. Jouret parcourt les petites villes du Ilainaut
M. Clément Lyon parle en connaisseur du pays
de Charleroi et M. G. Boulmont de l'Entre-
Sambre-et-Meuse. Les articles sur le Namurois
sont signés M. L. Dommartin ;
M. Pergameni traite du Condroz;
MM. P. Hymans et Greyson dé-
crivent les beautés de la Meuse
J et de la Lesse, son pittoresque
affluent. MM. E. Landoy et A.Le
Roy dépeignent la province de
Liège et son aimable chef-lieu ;
M. le chev. L. de Thiers est
chargé de Huy, M. Leclercq, de
Verviers. Citons encore le Lim-
bourg, par MM. E. Landoy et
H. Van Neuss, le Luxembourg
par MM. Landoy, Keiffer et du
Bois.
On reconnaîtra que l'éditeur
n'exagère que d'un peu, en se
prévalant du concours « des prin-
cipaux écrivains et artistes du
pays ».
Le « Groeningenhof » à Aertselaer (campine anversoise).
L'éditeur a bien voulu mettre à notre disposi-
tion quelques-uns de ses clichés. Voici d'abord
le superbe portrait bien connu, dû au pinceau de
Hans Memling, que possède le musée de Bruxel-
les. Nous donnons ensuite un fragment des
stalles conservées dans le chœur de l'église de
Saint-Pierre à Louvain, qui comptent parmi les
plus anciennes de la Belgique ; elles furent exé-
cutées vers 1440 par Nicolas de Bruges et Gérard
Georis de Bruxelles. Après la peinture et la me-
nuiserie, voici un chef-d'œuvre d'orfèvrerie, la
châsse de sainte Gertrude à Nivelles. Le premier
REVUE DE L AKT CHRÉTIEN.
190I. — l""*^ LIVRAISON.
74
3Rebue lie T^rt c!)vctien»
rang est occupé dans le domaine de la peinture
par le polyptyque de l'adoration de l'Agneau
mystique, œuvre des frères Van Eyck, dont
s'enorgueillit la cathédrale de ,Gand. Comme
art monumental, nous donnons enfin un des
ravissants coins du vieux Bruges, la rue de
l'Ane aveugle, et la vue pittoresque d'un ancien
manoir rural, le Groeningenhof, à Aertselaer, en
Campine.
L. C.
^Mn y^i^EjitX /*"'■*>
WÊ^
Gand. — Adoration de l'Agneau, des frères Van Eyck.
LA BELGIQUE PITTORESQUE ET MONU-
MENTALE, album photographique de 250 vues.
Bruxelles, Rubens.
Il y a cinquante ans, les reproductions couran-
tes que les gravures nous donnaient des monu-
ments et des sites étaient des à peu près le plus
souvent infidèles et incorrects, parfois la cari-
cature des choses. Que les temps sont changés,
depuis que la photogravure met à la portée de ,
tous une multitude de reproductions absolument
exactes ! Quel puissant enseignement intuitif
résulte de ces abondantes et véridiques illustra-
tions, qui se multiplient sous forme de cartes '
postales ou d'albums-panorama ! L'esthète, l'ar-
chéologue et l'artiste en font surtout leur profit,
et c'est à ce titre que nous signalons ici le recueil
édité par M. Rubens des principaux monuments
de la Belgique. L. C.
LES TORCHES DES COMMUNAUTÉS LA-
VALLOISES AUX PROCESSIONS DE LA FE-
TE-DIEU DU XVir SIÈCLE, paij. .M. Richard.
— In 8°. Laval, Lelièvre.
C'est une calamité et une honte pour la France,
que la procession de la Fête-Dieu ait été interdite
■f:
•v^.
iiîiiiiiiiiiiiiîîiiiîiiiïi:'
Rue de l'Ane aveugle à Bruges.
76
3Rcbue ïie V^xî c!)vcticu.
et que Notre-Seigneur ne puisse plus parcourir,
suivi d'un cortège de fidèles, les rues des villes et
les chemins des villages. L'antique institution
de la procession du « Vcncmble Sacrement 1> ne
reste plus que comme un souvenir poétique à nos
contemporains; c'est de plus un beau souvenir
artistique pour les érudits comme M. J.M.Richard,
qui ont la mémoire séculaire qui se nourrit de
documents d'archives. Beaucoup se souviennent
des rues tendues à ciel, à l'aide de ces toiles (dont
l'industrie a fait la fortune des Lavallois) étalées
sur des cordes tendues au travers des rues, et
de ces maisons tapissées de feuillages, tendues
d'étoffes aux couleurs vives, de ce sol jonché de
fleurs. Mais qui se souvient encore des proces-
sions autrement belles des siècles passés, rehaus-
sées de groupes costumés, jouant des mystères,
et des corporations marchant en costume avec
leurs attributs, leurs guidons et leurs drapeaux?
Plusieurs avaient aussi des {{gros cierges ou
torches », portées par les plus jeunes membres du
métier, et ornées de l'image du saint Patron de la
corporation. C'étaient de véritables objets d'art,
qui représentaient chaque année de nouvelles et
curieuses « histoires ». Leur exhibition avivait
l'intérêt et excitait l'émulation. On s'efforçait de
représenter chaque année un sujet inédit. Les
personnages, qui atteignaient trois pieds de haut
et plus, étaient entièrement ou partiellement faits
de cire; les groupes étaient portés sur des bran-
cards.
M. J. M. Richard a retrouvé de curieux
contrats relatifs à des torches confectionnées au
XVI I« siècle. On y trouve tout le décor pom-
peux de l'époque servant de cadre à des scènes
telles que Les trois Maries au tombeau du Christ,
Le roi Josias se faisant lire la table de la Loi,
L'Enfant prodigue, l'Annonciation, l'Aveugle-
né, etc., on rencontre même des sujets profanes
comme le triomphe d'Alexandre, ou l'apothéose
de la reine Marie-Thérèse, ainsi que des allégo-
ries ; exemple : Salomon et la sagesse renversée.
L'auteur analyse une longue série de ces
marchés passés au XVI I^ s. par les commu-
nautés des tissiers, des boulangers, des serruriers,
des cordonniers, etc., ou des maîtres ciriers,
comme Jean Bodard et Jean Mériale. Cet usage
pittoresque disparaît au XVII L siècle, j ^
LE MONUMENT DU CARDINAL LAVI-
GERIE A SAINT-LOUIS DE CARTHAGE. par
M. D'Ansp;lme de Puisave. — In-8', Paris, Leroux.
Les salons privés, les places publiques et les
galeries d'expositions et de musées regorgent
d'œuvres d'art, œuvres presque exclusivement
profanes. L'esprit profane, sinon païen, envahit
même les églises. Où sont les vraies œuvres de
l'art chrétien .' Elles sont si rares, que nous n'en
avons presque pas à signaler dans nos livraisons.
— Cependant ne faut-il pas ranger parmi elles les
somptueux cénotaphes que de temps à autre on
voit élever à quelque prince de l'Église? En réa-
lité, non ; nos évêques eux-mêmes n'ont presque
jamais l'honneur d'une tombe à la fois artistique
et vraiment chrétienne. — Aussi nous abstenons-
nous généralement de mentionner les mausolées
d'évêques,qui rentrent, par leur conception habi-
tuelle, dans la classe des statues profanes en
dépit de leur destination. Nous avons pris le parti
de ne plus chagriner les habiles praticiens qui
exploitent cette branche de l'art contemporain.
M. D'Anselme de Puisaye n'a pas la résignation
aussi facile, et, avec une noble énergie, il a voulu
dire une bonne fois la vérité sur cet abaissement
de notre art funéraire. — Il s'est attaqué pour
cela à une grande œuvre, de manière à frapper un
grand coup, c'est-à-dire au monument du grand
cardinal Lavigerie, œuvre vraie et somptueuse,
et en quelque sorte historique. En se plaçant, il
est vrai, à un point de vue plus philosophique que
religieux, il montre l'inanité d'une œuvre qui ne
tend pas directement à l'expression de la beauté
morale, et qu'à bon droit il compare à un temple
sans dieu.
L. C.
©crioïiiques.
ANNALES DE ST-LOUIS DES FRANÇAIS,
1899, livr. de janv.
VIDAL, L'émeute des pastoureaux en IJ22.
Lettres du pape Jean XXII, déposition du
juif Baruc devant l'inquisition de Pauiiers
(p. 121-174): d'après un ms. du Vatican.
Tostivint, Siège et prise de Jérusalem, en l'an
J de Jojakim (p. 175-202).
De Suyyc\, Histoire de la persécution et de l'émi-
gration des religieuses de la Province de Charle-
î^///^ (p. 203-255) : d'après un ms. de la Biblio-
thèque Victor-Emmanuel, à Rome.
Eraikin, Bulles inédites, extraites d'un matius-
crit de la Bibliothèque Barberini{ç. 257-275) : de
^•S8ài2i9. X. B. DEM.
ANNALES DE ST-LOUIS DES FRANÇAIS,
1900, 4'^ fasc.
J. M. Vidal, La poursuite des lépreux, d'après
des documents nouveaux, extraits des Archives
du Vatican, p. 419-478.
Btblto(ïrapl)ie.
77
L. Giiérard, Notes sjir quelques inventaires des
Archives pontificales (p. 479-508).
Jérôme A/cander, par ].V!iq\.\\er( Bibliographie).
L'AMI DU CLHRGÉ.
Erreurs sur la proclamation du dogme de
l'Immaculée Conceptiofi. ■ — \J Ami du clergé, ra-
contant la vie de l'abbé de Geslin, cite ce passage,
oià il décrit la fête de la proclamation du dogme
de l'Immaculée Conception : « Au moment où la
dernière parole sortait de la bouche auguste du
Pontife, le voile qui dérobait aux regards de la
foule, dans le fond de l'abside, la représentation
vénérée de Marie, le voile tombait, et au milieu
de rayons lumineux apparaissait l'image rayon-
nante de la Reine de la terre et du ciel. Et à cet
instant, de cent mille poitrines s'élevait vers la
voûte du saint Temple le Te Deum,... couvrant
les détonations du fort St-Ange, les mugisse-
ments de l'orgue.» Il y a là une quadruple erreur,
ce témoin oculaire a mal vu et, comme j'assistais,
moi aussi, à la cérémonie, je puis dire plus
exactement ce qui s'y est passé.
L'abaissement d'un voile recouvrant une
image ne se pratique qu'aux béatifications. Il
n'y a rien eu de semblable ce jour, et la chose
était impossible, puisque le trône pontifical
tournait le dos à l'abside.
Les rayons lumineux supposent une illumi-
nation qui, certainement, n'existait pas.
Les « mugissements de l'orgue » sont une autre
fantaisie, car cet instrument est proscrit des cha-
pelles papales, où qu'elles se tiennent. A St-Pierre,
il n'y a que de petites orgues pour l'office cano- ,
niai.
Le chiffre de cent mille assistants est exagéré
des trois quarts.
L'art n'est pas plus précis dans ses représen-
tations et, ni la fresque de N.-D. de la Drèche
(Tarn), ni le vitrail de la chapelle du séminaire
de Nantes ne reproduisent le pape avec le cos-
tume qu'il portait en la circonstance ; c'est donc
à tort qu'on l'a figuré avec la tiare, au lieu de la
mitre de drap d'or, et une chape violette, en place
d'une chasuble blanche, seule couleur liturgique
que comportât la solennité.
X. B. DE M.
BULLETIN MONOMENTAL,
n° 506, 1899-1900.
Ce numéro marquera dans les annales de la
Société française d'archéologie une page de deuil,
car elle contient le compte rendu des funérailles
du regretté comte de IVIarsy et les discours où
sont consignés les hommages dus à sa mémoire.
Il marque au surplus la vitalité dans laquelle
l'ancien directeur du Bulletin monumental laisse
cet important organe. Fort curieuse est la notice
de M. H. Jadart sur les anciennes halles, eu forme
de hangars en charpente, que possèdent la petite
ville de Rethel et maintes autres localités de la
région. — Importante et remarquable est l'étude
de M. le chan. Porie sur la statuaire ancienne en
Normandie. Nous trouvons encore dans la même
livraison la suite de l'intéressante série, exhibée
par M. V. Mortet, d'anciens marchés et devis
relatifs à des constructions languedociennes du
XII"= au XIV'5 siècle. — • Il sera permis au sous-
signé de ramener à cette occasion l'intérêt public
sur le plus considérable des devis de l'espèce con-
servés dans une autre région, celle du Tournaisis ;
il s'agit du devis détaillé de la construction du
chœur de l'église St-Jacques à Tournai en 1373,
écrit sur un rouleau de parchemin de 3 mètres de
longueur. J'ai publié ce rare document dans la
monographie de ladite église ('). L'original,
gardé au presbytère de l'église, mérite d'être
conservé avec sollicitude.
L. C.
SCIENCE CATHOLIQUE, juillet 1900.
PARMI les théories sur le Beau, nous de-
vons mentionner celle que sous une forme
poétique, M. H. Menés a exposée récemment
sous ce titre : Au pays de l'idéal (^Science catholi-
que, année 1900, p. 695) ; elle nous paraît heu-
reuse dans sa clarté et vraie en bonne partie. Elle
s'applique à la Beauté dans la nature et dans
l'art, et peut se résumer en ces termes :
Une créature est d'autant plus belle, qu'elle
est plus conforme à son modèle, qui est dans
l'intelligence divine. Trois éléments constituent
le Beau : Yintégritc de l'être, la proportion des
parties et X'éclat. — Le principe de la proportion
n'est autre chose que l'adaptation de l'être à sa
fin ; toutes les créatures sont proportionnées à
leur fin, mais à des fins qui ne sont pas égale-
ment nobles.
L'art est l'expression du beau par une forme
sensible. La nature est l'art de Dieu, et l'imita-
tion de la nature constitue l'art humain. Toute-
fois la nature étant déchue, elle n'a de beauté
complète que dans l'ensemble des espèces ; les
individus sont frappés d'imperfection et souvent
laids. L'art doit s'efforcer de concevoir et de
rendre le type même des choses, c'est-à-dire
V idéal.
Ici notre auteur énonce une triple loi, qui
manque de rigueur à nos yeux : celles de la
structure extérieure, de \' alternance symétrique.
I. L. Cloquet, Monographie de l'église St-Jacques. Tournai,
Desclée, De Brouwer et Ci=.
78
ISitWt lie r^rt t\)vttitn*
et de y ornementation, et il s'attache à en mon-
trer l'application commune aux arts divers. —
Nous avons fait consister, avec plusieurs philo-
sophes, le gracieux, le beau et le sublime dans
la manifestation de trois activités différentes.
M. Menés définit autrement ces termes, il en fait
trois degrés du beau, par le mélange, à pro-
portions différentes, de deux éléments du beau :
la grandeur et la variété ; dans le gracieux il y
a peu de grandeur et plus de variété : dans le
beau, beaucoup de variété et autant de gran-
deur ; dans le sublime, beaucoup de grandeur et
peu de variété. C'est ingénieux, mais on avoue-
ra que la grandeur, dans sa présente acception,
demande à être définie, ce qui serait peut-être
difficile ; et que la variété est une qualité bien peu
primordiale, pour en faire un des deux éléments
essentiels du Beau.
L. C.
REVUE DE L'AGENAIS.
MM. Tholin et Lauzun s'adonnent à l'étude
de l'architecture féodale de la Gascogne et de
l'Agenais ; ils ont publié dans la Revue précitée
la monographie du château de Perricard, d'Er-
tillac et de Gavaudun.
BULLETIN MONUMENTAL, n" 4, 1899.
Le présent numéro est le dernier, que nous
verrons émaillé du monogramme M, au bas des
articles du vaillant directeur de la Société fran-
çaise d'archéologie, feu de Marsy, qui dépouillait
d'une manière si intéressante les annales des
Sociétés savantes, et rendait compte avec tant de
soin des nouvelles publications archéologiques.
Son remarquable résumé du grand ouvrage de
M. E. Lefebvre-Pontalis sur la cathédrale de
Noyon, que contient en outre ce numéro même,
aura été son dernier travail notable. Le sérieux
intérêt archéologique qu'il excite est tout mé-
langé de mélancolie. Dans le même numéro
M. Merlet trace, avec grande compétence, un bel
itinéraire aux membres du Congrès de Chartres
de cette année. Nous avons signalé au chapitre
Bibliographie, l'étude de M. E. Soil sur la tapis-
serie de la cathédrale de Sens.
ZEITSGHRIFT FUR CHRISTLICHE KUNST
(XIII'' année, 2° fascicule).
Le P. S. Beissel publie un intéressant travail
sur les représentations peintes ou sculptées dites
« images du Rosaire » aux environs de 1500,
images où l'on voit d'ordinaire la Vierge figurée
au milieu d'une couronne de roses ou d'un rosaire
ou environnée des principaux épisodes de sa vie
et de celle du Christ. La reproduction de deux
sculptures de ce genre : un panneau richement
travaillé conservé au Musée germanique de Nu-
remberg et une Madone plus simple, en bas-relief,
au couvent de Saint-Jean, à Schleswig, accom-
pagnent cet article.
M. W. Schnyder continue son étude historique
sur V Église Santa Maria in Cosinedin, à Rome
(5 grav. et plan).
M. le chan. Schnutgen s'occupe d'un projet de
monument à Thomas à Kempis, pour l'église de
Kempis, œuvre du sculpteur W. Mengelberg.
(Cliron. des Arts.)
BULLETIN ARCHÉOLOGIQUE, 1899, n° l.
L'abbé Chartraire, Une statue de saint Thomas
Beckct, archevêque de Cantorbéry, de la fin du
XII<= siècle, pp. 24 à 27 et pi. — L'abbé Fillet,
La tour de Chamaret (Drôme), pp. 28 à 57. —
Le Clert, L'habillement d'un gentilhomme cam-
pagnard à la fin du X VI'^ siècle, ses armes, son
mobilier, pp. 58 à 65. — F. de Mély, La date de
la réception de la Sainte Couronne à Paris (19
août 1239), pp. 66 à 69. — E. Thoison, Notes sur
cinquante-quatre fondeurs de cloches, pp. 70 à 83.
— L. Demaison, Les chevets des églises Notre-
Dame de Châlons et Saint-Remi de Reims, pp. 84
à 107. — L'abbé P. Brune, Les reliques de l'ab-
baye de Beaune-les- Messieurs (Jura) et leurs
anciens authentiques, pp. 108 à 121, 5 pi. et grav.
— G. Villers, L^a tour de Vauban, à Port-en-
Bessin (Calvados), pp. 122 à 126. — L.-H. La-
bande, Fragment d'un inventaire estimatif du
trésor royal de France (f^"" tiers du XV"^ siècle),
pp. 126 à 12g. — C"^ de Grasset, La croix de
Lorraine, pp. 130 à 132.
KUNST UND KUNSTHAND'WERK
(111° année, 5' fascicule).
M. Cari Drexler consacre au monastère de
Klosterneuburg, près Vienne, et aux nom-
breuses œuvres d'art qu'il renferme, un intéres-
sant travail, accompagné de 28 reproductions de
l'abbaye elle-même, de l'intérieur de son église,
de style rocaille : chapelles, grilles, plafonds,
stalles, etc., et d'objets d'art conservés dans le
trésor, gravures parmi lesquelles on regrette tou-
tefois de ne pas trouver l'admirable autel émaillé
de Nicolas de Verdun, qui est la plus belle
richesse artistique du monastère.
Btbltogiapl)te.
79
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XxxttX btbl(ograpl)ique»
:?trtl)éologie et3Beaiu-':arr0'\
=^=^= jFiancc. ^==—
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d'après un inventaire inédit de 1782. — In-8°, Paris,
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Paris, Pion, Nourrit et C''.
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d'Annecy en 1393, dans le Bulletin archéologique,
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* Brune (L'abbé). — ■ Les reliques de l'Ab-
baye de Baume les-Messieurs (Jura). — In-8°.
Paris, Irap. Nat.
* Le même. — Statues de l'école dijonnaise
dans l'église de Mièges (Jura). — In-8°. Lons-le-
Saulnier, Declume.
* Le même. — Les églises romanes et l'ar-
chitecture religieuse dans le Jura. — In-8°.
Caen, Delesques.
* Le même. — La relique et le reliquaire
de Saint-Juste, a Chateau-Chalon. — In-8". Lons-
le Saulnier, Declume.
* Le même. — Le mobilier et les œuvres
d'art de l'église de Baume-les-Messieurs (Jura).
— In-8°. Paris, Imp. Nat.
Carpentier (C). — Historique de l'Hôtel de
Ville de Roye. — In-8° av. grav. Montdidier,
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seront l'objet d'un article bibliographique dans la Revue.
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et de la comtesse d'Angoulème, de m'="= d'Albret
ET de Madeleine Décéris, en 1481, dans \t Bulletin
de la Société archéologique de la Charente, 1900, n° 8,
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ViANCE, commandeur de Limoges, procureur
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archiépiscopal de Pontoise par le cardinal
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A LA Société de l'Union centrale des Arts déco-
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de Ville de Montdidier. — In-8° av. grav. Mont-
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Gauthier (J.). — L'ancienne collégiale de
Sainte-Madeleine de Besançon et son portail a
figures du XIIP siècle. — In-8° et pi. Besançon,
Dodivers.
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faictz pour le mariage de ma sœur, dam="'= Léo-
narde Peconnet, arresté avec M. Michel s'' de
la Bachelerie, dans le Bull, de la Soc. arch. du
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* Le même. — Inventaire des meubles et
autres choses trouvées dans les bastimens du
Chastenet, le 15 janvier 1694, dans le Bull, de la
Soc. arch. du Limousin, 1898, pp. 291-296.
* Le même. — Inventaire au décès de Jean
Peconnet, 31 octobre 1679, dans le Bull, de la Soc.
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8o
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d'après les documents des archives de Bourgogne. —
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motto araldici. — In-8° de 94 pag. Rome, Propa-
gande.
Tanfani Centofantl (L.). — Notizie di artisti
tratte dai documenti pisani. — In-8°. Pisa, Enrico
Spoerri.
Cspagne.
Arco y Molinero (A. del). — Restos artisti-
COS É INSCRIPCIONES SEPULCRALES DEL MONASTERIO
DE PoBLET. — In 4 " et fig. Barcelona, Susany.
Noguera Camoccia "(J)- — Escorial a la
VISTA. GUIA DESCRIPTIVA DEL ReaL MoNASTERIO,
Templo y Palacio de San Lorenzo del Escorial.
— In-i2 et fig. Madrid, Felipe Marques.
TPelgique.
Bethune(Le baron). — Epitaphes et monuments
des ÉGLISES DE LA FLANDRE DU XVI"= SIÈCLE, d'APRÎîS
les manuscrits DE CORNEILLE GaILLARD ET D'aU-
tres auteurs. 2"= partie (West-Flandre, partie méri-
dionale); — In-4°. Bruges. L. De Plancke.
* Bruylant (E.). — La Belgique illustrée, ses
monuments, ses paysages et ses œuvres d'art. —
3 vol. grand in-4°. Bruxelles. Prix : 100 fr.
Les secrets du coloris
spectre. — In-8°, 208 pp.
* De Lescluze (G.).
révélés par l'étude du
Roulers, de Meester.
* Germain (L.) et Donnet (F.). — Représi:n-
tation présumée de Jeanne d'Arc sur unetaque
DE foyer. — Une taque symbolique du xvii^ siè-
cle. — Broch. Anvers, De Backer, 1900. (Extrait
des Aimai. del'Acad. royale d' arch. d Anvers.)
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solennelle de l'académie royale d'archéologie
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* La Belgique pittoresque et monumentale,
album photographique de 250 vues. — Bruxelles,
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Le symbolisme et les symbolistes dans Le Messa-
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tableau de Memling au Musée de Bruxelles. — ■
In-8" 3 pi. Bruxelles, V= J. Baertsoen.
Vlaminck (A. de). — L'église collégiale Notre-
Dame A Termonde et son ancien obituaire.
In-8° et fig. Termonde, de Schepper-Philips.
■^
KKVUK DB L AKT CURÉTrEN.
I9OI. — i""^ LIVRAISON.
>^^^ :.^>U^^ -^ ^^ ^ ^. ^^ -^ -^ ^ ^. ^^ -^^ ■^■^, ■■'^. ^^, ^ ^ ^ ■^. ^^
<Ct)VOnlClUC, SOMMAIRE : RESTAURATIONS MONUMENTALES: Réponse à
M Fierens-Gevaert; vandalisme en France; restaurations en Belgique.^ ŒUVRES NOU-
VELLES : église St-Anselme à Rome ; vitraux ; calvaire à Lourdes. — DÉCOUVERTES :
fresques, etc. - VARIA. - NÉCROLOGIE
Albrecht De Vriendt.
% ■■=:^ --^^ ^^^t '^^ --'^ '^ '-^ '''^ ''^ '-^ '-^ '■'^ -^ '^ '"^ ''^ '^ ''^ '-^ ''^ '^ '^w W^
BLcstauration9 monumentales.
teur.
ONSIEUR Fierens-Gevaert est un
Flamand qui, à Paris, a su se créer une
notoriété par ses études sur l'art an-
_, cien dont il se montre fervent admira-
Nmis avons éprouvé le plus vif plaisir à
entendre ses conférences sur Van Dycketsurles
primitifs de la peinture l'an dernier à Anvers,
à Gand, à Bruxelles. Il est probable qu'il étudie
beaucoup; il est certain qu'il écrit davantage
et que ses informations manquent de sûreté. Dans
le présent fascicule de la ReTue de V Art chré-
tien notre collaborateur, M. Gerspach, remet au
point des faits entièrement inexacts avancés par
M. Fierens-Gevaert dans son article : De Van
Eyck à Van Dyck, celui-ci, notamment : que
Baldonnetti aurait été le premier à appliquer avec
succès les couleurs à l'huile à la peinture mu-
rale (i).
Dans un nouvel article que M. F.-G. vient de
publier dans la Chronique des Arts, et que nous
avons tenu à reproduire ci-après, il s'occupe de
ce qui se fait présentement dans son propre pays.
Il n'y montre ni l'exactitude ni le calme que
réclame une critique honnête. Un homme d'Etat
a dit un jour que le dénigrement est, chez les
Belges, une caractéristique nationale. Une fois
de plus il a raison. M. Fierens-Gevaert, rentré
d'un séjour au pays natal, s'empresse de dé-
noncer aux journaux de Paris le vandalisme des
Belges; sa critique est amère et singulièrement
injuste.
Il ne reproche pas aux Belges de négliger
leurs monuments anciens, d'en méconnaitre la
valeur artistique, de manquer de soin à leur
égard. Bien au contraire, il les traite de Van-
dales, parce qu'ils ne les laissent pas tomber en
ruines !
Nous tâchons de sauver ce qu'il en reste et
nous nous reprochons d'y avoir pensé trop tard ;
nous sommes navrés d'avoir vu s'effondrer les
superbes voûtes de l'abbatiale de Villers, d'avoir
laissé s'en aller pierre par pierre ces murs véné-
rables, jusqu'au jour où l'Élat a pu enfin devenir
propriétaire d'un terrain sacré pour l'art. Nous
déplorons d'être arrivés trop tard à Aulne pour
sauver le beau pignon occidental de l'église.
I. Lire dans la présente livraison « Correspondance d'Italie »,
par Gerspach. p. 55.
Mais nous nous félicitons d'avoir pu prévenir
au moins l'effondrement du chevet du chœur de
cette dernière et la chute d'un pan de mur qui
contient encore un dernier spécimen des baies
du XI 11^ siècle. Nous avons tenu à sauver le
réfectoire d'une ruine imminente en remplaçant
deux colonnes fêlées et en bouchant les trous
béants des voûtes ruinées par une végétation
parasite. Si l'on s'y était pris vingt ans plus tôt,
combien de beaux fragments de l'art monu-
mental on aurait pu garder, qui sont disparus
pour toujours !
Mais c'est justement là notre crime. Si M. Fie-
rens avait été le maître, il y a 20 ou 40 ans, il se
serait bien gardé d'opérer le sauvetage que nous
reprochons à nos devanciers d'avoir négligé. Au-
jourd'hui encore il ne ferait rien pour conserver
à la postérité ce qui reste de ces ruines, qui pour-
tant le passionnent. Il fallait les laisser mourir de
leur belle mort, car : « on ne restaure pas les
ruines. »
Non, on ne restaure pas les ruines, mais on les
conserve, quand ce sont des vestiges inestimables
de notre ancien art, comme des reliques pré-
cieuses ; on consolide, on soustrait au ravage
rapide des intempéries les murs lézardés, trem-
pés par l'eau du ciel, ébranlés par le temps ; on
remet en place les pierres tombées, on déblaye
les décombres amoncelés, on dégage de belles
pierres enfouies, on remet au jour des galeries
ensevelies.
On fait plus, et l'on a raison; on répare les
dégâts causés par le teinps et les vandales, on
bouche des brèches. On raffermit des murs bran-
lants, même on remet au.K verrières leurs presti-
gieuses résilles qui se découpent sur le ciel en si
riches dentelles et l'on repose sur leur base les
fûts exhumés des colonnes, qui désormais jalon-
neront la vieille nef et rappelleront l'ordonnance
du majestueux vaisseau. Eh bien, tout cela c'est
l'abomination de la désolation pour M. Ficrens,
qui va jusqu'à blâmer l'idée qu'on a eue de rap-
procher les claveau.x des ogives, de manière à re-
produire sur le sol leur cintre géant et d'empiler
avec ordre certaines pierres retrouvées qui con-
stituent des documents arcliitectoniques.
Il se trouve chez nous de bons confrères qui
s'attachent aux étrangers de passage pour leur
dénoncer les méfaits de leurs compatriotes et
leur dictent des catilinaires à insérer dans les
journaux de Paris, repris ensuite dans nos ga-
zettes. Ainsi faisaient naguère des membres
CDromque»
83
de la Société pour la protection des Sites, dont
nous avons ici même relevé les erreurs ; ainsi
faisaient également des « amis » du dernier
Congrès d'architecture à Bruxelles dont nous
avons dû également rectifier les dires. C'est ce
que, semb!e-t-il, quand au moyen d'informations
erronnées, on a voulu documenter M. Fierens.
C'est l'École de St-Luc que l'on a coutume de
charger des péchés d'Israël. M. Fierens, dans sa
loyauté, nous saura gré de le détromper et de lui
apprendre que l'école de St-Luc n'a rien à voir
ni à la restauration de Villers, ni à celle du
Sablon à Bruxelles, ni à celle du château des
Comtes à Gand. Sans être sorti de cette école, je
l'estime trop pour m'en séparer à propos d'Aulne.
M. Verhaegen sera sans doute dans le même
cas en ce qui concerne le Gerardsteen.
Il ne reste donc au passif de cette école, parmi
les griefs articulés, et nullement fondés d'ailleurs,
que la restauration de St-Pierre de Louvain. Or,
j'estime qu'elle n'a pas à rougir de ce remarquable
travail, une des meilleures restaurations qui
aient été exécutées en Belgique. Nous pourrons
en reparler s'il y a lieu. Enfin Saint-Martin de
Saint-Trond, église moderne, n'a rien à voir avec
la question des restaurations. Je n'entreprendrai
pas aujourd'hui de réfuter les attaques de M. Fie-
rens contre l'enseignement des Écoles de Saint-
Luc. Je ferai cependant une remarque. L'école de
Saint-Luc est une école libre et spéciale d'art
chrétien ; son enseignement est basé, comme il
convient, sur nos traditions nationales. Toutefois
celles-ci régnent d'une manière moins absolue, que
l'archéologie gréco-romaine n'a longtemps régné
et ne règne encore dans la plupart des académies
publiques et officielles et dans toutes les écoles
des Beaux-Arts de Belgique et de France.
En outre je demanderai comment un homme
de la valeur de M. Fierens peut faire entendre,
que l'étude de l'archéologie est funeste à ceux qui
sont appelés à restaurer nos anciens monuments
ou même à ceux qui doivent y faire œuvre d'ar-
tistes fidèles aux traditions dont ces édifices sont
imprégnés.
Voici l'article paru dans la Chroiique des arts.
L. C LOQUET.
Les restaurateurs n'ont pas encore épuisé la série de
leurs méfaits en France, et la Chronique s'est vue con-
trainte encore, la semaine dernière, de signaler leur zèle
malveillant. On peut constater du moins avec joie que
leurs reconstitutions, réparations, consolidations, tous
leurs pastiches ingénieux et glacés, exécutés sous prétexte
de conserver les monuments aux générations futures, ne
se commettent plus impunément. L'architecte qui entre-
prend une restauration est un homme hardi. Le prestige
des restaurateurs s'évanouit. L'industrie des arrangeurs
de vieilles pierres est en baisse. Elle sévit encore, par
suite d'une certaine force acquise. Il n'est plus personne
qui consente à la défendre.
Plût au ciel qu'il en firt de même en Belgique.
Ce charmant pays où la vie sociale et l'art traversent
en ce moment une période si brillante, est resté, par une
contradiction tout à fait paradoxale, l'Éden des restaura-
teurs. Je viens de m'y promener pendant cinq semaines.
Hélas ! il n'est pas de ville, pas de village où les restau-
rateurs n'aient laissé des traces de leur passage. Toutes
les églises, tous les édifices présentant un caractère d'art
sont signalés, par des comités provinciaux, à la commis-
sion royale des monuments ; celle-ci, pour prouver son
activité et « assurer la parfaite conservation » de l'édifice
signalé, ne trouve généralement rien de mieux que d'en
demander une restauration totale, — vœu toujours ratifié
par le gouvernement.
Par qui les restaurations sont-elles dirigées ?
Nous avons le malheur de posséder en Belgique une
« école d'art >, dite école de Saint-Luc, où les jeunes ar-
chitectes, sculpteurs, peintres, s'exercent exclusivement
à imiter les styles morts — particulièrement le roman et
le gothique, jadis si florissants dans les provinces wallon-
nes et flamandes. Cet institut archéologique forme un
nombre considérable d'élèves, souvent habiles, mais qui
ne possèdent aucun des dons de l'artiste. Toute origina-
lité est morte pour eux. En auraient-ils conservé la moin-
dre parcelle, qu'ils chercheraient avec soin à l'éteindre
pour réaliser l'idéal du parfait copiste prêché par leurs
maîtres. Ils ne conçoivent point la possibilité d'une créa-
tion personnelle. Ils sont vieux de trois ou quatre siècles.
Ils vivent dans un passé lointain. Leur travail a quelque
chose de funéraire. Et ils sont ainsi plusieurs centaines à
enrayer la vie dans l'art de leur pays, à recevoir des som-
mes considérables pour leurs besognes néfastes, tandis
que les vrais artistes obtiennent avec peine quelques mi-
sérables subsides. Car c'est dans les ateliers ou classes
de cette Académie du pastiche que se recrute la légion
compacte des restaurateurs belges.
Les élèves de Saint-Luc ont une carrière assurée. Ils
restaurent les églises,les reconstruisent au besoin entière-
ment dans le style ancien, taillent des autels, exécutent
des retables, des peintures murales, en s'inspirant des
« meilleurs modèles >. Leurs travaux corrects sont mor-
tellement ennuyeux. On en trouve partout ; c'est une ob-
session. Cette imitation servile est, en réalité, un acte de
parfaite déloyauté. On ne ravit pas aux morts leur idéal
de beauté avec un cynisme aussi tranquille. Cela révolte,
et l'on se prend à regretter le « mauvais goût » du siècle
dernier en présence de ce néant, de cette impuissance,
de ce vide funèbre. Je suis de l'avis de Flaubert, qui pen-
sait qu'avoir du mauvais goût, c'est encore avoir de la
poésie dans la cervelle. Or, nos bons pasticheurs belges
s'appliquent précisément à tuer toute la poésie des vieux
monuments de leur pays. Les stucs, les applications de
bois peint, de marbres blancs et noirs, tout ce faux décor,
derrière lequel les Jésuites cachaient les pierres gothiques,
ont moins défiguré les églises de la Belgique que les res-
pectueuses et mortelles reconstitutions des architectes
modernes.
Assez de théories ; passons aux faits.
L'une des façades de l'église du Sablon à Bruxelles vient
d'être complètement grattée, nettoyée, réparée ('). Elle est
d'une blancheur éclatante. Plus la moindre trace de pous-
sière dans les crochets, les pinacles, les moulures. Les
bourgeois et les ménagères s'émerveillent de cette pro-
preté. Plus la moindre dégradation, plus la moindre bri-
1. Par un architecte qui n'a rien de commun avec l'École Saint-
Luc. N. D. L. R.
84
WitWt De V^xt thxitmh
sure ; cela sort d'une boîte. Impossible de rêver pâtisserie
plus charmante, plus fondante ; c'est la crème des restau-
rations. On assure que toute l'tîglise subira le même sort.
En attendant, la façade nouvelle « hurle » à côté des an-
ciennes. A Sainte-Gudule (cathédrale de Bruxelles) on a
placé sur un portail latéral une \'ierge, toute fraîche, qui
parait bien ennuyée de se trouver si en vue dans un décor
vétusté. 11 y a un certain nombre d'années, Sainte-Gudule
avait déjà été mise dans un état pitoyable ; les arêtes des
gables, des pignons, des pyramidions avaient été considé-
rablement amincis ; on avait voulu rafraîchir le monument.
Ces bonnes traditions se perpétuent.
Il n'y a pas que les églises... Les édifices civils n'échap-
pent point à ce vandalisme conservateur. On a entière-
ment reconstruit le beau chemin de ronde du magnifique
burg des comtes de Flandre : 'S Graveiisleen, conservé à
Gand ("). 11 y a deux ans, en signalant ce superbe type
de l'architecture militaire du XIl" siècle, nous avons sup-
plié les architectes de ne point toucher aux échauguettes
si joliment posées sur la muraille d'enceinte. Elles ont
été impitoyablement refaites. Nous avons eu tort de nous
en mêler, sans doute. Les restaurateurs n'aiment point
que l'on mette le nez dans leurs affaires. Notre prière aura
louetté leur zèle réparateur. Notez qu'on les avait chargés
tout simplement de désencombrer les ruines du manoir
comtal. Ils n'ont pas encore reconstitué le donjon. Ne dé-
sespérons point : cela ne saurait tarder et le château des
Comtes sera bientôt un '\ vestige » aussi odieux que le
^■/i?^» de Gérard le Diable, autre monument de Gand res-
tauré jadis d'une manière abominable.
Les villes flamandes rivalisaient autrefois de zèle pour
élever des édifices plus somptueux les uns que les autres.
Aujourd'hui elles s'enorgueillissent, senible-t-il, de dépen-
ser beaucoup d'argent pour les restaurations — ou d'en
faire dépenser par le gouvernement. Louvain ne veut pas
se laisser éclipser par Gand. On y restaure abondamment:
les chœurs de l'église Saint- Pierre, et tout un côté de
l'hôtel de ville. Cette e.xquise maison communale avait
été bien malmenée par les arrangeurs officiels il y a qua-
rante ou cinquante ans. On posa sur les consoles de la
façade principale, de hideuses statuettes que l'on préten-
dait inspirées par un « intelligent souci archéologique ».
Aujourd'hui, pour éviter ces erreurs, on reconstruit une
façade depuis le sol jusqu'à la pointe extrême du pignon.
Et tout Louvain applaudit. A Malines on nettoie, on ame-
nuise l'énorme tour de Saint-Rombaut. Sans doute la
trouve-t-on un peu lourde. On cherche à lui donner un air
coquet, aimable. On la corrige, on lui voudrait de belles
manières
Vous savez quelles sont les réponses des architectes à
qui l'on adresse ces critiques : l" Les pierres tombaient
sur la tête des passants ; 2° la pluie filtrait à travers les
voûtes des édifices ; 3° dans une vingtaine d'années les
parties leconstruites seront identiques aux parties an-
ciennes, il ne sera plus possible de les distinguer les unes
des autres ; etc. Pour les deux premiers cas, une répara-
tion légère, ([uelques pierres adroitement remi)lacées, un
peu de ciment dans les lézardes, suffiraient souvent. Mais
dès qu'un architecte « tient > un monument, il ne le
« lâche > plus. 11 promet quelques renouvellements im-
perceptibles, — il change tout l'édifice. La troisième excu-
se des restaurateurs est la plus mauvaise et la moins sou-
tenable. Jamais le pastiche ne trompera personne. Il est
faux que l'on finisse par confondre la copie avec l'original.
Nous en avons à Paris la preuve flagrante. La sacristie
de Notre-Uame, construite par Lassus et Viollet-le-Duc,
a-t-elle jamais réussi à se faire prendre pour une con-
I. Également par un architecte qui n'a rien de commun avec
l'École Saint-Luc. N. D. L. 8.
struction du XII I^ siècle et ne continue-t-elle pas, malgré
les années, à porter la marque indélébile de la contre-
façon (■) ?
A la très grande rigueur (■'), et avec d'innombrables
réserves, on peut admettre que des églises encore
livrées au culte et des monuments civils habités par
des administrateurs soient restaurés. Mais où la raison
se perd, où l'on ne trouve plus l'ombre d'explication,
où l'on se sent en présence d'une négation absolue non
seulement de l'art, mais du i)his simple bon sens, c'est
devant les restaurations de ruines ! On restaure les
ruines des célèbres abbayes d'Aulne et de Villers. C'est
un crime, une profanation. 11 n'y a donc personne en
Belgique parmi les membres du gouvernement et des
commissions compétentes pour sentir le profond ridicule
qui s'attache à la réunion de ces mots : restauration de
ruines ? Une ruine restaurée est-elle encore une ruine?
N'est-ce pas proprement une aberration de vouloir ar-
ranger, relever, rejointoyer, ravaler de vieilles pierres
dont la séduction consistait précisément dans un désordre
imprévu, qui tiraient leur charme tragique de leurs bles-
sures mêmes, des traces de la dévastation et du temps?
Et ne sait-on pas ciue l'on détruit la beauté des paysages
environnants — ceux de Villers et d'Aulne sont admi-
rables — en se livrant à ces reconstitutions sacrilèges ?
A Villers, le chœur de l'église abbatiale est occupé par
un énorme échafaudage qui ne disparaîtra peut-être plus.
Ne vaudrait-il pas mieux que les murailles fussent per-
dues ? Un rédacteur du Petit Bleu de Bruxelles écrivait
ces jours ci : « Il y a dans le chœur de l'église un formi-
dable échafaudage, dressé là depuis le commencement
des travaux, qui a dû coûter cher, qui n'a, paraît-il, jamais
servi et qui est aujourd'hui si moussu, si moisi, qu'aucun
entrepreneur soucieux de la vie humaine n'oserait per-
mettre à ses ouvriers de s'en servir. >
La restauration de l'abbaye d'.Aulne est conduite avec
science, je n'en disconviens pas. Mais quelle joie a-t-on à
contempler les immenses câbles qui traversent l'église et
retiennent les meneaux des grandes ogives? quel plaisir
d'art peut-on éprouver à voir des tronçons de colonnes
rangés symétriquement dans les nefs ? Les corniches du
chœur et du transept sont égalisées, certaines voûtes sont
reconstruites. Ce n'est plus une ruine, ce n'est pas une
reconstitution. En réalité, on a l'air de visiter un chantier
de construction abandonné depuis la veille par les mar-
briers et tailleurs de pierre. L'église est devenue un local
idéal pour conférences sur l'art du moyen âge.
Mais c'est à la ville de Saint-Trond que revient la pal-
me. L'église Saint-Martin a été tout simplement détruite
et on a construit une nouvelle église « romane * à la
place ! Au moins, là, on n'a pas cherché les compromis ;
on a agi avec une franchise cynique.
Si l'on ne fait cesser promptement ces massacres, la
Belgi(|ue monumentale ne sera bientôt plus qu'un cime-
tière archéologique.
Je parlerai prochainement des sculptures et des pein-
tures.
Le mauvais goût de nos \'andales patentés s'y exerce
avec non moins d'ardeur. Je sujjplie, en attendant, mes
confrères belges, à quelque parti (|u'ils appartiennent,
d'écouter mon cri d'alarme et d'unir leurs efforts pour
arracher les glorieux monuments flamands et wallons des
mains infatigables de ces artistes-fossoyeurs. Ce n'est pas
seulement une question de vaine esthétique ; c'est aussi
1. La Sacristie de N. -D. de Paris n'offre le cas ni d'une restaura-
lion, ni d'une restitution, ni d'une copie; c'est une bâtisse entière-
ment originale de Viollct-lc-Duc; alors, que signifie cet exemple!'
2. M. F. G. est bien bon de ne pas exiger que l'on habite de
vraies ruines.
Cljrontque.
85
une question de gros sous. Le devoir des autorités est
d'enrayer par des remèdes radicaux cette épidémie restau-
ratrice qui dévore les budgets et anéantit, tout Moisir, un
illustre patrimoine d'art.
H. Fierens-Gevaert.
France. Le vandalisme en France semble devoir
être inguérissable.
A Avignon, le maire, qui a déjà fait abattre la
porte Limbert, vient de procéder à la destruction
d'une autre porte, la porte de Loull, en attendant
la démolition complète, lùyà antioncée. Il s'agit
d'obtenir un élargissement de 4 mètres.
A Soissons, la municipalité fait raser les restes
d'une basilique découverte il y a quelques années
et abattre une tour à laquelle s'attachaient des
traditions locales.
A Orléans, les édiles encore décident la mu-
tilation du cloître d'un ancien cimetière où se
trouvaient — justement dans la partie sacrifiée
— des restes assez bien conservés d'anciennes
peintures.
On sait que la maison de la rue Saint-Romain
de Rouen, et les vieilles murailles de Péronne,
d'Aigues-Mortes, sont menacées de destruction.
A Clermont-Ferrand, on vient de commencer
la démolition de la maison où Pascal vit le
jour, rue des Gras, près de la cathédrale. \J Avenir
du Puy-de-Dôme, qui proteste contre cette ab-
surde destruction, demande qu'on conserve au
moins un corps de logis auquel il n'a pas encore
été touché et qu'on y installe un musée pascalien.
Nous nous associons chaleureusement à ce vœu.
LES architectes de la ville de Paris sont en
train de restaurer le cloître des Billettes,
ce bijou du XIV'^ siècle dont les piliers et les
voûtes menaçaient ruine.
Ce cloître fut bâti par un bourgeois de Paris,
un antisémite du temps, sur l'emplacement d'une
maison qui appartenait à un riche Israélite nom-
mé Jonathas ; ce dernier, accusé d'avoir percé
de son canif une hostie et de l'avoir jetée dans une
chaudière d'huile bouillante, fut dépouillé de ses
biens au profit de l'église de Saint-Jean. Un cou-
vent fut fondé dans la rue, qui prit le nom pitto-
resque de rue « Où Dieu fust bouilli. » On fit venir
de Châlons des religieux hospitaliers, les Carmes
Billettes, ainsi nommés d'une partie de leur
vêtement, une sorte de scapulaire en forme de
billettes. Le couvent fut supprimé en 1790.
A Florence, le Marzocco signale le danger qui
menace une œuvre admirable de Brunelleschi,
le cloître de Santa Croce : le Conseil municipal
de Florence a projeté d'élever là la nouvelle
bibliothèque, dont la masse énorme, suspendue
sur le cloître, l'écraserait de son ombre. D'ailleurs,
deux autres œuvres de Brunelleschi sont déjà
abîmées depuis longtemps : à la sacristie de St-
Laurent, les sculptures de Donatello dorment
depuis un siècle sous un épais badigeon et la
lanterne qui surmonte l'édifice est aveuglée ; au
palais des Guelfes, une des plus belles salles du
monde, percée de fenêtres gigantesques, est divi-
sée, dans sa hauteur, en trois étages partagés
entre une caserne de pompiers et les écoles
communales.
Belgique. — La collégiale de Huy réclame une
restauration urgente, vu l'état de délabrement
de certaines parties de maçonneries.
A l'intérieur de l'édifice, il est question de
supprimer le jubé actuel et de le placer avec le
buffet d'orgues dans un autre endroit de l'église,
afin de rendre au vaisseau dont la grande tour
forme la continuation, toute son ampleur et sa
belle perspective. En outre, l'autel majeur qui a
été avancé dans le sanctuaire, devra reprendre
sa place normale dans l'abside où se trouvent
encore ses fondations.
— }®^— K^H-
Le retable de 'S Heeren-Elderen. — 'S Heeren-
Elderen (Limbourg) possède dans son église un
retable de grande dimension — • il mesure 2'". 15
de large — que d'aucuns attribuent à l'art rhénan,
d'autres à l'art mosan.
L'œuvre avait subi « du temps l'irréparable
outrage ». Elle était devenue une chose informe,
et, à raison des mignonnes statuettes et figurines
qui la composaient, les habitants du village ne
la désignaient autrement que sous le nom irres-
pectueu.x de Poppenkas, l'armoire aux poupées.
Et, en effet, ce n'était plus qu'un assemblage de
statuettes défigurées, mutilées, d'abord par les
iconoclastes du XVP siècle, ensuite par les
septembriseurs de la Convention, et, enfin, par
des prétendus restaurateurs, ravageurs artis-
tiques.
De hautes influences intervinrent ; M. le député
Helleputte éveilla la sollicitude du gouvernement,
et grâce à l'appui obtenu de celui-ci, le Poppenkas
d'hier se trouve transformé aujourd'hui en une
des plus belles productions de l'art chrétien du
milieu du XVl'^ siècle.
Le travail de restauration a été confié à deux
de nos concitoyens : à M. Léon Bressers pour la
86
îRebue lie r^vt cJ)ictieiu
peinture et la polychromie, et à M. Léopold
Blancliaert pour la sculpture et la statuaire.
Le retable de l'église de 'S Ileeren Elderen
retrace avec grande profusion mais bien artis-
tiquement ordonnancée d'accessoires et de dé-
tails, la vie de N.-S. Jésus-Christ ; la nativité,
l'adoration des mages, la circoncision, la chute
sous la croix sur la voie sanglante, le calvaire,
l'ensevelissement. Autour de ces groupes domi-
nants, des sujets en mignonne création repré-
sentant des scènes de l'ancienne Loi : le serpent
d'airain, le sacrifice d'Abraham, Caïn et Abel,
l'Arche de Noé, les prophètes, etc.
Il y a là une accumulation de plus de 300
personnages, parmi lesquels nous signalerons
tout spécialement le groupe des saintes femmes
au pied de la Croix. Tous ces groupes, tous ces
personnages, il a fallu les restaurer, les ressus-
citer en quelque sorte. Après de longues études,
de laborieuses recherches et un travail ininter-
rompu de sept mois avec quatre ouvriers d'élite,
nos concitoyens sont parvenus à réédifier ce
remarquable spécimen de l'art rhénan ou mosan
— nous ne nous prononçons pas — qui date de
I540-I545,et ils se sont acquittés de la tâche
ardue que le gouvernement leur a confiée avec
une science et un art qui touche à la perfection,
et qui leur vaudra la reconnaissance de tous les
amis de l'art chrétien médiéval.
(Bien Public.)
Le: nii)ies de Franchimont. — M. le ministre
de l'agriculture vient de décider la consolidation
des ruines du château de Franchimont acquises
par l'État.
Franchimont est un beau style de forteresse
du moyen âge d'une disposition originale et
d'aspect imposant. Vue des hauteurs de la route
qui se dirige vers Polleur, sa silhouette ne le
cède en rien à celle des ruines les plus remar-
quables des bords du Rhin. Elle s'élève sur un
plateau an point de rencontre de deux vallées et
domine toute la contrée environnante.
Avant la Révolution française, elle servit de
prison d'État. Sous la République,on y établit une
fabrique de salpêtre. Deux explosions successives
l'ont mise dans l'état oîi elle est aujourd'hui.
L'exécution de travaux de conservation est
urgente. Elle a été confiée à M. l'architecte
Lohest, l'habile restaurateur du château de
Bouillon.
A JOURNEE depuis longtemps, faute de
X 1. crédits, la restauration de la vieille église
S^int-Tierre de Montmartre, la plus ancienne de
Paris, va être très prochainement commencée ;
83,610 francs viennent d'être mis à la disposition
de l'architecte, M. Houvard, pour procéder à la
restauration du chœur seulement.
DES restaurations nombreuses sont en voie
de réalisation à Bruxelles.
Celle de l'église du Sablon, suspendue durant
quelques mois, vient d'être reprise. Les travaux
du Sablon coûteront 1,800,000 francs, dont la
moitié est supportée par la ville de Bruxelles, et
l'autre moitié par l'État et la Province.
On achève en ce moment la restauration de
la superbe église d'Anderlecht, à l'ombre de
laquelle se trouve le castel, rempli d'antiquités,
de M. Vandenpeereboom, l'ancien ministre des
chemins de fer.
A Ste-Gudule, on restaure la façade. — On
devrait songer à dégager le chevet de la splendide
collégiale. Il y a là un mur abominable auquel
est adossé le plus malencontreux des kiosques.
Quant aux restaurations de la Grand'PIace,
elles se poursuivent avec méthode. En ce moment,
on achève la restauration de la Maison des Bras-
seurs, surmontée de la statue équestre de Charles
de Lorraine, et on commence la démolition de
la Maison des Boulangers. Cette dernière restau-
ration, qui coûtera au delà de 300,000 francs,
donnera une superbe allure au côté occidental
de la Place, qui, outre la Maison des Bojilangers,
comprend Le Renard, Le Cornet, La Louve, Le
Sac et La Brouette ou La Presse.
Sur la façade de la Maison des Boulangers,
on replacera le buste de Charles II d'Espagne
encadré d'un trophée guerrier. Un dôme octogo-
nal dominera le toit, et six figures allégoriques
orneront, comme jadis, la balustrade de la cor-
niche. On va aussi restaurer prochainement Le
Cygne, qui était autrefois le siège de la fameuse
corporation des bouchers. Sur la toiture, on
replacera les grandes figures allégoriques d'autre-
fois. En attendant, elles se trouvent dans la cour
et dans un des vestibules de l'hôtel-de-ville.
On poursuit également la restauration de ce
vénérable monument. Actuellement on travaille
à l'aile gauche, c'est-à-dire du côté de la rue de
la Tête d'or. Puis, ce sera au tour du toit, dont
on va refaire les trois étages de lucarnes. Lorsque
toutes ces restaurations seront achevées, d'ici à
deux ou trois ans, la Grand'PIace de Bruxelles
sera réellement merveilleuse. Ce sera la Grand'
Place telle qu'elle existait il y a deux cents ans.
Cl)rontaue«
87
LE Congrès international des sciences ethno-
graphiques a émis à l'unanimité, un vœu
relatif à la conservation en France de la col-
lection de tissus et costumes du III'^ au XIII^
siècle, reconstituée à la suite de son séjour dans
la Haute-Kgypte, par M. Albert Gayet, et expo-
sée au Palais du Costume.
GGiiUrcs nouvelles.
La consécration de V église de Saint- Anselme à
Rome. Le 10 novembre le cardinal Rampolla,
assisté de 16 prélats de l'Ordre de Saint-Benoît,
a consacré la nouvelle église du collège bénédic-
tin de Saint- Anselme, bâti sur l'Aventin, d'après
les plans du R™'= P. de Hemptinne, Abbé primat
de l'Ordre de Saint-Benoît, le monument le
mieux réussi de la nouvelle Rome. Quand on
arrive par la voie de Civita-Vecchia, on est frappé
de ses dimensions imposantes, et de la disposi-
tion harmonieuse de toutes ses parties. L'intérieur
répond pour le fini d'exécution, le soin des
détails, à ce que promet l'extérieur, et il est assez
vaste pour pouvoir loger 200 religieux.
La consécration a été faite par S. Em. le car-
dinal Rampolla. Le souverain pontife s'étant
réservé le protectorat de l'Ordre de Saint-Benoît,
devait, naturellement, faire la consécration de
l'église qui devenait le centre de l'Ordre, mais les
conditions des temps l'avaient forcé de déléguer
son aller ego, le cardinal secrétaire d'Etat.
Plus de 80 abbés de l'Ordre de Saint-Benoît,
en chape et en mitre, formaient le chœur ; une
vingtaine d'archevêques et d'évèques rehaussaient
cette cérémonie de leur présence, et je renonce
à compter la multitude des prélats, de supérieurs
d'Ordres religieux qui y assistaient.
Léchant était celui de Dom Pothier, magnifi-
quement exécuté, sous la direction de Dom
Janssens, par les Bénédictins de Saint-Anselme,
et tout le monde a pu goûter la beauté des mélo-
dies grégoriennes exécutées avec une maestria et
un talent que l'on trouve rarement.
Voici quelques indications sur l'architecture
du nouveau monastère. Le collège qui couvre
6,000 mètres carrés de terrain est construit dans
le pur style roman du XIII'' siècle; il charme
l'œil par le choix intelligent des matériaux et par
l'harmonieuse proportion de ses parties.
De longs cloîtres, coupés à angle droit par
d'autres cloîtres, donnent accès aux différentes
salles. Ce qui distingue cette construction, c'est
son cachet de simplicité monastique unie à une
grande perfection dans les détails. C'est un rien,
une serrure, un fer qui retient une porte, une
lampe, une rampe d'escalier, mais ce rien est traité
suivant le style de l'époque et révèle la main d'un
artiste.
Quand on arrive à Rome par la ligne de Civi-
ta Vecchia, on est frappé des imposantes dimen-
sions de ce bâtiment qui domine toute la plaine.
Ses quatre tours en brisent les angles et lui
donnent l'aspect d'un château-fort, mais le
clocher de l'église, plus élevé, et plus élancé grâce
à ses fenêtres ajourées, a bien vite fixé le voya-
geur sur la destination de l'édifice ; c'est bien un
monastère bénédictin. Les monuments de la nou-
velle Rome sortis déterre après 1870, enfermant
en quelque sorte la vieille ville dans une couronne
de maisons et d'édifices, n'a pas beaucoup de
beaux palais. Les Italiens ont cherché avant tout
à faire des maisons de rapport. Sauf le palais
de la Banque d'Italie, le palais Boncompagni,
il n'y a rien qui fixe et arrête l'attention. Le
collège de Saint-Anselme est venu rompre cette
monotonie, et grâce aux Bénédictins, l'Eglise
comote à Rome un monument digne de ce grand
Ordre.
Le toit de l'église, de style basilical, en
montre à découvert la charpente, comme c'est
l'usage dans les anciennes basiliques. Les murs
sont encore nus, mais lisseront plus tard décorés
de peintures, et peut-être de mosaïques.
Le maître-autel est surmonté du baldaquin ou
dais traditionnel dans le style du XIV»^ siècle et
tous les autels ont été faits dans ce style. Le
Rév. Abbé-Primat a eu une heureuse idée.Prenant
à la lettre ce verset de la Genèse tpasuit lapident
in titulum fimdens oleum desiiper "j), \\ a voulu
réaliser ce concept. Les autels de la crypte, au
nombre de 16, se composent d'un bloc massif de
granit. Au milieu a été creusé le sépulcre où re-
poseront les reliques, enfermées dans une boîte
d'argent. Le sépulcre lui-même est clos par une
plaque de granit. Cette pierre, ce bloc a reçu
l'onction sainte. Une croix de cuivre doré, des-
sinée artistiquement, s'applique en relief sur le
devant de l'autel et rompt l'uniformité de la
surface sans dessins ni moulures. On ne pouvait
unir plus de simplicité à plus de grandeur.
— }@i " i©f-
M. Ed. Didron vient de mettre en place dans
l'église Notre-Dame de Beaune, une nouvelle
verrière. Elle remph't une fenêtre partagée en trois
lancettes surmontées d'un beau réseau flammé,
et raconte le martyre de saint Floscel, qui est très
honoré à Beaune.Traité en grisaille, copieusement
rehaussée de jaune d'argent et dans le style de
la première Renaissance, le nouveau vitrail repré-
sente, au centre, la scène du martyre ; à droite
la translation des reliques à Beaune ; à gauche,
une scène contemporaine, mais traitée, bien en-
88
HRcbuc lie r^rt t})rttien.
tendu, dans le même style ancien, la remise d'une
partie des reliques à l'église de Montebourg
(Manche), lieu du martyre, par Mgr Le Nordez,
évêque actuel de Dijon, et natif lui-même de
Montebourg. Dans les flammes au-dessus, deux
anges portant l'un la palme, l'autre la couronne;
enfin, dans le compartiment supérieur, la figure
du Christ assis.
Un calvaire. — La catholique Bretagne offre
à Notre-Dame de Lourdes un Calvaire, qui
s'élève près du célèbre lieu de pèlerinage.
Naguère l'amiral de Cuverville écrivait dans
sa lettre ouverte au Président de la République:
« La Bretagne a voulu que le siècle de l'Imma-
« culée Conception ne se terminât pas sans
« qu'un monument grandiose de sa foi et de son
« amour s'élevât au lieu même des apparitions :
« l'un de ses enfants vient d'achever le calvaire
« de granit qui rappellera aux âges futurs la
« fermeté de nos croyances et notre espérance
« en Jésus crucifié. ))
Le monument est digne de la fière Bretagne.
La base quadrangulaire porte quatre statues de
un mètre quatre-vingts chacune : la Sainte
Vierge, saint Jean, Marie-Magdeleine, Longin.
Sur une des faces figurent les noms des cinq
diocèses de Bretagne : Rennes, Saint-Brieuc,
Nantes, Vannes et Quimper. Une autre repré-
sente la prière « O Criix ave, spes nnica » en
langue bretonne. Une banderole entourant l'arbre
de la croix, superbe monolithe, proclame le
triomphe de Jésus-Christ : « Cliristtis vincit,
régnai, imperat.'^ Et en avant se détache l'écusson
de la province avec sa devise : « Potins mori
qnam fœdari: Plutôt la mort que la souillure. »
!Oécouï)cctc0.
Découverte de fresques. On a découvert d'in-
téressantes fresques pendant les travaux de
restauration exécutés dans le chœur du couvent
de Ste.-Cécile, à Rome.
Le docteur Frédéric Hermainn, invité par la
direction générale des antiquités et beaux-arts à
donner son avis sur les peintures découvertes, a
pu établir qu'elles sont du peintre romain Pietro
Cavallini.
Vasari raconte, en effet, que Cavallini « pei-
gnit de sa main presque toute l'église de Ste-Cé-
cile ».
L'importance de la découverte provient surtout
de ce qu'on ne connaissait jusqu'ici de Cavallini
que les mosaïques de Sainte-Marie en Transté-
vère, de St-Chrysogone et de St-Paul hors les
murs, œuvres dans lesquelles l'art du peintre ap-
paraît transformé par les mosaïstes.
Dans les fresques découvertes à Ste-Cécile, le
Christ entouré de la cour divine, l'artiste vanté
par Vasari nous apparaît comme un maître doué
d'une grande puissance, un émule de Giotto.
Ces fresques doivent remonter à l'an 1300,
c'est-à-dire à une époque où le rénovateur de la
peinture italienne venait de visiter Rome.
IL y a quelques mois, on a découvert à Bosco-
reale, près de Naples, là d'où est sorti le fa-
meux trésor qu'il y a trois ou quatre ans le baron
de Rotschild a donné au Louvre, un immense
édifice remontant, paraît-il, à une époque anté-
rieure à celle de Pompéi, et dont les parois sont
ornées de fresques de toute beauté, en parfait
état de conservation. Ces fresques décoraient
deux des salles sur les vingt qui ont été décou-
vertes. Elles sont de grande dimension, trois
surtout qui représentent : la première, une citha-
riste, la seconde, un gladiateur âgé racontant
probablement à une dame les exploits de sa
jeunesse, et enfin, la troisième, une femme qui
paraît écouter une harmonie lointaine. L'empe-
reur d'Allemagne a fait offrir de ces fresques une
somme considérable au propriétaire qui consen-
tirait volontiers à les lui céder, mais l'opinion
publique s'est émue et en appelle à l'intervention
du gouvernement en demandant en cette circon-
stance l'application de l'édit Pacca, qui interdit
la sortie d'Italie de certains objets d'art comme
l'on sait. Il y a de sérieuses difficultés à ce pro-
pos. Ainsi, on raconte qu'à l'insu du ministère,
la direction des fouilles de Naples aurait auto-
risé le propriétaire, M. de Prisco, député, à dé-
tacher les 70 fresques mises au jour, dont plu-
sieurs grandeur naturelle ; de sorte que, perdant
leur caractère d'immeuble, elles seraient deve-
nues meubles, frustrant ainsi l'Etat de son droit
d'expropriation, et alors comme objets d'art, le
propriétaire aurait le droit de les exporter. Le
ministre, M. Gallo, a désavoué la direction des
fouilles de Naples, se réservant d'établir la res-
ponsabilité individuelle de chacun.
— }Qi '■ )Q<—
UN tableau attribué à Hugo van der Goes,
peintre qui n'était pas encore représenté
au musée de Berlin, a été acquis récemment par
la galerie. C'est un groupe de saintes femmes
avec saint Jean, qui formait le volet droit d'un
triptyque dont la partie centrale représentait la
Descente de croix. Mais l'état de conservation
Cl)roiuque.
89
assez médiocre de la peinture ne permet pas
d'affirmer nettement l'authenticité de l'attribu-
tion.
l£aria.
Nouvelles religieuses. Reliques de saint Augus-
tin. — Le corps de saint Augustin, racheté aux
Sarrasins par le roi lombard Luitprand, reposa,
pendant des siècles, à l'église de Saint-Pierre in
cield'oio à Pavie, dans un reliquaire, dû au génie
artistique de Bonino de Campiglione, l'auteur du
célèbre tombeau des Scaliger, à Vérone.
Cette basilique lombarde ayant été désaffectée
à la suite des guerres napoléoniennes, le corps de
saint Augustin fut transféré à la cathédrale de
Pavie, où ses précieuses reliques restèrent dépo-
sées pendant près d'un siècle.
La basilique ayant été restaurée et rendue au
culte, l'autorité ecclésiastique a décidé que le
corps de saint Augustin y sera transféré et dé-
posé dans le célèbre reliquaire de Bonino, chef-
d'œuvre d'une grande richesse, ornée de 290 sta-
tues de saints et figures allégoriques, datant de
1362 et qui vient d'être restauré.
La translation a eu lieu en grande pompe
religieuse le dimanche, 30 septembre; le reli-
quaire restauré dépasse en richesse ceux de saint
Dominique de Bologne et de saint Pierre, martyr,
de l'église de San Eustorgio de Milan, et le mo-
nument de Benoit IX à Pérouse, ainsi que le
célèbre monument funéraire de Robert d'Anjou.
^ t», ,si. »». »». <f: '». '». •>». '». »». '». ■<». o». ».ft ,», ,», ,». ..y;, 4». .». t» <n *». t».
HlûcEfljt X)c Vricnbt.
LA mort inopinée d'Albrecht De Vriencitest
pour l'art belge un deuil qui sera partagé
par les pays voisins, où le peintre a souvent
fait connaître les œuvres de son pinceau, où il a
personnellement représenté la Belgique dans des
circonstances où la présence d'un artiste était
nécessaire. C'était d'ailleurs un peintre de l'an-
cienne race flamande ; studieux, travailleur,
dévoué à sa tâche, à qui l'inspiration ne faisait
pas défaut, mais qui n'entendait s'abandonner ni
aux hasards de l'inspiration, ni aux caprices de
la fantaisie. Fils d'un artiste de mérite, il avait
été à bonne école, et s'était bientôt rompu aux
difficultés techniques de l'art. Mais s'il était
maître de son pinceau, il n'oubliait jamais qu'avant
de peindre l'artiste doit penser. C'est grâce à ces
qualités acquises, — partagées avec Julien, son
frère aîné, — que, avec celui-ci, il s'était, dès sa
jeunesse, placé en bon rang dans la phalange des
peintres belges.
Tous deux ont déjà, par la date de leur nais-
sance, échappé aux engouements et aux séduc-
tions du romantisme de 1830. Leur génération a
profité de la lassitude et de l'évolution survenues
à la suite de ce mouvement aussi généreux que
superficiel. Le peintre Leys, après en avoir subi
la séduction dans toutes ses conséquences, fut,
grâce à un tempérament robuste et à une con-
ception élevée de l'art, un des premiers à réagir
contre des tendances dont il avait été la victime.
Il chercha, au moyen d'une exécution plus ser-
rée, d'une mise en scène plus sûre et d'études
historiques plus approfondies, enfin par des
caractères plus fouillés, à pousser l'art flamand
dans une meilleure voie.
Leys se souvint qu'il était de la race des Fla-
mands, mais de ces Flamands antérieurs aux
peintres de la Renaissance ; de ceux qui, restés
chez eux, n'ont pas subi l'influence de l'Italie.
C'est à ces peintres qu'il alla demander conseil,
un appui, des exemples. Il se mit à regarder très
attentivement les panneaux des Van Eyck, des
Quentin Metsys, des Memling et d'autres pein-
tres de race germanique.
On sait combien le succès répondit à cette
nouvelle orientation. L'exemple de Leys ne fut
pas perdu pour plusieurs artistes richement doués
de la jeune génération : Joseph Lies, Hendricx,
les frères De Vriendt, suivirent, sans rien abdiquer
de leur personnalité, une voie sinon identique,
du moins parallèle.
Albrecht De Vriendt est un de ces peintres
qui, en conservant l'admiration la plus convain-
cue pour les vieux Flamands, cherchèrent, non
moins sincèrement, à rester fidèles à eux-mêmes.
Les partis pris, les excentricités voulues, les sou-
bresauts et le charlatanisme de la peinture ultra-
moderne n'eurent aucune prise sur lui. C'était un
travailleur, je viens de le dire; il appliqua son
généreux labeur à cultiver, à perfectionner, à
mettre en valeur le riche fond que la nature
avait déposé en lui. Il parvint à acquérir un ta-
lent vraiment historique ; c'est-à-dire qu'il réussit
à faire revivre sur la toile les scènes de l'histoire
par des conceptions que le spectateur était tenu
d'accepter.
C'est ainsi que l'on doit à Albrecht De Vriendt
une série de tableaux qui, tout en marquant les
progrès successifs de sa carrière, lui assureront
une place distinguée parmi les peintres de la se-
conde moitié de ce siècle : Jacqueline de Bavière
et Philippe le Bon (Musée de Liège), Charles-
Quint au couvent de St-Juste, l'Excommunica-
REVUE DR l'art CHRÉTIEN.
igol. — 1'^ LIVRAISON.
90
îRcbuc Ijc rSvt cl)vcticu»
tion de Bouchard d'Avesnes, le beau tableau du
Musée de Bruxelles: « les Flamands venant offrir
leurs hommages et leurs dons à Charles-Quint
enfant » et d'autres toiles de valeur.
Que dire maintenant de sa dernière grande
œuvre, les peintures murales de la salle de l'Hô-
tel de ville de Bruges que sa main défaillante
vient de quitter ? Œuvre poursuivie pendant plu-
sieurs années avec une persévérance soutenue,
longuement méditée, reprise toujours avec en-
train et joie; et que le peintre se réjouissait tant
de voir terminée au cours de l'année prochaine !
Œuvre de prédilection, dont il aimait à prévoir
tous les effets, à fixer d'avance tous les détails !
dont il aimait à parler avec ses amis et sur la-
quelle il revenait toujours ! Elle reçut son dernier
coup de pinceau, et c'est dans la salie de Bruges
que De Vriendt ressentit les premières atteintes
du ma! inexorable qui devait l'enlever si rapide-
ment.
S'il est profondément triste de penser qu'Ai-
brecht De Vriendt n'a pu mettre la dernière
main à ces peintures, il ne faudrait pas s'exagérer
les lacunes que sa mort va y laisser. Les parties
essentielles sont achevées, et l'ensemble est trop
avancé pour qu'il soit possible d'en dénaturer
l'aspect et le caractère.
Deux grands panneaux restent à peindre au
fond de la salle ; dans la pensée de l'artiste ils
devaient être exécutés pendant l'année 1901.
Heureusement les études pour ces deux pan-
neaux qui complètent le cycle des peintures
historiques sont très avancées. Albrecht De
Vriendt mettait grand soin à préparer son travail
par des esquisses très arrêtées, très achevées,
peintes à l'échelle déterminée, n'abandonnant
rien à une interprétation éventuelle. Ces esquisses
ont été peintes cette année de la main du maître.
Il suffira de les agrandir et de rester dans la
tonalité établie, pour qu'il n'y ait à redouter rien
de disparate dans cette partie de l'ensemble.
Tous les yeux et tous les vœux d'ailleurs se
tourneront vers un artiste de même valeur dans
l'espérance qu'il reprendra d'une main fraternelle
l'œuvre que le défunt n'a pu achever.
Albrecht De Vriendt était depuis une série
d'années directeur de l'Académie d'Anvers, et
son action comme « éducateur » n'a pas été sans
importance. Cependant, chose étrange, il avait
peu de confiance dans le système de l'enseigne-
ment académique. Avec son profond sens de l'art,
il savait que c'est la Providence, que c'est Dieu
qui crée les artistes, et que la qualité essentielle
de leurs œuvres, celle qui y donne le charme et
la valeur, est précisément la chose qu'on ne peut
leur apprendre.
Le directeur de l'Académie d'Anvers était très
amical, presque paternel avec ses élèves ; il ne
leur imposait ni ses vues, ni une manière déter-
minée. Il s'attachait à les diriger conformément
à leur génie personnel, cherchant surtout à les
préserver des écarts qui pouvaient les éloigner
du but à atteindre.
Albrecht De Vriendt est mort trop tôt pour
son pays qu'il pouvait encore enrichir d'œuvres
excellentes ; pour l'art sur lequel, par ses conseils
et par ses exem|)les, il pouvait exercer une in-
fluence si heureuse. Il est mort trop tôt pour ses
amis qui prisaient à leur valeur, les qualités de
son caractère ; il est mort trop tôt pour sa fa-
mille surtout, dont tous les membres connais-
saient les trésors de son cceur.
Cependant, il fut un heureux de ce monde ; je
dirai presque un enfant gâté de la fortune.
Il fut heureux dans son art, où chaque pas
accusait un progrès, et où les succès ne lui furent
ménagés ni dans sa patrie, ni dans la plupart
des pays de l'Europe. En Belgique, comme à
l'étranger, il a obtenu à. peu près toutes les
distinctions qu'un artiste peut rcver. Dans ses
travaux, il avait tout à côté de lui un autre artiste
dont les conseils, dictés à la fois par l'affection
fraternelle et par une haute intelligence de l'art,
devaient être d'autant plus précieux à ses yeux
qu'il pouvait à son tour les rendre à celui dont
il les recevait. Il avait trouvé une compagne
digne de lui, et déjà il se voyait entouré d'enfants
qui lui donnaient plus que des promesses. Enfin,
par un privilège bien rare, il avait conservé sa
vieille mère, qui, parvenue à un âge très avancé,
a gardé toute son intelligence. L'artiste n'en
parlait qu'avec une sorte de fierté, empreinte de
la plus filiale tendresse. Assurément, si l'on ne
peut se reporter qu'avec les sentiments d'une
condoléance émue vers ceux qui l'entouraient,
on peut dire du défunt avec le poète : « Douce
est la mort qui vient en bien aimant. »
Albrecht De Vriendt était âgé de 57 ans. Mais
il paraissait beaucoup [ilus jeune ; la vie débor-
dait en lui. Dans la conversation, surtout lorsque
les intérêts de l'art semblaient en jeu, ses yeux,
naturellement brillants, illuminaient son visage.
Son verbe, si franc, allait droit au but, expri-
mant la sincérité de ses convictions. L'on sentait
alors comme un souffle de vie et de jeunesse qui,
en général, n'appartient qu'aux robustes, destinés
à une longue carrière. Après avoir beaucoup
donné, l'artiste semblait beaucoup promettre
encore, et nul ne se doutait qu'il était prêt à
s'échapper vers ces régions où ne peuvent le
suivre que nos souvenirs et nos prières.
Jules Hflbig.
Imprimé par Desclée. De Brouwer & C'«, Bruges.
a^fflffira^îSî^Fîi^siWfss^^BS
BetJiie ne
l'Hrt chrétien
4> yauaiseant tniiiî le» dciij: uuiio. 'J^
44'"^ Hnnée. — 5^ Série.
X Comc XH (i,'- ûL- (a lodcctian). 4
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livraison. — ffîars 190|. ï^liS
Wi¥^^^^?nwîWiWi¥^^¥^WiWi^
lies Hctes Des Hpôtres, — Tapisseries d'après Bapl)aëL
PRÈS les nombreux tra-
vaux parus sur la plus
célèbre de toutes les
tentures de tapisserie,
il y aurait de ma part
témérité à publier une
nouvelle étude, si je
n'avais soin de me mettre à des points de
vue qui, à mon sens, n'ont pas été suffisam-
ment envisagés.
Je me propose d'examiner les cartons
de Raphaël comme modèles de tapisseries ;
de juger les tapisseries dans leur exécution
technique, et d'apprécier la tenture dans
son rôle décoratif.
Accessoirement je relèverai diverses ob-
servations notées au cours de mes lectures
des écrits sur les Acies des Apôtj'cs, et je
donnerai quelques détails sur l'état matériel
de la tenture, avant les réparations dont
elle est actuellement l'objet.
Je ne dissimule pas, — on le verra bien
du reste, — que sur divers points je suis en
désaccord avec les éminents savants qui
ont traité la question ; ces divergences ré-
sultent d'abord des points de vue spéciaux
auxquels je me suis placé, puis aussi de
certaines appréciations d'ordre général que
je ne puis partager, malgré mon respect
pour leurs auteurs.
Je dois dire aussi par quelles circons-
tances particulières j'ai été conduit à m'oc-
cuper des Actes des Apôtres.
Comme presque tous mes prédécesseurs
à la Direction de la Manufacture des Go-
belins, je me suis trouvé en pénurie de
modèles nouveaux, et pour ne pas laisser
les métiers en chômage, j'ai dû recourir à
des modèles anciens.
En 1890, j'ai conçu le projet de re-
prendre quelques pièces des Actes des
Apôtres.
J'ai été guidé dans ce choix par le motif
qu'aucune des nombreuses répliques de la
tenture n'est absolument complète ; dans
toutes il manquait le Tremblonent de terre,
REVUE DE l'art CHRÉTIEN.
I90I. — 2'"^ LIVRAISON.
92
3^e\)ur be [*art cbicttcu.
sans doute à cause de la moindre importance
de la pièce.
Au Vatican même, dans la suite originale,
la moitié inférieure d'EIyinas frappe' de
cécité fait défaut.
Au mobilier national de France, les séries
n'étaient pas entières ; la Conversion de
saint Paul, la Lapidation de saint Etienne,
le Tremblement de terre n'étaient pas re-
présentés (').
Je pensais qu'il serait intéressant et méri-
toire pour notre administration de pouvoir
montrer, soit dans les Expositions, soit dans
un musée de tapisseries, qui reste toujours
à créer, la seule suite des Actes avec ses dix
pièces, complète par conséquent.
Il est clair que la tenture n'eût pas été
homogène de fabrication, mais mieux valait,
à mon sens, subir cet inconvénient que de
présenter les Actes avec des lacunes.
Pour conduire ce travail technique autant
que possible dans l'esprit de Raphaël, ou,
comme on disait jadis en France, dans V in-
telligence des modèles, je me suis rendu à
Londres, au South Kensington Muséum.
On sait que Sa Majesté la Reine Victoria
a autorisé le dépôt dans ce musée des
modèles de Raphaël qui sont sa propriété
particulière.
Je n'ignorais pas que Rubens n'avait pu
acquérir, en 1630, pour le compte du roi
d'Angleterre, que sept des dix originaux,
que précisément les trois qui manquaient
étaient ceux que je voulais reproduire, et
qu'à leurs places au Muséum il n'y avait
que de fort médiocres copies modernes.
Mais je savais, par expérience, que pour
l'exécution en tapisserie d'une draperie
i.J'ai mis sur métier, en iSgi,\a. Conversion de saini
Paul et le Trcmbloiicnt de terre. La première pièce a cté
faite d'après une copie conserve'e à la cathédrale de Meaux
dont il sera question plus loin ; la seconde, d'après une
copie exécutée sur la tapisserie du Vatican, par M. Danger,
pensionnaire de l'Académie de France à Rome.
rouge par exemple, on peut s'inspirer d'une
draperie verte, puisqu'il ne s'agit, en définitif,
que d'observer la hauteur des couleurs, le
nombre des passages du grand clair à
l'obscur et les rapports des diverses colo-
rations entre elles.
J'avais déjà précédemment pris des notes
au Vatican sur les tapisseries mêmes, et
depuis que j'habite l'Italie j'ai à plusieurs
reprises complété mes observations.
Ce sont mes carnets que je vais dé-
pouiller ; c'est dire que de l'histoire de la
tenture et de la composition des pièces je
me bornerai au strict nécessaire, cette his-
toire ayant été faite dans les écrits sur
Raphaël et sur l'art de la tapisserie.
I
LE pape Léon X, guidé par le goût pour
les arts et le faste de tradition dans
la famille des Médicis, veut des tapisseries
pour décorer, à la chapelle Sixtine,la plinthe
qui, à partir de la balustrade de marbre,
règne au-dessous des fresques des parois
latérales et du mur du fond alors décoré de
trois peintures de Pérugin, qui malheureu-
sement ont été grattées pour faire place
au Jugement dernier. Le pape choisit pour
thème les Actes des Apôtres et confie à
Raphaël les modèles au nombre de dix. Il
lui commande en plus le Couronnement de
la Vierge ; cette tapisserie devait servir de
fond à l'autel ; c'est à tort qu'elle a été
parfois comprise dans la suite des Actes.
Raphaël exécuta les modèles en 1 5 1 5 et
en 1516, temps très court pour une si im-
portante entreprise, d'autant plus que simul-
tanément Raphaël travailla à la chambre de
X Incendie du Bowg au Vatican et à d'autres
peintures pour des particuliers.
Les modèles sont envoyés dans les
Flandres, à Arras, a-t-on cru, jusqu'à ce que
ILts Zttt^ Des :apôtre0.
93
M. Muntz ait démontré d'une façon abso-
lument décisive que ce ne fut pas à Arras
mais à Bruxelles que les Ac/es ont été
mis en œuvre (').
Malgré les preuves de M. Muntz, l'erreur
persiste non seulement dans le public mais
dans quelques écrits.
Une autre erreur, encore plus répandue,
veut que le mot Arazzo, usité en Italie pour
désigner la tapisserie de haute et de basse
lisse, date de l'époque où les Actes des
Apôtres sont arrivés à Rome, c'est-à-dire de
l'année 1519-
Il n'en est rien.
La chapelle Sixtine, construite sous le pape Sixte IV, en 1475, P-i' '-^«.o Pinte......
{Photographie d'ALlNAKi de Florence.)
J'ai trouvé ce mot dans un discours, pro-
noncé par Savonarole, en 1498, à la cathé-
I. E. Muntz, Raphaël : sa vie, son œuvre et son temps;
1886; — Les tapisseries de Raphaël au Vatican et dans
les principatix musées et collections de r Europe.
drale de Sainte-Marie des Fleurs de Flo-
rence.
S'élevant contre le luxe, le fougueux
Dominicain signale «/? mura délie case loro
copcrte darazzi e di tappeti e insinie aile
mure tutte ornate ».
94
3Rebue lie T^it cl)rctien.
Savonarole parlait au peuple dans le lan-
gage usuel, le peuple connaissait donc le
mot arazzo, — sans doute déjà longtemps
en usage en raison des rapports commer-
ciaux entre Florence et les Flandres (').
La prédication de Savonarole n'eut pas
du reste des résultats efficaces en ce qui
concerne le luxe et l'emploi des tapisseries,
puisque les Médicis s'en servirent pour
couvrir les mulets de leurs équipages ; je
lis, en effet, dans l'inventaire du duc Cosme
ler, dressé en 1553 au Palais de la Seigneu-
rie, la mention suivante : « Otto panni d'à-
razzo con l'arme ducali a uso di coperte da
niula. »
Evidemment ce mot arazzo n'est pas
juste, puisqu'Arras n'a été que l'un des
centres renommés de la fabrication des
tapisseries, mais enfin il vaut mieux que les
expressions en usage dans les autres pays.
En Angleterre tapestry, en Allemagne
tapete s'appliquent à des tissus de diverses
espèces. En France le mot tapisserie est
donné non seulement à la haute et à la
basse lisse (°), mais au travail sur canevas
au petit point, à certaines broderies et
même aux étoffes et cuirs qui tapissent les
murailles.
I. Au moment de mettre sous presse, le savant M. Jo-
doco del Badia, des Archives de l'État à Florence, veut
bien me faite savoir qu'il a trouvé le mot arazzo dans
plusieurs documents antérieurs à la prédication de Savo-
narole en 1498.
Il existe dans une lettre écrite de Valence (Espagne),le
28 avril I4t6, par Lorenzo di Matteo Strozzi à sa mère,
Alessandra Macinghi, à Florence.
On le lit également dans un document où il est ques-
tion d'une renime: L' Histoire de Sansnri^ay d'une suite: /.rt
Faille de Pliaéton.
La lettre datée <le Bruges, 22 juin 1448, est adressée à
Giovanni di Cosimo de' Medici, à Florence; elle porte la
signature : tuo Fruoximo in Brugia.
2.0nsaitque lemot lisse vientde liciciiim, on écrit aussi
lice\ c'est l'orthographe lisse qui se trouve dans l'édit de
Louis XIV sur la création de la manufacture royale des
meubles de la couronne. On sait aussi que la haute lisse
se fait sur un métier vertical et la basse lisse sur un
métier horizontal.
Delà des confusions qui datent de loin,
car dans les plus anciens écrits il en est de
même, ce qui rend difficile l'histoire des
origines de la tapisserie proprement dite.
Avec le mot arazzo on sait du moins à
quoi s'en tenir.
II
LES dix pièces des Actes des Apôtres
ont reçu des dénominations diverses,
contradictoires, absurdes en quelques cas:
à côté de variantes admissibles, car elles
ne peuvent donner lieu à aucun doute sur
le sujet, il est des titres qui dénotent
l'ignorance du rédacteur des inventaires;
le plus souvent ce ne sont que des scribes
qui ne voient dans un objet d'art qu'un
article de comptabilité, mais alors leurs
chefs devaient les surveiller ; il est utile, je
crois, de signaler ces bévues.
La PccJie niiracitleiise.
On dit aussi la Navicellc ; les deux titres
sont justes. Apparition de [ésus-Christ à
saint Pierre n'est pas suffisamment expli-
cite.
La Vocation de saint Pierre.
On dit aussi Paissez mes brebis ; Conduis
mon troiipeau.Y^t titre Saint Pierre recevant
les clefs du Paradis peut, en certains cas,
donner lieu à erreur, car il est des répli-
ques de la tapisserie où les clefs ne figurent
pas.
La Guérison du paralytique.
On trouve aussi le Temple ; saint Pierre
et saint Jean ^U('rissa7it le paralytiqtie à
la porte du Temple ; quelquefois possédé
remplace paralytique, et fésns-Christ ou
saint Pliilippe sont à la place des apôtres
Pierre et Jean.
La Mort d' Ananie.
On lit aussi \ Histoire dAnanie ; la Mort
d' Ananie et de Saphire; la Punition d' Ana-
nie et de sa femme. Dans un inventaire
3le0 :acte0 des 3lpôtre2^,
95
administratif, cette pièce est marquée la
Guéi'ison dti possédé ; cette erreur ne serait
pas croyable, si le pointage ne démontrait
que c'est bien de la Mort d Ananie qu'il
s'agit.
La Lapidation de saint Etienne. Les
variantes de détail n'ont pas d'importance.
La Conversion de saint Paul, même ob-
servation.
Elynnas frappé de cécité. Ici on trouve :
Saint Paul interrogé devant le p7'OConstil ;
Saint Paul convertissant le proconsul Ser-
giiis ; ces titres s'expliquent à la rigueur,
mais ce qui est singulier, c'est l'erreur com-
La Vocation de saint Pierre. (Photographie cI'Alinari oe Florence.)
mise par Prud'hon, l'un des peintres les
plus distingués de France ; étant à Rome
en 1785 et jugeant les Actes, il ècrhà'Ely-
mas : « Saint Paul guérissant un aveugle en
« présence d'un consul ou tribun ou quel-
« qu'autre romain en dignité dont j'ignore
« le nom. »
Raphaël avait pour thème le texte sui-
vant des Actes des Apôtres :
« Elymas le magicien, ayant tenté de
« détourner de la foi le proconsul Sergius,
« homme sage et prudent, saint Paul ayant
« les yeux fixés sur lui, lui dit : « Homme
« rempli de toutes sortes de ruses et de
« perfidies, fils du diable, ne cesseras-tu
« point de pervertir les voies du Seigneur
« qui sont droites.'' C'est pourquoi voici dès
« maintenant la main du Seigneur sur toi,
i et tu seras aveugle et tu ne verras pas le
« soleil jusqu'à un certain temps.
« Et aussitôt l'obscurité et les ténèbres
<( tombèrent sur lui ; et allant çà et là il
96
9Rc\Juc Dr rSlrt cljrcticu.
« cherchait qui lui donnerait la main. »
Prud'hon, il est vrai, n'a vu que la
partie supérieure de la tapisserie, mais
l'expression du visage d'Elymas marque
bien « et aussitôt l'obscurité et les ténèbres
tombèrent sur lui ». Et puis, n'est-il pas
naturel qu'avant de juger comment l'artiste
a interprété un texte, on prenne connais-
sance de l'écrit ?
Saint Paul et saint Barnabe à Lystre.
Variantes : le Sacri/icc du veau ; les Is-
raélites retombant dans r idolâtrie; le Sacri-
fice de saint Paul ; Saint Paul déchiratit
ses vêtements.
Saint Paul à V Aréopage.
On dit aussi Saint Paul à Éphèsc; dans
l'inventaire de Léon X, cette tapisserie
est désignée d'une singulière façon : Saint
Paul prêchant à l'aveugle qui recouvre la
vue, avec une idole d' Hercule qui soutient
le ciel dans la bordure. La bordure est tou-
jours contre Saint Paul à l' Aréopage ; l'er-
reur de l'inventaire ne s'explique pas, sur-
tout dans un document aussi officiel.
Saint Paul en prison.
Variante : Le Tremblement de terre.
Après les inventaires, voici quelques-
unes des confusions et des erreurs des
écrivains.
Ouatremère de Ouincy, dans son cha-
pitre sur les tapisseries d'après Raphaël ('),
ne cite pas la Conversion de saint Paul, la
Lapidation de saint Etienne et Saint Paul
en prison, et ne fait pas de distinction entre
la suite des Actes des Apôtres et les autres
tapisseries d'après Raphaël ; on ne peut
faire fond sur cet écrivain, du moins en ce
qui concerne les Actes.
Le marquis de Laborde, dans sa Renais-
satice des arts à la cour de France, met à
I. Quatremère de Quincy, Histoire de la vie cl <ies
œuvres de Raphacl. 1824.
onze le nombre des pièces des Actes des
Apôtres. Cette erreur a été commise par
d'autres auteurs, soit qu'ils aient compris
dans les Actes le Couronnement de la Vierge,
qui cependant n'est arrivé à Rome qu'en
1537, soit qu'ils aient inexactement inter-
prété une note de paiement publiée par
Gaye dans son Carteggio, où il est écrit
que, le 21 avril 1518, on a acquitté les frais
de transport de onse tapisseries venant des
Flandres par Lyon ; à cette date l'envoi ne
pouvait contenir que sept tapisseries des
.4^/^j,lestrois autresn'étaient pas terminées.
Passavant (') a, selon mon opinion, été
beaucoup trop affirmatif dans ses attribu-
tions des bordures aux diverses tapisseries ;
je traite plus loin en détail la question des
bordures.
III
SEPT pièces des Actes arrivent à
Rome en i 5 i S.
La Mort d' Ananie, Saint Paul à l' Aréo-
page, le Tremblement de terre sont reçues
l'année suivante.
Le 26 décembre 15 19, jour de la fête de
saint Etienne, Léon X inaugure la tenture
à la Sixtine.
Dans quel ordre les tapisseries étaient-
elles disposées contre les trois parois de la
chapelle ?
Aucun document contemporain ne four-
nit de renseignement ; nous savons seule-
ment, à cause de leurs dimensions, que la
Lapidation de saint Etienne était placée sur
la paroi de gauche, au fond, et que le Trem-
blement de terre occupait, à droite, l'étroit
espace qui sépare la tribune des chanteurs
de la balustrade.
Bunsen (°) cependant, dans la Descrip-
1. Passavant, Raphacl d Urhin, 1839 et 1856.
2. Platner, Bunsen, Gherard Roestell, Bcschreibung
dcr Stadt Rome. Ouvrage collectif dont le premier vo-
lume est de 1829 ; le volume où Bunsen s'occupe des
Actes est de 1832.
3le0 :^cte0 îie0 i^pôtres.
97
tion de la Ville de Rouie, a essayé de déter-
miner les places ; l'auteur a fait autorité,
en ce sens que ce qu'il a écrit sur les Actes
a été accepté par Passavant et que Passa-
vant, plus connu que Bunsen, a été accepté
par presque tous les auteurs qui ont écrit
sur le sujet.
Voici ce que dit Bunsen :
A partir de la balustrade, à gauche :
Ananie,
La Gîiéi-ison,
Saini Etienne,
La Vocation.
A droite:
Le Tre^nblenient de terre,
L' Aréopage,
Lystre,
Elymas.
La mort d'Ananie. (Photographie d'Aur.
ce.)
Sur les deux côtés de l'autel :
La Conversion de saint Paul,
La Pêche miraculeuse.
Pour cette répartition Bunsen s'appuie
simplement sur une hypothèse; il suppose
quon a dû placer, sauf pour la Lapidation
de saint h tienne, ces tapisseries dans un
ordre rationnel, c'est-à-dire grouper d'un
côté les faits relatifs à saint Pierre et de
l'autre les faits relatifs à saint Paul.
C'eût été en effet très logique, mais rien
ne démontre qu'il en a été ainsi; on peut
même faire observer que la division loo-j-
que des tapisseries n'a jamais été suivie ul-
térieurement dans les diverses salles du
Vatican ornées par les tentures.
Il est regrettable que Bunsen se soit
abstenu de donner les dimensions exactes
3Rcbue ÏJe TSlrt cbvctien.
des pièces et celles des panneaux de la plin-
the. C'eût été un argument solide en faveur
de son hypothèse; mais l'auteur se plaît
dans les suppositions et les à peu près très
à la mode de son temps, et se contente
de dire que chaque panneau a environ vingt
pieds allemands de long (ce qui fait 6
mètres 22), sauf le petit panneau de gauche
qui a environ un tiers de moins que les
autres.
L'hypothèse de Bunsen n'a pas eu du
reste de conséquence, puisque, je le répète,
elle n'a pas été admise par le Vatican pour
les dispositions adoptées plus tard; ce qu'il
dit des pilastres et des bordures sera appré-
cié plus loin.
Les tapisseries ne sont pas restées long-
temps à la Sixtine.
En I 5 2 r , elles sont enlevées et mises en
gage.
En 1527, pendant le sac de Rome, elles
disparaissent en partie; la moitié inférieure
é'E/ymas est coupée et sans doute brûlée
pour recueillir l'or de la trame.
On veut que le pape Clément VII eut
l'intention de les racheter à Lyon, où elles
étaient en 1530, et que le pape Paul 111
(pontificat de 1535 à 1550) les fit disposer
dans diverses salles du Vatican, et qu'il
prit l'habitude, maintenue pendant long-
temps, de les faire tendre au dehors de la
basilique de Saint-Pierre pour la proces-
sion de la Fête-Dieu.
D'un autre côté, Vasari, dans sa vie de
Raphaël, écrit: « Si conserva ancora nella
capella papale. » Or, la première édition de
Vasari est de 1550; il avait été à Rome
vers 1529, puis en 1538, en 1544 et en
1546, c'est-à-dire au moment où il rédigeait
son ouvrage; en 1550, le pape Jules, qui
le connaissait particulièrement, l'invite à
assister à son couronnement.
Vasari est de nouveau à Rome dès
l'avènement du pape Pie V, en 1565; sa
seconde édition paraît à Florence en 1568
et contient, comme la première, la mention
« si conserva ancora nella capella papale »;
l'auteur ne fait pas d'allusion au rapt de
1527, nia la restitution faite par le con-
nétable de Montmorency, en 1553, au pape
Jules III de deux au moins des pièces en-
levées.
En 1798, la tenture est de nouveau
volée, puis mise en vente à Paris par des
brocanteurs.
Enfin, en 1808, le pape Pie VII put réu-
nir toutes les pièces au Vatican, sauf la
partie inférieure à! Elymas.
Vers 18 18, Pie VII les fit placer, avec
d'autres tapisseries, dans les appartements,
dits de Pie V, situés au-dessus de la cha-
pelle Sixtine.
Elles sont mises là sans ordre rationnel
et mêlées par des pièces étrangères aux
Actes.
Le pape Grégoire XVI les fit établir
dans la Galerie où elles sont encore avec
les tapisseries de la Sciiola nuova, ainsi
désignées par opposition à" la Scuola vecchia,
terme réservé aux Actes.
Dans cette galerie des tapisseries, les
Actes étaient disposés comme il suit :
x'I ofauche en entrant :
La Mort d'Ananie,
La Vocation de saint Pierre,
Saint Panl à [Aréopage,
Saint Patcl et saint Barnabe à Lystre.
Adroite en entrant :
La Conversion de saint Panl,
La Gjiérison du paralytique,
La Pêche miraculeuse,
La Lapidation de saint Etienne,
Saint Paul eji prison.
iLtQ ^ctcg i)e0 :^pôtrejs^.
99
Sur le côté droit, plusieurs tapisseries qui
ne font pas partie des Actes, étaient inter
calées dans la suite, comme dans les appar-
tements de Pie V.
La partie supérieure à'Elymas était hors
de la galerie, au-dessus de la partie des salles
des cartes de géographie.
L'ordre n'est plus le même que dans les
appartements de Pie V. mais il n'est pas
plus logique.
J'ai mentionné avec détail les deux seules
anciennes dispositions qui nous sont con-
nues, parce qu'elles ont de l'intérêt pour les
attributions des bordures.
Saint Paul et saint Barnabe à Lystre. (i'Iiulugrapliic d'ALi.NAia de tluieai.ej
IV
APRES avoir servi à la tenture de la
Sixtine, les modèles des tapisseries
et des bordures restèrent dans les Flandres,
sauf la Conversion de saint Paul, en la pos-
session, dès 1521, du cardinal Grimani à
Venise ; ce qui indique que les premières
répliques de cette pièce ont été faites
d'après une copie.
On ne comprend pas comment ces mo-
dèles ont été ainsi abandonnés. Peut-être
Léon X a-t-il eu l'intention de les faire
remettre sur les métiers .'* Mais après lui le
Saint-Siège, dont ils étaient la propriété,
aurait dû les réclamer.
KKVUE DB L AKT CHKËTIEN.
1901. — 2™^ LIVRAISON.
lOO
3Rebttr tie T^rt cbrétten.
Il n'entre pas dans mon cadre de relater
même les principales répliques de la tenture
exécutées dans les Flandres et ailleurs, soit
sur les originaux, soit sur des copies faites
d'après les modèles ou d'après des tapisse-
ries (') ; ce qui n'est pas douteux, c'est que
les cartons qui avaient servi à Van Aelst
sont restés plus d'un siècle dans les Flan-
dres, et que, durant cette période, trois
cartons et les bordures ont disparu.
En 1630, ils arrivèrent en Angleterre,
découpés par bandes, dans le sens vertical,
piqués de coups d'épingles, usés en partie,
repeints par endroits, fatigués par le service;
quelques-uns furent envoyés à la manufac-
ture de tapisseries de Mortlake pour être
mis en œuvre.
Puis on rassemble les morceaux ; l'opéra-
tion fut généralement bien faite ; cependant
quelques bandes n'ont pas été ajustées avec
assez de soin.
Les modèles ainsi reconstitués furent
placés dans divers palais, notamment à
Hamptoncourt dont ils prirent le nom.
Grâce à S. M. la Reine Victoria, ils sont
maintenant dans un musée public.
Là, comme précédemment, ils ont été
l'objet de nombreuses études. Ce n'est pas
ici le lieu de passer en revue même les plus
sérieuses critiques qui ont été faites(''); il suf-
fira de dire que tous les auteurs admettent
la collaboration de Penni, de Jean d'Udine,
1. Les répliques ont été mentionnées dans les ouvrages
de Passavant, de Miintz ; Mgr Barbier de Montault, dans
son hmentaite dis tapisseries de hitiite-lisse à Rome, a
marqué deux pièces : la Vocation et I.ystre, qui sont en
double au Vatican, mais qui ne sont pas de l'atelier de
Van Aelst.
2. En 1891 on a exposé à Paris une suite de toiles
peintes dites les toiles de Loukhmanott' du nom du mar-
chand russe qui en avait été propriétaire ; on a publié en
même temps un travail du professeur Schevyreff, de
l'université de Moscou, ayant pour but de prouver que ces
toiles étaient les modèles originaux des Actes des Apôtres.
Je fus chargé par le ministère des Beaux Arts de France
de faire un rapport sur les toiles. Je suis donc tenu sur
la question à la discrétion professionnelle.
de Jules Romain, non seulement pour les
colorations mais pour une partie des com-
positions et des figures. Quelques écrivains
ont été entraînés par une mode de plus en
plus en usage, qui consiste à enlever des
ouvrages à un artiste pour les donner à un
autre : M. Hermann Dollmayr, dans son
Rafaels JVerksfaefic, déclare carrément et
sans donner de preuve à l'appui que la
Vocatio7i de saint Pierre et la Pêche mira-
ciileîise ne sont pas de Raphaël mais de
Penni dit Fattorino ; l'auteur avoue qu'il
n'a pas eu le temps d'aller étudier les mo-
dèles à Londres et les tapisseries au Vati-
can !
Il, n'a vraiment pas eu de chance dans
son choix : les deux pièces qu'il cite sont
parmi les meilleures de la série.
Que dans les Actes il y ait des inégalités,
c'est évident : la Conversion de saint Paul
et la Lapidation de saint Etienne, sauf pour
la figure du saint, sont médiocres, on ne
peut le méconnaître.
Que Raphaël se soit fait aider, ce n'est
pas contestable ; le temps lui aurait manqué
pour les achever seul. Je crois que dans
l'état de repeint où sont les modèles, il
est bien hasardé de dire quelles sont les
parties où ont mis la main Penni, Jean
d'Udine et Jules Romain.
Après tout, peu importe.
Raphaël a accepté la commande de
Léon X ; il a touché le prix de son travail;
si dans les cartons il en est d'une valeur fort
contestable, c'est qu'il lésa jugés dignes de
lui ; il a couvert de son grand nom tous ses
collaborateurs; cela suffit, il est responsable.
Il n'est pas possible de parler des cartons
sans citer Vasari.
« Similmente venne volontà al papa di
« far panni d'arazzi ricchissimi d'oro e di
'? sera in filaticci ; perche Raffaello fece in
« propria forma e grandezza tutti di sua
ites Ztttts îie0 apôtres.
lOI
« mano i cartoni coloriti, i quali furono
« mandati in Flandra a tessersi, e finit! i
« panni vennero a Roma. »
De Giovanni Francesco Penni, dit II Fat-
tore, Vasari rapporte que Raphaël le prit
chez lui avec Jules Romain et qu'il tenait
les deux comme ses fils. Penni dessinait
dans la manière de Raphaël à s'y mépren-
dre comme en font foi les dessins du /l'ôro
de Vasari ; il travailla aux loges avec Gio-
vanni da Udine et Perino del Vaga ; il
excellait dans la peinture à l'huile, à la
fresque et à la détrempe, « onde fu di
« grande aiuto a Raffaello a dipingnere
La Gtiérison du paralytique. (Photographie d'.^LiNARi de Florence.)
« gran parte de' cartoni dei panni d'arazzo
« délia capella del papa e del consistoro e
« particolarmente le fregiature ».
Donc, d'une part, Vasari assure que Ra-
phaël a fait les cartons à la grandeur de
l'exécution et les a peints de sa propre
main, et d'autre part, il laisse entendre que
Penni a été d'un grand secours à Raphaël
en peignant une grande partie des cartons,
et particulièrement les bordures.
Il y a contradiction, c'est clair, mais
seulement pour la mise en couleur ; nulle
part Vasari laisse entendre que Raphaël a
eu des collaborateurs pour les composi-
tions.
I02
îRcbuc De l'^vt cbrcticn.
V
CE n'est pas en critique d'art, ni en
esthète que j'ai été étudier les car-
tons de Raphaël, mais en homme pratique,
et au seul point de vue de leur fonction
essentielle, qui était de servir de modèles
de tapisserie.
Avant d'entrer dans quelques détails, je
dois expliquer la signification des termes
que je vais employer ; c'est nécessaire,
parce que ces termes ne sont pas compris
par tout le monde de la même façon. Les
mots sont ceux qui ont été adoptés par
l'illustre Chevreul qui, de 1824 a 1883, fut
directeur des teintures aux Gobelins ; ils
sont restés dans l'usage de la manufacture.
Les tons d'une coîdcnr sont les différents
degrés d'intensité dont cette couleur est
susceptible, suivant que la matière qui la
représente est pure ou simplement mélan-
gée de blanc et de noir.
La p'amine est l'ensemble des tons d'une
même couleur. La couleur pure ou franche
est le ton normal de la gamme: une gamme
peut être composée d'un très grand nombre
de tons, cent, si l'on veut, et même plus.
Dans la pratique de la tapisserie une gam-
me d'une quarantaine de tons est regardée
comme très forte ; à mon sens, une gamme
de dix tons du clair à l'obscur est suffisante
en tapisserie. Dans une gamme bien faite
les tons doivent être gradués de façon à
se tenir tous à égaie distance les uns des
autres.
Les nuances d'une cou/eur sont les modi-
fications que cette couleur éprouve par
l'addition d'une autre couleur qui la change
sans la ternir.
La gamme rabattue est celle dont les tons
clairs comme les tons foncés sont ternis
par du noir.
Dans les parties les plus saines des car-
tons de Raphaël, c'est-à-dire dans celles qui
paraissent n'avoir pas été repeintes, ou qui
l'ont été avec intelligence, on remarque
l'absence de gammes rabattues.
Du grand clair à l'obscur d'une draperie,
il y a le moins possible de tons intermédiai-
res et les deux extrêmes ne sont jamais aux
deux bouts de la gamme.
Supposons une gamme de dix tons, le
numéro i correspondant au ton le plus clair
et le numéro lo au ton le plus foncé. Ra-
phaël n'a pas été au delà du n° 3 pour le
clair et du n° 8 pour le foncé ; pour le pas-
sage il n'a pas employé tous les tons repré-
sentés par les numéros 4-5-6-7.
J'ai noté des draperies à trois tons seule-
ment y compris le clair et l'obscur de la
même couleur; c'est précisément la manière
de Massacio dans la chapelle Brancacci à
Florence, où Raphaël a étudié. Dans
d'autres j'ai compté quatre tons de la même
couleur pour l'obscur et la demi-teinte et
deux tons d'une autre couleur pour les
parties claires.
Ce parti de mettre les lumières dans une
couleur différente est assez fréquent ; dans
Saint Paul à l' Ai-copage, par exemple, une
draperie verte dans le creux des plis passe
au jaune franc dans les parties saillantes.
Le jaune n'est pas venu là pour simuler un
tissu à reflets, mais par procédé décoratif
d'un effet certain dont on trouve de nom-
breux exemples dans les mosaïques.
Les tuniques des vieillards de l'Apoca-
lypse, dans l'arc triomphal de Galla Placidia,
du V^ siècle, à Saint- Paul hors-les-murs,
à Rome, sont bleues dans le fond des plis
et blanches en avant.
On observe dans beaucoup de mosaïques
des traits d'or dans les vêtements. Ce n'est
nullement pour imiter des tissus brochés
îles ^cte0 Des :^pôtres.
103
d'or, puisque l'or est également employé
dans les accessoires, les meubles et même
les parquets et les terrains, c'est tout sim-
plement pour accentuer les lumières.
Raphaël a donc visiblement traité ses
cartons avec une grande sobriété ; on peut
même dire que.dans certains cas, il a poussé
sa sobriété trop loin.
Ainsi pour les carnations il n'a employé
que quatre colorations: l'une pour les vieil-
lards et les malades, une autre pour les
hommes adultes, une troisième pour les
Saint Paul à 1 Aréopage. (PI
femmes et la quatrième pour les enfants ;
encore celles des femmes et des enlants sont
très voisines; comme pour les draperies les
tons sont pris dans lamoyenne de lagamme.
La même observation se fait dans d'au-
tres ouvrages de Raphaël, surtout dans les
carnations des personnages de la Sainte
Cécile du musée de Bologne. Seulement
là les tons, vraiment par trop pareils, sont
otogr.iphie d'Ai INAKI de Florence.)
pris dans les numéros accentués de la
ofamme ; cette uniformité nuit au tableau.
Dans certaines carnations des Actes on
trouve, comme dans les draperies, des
coups de pinceau trop énergiques et posés
avec une sorte de brutalité; sans aucun
doute ce sont des retouches de quelque
iinbrattatore barbouilleur.
Je n'ai découvert dans aucun des cartons
104
ISitWt île r^rt cf)rcticn.
l'intention de Raphaël de voir introduire
dans le tissu de la soie et de l'or.
Si c'est à dessein qu'il n'a pas marqué
les places de l'or et de la soie, cela prouve-
rait, à mon sens, que Raphaël a eu, soit par
intuition, soit à la suite d'observations, un
très juste sentiment de ce que doit être une
interprétation textile.
Je ne crois pas avec Passavant que les
étoiles d'or de la robe du Christ dans la
tapisserie la Vocaiioti de saint Pierre soient
de l'invention de Raphaël et que par l'usage
elles aient été effacées du modèle; la pein-
ture n'en porte pas la moindre trace; on ne
les retrouve pas dans une réplique de la
tapisserie qui est dans la même galerie du
Vatican.
Depuis bien longtemps il est dans l'usage
de ceux qui veulent vanter une tapisserie
de faire remarquer « qu'elle est tissue de
soie et d'or»; cette prétendue qualité est, à
mes yeux, un défaut.
Une tapisserie, comme une peinture, doit,
autant que possible, résister à l'action que
le temps exerce sur ses colorations ; si la
résistance des couleurs est inégale il s'en
suivra nécessairement une rupture de l'har-
monie générale.
Hé bien, alors même que la tapisserie est
exclusivement tissue de laines, la rupture
a lieu après que la pièce 2. fait son jcjc,
comme on dit dans les ateliers.
J'ai à cet égard des notes nombreuses et
probantes ; il me serait facile de citer des
tapisseries modernes où les laines ont subi
des altérations de couleur quelques an-
nées après l'achèvement de la pièce, et
quelquefois même pendant que la pièce
était encore sur métier.
Pour ne pas faire le procès,qu'elle mérite
bien cependant, à la chimie tinctoriale de
notre temps, car est elle inférieure aux
procédés des Coptes du commencement
de notre siècle, et à ceux des Flamands du
beau temps, je vais analyser une tapisserie
d'après Le Brun, tissée aux Gobelins en
1676: l'Audience donnée par /e Roi Louis
XIV à Fontainebleau au carditial Chigi,
légat dîc pape, de la suite célèbre :
\J Histoire du Roi.
En comparant l'envers de la tapisserie,
toujours tenue à l'abri de la lumière, avec
l'endroit, et en admettant la gamme de dix
tons, j'ai constaté que les violets et les
bleus avaient baissé de trois tons, les car-
nations, les jaunes et certains rouges de
deux tons, alors que les orangés, les verts,
les gris et certains rouges sont restés à la
hauteur primitive.
Et qu'on remarque bien que \ Audience
est parmi les tapisseries des Gobelins les
mieux conservées et que sous Louis XIV
l'atelier de teinture était infiniment mieux
dirigé que bien souvent depuis cette
époque.
La fugacité de certaines couleurs, la
résistance d'autres couleurs est chose con-
nue depuis qu'on teint des matières textiles,
mais jamais les peintres de modèle de
notre temps n'ont voulu tenir compte des
observations qu'on leur a faites à ce sujet.
Le chimiste Roard, directeur de la tein-
ture aux Gobelins, de 1803 à 1816, a écrit
à ce propos, en parlant des peintres de
l'école de David : « Je leur ai fait observer
(( que pour nous rapprocher le plus possible
« de leurs tableaux, nous ne pouvions don-
« ner aux tons si clairs qu'ils demandaient
<i la même solidité et la même durée à
« l'air que celles des demi-teintes et des
€ couleurs foncées ; qu'après un temps assez
« court, l'harmonie qui existait primitive-
« ment serait détruite et qu'enfin par leur
« faute on dirait plus tard que l'art de la
ILtô ZtttQ Des :^pôtrcs.
105
« fabrication des tapisseries a rétrogradé
« malgré les perfectionnements nouveaux
«et très importants apportés, tant dans
« cette même fabrication, que dans les tein-
« tures. Cependant on ne tint aucun compte
« de ces motifs si positifs; l'administration
« des Gobelins fut obligée de céder au dé-
(( sir de ces grands peintres et de se con-
« former à leurs exigences. ))
En ce qui concerne la résistance des
couleurs et les prétentions des peintres,
Roard a parfaitement raison; il se trompe
étrangement lorsqu'il parle des perfection-
nements dans la fabrication des tapisseries
et des progrès dans l'art de la teinture,
dans la première période duXlX^ siècle.
Les Gobelins étaient depuis longtemps,
à ce double point de vue, bien au-dessus
des anciens ateliers flamands et français.
Tous ceux qui ont observé les degrés de
résistance des laines et des soies teintes,
ont constaté qu'à couleurs égales et à con-
ditions d'âge et de milieu pareilles, les- soies
teintes perdent plus vite leur intensité que
les laines : si, par exemple, la laine descend
de trois tons sur dix, la soie descendra de
cmq a six tons.
Sans doute l'introduction de
la soie
Élymas frappé de cécité- (Photographie d'AnNARl de Florence.)
donne, dans les commencements, à la tapis-
serie plus de brillant, mais l'éclat n'a pas
de durée; par suite l'harmonie des colora-
tions, si nécessaire cependant, sera rompue,
et le dommage sera en raison de la quan-
tité de soies mêlée aux laines.
On peut en dire autant de l'usage des
fils d'or; l'or se ternit vite et le fil si écla-
tant au début prend un aspect métallique
terne et indécis.
Du reste l'expression yf/î d'or n'est, très
généralement, que de style, ces fils étant
d'habitude des brins de soie recouverts.
La dissection et l'analyse des fils d'or de
la tapisserie \' Ajidience du légat a donné
pour un poids de 494 les résultats suivants:
Soie, 157 — ^ argent, 310 — cuivre, 024 —
or, 003.
Je n'ai pu faire analyser les fils d'or des
Actes, mais certainement ils ne sont pas de
bon aloi, et c'est fort heureux.
On croit que la partie inférieure ^Elymas
frappé de cécité a été brûlée dans l'espoir
de recueillir l'or dont était tissée l'inscrip-
tion du socle sur lequel est posé le siège
du proconsul; la fonte a sans doute donné
des résultats à peu près nuls, après quoi on
aura renoncé à l'incinération; le même fait
est arrivé plus tard, lors du rapt, en 1798,
des tapisseries de la imova scuola
io6
l^tWt ïie rart cljvttien.
On sent ma conclusion.
La meilleure tapisserie est celle qui est
faite exclusivement avec de la laine et avec
le moins de couleur possible.
Je sais bien que je prêche dans le dé-
sert en un temps où, les défauts en art étant
souvent pris pour des qualités, bien des
gens donnent la préférence aux tapisseries
qui présentent avec des carnations déco-
lorées, des couleurs décomposées, des tons
heurtés et une accumulation de fils métal-
liques cuivreux introduits dans le tissu sans
raisons plausibles; toutes ces incohérences
sont pour les amateurs de cette école les
bienfaisants effets de la patine du temps !
Voyons maintenant le parti que les tapis-
siers des Flandres ont tiré des modèles de
Raphaël.
VI
Au cours de l'année 15 15, les modèles
sont confiés aux ateliers de Van Aelst
établi à Bruxelles et réputé le meilleur
tapissier du temps.
Il faut croire cependant qu'à Rome on
n'était pas sans quelques craintes sur les
capacités de Van Aelst, car Bernard Van
Orley, élève et ami de Raphaël, fut chargé
de suivre les travaux.
On a dit que Michel Coxcie fut adjoint
à Van Orley ; c'est évidemment une erreur.
Coxcie étant né en 1499, était beaucoup
trop jeune ; la méprise vient sans doute de
ce que Coxcie était élève de Van Orley et
dans son atelier au moment du tissage des
tapisseries.
A la fin de l'année 1518, la Péc/ie mira-
culeuse, la Vocation de saisit Pierre, la
Lapidation de saint Etienne, !a Conversion
de saint Paiil, la Guérison du paralytique,
Elymas frappé de cécité. Saint Pajil et saint
Barnabe à Lystre, étaient sur les murs de
la Sixtine. Les trois autres pièces arrivèrent
à Rome l'année suivante.
Nous ne savons pas dans quel mois de
l'année 15 15 les tapisseries ont été mises
sur métiers ni dans quels mois des années
1 5 1 8 et 1 5 1 9 elles ont été levées cependant
la durée du travail peut être estimée ap-
proximativement à trois ans.
Pour réaliser la tenture dans ce délai, il
a fallu nécessairement monter chaque pièce
sur un métier à part ; il est même probable
que les bordures ont été tissées sur des
chaînes spéciales.
Les modèles, sans bordures, ont été pour
les besoins de la fabrication, coupés en
bandes verticales à raison de quatre à cinq
par pièce ; par suite le tissage a eu lieu
dans le sens horizontal ; comme dans la
verticale les modèles ont 3 m. 65 cm., c'est
sur cette limite que les tapissiers ont pu se
mouvoir en largeur, ce qui donne trois
ouvriers par métier ; à moins de cas excep-
tionnels, il faut d'habitude à chaque tapis-
sier un peu plus d'un mètre pour travailler
sans être gêné dans ses mouvements.
Van Aelst a donc dû mettre à l'ouvrage
environ vingt-cinq à trente tapissiers si-
multanément et, quelque bien monté que
pouvait être son atelier, il est fort probable
qu'il n'avait pas à sa disposition un pareil
nombre de tapissiers de première qualité;
cela se voit bien au surplus. Il y a dans
l'exécution des différences très sensibles
d'une pièce à l'autre et même dans les
diverses parties d'une même pièce.
Le temps approximatif de la durée du
tissage, le nombre probable d'ouvriers
employés sur chaque métier ne sont pas
suffisants pour apprécier le plus ou moins
de rapidité de l'exécution ; il nous manque
un facteur important : le métrage exact de
la tenture.
J'en fais l'aveu ; ici le bât me blesse.
3Les ZtttQ hîQ ^patrc0.
107
Malgré mon désir, mes tentatives, mes
calculs, je ne suis pas arrivé à un résultat
satisfaisant.
Mon ambition était d'avoir :
i" les mesures justes des modèles,
2° les mesures des tapisseries avec et
sans les bordures.
3° les mesures des panneaux latéraux de
la Sixtine,
4'' les mesures des pilastres peints qui
partagent et terminent les panneaux.
N'ayant pas eu la bonne fortune de pou-
voir prendre moi-même ces mesures, j'ai
cherché si d'autres avaient été plus heureux.
La Conversion de saint Paul. (l'holographie (J'Alinaki de Kloience.)
J'ai trouvé qu'en général les auteurs
dont je connais les travaux, avaient évité
ces questions, et s'éiaient contentés de dire
que les tapisseries avaient des dimensions
différentes — ce qui saute aux yeux pour
qui les a regardées. Quelques-uns ont
donné la mesure de la plinthe depuis la
barrière jusqu'au fond, mais n'ont pu natu-
rellement fournir de note sur les surfaces
occupées par les tapisseries sur le mur où
a été peint le Jiigement dernier. Plusieurs
ont fourni les dimensions des tapisseries ;
j'ai trouvé de tels écarts entre ces mesurages
que je suis bien certain que les mesures ont
été prises de façons très diftérentes : sans les
bordures; avec les petites bordures inté-
REVUE UE L ART CHKÉTIEN.
190I. — 2""^ LIVRAISON.
io8
Be\)ue ïie l'art cbictteiu
rieures seulement ; avec les petites et les
grandes bordures.
Je n'ai pas besoin de faire remarquer
que pour les dimensions relatives des ta-
pisseries et des modèles, il ne faut tenir
aucun compte des reproductions résultant
des photographies ou des dessins. Aucune
reproduction, — les miennes pas plus que
les autres, — ne donne la suite des Actes à
une échelle déterminée.la même pour toutes;
c'est fâcheux, puisqu'ainsi une tapisserie
de 5 mètres de large est de la même
grandeur qu'une autre de 4 mètres ; mais
si on ne peut faire un reproche à ceux
qui se sont servis de photographies, on peut
regretter que les auteurs qui ont eu la
chance d'employer des dessinateurs, n'aient
pas recommandé d'observer les proportions.
Mais enfin, quoique critiquant chez les
autres le procédé par à peu près, je vais
suivre les mêmes errements ; je le fais à
simple titre de renseignement.
N'ayant pu, à mon grand regret, mesurer
les tapisseries le mètre à la main, j'ai opéré
de visu, aidé de divers renseignements
qu'on m'a donnés au Vatican ; je parle de
quelques tapisseries seulement et sans les
bordures.
La plus large est Elymas ; toutes les
mesures lui donnent 5 mètres 15 ctm.
Après viennent : la Giiérison, A naine,
la Vocation d'une largeur de 5 mètres à
5 m. 10.
]J Aréopage n'a plus que 4 m. 20 à
4 m. 25.
La Pêche mesure 3 m. 90, ou 4 mètres.
Saint Paul en prison n'a plus que o m.
80 à o m. 90.
Tout cela sous bénéfice d'inventaire, bien
entendu.
Les hauteurs devraient être toutes les
mêmes, c'est-à-dire, toujours sans bordures,
de 3 mètres 65 ; il y a cependant des diffé-
rences de 10 à 15 centimètres, je crois. Je
ne puis attribuer ces écarts à la négligence
des tapissiers ; je pense qu'ils résultent du
plus ou moins de relâchement de la chaîne.
Pour le carré de l'ensemble de la tenture
je me suis livré à bien des calculs ; je n'ai
été satisfait d'aucun, m'étant heurté à la
question des bordures verticales dont nous
ne connaissons pas le nombre primitif
exact ; je me hasarde cependant à supposer
que les Actes peuvent représenter de 240 à
260 mètres carrés.
Pour un temps de trois ans environ,
pour neuf ou dix métiers activés par vingt-
cinq ou trente tapissiers, ce carré repré-
sente par ouvrier une production d'environ
2 mètres ■ /, carrés par an (').
Ni Van Orley, ni Van Aelst n'ont été à
la hauteur de l'importante mission que
Léon X leur avait donnée.
Les modèles de Raphaël n'ont pas été
traduits avec le respect qu'ils méritaient et
peut-être aurait-on mieux fait de les confier
à l'un des ateliers qui fonctionnaient alors
en Italie sous la direction des tapissiers
Mamands.
On relève dans les tapisseries des fautes
de dessin et des fautes dans les colorations.
Les premières sont excusables, car aucune
n'est choquante, et c'est évidemment par
jalousie de métier et en exagérant, qu'en
15 19, Sébastien del Piombo écrivait à
Michel-Ange, après avoir vu les Actes à la
Sixtine : « E credo la mia tavola sia me-
glio disegnata che i panni arazi che son
venuti da Flandra. » Sebastien faisait allu-
sion à son tableau la Ré-iurrcction de Lazare.
I. Pendant le règne de Louis-Philippe on a repris aux
Gobelins quelques pièces des Actes d'après les modèles
déposés à la cathédrale de Meaux. La production moyen-
ne annuelle par tapissier a été de la moitié d'un mètre
carré. Cette faiblesse tient à la minutie de l'exécution à
la mode alors et surtout à ce fait que les tapissiers
n'étaient pas payés aux pièces comme jadis, mais au mois,
en leur qualité d'employés de la liste civile !
ILzQ :^ctes îïes :^pôtreg.
109
Il est rare de trouver une tapisserie d'une
correction de dessin absolue, et cela s'ex-
plique.
On commence par prendre un calque
sur le modèle ; la chose était regardée
comme délicate, car elle était confiée à un
dessinateur spécialement chargé des traits.
Puis on reporte les traits sur une chaîne
tendue mais (lexible ; on ne dessine pas sur
une nappe pareille avec autant de sûreté
que sur une surface solide ; c'est par des
pointillés que l'on procède.
Ensuite les fils de chaîne sont envelop
pés par les fils de trame roulés sur une
broche manœuvrée par le tapissier ; le poin-
tillé n'est qu'un repère, et la broche est
pour le tapissier ce que le pinceau est pour
le peintre.
On sent les difficultés : il est utile que le
tapissier sache dessiner ou tout au moins
qu'il ait le sentiment des formes ; mais tous
les tapissiers n'ont pas ces qualités au même
degré.
Il n'y a donc pas lieu de faire un crime
à Van Orley et à Van Aelst d'avoir laissé
passer quelques incorrections dans les
traits, d'autant plus qu'en définitive elles ne
portent pas une atteinte sérieuse à la com-
position et à l'esprit des modèles.
Pour les colorations, on a le droit d'être
plus sévère.
Je tiens compte bien entendu des diffi-
cultés du métier.
L'entrepreneur n'est pas toujours assuré
du degré de résistance aux actions de l'air,
de la lumière et du temps, des couleurs
qu'il emploie ; il peut de bonne foi croire
qu'une couleur est solide alors qu'elle est
fugace. Il ne connaît pas non plus les
résultats de la mue de certaines couleurs ;
il est arrivé, par exemple, même aux épo-
ques de bonnes teintures, que le brun foncé
s'est décomposé et a tourné au rouge vif.
D'un autre côté, le tapissier n'a pas
toujours à sa disposition des couleurs qui
correspondent exactement à celle du modèle
^
-,?1|
.igS-"
MMSUSÎ115Ï1J
Saint Paul en prison.
(Photographie d'AnNAUi de Florence.)
et le teinturier ne peut pas toujours les lui
fournir.
En tenant un compte équitable de ces
1 lO
3Rc\)uc lit rart cljrctitn.
considérations, je suis arrivé aux conclu-
sions suivantes :
Il y a dans les Acfes des morceaux con-
formes aux colorations des modèles.
Il y en a d'autres qui s'éloii^nent beau-
coup trop du modèle en ce sens d'abord,
que le tapissier, au lieu d'user, comme
Raphaël, de trois tons seulement du grand
clair à l'obscur, a employé six et même sept
tons de la même couleur et qu'ensuite, au
lieu de rester dans la moyenne de la gamme,
il est allé aux numéros extrêmes ; et malgré
cette multiplication des tons on remarque
des passages brusques et heurtés.
Ailleurs le tapissier a juxtaposé des cou-
leurs qui ne s'harmonisent pas, ce qui ne
se voit jamais dans les ouvrages de Raphaël,
fresques ou peintures.
Les carnations sont dans toutes les tapis-
series, les parties les plus faiblement trai-
tées. Dans les visages, les pommettes sont
en général beaucoup trop accentuées et font
taches ; autour d'elles le tapissier a fait un
cercle plein d'un ton plus faible que la partie
saillante, et autour de ce premier cercle il
en a mis un autre plus faible encore ; l'effet
est désagréable.
Quelques parties des tapisseries sont
traitées avec une extrême minutie et un
détail absolument inutiles.
Enfin il y a abus de l'or ; on en a mis
jusque dans les terrains !
Tout ceci est la faute de Van Orley et
de Van Aelst.
Il était de leur devoir de surveiller l'é-
chantillonnage, d'obliger les tapissiers à
une plus grande sobriété et au besoin de dé-
truire l'ouvrage mal fait.
La sobriété n'aurait nullement gêné les
tapissiers ; elle était de coutume dans les
Flandres avant l'arrivée des Actes et elle a
été pratiquée après.
En résumé, la technique des Acfes n'est
pas bonne en général ; avec les modèles de
Raphaël on pouvait faire mieux ; les Flan-
dres ont produit au XVI'= siècle des ou-
vrages bien supérieurs comme fabrication.
VU
CEPENDANT les tapisseries sont
accueillies à Rome avec la plus grande
faveur.
Paris de Grassis, maître des cérémonies
de Léon X, les qualifie dans son journal
« pulcherrimos, pretiosos, de quibus tota
« capella stupefacta est in aspectu illorum,
« qui, ut fuit universale judicium, sunt res,
« qua non est aliquid in orbe nunc pul-
« chrius. »
Vasari en parle avec le même enthou-
siasme: « Le quale opéra fu tanto miracolo-
« samente condotta, che reca mariviglia di
« vederla ed il pensare come sia possibile
« avère sfilato i capelli e le barbe e datocol
« filo morbidezza aile carni ; opéra certo
« piuttosto di miracolo che di artificio
« umano, perche in essi sono acque, ani-
« mali, casamenti, e talmente ben fatti, che
« non tessuti, ma paiono veramente fatti
« con pennello. Costoquesta opéra settanta
« mila scudi, e si conserva ancora nella
« cappella papale. »
Si Vasari crie au miracle, c'est qu'il
estime qu'une tapisserie est d'autant plus
parfaite qu'elle imite davantage la peinture.
Il avait la même conception des majoliques
peintes à plat ; parlant des plaques dipensc
itel piano dont Luca délia Robbia a décoré
le tombeau de 1 evêque Federighi, il écrit :
«festoni e mazzi di frutti e foglie si vive e
« naturali che col pennello in tavola non si
« farebbe altrimenti a olio ; ed in vero questa
« opéra è maravigliosa. »
Ce n'est pas l'effet décoratif qu'il admire,
c'est la virtuosité.
îles :^cte0 hts :^pôtres.
I II
Par malheur pour ce grand art de la
tapisserie, l'opinion de Vasari a fini par
prévaloir, et les ateliers arrivèrent à con-
centrer leurs travaux, presqu'exclusivement,
dans la reproduction des tableaux ; ils y
étaient encouragés de tous côtés. De notre
temps M. Ingres, l'illustre peintre français,
professait que le rôle de la tapisserie, de la
L H^
•firpr
»?!aîi~ilEr-ÎI^SIS
La Pêche miraculeuse- (Photographie i!'Alinaki de Florence.)
mosaïque, de la céramique était de re-
produire les chefs-d'œuvre de la peinture,
afin de prolonger leur existence.
La réaction contre le genre faux de
l'imitation servile de la peinture est arrivée:
les directeurs de manufactures réclament des_
modèles conçus en vue de l'interprétation
textile; en ce qui me concerne, mon modèle
I 12
îRebuc tie rart cbrcticn.
préféré serait celui où la figure humaine ne
tiendrait qu'un simple rôle décoratif; c'est
avouer que les cartons de Raphaël ne sont
pas mon idéal ; ce sont des tableaux d'his-
toire, presque tous dignes du grand homme
qui les a composés sur un programme
arrêté par le pape. II est probable que si
Raphaël, l'auteur des Loges du Vatican,
avait été libre, il aurait conçu autrement
une tenture de tapisserie.
Les prix payés par Léon X pour la
tenture n'ont aucune importance ; il faut
cependant citer les auteurs qui les ont
mentionnés.
Paris de Grassis, en 15 19, dit : 2,000 du-
cats en or pour chaque pièce.
Marc Antoine Mihiel dit, également en
15 19 : A Raphaël 100 ducats en or par
modèle ; pour le tissage 1.500 ducats par
tapisserie.
Panvinio et P. Giovio disent : 50.000
ducats pour le tout.
Vasari dit : 70,000 ducats.
Il y a donc des écarts considérables, mais
aurions-nous un seul chiffre réel que nous
ne serions guère plus avancés, puisque les
économistes ne sont pas d'accord sur la
décroissance du pouvoir de l'argent, même
depuis le commencement de notre siècle, à
fortiori depuis le XV I^ A cette époque
le ducat d'or de la chambre apostolique
pesait 3 Yz grammes ; les uns admettent
qu'il représentait une valeur de 60 francs
en monnaie actuelle, les autres ne vont
qu'à 30 francs.
Je ne connais rien à ces affaires, mais ici
des personnes, qui ne sont pas économistes
de profession, pensent que la seconde éva-
luation est plus près de la réalité que la
première. Elles se basent sur les prix des
choses nécessaires à la vie au XV 1*^ siècle,
prix que l'on connaît assez bien, et les
comparant aux prix payés actuellement
dans les mêmes pays, elles concluent que
pour vivre de la même façon dans la même
contrée, il faudrait au plus un revenu
triple.
Du'reste le prix vénal d'une œuvre d'art
ne signifie rien. Un État paie d'habitude
moins qu'un particulier. Un artiste, selon sa
situation pécuniaire du moment ou son
ambition, prend plus ou moins cher. Il est
des cas oij le prix d'un ouvrage résulte d'un
sentiment supérieur. Lorsque Pra Angelico
acceptait une commande, il demandait'un
prix plus élevé que celui des peintres de
son temps ; aux objections qu'on lui faisait
il répondait que l'argent n'était pas pour
lui, car il le consacrait à la glorification de
Dieu!
VIII
J'ABORDE maintenant la difficile ques-
tion des bordures ; elle n'a pas été
jusqu'à présent posée sous tous ses
aspects, peut-être à cause des problèmes et
critiques qu'elle soulève ; je vais l'attaquer
de front et je débute par avouer que je vais
être en bien des points en contradiction
avec les écrivains mes prédécesseurs.
Une tapisserie peut être sans bordures,
elle se présente moins bien; mais enfin on
peut la concevoir ainsi ; du moment où on
l'encadre, elle doit logiquement avoir quatre
bordures d'une importance à peu près égale,
deux horizontales et deux verticales.
A la vérité les Actes étaient bien munis
partout d'un premier petit encadrement
intérieur composé d'un listel, d'un chapelet
d'oves et d'une torsade, mais comment ex-
pliquer que Raphaël ait négligé de poser
sur la ligne horizontale supérieure de larges
bordures semblables à peu près à celles des
lignes verticales .''
C'est une faute sans excuses.
ILes ;^cte0 Des :^pôtre0.
"3
La Lapidation de saint Etienne, (l'hutugrapliie d'AtiNAKi de blorcni.c.)
La raison que la place a manqué n'a pas
de poids ; il suffisait de prendre un peu
dans le champ du haut des tapisseries et
de diminuer l'importance des horizontales
114
3Rcbuc t)e ravt cbvtticu.
inférieures qui sont sensiblement plus dé-
veloppées que les montantes.
La seconde erreur, à mon sens, c'est
d'avoir donné aux bordures horizontales du
bas, un caractère distinct, celui d'un support
en relief en façon de bronze rehaussé d'or.
On s'accorde à penser que Raphaël n'est
pour rien dans ces camaïeux, c'est possi-
ble ; mais il les a acceptés et par consé-
quent il en a pris la responsabilité.
Que Léon X lésait exigés pour rappeler
quelques épisodes de sa vie. c'est encore
possible.
Quoi qu'il en soit, au point de vue de la
fonction décorative, ces bordures sont inso-
lites.
L'opinion que j'émets est contraire aux
idées d'un artiste très distingué, le chevalier
Bernin, l'auteur de la belle colonnade de la
place Saint- Pierre à Rome.
En 1 665 le chevalier fut appelé en France
par Louis XIV, pour dresser les plans d'une
partie du palais du Louvre ; M. de Chante-
lou, chargé d'accompagner le chevalier, a
tenu au jour le jour \ç: Journal du J^oyage (').
Dans cet écrit je trouve un passage se
rapportant aux bordures des Aclcs.
« En parlant des tapisseries, le chevalier
« a dit qu'on n'y doit jamais faire de bor-
« dures de fleurs ni d'autres choses écla-
« tantes ; que Raphaël a eu une grande
« considération dans celle qu'il a fait exécu-
« ter pour le pape, n'y ayant fait mettre
« aux bordures que de l'or et du marbre,
« afin que le trop grand éclat et la variété
« ne nuisissent pas au corps de la tapisserie
€ et que la bordure ne sert que de terme et
« de finiment comme aux tableaux ; qu'il
« faut dans tous les ouvrages donner les
« choses les plus dégagées de confusion et
I. Le Journal du voyage du chevalier Bernin rédigé
par de Chantelou a clé publié par M. Ludovic Lalanne.
« les plus nettes qu'il se peut, que ce pré-
« cepte entre dans tout, même dans les
« affaires du monde. J'ai dit que c'est à
« même fin sans doute que M. Poussin prie
« toujours qu'à ses tableaux, l'on ne mette
« que des bordures bien simples et sans or
« bruni, et que c'est aussi la raison pourquoi
« Michel Ange ne voulait point qu'on ornât
« les niches et disait toujours que la figure
« était l'ornement de la niche. Mathie (')
« a ajouté qu'à Saint-Pierre on ne voyait
« aucune niche qui soit ornée. »
Le Vatican conserve sept bordures mon-
tantes ; je les désigne par leurs sujets et
non par les tapisseries qu'elles côtoient
présentement, car j'ai des réserves à faire
sur les places qu'on leur attribue générale-
ment.
Grotesques (n" i) (au bas deux inscrip-
tions).
Les Vertus théologales.
Grotesques (n° 2).
Hercule portant le globe céleste.
Les Heures.
Les Parques.
Les Saisons (').
Les Grotesques n° i portent, dans les
parties inférieures, une double inscription
tissée et ajoutée par couture.
La première porte les armes de la famille
de Montmorency et les mots :
« Urbe capta partem auleorum a praedo-
« nib. distractorum conquisitam Annac
« Mommorancius gallicae militiae praef.
1. Mathie était l'un des élèves du Bernin.
2. Trop tard pour y remédier et évidemment par suite
de photographies égarées en route, nous remarquons que
dans les reproductions des bordures il en manque deux :
Les Heures, la pièce est car.ictérisée par un cadran à
24 heures.
Lci, (.iro/csi/iics \\" I. la bordure composée d'arabes-
ques, d'édicules et de génies de petites dimensions, est
dans le génie des Grotesques n" i placés contre \ Aréopage.
(Note de la Direction.)
Heg :actes t)ts Zpùtvts.
115
« resarciendam atq. Julio III P. M. resti-
« tuendam curavit, 1553. »
Au-dessous de ce témoignage de recon-
naissance pour la restitution faite par le
connétable de Montmorency, une autre
inscription rappelle que les tapisseries ont
été disposées dans la galerie en 18 14 par
ordre du pape Pie VII.
(( Magni Raphaelis Sanctii Urbinatis
« picturas textis aulaeis expressas iubente
« Leone X P. M. ad Vaticani ornamentum
« Plus VII P. M. sumptu non exiguo re-
« demptas et instauratas in splendidiorem
« locum artium commoditati collocandas
« mandavit A. MDCCCXIV. »
La bordure Hercule porta7it le globe
céleste a également dans le bas une pièce
rapportée avec les armes de Montmorency
Tapisserie de Bruxelles, XVI" siècle. (Galerie des tapisseries de Florence.) (l'holographie d'Ai.iNARl de Florence )
et l'inscription commémorative de la resti-
tution.
On a remarqué que Bernin ne fait pas
la moindre allusion aux montantes ; bien
plus, il félicite Raphaël d'avoir évité des
bordures de fleurs et d' autres choses éclatan-
tes : cette omission résulte ou d'un défaut
de mémoire peu probable, ou du fait qu'à
l'époque de Bernin, les bordures verticales
étaient détachées des tapisseries.
On observe aussi l'absence des bordures
dans les copies des Actes faites au Vatican,
de 1664 à 1673, psi" 'ss pensionnaires du
roi de France à Rome (") ; c'est peut-être
encore un motif pour admettre qu'alors ces
ornements n'étaient pas contre les tapisse-
ries, ou que tout au moins ils étaient tenus
comme choses négligeables.
I. Les copies avaient été déposées à la cathédrale de
Meaux sur la demande de l'évêque, Mgr de la Roche-
Fontenille, aumônier de Madame Adélaïde, fille du roi
Louis XV ; elles ont été transportées à Paris en 1899.
KKVUE DU L AKT CHKETIEN.
igol. — 2'"*^ r.lvHAisON.
ii6
j|Re\)ue lie T^vt cj)rcttrn.
Dans un recueil de gravures, publié à
Rome, en 1776, sous le titre Loggie di
Rafaele 7iel Vaticano, du graveur Volpato,
on trouve les Vertus, les Heures, Hercule,
les Saisotis et les Pai'çues, mais nullement
au titre de bordures des Actes.
Le recueil est conçu d'une singulière
façon ; les planches sont composées au
moyen d'éléments choisis dans l'œuvre de
Raphaël et de ses collaborateurs dans les
diverses localités du Vatican et rassem-
blées sans aucun souci de la réalité; ainsi
les reproductions des bordures des Actes
sont entourées de motifs absolument étran-
gers à la tenture dont il n'est même pas
fait mention ; ces motifs sont du reste si
bien choisis, qu'on pourrait croire que les
planches donnent un ensemble homogène.
L'écusson de Léon X a été supprimé, le
génie ailé du bas de la bordure à' Hercule
se présente en pied; au lieu de tenir les
armes de Montmorency et l'inscription, il
porte une corbeille de fleurs.
Les bordures des Actes, les montantes
surtout, n'ont pas fait grand bruit jadis. Je
crois que Bunsen, vers 1830, est le premier
auteur qui s'en soit spécialement occupé ;
non seulement il décrit les motifs, mais il
fait la répartition des montantes par tapis-
series. Ses attributions ayant été adoptées
sans discussion par les écrivains, notam-
ment par Passavant, on est arrivé à dési-
gner les bordures par le nom des tapisse-
ries.
J'ai toujours tenu la répartition pour
arbitraire et comme j'étais, je crois, l'uni-
que contradicteur de Bunsen, j'entre dans
le détail.
Voici la répartition de Bunsen :
La Pêche mirac2ileiise,
Une montante. Les Grotesques {pP \.) {').
I. J'ai désigné les deu.\ bordures en grotesques par
les n"' I et 2, simplement pour les distinguer.
Horizontale : Jean de Médicis allant à
Rome après la mort de Jules 11, pour as-
sister au conclave. 11 est élu pape sous le
nom de Léon X et reçoit l'hommage des
cardinaux {1513).
La Vocation de saint Pierre,
Deux montantes : Les Parques — Les
Saisons.
Horizontale : Pillage du palais des Médi-
cis; fuite de Jean de Médicis habillé en
moine (1494).
La Lapidation de saint Etienne,
Pas de montantes.
Horizontale: Entrée à Florence du car-
dinal Jean de Médicis comme légat du
pape (1492).
La Guérison du Paralytique,
Pas de montantes.
Horizontale : Le cardinal Jean de Mé-
dicis est fait prisonnier à la bataille de
Ravenne. — Il s'échappe de sa prison{ 1512).
— Entre les deux sujets: lions et lauriers.
La Mort d' Atianie,
Une montante : Les Vertus théologales.
Horizontale: Le gonfalonier Ridolfi ha-
rangue les habitants de Florence. — Le
cardinal Jean de Médicis entre à Florence
(1512).
La CoJivcrsion de saint Paul,
Pas de montantes.
Horizontale: Persécution des chrétiens
par Saiil.
Elyinas frappé de cécité,
Pas de montantes.
Pas d'horizontale ; la tapisserie ayant
été coupée en deux, il n'existe aucun indice
du sujet de cette bordure.
Saint Paul et saint Barnabe à Lystre,
Une montante: Les Grotesqties vS>2.
Horizontale: Saint Jean quitte Antioche.
— Saint Paul prêche dans une synagogue.
— Entre les deux sujets : lions et les trois
JLtô :^ctes hzs i^pôtres.
17
plumes retenues par une bague, l'un des
emblèmes des Médicis.
Saint Paul à l Aréopage,
Deux montantes : Les Heures — Her-
cule.
Horizontale : Saint Paul dans son mé-
tier de tisserand. — Saint Paul à Corinthe
est la risée des Juifs. — Saint Paul impose
les mains aux convertis. — Saint Paul au
tribunal du gouverneur de l'Achaïe.
Saint Paul en prison,
Pas de montantes.
Horizontale : un personnage assis, un
autre debout; sans signification.
11 n'y a aucune remarque à faire sur les
explications de Bunsen des sujets traités
Tapisserie de Bruxelles, XVI' siècle (Galerie des tapisseries de Florence.) (Photograjitiie d'Ai.ixAKi de Florence.)
dans les bordures du bas qui, pour la plu-
part, ne paraissent pas avoir été séparées
des tapisseries; je ne veux pas dire par là
qu'elles aient été tissées sur la même
chaîne; c'est possible, mais il est possible
aussi qu'elles aient été jointes par la rentrai-
ture ; nous parlons plus loin de ce moyen.
Pour les montantes, les attributions de
Bunsen sont sujettes à de sérieuses critiques.
D'abord il ne produit aucun argument
en faveur de son opinion, et il néglige de
dire qu'il a purement et simplement noté
ce qu'il a vu lorsqu'il a étudié les tapis-
series au Vatican ; l'aveu eût été prudent.
Il n'a pas réfléchi qu'à la Sixtine une bor-
dure unique servait, dans la plupart des cas,
à deux tapisseries voisines, et que dès lors
il n'y avait aucune raison pour attribuer
cette bordure plutôt à la tapisserie de gau-
che qu'à celle de droite.
ii8
îRebue ÎJe V^xt t\)xitim.
II n'a pas songé que les tapisseries ayant
été maintes fois déplacées, quelques bor-
dures, simplement cousues contre la tapis-
series ou clouées contre le mur, ont pu
être posées au hasard pour remplir un espace
vide ; il n'a pas remarqué que quelques
bordures étaient plus courtes que les pièces
qu'elles côtoyaient ; ces faciles observations
auraient dû le mettre en méfiance.
Du reste les attributions de Bunsen, si
elles ont été toutes admises comme article
de foi par les écrivains, n'ont pas eu la
même fortune au Vatican.
Avant le remaniement actuel, plusieurs
bordures n'occupaient déjà plus les places
indiquées par l'auteur.
Dans la nouvelle disposition on n'a pas
tenu compte davantage de lopinion de
Bunsen.
Les deux bordures des Grotesq21.es et
celle des Heures ne sont plus contre des
tapisseries mais tout à fait isolées.
Le Vatican n'a pas non plus admis le
système de Bunsen qu'à la Sixtine des
faits relatifs à saint Pierre étaient d'un côté
et les faits relatifs à saint Paul d'un autre
côté, puisqu'il a disposé les pièces comme il
suit. Sur une muraille. La Vocation, la Cul'-
rison, Lystre, \ Aréopage; en face : Aiianie,
la Conversion, la Lapidation, la Fcclie.
Élynias et saint Paul en prison sont
isolés (').
IX
LA question des places des bordures
est rendue encore plus difficile par
l'incertitude où nous sommes du nombre
des montantes.
On veut que la fonction des bordures ait
été de recouvrir les pilastres peints sur les
plinthes.
I Le Couronnement de la Vierge, quoique ne faisant
pas partie des Actes, a été placé entre Ananie et la Con-
version.
En quel nombre étaient ces pilastres ?
Passavant, répétant Bunsen, écrit: « L'es-
« pace intérieur de la chapelle jusqu'à la
« grille est divisé par dix pilastres en au-
« tant de panneaux de différentes largeurs.
« Les tapisseries devaient correspondre à la
« mesure de ces panneaux, quatre de cha-
« que côté et deux au fond près de l'autel
« où Michel-Ange a peint plus tard le
« Jugement dernier. »
Le nombre de dix panneaux est hors de
discussion, puisque pour les garnir on a de
fait dix tapisseries.
Mais je ne puis m'expliquer les dix pi-
lastres peints.
A gauche il y a bien quatre pilastres, y
compris celui qui est en partie caché parle
trône du pape, mais adroite il n'y en a que
trois.
Pour le mur du fond les auteurs admet-
tent deux pilastres seulement pour les
deux tapisseries qui, selon Bunsen, étaient
la Pêche ^X. la Conversion ,■ ma.is alors les ta-
pisseries séparées' l'une de l'autre par l'es-
pace réservé au Couronnement de la sainte
Vierge n'auraient été encadrées que d'un
seul côté, ce qui n'est pas admissible.
Le chiffre adopté par Bunsen de dix
pilastres résulte donc d'abord d'une erreur
matérielle commise en comptant les pilas-
tres latéraux, et puis d'une simple supposi-
tion sur le nombre des pilastres du mur du
fond.
Je ne comprends pas davantage com-
ment Passavant, qui admet dix pilastres et
qui ne mentionne que sept bordures pour
les recouvrir, n'ait pas fait observer que
plusieurs bordures ont disparu ou que peut-
être elles n'ont pas été faites.
L'on peut objecter que jamais il n'a été
fait mention de plus de sept bordures ; cela
ne prouve rien, puisque jusqu'à Bunsen
personne n'a songé à les compter.
iles^^ctes Des :^pôtre0.
119
L'on peut dire aussi que sur les nom-
breuses répliques de la tenture, on n'en
connaît que deux qui présentent avec des
variantes quelques-uns des sujets des mon-
tantes conservées.
La suite dite de Mantoue, depuis 1866
à "Vienne, montre : Les Parques, les Vertus,
les Heures, Hercîtle.
La suite de Madrid montre : \&s Panjues,
les Vertjis, les Heures, Hercule, les Saisons.
Tapisserie de Bruxelles, XVI-^ siècle, (Galène des tapisseries du Horence.) (l'I.otogiaphie d'A. iNAlil de Florence.)
On a observé que les deux bandes com-
posées de grotesques n'existent dans aucune
réplique et que les bordures n'ont pas été
appliquées contre les tapisseries selon la
répartition de Bunsen. Mais à Vienne
contre Saint Paul à l'Aréopage il y a une
bordure qui n'est pas représentée au Va-
tican et qu'on voit également à Florence
dans une suite de trois tapisseries con-
servées au musée de la Crocetta ; elle
120
3Rcbur lie T^^rt c|)rcticn»
représente \ Aritlmiétique, Y Astronomie, la
Musique, la Géométrie ; on pourrait la dé-
nommer les Sciences, quoique la musique y
figure.
Je reproduis les trois pièces de Florence;
elles représentent : un Tournoi, le Pillage
d'un ca7)ip, le Passage d'une rivière par une
trotipe armée ; les personnages sont habillés
à l'antique.
Contre le Toiirnoi se trouvent des deux
côtés, en sens opposés, les Parques avec
des variantes ; contre le Passage sont les
Heures également avec quelques modifi-
cations ; contre le Pillage sont les Sciences.
Ces tapisseries sont du milieu du XVI'
siècle, je crois ; elles portent la marque de
Bruxelles et le sigle
+
K
c
^
Du moment où, à Vienne, la bande des
Sciences accompagne quelques bordures du
Vatican et qu'à Florence il en est de même,
il me paraît que les Sciences pourraient bien
représenter l'une des bordures perdues des
Actes; et de fait cette bande remplirait
aussi bien sa fonction que les Parques et
les Vertus.
Négligeant le Tremblement de terre, trop
étroit pour comporter des moulantes his-
toriées, j'estime que pour encadrer ration-
nellement les neuf autres tapisseries il a
fallu treize montantes, en admettant, bien
entendu, une bordure unique pour deux ta-
pisseries voisines. Ces treize bordures ont-
elles été tissées ?
C'est fort probable.
Les Sciences fournissent déjà un indice
adnu'ssible ; peut être qu'une heureuse dé-
couverte viendra confirmer mon opinion ;
l'immense fonds de documents conservés
en Italie et ailleurs est loin d'être épuisé.
X
/^~^OMME pour les tapisseries on discute
^-^ sur la part prise par Raphaël aux
modèles des bordures et sur les collabora-
teurs qu'il a pu s'adjoindre ; un seul de ses
aides, Penni, est cité par Vasari ; pour les
autres on en est aux hypothèses.
Comme pour les tapisseries je ne connais
que Raphaël ; s'il a accepté les travaux de
ses collaborateurs, c'est qu'il les a trouvés
suffisants. On a remarqué que c'est l'avis
de Bernin qui, en parlant des bordures
horizontales, n'a cité que Raphaël.
Je trouve que les bordures des Actes ne
méritent pas les grands éloges qu'on leur
accorde d'habitude.
Les horizontales sont médiocres tant
comme parti d'imiter des bas-reliefs que
par certaines de leurs compositions qui
sont confuses ou même inexplicables, comme
celle du Tremblement de /ét;'^ / quoiqu'ap-
pliquées à des tapisseries où les personnages
sont à peu près à une échelle uniforme,
elles sont d'échelles différentes. Il n'y a pas
eu là de plan d'ensemble pas plus du reste
que dans les montantes.
Evidemment on trouve dans ces mon-
tantes des bandes vraiment belles, mais il
y en a de fort mesquines ; de plus, elles sont
à des échelles par trop disproportionnées;
il suffit de comparer, pour s'en convaincre,
Hercule ou les Heures avec les Grotesqties
ou les Vertus.
Aucune bordure n'est adéquate aux tapis-
series; aucune n'a de rapports avec la pièce
qu'elle accompagne; elles auraient pu servir
aux Loges, aussi bien que nombre de pilas-
tres des Loges auraient pu servir aux ta-
pisseries.
Et puis pour l'Italie elles n'ont rien de
surprenant.
3les Ztttë ties :^pôtrej3;.
121
L'Italie dans ses églises et ses couvents
nous présente en profusion de superbes
bordures.
Il suffit de citer l'encadrement des fres-
ques de Giotto, dans la voûte d'Assise, et
ceux de la chapelle des Espagnols à Flo-
rence ; les bordures des portes Ghiberti au
baptistère ; le Campo Santo de Pise, et, à
Rome même, la porte, posée en 1445, à la
basilique de Saint-Pierre, qu'Antonio Fila-
rète a entourée de motifs empruntés à
l'ancien Testament et surtout à la mytho-
logie.
Ce sont là des exemples qui prouvent
que, bien avant Raphaël, l'art des bordures
était arrivé à un haut degré de perfection.
XI
JE passe à l'état où se trouvaient les
tapisseries et les bordures avant la
réfection dont elles sont actuellement
l'objet.
En 1866, le pape Pie IX en ordonna la
réparation à la manufacture pontificale de
Saint- Michel ; après les événements de
1870, le travail fut continué au Vatican,
mais il fut suspendu ; il a été repris en 1899
sur l'ordre du souverain pontife Léon XIII,
qui veille avec une sollicitude éclairée sur
les œuvres d'art des palais apostoliques.
Je prends les tapisseries dans l'ordre où
elles étaient disposées dans la galerie.
Mais auparavant il me faut encore entrer
dans des détails techniques arides mais
nécessaires.
La tapisserie, on le sait, comporte une
chaîne et une trame ; les fils de trame en-
veloppent complètement les fils de chaîne,
les deux éléments font corps et forment le
tissu. Mais il peut arriver à la longue, sur-
tout lorsque la tapisserie n'étant attachée
qu'en haut est presque flottante, que la
chaîne se fronce et que la trame se tasse ;
la tapisserie est alors par endroits comme
désagrégée par disjonctions ; cet effet peut
aussi résulter de la mauvaise qualité des fils
de chaîne, de leur rupture pour cause d'hu-
midité ou du fait des insectes.
Une tapisserie peut à la rigueur être
tissée d'un seul venant dans toute sa sur-
face, mais dans la pratique il n'en est pas
ainsi. Pour faciliter au tapissier, en certains
cas, les changements de couleurs ou de
dessin on opère par relais. Le relais donne
lieu à une solution de continuité dans la
trame, à une fente d'ordinaire de petite
étendue. Lorsque la pièce est enlevée du
métier, on procède dans un atelier spécial
à la recherche des relais et par coutures on
supprime les solutions de continuité.
Pour activer la fabrication on peut tisser
les bordures sur un métier à part. Lorsque
les deux parties sont terminées, on rattache
la bordure à la tapisserie par rentraiture.
La rentraiture est une sorte d'épissure
comme en font les marins pour souder les
fragments d'une corde ; on pourrait même
la comparer, dans une certaine mesure, à
la greffe végétale.
Le rentraieur allonge, par des additions,
les fils de chaîne de la bordure, les fait
pénétrer dans la chaîne de la tapisserie, et
les fixe ; il fait de même pour la tapisserie
par rapport à la bordure. Lorsqu'une ren-
traiture est bien faite, il est à peu près
impossible d'en reconnaître l'existence en
regardant la tapisserie à l'endroit ; il fau-
drait pouvoir l'examiner à l'envers, ce qui,
lorsqu'on ne commande pas, est fort malaisé,
la tapisserie pouvant être pourvue d'une
doublure ou fixée contre son support.
On peut aussi par rentraiture incorporer
dans le champ de la tapisserie, des pièces
nouvelles en remplacement des morceaux
disparus ou en trop mauvais état.
122
3Rebue tic T^rt rbrttîrn.
II est fréquent de trouver d'anciennes
tapisseries où les bordures n'ont pas été
ajoutées par rentraiture mais seulement par
un'e simple couture.
Ceci dit, passons en revue les tapisseries
et les bordures.
Il faut remarquer d'abord que la tapisse-
rie complète est, en outre des bordures
principales, entourée d'un listel et d'une
torsade, et qu'au bas de la bordure horizon-
tale inférieure il y a une grecque qui est
prolongée sous les montantes (voir la Voca-
tion).
Il faut remarquer également que les
bordures montantes complètes, comme les
Parqiccs de la Vocation, sont limitées sur les
quatre côtés par un listel décoré d'un
chapelet d'oves.
Si j'insiste sur ces ornements, qui dans
l'ensemble de la composition sont secon-
daires, c'est que leur absence ou la façon
défectueuse dont ils sont joints à la pièce,
prouve les déplacements et les lacérations
des bordures.
La Mort d'Ananie.
Bon état ; a été très habilement restaurée
par le chevalier Gentilli, directeur de la
manufacture pontificale de tapisseries.
La bordure les Vertus théologales s'ac-
corde avec la tapisserie.
Sur l'autre verticale la photographie
montre les Parques ; la bande ne s'accorde
pas avec la tapisserie, elle n'a pas son cha-
pelet d'oves et ne correspond pas exacte-
ment avec la bordure inférieure.
La Vocation de saint Pierre.
Le tissu est resté assez ferme, mais les
couleurs, surtout dans les draperies, ont
subi de graves altérations.
Deux montantes : les Parqties et les Sai-
sons ; les deux bordures cadrent avec la
tapisserie.
Saint Paul à l' Aréopage.
La tapisserie est en médiocre état, sur-
tout dans les fonds et les architectures ; les
draperies sont moins abîmées ; les colora-
tions sont relativement assez bien conser-
vées.
La bande Herctde était déjà contre la
tapisserie au temps de Léon X; elle est
restée adhérente dans la partie supérieure
jusqu'au-dessus du globe supporté par Her-
cule ; à cet endroit elle a été coupée. Plus
tard un morceau enlevé a été remplacé par
une pièce dont la coloration est bien plus
faible dans le chapelet d'oves dont le bas
a été remplacé par un morceau de toile
peinte.
Dans la partie rapportée. Hercule est
d'une bonne facture, mais le génie qui
tient les armes de Montmorency est fort
médiocre ; la pièce est cependant d'un seul
venant. La différence de qualité entre les
figures prouve que le morceau a été fait
par deux tapissiers: un habile ^owx Hercule,
l'autre très ordinaire pour le Génie.
La bordure inférieure a aussi été coupée ;
puis mal ajustée : une partie de la torsade
a été refaite à une échelle plus grande.
Saint Paul et saint Barnabe à Lystre.
Dans cette tapisserie, les figures sont
assez bien conservées, mais tout le reste
est en mauvais état.
La Conversion de saint Paul.
Bon état ; a été restaurée par M. Gen-
tilli.
Pas de montantes.
La Guérison du paralytique.
C'est la plus malade de tous les Actes ;
elle est dans un état déplorable, surtout
dans les fonds et les architectures.
Pas de montantes.
La Pêche miraculeuse.
Bon état ; a été fort bien restaurée par
M. Gentilli.
îLe0 ZzttQ Dc0 3pôtre0»
123
Deux montantes: Les Heures et les
Grotcsqtces n° i.
J'ai déjà fait remarquer que les Heures
étaient, par Bunsen et les autres auteurs,
attribuées à \ Aréopage ; il est probable
qu'elles ont été contre cette tapisserie, mais
elles n'y sont plus et s'accordaient mal avec
\ Aréopage ne reposant pas sur la grecque.
Les Grotesques (n" i) étaient simplement
clouées ; le raccord de la pièce avec l'ins-
cription relative au connétable de Mont-
morency est mal joint.
La Lapidation de saint Etieiine.
Assez bon état relativement.
Pas de montantes.
Saint Paul en prison.
Etat médiocre.
Pas de montantes, la tapisserie n'en
comportant pas.
Elymas frappé de cécité était placée hors
de la galerie au-dessus de la porte des
cartes géographiques. La moitié supérieure,
qui seule est conservée, est en bon état.
Pas de bordures.
J'ai indiqué sommairement l'état des
Actes, ne pouvant ici entrer dans des dé-
tails de métier ; en général, sauf dans les
pièces restaurées par M. Gentilli, les re-
lais ont besoin d'être repris et les autres
coutures remplacées par des coutures nou-
velles ; il est visible que les tapisseries ont
I été déjà recousues, mais on a travaillé avec
: négligence et avec du fil mauvais teint.
La chaîne, en bien des endroits, doit être
! renouvelée, et il y a même des morceaux
qui devraient être refaits entièrement par
I rentraiture.
J'ignore les intentions du Vatican sur
I cette question de réparations; à la rigueur
on peut pour le moment se borner à des
consolidations par coutures.
En somme, quoique le mal soit grand il
n'est pas irréparable, et la preuve en est
dans le travail accompli par M. Gentilli
sur la Pêche, la Conversion et Ananie.
Les bordures exigent une attention par-
ticulière : plusieurs sont en très mauvais
état ; quelques-unes ne correspondent pas
en hauteur avec les tapisseries ; le travail
ne présente aucune difficulté sérieuse.
Je me résume.
Sans me laisser éblouir par les grands
I noms de Raphaël et de Léon X, et en ju-
( géant les Actes des Apôtres tant au point
de vue de leurs fonctions décoratives qu'à
celui de la technique, j'estime que la tenture
ne mérite pas les éloges qu'on lui décerne ;
on a mieux fait au XV L siècle.
Gerspach.
Florence, rgoo.
REVUE DE L ART CHRÉTIEN.
1901. — 2'"'^ LIVRAISON.
ë
?<feV A-CJ^ >M-A A^V:^ A^X A^^ a"^ A^VC A-^^ A^^ A^ a ^^* A^yU A^-A A^^ A^^ ^^
ITTTTTIXIIIIJirTIXIJXriYTITIIIITTTI^ITriXII^ITTTTTTTTIIXIIIIIIJXIlJXIIIJIIXXIIJXlIlIJIIXIIXXII^
lies peintures Des maîtres iiuonnus.
Tableau attribué à Roger Van ùer Wepden.
I
Sfe V>^ *sé"* '^^ ''S:'' ^A^* ^^*l-^ *-4i^ ''S'' ^^-^ ^iil-'^ ^i^ ^iè^'f ^^^'f *.iî^ ^iÔ^Â^
^gï^îtttt^ E beau tableau que nous
reproduisons en tête de
cette notice, vendu au
commencement du siè-
cle dernier comme une
oeuvredeJeanvanEyck,
a été attribué par son
acquéreur, le baron van Keverberg van Kes-
sel, à Memling, attribution qui a été mainte-
nue pendant de longues années après que, en
1 827, letableau fut acquis par le roi des Pays-
Bas ('). Le D'" Waagen l'ayant examiné en
1860 l'attribua à Roger van der Weyden(").
Depuis ce temps l'attribution a été conser-
vée, notamment dans le catalogue (n°55)
du musée de La Haye. En 1893, M. A. J.
Wauters, dans ses Éludes pour servir à
l'histoire de Memling (f), le mentionne
comme un panneau important de ce maître,
et prétend que c'est l'œuvre inscrite dans
un inventaire de l'église de Middelbourg en
Flandre, dressé en 1653, comme« un tableau
représentant iJ/rt;7'zV,yt^x«i- avec saint Pierre
et saint Pault- Il se demande si ce ne serait
pas là le tableau offert à l'église par son pa-
tron spirituel, l'abbé miiré de Saint-Bavon.
M. Kaemmerer, trompé par Wauters, dit ('')
qu'il provient apparemment de Middel-
bourg, mais il n'accepte pas son attribution à
1. Le i" octobre 1827, au prix de 2,000 florins. Nous
devons ce renseignement à l'obligeance du savant direc-
teur delà Galerie, M. C. Hofstede de Groot.
2. Handhook of Painting, pp. 69. London, 1860.
3. Sept Études, Bruxelles, 1893, p. 38. Il est regrettable
que M. Wauters n'a pas donné le texte exact de cette
mention. Ne serait-ce pas une traduction, et le tableau
dont il est question ne représenterait-il pas Notre-Dame
entre les deux saints apôtres, patrons de l'église de Mid-
delbourg ?
4. Memling, pp. 11 et 14. Bielefeld, 1899.
Memling de ce panneau; il le croit l'œuvre
d'un inconnu qui aurait Heuri entre ce maî-
tre et Van der Weyden. Or ce tableau doit
avoir été peint dans les dix premières
années du X V P siècle. Le prélat, qui y est re-
présenté à genoux, est un luxembourgeois,
Nicolas Le Ruistre, prévôt de l'église
Saint-Pierre à Louvain, chanoine de Ter-
monde, et archidiacre de Bruxelles ; il fut
sacré évêque d'Arras en 150 1, et décéda à
Malines, le 9 novembre 1509. Il a fondé
dans cette dernière année le Collège d'Arras
à Louvain, et ce tableau ornait l'autel de la
chapelle de cette institution jusqu'à sa sup-
pression.
Peinte sur un panneau de chêne qui a
78 centimètres de haut sur 1 mètre 29 cen-
timètres de large, la composition représente
la Déposition du Christ, avec le donateur
protégé par les saints apôtres Pierre et Paul.
La scène se passe au pied du Calvaire ;
le montant de la Croix s'élève au milieu
sur un monticule rocailleux ; à droite se
trouve la partie inférieure de l'échelle au
moyen de laquelle la descente du corps du
Christ a été faite par Joseph d'Arimathie et
Nicodème. Ceux-ci, le portant sur un linceul,
le déposent à terre au premier plan, Joseph
le soutenant encore sous les bras avec
une tendre sollicitude. A gauche du Christ,
la Sainte Vierge, plongée dans la plus pro-
fonde douleur, l'adore en se penchant en
avant ; elle est soutenue par saint Jean qui
se tient debout à sa droite. Derrière Joseph,
une des saintes femmes, le bras gauche posé
sur l'échelle, les mains jointes et comme
crispées, paraît accablée par la douleur ;
une autre des saintes compagnes de la
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iles peintures ties maîtres inconnus.
12:
Vierge, à genoux, la main sur la poitrine,
détourne la tête. A l'extrême droite, un peu
en arrière, sainte Marie-Madeleine, debout,
essuie ses larmes avec son manteau. A
gauche, Nicodème, debout, la tête appuyée
sur la main droite, tient encore l'extrémité
du linceul. A l'avant-plan, le donateur à
genoux, revêtu des ornements pontificaux,
chape en brocart de velours cramoisi et
or avec orfrois historiés des figures des
apôtres, maintenue par une bille en or
ornée de la statuette de Notre-Dame
tenant l'Enfant entre les bras adoré par
deux anges. L'évêque est coiffé d'une mitre
blanche enrichie de pierreries, et porte des
gants avec deux anneaux sur le premier et
le cinquième doigts ; sa crosse est posée
contre son épaule droite. Derrière lui saint
Pierre et saint Paul tenant les clefs et le
glaive qui les caractérisent. — Le fond est
un paysage charmant, où l'on voit des che-
mins serpentant entre des arbres, animés de
cavaliers et de piétons, un château entouré
d'eau où nagent des cygnes ; au lointain,
à droite, une ville avec plusieurs tours, et à
l'extrême gauche, sur une colline, un grand
pigeonnier.
La composition de ce tableau est excel-
lente ; les figures, groupées avec un talent
supérieur, rappellent à certains égards Ro-
ger, mais le peintre, tout en variant les
expressions de la douleur, a évité les mou-
vements exagérés qui déparent parfois les
fipfures dans les tableaux où le maître tour-
naisien a traité le même sujet ; la touche
est aussi plus moelleuse, les contours moins
durs, les draperies mieux jetées, avec moins
de plis anguleux ; certains détails, tels que
la fourrure de la femme auprès de l'échelle,
rappellent Quentin Metsys. Le paysage
fait penser à Thierry Bouts, mais le coloris
semble plutôt avoir été inspiré par l'étude
des œuvres de Jean van Eyck et de Pierre
Cristus. Il serait à désirer qu'on retrouve
le nom du peintre, bien probablement men-
tionné dans le compte des exécuteurs
testamentaires de Nicolas Le Ruistre, ou
dans un inventaire du mobilier du Collège,
très probablement conservé dans l'un ou
l'autre dépôt d'archives.
W.-H James Weale.
;S&y ;w^»k »^v^ iMn A^-A iJ^U A^vlhc A^^r^ A^vihc »^^ a'^-vc Jt^v^ a"^ A^A^v-k \^yU »<g
(|^ Bra0 reliquaire a vtçim BtXlitolaQ dc Valenctennes.
rriirînriiiiiiTj'mmuT
§
' -f^^ ^Af5-^ V>* *;i5'' *i*'>^ *x*^ VJ^ VJ-* ^x^ ^xiT^ 'x^l* ^y^t^ 'i^'* 'x'-J'' *^^
fe
n était pas nécessaire |
aux artisans du moyen
âge d'employer des ma-
tières premières rares
ou coûteuses pour pro-
duire de véritables ob-
jets d'art ; des éléments
les plus simples ils tiraient les effets les
meilleurs. C'est là une observation que l'on
a faite bien des fois déjà et qui trouve
dans le bras-reliquaire de l'église Saint-
Nicolas, à Valenciennes, une nouvelle et
exacte confirmation.
Ce reliquaire se compose d'une âme en
bois de chêne, longue d'environ o.'"-35c.,
figurant assez sommairement un avant-bras
revêtu d'une manche, plus large vers le
coude, plus étroite vers le poignet et dont
la section donne un ovale aminci vers la
partie externe du bras. Des traces nom-
breuses d'une peinture rouge montrent que
jamais le bras ne fut entièrement recouvert
de métal ; des applications de cuivre en font
toute la décoration.
Trois bandes de cuivre cerclent le bras
au milieu et aux deux extrémités ; mainte-
nues entre elles par deux autres bandes
verticales, elles circonscrivent, sur chaque
face, deux espaces carrés qui laissent place
à d'autres ornements.
Ces bandes,larges de o.'"03c-,ont été fon-
dues, retouchées habilement au ciseau et
dorées. Entre leurs bords extérieurs laissés
nus et le long desquels apparaissent sans
aucune dissimulation les clous qui les fixent
au bois, se détache, en un très léger relief
accentué par le ciseau et sur un fond fine-
ment quadrillé de hachures serrées et
profondes, toute une suite de figures de la
plus amusante variété: des têtes d'animaux
bizarres, d'hommes encapuchonnés, de
femmes voilées, de chevaliers coiffés de
heaumes surmontant des corps d'oiseaux
à pattes de quadrupèdes terminés par des
queues extraordinaires, ou même par une
autre tête plus ou moins grimaçante. Entre
chacun de ces curieux petits monstres ont
été réservés des espaces circulaires, que
viennent recouvrir des cabochons de diffé-
rentes grandeurs. Les pierres ne sont guère
que des verroteries bleues ou violettes : ce-
pendant, à la face principale du bras, on a
employé quatre intailles antiques: une tête
fruste, une louve, un Bacchus, un paysan
portant un enfant dans une hotte; ces deux
dernières sont d'un travail assez fin.
La bande supérieure dépasse légèrement
l'âme de bois et protège le fond du reliquaire
couvert d'une plaque de cuivre gravé : un
losange inscrit dans un quatrefeuille encadre
une figure de moine assis — un bénédictin
semble-t-il — bien drapé dans un froc aux
plis nombreux et soufflant dans une buisine.
Des arbrisseaux très stylisés remplissent
symétriquement les vides compris entre les
lobes du quatreft jille et les angles du losan-
ge qui les pénètre. Comme ce motif — dont
l'ordonnance générale s'inscrit dans un cer-
cle — - ne saurait suffire à décorer toute la
surface de la plaque, un trèfle formé de trois
ovales garnis de feuillages complète la com-
position, dont le dessin correct, rendu par
des traits continus, ressort en réserve sur
un fond strié de lignes brisées très rappro-
chées.
De la bande supérieure à laquelle il
adhère en un point de son pourtour,émerge,
pour figurer le poignet, un cercle de cuivre
orné de cannelures horizontales et surmonté
d'une plus étroite bande rehaussée de cabo-
Bra0'reltquane à l'égïise ^t il^tcolas De lîalenctennes.
127
chons. Cette sorte de douille servait à fixer
la main bénissante ; par ce côté aussi étaient
introduites des reliques disparues aujour-
d'hui, mais dont 1 enumération se lit dans
une inscription placée d'une manière assez
particulière : elle est gravée au revers d'un
128
jRrtuc ïic r^vt cbvctieu.
des ornements plaqués au milieu des espaces
carrés formés par l'intersection des bandes
de cuivre.
On peut comparer ces ornements aux
reliquaires portatifs désignés sous le nom
àç. phylactères ; ils en ont l'apparence : dans
une lame de cuivre quadrilobée aux bords
repoussés en biseau, on a tracé quatre cer-
cles ; l'intérieur évidé de chacun d'eux
entoure une série de petites arcatures trilo-
bées découpées comme une rose sans rayons.
Des pierres montées lourdement, comme
toutes celles qui entrent dans la composition
du reliquaire, rehaussent également le cen-
tre de l'ornement et d'autres points de sa
surface.
Une mince feuille de cuivre appliquée
contre le bois fait un fond et donne l'illusion
d'un travail fondu ou ciselé dans une masse
pleine. Au phylactère supérieur de la face
principale, cette lame, parce qu'elle peut
devenir visible tout entière, a été nette-
ment découpée en un quatrefeuille relevé
de quelques dessins très simples ; elle est
percée en son centre d'une ouverture qua-
drilobée. A cette place sans doute on baisait
les reliques, — sans rien en voir d'ailleurs,
— car ce simulacre d'ouverture ne commu-
nique nullement avec la cavité intérieure :
ce n'est pas un morceau de verre qui la
recouvre, mais seulement un fragment très
usé d'une étoffe de velours rouge ('). Sur
cette feuille, avec laquelle il coïncide exacte-
ment, un ornement de tous points semblable
aux trois autres, se rabat avec une charnière
et se fixe par une goupille, l'une et l'autre
pratiquées sur la tranche des deux bandes
verticales. Pour donner plus de rigidité à
ce couvercle mobile, on l'a renforcé d'une
I. La présence d'un tissu à cette place mieux protégée
pourrait faire croire que tout le bois avait été recouvert
d'étoffe, mais on n'en distingue aucune autre trace sous
les bandes ou applications métalliques.
lame de cuivre dont la surface lisse s'est
trouvée très propre à recevoir une inscrip-
tion conçue en ces termes :
De le
Coulombe u
Diex ^ fu loiés
Dou brac. S. Lo-
renc. De le piere
sour coi li sains Jhesu-Cri-
st kei ('). Dou brac. S. Bertrem-
^CnFl
ieu. Dou brac. S. Phelipe. De. S.
Andriu. De se crois. De S. Ni-
caise. Dou sépulcre Nost-
re Sign \eur'\. De le Magdel-
aine. Des d-
ras Nostr-
e Dame.
I. De la pierre sur quoi le sang de J. C. chut. Dans le
voyage bien connu de Bernard de Breidenbach, édition
imprimée«/>^^ Erluudumde Rcuiuididc Traiecto inferiori
Bras reliquaire à VtQiist ^t-iBicolas tie 31laleiictennej&.
129
Les formes dialectales de cette inscrip-
tion, que sa rédaction en langue vulgaire
rend plus intéressante encore, permettent
d'attribuer à la Flandre wallonne ou au
Hainaut la fabrication du reliquaire. Il
serait téméraire de préciser davantage. A
la vérité, pour se procurer les parcelles des
nombreuses reliques énumérées plus haut,
il aurait suffi de s'adresser aux églises et
couvents de Valenciennes dans l'ensemble
desquels, — différents inventaires le mon-
trent, — on aurait pu trouver la plupart des
éléments de cette collection. Toutefois aucun
document ne fait mention de ce bras-reli-
quaire. Il était relégué dans une armoire ;
depuis plusieurs années la main qui le ter-
minait avait été vendue à un brocanteur,
parce qu'elle était d'ivoire, à ce que l'on
rapporte. Un savant ecclésiastique, M. le
D>' Desilve, le découvrit par hasard et en
fit connaître la valeur au clergé de St-
Nicolas (').
Comment est-il arrivé dans cette église ?
D'où provient-il .■* On ne sait; St-Nicolas,
in civitate Moguntina, anno salutis M. CCCC
LXXXVI Februarii >, au bas d'une gravure remarqua-
blement exacte pour l'époque et qui représente le parvis
de l'église du Saint-Sépulcre, se trouve cette légende :
Ante templum sepiilchri domini localus est lapis iste
super quo Christus crucem bajulans cecidit. Quelques
pages plus loin, au chapitre De egrcssti ex templo
dominici sepulchri, on lit : Item ante tempbtm ad
decem passus est lapis quidam positiis in signum qiiod
Christus ibi crucem bajulans pre amentia et debilitate
cecidit in terra sub cruce. Alius quoque tapis ostenditur
ptope murum' qui adhuc sanguinis Clirisli vestigia et in-
signia prefert. C'est sans doute de cette dernière qu'il est
question ici.
I. Mentionné par Mgr Dehaisnes,Z,£ Nord monumental,
p. 133, il avait été signalé déjà dans la Gasette des Beaux-
Arts, 1875, t. XI, P- 156- Exposition de Lille, pur A.Dar-
cel, qui en attribue la possession à l'église StNicolas
d'Arras.
érigé en paroisse lors du Concordat, était
autrefois l'église du Collège des P P. Jésuites ;
si un tel objet était venu en la possession de
ces religieux, ils en auraient probablement
enlevé les reliques pour les transférer dans
quelque vase plus conforme au goût de leur
temps que ne l'était ce travail de bois et de
cuivre dont il n'y avait rien à tirer une fois
qu'il était hors d'usage. C'est même à son
peu de valeur intrinsèque qu'il a dû sans
doute d'échapper aux brise-images des
XVIe et XVI I le siècles et d'arriver jusqu'à
nos jours, à peu près intact depuis le milieu
du XI I le. On peut, en effet, malgré un carac-
tère d'archaïsme dû à la présence des cabo-
chons, et si l'on en juge d'après différents
détails dans les dessins et l'inscription, faire
descendre à cette époque la composition du
reliquaire de St-Nicolas.
Assurément ce n'est pas un chef-d'œuvre.
Bien que dans le fini des gravures et la
correction du dessin, on retrouve quelques-
unes des qualités qui signalent des travaux
remarquables exécutés dans la réeion au
même temps, il faut avouer que la monture
en est très peu soignée — on croirait même
qu'il a été remottté par des mains inhabiles.
La décoration toute profane n'a guère de
rapport avec l'objet et ses fantaisies seraient
aussi bien à leur place pour bander un
coffret ou cercler un oliphant : de tels mo-
dèles devaient être d'un emploi courant
dans l'atelier où fut exécuté à peu de frais
ce reliquaire « de fabrication économique »,
mais d'aspect très décoratif.
Louis Serbat.
\^^ A^^ A^ * A^* k^yU iM* *^^ A^X A^-* a"^^ \^^ \^^ a'^ A^-A Jt^nA ^^jg
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fe
Quelques observations sur le
'' ffiemling " De ffi. Jï. lïacmmerer.
|E volume sur Memling publié par
M. L. Kaemmerer a déjà fait le sujet
d'une notice dans cette Revue. Cette
publication est certes la meilleure et
la plus complète de toutes celles qui ont paru
sur ce maître; cependant elle renferme, outre des
attributions et des appréciations discutables, un
certain nombre d'assertions dont je crois utile,
dans l'intérêt de l'histoire, de démontrer l'inexac-
titude.
M. Kaemmerer (p. 70) dit que les deux pan-
neaux appartenant autrefois au poète Rogers,
ensuite à M. Vernon Smith et faisant actuel-
lement partie de la collection de M. Kahn à
Paris, sont les volets du tableau donné en 1478
par le miniaturiste Guillaume Vrelant à la Gilde
de Saint-Jean et de Saint-Luc à Bruges, pour
orner l'autel de la chapelle de cette corporation
dans l'église abbatiale de Saint-Barthélemi dite
del'Eeckhout.U assure (p. 97 j que c'est par erreur
que le tableau de la Passion de Notre-Seigneur,
actuellement dans la Galerie royale de Turin,
passe pour être le tableau donné par Vrelant,
tandis qu'il est, au contraire, celui qui se trouvait
dans la possession de Côme de Medicis (p. 96).
Il est à remarquer tout d'abord qu'un seul
tableau fut donné par Vrelant, et que sur ce
tableau était peint son portrait et celui de sa
femme. Les anciens de la Gilde se réunirent chez
Vrelant en 1478, et là ils firent un accord avec
Memling pour la peinture des volets intérieurs
destinés a protéger le tableau. Celui-ci fut en-
cadré aux frais de la Gilde qui paj'a cinq escalins
de gros au menuisier la confection du cadre et
des volets qui furent remis à Memling, lequel
reçut quatre livres deux escalins de gros en
rémunération du travail, qui l'occupa pendant
deux ans. La Gilde fît faire ensuite deux autres
volets extérieurs pour protéger les premiers qui
doivent avr)ir été peints des deu.x côtés. En
1480, le polyptyque était placé sur l'autel ; en
1490, le tableau et les deux volets furent nettoyés
et revernis, aux frais de la Gilde ; à cette oc-
casion, le doyen de la Gilde, Arnould Basekin, et
le relieur, Jean Le Clerc, firent peindre en gri-
saille, à leurs frais, les figures de saint Arnould
et de saint Nicolas sur la face des volets
extéiieurs.
Dans un inventaire du mobilier de la Gilde,
dressé en 1619, le tableau de Memling est appelé
le tableau des Douleurs de la sainte Vierge.
Cette même année, la Gilde fit peindre un tableau
d'autel à la mode du jour par Guibert Janssens
au prix de 16 livres de gros ; c est alors que le
tableau de Memling fut placé contre le mur
latéral de la chapelle. En 1624, il fut vendu afin
de faire place à un buffet d'orgues. J'ignore quel
en fut l'acquéreur, mais, en 1637, Pierre van
Nieuwmunster et Hélène van Crombrugge, sa
femme, en firent faire une copie légèrement
agrandie. L'original, exporté du pays, fut donné
au couvent des Frères Prêcheurs à Bosco près
d'Alexandrie dans le Piémont. Lors de l'inva-
sion de l'Italie par les Républicains français, il
échappa heureusement au pillage, et, pins tard,
fut acquis par le roi, qui le plaça dans la Galerie
royale où il se trouve encore.
Je ferai encore remarquer une particularité
qu'offrent les panneaux de la collection Kahn
(Kaemmerer, p. 47), c'est le portrait de la dame
peint sur le volet de droite ; celle-ci devait se
nommer Anne, et elle est bien plus âgée que
l'homme représenté sur le volet gauche, qui doit
être le portrait de son fils. Vrelant était déjà
établi comme miniaturiste avant 1454 et fut un
de ceux qui, cette année, se constituèrent en
Gilde ; il mourut le jour de saint Boniface,
5 juin i4Si,sa femme lui survécut jusqu'en 1494.
A la page 1 10, M. Kaemmerer, parlant du por-
trait de Marie Morccl, plus connu sous le nom
de la Sibylle Sambetha, qui lui est donné depuis
le XVI« siècle, dit qu'elle est revêtue du costume
des sœurs de l'hospice Saint- Julien et que sa
mère, la femme du riche banquier et bourg-
mestre, Guillaume Moreel, se mit aussi au ser-
vice de cette institution. M. Kaemmerer doit se
£©élanges.
131
faire une idée singulière de la vie des sœurs qui
se consacraient aux soins à donner aux pèlerins
et à quêter des aumônes en faveur de l'hospice.
Du reste, le Règlement du 7 septembre 1331,
qui était encore en vigueur en 1600, leur prescrit
un habit blanc et gris; tandis que cette demoiselle
porte une robe garnie de fourrure, une coiffure à
la mode du jour et orne son costume d'un riche
joyau suspendu à une chaîne d'or, et ne porte pas
moins de six bagues à ses doigts. A la page i iS,
nous lisons que Martin van Nieuvvenhove, de
même que Guillaume Moreel, fut tuteur de cet
hospice, auquel il donna comme souvenir de son
administration le diptyque actuellement conservé
l'hôpital Saint-Jean. La liste complète des tu-
teurs de cette institution, conservée aux archives
des Hospices civils, démontre que ni l'un ni
l'autre de ces deux hommes n'ont rempli ces
fonctions. Nous croyons que le diptyque était
primitivement placé dans la chapelle de chan-
trerie de la famille à l'église Notre-Dame, et
qu'il a été transporté à l'Hospice Saint-Julien
en 1579. pour l'y mettre à l'abri des iconoclastes.
Il est possible toutefois que Jean van Nieuwen-
hove, fils de Martin, le donnât à l'Hospice dont
il fut tuteur en 1505- 1506.
Le saint à la droite de saint Christophe n'est
pas saint Benoît (p. 116), mais bien saint Maur,
et la fille aînée du donateur ne porte pas le cos-
tume des sœurs de l'hôpital Saint-Jean, mais
l'habit dominicain. Le saint qui protège la femme
de Jacques Floreins n'est certainement pas saint
Benoit, mais probablement saint Dominique. Le
tableau reproduit à la page 1 1 ne provient pas
de l'église de Middelbourg, mais bien de la cha-
pelle du Collège d'Arras à Louvain, ainsi que je
l'ai démontré dans un article précédent de cette
livraison.
Ce n'est pas le frère Jean Floreins qui remplit
les fonctions du jaugeur de vin auprès de la
Grue, au fond du tableau du maitre-autel de
l'hôpital Saint-Jean, mais le frère Josse VVillems,
maître de Ihôpital depuis l'année 1475 jusqu'en
1488. Cette erreur a sa source dans la « Notice
sur les tableaux du Musée de l'Hôpital », publiée
par M. le vicomte de Croeser, administrateur de
cette institution.
Il n'est peut-être pas inutile de relever encore
quelques légères erreurs qui se sont glissées,
probablement par inadvertance: pp. 30-3 i, il faut
lire Barbe au lieu de Katherine et Katherine
pour Barbe ; p. 40, prince-évêque pour arche-
vêque de Liège; p. 122, Kerniel dans la pro-
vince belge de Limbourg, pour Limbourg ;
p. 107, Anne de Blasere fut la femme de Jean,
fils de Michel van Nieuwenhove, dont Martin
était le fils aîné.
Une question assez importante est soulevée
par M. Kaemmerer (p. 14) ; il dit, en effet, qu'en
1459 il y avait au service de Roger de In Pastiire
à Bruxelles un jeune peintre nommé « Hayne »,
qui peignit l'extérieur des volets d'un retable
livré par Roger à l'église Saint-Aubert à Cam-
brai. M. Kaemmerer remarque que dans le pays
rhénan le diminutif « Henné » était fréquem-
ment employé au XV= siècle comme diminutif
de Hans, et que « Hayne » en est l'équivalent
phonétique français. Je dois faire remarquer
d'abord que l'interprétation du passage dans les
Mémoriaux de l'abbé Jean Robert, est tout à
fait fausse. D'abord, le peintre Hayne ne peignit
pas l'extérieur des volets, mais seulement le
cadre, le couronnement et la boiserie qui séparait
le retable des stalles du chœur, et qu'il fit ce
travail non pas pour Roger, mais à la demande
de l'abbé ('). Ensuite, chose plus importante à re-
marquer, ce Hayne n'était aucunement au service
de Roger, mais un jeune peintre de Bruxelles,
qui habitait Valenciennes depuis 1454, et qui, au
cours de cette année, peignit pour la fabrique de
la cathédrale de Cambrai, « xij ymages de Nostre
Dame à couleur d'oie et bien estoffées », au prix
d'une livre la pièce.
Si donc ce Hayne est bien Hans Memlinc, il
doit avoir quitté Bruxelles en 1454, ou avant
cette date, pour se rendre à Valenciennes. Là,
dans ces quatre ans, il doit avoir connu Simon
Marmion, si même il n'a pas travaillé comme
aide sous ses ordres, ce qui expliquerait la
ressemblance entre certains groupes du diptyque
I. Le tableau fut livré à Cambrai par la femme et les ouvriers de
Roger, le 8 juin 1459. Le 6 août, il fut payé « à Pierart Kemon,
pour une reprise et une liste de bos, mis et assiz desoubz et deseure
le dit tableau, i lyon d'or de 1. s. t. Item fu depuis payet à Hayne,
jone pointre, pour poindre autour dudit tabliau le liste et le deseure
et jusques as cayères de cuer, LX s. du nostre. tt Mémoriaux de
Jean Robert, abbé de Saint-Aubert, dans De Laborde, Les Ducs
Je Bourgogne. Preuves, I, li.\. Paris, 1849.
KHVUK DK L AKT CHRÉTIEN.
I9OI. — 2™* LIVRAISON.
132
3Re\)uc De ravr cbvctieu.
peint par Marmion (?) pour Jeanne de Bourbon
et les tableaux de Pesth et de Lubeck. Un
examen des archives de Valenciennes pourrait
amener la découverte d'un document qui résou-
drait cette question.
\V. H. James Weale.
Ostensoir, style Du XV^ siècle.
— ('Brc;s(or ûc ïîotrc=X)flme de Clérii.) —
E vase sacré est en vermeil, d'une hau-
teur de 80 centimètres. Sa forme est
celle d'une monstrance rayonnante
du XV'^ siècle.
M. Renouard, artiste peintre d'Orléans, qui en
a conçu et dessiné le plan, s'est inspiré, pour le
Ostensoir au trésor de Notre-Dame de Cléry (XV siècle).
Mélanges.
133
couronnement, d'un pilier dont on admire les
pinacles et le? fenestrages, dans la chapelle des
Dunois-Longueville ; tous les motifs décoratifs
sont inspirés du style de l'église de Cléry.
C'est M. Favier, de Paris, qui a fondu et ciselé
cette belle pièce d'orfèvrerie.
Au premier coup d'œil on est frappé de la
beauté des proportions, de la pureté des lignes, et,
après examen, on admire la richesse de l'orne-
mentation.
On peut dire qu'il est à tous les titres un
ex-voto : le métal, or et argent, dont il est fait,
provient, comme tout ce qui le décore, de dons
offerts à Notre-Dame de Cléry. Aussi, sous le
pied, sont gravées ces paroles : « Vanitates di-
vitiasque suas ut sint divincB majestati tlironus
gloriœ, per Mariant obtuleriint. »
Le pied, entouré à sa base, de grains de corail,
est orné d'émaux, de médaillons et de croix de
la Légion d'honneur. Les médaillons, œuvre de
M. Louis Bourdery, de Limoges, conservateur
des émaux du Louvre, reproduisent le sceau du
chapitre de Cléry, le sceau pour frapper les mé-
réaux des chanoines, celui du doyen avec le
contre-sceau ; la finesse du dessin et les nuances
de l'émail sont au-dessus de tout éloge.
Les croix représentent les différents régimes
de la France aux pieds du Christ-Roi, depuis la
croix de Saint-Louis jusqu'à celle de la Légion
d'honneur de la troisième République.
Le nœud, de même que le centre du soleil, sont
garnis de pierres précieuses : rubis, améthystes,
topazes, provenant de chatons d'anciennes
bagues.
Le plateau sur lequel s'appuie le couronnement
est soutenu par deux anges qui portent le
monogramme de Notre-Dame en lettres d'or sur
fond émail bleu. Sur le bord de ce plateau une
feuille en or tombe comme une grâce du cœur
du Christ.
Le croissant, orné de huit diamants entremêlés
d'opales, est supporté par une broche ajourée en
or, dans laquelle est enchâssé un sceau également
en or, sur les deux faces duquel est ciselée une
fontaine, symbole de la source des grâces. Six
petites tètes de chérubin entourent le cercle qui
doit recevoir l'hostie.
Parmi les nombreux bijoux (il y en a près de
deux cents) qui ornent le pied et le plateau, on
remarque un magnifique camée orné de trente-
deux perles fines et des broches de prix dont
l'une représente un ange aux ailes éployées. La
croix en or, fleurdelisée, qui est au sommet de
l'ostensoir, est ancienne ; sur ses deux faces, elle
porte le Christ et la Vierge.
Cette œuvre d'art fait honneur à ceux qui
l'ont conçue et exécutée, et est d'un prix inap-
préciable.
Saget.
3ics principes De Part au mopen âge et
les .fantaisies De la Décoration moDerne.
ANDIS que nous assistons au déve-
loppement, toujours croissant, de l'é-
tude de notre art national, de cet art
chrétien du moyen âge, que nous
voyons, dans presque toute l'Europe, honoré
comme il convient, compris par le peuple et
provoquant l'admiration universelle; nous cons-
tatons d'autre part, et non sans regret, les ten-
tatives prétentieuses de certains esprits pour
faire prévaloir un art indépendant de toute règle,
de toute tradition, de toute morale, de toute
logique.
Qu'on nous pardonne d'avoir laissé échapper
de la plume le mot « art ». Ce genre moderne sur
lequel nous allons jeter un coup d'œil, très briè-
vement, ne mérite pas ce titre, car il ne réunit
aucune des conditions requises pour être appelé
un art.
« L'art, dit Gaborit, est un ensemble de règles
pratiques employées pour produire un effet soit
utile ou agréable. »
Dans la décoration moderne telle que souvent
elle est conçue de nos jours, toute règle est ban-
nie, et assurément l'effet produit n'est ni utile ni
agréable ; loin de là, il est hiéroglyphique. Sans
le beau il n'y a pas d'art.
Examinons d'abord rapidement les principes
du moyen âge, comparés à ceux de ces dessina-
teurs modernes, si ce n'est faire affront au.x pre-
miers de tenter pareille comparaison.
Les artistes du moyen âge ont exalté ce qui
est immortel ; ils ont idéalisé l'homme en retra-
134
3Rcbur ïjc rSrt cbvctten.
çant en lui l'image affaiblie de l'Idéal insaisis-
sable, le Créateur; ils le faisaient comme planer
au-dessus de ce qui est mortel, en vue de la
destinée future du Chrétien.
Qu'y a-t-il d'étonnant, dès lors, que les œuvres
principales des plus beaux siècles de l'art soient
empreintes de tant de grandeur, de caractère et
de force? qu'elles arrachent à la fois l'admiration
et des aveux d'impuissance à la critique mo-
derne lorsqu'elle est impartiale ?
« Le style,dit C. Blanc, est le reflet de l'âme de
l'artiste dans l'exécution de son œuvre.»
Qu'on ne vienne pas objecter que le moyen
âge repoussait le naturel ; loin de là, les belles
œuvres de cette époque réfutent d'elles-mêmes
cette critique. Naturel n'est pas naturalisme.
C'est une interprétation savante, idéale et non
la copie servile de la nature qui doit guider
l'artiste dans son œuvre. L'art n'est pas fait pour
tenir compte uniquement des beautés de la terre.
Le moyen âge s'est toujours efforcé de repro-
duire des êtres conformes à la nature, et quand
ils se trouvaient distants de l'œil, l'artiste em-
ployait même tout son talent et son expérience,
pour que, disproportionnée, vue de près, l'image
prît les proportions les plus exactes, vue à dis-
tance. Peut-être objectera-t-on que cet art fut
exclusivement religieux, qu'il ne se prêtait nulle-
ment aux représentations de scènes profanes.
Cette objection se détruit par le seul examen
des œuvres du moyen âge, les jardins d'amour,
les soties, fabliaux, etc., qui y abondent.
L'artiste voulait mettre son œuvre à la portée
des plus ignorants ; pour ceux-ci, l'art était sou-
vent la seule source de leurs connaissances. « Heu-
reux, dit E. Renan, celui qui est assez grand
pour que les petits l'admirent ; la vraie grandeur,
c'est d'être vu grand par l'œil des humbles. »
Il serait inutile de s'étendre davantage sur le
développement des idées, sur les voies suivies par
les vrais grands artistes pour atteindre leur but.
Bien d'autres plus autorisés que nous, ont déve-
loppé d'une manière savante les principes de
l'art du moyen âge. L'exposé des théories et des
résultats de quelques dessinateurs à la mode fera
plus clairement ressortir la grandeur des pre-
miers, par ce contraste frappant.
L'impression résultant de l'examen de la
plupart des peintures modernes, affiches, illus-
trations, vitraux, prétendument artistiques, est
qu'on se trouve en présence d'une lutte préten-
tieuse d'individu à individu. La base de ces pro-
ductions n'est plus celle de nos devanciers, soumis
à des lois, unissant leur action pour atteindre
plus sûrement le beau, partant de l'idéal religieux.
La foi, seule créatrice du sublime, est chose
trop banale pour ces grands esprits ; on veut
s'affranchir de ce lien que l'on trouve humiliant
pour de si hautes intelligences ; en sa place on
fait parade de personnalité et d'indépendance
artistique, c'est de mode actuellement. Heureuse-
ment les écarts, aboutissement fatal de cette voie
nouvelle, viennent presque toujours témoigner
de son absurdité.
L'art sans Dieu n'existe pas. Sans lui, plus
d'école, plus d'unité,seuls le caprice et la fantaisie,
parfois tristement dévoyés, servent de guide.
L'homme se sent trop grand, trop épris de son
talent, pour se plier à des règles un peu saines.
Pour lui, nous sommes des copistes, des pasti-
cheurs du moyen âge ; son génie, à lui, n'admet
pas cette servitude, il est créateur, personnel,
indépendant de toutes lois. L'art pour l'art! voilà
le grand mot ! Idéal ! voilà le but visé ! et sous
prétexte d'idéal, le naturalisme perce partout, et
les sentiments les moins dignes, les passions les
plus viles ne se font jour que trop souvent,
hélas ! à travers ces voiles, bien minces, dont on
veut bien, au hasard de la brosse, recouvrir ces
scènes modernes. La personnalité ! nos artistes
du moyen âge n'avaient-ils donc pas, eux aussi,
leur personnalité? Mais, sensés, ils savaient se
conformer aux formules traditioimelles de leur
époque, faire concorder le but et les moyens.
En conséquence, le vague, l'indécis, un esprit
rêveur, égaré même, se trahissent dans ces com-
positions et semblent être très ardemment re-
cherchés par ces cultivateurs du beau. La figure
humaine, comme mue par un ressort automati-
que, se dégage d'un corps qui va se perdre dans
l'espace, ou un semblant de nuages ; elle plane,
indécise, négligente, les yeu.x maladifs, les che-
veux épars, au milieu de plantes enchevêtrées
comme à plaisir, pour être le plus méconnais-
sable possible. Ce corps est mou, sans vie, la
chair y est, mais c'est tout ; les règnes végétal et
£©élaiige0.
135
animal sont complètement travestis, mécon-
naissables. Mais que dire! c'est l'idéal de M. X.
M. Z., plus génial, fera plus inintelligible encore;...
l'idéal est mieux atteint! Ne vous étonnez pas de
rencontrer le pot à fleurs idéal, la cafetière idéale,
des ustensiles de toutes sortes idéaux. Heureux
l'homme dont l'intelligence sera sufifisamment
développée pour saisir l'idéal qui s'y trouve
caché !
Le dessin doit être une langue claire, compré-
hensible pour tous. Dans ces productions moder-
nes il est insaisissable à presque tous les hommes,
même doués d'une intelligence développée ; à
plus forte raison doit-il être énigmatique pour
le peuple ; heureusement pour le peuple !
L'art moderne n'est plus populaire, ce n'est
qu'un caprice, un orgueil fantaisiste, une mode !
Au lieu de guider le siècle, il le suit, sans se
préoccuper de ses travers, de ses tendances ma-
térialistes qu'il pourrait redresser ; il s'y plaît au
contraire et les favorise ; il a créé l'idéal animal ;
qu'on nous pardonne ce mot ! L'art moderne
s'est mis à genoux pour adorer la nature. La
mode ! Combien il est triste de voir l'art ravalé
aux caprices d'une mode, et des hommes de
talent, car il faut certainement le reconnaître
pour quelques-uns, y consacrer leur temps et
leur travail. Et que dire de l'emploi de la symé-
trie? quels abus! là oi^i la symétrie est inutile, elle
est fade.
L'exécution moderne n'est pas l'interprétation
d'un idéal ; son origine n'a pas de base sérieuse
et d'ordre supérieur ; elle est l'effet d'une préoccu-
pation personnelle prétentieuse, indépendante
de toute règle. On peut dire avec M Day : « c'est
de l'anarchie artistique ».
Nous ne nous en prenons, évidemment, dans
notre appréciation, qu'à ces œuvres dégagées de
tout esprit pondéré, telles que la mode les a con-
quises, c'est-à-dire à ces illustrations, affiches,
vitraux énigmatiques, devant représenter des
rêves, des visions saugrenues, des végétaux sans
nom, tantôt grouillant sur le sol, tantôt élançant
leurs tiges et leurs feuilles effilées, étiolées dans
l'espace, telles des ficelles sans lien et sans signifi-
cation ; à ces animaux bizarres dans lesquels on
ne trouve qu'une combinaison incohérente, d'au-
tant plus originale qu'elle est invraisemblable.
Seul, l'art gothique, après le XVIII<= siècle, put
se relever de ses ruines sur lesquelles la renais-
sance avait passé comme une importation étran-
gère, sans durée. L'Angleterre, l'Allemagne, la
France, la Hollande, la Belgique rouvrirent d'im-
portantes écoles, à l'art national, elles le reprirent
au moment de sa plus belle floraison, alors que la
Renaissance avait cru l'étouffer pour toujours; et
bientôt, l'on vit apparaître des œuvres nouvelles,
basées sur les principes du moyen âge; capables
de soutenir la comparaison avec ces dernières.
L'artiste pénétré des vraies traditions de l'art
regrettera toujours les écarts que nous signalons ;
il ne saurait y tomber, ces principes lui étant plus
sacrés qu'une orgueilleuse indépendance. Il re-
connaîtra que seul, le point de vue chrétien, met-
tant l'image de Dieu dans l'homme, et consé-
quemment en faisant le siège des vertus les plus
pures et les plus héroïques, peut le conduire au
vrai beau, à l'idéal, au sublime. Ses personnages
seront empreints d'une sorte de grandeur divine ;
les végétaux dans leur simplicité, les animaux
dépeints dans le rôle que Dieu leur a assigné,
rediront les magnificencesde l'œuvre du Créateur
et nous donneront par la seule contemplation,
un avant-goût de l'union à ce grand Artiste,
source des plus belles inspirations de l'art.
Joseph O.STERRATH.
Ire monumcmt De fligr Hioet à »i)on.
|E jeudi 27 décembre 1900, en l'église
cathédrale Saint-Bénigne de Dijon, a
été solennellement inauguré par l'évè-
que actuel, Mgr Le Nordez, le monu-
ment élevé par le diocèse à celui qui, pendant
plus de 45 ans, en fut le très digne et très vénéré
pasteur.
Né à Saînt-Germain-en-Laye, le 13 prairial
an IV — i«f juin 1796 — François- Victor Rivet
reçut la prêtrise le 4 juin 18 19. Il était curé de
Notre-Dame de Versailles, lorsqu'une ordon-
nance royale du 10 mai 1838 l'appela au siège
de Dijon en remplacement de Mgr Claude Rey,
démissionnaire ; il eut ses bulles en septembre,
fut sacré à Notre-Dame de Versailles le 21 oc-
tobre, et fit son entrée dans sa ville épiscopale
i^^6
i^ebuc De rSvt cbvctieu.
le 3 1 . Des archevêchés, entre autres celui de Tou-
louse, furent offerts à Mgr Rivet au cours d'un
long épiscopat, mais il ne voulut pas d'autre
épouse que son église de Dijon et mourut plein
de jours et d'oeuvres le 12 juillet 1884, à l'âge de
88 ans.
Mon objet ne saurait être de dire ici ce que
fut la carrière épiscopale de Mgr Rivet ; ce devoir
a été rempli à la perfection en la forme comme
au fond par Mgr Perraud, évêque d'Autun,
aujourd'hui cardinal, qui prononça l'oraison
funèbre ; en cette revue, plus spécialement vouée
aux arts, je ne parlerai que du monument lui-
même.
Dans un ouvrage décoratif et historique —
Dijon, nionuiiients et souvenirs — publié en 1S94,
j'écrivais ceci : « Quarante-cinq ans du plus digne
épiscopat ne mériteraient-ils pas au vieil évêque
une statue dans l'église haute?» Cette parole
n'était que l'expression d'un sentiment dès lors
unanime de reconnaissance et de respect : aussi
lorsque Mgr Oury, évêque de Dijon, aujourd'hui
archevêque d'Alger, prit l'initiative d'une sou-
scription pour élever dans sa cathédrale un
mémorial à son prédécesseur, la somme jugée
nécessaire fut-elle réunie en quelques semaines.
Ce monument ne devait pas correspondre au
cercueil enseveli ; conformément à ses dernières
volontés, Mgr Rivet repose dans la crypte, c'est-
à-dire dans l'étage inférieur de la rotonde élevée
au Xl'= siècle par l'abbé Guillaume de Saint-
Bénigne, derrière le chevet de l'église abbatiale.
Ce précieux monument d'art et d'histoire, le
plus respectable de la province et, pour le plan
et la structure, unique en France, avait été dé-
truit en 1791, sans nécessité, pour rien, pour le
plaisir de mal faire, malgré les protestations
énergiques de l'académie de Dijon. Mais on se
contenta de défoncer les voûtes de l'étage sou-
terrain et de combler celui-ci sans le détruire ; si
bien qu'en 1858, les fouilles pratiquées pour
asseoir la nouvelle sacristie mirent au jour les
colonnes robustes qui avaient porté les étages
aériens ; on retrouva également une partie du
sarcophage que depuis plus de quinze siècles la
Bourgogne chrétienne révérait comme celui de
l'apôtre venu d'Orient [)our l'évangéliser et subir
à Dijon même le martyre. C'est dans la crypte
restaurée, aux pieds du saint tombeau, que vou-
lut reposer Mgr Rivet, sous une simple dalle
noire où la vie du vénéré prélat est racontée
dans une inscription du meilleur style lapidaire,
composée par feu M. l'abbé Carra, alors aumônier
du lycée de Dijon, plus tard recteur de l'Uni-
versité catholique de Lyon.
La crypte ainsi exhumée a été restaurée avec
son annexe, cette mystérieuse chapelle Saint-
Jean, dont les maçonneries barbares sont plus an-
ciennes encore et remontent peut-être à l'ori-
gine même du christianisme en Bourgogne. Mais
l'œuvre de réparation fut entreprise dans des con-
ditions fâcheuses. Mgr Rivet tenait à sa sacristie,
et malgré toutes les représentations des archéo-
logues, voulait que, conformément au dessin
primitif, elle fût superposée à la crypte. Pour
porter la nouvelle construction il fallut jeter
parmi la double précinction de l'abbé Guillaume
deux gros massifs de pierre qui déshonorent à
jamais un monument rare entre tous. Entendez
que la sacristie pouvait aussi bien être mise
ailleurs ; on peut même penser que jeté derrière
l'abside polygonale du XII I*^ siècle, ce rectangle
de pierre n'est pas d'un heureux effet. Et puis,
quelle pauvreté, quelle disgrâce dans ces couloirs
brisés qui raccordent les salles de service avec
l'église ! On ne commettrait peut-être plus cette
faute-là aujourd'hui, maison en commet d'autres,
et à tout prendre, je ne crois pas que les restau-
rateurs actuels aient rien à reprocher à ceux
qui les ont précédés. Seulement ils écoutent
moins les évêques, ils n'écoutent même per-
sonne, pas même ceux qui sont des payeurs en
même temps que des conseilleurs. Pour conclure,
il est permis, sans toucher à la plus respectable
mémoire, de dire que Mgr Rivet n'était pas
artiste et commit ce jour-là une grave erreur de
goût. Mais que penser des architectes, Viollet-le-
Duc en tête, qui se montrèrent si mal à propos
complaisants ?
J'en reviens au motiument dûà la collaboration
de M. Charles Suisse, architecte du gouverne-
ment, chargé des travaux de Saint-Bénigne, et
de M. Paul Gasq, sculpteur, né à Dijon et grand
prix de Rome ; il s'élève dans le collatéral du
Nord et est appliqué au mur de la troisième
travée. Composé dans le style du XVI P' siècle, il
flgélanges,
137
présente un socle rectangulaire sur lequel quatre
griffes posées supportent le sarcophage figuré.
Selon la belle formule qui commence d'être
adoptée à la Renaissance et succède à celle du
gisant, le prélat est agenouillé, les mains jointes;
à ses pieds sont la crosse et la mitre ; en arrière
ondule la traîne de la robe épiscopale, longue
et débordant le sarcophage. Cependant, de-
bout sur le socle, et dans une attitude à demi
ployée de respect et de douleur, une figure de
femme en bronze fauve tend à deux mains des
fleurs au prélat ; à ses pieds est l'écu aux armes
de Mgr Rivet et entouré d'une banderole où est
inscrite la devise qui résume cette belle vie de
pasteur, Oinnia fit omnibus.
Toute la partie monumentale est faite d'un
calcaire rougeâtre fort dur et d'aspect porphy-
rique, dont les carrières sont à une dizaine de
kilom. au Sud de Dijon, à Brochon. Cette pierre
peut recevoir le plus beau poli et en variant le
degré de polissage, on est arrivé à un effet des
plus heureux sans porter atteinte à la gravité de
l'ensemble. Ainsi le socle brillant comme une
glace montre le Brochon avec son ton de vieux
vin d'Espagne, et tout nuage de jaune orangé.
Les griff'es non polies sont d'une nuance cendrée
et claire ; enfin le sarcophage présente en mat
ses cannelures et les feuillages stylisés de ses
angles.
Dans la statue agenouillée en Carrare clair,
mais dont le travail n'a pas été poussé jusqu'au
poli savonneux de Canova, M. Gasq nous a donné
une des plus nobles effigies que l'art ait produites
dans ces dernières années. Quelques-uns ont
trouvé que la statue faisait l'évêque plus
grand qu'il n'était en réalité ; l'observation est
vraie, Mgr Rivet était de taille très moyenne et,
surtout dans les dernières années de sa vie, un peu
entassé, comme aurait dit Saint-Simon. Mais je
n'estime pas que dans les statues historiques, il
soit à propos de perpétuer ces caractères très
adventices et secondaires de l'individu. D'ailleurs,
si Mgr Rivet était plutôt petit, il y avait en lui
tant de dignité, de noblesse simple, qu'il y fallait
réfléchir pour s'apercevoir de ce qui lui pouvait
manquer en stature.
La figure de femme en bronze est très belle
dans sa signification un peu imprécise, ce qui n'est
pas pour me déplaire. On comprend qu'elle per-
sonnifie l'hommage reconnaissant et attristé du
diocèse ; cela me suffit et je craindrais que l'on
inscrivît un nom quelconque sous ce long voile
qui déborde un peu du socle. Elle ne dirait plus
qu'une chose; en l'état, elle en dit mille.
Les deux talents amis de M. Suisse et de M.
Gasq ont su se fondre en une seule âme pour
nous offrir un monument d'une unité parfaite,
dont sous tous les angles de vision, les lignes se
présentent harmonieuses et nobles. Mais ce mo-
nument de grande valeur artistique a-t-il le
caractère absolument religieux? Ici on a fait
une réserve ; rien à dire assurément de la figure
agenouillée; belle et grave, elle est ce qu'elle doit
être, et, tout en étant très moderne d'accent, peut
soutenir sans infériorité la comparaison avec les
plus nobles morceaux de même famille que nous
ont laissés les siècles antérieurs. Aucun chiffbn-
nement, aucune manière dans la pose et les
draperies, sur ce point essentiel tout le monde
est d'accord. Mais l'opinion admet moins faci-
lement la figure de femme; sans nier la beauté,
ce qui serait impossible, ni même la chasteté de
ces longs voiles enveloppant la forme sans l'ac-
cuser, de ces bras nus chargés de fleurs, on estime
qu'elle enlève quelque chose à l'expression austère
d'un monument élevé à un vieil et digne évêque.
Évidemment cette figure trouverait tout aussi
bien sa place sur une place publique appuyée à
la stèle d'un littérateur, d'un artiste, voire même
d'un homme politique. C'est là un demi-défaut,
et les exemples invoqués,soit de l'art italien, soit
de l'art français des XVII« et XVIII<= siècles, ne
feront pas modifier cette manière de voir.
Que de choses, au surplus, n'y aurait-il pas
lieu de dire sur certains monuments funèbres
destinés à des églises .' Celui du cardinal La-
vigerie, par exemple, est d'une somptuosité
sans égale, mais M. L. Cloquet — Reime de V Art
chrétien, t. XI I«, p. 75 — remarque avec raison
qu'il a le caractère moins religieux qu'historique.
Pour ce qui est du monument à Bossuet, qui va
s'élever dans la cathédrale de Meaux, et dont
le modèle était à l'exposition universelle, M.
Ernest Dubois l'a traité comme un biscuit de
Sèvres ; je défie le spectateur le plus perspicace
de deviner que ces figures groupées à la base
138
IRebur ïic V^n cbrcticn.
du cippe qui porte la statue, sont destinées à
une église et à un monument funèbre. Il tombait
cependant sous le sens que la cathédrale de
Meaux ayant l'honneur de posséder les restes
mortels du grand évêque, le monument devait
être conçu comme un tombeau, magnifique et
grave, mais du plus grand caractère religieux,
ainsi qu'il convient à un tel lieu et à une telle
mémoire. Au lieu de cela on nous donne une
composition absolument profane et faite plutôt
pour une promenade publique et mondaine que
pour une église.
Si cette critique ne s'adresse que dans une
mesure extrêmement atténuée au monument de
Dijon, je devais à la vérité d'exprimer une réserve
faite par plusieurs au sujet de la figure de femme,
tout en reconnaissant qu'en fait de profane et de
païen les siècles passés nous en ont fait voir bien
d'autres. Mais notre époque est heureusement
revenue à des idées plus graves, et telles figures
de Canova, par exemple, nous paraissent à bon
droit peu acceptables aujourd'hui dans une église.
Le monument de Mgr Rivet est placé fort
mal dans une nef obscure où la lumière arrive
de différents côtés et de partout mauvaise et
insuffisante. Pour comble de malheur, il se trouve
sous une fenêtre à verres blancs dont les irradia-
tions éteignent toutes choses. Il ne manquait
pas cependant de meilleures places dans la cathé-
drale, mais l'aréopage parisien, qui préside en
dictateur aux destinées des édifices diocésains,
n'en a pas voulu entendre parler.Cela aurait porté
atteinte aux lignes sacro-saintes de la structure.
Entendons-nous bien cependant, personne ne
demandait que l'on rompît l'harmonie générale
de l'intérieur ; mais la plantation im peu libre des
monuments adventices est pour une église une
source de beauté morale, parce qu'elle met la
vie dans ces vaisseaux que les restaurations in-
tensives de notre temps réduisent trop souvent à
leur seule beauté géométrique. Or celle-ci n'est
pas la seule, peut-être même n'est-ce pas la
bonne ; il faut bien reconnaître, en effet, que
pour si habiles qu'elles soient, les restaurations
dirigées par la très méritante Commission fran-
çaise des Monuments historiques, ont plus de
succès auprès des archéologues et surtout d'elle-
même que des littérateurs, des artistes et des
poètes.
Henri CllABEUK.
Janvier 1901.
©iscoiirs
proioncc le jo juillet ipoo à la distribution des
prix de l'École Saint-Luc à Bruxelles, pttr
M. H. Carton de IViart, membre de la Chambre
des Représentants de Belgique.
ETTE belle allocution est celle d'un
esthète qui fut éclectique et que le
sens du Beau et du Vrai ramène à
l'art chrétien, « comme l'oiseau mi-
grateur, fatigué des aventures des pays exotiques,
revient toujours à son ciel natal ». M. Carton de
VViart a d'abord traité d'une façon spirituelle
et sagace de la question si actuelle de 1' « art
nouveau » issu du préraphaélisme anglais tra-
vesti par le commerce continental.
On sait quelle fut la vogue, déjà déclinante,
de ce style étrange, qu'on eut l'outrecuidance de
nommer le style « esthétique » ! Style anglais,
style moderne, style esthétique, on n'en voulut
plus d'autre. Alors on vit naître des créations
hybrides, où se mariaient les formes de jadis et
les motifs à la mode, les rocailles Louis XV et
les cartouches Renaissance, avec « le tibia stylisé »
et « le cartouche japonais ». Ce ne furent partout
que « vitrines ornées de serpentins et de délinéa-
ments macaroniques, céramiques anémiées, boi-
series vert pomme, charpentes en bois courbé
orné comme de la terre glaise, loall papers ryth-
més aux nappes artistiques, grès lumineux
comme des verres, verres opaques comme des
grès, canapés qui sont des bibliothèques, lits qui
sont des étagères. » Ce bel engouement dure
depuis cinq ans, mais le public commence à
flairer une vaste mystification.
Il constate combien ce style est déjà poncif et
banal, combien ces structures sont irrationnelles,
combien ces meubles aux formes plastiques sont
incommodes, combien ces raffinements coûteux
et ces illusions de luxe sont éloignés du concept
d'un art vraiment populaire, et que ces nouveaux
prophètes, qui devaient mettre l'art a la portée des
foules, ont retardé pour longtemps la vraie re-
naissance attendue.
« Quel autre enseignement d'art populaire les
artisans du moyen âge nous ont légué, dit l'ora-
teur, eux dont l'art enveloppait la vie et les
besoins de chacun et qui surent faire descendre
£!Bélanges.
139
l'harmonie de la ligne et de la couleur jusque
dans les demeures les plus humbles !
« Hélas ! ces leçons, il faudra, mes chers
Frères, que vous les rappeliez bien haut et sans
relâche, — car le flot des imitations et de la
médiocrité qui nous submerge accuse de plus en
plus leur méconnaissance. Et c'est pour avoir
méconnu en même temps d'autres principes chers
aux gothiques et à votre école, — principes de
goût, principes de construction, — que l'art dé-
coratif nouveau s'est déconsidéré par toutes ces
productions hâtives et incommodes dont je
dressais tantôt l'inventaire et le réquisitoire.
« En s'y exerçant, ils auraient pu sans doute,
ces décorateurs, ces artisans, reproduire des
meubles anciens dont on sait les mesures, les
proportions, la structure intime...
« Dédaigneux du modèle, ils ont voulu créer.
« Créer ! Et cela, sans avoir appris à connaître
la nature des matériaux, leurs propriétés, leurs
ressources, leurs résistances, — sans avoir le
souci suffisant de l'appropriation de l'objet, de sa
convenance, de son adaptation parfaite à une
utilité déterminée.
« L'échec était fatal. En décoration on ne
supplée pas à l'insufifisance de l'éducation pro-
fessionnelle par l'imagination.
« Dès aujourd'hui toutes ces aberrations sont
jugées.
« Elles peuvent bénéficier encore du sursis
que leur accorde la naïveté de quelques-uns,
mais elles sont marquées pour la mort. Comme
ont passé les manches à gigot et les crinolines,
ainsi ce « style moderne » ou soi-disant tel,
passera à son tour. Et qui sait ? Peut-être le goût
public, corrigé par cette salutaire épreuve, va-t-il
se ressaisir?
« On ne vous a jamais ménagé les objections
et les reproches, mes chers Frères... Et je vous
en félicite. Car vous savez qu'on peut mesurer
les grandes œuvres aux critiques qu'elles pro-
voquent, comme on peut mesurer les monuments
à l'ombre qu'ils projettent sur le sol.
« Or, parmi ces reproches, j'ai entendu qu'on
vous adressait parfois celui de rester trop obsti-
nément fidèles aux principes de l'art médiéval.
La division du travail, les conditions modernes
de la production ne s'accommodent plus, disait-
on, de cette patiente étude des matériaux, de
cette recherche approfondie des formes qu'ils
comportent et des applications auxquelles ils
sont destinés. Ah! vous voici bien vengés, et je
pense que, malgré votre charité naturelle, un
sourire un peu narquois vous sera parfois monté
aux lèvres.
« C'est précisément à ces principes de l'art
médiéval, aux vôtres, que l'art décoratif moderne,
s'il veut survivre, doit revenir après les expérien-
ces malheureuses auxquelles il vient de se livrer!
C'est à ces principes qu'il reviendra. La vague
s'était éloignée d'eux. Une autre vague s'en rap-
proche. N'est-ce pas une loi éternelle de toutes
les bonnes causes :
L'Idéal est fidèle autant que l'Atlantique.
11 fuit pour revenir... Et voici le reflux ! »
« Le reflux ! Oui, je l'entends qui monte! J'en-
trevois pour demain le développement d'un art
décoratif et d'un art architectural moins préten-
tieux et plus logiques, déjà préparés et manifestés
par votre enseignement fécond, et oii les principes
que vous défendez auront reconquis toute leur
prépondérance.
« Vous ne prétendez pas, vous ne pouvez pas
prétendre ressusciter ce passé. Les hommes ne
ressuscitent pas les morts. Mais vous voulez, et
vous avez mille fois raison, en reprendre la tra-
dition. Comment continuer cette tradition, sinon
en pénétrant votre activité et votre enseignement
artistiques des principes dérobés aux anciens
âges !
« Ces principes, vous n'avez rien à y changer.
Les lois du Beau sont éternelles. Elles ne relèvent
ni de la mode ni des écoles. C'est seulement dans
les applications nouvelles de ces principes que
la vie veut être reconnue, et qu'elle réclame de
votre œuvre comme de toutes les œuvres, de
l'art chrétien comme de l'Église elle-même, cette
perpétuelle adaptation aux contingences de
chaque jour, sans laquelle votre archaïsme ne
serait que l'archéologie. La fidélité à vos prin-
cipes, l'observance de vos méthodes, le respect
des traditions iconographiques même, ne vous
imposent ni stéréotypes ni canons inflexibles.
« Les bons ouvriers d'autrefois connaissaient
et regardaient aussi les belles œuvres dont ils
REVUE UE l'art CHRÉTIEN.
190I. — 2"**^ LIVRAISON.
I40
3Rc\)Uc tic rart cbvctieu.
étaient entourés. Mais jamais leur art ne se figea
dans l'imitation. Jamais il ne se réduisit à la
sèche répétition des œuvres de leurs devanciers.
La cathédrale de Reims ne reproduit pas la ca-
thédrale de Chartres... Et vous méconnaîtriez
l'exemple de ces bons ouvriers, votre état d'âme
serait indigne du leur, si vous vous borniez à la
copie des œuvres qu'ils vous ont léguées.
« Pour vous comme pour eux, la tradition se
complète et s'enrichit chaque jour par la vision
de la nature. Nul art ne fut plus près de la vie
que l'ancien art gothique. Nul ne puisa plus lar-
gement aux sources de l'observation judicieuse
des êtres. Et l'on ne sait pas assez à quel point
le concours du réel contribua à la vitalité et à la
popularité de notre art chrétien. »
M. Carton de Wiart développe cette der-
nière idée, en analysant les beautés de la flore
médiévale, à laquelle la Revue de V Art chrétien
a consacré de nombreux articles. Il oppose à la
décoration si réaliste de nos contemporains, telle
par exemple que celle du palais du mobilier à
l'Esplanade des Invalides, l'admirable intelli-
gence des gothiques interprétant la nature.
« L'art est la vérité, sans doute, mais « la
vérité choisie », suivant le mot d'Alfred de Vigny,
la variété appliquée à une matière destinée à un
usage précis.
« Vous ne trouverez jamais chez les gothiques,
même chez les flamboyants, cet emploi irrationnel
de l'ornement.
« La décoration n'est jamais chez eux que le
développement de la pensée créatrice de l'archi-
tecte. Elle fait corps avec les organes qu'elle
revêt, elle est régie par les lignes de ces organes.
Chaque détail est un morceau de l'ensemble.
On ne pourrait l'amputer sans blesser celui-ci
jusqu'aux sources de la vie. C'est une masse
fondue d'un jet avec .ses irrégularités, ses excrois-
sances, ses cavités. Vienne la Renaissance, les
saillies seront des superfétations. Ce ne seront
plus les traits du visage, mais des taches de
beauté ou des verrues. Le décorateur se bornera
souvent à dessiner sur les surfaces, quelles
qu'elles soient, des attributions parasitaires. Et
c'est encore la faute des prétendus novateurs
d'aujourd'hui qui prodiguent indifféremment le
même tournesol sur le plan d'une façade, le dos
d'une chaise, le manche d'un parapluie et le tissu
d'un mouchoir.»
Il n'est point banal de voir un littérateur
comme M. Carton de Wiart, esthète affiné,
mais étranger à la pratique de l'art, se rendre
compte avec tant de pénétration des secrets
intimes de l'art décoratif sainement entendu ; il
est rare d'entendre un exposé si plein de charme
de ces questions si importantes et essentielles
de l'esthétique pratique. Nous félicitons l'École de
Saint-Luc d'avoir rencontré, en face de tant de
détracteurs jaloux, un défenseur aussi autorisé
et aussi éloquent.
L. Cloquet.
t^i^lii^ii^i^-^^ .^ .^ :^ .^ :^ .^ :;^ .^t :^^ .^ ^^.^ ^ .^ .^^^ ^. ^. ^. -^
^^^5^^g^^^ Ccrresponliante. ^^^^^^^^
Italie.
lialliD (prolifnrc ûc Bcrgame): Keatautation ae
freequEs. — Gjî^anaroolia (ffiarrfjcjf) : Httributione nc
freaqufs. — BarDalgnc : Drcoiibrrtc D'une statue te
ÏJino Eisano. — arblno ; ©ccoubette Dano les arcljibes
D'un peintre inconnu. — Boiiu' : Trabaur Bana lea éalisco.
— JSatione : Déplacement n'une ftesquc. — liorfto : lia
Cbapellc Des Françaia. — Florence ■■ Goliae JSan Hm=
btoeio.
Lallio.
ETTE localité possède une petite
église, fondée et dotée par un fidèle,
en 1450, en l'honneur de saint Ber-
nardin de Sienne, qui résida à Ber-
game de 141 1 à 1430.
L'oratoire primitif était décoré de fresques ;
de ces peintures du XV<= siècle, il ne reste qu'une
figure de Saint Sebastien et une Madone avec
l'Enfant.
Ce morceau, daté de 1454, a été déplacé au
XVI'' siècle ; les autres peintures ont été dé-
truites ou recouvertes de nouvelles fresques à
partir de 1532.
Plus tard, l'église a été abandonnée et conver-
tie en magasin de céréales, et en lazaret.
En 1895, on a commencé les restaurations de
maçonnerie, d'architecture et de peinture ; elles
sont terminées.
Les fresques du XVI'' et du XYII^ siècle ont
été consolidées, et nettoyées, par M. Valentino
Bernardi, de Bergame. Ce vaillant artiste s'est
acquis une juste réputation par l'habileté tech-
nique et le goût qu'il met dans ses travaux de
restauration d'anciennes peintures, tableaux et
fresques.
La décoration recouvre toutes les surfaces du
sanctuaire.
Elle comprend une trentaine de compositions
relatives aux faits, de la vie de la Vierge, de
Notre-Seigneur et de saint Bernardin de Sienne,
et de plus, une centaine de figures isolées de
Saints, de Prophètes et de Sibylles.
Trois peintres surtout ont contribué à ces
travaux ; l'un d'un médiocre talent, qui a signé
T. L., est inconnu ; il a travaillé vers 1619.
Un autre a signé :
Hieronintus de Colleoni pinxit 1532. Il a fait
les scènes de la Vie de Jésjis- Christ, une Ataion-
ciation et une vingtaine de figures isolées.
Siret, dans son Dictionnaire, dit de lui ;
« Élève de Titien ; peu apprécié dans sa patrie
« (Bergame), il alla s'établir à Madrid et ne
<< laissa en Italie qu'un cheval peint sur une
« façade avec cette inscription : Nevio fropheta
i in patria. 1>
Baschenis (Évariste) (1617-1677) a fait la
Vie de saint Bernardin, une Annonciation, et
une trentaine de figures isolées.
Siret dit de lui :
« Instruments de musique, fruits, nature
« morte ; vérité extraordinaire ; relief magni-
« fique ; ses petits tableaux furent nommés des
« trompe-l'œil. »
On voit, d'après ce que je cite de Siret, très
consciencieux cependant, combien il est difficile
de faire un Dictionnaire des Peintres et combien
il serait nécessaire qu'un éditeur entreprît un
nouvel ouvrage de ce genre.
J'insiste sur cette question ; il me semble
qu'une Société de Beaux- Arts ou un Syndicat
de sociétés pourraient, à défaut d'un éditeur, se
mettre à la tête d'une pareille entreprise ; ce
serait un grand service à rendre à l'histoire de
l'art.
Des fresques de Colleoni et de Baschenis il n'y
a rien à dire de spécial ; elles sont dans le goût
du temps, mais sans exagérations de gestes, ce
qui est un mérite pour l'époque ; ce sont d'hono-
rables peintures.
La fresque : La Madone et l'Enfant, de 1454,
avait été repeinte, partie à tempera, partie à
l'huile. Le fait n'est pas très rare, mais il est bon
de le signaler. La critique d'art se fait souvent à
la légère, et il est possible qu'en présence de cet
ouvrage, et de cette date, un écrivain à courte vue
aurait conclu que, dès le milieu du XV"^ siècle,
on peignait en Italie à l'huile sur les murailles ;
on a imprimé des erreurs de cette force.
Le peintre qui a repeint cette Madone et l'En-
fant n'a pas même observé les couleurs de la
fresque ; la tunique de l'Enfant était jaune, il l'a
142
3Rel)uc ïie V^xt cf)vctieu»
mise en blanc avec ornements noirs ; le manteau
de la Madone, qui était blanc, a été repeint en
bleu ; le fond également a été modifié. M. Va-
lentino Bernardi a très habilement enlevé cette
seconde couche et rétabli la fresque dans son
état primitif.
Esanatoglia (Marches).
Ce ne sont pas des découvertes de peintures
qu'on signale de cette localité, mais l'existence
d'ouvrages qui ne paraissent pas avoir été men-
tionnés jusqu'à présent.
Dans l'église désaffectée de Sainte-Catherine,
et convertie en écurie, on voit une grande fres-
que, divisée en compartiments, représentant la
Crucifixion, avec la Vierge, les saints Tean-Bap-
tiste,Antoine de Padoue, Anatole, Antoine abbé,
et sainte Catherine ; sous le motif central se
trouve en caractères du temps l'inscription rom-
pue suivante :
... IVI ... LXVI ... OP ... aTa: s. ANTÔÏT
FRCI RICCAR ... HANC. BASILICAM.
FABRICAVIT. MCCCLXII
d'où on a conclu que l'église a été construite en
1362, et la peinture exécutée en 1366.
La fresque est en assez bon état.
Par analogie de style, on pense que le peintre
est Diotisalvi di Angeluziode Esanatoglia, élève
de Francescuccio Chisi da Fabriano ; ce Dioti-
salvi a peint vers la même époque des fresques
dans l'église de Saint-François à San Séverine
(Marches) comme l'indique l'inscription:
HOC OPVS FECIT FIERI NOBILIS ET
POTENS VIR ISMEDVTIVS PER MANVS
DETTALEVE ANGELVTI DE SA ANATOLIA
AN. DMI MCCCLXXII DIE XXIV MENSIS MAIJ.
Dettaleve, Diotisalvi, ou Diotallevi, comme on
lit ailleurs, est le même homme.
Et voilà encore des noms pour le futur Dic-
tionnaire des Peintres.
Ile de Sardaigne.
On a trouvé, dans un magasin de l'ancien cou-
vent de San Francesco in Oristano, une statue
représentant un évoque, à mi-grandeur de na-
ture, en très bon état de conservation.
Sur le socle :
NINVS : MAGISTRI : ANDREE : DE :
PISIS : ME : FECIT
Nino Pisano, fils du célèbre Andréa Pisano, a
laissé plusieurs sculptures à Pise ; il a travaillé
avec son père à la porte du baptistère de Saint-
Jean à Florence, fondue en 1332.
C'était un excellent sculpteur, mais la gloire
de son père a éclipsé le renom, qu'au dire de
Vasari, il devrait tenir dans la sculpture toscane
du XIV« siècle.
Urbino.
On trouve fréquemment en Italie des pein-
tures dont les auteurs sont inconnus, mais plus
rarement des peintres dont les peintures sont
perdues en totalité.
Le cas vient de se présenter à Urbino ; dans
les archives locales on a constaté l'existence de
Jacomo de Mastro Piero ; ce peintre était un
frère de la compagnie de saint Antoine abbé ;
de 141 1 à 1434 il a exécuté des travaux pour sa
Confrérie, pour les églises d'Urbino, et peut-être
pour la cité de Bologne.
Les archives d'Urbino mentionnent un Saint
Jacques, une Crucifixion et Vinsegna , la ban-
nière de sa confrérie.
La découverte a de l'intérêt pour Urbino, car
du premier peintre de cette cité, Giuliano, qui
travaillait en 1366, au second, Salimbene, qui a
terminé en 1416 les fresques de l'église Saint-
Jean, il y avait une lacune.
Rome. — Restaurations d'églises.
Nous avons annoncé que le ministère de l'In-
struction publique faisait restaurer les églises :
Sainte-Cécile, Gesù, Sainte-Marie in Via, Saint-
Martin ai monti ; Sainte-Marie délia Scala,
Sant-Onofrio.
A cette liste il faut ajouter :
Sainte- Marie sur Minerve: les travaux con-
sisteront à mettre l'extérieur, fort peu digne du
monument et des œuvres d'art qu'il renferme,
un peu plus en rapport avec la richesse de l'inté-
rieur.
Sainte-Marie- Madeleine. Cette église est peu
visitée ; elle a été construite sous le pape Inno-
cent XI (pontificat de 1676 à 1689) à côté du
couvent des Pères ministres des infirmes, fondé
en 1484 par saint Camille de Lellis.
L'église renferme de nombreuses peintures
dont une a joui d'une certaine célébrité. C'est
Corres^ponliante.
143
le Saint Laurent Giiistiniani par le chevalier
Lucca Giordano (1632-1705).
On veut que cette peinture ait été exécutée en
une seule nuit, et c'est à cette circonstance que
le tableau a dû son renom. Les tableaux de ce
peintre se comptent par centaines, il travaillait
tellement vite qu'en Italie on lui a donné le sur-
nom de Fa Presto. Son style maniéré est con-
damné maintenant, mais de son vivant il lui a
valu une très grande célébrité.
Giordano est, avec beaucoup d'autres peintres,
un exemple de la fragilité des réputations.
S a voue.
Le peintre Paul Jérôme Hrusco (1742-1S20)
avait peint à Savone, vers la fin du siècle der-
nier, dans l'église des Saints-Jean Baptiste-et-
Dominique, une fresque représentant l'apothéose
de saint Dominique. La peinture, étant en péril,
a été transportée sur toile par le professeur
Bigoni de Modène ; l'opération a très bien
réussi ; elle mérite d'être citée, la fresque mesu-
rant environ vingt-huit mètres carrés.
C'est par erreur que Siret a écrit Brusca.
Il ne faut pas confondre Brusco de Savone
avec le hollandais Poelenburg, surnommé Brusco
en Italie, à cause de son mauvais caractère.
Cette recommandation peut paraître puérile ;
mais il y a dans les écrits sur l'art tant d'erreurs!
Loreto.
M. Charles Lameire, le peintre français bien
connu par ses peintures murales et ses composi-
tions inspirées d'un profond sentiment chrétien,
a passé les mois de septembre, d'octobre et de
novembre à Lorette à travailler aux peintures
de la chapelle française, dédiée à saint Louis,
roî de France.
