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Full text of "Revue de l'art chrétien"

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Betîue  lie 


l'Hrt  chrétien 


paraissant  tons  les  bciDC  nuiis. 


44'"^  Hnnée.  —  5*=  Série.      "^ 

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[€ame  XII  (l^  de  (a  cadcctiou).      4^ 
F'^  livraison.—  vJantiier  190^. 

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miismiBB    Ices  roses  D*or  ponttfttales. 


gUse 


I 

EUX  cérémonies,  d'un 
caractère  à  la  fois  laïque 
et  religieux,  tenaient 
jadis  une  place  à  part 
dans  les  rites  de  l'É- 
'a  remise  de 
Épée  d'honneur  (  le 
«  stocco  benedetto  »)  (")  et  celle  de  la  Rose 
d'or  ;  la  première  avait  lieu  le  jour  de  Noël; 
l'autre,  le  quatrième  dimanche  de  carême. 
L'histoire  des  roses  d'or,  pendant  le 
moyen  âge  ou  les  temps  modernes,  a  donné 
lieu  à  une  longue  série  de  monographies  : 
de  quoi  composer  toute  une  bibliothèque  (^). 

1.  V.  sur  l'Épée  d'honneur,  La  Revue  de  F  Art  chrétien, 
de  1889-1890. 

2.  Je  me  bornerai  à  citer  les  principaux  de  ces  travaux: 
Cartari,  La  Rosa  iforo  fontificia.  Racconto  istorico.  Rome, 
1681.  —  Ducange,  Glossaire,  sub  verbo  :  «  Rosa  aurea  », 
éd.  Favre,  t.VII,pp.  214-215. —  Rechemberg,  Exercitalio 
de  Rosa  aurea.  Leipzig,  1686.  —  Grapiiis,  Schediasma 
Itistoricum  de  Rosa  aurea...  Leipzig,  1696.  —  Ciampini, 
De  Sacris  Aedi/îciis,pp. 120-121.  —  Baldassari,  La  Rosa 
d'oro  clie  si  benedice  nella  IV  Doiiienica  di  quarisima. 


Et  cependant,  est-il  un  seul  de  ces  mé- 
moires qui  nous  fasse  connaître,  pour  la 
période  ancienne  ,  les  circonstances  dans 
lesquelles  ces  joyaux  ont  été  distribués  ou 
même  qui  nous  renseigne  sur  leur  forme  ! 
Sur  certains  points,  les  auteurs  sont  en 
contradiction  flagrante  ;  sur  d'autres  et  — 
des  plus  importants  —  ils  n'ont  même  pas 
essayé  de  faire  la  lumière.  Tout  au  plus,  si 
le  dernier  d'entre  eux  a  connu  la  destina- 
tion d'une  dizaine  de  roses  distribuées 
pendant  le  XIV^  siècle,  dont  sept  par  les 
papes  d'Avignon  (').  Pour  comble,  un 
archéologue  allemand  célèbre   affirme  que 

Venise,  1709.  —  'R^\.%c\i\wi,Comtiteniatio  de  Rosa  aurea... 
1728. —  Busenelli,  De  Rosa  aurea  Episto/a.Vadoue,  1759. 
—  Cancellieri,  Descri::io/ie  délie  Cappelle-pontificic  e  carat- 
nalizie,  pp.  247-254.  Rome  1790. —  Moroni,  Disionario  di 
Erudisione  storico-ecclesiastica,  l.  LIX.  —  Le  Magasin 
pittoresque,  1841,  p.  326.  —  Mgr  Barbier  de  Montault, 
Œuvres  complètes,  t.  I,  pp.  76-78. —  Girbal,  La  Rosa  de 
oro.  Noticias  historicas  acerca  de  esta  dadiva  pontificia. 
Madrid.  18S0.  —  Joret,  La  Rose  dans  l'antiquité  et  au 
moyen  âge  ;  Paris,  1892,  pp.  432-434. 

I.    Moroni,    Disionario    di   Erudizione    storico-eccle- 
siastica, LIX. 


KRVUE    DE    l'art   CHKÉTIEN. 
19OI,    —    l'*^    LIVRAISON. 


Bc\)ue  De  r^rt  cl)rctien. 


l'on  ignore  si  une  seule  rose  du  moyen  âge 
est  parvenue  jusqu'à  nous  ('). 

C'est  à  combler  de  telles  lacunes,  que  je 
m'appliquerai  dans  le  présent  essai. 

Pour  résoudre  des  problèmes  si  dignes 
d'intérêt,  je  me  suis  attaqué  aux  Archives 
du  Saint-Siège.  Non  pas  toutefois  aux  re- 
cueils compulsés  par  mes  prédécesseurs  ; 
bulles,  brefs,  régestes  de  toute  nature,  mais 
bien  à  la  section  financière,  aux  «  Came- 
ralia»,  aux  «  Introituset  Exitus  »,  jusqu'ici 
universellement  dédaignés.  En  combinant 
le  témoignage  de  ces  pièces  comptables 
avec  celui  d'anciens  inventaires,  il  m'a  été 
facile  d'éclaircir  la  plupart  des  doutes.  C'est 
ainsi  que  l'on  ne  connaissait  jusqu'ici,  pour 
le  XIV^  siècle,  que  les  destinataires  d'une 
dizaine  de  roses  d'or  :  je  suis  en  mesure 
d'en  faire  connaître  une  quarantaine.  De 
même,  sur  la  forme,  le  poids,  la  valeur  de 
ces  insignes,  sur  les  artistes  auxquels  nous 
devons  des  merveilles  de  goût  et  de  fini, 
et  jusque  sur  le  caractère  des  papes  qui  les 
ont  commandées,  l'exploration  des  Archives 
vaticanes  a  fourni  une  ample  moisson  d'in- 
formations nouvelles. 

Je  me  hâte  d'ajouter  que  mes  recherches 
ne  porteront  que  sur  la  période  comprise 
entre  le  XI V^  siècle  et  le  XVI^.  A  d'autres  le 
soin  d'élucider  l'histoire  de  cette  cérémonie, 
soit  pendant  la  première  partie  du  moyen 
âge,  soit  pendant  les  temps  modernes. 

II 


L 


ES  rites  auxquels   donnait   lieu  la  re- 
mise de  la  rose  d'or  sont  connus  dans 


I.  Otte,  Handbuch  dcr  kirchlichen  Kunst-Archàoloj(te 
des  deuischen  Miltclalleis ;  Leipzig,  1883,  t.  I,  p.  364. 
<  Davon,  ob  sich  irgendvvo  eine  goldeiie  Rose  ans  dem 
Mittelalter  bis  auf  unsere  Zeit  erlialten  hat,  veilautet 
nichts  ;  ein  Exeniplar  angeblich  aus  den  XV'II  Jahrh., 
dem  Herzoge  von  Lucca  geliorig,  befand  sich  im  J.  1855 
bei  einen  Goldarbeiter  in  Uresden.  T>  {Deulsckes  Kuiist- 
biatt,  1855,  pp.  119,  166.) 


leurs  moindres  détails  (on  en  trouvera  le 
détail  dans  le  MusiBum  italicumàiÇ.  Mabillon 
(t.  II,  pp.  135,  176,  236,  470-472)  :  la  céré- 
monie n'a  guère  varié  pendant  une  période 
qui  embrasse  près  de  huit  cents  ans  ('). 

Tout  au  plus  si  une  fois,  une  seule  fois, 
un  souverain  pontife,  impatient  de  tout 
joug,  —  le  fougueux  Jules  II  délia  Rovere, 
—  éprouvala  tentation  de  rompre  avec  une 
tradition  consacrée  par  tant  de  siècles.  On 
juge  de  la  surprise  de  la  Cour  pontificale  ! 
Le  maître  des  cérémonies,  Paris  de  Grassis, 
ayant  demandé  la  raison  du  changement, 
on  lui  répondit  qu'il  n'y  en  avait  point 
d'autre  que  la  volonté  du  pape,  qui  jugeait 
à  propos  qu'on  en  usât  ainsi  par  la  suite. 
Paris  fut  obligé  de  s'incliner,  mais  après 
avoir  décrit  le  cérémonial  nouveau,  il  se 
permit  d'adresser  à  Dieu  cette  prière 
bizarre  :  «  Seigneur,  en  l'honneur  de  qui  se 
font  les  cérémonies,  dirige-les  en  inspirant 
des  idées  plus  saines  à  ceux  qui  les  prati- 
quent, de  sorte  qu'elles  ne  dégénèrent  point 
en  vanités  et  en  ridicules  ('').   » 

En  principe,  la  remise  de  la  rose  devait 
avoir  lieu  une  fois  l'an.  Mais  il  arrivait  que 
la  cérémonie  était  différée  certaines  années 
et  que,  dans  d'autres,  au  contraire,  on  distri- 
buait deux  roses.  Ce  n'était  là  toutefois 
qu'une  exception  assez  rare. 

A  la  rose  était  régulièrement  joint  un 
bref  relatant  les  circonstances  dans  les- 
quelles la  distinction  était  accordée  et 
célébrant  les  vertus  ou  les  mérites  du  desti- 
nataire. Beaucoup  de  ces  pièces  nous  sont 
conservées,  quoique  la  série  des  brefs  ne 
commence  véritablement  qu'avec  le  XVl^ 

1.  Dans  son  Raliotiale,  Guillaume  Durand,  le  célèbre 
évêqiie  de  Mende  (►{<  1296)  disserte  longuement  sur  la 
signification   de  la  rose  d'or. 

2.  Uurchard,  Dùirium  ;  éd.  Thuasne,  t.  111,  p.  419.  — 
Mgr  Barbier  de  Montault,  Œuvres  compiles,  t.  I, 
P-  342- 


3le0  ro2;e0  D'or  pontificales. 


3 


siècle.  (Pour  la  période  antérieure,  les 
registres-copies  font  défaut  (").)  Il  serait 
à  souhaiter  que  l'on  publiât  le  recueil  com- 
plet de  ces  documents  :  il  ne  manquerait 
pas  d'offrir  de  l'intérêt  pour  l'histoire  de  la 
diplomatie  du  Saint-Siège.  Que  de  commen- 
taires curieux  n'ajouterait-il  pas  au  témoi- 
gnage de  nos  pièces  comptables  ! 

Si,  laissant  de  côté  les  questions  de  litur- 
gie, suffisamment  élucidées,  nous  essayons 
de  saisir  l'esprit  même  de  cette  distinction; 
si  nous  nous  demandons  quels  mobiles 
dictaient  les  choix  faits  par  les  souverains 
pontifes  ;  et  même  si  nous  cherchons,  tout 
simplement,  à  déterminer  la  forme  des 
joyaux  qui  comptaient  parmi  les  chefs- 
d'œuvre  de  l'orfèvrerie,  nous  nous  heurtons 
aune  masse  de  difficultés. 

La  première  conclusion  qui  s'impose  à 
nous,  c'est  que  l'envoi  de  la  rose  d'or  à  tel 
ou  tel  prince  ou  chevalier  n'impliquait  pas 
seulement  une  série  d'imposantes  céré- 
monies ecclésiastiques  :  le  plus  souvent, 
cette  distinction  se  rattachait  à  des  négocia- 
tions politiques  de  la  dernière  conséquence. 
Il  appartient  aux  historiens  de  rechercher 
quels  graves  intérêts,  quelles  savantes  com- 
binaisons, se  cachaient  derrière  des  actes  en 
apparence  de  pure  courtoisie.  L'art  n'était 
ici  qu'un  prétexte,  qu'un  masque  ;  derrière 
la  façade  officielle,  l'on  finit  par  découvrir  les 
ressorts  qui  ont  provoqué  des  choix,  à  coup 
sûr  longuement  débattus  dans  les  consis- 
toires secrets. 

Pendant  la  période  des  papes  d'Avignon, 
il  a  pu  arriver  que  la  piété  du  destinataire 
pesât  seule  dans  la  balance.  Mais  plus  sou- 
vent des  considérations  d'un  ordre  fort  dif- 

I.  Nous  en  avons  pour  preuve  l'existence,  à  la  Biblio- 
thèque nationale  de  Florence,  du  registre-copie  des  années 
1481-1482.  Comment  ce  document,  qui  n'aurait  pas  dû 
quitter  les  Archives  vaticanes,  est-il  allé  échouer  sur  les 
bords  de  l'Arno  ? 


férent  guidèrent  les  grands  hommes  d'État 
qui  s'appelaient  Jean  XXII,  Benoît  XII, 
Urbain  V,  Clément  VII.  Leur  sollicitude 
s'étendait  jusqu'aux  confins  du  monde  ca- 
tholique. L'un  deux  ne  donna-t-il  pas, 
en  1383,  la  Rose  d'or  au  roi  d'Arménie  !  En 
octroyant  ce  joyau,  ils  entendaient  récom- 
penser des  services  rendus  ou  provoquer  à 
de  nouveaux  actes  de  dévouement  envers  le 
Saint-Siège. 

Tactique,  somme  toute,  des  plus  natu- 
relles et  qui  ne  pouvait  que  rehausser  le 
prestige  d'une  si  haute  distinction. 

Tel  était  dès  lors  le  prix  qu'y  attachaient 
les  plus  grands  princes,  que  le  choix    du 
titulaire  donna  plus  d'une  fois  naissance  à 
de  graves  conflits. C'est  ainsi  que,  lors  de  la 
visite  simultanée  faite  en    1368    par   le   roi 
de  Chypre  et  la  reine  de  Naples  à  Urbain  V, 
de  passage  à  Rome,  toute  la  Cour  pontifi- 
cale   s'attendait  à  voir  le  pape  donner  la 
préférence  au  roi.  Les  prescriptions  du  Pro- 
tocole étaient,  sans  exception  aucune,  en  sa 
faveur. Ce  fut  la  reine,  au  contraire,  qui  l'em- 
porta. Grand  émoi  parmi  les  prélats  :   plu- 
sieurs cardinaux  blâmèrent  ouvertement  le 
pape,  et  allèrent  jusqu'à  lui  dire  en  face  que 
jamais  princesse    n'avait   été   l'objet   d'une 
telle  faveur  au   détriment   d'un   prince   du 
même  rang.  Urbain  V  répondit  que  jamais 
non  plus  on  n'avait  vu  un  simple  abbé   de 
Saint- Victor  de  Marseille, —  c'était  son  cas, 
—  s'asseoir  sur  le  trône  pontifical.  En  réa- 
lité, il  n'avait  fait  que  constater  la   préémi- 
nence du  royaume  de  Naples  sur  celui    de 
Chypre  ('). 

A  tout  instant  aussi  le  caractère  et  le  goût 
des  souverains  pontifes  se  reflètent  dans 
la  commande  de  ces  joyaux  :  les  uns  les 
veulent  simples  et  sobres;  d'autres,  portés  à 
l'ostentation,  y  prodiguent  les  ornements. 

I.  Baluze,  Vilœ  Faparuni  avenionensiuiii,  t.    I,  pp.  38 1- 
382,  408. 


3Rebue  îie  T^rt  chrétien. 


Au  XlVe  siècle,  le  pape  d'Avignon,  Clé- 
ment VII,  auXVe,  le  pape  Paul  II,  si  célè- 
bres tous  deux  parleur  faste,  ont  distribué 
des  roses  d'une  richesse  hors  ligne. 

III 

DES  origines  mêmes  de  la  rose  d'or,  je 
ne  dirai  rien  :  la  matière  est  contro- 
versée et  il  n'entre  pas  dans  mes  vues  de 
m'attaquer  à  un  problème  si  ardu.  11  me 
suffira  de  rappeler  que,  depuis  un  temps 
immémorial,  les  papes  avaient  l'habitude  de 
donner  une  rose  le  dimanche  Lœtare  Jerji- 
salcin,  c'est-à-dire  le  quatrième  dimanche 
de  carême  :  d'où  le  nom  de  Dominica  Rosœ 
ou  Rosata  dominica,  parfois  donné  à  cette 
fête  (■). 

D'ordinaire  on  fait  remonter  l'idée  de  la 
cérémonie  en  question  à  saint  Léon  IX 
(1049-1054).  Les  RR.  PP.  Cahier  et  Mar- 
tin affirment  que  la  châsse  de  Charlemagne 
(exécutée  en  1215),  au  dôme  d'Aix-la- 
Chapelle,  représente  ce  pontife  tenant  delà 
droite  la  rose  d'or  ('). 

Toutefois  la  mention  la  plus  ancienne  de 
la  remise  d'une  rose  remonte,  d'après 
Moroni,  au  pontificat  d'Urbain  II,  et  à 
l'année  1096.  Cela  se  passait  pendant  les 
préparatifs  de  la  première  croisade  ;  la 
rose,  auparavant  réservée,  ce  semble,  aux 
préfets  de  la  ville  de  Rome,  fut  solennelle- 
ment remise  par  Urbain  II  au  comte 
Foulques  d'Anjou  et  associée  ainsi  aux  dé- 
buts de  la  plus  grande  expédition  militaire 
du  moyen  âge.  Autres  temps,  autres  mœurs. 
Aujourd'hui  la  rose  d'or  est  l'apanage  de 
la  princesse  la  plus  pieuse;  autrefois  elle 
servait  à  récompenser  le  chevalier  le  plus 
vaillant. 

Quelle  forme  les  roses  d'or  revêtirent- 
elles  au  début  ? 

1.  Voy.  Giry,  Manuel  de  Diplomatique,  pp.  267,  271. 

2.  Mélanges,  t.  I,  pp.  1819. 


La  réponse  n'est  pas  aisée.  En  effet,  si 
c'est  par  centaines  que  se  sont  chiffrés  ces 
insignes,  à  peine  si  une  demi-douzaine 
d'entre  eux  sont  parvenus  jusqu'à  nous.  Ils 
ont  partagé  le  sort  de  tant  d'autres  orne- 
ments en  métal  précieux  :  à  tout  instant,  on 
les  envoyait  au  creuset  pour  les  convertir 
en  numéraire.  Les  chances  de  destruction 
sont,  en  pareil  cas,  en  raison  directe  de  la 
valeur  intrinsèque. 

Plusieurs  érudits  affirment  que  ce  joyau 
se  composa,  jusque  vers  le  XV""  siècle, 
d'une  rose  montée  sur  un  pied  et  garnie  de 
feuilles;  dans  la  suite  seulement  on  y  aurait 
ajouté  plusieurs  fleurs,  de  nombreuses 
feuilles  et  épines,  accompagnées  des  armes 
pontificales,  d'un  aigle,  etc.  ('). 

Moroni  également  rapporte  que  la  rose 
pontificale  n'était  à  l'origine  qu'une  simple 
fleur,  dont  l'or  était  colorié  en  rouge,  afin 
d'imiter  la  couleur  naturelle  ;  plus  tard  on 
aurait  abandonné  ce  système  pour  placer 
au  centre  un  rubis  destiné  à  donner  plus 
de  prix  au  joyau  ;  après  Sixte  IV,  pro- 
bablement, on  aurait  substitué  à  la  rose  un 
rosier,  c'est-à-dire  une  branche  garnie 
d'épines,  de  feuilles  et  de  fleurs,  dont  une, 
celle  du  milieu,  était  plus  grande  que  les 
autres.  Au  centre  de  celle-ci  se  trouvait, 
ajoute  Moroni,  un  petit  godet  muni  d'une 
sorte  de  couvercle  ou  d'une  plaque  («  la- 
mina »)  percée,  où  le  pape  plaçait  le  baume 
et  le  musc  destinés  à  imiter  le  parfum 
de  la  rose. 

Le  pied  différait  également  selon  les  épo- 
ques :  il  fut  tour  à  tour  triangulaire,  carré, 
octogonal.  D'ordinaire,  sur  ce  piédestal,  se 
développait  un  vase  contenant  le  rosier. 
Parfois  le  socle  était  orné  des  armoiries 
du  pape  qui  offrait  la  rose  ('). 

1.  Cartari,  La  Rosa  li'nro  pon/ijicia,  pp.  17-18. 

2.  Moroni,  Dizionario,  t.  L IX,  p.  Il 2. 


3le0  roses  D'or  pontificales. 


Pour  la  première  partie  du  moyen  âge 
ces  différents  auteurs  ont  raison. 

En  effet,  si  l'on  en  juge  par  la  statue  du 
comte  Raymond-Bérenger  IV,  autrefois 
placée  sur  son  tombeau,  dans  l'église  Saint- 
Jean  d'Aix  (remplacée  par  une  copie  mo- 
derne), la  rose  était,  au  XI II'  siècle  encore, 
d'une  extrême  simplicité  :  c'était  une  fleur 
épanouie,  sans  accessoires  aucuns.  (On  sait 
que  Raymond-Bérenger  avait  reçu  la  rose 
du  pape  Innocent  IV,  en  1244  (').) 

Telle  semble  avoir  aussi  été  une  autre 
rose  d'or,  donnée  par  le  même  pape,  et  qui 
figura,  jusqu'au  siècle  dernier,  dans  le  trésor 
de  la  cathédrale  de  Lyon;  ce  joyau  était  en 
outre  enrichi  d'une  pierre  gravée  :  «  Rosam 
auri  cum  repositorio,  que  monstralur  in 
quadragesima.  »  (  I  nventaire  de  la  cathédrale 
de  Lyon  ;  1448.)  La  description  de  Lyon 
en  1761  donne  ce  renseignement:  «  Cette 
rose  est  d'or  et  renferme  une  cornaline  pour 
tenir  lieu  du  portrait  du  pape;  c'est  une 
pièce  antique  qui  représente  une  tête 
d'Hercule;  on  la  conserve  encore  dans  le 
trésor  de  Saint-Just;  elle  a  été  donnée  par 
Innocent  IV,  lorsqu'il   se   réfugia   dans   ce 

I.  «  L'église  Saint-Jean-d'Aix  renferme  une  copie  mo- 
derne, exécutée  par  M.  Bastiani  Pesetti,  d'après  les  des- 
sins de  l'ancien  mausolée  détruit  pendant  la  Révolution. 
On  y  voit  la  statue  de  Raymond-Bérenger  IV,  couvert 
d'une  cotte  de  mailles  et  tenant  d'une  main  la  rose  d'or. 
(Millin,  Voyage  da/ts  les  Départements  du  Midi  de  la 
France,  t.  II,  p.  287.  —  Cf.  Aix  ancien  et  moderne,  p.  169. 
Ai.x,  1833.) 

Les  manuscrits  de  Peiresc,  conservés  à  la  Bibliothèque 
de  Carpentras,  contiennent  un  croquis  de  ce  monument, 
ainsi  qu'une  note  qui  a  son  prix  :  «  La  rose  benicte  d'Aix 
et  le  tombeau  de  R.  Bérenger.  —  La  rose  bénicte  dans  la 
sacristie  de  l'église  Saint-Sauveur.  —  A  costé  du  tombeau 
de  Raymond  Bérenger,  qui  est  à  Saint-Jean  du  faubourg 
d'Aix,  il  y  a  une  statue  de  ce  prince  armé  de  mailles  selon 
le  temps  et  tenant  son  grand  escusson  de  la  main  gaui  lie 
et  de  la  droite  une  Rose  que  l'on  void  et  qui  est  celle  que 
le  Pape  lui  donna  au  concile  de  Lyon,  fort  approchanie 
de  celle  de  Saint-Just  de  Lyon  et  au  contraire  un  peu 
différente  de  celles  qui  restent  suspeudues  au  reliquaire 
de  Saint-Sauveur.  >  —  (Jean  Schopfer,  Documents  relatifs 
à  l'art  dn  moyen  âge.  Extrait  du  Bulletin  archéologique, 
1899,  p.  22.) 


couvent.  La  bulle  suivante  en  fait  foi  : 
«  Cum  igitur,  dum  Lugduni  traheremus  in 
claustro  ecclesiee  vestrse,  in  dominica  qua 
cantatur  Lsetare  Hierusalem,rosam  auream, 
quam  propter  diei  solemnitatem  more  solito 
in  nostris  manibusgestabamus,  eidemeccle- 
sifE  vestrse  duxerimus  concedendam  (').  » 

Vers  le  début  du  XIV"  siècle,  une  branche 
de  rosier  fut  substituée  à  la  rose  propre- 
ment dite. 

C'est  ainsi  que  la  rose  donnée  par 
Benoît  XI  (1303- 1304)  à  l'église  Saint- 
Etienne  (Saint-Dominique)  de  Pérouse, 
consistait  en  une  branche  de  rosier  («  un 
ramo  di  rose  d'oro  »),  garnie  de  cinq  roses 
ouvertes  et  de  deux  roses  fermées,  avec  un 
saphir  et  un  pied  en  bronze  doré,  le  tout 
d'une  valeur  de  70  ducats.  Cette  rose  fut 
vendue  par  les  moines,  probablement  au 
poids  du  métal  ('). 