Les principaux sujets confiés à M. Lameire
sont : Sa27it Louis, Les Croisades, La France
ckre'tienne.
Nous reviendrons sur les très importants tra-
vaux de cet artiste et sur toute la nouvelle dé-
coration de l'église, d'autant plus qu'une des
chapelles a été réservée à la Belgique.
L'Italie, l'Espagne, la Hongrie ont également
leurs chapelles dans la célèbre basilique.
Florence.
L'église San Ambrogio, qui était fermée depuis
quelque temps pour réparations intérieures, est
de nouveau ouverte.
Elle est peu visitée par les voyageurs, bien-
qu'elle mérite l'attention.
Son origine remonte au X« siècle, mais depuis
elle a subi des modifications qui en ont changé
le caractère.
Elle renferme deux ouvrages d'art très remar-
quables.
Un autel en marbre par Mino da Fiesoîe
exécuté en 1481.
C'est l'occasion de faire remarquer que le mot
da devant le nom d'une localité veut dire géné-
ralement que la personne dont il est question
est native de cet endroit ; mais il y a des excep-
tions ; Mino n'est pas né à Fiesole mais à Poppi
dans le Casentin ; il s'est illustré pendant qu'il
demeurait à Fiesole, d'oia son nom de Mino da
Fiesole.
L'autre ouvrage est une fresque par Cosimo
Roselli, peinte en i486 ; elle montre une proces-
sion de la Fête-Dieu. Roselli a d'autres ouvrages
à Florence : des tableaux à la galerie des Offices
et dans diverses églises. Dans l'atrium de la
Santissima Annunziata, il a peint Saint Philippe
Beniszi prenant l'habit des Servîtes ; cette fresque
fait partie de la suite célèbre où Andréa del
Sarto a représenté la Vie du Saint, l'un des
fondateurs de l'Ordre florentin des Servîtes, qui
a conservé les fonctions du culte à la Santissima.
Malheureusement la Procession de Roselli est
en très mauvaise lumière ; c'est un très bel ou-
vrage. Vasari !e tient pour le meilleur du peintre:
'i il le fit, écrit-il, pour les religieuses de Saint-
« Ambroise ; un nombreux clergé accompagne
« le prêtre, qui est suivi d'une infinité d'hommes
« et de femmes, selon la coutume du temps ; plu-
« sieurs personnages sont des portraits pris
« d'après nature ; on remarque, entre autres, celui
« de Pic de la Mirandole, qui est tellement res-
« semblant, qu'on croirait le voir lui-même. »
Le célèbre philosophe est représenté dans la
fresque en pourpoint rouge et bonnet violet.
La Procession, très populaire à Florence, avait
pour objet la présentation au peuple du calice
dans lequel le prêtre Uguccione avait trouvé du
sang divin.
L'autel de Mino avait été édifié, sur la com-
mande de l'abbesse Barbadori, pour renfermer le
calice.
144
9^rl)uc tic r^vt c!)vctieu.
L'église de Saint- Ambroise conserve les restes
d'artistes célèbres : Mino, sculpteur( 1 43 1 ►!< 1484);
Granacci (Francesco), peintre (1447 -i* I543);
Simone del PoUajulo, dit Cronaca( 1457 ►!< 1508),
architecte ; Verrocchio, peintre et sculpteur
(1435 ►{. 1488).
Sur la proposition d'un érudit florentin, très
dévoué à la gloire de la cité, M. Pietro Fran-
ceschini, les membres du Cercle des Artistes et
de l'Académie de dessin vont faire poser dans
le sanctuaire une plaque de marbre commémo-
rative en l'honneur des illustres défunts.
C'est un bon exemple à signaler ; ce genre de
manifestations vaut mieux que des discussions
sur l'esthétique et la philosoiihie de l'art, trop
fréquentes aujourd'hui dans les Sociétés de
Beaux Arts.
GERSPACH.
Florence, décembre 1900.
Tableau DcDicatoirc De la cl)apelle De
la Saintc=Trinitc à Hublin.
(Boj,iflume Oe Eoloonc.)
YANT trouvé dans la MonograpJiie
des églises catholiques du royaume de
Pologne, la description d'un vieux
tableau dédicatoire du XIV'' siècle,
j'ai pu en obtenir une copie faite spécialement à
l'intention de \2. Revue de l' Art chrctien;)c l'ajoute
à la description de la peinture, rédigée par l'artiste
Joseph Smolenski, auteur de la trouvaille, auquel
je laisse la parole.
« Le 26 février 1899, visitant la chapelle du
château deLublin, j'aperçus à l'endroit d'oia venait
de se détacher un gros morceau de plâtre, un
ancien motif d'ornementation. Piqué de curiosité,
avec grande précaution, je détachai le plâtre sur
toute la surface,et j'aperçus un tableau tout entier.
Il était impossible de le photographier, le tableau
n'étant pas peint sur une surface plane, mais sur
une tour ronde, d'un diamètre de 16 à 20 pieds,
liante de 30 pieds environ. J'en fis donc une copie,
que je joins ici.
« L'entrée de la tour est surmontée d'une
arcade: elle est étroite à l'intérieur, évasée exté-
rieurement. Elle sert à la fois d'entrée au chœur,
où se trouvait l'orgue, aujourd'hui disparu.
« La galerie du chœur, en bois de mélèze, est
garnie de poutres sculptées de style gothique,
avec des rosaces aux joints.
« La tour se rétrécit vers le haut; elle n'a rien
de commun avec l'architecture de la chapelle et
ses profondes fondations sont indépendantes de
celles des caveaux de l'église. On pouvait sup-
poser que c'est une des anciennes tours du châ-
teau de bois.
« A l'époque oij le château fut rebâti, et oîi la
chapelle fut construite, l'architecte du roi de
Pologne, Casimir le Grand, utilisa cette ancienne
tour, pour en faire le point d'appui de la galerie
du chœur.
« Le tableau découvert est peint au moyen des
procédés de la fresque, en usage depuis de longs
siècles : sur un crépi de chaux, on étendait une
fine couche de mortier,sur laquelle, encore fraîche,
on exécutait la peinture. Les couleurs sont si
adhérentes, qu'il est impossible de les laver; la
couleur verte particulièrement s'est conservée
jusqu'ici dans une fraîcheur étonnante.
« Sur les murs, à la même hauteur, suivent
d'autres compositions. Elles forment un cycle
représentant les principaux événements du règne
de Ladislas Jagellon. La disposition symétrique
des panneaux, l'harmonie des ornements et des
motifs romano-gothiques appliqués à l'architec-
ture, la perfection de la perspective et du jeu
des lumières, le sentiment de la couleur, enfin la
connaissance des règles de l'iconographie, nous
confirme dans la conviction que l'auteur était un
artiste de profession.
« Bien plus, étant donnés, d'une part, les procè-
des employés, et d'autre part, le fait, que Ladislas
Jagellon reconstruisit la chapelle, on peut ad-
mettre que l'auteur des fresques fut Wladyck,
ruthénien de Kiew, dont parle le baron Rasta-
wiecki, dans son Dictionnaire des peintres
polonais. Cette supposition est confirmée par
l'abbé A. Wadowski, connu dans l'histoire des
églises du diocèse de Lublin, et qui assure que
les peintures seules, et non les constructions,
furent exécutées sous ce monarque.
« L'aspect général des peintures nous autorise
à croire que l'artiste y donne en quelque sorte
un type de la polychromie gothique. Le ton du
ciel est gros bleu foncé : le château, crénelé au
CorreeponDance,
145
haut des murs, est garni de nombreux contre-
forts. (Au grenier du château actuel se trouvent
les traces d'une communication avec les nou-
veaux murs du pignon bâti au commencement
du XIX^ siècle.) La couleur du château est rouge
brique, l'encadrement des fenêtres et de l'embra-
sure des canons est couleur de pierre : l'église
sur le tableau est également d'un ton rouge : elle
est, ainsi que les contreforts, couverte de tuiles.
(Le fronton de la chapelle actuelle a été refait,
dans le style de la renaissance italienne du
XVL siècle.)
« La principale figure du tableau est la sainte
Vierge avec l'Enfant Jésus sur les bras. Elle est
assise sur un trône d'or de style roman : son
manteau est de couleur amarante foncé à bor-
dure d'or, la robe bleu clair. L'Enfant Jésus porte
un manteau de drap d'or, une robe blanche semée
d'étoiles rouges; il tient à la main un volumen de
parchemin.
l^^^^-!^'^'l^:!^:^\l^:S^'l^:m'^'-:^:!^if^
Peinture murale dédicatoire à Lublin.
« A gauche du tableau se tient S. Clément, pa-
tron des Slaves, ou bien le fondateur de l'Ordre
des Basiliens, S. Basile. Le saint est blond, il est
coiffé d'un bonnet jaune clair à liserés bleus, sem-
blable à ceux que porte le peuple dans le Gou-
vernement de Lublin. Il est vêtu d'un manteau
couleur chair et d'une robe violette, il tient à la
main un cartel.
« A gauche, un second personnage, probable-
ment S.Nicolas, pour quiLadislasJagellon profes-
sait une dévotion particulière, en chape de drap
d'or et en pallium archiépiscopal de laine blanche,
timbré de croix noires, sous lesquelles sont visi-
bles en vert les signes de svastica. Le pallium se
termine par des franges noires.
« Le personnage agenouillé devant la Ste
Vierge représente probablement le roi Ladislas;
sa tête, d'une calvitie naissante, est plus achevée
que les autres. Sa chevelure est de couleur châtain
foncé, les traits sont expressifs. Il est revêtu d'un
manteau de pourpre, doublé d'hermine, d'une
longue robe noire, retenue par une ceinture in-
crustée d'or. Le page blond, debout derrière le
roi, l'épée sur l'épaule, porte un manteau rouge,
et une cuirasse : sa tunique courte est verte,
bordée de jaune, ses chausses grises sont collan-
tes ; la chaussure est nouée avec des courroies ;
il porte au côté une escarcelle jaune.
« Derrière lui se tient debout, l'air humble, un
homme blond à barbe, en robe et manteau gris.
146
îRêbue tie l^^rt cbréricn.
« Le terrain du tableau est vert clair, encadré
d'une large bande rouge bordée d'une ligne
blanche. Au bas sous cette bande, on voit une
frise noire, bordée en haut et en bas de blanc ;
elle est recouverte d'ornements gris de style
roman.
« Sous la frise se trouve également une bande
rouge, sur laquelle sont tracées, avec un instru-
ment aigu, des signatures en langues polonaise,
ruthène, allemande, grecque et latine. Ces signa-
tures, dont quelques-unes accompagnées d'ar-
moiries, sont suivies de dates depuis le X V^ siècle
jusqu'au commencement du XVI<".
« Sous la bande rouge, est peinte une baguette
jaune, où sont enfilés des anneaux servant à
suspendre un rideau jaune foncé qui termine l'en-
semble.
« L'entrée de la cage de l'escalier se trouve
sous le tableau. Elle est ornée d'un encadrement
de bandes rouges. Sur la frise noire court une
ornementation blanche en forme de serpent. Sur
les chambranles sont peintes des rosaces multi-
colores à ornements noirs. >
A. Brykczynski.
Curé de Goworowo.
^ ^ ^ :^, :,^ ^;:^ ::^ :^ :^ ^ :^, ^ ^ ^ ^, :^ :^^ ::S^, ^ ^ ^ ^^J^L^^
Trabauv Des Sociétés savantes. ^^^^
'il^^^fW^^^WWWWWWW^^^^^WWWWWW^WWWWW^^
Société des Antiquaires de France. —
Séance du 28 novembre içoo. — M. le général de
La Noë produit deux fragments vitrifiés confir-
mant la théorie de la vitrification accidentelle
des enceintes fortifiées.
M. Héron de Villefosse présente quelques ob-
servations sur les deux bas-reliefs de Varbely,
portant des représentations du « dieu au mar-
teau » publiées en 1892, par M. Blanchet, dans
le Bulletin delà Société.
M. Collignon communique de nouvelles remar-
ques sur le torse Clazomène, appartenant au
mu.sée d»i Louvre, que vient compléter aujour-
d'hui un fragment de la partie inférieure.
M. Paul Girard présente l'estampage d'un frag-
ment de marbre antique conservé au musée de
Saint-Malo et représentant une scène d'adieux.
Séance du iç décembre. — M. Durrieu signale
dans un manuscrit de la bibliothèque d'Albi
deux portraits de Jacques-Antoine Marcello,
général vénitien connu pour avoir eu avec le roi
René des relations d'amitié très intéressantes au
point de vue de l'histoire littéraire.
M. Maurice fait une communication sur le
parti que l'on peut tirer de la classification chro-
nologique des monnaies de quelques ateliers
(Rome-Tarragone-Londres) pour déterminer la
politique de l'empereur Constantin pendant les
premières années de son règne.
M. Héron de Villefosse communique à la
Société des moules provenant d'une trouvaille
faite à Tortose fSyrie) et qui paraissent consti-
tuer le matériel d'un orfèvre.
M. Paul Monceau entretient la Société -de
diverses marques de carrière se trouvant sur des
blocs de marbre provenant de .Synnada et les
compare à des marques de carrière d'autre pro-
venance.
M. le D"^ Capitan présente à la Société un
casque de bronze appartenant au D' Bonneau
de Mantes, trouvé à Raugiport et dont la date
paraît incertaine.
Séance du .^janvier içoi. — M. de Lasteyrie,
élu président, fait l'éloge de son prédécesseur,
M. de Barthélémy.
M. Hamy communique une élégante minia-
ture, découverte par M. Gustave Schlumberger
dans la collection du comte de Ganay au château
de Courances, et qui représente un groupe de
guerriers en costume du temps de Charles IX,
conduits par un chef indien devant un pilier de
pierre aux armes de France, entouré de sauvages
qui lui rendent hommage. Cette scène est l'exacte
traduction d'un des récits de voyage en Floride
du capitaine Landonière, amené ainsi par le
chef Satouriona devant \s. padron dressé, quatre
ans auparavant, par Jean Ribault. Cette jolie
peinture a pour auteur le peintre de l'expédition.
Le Moyne de Morgues ; elle a été gravée par
Th. de Bry dans la seconde partie de son Amé-
rique, publiée en 1591.
M. l'h. Berger fait passer sous les yeux de
l'Académie une cymbale avec inscription phé-
nicienne, qui a été trouvée par le P. Delattre au
cours de ses fouilles à Carthage. D'après l'exa-
men de cette cymbale et d'autres semblables, il
y aurait lieu de conclure qu'on s'est trompé en
considérant comme un poids ou une sous-coupe
de candélabre l'objet généralement connu sous
le nom de « Poids d'Iôl » ; cet objet n'est autre
chose qu'une véritable cymbale du même genre
que celle du P. Delattre.
M. Héron de Villefosse commutn'que des ren-
seignements précis sur la célèbre inscription
bilingue de Malte, aujourd'hui conservée au
musée du Louvre.
M. HomoUe, directeur de l'École d'Athènes,
rend compte des fouilles exécutées, au cours de
l'année dernière, par les membres de l'Ecole,
notamment en Grèce et en Crète, et signale les
principales découvertes.
Académie des Inscriptions et Belles-
Lettres. — Séance du 2j novembre içoo. —
M. de Lasteyrie, en l'absence du président,
adresse à M. Wallon, secrétaire perpétuel, une
allocution a l'occasion du cinquantenaire de son
élection comme membre de l'Académie.
Après ce discours, accueilli par de vifs applau-
dissements, M. Wallon, très ému, prend la parole
pour remercier l'Académie de ce témoignage de
sympathie ; il lit ensuite une notice sur Quatre-
mère de Quincy qu'il remplaça, il y a cinquante
ans, et il insiste particulièrement sur sa vie poli-
tique pendant la période révolutionnaire.
M. S. Reinach étudie une inscription grecque,
connue seulement par des copies, qui surmontait
l'entrée de la niche où fut découverte la Vénus
de Milo. Il propose une restitution nouvelle et
insiste sur ce fait, à ses yeux certain, que cette
inscription n'a rien de commun avec la Vénus
de Milo.
REVUE DR l'art CHRÉTIEN.
1901. — a'"^ LIVRAISON.
148
WitWt lie r^rt cbrctieiu
M. Reinach parle ensuite des inscriptions gra-
vées sur les bases des deux hermès trouvés avec
la Vénus de Milo et affirme qu'elles aussi sont
tout à fait étrangères à cette statue. Celle de la
base d'Héraklès jeune doit appartenir à une
sculpture toute différente et d'au moins un siècle
postérieure au chef-d'œuvre du Louvre.
S/ance du 30 novembre. — M. le docteur
Hamy fait hommage d'une gravure très rare de
Girardot et que ne possédait pas la bibliothèque
de l'Institut, représentant la première séance
tenue par l'Institut au Louvre, dans la salle des
Cariatides, le 15 germinal an IV.
Séance du 5 décembre. — Il est procédé au re-
nouvellement du Bureau et à l'élection d'un mem-
bre résidant, en remplacement de M. Samuel
Berger.
Séance du 7 décembre. — Après un comité
secret, il est procédé à l'élection d'un membre
ordinaire, en remplacement de M. Ravaisson.
M. L. Léger, professeur de langue et littérature
slaves au Collège de France est élu.
Séance du ji janvier içoi. — M. Heuzey fait
connaître un travail qu'il a fait conjointement
avec M. de Sarzec, sur une «Villa royale chal-
déenne vers l'an 4000 avant J.-C. ». Cette villa fut
mise au jour par les fouilles qu'a fait exécuter
M. de Sarzec depuis 1888, pour la mission fran-
çaise de Chaldée, sur une station historique la
plus ancienne qu'on ait découverte dans ce pays.
M. Reinach commente le sujet d'un des deux
bas-reliefs du musée de Constantinople dont il a
déjà parlé à l'Académie. Ce bas-relief archaïque,
découvert à Chalcédoine, représente Jupiter
accouchant de Minerve entre deux divinités de la
délivrance.
Séance du 18 janvier. — Le président donne
lecture d'une lettre de M. Huillier, notaire à
Paris, accompagnant le texte d'un testament par
lequel M""^ Pellechet lègue à l'Académie des
Inscriptions et Belles- Lettres une somme de
300,000 francs qui sera em[)loyée à conserver
les monuments existant en France et aux co-
lonies présentant un intérêt historique ou archéo-
logique.
M. S. Reinach donne lecture d'une lettre de
M. Cavvadias, directeur des antiquités en Grèce,
sur la découverte de statues et de fragments en
marbre et en bronze recueillis dans la mer, à
quarante mètres de profondeur, près de la petite
île de Cerigotto, et provenant d'un naufrage qui
date de l'époque romaine.
M. Clermont-Gaiineau fait une communication
sur un sceau de l'époque des croisades provenant
de la léproserie de Saint-Lazare de Jérusalem,
que lui a envoyé le l'. Paul de Saint-Aigiian et
qui représente un lépreux.
M.Antoine Cabaton, membre de l'École fran-
çaise d'Extrême-Orient, rend compte de la visite
archéologique qu'il a faite des monuments
khmers de la province de Bâti et de Kompong-
Cham.
Séa7ice du 2^ janvier. — M. H. de La Tour
présente à l'Académie la reproduction d'une
monnaie de bronze découverte à Gergovia; c'est
la première frappée dans la colonie fondée par
les Romains près du confluent du Rhône et de
la Saône, sur l'emplacement de la vieille localité
gauloise appelée Lugdunum.
L'étude de cette médaille a permis à M. de
La Tour de préciser la date de la fondation de
Lyon, qui doit être fixée entre le mois d'avril et
le mois de septembre de l'an 43 avant Jésus-
Christ.
Société historique et archéologique de
l'Orne. — Cette Société, émue des actes de van-
dalisme trop souvent perpétrés contre nos vieux
monuments et résolue à y mettre obstacle le plus
possible dans la région qui la concerne, vient de
créer une « Commission de protection des monu-
ments ornais )) qui, sous la présidence de M. H.
Tournouer, veillera à la préservation et à la
conservation des anciens monuments, suscitera
la création de musées locaux, constituera une
collection de vues, dessins, gravures et photogra-
phies, des richesses historiques et archéologiques
de la région et en dressera l'inventaire.
On ne saurait trop applaudir à une semblable
initiative (').
Comité des travaux historiques. — Divers
érudits continuent d'approfondir l'histoire de
l'art roman français, dont il est si souvent ques-
tion dans nos colonnes. M. A. de Rochemonteix,
qui a déjà consacré une monographie aux églises
de l'arrondissement de Mauriac (^), s'occupe à
présent de celles de Saint-Flour et de Murât (3),
toutes différentes de celles de l'Auvergne.
L'architecture romane du Cantal se distingue
par la voûte médiane à berceau, fractionnée par
des doubleaux légèrement brisés, des bas-côtés
voûtés en quart de cercle, des absides circulaires
sur leurs deux faces interne et externe, des cou-
1. Les personnes désireuses d'adhérer à cette Société sont priées
de s'adresser à M. l'abbé Letacq, secrétaire, isi''''i rue du Mans, à
Alençon.
2. Revue de t Art chrétien, année 1899, p. 347.
3. Bullel. du C. des Irav. kist., 1900, 2= livr. . p. 203.
pôles octogonales sur trompes, des clochers à
huit pans à la croisée, des contreforts avec co-
lonnes engagées, des modillons très particuliers ;
bref, le mélange des écoles auvergnate, limousine
et poitevine; la voûte médiane est poitevine et
limousine, les voûtes latérales et la coupole sont
auvergnates.
Or cette architecture cantalienne s'unit à
d'autres voisines. L'école limousine intervient
avec ses chevets droits, ses archivoltes lobées, son
doubleau brisé ; la bourguignonne, avec ses pi-
lastres ; la provençale, avec ses archivoltes mu-
rales inférieures, ses clochers à pignons, ses absides
à pans, ses décorations flabelliformes, ses absi-
dioles empâtées.Il se fait, en outre, une infiltration
méridionale ; l'Auvergne fournit les absidioles
rayonnantes, les contreforts perdus dans la
corniche, les matériaux polychromes.
Le chœur de Saint-Urcize est inscrit dans huit
colonnes comme celui de Conques et les chapi-
teaux pseudo-corinthiens rappellent l'Aquitaine;
Auriac-l'Église a la coupole et les chapiteaux
en éventail de la Provence ; Bredons dérive de
Mauriac, ainsi que Molompize, mais beaucoup
d'autres églises restent indépendantes de toutes
écoles, grâce à leur simplicité.
M. l'abbé P. Brune s'occupe de l'orfèvrerie en
Franche-Comté. Il indique les courants reli-
gieux, populaires et commerciaux qui ont donné
naissance aux types de cet art, les centres de
fabrication, et les caractères de leurs produits ;
puis il met en lumière quelques reproductions
choisies, notamment la croix-reliquaire de Saint-
Ferréol-lez-Besançon, la croix processionnelle de
Rougemont, et celles d'Ornans (Doubs), le chef
de saint Léger à Chaux-en-Montagne et le reli-
quaire de la Sainte-Épine à Château-Chalon, le
reliquaire de Nevy-sur-Selle, et celui des saints
Maurice et Georges à Soucia.
L. C.
L'Art chrétien. — Une importante réunion
de la Société diocésaine d'art chrétien a été tenue
à Namur, sous la présidence de Mgr Heylen, le
révérendissime évêque, en janvier. M. le chanoine
Sosson présidait.
Mgr l'évêque a répondu par un discours sub-
stantiel. Il a loué la Société diocésaine d'art chré-
tien, à laquelle il portera le plus grand intérêt,
parce que l'art élève à Dieu et y conduit les âmes;
parce que la Société veut connaître les richesses
artistiques diocésaines, lesquelles sont un patri-
moine commun laissé par les ancêtres et qu'il
faut conserver. C'est d'ailleurs ce que recherche
' la Société d'art chrétien, et c'est ce dont la féli-
cite Monseigneur. Il promet qu'il l'aidera de tout
son pouvoir, et il désire voir bientôt paraître l'in-
ventaire des œuvres d'art que possèdent les égli-
ses du diocèse. On a beaucoup applaudi Sa
Grandeur.
M. Nifle, secrétaire, a fait ensuite une longue
et intéressante conférence sur les verres églomi-
sés. M. le chan. Sosson a fait, lui, une causerie
charmante sur certaines églises qu'il a visitées
dans le diocèse, et qui sont riches souvent d'ob-
jets de grande valeur.
Il a fallu ajourner à une séance ultérieure la
conférence que M. le curé de Saint-Germain
(Leuze) avait préparée sur son église, une très
vieille basilique classée dans la troisième catégo-
rie des monuments nationaux, et qui va être re-
construite avec goût et intelligence.
C'est au Luxembourg, probablement à St- Hu-
bert ou à Bastogne, que la Société d'art chrétien
tiendra sa seconde réunion statutaire annuelle.
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L'ANCIEN TRÉSOR DE L'ABBAYE DE
SILOS, par Doni Eugène RoULiN, bénédictin de la
Congrégation de Solesmes. — In-f°, 124 pp., avec
seize planches et vingt figures dans le texte. Paris,
Ernest Leroux, 1901.
^f^^^^T^RACE aux travaux publiés dans
W notre Revue, par Dom Roulin, une
'^ partie de la savante publication
li^. dont le titre figure en tête de ces
Pîf^'iu lignes, est déjà connue de nos lec-
teurs. Elle se compose en réalité de l'étude très
détaillée, très documentée et accompagnée d'ex-
cellentes planches, d'une vingtaine d'objets dont
plusieurs peuvent être considérés comme de
véritables inonuments ; l'auteur leur consacre
XVII chapitres, qui forment autant de mono-
graphies. Il nous est d'ailleurs facile d'en faire
apprécier la valeur, trois de ces études ayant paru
dans nos colonnes.
Nos lecteurs se rappellent sans doute que
l'abbaye de Silos, située dans la Vieille-Castilie,
au milieu de montagnes sauvages, à peine acces-
sible par de rares voies de communication, est
restée peu connue pendant longtemps de ce côté
des Pyrénées, malgré l'éclat que répandit sur
elle au XI<^ siècle saint Dominique, et au XIII<^
D. Rodrigue Yemguez de Gusman. Depuis peu
d'années seulement elle a trouvé un historien
digne d'elle en Dom Férotin qui lui a consacré
deux volumes pleins de recherches et d'une
science très sûre ; l'ouvrage a été couronné ré-
cemment par l'Académie des Inscriptions et
Belles Lettres, et des savants de premier ordre,
comme MM. Léopold Delisle et Morel Fatio,
lui ont rendu pleine justice.
Un côté de l'histoire de l'abbaye de Silos
n'avait pas été éclairé par l'ouvrage de Dom
Férotin : C'est l'étude des monuments de l'art
qui formaient autrefois le riche trésor de l'ab-
baye. Cette tâche était réservée à notre savant
collaborateur, qui, après avoir déjà fait connaître
isolémentquelques pièces de cetterichecollection,
malheureusement divisée actuellement, la réunit
et l'examine dans son ensemble par la publication
sur laquelle je tiens à appeler l'attention de nos
lecteurs.
Le nombre des objets principaux étudiés,
décrits avec un grand soin et reproduits par des
planches très fidèles, est de dix-sept, parmi les-
quels il en est plusieurs d'inédits, et dont d'autres,
de la plus haute valeur, n'ont été publiés que
d'une manière insuffisante. Une douzaine de ces
objets se trouvent encore à l'abbaye de Silos et
la plupart y sont encore en usage. Les autres ont
été incorporés au musée provincial de Burgos,
à une date relativement récente.
Parmi les pièces les plus remarquables de la
collection, je ne citerai que pour mémoire le
calice ministériel, publié et reproduit dans notre
Revue ('). Le lecteur se rappellera sans aucun
doute que c'est à la fois une œuvre d'art très
remarquable, un peu bizarre par la forme, et un
monument historique ; il a été exécuté sous
l'abbatiat de saint Dominique de Silos (1041-
1073), et on ne peut guère expliquer les pro-
cédés de fabrication et le style du décor arabe
que par des influences locales qui paraissent
manifestes. Il semble probable que le travail
aurait été fait à Silos même, par des prisonniers
maures, restés au service à l'abbaye. On se rap-
pellera qu'il servait à distribuer le vin, selon les
rites de la liturgie gothique ou mozarabe, en
vigueur à Silos au XI*' siècle.
Deux monuments de la plus haute importance
de cette collection sont des tables d'autel ou
frontaux, dont l'un déjà publié par M. Rupin (2).
De caractère et de décor très différents, ils sont
cependant tous deux du XII"= siècle et de fabri-
cation limousine. Le premier, très richement
émaillé, fait aujourd'hui partie du musée de
Burgos. C'est une osuvre particulièrement remar-
quable par son grand style et la richesse de son
ornementation. M. Rupin assure que jamais les
Limousins n'ont rien produit de plus parfait que
ce travail ; la gravure, dont le cliché a été mis
gracieusement à notre disposition, permet d'ap-
précier, à toute leur valeur, le caractère des
figures d'apôtres, qui, au noinbre de six de chaque
côté du Christ en majesté placé au centre de la
table, sont l'objet principal de la composition,
ainsi que le décor architectonique très particulier
qui encadre les figures. L'abbaye de Silos a heu-
reusement conservé le second retable en cuivre
gravé, moins riche d'aspect, mais non moins
intéressant par le grand style des figures d'apô-
tres qui y sont gravées.
D'autres objets seraient à citer. La planche
V^II représente en héliogravure une patène mi-
nistérielle que, très probablement, il faut égale-
ment faire remonter au XI 1"^ siècle. Elle est
décorée de filigranes, de pierres précieuses et
d'intailles antiques. L'ornementation révèle un
savoir faire exquis, un goût parfait et un art
1. Année 1898, pp. 35B et ss. grav. pi. XVIII.
2. L'Œuvre de Limoges, pp. 197 et 198.
Bibliographie.
Détail du frontal ëniaillé.
— K"^^z_^£-. c
151
consommé : c'est un objet à placer au premier
rang des pièces d'orfèvrerie ornées de filigranes
D'après Dom Roulin et d'autres archéologues
qui l'ont étudiée, cette patène serait également
de fabrication limousine. En ajoutant la patène
aux deux frontaux, il faut croire qu'il y a eu
152
jl^ebuc ïie rart chrétien.
Monstrance eucnaristique (XVF sièclK)
2dtbltograpl)ie.
153
au XI I"^ siècle, entre l'abbaye de Silos et Li-
moges, des rapports fréquents, qui ont donné lieu
aux commandes d'une série d'œuvres de la plus
haute valeur, qui toutes n'ont pas été conservées.
Deux petites châsses limousines, également re-
produites, et dont l'une existe encore à Silos,
tandis que l'autre se trouve au musée de Burgos,
semblent établir que ces rapports ont continué
au XIII<= et jusqu'au XIV' siècle. Ces châsses
appartiennent cependant à un ordre de travaux
beaucoup plus ordinaires.
Un magnifique coffret en ivoire, de travail arabe
du XI*^ siècle, mais avec garniture fabriquée à
Limoges, et un étrange étui, également arabe,
dont on a fait plus tard un reliquaire, sont
également à citer ; les reproductions de ces deux
objets sont excellentes.
Les notices sur une main-reliquaire et sur
deux devants d'autel ont été publiées dans notre
Revue (').
Avec la main-reliquaire se marque dans le
domaine de l'orfèvrerie une période de déca-
dence, à Silos, comme partout. Les traditions,
comme les principes particuliers à chaque art,
s'effacent et se confondent. Au simple examen
d'une reproduction, on en vient à se demander si
l'on a affaire à un travail d'orfèvrerie, de me-
nuiserie ou d'architecture ; on en vient aussi à se
demander quelle est la destination de l'objet que
l'on a sous les yeux.
Je suis heureux de pouvoir offrir à nos lecteurs
la reproduction d'un petit monument, style de
la Renaissance, dont le dessin ne manque pas
d'élégance. Il date de la fin du XVI'= siècle. Je
pourrais laisser deviner si cet édicule est destiné
à un mausolée, à une caisse d'horloge, ou bien à
un vase sacré Mais, afin de ne pas laisser
le lecteur dans l'embarras, j'aime mieux dire
tout de suite que c'est une monstrance.
Ce petit édifice a 90 cent, de hauteur ; il est
en argent et bronze doré. Il est conservé à la
salle des archives de Silos, et le jour de la Fête-
Dieu on y abrite la sainte hostie pour la porter
solennellement à travers les rues ; naturellement
il est placé sur un brancard, à la mode espa-
gnole ; on ne pourrait le transporter autrement.
Cependant, pour l'Espagne, les dimensions sont
relativement modestes.
On le voit, l'étude publiée par Dom Roulin
sur l'ancien trésor de Silos, est pleine d'intérêt
et d'enseignement ; les planches, je le répète,
sont excellentes, et le volume est imprimé avec
un soin et un goût qui doivent lui assurer bon
accueil, dans toutes les bibliothèques.
J. H. Helbig.
I. Voir année i8g8, pp. 450 et 452.
DE OUDE BRUGSCHE BOU"WTRANT EN DE
VLAAMSCHE RENAISSANCE, par A. VaN DE
Velde. — Bruges, H. Van MuUem, igoi.
IL est des styles qui exigent des matériaux
coûteux pour produire de belles façades.
Tel n'est pas le vieux style brugeois, qui fut
pratiqué d'une si magistrale façon par les maçons
de l'endroit, du XV'^ au XVII« siècle. Au moyen
de briques diversement profilées, ils ont su donner
à leur architecture des forines adéquates aux
simples maisons ouvrières comme aux demeures
patriciennes les plus cossues. C'est ce que nous
montre M. Van de Velde dans son charmant opus-
cule, gentiment illustré par M. H. Van Huile. Le
livre, spécialement écrit pour faciliter le tra-
vail des architectes dans l'élaboration des projets
de maisons en style local, n'est pas moins inté-
ressant pour tous ceux qui s'intéressent aux
belles choses de l'art flamand ; il met en évi-
dence la perfection de la technique des maçon-
neries en briques dans les pignons, tourelles,
cheminées, etc., là oîa les touristes en général se
contentent d'admirer simplement le pittoresque
des constructions.
E. C.
ESTHÉTIQUE FONDAMENTALE, PRÉCÉ-
DÉE D'UNE LETTRE DE M. EUG. GUIL-
LAUME, DE l'iNSTlTUT, par Ch. Lacouture,
S. J. — Librairie V. Retaux, Paris. Un vol. grand
in-8° de 422 pp. Imprimerie Jobard, à Dijon.
ON n'a jamais tant écrit sur les arts que de
notre temps, jamais si peu sur l'art. De
patients archivistes nous apprennent par qui,
en quel temps, pour qui fut exécutée telle
œuvre sur laquelle s'égarait la tradition, et ainsi
se constitue peu à peu l'état civil de nos richesses
artistiques ; en même temps des musées d'étude
nous permettent d'établir des comparaisons et
des rapprochements utiles. Mais il ne s'agit que
des manifestations extérieures, on dresse des
catalogues raisonnes, et c'est tout ; « les arbres,
comme dit le proverbe allemand, empêchent de
voir la forêt. »
Pourquoi une œuvre d'art est-elle belle? En
dehors de la sensation de plaisir éprouvée, existe-
t-il des règles positives pour déclarer telles formes
belles et telles autres non ? L'art enfin est-il un
spectacle dont chacun jouit selon sa réceptivité
propre, ou derrière le voile des formes et des
couleurs devons-nous chercher une beauté intel-
ligible dont elles seraient seulement l'expression
sensible, comme le visage humain révèle l'être
moral qui est en nous? Questions de tout temps
posées, mais que n'aime pas à remuer une époque
154
Brliuc t)c V^xt cbvctten.
éprise de faits et de documents. Se donner la
peine de chercher le pourquoi du beau et des
sensations qu'il nous donne, est un trop f^rand
effort pour nos volontés lassées. Surtout, au
Français de ce siècle commençant, ne demandez
pas de réagir par la raison contre les impressions
du moment;la doctrine que toute passion est légi-
time et a le droit de se satisfaire est pleinement
victorieuse en matière d'art ; le plaisir variable
chez chaque horhme, et chez chaque homme
selon le moment, le chatouillement sensuel et
imaginatif que nous causent un tableau, une
statue ou un morceau de musique, voilà les seules
lois du beau que l'on reconnaisse. Autant dire
qu'il n'existe point par lui-même ; de même que
la couleur est seulement une excitation de la
rétine.
Il apparaît cependant quelques symptômes
d'une réaction spiritualiste; les articles de M. Ro-
bert de la Sizeranne, dans la Revue des Deux-
Mondes, ont touché à ces questions, sinon pour
les résoudre, du moins pour les agiter, et voici
du P. Lacouture un livre tout rempli de faits,
mais aussi de doctrine, où l'écrivain affirme que
le beau n'est pas une impression subjective pro-
duite sur nos yeux, mais une réalité objective.
Dès lors, il y a une science du beau, et « comme
« toute science, l'esthétique ne se contente pas
« de constater le fait, elle en recherche le poiir-
« quoi, les lois. L'art a précédé la science, mais
•i les progrès de la science donnent à l'art un
« nouvel élan. » C'est en ces termes, que dès les
premières lignes, l'auteur pose le problèine de
l'esthétique. Si, en effet, la beauté est un caractère
des choses, comme l'étendue, comment la définir
et la déterminer .' C'est ici que commence le rôle
de la science.
Personne ne saurait tirer tout de soi-même et
l'on a toujours plus ou moins le temps, le sien et
le passé, pour collaborateur. Le P. Lacouture a
procédé par ces dénombrements complets, dont
Descartes a fait un des principes de la méthode,
et sa documentation va de Platon, d'Aristote,
de saint Thomas d'Aquin, à Ruskin, àTh. Jouf-
froy et même à Topffer, le spirituel et subtil
auteur des Menus propos, pour en arriver aux
tout derniers venus, à MM. Richard Kralik et
Robert de la Sizeranne. Par des réductions suc-
cessives de tant d'éléments ainsi coUigés et étu-
diés, le P. Lacouture en vient à condenser toutes
les définitions dans cette formule : « le beau est
la splendeur de l'ordre ». Or, qui dit ordre, dit à
la fois unité et variété, puisque l'ordre est l'orga-
nisation du multiple.
Le type en est donné par le spectacle de l'Uni-
vers, où la plus infinie variété se résout dans
l'ordre le plus parfait, puisqu'il est œuvre divine.
Et cet ordre est fait aussi de splendeur, c'est-à-
dire de force, de clarté et de lumière. Eh bien,
l'art s'élèvera d'autant plus qu'il se rapprochera
davantage de cet ordre, de cette splendeur qui
sont dans l'Univers. Et cela nous donne encore
un des éléments du beau, la vérité : «Toute beauté
doit ressembler à ce qui vit », dit Aristote.
De même que dans l'Univers créé il y a plu-
sieurs ordres, ainsi il y a autant d'espèces de
beau. Bien entendu l'auteur ne s'occupe pas, si
ce n'est pour le citer en passant, de ce diminutif
du beau qm' est \e joli et dont le trop charmant
XVI II >^ siècle a fait sa chose. Il y a le beau visible
et qui est seulement un spectacle, le beau de
Paul Véronèse, par exemple ; et cependant,
comme il est impossible qu'une œuvre de l'hom-
me n'exprime pas quelque chose, ce qui éclate à
l'esprit dans les grandes ordonnances de Véro-
nèse, c'est la joie de vivre et de jouir du riche
Univers que Dieu a fait pour l'homme.
Beaucoup estiment, avec Théophile Gautier,
qu'il n'y a rien au delà de ce beau matériel et
visible. Le P. Lacouture, il est à peine nécessaire
de le dire, pense autrement ; pour lui, il y a un
beau intelligible révélé par les formes qui tom-
bent sous les sens, de même que dans la vie ter-
restre l'âme se révèle à l'esprit par le corps. Mais
l'auteur est un prêtre, et si le caractère sacerdotal
apparaît seulement à l'état du spiritualisme le
plus élevé quand il ne s'agit que des formes, au
seuil de son chapitre sur le beau intelligible il se
prosterne devant Dieu, source de toute beauté
parce qu'il l'est de toute vérité. Puis, descendant
de ces hauteurs vers la nature créée, il montre
l'esprit divin donnant sa forme à celle-ci en em-
ployant toujours la voie la plus simple, ce qui
revient à la théorie de la moindre action des
philosophes.
Et l'auteur en vient alors à étudier le beau
intelligible dans les sciences, dans les arts utiles
ou industriels. Ce qu'il en dit est d'une finesse
neuve et rare ; ainsi, à propos de la locomotive,
il se rencontre avec Viollet-le-Duc pour montrer
que ce chariot monstrueux, mais non informe,
dont les anciens auraient fait un fils du feu et de
l'eau, a, comme toutes nos machines, sa beauté
projjre, parce qu'il est ce qu'il doit être pour
remplir sa fonction d'engin de mouvement et de
force.
Puis, s'élevant de l'industrie aux beaux arts,
voici d'abord l'architecture, dont le point de dé-
part est l'utile. A ceux qui demanderaient quelle
expression peut avoir un édifice, on n'aurait qu'à
les inviter à la contemplation des cathédrales du
moyen âge ; dans l'art de construire, elles sont
le triomphe du beau intelligible. Ce beau que
l'adaptation parfaite de l'édifice à la destination,
au climat, aux matériaux, aux conditions de
statique et de solidité qui impliquent la durée,
met aux œuvres de l'architecture, ne peut
être absent de la peinture et de la sculpture,
dont l'objet est d'exprimer cette vérité humaine
faite du vrai de l'âme comme du vrai du corps.
Oui, tout n'est pas dans la forme et la couleur,
et un tableau est quelque chose de plus qu'un
harmonieux tapis d'Orient ; seulement les arts
ne doivent pas empiéter l'un sur l'autre, et il ne
faut de pensée dans un tableau que ce qui en
peut être intelligible. Une œuvre trop pleine
d'intentions a toutes les chances d'être un tableau
médiocre, et je pense à ces tapisseries dont parle
Rabelais, où l'on voyait peintes les idées de
Platon et les catégories d';\ristote.
Au-dessus du beau intelligible est le beau
moral qui n'est plus alors << la splendeur du
vrai », mais celle du bien. Je sais, on nie volon-
tiers que ces choses-là soient belles, cependant
le sentiment populaire y voit plus clair que les
philosophes; << c'est un beau trait », dit-on, en
présence d'un acte de dévouement et d'héroïsme.
Et au-dessus du beau moral humain, l'auteur
vénère le beau moral religieux.
Ce beau moral existe-t-il dans les arts ? Oui,
et j'en reviens à nos cathédrales ; un homme qui
n'était pas un croyant, David d'Angers, leur a
reconnu ce caractère et à elles seules dans la
série du temps. Ici une remarque : L. Vitet, cité
par l'auteur, a pensé qu'en consultant la nature,
la naïveté de l'imagier du XII I^ siècle s'est plus
rapprochée de Phidias, c'est-à dire de la beauté
pure que tel habile praticien d'Athènes ou de
Sicyone travaillant pour les rois grecs d'Asie ou
pour les Antonins. Et cependant ils n'auraient
jamais été en contact avec l'art antique. Cela ne
me paraît pas exact ; d'abord la naïveté des ima-
giers, si naïveté il y a, est faite d'un sentiment très
élevé mais aussi très subtil et sans mélange
d'ignorance. Ensuite ils connaissaient l'antique :
en effet, jusqu'à la fin du moyen âge, la F"rance
était couverte d'œuvres gallo-romaines, édifices
et sculptures, celles-ci le plus souvent médiocres,
excepté dans les villes importantes, mais où se
retrouvait cependant le reflet du grand style et
même ce beau canon de la forme grecque qui,
suivant une parole précieusement recueillie par
moi de la bouche de M. Eugène Guillaume, s'était
conservé à travers les siècles jusqu'au XV"^. Ainsi
le merveilleux groupe de la Visitation à la cathé-
drale de Reims, où la Vierge est noble comme
une vestale, et sainte Elisabeth, comme une ma-
trone, mais avec la pureté chrétienne en plus,
est visiblement inspiré des figures antiques en-
core existantes parmi les restes de la civitas
Remomm.
Comme exemples de cette union de la pensée
et de la forme, le P. Lacouture cite la Madeleine
de Canova, le Bien et le Mal d'Orsel, le Saint
Augustin et la sainte Mottique d'Ary Scheffer.
Peut-être pour que les preuves fussent plus vic-
torieuses, aurait-il fallu chercher non dans les
régions moyennes de l'art, mais sur les plus hau-
tes cimes. Après tout, le résultat aurait bien pu
être de constater que les très grands parmi les
artistes ont mis plus de forme et de couleur que
de pensée dans leurs œuvres.
La conclusion à en tirer est que la poésie est
le premier des arts, parce que la pensée s'y dégage
de ces liens terrestres où, plus ou moins prison-
nière, elle se débat dans les arts plastiques.
Dans la musique, le P. Lacouture proclame
justement la noblesse et la beauté morale du
plain-chant.
Le livre III est consacré à la Gradation du
beau. En Dieu est la beauté absolue, et l'homme
ne peut connaître ou créer que le beau relatif; le
beau intelligible est supérieur au beau visible, le
beau moral au beau intelligible. Dans les choses
et dans les êtres, la beauté croît du minéral à
l'homme en passant par le végétal et l'animal,
parce qu'elle croît à mesure que diminue la dé-
pendance pour arriver à cette indépendance de
l'esprit qui est la marque du règne hoininal ou
règne humain. Et dans l'homme ce qui rend beau
le visage, c'est qu'il est le voile transparent de
l'âme ; le curé d'Ars était la parfaite image de
Voltaire, quelle différence physique entre eux
pourtant ! aussi grande qu'entre leurs natures
morales. C'est sur toutes les autres la supériorité
de cette beauté chrétienne, telle que l'a évoquée
Flandrin,dans ses frises sereinesde Saint-Vincent
de Paul et au delà encore, l'auteur entrevoit cette
beauté du Christ et de la Vierge dont les plus
grands artistes n'ont pu nous donner qu'un reflet
affaibli.
Passant ensuite au subjectif, l'auteur étudie,
dans son livre IV, l'impression du beau ; contre
l'opinion de Guyau et du professeur R. Kralik,
il ne pense pas que les sens du toucher, de l'odo-
rat et du goût aient rien à faire avec le beau ; ils
donnent des sensations agréables, rien de plus.
Seules font naître l'impression du beau la vue et
l'ouïe, parce qu'à peu près indifférentes à la souf-
france et au plaisir physique, elles font la plus
grande part possible à l'objet lui-même ; ce sont
donc les plus importants des sens et, par là, les
seuls qui soient esthétiques.
De là, l'auteur passe au rôle de l'imagination
et de la mémoire ; la première est l'intermédiaire
entre la sensibilité organique et l'intelligence,
mais ne vient qu'après celle-ci dans l'impression
du beau. Toutefois, elle en fait un facteur néces-
REVUE DR l'art CHRÉTIEN.
1901. — 2"*^ LIVRAISON.
156
IRebue lie P^rt cbrétien»
saire et, comme le dit Emerson, «rien n'est vrai-
ment beau qu'autant qu'il parle à rimaginHtion>.
La mémoire prolonge les sensations et les éveille
par association.
Si l'autorité suprême appartient dans l'esthé-
tique à l'intelligence, c'est qu'elle est le juge de la
beauté en étant celui de l'ordre, de la proportion
et de la justesse, « choses que seul l'esprit peut
concevoir», dit Bossuet. Ainsi est-il des lois diver-
ses qui ne sont que les éléments de l'ordre, lois
de continuité, de répétition, de symétrie.à prendre
ce dernier terme non au sens étroit des modernes,
mais dans celui d'équilibre et d'harmonie comme
l'entendaient les Grecs. Enfin, suivant une remar-
que profonde de M. Brunetière, l'intelligence, et
c'est la probité du critique, doit réagir contre les
entraînements de l'imagination.
Le parallélisme est plus libre que la symétrie;
lorsqu'il se produit dans les idées, non dans les
lignes, c'est le symbolisme.
L'auteur, pour ne rien omettre de son sujet,
effleure en passant le prétendu sens esthétique
des animaux, une simple amusette de savants, et
en vient à l'action de la volonté. Motrice de
l'âme, en présence de la beauté, elle entre aussitôt
en fonctions pour en jouir par la contemplation,
non pour se l'approprier ; comme l'autre amour,
l'amour du beau est une aspiration à l'union mais
qui se réalise seulement dans l'intelligence. L'a-
mour sexuel est donc l'antipode de l'amour
esthétique, et, aux belles époques de l'art, les
Grecs n'ont jamais cherché à exciter les sens par
le spectacle de la beauté.
L'impression du beau peut être définie, selon
l'auteur, «la jouissance de la perception de l'ordre
«dans sa splendeur». Elle est intuitive parce
qu'elle atteint directement son objet sans inter-
médiaire, tandis que la connaissance est généra-
lement discussive, c'est-à-dire qu'elle se produit
médiatement. Cette nature intuitive de la per-
ception du beau a été sentie par les platoniciens
et surtout par les néoplatoniciens, proclamée chez
les modernes par saint Thomas, Kant, Schopen-
hauer, et sa noblesse vient précisément de ce que
contempler la beauté c'est la posséder.
Mais comme toutes les impressions celle du
beau a besoin d'être cultivée ; trop préoccupée
du soin de plaire, de la peur de déplaire, la femme
l'a peu. Des hommes, même parmi les plus grands,
ne l'ont pas eue, ou imparfaite.
Selon le 1\ Lacouture, saint Bernard l'avait,
mais s'en privait ; j'avoue être en doute sur ce
point, et l'auteur me paraît sur un terrain plus
solide quand il exalte l'exquise sensibilité esthé-
tique de saint François d'Assise, qu'il met fort
au-dessus de ce dilettantisme impassible d'un
Renan et d'uii Leconte de Lisie, réfugiés déses-
pérés dans la contemplation d'un beau stérile.
Mais, étant donnée l'incertitude des jugements
humains, comment apprécier le beau ? Voltaire,
comme toujours, se tire d'affaire par une
plaisanterie, en nous parlant de la beauté selon
le Hottentot ; ce n'est pas répondre que d'invo-
quer le témoignage d'une race à peu près aussi
étrangère à la notion du beau qu'un animal supé-
rieur. Et cependant il y a une sorte de consensus
universel qui peut servir de point de départ ; tous
les hommes, même les plus déshérités, sont plus
ou moins sensibles à un glorieux coucher de
soleil, au spectacle de la nature. Et si nous nous
élevons dans la sphère supérieure des races
aryennes, ne pourrons-nous pas dire que l'art grec
est l'art universel du monde civilisé .■'
Il y a dans la splendeur de l'ordre trois espèces
d'ordres correspondant aux trois espèces de beau.
Une sorte de laideur matérielle peut coexister
avec la beauté intelligible, quand le but de la
forme est complètement atteint ; on dit « un beau
porc », et le langage populaire ne se trompe pas.
Quand les yeux des hommes se seront habitués
aux formes de la construction en fer, qui sait si
par le rythme logique de ses lignes et ses courbes
de plus grande résistance, la tour Eiffel ne paraî-
tra pas belle ? L'habitude la fait déjà paraître
tout autre à nos yeux qu'il y a dix ans ; il lui
manque surtout d'être utile. Mais faites-en un
phare, ou, comme l'espère le P. Lacouture, élevez
au sommet la croix victorieuse, elle aura tout
aussitôt sa beauté, parce qu'elle sera devenue
expressive.
Des objets vulgaires imités nous plaisent,
d'abord parce que l'artiste y a mis de sa vision
particulière des choses, — « l'art est l'homme
ajouté à la nature, » a dit Bacon — ensuite par
la ressemblance avec la réalité et la vie, enfin par
la difficulté vaincue d'exprimer la forme. Jamais
le vrai désordre ne peut être beau ; au contraire,
le désordre voulu le sera souvent ; ainsi dans
l'Hercule Farnèse, où l'exagération de la muscu-
lature comparée avec l'exiguïté du crâne donne
précisément l'impression qu'a voulu produire
l'auteur. Et je pense à cette parole de Mérimée
qu'aimait à répéter Delacroix : « L'art est l'exa-
gération à propos. »
Il y a dans le beau une loi hiérarchique, la
beauté d'un être est celle qui correspond au rang
qu'il occupe dans l'échelle des êtres ; la plante
est belle dans son libre épanouissement, l'animal
dans le mouvement et la passion, l'homme dans
l'intelligence et la vertu. Mais la vie étant la
condition des êtres, il n'y a pas de beauté sans
elle, et, pour l'exprimer, l'artiste ne craindra pas
de mettre dans son œuvre quelqu'une de ces
légères irrégularités qui rendent plus vivantes la
Vénus de Milo et les Vierges de Raphaël. Les
anciens ont cherché le beau dans ce calme qui
25tbUograpl)tc.
157
est l'idéal de la vertu païenne, l'art chrétien, celui
de Fra Angelico et de Raphaël qui ajoute l'an-
tique au Pérugin, l'a mis plus haut.
La beauté d'un objet, d'un être surtout, doit
être conforme au type défini qui vient de l'étude
de la nature et de la tradition artistique, et en
même temps au type idéal ; c'est ce que l'on peut
nommer le modèle extérieur et le modèle inté-
rieur. Les réalistes n'admettent que le premier,
sous prétexte que seul il existe. Dans le sens
matériel du terme, oui, mais c'est par la compa-
raison avec le n:\odele extérieur que se crée
l'autre et, dès lors, l'on ne peut dire que celui-ci
.soit une créature arbitraire de l'imagination. La-
mennais fait cette remarque que la beauté vient
de ce que dans l'être les parties sont le plus ap-
propriées à leurs fonctions ; c'est précisément par
là que la structure aisée, le port dégagé, la tête
développée de l'Aryen sont plus beaux absolu-
ment que celle du Hottentot ou de telle autre
race dégradée. C'est la loi que l'auteur appelle la
loi typique du beau.
Voici maintenant une loi psychologique : tout
ce qui dans un objet nuit à la jouissance offerte
nuit à la beauté. L'architecture ne doit nous
causer aucune inquiétude ; or, la tour penchée de
Pise, le jubé aérien de Troyes, les clés pendantes
de certaines églises inquiètent le regard et la
pensée. L'observation est juste ; seulement les
adversaires de l'art ogival l'appliqueront tout
aussitôt à ces étais permanents que sont les arcs-
boutants. Il ne faut pas non plus déconcerter les
regards ; le plaisir de la surprise se tourne facile-
ment en inquiétude. L'auteur ajoute avec sagesse
qu'il y a pour chaque objet, pour chaque être un
milieu propice ; le chameau et la girafe peuvent
avoir leur beauté en leur habitat ; transportés
chez nous, ils semblent plutôt ridicules. Enfin,
il ne faut pas demander trop d'effort à l'ima-
gination esthétique ; une œuvre d'art qu'il
faut longuement expliquer n'atteindra jamais à
la beauté complète. Mais l'effort que l'on doit
exiger de tout homme, c'est de s'élever au-dessus
de son goût personnel, de ses préjugés d'éducation
et d'habitude, surtout au-dessus de la mode du
jour, de cette opinion factice qui est souvent faite
par des marchands. Par-delà toutes ces contin-
gences, il faut s'élever jusqu'au style absolu,
c'est-à-dire l'élévation dans l'inspiration, et com-
prendre cet autre style qui est la vision particu-
lière que chacun a des choses et des êtres. On a
dit qu'un paysage était un état d'âme ; on le peut
dire d'un portrait et de toute œuvre du pinceau
ou du ciseau ; combien plus encore des beautés
flottantes de la musique !
Toutes ces lois sont surtout faites pour les
critiques, c'est-à-dire pour ceux qui demandent
seulement à l'art les nobles jouissances de la
contemplation ; mais elles ne doivent pas être
méconnues par les artistes, c'est en les observant,
en se faisant soi-même un idéal élevé que l'on
travaillera pour cette durée, qui est l'éternité des
choses humaines. Ces lois ne seront jamais des
entraves pour le génie, ni même pour le talent ;
au contraire, l'artiste y trouvera la véritable in-
dépendance, celle qui consiste à savoir se plier
à la nature des choses et rejeter le joug des pré-
jugés, de la mode et des idées toutes faites. Peut-
être, et je relève cette observation dans la ma-
gistrale préface de quelques pages que M. Eu-
gène Guillaume a mise en tête du livre, en con-
seillant à l'artiste de ne pas livrer toute sa
pensée, de laisser travailler celle du critique sur
son œuvre, l'auteur sera-t-il trop aisément écouté
par tant d'improvisateurs dont l'impuissance
érige en principe le droit souverain de la facilité
et de l'à-peu près. Telle n'est pas assurément la
pensée du P. Lacouture, mais en la poussant à
l'extrême, les partisans de l'art trop aisé pour-
raient y trouver un argument et une approbation.
Un dernier chapitre a pour objet la classifica-
tion des arts — arts rythmiques : la poésie, la
musique, la danse, — arts du dessin : architecture,
peinture, sculpture ; on pourrait appeler les
premiers, arts de succession, puisque à l'opposé
des autres, les impressions se produisent en
séries. Enfin, le P. Lacouture propose un second
groupement : de l'architecture avec la poésie ; de
la peinture avec la musique, on a constitué, en
effet, un clavier des couleurs comme il en est un
des sons ; de la danse avec la sculpture, parce que
celles-ci ont pour moyen commun d'expression
les attitudes et le geste.
Tel est ce livre construit selon les lois les plus
rigoureuses de la méthode scientifique, écrit
dans un langage clair, toujours approprié, ni trop
agréable, ni trop abstrait, un livre rare et, pour
tout dire, la tentative la plus réussie que je con-
naisse pour constituer la science de l'esthétique.
L'auteur est un savant qui, dans son Répertoire
chromatique, a fortement étudié les lois des cou-
leurs ; c'est un érudit aussi, qui de son sujet
connaît toutes les parties et les ouvrages cités
formeraient une ample bibliothèque. Un souffle
puissant d'idéalisme anime ce livre et cet idéa-
lisme est plus que philosophique ; bien qu'il se
rencontre sans cesse avec le spiritualisme profane,
il est chrétien, je dirai presque sacerdotal. Et je
suis touché de voir le caractère du prêtre si pro-
fondément empreint dans l'œuvre d'un prêtre,
d'autant plus qu'il n'enlève rien à l'indépendance
d'un esprit élevé qui remue toutes les questions
et les discute avec la plus entière sérénité de
pensée et de langage.
158
WitWt lie rSrt cbrétirn.
Mais j'ai employé le mot de tentative et je
dois l'expliquer ; c'est que dans ma manière de
voir, la quasi-impuissance de la démonstration
fera toujours de l'esthétique une demi-science,
comme l'histoire, comme la médecine. «; Il n'y a
de science que du général >, a dit profondément
Aristote ; en d'autres termes il n')- a de science
vraie que de ce qui pour tout homme a été, est
sera toujours. L'esthétique n'a pas tout à fait ce
caractère, et c'est ce qui me l'a fait rapprocher de
l'histoire et de la médecine.
Il me reste à m'excuser auprès de mes lecteurs
d'avoir si longtemps retenu leur attention ; mais
dans un livre d'une structure si rigoureuse, il
faut ou le faire connaître superficiellement ou
l'analyser page par page. La chaîne des idées est
trop solide pour qu'on en puisse détacher un
chaînon isolé, il faut donc prendre le tout ou se
contenter d'un jugement formulé en quelques
mots. Après tout le meilleur article à faire serait
encore de transcrire les quelques belles pages
d'introduction qu'a mises en tête du livre M. Eu-
gène Guillaume, non pour en faire, comme moi,
l'analyse, mais pour le présenter aux lecteurs.
Henri Chabeuf.
Bien Public, de Dijon.
BIBLIOGRAPHIE DES INVENTAIRES.
1. — LKS COMPTES DU DIOCÈSE DE BOR-
DEAUX DE 1316 A 1453, d'aprh les Archives de la
Chambre apostolique, par Fraikin, dans les Annales de
St- Louis des Français, 1900, livr. d'octobr., pp. 5-74.
IL y a peu à glaner dans ces comptes, curieux
surtout pour l'énumération si variée des
pièces de monnaie qui avaient cours alors. Quel-
ques dettes sont acquittées en nature, par exem-
ple : « Unum calicem, cum patena, argenti
deauratum. Item, in Loquearibus, quodam gobe-
letto et quodam pectorali mulicbri de argento.
Duas albas lineas sacerdotales. Unum manipu-
lum, stolam et zonam de filo. »
Il est question d'une provision de poissons
frais ou salés pour le palais du pape : « Provi-
sionem merluciorum et allecium pro palatio
d. nostri pape. Provisione piscium salsorum facta
Burdegale. »
On achète pour 796 florins de drap à donner
en aumône : « Pro pannis emendis pro eleemo-
sina necessariis. »
2. — COMPTES DU ROI RENÉ POUR LA
CONSTRUCTION DE DEUX CARAVELLES,
EN 1478, par Jos. FouRNiER, dans le Répertoire des
travaux de la Société de statistique de Marseille, 1900,
PP- 39>-399
Ces deux navires se nommaient la « Made-
leine » et la ^ Sainte-Marthe », noms chers à la
Provence. Les pièces de ce genre sont rares et
ont un langage à part qui doit intéresser les
gens du métier. Je limite mes notes, qu'il serait
facile de multiplier, à trois mots :
Bannières. « Pour l'achat de certaine quantité
de taffetas et autres draps de soye, prins en
Avignon, pour faire les bsnnières des dites cara-
velles ».
Chaleur. « Par le commandement de Monsei-
gneur, pour XII II cannes de toille, pour garder
du chault Jarotin et les autres ouvriers qui
besoingnent à la pynace de Monseigneur. »
Serpentine, pièce d'artillerie; « A Maistre
Jehan d'Orgon, bombardier, pour acheter une
serpentine. »
3. — INVENTAIRE DE NOTRE-DAME DE
FONTENAY (Vendée), par René Vallette, dans la
Revue du Bas-Poitou, 1537, 1900, pp. 144-147.
Il s'agit uniquement du « trésor », dont les
pièces sont dispersées en trois « armoyres », dé-
nommées de l'autel qu'elles accompagnent. Le
numérotage se fait par armoires, ce qui n'est pas
suffisant ; il le fallait progressif.
Aii::anne, pour kosanne,sYnonym& du dimanche
des Rameaux, où se portait cette croix : « Une
croex auzane, de cuyvre doré, fort vieille. »
Calice. Il prend son nom de celui qui l'a donné,
en 1487, Artus de Richemond, qui y employa
sa propre coupe : « Ung calice d'or fin, appelé
Coulpede Monseigneur Artus, et sa plactayne. »
0'(?/.t', à double croisillon, d'origine orientale:
« Une grand' croex d'argent doré, à deux
croezions, 6 pierres et camahyeux, que l'on nome
de Monsieur Jehan le Masle, en son vyvant
évesque de MaiUezoy » (de 1384 à 1421).
Monstrance, simple reliquaire, contenant une
relique de la Vierge, exposée à l'Assomption :
« Une monstrance d'or fin, que l'on nome de
l'Assomption. »
« Placts d'offrandes », en dinanderie : j'en ai
publié un de ce genre en 1900 dans la Revue
d' A rclu'ologic poitevine.
Vaisseau n'indique pas la forme : « Le vayseau
d'or fin, que l'on porte le Corpus Doinini. — Ung
aultre petit vayseau d'or fin, ouquel a un mor-
ceau de la vray croex. »
4. — PROCÈS-VERBAL DE VISITES DE PA-
ROISSES AU xviir SIÈCLE, édité par M. Tho-
Bibltograpl)te.
159
rel-Terrin, nnnoté par M. le chanoine Marsaux ;
Beauvais, 1900, in- 8" de 11 pages.
Au milieu d'une foule de renseignements cu-
rieux, je distingue ce qui concerne le dais et le
soleil.
Le dais de l'autel existe et semble obligatoire,
quoiqu'une fois le visiteur propose de le démolir.
« Il n'y a pas de dessus d'autel, un petit moineau
est tombé presque dans le calice » (p. 5). — « J'ay
remarqué qu'au-dessus de la chapelle de la Ste-
Vierge, il y a une espèce de dais de bois, soutenu
par quatre piliers de bois d'une ancienne struc-
ture et très malpropre. Il seroit plus décent de
l'enlever, la chapelle en seroit plus propre »
(p. 8). — « Un dais de bois » (p. 9).
« J'ay trouvé un soleil très malpropre et cras-
seux. Dans le tabernacle, les deux glaces ne
tiennent pas et tombent pour le peu qu'on y
touche ; le croissant est d'argent. Au lieu d'une
fiche ou cheville de cuivre ou une chaîne pour
fermer la Ste Hostie, j'y ai trouvé de cheville de
bois» (p. 8). La note porte : « Au XVIII"= siècle,
on croyait bien faire en ornant le tabernacle
comme un salon. Les glaces étaient de mode. Un
livre imprimé à Besançon, en 1772 : Méthode de
la direction des âmes, recommande « les glaces
et la dorure » pour le tabernacle. Ce n'est pas
ici le cas ; il ne s'agit pas du tabernacle-meuble,
mais du tabernacle- (expression du Pontifical)
ostensoir. Le contexte le dit clairement : croissant
pour l'hostie, sphère en soleil, cheville pour la
fermeture ; les « deux glaces » ou vitres garnis-
sent la sphère de deux côtés et protègent l'hostie.
5. — INVENTAIRE DU MOBILIER DE
L'ÉGLISE PAROISSIALE DE MAZAMET
(TARN), L'AN II, dans Y Albia chnstiana, 1899,
p. 168).
Ce texte est peu important. Deux mots seu-
lement sortent de l'ordinaire. Ce sont les « biens
du bassin du Purgatoire», immeubles fournissant
des revenus à cette caisse; « 7 grands bassins de
laiton, 2 petits bassins en cuivre».
A cause de sa forme, la lampe du St-Sacrement
est appelée « Cul de lampe, avec chainettes en
laiton ».
6. — LES RICHESSES ARTISTIQUES DE
MARSEILLE EN 1791, par Em. Perrier, dans le
Répertoire des travaux de la Société de statistique de
Marseille, 1900, p. 408-451.
Ce travail, très important pour l'histoire de
l'art et parfaitement annoté, comprend trois
parties : i. Déclaration faite par les officiers de
l'Académie de peinture, sculpture, architecture
civile et navale, sur les ouvrages en peinture et
sculpture qui se trouvent dans les maisons des
religieuses de Marseille ; 2. Supplément de relevé;
3. Monuments méritant d'être conservés et qui se
trouvent dans diverses églises ou couvents de
Marseille supprimés ou qui peuvent être dans le
cas de l'être.
7. — INVENTAIRE DU CHATEAU DE
BOURG-CHARENTE, EN 1792, dans le Bulletin
delà Société archéologique de la Charente, 6" série, t. VII,
p. LXXXVIII LXXXIX.
Malheureusement les extraits qui en ont été
faits sont trop peu nombreux, c'est le texte lui-
même qu'il importait de publier. A noter, pour
l'industrie locale, des « serviettes en toile de
Béarn », des «porcelaines de Limoges »; pour
les lits : « un lit à la polonaise, dont les rideaux
et les garnitures sont en perse, ainsi que les ten-
tures de l'appartement », « un lit à la turque, en
moire et en tapisserie».
X. Barbier de Montault.
LES SAINTS DE LA MESSE ET LEURS MO-
NUMENTS, par MM. Ch. et G. Rohault de
Fleury. Paris, 1900, in 4°. t. VIII.
Le tome VIII vient de paraître. En dire tout
le bien que j'en pense serait me répéter, car je
n'ai pas manqué de rendre compte, avec force
éloges, des volumes précédents, au fur et à mesure
de leur apparition. Comme antérieurement,
l'érudition la plus sûre et la plus variée y déborde
et est admirablement complétée par une illustra-
tion qui ne laisse rien à désirer au lecteur le plus
exigeant.
La première partie est consacrée à S. Jean
Evangéliste ; elle comprend 31 pages de texte,
illustré de 17 vignettes et accompagné de 61
planches, où sont à signaler, pour leur fidélité : à
Rome, les églises de St-Jean de Latran et de
St-Jean Porte Latine et, à Poitiers, l'abbaye de
Montierneuf.
A cet ensemble, si largement compris, il ne
manque que ces monuments : pour Angers, l'hô-
pital St-Jean, qui est une superbe construction
du XII^ siècle, où la chapelle est tendue de
tapisseries d'Aubusson du XVIIe, relatant
sa vie ; à la cathédrale, dans le transept sud, un
beau vitrail de la fin du XI 11^ siècle, à médaillons
légendaires, qui a longtemps intrigué Didron,
mais dont il est venu à bout, à force de science
et de patience ; enfin les célèbres tapisseries de
l'Apocalypse, don de René d'Anjou.
J'insisterai sur deux reliques qui méritaient
une mention : la coupe, où S. Jean but le breu-
i6o
jRrbue tie rSrt cbrcttcn.
vage empoisonné et qui est conservée à la basi-
lique de Latraii ; la manne qui a coulé de son
tombeau et dont parlent souvent les inventaires.
On se tromperait si on croyait que la palme,
un des attributs de l'apôtre, fait allusion à son
martyre ; j'y vois plutôt celle qu'un ange lui
remit pour porter devant le cercueil de la Vierge
à son enterrement.
Enfin, il eût été bon de ne pas omettre les
fonts baptismaux de Liège, œuvre du X 1 1'^ siècle,
en bronze, que le F. Cahier a reproduits et com-
mentés dans les Mélanges d'arclu'ologie, t. IV.
Un des bas-reliefs est dans les An/iales archcolo-
o-iques, t. V, p. 31 ; cette intéressante sculpture
représente le baptême de Craton le philosophe.
Dans la deuxième partie, relative au frère de
S. Jean, S. Jacques majeur, nous avons 51 pages
de texte, 1 1 vignettes et 40 planches.
Parmi les églises dédiées à l'apôtre, il y a lieu
de signaler St-Jacques d'Aubeterre (façade du
XI I<^ s.), la cathédrale de Compostelle (vue
intérieure et porche de la Gloria, XII<= s.), St-
Jacques de Dieppe (XIII*^ s.) et St-Jacques de
Louvain (XVI^ s.).
Dans cet ensemble si complet, je ne vois qu'une
petite lacune, qui est l'omission du Pas de
S. Jacques, vénéré à BuxeroUes, près Poitiers,
par les pèlerins du moyen âge.
On ne sait qu'admirer le plus de la fécondité,
vraiment prodigieuse, de l'auteur ou de la multi-
tude de renseignements qu'ont accumulés ses
voyages, ses lectures et sa vaste correspondance.
Daigne Dieu lui accorder encore de longs jours
pour l'instruction des savants et la gloire de
l'Église 1
X. B. DE M.
LA SCULPTURE A TROYES ET DANS LA
CHAMPAGNE MÉRIDIONALE AU XVl' SIÈ-
CLE, élude sur la Transition de T art 'gothique à T Ita-
lianisme, par Ravmond K<kchlin et Jkan Marquet
IJE Vasselot, attaché aux musées nationaux, — Paris
Armand Colin et C'", éditeurs, 5, rue de Mézières,
1900.
VOILA un excellent ouvrage. Il est.en effet,
le (ruit d'un long labeur, entrepris dans
les meilleures dispositions que l'on puisse exiger
des chercheurs. « Nous avons parcouru, nous
disent les auteurs, le département de l'Aube et
les arrondissements voisins, visitant commune
aprèscommune, église après église, et ne laissant
passer aucun morceau de quelque intérêt sans
le photographier. % MM. Kœchlin et Marquet ne
se sont pas crus dispensés cependant de mettre à
profil les travaux de leurs devanciers. Ils ont lu.
analysé et apprécié avec beaucoup de soin tous
les ouvrages relatifs;! la sculpture troyenne et ils
se sont appliqués à mettre en parfaite lumière les
objets de leurs investigations. Ils ont multiplié
les reproductions des monuments les plus carac-
téristiques. Epris de leur sujet, ils ont reconstitué
le milieu religieux, artistique, économique et
social où se sont épanouis ces modestes et labo-
rieux artisans troyens.
Le tableau est si complet, que leur livre devient
une source d'informations aussi bien pour l'his-
torien que pour l'esthète et le critique d'art. Que
de détails précieux non seulement sur les sculp-
teurs mais aussi sur les architectes, les peintres,
les verriers, etc. ! On se rend compte à merveille
de l'étroite intimité qui régnait entre les divers
métiers. En réalité leurs rapports, leurs emprunts
étaient constants et ils étaient vraiment soli-
daires les uns des autres.
« C'est cette influence réciproque des divers
métiers qui donne à l'art troyen son unité, et si,
comme nous le croyons, la part des imagiers a été
prépondérante dans la formation de ce style
local, si ce sont eux qui en ont été les créateurs,
les «situer» dans leur milieu, ainsi que nous
avons tenté de le faire entre les autres métiers
qui les imitaient et les bourgeois dont ils reflé-
taient le goût, est pour mieux faire comprendre
et apprécier leurs œuvres. »
Avec quel attrait on s'initie aux côtés intimes
de ces existences d'artistes exempts de cupidité
et de prétentions. On trouvera peut-être que
cette abondance d'informations surcharge le
tableau. Pour ma part, je m'en voudrais d'en
faire un grief aux auteurs tant j'ai trouvé d'agré-
ment à les suivre dans leur enquête. D'ailleurs ils
considèrent bien leur ouvrage comme une étude
et, à cet égard, ils ont [ileinement atteint leur
but. Leur méthode est excellente : composition,
choix de types, modelé, draperies, exécution,
polychromie, bref tous les éléments de la sta-
tuaire troyenne sont analysésetscrutésavec beau-
coup de précision et de sagacité. Il n'entre pas
dans le cadre de ce rapide compte rendu de
discuter certains points.
En tous cas, les auteurs me semblent exempts
de [larti pris. C'est ainsi qu'ils reconnaissent fort
bien l'influence du Nord dans le domaine artis-
tique du pays de Troyes ainsi que l'intervention
étrangère qui s'y fait sentir depuis le XIV'= siècle.
Celle-ci est également constatée au XV^ et
même au début du XVI= siècle. C'est ainsi que
l'on peut noter l'action exercée par tels monu-
ments appartenant à la plastique flamande ou
brabançonne.
« Le XVIe siècle, nous disent MM. Kœchlin et
Marquet, est en vérité le plus important de la
Btbltograpt)ie,
i6i
sculpture troyenne, et c'est celui où elle acquiert
son originalité. Auparavant l'art troyen se con-
fondait un peu dans le grand courant de l'art
français et les qualités propres que nous y avons
pu démêler n'étaient guère que des nuances ;
durant la renaissance qui suivit les guerres
anglaises et bourguignonnes, un caractère très
particulier se fit jour, au contraire, chez les ima-
giers de Troyes et une véritable école naquit,
parfaitement distincte de toutes celles qui se
développaient dans d'autres provinces. Un de ses
traits les plus remarquables est la fécondité, et
dans toute la région troyenne c'est du XVI'= siècle
que toutes les églises renferment des ouvrages ;
aucune autre école peut-être n'a autant produit.et
les ateliers troyens durent être des centres d'acti-
vité vraiment merveilleux. Mais ce qu'il y a de
plus remarquable, c'est que cette activité ne s'é-
puise pas avec la génération qui l'avait créée.
Les œuvres de cette première génération sont
reconnaissables par le sentiment purement go-
thique qui les inspire et par l'absence de tout
alliage étranger. >
Malheureusement cette belle école régionale
fut mise en échec, dès le milieu du XVI'= siècle,
par l'Italianisme représenté par Dominique le
florentin et sa suite. Des exemples nombreux
et probants permettent aisément au lecteur de se
rallier à l'avis de guides si bien informés. Il serait
superflu d'insister davantage sur les mérites de
l'étude de MM. Kœchlin et Marquet, et nous ne
croyons pas nous tromper en la citant comme
un modèle au point de vue de la méthode et de
l'agrément de l'exposition.
Joseph DestrÉE.
LA STATUAIRE EN NORMANDIE. — Dis-
cours de M. le chanoine Porée, directeur de la Société
des Antiquaires de Normandie. Caen, Uelesque, 1900.
ON a considéré jusqu'ici comme négligeable
la statuaire en Normandie, à côté de celle
de Paris, d'Amiens et de Chartres ; on a fait
entendre qu'elle n'est rien : M. le chanoine Porée,
sans la surfaire, prétend qu'elle est quelque chose.
Les plus anciennes sculptures normandes,
comme celles de la nef de Biyeux, semblent con-
firmer l'origine indo-scandinave attribuée aux
Normands. La crainte de l'idolâtrie constitua
longtemps un préjugé hostile à la représentation
des figures des Saints ; de là la gaucherie qu'elle
offrait encore au XI1'= siècle. L'influence cliar-
traine apparaît à la porte de l'abbatiale d'Ivry,
un peu postérieure à la porte de la salle capitu-
laire de Boscherville, dont il a été question dans
la Revue de l'Art chrétien (année 1899, p. 466);
nous avons reproduit notamment le fameux
chapiteau des musiciens conservé au musée de
Rouen.
Mais bientôt la métropole rouennaise ouvre un
vaste champ d'études. Les sculptures des portes
latérales dérivent de l'école de Chartres. La
sculpture décorative de Lisieux est identique
comme caractère à celle de Rouen. A la même
influence appartient la sculpture bien normande
de Séez. Partout !a sculpture décorative et his-
toriée fait partie intégrante de l'architecture.
Un instant étouffé par la vigoureuse poussée
de l'architecture de l'Ile-de-France, le style nor-
mand se réveille à partir de 1230, et s'incarne
dans des types qui sont à Fécamp, à Caen, à
Bayeux, à Eu, à Séez, à Coutances : arcs en tiers-
point aigus et fort moulurés, chapiteaux à aba-
ques ronds, chapelles en hémicycle, tours carrées à
l'abside, rosaces redentées, cordons de quatrefeuil-
les aveugles, tympans fleurages, grandes verrières
remplaçant les roses, tels sont les traits saillants,
développés avec un retard marqué sur l'art du
domaine de la Couronne. Mais bientôt les portails
de la Calende et desLibraires àRouen surpassent
en richesse tout ce qu'on fait ailleurs ; on constate
maintenant l'influence de la statuaire de Reims ;
l'art des sculpteurs se soutient plus longtemps
que dans le reste de la France et brille surtout
dans la statuaire des tombeaux. Il survit à la
Renaissance. M. Porée examine la part de
Jean Goujon dans l'œuvre du tombeau de Brézé.
Il relève les traits de l'influence italienne chez
les sculpteurs de l'ère nouvelle. li insiste sur
l'école de Gisors et sur celle, moins connue,
de Verneuil. Tel est, rapidement résumé, le sujet
du discours par lequel le président des Anti-
quaires de Normandie a ouvert la session de
l'année écoulée.
L. C.
BULLETIN DE LA SOCIEDAD ESPANOLA
DE EXCURSIONES. Madrid, impr. de St-Fran-
çois de Sales.
Ce sont des touristes sérieux, des amis de la
science et de l'art, qui se rangent et pérégrinent
sous ce vocable. Dans la livraison d'octobre
dernier de leur Bulletin, que dirige avec dis-
tinction M. Enrique Serrano Fatigati, nous trou-
vons notamment une étude de M. J. Ramon
Mélida sur des fibules ibériques en forme de
cheval de bataille, une autre de M. R. Ramirez
de Arellano sur plusieurs artistes inconnus
(artistas exhumados), une description de l'église
major de Libérija par M. A. F. Casanova et
enfin une importante étude du directeur de la
Revue sur les sculptures romanes en Espagne.
Elle est accompagnée de belles et curieuses
reproductions photographiques.
102
Brbuc De rSrt cl)rcticn.
G. VAN CASTER. MATHIEU, JOSEPH CHAR-
LES HUNIN, graveur (1770-1851) et PIERRE-
PAUL- ALOUIS HUNIN, peiatres de genre
(1808-1856), par M. le chan. Van Caster. Broch.
Malines, Godenne. 1900
Parmi les vues de la cathédrale de Malines
qui lui ont servi à établir ses études intéressantes
sur la tour Saint-Rombaut, le respectable pré-
sident de V Académie archéologiqi4e en possédait,
qui faisaient partie de son héritage familial ; il
compte parmi ses parents l'auteur d'une des
planches qu'il a publiées : c'est le graveur Jos.
lîuniii ; nous sommes d'ailleurs en présence
d'une famille d'artistes. Joseph était fils d orfèvre
et fut le père du peintre Alouis. M. V. C. leur
consacre d'intéressantes notices. L. C.
L'ART DES JARDINS, par G. RiAT, Petit
in-8°, de 400 pp., nombreuses gravures. Paris, May,
1900. — Prix 3,50.
L'éditeur L. H. May, successeur de Quantin,
vient d'ajouter un volume à la collection si appré-
ciée de la Bibliothèque de l'enseignement des
Beaux-Arts, dont nous avons présenté déjà de
nombreux volumes à nos lecteurs.
IJart des Jardins, traité comme il l'est par
M. Riat au point de vue rétrospectif, voilà un
sujet bien propre à intéresser plus ou moins une
multitude de lecteurs ; nous pourrions ajouter
que, traité au point de vue pratique, il en intéres-
serait un plus petit nombre, d'une manière beau-
coup plus vive peut-être ; mais l'éditeur n'a
entrepris, en sa belle série, de développer que
r histoire de l'art.
D'ailleurs, il est fort instructif d'apprendre
comment furent les jardins de l'antiquité, de-
puis les fameux jardins suspendus de Baby-
lone dont nous parle Hérodote et les jardins de
l'antique Egypte dont la vignette ci-contre(fig. I),
d'après des peintures murales, donne q^uelqu'idée,
jusqu'aux parcs publics des Grecs et aux ma-
gnifiques villas romaines, dont on entrevoit
l'ordonnance dans les historiens et les poètes du
temps. Comme l'auteur s'appuie en tout sur des
documents positifs, il s'interdit modestement de
')jMi»iafïiïfSiïiiw#iW
^Hî
^•' 1 I , 1 I , I 1 I i I ■ I I ■ I I I .1 ■'•... - TT
1 I I i!
I J I 1 ) 1 J J 1 Ai
Fig. I. — Plan d'une maison thébaine avec jardin.
nous décrire, pour commencer, le paradis ter-
restre.
Le chapitre consacré au moyen âge contient
des indications peu connues. Les moines furent
les ancêtres de nos horticulteurs. Le jardin du
monastère renfermait des légumes, des herbes
aromatiques ou médicinales, mais aussi des parcs
ombragés ainsi que des fleurs destinées,dit Albert
le Grand, au plaisir des yeux et de l'odorat et à
la décoration des autels. Le capitulaire de Char-
lemagna De villis imperialibus énumère les plan-
tes, herbes et arbres fruitiers à planter dans les
domaines impériaux. Le potager devient jardin
au XI'' siècle et les documents littéraires four-
Dissent des exemples de jardins seigneuriaux,
ecclésiastiques, bourgeois. Dans les chansons du
moyen âge, il est souventquestion d'un verger plein
d'arbres fruitiers avec une fontaine entourée d'un
4v
II. — Un coin du jardîu de Caprarola.
tapis émaillé de fleurs, où se promène un paon ;
souvent régnait autour de la fontaine un banc
ayant pour dossier un mur bas à trois pans,
et pour siège une banquette de gazon. On y voyait
Fig. III. — Montargis. — Jardin en éventail.
aussi des tonnelles, des treilles, des courtilles, des
labyrinthes ou iitaiso?is de Dœdalos. On avait
déjà conçu l'idée grotesque de tailler des arbres
en forme de vase ou même d'animal.
REVUE DE L ART CHRETIEN.
190t. — 2'"'^ LIVRAISON.
i64
Bebue De T^vt fl)rctten.
C'est en Espagne qu'on trouve les vrais monu-
;nts de l'art horticole, à l'Alhambra et au Gé-
néralife de Grenade, à l'Alcazar de Séville, etc.
A la Renaissance, les papes ressuscitent les
&
Fig. IV. — Paris. — Jardin des Colombier.
jardins à l'antique selon le inonde impérial. Tout
s'y trouve compassé, régulier, tiré au cordeau ;
les parcs sont meublés de vasques, de fontaines
— peuplés de Termes (fig. II), divisés en ter-
Jardin du Luxembourg:
fasses rachetées par de larges escaliers à rampes
bordés de balustrades, agrémentés de statues,
accompagnés d'exèdres, de grottes, de bâti-
ments ; le jardin est en quelque sorte bâti.
BtbHograpl)te,
165
Les lignes d'architecture commandent les lignes
générales des parterres et des bosquets, les
ronds-points, les carrefours, les étangs. Les allées
convergent vers des points d'un caractère monu-
mental. Le tout est arrangé dans une distribution
panoramique et symétrique. L'ensemble est froid,
mais embelli en Italie par le lointain des mon-
tagnes et de la mer ; sans quoi l'impression
en eût été, selon la remarque de Burckhardt,
lourde et pesante comme de Versailles. Il faut
citer parmi les monuments les parcs grandioses
de Caprarola, d'Esté à Tivoli, de Colonna,
de Madama, de Médicis, de Torlonia, de Barbe-
rini à Rome et la villa Ludovisi, dont Le Nôtre
s'inspira.
L'ancien jardin français était calqué sur la
maison plutôt que sur le site, témoin le curieux
jardin en éventail de Montargis (fig.I II). A la re-
naissance encore se multiplient les ordonnances
savamment régulières à compartiments géomé-
triques, dans lesquelles s'inscrivent des planta-
tions à dessins compliqués, sortes de broderies
dessinées comme les ornements d'un tapis (fîg.
IV) et semées d'arbres en boules ou en pyrami-
des, de vraies sculptures végétales. Les sites où
s'élèvent les châteaux de la Loire ont été juste-
ment nommés le jardin de la France. M. Riat
nous décrit, d'après les contemporains, les jardins
de Blois, Chenonceau, et nous fait connaître les
architectes des jardins de l'époque, qui ont nom
Mollet, Boysseau, Palissy, Ducerceau, etc.
Au XVI I^ siècle, Le Nôtre mit les parcs royaux
en harmonie avec le faste de la cour du Roi
Soleil ; il créa les ailées larges et sans fin, les
vastes pelouses, les riches parterres, les théâtrales
ordonnances de Versailles, du Trianon, de Chan-
tilly, de Clagny, de Marly, où la nature, domptée
par l'homme, se fait courtisane. Il créa le jardin
régulier, o\x jardin français (fig. V). La géométrie
y gouverne bosquets et parterres; le jardinier y
traite les arbres, comme le coiffeur les cheveux
et la barbe ; l'eau n'y existe, dit M. Dujardin, que
pour mettre en valeur l'art du fontainier.
Avec le XVI 1 1<= siècle, intervient la théorie des
jardins paysagers des Anglais, d'après le système
de William Kent et de Brown. De leurs parcs
pittoresques les Anglais ont fait des microcosmes
avec des fermes, des ruines, des moulins, voire
des tombeaux. Le modèle du genre est en France
le hameau factice du Petit Trianon.
L'ouvrage se termine par des considérations
sur le genre mixte qui caractérise le XIX^ siècle
et l'auteur nous quitte sous les ombrages modé-
rément naturalistes du Bois de Boulogne.
L. C.
ÉPITAPHES ET MONUMENTS DES EGLISES
DE LA FLANDRE AU XVI- SIÈCLE, par le
baron J. Bethune, Société d' Emulation, Bruges, 1900.
Corneille Gaillard naquit vers 1520. Après des
voyages en Italie et en Terre-Sainte, il s'adonna
aux recherches généalogiques et à des études
héraldiques circonscrites à la Flandre et aux
provinces voisines; il devint héraut d'armes de
l'empereur Charles-Quint et mourut à Bruges
en 1563. MM. Van Maldeghem et Van HoUebeke
ont dressé un catalogue de celles de ses œuvres,
dont les manuscrits sont conservés à la Biblio-
thèque de Bourgogne. Depuis, s'y est ajouté
V Epitaphier de Bruges.
Mais un autre document avait échappé aux
recherches des biographes de Corneille Gaillard.
C'est en 1893, que M. Ferd. Van der Haeghen
eut la bonne fortune de découvrir et d'acquérir
pour la bibliothèque gantoise un recueil relatif
aux épitaphes et monuments de la Flandre au
XVI'= siècle, coristituant en quelque sorte la suite
de YÉpitaphier de Bruges.
C'est une série de notes transcrites au
XVI 11'= siècle, que le baron Bethune, avec la
grande compétence qui le distingue et non sans
solides arguments, restitue à notre héraut d'ar-
mes. Elles sont d'autant plus intéressantes que
l'auteur s'y montre doué de connaissances ar-
chéologiques peu répandues à cette époque.
Lorsque Gaillard parle de « lourds casques, tels
qu'on les portait au milieu du XII'= siècle »,
de « tombes à la façon du temps du comte
Louis de Nevers », de « statues peintes, qui sem-
blent remonter à trois siècles au moins » ; on
croirait entendre un de nos archéologues con-
temporains.
La biographie du héraut d'armes Gaillard,
l'étude de ses œuvres, celle des manuscrits dont
le baron Bethune s'est aidé pour élucider des
points douteux et en compléter d'autres, tout
cela offre l'intérêt d'une page d'histoire locale et
familiale très vivante et parfaitement fouillée.
L'utilité de la publication ressortira surtout
après l'achèvement du quatrième et dernier fas-
cicule, qui contiendra la table des noms et per-
mettra aux familles flamandes de retrouver,
grâce à Corneille Gaillard et à son érudit édi-
teur, le baron Bethune, de nombreux renseigne-
ments que la révolution religieuse du XVI'' siècle
et les vicissitudes ultérieures ont fait disparaître
des églises et des monuments publics de la
Flandre.
En attendant, nous félicitons notre savant
collaborateur d'avoir ajouté un important volume
à l'ensemble déjà considérable de ses recherches
historiques et de ses études archéologiques.
L. C.
i66
Bc\)uc lie r^vt cbvcttcu*
SAINTE FOY, VIERGE ET MARTYRE ('\ par
MM. A. BouiLLET et L. Servièrf.s. Rodez, Carrère,
1900. Grand in-4 de 780 pp., richement illustré.
Prix : 30 francs. (En vente chez A. Picard, 82, rue
Bonaparte, Paris).
Parmi les tininbreuses monographies d'églises
Plan de l'église Saiute-Foy de Conques (Aveyrony, (XÎ'^-XIP siècle.)
I. Cet ouvrage a été honoré d'une médaille de vermeille (fondée en mémoire du regretté C" de Marsy) au Congrès de la Société française
d'archéologie, tenu à Chartres en 1900.
L'église de Conques'(Aveyron) vers 1820.
Restes du cloître de l'abbaye de Conques (XI T' siècle).
i68
WitWt lie V^ït cbrcttciu
anciennes que nous nous plaisons à enregistrer,
le volume de luxe que nous devons à MM. Bouil-
let etServièresest une desplus importantes à tous
ég;ards. Le monument qui en est l'objet représente
d'ailleurs par son architecture et par son trésor
un des joyaux du style roman. Il est consacré à
une sainte enfant martyre, qui fut grande aux
yeux de Dieu, quoique petite aux yeux des
hommes, et dont la mémoire reste entourée d'une
grande vénération. La basilique élevée pour abri-
ter ses reliques, est un édifice unique. « Issu de
cette école d'architecture qui a couvert le sol de
Reliquaire du grand voile de Sainte-Foy (XIX'' siècle). Trésor de Conques.
l'Auvergne de tant de monuments d'un très haut
intérêt, elle marque une étape caractéristique et
décisive dans la voie de perfectionnement et de
progrès, qui devait, par Saint-Sernin de Toulouse,
aboutir à Saint-Jacques de Compostelle. »
Quant au trésor de Conques, dont les pièces
capitales ont émerveillé les visiteurs de l'Exposi-
tion de 1900, il n'est rien moins qu'un des plus
riches de l'univers.
L'ouvrage est très complet. Il contient l'iiis-
toire de la Sainte étudiée dans toutes ses mani-
festations, et l'histoire de l'abbaye élevée sous
son vocable ; l'étude archéologique de son église,
la description de son trésor, une monographie
Btbltograpl)îe.
169
du culte de sainte Foy dans les sanctuaires
de la chrétienté et les actes de son martyre. Il
se termine par le Livre des miracles de sainte
Foy d'après les diverses versions et manuscrits,
suivi de la liturgie de la Sainte et de documents
divers. En deux mots, c'est un chef-d'œuvre du
genre. ^ ç-
LES CHEFS-D'ŒUVRE DES MUSÉES DE
FRANCE: LA PEINTURE, par Louis Gonse.
Paris, L. Henry May, 1900. ln-4°, 270 vignettes,
30 pi. hors texte. Prix, broché, 50 francs ; relié,
60 francs.
En lisant ce titre légèrement inexact, on s'atten-
dra à un recueil dans lequel la grande place
La Vieige entre deux Saints, par le Peiugin (Musée de Bordeaux).
est prise par les chefs-d'œuvre de l'opulent | quelques musées de second ordre comme annexe.
musée du Louvre, avec le dessus du panier de | Hâtons-nous de dire que le Louvre en est exclu,
lyo
îlXcbuc t)c V^n cbvcticiu
et qu'il ne s'agit que des musées de province.
Mais sait-on que la France possède, disséminés
sur son territoire, trois cent soixante et quelques
musées, recelant des trésors ignorés, contenant
une somme de 40,000 tableaux anciens, parmi
lesquels tous les maîtres de la peinture sont re-
présentés ? Aucun autre pays n'offre au curieux
de semblables richesses, presque inexplorées. La
réunion de ces petits musées formerait un en-
semble unique en Europe.
On devine l'intérêt d'un livre qui décrit ces
trésors, surtout s'il est écrit par le charmeur.
Glorification de l'Immaculée Conception, di]il\tnic de Jean Iîei.lkgamhe (Musife de Douai).
qu'est l'auteur de VAr/ gothique, de la Sculpture
française, et de Y Art Japonais : il est édité avec
un luxe au moins égal à celui des volumes que
nous venons de rappeler.
M. Gonse nous présente une sorte de Salon
carré, un salon de 300 chefs-d'œuvre, qui consti-
tue comme une des plus belles galeries du monde.
Que de rencontres imprévues, que de révélations
piquantes, depuis Rubens jusqu'à Ingres, en
passant par Véronèse, Rembrandt, Watteau, Vé-
lasquez, les Le Nain, La Tour, Nattier et tant
d'autres ! L'École française cjccupe naturellement
le premier plan.
Les gravures ont été obtenues directement,
Blbltograpl)tc»
lyi
d'après les photographies sans retouche, exécu-
tées sous la direction de l'auteur. Les quatre
planches gravées sont dues à la pointe habile de
M. Jean Wybaud, et les 26 héliogravures hors
texte sont de chez Georges Petit.Il serait difficile
de rencontrer des traductions de tableaux plus
L Adoration de l'Enfant Jésus. (Art italo-flamand du XV^ siècle, Musée d'Avignon.)
souples, plus colorées et en même temps plus
documentaires.
Nous exprimerons le regret, que l'éditeur n'ait
pas éliminé de ses illustrations quelques nudités
lestes, sinon grossières (rares d'ailleurs), telles celle
de la p. 71. Nous aurions alors pu présenter sans
réserve ce savoureux volume comme digne d'être
introduit dans les familles pour contribuer à
l'éducation artistique de la jeunesse.
L. C.
ICONOGRAPHIE ET BIBLIOGRAPHIE DE
N.-D. DE LA TREILLE, par L. QuaRRÉ-ReyBOUR-
BON. Broch. Lille, Quan, 1900.
La notice de M. Q. R. a servi d'annexé à
\ Histoire de la collégiale de Saint-Pierre de Lille,
complétée par V Histoire de N.-D. de la Treille de
Mgr Hautcœur.
f
On y trouve un inventaire bibliographique de
ce qui se rapporte au culte, à l'histoire, à l'ico-
nographie de la madone lilloise, dont on connaît
la popularité parmi les fidèles de la région du
Nord, et à l'honneur de qui l'on a commencé,
depuis 40 ans d'élever une cathédrale digne du
XI Ile siècle. (V. /?^7'//^ Jg l'Art chrétien, année
1894, p. 415)
L'œuvre se poursuit avec lenteur, par des
temps néfastes pour l'Église française ; néanmoins,
en 1897, l'on a inauguré la chapelle du chevet
dédiée à N.-D. de La Treille. Cette chapelle en
remplace une autre, élevée au XV« siècle en la
collégiale de Saint-Pierre. L'ouvrage ancien
dont la gravure ci-contre reproduit le type, se
rencontre pour la première fois dans un manuscrit
de 1592.
L. C.
-Kï
REVUE DE l'art CHRÉTIEN.
19OI. — 2™^ LIVRAISON.
172
•3Rtl)ue Dr V^xt cbrctien.
ZEITSCHRIFT FUR CHRISTLICHE KUNST.
(XI II"-' année, 3' fasc.)
I'^OUTE cette livraison est occupée par une
savante et intéressante étude du P. Beissel
sur l'Évangéliaire de Henri III provenant de la
cathédrale de Goslar, actuellement à la Biblio-
thèque d'Upsal, et sur les manuscrits apparte-
nant au même cycle. Une planche hors texte
et S gravures reproduisent des miniatures de ce
précieux ouvrage du XI'- siècle.
(4<= fasc). — Description, par M. VVùscher-
Becchi, de peintures murales du XV= siècle, ré-
cemment découvertes dans une chapelle de l'é-
glise paroissiale de Stein-sur-le-Rhin (2 reprod.).
— Notice du P. Braun sur l'aube de saint
François d'Assise, conservée à l'église Santa-
Chiara de cette ville (3 reprod.).
— Article de M. G. Jacob sur les statues dites
Les Quatre rois à cJieval à la façade de la cathé-
drale de Ratisbonne, qui viennent d'être restau-
rées ; il détermine le sens de ces sculptures, qui
lui semblent représenter les quatre animaux fan-
tastiques vus par Daniel et personnifiant les
quatre royaumes chaldéen, mède, perse et gréco-
macédonien.
(5e fasc). — M. A. Bertram donne des célè-
bres fonts baptismaux en bronze (fin du XIII^
siècle) de la cathédrale de Hildesheim une
description détaillée, accompagnée de 3 plan-
ches publiées dans la livraison suivante avec la
fin de ce travail, et de S gravures dans le texte,
reproduisant le monument sous toutes ses
formes.
(6« fasc). — Supplément au travail de M. H.
Semper sur les ouvrages rhénans en ivoire et en
os, des XI<= et XII<= siècles, avec reproduction
d'un beau reliquaire appartenant à ce groupe et
conservé au Cabinet des antiques de Stuttgart.
— Description, par M. H. Derix, d'anciens
vitraux du XV*" siècle à la cathédrale de Xanten
(planche hors texte reproduisant trois de ces
vitraux).
(7= fasc). — Sièges cpiscopaux et ambons en
Apulie, par M. P. Schubring (avec reprod. du
siège épiscopal de saint Nicolas de Bari (XI^
siècle), de fragments des ambons de Bitonto et
de la cathédrale de Bari (XII I<= siècle) et de la
chaire de l'église Saint-Basile, à Troia (XVI^
siècle).
— Note de M. Schniitgen sur un parement
brodé du XV*= siècle conservé au Musée des arts
industriels à Vienne (reprod.).
(8e fasc). — Le Goût en art, par L. M. K.
— Le P. Sœrensen nous fait connaître une
Pietà (reprod. dans cet article) conservée dans
la sacristie de l'église du couvent de Weert (Lim-
bourg hollandais) et qui lui semble devoir être
attribuée à Quintin Matsys.
— M. L. von Fisenne donne, avec commen-
taires, plusieurs plans d'églises à deux nefs des
provinces rhénanes et de Westphalie (').
I. Chronique des Arts.
^. ^. ^^^. ^. ^. ^^. ^ ^ ^. ^. ^. ^ ^. ^. ^. ■^. ^. ^. ^. ^. ^. ^. ■^. ^^.
Vrt)rOnlQUC. sommaire: œuvres NOUVELLKS : Le monument de Bossuet
à Meaux. — MUSÉES. — RESTAURATIONS : cathédrales de France, vieux Rouen, tour
de Vësone à Périgueux, Commissions diocésaines des monuments, Notre-Dame du Sablon
à Bruxelles, — NOUVELLES : art protestant, fresques anciennes, gares gothiques — NÉCRO-
LOGIE : M. H. -A. Revoil.
Œutires nouticllcs.
^E M onument de Bossuet à Meaux. —
Dans le Grand Palais des Champs-
Elysées, dressé comme un autel sur le
seuil de cette abside où s'inscrit l'es-
Cdiier en fer à cheval conduisant aux galeries
hautes, on voyait le mémorial de Bossuet, œuvre
de M. Ernest Dubois, destinée à la cathédrale de
Meaux. Il était là, faisant face au monument
triomphal de Victor Hugo, et cette place émi-
nente il la devait à l'importance du morceau,
une des plus grandes « machines » assurément
de cet immense fouillis qu'était le hall du Grand
Palais.
Au moment où, grâce à l'initiative de Mgr Le
Nordez, évéque de Dijon, va enfin être réalisé le
projet depuis si longtemps cher aux cœurs dijon-
nais d'un monument au plus illustre des enfants
de Dijon, il n'est pas sans intérêt d'examiner
comment a été traité le sujet dans le mémorial
destiné à la cathédrale de Meaux. Eh bien, je
n'hésite pas à le dire, l'artiste qui a bien réussi
le monument des frères Joseph et Xavier de
Maistre, à Chambéry, s'est trompé cette fois,
avec tout le talent que l'on voudra, mais enfin
l'erreur est à mes yeux complète.
De 1679 à sa mort, survenue à Paris dans un
hôtel de la rue Sainte- Anne, le I2 avril 1704,
Bossuet a été évêque de Meaux, et c'est dans sa
cathédrale qu'il repose sans que, jusqu'aujour-
d'hui, un monument funèbre désigne le lieu où
gît son cercueil. On croyait même que les restes
mortels du grand évêque avaient été profanés ;
mais, il y a quelque quarante-cinq ans, une fouille
fit retrouver sous le pavé du sanctuaire le cer-
cueil iîitact. On eut même la curiosité de l'ouvrir,
et la momie apparut ; pendant quelques instants
nos contemporains ont pu contempler ce qui
restait de Bossuet.
Dès lors, le programme était tout tracé ; il
s'agissait de réparer l'oubli de deux siècles — je
ne parle pas de la statue insignifiante que vit
Victor Hugo en 1838. — V. Le Rhin, t. I, p. 38,
— et d'élever à Bossuet le monument funè-
bre noble et grave auquel a droit cette grande
mémoire. Et même, étant donnée notre impuis-
sance actuelle à avoir un style, le mieux était de
s'en tenir à l'ancien. Ainsi, le monument devait
être tel que par les mains de Girardon, de Coy-
sevox ou de Coustou aurait dû lui consacrer le
XVIfle siècle commençant. Suivant la très
noble formule du tombeau français, de la Renais-
sance aux temps contemporains, je vois donc,
sur un sarcophage de marbre noir ou de porphy-
re sombre, Bossuet agenouillé devant un prie-
Dieu à ses armes, les mains jointes, la tête haute
et largement drapé dans sa robe à longue traîne.
A la base, lui font cortège, assises, la Théologie,
V Eloquence et V Histoire, qui pourraient très bien
être traitées non tout à fait dans la manière de
Coustou, mais avec une certaine adaptation per-
sonnelle, comme l'a fait M. Paul Dubois pour
les incomparables figures du tombeau de Lamo-
ricière. Il est manifeste qu'un monument à Bos-
suet, fût-il destiné à une place publique, ne doit
pas être conçu dans les mêmes données que
celui qui serait élevé à un poète ou à un auteur
dramatique. Mais du moment qu'il s'agit de le
placer dans une église, je ne puis admettre qu'une
œuvre ayant le caractère religieux ; et, dans
l'espèce, c'était évidemment le type-tombeau qu'il
fallait adopter.
J'ai examiné, avec l'intérêt qu'inspire à tout
Dijonnais le grand nom de Bossuet, le modèle
du monument destiné à la cathédrale de Meaux,
et j'ai eu le regret d'éprouver une déception com-
plète. L'œuvre n'est qu'un grand biscuit de Sè-
vres, sans style monumental et surtout sans
l'ombre de sentiment religieux ou funèbre. L'ar-
tiste n'a pas voulu d'allégories jugées vieux jeu,
mais les a remplacées par quelque chose de non
moins vu. Au pied d'un cippe sur lequel, concep-
tion malheureuse, Bossuet est représenté assis,
sont groupées quatre figures d'hommes et de
femmes dans le costume du temps et représentant
les personnages qui ont eu le plus de rapports
avec Bossuet. On connaît ce thème substitué aux
bas-reliefs, imaginé pour la première fois, je crois,
par Rauch pour la statue équestre du grand Fré-
déric à Berlin, maintes fois repris depuis, notam-
ment pour le monument d'Alexandre Dumas
père, à Paris, et du général Chanzy au Mans.
Mais les monuments de Berlin et du Mans sont
traités dans le style héroïque, et si le d'Artagnan,
assis au pied de l'image de celui qui fut son créa-
teur, n'est qu'une figure d'anecdote historique, il
n'avait pas besoin de viser plus haut.
Il n'en est pas de même des figures groupées
par M. Ernest Dubois au pied de son Bossuet ;
il fallait ici du plus grand style, et l'artiste ne
nous a donné que des statuettes amplifiées et
dans les attitudes les plus familières. Aussi,
174
îRebue îie V^xt c!)rétteiu
malgré des dimensions monumentales, cela est
petit ; l'ideri iitagnus, sentiri parviis, parce que
la conception est petite, et que sous les voûtes
graves et fatiguées du XIII<= siècle, on aura beau
entasser les matériaux et les formes, on n'aura
jamais qu'un joujou agrandi, une anecdote en
marbre, dont le plein air ne laisserait rien et dont
la cathédrale ne conservera pas grand'chose.Pour
le Bossuet assis et qui semble parler ou ensei-
gner, j'ai déjà dit que c'était une conception
malheureuse ; on ne perche si haut, en effet, que
des figures debout, de style historique et non un
personnage assis dans un fauteuil, ce qui im-
plique nécessairement le plainpied et le terre-à-
terre.Puis on me dit que cette attitude est réservée
aux saints et aux papes.
Ma conclusion est que l'absence de style et de
gravité sont des défauts essentiels que ne saurait
pallier, — je fais très sincèrement la partie
belle à M. Ernest Dubois, — la plus parfaite
exécution matérielle, et, pour tout dire, la France
va posséder un monument manqué de plus. On
me dira que dans le nombre ce n'est pas une
affaire.
Henri Chabeuf.
ffiui5ée0.
(E Musée du Louvre a reçu des étrennes
princières.
La Société des Amis du Louvre lui
a fait don d'une admirable tapisserie
de haute lisse, représentant \& Jugement dernier,
exécutée au XV^ siècle, à Bruxelles, sur les car-
tons très probablement de Ouintin Matsys.
La composition, à très nombreux personnages,
est d'une superbe et riche ordonnance. Les cou-
leurs en sont conservées à merveille. Elleprovient
de la collection espagnole du duc d'Albe et fai-
sait partie, chez ce dernier, d'une série de cinq
pièces dont deux appartiennent aujourd'hui à
des particuliers, deux autres au musée d'Am-
sterdam.
Cette pièce de la plus haute rareté a coûté
10,000 fr. Le Comité consultatif des musées et le
Conseil des musées ont donné leur pleine adhé-
sion à l'acceptation du don des Amis du Louvre.
ON procède en ce moment à la manufacture
des Gobelins, à la confection de la plus
grande tapisserie connue.
Cette œuvre d'art, qui mesurera 13'" de long
sur S"! de hauteur, est destinée à décorer le grand
panneau de fond de la salle des fêtes du XIII^
arrondissement.
... L'exécution du modèle a été confiée au
peintre Jean-Paul Laurens, qui s'est mis immé-
diatement à l'œuvre ces jours derniers.
Le sujet de la tapisserie choisi par M. Guiffrey
représente l'Apothéose de Colbert. Tous lescorps
d'Etat, porteurs de palmes, viennent saluer la
statue du grand ministre de Louis XIV.
La confection de ce merveilleux chef-d'œuvre
demandera six années de travail consécutif à
six ouvriers de la manufacture.
{ Petit Journal.)
— »©{-— s©^-'
ON n'hésitait pas quelquefois au moyen âge
à tisser des morceaux plus considérables
encore. Nicolas Bataille, célèbre tapissier parisien,
fournit à Louis I^^ duc d'Anjou, de 1377 à 1379,
cinq des sept pièces de la tenture de l'Apoca-
lypse, encore conservée en grande partie dans la
cathédrale d'Angers.
Cinq d'entre elles n'avaient pas moins de 24
mètres de long sur 5"" 60 environ chacune.
Les amateurs de tapisseries anciennes atten-
dent avec impatience la savante dissertation de
M. Léopold Delisle sur les manuscrits à vignette
de l'Apocalypse, comparés à la tapisserie d'An-
gers, dans laquelle il établit que l'auteur des
cartons n'a pas suivi le Manuscrit 403 de la
Bibliothèque Nationale, mais une autre collec-
tion de miniatures d'un type bien distinct, dont
le volume manuscrit de la bibliothèque de Cam-
brai est un des meilleurs exemples. Ce travail
décisif sur cette question doit paraître au cours
de l'année dans l'un des volumes de la Société
des anciens textes.
L. DE F.
BLestautations.
'ANS sa séance du 23 novembre, la
Chambre des députés a voté, sans
discussion, le budget affecté au service
des cultes. Deux chapitres de ce bud-
get fixent les crédits alloués pour 1901 aux
grosses réparations des édifices diocésains et les
crédits spéciaux pour diverses cathédrales.
Les premiers crédits proposés s'élèvent à la
somme de 875,000 frs, comme l'année dernière.
Les crédits spéciaux aux cathédrales, qui
étaient pour 1900 de 325,000 francs ont été
réduits de 30,000 francs.Cette réduction porte sur
les dépenses afférentes aux cathédrales de Mar-
seille et de Séez.
Voici quels sont les travaux auxquels sont
affectés les crédits votés.
Cl)romque.
175
Catlu'drale de Gap. Far décret du 2 mai 1866,
la reconstruction de la cathédrale de Gap fut
déclarée d'utilité publique. Les travaux furent
commencés dès 1866. Depuis cette époque
jusqu'en i899,ilsont coûté 3 millions 130,328 fr.
Le crédit porté au budget de 1901 permettra
l'achèvement du clocher. Il ne restera plus à
construire que le porche.
Cathédrale de Marseille. En 1852, un décret
impérial ouvrit un crédit de 2,500,000 francs pour
la construction d'ime nouvelle cathédrale à Mar-
seille. Les travaux commencèrent en 1854 et se
sont continués jusqu'à ce jour, payés au moyen
de crédits variables de 300,000 francs et de
250,000 fr., réduits ensuite à 150,000 fr., puis à
100,000 fr. et enfin à 20,000 fr. La ville de Mar-
seille a contribué à ces travaux pour 3,300,000 fr.
Les dépenses se sont élevées à 13,579,878 fr.
L'édifice, ouvert au culte depuis plusieurs années,
paraît achevé à tous les points de vue, mais l'au-
torité diocésaine réclame l'entreprise d'une
sacristie nouvelle qui était prévue dans le projet
primitif de l'architecte Vaudoyer. Actuellement
il existe, adossée à la nouvelle cathédrale, une
partie de l'ancienne cathédrale classée au noiTibre
des monuments historiques, appelée la Major,
qui sert de sacristie. La Commission a proposé de
supprimer le crédit de 20,000 fr. affecté à une
construction nouvelle.
Cathédrale de Séez. Les travau.K de restaura-
tion delà cathédrale de Séez ont été commencés
en 1870 par le transept nord. Puis on a dû démo-
lir et reconstruire le chreur avec ses chapelles
en partie sur l'emplacement des sacristies. De
1870 à 1898 les dépenses se sont élevées à
I 460.899 fr. Le crédit de l'exercice 1900 sera
employé à la reprise de plusieurs arcs-boutants
et à la reconstruction, avec le concours de
l'évêque, des sacristies démolies. La Commission
du budget et la Chambre ont estimé que le cré-
dit de cette année pouvait être réduit à 20,000 fr.
Cathédrale d'Evreux. Commencée en 1874, la
restauration de la cathédrale d'Evreux a entraîné
jusqu'en 1899 une dépense de 1,301,500 fr. 89.
Bien que cet édifice ait été complètement res-
tauré, il reste encore à y reprendre la porte
nord, dont le devis s'élève à environ 100,000 fr.
Cathédrale de Reims. De 1843 à 1874, il a été
dépense plus d'un million pour diverses répara-
tions à la cathédrale de Reims, notamment pour
l'abside. En 1875, on résolut de restaurer sérieu-
sement ce magnifique édifice, et un crédit annuel
de 200,000 fr. fut voté pendant dix ans. Fuis
ce crédit fut réduit à lOOOOO fr. De 1875 à 1899,
les dépenses se sont élevées à 3-499-790 fr.
Le crédit de 1901 et les crédits suivants seront
surtout employés à la restauration de la façade.
On a commencé par la tour sud, mais il reste
encore énormément à faire, notamment à la tour
nord et à la grande rose, dépense qu'on peut
évaluer à plus de 500,000 fr.Le concours financier
sollicité auprès du Département et de la Ville
afin de hâter l'exécution de ces travaux n'a pas
été obtenu.
Cathédrale de Bourges. Les faibles crédits
(50,000 francs, puis 25,000 francs) affectés à la
restauration de cet édifice entrepris sur la pro-
duction d'un devis de 1,545,1 10 francs obligent à
aller lentement. Les dépenses se sont élevées de
1882 à 1899 à 522,334 fr.
Cathédrale de Rouen. Depuis 1896, un crédit de
30,000 francs est inscrit chaque année pour la
restauration de la façade de la cathédrale de
Rouen. Grâce aux concours locaux, les dépenses
se sont élevées de 1896 à 1S99 à 207,882 fr. Cette
restauration devant entraîner une dépense de
600,000 fr., l'Etat a recherché des concours
locaux afin de ne pas faire durer trop longtemps
les travaux. Le Conseil général du Départe-
ment a promis en cinq annuités : 100,000 francs.
Le Conseil municipal de la Ville de Rouen
une pareille somme de 100,000 francs. L'auto-
rité diocésaine a aussi offert une somme
de 100,000 francs payable en plusieurs annuités.
(80,000 francs sont versés). Dans l'ensemble, les
fonds de concours s'élèvent à 300,000 francs.
Cathédrale de Mende. Sur l'engagement de
l'autorité diocésaine de contribuer à la dépense
pour 100,000 francs, un crédit spécial de
20,000 francs fut inscrit au budget de 1899. La
dépense, pour cette première année s'est élevée à
2!, 106 fr. 27. Pour cette année 1900, il sera
dépensé environ 60,000 francs dont 40,000 ver-
sés par l'évêché.
— »Qi " ■t&r-
ON annonce que le Conseil municipal de
Rouen, qui avait promis de conserver la
vieille rue Saint- Romain, voisine de la cathé-
drale, revient sur les intentions qu'il avait mani-
festées et abandonne à son malheureux sort ce
quartier si pittoresque, qui seul peut donner une
idée de Rouen au temps de Jeanne d'Arc, con-
damnée à mort dans cette rue (?). La Société des
Amis des monuments parisiens, convoquée par
son président, M. Charles Normand, vient d'en-
voyer à la Société des Amis des monuments
rouennais, dont il est le président honoraire, ses
félicitations, au nom des artistes et des touristes,
pour avoir repris le bon combat « contre les van-
dales ». M. Charles Normand dans son allocu-
tion s'est étonné qu'en trois ans la direction des
cultes, propriétaire de plusieurs maisons de la
rue Saint-Romain, n'ait pu assurer le maintien
176
Brbtir lie T^rt cbrcticn.
définitif et intégral du cadre nécessaire qu'elle
forme à la cathédrale.
Les édiles rouennais, a-t-il ajouté, ne sont-ils
pas satisfaits d'avoir dégagé l'église Saint-Ouen,
d'avoir démoli tant de quartiers nécessaires au
maintien du prestige et des intérêts de Rouen,
d'avoir laissé tomber la maison du Grand Cor-
neille? Pourquoi les touristes iraient-ils encore
enrichir Rouen, dépouillé chaque jour de ses
curiosités, ou portées en débris dans des musées,
quand elles doivent nous permettre de restituer
l'aspect des cités de nos ancêtres et de faire vivre
les contemporains en y attirant les étrangers?
LA vieille tour de Vésone, à Périgueux,
curieux et imposant édifice circulaire dans
lequel on a cru reconnaître, à tort ou à raison, la
« cella » de quelque temple disparu, est menacée
de suppression à peu près complète. Cette ruine
majestueuse qui se dresse au Sud de la ville, près
de la voie du chemin de fer, à l'Est d'une caserne
d'infanterie, a été récemment isolée au milieu
d'un jardin public. Or la municipalité vient de
décider de faire construire une aile nouvelle à la
caserne qui, en empiétant sur le jardin, englobe-
rait l'ancienne tour et la cacherait presque en-
tièrement. Les amis des monuments protestent
contre la décision prise par la municipalité péri-
gourdine.
A L'EXEMPLE de NN. SS. les évêques de
Saint-Brieuc et du Mans, ainsi que de Mgr Le
Nordez, évêque de Dijon, qui ont pris récemment
des mesures pour préserver les trésors d'art qui se
trouvent dans les églises de leurs diocèses, Mgr
Dubillard, évêque de Ouimper, vient de prendre
également des dispositions tendant à la conser-
vation des monuments religieu.x et des trésors
archéologiques si nombreux dans le Finistère.
Par une circulaire. Sa Grandeur prescrit à son
clergé de veiller soigneusement à l'entretien des
calvaires bretons et à la garde des objets précieux
du mobilier liturgique ancien, et elle crée au
grand séminaire une chaire d'archéologie reli-
gieuse dont le titulaire .sera le savant abbé Ab-
grall ; elle institue dans son diocèse une Commis-
sion spéciale, composée de laïques et d'ecclésias-
tiques, pour veiller au bon entretien des monu-
ments religieux de toutes les époques d'art, des
chaires, autels, retables et mobiliers des églises
et sacristies, et sans l'autorisation de laquelle
aucune reconstruction, aucune vente, ou aucun
échange d'objets artistiques ne pourra avoir lieu ;
enfin, elle donne refuge dans son évêché aux
vieilles statues, témoignages intéressants de l'art
breton, délaissées dans presque toutes les pa-
roisses pour les images de pacotille, en attendant
que l'influence intelligente du haut clergé soit
arrivée à inculquer à tous le respect des œuvres
religieuses du passé si pleines du plus noble sen-
timent, que c'est autant un crime contre Dieu
d'en dépouiller sa maison, qu'un crime contre
l'art.
La Restauration de l'Église de N.-D. du Sablon
à Bruxelles. — On lit dans le A'A''"= siècle :
Certains journaux ont annoncé que les travaux de res-
tauration de l'église de N.D. du .Sablon vont bientôt être
poussés activement et que leur achèvement sei a prochain.
Nous avons tenu à être renseigné exactement h ce
sujet et voici ce que nous avons appris à très bonne
source :
Comme on se le rappelle sans doute, la restauration de
l'église coûtera une somme totale de 1,400,000 francs,
répartie en dix exercices annuels de 140,000 francs
chacun. C'est la \'ille de Bruxelles qui assume cette
charge, avec les subsides de la province et de l'Etat,
mais sans le concours financier de la fabrique.
Les plans ont été approuvés par elle, il y a un peu plus
de trois ans. Les travaux ne doivent être terminés que
vers igo6. Il est donc inexact de prétendre, comme cer-
tains journaux l'ont fait, que la restauration sera achevée
prochainement.
Actuellement sont seuls terminés les travaux extérieurs
de la nef du côté du Grand-Sablon et le portail. Or, sui-
vant les instructions données, toute une série de travaux
auraient dû être terminés avant cet hiver : la restauration
de la sacristie, celle de l'abside et la construction du
calorifère. Au mois d'avril dernier, M. l'échevin Leurs,
impatienté des retards, avait convoqué dans son cabinet,
à l'hôtel de ville, l'architecte, AL \'an Ysendyck, les fabri-
ciens et les chefs de son personnel technique. Il mit
l'architecte en demeure de terminer au plus tôt la série
de travaux que nous avons cités. Les fabriciens insis-
tèrent également. Cependant, à l'heure actuelle, on
n'a pas encore établi le plus petit échafaudage.
On pourrait donc croire que les annonces de travaux
prochains qui paraissent périodiquement dans certains
journaux, ne sont insérées que pour leurrer les intéressés
et le public et pour leur faire prendre patience.
On a formulé diverses critiques à propos de la res-
tauration de l'église, critiques portant aussi bien sur l'en-
semble que sur le détail. Nous n'insisterons pas sur ce
point aujourd'hui. Qu'il nous suffise de dire qu'il existait
dans les cartons d'un architecte de la fabrique de
l'église, mort depuis queU|ues années, des projets très
intéressants. 11 paraîtrait même qu'on s'en serait servi,
mais maladroitement, pour la restauration actuelle.
Un mot encore à propos de celle-ci. Lorsque la nef du
côté du l'etit-Sablon, la sacristie et les côtés du portail
seront achevés, il restera encore .\ terminer la restaura-
lion intérieure de l'édifice, ^ réparer le toit et à cons-
truire le clocheton. L'on sait, en effet, que le petit campa-
nile où sonnent actuellement les cloches, est destiné îl
disparaître et fera place à une jolie flèche semblable à
celle qui domine le transept de l'église Sainte-Ciudule.
Cl)romque.
177
lîoimelles.
lOUS avons parlé naguère des tenta-
tives de M.Ë.Miintz en vue de ramener
les protestants à une conception nnoins
glaciale de l'art religieux. Son appel
n'est pas resté sans écho ; il est intéressant de
suivre les efforts des disciples de Luther et de
Calvin pour sortir de la torpeur oîi les ont tenus
des siècles leurs décevantes erreurs.
C'est en Suisse que se manifeste cette réaction.
Dans le canton de Zurich, beaucoup de temples
commencent à recevoir une décoration de cou-
leurs : tels celui de Neuchâtel et celui de Lau-
sanne, où la Bible de Doré a été traduite en
vitraux. Le jeune pasteur du canton de Vaud
commence à admettre des vitraux. A Horgen on
est allé plus loin ; on peut voir sur les murs deux
tableaux bibliques. Ailleurs on remet au jour
des fresques cachées sous le badigeon.
Le mouvement artistique, confiné jusqu'ici
dans la région zvvinglienne ou luthérienne, gagne
la région calviniste, « Le calvinisme, écrit
M. Miintz, avait supprimé, ou peu s'en faut, toute
manifestation d'art, presque tout culte extérieur,
et Genève était devenue une nouvelle Thébaïde.
A Bâle, à Zurich, à Berne, au contraire, des
peintres de la valeur de Hans Holbein, de Ni-
claus Manuel Deutsch, de Hans Asper, conti-
nuaient à mettre au jour des tableaux pleins
de sève et de piquant. La Suisse entière com-
mence à comprendre la mission éducatrice de
l'art.
Voici, d'autre part, ce qu'écrit un collabora-
teur anonyme de la Gazette des étrangers de Lau-
sanne (10 novembre) sur ce sujet.
... <î II est certain que la réaction calviniste a été très
préjudiciable au développement des arts dans la Suisse
occidentale, et M. le pasteur Bornand a mille fois raison
quand il écrit que ^< ce serait une tentative absurde que de
vouloir innocenter les réformateurs, Calvin en particulier,
d'avoir banni l'art hors des églises et de l'avoir même, en
quelque sorte, mis au ban de la chrétienté. » Luther
n'a eu garde de tomber dans une erreur aussi
funeste. Sans doute, les statues de la Vierge et des saints,
les cierges, l'encens et les enfants de chœur ont disparu
des églises luthériennes, mais les peintures murales et les
vitrau.x sont restés et, en général, les temples luthériens
sont extérieurement plus gracieux et intérieurement plus
confortables etmieu.\ ornés que les nôtres. En outre, on y
fait de bonne musique, et c'est à quoi, justement, nous
voulons en venir. 5)
A Niederzell, près de Constance,Grand-Duché
de Bade, on vient de découvrir dans l'église une
grande décoration murale de caractère roman,
datant probablement du XI' siècle, qui cou-
vre entièrement l'abside. Cette frise, l'une des
plus importantes de toutes celles qui existent
sans doute en Allemagne, représente le Christ en
gloire entouré des symboles des quatre Évangé-
listes et des deux patrons de l'église, saint Pierre
et saint Paul; puis, à droite et à gauche, deux
séraphins ; au-dessous, encadrés dans des arca-
des, sur deux rangées superposées, se voient les
Apôtres et les Prophètes. D'autres peintures
moins bien conservées, datant pour la plu-
part de la première époque gothique et repré-
sentant la Madone, divers saints et des scènes
de la vie de la Vierge, ont été découvertes dans
d'autres parties de l'église.
Les peintures de Louvain. Une découverte de
peintures murales dans l'église Saint-Pierre fait
grand bruit dans le monde des archéologues, nous
écrit notre correspondant de Louvain. Ces pein-
tures à fresque ont été trouvées, à l'occasion de la
restauration de l'église, à la voûte d'une des cha-
pelles absidales, exactement derrière le maître-
autel. Elles représentent des anges, autour des-
quels courent des nervures dorées fort bien
conservées ; elles sont d'une extrême finesse et
peuvent être considérées parmi les plus belles
qui aient été découvertes dans nos églises belges.
La Commission des Monuments, qu'accom-
pagnaient MM. le député Helleputte, le cha-
noine Reusens, Van Even, archiviste, Dumortier,
architecte provincial, et Langerock, architecte
chargé des travaux de restauration, a examiné
ces curieuses fresques.D'après M. Van Even, dont
l'avis a été partagé par les visiteurs, ces peintures
dateraient de 1440, et devraient être attribuées
au peintre Hubert Sturbout, contemporain du
peintre louvaniste Bouts. M. l'architecte Lange-
rock est persuadé que les recherches feront dé-
couvrir des peintures semblables dans d'autres
parties encore de notre vieille collégiale.
GARES gothiques. — Nous trouvons dans
un journal belge, « Le Patriote » {n° du
14 octobre), la lettre d'un architecte qui n'est pas
signée, et dont nous avons par conséquent le
regret de ne pas nommer l'auteur.
Cette lettre commente un discours que S. M. le
roi des Belges aurait tenu, à l'occasion de certai-
nes irrégularités qui se sont produites dans le
service des chemins de fer de son royaume.
Nous ne savons si le discours royal a été exac-
tement reproduit. Mais les observations que ce
discours a suggérées sont tellement marquées au
coin du bon sens — ce sens commun qui devient
de plus en plus rare — que nous nous faisons un
178
l^t\}X\t lie rart cbvctten.
véritable plaisir de communiquer la lettre à nos
lecteurs.
J'ai lu avec infiniment d'intérêt le petit discours qu'on
met dans la bouche du Roi, au sujet de la désorganisation
du service des trains. Ma profession m'oblige à me servir
fréquemment du raiiway national ; et les tracas , les pré-
occupations qui constituent, de ce chef, le lot ordinaire
de mon existence, contribuent certainement à abréger
celle-ci : ce qui est bien fâcheux pour moi, vous en con-
viendrez. C'est donc vous dire que le langage que le Roi
a tenu, d'après les journaux, h M. Raemackers, secrétaire
général du département des chemins de fer, m'apporte
quelque réconfort et même quelque joie.
Mais pourquoi faut-il que cette joie soit gâtée par le
restant du discours ! Serait-ce possible que Sa Majesté
ait dit textuellement :
« Il faudrait nous donner de bonnes gares, pratiques,
confortables, d'accès facile en toutes leurs dépendances,
au lieu de nous faire d'importants monuments, inutiles,
dans lesquels on sacrifie le confort à l'aspect monumen-
tal de l'extérieur. Les gares gothiques, par exemple, coû
tent bien cher et ne répondent guère à leur destination.»
(Qu'est-ce que les « gares gothiques» viennent faire en
tout ceci? M'est-il pas évident, en principe, qu'une gare
peut être en n'importe quel style — grec, romain, byzan-
tin, oriental, indou, « gothique » si l'on veut — et con-
stituer en même temps une excellente gare, une gare qui
réponde à tout ce qu'on peut légitimement en exiger, au
point de vue du pratique et du confortable ?
Il est non moins évident que des gaffes peuvent être
commises dans les constructions de tous les styles. Les
styles ne sont pas responsables des gaffes — mais bien les
architectes et les constructeurs. Pourquoi s'en prendrait-
on au style d'une gare si cette gare est défectueuse ?
En fait, tous les styles se prêtent à la construction
d'une bonne gare ; en tenant compte, bien entendu, des
matériaux à employer, du climat, des mœurs d'un peuple,
etc. L'aménagement, le confort, ça c'est l'affaire de l'archi-
tecte et du constructeur. Une gare «gothique », comme
une gare « Renaissance », peut donc parfaitement répon-
dre à sa destination.
Et l'argument du coût ! Mais n'est-il pas clair comme
le jour qu'une gare de n'importe quel style coûtera aussi
peu qu'on voudra, ou aussi cher qu'on voudra ? Faites-
vous simple? Le prix de votre édifice se ressentira, quel
qu'en soit le style, de votre décision. Faites-vous luxueux?
Voulez-vous, par exemple, une gaie où il y ait autant de
statues qu'au Dôme de Milan? 11 faudra les payer. Coni
prenons donc bien, une fois pour toutes, que tout cela est
relatif — et n'ayons pas, de grâce, de paiti-pris !
Sa Majesté ne sait peut-être pas qu'il y a comme une
idée fixe, chez certains sectaires, de qualifier avec mé-
pris de « gothiques » tous les facteurs de la véritable Re-
naissance nationale à laquelle nous assistons. Cet art
qu'ils disent « gothique », cioyant avoir ainsi tout dit, est
en réalité, un art rationnel, logique, raisonné; un art s'in-
spirant de la vie, des nécessités de la vie, des exigences
les plus modernes de la vie. Voyez les merveilleuses et
splendides applications de cet art « gothique 5> h l'électri-
cité — la plus contemporaine de nos conquêtes !
Des mois, tout cela. Ces sectaires s'inspirent malheu-
reusement de préoccupations étrangères à l'art. L'art
« gothique », l'art national, est brillamment représenté en
Belgique par des religieux. Les sectaires, méconnaissant
l'Histoire, oubliant que d'humbles Fra Angelico, que des
saints ont créé d'immortels chefs-d'œuvre, n'en revien-
nent pas. Ils nous donnent ainsi le spectacle de lamen-
tables niaiseries.
Or, comme pareil état d'âme n'est certes pas celui du
Roi, je suis convaincu que, sur ce point, on lui attribue â
tort les paroles que je viens de relever : il est trop bâtis-
seur pour ne pas savoir ce que valent les rengaines des
« antigothiques ». Le Roi, «: belge de cœur et d'âme »,
doit aimer notre art national, comme les Allemands,
comme les Anglais aiment le leur et le glorifient. D'au-
tant plus, on ne saurait trop le répéter, que le nôtre a
pour lui la raison et la logique.
Agréez, monsieur le Directeur, etc.
X
B-cstauration Des ruines.
Nous avons eu à soutenir dans la livraison
précédente une polémique avecM.Fierens-
Gevaert sur cette intéressante question. Cette
polémique a eu une suite dans la Clironique des
Arts; pour des raisons que nous ferons connaître,
nous devons remettre notre réplique au prochain
numéro. L. C.
■a '». «y. <». »^. «a», «y. .y. ^. »y «y >s^. ^ .y, .y, .y,^, .j». ^w, «y. .y. »». ^«y. «ae,
€^i^S)I>fcrologîe. ^iBm
... &
ffi. tiemi=Hntainc RcIidîï.
M. Henri Antoine Revoil, architecte, vient de
mourir dans sa propriété de Servanes, aux envi-
rons de Mouriès (Bouclies-du-Rhône). Il demeu-
rait à Nîmes, dont il était l'architecte des monu-
tnents historiques, en même temps qu'il était le
doyen des architectes du gouvernement. Il était
né à Ai.x le 19 juin 1822. Élève de Caristie, il
était entré à l'École des Beaux- Arts le 31 octo-
bre 1845. Il a e.xposé au .Salon de 1846, L'état
actuel et la resta?iration de l'abbaye de Montina-
joiir, près d'Arles, et. des travaux relatifs à des
restaurations de_ monuments du Midi, faites pour
le compte de l'État, à tous les Salons de Paris
jusque vers 1880. Il a publié aussi différents ou-
vrages, notamment L'architecture romane du
Midi de la France. A l'exposition universelle
de 1900, où il obtint une médaille d'or, il avait
envoyé des œuvres intitulées : Ciborium du
maître autel de la catln'drale de Marseille. En
récompense des longs et remarquables services
rendus par lui à l'art français, le Gouvernement
venait de l'élever au grade de commandeur de la
Légion d'honnetir. Il était chevalier depuis 1865
et il avait été promu officier en 1SS9, à l'occasion
de l'Exposition universelle, où il avait obtenu une
médaille de bronze.
Imprimé p.ir DescMc, De lirouwer et Cie, Bruges.
^^ 3'"^ livraison. — ffîai (90^. 4^|
¥n¥n^Yn¥mwi¥W?^wi^¥nwiWi
Jjc Trésor Dc régUsc aôbatialc DcHt'^ffîatl)taS, à TrèlJCS (Crusse).
g^mfAfe:^^^gA grande et belle église
bénédictine de Saint-
Mathias est veuve des
moines qui l'ont édifiée ;
depuis la révolution, elle
est tombée du rang éle-
vé d'abbatiale à celui
bien modeste de paroissiale. Néanmoins,
comme elle a la valeur d'un monument
historique, sa conservation et son entre-
tien ne laissent rien à désirer.
Sa situation en dehors de la ville de
Trêves, à l'extrémité d'un faubourg, fait
qu'elle est souvent oubliée par les touristes.
Le Guide pour Trêves, qu'on distribue à
l'hôtel Rothes Hmis, dit qu'elle est « encore
aujourd'hui lieu de destination de pèlerinage
au tombeau de l'apôtre (S. Mathias) et de
grandes reliques, dont une particulièrement
est remarquable, une parcelle de la croix,
en riche décoration duXI*^ siècle ».
Le corps de S. Mathias (') repose dans
I. Un intéressant ouvrage, publié à Coblentz en 1855,
sous le titre : Metropolis Ecclesiœ Treverica, par Bro-
un sarcophage de marbre, daté de 1786,
exhaussé sur quatre grandes colonnes, en
arrière du maître-autel, en sorte qu'on peut
passer dessous, suivant une pratique an-
cienne, pour se mettre sous la protection
directe de l'apôtre.
Quant aux « grandes reliques (") », elles
n'existent qu'en partie, à part la vraie croix,
réellement digne d'attention par ses dimen-
sions et son reliquaire, qui date du XI 11^
siècle et nullement du Xî^, ce qui est une
erreur grave pour des Allemands, d'ordi-
naire mieux renseignés.
Après le trésor de la cathédrale, on ne
songe guère à celui de St-Mathias ; c'est à
tort, car il contient quelques curiosités
qui ne sont pas à dédaigner. Il est assez mal
installé, dans une salle haute, qui aurait
besoin d'être nettoyée et aménagée plus
convenablement, pour l'œil aussi bien que
weret Masen, donne ces détails : Le corps de S. Mathias
fut retrouvé en 1053, il distillait de l'huile : < Inven-
torem ejus ex contacta siillantes oleo digitos. >
I. Les reliques étaient si nombreuses que le pape
Honorius III avait permis de dire le Gloriu en carême.
KKVUE DK l'aKT CHRérlEN.
igoi. — 3*"^ r.iVRAisON.
i8o
Bebue îie V^vt cbrétien.
pour la commodité des visiteurs. Ayant eu '
le loisir de l'étudier minutieusement, grâce
à la recommandation de Mgr l'évêque au-
près d'un des vicaires, je vais en dresser le
catalogue, dans le but de le faire mieux
connaître au loin et de lancer dans le do-
maine de la science les renseignements
utiles qu'il fournit à l'archéologie. Ce sera un
moyen efficace de payer ma dette de recon-
naissance envers ceux qui, appréciant l'op-
portunité de mes travaux, m'ont si gracieu-
sement donné facilité de les poursuivre en
toute liberté ; la sympathie fait toujours
plaisir à l'étranger.
I. — Ceinture De S. OstoalD ( vi i^ siècle).
Long. : i'",43 : Larg. : o"',o3.
VOICI la copie de l'authentique, qui
remonte à l'an 1478 :
« Iste est cingulus sancti Oswaldi ('), ré-
gis Anglorum et martyris, qui ex nimia
vetustate confractus, hic expositus est,
scilicetanno Domini MCCCC LXXVIII.
Argentum deauratum cum quo ornatus fue-
rat, id est das ùess/a^,poshum est super ein
schwai'tz geveb ad concedendum populo. Iste
est ergo verus cingulus in corio et in illo
cingulo verus ornatus istius cinguli.scilicet
sancti Oswaldi gurtels besslag. »
Cette ceinture est en cuir, recouvert d'un
tissu de soie noire (") formant un dessin
régulier en manière de treillis, avec cinq
raies unies, légèrement en relief tranchant
sur le fond. Toute l'ornementation, clous ('),
rosettes (•'), en argent doré, a été enlevée
1. « S. Oswald, Cj-îfa/(/?<j, roi des Northumbres et mar-
tyr, né en 604, tué le 5 août 642. > (Die t. hagiogr. de
M igné).
2. « Une escharpe d'or, toute de besans branlants, de
boillons et de lozenges, ferrés sur un tissu noir et pour l'or
de lad. ceinture, 4 o, 8 est > {Argenterie de la Reine, 1401.)
3. < Unecourroye de cuir de lion, sans nulle ferrure. >
(Invent, de Charles V, 1380, n° 78.)
4. (( Ferrure, garniture métallique, ajipliquée sur une
ceinture et comprenant les clous, rosettes, boucles, mor-
dants et passants. > (Gloss.arch.)
systématiquement pour en faire don aux
dévots : cette mutilation peu respectueuse
est des plus regrettables, car elle altère no-
tablement le caractère propre de la relique,
qui n'a plus que l'aspect d'un objet ordinaire,
sans aucune de ces marques de luxe qui en
faisaient véritablement un insigne royal.
La relique est enfermée dans une bourse
de parchemin, qui date du XV^ siècle. Après
l'avoir dépouillée, on pouvait lui donner
une enveloppe plus digne, car on s'est con-
tenté de détacher une feuille d'un missel,
que l'on a recouverte de cette étoffe légère
qu'on nommait voile et qui, manquant de
consistance par elle-même, avait besoin de
renfort à l'intérieur. Elle se termine par une
houppe de soie verte. Un cordonnet de
même nuance, avec bouton tressé, servait
à la suspendre, et deu.x autres boutons, de
qualité analogue, fermaient la partie supé-
rieure qui se rabattait sur l'ouverture, à la
façon des aumônières.
II. — Fragments De cljàsscs
(fin du XW siècle).
QUATRE plaques carrées en cuivre
ont survécu à la destruction des
châsses qu'elles ornaient. Elles sont couver-
tes de filigrane en argent doré et rehaussées
de cinq cabochons, un gros entre quatre
petits.
Le trésor de la cathédrale nous apprend
l'usage de ces plaques qu'on disposait en
bordure sur les couvertures des évangé-
liaires; ailleurs, elles formaient des bandeaux
sur les châsses. Elles alternaient toujours
avec des plaques émaillées.
III. — fiitacium (XII r siècle).
P 77^^ C/<7iî/ signifie étiquette (■).
On nomme ainsi, dans le langage
ecclésiastique, la bande de parchemin écrit
I. Voir mes Œ tvr. compL, .\, 42.
ile trésor De Vtqiist t)t'5©atl)(a0, à Zxt\)ts, iSi
et la tablette de marbre ou de plomb gravé,
qui, dans une châsse ou un reliquaire, ser-
vent à désigner la relique qui y est conser-
vée. Ce n'est pas un authentique en forme,
lequel ressemble à une charte ou à une let-
tre testimoniale, mais une simple et brève
indication d'identité.
Les deux pitacium, détachés des reliques
qu'ils accompagnaient, sont en plomb,gravé
au XII P siècle, en belle gothique ronde.
Le premier mesure en carré o"\65 sur cha-
que côté. On y lit :
• I^ ■ ÏÏ _MODES
• TI • EPI ■
TREVIRz (')
Le second, large de o'",65 et haut de
o"',04, porte :
• l^ ■ s" ■ ivs
TI • Miç • n
Les reliques abondent à St-Mathias : un
grand nombre est exposé, un peu confusé-
ment, dans de grandes vitrines fixées à
l'entrée du chœur; d'autres sont dans le
trésor, enfermées dans des caisses de fer
blanc. Voici l'indication des principales.
S. Materne {') et S. Euchaire {').
1. Reliquiœ sancti Modesti episcapi Treviroruin. — < S.
Modeste, évêque de Trêves et confesseur, florissait dans
le V siècle, 24 février. (Dict. hagiographique.)
2. Reliquia sancti Justi inartyris. — Les saints martyrs
du nom de Just ou Juste sont au nombre de douze, l'iden-
tification de ces reliques est donc impossible.
3. « S. Materne, évêque de Cologne et de Trêves, que
le Martyrologe romain fait disciple de ,S. Pierre... Son
corps, qui avait été inhumé à Trêves, dans l'église de
St-Mathias, fut transféré, en 1037, dans l'église métropo-
litaine par Poppon, archevêque de cette ville, 14 septem-
bre. » (Dict. hagiogr.)
4. <L S. Euchaire, Eiicharius, premier évêque de Trêves.
Il bâtit, près d'une des portes de la ville, un oratoire qu'il
dédia sous l'invocation de S. Jean-Baptiste et dans lequel
il fut enterré. Cet oratoire fut changé plus tard en une
église qui porta le nom de S. Eucaire. La congrégation
de clercs qui la desservait donna naissance au monastère
de St Eucaire et ensuite de St-Mathias, 8 décembre. »
(Dict. hagiogr.). — « S. Euchaire est le patron de la
De tunica S. Pétri, morceau de laine
grisâtre.
Brachiurn cum manu de Innocentibus: la
main est entière avec sa peau, ses doigts
sont repliés sur la paume (').
De capite S. Lasari, evajtgelici, fratris
SS. Marthe et M. Magdalene, episcopi
Massiliensis: ouire le chef presque entier,
il y a deux fémurs de S. Lazare et
plusieurs gros ossements de ses sœurs, Ste
Marthe et Ste Madeleine (^).
De lapide ipsiiis tunuili sancti Lazari,
queni Dotninus siiscitavit.
Une grande partie du corps de l'apôtre
S. Philippe, entre autres un bras et un
fémur.
Crâne d'un martyr inconnu, tranché par
un coup d'épée.
IV. — jpaûlcait De la Vraie croir
(XI Ile siècle).
Hauteur : o'",73S ; largeur : o™,55 ; épaisseur : o'",o5.
I. T E tableau rectangulaire, dans lequel
1 j est exposée et encadrée la Vraie
Croix, a une large bordure, où les plaques
filigranées et gemmées alternent avec les
plaques émaillées, pour produire une agréa-
ble variété.
Les émaux champlevés, de l'école des
bords de la Meuse, ont des dessins géomé-
triques multiples. Au nombre de dix, ils
sont opposés deux à deux : des feuillages
collégiale fondée par Pierie de Eri.xey (évêque de Toul
de u68 à 1191), dans l'église de Liverdun ». (Bretagne et
Briard, Note sur une troiivaille Je monnaies lorraines,
p. 25.)
1. Le musée de Trêves possède un élégant petit ber-
ceau, en os peint et sculpté, de la fin du XV= siècle, qui
a pu, comme en d'autres endroits, contenir quelque re-
lique des saints Innocents. — Voir mes Œuvr. complètes,
X, 517.
2. Voir Œuvres complites, St Lazare (XII, 525), Ste Ma-
deleine fXI, 3), Ste Marthe (XII, 567;.
l82
îRclJUc tie ravt chrétien.
rompent la monotonie des lignes droites ou
courbes, tracées par la règle et le compas.
On y compte sept nuances : blanc laiteux,
rouge terreux, vert, jaune, jaune de brique,
bleu lapis et bleu cendré. Malheureusement,
ces émaux sont de mauvaise qualité, pleins
de bulles d'air qui ont crevé à la cuisson,
médiocres comme composition et ternes
comme aspect. Ils détonnent véritablement
Reliquaire de la Vraie Cruix FaCi.
au milieu de l'exubéfcint éclat qui les envi-
ronne.
Les plaques filigranées exhibent un se-
mis de cabochons et deux camées an-
tiques.
Le glacis qui rejoint le fond du tableau
est découpé à jour. Dans son enchevêtre-
ment de feuillages courants se mêlent et
rampent, se poursuivent et s'attaquent, bon-
dissent et volent, une foule d'animaux et
d'oiseaux de toute sorte : lion, grifton (dont
un encapuchonné), singe, sanglier, loup,
renard, cerf, chien, bélier, chèvre, colombe,
aigle, etc. C'est la nature tout entière qui
exalte son auteur.
Une frise niellée nomme le donateur et
précise la date de la donation. Elle est fixée
par de petits clous sur l'âme en bois du
tableau et une feuille sépare presque cons-
tamment les caractères les uns des autres.
►î< ANNO ■ AB • rNCARNATIONE • DOMINI -
MCCVII ■ HENRICVS ■
AB ■ VLMENA ■ ATTVI.IT - LIGNVM • SCE •
CKVCIS DE ■ CIVITATE -
CONSTANTINOPOLITANA ■ ET - HANC • FOR-
TIONEM ISTIVS •
SACRI LIGNI ECCLESIE • SANCTI • EVCHA-
KII • CONTVLIT (').
Ce texte est très important, parce qu'il
affirme et surtout par ce qu'il ne dit pas.
Henri d'Ulmen parait n'avoir donné que la
vraie croix, qui, suivant la tradition, pro-
viendrait de la basilique de Ste-Sophie. S'il
eût fait exécuter en même temps le tableau
pour la contenir, l'inscription n'aurait pas
omis un don aussi précieux ; de plus, ses
armes y auraient été inévitablement appo-
sées et son effigie eût été ajoutée à celle
des bienfaiteurs. La date de 1207 se rap-
porte donc exclusivement à l'acte même de
la donation, non à l'exécution du tableau,
qui ne concorde pas avec ce millésime. En
effet, son style reporte plutôt vers le milieu
du XI II" siècle et, sous ce rapport, nous
sommes parfaitement à l'aise pour prendre
nos coudées franches, puisque l'abbé qui est
figuré au revers ne mourut qu'en 1257.
Mais voici une autre preuve non moins
décisive : cet abbé, nommé Jacques, ne fut
I. De Linas {Revue de t Art chn't., X.\XI, 67) a lu faii-
tivenient r/(.' Uliiiena cli/>S!Us. Il se trompe aussi en attri-
buant ce reliquaire i< à l'aube du .XIIl" siècle >. Il a dû
copier Aus'm Weerth, qui fait les mcmes fiutes, en y
ajoutant /tanc magnant et qui reproduit le C"' Riant dans
ses Exuviœ sacrœ Constantinopolitanœ, II, 17S.
JLt trésor De régltse ^t^^atl)tas;, à Crèt)es. 183
élu qu'en i 2 1 1, c'est-à-dire quatre ans après
la donation.
La croix occupe en entier le champ du
tableau, délimité par un bandeau filigrane et
gemmé. Elle est cantonnée de vingt locules
carrés, circonscrits par des bandes sem-
blables à la précédente, mais plus étroites.
Sous le cristal, taillé en table, on distingue
des suaires de soie ou de toile, et une éti-
quette en parchemin désigne les reliques
qui y sont enfermées.
Ces reliquaires, huit dans le haut, à droite
et à gauche de la tête de la croix, douze
dans le bas, près de la tige, escortent la reli-
que par excellence, qui est la croix du Sau-
veur. S. Paul l'avait dit dans une de ses
épîtres: Les Saints ont participé à la pas-
sion de leur Maître, il est donc juste qu'ils
soient associés à son triomphe ('). Ici le
symbolisme marche de pair avec l'esthé-
tique.
Didron avait bien raison, en faisant gra-
ver la face du tableau, ds l'accompagner de
cette note enthousiaste : « Dites si vous
connaissez une œuvre d'orfèvrerie plus déli-
cate, plus riche et plus belle, que cette table
d'or, d'émail et de pierreries.;) [Anua/.arc/i.,
t. XIX, p. 226.) Non, certes, nous ne croyons
pas que l'art du XI 1 1*= siècle ait été poussé
plus loin et ait produit un monument plus
véritablement beau dans son ensemble et
ses détails (-).
2. Une forte lame de cuivre, gravé etdoré,
d'un caractère magistral, fait le fond du re-
vers du tableau, auquel elle adhère par une
série de petits clous à tête ronde. Si le ta-
bleau eût été, en toute circonstance, adossé
à la muraille, l'artiste n'aurait pas songé à
lui faire un revers aussi riche que celui que
1. « Scienies quod sicut socii passionum estis, sic eritis
et consolationis. »(//*;</ Corintli., i, 7.)
2. Léon Palustre a fait du tableau cinq photographies,
que nous avons publiées dans le Trésor de Trêves.
nous admirons. A certains jours, le reliquaire
devait été porté en procession et exposé
sur le maître-autel, très certainement isolé,
comme il l'est encore aujourd'hui : il fallait
donc que le tableau fût montré et vu par
ses deux faces. Comme il n'a pas de pied ou
que, s'il y en avait un, ce que rend fort pro-
bable le tableau du S. Corporal, à Orvieto
(État pontifical), il était alors mobile ; deux
anneaux, placés sur les côtés, nous indiquent
le mode de fixation, à l'aide de courroies de
cuir ou de cordons de soie, sur un brancard
ou à l'autel.
Dès lors que le tableau comportait une
décoration au revers, cette partie devait
s'harmoniser, pour la composition, avec la
partie antérieure, sous peine de rompre
l'équilibre esthétique et de constituer une
disparate choquante. L'artiste a compris la
difficulté et s'en est tiré habilement. Il est
parti de cette idée, fournie par l'Evangile,
que la croix paraîtra au dernier jour pour
être la règle d'après laquelle sera jugé le
genre humain ('). La représentation du juge-
ment dernier s'imposait donc pour ainsi dire
comme suite de l'iconographie de la face
principale ; on l'avait déjà, sous cette même
forme, aux portails romans des cathédrales
d'Angers, de Chartres et du Mans.
La plaque est composée d'une large
zone, serrée entre deux, bandeaux étroits,
le tout historié. Une croix feuillagée, du
style le plus gracieux et le plus souple,
traverse la zone centrale : le milieu est coupé
par un losange, sur chacun des côtés du-
quel se soude un disque. Le losange en-
veloppe le Christ comme une auréole : le
champ en est étoile, car il figure le ciel. Le
Sauveur, pieds nus, avec le nimbe crucifère,
I. « Et tune parebit signum Filii hominis in crelo et
tune plangent omnes tribus terrre, et videbunt Filium
hominis venientem in nubibus cœli cum virtute niulta et
majestate. » (5. Mattli., xxiv, 30.)
i84
WitWt lie r^lrt cljrctten.
deux signes disiinctifs de la divinité, est
assis sur un trône; sa main droite levée
bénit a la manière latine et sa gauche élève
le globe du monde, parce qu'il l'a racheté
par sa mort.
Les quatre animaux prennent place dans
les quatre médaillons, selon l'ordre ration-
nel : l'homme vis à vis l'aigle et le lion en
face du bœuf.
En haut, une arcature courante, en plein
cintre, abrite sept saints : les trois premiers
sont seuls nimbés, quoique tous aient leur
nom précédé du qualificatif sanc/us qui en
est l'équivalent. Au milieu siège la Vierge,
►î< SANCTA MAKiA, qui tient d'une main sur
son genou droit son Fils bénissant et de l'au-
tre présente la pomme fatale dont, nouvelle
Eve, elle annihile l'effet par le fruit de ses
entrailles. A sa droite se succèdent: S. Pierre,
avec ses deux clefs symboliques et la croix
de son martyre, >i< ses • petrvs ; S. Valère,
►î< SCS • VALERivs ; S. Nicolas, ►!< ses ■ nico-
LAVs ; à gauche, S. Jean l'évangéliste, âgé,
barbu et pieds nus, son évangile en main ;
►î< SCS • lOHANNEs ■ Ev ; S. Materne, >i* ses ■
M.\TERNVS et s. Agricius, ►!< ses • agri-
cius >i>. Tous ces évêques sont vêtus pon-
tificalement, en chasuble, mitre et crosse
tournée en dedans et munis du livre de la
doctrine sainte qu'ils ont enseignée. S. Va-
lère ('), S. Materne et S. Agricius (') ont
occupé le siège de Trêves. Là est repré-
senté le ciel des élus. Dans l'office des
I. < s. Valère, Valerius, évêque de Trêves, succéda à
S. Euchaire. Il fut enterré auprès de son prédécesseur
dans l'église de St-Mathias et bientôt après on l'honora
comme saint, puisqu'on lit son nom dans le Martyrologe
de .S. Jérôme. Son corps fut transféré à Goslar, dans le
XI' siècle, par les soins de l'empereur Henri III. 29 jan-
vier >. {Die t. hagio^r.)
1. < S. Agrèce, Aj;rcecius, évêque de Trêves et succes-
seur de S. Florentin, appartenait au clergé de Rome,
lorsque, sur la demande de l'impératrice Ste Hélène, il
fut placé sur le siège de Trêves, en 314, par le p,ipe S.Sil-
vestre. Il mourut vers l'an 332 et il eut pour successeur
S. Maximin, son disciple. 13 janvier >. {Dict. hagiogr.)
morts, à l'antienne de la communion. l'Église
demande pour les défunts qu'ils jouissent
avec les saints de la lumière éternelle :
« Lux aeterna luceat eis. Domine, cum
sanctis tuis in sternum. » Le rapproche-
ment est encore plus évident quand on
constate, sur le bandeau inférieur, le groupe
des bienfaiteurs de l'abbaye. Huit arcades
cintrées les abritent.
S. Mathias, >^ ses mathias, nimbé, le
livre de l'apostolat en main, se tourne, à
droite, vers l'empereur Henri, >^ henricvs,
IMPERATOR, couronné, qui offre sur un mé-
daillon la représentation du château de
Vilmon sur Lahn ; suit la comtesse Jutta,
►J. IVTTA eoMiTissA, dont le médaillon porte
le nom de lieu cvbes, qui constitue une
autre propriété territoriale de l'abbaye ;
puis vient l'abbé Jacques, ^ iacobvs .\bkas,
tête nue, en chasuble et crosse, descendant
des ducs de Lorraine et XVH^ abbé de
St-Mathias, de 121 1 à 1257. A gauche de
l'apôtre, on voit S. Euchaire, ►î" ses evcha-
Rivs, mitre, crosse et bénissant ; S. Lut-
win ('), évêque de Trêves au VHI^ siècle,
►i< ses LVTVViNvs, mitre et en chasuble,
qui offre sur un médaillon le territoire de
STEM ; Everard, évêque, mort en 1056,
EVERHARDVS, mitre et crosse, qui présente
POLCHE comme don, et enfin le prieur Isen-
bard, Hf* isenbardvs • prior ►!<, les deux
mains enveloppées d'un linge par respect
pour la vraie croix qu'il montre.
3. Le bois de la vraie croix mesure o"',40
de hauteur et sa largeur est de o"*, 12 au
petit croisillon et de o'",28 au grand.
La forme est celle que l'Orient a cons-
tamment donnée à la relique de l'instru-
I. < S. Lutwin, Ludwin ou Lui vin, Ludovintts, évêque
de Trêves, fut élevé à Trêves par S. Basin, son oncle,
qui en était évêque. Il mourut vers l'an 71S et fut enterré
à Methloc, où l'on garde ses reliques, i" juillet et
29 septembre. » (Dict. hagiogr.)
ite trê0or îie l'église ^t £@atl)tas, à Crètîes. 185
ment du salut, c'est-à-dire qu'elle est à
double traverse ; l'une, plus large, repré-
sente l'endroit où le Christ étendit ses bras
et l'autre rappelle le titre, légèrement dé-
veloppé. Son origine ressort donc de sa
forme même, qui porte ainsi en elle un
cachet indéniable d'authenticité.
En Occident, nous exposions volontiers
la vraie croix dans un reliquaire de même
forme. Le contenant indiquait aussitôt la
nature du contenu. En Orient, on préféra
la forme en tableau. C'est la plus ancienne
et aussi la plus récente, comme en témoi-
gnent, pour le Vie siècle, le reliquaire de
Ste-Croix de Poitiers, envoyé par l'empe-
reur Justin à Ste Radegonde, et, pour le
XI V*^, le charmant triptyque gravé dans les
Antiales ai^c hé o logique s, t. II, p. 281, et qui
appartint en dernier lieu au chanoine
Bouiillier, curé de Coulanges (Nièvre) (').
Bien que le tableau dans lequel la vraie
croix fut apportée n'existe plus, nous savons
sa configuration par celui que possède
I. < La table marquée par derrière d'un grand A, a été
faite du temps de Dom Radulphe, XV abbé de Clair-
vaux. Il a placé dans le milieu de cette table un philac-
tère ou reliquaire quarré, couvert d'une lame de vermeil.
Dom Artaudus, chevalier du Temple, puis moine de
Clairvaux, y apporta ce philactère. 11 contient des reli-
ques de saints au nombre de vingt-quatre, sous vingt-
quatre petites cellules. Dans ce philactère il y a un mor-
ceau de bois de la vraie croix, à nud, sous la forme de
croix patriarchale à deux croisons, donné par le même
dom Artaudus. — La seconde table, marquée derrière
d'un B, a été faite du temps de Dom Radulphe. Il y a
trente-cinq saphirs et cinq tant émeraudes qu'autres
pierres précieuses et plusieurs autres d'un moindre prix.
Le fond est de lames d'argent doré. Et en cette table est
un morceau de la vraye croix de N.-S. En la table qui est
en bas, il y a trois rangs de reliques avec leurs écriteaux
sur petites lames d'argent en lettres gothiques. — La
troisième table, marquée d'un grand C, est couverte d'une
feuille d'argent doré, divisée en sept rangs, chacun des
quels contient douze cabinets. Les ossements des saints
y paraissent nuds, enchâssés sous de petites arcades,
avec des écriteaux à l'entour des reliques. Cette châsse
a été faite du temps dudit dom Radulphe, abbé de Clair-
vaux, vers l'an 1225. — La quatrième table, marquée D.
Ouvrage grec. C'est Artaudus, chevalier du Temple,
moine cellerier de Clairvaux, qui a apporté des reliques
et le reliquaire d'Orient ; il les avait reçus de Louis,
l'église de Limbourg (') et qui provient de
l'abbaye de Stuben. Même en le renouve-
lant, pour le mettre à la mode du jour, on
tint à conserver l'aspect primitif : l'orne-
mentation seule varia.
Par une intelligente précaution, le bois
sacré ne fut pas fixé à demeure dans son
cadre de métal, mais simplement encastré
dans une cuvette creusée exprès au milieu
du tableau. La face antérieure fut laissée à
nu ; au commencement du XI V^ siècle, on
trouva que c'était inconvenant et irrespec-
tueux, et alors on se décida à la couvrir
d'une feuille d'argent, gravée et rehaussée
de gemmes, que des goupilles maintinrent
aux extrémités, mais de façon à pouvoir les
enlèvera volonté.
Sur le bois même, au point de jonction
des traverses, pour les orner et consolider
en même temps, on fixa deux cabochons,
flanqués de pierres plus petites. La croix
fut ensuite emprisonnée dans un réseau
filigrane et gemmé, qu'enserra une seconde
bordure extérieure faite au repoussé.
Le bois est d'une teinte claire ('): il sem-^
ble, par ses veines serrées et presque droi-
tes, appartenir à la classe des conifères.
comte de Blois. Il paraît que, dans le milieu de la table,
il y a eu une grande croix qui n'y est plus depuis fort
longtemps. — ■ Il y a encore une table d'argent, fermante
à deux portes... couverts de feuilles d'argent et remplis
de reliques. Au milieu est une croix à deux croisons, où
il y a du vray bois. > (Inv. de Clairvaux, 1741, n"' 46,
47, 48, 49, 5°-)
1. Annales aich., XVI II, 374. — « Le contenu est, à
tous égards, digne de cette enveloppe magnifique. Le
morceau capital est une croix de bois, ayant o"',35 de hau-
teur sur o'",20 de largeur... .Selon Browere, un chevalier
allemand, Henri d'Uhnen, réussit à s'emparer de ce
reliquaire et de plusieurs autres, les rapporta dans son
pays, fit don de celui qui nous occupe en ce moment au
couvent de Stuben. » (/te/., XVII, 341, 342.) — La croix
de Limbourg, à double traverse, est figurée dans le
Mi'moire sur les instruments de la Passion, par Rohault
de Fleury, pi. XV, et décrite p. 142.
2. «La relique se compose de quatre morceaux dis-
posés en forme de croix... La couleur paraît plus rou-
geâtre que celle de Paris. » (Rohault de Fleury, p. 146.)
i86
^tWt ^t ratt cbrctieti.
qui est l'essence reconnue pour les reliques
de ce genre ('). La croix est formée de huit
morceaux, de deux centimètres d'épaisseur
et d'inégale longueur. La surface est polie,
comme une tablette menuisée.
Le revers de la croix a aussi son intérêt
particulier. Les contours sont dessinés par
un fil d'or, puis par une bande saillante et
à jour où les animaux et les oiseaux de toute
Reliquaire de la Vraie Croix ; Revers.
sorte jouent au milieu des feuillages. A
l'intérieur court un élégant rinceau de fili-
grane d'or, qui a certainement une signifi-
cation symbolique. Dans les miniatures et
les vitraux des XI I^ et XI 1 1^ siècles, la
croix sur laquelle meurt le Sauveur est
constamment verte et diaprde, suivant l'ex-
pression du blason. Ce n'est donc pas un
bois mort, desséché, bon à jeter au feu, mais
un bois plein de sève, de vigueur et de vie,
I. « On peut affirmer que le bois de la croix prove-
nait d'un conifère et on ne peut douter que ce conifèrc
ne soit du pin. La Judée en produisait. > {[bid., p. 63.)
qui se pare de verdure et d'une abondante
frondaison. Le moyen âge l'avait, en con-
séquence, qualifié arbir de vie, parce qu'il
est réellement vivant et qu'il rend la vie à
l'humanité qui l'avait perdue par le péché.
On peut dire de lui ce que S. Thomas
disait du pain eucharistique : « Panis vi-
vus, vitam prsestans homini » ('). et encore
avec le même poète théologien : « Mors
est malis, vita bonis » (').
La vie n'est que pour les bons, les justes,
les élus et c'est la croix qui, au dernier jour,
après les avoir jugés à sa mesure, les sépa-
rera des réprouvés pour qui elle est la
mort éternelle.
Quel délicieux revêtement pour l'ado-
rable croix du Sauveur ! A la face anté-
rieure, elle se montre radieuse, étincelante
et brillante comme un trophée de victoire
qui, lui aussi, participe aux honneurs de la
résurrection et du triomphe : au revers, elle
est tapissée d'une végétation qui atteste
quel effet produit sa vertu dans le monde
régénéré.
4. Après avoir décrit l'ensemble de cette
orfèvrerie incomparable, revenons sur ses
détails multiples, qu'il est opportun de bien
faire saisir dans leur forme ingénieuse.
Deux anges, en ronde bosse, sont age-
nouillés aux extrémités des croisillons d'en
haut; ils encensent la croix. Leur attitude
dénote le respect profond et l'adoration qui
sont dus au bois sacré, instrument de notre
rédemption ; leur acte peut aussi s'inter-
préter dans le sens de la prière, puisque
l'encens lui est comparé par la liturgie {^).
L'orfèvre a donc exprimé de la sorte le
culte spécial dont la vraie croix est l'objet
1. T)a.x\s\'Adnro te lievûte.
2. Dans le Lauda Sion.
3. Le prêtre, à l'encensement de l'autel, pendant
l'offertoire de la messe, dit cette prière : < Dirigatur, Do-
mine, oratio mea sicut incensum in conspectu tuo ».
JLt trésor De Téglise ^PS^aîW^ à Créées. rsy
dans l'Église catholique, c'est-à-dire l'ado-
ration et l'invocation (').
La croix, qui produit la vie, est entourée
de feuillages. Les locules des saintes
reliques ont aussi leur encadrement rehaus-
sé de feuilles et de fleurettes, car selon la
parole de la S'^ Écriture, les ossements des
saints vivent dans l'éternité : « Ossa eorum
pullulent de loco suo. » (Bcc/es., xlvi, 14.)
Remarquez encore le perlé qui contourne
la croix et les panneaux : c'est un fil qui a
pour mission d'accuser les lignes principales
du tableau en leur enlevant la sécheresse
d'angles aigus.
Le filigrane a cessé comme sur les cou-
vertures d'évangéliaires, d'être un fil tordu
à plat sur le fond qu'il embellit. Ici, il est
plus serré encore : ses vrilles et ses feuilles
plus rapprochées laissent moins d'ajours,
et, pour lutter d'effet avec le repoussé, il
s'enlève, s'arrondit, ce qui ne pouvait s'ob-
tenir qu'à la fonte. Enfin, ses tiges si-
nueuses se terminent en grappes de raisin.
Le moyen âge aimait la couleur et il la
demandait à la fois aux émaux et aux gem-
mes. Le tableau est, pour ainsi dire, cons-
tellé de pierres précieuses et de perles : il y
en a de toutes les tailles, depuis les grosses
jusqu'aux petites. Nous en avons compté
405, dix-sept petites seulement font défaut.
Elles sont ainsi réparties : douze à chaque
angle, onze dans les milieux latéraux du
cadre, quatre fois répété ; quatre-vingt-dix-
huit au pourtour et cent trente-deux pour
la croix.
Les grosses pierres sont des cristaux
de roche. Le cristal revient encore plusieurs
fois, surtout de chaque côté des deux ca-
mées. Pour le reste, ce sont des améthystes,
1. Dans l'office de l'Exaltation de la croix revient sou-
vent cette formule : « Adoramus te, Christe, et benedici-
mus tibi, quia per crucem tuam redemisti niundum ». —
€ Per signum crucis de inimicis nostris libéra nos. Do-
mine, y
rubis balais, saphirs, émeraudes, topazes,
chrysolithes, grenats, plasmes, cornalines,
calcédoines, aigues-marines, opales, nicolo,
cailloux du Rhin. La forme est très varia-
ble: ronde, ovale, oblongue, carrée, triangu-
laire, baroque ; quant à la taille, elle est
toujours en cabochon, autrement dit à sur-
face arrondie.
La monture est une bâte à bords rabat-
tus, quelquefois munie de quatre griffes
tréflées ; mais alors il s'agit d'une restau-
ration faite au XI V^ siècle.
Reliquaire de la Vraie Croix. Détail de la face.
Plusieurs pierres et perles sont percées
de part en part ; indice certain d'une desti-
nation différente à l'origine, comme serait
un collier. Cette particularité est souvent
relevée dans les inventaires (').
I. « Un saphir d'Orient percié. » (/«i/. (fe Clémence de
Hongrie, 1328, n° 17.)
« Unus alius anulus de auro de meta, cum lapide forato
cujusdam zaffiri. » (//«'. de Vévcquc d'Orvieto,\z(^^,r\'' x^b.)
<L Un autre annei d'or esmaillié, ouquel a une faulce
pière pertuisée. » (/«?/. du duc d'Orléans, 1393, n° 523.)
« Un petit reliquaire d'or, où il a une des dens de
l'enfance Nostre Dame, garni d'un saphir longuet per-
cié. > {Inv. du duc de Berry, 1414, (n" 20). — « Une belle
aiguière d'or... et ou fretelet du couvercle a un gros sa-
phir longuet percié. » [Ibid., n" 786.) — « Un gros saphir
percié... d'une salière de cassidoyne. > {Ibid., 1401,
n" 226.)
« Ung yinage de Nostre Dame, d'argent doré..., tenant
REVUE DE l'art CHRÉTIEN
1901. — 3'"*^ LIVRAISON,
i88
3Rrbur ïic V^xt cbrcticn»
Toute l'armature du tableau est en cuivre
estampé, seules les plaques filigranées sont
en aroent doré. On a donc intentionnelle-
ment limité la dépense, quoique le monas-
tère fût riche.
Etui de la Croix.
La tranche est également en cuivre, avec
feuillages tréilés, enfermés dans une série
d'arcades.
Le tableau est estimé 60,000 marks,
soit 75,000 francs.
en sa main une fleur de lis de fin or, garnie de sept perles
et ung saphir perse. 5> (Inv. de l'abbaye de Maubuisson,
1463, n° 12.)
< Ung gros ballay parssé. > (/«z/. de la duchesse d'Or-
léans, 1476, n"'892.)
< .Magistro Caradosio, gioylerio S""' D. N., pto pretio
trium saphirorum in modiim piri perforatoriim, ad usuni
rose ponlificalis emptorum. > {Compte royal de 150g.)
5. Le reliquaire de S. Mathias compte
parmi ses ornements deu.x camées et vingt-
deux intailles, le tout antique. Comme la
glyptique romaine n'est nullement ma spé-
cialité, j'ai prié mon docte ami Léon Pa-
lustre de vouloir bien me venir en aide
avec son obligeance habituelle ; ce qui suit
est donc entièrement de sa main, et je ne
puis mieux finir ma description de cette
œuvre d'art.
« Le camée, placé au centre de la bor-
dure supérieure, figure, taillé dans une aga-
teonyx, un buste d'empereur romain, jeune,
lauré, drapé et cuirassé, à gauche. Nous
croyons y reconnaître les traits de Com-
mode à l'âge de dix-neuf ou vingt ans. Un
bronze de 175 après Jésus-Christ, gravé
dans Cohen (t. II I, p. 257, 2^ édit.), peut
servira établir la ressemblance. Commode, à
cette date, avait déjà reçu le titre de César
depuis neuf ans,
« Dans le camée inférieur, on a voulu voir
« Romulus apprivoisant l'aigle de Rome ».
(Didron, Annales archéologiques, t. XIX,
p. 227). Nous pencherions plutôt pour Ga-
nymède donnant à boire à l'aigle de Jupi-
ter (■). Le costume qui rappelle celui de
Paris convient parfaitement au jeune prince
troyen. Sardonyx à trois couches, malheu-
reusement mutilée.
« Une seule des intailles est remarquable
par son exécution. Elle mesure dans son
grand diamètre seize millimètres et repré-
sente un buste de femme diadème, à droite.
Du même côté, en demi-cercle, le mot grec :
ACATI, qu'il faut peut-être lire ITACA
t. De Linas ccrivait, en 18S1, dans la Revue de l'Art
chrétien, X.\.\l, 68 : <.< liuste lauré d'un jeune empereur;
Hébé, assise, abreuvant l'aigle. Le personnage est vêtu
d'une longue robe de femme, mais il semble coitïé du
bonnet phrygien ; serait-ce Ganymcde dans un costume
que je ne crois pas avoir jamais rencontré ailleurs.' Les
baguettes intérieures ofirent quelques intailles, entre
autres un Pégase et un Mars. i>
(pour lOay.ri), ce qui fait songer à l'île d'Itha-
que.
« Quant à l'inscription clavdia sancta,
gravée sur deux lignes et qui remplit tout
le champ d'un petit nicolo, elle rappelle
le nom d'une dame romaine. Disons à ce
sujet que sancta est un cognouien connu
dans les Gaules, particulièrement par les
inscriptions de Périgueux.
« Les autres intailles appartiennent tou-
tes aux bas-temps et présentent un intérêt
fort médiocre. En voici la description :
« I. L'Abondance, debout à gauche, te-
nant des épis et la corne d'Amalthée.
« 2. L'Équité, debout à gauche, tenant
une balance et un bouclier.
« 3. Vieillard assis, auquel un homme
debout apporte une couronne.
« 4. Deux chevaux lancés au galop.
« 5. Mars debout, à gauche.
« 6. Mercure debout, à gauche.
« 7. Guerrier debout,appuyé sur sa lance.
« 8. Dauphin, enroulé autour d'un bâton.
« 9. Une Victoire, à droite.
« 10. Enfant nu, debout, tenant une
coupe de la main droite.
« II. Guerrier, armé de la lance et du
bouclier, courant à droite.
« 12. Deux mains croisées au-dessus d'un
autel et surmontées d'un oiseau et d'une
tête d'enfant; au-dessous, deux cornes d'a-
bondance.
« 13. Une femme à droite, occupée à ra-
masser des épis, peut-être Gérés.
« 14. Deux globes juxtaposés.
« 15 et 16. Homme debout, casqué, lan-
çant une flèche.
« 17. Cheval marin, monté par un triton.
« 18. Un cavalier au repos.
« 19. Une perdrix.
« 20. Cheval au trot, sur la tête duquel
est attachée une branche d'olivier. »
6. Le texte de l'inscription établit claire-
ment ce fait que le ligmim sanctce crucis,
qui était à Constantinople, fut apporté tout
entier par le chevalier croisé, qui n'en donna
qu'une portion, hanc portioneni istius sacri
/z^«/, à l'église St-Euchaire. Il importe de
rechercher les autres.
Le baron de Roisin a inséré cette note
dans les Annales archéologiques, XVII,
342 :
« Ulmen est dans l'Eiffel, l'ancien pays
des Ripuaires, près de Kelberg, district de
Cochem. Par une route creuse, en pente et
à parois volcaniques, on arrive à un petit
lac circulaire, qui dort dans le cratère d'Ul-
men. Ce lac est encadré de maisons villa-
geoises, d'une église et de deux manoirs,
dont un en ruines. Henri d'Ulmen, Hein-
rich ab Ulmena, assista à la prise de Cons-
tantinople en 1208. II passa l'acte de dona-
tion du reliquaire (de Limbourg) au cou-
vent des Dames nobles de Stuben. Il donna
un reliquaire, moins splendide mais fort
remarquable, à l'église de St-Mathias de
Trêves, où on le conserve encore. 11 fit don
d'un troisième à St-Sévère de Munster-
Maifeld et d'un quatrième à l'abbaye du
Laacherzée. »
Riant appelle Henri d'Ulmen «le dévas-
tateur de Ste-Sophie » [Exuvm, I.xxxiv),
et ajoute (clxiii) : « 11 retourna en Orient
pour accomplir son vœu, prit part à la
cinquième croisade, fut fait prisonnier et
mené au Caire. »
La seconde portion du bois sacré était à
l'abbaye de St-Nicolas de Steuben, comme
en fait foi cette attestation du donateur,
rapportée par Riant, II, 82 :
« Féliciter terrena possidet qui terrenis
celestia possidere intendit. Hujus igitur
felicitatis consideratione motus et divina
inspiratione commotus, ego, Henricus de
Ulmene, super omnes terrenas possessiones
190
3Ret3ue lie T^rt c!)rétten.
cordi meo semper dulcissimum, videlicet
sanctuarium S. Crucis et plures reliquias,
cum omnibus pertinentiis, libéra volun-
tate et communi manu heredum meorum,
ecclesie beati Nicolai in Stupa pro remedio
anime uxoris mee Imgardis, sub tali pacto
contuli ut nulla alicujus occasione necessi-
latis ab ecclesia aiienetur aut impignore-
tur... (")»
On lisait ces vers à Laach (Lacus), « in
scypho verre crucis » pour attester le don de
la troisième portion de la vraie croix (Riant,
il. 176) :
Vir meritis clarus, Henricus, in Ulmene natus,
Contulit hoc lignum nobis, veneramine dignuni,
Quod, Grecis victis, advexit partibus islis:
Albertus, claustro quo tempore piefuit, auro
Sic exornavit, Deus hoc quod gloiificavit.
Comme à Trêves, disent les deux der-
niers vers, le reliquaire fut l'œuvre de
l'abbé Albert.
La quatrième portion, selon la chronique
de Trêves, était à Cologne, dans l'église de
St-Pantaléon (Riant, II, 282) :
« Henricus de Ulmena, Constantinopoli
capta, reliquias, magnam partem Crucis
Dominice deportavit et très partes, unam
ad S. Mathiam, alteram ad monasterium
quod Stupa dicitur, tertiam ad S. Pantha-
leonem in Colonia, cum capite S. Pantha-
leonis, condonavit. »
i.Les Cesta Treviiorum ont une note à ce sujet (Riant,
11,282): «Nec pretereundum videtur quod in diebus istis
civitas ConstantiiiopoUtanaaTheutonibus et Francis cap-
ta est, anno videlicet Dominice Incarnationis MCCIIII...
Henricus .lutem de Ulmena, prefectus imperatoris, cleno-
dium illud exiinium, videlicet tabulamelectrinam niirifici
operis, cum reliquiis rétro contentis, et portione magna
Ligni Dominici inde asportavit et illud cenobio monialium
quod Insula sive Slupa vocatur, supra Mosellani situm,
cnnlradidit >. D'après ce texte, c'est du reliiiuaire cmaillé
de Sluben, qui est resté intact, qu'auraient élc détachées
les trois autres croix de Iréves, de Laach et de Cologne.
V. — Tableau De la crucifirion
(XlVe siècle).
CE tableau surmonte l'autel du fond de
l'abside, nommé dans les anciens tex-
tes autel tnatutinal, parce qu'il servait à
l'office moins solennel des heures de la
nuit, le grand autel, placé à l'entrée du
chœur, étant réservé aux offices du jour.
11 est en cuivre repoussé et formé de
pièces de rapport : la bordure remonte au
XI 11*^ siècle; le tableau lui-même, avec
ses pierres précieuses, est attribuable au
X1V'= et la crucifixion qui y est appliquée
n'est pas antérieure au XVI^, date du ma-
gnifique vitrail qui le surplombe.
Tout autour du chœur une série de ta-
bleaux, sculptés au XV I" siècle, et encadrés
seulement au XVI 11% donne en détail la
vie du Christ. Bien des particularités de-
vraient y être relevées, contentons-nous
d'une seule: à la descente aux limbes, Adam,
une croix et une pomme en main, est déjà
sorti ; Eve l'accompagne ; le Christ prend
un autre patriarche par la main ; S. Jean-
Baptiste, au second rang, attend son tour.
VI. — Boîtes De consécration
(XV-^-XVP siècle).
CHAQUE fois qu'un évêque consacre
un autel, il dépose dans la partie
creuse qu'on nomme si'pîi/cre, des reliques
de martyrs qu'il authentique de son sceau,
en ayant soin d'y joindre un petit procès-
verbal de la cérémonie dont le Pontifical
Romain donne la formule. En vertu d'un
induit apostolique, l'abbé, qui a le privilège
des pontificaux, peut procéder à une con-
sécration, mais seulement dans l'enceinte
de son monastère ou le lieu de sa juridic-
tion, s'il est plus étendu.
D'un autel de la fin du XV' siècle, après
sa démolition, on a gardé simplement le
He trésor de régltse â)t4Patl)îa0, à Crètjes. 191
sépulcre, qui consiste en un bloc de tuf,
large de o"\ 1 7, haut de o"\20 et épais de
o"\ 1 5. Il est clos par une planchette qui
entre dans une feuillure, et porte le sceau du
consécrateur empreint sur cire. A l'intérieur
est une petite boîte de bois qui contient les
reliques et est munie du même sceau.
Ce sceau représente l'abbé Antoine Le-
venius, qui siégea de 1484 à 15 19, age-
nouillé, avec sa crosse, devant l'apôtre
S. Mathias, tenant d'une main un livre et
de l'autre la hallebarde (hache à long
manche), instrument de son supplice. En
exergue : s. anthonii abbaiis monasterii
sci mat/lie.
L'étiquette, un peu mutilée, est ainsi
libellée : « (Reliquie saiicti) Magni mar-
tiris posite in hoc altare Anno
II idibus augusti sub Domino Anthonio
abbate. »
Une autre étiquette nous reporte à l'an
15 13 : « Reliquie plurimorum Scor invente
in nostra hac ecclesia an do MCCLIX VIII
kl' maii posite in hoc altare an do MDXI 1 1
idibvs augusti. »
Une boîte de consécration, en plomb
très épais et d'un travail grossier, haute de
o™, 10 et large de o^^.og, affecte la forme
d'un cylindre. Un parchemin nomme le con-
sécrateur: « Anno ■ I ■ 5 ■ 5 ■ 5 ■ Reveren-
dus Dominus Henricus Confluentie abbas
posuit. >> Parmi les reliques nous relevons
ces deux étiquettes : « De Presepio Do-
mini », « De altare sancti Michahelis quod
est in monte Gargano (') >), en écriture de
la fin du XI 1" siècle.
Une autre boite de même forme et du
même temps nous rappelle les boîtes du
musée de Trêves.
r. Sur le Mont Gargan et l'autel de S. Michel, voir mes
Œitvres complètes, t. XI, pp. 132-137.
VII. — CbaSUtJlC (XVP siècle).
ELLE se fait remarquer par ses bro-
deries et sa croix à bras obliques.
On y voit le Père éternel, issant des nuages,
chape, bénissant et tenant le globe du
monde ; au-dessous, sur une croix verte et
écotée, le Christ mort ; quatre anges re-
cueillent dans des coupes le sang qui coule
de ses plaies et la Vierge tombe en pâmoi-
son entre les bras de S. Jean et des saintes
femmes.
VIII. — calice (xvi^ siècle).
IL est en cuivre doré et haut de o™, 20.
Le pied forme une rose à six lobes. La
tige porte inscrit le nom de Jésus et cette
inscription énigmatique : ihnmae. Sur les
saillies du nœud se répète le nom de Jésus :
IHESVS.
N'oublions pas d'enregistrer un autre
calice, en argent doré, de style rococo, mais
d'un beau travail.
r
IX. — CÎjaSUblC (XVI L- siècle).
ETTE chasuble ressemble à toutes
celles que le XVII' siècle a brodées
et qui sont encore si communes en France.
Sur un fond de damas sont jetées des fleurs,
imitées au naturel en soies de diverses
teintes et, au milieu de l'orfroi, brille le nom
de Jésus, accompagné, suivant l'iconogra-
phie du temps, d'un cœur percé de trois
clous.
Les deux dalmatiques sont assorties à
l'ornement principal.
X. — cartons D'autel (xviii^ siècle).
LES trois cartons dont on pare le
maître-autel aux solennités sont écrits
à la main sur parchemin. La plume y a
tracé, en rouge et noir, une bordure assez
192
5Rrbuc tic r^rt cbréttctL
mesquine, où se succèdent, par allusion au
martyre de S. Mathias et aux espèces eu-
charistiques, des roses, des épis et des rai-
sins.
Le cadre est en argent.
Le carton du milieu porte les initiales et
le litre de l'abbé, la date d'exécution et de
donation, ainsi que les armes de l'abbaye.
L'écusson, accosté de deux palmes mon-
tantes, est circulaire ; il se blasonne : De...
à tine hache de... et îine crosse fourjiée en
dedans de... en sautoir, accompagnées en
chef d'une mitre précieuse de...
L'inscription se lit :
A • \V.
A • S • M (Abbas Sancti Matthia) 1772.
Il ne reste des anciens livres de chœur
qu'un manuscrit sur papier, daté de 1725.
XL — encensoir (Xix» siècle).
CET encensoir, en cuivre argenté, est
une imitation récente d'un modèle du
XV" siècle. Le pied est rond et perlé, la
cassolette et le couvercle sont hexagones.
La partie supérieure se termine en pyra-
mide, avec fenêtres flamboyantes au tam-
bour et bouton au sommet. Pièce d'un des-
sin sobre et d'une facture élégante.
X. Barbier de Montault.
?^ A^yl^ j>^y^ A^vU ^^ >^y^ iM^ x^U. jMa x^yU A^yk x^»^ v^ a^»:^ a^^ x^?^
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TiiLXtxirmtiiriiinxxuxmTTiiitiyr
TiTTiTixiiim cnriTii c
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3f Carixiirrixixiirriiirrixxixi.
ŒiTŒiiiJXLgiiJJLriixiriiiiixrrixniTyiiriiii^rrTTTT^^ ^
'^-^ ^iÔ-^ ^iil^ *^-* *i^^ ^JÔ-^ Viil^ ^iÔ^ *iAl^ *i*ï^ ^iil'f ^i*î^ V^^];^
ONDÉE, vers 1060,
par Adèle de France,
fille du roi Robert le
Pieux et épouse de
Baudouin V, qui tint
le gouvernement de la
fWWm^^î^fsmw^^ Flandre comme comte
héréditaire et celui de la France en qualité
de tuteur de son neveu, le roi Philippe I^'',
l'abbaye de Mecines (') occupe pendant
sept siècles, une place importante dans
l'histoire religieuse et politique du pays
flamand.
Une gracieuse légende enveloppe les
origines du monastère (^).
A l'endroit où s'élevèrent les vastes bâti-
ments de l'église et du cloître, trois humbles
filles des champs — trois « mechines »
comme disent les chansons de geste (2),
« diie meissine » comme le rapportent les
chroniques flamandes, — surprises dans
la forêt par des malfaiteurs, auraient préféré
le sacrifice de leur vie à celui de leur hon-
neur ("). Des prodiges plusieurs fois renou-
1. L'historiographe de Messines, M. Diegerick, fait ob-
server que € dans les chartes du XI" et du XII" siècle, le
nom s'écrivait régulièrement « jl/i7a«/^ comme substantif,
Meiinencis comme adjectif..., conservant toujours le c
primitif et ne présentant jamais \'s ou les ss seules ».
2. Dans les archives de Messines, il est parlé des
« maisines et serviteurs de Madame, des religieuses, du
couvent. > ( Ordonnances faites dis l'institutiou el fonda-
tion, ms. de la fin du XV= siècle, Inventaire Terrier,
n° 39)
3. Voir du Cange ; Glnssariiim, v° Miscitinus.
4. Les restes des trois « mechines » reposent dans une
châsse couverte de broderies, au côté du maître-autel,
dans l'église de Messines. Par lettres du 23 octobre 1591,
Pierre Sinions, évêque d'Ypres, fait connaître qu'il a
examiné les reliques authentiques des trois vierges de Mes-
sines, qui, depuis un temps immémorial, avaient été con-
servées au monastère. Il déclare les avoir déposées dans
une nouvelle châsse, non pas afin qu'on les honore comme
on honore les reliques des autres saints, puisqu'il n'est
pas tout à fait certain que ces vierges soient des saintes
velés, auraient marqué à un cuisinier de la
comtesse Adèle, la volonté céleste de voir
élever en ce lieu un foyer de prières et de
vie religieuse. La princesse, après avoir été
prendre, à Rome, l'avis du souverain pon-
tife, se serait décidée à réaliser cette œuvre.
Un diplôme de Drogon, évêque des
Morins, en date du 5 des kalendes de juin
1065 ('), confirma l'institution nouvelle et
lui attribua de précieuses immunités. Le
roi Philippe I^"" de France, par lettres don-
nées à Furnes, l'année suivante, sanctionna
ces privilèges (').
Après la mort de Baudouin V, sa veuve
prit le voile à Messines et fut, en 1079,
inhumée dans l'église (') qu'elle avait fondée
et construite jusqu'à deux fois.
En effet, l'irascible belle-fille d'Adèle, la
comtesse Richilde, avait, en 1071, mis le feu
au pieux asile et à la bourgade environ-
nante (^), après y avoir fait décapiter soi-
xante citoyens d'Ypres. Plus tard, l'altière
princesse revint à Messines, pour y chercher
rangées parmi les bienheureux du l'aradis, mais afin de les
conserver,comme elles l'ont été jusque-l.\.«On croit, ajoute
l'évêque, que ces trois vierges furent si agréables à Dieu
que, pour les défendre contre la violence de quelques
libertins qui en voulaient à leur chasteté, la terre
s'entr'ouvrit, les reçut dans son sein et les préserva de
toute atteinte. C'est dans ces conditions extraordinaires
que moururent et furent ensevelies ces trois jeunes
filles. > (Archives de l'abbaye, Inventaire Terrier, n" 60.)
On conserve dans les archives un reliquaire du XVI=
siècle, en bois, sur les parois duquel sont peintes les
scènes de la légende des trois jeunes filles. Il est probable
que leurs pieux restes y étaient placés avant la translation
faite en ;59i.
1. Cette pièce remarquable est munie du sceau épisco-
pal ; elle se conserve en original dans les archives de
Messines.
2. Diegerick, Inventaire des archives de l'ancienne
abbaye de Messines, n°' i et 2.
3. Gailliard, Epitaphes et monuments des ifglises de
Flandre, p.234. — Diegerick, p. Xiv.
4. Despaers, Clironycke van l'iaeiideren, t. I. p. 196.
194
3Rrbuc lie V^xt cbvcttcn.
dans la pratique d'austérités effrayantes ("),
le pardon de ses crimes, puis la paix du
tombeau.
Plusieurs filles des comtes de Flandre,
plusieurs princesses du sang royal de France
figurent au catalogue des abbesses et des
moniales de Messines. Aussi comprend-on
aisément que l'abbaye ne tarda pas à obte-
nir une situation privilégiée et à acquérir
d'importantes possessions.
En sa qualité de comtesse de Messines
et de princesse de Croisettes, Madame
l'abbesse jouissait d'une juridiction seigneu-
riale considérable. Elle n'était tenue de
« faire feaulté ne hommage a personne quy
vive, hors que chascune nouvelle doibt
baisier les pieds de Nostre Dame de Mes-
sines (') ». Elle avait aussi le gouvernement
du chapitre, qui se composait de trente
religieuses et de douze chanoines, parmi
lesquels était élu un prévôt.
Malgré les guerres et les révolutions
dont la ville et l'église eurent maintes fois
à souffiir, l'antique « chanesie » subsista
jusqu'en 1776. A cette époque, l'impératrice
Marie-Thérèse d'Autriche, avec le consen-
tement des dernières chanoinesses et l'as-
sentiment de l'évêque d'Ypres, transforma
l'abbaye en un établissement d'éducation
pour les enfants des soldats de ses armées.
L' « Institution royale de Messines » s'est
maintenue jusqu'aujourd'hui sous cette for-
me. Elle est installée dans les vastes édi-
fices claustraux, tandis que l'église sert aux
offices de la paroisse.
Les annales de l'antique monastère ont
fait l'objet d'une publication importante ('),
1. Li estore des comtes de Flandre, cité par Diegerick,
p. XVI.
2. Chronique de r abbaye, citée par Diegericli.
3. Inventaire analytique et chronologique des chartes
et documents appartenant aux archi^/es de l'ancienne
abbaye de Messines.Ui\xgts, 1876, 678 pp. in-4", avec trois
planches de sceaux.
pour laquelle M. J. L. A. Diegerick, archi-
tecte et bibliothécaire de la ville d'Ypres,
réunit de nombreux documents dans la pré-
cieuse collection d'archives que possède
l'établissement. Les chroniques du monas-
tère relatent qu'au décès de chacune des
abbesses, on s'empressait de mettre sous
scellés les coffres renfermant les titres et
papiers de la communauté. C'est à cette
circonstance, sans doute, qu'est due la con-
servation du remarquable chartrier de Mes-
sines.
\J Inventaire ana/ytique de M. Diegerick,
si riche de renseignements au point de vue
historique, ne fournit toutefois que peu de
données relatives à la construction et aux
modifications successives des édifices claus-
traux, notamment de l'église. Les questions
d'art et d'architecture tenaient évidemment
moins de place dans les préoccupations des
dames chanoinesses, que les débats de pro-
priétés ou les querelles de préséance. Quant
aux documents de comptabilité, qui consti-
tuent une partie notable de l'ancien fonds
d'archives, ils n'ont pas jusqu'ici fait l'objet
d'un examen attentif, au point de vue qui
nous aurait plus particulièrement intéressé.
Glanons dans les chroniques abbatiales
de Messines quelques faits relatifs à l'an-
tique édifice.
Il est fait mention, à diverses époques,
d'incendies qui ravagèrent le monastère pri-
mitif. Outre le désastre causé par la com-
tesse Richilde, en 1071, semblables cala-
mités sont encore marquées aux années
1127 et 1195 (').
Il y avait, dès le XI I" siècle, deux églises
à Messines ; l'une, dédiée à saint Nicolas,
servait aux offices de la paroisse ; elle était
située au marché et fut démolie en 1685.
La « grande église », consacrée à Notre-
I. Diegerick, p. XV.
€glt0e de £©e00tnes.
195
Dame, appartenait au chapitre ('). Dans
cette dernière, les documents mentionnent,
à la même époque, la «chapelle des cha-
noines (') » et l'autel de Saint Benoît qui,
avant 11 64, était consacré au service cu-
rial {').
Au commencement du XII I<= siècle, l'ab-
besse Elisabeth, sœur du comte Philippe
d'Alsace, autorise le chanoine Gérard à
réédifier la chapelle Saint-Michel, à l'orner
perpiilchre satis et decenter et à y instituer
une chapellenie (*).
Par son testament, fait en 1328. l'abbesse
Aëlis d'Auchy « requiert le couvent de
vouloir payer toutes les dettes qu'elle a
contractées pour le profit et la restauration
de l'église (5)».
La guerre entre les Anglais et les Fran-
çais, dont le siège d'Ypres (1383) constitue
un des principaux épisodes dans nos provin-
ces, exposa Messines à bien des épreuves.
La ville fut mise à sac et à feu par les
Anglais, « de telle manière que des deux
mille maisons dont elle se composait, il
n'en resta qu'une ou deux » (*). L'abbesse
Marguerite d'Oultre mit le monastère en
état de défense, en l'entourant de fortes
murailles, commandées par deux grosses
tours (^).
Un siècle plus tard, durant les sanglants
débats qui suivirent la mort de Charles le
Téméraire, le feu désola encore une fois
l'abbaye et le bourg. Par lettres du 10 juil-
let 1481, l'archiduc Maximilien et Marie
de Bourgogne, son épouse, autorisèrent
l'abbesse Agnès d'Averoult à faire, dans
tous les pays de leur domination, une quête
1. Diegerick, p. 71 (Charte de 126s).
2. Ibid., p. 60 (125S).
3. Ibid., p. 72. — Ordonnances faites dès Pinstitution,
nis. cité, p. 5.
4. Ibid., p. 30.
5. Ibid., p. 104.
6. Ibid., p. XL.
7. Ibid., p. XL.
afin de subvenir à la réédification des égli-
ses, du couvent et de la ville, incendiés
par les Français ('). Peu d'années aupara-
vant (1464-1466), on avait reconstruit la
chapelle du Saint-Esprit, qui fut désormais
spécialement consacrée à Notre-Dame de
Messines (^).
Semblables calamités accablèrent, de re-
chef le monastère et la petite cité vers le
milieu du XVI^ siècle, sous l'abbatiat de
Jeanne de Ghistelles, dont la chronique
relate le zèle et l'industrieuse énergie pour
relever le clocher et enrichir la sacristie {").
« En 1541, l'abbaye fut brûlée, et onze ans
plus tard, toute la ville, avec plus de trois
cents boutiques de drap, fut détruite par un
feu de méchef (■•). »
A peine le monastère avait-il été rebâti,
que les excès des iconoclastes, en 1568, le
ruinèrent de nouveau. « Non seulement les
sectaires avaient chassé les religieuses,
saisi et confisqué leurs biens..., mais ils
avaient aussi détruit, brûlé et ruiné de fond
en comble la belle église et le cloître, de
sorte qu'il n'y restait ç\\iun jiioiit de pierres
et de cailloux » (^), selon les expressions de
la chronique abbatiale. L'abbesse Jacque-
line de Haynin obtint du roi Philippe II,
en 1587, l'autorisation de réédifier l'église
et le cloître « en son vieux et anchien
lieu ».
Les travaux de reconstruction, un mo-
ment interrompus par les dévastations cau-
sées par les « mutinés d'Ostende », en 1 596,
furent activement poursuivis sous le régime
de Jeanne de Bailliencourt (1610-161S), qui,
selon la chronique, rebâtit le chœur des
religieuses et la chapelle Saint-Benoît. Nous
1. Diegerick, pp. XLIX et 15t.
2. Ibid., pp. y.\N-X\-.V\.— Mémoire de le édification
de la nouvelle chapelle Nostre Dame, Inv. Terrier, n" 39.
3. Diegerick, p. LXI.
4. Chronique m s. de l'abbaye.
5. Diegerick, p. LXII.
REVUE DE L ART CHRETIEN.
1901. — 3""^ LIVRAISON.
196
Be\)ue De TSlrt cbrcticn.
verrons tantôt que la majeure partie du
vaisseau de l'église date de la même épo-
que.
Cette abbesse fit aussi placer sur le
maître-autel, un retable peint par « m"
Vaast Bellegambe, demeurant à Douay,
selon le patron qu'il a laissé entre les mains
de madicte dame ». Le contrât avenu à cet
effet décrit minutieusement le travail de
l'artiste, qui reçut de ce chef 600 florins (')•
Au cours du XVI I^ siècle, les réparations
ou les reconstructions dans l'église et dans
le monastère, alternent avec les désastres
amenés par les guerres continuelles entre la
France et l'Espagne. Mais hélas! les unes
autant que les autres étaient néfastes au
vieux monument, dont les curieux vestiges
disparurent, cette fois, sous la surcharge
d'ornements en plâtras selon le goût du
jour.
Bornons-nous à noter ici le nom de
l'abbesse Marie- Louise-Victoire de Créquy,
qui, « le 2 avril 1685, plaça la première
pierre des fondements des murailles de
rallongement du grand chœur de l'église,
où son nom : Créquy, est gravé au bas d'un
nom de Jésus {'') ». La charpente et la voûte
en pierres du nouveau sanctuaire furent
terminées avant la fin de cette année.
Madame « fit tailler aux pieds de ladicte
voûte des personnages en pierre blanche,
et aux coins ses armes avec celles de la
fondatrice {') ». Ces encorbellements des
bandeaux de la voûte existent encore, de
même que l'orgue, donné par Madame
de Créquy en 1686.
Parmi les travaux exécutés sous son gou-
vernement, il faut encore noter, d'après la
1. Archives de l'abbaye, Inventaire Terrier, n" 79. La
quittance, en date du 26 octobre 1617, est signée du mo-
nogramme de l'artiste (un V, un croissant et une iielU
jambe).
2. Chronique citée par Diegerick, p. LXXXl.
3. Diegerick, p. LXXXll.
chronique du monastère, qu'en 1684, on
renouvela une partie des combles et des
murs de la chapelle de la paroisse ; en
1692, on dut « lier avec des bandes de fer »
une des tourelles, où des lézardes s'étaient
produites à la suite d'un tremblement de
terre (').
L'ameublement de l'église et de la sacris-
tie furent aussi l'objet de grandes dépenses,
sous l'abbatiat de Marie-Louise de Créquy.
Mais les parties qui en subsistent sont
trop peu en harmonie avec les vestiges
anciens de l'édifice, pour que nous ayons à
nous en occuper davantage.
Après tant de vicissitudes, de ruines et
de remaniements, on se demandera peut-
être quels souvenirs archéologiques dignes
d'attention offre encore l'ancienne église
abbatiale de Messines.
Les notes qui suivent permettront de
répondre à cette question.
Dans l'ordre chronologique, les différen-
tes parties de la construction actuelle s'in-
diquent comme suit (-) :
CONSTRUCTIONS PRIMITIVES
(vers 1070).
Le transept (A-C) ;
La tour centrale (B) ;
Les deux tours latérales (D-E) ;
Nous étudierons plus loin, en détail, ces
parties principales de l'édifice.
La chapelle méridionale (F) ;
L'autel de cette chapelle est dédié actuel-
lement aux âmes du Purgatoire.
Est-ce l'ancienne chapelle Saint-Benoît,
qui servait à la paroisse, avant 1 164? L'au-
tel consacré au patriarche des moines se
trouve maintenant non loin de là, contre
1. Ibid., p. LXXXIV.
2. Les plans architectoniques, qui accompagnent cette
étude, sont dus à M. H. Geernaert, architecte k Gand,
charge de diriger les travaux de restauration. Nous lui
offrons ici l'expression de nos sincères remerciements.
eqiist De £©e00ine0.
197
la paroi méridionale du transept. Déjà en
1445, le tableau des chapellenies(') mention-
ne que celle de Saint- Benoît était fixée
à l'autel du même nom, t'ft navi ecclesiœ.
Peut être cependant faut-il reconnaître
ici la chapelle Saint-Jean, mentionnée dans
le relevé des bénéfices, en T445, comme
ayant eu sa chapellenie fondée dès 1182,
et où les religieuses venaient « recevoir le
Sacrement » avant de procéder à l'élection
d'une nouvelle abbesse (°).
La crypte, établie sous l'abside, appar-
tient probablement aussi aux constructions
primitives ; mais elle a dû être remaniée à
différentes époques et ne présente pas de
formes architectoniques bien caractérisées.
Il est d'ailleurs difficile d'en faire l'examen,
car elle sert aujourd'hui de cave aux pom-
mes de terre !
C'est là qu'on a exhumé, il y a une dizaine
d'années, les restes de la comtesse Adèle,
en même temps qu'un ais de chêne et
quelques ferrures du cercueil. Le millésime
1079 taillé sur cette planchette en chiffres
romains, ne permet guère de croire qu'elle
ait appartenu à l'enveloppe primitive du
cadavre de la princesse. Cette planche fai-
sait peut-être partie de la tombe jadis élevée
au milieu du chœur ; celle-ci, au rapport de
Corneille Gailliard, qui la vit vers 1560,
était de bois de chêne peint en bleu {^). Le
monument de la fondatrice ne fut-il pas
enlevé du sanctuaire et ses restes déposés
dans la crypte, lors de la reconstruction, en
1685?
CONSTRUCTION DU XIII*^ SIÈCLE.
Le chœur septentrional (G) ;
Il est désigné dans les anciens documents
I. Registre B de l'Inventaire Terrier.
2. Relation des funérailles de l'abbesse Agnès de Ciaon,
en 1466 ; ms. (Inventaire Teirier, n" 36.)
3. « In de middel van de choor, een tombe van eecken
houtte blau gheschildert. » {Epitapkes et monuments delà
Flandre au XVlc siècle, p. 234.)
SOUS le nom de « chœur des chanoines »
(Heeren choor). On y trouvait un autel
auquel étaient attachées trois chapellenies :
celle de Sainte- Madeleine, fondée en 1182 ;
celle dite : de Roosebeke, fondée en 1292 ;
et celle de Sainte-Catherine, fondée en
i3i2(').
A l'époque où l'abbesse de Créquy entre-
prit la reconstruction du grand chœur de
l'église, elle résolut également de transfé-
Plan terrier de l'église.
rer dans le « vieux chœur des chanoines »
les services paroissiaux dont le siège, nous
l'avons vu, se trouvait dans la chapelle
Saint-Nicolas, qui tombait en ruines. Les
chanoines se virent relégués dans la cha-
pelle Notre-Dame, dont nous parlerons
tantôt ; mais ces messieurs, plutôt que de
s'assembler dans « cette espèce de trou ou
cave », décidèrent de ne plus chanter les
heures canoniales et portèrent leurs doléan-
I. Registre van de beneficien, dressé en 1445. (Inventaire
Terrier, B.)
198
Brtuc tie l'^vt cbrétten.
ces devant le parlement de Tournai. La
sentence, qui intervint le 8 janvier i69i("),
contient d'intéressants renseignements sur
les travaux exécutés alors. On y lit notam-
ment que le sol fut abaissé de cinq pieds
dans le « chœur des chanoines », afin de
« ne plus empêcher la lumière du jour sur
le maître-autel. »
Le 9 septembre 1686, le doyen de la
chrétienté de Warneton bénit « le chœur de
la collégiale des chanoines, qui servira éga-
lement d'église paroissiale, à la plus
grande gloire de Dieu et en l'honneur de
saint Nicolas et de sainte Marie-Made-
leine {') ». Depuis lors, cette partie de l'église
porte le nom de : chapelle de la paroisse.
Au devant du chœur des chanoines se
trouvait une « petite chapelle », à l'autel de
laquelle fut fondée, en 1257, une chapel-
lenie en l'honneur de saint Jacques {').
Ce bénéfice avait reçu le surnom de
«la cuisine » (da coquina), ou de la cuiller
à soupe (pollepel), parce qu'on y joignit le
fief de la cuisine de l'abbaye et que le titu-
laire était tenu de faire célébrer une messe,
tous les dimanches et jours de fête, pour le
cuisinier et les domestiques du monastère.
Le nom de « chapelle du Poeleple » semble
même avoir été donné au chœur des cha-
noines (■•), qui se trouvait adjoint à cet autel.
CONSTRUCTION DE 1464.
La chapelle Notre-Dame (M);
Située au midi du grand chœur, cette
absidiole sert aujourd'hui de sacristie. Un
petit manuscrit intitulé : Mémoire de le
édification de la nouvelle chapelle Nostre
Dame et de la translation de lyma^e Nostre
1. Inventaire Terrier, iV 143.
2. Ibid, n" 135.
3. <{Ten outareint cappelleken voorden iieeren clioor. »
(Registre van de bene/icieti, de 1443.)
4. Mémoire de le édification de la nouvelle chapelle,...
p. 6.
Dame en ycelle chapelle ('), nous apprend
que « la dessusdicte nouvelle chapelle de
Nostre Dame a été faicte et édifyé en la
plache de la chapelle de St Esprit, come
on le peult voir a lœl, audict an LXIIII »
(1464).
Lors de la nouvelle bâtisse du chœur,
l'abbesse Marie-Louise de Créquy sollicita
du vicariat d'Ypres, en même temps que la
bénédiction du nouveau maître-autel, celle
de « l'hostel de certaine chapelle joignant
de midi audit cœur, lequel elle at aussy fait
restablir après avoir fait démolir le vieu
hostel et relevé cielle chapelle par une
voûte ou cave à proportion dudit cœur »
Nous avons dit que les chanoines refusèrent,
en 1685, d'accepter cette chapelle pour y
chanter leurs heures.
CONSTRUCTION DE 16I2-16I4.
La nef (I) ;
Après les ravages qui marquèrent la
seconde moitié du XV'l" siècle, l'abbesse
Jeanne de Bailliencourt entreprit la res-
tauration du transept et la reconstruction du
vaisseau.
Celui-ci forme une nef unique, couverte
intérieurement, par une voûte fort élevée.
Trois fenêtres ogivales l'éclairent, sur le
côté ; une grande baie occupe le centre de
la façade, au-dessus de la porte d'entrée.
Toutes ces constructions sont en briques
et d'un style fort simple. On a toutefois
pris soin de leur donner un certain décor,
grâce à la polychromie naturelle des maté-
riaux. Les plats des murs,en briques rouges,
s'amortissent aux angles par des chaînages
en briques blanches ; les encadrements des
fenêtres offrent une alternance des deux
teintes ; les meneaux sont entièrement en
briques blanches. Sur la façade se des-
I. Iinentairo Terrier, n" 3g.
€gli0e De Hgesstnes.
199
sinent en grande dimension, à l'aide de
briques blanches, les initiales I. B. et la
date 1614.
Antérieurement aux dévastations des
iconoclastes, l'église abbatiale avait des pro-
portions beaucoup plus vastes. La partie an-
térieure du vaisseau comprenait trois nefs,
dont la hauteur sous clef devait être consi-
dérable, et elle s'étendait vers l'Ouest beau-
coup au delà du pignon actuel. Il est facile
de s'en assurer, puisque deux anciennes
arcades des travées sont demeurées debout,
encastrées aujourd'hui dans le mur qui
Vue de l'église (côté nord).
longe le parvis devant l'entrée de l'église.
Ces arcs doubleaux sont tracés en tiers-
point et construits en pierre blanche appar-
reillée, de même que les colonnes sur les-
quelles ils reposent. Ilsdatent certainement
de l'époque où l'abbesse Marguerite d'Ave-
roult réédifia son église, car les multiples
moulures des bases et les formes déprimées
des corbeilles des chapiteaux, accusent la
dernière période ogivale. Le type de ces
chapiteaux est cependant intéressant, en ce
qu'il dénote la recherche d'une transition
rationnelle du plan circulaire, qui est celui
du fût, au plan octogonal que comporte la
combinaison des méplats avec les angles
chanfreinés des arcs doubleaux.
Actuellement la porte (J) donne accès du
cloître de l'abbaye dans un vestibule d'où
une série d'escaliers mène à la nef de
l'église.
Une sacristie sépare ce vestibule de la
chapelle intérieure du monastère (K), qui
sert aujourd'hui d'oratoire pour les élèves
de l'Institution royale.
Chapiteau de l'ancienne nef (vu du parvis).
CONSTRUCTION DE 1685.
L'œuvre de madame Marie- Louise de
Créquy, dont nous avons précédemment
parlé, comprend le chœur (L) avec les stal-
les, et le sanctuaire (M), au fond duquel
s'élève le maître-autel.
La disposition actuelle ne correspond
pas à celle qui existait jadis, car l'abbesse
constate dans une requête au vicariat
d'Ypres, qu' « elle a fait abbattre l'hostel
et en partie le grand cœur de son église et
ensuitte l'a fait ralonger et rediffier en place
convenable l'hostel dudit cœur. ^> On voit.
200
2Rebue De T^rt chrétien.
au surplus, dans le registre des chapellenies,
qu'il existait, en 1445, un autel nommé : de
Salve, derrière le maître-autel {').
Notons ici que le même document ren-
seigne encore deux autels dont l'empla-
cement exact n'est plus connu : l'autel de
la Sainte-Croix (dans la nef gauche), dont la
fondation remonte à 1212 ; et l'autel Saint-
Barthélémy, contre un pilier à gauche (^).
Vue ÏDtérteure du chœur.
Parmi tant de constructions diverses,
celles qui remontent au XI'= et au XI 11^
siècle, doivent seules retenir l'attention de
l'archéologue. Nous limiterons donc notre
étude au transept, au chœur des chanoines
et au campanile de l'église de Messines.
I. — TRANSEPT.
DE la primitive basilique abbatiale, il ne
reste debout que la croisée du vais-
seau. C'est peut-être la plus ancienne et
assurément une des plus remarquables
constructions que possède laWest-Flandre.
Ses proportions considérables, sa maçon-
1. < De cap"'' van Sal-ue, ten outaer van .S'rt/7/i', b.ichten
den hoghen outare. >
2. K De cap"'= van den Heleghen Cruce, ten outaere in
navi eccUsiœ sinistrorsum onder 't Crucifix. »
< Ten outare van Ste Il'telmeus in navi ecclcsiœ an
eenen pilaer sinistrorsum. >
nerie aux lourdes assises, les dimensions
colossales du campanile central et des tours
adjacentes, ont défié les ravages du temps,
des incendies et des guerres. 11 semble que
le roi de France et les princes de Flandre
qui présidèrent à la fondation de l'église et
du monastère, y aient imprimé la marque
de leur puissance et le cachet de leur géné-
rosité.
Le transept mesure (compté extérieure-
ment) 34 mètres de long sur 9'"5ode large.
La hauteur sous clef est de 17 mètres. Les
murs, construits en grès ferrugineux de la
contrée, ont prèsde deux mètres d'épaisseur.
Le centre de la croisée, établi sur plan
Coupe d'un pilier à rentrée du chœur.
carré, est déterminé par quatre arches-
maîtresses. Celles-ci sont portées sur des
faisceaux de colonnettes engagées, réunies
par groupe de trois et juxtaposées de
manière à ce que le dé de chacun des pieds-
droits de la tour s'accuse dans la masse
constructive par des angles à vive arête.
Lesvingt-quatre colonnettes de la croisée
offrent uniformément le type du chapiteau
cubique rhénan. L'astragale se compose
d'un simple tore ; le tailloir, très saillant,
s'évase en doucine pour se terminer par un
méplat. Les bases, à double tore, reposent
sur un dé étage en deux assises carrées que
marque un chanfrein.
La corbeille des chapiteaux ne porte
aucune ornementation taillée. On a cepen-
dant retrouvé au-dessous du badigeon, sur
€gli0e De S^tQQints.
20 1
la colonne médiane à l'entrée du chœur,
côté du Midi, un décor tracé au cinabre ; il
représente une palmette renversée aux
volutes capricieusement contournées ('). Ce
curieux vestige, dont nous pouvons donner
ici l'esquisse, d'après un calque pris par M.
l'inspecteur provincial Naert, est, d'ailleurs.
le seul élément décoratif que l'on ait relevé
lors des travaux récents de restauration.
Constitue-t-il une ébauche d'ornementation
picturale ou une indication pour la sculp-
ture des chapiteaux ? Nous n'oserions nous
prononcer à cet égard.
Les archivoltes des quatre arches de la
vers le chœur.
Coupe sur
B
le transept
vers la nef.
croisée comportent un triple rouleau de
claveaux concentriques. Les voussures sont
à vive arête, mais leur saillie diminue très
sensiblement, en raison inverse du dévelop-
pement de leur rayon.
La voûte croisée, qui couvre le milieu du
transept, est de construction récente. Elle
a été érigée par l'abbesse de Créquy, en
1685 e).
De chaque côté de ce croisillon s'étend
1. Le dessinateur a omis une série d'oves esquissées à la
partie inférieure de la corbeille. Des traces confuses d'un
décor similaire apparaissent encore sur les chapiteaux
voisins.
2. Diegerick, p. LXXXI.
une travée barlongue, mesurant (à l'inté-
rieur) 9'", 60x6, 30. Le mur terminal ne
comporte d'autre décor qu'une fenêtre
ogivée, de date assez récente, dont nous
parlerons en décrivant le pignon exté-
rieur.
Dans chacun des bras du transept, la
paroi orientale offre, adjacente au retour
d'angle du terminal, une large arcature
cintrée, soutenue latéralement par une co-
lonnette engagée, dont le type est identique
à celui de la croisée, bien que d'un quart
moins élevée. Ici aussi, l'archivolte à triple
rouleau est construite, comme les maî-
tresses-arches, à arêtes vives.
202
BRcbue De l'^rt cfjrttien.
Dans la travée méridionale, cette arca-
ture correspond à une absidiole de forme
barlongue, au fond de laquelle l'autel occupe
un évidement ménagé dans l'épaisseur du
mur. Cette chapelle, couverte d'une voûte
romane, ne reçoit d'autre lumière que par
le transept. L'autel est, comme nous l'avons
dit plus haut, consacré actuellement aux
âmes du purgatoire.
L'arcature qui fait vis-à-vis, dans le bras
septentrional, menait peut-être primitive-
ment à une absidiole semblable ; dès le
XII I^ siècle, elle servit à mettre l'église ab-
batiale en communication avec la vaste cha-
pelle où se trouvait le chœur des chanoines.
L'espace existant entre les chapelles la-
térales et le grand chœur de l'église est
occupé, de chaque côté, par un énorme dé
de maçonnerie ; ceux-ci servent de base
aux deux tours latérales. Au centre de cha-
que massif, un escalier en pierre, à moyeu
central, donne accès au campanile principal
et aux combles de l'édifice. Dans la tou-
relle méridionale cet escalier a été enlevé
pour donner entrée à la chapelle Notre-
Dame, aujourd'hui transformée en sacristie.
Vis-à-vis des tours latérales, on remarque
dans les parois occidentales du transept,
Chapiteaux à l'entrée du chœur.
deux arcatures actuellement murées mais
qui devaient former l'extrémité des bas-
côtés de l'édifice primitif
Ces arcatures, dont la hauteur et la lar-
geur sont considérablement moindres que
les baies donnant accès aux absidioles, en
diffèrent aussi notablement par l'aspect
architectural. On y retrouve la triple archi-
volte bandée et les mêmes formes pour les
chapiteaux et les bases des colonnes de
support ; mais celles-ci sont de dimensions
beaucoup plus trapues et elles sont grou-
pées par faisceaux de trois, offrant ainsi la
même disposition que les maîtresses-arches
dont elles sont voisines.
Les dimensions restreintes des arcs d'en-
trée vers les bas côtés semblent indiquer
le peu d'importance des collatéraux de la
nef primitive. Ceux-ci ont disparu en même
temps que le vaisseau et n'ont pas été,
comme lui, réédifiés au commencement
du XV Ile siècle, n f-jm croire que c'est
particulièrement en parlant de la partie
antérieure de l'église, que la chronique ab-
batiale mentionne qu' « il n'y restait qu'un
mont de pierre et de cailloux » après le sac
de 1568.
Des deux pignons terminaux du tran-
sept, celui vers le Midi est adjacent aux
bâtiments de l'ancienne abbaye. Son archi-
Cgltse tie Sl^tssintô.
203
lecture est semblable à celui vers le Nord,
dont nous joignons ici l'élévation exté-
rieure.
On remarquera, tout d'abord, la noblesse
des lignes et l'élancement de cette construc-
tion. Cependant les remaniements qu'elle a
subis, notamment dans le profil des gables,
lorsque les voûtes et les toitures furent re-
nouvelées après la tourmente des icono-
clastes, lui ont fait perdre quelque peu de
sa hauteur. On retrouve, en effet, sur la
paroi de la tour, les traces des anciens
solins, qui accusent une hauteur d'un
mètre environ au-dessus de la faîtière
actuelle.
Pour étançonner ce haut pignon, on a
établi à chaque extrémité, un massif contre-
fort posé en retour d'angle. L'heureuse
disposition des lignes donne à ces pieds-
droits un aspect svelte et harmonieux.
Tandis que l'étage inférieur monte à plus
de six mètres, les deux suivants n'en comp-
tent guère qu'un, et le plus élevé trois envi-
ron. Ces étages sont marqués par des lar-
miers moulurés, couverts par un glacis. Les
pleins de maçonnerie sont bâtis en retraite
pour chaque gradin ; ainsi l'ensemble du
contrefort offre le type d'une pyramide
solidement assise, qui rompt l'aspect mo-
notone du profil perpendiculaire.
Une porte donnait jadis accès dans le
transept ; la silhouette en est encore fort
apparente et les détails architecturaux en
sont nettement conservés. Les jambages
ménagés dans la maçonnerie du mur, n'ac-
cusent aucune ligne moulurée ; le linteau
plat, en pierre non chanfreinée, s'avance,
de part et d'autre, assez loin dans le plein
du mur. Le tympan est marqué par un
cintre dont le diamètre dépasse la perpen-
diculaire des pieds-droits de la porte ; il
semble qu'il n'ait reçu aucune ornementa-
tion spéciale. L'arcature en est accusée par
I I I
Élévation du transept nord.
REVUE DE l'art CHRÉTIEN
igOI. — 3'"^^ I-IVKAISON.
204
Bebue De V^xt ti)xttm\.
un double rang de claveaux, entre lequel
on a ménagé un larmier sculpté, dont la
gorge moulurée est parsemée de blochets
posés en chevrons.
Cette porte a été établie, non au milieu
de la paroi du terminal, mais à côté du con-
trefort occidental. Faut-il voir dans ce
détail une précaution de l'architecte, qui
songeait à ne pas affaiblir l'aplomb du mur
formant pignon .'' Le maître de l'œuvre a-t-il
obéi plutôt à la convenance de causer moins
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Détail de la porte.
de trouble aux fidèles réunis dans cette
partie de l'édifice, par l'arrivée des derniers
venus ? Il serait téméraire d'en juger; mais
il est permis de constater, une fois de plus,
le peu de contrainte qu'inspirait le souci de
la symétrie, lorsqu'il existait quelque motif
d'y déroger.
On rencontre dans toute la maçonnerie
primitive, mais plus spécialement dans les
assises inférieures du terminal nord, des
briques et des tuiles mélangées au blocage
en gris brun. A en juger par le grain et la
forme de ces briques, elles remonteraient
à une époque fort ancienne, peut-être bien
à la période romaine. Il s'en trouve qui
mesurent o'",36 de long. o'",32 de large et
seulement o"\052 d'épaisseur.
La partie médiane du pignon a été pro-
fondément modifiée par l'insertion d'une
grande et svelte fenêtre, couronnée en
osfive. Cet ouvrasse a été exécuté vers l'an
i6i2, ainsi que l'indiquent les meneaux en
briques moulurées, dont le tracé gracieux et
la bonne construction méritent, d'ailleurs,
d'être signalés.
Primitivement il existait probablement
là une fenêtre cintrée, de proportions beau-
coup moindres, fianquée de deux arcatures
semblables, dont le tracé est encore facile à
reconnaître dans chacun des murs termi-
naux. Ces trois baies occupaient la partie
centrale du panneau; la base de celui-ci est
marquée par un talus qui accuse une retraite
de la partie supérieure de la muraille, et
le haut est séparé du sommet du pignon
par un larmier horizontal. Le triangle supé-
rieur porte un grand oai/us, simplement
accusé dans la maçonnerie.
II. — ANCIEN CHŒUR DES CHANOINES.
A COTÉ des massives et grandioses con-
structions du vaisseau primitif, s'élève
dans l'angle formé par le chœur et le tran-
sept nord, une vaste chapelle, dont l'archi-
tecture simple et gracieuse reflète les meil-
leures inspirations du style ogival primaire.
Il serait difficile, nous n'hésitons pas à
le dire, de trouver quelque chose de mieux
proportionné, de plus noble et de moins
banal que cet ancien sanctuaire. Réduit
aujourd'hui à 1 état de ruine, il n'en de-
meure pas moins un type particulièrement
digne de servir de modèle à nos archi-
tectes contemporains, car il réunit le mérite
d'une construction parfaitement comprise,
à celui d'une dépense restreinte au strict
minimum.
.Ainsi que l'indique le plan, cette chapelle
liruur ùr l'Hrl- ilirrricu
1^1. H
(^aM.se 'île Clicssinc^.
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€QiiQt ht £©es0mes.
205
forme une seule travée, mesurant intérieu-
rement 28 mètres de long sur 8 mètres de
large.
La construction est tout entière en pierre
de Tournai, d'appareil moyen assez ré-
gulier.
Le seul décor qu'accuse l'architecture,
consiste dans le tracé des fenêtres. Sur
chacun des longs côtés, deux groupes de
lancettes géminées, que séparent de larges
trumeaux; derrière l'abside, un triplet dont
la lancette médiane est surélevée.
Les pieds droits, qui forment l'accotement
chanfreiné de chaque lumière, sont ornés,
Elévation extérieure de l'ancien chœur des chanoines.
vers l'intérieur, d'élégantes colonnettes
annelées, dont la base pose sur un dé carré
et dont le chapiteau est garni de volutes
végétales. Sur le tailloir vient s'amortir la
voussure toreutique qui encadre l'arc en
tiers point du tympan. Le seuil des fenêtres
se profile en une moulure, prolongée sur
le plat du mur en forme de cordon.
Extérieurement les lancettes géminées
n'offrent d'autre ornementation que leur
rebord biseauté. Un cordon mouluré se des-
sine également à la hauteur des seuils et se
poursuit sur les trumeaux et les contre-forts.
Une seconde bande horizontale semblable
est établie à la hauteur des arcs d'ogrive
et contourne leurs sommets en guise de
larmier.
Des contre-forts, de types divers, butent
extérieurement la paroi septentrionale. Le
premier, vers l'ouest, est plus épais et d'une
seule venue ; il appartient, semble-t-il, à
une construction plus ancienne, ainsi que
la porte cintrée voisine. Le second contre-
fort, bâti sur plan triangulaire, s'étage en
deux ressauts et s'amortit en pyramide; le
dernier, formant croix avec l'anorle du mur,
correspond, pour la disposition des lignes,
au précédent.
On remarque, notamment au mur du che-
vet, que la construction originale de cette
chapelle devait comporter quelques assises
Coupe longitudinale de l'ancien chœur des chanoines.
de plus; elle se terminait probablement par
une corniche moulurée. La toiture actuelle,
fort ravalée, dénote un remaniement qui
doit être contemporain des bouleverse-
ments opérés par l'abbesse Marie- Louise
de Créquy ('). Du même temps date la
voûte en bardeaux, dont le profil accuse
le souci d'une stricte économie plus que
celui de l'élégance des lignes.
A quelle époque remonte la construction
de cette élégante chapelle .''
I. < Le 7 de 7bre 1686 fut tout achevé le chœur des
chanoisne, que Madame at faict rebatire, lequel ser des-
glise paroissiale, elle i fit mettre la vielle table dhostel du
grand hostel et lacomodit d'hornement sans i estre obligé.
Lon i transportât la cloche de la paroisse et Ion la mit au
cloché dudit chœur que M""^ i fit fair par bonne volonté.»
Journal autographe de Pabbesse Marie-Louise de Créquy.
n° 140 de l'Inventaire Terrier. )
206
Bebuc ÎJC r^rt cbrcticn.
La réponse serait aisée si l'on pouvait
identifier l'ancien « chœur des chanoines »
avec la chapelle Saint-Michel, que le cha-
noine Gérard reconstruisit et décora per-
pulchre satis ac decenter (') sous l'abbatiat
d'Elisabeth de Flandre, entre 1 187 et i 224.
Cette opinion ne paraît pas improbable, bien
qu'aucun document n'autorise à l'affirmer.
D'après cette indication, la chapelle date-
rait donc du premier quart du XII I"^ siècle.
Coupe transversale.
A ceux qui s'étonneraient de voir, dès
cette date, s'élever dans nos provinces une
construction où s'accentuent déjà si com-
plètement les formes de l'ogival primaire,
on peut répondre que ce style était déjà en
pleine efflorescence dans l'Ile-de-France.
Les influences françaises, à cette époque,
étaient prépondérantes parmi les dames de
Messines, qui avaient, pendant de longues
années, été régies par des princesses du sang
royal. La signature de l'ex-abbesse Agnès,
I. Diegerick, Carlulaire, p. 30.
qui appartenait à la dynastie régnante,
figure au bas de la charte citée; n'est-elle
pas un indice que l'œuvre du chanoine
Gérard se fit sous les auspices de cette
pieuse « fille de France », peut-être avec
le concours d'artistes qu'elle avait fait venir
pour embellir son monastère ?
III.
TOUR.
A PLUSIEURS kilomètres de distance,
on voit se profiler, au-dessus du
bourg de Messines, la masse imposante
de l'antique tour abbatiale. Assise sur un
tertre dont l'altitude est de 65 mètres en-
\ m\. /
Détail de la corniche de la tour.
viron, elle s'élève à 45 mètres de hauteur,
dominant ainsi les verdoyants pâturages
de la Haute-Lys et la région boisée du
« paysd'Ypres ».
La tour de Messines forme un bloc
carré, dont la construction cyclopéenne
défie depuis huit siècles la violence des
ouragans et la lime du leiiipus edax rerutii.
Elle est tout entière construite en gros
blocs du grès de la région, fort dur et de
couleur brune. 11 en est de même des deux
tourelles moindres qui la cantonnent dans
les angles vers l'Est. Les trois clochers
datent donc de la même époque que les
parties primitives de l'église et il n'est pas
improbable que nous devions le maintien
Cglise ht ^e00ines.
207
de celles-ci au désir de conserver le cam-
panile auquel elles servent de base.
Rien n'a été sacrifié à la décoration
dans l'architecture de cette massive et rude
bâtisse. A peine a-t-on ménagé sur chacun
des pans de la grande tour deux panneaux
adjacents, dont le couronnement est tracé
en ogive. La forme en tiers-point de ces
arcatures est assurément digne d'être notée,
vu l'époque où elles furent construites. On
remarquera que les seuils de ces panneaux
sont de hauteur inégale.
Sur les faces latérales, on trouve, à la
partie inférieure des panneaux, des fenes-
irelles de style roman, toutes simples, d'ail-
leurs, dans leur construction.
La corniche affecte la forme très primi-
tive d'un bandeau soutenu par un congé;
elle repose sur des corbeaux taillés en
quart de rond. Seuls les deux modillons
situés à l'angle sud-est offrent des masques
humains grossièrement sculptés.
La toiture en ardoises, dont le rebord
recouvre la corniche, a certainement été
refaite. L'œuvre actuelle paraît dater du
XVI I^ siècle ; mais — fait très remarquable
et sur lequel nous reviendrons tantôt — elle
doit rappeler néanmoins la silhouette de la
couverture primitive.
Cette toiture, carrée à la base, s'élève à
l'octogone par l'insertion de pans triangu-
laires, à la pointe inférieure desquels sont
établies quatre petites pyramides ardoisées.
Celles-ci constituent certainement un sou-
venir d'anciennes tourelles d'angle. La
partie octogonale se couronne par un étage
ajouré, composé de montants en bois, entre
lesquels s'agencent les sautoirs d'une balus-
trade. Au-dessus de cette lanterne s'élève
une coupole sphéroïdale, à la naissance de
laquelle règne une seconde galerie en bois.
La croix terminale porte le millésime :
1604.
Les deux tours adjacentes au campanile
ne comportent guère de description, car
leur bâtisse est des plus simples. Sur chaque
face, un panneau rectangulaire est ménagé
dans la maçonnerie. La couverture consiste
en une simple pyramide ardoisée. Dans
chacune de ces tours était établi un esca-
lier donnant accès au donjon central.
Tour (vue de l'Ouest).
Il semblerait, à première vue, que le plan
primitif de l'église comportât la construc-
tion de deux autres tours secondaires, à
l'Ouest du transept. L'église de Messines
eût ainsi présenté un aspect analogue aux
fameux « choncq clotiers » de Tournai.
Toutefois la position des arcatures qui
donnaient jadis accès du transept dans les
bas-côtés de la nef, ne permet guère d'ad-
mettre cette hypothèse, et l'on est amené à
208
3Re\)ue lit V^xt cl)vctten.
croire que le grand clocher de Messines
avec ses deux acolytes, se présente à nos
yeux tel que l'a projeté le primitif maitre
de l'œuvre.
Nous avons écrit tantôt que la couverture
de la tour, bien que de date assez récente,
rappelait le galbe de la toiture qui l'avait
précédée. Nous possédons à cet égard des
indications assurément curieuses et sur
lesquelles il nous faut revenir en terminant
cette notice.
Ceux qui liront ces lignes verront que
les petits monuments de la sphragistique
peuvent apporter parfois un utile concours
à la solution des problèmes archéologiques.
Grâce à la parfaite obligeance de M. Ter-
rier, secrétaire-trésorier de l'Institution
Royale, nous pouvons donner ici la repro.
Sceau des échevins de Messines. 1256
duction de trois anciens scels de Xi'cltevinage
de Messines (').
Le premier appartient évidemment au
XI 11^ siècle ; on le trouve appendu à une
charte datée de novembre 1256. Il est
orbiculaire et mesure o'",o65 de diamètre.
La matrice en cuivre est conservée aux
I. Le sceau de l'abliaye représentait la \'ierge debout
dans le champ, tenant de la main droite un rameau, de
la gauclie un livre fermé. Légende : ►J^ .KiltUIiiIi'V"
H. ffiHHXe JBeciDeDJSiB eccxie. 11 date du
XII' siècle (1164) et a été reproduit dans Diegerick,
p. CCIX.
archives de l'établissement, mais la gra-
vure a perdu de sa finesse.
Sur ce sceau, la partie gauche du champ
est occupée par une figure féminine, assise
sur un trône que supporte un large escabeau.
Vêtue d'une robe échancrée au cou et d'un
simple manteau, la dame porte sur la tête
une de ces coiffures basses en forme de mor-
tier, que Ouicherat (') désigne sous le nom
de « chapel de soie )) ; au-dessous paraît un
voile tombant sur les épaules. Le bras
I . Histoire du costume en France, p. 1 88.
Cgltse De S^es^stnes.
209
droit est levé dans le geste de la bénédic- '
tion ; la main gauche tient une cassette (ou
un livre fermé) et un rouleau. Le trône a
l'aspect d'un fauteuil, dont le dossier est
formé par une série de balustres simulant
des arcatures cintrées et dont les montants
se terminent par des pommeaux coniques.
Cette image représente-t-elle la Sainte
Vierge Marie, patronne de l'abbaye, ou bien
la princesse Adèle, fondatrice du monastère?
Il serait difficile d'en décider. Observons,
en effet, que la tète n'est pas auréolée du
nimbe et que la coiffure, de même que les
objets tenus dans la main gauche, donnent
quelque vraisemblance à la seconde hypo-
thèse.
Devant cette dame est placée l'image
d'un édifice, qui occupe tout le côté droit du
champ. Ce bâtiment rappelle assez bien,
dans ses lignes idéalisées, la porte symbo-
lique de la cité telle qu'on la voit, au XI 1 1^
siècle, sur les sceaux des villes, notamment
dans les domaines impériaux d'Allemagne.
Ici l'édifice est représenté par une arcade
trilobée, dont les pieds droits supportent
une toiture en pente; au-dessus de celle-ci,
on distingue une haute galerie, composée
d'une série d'arcatures cintrées et couverte
d'un toit en dôme, dont les segments sont
disposés en côtes de melon. Une grande
boule couronne l'édifice.
Le champ du sceau est parsemé de gros
pois. La légende, inscrite entre un double
cercle perlé, porte :
►î^ S : SCABINORVM : DG MecINeS : IN FLANDRIA.
Le contre-sceau montre une fleur de
lys, avec la légende :
►î- CVSTOS SIGILLI.
Le type de cette « clef du scel » s'est
maintenu jusqu'au XVI Ile siècle, et actuel-
lement encore la commune de Messines
porte pour armes : d'azur à la fleur de lys
d'or.
Le second sceau — ou plutôt le signet —
que nous avons à décrire, offre encore
une fois le type de la galerie à arcatures,
surmontée d'une coupole ; les segments de
celle-ci ne sont guère apparents, mais elle
se termine par une longue croix, dont le som-
met porte un coq en guise de girouette. La
toiture, qui sert de base à la galerie, est ici
mieux proportionnée; les pans en sont net-
tement dessinés et couverts d'un chevronné,
qui, sans doute, figure les lignes d'ardoises.
A la naissance de cette toiture on voit, de
part et d'autre, le comble des tourelles, de
forme conique et surmonté d'une croisette.
Cette fois, l'image de la partie supérieure
du campanile figure seule dans le champ
du scel échevinal. La légende, dont le com-
mencement est marqué par le coq de la
girouette, porte :
SLe STeDe van œiesiNH
Segheh ( der) siede ran Miesine. — Sceau (de la) i<ille
de Messines.
Ce signet se trouve appendu notamment
à un acte de cession de rente, « fait l'an de
grâce mil CCC trente et siis, le nuit saint
Pierre en février » ('). Il est imprimé en cire
brune,deforme orbiculaire et mesure o'",027
de diamètre.
Le type du troisième scel scabinal ne dif-
fère du précédent que par quelques détails.
C'est encore le dôme de l'église qu'on voit
représenté dans le champ ; mais ici la galerie
ajourée est réduite dans sa hauteur, tandis
que la toiture inférieure, de même que
la coupole, affectent des proportions plus
grandes. D'autre part, le couronnement des
tours latérales est figuré par des flèches
élancées et terminées, semble-t-il, par une
I. Repris à X Inventaire de M.Diegeiick, sous le n° 205.
2IO
3ae\)ur lie V^xt tbxitkn.
étoile. Il ne reste de la légende que les mots
tulle mcfinenf
On trouve ce scel appendu à une charte
datée de 1566, qui porte le n" 53 dans 1'/;^-
zr«/tj/';'^ complémentaire, dressé récemment
par M. Terrier, pour les pièces non encore
cataloguées. L'exemplaire du sceau est mal-
heureusement assez usé et en partie brisé ;
son diamètre devait être d'environo™,035(').
Si nous nous sommes assez longuement
arrêtés à la description de ces petits mo-
numents sphragistiques, c'est parce qu'ils
fournissent, pensons-nous, des renseigne-
ments curieux et pertinents sur la forme
qu'affectait primitivement la tour de Mes-
sines.
En effet, l'analogie constante du type
dans les trois sceaux officiels dont les éche-
vins de Messines firent successivement
usage, au XI I le, au XI Ve et au XVIe siècle,
mène à cette conclusion qu'on y doit recon-
naître la reproduction du campanile qui
B A
A/ Sceau des échevins de Messines en 1336. — B/ Idem en 1566.
dominait la petite cité. C'était bien /£•«;- tour
et non une tour quelconque, prise comme
symbole du pouvoir municipal, que ces ma-
gistrats avaient voulu voir figurer sur les
documents émanés de leur juridiction.
Les échevins de Madame l'abbesse n'é-
taient pas seuls, d'ailleurs, à ressentir
pour leur grandiose campanile un véritable
I. Nous devons la reproduction photographique de ces
sceaux à l'obligeance de notre ami, M. Ernest Fraeys,
conseiller provincial et échevin de la ville d'Ypres. Les
pi. II, IV, XVIII ont été gracieusement mises à notre
disposition par M. Terrier, secrétaire de l'Institution
Royale.
«amour de clocher». Les chanoinesses vou-
lurent, de leur côté, traduire ce sentiment,
en faisant confectionner un précieux reli-
quaire, qui reproduisait la silhouette du mo-
nument. Nous avons trouvé, à ce sujet, dans
le manuscrit intitulé : JMévioire de le édifica-
tion de la nouvelle chapelle Nosire Dame ('),
la curieuse annotation que voici :
« Item en lan LXIX (^) la dessusdicte
demoiselle Margrete de Noyelle, Treso-
riere, fist faire une belle grande nouvelle
1. Inventaire Terrier, n° 39.
2. En l'année 1469.
Cglise îic S0tssims,
21 I
relique d'argent quy est plaine de reliques,
aiant ladicte relique la manière des tours de
leglise de Messines et le conte Bauduin et
la contesse Adèle quy firent faire et fonder
ladicte Eglisede Messines. Laquelle relique
peise XXXVI II onches XII estail dargent
quy vallent au pris de XLII sols lonche,
LXXIX livres parisis monnoye de Flandre.
Et la fasson cousta LXXII livres parisis
monnoye dicte, font ensamble CLVI livres
dicte monnoye quy valent XIII livres de
gros. »
D'autre part, il résulte de la similitude
du type figuré sur ces trois scels, que, dès
le XI Ile siècle, ig couronnement de la puis-
sante tour du monastère de Messines, con-
sistait en une coupole sphérique, portée sur
une sorte de lanterne ou de oaJerie en bel-
védère. La flèche actuelle n'est donc pas,
comme on le pourrait supposer, une forme
imao-inée au XVI I^ siècle, mais la reconsti-
tution, plus ou moins fidèle, de celle que
l'architecte primitif avait conçue.
Assurément cette galerie ouverte et cette
coupole sphérique constituent un t)pe ex-
ceptionnel dans l'architecture flamande. Il
semble qu'on y doive chercher quelque ré-
miniscence des traditions monumentales
importées de Byzance ou des contrées mé-
ridionales de l'Europe. Cependant on ne
retrouve dans les annales de Messines
aucun fait indiquant que des relations fré-
quentes aient mis ce monastère en rapport
avec les hommes de l'Orient ou les idées
rapportées en suite des croisades ('). Bien
qu'aucune raison spéciale n'apparaisse pour
justifier la construction de pareil campanile,
dont les formes étranges sont cependant
clairement accentuées sur les anciens scels
que nous venons de décrire, il n'en est pas
moins établi ainsi par des documents gra-
phiques incontestables que, dès le XI 11^
siècle, le type de couverture à coupole,
fréquent dans d'autres régions, se retrou-
vait aussi en Flandre.
Ce sont là pour l'archéologue de pré-
cieuses indications, car elles dépassent les
termes d'une simple monographie locale et
pourraient trouver leur application ailleurs
encore que dans l'humble bourg auquel
nous avons consacre ces lignes.
gon Bethune.
I. On sait que la chapelle du Saint- Sang ainsi que
l'église de Jérusalem à Bruges possèdent des campaniles
avec galerie ouverte et surmontée d'une coupole. Mais,
pour ces deux édifices, il est aisé de rendre compte des
motifs qui ont fait adopter les traditions d'un style rap-
pelant au peuple les souvenirs de l'Orient.
Vue générale de l'abbaye (prise du Midi).
BEVUE UE l'aKT CHRÉTIEN.
1901 — 3'"- LIVRAISON.
W A^* A^A A^A A^ * A^* A^U A^* *^VU A^?I^ xg^* *^»Ia A^* A^^ A^^ \^U ^
M Gôsat sur la tJéccration arcbitcctonique
** H —
I I I 1 1 I ifTTTTTlITTimirrTTTTTlllEIIXHII^CTIXXXtimmUXIlIJ
Chapitre IL — lia flore.
(Suite des Sources de décor.)
g I. — STYLISATION DE LA FLORE.
LES types hiératiqites. — D'après cer-
tains auteurs, notamment selon M.
Goodyave, le lotus (fig. loç et iio) aurait
eno-endré les principaux types des premiers
décors humains, dont la tradition s'est per-
pétuée jusqu'à nos jours.
Fig. 109. — Lotus
au naturel.
Fig. 110. — Lotus
stylisé.
Le lotus vu de dessus présente un dis-
que, et ses pétales se groupent autour du
noyau de la fleur comme les rais d'une
étoile autour de son centre. Voici (fig. 1 1 1)
une amulette en forme d'étoile ou à'aster,
qui date de plus de 3000 ans av. J.-C, et
qui figure la fleur du lotus vue de dessus.
Fig. III. Fig. 112.
Amulettes égytiennes.
Vus de côté, les pétales s'ouvrent en
éventail, tandis que les sépales du calice
se recourbent et s'enroulent en volutes.
Ainsi s'engendre le type ionique du lotus
I. Voyez la 1"= partie, p. 481, 1900, et la. 2"" partie,
p. 25, îgoT.
dans sa forme si caractéristique de l'antéfixe
grec, mais qui existait en Egypte dès la
I 2' dynastie, témoin l'exemple que repro-
duit la fig. 112. Ici apparaissent à la fois
la palme t te (fig. iij) et la volute (fig. 126 et
I2J plus loin); celle-ci engendre la spirale.
Fig. 113. — Palmette grecque.
D'un autre côté le bouton du lotus parait
avoir engendré Xove ionique ('). Cela sem-
ble peu admissible « /^r?'or/,- cependant le
Fig. 114. — Bouquet de lotus égyptien.
bouton du lotus (fig. 114) jouait un rôle
important dans la toilette des Égyptiens,
témoin ce collier (fig. 11 j) dont les grains
Fig. 115. — Collier égyptien orné de boutons de lotus (.').
imitent des boutons de lotus; ce bouton est
considéré par l'auteur précité comme l'ori-
1. Nous avons donné l'ove précédeiiinient {Rrvne de
r Art chrétien, année 1900, p. 485, fig. 21.)
2. D'après \ Architectural Record.
€00at sur la Décoration arcl)ttectomque.
213
gine des globules désignés plus tard sous
le nom d'oves.
A coté du lotus, on rencontre un autre
idéogramme, c'est la double volute ou volute
Fîg. 116.
en S (fig. 116 et 117). Ce signe apparaît en
Écrypte sur un scarabée remontant à 3900
av. J.-C. (5^ dynastie). Les Grecs en ont
tiré de superbes motifs de méandres;" en
voici un exemple combiné avec \aster.
M. W. H. Goodyave a écrit un volume
pour prouver que cette spirale dérive elle-
même du lotus, comme les anneaux concen-
triques et même le chevron, par suite de
certaines combinaisons de feuilles de lotus,
telles qu'on en voit au bas du fût et dans
le chapiteau de la colonne égyptienne (').
La double volute engendre le méandre
courant et le guillochis, ainsi que les flots
grecs (fig. riS).
JUDU.t^ yj o\ajX*-
iT^e tt-'Tvti
^J:
.ee^jLL.
G\D(d\s |^X5VAy| ^XXXX.
Fig. II S.
Un troisième idéogramme, qui mérite
notre attention, est le Siuastika ou croix
P
jip
iîoii
Fig. 119.
gammée (fig. 120. 121 et 11 g), d'où dérive
la grecque, et qu'on peut assimiler aussi
au méandre brisé.
Ff m
Fig. 120. Fig. 121.
Swastika.
Ces types peu nombreux ont suffi à en-
gendrer tout un monde d'ornements.
L'ornement, dans l'histoire de l'art, ap-
paraît comme l'application complexe de
principes simples et comme le résultat d'une
convention perpétuée par la tradition, C'est
ce qu'a établi Owen Jones. Parmi les pro-
duits d'art qui nous inondent, pourrait-on
dire, nous retrouvons toujours les types
primitifs; ces vieux motifs traditionnels
légués par le passé continueront indéfini-
ment à constituer le fond de notre gram-
maire décorative, enrichie rarement de
quelques types nouveaux puisés dans la
nature. A de rares époques seulement, à des
époques d'apogée artistique, l'homme re-
tourne au réservoir de la nature pour y
puiser directement des éléments décoratifs.
C'est ce qu'ont fait les Egyptiens avec une
extrême réserve, en créant les ornements
nombreux tirés du seul lotus: l'étoile, la
palmette, les volutes. C'est ce qu'ont fait les
Grecs (^) plus directement encore, en tirant
de la feuille ôi acanthe, ce somptueux décor
qui suffit à tous les besoins des décorateurs
grecs et romains. C'est ce que firent plus
tard avec un art sans pareil, beaucoup plus
que leurs prédécesseurs, les grands artistes
du XII I^ siècle, en créant la fiore monu-
mentale la plus riche qui existe, flore qu'ils
empruntèrent aux plantes familières des
bois, des champs et des jardins.
1. V. Gondyave, Graminar of the lotus.
2. V. La décoration monumentale en Griee par Fergus-
son ( Moniteur des Architectes, 1897, p. 43.)
214
ISitWt tie rart cbrctirn.
Une fois produits, ces types créés par le
génie subsistent pour toujours, maintenus
par la routine ou par la tradition.
\J imitation de la nature. — On ne pourra
jamais assez admirer la richesse et la fécon-
dité infinie de la nature et les ressources
inépuisables que l'art peut y trouver. Com-
bien sont vraies les belles paroles de l'Ecri-
ture : « Considérez les lis des champs,
comme ils croissent: ils ne travaillent pas,
ils ne filent pas; et Salomon dans toute sa
gloire n'a pas été vêtu comme l'un d'eux. »
Si l'on observe la plante, si l'on se rend
compte de son organisme, de son expres-
sion, de ses mille variétés de formes, des
merveilles de sa conformation, de son colo-
ris, de son développement, quel trésor d'in-
spirations n'y trouve-t-on pas (') ?
Aujourd'hui, surtout, que nous sommes
blasés de l'imitation des styles passés, las
I. « Aucune tribu de fleurs de John Ruskin n'a eu une
aussi ijrande, aussi varie'e et aussi saine iniluence sur
l'homme que le grand groupe des Drosid;e, influence
résultant non tant de la blancheur de quelques-unes de
leurs fleurs ou de l'éclat des autres, que de cette forte et
délicate substance de leurs pétales, qui leur permet de
prendre des formes d'une inflexion élastique impeccable,
soit en coupes comme le safran, soit en clochettes épa-
nouies comme le vrai lis, soit en clochettes semblables à
la bruyère, comme la jacinthe, soit en étoiles brillantes et
parfaites, comme l'épi de la Vierge, ou bien, lorsque ces
fleurs sont aflectées par l'étrange reflet de la natiire du
serpent, qui forme le groupe labié à.e. toutes les fleurs, se
résolvant dans des formes d'une symétrie gracieusement
fantastique, dans le glaïeul. Placez à leurs côtés leurs
sœurs Néréides, les nénuphars, et vous aurez en elles les
formes les plus exquises du dessin ornemental et les
mythes floraux les plus puissants qu'aient jamais connus
jusqu'ici les esprits humains, parus sur les bords du Gange
ou du Nil, de l'Arno ou de l'A von.
« Considérez, en effet, ce que chacune de ces familles
a signifié pour l'esprit de l'homme. D'abord, dans leur
noblesse, les lis ont donné le lis de l'Annonciation ; les
asphodèles, la fleur des Champs-Elysées; les iris, la fleur
de lis de la chevalerie; et les amaryllidées, « le lis des
champs > du Christ ; tandis que le jonc, toujours foulé aux
pieds, devient l'emblème de l'humilité (*). »
Article de la Revue des Deux-Mondes, par M. Robert
de la Sizeranne. — N"' des i'"' décembre 1S95 et r'' juin
1896. La Religion de la Beauté, étude sur John Ruskin.
* Traduction de M. de la Sizeranne.
de leur demander des idées toutes faites et
des motifs de décor surannés, il ne faut pas
oublier que nous avons à nos côtés des réser-
voirs de beauté, des trésors d'idées, des
sources intarissables d'inspiration. Tour-
nons-nous vers la création, considérons la
plante, sa magnifique parure, ses fraîches
couleurs, ses merveilleuses variétés. Faisons
ce qu'on a fait à toutes les grandes époques,
puisons directement à la nature. Faisons
comme le moyen âge, qui s'est inspiré des
produits de la création pour les fixer sur
ses ornements, ses étoffes, ses monuments,
ses frises sculptées, ses murs peints et ses
vitraux.
Application de l' oi-neinent végétal. —
Mais gardons-nous de prendre le corps sans
l'âme, de copier la lettre sans l'esprit :
l'ornement végétal doit être interprété et
stylisé; foin de l'imitation servile qui mène
à un désolant réalisme! Idéalisons nos mo-
dèles et adaptons le sujet que nous fournit
la nature à la destination de l'œuvre d'art, à
la matière mise en œuvre, à notre propre
idéal. Faire œuvre personnelle, c'est une
condition essentielle de l'art ! Telle est la
voie de l'avenir.
Cette voie a été ouverte aux élèves des
écoles du dessin de Paris. Feu Ruprich-
Robert a doté l'enseignement d'un livre
utile : La Flore orneuicntale, basé sur
une doctrine excellente. 11 a analysé les
beautés de la flore et, avec un sentiment
profond de ses expressions si intéressantes,
il a montré par une multitude d'exemples
quelles applications nouvelles l'art peut en
tirer. Son ouvrage contient une magistrale
analyse du règne végétal et une méthode
pour son interprétation. Il a établi la théo-
rie du décor végétal, approprié surtout à
l'art plastique, en sa qualité d'architecte.
C'est dans la même voie que (irasset
a poussé avec un grand succès son ensei-
€00at 0ur la décoration arcl)ttectomque.
215
gnement à Paris, en visant plus particuliè-
rement les applications picturales, lui qui
était peintre de profession, et en complétant
ainsi l'œuvre de Ruprich-Robert.
M. Grasset prend une fleur; il la choisit
de préférence parmi les essences les plus
familières, parmi celles qui nous entourent
et qui ont pour notre esprit une significa-
tion précise, pour nos yeux un charme accru
par une fréquente contemplation. Il l'ana-
lyse, il l'étudié sous tous ses aspects, dans
toutes ses parties, mettant en évidence des
beautés intimes, des détails inaperçus, des
manières d'être pleines de caractère, des
poses de prédilection, des variétés d'allure.
Il appelle à son aide le charme du coloris,
dont la fleur, sinon la plante, est insépa-
rable et dont Ruprich-Robert avait fait
abstraction, ne considérant en quelque sorte
que le côté plastique de l'ornement végétal.
Dégageant du type végétal la quintessence
de la ligne et le caractère typique, il en fait
des applications pleines de style à la pein-
ture murale, à la céramique, à la composition
des vitraux, au décor de tentures, etc., voire
même des papiers peints.
Plus anciennement encore le même mode
d'étude était instauré dans les Écoles Saint-
Luc en Belgique, où la flore est stylisée
d'après les principes du moyen âge. Nous
signalons ici que beaucoup de ceux-là même
qui décrient d'une manière acerbe les efforts
des disciples de Béthune pour régénérer
l'art chrétien, ont emboîté le pas, sur pres-
que tous les terrains, à l'École de Saint-
Luc, qui, la première, a pratiqué la styli-
sation de la plante en même temps que la
structure apparente dans l'architecture.
La plante et la fleur introduites dans le
décor architectural y jouent un rôle double:
symbolique et ornemental.
Le symbolisme des végétaux appartient à
un ordre d'idées particulier, dont nous ne
traiterons pas ici. Il y a là-dessus des con-
ventions vulgaires et d'autres mystiques,
consignées, dans les traités du « langage des
fleurs » et d'iconographie, à l'aide desquels
l'artiste décorateur pourra fixer son choix
pour chaque application déterminée (").
Au point de vue ornemental l'emploi du
végétal réclame la stylisation.
Stylisation. — L'imitation pure et simple,
comme on la pratique beaucoup de nos
jours, n'a presque jamais été le point de
vue choisi par les artistes anciens. Appli-
quées à l'architecture, à la sculpture et à la
peinture monumentales, les plantes ont dû
affecter une allure particulière et s'adapter
intimement au caractère des ouvrages
qu'elles ornaient. La nature doit être trans-
formée dans la mesure dont l'artiste qui
s'en inspire est le maître.
Quand il envisage un végétal, il y perçoit
une qualité, il y trouve une expression qui,
selon ses vues, pourra être rendue de ma-
nière à produire l'effet qu'il recherche dans
l'œuvre construite. Il dégage cette expres-
sion avec clarté, et pour cela il doit faire en
partie abstraction des autres caractères
parmi lesquels celui qu'il a en vue se trouve
comme noyé. Donnons un exemple.
Si l'on considère un arbre quelconque,
on observe que toute la ramification s'est
développée de manière que les plus petits
rameaux puissent respirer librement, sans
se gêner l'un l'autre; de là une séparation
rationnelle des branches, qui peut frapper
un décorateur et lui inspirer un tracé de
ramification décorative, tandis que d'autres
particularités propres à l'essence de notre
I. Nous renvoyons, à cet égard, à nos études antérieures,
parues ici même sur l'iconoi^f aphte chréitcnne, a.nné^ 1887,
p. 183 et suiv. V. X. Barbier de Montault, Traiti d'icono-
graphie. — L. Cloquet, Eléiiieiits d'iconographie chré-
tienne. Désolée, Bruges. — F. Verneuil, Dictionnaire des
syinboles, etc. Laurens, Paris.
2l6
jRel)ue tie V^xt cl)rctten.
arbre le laisseront indifférent, telles que
certaine allure compliquée de la ramifica-
tion, propre plutôt à introduire une con-
fusion nuisible à son dessin. Il négligera
ce caractère ou d'autres, qu'il ne pourrait
peut-être pas rendre avantageusement avec
les moyens dont il dispose, comme encore
la ténuité remarquable de certains rameaux
extrêmes (').
Surtout s'il veut utiliser ce modèle dans
un décor plat, il se gardera de reproduire
perspectivement toutes les branches super-
posées. Il est clair que l'artiste sera ainsi
amené à faire des sacrifices nécessaires, ou
utiles et à introduire dans le détail une
régularité, un rythme, qui n'est pas évident
ni même apparent dans le modèle (/ig 122).
D'autre part, la matière dans laquelle
l'artiste réalisera son décor lui imposera ses
sujétions. Ce sera, par exemple, un champ
de mosaïque sur lequel les lignes contour-
nées ne peuvent être reproduites avec les
courbures exactes ; il y substituera des lignes
brisées aux lignes infléchies. Peut-être aussi
devra-t-il modifier la couleur, tout au moins
simplifier la gamme des tons et des nuances.
Enfin il aura sa manière personnelle de
voir et de comprendre les choses, que tra-
hira son œuvre.
On le voit, fatalement il v aura inter-
mms^S^sm-f'^^^p^ç'rt^
Fig. 122. — Frise au pochoir par M. F. Aubert (d'après IMr/f/t'rorrt^:/).
prétation, et de là résulte que l'œuvre aura
du caracth-e, du style.
Cette interprétation se rencontre à un
degré inattendu pour ceux qui sont peu
familiarisés avec les arts décoratifs, dans les
monuments des différents peuples. Pour
apprécier combien l'œuvre de l'ornemaniste
diffère de celle du paysagiste, il faut rap-
procher, par exemple, comme l'a fait Ru-
prich- Robert dans l'ouvrage cité, des arbres
tirés de monuments assyriens, égyptiens,
grecs, ou du moyen âge.Très différents tous
du modèle naturel, très différents entre eux,
ils présentent tous de grandes analogies
quant au travail de stylisation.
Simplification du dessin, — Ainsi donc
l'artiste, quand il imite, transforme : car il
I. V. Kuprich-Robert, La flore ornaiientalc , p. 3.
imite une créature, une fleur par exemple,
dans le but d'exprimer une pensée, sa
pensée. En outre, il l'imite dans une matière
déterminée ; cette matière lui offre une
résistance qu'il doit vaincre, mais elle ne
perd pas sa nature, avec laquelle il faut
compter: le fer ne peut pas être traité
comme le marbre, ni le bois comme la terre
glaise. De cette union de \a pensée et de la
matière naît V expression, qui est une con-
dition de beauté dans l'art.
En général il faut rechercher la simplicité
de la forme. « La nature, dit Fontenelle, est
« d'une épargne extraordinaire ; tout ce
« qu'elle pourra faire d'une manière qui lui
« coûtera un peu moins, quand ce moins ne
« serait presque rien, soyez sûr qu'elle ne le
« fera que de cette manière-là. Cette épargne
« néanmoins s'accorde avec une magnifi-
(Bssâi 0ur la Décoration arcl)ttcctontque.
217
« cence surprenante qui brille dans tout ce
« qu'elle fait. C'est que la magnificence est
« dans le dessein et l'épargne dans l'exécu-
« tion. Il n'y a rien de plus beau qu'un
« grand dessein qu'on exécute à peu de
« frais. Nous autres nous sommes sujets à
« renverser tout cela dans nos idées ! Nous
« mettons l'épargne dans le dessein qu'a
« eu la nature et la magnificence dans
(( l'exécution. »
Il ne faut jamais perdre de vue ce prin-
cipe de la siuiplicité dans Fexpresswn.
Dans la composition décorative la plante,
très irrégulière dans la nature, est assu-
jettie à des contours donnés par le cadre
qu'elle occupe, par sa fonction ornemen-
tale, par sa position dans l'œuvre. De là des
formes plus régulières, idéalisées dans un
sens géométrique.
Le plus souvent la plante, le rameau, le
bouquet, la feuille, s'inscrivent dans une
lig7te enveloppante (") et leurs parties se
dirigent suivant des courbes d'axe plus ou
moins régulières (Jîg- lyj pins loin). On
supprime ainsi le désordre provenant de
causes accidentelles et l'on introduit un
ordre inhérent à l'ouvrage auquel s'ap-
plique le décor.
En matière de flore ornementale l'ex-
pression gît surtout dans le dessin, dans un
dessin relativement simple et clair. « Le
dessin, dit Toppfer, est la pensée elle-même
et la couleur n'est qu'un moyen de la com-
pléter ('). » « Le dessin, dit à son tour
Lamennais, a un rapport direct avec la
pensée ; la couleur, un rapport direct avec
la sensation. » « Avec le dessin on ex-
prime une émotion : c'est l'élément moral ;
avec la couleur, qui est un complément plein
de charme, on exprime une sensation ('). »
1. V. fig. 76, 77 et 78 de Ruprich-Robert.
2. Menus propos.
3. Ruprich-Robert.
§ II. — HISTORIQUE DE L'ORNEMENT
VÉGÉTAL.
L'ornementation végétale des anciens se
caractérise par un petit nombre de types et
d'abondantes répétitions d'ornements très
stylisés et distribués suivant des ordonnan-
ces eurythmiques. Rien de plus frappant
sous ce rapport que l'art de l'Egypte et celui
de la Grèce. Les Egyptiens ont surtout
représenté le lotus (').
I 2
Fig. 123. — Éléments variés des palmettes gfrecques.
On serait tenté de croire que les Grecs
se sont inspirés, en outre, de la fleur du
chèvre-feuille pour varier leurs palmettes
(fis- ^^^ '^ ^30), dérivées apparemment
elles-mêmes du lotus ("). Celles-ci sont
formées de quelques types de pétioles :
droits ( 1 ), ondulés (2), enroiilés en crosses (3),
arrondis (4), aigus (fig I2j). Les palmettes
'V
m.
\r}}<
L\l '^^
Fig. 124. — Acanthe.
Fig. 125. — Feuille d'acanthe.
que les Grecs ont composées avec des élé-
ments si simples sont remarquables par leur
\. M. Architectural Record, mars 1894, p. 263, et sept.
1890, p. 88.
2. Toutefois plusieurs auteurs, notamment Owen-Jones,
croient que la palmetle grecque est une création pure
sans imitation du chèvrefeuille.
2l8
3Reliue De T^rt cbrctieu*
élégance, leur gracilité et la jolie pondéra-
tion des pleins et des vides.
Fiç. 126.
Un autre type végétal qui prend chez
les Grecs une place aussi importante que la
Fi"
palmette, c'est la fetiille iV acanthe (fig. 12^
et I2§), qui croissait en abondance sur le
Fig. 128. — Halmettes grecques.
sol de l'Hellas. L'acanthe est à la sculpture
ce que la palmette est à la peinture. Cette
belle feuille, si large dans son ensemble, si
richement dentelée et nervée, satisfit pleine-
Pig. 129. — Palmettes et culots.
ment les sculpteurs et les architectes grecs
plus amoureux de pure beauté que de va-
riété, et ils cherchèrent peu à varier le cha-
piteau corinthien dont elle fut l'ornement
caractéristique.
Fii^. 1)1. — Cymaise omaine ornée d'acanthes.
On distingue l'acanthe épineuse et sau-
vage (branche ursine) et l'acanthe molle
Fig. 132. — Crosse d'acanthe de la Renaissance.
Cathédrale de Tours.
(sans épines). Les deux variétés furent em-
ployées chez les Grecs et chez les Romains.
€ssài 0ur U décoration arcl)ttectoiuque.
219
Depuis que Callimaque en garnit le chapi-
teau corinthien, l'acanthe se multiplia dans
le décor antique : elle fournit l'ornement
des antéfixes, des cymaises (JΣ: 131). des
modillons, le fleuron du monument de Lysi-
Fiu
Rinceau, culots.
Frise au château de Vaux de Ceruay-
crate, les roses des caissons du Parthénon,
les culots et les feuilles des rinceaux et des
frises, etc. On la retrouve dans les rinceaux
sassanides et dans les chapiteaux byzantins.
A la Renaissance elle redevient l'élément
inévitable de toute composition feuillée
(fig- 132)-
Ce n'est que dans les derniers temps de
l'art grec qu'apparaissent les rinceaux en-
roulés qui devaient prendre un si grand dé-
veloppement dans le décor architectural
des Romains (fig. T34 et 135) (").
Chez ces derniers la beauté sagement con-
tenue des Grecs est remplacée par un luxe
exubérant. Les éléments du décor devien-
nent des feuillages développés, de véritables
frondaisons formées de l'acanthe comme
essence ordinaire. On représente aussi de
grosses guirlandes de laurier, de chêne, etc.,
et l'on mêle à la feuille la fleur sous forme
de roses très complexes, appelées surtout à
décorer le fond des caissons.
Les Byzantins reprennent l'ornementa-
tion de l'Asie et de Rome.
Fig. 134. — Frise romaine peinte.
Les Arabes, très pauvres au point de vue
floral, empruntent leur ornement principal
à la fougère argentée.
Flore médiévale. — Le moyen âge a
adopté un principe tout nouveau : les plantes
sont employées en nombre infini d'espèces
et prises dans la flore locale. Toutefois,
comme l'a justement fait remarquer M. F.
Lambin, à qui nous ferons de nombreux
emprunts, l'on s'en tient à l'imitation de la
feuille, à l'exclusion presque complète de
la fleur, du moins dans la sculpture monu-
mentale ; et l'on en tire de si merveilleux
effets, que la dernière période est qualifiée
de gothique fleuri, bien que la fleur n'y
figure pas. Crochets, fleurons, culots, rin-
ceaux ne sont formés que de feuilles cour-
bées, recourbées, épanouies en bouquets,
I. V. Moniteur des architecles, année 1874. Propylées —
1870, Temple lie la Vicloire.
REVUE UE l'art CHRÉTIEN
I9OI. — 3""^ LIVRAISON.
220
îRrbuc îJC V^xt cbicticn.
donnant l'idée d'une efflorescence véri-
table (yî£: 136).
D'ailleurs la fleur était rare à cette épo-
que, comme on peut en juger par les jardins
figurés comme fonds de tableaux dans les
manuscrits. Elle n'apparaît abondante que
dans les miniatures, mais sous des traits tout
conventionnels.
L'ornement végétal roman ne nous four-
nit que quelques types élémentaires, comme
Fit;. I
Bande verticale.
prélude aux richesses de la flore qui tapisse
les piliers des cathédrales gothiques ('). Elle
n'a guère connu d'essence vivante que l'a-
canthe, dont elle tira un parti superbe. Ce-
I. L'étude de la flore gothique avait éié quelque peu
négligé : jusqu'ici. Desmoulins * lui a consacré une notice
d'une vingtaine de pages ; Laubinet a déterminé 25 es-
sences de la cathédrale de Reims ; E. Woillez ** a donné
* Ch. Desmoulins, Cofisidérations iur la Jîore murale dans le
Bull, monumental, t. XI, 1845.
*• E. Woillez, Iconographie des plantes anïdes figurées au moyen
âge en Picardie, etc., dans le.<i Mém. des Antiquaires de Picardie,
U IX. 1848.
pendant, à la veille de la transition, cette
plante exotique connaît deux rivales indi-
gènes, l'arum et le nénuphar.
Les sculpteurs romans mêlent ces deux
feuilles d'eau à la feuille d'acanthe, qui se
transforme graduellement en feuilles de
vigne.
FifJ. I >6. — Épis gothiques fleuragés.
h,'arniii (ou pied de veau ou oonct) croît
dès le printemps dans les endroits humides,
dans les bois ombragés, sur le bord des
Feuille d'arum-
Naturel. Fig.
38. — stylisée (O-
ruisseaux. Il paraît avoir été pris au moyen
âge pour le symbole de la puissance créa-
trice de l'homme (^). La feuille é'arum
une notice sur les aroïdes ; voilà tout ce qui avait paru, en
outre des belles pages, quelque peu erronées d'ailleurs,
de \'iollet-Ie-Duc, sur la Flore*. M. Lambin a été bien
inspiré, en reprenant ce beau sujet dans sa Flore go-
thiquc.
:. D'nprès ^L E. Lnmbin.
2. Woillez, Iconographie des plantes aroïdes figurées au
moyen ât^e en Picardie. (Mém. des antiquaires de Picar-
die), t. IX. 1848.
* Dictionnaire rais, d'archil., art. Flore.
J. B. Giraud. Documents pour servir à l'histoire de l'ornement au
moyen âge et à. la Renaissance.
€ssat sur la Décoration arcl)itectoiuque.
221
(fig. ijy et ij8) est la feuille primordiale
de l'ornement gothique. C'est elle qui a
formé le décor à crochets des chapiteaux
que l'on rencontre partout. Au sommet de
cette feuille s'épanouit souvent une grappe,
Fig, 139. — Nénuphar. Lavacrum
de l'abbaye de St-Bavon à Gand.
un bouquet d'une essence plus riche, vigne,
trèfle, renoncule, chêne, etc. Dans l'inter-
prétation romano-gothique elle prend une
forme en fer de lance.
Fig. 140. — chapiteau de la cathédrale de Meaux,
d'après M. l'abbé JoLV.
On en voit un bel exemple dans des cha-
piteaux de la cathédrale de Meaux. (Voir
Revue de f Art chrétien, année 1898, p. 501.)
Le nénuphar {fig. 142 et i^j) étale sur les
étangs sa large feuille plate et ovale, et sa
fleur blanche et touffue; il est l'emblème de
la pureté chrétienne ('). Sa feuille, au large
contour sévère, se prête à des applications
décoratives monumentales (fig- 141 )•
Le nénuphar apparaît dans la sculp-
ture de la deuxième moitié du XI I«^ siè-
cle (fig. ijç à 144). Les artistes de cette
époque l'ont fortement stylisé et interprété
d'une manière parfois
bizarre. Tantôt ils pré-
sentent la feuille de
/
-K
•^^M:.
Fig. 142. — Nénuphar au naturel.
face, tantôt en la cou-
pant en deux et chaque
moitié ressemble à un
Fig. 143. — Nénuphar stylisé.
' cimier de casque. On
Fig. 141. - Rinceau de voit à Saint -JuHen-le-
nénuphar (miniature). Pauvre à Parls un cha-
piteau présentant une des plus belles appli-
cations du nénuphar.
Essences gothiques. — Bientôt appa-
raissent le plantain des champs et la
fougère des bois. A partir de ce moment la
nature devient pour l'artiste un trésor
inépuisable.
Viennent bientôt, à peu près par ordre
I. Viollet-le-Uuc, Dict. rais, d'arcliit. — V. le Coloriste,
15 mai 1896, p. 15.
222
3Rcbue ïic r^rt cbrctien»
chronologique, le trèfle, la renoncule, la ché-
lidoine {ou l'éclair des montagnes), Yancolie,
le chêne, le figuier, le lierre et le rosier.
Telles sont les plantes qui forment le fond
de la flore romano-gothique. En générai
elles ne sont pas symboliques.
Fig. 144.
Visne. —
~ Nénuphar. Église de Lillers (Nord).
Au moment où le style ogival
se déo-aee définitivement du roman, dit
M. Lambin, apparaît dans la sculpture une
Fig. 145-
Fig. 146.
feuille qui laisse loin derrière elle l'acanthe
grecque dont elle paraît dériver, et qui est
la base de la flore gothique, c'est la vigne
(fig. i-fs et /-/6j ('). apportée d'Orient en
Gaule. On la trouve partout depuis l'humble
église de village jusque dans la cathédrale.
Cette prédilection a une double raison
d'être. C'est la plante symbolique et
mystique par excellence ; elle est, par son
fruit, l'emblème de la sainte Eucharistie ;
jadis elle avait été le symbole préféré
Fig. 147.
de Bacchus. Toujours, pour les poètes, elle
a figuré l'automne en rappelant les ven-
danges.
Quand elle se substitua, au XII" siècle, à
l'acanthe antique, elle était à deux échan-
crures, et à trois groupes de lobes (fi^g W^)-
La vigne du XI 1 1' siècle (fig. i^g) tend à
revenir à la nature (7%". 156); celle du XI V^
tient le milieu entre la nature et l'interpré-
tation et se distingue parfois par quatre
Fig. I4S. — Rinceau de vigne ondulée (2).
échancrures et un dentelé plus prononcé
(fig. i^-j et 148). Enfin, au XV^ siècle, ap-
paraît la feuille de vigne naturelle, mais
ondulée et déchiquetée.
La vigne, bien à sa place en Champagne,
s'étale triomphante sur les chapiteaux de
la cathédrale tle Reims, surtout sur le
fameux chapiteau dit des Vendanges {f).
1. D'après M. Lambin.
2. D'après Viollet-le-Duc.
3. V. Revue de l'Art chrHien, année 1895, p. 152 et
année 1897, p. 230.
€ssat mv la décoratton arcl)itectontque.
223
Dans la fig. 154 on la voit appliquée à f^^. /J// On le voit aussi dans le beau
ornement de la menuiserie. ! chapiteau de la cathédrale de Meaux, des-
Tj'è/it'. — Le trèfle (/!£: ijo), symbole | sine par M. le chanoine Jouy, que nous
Fig. 149. — Vigne stylisée par simplification.
trinitaire et emblème de la Verte Érin,
est, avec la vigne, en quelque sorte le type
des fleurs styUsées. Ses feuilles abondent
Fig. 150.
Trèfle au naturel. Trèfle stylisé.
sur les chapiteau.x de N.-D. d'Amiens. On
le voit au deuxième pilier de droite de la
nef de N.-D. de Paris, et au premier de
Fig. 151. — Église de Sébourg.
gauche, battu par le vent ; ce chapiteau fait
l'admiration des connaisseurs ('). Il décore
le chapiteau ci-contre de l'église de Sébourg
I. V. E. Lambin, otiv. cité.
avons reproduit autrefois (') et dans une
miséricorde de stalle (fig. 153)-
Fig. 152. — Renoncule. — Cathédrale de Chartres.
Renoncule. — II y a deux sortes de re-
noncules dans la nature : l'une, très décou-
pée avec les deux lobes inférieurs détachés
à la base du lobe du milieu ; l'autre, avec
Fig. 153 — Miséricorde d'une stalle, ornée de trèfles.
les trois lobes qui se tiennent. Les sculpteurs
gothiques ont reproduit les deux. On en
voit dans les galeries sous la rose de S. Jean
Fig. 154. — Corniche en bois, ornée de feuilles de vigne.
des Vignes à Soissons et à N.-D. de Paris.
La Sainte-Chapelle de Paris en est remplie,
ainsi que la cathédrale de Meaux. En voici
I. V. Revue d'; l'Art chrétien, année 1898, p. 306.
224
BRrliuc De T^rt c!)rctieiu
un bouquet superbe tiré du portail nord
de Clnartres (fi(^. 155).
m
Fig. 155. — Renoncule. Cathédrale de Chartres.
Chélidoine. — Rien de plus charmant que
la feuille de chélidoine (fig. 138 el /jç),
r Ig. l 56. — Eglise de Chennevièr
dont les lobes â dents rondes ont une grâce
Fie. 157. — Chélidoine du XIV siècle, à Saint-Jean des
Vignes à Soissons, d'aprcs M. Lamhin.
parfaite et dont le port est plein de ma-
jesté. Aussi les sculpteurs du moyen âge
l'ont-ils traitée d'une façon très remarqua-
ble; ils en ont fait un chef-d'œuvre dans le
Fig. 158.
Chélidoine stylisée.
Fig. 15g.
Chélidoine au naturel.
chapiteau du premier pilier qui sépare les
deux nefs latérales droites de N.-D. de
Paris. Sur la façade, les grands bandeaux
Fig. 160.
Ancolie stylisée.
Fig. l6l.
Ancolie au naturel.
de chélidoine occupent toute la largeur du
monument. Notre-Dame de Paris est la
cathédrale de la fougère, de la
chélidoine et de la vigne (').
Retournée sur elle-même cette
feuille donne d'admirables cro-
chets.
Ancolie. — L'ancolie (fig.
160 el 161) offre une Heur
complexe, mais qui donne à
l'analyse des formes expres-
sives et gracieuses. Les pétales
roulés en forme de cornet se LJ
tournent vers la terre, tandis ^^'?-'^--
Cathédrale de
que leurs extrémités arrondies Chartres,
se relèvent vers le ciel avec un air de dé-
mence (^), ce qui a fait adopter cette fleur
comme emblème de la folie.
1. D'après le F. Mares.
2. E. Marchand, dans le Coiorisle Enlumineur.
C00ai sur U Décoration arcftitectontquc.
225
La feuille est richement découpée en
trois lobes redentés, comme ceux de la
renoncule et de la chélidoine ; mais ils sont
très détachés, et les lobes latéraux ont au-
dessous une large échancrure.
Fig, 163.
Chêne stylisé.
Fig. 164.
Chêne au naturel.
L'ancolie a fourni les feuilles et les cro-
chets du premier pilier de gauche du chœur
de Saint-Denis, qui est un des plus beaux
piliers qu'on puisse voir. Elle a été employée
Fig. 10;.
Chêne au naturel.
dans la miniature dès le XI I^ siècle ('). On
la voit à la cathédrale de Chartres (Ji<r.r62 ).
Clicnc. — Consacré à Jupiter, le chêne
(fig. i6j. 164 et 16^) est l'emblème de la
force ; autrefois les couronnes civiques
étaient tressées de chêne; c'était la marque
I. Marchand, Coloriste, 1896, p. 2. V. Grasset.
la plus éclataïue de la valeur du soldat. Ce
fut l'arbre national de la Gaule, et le gui,
Fig. 166. — Glands de chêne ('J
parasite du chêne, fut la plante sacrée des
Druides.
Fig. 167.
Il a été reproduit avec art à Bourges
et surtout à Chartres avec prédilection. Il
Fig. 168
Chêne.
Vignette.
Fig. 169. — Les stalles de Cornelymunster
(d'après M . de Kizenne).
abonde au XIV^ siècle. Au X\'^ il se voit
accompagné du gland. II est alors allongé,
I. E. Lambin, loc. cit.
220
Bcbuc Dr r^rt cbrctiea.
pointu et se rapproche comme aspect du
chardon. Voici (fig. i66) un joli décor
de panneau de menuiserie fait avec son
Fig. 170. — Figuier au naturel.
gland, du F. Mares, directeur des Écoles
St-Luc et (Jig: i6ç) une miséricorde de
stalle ornée de sa feuille.
Fig. 171.
Figuier au naturel.
Figuier stylisé.
\^& figuier (fig. ijo et iji) signifie dou-
ceur, fécondité. Il est resté l'arbre sacré
Fig. 172.
Lierre au naturel. Lierre stylisé.
des Indiens, qui le plantent près de leurs
temples et dfe leurs tombeaux. Ses larges
échancrures lui donnent un aspect sévère.
Le moyen âge l'a simplifié dans la sculp-
ture ; il est rendu avec art en particulier
dans la cathédrale de Bourges.
Fig. 173. — Lierre stylisé.
'L.^ lierre grimpant (fig. //2)est le sym-
bole des affections impérissables; il meurt
Fig. 174. — Lierre au naturel et lierre stylisé.
OÙ il s'attache. Il tapisse les murs; il est un
accessoire naturel du décor des édifices. Il
Fig. 175. — Lierre stylisé (vignette).
était consacré à Bacchus. En Grèce, l'autel
de l'Hyménée était entouré de lierre, et l'on
€S0at sur la Décoration arct)irectoiuque.
2.2-
en présentait une branche aux nouveaux
époux comme symbole d'un nœud indis-
Fi*J. 176. — Cathédrale de M^aux, — Chapiteau oriié de lierre.
soluble. On a quelquefois représenté l'in-
oratitude sous la figure du lierre qui étouffe
Fig. 177. — Églantier à N,-D. de Paris.
son soutien. Sa forme simple, inscrite dans
un pentagone, est très décorative (fig. i'/2
à 176).
Fig. I7S. — Rose symbolique (vignette).
Le rosier (fig. lyy et ijS) figure au
moyen âge avec ses feuilles plus souvent
qu'avec sa fleur. Aujourd'hui celle-ci est la
reine des fleurs, symbole de l'amour , et
ses épines figurent les peines inséparables
des joies terrestres. Le rosier sauvage ou
l'églantier se voit à la porte rouge de
N.-D. de Paris, à Chartres, sur la porte de
Fig. 179. — Chicorée à la cathédrale de Troyes-
N.-D. de Boulogne. La rose signifiait au
moyen âge le sang des martyrs. « La rose
s'épanouit près des eaux vives ("). » La
Fig. 180. — Fougère stylisée.
rose mystique était l'emblème de la Vierge
Marie.
La chicorée abonde au XV^ siècle.
Sur les rampants des frontons (fig. ijg)
I. Spicit. Solesm.^ t. II, p. 414.
REVUE DE l'art CHRÉTIEN.
190I 3""-' LIVRAISON.
228
îRcbuc tic l^^vt cljrctiru.
Fig. loi.
et des pinacles sa feuille apparaît en forme
Fig. 182. — Vigne allongée. - Cathédrale de Meaux.
de tête de dauphin ; c'est un des caractères
distinctifs de l'époque.
Mentionnons encore Winnoise qui
se rencontre à la cathédrale de IMeaux
et à celle de Chartres; Vananas qui,
comme l'ariichaiit de nos jardins, a
donné un des plus beau.\ motifs figu-
Fig. 1S3. — Crochets de pignons ;i feuilles de mufflier.
rant dans les diaprages des peintures
murales comme des tissus; \ aulne dont
la feuille simple garnit les chapiteaux
de l'abbaye d'Aulne ; la grande berce.
Fig. 1S4.
Chapiteau de léglise de Champigny, d'apris M. K. Lambin.
qui a fourni un si beau décor à certain cul de
lampe de Saint-Jean des Vignes à Soissons
(v. Revue de t Art chréliett, année 1896,
p. 328); le cresson, dont voici (fig. 184) une
application charmante ; \crable, qui orne
la clef de voûte qu'on trouvera ci-après
(fig. i8§), le imifflier, qui décore souvent
les crochets des chapiteaux et des pignons
€ssat e^ur la îiccoratton arcWectoinquc
229
(fio. jSj); \2i fougère, sur laquelle nous
devons insister.
Fougcre. Le long d'une tige qu'un duvet
recouvre encore, sont attachées d'autres
Érable.
tiges minuscules parallèlement disposées,
qui, elles aussi, s'arrondissent et se recro
quevillent (Jig. iSi). Les feuilles basses sont
.^^
% >;'^.7i
Fig. I S6 — Chapiteau de fougère.
déjà développées alors que les extrémités
des volutes ne sont encore que des em
bryons enveloppés dans une ouate protec-
trice. Cette crosse gracieuse (') a donné
I. E. Marchand, Le Coloriste Enlumineur.
l'idée des crochets enroulés qui décorent
les angles des chapiteaux et qui garnissent
les rampants des pignons. Parfois, comme
Fig, 1S7.
on le voit dans la figure 167, on
l'ensemble de la feuille, mais en
singulièrement sa forme, à tel
représente
simplifiant
point que
pjcr. 188. — Lis au naturel.
chaque tige latérale n'est rappelée que par
un lobe ; et l'on ne reproduit que l'allure
de l'ensemble.
M. Lambin a présenté à nos lecteurs des
230
îRcbuc Dr I'9rr fbvrticn.
spécimens de fougère stylisée dans des
chapiteaux de la cathédrale de Laon (') ;
nous croyons devoir reproduire l'un d'eux
(fig. i86).
et chères à l'art nouveau, l^'iris fut utilisé
à l'époque de la transition romano-gothique.
Fig. 1S9. — Lis stylisé.
I cjû. — Lis stylisé.
UJris (fig. iSj), une des Heurs les plus
opulentes de forme, présente en outre des
feuilles rubannées, aux courbes gracieuses
Fig. 191. — Hépathique de N,-D. de Paris.
On dit qu'il a donné naissance au lis héral-
dique; d'aucuns revendiquent cet honneur
Fif. 102 (°). ■• Sainte-Chapelle de Paris. — 2. Diplôme de Charles V. — 3. Château d Amboise (Charles VII). —
4. Château de Versailles (Bourbons).
pour l'antique lotus. L'église de Saint-
1. V. Revue de PArl chrétien, année rgoi, p. 46.
2. D'après E. Marchand.
Germain des-Prés, à Paris, est pleine d'iris.
V: hépathique (fig- içr) est une petite
feuille simple et gracieuse, qui ressemble
(BQSai sur la tiécoration ardîitectontque.
231
au lierre et au trèfle. Les sculpteurs du
moyen âge l'ont imitée sur leurs chapiteaux
et en ont fait aussi de gracieux bandeaux.
On la voit à Saint-Pierre d'Ivry (Seine).
Le //s (fig. iSS), symbole de pureté,
emblème des vierges, fut stylisé à diverses
époques. Nous en avons donné un bel
exemple {fig. 611, t. I),tiré du soubassement
de la façade de N.-D. de Paris. Voici
(fjg.iSç) le tracé élémentaire d'un lis stylisé
pour le décor mural etfy^. iço)
un lis héraldique sculpté.
La scabieuse se voit sculptée
à la cathédrale de Bourges.
"^ /
%
fig. I93.
Le chrysanthème, si ap-
précié de nos jours pour sa
fleur opulente, aurait été, selon
Fig. 19J.
Viollet-le-Duc, cultivé déjà
par les artistes gothiques, mais
sagittaire. r -ii .. ..
pour sa feuille, notamment
dans certain chapiteau de la cathédrale de
Meaux ; M. Lambin fait observer que cette
plante n'est connue en France que depuis
le XVII L siècle.
Plantain. — Le plantain (fig. IÇ3) est
représenté souvent sur la corbeille des
chapiteaux les plus simples de l'époque
romane. Les sculpteurs ont su tirer un parti
charmant de cette modeste plante. Ils ont
composé avec elle les chapiteaux du chœur
de N.-D. de Paris. Il accompagne souvent
le nénuphar. Quelquefois il se montre avec
ses nervures, quelquefois interprété et sim-
plifié (Jig. IÇ4).
Fig. 196. — Houx.
Qui ne connaît le sagittaire (fig. içs), à
la tige droite émergeant des eaux tran-
quilles, à la grande feuille à pointe de dard,
aux petites feuilles massivement groupées }
On le voit figuré à la
cathédrale de Reims
parmi les feuillages
encadrant les bas-re-
liefs de la paroi inté-
rieure du grand por-
tail.
Procédés décoratifs.
— Le XI IL siècle
prendses modèles par-
mi les jeunes pousses
de petites plantes et
r*^ les interprète selon
les besoins du décor.
Au XIV'', on repro-
duit la végétation
dans sa maturité et les
Fig. 19S.
Chardon
stylisé.
Fig. 197.
Ondulation.
Hôpital de Lou-
vain. végétation ... , _
bouclée etdéchi- tcuilles au nature), saut
quetée.
les modifications com-
mandées par l'art sculptural ; X ondulation
accentue le modèle; on marque les nervures'
des feuilles en creux; on les aligne en deux
rangs de bouquets dans les chapiteaux ; on
leur laisse la liberté dans les rinceaux et les
frises. Le XV'^ siècle applique les procédés
2 •^2
3Rrbur tir l'?lrr cbvcticn.
de mutation et Aç. section des feuilles. Alors
on abandonne les essences précédentes,
sauf le chêne et la vigne dont les lobes
deviennent aigus, et la belle Hore vigou-
reuse du XlVe siècle fait place à des es-
sences plus déchiquetées, au Ii07ix{fig. iç6).
au chardon (fig. içS), au houblon (Saint-
Fie. 199. — Musée des Augustius, Toulouse.
Ouen de Rouen, culsde-lampe des nefs),
à la chicorée, aux algues marines.
On découpe profondément les nouvelles
feuilles (fig. içjet 200), qu'on accompagne
souvent des fruits de la plante.
A la fin du XV^ siècle la végétation ap-
paraît flétrie, desséchée, bouclée et amaigrie.
On compare cette végétation à des ouvra-
Fif. 200. — Sculpture à Caen.
ges de dentelles, ce qui n'est pas en faire
l'éloge. Les sculpteurs de la première épo-
que avaient montré une préférence marquée
pour les petites plantes ; ceux de la dernière
s'attaquent aux gros végétaux et les rendent
avec exactitude : chêne, érable, hêtre, poi-
rier, châtaignier, saule, lierre, l'hellébore,
liseron, le chanvre.
Insistons sur les procédés à'intcrprc'tation
employés au moyen âge. Pour donner au
végétal la forme sculpturale, on supprime les
détails peu appréciables, on fait souvent
disparaître les dents de la feuille, on re-
tranche les parties pouvant nuire à la
netteté de l'aspect, on élargit le pétiole,
mais on conserve les grandes échancrures
et surtout le mouvement de la feuille et de
la fleur.
Parfois on combine différents végétaux.
Le crochet du chapiteau est souvent formé
d'une large feuille d'arum au sommet de
laquelle s'épanouit une fleur de mufflier ou
des feuilles de vigne enveloppant du raisin,
ou encore un bouquet de trèfles comme on
le voit à N.-D. de Paris (■).
D'ailleurs les procédés d'imitation varient
avec les applications. Nous venons de par-
ler de ceux de la sculpture ; ceux de la pein-
ture sont autres, et consistent à aplatir la
feuille, à dégager la fleur de sa tige, à adop-
ter des tracés géométriques.
Dans la miniature, on emploie les procé-
dés des replis et des ret roussis, nés des effets
accidentels produits dans les herbiers.
I. Voici, selon M. Lambin*, les procédés à'iiiUrprc'Ia-
tio7i de la feuille usités au moyen âge.
a. — Simplifier la forme en gardant le contour
l'échancrure.
le mouvement.
},_ — Élargir le pétiole pour donner une base en rapport
avec les contours.
c, — Présenter la feuille tantôt de plat, tantôt de dos.
Présenter de plat le lobe du milieu et de dos les autres
côtés ou inversement.
cl_ _ Donner au milieu du chapiteau le type de la
feuille dans toute son ami)leur ; disposer les autres
feuilles d'une manière mouvementée.
Le plus souvent le chapiteau est formé de feuilles
d'arum dégénérant à l'extrémité en un bouquet formé de
feuilles interprétées sur la corbeille.
L'interprétation est la règle au XIII'-' s. — Au .MX"
elle fait place à f imitation cii\xCa\x\é^ avec tondulation.
XIV" s. Onduler. On ne fait subir aux feuilles que
Lajhrc des ^i^nifidfs catiiédrala.
€00ai 0ur la Décoration arcl)ttectontqiie.
0-T-)
Le sculpteur gothique a tiré de la feuille
presqu'exclusivement tous les plus riches
effets du décor. L'enlumineur a commencé
à faire apparaître, d'abord modestement, la
fleur et ses richesses de couleur au milieu
des végétations tout idéales, aux feuilles
multicolores elles-mêmes, du décor des ma-
nuscrits. Au XVIe siècle, la fleur était
encore d'une simplicité extraordinaire.
A la Renaissance, l'emploi plus fréquent
de la fleur amollit l'ornement. On com-
mence à la considérer dans sa valeur
propre, plutôt que comme motif décoratif
assujetti au cadre. On lui donne de l'air
les simplifications commandées par l'art sculptural ; mais
on ondule, on plisse les feuilles de manière à donner un
modèle vigoureux.
Nerver en creux.
Aligner. — On aligne les feuilles sur deux rangs dans
les chapiteaux ; on leur laisse la liberté dans les rinceaux
et les frises.
XV= s. — Au XV" siècle prévalent les principes de
intiliilion, de section et de découpage.
Mutation. — Sauf la vigne et le chêne, on abandonne
les essences précédentes pour les remplacer par des
espèces à lobes pointus
Section et découpage. — Découper profondément les
feuilles ; c'est une manière particulière d'interprétation.
La vigne ressemble au houx.
Le fruit accompagne souvent la plante.
dans les panneau.x qu'elle occupe et ainsi
s'altère le sentiment de son rôle. Bientôt la
plante fleurie prolongera ses tiges et les fera
s'élancer avec une extrême liberté aux ex-
trémités de la composition, où elles iront
finir leur course en s'évanouissant comme
un son qui s'éteint dans le lointain.
L'application de la fleur s'accentue à la
fin du XVI" siècle: beaucoup de fleurs
sont importées d'Italie.Pierre Vallet publie
« Le jardin dit roy très chrélien Henry II»,
puis, Daniel Robel, le « Tlicatruni florae ».
Plus tard Gaston d'Orléans s'entoure de
peintres de fleurs et fait faire un recueil
de peintures de toutes les fleurs des jardins
de Blois. Ce (at l'origine de /a co//ecù'on des
vélins, conservée au Muséum d'histoire
naturelle.
Au XVI P siècle l'application artistique
de la fleur se ressent de sa figuration
appropriée à l'étude de la botanique. On
tire de la fleur sans modification, sans styli-
sation, des effets décoratifs s'appliquant à
tout. B. Monnoyer fut le maître de cette
école réalistique.
L. Cloquet.
(A sttivre.)
ERRATA. — A la page 35 de la livraison de janvier, 20° ligne de la 1™ colonne, an lieu de : au moyen âge,
lisez : aux sticles passés.
^ i.^A A^ A ^^A X^* >Ma A^ a A^^ A^^ A%A iM-A A^^ A^X A^A A^A A^A »^j^
V H;iiiriTTxrixriTiTTixiiiiirirrrrrTrTiiiir]ixiiiriixrriiiirïi3iiriri iiiii)iiiiiiii;[iiiin{iiinTrx:iiiiiixiii"rxiiiiiiiiii):iiixiiiî iiiiriTiXx:
fe
j^^^ y^it>v y^*)Jf y^^^Jf v^;j^ y^jx y^^x v^aj v y^*^ v v,/.] y y,A>v y^ * v.a) v v^*.} v y,^ v y^* X^
!Oc la restauration Des Monuments
en Belgique et ailleurs.
A restauration des monuments que nous
a légués le moyen âge a le don de
faire surgir de temps à autre des polé-
miques ardentes et des jugements qui
dénotent une passion, parfois un peu factice. La
passion prend les allures de la conviction, elle
donne un certain mouvement au style, l'écrivain
paraît inspiré par l'amour de l'art. Au bnn't qui
se fait à propos de questions qui peuvent être
examinées avec calme et à l'aide d'arguments
fondés, on est surpris par tant de véhémence ;
ce sont souvent des objurgations, des clameurs,
des afifiriuations indignées qui ont quelque chose
d'étrange ; ce ton n'a rien de cominun avec une
discussion qui aurait pour objet d'aboutir. On
pourrait se demander s'il s'agit de sauver les
monuments historiques par les procédés qui ont
sauvé jadis le Capitole de Rome, ou bien si les
auteurs de tout ce bruit n'ont d'autre but que
d'appeler l'attention sur leur propre personne, et
de se créer ainsi une notoriété utile. Le moyen
a déjà servi quelquefois, et c'est peut-être, pour
les impatients, un des plus commodes.
C'est ainsi qu'un périodique français, La C/iiv-
7ii(]iie des Arts, a publié, il y a quelque temps,
une suite d'articles sur tout ce qui se fait en lîel-
gique dans le domaine de l'art, et notamment
sur la restauration des monuments. La ]3elgique
est un petit pays, très vivant, très artiste, et qui,
malgré les ravages des Gueux au XVI^ siècle, les
invasions de la Révolution avec ses vandalismes
et ses démolitions, a conservé encore un très
grand nombre de monuments, pour la plupart
des églises encore consacrées au culte, ou des
objets d'art qui en proviennent. C'est aussi un
pays très religieux dans les masses ; le peuple,
et ici j'entends toutes les classes de la société,
s'accommoderait fort mal d'un régime qui ne
verrait dans les édifices du culte que diis monu-
ments du passé, n'existant que pour le plaisir
des curieux et des archéologues : ce sont à ses
yeux des monuments vivants ; le peuple y va
prier, méditer et rendre gloire à Dieu, comme
l'ont fait les générations qui l'ont précédé ; il
veut les entretenir, les conserver et les orner,
pour les générations qui viendront s'y age-
nouiller à leur tour.
J'admets qu'il peut y avoir dans la minière de
réparer, de consolider, de restaurer, — puisque
c'est le mot consacré, — les monuments, certaine
divergence de vues. Un architecte de beaucoup
de talent, mais surtout archéologue de haute
science, VioUet-le-Duc, écrivait, il y a quarante
ans, en parlant de « restauration », que le mot
et la chose sont modernes. Cela est exact. Mais
après bien des tâtonnements, des erreurs et des
systèmes, on est généralement d'accord aujour-
d'hui sur les principes d'une bonne restauration.
En Belgique, les travaux d'entretien, de déco-
ration et de restauration des édifices du culte et
des monuments publics, se font sous la sur-
veillance de la Commission royale des monu-
ments, aidée des Comités, de correspondants
provinciau.K ; naturellement, on choisit pour les
travaux de cet ordre, les arciiitectes les plus
capables, et, notamment, les artistes qui se re-
commandent par leurs études archéologiques.
A lire les articles de la Chronique des Arts,
tout ce qui se fait dans ce domaine est mauvais,
de tous points blâmable.
* *
« En Belgique, dit l'écrivain belge qui tient la
plume à la Chronique des arts et de la curiosité,
toutes les églises, tous les édifices présentant un
caractère d'art sont signalés pir des Comités
provinciaux à la Commission royale des monu-
ments ; celle-ci, pour prouver son activité et
assurer la parfaite conservation de l'édifice si-
gnalé, ne trouve généralement rien de mieux
que d'en demander une restauration totale, —
vœu toujours ratifié par le gouverneinent. »
Ce sont là autant d'erreurs (jue de mots.
M. h'icreus-Gevaert a le malheur d'affirmer tou-
jours sans rien prouver. Il s'avance avec une
£0élange0.
o o r
^o5
étourderie vraiment incroyable sur des terrains
qui lui sont inconnus, et croit suppléer à des
informations précises par des objurgations et des
critiques qui n'ont aucun fondement. Il parle des
monuments belges et de leur restauration, comme
il écrivait naguère de l'introduction de la couleur
à l'huile dans la peinture murale en Italie par
Baldovinetti. — Un de nos collaborateurs, M.
Gerspach, qui connaît la Toscane et ses peintres
au bout des doigts, s'est chargé de lui démontrer
combien l'assertion était inexacte.
Aujourd'hui je suis obligé de répondre à
M. F.-G. que tout, dans le passage cité, est
inexact (').
La Commission royale des monuments est une
commission consultative ; elle a très rarement une
initiative à prendre, en ce qui concerne la res-
tauration des monuments ; encore moins les
Comités provinciaux. Elle donne son avis, lorsque
le ministre le lui demande ; elle examine les plans
qui lui sont soumis, et en surveille au besoin
l'exécution. Tous ceux qui connaissent l'esprit
qui anime cette Commission, savent qu'il est
essentiellement conservateur ; son principe est
qu'au point de vue des restaurations, c'est dans
le monument même qu'il faut en chercher les élé-
ments, comme style, comme matériaux et comme
dispositions. Elle sait parfaitement que la restau-
ration la plus sobre est toujours la meilleure.
Mais encore une fois, les édifices civils et
religieux en usage, les hôtels de ville, les églises
affectées au culte doivent être traités dans des
conditions particulières. On ne peut les con-
sidérer comme objets de musée intangibles, ni
comme l'ornement d'un paysage dont le but
suprême serait d'alimenter les rêveries du tou-
riste. Une paroisse devient plus populeuse, sou-
vent i! faut agrandir l'église — cela s'est fait
partout et à toutes les époques de l'art. Pour
conserver un monument civil longtemps aban-
donné, ou qui a servi de magasin, il faut lui
trouver une affectation et l'approprier, dans les
meilleures conditions de l'art, à sa nouvelle desti-
nation. Cela est élémentaire; et presque toujours
un architecte habile peut concilier l'esprit de
I. Notre Secrétaire, M. Cloquet, a convaincu d'inexactitude
M. F.-G. par une série de faits, dans notre fascicule de janvier,
pp. 82 et ss. Il les précise encore davantage dans la présente
livraison.
conservation et le respect de l'art avec les con-
ditions d'utilité.
En se livrant à ses passes d'armes contre tout
ce qui se fait dans son pays pour la conserva-
tion et la restauration des monuments, le grand
redresseur de torts prend devant les lecteurs
de la Chronique des arts des attitudes un peu
risquées, et qui ne laissent pas d'inspirer une
certaine gaîté.
On sait que la Belgique possède encore un
petit nombre de ruines d'abbayes, d'églises,
de châteaux féodaux, pittoresques, intéressantes
au point de vue de l'histoire, souvent instruc-
tives pour l'archéologue et l'artiste. L'état de
ruine de ces monuments date généralement
de la même époque, celle de la Révolution,
et si on les abandonne à leur destinée, ils ne
tarderont pas à disparaître du sol, après avoir
figuré quelques années comme amas de décom-
bres. Les plus remarquables sont les abbayes de
ViUers, d'Aulne et d'Orval ; les châteaux de
Bouillon, des comtes de Flandre à Gand, de
Franchimont près de Spa, de Moha et de Logne
dans la province de Liège. Les antiquaires et
tous ceu.x qui s'intéressent à l'histoire du pays,
se sont émus à juste titre, voyant d'année en
année s'amoindrir, tomber pierre à pierre et enfin
s'écrouler ces restes encore imposants et, au
point de vue de l'art architectural, d'une haute
valeur.
Le Gouvernement, d'ailleurs incité, sollicité de
toutes parts, a consenti, — non à la restauration
de ces ruines, — mais il a accordé des alloca-
tions pour des travaux de consolidation, de
soutènement, de déblais et, dans certains cas,
de fouilles. Ces travaux se font sous la surveil-
lance de la Commission royale des monuments,
avec le concours de tous les hommes soucieux
du passé ; ils sont dirigés avec prudence et
économie.
Semblable préoccupation et les soins donnés à
la conservation de cette catégorie de monuments
ne semblent pas le fait d'esprits terre à terre,
absorbés tout entiers par le soin des intérêts ma-
tériels. Il semble qu'il y aurait lieu d'applaudir
à des travaux de cette nature et de savoir gré à
KttVUK DE LAKT CHKÉliEN.
IQOI. — 3""® I.IVKAISON.
236
jRebue ïir l'^rt rbrcttcu.
un gouvernement qui y consacre les allocations
nécessaires. Ce n'est pas ainsi que l'entend
l'écrivain de la Chronique des arts: à la vue
de ces travaux, il est sur le point de tomber
en pâmoison; il avoue ingénument qu'il en perd
la tête; écoutez plutôt :
« Mais où la raison se perd, où l'on ne trouve
plus l'ombre d'une explication, où l'on se sent en
présence d'une négation absolue non seulement
de l'art, mais du plus simple bon sens, c'est
devant les restaurations de ruines ! On restaure
les ruines des célèbres abbayes d'Aulne et de
Villers. C'est un crime, une profanation. Il n'y a
donc personne en Belgique parmi les membres
du Gouvernement et des Commissions compé-
tentes pour sentir le profond ridicule qui s'at-
tache à la réunion de ces mots : restauration de
ruines ! »
Pardon, il y a en Belgique, même dans les
Commissions compétentes, des hommes parfaite-
ment à même de voir le ridicule où il se trouve,
et même de s'amuser beaucoup de ces écrivains
indignés s'armant de leur plume comme d'une
férule, qui pourrait leur être appliquée à leur
tour. Les étrivières sont parfois un très bon
instrument d'éducation.
*
* *
L'éducation artistique de M. F.-G. n'est pas
encore complète. On me permettra, pour y
ajouter quelque chose, de recourir à quelques
souvenirs de voyage :
Il y a dix-huit mois à peine que, revenant de
Constantinople et me trouvant à Athènes,
comme tous les voyageurs, mon premier soin
fut de monter à l'Acropole.
Ce n'est jamais sans émotion et sans un véri-
table recueillement que l'artiste, l'archéologue,
ou simplement l'homme instruit, aborde cette
incomparable citadelle athénienne, véritable
sanctuaire de ce que l'antiquité nous a laissé de
plus magnifique, réunion d'édifices échelonnés
le long de la voie sacrée, sinon les plus anciens,
du moins les plus célèbres du monde! Avant
d'arriver aux Propylées, qui forment comme le
frontispice de cet ensemble de tant de ruines et
de tant de grandeurs, je fus obligé, à mon regret,
j'en conviens volontiers, de longer un petit che-
min de fer de service, où une série de wagonnets
chargés de blocs de marbre etd'autres matériaux,
se trouvaient en destination de la montagne
sacrée. Je me souvins alors, qu'il y aura bientôt
un siècle. Chateaubriand, passant par le même
chemin, devait enjamber les décombres clas-
siques, et chercher parmi les bastions turcs et
les batteries garnies de canons, les temples
dévastés et les monuments en ruines du temps
de Périclès et de Phidias. Les souvenirs de
ritiuéraire de Paris à Jérusalem me revenaient
à l'esprit, et j'avoue que j'eusse préféré peut-être
accompagner l'auteur du Génie du Christianisme
dans l'étude des monuments que j'allais com-
mencer.
Mais enfin les braves Turcs ayant été balayés
un beau jour, on balaya ensuite leurs installa-
tions belliqueuses, leurs batteries, leurs retran-
chements, les travaux si pittoresques de leur éta-
blissement, on démolit la mosquée qui, dans le
Parthénon même, avait succédé à l'église byzan-
tine établie par les ducs d'Athènes. La civilisa-
tion et la science de l'antiquité s'établirent sur le
plateau sacré. 11 y avait beaucoup à faire. Aussi
les travaux commencés depuis plus d'un demi-
siècle se poursuivent encore. J'ai trouvé, hélas!
bonne partie de la façade ouest du Parthénon
échafaudée ! Une partie était étrésillonnée au
moyen de croix de Saint-André établies entre
les colonnes en marbre pentélique, dont plu-
sieurs sont cerclées en fer, avec des coins de
bois chassés dans les cannelures !
En examinant l'une après l'autre ces admi-
rables ruines, je pus me convaincre qu'on y
travaillait ; je savais d'ailleurs que la plupart
avaient été l'objet de quelque chose de plus que
des réparations. Je vais citer quelques-unes de
ces « réfections ». Aussitôt que l'on est arrivé aux
Propylées, par le passage que l'on nomme la
porte Beulé, nom du savant qui a fait de si sa-
vantes études sur les monuments grecs, on arrive
au charmant petit temple de la Victoire Aptère
(la Victoire sans ailes), dont la construction est
probablement antérieure à Périclès ; il se dresse
presque fièrement, et comme en vedette, auprès
des Propylées.
Or ce petit temple avait été démoli en 1617,
£©élanges.
'■6i
(en 1751, on n'en voyait plus que les fondations
à ras du sol). Il a été relevé dans les années
'S3S-36, par l'archéologue L. Rofs, et deux
architectes du nom de Schaubert et Hansen ; ils
en avaient recherché tous les fragments avec
grand soin dans les décombres, et surtout dans
les débris d'une batterie turque élevée en 1687.
Cette restitution s'est poursuivie avec un tel désir
de rétablir ce qui a préexisté, qu'une partie de la
frise qui courait autour du temple au Nord et à
l'Ouest ayant été enlevée par lord Elgin, et se
trouvant actuellement au Musée britannique, on
a fait exécuter à Londres des moulages en terre
cuite, pour les mettre à la place des sculptures
originales !
Les travaux de consolidation, qui se faisaient
au Parthénon au moment de ma visite, sont dus
en grande partie à l'initiative de M. Magne; ils
ont été commencés au mois de janvier 1896.
On travaille encore à l'Erechthéion, ce temple
si original, avec son délicieux portique aux
cariatides. Cette besogne de longue haleine a été
commencée en 184,?. C'est à l'initiative de la
France que le travail a été entrepris; le déblai, qui
a duré quatre ans, s'est fait sous la direction de
M. Paccard, qui fit relever le célèbre portique
dont on voit aujourd'hui des moulages dans tous
les musées importants de l'Europe. L'Angleterre
contribua à cette réparation par le moulage,
également en terre cuite, de l'une des cariatides,
dont l'original se trouve au Musée britannique.
Enfin, si nous descendons de l'Acropole
dans l'ancienne ville d'Athènes, nous trouvons
dans la rue des Trépieds, le monument si connu
de Lysicrate, appelé aussi la lanterne de Diogène;
lord Byron avait eu l'idée originale d'y établir
sa bibliothèque, qui, alors, ne devait pas être
bien volumineuse ; le monument a été réparé
deux fois au siècle dernier, en 1845 et en 1892
aux frais du gouvernement français, dont il est
resté la propriété, constatée par une inscription ;
la France, ajuste titre, s'en fait un honneur. Elle
n'a pas fait l'acquisition du temple pour le
dépecer et en emporter les débris chez elle,
mais elle le couvre de sa protection, le conserve
et le répare à ses frais, lorsque cela devient
nécessaire.
Je pourrais continuer pendant quelques co-
lonnes l'histoire de <i la réparation de ruines » ;
mais je pense qu'en voilà assez pour imposer
une sourdine aux clameurs de M. F.-G.
Si nous ajoutons maintenant qu'Athènes est
devenu depuis de longues annéesl'objectif de tous
les savants du monde, que ses monuments sont
l'objet d'études continuelles, persévérantes, pour-
suivies avec piété, je dirais presque avec idolâtrie;
qu'il existe, dans cette ville, une École d'Athènes
française, un institut archéologique allemand,
que les élèves de l'École française à Rome )' ont
fait une série de restaurations sur le papier des
monuments les plus remarquables, et qu'enfin
tous les travaux de réparation, de consolidation,
de fouilles et de réfection, comme on voudra les
appeler, se poursuivent depuis plus de 60 ans
sous les yeux d'archéologues d'une autorité in-
contestable et incontestée, on peut juger l'impor-
tance que l'on ajouterait aux objurgations de
M. F.-G. citées plus haut. C'est tout au plus si
on les accueillerait avec un rire qui, pour rester
dans le ton local, serait « homérique ».
Et que l'on ne s'imagine pas que ces travaux
destinés à conserver des monuments qui ont plus
de vingt-cinq siècles d'existence, compromettent
l'impression produite sur l'âme du spectateur :
l'effet reste imposant, grandiose, saisissant! C'est
à peine si le visiteur de l'Acropole, même pré-
venu, s'en aperçoit ; n'étaient les rails du chemin
de fer dont il vient d'être question, et quelques
blocs de marbre dont la blancheur trop éclatante
détonne auprès de ces colonnes aux tons
d'ambre avec des reflets roses, le voyageur qui
survient à l'heure oii les ouvriers ne sont pas à
leur besogne, peut croire que presque rien n'a été
fait pour conserver les ruines grandioses à la
science de l'antiquité et aux générations futures;
l'impression reste prestigieuse.
Je n'en veux d'autre preuve que les accents
pleins de lyrisme d'un voyageur qui a visité le
Parthénon, il y a deux ans : écoutez plutôt.
« Ah ! que Renan a raison quand il écrit : « Il y
a un lieu oi^i la perfection existe : il n'y en a pas
deux : c'est celui-là. Je n'avais jamais rien imagi-
né de pareil. L'idéal cristallisé en marbre pen-
télique qui se montrait à moi. Jusque-là j'avais
cru que la perfection n'est pas de ce monde...
Voici que se révélait à moi le miracle grec, une
chose qui n'a existé qu'une fois, qui ne se reverra
plus, mais dont l'effet durera éternellement, je
238
iltbuc tic V^xt cbvcricu.
veux dire un type de beauté éternelle, sans nulle
tache locale ou nationale... » L'image, la photo-
graphie, le tableau, la description, tout cela est
absolument impuissant à donner l'impression de
la réalité. Il faut voir
« Le Parthénon, chef-d'œuvre de grandeur et
de force : l'Erechtéion, réalisation de l'idéal
ionien. Le Parthénon et l'Erechthéion : double
cristallisation du génie grec ('). »
*
* *
*
* *
Mais avant de s'en prendre, avec autant d'au-
dace que de légèreté, à des travaux de même
nature, entrepris dans son propre pays, avec
infiniment plus de réserve et de circonspection,
l'auteur des articles de la Chronique des Arts
devrait, non aller en Grèce et en Turquie, —
dans ce dernier pays on suit le système de
conservation qu'il préconise — ce serait peut-
être le condamner à un voyage un peu lointain.
Le gouvernement belge fait en ce moment répa-
rer, consolider, étançonner les ruines de quelques
abba}-es qu'il est très désirable de conserver le
plus longtemps possible. Mais que M. F. G.
prenne donc la peine de passer la Manche et de
voir ce qui se passe en Angleterre, le pays le
plus intelligemment conservateur, le plus sou-
cieux de ses anciens monuments, qui existe.
Là, il trouvera une série de ruines grandioses
d'abbayes qui, pour la plupart, appartiennent à
des particuliers ; on ne les restaure pas, à la vé-
rité, pas plus que l'on ne songe à restaurer les
ruines d'abbayes en Belgique ; mais on a eu soin
d'en déblayer les décombres, d'étayer les murs
menaçant ruine, de replacer les pierres qui tom-
bent, en un mot, de les entretenir et de prendre
toutes les mesures nécessaires pour en assurer
la durée. On les entoure de plantations charman-
tes, et si peut-être, comme l'église de rabba}'e.
d'Aulne, elles semblent parfaitement disposées
pour y donner des conférences sur l'art, elles
peuvent aussi, tout en conservant la poésie
qu'inspirent les ruines, surtout lorsqu'elles sont
entourées de végétation, être étudiées avec
grand fruit par les architectes anglais, qui ne
s'en font pas faute, et par les archéologues de
toutes les nations.
I. Cyr. Van Overbergh, Dans le Levani ; SraxeUes, 1899, p. 205.
Mais en Belgique on commet encore cette
chose insensée, ce crime, cette profanation de
restaurer les ruines de quelques châteaux
féodaux ! A Gand, on a déblayé, dégagé par des
fouilles, le château des Comtes qui, enterré sous
des décombres, enfoui sous d'infectes masures,
caché par d'affreux bouges, était ignoré de tout
le monde ; on a mis au jour et consolidé les murs
branlants et dégagé une série de constructions
grandioses dont l'étude forme une véritable évo-
cation de l'histoire ; tout ce travail a été conduit
avec infiniment de soin, de tact et de discrétion
par M. l'architecte de Waele, qui, dans les cas où
une reconstruction était nécessaire, a cherché
dans le monument lui-même les détails de la
restauration. Il en est de même du château de
Gérard le Diable, restauré avec beaucoup de
science par M. Verhaegen.
Tout cela, comme d'ailleurs tout ce qui se fait
en Belgique dans ce genre, ne vaut absolument
rien ; car c'est chose convenue : restaurer des
ruines est une aberration qui ne peut se justifier
aux )'eux du bon sens.
Puisque M. F.-G. a le bonheur d'être éclairé
par le soleil de la France, ce qui lui donne
assurément une supériorité manifeste sur les
régions brumeuses où il a eu l'inconvénient de
naître, je vais lui signaler quelques excursions où,
sans sortir du pays où paraît La Clironùpie des
Arts, il pourra trouver l'occasion de s'élever
contre l'absurde manie de restaurer des ruines.
Qu'il prenne un beau matin le train à Paris : en
peu d'heures il pourra se transporter au château
de Pierrefonds, dont ce malheureux VioUet-le-
Duc a complètement restauré les ruines, au point
de les rendre habitables.
— Si M. F.-G. préfère prendre une autre
direction, qu'il aille en Normandie, où un archi-
tecte dont il ignore probablement le nom, M.
Ruprich-Robert, a été, dès 1864, chargé de
restaurer les ruines du château de Falaise.
Après avoir reconnu combien ce travail est
insensé, il pourra continuer sa route jusqu'au
Mont St-I\lichel, oîi depuis une série d'années
on commet le double sacrilège tie restaurer un
monument qui est à la fois une abbaye et un
château-fort. Ce travail absurde a été confié à des
09é!ange0.
239
hommes sans valeur comme MM. Corroyer et
Petitgrand. Si M. F.- G. tient à trouver les élé-
ments d'un nouveau réquisitoire contre la restau-
ration des ruines en se dirigeant vers le Midi, je
lui enseignerai les remparts de Carcassonne,
restaurés par les soins de Viollet-le-Duc, déjà
nommé.
Je pourrais continuer encore quelque temps le
répertoire des méfaits de même nature, perpétrés
en dehors de Belgique. Mais je remarque que
mes souvenirs de voyage m'ont vraiment entraîné
si loin que le lecteur pourrait bien ne plus me
suivre. Il me faudra cependant bien rentrer dans
ce pays pour y examiner à la suite de M. F. -G.
tous les actes qui, sous prétexte de restauration,
se commettent avec le concours des Commis-
sions officielles, sous les yeux du gouvernement.
Je compte y revenir dans un prochain fascicule
de cette Revue.
J. Helbig.
■■':^ ^^ ^ ^^ ^ ^^ -'^ ^. ^ ^ ^ ^ "^ -^^^ -^^ ^^.^^^^ ^^ ^ ^^ ^^:^^^kj^^
wm^^mmm^ Ccrrcspoulianfe. wmwmmmwm
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Italie, -v^.— .— -— —
HlorfiifC : lia cloche Bu Ealaia Bu BoBcetat. — lia
Cantoria Bc DonatcUo. Ita manufacture ropaU te
picma Burca. — lîaplcjf : lia peinture Be Boscoreale. —
Un tableau Be JSimonc ffiartino.— Boinc : liea ftraquca
Bc l'ccliat' Bc Bamte=CeciIc. — Ji'roliae Bc Saint»
BilUCfltrc. — lica bécouocrtca Dana l'ésliec jSaintc^ffiaiic
liiberatricc au Eotum. - li'eBliac JSainte^HBnèa. —
lie château Saint^Hnee. ~ Bf^'e : lica freaquca Bc
BcnoMo Oloiîoli.
J^/o/i'/u'e.
Î'AI reproduit dans la livraison de
juillet de notre i'?^'?'//^ l'inscription de
la cloche de San Severino (Marches).
Depuis lors la Revue a fait connaître
d'autres inscriptions de ce genre ; en voici une
dont on a parlé dans ces derniers temps, la
cloche ayant sonné le passage du XIX« au XX^
siècle.
A la vérité c'est une cloche laïque, mais elle
présente néanmoins de l'intérêt.
Le palais du Podestat à Florence, également
nommé Bargello, est muni d'une tour qui ren-
ferme une cloche portant en relief l'inscription
suivante :•
A. D. MCCCLXXXI
Mentem. Sanc'tam. Spontaneam
HONOREM DEO AC PATRIE LIBERATION EM.
M.\TTEO DEL TEGIIIA
LINAIUOLO GONFALONIERE DI GIU.STIZIA
Francesco DI Giovanni di ser Sengnia
PlETRO DATINI I3ICHIERAIO
Mesere Giovanni Rinucci
Mesere Gucci coregiaio
Mesere Pazzino degli Strozzi
Léo di Lapo di Neri rimediatore
Giovanni di Niciiola tintore
Giovanni Giuntini
Maestro Riciio di Lapo
Domenico suo kigliui.o da Firenze
ME FECIT.
Voilà donc une cloche fondue en l'iionneur de
Dieu et de la liberté de la Patrie, sur l'initiative
de quelques citoyens, dont plusieurs ont eu soin
de marquer leurs professions ; dans nos mœurs
actuelles, elles peuvent nous paraître dépourvues
de prestige, mais alors, au XIV'= siècle, tous les
inétiers étaient honorés à Florence, car tous
prenaient une part plus ou moins grande au
gouvernement de la République.
On remarquera que Matteo del Teghia, Gon-
falonier de justice, était liiiaiii/o, fabricant de lin ;
Datini était bicliicraio, cabaretier ; Gucci était
coregiaio, bourrelier ; Nicholas était tintore, tein-
turier; Lapo di Neri était rimediatore, ravaudeur.
Tous faisaient partie des Arti, corporations,
qui ont administré Florence et sa politique pen-
dant plus de deux siècles, et qui ont puissam-
ment contribué à la floraison des beaux-arts et
notamment à l'édification et à la décoration des
églises.
Je me propose de publier, cette année, dans la
Revue, un travail sur ces Arti en général et par-
ticulièrement sur l'église d'Or San Michèle, qui
leur doit les statues qui décorent ses surfaces
extérieures.
Le musée national de Dublin a acheté la
reproduction de la Cantoria de Donatello que la
maison Bondi de Signa, près de Florence, avait
envoyée à l'Exposition de Paris.
Donatello et Luca délia Robbia avaient été
chargés de deu.x tribunes d'orgue pour Sainte-
Marie des Fleurs ; elles furent placées en 1433
et 143S.
Enlevées en 16S8, elles ont de notre temps
été mises au Musée ilu Bargello, puis au Musée
de l'Opéra du Dôme, où elles sont actuellement.
Le musée de Dublin a été bien inspiré ; la
reproduction est d'une fidélité absolue.
Les deux tribunes sont des ouvrages absolu-
ment hors ligne ; les bas-reliefs très accentués
présentent des groupes d'enfants symbolisant la
musique sacrée.
J'ai déjà eu l'occasion de signaler la transfor-
mation opérée dans l'organisation de la Manu-
facture royale de pierres dures de Florence,
fondée comme institution d'Etat, en 1588, par le
grand-duc P'erdinand de Médicis.
On a senti que le travail d'incrustation de
pierres dures avait fait son temps, l'industrie
Correspondance.
241
étant arrivée à la perfection du genre et n'ayant,
par suite, plus besoin d'être guidée par un
établissement officiel.
La Manufacture alors, pour justifier son exis-
tence, se mit, sous l'habile direction du chevalier
Marchionni, à la restauration d'anciens ouvrages
de céramique, de marbre, de métal, de mosaïque,
etc.; elle a travaillé pour Ravenne, Poppi, Al-
benga, Livourne, la chartreuse d'Ema, les églises
Santa Croce et San Ambrogio de Florence, etc.,
etc. Comme ouvrage de fond et de longue
haleine, elle a entrepris le parquet de la cha-
pelle des princes à Saint-Laurent de Florence
et la restauration de l'importante mosaïque du
baptistère de Saint-Jean ; ce dernier travail l'oc-
cupera encore au moins huit ans ; nous y revien-
drons.
Il faut reconnaître que l'idée d'abandonner
une fabrication surannée et de la remplacer par
des travaux utiles, est des plus heureuses.
Naples.
Les peintures murales de Boscoreale. Il a été
beaucoup question de cette découverte, mais,
comme d'habitude, du reste, les journaux se
sont trop hâtés de conclure.
M. de Prisco, député au parlement italien, est
propriétaire du sol près de Pompei où la décou-
verte a été faite ; il nie absolument avoir reçu
une offre d'acquisition de l'empereur d'Alle-
magne.
On a dit que les parois décorées de peintures
ayant été détachées de l'immeuble, sont par ce
fait devenues meubles et que par suite M. de
Prisco était libre de les exporter à l'étranger ;
c'est une erreur.
D'après la loi italienne en vigueur, aucun objet
d'art antérieur au XIX*= siècle ne peut être
exporté, sans autorisation préalable du gouver-
nement.
On a parlé des édits des cardinaux Doria et
Pacca, ignorant ou oubliant que ces édits, non
abrogés à la vérité, n'étaient applicables qu'aux
anciennes provinces pontificales, et que par
conséquent, ils ne peuvent atteindre les objets
existant à Boscoreale.
L'église San Lorenzo Maggiore de Naples
possède un tableau du peintre de Sienne
Simone Martino (1284- 1340), représentant saint
Louis de Toulouse assis sur son trône épiscopal,
en action de remettre la couronne de Sicile à
son frère Robert d'Anjou ; sur la prédelle sont
peints divers épisodes de la vie du Saint ; le
tableau porte : SIMONE de SEXIS ME
PINXIT. L'ouvrage est réclamé par le musée
royal de Naples ; en principe il est à désirer
que les tableaux restent dans les églises, mais à
San Lorenzo la peinture en question est placée
dans une chapelle obscure où on a de la peine
à la découvrir.
Nul saint d'origine française n'a en Italie un
aussi grand nombre d'effigies que saint Louis,
évêque de Toulouse. On le trouve soit en robe
de franciscain, soit en habits pontificaux dans la
basilique d'Assise par le même Simone ; à Santa
Croce, à Florence, par Giotto, à Pistoia, à
Atezzo, à Citta di Castello, à Trevi, etc., etc.
Donatello a fait deux fois sa statue ; l'une est
à Santa Croce de Florence, l'autre à Saint-An-
toine de Padoue.
Le Saint, qui avait été fait évêque à l'âge de
vingt ans par le pape Boniface VII I, a été cano-
nisé en 13 17. Il a relativement peu vécu en Italie,
mais ses vertus et sa charité l'ont vite rendu très
populaire.
Rome.
La découverte récente de fresques à l'église
Sainte-Cécile a donné lieu à des erreurs, même
dans les journaux italiens, et le sujet a été très
incomplètement décrit ; je complète et je rectifie.
La fresque représente Jésus-Christ sur un
trône décoré de pierres précieuses ; au-dessus du
Sauveur planent huit anges, quatre de chaque
côté.
A droite du trône était la Vierge en prière,
mais une partie de la peinture est perdue ; saint
Paul et cinq apôtres subsistent.
A gauche : saint Jean-Baptiste, saint Jean
évangéliste et quatre apôtres.
Tous les apôtres sont assis.
Il ne paraît pas contestable que la fresque soit
de Pietro Cavallini (1260- 1344), mais ce qui est
difficile de comprendre, c'est qu'on ait imprimé
qu'on ne connaissait jusqu'à présent de Cavallini
que les mosaïques de Sainte-Marie au Transte-
vère, de Saint-Paul-hors-les-Murs et de Saint-
Chrysogone.
242
Btliuc tie rSvt cbvcticu.
Pour la vie de la Vierge, ce n'est pas douteux ;
les six tableaux en mosaïque, — car ce sont déjà
des tableaux, — sont incontestablement de Caval-
lini ; de ce qu'il a pu faire à Saint- Paul-hors-les-
Murs, il ne reste rien, l'incendie de 1823 ayant
presque tout détruit de l'ancienne décoration
peinte ou en mosaïque. La mosaïque de l'église
Saint-Chrysogone est du XI I" siècle, elle montre
la Madone sur un trône, entre l'éponyme et
saint Jacques ; les figures sont vulgaires et roides,
sans aucune analogie avec le style de Cavallini,
souple et manifestement inspiré par l'étude de
la nature.
Certes un grand nombre de peintures de
Cavallini sont perdues, mais dire que ce peintre
n'est connu que par ses mosaïques, c'est aller
vraiment trop loin.
Des nombreuses peintures qu'il a exécutées à
Florence, il reste à l'église San-Marco une Aniioit-
ciation, toujours recouverte et le musée de l'Aca-
démie conserve une grande icône provenant
de la basilique de Santa Maria Novella ; elle
montre en trois compartiments : V Annonciation
et des groupes de Saints.
Mais c'est dans l'église inférieure d'Assise que
Cavallini se manifeste surtout ; il a peint là
une Crucifixion de grande beauté, con lioinini a
cavallo armati in varie foggie, e con iiiolta varieta
d'abiti stravaganti e de diverse nazioni straniere,
comme l'écrit Vasari.
Je ne parle que des peintures de Cavallini que
je connais, mais probablement il en existe d'au-
tres.
A la liste des églises déjà indiquées qui sont
l'objet de restaurations, il faut ajouter San Syl-
vestre in Capite, située près du Corso. Des tra-
vaux d'édilité exécutés contre le campanile ont
rendu nécessaire la consolidation du monument.
L'origine de l'église est incertaine, mais elle
est regardée comme une des plus anciennes de
Rome. On croit qu'elle fut édifiée en 261, par le
pape S. Denis, et restaurée par le pape Sym-
maque, en 500. Abandonnée ou concédée à des
moines grecs, le pape S. Paul la fit reconstruire
en 757. Abandonnée de nouveau, le pape Inno-
cent III en ordonna la réparation en iigSà
l'architecte Marchioni d'Arezzo ; c'est de cette
époque que date le campanile. Au XVIIe siècle
le pape Innocent XI la concéda aux religieuses
de Sainte-Claire qui la firent décorer de tableaux
du temps ; la façade de la fin du XVI L' siècle
est de Jean de Rossi.
L'église est dédiée à saint Sylvestre, pape, et à
saint Etienne ; elle est cardinalice.
Elle conserve les restes de plusieurs papes et
la tète de saint Jean-Baptiste depuis le XIII^
siècle, d'où son nom in Capite.
J'ai déjà dit quelques mots des découvertes
faites dans la démolition de l'église Sainte-Marie
Libératrice au Forum.
En raison de l'importance exceptionnelle de
cette excavation, le ministre a nommé une com-
mission spéciale composée d'architectes, d'ar-
chéologues et de peintres pour étudier les moyens
de conservation des fresques.
La commission a décidé que les fresques et les
autres objets découverts devaient rester en place
et être mis à l'abri sous un édicule.
Une inscription provenant sans doute d'un
ambon en marbre porte en latin et en grec :
>b JOHANNES SERVVS SCAE MARIAE
►J. hJANNOV AOVVOV THC eEtJïOKOV
Les archéologues sont d'accord sur la portée de
ce texte : l'église est du pape Jean VII (pontificat
de 705 à 707) ; elle est mentionnée au Liber
Pontificalis au chapitre de ce pontife.
Je vais aller exprès à Rome, pour étudier
ces fresques ; mais je suis informé qu'il n'en
existe pas de photographies et qu'il est défendu
d'en faire.
Aux églises de Rome, mentionnées précé-
demment, comme étant l'objet de restaurations
il convient d'ajouter l'église de Sainte-Agnès,
située sur la place Navona. (Circo Agonale.)
La sainte vierge et martyre est particulière-
ment vénérée à Rome.
L'empereur Constantin, à la prière de sa
fille Constance, fit bâtir sur la voie Nomentane
une église en son honneur, dans le cimetière où
fut trouvé le corps de la Sainte.
Dans l'intérieur de Rome, le pape Sixte V
(pontificat de 1585 à 1 590) éleva sur la place
Navone un petit temple à l'endroit où sainte
Agnès, selon la tradition, fut conduite pour être
Correspondance.
243
flétrie, mais elle fut sauvée du déshonneur mi-
raculeusement.
Le pape Innocent X (pontificat de 1644 à
1655), dont la famille Pamphili possédait un
palais attenant an temple, fit démolir entière-
ment l'édifice de Sivte V et construisit une église
nouvelle; il voulut y être enterré ; son tombeau
est de J.-B. Maini.
Les peintures de la coupole sont de Ciro
Ferri (1634 >i* 1689), l'auteur de plusieurs modè-
les de mosaïque de la basilique de Saint- Pierre,
notamment de celles de la chapelle du chœur
représentant VÉternel sur un trône, soutenir
par des nuages et les animaux évangéliques selon
le texte de l'Apocalypse; cette mosaïque compte
parmi les bonnes de la basilique.
La peinture de Ciro Ferri est le meilleur ou-
vrage d'art de l'église de Sainte- Agnès.
Le château Saint-Ange, l'ancien mausolée
d'Adrien, est peu visité ; on ne peut le reprocher
aux touristes, ils ont tant à faire à Rome!
L'administration militaire, qui détient le mo-
nument, en a facilité la visite.
Ceux qui en ont le temps pourront aller
revoir l'appartement du pape Paul III (Alexan-
dre Farnèse) — pontificat de t535 à 1550 —
décoré de peintures par Pierino del Vaga, Jean
d'Udine et d'autres peintures du XVI'= siècle.
Comme dans bien d'autres localités, plusieurs
fresques ont été recouvertes d'un badigeon ; on
se préoccupe de les remettre au jour.
Pise.
Le Campo Santo ne cesse depuis bien des
années de donner grand souci à l'office des
Monuments nationaux chargé de sa conserva-
tion.
Les murailles prennent l'humidité, et les fres-
ques se détériorent.
J'ai indiqué, dans la Revue de mai 1899, les
procédés employés par M. Fiscali pour sauver
les fresques d'Antonio Veneziano (i3i9*î< 1383),
représentant la mort de San Ranieri, patron de
Pise.
Maintenant ce sont les fresques de Benozzo
Gozzoli (1420 <^ 1498) qui sont en péril.
On sait qu'elles montrent l'histoire de Noé,
celles d'Abraham, d'Isaac et de Rébecca, de
Jacob et d'Esau,etc., etc.
Les peintures, qui demandèrent à Gozzoli
seize ans de travail, sont d'une main légère et
d'une coloration adoucie. Elles ont donné lieu
déjà à bien des tentatives de conservation ; une
fois, notamment, en ce siècle, on les a recouvertes
en partie d'une sorte de vernis qui n'a eu qu'une
portée éphémère et probablement nuisible.
A présent il faut des remèdes efficaces ; le
ministère des Beaux-Arts, dans cette vue, a
nommé une commission spéciale composée des
hommes les plus compétents en cette matière
particulièrement difficile.
Gerspach.
(Florence, mars.)
BEVUE DE l'art CHRÉTIEN
1901. — 3""' LIVRAISON.
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Société des Antiquaires de France. —
Séance du 23 janvier içoi. — M. Durrieu signale,
comme un fait curieux pour l'histoire de la li-
brairie parisienne dans la première moitié du
XlVe siècle, la présence à Paris, à cette époque,
d'un nombre considérable de copistes anglais.
Séance du jo janvier. — Présidence de M. Ba-
belon.M. Monceau discute les traditions relatives
à la légende des Martyrs d'Utique.
M. L. Poinsot fait connaître et commente des
inscriptions latines provenant de Mesiè et four-
nissant des renseignements sur la mythologie
des provinces danubiennes, en particulier sur une
forme locale du culte d'Hercule.
M. Vitry étudie des inscriptions plus ou moins
intelligibles en lettres très ornées qu'on voit sur
la bordure des manteaux de certaines statues de
la fin du XV-^ siècle et du début du XVI<^ siècle.
Séance du 6 février. — M. de Manteyer pré-
sente l'empreinte d'un sceau-matrice provenant
d'une collection italienne, et qu'il attribue à
Foulque le Jeune, comte d'Anjou.
M. Omont communique un recueil d'anciennes
écritures formé en vue de constituer une sorte de
traité de paléographie et dû à Pierre Hamon,
maître d'écriture de Charles IX et plus tard se-
crétaire de la chambre du roi de Jérusalem.
Séatice du 13 février. — M. Durrieu étudie les
inscriptions tracées sur les vêtements par des
peintres miniaturistes français du XV^ et du dé-
but du XVI« siècle,
M. Marquet de Vasselot signale un portrait
d'enfant du XVI<= siècle, conservé au Musée de
Versailles et qui paraît être celui d'Eléonore,fille
de Philippe le Beau, plus tard reine de France.
M. Pallu de Lessert commente une inscrip-
tion latine du IV'' siècle qui semble devoir être
attribuée au consul LoUianus Marvotius.
Séance du 2ù février. — M. Cagnat commu-
nique une inscription des ruines de Lebda en
Tripolitaine, d'après le Mercure galant de 1694.
M. de Manteyer présente de nouvelles obser-
vations sur le sceau-matrice de t'oulque le Jeune,
d'Anjou
M. Prou étudie les conditions dans lesquelles
a été rédigée une charte fausse relative à la fon-
dation de l'église St-Léonard de Bellême(Ornc).
Séance du 27 février. — M. Poinsot commente
quelques inscriptions latines de Kon Hovitza
(Médie inférieure).
M. Delaborde signale un diplôme aujourd'hui
perdu par lequel Philippe- Auguste confirme, en
II 79, un accord entre Hebes de Charenton-sur-
Cher avec l'abbaye de St-Sulpice de Bourges.
M. Monceau étudie la Vita Cypriaiii du diacre
Pontius et montre que cette relation est indépen-
dante des Acta Cypriani.
M. Toutain fait la critique des te.xtes sur les-
quels on s'appuie d'ordinaire pour établir l'exis-
tence des Druidesses dans la Gaule romaine.
Séance du 6 mars. — -M. Tardif communique la
photographie d'une inscription du moyen âge
trouvée à Saint-Pair (Manche).
M. Blanchet signale un dessin ancien du sceau
de Foulques le Jeune, reproduit dans une publi-
cation de M. Marchegay.
M. Roman signale les ruines d'un hypocauste
décoratifà Briançon.
Séance du /j mars. — M. Lafaye communique
des photographies présentant des mosaïques ro-
maines découvertes à Villelaure, arrondissement
d'Apt (Vaucluse).
M. Monceau signale un texte daté du début
du V'= siècle et qui permet de préciser l'emplace-
ment du tombeau de saint Cyprien.
M. Maurice montre, d'après des légendes de
monnaies, à quelle époque l'empereur Constantin
construisit la forteresse de Constantiniana
Daphné à la frontière du pays des Goths.
Académie des Inscriptions et Belles-Let-
tres. — Séance du /"'février içor. — M. Babe-
lon lit un Mémoire sur « la Silique et le denier
de la loi des Francs-Saliens ».
M. Héron de Villefosse transmet, de la part
de M. L. Lex, l'estampage d'une inscription
récemment découverte à Saint- Marcel-lès-Cha-
lon : Aug {usto) sacr {uni) deœ Temusioni Janua-
ris Veri fin (its) ex voto v{ptU7tî)s iolvit) l (Jbens)
)ii (erito). Le mérite de cette trouvaille réside
dans le nom, inconnu jusqu'ici, de la déesse
Temusio.
M. Théodore Reinach communique deux cu-
rieuses inscriptions grecques de la basse époque,
récemment découvertes. L'une d'Argos, fait con-
naître le nom d'un nouveau statuaire,y\rchélaiis,
et un nouveau proconsul de Grèce, Phosphonus,
que M. Reinach propose d'identifier avec l'aïeul
du fameux orateur Symmaque. L'autre, de Vyn-
dos, en Cane, découverte par M. Paton, confirme
Crat)au;i* ties Sociétés gatiaiites.
245
le témoignage du premier livre des Machabées
sur l'existence d'une communauté juive dans
cette localité ; elle fournit un nom inédit, Theo-
pimpta, et un nouvel exemple d'une femme ar-
chisynagogue, c'est-à-dire chef honoraire de la
Synagogue.
M. Thureau-Dangin présente un essai de tra-
duction de l'inscription où le souverain chaldéen
Gondia raconte un songe que les dieux lui ont
suggéré pour l'avertir de construire un temple.
M. de Barthélémy présente une brochure de
M. Adrien Blanchet, les Camées de Bourges. C'est
une note intéressante sur les gemmes qui, jus-
qu'à la fin du XVIIIs^ siècle, ornaient un reli-
quaire dit de la Croix aux camées, appartenant
à la cathédrale de Bourges.
Séance du 8 février. — M. Oniont communi-
que une lettre de M. J.-J. Smirnoff, conserva-
teur du musée de l'Ermitage àSaint-Pétersbourg,
qui signale l'existence au musée du Gymnase de
Marioupol, au Nord de la mer d'Azov, d'un
feuillet isolé du manuscrit pourpre en lettres
onciales d'or de l'Évangile de saint Matthieu,
découvert à Sinope, et acquis, l'an dernier, par la
Bibliothèque nationale. Ce nouveau feuillet, dont
une photographie a été communiquée par M. D.
Aïnaloff, professeur à l'Université de Kazan, à
la Société impériale archéologique russe de
Saint-Pétersbourg, le 4 février dernier, contient
le texte des versets 9 a 16 du chapitre 18 de
l'évangile de saint Matthieu.
M. Ph. Berger communique une lettre de M.
Perdrizet, relative à une inscription latine décou-
verte par le P. Ronzevalle, dans laquelle il a pu
retrouver la triade qui était adorée à Baalbek.
Cette triade se composait de Jupiter, Vénus et
Mercure. M. Perdrizet explique par là la pré-
sence de l'aigle tenant dans ses serres, au lieu
de la foudre, le caducée, sur le soffite de la porte
d'entrée d'un des temples de Baalbek.
M. de Vogué présente, au nom des auteurs,
MM. R. Dussaud et F. Mackler, un volume ren-
fermant le résultat de l'exploration qu'ils ont
faite en commun du Safa et du Diebel-ed-Draz,
région explorée il y a près de quarante ans par
M. de Vogiié et M. Waddington. De nombreuses
inscriptions nabatéennes et safaïtiques ont été
rapportées, qui complètent les collections anté-
rieures.
L'abbé Thédenat, après avoir rendu hommage
à la mémoire de M. Emile Pierre, dont la mort
récente a été une grande perte pour l'archéologie
de l'Est de la Gaule, présente plusieurs antiquités
que le regretté archéologue lui avait commu-
niquées.
M. P. Foucart lit une note sur une statue
égyptienne découverte en Crète par M. Evans.
Séance du 15 février. — M. S. Reinach commu-
nique le croquis de la partie supérieure d'une
statue de bronze, de grandeur naturelle, décou-
verte dans la mer auprès de l'île de Cérigo.Cette
statue, représentant Hermès dans l'attitude de
l'orateur, paraît être un chef-d'œuvre de l'art du
IV= siècle; c'est, d'autre part, la première statue
de bronze de grandeur naturelle et de l'époque
classique qui ait été découverte en Grèce.M. Rei-
nach la rapproche d'une statue analogue, qui a
été découverte en Autriche et se trouve aujour-
d'hui au musée de Vienne.
M. l'abbé Thédenat s'occupe d'une bague en
bronze, trouvée à Naix (Meuse). L'intérêt excep-
tionnel de cette bague consiste dans ce fait que
c'est le seul monument connu qui donne la
preuve, jusqu'ici inutilement cherchée, que les
Romains ont fait usage de caractères mobiles.
M. Viollet donne lecture d'une étude sur les
États-Généraux du XIV'= siècle.
M. Bertrand présente, au nom de l'auteur,
M. Forestier, un opuscule intitulé la Roue, étude
paléotechnique. On y suit les transformations de
la roue depuis les temps préhistoriques jusqu'à
nos jours ; ce travail est illustré de cent soixante
et une figures, dont quelques-unes sont particu-
lièrement curieuses.
M. Ph. Berger dépose sur le bureau les Anti-
quités puniques du musée Lavigerie, publiées par
les soins du ministère de l'instruction publique,
dans la collection des musées de l'Algérie et de
la Tunisie. Les monuments de la période romaine
et ceux de l'archéologie chrétienne avaient déjà
paru. Une introduction de M. Héron de Ville-
fosse retrace l'histoire de ce musée, dû à l'initia-
tive du cardinal Lavigerie, et donne une idée
d'ensemble des collections qui y sont réunies. Il
suffit de parcourir les planches pour se rendre
compte du progrès considérable que les fouilles
de Carthage ont fait faire à notre connaissance
de l'antiquité punique. Rien ne saurait mieux
démontrer combien l'Académie a été heureuse-
ment inspirée en subventionnant si largement,
depuis nombre d'années, les fouilles du P. De-
lattre.
Séance du 22 février. — M. Enlart commente
divers débris d'édifices français découverts ré-
cemment à Nicosie de Chypre et dont le major
Chamberlayne lui a envoyé des dessins et des
photographies. Il signale, notamment, une sculp-
ture gothique du XV« siècle représentant un
masque de satyre grec. La plus importante
de ces découvertes est celle des substructions du
monastère de Saint-Dominique où furent enter-
rés les rois de Chypre, un fils de saint Louis et
d'autres personnages illustres. Des portions du
246
Bebue De l'^lvr cbvétieu.
cloître du XIV'^ siècle ont été retrouvées et
sont intéressantes par leur ressemblance avec
le cloître de Lapais, bâti également par le roi
Hugues IV.
M. Wallon, secrétaire perpétuel, présente, au
nom de M. Mùntz, un ouvrage de IVI. Ch. Nor-
mand, la Côte nonnande à travers les âges, un
nouveau guide artistique et archéologique, avec
de nombreuses illustrations reproduisant même
les édifices disparus.
M. S. Reinach donne lecture d'une lettre de
M. Cavvadias, directeur général des antiquités
en Grèce, au sujet de quatre grandes statues
de bronze qui viennent d'être retirées de la
mer près de Cérigo. Une de ces statues, repré-
sentant Hermès orateur, ou un éphèbe tenant
une balle, est le spécimen le plus parfait que
l'on connaisse de l'art des bronziers grecs au
IV"" siècle.
La lettre de M. Cavvadias est accompagnée
de photographies qui seront publiées dans le
Bulletin de l'Académie.
Miniatures du Musée Condé. — M. Léon Dorez
essaye d'établir, à l'aide d'un travail de M. le
docteur J. de Schlosser, que les peintures sur
parchemin contenues dans les manuscrits du
Musée Condé, à Ciiantilly, ont servi, pour ainsi
dire, de « carton » à l'auteur des fresques de la
chapelle des Cortellieri,dans l'église des Emeri-
tani de Padoue, exécutées vers 1370.
Séance du S mars. — M. S Reinach commu-
nique une étude très documentée sur les différents
portraits de l'empereur Julien. Une série de dé-
ductions lui permet d'écarter, faute de ressem-
blance, les deux statues conservées à Paris : l'une
au Louvre, l'autre aux Thermes, que l'on donne
généralement coinme représentant cet empereur.
En revanche, il exprime le vœu que la Ville de
Paris obtienne de la Ville d'Acerenza, en Apu-
iie, le moulage d'un buste de Julien, conservé
dans la cathédrale de cette ville, et qui est cer-
tainement authentique.
Sociedad esparlola de excursiones. —
L'excellent Boletin de la dite Société, année 1900,
(264 pp., 35 planches hors texte et nombreuses
figures dans le texte), renferme un bon nombre
d'études qui ne doivent pas rester inconnues des
amateurs d'art et d'archéologie, étrangers à l'Es-
pagne.
Nous réclamons, ailleurs, que les titres des
ouvrages soient donnés dans la langue où ils sont
écrits, quand les indications bibliographiques
ont place dans des travaux sérieux. Mais un arti-
cle comme celui-ci peut avoir, en français, les
titres des études parues dans le Boletin ; de la
sorte, les lecteurs de la Revue les comprendront
immédiatement.
Dans la partie intitulée : Excursions, voici les
articles publiés : Excursion à travers l'Espagne
arabe, par D. Luis Cabello ; — Excursions archéo-
logiques, par D. Enrique S. Fatigati ; — Impres-
sions d'une visite à Ségûvie, pAr D. Alonzo Jara ;
— Olmedo par D. José Igual ; — Notes d'une
excursion à Coca, par D. .Alonzo Jara ; — Voyage
des Ducs d' Alhrantes au Saint Désert des Barnecas
— Excursion à Sotosalvos, par D. V. Escolar.
La section des Sciences historiques comprend :
Souvenirs de Tolède au Moyen Age, par D. R.
Amador de los Rios ; — Notes pour l'histoire de
t Architecture en Espagne, par D.Pedro .V. Beren-
guer ; — Safo, par D. Benito Vila ; — Doua
Maria Henriquez y Toledo, par le marquis de
Serralbo ; — • Epigrapliie arabe, par D. R. Ama-
dor de los Rios ; — Le Cavalier ibérique, par D.
José Ramon Melida; — La Sculpture romane en
Espagne, par D. Enrique S. Fatigati ; — • Reliefs
de chapiteaux, par le même.
Dans la section des Beaux- Arts : Les an-
ciennes peintures sur bois, du Musée du Prado, par
D. Narcisso Sentenach ; — Inventaire graphique
des monuments espagnols, par D. Enrique Serrano
Fatigati ; — Les anciens tableaux iC origine étran-
gère, an Musée du Prado, par D. Narcisso Sente-
nach , — Artistes exhumés, par D. Raphaël Ra-
mirez de Arellano ; — Sculptures du XII'^ siècle
et du XI IP, par D. ICnrique S. Fatigati.
Les conférences données à la Société com-
prennent les sujets suivants : Ciudad- Rodrigo ,
par D. Felipe B. Navarro ; — f^e Byzantinisnie
dans l' Architecture chrétienne espagnole, par D.
Vicente Lamperez ; — L'église majeure de Lebri-
da, par D. Adolfo F. Casanova.
Presque tous ces articles mériteraient une men-
tion particulière. A notre vif regret, nous ne pou-
vons l'accorder qu'à un nombre fort limité d'entre
eux. Ce nous est un bonheur, par exemple, de
signaler les nouvelles étuiles de D. Enrique S.
Fatigati, sur la sculpture romane. Les bas-reliefs
examinés sont nombreux ; beaucoup d'entre eux,
non seulement de l'Espagne, mais de la France,
que l'infatigable professeur connaît très bien,
sont cités à propos et lui suggèrent nombre de ré-
flexions ingénieuses et précises. — Excellente et
savante étude que celle de D. José Ramon
Melida sur le Cavalier ibérique. Les monuments
figurés dans cet article sont d'un choix très heu-
reu.x; les ouvrages cités sont itidiqués d'une façon
exacte et complète dans leur brièveté ; l'exem-
ple est à signaler au.x collaborateurs du Boletin.
Nous applaudissons à l'idée qu'a eue D. Narci-
so Sentenach d'examiner rapidement les pein-
tures sur bois, conservées au Prado ; les unes sont
%xa\)à\ix lïe0 t)octété0 gatjautes.
247
espagnoles, bien qu'un certain nombre d'entre
elles portent la marque des arts italien, flamand
ou allemand ; d'autres appartiennent sans con-
teste à ces divers arts, par exemple, une Annon-
ciation de Fra Angelico, et différentes œuvres de
Peter Christus, de Van der Weyden, de Quin-
tin Metsys, etc.. La critique moderne a cessé
d'attribuer plusieurs œuvres capitales du Prado
à Van Eyck ou à Van der Weyden, et D. Nar-
cisse Sentenach s'incline devant l'opinion des
vrais spécialistes en la matière. C'est la preuve
d'un amour sincère et loyal de la vérité. — D.
N. Sentenach aurait donné à ses études plus de va-
leur scientifique, s'il avait cité plus souvent et très
exactement les ouvrages des écrivains belges et
français auxquels il fait allusion. Mais, malgré
cette lacune, les deux articles sont excellents,
et nous espérons que l'auteur qui a un faible
pour les anciennes peintures, saura exploiter le
terrain si riche qui s'offre, en Espagne, à de pa-
reilles investigations.
A signaler encore la conférence très intéres-
sante que D. Felipe B. Navarro a donnée à la
Société sur Ciudad-Rodrigo. Les monuments
de cette petite ville y sont décrits avec le soin
et la précision qui caractérisent le savant espa-
gnol. Notons, en particulier, le long passage
consacré aux signes lapidaires, trouvés sur les
murs de la cathédrale et de plusieurs autres
monuments. D. Felipe B. Navarro s'est voué d'une
façon spéciale à l'étude de ces signes, presque
toujours incompréhensibles. Contrairement à son
dire, nous avons le ferme espoir que le résultat
de ses recherches ne lui vaudra pas « un diploma
de perfecto visionario », parce qu'il les poursuivra
avec la prudence qui convient en pareils sujets.
Pourquoi, même, s'il se trouve engagé dans les
sentiers d'un labyrinthe mystérieux, ne quitterait-
il pas cette voie qui pourrait facilement abou-
tir à des résultats stériles, sinon à des déceptions
pénibles ?
Enfin, nous signalons, recommandons et louons,
comme elle le mérite, l'étude singulièrement
attachante de D. Vicente Lamperez y Romea :
Le Byzantinisme dans l'architecture espagnole.
Rien, dans tout le Boleiin, nous l'avouons, ne
nous a charmé et retenu comme cette conférence
si intéressante pour tous ceux qui aiment l'art
byzantin — et ils deviennent nombreux, — sur
un sujet, en grande partie inconnu en France, où,
cependant, les études qui se rapportent à l'art de
la vieille Hyzance sont à l'ordre du jour. — Nous
avons dit autrefois à D. Vicente Lamperez que,
sur tel et tel point relatif à l'église romane de
Silos, nous ne partagions pas tout à fait ses
idées. Cette réserve faite, l'étude de l'auteur nous
paraît toujotirs très ingénieuse et appuyée sur
de solides raisons. D'excellents petits dessins
ajoutent leur intérêt à celui que leur donnait
déjà la compétence d'un homme du métier, d'un
architecte qui a vu et comparé la plupart des
églises à coupole de la péninsule.
La direction du Boletin nous permettra de for-
muler quelques désirs : que les vignettes, dissé-
minées dans le texte, portent toujours une légende
et que les planches soient numérotées, afin que
les auteurs puissent sans peine y renvoyer les
lecteurs ; puis, que des tables de cette double
classe de documents se trouvent à la fin de
chaque voulume. Ces ainéliorations seront un
secours pour ceux qui veulent profiter des études
du bulletin espagnol, — et nous sommes du nom-
bre. Une Revue doit offrir ces avantages aux
lecteurs, pour être classée parmi les publications
utiles et sérieuses.
Dom E. RoULiN.
Gilde de Saint-Luc et de Saint-Joseph à
Gand. — Les anciens élèves de l'Ecole de Saint-
Luc ont, depuis longtemps déjà, formé sous ce
titre un cercle ayant pour objet des relations mu-
tuelles amicales, la défense des intérêts de l'école
et l'étude. Cette vivante confrérie a pour
« Doyen » le distingué architecte provincial de
Gand, M. Et. Mortier.
La Gilde vient de publier un fascicule de ses
modestes mais intéressants travaux. Nous y trou-
vons un aperçu, au point de vueartistique, de l'ex-
position de Paris, par M. Van Houcke,et une notice
du même auteur sur l'hôtel de ville de Binche,
restauré par un membre de la Gilde, .\L Lange-
rock. La double planche qui est jointe à cet article
est des plus curieuses ; elle montre l'aspect du
petit hôtel municipal avant et après la restaura-
tion, qui a été faite, disons-le en passant, de main
de maître. On ne peut se figurer plus complète
métamorphose; jamais on n'a pu voir un édifice
médiéval plus curieusement travesti que ne l'avait
été celui-ci. La moitié du comble et les deux
tiers de la svelte tour avaient disparu sous une fa-
çade postiche précédéed'un portique classique et
agrémentée de fenêtres à la romaine, couronnée
d'un entablement complet avec architrave, frise
et corniche. Si les Binchois n'avaient assisté au
travail, ils devraient croire qu'on leur a escamoté
pendant leur sommeil leur hôtel de ville pour y
substituer un autre édifice, ou qu'il a été rasé et
rebâti de neuf II n'a été que déshabillé de son
burlesque accoutrement et habilement restauré
par un de ces néfastes « pasticheurs > de Saint-Luc
qui font le désespoir de AL Fierens Gevaert. Pen-
sez donc! On a détaché de la façade ces avant-
corps en plâtre surmontés de frontons ou de
larmiers, dans lesquels s'ouvraient des baies plein-
248
Bcl)ue De rSvt cbvctien.
cintre à chambranles, et l'on a rétabli lestrois
grandes arcades en cintre brisé formant un triple
portail. Au lieu de ressembler à une demeure
bourgeoise bien close du XVII 1= siècle, l'édifice
s'annonce maintenant comme la maison com-
mune, longue et ouverte à tout venant. Des
croisées à meneaux éclairent abondamment la
salle de l'étage ; une jolie corniche à corbeaux,
interrompue par une fenêtre de toit, souligne le
grand comble hérissé de lucarnes ; le pignon est
découpé en gradins. L'élégant beffroi se voit à
présent fièrement planté en façade comme une
ajoute coquette de la première renaissance. Des
bas-reliefs héraldiques et des ancres ouvragées
décorent la façade, en pierrede Bray, savamment
appareillée. C'est un vrai scandale pour les ad-
versaires de toute restauration, mais c'est pour
beaucoup d'autres une résurrection charmante,
inespérée, dont la jolie cité de Binche a le droit
d'être fière, ainsi que M. Langerock, ancien élève
de Saint-Luc. L. C.
Société d'archéologie de Bruxelles. — Le
t. XIII (1899) contient un important travail
de M. J. Destrée sur la sculpture brabançonne
au moyen âge. La première partie de ce travail
a paru en 1896.
M. Destrée rend au.K ateliers brabançons de
sculpture, trop négligés jusqu'ici, la place qu'ils
méritent dans l'histoire de l'art, en montrant
« qu'à partir du XI Vi? siècle, il a existé en Bra-
bant une école florissante de sculpture dont
l'influence au XV<î siècle a été prépondérante. »
Avant le XI V'^ siècle, l'art indigène, placé en-
tre les influences allemande et française, ne se
révèle que par intermittences ; mais au XIV<=
siècle l'école régionale est en pleine prospérité,
ses œuvres se multiplient et se répandent dans
les pays voisins; ses élèves sont à la tête du
mouvement artistique et en tiennent la direction
jusqu'au milieu du XV« siècle. M. Destrée étu-
die notamment les retables de Megen (proprié-
té du comte de Nahuys) et de Villers-la-Ville,
ainsi que certains monuments funéraires, entre
autres des œuvres auxquelles Jacques de Geri-
nés a attaché son nom, tel le célèbre tombeau
de Louis de Maele, à Lille.
M. Th. de Raedt,daiis sa notice sur la peintu-
re murale à l'huile de la grande boucherie à Gand,
prétend que cette peinture n'a plus de valeur do-
cumentaire. Les restaurations qu'elle a subies au
XVII'" et au XI.X'^' siècle, ne permettraient plus
d'y étudier la peinture à l'huile et ses procédés
au XVe siècle. Cette opinion est loin d'être
admise à Gand.
Dans le t. XIII, M. Raeymaekers étudie les
fonts baptismaux de l'ancienne église de Ruinmen
(canton de Léau). M. Raeymaekers décrit ces
fonts remarquables, qu'il croit devoir attribuer
au XIII"=s.,et qui sont peut-être plus anciens(').
M. Edgar Baes, sous le titre Gérard David et
Vêlement étranger dans la peinture flamande du
XV' au XVI' siècle, a réuni une série de notes
sur G. David et J. Joest. En voici la conclu-
sion : « la situation politique de nos provinces a
toujours formé nos artistes à une espèce de su-
bordination envers l'étranger, tandis que ce der-
nier venait presque en conquérant profiter des
fruits plantureux produits par notre sol. »
Cercle archéologique d'Enghien. — Dans
\es annales, très tardivement parues l'année 1894-
1898, signalons de M. l'abbé C. Diijardin (ancien
curé du lieu) (2) Dates mémorables de l'histoire
de Braine-le Comte. Ce sont des éphémérides de
cette commune; du même, en collaboration avec
M. l'abbé Croquet : Glossaire toponymique de la
ville de Brainede-Comte,w\\ des meilleurs travaux
de ce genre et qu'on peut offrir en modèle; de
MM. Delvin et Guignies : Notice historique sur
la commune de Rievcnc, étude importante et bien
faite; de M. E. Matthieu : L'ancienne grange -des
pauvres à Braine-le-Comte, de M. le comte
Maurice de Naliuis : Plaque de cheminée aux
armes de Ch.Attg. auc d A renberg {lô^yiôSi).
L. C.
1. V. Revue de C Art chrétien, année 1900, p, 270.
2. La paroisse di Braine-lcComle. Souvenirs historiques et
religieux : elles sont suivies d'une biographie brainoise. 1889.
^i^:i^i,:^^^i^tÉk^MMMMMMM;^^^^^^^^^^^
;;^WWWWWWWWWW^^^WWWWWWW^^^WWWWW
DIE WANDGEMAELDE IM KREUZGANGE
DES EMAUSKLOSTERS IN PRAG, VOn D'
Joseph Neuwirth mit-34 Tafeln und 13 Abbildangen
im Texi. Prag, Joseph Koch, 1898.
LES PEINTURES MURALES DU CLOITRE
DE L'ÉGLISE D'EMMAUS, A PRAGUE, avec
34 planches, et 13 figures dans le texte.
•a.îa&sa^:î*j£j^\ une première fois nous avons
^ rendu compte dans la Revue d'un
travail considérable de M. le docteur
Neuwirth surlss peintures qui déco-
*^^^^ ^p.W'^A raient autrefois le célèbre château
de Karlstein en Bohême, dont, heureusement,
bonne partie est encore conservée (■). A cette
première étude, qui assurément forme une con-
tribution importante à l'histoire d'une école de
peinture alors encore imparfaitement connue, le
même auteur a ajouté depuis des recherches nou-
velles, tout aussi approfondies et de même va-
leur. Si nous sommes en retard pour appeler
l'attention sur la publication dont le titre figure
en tête de ces lignes, c'est que, malheureusement,
il n'est pas toujours possible, en présence des
livres nombreux et de véritable mérite qui sur-
gissent de toutes parts sur l'histoire des arts, de
demeurer au courant, comme cela serait bien dé-
sirable. Ceux de M. Neuwirth, fort heureuse-
ment, ne vieillissent pas en peu d'années ; il
épuise la matière qu'il traite, il n'y a pas à
craindre que, de sitôt, on cherche à les refaire
au moyen d'études plus fouillées et de recher-
ches plus approfondies.
Voici en peu de mots l'historique du monu-
ment dont le cloître contient les peintures mu-
rales décrites et reproduites dans l'ouvrage de
M. Neuwirth.
En 1348 fut fondée à Prague, sur le désir du
roi Charles IV et de l'assentiment du pape Clé-
ment IV, une abbaye bénédictine. Cette commu-
nauté, ayant pour objet d'amener à l'Église
catholique les populations slaves, la plupart des
religieux étaient de cette nationalité ; ils en ob-
servaient les rites particuliers et se servaient,
autant que possible, de la langue slave. La
nouvelle maison était fondée sous le vocable des
Saints Cosme et Damien, et la première pierre
fut posée solennellement en présence du roi de
Bohême.
La construction de l'abbaye et de son église
réclama un quart de siècle : la consécration ne
1. Revue de C Art chrétien, année 1897, pp. 93-98, 215-220.
put avoir lieu que le lundi de Pâques de l'an 1373.
L'abbaye paraît avoir été bâtie avec un certain
faste ; on sait que les toits étaient couverts en
tuilesde couleur, et lesflèches destours en feuilles
de plomb dorées qui étincelaient au loin. A
cause du jour choisi pour la consécration, l'ab-
baye prit dans la bouche du peuple, le nom
d'Emmaiis, et ce nom lui est resté.
Malheureusement les religieux par leur vie et
le peu de régularité de leur discipline, ne parais-
sent pas avoir répondu aux intentions des fon-
dateurs.
Le 16 octobre 1419, une troupe armée de Hus-
sites vint assaillir la maison religieuse et lui
imposa, sous menace de pillage, l'obligation
d'introduire le rite de la communion sous les
deux espèces. L'abbé semble avoir cédé à cette
injonction sans trop de difficulté, et sous le régime
des Hussites, la communauté déclina toujours
davantage jusqu'à l'avènement de Rodolphe II.
Sous le règne de cet empereur, qui fut un
grand protecteur des beaux-arts en Bohême, et
qui à cet égard peut être regardé comme le con-
tinuateur du roi Charles IV, l'abbaye, redevenue
catholique, reprit un régime régulier.
En 161 1, la maison fut pillée complètement
d'abord par les soldats hongrois de l'empereur
Mathias, et ensuite par les protestants. Enfin,
après bien des destinées adverses, l'abbaye est
de nouveau échue en 18S0 au.x religieux béné-
dictins de la communauté de Beuron, et sous la
direction de Dom Wolter, elle reprit toutes les
anciennes traditions de l'Ordre.
L'auteur auquel nous empruntons ces données
historiques, se plaît à rendre justice aux nou-
veaux habitants d'Emmaiis, en ce qui concerne
leursollicitude pour lesœuvres d'art qui existent
dans leurs maisons. Malgré les vicissitudes de
toute nature, les troubles et les pillages, l'en-
semble des constructions de l'abbaye n'a pas
subi d'importantes modifications, à l'exception
des tours qui ont été bâties en 1712.
Le cloître, notamment, qui contient les peintures
murales auxquelles est consacrée l'étude que
nous analysons, n'a subi aucun changement dans
ses dispositions primitives ; il est établi au côté
méridional de l'église. Le vaste cycle de pein-
tures se trouve aujourd'hui dans un état qui, dans
maint détail, raconte les douloureuses destinées
de la maison. Si dans son ensemble, il date, à peu
d'années près, de l'achèvement du monument, il a
dans certaines parties, subi im certain nombre
d'additions postérieures et de réparations sur
250
Bclluc lie ravt cljrcticn.
lesquelles nous allons revenir ; mais malgré ces
outrages, des retouches et des violences de toute
sorte, les peintures du cloître de l'abbaye d'Em-
maiis offrent dans leur ensemble l'œuvre la plus
importante de ce genre qui se trouve de ce
côté-ci des Alpes. Telle est du moins l'opinion de
Schnaase, de Janitschek et d'autres archéologues
allemands, qui les ont étudiées avec soin.
La pensée qui relie entre elles les compositions
de ce vaste cycle, est la même qui a inspiré les
images si populaires des Biblia paupeimn et des
Spectiltiin himiame salvatioiiis; comme dans ces
recueils, leur objet est l'enseignement, l'édifica-
tion, la méditation du chrétien qui, en les contem-
plant, vient en quelque façon nourrir sa piété et
inspirer son oraison. A chacun des côtés du
cloître, l'artiste a voulu développer une idée con-
crète,une pensée d'ensemble, laquelle vient ensuite
se rattacher au thème général qui relie entre eux
les différents chapitres de cette « histoire ». L'aile
méridionale offre une série d'images représentant
l'attente, la préparation à l'avènement du Christ;
celle de l'Ouest retrace, dans une suite d'épisodes,
la Nativité du Sauveur et la préparation à la vie
publique jusqu'au baptême et sa tentation par
le démon. Au .^Jord du cloître, l'artiste a figuré la
vie active du Messie, sa vie publique, ses prédi-
cationsappuyées par des miracles; à l'Orient enfin,
c'est l'entrée triomphale à Jérusalem qui sert
comme de prologue aux scènes de la Passion
douloureuse, puis enfin vient la Glorification du
Fils de Dieu et la Descente du Snint-Esprit sur
les apôtres. Dans les angles de ce quadrilatère
sont peintes des scènes servant en quelque sorte
de transition entre les images appartenant aux
différents ordres d'idées que nous venons d'indi-
quer. Comme dans les Biblia pauperum, les
grandes scènes de la Passion du Christ sont mi-
ses en relation et en quelque façon commentées
par les figures et les événements de l'ancien Tes-
tament. A ce point de vue surtout, ce cycle est
de la plus haute importance. Quelques peintures
représentant des Saints d Ordres religieux ou de
nationalité slave viennent interrompre d'une ma-
nière assez malencontreuse les développements
du grand thème de cet ensemble si logiquement
établi ; M. Neuwirth les considère à juste titre
comme des interpolations introduites après coup.
Les planches, qui initient le lecteur de l'étude
de M. Neuwirth au caractère et a la valeur réels
du cycle monumental d'Einmaiis, sont remarqua-
bles; elles sont exécutées avec une conscience, un
soin, j'allais écrire, une piété qui méritent une
mention d'autant plus honorable que la tâche
était plus ardue et plus ingrate.
Il faut se rappeler tout d'abord que ces pein-
tures datent du troisième quart du .XIV"" siècle.
et que la plupart d'entre elles ont d'autant plus
souffert qu'elles ont été exposées aux agents de
destruction d'un climat rigoureux ; aussi ont-
elles été l'objet de quatre restaurations succes-
sives; notamment au .XV 11'= siècle, elles ont été
repeintes deux fois.
Il en résulte naturellement que la finesse du
trait, l'intensité des expressions, la délicatesse de
la technique et de la coloration primitives ont
disparu. Plusieurs des tableaux ne sont plus dé-
chiffrables ; d'autres, dont on devine encore quel-
ques contours et quelques taches colorées, appa-
raissent comme l'ombre d'un réve.Un assezgrand
nombre d'artistes ont dû travailler simultanément,
sans doute, sous la direction d'un maître unique,
pour créer dans un temps relativement limité une
série de compositions aussi considérables de mé-
rite inégal; il est impossible, dans l'état où se trou-
vent ces peintures, de chercher des attributions
et de faire la part distincte des artistes qui ont
pu y collaborer.
Cependant, malgré les lacunes, les outrages du
temps, les restaurations et les repeints, ces pein-
tures ont conservé dans l'ordonnance, souvent
dans le style et le dessin des figures, le cachet, le
caractère de l'époque où le pinceau de l'artiste les
a tracées sur le mur; les attitudes, les gestes ex-
pressifs et la disposition des groupes, parfois le
jeu des draperies s'y lisent encore avec intérêt et
sont éminemment suggestives. Un dessinateur
médiéviste au crayon exercé trouverait encore
matière à croquis intéressants, à des ensem-
bles pleins de verve et d'éloquence. On doit donc
être reconnaissant au savant professeur de l'Uni-
versité allemande de Prague, d'avoir, par les ex-
cellentes planches de son livre, assuré une nou-
velle existence à ces peintures si compromises,
et de les avoir rendues accessibles à un plus
grand public.
Nous ne pouvons le suivre dans l'étude com-
parative qu'il fait des peintures du cloître d'Em-
maiis avec les miiuatures sur vélin des manus-
crits contemporains conservés dans plusieurs
bibliothèques de Bohême. De l'ensemble de ces
peintures on doit reconnaître, même dans les
reproductions si fidèles de leur état actuel, des
influences très diverses qui s'expliquent d'ailleurs
par le nombre d'artistes de tous pays réunis
en Bohême sous le règne de Charles IV, et qui
ont dû participer aux peintures des cloîtres
d'Emmaiis. A côté de types et de caractères
de l'école nationale, on reconnaît des influen-
ces italiennes et comme les inspirations de pein-
tres de Sieime. En donnant plusieurs planches en
chromo, M. Neuwirth a voulu faire connaître
enfin le sj'stème de coloration de ces peintures.
Un crucifiement, assez bien conservé, donne l'im-
215tbliûgrapl)(e,
251
pression d'une tonalité grave et harmonique.
Mais là encore, il convient de faire la part de
l'action du temps et de l'influence des repeints.
Telles qu'elles sont, ces planches en couleurs
permettent au lecteur de se faire une idée plus
précise du cycle de peintures si soigneusement
décrit.
J- H.
LE COFFRET DE SAINT-NAZAIRE DE MI-
LAN ET LE MANUSCRIT DE L'ILIADE DE
L'AMBROSIENNE A MILAN, par F. DE MÉLY.
— Extrait des Monuments et Alémoires publiés par
l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres.
Très intéressant et savant travail, orné de
trois planches excellentes, par lequel M. de Mély
fait connaître un de ces monuments si rares
où le christianisme se revêt encore des formes
de l'art classique. Cette époque, où les formes
deviennent plus barbares à mesure que la foi
s'empare de plus en plus des populations, et où
se préparent mystérieusement les germes d'un
art nouveau, est d'une étude particulièrement ar-
due, et ce n'est guère que depuis un petit nombre
d'aimées que la lumière s'y fait. Notre collabo-
rateur date le coffret de Saint-Nazaire des pre-
mières années du V'= siècle ; il y a tout lieu de
croire qu'il ne trouvera pas de contradicteurs ;
les reliefs du coffret se rapprochent en effet de la
plastique des premiers sarcophages chrétiens et
semblent un peu antérieurs aux sculptures des
portes de Ste-Sabine à Rome, récemment étu-
diées par le P. Grisar et le D'^ Wiegand. C'est donc,
en ce qui concerne l'étude des monuments pri-
mitifs du christianisme, un chaînon nouveau que
M. de Mély introduit dans la série des œuvres
connues. Tous ceux qui étudient particulièreirient
cette époque, d'un si haut intérêt, apprécieront
hautement le mérite de son travail.
J. II.
LA TIARE PONTIFICALE, DU VII^ AU
XVI» SIÈCLE, par Eug. MÙNTZ. — Paris, Impri-
merie Nationale et Klincksieck. (Extrait des Mémoires
de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres,
t. XXXVI, i"^'' partie, 1S97), gr. in-4°, 94 pp.
IL est certains sujets que leur importance
comme leur notoriété ont tellement mis en
évidence qu'il semblerait que tout doit avoir été
dit sur eux. Loin de là. Leur très copieuse
bibliographie, les longues pages qui leur ont
été consacrées ne sont réellement qu'un trompe-
i'œil. Le travail d'un premier auteur a simple-
ment été répété, commenté, délayé par ceux
qui sont venus après lui : loin de s'accumuler,
les documents originaux ont été de plus en
plus laissés de côté, les sources négligées, si
bien qu'actuellement, lorsqu'on veut les aborder,
on ne trouve en réalité que le vide dans des
redites sans valeur. La tiare pontificale était dans
dans ce cas. Aussi M. Eug. Miintz, en reprenant,
avec l'autorité et le sens critique qui en font un
des maîtres incontestés de l'archéologie, l'histoire
de cette coiffure liturgique, en précisant ses
origines, en la suivant dans ses développements,
dans son symbolisme, en décrivant son écono-
mie artistique et les richesses dont les Pontifes
se plurent à l'orner dans ses successives trans-
formations, vient-il combler une véritable lacune,
qu'au fond bien peu se sentaient la force
d'aborder.
La tiare des Papes se rattache assurément à
la tiare en usage chez les peuples de l'Orient,
comme le prouvent la tiare de Saïtaphernès et la
cidaris, coiffure du grand-prêtre des Juifs « envi-
ronnée d'une triple couronne d'or, où il y a des
petits boutons de fleurs de jusquiame ».
On a souvent confondu la tiare avec la mitre,
avec le cainaicnmi, offrant certaines analogies
avec la couronne murale que les archevêques
de Bénévent s'arrogèrent le droit de porter. Mais
comme un des titulaires du siège s'était permis
de comparer sa coiffure au regnum pontifical,
Paul II défendit aux métropolitains de Bénévent
de la poser désormais sur leur tête; Maximilien
Palombara( 1574- 1607) fut le dernier à s'en servir.
Le cainaunim ne doit pas être confondu avec le
camelaucum, que le pape Constantin porta lors
de son entrée à Constantinople. Ce dernier était
une sorte de bonnet oriental, et il semble bien
probable que c'est de ce côté qu'il faut chercher
l'origine de la tiare.
Du V« au IX^ siècle, on ne trouve en réalité
sur la tiare que les documents les plus précaires.
Elle fut très probablement définitivement adop-
tée par les papes, au moment de la publication de
la donation Constantinienne. Or, à quelques an-
nées près, nous sommes d'accord avec M. M. pour
la dater ; vers 744, comme il incline à croire, avec
l'abbé Duchesne ; vers 800, me permet d'écrire
mon étude sur la couronne de Monza, qui dut
faire partie du prétendu trésor offert par Cons-
tantin à saint Sylvestre. Brunner descend même
encore un peu plus bas, dans la première moitié
du IX'-' siècle. Mais ce n'est cependant que dans
l'inventaire du trésor pontifical, en 1295, sous
Boniface VIII, qu'on vit figurer pour la première
fois une tiare enrichie de 48 balais, de 72 saphirs,
de 25 émeraudes, de 66 grosses perles et d'un
gigantesque rubis, fixé à son soinmet : dans le
bas, à cette date, figure un seul cercle émaillé.
Elle sera considérée plus tard comme la tiare de
BEVUE DE l'art CHRÉTIEN.
1901 — 3""*= LIVRAISON.
'D-
Bcbuc ï)c V^xt djvcttru.
saint Sylvestre. Très scientifiquement M. Miintz
la rapproche de la tiare placée sur la tête d'une
statue conservée à St-Jean de Latran, représen-
tant, d'aprèb l'opinion commune, le pape Nico-
Statue de Boniface Vlll, à la cathédrale de Florence.
las IV (1288-1292), identique d'ailleurs à celle
de la statue de Boniface VIII, à la cathédrale
de Florence. Nous allons la retrouver dans l'in-
ventaire de 1315-1316: mais à ce moment elle
porte les trois couronnes d'or, qui rorneront
désormais.
M. M. en résume ainsi l'histoire. La tiare de
Boniface VIII, d'abord conservée à Pérouse,
avec le trésor pontifical, fut envoyée à Lyon en
1305 pour servir au couronnement de Clément V;
rapportée à Rome, sous Grégoire XI, elle revint
à Avignon avec Clément VII. Ds là, elle émigré
en Espagne avec Benoit XIII, pour revenir fina-
lement à Rome, après la mort de ce pape. Ce
joyau eut la plus triste fin: volé le 22 novembre
1485, il disparut à tout jamais.
Du X« au XIIU" siècle, il est fréquemment
question de la tiare, appelée alors corona ou
regniiiH : son usage coïncide évidemment avec le
nouveau programme politique de la papauté et
copieuse est la moisson documentaire de M. M., qui
réunit les textes et les représentations figurées,
qui forment ainsi une série presque sans inter-
ruption. Fresques de Rome, de Subiaco, d'Assise,
de Florence, de Montefalco, sculptures italiennes,
françaises, allemandes, tombeaux du Vatican,
de Naples, d'Avignon, de La Chaise-Dieu, statues
de Chartres, de Reims, de Bamberg sont ici re-
produites pour nous faire suivre la tiare dans ses
formes successives.
Le point très intéressant à déterminer était
la date de la substitution de la couronne [iropre-
ment dite au simple cercle d'orfèvrerie : tous ces
documents nous engagent à la rapporter à Boni-
face VI 1 1, qui lui-même, à la fin de sa vie, y joignit
une deuxième couronne. Mais il est moins aisé de
déterminer celui de ses successeuis qui y ajouta
la troisième couronne. On pourrait, d'après les
inventaires cités plus haut, parler de Clément V,
sans aucune certitude, par exemple. Mais
pour quel motif cette troisième couronne ?
M. M. nous montre que nous n'avons que
l'embarras du choix ; il semble cejiendant à peu
près évident que les papes voulurent que leur
tiare ressemblât à la cidaris du grand-prêtre des
Juifs, ceinte de la triple couronne.
Quand, à partir du deuxième tiers du XIV^
siècle, nous allons prendre tout à fait pied, une
série de monuments, absolument authentiques, va
nous permettre de suivre pas à pas les transfor-
mations de la tiare : qu'elle s'allonge pour se ter-
miner en pointe, comme celle de Jean XXII;
qu'elle s'arrondisse comme celle de BenoîtXII;
ou de Clément VII; qu'elle soit un ornement litur-
gique très simple, comme celle d'Alexandre VI,
ou un véritable monument d'orfèvrerie comme la
grande tiare de Jules II, nous ne devrons pas
oublier que la partie la plus neuve de la disser-
tation, la plus précieuse assurément, est celle qui
traite des origines : là, M. M. a déployé toutes
les ressources de son érudition. Comme dans ses
plus brillantes études, l'artiste n'a pas manqué
20tbUograpl)te.
253
de se révéler en présence des monuments à dé- 1 supérieur lorsqu'il a fallu mettre au point la
crire, mais l'archéologue s'est montré tout à fait question historique. Aussi cette dissertation,
/^^i,-/
modèle à proposer à tous les érudits, accom-
pagnée des pièces justificatives les mieux choi-
sies, est-elle de celles qui, certainement, main-
La grande tiare de Jules II.
tiennent au premier rang la science française.
F. DE Mély.
254
jRc\)uc lie r^rt cl^vcttcu*
LE MUSÉE DE PORTRAITS DE PAUL JOVE,
par Eug. MùNTZ. Paris, Iinp. Nationale et Klincksieck.
(Extrait des Mémoires de l'Académie des Inscriptions
et Belles Lettres), 1900, in-4°.
Suivant les uns, Paul Jove, néà Côme en 14S3,
mort à Florence en 1552, fut, après Tite-Live,
le plus élégant des écrivains ; suivant les autres,
un auteur dont les œuvres, pleines de mensonges,
furent à sa cupidité d'un très grand profit ; mais
il eut du moins le mérite incontesté de prendre
parmi ses contemporains une place considérable,
avec sa galerie de portraits d'hommes célèbres,
commencée dès sa jeunesse. Pour la former, il y
mit l'ardeur opiniâtre d'une idée fixe, une libé-
ralité sans pareille.
Et pourtant il n'était pas, de son temps, le
seul à rechercher les effigies. Mais, il eut le talent
de créer un véritable musée, le « Musœum
Jovianum »,qui devint rapidement célèbre, même
à côté des séries réunies par les papes, par les
rois, par les ducs d'Urbin.qui chargèrent cepen-
dant les artistes les plus célèbres de les composer.
A l'occasion de recherches iconographiques
sur Christophe Colomb, M. M. a trouvé dans la
galerie de Paul Jove, qui possédait le portrait le
plus authentique du grand navigateur, les solu-
tions absolument définitives de quelques pro-
blèmes, non encore élucidés. Il les a communi-
quées à l'Académie, qui vient de les publier dans
ses /lAv«(7/;^j, d'oti est extraite cette dissertation,
illustrée des nombreuses reproductions de por-
traits ayant appartenu à P. Jove.
Pour nous montrer le goût du XV<" siècle pour
les portraits, IVI. M. nous rappelle d'abord Ra-
phaël prenant à tâche de ne donner pour base à
ses évocations du passé que les documents les
plus authentiques : puis, il fait passer sous nos
yeux les livres imprimés, italiens, allemands,
français, qui depuis le Bréviaire des décrets et
décrétâtes, imprimé à Milan en 1478, reprodui-
sent les portraits de leurs auteurs ; enfin, les por-
traits des empereurs et hommes illustres, publiés
en 15 17, par Andréa Fulvio, d'après d'anciennes
médailles. Paul Jove dut se mettre à l'œuvre
vers cette époque, car, dès i 521, il possédait déjà
une série relativement importante de portraits
de littérateurs et desavants. Son mode de recru-
tement était des plus simples, « il mettait à con-
tribution ses ainis, ses protecteurs, tous ceux qui
de près ou de loin avaient souci de leur renom-
mée, tous ceu.x qui avaient à compter avec sa
plume tour à tour si caressante et si mordante. »
Comme il voulait une galerie de portraits sur
toile, mesurant chacun environ un pied et demi,
forcément le nombre des originaux était limité.
Aussi dut il s'arrêter au parti de faire copier ou
interpréter les peintures, les documents de quel-
que nature qu'ils fussent. Parfois, ajoute M. M.,
Paul Jove semble avoir fait composer une effigie,
à l'aide de deux ou trois documents différents,
dont il faisait combiner les traits essentiels. C'est
là malheureusement le point vulnérable du Mu-
sœiun Jovianum ; mais il fut contrebalancé par
l'ardeur et la clairvoyance avec laquelle P. J. mit
à contribution les statues, les miniatures, les
médailles, en un mot, tous les matériaux que lui
signalait la renommée.
Quoiqu'évéque de Nocera, il continua d'habi-
ter Côme. Il y installa son musée, qu'il eut
bientôt l'idée de faire reproduire par la gravure.
En 1549, il en confia la tâche à Robert Estienne,
assisté de Geoffroy Tory. Mais ce fut l'édition de
1575, exécutée par Pierre Perna, l'éditeur bâlois,
qui mit en véritable lumière les trésors patiem-
ment amassés par le passionné collectionneur.
Malheureusement P. Jove fut surpris par la mort,
à Florence : il avait cru prendre, pour la conser-
vation de son cher trésor, les mesures les plus
prévoyantes, en défendant formellement par son
testament de jamais aliéner l'ensemble qu'il
s'était appliqué à constituer ; mais les galeries
ont leurs destinées ! Celle-ci est maintenant dis-
persée; les débris en sont partagés entre deux
branches de ses descendants ; leurs dissentiments
rendent fort délicate toute enquête sur la nature
des épaves qui en restent.
Heureusement de nombreuses copies en furent
faites. De 1552 à i562,Cristoforo dell' Altissimo,
notamment, copia pour le duc Cosme I de Médi-
cis, plus de 2S0 portraits. Quelles étaient, par
exemple, ces toiles ?
Tel est le problème que jusqu'ici personne
n'avait jamais songé à résoudre et que M. M.
vient de dégager en partie. La solution était
cependant des plus faciles, dit-il très simplement :
il ne fallait que lire Vasari, qui nous donne la
liste de 240 portraits faisant partie du Musée
de Cosme I. Or, écrit le savant académicien, elle
concorde pour la presque totalité avec le cata-
logue de la collection de P. Jove. C'est parfaite-
ment exact : la chose était très peu compliquée:
mais encore fallait-il y penser : de fait, personne
avant M. M. n'y avait songé.
Bien que très médiocres, les copies offrent ce-
pendant une écrasante supériorité sur les gra-
vures de l'édition bâloise. Elles ont le grand
mérite d'avoir été prises sur des originaux, alors
que les gravures ont été dramatisées ou que
les autres portraits, conservés à Vienne, ne sont
que des reproductions des portraits de Florence.
Il est facile de comprendre, cette détermination
faite, l'intérêt des tableaux de Florence. Le rap-
Bll)ltograpJ)ie.
255
prochement de ces toiles avec les gravures de
l'édition bâloise est le côté tout à fait nouveau
de la dissertation de M. M., qui nous permet
maintenant, pour des effigies disparues, de re-
courir à des répliques de première main, qui les
reproduisent avec une exactitude relative.
On ne saurait suivre ici, dans 1 enumération
qui est iinprimée à la suite, les rapprochements
pleins de détails précieux qui y sont insérés;
mais on ne pourra jamais trop louer la sûreté de
la critique du maître.
Quant au texte, je viens de résumer, en tâchant
d'être moins « traditore » que Pierre Perna, ses
pages excellentes. Elles sont comme une intro-
duction au savant Catalogue qu'aucun icono-
graphe ne pourra maintenant négliger.
F. DE MéLY.
SEPULVEDA Y SANTA MARIA DE NIEVA,
par D. Enrique Serrano F.\tigati. Grand in 8°,
24 pp., 8 phototypies, Madrid, 1900.
DEUX monographies courtes, mais substan-
tielles, comme sait en composer le docte
professeur de Madrid. — Nous trouvons d'abord
une introduction de quelques pages : Cuadro
gênerai. Que d'aperçus intéressants, de données
précises, d'appréciations justes qui se suivent
dans un ordre clair et naturel ! En somme,
on voyage en lisant cette introduction, et sans
quitter l'étroite enceinte de sa chambrette, on
parcourt un long trajet à travers las tierras
segovianas, apercevant bien des villes et villages,
bien des monuments, bien des objets de tous
genres. — Puis viennent les deux monographies.
Quelques notes historiques précèdent l'étude des
églises de Sepulveda. Celles-ci sont au nombre
de trois principales : El Salvador, San Jiisto et
la Virgen de las Penas. D. E. Serrano Fatigati
les décrit simplement, mais avec précision, exa-
mine les différents éléments d'architecture et de
sculpture, s'abstient prudemment de considéra-
tions trop hasardées, en un mot, fait œuvre de
vrai savant.
J'ai simplement relevé la croyance de l'auteur
aux influences clunisiennes sur les édifices romans
de l'Espagne. Si ces influences étaient réelles,
j'en serais heureux et fier. Mais n'a-t-on pas
démontré qu'il n'y eut point d'école clunisienne,
en fait d'architecture et de sculpture? — En
outre, puisque l'auteur cite la Revue de l'Art
chrétien, il me permettra de lui dire qu'il est
conforme aux règles d'une bonne bibliographie,
de donner également en français les titres des
ouvrages français, et non de les traduire en es-
pagnol.
Santa Maria de Nieva est déjà connue des lec-
teurs de ce recueil (année 1900, p. 250 et s.).
Dans la monographie espagnole, D. E. Se rrano
Fatigati reprend la même description, mais sur
un plan nouveau.
Les phototypies qui accompagnent l'étude du
savant archéologue sont excellentes, et contri-
buent singulièrement à rendre attachantes les
descriptions serrées des monuments.
Dom E. ROULIN.
ÉLÉMENTS D'ARCHÉOLOGIE CHRÉTIEN-
NE, II. LES CATACOMBES ROMAINES, par
H. Marucchi. Paris, Desciée, 1900. In-8'' de 450 pp.
avec planches.
CE second volume, complément du premier,
présente les mêmes qualités de science et
de critique, avec la même abondance de rensei-
gnements utiles et pratiques. Il concerne exclu-
sivement \çs cimetières romains. J'écris à dessein
cimetières, qui est le terme propre, et non cata-
combes, xésetvé pour un seul souterrain, celui qui
était à proximité de la tombe temporaire des
SS. Apôtres Pierre et Paul.
Qu'il me soit permis, dans l'intérêt du perfec-
tionnement de cette œuvre méritoire, d'ajouter
quelques observations dont les lecteurs sentiront
le bien-fondé.
Il y eut, ailleurs qu'à Rome, par exemple, à
Naples, des cimetières souterrains. Un chapitre
supplémentaire dirait, d'une manière généiale,
quels ils sont et en quoi ils ressemblent à ceu.x
de Rome.
Un tableau chronologique eût été opportun
pour classer les cimetières entre eux, faisant con-
naître l'origine et les développements successifs.
Quand vint la paix, commencèrent les cime-
tières à ciel ouvert. Un mot sur eux ne serait
pas déplacé.
Les inscriptions cimétériales forment une
catégorie à part dans l'épigraphie. Il manque un
chapitre spécial pour les relier ensemble. On
apprendrait ainsi le style de chaque époque, les
variantes des formules, tout ce qui, en dehors
des noms des consuls dont il importerait d'avoir
la liste, sert à dater.
Enfin, l'archéologie ayant sa langue à part,
pour être bien comprise, un glossaire explicatif
plairait surtout aux novices : on y trouverait des
mots tels <:[ue arcosoliiim,area,locitlns, transcnna,
etc. Plusieurs sont francisés par l'auteur, pas
toujours heureusement : ainsi la transenna de
256
5^tbur Dr V^xt cbvcticu.
marbre n'est pas une grille, qui suppose l'emploi
du fer ; pourquoi pas dire alors tout simplement
transenne ?
Tous mes vreux pour une large propagande
sont acquis à cette œuvre intelligente de vulga-
risation, qui se recommande surtout au clergé
studieux, avide de comprendre ce qu'il a vu à
Rome et qu'il ne saura bien qu'un aussi bon
guide à la main.
X. B. DE M.
s. PIKRRE DE ROME. HISTOIRE DE LA
BASILIQUE VATICANE ET DU CULTE DU
TOMBEAU DE S. PIERRE, parle P. MoRTIER,
des Frères-Prêcheurs; Tours, Marne, 1900. Grand
in-S° de 616 pag., avec de nombreuses planches et
vignettes.
Cet ouvrage a eu l'immense avantage de pa-
raître à son heure ; aussi, dès le début, pouvait-on
lui prédire le succès. Pour les pèlerins qui sont
accourus à Rome de tous les points de la France,
à l'occasion du jubilé, de la canonisation de
J.-B. de la Salle et de la béatification de trois de
nos compatriotes, la bordelaise Jeanne de Leston-
nac, le poitevin Charles Cornay et un religieux
normand, il leur fournissait à l'avance les ren-
seignements dont ils avaient besoin pour voir
avec fruit la basilique où toutes ces belles fonc-
tions se sont accomplies et, au retour, il aura fixé
et rafraîchi leurs souvenirs.
Mais il se recommande aussi par de sérieuses
qualités. Tout d'abord, il est imprimé avec autant
de soin que de luxe. Qui ne connaît les éditions
si élégantes de la maison Mame ? Ici, elle a fait
encore un petit chef-d'œuvre, digne d'orner la
table d'un salon, où les distraits ne manqueront
pas de le feuilleter pour en admirer l'illustration
abondante, tandis que les studieux y chercheront
à s'instruire.
Le goût est également flatté par un style pom-
peux, presque oratoire, qui sent la chaire du
conférencier, mais très suggestif, car il inspire
des sentiments et des réflexions. L'auteur semble
même s'y complaire et il ne cite pas un fait im-
portant qu'il n'en déduise aussitôt la philosophie,
au point de vue de l'histoire. Il ne fait pas de la
science à proprement parler, aussi n'écrit-il pas
pour les savants de profession ; mais il a bien
pénétré et mûri son sujet et toujours il le pré-
sente avec une conviction sincère. Telles sont ses
élucidations sur deux points importants, l'exis-
tence du corps de S. Pierre seul dans sa confes-
sion et sa translation temporaire à la Platonia.
Par une suite de raisonnements, il établit la date
de la fameuse statue de bronze, qu'il dit byzan-
tine et du VI*" siècle ; l'archéologie lui eût dé-
montré qu'elle n'est pas antérieure au XIII«
siècle, opinion qui semble prévaloir actuellement.
Le volume est grand et gros, et pourtant il ne
dit pas tout ce qu'on aimerait savoir. Que le
P. Mortier me permette de lui signaler quelques
regrettables lacunes qu'il s'empressera, je n'en
doute pas, de combler par l'addition de nouveaux
chapitres.
Ainsi, nous parlions tout à l'heure delà statue
de S. Pierre. Pourquoi n'est-il pas dit un mot de
ces imitations, grandes ou petites, qui sont si
répandues actuellement et que Pie IX a enri-
chies d'une indulgence spéciale, quand on en
baise le pied, absolument comme sur l'original ?
Les indulgences attachées à la visite de la
basilique sont nombreuses. Il était facile et pro-
fitable d'en dresser la liste.
Le livre III est consacré aux «principales
dévotions autour du tombeau de S. Pierre >.
Trois seulement sont énumérées : « Le culte de
la Ste Vierge >, « la statue de S. Pierre », « Ste
Pétronille et la France ». Ce n'est pas suffisant.
Que de reliques réclament une étude à part ! Par
exemple, les grandes reliques de la Passion. On
ne peut omettre la visite des sept autels et la
chaire de S. Pierre, qui méritaient plusieurs
planche.^.
Au livre II, voici « la canonisation des Saints »,
tracée en traits rapides. Avec deux tableaux
annexes, c'eût été parfait. L'un donnerait la série
des canonisations et l'autre des béatifications
accomplies à St-Pierre, avec leur date et le nom
du pontife. C'est là un renseignement de premier
ordre.
Incidemment revient la question du jubilé et
est donnée une vue e.xtérieure de la Porte-Sainte.
On peut, sans être difficile, désirer davantage.
Pourquoi pas aussi la photographie de la bulle
de Boniface VIII qui institue le jubilé, puisque
la charte pontificale, gravée sur marbre, est affi-
chée en permanence à gauche de la porte ; et
encore celle de cette mosaïque, placée à l'inté-
rieur, où S. Pierre regarde si fixement les pèle-
rins qu'aucun, en nul endroit, ne peut se sous-
traire à son regard, ce que les Romains savent
bien ?
Je termine en félicitant à la fois l'éditeur et
l'auteur, parce qu'ils ont ensemble mis au jour
un livre, qui leur fait honneur à tous deux, car
ils n'ont rien négligé pour satisfaire leurs lec-
teurs, que je souhaite nombreu.>: et choisis.
X. B. DK M.
ai5tblioig[rapl)ie.
257
ANALECTA HYMNICA MEDII AEVI. SE-
QUENTIAE INEDITAE, par le P. Blume. Leipzig,
1900, in-8" de 306 pages.
Ce 34e fascicule, non moins intéressant et rem-
pli que les précédents, se divise en quatre par-
ties : le Teîiips, la Vierge, les Saints et le Coni-
mutt. Il contient 360 proses, presque toutes tirées
des manuscrits.
Les saints qui figurent ici sont les suivants :
S. Acace, S. Adalbert, S. Agéric, Ste Agnès,
S. Alban, S. Amé, S. Ange gardien, Ste Anne,
S- Antonin, Ste Apolline, S. Augustin, Ste Bar-
be, S. Barthélémy, S. Benoît, S. Boniface, Ste
Cécile, S. Castor, Ste Catherine, SS. Corne et
Damien, S. Cyriaque, Ste Dorothée, Ste Elisa-
beth de Hongrie, Ste Engracie, S. Erasme,
S. Etienne, Ste Eulalie, Ste Euphémie, S. Eu-
sèbe, SS. Fabien et Sébastien, Ste Félicité,
SS. Ferréol et Ferruce, S. Florin, S. François,
S. Front, S. Gabriel, S. Genès, S. Georges,
S. Géréon, S. Germain, S. Gilles, Ste Hélène,
Ste Hilde, SS. Innocents, S. Jacques, S. Jan-
vier, S. Jean-Baptiste, S. Jean, év., SS. Jean
et Paul, S. Jérôme, S. Joseph, Stes Juste et
Rufine, S. Laurent, S. Léonard, S. Luc, Ste
Lucie, Ste Marc, Ste Marguerite, Ste Marie
Madeleine, Ste Marine, Ste Marthe, S. Martin,
S. Maurice, SS. Maxime et Vénérand, S. Mé-
dard, S. Michel, Ste Monique, S. Narcisse, Ste
Nathalie, S. Nazaire, S. Nicet, S. Nicolas, S. Ni-
colas de Tolentin, B. Nicolas de la Roche,
S. Norbert, S. Notker, SS. patrons de Hildes-
heim, de Salzbourg et de S. Udalric, S. Paul,
S. Paul ermite, S. Paulin, SS. Pierre et Paul,
S. Pierre m., S. Piat, S. Raymond, S. Remy, S.
Saturnin, S. Sébastien, SS. Senez et Théopont,
S. Sigismond.S.Sixte, Ste Tanche, SS. Timothée
et Apollinaire, S. Thomas, S. Thomas de Can-
torbéry, S. Udalric, Ste Ursule, S. Valère, Ste
Vérène, SS. Victor et Ours, S. Vincent.
A titre de curiosité, je citerai quelques proses
en acrostiche, 01.1 les initiales de chaque strophe
réunies donnent le nom de l'auteur. Ainsi, pour
S. Jacques (p. 203) : Frater Matlieiis fecit; pour
S. Laurent (p. 221) : Maremannus ; pour les pa-
trons de Hildesheim (p. 249) : Lippoldiis Stein-
berg.
Les peintres ont coutume de couronner les
vierges martyres de roses blanches et rouges.
L'idée a pu leur en venir de la liturgie, comme il
est dit de Ste Catherine dans le Missel de Sara-
gosse de I4S5, qui associe les lis aux roses :
« Sponsa sibi coronatur.
Rosis atque liliis,
Rubicunda
Tota munda. »
Le P. Cahier, dans ses Caractéristiques des
saints p. 663, dit que les potiers de terre ont pour
patron « S. Bont, Bonitus, Bon, évéque : ce peut-
être parce que l'on conservait à Clermont (en
Auvergne) un vase oii le saint s'était lavé les
mains. » En tout cas, le fait est essentiellement
local. Je préférerais les mettre sous le patronage
des saintes espagnoles Juste et Rufine, qui étaient
du métier, puisqu'elles faisaient le commerce des
vases tournés, au rapport du Missel de Saragosse
en 1485 :
« Nunquam vacabant otio
Feminœ sanctissimae :
Mos erat in mercando
Vascula fictilia
Istoque mercimonio
Cumegenis maxime
Dividebant ministrando
Sua victualia. »
X. B. de M.
BIBLIOGRAPHIE DES INVENTAIRES.
I. — INVENTAIRE D'AMBOISE ET CHAN-
TELOUP.
Ainboise, le château, la ville et le canton, est une
superbe publication illustrée, format in-4" (Tours,
1897), qui contient des extraits de plusieurs in-
ventaires. Il eût été certainement plus profitable
de les donner in extenso et de les rejeter à la fin
du volume à titre de documents. Les voici dans
l'ordre où ils se présentent :
1. Inventaire du château d'Avtboise, fin du
XV« siècle (pp. 148-154). J'y relève 24 petites
couvertures « façon de Poictou », pour lits et
couchettes. Les draps de toile sont marqués « à
trois fîeurs de Hz, en fil tanné >>. .
2. Compte de Pierre Briçonnet, argentier du roi
pour la dépense des manteaux nécessaires à l'as-
se?iiblée{àe l'Ordre de St- Michel) en 14S4 (p. 488).
3. Meubles estans en l'armeurerie du château
d Amboise en 14.ÇÇ. Le texte est ici en entier et
compte 34 nos (^pp 175.178). On y remarquedeux
épées papales : « 7. L'espée aux armes du pape
Céleste (Calixte IH), le fourreau garny d'argent
doré et ung chapeau de velours cramoisy, garny
et semence de perles. — Une épée, le fourreau
blanc, la poignée, garnye de boys; au pommeau
une Nostre Dame d'un côsté et un St Martin de
l'autre, nommée l'espée du pape (Pie II), qu'il
envoya au roy Loys (Louis XI). »
4. Inventaire du château de Chanteloup, l'an II
(pp. 450-457). Notons: « Deux bergères en gros
de Naples, à fond blanc brodé des Indes, repré-
sentant les Fables de la Fontaine », comme au
château d'Abin (Vienne).
2=;8
3Rrbur tic I^^vt djrctten.
5 . Inventaire de Notre-Dame du Bout des Ponts
à Amboise, an IV (p. 536).
6. Inventaire de l'église St-Florentin, à Anihoise,
an IV (p. 536). A citer : « Neuf tapisseries entoile
peinte, une bannière de damas rouge. »
Un voj'ageur du XVI I<= siècle dit avoir vu en
cette église, « au chœur, derrière le grand autel,
une châsse d'argent, renfermant le corps de S. Flo-
rentin » et « une antique et très riche tapisserie
à fond d'or et de soie incarnat, avec personnages
d'or, de soie et d'argent appliqués » donnée par
Louis XII et qui représentait, « la vie de S. Flo-
rentin, qui fut du Poitou, d'où il fut rapporté à
Amboise, sous Foulques Nerra» (p. lOi).
2. — LE CHATEAU DE VERRES ET L'IN-
VENTAIRE DE SON MOBILIER, EN 1565,
par F. Frutaz, Turin, 1900, in-S\ de 39 pages.
Ce château est situé dans la vallée d'Aoste;
une inscription le dit construit en l390.C'est une
vraie forteresse, qui avait sa petite garnison ;
aussi son ameublement consiste-t-il surtout en
armes et engins de toute sorte, dont le détail
est très curieux. Trois pièces ont en consé-
quence un nom spécial : « crotte de l'artillerie »,
« salle de la garde, » « chambre de la munition».
Le texte, divisé par n°^, correspondant aux
appartements — ce qui fait des articles trop
longs — est suffisamment annoté; toutefois, j'ap-
pellerai l'attention sur certaines expressions, qui
ne peuvent qu'enrichir les glossaires spéciaux.
Allemagne, lieu de fabrication d'arquebuses et
d'un carcan pour détenu. « Deux rouets d'arqui-
bus d'Allemaigne avec leurs appartenances. —
Ung collier de fer, fait en AUemaigne, avec
pointes dedans, pour tormenter ung homme au
col. »
Arche à poulets : « Une arche vieillie pour po-
laglies. »
Artillerie. Presque tous les canons sont
ornés des devises et armoiries des seigneurs, mais
l'une par la salamandre, rappelle le souvenir de
P^rançois I. « Deulx pièces d'arteglerie de cam-
pagne, l'une avec la salamandre de (et) la corone
au-dessus, de longeur de neufz pieds. »
Bitigl. « Abreuvoir, formé ordinairement d'un
seul tronc d'arbre : » >i Ung grand buigl à (en)
bois, de peu de valeur, pour tenir l'eau des bor-
neau de la tour, gasté. »
Crotte. Toute pièce voûtée, répond au français
grotte.
Cerf. <( Deux testes de cerfz — Ung braque-
mard de chasse, avec sa pugne (poignée) de
corne de cerfz. »
Doil, du latin dolium: « Deulx grands et deulx
petits doils, pour tenir huile. »
Forme, bois de lit : « Une forme de lit, vieillie
de sappin. »
Lanterne. « Quatre petites lanternes de corne,
garnies de fer blanc, six autres plus grandes de
mesmes. — Deulx autres lanternes de toile, des-
quelles l'une est à baston. »
Tableau, tringles de bois, disposées en carré,
pour suspendre les tapisseries le long des murs :
« Ung grand tableau pour tenir la tapisserie. »
Tenture, improprement appelée tapisserie :
« Deux pièces de tapisserie de taphetas blanc et
roge, trapoinctées et figurées de lions, relevées,
contournée, doublée de toille, avec leurs franges
alentour, roges, gausnes et verdes. »
Verdure. « Au-dessus la dicte table ung tappis
faict à verdure gaulne, convenable à la dicte table.
— ■ Trois pièces de tapisserie vieillies. — Ung
ciel de lict, avec son dorsier de tapisserie faicte
en verdure, avec quattre personnages, de damas
fort usé. — Une pièce de tapisserie, avec un cerfz
au melieu, fait en verdure et ung aultre semblable,
tous deux usés. — Une petite table de noier,
avec ses deu.x tréteaux de mesme, sur laquelle
est ung vieux tappis fait à verdure. »
3. — TESTAMENT DE PIERRE BERGERON,
en 1666, dans le Bulletin historique du diocèse de Lyon,
1900, p. 88.
Ce prêtre, qui était attaché au chapitre de la
primatiale, légua à 1' hôpital du Pont du Rhône
« sa chapelle d'argent, consistant en un calice,
quatre chandelliers, une croix, deux paires de
burettes, deux paires boittes à hosties, clochette
et petit bassin, le tout marqué des armes dud.
testateur; chasuble, aubes, missels du concile,
corporaux et voiles. »
Le rit lyonnais comprenait quatre cierges,
les deux paires de burettes devaient être de
rechange suivant les fêtes, car il y avait aussi
deux calices, dont un grand d'argent ciselé et
doré, le bassin servait aux burettes et si l'on
avait deux boites à hosties, c'est que l'une était
affectée aux hosties du prêtre et l'autre à celles
destinées à la communion des fidèles.
4. — INVENTAIRE DE L'ÉGLISE D'ESCOUS-
SENS, EN 1717, dans VAibia christiana, 1899,
pp. 72-73-
Ni numérotage des articles, que je suppose
abrégés, ni explication d'aucune sorte.
Bassin en dinanderie : « Un grand bassin
cuivre jaune. »
Bouquets: « Vingt bouquets artificiels ; 22 vases
de faïence, plusieurs bouquets en papier. »
Candélabre, avec le sens de lustre : « Un can-
Bibliographie.
259
délabre de cuivre à douze branches, qui pend de-
vant le maître autel. »
Carreaux ou coussins : « Deux carreaux pour
le missel. »
Couteaux pour le pain bénit : i< Deux couteaux,
à manche de corne, pour couper le pain bénit. »
Couverte du pupitre : \< Deux couvertes pour le
pupitre des chantres, une en panne rouge, l'autre
d'une étoffe à fleurs avec frange. »
Crcdences, près de l'autel : « Deux crédences
à fleurs rouges.»
Devant d'autel : « Un de dentelles avec les
deux crédences, deux en papier, l'un de toute
couleur. »
Étui : « Un reliquaire d'argent et son étui.
Une croix d'argent, dorée en partie, pour les pro-
cessions, avec étui. »
Falot ou lanterne : « Un falot de fer blanc
pour les processions, 2 petits falots pour porter
le S. Sacrement. »
Garniture ou parement de la chaire : « Une
garniture d'étoffe de laine à fleurs pour la chaise.»
Alouchettes, pom la lampe :« Lampe de cuivre
et sa conserve, avec trois mouchettes. »
5. — INVENTAIRK D'UN FABRICANT DE
PAPIER, EN 1723, dans le Bidktin de la Société
archéologique de la Corrèze, 1899, pp. 609-613.
Le papier se différencie par sa couleur, « viol-
let », « campet » (campêche .?), « bleuf terne »
« bleuf trace » (gris), « vioUet fiot » (couleur de
feu) ; par sa fabrication, « gros bon » (bulle) ; par
son assimilation à l'étranger, « papier Lombar »;
par son format, « papier carré fin ».
6. — DÉPENSES DE L'ÉVÊCHÉ DE CAS-
TRES, de 1722 à 1734, dans Y Albin cliristiana, 189g,
P- 253-254-
L'extrait est très écourté. Aucune explication
n'est fournie sur certains mots qui appellent
l'attention des lexicographes; je vais y suppléer
par ces notes.
Cre'iiiière, vase au saint Chrême et aussi aux
saintes huiles : « Des crémières d'étain, 36 sols ».
Croix d'offrande, que l'on faisait baiser aux
fidèles qui venaient à l'offrande : << 2 croix d'of-
frande, 8 I. ».
Etoles doubles, un côté blanc et l'autre violet,
pour pouvoir changer pendant l'administration
du baptême. « Camelot blanc et violet, avec four-
nitures, pour 10 étoles à administrer les sacre-
ments, 35 1. 6 s. — I étole blanche et violette,
4 1. lOS. ;)
Pluvial, du latin pluviale, chape : « 3 plu-
viaux ».
Porte-Dieu,custoàe pour le transport du S. Via-
tique : « 5 porte-Dieu », «porte-Dieu d'argent,
doré au dedans ».
Rayon, se dit du soleil, partie supérieure de
l'ostensoir, au disque rayonnant et dont le pied
fut souvent le ciboire ou le calice. «( i ciboire, i
rayon » ; « ciboire, rayon à pied commun ».
7. — LEGS FAIT A SA PETITE FILLE PAR
HUGON LE ROUX, EN 1723, dans le Bulletin de
la Société archéologique de la Corrèze, 1899, pp- 518-519.
M. Louis Guibert a trouvé cette énumération
de mobilier domestique dans un livre de raison
limousin. J'en détacherai les passages saillants
(les articles ne sont pas numérotés) :
Bergante s'écrivait comme on prononçait : « Un
chaslit garni de Vergame ». « Une table en cou-
lonne torse, couverte de son tapis de Vergame,
avec ses deux guérindons ».
Cadis : « Deux beaux chaslitz, garnis de ri-
deaux de cadit vert. — Mon list et chaslit, garny
de cadit coleur d'or. » Victor Gay ne donne pas
ces deux couleurs au cadis, mais seulement (^/«■«i:,
azuré et violet.
C^/^z/^r/j. Toute la « veselle est de bon estain
commun », mais elle est accompagnée de vieux
couverts, « six ceuillères et six fourchetes,de très
bon argent ».
Dévotion. « A la cheminée, un tableau de
St Joseph. A la cheminée, un crucifix ».
Linceuls. Les draps pour les maîtres sont « de
brain », c'est-à-dire fins, tandis que sont gros
ceux « pour valetz », fabriqués « d'estoupes ».
Prie-Dieu : « Mon prie-Dieu, à deux armoyres
fermant à clef», probablement à deux corps, un
en bas et l'autre au-dessus de l'accoudoir.
Serviettes. Comme les nappes, elles sont de
deux sortes : « unies » ou « ouvrées », avec des-
sins.
Taque. A ce mot insolite dans nos contrées, ne
se croirait-on pas en Lorraine? « Dans la cuisine
une gran taque au foyer ».
8. — INVENTAIRE DE LA SACRISTIE DE
REMIREMONT, EN 1727, par Didier-LaURENT
[Pouriial Je la Soc. d'arch. lorraine, 1899, pp. 148-156).
L'illustre abbaye nous fournit, dans son mo-
bilier, quelques mots qu'il est utile de consigner,
à l'usage des futurs lexicographes.
Bassin. L'affectation au transport du pain
bénit n'est pas indiquée dans le Glossaire de
V. Gay : « Un grand plat bassin d'argent, sur
lequel on porte les pains bénits» (n° 13).
Couronne de l'ostensoir. Ce rit, que j'ai encore
vu usité en Poitou, est absent du Glossaire: « Une
KKVUH DE L AKT CHRÉTIEN.
1901. — 3""*^ LIVRAISON.
200
jtRcbuc ÏJe rSrt cJ)vctien.
boîte en carton, dans laquelle il y a deux cou-
ronnes de fleurs peintes pour mettre sur le
S. Sacrement » (n" 27).
Feinte, nom expressif pour signifier ce qu'on
appelle ailleurs représentation, usitée pour les
anniversaires où le corps n'est pas présent :
« Quatre grands chandeliers de cuivre pour la
feinte » (n» 136).
Galoji. Ce mot manque complètement dans
Gay. Au lieu d'être plein comme la passemen-
terie, on le rencontre ici à Jour : « Une bourse de
damas violet, bordée d'un galon d'or à jour »
(n° 69).
Housse, pour protéger l'ornement : « Un orne-
ment d'étoffe d'argent,... avec leurs housses de
serge impériale rouge » (n»* 38, 39).
Parterre, semé de fleurs : « Un dez (dais) de
satin blanc, travaillé en parterre, de velours
cramoisy et argent, sous lequel on porte le Saint
Viatique » (n° 1 15).
Soleil, ou auréole circulaire rayonnant autour
d'un Nom de Jésus, comme les armoiries des
Jésuites en Italie : « Un voile de calice de damas
blanc, brodé d'un soleil d'or, avec un point d'Es-
pagne d'or autour » (n° 51). — « Un autre
voile de gros de Tours vert, brodé en or et en
argent, avec un soleil au milieu » (n° 58).
9. — REGISTRK DE FAMILLE, 1727-1800,
dans le Bulletin de la Société archéologique de la Cor-
rhe, XXI, pp. 615-624.
La sépulture se fait « près notre banc» (1739),
« sous notre banq » (1751), «auprès de notre
banq » (1768), pour mieux garder le souvenir
des défunts, chaque fois qu'on va à l'église.
Il est question des « pantion » des enfants :
« Aux filles de Notre-Dame, à S. Junien », le
prix était de iio livres et 6 livres, pour le blan-
chissage, en 1763 ; en 1764, à Limoges, 150 1.,
« sans le blanchissage ny le maître d'école »
10. — INVENTAIRE DE LA CHAPELLE DE
NOTRE-DAME DE PITIÉ, AU DIOCÈSE DE
POITIERS, EN 1730, par Bonneau, dans le Pays
Poitevin, 1900, p. ii8.
L'énumération des ex-voto est curieuse : « Un
gros cœur, une oreille, deux petites croix, le tout
d'argent, attachés ensemble par un ruban rouge.
Deux petits reliquaires, une croix et une effigie
d'Innocent XII, aussi attachés ensemble par un
ruban vert. Plus, sept cœurs, quatre yeux simple.^,
un double, une langue, le tout d'argent et atta-
chés ensemble par une chaîne aussi d'argent.
Un cœur d'or, attaché par un ruban rouge. Petits
cadres en nombre infiny ».
11.— L'ABBÉ DE GRÉCOURT, INVENTAIRE
DE SON MOBILIER, par VINCENT {Bullet. de la
Soc. arcli. de Touraine, 1899, pp. 158-173).
« Jean-Baptiste-Joseph Vuillart de Grécourt,
poète français, est né à Tours en 1684 et mort
en la même ville le 2 avril 1743... Il obtint, à
l'âge de 13 ans, un canonicat à l'église St-Martin
de Tours. » L'auteur déclare qu'il omet « le
mobilier et le linge, à cause de sa longueur » •
c'est bien à tort, car l'inventaire perd ainsi nota-
blement de son intérêt et reste mutilé. Les deux
pages qu'on en donne ne compensent qu'insuffi-
samment cette omission.
Voici ce qui concerne le costume:
« Une canne à poignée d'or, aprétiée 20 livres.
« Une canne à roseau, avec sa poignée à lor-
gnette.
« Un bonnet de velours brodé d'or.
i< Une robe de chambre de damas bleu et
violet.
« Une tabatière, une paire de boucles à sou-
liers, une paire de boutons, le tout en or.
« Un anneau d'or, dans lequel est enchâssée
une pierre bleue, 61 livres.
« Une montre à répétition à boîte d'or,
100 livres. »
12. — LIVRE-JOURNAL DE LA FAMILLE
BONNEVAL, dans le Bulletin de la Société archéolo-
gique de ta Corrcze, 1899, pp. 675-689.
En fait d'étoffes, voici le « velour de cotton »,
la « flanelle d'Engleterre croisée », le i. moleton
de cotton », la « ratine Châteauroux ».
Le chanvre est de deux sortes, en 1783 et
1785 : « Chanvre blanc », roui à l'eau et «chan-
vre de la fleur », « filasse du chanvre mâle, plus
estimée que l'autre », dit l'éditeur Delmond.
X. B.XRBIEK DK MONTAULT.
RÉPERTOIRE ARCHÉOLOGIQUE DE L'AR-
RONDISSEMENT DE REIMS (département de
la Marne), publié sous les auspices de l'.Acadcmie de
Reims. — Dixième fascicule: — CANTON DE
BEINE, — par Ch. Givelet, H. Jad.vrt et L. De-
maison, associés correspondants de la Société natio-
nale des .Antiquaires de France. — Reims, F. Michaud,
1900, un vol. grand in-S" de 393 pages, avec 25 grav.
LF, Répertoire archéologiqtte de l'arrondisse-
ment de Reims, de MM. Givelet, Jadart et
Deinaison, se continue sur le plan très complet
d'après lequel il a été conçu. La transcription des
textes épigraphiques, le relevé des noms de
téncmcnts intéressants, de rapides aperçus histo-
Bibltograpl)te.
261
riques, voire des indications de sources inédites,
s'y ajoutent à la description minutieuse des
œuvres d'architecture, de sculpture, etc., le tout
additionné d'abondantes et instructives illustra-
tions. Les auteurs réalisent ainsi, canton par
canton, pour cet arrondissement si merveilleuse-
ment riche, le triple programme archéologique,
épigraphique et artistique, proposé naguères à
l'activité des travailleurs de province par le
Comité des travaux historiques et par le Comité
des Sociétés des Beaux Arts (').
Le canton de Beine est << plein d'attraits »
pour l'archéologue. — « Il a déjà livré de nom-
breux secrets des temps antiques aux fouilleurs
qui l'ont scruté, notamment à M. Charles Bos-
teaux, maire de Cernay-lès- Reims. Poursuivant,
depuis 1870, avec autant de précision que de
méthode, ses investigations personnelles dans les
stations préhistoriques, les foyers gaulois, les
sépultures romaines et franques, les souterrains
de tous les âges, ce laborieux archéologue a
formé un véritable musée local avec ses décou-
vertes » (p. 6). — En ce qui concerne les pério-
des médiévale et moderne, l'architecture reli-
gieuse a fourni à MM. Givelet, Jadart et Demai-
son « seize édifices réellement intéressants à des
titres divers » (p. 8). L'architecture militaire et
l'architecture civile, au contraire, sont pauvre-
ment représentées ; « à part les traces d'enceinte
et de fossés entourant quelques villages », les
auteurs du Répertoire n'ont « rencontré aucun
monument de défense militaire, aucun château
et en général fort peu d'anciennes maisons :
bâties en craie, en terre ou en bois, les habita-
tions n'offraient... la plupart aucune résistance
aux éléments » (p. 7).
« Les seules richesses à signaler... sont donc
concentrées dans l'architecture ou la décoration
des anciennes églises que renferme le canton »
(P- 7)-
Architecture religieuse. — Quatre égli-
ses sont réellement des « édifices remarquables » ;
celles de Beine, de Cernay-lès-Reims, de Saint-
Masmes et de Bélheniville ». — Beine nous i. offre
un parfait modèle du style de transition du
Xlfe siècle » (cf. pp. 23 à 30). — L'église de
Cernay-lès-Reims occupe « l'un des premiers
rangs parmi les églises rurales de l'arrondisse-
ment de Reims » ; ses trois nefs (dont la princi-
pale est voûtée sur croisées d'ogives embrassant
chacune deux travées) ont été construites « dans
la seconde moitié du XII<= siècle (1180 à 1200
I. On sait que le Répertoire archéologique de la Fratice, le Recueil
dei Inscriptions et \' Inventaire des Richesses d'Art ont dCi...
« suspendre leur publication », — peut-être plus encore faute de
collaborateurs que faute de crédits.
environ) » (pp. 102 à 114, un plan et une coupe
longitudinale). — A Saint-Masmes, nous trou-
vons un « édifice de la fin du XI I^ siècle, qui est
resté intact dans ses éléments essentiels primi-
tifs et qui mérite à cet égard une attention par-
ticulière, aussi bien que pour l'harmonie de ses
proportions » (pp. 304 à 309). — ■ L'église de
Bcthe ni V m e,c\a.ssés monument historique comme
celle de Cernay, remonte à la fin du XII° siècle
ou au commencement du XIII' (pp. 78 à 88,
avec un plan).
A Auberive, l'église présente « un intérêt par-
ticulier à cause des matériaux qui ont servi à
sa construction au XP et au XII' siècle » (pp.
39 à 48, avec un plan et une vue générale hors
texte). Elle est en partie bâtie avec des briques
provenant de l'aqueduc romain, qui amenait les
eaux de la Suippe à Reims. On retrouve à
l'église de Prosiies des parties bâties avec des
briques de la même provenance (p. 247, etc.).
Une mention particulière est également due
aux églises — à'Epoye. < de la fin du XI= siècle
ou du commencement du X 1 1'^ pour la plus grande
partie» (pp. 157 à 165, avec un plan), — de
Nogent-l Abbesse, nef du XI"^ siècle, chevet carré et
tour de la fin du Xllf^, bas-côtés du XV1« (pp.
199 à 206), — de Berru, XII« siècle, dont la tour
centrale est «d'une remarquable ampleur » (pp.
58 a 62), — de Dontrien, en partie romane, en
partie du XIII« siècle, avec un portail du XVI^
(pp. 131 à 140, avec un plan et une planche hors
texte), — et de Nauroy, en majeure partie du
XVI<= siècle (pp. 184 à 193, avec un plan).
Sculpture. — Indépendamment des jolis
chapiteaux de Cernay-lès-Reims, XII'' et XIV^
siècles (pp. 112-113 et deux planches phototypi-
ques hors texte), — les sculptures les plus inté-
ressantes, tant au point de vue de l'art qu'au
point de vue de l'iconographie, sont : — au dit
Cernay-lès-Reims : une Vierge, du XI V'^ siècle,
« d'un haut intérêt artistique » (pp. 115-116 et
une planche hors texte); — à Dontrien: une
autre Vierge, également du XIV"' siècle (p. 142) ;
— à Nogent-l' Abbesse : une statue en bois, «repré-
sentant un saint costumé en guerrier, armé, à
cheval ; elle remonte au XV' siècle et a été vé-
nérée constamment dans l'église de Nogent sous
le nom de saint Caprais », bien qu'elle ne corres-
ponde en rien aux attributs iconographiques de
ce saint (pp. 207 à 209, avec une planche hors
texte) ; — à Dontrien : une statuette de la Vierge
debout au pied de la croix, « jolie sculpture du
XVl'^ siècle » (p. 142) ; — à Saint-Martin-
V Heureux : «une curieuse statue de sainte Bar-
be », également du XVI'' siècle (pp. 299-300) ; —
à Saint- Hilaire-le-Petit : plusieurs statues, dont
202
Bcbuc tjr rart cbvéttcn.
une, datée de 1598, représente sainte Agathe
« debout, tenant un livre de la main droite, et
dans la main gauche, une tenaille avec son sein
arraché >^ (p. 289) ; — à BctJieniville, au tympan
du portail : une statue en bois de sainte Marie-
Madeleine, «assez bonne sculpture du XVI«
siècle » (p. 88) ; — à Dontrien : un saint Laurent,
du XVI^ siècle (p. 142) ; — à Selles : un groupe
en bois, œuvre assez ancienne [ 1 546 ?] et de sculp-
ture intéressante bien qu'assez grossière, qui
représente saint Martin à cheval, coupant son
manteau à un pauvre » (p. 353) ; — enfin à Berrii,
dans le mur d'une maison particulière : un groupe
de saint Hubert, du temps de Louis XIII (pp.
/O/l).
Vitraux. — Les vitraux se réduisent à qua-
tre fragments: — à Naiiroy : deux panneaux, du
XV!*" siècle, représentant l'un la Prédication de
saint Jean-Baptiste dans le désert, et l'autre,
les saintes Femmes se rendant au Tombeau
(pp. 193-194); — à Nogcnt-l'Abbesse : « deux
remarquables figures de saint Pierre et de saint
Sébastien », également du XVI"^ siècle (« de
1550 à peu près ») (p. 210).
Orfèvrerie. — Le calice en vermeil de
l'église de Berrîi, qui provient du Temple de
Reims et qui porte une inscription en précisant
la date (1575), est « l'un des plus précieux du
diocèse de Reims » (pp. 6^ à 65, avec une plan-
che hors texte).
Menuiserie et Ferronnerie. — A Certtay-
lès-Reiiiis, les deux vantaux de la porte prin-
cipale de l'église « remontent au moyen âge, au
XIV<= ou au XV*! siècle, ainsi que leurs gonds
et leurs clous en forme de quatre-feuilles »
(p. 117) ; — les trois retables de Saiiit-Souplet
(XVTI"= siècle) sont « d'un caractère particuliè-
rement remarquable et imposant » (pp. 328
à 331, avec deux planches hors texte); — à
Dontrien, le fauteuil du célébrant date du début
du XVI I<= siècle ; sa décoration offre les insignes
des pèlerins de Saint-Jacques (p. 141): — à
Beine, « les bancs de la nef sont ceux du XVII P'
siècle et portent encore leurs anciens numéros
d'ordre » (p. 30) ; — la grille d'appui, en fer
forgé, de l'église de Prosnes, est une « œuvre
assez élégante du XVI 11"^ siècle » (p. 250).
Fonts baptismaux. — Le canton de Beine
a conservé trois fonts baptismaux du XI= ou
du XI P siècle, en pierre noire de Belgique ou
des Ardennes, décorés suivant les traditions des
ateliers de ce pays. Les deux plus intéressants
se trouvent à Beine (pp. 30-31) et à Aiiberive
(p. 49) (cf. pp. 179-180).
Épigrapiiie lapidaire. — MM. Givelet,
Jadart et Demaison ont relevé, dans les églises
du canton de Beine, — en outre de la légende
du calice de Berru, — un ensemble de quarante
inscriptions lapidaires antérieures à 1800 ou
relatives à des faits antérieurs à cette date, dont
une du XII^ siècle, une du XIV'?, une du
XV«, dix-sept du XVI^, onze du XVI P", sept
du XVIIP et deux du XIX^.
Sur ces quarante inscriptions, quatorze sont
des épitaphes, et trois, des textes de fondations;
— dix-neuf relatent des dons ou des événements
divers ; — quatre sont des pierres commémora-
tives de travaux d'architecture et se rapportent
à l'exhaussement de l'abside de l'église â' Aube-
rive, en 1438, par le maître maçon Huet Ludin
(pp. 44 et 51.), — à la construction en 1507 (.'),
de la chapelle Saint-Basle de l'église de Pninay
(pp. 279-280), — à la reconstruction, en 1532,
de deux piliers de l'église iXEpoye (p. 163), — et
à la reconstruction, en 1556, d'un pilier de l'église
de Nanroy, par le maître maçon Pierre Joli
(p. 190). — Je citerai encore l'abondante série
de graffites(du XVI^ au XIX= siècle) de l'église
de Dontrien (pp. 144 à 150).
Épigrapiiie campanaire. — Ici je deman-
derai aux lecteurs de la Revue de l'Art chrétien
la permission d'être moins laconique et d'ajou-
ter à l'analyse du Répertoire de MM. Givelet,
Jadart et Demaison quelques annotations per-
sonnelles.
Dans le canton de Beine, MM. Givelet, Jadart
et Demaison ont rencontré une dizaine de
cloches antérieures à la Révolution, dont plu-
sieurs portent des noms de parrains ou de mar-
raines, marquants dans l'histoire champenoise.
— La plus ancienne est celle de Saint-Martin-
rileureux ; elle date de 1463 et présente la for-
mule « me levèrent... » ('). — ■ Vient ensuite la
belle cloche de Saint-Masines, datant de 1522.
La seconde ligne de l'inscription de cette cloche
est « formée de lettres... et de chiffres, dont
l'assemblage... semble inintelligible » (p. 31 1).
Des séries de lettres analogues se retrouvent
ailleurs : nous avons jadis été porté à croire, à
la suite de feu G. Vallier, qu'elles pouvaient
avoir un sens symbolique (-); nous sommes plu-
tôt porté aujourd'hui à les considérer comme un
simple remplissage.
1. Communication de M. H. Jadart (i" mai 1900). — Ollc
cloclie sera publiée dans le prochain volume du Rdpertoirt archéo-
logique (canton de Bourgogne).
2. G. Vallier, Inscriptions campanaires de l' isète, p. 48 ; — Jos.
Hertlielé, Kecherches pour servir à r histoire des Arts en Poitou,
[)p. 271 à 273: — Jos. B..., V A rt campanaire en Poitou, dans le
liultetin archéologique du Comité des travaux historiques, année
1889, p. 300 : — Givelet, Jadart et Demaison, Répertoire archéoU,
t. X. p. 311, note 2.
Btbttograpl)te,
263
La seule cloche signée, antérieure à la Révo-
lution, qui existe encore dans le canton de Beine,
est celle de Dontrien ; elle a été fondue en
1788, par « LES ROY ET GURY »(pp. 143 et 373).
Cette société de Lorrains ambulants, — dont
les signatures n'ont pas encore été expliquées,
que nous sachions, — se composait de trois ou de
quatre fondeurs, dont le père, le fils et le gendre.
— Le père, CïlARLES RoY, habita successive-
ment deux villages voisins de Bourmont : Saint-
Thiébault et Gonaincourt ; il est dit fondeur
de cloches, dans les archives de Gonaincourt, à
partir de 1758 ; il mourut au dit Gonaincourt le
28 pluviôse an V, à l'âge de 85 ans. — Son fils,
Joseph-Hubert Roy, né à Saint-Thiébault le
3 novembre I754i marié à Gonaincourt le 9 août
1785, mourut le 2 janvier 1814 au dit Gonain-
court, dont il avait été maire ou adjoint à plu-
sieurs reprises. — Jean-Baptiste Guky, labou-
reur avant son mariage, fondeur de cloches après,
avait épousé à Gonaincourt, le 13 février 17S1,
Marie Roy, fille de Charles et sœur de Joseph-
Hubert ; il mourut, lui aussi, à Gonaincourt, le 25
décembre 1813, à l'âge de 70 ans. — Un autre
Gury, Nicolas, cousin-germain de Jean-Baptiste
Gury, qui précède, et peut-être neveu de Charles
Roy, fut aussi fondeur de cloches ; il se maria le
4 février 1788, à Huilliécourt, avec Charlotte
Morel (>).
Suivant que les Roy père et fils eurent avec
eux, en campagne, les deux Gury à la fois, ou
bien seulement l'un d'eux, Jean-Baptiste, les
signatures des cloches furent libellées : « les Roy
et les Gury », ou bien « les Roy et Gury», ou
bien encore « les Roy et J. B. Gury ».
Le campanographe du Tardenois et de la
Thiérache, M.B.Riomet, a signalé, dans la partie
nord du département de l'Aisne, plusieurs œu-
vres de cette société de fondeurs : — à Beaumé.
une cloche, encore existante, signée : LES ROY
ET LES GURY MONT FAITE EN 1783(2); — à
Rognj, trois cloches, dont deux détruites à
l'époque révolutionnaire; la survivante, qui pesait
260 kilog. et qui a été refondue en 1890 à Mohon
(Ardennes)par feu Honoré Perrin- Robinet et feu
Pol Perrin, père et fils, était signée, comme celle
de Dontrien : LES ROY ET GURY MONT FAITE
EN 1788(3); — k Proisy, une cloche qui porte
1. -Archives communales de Saint-Thiébault, de Gonaincourt et
de Huilliécourt (Haute-Marne), séries GG.
2. B. Riomet, dans la Thiérache, tome XIII, année 1889, p. 126.
— [L'abbé Palant], Rogtiv. baplëme des cloches, dans la Setnalne
religieuse du diocèse de Soissojis el Laon, n° du 6 septembre 1890,
p. 580 ; tirage à part, p. 6. — Communication de M. l'abbé Achille
Lépissier, curé de Besmont et Beaumé.
3. [L'abbé Palant], art. cité, dans a Semaine religieuse, pp. 580
et 640 ; tirage à part, pp. 6 et 13. — B. Riomet, dans la Thiérache,
tome XI\*, p. 5.
comme signature : « 1790 FAITE PAR G. ROY ET
J. E. GURY(i) ».
Parmi les anciennes cloches disparues du can-
ton de Beine, sur lesquelles les auteurs du Ré-
pertoire archéologique ont pu recueillir des ren-
seignements, les plus intéressantes sont certaine-
ment les trois fondues vers 1567- 1568 pour
l'église de Prunay, par le célèbre PIERRE DES-
CHAMPS, auteur du gros bourdon de la cathédrale
de Reims (p. 280). — A propos des trois cloches
provenant de l'ancienne abbaye Saint-Remi de
Reims, qui se trouvent depuis 1804 à l'église de
Cernay-lès-Reims, MM. Givelet, Jadart et De-
maison donnent (p. 120) divers détails sur les
fontes importantes faites pour cette abbaye en
1685 et en 1736 ; à cette dernière date, l'abbaye
de Saint-Remi utilisa le savoir-faire de deux
Lorrains bien connus des campanographes :
Antoine et Claude Brocard. — A Époye,
dans l'église, un graffite offre « le nom de PIE •
OVDIN, suivi de la figure d'une cloche » (p.
172). «Serait-ce un nom défendeur.'» La chose
est d'autant plus vraisemblable, qu'il a existé au
XVII<= siècle un fondeur de cloches du nom de
Pierre Oudin.
Durant le cours du XIX« siècle, les fondeurs
qui signent des cloches pour le canton de Beine,
sont en majeure partie des Lorrains. Nous trou-
vons ; — en 1807, LES Regnaud et les An-
toine (p. 66), une société d'ambulants que
M. Jadart a déjà signalée dans les Ardennes, et
que l'on retrouve également dans l'Aisne ; — de
i8i8à 1839 [Antoine] Antoine et [son beau-
frère] F. L01SEAUX (pp. 333-334, 290, 89-90 et
31-32), tous deux domiciliés à Robécourt (Vos-
ges):— en 1827, i-ES COCHOIS [père et fils] ET
les Barrard FRÈRES (pp. 281-282), c'est-à-dire
1° Jean-Nicolas Cochois, aliàs Cochois-Baret,
2° François Cochois, 3° Jean-Baptiste Barrard
raîné,aliàs Barrard-Husson.et 4° Pierre-François
Barrard le cadet, aliàs Barrard-Barrard (^) ;*
de 1834 a 1895, LES Paintandre, de Vitry-le-
François (pp. 238-239, 228-229, 237-238, 354,
216-217 et 172-173), c'est-à-dire les frères SÉ-
BASTIEN et Théodore Paintandre, de Breu-
vannes (Haute-Marne), établis à Vitry vers 1830,
et les deux fils de Théodore, Paul et Victor,
qui continuent l'industrie paternelle ; ■ — et en
1888, H[ONORÉ] Perrin - [Robinet]' (pp. 256-
257), établi aux portes de Mézières (Ardennes).
En outre des cloches fondues par des Lorrains,
ambulants ou fixés à plus ou moins de distance
du canton de Beine, — apparaissent, en 1838 et
1. B. Riomet, dans la Thiérache, tome X'VH, p. 65,
2. Cf. Jos. Berthelé, Les Cochois et les Barrard, fondeurs de cloches
ambulants dans t' arrondissement de Château-Thierry. — Annales
de la Société hist. et archéol. de Château-Thierry, année 1890
pp. 61 à 68. ^
>64
3Re)Jue De l*^vt cj)rétieit
en 1852, deux cloches signées: HiLDEBRAND
fondeur à Paris (pp. 354 et 366), — et en 1869,
deux cloches d'acier signées : jACOB HOLTZER
(p. 290) et fondues à Unieux (Loire). Ces deux
dernières cloches avaient été entreprises par un
personnage... de tempérament assez aventureux,
JÉRÔME DUTOT, qui ne coula jamais une cloche
de sa vie (à ce que m'ont assuré des gens bien
informés), mais qui ne s'en intitulait pas moins
<i. fondeur de dociles en bronze et seul fondeur en
i. France de cloches d'acier » (p. 290).
La réclame de Jérôme Dutot n'est pas la seule
signature apocryphe que nous fournissent les bef-
frois du canton de Beine. Les trois petits timbres
de l'horloge municipale de Pontfaverger portent
l'inscription suivante : <i Nous avons été fondues
« fn i8j^ par M. A. Calaine, ingénieur à Rethel,
« membre de plusieurs académies et sociétés sa-
« vantes de France et d' Angleterre, médaille d'or
« et d'argent » (p. 239). Ce CalAME, qui était
d'ailleurs un mécanicien intelligent, fabriquait
des horloges... et commandait les cloches, dont
il avait besoin, aux Paintandre, à Loiseau-Lié-
gault, etc. Au XIX"-' siècle aussi bien qu'aux
siècles précédents, on rencontre dans l'épigraphie
campanaire, un certain nombre de signatures,
dans lesquelles le nom du véritable auteur est
ainsi remplacé par celui de l'entrepreneur ou du
vendeur. Cette façon d'agir a toujours été admise
dans le commerce, et après tout elle est légitime !
Néanmoins elle peut, dans plus d'une occasion,
faire surgir de réelles difficultés sous les pas de
l'historien et de l'épigraphiste. Celles des substi-
tutions de ce genre, qu'il nous est possible de
percer à jour, parce qu'elles appartiennent à une
époque encore voisine de la nôtre, doivent nous
mettre en garde contre celles qui peuvent se
rencontrer dans les textes d'une date plus
reculée. , „
Jos. Berthelé,
''^m BcrioÏJiques»
BULLETIN MONUMENTAL, année 1901, n' i.
M. Lefèvre-l'ontalis, devenu à la fois Direc-
teur de la Société française d'archéologie et de
son organe le Bulletin monumental, marque son
avènement par une impulsion nouvelle donnée à
ce dernier périodique. 11 vient de paraître, chose
insolite, pas trop en retard sur sa date régle-
mentaire ; il est plus intéressant que jamais, et
M. L.-P. ouvre lui-même la livraison par une ex-
cellente monographie de la petite église de Chars
(Seine et Oise), charmant édifice du XI I-XIlI'^s.,
à trois nefs, avec chœur entouré d'un large
déambulatoire à tribunes et de cinq chapelles
rayonnantes. La nef centrale est étranglée (elle
n'a guère que 4 m. de largeur), mais le détail de
l'architecture est d'une extrême élégance : belles
moulures toriques, curieuse clef de voûte, des
angles de laquelle émergent quatre couronnes,
superbes chapiteaux romans à feuilles d'acanthe,
jolie rose. L'article est bien illustré, mais l'on
regrette de n'y pas trouver une coupe sur les
nefs.
M. A. de Rochemonteix donne à son tour
une notice de l'église de Sarcelle (Cantal), antique
et minuscule sanctuaire offrant un exemple d'ab-
side demi-ronde, carrée au dehors.
Il y eut aux XlV'^etXV'^ siècles une fabrication
quasi industrielle de panneaux de retable en al-
bâtre. Darcel croyait qu'ils provenaient d'ateliers
flamands : Feu Courajod et M. J. Destrée leur ont
attribué une origine italienne ; M. A. Bouillet
pense avoir trouvé la trace d'un atelier flamand
établi à Lagny (Seine et Marne).
Bil)ltograpl)te.
265
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^^^.^ ^ ,^t ^ ^^^^, :^ :,^ .,^. :,^ ,^ .,;^ :^ ,^ ,^ ,^ .^ ..^ ,^ ^^^^^
Cbrontque. soi
>MMAIRE : RKSTAURATION des ruines, réponse à M. Fierens-
Gevaert. — RESTAURATIONS DIVERSES. — VARIA. — NÉCROLOGIE.
wwwwwwwwwwwwwwwwwwwwwwww^
Hcstauration Des ruines.
î^N même temps que je répondais ici aux
critiques de M. Fierens-Gevaert diri-
gées contre la restauration des ruines
d'Aulne, j'ai tenu à défendre l'École
de Saint-Luc injustement attaquée par lui (V.
Revue de l'Art chrétien, n° i de 1901, p. 82). Mon
iionorable contradicteur a riposté sur ce point
dans la Chronique des Arts (p. 46 de cette année).
Avant de reprendre la discussion dans les co-
lonnes de la Revue de l'Art chrétien, il m'impor-
tait de savoir quel serait le sort d'une lettre, que
j'ai cru devoir adresser à la Chronique des Arts,
et que celle-ci a fini par reproduire en partie.
Parmi les dix exemples que M. F. -G. avait cités
de monuments qui auraient été mis à mal par les
élèves de cette « pépinière de pastiches », j'en ai
cité deux, spécialement, dont les restaurateurs
n'ont rien de commun avec l'école mise eu cause.
Les incriminations manquaient donc d'exacti-
tude autant que d'équité. M. F.-G. s'est donné
là-dessus le facile triomphe de conclure, que les
autres ont donc « quelque chose de commun
avec, etc.. » Il m'a fallu mettre les points sur
les i; j'ai prouvé que sur ces dix cas cités, deux
seulement peuvent être mis à l'actif d'un élève
de Saint-Luc ('). Une fois de plus il est démontré
I. Voici la lettre que j'ai adressée à la Chronique ttes
Arts et que l'on a reproduite en partie.
Monsieur le Directeur de la Chronique des Arts et de la
Curiosité,
Votre très estimé journal a publié deux articles de Monsieur Fierens-
Gevaert sur les restaurations monumentales exécutées en Belgique
et sur la part prétendument funeste qu'y prend l'École de Saint- Luc.
Le premier m'atteignait indirectement en critiquant les travaux
exécutés à l'abbaye d'Aulne sous ma direction. J'y ai répondu dans
la Revue de l' A rt chrétien en reproduisant in extenso l'article en ques-
tion de M. F.-G. Celui-ci m'a répliqué dans vos colonnes en jiie nom-
mant, et sans reproduire mes argimients. Je me dois de lui répondre
devant vos lecteurs.
Le premier article de M. F.-G. était criblé d'inexactitudes, fâcheuses
parce qu'elles servaient à étayer une amère critique d'une très esti-
mable institution. J'ai supposé que son auteur était documenté par
des tiers; il proteste, tant pis pour lui !
Il a, en effet, présenté comme imputables aux élèves de l'Ecole de
Saint-Luc des restaurations faites à dix monuments. J'ai rectifié ses
dires pour quelques-ims de ceux-ci; il triomphe et me proclame en
aveu pour les autres. Je suis obligé de mettre les points sur les / et de
déclarer que sur les dix monuments en question deux seulement, la
Collégiale et l'Hôtel-de-Ville de Louvain, sont restaurés (et d'une
manière remarquable d'ailleurs) par un ancien élève de l'école incri-
minée : M. Langerock. Voici quels sont les autres monuments
cités :
Eglise du Sablon à Bruxelles (architecte, M. Van 'Vsendyck).
Église de Sainte-Gudule (M. F.-G. Ait. cathédrale) de Bruxelles.
Je nie qu'elle soit restaurée par un ancien élève de Saint- Luc.
Château des Comtes de Gand (architecte, M. J. de Waele, élève et
professeur de l'Académie des Beaux-Arts de Gand).
avec quelle aveugle animosité l'on s'en prend à
cette école, qui heureusement ne s'en porte pas
plus mal. Mais il faut ajouter que les deux cas
qui seuls regardent l'école incriminée, à savoir
ceux de la collégiale et de l'Hôtel-de- Ville de
Louvain, font grandement honneur à celle-ci, et
à son élève M. Langerock. M. F.-G. ne trouvera
pas en France une seule restauration monumen-
tale effectuée avec une plus parfaite correction
archéologique que celle de Saint-Pierre de Lou-
vain. A l'Hôtel-de-Ville, deux architectes étran-
gers à Saint-Luc avaient commis des fautes
regrettables; on ne pourra pas faire le même
reproche au restaurateur actuel.
J'ai défendu l'école de Saint-Luc, parce qu'elle
avait été systématiquement et méchamment atta-
quée. Il est juste de défendre aussi plusieurs des
autres restaurateurs des monuments belges; nous
attendrons pour cela que M. F.-G. allègue des
faits précis. M. André Hallays reprend sa thèse
dans \z Journal des Débats (') et, du même cœur
léger, prétend qu'on a « iinpitoyablement démoli
des parties anciennes du Gravensteen ». On n'a
démoli au Château des Comtes qu'une partie de
tour qui allait s'écrouler, et pour sauver les parties
Steen de Gérard le Diable à Gand (architecte M. ,A. Verhaegen,
ingénieur honoraire des Ponts-et-Chaussées).
Cathédrale de Malines (architecte, M. H. Meyns, étranger à Saint-
Luc).
Abbaye de Villers (architecte, M. Licot, étranger à Saint-Luc).
Abbaye d'Aulne (architecte, votre serviteur, élève et professeur de
l'École du Génie civil de Gand).
Église de Saint- Martin à Saint-Trond (édifice moderne, donc hors
de cause).
M. Fierens-Gevaert s'est prévalu de dix exemples pour établir, à
l'aide des résultats obtenus, l'influence funeste de cette « trop célèbre
académie, pépinière la plus florissante des pasticheurs et copistes
belges ». Des dix exemples, huit sont imputables à des architectes
qui n'appartiennent pas à cette école. J'espère que M. F.-G.
regrettera la légèreté de ses attaques.
Après avoir réglé ce dififérend, où j'ai été personnellement cité, je
ne veux pas. Monsieur le Directeur, abuser de vos colonnes en y
abordant l'intéressante question de principe qui est soulevée.
Je compte retrouver M. F.-G. ailleurs.
Agréez, je vous prie. Monsieur, mes meilleurs sentiments.
L. Cloquet.
Gand, 3 mars 1901.
A quoi M. F.-G. répond :
<i. Ne voulant pas encombrer la Chronique d'une trop longue
réponse, je me contente de remarquer : 1° que M. Cloquet est confé-
rencier de Saint-Luc, 2" que j'ai, dès le premier jour, signalé l'église
de Saint-Martin de Saint-Trond comme un édifice moderne, 30 que
je me suis élevé surtout contre l'abus des restaurations et que la
question des attributions n'ayant aucune importance dans l'espèce,
la liste fournie par M. Cloquet n'enlève rien aux conclusions de mon
article. »
Nos lecteurs ont pu lire dans notre livr. de janvier, p. 83, l'article
de M . F. -G. et ils peuvent y vérifier que notre liste enlève toute valeur
aux incriminations violentes du correspondant de la Chronique des
Arts QonUe l'excellente institution de Saint-Luc.
I. N° du 15 inars.
270
Bebue bc r^rt chrétien.
voisines ; elle a été fidèlement réédifiée. Nous
prions M. Hallais de nous dire ce que l'on aurait
pu faire de mieux, et ce que l'on aurait fait en
France ?
M. F.-G. revient sur les travaux des ruines
d'Aulne. Il se scandalise de ce que l'on empile
avec ordre certaines pierres retrouvées qui cons-
tituent des documents architectoniques ; il croit
me confondre en citant un archéologue qui, décri-
vant l'état actuel de l'abbatiale, s'exprime ainsi :
« en posant le pied sur le sol de l'antique nef de
l'église Notre-Dame d'Aulne, on se croit tout
d'abord au beau milieu d'un édifice en pleine
construction ». La remarque est naïve ; M. l'abbé
B. et M. F. voudraient-ils par hasard que les
travaux nécessaires pour tenir debout des murs
qui s'effondrent se fissent sans échafaudages,
sans ouvriers et sans engins ?
Laissons de côté ces critiques dénuées de toute
valeur, et revenons aux principes. Entre deux
partis il fallait choisir ; ou bien, il fallait laisser
crouler les derniers murs de la fameuse abbaye
avec les curieux vestiges de l'art ancien qu'ils
recèlent, pour ne pas déranger un instant ce
pittoresque et chaotique aspect de la nature
sauvage qui, à la joie des snobs du pittoresque,
se développait au sein des débris amoncelés.
Ou bien, il fallait interrompre un instant cet
envahissement des végétaux parasites et l'action
délétère des intempéries, pour procéder à la
réparation urgente des ruines et les consolider
avant de les rendre à la nature.
Dans le premier cas, c'était la transformation à
bref délai d'un chef-d'œuvre d'architecture en un
amas de décombres, embellis, je le veu.x bien,
par des tapis de gazons et de mousses, des vête-
ments de lierre et de belles poussées d'herbes, de
buissons et d'arbres enracinés aux murs. C'était
l'anéantissement rapide de l'œuvre humaine par
l'œuvre de la nature.
Dans le second cas, c'était la conservation d'une
prestigieuse ordonnance monumentale, rehaussée
de ce que la nature saura bien y ajouter (après
la restauration tout comme après la destruction
première), de vénérable patine, de décor végétal
et d'allure pittoresque. Seulement, nous garde-
rons longtemps encore ce chœur dont les contre-
forts n'auraient pas vu le XX*^ siècle ; nous n'au-
rons pas laissé disparaitre cette curieuse fenêtre
du transept nord (côté ouest), unique spécimen
de tout le système des verrières de la grande
nef primitive ; le sol déblayé nous aura rendu la
statue du prince de Ligne et la superbe dalle
funéraire de Louant, le grand bâtisseur ; nous
aurons exhumé les nervures avec leurs clefs, qui,
reconstituées sur le terrain, indiquent toute la
superstructure, et la crypte funéraire régnant
sous la nef ; et la base des grands piliers et la
partie inférieure des galeries d'un cloître gigan-
tesque entièrement enfoui. Serait-ce donc un sa-
crilège d'avoir pour cela troublé quelque temps
le désordre, qui fait rêver les poètes au clair de la
lune? Et puis, n'est-ce rien d'avoir, en rétablissant
le niveau primitif du sol, rendu ses proportions
à toute l'architecture ? Le Gouvernement belge
et spécialement M. le ministre De Bruyii en ont
jugé autrement que M. Fierens-Gevaert.
On peut dififérer d'avis là-dessus, et le dire
Libre à M. F.-G. d'opter pour le premier parti.
Mais qu'il garde son opinion... et aussi ses ob-
jurgations, et qu'il laisse en paix l'excellente
école de Saint-Luc, dont les élèves ont mille fois
raison d'étudier l'architecture du moyen âge, non
seulement pour être à même de restaurer cons-
ciencieusement les monuments de cette époque,
mais encore pour s'inspirer des mêmes principes
et des mêmes traditions en construisant des
édifices conformes à la foi dont ils sont animés.
L. CloquET.
Kcstaurations Dioerscs.
E Nouvelliste de Rouen du 24 février
nous donne les renseignements sui-
vants sur la restauration de la cathé-
drale. Un comité a été constitué dans
le but de provoquer une souscription publique
destinée à aider à la restauration du grand por-
tail. Les travaux indispensables à la simple con-
servation du portail ont été évalués à 600,000
francs. La ville de Rouen s'est obligée à fournir
une contribution de 100,000 francs, payable en
dix annuités; le département s'est engagé pour
pareille somme, payable en cinq ans; le diocèse,
de son côté, a promis un concours de 100,000
Irancs à recueillir par voie de souscription ; l'État
doit fournir le reste. Le comité de souscription a
recueilli 82,140 francs. Il ouvre une souscription
pour les 17,860 francs qui restent à recouvrer (•).
LA cathédrale de Strasbourg va être restau-
rée; le Conseil municipal de cette ville a
évalué la dépense que nécessiteront les travaux
de restauration à 2,253,000 francs; vingt années
seront nécessaires pour rendre à l'admirable édi-
fice son ancienne splendeur.
Le Conseil municipal est d'avis que l'Alsace-
Lorraine et l'Allemagne doivent participer aux
I. Les souscriptions sont reçues : au secrétariat de l'arclievêché,
chez les membres du comité, dans les presbytères et dans les
bureaux des journaux du département qui voudront bien prêter leur,
concours.
chronique
271
frais de ces travaux, la conservation de la cathé-
drale de Strasbourg intéressant non seulement la
ville, mais la province et l'État.
—i<S< • l©«—
BIENTOT sera terminée la restauration des
restes de la célèbre abbatiale bénédictine
d'Etival-en-Charnée (Sarthe), restauration due
à l'initiative de MM. Robert Triger et du marquis
de Beauchesne, et aux générosités de MM. Sing-
her, Chappée, Galpin, etc., du duc des Cars, des
bénédictins de Solesmes. Les travaux sont diri-
gés par M. Triger. On a dégagé une absidiole du
XII<^ siècle, des peintures murales, une belle statue
de la Vierge en terre cuite. Le R. P. Dom
Guilloreau, de Solesmes, prépare une monogra-
phie de l'édifice.
LA vieille maison de la rue Saint-Romain, à
Rouen, pour laquelle ont combattu tant
d'artistes et d'archéologues, d'érudits et de sim-
ples touristes, est sauvée. Elle a pu être rachetée
par la Société des Amis des monuments rouen-
nais, et le Conseil municipal de Rouen, à la suite
de pourparlers avec le ministère, a décidé de
modifier son projet d'édilité.
ON exécute, en ce moment, dans les ateliers
d'un ferronnier liégeois, un grillage en fer
forgé destiné à entourer l'église collégiale de
Huy.
Oh mettra prochainement en adjudication les
travaux de restauration de la basse-nef méridio-
nale, près de la grande tour, et la reconstruction
de l'ancien portail du XIV<^ siècle, découvert lors
des derniers travaux.
-^t ■• }©f-
LA restauration des célèbres maisons de la
Grand'Place de Bruxelles se poursuit ; bien-
tôt l'ensemble sera achevé. On entreprend actuel-
lement des travaux à la maison /e Pigeon et à la
maison du duc de Bavière.
La première est située à droite de la Maison
du Roi. Elle a appartenu à la corporation des
peintres, puisa celle des arbalétriers. On lui ren-
dra l'aspect qu'elle possédait lors de l'entrée à
Bruxelles de l'archiduc Ernest.
Varia.
'ADEMOISELLE Pellechet, biblio-
thécaire bibliophile, qui a laissé un
^L^l legs important à la Bibliothèque na-
v^r^gaâl tionale, a, par son testament, légué,
en outre, à l'Académie des Inscriptions et Belles-
Lettres un capital de 300,000 francs. Les intérêts
de cette somme doivent être employés à con-
server les monuments existants en France et aux
colonies, qui présenteront un intérêt historique
ou archéologique. Le but que s'est proposé la
défunte est surtout de venir en aide aux monu-
ments historiques non classés ou à ceux classés
dont l'Etat se désintéresserait et non de faire
travail d'entretien et de restauration pour un seul
monument.
LA Société des Amis du Louvre a offert au
musée national une importante tapisse-
rie flamande du XV*^ siècle, qui ne mesure pas
moins de huit mètres de long etvaut 70,000 francs.
Elle ïsçvéscnXe Le Jugement deriiici: \^Q Christ,
assis au sommet de la composition, est envi-
ronné d'anges déroulant des banderoles et son-
nant de la trompette; à ses pieds, deux figures
allégoriques : l'une, placée à la droite du Christ,
symbolise la Vertu; elle lève d'une main, vers le
Souverain Juge, le lis, emblème de l'innocence
et, de l'autre main, invite à s'approcher les bons,
à qui des anges distribuent des couronnes; la
seconde est \a. Justice, qui menace de son glaive
vengeur les méchants épouvantés. Aux deux
extrémités de la composition, on voit encore
deux prophètes, assis dans de hautes chaires
sculptées, et déployant des phylactères où se
lisent des textes sacrés. Une merveilleuse bor-
dure, toute ornée de fruits et de fleurs, encadre ce
tableau, dont l'état de conservation est, pour ainsi
dire, parfait. Elle semble avoir été tissée à la fin
du XVe siècle et avoir appartenu à la maison
d'Albe. D'après le type des figures et l'arrange-
ment des draperies, il y aurait lieu d'en attribuer
la composition à Quintin Matsys. C'est une
œuvre d'une grande valeur artistique.
MONSIEUR G. Vergaud vient d'offrir au
musée de Cluny une boîte à boussole du
XVII" siècle, en ivoire gravé, ornée d'arabesques
et d'armoiries, ainsi qu'une statue polychrome de
la Vierge tenant l'Enfant Jésus, en pierre, du com-
mencement du XVe siècle, mesurant 0,70 centi-
mètres. Cette statue est un beau et curieux spé-
272
3&rbuc ïie V^xt t\)xttitn.
cimen de l'art primitif de cette époque en Lor-
raine.
— }0< ■■ >04—
LE gouvernement espagnol se proposerait de
^suivre l'exemple de l'Italie, de la Grèce et
de l'Egypte, et de prohiber désormais l'exporta-
tion d'aucun objet d'art, ni d'aucune antiquité de
l'Espagne; la prohibition s'étendrait également
aux livres, documents, manuscrits, coins, mé-
dailles, armes, armures, etc., etc.
— i©<— ^€M—
ROBERT DE LUZARCHES.
M. Jean Rameau écrit dans le Gaulois, à
propos de la statue qu'il est question d'élever à
Jehan de Meung, le continuateur du Roman de la
Rose, les lignes suivantes :
Nos écrivains du moyen âge sont obscurs, ou grossiers,
ou pédants; ils piétent tous par quelque coté à la critique.
Les architectes de la même époque sont lumineux et purs
comme le ciel, vers lequel ils dressaient leurs flèches
extatiques; et l'admiration impérissable des siècles est
acquise à leurs travaux.
Notre-Dame de Paris et la Sainte-Chapelle honorent
autant notre génie que le Ri>i)ian de la Rose et celui du
Renard. Je cherche en vain cependant, sur les places de
Paris, des monuments élevés à la gloire de Maurice de
Sully et de Pierre de Montereau.
Je pense, pour ma part, que Robert de Luzarches, à qui
nous devons la miraculeuse nef d'Amiens, mère de toutes
les belles nefs de la chrétienté, est plus digne de nos
louanges et de notre vénération que Michel-Ange, Raphaël,
Léonard de Vinci et tous les artistes de tous les pays et
de tous les temps. Et si quelques Parisiens trouvaient
mon enthousiasme un peu exagéré, qu'ils interrogent les
archéologues anglais ou allemands, et ils verront que
Robert de Luzarches est une de ces figures qui méritent
de faire à jamais l'étonnement du monde. Je ne vois pas
pourtant beaucoup de statues élevées en France à la mé-
moire de Robert de Luzarches.
Je vois un peu partout s'ériger des monuments pour
célébrer le génie de gens qui firent des mairies, des
théâtres, des marchés au poisson, des égouts collecteurs;
mais Robert de Coucy et Jean d Orbais, qui travaillèrent
■\ la prodigieuse cathédrale de Reims, n'en ont pas ;
Enguerrand et Cormon, qui travaillèrent au chœur de
Beauvais, le plus beau du monde, n'en ont pas ; Jean de
Beauce, qui fit le clocher de dentelle à la cathédrale de
Chartres, n'en a pas; Guillaume de Sens, qui, non con-
tent d'illustrer son pays, passe pour avoir bâti la plus
magnifique cathédrale de T.-Xngleterre, n'en a pas.
Il y a là une injustice révoltante, et l'on s'indigne de
voir prodiguer le bronze ou le marbre pour tant de pein-
tricules ou d'écrivaillons, ciuand on ne met même pas
une inscription sur une plaque pour honorer les maîtres
de l'art national, ces géants du moyen âge auprès des-
quels les architectes de Rome et d'Athènes ne paraîtront,
un jour, que de petits enfants.
i» -i» t», >,» ^f. ■>,% *yi ^» «y t».t»t»iis. »y »}!t >»*»>,•(■ »» ».tf »■■» «it »at |y
%
^ iV sV >:>î' ^sV»W *V ïV ^ «W *■ W ^' V ''ii »5; sW «ÎS;' «^ -W A:' *>î' »W^
'^m Nécrologie. ^^
LA Revue de l'Art chrétien vient de faire
une des pertes les plus sensibles qu'elle
ait essuyées depuis sa fondation, par la mort
inopinée de Mcin.seigneur X. Barbier de Montault,
le doyen de ses collaborateurs.
Le trépas l'a surpris en pleine activité, à tel
point qu'il laisse inachevé plusieurs articles qu'il
préparait pour la Revue et dont l'impression
était commencée.
Nous recommandons son âme aux prières de
nos abonnés.
Le temps nous faisaiit défaut, nous remettons
à la prochaine livraison un article consacré à sa
mémoire.
Imprimé par Desclée, De Brouwer & C'"=.
Be\)ue îie
l'Hrt chrétien
f> yaiaiosant tans les ùtiiy. moîô.
44'"^ Hnnéc. — 5^ Série.
Came XII (1.= ùe (a lolicctianj. 4<
4'"'-' livraison. — -.ïiiiUcr \^)o\. 4(
Wi¥^^^i¥nYnWiWiWiWiWi¥^¥n
^m^mM^m^m^m^ Jlt ©érxigin» mm^m^
H propos D'un litire récent. — ca jeunesse Du fiérugin et les Origines De
réCOle Ombrienne ('), par l'abbé Broussole, aumônier du Lycée Michelet.
H^fe^j E Pérugin est, dans le
mouvement de la Re-
naissance italienne, un
artiste dont la valeur
J ne semble pas encore
Il . ^Miiiissr^ir bien fixée. Il est né à
^^^^^f^^wH la période la plus bril-
lante de ce mouvement ; par son enfance,
ce maître appartient encore à la première
I. Paris, Oudin, éditeur, 1901 ; pp. 550, 130 grav. et
fig. dans le texte.
Notre article était écrit lorsque nous avons reçu de
M. Chabeuf, notre savant et dévoué collaborateur, le
compte rendu du livre de M. l'abbé Broussole, que nos
lecteurs trouveront à l'article Bibliographie.
Nous avons accueilli avec gratitude ce travail, qu'on
lira avec l'intérêt qu'inspirent toutes les communications
que M. Chabeuf veut bien nous faire. Dans les considé-
rations qu'il émet sur « La jeunesse du Pérugin », nous
sommes d'accord avec lui sur plus d'un point. Sur d'au-
tres, notre point de vue diffère ; à cet égard nos
lecteurs trouveront sans doute que les deux études, que
nous donnons sur le même livre, ne font pas double
emploi. N. D. L. K.
moitié du XV^^ siècle, si merveilleu.x par
les chefs-d'œuvre de la peinture qu'il a
produits en si grand nombre. Mais, malgré
son illustre disciple, qu'il a vu grandir et
mourir, on peut se demander si le Pérugin
a, par ses travaux, contribué, d'une manière
sensible, au développement de l'art dans
une voie déterminée. On doit reconnaître
en lui un grand artiste; je crois qu'il serait
difficile de voir en lui un peintre original,
un créateur, une grande figure.
Son temps l'a hautementprisé et surchargé
de commandes; mais de Citta délia Pieve à
Rome, de Rome à Pérouse, de Pérouse à
Florence, il semble avoir subi des influen-
ces, sans en imposer aucune. Homme la-
borieux, peut-être à l'excès, on lui doit quel-
ques pages de haute valeur; mais, tout adulé
qu'il fut par ses contemporains, il a pu, à
l'apogée de sa carrière, voir effacer à Rome,
KEVUE DE l'art CHBÉIIEN
I9OI. — 4""^ LIVRAISON.
274
Belluc tJe r^vt cbrcttnu
dans la chapelle Sixtine, quelques-unes de
ses fresques que l'on disait des meilleures,
pour faire place au Jugement dernier de
Michel-Ange.
L'ouvrage qui vient de paraître étudie le
maître sous un angle particulier; il reste à
examiner s'il en donne la figure avec la
netteté désirable et en juge l'œuvre avec
équité.
Si, il y a un demi-siècle, on avait annoncé
sous le titre « La jeunesse du Pérugin »
un volume de plus de cinq cents pages, on
aurait cru certainement à la publication
de quelque roman plus ou moins historique,
dont le maître de Raphaël d'Urbin serait
le héros. Comment,en effet, se serait-on dit,
trouver matière à un gros et fort étoffé
volume, sur la première partie de la biogra-
phie d'un artiste mort en 1524, et auquel
Vasari, né en 1512, encore son contempo-
rain, par conséquent, et son compatriote, ne
consacre qu'une demi-douzaine de pages ?
Cependant, si les recherches faites en
Italie par les savants « cultori dell'Arte >>
ont amené au jour un certain nombre de
renseignements documentés, ce n'est pas
précisément sur le Pérugin et sa biographie
que les érudits ont fait de nombreuses
trouvailles. On ne saurait même dire que,
dans les fluctuations du goût qui se sont
produites à l'endroit des œuvres de plusieurs
artistes, celles du Pérugin aient perdu ou
gagné. Ses tableaux valent encore dans
l'estime du monde, ce qu'ils valaient il y a
un demi-siècle, ni plus, ni moins. On est
donc presque surpris de voir le vieux Va-
nucci et son œuvre l'objet d'une aussi com-
pendieuse étude. Mais hâtons-nous d'ajou-
ter, pour être juste envers l'auteur, qu'il y
a un sous- titre, « Les Origines de l'école
Ombrienne » et que M. l'abbé Broussole
s'est attaché à justifier par une étude très
fouillée. Ce n'est, en effet, qu'après la lecture
de 240 pages que le lecteur arrive à l'en-
fance ou plutôt à la naissance du Pérugin.
L'auteur a beaucoup parcouru l'Ombrie,
en touriste, en fouilleur d'archives, même
dans les localités les plus modestes, et c'est
là l'un des charmes de son livre ; il n'a pas
toujours suivi les sentiers battus, et, chemin
faisant, il révèle le nom de peintres peu
connus; il décrit des fresques, des tableaux
et des bannières, qui le sont moins encore.
Il rattache toutes ses études à son thème
général, et souvent il le fait au moyen de
déductions, d'hypothèses et de rapproche-
ments qu'il faut bien accepter, car peu
d'hommes ont suivi tous les chemins qu'il
a parcourus, et ont fait avec ces régions
écartées la connaissance intime que l'abbé
Broussole a tenté de faire. Ajoutez à cela
que nous avons affaire à un érudil ; il a
lu sur l'art antérieur à la Renaissance à peu
près tout ce qui a été écrit avant lui, sans
excepter les recherches des Allemands et
des Anglais.
Il étudie ainsi successivement l'architec-
ture et la sculpture de l'Ombrie avant la
période de la renaissance ; les anciennes
peintures de l'Ombrie et des environs de
Rome ; les peintures de l'aimable Gentile
da Fabriano, d'Ottaviano Nelli, de Boc-
cati da Camerino, de Giovanni Santi, le
père de Raphaël, — dont il parvient à re-
constituer l'œuvre beaucoup plus considé-
rable qu'on ne le croit généralement — ,
de Benedetto Bonfigli, de Florenzo di Lo-
renzo, de Nicolo Alunno. Il jette un coup
d'œil sur les peintres contemporains de
Florence, de Sienne, même sur les Fla-
mands auxquels il découvre certaines ana-
logies avec les peintres de l'Ombrie. Nous
arrivons ainsi à la fin de la première partie
de l'ouvrage, à peuprès la moitié du volume.
L'auteur s'attache d'abord à fixer les
limites géographiques de l'Ombrie, et ce
île î^érugtn.
275
soin n'est pas inutile ; dans l'esprit de la
plupart des lecteurs ces limites ont quelque
chose d'indécis, de Hottant, qu'il importe
de préciser. Il convient, dit M. l'abbé Brous-
sole, de donner à l'Ombrie artistique tout
au moins les limites que le hasard de la
politique attribue aujourd'hui à la province
de Pérouse, mais il ajoute qu'il n'est pas
possible d'arrêter scientifiquement les li-
mites de l'art de l'Ombrie. Cependant, il
finit par conclure que l'art de l'Ombrie
sera pour lui l'art même de l'Église, qu'il
le considère principalement en tant qu'il
s'est développé dans les trois villes de
Gubbio, de Pérouse et de Foligno ; c'est là
que se trouvait en réalité le centre de l'État
pontifical, son cœur sinon sa tête.
L'art de l'Ombrie, ajoute-t-il plus loin,
c'est donc par excellence l'art romain, l'art
de l'Église, et ses limites ne peuvent être
autres que les limites du domaine de la
Papauté.
Voilà pour les limites géographiques : on
voit que l'auteur comprend l'art de l'Om-
brie d'une manière assez différente que ne
l'ontcompris laplupart de ses prédécesseurs,
et notamment Rio.
Mais en Italie, les écoles d'art se pénè-
trent réciproquement, et les peintres étant
souvent nomades, il en naît aisément une
certaine confusion lorsqu'il s'agit de fixer
le domaine de leur action. Il importe peut-
être davantage de bien établir le caractère
de ces écoles. Voilà l'opinion de M. l'abbé
Broussole sur l'école qu'il étudie particuliè-
rement.
« Si j'ai bien compris le caractère général
de l'art ombrien, je dirai qu'il est l'héritier
le plus authentique de l'art chrétien pri-
mitif, lequel fut romain avant tout, et sous
toutes ses formes ; que ses limites semblent
avoir été à peu près celles de l'Etat ponti-
fical, et qu'enfin, s'il n'a pas réussi à se
développer également, et à toutes les
époques, dans le sens de ses pures origines,
ce fut à cause des influences qui le vinrent
entraver, tout en paraissant quelquefois
destinées à le renouveler.
« Parmi ces influences, la plus désastreuse
fut celle de l'art florentin. Pour l'achever
tout à fait, comme il lui restait le tout puis-
sant patronage des Pontifes romains, il ne
lui fallut rien moins que les règnes succes-
sifs de deux papes florentins de goût et de
convictions ; l'agonie de l'art ombrien
commence sous Léon X, Jean de Médicis,
— et s'achève avec Clément VII, — Jules
de Médicis (■).
Voilà donc le lecteur à peu près renseigné
sur la région de l'Italie où l'art ombrien a
pris naissance et s'est développé, sur ses
origines et son caractère, et enfin sur le
terme de son existence. Malheureusement,
il arrive à l'auteur de modifier son point de
vue à cet égard.
De la jeunesse du Pérugin — qui, ne
l'oublions pas, fait l'objet du livre de M.
l'abbé Broussole, — on ignore presque tout.
On sait seulement qu'il naquit à Castello
del Pieve, et non à Pérouse, comme le
rapporte Vasari, de parents peu fortunés et
qu'il quitta dès l'enfance. On ne connaît pas
exactement la date de sa naissance que, très
probablement, il faut rapporter à l'année
1446 ; mais on sait que, déjà en 1455, il
n'était plus à Citta délia Pieve. Les recher-
ches de l'auteur, pour trouver le premier
initiateur de Pietro Vanucci à l'art qui
devait l'illustrer, sont restées infructueuses.
«On ne peut rien affirmer à ce sujet, dit-il,
comme aussi il est permis de tout imaginer.»
Si le procédé n'est pas strictement conforme
aux principes de la critique historique, on
suit cependant volontiers l'auteur dans ses
I. P. 35.
276
3Rc\jue tir rSit chrétien.
imaginations et ses déductions, parce qu'il
les donne pour telles, et que généralement
elles paraissent plausibles.
On ne sait où le jeune peintre se rendit en
quittant le toit paternel ; serait-ce à Sienne,
qui n'en est pas bien éloignée? Rien ne
prouve que la jeunesse tout entière de
Pietro ne se soit passée à Florence : le
Pérugin, par son éducation, n'a-t-ii pas été
d'abord siennois, ou florentin ? C'est tou-
jours l'auteur qui pose ces questions. Mais,
en présence de ces incertitudes, n'est-il pas
étrange d'entreprendre un livre sur la
jeunesse d'un maître, alors que l'on ignore
même où cette jeunesse s'est passée .''...
Il n'entre pas dans mes intentions d'en
suivre les développements lorsqu'il aborde
l'étude des oeuvres du peintre et les phases
mieux connues de son existence. Le livre
est particulièrement intéressant dans l'exa-
men des travaux exécutés à Florence et
dont une partie notable a malheureusement
disparu, du vivant de leur auteur, à la suite
de la destruction du couvent des Jésuates.
C'est dans ce couvent aussi, où les reli-
gieux avaient un atelier de peinture sur
verre, que le Pérugin dessinait des cartons
pour leurs vitraux.
Avant d'aborder cette période de la vie
du maître, M. l'abbé Broussole avait fait,
à propos de l'influence florentine, une remar-
que trop juste, pour ne pas la rapporter ici.
« A l'époque de la Haute-Renaissance,
quand la civilisation païenne eut pénétré
très profondément dans tous les esprits,
nulle part, comme à Florence, on ne sut
l'accommoder aussi délicatement avec les
exigences de la culture religieuse et chré-
tienne. Un parfum d'élégance y atténue la
senteur malsaine des plus évidentes turpi-
tudes. »
On ne saurait mieux dire.
En réalité, nous l'avons dit, les recherches
modernes résumées par M. l'abbé Brous-
sole ne semblent pas ajouter beaucoup à la
biographie du Pérugin, écrite peu d'années
après sa mort par Vasari. Malgré certaines
inexactitudes, et des affirmations parfois
émises légèrement, celle-ci reste encore
la source la plus sûre, et certainement la
plus abondante, sur l'existence et les œuvres
du maître. Cependant, Vasari n'aimait pas
le Pérugin. Il attribue le travail acharné
auquel le peintre s'est livré pour atteindre
aux sommets de l'art, à l'avarice et à la
soif de l'or : sans exprimer le moindre
regret, il rapporte qu'une série des meil-
leures fresques peintes dans la chapelle
pontificale au Vatican, à la demande de
Sixte IV, furent détruites sous le pontificat
de Paul III, afin de faire place au grand
Jugement dernier de Michel-Ange ; mais,
chose plus grave, il l'accuse d'avoir eu peu
de religion, et de n'avoir jamais voulu
croire à l'immortalité de l'âme. Nous allons
revenir sur cette assertion.
Malgré ses recherches et sa science, l'au-
teur laisse souvent le lecteur dans le doute
et dans l'indécision. Je constate des con-
tradictions, des conjectures hasardées et des
fictions ; parfois des exagérations auxquel-
les on ne saurait adhérer. Nous lisons, dès
la première page, que le Pérugin est le
«fondateur» de l'école Ombrienne. Le
fondateur, nous l'avons vu, subit assez for-
tement l'influence de Rome et surtout de
Florence ; nous ne sommes pas même cer-
tain que ce n'est pas dans cette dernière
ville, si fascinante, que s'est passée la meil-
leure partie de la jeunesse de l'artiste : il
est certain que plus tard il y a exécuté ses
travaux les meilleurs et les plus vantés ;
d'autre part, on nous dit que l'art ombrien
sous Léon X est déjà à l'agonie, Pérugin
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3Le i^érugtn.
277
ayant encore bien des années à vivre. A
ce compte là, l'école Ombrienne n'a pres-
que pas existé. Elle se résume dans le
Pérugin, puisque celui ci en est « le fon-
dateur », et elle meurt avant le Pérugin,
car l'auteur, non sans raison, assure que
la dernière partie de la carrière du maître
aboutit à une déplorable décadence
Il est difficile aussi de souscrire au juge-
ment de M. l'abbé B. quand il écrit que le
Pérugin « a inventé la peinture d'extase et
de ravissement ». Dans bien des têtes de
ses peintures, d'ailleurs belles, et qui incli-
nées dans un raccourci souvent répété, jet-
tent le regard au ciel, animées d'une expres-
sion un peu convenue et qui semble avoir
conscience du spectateur, on ne peut plus
retrouver le sentiment profond et vrai des
maîtres antérieurs à la Renaissance : dire
que « la fresque de Sainte Madeleine de
Pazzi » est, dans l'ordre de la peinture
contemplative, le chef-d'œuvre incontes-
table de l'art chrétien, semble l'exagération
manifeste d'un moment d'engouement.