Pendant  cette  première  période,  c'est-à- 
dire  jusqu'à  la  fin  du  XI 1 1^  siècle,  les  roses 
semblent  avoir   été    relativement    légères. 

o 

L'inventaire  du  trésor  pontifical,  rédigé  en 
1295,  en  mentionne  deux  ne  pesant,  l'une 
que  trois  onces,  et  l'autre  un  peu  plus  de 
deux  onces  seulement.  «  Item,  II  rose 
auri  que  portantur  a  Domino  in  Dominica 
de  Letare  ;  quarum  una  est  ponderis  III 
unciarum  scarsas  (sic),  alia  vero  est  pon- 
deris duarum  unciarum  et  dimid.  gr.  [').  » 
Mais  il  se  pourrait  fort  bien  qu'il  s'agît 
d'une  rose  centrale  détachée  de  la  branche 
et  restée  en  souffrance  chez  le  trésorier  du 
Saint-Sièee. 

Quant  à  la  rose  décrite  dans  l'inventaire 
de  131  I,  elle  provenait  d'un  crucifix  et  ne 
semble  pas  rentrer  dans  la  catégorie  dont 
nous  nous  occupons. 

1.  Niepce,  Les  Trésors  des  églises  de  Lyon,  pp.  25-30. — 
Mgr  Barbier  de  Montault,  Œuvres  complètes,  t.  I,  p.  77. 

2.  Cartari,  La  Rosa  d'oro,  pp.  58-59. 

3.  Molinier,  Inventaire  du  Trésor  du  Saint-SUge  sous 
Boni/ace  VIII,  Paris,  i8gS,  p.  44. 


îRcbue  lie  V^xt  cl^vcticu. 

«  Inventarium  thesauri  Ecclesie  Ro- 
mane apud  Perusium  asservati,  jussii  dé- 
mentis V  factum  anno  131  i.  Item  unam 
rosam  pulcram  de  auro,  de  opère  fili,  et 
habet  folia,  que  fuit  in  medio  magne  crucis; 
et  habet  in  medio  unum  magnum,  grossum 
et  quadrum  saphirum  incastonatum  et  rele- 
vatum;  et  per  circuitum  liabet  duas  exme- 
raldas  pulcras  et  quadras  et  duas  alias 
exmeraldas  oblongas,  et  II II  balatia,  om- 
nes  incastonatos  et  relevalos.  Et  in  fundo 
est  una  plata  de  ère,  ponderis  totum  —  unius 
libre,  trium  unciarum  et  unius  quarti.  — 
Ligata  est  per  se  (').  » 

Les  documents  tirés  des  Archives  du 
Vatican  me  permettent  d'affirmer  que  le 
poids  et  les  ornements  de  la  rose  variaient 
selon  le  caractère  ou  le  rang  du  personnage 
à  qui  elle  était  destinée. 

Pendant  le  grand  schisme,  le  pape  Clé- 
ment VII,  qui  connaissait  les  goûts  du  duc 
de  Berry,  le  plus  raffiné,  sans  contredit, 
parmi  les  amateurs  d'avant  la  Renaissance, 
fit  exécuter  à  son  intention  une  rose  d'une 
richesse  inusitée,  ornée  d'un  gros  saphir 
percé  et  de  deux  rubis  balais,  également 
percés.  Le  total  de  la  dépense  s'éleva  à 
plus  de  300  florins,  soit  au  moins  une  ving- 
taine de  mille  francs  au  pouvoir  actuel  de 
l'argent. 

La  différence  du  prix  de  revient  tenait, 
non  pas  à  la  différence  du  poids,  mais  à 
l'addition  de  pierres  précieuses. 

IV 

APRÈS  ces  détails  préliminaires,  j'étu- 
dierai, pontificat  par  pontificat,  l'his- 
toire des  roses  distribuées  pendant  le  XI V^ 
siècle. 

CLÉMENT  V   (1305-1314). 

La  rose  de  1309,  exécutée    par  l'orfèvre 


Rose  donnée  par  Clément  V  à  la  cathédrale  de  Bûle  (iMusée  de  Cluny). 


I.  Regesti  Clementis papœ  V,  Appendix,  t.  I,  p.  405. 


3Le0  roses  d'or  pontificales. 


Tauro  de  Sienne,  coûta  loo  florins  d'or  ('). 
Elle  a  disparu. 

Une  autre  rose  de  Clément  V,  celle  qu'il 
donna  soit  à  l'évêque,  soit  à  la  cathédrale 
de  Bâle,  a  été  mieux  partagée.  Elle  se 
trouve,  comme  on  sait,  au  musée  de  Cluny. 
C'est  une  branche  de  rosier  garnie  d'une 
rose  épanouie, de  quatre  roses  entr'ouvertes 
et  de  deux  boutons.  La  rose  épanouie 
l'y  emporte  sensiblement  sur  ses  com- 
pagnes, tandis  que  celles-ci,  dans  les  monu- 
ments postérieurs,  luttent  d'importance 
avec  elle. 

Dans  les  dernières  années,  il  est  vrai,  on 
a  révoqué  en  doute  et  l'antiquité  et  la  pro- 
venance de  cette  pièce  :  on  est  allé  jusqu'à 
l'attribuer  au  XVI  r,  voire  au  XVI II^ 
siècle,  sous  prétexte  qu'elle  ne  figure  pas 
sur  le  catalogue  de  la  vente  du  trésor  de  la 
cathédrale  de  Bâle,  d'où  elle  est  censée 
provenir  {").  Mais  cette  opinion  ne  soutient 
pas  l'examen.  En  effet,  dès  151 1,  l'inven- 
taire du  trésor  en  question  mentionne  une 
rose  de  tout  point  analogue  à  celle  du  musée 
de  Cluny,  sauf  pour  le  nombre  des  feuilles, 
dont  plusieurs  ont  disparu  depuis  lors  : 
«  rosa  aurea,  cum  triginta  octo  foliis, 
quinque  parvis  rosis,  duobus  nodis  et  tribus 
clipeis  ))  (^).  Il  résulte  de  cette  dernière 
mention  que  les  trois  écussons  faisaient 
partie,  dès  le  début  du  XVI"  siècle,  de  ce 
monument  en  miniature.  Seul  le  pied  a  pu 
être  remanié. 

Les  pièces  comptables  conservées  aux 
Archives  du  Vatican  confirment  le  témoi- 
gnage que  nous  apporte  la  rose  du  musée 
de  Cluny.    Ils  nous   montrent  qu'au  XI V^ 

1.  Faucon,  Les  Arts  à    la  Cour  d'Avignon  sous  Clé- 
ment V  et  Jean  XXII,  pp.  7-8. 

2.  Bulletin  de  la  Société  nationale  des  Antiçuaires  de 
France,  18S9,  pp.  274-276. 

3.  Miltlieihiiigen  der  Gesellscliaft  fiir  vater.  A  lier t II  li- 
mer in  Basel,  t.  IX,  p.  21.  — 

Otte,  t.  I,  p.  364. 


siècle,  ces  joyaux  comprenaient,  non  une 
rose  unique,  comme  on  l'a  prétendu,  mais 
une  branche  portant  plusieurs  fleurs  ou  bou- 
tons.Contrairement  à  l'opinion  commune  ('), 
la  rose  était  presque  invariablement  enri- 
chie de  saphirs,  et  non  pas  de  rubis.  Ceux- 
ci  ne  venaient  d'ordinaire  que  comme  acces- 
soires. On  ajoutait  en  outre  des  grenats, 
parfois  aussi  des  perles  (1372). 

La  rose  qui  figure  dans  l'inventaire  de 
Charles  V  (1380)  était  conforme  à  ce  type  : 
c'était  un  «  rosier  d'or,  à  tenir  en  sa  main, 
auquel  a  deux  pomellez  rons  »  (^).  Elle  est, 
ajoute  l'inventaire,  «  la  rose  que  le  pape 
donna  le  jour  de  la  Mykaresme  au  plus 
noble  ». 

JEAN  XXII  (1316-1334). 

Au  temps  de  Jean  XXII,  la  rose  pesait 
en  moyenne  une  dizaine  d'onces  et  coûtait, 
avec  les  accessoires  et  la  main-d'œuvre,  une 
centaine  de  florins,  soit  au  moins  de  6000  à 
8000  francs  de  notre  monnaie.  Ces  joyaux 
étaient  généralement  enrichis  d'un  ou  de 
plusieurs  saphirs,  parfois  aussi  de  grenats. 

La  plupart  des  roses  d'or  distribuées 
pendant  ce  pontificat  venaient  de  la  Tos- 
cane et  étaient  fournies  par  un  marchand 
italien  fixé  à  Avignon,  Richo  Corboli.  En 
1328,  pour  la  première  fois  depuis  plusieurs 
lustres,  la  rose  fut  exécutée  à  Avicrnon 
même,  d'ailleurs  par  un  artiste  italien,  Do- 
menico  di  Jacopo  de  Sienne,  qui  eut  désor- 
mais le  monopole  de  cette  fabrication. 

Voici,  d'après  M.  Maurice  Faucon  (^),  la 
liste  des  roses  distribuées  de  1318  à   1334. 

1318.  La  rose,  fournie  par  Richo  Corboli, 
pèse  89  florins  d'or  ;  elle  est  enrichie   d'un 


1.  Voy.  le  Diziotiario  de  Moroni,  sub  verbo. 

2.  Labarte,  Inventaire  du  Mobilier  de  Cliarles  l\  roi  de 
France.  Paris,  187g. 

2.  Les  Arts  à  la  Cour  d'Avignon  sous   Clément   V et 
Jean  XXII,  pp.  45,  10 1,  103. 


8 


9^cl)ue  Dr  l'Svr  cbrcticu. 


saphir  clu  prix  de  i6  florins.  Le  tout  coûte 
109  florins. 

1320,  21  avril.  —  Une  rose  d'or,  non 
donnée  lors  du  carême  précédent,  du  poids 
de  loi  florins,  avec  un  saphir  de  20  carats, 
est  mise  en  réserve  par  Jaufre  Isnard,  pré- 
vôt d'Aix. 

1323.  Le  destinataire  est  Amédée  V, 
comte  de  Savoie.  Cette  rose  coûte  100  du- 
cats d'or  et  26  florins. 

1 324.  Henri  de  Souillac.  Cette  rose  coûte 
113  florins  d'or,  5  sous  et  4  deniers  de 
petits  tournois. 

1325.  Aymar  de  Poitiers,  comte  du 
Valentinois.  Cette  rose,  payée  100  florins 
d'or,  était  ornée  de  trois  saphirs  et  pesait 
1 1  onces  I  denier. 

1326.  Le  comte  de  Comminges  (100 
florins). 

1328.  Henri  de  Boeto,  seigneur  alle- 
mand. Cette  rose,  exécutée  par  Domenico 
di  Jacopo,  portait  un  saphir  et  deux  gre- 
nats ;  elle  pesait  12  onces,  3  deniers. 

1329.  Le  comte  de  Comminges  (pour  la 
seconde  fois).  Cette  rose,  ornée  d'un  saphir, 
et  pesant  13  onces  et  1 1  deniers  d'or,  de  20 
carats,  fut  exécutée  par  Domenico  di  Jacopo. 

1330.  Le  comte  de  Nimbourg. 

133 1.  Le  comte  de  Boeto  (pour  la  se- 
conde fois).  Cette  rose  coûte  72  doubles 
d'or  et  demi  pour  la  matière  et  8  florins 
pour  la  façon. 

1332.  Le  seigneur  d'Avaugourt. 
1334.  Louis  de  Poitiers. 

BENOIT  XII  (1334-1342). 

1335  ou  ^33^-  La  rose,  du  poids  de  11 
onces  1/2,  est  exécutée  par  Dominicus 
(Minutius  ou  Manuchius)  Jacobi  et  donnée 
au  duc  Louis  de  Bourbon.  Elle  coûte  89 
florins  d'or,  non  compris  la  valeur  d'un  an- 
neau d'or  orné  d'un  saphir. 


1338.  Dominicus  livre  la  rose,  du  poids 
de  12  onces,  3  deniers,  et  du  prix  de  95 
florins  d'or,  5  sous,  non  compris  un  anneau 
d'or  orné  d'un  saphir.  Le  destinataire  est 
Stefano  Colonna. 