Assurément, au point de vue religieux,
celte fresque ne peut être comparée au
grand Crucifiement et à l'admirable Des-
cente de croix de Fra Angelico.
Ce qui est peut-être plus regrettable en-
core, c'est que l'auteur ne semble pas atta-
cher grand prix, ni à ses préférences, ni à
ses propres jugements ; il s'abandonne aux
fluctuations des impressions et des in-
fluences. C'est ainsi qu'il a demandé à la
plume éloquente de l'auteur de La cathé-
drale la préface, dont un livre de recherches
et d'érudition, d'ailleurs d'une valeur réelle,
semblait pouvoir se passer. Dans la préface
d'un livre, comme dans l'ouverture d'un
opéra, on aime à trouver l'harmonie qui
doit exister entre les différentes parties d'un
ensemble; l'indication des motifs qui seront
développés et au moins quelques fleurs du
parterre où l'on va conduire le lecteur. La
préface de M. Huysmans, loin d'aider à
l'unité du livre et d'en faire pressentir l'esprit
et les conclusions, ajoute à la perplexité du
lecteur. Le point de vue de l'écrivain n'est
certainement pas celui de M. l'abbé Brous-
sole. M. Huysmans semble admirer fort peu
les œuvres du maître auquel celui-ci a con-
sacré ses longues études et son livre. Je vais
citer son jugement à cet égard, et transcrire,
chose plus remarquable encore, l'opinion
de M. Huysmans, sur le plus beau titre de
gloire du Pérugin — son immortel disciple,
Raphaël d'Urbin :
« Pour ne prendre que ses œuvres du
Louvre, nous sommes en face de Madones
et de Saints qui n'en sont pas. Ce sont des
Apollon et des Aphrodite ; ses toiles sont
tout ce que l'on voudra, sauf de l'art catho-
lique et mystique ; et après lui, ce fut son
élève, l'odieux Raphaël qui, avec ses mado-
nes douceâtres et ses nourrices purement
humaines, nous conduisit par une longue
filière et toutes les transitions aux épou-
vantables niaiseries des marchands de
sainteté de la rue St-Sulpice et de la rue
Madame ('). »
Que de fois, en Italie surtout, on a écrit :
le divin Raphaël ! je n'ai jamais pu adorer
en Raphaël une idole ; je ne saurais oublier
que lui et l'irrésistible milieu qui l'entourait,
ont beaucoup fait pour dévoyer la peinture
relio-ieuse et la faire descendre des sommets
qu'elle a atteints avant lui. Mais il ne faut
pas avoir parcouru les chambres du Vatican,
il faut ignorer les portraits des contem-
porains que le pinceau de Raphaël nous a
transmis, il ne faut pas même avoir jeté les
yeux sur ses panneaux du Louvre, pour ne
pas admirer dans le célèbre Urbinate, un
grand, un très grand peintre ! Ses créations
I. Préface, p. vn.
278
3Rel)ut lie V^xt tbvttitn.
ont fait la joie et l'admiration des généra-
tions qui lui ont succédé. On ne peut que se
sentir froissé, comme d'une brutalité, de la
boutade que M. l'abbé B. a eu le tort de
laisser au frontispice de son livre, d'autant
plus sensible, que trois pages plus loin, il
écrit du même Raphaël, ces lignes :
« Il devint ainsi l'artiste chrétien par
excellence, également capable de traduire
les aspirations de l'âme qui prie, de racon-
ter les histoires qui sont le capital de la foi,
et aussi d'en célébrer les plus glorieux
triomphes. »
L'éloge est excessif dans un sens opposé.
On ne saurait voir en Raphaël l'artiste
chrétien par excellence. Si c'est une répa-
ration, que ÎNI. l'abbé B. a voulu tenter, mieux
eut valu ne pas permettre l'outrage. Mais
le lecteur, en présence de l'injure échappée
à la plume de M. Huysmans, et le pané-
gyrique de l'auteur, doit demeurer perplexe
et se demander à qui il faut entendre, et
quelles sont en réalité les convictions de
l'auteur ?
Lorsque l'on étudie une époque de l'art
encore controversée, cherchant à la résu-
mer, pour ainsi dire, dans un artiste, dont les
origines sont douteuses et les éléments qui
ont participé à sa formation peu connus, —
comme c'est le cas pour la période d'ap-
prentissage du Pérugin — il y a du mérite
à recueillir les recherches de la science,
et à faire l'examen critique des œuvres de
cet artiste ; tout cela donne de la valeur
à un livre d'art. Mais si celui-ci doit inspi-
rer confiance au lecteur, il faut quelque
chose de plus. Le lecteur demandera des
principes qui donnent à un livre l'unité
désirable, et des convictions, sans lesquelles
il n'y a pas d'autorité.
Comme beaucoup d'écrivains qui ont
étudié la vie du Pérugin, l'auteur est
amené par l'information donnée par Vasari,
à examiner la question de savoir si l'artiste
a été inspiré par la foi du chrétien. Il
écrit même tout un chapitre sur « La reli-
gion du Pérugin ». 11 s'agit de savoir si le
peintre, dont il étudie la jeunesse, fut un
incrédule :
Il le nie, « mais mollement », dit l'auteur
de la préface. Assurément la manière dont
il le défend de cette accusation est assez
étrange.
J'en transcris quelques lignes :
« II n'y a pas d'art sans convictions. Mais
il suffit à l'artiste, quand il veut parler des
choses les plus belles, de ce genre de con-
victions très particulières dont l'expression
sera peut-être d'autant plus éloquente
qu'elles restent plus à tieur de conscience
et ressemblent moins à la vertu, laquelle
est une conviction d'habitude se traduisant
dans les actes quotidiens et non dans les
créations de l'art. »
Si je comprends bien cette remarquable
théorie, l'artiste peut avoir plusieurs genres
de convictions qui se superposent par
couches. L'une qui restera à fleur de con-
science, et qui lui servira à exprimer les
choses les plus belles, les plus éloquentes.
Son travail fini, il la déposera, en même
temps que sa palette et ses pinceaux ; —
pour reprendre la couche de convictions
inférieure, sur laquelle il réglera les actes
quotidiens de la vie.
C'est assurément fort ingénieux, et
j'ajouterai que pour l'artiste qui voudrait
s'adonner à la peinture religieuse sans être
gêné par « les convictions d'habitude qui
peuvent ressembler moins à la vertu », c'est
très commode. Heureusement il n'en est
rien. Je préfère m'en tenir, à cet égard, à
l'opinion que Jean de Fiesole exprimait
avec une simplicité bien digne du religieux
et de 1 artiste, en disant : « C/ic chi fa cose
di Cristo, con Crisio deve star sempre. »
îLe j^érugm.
279
Un archéologue allemand, qui a fait de
la peinture en Italie une étude très appro-
fondie, dans laquelle les œuvres du maître
de Pérouse prennent la place qui leur est
due, réfute (en examinant la fresque que
M. l'abbé Brousolle prise si haut, le grand
Crucifiement de l'église Santa- Maddalena
de Florence), l'opinion de Vasari et les
écrivains qui l'ont suivi, dans des termes
que je vais traduire :
(( La figure du Sauveur est peut-être la
plus belle qui soit sortie du pinceau du
Pérugin. Dans la pureté des formes se
manifeste cet idéal d'humilité et d'esprit de
sacrifice que cherchait Fra Angelico, et qui
prouve que même l'ami de l'art ancien pou-
vait trouver son expression dans les lois et
les formules d'un art nouveau. Les figures
de saints qui entourent la croix expriment
le deuil le plus profond. On y sent une telle
vérité, une telle intensité de sentiment,
qu'en présence de semblable confession il
semble inutile de répondre à la question
posée par Burkhard : « Qu'y a-t-il dans ses
œuvres qui soit vraiment de pur et bon
aloi ? » (') Pour celui qui, des profondeurs
de l'âme, sait puiser l'expression avec une
plénitude si convaincante, la fable de Vasari
qui prétend « que le Pérugin n'aurait pas
eu de foi et aurait nié l'immortalité de
l'âme » ne saurait trouver créance ("). Un
peintre incrédule peut bien donner une
formule à des motifs religieux — mais leur
transmettre l'âme qui se communique au
spectateur et qui le subjugue dans l'inti-
mité de son cœur — • cela n'est possible qu'à
1. Le Cicérone, Guide de l'art aniigue et moderne en
Italie. Paris, Didot, 1898, II, p. 584.
2. Voici le passage de Vasari ; Fu Pietro persona di
assai poca religione, e non se gli potè mai far credere
l' immort alita delP anima : anzi con parole accommodate
al stio cervello di perfido ostinissimamente riciiso agtii
buona via.
Edition de Bologne MDCXL VII. Parte seconda., p. 41S.
une imagination toute vouée à Dieu (') ».
Le Pérugin est, paraîf-il, mort sans rece-
voir les sacrements. M. l'abbé Broussole
fait remarquer avec beaucoup de raison,
qu'il mourut à Fontignano, village près de
Pérouse. Le vieux peintre y mourut de la
peste, et, comme un pestiféré, probable-
ment abandonné de tout le monde ; il fut
enterré hors du village selon ia coutume,
afin d'éviter ia contagion. Il n'y a aucune
induction à tirer de ce fait contre sa foi,
d'autant que l'on ne tarda pas à donner
à son corps une sépulture honorable en le
transportant au cimetière de Fontignano.
Neuf ans avant sa mort, le Pérugin avait
acheté une sépulture dans l'église de l'An-
nunziata à Florence, ce qui n'est assuré-
ment pas un indice de scepticisme et d'in-
crédulité.
Mais l'auteur s'est privé, ce me semble,
du meilleur argument en faveur de la reli-
gion du Pérugin, en ne « voulant pas se
hasarder à juger de la religion d'un artiste,
d'après les qualités de ses tableaux ».
S'il s'agit de qualités techniques, de vir-
tuosité et de charme, il a certainement
raison.
Mais, comme le fait observer le savant
que nous venons de citer, il y a dans le
sentiment intime de l'œuvre d'un artiste
convaincu une éloquence qui n'appartient
pas à la virtuosité de la palette, ni même
à la maîtrise d'un talent consommé.
Il y a eu assurément au XV* siècle,
comme il y a eu de nos jours, des peintres
très habiles qui ont abordé les scènes de
l'Èvangile et les mystères de notre foi,
comme ils auraient peint les fables de la
mythologie, mais il est bien rare que ces
tableaux puissent donner le change sur les
I. D' Erich Fiantz. Geschichte der Christlichen Malerei.
Herder, Fribourg im Breisgau, II, p. 390.
28o
Withxit lie rSrt chrétien.
convictions des artistes qui les ont pro
duits !
S'il est malaisé de pénétrer aujourd'hui
dans le for intérieur des peintres de la
Renaissance et de connaître leur religion,
nous sommes heureusement très bien ren-
seigné sur l'esprit de foi des meilleurs
peintres religieux de notre temps, et parmi
eux, il n'en est aucun, que je sache, qui ait
été même soupçonné d'hypocrisie ! On peut
conclure de l'harmonie qui existe entre
leurs œuvres, leur vie et leur foi, à cette
même harmonie chez leurs prédécesseurs
du XV'= siècle.
En France, le peintre le plus sincèrement
religieux de notre temps, n'est-ce pas le
bon et simple Flandrin qui, en écrivant à
ses parents, se recommandait à leur prière
du soir, et dont on a pu écrire que « chaque
heure qui s'écoule à l'atelier, ou sur les
échafaudages d'une église, est un hommage
rendu par le chrétien convaincu à la vérité
évangélique et par le peintre à la dignité
de son art ('). » On pourrait citer d'autres
peintres français de notre temps, tout aussi
sincères que H. Flandrin. N'avons nous
pas vu, à Rome, une pléiade de peintres
comme Overbeek, Cornélius, Hubner et
bien d'autres, reprendre les meilleures tra-
ditions de la peinture religieuse du moyen
âge, tout en conformant leur vie aux strictes
préceptes de la religion catholique ? Les
peintres Veith etSteinle, à Francfort, n'ont-
I. Lettres et pensées d' Hippolyte Flandiin, prdcéd.
d'une notice biographique par le V'"' Henri Delaborde.
Paris, Pion, 1865.
ils pas laissé des œuvres sincères, con-
vaincues, en harmonie de tout point avec
une vie religieuse, édifiante .''
N'en a-t il pas été de même du groupe
de peintres catholiques à Dusseldorf, les
Deger, les Muller, les Ittenbach, les Sette-
gast ? Tous ces hommes, nos contempo-
rains, ont toujours mis d'accord l'exercice
de leur art et les préceptes de leur foi. Ils
auraient cru forfaire gravement à celle-ci en
se contentant d'une « conviction actuelle
chaque fois qu'ils mettaient la main à leurs
pinceaux » (').
La vie et les travaux de ces vaillants,
dont plusieurs nous étaient personnelle-
ment connus, projettent une certaine lu-
mière sur les pénombres de l'histoire du
passé
Lorsqu'un peintre, comme le Pérugin, a
vécu d'une vie laborieuse, presque toujours
en contact avec les prêtres et les religieux,
peignant dans les couvents et dans les
églises les scènes les plus touchantes de la
vie du Christ et des saints, et parvenant
souvent à donner à ses conceptions un
caractère d'intime conviction, comme dans
le Crucifiement de Santa-Maddalena, dont
nous donnons la reproduction d'après une
bonne photographie d'Alinari, on ne risque
pas de s'éloigner de la vérité en adoptant
le jugement de M. Erich Frantz et en
rangeant parmi les fables l'accusation de
Vasari.
J. Helbig.
1. F. 497-
K^fh- a'^ a'^-^ A^-jt K^^ A^ A \^^ ;t^^ a'^ A^-A A^A A^^ A^v)^ A^vI^A A^^ ^^
r-tiïTTi f:ii
iiiiii]Œijjxxixiixi_iiiJ:iiiriiii[iiiiiJJLXiiiJiii:;iiiTiiiriiTTi3iixriTrïJiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiirxiiriiJiiiiiirLriJiixjiJxiiriiii
Pince et fer à \)ostitQ au ffîu0ée tie Bribe (Gorvèse).
^^* V) ^ VI ^ ^-^ ''S'' "f^-^ ^x*5^ ^-^ ^i^ '^^ ^i^-^ ^iÔ^ ^iô-^ ^iÔ^ ^^-^ *^
ES moules destinés à
fabriquer et à cuire les
hosties qui servent au
Sacrifice de la messe,
à la communion des
fidèles, à la réserve
eucharistique et à l'ex-
position du Saint-Sacrement, sont faits
depuis longtemps de la même façon et avec
la même matière.
Ce sont des instruments en fer forgé {'),
composés de deux palettes, le plus souvent
rectangulaires. Rarement elles sont car-
rées (=) ; du XVI le au XIX'= siècle elles
affectent une forme ovale, ou elliptique.
Les palettes sont munies chacune d'un
manche de même longueur ; ces manches
sont réunis entre eux, dans la partie supé-
rieure, par une goupille autour de laquelle
les palettes peuvent tourner pour s'ouvrir
ou se resserrer à volonté.
L'une des palettes est unie (-) ; mais
l'autre est gravée et présente presque
toujours deux grandes et deux petites hos-
ties (■»).
1. On peut citer, comme exception, un moule à hosties
conservé au Musée du Louvre ; il est en terre cuite,
provient du Laurium, en Grèce, et porte l'inscription :
EVAOriA KVPlOr E<Ii-HMAS. Bu//, de /a Soc. des Anti-
quaires de France, an. 1893, p. 142.
2. Fera hosties de Brigueuil (Charente), dernier quart
du XI IP s. Bu//, de la Soc. arc/i. etliist. de /a C/iareiiie,
an. 1895.
3. Par exception, sur un moule à hosties du Musée d'Or-
léans, les deux palettes sont gravées ; sur l'une, se trouvent
les grandes hosties ; sur l'autre, les petites.
4. Un fer à hosties, du XI 11^ s., conservé dans l'église
de Mailhac (Haute-Vienne) offre une forme exception-
nelle, car il n'a été destiné qu'à la communion des fidè-
les. Les petites hosties, larges de 0.027 ni- sont disposées
au nombre de 18 sur trois rangs de 6 chacun ; elles alter-
nent la Crucifixion et le monogramme IHS.
Mgr Barbier de Montault, qui a décrit cet objet liturgi-
que dans le Bu//, de ia Soc. arch. et hist. du Limousin,
On ferme les palettes en rapprochant les
deux tiges que l'on fixe au moyen d'un
anneau, et cet anneau réunissant les deux
extrémités empêche tout écartement. A
l'aide de ces tiges on peut maintenir les
palettes sur le feu pour opérer la cuisson
de la pâte.
On sait avec quel respect on s'appliquait
autrefois à la préparation de la farine et
du pain qui devait servir à l'oblation de la
messe. Des religieux et des religieuses
choisissaient les grains de froment en réci-
tant des prières, les broyaient et en sépa-
raient la farine, toujours en priant. Sainte
Radegonde, à Poitiers, aimait à passer une
grande partie de son temps à préparer les
pains d'oblation. On conserve encore l'ins-
trument avec lequel elle imprimait dessus
le signe de la croix (').
Dom Martène donne à ce sujet des dé-
tails qu'il est intéressant de rappeler (') :
« On faisait des hosties dans les monas-
tères toutes les fois qu'on en avait besoin.
Il y avait néanmoins deux époques princi-
pales destinées à ce travail, savoir : un peu
avant Noël et avant Pâques.
« Les novices triaient le froment sur une
table grain par grain ; on lavait ensuite
ces grains et l'on les étendait sur une
nappe blanche pour les faire sécher au
soleil. Celui qui les portait au moulin lavait
les meules, se revêtait d'une aube et mettait
un amict sur la tête.
an. 1888, p. 268, fait observer qu'on ne lui connaît pas
de similaire, sinon dans un texte italien qui réduit à 6 le
nombre des petites hosties : « Una alia forma ferrea pro
hostiis parvis conficiendis, videlicet sex pro vice >. Invent.
de /a cat/iédra/e de Parme, 1483.
1. Bourassé, Coll. Migne, Diction. darckéoiog,ie sacrée,
t. II, col. 220.
2. De antiq. monaclior. ritibus, 11,8.
REVUE DELAKT CHRETIEN.
1901. — 4""^ LIVRAISON.
282
Bcbue De r^vt cl)vét(eu.
«Le jour de faire le pain étant venu, trois
prêtres ou trois diacres, avec un frère con-
vers, après l'office de la nuit, mettaient
des souliers, se lavaient les mains et le
visage, se peignaient et récitaient en parti-
culier dans une chapelle l'office des laudes,
les sept psaumes et les litanies. Les prêtres
et les diacres, revêtus d'aubes, venaient
dans la chambre où la confection des pains
devait avoir lieu ; le frère convers y avait
déjà préparé le bois le plus sec et le plus
propre à faire un feu clair. Tous quatre
gardaient un silence absolu ; l'un répan-
dait la fleur de farine sur une table polie,
propre, réservée exclusivement à cet usage,
et dont les bords étaient relevés afin de
contenir l'eau qu'on jetait sur cette farine
pour délayer la pâte. C'était de l'eau froide
afin que les hosties fussent plus blanches.
Le convers, avec des gants, tenait le fer et
faisait cuire les hosties six à la fois. Les
deux autres coupaient ces mêmes hosties
avec un couteau fait exprès ('), et à mesure
qu'elles étaient coupées, elles tombaient
dans un plat couvert d'un linge blanc. Ce
travail prenait un certain temps dans les
grandes communautés et néanmoins se fai-
sait à jeun. »
L'inventaire des ornements conservés
dans la trésorerie de l'abbaye de Saint-
Martial, à Limoges, dressé sous l'abbé
Raymond, qui occupa le siège de 1226 à
1245, contient six articles qui semblent se
référer à la fabrication des hosties :
Concha argentea cum talpa (couvercle).
Major cutella (sic pour scutella) et minor,
argentece.
Unum coclear magnum argenti.
Vas argenieum cum quo ostie in refecto-
rio portantur.
I. L'abbé Martigny, auquel nous empruntons cette ci-
tation, Dut. tics Antiq. chrét., p. 464, donne, au mot
Lance, le dessin d'un de ces couteau.\ eucharistiques.
Duo parva coclearia de argento.
Molle (■) ferreum, cum quo fiunt ostie (').
Pour compléter le détail des ustensiles
employés à la fabrication des hosties, nous
relaterons les textes suivants :
1578. « 4 fers à faire hosties, les fers à
compas pour ronder icelles, qui sont ung
compas et platine à ce servant, et 2 ron-
deaulx, l'ung pour les grandes hosties et
l'autre pour les communes ('). »
1 618. « 2 fers avec la pièce de cuivre pour
rongnier les hosties (M. »
1790. « Un fer pour faire les hosties,
deux fers pour les couper (=^). »
1790. « Un fer à faire les hosties, un
petit fer pour couper les hosties, avec la
plaque de cuivre (*). »
Ces citations montrent avec quel pieux
respect on procédait à la fabrication des
hosties. Le grain était broyé et recueilli
dans une écuelle plus petite; on le jetait
peu à peu dans la grande conque où il
était délayé au fur et à mesure avec de
l'eau. La cuiller, qui était en argent, servait
à prendre et à verser le liquide sur le fer
1. On a dit aussi au moyen-âge hostiarittm ; « Item,
tria hostiaria, vel instrumenta ad faciendum ostias ».
Invent, de Vabb. de Silvacane, 12%(). Mollii ferreum ào\\.
aussi se traduire par moule enfer. Mgr Barbier de Mon-
tault fait remarquer que pincettes se dit en Italien molle,
et que les moules, comme les ustensiles de foyer et de
cuisine, sont munis de deux bras ou pinces. />«//. delaSoc.
arch. et hist. du Limousin, an. 18SS, p. 252, note 4. — Le
mot/i?;-,quia prévalu dans la dénomination de l'ustensile
est aussi très ancien, puisqu'on le constate dès le XI II"' s.:
« Fro ferris ad panem faciendum pro cantare ». Compte
dcl'abbayc de Si- Denis, 1 290 :« Ferra ad faciendum panem
seu hostias pro celebrando ». Iiivent. de la Stc-CIiapelle,
1325-
2. Duplès-Agier, Chron. de Saint- Martial de Limoges,
pp. 312 et 315.
3. Invent, de la collégiale de Salins, p. 149. Cit. de
Victor Gay, Glossaire, p. 700.
i,. Invent.de St- Louis des Français à Rome, p. 52. Cit.
de Victor Gay, Glossaire, p. 700.
5. Invent, du couvent des Visitandines à Tulle. René
Fage, Le vieux Tulle, p. 364. Tulle, Crauffon, impr. 1888.
6. Invent, du monastirc des Claiisses à 7 '«//c. Fage,
loc. cit., p. 31 1.
I^ince et fer à l)ogties au £@u0ée îre mviMt.
283
que l'on mettait ensuite sur le feu pour la
cuisson. Puis on prenait les hosties que
l'on découpait, primitivement avec un cou-
teau spécial, et plus tard avec un compas,
pour mieux former cette rondeur requise
par le symbolisme ('). Enfin les hosties cou-
pées étaient empilées dans un vase, qui se
conservait dans une des armoires du réfec-
toire, lieu d'ordinaire sain et sec et où les
espèces ne pouvaient pas moisir et se cor-
rompre. De là on les tirait pour les besoins
du culte.
La platine (plataine, en latin platina),
dont il est fait mention dans l'inventaire de
1578, n'est autre que le vase sacré, en
forme de petite assiette, qui sert à couvrir
le calice et à recevoir l'hostie ; ses bords
coupants indiquent et préparent les divi-
sions de l'hostie qui sera séparée par le
prêtre pendant le sacrifice de la messe.
Dans la suite, toutes ces cérémonies reli-
gieuses ont été supprimées, mais chaque
église, séculière et régulière, avait son fer
à hosties, et c'était au prêtre qu'incombait
spécialement le devoir de préparer la ma-
tière du sacrifice, ou tout au moins d'en
surveiller la fabrication. De cette façon
toute erreur ou fraude devenait impossible,
et le sacrement ne risquait pas d'être nul,
faute de l'élément nécessaire à la consécra-
tion, car, d'après le droit canonique, les
hosties doivent être toujours en pure farine
de froment et de fabrication récente (°).
Aujourd'hui, malgré les inconvénients
1. « L'hostie est ronde, parce que la terre appartient
au Seigneur avec tous les pays qu'elle renferme dans son
cercle et avec tous ceux qui l'habitent ; et la forme même
de l'hostie représente Celui qui n'a ni commencement ni
fin, puisqu'il est l'alpha et l'oméga, le commencement des
commencements et la fin des fins {Apocalypse, ch. l) : et
comme la figure ronde est formée point pur point, cela
veut dire que tout part de lui et que tout retourne à lui. »
Guill. Durand, Ration. 1. IV, c. XXX, n" 8.
2. Barbier de Montault, Le fer à hosties de Château-
ponzac, dans le Bull, de la Soc. arch. et hist. du Limousin,
an. 18S8, p. 253.
qui peuvent en résulter, on préfère acheter
des hosties toutes faites et s'éviter la peine
de leur fabrication. lien résulte que les fers
à hosties^ qui étaient autrefois si communs,
tendent de plus en plus à disparaître. Ils ne
sont plus d'aucun usage, et, si on ne les
vend point, on les relègue dans la cuisine
du presbytère et bientôt la rouille les enva-
hit. Aussi est-il important de rechercher et
de décrire ceux qui sont encore conservés.
Dans un délai plus ou moins rapproché, ces
petits monuments gravés seront une véri-
table rareté.
Nous avons vu le soin apporté dans la
fabrication des hosties. On évitait avant tout
de les toucher avec la main dont le contact
Instrument en fer pour prendre les hosties. (Musée de Brive.)
aurait pu les souiller ; on allait jusqu'à se
servir d'une cuiller d'argent pour les mettre
sur la patène ('). Il est probable qu'on de-
vait user des mêmes précautions pour pren-
dre les hosties coupées au sortir du moule
et les déposer dans la boîte qui devait les
recevoir. Nous ne connaissons aucun texte
relatant ce fait, mais le Musée de Brive,
dans la Corrèze, possède un de ces petits
ustensiles qui nous renseigne complètement
sur ce point.
Ce petit instrument, dont nous donnons
le dessin, a été trouvé à Brive; il est en fer
et mesure 26 centimètres en longueur. Il se
compose d'une palette fort mince, rectangu-
laire, légèrement arrondie à son extrémité
et d'une pince à deux branches terminées
I. « Vasa quoque lignea, tornatili opère facta, quibus
oblatœ servantur, cum cochleari argenteo quo in patena
ponuntur. » Tabiilar. inonast. S. Theofredi in Vclaunis.
Du Cange, verbo Cochlear.
284
3SitWt lie r^rt cJ)rétien.
par une petite spatule. La palette et la pince
sont munies d'un manche et réunies par une
goupille, autour de laquelle elles peuvent se
mouvoir pour s'écarter, se rapprocher et
saisir des objets. On faisait glisser la palette
sous l'hostie posée sur une table, et les
petites spatules venaient la fixer lorsque, au
moyen de la main, on rapprochait les bran-
ches de l'instrument. Cet intéressant objet,
dont nous ne connaissons aucun autre
exemple, paraît appartenir au XYIII^siècle.
L'usage de faire cuire l'hostie entre deux
fers remonte au moins au IX^ siècle, ainsi
que le prouve la vision d' Eldefonsc, publiée
par Mabillon, à la suite de la dissertation
sur les azymes. Après avoir dessiné la dou-
ble figure de l'hostie qui lui apparut un
dimanche de novembre de l'année 845,
Eldefonse écrit : « Ces deux roues gravées
par deux fers appartiennent toujours à un
même pain, faites entre deux fers ('). » Plus
loin, traitant de la fabrication de plusieurs
hosties à la fois, notre auteur parle encore
d'un seul fer, mais grand.
L'iconographie des fers à hosties est un
sujet d'étude fort curieux qui n'a pas encore
été traité d'une façon complète. On ne
pourra l'entreprendre qu'après avoir réuni
de nombreux matériaux et nous savons que
depuis fort longtemps Mgr Barbier de Mon-
tault s'efforce d'arriver à ce résultat (").
1. « Igitur istae duœ rotx duobus ferris incisœ ad unum
panem pertinent semper, inter utramque partem fact,x>. >
Rcvelatio quœ ostensa est episcopo, à la fin de la disserta-
tion de Mabillon.
Mabillon, qui a relevé ce texte sur une copie d'un ma-
nuscrit du Vatican, cherche à prouver que cet écrit appar-
tient aux temps voisins de Charlemagne. Mais un manus-
crit de la fin du IX' siècle, conservé à la bibliothèque
nationale (Paschasius Radertus in Eucharislia. Ane. Fonds
latin, n" 2855) lève tout doute à cet égard. Darcel, Ann.
ar-chéolog.,\.. XXVII, pp. 278 et 279.
2. On a déjh de cet auteur : Descripl. iconog. de quelques
fers de /'AitjO!t,Angers, 1 880. Les fers à hosties du dioche de
P'erdun ; Les fers â hosties du Musée d'Orléans; Les fers
à hosties de la Saintonge. La Rochelle, i8go. Le s fers à
hosties de l'arrondissement de Confolens (Charente), 1895.
En ce qui concerne l'ornementation des
fers à hosties, on peut d'ores et déjà faire
les constatations suivantes :
Aux XII° et XI II" siècles, les petites
hosties portent comme motifs d'ornemen-
tation les monogrammes du Christ sous les
formes I. X. {/estts Christus) ('), IHS ('),
XPS ('), parfois surmontés d'un crucifix (■•) ;
le Christ en croix, représenté tantôt seul (5),
tantôt accosté du soleil et de la lune C"), ou
des lettres IS, l'initiale et la finale du nom de
Fesiis (') : et la Sainte Face (^).
Sur les grandes hosties on trouve: leChrist
cloué sur la croix, souvent avec le titulus
IN RI (lesusNazarenus Rex ludseorum) (''),
et les inscriptions IHS, XPS, gravées dans
Le fer à hosties de Châleaupomac et les fers du Limousin,
Limoges, 18S8. Voir aussi ses Œuvres complètes, t. VI,
p. 178.
1. Fer à hosties de Saint-Maigrin, en Saintonge.
2. IHS est pour IHesuS qui a fait passer dans l'usage
latin la forme grecque plus caractérisée dans le second
monogramme XPS, dont la finale est un sigma en C. .\PC
signifie .XPistoc, pour XPistuC.
On lit, à ce sujet, dans le Rational ou manuel des divers
offices (liv. II, ch. I) de Guill. Durand : « Pour ce qui est
du nom de Jésus, Porphyre, philosophe versé dans les
langues grecque et latine, l'écrivait Icsus et en grec par
un h, qu'on emploie en cette langue pour un i long. Voil.\
encore pourquoi il y en a qui prononcent Gysus ; mais les
Latins se servent de \'e long. II parait plus raisonnable
d'écrire ce nom ainsi : Yhs, en se servant de l'abréviation
grecque, que par Hiesus, avec l'aspiration latine. Et
comme C/«r/j/ est grec, on l'écrit en abréviation de cette
langue : XP.S, car les Grecs emploient .V pour chi, P pour
r et C pour s. Mais si on l'écrit par s, il finit par la termi-
naison latine. Donc, si on l'écrit par un mode long, on le
représente ainsi par aspiration : Christus >. Trad. par
Ch. Barthélémy, t. I, p. 149.
L'interprétation y««j/'flw/««w Snlvator (\\\'o'[\ a voulu
donner à ce monogramme ne paraît pas antérieure au
XVI I" siècle. Elle a dû cire popularisée par les Jésuites
eux-mêmes (|ui ne comprenaient plus leur chiffre. Les
trois lettres IHS devenant alors trois initiales, on les sé-
parait souvent par des points.
3. Fers à hosties des églises de Coutures, en Anjou et
de Hiesse, dans la Charente.
4. Fer à hosties de l'église de Coutures, en Anjou.
5. Fer à hosties à Gourgé (Deux-Sèvres).
6. Fer à hosties du Musée d'Orléans.
7. Fer à hosties de MazeroUes (Charente).
8. Fer à hosties de Mouzon, cant. de Montembœuf
(Charente).
9. Fer à hosties de l'église de Coutures, en Anjou.
î^tnce et fer à l)O0ttes au abusée De Brtbe.
^85
le champ (') ; quelquefois les lettres DNS
[DoiiiiNiiS) s'ajoutent à celles de IHS
(Dominusiesus) ('). D'autres fois le soleil en
étoile et la lune en croissant dominent la
croix (3), au-bas de laquelle apparaissent
fréquemment la Vierge et saint Jean (^).
On trouve encore la Résurrection (') ; le
Christ de gloire majestueusement assis,
bénissant de la main droite et tenant dans
la gauche un globe surmonté d'une croix (*).
Le Christ de gloire est représenté sur cer-
tains fers sans jambes ni pieds. On a voulu
l'immatérialiser ainsi le plus possible, tout
en lui conservant la forme humaine. Les
pieds font songer aux choses de la terre à
laquelle ils adhèrent en marchant. Dieu
étant considéré comme pensée et amour, on
ne lui attribue que les organes auxquels
correspondent ces deux qualités souverai-
nes : la tête, siège de l'intelligence ; la poi-
trine, où bat le cœur. Cette singularité est
fréquente sur les fers poitevins. On la trouve
sur ceux de Bouchet, des Trois- Moutiers,
de la Trémouille, d'Arçay, de Dissais, de
Bonnes et de Messemé, pour le XT I L siè-
cle ; et sur ceux de Saint- Léger, de Curçay
et de Baudimont pour le XIV" ('). Quelque-
fois, de chaque côté de la croix, s'élève sur
le sol un vigoureux rosier fleuri (').
Enfin on reconnaît encore sur les fers à
hosties de cette époque : la Sainte- Face (') ;
l'Agneau pascal ("'); et une fleur de lis (").
1. Fer \ hosties à Saint-Maigrin, en Saintonge.
2. Fer à hosties à Gourgé (Deux-Sèvres).
3. A Mazerolles (Charente).
4. A. Chassenon, cant. de Chabanais (Charente).
5. A Esse et à Brigueuil, cant. de Confolens (Charente).
6. Fer à hosties de Dampierre sur Boutonne, en Sain-
tonge.
7. Barbier de Montault, Le Fer à hosties de Château-
ponsac, loc. cit., p. 263.
8. A Alloue (Charente).
9. A St-Germain de Seudre, en Saintonge.
10. A Alloue et à Brigueuil (Charente).
11. A Chizé (Deu.x-Sèvres).
Le lis est l'emblème du Christ, « Ego flos
campi et lilium convallium » (Cant. Cantic,
II, i) ; il l'est aussi de la royauté.
Ajoutons que dans ces différentes repré-
sentations, on rencontre de fois à autre les
lettres H et X du monogramme du Christ,
qui se prolongent en une branche terminée
par une grappe de raisin, ou sous sa forme
la plus rudimentaire, qui est le triangle. Le
raisin a ici sa signification ; symboliquement
il a été pris par les Pères de l'Église pour
figurer le Sauveur sur la croi.x.
Souvent aussi le soleil, qui accoste avec
la lune les bras de la croix, n'est reproduit
que par une étoile à six rais, pour montrer
que les rayons sont moins éclatants et rap-
peler les ténèbres subites qui accompagnè-
rent la mort du Fils de Dieu.
A ces motifs de décoration viennent
s'ajouter :
Au XI V° siècle : pour les petites hosties :
l'Agneau pascal (') ; Notre-Dame de Pitié
tenant sur ses genoux le corps inanimé de
son fils {') ; et pour les grandes hosties :
la Flagellation (^) ; le Portement de la
croix (^) ; la Crucifixion à laquelle assistent
la Sainte Vierge et saint Jean {^) ; la Ré-
surrection (*) ; le Jugement dernier (').
Au XVe siècle, on trouve en outre : la
Trinité (^) ; le Christ sur la croix entre les
deux larrons ; le Christ debout dans son
tombeau et entouré des instruments de la
Passion (s).
1. Église de Thouarcé, en Anjou.
2. Collection Maxe-W^erly, à Bar-le-Duc.
3. A Neufour, diocèse de Verdun ; à St-Barthélemy de
Confolens.
4. Église d'Auzéville, au diocèse de Verdun.
5. Église d'Auzéville.
6. Collection Maxe-Werly, à Bar-le-Duc.
7. Collection Maxe-Werly.
S. Église abbatiale de St-Jouin-les-Marnes (Deux-
Sèvres),
g. Église de Couvertoirade, dans le Rouergue.
286
Eebue île VSixt thvttmh
Au XVI'' siècle, apparaît la scène de la
Nativité (').
Au XVI le, la Cène (=) ; l'Adoration du
Saint-Sacrement {^) ; la représentation des
instruments de la Passion ('). Dès le com-
mencement de ce siècle, le crâne d'Adam
se montre quelquefois sous les pieds du
Christ en croix (=).
Enfin, au XVI 1 1" siècle, on rencontre des
motifs nouveaux empruntés, non à la tra-
dition qui régissait jusque-là l'exécution des
fers, mais aux idées dominantes et aux
tableaux en vogue. Les hosties de cette
époque portent souvent comme empreinte :
un cœur surmonté de trois clous (*) ; les
cœurs de Jésus et de Marie (^) ; l'Agneau
de Dieu immolé sur un autel (^) ; et la
Madeleine attristée, agenouillée au pied de
la croix (').
L'iconographie, comme on le voit, s'est
directement inspirée de la liturgie. L'hostie
est marquée du monogramme de Jésus ou
de celui du Christ, pour indiquer la présence
réelle dans le sacrement eucharistique. La
représentation de l'Agneau pascal rappelle
les paroles prononcées par l'officiant en
montrant l'hostie : « Ecce Agnus Dei, ecce
qui tollit peccata mundi. » L'Agneau ar-
bore la croix à étendard, qui est le trophée
de la victoire ; il détourne la tête en arrière
pour inviter à le suivre.
La Sainte-Face est un souvenir de la
douloureuse Passion, qui est aussi exprimée
par les scènes de la Flagellation et de la
1. Musée diocésain, à Angers.
2. Coll. Alph. de la Guère, à Bourges.
3. Église de Montreuil-Bellay, en Anjou.
4. Les Islettes, au diocèse de Verdun.
5. A Cherves-Chatelars, cant. de Montenibœuf (Cli.i
rente).
6. Musée d'Orléans.
7. .St-Laurent de Céris,cant. de St-Claude (Charente).
8. .St-Christophe de Confolens (Cliarente).
9. Église de Segonzac (Charente).
Crucifixion. Le Christ debout dans le tom-
beau affirme la dévotion au mystère de la
Passion qui s'était spécialement étendue au
XV'" siècle.
La Résurrection est motivée par la prière
que récite le prêtre après l'Élévation :
« Unde et memores... necnon et ab inferis
resurrectionis ». La Majesté est le complé-
ment de la Résurrection qui ouvre la série
des mystères glorieux. Si le Christ ressus-
cité monte au ciel, c'est pour régner après
avoir souffert. Le Christ est assis sur un
trône bénissant le monde qu'il a racheté et
conservé. Comme sur le fer à hosties d'Esse
(Charente), il a à ses pieds, pour attribut,
un chandelier parce qu'il est la lumière
spirituelle « /ux Incis et fous lummis ». Les
roues et les rosiers qui décorent les bor-
dures, ou accompagnent la croix, sont un
souvenir de la Passion, suivant l'allégorie
de saint Bernard.
Quant aux Sacrés Cœurs de Jésus et de
Marie et à l'Adoration du Saint-Sacrement,
ils expriment, ainsi que nous l'avons déjà
dit, d'une façon mesquine ou fautive, une
dévotion contemporaine et ne devraient
point figurer sur les hosties (').
Le Musée de Brive possède un fer à
hosties qui se rapporte à trois des sujets
de décoration qui viennent d'être énumérés,
mais qui s'en distingue par un autre motif
tout à fait nouveau : celui du chiffre des
religieux réformés de l'Ordre de saint
François, dits des Récollets. C'est dans
l'ancien couvent bâti à Brive par ces reli-
gieux, en 16 13, que ce fer a été trouvé.
Il dessine une ellipse, c'est-à-dire qu'il
est courbe sur toute l'étendue de son pour-
tour et mesure dix centimètres sur vingt.
Sur l'une des palettes se trouvent gravées
I. Barbier de Montault, Les fers à hosties de Varrond.
de Confolens (Charente.)
0tnce et fer à l)o0t(eg au SJ^n^tt De Brtïje.
287
quatre hosties : deux grandes, et deux
petites pour la communion des fidèles,
posées verticalement entre les grandes. Les
grandes hosties ont o"" 086 de diamètre ;
les petites o"" 032.
La Crucifixion occupe l'une des deux
grandes hosties. La croix, dont le titulus
porte l'inscription IN RI, est plantée sur un
sol rocailleux. Le corps du Christ est à
peine couvert par un linge étroit et flottant ;
la tête est légèrement inclinée du côté
droit ; les bras ne sont pas étendus hori-
zontalement, mais fléchissent un peu sous
le poids du corps ; un seul clou perce les
pieds vus de profil. Entre une série de cer-
cles concentriques, formant bordure, appa-
raissent des têtes d'anges ailées au milieu
d'étoiles à cinq rais.
Sur l'autre hostie figure le nom de Jésus
sous sa forme monogrammatique IHS. La
Fer à hosties au Musée de Brive (Corrèze).
traverse de la lettre médiane H se relève
en accolade pour servir de base à un cruci-
fix. Au-dessous de ce monogramme sont
gravés les trois clous de la Passion réunis
par la pointe. Un semis d'étoiles et de bou-
tons de rose, décoré de quatre têtes d'anges
ailés, occupe la bordure.
L'Agneau pascal est représenté sur l'une
des petites hosties ; il est couché, ce qui est
une faute, car saint Jean, dans sa vision, le
vit debout : « Agnum stantem tanquam
occisum » [Apocalyp., v, 6). Sa tête, non
nimbée, se détourne ; une de ses pattes
soutient la hampe d'une grande croix pro-
cessionnelle. Il repose sur un sol parsemé
de boutons de rose ; une rangée d'étoiles
délimite le pourtour supérieur de l'hostie.
Les armes des religieux Récollets se
trouvent gravées sur la quatrième hostie :
une croix soutenue par un dextrochère et
un sénestrochère.
Ce fer, intéressant au point de vue ico-
nographique, n'offre aucun caractère artis-
tique ; il relève de l'industrie qui en a confié
l'exécution à des mains peu expérimentées.
Usé en certains endroits par un long service
288
Bebue De T^rt cJ)rctieiu
et surtout par la rouille, il ne fournit plus
aujourd'hui qu'une empreinte très mutilée.
En terminant cet article, nous donnons la
reproduction d'un autre fer à hosties que
conserve la petite église de Pazayac, canton
de Terrasson (Dordogne). Il est gravé de
deux grandes hosties et de deux petites,
mesurant les premières o" 06 de diamètre,
les secondes o" 035. Le corps du Christ,
réduit à l'état de squelette, ce qui est peu
gracieux et nullement exact, est attaché à
la croix par des clous très apparents. La
tête nimbée est entourée du soleil et de la
lune ; la Vierge et saint Jean figurent aux
côtés de la croix. Le soleil, au lieu d'avoir
six rayons, comme on le représente habi-
tuellement, n'en a que cinq.
Sur l'autre grande hostie, le Christ,
Fer à hosties de l'église de Pazayac (Dordogne).
tenant dans la main gauche un globe sur-
monté d'une croix, est debout, sur un autel,
entre deux chandeliers qui se terminent
par une fleur de lis. Ces motifs sont inscrits
dans trois cercles concentriques, formant
encadrement ; celui du milieu est orné de
petites aspérités, rappelant la couronne
d'épines.
Sur les petites hosties sont représentés
le monogramme XPS, formé de lettres
entrelacées, au-dessus d'une petite rose, et
une croix à branches inégales, cantonnée
de deux fleurs de lis et de deux roses. Trois
petifs points terminent les extrémités de
la traverse horizontale.
Ce fera hosties paraît remonter au XV I i I^
siècle. Le dessin est gravé assez profondé-
ment, mais il est mauvais, naïf et, dans tous
les cas, des plus étranges. A ce dernier
titre il méritait d'être publié.
Ernest Rupin.
■^
' A^yik A^^ A^^ ^^* A^Vk A^V^ A^^ A^gx A^»:^ VÏ^A A^I^ A^^ A^vt A^vk X^U
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mm;LXiTrTxr]Lixi.xn-i)ti3] £
Gôsai sur la décoration arc!)itectonique(suite)
(0
DmTIiriJJl 'TTTnrriTTTI TirTTTTTTTin
nrrrm-mrTTTTTTTin
rirTTTT-m-nTTTTTTTT'yTT^"i;n
g III. APPLICATIONS MODERNES.
LES artistes modernes sont retournés
à la source primitive du décor, qui est
la nature, mais trop longtemps ils l'ont
copiée d'une manière toute réalistique.
Depuis quelque temps un grand nombre ont
compris toute l'importance d'une interpré-
tation décorative. Bouvard n'a-t-il pas orné
la coupole du Champ de Mars, en 1889, de
riches vitraux représentant les principaux
végétaux du sol français : blé, orge, chan-
vre, etc. ? Les néo-gothiques, français et
Fig. 201. — Ananas stylisé.
belges, les préraphaélistes anglais et les
fervents de « l'art nouveau », ont surtout
contribué à ce retour aux meilleures pra-
tiques. Seulement beaucoup ont le grand
tort de styliser insuffisamment la plante,
comme l'animal. Un autre tort bien plus
grave, un abus trop fréquent, c'est de donner
aux objets, comme forme principale, celle
d'une créature. Passe encore pour les objets
emblématiques et pour ceux de fantaisie,
I. Voyez la i'= partie, p. 481, 1900; la a""' partie, p. 25
et la 3"'= partie, p. 212, 1901.
comme un insigne ou un bijou. Mais que
dire d'un vase affectant la forme d'un cJiou-
cabîis, ou d'un guéridon, que publiait, l'autre
jour, une revue d'art avec admiration, et
dont les pieds sont formés de trois libel-
lules gigantesques } Actuellement on donne
souvent aux montants de menuiserie, aux
pieds de tables, etc., des formes réelles de
tiges végétales, avec leurs nodosités bour-
Fig. 202. — Ananas au naturel.
geonnantes. Tout cela constitue l'abus.
Tenons-nous-en à l'usage raisonnable de
l'ornement végétal. On trouvera plus loin
des exemples de plantes heureusement
stylisées de nos jours.
Imitant les tissus du moyen âge, à
diverses époques récentes, on a tiré de
V ananas (fig. 202) et de \ artichaut de su-
perbes sujets pour le décor des tissus
(fig. 201).
KaVUE DK l'art CHRÉTIEN.
I901. — 4™^ LIVRAISON.
290
dSitWt De ravt c!)iétien.
A la suite des Chinois et des Japonais.nos
décorateurs ont abondamment reproduit le
camélia (fig. 20j), cette belle tleur au con-
tour simple, que de tout temps les Orientaux
ont mêlée à leurs décors et que des mission-
naires ont introduite en Europe en i739-
sier, aux longues feuilles doublées et aux
fruits semblables à des pierres précieuses,
si régulièrement groupés (Jîg. 20^). — La
clématite est remarquable aussi par la noble
Fig. 203. — Camélia au naturel.
Les Japonais en ont fait un témoignage
d'affection à cause du lent épanouissement
de son bouton et de la persistance de sa
fleur sur la tige.
Dans le décor, les fleurs les plus simples
trouvent de jolies applications, telle la
Fig. 204. — Cerisier. Sculpture en bois, d'après le 1'". Mares.
capucine (dite mastouche), que M. Grasset
a si joliment stylisée en son recueil ('). La
campanule aux fleurs à clochettes, dont une
variante s'appelle catnpanule carillon\\ç. ceri-
1 . La plante ornementale.
P'ig. 205. — Campanule carillon au naturel.
simplicité de sa feuille lancéolée, la régularité
géométrique de sa fleur pentagonale, au
calice allongé. Le cognassier, simple de
forme et collé à des rameaux pauvres de
'\'g. 206. — Dahlia au naturel.
feuillage, offre un grand caractère par le
contraste de sa fleur délicate et de ses
branches rugueuses. Il est l'objet d'une
grande prédilection de la part des Chinois ;
€g0ai mx la décoration arcl)ttectomque,
291
une branche fleurie de cet arbre est chez
eux un signe de bienvenue.
Le coq^telicot rouge des champs offre une
fleur brillante et régulière, portée fièrement
sur une belle tige.
Le daJilia (fig. 206) peut aussi se comp-
ter parmi les fleurs massives, géométriques,
régulières, favorables à l'interprétation
décorative en relief.
l^ç. fraisier, 3. la triple feuille festonnée,
on ne peut plus gracieusement penchée sur
une tige fine.est un des types les plus répan-
dus dans le décor plat des tentures et des
étoffes meublantes.
Le groseiller est bien intéressant, avec
sa large feuille à quatre échancrures et à
festons, comme celle de la
vigne, et avec ses groupes de
fruits pareils à des perles
de la couleur des rubis.
La giroflée de jardin est
une de ces fleurs modestes,
douées d'un éclat durable ;
elle garde toute l'année
ses belles fleurs rouges pyramidales et par-
fumées. La giroflée des murailles, soli-
taire, croît dans les fentes des vieux
murs et sur les tombeaux. Les anciens
troubadours portaient une branche de gi-
roflée comme emblème d'une affection qui
survivait au malheur.
« Sensible giroflée, amante des ruines. »
(Treneuil.)
\J héliotrope, dont la fleur violette est
douée d'un parfum enivrant, prétendu
mortel, a reçu son nom du botaniste Jussieu,
en 1770, parce qu'elle se tourne au soleil, ce
qui lui donne une valeur symbolique
particulière.
hdi Jonquille, nommée narcisse des prés,
si modeste, est décorative entre toutes. Sa
feuille comme sa fleur fournissent les plus
Fig. 207.
Pavot.
élégants ornemets. Sa feuille est un ruban ;
sa fleur se présente, de flanc, comme un cor-
net, de dessus, comme un disque dentelé
entouré de feuilles pointues.
Le laurier (fg 208) est depuis l'antiquité
l'emblème de la gloire terrestre ou céleste.
On en tressait autrefois des couronnes aux
conquérants ; les faisceaux des empereurs
en étaient garnis. Il figure l'hiver, temps
du repos qui termine l'année.
Fig. 208. — Laurier stylisé.
Le myrilie, signe de triomphe, partage
le privilège du laurier, d'orner le front
des guerriers vainqueurs. Cet arbuste, con-
sacré autrefois à Vénus victorieuse, offre
une verdure perpétuelle, des branches sou-
ples chargées de fleurs parfumées.
La gracieuse et humble
feuille de lin est l'emblème
de l'industrie textile et de
l'activité domestique.
Le liseron (fig. 210) est
une des plus gracieuses es-
sences que l'artiste puisse
imiter, remarquable par ses
fleurs en disques blancs ou
roses, au contour très délicatement dessiné,
par ses tiges enroulées, prêtes à s'accrocher,
et par ses feuilles triangulaires et on-
dulées.
La marguerite des prés, ou pâquerette,
est une fleur décorative simple qu'affection-
nent les décorateurs. Les Chinois lui
donnent le nom d'astre et nos archéo-
Fig. 209.
Œillet stylisé.
?92
3Rebuc lie T^rt cbvétien»
logues l'appellent aster. C'est chez nous 1 reux qui l'effeuillent. Une miniature bien
l'oracle des champs, consulté par les amou- I connue du XVP siècle représente Henry
Fi^. 2IO — Liseron au naturel.
d'Albret trouvant la marguerite, la perle
des perles, dans les jardins d'Orléans.
Plus majestueuse et brillante, la reine
marguerite rayonne comme l'étoile fy^. 211
et 212). Sa culture fut introduite en Europe
par le Père d'Incarville, qui en envoya, vers
1 700, la graine au jardin du roi. Ses variétés
des fleurs en clochettes rangées en grappes
au long de la tige. Ses fleurs s'ouvrent au
premier rayon du soleil de mai. On le voit
sculpté aux arcades du cloître de Saint-
Jean des Vignes à Soissons (fig. 21^) ; le
Marguerites
stylisées.
Fig.
offrent toutes les couleurs de l'arc-en-ciel.
La mative offre des tiges jolies, où les
feuilles plissées et les fleurettes aux cinq
pétales séparés et contournés en cœur
alternent régulièrement.
Le vmguct (fig. 21^), ou lis des vallées et
des bois, plante aux feuilles allongées, offre
Fig. 213. — Muguet stylisé.
voici appliqué à un papier peint (fig. 2ij).
Les jolies fleurettes du myosotis (fig. 216),
brillent au mois de juillet d'un bleu de ciel
et se penchent en se mirant au bord de
l'eau. On connaît la légende allemande du
fiancé qui se noie en voulant le cueillir, et
le jette en s'écriant: « Vergiss mein nicht».
Fig. 214. — Mug-uet au naturel.
A son complet épanouissement, l'extré-
mité de ses pétales se recourbe légèrement
vers le cœur, comme faisant un retour
sur elle-même ; de là un procédé de
stylisation fort joli, également appliqué à
la rose (fig. 212). Dans le myosotis sau-
vage, dont la petite fleurette rose et bleu-
pâle se balance sur une tige grêle garnie
d'un rare feuillage, les
quatre pétales sont sé-
parés par autant de sé-
pales longs et effilés, d'un
vert vigoureux. Du cœur,
jaune de Naples, très
frêle, s'échappent trois
pistils gris ; les feuilles
sont lourdes, velues et dentelées.
Symbole d'égoisme, le narcisse offre une
couronne d'or au centre d'une large fleur
blanche, penchée et parfumée. Cette fleur
aime l'ombre et la fraîcheur des eaux.
La mythologie parle du jeune berger qui
s'éprit de sa propre image aperçue dans le
miroir des eaux du Styx, y mourut et
fut changé en cette fleur. Depuis, les
Euménides paraient leur front d'une cou-
ronne de cette fleur consacrée à l'égoïsme.
Noisetier (fig. 21S). En blason, on donne
a>.^fy
Fig. 215.
Fig. 217.
Myosotis au naturel.
Fig. 216.
le nom de coqtierelle à l'assemblage de trois
noisettes.
294
Bebue te rSrt cl)rctten»
Fig. 218.— Cathé-
drale de Meaux.
XJœillet, fleur introduite en Occident
par le bon roi René d'Anjou, devenue un
symbole d'amour, présente des feuilles
à rubans d'un vert gris bleu, des fleurs
parfumées aux pétales déchiquetés, variées
de couleurs, portées sur des tiges élancées
par un culot bien rond. Elle a été souvent
stylisée (fig. 20c).
Uolivier, emblème de
la paix, consacré jadis à
Minerve, servait chez les
Romains à couronner les
généraux qui obtenaient le
petit triomphe. Les Grecs
en couronnaient les vain-
queurs des jeux olympiques.
Ses feuilles allongées et
pointues, ses fruits en boules
oblongues, sont d'une reproduction facile
et claire.
L.e. palmier, ou dattier, était l'arbre favori
des muses antiques : il servait d'insigne
aux vainqueurs des jeux olympiques.
Comme signe d'allégresse, le peuple le
jetait sur les pas du Christ à Jérusalem.
Les palmes furent, comme la couronne de
laurier, un emblème de la victoire et spécia-
lement du martyre. Le palmier avait dans
l'antiquité la réputation de renaître de lui-
même, comme le phénix, et les Grecs l'ap-
pelaient le phénicien. Il est l'image du
paradis et de la terre promise. C'est parfois
l'arbre \i2.rd.à\s\-àc\\iç..( Quasi palma exaltata).
La parnassée des marais, qui croît et
fleurit dans la fange, est l'image de la vertu
triomphant de la corruption qui l'entoure.
La pervenche (fig. 2iç), aux feuilles tou-
jours vertes et luisantes, à la fleur bleue ou
blanche, souple de forme, avec des pétales
qui se chevauchent, s'attache fortement
au sol qu'elle tapisse, image des premières
affections.
Le perce-neige apparaît au milieu des
glaces et brave les frimas avec ses blanches
fleurs portant dans leur sein un léger point
de verdure, comme marquée par l'espérance.
Elles semblent vouloir nous consoler de
l'absence des beaux jours.
Le pissenlit, si vulgaire, est d'une grande
richesse de dessin par le déchiqueté de
ses longues feuilles étagées vers le haut, par
le globe ouateux de ses semences, et par les
divers états de sa fleur dorée. Ses fleurs,
qui s'ouvrent et se ferment à heures
fixes, sont l'horloge des bergers. Ses
Fig. 219. — Pervenche au naturel.
boules légères, petites sphères transpa-
rentes, sont formées de petits volants
qu'on envoie dans l'air comme des mes-
sagers de tendresse. S'il reste une de
ces aiguilles, c'est signe qu'on n'est pas
oublié.
V.Ç. platane se dresse au-dessus des eaux:
quasi platamis exaltata swiijitxta aquas (').
Il est le symbole de l'intelligence et de
la pureté du cœur. Ses larges feuilles dé-
coupées à angles vifs, à échancrures peu
profondes, ne manquent pas de caractère.
I. EccL, XXIV, 19.
essai sur la îiécoration arcl)itectomque.
295
La primevère annonce le printemps,
comme l'indique son nom populaire. Déjà
les sculpteurs gothiques en faisaient usage,
VUmviortelle est consacrée aux morts,
non par antithèse, mais par allusion à l'im-
mortalité de l'âme.
\Jif est le symbole de l'immortalité, à
cause de son feuillage toujours vert, sym-
bole de deuil, à cause de sa couleur sombre ;
c'est l'arbre funéraire. Il partage ce privi-
lège avec le cyprès, qui élève vers le ciel
ses longues et sombres pyramides agitées
par le vent. Il se lève comme un emblème
funèbre au milieu de bosquets fleuris, mais
surtout près des tombeaux. Les anciens
l'avaient consacré aux Parques et à Pluton.
Et toi, triste cyprès.
Fidèle ami des morts, protecteur de leur cendre.
Sa longévité, son impérissable verdure
lui donnent tous les titres à cet usage.
C'est aussi l'arbre paradisiaque et une es-
sence mystique. (Quasi cupressus in monte
Sion). (■)
La flore de nos jardins et de nos serres,
devenue merveilleusement riche, offre des
espèces somptueuses, difficiles à styliser ;
néanmoins nos artistes si habiles en ont
parfois fait des merveilles.
Le chèvre- feuille des jardins, qui s'ac-
croche aux murs et aux arbres, et qui, selon
le poète :
« Monte, s'attache et s'enlace au treillage ».
symbolise l'amour fraternel et les liens
d'amour. Son imitation a déjà tenté les
Grecs.et les modernes en ont tiré beau parti.
Réservé pour nous consoler des fleurs
disparues, à l'approche de l'hiver, le
superbe chrysanthème se colore de tous les
I. Ecd., XXIV, 17.
tons ramassés avec peine aux pâles rayons
des derniers beaux jours. Celui de Chine est
le plus riche. Jaune, quand il fut introduit
en Europe, il offre à présent toutes les
couleurs, souvent mélangées, et il a inspiré
aux peintres décorateurs des compositions
parfois superbes (').
Fig. 220. — Digitale au naturel.
Le cyclamen est majestueux par son port
et ses larges feuilles tachetées ; sa fleur
pourpre et charnue fournit des thèmes de
grand style.
La digitale dresse fièrement ses tiges
pyramidales, où s'accrochent ses cornets
pourpres ou blancs inclinés (fig. 220).
I. Voir Grasset et Molkenbœr.
296
3Rr\jur tir V^xt cf)vctieu.
Lefnc/ism présente des fleurs semblables
à d'admirables pendeloques, motif d'un
emploi tout indiqué.
Le géranium sauvage (fig. 221) possède
de merveilleuses fleurettes roses, joliment
crroupées sur une tige légère, et des feuilles
fortement découpées ; tandis que le géra-
nium des jardins a des feuilles massives,
richement panachées et déployées en éven-
tail : autant de traits heureux pour les
applications ornementales.
Fig. 22
^.21. glycine, qui tapisse si bien les murs de
ses opulentes grappes violettes, est tout
indiquée comme un des meilleurs sujets de
décor mural.
Le lliy)jt signifie activité. Abeille, pa-
pillon, mouches de toutes sortes, environ-
nent ses toufïes fleuries. Les Grecs regar-
daient cette plante comme symbole de
l'activité. Les femmes brodaient sur l'é-
charpe de leur chevalier une abeille bour-
donnant autour d'une branche de thym.
Le tournesol, fleur énorme, qui se tourne
vers le soleil, symbole tout indiqué de la
prière. Le tournesol nous vient du Pérou,
où sa fleur était honorée comme l'image
du soleil (').
Baucis fut changée en tilleul : essence
bienfaisante, odorante, butinée par les
abeilles ; emblème de l'amour conjugal. On
boit l'infusion de ses fleurs, on fîle son
écorce, on en fait des cordes et des cha-
peaux; les Grecs en faisaient du papier. Ses
fleurs sont fines comme la soie.
KiÊf. 222.
La tulipe importée de l'Orient en France
au XV le siècle, est un emblème de la
renommée. Le turban ou tulipien des
Turcs est une imitation de la tulipe; ceux-ci
célèbrent sa fête au printemps.
Symbole de la fidélité féminine, la V(fro-
nique signifie en Orient : don du cœur. La
véronique des bois (Veronica officinalis, ou
spicata) est une plante décorative, connue
des gothiques.
La verveine (Verbena officinalis), est un
symbole de l'enchantement. Avec le myrthe,
I. V. Revue des Arts décoratifs^ 1899, p. 232.
€00at sur la îiécoratton arcftttectontque.
297
elle formait la couronne de Vénus. Elle fut
sculptée par les gothiques. La verveine
Fig. 223. — Clématite au naturel.
servait chez les anciens à toutes sortes de
Fig. 224. — Odontoglossum.
divinations. Les Allemands offrent un cha-
peau de verveine aux nouvelles mariées.
On s'accorde à voir l'image de l'humilité,
de la modestie dans la violette (viola odo-
rata), cette plante modeste, à courte tige,
cachant sous son feuillage sombre des
fleurs que trahit seul leur parfum suave.
L'obscure violette, amante des gazons,
Aux pleurs de leurs roses entremêlant ses dons,
Semble vouloir cacher, sous un voile propice.
D'un prodigue parfum les discrètes délices.
(M. BoisjOLiN.)
Fig. 225. — Feuilles de marronnier stylisées.
'\Jiris que les artistes gothiques avaient
interprété, nous l'avons vu, dans le sens
symbolique et sévère, est reproduit par les
ornemanistes modernes dans tout l'éclat de
la beauté. Avec sa feuille rubannée, sa fleur
opulente d'allure et de couleur, cette plante
Fig. 226. — Feuilles de marronnier au naturel.
est pareille à une grande dame à la mine
élégante. On la figure tantôt en plante
touffue, tantôt en tiges isolées; on prend ses
fleurs à leurs différents états de développe-
ment, sous des aspects divers, et l'on en fait
soit des ornements de sculpture, soit des
bordures de vitraux, soit des décors peints.
REVUE DE l'art CHRÉTIEN
I9OI. — 4"'*= LIVRAISON.
298
llel)ut ïJe rart chrétien.
en variant les jeux de dessin et de couleurs,
suivant la technique.
Le marronnier de l'Inde (fig. 225, 226
et 22"/), introduit dans nos pays depuis
deux siècles, sert à décorer les parcs et les
allées. Aux premiers jours du printemps, ce
bel arbre se couvre tout à coup de verdure.
Rien n'est comparable à l'élégance de sa
Heur pyramidale et à la richesse de ses
Fig. 227. — Marronnier au naturel.
sextuples feuilles qui le font ressembler à
un lustre couvert de girandoles. Ses bou-
quets de Heurs majestueuses comme des
candélabres, ses fruits en boules à picots,
d'un aspect très décoratif, et ses larges
feuilles s'étalant en pattes sont autant
d'éléments d'une grande richesse au point
de vue ornemental.
La superbe passijlore, ou fleur de la Pas-
sion, est une des plus décoratives de toutes,
très significative comme emblème religieux.
Cette fleur, avec ses boutons comme héris-
sés de clous, est entourée comme d'une cou-
ronne d'épines, qui évoque, d'une manière
frappante, le souvenir de la couronne qui
ceignit la tête du divin Sauveur et des
instruments de la Passion. Ses pétales
Fig. 228. — Pétunia au naturel.
réguliers, sa tige à vrille, sa belle feuille
à cinq longs pétales très échancrés, sont
sans pareils pour les applications orne-
mentales. Nous donnons dans la planche
Pavot.
Fig. 229.
Fig. 230
ci-contre deux exemples des applications
décoratives qu'on en peut faire soit à la
peinture décorative, soit à la sculpture des
bois.
Le sceau de Salomon, avec une longue tige.
'\ln\m k l'Hrl: ilinticti
'm.v
J^iiincau i>c menuiserie scufiitc.
RMôMSSiSiSœMSïîSiiS^^
"ri:c oc rcmtmv ntunifc .
'Ij-'lillcatiotis î'c Iri pursiflovc sUL'iîcc
€00at sur la Décoration arcftttectomque.
299
d'où les fleurettes pendent en branches, et
que les feuilles hérissent en panache, offre
un sujet de décor grandiose, mais difficile à
traiter.
Voici le pavot (fig. 20'j, 22g et 2jo) à la
feuille mouvementée, contournée, déchi-
quetée, à la tige élégante et fine, à la fleur
en calice, au bouton bulbeux surmonté
d'une couronne ; on ne sait si c'est le
bouton, la fleur ou la feuille, qui fournit
les plus riches ornements, tant cette plante
est décorative. Aussi en a-t-on, dans ces
derniers temps, usé et abusé comme décor.
Il symbolise le sommeil au physique et
au moral, à cause des propriétés morphi-
ques de sa semence.
V.Ç: petîinia (fig. 228) présente une corolle
en cornet chiffonnée sur ses bords épanouis,
de couleurs variées dont le sculpteur pour-
rait tirer le parti le plus riche.
La clématite (fig. 22j), aux pétales dis-
posés en étoile, offre une forme régulière
très avantageuse également au point de
vue décoratif.
(A suivre.)
L. Cloc^uet.
Fig. 231.
|<^V A^X >^^>^^fU\^h^ A^-^ iM* \^^ >M^ >M'A A^X ^^-A A^V-^ ^^V:^^ A^^ k"^
jt ^^1^TTTt-;rITTTTTT^TTTT^^TTTTTT^lTlfTT^-r^TTTTTTTTTTTIIIIII^XII^IXIrIIIXII^X^IIX^^X^^^J-^AIl-l^^%^^
^\ Jjts frc0que0 îie Tégltse Hanta ffîarta Hnttqua,
au Forum Romain. — Carnet De Vopage. ^s®
W UIIIIIITIIIirTTTTIIIIIT»TTTTT^TyTTrTTTrTTTTTTTTTT^TTTTrrrTIIlIIU-IJ.lJTrXIIJIXIIXriJlJIlXIIIIXIJiriJII^
^^^-'f *^^ ^.iî-* ^x^ ^i^* '^fi-* *AÏ^ ^x*I^ ^A^-^ ^iiï'' ^itï^ ^^-^ ''xt^ ^xtî^ *^^x
ORSOU'ON a le bon-
heur d'avoir des loisirs
et d'être épris d'une
étude d'art spéciale, il
est bien difficile de se
soustraire à une obses-
SmwWWKWAWwS sion ; malgré des con-
ditions défavorables je n'ai pu résister au
désir d'aller à Rome, pour examiner les
fresques de Santa Maria Antiqua, décou-
vertes au Forum.
L'importance de ces peintures est con-
sidérable pour l'histoire de l'art, et particu-
lièrement pour l'art chrétien; c'est à dessein
cependant que j'écris Carnet de Voyage,
comme pour mes précédentes excursions.
Ce n'est pas, en effet, une relation que je
me propose ; il faudrait pour la faire une
compétence que je ne possède pas, et atten-
dre la solution de nombreuses questions
à l'étude et que d'autres découvertes feront
naître sans doute.
Ce sont simplement des notes prises sur
place et des remarques recueillies dans
les opuscules et les articles parus, que je
résume présentement.
Je ne suis ni archéologue, ni architecte,
ni paléographe, mais j'ai fait du caractère
et de la technique des anciennes fresques
mon étude de prédilection et comme il
m'a semblé que, dans les écrits publiés
jusqu'à ce jour sur Santa Maria Antiqua,
ces questions n'avaient été qu'effleurées, je
m'y suis d'autant plus appliqué.
L
I
'HONORABLE M. Baccelli, étant
ministre de l'Instruction publique et
des Beaux-Arts, entreprit le projet de com-
pléter une voie qui allait du Capitole à
l'Arc de Titus, en suivant la déclivité du
Palatin ; sur le chemin était située l'église
Santa Maria Libératrice dont la démolition
devint nécessaire ; elle fut accomplie en
1900.
Sur l'origine de cette église on est réduit
à des conjectures.
Selon la tradition qui ne repose que
sur une légende fabuleuse, elle n'aurait été
d'abord qu'une petite chapelle élevée à
l'occasion d'une délivrance ; elle était au
niveau du Forum, à côté du temple de
Castor et PoUux. Là, dans une caverne
habitait un dragon que les devins nourris-
saient de victimes humaines et qui parfois
sortait de son antre et infectait l'air d'éma-
nations pestilentielles. On fit appel à saint
Sylvestre, pape de 314 à 336, et grâce à
son intervention, le monstre ne parut plus.
Cette histoire du dragon se retrouve dans
la vie de plusieurs saints et quelques écri-
vains placent son antre, non près du temple
de Castor et Pollux, mais au pied du Mont
tarpéien, mais ceci n'a aucun intérêt, la
légende étant du domaine de la fable.
En fait, l'église Santa Maria Libératrice,
sous le nom de Santa Maria de Inferno,
sans doute en souvenir de la légende, est
mentionnée pour la première fois vers le
milieu du XIV^ siècle, non pas à l'ancien
niveau du Forum, mais sur les remblais
qui mirent le sol à peu près à la hauteur des
ILtë fresques De l'église t)aiita ®aria :^ntiqua.
301
rues de Rome. D'anciennes gravures mon-
trent devant le monument la partie supé-
rieure des trois colonnes corinthiennes, qui
subsistent encore, du temple de Castor et
Pollux. On a discuté sur les divers noms
que cette église a pu porter : Sau Silvest7-o
in lacu, San Salvadore in lacu.
Silvestro, à cause du pape ; Salvadore à
cause de moines qui venaient y officier; lacu
par allusion au marais, ou gouffre dans
lequel se précipita le jeune Curtius, 360 ans
avant notre ère, pour sauver sa patrie de
la colère des dieux infernaux. Ce gouffre
cependant était au centre du Forum et non
aux pieds du Palatin; aussi a-t-on pensé
que le mot lactt, devait se rapporter avec
beaucoup plus de raison à l'eau Giuturna
qui vient d'être mise à jour. A la vérité, ce
n'est pas un lac, mais un simple bassin de
fontaine de quelques mètres de côté, en-
touré de plaques de marbre et situé près
du temple de Castor et Pollux.
Quelques écrivains ont intitule l'église
Santa Âlaria di Canepai'ia.M.a\s, en défini-
tif, c'est le titre de Santa Maria Libératrice
qui est resté ; il résulte de l'abréviation de
Santa Maria Libéra nos a Pcenis, inscrip-
tion qui se lisait encore sur la façade au
moment de la démolition.
L'église paraît avoir été délaissée pen-
dant quelque temps ; il en est cependant
question sous Martin V (pontificat de 1417
à 1431).
En 1 550, le pape Jules 1 1 1 la concède aux
religieuses oblates dites de Torre de Speccki,
mais, la localité étant malsaine, les reli-
gieuses abandonnèrent le couvent qu'elles
possédaient à côté, tout en conservant ce-
pendant l'église.
En 1583, un noble et riche Romain,
Michèle Lante, prescrit dans son testament
la reconstruction de l'édifice ; l'oncle du
défunt, le cardinal Marcellus Lante, le fit.
sinon rebâtir entièrement, du moins com-
plètement restaurer en 161 7. C'est dans ce
dernier état qu'il se trouvait lorsqu'il fut
démoli en 1900.
Les religieuses ont traité à l'amiable
avec le ministre; elles ont reçu une indem-
nité de 300,000 lires et le droit d'emporter
les objets et les peintures qui garnissaient
le temple. Les meilleures peintures sont du
Français Parrocel {^ i 78 1 ) et l'objet le plus
intéressant, la grande croix de bois qui
existait jadis au centre du Colysée.
On doit toujours regretter la suppression
d'une église ; cependant la destruction de
Santa Maria Libératrice n'a été blâmée par
personne, surtout après qu'on a connu les
heureuses conséquences de la démolition.
II
AU cours de travaux exécutés, en 1702,
dans un jardin situé derrière l'abside
de Santa Maria Libératrice, on trouva à
environ cinq mètres de profondeur, une
autre abside décorée de fresques ; le pape
Clément XI voulut la dégager, mais il ne
donna pas suite à son projet à cause des
difficultés de l'entreprise.
En 1885, on déblaie un grand édifice
carré, situé derrière le temple de Castor et
Pollux, et on reconnaît une partie, décorée
de fresques, de l'église dont l'abside avait
été signalée en 1702.
La découverte ne paraît pas avoir fait
alors une vive sensation, mais une dizaine
d'années plus tard, une ardente polémique
surgit entre les savants et les archéologues
de Rome sur le point de savoir quelle était
cette église.
Était-elle Santa Maria Nuova, ou Santa
Maria Antiqua "^
Je n'ai pas à résumer les discussions
engagées à ce sujet, la question ayant été
définitivement résolue par le dégagement
302
Bebue lie V^vt c{)rétien.
de l'édifice opéré en 1900, sous la savante
et sagace conduite de M. le commandeur
G. Boni, l'éminent directeur des travaux du
Forum.
Notre illustre compatriote, Mgr Du-
chesne, protonotaire apostolique, direc-
teur de l'école de France à Rome, avait
pris part à la lutte.
Mgr Duchesne démontra victorieuse-
ment que le sanctuaire avait été d'abord
dédié à saint Antoine, puis à la Vierge et
qu'il n'était autre que l'église de Santa
Maria Antiqua, dont il est plusieurs fois
question dans le Liber Pontificalis, comme
on le verra plus loin.
On sait que Mgr Duchesne a publié le
texte du Liber, travail extrêmement im-
portant, qui honore grandement l'auteur et
l'érudition française (").
Avant de pénétrer dans l'intérieur de
Santa Maria Antiqua, il est nécessaire d'in-
diquer où elle se trouve.
En venant des pentes du Capitole, on
prend l'escalier provisoire qui donne accès
au Forum ; on tourne à droite, et à peu de
distance, on est aux restes du temple de
Castor et Pollux, puis un peu au delà on
se trouve devant une haute construction
antique, les vestiges du temple d'Auguste.
C'est là,sur une voie, la Via nuova, qu'est
l'entrée de l'église à droite ; elle est de
plain pied avec le sol du l'"orum.
Santa Maria Antiqua n'est pas l'église
souterraine de Santa Maria Libératrice ;
il n'y a entre ces deux édifices aucun
rapport comparable aux églises super-
posées de Saint-Clément, par exemple.
Ceux qui ont construit Santa Maria Libé-
ratrice sur le remblai ne se doutaient pas
de Santa Maria Antiqua, et, comme l'a fait
I. Liber PontiHcalis. Texte, introduction et commen-
taires par l'abbé L Duchesne. ; 2 vol. Paris, Tliorin
1S86-1892.
observer justement Mgr Duchesne, l'église
du haut ne couvre pas exactement l'aire de
l'église du bas et les plans des deux sanc-
tuaires ne concordent pas.
De l'origine première de Santa Maria
Antiqua on ne sait rien ; il est visible, par
l'appareil des murailles, qu'elle a été éta-
blie dans un édifice antique, sans doute au
Vie siècle, époque où les chrétiens prirent
pour sanctuaires certaines localités antiques
abandonnées.
Si, par les découvertes de 1702, de 1885
et par le Liber Pontificalis, on connaissait
l'existence de Santa Maria Antiqua, on
ignorait absolument celle d'un autre sanc-
tuaire chrétien voisin que les fouilles récen-
tes ont mis au jour; il est en face de l'église,
sur la même Via nuova, mais orienté dans
un sens différent ; j'y reviendrai.
L'église Santa Maria Antiqua est oblon-
gue ; le mur de droite est adossé au tem-
ple d'Auguste: le fond est contre le Palatin;
l'entrée est sur la Via nuova qui longe
également le mur de gauche et monte en
rampe au Palatin ; cette rue a une largeur
d'environ 3 mètres 50.
Les mesures que je donne n'ont pu être
prises le mètre à la main ; elles ont été
appréciées au pas pour le terrain et à la
vue pour les hauteurs ; elles ne sont donc
qu'approximatives; j'ai lieu cependant de
les croire assez justes pour donner une idée
de l'ensemble.
Toutes les mesures ont été prises à l'in-
térieur ; l'observation est nécessaire, car les
murailles dégagées sont très fortes et at-
teignent parfois jusqu'à i mètre 50 d'épais-
seur.
La droite et la gauche sont celles du
spectateur qui pénètre dans l'église par la
porte d'entrée.
A mon grand regret, je n'ai pu me pro-
curer les photographies des fresques, ni en
3les fre0que0 ht VcQim ^anta avaria :^nttqua
303
faire faire ; il existe bien quelques photo-
graphies, mais elles sont d'ensemble et
ont été prises avant l'achèvement des fouil-
les ; elles sont trop incomplètes pour être
reproduites utilement.
L'aire de l'église est divisée en trois
parties distinctes.
En entrant par la Via nuova, on se
trouve dans le narthex, lieu de réunion
des fidèles.
Puis, après avoir traversé un espace
vide, on passe dans le presbytérium qui
se terminait au fond par un arc triomphal,
dont il ne reste que les bases en maçonne-
rie. Là se trouvent les bases, également
en maçonnerie, des ambons cornu epistolce
et cornu evangelii, des traces de ce qui
pouvait être la tribune des chanteurs et
quatre colonnes corinthiennes, isolées et
placées en carré oblong.
Puis, après un autre espace vide, on pé-
nètre dans le chœur qui se termine par une
abside hémisphérique ; à chaque côté du
chœur il y a une chapelle.
Du narthex on pouvait passer dans le
chemin en rampe qui monte à gauche au
Palatin ; on avait aussi accès à cette rampe
par un escalier placé à l'entrée du chœur.
Du seuil de la porte d'entrée par la Via
nuova, au fond de l'abside, il y a environ
51 mètres.
Le narthex mesure à peu près 19 a 20
mètres de long.
Le presbytérium est d'environ un quart
moins long.
Le chœur mesure de 7 à 8 mètres en
profondeur.
La largeur des deux premières divisions
est uniformément de 1 8 mètres à l'intérieur.
Le chœur, y compris les deux chapelles,
est un peu plus étroit.
Les hauteurs sont difficiles à apprécier,
puisque la toiture n'existe plus au-dessus
du narthex et du presbytérium, mais on
peut en avoir une idée par la hauteur des
quatre colonnes corinthiennes qui mesu-
rent environ six mètres avec leurs bases.
Les plafonds étaient-ils plats .-' ce n'est
pas probable ; à en juger par un édicule
peint dans les mains d'un personnage
dont il sera question, le toit devait être
cintré.
En tout cas, l'abside hémisphérique était
voûtée ; du sol au sommet de la partie de
la voûte qui subsiste, il m'a paru qu'il peut
y avoir une dizaine de mètres.
Tels sont les seuls renseignements archi-
tectoniques, que mon incompétence en ces
matières me permet de fournir.
Nous sommes bien, on le voit, dans la
primitive Église chrétienne, avec ses trois
divisions bien tranchées.
Peut-être Santa Maria Antiqua est-elle
maintenant la plus ancienne de nos églises
mises au jour, sans avoir subi d'altérations
dans sa forme ? Elle est certainement la
plus simple de toutes, car elle n'a ni por-
tique à l'entrée, ni nefs latérales ; mais si
son architecture est des plus élémentaires, il
n'en est pas ainsi de sa décoration.
Ici j'aborde un sujet où je me sens plus
à l'aise que dans les précédentes descrip-
tions.
111
SAINT Grégoire-le-Grand, pape de 590
à 604, a dit <? que la peinture remplisse
« les églises, afin que ceux qui ne connais-
«sent pas leurs lettres puissent au moins
« lire sur les murailles ce qu'ils ne peuvent
« lire dans les manuscrits ».
Cette prescription a eu pour l'art d'incal-
culables résultats ; elle était du reste con-
forme au sentiment chrétien manifesté
dans les catacombes.
304
jIRcllue Ifr l'^rt rbréticn»
Le concile de Nicée, en 787, reprend la
pensée de saint Grégoire-le-Grand. « Par
«la peinture nous pouvons toujours penser
«à Dieu, car lorsque dans les temples sa-
«crés la parole se tait, le spectacle des ima-
i. ges fixées aux murs nous raconte encore
«et nous enseigne, le matin, le midi, le soir,
« la vérité de ses actes. »
A l'église Santa Maria Antiqua ces
paroles de saint Grégoire-le-Grand ont été
fidèlement suivies.
Du sol au faîte, l'église était décorée de
fresques ; la prodigalité de ces peintures
est telle qu'il n'y a pas, je crois, dans toute
l'Italie, un pareil exemple à citer.
La peinture recouvrait non seulement
les murs droits, et les voûtes, mais les co-
lonnes, les embrasures des portes et les
bases des sièges et des ambons.
Les conditions défectueuses de la localité
ont causé des ravages.
En maints endroits l'enduit, sur lequel la
fresque a été peinte, s'est détaché du mur.
Ailleurs l'enduit a résisté, mais il a été en-
vahi par de petits cryptogames touffus qui
recouvrent les peintures comme d'un tapis
végétal ;il y a des pans de murs entiers ainsi
tapissés ; d'autres murailles n'ont été at-
teintes que partiellement. Sur divers points,
les couleurs ont été afîfliiblies en totalité ou
en partie. Par bonheur, plusieurs fresques,
et non des moins importantes, sont restées
dans un étal de conservation remarquable
et aussi fraîches que les mieux conservées
du XIV^' siècle.
La chute de nombreux fragments d'en-
duit, l'affaiblissement de certaines colora-
tions, les moisissures, la disparition d'une
fraction de l'abside hémisphérique et des
parties supérieures des chaires et des am-
bons, sont très regrettables sans doute,
mais, malgré ces dégradations, on peut se
rendre parfaitement compte de la valeur de
la décoration et des procédés techniques
qui ont été employés.
IV
AVANT de mentionner quelques-uns
des sujets représentés, — car tous
n'ont pu être spécifiés jusqu'à présent du
moins — et de noter les procédés, il con-
vient de faire connaître à quelle époque
nous nous trouvons.
Par une rare bonne fortune, il n'est besoin
ici de nulle hypothèse et aucune discussion
sérieuse n'est possible.
L'église était dépendante d'une diaconie
et desservie par des moines grecs ; la géné-
ralité des fresques est accompagnée d'ins-
criptions en lignes, ou en lettres superpo-
sées ; presque toutes ces inscriptions sont
en caractères grecs, elles étaient en nombre
inusité, puisque, malgré les dégradations,
on en compte encore au moins cent cin-
quante, les unes très lisibles, les autres en
partie effacées. Elles se rapportent soit
aux sujets représentés, soit à des papes,
à des donateurs et à des saints.
On a trouvé également quelques frag-
ments de marbre avec des inscriptions se
rapportant à l'église.
Plusieurs de ces indications concordent
avec le texte du Liber Pontificalis, qui par
trois fois mentionne l'église, et avec d'autres
documents authentiques.
Les plus anciennes mentions sont du
temps du pape Jean VII (pontificat de 705
à 708).
Le Liber Po7ilificalis dit :
Joannes natione grecus . . . vir erudissitnus
et facundus eloquentia Fecit ecclesias
quas, quicwnque liasse desidcrat in cis eius
vîcltuDi depictîun repperit. Basi/icam itaqne
Sanct(C Dei Genitricis qui antiqua vocatiir
îles fresques îie Tegltse ^anta £©am :antîqua.
305
pictura decoravit, ilHcque ambonem noviter
fecit et super eadem ecclesiam episcopium
qumitum ad se construere maluit, illicque
pOJitificali sui te^iipiis vitamfinivit.
Un fragment de l'ambon dont il est ques-
tion a été retrouvé dans l'église; il est en
marbre blanc avec l'inscription bilingue,
latine et grecque.
Joatmes Servus Sce Mariœ (').
Jean VII, vir erudissimus, est connu, dans
l'histoire de l'art de la mosaïque, par la
décoration qu'il fit faire dans la chapelle
de la Vierge de l'ancienne basilique de
Saint-Pierre (').
La protection qu'il a accordée à Santa
Maria Antiqua s'explique facilement. Il
était fils de PIatone(>î<687),intendantdu Pa-
latin où il y avait encore des palais à l'usage
des représentants de l'empereur. Jean VII
voulut demeurer au Palatin et, comme le
dit le Liber Poiitificalis, il se fit construire
au-dessus de l'église une résidence, où il
finit ses jours ; il s'en suit que le sanctuaire
devint l'église du pontife ; aussi la désigne-
t-on maintenant à Rome sous le nom de
Cappella palatina, ce qui la distingue nette-
ment des autres ésflisesdu Forum chrétien.
Jean VII fit également bâtir, vers l'arc
de Titus, la Torre chartularia, dont une
partie servit aux archives pontificales jus-
qu'au X<^ siècle.
Aucune mention de Santa Maria Antiqua
ne se trouve dans le Liber Pontificalis
depuis 708, année de la mort de Jean VII,
jusqu'au pontificat de Léon tll (795-816),
mais cela ne prouve rien, le Liber ne don-
nant pas le détail de tous les travaux
ordonnés par les papes ; ainsi le Liber passe
sous silence les peintures exécutées à Santa
1. Pour simplifier je donne les inscriptions, non avec
leurs caractères originaux, mais en lettres ordinaires.
2. Je reproduirai prochainement un important morceau
de cette mosaïque, conservé à Florence.
Maria Antiqua, sous le pape saint Zacharie
(741-752), et cependant ce pontife en fit
faire de très importantes; la preuve subsiste,
puisqu'il est figuré, dans une fresque, en
nimbe carré avec son nom en lettres super-
posées.
De même pour le pape saint Paul I^''
(757-767), qui est également représenté en
nimbe carré, dans une fresque.
D'autres papes du VI 11^ siècle ont, selon
le Liber, fait des munificences à Santa
Maria Antiqua, mais dans les mentions il
n'est pas question de peintures murales ;
il faut cependant observer que dans les
fresques on trouve quelques effigies en
partie détruites, avec des inscriptions incom-
plètes, se rapportant à des pontifes.
Au IX^ siècle, il y a lieu de croire que
le pape S. Léon IV (847-855) fit recons-
truire une partie du sanctuaire et que saint
Nicolas I'^'' (858-867) y ordonna aussi des
travaux.
Tel est en résumé l'état actuel, en ce
qui tient à la chronologie des papes ; les
points obscurs seront probablement éclair-
cis, mais ce qui est dès à présent hors de dis-
cussion, c'est que nous sommes en présence
de fresques du VII 1^ siècle, et que la plus
importante et par bonheur la mieux con-
servée a été peinte entre les années 741
et 752.
AU juger, j'estime au moins à trois
cents, le nombre de figures entières
ou partielles, groupées en tableaux, alignées
sur files, isolées, qui subsistent dans la
décoration des deux édifices et j'apprécie à
un pareil nombre les effigies disparues, par
suite de la chute de quelques murailles, du
détachement de l'enduit et de l'envahisse-
ment de la moisissure.
KKVUK DE L ART CHRETIEN.
igOI. — 4™^ LIVRAISON.
3o6
Bcbue tir V^n cbveticiu
Il m'eût été agréable d'entrer dans le
détail en mentionnant les sujets qui ont été
spécifiés jusqu'à présent et en marquant les
places respectives qu'ils occupent.
Mais j'ai reconnu qu'un pareil travail
était au-dessus de mes moyens, faute d'un
plan d'ensemble et de relevés géométriques
des murailles et des pans de murs ; si, en
effet, les lignes essentielles de l'église sont
simples, les détails sont plus compliqués ; il
y a là des pans de murs en redans à la
limite des divisions, des bases d'arcs et
d'ambons, de grandes niches oblongues
pratiquées dans le fond des chapelles, de
petites niches hémisphériques creusées dans
les murs. Ces petites niches mesurent
environ un mètre de haut et 0,30 ctm. de
profondeur ; on peut supposer qu'à l'époque
où l'édifice était païen, elles servaient aux
urnes cinéraires, la localité ayant été un lieu
de sépulture, comme l'indiquent les sarco-
phages qu'on y a trouvés ; des tombeaux
chrétiens ont aussi été découverts dans
l'église et aux abords.
Sans être appuyée de tracés graphiques,
une description détaillée ne pouvait être que
confuse ; j'y ai donc renoncé : je me borne
à des vues d'ensemble et à l'indication des
sujets les plus importants.
Le parti décoratif est simple ; il a été
observé à peu près partout.
Une première division de l'espace part
du sol jusqu'à environ i mètre 50 de hau-
teur ; elle est peinte de draperies plissées
relevées symétriquement et décorées d'or-
nements divers.
Au-dessus de cette zone, apparaît parfois
une suite de personnages debout, rangés sur
les côtés du trône du Rédempteur, ou de la
Madone.
Cette frise est surmontée de tableaux en
compartiments montrant des histoires tirées
des Écritures et du martyrologe des saints ;
par endroits ces tableaux sont surmontés
d'une autre suite de tableaux.
Lorsque la frise de personnages debout
n'existe pas, les tableaux sont tangents à
la draperie.
Le choeur et l'abside, les niches et les
parois des deux chapelles sont revêtus de
peintures, ainsi que les petites niches hémis-
phériques des murailles ; il en est de même,
comme je l'ai indiqué déjà, des embrasures
de portes, des bases des arcs et des ambons
et des murs en redans.
Pour donner une idée de l'ampleur de la
décoration, je prends l'un des murs du
presbytérium et l'une des chapelles du
chœur.
Sur la zone inférieure de la muraille du
presbytérium court une draperie plissée et
relevée symétriquement.
Au-dessus, une frise de personnages,
peints à grandeur naturelle ; elle représente
le Rédempteur avec le nimbe crucifère ;
il est assis sur le trône ; de la main droite il
bénit à la façon latine, dans la gauche il
tient un livre relié luxueusement : à ses
côtés se tiennent debout, d'une part, onze
saints latins, de l'autre, neuf saints grecs.
Ils sont revêtus de vêtements épiscopaux,
portent le pallium et tiennent la crosse
d'une main et un livre de l'autre ; leurs
noms en lettres grecques superposées sont
tous lisibles.
Au-dessus de cette division est figurée
l'histoire de Joseph en sept tableaux, dont
quatre sont suffisamment conservés; ils
montrent :
Le banquet de Pharaon.
Joseph et la femme de Putiphar.
Joseph conduit en prison.
Joseph près du puits.
Des trois autres tableaux il ne reste que
quelques figures insuffisantes pour détermi-
3Le0 fresques De réglise t^anta S^aria Zntiqm.
307
ner le sujet ; plusieurs compartiments ont
encore leurs légendes en partie.
Une quatrième zone de peintures, divi-
sée en sept tableaux, se trouvait au-dessus
de l'histoire de Joseph ; l'enduit est tom-
bé presque partout ; les quelques figures
qui subsistent ne permettent pas de fixer
le sujet ; on distingue une personne cou-
chée endormie et une vue de mer.
Malgré la chute de quelques morceaux
de l'enduit, l'une des deux chapelles du
chœur, dont je vais tenter la description,
est de la plus haute importance, tant pour
les sujets représentés que pour la tech-
nique des fresques et la conservation des
couleurs.
La décoration montre :
La Crucifixion de Jésus-Christ.
La JVladone allaitant l'Enfant.
Divers personnages isolés.
L'histoire de sainte Giulitta et de son
fils saint Ouirico, martyrisés dans les pre-
mières années du IV^ siècle.
Le Rédempteur est attaché à la croix
les pieds séparément cloués ; il est revêtu
d'une longue robe étroite, d'un ton bleu,
ornée d'un galon jaune ; les bras sont nus
et allongés sur le bois équarri. Il est vivant ;
au ciel, la lune et le soleil apparaissent
obscurcis.
Au bas de la croix, et de petite taille,
Longinus, marqué par son nom et un autre
pharisien,
D'un côté de la croix, la Madone, debout,
vêtue de noir.
De l'autre côté Jean, très jeune.
La scène, qui est peinte dans une niche
oblongue {'), est encadrée de palmiers por-
tant des fruits.
1. A la vue, elle a environ 2 mètres 25 de large et 3,50
de haut.
' Parmi les figures isolées l'une d'elles a
une importance capitale ; elle représente
un pape en nimbe bleu carré ; l'inscription
Zaccharia papa, en lettres grecques super-
posées, ne laisse aucun doute sur l'identité
du personnage et la date de la peinture.
L'autre figure montre Theodotus ; l'ins-
cription est en partie mutilée.
Elle a été facilement rétablie. Theo-
dotus était primicerius defensoniiu, di-
gnité élevée de la cour pontificale ; l'ins-
cription lui donne ce titre et apprend qu'il
était dispensatore, administrateur, delà dia-
conie de Santa Maria Antiqua.
Le personnage est nimbé en carré, il est
vêtu d'un manteau rouge et d'une aube
blanche ; dans les mains il tient un édicule
à toit cintré, qui est l'église.
D'autres personnages sont encore figurés :
plusieurs sont vêtus à peu près comme
Theodotus ; d'autres sont parés avec luxe ;
sauf sainte Giulitta et saint Ouirico, la
Madone et l'Enfant, on n'a pu les spécifier,
les inscriptions étant tombées ainsi qu'une
partie des figures.
Au-dessous de la Crucifixion, est peinte
en un tableau la Madone assise sur un
trône, avec l'Enfant dans ses bras.
Sur les murailles latérales se développe
l'histoire du martyre de sainte Giulitta et de
son fils Quirico.
Giulitta, pour échapper à la persécution
contre les chrétiens, s'enfuit d'Iconium en
Asie Mineure, vers l'an 304, avec son fils
Quiricus, âgé de trois ans, et se réfugia
d'abord àSéleucie, puisa Tarse, capitale de
la Cilicie. Reconnue, elle fut conduite de-
vant le gouverneur Alexandre, qui la fit
frapper à coups de nerfs de bœuf; il vou-
lut s'emparer de Quiricus. L'enfant lui
résista, le gouverneur le fit flageller ; Qui-
ricus criait : « Je suis chrétien », répondant à
sa mère qui répétait : « Je suis chrétienne ».
Alexandre fit arracher la langue à l'enfant
qui, malgré cette mutilation, criait toujours
« Je suis chrétien. » Les deux martyrs
succombèrent.
Leur histoire est retracée en six tableaux
pourvus d'inscriptions en partie détruites,
ainsi que plusieurs figures.
Giulitta et son fils conduits devant le
gouverneur, praeses, assisté de deux per-
sonnes.
Les deux chrétiens sont en prison.
Alexandre attire à lui l'enfant conduit
par deux soldats armés de lances.
Flagellation de Quiricus.
Le martyre de l'enfant en présence de
sa mère ; avant d'expirer, il bénit son bour-
reau.
Un sixième tableau, presque entièrement
ruiné, ne peut être expliqué par l'inscription
dont il ne reste que quelques mots.
Divers épisodes du martyre des deux
saints sont encore représentés dans une
autre suite de dimensions plus petites.
Les fresques de l'abside hémisphérique
et des murs latéraux du chœur de l'église
ont beaucoup plus souffert que celles de la
chapelle de la Crucifixion. Cependant on
distingue, dans la conque, le Christ assis sur
un trône ; la figure, de bien plus grande
dimension que les autres, est entourée d'an-
ges et de divers personnages en partie dé-
truits mais dont l'un est fort heureusement
encore appréciable; c'est le pape Paul ler,
et en nimbe carré bleu, avec l'inscription
Sanctissunus Pan/us P. P. Roma (iius).
Je ne puis que mentionner brièvement
les scènes et les figures qui subsistent en
totalité ou en partie sur les autres murail-
les du sanctuaire.
Jésus-Christ sur un trône, entouré de la
Vierge et de saint Jean, ou d'anges, ou de
divers personnages, est représenté quatre
fois encore.
Scènes de la vie de Jésus ; Crucifixion.
Adoration des Mages.
Les Evangélistes.
Scènes tirées des Actes des Apôtres.
David et Goliath.
Isaïe prédisant à Ézéchias sa mort.
La Madone sur un trône se trouve trois
fois.
Sainte Anne, avec l'Enfant.
Sainte Anne, avec saint Joseph.
Sainte Anne, sainte Elisabeth et la
Vierge.
Sainte Agnès.
Sainte Cécile.
Saint Abbaciro.
Saint Biaise.
Saint Basile.
Saint Laurent.
Saint Cristoforus.
Saint Benoît.
Saint Matthieu,
Saint Démétrius.
Saint Grégoire.
Saint Augustin.
Saint Paul.
Saint André.
Saint Jean- Baptiste.
Saint Bartholomé.
Ces personnages sont indiqués par des
inscriptions, mais il en est un grand nom-
bre qui n'ont pu être identifiés.
Ayant fait une étude spéciale du beau
sujet de \ Annonciation, je ne puis omettre
celle que j'ai relevée à Santa Maria Anti-
qua.
La Vierge est assise sur un siège peint
en jaune et brun, garni d'un coussin rond,
rouge avec des galons blancs ; malheureu-
sement le haut du corps n'existe plus.
L'ange Gabriel est vêtu à l'antique, en
blanc légèrement bleuté dans les ombres;
Hes^ fresques de Tégltse t)anta S^avià i^nttqua. 309
il n'est pas ailé, mais il a un nimbe à fond
bleu serti en brun. De la main droite en
avant, il bénit à la manière grecque ; de la
main gauche, il tient un long bâton appuyé
sur son épaule.
Il est jeune et porte une barbe légère.
Le fond de la composition est uni ; dans
la partie supérieure il est d'un ton rougeâ-
tre, au bas il est blanc ('). Une inscription
en lettres grecques donne la Salutation.
VI
J'AI indiqué que sur la Via Nuova, en
face de l'église Santa Maria Antiqua,
il existe un autre sanctuaire.
Cet édifice était absolument inconnu avant
les fouilles actuelles ; il affecte la forme
d'un parallélogramme de douze mètres en-
viron sur sept et demi ; sur le grand côté,
en face de la porte d'entrée, se trouve une
abside en conque d'une ouverture de
quatre mètres et demi à peu près.
Toutes les surfaces, même celle du mur
extérieur, étaient recouvertes de fresques.
Elles sont maintenant fort endommagées,
et cependant il est possible encore de dis-
tinguer quelques compositions.
On voit le Sauveur entouré de Saints ;
des groupes de personnages ; les traces
d'une Anjionciation ; àes ornements figu-
rant des draperies ; de grandes croix ornées
de pendants, des agneaux et le paon
triomphal.
Mais la représentation essentielle consis-
te dans un groupe compact et serré de
jeunes hommes à moitié nus, qui sont sous
la garde de soldats. Les inscriptions sont
presque toutes effacées ; quelques noms
i.Dans la Crucifixion peinte par Fra Angelico, dans la
salle du chapitre du couvent San Marco à Florence, on
remarque de même un fond en partie rouge et blanc. Je
n'ai pas trouvé d'explication suffisante à cette disposition.
cependant sont restés, notamment celui de
Kyricon en grec.
Ce nom et la scène représentée indiquent
qu'on est en présence des quarante martyrs
de Sébaste, martyrisés par ordre de Luci-
nius Lucinianus, qui fut mis à mort en 324
par ordre de Constantin, dont il avait été
l'associé à l'empire et ensuite l'adversaire.
Les jeunes chrétiens, sommés de renoncer
à leur foi, avaient été submergés dans un
étang glacé ; à côté se trouvaient des bains
chauds pour ceux qui reviendraient au
paganisme; ils refusèrent et succombèrent;
peu après leur mort ils devinrent très popu-
laires.
VIT
J'AI donné tant bien que mal — beau-
coup plus mal que bien — une idée
approximative de la décoration à fres-
que des deux sanctuaires.
Il resterait beaucoup à dire.
En ce qui concerne l'iconographie, mon
incompétence m'interdit de l'aborder ; je
n'ai du reste remarqué que peu de détails
qui ne se trouvent pas ailleurs dans les
monuments antérieurs.
Pour les inscriptions je suis au même
point. J'ai observé, comme tout le monde,
que le pape Jean VII (705-708) est quali-
fié à'episcopus, tandis que le pape S. Zacha-
rie, qui a occupé la chaire de saint Pierre
trente-trois ans plus tard, porte, à côté de
son effigie, le titre Papa.
Les procédés de peinture m'ont occupé
davantage ; ils sont intéressants à étu-
dier.
Rappelons que, soit par le Liber Pontifi-
calis, soit par les effigies et les inscriptions,
nous savons que Jean VII (705-70S), saint
Zacharie (741-752), et saint Paul I^"" (757-
767), ont fait exécuter des fresques à Santa
Maria Antiqua.
,IO
9Rc\)ue lie V^xt t\)xttmh
Au siècle suivant, saint Léon IV (847-
855) et saint Nicolas I^'' {858-867), ont
ordonné des réparations, mais on ignore
de quelle nature elles étaient ; il est pro-
bable cependant qu'elles s'appliquaient en
partie aux fresques.
En effet, avec un peu d'attention on
remarque que dans quelques groupes, il y
a des figures peintes sur un enduit visible-
ment mis à la place d'une couche précé-
demment appliquée et que l'humidité avait
fait tomber.
Ailleurs ce sont des motifs complets qui
ont été refaits : la scène, par exemple, de
V Annonciation a été tout entière peinte
à la place d'une fresque antérieure.
Mais, dans ces reprises, je n'ai pas trouvé
de différences notables entre les procédés
du Ville siècle et ceux qui ont pu être
suivis au IX^.
On observe avant tout l'harmonie des co-
lorations entre elles, non seulement dans un
même sujet, mais dans une suite de sujets
décorant un pan de mur ou une chapelle.
Dans chaque localité, qu'elle soit peinte
dans une gamme relativement douce ou
dans une note plus accentuée, l'ensemble
est à une même hauteur de tons ; point de
heurts, ni d'éclats, tout se tient harmonieu-
sement.
La remarque m'a paru nécessaire, car,
jusqu'à présent, on a généralement admis
que du VI^ siècle au XIII' et même au
XIV<^, les décorations murales étaient pri-
vées de cette qualité essentielle, l'harmonie
dans les colorations.
A Santa Maria Antiqua, la teinte plate,
c'est-à-dire l'emploi des couleurs sans mo-
delé n'existe qu'exceptionnellement.
Dans les étoffes des soubassements, les
plis vont de l'obscur au clair, par tons
dégradés et fondus ; quelquefois cepen-
dant, ils sont marqués par un simple trait
noir (').
Les modelés dans les carnations s'affir-
ment d'une façon très particulière.
Dans un assez grand nombre de têtes,
on remarque que les pommettes des joues
sont très saillantes et colorées en rouge ;
pour les rattacher au ton du visage, le pein-
tre a usé de trois etmême de quatre couleurs
de passage se fondant l'une dans l'autre.
J'ai observé avec grand intérêt les pro-
cédés de peinture suivis dans les chevelures,
et ce n'est pas sans surprise que j'ai trouvé
à Santa Maria Antiqua une pratique que
j'avais remarquée, notamment, dans la che-
velure du Christ de la mosaïque du XIII«=
siècle à Saint-Jean de Latran.
Une bonne fortune m'avait conduit à
Rome au moment où on réparait cette
mosaïque ; j'avais obtenu l'autorisation de
monter sur l'échafaudage et ainsi j'ai pu
examiner de près une technique impossible
à saisir d'en bas.
Pour donner à la longue chevelure noire
du Sauveur l'apparence fluide des cheveux
vivants, le mosaïste ne s'est pas contenté
d'émaux noirs à des degrés d'intensité diffé-
rents; il a intercalé dans les mèches noires,
d'étroites mèches bleues, rouges et brunes.
De près ces mèches sont très distinctes ;
à distance elles disparaissent et forment une
masse noire, transparente et fluide; ce résul-
tat n'aurait pas été obtenu avec une couleur
homogène.
Dans cette ingénieuse pratique le mosaïs-
te de Saint-Jean a été devancé, de cinq
siècles, par plusieurs des peintres de Santa
Maria Antiqua. Il y a là des chevelures
obtenues par différentes couleurs agglomé-
rées, mais non intimement mélangées ; la
I. Ce simple trait s'observe dans les mosaïques, no-
tamment de la chapelle Saint-Zénon du l.X'^ siècle, à
Sainte- Praxède .'i Rome,
iLes fresques tie régltse é>anta £©ana :^nttqua.
3
I I
brosse devait être courte et dure et maniée
en pleine pâte.
Je me suis assuré que ces chevelures
n'ont pas été retouchées ; elles ont été faites
du premier coup en vraie fresque, c'est-à-
dire sur enduit humide.
Toutes les fresques n'ont pas été traitées
avec cette habileté au moins égale à
celle du XIV^ siècle ; il en est qui sont
moins souples.
Dans l'histoire de Joseph, par exemple,
les contours des figures sont arrêtés par un
serti qui devait être trop accentué, même
lorsque les colorations, très affaiblies main-
tenant, étaient dans leur premier état.
L'exagération du serti se remarque du
reste encore dans certains ouvrages de
Giotto au XIV^ siècle.
Ces inégalités sont inévitables; une déco-
ration aussi complète a été nécessairement
exécutée par plusieurs peintres, qui ont
travaillé les uns simultanément, les autres
successivement.
L'état de conservation des couleurs de
plusieurs fresques, surtout de celles de la
chapelle de la Crucifixion, est vraiment sur-
prenant et témoigne de l'excellence de la
peinture à fresque, lorsque le peintre sait en
faire valoir les qualités expressives.
Il y a dans cette chapelle, peinte de
741 à 752 et non retouchée, des peintures
d'une fraîcheur dont nombre de fresques du
XVe siècle sont privées ; par une fortune
singulière, elles n'ont pas été envahies par
cette humidité permanente qui a affaibli les
colorations dans d'autres parties de l'édifice.
C'est une joie pour le regard de con-
templer cette décoration vieille de plus de
onze siècles, et dont l'aspect est resté tel
qu'à son origine.
J'ai pu constater sur divers points des
couleurs à tempera, c'est-à-dire à la colle ou
à l'œuf, posées sur l'enduit sec ; toutefois il
m'asembléque ce ne fut pas comme retouche,
mais en suite d'une nécessité technique ;
toutes les couleurs, le bleu-clair surtout, et
quelques bruns ne s'obtiennent pas à btion
fresco, c'est-à-dire à l'eau simple.
C'est la première fois que j'ai reconnu la
tempera à une époque aussi reculée, ce qui
ne veut pas dire qu'elle n'ait pas été em-
ployée ailleurs et avant le VI IL siècle,
mais je n'ai pas eu l'occasion de vérifier
partout où je l'aurais voulu.
A Santa Maria Antiqua, la tempera a
servi à peu près dans les mêmes conditions
que dans les fresques, récemment débar-
rassées du badigeon qui les recouvrait à
Santa Croce de Florence et qui, à mon
avis, ont été peintes par Taddeo Gaddi,
vers 1340.
J'estime qu'il faut apprécier une époque
ou un artiste, non point en faisant une
moyenne des qualités, mais par le point
culminant qui a été atteint.
Ainsi jugée et en prenant la chapelle de
la Crucifixion, je conclus qu'en ce qui tient
à l'emploi des couleurs a bîiott fresco et au
choix des colorations en vue de l'harmonie
générale, la fresque au VI IL siècle était
aussi avancée qu'au XIV^ siècle, sauf pour
la diversité des couleurs ; mais la richesse
de la palette n'est pas un indice de supé-
riorité, et je suis de ceux qui pensent qu'en
décoration, elle est plus nuisible qu'utile.
L'enduit, il est vrai, a généralement
ma! résisté à Santa Maria Antiqua ; cela
tient peut-être à sa composition, mais de
pareils accidents sont arrivés à toutes les
époques pour la même raison. La cause
essentielle de la chute de l'enduit vient de
l'humidité; le Forum a toujours été humide,
comme le prouvent les égouts déjà connus
et ceux qu'on vient de découvrir récemment.
Notre église était particulièrement exposée
à l'humidité, étant en contre-bas du Palatin.
312
3Êlebue lie V^xt (l)iétien.
vni
LA malheureuse Italieétaitaccabléesous
un déluge de calamités qui avait
anéanti ses édifices et ses artistes, nous dit
Vasari, « quando, come Dio voile nacque
« nella città di Fiorenza, l'anno 1240, per
« dar i primi lumi all'arte délia pittura,
« Giovanni cognomianato Cimabue ».
Les cris de douleur et de joie de Vasari
étaient sincères ; l'écho s'en est prolongé
jusqu'à nos jours.
Sauf de très rares exceptions, les auteurs
ont répété à l'envi : que du VP au XIII''
siècle l'art de la peinture était tombé en
Italie au dernier degré de la décadence et
de la barbarie ; que l'influence grecque était
devenue alors souveraine non seulement
par les procédés techniques mais dans le
style ; que l'Église étouffait les artistes
indigènes en les enfermant dans d'étroites
formules d'expression et dans une exécution
dont la richesse était l'essentiel.
Les auteurs ont manqué de prudence et
se sont beaucoup trop inspirés les uns des
autres.
Il eût été plus sage d'être moins affir-
matif, de faire quelques réserves et d'ad-
mettre la possibilité des découvertes nou-
velles.
Quelques érudits sont restés persuadés,
cependant que de l'admirable et bien latine
mosaïque du V^ siècle de l'église Sainte-
Pudentienne de Rome, aux peintures de
Cimabue, Giotto, Duccio, l'esprit latin a
persisté malgré les calamités, les Grecs et
les aberrations dont les mosaïques donnent
tant d'exemples.
Et ils ont eu raison.
Quelques anneaux de la chaîne du V^au
XI 11= avaient déjà été signalés dans les
fresques de l'Italie méridionale.
L'une des plus importantes manifes-
tations de la persistance de l'esprit latin est
visible dans les peintures trop peu étudiées
de l'église Sant'-Angelo in Formis, près de
Capoue. Didier, abbé du Mont-Cassin, avait
confié en 1073 à des peintres grecs la
décoration de ce sanctuaire ; ces artistes,
car c'étaient des artistes et non des imbrat-
/a//«rz (barbouilleurs), ont fait là une œuvre
absolument latine de style et de sentiment.
On a beaucoup trop tablé sur le texte de
la décision du Concile de Nicéede 787,011
il est dit que «la disposition des images n'est
« pas de l'invention des peintres ; que c'est
« une législation et une tradition approu-
«vée par l'Église catholique. Et cette tra-
« dition ne vient pas du peintre car la
« pratique seule est son affaire, mais de
« l'ordre et de l'intention des saints Pères
«qui l'ont établie».
Le concile a été très sage dans cette dé-
cision ; il a simplement recommandé aux
peintres de suivre, dans la représentation
des figures, une iconographie traditionnelle
et de composer leurs scènes d'après un
programme arrêté par l'Église.
Il n'y a rien là de spécial au VI I P siècle ;
les artistes ne sont pas tenus d'être des sa-
vants et, de notre temps encore, nous trou-
vons des exemples de programmes de déco-
ration arrêtés par les érudits et suivis par
les artistes (').
Je reviens à Santa iVIaria Antiqua.
Les partisans de l'inlluence grecque vou-
dront certainement la trouver dans quel-
ques peintures, notamment dans la grande
frise du presbytérium dont j'ai indiqué le
sujet: au centre, Jésus-Christ, est assis sur un
trône ; sur ses côtés, en deux groupes sy-
I. La façade du dôme de .Sainte-Marie de la Fleur,
inaugurée en 1887, a été exécutée d'après un programme
arrêté, pour les statues et les mosaïques, par le professeur
Auguste Conti.
3lt0 fresques îie régltse ^anta ^aria ;3lntiqua.
313
métriques, les saints se tiennent debout et
immobiles.
La disposition des personnages alignés
en parade autour du Maître n'est pas essen-
tiellement du style byzantin ; elle est com-
mandée d'abord par la division de l'espace
qui n'accorde au peintre qu'une zone allon-
gée et relativement étroite, puis par le
sujet même. On ne comprendrait pas des
assistants en mouvement et distraits au mo-
ment solennel où Jésus-Christ lève la main
pour les bénir. Du reste, ni dans la noble
figure du Sauveur, ni dans celles des
évêques, on ne relève les contours secs, les
formes maigres, l'absence de vie, qui carac-
térisent le style byzantin.
Je ne puis décrire ici toutes les scènes
où les figures, loin de rester figées, sont
dans un mouvement parfois très accentué ;
dans l'histoire de Joseph et le martyre
de Giulitta, l'action est menée avec entrain
et vivacité, comme les sujets le comportent.
Pour l'expression des sentiments deux
fresques m'ont particulièrement ému.
Dans la chapelle de la Crucifixion le
Sauveur en croix est mourant ; la tête, lé-
gèrement penchée, ne porte pas l'effroi de
la mort ; les yeux ouverts ont une expression
de tristesse, mais non d'angoisse ; toute la
physionomie est empreinte d'une douleur
résignée.
L'atmosphère est en accord : les disques
du soleil et de la lune se distinguent, mais
leurs lumières sont affaiblies et sur le point
de s'éteindre.
La Madone est debout au pied de la
croix ; elle tient les mains jointes sous
un long vêtement de deuil ; son visage
marque une tristesse profonde, concentrée ;
tout en elle, attitude et jusqu'aux plis
de sa robe, dénote son état d'âme (').
Les deux figures sont en tous points
dignes de Giotto; je trouve même que pour
l'expression de la douleur elles se rappro-
chent beaucoup de Fra Angelico.
Dans V Annonciation on ne peut juger la
Vierge, l'enduit où était peint le haut du
corps étant tombé, mais l'ange Gabriel est
là pour montrer combien le peintre a bien
compris la scène. Le divin messager vient
de s'arrêter, il s'incline respectueusement
devant la Vierge, et avant de lui faire part
de son message, il allonge le bras et la bénit.
La physionomie est jeune et sérieuse, on
sent que l'ange a la conscience de son
mandat. Les mouvements sont très justes
et souples et les draperies bien adaptées
aux mouvements.
Dans mes recherches sur les Annoncia-
tions peintes en Italie depuis les catacom-
bes jusqu'au XVI L siècle, cette figure
compte parmi les meilleures.
Je termine mon récit; il a été rapide-
ment écrit ; il est décousu et incomplet,
j'aurai sûrement l'occasion de le reprendre,
mais, tout en étant fort imparfait, il donne
du moins assez exactement l'impression que
j'ai ressentie à la vue des fresques de
Santa Maria Antiqua.
Cette découverte restera mémorable.
Elle montre qu'à l'époque où l'art parais-
sait anéanti, il y avait en Italie des peintres
indigènes soucieux de la vérité et animés
d'un profond sentiment chrétien.
C'est une page nouvelle et de grand in-
térêt à ajouter à l'histoire de la peinture.
(Rome-Florence, 1901.) GeRSPACH.
I. Des reproductions eussent été infiniment plus pro-
bantes que tout ce que je puis dire ; si plus tard je puis
m'en procurer, je ne manquerai pas de les donner.
REVUE DE l'art CHRÉTIEN
igoi. — 4""= LIVRAISON.
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ï)c la ïlcstauration Des ffîonumcnts
en Belgique et ailleurs.
N France, grand pays, riche en motni-
ments de premier ordre, de style, de
matériaux, d'époques et d'écoles très
variés, leur restauration se centralise
entre les mains de quelques architectes célèbres,
vivant à Paris, agissant souvent par des sous-
ordres, et dirigeant de haut et de loin. Pendant
longtemps c'est à Viollet-le-Duc qu'incomba non
seulement la surveillance, mais même la direction
effective des traveaux à un très grand nombre
d'églises et de monuments diocésains.
Malgré sa prodigieuse science d'archéologue
et son talent de dessinateur, il ne pouvait suffire
à une tâche aussi complexe, aussi étendue. Le
temps lui manquait pour étudier avec la maturité
voulue, les édifices à restaurer : si ses théories
souvent sont excellentes, en pratique ses travaux
ont soulevé des objections fondées et même les
critiques les plus vives. En réalité, surtout vers la
fin de sa carrière, il se mettait trop à l'aise avec
les monuments dont la restauration lui était con-
fiée. M. Anthyme Saint-Paul, dans un livre dont
on ne saurait trop recommander la lecture ('), fit
ressortir avec infiniment d'autorité et de science,
s'appuyant sur des documents irréfragables, ce
qu'il y avait d'erroné dans ses déductions histo-
riques et notamment d'inexact dans l'étrange
assertion qui attribue exclusivement à des
architectes laïques les magnifiques cathédrales
françaises et le grand essor de l'architecture dont
elles sont la riche floraison. D'autres archéo-
logues s'attaquèrent aux restaurations dirigées
par Viollet-le-Duc. Les critiques s'élèvent parfois,
avec une âpreté très grande, appuyées, il faut
en convenir, sur des arguments solides. Parmi les
archéologues français qui se prononcèrent avec le
plus d'énergie contre les restaurations de Viollet-
le-Duc, il convient de citer, en première ligne,
1. Viollet-le-Duc, ses travaux et son système archiologique. Paris,
.i88i. Bureaux de V Année archiologique.
Raymond ]îordeaux, et ce n'était pas là un
adversaire à dédaigner. Ses critiques égalèrent
plus d'une fois en véhémence celles que M.
Fierens-Gevaert dirige contre les restaurations
qui se font en Belgique. Mais Raymond Bordeaux
était un homme qui connaissait la matière dont
il écrivait ; il avait publié plusieurs ouvrages
dont l'un est particulièrement recommandabie ('),
il était bon dessinateur et connaissait les monu-
ments de son pays, au rebours de l'auteur belge
qui les a étudiés « pendant cinq semaines ».
En Belgique, le système de centralisation de
la restauration des grands monuments du pays,
entre les mains de quelques architectes réputés,
n'est heureusement pas possible. Chaque localité,
petite ou grande, aime ses monuments, et porte
une affection particulière à son église. Et ceci
est dans l'ordre des choses, puisque bonne partie
de la population y passe ses meilleures heures,
notamment les dimanches et jours de fête. Si ces
populations n'ont pas toujours l'intelligence de
la beauté de ces monuments, elles en ont du
moins l'instinct, le sentiment ; elles en ont assuré-
ment l'amour. Elles n'admettraient guère que leur
église à restaurer appartînt à l'architecte envoyé
par le Gouvernement, comme le malade appar-
tient au médecin. L'architecte n'est jamais nom-
mé par le Gouvernement ; et le règlement de la
Commission roj'ale des Monuments lui interdit
formellement d'intervenir à cet égard. Ce sont
les Conseils de fabrique qui choisissent librement
l'artiste auquel ils jugent à propos d'accorder
leur confiance. Il appartient à la Commission
des Monuments de contrôler son travail. En
Belgique, il existe d'ailleurs un autre élément
dont, toutes les fois qu'il s'agit des édifices du
culte, il convient de tenir compte. C'est le clergé
diocésain et paroissial. Aujourd'hui, la plupart
des évcchés ont des comités diocésains, composés
de prêtres et de laïcs, qui, avant les commissions
gouvernementales, examinent les plans de con-
struction des édifices du culte, ou ceux de
I, Traité de la réparation des églises et des principes darchéologit'
pratique. Evreux, 1862. Ce livre a eu plusieurs éditions.
£@élange0.
315
restauration. Ces comités rédigent un rapport
sur le travail proposé, lequel, généralement, est
transmis aux commissions officielles, dont très
souvent il facilite la mission. Très rarement
ces différents examens, faits à des points de vue
différents, donnent lieu à des conflits.
Mais ce n'est pas seulement par l'action des
Comités diocésains qu'en Belgique le Clergé
exerce une influence directe dans la construction,
l'entretien et le décor des églises. Presque chaque
curé, chaque desservant, a l'amour, on pourrait
dire parfois, la passion de son église. Il la
regarde un peu comme son domaine, et non
sans raison. En France, il n'en est pas de même.
Je me souviens que, visitant un jour, accom-
pagné par le secrétaire de l'évêché, une des
majestueuses cathédrales de l'Est de la France,
je fis quelques observations sur une partie
nouvellement restaurée qui ne me semblait pas
à l'abri de sérieuses objections. Mon conducteur
admit très facilement le bien fondé de celles
que je venais de formuler, en ajoutant que tout
dans ce magnifique édifice se faisait sous la
direction immédiate de la Commission des mo-
numents historiques. Nous, ajouta-t-il, membres
du Clergé diocésain, nous ne pourrions mettre
un clou dans la cathédrale. Je n'ai pas à
examiner ici si la conservation des monuments
religieux s'en trouve mieux ; mais je doute fort
que l'exercice du culte et l'action du clergé sur
les populations y gagnent. En Belgique, le Gou-
vernement ne pourrait ainsi exproprier le prêtre
du temple pour cause d'utilité monumentale. En
fait, le clergé intervient souvent pour une large
part par les ressources qu'il saitobtenir desfidèles,
par ses propres sacrifices, si cela lui est possible,
à la construction, à l'entretien, à l'ornement des
églises nouvelles et anciennes. Je n'oserai pré-
tendre que cela se fasse en toutes circonstances
avec tout le discernement et les connaissances
archéologiques désirables. Mais enfin, le sen-
timent qui anime à cet égard les prêtres est une
piété pleine de zèle et rarement ils peuvent agir
sans contrôle. D'ailleurs, il existe à Louvain un
bon enseignement archéologique, et plusieurs
séminaires épiscopaux ont organisé des cours de
même nature, qui ont déjà produit des résultats
appréciables.
On sait d'ailleurs qu'il existe dans ce pays, même
en dehors des administrations gouvernementales,
dans chaque province, des Sociétés archéologiques
qui font des monuments de leur région une
étude assez approfondie pour qu'il ne soit pas
possible de les abandonner ou d'y porter atteinte
par des restaurations maladroites, sans soulever
des réclamations qui trouveraient de l'écho dans
toute la presse.
Ces monuments avaient donc quelque chance
de rester debout, et d'échapper à d'épouvantables
mutilations, même sans l'étude de plusieurs
semaines que M. F.-G. a bien voulu leur con-
sacrer, et les remarquables articles publiés par
la Gai;ette des arts et de la curiosité'.
Nos lecteurs connaissent déjà la valeur de ces
invectives ; vitupérer est plus aisé que de raison-
ner ; et souvent la véhémence des -épithètes est
destinée à masquer l'indigence extrême de la cri-
tique. Après avoir démontré ce que vaut la
science archéologique de M. F.-G., nos lecteurs
nous en voudraient de le prendre au sérieux.
Nous avons vu qu'il perd de vue non seulement
ce qui s'est fait pour la conservation des monu-
ments de l'antiquité classique, mais il semble
même ignorer ce qui, pour les édifices du moyen
âge, se fait en Allemagne, en Angleterre et en
France même.
En Belgique, la plupart de ses chefs d'accusa.
tion portent sur l'école de St-Luc. Il confond les
travaux des élèves de celle-ci avec ceux d'artistes
qui n'ont rien de commun avec elle, et qui même
sont considérés comme leurs antagonistes dé-
clarés. Il en est de même pour la peinture ; à
l'abbaye de Maredsous, les peintres de l'école de
Beuron sont encore mis sur le même pied que
ceux de St-Luc. Nous avons affaire à un critique
qui n'a pas appris à voir et qui ne prend pas le
temps de regarder.
Nous ne le suivrons donc pas dans l'intéres-
sante excursion dont les lecteurs de la Chronique
des arts ont eu la relation, mais nous examinerons
encore quelques-uns des points particulièrement
lumineux de ses études. Généralement, nous
l'avons vu, c'est la critique et la critique de
principe qui déborde de l'âme sensible du voya-
geur. Les restaurations multiples qu'il voit par-
tout compromettent, à l'en croire, le patrimoine
artistique du pays !
M. F.-G. s'est arrêté quelque temps à St-
Trond.
Dans son examen des monuments de cette ville,
il s'abandonne à un mouvement d'enthousiasme
que je suis heureux de signaler, mais dont il est
permis de s'égayer.
L'admiration qu'il éprouve en présence de la
petite église de St-Pierre fait plus honneur à
son goût, en effet, qu'à sa perspicacité archéolo-
gique, et surtout à la fixité de ses principes en
matière de restauration. Dans « l'exquise église
romane de St-Pierre, faubourg de St-Trond
(une adorable merveille qui mérite d'être célèbre,
et qui le sera un jour) — c'est M. F.-G. qui parle
— on a placé devant le chœur une chaire ou
ambon en marbre blanchâtre... qui produit l'ef-
fet d'une véritable incongruité. »
Laissons « l'incongruité » et arrêtons-nous un
instant à « l'adorable merveille ».
J'ai vu l'église de St-Pierre, qui est effec-
tivement un monument fort intéressant, dans
un état d'abandon complet. Devenue propriété
particulière, elle ne servait plus guère au culte
et semblait abandonnée à une ruine immi-
nente ; mais c'était une ruine poétique, comme
M. Fierens-Gevaert les aime, avec des mousses
et des plantes pariétaires sur les murs, et à
l'intérieur d'intéressantes peintures murales fort
oblitérées ; dans la nef, on voyait encore des
médaillons représentant les Vierges sages et les
Vierges folles — à l'extérieur, des détails de
sculpture décorative finement fouillés...
L'église était dans cet état lorsque son pro-
priétaire jugea opportun d'en faire don au
Conseil de fabrique de l'église Xotre-Dame,
dont le desservant était heureusement alors un
prêtre distingué, M. le Doyen Cartuyvels, qui
sans retard s'occupa de sauver l'église romane
en ruine ; après avoir accepté ce cadeau embar-
rassant et surtout dispendieux, il s'adressa au
Gouvernement pour obtenir les subsides impor-
tants, mais indispensables à la réfection générale,
devenue urgente. Une allocation proportionnée
aux dépenses à faire fut consentie; et M. l'archi-
tecte Van Assche, depuis membre de la Com-
mission royale des monuments, fut chargé des
travaux de restauration, entrepris sans retard.
Ah ! si M. Fierens-Gevaert était survenu au
moment où l'on dressait les premiers échafau-
dages, quelle belle occasion de pousser des cris
et des protestations ! car nous savons combien il
est insensé de restaurer des ruines !
Cette restauration cependant fut faite ; c'est
grâce à elle que M. F.-G. a pu admirer une « ado-
rable merveille » à laquelle il promet une célé-
brité, que sans doute l'église devra en bonne
partie aux articles retentissants de la Chronique
de la curiosité.
On pourrait peut-être signaler dans la restau-
ration plus d'un détail incorrect de la sculpture
récente, mais puisque cela a passé comme tra-
vail original, nous ne troublerons pas M. F.-G.
dans son admiration.
Mais à St-Trond, cela va de soi, il n'y a pas
seulement à admirer.
Tous ceux qui connaissent les monuments de
cette ville depuis un certain nombre d'années,
savent combien l'église de St-Martin était insi-
gnifiante ; c'était une construction sans style, aux
murs salpêtres, n'offrant plus de solidité et qu'il
fallait bien démolir ; on a eu soin cependant de
conserver la façade et la tour, assez intéressante
et d'un aspect original.
Cela n'empêche pas M. F.-G. de s'écrier : C'est
à la ville de St-Trond que revient la palme :
l'église de St-Martin a été tout simplement dé-
truite, on a reconstruit une nouvelle église
romane à sa place !
St-Trond, cité ancienne presque rurale et qui
contient, nous l'avons dit, plusieurs édifices histo-
riques, a eu une bonne part de l'étude de cinq
semaines que M. F.-G. a consacrée aux monu-
ments de son pays.
Naturellement, il y a, comme partout, constaté
douloureusement l'influence néfaste de l'école de
St-Luc. C'est aux travaux de la peinture qu'il
s'en prend, à l'église Notre-Dame de St-Trond,
et c'est pour lui l'occasion de développer une
théorie fort intéressante sur la manière de décorer
Mélanges.
317
les édifices et d'utiliser les modèles que nous ont
laissés les XIV'=etXV« siècles. Je n'ai nullement
l'intention de défendre les peintures incriminées.
Je ferai seulement observer qu'elles comptent
parmi les anciennes exécutées en Belgique au
siècle dernier, et qu'elles n'ont certainement pas
subi l'influence de St-Luc, par la raison que
cette école n'existait pas encore. J'ai appris qu'en
ces temps-là ce travail était subventionné par
le Gouvernement ; les peintures furent examinées
par le peintre Navez, directeur de l'Académie
de Bruxelles, qui se montra fort élogieux à
leur égard. D'autres notabilités du domaine de
l'art, même étrangères, vinrent les voir ; parmi
ceux-ci, on peut citer Auguste Reichensperger
et Victor Hugo. Un journal de Bruxelles a pu-
blié récemment des lettres que Victor Hugo
adressa à rartiste,qui, comme jugement et comme
style, n'ont rien de commun avec les articles de
M. F.-G. Quant au peintre de !a cathédrale de
Liège, il n'a jamais été ni élève, ni professeur
à une Académie de St-Luc. Mais nous n'en
sommes plus à regarder aux inexactitudes!
Avant de quitter St-Trond, je ne voudrais
pas laisser échapper l'occasion de me trouver
d'accord avec notre touriste dans son apprécia-
tion sur les statues du chœur de l'église de
Notre-Dame « imitant, lourdement et gauche-
ment, la naïveté des images gothiques '». Seule-
ment encore une fois, ces figures n'ont rien de
commun avec l'école incriminée; elles sortent de
l'atelier fort académique du sculpteur Geefs, qui
les a façonnées à une époque où il n'était pas
question de l'école de St-Luc! D'ailleurs, à au-
cune époque de sa carrière, il ne s'est préoccupé
d'imiter la statuaire gothique (').
M. F-G. est particulièrement intéressant par
les informations qu'il offre aux lecteurs de la
Chronique de la curiosité. En voici une digne,
de tout point, d'y figurer.
« En excursionnant sur les bords de la Meuse,
j'ai appris que l'on conserve l'abbaye de Flône.
— Quelle reconstitution nous prépare-t-on, mon
Dieu ! — et qu'on allait abattre à Dinant deux
belles maisons du XVH^ siècle, etc. »
L'abbaye de Flône !
I. Joseph Geefs, professeur de r.'\cadémie d'Anvers ; les statues
des quatre évangélistes ont été exécutées en 1856.
Le corps de cette abbaye a été rebâti en 1660,
dans le style le plus banal de cette époque.
L'ensemble des constructions a été vendu comme
bien national à la Révolution. Après avoir
passé entre les mains de plusieurs propriétaires,
le bâtiment principal fut acheté par un banquier
de Liège ('). Avant lui déjà on avait fait du
corps principal une vaste maison de campagne,
qui depuis cette époque ne s'appelle plus l'abbaye
mais le château de Flône. Il s'agit donc d'un
très aimable séjour d'été, fort habitable et très
habité ; ce n'est plus une abbaye, et, comme on
voit, c'est très loin d'être une ruine. Cela n'a ja-
mais été un monument. Le voyageur qui de Bel-
gique se rend à Paris parla ligne du Nord belge,
en voit à sa droite la façade étendue et assez mo-
notone, percée de fenêtres carrées en longues files
bien régulières, très proprement peinte à l'huile
en couleur beurre frais, dont les couches sont
renouvelées aussi souvent que la propreté l'exige.
Assurément les propriétaires actuels sont loin
de se douter des soucis que donne leur immeuble
à un archéologue aussi distingué et à ses lecteurs.
Il est peu probable que le Gouvernement fasse
intervenir la Commission royale des Monuments
pour opérer le prochain peinturage qui doit
« conserver l'abbaye de Flône ».
En réalité, M. Fierens-Gevaert ne connaît pas
un traître mot de l'abbaye de Flône, dont il a
écrit le nom au hasard, ne doutant de rien et ne
se doutant de rien, ne se préoccupant nulle-
ment de commettie une ... inexactitude de plus.
Quant aux deux belles maisons du XVII^ siècle
« de Dinant », j'avoue ne pas connaître en cette
ville de maisons remarquables. Mon ignorance
à cet égard est aussi grande que celle de M. F.-G.
en ce qui concerne l'abbaye de Flône ; aussi
j'évite d'en rien écrire.
Mais quand cela serait, croit-on qu'en Belgique
on puisse empêcher le propriétaire d'une maison
dont il ne peut plus se servir de la démolir? Et
que prouvent ces accusations sans fondement
aucun, et ces blâmes qui ne reposent sur rien ? —
Ils témoignent simplement d'une légèreté puérile
et d'un parti pris qui naïvement se dévoile et
malgré lui, devient inoffensif
I. Le regretté M. Jules Frésart, amateur d'art et collectionneur
distingué.
On n'en finirait pas si, à la suite de M. F.-G.
il fallait passer en revue toutes les ënormités
monumentales qui se commettent dans son pays.
Nous en avons vu assez pour juger l'écrivain et
l'esprit qui l'anime. Mais cet esprit de parti pris
et de dénigrement devient surtout manifeste.lors-
que, sortant du domaine des monuments anciens
et de leur restauration, l'auteur s'en prend à un
édifice récent qui, ne doit rien à l'intervention
officielle, et qui, de l'aveu de presque tous ceux
qui l'ont visité, belges ou étrangers, est une des
plus nobles constructions érigées en Belgique de-
puis un demi-siècle ; je veux parler de l'abbaye
de Maredsous, dont feu le baron Bethune est
l'architecte. Ici encore il faut citer :
« Le pastiche architectural, sculptural y tient
du prodige. Il ne s'agit ici ni d'une restauration,
ni d'une reconstruction, mais d'une construction
entièrement nouvelle et toute récente, exécutée
jusque dans ses moindres détails en style gothi-
que primaire. Décoration ornementale, boiserie,
mobilier, tout est conçu suivant les principes sé-
vères de l'architecture cistercienne. L'impression
est paradoxale, on ne peut croire à la réalité et
à la contemporanéité d'un tel monument. Les
bénédictins, aidés sans doute de quelques célé-
brités de l'école de Saint-Luc, ont ressuscité une
abbaye du XIII<= siècle. Mais à quoi bon tant de
science? Le résultat reste fort discutable.»
M. F.-G.oublie de nous dire où se trouve l'ori-
ginal de ce pastiche monumental. Mais on doit
le plaindre de ne pas avoir su reconnaître l'œu-
vre pleine de sève et de conviction d'un artiste
qui, ayant à créer un édifice à l'usage de religieux
de l'ordre le plus historique du monde, a voulu
bâtir dans l'esprit de leur institut, conformément
à ses règles et à ses nécessités. 11 a accompli sa
tâche avec un talent auquel ont rendu justice
tous les hommes qui savent voir.
Nous ne suivrons pas plus loin La Chroni-
que des arts et de la curiosité ni son réqui-
sitoire contre tout ce qui se fait en Belgique dans
le domaine de la construction et de la restaura-
tion des monuments. Nos lecteurs sont édifiés
sans aucun doute sur la compétence de l'auteur
comme sur la valeur de ses informations et de
ses jugements.
En Belgique, pays resté fidèle à sa foi, et tou-
jours fécondé par l'esprit du catholicisme, il est
aisé de reconnaître que les monuments sont con-
servés, réparés, entretenus dans le même esprit
qui les a édifiés. C'est là, en général, la cause des
critiques qui s'élèvent de temps à autre avec
autant d'intempérance que d'impéritie. Ces sortes
de critiques sont toujours accueillies avec avi-
dité par une certaine presse ; plus elles témoi-
gnent de l'ignorance de leurs auteurs, et plus
elles trouvent d'écho auprès de l'ignorance.
C'est pour cela qu'il faut parfois accepter la
tâche rebutante, mais utile, d'examiner de près ce
qu'il y a de fondé dans ces déclamations. En
Belgique, heureuseiTient,on ne se laisse pas faci-
lement éblouir. On trouve assez naturel que ceux
qui ne fréquentent pas les églises et qui ne voient
dans les anciens sanctuaires que le décor d'un
site ou l'ornement d'un paysage, aimeraient à les
voir abandonner a l'action du temps ; lorsque
celui-ci en aura fait des ruines, le décor n'en
paraîtra que plus beau à leurs yeux. Mais nous
qui,dans ces sanctuaires, allons entretenir la vie
de notre âme, nous ne sommes pas d'humeur à les
abandonner aux esthéticiens de passage, et à ces
archéologues qui, par leurs critiques sans mesure,
ont la candeur de nous donner la mesure de leur
compétence.
J. Helbig.
Ira \s\z et les cruures Des granos maîiics
renoues populaires (■)•
ES entreprises récentes de la librairie,
qui, secondées par une élite d'écrivains
d'art, ont pour objet de rendre popu-
laires la vie et les travaux des grands
maîtres, sont remarquables. C'est un mouvement
intéressant, digne de l'approbation et de l'intérêt
de tous, d'autant qu'il se manifeste par des livres
édités avec élégance, écrits avec science, enri-
chis de nombreuses gravures, et paraissant dans
des conditions de bon marché qui les rendent
facilement accessibles. Depuis un quart de siècle,
la littérature et les recherches historiques con-
I. Greatmasiersin Painliiig and Sculpture ; Les grands maîtres
peintres et sculpteurs ; Londres, George liell and sons. Hans .V/em-
Une, par James Weaie.
£PéIaiigts,
319
cernant les arts ont pris un développement
énorme, et les efforts pour y intéresser toutes les
classes de la société sont assurément à signaler.
C'est tout d'abord une sorte de propagande
contre les livres frivoles ou mauvais, qui a bien
son mérite. La vie d'un grand artiste, racontée
par une plume honnête, a toujours un côté mo-
ral, en ce sens qu'elle fait l'apologie du travail,
car sans travail persévérant, quotidien, ayant
toujours le but en vue, il n'y a pas de grand
artiste. Les dons les plus brillants départis par
la nature ne suffisent pas. D'autre part, les livres
d'une lecture agréable qui répandent largement
l'intelligence des œuvres d'art, qui en dévelop-
pent le goût dans les masses, font du bien à la
société. C'est multiplier ses jouissances permises
et élever son niveau intellectuel. C'est donc faire
acte de philanthropie, ou mieux encore œuvre de
charité spirituelle, car c'est inviter à participer au
festin de l'art le plus de convives possible.
Nous avons signalé à nos lecteurs quelques-
unes des monographies de peinture publiées en
Allemagne sous la direction de M. Knackfuss,
avec le concours d'autres savants, parmi lesquels
se distingue M. Kâmmerer, notamment par ses
monographies d'artistes néerlandais antérieurs
à la Renaissance. La collection a augmenté consi-
dérablement et se poursuit avec un succès de
bon aloi. On peut y trouver, sur les artistes dont
la bibliographie a paru, à peu près tout ce que les
recherches les plus récentes ont apporté de lu-
mière sur leur vie et leurs travaux. Le public a
répondu avec d'autant plus d'entrain à cet essai
de vulgarisation, que chaque fascicule est riche-
ment orné de reproductions obtenues par les
différents procédés de la photographie et qui, par
conséquent, sont d'une fidélité incontestable.
Il y a lieu d'espérer que ce mode de rendre
accessible à tous la connaissance de la vie des
grands maîtres et de leurs attrayants travaux, se
propagera de plus en plus. A ce point de vue, il
me semble intéressant de signaler une publica-
tion qui vient de paraître à Londres, éditée par
la firme de Bell and sons, sous le titre de « Gi'eat
masters in painting and sculpture », les Grands
maîtres de la peinture et de la sculpture.
Le premier volume paru (pp. XXIV-iiO, 38
planches) est consacré à Hans Memling. On ne
pouvait mieux inaugurer la série des grands
maîtres que cette publication doit mettre en lu-
mière.
Si la vie de ce peintre est peu connue, il n'en
est guère dont les tableaux exercent un charme
plus attractif. Il n'est pas d'artiste dont les œu-
vres aient, autant que les siennes, gagné une
valeur aussi continuellement ascendante depuis
un demi-siècle. Ses peintures, en effet, inspirent
une religieuse sympathie, et de plus en plus
on les regarde avec cette sorte de tendresse
qu'elles expriment elles-mêmes. Pour assurer à
cette figure d'artiste tout le relief désirable, c'est
à M. James Weale que les éditeurs anglais ont
confié la tâche de la retracer.
Ils ont été bien inspirés ; à vrai dire, Memling
appartenait à M. Weale, sinon par droit de nais-
sance, du moins par droit de conquête. Il a été, en
effet, le premier à faire sortir l'histoire de cet
artiste des brumes de la légende aussi sotte
qu'invraisemblable, dont quelques écrivains, no-
tamment Decamps, l'avaient entourée, légende
dont Alfred Michiels s'était fait dans ses Pein-
tres brugeois le complaisant narrateur, un peu
au risque de devenir légendaire à son tour, tant
il a mis d'inspiration personnelle dans son récit.
Par des recherches poursuivies pendant nom-
bre d'années dans les différents dépôts d'archi-
ves de la ville de Bruges, où Memling, déjà en
pleine possession de son talent, est venu se fixer
à une époque qui n'a malheureusement pu être
établie, M. Weale est parvenu à trouver quelques
faits précis, et quelques dates certaines, qui font
connaître un artiste laborieux, vivant dans une
situation aisée, habitant une maison qui était sa
propriété, marié à une brugeoise ; il était père de
trois fils qui, à la mort de Memling, étaient encore
mineurs, c'est-à-dire âgés de moins de vingt-
cinq ans.
Par les documents retrouvés, M. Weale avait
établi que l'artiste était décédé avant l'année
1495, et de l'étude attentive de ses peintures, il
avait conclu à l'origine germanique de l'artiste,
ou tout au moins à l'influence de l'école de
Cologne sur sa formation.
Les recherches poursuivies par d'autres érudits
et par quelques fouilleurs d'archives locaux ont
peu ajouté aux renseignements désormais ac-
320
3^c\)ue lie ravt cbvéticn.
quis ; un seul fait de réelle importance a été dé-
couvert par le R. P. Henri Diisart. jésuite, dans
un manuscrit conservé à la bibliothèque commu-
nale de St-Omer. Les notes tenues par Romuald
de Dopper, notaire ecclésiastique à Bruges, et
écrites dans les années 1491-1498, consignent,
entre autres faits, la mort survenue à Bruges, le
1 1 du mois d'août 1494, de Maître Jean Mem-
linc, considéré comme le peintre le plus habile
et le plus excellent de toute la chrétienté. Il
était originaire de Mayence, et a été enterré au
cimetière de l'église Saint-Gilles.
Cette trouvaille, faite en 1S89, très intéressante
en elle-même, n'infirmait pas, elle confirme, au
contraire, les renseignements et les inductions de
M.Weale. On sait, d'ailleurs, que dans le domaine
de l'ancien Électorat de Mayence, se trouve une
petite rivière du nom de Memling, et un village
qui porte également ce nom, dont le peintre est
probablement originaire. Ce fait nous porte à ne
pas suivre l'orthographe de « Memlinc » que
M. Weale a adoptée ; rien en général n'est plus
variable que l'orthographe des noms patronymi-
ques d'artistes à une époque où ils l'écrivaient
eux-mêmes de plusieurs manières différentes ;
il semble plus logique de conserver au nom
.de Memling la forme qui accuse son origine ger-
manique, de préférence à l'orthographe flamande,
résultat d'une corruption consacrée, il est vrai,
par l'usage du pays où il a vécu en dernier lieu.
Memling vint s'établir à Bruges en 1477, peut-
être avant ; quelques années plus tard, on ignore
la date précise, il épousa Anne, fille de Louis de
Valkenaere ; M. Weale dresse ensuite une table
chronologique relative à la vie et aux travaux
du peintre.
Ce sont là des renseignements précis qui for-
ment en quelque sorte la charpente du livre dont
le reste se compose de l'étude des œuvres consi-
dérables et variées de l'artiste.
Cette étude que l'auteur divise en deux par-
ties : les peintures authentiques du maître et celles
qui lui sont attribuées, est d'un grand intérêt.
De la plupart des panneaux, exécutés à Bruges,
l'auteur connaît l'histoire, les personnages qui en
ont fait la commande et les circonstances qui
s'y rattachent. Souvent M. Weale décrit les pan-
neaux de Memling avec une minutie amoureuse.
avec la charmante précision des détails et le ca-
ractère des physionomies et des portraits. Il y a
plaisir à les revoir, accompagné d'un guide
aussi disert. Les panneaux du maître sont vrai-
ment historiques à plus d'un titre. S'ils racontent,
en de multiples épisodes, la vie du Christ, comme
dans cet admirable tableau de la Pinacothèque
de Munich que M. Weale intitule « Le Christ,
lumière du monde », ou dans cette autre compo-
sition si riche de la galerie de Turin où se dérou-
lent les différentes scènes de la Passion, ou bien
encore, sur la célèbre châsse de l'hôpital St-Jean
à Bruges où se lisent les chapitres émouvants de
la légende de sainte Ursule, — on se trouve d'au-
tre part transporté en plein dans la vie de la
seconde moitié du XV« siècle. On y trouve le
caractère calme, recueilli et pourtant énergique
des physionomies de cette époque complexe ;
on y voit les costumes, le mobilier, souvent l'ar-
chitecture et la manière de disposer les parcs et
les jardins autour des habitations seigneuriales.
Tout cela est vécii^ transporté sur ces panneaux
au moyen d'admirables photographies coloriées
dont l'œil de l'artiste a été le vivant objectif; sa
main nous offre des clichés d'une fidélité absolue,
illuminés d'une splendide couleur et de la vie de
l'âme que le génie seul peut donner.
En terminant son étude, M. Weale cherche à
établir les «caractéristiques » du maître, le pla-
çant dans son milieu chronologique, c'est-à-dire,
en mesurant sa hauteur à l'échelle des meilleurs
peintres qui ont vécu au même siècle, et qui, dans
une certaine mesure, appartiennent à la même
école. Il établit d'abord que le chef-d'œuvre des
frères Van Eyck, l'.Adoration de l'Agneau, n'a
pas été surpassé. « Quoique Memling, dit-il,
n'ait jamais produit de création semblable, il s'est
montré certainement supérieur aux autres pein-
tres de l'école. Jean Van Eyck l'a surpassé, à la
vérité, dans l'exécution technique, par le modelé
plastique des figures, par l'habileté consommée
avec laquelle il a su rendre l'aspect et la nature
du moindre détail : mais dans la manière de corn-'
prendre et de traiter les sujets religieux, un
monde sépare les deux artistes. Jean Van Eyck
voyait avec ses yeux, Memling voit avec son
âme. Jean étudiait, il copiait, il savait repro-
duire avec une exactitude merveilleuse le modèle
qu'il avait sous les yeux. Memling assurément
£©élanses.
321
étudiait et copiait aussi, mais il faisait quelque
chose de plus ; il réfléchissait et méditait ; son
âme tout entière passait dans son œuvre, et le
modèle qui posait devant lui réapparaissait sur le
panneau idéalisé, glorifié, transfiguré... A ce
point de vue, ses peintures montrent dans la
conception et l'idéalisation un réel progrès; bien
des sujets, représentés par son pinceau, n'ont
plus jamais trouvé une expression aussi délicate,
aussi délicieuse dans l'art d'aucun peintre, si ce
n'est peut-être dans celui de Fra Angelico.
Comparé aux autres maîtres de l'école néer-
landaise, il est le plus poétique, le plus harmo-
nieux, le plus musical de tous ; beaucoup de ses
peintures sont de petits bijoux d'une entière
perfection.»
Il n'est pas probable que personne, après avoir
fait une étude attentive de l'œuvre du maître,
vienne s'inscrire en faux contre ce jugement.
J. H.
Au moment de mettre ces lignes sous presse, nous
apprenons que M. Weale vient de publier un petit
volume intitulé: Hans Memlinc. Biographie. Tableaux
conservés à Bruges.
Cet ouvrage, basé sur de nouvelles recherches faites
dans les Archives de l'hôpital St-Jean, mises récem-
ment à la disposition de l'archéologue, formera un
guide de l'étranger, notamment dans l'étude des
oeuvres du maître que possède Bruges, dont les pan-
neaux de Memling forment, comme on sait, les joyaux
les plus précieux.
Nous pouvons donc espérer y trouver des rensei-
gnements nouveaux, à ajouter à ceux de la mono-
graphie dont il vient d'être rendu compte.
Fragments D'un " Bbpsioloçïus "
Du Xlle siècle, à ffion?a.
jE Physiologus, qui répond à notre His-
toire naturelle, comprenait au moyen
âge trois sections distinctes : les bctes
(d'où le nom de Bestiaire), les plantes
et \es pierres précieuses (ou Lapidaire).
Plusieurs ont été publiés, entre autres, par le
P. Cahier, l'archiprétre Ambrosiani, etc.
Celui du trésor de Monza est encore inédit. II
y a donc lieu de le tirer de l'oubli. La copie que
j'en reproduis, à l'usage des studieux, a été faite,
à ma demande, par Dom Achille Varisco ; qu'il
trouve ici l'expression bien sentie de mes remer-
ciements pour les nombreux services qu'il m'a
rendus sur place et, depuis, par sa correspon-
dance.
Malheureusement le manuscrit est très incom-
plet, mais les variantes qu'il fournit ont leur uti-
lité. Il date du XII'= siècle et a pour titre Liber
scintillarum. C'est une longue compilation des
textes des saints Pères, principalement sur des
sujets mystiques, qui comprend une vingtaine
d'opuscules différents.
Les trois parties se réduisent à peu de chose.
Pour le Bestiaire (pages 235-239,), nous avons
seulement l'aigle et le serpent ; pour les plantes
(pages 228-232), à la suite d'un « Sermo sancti
Cœsarii », Vomie et la vigne, opuscule qui reste
inachevé; pour le Lapidaire (pages 213-216),
deux séries qui se complètent mutuellement et
qui sont entières.
Le symbolisme donn e une grande valeur à ces
documents, car il aide singulièrement à l'intelli-
gence des monuments du moyen âge, oti sont si
souvent figurées des bêtes et des plantes, avec une
intention qui souvent nous échappe, et de l'orfè-
vrerie médiévale, presque toujours constellée de
gemmes.
Je ne me livre à aucun commentaire, car ce
serait allonger démesurément cet article qui n'a
d'autre but que de présenter de nouveaux maté-
riaux aux travailleurs.
L Incipit de Aquila.
T~\IC1T David in psalmo : Renovabitur sicut aquila
-*-^ juventus tua. — Aquila, cum senuerit, gravantur ala-
ejus, et querens fontem aqu:B,ut iiitingat alas suas et bap-
tizetur ter,et volans in aéra, sole fuliginem oculorum suo-
rum discutit, et renovatur, et nova efficitur.
Et tu ergo qui habes vesteni veteiem et caligant oculi
cordis tui,qu;Ere spiritualem fontem Uominum,qui di.\it ;
Me dereliquerunt fontem aquiu- viv^u.
Et iterum volans in ahitudinem solis justifia' Christi,
incende vestem diaboli et veterem conversationem. Prop-
terea duo presbiteri in Danihele audierunt : Inveterate
dierum maloruni. Baptiza ergo te in sempiterno fonte, ex-
polia te veterem hominem cum actibus ejus, indue te
novum hominem qui secundum Deum creatus est. Prop-
terea David dixit : Renovabitur ut aquila juventus tua. Et
KltVUe UE L ART CHKeTIEN.
I90I. — 4""^ LIVRAISON.
322
îRebue îïe V^vt cl)rétien.
Salvator in evangelio dixit : Potestatem habeo ponendi
animam meam et iterum potestatem habeo accipere eam,
et Judei irati sunt in verbo ejus.
De Serpentis Natura.
Salvator in evangelio dixit : Estote vigilantes sicut ser-
pentes et simplices sicut columbœ. — Prima ejus natura
hase est : Cum senuerit et caligant oculi ejus, et voluerit
novus fieri, abstinet se et jejunat quadratjinta diebus
donec pellem relaxât, et qiierit fissuram angiistam in petra
et intrat in fissuram, et contribulans se deponit pellem
veterem. Et nos per multam abstinentiam et tribulationem
per Christum deponemus veterem hominem et indumen-
tum ejus.Et querens spiritualem petram Christi et angus-
tam, id est angustam portam qiuc ducit ad vitam et pauci
introeunt per eam.
Secunda ejus natura est : Cum venerit ad flumen bibere
aquam, non affert secum venenum, sed in fovea sua depo-
nit illud. Debemus autem et nos cum imus in coUectam,
aquam vivam spiritualem et sempiternam audientes, et
cumdivinumsermonem et c.xlestem in ecclesia audiremus
venenum deponere, hoc est terrestres et malas concupi-
scentias. Multi enini insipientes in spiritualem venire no-
luerunt. Aliqui ex ipsis juga bovum probantes, alii agrum
ementes, alii mulieres ducentes. Sicut Apostolus dixit :
Reddite ergo omnibus débita ; cui tributum tributum, cui
timorem timorem, cui honorem honorem.
Tertia ejus natura est : Si viderit nuduni eum, timet
eum. Si autem viderit vestitum, exilit in eum. Sic et nos
spiritualiter intelligamus : quoniam prinius homo pater
noster Adam nudus in paradiso fuit, prsevaluit serpens exi-
lire in eum. Sedquando tunicam indutus est, hoc est mor-
talitatem corporis, tune exilivit eum serpens. Si ergo et tu
habes vestem mortalem et veterem,hoc est pristinam con-
versationem, et vis audire inveterate dierum malorum,
exiliat in te intellectualis serpens. Si autem expolies te in-
dumentum tuum pristinum,et potentes ssculi rectores te-
nebrariim istarum, et spiritus nequitiïe in caelestibus sicut
apostolus dixit ; tune non poterit exilire ad te antiquus
serpens. Finit.
II. Ejusdem (S. Cesarii) de slmilitudine Ulmse
arboris et de Vite.
LEGIMUS in quodam libro, fratres karissimi, de
Ulmo et Vite propositam nobis similitudinem, quam
qui diligenter osiendit non parvam anima; sueu œdificatio-
nem inveniet. Nam arbor ulmic et vitis satis sibi conve-
nientes esse videntur.
Arbor enimulmea.licet sitamicnaet in sublime porrecta,
nullum tamen fruclum habere probatur.Vitis vero,quamvis
sit parva et similis (humilis), fructibus plena esse cognos-
citur. Qui fructus nisi quolicumque ligno levantur in alto,
in terra putrescunt atque deperiunt. Si vero ulnuis exten-
dit ramos suos et erigit vilem, et se ornât et illam de putre-
dine libérât. Quare ista similitude posita diligenter osten-
damus. Arbor ulmea significat hominem divitem in hoc
mundo. Sic arbor illa sublimis est et ama^na et huniida
et tatnen fructibus vacua ; ita et quicumque dives saeculi
hujus quamvis sublimetur honoribus in multis facultati-
bus, et amasnus et jucundus esse videatur, tamen si ad
vitem, id est ad pauperem Christi elemosinarum brachia
quasi ramos piissimos humiliter non expandit, a fructibus
a3tern;ï vitx vaeuus remanebit. Vitis autem significat ser-
vos Dei vocatos et doctrin» jugiter insistentes et si quos
sunt alii similes horum, qui contempto mundo Deo die
noctuque deserviunt, quo servicio in œterna beatitudiue
uberes fructus habere creduntur.
Ac si divites hujus niundi habundant in hoc sœculo, et
pauperes Christi in caslo. Ouod ergo futurum est ut nec
arbor ulmea, sine fructu remaneat, nec vitis in terra pu-
treseat ; hoc enim expedit fieri ut quomodo arbor ulmea
extendit ramos suos et erigit vel sustinet vitem, sic dives
saîculi hujus porrigat ramos suos, id est ramos plenos
ructibus agri sui et sustineat pauperes Christi ; quod si
fecerit in hoc mundo, sine dubio ab ipsis pauperibus
Christi multipliciter illi rependebitur in futuro. Nec de-
dignetur dives, aut injuria sibi retineat facta quia hoc
modo arbori comparatus est. Sed audiat Dominumdicen-
tem : Arbor bona fructus bonos facit, mala autem arbor
malos facit. Sed magis illud quod sequitur: Omnis, inqiiit,
arbor qui non facit fructum bonum excidetur et in ignem
mittetur.
Extendat ergomanus suas ad elemosinas ut possit eva-
dere œternas flammas. Omnes ergo divites timeant exem-
plum illius arboris infructuosas et sterilis, id est illius qui
purpura et byssis induebatur ; arbor enim ama'na et su-
blimis erat in mundo, sed quia ramos misericordia? non
expandit ad Lazzarum flammas reciperemeruit in inferno,
et ab illo petebat guttam cui negaverat micam. Hoc ergo
cogitent divites qui se de rébus suis dum suse sunt redi-
mère nolunt, ut non faciant talia, ne taliafaciantur. Dives
fuit de quo loquimur : sunt et alii divites ad quos nunc
loquimur ; unius sunt nominis, caveant ne sint unius con-
ditionis. Cum hajc ita sint,si illi qui divites sunt avidaset
contractas manus habuerint ad elemosinas faciendas, et
quibuscumque servis Dei vigiliis, lectionibus vel orationi-
bus insistentibus qure suntcorpori necessaria dare nolue-
rint, efficientur velut ulmus sterilis qu;c vitem sustinere
dissimulât.
Et cum dives pauperibus Christi nihil dederit, qui
necessitate in opéra terrena plus quam solebant exercent,
et dum mundanis actibus occupantur orationi, lectioni,
jejuniis et vigiliis insistunt; necesse est ut fructus illorum,
quomodo vitis in terra jacet, ex parte aliqua minuatur, ac
sibi tantum sufficiant, et nihil divitibus largiantur. lieatus
enim apostolus Paulus dum divites mundi hujus pro sus-
tentandis Christi pauperibus admoneret, quasi divitem
loquebatur ad arborem, id est pro Christi paupere loque-
batur ad divitem. Vestra, inquit, habundanlia sit ad illo-
rum inopiam, ut et illorum habundantia veslr;e inopiœ sil
sublevamentum. Quam rem ut omnes intelHgant apertius
insinuare debemus. Divites mundi habundant in hoc
mundo pecunia: pauperes Christi habebunt in ca:lo vitam
asternam. Distribuant ergo divites in mundo pecuniam, ut
recipiant in ca;lo vitam ieternam.
^©élanges.
323
Divites mundi friimentum, vimini, oleum in horrea vel
in cellario copiose reponunt ; pauperes Christi orando,
vigilando, jejunando spirituales thesauros in cjelo recon-
dunt. Faciant ergo sibi quosciimque serves Dei divites
hujusmodi de terrena facultate participes, ut illi eossibi
in cselesti thesauro faciant collaudes. Divites mundi hujus
dum aliquoties nimium se terrenis actibus obligant quan-
tum illis oportet vigilare, légère et orare vel jejunare non
possunt. Unde timendus est ne forte aut pro peccatis mi-
nime ofFerant, aut non tantum quantum expedit in the-
sauro caslesti reponant. Pauperes Christi his fruclibus
Deo jugiter vacando
III.
JASPIS viridis colore, hoc est herbae quando venit in
florem. Hoc est fides immarcescibilis quae est in sancta
ecclesia quam in baptismo promisit, observet illam bene
usque in finem.
Saphirus tantus est extimandus sicut est thronus ubi
Deus sedet ; hoc est Moyses et Ezechiel illuc invocantes
cum duo adsunt. Qui suam spem semper habet in Deum
non plus in terra est quam in ctelo.
Kalcedonius in umbra lucidissimus significat illos ho-
mines taies qui in flagellis semper sunt parati, et veram
prehendunt confessionem de suis peccatis quas recognos-
cunt.
Smaragdus est viridis tantum quantum jaspis unde nos
diximus antea. Significantur illi homines taies qui stant
grandes in veritateet in ratione, sunt blandi in sermone
vel in humilitate aut peromnia.
Sardonius très habet colores, blancus et inter rubicum
ille candidus est ; illa puritas, ista mira est humilitas.
Rubidus est communie vel pertinet ad martyrium.
Sardius talem habet colorem quomodo rosa quando in
imberno floret. Hoc est pretiosa mors sanctorum qui sunt
occisi pro Christi amore; in hoc sasculo sunt flagella et in
altero sunt corona;.
Chrisolitus potest designare septem dona spiritualia :
scintillas habet ille aureas, quas désignant miracula quse
Deus ostendit per suos servos qui bene observant sua
prascepta.
Berillus habet viridem colorem et multumjuvat contra
solem ; hoc désignât taies homines qui alteros docent
bene ; quia satis ille est perfectus in opère qui alterum
illuminât hominem.
Topatius talem habet colorem qualem lux cum cselum
est bene purum: ille pra;signat homines mortales qui ha-
bent in se grandem sanctitatem contemplativœ vitae, lux
taies désignât illos claros.
Crisoprasus est viridis, talem habet colorem quomodo
purpura : illum hominem signât qui vitam terrestrem pro
Christi amore disperdit, et per illam vitam prceparat se ad
martyrium.
Jacintus habet colorem talem quem habet cselum cum
volet mutari ; hoc désignât illos homines taies qui sunt
perfecti in charitate, et quantum illi possunt tantum fa-
ciunt, et bonitatem non faciunt per laudem sed tantum
per Deum.
Amethistus tradit in rubrorem rosse suum colorem, hoc
significat illos homines taies qui semper vivunt per humi-
litatem, qua plus dignus ille erit ad Deum quam minus
se débet glorificare.
Cotnmentum de gemmis sichemachlae.
I''^ Jaspis viridis, per quem lapidem viridem Christus
intelligitur, in quo refectio sanctorum est, sive electorum
qui in viriditate fidei permanent.
II"'. Saphiris aerei, idest blavi coloris, significat electos
caslestiapetentes.
ni"'.Calcedonius colorem habet lucernœ pallentis,tant£e
duritiœ est ut a nuUo possit puliri : significat fortissimos
electos. Pallens dicitur propter humilitatem, quia licet
sint fortes, humiles sunt mente.
IV"'. Smaragdus nimia? viriditatis est, et in desertis
locis in Scythia reperitur, ubi sunt griphes qui significant
dœmones, contra quos pugnant Arimaspi unum habentes
oculum ut possint lapidem accipere. Significat dominum
Christum, qui in deserto mentis nostrre habitat. Unde
Psalmista ait:Ecce elongavi fugiens et mansi in solitudine.
— Per griphes qui obsident illa loca significantur dœmo-
nes, cum quibus pugnant Arimaspi, id est electi habentes
oculum mentis.
V"^ Sardonix compositum est ex honice et sardonico,
cujus gênera plurima sunt ; tamen unius generis trium
colorum est : nigri, candidi et rubri ; cui ccmparantur
sancti, passione rubicundi, puritate mentis candidi, sed
humilitate sibimet despecti.
Vl"^ Sardius sanguinei coloris est ; significat martyres.
VII"'. Crisolitus quasi aurum fulget, et videtur emit-
tere scintillas ardentes : cujus specie figurantur electi, qui
intellectu suprema; sapientiœ refulgentes suas virtutes at-
que verba exhortationis quasi scintillas in proximos effun-
dunt; de quibus fuit Paulus cœterique taies cœlestia ten-
dentes.
VI IT". Berillus duo colores habet ; viridem et pallen-
tem. Significat electos virides, in fide, pallentes in humi-
litate.
IX"'. Topazius omnium lapidum habet colores in se :
significat perfectos, qui omnes virtutes habent.
X"'. Crisoprasus aurei coloris est et viridis : significat
electos sapientia refulgentes et viriditate fidei.
XI"'. Jacintus similis est aquas perfusœ radio solis : si-
gnificat electos omni sapientia perfusos.
XIP". Amethistus purpureum colorem habet. Significat
sanctos,qui purpureum id est Citlestem habitumgerunt in
terris; unde in evangelio: Neque nubent, neque nubentur,
sed sunt sicut angeli Dei in cœlo. Ipse lapis roseum colo-
rem habet, id significat dilectioneni sanctorum ; unde :
Majorem hac dilectione nemo habet quam ut animam
suam quis ponat pro amicis suis. Vel etiam significat
martyrium.
X. Barbier de Montault.
324
Bebue lie T^rt cbrétien.
ane monstrancc flamanDc à ScDan.
iETTE monstrance est un travail fla-
mand de la fin du XV' siècle, ou du
début du XVI'', dans le style Renais-
sance. Elle a, de la base au sommet,
SI centimètres. Le pied est en vermeil; il rap-
pelle par sa forme générale les pieds de calice de
l'époque gothique à son déclin.
Le soubassement se découpe en six lobes qui
saillissent en accolades ; la tranche moulurée
admet comme décor une série de perles allon-
gées, séparées par une perle ronde d'infime
dimension.
Cette première rangée de perles est surmontée
d'une sorte de tranche unie, dont les renfonce-
ments, qui dessinent une seconde rangée de
lobes, sont marqués par des ornements affectant
alternativement la forme d'une coquille et d'une
feuille trilobée. Enfin, une troisième rangée de
lobes laisse voir, aux enfoncements, des angles
en saillie dans lesquels s'incruste une feuille
allongée et assez profondément découpée. Cette
dernière rangée de lobes ne présente, comme
ornement, qu'un motif au sommet des angles et
une croix gravée dans le lobe du milieu.
Une couronne ciselée, surmontée d'une large
moulure, termine le sommet du soubassement.
Au-dessus, une mince tige à six pans unis
supporte une couronne d'anges d'un fort joli
travail. Chacune de ces têtes gracieuses est ap-
puyée sur des losanges en pointes de diamant,
séparés les uns des autres par des feuilles refen-
dues, l'une en haut, l'autre en bas, et dont l'ex-
trémité se rencontre vers le milieu du losange
supportant les têtes d'anges.
Au-dessus de la couronne d'anges, la tige à six
pans se continue sur la hauteur d'un centimètre et
demi, et se termine par une moulure supportant
une couronne, dans laquelle s'enfonce l'ostensoir
proprement dit.
Une tige à six pans, en argent, plus larges
dans le haut, en forme la base que surmonte une
galerie ajourée. Plus haute, dans sa partie supé-
rieure, cette galerie se présente renversée dans
sa partie inférieure.
Le cylindre de cristal s'emboîte dans des
galons découpés en feuilles à la base et ajourés
au sommet.
La partie supérieure de l'ostensoir est d'un
travail plus fin encore ; la galerie du haut est
une dentelle d'argent au pied du clocheton prin-
I Monstrance flamande à Sedan.
cipal. Ce dernier est une sorte de niche, formée
par sixcolonnettes et surmontée d'un dais.
A l'intérieur de la niche apparaît, dans une
gloire, une Vierge portant dans sa main droite
un sceptre, dans sa gauche, l'Enfant Jésus. Une
croix de vermeil fleuronnée, avec un Christ sur
chacune de ses faces, domine le clocheton, et
forme le sommet de l'ostensoir.
H^élange©.
325
La base de l'ostensoir et la galerie supérieure
sont reliées de chaque côté par un contrefort
finement décoré, et terminé à la base par un
pendentif fleuronné en vermeil, et, en haut, par
un pinacle, également en vermeil.
A la base de ce contrefort, des niches gothi-
ques abritent d'un côté : à droite et à gauche, des
évêques en saillie dont la physionomie est parti-
culièrement fine ; de l'autre côté, à droite, une
Vierge portant l'Enfant Jésus sur le bras gauche ;
à gauche, une sainte, la tête ornée d'un diadème
et tenant à la main un panier ('). Au-dessus de
I. Probablement Ste Dorothée. Collectiofi de .l/i's Daireà Torcy-
SedaK (Ardennes).
ces niches, dans le montant du contrefort, qui est
chevronné, un buste de Vierge, tenant l'Enfant
Jésus sur le bras gauche, se détache dans une
sorte de croissant.
La partie latérale du contrefort répète les
mêmes motifs : d'un côté, une Vierge avec un
voile, tenant l'Enfant Jésus sur le bras droit ;
de l'autre, la sainte déjà mentionnée.
Dans l'intérieur de l'ostensoir, et abrité par un
cylindre en cristal, se trouve un croissant en
vermeil, dont le lobe uni est soutenu par une
console finement ciselée.
M. D.
1A
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^)^^)^^)^^j^ Correspontiaïue. wmmmmmmm
^.^ .^^ .^ .y^ ,i^- :J^ .,^ .,y :^^ :,^ .,>^ :,>^^ .,>^ ,)^ ,.^ .,>^ .,>^ ,j^ .,,^ .,1^ ^^^^ ^^ ^,>^ ^^^
BoiTiC : Etes frfaquca te la tfjapclle JSancta Banctorum
et Oc l'fclier JSaint.JSaba. — HrrjiO : li'feliac Santa
ffiariaocClc Srajic. - BlorciKf : lia façaBc ne l'roliec
Kaint-Iiaurcnt. — Ice ncttopaoc ïfo frcaquea ; noubcau
vmm. — lits ÎRiiorfa Bu Vatican.
OUS sommes à une époque si fertile
en découvertes d'anciennes fresques
que, l'an passé, je n'ai pu que signaler,
en quelques mots, les peintures des
salles qui se trouvent au-dessous de la Sca/a
Santa, dans la chapelle du Sancta Satictoriim.
Grâce à un savant et complet travail publié
par M. Th. Lauer dans les Mélanges d'archéologie
et d'histoire ('), je puis à présent entrer dans
quelques détails.
M. Lauer a conduit les opérations de déblaie-
ment et de fouilles ; il a dégagé les salles en-
combrées, redressé des erreurs et découvert des
fresques inconnues.
Je m'en tiens au.x fresques, mon étude préférée.
Les piliers qui soutiennent les voûtes paraissent
être du LX^ siècle, mais M. Lauer pense que les
peintures, qui les recouvrent en partie, sont moins
anciennes et en ont remplacé d'autres détruites
par l'humidité ou la chute de l'enduit.
Sur l'un des piliers on voit en peinture des
colonnes, quelques ornements, une sorte d'animal
semblable à un loup ; les images sont grossières,
et leur date importe peu.
Mais le même pilier montre une fresque in-
téressante. C'est un saint nimbé couché dans un
cercueil ; il est vêtu d'une tunique blanche et
drapé dans un linceul rougeâtre. Le corps n'a
pas la rigidité cadavérique, les bras étant ouverts
et les jambes ployées ; M. Lauer croit que c'est
S. Jean l'Évangéliste. A côté du cercueil sont
deux clercs en longues robes jaunâtres, ornées
de dessins géométriques ; des aubes blanches
paraissent vers le cou et les poignets. L'un des
clercs porte un cierge, l'autre un encensoir. Les
plis des vêteinents sont marqués par de simples
I. Fascicule d'avril-juillet 1900. U recueil est l'organe de l'École
française de Rome, palais Farncse.
traits ; les pommettes des joues sont saillantes et
teintées de rouge.
Sur un autre pilier sont peints deux papes
avec des nimbes ronds ; l'un porte la tiare en
forme — qu'on me pardonne la comparaison —
de bonnet de coton, haut et conique ; il a le
pallium, la planeta rouge, l'aube blanche; chez
l'autre on ne voit plus que des traces de la
tiare et du pallium. Entre les deux, il y a une
inscription qui peut être -S". Stefanus PP.
D'autres peintures montrent : Jésus-Christ
bénissant à la façon grecque; un saint nimbé
vêtu comme le pape ; deux saintes portant des
couronnes d'oblation.
Toutes ces peintures sont en médiocre état,
plusieurs sont incomplètes et ont été retouchées;
elles avaient déjà été signalées avec plus ou
moins d'exactitude. M. Lauer les a fait photo-
graphier, les a spécifiées autant qu'il est possible
et les décrit en détail.
Il estime qu'elles sont du XI<= siècle ; il appuie
son opinion sur les analogies de caractère, de
costumes et d'accessoires avec les fresques de
l'église souterraine de Saint-Clément et notam-
ment avec l'Enterrement de Saint-Cyrille.
Sur ce point on peut faire quelques observa-
tions.
D'abord la discussion sur l'époque des fresques
de Saint-Clément n'est pas close.
Puis les plis des vêtements marqués par un
simple trait, et les pommettes saillantes teintées
de rouge ne sont pas caractéristiques du XI"^
siècle ; je les ai constatés dans quelques fresques
de l'église Santa Maria Antiqua, peintes au
VIII<=, et dans les mosaïques du IX*", dans la
chapelle Sainte-Praxède.
La tiare conique se trouve à d'autres époques
et encore dans la statue du pape Boniface VIII
( 1 294- 1 303), jadis sur l'ancienne façade de Notre-
Dame de la Fleur à Florence, maintenant dans
l'intérieur du dôme.
L'effigie du pape Etienne ne prouve rien en ce
qui concerne la date de la peinture ; elle n'est
pas nimbée en carré, comme il était d'usage de le
faire pour les papes en vie au moment de l'exé-
CorresponDance.
327
cution du travail ; puis il y a eu deux papes du
nom d'Etienne au IX*^ siècle, trois au X^, deux
au XI*^ et un au XI I^
En somme, l'attribution des fresques de la
chapelle Saiicta Sanctoritin au XI^ siècle prête
à la discussion.
Ces observations ne portent pas la moindre
atteinte aux services rendus par M. Lauer,
d'autant plus qu'il ne s'est pas borné à explorer
les parties du Sancta Sanctoniin déjà connues
à peu près, mais que poussant plus loin ses in-
vestigations il a fait de véritables découvertes.
On abuse fréquemment de ce mot décoîiverte.
Signaler une chose que d'autres ont déjà vue
plus ou moins bien, mais qui est fort peu connue
cependant, n'est pas faire une découverte.
Trouver une chose que personne n'a vue aupa-
ravant, dont il n'y a aucune trace dans les
documents ou dans les souvenirs, c'est faire une
véritable découverte.
C'est le cas de M. Lauer.
En creusant plus profondément, il a rencontré
des murs peints à fresque.
L'une de ces peintures montre les fragments
d'une draperie à plis décorée de rosaces. Depuis
cette découverte, des draperies semblables ont
été constatées à l'église de Saint-Saba dans une
fresque placée au-dessous du sol actuel et aussi
sur presque toutes les bases des murailles de
l'église Santa Maria Antiqua du Forum ro-
main.
M. Lauer a aussi mis à jour une autre fresque
d'un intérêt de premier ordre.
C'est un personnage sans nimbe, vêtu de la toge
classique, avec le clavus surl'épaule; ilest assis sur
un siège en bois, aux pieds croisés et courbés,
et à haut dossier (') ; devant lui, sur un pupitre,
est placé un livre ouvert vers lequel le person-
nage tend la main droite ; de la gauche il tient
un rouleau. Une inscription indique que le per-
sonnage est un Père qui a écrit en latin des
ouvrages mystiques, mais elle semble, par la
forme des lettres, être antérieure au VII^ siècle
M. Lauer estime que le personnage est saint
Augustin {fi* 430) et qu'il a été peint un peu
plus décent ans après sa mort.
I. Dans le langage usuel, ce siège est nommé Savonarole ; on en
fabrique toujours en Toscane, mais les dossiers sont plus bas.
« La peinture, dit M. Lauer, est encore d'ins-
piration antique, sans influence byzantine.»
L'observation est fort juste ; rien dans la phy-
sionomie, la pose, les vêtements ne se rapporte
au style qu'on est convenu d'appeler byzantin.
La découverte est très précieuse ; elle fournit
un argument de plus à ceux, dont je suis, qui
pensent qu'on a exagéré l'influence des Grecs,
et qu'après les Catacombes l'art italien a per-
sisté non seulement dans certaines mosaïques
mais dans la peinture.
Il faut donc savoir grand gré à M. Lauer
d'avoir découvert dans l'histoire de l'art une
étape inconnue.
Je n'ai pas manqué d'aller à l'église Saint-
Saba, isolée sur la colline du Cœlius, pour voir
les fresques qui ont été découvertes sous le sol
actuel.
L'église est très ancienne ; elle a été rebâtie
en 1465 ; elle est dédiée à un abbé de Cappadoce
et a été jadis desservie par des moines Grecs.
Les fresques visibles jusqu'aux fouilles actuel-
les sont de la fin du XV siècle et du XVIe ;
les peintures découvertes récemment peuvent
être du VI'^ et du VIL'.
J'ai été informé, par le gardien, que le R. P.
Grisar, qui dirige les travaux, devait faire une
conférence sur le sujet.
Par suite j'ajourne le relevé de mes notes.
A rezzo.
La charmante petite église Santa-Maria délie
Grazie, située hors de la ville, est l'objet de ré-
parations. Elle renferme des œuvres d'Andréa
délia Robbia (1435-1525).
Les Pères carmélites Scalzi, qui desservent
l'église par délégation de la Commune, ont donné
500 lires, et un particulier, le colonel Testamanzi,
en a fait autant.
On a toujours plaisir à signaler de pareils
actes de générosité.
Florence.
Le concours annoncé pour la façade de l'église
Saint-Laurent a eu lieu ; 75 projets ont été en-
voyés.
L'ensemble a été très satisfaisant.
Le jury international a réservé neuf projets
pour l'épreuve définitive qui aura lieu au mois
d'octobre.
328
3Rebuê tic rart cbvétieu.
J'en rendrai compte; et dès à présent on peut
être assuré que la basilique aura enfin sa façade.
Le nettoyage des fresques.
J'ai donné dans la Revue, en 1898, des rensei-
gnements sur le nettoyage des fresques.
Le ministre des travaux publics de Belgique
a bien voulu faire delà substance de ces articles
une circulaire à ses agents, ce dont j'ai été très
flatté.
Dans ces importantes opérations, des progrès
s'accomplissent sans cesse mes notes de 1898
sont par suite déjà en retard ; je les continue
aujourd'hui.
Le plus redoutable ennemi des fresques est
l'humidité permanente : elle engendre des moi-
sissures, qui, peu à peu, envahissent toute la
peinture et finissent par détruire les colorations.
Le travail de cette lèpre peut durer des siècles,
car son action est très lente et même après un
millier d'années, il arrive parfois que lescouleurs
ne sont pas complètement dévorées.
Nous en avons des exemples dans l'église de
Santa Maria Antiqua au Forum romain, dont les
fresques du VIII^ siècle viennent d'être rendues
au jour.
La destruction des moisissures avait été
fréquemment tentée, généralement avec peu de
succès ; lorsqu'on parvenait à enlever la lèpre,
on enlevait souvent la couleur en même temps.
Mais voici qu'un nouveau procédé vient d'être
appliqué.
On stérilise la fresque au moyen d'un lavage
d'eau étendu de formaline. Je ne puis dire la
composition de cette substance, n'entendant
rien à la chimie ; tout ce que je sais, c'est que
dans cette matière il entre de l'hydrogène, de
l'oxygène et du carbone, et que c'est un poison
violent.
J'ai vu le résultat d'un essai.
On a expérimenté sur un fragment de fresque
du VIII'= siècle envahi par la moisissure, mais
dont les colorations n'étaient pas complètement
mangées ; la moitié du morceau a été laissée en
l'état, l'autre moitié a été lavée à la formaline.
Lorsque je l'ai vue, il y avait trois mois que
le fragment était à l'air et que le lavage avait
été fait. Sur tout le côté lavé la moisissure
n'existait plus et les couleurs étaient revenues
non à leur éclat primitif, mais à une intensité
suffisante.
On peut donc dire qu'au moyen de la forma-
line il est possible de débarrasser la fresque des
cryptogames qui la recouvrent, sans faire dis-
paraître en même temps les couleurs.
C'est un beau résultat.
Je crois cependant qu'il faut agir avec pru-
dence et s'assurer avant le lavage que la fresque
est exempte de couleurs à la tempera, c'est-à-dire
préparées à la colle ou à l'œuf, car certainement
elles ne résisteraient pas au lavage.
On constate la nature des colorations en
frottant la couleur avec un linge blanc imbibé
d'eau; si l'étoffe prend une teinte, il y a tempera.
Muse'es du Vatican.
Sa Sainteté le pape Léon XIII a donné aux
collections du Vatican une nouvelle preuve de
sa sollicitude.
Il a acheté, pour le cabinet numismatique,
les monnaies pontificales réunies par feu le Car-
dinal Randi ; la collection du cardinal était com-
posée de 22,000 pièces.
Dans les années ordinaires la taxe d'entrée
dans les galeries de sculpture produit de 35 à
40,000 francs; en 1S90, en raison de l'année
sainte, la recette est montée à 75,000 francs.
La taxe est établie depuis dix ans ; elle est
parfaitement justifiée, puisque le gouvernement
l'a établie dans ses musées royaux.
Le curie se contente de la percevoir au musée
de sculptures ; elle pourrait l'étendre au groupe
de la Sixtine, des apparteinents Borgia et de la
Pinacothèque dont la visite est gratuite. On ne
ferait ainsi qu'imiter ce qui se passe au Palais
Ducal de Venise.
GEksi'Acn.
•♦•
"V^n
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^i^I^i^i!^ii^i^i^i^^i^2^2^i^i^i^i^i^^i^i^J^ii^il^i:^i^^
WWWWWWWWW^WWWWW^WWWWWWW^^^îT^^
Société des Antiquaires de France. —
Séance du 20 mars içoi. — M. Michon fait
une communication d'une tête en bronze du
musée de Belgrade qui est sans doute un portrait
de l'empereur Constantin.
M. Ul. Robert entretient ses confrères d'un
tombeau disparu de Philibert de Châlons, prince
d'Orange, et de quelques portraits de ce person-
nage.
M. de l'Espinasse présente plusieurs fragments
de poteries estampillées provenant des fouilles de
Champvert (Nièvre).
Séance du 2j mars. — Lettre du R. P. Delattre
relatant la découverte importante faite par lui
d'une colonnade sur les ruines de Cartilage.
M. Mlintz montre par divers rapprochements
que la fresque de l'hospice de Palerme représen-
tant le triomphe de la mort n'est pas une
œuvre flamande, mais une œuvre italienne de
l'école de Pisanello.
M. Blanchet présente une bague et des fîbules
en forme d'oiseau trouvées aux environs d'Is-
soudun.
M. l'abbé Bouillet présente une petite plaque
d'agrafe en bronze provenant d'un fermoir de
livre et représentant une jonque analogue à un
type fréquent au moyen âge.
M. Hauvette présente quelques observations
sur une restitution douteuse dans l'inscription
connue sous le nom de Marbre de Paros.
M. Héron de Viilefosse lit une note de M.
Dechelette sur les vases antiques à obturateurs
percés de trous.
Séance du 10 avril. — M. Durrieu entretient
la Société d'un beau manuscrit de la bibliothèque
de l'Escurial venant de la maison de Savoie : une
Apocalypse avec peintures. L'illustration de ce
volume est due à trois artistes, dont le plus récent
est un maître de l'école de Tours, Jean Colombe.
M. Vitry montre la photographie d'une vasque
de la grande fontaine donnée au cardinal d'Am-
boise par les Vénitiens et provenant du château
de Gaillon ; elle est conservée aujourd'hui dans
le parc du château de Liancourt (Oise).
Séance du IJ avril. — M. Mlintz étudie un
grand médaillon du musée de Vienne, daté d'une
manière certaine et qui présente au droit le buste
de l'empereur Constance II à l'âge de 16 ans
environ, au revers Constantin entouré de ses
deux fils Constantin II et Constance II.
M. l'abbé Bouillet analyse un mémoire de
M. Destrée relatif à une riche série de petits
monuments religieux en albâtre datant du
moyen âge et provenant de la région de Nothin-
gham.
M. Guiffrey signale un vieil usage du pays
basque consistant à graver des inscriptions sur la
façade des maisons rustiques.
Séance du 8 mai. — M. Selbman présente deux
objets provenant d'Angleterre et faisant actuelle-
ment partie de sa collection, à savoir une enseigne
romaine et un siège pliant en fer incrusté d'or et
d'argent qui paraît être une sella castrcnsis.
M. de Rochemontaix signale la découverte,
entre Antibes et Cannes, de pierres sculptées
représentant des trophées guerriers, restes d'un
monument d'époque romaine.
Académie des Inscriptions. — Séance du
j avril içoi. — Société iiiternatiotiale des études
iconographiques. — M. Mlintz signale une fonda-
tion nouvelle, sans caractère officiel, mais qui
n'en est pas moins appelée à resserrer les liens
entre les érudits de tous les pays et à diriger
leurs efforts vers un but commun.
La Société internationale des études icono-
graphiques, qui compte parmi ses adhérents
lesarchéologues les plus autorisés del'AUemagne,
de l'Autriche, de la Belgique, de la Suisse, de
l'Angleterre, de l'Italie, de la Scandinavie, de la
Russie, et qui a réservé à la France une place
des plus honorables dans son comité directeur,
se propose de faire pour l'antiquité chrétienne
ce qui a déjà été réalisé avec tant de succès
dans le domaine de l'antiquité classique.
Le programme de la Société nouvelle comporte
l'étude des croyances, des mythes, des thèmes
littéraires de toute nature qui s'incarnent dans
un tableau, une sculpture, une gravure. Elle
s'occupera tour à tour des œuvres d'art aux-
quelles ont donné naissance soit l'histoire, soit la
légende d'un personnage déterminé, de l'icono-
graphie d'un poème. Ses recherches porteront sur
les chefs-d'œuvre du grand art aussi bien que sur
les manifestations les plus humbles de l'art po-
pulaire. C'est à ces divers titres que M. Mlintz
signale cette intéressante entreprise à l'Acadé-
mie.
Les fouilles d'Algérie. — M. Cagnat lit une
note sur les fouilles exécutées en 1900 par le
service des monuments historiques en Algérie.
KEVUE UE l'art chrétien
19OI. — 4'"^^ LIVRAISON.
330
ÎRcbue lie V^xt cbittten.
Grâce aux nouveaux crédits accordés par le
Parlement, on a pu, cette année, fouiller sur
plusieurs points à la fois et ouvrir des chantiers
dans les trois départements en même temps.
Le plus grand effort a porté, comme précé-
demment, sur les ruines de Timgad. L'espace
qui sépare le théâtre du Capitole est entière-
ment occupé par des maisons; on en a découvert
de nouvelles cet été. Près de la porte Nord de la
ville, on a mis au jour un splendide établisse-
ment de bains composé de 35 salles, le tout
disposé symétriquement de chaque côté de l'axe
transversal. Nulle part, dans la ruine, les murs
ne sont aussi bien conservés qu'ici. Beaucoup
ont gardé leurs enduits et les graffitti que les
baigneurs y avaient gravés pour occuper leurs
loisirs.
Le service des monuments historiques a égale-
ment fait des recherches sur l'emplacement de
l'ancienne Cuicul et de l'ancienne Tliubursicum
Nianidantm.
Chacune de ces villes, qui étaient fort impor-
tantes, possédait un théâtre. Dans les deux
endroits, on s'est attaqué à la scène et à l'or-
chestre qu'on a déblayés en partie. Les recher-
ches vont continuer cet été sur ces points, ainsi
qu'à Lambèse, Cherrhel, Tébessa.
M. Perrot présente quelques observations au
sujet de cette communication.
Communications diverses. — M. Adrien Blan-
chet fait une communication relative à l'origine
du gros tournois. Il démontre que cette moniiaie
d'argent, créée par saint Louis, a emprunté ses
types du droit et du revers à ceux du denier
tournois. La bordure de douze lis qui complète
le revers de cette monnaie a été introduite dans
le but de marquer la valeur de douze deniers
qui est celle du gros tournois.
M. Clermont-Ganneau fait une communica-
tion sur la destruction de l'église du Saint-Sépul-
cre à Jérusalem.
Monuments indo-lwuddhiques. — M. Charles-
Eudes Bonin, vice-résident de France en Indo-
Chine, fait une communication sur le monument
archéologique le plus important qu'il ait exploré
au cours de sa dernière mission officielle en Asie
centrale. Ce sont les grottes des Mille Bouddhas,
près de Shatchéou (Kanson), cryptes bouddhi-
ques, ornées de fresques de style hindou que M.
Bonin considère comme le spécimen le plus an-
cien de l'art indo- bouddhique en Chine. Les ins-
criptions qu'il a rapportées de cette contrée ont
été étudiées par M. Chavannes, professeur au
Collège de France, qui a communiqué le résultat
de ses observations dans la séance de l'Académie
du 8 février dernier. M. Bonin communique au-
jourd'hui les photographies de ces monuments,
en fait l'historique et appelle l'attention de l'Aca-
démie et des savants sur son importance unique
pour l'histoire des religions asiatiques.
Séance du 12 avril. — Découverte d'une mo-
saïque à Jérusalem. — Le R. P. Lagrange, supé-
rieur du couvent des dominicains de Saint-
Etienne, à Jérusalem, écrit à M. Clermont-Gan-
neau qu'on vient de découvrir dans le quartier
juif de cette ville, au Nord de la porte de Damas,
légèrement à l'Ouest, à peu près à moitié chemin
de la porte au couvent, une fort belle mosaïque.
Le sujet principal : Orphée jouant de la lyre ;
à ses pieds, un centaure et un silène, différents
animaux ; sur le devant, deux femmes accolées,
séparées par une sorte de faisceau-chandelier ;
l'une tient à la main une fleur de lotus (?), l'autre,
un oiseau. Les têtes sont comme nimbées avec
deux inscriptions. Serait-ce un sujet mytholo-
gique traité selon la symbolique chrétienne ? On
le croirait, à juger par ces deux figures allégo-
riques ; mais tout est si païen !
Séance du 10 mai. — Prix. — Le prix Allier
de Hauteroche (numismatique ancienne), dont la
valeur est de 1,000 fr.,est attribué à MM. Michel
Rostovtzew et Maurice Prou, pour leur ouvrage
intitulé : Catalogue des plombs de l'antiquité, du
moyen âge et des temps modernes, conservés au
déparlement des médailles et antiques de la Biblio-
tlièque Nationale.
Une somme de 1,000 francs est attribuée à
M. Barrière-Flavy pour son ouvrage Les Arts
industriels des peuples barbares de la Gaule.
miroirs funéraires chinois. — M. E. Guimet
présente des miroirs funéraires en bronze de
l'époque des Han (302 av. à 220 ap. J.-C).
Les plus anciens ont des décors symboliques
chinois et des caractères mystiques. Sous les Han
postérieurs, l'ornementation s'inspire subitement
de l'art grec et représente surtout des raisins avec
des animaux variés.
Cette transformation coïncide avec la date de
l'introduction de la vigne en Chine, et avec l'épo-
que des relations établies entre Alexandrie et
Canton d'une part, et la Perse et Si-ngan-fou de
l'autre, circonstances affirmées à la fois par les
auteurs grecs et les auteurs chinois.
Congrès des Sociétés savantes de Paris et
des départements à Nancy. — Le Congrès
des Sociétés savantes de Paris et des départe-
ments s'est tenu cette année à Nancy, du 9 au
13 avril dernier. Voici (.') la nomenclature des
D'après le Courrier de l'Art.
%và\}ànx Des Sociétés ©atlantes.
331
communications sur des sujets artistiques qui
ont été faites dans la section d'archéologie :
Mardi ç avril. — M. C. Drioton lit un mémoi-
re sur plusieurs retranchements calcinés des
environs de Dijon et soumet quelques fragments
de poteries recueillis dans ces enceintes.
M. R. Maire donne lecture de trois mémoires
de M. Aug. Casser consacrés à la description des
antiquités provenant des fouilles qu'il a prati-
quées à Mantoche (Haute-Saône), entre autres
d'une mosaïque romaine.
M. Chevreux lit un mémoire sur les antiquités
du mont Denon près de Schirmeck (Alsace-Lor-
raine) et spécialement sur le bas-relief représen-
tant le combat d'un lion et d'un taureau, avec
l'inscription Bellicus Surburo conservé au musée
des Vosges, à Épinal.
Mercredi 10 avril. — M. Cozette signale les
carreaux de terre vernissée de la salle du trésor
de Noyon, de l'abbaye d'Ourscamp et de l'église
de Bailly, publiés par M. L. Le Clert.
M. Ch. Denis lit une note sur un mortier de
bronze fondu à Lunéville, en 1771, par J.-B.
Fourno, comme l'indique une inscription.
M. l'abbé Brune lit une notice sur l'église
Saint-Just, d'Arbois(Jura).
M. Cliquet présente au nom de M. Descours-
Desacres une série d'aquarelles reproduisant des
carreaux vernissés du XIII^ au XVII'- siècle des
fabriques du pays du Pré-d'Auge et de Manerbe
(Calvados).
M. L. Germain appelle l'attention sur les pla-
ques en fonte désignées sous le nom de «taques»,
dont de belles collections existent au Musée
lorrain à Nancy, et chez feu M. Metz, aux forges
d'Eich, près de Luxembourg.
M. L. Maître expose le résultat de ses ob-
servations sur les cryptes de Saint-Victor de
Marseille.
M. R. Figer lit un mémoire sur le donjon ro-
man dp Beanmont-sur-Sarthe. La section émet
un vœu pour la conservation des ruines de ce
donjon, un des spécimens les plus intéressants de
l'architecture militaire du XIII" siècle, dans le
département de la Sarthe.
M. de la Bouralière lit une note sur un bas-
relief provenant de la commanderie du Temple
de Nontgauguier (Vienne).
Jeudi II avril. — M. de Gastebois donne lec-,
ture d'une notice de M. le chanoine Bottier, con-
sacrée à une croix processionnelle du XIV^
siècle, en bois recouvert d'argent doré et estampé,
ornée à ses extrémités d'émaux translucides, et
conservée à l'église de Parizot(Tarn-et-Garonne).
M. Cournault lit un mémoire relatif aux
nielles des objets de fer de l'époque franque et
aux incrustations d'or et d'argent sur les objets
persans, arabes et hindous.
M. Demaison lit un travail sur l'histoire de la
construction de la cathédrale de Reims.
M. Lefèvre-Pontalis expose les résultats des
fouilles qu'il a pratiquées dans la nef de la cathé-
drale de Chartres et grâce auxquelles il a
retrouvé l'emplacement exact des anciens por-
tails de cette église.
M. L. Germain communique le résultat des
études qu'il poursuit sur les tabernacles-édicules
de la Renaissance.
M. L. Coutil lit un mémoire sur les parures
Scandinaves trouvées dans les départements de
l'Eure et de la Seine-Inférieure.
M. L. Maître lit un mémoire sur les substruc-
tions d'un édifice heptagonal à double enceinte
découvert au Mur, en Carantoir (Morbihan).
M. J. Beaupré présente une liste des enceintes
préhistoriques dont les traces ont été relevées en
Lorraine.
M. Alb. Martin lit un mémoire sur les armes
défensives du guerrier à l'époque homérique.
Vendredi 12 avril. — M. L.Germain énumère
et décrit les fonts baptismaux les plus intéres-
sants de la Lorraine.
M. de Gastebois lit une notice de M. le cha-
noine Bottier sur les tissus qu'il a découverts
dans les reliquaires de l'abbaye de Grandselve et
dans le trésor de Montpezat (Tarn-et-Garonne).
M. Jadart présente une série de reproductions
des sceaux-matrices de la collection de la biblio-
thèque de Reims.
M. Prou rend compte d'un travail de M. Mas-
frand, qui est un catalogue raisonné des sépul-
tures préromanes du département de la Haute-
Vienne.
M. l'abbé Morel lit un mémoire sur le Saint-
Suaire de l'abbaye de Saint-Corneille de Com-
piègne.
M. l'abbé Arn. d'Agnel lit un rapport sur les
fouilles qu'il a faites en collaboration avec M.
L. Allée dans une station préhistorique jusqu'ici
inexplorée, sise sur le plateau de Vachères (Bas-
ses-Alpes).
M. L. Germain entretient la section des recher-
ches qu'il a faites sur le croissant dans la symbo-
lique chrétienne.
M. Em. Bonnet lit un mémoire sur les mon-
naies des évéques de Lodève.
M. Prou rend compte de deux travaux trans-
mis par M. l'abbé Poulaine, à savoir : un catalo-
3Rc\)uc tie r^rt chrétien.
crue de monnaies gauloises recueillies dans
l'arrondissement d'Avallon, et un relevé des sé-
pultures préromanes signalées dans le même
arrondissement.
Le samedi 13 avril a eu lieu, sous la présidence
du ministre des Colonies, remplaçant le ministre
de l'Instruction publique et des Beaux-Arts em-
pêché, l'assemblée générale de clôture.
Société des Lettres, Sciences et Arts de
Bar-le-Duc. — M. H. Labourasse, membre
correspondant, a détaché quelques pages d'un
travail considérable qu'il prépare depuis plu-
sieurs années, sur les Anciens Us, Coutumes,
Légendes, Superstitions, Préjugés, etc. du départe-
ment de la Meuse.
Les Observations sur les médailles de Benoîte-
Vaux à propos d'un travail récent, communiquées
par 1\L L. Germain, se rapportent à l'étude que
M. Max-Werly vient de publier dans la Revue
belge de numismatigue (i 899-1900). M. Liénard
avait fait connaître 21 médailles de ce pèlerinage,
mais n'en avait reproduit que douze ; M. Max-
Werly en publie une trentaine, dont les revers
sont très variés.
Société d'Emulation de Cambrai, t. LUI,
Cambrai, 1890 (Mémoires). — M. le chanoine Mar-
gerin, sous ce titre : Les cloches et le clocqueman de
l'ancienne église métropolitaine de Cambrai, publie
des notes intéressantes sur les cloches et les
usages liturgiques d'après un curieux manuscrit
d'un clocqueman.
Commission départementale des Monu-
ments historiques du Pas-de-Calais, t. Il,
2= livraison. Arras, lyoo (Mémoires). — M. le comte
A. de Loisore publie une étude sur les vêtements
pontificaux d'un évéque d'A rras à la fin du XIII'
siècle. Il fait connaître un acte du mois de dé-
cembre 1279 par lequel Pierre de Noyon,évêque
d'Arras, au moment d'abandonner son siège,
avait fait donation à son chapitre de ses orne-
ments ; les vêtements pontificaux énumérés dans
cet acte font l'objet d'un bon commentaire.
Comité des travaux historiques. Bulletin,
1900, 3nie livr. — M. L. Maître a retrouvé dans
les substructions de l'église de Cellier (Loire-
Inférieure) qui vient de disparaître, les restes
d'une tour romaine qui fut transformée en clocher,
et à Saint-Herblon, les substructions d'un petit
oratoire carolingien.
M. R. Drouault signale le bénitier « des lé-
preux» encore conservé à l'église de Milhac-de-
Vontron. M. l'abbé Chartraine s'occupe de deux
statues de la Vierge assise, conservées à l'arche-
vêché de Sens, d'un grand mérite artistique.
M. l'abbé Poulain signale divers carrelages peints
anciens.
L'église de Deas, à Saint-Philbert-de-Grandlieu,
avec son vaisseau large, élancé, ne ressemble
guère à ces lourdes églises du XI'^ siècle faites
pour être voiitées ; et cependant, à certains airs
de vétusté, M. L. Maître, qui en donne une
curieuse vue intérieure, croit y reconnaître un
édifice antérieur à l'an mille. A l'encontre de
M. Brutails, il veut trouver des preuves de cette
antiquité dans les particularités de la crypte, <L à
compartiments fermés, munis à'oculi et àefenes-
rellœ%, caractéristiques à son avis ; avec « confes-
sion distincte en rapport avec l'autel majeur de
l'église supérieure », avec « sa petite fenêtre
voisine de la tête du tombeau» qui rappelle les
rites de la primitive église. Notre impression est
que M. L. Maître raisonne.... de sentiment, s'il
est permis d'ainsi parler. — lia des arguments
surprenants, comme celui-ci : « Ermentaire nous
dit que l'édifice bâti en S15, était en forme de
croix : or le chœur allongé que nous voyons,
simulait bien avec ses deux branches une croix
de saint Antoine. » N'est-ce pas le tau de saint
Antoine qu'il faudrait dire?
De la vaste cathédrale de Saint-Etienne à
Besançon, achevée en 1048 et rasée par Vauban
de 1674a 1678, il ne reste pierre sur pierre, comme
du temple de Jérusalem. On avait jusqu'ici
vainement tenté d'en reconstituer les lignes
architecturales. M. J. Gauthier y réussit, à l'aide
d'une gravure ancienne et de divers documents
écrits. Il lui a fallu pour cela vingt ans de
patientes recherches, à reconstituer le plan rai-
sonné de l'église, des chapelles et des cloîtres de
Saint-Etienne. C'est un plan fiMt curieux que celui
du vaste vaisseau à trois nefs, la centrale voûtée
en travées barlongues, les latérales à croisées
d'ogives carrées avec des chapelles latérales de
double profondeur, des bras de transepts saillants
et un chœur à chevet plat accosté de deux ab-
sides ; le cloître placé derrière le chevet.
M. L. B. Labordc décrit un pied de croix du
(XIV'^ siècle) de l'ancien monastère de Saint-
Véran près d'Avignon.
M. l'abbé Brune signale, au point de vue de
l'iconographie, quelques statues des églises du
Jura, celles de saint Lautein, des saints martyrs
Speusippe, Eleusippe et Mélasippe, appelés les
saints Jumeaux, et de leur aïeule sainte Léonille,
celle probable de saint Méen et celle de saint
Pierre de Vérone.
Cra\3aujc îies t)OCtétés satiantes.
333
Congrès d'Archéologie et d'Histoire. —
Le 4 août 1901 aura lieu à Tongres le XV^
Congrès annuel, sous la direction de la Société
scientifique et littéraire du Limbourg, qui fête,
cette année, le 50^ anniversaire de sa fondation.
Des excursions seront organisées à Tongres,
en vue de l'étude de l'antique ville romaine, de
ses environs, ainsi que du réseau des voies
romaines.
Une excursion aura lieu par la vallée du Jaer
à Maestricht et aux environs.
La ville de Tongres elle-même, qui a enrichi
quantité de musées européens des trouvailles
provenues de son sol, possède aujourd'hui encore
des curiosités et des richesses de premier ordre.
Le comité d'organisation du Congrès s'effor-
cera de les faire valoir par des conférences et
des excursions.
Voici les principales questions à l'ordre du jour
concernant les arts et l'archéologie :
I. Nos premiers miniaturistes subirent-ils l'influence
de l'art franc, tel qu'il nous est connu par les bijoux du
VI^ siècle, recueillis dans les tombes franques découver-
tes dans notre pays ?
Maeterlinck.
I I. Quelles sont les règles à suivre dans la restauration
des édifices ?
Helleputte.
III. Du rôle et de l'importance de la polychromie dans
les églises du moyen âge.
Helleputte.
IV. De quelle époque datent les remparts qui envelop-
pent actuellement la ville de Tongres ?
Helleputtk.
V. Quelles sont les principales découvertes de peintu-
res murales faites dans les églises du Luxembourg? Que
peut-on conclure de ces découvertes quant à la question
de la polychromie des églises .''
Abbé Daniels.
VI. La tradition locale attribue à saint Monulphe la
construction de l'église St-Servais à Maestricht, avant
son remaniement à la dernière époque ogivale. Cette
opinion est-elle soutenable ?
Abbé Daniels.
VIL Renseigner les monuments d'architecture romane
existant clans le pays de Looz et déterminer le caractère
propre de cette architecture.
Abbé Daniels.
VIII. Les principes des proportions des majeures et
mineures proportionnelles ont-ils été d'application con-
stante pendant le moyen âge dans l'art de l'architecte,
du sculpteur et du peintie ?
Ces proportions peuvent-elles être traduites par un
tracé géométrique ?
Jajiine.
IX. L'article 5 de l'arrêté royal du 16 août 1824 est-il
suffisant pour obtenir la conservation des objets d'art ou
monuments historiques placés dans les églises ?
Saintenoy.
X. Étude de la restauration des peintures murales.
GlELEN.
XI. De quels moyens l'architecte archéologue dispose-
t-il pour stimuler le zèle des autorités dans la restaura-
tion des monuments historiques en général et des ruines
des châteaux féodaux et particulier .'
Arendt.
XII. Existe-t-il dans l'architecture wallonne du XVI*
siècle des détails capables de la caractériser? Comment
se sont répandus, notamment dans une partie de la
Belgique, au cours des siècles suivants, certains motifs
ornementaux qui ont leur origine à Liège et dans ses
environs ?
D' JORISSENNE.
XIII. Étude relative aux statues et images de la
Vierge et du serpent.
Germain DE Maidy.
Académie royale d'Archéologie de Bel-
gique. — La polychromie monumentale, telle
qu'on l'a comprise au moyen âge, est une chose
superbe, encore incomprise de nos jours. Etrange
oblitération du sens esthétique, tout le monde
admet l'union de la sculpture et de l'archi-
tecture, on répugne encore à y joindre la pein-
ture et à parfaire cette trilogie nécessaire, qui
est dans la nature des choses comme elle a été
dans la pratique universelle. Les uns vont stig-
matisant comme une monstruosité ce procédé si
puissamment expressif et essentiellement na-
turel, tandis que c'est leur propre sens esthé-
tique qui est altéré ; d'autres cherchent des
compromis entre le préjugé moderne et l'évi-
dence historique, surtout quand il s'agit de
monuments anciens. M. le chanoine Van Caster
a remarqué que dans les églises brabançonnes
on ne rencontre guère de décoration poly-
chrome complète ni systématique, mais beaucoup
de peintures fragmentaires, votives, etc., et il a
cru voir dans cette circonstance un fait général
« pour nos contrées », sinon une règle artistique.
Voici sa thèse : En gâicyal les peintures murales
historiées, dans les églises du moyen âge, n'ont pas
été dirigées par les architectes de ces monuments,
ni exécutées d'après un plan d'ensemble, du moins
dans nos contrées.
J'ai cru devoir intervenir dans cette discussion
au Congrès de Malines en 1897, et je crois l'avoir
fait dans les termes les plus corrects et sans me
départir du respect sympathique que m'inspire
l'érudit archéologue malinois. Ma réplique lui a
été désagréable ; je le regrette vivement. Aussi,
j'ai volontiers laissé place à d'autres, plus auto-
risés que moi d'ailleurs, dans cette polémique.
M. J. Helbig a repris l'intéressante controverse ;
nous la suivrons pour nos lecteurs (i). Quant à
I. Je me permetirai toutefois ici un mot d'observation personnelle
dans l'aparté decebasde page. Qu'a bien voulu dire M. le chanoine
334
3Rebur ïje r^rt chrétien.
l'incident de Malines, il paraît qu'il n'est pas
épuisé. M. V. C. me demande une rectification
que je ferai bien volontiers. On la trouvera à la
fin de ce compte rendu.
M. V. C. établit que la décoration des murs
répond à un besoin esthétique naturel. Puis, il
distingue entre \a. peinture et X'S. polychromie.
« Peindi-e, dit-il, c'est représenter une personne
ou une chose par des lignes et des couleurs \poly-
c/iromer, c'est appliquer des couleurs sur un objet.
La peinture s'exécute sur des surfaces unies,
tandis que la polychromie se contente d'orner
de couleurs les parties saillantes. Si elle fait plus,
elle devient de la peinture, mais décorative seu-
lement, qu'il faut éviter de confondre avec la
peinture historiée ('). »
La polychromie est de la compétence de l'ar-
chitecte ; elle est le complément logique de
son œuvre. A côté des parties architecturales,
des lignes saillantes, il y a, dit M. V. C, des
parties unies ; celles-ci échappent à la compé-
tence de l'architecte (-).
Or l'architecte n'est généralement pas un
peintre ; peu d'artistes peuvent exceller dans
plusieurs arts à la fois. Aussi M. V. C. croit-il
que les architectes du moyen âge ne se sont pas
préoccupés de la peinture historiée des monu-
ments qu'ils érigeaient. Dans la période gothique
avancée les membres d'architecture développent
un décor structural qui absorbe les champs unis
et élimine la peinture historiée. 11 n'est donc
pas étonnant que les architectes n'aient fait que
de la polychromie. Ils ont laissé entièrement
libre le peintre proprement dit. Celui-ci a géné-
ralement peint des sujets isolés, sans souci de les
accorder ensemble en vue d'un effet décoratif
général.
En résumé, M. V. C. est d'avis que les archi-
tectes de nos anciens monuments ont pu diriger
V. c. en cette phrase que je lis à la première page de son mémoire:
<( Aussi ne répondis-je point à la réplique que l'on me fit alors,
parce que, sans l'animosilé avec laquelle elle fut dite, j'aurais dû la
prendre comme une agression qu'il serait diflicile de justifier. »
On. c'est l'écrivain de ces lignes. M. V. C. reproduit sa réplique.
Les lecteurs du BuUelin de t .■iradéinic royale d Archéologie qui
voudront la relire jugeront si elle contient l'ombre d'une agression,
si elle respire l'animosité, si elle trahit même la nervosité.
i.Nous proposons d'autres définitions : Peindre c'csK appliquer des
couleurs sur un objet, l.a peinture peut être décorative ou imita-
tive.
On a.'ç^AXi polychromie une peinture décorative, soit à tons plats,
soit ornementale, soit historiée, qui a pour but un effet de coloration
harmonisée, par opposition avec la peinture en trompe l'œil.
C'est une erreur de croire que la polychromie « se contente
d'orner de couleurs les parties saillantei ]).
2. M. Van Caster suppose que toute surface murale plate doive
nécessairement être traitée en peinture historiée, et il admet que
celte peinture historiée n'intéresse pas directement l'architecte.
N'est-il donc pas possible de rehausser des murs plats de motifs
purement décoratifs? S'ils sont historiés, ne sont-ils pas encore
décoratifs par destination ? L'architecte peut-il se désintéresser de la
décoration de son oeuvre?
ce qu'ils appellent la polychromie de leurs
œuvres (c.-à-d., la peinture décorative des mem-
bres d'architecture, à l'exclusion des champs
unis des murs). En fait, les décorations de ce
genre n'ont été que rarement exécutées avant
le XIII<: siècle.
A partir de cette époque, les architectes, en
multipliant les lignes structurales, paraissent
avoir voulu exclure l'art du peintre. Les faits
prouvent que les architectes n'ont presque rien
fait pour la peinture des églises. (Ces conclusions
restent d'ailleurs en deçà du titre de la dis-
sertation, beaucoup plus catégorique : Les pein-
tures murales du moyen âge n'étaient pas exécutées
d'après un plan d'ensemble, dans nos contrées.)
Répondant à M. Van Caster, M. J. Helbig
affirme à son tour qu'il est naturel de décorer
les murs. Il conteste la distinction faite par
M. V. C. entre la polychromie et la peinture ;
la polychromie n'est autre chose que de la pein-
ture. La peinture s'exécute aussi bien sur des
surfaces unies que sur d'autres. La polychromie,
au sens de M. V. C, a souvent orné des surfaces
planes : rinceaux, arcatures, étoffes, etc.
Rarement l'architecte est capable de concevoir
la synthèse de son œuvre; mais quand il est le
vrai maître de l'œuvre, il lui revient de diriger le
travail du peintre.
Certes, les circonstances ont rarement permis
l'achèvement du décor conçu par les pieux
auteurs des grandes églises du moyen âge, et
l'exécution des peintures s'est souvent trouvée
abandonnée à l'initiative des décorateurs et des
donateurs particuliers. Mais vouloir réduire à
ces peintures fragmentaires le rôle de la peinture
murale au moyen âge, regarder comine des ex-
ceptions les cas où le grand art répond à sa
véritable destination, c'est méconnaître l'esprit
du moyen âge.
C'est ce que M. M. établit par de nombreux
exemples. Il invoque le témoignage du moine
Ernold Migellus (8o6) décrivant les peintures
murales de la chapelle palatine d'Ingelheim, celui
d'Ekkehard (1031-1051), traçant le programme
des peintures de la cathédrale de Mayence, et du
chroniqueur Gilles d'Orval, décrivant l'ensemble
des peintures de la catliédrale bâtie par Notger
(970-1008) que le feu venait de détruire. Puis il
cite les peintures, murales des cathédrales de
Brunswick, de Nuremberg, de Constance, de Co-
logne.
Des archéologues éminents, comme Essenwein
et Reichensperger, ont proclamé que de pareilles
peintures, se rapportant à une idée d'ensemble,
supposent des plans préconçus, une conception
décorative systématique.
%và\3imx î5es ^ociétég 0at)antcs.
10 C
Telles sont encore les peintures murales des
églises de Schwarz Rheindorf (i 15 i) et de St-
Georges à Oberzell, de plusieurs églises de West-
plialie, de celle de St-Nicolas de Soest et de Met-
teler près de Dortmund.
En France, on peut citer Saint-Savin, la Sainte-
Chapelle de Paris, et bien d'autres.
En Italie, on n'a que l'embarras du choix le
plus riche : Parme, Assise, Sienne, Padoue, Flo-
rence, Rome, offrent en foule de ces ensembles
de décorations picturales, à la fois historiées et dé-
coratives, qui ne font qu'un avec la construction,
qui épousent les lignes et la surface de l'archi-
tecture, et font partie, avec la structure, d'un vé-
ritable composé organique d'une parfaite unité.
!.. C LOQUET.
Rectification demandée. — L'an dernier j'ai
rendu compte de la si intéressante notice de
M. le chanoine Van Caster relative aux restes de
peintures murales découvertes à Saint- Rombaut
de Malines ('). J'ai cru devoir alors revenir sur
l'incident rappelé plus haut. J'avais dit au Con-
grès, que la polychromie des édifices a été une
pratique universelle de tous les peuples, dans
tous les temps et dans tous les styles, sauf chez
nous, pendant les deux derniers siècles. Dans ma
pensée les mots ici soulignés (peu exacts peut-
être), signifiaient dans nos contrées (France,
Belgique, etc.). — M. V. C. me citant dans sa
notice, a voulu préciser et a imprimé sauf en
Belgique. A mon avis c'était altérer ma pensée
et mettre dans ma bouche une grosse erreur;
une énormité, disait une phrase de mon compte
rendu (-).
Seulement cette phrase était mal tournée ; on
y lit : « sauf, ajoute M. Van Caster, en Belgique,
etc. » On pouvait croire que M. V. C. avait
ajoute un mot à ce que j'avais dit ; il n'en est rien,
il n'a fait que modifier un mot de ma phrase ; il
n'y a pas grande différence, mais ce n'est pas la
même chose.
Lui ayant communiqué l'épreuve avant tirage,
M. V. C. m'avait demandé de changer mon texte.
J'avais supprimé l'équivoque, adouci le terme
« énormité » et d'autres encore. . . sur une épreuve
qui malheureusement a été perdue de vue par
le typographe, l'insertion de l'article ayant été
ajournée.
Cette fois, j'espère, voilà les choses remises au
point à la satisfaction de M. le chan. Van Caster.
L. C.
Conférence d'histoire et d'archéologie du
diocèse de Meaux. — Cette Société modèle
1. V. Revue de V .4rt chrétien, année igoo, p. 533.
2. V. Ibid.
publie un bulletin qui peut servir de type aux
publications similaires. Sous son impulsion, les
ecclésiastiques du diocèse étudient l'art ecclésias-
tique et fouillent leurs archives. On remet au
jour bien des choses intéressantes oubliées, ou
cachées. M. Avalard, curé de Saint-Nicolas à
Meaux, déterre deux bas-reliefs de la Renaissance
encore pieuse, représentant, selon la tradition,
la descente de croix et la mise au tombeau du
Christ. M. G. Leroy, bibliothécaire de la ville
de Melun, exhume la copie de l'obituaire dis-
paru de l'abbaye de Marbeau. M. A. Vernon
poursuit, d'après le compte de la Marguillerie,
l'histoire de l'église de Saint-Denis de Coulom-
miers, durant les quatre derniers siècles. M. O.
Estournet décrit une cloche de 1687, etc. Notons
encore une étude sur l'iconographie de sainte
Geneviève, où l'on signale une déformation de la
belle et simiile légende populaire de la prétendue
bergère. Parmi les comptes rendus bibliographi-
ques, signalons la reproduction en gravure d'une
remarquable statue de saint Mammès, martyr
(111= siècle).
L. C.
Institut Archéologique du Luxembourg,
t. XXXV, Arlon, 1900 {Bulletin). — Deux spé-
cialités constituent l'intérêt du musée archéolo-
gique d'Arlon : les inscriptions romaines et les
taques de foyer historiées. IVI. J. B. Sibenaler
donne une bonne description de ces dernières;
il nous renseigne sur l'activité des forges luxem-
bourgoises au XVL', auXVII^ et au XVIIIe
siècle.
M. Van Werveke donne wne Notice sur la
vallée de l'Eissch, Luxembourg, Remich et Nennig.
M. Tandel reproduit un rapport que M. Charles
Lagasse-De Locht, président de la Commission
des Monuments, a fait au gouverneur de la pro-
vince sur l'église d'Attert.
Société historique et littéraire de Tournai.
Les archéologues tournaisiens ont célébré le 2
juin le jubilé de cinquante ans comme membre,
de leur vénérable président, M. le comte de
Nédonchel, et le jubilé de vingt-cinq ans de fonc-
tions de leur distingué secrétaire M. Soil.
La journée a débuté par une cérémonie offi-
cielle à l'Hôtel de Ville, où se trouvaient réunis
aux côtés des jubilaires, outre les membres du
Conseil communal, les membres de la Société
archéologique de Tournai, M. le sénateur comte
de Limbourg-Stirum, M. le représentant Du-
quesne, M. le baron du Sart, gouverneur du
Hainaut ; MM. le vicomte de Ghellinck et Don-
net, président et secrétaire de l'Académie royale
336
Brtut lit r^vt cbrctien.
d'archéologie de Belgique ; des députations des
sociétés archéologiques de Gand, de Mons, de
Douai, de Soignies, de Namur, de la Commission
royale des monuments, de la Gilde de Saint-
Thomas et de Saint-Luc, de la Société numis-
matique de Bruxelles ; des membres du tribunal
civil, de nombreux membres du clergé, du bar-
reau, etc.
M. le comte du Mortier, président du comité
organisateur, en remettant aux héros de la fête
des médailles d'or frappées à leur effigie, a fait
l'éloge du vénérable président et du dévoué
secrétaire qui ont tant contribué à la prospérité
de la Société et au développement du mouve-
ment artistique dans la région tournaisienne.
M. le bourgmestre, au nom de l'Administra-
tion communale, a uni ses félicitations à celles
de la société et M. le baron du Sart, à son tour,
s'est déclaré heureux de pouvoir assister à cette
fête en sa qualité officielle d'abord, mais surtout
comme Tournaisien.
M. le chanoine Van den Gheyn, de Gand, dans
un discours très éloquent, a félicité les jubi-
laires au nom des sociétés étrangères et MM.
de Nédonchel et Soil ont remercié chaleureuse-
ment toutes les notabilités du monde officiel et
artistique qui s'étaient associées à la manifesta-
tion organisée en leur honneur.
Lesorateurs ont fait ressortir l'extrême vitalité
de la société archéologique de Tournai, qui n'a
pas publié moins de 55 beaux volumes sur l'his-
toire, l'archéologie, les arts industriels tournai-
siens et les arts décoratif et monumental.
Elle a été aussi pour beaucoup dans l'œuvre
de la restauration de la cathédrale, dont elle
poursuit le dégagement avec la plus grande
énergie, dans la conservation du Pont-des-
Trous, de la Tour Henri VII, des tours de Mar-
vis ; dans la création des musées communaux,
dans l'organisation du Congrès archéologique
de 1895.
A notre tour, nous présentons nos filicitations
à rémittent et tant estimé comte de Nédonchel
et à M. Soil, un des collaborateurs de la Revue
de l'Art clirctien, l'écrivain archéologue estimé,
dont nos lecteurs connaissent l'érudition.
L. C.
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^m^m^^^^m !6ibltograp!)ie. ^
LE DIX-NEUVIEME SIECLE. LES MCEURS
LES ARTS, LES IDÉES. — Paris, Hachette
1901, gr. in-4°.
S'IL est un âge de l'histoire peu connu, c'est
assurément la période la plus voisine de
nous. La distance nous permet seule, en effet,
Le Pain bénit, par Dai;nan-Rou\'ebet.
REVUE UE l'art CHRÉTIEN
1901. — 4'""^ nVRAIPON.
338
Bcbuc br r^rr cbvcticiu
de dégager les grands faits, trop nombreux, trop
touffus quand il s'agit de nos contemporains et
de notre vie quotidienne. Aussi ce XIX« siècle,
si luxueusement édité par la librairie Hachette,
est-il une véritable fête pour les yeux et pour
l'intelligence de ceux qui aiment à revivre les
jours si rapidement écoulés.
Les premières années du siècle passé sont déjà
du domaine réel de l'histoire, car bien rares sont
ceux qui ont aperçu Napoléon l", Jokséphine, la
Cour impériale ; mais il en reste qui ont vu
Charles X, Louis-Philippe ; nombreux enfin sont
Gallia, p.ar MokKAf-VAUTHiER.
ceux qui ont connu Napoléon III. Et le dévelop-
pement des chapitres qui leur sont consacrés est
justement en raison inverse de leur éloignement.
C'est surtout avec le second Empire que se
développe ici curieusement la vie tout entière
d'une société élégante, aujourd'hui disparue ; les
arts si protégés dans la deuxième moitié du siècle
y sont longuement étudiés, et pour n'être pas de
l'archéologie, on n'en est pas moins heureux de
revoir passer sous ses yeux, les chefs-d'œuvre
qui, de 1800 à 1900, illustrèrent une époque
éprise d'art et de science.
F. DE M.
BIBLIOGRAPHIE DES INVENTAIRES.
1. — COMPTES DE MÉNAGE DE JEANNE
DE LAVAL (1455-1459), par le P. Ubald d'Alen-
çoN, capucin, dans Y Anjou historique, 1901, pp. 394-
406.
CE document existe manuscrit à la biblio-
thèque d'Angers. Au lieu de le reproduire
textuellement, quitte à supprimer les répéti-
tions et les inutilités, l'auteur n'en donne que
des e.xtraits, entremêlés à sa prose. S'il s'en con-
tente personnellement et si ses lecteurs trouvent
de la sorte la lecture plus agréable, je ne puis
taire que pareil procédé n'est nullement scienti-
fique ; tout au plus pourra-t-on voir là une intro-
duction à une édition complète.
En 1456, René d'Anjou avait peint un porte-
ment de croix. Les frères mineurs de Laval, à
qui il offrit ce tableau, l'en remercièrent par
une lettre qui en fait l'éloge : « Ung imaige de
pitié portant la croix, le plus piteux, le mieux
portraict selon la réale vérité du fait que tous
ceulx qui le regardent en font grande admiration
et en le regardant, ont de leur rédempteur moult
grand compassion. » Jeanne fit faire le cadre.
Elle fit exécuter en cire, par maître Odinet,
imagier, et peindre par Jean Coppicii, un « veu »
ou ex-voto, qu'elle donna à « l'église des frères
prescheurs de nostre ville de S. Maximin. » Le
bougran sur lequel le tableau fut appliqué reçut
les armes du roi et de la reine de Sicile.
2. — INVENTAIRE DE LA MAISON CU-
RIALE DE LA CROUSILLE, EN 1459, par SaLA-
BERT, dans le Bulletin de la Société arclicologique du
Midi, 1900, pp. Il 2- Il 6.
Cet inventaire ne compte que 33 articles non
numérotés. Écrit en latin, il n'a été traduit qu'à
peu près ; un mot, qui revient deux fois, à la
suite du linge, est inconnu des glossaires : « Una
botana senex, longitudinis duarum cannarum
vel circa, listrata diversis listris lividi coloris.
Item plus, alla botana senex, longitudinis septem
palmarum vel circa, modo simili listrata. »
La toile est de Bourgogne, du pays ou de
France. « Quatuor lintheamina nova telc prime
vocate de Borgonha. Alia quinque lintheamina
tele Uni presentis patrie. Unam longieram novam
canapis, operis Fransie. »
Cette toile est de deux qualités : prime ou
fine et à'ctoupes, grossière : « Mape tele lini de
stopis. Longieram, orditam fili priini et textam
de stopis. »
3. — INVENTARIO DELLE ARMI E DELLE
MUNIZIONI DA GUERRA CONSEGNATE A
2l5ibUograpl)te.
339
GIUSKPPE SGARABELLI, SKNIORE DEL
DUC A ALESSANDRO H PICO, dans le Giornale
araldico, Pise, 1899, pp. 237 238.
Ces armes et munitions se trouvaient réparties
entre trois arsenaux, à Mirandola. L'inventaire
est surtout curieux par les noms donnés aux
engins de guerre. Il y a des cannoni, des mezzi
cannoni, des cannoni basiai-di, des falernetti, des
sagri, etc.
Les boulets sont de fer ou de marbre, les
canons de bronze ou de fer.
Les inortari servaient pour les bombe et les
viortaretti pour les fêtes. On y trouve aussi
24 lances pour le jeu de la quintaine, quintana.
Les fochi artificiali étaient gardés dans des barils
cerclés de fer. Je m'arrête, car beaucoup d'autres
mots ne peuvent intéresser que des spécialistes.
4. — LIVRE DE RAISON DE JEAN DE MA-
TEAU, DE GOULLES (1729-1740), par Louis
GuiBERT, dans le Bulkt. de la Soc. arch. de Brive,
1900, pp. 508-515.
Il débute par cette pieuse formule : In nomine
Doviini, amen. Lausque divœ Triadi.
5. — LIVRE DE COMPTES DE LA FAMILLE
MAUFLE (1740-1825), par Louis Guibert, dans le
Bullet. de la Soc. arch. de Jh-ive, 1900, pp. 516-520.
N'a d'intérêt que pour le prix du bétail, les
fermages et les gages des domestiques. Une
servante reçoit, en 1795 : « 8 aunes toille, dont
4 étoupe et 4 mêlés, un cotillon de droguet mêlé,
une brassière de droguet bleu » ; mais elle n'a
droit qu'à « la moitié des pratiques » ou pour-
boires donnés à l'occasion de la vente « des
cochons », qu'elle est chargée d'élever.
6. — LIVRE DE RAISON DE JOSEPH LEY-
NIA, JUGE DE BEAUMONT (1741-1801), par
Champeval, dans le Bullet. de la Soc. arch. de Brive,
1900, pp. 521-522.
En 1745, un domestique recevait : « 27 liv.
argent, 20 sols pour chapeau et sabots, plus i liv.
laine, 4 aunes toile bouiradisse et i de grosse. >
La fille n'avait que « 9 liv. argent, 4 aunes toile
bouiradisse, i de brin, I tablier droguet, I liv.
laine, plus 15 s. pour sabots ». En 1783, les
« sabots de domestique » coûtaient « 20 sols »
et la « ferrure de sabots de femme, 7 sols ». Les
pièces se nomment ici aventures.
7. — INVENTAIRE DES MEUBLES DU
CHATEAU DE JARNAC, DRESSÉ LE 29 NO-
VEMBRE 1762 ET JOURSSUIVANTS, PUBLIÉ
D'APRÈS UN MANUSCRIT AUTHENTIQUE,
AVEC UNE HÉLIOGRAVURE,UNFACSIMILE
ET UNE NOTICE HISTORIQUE, par Ph. Dela-
main; Niort, Clauzot, 1900, in-4"' de XVIII-i2r pag.
Ce château était situé dans la Charente, la
Révolution l'a détruit. Il appartenait aux comtes
de Jarnac et, par substitution, aux de Rohan-
Chabot. Les articles de l'inventaire de 1762
montent à 395, dont 251 pour Jarnac et le reste
pour le « château de la Vénerie », qu'il eût été
mieux de numéroter à part.
La publication est très soignée comme édition
et elle figurera bien sur la table d'un salon. J'y
aurais voulu ce double complément indispen-
sable : une table alphabétique des mots employés,
auxquels parfois on recourra pour expliquer des
documents analogues, et quelques annotations,
pour donner la signification de certains termes
peu usités et qu'on ne trouve pas toujours dans
les Glossaires. A ce titre, je vais en citer quatre.
Badine, espèce de tisonnier en fer mince, sem-
blable à une baguette, appelée vulgairement de
ce nom : « Une petite pincette ou badinne de
cuivre jaune » (n° 11). — i. Une pelle, des pin-
cettes et des badinnes » (n° 79).
Biribi, sorte de jeu, qui reste à déterminer :
« Un jeu de biriby, avec plusieurs de ses instru-
ments » (n° 16).
Grimace. « Plus, une table de toilette, avec
son tiroir... De laquelle commode ayant fait
ouverture, s'y est trouvé... une grimasse ou pe-
lotte, le tout servant à la toilette de la dite
dame ». Ce mot s'emploie encore à Poitiers dans
les communautés. Furetière en a donné cette
définition : « Grimace est une toile couverte
d'étoffe, dont les dames se servent à leur toilette
et au couvercle de laquelle il y a une pelotte pour
mettre des épingles ».
Sauterelle. « Une sphère, un globe, une saute-
terelle et autres instruments servant à la géomé-
trie, le tout au nombre de quatre pièces ». Con-
sultons encore Furetière : « Sauterelle, instru-
ment de géométrie, fait de deux règles mobiles
et assemblées par un de leurs bouts en charnière
comme un compas ».
8. — COMPTE D'APOTHICAIRE, de 1766 à
1777, par Delmond, dans le Bullet. de la Soc. arch. de
Brive, 1900, pp. 613-617.
Ce « Mémoire des drogues et médicamens
fourni à M. Lacombe de Bonneval » présente
quelques particularités curieuses. Ainsi la
<i morue », qui revient souvent, est considérée
comme remède : « une morue », « 10 sols de
morue ». Ce qui est plus étonnant, c'est de voir
employer \ç.sAgHus, chose sacrée qui ne pouvait
540
jRebue De rSrt cj)vctten.
pourtant pas se vendre : « deux onces agnus
dei, \6 sols y>. La « poudre de vipère », prise par
« once », au prix de 2 livres, était « un spéci-
fique contre le venin et propre à purifier le sang,
à guérir la petite vérole, les fièvres, la ladrerie
et le scorbut » (Nie. Lemery, Traite des drogues
simples, Paris, 17 14). La « segniée » se prati-
quait, non seulement « au bras », mais aussi « à
la langue ». La « thériaque » figure seule, ou
mélangée « d'huile d'amande et autant eau de
fleur d'orange ».
9. — INVENTAIRE DE L'ÉGLISE DE VIL-
LETTE, AN 11(1793), dans le Recueil de mémoirei,
et documents de l'Académie de la Val d'Iscre, Moutiers,
1900, pp. 360-362.
J'ai écrit inventaire, à cause de la série, mais
le vrai titre est Procès-verbal du Juge de paix\
chargé par « l'administration » de rechercher
« dans chaque commune », « la vaisselle et vases
d'or et d'argent et autres effets précieux des
églises ». La déception fut grande, car il n'y avait
à Villette que deux calices d'argent, « un osten-
soir d'argent » et « une boîte où est le S. Crème
d'étain ». Ce peu de vases dénote une grande
pauvreté au milieu de ces montagnes de la
Tarentaise.
X. B. DE M.
RÉPERTOIRE GÉNÉRAL DES COLLEC-
TIONNEURS ET DES PRINCIPAUX ARTIS-
TES, LETTRÉS, SAVANTS ET CURIEUX DE
LA FRANCE, LA BELGIQUE ET LA SUISSE,
par E. Renard, avec un AVANT-PROPOS, par
Ris-Paquot. Paris, 1901, in- 12 de XXVI-yoS pages.
Ce gros volume est indispensable à tous les
amateurs, qui y trouveront à se renseigner com-
plètement sur les collectionneurs et leurs collec-
tions. Personne n'a été oublié dans ce vaste re-
cueil, qui paraît pour la seconde fois et qui sera
continué ultérieurement, afin de tenir le public
toujours au courant. Des signes spéciaux pré-
cisent chaque genre de collections, histoire natu-
relle aussi bien qu'archéologie, bibelots et biblio-
thèques, etc. Le classement permet de s'y retrou-
ver aisément, car il procède par départements
et, dans chacun, par localités, selon l'ordre
alphabétique. A la fin vient une « Liste des
marchands, avec adresses et professions ». Tout
cela est très pratique et se recommande de soi.
Nous félicitons du succès obtenu l'infatigable
travailleur qui n'a pas reculé devant un pareil
labeur à l'avantage de la science et du progrès.
X. B. DE M.
LA JEUNESSE DU PÉRUGIN ET LES ORI-
GINES DE L'ÉCOLE OMBRIENNE, par M. l'abbé
Broussolle, aumônier du lycée Michelet à Paris,
avec préface de J. K. Huysmans. — i vol. in-8° de
561 pp., avec de nombreuses reproductions d'après la
photographie. Paris, H. Oudin, 1901.
VOICI un livre aux grandes lignes unpeu flot-
tantes, mais tel qu'on en voudrait posséder
sur toutes les écoles primitives. Sur le XVL' siècle
italien, il n'y a plus grand chose à dire, ou du
moins l'on ne semble pas très disposé aujourd'hui
à approfondir le sillon déjà tracé. Avouons-le
donc, peut-être parce qu'il semble avoir livré
tous ses secrets, l'admirable XVI'^ siècle n'est
plus à la mode ; à beaucoup il ne paraît pas assez
chrétien, à d'autres, épris du détail curieux, de
la patiente ciselure de l'exécution, de la vérité
la plus anecdotique, trop oratoire, pas assez
intime et voisin de nous. Et telle est la réaction
actuelle que dans la préface, mise en tête du
présent volume, M. Huysmans va jusqu'à re-
procher à « l'odieux Raphacl » ses madones
« douceâtres » et ses <i nourrices purement hu-
maines ». Il est difficile, on le sait, de plaire à
l'auteur de la Cathédrale, et la seule chose à faire
est de lui laisser la responsabilité de ses épithètes.
Je ne puis cependant ne pas faire remarquer que
celle de « douceâtre » est au moins singulière,
appliquée à des figures comme la Vierge à la
Chaise, la Madone de Saitit- Sixte et la Vierge
aux Poissons.
La vérité est que Raphacl subit le contre-
coup d'un double mouvement des esprits. II y a
d'abord la demi-défaveur dans laquelle est tombée
l'antiquité ; ensuite le retour d'une génération
blasée vers la naïveté des origines. Je m'expli-
que : assurément l'art grec n'a pas cessé d'être
l'art commun des peuples civilisés, et on ne l'a
pas fait déchoir du rocher glorieux de l'Acropole.
Sans doute aussi on n'a jamais mieux connu
l'antiquité dans ses profondeurs, mais jamais
aussi l'archéologie ne l'a plus librement discutée,
la critique n'a établi plus de divisions et de
rangs ; elle n'est plus intangible et sacrée, rien
ne l'est plus, à vrai dire, en ces temps de dis-
cussions à outrance, et peut-être paye-t-elle ainsi
le fétichisme dont elle a été si longtemps l'objet.
D'autre part, comme à toutes les époques d'ex-
trême raffinement, on demande à l'art les im-
pressions les plus subtiles, les plus nouvelles, et
c'est ainsi qu'il est de mode de trop aimer Botti-
celli si parfaitement inconnu au grand public, il
y a un demi-siècle. On se plaît aux naïfs et
aux compliqués, c'est souvent tout un, enfin on
raffole des énigmatiques ou prétendus tels. C'est
le propre des âges où l'invention se dérobe
B(bliograpl)te,
341
épuisée, que cette passion pour les époques loin-
taines, de sincérité naïve, un peu gauche mais
émue, parce que le propre de l'homme est
d'aimer ce qui lui manque le plus.
L'Ombrie est le domaine de M. l'abbé Brous-
solle ; il l'a parcourue à maintes reprises en tous
sens, à la manière d'un pèlerin qui cherche les
sanctuaires les plus ignorés, les plus obscurs de
la piété et de l'art. Aussi bien, nous avons de
lui un volume publié en 1896 — Pèlerinages
cJ laiic (--citlutU. et Oitiinu
É,ci5c&
ombriens, études d'art et de voyages — dont la
Revue de r Art cJirétien A. rendu compte en son
temps. L'auteur nous avait donné là un de ces
livres patients, consciencieux et sagaces, d'une
marche un peu incertaine comme l'avait été
celle du voyageur lui-même, mais plein d'idées
et de faits, à tout prendre, d'une qualité supé-
rieure et rare.