1338  (?).  Le  même  artiste  fournit  la  rose, 
du  poids  de  12  onces  un  demi-quart,  l'once 
calculée  à  raison  de  6  florins  et  demi.  Il 
reçoit  pour  la  main  d'œuvre  10  florins.  Le 
prix  total  s'élève  à  96  florins,  9  deniers 
tournois,  non  compris  un  anneau  d'or  orné 
d'un  saphir  et  d'un  grenat. 

1 34 1 .  La  rose,  du  poids  de  1 2  onces  et  3 
deniers,  à  raison  de  7  florins  d'or,  i  denier 
d'argent  par  once,  est  exécutée  par  le  même 
artiste.  Elle  est  ornée  d'un  saphir  et  de  deux 
grenats.  La  dépense  totale  s'élève  à  103 
florins  d'or,  5  deniers  tournois.  Le  destina- 
taire est  un  chevalier  du  roi  de  Portugal. 

1342.  La  rose,  du  poids  de  12  onces  trois 
quarts,  2  deniers  d'or,  est  exécutée  par  le 
même  artiste.  Elle  est  donnée  au  comte  de 
Comminges  («  Comes  Convenarum  »).  La 
façon  coûte  10  florins. 

CLÉMENT   VI  ()342-I352). 

1346.  La  rose  est  exécutée  par  Domi- 
nicus Jacobi.  (Faucon,  p.  110.) 

1347.  La  rose  est  fournie  par  l'argentier 
Johannes  Menuchii  (.'').  Reg.  248,  fol.  i  20  v". 

1348.   —    La   rose  est  donnée   au    roi 
Louis  I^f  de  Hongrie  (Moroni). 

A  une  époque  que  je  n'ai  pas  pu  déter- 
miner. Clément  VI  donne  la  rose  au  comte 
Guy  VI  du  P'orez.  Cette  rose, offerte  en  1372 
à  l'église  collégiale  de  Notre-Dame  de 
Montbrison  par  Jeanne  de  Bourbon,  com- 
tesse douairière  du  Forez,  veuve  de  Guy, 
fut  détruite  au  XVI^  siècle  par  les  Hu- 
guenots. (La  Mure,  Histoire  des  ducs  de 
Bourbon,  édit.  Chantelauze,  t.  III,  p.  135. 
Paris,    1860.) 


3les  ro0e0  d'or  pontiôcaïes. 


INNOCENT  VI  (1352-1362). 

1353.  La  rose  est  exécutée  par  Marcus 
Landi.  Elle  est  enrichie  d'un  rubis  et  de 
douze  perles. 

1360.  La  rose  est  donnée  à  Nicolas 
Acciajoli,  grand  sénéchal  du  royaume  de 
Naples  (Moroni). 

URBAIN    V  (1362-1370). 

•365,  1366,  1367.  Les  roses  sont  exécu- 
tées par  le  Siennois  Johannes  Bartoli. 

1368.  La  rose,  confiée  au  même  artiste, 
est  donnée  à  la  reine  Jeanne  de  Sicile. 
Cette  rose,  du  poids  de  14  onces  et  12 
deniers  d'or  de  20  carats,  est  enrichie  de 
trois  saphirs.  Certains  auteurs  affirment 
que  la  reine  reçut  en  outre  l'épée  d'honneur, 
mais  le  fait  est  contesté  et  avec  raison  ("). 

1369.  La  rose  est  donnée  à  la  basilique 
de  Saint-Pierre  à  Rome.  —  Cette  rose  fut 
détruite  en  1527,  lors  du  sac.  (Torrigio,  Le 
Sacre  Grotte  vaticane,  p.  4/2.) 

Date  inconnue.  Le  roi  VValdemar  IV  de 
Danemark  (Moroni). 

GRÉGOIRE  XI  (1370-1378). 

La  plupart  des  roses  distribuées  sous  ce 
pontificat  furent  exécutées  par  l'orfèvre 
siennois  Giovanni  di  Bartolo  ('). 

Celle  de  l'année  1372  était  particulière- 
ment riche  :  elle  pesait  i  marc,  5  onces, 
4  deniers,  et  était  ornée  d'un  saphir  et  de 
deux  perles.  Elle  coûta  en  tout  1 14  florins. 

1374.  La  rose,  exécutée  par  Johannes 
Bartoli,  pèse  i  marc,  4  onces  et  i  denier 
d'or  de  20  carats,  correspondant  à  78  florins 
et  12  sous  ;  elle  est  enrichie  d'un  saphir  et 
de  deux  grenats  d'une  valeur  de  12  florins; 
au  total  105  florins,  12  sous. 

1.  Cartari,  p.  62. 

2.  V.  mon  mémoire  sur  Giovanni  di  Bartolo  da  Siena, 
orafo  délia  corte  di  Avi}^none  7iel  XIV secolo.  (Extr.  de 
\'Archivio  storico  italiano  de  iSSS.) 


La  même  année  il  est  question  d'une 
rose  pesant  i  marc,  2  onces  et  1 1  deniers 
d'or,  correspondant  à  69  florins. 

1375.  Johannes  Bartoli  reçoit  100  florins, 

2  sous,  8  deniers  pour   la  rose  qui  est  don- 
née au  fils  du  duc  d'Andria. 

Ce  joyau  pesait  r  i  onces,  2  i  deniers  ;  il 
était  enrichi  d'un  saphir  et  de  deux  grenats. 
La  main-d'œuvre  coûta,  comme  à  l'ordi- 
naire, 15   florins. 

1376.  La  rose,  exécutée  par  le  même 
artiste,  est  donnée  au  vicomte  de  «  Villa- 
muro  »  (Villanova  ?).  Elle  pesait  i  marc  et 

3  onces  et  fut  payée  93  florins,  12  sous. 

URBAIN   VI  (1378-1389). 

En  1389,  la  rose  est  donnée  à  Raimondo 
Orsini  (d'après  Moroni). 

BONIFACE   IX  (1389-1404). 

Je  dois  me  borner,  pour  ce  pontificat,  à 
rapporter,  d'après  Moroni,  la  liste  des  des- 
tinataires des  roses  d'or. 

1391.  Albert  d'Esté. 

1393.  .'Vstorre  da   Bagnacavallo. 

1398.  Ugol.  Trinci  da  Foligno. 

Date  indéterminée.  Benuttino  Cima  da 
Cingoli. 

CLÉMENT  VII  0(1378-1394). 

1379.  La  rose,  exécutée  à  Fondi,  pèse  9 
onces,  1  obole  d'or,  à  raison  de  24  carats. 
Cette  rose  est  mise  en  réserve  et  le  pape 
en  donne  une  autre  envoyée  de  Naples  par 
l'évêque  de  Genève. 

1381.  La  rose  pèse  i  marc,  i  once,  2  de- 
niers d'or,  du  prix  de  60  florins  de  la 
Chambre,  2  sous.  On  y  ajoute  un  saphir  et 
deux  grenats.  La  main-d'œuvre  n'est  comp- 
tée que  I  2  florins. 

I.  V.  mon  mémoire  intitulé  L'Antipape  Clément  VII, 
p.   19. 


REVUE    DE   L  AKT  CHRETIEN. 
1901.    —    I^*^    LIVRAISON. 


lO 


3Rebuc  lie  V^xt  thxtîmx. 


1382.  La  rose  pèse  i  marc,  5  onces,  8 
deniers,  3  grains  ;  elle  est  enrichie  d'un  sa- 
phir, du  prix  de  80  florins  de  la  Chambre, 
de  deux  rubis  balais  du  prix  de  107  florins 
de  la  Chambre,  4  sous,  et  de  deux  autres 
saphirs,  du  prix  de  20  florins.  Le  total  de 
la  dépense  s'élève  à  328  florins  de  la 
Chambre,  18  sous,  4  deniers. 

1383.  Giovanni  di  Bartolo  exécute  la 
rose  destinée  au  roi  d'Arménie.  Cette  rose, 
du  poids  d'un  marc,  3  onces  et  18  deniers, 
au  titre  de  20  carats,  coûte  93  florins. 

1385.  La  rose,  exécutée  par  le  même 
orfèvre,  coûte  107  florins,  4  sous.  Elle 
est  donnée  à  Jean  de  Serre,  parent  du 
préfet  de  la  ville  de  Rome.  («  Consan- 
guineo  prefecti  Urbis  »).  Son  poids  s'élève 
à  8  onces  et  8  deniers;  son  prix  à  1 27  florins, 
4  sous, 

1386.  La  rose,  exécutée  par  l'argentier 
Johannes  Maurini  et  destinée  au  duc  de 
Brunswick  (.-'),  pèse  8  onces,  4  deniers,  16 
grains,  d'une  valeur  de  76  florins  courants, 
3  sous,  4  deniers.  Elle  revient  au  total  à 
93  florins  courants,  3  sous,  4  deniers. 

1887.  La  rose  est  exécutée  par  Johannes 
Maurini. 

1389.  La  rose,  donnée  à  Johannes  Cavi- 
lone  (Jean  de  Cavaillon  ?),  pèse  10  onces, 
à  raison  de  8  florins  d'or  chaque  once 
de  20  carats.  On  y  ajoute  deux  balais 
percés,  du  prix  de  5  florins  courants.  La 
main-d'œuvre  représente  1 5  florins  de  la 
Chambre,  soit  au  total,  88  florins  de  la 
Chambre,  i  i  sous. 

1390.  La  rose,  fournie  par  Cathalamus 
de  Rocha,  coûte  85  florins  de  la  Chambre, 
27  sous. 

1391.  Particulièrement  riche  est  la  rose 
donnée  au  duc  de  Berry;  elle  pèse  i  marc, 
2  onces,  10  deniers,  représentant  83  florins 
courants  et  8  sous.  La  main-d'œuvre  est 
comptée  15  florins  de  la  Chambre  de   29 


sous. Un  saphir  percé,  du  prix  de  125  florins 
courants,  et  2  rubis  balais  percés,  du  prix 
de  93  florins  courants,  18  sous,  y  sont 
ajoutés.  Le  total  de  la  dépense  s'élève  au 
chiffre  inusité  de  320  florins  courants,  5 
sous,  soit  274  florins  de  la  Chambre,  4  sous. 

BENOIT  XIII   (1394-1424). 

Plus  encore  que  Clément  VII,  l'antipape 
Benoît  XIII  éprouva  le  besoin  de  recourir 
aux  distinctions  honorifiques  pour  conso- 
lider son  autorité  battue  en  brèche  de  toutes 
parts. 

Pendant  la  première  partie  de  son  ponti- 
ficat, il  ne  négligea  pas,  même  au  milieu 
des  épreuves  les  plus  dures,  d'envoyer  la 
rose  d'or  aux  personnages  qu'il  avait  intérêt 
à  se  ménager. 

Je  ne  suis  malheureusement  pas  en  état 
de  donner  la  liste  complète  des  destinataires 
de  ces  insignes  et  dois  me  borner  à  quelques 
indications  sur  les  artistes  qui  furent  chargés 
de  les  exécuter,  ainsi  que  sur  leur  prix  de 
revient. 

En  1394,  la  rose  est  donnée  à  l'infant  du 
Portugal. 

En  1 396,  l'exécution  de  la  rose  est  confiée 
à  l'argentier  Johannes  Martini  ou  Marini 
ou  Maurini,  qui  reçoit  68  florins  de  la 
Chambre  pour  le  métal  et  15  florins  pour 
la  façon.  On  y  ajoute  un  saphir  du  prix 
de  4  florins. 

En  1397,  la  rose  est  fournie  par  le  chan- 
geur Thomas  de  Podio.  Elle  semble  desti- 
née  (mais  ce  n'est  là  qu'une  présomption), 
au  roi  Martin  d'Aragon  qui  se  préparait  à 
visiter  Avignon. 

En  1398,  Johannes  Morini  (qui  mourut 
cette  même  année)  reçoit  80  florins  pour 
l'or  nécessaire  à  la  confection  de  la  rose. 
Celle-ci  est  enrichie  de  cinq  rubis. 

En  1405,  on  emploie  6  onces,  12  grains 
d'or  de  2  doublons,  et  5   onces,  23   deniers 


3Les  roses  ti'or  pontificales. 