Sans être d'une structure entièrement irrépro-
chable, celui d'aujourd'hui est beaucoup mieux
fait et plus important en faits comme en idées
et en pieuves. Il ne s'agit plus, cette fois, d'œu-
542
3^e\)uc ïje T^rt cbrctien.
vres rencontrées au hasard d'une longue pro-
menade en zigzags à travers une région déter-
minée, mais d'une synthèse générale à laquelle
concourent des comparaisons entre des œuvres
Ottavio Nelli. — Rencontre à la Porte d'Or. — Fresque de Foligno.
dispersées dans toute l'Europe. Et les idées per-
sonnelles de l'auteur sont soutenues par une
documentation telle qu'on ne pourra désormais
écrire sur ce sujet sans consulter son livre.
Gentile da Fabriano. — La Présentation. — Prédelle à Paris.
Pour M. l'abbé Broussolle l'Ombric artistique
forme au Nord de Rome, dans les anciens États
de l'Église, une sorte d'île aux contours onduleux
dont les lignes seraient déterminées par les
2d(bltograpl)te.
343
voies ferrées de l'Italie centrale. Il en résulte
une sorte de quadrilatère fort irrégulier coupé
par l'embranchement de Terontola à Foligno, en
passant par Pérouse, la métropole artistique de
la région. Cependant ce titre lui pourrait être dis-
puté par Assise, le lieu natal de saint François,
à la double et merveilleuse église, éclose comme
une fleur de foi, d'art et de beauté sur le tombeau
de celui qui a été sur la terre la moins imparfaite
image du divin modèle. C'est une région aux
reliefs modérés, aux sites faits de paix et de
grâce, sous la douce lumière italienne ; les pay-
sages de l'Ombrie sont ceux que l'on voit aux
tableaux du Pérugin et de Raphaël, dans ses
premières années.
Nulle mollesse, d'ailleurs, dans la race qu'il ne
faudrait pas juger sur l'art ombrien de la fin du
XV*^ siècle et du commencement du XVI^. Ho-
mmes postretna meminere, cette parole si juste
de Tacite s'applique pleinement ici ; le doux et
calme décor artistique de l'école péruginesque
masque aux yeux celui de la période précédente.
Tout, en effet, ne fut pas sourire dans la pein-
ture ombrienne du XV"^ siècle, qui a pour repré-
sentant le plus connu, non le plus grand peut-
être, Gentile da Fabriano. Aux fresques du palais
Mezzastri.
Madone et Anges. — Fresque à Foligno.
Trinci à Foligno, inspirées des naïfs évangiles
apocryphes qui ont tant charmé les artistes du
moyen âge, Ottavio Nelli fait preuve d'un natu-
ralisme à la fois religieux et rude. Il y a plus de
tendresse dans ce Benedetto Bonfigli à qui
M. l'abbé BroussoUe attribue la Vierge, fort belle
d'ailleurs, récemment entrée au Louvre comme
une œuvre de Piero délia Francesca, né en 1416,
un de ces peintres qui sont grands non seulement
par leurs œuvres, mais aussi par le pas qu'ils ont
fait faire à l'art. Encore un très grand artiste, ce
Melozzo da Forli, né en 1438, mais qui ne peut
qu'assez artificiellement être rattaché à l'école
ombrienne; toutefois il ne pouvait être passé
sous silence dans une revue aussi générale. A la
bibliothèque du Vatican, sa fresque. Sixte IV
avec ses neveux et le bibliothécaire Platina, est une
des plus belles du palais pontifical. On peut
donner les mêmes éloges à ces têtes d'apôtres et
de musiciens que l'on voit dans la sacristie de
Saint-Pierre, restes de la décoration du sanc-
tuaire de l'église des Saints-Apôtres, démoli en
171 1. Un peu au-dessous, et cette fois bien de l'é-
cole ombrienne, voici Boccati da Camerino, enfin
Nicolo Alunno, de presque grands peintres, mais
dont les noms sont à peine connus hors de la
344
ISitWt lie rart rfjrcticu.
région qu'ils ont rennplie de leurs œuvres. A la pi-
nacothèque de Pérouse, Giovanni Boccati a une
Vierge dont M. l'abbé Broussolle dit qu'elle est
« une belle vision du paradis ». Nicolo Alunno,
qui travaillait à Foligno, et dont le Vatican pos-
sède deux œuvres importantes, a quelque chose
de la mélancoh'e flamande. Et les ressemblances
sont telles ici que M. l'abbé Broussolle croit à
une influence directe, non à ce parallélisme qui
fait souvent apparaître les mêmes caractères dans
des œuvres écloses en même temps dans des
pays fort éloignés et sans rapports essentiels
entre eux.
Or cette influence est fort probable ; les
peintres du Nord étaient connus et appréciés en
Italie au 'X.V'^ siècle; le plus grand d'entre eux,
depuis la mort des Van Eyck, Rogier van der
Weyden, était venu à Rome ; Juste de Gand a
vécu plusieurs années à la cour du duc Frédéric,
à Urbino, où il existe de lui un très beau tableau
la Ccite. Les grands amateurs italiens aimaient
ces œuvres patientes et vraies qui, pour des raf-
finés de leur sorte, avaient une saveur exotique
et piquante. Ainsi Richard Portinari faisait venir
de Bruges cette Adoration des bergers, qui est
l'œuvre capitale de Hugo van der Goes et l'un
Boccati da Camerino. Vierge et Saints à Pérouse.
des chefs-d'œuvre des écoles septentrionales que
possède Florence. Il est assez singulier que la
Flandre lointaine exerce une telle influence en
Ombrie, alors qu'on n'en constate aucune de
Florence toute voisine ; M. l'abbé Broussolle
admettrait plus volontiers une certaine action de
l'école siennoise.
En dehors des limites géographiques et artis-
tiques de l'Ombrie, l'auteur distingue un homme
qui appartient manifestement à la famille om-
brienne, Giovanni Santi. I! ne fut guère, à vrai
dire, qu'une sorte d'entrepreneur de tableaux et
de fresques sur commande, rôle qui est du reste
celui de beaucoup de peintres italiens en ce
temps et en d'autres, improvisateurs habiles, sur
des thèmes qui ne variaient pas beaucoup.
d œuvres votives dont la piété des particuliers
couvrait à l'envi les murs des églises. II me
semble que le procédé ex[:)éditif et primesautier
de la fresque est le grand facteur de cette facilité
qui est le caractère général de l'art italien. Mais
Giovanni Santi n'est autre que le père de Ra-
phaël, et l'artiste obscur d'Urbin souffre, dans
sa rénommée, de cette évolution du langage
populaire qui a transformé son nom de Santi en
Sanzio. Il était né avant 1446, et en 1469 nous
le trouvons établi à Urbino dans une maison à
lui, celle où, en 1483, de son mariage avec Magia
Ciarla naîtra Raphaël. Nombreuses sont les
peintures de Giovanni Santi, mais ce qu'il nous
a laissé de plus précieux est peut-être cette Chro-
nique riinée, dont Passavant a donné de notables
BtbUograp|)îe.
345
extraits et qu'il serait intéressant de voir
publier en entier ; dans cette œuvre qui, selon
M. Broussolle, n'est pas aussi médiocre qu'on le
veut bien dire, Giovanni Santi parle avec admi-
ration de Jean van Eyck et de Rogier van der
Weyden et dit d'eux qu'ils ont « quelquefois
surpassé la nature : Che Itaii superato spesse volte
il vero. 1>
Évidemment il est ici l'écho de l'admiration
que dans ce pays d'improvisateurs excitaient ces
œuvres lentes, précises et sincères ; il les con-
naissait et peut-être avait-il été en contact avec
quelques-uns de ces peintres attirés du Nord vers
l'Italie lumineuse.
Toute cette première partie du livre de M. l'abbé
Broussolle est neuve, amplement documentée
et à peu près excellente.
En abordant la seconde, nous nous trouvons
sur un terrain plus connu et déjà maintes fois
exploré, non encore épuisé toutefois. Aux ap-
proches du XVI' siècle, dans ce premier renou-
veau de 1 antiquité éveillée de son long sommeil,
la pieuse rudesse du premier âge ombrien va se
tourner en douceur, en élégance un peu banale,
moins intimement personnelle à coup sûr, et dont
le Pérugin sera l'expression accomplie. Très
admiré au commencement du XIX^ siècle, si
bien que les commissaires chargés de pourvoir
Nicolas Aluiino. — Martyre de S. Barthélenii.
l'empire français de chefs-d'œuvre arrachés à
l'inépuisable Italie, acheminaient par charretées
ses œuvres de Pérouse vers Paris ; fort célébré
par Rio, du moins dans la première édition de
son Art chrétien, le Pérugin a perdu beaucoup
de terrain depuis un demi-siècle. On ne consi-
dère plus que la peinture moderne date de lui et
l'on appelle à la lumière comme les vrais primi-
tifs, les vrais et pieux ingénus, ces prétendus
barbares qui se révèlent à nous bien autrement
savoureux et personnels. Le Pérugin n'est qu'un
homme de la transition entre l'art primesautier
des premiers Ombriens et celui de Raphaël.
Déjà il a reçu quelque clarté de l'antique, il y
paraît à une certaine plénitude de formes, à
une simplicité plus apaisée répandue dans ses
œuvres. Toutefois M. Huysmans va beaucoup
trop loin en prétendant que ses Vierges sont
des Vénus et son saint Sébastien un Apollon.
Ce fondateur de la nouvelle école ombrienne
fut-il un grand artiste? Non, en vérité, il donne
trop, pour l'être, l'impression du déjà vu, du tou-
jours la même chose.Du charme,oui,de l'émotion,
non ; et peut-être ce défaut tient-il à la tiédeur
religieuse que son siècle lui a reprochée. Vasari
va même jusqu'à l'accuser formellement de maté-
rialisme, ce qui parait à bon droit exagéré à
M. l'abbé Broussolle. Mais il n'en est pas moins
REVUE DE l'art CHRÉTIEN
I9OI, — 4""^ LIVRAISON.
346
Bebue De T^it thvttitn.
certain que le Pérugin ne fut pas un de ces ar-
tistes pour qui le travail était une prière, un
acte de foi et d'amour ; ceux-ci, dont le plus
noble a été le Bienheureux Angelico, ont pu être
de moins habiles praticiens que le Pérugin, ils ont
été plus grands parce qu'ils furent plus sincères
et surtout plus émus. Pérugin, qui fit de l'art un
métier, ne fut donc qu'un artisan supérieur, et
j'en atteste cette facilité souriante, ces expres-
sions imprécises et banales qui dans les in-
nombrables tableaux votifs de l'école péru-
ginesque vont désormais régner après lui et
d'après lui.
Le livre de M. l'abbé BroussoUe n'est pas de
ceux qui se lisent en courant, comme les pauvres
monographies de vulgarisation dont se compose
\ Histoire des peintres de Charles Blanc, ce La-
rousse de l'art. C'est un de ces ouvrages d'érudi-
tion, mais aussi d'idées générales et particulières,
documentés sans pédantisme, consciencieux sans
lourdeur, qui sont trop rares en France. J'ai déjà
dit que comme construction il laissait un peu à
désirer, et c'est là un défaut, un demi-défaut
plutôt, mais il n'y a rien ici du pêle-mêle de ces
livres mal faits, dont on dit volontiers qu'ils sont
comme une bibliothèque renversée. On lira aussi
avec intérêt la préface de M. Huysmans, bien
entendu sans en accepter les idées et sans croire
que l'auteur a vu et admiré à Gand des panneaux
de Van Eyck qui sont à Berlin.
De nombreuses reproductions, d'après les ex-
cellentes photographies de la maison Alinari de
Florence, documentent graphiquement ce beau
et bon volume que l'on quitte ayant beaucoup
appris, avec des idées saines autant qu'élevées
sur l'art religieux. C'est un plaisir, un enseigne-
ment que je dois à M. l'abbé BroussoUe et dont
je suis heureux de le pouvoir remercier publi-
quement.
Henri Chabeuf.
LKS ARCHIVES DE LA COMMISSION DES
MONUMENTS HISTORIQUES, par A. Pkrrault-
DABOT, Paris, Lechevalier, 1900.
L'ÉTAT DES MONUMENTS HISTORIQUES,
par L. Pâté, Paris, Picard, 1900.
CRÉÉE en 1837 et réorganisée en 18S9, la
Commission des monuments historiques a
bien mérité de la patrie. Les incomparables mo-
numents anciens dont la France est si riche
étaient, au commencement de ce siècle, bien ex-
posés à diparaître. Le premier cri d'alarme fut
poussé, en 1 83 1 , par feu Vitet dans un mémorable
rapport adressé au ministre de l'Intérieur. Vitet,
et après lui, Mérimée, furent les sauveurs des
monuments incompaiables du moyen âge et
de la Renais.'^ance dont la conservation est à
présent assurée.
La Commission a opéré le classement et
assuré la restauration des monuments de tout
style qui couvrent le sol de la Gaule et des colo-
nies. Elle a constitué pour leur garde et leur
étude un groupe de protecteurs éclairés, tels
que Ch.Lenormand,F. de Lasteyrie, A. de Long-
périer, Guilhermy, J. Quicherat, du Sommerard,
A. Darcel, L. Courajod. Elle a amassé en même
■'4Wl^fi'--j| lî'
y-
Jubé de Saint-Etienne du Mont à Paris.
temps ses précieuses Archives, qui sont présen-
tement publiées sous la direction de M. Perrault-
Dabot. Celles-ci comprennent une collection de
photographies prises avant restauration, comp-
tant environ 25000pièces,dont plus de 3000 sont
mises à la disposition du public. Elle possède,
en outre, de remarquables relevés d'architectes.
Dès i845,Vaudoyer relevait les célèbres maisons
d'Orléans, de Ciuny, de Troj-es, de Provins, de
Rouen, de Perpignan, de Dijon, de Tours, de
Vienne et de la Vendée ; à ces relevés s'ajoutè-
rent les dessins de grands monuments, notam-
ment des cathédrales, dues à Bocswilwald, à
Duban, à Lassus, à Questei, à Abadie, à Ru-
ll5tbltograpl)te.
347
prich-Robert, etc. Amassés en un demi-siècle,
ces dessins forment un trésor graphique de plus
de 1 2000 pièces de valeur, sous la garde de la Com-
mission des uioniiinents historiques, sans compter
de nombreuses reproductions de peintures mura-
les qui sont au Trocadéro, avec les précieux
dessins de Viollet-le-Duc. En outre, une biblio-
thèque contenant 3000 ouvrages spéciaux, est
ouverte aux chercheurs.
Façade de Saint-Étienne du Mont à Paris.
La publication des principaux documents des
Archives fut commencée en 1S52 ; en 28 ans on
mit sur pied 4 volumes ; cette publication se
complète, en ce moment, par l'impression de
5 volumes in-folio de 100 pi. chacun. Trois vo-
lumes ont paru déjà ; le 4^ est sous presse.
L. C.
LES SCULPTURES EN PLEIN AIR A BRU-
XELLES, guide explicatif, par Pol. Meirsschaut.
Édition de luxe. — Un vol. in-8° de XVI-2 1 2 pp., illus-
tré de 121 photogravures en teintes variées. Brugland,
Bruxelles, 1901. — Prix : fr. 7,50 (').
^ I. En vue de permettre aux Administrauons communales et aux
Etablissements d'instruction de donner cet ouvrage en prix, il en a
été fait une édition ordinaire à 5 francs l'exemplaire.
Aux bonnes époques de l'art monumental, la
statuaire faisait partie intégrante des édifices.
C'est quand elle se greffe à l'architecture qu'elle
prend sa plus haute expression et qu'elle est le
mieux comprise du public. Ainsi l'entendait-on
sous Périclès comme sous saint Louis. La Re-
naissance, en divisant les arts et en créant les
genres distincts cultivés par les virtuoses au nom
de l'art pour l'art, a fini par donner naissance à
une statuaire sans destination, qu'on ne saurait
où remiser, si l'on n'avait créé pour elles des asi-
les de charité, qu'on appelle des musées.
Celles qu'on a laissé errer sur les places publi-
ques ont souvent l'air dépaysé, à moins qu'elles
ne soient fortement empreintes et affectées à un
usage monumental.
A cet égard de grands progrès se sont accom-
plis au cours du siècle qui vient de finir, et nous
arrivons à une époque, où se refait l'union entre
la sculpture et l'architecture. C'est ce progrès
que l'on peut suivre en France surtout et consta-
ter à Bruxelles aussi, en comparant par exemple
le parc avec le square du Sablon.
Quoiqu'il en soit, rien de plus intéressant que
le recueil fort joliment illustré, que M. P. Meirs-
schaut a consacré à la sculpture en plein air, qui
décore les monuments et promenades de Bruxel-
les, et auxquels on doit l'aspect pittoresque du
Petit Sablon, du Jardin botanique, du Quartier
Nord-Est, de l'Avenue Louise, ainsi que la déco-
ration sculpturale des monuments publics les plus
récents, surtout de l'Hôtel de Ville et des Mai-
sons de la Grand'Place.
L'auteur passe en revue plus de 700 œuvres
dues à 146 sculpteurs appartenant à trois siècles.
M. Meirsschaut conduit le flâneur d'abord au
Parc, où 48 sculptures (quelques-unes sont abso-
lument ignorées du public) se cachent dans la
verdure ; puis au Palais des Académies, au palais
des Beaux-Arts, au Petit Sablon, avec son pan-
théon national ; à la Colonne du Congrès ; à l'é-
glise Sainte-Gudule, etc. Deux chapitres ont
pour objet la Grand'Place et son merveilleux ca-
dre, qui se compose d'une trentaine de maisons
de Corporations.
L. C.
UZESTE ET CLÉMENT V, par l'abbé LE BrUN.
— Bordeaux, Foret, 1S99, in-8°, 175 pp. illustrées.
Uzeste est célèbre pour avoir été probable-
ment le berceau (') et avoir reçu la sépul-
ture d'un pape, dont la mémoire, salie par les
I. Si ce n'est Uzeste, c'est la paroisse voisine de Villandrant.
248
3Rel)ue ÏJC T^rt c|)rctiea»
ennemis de l'Église, est aujourd'hui presqu'en-
tièrement réhabilitée. Uzeste possède, en outre, une
église fort remarquable. L'histoire de la paroisse
et la monographie de l'église ont été traitées
dans ce livre, qui a vu sa seconde édition, chose
bien rare pour une publication de l'espèce. C'est
que son auteur est un bon écrivain, et qu'il a eu
pour collaborateur un maître en archéologie,
M. Brutails, bien connu de nos lecteurs. Celui-ci
leur a fourni quelques pages de description
technique qui sont des modèles de clarté et de
précision. Le texte de M. Br. nous montre sans
obscurité des choses qu'il ne semble possible
d'exprimer que par le dessin ; il est vrai que
quelques vignettes auraient pu remplacer de
longues pages, mais nous aurions perdu ces
Plan de l'église d'Uzeste.
pages, qui sont d'un virtuose dans l'art de
décrire les formes.
Sur les fondements d'un oratoire roman, dont
on a retrouvé la crypte. Clément V éleva, au
XIV' siècle, l'église d'Uzeste, dont !e chevet
épouse la forme semi-circulaire de l'abside pri-
mitive. Cet édifice, classé parmi les monuments
historiques, est gracieux et intéressant. Il est
dominé, presque écrasé par une tour carrée
puissante, un peu lourde à sa base, couronnée
d'élégantes balustrades, percée de jolies fenêtres,
couverte d'une flèche en pierre, aux huit arêtes
fleuronnées, un peu légères pour la tour.
Le plan est original : les trois chapelles du
chevet sont greffées directement sur l'abside ; ou,
si l'on veut, le déambulatoire et les absidioles
à trois pans qui le bordent sont compris sous
les mêmes voûtes à six compartiments que se-
Biblto5rapl)ie,
349
parent des doubleaux dirigés dans le prolon-
gement des rayons de la courbe du chœur. En
outre des voûtes nervées àdoubleaux de recoupe-
ment couvrent les travées de la grande nef,
posant sur des piles alternativement fortes et
faibles, flanquées de sveltes colonnettes. Les voû-
tes dece système ont été généralement combinées
avec des voûtes de bas-côtés carrées et deux fois
plus nombreuses. Ici, chose curieuse, les voûtes
des collatéraux sont du même système que celles
des nefs et, par suite, très allongées. Il en résulte
dans la projection horizontale des nervures au-
tour des piles, de grandes inégalités dans les
angles compris entre les plans de direction de
ces nervures et, par suite, des complications
dans les retombées qui s'égrènent, comme dit M.
Brutails, à différents niveaux, et ont été réalisés
par des expédients divers. Il y a là de curieuses
combinaisons, que M. Brutails analyse d'une
manière serrée, avec la lucidité qui le caractérise.
M. l'abbé Brun nous décrit en détail son
église dont il est épris, ainsi que le tombeau de
Clément V avec la statue couchée, malheureuse-
ment décapitée par les Vandales, et diverses
sculptures, notamment une statue romane d'un
évêque bénissant, et celle de la belle Vierge tant
vénérée des pèlerins, puis détruite par les Hu-
guenots et dont M. le curé Brun a recueilli les
débris épars. Il a pu reconstituer cette intéres-
sante statue du XIII<= siècle, qualifiée en 1623
par l'archevêque de Bordeaux, de « désagréable
et indécente ». Signalons encore une belle porte
historiée, avec rosace élégante, des clefs de voûte
et des chapiteaux à sujets symboliques, et des
marques détacherons du XII« et du XII I<= siècle.
T.. C.
HISTOIRK DE LA CATHEDRALE DE
NOYON, par Eug. Lefèvre-Pontalis. Paris, 1900,
Bibl. de l'Ecole des Chartes.
La monographie que nous annonçons est une
des plus remarquables parmi les études de l'es-
pèce que nous aimons tant à enregistrer. Elle
est due au nouveau Directeur de la Société
française d'archéologie.
Une gracieuse légende rapporte que la pre-
mière cathédrale de Noyon, bâtie par saint Éloi,
étant devenue la proie des flammes en 6^6, la
vierge Godeberte arrêta l'incendie d'un signe de
croix. Sans doute la sainte fut appelée un peu
tard ; car saint Mummolin (^ 685), selon M.
Lefèvre-Pontalis, eut à reconstruire une seconde
cathédrale entière, dans laquelle Charlemagne
fut sacré en 768. Détruite par les Normands au
siècle suivant, elle fut probablement relevée de
ses ruines au commencement du X^ siècle et
reconstruite encore par Hardouin de Croy, dans
la première moitié du XI^ siècle ; elle fut enve-
loppée dans l'incendie qui réduisit en cendres
presque toute la ville de Noyon en 1131. Enfin,
Simon de Vermandois se mit à l'œuvre pour
élever l'édifice dont une partie subsiste: c'est ce
que notre savant auteur établit à l'encontre de
Levasseur et de Vitet. Quoi qu'en ait pensé ce
dernier, le chevet actuel de N.-D. de Noyon
devait être à peu près terminé en 1 157, lorsqu'eut
lieu la déposition dans une nouvelle châsse des
ossements de saint Éloi. L'architecture du chœur
corrobore les déductions tirées de l'histoire.
M. L.-P. fait remarquer l'analogie étroite de cette
construction avec l'abside de Saint-Germain-
des Prés (i 163) et avec quelques autres construc-
tions du milieu du XIP s., notamment l'église
de Dommartin, consacrée en 1163.
Baudouin II fit bâtir la salle du Trésor et
commença les travaux du transept, qui furent
terminés vers 1170. Renaud, successeur de Bau-
douin II, reprit vers 1180 les travaux de la nef
Etienne de Nemours a dû trouver en 1188 la nef
presque achevée avec ses bas-côtés ; à partir de
cette époque on constate une reprise ; le décor
se modifie alors et comporte de nouvelles espèces
végétales que notre collaborateur M. Lambin
étudiera prochainement dans nos colonnes. Les
proportions s'allongent, les piles deviennent
moins trapues, mais l'ordonnance antérieure est
respectée et présente le prototype de celle de
la cathédrale de Senlis, consacrée en II91 et de
celle de Laon.
Ce n'est qu'au milieu du XIII^ siècle que
s'édifia le cloître. L'incendie de 1293 ne détruisit
qu'une partie de la cathédrale, avec le cloître
et la salle capitulaire, savoir la charpente, les
voûtes et l'arc triomphal. M. L.-P., par une judi-
cieuse critique, rectifie ici les erreurs des annalis-
tes. Après ce sinistre eut lieu le remaniement du
triple portail de la façade, la reconstruction sur
plan barlong des voûtes de la nef et celle des
arcs-boutants dont le nombre fut doublé. La
grosse tour du Nord commencée alors fut termi-
née en 1320. Enfin, vers 1333, furent édifiés les
deux éperons bâtis en dehors du porche pour
contrebuter les voûtes. L'église fut flanquée de
chapelles latérales au cours du XIV'= siècle.
Nous ne suivrons pas le savant monographe
dans l'étude critique très serrée qu'il continue à
faire de l'histoire d'un des plus importants monu-
ments de la France au moyen âge. Il redresse
des erreurs, précise des points douteux, apporte
des données nouvelles, et nous fait regretter que,
par cinq fois déjà, l'on ait prématurément entre-
pris, sans y être assez préparé, l'étude d'ensemble
qui aurait dû lui être réservée. Il a cru devoir
350
3Rcbue ï)C r^rt cl)vcticn.
se contenter d'un modeste mais substantiel
mémoire où, durant cent pages, il étudie la vieille
cathédrale sous tous ses aspects, et cette étude
captive par la précision de son contenu, bien
qu'elle soil menée tout d'une haleine,sans l'ombre
d'une subdivision, d'un sous-titre, d'un simple
blanc entre les alinéas.
Les croisillons du transept de Noyon furent ar-
rondis comme ceux de la cathédrale de Tournai,
qui portent l'empreinte d'un style plus archaïque,
car leur construction remonte au second tiers du
Xlle siècle. «L'influence germanique se fit donc
sentir dans le plan du transept de Notre-Dame
de Noyon, comme dans .certains clochers du
Vermandois et de la Champagne ; mais si les
croisillons arrondie de plusieurs églises des bords
du Rhin, comme celles des Saints-Apôtres et de
Sainte-Marie du Capitole à Cologne, sont anté-
rieurs à ceux de Tournai, il est juste de faire ob-
server que cette forme dérive du plan des cha-
pelles trichores élevées à Rome par les premiers
chrétiens ('). »
M. L.-P. cite ici les chapelles à absides trifo-
liées de Saint-Sixte, de Saint-Soter et de Sainte-
Symphorose à Rome,celles d'Algérie et de Tunis,
signalées par M. Gsell, celles de Saint-Laurent
de Grenoble (2), de Germigny-les-Prés, de Saint-
Satire de Milan, de Saint-Michel-d'Aiguilhe au
Puy, etc. Il rappelle enfin que l'abbatiale de
Saint-Lucien de Beauvais (i^r quart du XII^ s.)
présentait également des croisillons arrondis.
De même il établit la filiation de cette forme
caractéristique, depuis Rome et le premier siècle
chrétien jusqu'au XI= siècle, et l'on ne voit pas
ce qui l'empêche de conclure, comme j'ai cru
pouvoir le faire à propos de Tournai (3), que le
groupe si caractérisé d'églises romanes du Nord
de la France, auquel appartient Tournai, pourrait
dériver en ligne droite du style lombard au même
titre que les églises du Rhin. Ce groupe a ses
caractères propres, distincts du rhénan; il peut
devoir directement à la Lombardie les traits
qui l'apparentent à l'école rhénane, et l'on ne
nous a jamais montré clairement les traces de
l'influence de celle-ci sur les premiers.
L'alternance de colonnes et de piles cruci-
formes, par exemple, que le savant maître attri-
bue à cette influence « germanique ou nor-
mande » a pu être empruntée, comme il l'observe
lui-même, aux constructeurs lombards ; je note
avec plaisir cette remarque, et cette autre, que la
dite alternance fut appliquée peut-être pour la
première fois (en France) dans la nef de l'abba-
tiale de Jumièges (1067). On la retrouve à N.-D.
1. Lefèvre-Ponlalis, Ouv. cit., p. 17.
2. V. Revue de /'Art chrétien, année 1894, p. 75.
3. laid , année 1893, p. 216,
du Pré au Mans, à Saint-Nazaire de Carcassonne
comme à Soignies en Belgique, et en Angleterre.
L. C.
L'abondance des matières nous oblige à
ajourner, quoique composés, plusieurs articles
bibliographiques, notamment le compte rendu
par M. Chabeuf de la belle Histoire de Saint-
Bénigne de Dijon, par M. le chan. Chomton.
©ériotitqttes.
L'ART ET L'AUTEL. (N^ i, mai igoi.)
C'est le titre d'une nouvelle revue illustrée,
fondée pour la rénovation de l'art chrétien
et qui se propose de combattre le mauvais goût
presque général des œuvres d'art religieux con-
temporaines pour y substituer en architecture,
en sculpture, en peinture et en musique un stj'le
plus pur et plus artistique. Les divers articles de
ce premier numéro sont consacrés surtout à ex-
poser ce programme sous ses différentes formes.
Revue d' archéologie poitevine. — Ce périodique,
dû à l'initiative de notre 'regretté collaborateur
Mgr Barbier de Montault, est tout plein de ses
savantes communications. Signalons les derniè-
res que nous aurons l'occasion d'y rencontrer.
C'est d'abord une note sur une applique d'émail
champlevé du XII 1*= siècle ; elle méritait d'être
signalée, mais elle est d'un caractère banal com-
me tant d'œuvres de Limoges. L'érudit prélat,
comme feu de Linas, son émule, fait ressor-
tir le contraste qui s'accuse entre de nombreux
objets mercantiles et sans destination à priori,
sortis des mains d'émailleurs limousins, et les
travaux originaux et de grande envergure aux-
quels se livraient leurs confrères des bords du
Rhin. — Plus loin nous trouvons une communi-
cation d'ordre liturgique sur la prière « Avete »
pour les défunts et la description succincte d'un
missel poitevin du XV^ siècle, puis l'inventaire
de l'église de Lonzy en 1624.
Mgr Barbier de Montault a fait école, et c'est
dans le même esprit scientifique qui caractérise
ses travaux, que sont conçues les notices de ses
collaborateurs : {'Encensoir de Varennes, par M.
J.-B. de la Rennerie, Un Reliquaire-cœur à Poi-
tiers, par M. de Fredilly, Un architecte loudnnois
au XVI F' siècle par Dom Rasquin.
Semaine religieuse de Soissons et Laon. — A
propos des cloches de Charlj'-sur-Marne, M.
Jos. Berthelé donne une intéressante leçon
de paléographie à M. L.B. (no du 26 janvier 1901).
20tbltograpl)te»
351
XiiDeji* biblîograpl)(qiie.
(5
B •*: «Sî' «Se «ïc •'^c •'*; »!tt •'« ^« «^ «'Ji: •!« •'« ^jc «Si;' •■« «'^ «iii! •'>i: •'« ^*r ♦'« «'^ (?
:^rcl)éologie etiideaiu* :art0^'\
==^ JFrancc. =
Adam (L'abbé A), Avoine (J.), de Beaure-
paire (C.-E. G. et J.), Boscq de Beaumont (G.),
et Bouillet (l'abbé), etc. — La Normandie monu-
mentale El' PITTORESQUE. Édifices publics, églises,
CHATEAUX, manoirs, etc. Manche, i'" et 2"^ parties. —
Gr. in-folio avec grav. et 96 pi.
Alcanter de Brahm. — L'église Saint-Julien-
LE- Pauvre, dans Le Parisien de Paris, 1S98, n^ 89.
Alis (R.-L.). — • Histoire de la ville, du châ-
teau et des seigneurs de Caumont. — In-8°, Agen,
Ferran ; Saint-Colomb, au Presbytère.
Allemagne (H.-R.-d'). — Un bassin de Hugues
IV, roi de Chypre et de Jérusalem (1324-1359).
— In-S", avec iig. et planches. Paris, Leroux.
Babeau (A.). — Le Musée de Troves. — In-
8° avec 11 gr. Paris, dans la Gazette des Beaux-Arts.
Barbier de Montault (Mgr X.). — Le trésor
liturgique de Cherves en Angoumois. — In 4°,
Angoulème, Constantin.
Bazin (A.). — Notice historique et descrip-
tive de l'église Saint-Paul-Saint-Louis. — In-
16, 163 pp. Paris, Leroy. Prix : 2. 50 fr.
Bertaux (Emile). — Les saints Louis dans
l'art italien, dans la Revue des deux Mondes, i"
avril 1900, p. 616.
Bonne (L'abbé A.). — La collégiale royale de
Saint-Martin de Champeaux, dans le Bu/l. de la
Soc. i'hist. et d'archécl. de Provins, III, pp. 55-84 et
tirage à part.
Boucher (G.). — Saint-Étienne de Niort. —
In-8", et 7 grav. Ligugé, Bluté.
Bouillet (L'abbé). — Au pays du frère Hugo,
dans les Notes d'art et d'archéologie, avril 1900.
Le même. — Les églises paroissiales de
Paris. V : La Sainte Chapelle. VI : Notre-Dame
d'Auteiiil. — II fasc. gr. in-8°, Paris.
Le même. — Les églises paroissiales de
Paris. VIII, Saint-Germainl'Auxerrois. — In-8°,
avec grav. Paris, Rondelet.
Brandicourt (V.). — Les labyrinthes d'église,
— dans le Cosmos, 13 janv. 1900.
Braquehaye (C). — Documents pour servir
a l'histoire des arts en Guyenne. T. III. Les
peintres de l'hotel-de-ville de Bordeaux et des
I. Les ouvrages marqués d'un astérisque (') ont été, sont ou
seront l'objet d'un article bililiographique dans la I\evue.
ENTRÉES ROYALES DEPUIS 1525. In-S", 314 pp. et
planches hors texte. Paris, Pion, Nourrit et C'". Bor-
deaux, Feret et fils.
* Broussolle (M. l'abbé), — Huysmans (J. K.).
— La JEUNESSE DU PÉRUGIN et LES ORIGINES DE
l'École ombrienne. — Paris, H. Oudin, 1901.
* Cabrol (Le R. P. dom F.). — Le livre de la
prière antique. — In-12, XVII-573pp. Paris,Oudin,
1900.
Canatde Chizy (N.). — Études sur le servi-
ce des travaux publics et spécialement sur la
charge de maître des œuvres en Bourgogne, sous
les ducs de la race de Valois (1363-1477). — In-
8% Caen, Delesques.
Carot (H.). — Vitraux des églises de Paris.
Commission du vieux Paris. Procès-verbal de
1898, N" 3, p. 4-5 ; N° 4, p. 3-7 ; N° 9, p. 1-2.
Chevalier (Le chan. Ul.). — Étude critique
de l'origine du s. Suaire de Lirey-Chambery.
Turin. — In-8°, Paris, Picard.
Le même. — Le Sanctuaire de Turin est-il
l'original ou une copie. — In-8°. Chambery,
Menard.
* Chevalier (V.). — Les rues de Romans, frag-
ments historiques. — les consuls de Romans.
Le même. — L'abbaye de Notre-Dame de
Valcroissant, au diocèse de Die. — In-8', Valence.
*.Chomton(L'abbé L.). — Histoire de l'église
Saint-Bénigne de Dijon. — In 4° de 470 pages
avec trente planches hors texte.
Coutan. — L'architecture religieuse dans
l'ancien diocèse de Soissons aux XI' et XIP
SIÈCLES, dans le Bulletin monumental, 1899, N° 2.
Crocodiles empaillés dans les églises, dans
V Intermédiaire des chercheurs et des curieux, 7 août
1899.
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^ ^^^ ^. ^ ^ ^^. ^. ^. ^ -^. ^^ ^ ^ ^, ^ ^ ^ ^ ^ ^^ ^':^ ^ ^M^
Cl)rOntClUt. sommaire : LÉON XIII ET LE CHANT GRÉGORIEN. — PLAIN
CHANT: le monopole des éditeurs liturgiques. — RESTAURATIONS: cathédrale de
Rouen ; Monuments belges: Soignies, Bruge:,, Hoogstraeten, Châtelet, Enghien, Diest, Binche,
etc. — NOUVELLES. — NÉCROLOGIE.
:^^ ^i^ -^^ :^'K -^^ ^<^^ --^ -^^ '-^ '-^ '^^ '^^ '-^^ '-^ ''^ '-^ -^ -^ '-^^ -^^ '^^^ W W^
Hcon XIII et le cbant GrcBoricn.
os lecteurs sont pour la plupart de ceux
qui se sont intéressés avec la plus vive
sympathie aux belles études de Dom
Pothier sur l'ancien chant grégorien
et à^la réforme introduite par les PP. Bénédictins
dans la musique liturgique. Nulle œuvre d'art
chrétien plus haute et plus méritoire n'a été
accomplie au cours du XIX^ siècle. Mais ce
retour aux meilleures traditions, s'il était
partout réalisable au début dans les cloîtres,
n'était pas moins désirable dans les églises sécu-
lières, où il a rencontré tant d'obstacles. Nous,
chrétiens d'une génération qui s'en va, nous
désespérions de voir s'accomplir de notre vivant
ce progrès tant souhaité, et dont le spectacle
semblait réservé à une génération ultérieure.
Grâce à S. S. Léon XIII, nous verrons du moins
les préludes de la réforme. C'est ce que semble
du moins nous promettre le bref suivant adressé
par le Souverain Pontife au révérendissime Dom
Delatre. C'est pour l'éminent abbé de Solesmes
et pour les religieux de la célèbre abbaye, un
heureux événement dont nous les félicitons.
LÉON XIII, PAPE,
Cher Fils,
Salut et bénédiction apostolique.
Nous connaissons et avons loué, en d'autres
circonstances, les efforts intelligents que vous
avez déployés dans la science de ces chants
sacrés qui doivent être rapportés à Grégoire
le Grand, leur auteur, d'après la tradition.
De même. Nous ne pouvons qu'approuver les
travaux si laborieux et si persévérants que vous
avez consacrés à rechercher et à répandre les
anciens monuments de ce genre. Les fruits
divers de ces labeurs. Nous les voyons contenus
dans ces volumes assez nombreux que vous Nous
avez adressés à diverses époques et que Nous
avons reçus comme un bien agréable présent.
Ces ouvrages, — nous l'avons appris, — sont
désormais largement répandus au grand jour,
frappent les yeux du public et sont, en beaucoup
d'endroits, d'un quotidien usage. Tout le zèle
dépensé dans l'illustration et la propagation
de cette compagne et auxiliaire des rites sacrés
doit être loué, non seulement à cause du talent
et de l'ingéniosité qui s'y emploient, mais en-
core, — ce qui importe bien davantage, — à
cause du développement que l'on en espère pour
le culte divin.
En effet, les chants grégoriens ont été com-
posés avec beaucoup d'habileté et de goût pour
éclairer le sens des mots. Il existe dans ces
chants, pourvu toutefois qu'ils ne soient pas mis
en œuvre sans art, une suavité merveilleuse,
mêlée de gravité, et qui, pénétrant facilement
l'âme des auditeurs, peut très à propos faire naître
en eux de pieux mouvements, et y nourrir des
pensées salutaires.
Il convient donc que to'.is ceux, quels qu'il
soient, surtout appartenant à l'un et à l'autre
clergés, qui se sentent capables d'obtenir quelque
résultat dans cette science ou dans cet art, y
travaillent avec zèle et hardiment, chacun selon
son pouvoir. Pourvu qu'on sauvegarde la charité
mutuelle, la soumission et le respect qui sont dus
à l'Église, les travaux d'un grand nombre
d'hommes en une même matière peuvent produire
beaucoup de fruits, ainsi que le firent jusqu'à ce
jour vos propres études.
Comme gage des grâces divines, et aussi de
Notre paternelle bienveillance. Nous accordons
très affectueusement dans le Seigneur la béné-
diction apostolique à vous, cher Fils, et à vos
frères.
Donné à Rome, près Saint-Pierre, le 17 mai
1901, en la vingt-quatrième année de Notre
pontificat.
LÉON XIII, PAPE.
D'autre part on lit dans Le XX' siècle.
On a beaucoup parlé de la nomination d'une commis-
sion pour le plain-chant à Rome et les journaux ont tiré
de cette nomination des conséquences qui ne sont
d'accord ni avec la logique, ni avec la volonté du Sou-
verain Pontife. Voici les faits.
Le privilège ou monopole de Pustet expirait au premier
janvier de cette année, et toutes les instances de l'éditeur
allemand pour obtenir une confirmation de son privilège
ont échoué. Le .Souverain Pontife a refusé le renouvelle-
ment du monopole, et ;i partir du i" janvier tous les
diocèses du monde sont libres d'adopter le chant qu'ils
croiront le plus convenable pour eux 11 est clair que le
chant des Bénédictins de France, autrement dit de Dom
Potliier, édifié sur ce magnifique monument historique
que l'on appelle la « Paléographie musicale >, a pour lui
la science et la tradition, mais il n'est pas toujours facile
à un chef de diocèse de ne considérer que la question
scienlifi(|ue. D'autres exigences peuvent se faire jour et
lui conseiller de conserver un chant, moins parfait par
Cl)romque.
355
exemple, mais qui ne l'obligera pas à un remaniement trop
coûteux. Quoi qu'il en soit, liberté complète est laissée, et
elle est si complète que Pustet ayant répandu le bruit
que le Souverain Pontife, tout en déclarant laisser libres
les évoques, désirait « 2'«/<?//fl » l'adoption du chant de
Ratisbonne, le Pape a fait démentir ces bruits et pris des
mesures pour qu'ils ne se reproduisent pas.
Mais le diocèse de Rome n'est pas dans une condition
différente des autres diocèses du monde, et la question
du plain-chant se pose à Rome comme ailleurs. C'est
précisément pour la résoudre que le Souverain Pontife
a chargé le cardinal Respighi de nommer une commission
spéciale qui lui ferait un rapport sur les différents plains-
chants. Sur le rapport de cette Commission, le Pape dé-
cidera pour Rome et son district. Mais cette désignation
ne regarde que Rome, et ce serait dépasser !a pensée
pontificale que de se croire obligé, dans un diocèse étran-
ger, à suivre le chant que le Souverain Pontife aura
adopté pour sa ville. Léon XI II n'a fait qu'user delà
liberté qu'il laisse à tous, et n'a aucune envie de la limi-
ter directement ou indirectement.
Je ne sais point quelle décision prendra la Commission
romaine, mais cependant, si l'on considère sa composi-
tion, les études et les idées des personnalités qui en font
partie, il semble presque certain que le chant de Pustet
sera écarté, et que celui des bénédictins sera adopté.
La S. Congrégation des Rites a autorisé l'emploi de
la lumière électrique dans les églises et les oratoires,
mais seulement « ad depcllcndas tenehras ». Les cierges
restent toujours le mode d'éclairage liturgique. La lumière
électrique, si on l'emploie sous forme de petits globes,
donne aux églises l'aspect d'une salle de théâtre.
Pour obvier à cet inconvénient, on propose de faire
usage des bougies électriques, qui ressemblent, h s'y
méprendre, à des cierges, n'ayant de plus que les autres
qu'un éclat supérieur. Ainsi l'illumination des nefs ne
constrasterait pas avec celle du chœur et des autels, et
l'ensemble aurait la gravité requise dans la maison de
Dieu.
Restaurations.
E Nouvelliste de RoJien, du 24 février,
nous donne les renseignements sui-
vants sur la restauration de la cathé-
drale. Le Comité constitué par Mgr
Sourrieu dans le but de provoquer une souscrip-
tion publique destinée à aider à la restauration
du grand portail de la catliédrale de Rouen, s'est
réuni le 29 janvier 1901, avec l'approbation de
Mgr Fuzet, archevêque de Rouen. Il a décidé
de faire un nouvel appel à la générosité des
catholiques. On sait que les travaux indispen-
sables à la simple conservation du portail ont
été évalués à 600,000 francs. La ville de Rouen
s'est obligée à fournir une contribution de 100,000
francs, payable en dix annuités ; le département
s'est engagé pour pareille somme, payable en
cinq ans ; le diocèse, de son côté, a promis un
concours de 100,000 francs à recueillir par voie
de souscription ; l'État doit fournir le reste. Le
Comité de souscription a recueilli, en 1898, 82,140
francs. Il ouvre une souscription pour les 17,860
francs qui restent à recueillir. Les souscriptions
ont reçues : au secrétariat de l'archevêché, chez
les membres du Comité, dans les presbytères et
dans les bureaux des journaux du département
qui voudront bien prêter leur concours.
Les monuments belges. — On s'occupe active-
ment de la restauration de la collégiale romane
de Saint-Vincent à Soignies. Les parements
intérieurs des murs sont à nu, leur appareil gros-
sier et leurs formes archaïques produisent un
effet austère et étrange. On a démoli les voûtes
à la romaine bandées au XVIII^ siècle sur la
grande nef et sur les galeries des petites nefs à
la place de l'antique plafond plat ('). On rétablit
le plafond primitif en remplaçant les poutres de
bois manquantes par des sommiers en ciment
armé.
Rien de plus rudimentaire que les piles cylin-
driques en pierres à peine taillées, et que leurs
chapiteaux, dont l'échiné en tronc de cône rap-
pelle le chapiteau dorique grec.
On a découvert dans le sol les bases des pilas-
tres demi circulaires qui, autrefois, accostaient
les piliers octogones. C'est sur ces bases que l'on
vient de rétablir les demi-colonnes cylindriques
qui, jadis, flanquaient les piliers cruciformes, tant
du côté des basses-nefs que de la nef centrale.
Dans cette dernière elles montent jusqu'à la
corniche des galeries et se prolongent ensuite en
pilastres à trois ressauts jusqu'au faîte de l'édi-
fice, s'y terminant en forme de bec de clari-
nette. Cette disposition est du plus heureux
effet. Dans le bas-côté nord on a rétabli égale-
ment entre les fenêtres les contre-forts à cha-
piteaux.
L'extérieur du monument a déjà reçu aussi de
notables améliorations. Le porche en style
Renaissance donnant du côté nord sur la Grand'
Place, a été démoli. Les fenêtres de la grande
nef, ainsi que celles des bas côtés, ont repris leur
forme primitive, avec leur cintre aux claveaux
déversés et à la clef triangulaire, comme au
château des Comtes de Gand (f) ; elles donnent à
tout l'ensemble un cachet spécial de sévérité et
de recueilleinent. On croyait que les fenêtres des
galeries se terminaient en talus, mais, vérifica-
tion faite, le talus était de date plus récente et
les fenêtres ont pu être allongées de vingt-quatre
centimètres, ce qui leur donne des proportions
plus sveltes. Elles auront ainsi une hauteur uni-
forme de 2'",34 sur 0"\70 de large. Déjà plu-
sieurs contreforts extérieurs ont été reconstruits.
La pierre ernployée est le grés jaune-verdâtre
retrouvé aux Écaussines. M.Verhaegen ne néglige
rien pour rechercher des matériaux de restaura-
1. V. Revue de l'Art chrélicn, année 1896, p. 422.
2. V. Revue de t Art chrétien, année 1897, p. 437.
356
3Rel)ue ïie V^xt cbrctieu.
tion conformes à ceux de la construction origi-
nelle, fallût-il pour cela ouvrir une carrière; c'est
ainsi que pour la restauration du château des
Comtes de Gand, on est allé avec succès à la
recherche de grés rose jusqu'à Reaumont, à la
frontière française. Autour des toitures on a
commencé à rétablir une nouvelle corniche d'une
grande sobriété, soutenue par de simples cor-
beaux en pierre bleue d'après le modèle de ceux
retrouvés.
Cette restauration d'un des plus vénérables
monuments de la Belgique est tardive, mais
elle n'en sera que plus correcte. Elle est due à
l'initiative et au zèle de M. le Doyen Dujardin
et au talent de M. A. Verhaegen.
Le premier, qui est un archéologue de valeur,
a d'autant plus de mérite d'avoir entrepris cette
restauration, que, comme pasteur, il doit assez
en soufifrir. Sa paroisse traverse une crise au
point de vue des pratiques du culte, depuis que
les fidèles, chassés du vaste vaisseau, n'ont plus
à leur disposition que des recoins de l'église.
'Le Journal de Bruges a publié une notice de
M. Ch. De Wulf, siir le projet de restauration
de la Porte des Baudets à Bruges. La création de
Bruges-port de mer devant amener le remanie-
ment d'une partie des remparts de Bruges, la
ville a chargé l'architecte Ch. De Wulf de pré-
senter un projet de restauration de la porte
d'Ostende, dite des Baudets. M. De Wulf a pro-
posé de remettre le monument en l'état où il
se trouvait au XV*^ siècle et, à cet effet, il a con-
sulté tous les documents conservés aux archives
communales relatifs à la porte d'Ostende et
signalés dans Y Inveiitaire de M. GiUiodts et pu-
blie une monographie du monument. La nouvelle
porte des Baudets sera un des plus beaux spé-
cimens de l'architecture militaire du XV'^ siècle.
La Poorterslogie, ancienne académie des beaux-
arts, se dresse belle et pittoresque dans sa nou-
velle enveloppe de pierre blanche, mais inachevé.
D'après les plans adoptés, sa gracieuse tourelle
octogone doit être restaurée et surélevée de
15 mètres. Une flèche en bois, à 2 étages, sur-
montée d'une figure en cuivre rouge (saint Michel
terrassant le dragon), doit la terminer et l'em-
bellir.
La fourniture des meubles nécessaires à l'in-
stallation, au musée Gruutlmuse, de l'intéressante
collection d'objets préhistoriques recueillis parle
baron Gilles de Pélichy, fera l'objet d'une pro-
chaine adjudication. Le devis s'élève à 2,900 fr.
L'offre généreuse du baron Liedts, d'établir à
ses frais dans la grande salle à l'étage de l'aile
sud une seconde collection de dentelles ancien-
nes, a été acceptée avec reconnaissance.
La Commission royale des monuments a
accepté le principe de la décoration picturale
de l'intérieur de la belle église de Sainte-Ca-
therine à Hoogstraeten (prov'^ d'Anvers). Elle
insiste pour que la décoration soit conçue avec la
plus grande simplicité. Pourquoi ? L'excès de
simplicité peut être un défaut comme l'excès de
richesse. Le préjugé contre la polychromie cède,
mais ne se rend pas. Il faut louer la Commission
d'avoir recommandé le déplacement du jubé,
qui masque la fenêtre de la façade occidentale
de l'église ; deux emplacements sont possibles,
ici comme dans la plupart des églises : l'un au
transept, l'autre entre les arcades latérales du
chœur.
Un projet de reconstruction de l'église Saint-
Germain (Namur) a heureusement été écarté ;
on va se borner à restaurer cet intéressant vais-
seau du Xni'= siècle, qui a été classé dans la 3*^
catégorie des monuments nationaux.
Une nouvelle église devant être érigée à Asse-
nois, commune d'Offagne (Luxembourg), l'archi-
tecte eut le bon esprit de se conformer aux règles
liturgiques quant à l'orientation du vaisseau.
L'administration communale prétendit changer
cette orientation pour élever la façade principale
en bordure de la place publique. L'autorité supé-
rieure est intervenue, et a maintenu l'orientation
traditionnelle. C'est d'un bel exemple, digne
d'être signalé.
Le révérend et distinguédoyen de Châtelet vient
de retrouver dans quelque remise une belle croix
triomphale d'environ 7"^ de hauteur, ornée aux
angles de médaillons aux attributs évangéliques,
accostée des statues de S. Jean et de la Vierge.
Encore une qui va reprendre sa place d'honneur
sous l'arc majeur de la belle église élevée naguère,
en pur style du XIII^ siècle, par feu Carpentier.
Nos félicitations à M. le doyen de Châtelet.
Nous signalons une autre et belle croix triom-
phale à replacer, celle de l'église de Givry
(Hainaut) avec les statues de Marie et de Jean.
Depuis que feu Béthune a restauré en Belgique
l'art des vitraux de couleurs, ce pays possède
quelques artistes qui, avec l'Angleterre, lui
donnent une supériorité sur ses voisins dans cet
art. Aussi faut-il s'étonner de voir des ecclé-
siastiques aller jusqu'à Francfort chercher des
peintres verriers pour orner leurs églises. Outre
que c'est décourager les louables efforts de nos
écoles belges, c'est compromettre l'intérêt es-
thétique de nos monuments. C'est le cas pour
l'église d'Enghien qui doit à des ateliers tudes-
ques un nouveau vitrail incorrect au point de vue
iconographique, dépourvu de transparence, vio-
lemment jaune, en un mot, désastreux pour le
monument. Espérons que ce ne sera qu'un
essai sans suite.
On se préoccupe de la conservation des ruines
de l'église Saint-Jean à Diest. On aurait gran-
Cl)romque.
357
dément raison de restaurer le chœur et de le
convertir en chapelle funéraire. La Commission
des monuments propose même d'y créer des
galeries constituant une sorte de Campo Santo ;
l'idée est excellente.
On s'occupe activement de restaurer l'intéres-
sante église brabançonne d'Hérent et d' Aerschot.
On restaure, en ce moment, la collégiale Saint-
Ursmer ; les travaux du chœur et de la chapelle
du Saint-Sacrement sont terminés ; les voûtes ont
été débarrassées de l'épaisse couche de badigeon
qui les recouvrait et les fenêtres ont été reconsti-
tuées comme anciennement: celles-ci ont été
pourvues de riches vitraux d'une tonalité vive
qui fait valoir l'ensemble architectural de l'inté-
rieur; ils font honneur à leur auteur M. J. Casier.
On va maintenant continuer les restaurations par
le transept. L'édifice sera ensuite complètement
dégagé par la démolition des bâtiments qui com-
posent le presbytère actuel. Ici encore la croix
triomphale va reprendre sa place d'honneur,
après avoir été décrassée et polychromée. Une
arcade a été remise au jour du côté nord, aux
moulures ornées de feuillages, mutilée en 1554
pour placer des boiseries.
Une autre restauration, dont le besoin se fait
grandement sentir, est celle des anciens remparts
de la ville, qui présentent aux voyageurs passant
en chemin de fer le spectacle d'un joli panorama.
Malheureusement le panorama est menacé aussi
par des constructions et des travaux de tout
genre. Il est grand temps que les autorités pren-
nent des mesures pour la conservation de ces
restes uniques d'architecture militaire (').
Nous avons parlé, dans notre précédente livrai-
son, de la belle restauration de l'hôtel-de-ville de
Binche. Nous avons oublié de mentionner les
intéressants vitraux de style civil qu'y a placés
M. Jos. Casier, le continuateur du célèbre atelier
de maître Jean Béthune. Toute la décoration est
héraldique ; elle s'étend à tout l'édifice. Elle a
valu à son auteur de nombreuses félicitations,
auxquelles nous joignons les nôtres.
Le même artiste a placé naguère un grand
vitrail dans le transept sud de l'église Saint-
Macaire à Gand. Au centre figure saint Joseph,
patron de la Belgique, ayant à ses côtés saint
Liévin et saint Bavon, patron de la Flandre et
de la cité gantoise.
La restauration du château des Comtes de
Gand reste suspendue. Une grosse question reste
pendante.
L'ancien donjon était jadis divisé en plusieurs
étages. Faut-il rétablir ces étages ? Sur un autre
I. Chroniqtie des Tiavaux publics.
point encore, la discussion est ouverte. Faut-il
terminer le donjon, à sa partie supérieure, par
une plate-forme ; ou faut-il y ajouter une toiture?
L'architecte restaurateur est partisan d'une
plate-forme.
M. Verhaegen, membre correspondant de la
commission, a défendu par de très bons argu-
ments la seconde opinion. On ne sait pas encore
dans quel sens se prononcera la commission.
I^ouoclles.
ES fouilles viennent d'être commencées
à Saint-Denis, sur l'emplacement des
terrains qui bordent la basilique, du
côté de la rue de Strasbourg : c'est là
qu'autrefois s'élevait l'église des «Trois Patrons»,
dans la cour de laquelle furent enfouis les cer-
cueils des rois de France, arrachés des caveaux
de la basilique en 1793. On a découvert des mé-
dailles et des monnaies anciennes, et des pierres
sculptées, qui ont été recueillies et placées à la
mairie.
-i©t-<— J©4—
A NOTER le sujet du récent concours d'his-
toire et d'architecture de l'École de Beaux-
Arts de Paris « Une chaire dans une église du
XI IP siècle. »
ai j,ft »,ft ijf., :i» «y, ^y *%, ti», tSi »yt *». '». «s ■'». *».*»'•» t% =» ait »y »at, »5t,ty
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ffîgc Xatiier Barbier De ffiontault.
Au moment où nous corrigions les pages de
notre dernier fascicule, nous parvenait la
nouvelle, aussi douloureuse qu'inattendue, de la
mort du plus laborieux et certainement d'un des
plus savants de nos collaborateurs : Mgr Marie-
Joseph-Xavier Barbier de Montault était mort
à Blaslay (Vienne), le 29 mars, dans la soirée,
presqu'inopinément, quoique déjà souffrant de-
puis longtemps ; ce qui ne l'empêcha pas de
travailler jusqu'au soir même de sa mort.
Le temps nous faisait défaut pour retracer,
même brièvement, cette longue et féconde car-
rière qui venait d'atteindre son terme. Aujourd'hui
il nous importe de joindre nos regrets profon-
dément sentis à tous ceux qui ont été exprimés
par les amis du défunt et par les amis de l'ar-
chéologie chrétienne. Mgr Barbier de Montault
avait atteint l'âge de 71 ans, mais, jusqu'à sa
dernière heure, sa verve studieuse et son ardeur
au travail ne se sont pas ralenties un instant. Dans
la Revue de l'Art chrétien son décès laisse un
vide immense, qui ne sera pas comblé. C'est donc
un deuil profond pour nous, et c'est avec un
sincère sentiment de gratitude que nous recom-
mandons aux prières de tous ceux qu' ont profité
de ses travaux, le repos de l'âme de ce laborieux.
Si nous ne pouvons même tenter d'écrire une
notice biographique acceptable, nous croyons
cependant que nos lecteurs accueilleront avec
satisfaction les renseignements que nous avons
pu réunir. A la vérité, l'intérêt de la vie du prélat
qui vient de mourir et sa gloire sont tout
entiers dans ses travaux.
Mgr Barbier de Montault était d'ancienne et
même de grande famille, sur laquelle les jour-
naux locaux donnent d'abondants détails : il
est même question de publier une étude généa-
logique
Mgr X. Barbier de Montault.
Né à Loudun, le 6 février 1830, il était le
second enfant de M. Joseph Barbier et de dame
Adélaïde de Montault ; la famille devint extrê-
mement nombreuse, car la souche était féconde
autant qu'elle était ancienne : après Xavier,
quinze autres enfants vinrent successivement
répandre vie et joie dans cette maison patriarcale.
Xavier montra de bonne heure un goût décidé
pour les études et les indices d'une vocation
ecclésiastique. Ayant été envoyé à l'évêché d'An-
gers, chez son grand oncle Mgr Montault des
Isles, celui-ci dirigea son éducation ; à huit ans,
l'enfant entrait au Séminaire d'Angers, où il
poursuivit ses études jusqu'à la philosophie
inclusivement. Il cherchait déjà, à cette époque,
à compléter l'enseignement qu'il recevait par
des lectures faites avec soin, annotant, classant
tout ce qui avait de l'attrait à ses yeux. Bientôt
il fut en état de poursuivre à Saint-Sulpice ses
études théologiques qu'il termina avec succès.
Ayant atteint l'âge de vingt-trois ans, il se rendit
à Rome oij tout l'attirait, et où il devait d'ailleurs
rencontrer son cousin, le prince de la Tour
d'Auvergne qui, à cette époque, était premier
secrétaire d'ambassade. Le jeune abbé suivit,
avec un succès marqué, les cours de la Sapience
et du Collège romain. Il s'adonna bientôt
avec une ardeur si absordante aux études qui
embrassaient à la fois la science théologique et
les recherches de l'archéologie, que sa santé en
fut altérée. Après quatre années de travail inces-
sant, en 1857, il fut obligé de quitter Rome pour
rentrer en France. Mais ce ne fut pas afin d'y
chercher des loisirs ; dès son retour, Mgr Ange-
bault le nomma historiographe du diocèse d'An-
gers, charge qui l'absorba de 1857 à 1861.
L'activité prodigieuse qui était un besoin de
sa nature le poussa à profiter de sa nouvelle
situation, pour continuer, dans des conditions
différentes et dans son propre pays, les études
commencées à Rome. Il se mit à fouiller les
archives du diocèse et à recueillir tous les maté-
riaux, inscriptions, monuments, tombeaux, reli-
ques, qui pouvaient répandre quelque lumière
sur l'histoire et la littérature angevines. Il
poursuivit en même temps la béatification, à
Rome, de Robert d'Arbrissel et du B. Regnault.
Enfin il fonda un musée diocésain, qui, grâce à
ses soins et à ses trouvailles, acquit bientôt une
véritable importance et s'enrichit d'un grand
nombre d'objets de valeur ; M. de Caumont prit
un intérêt très vif à cette initiative qui devait
bientôt trouver, en France, de nombreux imita-
teurs.
En 1861, Mgr B. de Montault retourna à
Rome, cette fois pour y faire un séjour de
quatorze années. Dans la Ville éternelle, qui avait
toutes ses sympathies et où il pouvait s'abreuver
si largement à toutes les sources de l'antiquité
chrétienne, il se trouvait dans son véritable
élément : comme partout le travail était sa vie,
c'est là qu'il acquit ce fond inépuisable d'infor-
mations ; cette science liturgique et cette con-
naissance des antiquités chrétiennes qui don-
naient tant de valeur à ses travaux, et qui en
faisaient un adversaire si redoutable pour ceux
qui entraient en controverse avec lui. Il y prit
l'habitude d'écrire avec sûreté, avec autorité, ne
redoutant pas la contradiction, et montrant
volontiers qu'il avait sur bien des points des vues
personnelles qu'il tenait à faire prévaloir.
Il nous est impossible de suivre l'existence si
remplie de Mgr B. de M. [jendant le long
séjour qu'il fit à Rome et dans nombre de villes
les plus intéressantes de l'Italie, ni même
d'énumérçr Içs travaux qu'il publia après son
CÏ)ronlque.
359
retour en France. La collection de la Revue
de l'Art chrctien donne à cet égard les rensei-
gnements qui intéressent le plus nos lecteurs.
Ce sont eux qui ont eu la meilleure part
du constant travail, de l'esprit d'investigation
et de recherches, enfin de la fécondité prodi-
gieuse de notre regretté collaborateur. L'indica-
tion sommaire seule de toutes ses publications
dans les domaines les plus variés réclamerait
un volume. Il est peut-être plus intéressant de
connaître comment, dès sa jeunesse, l'abbé
Barbier de Montault embrassa avec tant de zèle
et de feu, avec tant de constance et de succès, la
cause de l'archéologie religieuse.
iVIgr B. de M. appartenait à ce groupe d'hom-
mes qui, pleins de conviction, d'élan et de géné-
reuse ardeur, ont trouvé dans \qs Annales archéo-
logiques de Didron un organe digne de la cause
qu'ils avaient embrassée. Il a dit lui-même que
c'est de là que vint l'étincelle du feu sacré qui ne
devait plus s'éteindre en lui :
« J'avais alors dix-huit ans, l'âge où l'imagi-
nation est vive et l'enthousiasme facile, où la
vocation se dessine et l'avenir s'entrevoit. Les
ouvrages élémentaires de Bourassé, d'Oudin et de
Caumont ne suffisaient plus à mon avidité et à
mon besoin d'apprendre. Les Annales archéolo-
giques, en élargissant mon horizon, furent pour
mon inexpérience une véritable révélation. Dès
lors elles devinrent mon livre favori. Les planches
m'attiraient puissamment, autant que d'autre
part je me sentais captivé par les idées neuves et
originales, le style vif et brillant du texte.
«Je me plais à le proclamer hautement ici, la
lecture assidue de ce recueil périodique m'a donné
non seulement le goût, mais encore la science de
l'archéologie. Aussi, pénétré comme je l'étais de
toute sa substance, M. Didron n'hésita pas à me
proposer de rédiger la « Table » d'une collection
que j'avais tant de fois parcourue avec un plaisir
toujours nouveau et un profit incontestable. Je
ne pouvais rien refuser à celui qui m'en priait
comme d'un service rendu, à lui d'abord, puis à
ses fidèles abonnés. J'acceptai. La longue maladie
et la triste mort de notre cher Directeur m'empê-
chèrent seules de donner suite à ce projet. »
J'ai tenu à laisser notre regretté collaborateur
faire lui-même le récit de sa première initiation
aux études de l'archéologie religieuse. Les Anna-
les archéologiques avaient été fondées au mois de
mai 1844. C'est, je pense, au tome XI (185 i), que
parut la première étude de Mgr B. de Montault
sur «Les anciens artistes du Poitou» dans ce
recueil. Dès lors il demeura aussi fidèle à cette
collaboration qu'il l'a été à la Revue de l'Art
cJirétieu depuis la fondation de cette dernière en
1857. Je pense que ce n'est pas sans quelque
fierté qu'en dressant la table des Annales Mgr
B. de Montault put écrire sous son nom le titre
de trente-sept études et articles divers.
Mgr B. de M. était resté l'un des derniers
survivants de cette phalange d'écrivains dont la
lutte et les labeurs ont eu tant de retentissement,
non seulement en France, mais dans tous les
pays de l'Europe où, à partir de ce moment, se
manifesta un si généreux élan pour l'étude et la
conservation des monuments de l'art chrétien.
Il ne craignit pas d'écrire que « L'art du
Moyen-Age tout entier est dans cette collection
précieuse. » Ce fut seulement longtemps après
la mort de Didron, dans les loisirs que lui lais-
sèrent ses voyages et ses travaux habituels de
droit ecclésiastique et d'archéologie, qu'il se mit
de tout cœur à faire la table de la collection,
travail de longue haleine; et c'est seulement après
une année de patiente analyse qu'il put achever
une tâche d'autant plus méritoire qu'elle est plus
modeste et plus utile.
Cette table, que l'on peut considérer comme un
modèle du genre, forme un gros vol. in-4°, et
elle sera toujours consultée avec reconnaissance
par tous les érudits qui ont recours à la collection
des Annales, laquelle aujourd'hui encore, à tous
les points de vue, a conservé sa haute valeur.
Je me suis peut-être étendu avec trop de
complaisance sur les débuts des études archéolo-
giques de notre regretté collaborateur, et sur le
travail extrêmement considérable que, jusqu'à sa
fin, il n'a cessé d'y consacrer. Je sais que ce n'est
là qu'un des côtés de la vie de ce travailleur, mais
c'est le côté par lequel il nous appartient.
D'autres parleront du prêtre, des missions qu'il
reçut du Souverain Pontife, du rôle qu'il joua au
Vatican comme théologien de Mgr Desflèches,
des travaux qu'il fit pour d'autres évêques,
tantôt pour donner des consultations canoniques,
tantôt pour la récognition des reliques, le cata-
logue des trésors, les recherches de toute nature
dans les dépôts d'archives ; à toutes ces tâches,
qu'il acceptait d'ailleurs toujours avec bonne
grâce et accomplissait avec entrain, il a dépensé
un labeur qui, pour d'autres, aurait réclamé toute
une existence . Jamais son courage ne se lassait,
jamais son érudition n'était en défaut. Je n'ose
aborder non plus la bibliographie de ses publi-
cations de tout genre dont le simple catalogue
prendrait un espace dont je ne puis disposer ; je
me contente simplement de transcrire ce que je
trouve rappelé dans une biographie récente,
écrite peu de temps avant sa mort.
«En 1S89, l'infatigable prélat a commencé la
réimpression de tant d'œuvres éparses, les clas-
sant par catégories pour qu'il en résulte plus
d'unité dans la composition et plus de commo-
360
Bellut tie l'^it cbvétieiu
dite pour les studieux qui les consulteront : les
revisant avec soin, les complétant, les mettant au
point. Le treizième volume est actuellement sous
presse chez Biais et Roy à Poitiers. Chaque
volume coûte 10 francs. L'œuvre complet de
l'écrivain ne comprendra pas moins de soixante
volumes in-8° de 500 à 600 pages ; ce sera une
véritable encyclopédie ecclésiastique, émanée
d'un seul homme. Plaise à Dieu d'accorder au
savant prélat le temps et la force nécessaires
pour mener à son terme cette entreprise
colossale {'). »
Voici maintenant la liste des principaux
ouvrages publiés en dehors des recueils périodi-
ques : Chef,s-d'œuvke de la .sculpture a
Rome a l'époque de la Renaissance. —
Iconographie des Sibylles a Rome. — Les
basiliques mineures. — Traité pratique
de la construction, de l'ameublement et
DE la décoration DES ÉGLISES SELON LES
règles canoniques et LES TRADITIONS RO-
MAINES. — Les gants pontificaux. —
Lettres inédites de Fénelon. — Notes
archéologiques surMoutiers et la Taren-
taise. — Les églises de Rome étudiées au
point de vue archéologique. — Le con-
clave ET le pape. — Le sacré collège des
cardinaux. — Traité d'iconographie chré-
tienne. — Le vase de Saint- Savin. —
Traité du chemin de la croix. — Etudes
SUR LES MOS.V1QUES d'Aix-la-Chapelle. —
DÉCRETS authentiques DES SACRÉES CON-
GRÉGATIONS ROMAINES : — DE L'IMMUNITÉ.
— Des INDULGENCES. — DES RITES. — LE
TRÉSOR DE MONZA. — Le COSTUME ET LES
USAGES ECCLÉSIASTIQUES SELON LA TRADI-
TION ROMAINE, ETC., ETC.
Je ne suivrai pas les biographes du savant
prélat qui ont dressé l'arbre généalogique de
sa famille qu'ils font remonter jusqu'au X^
siècle, et je ne m'arrêterai pas non plus à l'énu-
mération très considérable des titres de gloire
que personnellement il a ajoutés à sa maison :
prélatures, décorations multiples, distinctions de
toute nature, association aux principales Sociétés
savantes de l'Europe, etc.; tout ce brillant décor
est peu de chose dans la vie de l'homme et sur-
tout du prêtre ; à sa mort il disparaît avec le
reste de tout ce qui passe.
Mgr Barbier de IVIontault a été le plus ancien,
le plus fidèle, le plus fécond des collaborateurs
de la Revue de l' Art clirétien ; lorsque parut, en
1857, sous les auspices du chanoine Corblet, le
premier volume de ce recueil, on y put lire déjà
1. Dictionnaire biographique dit clergé français, f. 140.
un article sur la Poésie liturgique du moyen âge,
et trois études sur V Èpigrapliie des Catacombes
de Rome, signées de son nom, et aujourd'hui,
après une collaboration ininterrompue de qua-
rante-quatre ans, toujours abondante, toujours
généreuse, le volume actuel commencé le premier
janvier 1901, contient encore une série de com-
munications de notre inépuisable coopérateur.
La somme de travail dépensé au profit de la
Revue est immense ; immenses aussi étaient son
érudition, les trésors de sa mémoire et la fécon-
dité de sa plume. C'est une douleur bien grande
pour nous de ne plus pouvoir compter sur un
concours toujours assuré, de voir disparaître
désormais de nos colonnes un nom si vénéré dans
la science catholique, et qui, dans l'archéologie
chrétienne prenait une place si honorée C'est
une perte irréparable dont le poids nous acca-
blerait, si, de tout temps, nous n'avions trouvé
l'appui souvent inattendu de généreux travail-
leurs, et si l'expérience du passé ne nous auto-
risait à beaucoup espérer de l'avenir. Un seul
mot encore, sur la dernière phase de l'existence
du prêtre.
Mgr Barbier de Montault s'était de longue
main préparé à la mort. 11 avait réglé ses affaires
spirituelles et temporelles ; il avait pris le soin
d'ordonner ses funérailles qui devaient être
modestes, et dicté même les termes de la lettre de
faire-part qui devait aiuioncer son décès. Il voulut
que son corps reposât dans l'humble cimetière
de la paroisse de Hommes (Indre-et-Loire) parce
qu'il avait une amitié particulière pour le curé
le R'' Et. Girou ; il lui était doux de devenir
ainsi <>< son paroissien ».
Vers la fin, son médecin lui avait prescrit le
repos et interdit tout travail. Mais le travail pré-
cisément, nous l'avons dit, c'était sa vie ! Com-
ment y renoncer, pour vivre plus longtemps ?
Aussi sa dernière journée, celle du 29 mars, ne
fut pas moins laborieuse que les autres. C'est
seulement après s'être couché que le mal dont il
souffrait depuis longtemps, une angine de poitrine,
triompha de sa robuste nature et l'enleva en peu
d'uistants.Une oraison jaculatoire « Mon Dieu ! ï>
et un signe de croix — tout était fini !
Dans la lettre de faire-part qu'il avait pré-
parée on lit cette prière :
Tu qui legis orapro eo et dic : Anima
EJUS REQUIESCAT IN PAGE CHRISTI QUEM
UNICE DILEXIT ET IN QUEM I-TRMITER CREDI-
DIT ARUENTERQUE SPERAVIT.
Elle s'adresse à nos lecteurs.
J. IIelbig.
Iiiipriiiié par Desclée, De Brouwer i^ C'«.
HLcUiic De l'Hrt cbrctien.
PL. YI.
Iff Couiounniunt Uf la Sainte Vifigr.
Peint par Albert CORNELIS (1517-1522).
kf^kUkUkf^M^k9^kUkUkUkUkU^
îlŒlLiT^TirTrriaiiiiiinxjriiTiTTi^mciTTrTjj^mciiriTlTirTni
ymiTiiiît"'! iiiiiii;c!il:iiiiiii]ti:'[imiinLJriiiiiin^gj[
Bel) lie lie
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l'Hit rljrétien
>^ païaîssaut toujs les bt'ii): mois. 4<
^- ««<
44"'^ Hiinéc. — 5^ Séi-lc.
tCûiiiL* XII (l^ ùc (a collection,).
S'"'^ liur. — Septembre |90(.
;%|J^5^>^?^?WÎ^J^?^5^5^}^5^5t^
lie Couronnement lie la JSainte Vierge,
—== peint par iîlbcrt Gornelis, 1517-1522. =— =
Panneau découpé en haut en forme d'un arc en accolade. H. i"^68. L. l'^-jô.
U haut du tableau se
trouve un trône à haut
J dossier et dais sculpté
g: très riche, de style flam-
" boyant. Par devant, les
^ montants latéraux sont
ornés de trois niches
garnies de statues de prophètes, sous des
baldaquins surmontés d'un pinacle.
Sur le trône, à droite, est assis le Père
Éternel, représenté, non comme l'Ancien
des jours, mais dans toute la force de l'âge,
avec une physionomie sévère. Il est vêtu
d'une tunique bleue et d'un manteau rose
retenu par une bille (fermoir) en or, qui a
la forme symbolique du trèfle. De la main
droite, il tient un livre orné de cinq plaques
en or richement ciselées. Il a les pieds
chaussés. A gauche se trouve le Christ, vêtu
d'une tunique et d'un manteau rose retenu
par une petite bille en forme de losange.
Il tient de la main gauche un globe surmonté
d'une croix en or à hampe torse. Sa figure
est empreinte d'une grande douceur.
Le Père et le Fils tiennent une riche
couronne qu'ils vont poser sur la tête de
Marie, agenouillée devant eux, les mains
jointes. Cornelis l'a représentée, tournant
le dos au trône, inconvenance que n'aurait
point commise un peintre du XI II^ ou du
XIV^ siècle. Au-dessus de ce groupe plane
la Colombe, figurant le Saint-Esprit, en-
tourée d'une auréole jaune.
La Sainte Vierge est vêtue d'une robe
bleue et d'un très ample manteau de même
couleur qui retombe en plis harmonieux.
Une longue et riche chevelure inonde ses
épaules.
Autour du trône sont groupés les neuf
chœurs des anges ; à droite, les Séraphins,
seraphiiii, anges à deux ailes, complètement
rouges comme le feu. Selon l'étymologie de
leur nom, ce sont des flammes vivantes qui
brûlent et font brûler d'amour pour Dieu.
KKVUE DB L ART CHRETIBN.
1901. — 5*"° LIVRAISON.
î62
jRcbuc tic r^rr cljvctieiu
A gauche sont placés les Chérubins, che-
riibim, anges à deux ailes, complètement
bleus, couleur qui indique leur sagesse ;
ils tiennent chacun un livre, ouvert pour
les uns, fermé pour les autres.
Les Trônes, thronî, sont rangés en face
de la Sainte Vierge. Ils sont vêtus d'aubes
blanches.d'amicts rouges ou bleus, et d'éto-
les vertes croisées sur la poitrine ; à la
ceinture sont suspendues, au moyen de
cordons, de petites clochettes en or. Cha-
cun d'eux tient un rouleau de parchemin ;
ils sont assis sur des trônes ornés aux
côtés de sculptures en bas-relief.
A droite, derrière les Séraphins, on
voit les Dominations, doniinationcs, vêtues
d'aubes, d'amicts blancs, d'étoles rouges
croisées sur la poitrine, et de chapes bleues
doublées de fourrure blanche ou brune, ou
de peaux de léopard, maintenues par des
cordons ou des agrafes. Elles tiennent de la
main droite un sceptre. Le plus riche de ces
sceptres est surmonté d'un groupe de la
Sainte Vierge avec l'Enfant Jésus entre
deux anges adorateurs.
Les Vertus, virtutes, sont placées à la
même hauteur au côté gauche du tableau.
Elles sont vêtues d'aubes et d'amicts verts,
et ceintes d'un cordon. Les unes tiennent un
flacon en cristal de la main droite, les autres
une boîte cylindrique aplatie en argent
ciselé.
En face du trône de Dieu, derrière les
Trônes, se trouvent les Puissances, pote-
states. Elles sont vêtues d'aubes en batiste
et portent une armure, couvertes de tu-
niques vertes à rellets des couleurs de
l'arc en ciel. Leurs cheveux sont retenus
par des diadèmes ornés d'une croix placée
au-dessus du front; les unes tiennent une
croix à longue hampe torse; les autres
lèvent un glaive nu.
Derrière les Dominations le peintre a
placé les Principautés, principatns. Elles
sont vêtues d'aubes et d'amicts bleus ; à
l'exception de trois, elles portent, en outre,
une tunique bleu verdâtre doublée de rouge.
La plupart de ces anges tiennent une longue
verge, mais deux ont pour attribut une
masse à sommet triangulaire, et une troi-
sième une baguette courte.
Du côté opposé, derrière les Vertus, se
trouvent, agenouillés, — tous les chœurs
précédents sont représentés assis, —
les Archanges, archangcli, habillés d'aubes
et d'amicts bleus, avec larges ceintures
garnies tout autour de pendeloques en or,
et par devant, de riches chahies.Ils portent,
en outre, des chapes roses maintenues par
des billes de différentes formes. Les orfrois
et les capuchons pointus des chapes sont
ornés de broderies, de perles et de pierre-
ries ; ceux de la chape de saint Gabriel
sont historiés. Quelques-uns des Archanges
tiennent un encensoir, les autres une na-
vette avec cuillère : ce sont les symboles
des prières des justes que les Archanges
offrent à Dieu.
Au centre de l'avant-plan se trouvent les
Anges, angeli, groupés autour de saint
Michel, qui, revêtu d'une riche armure, se
tient debout ; il porte dans la main droite
un long bâton terminé en croix, tandis que
la main gauche repose sur un bouclier
hexagone. Sous sa cuirasse, richement ci-
selée en or, il porte une tunique rose.
L'armure qui recouvre les jambes est ornée
de têtes de Chérubins. Par-dessus l'ar-
mure il porte une riche chape en brocart
d'or, doublée de vert, à orfrois semés de
pierres fines et de perles. Ses cheveux sont
retenus par un bandeau noir garni de perles
et orné par devant d'une croix en or.
A droite de saint Michel on voit cinq
anees vêtus d'aubes et d'amicts d'une teinte
bleu pâle ; à leurs ceintures sont attachées
île Couronnement tie la t)atnte îlîterge.
363
des pendeloques. Un de ces anges, un
genou en terre, tient dans la main gauche
un encrier et un porteplume dont le cou-
vercle est retenu par quatre cordons bleus.
Il est occupé à écrire sur une feuille de
vélin placée sur son genou droit ; sous
l'aube on aperçoit la manche ample d'un
vêtement rouge. Les quatre autres anges
tiennent chacun une feuille de vélin. Ces
feuilles sont celles du Livre des Bien-
heureux. Sur la feuille que porte l'ange
immédiatement à côté de saint Michel on
peut encore lire :
Item albertus cornelis.
Item adam g
Item
Item
Item egidius
Item lievin
Item
Item
Item cornelis
Les quatre anges placés à gauche tien-
nent aussi des feuilles de vélin, mais nous
n'avons pu déchiffrer les noms des person-
nages qui y sont inscrits.
Dans l'angle droit le peintre a représenté
le roi David. Dessiné à une échelle beau-
coup plus grande que les anges, on ne voit
que son buste. Il est revêtu d'une robe
rouge sans manches et coiffé d'un couvre-
chef bleu dont la pointe tombe par devant
sur l'épaule droite. On aperçoit en outre les
manches étroites d'une tunique brun ver-
dâtre. Entre les mains il tient une bande-
role sur laquelle est inscrit le verset :
Adorate eum omnes aiigeli eius Ps. xvj".
Au coin opposé de l'avant-plan se trouve
le prophète Ezéchiel, vêtu d'une tunique
verte à manches serrées, d'une robe cra-
moisie à larges bordures en fourrure brune,
et de manches jaunes très larges. Il est
coiffé d'un turban dont le haut est violet.
De la main gauche il tient une longue
banderole chargée de la légende : Beiiedicta
gloria doininl de sancto loco suo. Ezech. 3'',
qu'il indique de l'autre main.
Par un acte, daté du ig novembre i 5 i 7,
le peintre Albert Cornelis s'était engagé
envers la gilde de Saint-François (toideurs
et foulons) qui avaient leur chapelle dans
l'église Saint-Jacques, à peindre un trip-
tyque dont ce tableau était le panneau
central, pour la somme de trente livres de
gros. Il s'engagea, en outre, à suivre fidèle-
ment les prescriptions d'un écrit traduit du
latin en flamand qui lui fut remis, et à
terminer le tableau avant deux ans à
compter de la date du contrat. Maître
Albert n'ayant pas rempli cet engagement,
fut cité devant les échevins, par le doyen et
les curateurs de la gilde. Il allégua pour
excuse qu'on ne lui avait point payé les
acomptes qu'on était tenu de lui donner
selon les stipulations de la convention. Les
échevins décidèrent, le 27 janvier 1520, que
le peintre devait achever et livrer le trip-
tyque avant Pâques 152 r, sous peine d'une
amende de six livres de gros. Cornelis,
néanmoins, n'acheva pas le tableau à temps,
mais, le 15 avril 1522, il cita le doyen et les
curateurs de la gilde devant les échevins,
parce qu'ils ne voulaient pas accepter le
triptyque qui était enfin terminé. Les éche-
vins décidèrent que kl gilde devait accepter
le triptyque, mais réservèrent l'examen de
la question de l'amende que le peintre avait
encourue.
Il est intéressant de noter que la gilde
allégua que Cornelis avait commandé le
tableau en sous-œuvre à un autre peintre
pour la somme de huit livres de gros.
Cornelis admit avoir agi ainsi, mais soutint
qu'il n'était tenu qu'à dessiner la composi-
tion et à peindre de sa propre main les nus
^
64
9Rcl)uc tir V^xî fbrcticu.
et parties principales qui réclamaient le plus
d'art.
Il est à noter que la classification des
anges suivie par Cornelis est celle de
l'auteur du traité De coelesti hierarchia, qui
du reste est d'accord avec celle que donne
saint Paul dans l'épître aux Éphésiens.
Le joli tableau dont nous donnons
la reproduction est le seul connu de
son auteur, Albert Cornelis, peintre d'un
mérite incontestable, dont le nom ne se
trouve mentionné ni par Van Mander, ni
par les autres auteurs qui se sont occupés
des peintres de l'ancienne école. En 1863,
nous eûmes la chance de découvrir les
documents qui établissent l'histoire du
tableau. Quant à Cornelis, nous n'avons pu
découvrir ni où il naquit, ni où il apprit
son art. Mais il est probable qu'il vint se
fixer à Bruges à la fin du XV^, ou tout au
commencement du XVI^ siècle. Il doit avoir
peint un grand nombre de tableaux, car, au
marché qui se tenait deux fois par an, pen-
dant les mois de janvier et de mai, près du
couvent des Frères Mineurs, il occupait par-
fois jusqu'à cinq stalles pour l'exposition de
ses œuvres. En 1513,11 porta plainte, devant
les échevins de la ville, contre Rodrigo
Cathelaen, négociant qui lui avait fourni
pour la somme de 30 livres, 16 escalins de
gros, 176 livres d'azur à 21 stivers la livre.
Cornelis soutenait que cet azur était de
mauvaise qualité, mais les échevins décidè-
rent que sa plainte n'était pas fondée.
En 15 15, il prit comme apprenti un
certain Pierre Verhaghe. En 15 18, il fut élu
juré de la corporation des peintres. En 1 5 20,
il fut employé avec un grand nombre
d'autres peintres aux décors entrepris par
ordre du magistrat, pour la joyeuse entrée
du roi des Romains qui eut lieu le 24 juillet.
En 1521, Cornelis est cité au nombre des
débiteurs de Rodrigo Cathelaen pour la
somme de 27 livres. Cette même année, il
est encore cité devant le tribunal parce
qu'il se refusait à évacuer une maison située
dans la paroisse Saint-Gilles et qu'il habi-
tait comme locatairede Jérôme Frescobaldi.
Cornelis épousa Catherine de Ghezelle,
une brugeoise, dont il eut trois enfants.
L'un d'eux mourut au mois d'avril 1532
et fut enterré au cimetière de Saint-Gilles,
du côté nord. Lorsque le peintre mourut
en 1532, ses deux autres enfants, Nicolas
et Louis, étaient encore mineurs. Sa veuve
épousa en secondes noces un autre peintre,
Guillaume d'Hervy. Nicolas Cornelis fut
admis comme franc maitre dans la Gilde
de Saint-Luc en 1541.
\V. H.James Weale.
:y^
■» iM-* K^^ A^-^ A^^ Jt'^ A^^ A^^ a'^ a'^vI^ A^^ a'^-A A^A A^^ A^^ \^-A ^'S^,
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Jxt^ Origines Ïjc THrcbitccturc gotfjiqur.
Xïcs premières Croisées D'Ogtues en Hng:lctcrre, par John Brr.soN ('
Sf oiIxiiixiiiiiiiiiiiiiiiixiTiiTiiffiiiiiTrTiiiiiii-rTTiiiiisiiiiiiïiiTiiiiiiiriiiirTixriiiiiirTTTiiirTiiiiiiiyiirriiTïiriiirrtîiiïiiixriiiiiitiiiii ^
#Â*x6^^ réef ^i^^^ *^^ ^A^-^ ^i^ï'' *A^'^ ^^'f ^^^ *^^ *^^ ^A^'f *itî^ *^^ ^i^^Â^
a^Tnm,gij:^rH, >;.ry^ E dernier mot n'a pas
J encore été dit en ce qui
concerne la question
^ des origines de l'archi-
tecture gothique. Il ne
subsiste plus cependant
que de légères diver-
gences d'opinion dans la question de savoir
comment, de la basilique à plafond usitée
dans l'Europe occidentale, l'architecture a
évolué pour aboutir à l'église gothique
couverte de voûtes en pierre. On n'est
surtout pas d'accord sur le rôle joué par
différentes régions, dans" les premières
phases de cette évolution. Il est admis, en
général, que les trois éléments caractéris-
tiques de l'évolution du roman au gothique
sont constitués par la croisée d'ogives, l'arc
en tiers-point et l'arc-boutant, et que, de ces
trois éléments, la croisée d'ogives est le
plus important.
On peut atïirmer dès à présent que, sitôt
que fut réalisée l'importante découverte de
ces trois éléments, c'est à l'Ile-de-France
qu'il faut attribuer le mérite de leur rapide
et merveilleux développement. Mais la
jeune école archéologique française, repré-
sentée par M. Lefèvre-Pontalis, ne se
I. D'après \^ Journal of ihe Royal Institute qf British
Architects, vol. VI, 3" série, p. 289.
L'auteur tient à exprimer ses plus sincères remercie-
ments à M. Lionel de Crèvecœur et à M. Marc Raynaud
qui, avec une extrême obligeance, ont bien voulu se char-
ger de la traduction de ce mémoire. Il tient également à
exprimer sa profonde obligation à son ami M. C. Enlart
pour l'intérêt qu'il a pris à la préparation de la traduc-
tion.
La Revue de VArt chrétien, de son côté, adresse ses
meilleurs remerciements au « Ro5'al Institute of British
Architects 5> qui a eu la gracieuseté de mettre à sa dispo-
sition les clichés des belles planches qui illustrent cet
article.
déclare pas satisfaite par de telles conclu-
sions. — C'est à l'Ile-de-France exclusive-
ment que ce savant archéologue veut réser-
ver le mérite d'avoir découvert la croisée
d'ogives. — Dans son grand ouvrage sur
les églises du Soissonnais, M. Lefèvre-
Pontalis dit : « La nervure est une décou-
« verte essentiellement française. C'est sur
« le sol de l'Ile-de-France qu'elle fut sou-
« mise à des expériences décisives avant
« de s'imposer aux écoles des autres pro-
« vinces et à celles des pays étrangers ('). »
D'après le même auteur, Senlis serait, à peu
près, le centre géographique de cette aire
de dispersion. — D'après lui encore, ce fut
dans les basses vallées de la Seine, de l'Oise,
de l'Aisne, de la Marne et de leurs affluents
que cet art original atteignit rapidement à
un si haut degré de perfection. — C'est dans
cette région que M. Lefèvre-Pontalis trouve
l'embryon du système inauguré à Saint-
Denis, fait qui avait échappé à Viollet-le-
Duc, et il représente les monuments ana-
logues qui subsistent dans d'autres provin-
ces comme des emprunts faits à l'Ile-de-
France.
Cette manière de voir n'a pas été unani-
mement adoptée. Dans son beau travail sur
la Transition, M. Anthyme Saint- Paul dit:
« L'heure me semble venue de nous de-
« mander s'il faut, oui ou non, associer la
« Normandie au mouvement transitionnel.»
Cet auteur est convaincu que parmi les
voûtes normandes il en est d'antérieures à
celles de Saint-Denis, ou tout au moins de
I. V Architecture reHj^icwie datts l'ancien diocèse de
Soissons au XI" et au XII" siècle, par Euyène Lefèvre-
Pontalis. Paris, 1894-1S97, t. I, p. 96.
366
Wit\)\it lie r^vt cljrctien.
contemporaines ('). — Il admet un i/oiiô/e
couratU venant, l'un de la Picardie, l'autre
de la Normandie. — Le premier, le courant
picard, auquel M. Lefèvre-Pontalis attribue
une importance exclusive, se caractérise
par l'adoption presque simultanée de l'arc
en tiers-point et de la croisée d'ogives. —
L'autre, qui s'étend sur toute la vallée de
la Seine et dont le principal monument est
l'église de Poissy, possède des architectes
comprenant pleinement l'importance de la
croisée d'ogives, mais hésitant à adopter
l'arc en tiers-point.
On a très justement remarqué (') que la
voûte sexpartite joue un rôle considérable
dans cette question. — Dans le groupe fort
important des églises de style gothique
primitif dont Noyon est le type, nous
trouvons la voûte sexpartite accompagnée
de tribunes. — Il est à noter que, tandis
que nous cherchons en vain cette particu-
larité dans les églises de l'Ile-de-France
décrites par M. Lefèvre-Pontalis comme
étant les devancières de Saint-Denis, nous
la trouvons dans l'architecture normande.
— S'il est vrai que dans beaucoup d'églises
normandes, les voûtes ont été ajoutées
postérieurement à la construction de la nef,
ce n'est pas une raison d'affirmer qu'elles
sont toutes dues à des réfections entreprises
dans la seconde moitié du XIP siècle.
Quelques églises ont certainement reçu
des voûtes dès l'origine, mais malheureuse-
ment on ignore la date de leur construction.
Aussi trouvons-nous en Normandie, au
lieu de la voûte sexpartite habituelle, une
voûte analogue bien que plus imparfaite,
une croisée d'ogives quadripartite divisée
1. Revue de t Arl chrt'tien, 1895. '" livraison, p. 15.
2. Die Atifàiijie des gotkiuhen Batislils ; zur Kritik ,/es
i^es^einuartigeii Standes dcr Fra^e, par G. Dehio, dans le
Repertorium fiir Kunstwissenscha/t, xix JJand, 3 Hefi.
lieiliii et Stuttgart, liigô.
par un arc doubleau portant un mur de
refend. Il est certain que ce système n'eût
pu être conçu en dehors d'une connaissance
préalable de la croisée d'ogives quadripar-
tite. — En ce qui concerne le développe-
ment de ces différentes variétés de voûtes,
M. Dehio a constaté, en prenant pour point
de départ le plus reculé, la date de construc-
tion de St-Étienne de Beauvais, qu il a fallu
un temps tel, pour parfaire cette évolution,
que l'influence de l'Ile-de-France n'y peut
être admise. Aussi ne pouvons-nous accep-
ter la conclusion de M. Lefèvre-Pontalis, à
savoir que la croisée d'ogives a été une
véritable importation dans l'architecture
normande (').
Il est certain que cette discussion ne
serait susceptible de conclusions précises
que s'il était possible de dater exactement
les plus anciens exemples de croisées
d'ogives normandes, ce qui n'est malheureu-
sement pas. — Jusqu'ici aucun des érudits
qui ont pris part à la discussion n'a eu l'idée
d'étudier les monuments anglais, pour y
trouver des arguments. M. Lefèvre-Pontalis
s'y réfère bien, mais, selon lui, la croisée
d'ogives n'a été employée en Angleterre
qu'après la généralisation de son emploi
dans la France occidentale. — Il semble
avoir adopté les conclusions de M. Félix
de Verneilh, conclusions dont nous par-
lerons plus loin.
Il serait bien étrange que cette question
ne reçût pas quelque éclaircissement de
l'étude des églises normandes d'Angleterre,
si l'on considère leur grandeur et leur
importance, et si l'on remarque quelle
fièvre de construction régna à cette époque,
dite époque normande. Il est vrai que
vingt ou trente ans après la conquête
paraissent dans ces monuments certains
I. Die Anfiinge des gothischen Baustils.
JLtQ €)ngînes tje r:^rcl)ttecture gott)iQue.
367
I
traits caractéristiques dont plusieurs pro-
cèdent des traditions architecturales d'avant
la conquête, et que l'on trouve par consé-
quent des monuments qui suivent d'une
façon moins rigoureuse et moins logique le
seul type de plan ou de construction géné-
ralement usité en Normandie. Cependant
il n'en est pas toujours ainsi, et, pour ce qui
est de la construction, les renseignements
évidents que fournissent certaines églises
anglaises, prennent une valeur d'autant
plus grande que plusieurs d'entre elles
peuvent être datées avec une très grande
précision.
Il me semble donc que l'on puisse tenter
de faire pour l'Angleterre une histoire
méthodique de la construction normande
comportant des voûtes, autant que le
permettent les monuments qui nous en sont
restés. C'est ce que je vais essayer dans
l'étude suivante, en citant, à l'appui de ma
thèse, les exemples dont la plupart peuvent
être datés avec quelque certitude.
Bien que j'aborde un sujet assez familier
aux érudits, je dois tout d'abord faire
remarquer que l'architecture normande de
l'Angleterre n'a été étudiée que très peu au
point de vue si important auquel je veux
me placer ('). Je dois ensuite déclarer que
je ne saurais adopter les théories (^) qui
donnent à l'architecture gothique une
origine anglaise ; une telle prétention, il me
semble, ne tient aucun compte des données
élémentaires du problème. Dès la construc-
tion de Saint-Denis on ne peut contester la
supériorité de l'école française. Cependant
l'histoire de l'architecture normande en
I. L'importance de Durham n'a été saisie ni par Deliio
et von Bezold (Dh' kirchliche Baitkiinsl des Abendlandes),
ni par Ruprich-Robert, dans L'architecture normande
aux XI" et Xll" siècles en Normandie et en Angleterre.
1. Comme, par exemple, celle qu'a soutenue M. J. H.
Parker, dans l'article intitulé .• On llic Engiish origin oj
Cothic Architecture {Archceologia, XLIII, 73).
Angleterre prouve sa complète indépen-
dance à l'égard de l'école de l'Ile-de-France,
et tend à faire penser que l'école normande
a pu, au contraire, influencer l'école fran-
çaise.
Au temps de la conquête de l'Angleterre,
le roman normand était déjà empreint d'une
puissante originalité et commençait à se
montrer supérieur aux écoles contempo-
raines des provinces voisines. La caracté-
ristique peut-être la plus frappante de
l'architecture normande consiste dans les
relations parfaitement logiques qui sont
établies entre les arcs, les voûtes et leurs
supports. Les Normands aimaient déjà à
multiplier les lignes dans les archivoltes et
les piliers. C'est cette tendance qui les a
conduits à employer des divisions nom-
breuses pour orner les arcs et les piliers
pendant la première moitié du XI I^ siècle,
ainsi que les riches moulures si caracté-
ristiques dans le gothique anglais même
durant sa première phase. Les plans si
rigoureusement logiques des Normands
prouvent qu'ils cherchaient à voûter entiè-
rement leurs églises. On peut affirmer que
les bas-côtés de certaines d'entre elles
étaient déjà voûtés au temps de la conquête,
quoiqu'en Normandie même il n'en ait
subsisté que fort peu auxquelles on puisse
assigner une date antérieure à 1050 ('). Les
architectes normands n'avaient pas réussi
du prernier coup à voûter le vaisseau central
de leurs édifices, mais les voûtes établies
au-dessus de quelques chœurs sont là pour
nous prouver qu'avant la fin du XI^^ siècle
le problème était en somme résolu.
Nous ne savons que fort peu de chose au
sujet des grandes églises anglaises anté-
rieures à la conquête, mais les textes prou-
363
Bcbuc tir rart chrétien.
vent que déjà quelques-uns des procédés j
normands y avaient été employés. Cepen- [
dant nous ne saurions affirmer que les cons-
tructions anglaises de cette époque fussent
empreintes des caractères de précision
et de logique particuliers aux Normands,
ni que les architectes anglais eussent à ce
moment fait aucun pas dans une direction
qui pût les amener à construire des églises
entièrement voûtées. La persistance de la
tradition de la charpente apparente, que
l'Angleterre avait partagée avec toute
l'Europe du Nord-Ouest, se manifeste suffi-
samment par l'emploi de gros piliers cylin-
driques supportant les grands arcs, tels que
nous en trouvons à Gloucester,Tewkesbury
et Souihwell. C'est là un type inconnu en
Normandie, sauf dans quelques églises de
médiocre importance. Il n'est pas impossible
que la tradition purement anglaise ne puisse
expliquer certains traits particuliers que
présentent les plans de quelques-unes des
plus grandes églises normandes d'Angle-
terre. On trouve, en effet, dans ces der-
nières certaines dispositions inconnues en
Normandie, et les constructeurs s'en tien-
nent généralement à un type moins uni-
forme. Certains détails indiquent la même
tendance. Le chapiteau cubique est partout
employé au lieu du chapiteau à volutes si
fréquent en Normandie (').
Si l'on étudie l'évolution de la voûte sur
des types anglais entre la conquête nor-
mande et le milieu du Xll^ siècle, il
convient de parler d'abord des voûtes des
parties basses de l'église (bas- côtés et
I. I3ans certaines des plus anciennes églises de Nor-
mandie on peut trouver des chapiteaux cubiques qui
s'arrondissent <;raduellenient pour faire corps avec le fût,
ou dont le cube a les angles biseautés (nef de Jumièges).
Mais ces chapiteaux ne montrent pas sur la face du cube
la ligne demi circulaire si courante en Angleterre, et il
est certain que des chapiteaux de ce dernier type ont été
employés en Angleterre avant la conquête.
cryptes), parce que ce sont ces voûtes qui
nous fournissent des exemples les plus
anciens et parce que leur étude n'est pas
compliquée par les considérations relatives
à la poussée, qui offrent une si grande im-
portance lorsqu'il s'agit des voûtes hautes.
Nous n'avons à nous occuper que de la
voûte d'arêtes, car les Normands ont rare-
ment employé la voûte en berceau dans les
parties importantes de leurs églises. La
voûte en berceau existant au-dessus de la
0 1 10
l'H'H [ I I I I I I I I
0 12 1
l""l""l \ \
^ 1
Fig. I. — Durham, crypte du réfectoire.
nef de la chapelle de la Tour de Londres en
est un exemple rare.
La voûte d'arêtes, dans sa forme la plus
simple, est engendrée par deux demi-cylin-
dres se pénétrant à angle droit, et est
dépourvue d'arcs doubleaux : c'est une
réminiscence de la voûte d'arêtes romaine.
Les bas-côtés de la nef de la Trinité à Caen
sont voûtés d'après ce système, plus fré-
quemment usité dans les cryptes. (Trinité
de Caen, et cathédrale de Bayeux.) En
Angleterre, nous avons des exemples de
ces voûtes d'arêtes dans les cryptes du
réfectoire de Durham construites pendant
l'exil de l'évêque Guillaume de Saint-Calais
3Les €>rigine0 de r:^rcl)ttecture gott)tque.
369
(1088-1091) ("), et dont les voûtes sont fy^. /^, ainsi que dans la crypte s'étendant
supportées par des piliers rectangulaires sous le chœur de la cathédrale de Roches-
^^
^
< 1
Où <
-4 a:
<n
H =
m u
ter, qui fut construite par l'évêque Gun-
I. Durham Cathedra!, par William Greenwell, 5= édi-
tion, p. 21.
dulphe (1077- 1082) et dont les supports
sont des fûts cylindriques (').
I. Gundu/fs Totver at Rochester, and i lie first Norman
REVUE DE L ART CHRÉTIEN.
1901. — 5'"*^ LIVRAISON.
370
^ebue ïie T^vt cbvctien.
En général ces voûtes d'arêtes sont
renforcées par des doubleaux en plein-cintre
de section carrée, qui forment sous la voûte
une sorte de cintre permanent ('). L'emploi
de ces doubleaux entraînait cependant des
difficultés considérables pour construire la
naissance de l'arête. Dans la voûte d'arêtes
romaine et dans ses imitations l'arête part
de l'angle externe du pilier. Dans plusieurs
voûtes normandes primitives, l'arête part
de l'angle interne formé par la rencontre
de deux doubleaux ou d'un doubleau avec
le mur ('). Étant donné que les voûtes
étaient construites en blocage, avec de gros
joints et couvertes d'enduit, celte manière
d'agencer la naissance de l'arête était
évidemment défectueuse. Aussi tourna-t-on
bientôt cette difficulté en développant le
plan des piliers. Le pilastre sur lequel re-
pose le doubleau est flanqué de chaque
côté par un pilastre secondaire qui forme
pour l'arête un support indépendant (3).
Cette disposition est employée dans la
crypte du dortoir de Westminster (conti-
nuation de l'œuvre d'Edouard le Confesseur
1070- 1080 environ), où le pilier et l'arête
Cathedral Church there, par W. H. St-John Hope, Ar-
cluvologia, XLIX, 323.
1. Les extrémités des coucliis étaient posées sur l'ex-
trados des doubleaux. On voit encore en place des frag-
ments de ces couchis dans la crypte de Lastingham
(Yorkshire). Cette crypte fut construite entre 1078 et 1088
par des moines venus de l'abbaye de Whitby et qui
n'avaient pas achevé l'église de Lastingham quand ils
partirent pour fonder l'abbaye de Notre-Dame à York.
2. Bas-côtés de la nef de Lessay (fi^. 20). Chœur et
bas-côtés de Saint-NMcolas de Caen et de St-Georges de
Boscherville (/is^. 24). Voir aussi les pilastres du bras
nord du transept de la cathédrale d'Ely (/ig. 2, VIII).
3. Dans de très anciens exemples, tels que Bernay et
Tumièges, nous voyons la préparation de ce système.
Dans le bas-côté sud du chœur à Bernay, l'arête forme ,\
sa naissance un angle saillant, mais le pilier n'ofire pas
de subdivision pour la recevoir. Dans les bas-côtés de la
nef de Jumièges le support adossé au mur est formé par
une demi-colonne engagée dans un pilastre carré (comme
à Kly, /?;'■ ^, VIII); mais, le doubleau n'occupant pas
toute la largeur du pilier, les angles restent disponibles
pour recevoir la saillie des arêtes à leur naissance.
sont continus et dépourvus d'impostes ('). Il
existe d'autres exemples avec imposte
moulurée: les bas-côtés de St-Albans (com-
mencé par l'abbé Paul de Caen en 1077)
{fig. 2, i); la crypte de la cathédrale de
Winchester, commencée par l'évêque Wal-
kelin en 1079 (Jîg. 2, II, &t/ig: j) ; les bas-
côtés de la chapelle de la tour de Londres
(1080 environ) ; les bas-côtés de la nef du
prieuré de Blyth (Nottinghamshire), fondé
Fig. 3. — Winchester, crypte.
en 1088 (/iq. 2, V); la crypte de Bow-
church à Londres ('') et les bas-côiés du
chœurde. S t- Barthélémy de S mi thfield fondé
seulement en 1123 (').
Dans certaines cryptes, oh les supports
sont constitués par des fûts cylindriques,
1. Cela n'est exact que pour les piliers adossés. —
Quant aux retombées supportées par des jiiles cylindri-
ques, l'arête nait un peu au-dessus du chapiteau, dans
l'angle formé par les doubleaux qui sont en plein cintre
surbaissé.
2. Velusla Moiiuincnla, V, planche 64.
3. Dans la crypte du dortoir de Westminster, les bas-
côtés de la chapelle de la Tour de Londres, la crypte
de Bowchuich et les bas-côtés du chœur de St-Barthé-
Icmy de .Suiiihfield, les voûtes sont munies de fornierets
qui reposent sur des pilastres distincts. Voir les illus-
trations relatives ;\ la chapelle de la Tour dans les Vciusta
Moniiiiunta, I V, pi. 48 .^ 5 1 .
Hes C>rtgtnes De r:^rcl)ttecture goftique.
371
le sommier de la voûte offre des divisions
correspondant aux dispositions que nous
venons d'indiquer, de manière à four-
nir une saillie spéciale au départ de
l'arête. (Crypte de la cathédrale de Wor-
cester 1084 (') , crypte construite par
Ernulphe à la cathédrale de Cantorbéry
(1096 environ), chapelle du château de
Durham, commencée par Guillaume le Con-
quérant en 1072.)
Un autre progrès fut réalisé par la
substitution de colonnes engagées aux pi-
lastres carrés qui recevaient les arêtes. Les
voûtes situées sous les tribunes du transept
à St-Étienne de Caen ont des supports de
ce genre (fig. 2, III) et, bien que les
voûtes des bas-côtés de la nef aient été
reconstruites à une date postérieure (°), les
plans des piliers indiquent clairement que
la même disposition y avait été adoptée (^\
La même méthode est employée dans les
constructions dues à l'évêque Walkelin
dans les bas-côtés du transept de la cathé-
drale de Winchester (fig. 2, VII ^^ fiS-
4 ('') ). Nous la rencontrons également dans
les constructions de l'abbé Siméon, frère
de Walkelin, dans les bas-côtés du transept
de la cathédrale d'Ely, mais ici on ne ren-
contre la colonnette recevant l'arête que
dans les piliers des grands arcs et non pas
dans les piliers adossés au mur (fig. 2,
F///^.Dans les bas-côtés de la nef d'Ely (^)
1. Une excellente étude sur les voûtes de la crypte de
la cathédrale de Worcester, due au professeur Willis, se
trouve dans les Transactions of Ihe Royal Jnstituie of
British Architects, 1862-3, p. 213.
2. G. Bouet, Analyse architecturale de l'abbaye de
St-Étienne de Caen, 1868, pp. 32 et 34, et dans \e Bulletin
Monumental, XXXI, pp. 448 et 450.
3. Également dans le bas-côté nord de St-Taurin
d'Évreux.
4. Également dans les angles de la partie centrale de
la crypte de Rochester, œuvre de Gundulphe [/Irchao-
logia, XLIX). Dans les angles des bas-côtés de cette
crypte les arêtes retombent sur des pilastres carrés.
5. Ruprich-Robert donne pour la nef d'Ely les dates
de 1174 à Ii8g. Elles ne peuvent s'appliquer qu'à la par-
on rencontre la même disposition, à cela
près que les pilastres adossés au mur ont
une colonne correspondant à la retombée de
l'arête (fig. 2, IX), comme à Winchester.
Dans le collatéral nord de l'église abbatiale
de St-Augustin à Cantorbéry, une colon-
nette reçoit l'arête (fig. 2, VI), et le pro-
fesseur Willis croit que l'on adopta le même
mode de construction dans les bas-côtés du
chœur de la cathédrale de Cantorbéry, qui
Fig. 4. — Winchester, voûte sous la tribune du transept nord.
sont l'œuvre d'Ernulphe ('). Cet agence-
ment de voûtes et de supports ne fut
probablement que peu usité et bientôt
abandonné pour l'emploi de la croisée
d'ogives.
Dans les voûtes situées sous les tribunes
du transept à St-Etienne de Caen et dans
les constructions de l'évêque Walkelin à la
cathédrale de Winchester (crypte, y%-. j ;
tie supérieure du transept occidental. Le projet de la nef
est certainement dû à l'abbé Richard (i loo-i 107), si même
on ne peut lui attribuer la plus grande partie de la cons-
truction actuelle. Voir D. J. Stewart, The Architectural
History of Ely Caihedral, 186S, p. 38.
I. Voir R. Willis, The Architectural History of Canter-
biiry Cathedral, 1845, p. 77.
572
l&thxit ÏJC r^lrt cbréttcn.
bas-côtés du transept, /%•. y) ('), se trouve
réalisé un progrès important : les reins de
la voûte sont appareillés en moellons, le
reste étant construit en blocage recouvert
d'enduit. Ces progrès relatifs à la construc-
tion de la naissance des arêtes et au plan
des supports sont dignes d'attention, car
ils font comprendre comment on accueillera
la découverte bien plus importante de la
croisée d'ogives. Mais, avant d'en venir à
ce point, qui sera l'objet principal de mon
étude, il est nécessaire de parler des modi-
Fig. 5. — Gloucester, chapelle sud du déambulatoire, côté nord.
fications que subit la voûte d'arêtes dans
le cas où il fallait voûter des travées de plan
barlong, ou irrégulier.
Quelle que fût la forme de l'espace à
couvrir, qu'on la suppose barlongue, trian-
gulaire ou trapézoïdale, les Normands cher-
chaient toujours à ne pas donner aux voûtes
I. Également dans les voûtes des bas-côtés de la nef
de Blyth (Noltinghamshire).
d'arêtes une forme bombée ('). Ils attei-
gnirent ce but en surélevant le tracé des
voûtains les plus étroits de portée. Quel-
quefois ces courbes sont simplement en
plein cintre surhaussé ; le plus souvent la
courbe adoptée est celle d'une ellipse posée
I. En Angleterre, au moins, les Normands ne parais-
sent pas avoir adopte l'expddient de bomber la voûte de
manière à pouvoir donner à l'arcte un tracé en plein-
cintre. {Viol\et-le-D\xc, Dictionnaire, IV, iS.)
BLctiuc Dc l'Hrr cbréticn.
Pl. YlII.
HLcmic Dc PHrt chrétien.
DURHAM CATtiEDRAL.
HALF CR055-5ECT10N OF CHOIR
NORTH 5IDE.
t «^/U/*i7<
îLe0 £)rig(ne0 De r:^rcl)ttecture gotl)ique.
373
sur son petit axe. Les méthodes employées
sont irrégulières, car à ce moment on ne
réalisait de progrès que par voie de tâton-
nement. Que les Normands aient acquis
une grande habileté avant l'introduction de
la nervure, pour voûter des travées de plan
irrégulier, cela nous est prouvé par les cryp-
tes de Winchester (') et de Worcester (').
Dans l'abside et le déambulatoire de la
crypte de Winchester le tracé irrégulier
des travées et la science déployée dans la
construction de leurs voûtes sont très
remarquables. — Les arcs sont en plein
cintre légèrement surbaissé (^), tandis que,
pour maintenir les clefs à un même niveau,
il a fallu que l'on fît prendre aux voûtains
latéraux des travées les plus étroites une
haute courbe elliptique. — A la cathédrale
de Gloucester (commencée en 1089, con-
sacrée en 1 100), dans l'étroite travée qui se
trouve au côté-ouest de la chapelle absidale
sud, le formeret est un véritable arc brisé,
bien qu'à son sommet la lunette de la
voûte soit arrondie (fig. 5). ■ — L'extrême
ingéniosité dont les Normands ont fait
preuve, dans l'emploi de la voûte d'arêtes,
explique, dans une certaine mesure, pourquoi
ils ont de bonne heure adopté le principe
de la croisée d'ogives et lui ont donné un
développement systématique.
La forme semi-elliptique (^) donnée aux
compartiments latéraux des voûtes d'arêtes
mentionnées plus haut est digne d'attention,
1. Un plan de cette crypte se trouve dans History and
Antiquities of Ihc Sec and Cathedral chiirch of Winches-
ter, par J. Britton (1817), pi. II.
2. R. Willis, voir plus haut.
3. Le professeur Willis en parle comme de courbes
elliptiques dont la portée est de 4 '" 57 et la flèche de
I m 8j. — Voir les Transactions citées plus haut, p. 215.
4. D'après Sir G. G. Scott (Lectures on Mcdiœval
Architecture, I, p. 57 j, ce n'était qu'exceptionnellement
qu'on adopta ces courbes, mais j'estime que les exemples
existants ne sont pas susceptibles d'une interprétation
autre que celle donnée plus haut. Voir Ruprich-Robert,
L'architecture normande, p. 71.
parce qu'elle démontre qu'avant l'introduc-
tion de la nervure les architectes normands
modifiaient déjà la courbure de ces com-
partiments latéraux, de manière à la faire
concorder avec la courbe de l'arête. Etu-
dions le cas d'une voûte d'arêtes établie sur
une travée barlongue A B C D. (fig. 6) :
le tracé de la lunette la plus large est un
demi-cercle A E B, et les lignes de faîte
des voûtains doivent être placées de niveau.
— Si la courbe du compartiment latéral est
un demi-cercle surhaussé A F G, l'arête,
F
A
C
J
\
\
/
H/
\
\
Fig. 6.
au lieu de se trouver dans un plan vertical,
décrira en projection une ligne infléchie
A H, B H ('). — Mais, pour que l'arête
soit contenue dans le même plan D H, sa
courbe devra être une demi-ellipse D K,
et la projection de cette courbe sur le mur
latéral imposera à la lunette une forme
semi-elliptique D L G. — Je ne prétends
pas que ces voûtes primitives aient été cons-
truites avec une exactitude mathématique,
mais il me semble évident que c'est afin
I. Voir le professeur Willis sur les voûtes de la crypte
de Worcester, Transactions citées plus haut, p. 215 et
pi. I.
374
Wit\)x\t lie l'^rt cl)rcticn.
que l'arête se trouvât à peu près dans un
plan vertical que les compartiments laté-
raux ont reçu cette forme elliptique. Après
l'introduction de la nervure, les comparti-
ments latéraux des voûtes barlongues
prennent généralement aussi un tracé ellip-
tique, bien que dans les plus anciennes
croisées d'ogives la nervure ne décrive plus
une demi-ellipse mais un arc de cercle, dont
le centre de figure est placé au-dessous des
impostes. — Désormais la courbe des
ogives sera le principe générateur de la
construction, déterminant la disposition
des compartiments de remplissage.
La croisée d'ogives apparaît vers la fin
du XI" siècle dans les pays, fort éloignés
les uns des autres, situés entre l'Italie
septentrionale et la Bretagne. L'histoire
de son évolution dépasserait de beau-
coup les limites de ce travail où je ne me
propose que d'étudier son développement
dans les monuments anglais. — Mais, quels
qu'aient été l'endroit et les circonstances
dans lesquels sa découverte a eu lieu, ses
avantages ont dû immédiatement apparaître
à tous les yeux. La croisée d'ogives assurait,
en effet, un cintre permanent à l'arête qui,
lorsqu'elle avait une grande portée, était
toujours sujette à s'écrouler. — L'ogive
complétait donc la membrure inaugurée
déjà par l'adjonction de l'arc doubleau à la
voûte d'arêtes romaine. — Avant la fin du
XI" siècle, les architectes normands cou-
vraient déjà les chœurs de voûtes d'arêtes:
il en reste quelques exemples dont nous
parlerons plus loin. — L'emploi de la ner-
vure se recommandait naturellement à une
école qui eut toujours une tendance mar-
quée à multiplier les piliers et les arcs et
qui était devenue aussi habile à construire
les voûtes d'arêtes. Il ne faut donc pas nous
étonner de voir,qu'en Angleterre aussi bien
qu'en Normandie, les architectes normands
adoptèrent volontiers et développèrent
rapidement cette innovation.
La cathédrale de Durham n'est pas
seulement la plus belle construction romane
que possède l'Angleterre, elle est aussi le
plus parfait parmi les premiers exemples
de l'emploi de la croisée d'ogives dans
notre pays. Toutes les parties de l'église (')
furent voûtées sur croisées d'ogives entre
1093 et 1133. ^^ constatation de ce fait
est de la plus haute importance pour la
solution du problème brièvement exposé
au début de cette étude. Nous pouvons
heureusement nous fier aux témoins qui
l'attestent, car ce sont deux chroniqueurs
contemporains dont l'un fut probablement,
et l'autre certainement, moine à Durham.
— Nous citons du reste les textes les plus
importants ("). Ils nous permettent de dater
avec exactitude certaines phases dans la
marche de la construction. — Aussitôt après
son retour de l'exil, l'évêque Guillaume de
Saint Calais fit abattre l'église d'Aldhun et,
dès l'année suivante, commença la construc-
tion d'une église plus importante, dont la
première pierre fut posée le i i août 1093.
— Nous n'avons pas de renseignement
1. Excepté peut-être la croisée du transept. — Nous
n'avons pas de données certaines à son sujet, car on
reconstruisit la partie supérieure de la tour centrale au
XV'= siècle ; mais les colonnes montées dans chaque
angle de la lanterne étaient probablement destinées à
recevoir les ogives d'une voûte.
2. Syineonis monachi Duiihclni. lihcllits de cxordio
Diinhclinensis Ecclesiae. Ed. Thomas Bedford, Londres,
1732. Rolls Séries, éd. T. Arnold, 1882-1885. C'est à cette
dernière édition que nous renvoyons plus bas. L'histoire
de Symeon s'arrête en 1096; celle de son continuateur en
1144. — « Ecclesiam xcvill anno ex quo ab Akhino fun-
data fuerat, destrui precepit, et sequenti anno positis fun-
damentis nobiliori satis et majori opère aliam construere
cœpit. — Est autem incepta MXCUj Dominicic incarna-
tionis anno, pontificatiis autem Willelmi xilj ex quo
autem monachi in Dunelmum convenerant xj tertio Idus
Augusti, feria V. Eo enim die Episcopus, et qui post euni
secundus erat in ecclesia prior Turgotus cum cœteris
fratribus priinos in fundamento lapides posuerunt. Nam
paulo ante, id est, IV Kal. Augusti feria VI, idem Epis-
copus et prior, facta cum fratribus oratione ac data bene-
iLc0 €)rtgtne0 de r:^rcl)itecrure gotl)ique.
375
précis sur l'état de la construction au mo-
ment de la mort de l'évêque (6 janvier
1096). Nous savons cependant que l'évêque
avait entrepris la construction de sa cathé-
drale en même temps que les moines celle
de leur monastère et que sa mort vint
modifier cet état de choses. — - Désormais
les moines se consacrèrent uniquement à
l'œuvre de la cathédrale, qui avait été pour-
suivie jusqu'à la nef lorsque Ralph Flam-
bard accéda au trône épiscopal (1099). Si
nous considérons que l'évêque Guillaume
était d'un caractère énergique et qu'il dis-
posait de grandes ressources, évidemment
très supérieures à celles des moines, ses
continuateurs, nous sommes amené à cons-
tater un fait nettement indiqué du reste
par les caractères archéologiques de l'édi-
fice: le chœur et le côté oriental du transept
jusqu'au haut du triforium sont l'œuvre de
Guillaume, tandis que le côté occidental du
transept peut être attribué aux moines. — •
Le chœur était déjà si avancé en 1 104 qu'à
cette date on y transporta et qu'on 1 plaça
au chevet la châsse de Saint-Cuthbert.
Flambard poussa les travaux: (imodo
intentms, modo remissitis » ; ce fait s'est
manifesté par certaines modifications appor-
dictione, fundamentiim cœpeiant fodere. Igitur monachis
suas officinas sdificantibus, suis Episcopus sumptibus
ecclesiœ opu5 faciebat. > — Syineon, I, 128-g.
— Le continuateur parle de Flambard en ces termes :
« Circa opus ecclesias modo intentius modo remissius
agebatur, sicut illi ex oblatioae altaris et cœmeterii vel
suppetebat pecunia vel deficiebat. His namque sumptibus
navem ecclesia; circumductis parietibus, ad sui usque
testitiidinem erexerat. — Porro pr^-cdecessor (Willelmus de
S. Carilefo) illius (Rannulfi), qui opus inchoavit, id decer-
nendo statueiat, ut Episcopus ex suo ecclesiam, monachi
vero suas ex ecclesia; collectis facerent officinas. — Ouod
illo cadente cecidit. — Monachi enimomissis officinarum
asdificationibus operi ecclesiis insistunt, quam usque
navem Rannulfusjam factum invenit. » — Con/inuatio, I,
139-140.
— Après la mort de Flambard : « Vacavitque episco-
patus per quinquennium. Eo tempore navis ecclesiae
Dunehiiensis monachis operi instantibus peracta est. 2>
Contintiatio, I, 141.
tées au plan primitif de la nef et aux parties
hautes du bras sud du transept... Quand
Flambard mourut en 1 1 28, la nef était ter-
minée jusqu'à la naissance des voûtes hau-
tes : dans l'intervalle qui sépara sa mort de
l'élection de son successeur, Geoffroy le
Roux (1133), les moines achevèrent com-
plètement la nef, c'est-à-dire qu'ils construi-
sirent la voûte.
II semble d'après le plan ('), du chœur et
de la partie orientale du transept, que l'on
avait bien eu, dès l'origine, l'intention de
couvrir les bas-côtés et les nefs de voûtes
qui furent alors véritablement construites. —
Décrivant plus loin les voûtes des nefs prin-
cipales, nous examinerons d'abord les voûtes
des collatéraux construites par l'évêque
Guillaume entre 1093 et 1096. Ces voûtes
sont figurées dans les relevés que nous don-
nons d'une des travées du chœur (Jîg. 7, 8
et ç) [-). Nous y joignons un plan détaillé
(Jig. 10) sur lequel est figuré le rabattement
1. Cf. le plan de la cathédrale dans Architectural Illus-
trations and Description of the Cathedral Church of Dur-
ham, par R. W. Billings, 1843, pi. 3 et 4, ou dans The
Bttilder, LXIV, p. 427. Voir aussi le plan du chevet pri-
mitif dans VArchœotogical Journal, LUI, 9, pi. 2.
2. Les figures 7 à 12 montrent la moitié ouest delà
double travée est du chœur (côté nord). Dans les fig. 7 et
8 nous avons supprimé la voiite actuelle du chœur cons-
truite au milieu du XI 11^ siècle ; quelques remaniements
ne sont pas figurés. — Les formerets AAA, de la voûte du
Xlll'siècle et les colonnes qui les reçoivent, sont indiqués
(fig. 7) par des lignes ponctuées. — L'appareil de la partie
haute du mur en BB et CC (fig. 7) montre le tracé de la
lunette de la voûte primitive. — Au XIII'' siècle, quand
on construisit la voûte actuelle, on sculpta les chapiteaux
des triples colonnes en D (fig. 7), mais les chapiteaux
correspondants de la double travée occidentale n'ont pas
été modifiés. — La colonne en E (fig. 7) a été coupée
pour faire place aux stalles du chœur, qui recouvrent le
mur dans toute la partie où les joints ne sont pas indiqués.
Le niveau actuel du dallage du bas-côté donne le niveau
primitif du dallage du chœur (voir Archaological Journal
LUI, 6). Les fenêtres du bas-côté nord ont été remaniées;
les lignes ponctuées en F dans la coupe transversale
(fig. 8) indiquent une fenêtre semblable à celles du bas-
côté du transept. — Le banc de pierre que 1 évêque Gau-
tier de Skirlaw (1388 à 1405) a fait construire dans le
bas-côié nord est indiqué par des lignes ponctuées en G
(fig. 8)-
576
ÎRcbut lie rSlrt cJ)rétim.
Fie. 9.
i/<(t/ /Sf!S
ILîQ C>ngtne0 îie l'3trtl)ttecture gotl)tque.
377
horizontal des nervures et des doubleaux (').
I. Dans ces plans et les plans suivants les rabattements
sont faits autour des niveaux des naissances des nervures,
pris comme axes.
Les doubleaux et les ogives sont supportés
par des triples colonnes adossées au mur du
collatéral, ou aux piles fortes et faibles qui
RKVUE DE l'art CHRÉTIEI*.
I9OI. — 5™*^ LIVRAISON.
378
3Rrbut ïic l*^rt cbvcttcn.
reçoivent la retombée des orands arcs. A
chacune des nervures correspond une co-
lonne distincte. Le plan des travées des
collatéraux du chœur est barlong ('), le
rectangle étant orienté comme l'église dans
le sens de sa plus grande dimension. La
portée des ogives est, en conséquence, de
plus du double de celle des doubleaux. Les
grands arcs sont à peu près en plein cintre ;
celui de la travée que nous reproduisons a
son centre de figure situé à o"''20'^ au-dessous
du niveau des impostes. La portée du dou-
bleau qui retombe au revers de la pile fai-
ble est un peu plus grande que celle du
doubleau correspondant à la pile forte. —
De la sorte, tandis que le premier est tracé
en plein cintre, le second a dû être sur-
haussé d'environ o^a^f^. Les courbes des
oeives sont des arcs de cercle tracés de
centres situés à i™45*^ au-dessous du niveau
de leur naissance ; les ogives, par consé-
quent, forment, en retombant sur leurs cha-
piteaux, un angle aigu avec les tailloirs. Les
clefs des ogives sont placées beaucoup plus
hautque le sommetdes doubleaux; les lignes
de faîte des voûtains montent donc vers la
clef des ogives ('). Les lunettes des voû-
tains, sur les murs goutterots, sont en plein
cintre surbaissé ; sur le mur du bas-côté,
elles le sont davantage encore. Sur le mur
latéral du chœur, la lunette de la voûte n'est
pas concentrique au grand arc, à cause de la
largeur considérable de la pile forte ; il fal-
lut, en conséquence, laisser un pan de mur
entre l'extrados de l'arc et la voûte du côté
1. Excepté la travée ouest qui se rapproche davantage
du plan carré, car c'est la largeur du collatéral au tran-
sept qui détermine la forme de son plan. Les autres
travées sont à peu près de largeurs égales, d'axe en axe
des piliers.
2. Les coupes des clefs de voûtes se trouvent fij^. lo.
Dans la travée en question les pentes qu'accusent les
lignes de faîte des voûtains sont respectivement : de la
clef des ogives au mur du chcuur, o"'20", au mur des bas-
côtés, o"'53', aux clefs des doubleaux transversaux o'"68^.
de la pile forte. — Remarquons que, con-
trairement à ce qui se passe pour l'arête
d'une voûte sans nervures, la courbe de
l'ogive n'est pas déterminée par l'intersec-
tion des compartiments de voûte ; au con-
traire, l'ogive est établie d'une manière in-
dépendante, et c'est sa courbe qui détermine
la forme des voûtains de remplissage (').
Ce fait est très apparent en ce qui concerne
les compartiments aboutissant aux murs du
chœur et du bas-côté ; leur surface a dû être
considérablement gauchie, parce que le
centre de figure de l'ogive est à un niveau
bien inférieur aux centres des courbes oréné-
ratrices des voûtains. — Le profil des dou-
bleaux se compose d'un méplat encadré de
deux boudins surmontés de cavets ; celui
des ogives, d'un gros boudin entre deux
gorges... Les moulures de l'ogive ne se
dégagent pas bien à sa naissance, surtout
à la retombée de la pile faible (voir les fig.
10. II et 12). Les ogives et les doubleaux,
ainsi que tous les arcs du reste, sont cons-
truits en claveaux minces d'une épaisseur
moyenne de o'"i8c. Les clefs des ogives
sont appareillées d'une manière toute pri-
mitive : les faces des clefs ne se présentent
pas dans une direction perpendiculaire aux
axes des nervures, mais elles forment le
prolongement des côtés de celles-ci, de
sorte que des claveaux triangulaires ont dû
être disposés tout autour de la clef pour
opérer le raccordement fyfi,''. 10) ('). 11 n'y
a pas de formerets. Les voûtes des bas-
côtés du transept sont exactement sembla-
bles à celles des collatéraux du chœur, à
cela près que le plan des travées y est de
proportions différentes. Toutes ces voûtes
1. Il est à peine nécessaire de faire remarquer que
cela seul démontre l'impossibilité qu'on ail ajouté ici des
ogives sous les arêtes d'une voûte originairement cons-
truite sans nervures.
2. Les clefs des autres voûtes de la cathédrale sont
appareillées d'une manière presque semblable.
ILtQ C>rigtne0 îie r3Crcl)ttecture gothique.
379
basses font certainement partie de l'œuvre
primitive ; leur appareil et leurs profils
présentent les mêmes caractères que ceux
des arcs du chœur, et', pour des raisons de
construction, elles ont certainement dû être
montées, comme à l'ordinaire, en même
temps que les murs principaux. — On a dit
que les colonnes engagées dont nous
avons parlé plus haut avaient dû être
Fis
Durham, bas côté du chœur, pile forte.
disposées pour recevoir la retombée de
voûtes d'arêtes semblables à celles des
cathédrales de Winchester et d'Ely, et que
les voûtes actuelles sont dues à un rema-
niement postérieur. La construction des
voûtes considérée en elle-même ne peut
fournir aucun argument à l'appui de cette
thèse. — Elle se trouve, d'autre part, net-
tement contredite par la disposition donnée
aux colonnes engagées à l'angle des colla-
téraux du chœur et du transept, aussi bien
du côté nord que du côté sud. Dans le bas-
côté du chœur ce sont des groupes de trois
colonnes qui reçoivent comme ailleurs les
deux ogives et les doubleaux, mais dans
cette première travée du bas-côté du tran-
sept on n'eut besoin que de deux colonnes,
puisque l'ogive de la travée commune, de
la travée de jonction, était déjà pourvue ;
et le plan du pilier d'angle fut simplement
Fig. 12. — Durham, bas-côté du chœur, pile faible.
modifié par la suppression de la colonne
devenue inutile (^^. ij) ('). Si l'architecte
s'était proposé de construire des voûtes
d'arêtes, il aurait tout simplement pris
l'angle du mur comme point de départ de
l'arête et ne se serait pas imposé une diffi-
culté pour le simple plaisir de la surmonter.
Les voûtes des bas-côtés de la nef de
I. A une date plus récente, on petit reni.iiquer Teniploi
de la même soltition h l'angle des bas entés du chœur et
du transept de la cathédrale de Lisieux.
38o
3Re\jur ïir l'^vr djrcttcu.
Durham sont l'œuvre de l'évêque Ralph
Flambard (1099-1 128), et comme il éleva la
nef jusqu'à la naissance des voûtes hautes,
celles des bas-côtés peuvent donc être
attribuées aux vingt premières années du
XI I« siècle. Leurs caractères sont les
mêmes que ceux des voûtes des collatéraux
du chœur, à l'exception de quelques détails
de minime importance. Au dos des piles
fortes et vis-à-vis d'elles, les ogives et le
doubleau retombent sur trois colonnes
engagées comme dans les collatéraux du
Fig. 13. — Durham, plan du pilier à langle des collatéraux
du chœur et du transept.
chœur et du transept, mais les piles faibles
sont simplement cylindriques, dépourvues
de colonnes engagées spécialement des-
tinées à la retombée de la voûte, et les
piliers qui leur font face sont constitués par
une grosse colonne à demi engagée dans le
mur du collatéral. Les doubleaux corres-
pondant aux piles faibles ont une portée
plus considérable que ceux correspondant
aux piles fortes, et la courbe des premiers
a été modifiée en conséquence. Les dou-
bleaux de toutes les travées des bas-côtés
de la nef et les ogives des deux travées
orientales présentent les mêmes profils que
dans les collatéraux du chœur et du tran-
sept. Dans les autres travées, le boudin de
l'ogive, au lieu d'être flanqué de deux
gorges, est encadré par deux rangs de
bâtons brisés. Les voûtes situées sous les
tours occidentales sont également l'œuvre
de Ralph Flambard; elles diffèrent de celles
décrites plus haut. Comme les tours font
une forte saillie sur l'alignement extérieur
du bas-côté, les ogives de leurs voûtes ont
une portée plus grande que celles des
voûtes des collatéraux. En conséquence, les
chapiteaux des ogives ont été placés plus
bas que ceux des arcs donnant ouverture
sur la nef et les bas-côtés (fig. i^) et, de
la sorte, l'abaissement du point de départ
de l'ogive compense l'accroissement donné
à sa fièche. La même disposition a été
employée par Suger à Saint-Denis (i 137-
1140) dans les voûtes placées sous les
tours de la façade, mais dans ce dernier
exemple tous les arcs sont en tiers-point.
L'exemple immédiatement postérieur de
croisées d'ogives auxquelles nous puissions
attribuer une date presque certaine nous
est fourni par la cathédrale de Winchester,
dans les parties de son transept recons-
truites au Xll<ï siècle. La construction
primitive remontait à l'œuvre de l'église
entreprise par l'évêque Walkelin, en 1079,
et dont les moines prirent possession en
1093. La tour centrale s'écroula en 1 107 (')
et les travaux de reconstruction nécessités
par cette catastrophe peuvent être facile-
ment distingués des travaux primitifs, grâce
aux épaisseurs des joints de maçonnerie :
très épais dans l'œuvre de Walkelin, ils sont
au contraire très étroits dans les parties
reprises postérieurement ('). Dans les
i.« Anno MCV'II. Turris ecclesi;!: ejusdemcecidil non.is
Octobiis, » Annales monasterii de Wnitonia, dans les
Annales monastici (Rolls séries, éd. H. R. Luard) II. 43.
2. 'l'he Aichitecliiral Histoiy of Winchester Calhedral.
par le prof.Willis, Archœol. Instit., Winchester vol., p. 25.
iLe0 C>rigme0 îie r;?lrd;itecturc gotl)ique.
381
travées reconstruites des bas-côtés du tran-
sept les voûtes primitives furent entière-
ment remplacées par des croisées d'ogives
dans lesquelles la nervure retombe sur les
colonnes qui, à l'origine, recevaient les
arêtes de la voûte non nervée (fig. ^, VI 1 ;
AA sont les ogives de la voûte reconstruite).
Comme à Durham, la courbe de la nervure
est un arc de cercle tracé d'un centre placé
au-dessous du niveau des impostes. Les
lignes de faîte des voûtains sont à peu près
de niveau. Le profil de la nervure est formé
par un large boudin encadré par deux pe-
tites gorges. A Durham les voûtes des bas-
côtés nous montrent des profils sembla-
bles, bien que moins finement exécutés (').
Les claveaux des nervures sont minces et
leurs joints étroits. Les clefs sont appa-
Durham, voûte sous la tour nord-ouest.
reillées de manière à ce que leurs joints
soient perpendiculaires à l'axe de la ner-
vure. La travée située à l'extrémité nord du
bas-côté est du transept nord n'a pu être
atteinte par la chute de la tour, et la voûte
primitive semble avoir subsisté en ayant
toutefois reçu le renfort de nervures appli-
quées sous les arêtes ('). Quant à la date
1. Les ogives des voûtes des bas-côtés de Durham ont
o 56, et celles de Winchester 0.36 de large.
de ces voûtes nervées, nous ne pouvons
mettre en doute que dans une église aussi
importante que Winchester les moines
I. Le rapport du prof. Willis (p. 35, ut sitp.). en ce qui
concerne les travées des bas-côtés nord du transept qui
ont des voûtes nervées, n'est pas absolument exact. Les
travées marquées C et I sur son plan {fig. j6) ont des
voûtes nervées. Dans la travée H je pense que les nervures
ont dû être ajoutées sous la voûte d'arùte primitive. Les
travées D, E, F, et G ont des voûtes d'aiètes primitives.
Dans la travée I les nervures sont dues à une reprise du
XIV siècle.
382
lSit\)x\t tic ravt fijrcricn.
n'aient voulu entreprendre immédiatement
la réfection des dommages causés, et nous
sommes en droit de fixer l'érection de ces
voûtes aux deux ou trois années qui ont
suivi l'an 1107, date de la chute de la
tour (').
I
La cathédrale de Peterborough possède
des croisées d'ogives dont la date nous est
donnée par des documents. L'église fut
incendiée en i 116, et le monument actuel
commencé en 11 17, ou 1118 ('). En 1140
ou I 143 (les deux dates sont citées par dif-
01234
iiiiiiii
O I
1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1
234567
I I I 11 I
8 9 10
i5 FEET
H
5 MÈTRES
Peterborough, bas côté sud du chœur. Plan de la voûte.
I. M. F. de Verneilh {A?inales arc/téologiqiics, XXIV,
234) s'appuie sur le prof. Willis pour démontrer que ces
voûtes sont d'une date plus récente que la construction
primitive; mais il n'est pas fait mention dans cette
démonstration de la cliute de la tour qui nécessita la
reconstruction des voûtes en question, et la date donnée
par cet événement ne convient pas aux conclusions formu-
lées.
2 « An MC.W'I. La même année l'église de ISurh fut
entièrement brûlée. >(.-i'/^/i5 5i(.ro« throiiiiie^KMs .Séries
éd. Henj. Tliorpe I. 371, II, 213).
i MC.WI. Tota ecclesia et villa combusta est... In alio
autem anno ipse abbas inchoavit novam ecclesiam, et
férents chroniqueurs) (^),les moines prirent
jactavit fundamentum octavo idus Martii,anno ab Incar-
natione Domini millesimo centesimo decimo octavo, et
multum operatus est in ea, sed non complevit. » (Hu-
sonis Candidi Coenobii Burgensis Hisloria, p. 72, im-
primé dans les Hisloriœ Anglicatiœ de Sparke.
« MCXVI. Monasterium Burgi, cum magna parte villa:
adjacentis, combustum est secundo nouas Augusli, die
\'eneris ». « MCXVII. Kundamentum nova; ecclesi;c
Hurgi ponitur quarto idus Martii :». (Clticmicoii Aiii^liœ
per Johannem Abbatein Burgi S. f'elri. SiiaïUe, Hiilorice
Aiiglhiinœ, p. 64.)
3. L'abbé Martin... amena les moines dans le nouveau
JLtQ £)nstneô De r:lvcl)itecture sotï)ique.
383
possession de la nouvelle église. Les parties
alors terminées comprenaient le chœur et le
côté est du transept, sauf peut-être les fe-
nêtres hautes. Les bas-côtés du chœur et du
transept sont voûtés d'ogives (JÏ£. 15).
Les doubleaux et les ogives retombent sur
un groupe de trois colonnes adossées aux
murs des bas-côtés (fig- i"/}- Les piliers des
grands arcs sont cylindriques ou de forme
polygonale ; leurs chapiteaux sont subdi-
visés de manière à fournir un support
distinct à chacune des nervures des arcs et
à chacune des nervures des voûtes des bas-
côtés (fig. 16). Les grands arcs et les dou-
tains sont sensiblement de niveau. Au dos
de la nervure, les voûtains offrent une sur-
face gauchie bien que dans une proportion
moindre qu'à Durhani. A Peterborough, en
effet, les travées se rapprochent beaucoup
plus du plan carré. Les doubleaux sont
décorés d'un boudin à chacun de leurs
angles, et les nervures ont pour profil un
large boudin encadré par deux méplats {').
Ces croisées d ogives sont dépourvues de
formerets.
1! nous faut ici examiner les conclusions
formulées par M. Félix de Verneilh (') au
sujet de ces voûtes, puisque son opinion
paraît faire autorité pour M. Lefèvre-Pon-
I' i .^. 16. — Peterborough, bas côté sud du chœur.
bleaux des voûtes du bas-côté sont en plein
cintre légèrement surhaussé. ■ — Les ner-
vures décrivent des arcs de cercle tracés
de centres placés au-dessous de la ligne
des impostes ; les lignes de faîte des voû-
monastère le jour de la messe de S. Pierre, avec de
grandes cérémonies. Ce fut : « anno ab incarnalione
Dom. MC.XL, acombustioneloci XXIII ». {Anglo-Saxon
Chronide, I, 3S3, II. 232.)
« MCXL. Martinus autem abbas sub isto lege...
niulta operatus est, et presbyterium ecclesi;u perfecit...
monachos in die festivitatis Sancti Pétri in novam ec-
clesiam cum magno gaudio introduxit». (Hugo Candidus,
p. 76). Martin fut abbé de 1 133 à il 55.
« MCXLIII. Conventus iJurgi hoc anno intravit in
novam ecclesiam ». {Chron. per Johanneni, p. 75.)
i MCXLIII. Conventus Burgi intravit novam eccle-
siam. > {Chronicon Peiroburgense, Camden Soc, éd.
Thomas Staplelon, p. 2.)
Fig. 17. — Peterborough. bas. côté nord du chœur
talis à qui elle suffit pour attribuer les
nervures de Peterborough à une réfection
accomplie dans la seconde moitié du
XI I^ siècle ('). M. de Verneilh, après avoir
fait remarquer que les bas-côtés des églises
romanes en Angleterre sont couverts de
voûtes d'arêtes, dit : « Par des motifs de
« pur embellissement, à ce qu'il semble, on
« introduisit des nervures sous les arêtes
« des voûtes primitives, ou l'on remplaça
1. L'ancienne porte d'entrée du monastère possède
une voijte semblable.
2. Le Style ogival en Angleterre et en Normandie . par
Félix de Verneilh, Annales archéologiques, 1864 XX1\',
232 et ss.
3. E. Lefèvre-Pontalis, op. cit., I, p. 89.
3^4
3Rcbur iJt V^xt cbrcttrn.
« en entier ces voûtes, sans rien changer à
« la forme et à la direction de leurs sup-
« ports inférieurs. Aussi, les colonnes
« engagées qui reçoivent la retombée des
« nervures, au lieu de leur faire face, con-
« formément à un usage très général et très
« logique, se présentent-elles alors par
« l'angle de leurs bases et de leurs chapi-
« teaux. » M. de Verneilh semble donc
avoir été amené à douter de l'authenticité
des croisées d'ogives primitives en Angle-
terre (y compris celles de Peterborough) par
ce fait, que l'axe des chapiteaux n'est pas
d'équerre avec celui de la nervure comme
c'est généralement l'usage dans l'Ile-de-
France. Il affirme que ce détail de cons-
truction est d'application constante en
France, sauf des exceptions infiniment
rares, comme dans une des travées du
narthex de Suger à St-Denis. Ces ex-
ceptions, cependant, ne sont pas si rares
que veut bien le dire M. de Verneilh, car
dans plusieurs des plus anciennes croisées
d'ogives qui ont subsisté dans l'Ile-de-
France on voit les chapiteaux sous les
ogives et leurs tailloirs placés d'équerre
avec le doubleau et non avec la nervure (').
De l'examen des voûtes de Peterborough
M. de Verneilh vient à conclure que les
supports étaient agencés pour recevoir les
arêtes saillantes d'une voûte non nervée et
que les nervures actuelles furent ajoutées
après coup, parce qu'il crut avoir observé
que les grands arcs se continuaient derrière
la retombée des nervures, sans liaison avec
elles jusqu'au chapiteau. Dans l'état actuel,
1. C'est notamment le cas en France à St-Denis (tour
du Sud-Ouest et déambulatoire), cathédrale de Sens
(bas-côtés), St-Martin de Laon, Nouvion-le- Vineux (bas-
côtés), cathédrale de Noyon (bras sud du transept et, en
partie, bas-côtés de la neO, St-Maclou de Pontoise
(déambulatoire), St-Germain des Prés à Paris (chœur et
déambulatoire), .St-Leu-d'Ksserent (déambulatoire), ca-
thédrale de Soissons (collatéral du bras sud du tran-
sept).
àleur naissance, les nervures sont encastrées
entre les grands arcs et les doubleaux, ainsi
que le montre la y^'. /S (') ; le dos de la
nervure n'est pas aminci de la même
manière que nous le montre le dessin de
M. de Verneilh. Mais, dans toutes les pre-
mières croisées d'ogives, les nervures et les
arcs ont des surfaces de raccord très gros-
sières ('), et ce fait est plutôt un argument
en faveur de la date que nous leur assignons,
car ce n'est que dans l'ère des premiers tâ-
tonnements que nouspouvons nous attendre
à rencontrer de semblables malfaçons.
Depuis les travaux de M. de Verneilh, ce-
pendant, la tour centrale de Peterborough
M"l>"iï
Fig. l8. — Peterborough. bas côté nord du chœur.
Flan à la naissance de la voûte du bas-côté.
a été démolie et rebâtie ; on a eu ainsi
l'occasion de s'assurer exactement de la
m.anière dont les voûtes des bas-côtés
avaient été construites. M. J. T. Irvine, qui
a dirigé les travaux avec tant d'expérience,
1. Je dois ce relevé à M. J. T. Irvine ; le dessin de
VioUet-le-Duc [Dictionnaire, IV, 102, fig. 54'") montre la
nervure et le grand arc comme réunis à l'imposte en un
seul claveau, ce qui, comme M. de Verneilh le fait remar-
quer, est tout à fait inexact. Ce n'est que vers la fin du
XI F siècle que fut introduite cette manière d'appareiller
solidement les impostes.
2. Cf. Lefèvre-Pontalis {op. cit., II. 6). A Bellefontaine,
dans la voûte du chœur, les nervures « viennent retom-
ber maladroitement sur quatre colonnettes >.
Dans la cathédrale de Laon, on peut remarquer un
agencement aussi gauche au-dessus des piliers des bas-
côtés du chœur.
3Leô C>ngmes îie l':^rcl)itecture gotl)uiue.
385
m'a assuré qu'on n'observa aucune particu-
larité qui pût corroborer la théorie de
M. de Verneilh. Faisant abstraction de
l'évidence qui ressort de la simple étude de
la construction elle-même, cette théorie
n'est pas soutenable. Les nervures ne
peuvent pas avoir été ajoutées sous des
voûtes d'arêtes plus anciennes pour une
raison purement géométrique. L'arête d'une
voûte d'arêtes ordinaires décrit une demi-
ellipse, tandis que la courbe actuelle de
la nervure est un arc de cercle. Si les ner-
vures avaient été ajoutées, elles auraient
laissé, vers les reins, un vide à remplir entre
elles et la courbe elliptique des arêtes (');
mais tel n'est pas le cas. Si, néanmoins, les
nervures sont postérieures à leurs supports,
les voûtes elles-mêmes doivent avoir été
entièrement reconstruites. Cependant c'est
trop nous demander que de vouloir nous
faire admettre que toutes les voûtes primi-
tives des bas-côtés du chœur et celles des
bas-côtés du transept (quatorze travées en
tout) aient été remaniées un demi-siècle
après leur construction, sans que nous soit
parvenue aucune trace de leur état anté-
rieur, ni aucun indice d'un vice de construc-
tion ayant pu rendre leur réfection néces-
saire. Il semble donc bien évident que les
voûtes de Peterborough sont les voûtes
primitives, car elles ne constituent pas un
exemple isolé ; elles sont analogues, par
leur système de construction, à un grand
nombre d'autres voûtes qui, dans leur
ensemble, ne peuvent être le résultat de
refaçons telles que celle dont M. de Ver-
neilh a émis l'hypothèse.
Passons maintenant à l'examen des croi-
sées d'ogives similaires dont, faute de docu-
ments, nous devons fixer approximative-
ment les dates d'après les caractères de la
I. C'est le cas dans la tiavée du nord-est du transept
nord à Winchester.
construction. Celles de ces voûtes qui pa-
raissent devoir être rangées parmi les plus
anciennes se trouvent au-dessus du colla-
téral nord de la nef dans la cathédrale de
Gloucester (fig. iç). La reconstruction
de l'église abbatiale fut commencée par
l'abbé Serlo en 1089, et la dédicace eut lieu
en 1100. Selon toute probabilité, seule sa
partie orientale était alors achevée ; mais
nous pouvons renfermer dans les vingt pre-
mières années du XII^ siècle la construc-
Fig. 19. — Gloucester, bas-côté nord de la nef.
tion du bas- côté nord et de ses voûtes. Ce
sont des groupes de cinq colonnes enga-
gées qui reçoivent les retombées des voûtes
sur le mur du collatéral; le doubleau qui est
en plein cintre et de profil simplement carré
est supporté par la colonne centrale dont
le fût est demi cylindrique ; les deux colon-
nettes engagées qui, de part et d'autre, re-
çoivent les oçrives et les formerets sont pro-
filées en quart de rond; nous en trouvons de
semblables dans les parties les plus ancien-
nes du chœur. Les tracés des nervures sont
des arcs de cercle dont le centre est placé
au-dessous de la ligne des impostes. Leur
section se compose d'une arête entre deux
REVUE DE l'art CHRÉTIEN
1901. — s'"'^ LIVRAISON.
^36
3Rebue ïie T^rt chrétien.
tores. Les formerets sont considérablement
surhaussés. Les travées sont construites
presque sur plan carré. Dans quelques tra-
vées du déambulatoire de la crypte (dont
les voûtes les plus anciennes sont des voû-
tes d'arêtes), les piliers ont été noyés dans
la maçonnerie et les voûtes renforcées par
l'addition de nervures. — Les profils de
quelques-unes d'entre elles sont simplement
carrés ; les autres sont décorés d'un gros
boudin entre deux petites gorges. Ces
remaniements paraissent être contempo-
rains du collatéral nord de la nef. Dans la
petite église d'Avening(Gloucestershire)('),
nous trouvons des croisées d'ogives que
l'on peut attribuer à une date voisine de
1120-1130 et qui semblent avoir subi l'in-
fluence des travaux des premières années
du X 1 1^ siècle à Gloucester. Dans la travée
occidentale du chœur, les nervures ont pour
profil un gros boudin flanqué de petites
o-orges ; sous la tour centrale, elles sont
carrées. Dans ces deux voûtes les nervures
sont supportées par des colonnes d'angle,
dont les chapiteaux sont normaux à la
direction de la nervure.
Les bas-côtés de la nef de la collégiale
de Southwell sont couverts de croisées
d'ogives dont la date doit être voisine de
1 120 ("). Les doubleaux sont en plein cin-
tre et considérablement surhaussés. Les
nervures sont des arcs de cercle tracés de
centres situés au-dessous de la ligne des
impostes. Comme la travée est construite
1. Un article sur cette e'glise avec plans à l'appui, dû
à MM. R. Herbert Carpeuter et B. Ii);jelow, a été iuipri-
mé dans les Transactions ofllie Brislol and Gloncesier-
shire Arclnrological Society, \1V, 5-13.
2. M. Lefèvre-Pontalis {op. cit., I, 89) dit que ces voûtes
ne sont pas antérieures à la fin du règne de Henri I",
mais il ne donne aucune raison à l'appui de son opinion.
Le seul document digne de foi est une lettre de l'archevc-
que Thomas (sans aucun doute, Thomas II, 1 109-1 1 14)
demandant des subsides pour l'œuvre de l'éylise. D'autre
part les caractères archéologiques des bas-côtés indiquent
ijien que leur construction a dû avoir lieu vers 1120.
sur un plan barlong très prononcé, les ogi-
ves ont peu de flèche et les voûtains affec-
tent à leur naissance une surface fortement
gauchie. Les nervures et les doubleaux ont
pour profil deux filets jumeaux entre deux
tores. Il n'y a pas de formerets (').
L'église priorale de Lindisfarne fut bâtie
par le prieur Edouard qui mourut proba-
blement vers la fin de l'épiscopat de Ralph
Flambard (i 128) ('). Reginald de Durham,
qui écrivait vers 1 165, nous dit qu'Edouard
érigea en l'honneur de S. Cuthbert une
église entièrement neuve et qu'il l'acheva
(coiismiDtiavit) en pierres d'appareil et d'une
façon très soignée ('). L'église fut par-
tout couverte de croisées d'ogives, et ses
dispositions architectoniques ont été visi-
blement inspirées par celles de Durham.
Les voûtes des vaisseaux principaux seront
décrites dans la suite. Les piliers des grands
arcs de la nef sont alternativement cylindri-
ques et formés de faisceaux de colonnes ;
les nervures des voûtes du collatéral nord,
(les voûtes du collatéral sud n'existent plus),
sont supportées par des faisceaux de trois
colonnes alternant avec des fûts demi cylin-
driques engagés, ainsi que dans les bas-
côtés de la nef de Durham ; mais, à Lindis-
farne, les chapiteaux de ces demi-colonnes
engagées présentent des divisions corres-
pondant aux deux nervures et à l'arc dou-
bleau, disposition qui marque une avance
stir Durham, où les chapiteaux des piliers
analogues sont semi octogonaux. Les dou-
1. Pour le plan de la collég^iale de Southwell voyez :
Tlic Buildcr, LXIII, 12 ; détail de la naissance des voûtes
au-dessus des piliers, p. 15.
2. History and ^intiquitics of Notth Diir/iain, par Jas.
Raine, p. 74. La date de la mort d'I^douard ne peut être
fixée d'une manière très précise : dans la liste des moines
de Durham son nom suit immédiatement celui de
Symeon, l'Historien, qui mourut probablement peu après
1130.
3. Reginaldi Monachi, Dunelinensis Lity'llus, etc., éd.
Jas. Raine, .Surtees Society, vol. I, pp. 44-45.
3le0 î^rtgtnes De r:arcl)ttecture gotfttque»
387
bleaux des voûtes des bas-côtés sont en
plein-cintre surhaussé de la hauteur de deux
assises. Les nervures décrivent des arcs de
cercle surbaissés. Les doubieaux sont ornés
d'un boudin à chaque angle et les nervures
ont pour profil un boudin entre deux
gorges. Il n'y a pas de formerets (').
La nef de l'église abbatiale de Dunferm-
line est une autre œuvre directement in-
spirée de la cathédrale de Durham. Elle
R0M5EY.
CMOIR
EASTERN BAY5
LE55AY,
NAVE
WE5TERN BAY5
Oi2'i456/8HIO
l"H"H I I I I I I M I
15 FEET
O I
4'
Fig. 20. — Plan des piliers.
fut probablement érigée peu de temps
après l'accession au trône d'Ecosse de Da-
vid 1er en 1124 ("). Les croisées d'ogives
édifiées au-dessus des bas-côtés rappellent
presqu'entièrement dans leurs détails celles
des collatéraux de Lindisfarne. Les travées
orientales de la nef de l'église abbatiale de
Selby nous montrent aussi d'une manière
évidente l'influence de Durham {^). Les
piliers des grands arcs de la nef sont
alternativement constitués par des groupes
1. Pour le plan et la description voyez: The Builder,
LXVIII, 414. La vue intérieure représente les voûtes du
bas-côté nord.
2. The Ecclesiaslical Architecture of Scotlnnd, par
David Macgibbon et Thomas Ross, I, p. 231, etc. Les
relevés des voûtes des bas-côtés sont représentés aux
figures 208, 210 et 212.
3. The Architectural History of Selby Abbey (avec
plan), par C. C. Hodges, Yorkshire Archœologi cal Jour-
nal, XII, p. 344.
de colonnes ou des piles cylindriques, ces
dernières possédant à leur revers des fûts
Fig. 21.
Romsey, bas-côté sud du chœur.
engagés destinés à recevoir les nervures
et les doubieaux des voûtes du collatéral,
388
9Re\)ue ïje V^xt cl)ictieu»
disposition qui rappelle l'ordonnance du
chœur de Durham, bien qu'à Selby la cons-
truction soit empreinte d'un caractère plus
avancé. Les voûtes primitives subsistent
encore au-dessus des deux travées orien-
tales du collatéral sud. — Au dos du pilier
situé le plus à l'Est, le doubleau retombe
sur deux demi-colonnettes, séparées par un
filet, et engagées dans un pilastre carré.
Le doubleau en plein-cintre offre un profil
correspondant; les nervures, dont la courbe
est surbaissée, sont décorées d'un gros bou-
din, encadré de chaque côté par un méplat,
et retombant sur des colonnettes flanquant
de chaque côté le pilastre dont il a été
question plus haut (').
Les voûtes des bas-côtés du chœur de
l'église abbatiale de Romsey sont conçues
5 METRES
Fig. 22. — Église Saint-Jean à Devizes. Plan de la voûte du chœur.
exactement de la même manière. Les piliers,
cependant, étaient évidemment destinés à
supporter des voûtes d'arêtes ; leur plan
nous montre un pilastre saillant avec une
seule colonne engagée f/îo-. 20), ce qui
constitue pour le doubleau d'une voûte
d'arêtes un support rationnel. On n'avait
rien prévu pour recevoir la nervure qui
actuellement retombe sur un petit corbeau
placé transversalement au-dessus de l'angle
formé par les tailloirs (fig. 21). Dans les
parties les plus occidentales, qui ont été
édifiées les dernières, le constructeur a
ménagé en certains endroits un groupe de
trois colonnes engagées destinées à recevoir
I. Il est à peine nécessaire de faire remarquer à quel
point CCS exemples confirment la réfutation que nous
avons exposée plus haut, de la théorie attribuant les voû-
tes de Uurham à une réfection.
îles C>rtg(ne0 îie r^rcl)îtecture gotl)ique.
389
les ogives et le doubleau ('). A Lessay, en
Normandie, les croisées d'ogives qui sub-
sistent au-dessus du chœur, du transept et
des travées orientales de la nef, retombent
gauchement sur des colonnes enofagfées,
disposées en vue de voûtes d'arêtes sem-
blables à celles qui ont été effectivement
construites au-dessus des bas-côtés. Dans
les travées occidentales de la nef le plan
des piliers fut modifié, par la substitution à
la colonne unique d'un pilastre saillant, avec
une colonne engagée aux trois quarts à
Malmesbury, bas-côté sud de la nef. Plan de la voûte.
chacun de ses angles; ce qui fournit {fig.
20) aux ogives et au doubleau de la voûle
haute, un support mieux approprié. Ces
exemples sont intéressants en ce qu'ils
I. Dans la partie orientale de l'église cette méthode
de construction n'est pas toujours suivie. Cependant,
aux piliers qui séparent le chœur du déambulatoire, il y
a des colonnes destinées à recevoir les nervures, de même
qu'au.f angles occidentaux des collatéraux du chœur, tou-
chant le transept. Les arcs doubleaux de ces voûtes
nous montrent comment s'est introduit le
facteur nouveau de la voûte sur croisée
d'ogives au cours de la construction d'édi-
offrent une section carrée sans moulures ; les nervures
ont pour profil un tore entre deux petites gorges, comme
h Winchester. Nous n'avons aucun document qui nous
permette d'établir la date à laquelle l'église de Romsey
a été édifiée ; mais, d'après les caractères de la construc-
tion, on peut admettre qu'elle a été commencée vers 1 1 10.
Pour le plan et la description de l'église, voxxThe Builder,
LXIX, p. 236.
39°
jRebue ïie r!3rt fljrétirn.
fices dont le plan primitif ne comportait que
des voûtes d'arêtes.
Les deux églises de Devizes (Wiltshire)
nous offrent des exemples de chœurs
dépourvus de collatéraux et couverts de
croisées d'ogives. Ces travaux peuvent être
attribués avec quelque vraisemblance à
levêque Roger de Salisbury, et on peut
leur assigner comme date approximative
les années voisines de 1125 ou 1150,
St-Jean étant légèrement antérieurà Notre-
Dame. Dans chacune de ces églises, le
chœur est divisé en deux travées barlon-
gues. Les doubleaux séparant ces deux
travées sont supportés par des fûts accou-
plés rtanqués de colonnes qui reçoivent
les nervures supportées, d'autre part, dans
les angles du chevet, par des colonnes
correspondantes. Dans l'église St-Jean
(fig. 22), les doubleaux en plein cintre sont
F ig. 24. — Cathédrale de Durham. - Transept sud et nef. (D'après une photographie de M. C. C. Houcbs.)
de section simplement carrée ; les nervures
sont décorées d'un large boudin flanqué de
deux petites gorges. A Notre-Dame, le
profil du doubleau présente deux gros bou-
dins séparés par une arête et encadrés de
chaque côté par une gorge et un filet. Le
profil de la nervure est un gros boudin
encadré de deux petites gorges et de deux
ressauts. Les claveaux des ogives sont en
pierres minces, et les clés sont appareillées
comme on peut le voir (^g-. 22). II n'y a
pas de formerets, et les lunettes latérales
des voûtes décrivent sur les murs des
courbes semi-elliptiques. Dans ces deux
églises le sommet des voûtes, à la clé des
ogives, est placé à un niveau un peu
supérieur à la clé du doubleau ; la différence
est de o '", 30 c. dans l'église Saint-Jean et
de o "\ 13 c. dans l'église de Notre-Dame.
Nous remarquons ici une tendance à per-
fectionner la courbe décrite par la nervure.
Dans toutes les croisées d'ogives anglaises
que nous avons décrites plus haut, la courbe
de la nervure est un arc de cercle dont le
centre est placé au-dessous de la ligne des
impostes. Ce tracé n'est pas satisfaisant
pour l'œil, puisque la nervure, à son départ
du mur ou du pilier, forme avec la verticale
un angle obtus. C'est, en outre, une mé-
thode de construction vicieuse, parce que la
poussée de l'arc ogive se trouve augmentée
sans nécessité ; aussi dans quelques exem-
ples plus tardifs trouvons-nous les ogives
tracées suivant une courbe semi elliptique,
alors que les doubleaux sont encore en plein
cintre ('). Dans le chœur de l'église St-Jean
à Devizes, la courbe de la nervure est
un peu plus ouverte qu'un arc de cercle.
A Notre-Dame, la courbe approche da-
vantage d'une demi-ellipse ('). Au prieuré
Fig.
Cathédrale de Durhain. — Nef. (Daprès une pliotogiapliie de M. C. C. Hodges.)
de Dunstable, les voûtes du collatéral sud
de la nef constituent un exemple plus tardif
dans lequel on peut encore observer l'emploi
de la courbe semi-ellipiique dans le tracé
des ogives.
Les difficultés auxquelles se sont heurtés
les architectes de ces croisées d'ogives
primitives, tant qu'ils ont seulement employé
le plein-cintre et les courbes elliptiques
dans la construction des arcs, disparurent
absolument du jour où ils adoptèrent l'arc
en tiers-point ; il devint dès lors possible
de construire les ogives en plein-cintre
1. Dans la région de Caen les croisées d'ogives portent
la trace de nombreux tâtonnements dans le tracé de leurs
nervures ; les unes sont en plein-cintre surhaussé ou
surbaissé ; au contraire, les autres ofiVent une courbe
semi-elliplique.
2. 11 existe sous la tour centrale de l'église St-Jean h
Uevizes des arcs brisés qui peuvent être cités comme un
exemple ancien de leur emploi, en dehors du système des
voûtes ; la tour offre plus de largeur du Nord au Sud que
de l'Est à l'Oueit. Aussi, tandis que les arcs est et ouest
sont en plein cintre, les arcs nord et sud sont en tiers-
point.
392
3Rrbur tir r^vt cbrctirn.
sans élever la clé de la voûte à une hauteur
considérable au-dessus des clés des dou-
bleaux. On a fréquemment cité les croisées
d'ogives qui couvrent les collatéraux de la
nef dans l'église abbatiale de Malmesbury,
comme l'exemple le plus ancien que l'on
rencontre en Angleterre de cette nouvelle
méthode de construction (') ; elles ont été
attribuées à l'évêque Roger de Salisbury ;
en effet le caractère très soigné de la cons-
truction rentre bien dans les termes de la
description que William de Malmesbury
nous a laissée de l'œuvre due à l'évêque
Roger ; il est peu probable que la construc-
tion de l'église ait été commencée avant la
mort de l'évêque survenue en i 139; elle
doit cependant avoir suivi de près cet
événement, et on ne peut assigner à la nef
existante une date postérieure au milieu du
XII" siècle (-). Les voûtes des bas-côtés
(fis- ^3) ^^"'^ supportées, d'une part, par les
grandes piles cylindriques des grands arcs,
1. Pour le plan de Malmesbury, voyez The Builder,
LXVIII, p. 164. Des relevés de la nef ont été publiés
dans les V'etusta Montiiiienta, V, planches 1-9.
2. Le passage qui se rapporte à l'œuvre Je l'évêque Ro-
ger dit: i Pontifex magnanimus, et nullis unquam parrens
sumptibus, dum qutt facienda proponeret, ;i;dificia
prœsertim, consummaret : quod cum alias, tuni maxime
in Salesberia et Malmesberia est videre. Fecit enim ibi
aedificia spatio diffusa, numéro pecuniarum sumptuosa,
specie formosissima ; ita juste coniposito ordine lapidum,
ut junctura perstringat intuitum, et totam maceriam unum
meutiatur esse saxum. Ecclesiam S.ilesberiensem et no-
vani fecit et ornamentis excoluit, ut nulli in Angliacedat,
sed multas prœcedat ; ipseque non falso possit dicere
Dec < Domine, dilexi decorem domus tuii: ». Willelmi
Malmesbiriensis Monachi, De Gestis Regum Anglorum,
lib. V. 5; 40S ; Rolls séries, édit. \Vm. Siubbs, II p. 4S4.
(Voyez aussi Historia Sovcllti, lih. II, § 4S1, p. 558, dans
le même vol.) Les mots : « et Malmesberia S> dans le pas-
sage cité ci-dessus sont omis dans plusieurs des manus-
crits et s'ils sont une leçon authentique ils se réfèrent
probablement au château que l'évêque Roger avait bâti
à Malmesbury, plutôt qu'à l'église de ce lieu. William de
Malmesbury dans son Histoiia Novella (qui se termine
en 1142) ne fait mention d'aucune construction dans
l'église, quoiqu'il raconte comment le monastère recouvra
son indépendance en 1 140. Il est probable que la recons-
truction de l'église fut entreprise peu après cet événe-
ment.
et de l'autre, par trois colonnes adossées au
mur latéral. Les grands arcs de la nef et les
doubleaux des bas-côtés sont en tiers-
point (') et ces doubleaux sont de section
simplement carrée. Les ogives sont en
plein-cintre ; elle sont formées d'un groupe
de trois tores, séparés par deux baguettes.
Les clés des ogives sont placées à un niveau
supérieur à celui des clés des grands arcs
et des doubleaux. Dans la travée dont nous
donnons le plan, l'intrados de la voûte pré-
sente entre la clé des nervures et les som-
mets des doubleaux, celui du grand arc et la
lunette de la voûte sur le mur latéral, une
différence de niveau qui est respectivement
de o™,43 et de o"\6i. M. C. H. Moore (')
dit que ce système de voûtes est une imi-
tation des croisées d'ogives françaises, mais
c'est là une simple affirmation, et il ne peut
invoquer de preuves, de quelque ordre
qu'elles soient, à moins que nous n'ad-
mettions que l'arc brisé ait été directement
importé de l'Ile-de-France ('). La forme
bombée de la voûte que M. Moore semble
1. On doit remarquer qu'à Malmesbury les arcs en
tiers-point sont seulement employés dans les voijtes des
bas-côtés. Les autres arcs sont en plein-cintre.
2. Development and Charucte}' of Gothic Arehitecture, par
C. H.Moore(i89o) pp. 124-127. M. Moore paraît accepter la
date habituellement attribuée à Malmesbury ; il en parle
comme d'un monument presque contemporain de St-Den:s
et fait remarquer, ce dont nous sommes en droit de nous
étonner, que Malmesbury est un exemple isolé et sans
précédents en Angleterre ; je pense avoir suffisamment
montré à quel point cette opinion est erronée. Le dessin
qu'il donne du collatéral (ng. 68, p. 124) n'est pas exact
dans le détail et les nervures sont plus saillantes qu'il les
représente. M.. Moore cite les bas-côtés de la nef de l'abbaye
de Fountains comme un exemple typique de voûtes anglai-
ses du milieu du .Xll" siècle ; en fait, le système des ber-
ceaux brisés perpendiculaires à l'axe de la nef et ren-
forcés par des doubleaux transversaux n'est pas du tout
anglais, mais bien une importation des Cisterciens de
Bourgogne. (Cf Pietionnaire de ['iatlet-le-Duc, I, p. 179,
l'b'- 14-)
3. L'arc brisé apparaît dans la voûte de la nef à Dur-
liain, qui est, comme nous le verrons, un monument exac-
tement daté et antérieur à Malmesbury. L'emploi de
l'arc brisé est toutefois beaucoup plus méthodique à
Malmesbury qu'à Durham.
considérer comme une caractéristique
spéciale aux croisées d'ogives françaises,
se rencontre en Angleterre, dans plusieurs
des plus anciennes croisées d'ogives qui
nous soient restées, et notamment d'une
manière très suflisamment marquée dans
les premières d'entre elles édifiées à Dur-
ham ('), au-dessus des collatéraux du chœur.
1. La double inclinaison présentée par l'intrados de la
voiite dans le sens de l'axe de l'église est presque la
même qu'à Malmesbury ; dans cette dernière église,
toutefois, l'inclinaison des voûtains est plus forte dans le
sens transversal (c'est-à-dire de la clé des grands arcs
au sommet de la lunette du mur latéral, en passant par
la clé des ogives).
Quant à son style, l'église de Malmesbury
est cependant bien anglo-normande, et
nous n'y trouvons nulle trace d'une in-
fluence pouvant émaner d'oeuvres fran-
çaises, telles que la chapelle de Bellefon-
taine ou l'abbatiale de St-Denis. Néan-
moins les voûtes de Malmesbury nous
amènent à un point oli il ne manque pres-
que rien au système des voûtes gothiques
pour être complet, et cela, au moment
même où l'influence française a commencé
à se faire sentir en Angleterre.
(A suivre.)
KBVUlf UK l'aKT CHKéTlEN.
1901, — s'"'^ 1-IVRAISON.
A^^ X^iL A^^ A-^^ A^X A^X A^X A^^ A-^A vl^A A^A ^^A A-^^ a'^A a'^A ^^.^
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IXJClI_IIIIIXIIXIIIIUlllIllJLIl)r!
Gssai sur la ïicroration arcljitcctoniqtie.
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S^ 'Ai)^ ^.«-'f ^itl^ »*^ ^Ail^^ ^^"^ *iiî^ *AiI^ V^^'f ^^^ ^S'^ V^-^ ^^^ ^^^ l'^^ 3^
I
Z^j soui'ces du décor (suite) (').
Chap. III. — Xa^ créatures
alliantes.
g I. — LES ANIMAUX.
NOUS avons montré, par un grand
nombre d'exemples, quelles ressour-
ces les décorateurs de toutes les époques
ont trouvées dans le monde végétal. Ils en
rencontrent d'autres non moins riches dans
la zoologie, dans la faune fantastique et
parfois hybride des mythologies anciennes,
dans le symbolisme de l'iconographie
chrétienne et dans le monde naturel, qui
sollicite l'esprit d'observation et la con-
templation souvent ravie des véritables
artistes.
Les Orientaux des premiers âges ont
élevé à la fonction monumentale le taureau,
le lion, l'aigle, l'éléphant, les types divers
Fig. 232. — Décor sculpté au soubassement de la cathédrale de Paris.
de la force; les Assyriens ont affectionné le
taureau androcéphale (fig. 2jj); les Égyp-
tiens ont fisfuré d'une manière Sfrandiose
dans des monuments de tout sfenre le lion,
le bélier, l'épervier, le vautour, l'ibis, etc.
Les animaux fantastiques et des espèces
conventionnelles, fabuleuses, furent d'au-
tant plus volontiers employées, qu'elles ou-
I. Voyez la impartie, p. 481, 1900; la 2"" partie, p. 25,
la 3°" partie, p. 212 et la 4'°= partie, p. 289, 1901.
vraient un plus vaste et plus libre champ
aux fantaisies de l'imagination et qu'il s'y
attachait un symbolisme connu et un sens
religieux. Les artistes de l'époque romane
en ont fait surtout grand usage; ils aimaient
à orner de figures fantastiques les corbeaux
qui portaient les corniches, comme on le voit
à l'abside de I racy-le-Val, où apparaissent
dans une même rangée une tête de bouc, un
colimaçon, un masque humain et d'autres
€SQài Sur la îiécorattoit arcl)ttectontque.
395
figures étranges, propres au génie de ces
Barbares civilisés {').
Fig. 233. — Kérubin assyrien.
Les ornements animaux s'emploient seuls
* Fig. 2^4 — Grotesques de la Renaissance.
OU associés aux ornements végétaux; on
I. V. Raguenet, Petits édifues Iiistoiiqucs.
voit de curieux exemples de ce mélange
dans les grotesques de la première Renais-
sance (Jt^. 2J4), comme dans des frises
romanes ou gothiques; tels les trois remar-
quables bandeaux de N.-D. de Dijon que
nous reproduisions récemment (').
Donnons par quelques exemples une idée
des types usités et de la manière dont on
les interprète.
Les Grecs, absorbés dans l'idéalisation du
type humain, ont négligé la forme animale ;
ils ont donné le jour à quelques monstres
fabuleux dont nous parlerons plus loin : le
griffon, les syrènes, etc. Toutefois ils ont
parfois tiré le plus beau parti du décor ani-
mal, notamment dans les mufles de lion
Fig. 235. — Sphinx égyptien.
greffés comme gargouilles en bordure de
leurs chéneaux (Jîo-. jjSJ. Les Romains ont
repris les éléments grecs de l'ornement avec
quelques ajoutes, telles que l'aigle triom-
phale fyf^. 262). Leurs portes de bronze
sont ornées de têtes de lion comme attaches
des poignées.
Les sculpteurs romans ont emprunté à
l'Orient, à titre purement ornemental, plu-
sieurs thèmes décoratifs. C'est ainsi que l'on
voit sur leurs chapiteaux des lions disposés
symétriquement, de chaque côté d'un arbre,
copiés des animaux qui veillent sur le
/lom, l'arbre sacré de l'Iran ('). Le griffon
1. V. Revue de l'Art îhrétien, année 1900, p. 474.
2. Lenormant a prouvé que ce tlième fut copié sur les
étoffes fabriquées à Constantinople d'après de vieux
396
3Rel)ue îie T^rt c!)rétien.
buvant à une coupe est la reproduction d'un
mythe barbare. Bien souvent les animaux
reproduits à cette époque sont des symboles
en même temps que des décors, comme les
bêtes évangélistiques. Divers monstres fi-
gurent Satan (tels ceux dont on a garni la
cuve baptismale ci-contre (fig. 2j6) et
ceux auxquels les bestiaires attribuaient un
Fi;^. 236.
sens mystique dans de naïves et poétiques
légendes.)
modèles persans. — V. Mélaiii^nx d'A>-Mologic des PP.
Cahier et.M irtin. I'" série. — V. Co)-respondince Iiisloriquc
et archéologique, 25 décembre 1894.
Fonts de Nordpeene.
Mais l'époque gothique se dégage de ce
symbolisme compliqué et ne cherche dans
l'imitation de l'animal qu'un sujet ornemen-
tal gracieux. C'est ainsi que l'on voit le sou-
€0s^ai sur la liécoratîon archîtectontque.
397
bassement du portail de la cathédrale de
Lyon orné de médaillons où se jouent des
bestioles d'un beau réalisme : un poulet
qui se gratte, une patte engagée dans les
plumes, des écureuils qui sautillent parmi
les branches d'un noisetier, un corbeau se
dressant sur un lapin mort, un oiseau pê-
cheur tenant dans son bec une anguille, un
escargot qui chemine sur des feuilles, une
tête de porc apparaissant entre des branches
Fig". 23/. — Bases ornées d'animaux, crypte fie Rolduc ; d'aprts M. J. Cu^I'Eks.
de chêne ('). Au portail de la Calende de
Rouen, comme au soubassement de N.-D.
de Paris (fg. 2J2) des êtres fabuleux ou
naturels apparaissent comme purs orne-
ments ; un centaure, une syrène, un cerf,
le pélican, des êtres naturels ou hybrides,
étranges mais gracieux. Ailleurs, ce sont
des monstres fantastiques faisant fonction
de gargouilles, accrochés aux corniches et
hurlant dans les hauteurs.
I. V. E. Maie, L'art religieux au XIII' siècle, p. 75.
S n.
LES ANIMAUX FABULEUX.
U aspic des bestiaires du moyen âge est
une espèce de serpent préposé à la garde
de l'arbre à baume. Pour en approcher, il
faut que l'homme endorme le serpent par
enchantement. Mais celui-ci, pour se sous-
traire à l'incantation, se bouche une oreille
avec sa queue et remplit l'autre de terre
en se vautrant, image de ceux qui restent
sourds aux commandements du Seigneur.
Il figure aussi le démon, sous les pieds du
Christ; au portail d'Amiens, par exemple,
il se voit sous le Beau Dieu.
Leâasi/ic (fig. 2jç et 2^0), selon Vincent
de Beauvais, a par devant la forme d'un
cocj, par derrière celle d'un serpent. Il était
398
WitWt lie r^rt cljréticn.
censé provenir d'un œuf couvre par un rep-
tile. Il passait au moyen âge pour avoir le
pouvoir de tuer du regard ; c'est une des
images du mauvais esprit. 11 figure aussi
sous les pieds du Christ.au portail d'Amiens.
La caladre (fi^. 2j8), l'oiseau fabuleux
du moyen âge, dont le regard guérissait
les malades, symbolise l'amour.
Fia
Le caméléon fabuleux est un animal à
deux pieds, à queue de saurien, couvert
d'écaillés. La faculté qui lui était attribuée
B^^'LÎ
~^^ '
%
^
^
1
Flg. 239. — Basilic.
de changer de couleur en fait l'emblème de
la versatilité et de l'hypocrisie.
Le capricoi'ne fabuleux se distingue par
un corps de chèvre dégénérant en queue
^^^^'^[*.rt=.^i^ .»«>
1
■■■■■II^H
wà
Fig. 240. — Basilic, sculpture romane.
de dragon. Il figure un des douze signes
du zodiaque.
Le centaure de l'antiquité a la figure d'un
quadrupède à buste humain; il est le sym-
bole des passions sauvages et aussi de la
puissance corporelle. Il figure, comme tel,
sur un chapiteau de l'église de Montivilliers
(Seine Inf.), au tympan du portail de l'église
d'Erville (Manche), sur un chapiteau de
Fig. 241. — Grififons affrontés.
l'église de Sainte- Marie - du -Mont, à la
crypte de Saint- Parèze-le-Chatel, etc.
Giotto l'a peint dans ses fresques d'Assise,
où il a représenté saint François triom-
phant des passions (").
Fig. 242.
\J hippocentaure a par devant le corps de
l'homme et dans l'arrière-train, les membres
du cheval. La centauromachie (combat des
Centaures et des Lapithes) décorait les
métopes du Parthénon.
Le cocabicx des bestiaires du moyen âge
I. V. Didron, Manuel de l'art chtHien. — Gazette ar-
chéologique, année 1S85, p. 165. — P. Cahier, C«wx/'/e'V
tnyste'riciises, p. 262.
€s&âi mv la îiccoratton arcî)ltectontiiue<
399
figure sur un plafond du XV^ siècle au
P!.y (').
La chimh'e antique, terrassée par Bel-
lérophon, symbolise la ruse. La fable lui
donne une tête de lion, un corps de chèvre,
une queue de serpent. Les modernes ont
243-
créé des chimères variées, à corps de lion,
à tête de femme.
Le dragon. L'art héraldique représente
le dragon (fig. 24J, 244, 24s) avec la
tête, la poitrine et les pattes de devant du
griffon, sauf la langue en dard; avec des
ailes de chauve-souris et un tronc dégé-
nérant en queue de serpent.
L'antiquité lui attribuait la garde des tré-
sors; un dragon veillait à l'entrée du jardin
des Hespérides et gardait la Toison d'or.
Selon les légendes du moyen âge, c'est le
grand serpent, ailé, crête, armé de dents et
Flg. 244. — Entrait de charpente à tête de guivre.
Église de N.-D. du Tertre (Côte-d Or) (').
pourvu de pieds et d'une queue aux enlace-
ments redoutables ; c'est le léviathan bibli-
que, le dragon infernal de l'Apocalypse, la
figure de Satan (^).
Dans les miniatures du moyen âge,
Fig. 245. — chenet en orme de dragon. Dessin de M. Jackson Q\
comme dans le décor Scandinave, sa queue
démesurément allongée donne naissance à
une flore conventionnelle, à un feuillage
spécial, ou bien elle entre dans la composi-
tion même du motif ornemental.
I. V. L. Giron, Congrès des Soc. sav., 1895.
Le griffon (fig. 241 ), l'antique gardien
des trésors de l'Asie, aux ailes puissantes, au
bec crochu,aux serres ravissantes de l'aigle.
1. V. Gélis-Didot, Hisl. de la peinture.
2. V. Le Coloriste, juin l8g6, p. 1 1.
3. D'après Tiie architectural Record.
400
3Rct)uc tJC r^vt fl^rcttcn.
au corps de lion, a toujours deux oreilles
aiguës et droites, qui l'ont fait nommer
aiiridis. Il symbolise la vigilance, du moins
la vigilance de l'avare qui veille à son trésor
et par suite l'avarice. Au moyen âge il figure
les ravisseurs et le démon. Les traits qui
lui sont attribués sont ceux qui conviennent
F"ig. 246. — Hydres et Sirènes. Bas-reliefs de l'arc de
triomphe romain de Saint-Remi.
à un gardien : les ailes marquent la dili-
gence; il a la force du lion; le bec acéré
symbolise la prudence. Il est bien à sa place
comme portant d'armoiries, dans les armes
de la ville de Malines. Il se voit à la cathé-
drale de Sens.
La gîiivre (fig. 2^^) est une sorte de
couleuvre, adoptée comme emblème de
Valentine de Milan.
La harpie, oiseau à tête de femme,
toujours affamé, figure le démon ravisseur
des âmes. On en voit de beaux exemples
aux quatre angles d'un chapiteau de l'église
St-Julien-le- Pauvre à Paris et dans des
peintures ornant un plafond du XV'^ siècle
au Puy ('). On la représentait avec le buste
d'une jeune femme, le tronc ou les ailes du
vautour et la queue du serpent.
V! hydre (Jïg. 2^6) est une variété du
dragon. L'hydre de l'antiquité ; le monstre
Fig. 247.
de Lerne tué par Hercule, avait sept têtes ;
quand on en coupait une, on en voyait naître
autant qu'il en restait.
La licorne (fig. 248) est un cheval blanc
fantastique, portant une corne au milieu du
front. Selon une fable gracieuse du moyen
Fig. 248. — Lie
âge, ce monocéros indomptable défiait tout
chasseur, mais à la vue d'une vierge, il se
réfugiait dans son giron ; il s'agit d'une chasse
mystique où la licorne figure de manière
très poétique le mystère de l'Incarnation.
Au déclin du moyen âge ce thème a donné
lieu à des produits artistiques innombrables
et charmants ; il apparaît dans les vitraux,
dans les tapisseries (témoin la fameuse ta-
I. V. L. Giron, Congris des Sociétés savantes, 1898.
€6Sai sur la Dccoration arcbttectonique.
401
pisserie de la Dame à la Licorne conservée
au Louvre) dans les reliures, dans les mi-
niatures et dans les sculptures.
La manicore est encore une des formes du
démon. Cette figure hybride a le visage de
l'homme, le corps du lion, la queue du scor-
pion, le vol de l'oiseau ; elle figure la triple
concupiscence ('). (Abbatiale de St-Denis,
sculpture du XIV*^ s. ; église romane de
Souvigny) ; à la cathédrale de Cahors, la
figure peinte de Jérémie est accompagnée
d'une manicore ou mmidicore, qui, selon les
bestiaires, habite les parties profondes de
la terre (').
Le niinolaure, que le moyen âge confon-
dait avec le centaure, se rattache au mythe
du labyrinthe souvent représenté sur le pavé
des églises, mais avec un sens nouveau
depuis l'époque carolingienne ('). La signi-
fication de ce symbole est indiquée dans ces
vers connus :
Hune mundum typice labyrinthus dénotât iste
Inlranti largus, redeunti sed nimis arctus.
\J onocentaure est un pseudocentaure,
cheval marin (fig. 2^g), à queue de poisson ;
Fig. 24J. — Cheval marin.
moitié homme, moitié âne, il abonde dans
les peintures murales de Pompei.
1. \. Eosc, Dict. d'archéûL, p. 363.
2. Elle est ainsi le symbole de la fosse de boue où fut
jeté le prophète et l'emblème de l'erreur.
3. V. Bulletin monumental^ 1899, p. 336. — E. Miintz,
Étude archéol. et icono^r. sur le moyen âge, Paris, 1877,
p. 17. — Campi, DelVistoria eecl. di Parense, p. 241. —
de Rossi, Bull. dall. ht.. 1S52, p. 25.
Le phénix est l'oiseau unique et immortel
de l'antiquité, qui vivait 315 ans et renais-
sait de ses cendres après trois jours (').
On le figure perché sur un pahuier ('), en-
touré de fiammes, le regard fixé sur le
soleil, dont il est un emblème ; parfois
nimbé et posé sur un bûcher. II personnifie
\-à. résurrection. 11 a été reproduit dans l'ico-
nographie chrétienne comme emblème de
l'immortalité. Il abonde sur les lampes chré-
tiennes retrouvées à Carthage. Le phénix
Fig. 250.
figure dans les décors de la Renaissance
comme l'attribut d'Éléonore d'Autriche.
Le sagittaire (fig. 2^1) est un cheval à
tête humaine, tendant son arc et lançant sa
flèche contre un cerf. Cet emblème païen
Fig. 251.
constitue un des signes du zodiaque (Cloiire
de St-Aubin à Poitiers, XII^ s.). Il était
l'image de la nature humaine révoltée contre
l'esprit.
La salamandre, sorte de reptile ailé
respirant des flammes et vivant dans le feu,
était le roi de cet élément. A la Renais-
sance, la salamandre, emblème héraldique
1. Vitraux de Lyon, de Hourges, du Mans de Chartres.
V. Rose, p 58.
2. En grec, le palmier s'appelait du même nom.
REVL'E UK L ART CIIUEI lEN
I9OI. — 5""-' IIVIJAI^ON.
402
5Rrl)ur tic rSrt cl)vcticu.
de François l^'\ prend une grande place j composition relative à la Salamandre,
dans la décoration. En voici (/o: 2^0) Le.sa/;'r(?estrhomme-bouc de l'antiquité,
un exemple emprunté à l'Hôtel-de-Ville devenu l'emblème de l'impudicité chez les
de Beaugency, et (Jlg. 2^2), toute une 1 chrétiens.
Fi". 252. — Tableau de salamandre. Broderie italienne du XVr siècle.
Le scorpion est le nom d'une constella-
tion céleste, et figure dans le zodiaque.
De tous les mythes de l'aniique Egypte,
l-'ig- 2 53-
le sphinx est le plus important : il offre la
tête humaine sur le corps du lion, réunissant
la plus haute expression de la force muscu-
laire avec la puissance intellectuelle. Le
sphinx qui se dresse au pied de la grande
pyramide de Chéops (Jig. 2jj) est consi-
déré comme la plus ancienne sculpture du
monde.
Le sphinx égyptien avait une tête
M
Fig. 254
d'homme. Les Grecs en firent, dans la lé-
gende d'(I'"dipe, un lion ailé (aux ailes
d'aigle), ou aptère à buste féminin.
essai sur la Décoration arcl)itectonûiue.
403
La sirène est un animal à tête de
femme, ou une femme à queue de poisson.
Les sirènes musiciennes, symbole des vo-
luptés du monde, selon le sermonnaire
d'Honorius d'Autun, sont sculptées comme
tel au portail de la cathédrale de Lyon (').
A la façade de la cathédrale de Sens, la
sirène symbolise l'Océan (').
Le vavipirc est souvent figuré comme
une femme ailée et furieuse, semblable aux
harpies.
,^ m.
ANIMAUX REELS.
Parmi les animaux réels, il y en a de
nobles, spécialement dignes d'entrer dans
l'art monumental. Ce sont d'abord les prin-
ces des animaux: le lion, l'aigle, le dauphin.
Le lion est reconnu comme le roi de tous
les animaux. Emblème de la force, il re-
^'S- -55- — Montant de cheminée
provenant de Berg-op-Zoora.
Fig. 256. — Arc romain
de St-Ciiamas (l'rovence).
présente l'autorité de la justice. Douze
lionceaux ornaient les degrés du trône de
1. Maie, otivr. cité, p. 60.
2. Sur une crosse de 1200 environ, trouvée à la cathé-
drale d'Albi, on voit la sirène-oiseau d'Ovide, sorte de
harpie, symbole de tous les vices en même temps que la
sirène-poisson figurant particulièrement la tentation des
plaisirs ; celle-ci tient un sceptre, emblème de sa puis-
sance.
Salomon. Les porches des basiliques d'I-
talie, sous lesquels se rendait la justice,
avaient des colonnes posées sur des lions.
Lion lîéraldique
25*5. — Lion, figure divine.
Le lion est le symbole de la bravoure et
l'un des meubles héraldiques les plus fiers
(fig. 2^y). Il figurait aux pieds des images
funéraires des preux morts au champ
d'honneur.
Dans l'iconographie mystique, il est une
figure du Christ (Jig: 2jS) et l'emblème de
l'évangéliste saint Marc fy%-. 262J, et,
comme tel, de la République de Venise.
F'g- 259. — Gargouille grecque.
L'art assyrien l'a rendu d'une manière
remarquable fy%-. 260). Il faut admirer
la lionne blessée qui figure dans un bas-relief
assyrien conservé au British Muséum. Très
remarquables étaient les deux lionnes de la
porte de Mycènes (fig. 261). Des mufles
de lion formaient les gargouilles des tem-
ples grecs et romains, au Parthénon, à
Métaponte, comme à la basilique d'Antonin
à Rome, et la poignée des portes de bronze
des temples romains.
404
ISitWt tic rart djrctini.
Fig. 260. — Tête de lion assyrienne.
Le lion sert souvent d'emblème héral-
dique très noble, ou de portant d'armoiries.
•^'Fft'
à-mm
s.-^-'-^-r'-
Fig. 261. — Bas-relief de Mycènes.
\Jaigle, symbole de génie ('), emblème
de la puissance militaire et impériale, do-
Fig. 262. — Lion, figure évangélistique.
minait les attributs militaires des monu-
ments somptuaires romains (fig. 2^6 et 26j),
1. V. Annaks archéoL, art. aigle.
et surmontait les enseignes militaires. On le
sculptait dans les frontons des temples
dédiés à Jupiter, dont il était l'attribut.
11 est l'emblème des empires français et
germanique.
Fig. 263. — Aigle romaine.
Roi des airs, il figure, parmi les quatre
éléments de la nature, le domaine de l'at-
l' ig. 264. — Aig-le, figure divine. Fig. 265. — Aigle héraldique.
mosphère. Dans les monuments chrétiens,
l'aigle couronné, fixant le soleil, est l'image
Fig. 266 — Aigle, figure évangélistique.
du Christ (fig. 26^); portant un livre ou le
phylactère (fig. 266), il figure l'évangéliste
S. Jean. L'aigle est un des meubles héral-
diques les plus nobles (fig. 26^).
Le dmiphin est un type d'ornement très
usuel ; c'est un mythe païen introduit par
la poésie dans le répertoire de la sculpture
courante. Il représente le roi des mers, il
€ssai sur la DécoratîoiT arcl)ttectonique.
405
symbolise l'Océan (fig. 26S), les eaux, et
figure, à ce titre, dans les décors des fon-
taines, sur le bord des piscines, etc ; cou-
ronné, il est l'emblème du Christ.
Fig. 267.
Marque de la Société de Saint-Jean l'Evangéliste.
Il a été figuré souvent dans l'art ro-
main, où il rappelait la légende du poète
Arion de Méthymne, qui, menacé de
mort par de cupides matelots et s'étant
jeté à la mer, fut porté au rivage par un
dauphin. La réminiscence de cette gra-
cieuse légende paraissait dans les peintures
des catacombes de Rome. L'aimable cétacé
Fig. 268.
Dauphin, peinture des catacombes.
figure dans la scène de la migration des
âmes figurées par des colombes qu'il guide
vers le port du salut.
Délaissé par le moyen âge,le type si déco-
ratif du dauphin eut une vogue extraor-
dinaire à la Renaissance. Depuis lors on le
trouve partout, à propos et hors de propos.
\Jabeille est le symbole du travail, de
l'abnégation. L'ordre qui règne dans la
Fig. 269. — Lions et aigles, tenture.
ruche en a fait dans les anciens bestiaires
un des emblèmes de la justice.
'L'agneau apocalyptique est, chacun le
sait, le symbole très ancien du Christ
lUt&îi»
(/ig. 2yr). C'est par milliers de fois, qu'on
l'a figuré comme tel au frontispice des
églises, ou qu'on en a décoré des clefs de
voûtes. Dans la Bible, le peuple de Dieu
est comparé à des agneaux, à des brebis (').
Comme symbole eucharistique, l'agneau
joue un rôle important dans l'art chrétien.
Au sens vulgaire, l'agneau figure /a dou-
ceur.
I. V. DiLlioiiiiaiic de lu Bible, avi. Brebis.
4o6
3Rcbur iJC T^rt f})vctiru.
Uâne a son sens mystique : à côté du
bœuf, image des Juifs endurcis, il figure
les gentils près de la crèche du Sauveur.
Par contre, là où le bœuf représente le sa-
cerdoce, il figure la gent laïque et igno-
rante. L anesse sert de monture à la figure
allégorique de la Synagogue, en qualité de
bête obstinée comme le peuple juif. Quel-
quefois l'âne indique la paresse ou la paix.
La baleine est un des emblèmes du
démon ; sa gueule ouverte figure parfois
Flg. 2/1.
l'entrée de l'enfer. Dans le symbolisme de
l'histoire de Jonas, elle symbolise la mort.
Le bélier remplace souvent l'agneau,
comme symbole du Sauveur, ou la brebis,
comme image des fidèles. Par contre, il
se trouve parmi les figures des vices et re-
Fig. 272.
présente, grâce à ses cornes, la lutte contre
la grâce. Il est aussi l'emblème de la stu-
pidité , sa tête très énergique s'interprète
avantageusement dans les décors. Le bélier
est la figure d'une des constellations du
zodiaque.
La bicke se désaltérant aux sources des
eaux du salut symbolise, comme le cerf,
l'âme fidèle, parfois l'Église, la bonté, la
timidité.
Flg. 273. — Tour de Laoïi.
Le bœuf, avec le taureau, est vulgaire-
ment considéré comme l'emblème de la
force matérielle. Modèle de patience, les
essai sur la Décoratiott arcl)ttectoiuque.
407
écrivains sacrés en ont fait parfois celui
des justes. Les païens l'ont choisi pour
serviteur de la lune, dont il traîne le
char. Les chrétiens y voient la figure des
Juifs servilement attachés aux observances
de l'ancienne loi. Les commentateurs re-
connaissent les douze apôtres dans les
douze taureaux de bronze qui, dans le
temple de Jérusalem, portaient la « mer
d'airain ».
Nous trouvons au moyen âge le bœuf
treize fois figuré au sommet de la tour de la
cathédrale de Laon (Jiç. 2jj), pour rap-
peler les immenses services rendus par
Fig. 274. — Bucràne, frise romaine.
cette vaillante bête de somme, qui éleva
sur la montagne tous les matériaux de ce
monument.
Pris en mauvaise part, le taureau, à la tête
cornue et à l'allure fougueuse, symbolise
l'orgueil.
Le bœuf est un emblème évangélistique,
celui de S. Luc (Jig. 2J2).
Le taureau fut chez les Assyriens et les
Perses le sujet de figurations monumen-
tales de premier ordre, dont les animaux
ailés qui gardaient l'entrée des temples
(fig. 2jj). Il fournit le décor principal des
colonnes persépolitaines.
Les bucrânes (fig. 2/./.) sont des têtes de
boeufs offertes en holocauste et décharnées,
garnies de leurs bandelettes, habituellement
représentées alternativement avec des
guirlandes, dans la frise des entablements
classiques (').
Le bouc, au regard oblique, emblème
de réprobation, figure les pécheurs qui
seront au jugement dernier séparés des
brebis. Ce sens subsiste même dans les
sujets où le bouc figure le Sauveur, vic-
time expiatoire comparée au Botcc émis-
saire.
Le cerfi, selon une parole du psalmiste (-),
a soif de l'eau des fontaines, comme le
Fig. 275. — Cerf héraldique. Fig. 276. — Cerf, figure divine.
fidèle aspire à l'onde du baptême. Aussi
a-t-on donné la forme de cet animal aux
vases liturgiques nommés aquamanile.
Dans les peintures chrétiennes, le cerf
se désaltérant à la fontaine est un emblème
divin (fig. 2/6).
Fig. 277. — Cerfs au naturel.
I. V. Dictionnaire archéologique, p. log.
I. Ps. XII, 2.
4o8
Htbue lie r^rt c!)rctien.
La figure 277 représente quatre figures
de cerfs, d'attitudes variées, tirées des
sculptures de la cathédrale de Paris.
Le cerf accosté de limiers se silhouette
de belle façon au-dessus du pavillon de
chasse de Fontainebleau.
Le voici qui fournit le décor d'un cul-de-
lampe (^^. 2j8).
Fig. 27S.
Le c/iainean, modèle de sobriété et de
docilité, sert d'attribut à l'Obéissance, dans
lés sculptures de Notre-Dame de Paris. Il
figurait jadis la colère, le garnal ancien
passant pour avoir des colères inexorables.
Le chat, cet hôte de nos foyers, person-
nifiait autrefois l'esprit d'indépendance.
Fig. 279.
Dans l'art héraldique, les chats passants,
effarcnichés, courants font allusion à la
liberté noble et fière. Dans le pavillon de
la laiterie suisse (architecte M. Bonet) à
l'Exposition de Paris, le chat, perché sur les
gouttières, aux gradins des pignons, un peu
partout, jouait un rôle décoratif des plus
gracieux.
Fig. 280.
Maison Boulevard du Nord à Bruxelles, par Iîevaekt.
Feu Beyaert se plaisait à représenter des
chats autour des lucarnes de ses construc-
tions (Jîg. 2S0).
Fig. 2S1.
D'autre part, voici une retombée de
larmier, à une ancienne maison de Bourges
V
Fig. 282. — Colonne de la crypte de Rolduc.
(fig. 2jç), ayant pour amortissement un
chat qui se raidit d'une manière bien ex-
pressive sous l'effort que son échine est
€0Saî mx là htcoïàtion arcl)ttecî:omque.
409
sensée supporter. Le cloître roman du Puy
est rempli, dans ses sculptures, d'individus
de l'espèce féline domestique.
Le c/ia^ huant (fig. 2S1 ) est une figure
du démon et un emblème d'hypocrisie.
Le cheval a noble place dans l'art monu-
mental. Les Romains le figuraient sur pié-
destal aux côtés des grands perrons de
leurs temples. On le voit sculpté sur les
quatre faces d'un chapiteau romain à la
crypte de Rolduc (fig. 2S2). Attelé aux
quadriges, il couronne les édifices somp-
tueux de style classique (fig. 2Sj), et il
J
dans ceux de la ferronnerie, sculpté en
relief dans la menuiserie et l'orfèvrerie des
siècles suivants. Ce fidèle ami de l'homme
méritait certes cette marque de préférence
à cause de ses qualités remarquables et,
entre tous, le lévrier qui, dans la gent
canine, représente la figure aristocratique
par excellence. Aussi les trouve-t-on par-
tout : au pied du candélabre de Milan, dans
, les meubles du blason, sur les tombeaux
sculptés, aux pieds des chevaliers ou de
leurs dames, où ils rappelaient leur ver-
tueuse fidélité.
Le chien est le gardien des troupeaux ;
les canes dominici figurent les prêtres, pas-
teurs préposés à la garde des brebis chré-
Fig. 2S3.
Quadrige du '< Monument national ., à Berlin, par J. Goth ('j.
lutte d'importance avec les personnages
qu'il porte dans les statues équestres. Les
Scandinaves aiment à le représenter à la
crête de leurs isbas.
Aux X" et XL siècles, c'est le chien
qui semble être l'animal sur lequel s'est
portée plus particulièrement l'attention des
artistes. Ils l'ont fait entrer dans de nom-
breuses compositions. Malgré les formes
diverses qu'ils lui ont données, il n'est pas
douteux que ce soit la silhouette du chien
qui ait servi à composer leurs dessins.
On le voit d'ailleurs souvent répété, gravé
dans les travaux de la céramique, forgé
I. D'après VAcadeiny architecture.
Fig. 284.
tiennes. Cette allégorie décore une frise au
haut de la tour de l'église de Neuss, comme
les fresques de la chapelle des Espagnols
à Florence. De même le chien Fo de la
Corée est le gardien des temples (').
La chouette(fig. 2S4), l'oiseau de Jupiter,
emblème de la sagesse, figure la nuit.
1. Di IVTély, Revue de V Art chrétien, septembre 1S90.
KBVUE UK 1. AKT CHKBTIBN,
1901. 5"*® LIVRAISON.
4iô
î^cbue iJe T^rt cljrcttcn.
La colombe, emblème de l'Esprit-Saint
(fig. 28^), symbole de la douceur et de la
l'isj. 28v
simplicité, a donné sa forme aux anciennes
custodes eucharistiques. Elle fut dans les
catacombes la figure de l'âme chrétienne.
Le coq (fig. 286, 28y, 288) est le symbole
de la vigilance et de la prière. On chante,
Notre-Seigneur au coq matinal, qui arrache
les hommes au sommeil. 11 rtyure encore
287.
Ftise murale.
un des dons du Saint-Esprit, l'intelligence,
Qîiis dedil gallo intclligciitiani (') } Pris en
mauvaise part, il est l'emblème de la colère.
Comme modèle ornemental, le coq re-
monte à l'antiquité. Le British Muséum
1 1-. 20S.
conserve une belle frise trouvée à Xanthos
(Lycie) représentant un combat de coqs (').
Le coq est aussi l'emblème de la Gaule, et
quand il se dresse fièrement, jetant son cri
vainqueur, ayant pour crête une couronne,
il est digne de figurer la nation française,
Fig. 286. — Tissu conservé au Musée de Wismar.
aux laudes du dimanche, Siirgaiinis ergo,
galltis jacenlcs excitât. Il signale le lever
du jour et la joie caractérise son chant. Il
annonce ou figure la Résurrection, ce réveil
suprême. Aussi Prudence a-t-il comparé
Fig. 2S9.
comme il le fit si crânement dans le décor
de l'Exposition internationale de 1900. Le
1. Job, xxvui.
2. Les chefs-d'œuvre de la sculpture. 2" vol. Ibid., X.
(B^Qai mv la îiécorarton arcDitcctoiuque,
411
voici figuré dans une tenture ancienne.
. Feu Beyaert a stylisé le coq gaulois,
d'une manière très remarquable, à l'un des
frontons de la banque nationale d'Anvers.
Les Japonais l'ont reproduit dans leurs
dessins d'une manière admirable.
Fig. 290.
XJdlc'pJiant (fig. 28c) est vénéré dans
l'Orient. Aussi le voyons-nous figurer avec
honneur sur d'antiques tissus. Les anciens
Fig. 291. — Chapiteau de la crypte de Roldiic.
l'avaient adopté comme la figure d'un des
quatre éléments.
Le ///;7.J5i7;^ comme attribut de Louis XI I,
X'hennine, comme emblème d'Anne de
Bretagne ; la levrette fournissent de char-
mants décors dans les ouvrages d'archi-
tecture et le mobilier de la première Renais-
sance.
Le hiboti (fig. 2Ç2), l'oiseau nocturne,
symbolise la nuit et l'ignorance ; il en est
de même de la chauve-souris.
Fig. 292.
Uours lui même, si peu élégant, a été
stylisé avec science ; on le voit figurer ici
dans un chapiteau roman (fig. 2çi), là
dans le fond d'un vitrail gothique.
Fig. 293. — Graffiti de M Crespin.
M. Crespin a décoré une façade de feu
Hankar de graffiti où Vo7trs, Wcnretiil
(fig. 2Ç3) et le lapin se jouent parmi les
feuillages.
Parmi les volatiles, citons \efiiiisan, aux
formes élérantes et au coloris brillant ; le
cygne (fig. 2Ç4. et 2ǧ). à l'élégante enco-
lure, à la blancheur immaculée, qui a fourni
le magistral motif d'une ancienne et célèbre
image de la Grand' Place à Bruxelles (fi'g.
2ç§) et qui, parmi les emblèmes des élé-
412
2Rel)ue ÏJC T^rt chrétien.
ments de la nature figure l'eau, son do-
maine ; la cJiouetle, oiseau de Minerve,
emblème de la nuit.
Fig. 295.
Enseigne de la miison : ^( Au Cygne », Grand' place à Bruxelles (').
Le paon superbe dont la roue orgueil-
leuse, inimitable pour la peinture, offre un
des plus beaux motifs de décor que l'on
puisse concevoir, est considéré dans l'icono-
graphie chrétienne comme le symbole de la
Résurrection et de la gloire immortelle. On
en a un bel exemple à l'ambon de San
Salvatore, à Brescia. Il était fréquemment
Fig. 296
figuré sur les chancels des anciennes basi-
liques ('). Il abonde sur les anciens tissus.
L'élégance de son port altier et la splendeur
de sa roue déployée en font un des plus
1. D'nprhsVAri //uâ/ic.
2. V. Bullclin îiipnttiiiottal, 1890, p. 336.
beaux sujets que la Zoologie fournisse à
l'art décoratif.
'L.ç. pélican (fig. 2çy) avait, au moyen âge,
Fig. 297.
la réputation de nourrir ses petits de sa
propre substance, ou plutôt de rendre la vie
à ses petits que le serpent a tués ('). Il
Fig. 298.
est par là l'emblème de l'Eucharistie et de
la Résurrection.
Fig. 299. — Bourse de Madrid (archit. M. RepuUès y Vargas).
Le serpent, attribut d'Esculape, dans
I. V. les PP. Martin et Cahier, Sur quelques points de
Zoologie viYSliqiic de Tait mit. Paris, Didot, 1842.
€SQai sur la décoration arcl)ttcctonique.
413
l'antiquité ; symbole du démon tentateur,
dans l'iconographie chrétienne, familier au
génie des ornemanistes francs, insinue par-
tout dans l'art ses formes enroulées.
Le serpent infernal enlace ses anneaux
autour de la croix et en mord le pied.
II forme les enroulements de la croix des
évêques, aux prises avec l'agneau figure du
Christ. Cette figure est rapprochée du ser-
pent d'airain élevé par Moïse.
Le serpent s'enlace autour des bras de
la figure antique de la Terre, ou souvent
se nourrit à son sein. — La médecine a
pour attribut le serpent sortant d'une
coupe.
Comme application d'ensemble des sujets
animaux nous donnons le zodiaque de la
cathédrale de Paris.
L. Cloquet.
(^ sjiivrc.)
Fig. 300. — Le zodiaque de Notre-Dame de Paris.
»'^^ A^X K^H X^* A^^ )J*JrA *'^* a'^1* A^^ a'^ a'^ a'^ a'^ a'^^ a'^X ^'
^^
^^î)^^©i©^©^:@ïiKg)r© ffîclaugcs. ^©^^SKg5^mg5^^K©©
V ' ■'oXXIXriîiriIIITrxlilIIllXIIITTIlXilIIIlXaiIXIIIXIIXUIIXrillIIIÏIIlirciIIIJII-.CTITTTXITIITITXIIIXIII^
Kl^*;iî^ *i^>* "xÛ"" ''S'' *^^ *At).* ^;*5 * ^i^* *^"î^ ^i^-'f ^A^î^ ^^î^ *iiï-* ^Jiî^ ^i^f A'
.Ua maison Du François T" à Hblicuiilc-
X moine picard, le bénédictin D. Gre-
nier, né à Corbie, en 1725, mort en
1789, a constaté que les sculptures
sur bois étaient en très grand honneur
à Abbeville, et qu'aucune antre ville de Picardie
ne possédait autant de maisons en bois du XV h'
siècle à façade sculptée.
Le nombre de ces maisons est aujourd'hui
considérablement réduit. Parmi celles qui sub-
sistent encore, il convient de placer en première
ligne la maison dite à tort de François V'^, rue
de la Tannerie, n° 29, qui a été bien des fois
reproduite, et qui, pendant la bonne saison, attire
les touristes.
Dans son excellent ouvrage, La Topographie
d' Abbeville (I, 403 et suiv.), M. E. Prarond a
donné de cette construction conteinporaii.e du
roi-chevalier une description exacte et minutieuse
que nous reproduisons en entier, parce que nous
ne saurions faire aussi bien {fig. i ).
La façade sur la rue de la Tannerie n'est pas très re
marquable. Elle donnait sur la rivière comblée aujourd'hui;
Cette position justifie la sobriété sculpturale de l'archi-
tecte, qui n'a laissé, en guise de préface, qu'une jolie
pone, une filière entourant la base du premier étage et
des mascarons grotesques collés sur l'entablement uni
qui supporte le toit.
Sous la porte cochère, on voit, engagées dans le
mortier d'un plafond de fraîche date, les pointes en
pierre d'un support de balcon ; le pignon dans lequel
elles sont incrustées devait terminer le corps piincipal.
A l'intérieur, la disposition piimitive est changée.
L'aile gauche a été appuyée sur le corps principal dont
elle masque le tiers de la largeur; la corniche du toit de
ce dernier corps continue sa course sous la tuile ; l'esca-
lier lui-même n'est point à la place où il a été construit ;
au premier étage, la rampe s'arrête brusquement, tranchée
par une scie barbare ; nous croyons qu'il a fait partie
d'une tour et n'a dû qu'à son utilité d'avoir échappé h
la démolition.
Le sculpteur a déployé dans l'exécution de la cage et
de la porte de cet escalier les trésors infinis de l'art
arabe ; les quatre panneau.\ du pourtour sont d'un dessin
correct et délié, où l'entrelacs suit les plus capricieux
détours ; une cordelière, terminée par deux glands, unit
les lettres d'un monogramme mystérieux ; le demi-relief
de ces panneauv est du plus charmant effet ; il contraste
avec la sculpture fouillée de la filière servant d'appui
aux dentelles supérieures dont les colonnes seules sont
restées.
La porte, en anse de panier, est entourée d'un ruban
de liserons de haut relief terminé par deux glands ; au-
dessus, un entrelacs de brandi iges bien évidés forme le
socle d'une statue absente ; le clocheton qui surmonte la
niche est du gothique le plus pur ; il se détache sur un
reste de dentelles très finement découpées, où l'arabesque
le dispute au gothique de caprice et de fantaisie.
Dans toute cette œuvre, on reconnaît les signes
caractéristiques de l'architecture transitoire du siècle de
Louis XII. Les arcs en anse de panier, le gothique,
l'arabesque, le plein cintre dans les détails des filières, y
sont délicieusement unis sous l'inspiration d'un ciseau
savant.
Le bâtiment principal est régulier. Du sol à la toiture,
la façade est rayée de nervures pentagones rapprochées
et seulement interrompues par la double filière de pam-
pres et de houx qui ceint le premier étage. Les fenêtres
du rez-dechaussée sont surmontées de filigranes qui font
l'effet des franges d'un store replié ; de jolis rinceaux
parent les pilastres soutenant la saillie du premier. L'en-
tablement reproduit les figures bouffonnes du côté de la
rue, séparées, au milieu, par une rosace délicate figurant
assez bien une marguerite sextuple.
Maintenant, que notre imagination colore cette ra-
pide esquisse avec le pinceau éclatant des architectes
d'alors. Ces grappes violettes à demi cachées sous une
feuille jaunie, ce houx vert aux graines pourpres, ces
nervures, ces chiffres dorés comme le sont les draperies
sculptées de la porte qui termine l'escalier ; toutes ces
magnificences de sculpture peinte et dorée ne piêtent-
elles pas à cette demeure le charme d'une retraite desti-
née à de tendres visites ?
Cette maison, avons-nous dit au début, est
désignée à tort, dans notre ville, sous le nom de
Maison de François I". C'est le P. Ignace, qui,
croyons-nous, a créé cette légende, bien des
fois reproduite ; cet liistorieii dit, en effet, dans
son Histoire des ina'ieurs d' Abbeville, publiée en
1657, qu'à l'occasion du mariage de Louis XII
avec Marie d'Angleterre, célébré à Abbeville en
15 14, « le duc d'AngouIesme, premier prince du
sang (ce fut depuis le Roy François premier,
gendre du Roy Louis XII), estoit logé en une
maison oti demeure à présent le sieur Claude
Gaillard d'Ambreville, et y entroit par une porte
a^êlaiigcs.
répondante sur la rue St-Gilles, où on a basty
une maison dans laquelle a demeuré plusieurs
années Monsieur de Launay, commandant pour
le Roy à AbbeviUe. On voit encore dans la
maison dudit sieur Gaillard, en la Tannerie,
une ancienne montée faite de ce temps-là, qui
est une pièce rare pour sa structure. »
Plus tard, un autre Abbevillois, Hermant,
procureur fiscal, disait, dans une Histoire du
Pontliieii demeurée jusqu'ici manuscrite : « Le
duc d'Angoulême, premier prince du sanp;, de
puis François !•='", fut logé en une maison où a
demeuré depuis le sieur Gaillard d'Ambreville,
dont le jardin s'étendait jusqu'à la rue Saint-
Gilles. Ma grand'mcre l'a occupée, et c'est à
présent M. Dufour, dans la Tannerie. »
Ce passage est certainement emprunté à l'ou-
vrage du P. Ignace. Or, pour la notice que nous
avons consacrée au mariage de Louis XII avec
Marie d'Angleterre, nous avons soigneusement
dépouillé les comptes des argentiers d'Abbe-
ville, et nous avons relevé cette mention, qui est
en désaccord avec le dire du P. Ignace : « Pour
deux autres fallotz à main, lesquelz ont esté dé-
livrez aux gens et pour l'iiostel de monseigneur
Monsieur, lui estant logé au 'prieuré de Saint-
Pierre de cette dicte ville, à six soulz pièce,
XII sous. »
Ce passage du compte des argentiers est irré-
futable et détruit la légende dont le P. Ignace
s'est fait l'écho, et qui se répète encore de nos
jours.
Mais, si François F'' n'a pas eu pour logis la
maison de la Tannerie en 1514, peut-être y serait-
il descendu dans l'un des fréquents séjours qu'il
fit dans la capitale du Ponthieu après son avène-
ment au trône ; de 1517 à 1542, le roi-clievalier
devait venir sept fois à Abbeville. Pour trois de
ces voyages, le logis du roi est indiqué par les
registres de l'échevinage : il descendit à l'hôtel
de la Gruthuse, situé rue St-Gilles. Les mêmes
registres sont muets sur le logement occupé par
François I" lors des autres séjours qu'il fit dans
la capitale du Ponthieu.
Au mois de juin 15 17, François I^^"^ arrivait à
Abbeville avec la reine et toute sa cour dans
quatorze gribannes richement décorées. Les sou-
verains logèrent à l'hôtel de la Gruthuse ; pen-
4i6
3Rcbur lie rart cbvctîni.
dant son séjour, le roi présida les États de
Ponthieu et y publia son ordonnance sur l'ami-
rauté de France. Au mois de décembre 1531,
François l'^'' se rendant à Calais, pour y conférer
avec le roi d'Angleterre, s'arrêta à Abbeville et
logea à l'hôtel de la Gruthuse avec sa seconde
femme, Éléonore d'Autriche.
Les comptes des argentiers nous font con-
naître le nom de l'hôtel où descendirent les sou-
verains lors de ces deux voyages, parce qu'ils
furent reçus avec magnificence aux frais de la
ville, attendu qu'en 1517,1e roi faisait sa pre-
mière entrée officielle depuis son avènement, et
qu'en 1531,1a reine Éléonore était reçue pour
la première fois à Abbeville.
François P"' avait séjourné avec la reine dans
la même ville au mois de juillet I S 19 ; ils y reve-
naient le 16 mai de l'année suivante, en se ren-
dant au Camp du drap d'or ; à leur retour, ils
s'arrêtèrent à Abbeville et s'embarquèrent sur la
Somme, dans le Rivage, pour se rendre à Amiens.
Le 25 mai 1535, le roi et la reine Éléonore d'Au-
triche, sa seconde femme, assistèrent à la messe
en l'église Saint-Georges, et suivirent ensuite la
procession du Saint-Sacrement qui se fit autour
de la place du marché, que l'on avait jonchée
de verdure ; le cardinal de Bourbon, archevêque
de Sens, portait le Saint-Sacrement ; le poêle
était porté par les trois fils du roi et le fils du
duc de Vendôme ; François I^" suivait tête nue,
tenant un cierge de cire vierge à la main ; la reine
et les princes de la cour venaient derrière por-
tant de grands cierges allumés. Au mois de juin
1540, le roi séjournait à Abbeville et à Nouvion ;
il y revenait pour la dernière fois en 1542. Pour
ces différents séjours, les registres de l'éche-
vinage et les comptes des argentiers sont abso-
lument muets à propos du « logis » où descendit
le souverain, car, pour chacune de ces entrées, la
ville n'avait plus de réception officielle à faire.
Il est permis de conjecturer qu'à chacun de
ses voyages à Abbeville, François I" dut des-
cendre à l'hôtel de la Gruthuse ; ce magni-
fique palais avait été commencé par Philippe
de Crèvecœur, seigneur d'Esquerdes, gouver-
neur d'Abbeviile de 1475 à 1494, et terminé
par son beau-frère Jean de Bruges, seigneur de
la Gruthuse, gouverneur d'Abbeviile de 1502
jusqu'à sa mort, arrivée en 15 12. C'est dans cet
hôtel, le plus vaste et le plus somptueux de la
ville, que Louis XI 1 descendit en 1514. L'année
suivante, il devenait une des demeures des rois
de France, et, après des changements et des
augmentations, il était affecté à la recette du
Ponthieu, puis au bailliage, au présidial et à
l'élection ; pendant la Révolution, il devint le
siège du district et fut incendié dans la nuit du
4 au 5 janvier 1795.
Il est logique de supposer que cet hôtel, tom-
bé dans le domaine royal, devait servir de rési-
dence, à l'exclusion de tout autre, aux souverains
de passage à Abbeville.
Une autre objection peut être invoquée à l'ap-
pui de notre thèse que François L' n'aurait
jamais habité la maison à laquelle a été donné
son nom.
Dans le principe, la rue de la Tannerie s'ap-
pelait rue Cache-Cornaille ; cette dénomination
lui venait de ce que les corbeaux — corneilles
ou cornaiilcs en patois picard, — étaient attirés
dans cette rue par les peaux des tanneries, et
qu'on les y cachait, — chassait (').
Ce quartier formait comme une petite Venise.
La rue Cache-Cornaille était occupée dans son
milieu par un des bras de la Somme, appelé la
rivière de la Plume, d'une largeur de dix mètres.
Le passage d'un cortège royal par cette rue
aurait manqué de prestige, et, rien que pour cette
raison, a dû être écarté par la municipalité.
Le P. Ignace ajoute bien, il est vrai, que l'on
entrait dans la maison de la rue de la Tannerie
« par une porte répondante sur la rue St-Gilles ».
Mais aucun document n'est venu jusqu'ici con-
firmer cette supposition.
En 1620, dit M. E. Prarond, d'après Collenot,
il y avait à Abbeville quarante maîtres tanneurs,
qui habitaient, sinon tous, du moins le plus grand
nombre, la rue de la Tannerie. Il est de tradition
que ceux qui s'enrichissaient dans cette industrie
achetaient les propriétés qui faisaient suite aux
leurs et donnaient sur la rue Saint-Gilles, et qu'ils
y faisaient élever des hôtels plus ou moins vastes ;
c'est là qu'ils habitaient après qu'ils s'étaient
retirés des affaires et ajoutaient à leur nom pa-
tronymique un nom de fief ou de seigneurie.
I. E. Prarond, Topographie d'AbèeviUe [l. ^00].
Mélanges.
417
Or, si un hôtel était construit rue Saint-Gilles
à la suite de la inaison dite de François 1"^^, c'est
dans cette habitation que ce roi serait descendu
et non dans les dépendances de la rue de la
Tannerie; mais si cet hôtel n'était pas construit,
les moyens de communication entre les deux
propriétés ne devaient guère être faciles. Il est
vrai que, suivant une tradition, une ruelle lon-
geant la propriété de la maison dite de Fran-
çois I^"" faisait communiquer la rue Saint-Gilles
avec la rue de la Tannerie ; mais cette voie devait
être fort étroite et d'assez longue étendue; aussi
dut-on se garder de la faire suivre par le roi.
De l'examen attentif des lieux et de l'étude
minutieuse des documents qui relatent les diffé-
rents séjours de François I<''' à Abbeville, il res-
sort clairement pour nous que ce roi n'a jamais
habité la maison qui porte son nom.
D'où viendrait cette appellation? Nous avons
entendu dire par des personnes âgées de notre
ville que l'escalier sculpté qui se trouve dans
cette maison y aurait été rapporté d'une habita-
tion où aurait logé François h''. Cela est peu
probable. Les autres sculptures de cette maison
portent bien l'empreinte de la même époque, et,
comme le roi-chevalier a dû habiter l'hôtel de la
Gruthuse dans chacun de ses voyages à Abbe-
ville, — sauf pour celui de 15 14, — il est plus
que certain que cet escalier ne fut pas enlevé de
l'hôtel de la Gruthuse.
Nous émettrons une hypothèse qui nous paraît
plausible. La construction de la maison de la rue
Cache-Cornaille fut commencée sous le règne de
Louis XII; elle appartenait sans doute à un offi-
cier royal quelconque, ou au maïeur en charge
en I S 1 7 ; or, c'est en cette année que François I'^''
fit sa première entrée solennelle à Abbeville ;
pour récompenser les services rendus par l'un de
ses officiers, ou en reconnaissance de la magnifi-
cence déployée par la municipalité, on peut sup-
poser que le roi a pu faire quelque libéralité au
propriétaire de cette maison pour son complet
achèvement. De là serait venue l'appellation qui
s'est perpétuée jusqu'à nos jours.
villois, E. Poilly, et appartient à la Société
d'Émulation d'Abbeville ; cette planche et une
autre figurant une filière et des mascarons ont
été insérées dans le volume des mémoires de
cette Société en 1833, mais sans être accom-
pagnées d'aucun texte.
La maison dite de François L'' et son escalier
figurent dans le tome 1'^'' de la Picardie du baron
Taylor, publié en 1835.
Depuis, des reproductions plus ou moins
exactes, plus ou moins fantaisistes, accompagnées
de textes d'une inexactitude flagrante, ont été
faites de cette curieuse maison dans des publi-
cations qu'il n'est point nécessaire de nommer.
*
* *
L'une des deux figures ici reproduite (Ji£^. 2)
est la réduction d'un cuivre gravé par un Abbe-
Pour terminer, nous dirons que l'escalier de
cette maison a été reproduit par la peinture.
Charles-Edouard de Beaumont, né à Lannion,
mort à Paris le 13 janvier 18S8, élève de Boisse-
lier, a exposé au Salon de 1873 un tableau de
genre fort apprécié; sous le titre : Fin d'une chan-
son, l'artiste a représenté un jeune homme et une
jeune femme étendus morts au pied de l'escalier
à l'intérieur de la maison dite de François I".
Alcius Ledieu.
REVUE DE l'art CHRÉTIEN
1901. — 5'"*^ LIVRAISON.
4i8
Bcbue iie T^rt cbvctten.
H'art et l'autel.
[I. a paru récemment une nouvelle
revue d'art chrétien : L Art et F Autel.
Nous nous sommes procuré ce petit
et élégant périodique, qui paraît
appelé à faire beaucoup de bien. Il nous semble
bien inspiré, très bien intentionné, et bien fait
pour vulgariser les meilleures idées d'art chrétien.
Dans les trois premières livraisons, nous trouvons
de belles illustrations, d'excellents articles, et
rien à critiquer, si ce n'est peut-être certain projet
de peinture murale fait à distance pour une
chapelle en style Louis XIV, et une réclame en
faveur d'un fournisseur de plantes stérilisées,
préconisées, avec un à-propos contestable, pour
la décoration à demeure des sanctuaires. Ajou-
tons une petite critique encoie ; M. J. de Bonne-
fon, le directeur distingué de cette belle publi-
cation, termine un excellent article résumant
l'histoire de l'autel chrétien par des conseils
pratiques étranges. Il regrette le fastueux autel
Louis XIV qui abîmait jadis le chœur de Notre-
Dame de Paris, et signale comme un chef-
d'œuvre de bon goijt un autel ayant pour retable
la table même de la Cène, avec le Christ et les
Apôtres en grandeur naturel
Uart et l'autel gémit, à bon droit, de l'ineptie
des fabricants d'objets religieux et du manque
absolu de bon goiît, de sentiment chrétien et de
valeur artistique qui caractérise tous les produits
actuels du genre orfèvrerie, statuaire, ima-
gerie, etc.
Il faut dire que le marasme de l'art religieux
n'est pas aussi complet qu'on veut bien le dire.
On feint d'ignorer bien des efforts intéressants,
bien des œuvres de valeur, et, par une véritable
conspiration du silence, on semble vouloir dé-
courager ce qui se fait de meilleur en matière
d'art religieux. On s'extasie, légitimement d'ail-
leurs, devant telle statue, tel reliquaire, telle mi-
niature du moyen âge, auxquels on trouve un
monde de naïveté charmante, de sentiment ex-
quis, de caractère et de style. Mais que des ar-
tistes actuels pratiquent le même art chrétien et
produisent des œuvres neuves, animées du même
sentiment traditionnel, on leur tombe dessus en
traitant leurs produits de pastiches et de magots.
Le crucifix, que nous donnons aujourd'hui, serait
certainement loué et peut-être admiré, s'il se
rencontrait tout patiné dans un coin de sacristie,
ou sur les rayons d'un musée, car il est du plus
beau style médiéval, et au surplus, d'une fière
distinction de forme et d'un sentiment profond.
Ne voulant pas faire de réclame, nous ne dirons
pas de quel atelier il provient. Les lecteurs de la
Revue de l'Art chrétien qui voudraient mettie
en place d'honneur une belle image du Sauveur,
seront sans doute heureux de rencontrer un
excellent produit de cuivre ouvragé ; il est dans
le commerce, avec d'autres ouvrages non moins
recommandables.
L. C
ïlc\juc De Vmt cîjréticn.
Pl. IX.
^.^ .5^ .^ ^.^ :,^ .5^ .^ .^ .^ .^ .^ ^..^ .^ .^.,^^;^^ .^ ^, ^, ^ ^^
I
^■wwwwwwwwwwwwwwwwwwwwwww^
Italie.
Hlorenrr : lia ffiiscticomia ; lifa Bcliqimitcc ; une
nnnonciation Bc Caballtni. — fficprisc îi'autciir. — HfB
ffioniimnuB dnrtifns cur \za fflontaenra. — Bonie :
flaucrc noiiucau rt nom noubrau, — EtirilIC : Tiîi> fresques
ne Corrroc au Dôme.
Florence : La IMisericordia.
FA vénérable archiconfiateinité de la
I\Iisericordia de Florence célèbre di-
vers anniversaires au conrs de l'année.
Le jour de l'octave de la Fête-Dieu,
elle expose, à l'extérieur de son siège, un grand
tableau peint par Lodovico Cardi, dit Cigoli
(1559 '^ 1613).
La toile représente la peste de 1348, et les
membres de la confrérie occupés à remplir leur
triste mission, le transport des malades et des
morts.
Cette exposition publique est la conséquence
d'un don fait à la confrérie.
En 1765, un confrère donna le tableau de
Cigoli à la compagnie, à la condition qu'il serait
exposé au public à l'octave du Corpus Doiiiini ;
le confrère, homme de précaution, ajouta qu'en
cas de pluie ou de vent le tableau ne serait pas
mis au dehors.
Cette fois, le temps a été très beau et j'ai vu
avec plaisir que, comme les années précédentes,
le peuple en foule respectueuse était venu rendre
hommage à la plus populaire des sociétés de
charité de la cité.
La Misericûrdia mérite, en effet, le respect de
tous.
Elle doit son origine à un simple ouvrier en
laine, Pietro Bordi.
En 1240, ce brave homme fonda avec quelques
camarades une petite association de piété et de
charité chrétienne.
Le sociétaire qui blasphémera paiera une
amende ; avec les recettes on achètera des lits
pour les malades et on pourvoira à la sépulture
des morts.
L'œuvre de Bordi prit une grande importance
après 1326, année funeste, où sévit pour la
première fois la peste, qui par vingt fois devait
affliger la cité.
Trois ans aprè';, la société prit le nom touchant
de Misericordia et reçut de la Seigneurie une
existence légale. En 1425, elle fusionna avec la
confrérie dite du Bigallo.
Depuis, la i^//5£';7V^;7//rt n'a cessé defonctionner;
elle compte environ cinq cents membres recrutés
dans tous les rangs : famille royale, épiscopat,
aristocratie, bourgeoisie, ouvriers.
Les confrères sont d'abord novices ; ils passent
ensuite par une hiérarchie et arrivent au grade de
Capi Guardia, dont le nombre cependant est
limité à soixante et douze en souvenir des dis-
ciples de Jésus-Christ.
Comme marque d'égalité, les confrères en
fonctions portent tous le froc et le capuchon
noir qui recouvre toute la tête sauf les yeux.
Le jour de la Purification, ils reçoivent deux
cierges ; le jour de la fête de leur patron, saint
Sébastien, on leur distribue des petits pains.
A chaque service, le confrère est reçu par la
salutation :
Dio gli ne renda mérita e San Bastiano.
A quoi l'on répond :
Ancora a lei (')•
Depuis 1576, la Misericordia occupe un bâ-
timent sur la place du Dôme en face du
campanile de Giotto. Il y a là des civières, une
ambulance, et une chapelle ; des serviteurs
sont de garde en permanence.
En cas d'urgence, on sonne une cloche spéciale
placée dans le campanile.
Comme beaucoup d'œuvres pies, la Miseri-
cordia possède des ouvrages d'art.
I. Traduction ; Dieu vous en fera un mdrilc et de même saint
Sebastien.
— Et aussi à vous.
Ce remerciement est également en usage chez les Ordres qui
demandent la charité k domicile, avec modification du nom du
patron.
Pendant un voyage en Dalmatie, j'ai reçu le même remerciement
dans une contrée très pierreuse ; le pauvre a ajouté : Et que Dieu
vous donne de la terre verte.
420
îXrbur lie r^rt djvcttcn.
Elle conserve des sculptures dont les plus
remarquables sont : un autel avec la Madone et
des Saints en terre émaillée, par Andréa délia
Robbia(i435Ȕ'i525) ; deux anges d'une pareille
fabrication ; une petite statue en marbre de
saint Sébastien par Benedetto da Maiano
(1442- 1497), et une statue inachevée de la Vierge
du même sculpteur.
Outre le tableau de Cigoli, elle possède d'au
très peintures modernes etanciennes; on distingue
notamment un saint Sébastien par Santi di Titto
(1536-1603), une Madone avec l'Enfant et saint
Jean par Andréa del Sarto (1486-1 53 1), et une
suite de portraits des hauts protecteurs, princes
de la famille de Médicis, de la maison de
Lorraine et de la dynastie de Savoie.
L'effigie du fondateur, Pietro Bordi, occupe la
place d'honneur ; il est vêtu du lucco, longue robe
rouge ; ce n'est pas, à la vérité, le simple costume
que portaient les ouvriers en laine au XII 1'= siècle,
mais il faut voir l'intention et ne jamais re-
procher à la reconnaissance un excès de grati-
tude.
Les reliquaires.
L'inauguration d'un buste de Benvenuto Cel-
lini sur le Pont-Vieux de Florence, toujours
occupé par des boutiques d'orfèvres, a donné
l'occasion d'organiser une exposition d'un genre
original et pratique.
La Société italienne de l'Art public, dont le
siège est à Florence, aurait bien voulu faire une
exposition spéciale à Cellini, mais l'Italie ne
possède pas une seule pièce d'orfèvrerie authen-
tique du célèbre artiste.
Du reste, dans le monde entier, et quoi qu'on en
dise, il ne reste de Cellini qu'un seul ouvrage
d'orfèvrerie : la salière du trésor impérial
d'Autriche conservée à Vienne.
C'est surprenant, mais c'est ainsi, et Florence,
très jalouse cependant de ses artistes, en convient.
Mais à défaut d'orfèvreries de Cellini la
Société de l'Art public a eu l'heureuse idée de
demander aux églises de Florence de mettre sous
les yeux du public les pièces d'orfèvrerie reli-
gieuse qu'elles possèdent.
Le temps lui a manqué pour faire des recher-
ches dans les églises des environs de la cité et de
diverses localités de la Toscane, qui, paraît-il,
détiennent des objets remarquables.
Les pièces de diverses églises ont éié groupées
au musée de l'Opéra du Dôme, et dans les
sacristies des églises de Santa Maria Novella, de
la Santa Trinità et de San Lorenzo ; de plus le
cabinet des argenti du palais Pitti avait été
ouvert au public.
Je n'essaie pas de décrire ces objets ; mais
comme, sauf au palais Pitti, il est difficile de les
voir et qu'on ignore même où ils se trouvent, je
vais au moins citer les églises qui les possèdent ;
cette indication pourra peut-être servir un jour à
un confrère.
Dôme de Notre-Dame de la Fleur.
Église de Santa Maria Novella.
Église San Marco.
Église Ognissanti.
Église San Remigio.
Église San Lorenzo.
Église Santa Trinità.
Église San Stefano délia Badia.
Église San Frediano in Cestello.
Église San Pier Gattolino.
Église Santa Lucia di Magnoli.
Église Santa Félicita.
Église San Ambrogio.
Église San Michèle Visdomini.
Église San Giovanino dei Cavalieri.
Ces églises ont exposé environ soixante et
quinze pièces du XIV'= au XVI F' siècle, mais
il y a à Florence d'autres églises qui n'ont pas
participé à l'Exposition.
La cathédrale de Sainte-Marie de la Fleur
détient dans son trésor les reliquaires du Baptis-
tère de Saint-Jean.
Voici la liste sommaire des principales pièces
de ce trésor, désignées par les dénominations
des reliques qu'elles renferment.
Saint Zanobi, XIV'^^
Saint Philippe apôtre, XIV^
Saint Simon Stylite, XI V=
Saint Jean-Baptiste, XIV«
Saint Jérôme, XV''
Sainte Reparata, XV""
Chaîne de saint Pierre, XV^
Bois de la vraie croix, XV<^
Instruments de la Passion, XV»;
Saint Jean, XVI«
Correspondance.
421
Saint Antoine, abbé, XYI^
Saint Jean, XVP
Bois de la vraie croix, XVII''
Saint Jean, XVI I«
Il y a de plus les reliquaires de saint Philippe
Néri, sainte Marie-Madeleine, saint Giusto
évêque, «^"'nt Sébastien, martyr.
Le reliquaire dit del libretto, de la fin du
XV<= siècle, qui renferme des fragments des
instruments de la Passion, est particulièrement
précieux. Il est nommé dd libretto, parce que
les reliques sont dans un petit coffret en forme
de livre ; le coffret a appartenu à Charles V, roi
de France ; plus tard il fut mis dans le reliquaire-
tabernacle où il est encore.