1 1 


d'or  de  florins,  soit  un  marc  et  demi  (d'une 
valeur  de  80  florins,  4  sous,  8  deniers  de  la 
Chambre),  pour  la  rose,  qui  est  donnée  à 
Jean  le  Maingre,  maréchal  de  Boucicaut, 
gouverneur  de  Gênes.  L'argentier  Rubinus 
de  Anelha  y  ajoute  trois  saphirs  et  reçoit 
10  francs,  soit  17  florins  de  la  Chambre, 
24  sous,  pour  la  main-d'œuvre. 

En  1405,  le  changeur  Martin  Pamperati 
livre  pour  la  rose  un  saphir  du  prix  de  15 
florins  courants,  trois  bons  rubis  balais  du 
prix  de  41  florins  courants  et  6  sous,  et 
trois  rubis  moins  bons,  du  prix  de  13  florins 
courants,  i  2  sous  (J). 

L'inventaire  du  roi  Charles  V  (13S0) 
mentionne  un  certain  nombre  de  roses  d'or. 
C'est  d'abord,  «  ung  rosier  d'or,  à  tenir  en 
sa  main  ouquel  a  deux  pommelez  rons  ;  et 
est  la  rose  que  le  Pape  donne  le  jour  de  la 
mykaresmeau  plus  noble.»  (Voy. ci-dessus). 

Ailleurs  (n"  3138)  figure  «  une  roze  d'or, 
où  est  esmaillé  le  Roy  à  genoulx  devant 
monseigneur  saint  Denis,  et  l'évangile 
saint  Jehan  escripte  au  dos  ;  pesant  cinq 
onces  d'or.  » 

Je  doute  fort  que  la  «  roze  d'argent, 
blanche,  niellée,  à  ung  escuçon  de  Bour- 
gogne, pesant  deux  onces  »  (n°  3129)  ait 
quelque  chose  de  commun  avec  la  rose 
pontificale  ('). 

L'inventaire  de  Charles  le  Téméraire,  de 
son  côté,  enregistre  plusieurs  roses,  dont 
l'une  ou  l'autre  pourrait  bien  remonter  au 
XlVe  siècle. 

2977.  «  Item,  une  rose  d'or  esmaillée  de 
blanc,  garnye  d'une  fleur  de  dyamant  de 
cinq  pièces  et  d'une  grosse  perle  au  dessus. 

1.  Notes  sur  quelques  artistes  avi^nonais  du  pontificat 
de  Benoît  XIU,  p.  3. 

2.  Labarte,  Inventaire  du  Mobilier  de  Charles  V.  N"* 
2156,  3129,  313S. 


2978.  —  Item,  une  autre  rose  d'or  es- 
maillée de  blanc,  garnye  d'une  grosse  table 
de  dyamant  et  de  deux  grosses  perles  pen- 
dans  en  faceon  de  poires  avec  une  petite 
chaynecte. 

2979-  —  Item,  une  autre  rose  d'or  es- 
maillée de  blanc,  à  tout  une  chaynecte 
garnye  d'un  gros  rubis. 

3101.  —  Item  ung  arbre  d'or  en  manière 
d'un  rosier,  où  il  y  a  audessus  une  rose 
et  dedens  un  saphir,  qui  poise  ensemble  : 
I™,  VII  o.  »  Cf.  n"  3367  ('). 

Si  nous  essayons  de  combiner  les  témoi- 
gnages divers  qui  viennent  d'être  rapportés, 
nous  arrivons  à  la  conclusion  que,  pendant 
le  XlVe  siècle,  le  poids  des  roses  pontifi- 
cales était  de  dix  à  douze  onces  en  moyenne. 
L'évaluation  des  poids  indiqués  par  les 
pièces  comptables  donne  lieu,  il  est  vrai,  à 
quelques  difficultés.  On  sait  que  l'ancien 
marc  avignonais,  subdivisé  en  8  onces,  pe- 
sait environ  223  grammes,  et  l'once  par  con- 
séquent un  peu  plus  de  27  grammes  ('').Sans 
entrer  dans  un  examen,  qui,  pour  le  moment, 
nous  entraînerait  trop  loin,  je  me  bornerai 
à  constater  que,  comme  le  florin  d'or  de  la 
Chambre  apostolique  pesait  environ  3 
grammes  et  demi  et  que  certaines  roses 
équivalaient  à  100  florins,  nous  obtenons 
un  poids  moyen  de  300  à  350  grammes 
par  rose.  Or,  c'est  là  justement  le  poids 
de  la  rose  du  musée  de  Cluny.  Les  textes 
sont  donc  d'accord  avec  le  témoigfnasfe 
des  monuments. 

Eugène   Muntz. 

(A  suivre.) 


1.  Le  comte  de  Laborde,  Les  Ducs  de  Bourgogne,  t.  II, 
pp.  III,  123. 

2.  Voy.  la  Revue  des  (Questions  historiques  de  iSgg,  t.  II, 
p.  7. 


fe'f  A^^  a'^-X  \^A  A,^^  K^-A  \^^  iS^A  jMa  iSÎA\^A  A^X  \^-A  A^-X  ^'^^  a"^'A  ^' 


ciTiTTiria^xixiTiiiiiiixixiiiJixxiiirriiKTixixiTriirirrixriJiiiirTiiirLii^ 


nciiurmcn  nrxir 


^  §  Ha  Couronne  ht  fer,  au  trésor  De  ffîon5a  (liomùarDic) '■.  1^ 


5f      fîiii:iiT-;iiiiïiixiiiiTiiiiiiiiiritiiriiiJirriiriiixiiiiiiiïniTiii:ciiiiriiT,iiiiiii:[iiiiiii:iiiriiiiiiiiiiit;,  iii^iiiiLiiiiiiiiiiiiiiiKiiriTTnri 

^A  ^S:""  ''iû^  *AtI^^  *ièl-^  ^^'f  ^iâ^  ^iii'f  ^iil^  ^iil'f  ^Ail-^  *Ail^  ^Aa-'f  ^iû''  ^iÔ-*  ^Atl-^  \ 


X.  —  Hrmoiries  De  caon?a. 

bbfaVpbWii>WTOWo'rin^  U A N  D  Charles-Ouint 
voulut  se  faire  couron- 
ner de  la  couronne  de 
fer,  la  vraie  couronne 
n'existait  déjà  plus  :  on 
improvisa  donc  pour  la 
circonstance  la  cou- 
ronne actuelle,  grâce  à  cette  interprétation 
vraiment  hardie  qu'elle  contenait  du  fer  à 
l'intérieur  (=).  La  prétendue  couronne  de  fer 
que  nous  connaissons  n'a  donc  fait  son 
entrée  dans  l'histoire  qu'en  1530.  Cette 
erreur  s'est  ensuite  propagée  fatalement,  et 
il  est  à  propos  d'en  citer  deux  applications. 
Les  armes  de  Monza,  gravées  en  tête 
de  l'ouvrage  de  Frisi,  portent  pour  meubles 
héraldiques  la  croix  du  royaume  et  la  cou- 
ronne de  fer,  avec  cette  légende:  est  sedes 

ITALIAE   REGNI     MODOETIA    MAGNI.    Ce    VerS, 

avec  sa  rime  intérieure,  dénote  le  moyen 
âge,  mais  je  doute  qu'il  ait  été  fait  spéciale- 
ment pour  servir  d'exergue  au  blason  de 
la  ville.  Il  importe  donc   de  savoir  à  quelle 

1.  Deuxième  partie  (fin),  voyez  la  5'""  livraison,  p.  377. 

2.  Le  Cérémonial  romain,  parlant  de  la  couronne  de 
fer,  non  de  celle  de  Monza,  mais  de  celle  qui  servait  au 
premier  couronnement,  dit  qu'à  son  sommet  existait  une 
lame  de  fer  :  or  l'inférieur  et  le  miiieit  n'étant  pas  le  som- 
met, il  y  avait  donc,  au  moyen  âge,  une  autre  couronne 
distincte  de  celle-ci.  «  (2u;e  quidem  corona  ideo  appella- 
tur  ferrea,  quod  laminam  quamdam  habeat  ferream  in 
summitate,  alioquin  area  et  prétiosissima  2>  (Cœrem. 
Roman,  seu  rituum  ecciesiasiic.  sive  sacr.  cœremoii. 
S.  S.  Rom.  Eccl.,  lib.  1,  sect.  5,  De  tripliciimperat.  corona, 
Venise,  15 16).  Ce  livre  était  donc  imprimé  avant  le  cou- 
ronnement de  Charles-Quint. 

Albert,  duc  d'Autriche,  fut  couronné  ,\  Rome  par  Ni- 
colas V',  le  16  mars  1452,  pujs  trois  jours  après  il  reçut  la 
couronne  impériale.  Le  pape,  sur  la  plainte  des  ambassa- 
deurs de  Milan,  déclara  dans  une  lettre  qu'il  avait  agi 
ainsi  à  cause  de  la  peste  qui  sévissait  en  Lombardie,  mais 
qu'il  n'entendait  par  là  préjudier  en  rien  aux  droits  ac- 
quis :  cependant  il  ne  se  servit  pas  de  la  couronne  de 
Monza. 


époque  précise  la  croix  et  la  couronne  ont 
été  substituées  au  croissant  de  la  lune, 
attribué  comme  emblème  par  les  papes. 

Les  armes  gravées  par  Frisi  au  frontis- 
pice de  son  tome  L  ont  paru  pour  la  pre- 
mière fois,  en  161 3,  dans  les  Trc  o/oi'ie  di 
Monza,  de  Bartolomeo  Zucchi.  Giulini  n'a 
pu  citer  un  monument  plus  ancien.  M.  Aguil- 
hon  a  écrit  sur  les  armes  de  Monza  une 
dissertation  spéciale,  où  il  démontre  que  le 
premier  meuble  de  l'écusson  fut  une  cou- 
ronne, avec  la  d&v\sç.  Est  sedes  liaiiae  regjii 
Modoetia  niagiii,  par  allusion  au  couronne- 
ment des  empereurs.  Aussi  Landolphe  a- 
t-il  pu,  en  I  128, appeler  M.on7.a.  priiims  locus 
coronœ  (coronationis  ?)  regù  Italiœ.  Plus 
tard  apparut  sur  fond  rouge  le  croissant 
blanc  de  la  lune.  La  couronne  et  le  crois- 
sant furent  gravés  sur  le  sceau  de  la  com- 
mune, dont  les  bannières  portaient  la  croix 
blanche  sur  fond  rouge  ou  la  croix  rouge 
sur  fond  blanc.  Ces  emblèmes  dateraient 
des  guerres  nationales  contre  les  Frédérics, 
car  Milan  donnait  des  armes  symboliques 
à  ceux  qui  se  rangeaient  de  son  côté. 

Monza  ayant  conquis  son  indépendance 
politique,  elle  ne  garda  dans  son  sceau  que 
l'effigie  de  S.  Jean,  ainsi  qu'on  peut  le  voir 
dans  ses  Statnti,  qui  datent  de  (336. 

II  n'y  a  donc  pas  lieu  d'invoquer  les 
armoiries  de  Monza  comme  preuve  du  culte 
de  la  couronne  de  fer. 

XL  —  couronnement  OcX^apolcon  X". 

NAPOLÉON  tint,  comme  roi  d'Italie, 
à  ceindre  la  couronne  de  fer.  Ce  fut 
l'occasion  d'une  fête,  ainsi  racontée  par  un 
auteur  contemporain  : 

«  Quand  Napoléon  voulut  se  couronner 
lui-même  du  diadème  le  plus  ancien  et  le 


îliî  Couronne  ùe  fer,  au  trésor  de  £@on3a. 