Uargeiitaria du Palais Pitti conserve les pare-
ments et l'orfèvrerie religieuse de l'ancienne
chapelle des Médicis ; ces objets étaient, non du
domaine de l'Etat, mais la propriété de la famille.
En 1737, meurt Jean-Gaston, le dernier grand
duc des Médicis, sans laisser d'héritier à la
couronne ; sa sœur, Anna Lodovica, électrice
palatine, hérite de tous ses biens. Par un acte
d'une grandeur et d'une générosité mal reconnues,
elle donne à l'Etat de Toscane les immenses
richesses d'art réunies par les Médicis et à leurs
frais et spécifie particulièrement le très riche
trésor de la chapelle.
Une Annonciation de Cavalliiti {i2'i()>h 1344).
Vasari rapporte que Cavallini, l'un des meilleurs
élèves de Giotto, vint à Florence pour voir les
peintures de son maître.
Il peignit dans cette cité un grand nombre de
figures à l'église de San Marco.
En 1550 déjà, date de la première édition de
Vasari, les peintures de Cavallini ne se voyaient
plus, l'église ayant été blanchie !
Une seule avait échappé au badigeon ; c'était
une Annonciation, mais Vasari nous apprend
qu'elle était recouverte et par conséquent invi-
sible.
Elle l'est restée jusqu'à présent ; j'ai interrogé
bien des personnes, aucune n'a jamais vu cet
ouvrage et n'a pu me dire pour quelle raison il
était caché.
Je me suis appliqué à le faire découvrir, et j'ai
enfin eu la satisfaction de réussir.
Les peintures de Cavallini sont très rares,
quoiqu'il en ait exécuté beaucoup.
La mauvaise chance a poursuivi ce peintre ; il
ne reste de lui qu'une Crucifixion superbe dans
l'église inférieure d'Assise ; une grande ancone
avec V Annonciation et des saints au musée de
l'Académie à Florence, et les fresques récemment
découvertes à Sainte-Cécile à Rome.
Il est connu surtout par sa mosaïque de
Sainte-Marie en Transtevere, montrant en six
tableaux la vie de la Vierge.
Lorsque la photographie de l'Aimonciation
sera faite nous la reproduirons avec quelques
explications.
Méprise d'auteur.
Dans son livre Le Puits de sainte Claire,
M. Anatole France, membre de l'Académie
française, raconte qu'au XIV<= siècle le peintre
« Buffalmaco fut appelé de Florence dans la
« ville d'Arezzo par le seigneur évéque, qui lui
« demanda d'orner de peintures les salles de
« l'évêché. Buffalmaco se chargea de ce travail et
« sitôt que les murailles furent enduites de stuc,
« il commença de peindre l'Adoration des
« mages. »
Puis M. Anatole France rapporte les méfaits
d'un singe qui regardait travailler Buffalmaco.
« Que le peintre maniât les couleurs, battit les
« œufs, ou mît avec le pinceau les touches sur
« l'enduit encore frais, l'animal ne perdait pas un
« seul de ses mouvements.»
Et plus loin :
<!, Il le laissait libre d'errer dans les salles et
« dans les jardins où l'animal ne cessait point de
<i faire quelque malice. Un dimanche, en l'absence
« du peintre, il grimpa sur l'échafaud, prit les
i. tubes, mélangea les couleurs à sa fantaisie,
i cassa les œufs qu'il trouva et commença de
« promener le pinceau sur le mur, ainsi qu'il
« l'avait vu faire. Il travailla sur le roi Melchior
« et sur le cheval et n'eut de cesse qu'après
« avoir tout repeint de sa main. »
Donc, d'après M. Anatole France,
1° L'évêque fit enduire les murailles de stuc
et Buffalmaco peignit à fresque sur cette matière.
Or il est impossible de peindre à fresque sur le
stuc.
2° Buffalmaco se servait de couleurs en tubes.
Or les tubes sont une invention moderne.
3° Buffalmaco préparait ses couleurs à l'œuf
pour peindre sur un enduit frais.
Or la peinture sur enduit frais se faisait alors
et se fait encore maintenant avec des couleurs
préparées à l'eau.
Les couleurs préparées à l'œuf ne servent qu'à
la peinture exécutée sur un enduit sec.
De sorte que les lecteurs du Puits de sainte
Claire auront une idée complètement fausse sur
les procédés de la peinture à fresque.
Les monuments chrétiens sur les montagnes.
J'ai déjà parlé de divers monuments élevés sur
les Alpes et les Apennins, en l'honnenr de Notre-
Seigneur et de la Madone ; l'impulsion donnée
il y a deu\ ans s'est généralisée ; on cite notam-
ment le Mont Cervin, hîut de 4482 mètres.
Un Comité s'est formé en vue de la création
d'un type de statue ; il a réuni une somme suffi-
sante pour faire placer vingt effigies du Rédemp-
teur d'un modèle uniforme, sur les plus hautes
cimes de l'Italie. La statue est l'œuvre du sculp-
teur Aure'.i ; le premier exemplaire a été remis
au palais du Vatican.
Rome: ttouveaux musées et mot nouveau.
M. Boni, l'éminent directeur des fouilles du
Forum, va organiser au Forum même un musée
des objets de tous genres que les travaux qu'il
conduit mettent à jour et qu'il y aurait péril à
laisser en plein air.
Le musée sera établi dans l'ancien couvent des
Olivétains attenant à l'église de Santa Francesca
Romana, située près de la basilique de Constantin.
Le sénateur Barraco a fait don à la cité de
Rome de son importante galerie de sculptures
antiques; le donateur fera élever à ses frais un
édifice sur un terrain municipal.
M. Boni préconise une expression nouvelle :
archconomie.
L'archéonomie est une branche de l'archéo-
logie ; elle a pour but la reconstitution de la vie
politique, religieuse, civile, domestique des
peuples disparus, au moyen des objets de tous
genres que les fouilles mettent à jour.
Parme. Les fresques de Corrige.
Il y a bien des années qu'on répète que les
fresques de la coupole du dôme sont en partie
compromises, et c'est vrai.
Allegri, dit Corrège, les peignit de 1526 à 1530;
le sujet donné était V Assomption de la Vierge.
Corrège l'a traité avec une hardiesse inusitée
alors, mais dépourvue de sentiment religieux. Un
contemporain, qualifié pour juger le travail, dit
au peintre une parole qui est restée: « Vous avez
« fait là un plat de grenouilles », allusion à
l'enchevêtrement des jambes et des bras, des
raccourcis et des contorsions des nombreux anges
qui planent dans l'air.
En réalité, la fresque, cependant si célèbre,
cau^e une désillusion ; on ne la comprend pas
bien et elle n'est pas à l'échelle de la voûte, défaut
capital dans une décoration murale.
Néanmoins, on s'est grandement alarmé de
l'état de perdition oij elle se trouve et un remède
a été jugé nécessaire.
Des praticiens furent mis à l'ouvrage, mais
bientôt une clameur s'éleva ; les artistes furent
accusés d'avoir fait plus de mal que de bien, et
de violentes polémiques s'engagèrent.
Pour en finir le ministre nomma une Commis-
sion compétente qui vient de déposer son rapport.
Aucune retouche de peinture n'a été faite,
comme on l'avait assuré.
L'affaiblissement des couleurs a détruit en
plusieurs parties l'harmonie générale ; cet affai-
blissement provient de l'envahissement du nitre
dû à l'humidité qui a atteint l'enduit.
Il n'y a donc rien à reprocher aux opérateurs.
On se bornera dorénavant à consolider l'enduit
dans les endroits où il y a crainte qu'il se détache.
Aucun coup de pinceau ne sera donné à la
fresque, excepté cependant sur les bords des
crevasses qui se sont produites.
La Commission a été sage.
L'humidité est pour les fresques un ennemi
mortel. On peut la vaincre en isolant l'onduit de
la muiaiUe, comme cela a été fait, par M. Fiscali,
au Campo Santo de Pise, pour la fresque
d'Antonio Veneziano représentant l'histoire de
saint Renier (voir la Revue de mai 1899) ; mais
l'opération est très difficile. Si on ne veut pas la
tenter, il faut laisser aller les choses et se
contenter de consolider l'enduit.
Correspondance
423
Des retouches de peinture ne seraient qu'un
expédient inutile ; d'abord elles pourraient
altérer le caractère général de la fresque, puis
elles seraient mangées par l'humidité comme les
couleurs primitives.
Gerspacii.
(Florence, août.)
NOUS avons reçu l'agréable lettre ci-après,
accompagnée de feuilles vivantes, que
nous reproduisons en croquis.
Cher Monsieur,
;i mai 1901.
VOTRE dernier article sur la flore de'corative du
moyen âge dans la Revue de PArt chrétien est plein
d'intérêt, pour moi surtout. Continuez, je le souhaite.
Je vous envoie de jeunes pousses de deux fougères,
indigènes en Ardenne ; j'espère qu'elles vous arriveront
non fanées. Le Polypode vuXga^we. ( Polypodiiim vii/gate)
en flamand Roomvarcn, est commun dans presque toute
la Belgique ; vous remarquerez combien ses petites
crosses sont simples, décoratives et en même temps
faciles à interpréter, pour des crochets en pierre par
exemple. L'autre est la Langue de Cerf ou Scolopendre
{Scolopeiidrimii viilgare Sm). Ces jeunes frondes pro-
viennent d'un pied que j'ai un jour transplanté des rochers
de la Semois dans notre jardin. Mais j'en ai, l'an dernier,
observé de bien plus belles, qui rappelaient d'une façon
frappaiile c&riaXns crochets de la plus belle époque. Cette
plante n'est pas spéciale à la .Semois et elle se rencontre
même dans le plat pays, au moins à l'état subspontané
ou naturalisé. Je l'ai observée notamment à Havre,
tapissant les parois d'un puits, où elle trouvait l'ombre
et la fraîcheur.
C'est une question bien complexe et bien difficile, que
de savoir où les anciens imagiers prenaient leurs inspira-
tions. D'où vient réellement la fleur de lys et le beau
crochet classique du XIII= siècle? Moi qui fais de la
botanique, je vous avoue que je me prends parfois à douter
des opinions les plus accréditées, et je me dis que le
dernier mot sur ces questions si intéressantes n'est peut-
être pas encore prononcé. Mais ce n'est pas une raison
pourne pas continuer vos recherches si bien commencées;
au contraire. Ces articles si bien illustrés ont déjà un
grand mérite au point de vue des jeunes artistes qui, au
lieu de rester courbés sur leur planche de dessin, feraient
bien d'observer d'un peu plus près notre flore indigène,
en faisant des rapprochements avec les beaux modèles du
passé.
Et puis, qui nous délivrera des élucubrations de
ce style «serpentin» que vous avez très bien baptisé, et qui
ne vaut quelque chose que lorsqu'il s'inspire de la nature
en l'interprétant précisément d'après les règles etlesprin-
cipes d'autrefois.' Mais : « Confetti — monnaie du diable
et serpentins — flore du diable ». S'il n'a que cela à nous
m
Scolopendre.
(Langue de cerf.)
Fougère.
(Pûlypode vulgaire.)
donner, qu'il demeure en enfer, n'est-il pas vrai ? Mais
vous nous donnez autre chose, cher Monsieur Cloquet,
et, je vous le dis, votre dernier article m'a comblé de joie,
moi qui ne sais ce qu'il faut le plus admirer, des végétaux
vivants créés par Dieu, ou des mêmes végétaux changeant
de rôle et de forme pour glorifier encore une fuis le
Créateur.
Pardonnez-moi ces quelques réflexions. J'espère qu'elles
vous encourageront dans cette bonne et belle voie.
Eugène H.
-^
^ :^ :^ :^ ^ ^ ^% .^ .^ ^ ^ ^^S^^^t^. ^ ^ ^^ ^ ^ ^ ^ ^ ^ ^^^
Tvabauv ttcs JSocittcs saluantes.
^
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^WWWWW^WWWWW^^WWWWWWWW^^fWWWW^
Société nat=''= des Antiquaires de France.
— Séance du /j mai igoi . — M. Lefèvre- Pontalis
communique les résultats des fouilles qui ont été
exécutées, sous sa direction, au mois de février
dernier, dans la nef de la cathédrale de Cliartres.
M. le capitaine Espérandieu communique
deux inscriptions latines provenant, l'une de
Lectoure, l'autre d'Annecy.
Scance du 3 Juin — M. Stein signale un nou-
veau document qui éclaire la vie et les travaux
du sculpteur Barthélémy du Tremblay, célèbre
artiste de l'époque de Henri IV, l'auteur de la
décoration sculpturale de la chapelle du château
de Fontainebleau.
M. Monceau présente quelques observations
sur les origines de la Bible latine ; il admet que
Tertullien avait sous les yeux des traductions
latines de quelques livres sacrés.
Séance du u juin. — M. Lafaye communique
de la part de son fière M. R. Lafaye le texte
d'une inscription latine trouvée il y a une ving-
taine d'années à Montlazi. Elle porte les mots :
Fulgur divon
M. Cagnat met sous les j-eux de ses confrères
une cornaline talismanique avec caractères ara-
bes qui appartient au commandant Fa.xges de
Constantine.
M. Prou entretient la Société de deux diplô-
mes du roi Philippe I*^'' conservés dans l'ancienne
abbaye de Messines près d'âpres. L'un d'eux
serait un faux fabriqué au temps même de
Philippe \".
M. Michon fait une lecture sur une statue
d'Apollon provenant de Nîmes et conservée au
Musée du Louvre.
Congrès de la Société française d'ar-
chéologie. — La Société française d'archéo-
logie a tenu son congrès annuel à Agen, puis à
Auch, du 1 1 au i6 juin, sous la présidence de M.
Lefèvre-Pontalis.
Plusieurs discours ont été prononcés ayant
pour but d'inviter les représentants de la science
archéologique à veiller sur les monuments que
menacent de coupables négligences. M. Héron de
Villefosse, qui représentait le ministre de l'Ins-
truction publique, a rappelé à ce propos les dan-
gers que courent les remparts d'Avignon et la
tour de Vésone, à Périgueux.
M. Lefèvre-Pontalis a exposé les travaux de la
Société depuis l'année dernière, consacré un sou-
venir ému à ceux de ses membres qui sont morts,
notamment au comte de Marsy, son prédécesseur,
et indiqué les travaux qui peuvent solliciter la
curiosité des archéologues dans l'Agenais.
M. Momméja a hi, ensuite, un mémoire très
intéressant sur les ateliers de sculpture de la
région.
M. Lauzun a donné communication de deux
notes de RL C. Julian, professeur à la Fa-
culté des lettres de Bordeaux, sur le culte des
déesses Tutelles dans le Sud-Ouest et l'origine du
nom d'Agen. 11 estime qu'il y a connexité en-
tre les deux questions, et que dans la forme
antégauloise Aginnuni on doit retrouver un
souvenir de culte, d'hommage à une fontaine,
à une source, également divinisée à l'éjjoque anti-
que sous le nom de Tutelle.
Signalons ensuite les communications de MM.
P. Longin et le chan. Pottier concernant l'his-
toire des églises, des châteaux et forts de la
région ; une étude de M. A. Hlanchet sur la pho-
thographie d'un dessin de la collection Gai-
gnières, exécuté entre 1700 et 1710, représen-
tant dans son état primitif le château de Mon-
taner, aux environs de Pau, construit en 1375
par ordre de Gaston Phœbus, comte de Foix, et
dont il ne reste plus aujourd'hui que des ruines;
des études de M. Brutails sur les églises à cou-
poles, de M. Momméja sur l'architecture de
l'Agenais et les carrelages vernissés ; des notices
de MM. Ouarré sur un voyage à Agen en 1690;
de M. Courreau sur l'église de Clermont-Des-
sous ; etc.
Les congressistes étaient très nombreux.
Ils ont visité dans le Lot-et-Garonne et le Lot
des châteaux féodaux, dont les ruines sont encore
imposantes, et des églises romanes, sous la direc-
tion de M. Lefèvre-Pontalis.
La cathédrale actuelle d'.Agen (l'ancienne
église abbatiale de Saint-Caprais) a attiré leur
attention par son plan qui comportait évidem-
ment des coupoles, remplacées au XIV"^ siècle,
faute de ressources, par des croisées d'ogives; ainsi
que l'église des Jacobins, intéressante par son
plan, analogue à ceux de leur église de Paris
aujourd'hui détruite et de leur grande et belle
église de Toulouse, plan à deux nefs parallèles
séparées par un alignement de colonnes.
L'église et surtout le portail de Moissac, ainsi
que le cloître très bien conservé, ont suscité deg
discussions intéressantes.
%va\iànx ties ^octété0 gatjantes.
425
La visite de la cathédrale d'Auch avec ses
superbes vitraux a terminé cette fête de l'art.
Il convient de mentionner, parmi les récom-
penses qu'a accordées la Société d'aixhéologie,
la médaille offerte à M"« Louise Carreau, qui a
acheté les vieux murs du château de Modaillan
et pris toutes les mesures pour les préserver de la
destruction.
Société archéologique du Midi de la
France. — La laborieuse société que dirige M.
J. Mérimée se distingue paria variété des études
de ses membres. Parmi les travaux de l'année
écoulée, signalons trois communications de M.
l'abbé Auréol, l'une relative à une miniature
figurant l'Immaculée Conception, l'autre sur un
fer à hosties du XV^ siècle, une troisième sur
quelques dévotions pendant le XV^ siècle, inté-
ressante au point de vue de l'art et de l'icono-
graphie; d'intéressantes remarques du baron de
Kivières sur les plus anciennes sculptures roma-
nes du Midi et de Toulouse; une étude du baron
Desazars de Montgaillard sur les origines de
Toulouse; des recherches de M. B. Dupuy des
Grais sur l'histoire de Toulouse ; la publication
par M. de Lahondès d'une inscription funéraire
du XI V'^ siècle; un mémoire important du même
auteur sur les châteaux de Cabaret (Aude), et
un autre sur d'anciennes maisons de Toulouse.
Ce dernier offre un intérêt spécial à notre point
de vue. La Revue de l'Art chrétien s'est plusieurs
fois occupée de l'architecture domestique au
moyen âge. Cette architecture n'a guère produit
de plus charmants spécimens que les demeures
modestes publiées par M. de Lahondès ; signa-
lons la principale et la plus ancienne de Toulouse,
sise rue Croix-Baragon et remontant au XIV<=
siècle. Elle présente au rez-de-chaussée deux lar-
ges boutiques abritées sous des arcades ogivales.
Le premier étage est éclairé par une rangée de
cinq fenêtres géminées. On accédait aux boutiques
directement de la rue, ou par un couloir. La salle
de l'étage était l'âme du logis, la grande pièce
servant de réfectoire et parfois de dortoir et aussi
de salle de réception intime. On y accédait par
une vis au fond du couloir ; des appartements de
derrière prenaient jour sur la cour. Une aile de
derrière était au moyen âge toujours ménagée au
fond de la cour ; on y plaçait la cuisine et les ser-
vices ; on y accédait par un passage couvert du
rez-de-chaussée et de l'étage, par une galerie.
Quelquefois un entre-sol était ménagé an-dessus
des boutiques. La maison avait un second étage.
Nous engageons M. Fierens-Gevaert, si sévère
pour ses compatriotes et avec qui nous polémi-
quions naguère, à diriger son attention vers le
Midi de la France ; il trouvera à la cathédrale
d'Albi de quoi exercer sa verve. On a démoli
les tourelles, sauf deux. A la place de celle qui
servait autrefois de vigie et oîi depuis on a mis le
timbre de l'horloge, on en a élevé une nouvelle,
toute de fantaisie. Les contre-forts ronds n'ont
plus de couronnement. Un mur monotone a fait
place à la balustrade, supprimée par motif d'éco-
nomie ! On a introduit de la pierre blanche, là
où, respectant la nature des matériaux origi-
nau.x, C. Daly, autrefois, avait eu soin d'em-
ployer de la brique et de la pierre de Plaisance.
Telles sont, du moins, les doléances qu'un homme
très entendu, M. le baron de Rivières, faisait
naguère entendre à ses confrères de Toulouse.
M. l'abbé Cau -Durban fait connaître l'exis-
tence dans le passé d'une collégiale tombée dans
l'oubli, celle de Massât et fournit des renseigne-
ments à son sujet. M. l'abbé Auriol lit un mémoire
sur la fondation de la Chartreuse de Toulouse.
A la séance annuelle, M. le prof Mérimée a
prononcé, en un discours de grande élégance lit-
téraire, l'éloge de l'archéologie... et des archéo-
k, ,,;iwvi%*^^Éi|l
-%r.
Figr. I. — Chapiteaux de l'église SaintNazaire à Carcassonne.
logues toulousains ; M. E. Cartailhac a traité de
l'histoire, de l'état et du rôle des musées.
Signalons encore une étude de M. de Lahondès
sur la cathédrale de Saint-Nazaire à Carcassonne.
On aimait à insérer dans la construction des
églises romanes quelques restes choisis des sanc-
tuaires antiques qu'elles remplaçaient. C'est ainsi
que l'on peut voir dans l'église de St-Nazaire
trois chapiteaux, les premiers vers le chœur, pro-
venant d'une église antérieure, que l'on sait, par
un parchemin de 85 1, avoir été élevée à la même
place. Ils rappellent ceux de Ravenne et de
St-Ambroise à Milan, c'est dire combien ils
sont intéressants ; nous croyons bien faire d'en
reproduire deux (Jig. i ).
Rappelons l'allure générale de l'édifice. St-
Nazaire diffère essentiellement de Saint-Sernin
de Toulouse, sa voisine. Tandis que celle-ci,
élevée suivant le mode auvergnat, présente des
demi-berceaux contrebutant la grande voûte
au dessus des bas-côtés, on voit à la cathédrale
carcassonnaise les deux petites nefs montées jus-
revue DE l'art chrétien.
1901. — 5™*^ LIVRAISON.
426
jRrbuc lie r^rt cbvcttcn.
qu'à )a hauteur de la nef centrale, selon le mode
du Poitou (ex. : St-Savin). Le chœur fut construit
vers 1267.
Le charme suprême du chœur de St-Nazaire
vient de ses vitraux ; on ne voit que du verre coloré
entre les minces colonnettes qui séparent les ver-
rières ; la richesse de leur coloration est incom-
parable.
De plus, la cathédrale de Carcassonne s'enrichit
d'une statuaire vraiment supérieure, la plus
Fig. 2. - Le Christ.
belle que le XIV»' siècle ait laissée à la pro-
vince (131 5-1326). Vingt statues entourent le
chœur ; elles représentent notamment la Vierge
(même inspiration que celle de la porte dorée
d'Amiens), et le Christ, resté inaperçu de Viollet-
le-Duc par suite de cette circonstance étrange,
qu'il est de taille inférieure à celle des trois
statues de la Vierge, de S. Nazaire et de S.
Gimer (fig. 2). C'est une figure superbe, que nous
avons fait reproduire. Puis viennent les apôtres.
Ces statues ont une attitude simple et noble,que
le vêtement suit avec aisance ; elles ont plus de
délicatesse que de grandeur ; on y voit poindre
le réalisme de l'époque et elles doivent être
l'œuvre d'artistes du Nord. Elles étaient poly-
chromées. Elles sont à rapprocher de celles de la
chapelle de Rieux, actuellement au cloître des
Augustins, un peu plus réalistes.
Dans sa très belle étude, M. de Lahondès a
glissé une assertion qui nous paraît étrange.
« L'essor, parti des provinces françaises, de la
Bourgogne surtout, avait gagné les Flandres... »
Ce serait une théorie bien neuve et digne d'être
démontrée, que celle qui ferait naître l'école
flamande de la bourguignonne ? Jusqu'ici l'in-
verse a toujours été admis.
L. Cloquet.
Société d'archéologie de Bruxelles. — Le
t. XV des Annales {\\, 1901) contient une notice
de M.J.Van der Linden sur quelques œuvres d'art
de l'église d'Opwyck, en Brabant, édifice élevé
du XlV'= au XV'= siècle, et qui possède trois ta-
bleaux de Crayer, des statues en bois d'Ant.
Faydherbe, et un ostensoir du XVI^ siècle, de
l'orfèvre Jooris Van Horenbeke.
M. P. Combrez étudie les restes des remparts
de Bruxelles, et en particulier de la Steenpoort.
Société d'histoire et d'archéologie de
Gand. — Le musée germanique possède un
tableau flamand du XV'^ siècle, représentant la
Mort de Cynis, sujet puisé, comme le montre
M. le prof. G. Hulin, dans le Spéculum hiunanœ
Salvationis.
De patientes recherches ont amené M. Hulin
à la conviction, que ce tableau provient de l'an-
cien palais épiscopal de Gand ; il est attribué
jusqu'ici à un anonyme, auteur du célèbre retable
provenant de l'abbaye de Flemalle, conservé au
musée Staedel de Francfort.
En outre, M. Hulin avance comme une con-
jecture très probable et singulièrement intéres-
sante, que le « maître de Flemalle » n'est autre
que le peintre tournaisien Jacques Daret.
En présence de cette hypothèse, qui donne
un nouveau relief au maître tournaisien, nous
croyons intéressant de reproduire ici les rensei-
gnements que nous avons naguère réunis sur ce
peintre, en collaboration avec feu A.deLagrange.
Les Daret ont formé une des lignées d'artistes tour-
naisiens les plus remarquables. Le plus ancien et le plus
intéressant de ses membres est Jacques Uaret ('), pro-
bablement fils de Jehan, l'escrinier. Entré le 12 avril 1427
comme apprenti dans l'atelier de maître Robert Campin,
il fut re<;u à la maîtrise le iS octobre 1432. et d'emblée
nommé prévost de la confrérie de St-Luc. Il eut à son
I. Il était signalé dès i865 par M. Genard. (V. Compte-rendu du
Congrès archéologique d'Anvers.)
%va\)ànx Oes Sociétés satjautes.
427
tour pour élève Jehan le Bacrele Jeune, et à son service,
comme varlet, en 1462, Hans de Strasbourg.
Appelé au loin, partout où l'on a besoin d'un talent
éprouvé, nous le voyons travailler à Bruges, à Lille, à
Arras. En 1441, il est fixé à Arras ; il séjourne longtemps
dans cette ville, où il occupe de 1446 à t458 la maison de
l'Écurie ('}. 11 reparaît à Tournai en 1459. Il y mourut en
1466, selon un renseignement que nous tenons de M. le
comte B. du Mortier. C'était, comme nous allons le voir,
un artiste de premier ordre. Il faisait à Arras des cartons
pour les hautelisses historiées. Les comptes de l'abbé du
Clercq, de Saint-Vaast ("'), contiennent cet article intéres-
sant au sujet de ses travaux.
« Item payé p.ir mondit Seigneur l'abbé, comme dessus,
à Jacques Daret, paintre, le VI I'^ jour de juillet mil IlII"
XLIX, pour ung patron de toille de couleur à destempre
contenant XI 1 aulnes de lonc et IIII aulnes de larghe
ou environ ouquel est listoire de la Résurrection Nostre
Seigneur Jhesu Christ bien pointe et figurée sur lequel
patron a esté faict un tapis de hauteliche de ladite Résur-
rection lequel patron est et a esté mis par l'ordonnance
dudit monseigneur l'abbé en la Galle quarrée. En ce
comprins XXXVI aulnes de kanevach sur lequel kane-
vach fu fait ledit patron, la somme de X.VHI livres
XV S. monnoie dite. »
On le voit collaborer dans l'Artois aux œuvres du
fameux fondeur tournaisien Michel de Gand, dont il
fournit les patrons. Ainsi, c'est d'après ses dessins que ce
dernier exécuta pour le chœur de l'abbatiale de Saint-
Vaast, un lampier, ainsi que la croix monumentale qui
s'élevait au milieu de la place de Saint-Vaast {'=). Ainsi
encore il dora la « coulombe (colonne) candeliers et
croche » servant à suspendre à l'autel du chœur de l'église
précitée la réserve eucharistique, ouvrages du même
fondeur {*).
Pendant son séjour à Arras, Daret fut appelé à Lille
pour les préparatifs de la fête du Vœu du Faisan, en
1454 (5). Voici l'extrait des comptes de ce banquet qui le
concerne :
« A Jacques Daret, aussi pointre, pour lui et quatre
varlets de mestier, qui ont ouvré audit lieu, savoir : les
deux onze jours et les autre deux dix-neuf jours auxquels
a été tansée, à savoir ; audit maistre, chacun jour, vint
sols, font XI francs ; à ses compagnons, les deux premiers,
de onze jours chacun huit sols par jour, font VIII francs,
XVI sols et les autres deux pour dix-neuf jours, a prix de
six sols par jour valent CXIIII sols. »
Avec lui furent employés Lablié et Cauntrain, « aussi
pointre demeurant à Tournai », qui y travaillèrent douze
jours au prix de 8 sols par jour.
Vers la fin de sa vie (1468), Daret se rendit à Bruges
à la tête de plusieurs autres peintres pour prendre part à
la « décoration de l'ostel de monseigneur le duc de Bour-
gogne ». Il fut taxé en cette circonstance à vingt-sept sous
par jour, somme relativement très importante, puisque la
plupart des autres artistes et ouvriers n'en gagnaient que
dix, et que Hugo \'an der Goes lui-même, malgré sa ré-
putation et son talent, n'en recevait que quatorze ("). Avec
lui travaillait un peintre nommé Massin de Tournai.
Ce maître forme un trait d'union entre l'école de Tournai
et celle d'Anvers. On trouve parmi les peintres qui tra-
1. V. A. Guesnon, Décadence des tapisseries d' Arras.
2. H. Loriquet, Note sur les tentures de hautelisse possédées par
l'abèave de Saif/t- Vaast.
3. V. C. de lÀnas, Revue de l'Art chrétien, OCX. 1885.
4. V. Jbid.
5. De Laborde, Histoire des ducs de Bourgogne.
6. L'art chrétien en Flandre, par le chan. Dehaisne.
vaillaient sous ses ordres : Jean Snellaert, Godefroy
d'Anvers, Jean Thomas, Jacques Thony, Henri Bastin,
Adrien Gerop, Luc Adrien, Jean Casyn Vinckaert, Guil-
laume Guddeman, etc., qui en 1453 contribuèrent à
l'institution et à la réorganisation de la Gilde de Saint-
Luc à Anvers (').
En 1461 Jacques Daret travaille à la peinture décora-
tive d'un des quatre personnages sculptés placés au
sommet de l'une des tourelles du beffroi de Tournai.
Cet artiste avait un frère, Danelet (Daniel) Daret, qui
commença ses études en 1432 avec lui. Il fut reçu à la
maîtrise de Saint- Luc le 10 février 1440. Il succéda à
Jean Van Eyck lui-même, en 1449 (après neuf ans de
vacation de la charge), dans les fonctions de peintre offi-
ciel du duc Philippe-le-Bon. Pinchart a reproduit l'ordon-
nance relative à cette nomination (■).
En même temps que Jacques, un Jehan Daret, peintre,
demeurant à Tournai, travaillait aux entremets de Lille
en 1454, où il était occupé avec deux varlets (').
Nous avons longuement parlé, dans notre premier
volume des Études sur l'Art à Tournai (p. 170;, du
sculpteur Jehan Daret, de son fils Martin, et de Jacques
Daret, aussi sculpteur employé à Lille en 15 16 par le duc
de Bourgogne, tous trois contemporains des peintres dont
nous venons de nous occuper, ainsi que de Oste Daret,
tailleur d'images du XVI'^ siècle.
A. Pinchart nous apprend (<) qu'un Jacques Daret, peut-
être un fils de notre Jacques, fournit en 1520 difterents
patrons à l'occasion du couronnement de l'empereur
Charles-Ouint à Aix-la-Chapelle. Il dessina notamment
le harnais du cheval monté par le souverain.
Citons en passant, à cause de la quasi similitude de
nom, Estiévenart Dare, qui en 1406 est chargé par la
Ville de « poindre et former un mapemonde de le scitua-
tion de ladite ville de Tournay, qui est confrontans aux
pays de l'empire, Hénau, Braibant et autre pays,comment
elle est environnée, les villes, pays et notables cités par
où on va et entre, et les rivières qui y sont, à quatre
journées près de ladite ville de Tournay, pour icellui ma-
pemonde baillier à maître Jacques d'Aosti par courtoisie
à lui faite. XXV S. »
Guillaume Daret, faiseur de cartes, natif de Tournai,
fils du sculpteur Martin, acheta la bourgeoisie le 4 décem-
bre 1510 ; il était arbalétrier du Grand Serment. Un autre
Martin Daret est employé comme ouvrier peintre en
146S à Bruges, aux décors exécutés pour les noces de
Charles- le-Téméraire.
Un peintre du nom de Jean Daret, né à Bruxelles, peut-
être originaire de notre pays, était établi au XVI I" siècle
à Aix, en Provence. Il peignait à la manière du Guerchin;
le musée de cette ville garde de lui des toiles qu'on dit
remarquables (").
M. G. du Plessis, dans son Dictiormaire des marques
et iiifluograiiDiies de graveurs, parle de « Jean Daret,
peintre, graveur français, travaillant en 1658, et de Pierre
Daret, né à Paris en 1610, mort vers 1675. » C'est ce que
relève Ch. de Linas C^), et il ajoute : « Les personnages en
question ne descendraient-ils pas du peintre tournaisien
Jacques Daret, ou de son compatriote l'imagier Jean
Daret, qui vivaient tous deux au XV= siècle? Vers cette
1. V. Genard, Congrès archéol. d' Anvers, 1866.
2. Pinchart, Documents relatifs au.x frères Van Eyck et à Roger
Vanderweyden. Bruscher.
3. .'\rchives du Nord. t. IV de l'Inventaire sommaire.
4. V, Archives des arts.
5. V. Messager des sciences, 1S53, p. 498 ; Bulletin archéologique,
II vol. p. 576.
6. Revue de l'Art chrétien, 1887, p. 224.
428
îRebtte lie T^it c|)rctien.
période on a des exemples d'artistes tournaisiens émigrés
h Paris, témoin l'ivoirier Jean Aiiberl.
Dans la même Société s'est soulevé à plusieurs
reprises un intéressant débat sur la question du
maintien ou de la suppression des clôtures en
style renaissance qui enveloppent le chœur go-
thique de la cathédrale de Saint-Bavon.
Tout le monde paraît d'accord pour maintenir
comme très intéressantes les clôtures ajourées,
d'un style fâcheux mais d'une grande richesse
matérielle et d'une valeur artistique sérieuse, qui
ferment les travées du rond-point. M. Van Bies-
broeck a plaidé avec une grande éloquence la
cause de ces œuvres intéressantes ; avec un talent
digne d'une meilleure cause, il a proclamé, au
surplus, l'intangibilité sacrée de la plate, froide,
énorme et affreuse enceinte de marbre noir et
blanc qui constitue la partie antérieure de cette
clôture, et fait retour sur le devant du chœur ;
ce mur aveugle, sans aucun mérite artistique
en lui-même, constituant esthétiquement une
monstruosité, qui enveloppe les colonnes du
chœur, s'élève jusqu'au-dessus des chapiteaux
et soustrait aux yeux la superbe ordonnance d'un
des plus beaux chœurs gothiques qu'on puisse
voir. Nous nous étonnons de voir un homme de
goût comme M. Van Biesbroeck prendre la dé-
fense de cette aberration architecturale. Il est
vrai qu'il a pour lui tous les suffrages des
archéologues gantois ; c'est selon nous un triste
symptôme de l'esthétique courante.
L. C LOQUET.
Société des Mélophiles de Hasselt. 36« v.
Hasselt, 1900. — • F. Straven donne une Notice,
historique sjn-l'cglise de St-Gangulphe à St- Trond.
Cette église est une de celles qui furent édifiées
par l'abbé Adéiard II ; elle fut érigée en paroisse
en 1133. M. Straven a recueilli sur l'église et la
paroisse une ample moisson de renseignements,
dressé une liste des curés depuis le XIII*= siècle
et publié dix-sept épitaphes conservées dans la
collection de tombes du baron de Herckenrode, ou
dans le recueil confectionné en 1698 par le notaire
Van de Walle. Il est à regretter que, sauf pour les
épitaphes, M. Straven néglige complètement d'in-
diquer la source où il a puisé ses renseignements.
(V. Arcliives historiques^
^^^^^.0)t ^ ^ .^ ^,^^J^ :^^ ^ ^ ^^^ ^ :^^ ^ ^^ ^^, ^ -^^ ^
'lu
^:§Kg5^©s©^§K©^®i© BiMiogvapJ)ie. ^^sk^^^k©^©^^©^
IGLESIAS ESPANOLAS DEL SANTO SEPUL-
CRO. LA VERA CRUZ Y EUNATE, par D. E.
Serrano Fatigati {La Ilicstracion espaTiola y ame-
ricaita, 1900, N° 13).
SEGOVIA. PORTIGOS DE SUS IGLESIAS
ROMANICAS, par le même {La Llustracion espai'wla
y aiiui'icafui, igoo, N° 20).
^ra^^^i^^ ne reste plus en Espagne que deux
« églises édifiées pour rappeler celle
% du Saint-Sépulcre de Jérusalem.
% Toutes les deux semblent remonter
èt^WS^4^ à la fin du XII« siècle. L'une s'ap-
pelle la Vera-Crn:: et se voit à Ségovie ; l'autre,
qui porte le nom à'Einiate, est située près du
village de Muzurabal, dans la Navarre. Ces deux
églises sont soigneusement décrites par M. D.
E. Serrano Fatigati et son article comporte
d'excellentes figures (ensemble et détails).
Mêmes qualités d'illustration et de rédaction
dans l'article consacré aux portiques ou sortes de
cloîtres extérieurs qui longent un côté des églises
de Ségovie. La galerie de San Millau a été
publiée par Gailhabaud {L'architecture et les arts
giii en dépendent, t. 1'='^), et dernièrement M. G.
Rohault de Fleury a fort bien reproduit par
l'eau-forte celle de San Esteban {Les Saints de la
messe et leurs monuments, t. V).
E. R.
LE LIVRE DE LA PRIERE ANTIQUE, par le
R. P. Dom F. Cabrol, bénédictin de Soiesmes, prieur
de Farnborough (Angleterre). — In-12, XVII-573PP.
Paris, Oudin, 1900.
VOICI un titre qui étonnera plus d'un lec-
teur de la Revue, accoutumé aux comptes-
rendus d'ouvrages d'art et d'archéologie. Dus-
sions-nous les étonner davantage encore, nous
leur dirons que le volume annoncé est, en réalité,
un des plus utiles qu'ils puissent consulter.
L'art religieux, aux différentes époques, s'est
assez inspiré de la Liturgie, pour que tous ceux
qui étudient les monuments chrétiens, petits et
grands, aillent également puiser aux sources
vivifiantes de cette Liturgie catholique et connais-
sent l'usage qu'elle fait de la Bible, l'agencement
de ses prières et de ses fêtes, la genèse des livres
qu'elle emploie (Missel, Bréviaire, Pontifical,
Rituel, Cérémonial des évêques et Martyrologe),
le culte qu'elle rend à Notre-Seigneur et aux
Saints, la direction qu'elle imprime à l'architec-
ture et à la construction des églises. Tout cela, et
bien d'autres choses encore, est expliqué par
l'auteur, avec une science consommée du sujet
et, cependant, dans un style sobre et clair qui
fait de ce travail un livre à la portée de la masse
des lecteurs. Ajoutons que les indications biblio-
graphiques sont nombreuses et les sources bien
indiquées.
Je signalerai d'une façon particulière le chapi-
tre VII'î : Une messe à Rome, au commencement
du HI^ siècle ; le VIII<= : Les attitudes durant la
prière, les gestes liturgiques, le signe de la croix ;
le XIX^:/:*? Christ, centre de la Liturgie ; le XX= :
La Vierge Marie dans la Liturgie ; le XXI"^ : le
culte des martyrs, des apôtres, des confesseurs et des
vierges ; le XXII° : la maison de Dieu: le XXI ¥*=;
sanctification des éléments {Veau, L huile, le sel, les
cendres, le feu et les lumières, l'encens, les cloches).
Bien d'autres chapitres seraient à mentionner.
Dans chacun d'eux, on trouvera lumière pour
l'intelligence, nourriture pour l'âme, réconfort
pour le cœur, — sans compter que, des prières
antiques publiées par l'auteur et des belles expli-
cations qu'il en donne, se dégage un parfum
d'une vigueur et d'un charme tout particuliers.
L'ouvrage de Dom Cabrol a paru en 1900 et,
avant la fin de la même année, l'éditeur publiait
le troisième mille. Rien n'était à changer, semble-
t-il, dans les volumes du premier tirage, sauf un
certain nombre de fautes dans les textes grecs ;
la plupart ont été soigneusement corrigées dans
le troisième mille. — L'écoulement si rapide de
la première édition d'un livre si excellent, sérieu-
sement conçu et fort documenté, présage un
magnifique succès pour l'ouvrage, en même
temps qu'il prouve que, dans notre société, en
apparence bien frivole, se trouve encore bon nom-
bre de personnes qui savent goûter la solide piété
unie à la vraie érudition.
G. A.
HISTOIRE DE L'ÉGLISE SAINT-BÉNIGNE
DE DIJQN, par l'abbé L. Chomton, chanoine hono-
raire de Dijon et de Nantes. Dijon, imprimerie et
lithographie JODARD, MDCCCC. Un vol. in-4°de47o
pages, avec trente planches hors texte.
Mie chanoine Chomton donne enfin au
public cet ouvrage important, fruit de
longues années de travaux documentaires pa-
tiemment poursuivis à la bibliothèque publique
de Dijon, aux archives départementales, et
sans cesse contrôlés par l'étude du monument
lui-même. L'œuvre me paraît être la plus consi-
dérable qui, depuis les anciçns bénédictins, ait été
publiée sur l'histoire religieuse de la Bourgogne;
j'ajoute que par la science des textes, la méthode, '
le style toujours grave mais aisé, sans dogma-
tisme comme sans recherche, le Saint-Bénigne
est digne de la science bénédictine ancienne et
moderne. L'auteur s'y montre fidèle aux métho-
des éprouvées du passé, mais il sait aussi profiter
de l'expérience du présent, avec cette probité du
savant qui ne veut rien ignorer ou écarter des
éléments de son sujet. Si le mot définitif avait
une signification absolue en ces matières, je
l'emploierais ici ; je me contente d'affirmer que i
les découvertes peu probables, possibles après
tout, de l'avenir, ne feront pas fléchir les grandes
lignes d'un tel livre ; que tout au plus la mise au
jour de quelque document ignoré pourra modifier
sur quelque point de détail une parole.une déduc-
tion, affaiblir un anneau de l'argumentation la
plus serrée et la plus libre. J'insiste sur ce dernier
point ; un tel livre, écrit par un prêtre, ne peut être
tout d'abord qu'un acte de foi. Mais ayant à dis-
cuter des contingences historiques, des traditions,
des faits qui ne touchent ni au dogme ni à l'es-
sence même de la croyance ; ne cherchant parmi
les ténèbres lointaines que la vérité ou cette demi-
certitude qui en est la seule image réelle en his-
toire, M. le chanoine Chomton a traité toutes les
faces de son sujet avec une indépendance d'esprit
entière autant que respectueuse.
La critique s'exerce surtout dans l'introduction
consacrée au récit du martyre de S. Bénigne, à
ses actes, comme on dit dans le langage ha-
giographique. Avec un sens très droit, l'auteur
dépouille la vie de l'apôtre bourguignon de tou-
tes les adjonctions légendaires. Pour lui, l'Au-
relianus des Actes n'est ni Marc-Aurèle —
j'en suis bien aise pour le grand empereur stoï-
cien — ni ce rude soldat qui fut Aurélien ; l'Au-
relianus du cycle bénignien serait plutôt un
nom type que l'on retrouve souvent dans les actes
généralement rédigés vers le V*^ siècle. Peut-
être les déductions permettent-elles de pla-
cer sous Caracalla, pendant le fastueux voyage
qu'il fit dans les Gaules, le martyre et la mort de
S. Bénigne; mais, et une telle modestie n'appar-
tient qu'aux vrais érudits, l'auteur ne risque au-
cune conclusion positive. «C'est agir sagement,
dit-il, c'est faire œuvre de critique, que de conser-
ver ces vieux documents, si défectueux qu'ils
soient, dans ce qu'ils offrent de vraisemblable, et
d'attendre que le jour se lève sur ces ténèbres,
grâce à une inscription qui surgira du sol. Alors,
peut-être, aura-t-oii le mot de l'énigme. »
Compris encore dans Y Introduction, le chapitre
qui suit est intitulé : Origines de Dijon. Ce n'est
ni un récit continu, ni un tableau d'ensemble ;
divisé en sous-chapitres, ayant chacun son inti-
tulé, il se présente plutôt comme un assemblage
de courtes monographies historiques et descrip-
tives conduisant les annales dijonnaises de la
naissance obscure et incertaine de Divio à la
réunion de la Bourgogne à la France, après l'ex-
tinction de la seconde race ducale.
Le chapitre I'^''est consacré à la Première basi-
lique bâtie au VI'= siècle par S. Grégoire, évêque
de Langres, et à la fondation de l'abbaye, la se-
conde en ancienneté, la première en dignité des
quatre abbayes mérovingiennes de l'ancien dio-
cèse de Langres. L'auteur nous dit les libéralités
du roi Gontran ; l'institution du Laus pcrennis ;
la consécration de l'abbaye à S. Maurice comme
second patron ; les invasions, les ruines maté-
rielles et morales, les spoliations princières. Enfin
il décrit d'après les documents cette ancienne
basilique disparue dont quelques vestiges se
voient encore dans la crypte, un des plus anciens,
un des plus vénérables monuments de la France
du Nord.
Au chapitre II, surgit la grande figure de l'abbé
Guillaume ; elle est très haute, très noble, faite à
la fois de rigueur et de charité, rigueur pour les
religieux et pour lui-même, surtout pour lui-même,
charité, douceur infinie pour les pauvres et les
humbles. Joignez-y la hardiesse devant les prin-
ces et les puissants, et vous aurez le portrait du
grand abbé dont le labeur, l'intelligence et la
vertu un peu âpre firent refleurir non seulement
à Saint-Bénigne, mais encore en maintes maisons
religieuses, la pure règle de S. Benoît à demi
tombée dans la négligence et l'oubli.
L'abbé Guillaume fut le constructeur de la
seconde église, celle du XI*' siècle, et de la roton-
de à trois étages dont un souterrain, qui la pro-
longeait à l'Est. La restitution qu'en donne M. le
chanoine Chomton est aussi satisfaisante qu'in-
génieuse, et rien d'aussi complet n'a été publié
sur ce sujet jusqu'à ce jour.
Le chapitre III est consacré à Saint-Bénigne
pendant la grande période romane ; là paraissent
deux des hommes les plus remarquables de l'his-
toire abbatiale, les abbés Halinard et Jarenton.De
grands travaux de construction furent exécutés
dans cette période, notamment après l'incendie
de Dijon en 1137 ;jeme borne à signaler un fait
peu connu, l'écroulement de la tour centrale de
l'église vers 1 100, événement qui, avec des consé-
quences plus graves, se reproduira en 1 271. Cette
tour était certainement établie en porte-à-faux;
mais l'expérience de 1 100 fut perdue pour les nou-
veaux constructeurs qui préparèrent ainsi une
nouvelle catastrophe ; du moins celle-ci se fit-
elle attendre plus d'un siècle et demi.
C'est aux réfections auxquelles donnèrent lieu
les dommages causés par le grand incendie de
1 137, que remontent le narthex qui prolongea
d'une travée environ l'église romane à l'Ouest, et
Btbltograplîle,
431
l'ample imagerie du portail dont la beauté ne
nous est plus connue que par une ancienne gra-
vure, mais est attestée par le style ornemental
des bases encore en place. Cette page magnifique
d'art chrétien, comparable, semble-t-il, à ce que
l'on voit de plus beau à Vézelay, à Autun et à
Moissac, a été exterminée sous le proconsulat ré-
volutionnaire du représentant Bernard de Saintes.
On a conservé du moins les tympans des deux
portes secondaires, celle du réfectoire, qui montre
une très intéressante représentation de la Cène et
celle du cloître, où l'on voit le Christ bénissant
entouré des symboles évangéliques. Ces deux
précieux morceaux sont au musée delà Commis-
sion des antiquités à Dijon.
On lira avec intérêt le tableau de la vie mo-
nastique à Saint-Bénigne pendant cette période;
c'est une véritable résurrection, mais sans rien
d'oratoire. M. le chanoine Chomton cherche la
vérité, non le pittoresque et ce n'est pas un ro-
mantique attardé, toujours porté à sacrifier l'exac-
titude à l'effet des mots ou à la couleur. Le
chapitre se termine à la seconde chute de la
tour centrale, survenue le 14 février 1271, et qui
consomma la ruine définitive de l'édifice roman.
Le I V^ chapitre a pour objet: L Eglise ogivale,
œuvre de l'abbé Hugues d'Arc. L'étude de ce mo-
nument, encore debout et à peu près intact.donne
à l'auteur l'occasion d'exprimer ses idées sur l'art
ogival. Selon lui, les architectes du XIII<^ siècle
ont trop méconnu la valeur des lignes horizon-
tales en architecture et tout sacrifié aux éléments
vertigineux en hauteur. Il y a du vrai dans cette
observation appliquée à certains édifices où,
comme dans la cathédrale de Beauvais, le maître
de l'œuvre a volontairement altéré toute échelle
humaine en verticale et conçu un édifice qui
paraît fait pour des êtres d'autre taille que la
nôtre. Mais des églises du même style, notam-
ment les cathédrales deStrasbourg et deChartres,
ont des proportions différentes, et, comme ce
sont, la seconde surtout, des chefs-d'œuvre de
l'art ogival, on en peut conclure que l'exagération
dans la verticalité des lignes n'est pas inhé-
rente au XII h' siècle. Le défaut de Saint-Bé-
nigne, selon moi, et c'est par là qu'il me paraît
fort inférieur à sa voisine et aînée, Notre- Dame de
Dijon, est surtout dans ceci que les arcs prennent
leur point d'appui beaucoup trop haut. Il en
résulte quelque chose de démesuré, de fatigant
pour l'œil dans les longues lignes rigides sans
ressaut, de la croisée.Le chœur n'en est pas moins
un beau morceau, et il est fâcheux que le style
fléchisse dans le transept pour décliner tout à
fait dans la nef. L'auteur établit un parallèle
entre la cathédrale Notre-Dame et l'église abba-
tiale Saint-Nicaise de Reims ; mais ici nous
sommes un peu dans le domaine des hypothèses,
puisque la seconde, <L la perle de Reims », comme
on disait il y a un siècle et demi, a été détruite
à la Révolution et que la façade nous en est
seule connue par l'image du grand portail qui
figure dans une gravure fort rare de 1625, signée
A^. de Son, Rémois. Contrairement aux- habitudes
des dessinateurs du temps, le style du monument
est parfaitement compris et nous pouvons appré-
cier pleinement la perte irréparable qu'ont faite
l'art et la ville de Reims par la destruction d'un
tel chef-d'œuvre. On a transporté à la cathédrale
la pierre tombale de l'architecte, Hugues Liber-
gier, un nom à mettre parmi les plus grands de
l'art médiéval, de l'art tout court.
M. le chanoine Chomton décrit ensuite la
châsse de S. Bénigne, les modifications apportées
au inartyi'iu/n,en(in les tours de la façade occiden-
tale ; Viollet-le-Duc déclare celles-ci d'un pauvre
style, ce à quoi je ne contredis pas ; toutefois
telle est la vertu de cet art admirable du moyen
âge, que, même dans ses œuvres inférieures, il se
montre encore imposant, monumental et noble.
Sur la tour du Sud régnent deux frises dont l'une
présente de belles sculptures, figures et feuillages
stylisés.
Telle est à Saint-Bénigne la pauvreté orne-
mentale de la nef, que l'on s'est demandé si les
bénédictins n'avaient pas eu l'idée saugrenue,
et en partie réalisée, d'épurer leur église en raclant
soigneusement toutes les saillies, chapiteaux
feuillages et moulures, selon les doctrines pro-
fessées par l'abbé Laugier dans son livre, Oâ-
servations sur V architecture, Paris, 1765. Seule-
ment l'opération sacrilège n'aurait pas dépassé
la nef. Naguère le fait était accepté sans con-
testation ; mais par des raisons géométrique-
ment déduites de l'étude du monument, l'auteur
contredit formellement M. l'abbé Bougaud, mort
en ce siècle évêque de Laval, qui, l'un des pre-
miers, avait affirmé le prétendu vandalisme mo-
nacal. Peut-être l'absence de documents écrits
n'est-elle pas en soi une preuve absolument con-
vaincante; ce qui a plus de force, c'est l'étude
minutieuse, épidermique pour ainsi dire, qu'a
faite du monument M. le chanoine Chomton. On
pourrait dire aussi que cet aspect veule, sucé des
moulures, qui impressionne si désagréablement
dans le beau vaisseau de Saint-Bénigne, se re-
trouve dans les baiesdes tours,qued'autreséglises,
pauvrement construites, présentent les mêmes
misères ornementales, par exemple, Saint-Jean
Baptiste de Chaumont. Enfin, et ceci paraît pé-
remptoire, l'œil des gens du métier ne reconnaît
nulle trace de parties ainsi rabotées ; sur ce point,
l'examen auquel ont permis de se livrer les tra-
vaux en cours d'exécution, dans le collatéral du
Nord, donne raison à M. le chanoine Chomton.
Je passe sur les notices biographiques, dont la
432
îRebue lir T^rt cl)rétten.
principale est assurément celle du roi de Pologne,
Wladislas le Blanc, mort sous le froc à Saint-
Bénigne, après une vie qui serait un invraisem-
blable roman d'aventures. Le temps me presse
et je ne puis tout dire ; je mentionnerai seulement
des articles : sur le trésor, pour lequel l'auteur fait
des emprunts loyaux à un savant volume, publié
à Dijon en 1874, — Le Trésor de l'abbaye St-
Bénigne de Dijon, — par M. Bernard Prost, ins-
pecteur général des archives et bibliothèques ;
sur la vie littéraire à Saint-Bénigne ; sur la fon-
dation de nouvelles chapelles ;sur l'iconographie
de St-Bénigne ; sur les rouleaux des morts, ces
manuscrits de circulation par lesquels les com-
munautés religieuses se notifiaient entre elles les
décès de leurs membres ; enfin, sur les travaux
exécutés à la fin du XV'' siècle et au commen-
cement du XVI«, dont le principal est la flèche
dorée que l'abbé Claude de Charmes dressa
au-dessus de la croisée pour remplacer, plus riche
et plus haute, celle que la foudre avait détruite
en 1506.
Le chapitre V, Saint-Bénigne sous la coin-
viende, montre dans le premier des abbés
commendataires, Frédéric Frégose, un prélat
digne de porter la crosse de l'abbé Guillaume.
L'église lui dut une décoration importante, la
réfection des stalles, œuvre d'un menuisier, c'est-
à-dire d'un sculpteur en bois, originaire de
Troyes, Jean Boudrillet, qui fut le maître et le
beau-père du Comtois Hugues Sambin, venu de
Gray à Dijon, où il se fixa et y devint l'homme
universel dans les arts. Commencées en 1528,
terminées en 1535, les nouvelles stalles étaient
« à l'antique» ; c'est-à-dire de ce goût charmant
oîj, dans la plus heureuse dissonance, l'art con-
fond les anciennes et les nouvelles formes. Les
stalles de Saint-Bénigne devaient donc être en
bois ce qu'est en pierre la partie inférieure du
portail de l'église Saint-Michel de Dijon, œuvre
très ornée et datée de 1537, mais que M. le
chanoineChomton attribue un peu témérairement
à Hugues Sambin qui, par les dates connues de
sa vie, comme par la nature de son talent, est
un homme de la seconde Renaissance et non de
la première. On peut admettre à la rigueur que,
comme l'assure la tradition, à la vérité dénuée
de toute preuve documentaire, Sambin soit
l'auteur des tours de Saint-Michel et de toute la
partie au-dessus des trots grandes baies infé-
rieures. Mais celle-ci est encore trop à demi go-
thique pour appartenir à un artiste dont les
œuvres authentiques, monuments ou livres, sont
d'un style tout différent.
Les guerres de religion amenèrent, en 1566, la
spoliation du trésor, et, de par la volonté royale,
furent envoyées à la fonte des merveilles faites
d'un peu de métal précieux et de beaucoup d'art.
Ce vandalisme a sévi de tout temps en France
et on sait quelles misérables ressources financières
il a produites. Au commencement duX\'1 1 'siècle,
la bibliothèque janinienne, ainsi nommée de
l'abbé Nicolas Jeannin, le fils du grand ministre
de Henri IV, et dont les manuscrits avaient été
inventoriés par un érudit dijonnais, Paul Dumay,
fut en partie dispersée dans des conditions
demeurées obscures. Sous le neveu et successeur
de Nicolas Jeannin, Nicolas de Castille, il fut
question de séculariser Saint-Bénigne, qui serait
devenu la cathédrale d'un nouveau diocèse dé-
membré de celui de Langres. Mais la résistance
de l'évèque de Langres fit échouer la tentative ;
on se contenta, en 1651, d'introduire dans l'ab-
baye la réforme de Saint-Maur.
En 1625 la foudre avait détruit la flèche de
Claude de Charmes, aussitôt remplacée par une
aiguille de style moderne, qui dura jusqu'au
17 août 1738. Renversée alors par un cyclone,
on éleva une haute flèche ardoisée d'une pauvre
structure, qui, avec des modifications assez mal-
heureuses, dura vacillante jusqu'à la fin du
XIX<= siècle. Le XVIHe avait vu reconstruire la
plus grande partie des bâtiments claustraux et
réunir la mense abbatiale à l'évéché de Dijon
créé en 1731, toutefois sans diminution de la
conventuelle.
Le chapitre VI, Saint-Bénigne et la Révolution,
n'est pas moins intéressant, mais toute cette
partie de l'histoire du monument a été fouillée
dans ses profondeurs et l'inédit est moins abon-
dant que dans les autres. Sans doute on connais-
sait déjà, on n'en relira pas moins avec un amer
regret l'histoire de la démolition de la rotonde
en 1791, un des actes du vandalisme le plus
stupide, le plus parfaitement inutile que l'on
puisse imaginer. Disons pourtant, à la vérité la
consolation est mince, qu'il souleva l'opposition
indignée de tout ce que Dijon comptait alors
d'hommes intelligents et soucieux de la beauté
comme de la dignité de leur ville. Dans l'église,
le jubé, les stalles de Boudrillet, les clôtures en
pierre hérissées de pinacles sculptés auxquelles
elles s'adossaient, disparurent sans laisser de
trace ; nous n'en avons même pas un dessin.
Le chapitre VII a pour titre : U Église cathé-
drale. On y rencontre l'histoire navrante des
travaux de soi-disant restauration dont le mo-
luiment a été la victime pendant le XIX= siècle
presqu'entier. Sous l'Empire, on accommoda en
gothique, et quel gothique! la grande porte occi-
dentale exterminée par le marteau révolution-
naire ; mieux eût valu cent fois, comme à Notre-
Dame de Dijon, laisser visibles les plaies faites
au monument. On y encastra, mais en l'augmen-
tant des deux côtés, ce à quoi il n'a pas gagné,
le bas-relief exécuté en 1720 pour l'église Saint-
Btl)liograpl)ie,
433
Etienne par le sculpteur Jean-Baptiste Bouchar-
don, aidé de son fils Edme, alors âgé de vingt-
deux ans. Sous la Restauration, Mgr de Bois-
ville permit l'entrée au musée des deux retables
en bois sculpté et doré provenant de la Char-
treuse, et qui sont l'œuvre du sculpteur flamand
Jacques de Baërze ; on sait que l'un d'eux a con-
servé ses peintures extérieures dues à Melchior
Broederlam, peintre du duc de Bourgogne, Phi-
lippe le Hardi ; au témoignage de M. Waagen,
ces panneaux sont l'œuvre capitale de l'art fla-
mand, dans les toutes dernières années du XIV^
siècle. En 1857, sous le long et exemplaire
épiscopat de Mgr Rivet, la découverte de l'étage
souterrain de la crypte, où se rencontrèrent les
restes du tombeau de S. Bénigne, amena la
restauration, aujourd'hui terminée, du sanctuaire
le plus vénéré de la Bourgogne. Mais tout aussi-
tôt il fut irrémédiablement gâté par la planta-
tion parmi la double précinction de colonnes,
de deux gros massifs en pierre de taille, destinés
à supporter le poids de la nouvelle sacristie. On
aurait pu placer celle-ci ailleurs et mieux ; mal-
heureusement la volonté de Mgr Rivet prévalut
sur celle des archéologues et des architectes,
même sur celle de Viollet-le-Duc.
La fin du XIX«^ siècle a vu restaurer encore
une fois, mais par des mains autorisées et sa-
vantes, celles de M. Charles Suisse, architecte
en chef des monuments historiques, le chœur
et les quatre piliers de la croisée. Le nouveau
sanctuaire fut inauguré pour les fêtes de Noël
1892 ; à 7 heures du soir, les ouvriers besognaient
encore pour achever la réédification du maître-
autel ; à 10, les cloches, sonnées à toute volée,
appelaient à Saint-Bénigne le clergé et les fidèles
à l'office de minuit. Quatre ans plus tard s'élevait
la nouvelle et belle flèche du transept, œuvre de
M. Charles Suisse, secondé par M. Monduit de
Paris, pour l'exécution des statues et de l'orne-
mentation en cuivre repoussé, et par MM. Billet,
charpentier,et Chaussenot, serrurier, l'un et l'autre
de Dijon. L'autel, si mal placé en 1802 au centre
de la croisée, a été reporté dans la première
travée du sanctuaire ; beaucoup ont regretté
alors qu'on ne lui eût pas rendu sa place primi-
tive sous la rose feuillagée qui réunit et scelle
les nervures du chevet. On trouve aussi que
les belles boiseries du XVII« siècle — et non de
la Renaissance, comme le dit par inadvertance
l'auteur — provenant de l'église cistercienne de
la Charité près de Vesoul,ont perdu à être divi-
sées de manière à former des panneaux s'inscri-
vant isolés et trop sagement entre les piliers, au
lieu de former un ensemble continu.
Il reste encore beaucoup à faire à Saint-
Bénigne, ne fût-ce que pour la simple consolida-
tion d'un édifice dont les fondations ont été mal
établies aux XIII^ et XIV^ siècles ; le collaté-
ral du Nord est livré en ce moment aux ouvriers
qui, avec une lenteur prudente et sous la direction
de M. Charles Suisse, opèrent pièce à pièce, pierre
par pierre, le remplacement d'un appareil disso-
cié et croulant. Quand ces travaux seront termi-
nés, il restera à guérir la vieille église des plaies
que lui ont faites les architectes vandales de la
première moitié du XIX^ siècle, notamment aux
pignons du transept. Dans celui du Sud, on aura
une inqualifiable sottise à réparer ; il y a une
trentaine d'années, en effet, alors qu'était singu-
lièrement relâchée la tutelle des édifices diocé-
sains, j'y ai vu apparaître, à l'intérieur, les restes
d'une très belle porte à feuillages sculptés et
peints. J'espère que les maçons se sont contentés
de voiler, sans le détruire ce morceau qui était
dans le style d'une très belle clé de voûte déposée
aujourd'hui au musée archéologique et qui de-
vrait reprendre sa place dans la chapelle du
Saint-Sacrement oil elle est remplacée par un
misérable oculus en verre dépoli ; je m'associe
pleinement, sur ce point comme sur tant d'autres,
au vœu exprimé par l'auteur qui est un artiste
autant qu'un érudit. Les musées archéologiques
sont des cimetières, aussi nécessaires sans doute
que les cimetières d'hommes.mais où nousn'avons
que les débris de ce qui a eu corps et vie autre-
fois, disjecti inembra poetae. Lamartine n'aimait
pas les musées tout court, et son imagination
sentait ce qui leur manque pour donner cette
sensation artistique complète reçue seulement
des objets demeurés en la place pour laquelle
ils ont été faits. Sans aller peut-être aussi loin
que le poète, on éprouve dans les musées archéo-
logiques cette impression un peu déconcertante
que donnent les fossiles étiquetés sur les tablettes
d'un muséum.
J'en reviens au livre de M. le chanoine Chom-
ton et je conclus en disant que cette œuvre lente
— je prends ce mot dans le meilleur sens, bien
entendu — est d'une science à décourager ceux
qui se mêlent d'écrire sur l'histoire locale. Rien,
ici, je l'ai dit, d'oratoire, de grandiloquent, de pit-
toresque, et cependant on lit l'ouvrage entier
avec l'intérêt le plus soutenu, le plus captivé.
Seuls, peut-être, les érudits purs et les liturgistes
interrogeront l'appendice tout en pièces justifica-
tives et en nomenclatures établies de la manière
la plus rigoureuse, qui ne comprend pas moins
de 123 pp.; le corps même du livre est accessible
à tous. En 1892, lors de la cérémonie inaugurale,
j'ai entendu ce cri jeté à la vue de Saint-Bénigne
restauré : « Je ne le croyais ni si grand ni si
bien ! » Eh bien ! il n'est lecteur de cet excellent
livre qui ne le fermera sans se dire qu'il ne croyait
pas notre vieille abbatiale si insigne par la
REVUE DE l'art CHRÉTIEN.
I901. — 5"° LIVRAISON.
434
jElcbuc De rsâvt (l)vcticiu
beauté et la grandeur des souvenirs religieux,
historiques et artistiques.
Trente planches en lithographie ou photogra-
phie, plans, restitutions, vues perspectives et d'en-
semble, forment hors texte le complément, le
commentaire graphique du texte. Dans les res-
titutions d'après les documents écrits, de ce qui
a péri sans retour et sans laisser de trace, il y a
toujours une part d'hypothèse ; la preuve en est
que les meilleurs archéologues ne s'entendent
jamais sur la traduction par le crayon de la
description la plus minutieuse. Il en est ainsi
pour la Minerve du Parthénon, le char funèbre
d'Alexandre, la villa de Pline à Laurentum, le
temple de Salomon, et, dans les temps chrétiens,
des belles basiliques détruites, par exemple, celle
de Saint-Martin de Tours, je parle bien entendu
de la basilique mérovingienne. La raison en est
très simple : ceux qui ont décrit ces œuvres du
passé étaient des historiens, des lettrés, non des
artistes et des géomètres. Il faut donc laisser
une certaine part à l'imagination servie par l'éru-
dition, comprendre surtout que, et c'est ici une
observation très générale, si notre conception
archéologique des choses nous paraît meilleure
que celle de nos prédécesseurs, les érudits de
l'avenir en auront, à coup sûr, une autre, et qu'ils
croiront meilleure que la nôtre. A tout prendre,
en l'état de la science, j'estime qu'il est difficile
de ne pas accepter dans leur ensemble les resti-
tutions de M. le chanoine Chomton ; je fais bien
volontiers abstraction des détails sur lesquels on
peut formuler des réserves. Ainsi, je présenterai
une critique minuscule, mais très nette au sujet
de la pi. XIV, Le tombeau de saint Bénigne de
1016 à 102S; la porte d'accès du viartyrium
présente un linteau horizontal beaucoup trop
faible pour supporter le poids du plein au-dessus.
J'ajoute, pour descendre à un détail infinitésimal,
que l'arcature qui porte la châsse devrait être
extradossée, ce que n'indique pas le travail du
crayon. Dans la pi. XVI, Le tombeau de saint
Bénigne aux XII' et XIII' siècles, l'autel placé
aux pieds est trop saillant et j'ai des doutes sur le
gradin portant le Crucifix entre deux fîambeaux.
J'en ai également sur cette succession de gables à
trilobés en plein cintre, qui orne le coffre même,
de la châsse. Ce sont là des minuties, et, en défi-
nitive,je suis heureux de pouvoir dire que l'exécu-
tion des dessins inspirés de près par M. le cha-
noine Chomton, fait honneur à M. Louis Chapuis,
de Dijon. L'ensemble constitue une véritable
monographie monumentale de Saint-Bénigne à
travers les âges ; toutefois, je regrette de ne pas
y rencontrer le beau tympan de la porte du
cloître, le Christ entouré des symboles évangé-
liques, et la clé de voûte, au feuillage poly-
chrome, dont il a été parlé plus haut. Par contre.
voici, pi. XVII, celui du réfectoire, dans lequel
M. Edouard Didron,qui connaît si bien dans ses
profondeurs l'iconographie du moyen âge, voit
une des plus précieuses et des plus anciennes re-
présentations qui existent de la Cène dans la
sculpture occidentale. J'appelle aussi l'attention,
même page, sur la tête mutilée de saint Bénigne ;
c'est tout ce qui subsiste de la statue du trumeau
de la porte occidentale, et par la grandeur du
style on peut rapprocher ce morceau de certaines
statues de Chartres, au porche septentrional ;
elles sont de la même époque, c'est-à-dire des
dernières années du XII^ siècle.
Il me reste à parler de la présentation typo-
graphique de tous points excellente. Iinprimé
en beaux caractères sur deux colonnes, le texte
est la perfection même et fait honneur à la
maison Jobard, de Dijon, à qui appartient aussi
l'impression lithographique des dessins de
M. Louis Chapuis.
Henri Chabeuf.
L'ARTE DI BENVENUTO GELLINI. par
J. B. SupiNO, conservateur du Musée national du
Bargelio. — Florence, Alinari, éditeur, igoi.
B'
ENVENUTO Cellini est l'un des artistes
italiens dont on parle le plus... sans con-
naître ses ouvrages, sauf le Persée.
Comme sculpteur, il a fait le Persée très discu-
table, deux bustes et la nymphe dite de Fontai-
nebleau conservée au musée du Louvre.
Comme orfèvre, il a fait une quantité de pièces,
toutes perdues sauf sa salière du trésor de Vienne,
très discutable aussi.
Cela n'empêche pas qu'on le proclame le roi
des orfèvres du XVI^ siècle !
De ses dessins il n'en reste pas un seul.
A quoi donc tient cette étonnante popularité ?
D'abord aux propres écrits de Cellini dans
lesquels il a su, comme personne, se tailler une
réclame.
Puis à ses aventures, fort peu édifiantes du
reste.
Puis aux poésies, aux drames, aux images qui
l'ont pris pour objet.
Mais, enfin, un orfèvre qui a reçu des com-
mandes des papes, des rois, des patriciens, devait
certainement être de premier ordre dans son
art, on ne peut en douter.
Après d'autres écrits sur Benvenuto Cellini,
M. J. B. Supino vient de publier un nouveau
travail chez M. Alinari, qui ne se contente pas
d'être le premier photographe de l'Italie, mais
qui prend rang parmi les premiers éditeurs de
livres d'art de son pays.
Btbliosrapl)ie.
435
L'érudit M. Supino met au point juste la
personnalité de Cellini, comme homme et comme
artiste.
Il l'a fait avec compétence et indépendance,
sans l'ombre d'adulation.
Il a annexé au volume l'inventaire inédit de
VArgenteria de \di gitarda robe du grand-duc de
Toscane, François I", dressé en 1587, en ne
mentionnant que les pièces ayant un caractère
d'art.
Dans la nomenclature il n'y a rien de Ben-
venuto Cellini, ce qui montre une fois de plus
qu'aucun des objets, intéressants du reste, con-
servés dans \' Argeiiieria du Palais Pitti, n'est
de lui ; ils proviennent d'orfèvres italiens et
allemands qui probablement ont été inspirés par
l'œuvre de Benvenuto Cellini.
Gerspach.
le salairk dk la trahison de judas.
LE CRUCIFIX. — Broch., Imprimerie marseillaise,
igoi.
L'AUTEUR anonyme de cette plaquette est
pénétré de l'idée, que trente deniers auraient
constitué un salaire insuffisant pour la trahison
de Judas, étant donnée la rapacité probable de
riscariote et l'opulence des Juifs acharnés contre
le Sauveur. Il s'efforce d'établir que les deniers
traditionnels doivent avoirétédes talents d'argent.
Il accumule autour de cette thèse quantité d'argu-
ments tendancieux, dont aucun n'est péremptoire.
Le principal est faux : on se sera trompé sur la
valeur du prétendu denier, puisqu'on s'est trompé,
à la Renaissance, sur la figuration du crucifiement.
Le Saint-Voult nous est témoin, dit l'auteur,
que le Christ fut mis en croix vêtu de la tunique ;
ce n'est qu'à la Renaissance qu'on a supprimé la
tunique.
Rien de tout cela ne se tient. A part le type
exceptionnel du Saint-Voult, les crucifix les plus
anciens offrent le colobium ; dès l'époque romane
apparaît \ç. perizoïiiiun ; la Renaissance n'a rien
innové quant au costume.
La question du denier reste entière ; l'auteur
ne semble pas l'avoir avancée d'un pas ('). Toute-
fois son opinion paraît très plausible. Elle a déjà
été développée, et d'une manière beaucoup plus
probante, par M. F. de Villenoisy {-), dans un
travail qu'il aurait dû consulter, ainsi que les
études de M. de Mély (3) et de Mgr X. Barbier de
Montault.
L. C.
1. A signaler une erreur grossière de calcul, p. 21 :1a drachme
vaut 94 centimes, donc 7000 drachmes valent près de 7000 francs.
2. Le dciiier de Judas du Couvent des Capucins d' Enghien. Con-
grès archéol. d' Enghien, Enghien, Spinet, 1900.
3. V. la Revue de Numismatique et les Bulletins de la Société na-
tionale des Antiquaires de France.
LE MOBILIER D'ART DU VAL-DIEU. Mor-
tagne, G. Meaux,i9oi. — EXCURSION ARCHÉO-
LOGIQUE A BELLÊME, par l'abbé A. desvaux.
Alençon. A. Manier, 1900-
Dans la première de ces brochures, M. le
curé de Verrières fournit des renseignements
inédits sur la Chartreuse du Val-Dieu et son
mobilier ; il fait notamment l'histoire du taber-
nacle exécuté par le sculpteur-ciseleur L. F.
Laytié de Paris.
La seconde décrit les antiquités des environs de
Bellêmeen Perche, la chapelle romane de Saint-
Sanctin, alias Notre-Dame du Vieux-Château,
l'église Saint-Sauveur, édifice du XVI*= siècle,
le donjon deBellême, la collégiale de Saint-Léo-
nard, etc.
Ces deux notices, fort bien écrites, montrent
une fois de plus combien les ecclésiastiques éru-
dits peuvent recueillir autour d'eux en province
de précieux renseignements archéologiques.
L. C.
TRAVAUX EXÉCUTÉS PAR DU RIF, MAI-
TRE SCULPTEUR, DANS LES SALLES DU
COUVENT DES GRANDS AUGUSTINS (Paris.
1734), par F. Mazerolle — Paris, Pion, 1900.
Millin avait dit quelques mots des embellisse-
ments apportés aux salles du couvent des Grands
Augustins affectées par Henri JVà l'Ordre du
Saint-Esprit, et depuis à des réunions du
Parlement et de la Chambre des Comptes. Notre
collaborateur fournit sur ces travaux d'art des
détails précis ; il a été assez heureux pour décou-
vrir le nom, jusqu'à présent inconnu, de l'artiste
qui enrichit de sculptures la salle des chevaliers.
L. C.
LES RUES DE ROMANS. FRAGMENTS
HISTORIQUES.— LES CONSULS DE ROMANS,
par U. Chevalier.
Ces pages d'histoire et d'archéologie locale, que
publie un érudit très connu de nos lecteurs,repré-
sentent l'accumulation de très multiples notes et
documents récoltés à la longue, comme peut seul
le faire un patient chercheur amoureux d'une
vieille cité. Pareil ouvrage se prête mal à l'ana-
lyse, mais il mérite d'être signalé comme un des
meilleurs parmi ceux qui transmettront à la
postérité la connaissance du passé de nos villes
anciennes. Il contient une multitude de données
sur les rues, les abbayes, les églises, les monu-
ments civils, les fortifications, les corporations,
ainsi que sur les institutions et les usages de
Romans.
L. C.
436
ÎRebue lie V^vt cbrétten»
HISTOIRE DES BEAUX-ARTS EN TRENTE |
CHAPITRES, par Paul Rouaix. 2 volumes in-S"
carré contenant 490 gravures. Broché, 15 fr. Relié,
18 fr. H.Laurens, Paris, 1901.
Ces deux beaux volumes constituent un traité
substantiel et des plus instructifs. Ils témoignent
d'une vaste érudition ; ils renferment une mine
de renseignements. La matière, très condensée,
est présentée sous une forme élégante, parfois
originale et très personnelle.
Le sujet est redoutable par son étendue et sa
profondeur. Félicitons l'auteur de s'être tiré
avec certain succès d'une tâche aussi considéra-
ble. Son livre mérite d'être loué et recommandé,
mais non sans réserves. Notre rôle de critique
sincère nous oblige à en indiquer les défectuosi-
tés ; qu'on veuille toutefois ne pas mesurer l'im-
portance de nos observations à la longueur
inévitable de leur exposé.
Le second volume, consacré à la Renaissance
et à l'époque moderne, est surtout attachant ; l'au-
teur s'y meut à l'aise dans des questions qui lui
sont familières. Mais le premier offre des parties
faibles, d'autres trop touffues ; on voudrait plus
d'ordre, plus de méthode et des subdivisions plus
nettes des chapitres.
Il y en a trente, tous de 24 pages. Pour l'his-
toire, en réalité si peu artistique, des silex taillés
et autres monuments préhistoriques, qui forme
le premier, c'est trop ; c'est trop peu pour le
grand art égyptien, embrassant toute l'antiquité,
qui vient ensuite. Encore ce chapitre trop court
est-il bourré de notions mythologiques vague-
ment relatives à l'art, dont le sujet principal
ne se dégage guère. On s'attarde à l'histoire des
découvertes ; on glisse sur des notions essentielles,
comme le culte des morts, l'influence des castes,
les types primordiaux de la construction en
limon. On mentionne a peine la prestigieuse
décoration polychrome, on ne parle même pas
des syringes. L'architecture, qui domine l'art des
Pharaons, n'est l'objet d'aucune description ; ce
qu'on en dit est contestable ('). L'hiératisme est
expliqué seulement par cette raison : « l'art
égyptien est une écriture », explication ingé-
nieuse, mais qui n'est pas la principale.
Le chapitre Assyrie appelle des remarques
semblables ; après l'avoir parcouru, le lecteur, qui
n'aurait à sa disposition que cet ouvrage, n'aurait
aucune idée concrète du palais de Khorsabad,
pas plus que le précédent chapitre ne lui permet
de se figurer le temple de Karnak. Énormément
I. Est-il vrai que la pyramide égyptienne procède du tumulus ?
(p. 9)... que l'obélisque soit un pilier... une colonne ? (le pilier et la
colonne sont dos itifif'Or/s), qna les pylônes soient des pyramides
tronquées? (géométriquement, oui; au point de vue structural,
erreur.)
de détails instructifs, mais aucun exposé large
donnant des vues d'ensemble. On n'insiste pas
assez sur l'allure caractéristique des murs en
briques plats et crénelés, décorés, ni surtout sur
le talent des sculpteurs assyriens comme ani-
maliers.
Nous pourrions faire des observations analo-
gues sur les chapitres relatifs à la Perse et à
l'Inde. Le suivant : Chine et Japon, au contraire,
loin de sentir la compilation, est un travail ori-
ginal d'un grand intérêt, à tel point que nous
croyons bien faire de le résumer pour nos lec-
teurs.
La Chine est la préface du Japon, — ce que l'E-
gypte est à la Grèce. La chronologie est précise,
mais suspecte. Des systèmes religieux successifs
se sont implantés et ont coexisté ; ils ne donnent
guère de critérium pour le classement ; ils n'in-
téressent que par leur iconographie, qui forme
le fond hiératique de l'art sino-japonais. Les
sectes de Confucius et de Lao-Tsé datent du
Vis s. avant notre ère et sont purement chinoises
d'origine. La troisième, le bouddhisme, importée
de l'Inde vers la fin du P'' siècle de l'ère chré-
tienne, fleurit surtout au VI''. Bouddha s'appelle
Fo en Chine, Bouts au Japon.
C'est de Lao-Tsé que sort l'émancipation de
l'art dans le sens de la vérité et le courant japo-
nais.
Il y a tout un olympe du bibelot qui domine
l'art sino-japonais. Le grand n'y est que l'ampli-
fication du petit. La maison même est une sorte
de meuble laqué de grandes dimensions. Dans
l'œuvre d'art le détail l'emporte, se juxtaposant
à un autre détail.
La faune symbolique a pour principaux types
Fo, le chien de Bouddha, et le dragon hérissé,
contorsionné, furieux, qui se démène parmi des
nébules. Il faut y ajouter le phénix, la licorne et
la tortue à large queue. Parmi les ornements
purs la grecque domine.
Le Chinois enferme l'art dans la permanence
routinière des traditions et des décors consa-
crés. Les arts décoratifs et l'architecture ont leur
protocole comme le costume. La construction
privée ne sort pas d'un type à peine varié par la
position sociale de l'habitant. Toujours petite, elle
se distingue par une légèreté peut-être due à
l'instabilité du sol et par une régularité dissymé-
trique. Une sorte de balcon bas s'abrite sous la
saillie de la toiture soutenue, sans architrave, par
un nombre réglementaire de poteau.x. L'angle
droit des raccords est égayé par un motif ajouré.
Le toit, un peu lourd, infléchi, est couvert de
tuiles brillantes, hérissé de bêtes fantastiques
Btbliograpl)te.
437
au faîte et aux arêtiers. Rarement il y a un étage.
Les maisons se groupent, ou s'isolent dans des
jardins tout en courbes et en bosses, garnis de
ponts minuscules et de kiosques.
Si les palais sont grands, ce n'est que par
juxtaposition, ou superposition. Le palais est un
temple ; il prend l'allure de la pagode indoue.
Aux XI>^ et XI 1= s., les empereurs se passionnent
pour les tours hautes de lOO et même de 130 m.,
et surmontées d'un kiosque. Elles ont été dé-
truites. La plus célèbre fut la tour de porcelaine
élevée au XV'ï s. et détruite vers 1860. Chacun
des huit étages avait son toit.
La plupart des temples chinois sont disposés
à l'instar des pagodes bouddhiques de l'Inde, mais
contiennent des constructions dans le style des
maisons chinoises; point de dômes. On y accède
par des portiques et par un pont. L'autel est une
pyramide remplaçant le dagouba en dôme. Les
temples sont précédés de portiques, tout en sur-
face, sans épaisseur, souvent en bois.
Les monuments funéraires sont des pyramides
ou des sortes de dagoubas; sur un tertre arrondi
se dresse une espèce de balustre; l'ensemble a la
silhouette d'une carafe.
Les Chinois connurent la voûte ; ils em-
ployèrent l'arcade dans les ponts.
La sculpture monumentale n'existe pas en
Chine, sinon à l'état barbare. La peinture est
purement décorative, et là est le triomphe de
l'art chinois, surtout dans le décor céramique.
Les Japonais sont autrement artistes que les
Chinois. Ils se sont approprié les habiletés tech-
niques de ceux-ci. Ils possèdent le métier, sans
être possédés par lui.
Le Japonais est éloigné de l'idéal grec, au type
général et symétrique entièrement équilibré. Il
aime le beau particulier, occidental, pittoresque et
la nature. Sa mythologie s'harmonise. Aux sept
dieux bons enfants s'ajoute le symbole de la
patrie, le Fushi-Jarna, le mont sacré, occupant
le fond des tableaux, donnant sa forme aux
objets.
Néanmoins, la sculpture japonaise est faible ;
elle n'a guère que ses masques de théâtre, réa-
listes et grimaçants. Le métal est travaillé avec
une prodigieuse habileté. La céramique est plus
variée, plus artistique qu'en Chine, dans ses dif-
férentes espèces, qui sont le Kanga (décor rouge
et or sur fond crème), l'Imari (décor bleu, rouge
et or sur fond blanc), l'Ovari (décor bleu sur
fond blanc), le Satsouma (multicolore sur crème),
la plus belle céramique japonaise. Le décor
abonde en bestioles parmi les branches fleuries
de chrysanthème. L'ornement linéaire comprend
des flots superposés comme des écailles, des
grecques répandues en labyrinthes. L'art est
propagé par des albums et des Kakémonos. La
peinture décorative égale la nôtre par certains
côtés, surtout dans le rendu des animaux.
Parmi les artistes trois noms caractérisent et
résument l'art japonais récent: Outomaro (1754-
1806), le dessinateur de genre, Horoshigué (1797-
1858), le paysagiste, et surtout Hokousai (1760-
1849), le peintre poétique de la nature.
Mais reprenons notre rôle de critique.
Avec l'architecture grecque, M. Rouaix « entre
dans la Beauté » et son allure s'en ressent; il
nous donne un chapitre bien composé, vraiment
didactique. Regrettons l'absence d'une vue d'en-
semble du trésor d'Atrée, et surtout du plan par
terre du Parthénon, et ne chicanons pas sur des
erreurs de détail (').
Deux mots à propos des Étrusques. On ne
peut plus dire aujourd'hui que les Étrusques ont
peut-être inventé la voûte; n'est-ce pas.' (v. p. 198)
Il est constant qu'elle existait déjà sous l'ancien
empire égyptien. Depuis les fouilles effectuées, en
1900, au Forum romain, il est au moins douteux
que la voûte que les ciceroni indiquent le long de
la basilique Julienne comme étant une partie du
cloaca inaxinia remonte aux Etrusques. L'aque-
duc des Tarquins est sans doute celui qu'on
a récemment découvert et qui traverse oblique-
ment le forum (ibid.). Nous n'admettons pas que
les Romains aient tiré du principe de la voûte
« tout ce qu'on pouvait en tirer ». Alors il faut
biffer la construction médiévale! Il est vrai que
l'auteur en fait bon marché, comme on le verra
plus loin.
Des chapitres notablement insuffisants sont
ceux qui sont réservés à X Art chrétien. Dès la
seconde page se rencontre une expression impar-
donnable à un lettré de la valeur de M. Rouaix;
nous lisons « les illettrés, les pauvres d'esprit
n'ont point de culture intellectuelle. » (Il s'agit
des esclaves et des barbares) ; les bienheureux
de l'Évangile ne sont pas ce que l'auteur pense.
D'autre part, le témoignage prophétique des
Sybilles n'est pas si méprisable qu'il le croit. Mais
ce qui mérite une vive protestation de notre part,
c'est cette allégation étrange : « Pour le chris-
tianisme primitif, Jupiter, Vénus, Apollon et les
autres dieux païens existaient réellement, étaient
puissants. » Ce que dit M. Rouaix du type pri-
mitif du Christ est à négliger ; il est mal informé.
I. Le coin d'entablement de la fig. 9 ne peut pas provenir du mo-
nument de Lysicrate, qui n'a pas de coin. Comment peut-on trouver
« inintelligible » l'origine des volutes, et nommer leur combinaison
un « baudrier » ? (p. 20). N'est-ce pas une erreur de dire « une statue
QXi ckryst'Uphantiiie (p. 12-1S0, p. 16-184 et p. 19-187). Le mot est
d'ailleurs employé comme adjectif à la p. 218, conmie substantif trois
lignes plus loin, mais dans un troisième sens.
438
ISitWt lie rart tfjrétten.
Il est inexact encore quand il assure que les
caractères de la basilique primitive sont devenus
méconnaissables à travers les transformations
ultérieures : n'avons-nous pas encore le type
fidèle du premier siècle dans St-Paul-hors-les-
murs, dans St-Clément, dans Ste-Marie in Cos-
medin? — Quand on écrit une histoire générale
des Beaux-Arts, on ne peut faire fi de l'architec-
ture au point de passer sous silence le rôle de la
voûte sphérique sur pendentifs, qui fut l'âme des
grandes ordonnances des styles byzantin et
musulman. L'auteur semble étranger à cette
révolution technique, qui créa un abîme entre la
pesante coupole du Panthéon romain et les har-
diesses des coupoles orientales. Il est trop in-
juste envers le style byzantin, dont, par contre,
M. Gosset est trop épris, selon nous.
Du style roman, avec ses enfantements, ses
progrès admirables qui préparent tout l'art mo-
derne, M. R. ne voit que l'apparence superfi-
cielle. L'évolution du plan, les développements
rationnels du chœur, ses accroissements logiques,
l'adjonction du déambulatoire, l'épanouissement
des absidioles, tout cela lui semble des anoma-
lies, « une moitié du temple plaquée sur l'autre,.. . .
une foule de chapelles qui sortent de l'église, en
crèvent les murs.... » Il ignore la merveilleuse
genèse de la croisée d'ogives, ou la croit indigne
d'être esquissée.
Passons l'intéressant chapitre de l'art musul-
man, qui est fort réussi et arrivons à l'architec-
ture gothique. L'auteur exprime éloquemment
l'importance absorbante de l'église. Il exagère
toutefois, quand il avance que tout s'y fait, que
la communauté y délibère, qu'on y conserve
jusqu'aux contrats de vente. C'est du Viollet-le-
Duc outré. S'occupant de l'origine du style
ogival, il en est encore à prendre l'arc brise
(improprement appelé ogive) comme un des
principes générateurs du style ; il définit le cintre,
à la page 322, en dix lignes de charabias. Il
ajoute, il est vrai, qu'il ne faut pas voir seulement
dans le cintre des baies la caractéristique du
style; mais il n'indique pas un autre facteur de la
transformation radicale qui signale l'époque go-
thique. Il ne s'occupe pas des voûtes, qui sont le
pivot du système de construction d'alors ; même
il confond (p. 324) /a croisée d'ogives avec la
croisée du transept; c'est très curieux ! Il croit de
bonne foi que c'est à Morienval que s'est ren-
contré le premier « arc brisé ».
Nous ne suivrons pas l'auteur dans le second
volume, où il est mieux sur son terrain et ne
mérite guère que des éloges. Cette principale
portion de son œuvre, très substantielle, très
documentée, constitue un résumé utile à la
vulgarisation du développement de l'art moderne
et contemporain.
Une dernière critique : les gravures sont mé-
diocres et peu adéquates au texte.
L. Cloquet.
LOUIS COURAJOD. LEÇONS PROFESSEES
A L'ÉCOLE DU LOUVRE (1887-1896), publiées
par MM. H. I.emonnier et A. Michel. // Origines
de la Renaissance. — In-8°, 687 pp. Paris, Picard,
1901.
Nous n'avons plus à faire l'éloge du sympa-
thique et chaleureux conférencier que l'École du
Louvre a perdu, et qui avait donné une allure
presqu'émouvante à son enseignement, par la
hardiesse et la nouveauté de ses idées émises et
la chaleur de ses exposés. Nous sommes de ceux
qui avons, dès le début de son enseignement,
suivi celui-ci avec le plus vif intérêt, et adhéré
à plusieurs de ses idées quelque peu révolution-
naires. Nous nous bornerons à résumer le second
volume de ses leçons, comme nous avons fait
du premier.
Nous avons les premiers fait connaître la
matière des leçons qui ont pour objet les
origines de la Renaissance en France aux XIV<=
et XV'' siècles, d'après des épreuves que l'écrivain
avait eu la bonté de nous communiquer. Courajod
a montré que la Renaissance, qu'on faisait com-
mencer au XV fs siècle, doit être reportée à cet
instant de l'histoire où, aux spéculations imma-
térielles, aux idées mystiques et chevaleresques,
succèdent la curiosité de la nature, l'analyse
sceptique des choses, le goût des palpables réa-
lités. Un élément nouveau s'est introduit au
cœur de la France; Paris est devenu le centre
artistique où l'influence flamande est puissante ;
le naturalisme de l'école du Nord prend racine
dans la capitale, encouragé par la cour des
^Valois ; le portrait est sa préoccupation. C'est
l'aurore d'une ère nouvelle, qu'on n'avait voulu
saluer que dans son plein Midi, lequel s'est
appelé la Renaissance. L'individualisme et le
naturalisme régnent presque sans partage dans
la seconde moitié du XVI'= siècle. C'est la renais-
sance franco-flamande, sans influence ultramon-
taine, et qui devance d'un siècle la Renaissance.
C'est la première période.
L'art flamand, naturalisé français, eut, dès le
début du XV= siècle, son foyer en Bourgogne ;
c'est la seconde phase de la renaissance française.
A partir des soixante dernières années du
XV" siècle, il se répand sur toute la surface de
la France. Il est contemporain du réveil de
l'Italie au sentiment de l'art antique.
2dtbltograpl)te.
439
La troisième phase est celle où l'art italien
s'introduit d'abord lentement, furtivement, en
France, puis bruyamment importée par les rois
et détermine ce qu'on a eu l'habitude d'appeler
jusqu'ici exclusivement la Renaissance.
Le mélange de ces deux éléments, l'art bour-
guignon et l'invasion de l'influence italienne,
amendés par l'éclectisme français,donnanaissance
à l'école de la Loire, qui, à la fin du XV^ siècle
et au commencement du XVL, complète la
physionomie de la véritable et définitive renais-
sance française.
Courajod s'est vivement intéressé aux tombes
du XIV« siècle ; leurs caractères uniformes ré-
vèlent une industrie spéciale. Parmi les tombiers
du XIV'^ siècle, il distingue Jean Pépin d'Huy,
originaire d'un « village près Liège » (sic), qui
s'intitule « tombier et bourgeois de Paris », au-
teur de la statue de Robert l'enfant, conservée
à Saint-Denis (artiste que M. Richard a mis en
lumière), Robert de Launoy (révélé par M. Bor-
dier), originaire d'Arras, Guillaume deNormandie,
et R. de Hondicourt, ses compatriotes et collabo-
rateurs, enfin Pierre de Bruxelles. Leur art était
d'origine flamande. Il en est de même et plus
spécialement des tombes gravées, dont M. Cou-
rajod fait ressortir le puissant intérêt. « C'est
peut-être l'examen de cette classe de monuments
qui nous fait pénétrer le plus avant dans
l'esthétique de l'art du moyen âge», parce qu'ils
fournissent la quintessence de la ligne du dessin,
et que le dessin livre l'âme de l'artiste. « Je ne
connais, dit-il, pas une seule époque de l'art qui
puisse dépasser la beauté, la science, la noblesse,
la grandeur, la fierté, la simplicité de ces dessins
par traits massés. C'est de l'art absolument con-
sommé. »
*
* *
Nous avons considéré l'art flamand ou franco-
flamand. Tournons-nous un instant avec Courajod
vers l'Italie. Nicolas de Pise, auteur de la chaire
de la cathédrale de Sienne, artiste sans doctrine,
avait pastiché l'art antique avec une virtuosité
merveilleuse ; mais son initiative resta isolée. Son
fils Giovanni, auteur de la chaire de Pise, fonda
l'école gothique : il fut brutal, réaliste et gran-
diose. Andréa, à son tour (l'auteur des portes de
bronze du baptistère de Florence), regarde la
nature avec les yeux d'un gothique, mais la
rend avec une sobriété harmonieuse. L'art nou-
veau, qui avait apparu avec Giovanni, rentre avec
Andréa sous la férule dogmatique ; un dogme
est créé, sous lequel l'Italie vivra un siècle.
Ce n'est pas de l'école de Pise que la Renais-
ance devait sortir. L'ombre de Giotto s'étend
sur le XIV^ siècle italien. Le naturalisme relatif
du maître de Sienne était tel que celui des grands
imagiers du XIIL s. ; c'était ce naturalisme sage,
qui ne va pas jusqu'à copier l'individu, mais s'ar-
rête à un type humain convenu et transfiguré
par une opération de l'esprit ; c'est un natura-
lisme tempéré par un rationalisme décidé ; après
lui, dans son école, son idéal s'immobilise.
Giotto n'avait aff'ranchi l'art qu'à demi ; il l'avait
arraché aux traditions byzantines, mais il leur
imposa son style mystique ; l'Italie, jusqu'à la
fin du XIV<= siècle, reste dominée par cette tra-
dition. Qui remonta le courant et renouvela la
peinture italienne en la ramenant vers l'antique?
Masaccio, répondent les dictionnaires. — Erreur !
dit Courajod. « Le vrai point de séparation entre
le vieux monde gothique et le monde moderne n'a
pas été l'introduction du goût antique ni l'avè-
nement de l'ornement classique, mais une con-
ception nouvelle des lois de l'art. » C'est la subs-
titution du naturalisme au spiritualisme même
en Italie ; même à Rome, la Renaissance n'a pas
eu pour cause unique l'imitation de l'art antique.
Et en vérité, l'art nouveau n'a pas pour berceau
l'Italie seule. Le XIV*^ siècle est caractérisé par
un effort collectif de l'Europe pour créer cet art,
l'art moderne, en prenant pour base l'art gothique;
toute cette époque a besoin d'être étudiée d'une
façon internationale. A partir de Giovanni Pisano
et de Giotto, l'Italie, tout en empruntant à l'an-
tique, s'attache de plus en plus au style go-
thique. On dit quelquefois que l'Italie n'a pas
eu de style gothique ; c'est une énorme erreur!
Rome, selon notre auteur, est l'une des villes
les plus gothiques de l'Italie. L'école gothique
s'efforce de se régénérer par l'étude de la nature,
en Italie comme en France et en Flandre ; et l'on
voit à ce moment des artistes du Nord, des Te-
desco et autres, faire sentir leur influence artis-
tique à Florence et ailleurs, des J. délia Ouercia
pratiquer une sculpture inspirée des écoles de
Bourgogne et de Flandre, témoin la manière de
traiter les draperies, témoin l'introduction des
paysages à la flamande dans les bas-reliefs de
Ghiberti. « Nous prétendons, dit M. C, qu'il y a
des sculptures italiennes du premier tiers du
XV^ siècle, qui témoignent d'une communication
entre l'école italienne et l'école du Nord. »
Ceci nous ramène au style flamand, auquel
Courajod s'est attaché avec tant de prédilection.
L'art flamand est-il sorti de l'école de Cologne?
Non ! L'école de Cologne se développa parallè-
lement à celle de la Flandre, mais en sens opposé;
la première, dans le sens mystique, la seconde,
dans le sens naturaliste.L'école flamande et bour-
guignonne exerça en Europe, pendant près de
deux cents ans, un empire puissant. Un seul pays,
après en avoir reçu l'impulsion, lui résista. Tou-
440
jlRebur De V^xt cl)vctien.
tefois le branle fut donné au mouvement italien
par le réveil prématuré de la F"landre. Il y a deux
courants dans le mouvement de la Renaissance :
le courant flamand, naturaliste, et le courant ita-
lien, antique. Mais « l'idée d'après laquelle le
mouvement de la Renaissance n'existe que depuis
la communication définitive du style antique à
l'art moderne et depuis l'entrée en scène de
l'Italie, est une idée fausse dictée par la pé-
dagogie classique ». L'influence de l'école fla-
mande sur l'école italienne comme sur toutes les
autres écoles de l'Europe, de la fin du XI V<= siècle
ou du commencement du XV'=, était une vérité,
reconnue en plein XVI<= siècle, qu'a proclamée
Lambert Lombard. « Il résulte de l'ensemble des
textes de Cyriaque d'Ancône, de Fazio, de Fila-
rete et de Santi, a dit A. Pinchart, qu'en Italie,
au XlVe siècle, la réputation des deux grands
maîtres de l'école flamande primait celle de tous
les autres peintres. » De Laborde avait déjà fait
la même observation, que Courajod développe
d'une manière complète, sur l'histoire du courant
flamand auquel l'Europe doit en grande partie
son art moderne.
Revenons maintenant en France. Le grand art
du XI V*^ siècle, sorti des ateliers parisiens, franco-
flamands d'origine, l'art de Beauneveu, des Jean
de Liège, l'art des vitraux de Bourges, des scul-
ptures de la Ferté-Milon, des peintures de Broe-
derlam, l'art des draperies amples et souples,
du naturalisme grandiose, art qui avait créé une
première renaissance, se voit remplacé par cet
art naïf, tendre, timide à la fois et audacieux,
robuste, sincère, spontané, un peu gauche, c'est-
à-dire, l'art bourguignon. C'est l'art démocratique
qui remplace l'art de cour ; c'est l'art de Claus
Sluter. On peut dire que Courajod a réhabilité
cet art bourguignon, si intéressant par sa sincère
et libre émotion. Il s'attache longuement à son
étude, à la description de ses chefs-d'œuvre.
Sous Charles VII, le siège de la monarchie
est déplacé ; Paris perd son titre de capitale ;
Charles VIII n'est longtemps que le roi de
Bourges ; le centre de la France est le Berry et
la Touraine, provinces soumises à l'art bour-
guignon. L'art du XV"^ siècle se développe dans
le Berry et surtout dans le bassin de la Loire.
C'est là que la Renaissance italienne est venue
se marier avec lui, et cette union fait le triomphe
de Michel Colombe, qui introduit des idées de mo-
dération, de conviction, que l'Italie avait apprises
de l'antiquité. C'est l'école franco-italienne du
XV"^ siècle. Le maître fait maintenant l'histoire
de la pénétration italienne, comme il a fait l'his-
toire de la pénétration flamande ; il signale le
voyage de Jean Fouquet en Italie, il montre
le rôle du roi René, décrit le milieu tourangeau
et expose l'influence de Bourdichon.
Ici, les notes recueillies religieusement par
MM. H. Lemonnier et A. Michel deviennent
rares et incomplètes. Une série de leçons est con-
sacrée à montrer la lutte entre l'art méridional
et l'art du Nord, qui se mesurent dans une ba-
taille suprême. Celui du Midi longtemps réuni à
son rival, a pris une tardive mais définitive
revanche et préparé la domination qu'il étendit
sur le monde entier.Le maître fait le procès à la
pédagogie, et aux procédés d'enseignement par
lesquels elle a exaspéré les esprits. Nous avons
dans le temps relaté ce procès et reproduit les
éloquentes plaidoiries de C. Depuis trois siè-
cles, dit-il, la pédagogie classique nous fabrique
de faux titres de noblesse pour nous rattacher à
une civilisation inférieure à la nôtre ; elle a arra-
ché au peuple les consolations de l'art en en
faisant, non la satisfaction d'un besoin universel,
mais l'expression du luxe et l'apanage des lettrés.
Elle a mis la femme hors de l'art en faisant
parler à l'art une langue qu'elle ne comprend
pas. Dans le domaine de l'art presque toutes les
conquêtes morales et sociales du christianisme
sont compromises. Pour les retrouver, l'humanité
devra revivre son histoire du moyen âge. Arrê-
tons-nous sur cette belle et généreuse conclusion,
et louons le vaillant qui a osé la proclamer du
haut de la chaire du Louvre.
L. Cloquet.
LES VILLES D'ART CÉLÈBRES — BRUGES
YPRES, par M. H. Hymans, Paris, Laurens, 1900.
Il existe pas mal de descriptions de la noble
cité de Bruges, et plus d'une excellente. Le mo-
deste guide de M. James Weale est d'une haute
valeur documentaire avec ses informations con-
cises, sûres et souvent inédites et ses apprécia-
tions sagaces; celui de M. le chanoine Duclos
donne au touriste l'impression communicative
d'un Brugeois épris de ses vieilles rues, et fami-
liarisé avec leur histoire intime ; la sémillante pla-
quette de M. Ch. de Pion, si joliment illustrée, a
aussi son charme particulier.
Néanmoins le livre de M. Hymans est aussi
nouveau que si l'on n'avait pas encore traité le
sujet. On éprouve une sensation vive de littéra-
ture et d'art, à ces pages qui sont d'un esthète
délicat, d'un connaisseur ayant sa manière à
lui de voir les choses anciennes et modernes et
excellant à distinguer les perles dans cet écrin :
à raviver l'intérêt des objets et des monuments
par des rapprochements historiques, à carac-
tériser leur valeur avec un goût très sûr. Quant
à l'illustration, elle est une œuvre d'art, quoique
photographique; le choix des sujets et des
points de vue trahit le fin connaisseur, et l'exé-
cution est le dernier mot du progrès.
Btbliograpl)te.
441
D'ailleurs, les descriptions tant de fois faites
ne sont-elles pas à refaire, aujourd'hui que les
recherches récentes ont tant augmenté nos con-
naissances sur les artistes et leurs œuvres, que
le goût public avivé a modifié des appréciations,
détruit des préjugés déplacé les points de vue?
N'est-ce pas d'hier, que la critique apprécie à leur
valeur les primitifs, et que l'on connaît à peu
près leur histoire? La vieille ville achève à peine
la restauration de ses vieux pignons et la série
de ses constructions archaïques, pleines de saveur,
qui sont comme une résurrection du passé. L'on
doit, pour une bonne part, ce retour au passé à
l'ancien architecte de la ville, Rudd (1792-1870)
et à feu Jean Béthune, qui fut, soit dit en passant,
l'ami de Welby Pugin,mais non son élève, comme
le croit M. Hymans. Le premier releva et sauva
plusieurs anciens monuments, notamment le
palais du Franc; le second propagea les prin-
cipes dont l'architecture brugeoise est la si lidèle
expression ; le type d'édifices que son école mit
en honneur dérive directement de Bruges, et c'est
la forme idéale de la construction en brique ;
nous l'avons démontré ailleurs (i).Quant aux em-
bellissements nouveaux, si conformes à l'esprit
ancien, qui se sont produits dans ces dernières
années, l'on en est redevable à deux hommes
de goût et de talent, les architectes Delacenserie
et de Wulf.
Mais tout Bruges, magistrat et particuliers, a
le culte de l'art ancien. C'est un prodige, re-
marque M. Hymans, que la châsse merveilleuse
de sainte Ursule ait pu traverser les siècles et les
tourmentes sans jamais changer de place, alors
que tant d'œuvres d'art ont pris le chemin de
l'étranger. Mais aussi avec quelle sollicitude les
Sœurs Ursulines ont veillé jalousement sur le
trésor confié à leur garde ! La salle des malades
est toujours là, exactement telle qu'au XIV^
siècle, avec ses deux-cent-quarante lits, « évoca-
tion absolument frappante de ces établissements
hospitaliers du moyen âge, si fréquemment
aperçus dans les tableaux et les miniatures; et à
côté, la pharmacie, encore comme au temps de
Van Eyck et de Memling, desservie par les
sœurs. Ensemble délicieux, avec ses antiques pots
d'apothicaire en faïence de Nevers, ses immenses
mortiers en cuivre aux délicates ciselures, ses
multiples et pittoresques ustensiles.
Nous devons insister sur le très vif intérêt
de la description de tant d'anciennes pein-
tures qui forment la richesse de Bruges, sous la
plume d'un des plus fins connaisseurs de tableaux
anciens de la Belgique, pour ne pas dire plus.
Aussi, sommes-nous embarrassé de remplir ici
I. V. L. Cloquet, Traité d'architecture, t. Il, p. 6i. Revue de
l'Art chrétien, année 1893, p. 288.
notre devoir de critique, à moins de chercher la
petite bête et de faire des réserves de détail,
comme par exemple, quand M. Hymans trouve
réussie la superstructure moderne de la grande
tour de Saint-Sauveur.
Façade de la maison dite des Templiers, rue de Lille a Ypres.
État avant restauration (1899).
A Ypres, si l'attention charmée se disperse
sur une multitude de maisons anciennes, l'admira-
tion est absolue pour les Halles, qui offrent, selon
un écrivain français, la majesté des cathédrales et
qui rivalisent avec les palais vénitiens. Le cœur
se serre quand on pense que ce monument, sans
RKVUE DE l'art CHRÉTIEN.
1901. — 5"^*-" LIVRAISON.
442
Brbue Dr r^rt chrétien.
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Ancienne Halle de la rue de Lille à Ypres. Restitution de la façade complète, par les architectes L. Cloquet et E. Moktikr.
Bibltograpl)le,
443
rival au monde, faillit être abattu par les révolu-
tionnaires français! M. Hymans apprécie favo-
rablement les peintures décoratives de M. Del-
beke, qui ont été, un peu partout et ici même,
l'objet de vives critiques (i).
L'auteur n'accorde que quatre lignes (non
compris quatre autres exprimant la défiance en-
vers les restaurateurs) à la maison dite des Tem-
pliers, qui fut en réalité une superbe petite halle,
avec sa façade jadis plus que double de celle qui
subsiste, avec son rez-de-chaussée analogue à
I. V. Revue de l'Art chrétien, année 18
P- 538-
celui de la Boucherie, avec ses deux étages pareils
à l'étage unique des grandes halles, avec, enfin, une
corniche crénelée identique au superbe couron-
nement du palais communal. Encore faut-il noter
que les trois fenêtres ogivales qui subsistent sont
intactes, tandis que pas une des baies des grandes
halles ne contient son ancien fenestrage. Nous
croyons pouvoir garantir que pas une pierre de
la ruine actuelle n'en sera enlevée pour autant
qu'elle puisse encore tenir.
L. C.
444
jRcbue ïje T^rt chrétien.
Ï&S&Ï&S
w «5? -V «V '^^ 'V «V •'« •H' <5r' «W ''ft «ït •'>î î
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~40^ ^Of-
^^^^^..^ ::^ ,^ ^ij^j^:^ :^^ ^^^ :^.^ :^^ :W^ :^^ :^^ :^S^ :^^^5i^ :^^ :^5!^ ^^
\Lt)rOnlQUC. SOMMAIRE: CHANT GRÉGORIEN. — MONUMENTS ANCIENS.
SOLESMES. — NOUVELLES.
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w
Cbant grégorien.
On lit dans le XX<' Siècle.
Rome, le 14 juin 1901.
ARMI les différentes questions qui s'agitent
à Rome, il en est une qui mérite d'être traitée
spécialement à cause de la tournure qu'elle
prend actuellement et de son importance :
c'est la question de la restauration du chant
ecclésiastique.
Sans revenir sur l'histoire du monopole concédé à
M. Pustet pour son édition médicéenne, on sait que ce
privilège avait soulevé de nombreuses réclamations, sur-
tout en France. Les Français ne voulaient pas être, sur
ce point, tributaires de l'Allemagne. Le décret (Juod
Sanctus Augiesiinus, rendu par la S. Congrégation des
Rites, à la date du 7 juillet 1S94, après avoir fait l'histo-
rique de la question, concluait en ces termes : « La Con-
grégation laisse aux Ordinaires la liberté de conserverie
chant dont se servaient leurs Églises, mais elle les exhorte
fortement, en vue d'opérer l'unité dans le chant, à adopter
l'édition de Pustet. Elle ne leur fait pas pourtant une
obligation formelle de cette adoption. »
La question ainsi posée était, par là même, pratique-
ment résolue, car le chant de Pustet s'imposait forcément
aux évêques, désireux de suivre en cette matière les dé-
sirs du Souverain Pontife sans se contenter d'obéir seule-
ment à ses ordres.
C'est vers cette époque que commença, en France, une
forte campagne. Un laïque, instruit comme un bénédictin,
très au courant de toute cette question, groupa dans une
action commune les industries du livre. Des mémoires
furent rédigés, présentés à la Chambre, et le ministère
des affaires étrangères en saisit la Secrétairerie d'État.
A tort ou à raison, — c'est une chose sur laquelle je ne
veux point me prononcer — M. Lefebvre de Béhaine,
ambassadeur de France à Rome, fut accusé sinon de
complicité, au moins de combattre mollement le mono-
pole Pustet. L'homme qui conduisait cette campagne, —
M. Bourgeois était alors ministre, — résolut de frapper
un grand coup. Parle moyen d'un député connu, M. Jour-
dan (de La Lozère), il fit faire une interpellation à la
Chambre française sur les agissements de l'ambassade à
Rome, à propos de cette question. M. Bourgeois, le jour
même de l'interpellation, fit mander M. Jourdan et lui
demanda de retirer son interpellation, l'assurant que toute
satisfaction lui serait donnée et que IVE. de Béhaine quit-
terait l'ambassade. C'est en effet ce qui fut fait. iVL de
Béhaine dut demander sa mise à la retraite et c'est une
question de musique sacrée qui a enlevé à Rome un am-
bassadeur qui avait eu, jusque-là, le rare talent de se faire
bien agréer du Souverain Pontife, qui l'estimait haute-
ment, et d'avoir représenté pendant douze ans la France
à Rome. Preuve, évidemment, que le quai d'Orsay était
content de ses services.
La secrétairerie d'État dut alors déclarer officiellement
à l'ambassadeur de France que le monopole Pustet, qui
expirait en 1901, ne serait pas renouvelé. C'était une pre-
mière victoire.
Si le chant de Pustet avait été si favorablement accueilli,
c'est qu'il reproduisait l'édition médicéenne, qui était
l'œuvre de Pier-Luigi de Palestrina. Rien que ce nom
suffisait à faire son éloge. Mais voilà que Mgr Respighi,
cérémoniaire pontifical, publie des brochures qui démon-
trent, en s'appuyant sur des documents inédits, que jamais
Pier-Luigi de Palestrina n'a collaboré, même de loin, à
l'édition médicéenne. Le fondement scientifique de cette
édition venait donc à lui manquer complètement.
D'autre part, Dom Pothier avait, depuis une dizaine
d'années, commencé ses études sur les mélodies grégo-
riennes. Ne s'attachant à aucune édition connue, il remon-
tait aux sources, fouillait les plus anciens manuscrits de
chant, ceux de Saint-Gall entre autres, qui sont du IX'= siè-
cle, et arrivait, comme conséquence de ces confrontations,
à une notation qui s'approchait aussi complètement que
possible de celle de saint Grégoire, si elle n'était point la
mélodie grégorienne pure. Il y avait donc lutte entre
l'édition médicéenne, ou de Pustet, et les grégoriens.
Le chant de Solesmes ne pouvait avoir la faveur de la
Congrégation des Rites, liée qu'était celle-ci par les brefs
précédents accordés à Pustet. Aussi, le cardinal Pitraeut
toutes les peines du monde à obtenir un bref en faveur
de Dom Pothier. A peine l'avait-il en sa possession, que,
quatre jours après, le cardinal Bartolini, alors préfet des
Rites, obtenait une nouvelle lettre dans laquelle le Sou-
verain Pontife déclarait qu'en louant le travail des Béné-
dictins, il n'avait nullement entendu recommander leur
édition, et que les décrets des Rites qui régissent la ma-
tière conservaient toute leur vigueur.
Nous sommes ainsi arrivés au i"' janvier de l'année
1901, date à laquelle cessait officiellement le monopole
Pustet. Celui-ci était terminé, mais le décret Q'^tod sanciiis
Aiigustinus, précédemment cité, qui exhortait les évêques
à adopter la notation de Pustet, subsistait encore. C'était,
au fond, le monopole sous une forme plus adoucie.
Les industries du livre à Paris s'émurent de nouveau
de cette situation qui pouvait priver une classe impor-
tante de travailleurs d'une source non indiftérente de
bénéfices. Une grande maison de librairie catholique,
voyant que les éditions dont on se servait en France
étaient épuisées, résolut de s'occuper d'une nouvelle édi-
tion des livres de chant. Elle voulait la faire suivant la
méthode des bénédictins, avec l'aide de Dom Pothier, et
en appelant tous les savants qui se sont occupés des mé-
lodies grégoriennes à une dernière refonte de ces études,
pour arriver à une édition scientifiquement aussi exacte
que possible. Toutefois, avant de se lancer dans cette
entreprise considérable, il fallait s'assurer si le .Souverain
Pontife verrait avec plaisir ce mouvement de retour à la
tradition, et s'il agréerait l'usage que les éditeurs catho-
liques feraient de la liberté c|ui leur serait laissée. On ne
pouvait détruire le décret (2uod Sanctics Aiigus/inits, mais
le Souverain Pontife pouvait en annuler pratiquement
refi'et,en déclarant qu'il voyait d'un œil favorable ce retour
aux vieilles mélodies qui avaient soutenu et fortifié la foi
de nos pères.
Un premier pas dans ce sens a été fait récemment par
la publication du bref aux Bénédictins de Solesmes. Diffé-
rentes influences ont bien fait remanier ce bref pour en
diminuer l'importance, mais enfin le Pape y affirme nette-
ment la liberté du chant et loue ceux qui cherchent dans
l'antiquité liturgique les sources les plus pures de la mélo-
die grégorienne.
Ce premier mouvement vient d'être suivi de deux faits
significatifs. Le cardinal Vaughan avait installé dans sa
cathédrale de Westminster des bénédictins de l'abbaye
de Solesmes. Naturellement, ils chantaient le grégorien.
WEVUE DEL ART CHRETIEN.
1901. — S'"*^ LIVRAISON.
450
îRctour tic V^xt i\)xititn.
et le cardinal voulait étendre cette mesure h. tout son
archidiocèse, mais la prudence l'avait jusqu'ici retenu.
Ayant consulté h. ce sujet le cardinal Respighi, vicaire de
Sa Sainteté, celui-ci répondit que le Souverain Pontife,
dans le bref aux bénédictins de Solesmes, confirmait de
nouveau la liberté, et que le cardinal était parfaitement
libre d'employer une notation qui venait d'être publique-
ment louée par le Souverain Pontife.
Le cardinal Gibbons se trouvant récemment à Rome
dans une séance qu'on donna en son honneur au Collège
Américain du Sud, les élèves chantèrent devant lui plu-
sieurs morceaux de chant grégorien suivant la méthode
de Dom Pothier. Le cardinal fut enthousiasmé de ces
mélodies, et, dans sa réponse aux discours qui lui avaient
été adressés, il annonça sa résolution d'introduire le chant
grégorien des Bénédictins dans son grand séminaire de
Baltimore. Cette mesure est évidemment le prodrome de
l'extension de ce chant à tout son diocèse, et quand on
réfléchit à la grande popularité dont jouit ce cardinal
aux États-Unis, il est à croire que le mouvement dont il
se fait l'initiateur aura de nombreux imitateurs dans les
80 diocèses qui se partagent la grande république.
Les Français cependant demandent autre chose que le
bref de Solesmes. Les industries du livre veulent du tra-
vail, et, s'étant agitées une première fois, elles voudraient
de nouveau forcer la main aux pouvoirs publics pour ob-
tenir une solution, non plus officieuse, mais officielle, à
des réclamations qu'elles croient d'une absolue légitimité.
Une interpellation est préparée pour être présentée à la
Chambre française et faire protéger le livre par une dé-
claration officielle du Pape attestant que la France peut
imprimer tel chant qui lui plaira et que le monopole,
maintenant terminé de Pustet, ne la lie plus en quelque
manière que ce soit. Le Pape n'a pas intérêt à ce qu'une
pareille question soit déférée à la Chambre, surtout en
ce moment où des luttes autrement graves, grosses de
bien plus douloureuses conséquences, attirent toute son
inquiète sollicitude. Si l'on en croit les bruits qui circulent,
le Souverain Pontife, qui s'est exclusivement réservé
cette question, publierait sous peu un document qui don-
nerait tou'e satisfaction aux maisons catholiques d'édi-
tions, et leur assurerait la liberté.
Tel est actuellement l'état de cette question, qui n'in-
téresse pas seulement la France, mais tous les pays, car
la liberté proclamée pour un éditeur est par là même
promulguée pour tous ; et ce sera partout une noble ému-
lation pour puiser aux meilleures sources le chant tradi-
tionnel de l'Église. On fêtera solennellement en 1904 le
quinzième centenaire de la mort de saint Grégoire le
Grand, et la meilleure manière d'honorer le grand Pape
est d'étendre l'étude et l'exécution des mélodies dont il
est l'auteur. Elles sont à l'ensemble de la liturgie ce que
la fleur est à l'arbre et le parfum au fruit.
D'autre part, la Croix, en publiant le bref du
Saint Père à Dom Delatte, l'a fait précéder
des réflexions suivantes :
Les savants travaux de Dom Pothier ont opéré, nos
lecteurs le savent, une véritable révolution dans le chant
liturgique, mais révolution qui, à l'encontre des autres,
ne pouvait amener que de bons résultats.
Depuis longtemps on avait perdu l'intelligence de ces
vieilles mélodies grégoriennes, le déchant et le mauvais
goût des liturgies jansénistes du XVIIP siècle avaient
absolument relégué aux rangs des énigmes les pages de
nos vieux manuscrits.
Aussi, les éditions de chant publiées alors furent
pitoyables. Embarrassés des « neumes » qu'ils ne savaient
comment traduire, les éditeurs sabraient à tort et à travers,
retranchaient Ih, ajoutaient ici, suivant leur caprice. Du
rythme qui est l'âme de la musique, il n'en était plus
question, et on en vint à ne voir dans les mélodies an-
ciennes qu'un chant à notes égales, lourd, sans âme, sans
vie, exécuté par d'âpres gosiers qui semblaient devoir
s'épuiser sur chaque note.
Les éditions publiées en France dans le XIX"' siècle
n'eurent pas beaucoup plus de mérite, sauf celle de la
Commission de Reims qui se rapprochait plus conscien-
cieusement des manuscrits. Mais cette édition elle-même
n'en était que plus indigeste parce qu'elle ne donnait pas
les règles d'exécution.
Ce fut le grand mérite de Dom Pothier de rechercher
dans les livres anciens les mélodies telles qu'elles étaient
sorties de l'âme de leurs auteurs. 11 exhuma des vieux
traités du moyen âge les règles d'exécution dont la trace
était perdue.
On hésita d'abord, mais la pureté des mélodies, le
rythme qui leur donne une âme eurent vite raison des
objections. Il fallut se rendre. Sans doute, le dernier mot
n'est pas encore dit; de tel ou tel perfectionnement dans
l'interprétation surgiront de nouvelles découvertes. La
méthode est susceptible de progrès.
Mais déjà les preuves historiques, les preuves techni-
ques sont surabondantes pour rendre indiscutable le sys-
tème du savant Bénédictin. Aussi, les controverses vin-
rent moins du côté des artistes compétents que du côté
des liturgistes à outrance.
Peu avant l'apparition du graduel bénédictin, l'éditeur
catholique Pustet de Ratisbonne avait reçu du Saint-Siège
le privilège d'être l'éditeur officiel des livres du culte. Un
décret postérieur avait prescrit de n'imprimer dans le
missel que le chant de Ratisbonne. On se retrancha der-
rière ce caractère officiel pour écarter l'édition bénédictine
devant l'édition prétendue obligatoire ; mais les mélodies
grégoriennes s'imposaient d'elles-mêmes. Le privilège
temporaire de l'éditeur Pustet est depuis quelque temps
périmé et n'a pas été renouvelé. Le chant de Dom Pothier
s'est propagé depuis en toute liberté et a été admis dans
nombre de Séminaires et d'Ordres religieux.
Le dernier bref de S. S. Léon XIII adressé à Dom
Delatte, daté du 17 mai dernier, en même temps qu'il est
le digne couronnement des efforts des Bénédictins pour
' la restauration du chant traditionnel, précise la liberté
laissée à tout effort « en vue de nouveaux résultats à ob-
tenir dans cette science ou dans cet art, pourvu qu'on
sauvegardela charité mutuelle, la soumission et le respect
qui sont dus à l'Église. >
Il ne sera plus permis de dire désormais (ce fut jadis
une objection courante) que l'exécution des mélodies est
presque impossible, car les ouvrages publiés par les Béné-
dictins i. sont désormais répandus au grand jour et sont
dans beaucoup d'endroits d'un quotidien usage ». Enfin,
connue on le voit dans le texte lui-même du Bref, le Pape
fait ressortir la grande puissance, le mérite merveilleux
de ces mélodies.
Nous sommes sûr que ce chant se répandra bien
davantage et que nous entendrons enfin dans nos églises
de vraies mélodies ayant un sens, un rythme et un chant
qui parlent à l'âme et au cœur.
chronique.
451
ffionumcnts anciens.
LA suite d'une visite faite à Angers
par M. Roujon, directeur des Beaux-
Arts, ont été classés parmi les monu-
ments historiques le logis Barrault
(musée actuel d'Angers), les ruines de l'impor-
tante abbaye Toussaint, célèbres par leurs voûtes
hardies, originales et typiques, si pittoresques
dans leur vêtement de verdure qu'on en fait
présentement un parc public, et l'ancienne église
Saint-Martin, occupée actuellement par le dépôt
des tabacs.
Dans sa dernière séance, la Société des Amis
des momuiicnts s'est occupée de deux questions
qui, pour le moment, intéressent vivement l'opi-
nion publique. D'abord, elle a tenu à renouveler
les protestations qu'elle avait déjà maintes fois
élevées contre toute altération du palais de la
place de la Bourse, et elle a exprimé le vœu que
l'Administration de la Ville et le Conseil muni-
cipal reviennent sur les décisions qu'ils ont déjà
prises à ce sujet. Puis, à propos de la question
des remparts d'Avignon, elle a décidé de trans-
mettre à M. le ministre de l'Intérieur, président
du Conseil, la protestation suivante :
« La Société, pénétrée des intérêts de l'art et de
l'histoire de la France, proteste contre toute démolition
de l'enceinte d'Avignon, démolition qui violerait le droit
de propriété indiscutable de l'État et serait pour toutes
les municipalités de France le pire des exemples. »
La démolition d'une grande partie des rem-
parts d'Avignon vient, en effet, d'être décidée
entre le ministère de l'Instruction publique et
des Beaux-Arts (qui, l'an dernier, se déclarait
« résolu à s'opposer par tous les moyens légaux
à toute mesure tendant à l'exécution de ce pro-
jet ») et la municipalité d'Avignon, avec l'agré-
ment de la Commission des Monuments histo-
riques.
C'est là, remarque le Courrier de l'Art, une vio-
lation flagrante de la loi, qui ne permet pas à
l'État d'aliéner quoi que ce soit de son domaine,
sans y être autorisé par un acte législatif.
Sur l'intervention de la Commission du Vieux-
Paris, on va procéder à la restauration de la
belle verrière de Saint-Germain-l'Auxerrois re-
présentant X Incrédulité de saint Thomas,
Une proposition ayant pour objet la création
d'une Commission archéologique du département
de la Seine, vient d'être soumise au Conseil
Général. Cette commission, analogue à celle du
Vieux- Paris dont les travaux sont limités à la
Ville de Paris même, permettrait dans certains
cas d'agir plus facilement dans toute l'étendue
du département de la Seine, où la Commission
du Vieux-Paris, rencontre parfois des mauvais
vouloir.Cette Commission départementale serait
divisée en quatre sections comprenant chacune
vingt membres. Quinze membres seraient choisis
parmi les archéologues locaux et les artistes
désignés par le préfet de la Seine ; les cinq der-
niers membres seraient pris parmi les membres
de la Commission du Vieux-Paris. M. Mithouard,
auteur de cette proposition, après l'avoir déve-
loppée dans la séance du Conseil de mercredi, a
obtenu qu'elle fût renvoyée à l'administration
pour y être sérieusement étudiée.
La Commission royale des monuments de
Belgique a appelé l'attention sur la curieuse
église de Forest, qui a failli faire place à une
neuve, mais qu'il importe de conserver.
On a classé l'église de Sensenruth (Belgique),
qui remonte au XV"^ siècle ; ses fenêtres ont des
meneaux d'un tracé original ; elles gardent un
panneau de vitrail du XVI*' siècle ; la base des
fonts remonte à l'époque romane ; ils étaient à
support central accosté de quatre colonnes ; un
morceau de la cuve est encastré dans le mur à
l'extérieur, de même qu'à Lessines.
M. l'abbé P. Daniels a décrit dans un rapport
adressé à M. le Gouverneur de la province de
Limbourg, les peintures murales qu'il a découver-
tes dans l'église de Zepperen. Elles sont de 1 509,
et représentent le Jugement dernier. Les murs
de l'église étaient polychromes « d'une manière
systématique ».
Des peintures murales ont été naguère décou-
vertes dans l'église de Wuestwezel (Anvers).
Signalons que cette église a gardé la croix
triomphale, reléguée dans la tour ; encore une à
remettre en place.
A Alost aussi (église St-Martin) ont été mises
à nu des fresques décorant la voûte du pourtour
du chœur; elles datent du XVI^ siècle.
L'église d'Havré(Mons), encore gothique, date
de la seconde moitié du XVI'" siècle ; elle est
digne d'une bonne restauration ; on va y pour-
voir.
L'église d'Hoegard (Brabant) du XVII !«
siècle, a été classée dans la s'"'^ catégorie des
monuments. Elle garde des fonts romans. Elle
est accostée d'un intéressant presbytère de
l'époque Louis XV, un type également classé.
La Commission des monuments s'est intéressée
aux restes de l'abbaye des Dames Nobles de
Herckenrode (Limbourg). On y voit un vaste
porche d'entrée du XV siècle, surmonté d'un
clocheton original, type superbe du style liégeois.
452
Bebur De V^xt cbrctten.
L'abbaye a été détruite lentement, sans nécessité.
Les démolisseurs, pris de scrupule, ont épargné
une ravissante cage d'escalier, à voûte rampante,
du XV'= siècle. On pourrait sauver ce qui reste
en l'affectant à une école agricole.
Après avoir restauré le chœur de la belle
abbatiale de Lisseweghe, on va s'occuper de ses
trois nefs, qui ont été grattées. On rétablira les
arcatures décorant les murs des bas-côtés ; on
couvrira le vaisseau d'un plafond en bois.
La vaste abbatiale de Saint-Hubert, à cinq
nefs, est aussi en voie de restauration. C'est un
des plus majestueux vaisseaux de la Belgique.
L'Hôtel-de- Ville de Looz, qui date de 1680,
réclame une restauration. L'église de cette loca-
lité remonte à l'époque romane, mais elle est
moderne, la tour est ogivale ; on garde les restes
d'un ancien cloître ; elle va être classée.
Solcsmcs.
OUS avons entretenu jadis nos lec-
teurs de l'érection de l'abbaye de So-
lesmes;(que leurs pieux habitants vont
peut-être devoir quitter pour l'exil,
grâce à la liberté large dont jouissent présente-
ment les sujets de la République française) (')
dont nous avons donné le plan, d'après le dessin
de deux architectes de ce remarquable monu-
ment, le R. P. Dom Mellet et M. Mellet, archi-
tecte à Rennes. Ce dernier est aujourd'hui Vice-
Président de la Société des architectes de Rennes;
son aîné, le moine, en est membre honoraire.Voici
ce qu'on lit à ce sujet dans XArcliitechire, \\° 26.
Une partie de ce monastère subsistait, consistant en
d'assez grands corps de bâtiments construits sous Louis
XIV. Nos confrères y ont ajouté, sur un plan réellement
magistral, des constructions considérables et une église,
tous ouvrages traités dans le style des premiers temps
du moyen-âge. Il leur avait sans doute semblé, à eu.K-
mêmes et à la communauté dont ils étaient les archi-
tectes, qu'une religion aujourd'hui consacrée par la foi des
multitudes de générations qui se sont succédé dans le
monde entier et sur notre sol de France, depuis près de
deu.x mille ans, appelait, pour l'habitation des membres
de l'un de ses ordres monastiques les plus anciens et les
plus illustres, la réalisation d'une manière d'art confinant
à son origine, manifestement écluse du pur sentiment
qu'elle a créé, et répondant à son idéal avec des intensi-
tés d'expression qui n'ont jamais été surpassées dans
aucun des styles d'architecture inventés depuis cette épo-
que lointaine.
Nous devons dire, quoi qu'il en soit, que cette ré-
surrection des formes romane et ogivale a donné lieu à
un édifice très remarquable, à coup sîir extraordinaire-
ment imposant dans la campagne où il est élevé.
Figurez-vous, tout près d'un petit village, sur une rive
de la Sarthe, de hautes murailles épaisses, encore conso-
j. V. Revue de l'Art chrilien, années 1899, p. 435 et 1900, p. 160.
lidées par des contreforts puissants, avec çà et là des
baies géminées, sous des arceaux bas, ou bien des tours,
des avant-corps, des nus de pierre tout unis d'une con-
struction bien accusée, somme toute, un édifice ayant
les apparences d'un de ces monastères fortifiés qui ser-
vaient de refuge aux familles des paysans d'alentour, en
un temps troublé par des guerres continuelles.
A l'intérieur, ce sont des désirs d'air et de lumière, le
souci d'une vie calme, paisible, recueillie, qui ont déter-
miné les formes des cloîtres tout à jour, des hauts réfec-
toires voûtés sur des colonnes trapues, des salles d'assem-
blée des religieux et de leurs cellules.
Les architectes ont d'ailleurs soudé à leurs ouvrages,
avec une grande habileté, les constructions du temps de
Louis XIV, traitées plutôt en façon de château rural, et
ont parfaitement compris et rendu les quelques adjonc-
tions de même style que nécessitaient les raccords. Ils
ont encore imaginé des aménagements de détails en rap-
port avec les usages de la vie de notre temps, notamment
une usine d'électricité, mais sans jamais perdre de vue la
vérité, la sincérité, la pure loyauté de leur point de dé-
part, sans rien sacrifier au piètre gothique de convention
si souvent pratiqué aujourd'hui. La note d'art qu'ils ont
réalisée est saine, dénote une élévation de pensée et de
sentiment peu commune. Je prie ces messieurs, en rece-
vant ce témoignage si moderne de l'estime de leurs con-
frères de la Société centrale, de croire à notre profond
respect pour l'idée maîtresse qui les a guidés dans tous
leurs travaux de l'abbaye de Solesmes.
KoutJcUcs.
N comité vient de se constituer dans
le but d'organiser l'an prochain, à
l'École des Beaux-Arts, .une expo-
sition rétrospective, historique et tech-
la gravure sur bois, envisagée au
double point de vue de l'estampe et de l'illustra-
tion du livre ; il a pour président, M. Auguste
Lepère, pour vice-présidents, MM. Henri Béral-
di, Roger Marx et Jean Masson. Afin de donner
à cette manifestation tout l'éclat qu'elle doit
comporter, le Comité organisateur adresse
un chaleureux appel aux amateurs possédant
des estampes gravées en bois, du XV« à la fin
du XVJe siècle, ou des livres à figures sur bois,
français et étrangers. Le Comité acceptera avec
reconnaissance les indications de nature à lui per-
mettre de rendre aussi complète que possible
l'exposition projetée. Toutes les coininunications
doivent être adressées au siège social du Comité,
67, rue Sainte-Anne, chez M. Loys Delteil, l'un
des secrétaires.
*
* *
M. Sellier, membre de la Commission du
Vieux-Paris, qui depuis quelque teinps fait pro-
céder à des recherches historiques dans les sous-
sols d'une ancienne église, y a découvert récem-
ment plusieurs sarcophages. Dans l'un d'eux se
trouvaient de nombreuses pierreries cloisonnées
nique
d'or, parmi lesquelles une broche mérovingienne
et une agrafe en or ayant servi À un manteau
royal de la même époque. Dans un autre sarco-
phage, M. Sellier a découvert quatre crânes, des
débris d'ossements humains, des aiguières en
bronze de l'époque gallo-romaine. Toutes ces
trouvailles ont été envoyées au musée déjà établi
chez M. Delaize, rue de la République.
Le bruit qui se fait depuis quelque temps
autour de l'installation, au musée Guimet, des
découvertes de M. Albert Gayet, et notamment
de la présence parmi ces découvertes, des restes
de Thaïs, chrétienne du IV^ siècle, a attiré
l'attention du cardinal-archevêque de Paris, Mgr
Richard. D'après les pourparlers entre les repré-
sentants de Mgr Richard, M. l'abbé Audollant
et M. Gayet, il semblerait résulter que la Thaïs
du musée Guimet d'abord prise pour une célèbre
courtisane est bien la Thaïs chrétienne du IV"^
siècle. Quant au Sérapion, qui fait partie aussi
des découvertes dont il s'agit, il s'est élevé des
doutes très sérieux sur son identité. Il a existé,
paraît-il, au moins deux cent soixante-douze
Sérapion qui ont été anachorètes.
La Bibliothèque de l'École des Beaux-Arts
vient de s'enrichir, grâce à la libéralité de la Direc-
tion des Beau.K-Arts, d'une magnifique série
de dessins originaux, exécutés par M. Gélis-
Didot d'après les peintures décoratives françaises
du XVIe au XVIII"-' siècle. Cette collection, qui
comprend 169 pièces en couleurs ou en noir,
complète à souhait une suite plus ou moins nom-
breuse, conservée dans le même dépôt et repro-
duisant les chefs-d'œuvre de notre peinture dé-
corative du XI'^ au XVI'^ siècle.
La coUectiond'objets d'art rapportée de Russie
par le savant explorateur, M. le baron de Baye,
et offerte par lui à la Ville de Paris, est depuis
plusieurs jours exposée au musée Galliera. Une
salle très artistiquement aménagée par le con-
servateur du musée, M. Ch. Formentin, lui est
tout entière consacrée. On y voit groupés tous
les échantillons, anciens et modernes, de l'art
industriel russe, depuis les bijoux qu'on fabrique
au Caucase jusqu'aux broderies exécutées par
des paysannes de la Petite Russie.
Une découverte d'une grande valeur artistique
a été faite à Venise dans l'église des Frari, qui
renferme, parmi d'autres tombeaux, celui de
Jacopo Marcello, le vainqueur de la bataille de
Gallipoli, mort en 1484. En nettoyant le mur de
l'église derrière ce tombeau, on a mis au jour
une magnifique peinture à fresque représentant
Jacopo Marcello à cette bataille, plus un grand
nombre de soldats, de chevaux, de prisonniers
de guerre, et un char triomphal. On attribue
cette œuvre à Giovanni Bellini (plus connu sous
le nom de Gianbellino) qui fut le réformateur de
l'École vénitienne et le précurseur de Titien.
Imprimé par Desclée, De Brouvver & €'■=, Bruges.
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nLiixxjij.-m:j.ii-iiir;nn.rtiriii]i-]LLlJtJ-iiJnriaiiiiir; -rti
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B>§» pacairisaiit tomî les bcuic m
= >^ ^
5)^ 44"'« Hnnce. — 5' Sene.
"^ Conu- XII ri.-- tie (a codcction).
E I I juillet dernier est
mort à Bruxelles l'ar-
tiste dont ma plume
vient de tracer le nom.
Il me semble opportun
de lui consacrer un sou-
venir dans cette Revue:
moins peut-être à cause de l'originalité et de
l'envergure de son talent, mais parce que,
par la pureté de sa vie et la noblesse de ses
aspirations, il offre un modèle qu'il est bon
de recueillir. On peut appliquer, dans une
certaine mesure, à Guffens ce que, peu de
temps après la mort d'Hippolyte Flandrin,
— avec lequel son œuvre n'est pas sans
analogie — on a écrit de ce dernier. « Sa
vie n'intéressait pas seulement le progrès
de notre art national, elle était aussi un
bon conseil, une leçon pour tout le monde,
depuis les jeunes artistes auxquels elle
enseignait le dévouement passionné au
devoir, jusqu'aux artistes plus avancés dans
la carrière qu'elle pouvait rappeler à la bien-
veillance envers les rivaux, à la générosité
envers les adversaires, et quelquefois au
respect de leur propre indépendance ('). »
Godefroid Guffens, — l'artiste, en vrai
Flamand, signait Godfried, nom qui peut se
traduire « la paix en Dieu», qui lui convenait
de tout point — est né dans une condition
voisine de la pauvreté, àHasselt, le 22 juillet
1823. Cette ville, on le sait, est située à
peu de lieues de Maes-Eyck où sont nés
les deux frères qui en ont immortalisé le
nom, et c'est dans cette même région qu'ont
vu le jour Paul de Limbourg et ses frères,
les admirables artistes qui, au service du
duc de Berry, ont peint le chef-d'œuvre
connu sous le nom de livre d'heures de la
Bibliothèque de Chantilly. Guffens était
donc l'enfant d'un sol qui a produit de très
grands artistes et dont la fécondité ne
semble pas épuisée. Son père, issu d'une
des bonnes familles de la ville, avait perdu
ses parents à l'âge de sept ans ; abandonné
à lui-même, son éducation était ce qu'elle
I. Lettres et pensées d'Hippolyte Flandrin, par le Vie''
Henri Delaborde. Notice biographique, p. i.
REVUE DE I.'aRT CHRÉTIEN.
1901. — 6"**^ LIVRAISON.
456
îRcbuc br rSvt tlKCttcn,
avait pu devenir. Il s'était marié jeune, et
pour subvenir à la subsistance de la famille
qu'il venait de fonder, il établit une bou-
langerie.
Si le patrimoine était maigre,la bonne fée,
qui sans doute avait été invitée à temps au
baptême du premier enfant né de cette
union, ne permit pas qu'il sentît les étrein-
tes de l'indigence. Le père ne pouvait guère
lui donner une éducation qu'il n'avait pas
reçue lui-même, mais la maison qu'il habi-
tait étant spacieuse, il en loua une partie à
une dame du nom de Soiron, qui, dans
l'appartement qu'elle occupait, ouvrit une
école pour jeunes filles. La dame était ins-
truite et de bonnes manières; son institut
fut bientôt fréquenté par les jeunes person-
nes des meilleures familles de Hasselt.
Voyant le jeune Godefroid un peu aban-
donné, attirée d'ailleurs par le caractère
simple et aimable de l'enfant, elle le prit en
affection, et bientôt commença son éduca-
tion en lui apprenant à lire et à écrire. Seul
de son sexe, il fut admis à fréquenter la
classe des fillettes ; il s'y trouva naturelle-
ment un peu en enfant gâté. La direction
maternelle de la maîtresse et la société de
ses petites compagnes exercèrent une in-
fluence durable sur le caractère doux et
réservé du petit intrus. Voulant, de son
côté, se rendre utile à l'établissement où il
était si généreusement accueilli, il taillait
les plumes des élèves, — à cette époque on
ne connaissait pas l'usage des plumes
métalliques, — et il crayonnait des dessins
de broderie à leur usage. C'était la première
clarté des vues de la Providence sur l'ave-
nir de l'enfant.
Madame Soiron ayant reconnu ses dis-
positions pour le dessin, l'envoya à une
école du soir tenue par un peintre décora-
teur qui passait pour avoir une bonne mé-
thode d'enseignement. Conformément à
l'usage suivi alors par toutes les académies,
il mit le débutant au dessin des principes,
c'est-à-dire qu'il lui fit crayonner les dif-
férentes parties du visage humain: pour son
début Guffens eut à dessiner un œil ; il s'y
mit avec un tel entrain que, longtemps
avant la fin de la leçon, son papier était
couvert d'une collection d'yeux, tous plus
exacts les uns que les autres. Sa prestesse
causa une révolution parmi les gamins qui,
observant le nouveau venu, s'étaient, à son
insu, groupés autour de lui. Quand le petit
Godefroid s'en aperçut, il fut pris de con-
fusion et n'osait lever la tète de dessus
son papier. Dès ce moment, il fit de rapides
progrès, tout en continuant à composer des
dessins de broderies pour ses compagnes
de la classe du jour.
Ce fut une de ces compositions qui lui
gagna un protecteur, dont la générosité lui
permit de suivre un enseignement d'ordre
plus élevé, à l'Académie d'Anvers.
Le propriétaire du château de Herc-
kenrode, tout proche de Hasselt, dont
la fille était élève de Madame Soiron,
M. Ulysse Claes, était un ami des arts :
à cette époque, il se faisait un plaisir de
recevoir chez lui les artistes les plus con-
nus, notamment les musiciens. Servais,
Vieuxtemps, Léonard, Blaes formaient le
cercle de son choix ; un soir où ces mes-
sieurs se trouvaient réunis au château, la
jeune fille de leur hôte travaillait à une
broderie dont le dessin attira l'attention.
On trouva le modèle excellent, décelant
chez son auteur un véritable talent: lorsque
la jeune personne fit connaître les débuts
de l'enfant qui l'avait tracé, on fut unanime à
croire que tous les indices annonçaient un
artiste. Le projet d'envoyer le jeune dessi-
nateur à l'Académie d'Anvers pour y faire
des études en rapport avec ses dispositions
surgit naturellement, et ce fut le maître de
dBodefrott) 6gtt)e (I5iiffcn0.
457
la maison qui résolut de réaliser cette
pensée.
Peu de temps après, M. Ulysse Claes, ac-
compagné de son fils, voulut conduire lui-
même Guffens, alors âgé de quinze ans, à
l'Académie d'Anvers. Le ii octobre 1838,
ils montèrent ensemble dans la diligence
qui les transporta à Louvain pour prendre
le train d'Anvers, où ils arrivèrent dans
l'après midi. Ils descendirent à l'hôtel des
Pays-Bas, fréquenté par les artistes et ils
dînèrent le jour même avec Dekeyser, Leys
et Godecharles, qui tous trois jouissaient
déjà d'un véritable renom.
Guffens fut immédiatement admis à fré-
quenter l'atelier de Dekeyser, où se trou-
vaient une trentaine d'élèves, tous plus âgés
que lui, tous plus avancés dans l'étude de
l'art; aussi les débuts lui semblèrent durs.
Mais à l'académie les places étaient
occupées. Dans son désir d'y trouver admis-
sion, le nouveau débarqué s'y rendait
chaque soir pendant trois semaines, mais
revenait toujours tristement, n'ayant pu
aboutir. Enfin M. Corr, professeur de la
classe, touché de la persistance de Guffens
et du chagrin que lui causaient ses décon-
venues, demanda à un élève du nom de
Jean Swerts, si, se gênant un peu, il ne
pouvait lui céder la moitié de sa place.
Swerts accéda de bonne grâce ; ce mouve-
ment d'obligeante camaraderie fut le point
de départ d'une amitié étroite et fidèle
jusqu'à la mort. Elle aboutit en peu d'années
à une collaboration des plus fécondes.
Guffens arrivait à Anvers au bon mo-
ment. C'était une époque de fermentation,
d'enthousiasme, d'essor. C'était l'entrain de
la jeunesse de la patrie et du renouveau de
l'art. Le respect des traditions du passé
illuminait les espérances de l'avenir. De-
keyser ouvrait l'horizon aux plus belles
visions des jeunes, et les vieux étonnés
avaient applaudi à ses débuts. Son atelier,
nous venons de le voir, était encombré
d'élèves. Guffens apprenait à y monter sa
palette en même temps que Verlat, le
brosseur merveilleux, le fougueux animalier.
Un grand nombre de jeunes artistes qui
ont marqué dans l'histoire moderne de
l'école flamande, en étaient à leurs premiers
essais. C'était l'époque des débuts de Leys
qui fit école, de Joseph Lies, peintre excel-
lent, quoique peu productif, du pieux et
tendre Hendricx, le maître du chemin de
la croix de Notre-Dame d'Anvers et de
nombre d'autres peintres qui presque tous
avaient ce qui s'est perdu depuis, des
convictions, de l'ardeur au travail et le
désir de reprendre la palette chatoyante de
l'école flamande.
A tout cela se mêlait bien une certaine
dose de romantisme qui devait bientôt se
volatiliser et s'assagir. Guffens peignit
alors son tableau « Rouget de l'Isle, chan-
tant la Marseillaise » exposé à Paris en
1849, et acquis pour le Musée de Philadel-
phie ; en 1845, il avait déjà envoyé au Sa-
lon de Paris un saint Paul, et puis « une
marchande de crevettes d'Anvers ».0n voit
qu'il s'essayait un peu à tous les genres, et
dès le commencement les succès ne lui
manquèrent point. Il fit plusieurs voyages
à Paris, ce qui lui procura l'occasion
de connaître Ary Scheffer dont il avait le
talent en très haute estime; dans la sincère
admiration que lui inspiraient les œuvres
religieuses du maître, il trouva peut-être des
lumières pour la voie qu il devait suivre lui-
même. Aussi, tout en se faisant connaître
dans les expositions du pays et de l'étran-
ger, en peignant des tableaux de chevalet
et des portraits, l'horizon des idées du jeune
peintre s'élargissait, ses aspirations vers le
but qu'il entrevoyait s'élevaient. Les con-
versations qu'il avait avec son ami Swerts,
458
3Rr\)uc De V^vt chrétien.
étaient de nature à le fortifier encore dans
le désir de donner un but déterminé à ses
rêves d'avenir. Vers 1850, les deux frères
d'armes, alors déjà en pleine possession des
procédés techniques de leur art, fortifiés
par quelques succès, mais avides de progrès,
entreprirent en Allemagne et en Italie un
voyage qui dura deux ans. Si naturelle-
ment leur enthousiasme pour l'art s'exalta
à la vue des œuvres des grands maîtres
du pays où fleurissent les orangers, et si
dans mainte fresque ils puisèrent de pré-
cieux motifs d'étude, ils trouvèrent «n
Allemagne les peintres vivants dont les
œuvres les stimulaient à un haut point.
Grâce aux pages monumentales des Over-
beck, des Cornélius, des Kaulbach, des
Rethel et de beaucoup d'autres artistes
aux grandes vues, il s'était produit un
mouvement en faveur delà peinture monu-
mentale, des fresques et de la décoration
murale au moyen de compositions religieu-
ses et historiques, qui impressionna vive-
ment les deux flamands cherchant leur voie.
Ayant une haute idée de la mission de l'art,
ils voulurent s'inspirer des mêmes principes
et résolurent, sans désavouer leur nationa-
lité, sans faire violence à leur tempérament
personnel, d'importer dans leur pays un art
qui, en Allemagne, avait produit des œuvres
dignes de leur admiration. L'esprit méditatif
et l'intelligence très compréhensive de
Guffens le portaient naturellement à voir
les choses d'un point de vue que l'on ne pou-
vait taxer d'exclusivement professionnel.
Pour lui, comme pour son confrère, la
peinture murale devait être pour le peuple,
— et par ce mot ils comprenaient toutes les
classes de la société, — une source d'édifi-
cation, d'enseignement, de méditation, à
l'église ; et, dans les monuments civils, —
une incitation aux idées, un enseignement,
le moyen de renouer les traditions du pa-
triotisme et d'alimenter l'amour du pays
natal.
De retour en Belgique, ils se mirent
énergiquement au travail. Les peintures
murales de l'église paroissiale de la ville de
St-Nicolas furent un début qui rencontra
le succès et obtint des encouragements.
Adolphe Siret, dans \ç. Journal des Beaux-
Arts, se montra l'appui fidèle des peintres,
et le juge sympathique de leur tendance
qui, en Belgique, ne répondait peut-être
pas de tout point aux traditions reçues,
et au tempérament national, bien que Por-
taels eût, de son côté, tenté, à cette époque,
quelques essais de peinture monumentale.
Après l'église de N.-D. de St-Nicolas, les
deux peintres entreprirent le décor de
l'église de S t-Georges à An vers (1859- 1868).
Dans ce cycle considérable, qui ne comporte
pas moins de quatre-vingts panneaux, les
artistes voulurent grouper leurs composi-
tions de façon à représenter les trois gran-
des phases de l'Église militante, souffrante
et triomphante. Au cours de l'exécution de
ce vaste ensemble, les artistes n'ont peut-
être pas su s'affranchir assez complètement
du modelé et des effets trop concentrés
de la peinture de chevalet.
De même que son frère d'armes Jean
Swerts, Guffens n'était pas seulement
praticien habile, enthousiaste de l'art, c'était
encore un penseur, un esprit cultivé, qui
savait au besoin recourir à la plume lorsque,
mieux que le pinceau, cet instrument con-
venait plus à la diffusion des idées qu'il
voulait faire triompher. On doit à la colla-
boration de Guffens et de Swerts plusieurs
essais littéraires qui sont loin d'être dénués
de mérite et peuvent encore être lus avec
intérêt, surtout au souvenir des circonstan-
ces qui les ont fait naître. C'est ainsi que
l'on doit aux deux amis : Souvenirs diin
voyage artistique en Allemagne. C'est, en
Hetiuc Dc l'Hrt cïjtcticn.
Pl. X.
Goïirfroiti=6giïic (âuffms.
La sainte Vierge et saint Jean au pied de la Croix.
{Peinture murale de l'église N.-D. à Saint-Nicolas.)
(15ot)efroîti'6gîde 6uffen0.
459
vérité, un rapport détaillé au ministre de
l'intérieur de Belgique, qui lui fut adressé
à l'occasion de l'Exposition universelle de
Paris en 185S ('). Un travail de même
nature est le Rapport sur t Exposition
historiipie de Munich ('). Cette exposition,
très remarquable, avait été organisée par
l'Académie de Munich, qui, voulant fêter
le cinquantième anniversaire de son exis-
tence, avait ainsi résumé, pour ainsi dire,
l'histoire de l'art allemand, pendant le
dernier demi-siècle. Il y figurait 1762 ta-
bleaux, cartons, aquarelles et gravures, 138
sculptures et 310 dessins d'architecture.
Malgré le ton un peu enthousiaste de cette
revue, on y trouve, dépouillée des formules
officielles, l'impression des auteurs et on ne
peut qu'admirer la forme variée de leurs
jugements où la critique n'a pour ainsi dire
aucune part, en présence de la multitude
d'oeuvres passées sous leurs yeux. Il y a là
de la jeunesse, de la sève, et pourtant le désir
d'être équitable. D'autres petits travaux,
Lettres sur t Ile de Capri, et Lettres stcr
Naples, sont des impressions de voyage, et
ont été lus avec intérêt, à l'époque où ils
ont paru.
Je pense que ce sont aussi les deux ar-
tistes qui ont réuni en brochure et publié
l'intéressante discussion sur la peinture
murale qui se poursuivit à la Chambre des
représentants de Belgique, du 24 au 27
février de l'année 1863.
Les peintures murales qu'ils avaient exé-
cutées étaient à la fois un signe de force et
le manifeste d'une conviction. La peinture
sacrée convenait de tous points au génie
de Guffens à la fois méditatif et travailleur,
dont l'énergie ne redoutait pas les thèmes
les plus complexes de l'histoire religieuse.
Quelques-unes de ses compositions devin-
1. Messager des sciences, Gand, 185g.
2. Monileur, 1858.
rent populaires; elles attirèrent sur l'artiste
l'attention de ses compatriotes et même
l'admiration des étrangers. C'est ainsi que
Mi^e Jameson, dans son intéressant livre
The history 0/ our Lord, passant en re-
vue les peintures par lesquelles plusieurs
des anciens maîtres d'Italie et de la Flandre
ont représenté le grand drame du Golgotha,
dont elle donne des reproductions gravées,
y ajoute la réflexion suivante : « Plusieurs
peintres modernes ont voulu représenter
laVierge Marie, accompagnée par saint Jean,
après le supplice du divin Crucifié. Mais
leur douloureux adieu au Calvaire n'a guè-
re été tenté que par M. Guffens d'Anvers,
dans la fresque de l'église St-Georges de
cette dernière ville, représentant la sainte
Vierge saisissant la main du fils qu'elle
vient d'adopter, tandis que tous deux, sous
le bois de la croix, sont courbés par la
douleur. La scène est si touchante et d'un
sentiment si vrai qu'il est difficile de la
voir sans émotion ('))). Nous reproduisons
cette composition, d'après une gravure
déjà ancienne, éditée par la Société pour
la diffusion des bonnes images, de Dussel-
dorf.
Au cours de sa laborieuse carrière Guf-
fen sa peint un certain nombre de portraits.
Parmi les personnages qui ont posé devant
lui, on cite feu Thonissen, ancien ministre
en Belgique, la princesse Nathalie Esch-
born, duchesse de Wurtemberg, le comte
I. But their tearful greeting before they left Calvary
has scarcely been attempted but by M. Guffens of.'\nt-
werp, whose fresco in St. George's Churcli in that city,
representing the Virgin takingtlie liand of her just-adopt-
ed son, eacli bowed with grief, is so touching, and so pro-
bable in sentiment that no one can look at it unmoved.
<L The history of our Loni, tomincitced by the late M''' Ja-
meson, continucd and compleied by Lady Easttake. > Lon-
don, Longman, Green and C, 1872, t. II.
Il est assez étrange que, dans le texte du volume,
p. 159, la fresque est désignée comme se trouvant à
l'église St-Georges, d'Anvers^ tandis que la gravure dé-
signe la peinture comme e.xistant à l'église de N.-D. de
St-Nicolas ; ce qui est e,\act.
460
îRcbuc ïie rSrt t{)réttetu
et la comtesse Emile deT'Serclaes,le comte
Duval de Beaulieu, le baron Orban de Xi-
vry, gouverneur du Luxembourg et beau-
coup d'autres notabilités. Les portraits sont
en général la pierre de touche de la j)uis-
sance technique de l'artiste, de sa force
d'interprétation en présence de la nature.
Les portraits de Guffens donnent-ils bien
la mesure de son talent: sont-ilsvivants, ont-
ils tout le relief plastique nécessaire, et
mettent-ils en présence d'uncaractère, d'une
personnalité ?Je n'oserais l'assurer. L'artiste,
dans sa simplicité, disait que ses portraits
avaient toujours l'approbation des mem-
bres de la famille du personnage qu'il
venait de peindre, mais que ce succès ne
s'affirmait pas lorsque le même portrait fi-
gurait aux expositions publiques. Cette
appréciation caractérise assez bien la ma-
nière du peintre dans ce genre particulier.
Il y avait toujours de la noblesse dans la
conception ; mais il y a aussi une certaine
négligence voulue des détails qui, pour être
caractéristiques, tendent parfois à rendre la
physionomie vulgaire. Guffens n'avait pas
l'intention de flatter, mais il généralisait ; il
voulait élever son point de vue. A vrai dire,
ses portraits constituent pour les familles un
souvenir précieux. Ils gagnent de la réalité
lorsque le modèle n'est pas présent pour
servir de point de comparaison, ou qu'il
n'est plus ; ils prennent de la vie lorsque
celui qu'ils représentent a cessé de vivre.
C'est l'harmonie fine existant entre l'âme et
la dépouille passagère qui séduisait l'artiste.
C'est ainsi qu'on aime à retrouver l'image,
comme entourée d'une sorte d'auréole, de
ceux que l'on ti aimés.Je me souviens avoir
vu le portrait, posthume si je ne me trompe,
d'un jeune homme dont l'artiste avait fait à
plusieurs reprises le portrait aux différentes
phases de son adolescence et qui. .'ils
unique, avait, à l'âge de trente trois ans.
été enlevé à l'amour de sa mère, à l'amour
des pauvres dont il s'était fait l'ami et
aux bonnes œuvres dont il était l'âme ('). Le
portrait était placé sur un chevalet, dans le
cabinet de travail de la dame, et un bou-
quet de fleurs, chaque jour renouvelées,
était placé devant l'image du défunt. Dans
une autre circonstance, j'ai vu, dans un
château au bord d'im des affluents de la
Meuse, le portrait d'une jeune fille, remar-
quable par sa beauté comme parla sainteté
qui caractérisait sa physionomie. La toile
était placée dans une sorte d'oratoire, à
côté de la chambre de la mère, où celle-ci
allait dire ses prières du matin et du soir, y
associant sans doute l'image de sa fille qui
semblait chercher le pardon d'une sépara-
tion peut-être cruelle, par une irrésistible
vocation. Voilà l'atmosphère qui semble
convenir aux portraits de Guffens ; ils ne
sont pas destinés au public. L'image doit
évoquer l'âme de ceux qui ne sont plus au
cœur de ceux qui les ont aimés. On ne sera
pas surpris d'apprendre que souvent Guf-
fens est resté l'ami des familles où il a peint
des portraits. Guffens a fait son propre
portrait pour le Musée d'Anvers, où, comme
à Florence, on cherche à réunir les effigies
des peintres tracées par leur propre pinceau.
Le cadre de cette notice ne me permet
guère d'entrer dans l'examen des travaux
considérables exécutés en collaboration
par Guffens et Swerts. Les deux peintres,
étaient très laborieux, et quoique leurs
compositions fussent châtiées et suffisam-
ment achevées, leur manière de peindre,
grâce à des carions très étudiés, était ex-
pédiiive.
Il faut citer cependant les peintures mu-
rales de la salle gothique de l'hôtel de ville
de Courtrai, où Guffens a cherché à carac-
1. Le comte de Stainlein Saalenfeld, ►J» le 21 août 1SS2.
d^odefroiti CgiDe (^uffens;.
461
tériser les types de la Société du moyen
âge; le Clergé, la Noblesse, la Bourgeoisie;
les peintures delà chapelle de Well-Bundel,
en Angleterre ; une via crucis'k l'église St-
Ignace à Anvers ; les peintures murales du
chœur de l'église St-Joseph et les panneaux
de la chapelle Ste Barbe à Louvain ; les
peintures monumentales de l'une des salles
de l'hôtel du baron de Schilde à Anvers ;
elles représentent l'histoire de la famillevan
de Werve. Enfin, il est impossible d'oublier
l'épisode si douloureux de la collaboration
des deux artistes qui, de 1855 à 1S58, vouè-
rent un travail exclusif et persévérant à ce
qu'ils regardaient comme une œuvre de pré-
dilection, les peintures murales de la cham-
bre de commerce à la Bourse d'Anvers ;
à peine terminé, ce cycle de peintures, dans
le terrible incendie qui dévora tout l'édifice,
devint la proie des flammes. Cette catas-
trophe attrista profondément les deux
collaborateurs, mais ne les découragea pas.
Leur travail en commun, dans des œuvres
de même nature, continua jusqu'en 1874,
époque où Jean Swerts accepta la direction
de l'Académie de Prague.
S'il fallait suivre pas à pas les différentes
phases de l'existence de Guffens et l'histoire
de ses travaux, on trouverait que sa biogra-
phie se lie assez intimement à l'histoire de la
peinture en Belgique dans la seconde moitié
du dix-neuvième siècle, et cependant ses
aspirations les plus intimes trouvaient une
satisfaction bien incomplète dans les tradi-
tions comme dans les voies nouvelles de
la peinture flamande. Son but avait été de
rendre à l'art national une ampleur que la
peinture murale seule peut donner, un nou-
vel essor par l'alliance plus intime de la
peinture avec l'architecture.
Dans son ensemble la carrière de Guf-
fens fut heureuse ; si, comme tous les vérita-
bles artistes, il ne réalisa pas dans sa pléni-
tude l'idéal qu'il avait rêvé, les succès et
les distinctions de toute nature ne lui furent
pas refusés. Il était membre de l'Académie
royale de Belgique, correspondant de
l'Institut de France, membre d'honneur des
Académies royales d'Amsterdam, de Baviè-
re et de Saxe, commandeur de l'Ordre de
Léopold, officier et chevalier de plusieurs
Ordres étrangers ; mais ces distinctions,
qui souvent éblouissent ceux qui en sont
l'objet, ne portèrent aucune atteinte à sa
modestie naturelle et à sa simplicité.
La dernière période de la vie de Guffens
n'a pas été la moins laborieuse ; elle n'est
pas non plus la moins intéressante à étu-
dier, bien que, comme peintre, il eût cessé
d'être lui-même, c'est-à-dire de donner la
forme et la vie à ses propres inspirations.
L'âge était survenu, mais les années ne lui
avaient apporté ni le dégoût du travail, ni le
besoin de repos. Il se fit copiste, mais copiste
inspiré, amoureux des grands maîtres ita-
liens, des quatrocentistes particulièrement;
il reproduisait leurs créations avec ardeur,
avec intelligence; dans l'étude intime de
leurs œuvres, il se délectait, parce qu'en elles
il voyait réalisée dans toute son ampleur,
la peinture de grand style qu'il avait rêvée.
Pour beaucoup ce changement de travail
et cette sorte d'abdication parut une énig-
me. On pouvait se demander ce qui por-
tait l'artiste septuagénaire, déjà souffrant
d'une première atteinte du mal auquel il
devait succomber, à renoncer au genre de
peinture qui, jusque-là, avait rempli sa vie.
Ce ne pouvait être l'esprit de lucre assu-
rément, le placement de copies étant tou-
jours chose douteuse; sa situation le rendait
d'ailleurs indépendant du produit de son
travail. Ce ne pouvait plus être le désir
d'étudier les grands maîtres pour surpren-
dre les secrets de leurs procédés techniques,
de se pénétrer de leur style et de la formule
462
Wit\)m ïic r^rt cljrcttnu
de leurs conceptions en vue des travaux
d'un avenir que Guffens ne pouvait espérer:
le mobile de ce travail poursuivi avec une
singulière persévérance devait être d'une
tout autre nature.
En réalité, l'artiste était dérouté et même
dégoûté des évolutions rapides, parfois
insensées dans leurs excès, de l'art qu'il
* ...
voyait pratiquer autour de lui ; il était
fatigué des utopies suivies de déceptions de
Tart nouveau. Il sentait la jeune généra-
tion, en proie à l'anarchie des idées et des
principes d'art, lui échapper et c'est avec
raison qu'il prévoyait que de moins en
moins, il trouverait un public apte à com-
prendre et à goûter les grandes pages mo-
numentales, correctes, d'un style châtié qui
avaient servi à l'expression de son art à lui,
et dont, pendant une série d'années, on
avait vu les cartons figurer avec succès
aux expositions du pays et de l'étranger.
C'est à ce retour aux enthousiasmes de
ses années d'études que l'on doit quelques
excellentes copies incorporées aujourd'hui
au Musée de la peinture monumentale du
Parc du Cinquantenaire à Bruxelles : saint
Laurent distribuant les aumônes aux pau-
vres de la chapelle de Nicolas V au Vatican,
par Jean de Fiesole ; le pape Sixte IV avec
Platina, de Melozzo da Forli, au même
palais; l'Annonciation et la Fuite en Egyp-
te, par Giotto, de la Chapelle de l'Arena à
Padoue, et bon nombre d'autres fresques,
rendues dans leur esprit, leur style et leur
tonalité.
Cet exil que le peintre s'imposait chaque
année six ou huit mois, accompagné de sa
fille Hubertine. laquelle est aussi artiste, et
qui tout en l'aidant dans son travail, sem-
blait son ange gardien, était pour son âme
une sorte de fontaine d(î Jouvence où il re-
trempait ses forces et les joies de ses jeunes
ans ! Rentré dans son atelier avec les œu-
vres des maîtres qu'il avait fait siennes, il
organisait une exposition à laquelle il con-
viait ses amis et tous ceux qu'il croyait à
même d'apprécier l'expression du génie des
siècles passés. Avec quelle joie il en dis-
sertait et cherchait à en faire ressortir les
grandeurs! Malgré la difficulté qu'il avait
à s'énoncer, à la suite d'une crise qui cepen-
dant n'avait eu aucune prise sur son intel-
ligence, son œil pétillait lorsqu'il voyait que
son travail était compris et son admiration
partagée (').
La dernière fois que je l'ai vu, il était
couché sur son lit de douleur ; une nouvelle
atteinte du mal dont il souffrait avait pa-
ralysé tout le côté gauche et, en constatant
qu'il ne pouvait plus tenir la palette, une
larme furtive perlait sous sa paupière ;
mais dans le regard il y avait encore cette
résignation du chrétien qui ne renonce pas
à l'espérance.
II ne devait plus reprendre ses pinceaux.
Les copies rapportées de son dernier
voyage en Italie étaient le chant du cygne
d'une vie d'artiste laborieuse et bien rem-
plie, arrivée aux termes de ses joies et de
ses épreuves.
Jules Helbig.
1. 'Voyez Revue de t Art c/irt'lie>t, année 1S98, p. 114
et ss.
V A^Vik >.^^ A^Vt \^A >Ma A^A iMi^ A^gx i^^X A^^ A^A a'^ A^V^ A^iC A^V^ >^
tTTTTTTt-lfTTTTTTTTrïTTTTTTrTTTTTIÏTTirTrTrTrrriITTTTrTrrtrmrTTtnTTTTrTrin
II iirrrrxizrjiXiriiiiicTiirm 2
lies Origines ïie rHrcf)itecture got{)ique
Hcs Kcemicrcs Croisées O'OgiDcs en Hnglctcrre, par John Bilsox.
□cTiixrTrjtTiixTjriixiiirxiTiiiirKiijiiintiiiiriTxiiJiiiixiiixiiiiiiii:ixi3Liixiii3LLiiiiiirxj^
niTTnnnt]
I
intii iTTTrm-ii'^ ^
^^Atl-^ ^iil^ ^A^l^ ^S.'' ^S:'< *A^1^ *A*Î^ ^aAI^ ^^^ ^Atl* ^Ail^ ^Aiî^ ^^^ ^Ail^ ^A^^:^
pal. Les piliers du chœur de l'église St-Ni-
colas à Caen et ceux de St-Georges de
Boscherville (/j^. 26.) peuvent être pris
comme un exemple frappant à l'appui de
ce fait ('). Nous y trouvons de chaque côté
du massif du pilier un groupe de trois
colonnes engagées destinées à recevoir la
retombée des grands arcs qui sont doublés.
Une colonne est disposée pour recevoir le
doubleau des voûtes d'arête du collatéral,
et il existe symétriquement, du côté de la
BANDONNONS maintenant
cette partie de notre sujet pour
étudier les voûtes lancées au-
dessus du vaisseau central des églises.
J'ai dit, plus haut, que le but des archi-
tectes normands ne consistait à rien moins
qu'à couvrir de voûtes de pierre toutes les
parties de leurs églises. La disposition des
piliers nous indique très clairement qu'après
avoir voûté les bas-côtés, ils ont immédiate-
ment cherché à voûter le vaisseau princi-
5AINT- NICOLAS. CAEN
5AINT-CE0RCE5 de B05CHERVILLE
Fig 26. — Plans des piliers des chœurs.
nef, une colonne correspondante. Si nous
tenons compte de la logique remarquable
et très caractéristique que les constructeurs
normandsont toujoursobservée dans l'agen-
cement des supports, en vue de la retom-
bée des arcs et des voûtes, il semble bien
que cette colonne engagée que l'on trouve
dans la nef sur la face des piliers ne puisse
avoir d'autre fonction que de recevoir une
voûte ('). Cela ne peut être mis en ques-
1. 2'""' partie ; voyez la i'" partie, page 365.
2. On ne trouve pas de colonnes dans le vaisseau cen-
tion pour les deux monuments cités, dont les
chœurs ont conservé les restes des voûtes
d'arête primitive ; d'autres exemples analo-
tral des monuments aussi anciens que la Basse-Œuvre
à Beauvais, ou encore dans la nef de Bernay où existe
seulement une charpente apparente. On n'en rencontre
pas non plus dans les églises suivantes du .Soissonnais,
citées par M. Lefèvre-Pontalis et attribuées par lui à la fin
du XI' siècle : Berneuil sur-Aisne, Montlevon, Jouaignes,
Oulchy-le-Château et St-Léger-aux-Bois. Il en subsiste
des traces dans la nef de Morienval(milieu du X!= siècle),
et M. Lefèvre-Ponialis suppose que cela indique peut-
être chez l'architecte Fintention de couvrir la nef d'une
voûte qu'il n'aurait pas osé construire {o/>. cit., I, p. 196).
I. Cf. nef de Lessay, fig. 20.
RKVUE OE l'aKT CHRÉTIEN,
igoi. — 6'"*^ LIVKAtSON.
464
3Rrbuc lir V^vt cbréticiu
gués subsistent, du reste en Normandie,
dans les chœurs de Noire-Dame-sur-l'Eau
de Domfront et de la Trinité à Caen (').
Il est vrai que dans la majorité des édifices
anglais, dans lesquels on l'observe, cette
colonne ne supporte pas présentement de
voûte, mais qu'elle est simplement montée
jusqu'en haut du mur et quelquefois se
termine sous la charpente d'une manière
peu logique. Quoi qu'il en soit, le but
poursuivi en disposant cette colonne, ne
peut certainement avoir été de supporter
simplement l'entrait de la charpente, ainsi
qu'on l'a souvent affirmé ; il faut donc
accorder aux architectes qui l'ont systéma-
tiquement prévue dans leurs constructions,
l'intention de voûter le vaisseau central,
quoique, dans beaucoup de cas, ils n'aient
osé poursuivre jusqu'au bout l'exécution de
leurs plans. Le demi-berceau qui existe
encore, derrière le triforium du chœur, dans
la cathédrale de Gloucester ('), semble avoir
été disposé pour contrebuter la voûte haute
du chœur ; nous n'avons toutefois aucun
moyen de savoir si cette dernière a jamais
été exécutée. Ainsi qu'on peut l'observer
dans plusieurs monuments, le chœur était
voûté, alors que la nef et le transept étaient
seulement couverts de charpentes appa-
rentes ; malheureusement, la partie des
églises qui a été le plus souvent remaniée
à une époque postérieure, est précisément
le chœur. Il n'est, du reste, pas téméraire
de supposer que ce soit la ruine de ces
voûtes anciennes qui, dans un certain
nombre de cas, ait pu rendre ces recon-
r. Le chœur de St-(jeor<;es-de-Bosclierville est proba-
blement des piemicres années du XII'' siècle et les trois
autres datent du courant du .XI" siècle. Rupricli-Robert
assigne rojo environ comme date à Notre- Dame-sur-
l'Eau à Domfront.
2. Cf. La voûte en demi-berceau au-dessus des tribunes
de la nef à St-Etienne de Caen. Les amorces d'une voûte
similaire subsistent encore à Cerisy-la- Forêt, dans la
tribune du chœur.
structions nécessaires. Que cette raison
soit exacte, ou que la tradition de la
couverture en charpente soit demeurée
prépondérante en Angleterre, il nous reste
très peu d'exemples de ces voûtes primi-
tives jetées au-dessus des nefs principales.
Celles d'entre elles qui subsistent sont tou-
tes des plus précieuses ; mais il se pourrait
que des recherches plus étendues viennent
encore ajouter aux données que nous pos-
sédons à leur égard.
A ma connaissance, l'exemple le plus
ancien d'une croisée d'ogives édifiée au-
dessus d'une nef principale, dont le souvenir
nous ait été conservé en Angleterre, se
trouvait dans le chœur de la cathédrale de
Durham ; cette voûte primitive a été recon-
struite au XI 11^ siècle. Aussi la plus an-
cienne croisée d'ogives qui subsiste encore
en Angleterre est probablement celle qui se
trouve dans le bras nord du transept de
cette même église. Les caractères de la
construction, l'analogie de toutes les voûtes
de ce monument remarquable, les données,
enfin fournies par les documents, nous
permettent de parler, avec quelque pré-
cision, des dispositions primitives et de la
date de la voûte élevée, dès l'origine,
au-dessus du chœur. J'ai établi plus haut
qu'en 1104 le chœur était assez avancé
pour que l'on pût opérer la translation du
corps de S. Cuthbert dans une châsse
placée au chevet. William de Malmesbury
rapporte un fait miraculeux qui se serait
produit à l'occasion de cette cérémonie.
S. Cuthbert lui-même aurait déplacé le
cintre en charpente de la voûte située
au-dessus de sa châsse ('). Ce récit nous
indique que les voûtes du chevet venaient
d'être achevées à cette époque. Il est
I. « Materia lignorum, quiE recentem piesbyterii testu-
ilineui susliuebat ». /A' Geslis Ponliliciim, lib. III, § 135 ;
Rolls séries, éd. Hamilton, p. 276.
3tES £)rtg(nes De l':^rcl)itecturc gotl)lque.
465
probable qu'il en était de même pour
l'ensemble des voûtes du chœur, car il n'y
a aucune raison de croire que toute cette
partie de l'église n'ait été entreprise à la
fois. Des indulgences, remontant au second
quart du XII I^ siècle, nous indiquent
qu'alors ces volâtes menaçaient ruine —
l'une d'entre elles nous les décrit comme
des voûtes de pierre (') ; — elles furent
depuis lors démolies et remplacées par les
voûtes qui subsistent. Privé de son abside,
aujourd'hui détruite, le chœur de Durham
se compose actuellement de deux doubles
travées ; c'est là une variété de plan qu'à
une époque plus tardive nous sommes
habitué à rencontrer associé à la voûte
sexpartite. Il ne peut cependant être ques-
tion ici d'une voûte de ce genre, car nous
nous trouvons pour cela à une époque trop
peu avancée. Il est bon de noter que cette
double travée n'est pas sur plan carré, mais
forme un rectangle allongé, sa longueur
étant beaucoup plus grande que la largeur
du chœur ('). S'il eût été question de cou-
vrir la double travée avec une seule croisée
d'ogives quadripartite ou sexpartite, le plan
barlong de la travée n'aurait pas fait
disparaître la difficulté à laquelle on s'était
efforcé d'obvier par l'emploi d'une double
travée sur plan carré. Sur la face des piles
fortes, un faisceau de trois colonnes enga-
gées s'élève du sol à la naissance des
voûtes et recevait, dans l'état primitif, un
doubleau doublé, ainsi qu'on peut encore le
voir dans le transept. Les piles faibles sont
I < Ubi supra sacrum illius sepulchrum devocio
veterum lapideas erexit testudines, qiue jam nunc plenœ
fissuiis et riiinis dissoliitioiiem sui indicant imminere >.
Indulgence de Hugh de Northvvold, évêque d'Ely, datée
de 1235 ; Trésor de Durham, mise, chart. N° 15 12 (im-
primé dans le Saint Cutlihert, de M. Raine, Appendice,
p. 7 ; voir aussi pp. 101-3, d'autres indulgences).
2. On trouve quelques exemples anciens de la même
disposition. Dans la nef de N.-D. du Pré, au Mans, par
exemple.
cylindriques et renforcées, à leur revers,
d'un groupe de trois colonnes destinées à
recevoir les nervures et les doubleaux des
voûtes des collatéraux. A la hauteur du
triforium, le parement du mur se trouve en
retrait de 28 centimètres, et c'est sur cet
espace que reposent les colonnettes qui
recevaient primitivement les retombées des
voûtes hautes ; elles sont au nombre de
deux, de part et d'autre des piles fortes,
et de trois au-dessus des piles faibles,
c'est-à-dire au milieu de la travée. Les
traces de la reprise exécutée au XI 11^ s.,
lorsqu'on édifia la voûte actuelle, sont encore
bien visibles à droite et à gauche de
toutes les piles fortes, (fig. 7, BB et CC).
Le rejointoiement de ces deux maçonne-
ries d'époques différentes nous permet de
reconstituer le tracé de la lunette des
voûtes primitives ; c'était, comme dans les
voûtes du transept, une haute courbe ellip-
tique ; nous ne pouvons douter que ces
voûtes originales du chœur ne fussent
nervées, car nous ne saurions admettre que
des architectes, ayant déjà édifié des
croisées d'ogives au-dessus des bas-côtés,
en soient revenus à l'emploi de la voûte
d'arêtes pour voûter le vaisseau central. La
conclusion qui s'impose, est que, dans son
état primitif, le chœur était couvert de
doubles croisées d'ogives quadripartites,
correspondant à chacune des doubles tra-
vées, disposition identique à celle que l'on
peut observer dans le bras nord du transept,
qui, selon toute vraisemblance, a dû être
construit presqu'immédiatement après le
chœur. Le triplet de colonnettes qui existe
au milieu de chacune des doubles travées,
semblerait conçu pour supporter la re-
tombée d'un doubleau intermédiaire et plus
faible que les doubleaux principaux ; mais,
comme aucune des voûtes hautes ne nous
oiïre l'exemple d'une semblable disposition,
466
3Rcbue ï!e T^rt cbvctien.
il est probable que ces trois colonnettes
recevaient seulement la retombée des deux
nervures. Les deux colonnettes, qui les
remplacent dans le transept, ont dû être
adoptées comme constituant un support
plus rationnel. La coupe transversale du
chœur (fig. S) nous montre comment les
voûtes étaient épaulées par des arcs en
plein cintre, portant le rampant du toit des
tribunes. Au centre de la double travée,
l'épaisseur de ces arcs est de i m. 52 cm;
ils reposent de part et d'autre sur des
pilastres carrés. Au dos des piles fortes,
existent de larges contreforts desquels se
détachent les pilastres supportant des arcs,
et dont l'épaisseur s'élève ici à t m. 87 c.
(fig. ç). 11 est important de noter que les
contreforts, les pilastres, les arcs de butée
qu'ils supportent, forment partie intégrante
de la construction et ne sont pas des
additions postérieures. Le tracé de ces
derniers arcs n'est pas convenablement
conçu pour neutraliser la poussée des
voûtes ; aussi, malgré la grande épaisseur
des murs, s'est-il produit des déformations.
Les faces est des bras du transept repro-
duisent presqu'exactement la disposition du
chœur, mais les travées y sont beaucoup
plus étroites et varient de largeur ('). D'au-
tre part, comme nous l'avons dit, ce sont
deux colonnettes, et non trois, comme dans
le chœur, qui reçoivent la retombée des
nervures au milieu de la travée. Les arcs
de butée placés derrière le triforium sont
bien contemporains de la construction ; leur
existence, la disposition des piliers prouvent
I. Cette irrégularité de plan ne provient pas, comme
l'ont avancé quelques écrivains trop fantaisistes, du désir
d'augmenter le pittoresque de la construction. La largeur
de la demi-travée qui touche le carré du transept est déter-
minée par la largeur du collatéral du cliicur ; les trois
autres demi-travées semblent avoir été obtenues en divi-
sant également l'espace compris entre le milieu des piliers
et le milieu du mur du pignon.
que, dès l'époque à laquelle les murs orien-
taux du transept furent édifiés, on avait
prévu des voûtes hautes. Cependant, du
côté ouest du transept [voir fig. 2^, p. jço
de la livraison de sept?), nous ne trouvons
que les trois colonnes engagées destinées à
recevoir les doubleaux. A la hauteur du
triforium, il n'y a pas de colonnettes dis-
posées en vue de la retombée des nervures.
Nous avons des raisons de croire que le
projet de voûter le transept fut temporai-
rement abandonné lorsque les murs ouest
furent édifiéspar les moines, dans l'intervalle
qui sépara la mort de l'évêque William
(1096) de l'avènetnent de Flambard (1099).
En effet, dans le bras sud du transept,
l'étage des fenêtres était décoré d'une arca-
ture continue, ce qui impliquait évidemment
l'emploi, comme couverture, d'une charpente
apparente, bien qu'aucune trace de cette
disposition ne puisse être relevée dans le
bras nord du transept. Il paraît donc cer-
tain que le projet primitif de construire des
voûtes fut repris alors que les travaux de
cette partie de l'église étaient encore ina-
chevés. Le caractère de simplicité qu'of-
frent les voûtes du bras nord du transept
(fig. 2/'), l'absence, dans l'ornementation
des nervures, des bâtons brisés qui décorent
les nervures des bas côtés de la nef, sem-
blent prouver que ces voûtes ont dû être
édifiées peu après l'achèvement des voûtes
du chœur, en i 104. La double travée con-
tiguë à la croisée du transept est couverte
d'une double voûte quadripartite, sans dou-
bleau intermédiaire. La double travée sui-
vante, la plus au nord, n'est couverte que
d'une simple voûte quadripartite ; cette mo-
dification a évidemment son origine dans
l'extrême étroitesse des travées et les deux
colonnes qui les séparent, devenues inutiles,
sont simplement montées jusqu'à la lunette
de la voûte. Comme dans les bas-côtés, le
îles £)rîstnes ht r^rcljitecture gotl)ique.
467
profil de la nervure est composé d'un gros
boudin entre deux gorges. Les voussoirs
internes du doubleau sont moulurés de sem-
blable façon, alors que les voussoirs externes
sont seulement équarris. Le doubleau est en
plein cintre alors que les ogives sont proba-
blement des arcs surbaissés comme dans les
collatéraux, mais à cause de l'étroitesse
des travées, et spécialement de celles qui
touchent à la croisée, la courbe des nervu-
res se rapproche sensiblement du plein
cintre. A la hauteur de l'étage des fenêtres,
les retombées de la voûte sont fortement
gauchies. Dans les étroites travées contiguës
Durham. transept nord, côté est.
au carré du transept, la lunette de la voûte
décrit une demi-ellipse extrêmement haute.
Du côté ouest de ce bras du transept les ner-
vures retombent sur des corbeaux qui ont
été ajoutés lorsque le mur s'élevait déjà à
la hauteur des fenêtres hautes. Le mur de
l'étage des fenêtres lui-même semble toute-
fois être de la même date que la voûte.
Dans le bras sud du transept, le profil
des nervures est composé d'un gros boudin
encadré de bâtons brisés. Les voussoirs
internes du doubleau doublé sont ornés
d'un boudin entre deux gorges, et les vous-
soirs externes, de bâtons brisés. En dehors
de ces différences dans les détails et dans
la disposition de la claire-voie, dont il a été
468
5Rr\jur De r^rt cbrcttcu.
parlé plus haut, les voûtes du bras sud du
transept présentent les mêmes caractères
que celles du bras nord. Elles sont d'une
date évidemment un peu postérieure, anté-
rieure toutefois à celle des voûtes de la nef.
Nous remarquons de même, dans la
nef, que le projet de construire des voûtes
fut abandonné, puis repris pendant le cours
des travaux, ainsi que dans le transept.
A la hauteur du triforium, les colonnes
prévues dans le chœur pour la retombée de
voûtes n'existent pas dans la ï\ç.{(i'ûirjîg.2^
page jçi de la livraison de sept.). La paroi
du mur est sur le même alignement que le
tympan des grands arcs, et une colonne
supplémentaire est disposée en vue du
doublement de l'arc du triforium. Par
conséquent, il n'existe aucun fût destiné à
recevoir les nervures diagonales. Il existe,
d'autre part, dans la maçonnerie de deux
doubles travées joignant le carré du tran-
sept à la hauteur des fenêtres hautes, des
indices permettant de conclure au projet
d'une couverture en charpente.Ce dispositif
est en lui-même assez probable, car nous
savons que lors même que le chœur d'une
grande église était voûté, la charpente
apparente était encore la couverture la
plus habituellement employée au-dessus
de la nef et du transept. A cet égard, le
continuateur de Symeon ne nous dit-il pas
expressément que Flambard procédait pour
les travaux : « modo intentius modo remis-
sius », ce qui permettrait de supposer des
hésitations et des changements dans le plan
primitif? Il est tout à fait certain que le
triforium fut achevé jusqu'au niveau des
fenêtres hautes avant qu'aucune disposition
ait été prise en vue des voûtes, caries cor-
beaux qui reçoivent les nervures ont été
insérés après coup entre les arcs du trifo-
rium. On ne peut guère douter, d'autre
part, que la disposition de l'étage des fenê-
tres n'ait été agencée en vue des croisées
d'ogives existantes ; en fait, ces différentes
parties de la construction doivent être con-
temporaines.
Les voûtes de la nef (fig. 28) (') mon-
trent une avance remarquable sur celles du
transept. Le plein cintre y est employé non
dans les doubleaux, comme jusqu'alors,
mais dans les ogives. C'est là un progrès
qui, selon Viollet-le-Duc, constitue la seule
innovation des premiers constructeurs de
voûtes gothiques ("). En conséquence, l'arc
brisé dut être adopté pour les doubleaux.
Ici, toutefois, leur courbe est gauche, car
elle est tracée de centres situés considéra-
blement au-dessous de la ligne des impostes.
On peut facilement admettre que cette
innovation dans la construction des voûtes,
ne prit pas tout de suite en Angleterre le
remarquable développement qui marqua
son adoption dans l'Ile-de-France ; mais cet
exemple si primitif de croisées d'ogives est
précieux en ce qu'il prouve l'indépendance
des efforts d'une école architecturale qui ne
devait rien à l'influence française.
Comme le transept, la nef est couverte de
doubles voûtes quadripartites sur chaque
double travée, sans doubleau intermédiaire.
Les voûtes sont légèrement bombées ;
leur lunette décrit une demi-ellipse, et il
n'existe pas de formerets ; les doubleaux
sont doublés ; le doubleau intérieur est orné
d'un gros boudin entre deux gorges, le dou-
bleau extérieur est orné de bâtons brisés.
Le sommier de chacun de ces doubleaux
extérieurs est plus large que les autres
voussoirs, qui ont dû être réduits de manière
à dégager la naissance des ogives. Les
1. C'est à M. ce. Hodges, d'Hexham, que je dois la
permission de reproduire les photographies qu'il .ivait
prises des voûtes du transept et de la nef (fig. 24, 25, 27
et 28).
2. Dictionnaire, IV, p. 35.
iles £)ngme0 De r:^rcl)itectuit goîl)ttiue.
469
nervures présentent un gros tore flanqué
de bâtons brisés de chaque côté. La voûte
est épaulée p^r des arcs en quart de cercle
placés au-dessous du toit du triforium (').
Ce procédé est de beaucoup supérieur, pour
neutraliser la poussée, à l'arc en plein cintre
qui est employé dans le chœur et le transept.
Ces arcs, qui ont i'"52 c. de largeur, naissent
de plinthes chanfreinées adossées au mur
extérieur du triforium. Ces plinthes et les
¥\s. 2S. — Dnrham, voûte de la nef, côté nord-
assises placées immédiatement au-dessus
d'elles paraissent faire partie de la construc-
tion primitive, mais les arcs eux-mêmes
semblent avoir été construits en même
\. Diirhain Ca/kednil, par R. W. Billings, pi. XIII,
XLIII.
temps que les voûtes. De semblables arcs-
boutants, aussi rudimentaires, existent dans
la nef de la Trinité à Caen (').
Les voûtes de la nef de la cathédrale de
Durham ont été attribuées avec persistance
I. L'architecture normande, I, p. 139, p. 141.
470
îRcbuc lir V^xt cbrcttca.
au milieu du XI 11'^ siècle, apparemment
sur la foi d'un vague rapport de Leland
dans la Collectanea ('). Billings affirme
qu'elles ont été construites entre 1233 et
1244, dans le style normand ('). Si cette
date est exacte, ce serait, comme il le dit
lui-même, un fait unique dans l'histoire de
l'architecture du moyen âge. Son erreur
ayant été répétée par des écrivains posté-
rieurs, qui auraient dû être mieux informés,
il est nécessaire d'affirmer positivement
que son assertion n'a absolument aucune
autorité. — En dehors de ce fait seul que
les architectes médiévaux n'avaient pas
accoutumé d'imiter des œuvres vieilles d'un
siècle, la voûte du XII 1° siècle existant
encore au-dessus du chœur, nous montre ce
qu'aurait été la voûte de la nef, si elle datait
de l'époque à laquelle Billings l'attribue.
Les passages déjà cités du continuateur
de Symeon prouvent que la nef fut voûtée
entre 1128 et 11 33. Le chroniqueur nous
dit, en propres termes, que Flambard bâtit
la nef : « usque testidunem », et que
pendant l'intervalle qui sépara la mort de
Flambard(i i28)deravènementdeGeoffroy
Rufus (1133), la nef fut achevée par les
moines. Selon toute évidence, seule la
voûte manquait à cette partie de l'édifice;
en dernière analyse, le caractère de la con-
struction confirme absolument cette hypo-
thèse. Les nervures nous montrent le lay-
age en diagonale caractéristique de cette
époque ; leurs voussoirs sont étroits comme
d'habitude, leur largeur étant seulement de
o"i(5 c. La maçonnerie présente donc les
mêmes caractères dans les voûtes que dans
la partie haute des murs Ils n'ont rien de
commun avec ceux des œuvres exécutées à
1. Durham Cathédrale pai William Greenwell, 5'"= éd.,
PP- 37-38. Je dois beaucoup de données à cet excellent
ouvrage.
2. Billings, op. cil., p. 16.
l'intérieur et autour de l'église par l'évêque
Hugues de Puiset et ses successeurs.
Durham donc nous fournit complète-
ment la preuve que les architectes nor-
mands étaient capables de construire des
voûtes au-dessus du vaisseau central d'une
grande église, et de contrebuter la poussée
de ces voûtes par des arcs situés à la
hauteur du triforium, et dont les arcs-bou-
tants sont simplement le perfectionnement.
Les témoignages écrits déjà invoqués
semblent bien indiquer que la voûte du
chœur fut construite en 1104. — La date
de la voûte du bras nord du transept peut
être fixée aux dix premières années du
XI 1^ siècle, et celle du bras sud au premier
quart du même siècle. — Quant à la voûte
de la nef, avec ses doubleaux en tiers-point,
elle fut construite entre 1 128 et 1 133. La lar-
geur du vaisseau que franchissent ces voû-
tes mérite d'être notée ; entre les murs, celle
du transept est de io"\28, celle de la nef,
de 9"\85. En ce qui concerne l'attribution
exclusive à l'Ile-de-France de la découverte
des voûtes sur croisées d'ogives, nous de-
vons noter, au passage, une remarque de
M. Lefèvre-Pontalis. Il reconnaît que les
églises rurales du Soissonnais, même dans
la seconde moitié du XI le siècle, étaient
généralement couvertes de charpentes ap-
parentes, et avance, qu'à cette époque,
l'emploi de la croisée d'ogives nécessitait
la faible largeur des nefs ; à l'appui de son
dire, il cite quelques-unes des nefs les plus
anciennement voûtées dans le Beauvaisis('),
1. op. cit., I, p. 90. La largeur de la nef de Cam-
bronne est entre les murs de 3'",gi, celle de la nef de
Bury de 4"',8o. M. Lefèvre-Pontalis dit que Cambronne
ne peut pas être postérieur .i 1 1 25. Oes deux exemples rudi-
mentaires de croisées d'ogives qu'il incline à attribuer à
la fin du .\I siècle, celle de Rhuis, près Verberie, est
une simple travée d'un bas-côté et s'élève au-dessus d'un
espace carré de 2'°,2o décote. Celle d'Auvillers, près Cler-
mont-en-Beauvaisis, est située sous un clocher et n'a
qu'une portée de 2"',6o.
iles £)rîgîne0 De r^lrcbitecture gothique.
471
qui ne sont guère plus larges que les bas-
côtés de Durham.
Dans l'église du prieuré de Lindisfarne
les vaisseaux principaux furent Couverts de
croisées d'ogives, qui du reste, comme l'en-
semble de l'église, furent visiblement ins-
pirées de la cathédrale de Durham. Les
retombées des voûtes du chœur, du tran-
sept et de la croisée existent encore. Le
chœur était couvert de voûtes quasi-quadri-
partites, sans doubleaux. Les nervures ont
pour profil un boudin entre deux gorges.
Chacun des bras du transept était couvert
d'une simple voûte quadripartite avec des
nervures présentant le même profil que ci-
dessus. Ce sont des corbeaux qui, dans le
chœur comme dans le transept, reçoivent
les nervures. La croisée possédait aussi une
voûte quadripartite dont les nervures sor-
taient de culs-de-lampe ; une de ces ner-
vures est encore en place. Sa partie inté-
rieure est décorée de bâtons brisés et Sa
partie extérieure de moulures. Les voûtes
n'ont pas de formerets. Il ne reste plus de
la voûte de la nef qu'un rang de voussoirs
dessinant la lunette au haut du mur occi-
dental. Dans son ensemble, la construction
paraît un peu postérieure à la nef de Dur-
ham, mais aucune de ses parties ne semble
dater d'une époque plus récente que le
milieu du XII'' siècle.
L'église de Warkworih (Northumber-
land) est, sur une plus petite échelle, un
morceau d'architecture qui est aussi certai-
nement dû à l'influence de Durham. Le
chœur, long de 9"'',75 sur 5^,03 de largeur,
et divisé en deux travées, est couvert d'une
double croisée d'ogives quadripartite et
dépourvue, à l'origine, de doubleau in-
termédiaire (■). Les nervures reposent sur
I. Le doubleau existant est une addition postérieure.
L'église est examinée et décrite dans A Histoiy of Nor-
ihiimbtrland, V, p. 170.
de courtes colonnettes partant d'une cor-
niche qui court au-dessous de l'appui des
fenêtres, et qui porte en arrière la paroi du
mur, exactement comme dans le triforium
du chœur et le côté est du transept à Dur-
ham. II y a une seule colonne dans chacun
des angles du chœur et un groupe de deux
au milieu de chacun des murs latéraux ;
chacun des fûts reçoit une nervure. Le pro-
fil de ces dernières est composé d'un gros
boudin encadré de bâtons brisés de chaque
côté. Les nervures sont en plein-cintre
surbaissé. Le tracé de la voûte a été dis-
posé en suivant l'arc en plein-cintre du
chœur. Les voûtes sont léeèrement bom-
bées ; la différence de niveau entre la clé
des nervures, celle de l'arc du chœur et le
sommet de la lunette sur les murs latéraux
est respectivement de o"\ 10 et de o'",23.
La lunette elle-même décrit sur les murs
latéraux une demi-ellipse. Les nervures
sont composées de voussoirs minces, dont
l'épaisseur moyenne est de o'", I 7. 11 n'y a
pas de formerets. La date de cette église
peut être fixée approximativement entre
I I 20, et 1 130.
En dehors de la cathédrale de Durham, la
nef d'une autre grande église cathédrale fut
aussi voûtée avant le milieu du XI L siècle.
La nef de la cathédrale de Lincoln (bâtie
par l'évêque Rémi et consacrée en 1092)
fut incendiée en 1141 ; Giraud le Cambrien
(GiraldusCambrensis) nous rapporte qu'elle
fut voûtée par l'évêque Alexandre ('). Henry
de Huntingdon, qui place la date de ces
travaux en 1146, dit qu'Alexandre la fit
plus magnifique que lorsqu'elle était nou-
vellement bâtie, et qu'elle n'était inférieure
à aucune autre construction du royaume
I. « Ecclesiam tamen Lincolniensem casuali igné con-
sumptam egregie reparando lapideis fideliter vollis pri-
mus involvit. » Giraldi Cauibrensis Vita S. Remigii,
Rolls Séries, éd. J. F. Dimock, cap. XXII (vu, 33).
REVUE DE L ART CHRETIEN.
1901. — 6"*^ LIVRAISON.
472
îRrliuc ïir rairt clircttcn.
d'Angleterre ('). Il ne reste plus qu'un
fragment de la nef édifiée par l'évéque
Renii dans la travée située entre les clochers
occidentaux ; au-dessus s'élève l'étage des
fenêtres construit par l'évéque Alexandre
et sur le mur duquel on peut encore voirie
tracé semi-elliptique de la lunette de la
voûte détruite ('). Le chœur de l'église
de Stow (Lincolnshire) nous montre ce
qu'était très probablement cette voûte ; par
ses détails il ressemble d'assez près à l'œu-
vre d'Alexandre à Lincoln pour qu'on puis-
itm — I — \ — I — h
+
_|FEET
MÈTRES!
Fig. 29. — Christchurch, chapelle est du transept sud.
se l'attribuer à la même école. Le chœur
de Stow se compose de trois travées et a
7™32'= de large. Les travées sont divisées
par des triplets de colonnes adossées, un fût
distinct reçoit chacun des arcs de la voûte ;
il y a aussi une colonne engagée dans cha-
cun des angles du chevet pour la retombée
des oofives. La voûte elle-même est une
reconstruction moderne ; on y a réemployé
des voussoirs anciens trouvés dans les par-
1. * Ecclesiam vero suam, quse combustione detuipata
fuerat, subtili artificio sic reformavit, ul pulchrior quam
in ipsa siii novitate compareret, nec ullius redificii struc-
tura- intra fines AnsliiE cedeiet.» Henrici Aichidiacoiii
Huntendunensis Historia Anglorum, Rolls séries, éd.
Tlios. Arnold, pp. 278 9.
2. AnhϞlo;rical Journal, .VI., p. I'J2, pi. Il (.X).
ties supérieures des murs ; quelques-unes
des nervures n'ont pour profil qu'un boudin
entre deux eorees ; d'autres sont ornées de
bâtons brisés. Selon toute apparence, les
voûtes construites par l'évéque Alexandre,
au-dessus de la nef de Lincoln, étaient des
croisées d'ogives.
L'étude des croisées d'oQ^ives lancées au-
dessus d'un vaisseau central, comme nous
en trouvons dans les chœurs de Kirkstall
et de Ste-Croix près Winchester et qui ont
des doubleaux en tiers-point, excéderait les
limites de cette étude. Aussi loin qu'ont
pu s'étendre mes observations en Angle-
terre, je n'ai pu relever, en dehors de
Ste-Croix, d'édifice plus ancien, indiquant
chez son auteur quelque connaissance des
travaux contemporains exécutés dans l'Ile-
de-France ; néanmoins, à Ste-Croix, les dé-
tails 'portent bien l'empreinte du style
Anglais. — Les édifices de la période de
transition en Angleterre n'ont guère été
jusqu'ici étudiés à ce point de vue. Dans
les travaux dont ils feront encore l'objet, il
serait à souhaiter que l'on donnât place à
l'analyse de l'influence indéniable exercée
par r Ile-de-France, aussi bien qu'à l'histoire
de la renaissance cistercienne dont les effets
n'ont été que très insuffisamment indiqués.
Il nous reste à passer en revue les an-
ciennes croisées d'ogives édifiées au-dessus
des absides de quelques églises. Nous en
trouvons une dans la petite chapelle absi-
dale, qui s'ouvre sur le bras slrI du tran-
sept, dans l'église de Christchurch (Hauts)
(fig. 2ç). Elle paraît dater des premières
années du XI L siècle. Le rond-point est
divisé en trois travées par des colonnes
adossées à des pilastres carrés ; les nervu-
res présentent un profil analogue. L'arc en
plein cintre qui s'ouvre sur le transept est
très épais, et son tableau est orné à chaque
angle d'un gros boudin de même diamètre
3le0 îcDnstnejS U r:^rcl)ttecture gotUique,
473
que ceux des nervures, et qui correspond
à des colonnes engagées ; deux nervures se
réunissent à la clé de l'arc. Cette dernière
est de très grande dimension, alors que les
nervures sont appareillées, comme d'habi-
tude, en claveaux minces. La chapelle
absidale qui s'ouvre de même sur le bras
sud du transept, dans l'église abbatiale de
Tewkesbury, est couverte d'une voûtes em-
blable, mais les nervures, dont le profil est
un simple chanfrein, sortent directement
du mur pour se réunir à la clé d'un doubleau
en plein cintre non mouluré. L'abbatiale
ayant été consacrée en i i 23, on peut admet-
tre que cette chapelle a été construite dans
les vingt premières années du XII"^ siècle.
Une voûte semblable, édifiée au-dessus
d'une abside, se voit dans l'église de Bir-
kin (Yorkshire), mais elle ne remonte qu'au
milieu du XI I" siècle; les nervures ont
pour profil trois tores séparés par des filets
(^^. ji) ; la lunette de la voûte est dessi-
née par l'archivolte de la fenêtre qui est
en plein cintre ; la voûte dans son ensemble
offre, pour ainsi dire, l'aspect d'une coupole.
Bien qu'élevée sur plan carré, la voûte
octopartite de la salle du Trésor, dépen-
dant de la cathédrale de Cantorbéry, pré-
sente les mêmes caractères (').
La salle capitulaire, dépendant de la
cathédrale de Durham, possédait une voûte
absidale de plus grande importance et d'une
construction plus parfaite. Sa date est con-
nue, la maison du chapitre ayant été termi-
née par l'évêque Geoffroy-le-Roux qui
occupa le siège épiscopal de 1 133 à i i4o(').
Elle fut partiellement détruite en 1 796, mais
1. T/ie Architectural History of the Conventual Build-
ings of the Mo7iastery of Christ Church in Canterbury,
par prof. Willis, fig. 6 et p. 77. Le Tiésor fut probable-
ment bâti peu après 1130.
2. < Ipsius (Gaufridi) tempore capitulum nionachorum
consummatum est 1>. Symeoii, Continuatio, Rolls Séries,
éd. T. Arnold, I, p. 142.
les dessins de Carter en ont conservé une
reproduction fidèle ('). L'abside était divi-
sée en cinq travées (fig. 30) ; les nervures
de la voûte étaient supportées par des culs-
de-lampe, desquels trois ont été conservés
dans la bibliothèque du chapitre ; la clé de
voûte existe encore. Le profil de la nervure
était un tore entre deux rangs de bâtons
brisés. La clé A ne coïncidait pas avec le
centre du rond- point, et la voûte était cons-
truite de telle sorte que les nervures i et 5
et 2 et 6 étaient respectivement dans le
prolongement les unes des autres. Elles
étaient par conséquent de longueurs inéga-
Fig. 30. — Durham, abside de la salle capitulaire.
les. La largeur de la salle capitulaire est
de io"^52c entre les murs.
Il ne nous reste plus qu'à dire quel-
ques mots au sujet de l'importance que
peuvent avoir les monuments anglais que
nous venons d'étudier relativement au pro-
blème général des origines de l'architec-
ture gothique. Avant l'introduction de la
nervure, les Normands développaient déjà
l'ossature de leurs constructions dans des
proportions tout à fait inconnues dans
l'Ile-de-France, à en juger d'après les plus
anciens monuments cités dans l'ouvrage de
M. Lefèvre-Pontalis. Les premières croi-
sées d'ogives décrites plus haut et dans
I. Les dessins de John Carter ont été publiés par la
Société des Antiquaires en 1801. Une vue intérieure de la
maison du Cliapitre est donnée dans Durham Cuthedral,
par Billings, pi. LU.
474
î^ebue De V^xï cljvcttcu.
lesquelles les nervures sont en plein cintre
surbaissé, nous montrent un système de
construction légèrement moins av^ancé que
celui d'après lequel sont conçues les voûtes
qui couvrent les bas-côtés à St- Etienne de
Beauvais. Dans ces dernières, les doubleaux
sont considérablement surhaussés de ma-
nière à ce que la nervure ait pu être tracée
en plein cintre, ou peu s'en faut. D'autre
part, le grand nombre de croisées d'ogives
BERNIERE5
MAVE A15LE5
5A!NT-ET!ENNE,CAEN
NAVE
CANTERBURY
TREA5UKY
BIRKIN
AP5E
.FEET
I I I I I I I I
J L
J L
I, METRE
subsistant encore en Angleterre prouve
l'existence d'une école active, qui avait déjà
accompli de grands progrès avant l'intro-
duction de l'arc brisé. Il est remarqu.ible
que toutes les voûtes que nous avons pu ob-
server soient quadripartites. Nous n'avons
rencontré aucun exemple, soit de voûtes
sexpartites ('), soit de la forme intermé-
diaire : une voûte quadripartite édifiée sur
I. Au moment où ce travail a élc écrit je ne con-
naissais pas, en Angleterre, de voûtes sexpartites plus
anciennes que celles édifices à Cantorbéry par (iuillaunie
de Sens. — .Mais le choeur de la petite église de Ticken-
cote (Rutland) est couvert d'une voûte sexpartite, qui
doit dater du milieu du XII'-" siècle. Toutes les nervures
sont ornées de bâtons brisés.
une double travée et divisée par un arc
doubleau secondaire portant un mur, deux
genres de voûtes qui ont été employés en
Normandie dans la région de Caen. — En
conséquence, il est permis de considérer la
voûte quadripartite comme constituant la
forme primitive de la croisée d'ogives, et,
comme le dit M. Dehio, les autres variétés
de voûtes n'auraient pu se développer si la
voûte quadripartite n'avait d'abord été con-
nue. En étudiant les divers profils employés
dans les nervures, nous sommes amenés à
la même conclusion. Si l'on se base sur
leurs caractères généraux aussi bien que
sur leurs profils, les premières croisées
d'ogives anglaises, qui ont été décrites plus
haut, peuvent être comparées aux voûtes
quadripartites de Lessay et appartiennent
à un état architectural antérieur à celui
auquel se rapportent les croisées d'ogives
du groupe d'églises environnant Caen. Ces
dernières, qu'elles soient sexpartites ou de
la forme intermédiaire (voûte quadripartite
coupée par un doubleau secondaire), nous
montrent une série de profils d'ogives
faciles à classer (fig-3t), et qui constituent
un type plus affiné et plus clairement posté-
rieur à tout ce que nous pouvons trouver
en Angleterre, jusqu'à l'époque où fut con-
struite la voûte octopartite du Trésor de
la cathédrale de Cantorbéry, c'est-à-dire,
selon toutes les probabilités, peu après i 1 30.
En l'absence de tout témoignage précis, la
date approximative de 1130, proposée (')
pour les voûtes les plus anciennes du groupe
de Caen, semble assez vraisemblable et les
expériences que les constructeurs de ces
voûtes firent en variant les tracés adoptés
I. Le profil de St-Étienne de Caen se rencontre aussi
dans les grands arcs de la nef de l'église de New Shore-
liam. M. Edniund Sliarpe assigne h ceté lifice la date de
1 1 30 ( The A rchitccitir, il Ilisloiy ofSI-Maiy's Chiirch, New
Shorehim, par Kdniund Sliarpe, 1861 ; croquis supplémen-
taire, p. 6).
3Le0 £>rigineô ht r:^rcl)ttecture gotl)tiiut.
475
pour les courbes des nervures, prouvent
qu'ils n'adoptèrent pas un procédé de con-
struction déjà fixé et expérimenté ailleurs.
Cependant, même en ne prenant en con-
sidération que les seuls monuments anglais,
les dates précises des plus anciennes croi-
sées d'ogives que nous y rencontrons ren-
dent tout à fait impossible l'hypothèse d'une
influence venant de l'Ile-de-P'rance ; leur
étude nous permet d'affirmer positivement
l'indépendance complète de l'école norman-
de jusqu'à la fin du premier tiers du XI I"
siècle. Quant à déterminer quel rôle ont
pu jouer les influences normandes dans la
transition française, c'est un point difficile
à fixer. A première vue, il semble que ces
influences ont été beaucoup plus considé-
rables que bien des archéologues français
n'ont voulu l'admettre jusqu'à présent.
■ — C'est l'espoir de contribuer, dans quel-
que mesure, à la solution définitive de la
question, qui m'a amené à donner une
étude méthodique des monuments anglais
qui renferment, comme on l'a pu voir, bien
des éléments du problème.
Xiotz aDOitionncllc relative aur tioûtcs
Oc la catbcDralc De ï)urf)am.
CETTE note est une réponse aux
critiques qui ont été formulées au
cours de la discussion soulevée par l'ar-
ticle qu'on vient de lire, et qui se référaient
aux dates assignées par moi aux voûtes
hautes de la cathédrale de Durham.
11 me semble que les objections que l'on
m'a faites se réduisent simplement à ceci :
à savoir que c'est une chose discutable
que des architectes se soient trouvés en
mesure de construire des croisées d'ogives
dès le commencement du XII'' siècle, car
cela ne s'accorde pas avec l'opinion géné-
ralement admise en ce qui concerne le
développement delà construction de voûtes
dans l'Europe occidentale pendant la pé-
riode de transition. — Il serait impossible
de discuter ici l'exactitude de cette opinion
sans dépasser les limites de cette étude.
Cependant, je tiens à citer un passage de
MM. Dehio et von Bezold qui est digne
d'être noté, d'autant qu'ils ne reconnais-
saient pas la cathédrale de Durham comme
constituant un des facteurs du problème
consistant à voûter en pierres le vaisseau
principal de nos églises. Voici ce qu'ils
disaient : « Les grands monuments archi-
« tectoniques du XI^ siècle n'ont pas fourni
« la solution de ce problème, mais l'ont
« préparée dans toutes ses parties. Aussi,
« au seuil du siècle suivant, l'école nor-
« mande fut-elle la première à atteindre
« le but sur lequel se sont concentrés
« longtemps les efforts de toutes les écoles
« de la France septentrionale ('). »
On a émis l'hypothèse que les voûtes
de Durham fournissaient peut-être l'exem-
ple d'une contradiction entre les conclusions
auxquelles pouvait nous conduire l'examen
de l'édifice, et les faits avancés par les
documents écrits. Si l'on examine ces
deux sortes de documents, il ne peut y
avoir ici de conflit dans le résultat de la
confrontation. Connue on l'a si bien dit,
la base même de l'histoire de l'architecture
ne peut être déterminée qu'à l'aide des
documents écrits. Dans le cas qui nous
occupe, les documents écrits sont contem-
porains de l'édifice ; l'auteur a rédigé son
œuvre sur les lieux mêmes et il n'y a
aucune raison de douter de son exacti-
tude. Si l'on considère seulement les
caractères archéologiques de la construc-
tion, l'histoire de l'édification successive
des voûtes hautes et de leur liaison avec
I. V/i: Kircliliclic Buiikiinsl, I, p. 279.
476
Withxit îie rSvt cbrctien.
le reste de l'église nous apparaît comme tenl simplement à même de dater certaines
parfaitement claire. Les chroniqueurs met- 1 étapes de la construction. Voici ce qu'est
^/^k^^
SI
DE
SOUTH TRAN5EPT VAULT, DIAGONAL RIB.
SOi'RT
SOlViT
NAVE VAULT (II2Ô-1133), DIAGONAL RIB.
SIDE
SOFFIT
DIAGONAL RIB OF OBLONG BAY5
\
RIB5 OF AF5E
.^^^J
50FFIT
CHAPTER-H0U5E VAULT (1153-1140).
0 1 2
1 ' ' I ' I I I ' I M I __ . ^
ARCADE IN CA5TLE..
500N AFTER 1155
3 FEET .
1 METRE
Fig. 32. — Durham, catliédrale et château.
en réalité la question : ces voûtes hautes
sont-elles, oui ou non, la couverture primi-
tive de l'église? Mon o[)inion, tirée du seul
examen de l'édifice, est que oui, excepté
iles €)ngmes De r^ixl)ttecture gûtl)tque.
477
peut-être la voûte du bras sud du transept,
et réserve faite que la voûte actuelle du
chœur est du XI 11^ siècle.
Dans le chœur, le plan général prouve
de la façon la plus claire l'intention de
couvrir le vaisseau principal de voûtes
dont on peut voir encore les traces dans
la claire-voie. Si l'on admet que les croisées
d'ogives des bas côtés du chœur (où les
travées ont 7'^, 21 de long) datent de l'ori-
gine, est-il vraiment si difficile d'admettre
la possibilité de construire une croisée
d'ogive sur le chœur qui a une largeur
de 9'", 96 ; étant donné surtout qu'un peu
plus de cent ans après sa construction cette
voûte menaçait déjà ruine ? Il est bon de
se souvenir, en effet, que dans une église
normande, achevée quelque vingt ans plus
tôt, Saint-Nicolas de Caen, un chœur de
8i",69 de large, comportant des bas côtés
et une claire-voie, a été couvert de voûtes
d'arêtes. Ce n'est pas le seul exemple de
ce genre qui subsiste. La voûte originale
du chœur de Durham a dû presque cer-
tainement précéder celle du bras nord du
transept. Lhabitude fut tellement répan-
due de voûter le chœur seul, et de couvrir
le reste de l'église avec une charpente ap-
parente, que nous avons peine à croire que
l'ordre habituel ait été interverti ici. La
disposition du côté est du transept dénote
l'intention de construire une voûte comme
dans le chœur. Dans le bras sud du tran-
sept qui aurait été construit avant le bras
nord, le cloître et les bâtiments étant du
côté sud, le projet de voûtes fut abandonné
et la claire- voie disposée pour supporter une
charpente apparente ; il fut peut-être à cette
époque effectivement couvert de cette
manière. A cette période de l'œuvre, on
eut, à ce qu'il semble, l'intention de renon-
cer à lancer des voûtes au-dessus du reste
de l'église (transept nord et nef) pour em-
ployer les charpentes apparentes d'un
usage général dans les parties analogues
des édifices religieux.
Nous avons cependant des preuves su-
rabondantes que cet abandon des projets
primitifs n'a pu être que temporaire, et ici
le caractère des détails de la voûte demande
toute notre attention. Il y a des différences
de détails qui seraient de peu d'importance
si on les rencontrait dans des ouvrages
séparés, mais qui deviennent très significa-
tives lorsqu'on les trouve dans un ensemble
de bâtiments, œuvre d'une même école
d'architectes. Lorsqu'il fut question de
couvrir le bras nord du transept, on con-
struisit une voûte qui ressemble par ses
détails aux voûtes les plus anciennes de
l'église, celles des bas-côtés du chœur et du
transept, et qui est dépourvue des bâtons
brisés dont on a usé si librement dans la
nef due à l'évêque Flambard. La voûte du
bras sud est un peu plus récente que celle
du bras nord, mais les bâtons brisés des
nervures sont aussi simples que partout
ailleurs dans ï église {voy. Jl^. j 2), tandis
que les bâtons brisés des arcs doubleaux
de cette voûte sont du même modèle que
ceux des giands arcs de la nef. La voûte
de la nef est encore un peu postérieure et
nous montre l'arc brisé employé avec une
curieuse inexpérience, ce qui tendrait à
confirmer l'hypothèse de son ancienneté
relative ; les bâtons brisés des nervures
{voyez/lg. J2 et la première photographie
dans layf^. jj) (') sont encore très simples,
et pourtant le sont déjà un peu moins que
ceux des nervures du transept sud. Enfin,
nous avons la voûte de la salle capitulaire,
d'une portée plus grande que la largeur de
la nef elle-même, et quelle que soit l'inter-
prétation donnée aux documents relatifs à
I. Je dois cette photograpliie au professeur Baldwin
Brown.
478
ÎRrDuc lie riait cljvctieu.
l'église, nous possédons, en ce qui la con-
cerne, une preuve indiscutable et certaine
qu'elle a été achevée sous l'épiscopat de
Geoffroy-le- Roux ( i 133-11 40). Quoique les
doubleaux soient en plein cintre, les croisées
d'ogives de la salle capitulaire ont été con-
struites sur plan quadripartite ordinaire et
ne reproduisent pas la disposition que nous
trouvons dans le transept ainsi que dans la
nef et qui comporte la suppression du dou-
bleau intermédiaire au centre de la double
travée. Une simple comparaison des bâtons
brisés qui décorent les nervures de la salle
capitulaire (Jig.j2) avec ceux des nervures
de la nef fait clairement apparaître la date
Fig. '}>})■ — Cathédrale de Durham,
Nervure diagonale des voûtes de la nef (1128-1133).
plus reculée de cette dernière. Sur les ner-
vures des travées barlongues les bâtons
brisés sont d'un modèle semblable à ceux
qui se trouvent sur les nervures des bas-
côtés de la nef, mais leur détail est toute-
fois plus soigné et le tore affecte légère-
ment la forme en amande ; sur les nervures
de l'abside les bâtons brisés sont encore
d'un caractère plus avancé que ceux de la
nefC).
I. Les ogives des travées barlongues (fig.32.) ont pu être
Un autre point important, que le seul
examen de la construction élucide complète-
ment, est que (excepté le bras sud du tran-
sept) les claires-voies sont de la même
époque que les voûtes. Dans le chœur, ce
fait apparaît suffisamment dans la travée
représentée par may/V 7 (p. -iyT^- ante) : la
fenêtre de la claire-voie n'est pas dans l'axe
de l'ouverture du triforium ; au contraire,
sa position est évidemment déterminée par
la voûte (voir aussi Diirhain Cathedra!, par
Billings, pi. XI). Les claires-voies de la nef
se raccordent si bien avec les voûtes, qu'il
est difficile de croire qu'elles ont été édifiées
séparément, mais, en outre, nous avons des
preuves précises de la contemporanéité de
leur construction. C'est dans la seconde
travée à partir de la façade qu'on le voit
le plus clairement ; dans cette travée, sim-
plement barlongue, le pilier de la tour pré-
sente une colonne supplémentaire qui reçoit
les nervures du côté ouest ; du côté est de
la travée, la nervure sort d'un cul-de-lampe
comme dans le reste de la nef. Le milieu
du triforium coïncide avec le milieu de
l'espace séparant les piliers : l'axe de la
voûte est nécessairement placé au milieu
du pilier ouest et de l'encorbellement est ;
il n'en est pas ainsi dans l'axe du triforium
et du grand arc situé au-dessous (voyez :
Dtcrham Cathedral,\)AX Billings, pi. X). Or,
l'axe de la claire-voie n'est pas dans l'axe du
triforium mais coïncide avec celui de la
lunette de la voûte ; ce qui [M'ouve péremp-
toirement que claire-voie et voûte ont été
mesurées dans toutes leurs dimensions grâce à un de leurs
voussoirs trouvé dans le cours de la restauration récente ;
au reste beaucoup des anciens voussoirs ont pu cire
utilisés dans les voûtes nouvelles. — C'est d'après l.i clé
de voûte (à A. fie;. 30, p. 77J aiitc) qu'ont pu être déter-
minées les dimensions des nervures de la voûte absidale.
— C'est à M. J. Freeman, sacristain de la cathédrale, que
je dois la photographie de cette clé de voûte (fig. 34),
ainsi, du reste, que celles de l'ornementation en bâtons
brisés du narlhex.
Iles £)ngtiies îie r;arcl)itecture gotl)ique.
479
construites simultanément. Dans toutes les
autres travées de la nef (excepté peut-être
dans la moitié de la travée est, contiguë à la
croisée du transept), l'axe de la voûte n'est
pas dans celui du triforium, puisque le
cul-de-lampe d'où sort la nervure au-dessus
des piles fortes est plus près de l'axe du
triforium que le cul-de lampe placé au-des-
sus des piles faibles ; en tous cas, l'axe de
la claire-voie coïncide avec celui de la voûte
et non avec celui du triforium. Dans le
transept nord, la travée la plus proche de la
croisée nous fournit une preuve semblable,
et dans la travée du nord (côté est) la claire-
voie ne peut avoir été construite qu'en vue
de la voûte existante. Dans la claire-voie de
la nef (la moins ancienne), le style des dé-
tails s'accorde avec le travail de la partie
inférieure et tous les chapiteaux sont de
simples chapiteaux cubiques.
La seule conclusion, à mon avis, est que
les voûtes encore existantes du transept
nord et de la nef de la cathédrale de Dur-
ham ont couvert dès l'origine ces parties de
l'église et sont contemporaines des claires-
voies. Si on veut, cependant, discuter
cette conclusion, nous somme.'^, je pense,
en droit de demander quelque chose de
plus qu'une critique purement négative. 11
nous faut une analyse de l'histoire de ces
voûtes qui puisse s'accorder avec l'étude
du monument, les documents fussent-ils
laissés entièrement de côté. En effet, les
voûtes du transept et de la nef existent ; il
faut analyser leur histoire, et non seulement
la leur, mais celle des claires-voies qui (ex-
cepté dans le transept du sud) sont, sans
conteste, contemporaines des voûtes. Pre-
nons la nef, par exemple; si « testudo » dans
le passage déjà cité (note 2 p. 375 préc.)
signifie un toit ou un plafond de bois et
que l'on suppose que ce plafond ait été
posé au-dessus du triforium, alors on ne
peut admettre que le chroniqueur nous
donne l'église comme achevée en 1 133. Si
ce plafond a été posé au-dessus de la claire-
voie,alors cette dernièretout entièreadûêtre
reconstruitelorsde l'add il ion des voûtes. Con-
séquemment, la reconstruction des claires-
voies et l'érection de voûtes au-dessus d'une
église qui mesure presque 120 mètres de
long, auraient dû être une opération d'une
importance considérable et, non seulement
les documents écrits, qui nous donnent de
la construction une histoire comme on en
rencontre rarement d'aussi complète, ne
FlJJ, 34- — Cathédrale de Durhani.
Clef de la voûte de l'abside du chapitre (1133-1140).
(Geoffroy-Ie-Rcux, évêque.)
nous laissent aucune indication à ce sujet,
mais l'édifice lui-même ne nous montre
aucune trace d'une reprise de ce genre,
alors qu'il est facile de remarquer un rema-
niement analogue dans le bras sud du tran-
sept, où le projet d'une charpente apparente
a certainement précédé l'érection des voûtes
actuelles. La seule hypothèse, qu'on nous
ait jusqu'ici soumise, est que les voûtes
hautes furent bâties au temps de l'évêque
Hugues de Puiset(i i6o environ). 11 n'existe
aucun document qui corrobore cette opi-
nion, et elle est amplement contredite par
le caractère facilement reconnaissable des
constructions dues à cet évêque, tant dans
la cathédrale, que dans le château de Dut-
revue DE l'art chrétien.
igOI. — 6™^ LIVRAISON.
48o
B.cbuc ÏJC ravt cbvctien.
ham et à Auckland, Sherburn, et Darling-
ton. Le bâton brisé représenté dans la
fioure J2 est pris dans ce qu'on appelle au
château de Durham :1a Galerie normande.
C'est la première connue des constructions
qu'a fait élever Hugues de Puiset ; elle fut
nécessitée par un incendie qui eut lieu peu
de temps après son avènement, en 1153.
Fig- 33- — Cathédrale de Durham.
Arcades principales du galilée, 1175 environ (Hugues de Puiset,
évtque.)
Le narthex, dit « galilée », de la cathédrale
(fi"'- 35) (')■ ^^^ ^^^ ouvrage plus récent de
ce prélat, et date de i 175 environ. L'évi-
dence matérielle, qui découle de l'examen
de ces quelques détails, sera sans doute
suffisamment convaincante sur ce point. Il
est cependant prématuré de discuter une
hypothèse de ce genre, avant qu'une étude
approfondie nous donne de ces voûtes une
analyse en rapport avec les constatations
matérielles qu'on peut faire sur le monu-
ment.
I. Pour le détail des arcs du narthex, voyez Durham
Calhedral, par R. \V. Dillings, pi. XXXV.
On nous a aussi fait l'objection qu'à
notre connaissance ces voûtes n'ont pas
été copiées ailleurs. J'ai déjà (p. 463 an/c)
fait quelques rapprochements qui me sem-
ble contredire cette opinion, et sa valeur
est bien diminuée si l'on remarque combien
peu de chœurs construits en Angleterre
pendant la première moitié du XII<= siè-
cle, ont subsisté sans avoir subi des rema-
niements, ou sans avoir été entièrement
reconstruits ; ce qui rend souvent impos-
sible de dire comment Ils étaient voûtés à
l'origine. On a, d'autre part, peu de chances
de rencontrer des croisées d'ogives au-des-
sus de transepts et de nefs ; à cet égard,
l'intention de couvrir les principaux vais-
seaux de l'église de Norwich, intention
que M' W. H. St. John Hope nous fait
remarquer, n'est pas seulement intéressante
en elle-même, mais aussi parce que des
piliers de cette église offrent, par leur
agencement, une ressemblance frappante
avec ceux du chœur de Durham. L'objec-
tion mentionnée ci-dessus me paraît donc
perdre toute sa force, surtout si l'on étudie
les voûtes anglaises en les comparant à
celles de Normandie ; on ne peut les con-
sidérer autrement que comme les travaux
d'une même école d'architectes. M. An-
thyme St-Paul [La Transi/ ion, chap. VI)
incline à penser que la cathédrale d'.Evreux
avait des croisées d'ogives avant 1 130. Il y
a les voûtes, incontestablement primitives,
de Lessay et des exemples plus récents,
comme le transept de Montivilliers, qui
représentent un type moins développé que
le groupe important de Caen et de ses
environs.
John liii.soN.
A^^ X?^ iif^ A'^-Jt K^^ kM* \^^ AJ^VU i>fYU Ariy* A^Jx K^A \^^ A^^ A^^
^'TTTyiTTI TTTTTTïr^''^^^TTTT^-TIII-I^T^-^^TTTlT^[T^ïTTTr:^I^I^TT^yTT^TTT^: i-TTTTirTtriJiiiiiJiiiiiIffriTII^
txiiimr-a
nniniHî(-ii;p
i^i 6s0ai sur la ticcorattcn arrI)ttcctoniquc»
'uixiiii [:TX3iLiiijaTJiiii]:iiriJii:LiiiiiTi^.Tiirixi:cii3JXiJ]:iiiiiJi:^[rixiriicixi:iiiixjiiiiii.[:xjij:xxi tuiiiir.cxi-iiiii niiiiu ctiiuiï tniixrï txit)
jfe *Atl 'f ^A^^f ^A*!^ *AÔ* *AiI* ^Ail^'f *Atl* *AiI^ *:AÏ^ *iiï'f *^^ ^iil'' *^^ ^^'f *iil'' *^
I
A
Soîirces de décor {?.u\^€).
LA FIGURE HUMAINE.
COMME couronnement de notre collec-
tion de sujets vivants se présente la
figure humaine.
Entière et dégagée (en haut relief), elle
s'ajoute à l'architecture sous la forme de
statues (ou de groupes) portées sur piédes-
tal, encadrées dans une niche, se dressant
au-dessus d'une corniche, planant même au
faîte d'un comble, comme l'ange de l'anté-
fixe du chœur de N.-D. de Paris et ceux
des pinacles de la cathédrale de Reims,
comme le saint Michel de bronze au sommet
de la tour de l'Hôtel-deVille de Bruxelles,
et le Hanske de Kryger, le porte-bannière
du beffroi d'Audenarde (Jig. joi ).
Fig. 301.
Remarquons tout d'abord, ici que cer-
taines des figures que nous venons de citer
comme exemples remplissent un rôle à la
fois fonctionnel et décoratif; le personnage
humain devient un organe élégant, artis-
tique, mais reste un organe de l'édifice ;
ainsi en est- il des cariatides et des statues
servant d'épis de combles, d'amortissements
de pinacles (Jîg. J02), etc. Dans ce cas,
elles ont à la fois tous les mérites des formes
de convenance, de structure et d'expression.
D'autres, placées sur un piédestal, sous un
Fig
baldaquin, sont ajoutées plutôt que soudées
au monument, et en constituent des élé-
Flg. ^O'^. — Statue du Chiist à Saint-Nazaire de Carcassonne.
ments moins essentiels mais non dépourvus
de convenance. Encore faut-il qu'elles ne
482
l^rbuc ïic V^xt cbvcttcn.
se substituent pas K un membre de la struc-
^ 'rï- 3'^4- — Détail du grand portail de la cathédiale de Reims.
ture, de mnnière à en usurper la place ;
dans l'œuvre bâtie et la gâtent au lieu de
l'orner. Nous ne pouvons nous empêcher
de songer ici à la mode fâcheuse, qui sévit
actuellement, de jucher des statues colos-
certaines statues interviennent brutalement
Fig. 306. — Musée de Toulon.
sales au sommet des tours d'églises. Ces
aberrations sont dues à d'impérieux caprices
de goût de la part de personnes étrangères
à l'esthétique monumentale. Nous plaignons
Fig. 2^7' — Porte (1 un palais de Géiie.<!.
les architectes qui se laissent violenter par
l'autorité, quand elle est si mal inspirée.
La statue gothique se dresse d'habitude
sur un cul de lampe et s'abrite sous un bal-
daquin (v. fig. 303 et 305).
€ô0at 0ur la ùécorattoii arcl)ttectontqiie.
483
Dans le style classique, des personnages
humains se voient souvent étendus en pen-
dants sur les deux rampants d'un fronton,
ou même, plus intimement soudés à l'ar-
chitecture, ils constituent des supports an-
thropomorphes, ou se dressent en caria-
tides, comme à l'Erechteion d'Athènes,
où ils prennent la place de pilastres, ou rem-
plissent la fonction de grandes consoles sous
un avant-corps, comme à la célèbre porte
de Puget à l'Hôtel-de-Ville de Toulon et à
celle d'un palais génois figiin'e ci-contre
(fis- 3^7}- ^'^ apparaissent même, dans les
gaines et les termes, à mi-corps ou en
bustes (fig. Jjoç).
Aux trumeaux et aux ébrasements des
portails des grandes églises gothiques se
dressent ordinairement des personnages qui
comptent parmi les plus beaux exemples de
piliers anthropomorphes f/ig. jo^ et 308).
Isolées et groupées, plusieurs figures com-
posent des ensembles architectoniques du
même ordre dans des monuments tels que
le fameux groupe dit des Trois Grâces, que
Germain Pilon composa pour le monument
de Henri II, ou la fontaine dite de Moïse à
Dijon, qu'on trouve reproduite à la page 157
de l'année 1896 de la Revue de l' Art chré-
tien. Ajoutons encore un exemple emprunté
à l'époque romane, savoir un pilier du
cloître roman de Moissac, qui représente
lin évangéliste (année 1899, p. 35). Remar-
quons que les prophètes de Dijon et l'évan-
géliste de Moissac constituent des figures
décoratives et symboliques incorporées à un
^'g- 3^9- — Maison B'i du Nord à Bruxelles, par Bp.vaert.
pilier, non des figures fonctionnelles identi-
fiées à l'organe de structure comme le sont
les cariatides. On trouvera de vraies et
splendides cariatides aux accoudoirs de
stalles publiés naguère ici (fig. p. 73 de
l'année 1898 de la Revue de l' Art chrétien).
Au lieu d'être isolée, en ronde bosse,
comme disent les sculpteurs, dégagée de la
pierre, la figure peut encore être tr.iitée en
bas-relief ; elle s'unit alors plus intimement
à l'œuvre construite, dont elle occupe des
parties bien délimitées, le plus souvent des
484
Bcbuc tic r^vt fbrcttciu
Fiar. iio
Hôtel des Postes de Toulouse ; arch. : M. H. Maurette (').
panneaux. Voici par exemple fy^^. J/o) dans | un panneau, un cadran d'horloge accosté de
L'Architecture.
La Sculpture.
L:i Peinture.
Fig. 31 r. — Église Saint Epvre à Na
personnages en demi-bosse; des quatre- 1 feuilles en panneaux rentrés (^/^>. 7//^ où
, r»',,,,à. M TJo„ . ,r 77- Z 777- 7 sont sculptées les fio[ures allégoriques de
i.L) après M. Kaguenet, Monographtes des bâlnnetits ! ^^ '^ .
modernes. ' ' l'architecture, de la sculpture, de la peinture
€S0ai 0ur la îDécoration arcl)ttcctoiuque.
485
et de la musique; un Hanc de sarcophage
chrétien (fii^. 312) offrant en bas-reHef une
collection de personnages; des dossiers de
stalles (fig. 313) où, sous des arcatures, des
figures de saints sont taillées dans le chêne;
enfin une façade en pans de bois (fig- 314)
où l'allège des fenêtres est orné de person-
nages sculptés.
La têle seuld apparaît souvent dans les
médaillons ( fïg- 315), ornement favori de la
renaissance, répandu à l'infini sur les fa-
çades, dans les écoinçons, les frises, les pan-
neaux de menuiserie, contenant des figures
en demi-relief, ou gracieuses ou plaisantes;
ou encore, à la seconde période de la
renaissance, dans des mascarons, des
masques souvent grimaçants fyf^. 31b à
31S. 322 à 324).
Les romans aussi et les gothiques ont fait
un usage abondant de la tête et du masque,
non pas tant comme motifs ornementaux
appliqués aux façades et destinés à combler
des vides, ce qui constitue un emploi tout
à fait inférieur au point de vue esthétique.
mais comme forme animée et poétique
donnée à des éléments utiles de la construc-
tion, notamment à des corbeaux. Ils font
reposer des corniches sur des modillons à
masques humains, arnortissent des larmiers
sur des têtes gracieuses, donnent à leurs
Fig. 313-
dégorgeoirs de descente d'eau la forme
d'une face crachante, et décorent de mas-
ques fantastiques ou jolis des clefs de
volâtes, des bouts de poinçons, etc.
Le arand art de l'ornemaniste consiste
ici à bien incorporer l'œuvre de sculpture
486
î^cliuc tir V^xt fbvcticn.
à l'édifice. Une grande leçon nous est
donnée à cet égard par les Égyptiens dans
,^^:ç==^.«sS;j~.•■^^««aiaS!!^;^,j||l||
.,:'***'^"«lSiHl&
Ï" ' iiif -^=--^4 4M4' w^
pjCT. ^11. Composition de M. Percy. E. Newtan.
leurs décorations murales à fleur de paroi,
si savantes, si nobles, si puissamment déco-
Fig. 315-
ratives. On ne peut assez admirer comment
ils ont su exprimer leurs magistrales con-
,— _■ , s--. ;■-; »t;*î-, -;XJu'^-P^- f?WD.;;j;ii^.y.ii5S5>.'W^saîHs3?
ceptions dans une sorte degravure analogue
à celle des médailles, où des tableaux
grandioses sont rendus en relief à l'aide
d'un renfoncement de la paroi de quel-
ques millimètres seulement.
Dans la figure 326 on voit l'exemple
d'un décor formé d'une tête noyée dans les
fleurs, collée à la muraille de la façon la
moins judicieuse; c'est un décor plaqué.
Fig. 3'S.
Fi.
i>9-
Dans la figure 325, le masque est adapté
en guise de clef à une archivolte par l'inter-
médiaire d'un cartouche de forme com-
pliquée. On a voulu greffer le décor, mais
on l'a fait d'une façon incohérente, qui ne
Fig. 320.
F.g.
vaut guère mieux que le plaquage pré-
cédent.
Nous avons, dans ce quiprécède, envisagé
surtout l'ornement sculpté ; dans le décor
peint, la figure humaine prend une place
plus importante encore, soit comme orne-
ment pur, soit comme entrant dans les
sujets historiés. Elle y est souvent plus
(Bssài mv là îiécoratiou arcljitectoiiîque. 487
complètement stylisée que dans la seul- | tion symbolique, historique ou pittoresque.
(i
ri#^J^'»/l
Fig. 322 et 323. — Un corbeau du Pont-Neuf.
pture ; elle y joue un rôle important tantôt
Fig. 324. — stalles de Lanjese.
comme pur décor, tantôt comme figura-
^h- 325-
Avec ce genre de composition nous sortons
~éi
du domaine architectonique dont nous ne
voulons pas dépasser les limites.