13 


plus  féodal  de  l'Europe,  il  donna  à  la  céré- 
monie toute  la  splendeur  et  la  majesté  dont 
elle  était  susceptible.  Son  voyage  à  Milan 
fut  semblable  au  triomphe  d'un  empereur 
romain  ;  et  la  description  des  processions, 
des  pompes  de  tous  genres,  préparées  pour 
cette  occasion,  remplit  un  assez  gros  volume. 
Les  décorations,  depuis  le  Palais-Royal  jus- 
qu'à la  cathédrale  de  Milan,  tiennent  plu- 
sieurs pages.  Le  cortège  qui  apporta  la 
couronne  de  Monza,  était  singulier  :  il  était 
conduit  par  une  garde  d'honneur  à  cheval, 
composée  d'un  corps  de  la  garde  italienne  ; 
une  voiture  contenait  la  municipalité  de 
Monza  ;  une  autre,  les  ouvriers  employés  à 
transporter  la  couronne  ;  les  chanoines,  le 
syndic  et  l'archiprêtre  de  Monza  suivaient 
dans  une  autre  ;  enfin  venait  celle  dans  la- 
quelle le  grand-maître  des  cérémonies  de 
la  cour  impériale  portait  la  couronne  sur 
un  coussin  de  velours.  Vingt-cinq  soldats 
de  la  vieille  garde  de  Bonaparte  entouraient 
l'honorable  relique,  qui  fut  reçue  à  Milan 
au  bruit  des  cloches  et  des  salves  d'artil- 
lerie, et,  à  la  porte  de  la  cathédrale,  par 
l'archevêque  de  Milan,  qui  la  porta  à  tra- 
vers l'église,  et  vint  la  déposer  sur  un  autel. 
Des  gardes  veillèrent  autour  d'elle  pendant 
toute  la  nuit. 

«  Les  rois  sont  tous  comédiens  :  ils  aiment 
les  représentations  théâtrales  ;  mais  aucun 
n'en  a  mieux  connu  Xeffet(\MÇ.  l'usurpateur  ; 
aucun  ne  les  a  plus  fréquemment  appliquées 
à  la  folie,  à  la  vanité,  à  la  duperie  de  ses 
sujets.  ))  (Lady  Morgan,  L'Italie,  t.  \, 
pp.  283-284.) 

Dans  la  chapelle  du  Saint-Clou,  on  voit 
trois  inscriptions  commémoratives  qu'il  est 
utile  de  reproduire.  Elles  se  réfèrent  au 
couronnement  de  Napoléon  L'en  1S05,  de 
Ferdinand  L'  en  1838  et  enfin  au  retour  de 
la  couronne  en  1866.   Je  passe  sous  silence 


les  inscriptions  antérieures   qu'on  trouvera 
dans  Frisi. 

CORONA    FERREA 

ITALIAE   REGVM    INSIGNE 

NAPOLEON!    I 

IMP  •  GALL  •  REGI  ITAL  • 

MEDIOLANI  IMPOSITA 

VU  KAL.  IVN  •  MDCCCV  ' 

PERENNE   MODOETIAE    DECVS 

FERDINANDVM    I 

AVSTRIAE   IMPERATOREM 

CORONA   FERREA 

IN   REOEM    LONGOIÎ  '  ET   VENET  " 

RITE  INAVGVRATVM  MEDIOLANI 

POSTR  •  NON  •  SEPT  •  MDCCCXXXVIII  • 

POSTERIS  TRADVNT 

MODOETIENSES 

REGIO  PALLIO  ET  ENSE 

GRATIA  CAESARIS  AVCTI 

FESTIVAM    FELICEMQVE   DIEM 

VIII  •  ID  •  DEC  •  AN  ■  MDCCCLXVI 

QVA   DIE   VENETIA   ITALO   REGNO   RECEPTA 

ET  CORONA   FERREA  SEPTENNIO   EXVL 

PROPRIAM   REPETEBAT  SEDEM 

VICTORIO  EMMANVELE    II 

VINDICE   •   RESTITVTORE 

DIADEMATIQVE  lAM  STRENVE   SVO 

PRISTINVM   DECVS   ET   NOiMEN  REPARANTE 

MODOETIENSES 

OMNIA   FAVSTA   AVSPICATI 

HOC   MONVMENTO 
PROROGABANT   IN   AEVVM 

Le  chapelain  Aguilhon,  qui  savait  tant 
de  choses,  m'écrivait  :  «  Je  possède  deux 
médailles  en  bronze,  frappées  à  Milan  en 
souvenir  du  couronnement,  qui  eut  lieu  le 
26  mai,  l'une  à  la  date  du  23  mai  1805  et 
l'autre  de  1 809.  Si  la  première  porte  2j  mai, 
c'est  qu'il  y  a  eu  pour  la  cérémonie  un  re- 
tard imprévu.  Dans  celle-ci  Napoléon  a  la 
couronne  de  laurier  ;  mais,  au  revers,  on 
voit  l'Italie,  sous  la  figure  d'une  femme, 
poser  la  couronne  de  fer  sur  la  tête  de  l'em- 
pereur, donnant  au  royaume  sa  constitution. 
Sur  la  seconde  médaille,  Napoléon  porte 
encore  la  couronne  de  fer.  » 

En  1812,  Longhi  a  exécuté  une  superbe 
gravure  qui  représente  «  Napoléon  à  la 
couronne  de  fer  ».  «  Ce  rare  portrait  »,  dit 


14 


9^e\)uc  lie  V^vt  cbvctim» 


un  amateur,  M.  Geoffroy,  atteint  dans  le 
commerce  le  prix  de  20  francs. 

Malte-Brun,  dans  sa  Géop-aphie  univer- 
selle, a  imprimé  cette  phrase  qui  n'est  pas 
exacte,  car  il  n'y  a  sur  la  couronne,  en  aucun 
endroit,  trace  d'inscription  :  «  Napoléon 
plaça  la  couronne  de  fer  sur  sa  tête  en  disant: 
Dieu  me  la  donne,  gare  à  qui  hi  touclic.  Al- 
lusion à  l'inscription  qu'elle  porte  :  Guai  a 
chi  la  tocca.  » 

M.  Aguilhon,  consulté  à  cet  égard,  m'a 
répondu  :  «  îl  n'y  a  pas  de  doute  que  Napo- 
léon l*^'  ait  prononcé  les  paroles  qui  lui  sont 
attribuées.  La  certitude  résulte  d'un  manus- 
crit autographe  d'un  chanoine  de  Monza, 
Jean-Baptiste  Castelfranco,  l'un  des  deux 
qui,  avec  l'archiprêtre,  accompagna  à  Milan, 
le  23  mai  1805,  la  couronne  de  fer  et  qui, 
ayant  assisté  à  la  cérémonie  du  26,  en  a  fait 
une  description  détaillée  en  témoin  oculaire. 
Or  il  déclare  avoir  entendu  Napoléon, 
tenant  la  couronne  dans  ses  mains  et  se  la 
posant  sur  la  tête,  dire  assez  haut  :  Dio  vie 
[ha  data,  guai  a  chi  vie  la  tocchera.  » 

En  souvenir  de  son  couronnement 
comme  roi  d'Italie,  Napoléon  fit  remettre 
au  trésor  de  Monza,  par  le  cardinal  Caprara, 
les  pains  d'or  et  d'argent  offerts  pendant  la 
cérémonie.  Ces  pains  y  sont  encore  ;  mais 
j'estime,  contrairement  à  l'opinion  de  Valéry 
{l^oyag.  en  Italie,  t.  1,  p.  198),  que  si  l'em- 
pereur les  avait  présentés  au  moment  de 
l'offertoire,  il  ne  pouvait  plus  en  disposer, 
et  que  l'envoi  par  le  cardinal  légat  fait  sup- 
poser qu'ils  sont  un  don  au  cardinal  du 
pape  Pie  Vil  qui  les  avait  reçus,  lors  du 
sacre,  à  Paris. 

La  couronne  de  fer  vint  à  Paris  en  1797, 
par  droit  de  conquête  ;  portée  par  les  Au- 
trichiens dans  la  citadelle  de  Vérone  en 
1859,  elle  fut  réintégrée  à  Monza  en  1866. 
M.  Aguilhon,  à  la  demande  du  syndic, 
a  consigné  ce  fait  historique  dans  une  ins- 


cription, apposée  le    long  du   mur  dans   la 
chapelle  du  Saint-Clou. 

XII.  —  «ccm  De  la  s.  G.  Des  Hites. 

IE  serai  aussi  bref  que  possible  sur  le  der- 
nier point,  à  savoir  que  la  Congrégation 
des  Rites,  par  son  décret  rendu  sous  le 
pontificat  de  Clément  XI,  en  1713,  ne 
tranche  pas  la  question,  qui  reste  intacte. 
Voici  le  fait  qui  donna  lieu  au  débat  :  «  En 
1656,  les  chanoines  de  Monza  firent  une 
nouvelle  croix,  et  y  placèrent  dans  le  milieu 
la  couronne  de  fer,  en  y  joignant  plusieurs 
autres  reliques  de  la  Passion.  Cette  innova- 
tion obtint,  dans  l'origine,  l'agrément  de 
l'archevêque,  qui  autorisa  une  procession 
solennelle,  où  la  croix  en  question  fut  portée 
avec  pompe  ;  mais,  peu  d'années  après,  à 
l'occasion  d'une  superbe  chapelle  destinée 
à  recevoir  l'insigne  relique,  un  visiteur  ar- 
chiépiscopal interdit  le  culte  qu'on  lui  ren- 
dait depuis  tant  de  siècles,  en  ordonnant  au 
chapitre  de  prouver  devant  le  cardinal-ar- 
chevêque en  vertu  de  quelle  autorisation  la 
couronne  de  fer  avait  été  extraite  du  trésor, 
où  elle  s'était  trouvée  jusqu'à  cette  époque, 
pour  être  mise  dans  la  nouvelle  croix  d'or, 
conjointement  à  d'autres  reliques.  Il  défen- 
dit de  l'exposer  publiquement  sans  l'autori- 
sation du  vicaire-général. 

«  Contre  le  décret  du  visiteur,  les 
chanoines  et  les  habitants  de  Monza  recou- 
rurent au  cardinal-archevêque,  Frédéric 
V'^isconti,  qui  jugea  l'affaire  trop  importante 
pour  ladécider  sans  consulter  le  Saint-Siège; 
il  prescrivit  ultérieurement  que  le  recours 
au  pape  aurait  lieu  dans  le  laps  de  six  mois, 
après  lesquels  la  couronne  de  fer  serait 
séparée  des  autres  reliques,  et  replacée  dans 
le  lieu  qu'elle  occupait  avant  l'année  1650. 
Il  fallut  se  soumettre  à  la  décision  du  prélat, 
mais  les  recourants  sollicitèrent   d'abord  la 


JLà  Couronne  De  fer,  au  trésor  tie  £©on5a.  15 


prorogation   du    terme   de    six    mois   pour 
porter  la   question  au  jugement  du  Saint- 
Siège,  ensuite  une  enquête  juridique  sur  le 
culte    rendu    de    temps    immémorial    à    la 
couronne   de  fer,   afin   que   les   dépositions 
authentiques  des  témoins  et  l'examen  juri- 
dique des  titres  pussent  servir  de  base  à  la 
sentence  que  l'autorité  suprême  du   Saint- 
Siège  devait  prononcer.Conformément  à  la 
requête,  l'archevêque  délégua   deux  juges 
et  un  notaire  qui  se  transportèrent  à  la  col- 
légiale de  Monza.  Ils  dressèrent  les  articles 
de  l'interrogatoire  que  devaient   subir  les 
témoins  ;  ils   nommèrent  des  experts  qu'ils 
chargèrent  de  reconnaître  la  matière  de  la 
couronne  de  fer.  Une  multitude  de  témoins 
furent   successivement    entendus   et  dépo- 
sèrent de  la  persuasion   publique  et  de  la 
tradition,   comme  quoi  la  couronne  de  fer 
contenait   un   des   clous  de  la   Passion  du 
Sauveur  ;  que,   pour  cette  raison,   elle   fut 
l'objet  de  la  vénération  publique  depuis  un 
temps   immémorial  ;   qu'elle  était    exposée 
dans  l'église  le  jour  de  S.   Jean-Baptiste 
avant   d'être  placée  dans   l'intérieur   de  la 
croix  ;  qu'on  la  porta  processionnellement 
plusieurs  et  plusieurs  fois  ;  que  Dieu  avait 
daigné  opérer  des  iniracles  ;   enfin  que  S. 
Charles    Borromée  et  autres  archevêques 
avaient  donné  l'exemple    du    culte    public 
envers    cette  précieuse  relique.  —  Après 
l'examen  des  témoins,  le  notaire  se  trans- 
porta aux  lieux  circonvoisins  et  y  reçut  de 
nouvelles    dépositions,     qui     confirmèrent 
celles  déjà  faites  par  les    habitants.  Enfin 
on    présenta    aux    délégués    les    écrivains 
anciens  et   modernes  rendant  témoignage 
delà  tradition  commune  sur  le  clou  renfermé 
dans  la  couronne  ;  ainsi  que  les  anciens  cata- 
logues   des     reliques     conservées  dans    la 
collégiale   (catalogues   qui   furent   toujours 
exposés    en    public)    et    dans    lesquels   on 


trouve  constamment  la  couronne  de  fer  avec 
mention  expresse  du  saint  clou. 

«  Toutes  ces  choses  constent  du  procès 
dressé  devant  les  juges  délégués  par  le 
cardinal  Visconti  ;  mais  ceux  qui  suivaient 
cette  affaire  étant  venus  à  mourir,  le  procès 
ne  fut  pas  envoyé  à  Rome,  et  la  question 
fut  assoupie.  Le  chapitre  et  la  population 
de  Monza  la  réveillèrent  en  1 7  1 3,  en  recou- 
rant au  pape  Clément  XI,  qui  remit  la 
cause  à  la  Sacrée  Congrégation  des  Rites. 
Le  vicaire  capitulaire  de  Milan  reçut  com- 
mission d'envoyer  copie  du  procès  fait  en 
1688  et  1689.  S'étant  transporté  à  Monza 
pour  cet  effet,  il  reconnut  la  couronne, 
même  à  l'aide  d'experts,  fit  examiner  des 
témoins  sur  son  identité,  c'est-à-dire  pour 
établir  que  c'était  réellement  celle  qui  exis- 
tait en  1688.  Ayant  ainsi  formé  un  nouveau 
procès  et  extrait  les  actes  faits  en  1688,  il 
transmit  le  tout,  en  forme  publique,  à  la 
Sacrée  Congrégation  des  Rites,  qui  se 
prononça  favorablement»  [Anakc/a,  t.  I, 
col.  323-324). 

Tout  le  dossier  de  l'affaire  a  été  résumé 
par  Mgr  Chaillot  dans  un  article  intitulé  : 
Cti/le  de  la  cotironne  de  fer  et  publié  par  lui 
à  Rome,  en  1855,  dans  les  Analecta  j'ui-is 
Pontificii,  t.  I,  col.  321-340.  J'ai  lu  très 
attentivement  toutes  les  pièces  produites  et 
les  preuves  fournies.  Elles  se  réduisent  à 
trois  :  les  auteurs,  les  catalogues  et  les 
témoins.  J'ai  discuté  plus  haut  les  textes 
des  auteurs  et  conclu  à  l'impossibilité  de  les 
appliquer  d'une  manière  adéquate  à  la 
couronne  actuelle.  J'ai  cité  textuellement 
les  inventaires  et  j'ai  démontré  que  la 
tradition  se  forme  très  tard,  mais  n'existe 
pas  au  moyen  âge  :  il  y  a  à  cette  date  une 
lacune  tellement  considérable  que  l'on  est 
étonné  de  voir  qu'on  ne  s'en  soit  pas  ému 
davantage. 

Qu'ont  attesté  les  témoins  i'  qu'ils  ont  vu 


i6 


3Rcbuc  tir  l'art  djrctien» 


exposer,  porter  en  procession  ('),  encenser, 
vénérer  la  couronne.  Leur  âge  varie  de 
64  ans  à  90  et  100.  Prenons  le  plus  âgé. 
Que  prouve  t-il,  sinon  qu'en  1588,  c'est-à- 
dire  cent  ans  auparavant,  ce  culte  existait  ? 
Or,  comme  il  est  certain  pour  nous  qu'il 
n'a  commencé  qu'en  1530,  on  voit  qu'il  y  a 
encore  un  écart  de  cinquante-huit  ans  pour 
lesquels  ne  se  produit  d'autre  témoignage 
que  celui  de  S.  Charles.  Il  ne  faudrait  pas 
s'arrêter  là,  mais  franchir  encore  cette  date, 
pour  montrer  que  l'on  n'a  rien  inventé  alors 
et  qu'on  a  continué  purement  et  simplement 
la  tradition.  Ceci  n'a  pas  été  fait,  et  là  est 
vraiment  le  côté  défectueux  de  ce  procès, 
qui  ne  prouve  que  pour  un  peu  plus  des 
cent  dernières  années,  c'est-à-dire  une  pos- 
session centenaire  et  l'immémorabilité,  au- 
cun homme  ne  se  souvenant  alors  d'avoir 
vu  établir  ce  culte,  que  tous  disent  au  con- 
traire avoir  été  en  pleine  vigueur.  La 
Congrégation  a  accepté  le  fait  tel  qu'on  le 
lui  présentait  et,  en  conséquence,  elle  a 
autorisé  l'exposition  et  la  procession  de  la 
couronne  de  fer,  s'appuyant  sur  ce  décret  de 
la  S.  Congrégation  du  Concile,  rapporté 
sous  cette  forme  dans  Delbene,  De  officio 
sanctœ  Inçitisiiioitis,  part.  2,  diib.  234,  sect. 
4  :  «  Lorsqu'une  église  possède  des  reliques 
qui  y  sont  vénérées  depuis  longtemps,  on 
peut  les  exposer  publiquement,  car  la 
Sacrée  Congrégation  a  décidé  formellement 
que  les  anciennes  reliques  doivent  jouir  de 
la  même  vénération  qu'autrefois.  » 

Mgr  Prosper  Lambertini,  qui   était  alors 

I.  «  Cette  déposition  est  contredite  par  la  visite  du 
cardinal  Frédéric  Borromée,  de  l'an  162 1,  dans  laquelle 
il  est  affirmé  qu'on  ne  portait  en  procession  que  la  croix 
du  royaume.  Fontanini  (XI,  II)  cherche  à  dissiper  l'objec- 
tion dont  il  sent  le  poids,  mais  à  sa  manière,  en  rodoniont 
littéraire.  Pourquoi  ne  reproduit-il  pas  le  texte  de  la 
visite?  Les  chanoines  sont  invités  à  montrer  les  reliques 
auxquelles  on  prête  un  culte  particulier  et  ils  ne  montrent 
que  la  croix  susdite,  passant  sous  silence  la  couronne  v> 
(Lettre  du  ch.  Aguil/ion,  iSfévr.  iSSo). 


promoteur  de  la  foi  ('),  a  laissé  passer  cette 
maxime  :  <<:  Le  fait  ainsi  constaté  de  cette 
persuasion  commune,  de  cette  tradition  im- 
mémoriale, aurait  suffi  pour  légitimer  la 
continuation  du  culte  religieux  et  public, 
car  le  Concile  de  Trente  n'exige  d'approba- 
tion formelle  que  pour  les  nouvelles  reliques; 
ne  faisant  aucune  prescription  au  sujet  des 
anciennes,  il  est  censé  leur  conserver  le 
culte  dont  elles  ont  été  toujours  entourées.  » 
Sans  doute  la  possession  vaut  titre  en 
droit  ;  mais,  dans  la  pratique,  avec  les  pro- 
grès de  la  science,  celte  théorie  n'est  plus 
soutenable  ;  autrement,  nous  serions  trom- 
pés à  chaque  instant  sur  une  foule  de  choses 
dont  l'authenticité  est  très  contestable.  Le 
regretté  cardinal  Altieri  me  disait  un  jour 
que  la  Congrégation  des  Rites  devrait 
compter  dans  son  sein  des  archéologues, 
sinon  comme  membres,  au  moins  comme 
consulteurs.  Voilà  le  moment  venu  de  réa- 
liser ce  vœu  si  légitime.  La  Congrégation 
reviendra  sur  sa  décision  première,  comme 
elle  l'a  fait  en  mainte  autre  circonstance, 
quand  elle  sera  mieux  éclairée  et  qu'elle 
n'aura  pas  seulement  consulté  des  juristes, 
mais  des  savants  :  il  y  a,  dans  l'espèce.ainsi 
que  cela  se  rencontre  fréquemment,  une 
matière  qui  est  du  ressort  exclusif  de  l'ar- 
chéologie. Ce  sera  toujours  un  honneur 
pour  la  science  d'intervenir  dans  de  pareilles 
discussions  et  de  pouvoir.dans  l'intérêt  de  la 
religion,  formuler  un  avis  motivé.  Les  bon- 

I.  Tels  sont,  d'après  la  table  de  son  ouvrage  sur  la  béa- 
tification et  la  canonisation,  les  points  traités  par  Benoit 
XIV:  «  Corona,in  oppido  Modoetix'  conservata,ylv7-crt  di- 
citur,  quod  in  ea  unus  ex  clavis  Christi  a  S.  Helena  inser- 
tusfuerit. —  Hanccoronam  S.  Gregorius  M.  regin;L'Theo- 
dolindit  dono  dédisse  dicitur.  —  Hac  corona  Bononiam 
e  Modoetiensibus  allata,  Carolus  in  eadem  civitale  coro- 
nalus  fuit  et  alii  imperatores  eadem  aliisque  coronis  in 
diversis  locis  coronari  consueverant.  —  Corona  ha:c  fer- 
rea,  in  cruce  aurea  coUocata,  inter  alias  instrumentorum 
l'assionis  Christi  reliquias  Modoelia:  colitur,  perniitlente 
Sacrorum  Riluuin  Cnngregatione,  apud  tpiam,  uti  et  Mo- 
doelire,  plura  de  ejus  cultuet  identitate  actasunt.  > 


ILa  Couronne  îie  fer,  au  trésor  de  £©on5a. 


n 


nés  gens  de  Monza,  appelés  en  témoignage, 
n'ont  fait  que  répéter  machinalement  ce 
.qu'ils  avaient  entendu  ou  appris  de  leurs 
ancêtres  ;  actuellement,  on  veut  des  déposi- 
tions plus  complètes,  plus  accentuées  et 
surtout  visant  au  cœur  même  de  la  difficulté, 
qu'ils  ont  à  peine  effleurée  et,  en  tous  cas, 
qu'ils  n'ont  même  pas  soupçonnée. 

XIII.  —  Bibliograpbie. 

JE  n'ai  fait  qu'effleurer  la  question,  mais 
ceu.x  qui  voudraient  en  savoir  plus 
long  pourront  se  renseigner  auprès  des 
auteurs  suivants,  dont  la  liste  a  été  dressée 
avec  beaucoup  de  soin  par  Mgr  Chaillot 
dans  les  Analecta  juris  pontificii,  t.  I,  col. 
334.  335.  336  et  que  je  reproduis  avec 
quelques  variantes  : 

1.  Gaspard  Bugati,  dominicain,  dans  le 
volume  intitulé  Additiones  ad  ziniversales 
histoi'ias  reriiin,Medioiain,'\m\)r\mè  en  1587. 

2.  François  Collio,  livre  3  De  sanguine 
Christi,  imprimé  à  Milan  en  161  7. 

3.  François  Besozzi  dans  sa  Storia  ponti- 
ficale di  Milano,  dédiée  au  cardinal  Frédé- 
ric Borromée,  imprimée  à  Milan  en  1596. 
Cet  auteur  dit  la  même  chose  dans  un  autre 
livre  :  Brève  storia  délia  invenzione  délia 
santa  Croce  e  dei  sacri  Chiodi,  imprimé  en 
1603  à  l'imprimerie  épiscopale  de  Milan  ('). 

4.  Paul  Morigia,  Sanctuaire  de  la  ville  et 
du  diocèse  de  Milan  (en  italien).  Milan,  1603. 

5.  L'auteur  du  livre  intitulé  Le  Dô/ne  de 
Milan,  réimprimé  en  1642  avec  permission 
des  supérieurs,  chap.  19,  De  la  Couronne  de 
fer. 

6.  Barthélémy  Zucchi,  dans  sa  Storia 
délia  corona  ferrea,  imprimée  à  Milan  en 
1609,   avec   l'approbation   des  supérieurs. 

I.  D'après  Besozzi,  pag.  143,  des  quatre  clous  de  la  Pas- 
sion, deux  auraient  été  employés  au  mors  du  cheval  de 
bataille  de  Constantin, le  troisième  aurait  formé  la  couron- 
ne de  fer,  et  le  dernier  aurait  été  jeté  dans  l'Adriatique 
pour  en  apaiser  les  tempêtes. 


7.  Le  P.  Fabius  Corona,  barnabite,  dans 
le  livre  intitulé  Sacri  tenipi,  Rome,  1625, 
part.  III,  chap.  12,  p.  118. 