L. Cloquet.
HnvUE DE L ART CURBTtEN.
I9OI. — 6""^ LIVRAISON.
^» K^^ A^yik A^^ \^A A^X A^VU A^^ A^ A A^A A^X it^^ ^^V^ ^^»^ A^A A^^
^Tï^xxTIx^IITIIrrTTIlI^rxTIrIIlIIIIIIII^xT^IlI^IXIII^IlIJITT^TIITXIIIlIIlIITITrTrTIIIllIIl;IIIIIIITIlïIIIJ[]IIIIIII^XI3IIIIl^IIlllI miiiii^nm'
n .^ - ..1 ■ ■ I —Il G
^
©u vole îit l'avum ïians la Flore gotijtque.
i^ t^[ii_iijïrrii3iriiTztiiiitrxiiiiiiiJ(iiiiiiixiiiiiiixiiiiiiiïriiiiii)iiiiiiiisiiiiiiiïiiiiiii;iiiiiiiixiiiiiirMiiiiiijïiiiiiiiiiiiiiiixiiii)iiiii;u
É^ ^S:'' ^Atl^^ *Atl^ ^A^^ ^S"" *^-^ *i4ï-^ ^iÔ-'f *i^^ *AÔ^ ^Atl^ ^iiî-^ ^A^^ ^A^'^ ^.-^1^ V
I
.-:/ y? 6^ J / : 7/ /i,^ (7 ;'^ dont
\ar21111 macïilalnm est
une variété, peut être
considéré comme la
plante qui a donné
la feuille primordiale de
^^m^^^ la Flore gothique. I,es
botanistes nous disent que cet arum est le
type des plantes désignées sous le nom
iïaroïdées. Sa racine est bulbeuse. Ses
feuilles sont d'un vert tendre très brillant,
et ressemblent à un fer de lance. Aussi les
appelle-t-on feuilles hastées. De leur ner-
vure centrale partent de petites nervures
qui viennent finir à une autre nervure péri-
phérique qui borde le contour de la feuille.
La fleur de l'arum se nomme spathe. C'est
une membrane qui enveloppe le spadice,
partie delà plante de forme conique, portée
sur une hampe à la base de laquelle se
trouve le fruit. Ce fruit, un peu ovoïde, se
compose de petites baies rondes, rouges, et
se tient également sur une tige droite et
ferme. L'arum est une plante tout à fait
printanière. Aussitôt que la chaleur se faii
sentir, la spathe devient violette, se flélrit,
et laisse voir le spadice, légèrement violet
aussi, ainsi que le fruit qui n'est pas sans
avoir quelque ressemblance avec la grappe
de raisin. Puis les feuilles disparaissent à
leur tour pour renaître au printemps sui-
vant. L'arum paraît donc annoncer le réveil
de la nature.
Il croît au fond des bois, dans les endroits
humides, sur le bord des ruisseaux, dès le
commencement d'avril. La seule différence
qui existe entre \ antiii inadtlaluin que nos
archéologues donnent, par erreur, comme
le type des aroïdées, et Xariiiii vtilgarc, qui
en est le type réel, c'est que les feuilles du
premier portent des taches d'un très beau
violet foncé, taches qui n'existent pas sur
celles du second. Voyons maintenant à
quelle époque l'arum fit son apparition dans
la sculpture ornementale de nos édifices re-
ligieu.x du moyen âge.
II
QUELLPL que soit notre admiration
pour les Gothiques, la vérité nous
oblige à dire que c'est aux Romans
que revient l'honneur d'avoir les premiers
Arum nature] tel qu'il pousse dans les bois.
trouvé et interprété la feuille d'arum. Viol-
let-le-Duc nous a donné quatre motifs
d'arum, qui nous paraissent indiscutables,
relevés par lui dans la grande église de Vé-
zelay ('). Là, avec la feuille, se trouve le
I. VioUetle-Duc, Diclinitnuii e raisonné de l' Architec-
ture fr.tiicaisc du XI' au XVI' sihle, t. V^. Au mot Flore^
2Du rôle îie l'arum îïan0 la jfiore gotl)iiiue.
489
fruit granulé. Or, comme ces motifs sont
pris sur des chapiteaux de la nef, partie ro-
mane de l'édifice qui date de la seconde
moitié du XP siècle, il en résulte que c'est
bien alors que l'arum apparut dans l'orne-
mentation de nos églises.
Cette observation s'applique également
au nénuphar. En effet, le nénuphar, qui
peut être considéré comme la deuxième
plante de la Flore gothique, s'est introduit
en même temps que l'arum dans l'ornemen-
tation romane. Ainsi que pour l'arum, Viol-
let-le-Duc nous a donné deux motifs de
nénuphar relevés sur les chapiteaux de la
nef de Vézelay ('). La feuille est représentée
plissée au sortir de l'eau. On voit ensuite
le nénuphar avec l'acanthe dans la plupart
des églises du commencement du XI I^ siè-
cle. A ce moment il a la forme d'une feuille
à peu près carrée, dont la partie supérieure
se divise le plus souvent en deux enroule-
ments, et retombe lourdement sur elle-
même. Il est à remarquer que le nénuphar
est plus commun dans la première moitié du
XI P siècle que l'arum qui est extrêmement
rare.
Ici nous nous trouvons en présence de la
doctrine du docteur Eugène Woillez, que
notre sujet nous oblige à examiner et à dis-
cuter, pour ainsi dire, pied à pied. Mais il ne
faudrait pas se méprendre sur les sentiments
que nous professons pour la mémoire de
l'éminent archéologue de l'Oise. lia été un
de ces piemiers maîtres que nous devons
toujours saluer avec respect, et s'il lui est
arrivé, à lui comme à tant d'autres, de com-
mettre une erreur, il n'en est pas moins vrai
que ses travaux nous ont ouvert la voie, et
qu'il a droit à notre reconnaissance.
En 1848, Eugène Woillez présenta à la
Société des Antiquaires de Picardie une
I. V'ioUet-le-Duc, loc. cit., p. 494.
étude intitulée : Iconographie des plantes
aroïdes figurées au Moyen Age eti Picardie
et considérées comme origine de la fleur de
lis de France. Ce travail parut dans les
Mé)ïioires de la Société et eut un grand re-
tentissement (■), non pas tant à cause delà
thèse héraldique soutenue par l'auteur, que
par suite de considérations originales sur
l'arum, qui firent sensation à une époque
où la Flore gothique était à peine connue.
Or, si nous acceptons la doctrine de Woil-
lez en ce qui touche l'arum présenté comme
feuille primordiale de la Flore gothique,
bien qu'à la rigueur le nénuphar puisse être
mis sur le même rang, il nous est impossible,
sauf pour deux motifs, d'accepter les exem-
ples que l'éminent archéologue apporte à
l'appui de ce sentiment. Ce qui peut éton-
ner, c'est que ViolIet-le-Duc ait accepté le
tour, sans voir combien les exemples d'arum
produits par Woillez différaient des siens ;
et que M. Lefèvre-Pontalis se soit rallié à
la doctrine de cet auteur sans faire de res-
trictions ('). Pour nous, après avoir étudié
dans tous leurs détails les chapiteaux et
motifs divers figurés sur les dix planches
qui accompagnent le texte du mémoire de
Woillez, nous sommes arrivé à la conclu-
sion que voici : trois petits chapiteaux d'un
même pilier donnent de l'arum incontes-
table ; un chapiteau présente des feuilles
en ruban qui peuvent être des feuilles d'a-
rum ou de sagittaire ; deux chapiteaux
offrent des feuilles de nénuphar primitif ;
un chapiteau est formé de feuilles de vigne,
et tous les autres dessins sont des motifs
d'acanthe simple ou d'acanthe arrangée
d'une façon plus ou moins fantaisiste par
1. Mémoires âe la Société des Antiquaires de Picardie,
t. IX, 1S48.
2. Eugène Lefèvre-Pontalis, Larchilecticre raligieuse
liaiis l'ancien diocèse de Soissons au XI' et au X/l" siècle,
V part., chap. \'l II.
490
Urbur tic T^lit rbrcttcn.
les artistes de la fin du XI^ ou de la pre-
mière moitié du XII^ siècle.motifs que l'on
rencontre dans la plupart des édifices dont
ces artistes ont créé l'ornementation. Quant
au fruit qui accompagne presque toujours
la feuille, et que Woillez affirme être celui
de l'arum, il est de forme si variée que tan-
tôt on peut le prendre pour le fruit de celte
plante, tantôt pour la pomme du pin, et
souvent aussi pour la grappe de raisin,
attendu que, dans la seconde moitié du
XII' siècle, on le retrouve avec la feuille de
fougère et la feuille de vigne. Par consé-
quent sa présence est loin de prouver que
les feuilles qu'il accoinpagne sont des feuil-
les d'arum. Voici plus détaillés et avec
indication permettant de les retrouver faci-
lement dans l'ouvrage de W'oillez, les cinq
motifs dont nous venons de parler :
1° Trois petits chapiteau.x d'un même
pilier de l'église de Cambronne (Oise),
Planche VIII, figure 38, qui donnent de
l'arum indiscutable, mais de l'arum naturel,
c'est-à-dire non interprété comme celui de
l'église de Vézelay, et tel qu'il pousse dans
les bois ;
2" Un chapiteau de l'église d'Avrechy
(Oise), PI. V. fig. 23, qui présente des
feuilles en ruban qui peuvent être des
feuilles d'arum ou de sagittaire, mais plu-
tôt de sagittaire, étant donnée leur lon-
gueur ;
3° Un chapiteau de l'ancienne église des
Minimes de Compiègne (Oise), PI. VI, fig.
28, dont les feuilles sont des feuilles de
nénuphar si bien caractérisées que l'auteur
hésite à les donner pour de l'arum, et dit
qu'elles pourraient bien être des feuilles
d'eau, ce qui est vrai ;
4° Un chapiteau de l'église de Saint-
Évremont de Creil (Oise), PI. VI, fig. 29,
qui porte des feuilles de gros nénuphar pri-
mitif, tellement nettes qu'on se demande
comment Woillez a pu voir en elles des
feuilles d'arum ;
5° Un autre chapiteau de l'église de Cam-
bronne, PI. VIII, fig. T^y, qui offre des
feuilles de vignes indéniables, mais que
l'auteur déclare être, sinon de l'arum, du
moins des feuilles d'une espèce voisine,
espèce qu'il n'indique pas, parce que sur
leur bord existe la petite nervure périphé-
rique que l'on voit sur l'arum naturel, la-
quelle n'est là très probablement qu'une
simple fantaisie d'artiste.
En somme, de tous les exemples d'arum
présentés par Woillez, il n'y en a qu'un seul
qui soit absolument sûr, c'est l'arum natu-
rel de l'église de Cambronne.
Comme type de son arum prétendu, qui
remplit presque à lui seul les di.x planches
joiiUes à son mémoire, Woillez indique les
figures 8, 9 et 10 de la planche III. Mal-
heureusement il suffit de regarder ces trois
motifs pour se convaincre de suite que l'on
a sous les yeux de la belle et bonne acanthe.
Ajoutons que les trois inotifs n'en forment
qu'un, en réalité, les différences existant
entre eux n'ayant aucune importance.
Eugène Woillez, il faut bien le dire, est
assez flottant dans sa doctrine. Il commence
par nous dire que le type des aroidées
est y Arum iiiaciilaiuin, connu aussi sous
les noms de Gotiet ou Pied de veau, et tout
semble indiquer, au commencement de son
travail, que c'est cette plante que nos pre-
miers sculpteurs ont interprétée. Puis, tout
à coup, il la laisse de côté pour nous ^xk.-
s&n\.tiv\G Ca//a cf/iiopica, Anou d Ethiopie,
comme ayaiit d'abord inspiré ces artistes.
Enfin, il nous dit qu'.ui XIII" siècle nos
sculpteurs abandonnèrent la plante exo-
tique pour prendre le Gouet. Tout cela est
inacceptable. Le Calla ethiopica n'ayant
été connu en P>ance qu'au XVI 1 1*^ siècle, il
est impossible que les sculpteurs du moyen
Du rôle De rarum îian0 la jflore gotl)tque, 491
âge l'aient reproduit dans nos églises des
XI" et XIJs siècles, pour lui substituer,
au XIII', notre arum indigène. Woillez ne
domine pas son sujet, il est au contraire
dominé par lui. Il voit de l'arum partout et
encore, au lieu de s'en tenir à celui de nos
bois, il va en chercher en Ethiopie.
Maintenant si nous étudions les offands
monuments de la première période gothi-
que, nous serons complètement fixé sur
la valeur de la thèse que nous combattons.
Prenons d'abord l'égalise abbatiale de Saint-
Denis, édifice type regardé comme le pre-
mier des monuments gothiques.
Dans ses parties les plus anciennes datant
de l'abbé Suger, l'abbatiale de Saint-Denis
a l'ornementation romane du milieu du
XI I*^ siècle. Examinons donc cette orne-
mentation, en ayant sous les yeu.x les plan-
ches du mémoire de Woillez.
Au portail les frises qui ornent les tail-
loirs des chapiteaux des quatre colonnettes
de l'ébrasement droit de la porte centrale,
sont formées du motif de Woillez avec la
longue tige que l'on voit supportant ce mo-
tif dans beaucoup des exemples donnés par
notre auteur. Les frises qui ornent les tail-
loirs des chapiteaux des quatre colonnettes
de l'ébrasement gauche de la même porte,
sont formées de feuilles d'acanthe posées
droites sur un seul rang et accompagnées
de pommes de pin. tellement ressemblantes
à la pomme de pin naturelle que toute né-
gation est impossible. Mais le plus curieux,
Acanthe que le D'^ Woillez prétend d'être de l'aruii
c est que les personnages qui occupent le
premier rinceau de la voussure, sont enlacés
dans de longues tiges semblables à celles
dont nous venons de parler, et à l'extrémi-
té desquelles fleurit le motif de Woillez.
Aux portes latérales le même motif se re-
trouve également dans l'ensemble de la
sculpture. Sous le porche intérieur, dans la
première travée, qui, ainsi que le portail,
date de Suger, sous la tour méridionale, sur
les chapiteaux des colonnettes posées de
chaque côté de la petite fenêtre existant au-
dessus de la porte droite du portail, on aper-
çoit de l'acanthe et le motif de Woillez avec
tige et sans tige. Dans la partie nord de la
même travée, partie qui supportait autrefois
la belle flèche qu'aimaient tant les Parisiens,
sur les chapiteaux du deuxième gros pilier,
on voit une feuille droite, bien développée,
au milieu de laquelle se dresse,sur sa hampe.
le fruit que Woillez dit être celui de l'arum.
Sur les mêmes chapiteaux on voit également
deux tiges réunies par une bague, formant
une croix de Saint-André, tiges au bout des-
quelles fleurit encore le motif de Woillez.
Enfin, dans le pourtour du chœur, qui, lui
aussi, a été édifié par le grand Abbé, sur des
chapiteaux de colonnettes existant dans les
première et deuxième chapelles du côté
nord, et deuxième, et troisième chapelles du
côté sud, on distingue, autant que l'obscurité
qui règne dans ces chapelles le permet, des
tiges enroulées portant toujours la même
feuille. Tels sont les motifs qui se voient à
Saint-Denis. Or, comme ces motifs ressem-
blent exactement à la feuille d'acanthe ro-
mane, et qu'ils font partie intégrante de
l'ornementation d'acanthe du portail, du
porche intérieur et du pourtour du chœur,
il est évident qu'ils sont aussi de l'acanthe
492
î^rbuc tic l'^vt cbrcticu»
et non de l'arum. Les séparer de la masse
sculpturale qui les entoure pour voir en eux
une feuille autre que celle de l'acanthe, se-
rait une opération absolument arbitraire et
que rien ne pourrait justifier.
Après avoir étudié Saint-Denis, étudions
Notre-Dame de Paris.
Si Saint-Denis nous offre l'ornementation
d'acanthe du milieu du XI I*^ siècle, la grande
cathédrale nous présente la Flore gothique
Chapiteau de Saint Benoit sur-Loiie. Porche XU'- siècle.
primitive dans toute sa pureté et toute sa
grandeur. La partie la plus ancienne de
l'édifice est l'abside. Aussi, dans la galerie
ou triforium de cette abside, on retrouve
avec un peu de nénuphar et de plantain,
une épaisse floraison d'acanthe. Or, si nous
montons dans cette galerie, nous voyons
sur la colonnette isolée de la travée termi-
nale, juste dans l'axe de l'édifice, un très
beau chapiteau d'acanthe, et à gauche de
cette colonnette, sur la première du groupe
gauche de la travée, un autre chapiteau sur
lequel est sculptée une petite téie d'homme
tirant la langue, et sous cette tête le motif
de Woillez Dans la même galerie, sur un
des chapiteaux de la quatrième travée du
côté sud, on retrouve le même motif, un peu
moins fini comme tr.ivail, et trois feuilles
posées droites, complètement développées.
Celle du centre, surmontée d'une petite tête
de monstre, n'a rien devant elle ; mais les
deux autres ont devant elles, posé sur sa
hampe, le fruit que Woillez considère comme
le fruit de l'arum. Enfin, sur un chapiteau
de la première travée du côté nord, on voit
encore le motif de Woillez, formé ici de deux
feuilles qui se regardent, ayant devant cha-
cune d'elles le fruit en question toujours
posé sur sa hampe. Cette composition est
très gracieuse. Eh bien ! quand on compare
ces motifs avec la niasse d'acanthe qui cou-
vre les autres chapiteaux de la galerie ; en
voyant qu'ici, comme à Saint-Denis, ce sont
les mêmes lobes pointus et nervés en creux,
le même contour, le même mouvement, en
un mot la même ressemblance parfaite avec
l'acanthe qui les entoure, on ne peut douter
que ces motifs soient eux-mêmes des motifs
d'acanthe. Il faut connaître la doctrine de
Woillez pour que l'idée de les regarder
comme une autre plante puisse venir à l'es-
prit. Ajoutons que ce motif de W^oillez se
rencontre partout où la feuille d'acanthe ro-
mane orne nos édifices religieux. 11 existe
aussi bien sur les chapiteaux de Saint-
Benoît-sur-Loire, que sur ceux des églises
de l'Oise. Cette ornementation d'acanthe a,
en réalité, une allure générale assez païenne.
On sent que tout cela a été inspiré par la
sculpture antique, dont les débris n'étaient
pas rares en Gaule. On ne voit rien dans ces
feuillages qui ait un caractère vraiment na-
tional. Cependant l'esprit gaulois s'y révèle
déjà par la variété des compositions, et
par l'introduction au milieu de l'acanthe de
personnages étranges, grotesques ou fan-
2DU rôle De l'arum ham la jflore gotliique.
493
tastiques, que l'on aimait beaucoup à cette
époque.
Nous n'avons pas à examiner ici la doc-
trine d'Eugène Woillez sur l'arum considéré
comme origine de la fleur de lis de France,
d'autant plus que son arum prétendu n'é-
tait que l'acanthe ; sa doctrine n'a aucune
base. Mais ce qu'il dit de la perpétuité jus-
qu'au XII^ siècle et même jusqu'à nos jours,
d'une tradition païenne faisant de l'arum
naturel le symbole du réveil de la nature et
de la puissance génératrice de l'homme,
nous paraît admissible. Nous avons essayé
de démontrer ailleurs (') que le chêne abon-
dant, qui couvre les chapiteaux de la cathé-
drale de Chartres, était là en vertu d'une
tradition celtique, et que la coutume d'ado-
rer les fontaines, les arbres et les pierres
persista en Gaule jusqu'à la fin du VIII<=
siècle, ainsi que le démontrent les Capitu-
laires de Charlemagne d'Aix-la-Chapelle,
789, et de Francfort, 794, Il n'y aurait donc
rien de surprenant, en ce qui touche l'arum,
à ce qu'une tradition païenne, de source
romaine, se fût glissée dans les traditions
celtiques pour se perpétuer avec elles à tra-
vers les âges. Quand on voit l'arum pousser,
se développer et fleurir dans les bois aux
premiers jours du printemps, alors que les
bourgeons des autres plantes commencent
à peine à s'ouvrir ; quand on voit la forme
de son spadice, on s'explique sans effort que
cet arum ait été remarqué dans les temps
anciens et qu'on lui ait attribué le symbo-
lisme dont parle Woillez.
III
NOUS avons vu, au commencement
du paragraphe précédent, que l'a-
rum trouvé par les Romans, pouvait, à la
rigueur, être considéré comme la plante
I. Dans La Flore des grandes catJicdrales de fraïue,
p. 44, et la nule.
primordiale de la flore gothique. Il faut
toutefois reconnaître que des motifs simi-
laires à ceux relevés par Viollet-le-Duc
dans l'église de Vézelay, doivent être très
rares et n'exister que dans les édifices de
l'époque romane ; car nous n'avons trouvé
sur les chapiteaux des gros piliers de nos
cathédrales les plus anciennes, aucune
composition d'arum avec son fruit se rap-
Cliapiteau de Saint Benoîtsiir-Loire. Porche XU"" siècle.
prochant de celles de la grande église bour-
guignonne. Discutant ensuite la doctrine
d'Eugène Woillez, nous croyons avoir dé-
montré que la feuille qu'il pensait être de
l'arum, était de l'acanthe.
Mais alors, dira-t-on, quelle est donc la
feuille d'arum de l'époque gothique .'' C'est
ici que notre sujet devient intéressant.
La feuille d'arum de l'époque gothique est
d'abord la feuille d'arum naturelle, c'est-à-
dire reproduite par la sculpture telle que la
nature la donne. L'exemple le plus ancien
de cette reproduction est probablement
494
3Re\)uc tir r9rt djrctien.
celui de l'église de Cambronne qui date de
1130 environ. Ici, nous sommes dans la
période dite de Transition parce qu'elle vit
le passage du roman au gothique. Puis, on
trouve cet aruni traité avec beaucoup plus
d'art, sur un chapiteau de l'église de Mantes,
église contemporaine de Notre-Dame de
Paris, c'est-à-dire de la seconde moitié
du XI I^ siècle. L'arum ici est posé gra-
cieusement sur une feuille de nénuphar. On
le voit encore sur la grande colonnette de
l'étage supérieur du clocher de Saint-Spire
de Corbeil, clocher de la fin du XI V siècle ;
sur deux chapiteau.x du triforium de l'église
Arum interprété de 1 église de Bagneux.
de Bagneux (Seine), église des dernières
années du XII^ siècle ou des premières du
XI 1 1" ; sur un petit chapiteau du bas côté
sud de la nef de Saint- Léger de Soissons,
chapiteau du XI II" siècle; sur les petits cha-
piteaux d'un gros pilier de la nef de l'église
de Chambly (Oise), nef qui est de la fin du
XI II" siècle ; enfin sur les deux chapiteaux
des deux premiers piliers du pourtour du
chœur de Notre-Dame de Paris, côté nord,
et sur le chapiteau du deuxième pilier du
même pourtour, côté sud. A Chambly et à
Notre-Dame de Paris, l'arum est ondulé se-
lon la manière des artistes de la fin du X 1 1 P
siècle et du XIV". Aussi est-il hors de
doute que les chapiteaux de Notre-Dame
présentant un feuillage ondulé auront été
refaits à cette époque. Outre les exemples
que nous citons, l'arum naturel doit exister
dans beaucoup d'autres monuments.
Après la feuille d'arum naturel, ou en
même temps qu'elle, les Gothiques mirent
sur leurs chapiteaux une feuille d'arum in-
terprétée. Cette interprétation n'est plus
celle des Romans. Ces derniers avaient pris
la feuille de l'arum avec son fruit pour créer
Arum ondulé de 1 église de Chanildy.
des motifs variés, ainsi qu'en témoignent
les exemples de Vézelay. Les Gothiques
se contentèrent de créer avec la feuille
seule ces admirables crochets qui ornent
les chapiteaux de nos églises et de nos
cathédrales. Voici ce qu'ils firent : ils con-
servèrent la nervure centrale de la feuille,
nervure unique, vu que la nervure périphé-
rique ne compte pas, mais ils supprimèrent
ses petites ondulations naturelles, que les
dessinateurs exagèrent d'ailleurs lorsqu'ils
2Du rôle de l'arum dans la jflore gotljtque.
495
reproduisent la plante, et arrondirent les
pointes de son extrémité inférieure par une
courbe gracieuse venant joindre le pétiole.
Parfois, aussi, ils se bornèrent à diminuer
les pointes sans les arrondir, ce qui donne
à la feuille l'aspect d'un fer de lance. Puis,
ceci fait, ils inclinèrent légèrement en avant
la partie supérieure de la feuille ; ou bien
l'enroulèrent sur elle-même ; ou encore lui
attachèrent une ou plusieurs petites feuilles
empruntées à une autre plante et formant
aussi crochet. On appelle souvent bourgeons
ces feuilles ajoutées. C'est, croyons-nous,
Viollet-le-Duc qui, le premier, leur a donné
ce nom ; et, bien entendu, on l'a accepté
sans examen. Or, c'est une erreur. Si ces
feuilles sont petites, elles sont développées,
complètes, et, par conséquent, ce nom de
bourgeons ne doit pas leur être appliqué.
Sous la feuille ou les feuilles ajoutées à
l'arum, particulièrement sous la fougère
et sous la vigne, on voit du raisin. Parfois,
aussi, entre deux feuilles d'arum en crochet
se dresse sur sa hampe le fruit dont nous
avons parlé, en examinant la doctrine de
Woillez. Il a le plus souvent l'aspect du
raisin. Toutefois, ainsi qu'il a été dit plus
haut, il est difficile, surtout après les grat-
tages qu'ont dû subir nos églises, de dire
d'une façon affirmative si ce fruit est celui
de l'arum, de la vigne, ou du pin. Les princi-
pales feuilles ajoutées pour former des cro-
chets sont à peu près par ordre chronolo-
gique :1a fougère, la vigne, le trèfle, la re-
noncule, la chélidoine, l'ancolie, le chêne et
le lierre. Quand le crochet est fait de plu-
sieurs petites feuilles, il ressemble à un joli
bouquet.
Mais, dira-t-on, on a fait des feuilles en
crochet avec le nénuphar et le plantain.
Cela est vrai, aussi faut-il ne pas les con-
fondre avec les feuilles en crochet d'arum.
La feuille faite avec le nénuphar se recon-
naîtra à sa largeur, à la grosseur de son
crochet, et lorsque sa partie inférieure est
reproduite, elle présente de chaque côté du
pétiole une courbe rentrante en quart de
cercle. On trouve aussi, sur des petits chapi-
teaux, une feuille plus étroite et plus allon-
gée que l'arum, dont la partie inférieure et
surtout le pétiole forment de chaque côté
une courbe rentrante en demi-cercle qui se
lie à la même courbe des feuilles voisines,
de sorte que ces feuilles ont un peu l'aspect
d'une couronne.On a là une jolie interpréta-
tion de nénuphar se rapprochant de l'arum.
Maintenant la feuille faite avec le plantain
est caractérisée par trois nervures. Le
plus souvent sa partie inférieure s'arrondit
comme l'arum en venant toucher le pétiole;
quelquefois elle garde ses deux pointes, ce
qui lui donne la forme hastée. Cette feuille
ne diffère de l'arum que par le nombre de ses
nervures, car elle aussi s'incline simplement
en avant, s'enroule sur elle-même et présen-
te des crochets de petites feuilles prises
aux plantes que nous venons d'énumérer.
Jusque dans ces derniers temps nous avions
pensé qu'elle était de l'arum, et que les
feuilles d'angle des chapiteaux qui ont trois
nervures en étaient également. Mais nos
idées sur ce point se sont modifiées et au-
jourd'hui nous distinguons la feuille de
plantain en crochet, de la feuille d'arum de
même forme, d'après le nombre des ner-
vures.
Tel est notre sentiment sur la feuille
d'arum interprétée par les Gothiques. S'il
n'était pas accepté, il ne faudrait alors ne
reconnaître pour arum que la feuille rendue
telle que la nature la domie. Dans ce cas, le
rôle de l'arum dans la Flore gothique serait
singulièrement diminué. Mais les crochets
ont leur langage, et à ceu.K qui les étudient
avec attention, ils disent que la feuile d'arum
est bien celle qui leur a donné naissance.
REVUE DE l'art CHRÊIIEN.
igoi. — 6'"'^ LIVRAISON.
496
îRrliur Dr r^rt cbrctîcu»
Les chapiteaux d'arum en crochet sont
extrêmement simples et élégants. Ce carac-
tère d'élégante simplicité, qui est celui de
toute chose primitive, permettrait, à lui seul,
de voir dans l'arum la première plante choi-
sie par les Gothiques pour orner leurs édi-
fices. Cette sculpture égale parla pureté de
son dessin, la grâce de ses lignes, et aussi
par la vigueur de son modelé, la sculpture
antique. C'est principalement dans l'Ile-
de-France, l'Attique de notre pays au
moyen âge, pendant la seconde moitié du
XI I^ siècle et la première du XI IF, que
l'arum apparaît d'abord dans toute sa
Chapiteau de l'église de Taverny, formé d'arum s'enroulant
sur lui-même.
beauté, et donne ensuite sa plus riche flo-
raison. On le trouve non seulement dans
les cathédrales, mais encore dans les
églises de campagne. Il fleurit sur les cha-
piteaux des gros piliers des nefs et des
chœurs; il se presse sur les petits chapiteaux
des colonnes qui montent jusqu'aux voûtes
pour recevoir les retombées des arcs-ogives,
et sur les chapiteaux des colonnettes des
triforium. Les églises si remarquables de
Taverny, de Sarcelles, d'Auvers-sur-Oise,
de Champagne, de Beaumont-sur-Oise, au
Nord de Paris ; de Montreuil-sousBois,
de Champigny-sur-Marne, à l'Est ; deThi-
verval, de Marciil-Marly, à l'Ouest ; de Ba-
gneux, d'Arcueil,de Palaiseau et d'Ilteville
au Sud, pour ne citer que celles-là entre
mille.ont des chapiteaux d'arum en crochet
très nombreux et d'une absolue perfection.
S'il nous fallait indiquer ici les plus beaux,
la liste serait vraiment trop longue. D'ail-
leurs, il suflit d'examiner avec attention l'or-
nementation de ces églises pour les aperce-
voir presque aussitôt.
Nous avons essayé de mettre dans cette
étude le plus de clarté possible. Toutefois,
afin que nos lecteurs aient, pour ainsi dire,
en mains le hl chronologique du travail,
nous donnons le petit tableau qui suit, avec
lequel il n'est pas possible de s'égarer,
lîn voici les motifs :
1° Arum naturel, tel qu'il pousse dans les bois.
2" Arum de l'église de Vézelay interprété i)ar les
artistes romans.
3" Arum de l'église de Cambronne donnant la
feuille naturelle.
2Du rôle îie Tarum îians la jflorc got!)ique»
497
4" Arum de l'église de Mantes donnant la feuille
naturelle légèrement interprétée.
5° Arum de l'église de Chambly, donnant la feuille
naturelle bien caractérisée, mais ondulée à la manière
du XIV siècle.
6° Acanthe, que le D"" Woillez prétend être de
l'arum.
7° Arum des églises de la seconde moitié du XIl""
siècle et de la première moitié du XIII"", interprété et
donnant la feuille s'inclinant sur elle-même en forme
de crochet.
8^ Arum des mêmes édifices, interprété, et donnant
la feuille s'enroulant sur elle-même en forme de
crochet.
9° Arum des mêmes édifices, interprété, et donnant
la feuille portant à son extrémité supérieure un petit
bouquet de fougère, et s'inclinant aussi en forme de
crochet.
Conclustoii.
D'APRES ces considérations, on voit
le rôle, en quelque sorte exceptionnel,
que l'arum a joué dans la Flore gothique.
Il apparaît à la fin du XI^ siècle mêlé à
l'ornementation romane. Puis il semble dis-
paraître au commencement du XII" siècle
pour renaître bientôt soussa forme naturelle
et sous une interprétation différente de celle
de Vézelay. Cette nouvelle interprétation
qui a donné l'arum s'inclinant en avant, s'en-
roulant sur lui-même, ou portant un bou-
quet de petites feuilles prises à d'autres
plantes, est certainement une des plus belles
conceptions de l'art gothique à son origine.
Des cinq plantes qui représentent la Flore
primitive de cet art, c'est-à-dire de l'arum,
du nénuphar, du plantain, de la fougère et
de la vigne, il serait difficile de dire laquelle
a été la mieu.x imitée, car avec chacune
d'elles on a fait des chefs-d'œuvre. On peut
cependant affirmer qu'à ce point de vue
l'arum marche de pair avec les plantes qui
l'ont suivi. Son caractère principal, ainsi que
nous venons de le dire, est cette simplicité,
pleine de grandeur, qui lui fait égaler les
plus belles œuvres de l'art grec.
Et maintenant, pour finir, disons qu'en
dehors de la question artistique, l'arum a
un charme particulier,car l'on aime à retrou-
ver, soit dans sa forme naturelle, soit dans
son interprétation, la plante que l'on va
cueillir au fond des bois dès les premiers
jours du printemps, et qui fut au moyen âge
un symbole de réveil et peut-être même
de Résurrection !
Emile Lambin.
î^ \^A \^A \^A yvlx \^A \^^ A,^jC K^^ X^* A^^ A^X A^X a'^^ A^^ a'^A ^4^
ux3-i.i:um-im.iiitïn)cmiiiixiTiiiiiTiiiiiïiviiniiioiniii: tiitTiiiiiiiiïïririnxiiiiiiiiiiiTiiiïiiiiiiixniiiiniiiiiiniimiixiiiiiin
lia restauration Des monuments anciens
!0
kTÂ^^^ *AiI^ ^Ail^^ V.l^*^Al^ ^.*1^ ^^1^ ^;i)^ *^}V V^AJV Y,a5V V^V V}V y,A)V ^AÎV^^
A restauratioti des monu-
ments anciens est plus que
jamais à l'cirdre du jour.
Après tant d'autres {-),
nous allons examiner les
principes qui doivent y
présider. Des polémiques
acrimonieuses se sont éle-
vées à ce sujet ; nous avons eu à repousser des
attaques personnelles, à réfuter des incrimina-
tions passionnées, à faire face à des procès de
tendance. Nous reprendrons quand il le faudra
la polémique. En attendant, il sera plus utile
d'aborder l'étude sereine de la question.
Pour fixer des règles en matière de restau-
ration, il convient de distinguer et de classer,
comme je l'ai fait jadis, les monuments en deux
catégories: les morts et les vivants.
Il y a des monuments qui sont t)iorts, en ce
sens qu'ils appartiennent en quelque sorte au
passé, qu'ils ne peuvent plus prétendre à subsister
que comme des souvenirs d'époques éteintes,
comme de purs documents de l'art. Tels sont, par
exemple, les temples de l'antique Egypte et de
la Grèce, les ruines de Pompei et les amphi-
théâtres romains, qui appartiennent à des civili-
sations disparues et jamais plus ne seront rendus
à leur usage originel ; telles sont encore les en-
ceintes des cités du moyen âge, comme celle de
Carcassonne, les castels féodaux perchés en nids
d'aigles sur les cimes rocheuses veuves de leurs
habitants, les abbayes détruites par la révolu-
tion, comme Jumièges, Villers et Melrose, les
donjons comme ceux de Coucy et de Gand. Ces
édifices sont irrémédiablement abolis et leurs
restes, qui n'en sont que plus précieux, ne sub-
sistent que comme des souvenirs et des reliques.
Il ne peut être question de rétablir à neuf le
temple de Karnak, ni le r.irthénon d'Athènes, ni
la Porta nigra de Trêves, pas plus que les rem-
1. Première partie.
2. Duclos, Bull. Je la Gilde de SC-Thomas et St-Liic. Anvers,
année 1874. J. Nève, L. Saintenoy, La comeivalion des moniimeiils
en Belgique. V. KapnchRobevl, lu 'luence de l'opinion /lulitiquc sur
la conservation des monuments.
parts d'Avignon, ni la chapelle palatine de Ni-
mègue, ni l'abbaye de Villers.
Mais il en est d'autres qui sont restés vivants
dans leur vénérable vieillesse, comme le Pan-
théon romain, les cathédrales du moyen âge et
les châteaux de la Renaissance.
Cette classification, que j'ai proposée il y a
huit ans ('), j'ai la satisfaction de la voir adoptée,
et en quelque sorte consacrée, par un des émi-
nents archéologues et un des esthètes délicats
de ce temps.
« A tous ces trésors si divers, disait tout ré-
cemment M. Auge de Lassus (2), notre piété
filiale est également due ; mais ce n'est pas de
même qu'elle doit se manifester. Ici et tout
d'abord une distinction essentielle apparaît et
s'impose. Le monument n'est-il plus qu'une
chose du passé...., le décor est-il seul demeuré
sur la scène désertée à jamais, est-ce une ruine
qui seule nous a été transmise ? — Au contraire,
le monument n'a-t-il pas encore épuisé sa tâche,
demeure-t-il associé à notre vie journalière, est-il
encore vivant d'une vie qui n'est pas que de sou-
venir ? — Nos devoirs en l'une et l'autre occur-
rence diffèrent absolument. »
Examinons quels sont ces devoirs :
Les monuments morts.
Les premiers ne sont pas nécessairement des
ruines, m^is ils sont exposés à la lente et im-
placable morsure du temps, à l'assaut continu
des éléments destructeurs, sans profiter de la
défense opposée à ces dégradations de la part
des occupants, comme c'est le cas pour ceux de
la seconde espèce.
Qu'ils soient restés debout dans leur ensemble,
sinon dans leur intégrité, comme les pyramides
des Pharaons et la Tour des Vents d'.Xthcnes, ou
qu'ils ii'ofTfrentplus que des restes,comnic ri<>ech-
téon, le Coliséc, ou l'église de Jumièges, ils consti-
tuent en tout cas des reliques précieuses du passé,
qu'il faut à tout prix faire durer le plus long-
1. V. Bull, du Cercle liisl. et archéol. de Gand. £" année (1893),
p. 31-
2. Journal de l'Art, 17 aoùl igoi.
3La restauration îïes monuments anciens»
499
temps possible. Ne sommes-nous pas tous d'ac-
cord sur ce point?
Non pas, malheureusement ! Il est des poètes
amoureux du pittoresque, qui trouvent un
charme supérieur à tout dans les murailles bran-
lantes, croulantes et agonisantes, et font consister
la beauté des ruines précisément dans leur marche
vers le néant. Ils adorent surtout le lierre grim-
pant au.x vieux murs, les buissons poussant à
travers les éboulis de pierres, les arbustes enra-
cinés aux voûtes et au sommet des murailles,
la mousse qui tapisse et la patine qui dore les
parois et jusqu'aux monticules accidentés que
forment les amas de maçonneries écroulées et
ensevelies sous la poussière. Arrière le curieux
qui veut sonder ces décombres ; l'esthète qui cher-
che à en relever d'artistiques fragments; arrière
l'architecte qui veut remettre l'une sur l'autre
les pierres renversées, rétablir une belle ordon-
nance brisée par un effondrement, remettre à sa
place un savoureux morceau de sculpture pré-
cipité à terre; arrière l'archéologue qui ose profa-
ner le pittoresque désordre par des fouilles entre-
prises au nom de la science ! « On ne restaure pas
les ruines. > Laissez les vieux monuments mourir
de leur belle mort, parés par la nature pour la
tombe éternelle. — Ainsi raisonnent de sincères
mais exclusifs amants de la beauté purement
pittoresque, frappés de certains aspects particu-
liers des choses, fermés aux considérations plus
hautes et aux idées plus larges. Ils oublient qu'à
côté de cette triste beauté des ruines mori-
bondes il y a la beauté des œuvres de l'art
humain en voie de perdition.
Cette beauté mourante qui seule les touche,
qu'ils la cherchent dans la pure nature oii elle
abonde, dans les montagnes ébréchées, dans les
falaises ravinées, dans les rochers croulants
qu'enlace la verdure. De quel droit s'attachent-
ils aux productions historiques des plus nobles
industries humaines, ceux qui comptent absolu-
ment pour rien le charme esthétique de l'œuvre
architecturale? Il est peu intelligent d'assimilei
les murs harmonieux d'un temple grec, l'ordon-
nance prestigieuse d'un cloître roman, les lignes
expressives d'un style historique à des parois
rocheuses quelconques tapissées de poétiques
végétations. Ici le beau artistique et l'intérêt
des souvenirs séculaires priment l'attrait pure-
ment pittoresque qui n'est pas, après tout, si rare
dans la nature, qu'il faille y sacrifier les leçons
de l'histoire, les beautés et les documents de
l'art monumental dans ses restes de plus en
plus rares.
Il ne faut pas laisser périr les ruines histo-
riques ; leur perte serait irréparable ; il faut les
conserver. Si les générations passées n'avaient
pas eu à cœur de nous les garder, si elles avaient
pratiqué le système préconisé par nos artistes
et nos poètes, il y a beau temps qu'il n'y aurait
plus à controverser à leur égard.
— Les ruines ont deux ennemis : l'homme et
la nature.
L'homme est souvent brutal ; il exploite les
ruines comme des carrières. Il dépouille la pyra-
mide de Chéops de son revêtement de marbre
pour en faire des maisons au Caire; il arrache la
façade du Colisée pour bâtir des palais romains ;
il démolit les ruines de l'abbaye d'Aulne pour
construire les têtes du tunnel de la ligne ferrée
de la Sambre ; il fait des bornes d'amarrage
avec les tambours des colonnes d'églises et
transforme en usine le donjon du château des
comtes de Gand.
L'homme est maladroit et redoutable, même
quand il est respectueux du passé. Il lui arrive
de refaire des murs gothiques en appareil mo-
derne, de renouveler en pierre d'Avesnes les
fenestrages des Halles d'Ypres taillés dans le
grès d'Artois.Trop souvent il a copié gauchement
des profils incompris et gâté des monuments en
voulant les réparer.
Est-ce à dire qu'il soit absolument inhabile,
et que la restauration correcte des monuments
soit pour nous chose impossible ? En serions-
nous là après un demi-siècle de romantisme
suivi d'un demi-siècle d'archéologie? Nous pos-
sédons à fond la science des styles ; nous avons
su faire une église de la Madeleine plus romaine
que les temples d'Auguste, comme des églises
du gothique le plus pur, et nous refaisons du
Louis XV avec une impeccable virtuosité ! Nous
avons retrouvé l'art de restaurer les vitraux des
cathédrales et de réparer les vieilles haute-lisses.
Serait-il impossible que des spécialistes conscien-
cieux, surveillés par des hommes compétents.
500
Withxxt ïje PSrt (bvcttcn.
parviennent à réparer convenablement nos mo-
numents délabrés, et faut-il laisser ceux-ci tomber
sous nos )'eiix de peur de les altérer? — Dans
aucun domaine on n'oserait faire semblable in-
jure aux capacités de nos contemporains, et il
faut un excès de préventions passionnées pour
soutenir cette énormité. Disons hardiment que
nous savons et devons conserver, réparer, conso-
lider nos ruines, entretenir nos monuments morts.
— Mais faut-il les retouclier, les restaurer et
dans quelle mesure?
Les solutions radicales, les formules absolues
séduisent facilement les esprits. Une de ces for-
mules a obtenu dans ces derniers temps une
faveur singulière, c'est celle des archéologues
anglais : « conseiver, non restaurer >. Elle n'est
pas absurdement négative comme le système de
nos poètes, mais à notre avis elle est encore trop
étroite. Il ne sera pas difficile de le montrer
par des exemples frapjjants.
Ses adeptes se résignent aux ravages accom-
plis ; ils laissent par terre les monuments que le
temps y a jetés ; ils déclarent le désastre irré-
médiable. Ils ne relèveraient pas même, comme
on l'a fait l'hiver dernier, les fameuses colonnes
écroulées de la salle hypostyie de Karnak. Mais
la destruction commencée, ils veulent du moins
l'interrompre pour conjurer l'anéantissement
suprême. Défense de toucher à l'œuvre d'autre-
fois, autrement que pour en prévenir la chute sur
la tête des passants !
A s'en tenir à la lettre, la formule est uto-
pique.
Car comment raffermir une ruine en la
laissant intacte ? Force nous est d'y opérer des
retouches pour la consolider : ancrage.*^, étais,
remplages, que sais-je ? Mais ne voit-on pas
qu'il vaut mieux lestituer des organes essentiels
de la structure originelle, plutôt que d'introduire
des ouvrages de secours le plus souvent hideux?
Au lieu d'ancrer une voûte, pourquoi ne pas lui
rendre son contrefort ? Au lieu d'étayer une
maçonnerie, pourquoi ne pas refaire son support
naturel ? Au lieu de boucher brutalement une
brèche, pourquoi ne pas reconstituer l'appareil
primitif?
Voici un pan de mur qui boucle ; comment
prévenir son effondrement sans le démolir en
partie pour le refaire? Voici un contrefort lé-
zardé; coinment le réparer sans en dé[)oser et en
reposer les pierres? Voici une muraille ébréchée
qui s'en va pierre par pierre ; comment arrêter
son érosion, sans en remplir les vides, l'araser,
la couvrir d'un chaperon, et (pourquoi pas ?), de
[^référence, de sa corniche ? Voici un parement
dont les joints délavés et dénivelés n'ont plus
d'assiette ; comment rendre la stabilité à son
appareil sans procéder à un bon rejointoyage ?
Remarquons, d'ailleurs, que certains monu-
ments, surtout ceux du moyen âge, sont con-
stitués de telle sorte, qu'aucun membre d'archi-
tecture n'y est inutile ; si un de ces membres vient
à disparaître, il faut nécessairement le rem-
placer ; il faut renouveler les larmiers et les gar-
gouilles qui égouttent les eaux, rétablir les con-
treforts qui soutiennent les poussées, etc.
Mais d'autres cas se présentent. C'est, par
exemple, une belle fenêtre gothique privée de ses
meneaux montants, et dont la riche résille s'est
maintenue dans le tj'mpan (cela se rencontre),
comme par miracle suspendue sur ses barlotières;
c'est une croisée dont le linteau, fait de deux
pièces avec un joint au milieu, a perdu l'appui
du montant, le croisillon ayant été arraché, et
reste suspciuki comme par habitude sur le vide ;
c'est im arc-boutant prêt à céder sous la poussée
des voûtes qu'il ne pourra bientôt plus soutenir,
parce que son pinacle s'en est allé pierre par
pierre ; c'est une voûte éventrée dont le reinplis-
sage commence à tomber et va peu à peu dis-
paraître. Quel est l'homme sérieux qui protes-
tera contre l'idée de rétablir les meneaux mon-
tants et le croisillon, de refaire le pinacle et de
refermer la voûte ? Mais ces réparations néces-
saires, qu'est-ce autre qu'un commencement de
restauration, cette chose honnie? Et pourtant,
quel mal )' a-t-il à ce que la réparation, tout
en cc)nservant l'édifice, lui rende quelques traits
authentiques de sa beauté passée ? — Non
seulement des moyens de réparation, de con-
solidation, de conservation s'imposent à nos
soins, mais il est impossible de les séparer radi-
calement de la restauration véritable ; et l'on
conviendra qu'il est heureu.x de pouvoir réaliser
de préférence la consolidation à l'aide des
membres mêmes de la structure restitués à
3La restauration îies monuments anciens.
501
l'édifice. Il vaut mieux, encore une fois, remettre
un meneau que poser un étançon, élever un
pinacle que murer l'arc-boutant.
Oui osera contester ce qui précède? Mais
alors, où est la limite et que devient la fameuse
formule: conserver, non restaurer 1 Disons plu-
tôt : conserver avant tout, restaurer avec discrétion.
— La formule anglaise est au moins trop
absolue ; ajoutons qu'elle est mal fondée.
Si nous faisons tant de cas d'un édifice ancien,
c'est qu'il a par lui-même une valeur estliétique,
archéologique et historique. Qu'il soit partielle-
ment détruit, c'est chose déplorable ; on doit
regretter de ne plus le posséder intact. Quel
homme raisonnable ne se réjouirait, si, par mi-
racle, il pouvait nous être rendu dans son inté-
grité ?
M. Auge de Lassus suppose un monument
ruiné, mais dont les éléments soient restés sur
place, Il admet, par exception, qu'une main pieuse
les assemble, les rapproche, les relève. « Telle
est, dit-il, la logique suprême d'un monument
grec, qu'un tel labeur est facile. Ainsi, l'acropole
d'Athènes a pu reprendre possession du temple
de la Victoire Aptère longtemps rompu et dis-
persé. >) Mais, ajoute l'éminent esthète, ces réap-
paritions supposent une construction de blocs
précieusement appareillés et sculptés, sans au-
cune aide de maçonnerie grossière. Cette réflexion
très juste nous fournit en quelque sorte la clef
du vrai système pour la restauration des édifices
morts.
La restauration ne doit se faire, que si cela se
peut sans incertitude et sans crainte d'erreur
quant à la forme et quant au procédé originels.
Il faut, pour restaurer, être parfaitement maître
de l'un et de l'autre. La restauration s'impose
alors, si l'on dispose des matériaux anciens pro-
pres à être remis en œuvre.
Ces conditions sont réalisées, nous l'avons vu,
dans l'architecture si régulière des Grecs ; ce fut
une idée généreuse et non pas une utopie, du
moins au point de vue de l'exécution, que conçut
M. Fréd. Harrisson quand il proposa de rétablir
le Parthénon, en rachetant à l'Angleterre les
marbres enlevés par Lord Elgin. Il n'en pourrait
être de même des monuments romains.
Les monuments des Grecs constituent ce que
j'appelle une maçojinerie ctasseinblage,une. sorte de
menuiserie en pierre ; ceux des Romains forment
le plus souvent une maçonnerie concrète, agglo-
mérée.Ces derniers n'ont pu que s'abattre, s'émiet-
ter ; leur poussière est dispersée, ils ne sauraient
se redresser d'eu.K-mêmes. On pourrait seulement
en reconstituer l'effigie avec des matériaux neufs
et par une technique souvent contestable.
Les édifices du moyen âge sont d'une espèce
intermédiaire. Leurs maçonneries irrégulières ne
peuvent être que refaites de neuf, en pastiche ;
mais leurs œuvres vives peuvent ordinairement
être exactement restituées, comme nous l'avons
vu plus haut dans maints exemples.
— Mais cette restitution correcte n'a plus du
tout la valeur d'authenticité propre à l'original ;
vaut-elle la peine de l'entreprendre 1 Oui, par-
fois, et pour deux motifs.
Dans bien des cas des réfections partielles
sont nécessaires pour compléter la structure,
augmenter la solidité et assurer la conservation :
tels les meneaux remis aux verrières, les pinacles
ajoutés aux arcs-boutants, les remplages refaits
aux voûtes.
Parfois aussi, exceptionnellement, les restitu-
tions, à supposer qu'elles puissent être correcte-
ment faites, contribuent à la beauté harmonique
et à la compréhension des restes conservés.
Il faut reconnaître que les monuments anciens
relèvent de l'esthétique, de l'art, de l'architecture,
plus encore que de la nature qui peut les avoir
envahis. Or, les ordonnances brisées, amputées,
déformées, excellent peut-être à alimenter les
rêves vagues des poètes ; elles restent inexpres-
sives à l'œil qui cherche à retrouver la belle ligne
de l'œuvre originale.
Voici un monument que la barbarie des hom-
mes et les injures du temps ont défiguré dans le
détail, tout en respectant ses grandes masses;
des plaies, des brèches, des hiatus rompent la
continuité des moulures ; les baies sont murées
et les façades aveuglées ; des lignes d'amor-
tissement énigmatiques tendent à un couronne-
ment disparu ; des membres d'architecture entre-
coupés offrent un assemblage biscornu : telle
une inscription mutilée, où l'on pouvait jadis
502
5Rcbuc ïir r^rt chrétien.
lire quelque texte émouvant, et où le passant
ne trouve plus aujourd'hui qu'un assemblage de
lettres dépourvues de sens. N'est-ce pas œuvre
intelligente, artistique, œuvre respectueuse du
monument, œuvre de méritoire vulgarisation,
que de refaire, en comblant les lacunes, la conti-
nuité des lignes, de rendre lisibk l'ordonnance
du monument et expressive sa beauté latente ?
Enfin on peut aller plus loin, exceptionnelle-
ment. Souvent des fragments échappés à la ruine
sont compréhensibles pour les savants et ils leur
révèlent tout un ensemble disparu, tandis qu'ils
ne représentent au public qu'un amas de pierres
vénérable mais peu intéressant. Un pan de mur
d'enceinte médiévale est curieux, mais combien
ne s'aviverait pas notre intérêt, si nous pouvions
letrouver le tracé complet des remparts ? — Par
d'immenses sacrifices, par de savantes études,
on est parvenu à dégager les restes du château
des comtes de Flandre à Gand. Ses créneaux
curieux, ses demi-tourelles sans pareilles ont
réapparu ébréchées, mais presqu'entières. Con-
sciencieusement, scrupuleusement, sans hâte, on
les a réparés, complétés, sans rien laisser (c'est
probable et je le suppose) au hasard, ni à l'in-
certitude ; et voilà une incomparable et séculaire
relique sauvée. Après cela, quel tort lui fait-on,
si, pour le public, on ajoute un commentaire à
cette restauration ; si, pour expliquer ce qui
reste, on ajoute à côté la restitution de ce qui
a disparu ; si l'on complète l'enceinte ; si derrière
les tourelles anciennes et authentiques on réta-
blit le chemin de ronde sans lequel on ne peut
comprendre leur usage tactique ; si aux créneaux
primitifs et intacts avec les gonds de fer des
volets de défense, depuis longtemps pourris, on
ajoute une restitution de ces curieux volets ?
Qui pourra se plaindre raisonnablement de cette
résurrection instructive du passé, pourvu que
l'on respecte absolument les parties originelles
et authentiques ?
Les monuments vivants.
Mais, comme le remarque M II. Chabeuf en
un article remarquable ('), « les édifices anciens
ne servent pas seulement à offrir des tableaux
décoratifs aux artistes et aux poètes, ils sont
I. Journal des Aris, n° 62, 1901.
aussi des œuvres d'usage, et cet usage est insé-
parable de leur beauté morale. > De là, pour les
monuments, cette nécessité des restaurations
auxquelles on a sagement renoncé pour les
œuvres de la sculpture et de la peinture.
Comment devons-nous traiter les anciens
monuments encore habités, occupés, ou du moins
utilisés, tels que les églises romanes et gothiques,
les châteaux de la Renaissance, nos vieux hôtels
de ville, les très anciennes maisons, etc. ?
Ces édifices ne sont pas, comme les précédents,
entrés dans le domaine historique, où archéolo-
gues, artistes et touristes se disputent au sujet
des monuments morts, sans rencontrer d'autres
obstacles que la difficulté de s'entendre. Malgré
l'intérêt passionné qu'ils leur portent, ces édifices
ne leur appartiennent pas ; c'est quelque peu en
intrus qu'ils interviennent, sous prétexte que
tout ce qui touche à l'art les intéresse. Une consi-
dération domine ici les droits de l'archéologie et
de l'esthétique, c'est l'emploi et l'utilité de l'édi-
fice, sa destination. Celui-ci a une vie actuelle et
doit s'adapter à son usage, sauf le respect dû à sa
beauté ; il faut qu'il dure, mais il faut aussi qu'il
serve. On peut avoir besoin de le développer, de
l'augmenter en raison de son affectation mo-
derne. Celle-ci comporte non seulement la con-
venance, l'utilité d'usage, mais encore parfois
une manière d'être actuelle et vivante en accord
avec les mœurs présentes, les besoins nouveaux
et le milieu qui l'entoure. Le point de vue archéo-
logique et pittoresque passe ici au second plan,
malgré toute sa valeur. Nous ne sommes plus en
présence d'un simple document en pierre, com-
parable à une ruine ou à un objet de musée, cette
chose morte qu'on remise et qu'on met sous
verre avec une étiquette. Si c'est un hôtel de
ville, il reste la maison de tout le monde, l'organe
central de la vie municipale active, comportant
aujourd'hui les amples services modernes, tels
que l'état civil et autres. Si c'est une église, elle
reste, comme parle passé, asservie journellement
aux inultiples convenances de la liturgie.
Il faut faire à pareils édifices non seulement
les travaux propres à leur rendre au besoin leur
physionomie primitive et ensuite à assurer leur
conservation, mais encore les ouvrages néces-
saires pour les approprier à l'emploi actuel, avec
ses développements normaux. On doit donc-
répudier entièrement ici la fameuse formule :
conserver, non restaurer. Il faut conserver, res-
taurer, et même parfois agrandir.
Ainsi, c'est avec raison, incontestablement, que,
pour rétablir dans son ampleur le culte épiscopal
dans la cathédrale de Cologne, le fameux Doin-
verein a construit les nefs de ce colossal monu-
ment, que les siècles passés avaient laissé in-
achevé ; c'est à bon droit, nul ne le niera, que
le Gouvernement français a conjuré la lente
désagrégation des grandes églises du moyen âge
et les a mises en état d'abriter, durant des siècles
encore, sous leurs voûtes déjà séculaires, les céré-
monies religieuses. On a bien fait de donner à
Sainte-Marie-de-la-Fleur de Florence la façade
qui lui manquait, et à Saint- Bénigne de Dijon,
comme à la Sainte-Chapelle de Paris, l'élégant
campanile qui leur faisait défaut. Il ne convenait
pas à notre époque éclairée de livrer aux temps
futurs dans leur état mutilé ces monuments qu'un
passé calamiteux nous avait légués incomplets,
mais encore vivants.
L'achèvement, et parfois l'augmentation de ces
édifices, s'impose. Pourquoi nous serait-il interdit
de faire ce qu'on a fait à toutes les époques, c'est-
à-dire d'approprier nos vieux édifices aux besoins
modernes, d'ajouter des salles d'audience au vieux
Palais de justice de Paris, d'annexer une aile
indispensable à un hôtel de ville devenu insuffi-
sant, d'adjoindre une sacristie à une église qui
a pu s'en passer en d'autres temps, ou même en
certains cas de l'agrandir par suite de l'accrois-
sement d'une paroisse ?
Néanmoins, il ne faut le faire que dans la
mesure du nécessaire. Plutôt que d'agrandir
l'hôtel de ville d'Arras, qui formait un tout com-
plet, on a très sagement reporté les services ex-
cédants dans l'édifice voisin, et l'on fera de même,
avec raison, à Gand, en utilisant à cette fin la
nouvelle halle aux draps restaurée. Au lieu
d'abîmer les proportions d'une église ancienne,
devenue trop petite, il sera quelquefois possible
de dédoubler la paroisse.
En tous cas il ,ie faut pas perdre de vue les
égards dus à im monument séculaire, ni le haut
intérêt qui s'attache à la conservation des ves-
tiges de l'art ancien et de l'histoire locale qui
y restent empreints. Toutes les retouches qu'on
lui fera subir doivent s'inspirer d'un soin pieux
et d'un esprit de conservation systématique. Il
ne faut pas sans nécessité « mettre du neuf
parmi ces couleurs, ces formes qui ont vieilli
ensemble » ('). Il faut respecter ce que nous ap-
pellerons l'âme du monument, son caractère
propre, son style, et celui qui y met la main
doit se considérer comme le continuateur de
l'artiste qui l'a conçu. Il doit être réparé, entre-
tenu, développé au besoin dans l'esprit de l'œuvre
originelle et avec le souci de ne toucher à celle-
ci que dans la mesure nécessaire à la fragile
harmonie que le temps lui a donnée. Ici nous
n'aurons qu'à adopter, comme nous l'avons fait
en 1894, la belle formule de Didron, mais en
y introduisant une division : Quand il s'agit des
monuments morts, il faut, dirons-nous, plutôt
consolider que reparer, plutôt nparer que restau-
rer ; et quand il s'agit des monuments vivants,
plutôt restaurer que refaire, plutôt refaire qu'em-
bellir.
L. ClO(JUET.
(A suivre.)
I. H. Cliabeuf, loc. cil.
KBVUE DK L ART ClIKIîTIEN.
I901, — 6"^^ LIVRAISON.
A,^^ a'^VJ^ a'^X K^A iM* >M* \^* \^* A^X A^A k^* k^H i.^* A,^tC a'^X ^4^
jt I cxrriixritiiiiiiiiiiiiiiiïtiiiiiiiii3iii"iixiiiirirxririiiiTiiiiiiii[iiiiiii:tiiiiiiiïiiiiiii>iïiiiiixiiiiiiiïiiiiiiixiiiii (iiiiiimi ii i i'iiittii
i®!®îSKe3iiK@ïg®î® ffîclanges. ■sagingî®®®®® ||)
^ r'axrilix):iiiriii:c-iiiiiiï:tiiiiiii][iiiiiii tiLiiiiiJ'.iiiiiiixiiiiiiixiiiiiiiiiiiiiriiîtiiiiiiiiixiiiiiiiïtiiiTiTixiiiiiii) iiiiiiriiiiTTriTimiii! JJjfi
X^^^^ *;iî^ ^Atï^ ^.èlV r^V V^V YT^V y^-}V V^)V V.AlV V,^}V V^V %f^^ V^V ^:Al^I^
Jla Vierge ffîarie et le Serpenr.
Efffjcrr[)C,si fi-onoarai,i[)iqiies?.
(Extrait àes Dociiinenls du Congrès arclu'ologique
de Tongres.)
f^^^^^E nos jours, on représente habitueliement la
]j Vierge Marie debout, ayant le serpent sous
les pieds ; du pied droit elle lui écrase la
tête, tandis qu'il lui mord le talon. L'inter-
prétation ordinaire de cette figuration y fait voir le sym-
bole de l'Immaculée Conception, à cause du verset i;,
ch. III de la Genèse, tel qu'il est traJuit dans la Vulgate.
Mais cette traduction n'est pas littérale : la Vierge ne
saurait être théologiquement considérée comme écrasant,
à elle seule, la tcte du serpent ; cependant, il est permis
de la représenter ainsi h cause de son divm Fils et de
toute l'humanité, dont elle est la mère spirituelle.
Cette relation iconographique du serpent avec l'Imma-
culée Conception n'est pas ancienne ; on ne la trouve pas
dans la figuration, dite i/tvs/ii/iit\de cette croyance, figura-
tion usitée aux XV'= et X VI" siècles, oii la \'ierge est en-
vironnée de nombreux emblèmes ; le serpent n'apparaît
qu'à l'époque où l'on représenta l'Immaculée debout sur
le monde et sur le croissant, c'est-à-dire vraisemblable-
ment à partir du XVI P siècle.
Ce symbolisme particulier est donc récent ; mais il
n'en était pas besoin pour figurer le serpent sous les
pieds de la Vierge, car cela s'est fait assez fréquemment
depuis le XI 11'= siècle, afin de rappeler qu'elle est la Nou-
velle Eve. Je ne connais pas d'exemple antérieur : sans
doute l'on voulut longtemps éviter de placer, auprès de
Marie, le symbole du mal, l'image du démon, figuré an-
ciennement sous les pieds du Christ ; en outre, la \'ierge
était primitivement représentée assise, tenant sur ses
genoux l'Enfant Jésus.
A dater du XIII"' siècle, les admirables statues de la
Vierge debout aux portails des grandes cathédrales
(Amiens, Reims, etc.) offrent sous ses pieds uu monstre
reptile, souvent à tête de femme ; la Vierge ne l'écrase
pas, mais elle marche sur lui, parce qu'il n'a pas de puis-
sance sur elle ; son Fils l'a vaincu.
Cette figuration continua d'être en usage, sans néan-
moins devenir jamais très fréquente, jusqu'au moment où
on l'adapta plus spécialement à llnimaculée Concep-
tion.
Le pape Paul V (1635- 1612) fit élever, devant la basi-
lique de Sainte-Marie-Majeure, une statue de la Vierge
portant l'Enfant-Jésus qui tient une croix à longue ham-
pe, dont l'extrémité inférieure lui sert comme de pique
pour transpercer la mâchoire du serpent. Ce type, recom-
mandé par d'autres papes, se répandit au loin sous le
patronage de l'Ordre de Saint-François et de la Compa-
gnie de Jésus. A Montmédy, un tableau du X \' 111= siècle
offre une variante : c'est un éclair, partant de la main
droite de l'Enfant, qui va fracasser la tête du serpent.
A partirdu XVII" siècle se propagea l'image de Marie,
ouvrant les bras ou joignant les mains, debout sur le
monde et sur le croissant, et ayant sous ses pieds le
serpent, auquel souvent elle écrase la tête. Saint Pierre
Fourier, qui répandit beaucoup en Lorraine la dévotion
à l'Immaculée Conception, fit frapper, pour les confréries
placées sous ce vocable, des médailles offrant une varian-
te très remarquable : les pieds de Marie ne touchent pas
le serpent, qui, beaucoup plus bas, entoure le globe ter-
restre suivant son diamètre horizontal : image de la ma-
lédiction du monde, à laquelle échappe la Vierge Marie.
Il serait intéressant de rechercher et de classer chro-
nologiquement les variantes de la représentation du
serpent relative à la Vierge.
Léon Germ.ain de M.aidv.
^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^
^^C ^^t ^'^^ ^^^ -^ ^^ '^^ '^^ ^^^^ '^ '^^^ ^^^ '-^^ :^^ WW^^W ^^^ ^^ ^^^^ ^=vf ^;9jr ^^^f ^^^
Italie.
ffîilan : Dccoutrtte ne frcaqucs par B. liiiiiii. —
Eoinc : Vol D'un tabifau ; le Conor^a itttrniational
Dca scicncra ijistoriqiica. — Gcnhu" : lica pcimutca mii =
ralfa De riîût(i=ùc-- Ville. — Blorenrr : lie Bortc=fcu
Bu HameBi-.Saint ; la JPvimtc H'HtiUrca Bel Caaragno.
iN 1470,1e bienheureux Amadeo, clie-
valier portugais, fonda à Milan une
église et la dédia à sainte Marie délia
Face, le but de la fondation étant
de rétablir la paix entre les citoyens de la cité.
Plus tard, Bernardino Luini fut chargé de pein-
dre à fresque deux chapelles du sanctuaire.
L'église fut désaffectée en 1S05 et convertie, en
magasin d'abord, puis en manège militaire.
Les fresques de la chapelle de Saint-Joseph
furent détachées et transportées au musée Brera,
d'autres fragments furent ultérieurement remis
au même musée.
M. Corrado Ricci, l'éminent directeur de Brera,
profitant des travaux qui s'exécutent au musée,
s'occupe actuellement de la reconstitution de
la chapelle Saint-Joseph dans la forme qu'elle
avait à Santa Maria délia Pace.
L'idée est excellente.
Que de peintures perdent de leur intérêt pour
être déposées dans un musée, sans aucun souci
des places qu'elles occupaient dans l'édifice qu'el-
les décoraient primitivement !
Il est évident que le projet de M.Ricci peut
rarement être réalisé, mais lorsque la chose est
possible, il faut y applaudir.
L'an passé, le comte Francesco Lurani entre-
prit d'approprier l'église Santa Maria délia Pace
en salle de concert pour l'exécution des orato-
rios de l'abbé Perosi, qui ont eu en Italie un si
grand succès.
Au cours des travau.K, le comte découvrit les
fresques de la seconde chapelle peinte par
Luini ; elles avaient été, comme beaucoup d'au-
tres fresques, badigeonnées au lait de chaux ; la
composition montre V Annonciation dont les figu-
res sont plus petites que nature, et plus bas,
sainte Catherine et saint Jean-Baptiste de gran-
deur naturelle. Le comte Lurani a pris à sa char-
ge tous les frais de la remise en lumière de ces
peintures.
De pareils exemples de générosité sont fré-
quents en Italie.
Voilà donc l'œuvre déjà si importante de B.
Luini, augmentée encore.
Le noinbre de peintures exécutées par Luini,
l'élève de Léonard de Vinci, en Lombardie et dans
le Tessin, est considérable. On en trouve notam-
ment à Milan dans les églises, à Brera, à l'Am-
brosienne ; dans les églises de Saronno, de Le-
gnano, de Como et de Lugano.
Dans cette dernière cité, il y a à Santa Maria
degli Angeli les fresques bien connues: la Cruci-
fixion, la Cène, la Madone avec l' Enfant et saint
Jean, mais il existe de plus, de Luini, un ou-
vrage peu connu et négligé par les Guides. Il se
trouve dans la villa Vedani et représente la Cru-
cifixion en grandeur naturelle avec la Madone et
saint Jean aux côtés de la croix. La fresque était
dans un couvent voisin, elle a pu être transportée
sans trop de dégâts dans le salon de la villa.
Je puis citer cette Crucifixion comine un exem-
ple des méprises commises parfois par les écri-
vains les plus consciencieux.
Après avoir étudié cette fresque, j'ai, quelques
années après, lu dans une Revue d'art très impor-
tante une description du sujet. L'auteur de
l'article dit que le personnage à la gauche
du Crucifié est sainte Véronique ; or ce person-
nage est saint Jean-Baptiste. Le visage très
jeune porte une légère barbe, ce qui ne laisse
aucun doute sur l'attribution ; il est vrai que
saint Jean tient à la main une étoffe blanche qui
ne s'explique pas et qui sans doute a donné lieu
à la méprise.
Il est vraiment singulier que de Luini on ne
sache exactement ni l'année de la naissance, ni
celle de la mort. On suppose qu'il est né vers
1470, et sûrement il est mort après i 529, puisque
la Crucifixion de Santa Maria degli Angeli porte
cette date.
Sur les motifs de son séjour à Lugano on
brode des histoires.
5o6
jRcbuc lie r^rt cbrctien*
Les lins pensent qu'il est venu à la suîte d'une
aventure romanesque, d'autres admettent qu'il se
soit réfugié dans le Tessin afin d'échapper aux
poursuites dont il était l'objet pour avoir commis
im assassinat.
L'exquise douceur de ses compositions, le
charme de sa couleur, le sentiment délicat de ses
personnages ne dénotent assurément pas un
caractère violent ; entre les deux hypothèses
acceptons celle qui est le plus favorable à cet
excellent artiste et mettons l'autre sur le compte
d'une légende.
ROME: Vol d un tableau.
L'église du couvent de Sainte-Sabine, située
sur le mont Aventin, conservait un tableau par
Sassoferrato (1605-1685) représentant la Vierge
au Rosaire.
Au mois de juillet dernier, le tableau a été volé
par une bande de malfaiteurs qui ont profité de
ce que l'église n'est ouverte que le dimanche.
Le tableau est connu ; il mesure 2 mètres 15
sur I mètre 10.
Les voleurs trouveront difficilement un acqué-
reur, d'autant plus que Sassoferrato, jadis en
faveur, n'est plus recherché aujourd'hui.
On annonce pour le printemps de 1902 la
réunion à Rome d'un Congrès international des
sciences historiques.
Le programme comprend quinze sections :
Archéologie classique — Numismatique — An-
tiquités orientales et classiques — Littérature
antique — Sciences diplomatiques du moyen
âge et moderne — Littérature du moyen âge et
moderne — Art du moyen âge et moderne —
Droit moderne — Sciences économiques et
sociales — Philosophie et pédagogie — Reli-
gions — Géographie et explorations — Sciences
mathématiques et expérimentales — Art musi-
cal et dramatique — Méthode historique.
Faisant partie de la section de l'art du
moyen âge, je rendrai compte dans notre Revue
des lectures relatives à l'Art chrétien.
La liste des adhérents compte déjà plus de
mille personnes; on y remarque des noms de
France, d'Allemagne, d'I-lspagnc, d'Autriche,
d'Alsace, d'Egypte, d'Angleterre, de Roumanie,
des États Unis d'Amérique, de Grèce, de Suisse.
Naturellement les Italiens de tous les points du
territoire se sont fait inscrire en grand nombie.
Genève : Les fresques remises au jour.
Ce n'est pas à proprement dire une découverte
qu'on vientde faire à l' Hôtel-de-ville de Genève
au mois d'août dernier, car les peintures murales
rendues à la lumière étaient mentionnées dans
des documents d'archives et dans diverses publi-
cations sur la ville.
Mais, fait assez étrange, personne à Genève ne
connaissait leur existence; elles étaient cachées
en grande partie par des draperies et peut-être y
en a-t-il sous des revêtements de boiseries.
La salle décorée est la saUe du Conseil d'État:
elle servait jadis aux réunions des syndics qui
avaient des attributions judiciaires; en 1473, le
local avait été l'objet d'une transformation.
Li peinture occupe une frise d'environ i
mètre 50 de haut; elle représente une assemblée
de juges et divers personnages.
Les juges sont au nombre de sept; dont un
président. Six juges ont les deux mains coupées ;
le septième, qui porte un sceptre, n'a que la main
gauche coupée.
Parmi les personnages, on remarque Moïse
tenant un cartouche avec les mots de l'Exode :
« Tu ne prendras point de don, car le don
aveugle le produit et renverse la parole du juste.»
Les autres figures sont sensément les portraits
de Stace, Salluste, Cicéron, Virgile, Aristote,
etc., etc., elles sont accompagnées d'inscriptions
tirées des écrits des auteurs. Quelques sibylles
tiennent des phylactères avec des passages
bibliques.
Le Conseil d'Etat a nommé aussitôt une Com-
mission poui étudier ces peintures et procéder
à leur conservation.
En attendant le rapport de la Commission, on
peut dire que les peintures appartiennent à des
époques et à des mains différentes ; les plus an-
ciennes paraissent du dernier quart du X V'= siècle.
On sait, par des documents d'archives, qu'en
1604, un italien, nommé Cesare Julio, a été chargé
de restaurer la décoration; il semble qu'il ait fait
là une mauvaise besogne et repeint à sa façon
plusieurs figures ; peut-être même une partie de
la peinture est-elle de sa composition.
Correspondance.
507
N'ayant pas eu le loisir de me rendre à Genève,
je me suis adressé à une personne compétente
fixée dans la localité.
Selon mon honorable correspondant, il faut en
rabattre beaucoup de ce qu'ont dit les journaux
et de l'importance de la découverte dans l'opi-
nion du public.
D'abord la peinture ne serait pas une fresque
véritable, dite buon frcsco, c'est-à-dire un ouvrage
exécuté sur un enduit frais avec des couleurs à
l'eau, mais un ouvrage peint avec des couleurs
préparées à l'eau ou à la colle, du genre dit
tempera en Italie.
J'ai eu souvent l'occasion, dans la Revue de
V Art chrétien, As. marquer la différence entre le
buoii frcsco et la tempera, et si j'ai insisté, c'est
parce que, dans les nettoyages et les restaurations,
il faut avant tout se rendre compte du procédé
qui a été employé, autrement on risquerait des
dégâts.
Puis la décoration est loin d'avoir les qualités
d'art qu'on lui a attribuées au premier moment;
il paraît même que l'exécution en est médiocre.
Je le regrette pour Genève; mais dans une
œuvre d'art ce n'est pas seulement le travail
technique qu'il faut juger, c'est aussi l'intention
qui a donné naissance à l'ouvrage. Ici l'intention
est des plus intéressantes et constitue un docu-
ment précieux pour l'histoire de la cité.
Florence : Le porte-feu du Samedi-Saint.
Dans ma dernière correspondance, j'ai men-
tionné les reliquaires qui ont été exposés dans
plusieurs églises de Florence par les soins de la
Société italienne de l'Art public.
J'ai omis intentionnellement une pièce curieuse
— ce n'est pas un reliquaire à la vérité — parce
que je n'avais pas alors de renseignements suf-
fisants ; ce n'est que depuis que j'ai pu à loisir
étudier l'objet.
C'est le porte-feu, il porto-fuoco, du Samedi-
Saint à Florence ; il a été montré, avec les reli-
quaires, au musée de l'Opéra du Dôme ; d'habi-
tude il est au presbytère de l'église des SS. A-
postoli, mais comme on ignore qu'il est là et que
un seul jour par an, il remplit sa fonction, il est
fort peu connu.
J'ai décrit, en [896, dans la Revue de P Art chré-
tien, la cérémonie à la fois religieuse et patrio-
tique du Samedi-Saint, unique en son genre, le
scoppio del Carro, l'explosion du Char.
En souvenir des prouesses accomplies par un
parti de jeunes Florentins sous la direction de
Godefroid de Bouillon, lors de la prise de Jéru-
salem, en 1099 et d'un fragment du saint Sépul-
cre rapporté à Florence par Pazzino de Pazzi,
la Commune ordonna que chaque année, le Sa-
medi-Saint, un grand char serait amené devant la
cathédrale, qu'elle entendrait la messe, et qu'une
Porte-feu en fer et cuivre, XI V siècle. Eglise des SS. Apostoli
de Florence (Pliolographie .\ltnaki.)
pièce d'artifice en forme de colombe mettrait le
feu aux bombardes dont le char était pourvu.
Le feu provenait du fragment du saint Sé-
pulcre et était porté à la cathédrale dans un
porte-feu.
Ainsi fut fait et continué.
Je reproduis le porte-feu.
Il n'est pas homogène.
Il est composé de trois parties distinctes, réu-
nies sans grand soin, à une époque que je n'ai
pu déterminer.
Le sujet principal est un aigle qui étreint un
5o8
5&r\)ur tic V^vt fbvcttcu.
dragon dans ses serres ; au-dessus se trouve une
colombe et au-dessous une cassolette.
La hauteur de l'ensemble est de 0^50 et la
largeur de 0'"35.
L'aigle est l'emblème de la Parte Giielfa, ins-
titution très puissante qui a tenu à Florence un
rôle politique important depuis 1267 jusqu'à la
rhute de la République, au XYIi^ siècle.
L'aigle, le dragon et les volutes sont en argent
recouvert jadis d'émaux rouges et verts, couleurs
du parti.
L'emblème a le caractère des ouvrages floren-
tins du XIV*^ siècle ; il est problable qu'il sur-
montait une bannière de la Parte.
La colombe est plus ancienne et traitée plus
sommairement.
La cassolette est plus moderne ; elle est en
cuivre doré et aménagée pour recevoir le feu.
Tous les Samedis-Saints, le clergé des SS.
Apostoli transporte en cérémonie le porto-fiioco
à la cathédrale et, après que le feu a été mis
à la Colombina du Carro, le réintègre à son
presbytère.
L'objet appartenait à l'église San-Biagio,
paroisse de la Parte Giielfa ; après un incendie
qui, en 1785, détruisit l'église, il fut déposé aux
SS. Apostoli, qu'on croit fondés par Charle-
magne.
Evidemment le porte-feu ne peut pas être
présenté comme un type d'orfèvrerie florentine
caractérisée, puisqu'il résulte d'un assemblage de
morceaux disparates ; cependant il est curieux
en ce sens que d'un emblème politique on a
fait une pièce d'orfèvrerie religieuse. |
j
La Trinité par Andréa del Castagno.
J'ai annoncé qu'en 1S99 on avait trouvé sous
un tableau d'autel de l'une des chapelles de l'é-
glise de la Santissima Annunziata une fresque
d'Andréa del Castagno ( 1390 .'-1457) représen- î
tant la Trinité.
Je n'ai pas dissimulé alors le profond dégoût
que m'mspirait cette fresque réaliste à l'excès,
indigne de l'art chrétien, mal dessinée, mal con-
çue, repoussante en un mot.
Je puis croire que mon opinion a été partagée,
car la famille qui possède d'ancienne date le
patronat de la chapelle, est en instance près de
l'autorité compétente pour que le tableau enlevé
soit remis à .sa place.
Les yeux des fidèles ne seront plus, de cette
façon, ofiensés par une image indigne d'une
enceinte sacrée.
Gerspacii.
I>eintiuc5 murales Du XV sicdc à Bcaunc.
NE découverte artistique d'un haut
intérêt vient d'être faite en l'église
Notre-Dame de Beaune, dans une
des chapelles ajoutées au XV<= siècle
à la nef du XII'', celle dite du Grand Christ, la
seconde en entrant à gauche.
Quelques morceaux du badigeon étant tom-
bés, on a vu apparaître des traces d'ancienne
peinture. Un enlèvement partiel mit au jour une
figure, et M. le chanoine Héron, curé-doyen de
Beaune, dont le zèle éclairé pour sa belle église
paroissiale ne cesse de s'affirmer avec un goût
excellent, autorisa un amateur soigneux, M. Ma-
thieu, à entreprendre la tâche difficile et délicate
de faire revivre l'ensemble depuis des siècles
voilé. Ce travail de patience a été accompli en
perfection et l'on se trouva en présence non d'une
fresque, il est à peine nécessaire de dire une fois
de plus qu'il n'en existe aucune dans nos églises
bourguignonnes, mais d'une ample peinture
murale du XV« siècle.
Elle représente la Résurrection de Lazare et le
choix du sujet s'explique par ce fait que jusqu'à
la révolution de 17S9, Beaune a appartenu au
diocèse d'Autun, dont la cathédrale est dédiée à
saint Lazare. Peut-être même faut-il reconnaître
Autun dans cette ville que l'on voit au fond,
ceinte de murs crénelés avec tours à faites aigus,
derrière lesquels se dressent de nombreux clo-
chers '; MM. lie la Société éduenne et de la So-
ciété d'histoire de Beaune, deux des sociétés
érudites les plus distinguées qui travaillent sur le
passé provincial, nous diront certainement ce qu'il
faut penser de mon hypothèse, mais en soi elle
n'a rien que de très vi aisemblable. En effet,
les peintres flamands ont le plus souvent
donné à leurs scènes religieuses le décor monu-
mental des villes oij ils habitaient. Dans le ce-
Corresponliance.
509
lèbre panneau du Palais de justice à Paris, le
Christ en croix, on voit représenté à gauche,
derrièie les figures de saint Jean-Baptiste et de
saint Louis, le Louvre de Pliilippe- Auguste et de
Charles V avec la tour de Nesle au premier plan,
et l'image est si parfaite que VioUet-le-Duc n'a
eu qu'à la transcrire pour ressusciter la résidence-
forteresse où s'abrita jusqu'à François X^'' la
royauté nationale.
Ce n'est pas une raison d'ailleurs pour faire
une œuvre française, que dis-je ? parisienne, d'un
tableau si manifestement dû à une main flaman-
de, et sur ce point je ne puis partager l'opinion
exprimée par M. Camille Benoît dans un savant
article de la Gazette des Beaux- Arts, nodu i août
1901. On voit au Louvre une peinture du même
temps, la Déposition de la croix, où le fond repré-
sente Saint-Germain-des-Prés, la Seine, le Louvre
et la butte Montmartre ; M. Camille Benoît con-
sidère aussi comme une œuvre française ce pan-
neau qui provient de Saint-Denis; aucun souvenir
personnel ne me permet de contredire ou d'ac-
cepter une attribution que je me borne à citer.
D'une manière très générale, et sauf exceptions,
comme pour Jean Foucquet, je crois qu'au
XV'î siècle la peinture française est flamande,
même quand l'artiste est un Français d'origine ;
ce n'est guère que dans les toutes dernières
années du siècle que le caractère national s'affir-
mera universellement, de manière à constituer
une école que l'on peut dire française.
Pour en revenir à la peinture murale de Beaune,
sur le devant, à gauche, la tête nimbée et vêtu
d'une robe rose brodée d'or, le Christ étend la
main et l'on devine qu'il vient de prononcer la
parole de vie : Lazare, vcni foias ; il est entouré
de cinq personnages dont l'un, au vêtement de
drap d'or à ramages bleus, joint les mains et le
regarde avec admiration. Le Lazare est malheu-
reusement en partie effacé ; enveloppé dans son
linceul, il vient de se dresser à demi et se trouve
comme assis dans un sarcophage en marbre de
couleur ; il a les mains jointes mais encore serrées
dans des bandelettes que délie un homme vêtu
de bleu. A droite, une dizaine de personnages
richement vêtus contemplent la scène miracu-
leuse; parmi eux, une femme, en robe de damas
jaune et la tête couverte d'une sorte de capuchon
brodé d'or, se cache le visage et étend la main
comme pour éloigner d'elle le spectacle du mort ;
un homme, en chape richement ornée d'orfrois,
semble la rassurer en lui montrant que Lazare
est déjà ressuscité ; en arrière, d'autres person-
nages, les uns coiffés du bonnet pointu des Juifs,
les autres du tuiban, commentent l'événement
dont ils sont témoins. Une réparation ancienne-
ment faite au côté gauche de la muraille doit
avoir supprimé quelques figures secondaires.
Sur une hauteur de cinq à six mètres, le sujet
couvre la surface entière du mur de refend en
face du grand Christ ; mais la décoration se
continue de chaque côté de la fenêtre flam-
boyante qui a reçu récemment un remarquable
vitrail en grisaille de W. Edouard Didron, l'his-
toire de saint Flocel. A gauche est une sainte
Marthe terrassant le dragon et tenant dans ses
mains une palme et un bénitier ; à droite, sainte
Marie-Madeleine porte un livre ouvert et le vase
à parfums qui est sa caractéristique ; ces deux
figures sont fort belles, surtout la Marie-Made-
leine, dont le vêtement est d'une grande richesse.
Enfin l'arc de la fenêtre et les nervures de la
voûte sont couverts d'ornements polychromes ;
il est donc très probable que les compartiments
de la voûte étaient aussi peints ; c'est une recher-
che à poursuivre.
De nombreuses peintures murales ont été dé-
couvertes en Bourgogne au cours de ces dernières
années; abolie depuis des siècles par l'invasion du
badigeon, la polychromie vivante où se plaisaient
nos pères reparaît peu à peu au jour, le plus sou-
vent à l'état de lambeaux, mais combien noble
encore dans sa ruine ! La Résurrection de Lazare
comptera parmi les œuvres les plus remarquables
de cette famille ; l'expression variée des figures,
la correction du dessin, la beauté des draperies et
des étoffes, enfin la distribution savante et équi-
librée des groupes, tout révèle ici la main d'un
maître travaillant pour un homme considérable
et artiste. Mais, à moins qu'un document révéla-
teur ne sorte quelque jour d'une liasse non encore
explorée des archives départementales, nous
ignorerons à jamais quel fut le créateur de ce bel
ensemble. Tout est anonyme, en effet, dans ces
chefs-d'œuvre que le moyen âge a prodigués
aux discussions des critiques modernes. Mais
lO
3Rrbtic ïic l'^lrt cbrctten.
nous savons du moins pour qui travailla le
maître de Beaune; les écus que l'on voit aux côtés
de la fenêtre, d'azur à trois clefs d'or tnises en
pal, et la devise, Dejtvi time, inscrite sur des ban-
deroles, sont, en effet, la signature du prélat le
plus qualifié de la Bourgogne au XV^ siècle, le
cardinal Jean Rolin, évéqne de Chalon-sur-Saône,
puisd'Autun, fils du fameux chancelier de Bour-
gogne, Nicolas Rolin, et de sa première femme
Marie Delandes. Ce Nicolas Rolin fit une trop
grosse fortune au service du duc Philippe le Bon ;
toutefois on se sent porté à l'indulgence envers
celui à qui Beaune doit son merveilleux Hôtel-
Dieu et le polyptyque àwjugcineiit dernier, cette
page unique en France et que l'on attribue
aujourd'hui avec traite vraisemblance à Roger
Van der Weyden.
Le cardinal Jean Rolin était dignitaire du
chapitre de l'^insigne» collégiale Notre-Dame
et pendant que son diocèse était ravagé par les
guerres qui accablèrent la Bourgogne sous Char-
les le Téméraire, il chercha un asile à Beaune où
on lui donna pour habitation l'une des plus
belles maisons canoniales et l'usage d'une cha-
pelle. Par reconnaissance, il fit des dons impor-
tants en argent et en œuvres d'art, entre autres
celui de son portrait, à l'église collégiale où il
avait même l'intention de préparer sa sépulture,
ce qui ne s'exécuta pas.
J'ai eu l'occasion de raconter ici même ('")
comment il avait commandé au peintre Pierre
Spicker les cartons, ou, pour employer le terme
du temps, \e.s patrons d'une tenture de tapisse-
rie dont le sujet était la vie de la Vierge. Elle
devait former une longue bande ou litre destinée
à être tendue aux jours de grande fête autour
du sanctuaire, mais le projet ne fut pas exécuté,
du moins de son vivant. J'ai dit comment il fut
repris plus tard par le do\'en Hugues le Coq qui
y mit son nom, son portrait, ses armes et la
date de 1500.
Pour ce qui est de Pierre Spicker, je me borne
à rappeler qu'il était un de ces artistes flamands
très nombreux alors en Bourgogne et dont Dijon
possédait toute une colonie. Son père, Guillaume,
avait été peintre-verrier du duc Philippe le Bon ;
I. V. Revue de l'Art cAriUieri, année 1900, p. 20.;.
les documents français fort abondants aux archi-
ves départementales écrivent toujours le nom
comme les deux artistes le prononçaient, Spicre,
mais il n'est pas douteux que la forme flamande
ne fût Spicker. Si, comme il est possible, Pierre
Spicker est l'auteur des peintures murales qui
viennent d'être découvertes, il faut lui assigner un
rang distingué parmi les artistes contemporains;
à une notable distance pourtant, des tout à fait
grands, les Van Eyck, Roger Van tier \\'e\-den,
Hugo Van der Goes et Memling.
La notice publiée ici même sur les tapisseries
de la collégiale Notre-Dame de Beaune a été
écrite avant que la série d'Hugues le Coq eût
figuré à l'Exposition universelle, au Petit Palais.
Je crois que pour l'éclat exquisement fané des
couleurs et pour la couleur tout court, la tenture
exécutée pour Hugues le Coq ne le cédait à
aucune des pièces exposées. Et elle luttait dans
de bien mauvaises conditions, ayant été placée
beaucoup trop haut et mal à propos divisée en
deux tronçons.
Henri CllABEUF,
Saint-Seine r.-\bbaye (Côte d'Or),
août iqor.
H'arcbcologic au Vatican.
lE jour de la Saint-Joachim, qui est
celui de sa fête, le Souverain Pontife
Il a coutume de tenir ce que l'on appel-
l^fe"^^^ le un circolo. Il réiniit dans sa biblio-
thèque privée les cardinaux, archevêques et
évêques, les différents collèges de la prélature,
les camériers ecclésiastiques et laïques, et là, pen-
dant près d'une heure, cause familièrement avec
les cardinaux, interpelle des prélats, parfois
même de simples missionnaires, passant avec eux
en revue différents événements de l'année.
Jadis le .Souverain Pontife tenait une réunion
analogue pour le jour de son élection au souve-
rain pontificat, mais, l'âge commençant à peser,
il a supprimé, il y a quelques années, cette réu-
nion pour ne laisser que celle du jour de sa
fête.
A priori, l'Art chrétien et sa docte Revue n'au-
raient rien à faire dans le récit de ces réunions.
Correspondance.
511
On y a souvent parlé d'art, il est vrai, et je me \
souviens qu'un jour le Pape avait fait porter dans
la salle de la réunion une magnifique tapisserie
des Gobelins, oubliée et perdue dans les magasins
du Vatican, et qui représentait le cardinal de
Fleur)-. A cette occasion, Léon XIII fit distribuer
à tous les prélats assemblés une belle monogra-
phie, due à la plume de Mgr Davide Farabulini:
Uarte degli arazzi e la nuova G aller ia dei Gobc-
lini al Vaticano, Rome, 1884. Mais de pareils
événements sont une exception à la règle ordi-
naire, et l'art n'entre dans ces réunions que d'une
façon tout accessoire.
Le circula tenu dimanche dernier, 18 août,
avait une autre portée. L'archéologie chrétienne,
l'art chrétien en ont fait les frais, et raconter ce
qui s'y est dit, ce qu'on y a vu ne peut qu'intéres-
ser les lecteurs de l'Art chrétien. Certes, ce ne
seront pas pour eux des choses nouvelles ; elles
ne seront pas même dites d'une façon neuve, ce
qui serait encore une ressource, mais le fait du
Souverain Pontife Léon XIII, prenant quelques
moments sur ses graves préoccupations pour
venir voir des projections des catacombes et
écouter les explications des savants qui les fai-
saient, n'est point un spectacle banal.
Il avait, d'ailleurs, au Vatican une signification
toute spéciale, et qui aidera à faire comprendre
l'importance réelle de cette séance.
Motifs de cette séance.
Il y a quelques mois, les journaux libéraux
menèrent à grand bruit une campagne contre la
Commission d'archéologie sacrée qui a la charge,
le soin et l'entretien des catacombes. Ils deman-
daient instamment au gouvernement d'enlever
au Pape, qui l'exerçait par cette Commission, la
surveillance de ces cimetières et de l'assumer
directement.
Pour justifier cetle attitude, ces journaux ex-
primaient des craintes de périls futurs et se plai-
gnaient de l'insuffisance du service actuel.
Tout d'abord, il y avait l'intérêt sacro-saint de
la patrie. On ne voit pas de prime abord le rap-
port étroit qui pourrait exister entre les cata-
combes et la sauvegarde de Rome, mais en y
réfléchissant bien, on s'aperçoit que les cimetières
romains éparpillent en tout sens leurs 900 et plus
kilomètres de galeries sous la campagne romaine.
Or, celle-ci a, depuis une vingtaine d'années, été
ornée d'une grande quantité de forts destinés à
protéger la ville en cas d'invasion (')• Ces galeries
menaçaient l'existence des forts eux-mêmes, car
par elles l'ennemi pouvait s'approcher sans que
rien trahît sa présence, et faire sauter l'ouvrage
au moment où l'on ne s'y attendrait pas.
L'objection était plus spécieuse que solide.
D'abord les galeries des catacombes ont leurs
ouvertures près des murs de la ville et pour que
l'ennemi pût les utiliser, il faudrait qu'il eût déjà
dépassé la ligne des forts. Mais alors les forts
étaient pris. De plus, une carte publiée par le
Nuovo Bollettino di archeologia indiquait le centre
de chaque catacombe en relation avec les forts
les plus voisins, et on voyait aisément la grande
distance qui existe entre les uns et les autres.
Le génie militaire, d'ailleurs n'avait point cons-
truit ses ouvrages à l'aveugle ; il s'était parfaite-
ment rendu compte de la proximité plus ou
moins grande des galeries souterraines, en avait
tous les plans, et il a placé ses fortsou ses batte-
ries assez à l'écart pour qu'elles n'eussent rien à
redouter de ce voisinage. Avec la susceptibilité
italienne, si une ombre seulement de danger
avait existé, il y a longtemps que le ministre de
la guerre aurait demandé aux Chambres, qui se
seraient empressées de l'accorder, ce que j'ap-
pellerais volontiers la militarisation des cata-
combes.
Le premier argument n'eut pas grand succès,
aussi on en entama vite un second. On plaignait
le sort de la pauvre Commission d'archéologie
sacrée qui n'avait pas d'argent pour faire les
fouilles les plus urgentes, manquait de l'autorité
nécessaire pour effectuer les expropriations in-
dispensables, et disposait d'un personnel tout à
fait insuffisant pour la visite des catacombes.
C'est pour ce motif que les catacombes étaient si
peu connues, si peu visitées, tandis que si elles
tombaient dans les mains de l'Etat, on verrait
immédiatement les heureux effets de ce passage.
Les gardiens seraient plus nombreux, les cime-
tières plus accessibles recevraient plus de visi-
teurs, et l'archéologie chrétienne y gagnerait.
i.Ces forts sont au nombre de quinze, el tracent un grand cercle
autour de Rome. Tous les cimetières, actuellement fouillés (ils sont
34), se trouvent à \ intérieur de cette enceinte, à l'exception d'un,
celui de Ste-.\gathe, situé au-del,'i du fort de la voie triomphale.
REVUE UE l'art CHRÉ'I IEN.
I9OT. — 6""^ LIVRAISON.
512
î^rliur lir T^vt cbvétim.
Le gouvernement, en effet, armé comme il est de
la loi d'expropriation, s'en servirait pour mettre
à la raison les propriétaires qui ne veulent point
permettre que l'on bouleverse leur sous-sol.
Ici la réponse était plus longue, et partant
moins facilement compréhensible. Il fallait mon-
trer tout ce qu'avait fait, depuis sa fondation, la
Commission d'archéologie sacrée, et insister sur-
tout sur ce qu'elle avait fait depuis 1S70, époque
où l'invasion italienne lui enlevait forcément les
ressources qu'elle tenait du gouvernement pon-
tifical. Il faudrait pour répondre prendre toute la
collection du Bollettino di arcJieologia du regretté
Commandeur de Rossi, lire les comptes rendus
des Conférences d'archéologie où l'on fait con-
naître les fouilles des catacombes et les résul-
tats obtenus. Non seulement ce sont des cryptes
historiques retrouvées et dégagées, comme celle
des saints Pierre et MarcelJin, des basiliques
anciennes qui renaissent en quelque sorte de leurs
ruines, comme celle de Sainte-Pétroniile sur lavia
Ardeatina, mais des catacombes entières ouvertes
au public, comme celle de St-Nicomède où l'on
n'osait plus s'aventurer de crainte d'y rester
enseveli.
La Commission d'archéologie a fait plus que
n'aurait fait le gouvernement lui-même. On n'a
qu'à voir à quel point celui-ci laisse dépérir les
monuments qui sont à fleur de sol pour com-
prendre avec quelle indifférence il traiterait ceux
que ni lui, ni le gros public ne voient pas. Et
puis l'argent n'a jamais manqué à la Commission
d'archéologie, elle n'a jamais en vain frappé à
la porte du Souverain Pontife. Le Pape lui a tou-
jours largement donné, non seulement pour con-
server ce qui était découvert, mais pour accroître
ces découvertes, et ajouter de nouveaux anneaux
à cette longue chaîne de nécropoles souterraines
où dorment les chrétiens des premiers siècles, et
où ont été ensevelis nos plus illustres martyrs.
Quelques journalistes, pour ne pas verser dans
l'ornière commune, eurent l'idée de mettre en
avant un argument tout différent et qui battait
en brèche celui que l'on vient de développer. On
s'était plaint de la pauvreté de la Commission
d'archéologie sacrée ; maintenant on la trouvait
trop riche, et on demandait au gouvernement de
ne pas laisser cette source de gain national aller
à une institution pontificale, mais de rattacher
les catacombes aux musées, d'y mettre des tour-
niquets et de percevoir les entrées. T/argument
visait, d'ailleurs, exclusivement une catacombe :
celle de Saint-Callixte, qui, il y a une quinzaine
d'années, avait été en quelque sorte comme im-
posée par le Pape aux Trappistes. Le Pape leur
avait donné la jouissance de 28 hectares de ter-
rains avec l'obligation de bâtir un monastère et
de se charger de l'entretien de la catacombe qui
dépérissait par manque de soins.
Un trappiste ne raisonne pas, il obéit; c'est ce
que fit dom Sébastien Wyart, actuellement abbé
général. Il s'installa à ce que l'on appelle aujour-
d'hui Notre-Dame des Catacombes, fonda avec
l'argent étianger un monastère, restaura le cime-
tière, y fit des entrées dignes de cette sainte
nécropole, releva de ses ruines la basilique
dite de Saint-Sixte qui date du IV° siècle, et
éclaira les galeries souterraines à l'électricité. Le
résultat de toutes ces mesures fut que les fidèles
accoururent de jour en jour plus nomhreu.x et
que la modique ta.xe de un franc par visiteur (il y
avait cependant de bien nombreuses exceptions)
devint rémunératrice. Mais pour arriver à ce ré-
sultat, les Trappistes avaient perdu quinze d'entre
eux pendant les premières années ; ils avaient
dépensé une quarantaine de milliers de francs
dans cette seule catacombe, relevé une basilique,
en reconstruisent maintenant une autre; aussi
se passera-t-il encore de longues années avant
qu'ils puissent rentrer dans leurs débours.
La campagne cessa, mais elle reprit quelques
mois plus tard, d'une façon moins violente dans la
forme, quoique plus traîtresse dans le fond. La
Commission d'archéologie se crut alors obligée
de se défendre et son secrétaire, Mgr Crostarosa,
fit publier une lettre où il mettait la question
sous son véritable point de vue. Après avoir
relevé les erreurs de détail, les vices de logique de
l'attaque, il concluait par ce dilemme: Les cime-
tières souterrains de Rome sont, ou des reli-
quaires, puisqu'ils contiennent des corps de mar-
tj'rs, ou des églises, puisqu'ils ont servi et servent
encore dans un grand nombre de circonstances
à l'assemblée des fidèles, et qu'au jour de fête
des martyrs on y célèbre solennellement les
saints mystères. Dans l'une ou l'autre hypothèse,
ils relèvent exclusivement du Souverain Pontife,
et toute usurpation sur ce point serait un sacri-
CorrespoiiDance.
513
lègeja main mise du pouvoir civil sur un lieu reli-
gieux protégé par les lois de l'Église.
Cet argument tranchait définitivement toutes
les difficultés, et en effet la controverse s'apaisa
aussitôt. Mais le Souverain Pontife pensa qu'il
fallait, sinon donner une autre réponse, au moins
la donner d'une autre manière. M. Marucchi et le
baron Kanzler avaient fait, il y a quelques mois,
des conférences très applaudies et très courues,
où on avait admiré, projetées en grandeur natu-
relle sur un écran, les plus belles cryptes des
catacombes, l'état des travaux, les fresques, les
monuments de ces cimetières ; le Souverain
Pontife voulut que le spectacle se renouvelât au
Vatican, sous ses yeux, et avec l'intervention de
toute la cour pontificale. C'était non seulem.ent
montrer combien il avait à cœur ces vénérables
monuments de la foi de nos pères, mais encore
faire en quelque sorte toucher du doigt l'œuvre
de la Commission d'archéologie sacrée.
Telle est, en quelques mots, la genèse de cette
conférence, la première qui se tenait au Vatican.
Voyons maintenant comment les organisateurs
ont été à la hauteur de leur tâche.
Il fallait, pour que les projections suffisamment
grandes réussissent, disposer d'une salle aux
vastes proportions. La salle dite du Consistoire
secret fut choisie. A une distance convenable, on
dressa un grand écran blanc entouré d'une bande
de velours rouge relevée par un galon d'or.
Devant était le trône du Souverain Pontife, à
droite et à gauche des fauteuils pour les £""=■=* car-
dinaux, et derrière se tenaient les archevêques et
évéques, les différents prélats de la cour pontifi- ,
cale et les laïques invités à assister à la confé- 1
rence. Celle-ci pouvait aisément se diviser en trois
parties distinctes, dont les deux premières s'en-
tremêlaient, et la troisième était complètement
séparée.
Les catacombes. j
On avait couvert par d'épais rideaux toutes les
fenêtres, et des lampes électriques laissaient tom-
ber des plinthes une lumière que l'ampleur de la
salle rendait fort douce. A un signal donné par
le Souverain Pontife les lampes s'éteignaient
brusquement, et sur l'écran apparaissait en gran-
deur naturelle la capella greca du cimetière de
Priscille, puis le baptistère où, suivant une tra-
dition dont M. Marucchi a su retrouver les tra-
ces, l'apôtre saint Pierre avait administré le
sacrement du baptême. Je ne reviens pas sur
l'importance de cette découverte, qui paraît au-
jourd'hui bien solidement établie. Elle n enlève
rien d'ailleurs à la tradition, dont il existe aussi
des preuves bien claires, qui veulent que saint
Pierre ait baptisé au cimetière Ostrien. Il est
évident que l'apôtre ne réunissait pas toujours
les fidèles dans le même endroit, et que, soit
pour déjouer les soupçons, soit pour moins in-
commoder les chrétiens, il se rendait au lieu le
plus voisin et y célébrait les saints mystères.
On ne me demandera point la longue liste de
tous les tableaux qui ont défilé sous les yeux des
assistants, elle n'apprendrait pas grand'chose. Il
suffira d'indiquer les cimetières dont on a pu se
rendre compte, et de signaler au passage quel-
ques-unes des projections les plus intéressantes.
Tour à tour ont défilé sous les yeux du Sou-
verain Pontife des parties des cimetières de Pris-
cille, Ostrien, de Nicomède,de St-Hippolyte, des
Saints-Pierre et Marcellin.de Prétextat.de Saint-
Callixte et de Domitille. La découverte de la
crypte historique des Saints-Pierre et Marcellin
a donné lieu à d'intéressantes projections, qui ont
montré les différentes phases de la découverte et
de la restauration. De même, on a pu se rendre
compte pour la basilique de Saint-Sixte d'un
passé qui heureusement n'existe plus. On vit sur
l'écran l'état de ces ruines alors qu'elles étaient
complètement abandonnées. Il manqua cepen-
dant un autre tableau faisant voir la basilique
complètement restaurée par les soins des Pères
Trappistes, qui ont dépensé à ce travail une di-
zaine de milliers de francs. Un autel de marbre,
tourné vers le peuple, y est dressé, une transenna
sépare le clergé des fidèles, les absides ont été
continuées et recouvertes, et un toit dit basilical
protège contre les intempéries de l'air. Les pa-
rois latérales en dehors du sanctuaire ont été
consacrées aux souvenirs chrétiens de la cata-
combe ; on y a méthodiquement réuni les diver-
ses inscriptions dont on n'avait pas retrouvé la
place primitive, et un buste du Commandeur de
Rossi rappelle celui que l'on a appelé à juste
titre le Christophe Colomb des catacombes.
Il est à regretter que l'on n'ait pas adressé un
514
ÎRcbur tic V^xt fbvcttcu.
mot d'éloge aux humbles religieux, auxquels
la catacombe de Callixte doit tant, et qui, s'ils
n'ont pas eu le mérite de la découvrir, ont celui
bien réel de la conserver et de la restaurer,
Parmi les intéressantes projections qui ont
passé sous les yeux, il faut encore citer celle de la
basilique de Sainte-Pétronille à la via Ardeatina.
On voyait l'état des premières fouilles, puis les
restaurations successives qui rendaient à la basi-
lique son ancien aspect, et, enfin, une dernière
photographie montrait cet édifice, où saint Gré-
goire a prononcé une de ses plus belles homélies
sur les saints Nérée et Achillée, orné de verdure
et de festons pour le grand office pontifical qu'y
célébra, il y a quelques mois, le cardinal Satolli.
Le costume des premiers chrétiens.
La succession des tableaux reproduisant les
plus belles fresques des catacombes pouvait faci-
lement engendrer l'uniformité, et l'uniformité
faire naître l'ennui. Ce pas est ordinairement
vite franchi. On a habilement évité cet écueil
en entremêlant les projections des catacombes
d'antres tableaux où ces galeries souterraines,
ces cryptes étaient le théâtre d'une scène chré-
tienne traitée comme elle avait dû se développer
dans les temps anciens.
Le baron Rodolphe Kanzler a fait des études
très importantes et très sérieuses sur l'habille-
ment des premiers chrétiens et les vêtements
liturgiques à cette époque. On sait que les apôtres,
pour célébrer le saint sacrifice, prenaient par
respect pour Notre-Seigneur, le costume des
classes aisées, mais parmi les pièces de ce vête-
ment il en est une offrant une importance spé-
ciale: le pallium. Soit qu'il fût dans sa forme
primitive, le pallinm philosophique dont sont
revêtus les portraits des premiers papes, soit qu'il
ait sa seconde forme, la bande de laine blanche
s'enroulant autour du cou et retombant librement
des deux côtés, on peut dire que cet ornement
était le seul qui fût, à cette époque reculée,
employé dans les cérémonies religieuses. Le baron
Kanzler, pour rendre plus tangible le fruit de
ses travaux, fit d'abord des mannequins qu'il re-
couvrit d'étoffes drapées comme les portaient les
anciens. C'est la toge blanche agrémentée des
bandes de pourpre qui constitue encore aujour-
d'hui la dalmatique. Les peintures des cata-
combes permettaient d'en retrouver avec certi-
tude la forme et la couleur. Puis, il fitmieux ;
il habilla ainsi quelques personnes, hommes, fem-
mes et enfants, les plaça à certains endroits des
catacombes dans l'attitude que nous représentent
les fresques qui s'y trouvent et en prit des pho-
tographies. Ces photographies à personnages ont
passé sous les yeux du Souverain Pontife et de
sa cour et reproduisaient les plus intéressantes
scènes des premiers temps du christianisme.
On y voyait, par exemple, la célébration, dans
une crypte des catacombes, du saint sacrifice
par l'évêque assisté de son diacre. L'évêque a
autour du cou le pallium, il est debout devant
un petit autel carré, a devant lui le calice et le
pain ; l'assistance, dans les costumes de l'époque,
est groupée sur les côtés, soit debout, soit assise
sur les bancs de pierre qui s'y trouvent encore.
De même, on assistait à l'enseignement de la foi
chrétienne donné par l'évêque assis sur sa chaire
taillée dans le roc, et, reprenant une description
de Fabiola, le baron Kanzler nous faisait voir la
prise de voile d'une vierge chrétienne, et ainsi
de suite.
Mais à côté de ces tableaux que j'appellerais
liturgiques, il y en avait d'autres qui remuaient
plus profondément le cœur humain. On voyait,
par exemple, une jeune veuve guidée par un
fflssor à la recherche du tombeau de son mari.
Un autre tableau nous montrait une jeune femme
répandant des fleurs et des palmes sur la tombe
à peine fermée de celui qui fut son soutien dans
la vie et avait confessé la foi qu'elle partageait
avec lui. Un peu plus loin, c'est une mère faisant
baiser à son jeune enfant le marbre glacé, marqué
d'une palme, derrière lequel repose en paix
l'époux et le père martyr.
Ces différents tableaux étaient étonnants de
vérité archéologique, et n'eût été l'absence de
couleurs, on aurait cru vraiment assister à une
scène antique. Ils ont dû demander beaucoup
de travail et d'art [lour les conduire à bonne fin,
car il fallait non seulement se préoccuper du
groupement des personnages dans des endroits
où l'espace est très petit, mais penser au déve-
loppement des premiers plans qui devaient être
aussi nets que les derniers, et bien faire attention
à l'éclairage, ce qiu' était encore une grosse diffi-
culté. Tous ces différents obstacles ont été si
habilement vaincus, qu'il fallait l'œil d'un pho-
tographe pour les sou[)Ç()nner.
Mais le baron Kanzler a voulu sortir des cata-
combes et nous a donné (luelqucs tableaux en
CorresponDance.
515
pleine lumière. Cette fois il s'est inspiré du Qiio
vadis de Sinkiewicz, et en a tiré des scènes en
couleur admirablement réussies. Les personnages
étaient si habilement groupés, la couleur, soit
des vêtements, soit du milieu où se développait
la scène, était si bien reproduite, que cette resti-
tution était un vrai plaisir pour les yeux. On
admirait la matrone romaine Lucine enseignant,
sous les colonnes de l'atrium, la foi chrétienne à
son fils Prétextât, puis Lygie traçant sur le sable
du jardin le poisson symbolique, etc. Ces tableaux
passaient trop vite au gré des spectateurs et on
peut dire que ces reconstitutions du baron
Kanzler ont été le clou de la séance.
La restauration de Sainte-Cécile.
On sait que le cardinal Rampolia a voulu
faire fouiller le sol sur lequel se trouve l'église
de Sainte-Cécile. Cette basilique est celle du
pape S. Pascal L'' (S17-S24), qui par conséquent
avait dû enfouir ou détruire l'église primitive.
Or celle-ci, d'après les actes de la sainte, devait
être sa propre maison, puisqu'il est dit qu'elle
donna sa maison pour qu'on en fit une église.
Il y avait donc un grand intérêt à vérifier
cette donnée des actes, et si les fouilles réus-
sissaient selon les désirs du cardinal, elles
devaient remettre au jour la partie de la maison
de la sainte, la basilique domestique, qui fut
changée en église après sa mort et servit au
culte jusqu'au IX^ siècle.
Mgr Crostarosa fut chargé de faire les sondages
préalables, et ceux-ci indiquèrent comment de-
vait être fouillé le sous-sol. Sans entrer dans les
détails, il suffira de rappeler que l'on retrouva
toute la basilique domestique de la Jomus Ccciliœ.
Son axe était à trois mètres de celui de la basi-
lique actuelle, sa longueur était la même, et
comme celle-ci, elle avait trois nefs. Le mode de
construction la faisait remonter à l'éjioque répu-
blicaine. Sa hauteur toutefois était peu considé-
rable, car les piliers (en briques et non en marbre)
n'avaient que 2,60. A une époque postérieure, le
pavé avait été relevé de 0,80 cent, pour le
mettre à l'abri des inondations du Tibre, et c'est
pour la même raison que plus tard le pape
S. Pascal I*^"^ l'avait encore surélevé en déplaçant
son a.xe, pour en faire la basilique actuelle.
Or, cette église inférieure va être rendue au
culte, grâce aux magnifiques travaux qu'y a fait
exécuter le cardinal Rampolia, en s'înspirant de
la forme qu'avaient les églises à Rome aux Vni<=
et IX« siècles. Tour à tour ont passé devant les
spectateurs différentes vues panoramiques des
restaurations en cours d'exécution : l'église avec
ses trois nefs, l'abside avec ses fenêtres en marbre
qui, donnant sur le corps de la sainte, permet-
taient d'en apercevoir le tombeau, les stucs dont
cette abside sera décorée, etc. Ces projections
avaient été voulues par le Souverain Pontife, qui
s'intéresse grandement aux travaux de son secré-
taire d'État, et voulait que tous pussent s'en
rendre compte avant que le public soit admis à
pénétrer dans la crypte (').
C'est par ces projections que prit fin la séance
d'archéologie donnée au Vatican. On doit dire
qu'elle avait parfaitement atteint le but que l'on
se proposait, et tout le monde, en sortant, était
convaincu de l'énorme labeur auquel s'était livrée
depuis trente ans la Commission d'archéologie
sacrée, et de l'immense résultat qu'elle avait
obtenu. Aussi le Souverain Pontife a tenu à féli-
citer publiquement les membres de cette Com-
mission du zèle qu'ils avaient apporté à remplir
l'importante mission qu'il leur avait confiée ; il
les a encouragés à déployer la même activité,
les assurant qu'ils ne feront jamais appel en vain
à sa munificence quand il s'agira des cimetières
et de leur restauration. Cette année, par exemple,
la Commission d'archéologie sacrée a pu racheter
un lot important d'inscriptions qui avaient appar-
tenu à la catacombe de Domitille, et avaient été
très imparfaitement copiées. Ayant eu la bonne
fortune de les retrouver, elle en a fait l'acqiu'si-
tion et les a remises au lieu même d'où elles
avaient été enlevées.
Cette séance au Vatican a été un événement
pour l'archéologie romaine ; elle est le digne
comi)lément du grand Congrès d'archéologie, qui
s'est tenu l'année dernière sous la présidence du
cardinal Parocchi dans les locaux du Séminaire
romain. Elle montre, enfin, comme l'auguste
vieillard, qui préside de par Dieu aux destinées
de son Église, s'inquiète autant de faire revivre
son glorieux passé qu'il se préoccupe de son état
présent.
Dr Albert Battandter.
I. L'église inférieure de .Ste-Cécile sera ouverte aux fidèles pour
le 22 novembre, jour de la fête de la sainte.
5
lO
Belluc Dr l'^lrr ffirctim.
Florence, 15 octobre 1901.
Cher Monsieur,
VOUS avez bien voulu me comiiuiiiiquer une
note qui vous a été adressée de Rome à
propos de mon article sur les fresques de Santa
.Maria Antica.
Je vous prie de remercier de ma part votre
honorable correspondant et de vouloir bien in-
sérer sa communication.
Veuillez agréer, M
Gi:rsp,\<I!.
Voici la note de notre correspondant de
Rome :
Le dernier numéro de la Revue de F Arl chrc-
iien parle des fresques de Santa Maria Antica; je
veux relever une petite erreur qui s'est glissée
sous la plume de l'auteur. Il dit, page 302, que
Mgr Duchesne démontra victorieusement que
l'église que l'on venait de découvrir n'était
autre que l'église de Santa Maria Antica : et
c'est précisément le contraire qui a eu lieu. Le
Père Grisar soutenait que cette église était Santa
Maria .Antica, et Mgr Duchesne affirmait que
Santa Maria Antica n'était autre que Santa
Maria Nuova, ou sainte Françoise romaine.
La controverse a duré jusqu'au moment de
la découverte de la fresque et de l'inscription de
Thodotus, primicier de l'église de Santa Maria
« qu3e dicitur Antica » et surtout de la décou-
verte d'un des ambons de Jean VII.
Inutile de dire que Mgr Duchesne s'est soumis
de fort bonne grâce : « îiiai^is antica veritas ».
Trabauv tics JSocictés savantes.
'rSK!»')!!^,
^
^
^^w^^ww^w^ww^wwwwwwwwwwwww^
Société des Antiquaires de France. —
Séance du 2^ juillet icjoi. — M. Michon commu-
nique un mémoire sur diverses statues trouvées
en France et faisant partie de la collection du
Roi.
M. Adrien Blanchct donne lecture d'un tra-
vail sur les figurines de terre noire cuite de la
Gaule romaine.
Séance du ji juillet. — M. Gaidoz entretient
la Société du rôle de Chuchulain dans l'épopée
irlandaise au sujet des exercices de gymnasti-
que. Il communique ensuite le dessin d'un moule
du X'VIII'^ siècle, qui servait à la fabrication des
gàteau.K de Nocl dans le Gévaudan.
M. Durrieu parle des concessions territoriales
accordées par Charles I^r d'Anjou à des seigneurs
français dans le royaume de Naples.
La Société s'ajourne au U'"" mercredi de no-
vembre.
M. A. de Rochemonteix décrit une croi.K pro-
cessionnelle du XVI^ au XVII^ s., en argent re-
poussé, de l'église de Saint-Cirgues de Jordanne,
le seul objet de l'espèce connu dans la Haute
Auvergne.
M. Smirnolf, conservateur du musée de l'Ermi-
tage impérial de Saint-Pétersbourg, signale un
parquet de pierre à figures incisées, trouvé près de
Sébastopol, en le rapprochant d'un fragment
analogue conservé au Louvre. M. E. Michon
établit que les deux pièces doivent avoir appar-
tenu à quelque ambon du V" ou du VI<= siècle.
M. R. de Lasteyrie a retrouvé, chez un mar-
chand d'estampes, de vieilles gravures donnant le
château de Gisors et la cathédrale de Noyon
avec des détails intéressants et disparus.
M. Destrée a étudié, comme on sait, les bor-
dures à inscriptions qui ornent la draperie de
quantité de statues flamandes du moyen âge. M.
P. Viky en signale quantité d'autres en France,
et attribue comme origine à l'emploi de ce décor
l'imitation d'étoffes arabes à textes décoratifs.
De son côté, M. P. Durrieu signale l'emploi fré-
quent de ces ornements chez les miniaturistes
français.
Académie des Inscriptions et Belles-Let-
tres. — Séance du 2 août. — M. Edmond Pottier
donne lecture d'un travail sur l'attitude de Phèdre
dans la fresque de Polygnote, à Delphes.
Phèdre y étant représentée balancée sur ime
corde, on peut y voir, dit M. Pottier, wne. allu-
sion au rite religieux de la purification par l'air,
une des formes de la « lustratio » antique.
Séance du 16 aotlt. — M. Clermont-Ganneau
communique la photographie d'une plaque en or,
que M. Durighello vient de lui envoyer de Syrie.
Trois personnages sont figurés, le dieu Esculape,
la déesse Hygie et le petit Télesphore.
M. Héron de Villefosse donne des nouvelles des
fouilles entreprises au sommet du Puy-de-Dôme,
sous la direction de MM. Ruprich-Robert et Ap-
doUat. On a dégagé deux murs, d'une trentaine
de mètres de longueur, construits en petit appa-
reil et un dallage à grand appareil et exhumé
plusieurs colonnes brisées, un beau chapiteau
corinthien et des monnaies impériales allant
d'Auguste à Magnence.
M. Enlart communique la reproduction de la
dalle funéraire de l'archevêque de Chypre, Thierry^
précédemment archidiacre de Troyes, qu'il a dé-
couverte dans l'ancienne cathédrale de Nicosie; le
tombeau est du style du Xni<= siècle.
M. Enlart fait passer sous les yeux des mem-
bres de l'Académie les restes de trois manuscrits
liturgiques des XHP' et XIV*^ siècles découverts
dans la même église.
Séance du 2j aotït. — M. S. Reinach donne lec-
ture d'un mémoire consacré à Télesphore, le dieu
grec de la santé, habituellement figuré à côté
d'Esculape et d'Hygie.
Séance du jo août. — M. Reinach tient l'Aca-
démie au courant des fouilles importantes diri-
gées par M. Vassits, conservateur du musée de
Belgrade, à Jablanica, en Serbie.
Le P. Lagrange communique les résultats de
la mission dont il a été chargé par l'Académie
pour étudier sur place la fameuse mosaïque géo-
graphique de Mâdaba.
Séance du 6 septembre. — ■ M. Miintz lit un
curieux mémoire sur l'Académie artistique et
scientifique, fondée à Milan vers la fin du
XVe siècle par l'illustre Léonard de Vinci. Cette
création a été niée récemment par un savant
étranger, dont M. Miintz réfute les assertions.
Non seulement une pareille fondation n'est pas
t;n contradiction avec les mœurs du temps et les
tendances du maitre, mais il faut tenir le plus
grand compte des sept gravures portant la men-
tion Academia Lconardi Vinci. D'autres témoi-
gnages contemporains produits par M. Mûntz
ont aussi une grande force. Il est vraisemblable
que l'erreur de l'érudit en question est due à la
confusion qu'il a faite entre l'Académie du
XV= siècle et celles qui existent aujourd'hui. A
l'époque de Léonard, les Académies étaient des
5i8
3^rbur lir r^rt cf)vctien.
réunions privées et amicales, sans devoirs, mais
sans droits. Ce n'est qu'au siècle suivant que
certaines d'entre elles commencèrent à devenir
des iiibtitutions d'État.
Séance du ij septembre. — M. Héron de Vil-
lefosse communique un rapport du P. Delattre,
correspondant de l'Académie, relatif aux der-
nières fouilles faites à Carthat^e dans la nécro-
pole punique voisine de Sainte-Monique et qui,
comme les précédentes, ont été très fructueuses.
Au rapport sont joints des dessins et des photo-
graphies reproduisant les priiicipau.x monuments
découverts, stèles, figurines en terre cuite, objets
en bronze, parmi lesquels se trouve un vase très
élégant, muni d'une anse formée par un groupe
de deux hommes nus. Plusieurs rasoirs, en forme
de hachette, présentent une décoration gravée,
toujours fort intéressante. Un certain nombre de
monnaies puniques sont sorties de ces tombes,
ainsi que quelques épitaphes qui fournissent des
noms de métiers.
Séance du 20 septembre. — M. Gauckler pré-
sente les plans et photographies de plusieurs
baptistères byzantins, ornés de mosaïques riche-
ment décorées, récemment découvertes en Tuni-
sie dans les fouilles exécutées par le service d'an-
tiquilés.Le plus important et le mieu.x conservé de
ces monuments, qui a été trouvé en 1899 à Car-
thage, à peu de distance des thermes d'Anto-
nin, fait partie d'une luxueuse basilique qui
a été méthodiquement déblayée et qui com-
prend une église à cinq nefs avec cathèdre
réservée à l'archevêque dans l'abside et autel au
milieu du chœur, des sacristies et les diverses
pièces qui constituent le secretarmm, enfin un
atrium central. Le baptistère proprement dit se
compose d'un oratoire et des fonts baptismaux,
dont la cuve, hexagonale comme celle de
Damons el Karita, est plaquée de marbre blanc.
Tout 1 édifice est pavé de belles mosaïques
décoratives et est lui-même très richement dé-
coré. Les fragments architecturaux recueillis
permettent de le reconstituer dans son entier.
La basilique, qu'il est impossible d'identifier d'une
manière précise, seiuble avoir été constiuite
sous le règne de Justinien. Elle a été incendiée
parles Arabes, au moment de la destruction de
Carthage par Hassan en 69S.
Le baptistère de Siagu dépend, lui aussi, d'u-
ne grande basilique qui a été déblayée en 1899-
1900, par la mission Drude-Bordiery, pour le
compte de la direction des antiquités. Construit
sur un plan octogonal d'une régularité géomé-
trique, il occupe le fond d'une église à trois nefs,
avec déambulatoire régnant autour de l'abside
et autel au milieu du chœur. Un atiiuni carré,
entouré d'un cloître et un escalier monumental
précèdent le sanctuaire.
Le baptistère de l'Oued Ramel, découvert en
1S98, occupe un pavillon indépendant, englobé
dans la même enceinte qu'une basilique byzan-
tine à trois nefs el divers autres bâtiments. La
cuve baptismale, semblable à celle d'El Kantara,
dans l'île de Djerba, affecte la forme d'une croix
grecque, dont une branche a été barrée par une
dalle de marbre remployée, un devant de sarco-
phage païen représentant les Trois Grâces et les
Quatre Saisons. Tout l'édifice est pavé de riches
mosaïques représentant des figures chrétiennes,
telles que la Colombe du Saint-Ksprit, le Pal-
mier, le Cerf et la Biche buvant aux quatre fleu-
ves du Paradis.
D'autres baptistères, moins bien conservés que
les précédents, ceux d'Hamman-Lif, d'Upenna,
d'Henchir-Hakaïma, et les deux de Sfax, pré-
sentent cependant autant d'intérêt, car ils for-
ment une série originale qui n'avait pas encore
été signalée et qui semble particulière à la Tuni-
sie. Ce sont des bassins étoiles, à six ou huit
branches qui forment autant d'alvéoles où plu-
sieurs catéchumènes pouvaient prendre place
pour recevoir simultanément le baptême.
En somme, sur onze baptistères relevés jus-
qu'ici en Tunisie, quatre seulement, dont trois à
Carthage même, représentent fidèlement les
types classiques de l'école byzantine. Les autres
s'en éloignent plus ou moins et présentent des
particularités caractéristiques prouvant que les
architectes africains ne s'astreignaient pas à
l'imitation servile des grands maîtres grecs ou
romains, mais qu'ils réussissaient, au contraire,
en modifiant les modèles dont ils s'inspiraient,
à créer de nouveaux types d'une réelle origina-
lité.
M. Homolle entretient l'Académie d'une ins-
cription métrique provenant des fouilles de Del-
phes, qui servait de dédicace à une statue de
Lysandre.
Séance du 27 septembre. — M. Clermont-Gan-
neau commente un important monument phéni-
cien, dont l'original est entré dans les collections
de M. Jacobsen,de Copenhague. C'est une gran-
de stèle, découverte dans les environs de Tyr et
représentant, sculpté en bas-relief, un personnage
debout, qui fait le geste rituel de l'adoration.
La tête est d'un modelé remarquable. Une ins-
cription phénicienne de plusieurs lignes nous
apprend que c'est le cippe commémoratif d'un
haut dignitaire phénicien, un ;v?/', nommé Baal-
yathon, fils de Baaiyathon.
^va\innx ties Sociétés satiantcs.
519
Comité des travaux historiques. — Le
Bulletin de 1901 (i''" livr.) contient plusieurs
travaux intéressants pour nos lecteurs. Nous
signalons d'abord la description due à M. le
comte de Loisne et surtout la reproduction de
deux charmants tableaux flamands (vers 1500),
provenant de la Chartreuse de Gosnay et conser-
vés dans l'église d'Hesdigneul-lès-Béthune. L'un
représente Ste Ursule, avec huit épisodes de
son histoire, réminiscence dès miniatures de
Memling sur la châsse de Bruges. Le second, re-
marquable surtout parce qu'il contient des
portraits de Philippe le Bon et d'Isabelle de
Portugal, représente d'un côté l'Annonciation,
de l'autre, le couronnement de la Ste Vierge,
auquel président les trois personnes de la Ste
Trinité ■. le Père, vêtu en pape, le Fils, vêtu du
manteau de pourpre de la passion et tenant la
croix hastée (c'est le Christ de la Résurrec-
tion), et le Saint-Esprit sous la forme d'une
colombe.
M. M. F. Lamy, de Clermont-Ferrand, a com-
muniqué la reprodution en aquarelle d'une des
peintures murales de la cathédrale de cette ville,
du XIII'' siècle; elle figure un épisode des croi-
sades.
Nous nous bornerons à signaler, en y ren-
voyant les spécialistes, un important article de
M. J. Pilloy sur l'orfèvrerie lapidaire et l'émail-
lerie au V'^ siècle. Il établit une distinction
entre l'orfèvrerie franque et l'orfèvrerie byzan-
tine.
M. l'abbé Chartraine donne la description
illustrée d'une reproduction photographique de
deux vierges assises, l'une romane et l'autre
gothique.
Au cours de la restauration de la cathédrale
de Reims, le percement d'une fenêtre, ajoutée au
transept nord dans un but de symétrie, amena
la suppression d'une chambre voûtée qui avait
contenu au moyen âge le cartulaire du Chapi-
tre ; ce changement peu plausible a fait dispa-
raître cette curieuse peinture, dont l'Adminis-
tration n'a pas même eu le soin de lever une
copie. Heureusement M. Ch. Givelet en prit une
copie, aujourd'hui reproduite dans le Bulletin
diL Comité des travaux Instoriques, en quoi il a
rendu un grand service ; d'autant plus que la
peinture était fort curieuse. Elle représentait
l'écolâtre Gui de Villennes, tenant une charte
au revers de laquelle il écrit, le grand ar-
chidiacre, Guillaume de Bray et Raoul, le tré-
sorier.
Signalons encore l'inventaire du trésor de
Saint-Saulve de Montreuil-sur-Mer par M. le
Comte de Loisne.
Congrès archéologique de France. — Le
II juin s'ouvrait à Agen la 68= session de la So-
ciété française d'archéologie sous la sympathique
direction de M. Lefèvre-Pontalis. Après les céré-
monies officielles, sur lesquelles nous passons, M.
Momméja a donné lecture d'un intérressant
mémoire sur l'existence à l'époque gallo-romaine
des ateliers de sculpture à Agen. — On a en-
tendu un excellent rapport de M. P. Lauzun sur
l'état des études archéologiques dans l'Agenais.
M. Lauzun a rappelé la fondation du musée
d'Agen et exposé les travaux scientifiques de la
Socfété locale des lettres, sciences et arts, qui
s'est attaquée à tous les sujets d'érudition, tels
notamment que la numismatique, l'orfèvrerie, la
céramique et le costume.
M. l'abbé Marboutin, curé de Cours, a lu en-
suite un rapport très documenté sur les souter-
rains de l'Agenais.
Une prernière excursion a eu lieu vers Mon-
sempron-Libos. Certaines irrégularités donnent à
l'église de Monsempron son intérêt spécial pour
les archéologues: le manque d'unité dans la com-
position du plan, la forme des colonnes, isolées,
appareillées de plusieurs pièces, et enfin les ab-
sidioles, dont l'une surtout est des plus remar-
quables. L'église, avec sa voûte en berceau
simple, remonte à la première moitié du XI 1'=
siècle ; le chœur a été refait au XV". Des deux
absidioles, celle de gauche, intacte, constitue avec
la voûte elliptique de son vestibule et ses arcades
sculptées un modèle vraiment unique et peut être
considérée comme le joyau de l'église. Elle est
ouverte à l'extérieur et servait peut-être à expo-
ser des reliques. Monsempron était un lieu de
pèlerinage. Le malheur est que l'église ait été si
maladroitement restaurée, surtout en ce qui
concerne l'appareil.
La visite au château de Bonaguil, le « Pierre-
fonds du Sud-Ouest », fut le gros morceau de la
journée. — C'est le type le plus parfait en
France de l'architecture militaire au XV= siècle
par son système de défense.
Le donjon, construit vers 1250, présente une
forme bizarre, peut-être unique, de losange irré-
gulier, imposée par le contour capricieux du roc.
Son angle aigu, tourné vers le Nord, était,
comme à Loches et à Issoudun, destiné à em-
pêcher l'ennemi de se servir du bélier; il offrait
un dernier refuge, très solide, aux assiégés.
On se rendit delà au château de Perricard,
d'un intérêt secondaire.
Dans la séance qui suivit, M. Ouarré-Reybour-
bon communiqua une notice sur un voyai^e de
Toulouse à Bordeaux en i6go par un gentillwniuie
lillois. Puis M. le chan. Dubourg, curé de Lay-
rac, produisit une note très documentée sur les
KKVUK OH LAKT CHKeTlEN.
1901. — 6""^ LIVRAISON.
=;2o
îRcbuc Dr ravt cbrcticiu
remparts et vieilles maisons en pans île bois de
Caudecotte. M. E. Travers fournit quelques
indications sur le * Villeneuve » de Normandie.
M. Rrulails lut un résumé de son travail, bien
connu de nos lecteurs, sur les églises à coupoles
de la région et s'attacha à prouver que Saint-
Front de Périgueux n'est pas le prototype de ce
genre d'églises dans la contrée. D'après lui, comme
on sait, les premiers essais se retrouveraient dans
des églises de moindre importance, et le vieux
Saint-Front, qu'il date de 1 120, ne serait pas l'ori-
gine des églises à coupoles en France. Le travail
de M. Brutails a paru dans le Bulletin uioniDiien-
tal (7"= série, t. II, 62« volume de la collection).
M. Lefèvre-Pontalis croit qu'il est peut-être
prudent de ne pas se prononcer sur ce point
d'origine de l'introduction de l'art byzantin. M.
le marquis de Fayolle combat la thèse de M.
Brutails en s'appuyant principalement sur l'opi-
nion de IVI. de Verneilh, dont les travaux con-
cernant l'architecture byzantine en France font
autorité. M. le comte de Roumejoux apporte
sa contribution pour soutenir M. le marquis de
Fayolle.
Une seconde excursion eut lieu aux églises de
Moirax et d'A'ibiac, ainsi qu'au cliâteau d'Es-
tillac. L'église de Moirax, fondée en 1049, faisait
à l'origine partie d'un magnifique prieuré de
Cluny. Elle comprend une nef flanquée de deux-
bas côtés, un transept comportant deux absidioles
et un chevet assez allongé, se terminant en
hémicycle.
L'intérieur possède de beaux chapiteaux histo-
riés dont la décoration, empruntée à la flore et à la
faune, est d'une grande richesse. La nef centrale
est voûtée en berceau légèrement brisé ; les deux
bas côtés sont couverts en voûte d'arête. La
partie la plus caractéristique de cette église est
la travée qui précède le sanctuaire.
« Elle est recouverte, dit M. G. Tholin, d'une coupole
sur trompes, sphérique à la base, conique au sommet,
largement ouverte sous le campanile. Une double arcade
extradosse'e portant sur des colonnes, un rang de trois
fenêtres égales, un oculus au sommet à la hauteur des
trompillcres, donnent trois élages à cette travée. L'abside
est voûtée en cul-de four. Cinq fenêtres larges et hautes
l'inondent de lumière. Deu.\ colonnettes dans lesébrase-
ments et des arcades portant sur des colonnes encadrent
doublement chacune de ces baies. »
ICnsuite les congressistes se rendent à N.-D.-
d'Aubiac. Cette église, du XL siècle, appartient
cependant à une famille d'édifices plus anciens ;
son plan, ainsi que certains vestiges d'appareil
antérieur indiquent que cette église romane fut
rebâtie sur des substructions carolingiennes. Elle
possède un sanctuaire à plan trifolié; une cou-
pole couvre la croix. L'excursion se termine au
château d'Estillac, qui fut la demeure du célèbre
Miîutluc. Au retour eut lieu une nouvelle séance
présidée par M. Lefèvre-Pontalis et entièrement
occupée par deux conférences faites par M. le
clianoine Pottier sur l'architecture religieuse de
la région et par M. P. Lauzun sur les châteaux
de l'Agenais.
Le lendemain, les congressistes repartaient
pour Madaillon, dont le château, datant de trois
époques principales, XIIL, XlV^^et XV"= siècle),
a plus d'importance au point de vue liistorique
qu'au point de vue archéologique.
De retour à Agen, on se rendit à Saint-Ca-
prais, église cathédra'e d'Agen. L'abside et le
transept datent de la seconde inoitié du XIL
siècle et composent la partie le plus remarquable
de l'édifice. Les piliers avec leurs chapiteaux, les
arcades extradossées, les colonnettes de l'ab-
side principale et des deux absidioles, accusent
les caractères les plus purs de la belle époque
romane.
La salle capitulaire est surtout remirquable
par son magnifique portail du XI L siècle,
aux chapiteaux historiés où se découvrent des
traces de décoration polychrome et qui peuvent
rivaliser avec ceux de Moissac. Dans l'intérieur,
les belles voûtes d'ogives retombant sur de riches
colonnes de marbre ont été l'objet de l'attention
de tous.
Les excursionnistes consacrèrent encore quel-
ques instants à la visite des vieilles maisons
d'Agen, notamment à celle dite « maison du Sé-
néchal », qui mérite qu'on s'y arrête. La rue
Puits-duSaumon a aussi son caractère, avec ses
galeries à arcades du XIV>= siècle.
Puis ils visitent les églises Sainte-Foy,
Saint- Hilaire et des Cordeliers, enfin l'église
paroissiale de Notre-Dame, construite en 1254
par Armand Bélenger, bienfaiteur du cou-
vent des Dominicains. Elle est peut-être, avec
l'église des Jacobins de Toulouse, le seul type
de construction établi sur les données du maître
par les disciples de saint Dominique : un seul
vaisseau rectangulaire, divisé en deux nefs égales
et parallèles séparées l'une de l'autre par une
rangée de piliers.
Poursuivant leurs pérégrinations, les congres-
sistes se rendirent à Moissac, et rcçusparla^rv/t'Vt'
archéologique de Tarii-€t-Garoniie,\\s se dirigèrent
immédiatement vers l'église latine de Saint-
Martin, antérieure à l'an looo, avec portail du
XV'-' siècle.
La façade, en petit appareil, flanquée de deux
massifs cylindriques, pourrait la faire remonter
aux temps mérovingiens. Il est cependant plus
prudent de ne la dater que de l'époque carolin-
gienne, à laquelle était encore employé ce mode
Cratjaur Des Sociétés; 0at)antes.
521
tout romain de revêtement. La chapelle de la
Sainte-Trinité laisse voir des traces de pein-
tures murales datant du XV*^ siècle et rappelant
la vie de Notre-Seigneur.
Le déjeuner fut servi au célèbre cloître de l'ab-
baj'e de Saint-Pierre ; environ cent-vingt convi-
ves se trouvaient réunis dans ce superbe cadre.
Puis a commencé la visite de l'église. M. le
chanoine Pottier, et, après lui, M. de Lasteyrie,
ont supérieurement décrit et commenté la mer-
veilleuse page qu'offre le portail de l'église, l'un
des plus beaux morceaux d'architecture et de
sculpture romanes que l'on connaisse.
« L'arcade d'ouverture repose sur quatre colonnes, aux
chapiteaux délicatement fouillés. Les parois latérales,
formant porche, sont revêtues de trois rangées de sculp-
tures figurant des panneaux rapportés, ainsi qu'on en peut
juger par les agrafes encoie visibles. Ces sculptures, du
plus haut intérêt, représentent : la Visitatinn,P Atniojicia-
tion, la Présetitatioii de Jcstis au Temple, la Fjiite en
Éiiypte, la Luxure, l'Avarice, la Mort de l'avare, la
Damtiation de l'avare et de la femme nnpudigue, Lazare
et le mauvais riche, Abraham nimbe, et enfin un autre
patriarche également nimbe.
« La porte, partie sur laquelle peuvent s'exercer avec le
plus de fruit l'étude et la discussion, se compose d'un
trumeau central, avec, h droite et à gauche, une large
ouverture aboutissant à deux pieds-droits dont les parois
sont décorées des statues de saint Pierre et d'Isaïe.
■! Ce trumeau, appartenant sans aucun doute à un édi-
fice d'une époque antérieure et à une école de sculpture
étrangère à. la région, est décoré de trois couples de
lionnes se chevauchant. Deux gigantesque statues de
prophètes occupent ses faces latérales.
« Les pieds-droits et le trumeau sont couronnés par un
magnifique linteau en marbre blanc, décoré d'entrelacs
et de superbes rosaces, et que Viollet-Le Duc n'hésitait
pas à assimiler aux plus belles sculptures grecques.
«Ce linteau devait appartenir au même monument que
le trumeau dont il vient d'être parle ; en effet, lesrobaces
qui décorent le linteau se retrouvent dans le trumeau,
entre les lionnes passantes.
« Les dimensions du trumeau n'étant pas exactement
conespondantes à la hauteur sous linteau, les construc-
teurs durent rapporter à la partie haute de ce trumeau
une abaque restée brute et dont le fruste ne fait que
mieux valoir la richesse artistique du trumeau et du
linleau.
€ .A.u-dessus s'étale le tympan, admirablement fouillé,
représentant Jésus dans sa gloire, avec, à ses côtés, les
quatre évangélistes, et, au-dessous, les vingt-quatre vieil-
lards de l'Apocalypse. Des cordons formés par de lon-
gues files de rats et de grenouilles (assemblage bizarre
qu'a dû, sans doute, inspirer la lecture d'Aristophane)
séparent trois rangées de voussures couvertes d'ara-
besques.
La nef unique paraît dater du X1V'= siècle, époque h.
laquelle elle fut reconstruite sur les débris de l'ancienne
église à coupoles, laquelle avait elle-même remplacé
l'église primitive. L'église renferme un beau tombeau du
VU" siècle, où fut inhumé plus tard, au .Xlll" siècle, l'abbé
Raymond de Montpezat. Dans le sanctuaire, on remarque
l'inscription dédicatoire du XL' siècle, des sculptures sur
bois du XV'' et les orgues données par Mazarin, ancien
abbé de Moissac.
« A l'Ouest, la nef est précédée d'une tour carrée et for-
tifiée qui s'élève au-dessus du narthex ; on y voit l'une
des premières voûtes d'ogives, dont les nervures reposent
sur des colonnes ornées de remarquables chapiteaux.
« Attenant à l'église, est le cloître, si souvent décrit,
composé d'une série d'arcatures régulières entourant une
grande cour carrée et supportées par des colonnes très
élégantes, alternativement simples et jumelées, surmon-
tées de chapiteaux à sujets divers, dont chacun est un
admirable morceau de sculpture.
« Aux angles et au milieu de chaque galerie, les arca-
tiires sont renforcées par des piliers carrés, avec, à
chaque angle, la statue d'un apôtre, et, au milieu de la
galerie orientale, celle de l'abbé Durand, constructeur de
l'église.
« Ce cloître, de la fin du XI"' siècle, fut terminé dans
les premières années du XII'. »
Le dimanche 16 juin, le Congrès tenait sa
séance de clôture.
M. Courau, architecte, lut une intéressante
étude sur l'église de Clermont-Dessous, restaurée
par lui avec un grand souci de la science archéo-
logique.
Le Congrès, sur la proposition très chaleureu-
sement exprimée par M. Planté, maire d'Orthez,
vota une résolution tendant à ce que l'adminis-
tration des musées rende au château de Pau
quatre panneaux de tapisserie qu'elle en avait
retirés pour être exposés, l'an dernier, au Petit
Palais.
Le lendemain, les congressistes restés présents
se rendaient en excursion à Lectoure, où, sous la
conduite de M. Lefèvre-Pontalis, ils visitaient
la cathédrale de Saint-Gervaiset-Saint-Protais,
monument plusieurs fois remanié, et dont les
différentes parties datent des XIII^, XV^, XVI^
et XVI le siècles. Sa nef centrale, divisée en deux
travées à peu près carrées, voûtées sur croisées
d'ogives, offre tous les caractères d'une ancienne
église à coupoles dont les pendentifs devaient
reposer sur les énormes piliers qui la soutiennent
de chaque côté ('J.
Gilde de Saint-Thomas et de Saint-Luc. —
Session de igoi (=). _ C'est vers l'ancien pays de
Clèves, aux confins de l'Allemagne et des Pays-
Bas, que les membres de la Gilde faisaient cette
année leur trente-cinquième session.
Il était difficile de mieux choisir. Au charme
des forêts séculaires, des collines pittoresques,
des riches vallées qu'arrose le Rhin majestueux,
s'ajoutait l'attrait d'une série de monuments bien
dignes d'un examen attentif
Si les châteaux de Clèves, de Moyiand, de
Kempen évoquaient les souvenirs de la puissante
1. L'après une correspondance du liien Public.
2. D'après M, .■\. Besnard dans l'Architecture.
522
3Rrbur tir V^xt cbrcticn.
féodalité, les églises de Calcar, de Xaiiten, d'Em-
meiich, d'IIochelten, de Kempen, celle d'Essen
surtout, offraient à l'archéologue et à l'artiste d'in-
comparables sujets d'étude.
Leur structurearchitecturale affecte des formes
particulières à la région et dont le développement
successif met parfois à l'épreuve la sagacité des
antiquaires ; leur mobilier mérite à bon droit
d'être examiné et imité par nos artistes, car au-
tels, tombeaux-, jubés, stalles, luminaires, etc. sont
demeurés tels que les avait créés l'art du moyen
âge ; mais ce qui laisse surtout d'ineffaçables sou-
venirs, c'est la richesse des « trésors » — le mot
est vrai dans toutes ses acceptions — que conser-
vent les sacristies et qui demeurent comme les
témoins muets de la piété des générations pas-
sées, de leur bon goût artistique et de leur habi-
leté technique.
Le rendez-vous des Gil leuianncii avait été fixé
à Nimègue dans la journée du lundi 2 septembre.
La caravane, où prêtres et législateurs, archéo-
logues et artistes, hommes d'âge et jeunes gens,
se trouvent amicalement réunis, est placée sous
la direction de MM. le baron Bethune de Villers,
président, le chanoine Delvigne et Jules Helbig,
vice-présidents, chevalier J.-B. de Ghellinck
d'Elseghem, secrétaire, Joseph Casier, trésorier.
Vers le soir, les excursionnistes arrivent à Clè-
ves, dont la situation pittoresque, sur le sommet
de collines qu'encadrent de superbes forêts, offre
un panorama splendide. Du balcon de l'hùtel où
est installé le quartier-général, on découvre
les clochers de la plupart des localités qu'on
doit visiter cette semaine.
A la séance d'ouverture, le président, après
avoir rappelé que la Gilde avait déjà parcouru
cette partie de l'Allemagne en 1868, tint à cons-
tater combien, depuis lors, l'association, si mo-
deste à ses débuts, a vu s'accroître et le nombre
de ses adhérents et son influence pour la réno-
vation de l'art dans notre pays. Il émit, en même
temps, le souhait que la Gilde sache demeurer
fidèle aux principes et aux traditions que lui ont
imprimés ses zélés fondateurs.
Le 3 septembre, après la messe de la Gilde,
célébrée par M. le chanoine Delvigne, on étudie
en détail l'église collégiale de Clèves. C'est une
construction en briques, élevée au XIV° et au
XVi^ siècle et qui porte bien les caractères spé-
ciaux de l'architecture du pays. Deux grandes
tours, assises aux côtés de la façade, annoncent
l'ancieiuie collégiale.
Comme mobilier, les tombes des ducs de Clèves,
dont l'une, couverte de lames de cuivre, est fort
remarquable ; un tabernacle sculpté et un repo-
soir aux reliques, décorent le mur nord du sanc-
tuaire ; des sedilia ou sièges pour les officiants,
en bois finement taillé.
Dau.x rétables, portant la main d'Anvers, se
trouvent dans les chapelles ; l'un d'eux accuse
déjà l'influence de la Renaissance païenne. Des
vestiges de fresques, diverses statues et tableaux,
quelques objets d'orfèvrerie complètent la série
des œuvres anciennes que l'église a conservées.
En effet, le (,< modernisme » a sévi ici, dans les
premières années du X1X'= siècle, d'une manière
déplorable. L'histoire locale a gardé le souvenir
des rétables, dont les statues (jualifiées alors de
« poupées» alimentèrent pendant plusieurs an-
nées le poêle de la sacristie, non moins que des
manuscrits, des ornements sacerdotaux, même
des pierres tombales brocantés, vers la même
époque, à des juifs hollandais !
Serait-ce par suite d'une réaction exagérée
contre ces anciens abus que les archéologues ren-
contrent parfois un accueil peu gracieux à la sa-
cristie de Clèves ?
De Clèves à Calcar, voyage en pataches,
comme il sied à des admirateurs du « bon vieux
temps ».
On traverse les superbes allées du beau domaine
de Moyland, — un nom qui ne ment pas, — dont
le propriétaire, M. le baron van Steengracht, a
gracieusement autorisé la visite. Moyland est
un vaste château, construit au XIV<^ siècle, mais
qui a été victime, passé lui demi-siècle, d'une
restauration trop radicale. De riches collections
de tableaux et de porcelaines décorent les vastes
appartements où l'on est quelque peu étonné de
trouver le fauteuil de Voltaire qui reçut jadis ici
l'hospitalité de son royal ami, Frédéric II de
Prusse.
Grâce à l'éloignement des voies ferrées, la petite
ville de Calcar a gardé un aspect moyenâgeux
bien fait pour plaire aux archéologues. Elle a
gardé aussi, dans l'église paroissiale, une série
incomparable d'anciens rétables d'autel, exécutés
par une pléiade d'artistes qui taillaient le bois
avec une patience et une habileté non égalées de-
puis et que l'on désigne habituellement sous le
nom d' « école de Calcar ».
Impossible d'en parler ici avec la compétence
requise. Disons seulement que le maître-autel
renferme plus de 200 statuettes, qui représentent
avec un fini merveilleu.x les scènes de la Passion.
Vingt panneaux, peints par Jean Joest.surnommé
«Jean de Calcar », forment les volets de cet au-
tel ; l'habileté du dessin et de la composition,
l'énergique sentiment des expressions, la vigueur
et l'harmonie du coloris font ranger ces tableaux
parmi les meilleures œuvres picturales du com-
mencement du X\'l« siècle.
Six autres rétables sculptés et munis de volets
peints, forment comme une couronne autour du
grandiose maître-autel. Ce trésor artistique ne
%Yii\)à\ix tïes ^octétéô gat^antes.
523
représente cependant qu'une partie des richesses
que Calcar possédait jadis. Ici aussi on mutila
les chefs-d'œuvre anciens, ou on les vendit à l'en-
can. Un de ces rétables se trouve aujourd'hui,
nous dit-on, au musée d'Anvers.
L'église possède encore maints objets intéres-
sants, notamment un lustre colossal, qui est sus-
pendu au milieu delà nef,représentant l'arbre de
Jessé. A la sacristie se trouvent une série d'objets
d'orfèvrerie et d'ornements sacerdotau.\, con-
temporains des anciens rétables. La tour renfer-
me plusieurs cloches anciennes.
L'Hôtel de ville de Calcar est une construc-
tion en briques du XV« siècle, fort simple, mais
grandiose d'aspect et admirablement située sur
la grand'place.
Les membres de la Gilde y tinrent une séance
qui fut naturellement consacrée, tout d'abord, à
l'examen raisonné des œuvres d'art visitées pen-
dant cette journée. M. le chanoine Delvigne y
présenta une remarquable étude sur les divers
modes d'éclairage adoptés dans les églises, depuis
l'humble lampe des catacombes jusqu'aux scin-
tillantes ampoules d'Édison, qui commencent à
pénétrer dans nos sanctuaires.
Congrès eucharistique d'Angers. — Une
innovation du Congrès d'Angers a été la section
d'art et d'archéologie religieuse. Cette section a
attiré de nombreuses sympathies.
Pour cette section, plusieurs hommes d'une
réelle compétence sont venus à Angers. Parmi
les questions qui firent l'objet des discussions,
l'une est ainsi formulée: « Quels objets artistiques
se rapportent au culte du Saint- Sacrement ?
Tabernacles... crosses et colombes eucharisti-
ques .. dais de l'autel et de procession... ci-
boires... calices... ostensoirs, etc. »
On s'y est posé aussi une question pratique :
« N'y aurait-il pas lieu d'établir, à Angers, une
école d'art religieux comme celle de Saint-Luc
à Bruxelles, à Gand et à Liège .'' » Cette question
a été résolue dans un sens affirmatif. Nous som-
mes heureux d'enregistrer ce nouvel hommage
rendu à l'initiative d'une œuvre que nous appré-
cions si hautement.
Gilde de Saint-Bernulphe de Hollande. —
L'excursion annuelle a eu lieu dans le courant
du mois de juillet. Les membres de la Gilde
s'étaient donné rendez-vous à Bonn, où ils
furent pilotés durant la première journée par le
professeur Paul Clemen. Ils y visitèrent l'église
dédiée à S. Florent. C'est une basilique de style
roman sur plan en croix latine, comportant deux
chœurs et cinq tours, dont une sur l'intersection
du transept. À noter le Chemin de la Croix
datant de 11 50 environ; le monument a été
restauré d'une façon satisfaisante ; les vitraux
des collatéraux sont d'un bon style.
La Société s'est rendue, ensuite, en voiture à
Schwarzrheindorf, situé en face de Bonn sur
l'autre rive du Rhin, pour y visiter l'importante
église St-Georges ; elle fut consacrée en l'an 1151
et fut construite sur plan en croix grecque, mais
subit de 1151 à 1171 de notables modifications
du côté de la façade ouest. Cette église est re-
marquable surtout par ses fresques. Le même
jour la Gilde se rendit à Maria-Laach.
Le lendemain à 7 h. j/^ fut dite, par le Rév.doyen
Eppinck de Deventer, la messe à la mémoire
des membres défunts. A 9 h. ^^, il fut donné aux
excursionnistes d'entendre la messe en chant
grégorien dans l'église conventuelle des RR. PP.
Bénédictins ; ils garderont longtemps le sou-
venir de cette cérémonie émotionnante.
L'église bénédictine fut fondée en 1093 par
le comte Henri II et achevée en 11 56. C'est une
basilique à deux chœurs, comportant six tours.
Dans le chœur ouest se trouve le sarcophage du
fondateur de l'abbaye et devant l'abside, un
petit Chemin de la Croix, véritable joyau de
sculpture monumentale et d'architectureromane.
De là l'on se rendit à Andernach à travers
la ravissante vallée du Brôhl.
L'église paroissiale de cette ville est une basi-
lique sans transept, avec galeries sur les colla-
téraux et ayant quatre tours ; à remarquer les
fonts baptismaux en pierre datant du XII'^s.,
et un St-Sépulcre du XV<= siècle. A Oberwesel,
non loin d'Andernach, on visita la simple mais
belle église N.-D., bénie en 1331. On y voit un bel
autel contemporain de la construction de l'église,
orné de multiples statuettes polychromées re-
présentant des personnages de l'ancien et du
nouveau testament, ainsi qu'un magnifique jubé
du XIV« siècle. On y conserve également une
partie du vieux Chemin de la Croix, ainsi que
deux belles statues de la Ste Vierge du XIV'^
siècle.
Le programme officiel de l'excursion était
ici épuisé. Cependant la plupart des membres
de la Gilde poussèrent jusqu'à la ville voisine
de Kidrich pour y visiter la remarquable église si
bien remise en état, grâce aux largesses de Lord
Sutton. On y rencontre de remarquables autels,
une chaire de vérité du XV'= siècle et les stalles
du chœur. Mais ce qui frappe surtout, ce sont
les bancs destinés aux fidèles ; ces bancs sont
uniques dans leur genre par la sculpture et la
524
Bebuc ïie T^rt cljrétteu.
pol}chromic primitive. Ils furent exécutés en
15 10 par Erliart Salckeiier, d'Abcnsperck en
Bavière, résidant à Ganoderlieim.
En somme et grâce à l'intelligente direction
du Rév. doyen et du secrétaire de la Gilde
St-Bernulphe, cette excursion marquera parmi
les plus importantes et les plus instructives que
la Société ait faites (-).
Gilde de St Luc et St-Joseph de Gand
(1896-1901). — L'anniversaire de cette modeste
société d'artistes amateurs d'archéologie et d'art
contient une notice de RL J. Coomans, architecte
de la ville d'Ypres, sur la collégiale de St-Martin
de cette ville.
L'auteur y a joint des reproductions photo-
graphiques singulièrement intéressantes des
curieux cloîtres de l'ancienne collégiale, deve-
nue maintenant cathédrale. Le cloître, ci-de-
vant occupé par les sœurs Clarisses, était resté
60 ans dérobé à tous les regards ; depuis peu
de temps accessible, il va êtie restauré par
RI. Coomans, et comprend des parties du XIIL'
et d'autres du XV<= siècle.
Profitons de l'occasion pour noter ici une
rénovation architecturale due à RI. Coomans.
On sait quelle multitude de beaux pignons en
bois agrémentaient jadis les rues pittoresques
de la ville d'Ypres ; on n'en garde guère d'autres
souvenirs que la riche collection de dessins con-
servés au musée de la ville et dus à un artiste du
commencement du siècle dernier. RI. Coomans
vient d'édiiîer sur le nouveau boulevard à Ypres
trois pignons anciens, d'après la forme tradition-
nelle locale ; ils sont toute une révélation pour
le public et un signal pour les amateurs d'art de
bon aloi.
L. C.
Commission royale des Monuments de
Belgique. — Le collège a tenu, en octobre,
l'assemblée générale qu'il a annuellement avec
ses correspondants.
RI. Lagasse de Locht, directeur des bâtiments
civils, piésident de la Commission, avait à ses
côtés au bureau M RI. le Rlinistre de la Justice,
de RIontpellier, gouverneur de la province de
Namur, de Kerckhove d'Exaerde, gouverneur de
la Elandre orientale, le comte d'Ursel, gouver-
neur de la Flandre occidentale, lîecco, secrétaire
général du ministre de l'agriculture, Ilelbig, vice-
président, etc., Massaux, secrétaire de la com-
mission.
I. U'aprcs Het Cetilrtivi.
La séance est ouverte par une allocution de
RI. Van den Heuvel, qui assure la Commission des
Monuments de la reconnaissance et des sympa-
thies du gouvernement.
On a entendu le rapport du secrétaire sur les
travau.x de la Commission.
M. Rlassaux rend hommage à la mémoire de
RI RI. A. De Vriendt et Van Ysendyck, que la
Commission a perdus cette année, et à celle de
RI. le docteur Lambert, de Bouillon, qui était
membre correspondant. Il caractérise, par les
chiffres suivants, l'activité de la Commission :
celle-ci a tenu 49 réunions, fait no inspections
d'édifices et donné son avis sur 1200 affaires; elle
a eu de nombreuses conférences avec des artistes
et des délégués d'administrations publiques. Le
secrétaire entre ensuite dans le détail des tra-
vaux de la Commission, indique ses préoc-
cupations en matière de restauration et pré-
sente, à propos de celle-ci, diverses considéra-
tions.
Les rapports faits au nom des Comités provin-
ciaux ont suivi. Ont lu ces rapports : RI. l'abbé
Van Caster, de RIalines, remplaçant RI. Donnet,
pour Anvers ; M. l'architecte provincial Dumor-
tier, pour le Brabant ; M. Van Ruymbeke, bourg-
mestre d'Oedelem, pour la Flandre occidentale ;
RI. De Ceuleneer, professeur à l'Université de
Gand, pour la Flandre orientale ; RI. l'architecte-
ingénieur Hubert, de Mons, pour le Hainaut ;
M.Lohest, pour Liège; M. l'abbé Daniels, archéo-
logue à Zolder, pour le Limbourg ; M. Tandel,
commissaire d'arrondissement à Arlon, pour le
Luxembourg; M. l'architecte provincial Bove-
roulle, pour Namur.
Une discussion sur deux questions d'art devait
avoir lieu, d'après le programme : la première
question était celle du rôle légitime des formes
de structure simulée dans l'aspect des monu-
ments ; la seconde était ainsi formulée : « Qu'en-
seignent les découvertes de peintures murales
faites dans les monuments de la Belgique 1 >
Sur la première question, il ne s'est trouvé
personne pour prendre la parole. Nous nous
permettons de signaler une étude développée
sur ce sujet, contenu dans un récent ouvrage du
secrétaire de la Revue de l Art chrétien (').
Sur la seconde, RI. l'abbé Van Caster a repro-
duit l'opinion qu'il avait déjà soutenue, dans une
polémique, contre RI. Hclbig, à savoir qu'aucune
décoration picturale n'a été exécutée, dans une
grande église belge, selon un plan d'ensemble; la
cause en est, ou que ces monuments étaient trop
vastes, ou que l'édifice était construit en plusieurs
I. L. Cloquet, Tniilé d' Archilecture, t. V, pp. 75 à 86.
%vù\}anx Des Sociétés satjante©.
525
fois, au cours de plusieurs siècles ; l'église étant
construite sur des plans successifs, comment
eût-elle pu être polychromée selon le plan d'en-
semble d'un architecte?
M, l'abbé Daniels a cité, à l'encontre de cette
opinion, l'exemple de l'église de Neeroeteren
(Limbourg). Il a fait observer qu'une décoration
d'ensemble selon un plan uniforme pouvait tou-
jours avoir eu lieu après l'achèvement de l'église
et être ainsi plus ou moins contemporaine de
l'église.
M. le chanoine Sosson signale la polychromie
de l'église de Bourcy (Luxembourg) : c'est une
polychromie faite selon un plan uniforme ; le
sujet en est le VI^ livre de l'Apocalypse.
— Si on trouve çà et là des polychromies dans
des églises, ce n'est pas une raison pour poly-
chromer tous les édifices religieux de Belgique,
dit M. l'architecte Bordiau.
Plusieurs observations de détail sont encore
présentées. On décide de laisser la question à
l'ordre du jour de la réunion de l'an prochain, où
elle fera sans doute l'objet d'une plus ample dis-
cussion.
La séance se termine par la lecture de plusieurs
passages d'un travail envo)'é par M. le baron
Béthune, député permanent de la Flandre occi-
dentale, et qui traite de la technique du vitrail.
Ce travail nous paraît tout à fait remarquable.
Nous comptons)' revenir quand le compte rend-
officiel de la séance nous aura permis d'en pren
dre connaissance à tête reposée.
Le Congrès archéologique de Tongres. —
Les congressistes, conduits par M. le chevalier
Oscar Schaetzen, vice-président du Congrès,
ont fait une excursion à Maestricht. Après avoir
été reçus à l'hôtel de ville par les autorités, les
congressistes ont visité les principaux monu-
ments de la ville.
Les sections ont abordé leur ordre du jour.
A la i'« section (études préliistoriques), M.
Foudrignier discute longuement les vues émises
au sujet des bas-reliefs de la Gaule-Belgique re-
présentant des scènes de métiers; MM. Comhaire
et Bertrand ont traité de la détermination de la
verrerie franque.
A la 2*= section (histoire), M. Arendt parle de
la restauration des monuments et ruines histori-
ques ; M. le président de Ghellinck lit une étude
iconographique de M. Germain de Maidy sur la
Vierge Marie et le Serpent, qu'on trouvera re-
produit sous notre rubrique « Mélanges ».
Sur la proposition de M. le chevalier Schaet-
zen, l'assemblée émet le vreu de voir restaurer
complètement l'église de Notre-Dame de Ton-
gres.
M. le D'' Jorissenne caractérise l'architecture
wallonne du XVIî^ siècle.
M. Gielen expose quelques idées sur la restau-
ration des peintures murales.
M. Jos. Hubert montre comment on peut re-
constituer les porches du transept de l'église
Sainte-Waudru de Mons, d'après les données
fournies par le monument lui-même.
A la 3e section (Archéologie et architecture),
M. Mathieu traite des monographies commu-
nales. La question de la rectification des armoi-
ries communales amène une longue discussion
entre MM. l'abbé Daniels, Gielen, De Pauw, che-
valier de Borman, Mathieu et le comte de Re-
nesse. M. l'abbé Nouwen fait une intéressante
causerie sur les préparatifs de la première croi-
sade. M. Donnet fait ressortir le rôle de la pa-
pauté dans l'organisation de la croisade.
Des excursions ont eu lieu aux environs de
Tongres : ruines de Colmont, tumuli, fouilles à
Coninxheim, etc.
Un grand nombre de congressistes ont visité
les enceintes de Tongres et un tumulus ouvert
à leur intention. Ils ont assisté à une fouille inté-
ressante dans un champ de Koninxheim. Cette
fouille a donné un résultat aussi important qu'in-
attendu. Après avoir déterré une quantité d'ob-
jets ordinaires, on est tombé sur un tombeau de
femme, renfermant une quantité d'objets en
bronze émaillé de toute beauté, un petit miroir
circulaire, etc. Cette trouvaille a été une surprise
agréable pour les excursionnistes.
La i>e section seule a continué mercredi son
travail.
M. Foudrignier a parlé des découvertes de l'âge
du bronze faites en Belgique, et M. Montelius,
un Suédois, a présenté quelques observations à
ce sujet. M. L. Bertrand a parlé de l'homme pré-
historique, M. Arendt, de l'utilité des collections
privées.
M. Guignard s'est occupé de l'analogie qui
existe entre les tumuli de Belgique et ceux de
France, au point de vue de l'âge de la pierre et
de l'âge du bronze.
L'assemblée générale de clôture s'est tenue au
palais de justice. Au bureau, MM. le comte de
Heinricourt de Grunne, président; Ose. Schaetzen
Montelius et Huybrechts.
On a entendu des rapports intéressants de
MM. Ubrix, Mathieu, abbé Remy, et Libot. Puis
on a déclaré que le prochain Congrès se tiendrait
à Bruges.
M. le comte de Grunne a prononcé ensuite, au
milieu d'applaudissements enthousiastes, le dis-
cours de clôture.
528
3Rebue tie Tiart cbrctien»
mine le Château des sept tours, l'ancien Cyclobion,
élevé par les Musulmans. Ces murs ont résisté
jusqu'ici, mais il est temps qu'on les sauve!
Emporté par son enthousiasme en présence
des églises byzantines, M. Soil y voit le type
possible d'une rénovation de notre art du XX'=
siècle, exprimant après M. Gosset une opinion
que nous avons combattue dans ces colonnes (').
Sainte-Sophie est trop connue pour que nous
nous y arrêtions, sinon pour signaler les belles
vues, intérieure et extérieure, qu'en donne notre
voyageur ; celle de l'esonarthex sera une nou-
veauté pour bien des lecteurs. Sainte-Sophie est
le chef-d'œuvre de l'art byzantin, d'un art en
formation depuis deux siècles. Des débuts (com-
mencement du IV'^ siècle), Constantinople garde
les églises de St-Jean Stoudios, de St-Théodore
de Tyrone, des SSts-Serge et Bacchus; les deux
premières, transformées en mosquées, sont for-
tement remaniées. La troisième est connue sous le
nom de petite Ste-Sophie. Carrée à l'extérieur
(34 m. sur 30), elle est à l'intérieur octogonale,
comme St-Vital de Ravenne, à quatre pans plats,
à quatre autres munis d'absidioles ; l'une, al-
longée, forme le chœur ; huit pendentifs sup-
portent le tambour portant la coupole, qui est
surbaissée, à côtes saillantes.
Après Saint-Serge vient Sainte-Sophie, après
celle-ci, Sainte-Irène, construite par Justinien et
restaurée au VIII'' siècle; simple d'allure, de
forme basilicale allongée, elle offre une coupole
surbaissée sur un tambour rond.
L'église de la Mère de Dieu, la Theotocos, date
du X'^ siècle ; celle du Pantocrator fut élevée en
1124 ; celle de la l'anmacharistos fut fondée au
XII'^ siècle. L'église du Christ, fondée par Jus-
tinien, fut reconstruite à la fin du XI^ siècle ;
précédée d'un double nartiiex, bâtie sur plan
carré, sa coupole porte sur un tambour ; elle a
un chœur circulaire en saillie sur la façade orien-
tale.
Quant aux mosquées musulmanes, elles re-
produisent un type constant. La grande coupole
centrale est contrebutée par des demi-coupoles
secondaires, supportées à leur tour par des demi-
coupoles basses,et enveloppées d'annexés couver-
tes d'une série de petites coupoles. La mosquée
est précédée de l'atrium ou portique, au centre
duquel s'élève la fontaine aux ablutions; d'autres
lavabos sont établis sur les flancs de l'édifice.
Deux, quatre, six minarets à balcons flanquent
l'édifice, qu'entourent des écoles, des hôpitaux,
les demeures de prêtres et des cimetières. C'est
le système de Ste-Sophie développé d'une ma-
nière complète. Énumérons les principales mos-
I. V. Revue de V Art chrétien, année 1899, p. 444.
quée,s érigées par les Musulmans, par ordre de
date.
Daoud pacha Djaini (mosquée) date de 14S2 ;
Eyonb Djaini, construite par Mahomet le Con-
quérant en 1460, est interdite aux Chrétiens.
Mahmoud Pacha Djanii (XV'^), avec la Baja-
zidié {mosç\néç. de Rajazet), sont surtout remar-
quables. La dernière dessine en plan un carré,
au centre duquel quatre piliers massifs portent,
par l'intermédiaire d'autant d'arcs, la coupole, sur
tambour ; sur deu.x côtés s'appuyent des demi-
coupoles comme à Ste-Sophie ; sur les deux
autres régnent des bas-côtés couverts de petites
coupoles ; un atrium précède l'édifice.
La Shali Zadc Djami, élevée en 1543 par Soli-
man, représente le type complet : coupole cen-
trale épaulée par quatre demi-coupoles, soutenues
elles-mêmes par 3 demi-coupoles plus petites, le
tout inscrit dans un carré ; portiques ogivaux,
minaret élégant, décor délicat.
Sidcïinanié, mosquée de Soliman le Magni-
fique, bâtie de 1550 a 1566 par le célèbre archi-
tecte Sinan, est la reine des mosquées de Stam-
boul. La coupole centrale, de 26 m. de diamètre,
élancée, s'appuie sur deux coupoles garnies de
trois absidioles et aux quatre angles se dressent
quatre grandes coupoles, sans préjudice des
petites. L'ensemble mesure 6g mètres sur G}). Ici
apparaissent les stalactites.
'L'Ahtncdié, ou mosquée d'Achmet, brûlée en
1610, est à quatre demi-coupoles appuyant le
dôme central ; ses six minarets font sa gloire ;
elle mesure 72 mètres sur 64; elle a deux galeries
d'étage.
Nous passons sur les autres. M. Soil décrit
encore les Turbcs (tombeaux), les fontaines et
les autres monuments de l'époque ottomane, et
passe à la ville moderne.
L. C.
DEFORMATION D'UNE LÉGENDE DE
SAINTE GENEVIÈVE, par H. JoUY (Ext. du
Bull, de la conf. d'hisl. et d'arch. de Mcaux, 1901).
Examinant un bas-relief ancien, M. le cha-
noine Jouy étudie l'iconographie de la patronne
de Paris, abusivement représentée sous les traits
d'une bergère à partir du XIV'= siècle et surtout
depuis le poème de Pierre du Pont, surnommé
l'aveugle de Bruges. Les poètes et non les histo-
riens, ni même les artistes sérieusement docu-
mentés, ont travesti en pastourelle la libératrice
de la P'rance. Sa plus ancienne image connue est
la statue du porche de Saint-Germain-l'Auxer-
rois : tête voilée, un cierge dans la main droite,
un livre dans la main gauche, un diable sous les
BtbUograpl)te.
529
pieds (XIII'= s.). La bougie éteinte par le vent
ou par le diable, rallumée miraculeusement, est
sa caractéristique la plus précise, à laquelle on
peut ajouter les clés. La courte mais substan-
tielle notice de M. Jouy, d'une sérieuse érudition,
est un modèle d'étude iconographique.
L. C,
L'ABCHÉOLOGIE DU MOYEN AGK EN
FRANCE, par M. Anthyme Saint-Paul (Extrait
du Compte rendu des travaux du Congrès bihliographi-
que international àz 1898).
Nous devons signaler (il n'est jamais trop tard
pour bien faire) une notice ancienne déjà, très
brève, mais trop importante pour n'être pas notée
dans notre recueil.
Au Congrès scientifique de Bruxelles, feu de
Marsy avait donné un rapport substantiel du
mouvement des études d'archéologie religieuse
en France, de 1S91 à 1894. De son côté, M. A.
S. -P. reprend le mouvement de l'archéologie
médiévale durant la période décennale brillante
qui finit en 1898.
Parmi les périodiques, il fait à la Revue de
r Art chrétien l'honneur de la citer en tête, avec le
Bulletin monumental. A côté de ces deux revues
viennent se placer l'Ami des monuments français
de M. Ch. Normand, le Bulletin archcologique et la
Revue archéologique de Jules Quicherat. Puis
viennent le Moyen Age, \ Archéologie, la Corres-
pondance historique et archéologique ; les Notes
d'art et d'archéologie de la Société de Saint-Jean.
Parmi les grandes publications illustrées non
périodiques, il faut mettre hors ligne : le Dic-
tionnaire de la Fratice de M. Joanne et la France
artistique et monumentale de M. Havard.
Les sociétés provinciales ont apporté leur
contingent considérable.
La série des monographies est surtout remar-
quable ; nous les avons annoncées avec soin au
fur et à mesure de leur apparition.
D'une manière plus spéciale, l'art médiéval a
été étudié par MM. Gonse, Muntz, Palustre, de
Lasteyrie, Rupin, de Farcy, par Mgr Barbier de
Montault et par les brillants élèves de l'Ecole des
Chartes : G. Durand, de Cessac, Lefebvre-Pon-
talis, Virey, Enlart, Join-Lambert, Thiollier, de
Crèvecœur, Royet. Il faut encore citer Corroyer,
Brutails, Berthelé, Demaison, L. Régnier, le D"^
Coutan, l'abbé Bouxin, l'abbé Dumaine, Mortet,
E. Lambin, etc., et surtout ne pas oublier
M. Anthyme Saint-Paul lui-même, l'éminent
auteur de tant d'études approfondies, que résume
son bel ouvrage la France monumentale.
L. C.
LA BASILIQUE DE SAINT-REMI A REIMS,
par A. GossET. In-4° de 90 pp. et 40 pi. — Paris,
Librairies réunies, 1900.
M. Gosset peut être considéré comme un des
plus méritants parmi les citoyens de la noble cité
rémoise. Auteur de nombreux travaux d'érudi-
tion et d'importantes conceptions architecturales,
notamment de l'église votive de Ste-Clotilde,
il a consacré aux deux grandes églises de Reims
des monographies de premier ordre. Nous avons
jadis fait connaître sa très belle description de la
cathédrale ; nous saluons à présent l'apparition
d'un autre ouvrage naguère annoncé à nos
lecteurs.
L'église de St-Remi, telle qu'elle existe, est
celle que reconstruisit l'évêque Thierry, sacré
en 1034, et que le pape Léon IX consacra en
1049. La façade principale, comme le remarque
l'auteur, n'est pas le monumental frontispice qui
conviendrait à la vaste et vénérable basilique.
Les façades latérales sont fort modestes, mais
par contre très instructives ; on y peut suivre
les transformations de l'église romane et l'évolu-
tion architecturale depuis la basilique aux murs
épais et lisses jusqu'aux claires-voies du XIV^*
siècle et au.x floraisons flamboyantes du XV>^ ;
530
3Rrl)uc tie V^xt i\)Xttinh
c'est tout un exposé de l'histoire de l'architecture
durant cinq siècles. Ce qui distingue surtout St-
Remi, c'est la magnifique abside élevée en i 170
et sa belle claire-voie mallieureusemetit rompue
par des piliers-butants, surajoutés et dispropor-
tionnés. Elle est contournée par de curieuses
absidioles sur plan circulaire; M. G. fait claire-
ment saisir l'habileté du constructeur, qui a
résolu d'une manière si particulière une diffi-
culté nouvelle et préparé d'autres solutions aux
constructeurs des cathédrales de Paris, de
Bourges, du Mans et de Tolède. On reconstruisit
à la même époque les voûtes du transept et l'on
rebâtit deux travées de la nef à la place du
narthex. Le triforium de St-Remi, d'un effet si
saisissant, est un des chefs-d'œuvre de l'école
champenoise. On trouvera dans l'ouvrage la
reproduction et le commentaire iconographique
du curieux pavement de la chapelle St-Éloy,
ainsi que des fameuses tapisseries données en
1531 par Robert de Lenoncourt.
Les planches de cet ouvrage n'ont pas toutes
l'élégance de celles de la cathédrale ; elles sont
du moins claires et singulièrement instructives.
L. C.
LA RKCONSTRUCTION DE L'ÉGLISE DE
VINÇA 1734-1769. (Brochure extraite de la J?evue
d'hist. et d'arch'eol. du Roussillon^
M. J. Sarrète fait, d'après des documents d'ar-
chives, le récit, plus intéressant au point de vue
épisodique et local qu'au point de vue de l'art et
de l'archéologie, des curieuses péripéties qui ont
marqué la reconstruction de cette église.
L. C.
LES SÉPULTURES ANTIQUES DU PAYS
NANTAIS, L'AGE DE L'ÉGLISE DE DEAS A
SAINT-PHILIBERT DE GRANDLIEU, par
L. Maître. (Brochure extraite du Bulletin archéolo-
gique, igoo. Paris, Imprimerie nat.)
Les plus anciens tombeaux chrétiens en Gaule
sont, comme on sait, des coffres rectangulaires en
pierre ; le plus souvent ceux du Midi sont riche-
ment sculptés. Le cercueil en pierre est de règle
jusqu'à l'an Mille ; plus tard il est réservé aux
personnages; les simples fidèles se contentent du
cercucil'en bois. Les anciens sarcophages païens
et chrétiens, identiques de forme, se reconnaissent
à l'orientation de ces derniers ; les premiers, aux
vases à parfums déposés auprès des corps. Telles
sont les généralités de cette étude, que feu Ed. Le
Blant a traitée à fond pour la Gaule, et que M.
Maître reprend pour la contrée nantaise. II
signale les emplacements des anciens cime tières
étudie la matière, la forme et la décoration des
sarcophages. L'ensemble des observations qu'il
consigne accuse une population dense groupée
autour de ses églises dès les temps mérovingiens.
Mais on est loin de pouvoir préciser l'ordre
chronologique des vestiges recueillis, ou tirer des
déductions historiques positives de cette étude
encore pleine de mystères.
Nous avons rendu compte antérieurement de
la notice consacrée par M. Maître à l'église de
Grandlieu (').
VIEUX COINS EN FLANDRE, par A. IIeiNS.
3^ livr. de 40 pi. petit in-folio. Gand, Heins, 1901.
Prix : 24 fr.
Sous la préoccupation archéologique qui do-
mine présentement le monde des lettré?, une
enquête spontanée s'est ouverte de toutes parts
au sujet des vestiges de l'ancien art monumental.
Nous disions récemment ce que MM. Thiollier
ont fait en Auvergne d'une manière accomplie,
qui ne laisse plus rien à faire après eux. En
Flandre, ce travail s'opère d'une façon plus dé-
cousue, mais se poursuit néanmoins avec succès.
Le baron Bethune a commencé dans la Revue
de r Art chrétien une série de monographies
d'églises romanes de la Flandre occidentale.
Depuis longtemps MM. Van Houck et Lange-
rock, dans leur excellente publication: Anciennes
constructions de Flandre, M. Mommcns dans ses
Croquis d' Architecture, M. Laureys, dans son
petit recueil: La Belgique au moyen âge, M. Van
Assche dans quelques belles monographies très
connues, la Gilde de St-TIwinas et St-Luc dans
ses Bulletins si documentés, d'autres encore ont
levé les plans des principales églises rurales de
la Flandre orientale et donné des notices de
leur histoire. Ces monographies, souvent très
étudiées, sont loin de former encore un ensemble.
M. P. Bergmans dans une élégante préface qu'il
a écrite pour le recueil de M. Ileins apprécie de
façon trop peu indulgente ces relevés, généra-
lement excellents, qui valent pour l'étude ce que
les croquis pittoresques valent pour l'agrément
et la vulgarisation.
En attendant qu'on en complète la collection,
M. A. Ileins nous rend un grand service en
entreprenant le relevé pittoresque des vieilles
constructions de la Flandre orientale, relevé un
peu superficiel, mais général et systématique.
Après avoir crayonné les Vieux ceins de Gand,
il illustre les Vieux coins de la /province. Ses
planches lithographiées de chic nous donnent
I. Revue de r A ri c/trélicn, année 1901, p. 332.
2i5tbliograpl)te*
531
des croquis légers, mais savoureux, des silhouet-
tes sommaires, mais bien senties, des impressions
justes et vives. Il parcourt le pays et ses recoins
en de gaies promenades, auxquelles on serait
heureux d'avoir le temps de prendre part ; rien
n'échappe à son œil d'artiste, et son alerte crayon
relève tout ce qui mérite de ne pas tomber dans
l'oubli. Là où tant d'autres sont passés en
aveugles, il découvre quelque charmant morceau:
un chevet de chapelle gothique, une tour romane,
une poterne de manoir, une charmille de vieux
parc, un reste de donjon, un vieux pilori, un
banc de justice, un châtaignier géant, un tilleul
séculaire, une ruine de prieuré, une porte monu-
mentale de vieille auberge. Surtout il nous ap-
porte les croquis d'une multitude de jolies églises
flamandes, et l'on ne se figure pas combien on y
retrouve de restes de l'époque romane ; combien
surtout, de ces jolies tours caractéristiques de la
région émergeant de la croisée du transept, pas-
sant d'une souche carrée à une lanterne octo-
gonale à l'aide de gracieux amortissements en
demi-pyramide, et s'ajourant d'élégantes baies
géminées.
L. C.
LK MOBILIER D'ART DU VAL-DIEU, par
M. l'abbé Desvaux. Broch. Veaux, Mortagne, 1901.
Quand il était curé de la paroisse où se trouve
le Val-Dieu, M. l'abbé Desvaux s'est attaché à
l'étude du monastère, de ses ruines, de son passé,
et il a amassé les matériaux d'une histoire,
que, nous l'espérons, Dieu lui donnera le temps
d'écrire. En attendant il publie des notices frag-
mentaires. Nous en annoncions une, dans notre
dernière livraison (p. 435). Sous le même titre,
depuis, il a fourni une réponse à des demandes de
renseignements de M. Tournotier, en offrant des
détails sur le mobilier d'art de ce monastère.
L. C.
ROGER VAN DER WEYDEN & LES « YMA-
GIERS » DE TOURNAI, par L. MAETERLINCK.
Broch. extraite du t. LX des Mémoires œmvntiés par
r Académie royale de Belgique, 1 900.
Jean Van Eyck apparaît à l'aube de la pein-
ture flamande, avec son frère Hubert, comme le
maître incontesté de l'école flamande ; cependant
un peintre reste indépendant de ce génial artiste,
c'est le fameux Roger de la Pasture, pour em-
ployer son nom d'origine. Si le premier fut le
peintre attitré des princes, le second fut celui
du peuple croyant et souffrant ; son art est dra-
matique ; ses personnages sont remués par la
joie et la douleur en même temps qu'ils sont
profondément pieux. D'où tient-il des principes
d'art si absolus ?
L'origine tournaisienne de Roger, qu'on a
tant contestée, commence à être universellement
reconnue. Après A. Pinchatt et Monseigneur
Dehaisnes, avec feu le baron de Lagrange, nous
avons montré, comme vient l'attester M. Mae-
terlinck, le rôle et l'importance de l'art sculptural
tournaisien dans cette renaissance anticipée
reconnue par L. Courajod. Après avoir résume
le résultat de nos recherches sur les anciens
ateliers tournaisiens et sur le vaste débouché de
leurs produits ('), le distingué conservateur du
Musée de peinture de Gand en tire une déduction
des plus intéressantes.
M. A. Philippi avait fait naguère cette re-
marque curieuse :
« L'art de Roger Van der Weyden nous rap-
pelle qu'il y avait à Tournai d'excellents sculp-
teurs » (2); M. E. Baes reconnaît de son côté, que
Roger doit être influencé par l'art sculptural de
Tournai « si intimement lié à la peinture ».
M. Maeterlinck pousse plus loin cette impor-
tante observation. Examinant la plus ancienne
œuvre connue du maître tournaisien, le petit
retable de Miraflorès, actuellement au musée
de Berlin (n° 534), il en dégage des traits d'ana-
logie avec les sculptures contemporaines de
l'école de Tournai, et il constate que d'autres
œuvres du peintre présentent un caractère sculp-
tural ; il en est qui produisent l'effet d'un bas-
relief superbement polychromé.Les compositions
sont resserrées et symétriques, on y retrouve
souvent les deux anges soulevant une draperie
si caractéristiques des bas-reliefs votifs de Tour-
nai.
L. C.
HISTOIRE DE NOTRE-DAME DU DÉSERT,
par M. A. J. Devoisins. Gr. in-S", illustré, 220 pp.
— Paris, Lechevalier, 1901.
Les curés de campagne, par une entente tacite,
rassemblent pour une grande part, mais trop
lentement à notre gré, la précieuse collection
des monographies paroissiales de France, tâche
qui leur est naturellement dévolue et réservée :
à côté d'eux, les médecins, en leur qualité de
lettrés parfois trop riches de loisirs, sont bien
placés pour y collaborer. C'est toujours une belle
et bonne œuvre, de sauver de l'oubli les souve-
nirs du passé; quand on n'a pas la bonne fortune
1. V. De Lagrange et Cloquet, Études sur l'Art de Tournai.
2. A. Philippi. Die Kunst in dcn XI", nnd XVI Jahrhunderl in
Ddictschland und in den Nederlanden. Leipzig, i8g8.
532
3artur tir r^lrt tbrttten.
d'exhumer du sol des vestiges archéologiques et
des vieux parchemins, des révélations histo-
riques, encore peut-on appliquer son talent à
vulgariser les données de l'histoire locale, à
faire revivre les traditions, à perpétuer dans le
peuple l'amour des ancêtres, le culte des saints
locaux, les poétiques et pieuses histoires. C'est a
quoi s'est appliqué le D' Devoisins, sans préten-
tions scientifiques, mais non sans préparation
liistorique et sans talent littéraire.
Il recherche les traces de la civilisation anti-
que dans le pays des Aulerques où les Romains
ont exploité le fer, et les souvenirs des premiers
chrétiens dans cette petiteThébaïde sanctifiée par
Melonius, le futur évéque de Reims. Il décrit la
crypte de N.-D. du Désert, cet hypogée en
forme de croix recroisettée, qui ne serait, selon
M. le chanoine Forée, qu'une cave à vin, mais qui
abrita les reliques de sainte Suzanne. Il raconte
la vie et retrace le culte de cette vierge martyre,
une des huit que l'Église honore sous le même
nom. Il raconte la légende du grand chêne et
résume l'existence au Désert de Fulbert, l'ancien
évêque d'Evreux et le futur évêque de Reims.
Puis il fait l'historique de la fondation du prieuré
de N.-D. du Désert, et de celle de l'abbaye de
la Chaise-Dieu et de l'abbaye de N.-D. de Lyre;
il poursuit enfin l'histoire de N.-D. du Désert.
C'est par de tels livres, où l'érudition sérieuse
est rehaussée par le charme littéraire, qu'il est dé-
sirable de voir remplacer tant de pieux libelles
d'une naïveté inepte et désespérante.
L. C.
TRAITÉ D'ARCHITECTURE, tome V (esthé-
tique, composition et décoration), par L. Cloquet,
architecte, ingénieur honoraire des ponts et chaussées,
professeur à l'Université de Gand. (Paris et Liège, ■
Ch. Béranger, successeur de Baudry et C'% édit.)
Voici un ouvrage considérable et appelé à tenir
une grande place. La littérature de l'architecture
ne PC compose, à part le Dictionnaire Ae. Viollet-
le-Duc, que d'un petit nombre de traités qui ne
sont guère que des énumérations de règles empi-
riques et tl'une foule de travaux d'importance très
diverse, traitant chacun d'un point plus ou moins
intéressant. Il n'existe pas d'ouvrage d'ensemble,
établissant les principes de la composition archi-
tecturale, en se basant sur une doctrine. Ce n'est
que dans les cours oraux que l'on peut puiser les
connaissances directrices sans lesquelles l'art de
l'architecte ne s'élève pas au-dessus de la routine.
M. Cloquet a voulu combler cette grande
lacune. La tâche était ardue : il l'a remplie avec
une hauteur de vues, une méthode, une érudition,
une rigueur de logique au-dessus de tout éloge.
La première partie du tome V, qui vient de
paraître, traite de l'esthétique de l'architecture.
Après un premier chapitre consacré à l'analyse
et à la classification des formes — établie avec
une grande clarté — l'auteur aborde, dans le se-
cond, l'examen des principes d'esthétique archi-
tecturale ; il trouve ici, dans les définitions phi-
losophiques du beau auxquelles il se rallie, la
justification des conceptions rationnelles en
architecture et la condamnation « de la structure
« feinte qui cache l'idée vraie au lieu de l'expri-
« mer, et qui supprime l'expression véritable ».
Cette doctrine dominera le livre tout entier.
L'appréciation des formes, qui fait l'objet du
troisième chapitre, fournit d'abord à M. Cloquet
l'occasion de faire justice des subtilités par les-
quelles des théoriciens ont attribué une expres-
sion propre aux lignes abstraites et de montrer
l'inanité des proportions absolues. Il détermine
ensuite la valeur de chaque classe de formes con-
crètes : formes de convenance, formes de struc-
ture réelle, de structure fictive, de structure trans-
posée, formes symboliques, formes décoratives.
Les paragraphes concernant les structures fic-
tives, les structures transposées et les formes
symboliques, sources de tant d'abus, sont d'un
intérêt extrême. Un paragraphe est aussi consacré
— car l'auteur suit son sujet littéralement jusqu'à
l'heure où il écrit — aux structures « d'organisme
imaginaire », ainsi qu'il les qualifie très exacte-
ment, c'est-à-dire à celles de cette nouvelle école,
représentée notamment par M. Guimard, où
domine la préoccupation de raccorder entre elles
les lignes et les surfaces de telle sorte qu'à l'objet
complexe, composé de parties rapportées, soit
substitué un être doué de l'intégrité propre aux
créatures végétales et vivantes.
Dans le quatrième chapitre, les appréciations
du précédent sont appliquées à des exemples
connus : au temple égyptien, au temple grec, à la
porte grecque, aux chapiteaux, aux nervures et
arcs de décharge, etc.
Le cinquième est rempli par l'exposé des théo-
ries actuelles de l'architecture et, parmi elles,
celle professée par M. L. A. Boileau, la théorie
« des formes construites », basée sur l'axiome
paradoxal que « l'appropriation de la forme à un
but exclusivement utile a d'autant moins de
rapport avec l'art qu'elle est plus parfaite ». Une
j large place est consacrée à discuter, avec une
i modération exemplaire, cette doctrine qui nous
i apparaît presque comme uneénormité, antithèse
de celle des formes rationnelles, à laquelle adhè-
rent plus ou moins complètement de lieaudot,
Vaudremer, Magne, Paul Sidille, Corroyer, etc.,
et que M. Cloquet adopte dans toute sa rigueur.
Le sixième et dernier chapitre de la première
Bibltograpl)te.
533
partie en est la conclusion. Quelle voie doit suivre
l'architecture de nos jours pour enfanter un style
convenant à notre temps ? Question cent fois
posée et jamais résolue. M. Cloquet pense que le
point de la tradition par lequel le présent doit être
rattaché au passé est le gothique de l'époque où,
tout à fait formé, il n'avait pas encore donné les
premiers signes de son déclin. Ici, nous eussions
préféré que l'auteur présentât autrement sa pen-
sée. Par les explications précises qu'il donne, il est
clair qu'il n'entend pas le moins du monde que
nous devions copier les foimes des gothiques ; il
veut dire qu'il faut se pénétrer des principes dont
ils s'inspiraient, mettre à profit leurs procédés
constructifs dont l'e.xcellence est reconnue. « Il
s'agit — ce sont ses propres termes — d'en ex-
traire les principes vivants et non des pastiches
de formes. » Ainsi compris, le renouement de la
tradition se réduit à la remise en honneur des
principes de raison et de sincérité oubh'és depuis
la Renaissance. Il eût été dès lors préférable de
ne faire intervenir ici les gothiques que comme
exemple et point de comparaison.
Du reste, un style nouveau, dit l'auteur, pour-
rait résulter d'éléments existants dans notre
passé immédiat, auxquels s'appliquerait l'art de
l'avenir. « L'art véritablement nouveau devra
« son réveil à quelque principe nouveau de con-
« struction greffé sur la technique traditionnelle...
«Nous marchons rapidement... L'artiste affolé
« suit avec peine la marche vertigineuse du con-
« structeur ; il a peine à s'assimiler les nouveaux
« procédés comme il a pu s'assimiler ceux des
« siècles passés... Seul, l'ingénieur-artiste sera
« préparé à donner du style et une forme artis-
« tique aux constructions nouvelles, à des fermes
« métalliques aussi bien qu'à des masses de pierre,
« à des édifices en ciment armé comme à des
« charpentes en bois. >
Nous avons analysé, dans ce qui précède, la
première partie de cet ouvrage considérable, celle
qui traite de l'esthétique dans l'architecture.
Cette analyse était forcément très succincte, et
pourtant les matières sur lesquelles elle portait
n'occupent que le quart de ce volume de 620
pages. Pour les deux autres parties (composition
et décoration), nous ne pouvons guère que don-
ner une idée extrêmement sommaire de la
richesse de leur contenu, en énumérant ici les
chapitres dont elles se composent.
La deuxième partie, traitant de la composi-
tion architectonique, se subdivise comme suit :
1° Ensembles d'édifices, villes (tracés des rues,
places publiques, groupes). — 2° Edifices consi-
dérés isolément (étude de rensemble,proportions,
symétrie, types généraux d'édifices, élaboration
d'un projet;. — 3° Étude des parties (façades,
combles, dispositions intérieures, tracés graphi-
ques). — 4° Conditions particulières (hygiène et
confort, optique, éclairage, éclairage artificiel,
acoustique, sécurité, emploi de la pierre, emploi
du métal, emploi du bois).
La troisième partie, concernant la composition
décorative, se compose des chapitres suivants :
1° Les sources du décor (ornements géoinétri-
ques, ornements imités). — 2° La fliore (emploi
de la flore dans le décor, historique de l'ornement
végétal, procédés décoratifs, applications moder-
nes). — 30 Les créatures vivantes (animaux,
figure humaine). — 4" Procédés de la décoration
(fonction et mode d'emploi, procédés rythmiques
de la décoration, échelle décorative. — • 5° Déco-
ration des divers membres de la construction
(décor du pavement, du mur, des appartements,
du plafond, de la voûte, frises et panneau.>:, décor
du fronton, du pignon, de la corniche, des sup-
ports verticaux, des baies, encorbellements et
amortissements, décor des combles, ferronnerie,
serrurerie).
En résumé, cet excellent traité est l'ouvrage
didactique d'architecture le plus complet jusqu'à
ce jour ; il est au courant jusqu'à l'heure même
oij l'auteur vient de l'écrire et puise ses exemples
dans tous les pays civilisés. Dominé de plus par
les idées les plus larges et une impartialité peu
commune, il a droit à la plus haute estime et
contribuera grandement à épurer l'enseignement
de l'architecture.
Dans chaque subdivision, M. Cloquet suit le
sujet jusqu'à l'heure actuelle, n'omettant aucun
des moyens les plus récents. Au caractère de
modernisme que l'ouvrage revêt par là s'ajoute
celui d'universalité, par les exemples (880 figures)
tirés non seulement de France, mais des contrées
flamandes, d'Allemagne, d'Angleterre, d'Italie et
même quelquefois des pays les plus lointains.
(Extrait de l'Art décoratif^
^^ "Gtxioy^iqxit^.mm
BULLKTIN DKS METIERS D'ART. — Le
numéro, fr. 1,00 Vromant, Bruxelles.
NOUS signalons avec plaisir un nouveau
périodique qu'on nous avait depuis très
longtemps promis et annoncé, et que nous ap-
pelions de nos vœux, l'organe des écoles Saint-
Luc. Le correspondant artistique bien connu du
<i Journal de Bruxelles », Jean Snob, n'est pas
loin de trouver qu'il comble... plusieurs lacunes,
et il a raison, car il sera le lien unissant les
534
3Rrliue tje V^vt cbrctien.
diverses écoles ; il continuera l'enseignement des
maîtres; il sera l'officiel de l'Institution ; il fera
connaître les œuvres marquantes des artistes
seaiiuhnii Lncam ; \\ divulguera leur enseigne-
ment. — Dès le premier numéro il se montre
pratique, sérieux, en ses articles substantiels et
clairs. Il promet d'être, comme dit Jean Snob,
« exactement le contraire de tant de papiers
vaguement artistiques où pontifient tant de
blancs-becs vaguement esthètes, sous prétexte de
tenir au-dessus de la foule le sacro-saint flam-
beau de l'Art pur. »
Le premier numéro contient, après l'article-
programme obligé, tout d'abord un hommage
au maître reconnu de l'Ecole, le baron Bethune :
article bien écrit, dans lequel M. Gevaert expose
à grands traits les origines de la renaissance de
l'art chrétien en Belgique et décrit une œuvre
peu connue de feu Bethune, mais peut-être la
plus parfaite dans son unité et son complet
développement, la petite église de Vyve-Capelle,
où tout est du grand artiste: architecture, mobi-
lier, peinture, vitraux, etc.
M. Bâillon traite ensuite de l'enseignement
professionnel ; M. A. Uankelman décrit l'élé-
gant petit hôlel communal île Réthy, par M.
Langerock ; puis commence une étude à la fois
archéologique et pratique de M. D. Pauwels :
t l'autel chrétien ». A signaler tout spécialement
le commencement d'une étude signée F. F. G.
sur les éléments de botanique appliqués aux arts
industriels, accompagnée d'une planche des plus
intéressantes. Cette étude promet de nous révéler
les particularités de l'enseignement de St-Luc
dans ses œuvres les plus vives et dans son carac-
tère le plus original, à la fois traditionnel et
novateur. Ajoutons que la jolie revue est très
coquettement éditée en format petit in-4", et
supérieurement illustrée.
Et maintenant rendons encore un instant la
parole à Jean Snob:
< Vraiment, dit-il, cette Revue est à recommander :
« Je la recommande d'autant plus volontiers que, depuis
un certain temps, un snobisme spécial pousse à mécon
naître les services de l'Kcole Saint-Luc. Je connais des
gaillards bêtes h faire pleurer, écrivant couramment «si
je serais :> et « je m'en rappelle» (je vous prie de croire
que c'est ainsi), qui attaquent le Saint Luquisme (sic) au
nom de la littérature ; des snobs de toute variété et des
estlictes de tout acabit, qui prennent pour parler de
r Picole un air de supériorité, se larguant d'un Art supé-
rieur dont ils auraient le monopole; de braves bourgeois
aussi, au nom du bon goût ou simplement du Ijon sens,
daubent volontiers sur le compte de l'École Saint- I.uc.
L'ensemble de tout ce monde fait un clan d'opposants
sérieux par le nonibre, sinon par le mérite. Les légendes
se créent, idiotes, si vous voulez, dans le principe, mais
qui finissent tout de même parfaire leur petit bonhomme
de chemin. Il est bon que de temps à autre on s'efforce de
remettre les choses au point. » L. C.
BULLETIN DE CORRESPONDANCE HEL-
LÉNIQUE.
M. Laïuent fait connaître luie statuette de
marbre blanc du Bon Pasteur, conservée au
musée de Tchinli-kiosk à Constantinople, trou-
vée près de Brousse. Elle appartient au type le
plus commun défini par de Rossi d'après
Strzyonski (') ; elle appartient à la série connue
par les exemplaires de Contantinople, d'Athè-
nes, de Sparte et de Rome, mais se trouve être
le seul exemplaire authentique qui nous soit
parvenu à peu près intact.
Le nouveau Bon Pasteur de Constantino[)le
confirme et la popularité du Bon Pasteiu', et
l'unité du type artistique dans tout l'empire
romain aux premiers siècles chrétiens. Toutefois
il ne permet plus de dire, que le modèle
unique de sculpture soit le type du Latran : il
en diffère notablement et reproduit tme attitude
connue jusqu'ici par la peinture seulement.
Il devait être placé dans tme niche. Les
chrétiens des premiers siècles n'ont jamais voulu
détacher des murs et isoler du reste de l'orne-
mentation de leurs maisons ou des églises les
figures symboliques, dans la crainte qu'on ne les
prît pour des idoles, si on leur avait accordé
trop d'importance.
L. C.
REVUE NÉO-SCOLASTIQUE, — mai 1901.
Nous avons dans le temps rendu compte du
très curieux ouvrage de M. Delescluze : « Les
secrets du coloris1> qui constituent tout au moins
une hypothèse ingénieuse, permettant de coor-
donner et d'expliquer les phénomènes de l'har-
monie des couleurs ; c'est le premier essai sérieux
d'une théorie de l'art du coloris.
Le livre que nous avons analysé, le mieux que
nous avons pu, n'est guère à la portée des pro-
fanes ; il exige une certaine préparation pour
être compiis.Ceux que la question intéresse liront
avec grand plaisir l'exposé plus élémentaire que
donne de la théorie de M. Delescluze, M. J.
Homans dans la savante revue thomiste de
Louvain.
L.C.
ZEITSGHRIFT FUR CHRISTLIGHE KUNST
— (XIV année l"' fasc.)
M. le chan. Schnùtgen fait connaître un cu-
rieux tableau à volets de l'ancienne école bour-
guignonne, représentant la Trinité entre les
I. Hoemiichc Quartahehrift . IV, p. ion
î5ibHogvapt)te.
535
quatre Évangélistes, conseivé à la galerie We-
ber, à Hambourg.
M. R. Herzig, décrit le grand lustre-couronne
de la cathédrale de Hiïdesheini, remontant,
comme ceux du dôme d'Aix-!a Chapelle et de
l'abbaye de Komburg, à la première période du
moyen âge.
Le P. J. Braun s'occupe de l'étole brodée de
l'archevêque de Trêves, Théodoric II (mort en
1242), trouvée il y a trois ans dans son tombeau,
et reproïkiit une étole du même genre, dite étole
de saint Bernulf (mort en 1054), conservée aux
archives de l'église janséniste d'Utrecht.
(2e fasc.) — M. le chanoine Schniitgen com-
pare deux Mariages mystiques de sainte Cathe-
rine par le Cortège. Il publie en outre une belle
coupe en cristal de roche ornée d'émaux, datant
du XlV'-siècle.conservéeau musée Poldi-Pezzoli,
à Milan.
M. H. Semper étudie une prédelle en bois
ornée de figures en os sculptées en bas-reliefs,
ouvrage vénitien de style romano-byzantin,
expo!-éau South-Kensington de Londres, auquel
sans dente servirent de modèle des sculptures
de Saint-Marc de Venise, celles du Vatican, et
des miniatures d'un manuscrit de la Bibliothèque
nationale de Paris (début du XV<= siècle).
M. J.-M.-B. Clauss décrit trois reliquaires de
style roman conservés à l'église de Reingen
(Alsace), et donne des reproductions de ces trois
NOUS venons de recevoir les deux pre-
mières livraisons de l'annuaire de la Gilde
de St-Luc et St-Joseph à Gand, pour la période
1896 à 1901.
Dans la première livraison, M. Van Houcke
passe en revue les monuments de l'exposition de
Paris en 1900, qu'il divise en deux catégories, les
édifices élevés pour le temps de l'exposition et
ceux destinés à rester à demeure.
En peu de pages, il nous fait voir les construc-
tions les plus remarquables de la grande foire
parisienne, et, s'il trouve par ci par là des produc-
tions architecturales à louer, il constate cepen-
dant que presque partout on a visé à éblouir les
profanes, les masses qui prennent généralement
le clinquant pour des chefs-d'œuvre.
Dans un second article, le même auteiu- nous
donne la monographie de l'Hôtel-de-Ville de
Binche restauré avec grand talent, comme nous
l'avons déjà dit, par M. l'architecte Langerock.
La seconde livraison renferme une phototypie
de l'Hôtel des Postes de Thuin, ancien refuge de
l'abbaye de Lobbes; le bâtiment, après bien des
vicissitudes, fut rendu à sa destination actuelle
par M. le ministre Van den Peereboom, après
avoir été remis en état par M. Van Houcke.
Nous avons jadis reproduit une vue de ce joli
bâtiment si bien restauré par le distingué ingé-
nieur architecte des Postes ('). Dans un autre ar-
ticle, M. H. de Tracy rend compte de l'excursion
de la Gilde à l'île de Walcheren, à Goes, Middel-
bourg et Vere : le texte est abondamment il-
lustré par des esquisses prises sur place par
MM. St. Mortier, Fr. Coppejans et J. Van den
Bogaert.
En vue de perpétuer le souvenir des services
rendus par M. le baron Surmont de Volsberghe,
en sa qualité de Bourgmestre, le Conseil com-
munal de la ville d'Ypres ayant décidé de lui
offrir un objet d'art, M. le baron Surmont, depuis
ministre de l'Industrie et du Travail, exprima le
désir de voir affecter le montant des souscriptions
à la construction d'une maison ouvrière : c'est
cette maison ouvrière, dont M. Coomans, ingé-
nieur-architecte, donne les plans et la description.
Le coût de cette élégante construction n'a pas
dépassé 4S00 frs. Elle a, depuis, échu au sort à
un ouvrier.
Lors de l'assemblée générale tenue le 28 avril
dernier, M. Coppejans a entretenu les membres
de la Gilde de la restauration de V Achter-Sikkel
à Gand, bâtiment destiné à être incorporé dans
le conservatoire de la ville. La construction prend
son nom de celui de son premier propriétaire
Filip Van der Zickele (1401) ; elle fit partie à
l'origine du « Huis ter Sikkelen », plus tard
« Stntc Sikkel ». C'est à tort qu'on l'a appelée
Refuge de l'abbaye de St-Bavon.
M. Coppejans établit que primitivement les
bâtiments que l'on vient de dégager donnaient
sur une cour intérieure et n'étaient pas aperçus
complètement de la voie publique ; il est d'avis
qu'il conviendrait de remettre les tourelles et la
charmante petite abside dans leur cadre originel.
La consciencieuse étude de M. C. est émaillée
de plusieurs vues photographiques et de deux
croquis inédits dont le fac-similé d'une esquisse
de P. F. de Noter (1779-1842).
Ce résumé des travaux de la Gilde de St-Luc
et St-Joseph nous montre cette société juvénile
en pleine activité ; les premières livraisons de
l'annuaire promettent pour l'avenir plus d'un
travail intéressant et instructif.
E. C.
1. R,,vue de V Art chrélien, année i8y2, p. 370.
KBVUE OS L ART CHRETIEN.
I9OI. — 6"^ LIVRAISON.
536
jRcbur ïie Tî^vt cbrcttrn.
'&iÊj&i
Xn^tx bilUiograpljique.
?i
:^rcl)cologie et Beaiu* :^rrô^'^
^— =^^ jTvancc. =
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Glaire (L'abbé). — Les saints évangiles, illus-
trations d'après les maîtres des XIV=, XV' et XVP
siècles. — In-4°, Paris, Goupil.
1. I es ouvrages marqués d'un astérisque (*) ont été. sont ou
seront l'objet d'un article l>il)liographique dans la lievue.
2. I^ prix de l'ouvrage est fi.xé à cent francs, payable par parties,
après réception . de chaque volume.
Le vol. III, Broderies, Tissus, Mobilier, etc. est en vente.
* Gosset (A.). — La basilique de Saint-Remi a •
Reims. — In-4° de 90 pp. et 40 pi. — Paris, Librairies
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ChrOlUQUC. SOMMAIRE : ÉGLISKS NOUVELLES : Rome, Luxembourg. ^ MO- ^^
NUMENTS ANCIENS : Dijon, Toulouse, Langres, Paris, Biaise, Looz, Louvain. - LE
MUSÉES. — PEINTURES MURALES : h Beaune,
CHATEAU DE LAROCHEPOT.
FOUILLES DE SAINT-DENIS. -- NOUVELLES. - Mgr
NÉCROLOGIE : Emile Lambin.
h. Anvers, ;\ Zepperen.
BARBIER DE MONTAULT.
Ï^
¥
i^-^^^^^^^^^^^^i^WWWWWWWWWWWWWWWWWH?
églises nouvelles.
:ANS la séance d'archéologie tenue au
Vatican au mois d'août, dont notre
correspondant romain, Monseigneur
Battandier, a donné à nos lecteurs un
très intéressant compte-rendu, le Saint-Pere a
exprimé le désir d'avoir à Rome une grande
église du rite oriental, aux cinq coupoles tradi-
tionnelles et où les belles cérémonies de ce rite
pourraient se déployer dans toute leur splendeur.
Elle montrerait aux orientaux dissidents com-
bien l'Église romaine tient à ces rites, et dé-
truirait par-là même un grand obstacle à cette
réunion des Églises, qui continue à être un de
ses rêves les plus ardents.
ON projette de construire à Luxembourg une
nouvelle cathédrale. Cette construction
répond à un besoin très urgent. Le pèlerinage de
Notre-Dame de Luxembourg prend d'année en
année une plus grande extension. Dans la se-
maine du quatrième au cinquième dimanche
après Pâques, on compte annuellement plus de
60,000 pèlerins qui viennent en procession, sans
compter les autres. La cathédrale actuelle, qui
est en même temps l'église du pèlerinage, est
trop étroite pour ces journées de grand concours.
ffiomimcnts anciens.
'OURAGAN du 30 juin a été rude aux
églises de Dijon, surtout à leurs vitraux,
dont plusieurs ont été criblés comme
une écumoire. Il a heureusement
épargné ceux que M. E. Didron a récemment
posés à St-]5énigne. Mais à Notre-Dame les
verrières en style du XI II^ siècle exécutées
depuis trente ans par le même artiste ont été
fort éprouvées ; toutefois la grande rose du Midi
reste intacte. Dans la chapelle des œuvres, un
vitrail du XV^ siècle provenant de la Sainte-
Chapelle a été endommagé.
-îO< — ï©4-
DES vitraux, conçus et exécutés sous la
direction de M. Didron, viennent d'orner
quelques-unes des fenêtres des transepts de la
basilique Saint-Sernin de Toulouse. Ce sont des
grisailles avec scènes dans des médaillons et
quelques notes de coloration discrète. De pa-
reilles verrières ont l'avantage de laisser pénétrer
plus de lumière que celles à colorations plus
intensives. Elles sont aussi plus économiques et
ont leurs avantages surtout dans les églises
romanes méridionales, où les fenêtres sont
petites,
->©^— JOi—
LE crédit des monuments historiques va être
augmenté de 300,000 fr. ; il sera, l'année
prochaine, porté de 1,127,000 fr. à 1,427,000 fr.
Ce crédit doit pourvoir aux besoins de 2,570
édifices classés. Or, non seulement les res-
sources actuelles ne permettent pas de restau-
rer tous les édifices en mauvais état de conser-
vation, mais elles ne sont pas suffisantes pour
sauver de la ruine tous ceux qui en sont menacés.
On pourra, à l'aide de l'augmentation prévue,
faire exécuter les travaux de consolidation d'une
extrême urgence que l'on ajourne depuis plu-
sieurs mois. Mais sera-t-il suffisant ?
— }©<— »->©i—
LE déclassement des fortifications de Langres
va permettre de rendre à l'admiration des
savants et des archéologues la magnifique porte
romaine que Constance Chlore, dit-on, fit élever,
en 303, en souvenir de sa victoire remportée la
même année sur les Alamans. Cette porte, véri-
table joyau de l'art gallo-romain, et dont le style
rappelle celui des portes romaines de Reims et
d'Autun, est encore aujourd'hui bouchée rt en-
castrée dans les remparts de Langres, qui fut,
on le sait, la capitale des antiques Liiij^viis.
Située à l'Ouest de la ville, elle se compose de
deux arcades (celle de Reims en a trois) et pré-
sente, comme ornement, cinq pilastres corin-
thiens. Le Nord de la France est trop pauvre en
monuments de ce genre, pour qu'on ne remette
l)as au plus tôt en lumière un tel souvenir artis-
tique de la Gaule romaine (').
LA restauration de la délicieuse fontaine de
l'ancien jardin de l'archevêché de Paris,
dans l'axe de Notre-Dame, est presque terminée.
On a remplacé toute la partie moyenne de cette
fontaine sans déplacer la partie supérieure, ni la
I. Joitnial drs Arts.
grande statue de la Vierge placée entre les colon-
nades. Ces colonnades légères, usées par le
temps, étaient brisées en plusieurs parties. On
les a remplacées par des colonnes d'un seul jet,
qui offriront plus de résistance que les ancienues
colonnes faites de pièces cimentées. Il est pro-
bable que les parties artistiques des colonnes
enlevées, et particulièrement les chapiteaux,
seront transportées derrière Notre-Dame, dans
le jardin où sont déjà de nombreuses pièces pro-
venant de la restauration de la basilique.
EN procédant à l'installation de l'Office des
brevets et marques de fabrique, récemment
transporté dans une des salles du Conservatoire
des Arts et Métiers, les ouvriers ont mis à jour,
en arrière d'une maison voisine de cet établisse-
ment, une seconde tour de l'ancienne abbaye de
Saint-Martin des Champs, dont on ne soupçon-
nait plus l'existence. Cette tour, que l'on déga-
gera sans doute d'une façon quelconque, admi-
rablement conservée, possède une frise des plus
finement sculptées.
— f©^-<-^©f-
ON va mettre la main à la restauration de
l'Môtel-Dieu de Beaune, cet ensemble ex-
quis, unique en France. Ce travail est confié à
M. L. Sauvageot et une somme de 60,000 fr.
y est affectée. Le Journal des Arts du 7 sep-
tembre contient sur le monument et sur la
question de principe que soulèvent les restaura-
tions de l'espèce un article des plus intéressants
signé « André Arnoult » qui fait suite à un autre
article non moins remarquable, donné dans le
Journal, par M. Auge de Lassus. Nous sommes
heureux de nous rencontrer entièrement avec
ces deux archéologues éminents dans notre étude
sur la question qu'on trouvera plus haut.
ON a entamé la restauration de l'hôtel
de ville de Looz (Limbourg).
Le badigeon qui couvrait outrageusement
toutes les parties de l'édifice est aujourd'hui en-
levé, de sorte que les formes anciennes appa-
raissent dans leur élégante beauté.
La Commission des Monuments a examiné sur
place les travaux à faire. Elle a décidé de déga-
ger complètement l'hôtel de ville et de l'entou-
rer d'un square. Ce travail nécessitera d'assez
grandes dépenses, mais la ville, escomptant d'ail-
leurs le concours du gouvernement qui certes
ne lui fera pas défaut, est décidée à ne rien négli-
ger pour rendre à son hôtel communal sa splen-
deur primitive.
ON continue la restauration de la belle col-
légiale de Louvain, si bien conduite par
M. Langerock, et si injustement critiquée par
M. F.- G... Une décision importante vient d'être
prise par les autorités supérieures, c'est de pour-
suivre la démolition des maisons adossées à
l'édifice et qui en déparent les formes. Les som-
mes nécessaires à l'achat de ces immeubles se-
ront imputées sur les fonds de la restauration.
Ee cbâteau oc iraiocl)cpot.
Onsieur le capitaine Sadi-Carnot, fils
du regretté président de la Républi-
que, a acheté, il y a quelques années,
les tours éventrées, les courtines ébré-
chées et les amoncellements de décombres qui
furent autrefois le château de Larochepot, canton
de Nola)^ arrondissement de l^eaune, Côte-d'Or.
Élevée au commencement du XIII^ siècle, la
forteresse fut acquise en 1403 par Régnier Pot,
l'aïeul de ce Philippe Pot dont le tombeau est au
Louvre, et presqu'entièrement reconstruite sur
les données de l'art militaire du temps. Après les
Pot, elle passa par héritage aux Montmorency et
en 1789 appartenait à une famille de Beaune, les
I^lancheton.
M. le capitaine Sadi-Carnot a confié la restau-
ration partielle de ces pierres croulantes à
M. Charles Suisse, architecte en chef des monu-
ments historiques à Dijon ; son intention n'est
pas de faire de Larochepot un Pierrefonds
bourguignon, mais d'arrêter les progrès de la
destruction, de déblayer les fossés remplis de
décombres, enfin de ménager dans une partie de
l'ancienne habitation seigneuriale une retraite
d'un caractère artistique et surtout personnel.
Peut-être à l'heure qu'il est, ni le propriétaire
ni l'architecte ne savent-ils où s'arrêterala restau-
ration qui se poursuit. Mais quoi qu'il en arrive,
l'œuvrecommencée et dans quelquesparties ache-
vée, fait une fois de plus grand honneur à la
science, à l'ingéniosité et au goût de M. Charles
Suisse (i).
L'église de Larochepot, où, sous des dalles aux
inscriptions effacées, reposent Régnier et Jacques
Pot, l'aïeul et le père de Philippe, est un édifice
roman à trois nefs et à trois absidioles, superfi-
ciellement gâtée par une restauration maladroite
sur laquelle il serait bon de revenir. On y voit de
1. Celui-ci est p.irfaitement secondé, d'ailleurs, pour I.1 charpente,
par M. BiUiette, de Dijon, qui a exécuté sur ses plans la nouvelle
flèche de la cathédrale ?auit-Bénigne ; pour la maçonnerie, par
MM. Robin et Dolfini, qui ont travaillé sous sa direction à la res-
tauration du palais ducal de Dijon ; enfin par un très habile scul-
pteur dijonnais, M. Xavier Schanosky. A. .A.
540
3Rr\)ur tir r^rt cbvctten.
très curieux chapiteaux du XII<" siècle, diîjnes
d'être comparés avec ceux de la cathédrale Saint-
Lazare d'Autun, dont Notre-Dame de Laroche-
pot est la fille monumentale, et un admirable
tableau de l'école italienne, provenant, dit-on,
de l'ancienne chapelle du château. C'est une
sainte Catherine en pied, au tiers de nature en-
viron, d'une couleur éclatante et pourtant douce,
qui fait penser à l'art vénitien immédiatement
antérieur au Titien (').
L'église de Larochepot renferme encore deux
tapisseries au petit point du XVII'= siècle, L'As-
soniption et Saint Georges, bien charmantes dans
leur harmonie fanée ; ce sont sans doute d'an-
ciennes bannières. Enfin, il s'y rencontre un
vitrail, scène d'hôpital, qui, comme mauvais,
comme grotesque, comme ridicule, dépasse tout
ce que j'ai jamais vu, et Dieu sait pourtant si les
vitriers contemporains ont commis des horreurs
en ce genre ! Mais cela est vraiment et de beau-
coup au-dessous de tout. L'auteur de cette chose
sans nom l'a signée en toutes lettres et y a mis
la date, 1877 ; de plus le donateur y a fait pein-
dre ses armes, que je n'ai pas cherché à déciiif-
frer. Et quant au nom du vitrier, j'aurai la cha-
rité de ne pas l'écrire ici. Je m'empresse d'ajou-
ter que cette image, rendue plus grotesque encore
par la translucidité qui avive l'éclat criard des
couleurs, n'a pas été posée sous M. le curé actuel
de Larochepot, qu'on me dit être un homme de
goût. Et dire qu'une fois ces monstruosités mises
en place, il n'y a plus moyen d'y toucher (2) !
André Arnoult.
ffî usées.
E Louvre vient d'entrer en possession
de la fameuse collection d'objets d'or-
fèvrerie religieuse du Moyen Age et de
la Renaissance que le baron A. de
Rothschild considérait comme ce qu'il avait « de
plus précieux ». Cette collection, unique au
monde, présentera des merveilles aux visiteurs.
I. Toutefois le type de la sainte ne semble pas vénitien et, dans
ces cheveux qui tombent sur les épaules en opulentes ondes cres-
pelées, on retrouve quelque chose de cette beauté lombarde cliore à
Léonard et à Luigi. Mais la couleur vive et franche ne rappelle en
rien les denii-teiutes mystérieuses où s'enveloppent les Vierges et
les Hérodiades de l'école. Qu'importe après tout ? L'œuvre est at-
trayante et belle, c'est rcsscniiei, et je suis trop édifié sur l'infailli-
bilité des classes dirigeantes en matière artistique pour m'attachcr à
tel ou tel nom.
Ce très beau panneau serait intact, h fleur de coin, si, probable-
ment lorsque le château fut envahi à la Révolution, im imbécile ne
l'avait raye en croix de Saint-.^ndré par des coups de pointe qui font
l'effet de minces fils blancs appliqués sur la peinture. On m'affirme
que le dommage souffert est facilement réparable et sans effleurer
l'épiderme merveilleusement paliné de l'ensemble. S'il en est ainsi,
va pour une retouche; sinon, non. A. A.
a. Journal iifs Ar/s.
La plupart sont des XV« et XVI' siècles, une
partie du XlV'"et queUjues-uns même du XIII''.
La collection se compose de 14 reliquaires, 10
médaillons et médailles, 9 baisers de paix, 9 pen-
dentifs, 6 statuettes ou figurines, dont 2 réunies
sous un seul numéro, 3 croix, 3 dizaines de cha-
pelets ou rosaires, 4 plaques, 3 chandeliers, doiit
2 sous un seul numéro, 2 triptyques, 2 ostensoirs,
2 boîtes, I lot de chaînes d'amulettes, i lot de
fermoirs de missel, 2 bagues d'évêques, 2 hauts-
reliefs, I paire de miniatures sur vélin par Giulio
Clovio (sujets tirés de l'histoire sainte) dans des
cadres de bois sculpté, 1 ciboire, i crosse pasto-
rale, I navette à encens, i cuiller à encens, i mors
de chape, i collier, i bénitier, i autel portatif,
I goupillon, I couteau, i retable, i bas-relief,
I noix de rosaire, i bâton de baldaquin, i statue
de sainte Marguerite.
Le moindre de ces objets est un chef-d'œuvre
d'art séculaire ; tout y est or, argent, ivoire, bois
sculpté, émaux, cristal églomisé ou cristal de
roche finement taillé et somptueusement serti.
Pour citer seulement quelques-unes des pièces
à sujet les plus importantes, nous signalerons :
Un reliquaire-statuette en argent repoussé. Flandre,
XV siècle : La llc>-ge et V Enfant Jrsin:.
Un autre reliquaire en argent niellé, de forme ronde.
Italie, X\'I'= siècle : Madeleine lavant les pieds du Christ.
Un baiser de paix de l'école de Cologne, XV siècle :
La Vierge assise sur un trône.
Un autre, en argent doré, cristal églomisé et émail.
Italie, XV' siècle : La Vierge et les douze apôtres e.\. Le
Portement de Croi.v.
Trois autres, du XVI= siècle, italiens : Saint Léonard,
daté I 5 \o,Je'sus devant Pilate, L' Adoration du Christ.
Un pendentif, médaillon ovale avec miniature, de
Giulio Clovio.
Un aure pendentif, médaillon nvale en cristal déroche.
France, XVI° siècle : Le Christ et les instruments de la
Passion.
Un autre encore, tout en or ciselé. Flandre, XVI° siè-
cle : Dieu le Fils et le .Saint-Esprit.
Un pendentif, plaquette de bronze. Italie, XV"-' siècle :
La Mise au Tombeau.
Un autel portatif avec deux colonnes torses et un ange
en or éniaillé. Italie, XVI'' siècle.
Des médailles de formes diverses, en cristal églomisé,
ayant pour sujets : I^e Christ, Le Sacrifice d^ Abraham, Le
Martyre de saint Laurent, L'Assomption, L'Ange a/iiion-
ciateur, L.a Vie?ge, Sainte Madeleine et sainte Monique,
Sainte Catherine, Sainte Marie, Saint Joseph et L.e Saint-
Esprit.
Une statuette en racine de buis. Flandre, -W" siècle :
Sainte Catherine.
Un retable triptyque en buis, allemand, attribué à
Diirer : Le Calvaire, Le Portement de Croix, La Résur-
rection.
Un haut-relief en marbre, de Desiderio : La Vierge et
P F.nfant Jésus.
Une statue de sainte Marguerite, en pierre blanche.
France, XVI" siècle, avec son socle en bois sculpté de la
même époque.
Cl)rontque,
54 ï
Un haut-relief en bronze italien de la fin du XVI"= siè-
cle : La Conversion de saint Paul.
Le musée de Cluny a reçu, d'autre part, qua-
torze autres pièces qui complétaient la collection
A. de Rothschild et dont voici la liste :
88. Groupe en \i\\\% : Jésus et ses disciples. Fiandie,
XVII» siècle.
89. Petit retable en buis, XVI= siècle.
90. Haut-relief en bois sculpté rehaussé de dorures
représentant un saint allemand. Fin du XV" siècle.
91. Canne de cardinal en bois avec incrustations d'ivoi-
re gravé. Italie, XVII" siècle.
92. Cadre en bois et pâte orné de colonnes en lapis et
contenant deux hauts reliefs en albâtre : La Résurrec/ion
ei/ésus déliv>a7it les âmes des Limbes.
93. Armoire en bois sculpté, La Vierge, surmontée
d'une couronne royale.
94- Deux moules à pâtisserie en ardoise sculptée en
creu.\'. Allemagne, XV" siècle.
95. Serrure en fer forgé ; le trou de la clef recouvert
par une statuette du Christ. France, XV" siècle.
96. Médaille en plomb : L'Adoration des bergers. Au
revers : L'Adoration des mages. Avec chaîne de suspen-
sion. Flamande.
97. Plats en étain : La Rcsurreclion. Allemagne,
XV l" siècle.
98. Tableau diptyque, peint par Wohlgemuth : Le Con-
cert céleste, dans un cadre gothique.
99. Tableau peint par van Orley : L'Adoration des
mages.
100. Miniature sur vélin. Composition sur fond or
divisée en nombreux compartiments avec figures de la
Vierge et des saints.
loi. Miniature sur vélin. Feuilles de missel : Saint
Jacques de Cotnpostelle et V Amionciation de la Vierge (').
UNE bonne fortune est échue au directeur
du musée de Cluny : le fils du sculpteur
Geoffroy Dechaume, qui restaura autrefois la
Sainte-Chapelle et Notre-Dame, est venu lui
apporter trois têtes, oubliée?, dans ce temps, dans
l'atelier de l'artiste, et qui manquaient à trois,
statues d'apôtres provenant de la Sainte-Cha-
pelle, déposées au musée de Cluny dans la salle
des sculptures.
A SAINT-DENIS, une Commission se pré-
occupe d'installer- un musée dans les lo-
caux qui lui ont été octroyés par la inunicipalité
dans l'ancien hôpital de la rue de la boulangerie.
Le public sera prochainement admis à visiter les
différentes collections exposées dans la chapelle
désaffectée et dans plusieurs salles. Dans la
section mérovingienne sont déjà rangés les sar-
cophages reconstitués et provenant des récentes
fouilles pratiquées sur l'einplacement de l'an-
cienne église dite des Trois-Patrons. Dans
j. D après la Chronique des Arts,
d'autres sections sont placées différentes anti-
quités retrouvées dans la ville, ainsi qu'une col-
" minéraux et de fossiles des plus
lection de
curieuses.
Bcinturcs murales.
ON vient de remettre au jour àl'église Notre-
Dame de Beaune, dans une des chapelles
latérales de gauche, une peinture murale de
dimensions considérables, qui représente La
Rcsurreclion de Lazare. Cette œiivre, d'un très
grand intérêt, et retrouvée à peu près entière, n'est
qu'un fragment de la décoration qui probable-
ment recouvrait autrefois la chapelle tout entière.
A droite et à gauche de la fenêtre, on a mis au
jour également deux figures : une sainte JSIade-
/^/«^ et une satnte Marthe. Les compartiments
de la voûte, encore cachés sous le badigeon, sont
séparés par des ornements peints.
Ces peintures sontduesàla libéralité du fils du
chancelier Nicolas RoUin qui fonda l'hospice de
Beaune, Jean Rollin, évêque d'Autunet cardinal.
Elles remontent, par conséquent, à la seconde
moitié du XV= siècle et furent sans doute exé-
cutées par un artiste flamand.
ON a découvert récemment, dans une maison
appartenant autrefois à une ancienne fa-
mille patricienne d'Anvers et que l'on est en train
d'approprier pour y établir un dispensaire des-
servi par les Sœurs de St Vincent de Paul, une
série de peintures murales d'un haut intérêt, mais
malheureusement fort endommagées.
Trois figures de femtneà peu près de grandeur
naturelle, sous un couronnement d'architecture
du déclin de la période ogivale, ont apparu au
jour. Elles sont revêtues du costume des patricien-
nes de la fin du XV«siècle,ou du commencement
du XVI'= et dénotent un peintre très distingué.
Elles représentent très probablernent des Sibylles
qu'il n'a pas encore été possible d'identifier, le
crépi qui couvre la partie inférieure des figures
cachant sans doute les attributs qui les caracté-
risent.
La supposition de voir dans ces figures la re-
présentation de Sibylles est rendue presqu'une
certitude, par une peinture qui se trouve sur la
même paroi de l'autre côté de la porte donnant
accès à cette salle. On y voit la Sibylle de Tivoli,
montrant dans le Ciel la Vierge et l'enfant Jésus
à l'empereur Auguste, pour l'empêcher de se
faire adorer coinme Dieu, comme c'était l'inten-
tion de l'empereur.
542
Wit\)m Dr V^vt fbictira.
Il est très probable que tout le décor pictural
de cette salle avait pour thème le cycle des Si-
bylles qui, comme on sait.était singulièrement en
faveur dans l'art au déclin du moyen âge. 11 serait
vivement à désirer que le travail auquel on va
se livrer pour remettre au jour ces précieuses
peintures sur les autres murs de la salle aboutît
à en faire connaître l'ensemble. Il s'agit, en effet,
comme il vient d'être dit, de l'œuvre d'un maître
qui même dans unétatincomplet et fragmentaire
intéresse l'histoiic de l'art flamand dans une de
SCS applications encore peu connues.
EN restaurant l'église paroissiale de Zeppe-
ren(Be!gique)ona découvert des peintures
remarquables. Elles ont été minutieusement dé-
crites dans un rapport envoyé à la Commission
royale des Monuments, par le R. abbé Daniels,
de Vogelsanck.
C'est dans le transept sud qu'on les a trouvées.
Qu'elles doivent être restaurées, c'est une ques-
tion à examiner. Toutes les autorités ont été
d'accord sur ce point. Mais voici, dit le correspon-
dant du X/X'^ Sièile, le fait étrange qui s'est pro-
duit. L'église est l'objet d'une restauration
presque générale. Que fallait-il faire dans la nef?
}5adigeonner ? Enlever l'enduit des murs et des
voûtes et rendre les matériaux apparents ? Ou
bien l'orner de peintures comme le transept .''
Ici les divergences se manifestèrent. La Com-
mission des monuments fut consultée. Quelques-
uns de ses membres furent d'opinion qu'il fallait
rendre les matériaux apparents!
L'église se serait ainsi présentée revêtue d'un
habit d'arlequin: le transept orné de peintures, la
nef en briques d'un rouge vif!
Alors une proposition transactionnelle se fit
jour : la nef n'aurait été que partiellement en
matériaux apparents. Au lieu de deux systèmes
on en aurait eu trois, une partie de la nef devant
conserver son enduit.
Des délégués de la Commission des monu-
ments revinrent à Zepperen. Leur conclusion
fut tout autre que lors de la première visite.
Selon cu.x, il fallait prévoir pour la nef des pein-
tures de même nature que celles du transept, et
il fallait respecter l'intention de l'architecte
primitif.
Tous les archéologues trouvent que, contraire-
ment au proverbe, c'est sa seconde idée qui est
la bonne, et que la Commission, en n'adoptant
[)as l'avis de ses premiers délégués, a évité une
faute grave.
-mi- >©<—
Fouilles à Saint^Ocnis.
ES fouilles pratiquées à Saint-Denis,
sur le lieu de sépulture de la Lutèce
des Romains, ont donné des résultats
des plus intéressants. Saint-Denis était
sur la voie des tombeaux du bourg des Parisiens
et de plus cà proximité des carrières. Les Francs
adoptèrent la nécropole des Romains, et Dago-
bert construisit en cet endroit consacré par la
sépulture de saint Denis un tombeau et une
abbaye pour le garder. Celle-ci fut remplacée par
la basilique élevée par saint Louis. Alors les
vestiges romains ont été en grande partie ex-
traits du sol; mais des restes mérovingiens plus
nombreux y sont restés enfouis jusqu'à nos
jours. Voici l'histoire des fouilles.
Un terrain situé entre l'hôtel de ville et la
basilique se trouva mis en vente. Il s'y élevait
jadis de vieilles masures construites avec les
restes d'une ancienne église que l'on sait être
celle des Trois Patrons, construite au XI 11^
siècle et formée par la réunion de trois petites
églises : Saint-Michel dii-Gré, Saint- Dart/iclony
et Sainte- Geneviève.
Leur disparition ne date probablement que de
la Révolution ; lors de la mise en vente de ce
terrain, M. Rémy, maire de St-Denis, proposa
de surveiller les démolitions et, diverses pierres
sculptées et peintes ayant été trouvées, on conti-
nua les fouilles. Parmi les pierres découvertes,
on remarque une clef de voûte en forme de mar-
guerite ; une pierre tombale, datée de 1576, d'un
prêtre enterré dans l'église, des sculptures sur
bois mutilées, plusieurs chapiteaux : l'un historié
de peisonnages romains ; un autre, historié aussi,
mais de trois saints seulement, ce qui a pu faire
supposer que c'était le chapiteau des «Trois
Patrons ». Un autre offre des particularités by-
zantines, tandis qu'il est difficile d'établir le stj'le
d'un dernier, à cause de sa vague ressemblance
avec ceux du temple d'Edfou en Egypte. Il a la
feuille de plantin encadrée aux angles d'une
autre grande feuille qui rappelle celle du bana-
nier. Ou découvrit ensuite quantité de poteries
gallo-romaines et mérovingiennes.
Puis furent amenés au jour plusieurs sarcopha-
ges de la même époque, tous ornés d'un dessin
particulier : c'est une sorte de rosace formée par
l'enroulement de deux lignes parallèles autour
d'une sorte d'étoile. Sur la plaque de fermeture
de l'un d'entre eux, se lisent l'alpiiaet l'oméga et,
dans un autre, existe un oreiller taillé à même la
pierre et sur lequel s'appuyait la tète de l'ense-
veli. Un sarcophage intact fut ouvert : il contenait
le squelette aisément reconnaissable d'une jeune
CJ)ronique.
543
femme, mais qui tomba en poussière au premier
toucher. Un fragment d'antéfixe du Illi^siècle (?),
portant la figure du Christ surmontée d'une croix,
a été trouvé, ainsi qu'une fiole de verre métallisé
aux irisations multicolores. A remarquer des
boucles de ceinturon en bronze et une applique
fort belle en argent d'un dessin ornemental très
décoratif en sa simplicité, des épées mérovin-
giennes, d'antiques fers de framées, des cuillères
de la même époque.
Il faut surtout noter trois découvertes: d'abord,
une monnaie de bronze, datant de l'an 250: elle
est de Magnence, lieutenant de Constance qui,
pour remercier celui-ci de l'avoir élevé au capi-
tainat, le fit assassiner ; ensuite une aiguillette
en or, longue de 12 centimètres à peu près, et
ciselée avec un art tel qu'on la croirait en
dentelle ; enfin, un magnifique médaillon d'or
cloisonné de près de 10 centimètres. De forme
ovale, il est orné de rubis et d'agathes. Il est
question de l'acquisition, opérée par la Ville, du
terrain des fouilles sur lequel on construirait un
musée destiné à contenir le produit de ces der-
nières, en se servant de l'église restée encore
debout.
I^outicUcs.
E maître de Flcmalle. — Nous avons fait
connaître (■) l'hypothèse émise par le
professeur Hulin, que le mystérieux
anonyme connu sous le nomde « maître
de Flemalle >, ne serait autre que le peintre
Tournaisien Jacques Daret, dont nous avons
donné une esquisse biographique. Cette thèse si
intéressante confirme les nombreuses études qui
ont mis en relief l'existence de l'École de Tour-
nai, et spécialement celles si intéressantes pu-
bliées récemment par M. Maeterlinck, conser-
vateur au musée de peintures de Gand ; aussi y
revient-il dans la Gazette des Beaux Arts &X. ÔAns
la Chronique des Arts en un article que nous
signalons spécialement à nos lecteurs.
-tO^ ^0^-
ON nous écrit que des vitraux viennent d'être
posés dans l'église gothique de la jolie
commune de Libin (Luxembourg). M. l'abbé
Paquot, curé de Libin, qui est doublé d'un
artiste, a voulu, en la dotant de ce vitrail,
laisser un souvenir impérissable de son passage
quasi demi-séculaire dans cette paroisse. On
vient d'en terminer le placement admirable
de composition et de tonalités ; rien de criard,
I. Revue de l'Art chiéiien, année 1901, p. 426.
rien d'emporté, rien de mondain. Les sujets sont
artistiquement dessinés et rehaussés de couleurs
bien harmonisées. Cette série de vitraux témoi-
gne de la science et du bon goût des artistes
qui les ont exécutés.
L'ameublement est dans le style de l'église.
ffîgr Barbier De ffîonraiilr.
jOUS trouvons dans la Revue de l' Anjou
(mai et juin 1901) une notice biogra-
phique de Mgr Barbier de Montault,
J due à la plume de M. Joseph Denais.
Quoique cette notice s'attache à faire ressortir
particulièrement ce que notre regretté collabo-
rateur a fait dans le domaine de l'histoire et
de l'archéologie pour la province oij il est né,
nous en reproduisons les passages les plus impor-
tants qui, sans aucun doute, intéresseront nos
lecteurs.
Parmi les hommes qui ont rendu le plus de services à
l'histoire et à l'archéologie angevine, il convient, pour ne
parler que des morts, de citer, en première ligne, avec
M. Godard-Faullrier et M. Célestin Port, 'W-' X. Barbier
de Montault, historiographe du diocèse d'Angers, cre'a-
teur de notre Musée diocésain, l'un des fondateurs du
Répertoire archéoloçiguc et l'un des plus anciens rédac-
teurs de la Revue de P Anjou.
Nombre de nos compatriotes lui ont dû le goiit des anti-
quités de notre pays, et c'est faire œuvre de justice et de
gratitude en même temps, que de saluer sa tombe, en énu-
mérant ses tiavaux devant qui peut-être les ignore ou déjà
les oublie. Bien que la vie ne soit pas longue, la mémoire
est encore plus courte. Et si l'on ne songeait qu'à la terre,
rien ne serait plus mélancolique et plus désespérant que
la brièveté du souvenir.
Ainsi, eu 1876, M'" X. Barbier de Montault décrivit et
classa le riche trésor de la magnifique collégiale de Saint-
Nicolas de Bari, en Calabre. Le Chapitie ne savait com-
ment lui témoigner sa gratitude, son enthousiasme ; il le
nommait « surintendant des travaux de restauration de
l'église » ; il lui prodiguait les honneurs, les témoignages
d'une reconnai^sance qui semblait devoir être éternelle.
Et, vingt-trois ans plus tard, l'auteur de ces lignes essayait
en vain d'évoquer le nom du savant prélat en cette même
église de Saint-Nicolas de Bari : les publications que
M*-'' Barbier avait consacrées au célèbre sanctuaire étaient
oubliées déjà, ignorées de tout le clergé !...
Je suis convaincu que notre province gardera plus fidè-
lement la mémoire de ceux qui, dans la mesure de leurs
moyens, avec leurs qualités — et leurs défauts, qui n'en
a pas ? — à l'heure où ils ont vécu, ont contribué plus ou
moins au progrès des sciences et des lettres angevines.
Et c'est pour y aider que j'essaie de résumer, en quelques
pages succinctes, et en toute liberté, mais fatalement avec
des omissions, la vie et les écrits de l'éminent archéo-
logue qui vient de disparaître.
Né à Loudun (Vienne), le 6 février 1830, l'abbé Marie-
Joseph-Xavier Barbier était angevin par ses origines
paternelles ; il l'était un peu aussi par sa mère, nièce de
l'évêque, Mgr Montault. 11 avait d'ailleurs tenu à rappeler
cette alliance distinguée, non sans une pointe d'exagéra-
tion en ajoutant à son nom celui de sa mère, et c'est sous
REVUE DE I- AKT CHRETIEN.
1901. — 6'"*^ LIVRAISON.
544
jacliur tir rSrr cljvctira.
la signature « X. Barbier de Montauli > qu'il s'est fait
connaître (').
Élève du petit séminaire Mongazon, puis, à Paris, du
séminaire Saint-Sulpice, et, à Rome, de la Sapience et du
Collège roniam, il revint tout jeune h Angers, où Mgr
Angebault voulut se l'attacher avec le titre d' i. historio-
graphe du diocèse > (1857).
On a parfois reproché à l'abbé Barbier de paraître
rechercher trop la vanité des titres et des dignités ; il
éprouva, en ce temps-là, des déboires assez cuisants, au
sujet de son camail de chanoine honoraire, puis de son
titre de camérier de Sa Sainteté, alors beaucoup plus rare
qu'aujourd'hui. Mais il convient de lui rendre cette justice
qu'en dépit d'une santé assez éprouvée, le jeune préti e prit
très au sérieux les obligations de sa charge d'historio-
graphe du diocèse.
Les brocanteurs et les € chineurs > n'avaient pas encore
parcouru toutes les sacristies et tous les presbytères ; les
archives de fabrique n'avaient pas toutes été dispersées.
L'historiographe se montrait infatigableà la recherche des
vieux papiers qu' il sauvait du désastre et qu'il rapportait
triomphalement il l'évéché, où on les voit encore, malheu-
reusement insuffisamment classés, malgré le zèle éclairé
de ^L AL Charles Urseau et Pinier, qui avaient commencé
à s'en occuper depuis.
Il relevait en même temps 900 inscriptions, qui furent
publiées en 1S6S-1869 sous le titre Èpii^raphic aiii^evine.
Il rétablissait d'anciens usages locaux, répondant ainsi
par avance à ceux qui devaient l'accuser plus tard de
vouloir <,< tout romaniser>. Il « reconnaissait » les reliques,
restaurait le culte des Florent, des Maxentiol et des Aver-
tin, poursuivait le procès de béatification de Robert
d'Arbrissel, le fondateur de Fontevrault, et du moine
Regnault, de l'abbaye de Mélinais.
Enfin, ses voyages et ses excursions dans le diocèse lui
permettaient de se procurer des ornements anciens, des
émaux, des vases sacrés, des vitraux, des manuscrits,
maints objets souvent très précieux, parfois aussi de
valeur inégale — comme il arrive en pareille occurrence
— mais tous dignes d'être recueillis, conservés et
étudiés.
Mgr Angebault, qui n'était point un artiste, mais qui
savait honorer les Arts, — c'est à lui, ne l'oublions pas,
que la cathédrale de Saint- Maurice doit son incompa-
rable tapisserie française du XI V" siècle, X Apocalypse à.^
Nicolas Bataille, — Mgr Angebault écrivit, à ce propos,
une Lettre pastorale (16 juillet i S 57), en faveur de la créa-
tion du Musée diocésain, dont l'évêque fut le patron,
mais dont l'abbé X. Barbier fut l'âme, le véritable fonda-
teur (7 novembre 1857).
Ce Musée d'abord à ia Psalette, rue Saint-Aignan. puis
à l'Évèché, contenait en 1861, lorsque le jeune archéo-
logue voulut repartir pour Rome, plus de 3.000 numéros,
et c'est encore aujourd'hui — entre les mains si compé-
tentes de M. L. de Farcy, qui le diiige depuis 1867 —
le seul musée de ce genre, si l'on excepte peut-être une
tentative faite, je crois, à l'évéché de Tareniaise et h l'ar-
chevêché de Bourges.
II est moins aisé que ne le pourraient croire les jeunes
gens de rendre service h ses concitoyens, surtout lorsqu'il
s'agit de déranger certaines habitudes apathiques et de
réveiller l'inertie.
Ceux qui apprécient le repos et la tranquillité, ceux qui
craignent les dérangements et les déceptions, redoutent
les critiques mal fondées ou malveillantes, les quolibets
I. Ce renseignement rectifie ce que, d'après différentes notices
consacrées à Mgt Barbier de Montault, nous avons écrit des ascen-
dants de notre regrette collaborateur ; on ne doit aux morts que la
vérité, quelle que soit la vénération avec laqUL'Ue on conserve leur
souvenir. N. o. t.. K.
malicieux ou les plaisanteries épaisses, ceux qui escomp-
tent à leur profil les jouissances de la sympathie générale,
ceux qui s'imaginent enfin qu'ils seront récompensés de
leurs eftbrts et de leurs peines par les hommages publics,
ou tout au moins par une déférence spéciale, ceux-I^ ne
connaissent point la vie humaine. Qu'ils reviennent de
ces illusions et sachent envisager les choses comme elles
sont, ou ne se prêtent point au rôle, toujours fort discuté
et fort contesté, de « bienfaiteur de ses contemporains >.
D'abord « nul n'est prophète en son pays >, c'est la
parole d'Évangile. Le sage Solon, qui était païen, dit
aussi, qu'en tous les cas on •? ne peut juger le mérite d'un
homme qu'après sa mort >, ce qui prouve qu'on se leur-
rerait parfois, en pensant recueillir la moisson de son
vivant.
Le public, appelé à bénéficier de votre création, s'éton-
nera, soupçonnera, dénigrera
V'otre dévouement paraîtra suspect, intéressé, vaniteux
ou ambitieux. Bien heureux si vos sacrifices d'argent ne
vous sont pas reprochés comme des spéculations avanta-
geuses pour vous-même !
On vous supposera des arrière-pensées détestables.
On ne se décidera pas aisément à reconnaître, tout
simplement, ce qui est pourtant vrai, grâce à Dieu ! que
certains hommes aiment à se dépenser et à se dévouer,
comme il y en a d'autres qui se complaisent à nuire et à
opprimer.
Donc, si vous entreprenez quelque fondation, si vous
faites efifort pour sortir de l'ornière ou en faire sortir,
attendez-vous à n'être ni très secondé ni très apprécié.
Il n'y a pas là non plus de quoi se décourager, si la
gloire ou la renommée, ou même si la simple équité vous
fuit :
Quand l'abbé ISarbier entreprit de créer à Angers le
Musée diocésain, de sauver de la destruction tant d'objets
intéressants pour l'archéologue et pour l'artiste, il dut
nécessairement se heurter à tous les ennuis, à tous les
obstacles et à toutes les résistances que suscitent, non
seulement le mercantilisme inquiet et jaloux, mais aussi
l'ignorance satisfaite, l'esprit de contradiction, les calculs
mesquins et, plus tard, les rivalités basses et les jalousies
implacables, lorsque l'œuvre, bien modeste pourtant, eut
pris corps et sembla prospérer, en dépit de la routine, en
dépit de tant d inertie et d'obstruction, et des sarcasmes
timides et des assauts effrontés pour décourager l'initia-
teur. D'autres ont connu ces difficultés et ces luttes et
n'ont pas failli pour cela ; ne suflirait-il point de nommer
ici le vénérable AL Godard-Faultrier, lorsqu'il entreprit,
il y a soixante ans, la création du Musée d'Antiquités
d'Angers, devenu aujourd'hui l'une des plus intéressantes
et des plus utiles collections publiques '1
Il n'y a pas très longtemps, M. J.-E. Lenepveu, le
futur membre de l'Académie des Beaux-Arts, me rappe-
lait combien M. Mercier, conservateur du Musée de
peinture, au logis Barrault, se plaignait amèrement alors
des « gros cailloux > et des « vieux pots » de cet « excel-
lent M. Godard », que l'on tolérait à grand'peine, qui de-
venait encombrant, envahissant, et qu'on estimait tout
juste comme un doux maniaque, sinon comme un em-
ballé dont il fallait modérer l'enthousiasme aventuieux.
Il n'est i)as donné à tout le monde de comprendre tout
de suite l'utilité des plus anciens monuments de l'art et
de l'industrie humaine, et plus d'un de ceux (|ui ont la
prétention d'être universels, sont légèrement déconcertés
à la pensée que le Musée Saint-Ciermain, — le Château
royal I — que Cluny, que le Louvre même, — le palais de
nos rois ! — conservent tant de « gros cailloux >■ et de
«vieux pots» sous vitrines, — et parfois sous vitrines
dorées ! — que le Musée Carnavalet recueille pieusement
les démolitions de Paris, (|ue le Musée de l'.-Xrmée col-
chronique.
545
lectionne avec ferveur les vieilles armes et les vieux
équipements.
Aujourd'hui, cependant, le public se rend mieux compte
des ressources que trouvent l'Art et l'Histoire à l'étude
de certains objets qui, devant des yeux moins clair-
voyants, peuvent paraître inutiles ou puérils ; mais,
qu'était-ce, il y a quarante et cinquante an?,avant la créa-
tion des Musées diocésains?
L'abbé Barbier, malgré l'appui officiel de son évêque,
se heurtait à des préjugés du même genre. Il ne considé-
rait cependant pas comme absolument perdu tout le
temps qu'il passait en courses, en correspondances, en
plaidoyers, pour sauver quelque vase sacré ou quelques
débns d'ornement d'église.
Il en profitait pour prendre des notes qu'il utiliserait
ensuite ; mais il n'en avait pas moins conscience, sans
doute, — et de cela aussi, il convient de lui tenir compte,
— que, s'il eût employé à son profit exclusivement per-
sonnel les longues journées, les semaines, les années
entières qu'il consacrait à cette fondation, bien plus
grand fut le bénéfice particulier qu'il en eût pu retirer.
D'autant qu'il ne possédait pas, on peut le dire, de la
fortune, et qu'il est bien difficile, quand on n'a point de
budget — l'Evêché ne pouvait pas lui ouvrir de crédits
sérieux, — de résister à l'entraînement, de consentir à
laisser échapper telle ou telle pièce en vente. On aime
mieux l'acquérir à ses frais. J'ai connu tout cela, pendant
les longues années — autant dire ma vie entière — où
j'ai voulu former les collections d'histoire, d'archéologie
et d'art que j'ai données à la ville de Beaufort, en vue de
contribuer à l'instruction et à l'éducation de mes conci-
toyens.
Ce n'est point ici le lieu de rappeler les vicissitudes à
travers lesquelles passa le Musée diocésain depuis 1860,
ni de discuter le point de savoir s'il n'eût pas mieux valu
réunir toutes ces collections angevines au Musée munici-
pal d'Antiquités ; il y a des raisons pour et contre, et, si
j'avais à émettre mon humbie avis, j'inclinerais vers toute
solution qui permettrait (avec le respect voulu) aux tra-
vailleurs et aux curieux l'accès tout à fait libre de ces
nionuments_ d'art et d'archéologie. Je ne doute pas qu'au-
jourd'hui l'Evêché se fasse un plaisir d'ouvrir ses portes à
qui le lui demande ; mais les collections ne sont vraiment
utiles que quand le visiteur peut les considérer tout à
loisir et sans l'ennui de déranger personne (').
Quoi qu'il en soit, on peut diie sans crainte de se trom-
per que. sans Mgr X. Barbier de Montault, la plus grande
partie des objets qui composent le Musée diocésain
d'Angeis seraient aujourd'hui perdus. Le prélat n'eût-il
rendu à l'Anjou et à la science d'autre service que d'avoir
sauvé de la ruine tant d'objets remarquables ou simple-
ment curieux, sa vie n'aurait pas été inutile à son pays.
Ce fut l'opinion du Gouvernement qui ne tarda pas à
lui conférer le titre de correspondant du Ministère de
l'Instruction publique pour les Travaux historiques ; ce
fut aussi le sentiment de la Ville d'Angers qui lui décerna
une médaille de vermeil pour l'installation du Musée
diocésain et pour le dévouement éclairé qu'il apporta à
l'organisation de l'Exposition d'Antiquités ouverte au
chef-lieu du département de Maine-et-Loire, h l'occasion
du Congrès archéologique, tenu sous la présidence de
M. de Caumont.
Malgré l'obligeance du prélat à mettre ses connais-
sances à la disposition de quiconque le désirait, ses
collègues du clergé n'appréciaient pas tous, au même de-
gré, les efforts de l'historiographe du diocèse. 11 eut aussi
parmi les laïques d'ardents adversaires, J'oserais dire des
I. C'est un point sur lequel j'ai le plus insisté, pour ma part, en
donnant, de mon vivant, mes collections à la ville de Beaufort : le
Musée doit être ouvert pubuqjietneut ^x graiuiUment.
ennemis passionnés. L'un d'eux — et la chose est assez
piquante pour qu'on la remarque — se vantait, il n'y a
pas encore très longtemps, à qui voulait l'entendre — lui
qui allait être enterré civilement et qui proclamait
cependant l'abbé Barbier l'un de nos plus savants
archéologues — d'avoir envoyé contre ce prélat au
ministère des cultes tout un réquisitoire pour empêcher
son élévation à l'épiscopat.
La situation du leune prélat à Angers devint assez dif-
ficile pour le décider à quitter le diocèse. 11 prit congé de
Mgr Angebault et retourna à Rome en 1S61. Il y demeura
jusqu'en 1875, explorant ce vaste champ d'études d'art et
d'archéologie religieuses, amassant des matériaux pour
ses publications futures, s'occupant également de liturgie
et de droit canon, faisant preuve d'une érudition sans
cesse en progrès, témoignant d'une fécondité surprenante,
bien rarement prise en défaut d'exactitude, jamais sus-
pectée pour sa sincérité.
Affirmer que l'abbé Barbier fut h l'abri de la critique,
serait tomber dans une exagération ridicule ; ce serait
méconnaître la vérité, compromettre la science et les
savants. Peut être même avait-on quelque raison de re-
marquer qu'il se soit montré parfois trop audacieux dans
ses hypothèses.
L'archéologie doit être prudente et même — qu'on me
le pardonne ! — quelque peu sceptique.
On a reproché à Mgr Barbier, et ce semble avec quelque
apparence de raison, de voir partout du symbolisme, là
même où l'artiste ancien pourrait bien n'avoir pas du tout
songé à en mettre : dans un vitrail du X11I= siècle, il
aperçoit une croix rougi' et plus bas une croix l'crte, très
probablement parce ciue le verrier se préoccupait surtout
de l'effet des couleurs ; Mgr X. Barbier, lui, y voit une
intention symbolique, la croix « rouge » par allusion à la
« foi ardente », la croix « verte » parce que le < bois vert »
est l'allégorie de la vie, puis qu'il s'agit de « l'arbre de vie >,
et non d'une croix de bois mort... J'indique ici, par à peu
près, une forme de raisonnement (|ui a pu entraîner le
savant archéologue un peu plus loin que de raison, sans
que j'estime le moins du monde sa méthode a priori
blâmable, et sans ignorer combien le symbolisme eut
généralement de l'influence sur les arts du moyen âge.
Pendant le Concile de 1870, Mgr Desflèches, vicaire
apostolique du Su-Tchuen Oriental, le prit avec lui en
qualité de théologien.
Mais nous n'avons à nous occuper ici que de l'érudit,
et spécialement de l'érudit angevin.
Lorsque la guerre advint, Mgr X. Barbier de Montault
allait, comme directeur des travaux, poursuivre la lestau-
rationde la mosaïque du dôme d'Aix-la- Chapelle lAachen)
exécutée sous Charleniagne ('). Presque en même temps
il faisait partie, avec \''iollet-le-Duc, de la Commission
internationale chargée de se prononcer sur le plan de
restauration du dôme de Cologne.
En Italie, nous le trouvons successivement àEénévent
près du cardinal Carafta, pour étudier les précieuses
archives du cardinal Orsini, plus tard Benoit XIII,
administrateur émérite en son temps ; à Bari, nous
l'avons dit déjà, pour inventorier le Trésor ; à Monza,
pour y dresser le catalogue général des reliques ; à la
cathédrale de Milan et à l'église Sainte-Marie, piès
.Saint-Celse ; puis en Savoie, devenue française, où ^Igr
Turinaz l'avait accueilli avec d'autant plus d'empresse-
r. Lorsqu'il s'est agi d'examiner la restauration de l'Octogone
carolingien d'Aix-la-Chapelle et de rétablir éventuellement la mo-
saïque qui l'ornait primitivement, un jury international fut institué
pour présider à cette restauration. Ce jury se composait de M. M.
Salzenberg (Prusse) ; de Surigny (France) ; Barbier de Montault
(Rome) ; Schmidt (.■\utriche) ; Parker (Angleterre) ; Visconti
(Italie); Bethune (Belgique). Mais il n'a jamais été question de
confier la direction de ces travaux .à Mgr Barbier de Montault.
)46
3Rcbue lie T^rt cl)vctica.
ment que l'éiiiinent prélat publiait lui-même, sur la con-
servation lia objets d'art reli(;ieii.x , une lettre appelée
à faire sensation et que reproduisit \e Niii'/etii: Dioitiii/ieii-
tal. Nous retrouvons encore M,t;r Barbier à Albi, et dans
dix diocèses de France, qui ont bénéficié de son savoir et
de sa passion pour les études ecclésiologiques, l'épi-
grapbie et la liturj^ie.
Userait impossible de donner ici toute la Bibliographie
des écrits de Mgr X. liarbier de Montault : son légataire
universel ne porte pas à moins de 700 le nombre de ses
publications diverses, livres, brochures et plaquettes.
En 1889, il eut la pensée de les réimprimer, en les coor-
donnant, et ses Œuvres complètes n'eussent pas compris,
parait il, moins de 60 volumes in-8" de 5 à 600 pages ; le
quinzième volume est \ peine terminé.
Retiré, en ces dernières années, dans une campagne du
Poitou, il ne pouvait se décider au repos, malgré son âge et
ses souffrances. Sans avoir été jamais de l'inlimité du
savant prélat, j'étais de ceux qui, malgré certaines diver-
gences, tenaient beaucoup à rester en excellents rapports
avec Mgr Barbier, comme avec .M. Port, dans un autre
camp, et cela un peu pour des raisons du même ordre,
que j'ai données plus haut, échangeant avec eux très
volontiers, par hasard, de ces communications dont les
travailleurs profitent respectivement et dont j'ai dû très
certainement profiler plus que personne.
Je m'étais fait aussi un devoir de provoquer l'admission
— ou plutôt la réintégration après son séjour à Rome — •
d'un archéologue de la valeur de MgrBarbier de Montault
à la Société Nationale d'Agriculture, Sciences et Arts
d'Angers, qui l'accueillit avec empressement, il y a deux
ans, à la vive satisfaction du prélat. Se sachant très
malade, se croyant perdu, il m'avait instamment prié, il
y a deux ans, de le venir voir en sa solitude, et il m'apprit
qu'il désirait donner au musée Saint-Jean son portrait en
prélat (toile), une grande partie de sa bibliothèque, tout
ce qui le concernait comme archéologue et écrivain, ses
manuscrits, ses papiers, ses notes (plus de 300,000,
pensait-il).
— Vos travailleurs trouveront dans ces matériaux une
mine qu'ils n'épuiseront pas tle si tôt, me disait un ami
et un confident du prélat.
Il me fit part aussi de divers autres legs projetés par lui ;
mais je ne crois pas qu'il ait pu réaliser tous ses projets.
Mgr X. Barbier de .Montault est mort le 30 mars 1901.
Puissent ces lignes conserver près de nos compatriotes
la mémoire d'une figure très originale, très personnelle,
qui demanderait à être étudiée mieux qu'en ces courtes
impressions, d'un savant qui, jusqu'au delà de sa mort,
a tenu à rester angevin, qui eut sa part de dignités et
aussi de déceptions, qui était peut-être en droit de se
croire appelé à de plus grandes charges, sinon à de
plus grands honneurs, mais qui eut en somme la meilleure
part, puisqu'il a pu mourir avec les consolations que doit
donner à l'homme une longue vie de travail, avec les
espérances que doit donner au chrétien, au prêtre, la
fidélité de sa Foi.
Joseph DlfN.MS.
^:a.-.a.-.&--2.-.&-.a.ii^-A'.£'y.'R^&«&i&-&.g.'.&*a.ia.ii&ai'.a.sa.^'
'^m ïîccrologte. '^m
eniiïc Iinniïiin.
La Revue de l' Art chrctien a été fort éprouvée
au cours de l'année 1901, qui itii enleva son
plus ancien, son plus assidu et l'un de ses plus
éminents collaborateurs en la personne de Mgr
15arbier de Montault. Elle vient de perdre encore
bien inopinément un de ses dévoués auxi-
liaires; nous avons appris la mort de M.E. Lam-
bin, alors que nous étions en pleine correspon-
dance avec ce sympathique écrivain au sujet de
ses travaux en cours destinés à notre Reinie :
nous nous étonnions de son retard à nous répon-
dre ; il n'était plus de ce monde: il était entré le
19 septembre 1901 dans la vie éternelle, oît le
Seigneur l'aura accueilli avec faveur, nous en
avons la confiance ; car il a aime son temple et
consacré son talent a célébrer les beautés de
l'art chrétien dans les applicatioru; décoratives
de la flore. C'était un chrétien et un homme
d'une grande bonté.
Emile Lambin, né à Paris le 18 décembre
1835, appartint d'abord à l'administration de
la Préfecture de police. Mais à sa retraite, en 1890,
il consacra ses loisirs à des travaux archéolo-
giques d'une rare conscience, notamment à des
études sur la flore sculpturale des cathédrales,
dont bénéficia la Revue de r Art cJirctieii et qui
lui créèrent une place à part dans cette branche
de l'archéologie qu'il avait faite sienne. En même
temps, il faisait participer à sa science les tra-
vailleurs dans des conférences très suivies don-
nées à l'Institut populaire du Trocadéro. On a
de lui, entre autres : La Flore gothique (1893),
Les Églises de V Ile-de-France ( 1 89S), La cathé-
drale et la Forêt ( 1 899), La Flore de la cathédrale de
ALeaux{\Ç)00),éXud^s publiées pour laplupartdans
nos colonnes, dans la Semaine des Constructeurs,
V Art pour tous, etc. Il a donné à la Gazette des
Beaux-Arfs,en 1899 et en igoi.deux intéressantes
études sur La Flore sculpturale du moyen Age et
L'Eglise de Saint-Lett d' Esserent. Il laisse en
manuscrit des notes sur la cathédrale de Cologne
que nous publierons prochainement et une mono-
graphie de l'église de Neuilly-sur-Marne. Il a,
sinon créé la science de la flore médiévale,
du moins donné un corps aux études commen-
cées sur ce beau sujet. Il a écrit aussi divers
opuscules historiques : Ajax ; Duguesclin, con-
nétable de France et de Castille ; etc., et publié les
cours sur l'histoire de la Bible professés au
Collège de France par Renan. Il était membre
de plusieurs Sociétés archéologiques.
L'homme privé n'était pas inoins sympathique
que le savant et sera lum moins vivement re-
gretté.
Imprimé par Desclée, De Brouwer & C"^, Bruges.
Les roses d'or pontificales, par M. Eug. Muniz p.
La Couronne de fer, au trésor de Monza (fin), par Mgr X. Barbier de Montault. ... p.
Essai sur la décoration archilectonique, par M. L. Cloquet. pp. 25, 212, 289, 394, 481
La cathédrale de Laon, par M. Emile Lambin p.
Les Actes des Apôtres. — Tapisseries d'après Raphaël, par M. Gerspach p.
Les peintures des maîtres inconnus. Tableau aitriiîué à Roger Van der Weyden, par
M. W.-H. James Weale. p.
Bras-reliquaire à l'église St-Nicolas de Valenciennes, par M. Louis Ser bat p.
Le trésor de l'église abbatiale de St-Mathias à Trêves, par Mgr X. Barbier de
Montault p.
Eglise de Messines, par M. le baron Bj'.thune. . . 1>.
Le Pérugin, par l'abbé Broussole, par AL J. Hei.big. p.
Pince et fer à hosties au Musée de Brive, par M. Ern. Rupin ]).
Les fresques de l'église Santa Maria Antiqua, au Forum Romain, par M. Gerspach. p.
Le Couronnement de la sainte Vierge, par M. W.-H. James Weale p.
Les Origines de l'Architecture gothique, par M. John Bilson p|). 365,463
G.-É. GulTens, par M. J. Hklbig. p.
Du rôle de l'arum dans la Flore gothique, par M. Em. Lambin p.
La restauration des monuments anciens (i"part.), par M. L. Cloquet p.
12
(fin).
36
9'
124
I 26
179
•93
273
28r
300
361
(fin).
455
488
498
ffîélanges.
Une inscription de cloche (Mgr X. Barbier de Montault)
trésor de St- Pierre (le Père Jos. Braun)
La dalmatique du
Le « Memling » de M. Kaemmerer (W.-H. James Wealh). — Ostensoir de Notre-
Dame de Cléry (M. Saget). — Les principes de l'art et les fantaisies modernes
(Jos. Osterrath). — Le monument de Mgr Rivet à Dijon (H. Chabeuf). — Discours
de M. H. Carton de Wiart, à l'École St-Luc à Bruxelles (L. Cloquet) p.
De la restauration des Monuments en Belgique et ailleurs (J. Helbic.) p.
5t
'34
REVUE DE L ART CHKETllîN.
548
l^tWt tir raivt fbrcrtcu.
Restauration des Monuments (J. Helbig). — Les grands maîtres rendus populaires
(le même). — Fragments d'un " Physiologus " (Mgr X. Barbier de Montault) — Une
monstrance flamande (M. D.) P- 3U
La maison de François l' à Abbeville (Aie. Ledieu). — L'Art et l'Autel (1,. Cloquei). p. 414
La Vierge Marie et le Serpent (L. Germain de Maidv) p. 5°4
Gorreïî^ponDanccs.
Lettres d'Italie de M. c;ersp.\ch pp. 55, 141, 240, 326, 419, 505
Lettres de N. Thioli.iek, 1.. Sacet et Ém. I.ambix p. 58
Tablea^l dédicatoire de la chapelle de la Sainte-Trinité à Lublin (Pologne)
(A. Brykczynski).
Lettre par Eugène H.
Peintures murales du XV siècle a Beaune (H. C'hai'.eue;. - L'archéologie au
Vatican (D' Alb. Iîattandier). — Lettre de M, C.kkppach p,
Tra^eiur ùcs Hociétés satjantes.
M4
419
508
FRANCE. — Société nationale des Antiquaires <iH France pp. 60,
Académie des Inscriptions et Belles-Lettres p
Congrès des Sociétés savantes et réunion des Sociétés des Beaux- Arts des Dépar
Congrès des Sociétés savantes à Nancy en 1901
Commission diocésaine des monuments
Société historique et archéologique de l'Orne
Comité des travaux historiques
Sociéé des Lettres, Sciences et Arts de Bar-le-Duc.
Société d'Émulation de Cambrai
Commission déparlementale des Monuments historiques du Pas-de-Calais.
Conférence d'histoire et d'archéologie du diocèse de Meaux.
Congrès de la Société française d'archéologie
Société archéologique du Midi de la France.
Congrès eucharistique d'Angers
BELGIQUE. — La Commission royale des monuments de Belgique
Académie royale d'archéologie de Belgique
I^'Art chrétien h Namur
Gilde de Saint-Luc et de Saint-Joseph à Gand.
Société d'archéologie de Bruxelles
Cercle d'arcliéologie d'Enghien
Congrès d'archéologie et d'histoire à Tongres
Institut archéologique du Luxembourg
Société historique et littéraire de Tournai.
Société d'histoire et d'archéologie de Gand.
Société des Mélophiles de Hasselt
Commission royale des monuments de Belgique.
HOLLANDE. — Gilde <le Sainl-Bernulphe
ALLEMAGNE et PAYS-BAS. — Gilde de Saint-Thomas et de Saint-Luc
ESPAGNE. — Sociedad espafiola de excursiones
147, 244,
32g, 424, 517
p. 60, 147,
244, 329, 5 '7
rtements.
... p. 62
PP- 62, 330
... p. 63
p. 148
PP
u«, 332, 519
■■■ P- 332
P- 332
P- 332
■ P- 335
PP- 424. 519
... p. 425
■ P- 523
p. 63
PP- 63, 333
... p. 149
PP- 247, 524
pp. 24S, 426
... p. 248
PP- 333, 525
P- 335
P- 335
p. 426
p. 42S
P 524
P- 523
p. 521
p. 246
Cable Des matière0. 549
Btliitograplnc.
Première liziraison. — Raccolta di divise o motti araldici, par (1. Pietraiiiellara. — Bibliographie des
inventaires. — Mobilier et reliques de l'abbaye du Baume-les- Messieurs, par l'abbé Brune. — Statues
de l'école dijonnaise, par le même. — L'architecture romane dans le Jura, par le même. -- Reliquaire
de Saint-Juste à Château-Ghalon, par le même. — Monuments du Velay, par A. ThioUier. — La Vierge
«t le Buisson ardent, par le chan. Marsau.x. — Les secrets du coloris, par G. de Lescluze. — Monographie
de l'église de Rélhel, par H. Jadart et P. Demaison. — Constitutions de Guillaume Durand, par Jos. Berthelé
et I\I. Valmary. — Jeanne d'Arc sur une taque de foyer, par M. L. Germain. — Une taque symbolique
du XVIl" siècle, par M. F. Donnât. — La Touraine au petit Palais, par le C" Ch. de Beaumont. —
La Belgique illustrée, par M. E. Bruylant. — Les torches des communautés lavalloises, par J. M. Richard.
— Le monument du cardinal Lavigerie, par M. d'Anselme de Puisaye p. 65
Deuxième livraison. — Le trésor de l'abbaye de Silos, par Dom Eug. Roulin. — De oude brugsche
bouwtrant en de vlaamscho Renaissance, par A. Van de Velde. — Esthétique fondamentale, par
Ch. Lacouture, S. J. — Inventaires, par M^r X. Barbier de Monlault. — Les saints de la messe, par Ch. et G.
Rohault de Fleury. — La sculpture à Troyes au XVl" siècle, par R. Kœchlin et Marquet de V'asselot. —
La statuaire en Normandie, par le chan. Porée. — Bulletin de la Sociedad espaflola de excursiones. —
G. Van Caster et les Hunin, par le chan. Van Casier. — L'art des jardins, par G. Riat. — Épitaphes de
la Flandre au XVI" siècle, par le B" Hethune. — Sainte Foy, par A. Bouillet et L. Servières. — Les chefs-
d'œuvre des musées de France: la peinture, par L. Gonsc. — Iconographie et bibliographie de N.-D.
de la Treille, par Quarré-Reybourbon p. 150
Troisième livraison. — Les peintures murales du cloître de l'église d'Emmai_is A Prague, par le D''
J. Neiiwirtb. — Le coffret de St-Nazaire et le manuscrit de l'Iliade de l'Ambrosienne à Milan, par F. de
Mély. — La Tiare pontificale du VII'^ au XVI' siècle, par Eiig. Miintz. Le musée de portraits de Paul
Jove, par le même. — Sepulveda y Santa Maria de Nieva, par le D' Enr. .Serrano Fatigati. — Éléments
d'archéologie chrétienne et les Catacombes romaines, par H. Marucchi. — St-Pierre de Rome. Histoire
de la basilique vaticane et du culte du tombeau de S. Pierre, par le P. Mortier. — Analecta hymnica
Medii .^vi. Sequentiae ineditae, par le P. Blume. — Bibliographie des inventaires, par Mgr X. Barbier
de Montault. — Répertoire archéologique de l'arrondissement de Reims, par Ch. Givelet, H. Jadart et
L. Demaison p. 2^()
Quairtème livraison — Le XI X"' siècle. — Bibliographie des inventaires, par Mgr X. Barbier de Montault.
— Répertoire des collectionneurs et des artistes, par E. Renard. — Jeunesse du Pérugin, par l'abbé
Broussole et J. K. Huysmans. — Archives de la Commission des Monuments historiques, par A. Perrault-
Dabot. — Monuments historiques, par L. Pâté. — Les sculptures en plein air à Bruxelles, par Pol.
Meirsschaut. — Uzeste et Clément V, par l'abbé le Brun. La cathédrale de Noyon, par Eug. Lefèvre-
Pontalis p. ^^7
Cinquième livraison. — Iglesias espaîiolas del santo Sepulcro. La Vera Gruz y Eunate, par D. E. Serrano
Fatigati. — Segovia. Porticos de sus Iglesias Roinanicas, par le même. — Le livre de la prière antique,
parle R. P. Dom F. Cabrol. — Histoire de l'église Saint- Bénigne à Dijon, par l'abbé L. Chnmton. — L'Arle
di Benvenuto Cellini, par J.-B. Supino. — Denier de Judas. — Le mobilier du Val-Dieu. Excursion
archéol., par l'abbé .A. Desvaux. — Travaux de Du Rif, par F. Mazerolle. ~- Les Rues de Romans, par
U. Chevalier. - Histoire des Beaux-Arts, par Paul Rouaix. — Louis Gourajod (leçons), par H. Lemonnier
€t A Michel. - Bruges et Ypres, par H. Hymans p. jSg
Sixième livraison. — Le Bienh. Humbert de Romans, par M"" de Waresquiel.— Constantinople, par E. Soil.
— Sainte Geneviève, parH.Jouy. — L'archéologie du moyen cage en France, par Anthyme .Saint-Paul. —
Saint-Reml à Reims, par A. Gosset. - L'église de Vinça, I734-I769 ; les Sépultures antiques du Pays
nantais ; l'âge de l'église de Deas à Saint- Philibert deGrandlieu, par L. Maître. — Vieux coins de Flandre,
par A. Heins. — Le mobilier du Val-Dieu, par l'abbé Desvaux. — Roger Van der Weyden, par L. Maeterlink.
— N.-D. du Désert, par M. -.A. -J. Devoisins. — Traité d'architecture, par L. Cloquet p. 526
Périodiques pp. 76, 172. 264, 350, 533
Index bibliographique pp. 79, 265, 351, 444,. 536
550
B.ebue tir TSlvt djrcticu.
Gl)rontque.
Première livraison. — RESTAURATIONS MONUMENTALES; Réponse h M. Fierens-Gevaert ;
vandalisme en France; restaurations en Belgique. - CEUVRES NOUVELLES: église St-Anselme à
Rome; vitraux; calvaire à Lourdes. — DÉCOUVERTES: fresques, etc. - VARIA. — NÉCRO-
LOGIE; Albrecht De Vriendt p. !i2
Deuxième livraison. — CEUVRES NOUVELLES : Le monument de Bossuet à Meaux. - MUSÉES.
— RESTAURATIONS : cathédrales de France, vieux Rouen, tour de Vésone à Périgueux, Commis-
sions diocésaines des nnonuments, Notre-Dame du Sablon à Bruxelles. — NOUVELLES : art pro-
testant, fresques anciennes, gares gothiques. - NÉCROLOGIE : M. H. -A. Revoil p. 173
Troisième livraison. RESTAURATION DES RUINES, réponse à M. Fierens-Gevaert. — RES-
TAURATIONS DIVERSES. VARIA. ~ NÉCROLOGIE : M. H. -A. Revoil p. 269
Quatrième livraison. —LÉON XIII ET LE CHANT GRÉGORIEN. PLAIN CH A NT : le monopole
des éditeurs liturgiques. — RESTAURATIONS: cathédrale de Rouen ; Monuments belges: Soignies,
Bruges, Hoogstraeten, Chàtelet, Enghien, Diest, Binche, etc. — NOUVELLES. — NÉCROLOGIE:
Mgr X. Barbier de Montault p. 354
Cinquième livraison .
NOUVELLES. ...
CHANT GREGORIEN. - MONUMENTS ANCIENS.
SOLESMES. —
P- 449
Si.vième livraison. — EGLISES NOUVELLES: Rome, Luxembourg. — MONUMENTS ANCIENS :
Dijon, Toulouse, Langres, Paris, Biaise, Looz. Louvain. — LE CHATEAU DE LAROCHEPOT. —
MUSÉES.— PEINTURES MURALES : h Beaune, à Anvers, à Zepperen.— FOUILLES DE ST-DENIS.
— NOUVELLES.— Mgr X. BARBIER DE MONTAULT.— NÉCROLOGIE : Emile Lambin, p. 538
4^ WMt hts :Qlanc!)eg> ^
I. — Déposition de la Croix : 'I\ihlenu du Musée de T,a Haye.
II. — Église de Messines. Fenêtre absidale (ancien clireur des clianoines).
III. — Id. Id. Fenêtres latérales géminées. Id.
IV. — Pietro Perugino. Fresque au cloître de .Santa Maria Maddalena de Pazzi.
V. — Applications de la passiflore stylisée (menuiserie et peinture murale).
VI. — Le Couronnement de la sainte Vierge, peint par Albert Cornelis.
VII. — Cathédrale de Durham. — Coupe transversale.
VIII. Id. Id. Une travée du chœur.
IX. — Crucifix.
X. — Godefroid-Egide GulTens. - T..\ s.mnte Viergk et s.'vint Jean au piku de la Croix.
(Peinture murale de l'église N.-I). à .Saint-Nicolas).
XI. — Intérieur de la basilique de Sainte-Sophie à Constantinople.
Vignettes tnterealéee; Dans ïe îtxtt.
Rose donnée par Clément V à la cathédrale
de Bâle P- 6
Essai sur la décoration architcctonique,
56 vignettes pp. 25 K 35
Laon. — Intér. de la cathéd. nef et chœur, p. 3S
Id. Id. chœur et nef. » 40
Id. . Chapiteau de nénuphar. > 42
Laon. — Chapiteau de plantain
Id. Chapiteau de fougère
Id. Chapiteaux et rinceau de vigne.
Id. Chapiteaux de fougère et de vigne.
Portrait d'homme, par Memling
Stalles anciennes à Louvain.
Châ-sse de sainte Gertrude à Nivelles. . .
44
46
47
48
71
72
72
Cable lies matières.
551
Le « Groeningenhof >> à Aertselaer
Tableau de l'Adoration de l'Agneau, par
A'an Eyck
Rue de l'Ane aveugle à Bruges
La chapelle Sixtine
La Vocation de saint Paul ; tapisserie.
La Mort d'Ananie. Id.
St Paul et St Barnabe à Lystre Id.
La Guérison dn paralytique Id.
Saint Paul à l'Aiéopage Id.
Élymas frappé de ct^cité Id.
La Conversion de saint Paul Id.
Saint Paul en prison Id.
La Pêche miraculeuse Id.
La Lapidation de saint Etienne Id.
Tapisserie de Bruxelles (XVI" siècle).
Id. Id.
Id. Id.
Bras-reliquaire à Saint-Nicolas de Valen-
ciennes.
Id. Id. Id.
Ostensoir au trésor de N.-O. de Cléry
(XV= siècle)
Peinture murale dédicatoire à Lublin.
Détail de frontal émaillé (Trésor de Silos).
Monstrance eucharistique {XVI° siècle).
Plan d'une maison thébaine avec jardin.
Un coin du jardin de Gaprarola.
Jardin en éventail de Montargis.
Jardin des Colombiers à Paris
Jardin du Luxembourg.
Plan de l'église Sainte-Foy de Conques.
L'église de Conques, vers 1820
Restes du cloître de l'abbaye de Conques.
Reliquaire du grand voile de sainte Foy.
La Vierge entre deux Saints
Glorification de l'Immaculée Conception.
L'Adoration de l'Enfant Jésus
L'église de Saint-Mathias, à Trêves. — Re-
liquaire de la Vraie Croix, face.
Id. Id. Id. revers
Id. Id. Id. détail de la face.
Id. Id. Id. étui
Église de Messines. — Plan terrier
Id. Vue (côté nord)
Id. Chapiteau de l'ancienne nef.
Id. Vue intérieure du chœur.
Id. Coupe d'un pilier
Id. Coupe sur le transept
Id. Chapiteau àl'entrée du chœur.
Id. Élévation du transept nord.
Id. Détail de la porte
Id. Élévation extér. de l'ancien
chœur des chanoines.
Id. Coupe longitudinale Id.
Id. Coupe transversale Id.
Id. Détail de la corniche delà tour.
P- 73
» 74
» 75
» 93
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» 99
» lOI
î> 103
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» 199
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» 200
» 201
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» 203
» 204
» 205
» 205
« 2o5
> 206
Eglise de Messines. — Tour (vue de l'Ouest), p. 207
Id.
Id.
Id.
Essai sur
Sceau des éclievins de Mes-
sines 1256
Id. Id. 1336-1566.
Vue générale de l'abbaye,
la décoration architectonique,
90 vignettes. pp. 212
Statue de Boniface VIII, à Florence.
La grande tiare de Jules II.
Pince et fer à hosties au Musée de Brive.
Id. Id. Id.
Id. Id. à l'église de Pazayac.
Essai sur la décoration architectonique,
31 vignettes. pp. 281
Monstrance flamande à Sedan
Le Pain bénit, tableau de DagnanBouveret.
Gallia, buste par Moreau-Vauthier
Carte de l'Italie centrale et de l'Ombrie.
Rencontre h la Porte d'Or, fresque de Ott. Nelli.
La Présentation, tableau de (ient. de Fabriano.
Madone et Anges, fresque de Mezzastris.
Vierge et Saints à Pérouse, fresque de Boccati
da Caraerino.
Martyre de S. Barthélemi, fresque de Nicolo
Alunno
Jubé de Saint-Étienne-du-Mont à Paris.
Façade Id. Id.
Plan de l'église d'Uzeste. .-
Portrait de Mgr X. Barbier de MontauU.
Durham, crypte du réfectoire
Id. plan des piliers
Winchester, crypte
Id. voûte sous la tribune
Gloucester, chapelle sud du déambulatoire.
Durham, triforium
Id. bas-côté du chœur, plan de la voûte.
Id. Id. piles.
Id. plan d'un pilier
Id. voûte sous la tour nord-est.
Péterborougli, plan de la voûte
Id. bas-côté sud du chœur. ...
Id. bas-côté nord du chœur. ...
Id. Id. Id. plan.
Gloucester, bas-côté nord de la nef
Id. plan des piliers
Romsey, bas-côté sud du chœur.
Devizes, église Saint-Jean, plan de la voûte
du chœur
Malmesbury, bas-côté sud de la nef, plan
de la voûte.
Cathédrale de Durham, transept sud et nef.
Id. Id. nef
Essai sur la décoration architectonique,
78 vignettes. pp. 394
Porte de la maison de François P' à. Abbe-
ville
Id. Id. Id.
9
208
»
210
i»
211
à
232
P-
252
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253
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» 381
> 384
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» 387
5> 387
> 3S8
■» 389
S. 390
» 391
à 413
P- 415
.. 417
552
BrDur tir l'Slrr cbrtttcn.
Scolopendre (Langue de cerf.) > 423
Fougère. (Polypode vulgaire.^ » 423
Chapit. del'i^glise St-Nazaireà Carcassonne. » 425
Statue du Christ » 426
Ypres, façade de la maison des Tenfipliers. > 441
Id. ancienne Halle, restitution de la fa-
çade complète. '> 442
Plans de piliers » 463
Duriiam, transept nord, côté est > 467
Id. voûte de la nef, côté nord. ... •> 469
Christchurcb, chapelle est du transept
sud » 472
Durham, abside de la salle capitulaire. ... )> 473
Profils de nervures de voûte. 474 et 476
Durham, nervure de voûte p. 478
Durham, clef de voûte p.
Id. arcades principales du galilée. »
Essai sur la décoration architectonique,
30 vignettes. pp. 481 à
Arum naturel des bois [>.
Acanthe que le D' Woillez prétend être de
l'arum. *>
Chapiteaux de St-Benoit-sur-Loire. pp. 492 et
Église de Bagneux. — Arum interprété, p.
Église de Chambly. — Arum ondulé. ... »
Église de Taverny. — Chapiteau d'arum. »
Différentes formes d'arum »
Porte-feu en fer et cuivre, .\1\''' siècle. ... »
Groupe de mosquées à Stamboul »
Sainte Geneviève. >
479
4S0
4S7
4S8
491
493
494
494
49Û
496
507
527
ArnOULT (André.) —
B.\RDIER DE MONT.^U
B.\TTAND11£R (Dom A
Bekthelé (Jos.). — •
Bethune (Le B"").
BiLSON (John). —
BR.i^UN, s. J. (Jos.). —
Brykczvnski (A.). —
Ch.^beuf (H.;. —
Cloquet (Louis).
DE F.^RCY (L.). —
DE MÉLY (F.). —
D EN Aïs (Joseph). —
Destrée (Joseph;.
E. C. —
E. K. —
Germain de .Maiuv
Gekspach. —
-i^ Table par uoihg D'auteurs. ^
- Le château de Larochepot (Chronique)
Ll(MgrX.) — La Couronne de fer, au trésor de Monza Lombardie).
Le Trésor de l'église abbatiale de Saint-Matliias, A Trêves (Prusse).
Une inscription de cloche (Mélanges)
Fragments d'un « Physiologus » du Xll' siècle, à Monza (Mélanges). ..
Bibliographie pp. 65 à 68, i 58 à 160, 2;? à ;6o.
Périodiques.
). — L'archéologie au Vatican (Correspondance)
Bibliographie
- Église de Messines.
Les Origines de l'Architecture gothique
• La dalmatique du trésor de Saint-Pierre (Mélanges).
Tableau dédicatoire de la chapelle delà Sainte-Trinité h Lniilin (Royaume
de Pologne) (Correspondance)
Le monument de Mgr Rivet à Dijon (Mélanges)
Peintures murales du XV siècle à Beaune (Correspondance!
Bibliographie
Œuvres nouvelles (Chronique)
Essai sur la décoration architectonique. pp
La restauration des monuments anciens 11'"' partie).
Discours (Mélanges)
L'art et l'autel ( Id. )
Travaux des Sociétés savantes pp. 148, 247, 248, 333 à 336, 425 à 428,
Bibliographie pp. 68 à 76, 161 à 171, 346 à 350, 435 h 443, 527 à
Périodiques pp. 77,78, 533,
Restaurations monumentales (Chronique)
Restauration des ruines ( Id )
Chronique
Bibliographie
Mgr X. Barbier de Montault (Clironique)
Bibliographie
Bibliographie. ...
Bibliographie. p.
(Léon). — La Vierge Marie et le Serpent (Mélanges). . p.
Les Actes des Apôtres. — Tapisseries d'après Raphaël. p.
Les fresques de l'église Santa Maria Antiqua, au Forum Romain (Carnet
de voyage). p.
Correspondance d'Italie. pp. 51;, 141.240,326,419, 505,
Bibliographie p.
P-
P-
P-
P-
P-
338 a
... p.
... p.
... p.
... p.
PP- 363.
... p.
P-
P-
P-
PP- '53. 34°-
P-
25, 21:
394,
P-
P-
P-
... p.
... p.
. . . p.
pp. 251,
... p.
... p.
l'l>- 153.
339
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543
160
535
428
504
91
300
516
434
Cable De0 matières.
553
G. A. —
H. (Eugène).
Helbig fj.}.
Lambin (Ém.).
Ledieu (Alcius). —
M. D. —
MUNTZ (Ellg.)- —
OSTERRATH (Jos.). -
ROULIN (Doni E.). —
Rupin (Ernest). —
Saget. —
Serbat (Louis). —
Thiollier (N.) —
Weale (W.-H.-J.). -
X. —
Bibliographie
Correspondance.
Le Pérugin
Godefroid-Égide Guffens
De la restauration des monuments en Belgique et ailleurs (Mélanges), pp.
La vie et les oeuvres des grands maitres rendues populaires ( Id. ).
Bibliographie pp. 150,24g,
Nécrologie pp.
La cathédrale de Laon
Le rôle de l'arum dans la Flore gothique
Correspondance
La maison de François I" h Abbeville (Mélanges)
Une monstrance flamande à Sedan (Mélanges)
Les roses d'or pontificales
Les principes de l'art au inoyeii âge et les fantaisies de la décoration
moderne (Mélanges)
Travaux des Sociétés savantes.
Travaux des Sociétés savantes
Bibliographie
Pince et fer h hosties au Musée de Brive (Corrèze).
Ostensoir, style du XV siècle, à Notre-Dame de Cléry (Mélanges)
Correspondance
Bras-reliquaire à l'église Saint-Nicolas de Valenciennes
Correspondance
Les peintures des maitres inconnus Tableau attribué à Koger Van der
Weyden
Le Couronnement de la .Sainte Vierge, peint par Albert Cornelis
Quelques observations sur le '< Memling » de M. Kaemmerer.
Chronique
p-
42»
p-
423
p-
273
p-
455
234
314
p-
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36
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p-
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p-
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63
p-
246
p-
255
p-
281
p-
132
p-
58
p-
126
p-
58
p-
124
p-
361
p-
'3c
p-
177
ERRATA.
Page 248, I'' col. 6 ligne, au lieu de: longue et: lisez: largeineul.
» 272, 2° » Nécrologie, 7° ligne, au lieu de: achevé; lisez: achèves.
A.
Abadie, architecte, 346.
abbaye, d'Angers (Toussaint). 451 ; — Aulne,
82. 84. 228, 235 238, 269. 270. 489 ; ~
Baune-les-Messieurs, 68; - Bourges (St-Sul-
pice), 244 , — Conques. 167 ; — ' Emmaiis.
249 . — Flémalle. 426 ; — Flône, 317 ; —
Fontains. 392 ; — Gianselve. 331 : — Her-
ckenrode (des Dames nobles), 451 ; — Ju-
mièges. 438 ; — Klosterneubourg, 78 ; —
Komburg. 53=; ; — Laacherzee, 189 ; —
Limoges (St-.\Iartial), 282 ; —- Maredsous,
3Tc;,3iS; — Messines, 193; — ^ Melrose, 49S;
— ~Mont-St-Michel, 238 ; — Moutierneuf.
159; — Orval, 03. 235; — Ourscamp,
331 ; — Prague, 249; — Remiremont. 259;
— Saint-Anselme, 87 ; — Saint-Denis,
282 ; — Silos, 150, 15T, 153 ; — Silvacane,
28.^ ; _ Stuben, 185. 189; — Valvisciola,
58; -- Villers, 63. 82, 83, 84. 235. 236. 498;
Wiiitby, 370; — Yoult (Notre-Dame),
370-
Abbeville, hôtel Gruthuse, 144. 417 ; — mai-
sons en bois, 414; —m. de François I",4ii;
— m. delaTannerie,4i4.4i5; — porte sculp-
tée, 414, 415 : — rue Cache-Cornaille, 416.
abeille, 405.
Abin (château d'). 257.
Abondance (F), 189.
abside polygonale, 62.
Académie, artistique et scie*îtijique de Milan,
527; -des Inscriptions et Belles-Lettres, 60,
147. 244. 271, 329, 527 ; — royale d'archéo-
logie. 63. 333.
acanthe (feuilled'), 213. 217, 218,222,489-499.
Acciajoli (Nicolas), 9.
Achmet (mosquée d'). 538.
Actes des apôtres (tapisserie des), 9r-T23.
Adam, 190.
Adoration, des Bergers (Baldovinetti), 55-57;
— (Van der Goes), 344 ; — de V Enfant
Jésus. 17 r.
Adoro te. ï8ô.
Adrien, empereur, (mausolée d'), 243 ; —
(Luc), peintre. 427.
Aelst(Van). tapissier, 100, 106, 108, 109, iio.
Aerschot (église d"). 357.
Aertselaerl. Groeningenhof, 73.
Agathe (statue de Ste). 265.
Agen, ateliers de sculpture, 519; — cathé-
drale, 424, 520 ; — Congrès de la Société
française d'archéologie, 424 ; —études ar-
chéologiques, 519; - éghse des Jacobins,
424 ; — maisons antiques, 520 ; — musée,
519 ; — origine du nom. 424 ; — souter-
rains, 519.
Agenais, architecture. 424 ; — ■ églises, 520 ;
— [Revue de V ) , 78.
Agneau, mystique (adoration de 1"), 74; —
pascal, 287.
Agnès (Ste), 242.
ognus. 339.
Agréées (S). 183.
Aguilhon, 12-14, 16, 17, 21.
aigle (icon.). 321. 394. 404-
Algues-Mortes, maisons antiques, 85.
Aix, musée. 427 ; — reliquaire, 23 ; — trésor,
25-
Aix-la-Chapelle, capitulaires de Charlemagne.
4 ; — châsse de Charlemagne, 493 ; —
octogone carolingien, 545 ; — reliquaire
grec, 23.
Albert (l'abbé), rgo ; — duc d'Autriche. 12 ;
— d'Rste (rose d'or d'), 9 ; — le Grand,
162.
Albi, bibliothèque, 147 ; — cathédrale, 425 ;
— crosse de 1200, 403 ; — manuscrit, 147.
Alcamène, sculpteur, 61
Aldhun. église, 374.
Alexandre IV, 526 ; — VI (tiare d'), 252.
Algérie, fouilles, 329.
algues marines (icon.), 232.
Allegranza. (le R. P.), 20.
Allemagne (serge d'), 66.
Alost, fresques, 451.
Alunno (Nie), peintre, 274, 343, 344.
Amboise, château, 230, 257 ; — inventaire de
meubles anciens, 257 ; — (cardinal d'), 329.
anibon en marbre blanc, 305, 316.
Ambroise (S.), De obi tu Theodosii Magni, 20.
Ambrosienne, manuscrits de la bibl., 18.
Ami dit clergé fl'J. 77.
Amiens, cathédrale, 223, 504 ; — portail, 397.
amphithéâtres romains, 498.
Amsterdam, musée, 58.
amulette, 212 ; — égyptienne, 212.
ananas (décor.). 228, 289.
Ananie(mort d"), 94, 96. 97, 98, 108, ir6,
118, 122.
Analccta, hymnica viœdli œvi. 257 ; — Juris
pontificii, 15. 17.
Anatole (S ), 142.
ancolie (décor. ), 222, 224.
Anderlecht, église du Sablon, 85.
Andernacli, église, 523; — fonts baptismaux,
523: — St-Sépulcre, 513.
Andréa, de Florence, 439.
.Andria (duc d') (rose d'or du), 9.
âne (icon.), 406.
Angibault (Mgr). 543.
Angelico (Fra). 57, i[2, 157, 217, 279, 309,
313. 321.
Angeli (Luig. de), 22.
Angeluzzio (Diotisaivi). peintre, 142.
Angers, abbaye Toussaint, 451 ; — biblio-
thèque, 338; — cathédrale, 183; — Con-
grès eucharistique, 512 ; — église St-Jean,
159 ; — église St-Martin, 4 5 ; — logis
Barrault, 451; — Imusée diocésain, 544.
545 ; — musée St-Jean. 60 ; — palais de la
place de la Bourse. 431; — tapisseries, 174:
— tapisserie de l'Apocalypse, 544 ; — vitrail
du XlIIe siècle, 159.
anges. 362 ; — adorateurs, 186 ; — (les neuf
chœurs des). 361.
Angleterre, églises normandes, 366; — mo-
numents anciens, 238 ; — parcs pittores-
ques, 165; — premières croisées d'ogives,
365 : — (œuvre d'), 66.
animaux (icon.). 394; — fabuleux. 397.
Annales archéologiques, 185, 188, 359 ; — de
St'Louis des Français, 76.
Annecy, inventaire du château, 66 ; — inscrip-
tions latines, 424.
Annonciation, 519; — (Baldovinetti), 55; —
(Cavallini), 421 ; — (Giotto), 462 ; — du
XVe siècle, 68. 76, 308.
Anselme de Puysaie (D^), 76.
Anthyme Saint-Paul, 4r, 314, 365, 480, 529.
Antiquités, chrétiennes, 329 ; — classiques,
329 ; — puniques, 245 ; — à Denon, ^2>'^.
Antoine, de Padoue (.S.), 142 ; — abbé (S.),
142 ; — (tau de) 332 ; — (les) fondeurs de
cloches. 263.
Antonio Veneziano, peintre, 24:;.
Anvers, banque nationale, 411 ; — bourse,
461 ; — chemin de croix, 457, 461 ; —
église St-Georges, 45S ; — maison antique,
541 ; — peintures, 458. 461.
Apocalypse en peintures, 329.
Apollon, 35 ; — (statue d'j. 424.
Apôtres. 514; — (actes des), tapisseries, 91-
123.
Apoxyamène de Lysippe, 61
Apulie, ambons, 172; — sièges épiscop.,172.
aquamanile, 407.
aquarelle, 331 .
Arabes (art des), 219.
arabesques, 25.
Arasso, 93, 94.
Arbois (Jura), église St-Just, 331.
arbre de vie, 180.
Arçay, fera hosties, 285.
arc-boutant, 46 ; — brisé, 392, 468 ; — ro-
main, 403 ; — en tiers-point, 3OÔ.
archanges, 362.
Archelaûs, statuaire, 244.
archéologie (!'), 21 ; — romaine, 515.
archéonomie, 422.
architecte, Abadie, 346 ; — Assche (van),
316, 530: — Bernin (le chev.), 114, 115,
120 ; — Bethune (leb*"'), 165. 211, 215. 318,
356. 441. 530: — Beyaert, 408, 483; —
Boeswihvald, 346; — Boisseau, 165; —
Bonet, 4j8; — Bordeaux (R.), 314; — Bou-
vard, 80; — Couran, 521 ; — Daly (C).
425; - Duban. 346 ; — Ducerceau, 165 ; —
Dumortier, 63; — Gautière (J). 332; —
Geernaert (H.). T96, — Guillaume de Raz,
519; — Hansen, 197; — Huet Ludin. 262;
— Iwine ( ) . T, ), 384 : - Joli ( P. ), 262 ; —
Languerock, 177, 247, 248, 269, 530, 534,
.S35. 539 : — Lassus. 83. 346. 498, 501. 539;
— Le Nôtre, 165; — Libergier (H. i 431 ;
— Licot, 63 ; — Mallet, T45 ; — Marchioni
d'Arezzo, 242 ; — Maurette (H.). 483 ; —
Mellet, 452 ; — .Michel-Ange, 274, 276 ; —
Monduit, 433; — Mortier (Et.), 247; —
Naert, 201 ; — Newton (K. ), 486 ; — Pac-
cand. 237 ; — Palissy, 165; — Pantilli (Bac-
cio), 93 ; — Polajuolo (Sin-del), 144 ; —
Pugin (Welby), 441 ; — Questal, 346; —
Rossi (J. de), 242, 512, 534 ; — Rudd, 441 ;
— Ruprich Robert, 238. 346. 367, 371.373; —
Sauvageot (L.). 528; — Schaubert, 227 ; —
Sinan, 527 ; — Suisse (Ch.), 136, 137, 433.
439 ; — Vaudoyer, 175 ; — Verhaegen, 23S.
355-357; — VioUet-le- Duc, 154, 220, 231,
234. 238. 239. 314, 347, 365, 372. 384. 426.
431, 433. 468. 488. 489. 493. 495. 509 ; —
Waele (de). 238 ; — Wulf (Ch. de) 456 ; —
Ysendyck (Van), 176.
architectes, 64 ; — alricains, 518 ; — anglais.
368; - gothiques, 485. 494. 495; — mé-
diévaux, 334, 470 ; — normands, 367-374,
463, 470, 473 ; — romans, 485, 494, 495.
Architectural record, 212.
architecture, agenaise, 424 ; — auvergnate,
168 ; — bourguignonne, 149 ; — byzantine,
520; — domestique, 425; - espagnole,
247 ; — féodale, 78 ; — française, 42 ; —
gothique, 46, 365, 463-482; — limousine, 149;
— militaire, 331, 356, 519; — normande,
366, 367 ; — provençale, 149; — religieuse,
63. 68, 261 ; — romane, 148 ; — wallonne,
333; — (traité d'J. 532.
archives de Bruges, 319. 321 ; — ^ de la Com-
mission des monuments historiques, 346 ;
— du département du Rhône, 67; — rie
Messines, 193; — d'Orsini (cardinal), 445;
— d'Urbino, 142 ; — de Valenciennes, 132;
— du Vatican, 2, 3, 6, 7, 76.
TQoi. — Table analytique.
556
9Rc\)ue lie T^rt cbrctieu.
Arcucil, église, 496.
Arendonck. (vieille tour à), 63.
Arendt, 5)33.
Arezzo, église Santa Mnria délie Grazie, 327.
Argos. inscriptions grecques, 244.
Ariège, églises foilifiées, 62.
arithmétique (l'I (icon.), 120.
Arles, corniche du théâtre, 25.
Arlon, musée archéologique, 335.
Arménie {roi d'), 3-10.
armes guerrières grecques, 331 ; — (inven-
taire d') 339.
armoiries, communales, 52s ; — de Malines,
400; — de Montmorency, 114; — de Monza,
12; — desKécollets. 237; — de Rivet (Mgr),
•37-
armoire. 128.
Arnould (S.) 130; — (.^ndré), 539. 540-
aroïdes (iconographie des plantes), 489.
Arras, ancien collège des Jésuites, 129; —
éghse St-Nicolas, 129 ; — fabrication de
tapisseries, 94 ; — hôtel de ville, 503.
art, allemand, 32. 458; — arabe, l'O, 153.331 i
— barbare, 23; — bourguignon, 440; — by-
zantin, 32,53, 247. 313. 520. 528; — chinois,
330, 437 ; — chrétien, 70. 76, 8=;. 227. 300,
431,437.506: — décoratif, 25, 139; — ecclé-
siastique, 335 ; — égyptien, 32. 227. 486;
-flamand, 32, 53, 433, 438, 439;— floren-
tin, 275 ; — franc, 333 ; — français, 138 ;
— gothique, 30. 69, 135 ; — grec. 2';, 28.
32. 61, 217, 219, 340 ; — indoboud-
dhique, 330 ; — italien, 137,327 ; — italo-
flamand, 171;— japonais, 437; — limousin,
150 ; — médiéval, 28, 31. 113 ; — méridio-
nal. 440 ; — moderne, 135, 440 ; — monu-
mental, 74 ; — niosan. 85 ; — musulman,
438; — national, 133, 135: — du Nord,
440 ; — normand, i6t ; — nouveau, 138; —
ombrien, 175, 343 ; — oriental, 61 ; —
populaire, 138; — romain, 32, 219; —
roman français, 148 ; — romano-chrétien.
23 ; — sinojaponais, 436; — syrien, 603; —
troyen. 160 ; — vénitien, 540.
Art et l'aulel{\'), 350. 418.
Arthémis (temple d'), 6r.
Artt (corporation des), 240.
artichaut (décor. ). 289.
artillerie. 258.
artistes. 27S ; — gothiques, 231.
dernes. 284 ; — parisiens, 48
48. 394-
arts, libéraux, .\2, 43 ; — mécaniques, 35 ; —
(classification des) 157.
arum (décor.), 220. 232, 488 498.
aryennes (les races), 156.
ascension, 42.
Asper (Hans), peintre, 177,
asphodèle, 214.
aspic (icon. ), 397.
Assche (van), architecte, 316, 530.
Assenois. éghse, 356.
Assise, crucifixion. 242; — église inférieure.
242 : — santa Chiara, 172 ; — fresques,
121. 252. 398.
assomption, 422.
Assyriens, 394 ; — (arbre mystique des), 35
aster, 212, 213, 292.
astronomie (1') (icon.), 220.
Atarg, 65.
Athènes, acropole, 36, 236 ; — (ducs d'),236:
— École française d'architecture, 61, 237 ;
— Erectheion, 237, 238, 483, 498 ; — Insti-
tut archéologique ailtmand, -iyj ; — méto-
pes du Panhénon, 398 ; — monument de
Lysicrate, 237 ; — Panhénon. 236, 403.
498. 501 : — porte Beulé. 236 ; — temple
de la Victoire Aptère, 236, 501 ; — tour
des Vents, 498.
Atrée, trésor, 437.
Attert, église, 335.
attributs, 28, 35.
207 ; — mo-
— romans.
Auberive, église, 261 ; — fonts baptismaux,
262.
Aubert (Jean), ivoirier, 417.
Aubeterre, église St-Jacques, 160.
Aubiac, église, 520.
Aubusson (tapisseries d'), 159.
Auch, cathédrale, 425 ; — vitres, 425.
Audenarde, Hanske de Kryger, 481.
Auge de Lassus. 498, 501, 539.
Augustin (S.), 20, 327 ; — (reliques de), 89.
Aulne, abbaye, 228, 235, 236, 238, 269, 270.
489 ; — église abbatiale, 82, 84.
Aureli. sculpteur, 422.
Aurère-l'lfglise, église. 149.
aurttus, 400.
autel, en marbre. 143 ; — iii.muinal, 190 ; —
(consécration d") 190.
Autun, cathédrale, 508; — porte romane
538.
Auvergne, monuments féodaux. 68.
Auvillcrs, église, 470.
Auzanne, 158.
Avallon, monnaies gauloises, 332.
Aveiiing, église, 386.
Averdon. fouilles, 02.
aveugle-né (!'), 76.
Avignon, musée, 171 : — papes, 1-3 ; —
porte Liiiibei t, 85 ; — porte de LoiiU, 85 ;
— tombeaux, 252 ; - icniparts, 424, 451.
49B.
Avrechy, église. 490.
Baaiyathon, rab phénicien, 518.
Babylone, jardins suspendus, 162.
Bacchus, 222. 226.
Baërze (Jacques de), sculpteur, 433.
Baes (E.), 248, 531.
Bagneux, éghse 494, 496.
bague antique, 329 ; — eu bronze, 245 ; —
en or, 62.
baguette à ruban, 28.
BaiUv. église, 33t.
Baldovinetti (Alessio). peintre. 55-57. 82.
Bâle. cathédrale. 7 ; - rose d'or de Clément
V, 6 1 — trésor, 7.
baleine (icon.), 106.
Bamberg, statues, 252.
bandelettes (décor.), 28.
banderoles (décor.), 31.
bannières (décor.), 158.
baptistères byzantins. ."iiS.
V.Ax-\ii-\i\xz,SociUi des lettres, sciences et arts,
332.
barbares alamans (industrie de) , 62.
Barbe (statue de Ste), 261.
Bari. auibons, 172 ; - siège épiscopal, 172 ;
— trésor, 543.
Banard des), fondeurs, 263.
Barthélémy (St)(peau de), 67; — (martyre de),
345 ; - de Vire, 36, 37.
Bartoli de Sienne, orlèvre, 9, 10.
Basclievis(livariste), peintre, 141.
Bazeltin (Arnould), 130.
Basile (S,), 145.
basilic (icon.). 397, 398.
basilique, Reims (St-Remi). 529; - Rome.
(Ste-Julienne). 437 ; — (St-Paul-hors-les-
mur-), 162, 2.(1. 242; — Ste-Pétronille, 514;
— (St-Pierre), 9. 114;— (St-Sixte). 512.
513 ; — Soissons, 85 ; - à plafond, 365
— Vaticane (inventaire de la), 52.
Basin(.S. ), 184.
bassin. 258, 259; - antique à Amsterdam, 58.
Bastin (Henri), peintre, 427,
Bataille (Nicolas), tapissier, 174.
Baltandier (le docl, Alb.), 515.
Baiidimont, fera hosties, 285.
Baune-les-Messieurs, abbaye (reliques de 1"),
68 ; - mobilier de l'égliîié, 08.
Baye (baron de), 453.
Bayeux, cathédrale, 161, 368.
Beau, (dans l'art) (le) 154 ; - (gradation du).
155* ~ (impression du). 155; — (lois du),
139, 154 ; — moral (le), 155 ; — (théorie
sur le), 77.
Beaugeiicy, hôtel de ville. 402.
Beaumé. cloche du XVIII=s.. 263.
Beaumont (le c»*^ CIi. de), peintre, 70, 417.
Beauinont-sur-Sarlhe, 331.
Beaune, église Notre-Dame, 508 ; — hôtel-
Dieu, 539; — peintures nturales du XIK s.,
508, 341 ; — Société éduenne, 508 : — ta-
pisseries, 510; — vitrail. S/, 509; - (Jean
de), 272.
Beausac, église, 69.
Beauvais, abbatiale St- Louis, 350; — Basse-
Œuvre, 463 ; — cathédrale, 431 ; — église
St-Étienne, 366, 474.
Beau.x-Arts (histoire des). 436.
Beine, bancs du Wlll" s., 262 ; — éghse,
261 : — fonts baptismaux, 2O2 ; — (réper-
toire archéologique pour le Canton de), 261.
Beissel (le P.), 78, 172.
Belgique, Commission royale des monuments,
63, 23 = , 451, 524 ; — école de Saint-Luc,
215 ; — ruines monumentales, 238 ; — res-
tauration des monuments, 234. 314.
Belgique, illuslric (la), 71 ; - pillores<jue il
mon umentale, 74.
Belgrade, musée, 329.
bélier (icon.), 394, 406,
Belleforuainc, église, 384, 395.
Bellegambe (Jean), peintre, 196; — (Vaast),
pemtre, 196.
Belléme, antiquités, 435 ; — église St-Léo-
nard, 244.
Bellérophon, 398.
Bellini ((iiov. ), peintre, 453.
Benedetto da Maiano, sculpteur, 420.
Bénévent (archevêques de), 251 ; — archives
du cardinal Orsini, 545.
bénitier des lépreux, 332.
Bénigne (S.) (châsse de), 431 ; — (martyre
de), 430 ; — (tombeau de), 433, 434.
Benoît IX, (monument de), 89; — XI, 5 ; —
XIL 3. 8 ; — (roses d'or de), 8; — (tiaiede).
252 ; — XIIL 252 ; — (rose d'or de). 10 ; —
XIV. 16 ; — (ordre de St-). 87 ; — (Ca-
mille). 509.
Benoite-Vaux. médailles. 332.
Benozzo Gozzoli. peintre, 243.
berce (décor. ). 228.
Berg-op-Zoom. moiit.int de cheminée, 403.
Bergaine, 259.
Bergman (P.), 530.
Berlin, musée. 87. 531 ; — quadrige du mo-
nument national, 409; — statue de Frédé-
ric le Grand, 173.
Bernard (S.), 156 ; — de Saintes, 431.
Bernard! (Valentino), peintre, 14 1, 142.
Bernardin de Sienne (S.), 141.
Bernay, charpente apparente, 463 ; — église,
37°'
Berneuil sur Aisne, église, 463.
Bernin (lechev.), architecte, 114, 115, 120.
Bernulf(S.), (étolede). 535.
Berru, calice en vermeil. 2Ô1 ; — église, 262
— statue de S. Hubert, 261.
Berteaux (Charles), 261.
Berthelé (Jos. ), 70, 264.
Bertram (A.), 172.
Besançon, cathédrale, 72, 33a ; — pièces
d'honneur et jetons, 62.
Bettreniville, église, 261 ; — statue en bois,
262.
Bethune (le b°"). 1Û5, 211, 215,318, 356, .(.(i,
530.
Beuron (bénédictins de), 249.
Beyaert. architecte, 483.
Bezold (van). 367. 475.
Bianconi, 19.
bible latine. 424.
Cable analytique.
557
Bibîia pattpi'mm, 250.
Bibliographie, 6^, 150, 248, 337, 429, 444,
526.
bibliotlièque, d'Albi, 147; — Cambrai, 174:
— Carpentras, 5 ; — Bruxelles (de Bour-
gogne), 165 ; — Dijon (janinienne), 432 ; —
Florence (nationale), 3 ; — Madrid (Escu-
rial), 329 ; — Paris (de l'Ecole des Beaux-
Arts), 453; - (nationale), 60. 61, 284 ; —
Reims, 331 i — Rome (du \'atican), 343 ;
— {Victor Emmanuel), 76; — Saint-Omer,
320; — Upsal. 172 ; — du XIV^ s.. 65.
biche (icon,), ^o6.
Biesbroeck (van), .128.
Bievène (notice hisiorique sur), 248.
bijoux, du Caucase, 4;3; — persans, 331.
Billet, charpentier. 433
billette (décor.), 539.
Bilson (John). 365, 463, 481.
Binche, collège St-Ursiner, 357 ; — hôtel rie
ville. 247, 357 ; — vitraux, 357.
biribi (jeu du), 339.
Birkin, église, 473
Bitouto, arnbon, 172,535; — croix triom-
phale. 357 ; — remparts, '^$7.
Blanc (C), 134. 346.
Blanchart (U ), sculpteur. 86.
Blanchet, 147, 245.
Blaes, musicien, 256.
blason italien (devises du), 65.
Blois. jardin, 165, 233.
iîlyth, église, 372 ; — prieuré, 370.
Boccali d-i Camerino, peintre, 271. 343, 314.
Bock (Pr. ), 22. 23, 53.
Bodard (lean), maître cirier, 76.
Boe^uilwald, architecte, 346.
Boethas. sculpieur grec, 60.
Boeto( Henri del, 8*
bœuf (icon. ), 406, 407.
bœufs (statues colossales de), 45.
Boileau (L. A. ), 532.
botradis, 68.
Boisselier, i^einlre, 417.
boite, d(* consécration, T90 ; — polychromie
du VII^^s., 68.
BoUettiiw diarcheoïogia, 511, 512.
Bologne, Sle Ct!cile (\q Raphaël, 103.
Bombelli, rç).
Bon Paitenr, statuette en marbre blanc, 534.
Bonaguil, cliàteau, 519.
Bonet, archit., 408.
Bonfigli (Ben.), peintre, 274, 343.
Boni {le comm, ), 302, 422.
Boniface, V'I II, 241, 256; — {statuede), 232,
326 ; — tiare, 253 ; — IX (rose d'or de),
9-
Bonino (reliquaire de), 8g,
Bonn, chemin de croix, 523; — église Sl-
Florent, 522.
Bonnefois {J. de), 418.
Bonnes, fera hosties, 285.
Bordeaux, comptes du diocèse, 158 ; — mu-
sée, 169 ; — (épée de), 66 ; — (Raymond),
architecte, 314.
Bordi (Pietro). peintre. 419.420.
Bordiau, architecte, ^^25.
bordures à inscriptions, 527.
Borgognone, peinue, 56.
Boscherville, abbatiale, 161 ; — église, 370,
463, 464 ; — porte, 161,
Bosco, couvent des Frères -Prêcheurs, 130,
Bosco- Reale. ancien édifice, 88; — fresques,
88, 241.
Bossuet, 156 ; — (monument de), 137, 173.
bouc {icon.), 394. 407.
Bouchardon (J -B'). sculpteur, 433.
Bouchet, fer à hosties, 285.
boucles d'or. 23.
bouclier, 33. 34.
Bouddha. 436.
boud'lhisnie, 436.
Boudrillel(Jean). sculpteur sur bois, 432.
Bouillet (A.). 166. 264.
Bouillon, château, 235.
Boulmont (G.). 73.
Boulogne, bois, 1Ô5 ; — égUse Notre-Dame
227.
bouquets, 25. 258.
Bourg-Charente, inventaire du château,
^59.
Bourges, abbaye St-Sulpice, 244 ; — camées
245; - cathédrale, 17;, 226, 231 ; —
maison antique, 40S ; — reliquaire de la
Croix, 245.
Bourgogne, peintures murales, 509 ; — (toile
de), 333.
Bourny, église, 525.
bourse de parchemin du XV"^ s.. ï8o.
Bout (S.), patron des potiers. 257.
Bontillier (le ch"^), 185.
Bouts (Thierry), 125, 177.
Bouvard, archit.. 86. 289.
Bouxin (l'abbé), lô, 37.
Boysseau, arcliitecte, 165.
Boysson (B. de), 65.
bracelets en or, 24.
Braine-ie-Comte, glossaire topographique,
248 ; — grange des Pauvres, 248 ; —
histoire, 248,
bras-reliquaire, 126.
Braun(Jos.), 54 ; — (le R. P.), 172, 535.
Bredons, église, 149.
Brescia, ambon de San Salvator, 412.
Biessers (L. ), peintre, 85.
Bretagne, 88.
Brézé (tombeau de), 161.
Briançon, hypocauste décoratif, 244.
Brigueil, fer à hosties, 281.
Brive, fer à hosties, 281-287 : — musée, 281-
283.
Brocard (Ant. et Claude), 263.
Broederlam (Melch,), peintre, 433.
bronze (âge du), 525.
bionziers grecs, 246.
Broussole (l'abbé), 273, 280, 340.
Brown(le prof.), 165, 477.
Bruges, abbatiale de l'Eeckout, 130; —
anciens peintres, 441; — archives, 319, 321;
— chapelle du Sl-Sang, 211 ; — châsse de
Ste Ursule. 320 ; — église Notre-Dame,
131 ; — église de Jérusalem, 211 ; — épita-
phier, 165; — gildeSt-Jean et St-Luc, 130 ;
— St-Fraiiçois, 363 ; — St-Luc, 364 ; —
Gruuthuuse, 356 ; — hôpital St-Jean, 131;
— hospice St-Julien, 131; — hôtel de ville,
89; — peintures de Memling, 34; —
poorterslogie, 356 ; — porte des Baudets,
356 ; — rue de l'Ane aveugle, 74-75 ; —
tour St-Sauveur, 431.
Brune. 68.
Brunelleschi, architecte, 85.
Brunetiêre, 156.
Brunner, 251.
Brunswick, cathédrale, 334 ; — (duc de)
(rose d'or de), 10.
Brusco (Paul Jérôme), peintre, 143.
Brutails. i^fy. 348. 349.
Bruxelles, bibUothèque de Bourgogne, 165 ;
— congrès scientifique, 519; — école St-
Luc, 138 ; — église du Sablon, 83, 86, 176 ;
— de Ste-Gudule, 84. 86, 176 ; — façade de
maison, 408, 411 ; — Grande Place, 06 ; —
hôtel de ville, 347, 481 ; — maisons anti-
ques, 271 ; — musée, 71, 89, 462 ; — quar-
tiers pittoresques, 347 ; — Société arckéo-
logiqiie,-2.^Z, 426; — tapisserie des .<4i:^tfj(/«
apôtres, 93 ; — du XVI^ s., 115, 117,
119.
Bruyland (E. ), 71.
Bryckczynski (abbé), 146.
bucrâne (icon. ). 407.
Buffalinaco, peintre, 421.
Bugah (Gasp.). dominicain, 17.
buisson ard'-nt, iconographie, 6g.
Bulletiv , archéologique, 78 ; — de correspon-
dajice hellénique, 534: — de^ métiers d'art,
533 ; — monumental. 77, 78, 264.
Bunzen, 96, 97, gS, I16-119, 122.
buon fre<:co, 56, 57, 311, 50/.
Burckardt {].). 55, 56, 165, 279.
burettes, 66.
Burgkmair, graveur, 61.
Burgos, musée, 150.
buste, de Charles lï d'Espagne, 86; — Julien.
246 ; — Lôwendahl (maréchal). 60; — Ma-
réchal de Saxe, 60 ; - Pigula, 60.
Bu.xerolles, Pas de St-Jacques. lôo.
Byzautiiiisches Zeitsckrift, 54.
Byzantinisme dans l'architecture espagnole
(le), 247.
Byzantins (les), 219.
Cabaret (château de), 425.
câble (décor.), 49.
cabochons (décor), 29.
c,i.dran d'horloge, 484.
caducée, 35.
Caen, église St-Etienne, 371. 374 ; — St-Ni-
colas, 370,474 ; — Trinité, 368, 464, 469 ;
— Sculpture, 232.
Cahier (le P.). 4. 160. 257, 321.
Cahors. cathédrale, 401 ; — maison antique
62.
caladre (icon.), 398.
Calcar, église, 522 ; — liôtel de ville, 523 ; —
lustre, 523 ; — maître autel, 522
calice, ministériel, 250 ; — en vermeil, 262; —
du XVe s., 158 ; — du XVK s., 191.
Callimaque, 218.
calvaire, 88.
calvaires bretons, 176.
camaurum, 251.
Cambrai, cathédrale, 131 ; — chapelle de
N.-D. de la Treille, 171 : — cloches
antiques, 332; — collégiale St-Pierre, 171 ;
— église St-Aubert, 131 ; — manuscrit de
la bibliothèque, 174 ; — Société d'émula-
tion, 332.
camée, antique, 188; — de Bourges, 245.
camelaurîim., 251.
camellan. 398.
camélia (icon.), 290.
camelot de Reims, 66.
Camille de Lellis (S.), 142.
Campanula. carillon, 290.
Campin (Robert), peintre, 426.
candélabre, 30, 31. 258.
Cannes, pièces sculptées. 329.
Canova, peintre, 138. 153.
Cantal, architecte romain, 148.
Cantorbéry, cathédrale, 371, 473. 474.
Capella greca, 513.
Capitan (le D^). 147.
Capoue, église Sant-Angelo in formis, 312.
Caprais(S. ) (statue de). 261.
Caprarola. jardin, 163, 165.
Capricorne, 398.
caravelles, 158.
Carcassonne, cathédrale St-Nazaire, 350.
425 ; — chapit-aux, 425; — enceinte, 498 ;
— remparts. 239 ; — statue du Christ, 481 ;
— vitraux, 42Ô.
Cardi (Lod. ), peintre, 427.
cardinal (robe de), 66.
Carpentras, bibliothèque, 5.
carreaux, 259 ; — peints, 332 ; — de terre
vernissée. 331, 424.
Carthage, colonnade antique. 329; —cymbale
phénicienne. 147 ; — fouilles. 61, 245, 517 ;
— lampes chréiiennes. 401 ; — monument
du card. Lavigerie. 76 ; — nécropole puni-
que, 518.
Carton de Wiart (H.), 138, i )0.
canons d'autel, 191,
cartouche, 32.
Casanova (A. F.). i6ï.
Casier (J.), 357.
casque de bronze-, 167 ; — du XII<= s., 165.
Casseneuil, tn-^sor de l'église, 66.
Castagno (Aiidrea del), ])eintre, 508.
Castelfranco (le ch, J.-Bte), i^.
castels féodau.s. 498.
558
3Rel)uc Dr l'art cbvcticu.
Casier (le ch. van). 162, 333 — 335 ; —
(John). 473
Castor et Pollu.v (temple de), 300. 301.
catacombes. 255; — (cimetières des). 511.
513 ; -crypte des Sts-Pierre-et-Marcellin,
S'-. 5'3-
Cathalamus tie Rocha. orfèvre, 10.
catliédrale, Agen. 530; — Albi, 425; —
Amiens. 504; — Angers. 174. 183; —
Auch. 425 ; — Autim. 508 ; — Bàle. 7 ; —
Bayeux, 161, 368; — Beauvais. 431; —
Besançon. 62. 232 ; — Bourses. 175. 226.
231 ; — BrunsHicl<. 334 ; — Cahors. 401 ;
— Cambrai, iji ; — C'anlorbéry. 371, 473.
474 ; — Carcassonne. 423 ; — Chartres, 140,
183. 225, 227. 228. 331. 431. 493 ; —
Cologne. 334, 503. 545 ; — Compostelle.
160 ; — Constance. 334 ; — Durham. 368,
374.376.391. 463. 482; — lily, 370.371.379;
— Evreux. 175, 480 ; — Florence, 93 ; —
Gand, 74, 438 ; — Gap, 175 ; — Gloucester,
372, 373. 464 ; — Goslar, 172 ; — Laon, 36.
230, 349. 384. 406, 407 ; — Lincoln. 471 ;
— Lisieux, 379 ; — Luxembotirg, 538 ; —
Lyon, 397, 403 ; — Malines, 162 ; — Mans,
183 ; - Marseille. 175 ; — Mayence, 334 ;
— Meaiix. 92, 108. 115, 138, 221, 294 ; —
Milan, 227, 232 ; — Monza, 22 ; — Nico-
sie. 517 ; — Noyon, 39, 78, 349, 517 ; —
Nuremberg, 334 ; — Paris, 30. 223, 224 :
— Peterboroiigh. 382- 385 ; — Puy, 69; —
Ratisbonne. 172 ; — Reims. 30. 140, 155,
175. 222, 231. 331. 431. 48r. 504. 519; —
Rochester. 369. 371 ; — Rouen, 58. 59.
175. 270. 355; — Séez, 175; — Senlis, 349;
— Sens. 78, 384. 400. 403 : — Soissons, 37,
43. 47. 384; — Strasbourg, 270. 431; —
Toulouse. 168 ; — Tournai. 335. 350 ; —
Tours, 218; — Trêves. 180; — Troyes,
227 : — Versailles, 30; — Winchester, 370,
373, 380 389; — Worcester, 371, 373,
379 '• — Vpres. 524.
Catherine (Ste), 142, 540 ; — (mariage mys-
tique ,iej $si-
Caudecotie. vieilles maisons et remparts, 520.
Caumont (de), 36.
Cauntrain. peintre, 427.
cavalier hibériqite, 246.
Cavallini (Pietro). peintre, 88, 241, 243, 421.
Cellin. église. 332 : — tour romane, 332.
Celhni (Benv.). 420, 434.
Ctiie (la) de Léonard de Vinci. 57.
centaure (icon. ). 398.
céramique japonaise, 437.
Cercle archéologique d' Enghic», 248.
Ctifétnouitil romain, 12.
C'érès, 189.
cerf (icon ), 65. 258. 407.
Cerigatto, statues en marbre et en bronze, T48.
Cerigo, statue en bronze, 245, 24Ô.
cerisier (décor. ). 290.
Cerisy-la-Forêt. église, 464.
Cernay-Iez-Reims, chapiteaux, 261 ; — église,
261: — vantaux' du XIV'-' s., 262; — Vierge
du XI V'c s., 262.
Cessenon (manuscrit de) 70.
Chabeuf (H.), 138, 158, 174, 273, 346. 434,
502, 510.
Chaise- Dieu, église, 69.
Chaldée, bas-relief historique, 60.
Challes, cloche, 51.
ChAlons. église Notre-Dame, 78.
Chamalières-sur-I.oire, église, 69.
Chamaret. tour. 78.
Chambéry. monument des frères J. et X. de
Maistre. 173.
Chamberlayne(le major), 245.
Chambly, église, 494 - 496.
Chambre apostolique (florin d'or de la), 11.
chameau (icon.), 157, 408.
Champ Dieu, église fortifiée. 69.
Champ.igne (sculpture dans la), 160.
Champigny, église, 228, 496.
Champvert, fouilles gallo-romaines, 62, 329.
chandelier de cristal, 66.
chant liturgique. 87, 354. 449.
Chanteloup. inventaire. 257.
Chantilly, Jardin, 165 ; — livre d'heures, 455 ;
— musée Coudé. 246.
Chanzy (monument du général), 173.
chape. 65.
chapelle,'^65 : — à Bruges (.St-Sang). an ; —
Cambrai (N.-D. de la Treille, 17 1 ; —
Cléry (des Dunois-Longueville), 133 ; —
Dijon (.St-îean), 136; — Florence (Bracacci),
1Q2 ; — (des l^spagnols). 121. 409 ; — (des
Princes). 241 ; — (du Tombeau). 55 ; —
Nimègue (palatine). 498 ; — Padoue (de la
Madonna do l'Arena). 57: — Paris (la .Ste),
223, 230, 272, 504; — (St-Cloud), 13; —
Rome (.Sixtine), 92, 93. 99. 106, 108. 117.
118 : — San-Miniato (du cardinal de Por-
tugal). 55; — Tour de Londres. 368-370;
— chapelles, à absides trifoliées, 350; — tri-
choves. 359,
chapiteau, d'acanthe, 218.490. 492-497; —
d'arum, 490 -497; — byzantm. 219; —
corinthien, 218, 517 ; — de cresson, 228 ;
— cubique, 368 ; — en éventail. 149 ; — de
fougère. 46 - 48 ; . — historié. 520 ; — de
lierre. 227; — des musiciens, 161; — de
nénuphar, 42. 221 ; — octogonaux. 37 ; —
de plantain, 441; — roman, 264; — à tailloir
carré. 37 ; — des vendanges, 222 ; — de
vignes. 47. 48, 223 ; — à volutes, 368 ; —
à Carcassonne, 425 ; — Meaux, 221. 223 ;
— Messines. 199; — Saint- Benoit-sur- Loire.
492 : — Séhourg, 223 ; — du XII'^ s. 41.
540; — du XI 11" s., 41. —
chardon (décor.). 231. 232,
Ch,arleniagne, 349; (châsse de), 4;— (capitu-
!airesde),59. 102, 493; — (dalmatiquede),52.
Charleroi, 73.
Charles, l" d'Anjou. 517; — II d'Espagne
(buste de), 86; — IV, 249;— \' (diplôme de).
230 : — (inventaire), 11. iBo ; — VI (inven-
taire de), 7 ; — (rose d'or de). 7 ; — VII.
441; — IX. 244 ; — Borromée (S.). 15. 16.
20 ; — Quint (couronnement de), 18. 427 ;
— le Téméraire (inventaire de), 11. 195.
Charly-sur-Marne, cloches, 350.
charpente apparente, 368, 463, 468, 477.
Chars, église, 264.
Chartres, cathédrale, 140, 183, 224, 225, 227,
228, 331, 424. 431, 493 ; — fouilles, 331 ; —
portes sculptées, 161 , — statues, 252.
chftsse, de Charlemagne, 4 ; - d'argent, 258 ;
— limousine. 153 : — (fiagments de) 180.
Chassenon, fouilles gallo-romaines, 62.
Chastenet (inventaire du). 67.
chasuble, du XVI= s.. 191 ; — du XVII' s.,
191.
chat, 408 ; — huant, 409.
château, d'Abin, 257; — Amboise, 230, 257 ;
— Annecy 66 ; — Beauniont-sur-Sarthe,
331 ; — Bonaguil, 519 ; — Bouillon, 235; —
Bourg-Charente, 159 ; — Gabarit, 415 ; —
Chanteloup, 257; — Clèves, 521; — Coucy,
498 ; — Coutances, 147 ; — Durham, 371,
476, 480 ; — Estillac, 78, 520 ; — Flône,
317 ; — Fontainebleau. 60. 424 ; — Fran-
chimont, 86. 235 ; — Gaillon. 329 ; —
Gand (comtes de Flandre). 235. 269, 355,
357. 498. 499. 502 ; — (Gérard le diable).
238 ; — Gevaudan, 78 ; — Gisors, 517 ; —
Jarnac. 339; — Karlstein. 249; — Kempen.
521; — Larochepot, 539: — Liancourt,329:
— Logne.235; — Lublin,i44; — Madaillan.
425. S20 ; — Moha. 235 ; — Myland, 521 ;
— Oiran. 65 ; — Orclier. 92 ; — Pau. 521 ;
— Pericard, 78, 519; — Pierrefonds.238; —
Vau de Cernay. 219 ; Verres. 258 ; — Vil-
mon sur Saha. 184.
ChSteau-Chalon. reliquaire de la Ste Epine,
68. 1.(9; —de St-Just, 68.
châteaux féodaux. 424.
Châielet. croix triomphale, 356.
C'haumont. église St-Jean-Bapt., 431.
Chaussenot, serrurier, 433.
Chaux du Mondague. chef de S. Léger. 149.
Chayelle. compte de l'église. 68.
chélidoine (décor.). 222, 224.
chêne (décor.). 222. 225.
Chennevières. église, 224.
Chenonoeau. jardin. 165.
Chéops, pyramide, 402, 499.
Cherchel, fouilles, 330.
chérubins. 362.
cheval (icon.). 409 ; — marin. 401.
chevelure dans les mosaïques (représentation
delà). 310.
Chevigny. cimetière burgonde. 62.
chèvre- feuille (décor), 217, 295.
Chevreuil, directeur des teintures aux Gobe-
lins. 102.
chicorée (décor.), 217. 232.
chien (icon. ), 409.
chimère antique. 398.
Chine, tour en porcelaine. 437.
Chinois, 290-291.
Chisi (Francese). peintre, 142.
chœur en conque. 69.
Chomton (le ch'i=). 429.
chou frisé (décor. ). 58. 59.
chouette (icon.). 409. 412.
chrétiens (costumes des premiers), 514.
Christ, adoration des bergers, 55-57 ; — as-
cension, 62 ; — crucifixion. 57, 142, 190,
242,250, 309. 313. 505. 509 ; —déposition,
124, 277, 509 ; — figure, 403. 404 ; — pas-
sion. 42. 250 : — résurrection. 42. 55 ; — ■
(robe du). 104 ; — statue. 426 ; — vie, 190.
Christchurch, église, 472.
Chronique, des arts (la), 234, 269, 315; —
rijnt'e 344.
chrysanthème (décor.), 231. 295.
chute (décor.), 2;,
Chypre (royaume de). 3.
Cidaris. coiffure du grand prêtre juif. 251,
252.
Cimabue, peintre, 57, 312.
cimetières romains, 62. 255.
cimiers, 33. 34.
Ciro Ferri, peintre. 243.
Clagny. jardin. 165.
Claire (Ste) (puits de). 421.
Clans .Sluter. 440.
Clazomene (tasse de), 147.
clef de volîte. 479.
clématite (décor.). 290. 297, 299.
Clément. (S.). r45 ; — IV. 249; — V. 25^,
347 ; — (roses d'or de). 6; — (tombeau de),
349 ; — V[ (roses d'or de), 8 ; — VII, 3. 4,
6, 98, 275 ; — (roses d'or de), 9 ; — (tiare
de). 252 ; — XI. 14, 15, 20, 301.
Cleroci (l'abbé de), 427.
Clermont- Dessous, église, 434, 521.
Clennont-Ferrand, maison antique, 85 ; —
peintures murales, 519.
Cléry, chapelle des Dunois-Longueville. 133 ;
— église N.-D.. 59; — ostensoir du XV'=s. ,
132 ; — trésor Notre-Dame, 132.
Clèves. château, 521 ; — collégiale, 522 ; —
retable, 522 ; — tombeau des ducs. 522.
cloche, d'acier. 264 ; — antique. 58 ; — de
Cambrai 332; — de Challes. 51; — de Char-
ly sur Marne. 350 ; — du centre de la
France, 58 ; — du XV'' s., 262 ; — du
XVI'-s., 262;— duXVlI« .s., 335; — du
XVIlI"s.,263.
clocher, à huit pans. 149 ; — de Saint-Spire,
494 ; — à.Senlis, 44.
Cloquet. 35. 42. 68-78, 83. 137. 140, 161171,
2.-I3. =35. =48. 269. 270, 299. 335, 336, 347-
349. 413. 4 '8. 426. .(28, 435-443, 487, 503,
524. 528, 532.
clou de la Passion, 15. 17, 22.
Clovis(Giul ) miniaturiste, 5.(0.
('luny. musée. 271. 541 ; — rose d'or, 7.
Cocabiex (icon.). 398.
Cochois (les), fondeurs de cloches, 263,
coffret en ivoire. 153.
cognassier, 290.
colimaçon, 394.
Cable analptique.
563
Jérémie, 401.
Jérus^leTii, église St-Sépulcre, 330 ; — Lépro-
serie de St-Lazare, 148; — mosaïques, 330.
]oest(J.). peintre, 248, 522.
Joli (Pierre), maitre maçon, 262.
Jonas, 406.
jonquille, 291.
Jordaeus, 69.
Joriianne, croix processionnelle, 517.
Jorissenne (le D'), 333. ^ .
Joseph (hist de), 306. 31 1, 313; — d Arima-
thie, 124.
Josias (le roi). 76.
Jouaigues. église, 463.
Jourel (Th.), 73.
Jouy (le cli""^), 223, 528.
Jove (Paul) (musée de), 254.
jul)ilé, 256.
ludas (trahison de). 435-
Jugement dernier, 42, 43. 94. 107, 118, 174.
270. 274. 276.
Jules, II. pape. 2. 116. - (tiare de). 252. 253;
- Ut. 18. 301.
Julien, l'empereur (portrait de), 246.
Iulio (Cesare). peintre. 506.
Jumieges, abbatiale, 350, 36S, 370, .498.
Jura, églises romanes, 68 ; - statues ancien-
nes, 62.
Joste(.S.). 181. 2c;7 ; - (reliques de). 68 ; -
de Gand, peintre, 344.
Justin, empereur. 185.
K.
Kaemmerer, 124, 130, 131.
Kahn (collection), 130.
Kant. 156.
Kauzler (le bar.), 513-515.
Karnak. temple, 436, 450, 498.
Karlsiein, château. 249.
Kaulbach, peintre, 458.
Kazan, bracelets eu ur, 23; - couronnes, 24.
Keiffer, 73.
Kempen. château. 521 : - église. 522.
Kempis( Thomas à) (monument de), 78.
Kérubim assyrien, 395.
Kidrich. bancs, 523 ; - église, 523.
Kirk-itall, église, 472.
Ivlosterneuburg, monastère, 78.
Koecklin (Raymond), 160.
Komburg, abbaye, 535.
Kon Hovista, inscriptions latines, 544.
Kon'Iakow. 22. 24,
Korsabad, palais, 436.
Kralik (le prof. ). 155.
Ksar-Rlielan (Sahara;, poste romain, 61.
Kunst iind Kuniihxndwerk, 78.
Laach, 190.
Laachersee, abbaye, 189.
Labarde, 20, 22, 23.
I^ablié. peintre, 427.
Laborde (marqui.s de), 96, 131, 132, 440.
La Chaise- Dieu, tombeau, 252.
Lacouture (Ch ), 153 156.
Lagrange (A. de), 426; — (le R. P.), 330,
La Haye, musée, T24.
Lahondès (M. de). 425.
Lalanne (Ludovic), 114.
Lamartine, 437.
Lanibèse, fouilles, 330.
Lambin (E.).. 50. 59, 219, 222, 229, 231, 232,
349. 497 i — nécrologie, 546.
lambrequins, 33.
Lameire (Ch.). peintre. 143.
La Moricière (tombeau de), 173.
lampe, 30.
Lamperez y Roniea (D. Vicente), 247.
Lando de Sienne, orfèvre, 22,
Landoy (E. ) 73.
Langerock. architecte, 177, 247, 248, 269,
530- 534- 535- 539-
Langres, fortifications, 538; — porte romaine,
5.^8.
La Noue (Gén. de), 147.
Lante (Marcellus). card, 301 ; — Michèle,
301.
lanterne. 66. 258.
Laon, cathédrale, 36, 230. 349, 384, 406. 407;
— chevet, 46 ; — chœur, 38. 40, 41 ; —
grand portail 42 ; — flore, 46 ; — nef, 37,
38. 40 ; — oriçine. 36 ; — portails latéraux,
45; — tour de l'horloge, 45; Saint-Paul,
4S ; — transept, 39 ; — vitraux, 42.
Lapais (cloître de), 246.
lapin, 4 [ I.
Lapo de Neri, 240.
Larchant, poteries romaines, 62.
Larochepot, château, 539 ; — église, 539 ; —
vitraux, 539.
Lassus, architecte, 83, 346, 498, 501, 539.
Laslingham, crypte. 370.
La Tour, peintre, 170.
Laugier (l'abbé), 431.
Laiijrac, stalles, 487.
Launny (de), 415.
Laurens (Jean Paul), peintre, 174.
Laurent (S.), 242 ; — (statue de), 262.
Laurentum, villa de Pline, 434.
Laureys. 530.
laurier, 291,
Lausanne, temple protestant, 177.
Lauti (Giov.), peintre, 344, 345.
I^autrin (S.), (statue de), 332.
Lauwer (Th. ). 326, 327.
Lauzun, 78.
lavacrnm, 221.
Laval, Frères-Mineurs, 338.
Lavigerie (card.), 245; — (monument du),
76, 137.
Laylié (L.-F.), sculpteur ciseleur, 435.
Lazare, 508, 509 ; — (reliques de), i8i ; —
(résurrection de) 108.
Lebda (ruint-s de), 244.
Le Brun, lO-i, 347,
Le Cler (Jean), relieur, 130.
Leclerc (E), 71 73.
Le Clert, 67.
Lecomte de Lisle, 156.
Le Coq (Hugues). 510.
Leclour, cathédrale Sts-Gervais et Protais,
521 ; — inscriptions latines. 424.
Ledesma (Alexis), 17.
Ledieux (Alcius). 417.
I^efebvre Pontalis {E. ), 78, 264, 349, 365,
366.383. 386. 463, 470, 473, 4S9.
Léger (S. ) (chef de), 149,
Légnano, église, 505,
Lemonnier (H,|, 438.
Lemoyne, sculpteur, 60 ; — de Morgues,
peintre, 147.
Le Nain, peintre. 170.
Le Nôtre, architecte. 165.
Léon. III, 305 ; — IV, 305, 310; - ÎX (s.).
4i S09 ; — ^' 99- 100. 108, 110, 112, 114,
122, 123, 273, 276, — (écusson de), 116; —
(inventaire de), 96 ; — XIIÏ, 121, 328, 354,
355. 450. 5". 538.
Léonard, musicien, 456.
Léonille (ste) (statue de), 332.
Lepautre, 35,
Leroy (G.), 355.
Le Roy (A.). 73.
Lespinasse ( r<ené de), 65.
Lessay, église 370, 387. 389. 474, 480.
Leuze, église St-Germain, 149.
Levasspur, 34g.
levrette, 411.
Lezoux, inscription gravée, 60.
Liancourt, château, 329.
Libergier (Hugues), architecte, 431.
Liberija. église majeure, 161.
Libin, vitraux, 543.
librairie parisienne (histoire de la), 244.
Libretto (reliquaire del). 421.
licorne, 400, 436.
Licot, architecte, 6y
Liège, fonts baptismaux, 160 ; — musée, 89 ;
— (province de), 73.
lierre. 222. 226.
Lies (Jos, ). peintre, 457.
Lille, tombeau de Louis de Maeie, 248 ; —
Vœu des Faisans. 427.
Lillers (Nord), église, 222.
Limbourg, 73 ; — croix, 185.
Limoges, abbaye St-Marliaf, 282 ; — inven-
taire. 282 ; — porcelaines, 159.
lin. 291.
Linas (Ch. de), 20, 182, 188, 350, 427.
linceuil, 259.
Lincoln, cathédrale, 471.
Lindisfarne, église 386. 387, 471.
lion, 394, 403, 404; ~ Néerlandais, 70.
Lippi, peintre, 57, 38.
lis, 214. 22g, 230, 231.
liseron, 291, 292,
Lisieux. cathédrale, 379 ; — sculpture déco-
rative. 161.
lisse, 94.
Lissevveghe, église, 452.
lit, 2 la polonaise, à la turque, 159,
liturgie, de la présentation delà Rose d'or, 3;
béatification et canonisation des saints. 16,
256 ; — Cérémonial romain, 12 ; — chant
liturgique. 387, S-j, 449 ; — consécration
d'un autel, 190 ; — culte de la couronne de
fer de Monza. 14-16, 20; — distribution du
vin, 150 ; — éclairage liturgique, 354; —
exposition des reliques, 16; — hosties (fa-
brication des), 281 ; — Liber pontijicali^, 302-
304; — iivrede la prière antique { le } , 429;
— mélodies grégoriennes. 449 ; — office de
l'exaltation de la croix, 187 ; — pain bénit
(le). 337 ; — Plain chant (le), 354. 449 ; —
Pontifical romain, 190 ; — prière Avete,
350 ; — procession de la Fête-Dieu, 74 ; —
rite, chaldéen, 60; — lyonnais, 258; —
oriental, 538 ; — Sacrée Congrégation des
Rites, 14-16, 19 ; —Saints de la messe (les),
159 ; — Scoppio del Carro, à Florence, 507.
Lodève, monnaies d'évêque, 331.
Logne, château, 235.
Loiseaux (P.), fondeur, 263.
Loisne (comte de), 519.
lombard (Art), 23.
Lombard (Lambert), 440.
Londres, Bovvchurcn, 370;— Rritish Muséum,
60, 237 ; — Chapelle de la Tour, 368, 370;
— South Kensington Muséum, 92, 535.
Longhi. gravpur, 13.
Longinus (S.), 307.
Looz, hôtel de ville. 452, 539; — (pays de),
architecture romane, 333.
Lorenzeiti (Ambr. ) peintre, 57,
Loreto, église St-Louis des Français, 143 ;
— peintures. 143,
Lorraine, (croix de), 78 ; — fonts baptismaux.
331; — pots, 68 ; — mode d'habitation, 63.
lotus, 212, 217.
Louan (dalle tumulaire de). 270.
Louis, I d'Anjou, 174; — I de Hongrie, 8;
— IX, 526 ; — XI, 58 ; — XII, 258. 411.
416; — XIV, 28. 33, 35. 94. 104, 114, 452;
XV, 33 ; — de lilois, 18s ; — de Bourbon,
8; — de Maele (tombeau de), 248; —
Philippe, 108; — de Poitiers, 8; — -de
Toulouse (s.) (statue de), 24c ; — roi, 330.
347-
Louvain, 71 ; — collège d'Arras, 124. 131 ; —
église, St-Jacques, 160; — St-Pierre, 72,
83, 84, 177. 539 ; — hôpital, 231 ; — hôtel
de ville, 269; — peintures murales, 177.
Louvre, fer à hosties, 2S1 ; — musée, 169,
174, 281, 435, 540; — (Palais du), 114 ; —
parquet à ligures incisées, 517 ; — tapisse-
rie à la licorne. 401,
Louzy, inventaire de l'église, 350.
Lublin, château, 144; — tableau dédicatoire,
144.
tçoi.— Table analj'tiçue.
Luc (S.), 407 ; — (école St), 215.
Luc;i della Robbia, 240.
Lugano. église, 505 ; — fresques, 505,
Luidprand, 89.
Luini (Rernardino). peintre, 505.
lumière électrique, 355.
Lunéville, mortier en bronze, 331.
I.urani (Franc.), 505.
Lutwin (S.), 184.
Luxembourg, cathédrale, 538 ; — institut ar-
chéologique, 335 ; — peintures murales.
333.
Luzarche (Robert de). 272.
Lyon (Cl.), 73.
Lyon, cathédrale, 397, 403 ; — fondation,
148 ; — inventaire de la cathédrale, 5 ; —
rose d'or, 5 ; — tapisseries, 96-98.
Lysandre (statue de), 518.
Lysicrate (monument de), 218, 237, 437,
Lysippe (types féminins de), 61.
M.
Mabillon, 2. ij. 284.
Mackler (Fr. ). 245.
Madaba, mo.saïque géographique, 517.
Madaillan, château, 415, 520.
Madi leine (Sie) (relique de), 181.
Madrid, bourse, 412.
Maeslricht. 525 ; —église SlServai?, 333.
Maeterlinck, 332, 541.
Magne (L.), 237.
Maiihac, n ouïe à hosties, 281.
Main-reliquaire, 153.
Maini(J.-a), 243
maisons, antiques à Abbeville, 414-415 ; —
Agen, 520 ; — Aigues-Mortes, 85: — An
gers, 451 ; — Anvers. 541 ; — Bourges
408; — Bru.xelles, 86, 271. 408 ; — Cahors
62 ; — Caudecotle, 520: — Clerniond-Fer
rand, 85 ; — Dinant, 317 ; — Orléans, 85
— Paiis, 5^2 ; — Réihel. 77 ; — Rouen
85. 175. 270; — 'l'hèbes. 162; — Toulouse,
415 ; — Ypres, 441, 524 ; — en bois, 414
— rustiques (inscription sur façade des),
329-
Maisire (J. et X. de) (monument de), 173.
Maiire (L.), 332, 530.
niaiires, inconnus, 124 : — (Vie des grands),
318.
majoiiques, iio.
Malampize, église, 149.
Maldeghem (van), 165.
Malines. armoiries, 400 ; — ■ cathédrale, 162 ;
— congrès, 333; — • peintures murales, 335.
Mallet, arcliitecte, 165.
Malmesbury, église, 389, 390, 393.
Malte, cunuuanderie, 67 ; — inscription bi-
lingue, 147.
Mainmès (S. ) (statue de), 335.
Mander (Van), 364.
manicore, 401.
Mans(Le), cathédrale, 183: — monument du
général Chanzy,i74; — N.-D. du Pré, 350,
365-
Mantes, église, 494, 496.
Mantoche, fouilles, 330 ; — mosaïque romai-
ne, 331.
manuscrit, à Albi. 147, — Bascas de Bagaris,
60 ; — Cambrai, 174 ; — Cessenon, 70 ; —
Madrid, 319 ; — Marioupol, 265 ; — Milan
(à l'Ambrosienne), 18, 251 ; — Pairesc, s ;
— Vatican, 76 ; — S.tint-Gall, 449 ; — du
IX« s.. 284; ^à miniatures, 61; — de
Phèdre, 60.
marbre de Paros, 329.
Marchioni (lechev ), 241, 242.
Marcus Sandi, orfèvre, 9.
Maredsous, abbaye, 315. 318.
Mar.il-Maily, église, 496.
Mares (le Fr. ), 226.
Marguerite d'Oultre, abbesse, 193.
marguerite des prés, 291.
Marie, d'.Xngleterre, 414. 415 ; — de Bourgo-
gne. 105 ; — Madeleine, 125, 509 ; —
(reliquaire de), 421 ; — (statue de) ; 262 ;
— Thérèse d'Autriche, 194 ; — (apothéose
de), 76.
Maries (les trois), 76.
Mariinonte, 19.
Marioupol. manuscrit de l'évangile S. Mat-
thieu, 245 ; — musée, 245.
Marmion jisinion). 131. 132.
Marquet de Vasselot (Jean), 160.
marronfiier, 297, 298.
Mars, 189.
Marsaux (lech"«),69, 159.
Marseille, catliédrale, 175 ; — richesses ar-
tistiques, 159.
Mairy{C'e rie), 77, 78, 166, 424, 529.
Martène (Dom),28i.
Marthe (Sic). ^09 ; — {relique de), 18 r.
Mnrlin (le V.), Ar\~ (l'abbé). 382. 383 : —
V, 301; — d'Aragon, rose d'or, 18 ; — (S.)
(statue de). 242.
Marucchi (H.), 255. 513.
Masini (AiU.), 18.
masque, 486, 487.
Massaccio. peintre, 102.
Massât, coIl<?giaIi\ 425.
Massin, peintie, 427,
Mastro Piero ()acomo de), peintre, 142.
Mathias, (S). 184, 191. 192; — (corps de),
179 ; — (sarcophage de), 179.
Mathie, 114.
Matthieu (E.). 248.
Maubrisson, inventaire de l'abbaye, 188.
M^ur(S.). 131.
Maurette (H), architecte, 484.
Mrturiac (églises de l'arrondissement de).
148.
Mauiini (Johannes), orfèvre, 10.
mauve. 292.
Maximin (S), 184.
Max-Werly, 332.
May (L. H.), 162.
Mayence, caihédralr, 334.
Mazerolle { l'V. ), 435.
Mazerolles, fera hosties, 284, 285.
Meaux, bas-reliefs de la Renaissance, 335 ;
— cathédrale, 92, 108, 115. 138, 221;
chapiteaux, 221, 223, 227. 22B, 241, 294 ;
— conférence ahistoire et d'archéologie,
335 ; — monument de Bossuet, 137, 173.
Mécines, abbaye, 193.
médailles anciennes, 357; — de bronze, 13.
Ménicis (Cosme de), 150;— (famille des), 92,
94. 420.
Mégare. groupe en bronze de Lysippe, 6i.
Megen, retable. 24S
Meirsschaut (P, ), 347.
Mélanges d'archéologie et d'hiUoire, 326.
Méiasi'ppe (S.) (statue de), 332.
Mellet (Dom). 452 ; — architecte, 456.
mélodies grégcriennes. 449.
Mclozzoda l'orli, peintre, 343, 462.
Melrose. abbaye, 498.
Mély (de), 19. 251. 253. 255, 257, '338, 435.
Memling, 71, 124, 130, 131, 319, 320. 321,
442,510. 519.
Meninii, pemlre, 57, 58.
M(hnoire(la), 155.
Mcn.le. cathédrale, 175;— clergé, 70.
Mfnès(il.). 77, 78
Mengelbert (\V. ), sculpteur, 78.
Menuchii (Johannes), argentier. 8.
menuiserie gothique, 30,
Mérimée. 346.
Merlet, 78.
Mésié, inscriptions latines, 264.
messe (les saints de la), 159.
Messeré, fer à hosties, 285.
Messines, abbaye, 424 ; — abbesses, 194 ; —
ancien chœur des chanoines, 204, 205 ; —
anciens scels, 208 ; — archives, 193; —
constructions primitives, 196-199: — cha-
piteaux, 199, 201 ; — église, 193, 194; —
institution royale, 194; — plan terrier. 197 ;
pilier. 200 ; — porte, 204 ; — reliquaire
du XVl*^ s., 193 ; — transept, 200. 201 ; —
tour carrée, 206; — (vierges de), 193; —
vue du chœur, 200 ; — de l'église. 199.
Metsys (Quintin), 58, 125, 172. 174.
Metz (M.), 331.
meubles, anciens. 67 ; — héraldiques, 33.
Meuse (la), 73.
Meungijean de) (statue de), 272.
Mezzastri, peintre, 343.
Michta (S.) (statue de). 481 ; —(A.), 438; —
de Gand, fondeur, 427 ; — seigneur de la
Machelerie, 67.
Michel-Ange, 108, 114, 118, 274. 276.
Michicls (Alph. ). 319,
Middelbourg, église, 131 ; — inventaire, 124.
Mièges, église, 68.
Migfllos (Krnold). 334.
Mihiel (Marc-Auioiiie), 1x2.
Milan, Académie arti>tK|ne et scientifique,
517 ; — candélabres, 409 ; — coffret de
St-Nazaire, 251 ; — coupe en ciistal du
XIV'-* s., 535 ; — couvent Saniii Maria
délie grazie, 55 ; — fresques. ^,05 ; — Mu-
sée Brera, 505 ; — Manuscrit de \' Iliade,
251 ; — paholto, 23, 24 ; — Santa-Marla
della mare, 505.
Milhac de Voulron, bénitier des lépreux, 332.
Millin. i8.
Milo (Vénus de). 60, 6t. 147, 156.
miniature du XII*^ s., 186.
miniaturistes français, 517.
Mino de F'iesole, sculpteur, 143, 144.
niinolaure, 40[.
Muatlorès, retable, 531.
miroirs funéraires chinois. 330.
missel de Sarragosse, 257.
Mithridate, 61.
mitre, 25T.
mobilier, aiguières en bronze, 45^ ; — ar-
moires, 68 ; — bassins antiques, 58 ; — cage
à oiseau, 66; — carreaux, peints, 332; —
eu terre vernissée, 331 ; — cotlret en ivoire,
153 ; — coupe en cristal. 535 ; — coupes
sassanides, 61 ; — cymbale phénicienne,
J47; — encrier, 66; — fauteuil, 262, 522; —
fibules antiques. 329; — ibériques, 161 . —
garde-mangtr, 65; ~ lanterne, 66 ; — lit,
159; — miroirs funémires chinois, 330; —
montant de cheminée. 403 ; — mortier en
bronze, 331 ; — pistolets, 68 ; — plaque de
cheminée. 248 ; — en fonte. 321 ; — porce-
laines, 159; — poteries anciennes. 331 ; —
estampillées, 329;. — romaines. 62; — pots
de Lorraine, 68; — sièges pliants en fer,
329; — taques de foyer, 70, 259, 331, 335;
— torches du XVII'^s., 7 ; — vases antiques
à obturateurs, 329 ; — de bronze, 62 ; —
anciens, 67, 257 ; — du XIV*^ s. , 65.
mobilier liturgique, 68; — autel, 143, 190,
331, 418, 420, 427.522;- bancs. 513; —
boîtes de consécration, 190; ^calice, 150,
158, 191, 262; — canons d'autel, 191 ; —
chaire, 172, 439 ; — chandelier, 66 ; —
châsse. 4, 72, 153. 184. 185, 189, 244. 375,
421, 43r, 441, 535 ; — chemin de croix, 457,
513; — cloche, 51, 58, 262, 263, 264, 332,
335; — croix, 78, 149, 158, 179. i8r, 182,
185, 187, 213, 259 ; — crosse, 403 ; — dais,
159; — encensoir, 192; — évangéliaire, 172;
— fer à hosties, 281-289, ^25; — jubé, 523;
— livre d'heures, 455 ; — lustre couronne,
534 ; — missel, 257 ; — monsirance, 68. 152,
153, 158, 324 ; — orgues, 521 ; — ostensoir,
132, 426; — ■ patène ministérielle, 150; —
pied de croix, 332 ; — pince à hostie*^, 281.
283 ; — plat d'offrande. 158 ; — porte-feux,
^07; ^ prie- Dieu, 259; — reliquaire. 23, 67,
Ô3, 89, 126, 149. 153, 168, 184. 185. 189,
244, 421, 535 ; — retable. 68, ^^, 150, 522,
531 ; — sièges cpiscopaux, 172; — sialles,
34. 68, 72, 225, 432, 487 ; — tabernacles,
ïS9> 33^ : — tables d'autel, 151.
Modeste (S.), 181.
Cable analptuiue.
565
Moha, château, 235.
Moirax, église, 520.
Moïse (fontaine de), 483.
Moissac. cloître roman, 483; — église, 424,
520; ~- orgues. 521.
Mommers. 530
Monceau (P.iul). 147.
Monduit, architecte. 433.
monnaies, anciennes. 357 ; — de bronze, 148 ;
-~ wauloises, 02. 332; — des évéques de
Lodève. 331 ; — impériales, si? ; — ponti-
ficales. -28 ; — (classification chronolo-
gique des), 147.
monogramme, 35 ; — du Christ, 284.
jîionographies, communales, 525 ; — parois-
siales, 531.
Mons, 73; — église Ste-Waudru, 525.
Monsempron. éi^lise, 519.
monstrance. eucharistique, 152, 153, 158; —
flamande. 324 ; — du XVP s., 68.
Mont Saint-Michel, abbaye, 238; — construc-
tions militaires. 62
Montaner, château. 424.
montant de cheminée. 403.
Montault (Mgr X. B. de], 24. 52. 08, 76, 77,
100. i;9, 160. 192, 256, 257, 260, 281. 286.
323. 340. 350. 357. 435. 543 : — <^«^''^^
complètes, 346.
Montargis, jardm en éventail, 163, 165.
Montbrisson. collégiale N.-D. , 8.
Montebourg. reliques, 88.
Montefalco. fresques. 252.
Montefarno, peintre. 57.
Moniierneuf. abbaye, 159.
Montivilliers, église. 398. 480.
Montlake, manufacture de tapisseries, too.
Montlazi, inscription latine, 424.
Montlevon. église. 463.
Montmédy, tableau du XVIIes., 504.
Montmorency. 539; — armes de la famille,
114. 1 16 ; — (connétable de), 98, 115.
Montpezat. trésor, 331 ; — tissus, 531.
Montreuil-sous-bois, église, 496 ; — sur mer,
inventaire du trésor de St-Saulve, 519.
Monulphe (.S.), 333.
monument, de Benoît IX. 89;— Bossuet, 147,
172; — Chanzy. 73; — Damas (Alex.), 173;
— Hugo (Vict.j, 173: — Lavigerie, 76.
157; — Lv>icrate, 218, 2^7: — Maîstre
(J. et X. de'). 173; — Rivet "(Mgr), 135.
monuments, anciens (conservation des), 148 ;
— (restauration des). 314. 498. 538; — chré-
tiens sur les montagnes, 422 ; — grecs, 50.
!^3. 62, t^oi ; — funéraires chinois. 437 ; —
iiistoriques. 346. 538; —indo-bouddhiques,
^^o ; — morts. 498 ; — religieux en albâtre,
■^29 ; — romains, 502 ; — vivants, 502.
Monza. armoiries. 12 ; — cathédrale, 22 : —
chanoines, 14: — couronne de fer, 12. 14,
22, 251 ; — physiùlogits du XlIIe s., 321 ;
— rehques, 545; — sceau. 12; — trésor,
12 14
Moor (C H.). 392.
Morigia (Paul), 17.
Morlet (V.), 77.
mortier en bronze, 331.
Mortier (Et.) architecte, 247 ; — (le (P.), 256.
mosaïques, byzantines, 25 ; — à Florence,
241 ; — à lérusalem. 330; — à Mantoche,
331 ; — romaines, 244, 421 ; — (vêtements
dansies), 102.
mosquées musulmanes, 527, 528.
mouchettes. 259.
•m >ule de gâteaux de Noël, 517.
Mouzon. fer à hosties. 284.
Moyland. château, 521.
iniiffli^'r, 228. 232.
muguet, 292, 293.
MuUer, peintre, 280.
Mum-nolin (S,), 349.
Munich, exposition de peintures, 458 ; —
pinacothèque. 320.
Munst^rm^ifeld. reliquaire, 189.
Miiniz(Eug ), 4r, 93, 100. 177. 251.
Murât (arrondissem.). églises, 148.
Muratori, 18, 22,
musée, Aix. 427; — Amsterdam, 58; — Angers
(St-Jean), 60; — (diocésain), 544. 545; —
Arlon (archéologique), 335 ; — Avignon,
171 ; — Belgrade, 329 ; — Berlin, 88, 53T ;
— Bologne. 103 ; — Bordeaux. 169 ; —
Bruxelles. 71, 89; — (de la peinture orne-
ment.). 462 ; — Burgos, 150 ; — Chantilly
(Condé). 246; — Cluny, 7. 27t, 541; —
Constantinople, 62, 148; — (Tchinli-Kiosk),
534; — Douai, 170; — Dresde, 61; — Dublin
(national), 240 ; — Épinal (des Vosges),
33^ ; — Florence (académie), 242,421 ; —
( Bargello), 260; — (Croceita), iig ; —
(Offices), 58 : — Francfort (Staedel). 426; —
Jove Paul (de portraits), 253 ; — La Haye,
124; — Liège, 89; — Londres, (Briush
muséum), 60, 237. 403; — (South Kensing-
ton), 92, 535; — Marioup'>l, 245; — Milan
(Bréra), 505; — Nancy (lorrain), 331 ; —
Naples (royal), 241 ; — Nuremberg (ger-
manique), 78 ; — Paris (Gumet), 452 ; —
(Louvre), 60. 88. 169 174. 435, 540; —
Philadelphie, 457; — Rome (Vatican), 328;
— Rouen. 16 ; — Saint-Malo. 147 ; — Tou-
louse (Augustins), 232, 482; — Trêves (de
la cathédrale), i8r, 191; — Versailles, 244;
— Vienne, 245, 329; — des arts industriels.
172
musées (entrée gratuite des), 545.
Mycènes, portes, 403.
myosotis, 292. 293.
myrthe, 291.
mythologie, Apollon, 35 ; — Artémis (tem-
ple d"), 6( ; — Bacchus, 222; — Castor.
300, 301 ; — Cérês, 189 ; — Kmyo, 61 ; —
Euménides (les). 293 ; — Hercule, 114. 1 16.
117, T19, 120, 122, 244, 400; — Hespérides
(jardin des), 398; — Hygie. 527; — lupiter.
148, 225. 245, 404; — Ma. 61 ; — Mercure,
35. 189, 245 ; — Gaulois, 60 ; — Mars. 180 ;
— Mmerve. 148, 294, 434; — Neptune,
3;, 6i ; — Orphée. 330 ; — Parques (les),
114, 116, 119, 120, 122, 295; — Persée, 434;
— Pluton, 295 ; — Poll'ix, 300, 301 ; —
Sibylles, 541; — Styx (le). 293; — Téles-
phore. C27 : — Tenmsio, 244 ; — Tutelles
(culte des déesses), 424 ; — Vénus, 245 ; —
genitrix, 61 ; — de iVIilo, 60, 6r, T47, 156,
N.
Naert, architecte, 201.
Nahuis (le ct« Maurice de), 248.
Naix, bague en bronze. 245.
Namur, église Si-Germain, 366; — Société
diocésaine d'archéologie chrétienne, 149.
Nancy, congrès des sociétés savantes. 330;
— église St-Epvre. 484 ; — musée lorrain.
331-
Nantes, vitrail du séminaire, 77.
Naples (royaume de), 3 ; — cimetières sou-
terrains, 255; — éghse San Lorenzo o
Maggiore, 241; — musée royal, 241; —
peimures murales, 241; — (oeuvre de), 66.
narcisse des prés, 291, 293.
Nattier, peintre, 170.
nature, source du décor, 289; — (imitation
de), 214
Xauroy, église, 261 ; — vitraux, 262.
Navarro (D. Felipe B. ), 247.
Navez. peintre, 317.
Nazaire ^S. ) (statue de). 4 62.
nécrologîp. Barbier de Montault (MgrX.), 272,
357:— Lambin fE.). 546; — Revoil (Henri-
Ant ), 178; — Vriendt (Albrecht de), 89
Nédonchel (ct^ de) 335.
Neeroelheren, église, 525.
Nelli Ottaviano, peintre. 274, 342, 343.
nénuphar, 42, 214. 220. 221, 469.
néo-gothiques (les), 289.
Neuss (H. vati). 73.
Neuss, église. 409.
Neuwirth (le D""). 249, 250.
Nevers, inventaire du XI Ve s., 65.
Nevy sur-SelIe, reliquaire, 149.
Newton (E. ), architecte, 486.
Nicée. concile, 304. 312.
Nicodème, 124, 125.
Nicolas (S.), 130, 145, 184. 305.310; — (siège
épiscopal de). 172 ; — de Bruges, sculpteur,
73 ; — de Pise. sculpteur, 439 ; — de
Verdun. 78 ; — IV, 2^2 ; — V, 12.
Nicosie, anciens édifices français. 245 ; —
cathédrale. 517 ; — manuscrits liturgiques,
517 ; — monastère de St-Dominique, 245.
Niederzeil, peintures murales, 177,
nielles franques, 331.
Nimègue, chapelle palatine, 498.
Nivelles, châsse de Ste-Gertrude, 72.
nœud. 28.
Nogent l'Abbesse, église, 261 ; — statue en
bois, 261 ; — vitraux, 261.
noisetier, 293.
Nontgauguier, bas-relief, 331.
Noordpeene, fonts baptismaux, 396.
Normand (Ch.) 175.
Normandie, statuaire ancienne, 77, i6r.
Normands (les). 161. 349.
Norwich. église, 480.
Notger. 333.
Notre-Dame, du Bout des Ponts (inventaire),
258 ; — du Désert (liist. de), 531 ; — de
Pitié (invenl.). 260 ; — de Tertre, église.
398 ; — (monogramme de), 133.
Nottingham, petits monuments religieux en
albâtre. 329.
Nouvion le Vineux, église, 384.
Noyon. cathédrale, 39, 78, 349, 517.
Nuremberg, cathédrale, 334; — musée ger-
manique, 78.
O.
Oberwesel, chemin de croix, 523 ; — église,
323 ; — jubé du Xi V'^ s., 523,
Oberzell, église, 335.
objets, d'art (conservation des). 333 ; — arti-
fiLiiels (dans la décoration architectonique).
28 ; — russes. 453.
Odinet (maître), imagier, 338,
Œdipe, légende, 402.
œuvre, d'Angleterre (broderies), 66 ; — de
Naples, 66.
oie (l'enfant à 1'), 60.
Oiron, château, 65.
olivier, 294.
Ombrie artistique. 275. 341.
onocentaure. 401.
Opwijck, église. 426.
oratoire, carolingien, 332 ; — roman, 348.
Orbais (Jean d'), 272.
Orban de Xivry (le baron). 460.
Orcher. château-fort. 62.
ordres mendiants, 526.
orfèvre, Bartoll de Sienne, 9. 10 ; — Catha-
lanus de Rocha, 10; — Cellini (Benvenuto),
434 ; ^~ Domenico di Jacopo de Sienne, 7.
8 ; — Favier, 133 ; — Horenbeke (Jooris
van), 426; — Lando de Sienne, 22; —
Marcus Landi. 9 ; — Maurini (Johannes).
lo; — Mf-nuchii (Johannes), 8 ; — Pampe-
rati (Martin), ti ; — Richo Corboli, 7 ; —
Rubinus-da-Anelha, 11; — Taiiro de Sienne,
7 ; — Thomas de Padio, 10.
orfèvrerie, 153; — byzantine, 519; — cloi-
sonnée, 62; — franque, 519; — lapidaire,
519-
orfroi, 66.
Orléans, ancien château. 85 ; — (inventaire du
duc d'), 187, 188 ; — moule à hosties. 281,
284.
Oiiey (Bernard van), peintre, 106, 108, 109.
iio.
orme, 322.
Ornans (Doubs). croix processionnelle. 149.
ornemaniste, 216.
566
WitWt tie rart cbrctteu.
ornements, historiques, 217; — végétaux,
25. 214.
Orphée jouant de la lyre, 330.
Orsel. peintre, 155.
Orseninghi (devise des). 65.
Orsini (Raymondo), rose d'or, 9.
Orsini {archives du card.), 545.
Orval, abbaye, 63. 235.
Orvieto, inventaire de l'évéque, 187: — tableau
du S. Corporal, 183.
os, 66.
ostensoir, du XV«s,. 132 ; — du XVI«s., 426.
Ostende (mutinés d"). 195.
Osierrath (Joseph). 135.
Oswald (S.) (ceinture de). 180.
Oudin (Pierre), fondeur 263.
Oued-Kamel, baptistère 518; — cuve baptis-
male, 518.
Oulchy le Château, église, 463.
ours, 41 1.
Ourscanip, abbaye, 331.
Outoinaro. dessinateur japonais, 437.
ove ionique. 217.
Overbeek, peintre, 280, 458.
Owen (Jones). 213, 217.
P.
Pacca (édits), 88, 241.
Paccaid, architecte, 237.
Padoue, chapelle de la Madonna de l'arenn,
57 ; — fresques. 246.
pain, bénit (le), 337 ; — d'or. 14.
Painiandre (les), fondeurs, 263.
palai** chinois, 437.
Palaiseau. église, 496.
paléographie mu icale, 354.
Païenne, frestjnes. 329.
Palestrina (Hier I.uigi), 449.
Paliotto, de Milan, 23, 2q.
Palissy, architecte, 165.
pallium, 514,
palmetles, 26, 212 ; — grecques, 217, 218,
palmier, 294
Palustre (Léon), 20, 183, 188.
Pamperali (Martin), ortevre, ii.
panneaux. 31.
paon. 412.
papes, 525 ; — d'Avignon, i, 3.
pâquerette, 291.
parcs anglais. 165.
parement broilé du XV*"" s., 172.
Paris. aie;uière en bronze, 452 ; — autel
Louis XIV. 418 ; — bibliothèque, de l'école
des Beaux-Aits, 453 ; — nationale, ôo, 61 ;
— cathédrale, 30. 394 ; — cloître des
Billelies. 85 : — collection Kahn, 130 ; —
copies de tapisseries. 115; — couvent des
Grands Augustins. 435 ; — décor sculpté,
394 ; — églises : Notre-Dame. ^6, yj. 3g,
42, 47, 48, 397. 408 ; — Saint-Denis, 380,
384, 393; — Saint-tiermain-des-Prés, 349,
384; Saint-Julien-le-Pauvre, 221, 400; —
Saint Pierre de Montmartre, 86 , — espla-
nade des Invalides. 140; —exposition, 247;
— rétrospective de la gravure sur bois, 452 ;
— de toiles peintes, 100 ; — fontaine de
l'évêché. 538 ; — fresques du Panthéon, 56 ;
— jardin des Colombiers. 164 ; — du
Lu.\embourg, 164 ; -- maisons antiques,
542 ; — nï'jnument d'Ale.\andre-Dumas,
173 : — musées ; Gallena. 453 ; — Guinet,
452 ; — du Louvre, 60, 88 ; — obiets russes,
45S : — palais: de justice, 504. 509 ; — du
Louvre, 114; — pierre tombale de 1576,
542 ; - porte St-Denis. 351 ; ~ prédelle,
34^ -^ — Sainte-Chapelle, 4b, 335. 509 ; —
Ste-Couronne. 78 ; — sarcophages anciens,
452 ; — tapisseries, 98 ; — zodiaque de la
cathédrale. 413.
Parizot, croix processionnelle, 331.
Parker (J H |, 367.
Parme, fresques du Corrège, 422.
parnassée des marais. 294,
paroisses au XV!!*-" s, (visites des), 158.
Paros, marbre. 329.
Parques ( tes), 295; — tapisserie, 119, 116.
X19. 120. 122.
parquet à tigures incisées, 517.
Parrocel, peintre, 301.
parterre, 260.
Parthénon, 219 ; — ■ (Minerve du). 434.
parures Scandinaves. 331.
Pas de Calais, Commission départ, des monu-
ments historiques, 332.
Passavant, q6. 97, 100, 104, ri6. 118, 344.
passiflore, 298 - 299.
i'assion, 42 ; — (clous de la), 15, t7. 22 ; —
{reliques de la), 14, 256.
Pasture (Roger de la), 131.
Paie (L.). 346.
patène ministérielle, 150.
Pau, château, 521.
Paul (S.), a r Aréopage, tapisserie. 36 - 123 :
— et St Barnabe à Lystre, tapisserie. 9Ô -
122; — (Conversion de), tapisserie, 92-123,
457; — en prison, tapisserie, 96- 123 ; —
Kr{s.), 305. 30S, 309; — II. 4. 251 ; —
in, 98, 243. 276;— V, 504; — de Caen, 370.
Pavie, chartreuse, 56 ; — église St- Pierre, 89 ;
— fresques, 56
pavot, 29T, 298, 299.
paysage, T57.
paysagiste. 216.
Pazayac, fer à hosties, 288.
peintre. Adrien Luc, 427; — Alienno (Nie),
274. 313. 345 ; — Angelico (Fr.), 57. 112.
157, 2 17, 309, 313. 321; — Angehizio (Dio
tisalvi, 142; — Baldovinetti (.Al), 55-57, 82
— Baschenis (Êv.). 741; — Basiin (Henry),
427; — Beliegambe ().). 170. 196; — Bel
lini, 405; — B'^rnardi (Val.), 141, 142 : —
Boccaii da Canierino, 274, 313. 344: —
Bonfigli (Ben.), 274; — Horgognone, 56; —
Bouts ( Thierry). 125, 175; — Bressers(L.), 85;
— Brusco (Paul. Jér.). 143; — Calleoni
(Hier, de), 141 ; Campain (Robert), 426; —
Canova, 155; — Cappicii (Jean), 338 ; —
Casier (j-),357- ~~ Castagno (Andréa del),
50S ; — Cautrain. 427 ; — Cavallieri (Pie-
tro). 88, 241,242; — Chisi (Kr.). 142; —
Cimabué, 57,312; — Ciro Ferri, 243; —
Cornelis {Alb. ). 361-364; — Cornélius, 280.
458; — Casino Roselii, 1.^3; Coxie (Mi-
chel), io6 ; — Crayer{de), .|2ô ; — Cristus
(Pierre), 125, 247; — Dagnan Boiiveret,
337; — Dare (Et.), 427; — Daret, Jacques,
426.543; — D,ivid (G.). 104, 248; — Deger,
280 ; — Dekeyser, 457 ; — Delbeke, 443; —
Doué(Marlin), 62 ; — Duccio. 57, 312 ; ^
DycU (van), 82 ; — Euch (Franz), 280 : —
Eyck (van). 55, 74.82, 124, 217. 320. 344.
345. 427,441,510,531; — Francesco (Pierro
delln), 343: — Fiandrin. 280, 45^; — ■ (îaddi
( l'addeo). 58, 311 ; — Gentile da Fabiano,
274. 342, 3^3 ; — Gerop (Adrien), 427 ; —
Giordano (l.ucca), 143 ; — Giotio, 57, 58,
121. 241. 311. 312. 313, 398, 439, 462 ; —
Giuiiano, 142 ; — (iodefroy d'Anvers, 427 ;
— Goes (Hugo van dei ). 86. 344, 427. 510 ;
— Guddeman (Guil.), 417 ; — Gnffens.
455-462 ; — Ghirîandajo (Dom..) 56 ; —
H'iyne. 131 ; — Hendricx, 457; — H'^rvy
(Guil. d"). 3Ô4 . — Hokousai. 437 ; — Hol-
bein(Hans), 177; — Hubner,28o; — Hunin
(P. P.). 162; — Ingres, m, 170; — Itten-
bach,28o; ^ Janssen (Guil.). 130; — Jean
de Kiesole. 278, 462; — Jehan le Diacre le
Jeune, 427 ; — Jo-st (Jean). 522 ; — Jor-
daens. 69 ; — Julio (Cesare), 506 ; — Kaul-
bach, 458; — Ldlié,427; — Lameire (Ch.),
143; — La Tour. 170; — Laurens (Jean
Paul), 174; — Le Corrège, 535; — Le
Moyne de Morgues. 147; — Le Nain. 170;
Leys. 89, 457; — Lies (jos.). 457; — Lippi,
57» 58 ; — Lorenzelli (\mbr. ). 57 ; — Lo-
renzo di Florenzo, 274; — l^uini (Bern).
505 : — Massaccio. 202 ; — Massin, 427 ; —
Mastro Pierro (Jacomo de), 142 : — Me-
lozzo da ForlI,343.462;— Memling. 71,124,
130, 131, 319-321. 441. 510, 519: — .Memmi,
57,58; — Met^ys (Quinlin). 58,125,172,174.
247.271; — Mezzastris,343; — Monlefarno,
57; — Muller. 280; — Nattiez. 170; Navez,
317; — Nelli (Oitav.)274. 342. 343; —
Orley (Bern. van.) 106-1 10 ; — Orsel. 155;
— Overbeek. 280. 458; -- Parrocel, 30T ; —
Pasture (Roger de la). 131 ; — Paul de
Linibourg. 455 ; — Penni, 100. 101. 120;
— Peretti (Bart. ), 5; — Perino del Vaga.
loi, 143 ; — Perrugin, 92, 157, 169, 273-
280. 343. 346; — Pisanello, 329; — Poelen-
burg, 243 ; — Portaels, 458; — Prud'hom.
95, 96; — Raphaël. 115, 116. 120. 123. 15O.
157, 277, 278 ; — Rembrandt. 69, 170 ; —
Renouard, 132; — Rethel. 458; — Robbia
(Andréa délia), 327: — (Luca). no, 240; —
Romain (Jules). 100 ; — Rui)ens, 69, 92,
170; Salimbene. 142; — Sano di Pielro,
57; ~ Santi (Giov.). 274. 344. 345 ; —
Sanzio, 344 ; — Sarto {.Andréa del), 143; —
Sasso Ferraio, 506; — Scheder (Aug.).i55.
457; — Settegart,i8o; — Simone (Martino),
241 ; ^ Smoienski (Jos. ). i (4; — Snellaert
(Jean). 427; — Spiker. 510; — Steinle,28o:
— Stuibout (Hubert). 177 ; — Swerts. 457-
461; — Thomas (Jacque.s). 427 ; — Thony
(Jacques), 427 ; — Udine (J.), 100, 243 ; —
Veith. 280; — Velasqiiez, 170; — Verhage,
(P.), 364; — V^erlat. 45 ; — Véronèse
(Paul), 154, 170; — Verrochio, 144 ; —
Vmci (L.), 57.505.517; — Vinckaert (Jean),
427; — Vriendt (.Alb. de). 89; — VVatteau.
170; — Weyden (Roger van der), 124, 247;
— Wladyck. 144.
peintres, brugeois, 3tg ; — flamands, 274 ; —
grecs, 312; — italiens, 344.
peintres (Dictionnaire des), i^i ; — (Histoire
dc%), 346.
peinture (la), 334; ^buon fresco, 56. 57,507;
— sur bois. 246 ; — ■ flamande, 248 ; — à
l'huile, 248; — murale à l'huile, 55; — Om-
brienne. 343; — à tempera. 55, 55,323. 507.
peintures murales. 64, 69. 524. à Anvers, 458.
461 ; — Beaune. 508. 541 ; — Bourgogne,
509; — Bruges, 321, 441 ; — ■ Clermont-
Ferrand, 519 ; — Courtrai, 460; — Ingel-
heim, 334; — Loreto, 143; — Louvain,46i;
— Luxembourg 333 ; — Malines, 335 ; —
Naples. 241 ; — Niederzell. 177 ; — Pom-
pei. 401; — Prague. 249; — Saint-Nicolas.
458, 4S9 ; — Siein sur le Rhin. 172; —
Well-Bundel. 411; — VVuestwezel, 451; —
Zepperen, 451, 5p ; — gréco-romaines,
25 ; — (restauration des), ^^^.
Peiresc, manuscrits, 5.
pèlerinages ombriens, 341.
pélican, 412.
pelte, 34.
pendentifs à stalactites, 29.
Penni, peintre, 100. loi, 120.
Pépin (Jean), tombier, 439.
perce-neige. 294.
Père éternel, 191, 3Ô1.
Peretti (Bastiani), peintre. 5.
Périgueux. tour de Vérone, 176, 424.
Périno del Vaga, peintre. 101.
périodiques. 76, 172, 264, 350. 533.
Perizoniuni, 435.
Perna (Pierre), imprimeur, 254.
Pérosi (l'abbé). 505.,
Pérouse, église Si-Etienne, 5 ; — Monument
de Bjuoit IX, 8q; — rosed'or, 5; — Vierge
de Boccati da Camerino, 34;.
Perraud-Dabet (.A.), 346.
Perricard. château, 78, 519.
Perrier (Em.), 159.
Pernn Kobinet, fondeur. 263.
Perrusson, abside polygonale, 62.
Perugin (Le), 92, 157, 109.273-280. 340, 345,-
pervenche. 294.
Peierborough. cathédrale, 382, 383.
Petrowski, 54.
%Mt analptiquc.
567
Phèdre, 517 ; — (manuscrit de), 60.
phénix. 4or, 436.
Phidias, 155, 236.
Philadelphie, musée, 457.
Philippe (S.) (reliques de), 181,421; — Benizzi
(S.). 143 ; — I. 193 ; — (diplôme de), 424;
— II. 195 ; — Auguste (diplôme de), 244 ;
— le Bon, 427, 510 (portrait de), 51g.
Phihppi (A.). 531-
photographies (collection de), 346.
phylactères, 31, 128.
phyiiologiis du XI1I« s., 321.
piastres, 29.
Pie, V, 98 ; —VII, 14, 98, 115;— IX, 121, 256.
Pterre {'> ). tapisserie, 94-122.
Pierre. (S.), iSi. 184. 256. 513 ; — (culte du
tombfau de). 256; — (statue de). 256; —
(tunique de). 181. 184; — de Brixhey. év.
181; — de Bruxelles, tombier, 430 ; — Em..
245 ; — de Noyon, 332 ; - de Vérone (S. J
(statue de), 332 ; — du Pont, 528.
Pierrefonds. château, 238.
pierreries, 23, 29.
pierres. gravées antiques. 60; — sculptées, 329;
— • tombales. 70.
pieià antique, 172.
Pigalla (buste de), 60.
piliers, monocylindriques, 37 ; — anthropo-
morphes, 483.
Pilon (Germain), 4S3.
pinceà hosties, 281, 283.
Pinchart (A.). 440, 531.
Pintelh (Bacciû), architecte, 93.
Pisanello. peintre, 329.
Pisano (Nino), sculpteur, 142.
Pise, campo sanio, 121, 243, 422 ; — chaire
à prêclier, 439 ; — -tour penchée, 157,
pissenlit, 294.
Pitra (le card.). 439.
Pitres, fouilles, 62.
plats d'offrandes. 158.
plain-chant, 354.
plantain, 44, 221, 231.
plaque, syrienne en or, 527 ; — de cheminée,
248 ; — d"agrafe en bronze, 329 ; — en
fonte. 331.
platane. 294.
Plessis(M. G. du). 427.
plombs antiques, 330.
Pion (Ch. de), 440.
pluviale, 259.
Poelemberg, peintre, 143.
Poésie (la), 155,
Poilly (E. )- graveur, 417.
Poissy, église, 360.
Poitiers, abbaye de Moniierneuf, iS9 ; —
cloiirede St-Aubin, 401 ; — reliquaire Ste-
Croix, 185.
PoUajuolu (Simone del), architecte, 144.
Pologn-, correspondance, 144.
polychromie, des églises, 332 : — monumen-
tale, 333, 334, 335.
Polygnote, fresques, 517.
Pompei, ruines, 49S.
Pontfaverger, horloge municipale, 264.
Pontoise, église, 3S4.
Poppon, archevêque, 181.
Porée (le Chne). 77. ^ôi.
Port en Bessin. tour Vauban, 78.
Portaels. peintre, 458.
portail du Xlle s., 520; — du XIV« s. ,45.
portants, 33.
porte, à Athènes, 236 ; — Autun (romaine),
538 ; — Avignon (Limbert), 85; — (Loull),
85; — Boscherville, 160; — en bronze.
395. 439 : — Bruges (des Baudets). 336 ; —
en bois du XVIe s.. 69; — Dijon (en
feuillage sculpté), 433 ; — Chartres (sculp-
tées). 161 ;— Florence (Ghiberti), 121 ; —
(en bronze), 439 ; — du XI Ve s. , 142 ; —
Gènes, 482 ; — Ivry, lôo ; — Langres
(romaines), 538; — Laon (de l'horloge), 45;
— (de St-Paul), 45 ; — Messines, 204 ; —
Mycènes,403: — Reims, 538; — Rome
(St-Pierre), 121; — (Ste-Sabine), 251 ; —
Toulon, 483 ; — 'Trêves, 498.
porte, — Uieu. 259; — mât à Venise, 31.
portraits (musée de), 254.
Pot (Phil.), tombeau, 539.
poteries, anciennes, 331 ; — estampillées,
329; — lorraines, 67 ; — romaines, 62.
Pothier (Uom), 87. 354, 449, 450.
Poulaine (l'abbé), 331.
Prado, peintures sur bois, 246.
Prague, abbaye bénédictine, 249; — Aca-
démie, 461 ; — peintures murales, 249.
Praxitèle, sculpteur. 61.
prédeile, en bois, 535.
préraphaéiisies, 289.
Présentation (la), 342.
prie-Dieu, 259.
primevère. 295.
priiniiil's italiens. 57.
principautés (les), 362.
Proisy, cloche du XVI II* s., 263.
Prosne, église, 201; — grille en fer forgé, 262.
Prou (M.), 330.
Prud'lioii, peintre. 95. 96.
Prunay. cloche, 263.
Pugin (VVelby). architecte, 441.
puissances. 362.
puits de Ste Claire (le), 421.
Pupput. villeantique, 62.
Pustet (le monopole), 449. 450.
Puy, cathédrale, 69 ; — cloître roman, 40g ;
— peintures du XV^ ?., 400.
Puy de Dôme, chapiteau connthien, 527 ; —
fouilles, 517.
quadrige. 409,
Quarré-keybourbon (tv.), 171.
Quatreinère de Quincy, 96.
Querca (J. délia), 43g.
Quertei. architecte, 346.
queue d'aronde. 41.
Quirico (S ). 307.
Quintin Metsys, 247, 27t.
R.
Radegonde (Ste), 185, 281.
Radowitz (collection), 62.
Radulphe (Dom), abbé du XV'^s., 185.
Raedt (Th. de), 248.
Raeyjnaekers. 248.
Raggi (Oreste),i9.
Rameau (lean). 272.
rampe d'escalier, 31.
Raphaël, 91, 92. 95. 98, 100-104, 106, 108,
H0-116, 120, 123, 156, 157, 254, 277. 27a,
340.
rasuirs antiques, 518.
Ratisbonu'-, cathédrale, 172 ; — statues des
Quatre-Rois, 172.
Rauch, 173.
Raugiport, casque de bronze, 147.
Ravenne, boucles d'or, 23 ; — sculptures,
23-
rayon, 259.
réalistes (les), 157-
Récollets {armes des). 287.
Rédempteur, 306. 307 ; — effigie du, 422.
Regnaud (les), fondeurs, 263.
Reichensperger. 317, 334.
Reims, abbatiale St-Nicaise, 431 ; — biblio-
thèque, 331 ; — camelot, 66; — cathé-
drale, 30, 140. 155, 175. 220, 222. 231, 331,
431,481,504.519;— cloche, 263; — église St-
Rémi, 62, 78, 529; — manuscrit de Phèdre
60; — portiil. 482 ; — porte romaine, 538;
— répertoire archéologique, 260 ; — sta-
tues, 252 . — tapisserie, 530.
reine-marguerite (la), 292.
Reingen. reliquaires romans, 535.
reliquaire, à Aix, 23.; — Bovino, 89; — Châ-
teau-Chàlons, 68, 149 ; — Chaux-en-Mon-
tagne, 149; — Conques, 168 ; — en cuivre,
67 ; — de la Sie Croix, 185. 244 ; — de S.
Giusto, 421 ; — grec. 23; — Herford. 23 ;
— Mams, 153; — de Ste Marie- Madeleine,
421 ; — à Munstermaifeld, 189; — Nevy
sur -Selle, 149 ; — Ormans. 149 ; — de S.
Philippe de Néri, 421 ; — à Poitiers. 184 ;
— Reingen, 535 ; — Rougemont, 149 : —
de S. Sébastien. 421; — A Saint-Ferréol. 149;
— à Trêves, 184 ; — à Valenciennes, 126,
127.
reliques (exposition de), lô.
Rembrandt. 69, 170.
Rémi (évêque), 471 ; — (tombeau romain
de S.). 26.
Remiremont, abbaye, 259 ; — inventaire de-
la sacristie, 259.
Renaissance, 32, 140, 233, 347; — en France,
438 ; — italienne. 28.30, 440.
Renan (E. ), 134, 156, 237.
Renard {M.), 340.
René, d'Anjou, 294, 338 ; — (le roi), 147; —
(comptes du), 158, 159.
renoncule. 222-224.
Renoiiard. peintre, 132.
Répertoire archéologique, 260.
Repertorium fur Kunstgeschirh/e, 54.
Repullès y Vargas, architecte, 412.
réàeau, i6.
restaurations, à Aerschot. 357; — Anderlecht,-
g(S ; — Bourges, 175 ; — Bruges, 356 ; —
Bruxelles, 86. 176. 271 ; — Evreux, 175 ;
— Florence, 85 ; — Franchimont. 86; —
Gap, 175 ; — Havre, 451 ; — Héreni. 357;
— Lallro. 141 ; — Langres, 538 ; — Looz,
539 ; — Marseille. 175 ; — Mende, 175 ;
— Paris, 85, 86, 538 ; - Reims, 175. 519;
— Rome, 142 ; - — Rouen. 175, 270, 355: —
Séez, 175 : — S'IIeeren-El'ierf n, 85; —
Strasbourg, 270 ; — monumentales, 82,
174. 333. 355- 493-
Résurrection, 42 ; — (par Baldovinetii). 55;
— de Lazare, 108.
retable, en cuivre gravé, 150 ; — sculpté, 68,
Rethel, peintre, 458.
Rélhei, anciennes halles, 77 ; — église, 70^
Rethy, hôtel de ville, 534.
kevoil (Henri-Ant. ), nécrologie, 178.
Revue, de l'Agenais, 78 ; — d'archéologie
poitevine, 350 ; — néo-scolastique, 534.
Rheindorf, église, 335.
Rliône, archives départementales, 67.
Rhuis. église. 470
Riant (le comiej, 182, 18g. igo.
Riat (G.); 162.
Ribault (Jean), 147.
Richard (J. M. ), 76 ; — l'abbé, 371 : —
(Mg').45 3-
Riclio-Carboli, orfèvre. 7.
Rif (du), sculpteur, 435.
rinceaux, 25, 23, 219; — sassanides, 219.
Rio, 345.
Riomet (B.), 263
Riotard, église, 69 ; — tour carrée. 69.
Ripamonti (Jos), 17.
rite, pontifical, 2 ; — chaldéen, 60 ; — lyon-
nais, 258 ; — oriental, 538.
Rites (Congrégation des), 14-16, 19,
Robbia. (Andréa délia), peintre, 327, 420 ; —
(Luca), iio.
Robert, d'Anjou, 241 : — (l'Enfant) (statue
de) 439; — (Etienne), graveur, 254; —
Jean, abbé, 131 ; — de Launoy, tombier,
439 ; — de Lenoncourt, 530 ; — le pieux.
193-
R bm, 53g.
rocaille, 33.
Rochemonteix (A. de). 264.
Rochesier, cathédrale, 369, 371.
Rogney, cloches, 263.
Ro'iault de Fleury (Ch. et Cî.)> 159. 185,429,
527-
Roism (le baron de), 189.
Rolduc, chapiteau romain, 409, 411 ; —
crypte, 397, 408, 409, 41T.
568
IBitWt tir rSrr cl)vcticn»
kollin. Jeiin (armoiries de), 510, 541 ; — Ni-
colas, 510, 541.
Romans (rues de), 432.
Komaiii, Jules, peintre. loo.
Rome, abbaye St-Anselme, 87 ; — apoxyo-
inène de Lvsippe, 61 ; —appartements de
Faiil 111. 2J3; - de Pie V. 98, 99 ; — '
aqueduc des Tarquins, 437; - arc. des j
orlèvres. 34 ; — arc triomphal de Gall.a Pla-
dia, 102 ; — archives du Vatican, 2. 3. 6,
7, 76 ; — basiliques : d'Antonin, 403 ; —
Ste-Julienne, 437 ; — St-Pierre. 9. 114 ; —
StPaul-iiors-ies-murs, 102. 241. 242: —
St-Sixte, 512; —bibliothèque Victor lim-
manuel, 70 ; — Capella palatina. 305 ; —
Catacombes, 512;— Sanctasanciorum, 316-
317 : — chapelle Sixtine 74 ; — colonnade
de la place St-Pierre, 114; — colonne tra-
jane, 34 ; — Colysée, 301. 498, 499 ■, — Com-
m/ssion ti'archéolfl^it sacrée, 511, 515 ; —
CoH^^ri^ hiternatiouat des Sfieiieis hi\tori-
^«£•1, 50Ô : ^ couvent Ste-Sabiue, 506 ; —
dalmatique de Ciiarlemagne. 52 ; — des-
cription de la ville. 97 ; — églises, Ste-
Agnés. 242; — Ste-Cécile, 142, 241, 5t5 ;
— St-Chrysogone, 24t. 242; — Gesii. 142;
St-Jean t'ie Latran. 159 ; ^ Santa- Maria
in Cosmedin. 78 ; — Ste-Marie sur Miner-
ve, 142 ; — Marie Madeleine, 142 ; — San-
ta Maria in Via, 142 ; — Ste-Marie au
Transtevère. 241 ; — .Santa Maria Antiqua,
3O0, 313 : — Santa M.iria I,iberatrice 300,
313 ; — Sainte-Marie Majeure. 504 ; San
Silvestro in Capite, 242 ; — fortifications,
511 ; — forum. 311, 437 ; — fresques, 88,
241, 276. 300. 313. 326. 327. 516; — jardins,
165 ; — Manutacture pontificale de St-
Miciiel. 121 ; — logesdu Vatican. 112; —
manuscrits du Vatican, 76 ; — mosaïques,
310, 312. 421 ; — nouveaux musées. 421 ; —
palais de Titus, 26; — porte de St- Pierre,
121 ; — porte Ste Sabine. 251 ; — Porte
sainte. 2^6; — recueil de gravures. 116;
— sac. 98 ; — restaurations d'églises, 142 ;
— tapisseries des Actes au Vatican, 92, 97,
110 ; — torrechartularia, 305 ; — trésor de
St-Pierre, 52.
Romsey, église, 387, 388.
rosaire (intages du), 78.
roses d'or pontificales, i ; — formes, 4 ; —
origines, 4 : — rites, 2 ; — symbolisme,
227; —de Benoît XH, 8; — XIII. 10; —
Boniface IX, 9 ; — Clément V, 6 ; VI, 8 ;
VII. 9 ; — Grégoire XI. 9 ; — Innocent Vi,
9 ; — Jean XXII, 7 ; — Urbain V, 9 ; —
données à Acciajoli (Nie), 9: — .Albert
d'Esté. 9 ; — Andria (ducd'), 9 ; — Astorre
da Bagnacavallo, 9 ; — .'\vangoust (Seign.
d'), 8 ; — Aymar de Poitiers, 3 ; — Bàle
(cathédrale), 6 ; — Berry (duc de). 10 ; —
Boeto (Henri de). 8 ; — Brunswick (duc de),
10; — Cavilone (Johannes). 10 ; — Charles
V, 7 ; — Cima da Cingoli. 9 ; — Cluny. 7 ;
^ Colonna (Stefano). 8 ; — Comminges
(C'=de), 8; Foulques d'Anjou, (C'«). 4; —
Jean le Maingre, i t ; — Jeanne de Sicile, 9 ;
— Louis de Hongrie. 8 ; — Louis de Poi-
tiers, 8; —Lyon (cathédrale), I, 5; — Martin
d'Aragon. 10; — Montbrisson (collégiale),
8 ; — Nmibourg (C'"' de), 8 ; — Orsini
(Rivmoiido). 9; — Pérouse (église St-
Étienne), 5 ; — Portugal iinfant de) 40 ;
— Raymond-Béranger, IV, 5 ; — Serre
(Jean de), lo ; — Souillac (Henri de) 8 ;
Waldemar IV de Danemark, 9.
rosier, 222, 227.
Rosiers-Côtes-d'Aurcc, églis?, 69.
Rossi (le Com. J.-B. de), 242. 512. 514; —
(buste de). 513,
Rostoutzew (Michel), 330.
Rotscliild, 88 ; — (collection), 340, 541.
Rouais (Paul). 436.
roue, bibliothèque tournante, 56.
Roue (la), 245,
Uouen c.uliédrale, 58, 59, 475 : — chapi-
teaux des musiciens, 161 ; - église St-
Ouen. 176, 232 ; — maison antique, 85,
270; — musée, 181; — portail de laCalen-
de, 161. 357 ; — sculptures décoratives.
161 ; vieille rue .St-Rom,ain, 175.
Kougemoiii, croix processionnelle, 149.
Rouget de l'Isle. tableaux, 457.
Rouiin (IJom Kug.), 150. 151,247, 255.
Rouzevalle (le P.). 245.
Roy (les), fondeurs de cloches, 203.
ruban, 28.
Rubens, 69, 72. 170.
Rubinus de An^-IIia. orfèvre, n.
kudd, architecte. 441.
Rufine (Ste). 257.
ruines (restauration des), 82. 178. 236. 269.
499. 500. 525 : — liistoriqiies, 499, 525.
Rum lien, fonts baptismaux, 248
Rupin (E. ), 150. 288.
Ruprich- Robert, architecte, 214, 216, 237,
3+6. 3^7. 37'. 373. 464-
Rti:)kiii (John), 214.
S.
Saget (L.). 58. 59. 133.
sagittaire, 231.
Saglio. 67.
Saint, Agrèce, 184 ; — Anibroise. 20 ; — ."Ana-
tole. 142 ; — Antoine, abbé. 142 ; — An-
toine de Padoue, 142, 332 ; — .Arnould,
130; — Augustin. 20. 89. 327: — Barthé-
lémy, 67 : — Basile. 245: -- l3rsin. 184;
Bénigne. 430 ; — Bernard. 1,6; — Ber-
nardin de Sienne, 141 ; — Bernulf, 535;
— Bout, 257; — Camille de Leilis. 142; — ;
Charles Borromée, 15. 16. 20 ; — Clément,
14s : — tjuthbert, 375. 38Ô. 464 ; — Cy-
prien. 244; — Dominique. 131. 143. 150;
Eloi. 349 ; — Etienne. 42, 92. 123. 242 ; —
Euchaire. 181, 184; — Élorenlin. 184.238:
— Floscel. 87. 50g; — François d'Assise,
1:6. 172. ^98 : Grégoire le Grand. 303-
309. 430. 449. 450. 514 ; — Jacques. i6o,
196; — Jean. t2. n6, 159, 184, 191, 241,
326; — Jean- Baptiste, 142, 190. 241, 503,
— Juste, 68, iBi, 257; — Lazare, 181 ;
— Léger, 149 ; — ■ Louis, roi, 3^0, 348:
— Luc, 407 ; — Lutwin, 184 ; .Mammès;
335 ; — Maur, 131 ; Materne, 181, 184 .
— Malhias. 179, 191, 192 ; — Maximin;
184; — Michel, 191. 481; — Modeste,
181 : — Muminolin, 349 ; — Nicolas, 1^0,
145, 172, 184. 305. 310 ; — Oswald, 180,
PascHl I', 515; — Paul, 91-123, 183. 241;
305, 308, 309. 364. 4S7 : — Paulin de NoH,
18; — Philippe. i8t ; — Philippe Béiiti,
143; — Pierre, 181. 184. 256. 513;— Pierre
Fourrier. 504; — Quirico. 307: — Rémi,
26 ; Sébastien, 141 ; — Suaire. 311 ; — Syl-
vestre. 242, 252, 300 ; — Thonïas. 156,
i85; — 'l'nomas Becket, 78 ; — Valère,
184 ; — Zacharie, 305, 307, 309.
Saint-.-\ubert, égli.se. 482 ; — Callixte (cata-
combe de). 512; — Chamas. arc romain,
403 ; — Denis, abbatiale, 491 ; — fouilles,
542 ; — musée, 541 ; — Ferreol-lez-Besan-
çon, croix-reliquaire, 149: — Flour (arron-
dissement), églises, 148; — Front de Péri-
gueux, église, 520 : — Gall, manuscrit du
IX*-" s,. 449: — Herblon. 332; — Jean
d'Aix, tombeau de R.aymoiid Béranger
IV, 5; — ■ l'Evangéliste (marque de la
Société), 405; — Julien (Sœurs de). 130-
131 ; — Just, trésor, 5; — Louis des Fran-
çais (annales "e), 76 ; — Luc (écoles de),
82, 315- ii8 ; — M.ircelles-Châlons. inscrip-
tion latine. 244: — Nicolas, peintures mu-
rales, 458419; — Oiner, bibliothèque,
320 ; — Parère-le-Chàtel, crypte, 308 ; —
Rémi, arc de tri imphe romain, 400; —
siège (archives), 2, 3, 6, 7 ; —Simon, 137 ;
— Sixte, basilique. 512. 513 ; — Souplet,
retable. 262; — Irond, église StGangulphe.
428 ; — St-Martin, 83, 84, 316 ; — Notre-
I)ame, 317 ; — Si-Pierre, 516 ; — Urcize,
chœur, 149 ; — V^aast. abbatiale, 427 ; —
croix monumentale, 4^7; — Véi"an,pied de
croix du XIV» s.. 332.
Sainte. Agathe. 262 ; — Agnès, 242 ; —
Barbe, 261 ; - Catherine, 142, 535 ; —
Cécile, 103; — Elisabeth, 155; — Foy,
160 ; — Geneviève, 335, 528 ; ^ Gerlrude,
72; — (imlitia, 301, 313; — Godeberte,
349; — Madeleine, 181; — Marthe, 181,
509; — Radegonde, 185, 281 ; - Rufine,
257 ; — Suzanne, 532 ; - Ursule, 519 ; —
Véronique, 505.
Saintenoy, 333
saints, de la messe (les), 159 ;— (béatification
et canonisation des), 16.
Stjîsoiis [les), tapisseries, \\.\.
Salabert, 338.
salamandre (icon.), 401 ; — (tableau de la),
broderie, 402.
Salckener (Erhart). sculpteur, 524.
salière, 420, 434.
Salimbene, peintre, 142.
Salomon (temule de), 434 ; — (trône de), 403.
Sambin (Hugues,), sculpteur. 432.
San Miniato. ciiapelle du cardinal de Portu-
&•*'■ .S5 '< — .Severiiio. tresqiies. 142.
.Santi di Tilto, peintre, 274, 420. 440.
Sanzio, peintre, 344.
saphirs du Puy, 66.
Sarcelles, église, 264, 496.
sarcophage, aiititjue, 542 ; — chrétien, 485
— païen. 518 ; — du XVIII<^s.. 179.
Saronno, église. 505.
Sarto (Andréa del), peintre, 410.
Sarzec (de), 148
Sasso Ferrato, peintre, 506,
satyre, 402 ; — grec, 245.
sauterelle, 339
Sauvageot (L. ), architecte, 539.
Savonarole, 93, 94.
Savone, église St-Jean Baptiste, 142 ; —fres-
ques, 142.
scabieuse, 231.
.Scandinaves. 409.
scarabée égyptien. 213.
sceau, antique, 148 ; — de Foulques lejeune,
244 ; — italien, 244 ; — (matrice de). 331 ;
— Messines, 208 ; — .VIonza, 12 ; — de
.Salomon, 298 ; — du XI 1" s. , 62 ; — du
XIII»'. 62.
Schanosky (Pav. ), .sculpteur, 539.
Schefter (Henry), peintre, 155, 457.
Schevyreff (le prof. ). 100.
Schlesswig, madone, 78.
Schlosser (de), 246.
Schnaase. 2;.o.
Schniitgen (le ch.). 78, 172. 534.
Schnyder (W. ). 76.
Schubring (P.), 172.
Schw.arzrheindorf. église St-Georges. 523.
i^cieuce eaikoliquc (la). 77.
Sciences ( Ici), tapisseries, 120.
sculpteurs : .Alcamène, 61; — Aureli, 422 ; —
Baérze (Jacq les de), .133 ; — Blanchaert
(L.). 86; — Bocihos. 68 ; — Bouchardon
(J.-Bt.). 433 ; - B .iidrillet (Jean). 432 ; —
Broederlam (Melchior), 433 ; — Uaiet.
(lehan), 427; — Dechaume (Geoffroy),
541 ; — Donatello. 241 ; — Faydherbe
(Ant.). 426 ; - Ci.isq (Paul), 136. 137 ; —
Geefs. 317 ; — Georis (Gér. ) de Bruxelles,
73; — Gliiberii. 439; — Laytié (I.. F.).
435 ; — Le Movne. 60 ; — Mengelberg
(W.). 78 ; — .VIic'i l-.'\nge. 108, 114, 118.
438; — Mino di Fiesole, 143, 144 ; —
N1C0I.IS de Bruges, 73 ; — de Pise, 439 ; —
Pib-ano (Nui 1), 142 ; — Praxitèle, 61 ; —
Ril (du). 435; - Salckener (Erhart), 324 ;
— Samoi i(li ). 432; — Schascorky (Dav.).
539 : — Verroccio. 144.
sculpteurs, du XVI s, 59 ; — romans, 395;—
CaDle analptique.
509
sculpture, allemande, 252 ; — brabançon-
ne, 248 ; — sur bois. 414, 521 ; — à Caen,
232 : — chinoise. 437 ; — décorative, 16 1 ;
— dijonnaise, 68 ; — française, 252 ; —
gothique, 233. 245; — italienne. 232, 439; —
japonaise, 437; — de Ravenne, 23; —
romane, 161, 246, 425 ; — toscane, 152 ; —
troyenne. 160, 161 ; — du XIII-^ s., 221.
Sébaste (les 40 martyrs de). 309.
Sébastien (S.), 141 ; — (reliquaire de), 421.
Sébastopol, parquets à figures incisées, 5r7.
Sebourg, chapiteaux. 223 ; — église, 223.
Sedan, monstrance flamande, 324.
Séez, cathédrale, 175; — sculptures décora-
tives, 161.
Ségovie. église Ste-Croix, 429.
Selby, église, 387. 38S
Selles, statue St-Mariin, 262.
Semaine dgi Fiiteles (laj, 51.
Semper (H.). 172, 535.
Senlis, cailiédrale. 349 , — cloclie, 44.
Sens, cathédrale, 384, 400, 403 ; — tapisserie
ancienne, 78 ; — (Guillaume de), 272.
Sensenruth, église, 451 ; — tbnt.s, 451.
sépulcre, 190; — (fiiigment du Si). 507.
sépultures antiques, 530 ; — préromaines,
381. 382.
Sepulvtrda, églises, 255.
séraphin, 361, 453
Serbat, (L.), 129.
serge d'AllematJiie, 66.
serpent. 322, 413.
serpentine, 158
Seirano Katigati (Enriquel, i6r, 429.
Servais, musicien, 456.
Servières (L. ), 166.
serviette, 30, 259.
Settegart, peintre, 280.
Séville, Alcazar, 164.
Sfax, baptistère, 518.
Sha-tcheou, grotte des mille Bouddha, 330.*
Siagu, ville antique, 62 ; — baptistère, 518.
Sibenaler {).- B), 335.
Sibylles. 541 ; — (prophéties des), 437.
siège, pliant en fer incrusté d'or, 329.
Sienne, peintres, 250.
Silos, église romnne. 247 ; — trésor de l'ab-
baye, 150. 151, 153.
Simone (Mariino), peintre. 241.
Sinon, architecte turc, 328.
Sinope, manusc. de l'évang. S.Matthieu, 245.
sirènes, 395, 400, 403.
Siret. 141. 143.
Sizeranne (Robertde la), 154, 214.
Smithfield, égUse St Barthélémy, 370.
Sinolensky (Jus. ), peintre, 144.
Snellaert (Jean), peintre, 427.
Sociedad espanola dei excursiones, 246.
Société, des amis des motiuments parisiens,
175 ; — des Antiquairesde France, 60 147,
224, 329. 424, 517 ; — archéologique de
Bruxelles, ^■48. 426 ; — archéologique du
Midi de la France, 425 ; — diocésaine d'ar-
chéologie chrétienne de Nanutr, 1^9 ; —
éduenne, 508 ; — d'émulation de Cambrai,
332 ; — française a' archéologie, z^\(^\ —
d'histoire ae Beaune, 508 , — d' histoire et
d'archéologie de Gand, 426 ; — historique
et archéologique de l'Orne, 148 ; — histo-
rique et littéraire de Tournai, 335; —
internat, des études iconogro phique^^ , 329 ;
— des lettres^ sciences et arts de Bar-le-Duc,
332 ; — des Mélophiles de Hasseît, 428.
soies teintes, 105,
Soignies. collégiale St-Vincent, 355.
Soil(E ), 78, 335. 527.
Soissonnais, égUses, 463, 470,
Soissons, ancienne basilique, 85 ; — cathédra-
le. 37. 43. -48, 384 : — cloître St-Jean des
Vignes, 30, 224, 228 292 ; — église St-Lé-
ger, 494 ; — Semaine religieuse, 350.
soleil, 159, 260
Solesmes, bénédictins, 449, 450, 452 ; —
chant, 449.
Sorbonne, congrès des sociétés savantes, 62.
souche, 27.
Soucia, reliquaire, 149.
Soulhwell, collégiale, 386.
Souvigny, église, 401.
Speusippe (S. ) (statue de), 332.
sphinx égyptien, 395, 402.
Spicker (Guillaume), peintre verrier, 510; —
(I^ierre). peintre, 510.
spirale, 28, 2T2.
stalactites. 29, 30.
stalles, à ('oriielynuinsler, 225; — Dijon, 432;
— gothiqrres, 68 ; — Heinsberg, 34 ; —
Lanjex, 487; — Louvain, 72.
Stamboul, groupe de mosquées, 527.
statuaire (la), 347 ; — en Normandie, 161.
statue, de Ste Agathe, 282 ; — Apollon.
424; — Ste Barbe, 262 ; — BonifaceVIII.
252, 326 ; — S. Caprais, 262 ; — Christ,
426. 481 ; — Durand (abbé), 521 ; —
Kleusippe, 332 ; — évêque, 142 ; — Frédé-
ric le Grand, 173 ; -- Ste Geneviève, 528 ;
— S. Gimer. 426; — Héraclès, 148; —
Hermès, 245 ; — S. Hubeit. 202 ; —
S. Laurent. 262; — S. Lautein, 332; —
Ste LéoniÉle, 332 ; — S. Louis de Toulou-
se, 241 ; — Lysandre. 518 ; -- S. Mammès,
335 i — ^t*^ Marie-Madeleine. 262 ; —
S. Martin, 2Ô2 ; — en marbre et en
bronze, 148 ; — Meung (Jean), 272 ; —
Mélasippe, 332 ; — S. Michel, 481 ; —
Mnémosyne, 61 ; — S. Nazaue, 420 ; —
S. Pierre. 256 ; — S. Pierre de Vérone,
332 ; — prince de Ligne. 270 ; — quatre
Rois, T72 , — Raymond-Béranger IV, 5 ;
— S. Thomas Becket, 78 ; — Vierge, 44,
69. 262. 27t. 504. 538.
statues, anciennes dans le Jura, 62 ; — de
bronze, 6r ; — colossales (de bœufs), 45;
— diaprées, 61 ; — dijonnaises, 68 ; —
équestre, 62.
Stein sur le Rhin, peintures murales, 172.
Steinl, pemire. 280,
Stèle des Vautours (la), 60 ; — phénicienne,
518.
Stimmeti ans Maria Laach fdiej. 52.
Stovv, église, 472.
Strasbourg, cailiédrale, 270, 431.
Straven (F). 428.
strigilles. 29, 30.
Stuben. abbaye, 185; — couvent des dames
nobles, 189.
Sturbout (Hubert), peintre, 177.
Siuitgart, Cabinet des antiques, 172.
style, brugeois, 153 ; — esthétique, 138.
styx, 293.
Subiaco, fresques, 232.
Suger. 380. 384. 491-
Suisse (Charles), architecte, 136, 137, 433,539.
Suzanne iSte), 532.
Sylvestre (S.), 242, 300 ; — (tiare de), 252.
symbolique chrétienne (la), 33r.
Synnada, blocs de marbre, 147.
tabernacle, édicule, 331 ; — du XVHI'^ s., 159.
tableau, 258 ; — dédicatoire à Lublin, 144 ;
— d'église, 63 ; - flamand, 519,
tables d'autel limousines émaillées, 150. 151.
tiipèfe, 94.
tapestry, 94.
tapisseries 94, des Actes des apôtres^ 91 - 123;
— à Angers, 174; — de l' Apocalypse, 544; —
\ Arithmétique, 120 ; — l Astronomie, 120 ;
— à Aubusson, 159; Audience du roi
Louis XIV, 104, 105 ; — bataille de
Formigiiy, 60; — à Beaune, 510; — coptes,
104 ; flamandes, 96, 99, 100, 270 ; — la
Géométrie. 120 ; — des Gobelins, 511 ; — les
Grotesques, 114; — à Hamploncourt, 100;
— Hercule portant le globe céleste, 114, 122 ;
— les Heures, 114 - 123; — à Loukmanoff,
100 ; — à Lyon, 96. 98 ; — modernes. 104 ;
— à Paris, 98 ; — la musique, 120 ; — Les
Parques, 1I4 - 123; — Passage d'une rivière,
120; — Pillage d'un camp, 120; — au petit
point, 540; — à Reims, 530 ; — la Résur'
rection de Lazare, 108 ; — les Saisons, 114,
116, 119. 122; — les Sciences, 120; — àSens,
78 ; — à Tournai, 120 ; — à Vienne, 119 ;
— les vertus théologales, 114, 116, iig, 121;
— du XVIc s., à Bruxelles, 115, 117. ng.
tapissiers, flamands. 104, 106, 108, no; —
{qualités des), 109.
taques de foyer, 70, 259 ; — historiées, 335 ;
— symboliques du XVH* s., 70.
taureau, 394, 406 ; — androcéphale, 394.
Tauro de Sienne, orfèvre, 7.
Taverny, église, 496,
Tebessa, fouilles, 330.
Tedesco, 439.
tempera (peinture à), 55 - 57, 311, 328, 507.
temples chinois, 437.
tenture, 258.
tête de clou, 29 ; — en bronze 329.
Tewkesbury, église abbatiale, 473.
Thaïs (restes de), 453.
Thèbes, maison antique, 162.
Théodoric II, (histoire Iirodée de), 535,
1 héophile (légende de), 42.
Thiollier (A ). 68, 530 ; — (N.), 58.
Thiverval. église. 496.
Tholin (I.), 66, 78, 520.
Tlîomas, (S ), 156, 186 ; — Becket (S.). 386 ;
— (<-taiue de), 78 . — (J.). peintre, 427 ; —
de Podio, orfèvre, 20.
Thony(J.), peintre 427,
Thooris ( L. ), 71.
'Ihorel-Terrin, 159-
Thrace (fouilles en), 6r.
Thuin, refuge de Lobbes, 535.
thym, 296.
tiare conique, 326.
Tickencote, église, 474.
tilleul, 296.
Timgad, établissement de bains antiques. 330.
tissus du nr' s. (collection de), 87.
Titus (palais de), 26.
Tivoli, jardin d'Esté, 165.
toile de Bourgogne, 66.
toison d'or, 398.
tombeau, de S. Bénigne. 433, 434 ; —
Brézé, 161 ; — Clément V, 349 ; — duc de
Clèves, 322; — Federighi, év. 110; —
Innocent X, 243 ; — Jacopo Marcello, 453 ;
— Lamoricière, 173;— Louis de Maele, 248:
— Philibert de Chàlons, 329; — Pot (P.),
539 ; — Raymond Béranger iV. z^;— Ray-
mond de Montpezat. 521; — romain, 26.
tombes (collect. de), 42*:.; — du XlVcs., 439,
Tongres, congrès d'archéologie et d'histoire,
333- 525 ; — église Notre-Dame, 525 ; —
remparts, 333; — trouvaille archéologique,
525 ; — tumulus, 525.
Tonnerre, statue de la Vierge, 69.
Tcippfer. 217.
torche. 30. 3( ; — du X\'ir s., 74.
Tornabrioni. patricien, 56.
torsade, 29.
Tortose (Syrie), matériel d'orfèvre, T47.
Tory (Geoffroy), graveur, 254.
Toscane, anciennes fresques, 56,
Toulon, musée, 482 ; — porte de Puget, 483.
Toulouse, anciennes maisons. 425 : — cadran
d'horloge, 484 ; — cathédrale. 168, 425 ; —
chartreuse, 425; — église des Jacobins,
530; — St-Martin, 434 ; — St-Servais, 538;
musée des Augustins, 232 ; — vitraux, '538.
tour, antique à Arendonck, ô'^ ; — Athènes
(t. des Vents), 498; — Bruges, 44 r; —carrée,
161, 2c6 ; — Laon, 40, 44, 45 ; —
Lisieux, 40 ; — Riotard, 69 ; — Chamaret,
78 : — Dijon. 430 ; — Laon, 406, 407 ; —
Messines, 206; — monumentale du XVIII.
s., 70 ; — Noyon, 349 ; — Pise (penchée),
157 ; — en porcelaine, 437 ; — romaine,
332; — Tournai (Henri VIU), 2Z5 '• —
Vauban à Port en Bessin, 78 ; — de Vésone
à Périgueux, 176.
570
WitWt lie rairt chrétien.
Touraine, 70; — colonnes à imbrications. 62,
Tournai, 73 ; — beffroi. 427 ; — cathédrale,
S'^S- 350 ; ~ êglisiî St-Jacques, 77 ; — Ste-
Marie-Madeleine, 68 ; — poni des Trous,
335 ; — Société historique et littéraire, 33=; ;
— tapisseries. 120; — tour Henri VIII,
335 ; — Ymagiers, 531.
tournesol, 296.
Tournon, inventaire des reliques, 66; — trésor
de l'église, 66.
Tours, cathédrale, 218.
Tracy le Val, 394.
Tracy (de), 535.
transenna, 256.
Transition (la). 365.
travaux des sociétés savantes, ôd, 244, 329, 424.
trèfle, 222 - 223.
Treille, 31 ; — (Notre-Dame de la), 171.
Tremblay (Barthél. du), sculpteur, 424.
Tremouiiie (de la), fer à hosties. 285.
Trente, concile 16.
trésor. d'Aix. 23 ; — Atrée, 437 Bàle (ca-
thédrale). 7 ; — Barî, 1^43 ; — Casseneiiil,
(église). 65 ; — Clery (Motre-Dame), 132;
— Conqu'-s. 168 ; — Dijon (St- Bénigne)
432 ; — Fontenay, 158 ; — France (royal),
66 : — Guarazar. 123 ; — Montoezat. ^31 ;
Monza. 12, 14; — Rome (St-Pierre). 52;
— Saint-lu^t. 5 ; — Silos, 150, 151, 153; —
Tournon (église). 66 ; — Trêves (St-
Mithias), 179 ; — Vienne, 435.
tresse, 29,
Trêves, cathédrale, 180; — musée, 181. iqt ;
— Porta Nigra, 498 ; — trésor de l'église
St-Mathias. 179.
trident, 3s
Trigh, architecte, 271.
rr/v77/(la). S08.
Troia, chaire de l'église St-Basile, 172
Troismoutier, fer à hosties, 28c;.
Trônes (les). 362.
trophées. 34 ; — guerriers, 329.
Troyes, cathédrale, 227 ; — jubé, 157 ; —
sculpture, 160.
tulipe. 296.
tumuli. S25.
Tunisie, baptistères byzantins, 518; — basi-
lique antique. 518; — fonts baptismaux,
5t8 : — fouilles, 62.
Turin galerie royale, 130.
Tyr, inscription phénicienne, c;i8.
U.
Udine (Jean d"), peintre, 100.
lunbo. 33.
Uperna. baptistère, 518.
Upsal, bibliothèque. 172.
Urhino. archives. 142 ; — cour du duc Fré-
déric. 344 ; — église St-Jean. 142 ; — pein-
tres inconnus, 142.
urne. 30.
Ursule (Ste), 519; — (châsse de), 441.
V.
Vachères, fouilles, 331 ; — station préhisto-
rique, 33T.
VaM)ieu. mobilier d'art, 435, 1^31.
Valenciennes. arcliives, 132 ; — reliquaire,
126, 127
Valére(S.). 184.
V.^liette (René), 158.
Valmary, 70.
V-iIvisciolo. abbaye cistercienne, 58.
vampire, 403.
Vandenpp^reboom (.'\.), 71; — (castel de), 86.
van der Kaeghen (Ferd.), 165.
Vandevelde (A.). 153.
Van Duyse (H.). 72.
Van Kven, 70, 177.
Varbely, bns relief. 147.
Vasari, 57, 88, 98. loo, 101. iio ï 12, 120, 142,
143, 242, 254, 274-280, 312. 421.
vase, 30 ; — antique à obturateur, 329 ; — de
bronze préromain, 62.
Vatican, apoxyoniène de Lysippe, 61 ; — ap-
partement de Pie V, 98, 99; — circo/o, 510;
— loges, 112; — projections lumineuses,
513 ; — séance d'archéologie. 510, 538 ; —
tableaux liturgiques, 513. 514; — tapisse-
ries, 92, 97. 114.
Vaudoyer, architecte. 175, 346.
vautour. 344 ; — {la stèle des), 60.
Vaux de S^rnay. château, 219.
végétaux (stylisation des), 215 ; — {symbo-
lisme des), 215.
Veith, peintre. 280
Vélasquez, peintre, 170.
Velay. monuments, 68.
Veneziano (.Ant. ), peintre. 422.
Venise, 403; — porte-mât, 30 ; — tombeau de
Jacques Marielo. 453
X'enus. 245 ; — tàenitrix, 61 ; — de Milo, 60.
61, 147, 156.
verdure, 258.
Verhage (Pierre), peintre, 362.
Verha*?gen, arciiitecte, 82, 238, 355, 356, 357.
Verlat. peintre, 457.
Verneilh (Félix de), 366. 382-385.
Vernon (A). 335; — (Smiih). 130.
Véronèse ( Paul), peintre, 154, 170.
véronique, 296
Véronique (Ste), 503.
verres églomisés, 149.
Verres, château, 258; — inventaire du mobi-
lier, 258.
Verrochio, peintre et sculpteur, 144.
Versailles, cathédrale, 30; — château, 230; —
jardin, 165 ; — musée, 244.
Vertus (les). 362; — théologales (les), tapisse-
ries, 114, Tr6, 119, 122.
verveine, 296.
Verviers, 73,
vêtements du III^ s. (collection de), 87.
vêtements liturgique , dalniatique. 51 ; —
aube, 172; — (iimaurum, 251; — camelau-
cum, 251 ; — chape, 65 ; — chasuble, 191 ;
— costume canonial, 65 ; — dalmatique,
52 ; — étole, 259, 535 ; — mitre, 251 : —
omophorion, 53; — pallium, 514; — plu-
vial, 259; — )e!^num pontifical, 251. 252;
saccos grec, 53; — tiare, 251, 326; — vête-
ments pontificaux, 332.
Victoire aptère (temple de la), I^o^.
Vidal (Ci. M ), 76.
Vienne, médaillon. 329; — musée, 245; — des
arts industriels. 172 , — salière du trésor
impérial. 420. 434; — tapisseries. 119.
Vierge, 124, 141, 142. 145, 184, 191, 2^2. 361,
459! — annonciation, 55, 68, 76, 308, 310,
421, 462, soS> 519; — assise, 332; — as-
somption, 422: — couronnement, 92, 96,
ç8. 118 ; — douleurs, 130; — entre deux
saints, 169; — immaculée-conception, 77,
361, 504. 519 ; — glorification, 42. 170,
425 ; — scènes de sa vie, 42, 43 ; — statue,
44,69,262,271, 504, 538; — Visitation, 155.
vigne, 47, 222, 228, 322.
villa royale chaldéenne, 148.
Villard de Honnecourt. 42.
villas ronïaines, 162.
Villefosse, trésor. 147.
Villelame, mosaïques romaines, 244.
Villenoisy (F. de). 435.
Villers, aljbaye, 63, 235, 236. 49S ; — église,
82-84 ; — retable, 248.
Villette, inventjiire de l'église, 340.
Vilmont sur Lalia, château, 184.
Vinça, église. 540.
Vincent de Beauvais. 397, 398.
Vinci {Léon, de) peintre, 57, 505. 517.
Vinckaert (Jean), peintre, 417.
violette, 296.
I Viollet le Duc, 83, 154, 220, 231, 234, 238,
239. 314. 347. ^^S' il^^ 384. 426, 431. 433.
468, 488. 489, 493. 495. 509.
VMsconti (Fréd.). archéoi., 14, 15.
l'isitntioji, 155.
Vitet (L.) 155. 346. 349.
vitraux, à Angers. 159; — Auch. 425; —
Beaune, 87, 509. — Binche, 357; — Carcas-
sonne, 425 ; — Dijon, 538; — Enghien,
357 ; — Gand, 357 ; — Laon, 42 ; — Laro-
chepot, 539 ; — Lîbin, 543 ; — Nantes,
77; — Nogent l'abbesse, 262; — Paris,
451 ; — Toulouse, 538 ; du XIL«^ s., 186.
vitrification accidentdle, 147.
Vogué (dej, 245.
Volpato, graveur.
volute, 212.
VouU (le tSt-). 435-
Voûte, d'arêtes, 368, 370, 374-392 ; — en
berceau, 148, 308 ; — en coupole, 69 ; —
croisée, 201; — mauresque, 29 ; — norman-
de, 365. 370; — oclopiiriiie, 473. 474; — en
pierre, 365, 463. 465; — quadripartite, 46!*,
474; — rampante, 452"; — romane, 355;
— se.ypartite, 366. 374 ; — sphérique, 438.
Vrelan (Guil.), miniaturiste, 130.
Vriendt {Alb. de), nécrologie, 89.
Vyve-Capelie, église, 53J.
W.
Wadovv'ski (l'abbé A.), 144.
Wagen (le Dr), 124.
Warkworih, église, 471.
Watteau, peintre, 170.
Wauters, 124
VVeale (W. H.-J.), 125, 132. 238, 319, 320,
321, 304, 440.
Weber, galerie, 535.
W'eert ( pietà à) - 172.
VVell-Bundel, peintures murales, 451.
Westminster, dortoir, 370.
Westphalie. église à deux nefs, 172.
Weyden (v. der). 224, 247, 334, 345, 510, 531.
Whitbv, abbave, ',70.
Wiegand (ie D,), 251.
Willame (G ) 71.
WiUis (le prof.) 371, 373.
Winchester, cathédr. , 370 389; — crypte, 370.
Wisniar, musée, 410 ; — tissu antique, 420.
Wladyck, peintre, 144.
W(>illez{K. ), 220, 489497.
Worcesttr, cathédrale. 371, 373, 379.
Wuestwezel. peintures murales, 451.
Wulf (C'h. de), arciiitecte, 356.
WU-scher-Becchi. 172.
Wyart (I!)oni. Sébastien), 512.
Wybaud (Jean), graveur, 171.
Xanten, église 522 ;
Xanthos, frise. 410.
- Vitraux, 172.
N'ork, aithaye N.-D. 370.
Ypres, cathédrale, 524 ■ — halles. 442, 449;
pignons en bois, 524; — trésor dit « des
Templiers », 441 ; — {siège d'), 195.
Ysendyck ( Van), architecte. 176.
Z.
Zacharie (S.), 305. 307. 309.
y.eitschrift fur chriitluhe Kufisf, 78, 172,
534-
Zcpperen, église, 451 ; — peintures murales,
4-;i. S4>-
Zeibi (Luigi), 19.
zodiacjuc >ie N.-D. de Paris, 413.
Zucchi (Bart.), 12, ly.
Cable analytique.
559 1
collectionneurs (répertoire général des), 340.
collégiale, de Binche (St-Ursmer), 357; —
Cambrai (St-Pierre), 171 ; — Clèves, 522 ,
— Huy, 85. 271 i — Louvain, 72, 83, 84,
'^77' 539 ; ~~ Manat. 425 ; — Monlbrisson
(Nolre-Danie). 8 ; — Saint-Paulin. 69 ; —
Soignies(St-Vincent),355; — South\veU,386.
Colleoni {Hier, de), peintre, 141.
Colmont, ruines, 525.
Colobium, 445.
Cologne, cathédrale. 334. 503, 545; — église
des Sts Apôtres, 350 ; — de Ste-Marie du
Capitole, 450 ; — de St-Pantaléon, 190.
Colomb (Christophe), 254.
colombe, 410.
Colombe (Jean), miniaturiste, 329 ; — (Mi-
chel), 440.
Coloma (Stefano).8.
colonnade antique, 329; — grecque, 36.
colonne à imbiications. 62.
coloris (les secrets du), 69, 534.
coloristes, 69.
comité, diocésain. 315 ; — des travaux
historiques, 148, 332, 519.
Commission, archéol. du départ, delà Seine.
451; — département, des monum. hist. du
Pas-de Calais, 332 ; — diocésaine des mo-
numents, à^ ; — française des monuments
historiques. 136, 315 ; — royale des mo-
numents de Belgique, 63.
ComTiiode. empereur (portrait de), 188.
Como, église. 505.
Compiègne, Ste Klarie. 331.
composition architectonique, 532 ; — déco-
rative, 532.
Composlelle. cathédrale. 160 ; — église St-
Jacques, 168.
Conférence d'histoire et d'archéologie du
diocèse de Meaux, 335.
Congrès, archéol. de France, 519; — deTon-
gres, s^S ; — d'archéologie et d'histoire,
333; — eucharistique d'Angers, 522; —
international des sciences ethnographiques,
87 ; —de Malines, 333 ; — scientifique de
Bruxelles. 529 ; — de la société française
d'archéologie, 424; — des sociétés savantes,
62. 530.
Coninxheini. fouilles. 525.
Conques, abbaye, 167;— chœur, 149;— église
St Foy. 16Ô, 167 ; — reliquaire, 168 ; —
trésor'. 168
Constfuice, cathédrale, 334.
Constantin, empereur, 22, 147, 242, 251 ; —
(le pape), 251, 309 ; — (portrait de), 329;—
II, 329.
Constantiniana Daphné, forteresse. 244.
Constantinople, Cyclobion, 528; — églises,
528; — mosquées, 527 ; — murailles, 527 ;
— musée. 62, 148, 534 ; — prise, i8g ; —
Ste Sophie, 528.
constructions, languedociennes, 77 ; — mili-
taires, 62,
contreforts. 46.
conversion de S. Paul, tapisserie. 92-123.
Cappicii (Jean), peintre. 338,
Coptes (tapisseries des), 104.
coq (icon.). 410,
coquelicot (décor.), 291.
coquerrlle, 293.
Corbeil, clocher de St-Spire, 494.
cordelière (symb.), 29.
Cormon. 272.
cornaline talismanique, ^24.
Cornelis (Alb.). peintre, 36r, 363, 364.
Cornélius, peintre, 280, 458,
Cornelv munster, stalles, 225.
corniche du théâtre d'Ader, 25.
Corona (le P. Fabius), bfirnabite, 17.
corona. 252.
Corrège (le), peintre, 535; — ^ (fresques du),
422.
correspondances d'Italie, 55. 143, 240, 326,
419, 505 ; — de Pologne, 144.
Corroyer (E. ), 239.
Cosimo Roselli, peintre, 143.
costume canonial, 65.
côte normande ( h: f, 246.
Coney, donjon, 498 ; — (Robert de). 272.
couleur, à l'huile, 55; — (définition de la), 69.
couleurs (échelles et genres des), 65. 102. 110;
— (résistance des), 104, 105, 109.
Coulommiers, église St-Denis, 335.
coupe, en cristal, du XIV*^ s., 535 ; — sassa-
nide, 61.
Courajod (L. ), 264, 438, 439.
Couran, architecte, 521.
Courances, château, 147.
couronne, 35 ; — antiques à Kazan, 24 ; —
émaillées. 22 : — de fer à Monza, 12, 14,
16,20, 22, 251 ; — impériales, 24 ; — lom-
barde, 22 ; — d'ostensoir, 259 ; — (la Ste)
à Paris, 78,
couronnement de la Vierge, tapisserie, 96,
118.
Courtrai, hôtel de ville, 460; — peintures
murales, 460.
couteaux, 159
Coutures, ter à hosties, 284.
couverte de pupitre, 259.
couverts, 259.
Coxie (Michel), peintre, 106.
Crayer (de), peintre, 42Ô.
crê.iHofi du Monde. 43. «
créatures vivantes, 394.
crèche du Sauveur, igr.
crédences, 259.
Creil, église St-Evremond, 490.
crémière, 259.
Crespin, architecte. 411.
Crète, fouilles, 61, 147; — statue égyptienne.
245-
Crèvecœur (Lionel de), 365.
Christus (Pierre), peintre. 125,245,
croisade (rôle de la papauté dans la i''^). 525.
croisées d'ogives. 365-393, 463-481.
croissant (le), 331.
croix à double croisillon. 158; — gammée,
2T3 ; — de Limbourg, 185 ; — de Lorraine,
78. — monumentale. 427; — offrande, 259;
— processionnelle. 149, 331. 517 ; — reli-
quaire. 149 , — triomphale, 356, 357; —
(parcelle de la), 179 ; — (reliquaire de la),
179-182;' — (tableau de la). i8r, 187.
Croix ( La ) , .450.
Croquet (l'abbé). 248.
crosse de 1200. 403.
Crostarosa(Mgr;. 512, 515.
Crousille, inventaire de la maison curiale, 338,
crucifix, 418-419
Crucifixion, 421,505; — (de Montofarno),
57 142 ; — (tableau de la). 190, 250.
Cuicul, fouilles, 330.
j culots (décor.), 218, 219.
I Curçay. fera hosties, 285.
1 Cuthbert (S.), 386, 464 ; — (châsse de), 375.
[ cyclamen (décor.), 295,
I cygne (décor.), 411.
I cymaise romaine, 218.
cymbale phénicienne, 147.
cyprès, 295.
Cyprien (SV) (tombeau de), 244.
Cyriaque d'Ancône, 4^0.
Cyrus [ mort de), tableau, 426.
D.
Dagnan Bouveret, peintre, 337.
dahlia, 290-291 .
dais, 150.
dalmatique, de Charlemagne, 52.
dalmatiques romaines, 52.
Daly, architecte, 425.
Damou-el-Karila, fonts baptismaux, 518.
Daniels, abbé, 332,451.
DarceUA.), 129, 264.
Dare (Estiévenart), peintre, 427.
Daret (Danelet). 427 ; — (Jacques), peintre,
426, 543; — (Jehan), sculpteur, 427; —
(Octe), tailleur d'images, 427,
— fresques, 517 ; —
518.
I David. d'Angers, 155 ; — d'Ecosse, 387 ; —
I roi, 363 ; — peintre, 104, 248.
! Deas, église, 332.
1 Dechaunie (Geoffroy), sculpteur, 541.
décor (sources du). 394.
décoration, architectonique, 25. 212, 289,
394. 481; — moderne, 133; — picturale^
des églises, 524 ; — polychrome, 64 ; —
sarrasine, 25.
découvertes archéologiques, à Anvers, 541; —
Heaune, 541 , — Bosco-Reale. 88, 241 ; —
Jérusalem, 330 ; — Paris. 539. 542 ; —
Rome, 88, 242 ; ~~ Tongres, 525 ; — Ville-
larîe, 244.
Deger. peintre, 280.
Dehaisnes(Mgr), 129, 531-
Dehio, 366. 367. 474, 475.
Dekeyser. peintre, 457.
Delacroix, r56.
Delamain (Phd.), 33g.
Delatte (C. P.). 147. 245, 354, 450.
Delbeke. peintre. 443.
Delescluze, 69, 534,
Delisle (Léop.), 150. 174.
Delphes, fouilles,
inscription métrique,
Delvin, 248.
Demaison (P.), 70, 260.
denier, 435.
Denis (S.), pape, 242.
Denon. antiquués, 331.
dentelles anciennes, 356.
Déposition du Christ, 124, 509.
Derix (H.), 172.
Descamps, fondeur. 263.
Descente de croix, 88, 277.
Desilve (le D'), 129
dessin (le). 135; — (simplification du), 216 ;
— de 1621, 60 .
Destrée (Jos. ), 161, 248. 264. 329.
Deutsch iNic.-Man.), 177.
devant d'autel, 259.
Deventer, chemin de croix, 523 ; — église
bénédictine, 523.
Devizes. église St-Jean, 388-391; — église N.-
D.. 390-391-
Devoisni (.-\.-J.), 531,
dévotion, 259.
Didier, abbé, 312.
Didron (E.). 87. 159, 183. 188. 359, 434. 503.
509. 538.
Diegerick, 193. 194.
I Diehl (Charles), 23.
Dieppe, église .St-Jacques, 160.
Diert, église St-Jean, 357.
digitale (décor.), 295.
Dijon, bibliothèque [aninienne. 432 ; — boi-
series sculptées, 433; - chapelle St-Jean, 136;
— église St-Hénigne, 429-434, 504; — église
N. -D. , 430 ; — flèche dorée, 432, 433 ; —
fontaine de Moïse. 483 ; — incendie, 430 ;
— porte à feuillages, 433 ; — retranche-
ments calcinés, 431 ; — tour 430.
Dinant. maisons antiques, 317.
disque en argent, 6r.
Dissais, fer à hosties, 285.
Doil. 258.
Dolfini, 539.
Dollmayer (Herman), loj.
Dominico di Jacopo de Sienne, orfèvre, 7. 8.
Domfront, église N.-D. sur l'eau, 464.
Dominations (les), 362.
Dominicains, 526; — (chape des), 6^.
Dominique (S.), 131, 150 ; — (apothéose
de), 243 ; —le Florentin, 161.
Domitille (catacombe). 515.
Dommartin, église, 349 ; — (L. ) 73.
Domns Cœciti(r, 515.
Donateilo. sculpteur, ^t^. 240, 241.
Donnet (F. ), 70.
Dontrien, cloche, 263; — église, 261 ; —
fauteuil de XVI le s., 262; — graffite, 262 ;
— statue de S. Laurent, 262 ; — Vierge du
XIV^s.. 261.
560
3Rebur iJC ('2lrt cbvctinu
Dorez (Léon). 246.
Douai, musée, 170.
Doué (Martin), peintre, 62.
doinils, 68.
dragon (icon.). 398, 436.
draperies (décor.), 29.
Drèche (N.-D. de la), 77.
Dresde, musée, 6r.
Drexler(Karl), 78.
Drosidx (groupes des), 214.
druidesse. 244.
Duban, arcliitecte, 346.
Dublin, musée national, 2to.
Dubois (Em. ), 137, 173.
du Bois (A.), 73.
Duccio. peintre, 57, 312.
Ducerceau, architecte, 165,
Duchesne (l'abbé), 251, 302, 516.
Duclos (le ch"«), 440.
Dujardin (l'abbé), 165, 248, 356.
Dumferniline, église, 387.
Dumortier, architecte, 63.
Dunières, église, 69.
Dunstable. église, 391.
Durand (Gui'l.), 2, 70, 284 ; — (l'abbé) (sta-
tue de), 52t.
Durham, cathédrale, 368, 374, 376-391, 465-
492 ; — château, 371, 476, 480 ; — voûte,
377. 38i. 388, 475-
Dusart (le I<. P. Henri), 320.
Dussaud (R.), 245-
Diidot (Jérôme), fondeur, 264.
Dyck (van), 82.
E.
éclairage liturgique, 355.
école, anversoise de peinture, 427 ; — auver-
gnate, 168; — bourguignonne d'architecture,
149 ; — brabançonne de sculpture. 248 ; —
dijonnaise de s'culptnre, 68 ; — française
d'archéologie. 61, 365 ; — d'.architeciure,
237 ; — de peinture, 170 ; — - limousine d'ar-
chitecture, 149; — normande d'architecture,
475 I — ombrienne de peinture, 273-280,
340 ; — provençale d'architecture, 149 ; —
rhénane d'architecture, 350 ; — tournai-
sienne de peinture, 427 ; — vénitienne de
peinture, 453 ; — de sculpture de Calcar,
522.
écoles d'architecture religieuse, 63.
écritures anciennes, 244.
écu, 33-34.
écureuil (décor.). 411.
édifices anciens, 502.
Edfou, temple, 542.
église, Aerschol. 357; — ."Mahuni, 374; —
Amiens, 213 ; — Anderlecht, 86, — Ander-
nach. 523 ; — Angers. 451, 458; — .Arcueil,
496 ; — Àrezzo, 127 ; — .Arras, 129 ; — As-
senois, 356; — Assise ; 172, 242 ; — Attert,
345 ; — .Auberive, 161; — Aubeterre. 160 ; —
Aubiac. 520 ; — Auriac, 523 ; — Auvers-
sur-Oise. 496 ; — .•\uvillers. 470 : — Ave-
ning. 386 ; — Avrechy, 490 ; — Bagneux,
494. 496 ; — Bailly, 331 ; — Beaune, 508 ;
— Beausac. 4g; — Beauvais, 366, 463,474;
— Bellefontaine. 384; — Bernay, 370, 463;
— Berneuil sur Aisne, 463: — Berac. 261; —
Betheniville, 261 ; — Birkin, 473 ; — Blyth,
372 ; — Bonac, 523 ; — Boscherville, 370,
463. 464: — Boulogne. 227 ; — Bourny, 525;
— Bredon 149 ; — Brienne, 261; — Bruges,
131,224; — Bruxelles, 83, 84, 176; — Biuth,
382 ; — Caen, 371, 463, 464. 469, 474, 477;
— Calcar, 522 ; — Cambrai. 131 ; — Cam-
bronne, 470, 490, 496 ; — Capoue, 312 ; —
Carcassonne,35o; — Cellier, 332; — Cerisy-
laForêt. 464; — Cernay-lez- Reims, 261; —
Chaise-Dieu, 69 ; — Châlons, 78 ; —
Chamalières-sur-Loire, 68 ; — Chambly,
494 ; — Champs-Dieu, 69; — Champigny,
228, 496 ; — Chaumont, 433 ; — Chenne-
vières, 224 ; — Cliers, 264 ; — Christ-
church, 472 ; — Clermont-Dessous, 521 ;
— Clery, 69 ; — Cologne, igo, 350; —
Como, 525; — Compiègne, 490; —
Conques, 166 ; — Constantinople, 527 ;
— Coulommiers, 335 ; — Creil, 490 ; —
Deas, 332 ; — Deventer, 523 ; — Devigne,
388, 390, 391 ; — Dieppe, 160 ; — Diest,
356 ; — Dijon, 395. 429 434. 504 ; — Dom-
front, 464; — Oomniartin, 349; — Don-
trien, 261; — Dumfermline, 387; — ,Duns-
table. 391 : — Emmerich, 522 ; — Epoye,
261; — Erville, 398; — Esauatoglia, 142; —
Essen, 52^ ; — Eunate, 429 ; — Evreux,
371 ; — Florence, 55-57, 93, 143, 240, 312,
326. 327. 430, 50S; — Korest, 451; — Gand
357 ; — Hairé, 451; — Hérent, 357; —
Hesdigneul-lez-Bethune, stg ; — Hochel-
ten, 512; — Hoe»aerd, 451 ; — Hoog-
straeten, 356 ; — Itteville, 496 ; — Ivry,
230; — Jérusalem, 330; — Jouaignes, 463;
— Jumièges, 368,370, 408; — Kemnen,
522 ; — Kidrich, 523 ; — Kiikstall, 472 ;
— Lallio, 141 ; — Larochepot, 539; —
Legnano, 505 ; — Less.ry, 370. 387, 389,
474, 480 ; — Leuze, 149 ; — Lihérija, 161,
— Lillers (Nord), 222; — Lindisfarne, 386,
387, 471 ; — Lisseweghe, 451 ; — l.oieto,
143 ; — Louvain, 72, 83, 84, 160, 177 ; —
Lugano, 505 ; — Maestricht, 333 : — Ma-
lanipize, 149; — Malmesbury, 389. 390;
— Mans, 350, 465 ; — Mareil-Marly,
496;— Messine. 193; — Middelbouig.
131 ; — Mièges. 68 ; — Milan, 505 ; —
Moirac, 520 ; — Moissac. 520; — Monsem-
pron. 520 ; — Montivilliers, 398, ifia ; —
Montlevon. 463; — Montreuil-sous-Bois,
496 ; — Namur, 356 ; — Nancy, 484 ; —
Naples, 241 ; — Nauray, 261 ; — Neeroe-
theren, 52^; — Nogent l'abbesse. 261 ; —
Norwich. 480 ; — Nouvion le Poisseu, 384;
— Oberwezel, 563 ; — Oberzell, 334 ; —
Opwyck. 426 ; — Oulchy le Château, 463 ;
— Palaiseau, 496 ; — Paris, 30, 36-48, 86,
230-232, 272, 349, 380, 384, 393-3g4, 397.
408, 481, 492. 494, 499; — Pavie. 89; —
Pérouse, 5; — Poissy, 366; — Pontoise,
384 ; — Prosse, 261 ; — Reims, 62, 78 ;
— Rethel, 70 ; — Rheindorf, 334 ; —
Rhuis, 470; — Riotard, 69; — Rome,
78, 87, 159, 192, 241, 242, 252, 400,
413, 504; — Romsey, 387, 388 ; — Rosiers,
69 ; — ■ Rouen, 232 ; — Saint-Front de Pé-
rigueux, 520 ; — Saint-Hubert 451 ; —
Saint-Léger au Bois, 463 ; — .Saint-Leu
d'Esserent, 384 ; — Saint-Masme, 20r ; —
Saint- Nicolas, 458, 459; — Sainl-Savin,
354 ; — Saint-Trond, 83, 84, 316, 317, 428;
— Sarielles, 264, 496 ; — Saronno. 505; —
Savone. 193 ; — Scharz. 336; — Scliwarz-
rheindorf, 523 ; — Sébourg, 224 ; — Ségo-
vie, 429; — Selby, 387, 388; — Sensenruth,
431 : — Sepulveda, 255 ; — Silos, 245 : —
Sniithfield, 370 ; — .Soissons. 494 ; — Sou-
vigny, 401 ; — Stow. 472; — Taverny. 496 ;
— Tewkesbury, 473 ; — Thiveival, 496 ; —
Tickencote, 474 ; — Tongres, 525 ; —
Toulouse, 520; — Tournai, 68, 77 ; - -
Urbino, 142 ; — Uzeste, 357, 358; — Veze-
lay, 488, 490, 493, 496; — Viuça, 530 ; —
Vyve Capelle, 534 ; — Warkvvorth, 271 ;
— Xanten, 522.
églises, anciennes (classement des), 63 ; —
brabançonnes, 342 , — byzantines, 528 ; —
à coupole, 424, 520; — fortifiées, 62, 69 ; —
romanes. 62, 63, 68, 425 ; — (décoration
picturale des), 524.
Egypte, jardins antiques, 162 ; — temples.
4g8.
itgyptiens, 3g4 ;. — (toilettes des) 212.
éléphant (icon.), 394, 411.
Eleusipe (S.) (statue de), 332.
Elgm (lord), 237, 501.
Elisabeth, (Ste), 155 ; — l'abbesse, T96, 206.
El-Kansara, cuves baptismales, 518.
Eloi (S ),349.
Ely, cathédrale, 370, 371, 37g.
émaillerie, 519.
émailleurs limousins, 350.
émaux byzantins. 22 ; — chaniplevés. 350 ;
— mosans, 181.
Emmaiis, abbaye, 249.
Emmerich, église, 522.
enceintes préhistoriques, 331.
encrier. 66.
encensoir du XI V*^ s.. 192.
enfant, â l'oie (1'), 60 ; — prodigue, 76.
Enghien. Cercle arciUologiqiic, ;;48 ; —
vitraux, 356.
Enlart (Cani.), 58, 365.
enseigne romaine, 329.
entablement romain. 30.
Enti"e-.Sanibre et- Meuse, 57.
épée, de Bordeaux, 66 ; — d'honneur, i.
épervier, 394.
épigraphie, angevine, 544; — campanaire,5r,
58, 262.
Epinal, musée des Vosges, 331.
épis gothiques fieuragés, 280.
cpitaphes de Flandre. 165.
Epoye, egli.se, 261.
Equilé(r) (icon.), 189.
érable (décor.), 22S, 229.
Ertillac, château, 78.
l'".rviile, église, 398.
Esamatoglia, église Ste-Catherine, 142 ; —
fresques 142.
escîuijuette, 66.
Escousseur. inventaire de l'église, 258.
Esculape. 60, 517.
Escurial, bibliothèque, 329.
Espagne, objets d'art, 272 ; — sculptures ro-
manes, i6r.
Esse, fer à hosties. 286.
Essen, église. 522.
Essenwein, 334.
esthétique, 158 ; — fondamentale, 153.
Ertillac. château, 520.
Etournet (O.), 335.
Etienne. 326; — (S.) (martyre de), 42 ; —
{lapidation de) tapisserie, 92-123, 242 ; —
de Nemours, 344.
Etival en Charnée, abbatiale, 271.
étoffes arabes, 517.
étole, brodée, 535 ; — double, 259.
Etrusques (les), 437.
études, iconograpiiiques (Société internatio-
nale des), 329 ; — préhistoriques, 525.
étui, 259.
Euchaire (S.), 181,184.
Euménide^ (les). 293.
Eunate. église, 429.
évangéliaire d'Henri TH, 172.
Evangélistes(les). 55.
Evangile (scènes de r), 279.
livans, 245.
Eve, 190.
Evreux, cathédrale, 175. 480 ; — église St-
Taurin, 571.
Exaltation de la croix (office de 1'). 187.
exposition, jubilaire, 63 ; — de peinture, 458;
— rétrospective de la gravure sur bois, 452.
Eyck (van), 55, 58, 74, 82, 124, 247, 320,
3-14. 365. 427. 441. 520. 531-
F.
façades, 153.
faïence, 67.
faisan (icon.),
faisceaux, 31.
falot, 259.
Farcy (de) 66,
411.
174.
Farnèse (l'Hercule), 156.
Faligaii (D. Enriquez de), 246, 255.
Faucon (Maurice), 7.
fauteuil du XVH^ s., 262.
Favier, orfèvre. 133.
Cable aitalpttque.
56 r
Faydheibe (Ant. ), sculpteur, 426.
Kederighi, èv. {tombeau de), 110.
feinte, 260.
fenêtre du XlVe s. , 4t.
fer à hosties, 281 - 288, 425 ; — iconographie.
284 ; — ornementation. 284.
Fête-Dieu (processions de la), 74.
fêtes. 71.
fibules, antiques, 329; — ibériques, j6i.
Fierens-Gevaerl, 55 - 57, 82, 85, 118, 234 -
349, 269, 314 - 316. 425.
figuier, 222, 226.
tigure, humaine, 481-^87 ; — de femmes, 541.
figurines en terre noire, 517.
Filarète, 121, 440.
fils d'or, 105.
Finistère, richesses artistiques, 156.
Fisenne (von), 172.
flabeilum, 29.
Flambard (Ralph), 375, 380, 386, 466, 468,
470' 477-
Flandre, épitaphes, 165; — tapisseries, 96,
99, 100; — vieux coins, 530.
Flandnn, peintre, 155, 280, -155.
fîcche, dorée à Dijon, 432 ; — en pierre, 348.
Flémalie, abbaye. 420; — (le mailre de), 543.
Flône. abbaye. 317: — château, 317-
rtore, gothique, 46. 488 - 497 ; — de Laon,
49 ; — médiévale, 140, 219; — ornementale,
214 ; — roniano gothique, 222 ; — (stylisa-
tion de la), 212,
Florence, académie. 58 ; — annonciation.
242; — archiconfrérie de la Concordia, 419;
— - arti. 240 ; — autel, en marbre, 143 ; —
en terre émaillée, 420 ; — bibliothèque
nationale. 3 ; — baptistère St-Jean, 241 ;
cathédrale. 93, 420, 504 ; — chapelle,
Brancacci, 102; — des Espagnols, 121. 409;
— des Pierres, 241 ; — du Tombeau, 55 ;
— cloche du palais du Podestat, 240 ; —
cloître de Santa Croce. S5 ; — crucifixion,
279, 280 ; — décorations murales de Baldo-
vinetti, 55 ; — églises : de Saint-Ambroise,
143 ; — Sts-Apôires, 508 ; — Santa Maria
^Iovpila, 56 ; — San Michèle, 240 ; — San
Nicolo, 55 ; — Santissima Annunziata, 55,
143 ; — Santa Trinita, 55, 57 ; — fresques,
^43' 31Ï ; — galerie, de^ Otfices, 58; — des
tapisseries, 115 . — Guelfes, 508 ; — manu-
facture royale de pierres dures, 240 ; —
mosaïque. 241 ; — musée, de l'académie,
242, 42( ; — du Bargello, 240; — de la
Croceita. 119 ; — de l'opéra. 240 ; — orfè-
vrerie, 420 ; — palais, des Guelfes, 85 ; —
Pitti. 420 ; — vieux, 50 ; — porte-feu, 507 ;
— portes, Ghiberti, 121; — du XIV^^ s.,
142; — rt liquaires, 420; — saciistie de
St-Laurent, 85; — statue. cleBoniface VIll,
252 ; — en marbre, 420 ; — tableau de
l'archiconfrérie de la Concordia, 419.
Florentin (S ), 184, 25S.
Florenzo de Lorenzo. peintre, 274.
Floscel (S.), 509 ; — (martyre de), 87.
Fo, chien de Bouddha, 436.
Foi (la). 134.
Foix, fortifications, 62.
Foligno, fresciues de Mezzanti, 343 ; —
d'Ottavio Nelli, 342.
fondeur, 78, Antoine (les) 263 ; — Barraud
(les), 263 ; — Cochois (les), 263; — Des-
camps. 263; — Dudot (Jérôme). 264; —
Focerno, 331 ; — Gury (les), 263 ; —
Haltzer (J,). 26J. ; — Hiidebrand, 264; —
Loiseau (f. ), 263 ; — Michel de Gand, 427 ;
— Oudin ( Pierre), 263; — Paintaindre (les).
263 ; — Perrin Robinet, 263 ; — Regnaud
(les), 263 ; — Roy (les), 263.
fondeurs lorrains, 263.
Fontainebleau, château, 60, 424 ; — pavillon
de chasse, 408.
Fontenay, inventaire de N.-D. , 158; — trésor,
158.
Fontenelle. 216.
fonts baptismaux, Andernach, 523 ; — Aube-
rive. 262 ; — Brienne, 262 ; — Damou-el-
Karita, 518 ; — El Kansara, 518 ; —
Hildesheim, 172; — Hoegaerd, 451 ; —
Liège, 160 ; — Lorraine. 331 ; — Noord-
peen. 396 ; — Oued-Ramcl, 518 ; — Rum-
men, 24B ; — Sensenruth, 451 ; — Tunisie,
518.
I-orest, église, 451.
Foretz, manufacture d'armes. 67.
forges luxembourgeoises au XVIe s., 335.
forme, bois de lit, 258.
forteresse du moyen âge, 86.
Foucquet (Jean), 440, 509.
fougère, 217 ; — argentée, 219 ; — des bois,
225, 228. 423.
fouilles, Algérie. 329 ; — Averdon. 62: —
Carthage, 61, 245, 517 ; — Champvert, 62,
329 ; — Chartres, 331 ; — Chassenan, 62 ;
— Cherchel, 330; — Chevigny, 62; —
Coninxheim, 525 ; — Crête, 61, 147 ; —
Cuicul, 330 ; — Delphes, 61 ; — Grèce, 147;
— Hermès, 62 ; — Jablanica, 517 ; — Ksar
Rhelan (Sahara), 61 ; — Lambèse. 330 ; —
Piires, 62 ; — Puy de Dôme, 517 ; —
Rome, 326, 437 ; — Saint-Denis, 357, 542 ;
— Tébessa , 330 ; — Thrace, 61 ; — Tunisie,
62; — Vachères, 331.
Fourno, fondeur, 33r.
Fouiains, abbaye, 392.
Foy (Ste), 166 ; — (église de), 166.
Fraeys (Ern. ), 210.
Framkin, 76, 158.
fraisier (décor.), 291.
France, archéologie du moyen âge, 529; —
chefs-d'œuvre des nmsées, 169 ; — restau-
ration des monuments, 314; — trésorroval,
66.
France (Anatole), 421.
Francesca (Piero della). peintre, 343.
Francfort, musée Siaedel, 426.
Franche-Comté, orfèvrerie, 149.
P'ranchimont, château, 86, 235; — ruines, 86.
François, I^^^ 258, 40:^ ; — (maison de), 414-
416 ; — I*^"". de 'loscane, 435 ; — d'Assise
(S.), 156; — (aube de), 172.
Frantz Erich, 280.
Francueil. monnaies gauloises, 62.
Frédéric, III, 53; — le Grand (statue de), 173.
Frésart (Jules), 317.
fresques, à Alost, 451 ; — Assise, 121, 252,
398: — Bosco-Reale, 88; — Delphes, 517;
— Esanatoglia, 142 ; — Florence, 143, 252,
31 1 ; — Foligno, 342 ; — Genève, 506 ; —
Lallio, 141 ; — Lugano, 505 ; — Milan,
505 ; — Montefalco. 252 ; — Padoue, 57,
246 ; — Palerme. 329 ; — Paris, 56 ; —
Pavie. 56; — du Pérugin, 276-277; —
Polygnote, 527 ; — Rome, 88, 241, 256,
276, 310 - 316, 326, 327. 516 ; — San-Seve-
rino. 142; — Savone, 143; — Subiaco, 252.
— Toscane, 56 ; — Venise, 453 ; — du
Ville: s., 305; _ du XV-^ s., 55, 56; —
(nettoyage des), 227.
frises, au perchoir, 216 ; — romaines, 25 ; —
à strigilles, 30.
fuchsia (décor.), 236.
Fulvio (Andréa), 254.
fuseau. 29.
Fuzet (Mgr), 355.
Gaborit (l'abbé), 133.
Gabriel, 308.
Gaddi(Tad.), peintre, 58, 311.
Gaignières (collection), 424.
Gaillard (Corn.), 165, 193, 197 ; — d'Ambre-
ville, 414.
Gaillon, château, 329 ; — plaque de la grande
Fontaine, 329.
Galla Placida(arc triomphal de), 102.
Galîa, 338.
galon (décor.), 28, 260.
Ganay (c'«= de) (collection du), 147.
Gand, Achter Sikkel, 535; — cathédrale, 74,
428 ; — château, des comtes, 83. 84, 235.
238, 269, 498, 499, 502 ; — de Gérard le
Diable. 238 ; — église St-Macaire, 355-357;
— gilde de St-Joseph et de St-Luc, 247,
524. 525 ; — hôtel de ville, 503 ; — lava-
crum de St-Bavon, 221 ; — peinture à-
l'huile de la grande Boucherie, 248 ; — So-
ciété d'histoire et d'archéologie, 426 ; —
vitraux. 357.
Gap, cathédrale, 175.
garde-manger, 65.
gares gothiques, 177.
Garreau (M^''^ L. ), 425.
Gascogne, architecluie féodale, 78.
Gasq (Paul), sculpteur, 136, 137.
Gaule, Belgique, bas-relief, 325 ; — romaine,
figurines en terre noire, 517 ; — sépultures
antiques. 530 ; — (Symbole de la), 410.
Gauthier (J. ), architecte, 332 ; — de Skirlaw
375-
Gavaudan, château, 78.
Gay (Vict. ), 259-260.
Gazette des Beaux-Arts, 509.
Geefs, sculpteur, 317.
Geernaeri (H. ), architecte, 196.
Gélis Didot, 453.
gemmes, 29.
Gènes, porte d'un palais, ^82.
Genève, fresques, 506 ; — hôtel de ville, 506.
Geneviève (Ste), 335 ; — légende, 528 ; —
statue. 528.
Gentile da Fabriano, peintre, 274, 342, 343.
Gentilli (chev. ), 122, 123.
Geoffroy. 14 ; — le Roux, 375. 470, 473. 478,
479-
Géométrie (la), (embl. ). 120.
Georis (Gér ), sculpteur, 73.
geianium (décor.), 269.
Gérard (le ch"*^), 195, 206.
Germain (L.), 70.
Gerspach, 58, 82. 123. 14^. 235, 243. 313,
328. 422, 423, 435. 508, 516.
Gertrude (Ste) (châsse de), 72.
Geslin (Tabbé de), 77.
Gevaudan, moule de gâteaux, 517.
(jhiberli, sculpteur, 439.
Ghirlandajo (Dom), 56.
Gibbon (le card.), 450.
Gielen, 333.
Gilde, de St-Bernulphe de Hollande, 523; —
Sf-Josepk et St-Luc de Gand, 524 ; — de
St- Thomas et de St-Luc, 521.
Gilles d'Orval, chroniqueur, 334.
Gilles de Pélichy (baron), 356.
Gilliodts, 356.
Gimert (S.), statue, 426.
Giordano (Luca), peintre, 143.
Giotto, 57. 58, 240, 311, 312, 313. 439, 462 :
— (forges de), 121, 398.
Giovio (L. ). 112.
girafe (icon.), 157.
Girardot, graveur. 148.
Gisors, château, 517,
Giuliana, peintre, 142.
Giulika (Ste), 307, 313.
Giudo (S.) (reliquane de), 421.
Givelet (Ch), 260, 519.
Givry, croix triomphale,
gland (décor.), 225.
Gloucester. cathédrale, 372, 373, 385, 464,
glycine (décor.), 296.
Gobelins (manufacture de), 91, 105, loS, 174,
5"-
Godard-FauUrier, 544.
Godeberte (Ste), 349.
Godefroy, d'Anvers, peintre, 427 ; — de
Bouillon, 507.
Goes (Hugo van der), 88, 344, 427, 510.
Gombeaud, lieutenant, 6f.
Gonze (L.), 169.
Goodyave, 212, 213.
Goslar, cathédrale, 172.
Gosnay, chartreux, 519.
Gosset (A.), 529.
56^
îRcbur tic raivr cl)rcttriu
gothique, anglais, 367 : — fleuri, 219.
Goujon (lean), 161.
Gouigé. fer à hosties, 284-285.
gratïites, 262.
Granucci (Pr ), peintre. 144.
Grandselve, abbaye, 331 ; — tissus, 331.
Grasset. 214, 215. 290.
Grèce, fouilles. 147 ; — monuments, 501 ; —
temples. 498.
Grecs. 156. 294, 296, 395, 402 ; — (parcs pu-
blics des), 162.
Grégoire (S.), 21, 22, 303, 304, 430, 449, 450,
514 : — XI. 252 ; — (rose d'or de), 9 ; —
XVI. 98.
Grenade, généralife. 164.
Grenier (Doni). 414.
Gretser. 17.
Greyson. 73.
griffons (icon.). 395. 398. 399.
grille en fer forgé. 262. 271.
Grisar(le P.). 251, 327, 516.
grotesques. 2=;.
Grote^qiifs fleij. tapisserie. 114 ; — de la
Renaissance. 395.
Guarrazar. trésor. 23.
Gudderman (Guill.), peintre. 427.
, peintre. 455-462 ; — (por-
Guérard (L.). 77,
Guffens(Ood. E
traits de) 460.
gui. 22^.
Guibert (Louis). 67. 248. 33g.
Guiffrey. 174.
Guillaume. (Eug. ). 155, 157, 158; —l'abbé,
430 : — de Bray, architecte, 519-
guillochis, 213.
Guilloreau (le R. P. Dom). 271.
Guimard. 532.
^^nimheïet, 67.
guirlande. 25.
guivre. 409.
Gury (les), fondeurs de cloches, 263.
Guyau, 155.
H.
hachures dans la peinture, 57.
Halinard (l'abbé). 430.
H.allays (André). 269.
Hallzer (Jac. ). fondeur. 264.
Hambourg (galerie Weber). 534.
Hamen (Pierre). 244.
Haniman-Lif, baptistère. 518.
lïamptoncourt. tapisseries, 100.
Hans. de .Strasbourg. 417.
Hansen. architecte. 237.
Hardouin de Croy. 349.
harpie. 400
Ilarrison (Fréd.). 501.
Hasselt. Société des Mélophiles, 428.
Hautcœur (Mgr). 171.
hflutelisses historiées. 427.
Havre, église. 451.
Hayve. peintre, 131.
heaume. 33.
('s) Heeren-Elderen, retable, 85,
Heerswingels (Van). 72.
Heins (.A.). 72. 530.
Heinsberg. stalles. 34.
Hclhig (t.). 64. go. 153. 239. 251. 280, 318,
321. 332. 334. 360. 462. 527.
Helleputte. 85. 333.
héliotrope. 2g:.
Henchir-Kakaina, baptistère, 518.
Hendricx. peintre. 457.
Henri. 1. 387 ; — II. 28. 523 : — III, 184 : —
(évangéliaire de). 172 ; — IV. 35. 435 ; —
VII. 2r ; — VIII. 20; — abbé. loi ; — de
Souillac. 8: — d'Ulmen, 182, 185.
Henry (Guill. d'). peintre. 364 ; — de Heen-
tinghan, 471.
hépathîque, 230.
Héraclès (statue d'). 148
héraldique 12. 33.
Herckenrode. abbaye des Dames nobles, 451;
— vofite rempante 452 ; — (bain d'). 428.
Herculanum. statues drapées. 61.
Hercule, 400 ; — (culte d') 244 ; — Farnèse,
156 ; — (tête d'), 5 ; — portant le globe ci-
leste, 114, 115. 1T7. ug, 120, 122; — (tète
d'), 5-
Herdigneul-Ies-Bethune. église, 519.
Hérent, église, 357.
Herford, reliquaire, 23.
hérisson, 411
Hermant, (J15.
hermine, ^\\.
Hermainu (Fréd.). 88.
Hermès, bague antique en or, 62 ; — statue,
en bronze. 215; — équestre, 62; — de Theo-
doridos, 60.
Héron {le ch""-"), 508 ; — de Villefosse, 245.
Heures (les), tapisserie, 114. 116, 117, iig,
I20, 123.
hibou, 411.
Hildebrand, fondeur, 264.
Hildesheini. fonts baptismaux, 172; — lustre-
couronne, 535.
hippocenlaure. 398.
histoire de l'art, 61.
Hochelton, église, 522.
Hoegaerd, église, ^51 ; — fonts baptismaux,
4=>i ; — presbytère Louis XV, 451.
Hokansai. peintre japonais, 437.
Holbein (Hans), peintre, 177.
HoUebeke (van), 165.
ham, 395.
Hondicourt (R. de), tombîer, 439.
Hoogstraeten, église Ste-Catherine, 456.
Hoozenbeke ( Jooris van), orfèvre, 426.
Hope \V. H.St-John. 480.
Horgen, fresques. 177.
Horoshigué, paysagiste japonais, 437.
hosties (fabrication des), 281.
Hottentot (le), 156, 157.
houblon, 232.
Houcke (van), 247. 530, 545.
housse, 260.
hovix, 232.
Hubert (statue de S.), 262.
Huet Ludin, maître-maçon, 262.
Hugues, IV, 246; —d'Arc, abbé. 431; — de
Puiset, év. , 470, 479, 480.
Hulin (le prof G.) 426.
Huile (H. van). 153.
Humbert de Romans (le bon), '^26. 527.
Hunin (Matthieu), graveur, 162 ; - (Pierre
Paul), peintre. 162.
^uy. 7Z'< ~ collégiale, 85, 271.
Huysmans, 277, 340, 345.
hydres, 400.
Hygie {la déesse), 517.
Hymans (H ), 71, 440 ; - (P.). 73
hyménée (autel de 1'), 226.
hypocausle décoratif, 244.
Ibis. 394-
Iconoclastes, 85, 195.
if, 295.
Ignace Me P.). 414-416.
Me de France, 363 ; — églises, 366.
images (dispositions des), 312.
imagiers, 155: - du lll*^s.,439.
Imagination (i"), 155.
Immaculée Conception, 77, 425 ; - (glorifi-
cation de). 370.
immortelle, 295.
Incarvtlle O** P- fl). 292.
fiicendie du Bourg, tapisserie, 92,
Ingelheim, peintures nnirales, 334.
Ingelo\v(H.). 386.
Ingres, peintre, III, T70.
Innocent, III. 242: IV, 5. 526; - VI
(roses d'or de), 9 : - X (tombeau de), 243;
— XI, 142:— XII (effigie de), 260.
Innocents (saints). 181.
uiscription. bilingue, 147 ; — de cloche, 51,
58; — française du XlV^s. , 42<5; — gravée,
60;— grecque.ôo, 147.242, 244: — italienne,
du XlV^s., 240; — latine, 142, 181, 242,
2^4. 424; —métrique, si8; —phénicienne,
518 ; — duXlV^s.. 128.
inscripiious. campanaires, 51, 58 ; — cime-
lériales, 255 ; — grecques, 61, 244 ; —
indo-bouddhiques, lapidaires, 31, 262; —
latines, 13, 244 ; — en lettres ornées, 244 ;
— nabatéennes, 245 ; — romaines, 335 ; —
safiliques. 245.
Institut archéologique de Luxembourg, 325.
interprétation (procédés d-), 232.
inventaire. Annecy (château d"), 66; — basili-
que vaticane, 52 ; — Berry (des ducs de),
i87 ; — Bourg-Charente (château de), 159;
— Chastenet, 67; — Clémence de Hongrie,
187; — Cosme 1*-'^ de Médicis, 94 ; —
Crouville, 338; — Escoussens (de l'église),
258 : — Fontenay (de Notre-Dame), 158 ;
— Grécourt (abbé), 260; — Jarnac, 339; —
Léon X, 96 ; — Limoges, 282 ; — Lonzy
(église), 350; — Lyon (cathédrale), 5 : —
Monbrisson (abbaye), 187 ; ^ Mazamet,
159 ; — Middelbourg, 142 ; — Mobilier de
1629, 130 ; ~ Montreuil sur-mer (trésor
St-.Saulve).5r9; — Nevers du (XIV*" s., 65;
— Notre-Dame de Pitié, 2Ô0 ; — Notre-
Dame du bout des Ponts, 258 ; — Orléans
(duc d'). 187 ; — (duchesse d'), 187 ; —
Orviéto (év. d). 187: — Pécounet (Jean),
67;— Remiremont. 259; — Saint-Florentin
(église), 258 ; — Scarobelli, 338 ; — Silva-
cane (abbaye), 282 ; — Terrier, 193-220; —
Tournon (reliques de), 66 ; — Trésor de
France, 66; — Verres, 258; — Viilette (égli-
se), 340.
invenjaires (bibliographie des), 65, 158, 257.
iris, 214. 230, 237,
Isabelle de Portugal (portrait d'), 519.
Isembard, prieur. 184,
Issoudun, bague et fibules antiques, 329.
Italie, basiliques. 403; — Correspondance, 55,
143, 240, 328, 419. 505.
Ittenbach, peintre, 280.
Itteville. église, 496
ivoires rhénans, 172.
Ivry, abbatiale, 161; — église St Pierre, 230.
Irvine (J.-.T). architecte, 384.
Jablanika (Serbie), fouilles, 517,
Jacob (G. ), 172.
Jacobsen (collection). 518.
Jacques, abbé, 184; ^ d'Aorti, 427; — de
Gérin, 248 ; — le Majeur (S.), 160, 19B.
Jadart (IL). 70, 77, 26 j.
Jameson (M.) 45g.
Jamivi. 333.
Janssens (Guil.), peintre, 130.
Japonais (art des). 290, 411, 437.
jardin (l'art des), 162.
Jarenton (l'abbé), 430.
Jean, VU. 242, 304. 305, 309; — (ambon de),
516 ; — XXII, z*7 '* — {roses d'or de), 7 ;
— (tiare). 252 ; — de Bruges, 416 ; — de
Fiesole. 278. 462 ; — Grégoire de J.-C. (le
P.), 17 ; — le Maingre, gouverneur de
Gênes, rose d'or, 11 , — d'Udine, 243 ; —
de Saint-Viance,67 ; — (S.), (eftigiede) 12,
116; — B.ipliste (S.), 142, 190. 241, 505; —
(tête de), 242; — évangélisle (S.) 159, 184,
191, 2.(1, 326; — (Coupe de), 259; —
(Manne de). 160.
Jeanne. d'Arc (représentation de), 70 ; — de
Bailliencourt, abbcsse, 195, 198; — de
Botirbon, 8; — de Ghistelles, abbesse, 185;
— de Sicile, rose d'or, 9.
Joannin (Nie), 432.
Jehan, le Baere le jeune. 427 ; — le Masle.
év., 158.
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