8.  Joseph  Ripamonti,  Histoire  de  l'église 
de  Milan. 

9.  Jean- Baptiste  Villa,  chanoine  de  S. 
Bubila,  puis  maître  de  chœur  à  la  métro- 
pole de  Milan. dans  le  livre  intitulé  Zé?.s- .j^// 
églises  (en  italien),  imprimé  à  Milan,  avec 
permission,  en  1627,  p.  335. 

10.  Jean-Pierre  Paricelli,  archiprêtre  de 
St- Laurent  à  Milan,  dans  l'ouvrage  intitulé 
Basilicœ  Anibrosianœ  iiiomnnenta.  Milan, 
1645. 

11.  Alexis  Ledesma,  Vie  de  la  reine 
Théodelinde.  Foligno,  1689  ;  Vie  de  S.  Gé- 
rard, Bologne,  1697. 

12.  Marien  Moroni,  franciscain.  Terra 
santa  nuovaincnte  illustrata.  Plaisance,  1669. 

13. Jean-Baptiste  Cornet,  //  sao^o  Chiodo, 
tesoro  del  duonio  di  Milano  (').  Milan,  1 67 1 . 

14.  Mabillon,  dans  Xlter  Italiaim,  t.  1, 
p.  212,  édition  de  Paris,  1687. 

15.  Gretser,  De  sancta  cruce,  part.  3, 
pag.  2639;  Ingolstadt,  1616. 

16.  Eustache  de  St-Ubald,  augusiin  ré- 
formé. De  Metropoli  Mediolanensi,  p.  319; 
Milan,  1699. 

17.  Gualdus  Prioratus,  Relatio  urbis  et 
statîis  Mediolani,  pp.  221  et  260. 

18.  Le  P.  Jean  Grégoire  de  Jésus-Marie 
de  Naples,  dans  le  livre  intitulé  Ultima 
scola  di  sottigliezza  cristiana  fatta  nel  Cal- 
vario.  Naples,  1651. 

I.  La  cathédrale  de  Milan  possède  un  clou  de  la  Pas- 
sion, qui  est  conservé  au  fond  du  chœur,  sous  la  voiite, 
dans  une  grande  auréole  dorée  ;  une  lampe  btùle  constam- 
ment devant.  «  Tous  les  ans,  le  3  mai,  anniversaire  de  la 
terrible  peste  de  1576,  le  saint  clou  est  porté  procession- 
nellement  par  l'archevêque  de  Milan,  à  l'e.xeniple  de 
S.  Charles, après  avoir  été  retiré  de  la  voûte  par  quelques- 
uns  des  dignitaires  du  chapitre,  hissés  théâtralement  jus- 
que-là dans  une  machine  peinte,ayant  la  forme  d'un  nuage 
et  mêlée  de  petits  anges  »  (Valéry,  Voyages  historiques  et 
littéraires  en  Italie.  Paris,  1S31,  p.  106). 


KHVUE    DE    l'art   CHRÉTIEN. 
190I.    —    1^*^    LIVRAISON. 


i8 


3Rt\)ue  lie  rSrt  c!)vcticn» 


19.  Donat  Calvo,  Proprinomio  Evange- 
lico,  resohit.  25. 

20.  Antoine  Masini,  ouvrage  intitulé 
Distretto  délia  passione  dcl  Noslro  Signore. 
Bologne,  17 13. 

21.  Louis  Tatti,  de  la  Congrégation  des 
Somasques,  Martyrologium    Novocoinensc, 

P-75- 
Cette  liste  peut  être  utilement  complétée, 

ce  que  je  vais  faire. 

22.  Muraton,  A necdola  litteraria,  tom.  1 1  ; 
Annali  d' Italia,  t.  IV,  p.  8  ;  Reruiii  Itali- 
carum  scriptores,  t.  I,  p.  460  ;  Comment a- 
rium  de  Corona  ferrea. 

«  Il  faut  compter  principalement  (parmi 
les  manuscrits  de  l'Ambrosienne),  ceux 
dont  Muratori  a  fait  usage  dans  ses  mé- 
langes :  Anecdota  ex  Bibliothecce  Ambro- 
sianœ  codicibus,  1697,  in-40,  2  vol.,  dont  le 
premier  contient  quatre  poèmes  de  saint 
Paulin,  évêque  de  Nola  ;  et  le  second, 
beaucoup  de  pièces  historiques,  dont  la 
plupart  sont  relatives  à  la  couronne  de  fer  » 
(Millin,  Voyage  dans  le  Milanais,  t.  1, 
p.  201). 

Pour  Muratori,  le  couronnement  avec  la 
couronne  de  fer  n'aurait  pas  eu  lieu  avant  le 
IX^  siècle,  ce  qui  ferait  concorder  parfaite- 
ment l'histoire  avec  la  donnée  archéolo- 
gique. Dans  ses  Annali  d' Ilalia,  il  assure 
que  Bérenger,  duc  de  Frioul,  ayant  été 
élu  roi  d'Italie  en  888,  il  est  permis  de 
croire  que  c'est  à  cette  date  qu'il  faut  se 
tenir  :  «  e  permesso  di  credere  che  allora  si 
cominciasse  ad  usare  la  corona  ferrea  ».  Ce 
serait  une  hypothèse  des  plus  probables 
si  M.  Labruzzi  ne  contestait  le  fait  en  disant 
que  Bérenger  «  ne  fut  pas  le  premier  qui 
se  fît  couronner  en  Lombardie  »  [Il Btcona- 
rotti,  2^  sér.,  t.  XII,  p.  83),  et  qu'il  ne  se 
crut  obligé  de  faire  remonter  la  couronne 
de  fer  plus  haut  que  les  rois  d'Italie  (p.  125). 


Muratori,  racontant  le  couronnement  de 
Charles-Ouint  à  Bologne,  en  1530,  dit  posi- 
tivement qu'à  cette  époque  on  ignorait- 
encore  l'existence  du  clou  dans  la  couronne 
de  fer,  argument  d'une  grande  valeur 
historique  contre  son  authenticité  :  «  Vien 
descritta  essa  corona,  portata  cola  da  Mon- 
za,  non  meno  dal  Giovio  che  dal  maestro 
délie  cérémonie   del  papa,  presso  il  Rinal- 

di senza   che  alcuno  sognasse  allora 

quel  ferro  essere  un  chiodo  délia  Passione 

del   Signore Ne   alcuno  di  essi  scrive 

che  si  mostrasse  alcuno  seenodi  venerazione 
a  quella  corona,  come  cento  anni  dopo  im- 
magino  il  Ripamonti  nella  sua  Storia  di 
Milano.  » 

23.  Un  volume  in-f°  de  la  bibliothèque 
du  chapitre,  resté  à  l'état  de  manuscrit,  a 
pour  titre  :  De  corona  ferrea,  qiue  asservatnr 
in  templo  perinsigni  sancti  Johannis  Bap- 
tistœ  Modoetiœ,  disputatio  cum  responsione 
ad  D.  Lîcdovicnni  Antonium  Muratorium, 
auctore  Petro  Paulo  Bosca,  ex  sodalitio  Obla- 
iortini,  protonotario  apostolico,  et  archipres- 
bitero  Modoetiœ  (').  Voici  le  sommaire  des 
principaux  chapitres:  Cap.  III.  Qualis  sit 
Corona  ferrea  ;  qiiid  de  illa  senserit  Pan- 
vinius,  Blondus  et  Volateraniis,  quorum 
opinio  confutatur.  Cap.  V.  ^In  corona  ferrea, 
quce  asservalur  Modoetice,  tnstituta  fuerit  a 
Maximiano  imperatore,  an  a  Carolo  Magno; 
eam  institîitain  ftiisse  a  Tàeodelinda,  l'egina 
Longobardorum,  affr)namus,  et,  data  occa- 
sione,  obi  ter  agimus  de  corona  ferrea  Ilenrici 
septimi.  Cap.  VI.  Ati  reges  Longobardortmi 
corona  ferrea  fuerint  redimiti,  et  an  regni 
insignia  caperent,  tradita  sibi  hasta.  Cap. 
VII.  Fidèles  venerantur  coronani  ferream, 
quod  in  ea  inclnsus  stt  unus  ex  clavis,  quibus 

I.  Mgr  Bosca  fut  archiprêtre  de  1680  à  1699.  «  L'dcriture, 
dit  Ajjuilhon,  en  est  très  décolorde.  D'ailleurs,  tous  les 
apologistes  de  la  couronne  en  ont  fait  très  peu  de  cas.  » 


3La  Couronne  De  fer,  au  trésor  tie  ®on5a. 


19 


est  Jésus  crucifixus.  Cap.  VIII.  Solvuntur 
argumenta  adversantia  ('). 

24.  Giusto  Fontanini,  Dissertatio  de 
corona  fcrrea  Lo7igobardorum,  Rome,  1 7  1 7, 
in-4°  de  132  pag.,  avec  planches. 

L'ouvrage  est  adressé  à  la  Sacrée  Con- 
grégation des  Rites  au  nom  de  l'archiprêtre, 
des  vingt-deux  chanoines  et  de  tout  le  clergé 
de  l'insigne  et  royale  basilique,  ainsi  que  du 
préposé  de  la  fabrique,  du  magistrat  et  de  la 
population  de  Monza. 

2^.Sacra  Congregatione  Rituum,  Etnin'^'^'^^ 
et  Rev'^'^  D.  Card.  Ptolomeo ponente.  Medio- 
lanen.  Sjiper  cultu  Coro7iœ  Ferreœ,  pro 
Reverendissimo  Capitula  Insignis  CoUegiatœ 
S.  Joaiinis  Baptistœ  Modoetiœ  et  Communi- 
tate  ejusdeiu  oppidi,  eottfra  D.  Promotorem 
fiscalem  cîiriœ  archiepiscopalis  Mediola^ii, 
Responsio  (Rome),  1 7 1 7.  Ce  voturn  est  signé 
«  Guglielmus  Ricca  ». 

26.  Lamberiini,  De  servorum  Dei  beatifi- 
catione,  1747,  lib.  IV,  pars  II,  cap.  25. 

27.  Solenne  trasporto  délia  sacra  corona 
ferrea  con  croce  del  regno  da  Â'Ionza  alla 

metropoli  di  MilaJio,  seguito  il  giorno  22 
maggio  180^,  colla  deputazione  superiormente 
dele^ata  adoo'Setto  dell'  incoronasione  di 
Napoleone  primo,  imperatore  dé  francesi  in 
re  d'Italia.  Q^  in-8°  de  14  pag.,  sans  date 
ni  lieu  d'impression. 

28.  De  Murr  (Theophilus),  Dissertatio 
de  corona  regnin  Italiœ  vidgo  ferrea  dicta. 
Monachii,  1808,  in-4°  de  54  pages,  avec 
deux  mauvaises  gravures. 

29.  Bellani  (Antonio),  chanoine  de 
Monza.  La  corona  ferrea  del  Regno  d' Itaha, 
considerata  7°  corne  monumento  d'arte,  2'^ 
corne  monumento  storico,  j°  co7ne  monumento 
sacro.  Milan,  Sirtori,  1819,  in-4'i  de  210 
pag.,  avec  une  mauvaise  vignette  au  fron- 
tispice. 

I.  Frisi,  t.  III,  p.  251. 


30.  L'extrait  du  Giornale  dell'  Italiana 
letteratura,  où  la  «  Memoria  apologelica  » 
fut  publiée  la  première  fois  (Padoue,  1819, 
sér.  II,  t.  XXI)  forme  un  in-8°  de  45  pag. 

31.  Martorelli,  Rivista  delf  Apologia  di 
Bellani,  apud  Giornale  Arcadico  di  Roma, 
tom.  IX. 

32.  Articolo  sulla  corona  ferrea,  estratto 
dal  Giornale  dell'  Italiana  letteratur-a,  Pa- 
dova,  settembre  et  ottobre  1S19,  con  note  cri- 
tiche,  Venise,  182  i,  in-4°  de  65  pag. 

C'est  la  réimpression  de  la  première 
édition  du  n°  30. 

2,1-  Francesco  Antolini,  Dei  re  d'Italia 
inaugurati  0  no  colla  corona  ferrea  da 
Odoacre  fine  a  Ferdinando  I .   Milan,  1838. 

34.  Marimonte,  Memorie  storiche  délia 
città  di  Monza,  Monza,  1841,  in-8°. 

35.  Corona  ferrea,  Monza,  sans  date 
(mais  postérieur  à  1859),  in-f'^  d'une  page. 

36.  Bianconi,  avocat,  Memoria  intorno 
la  corona  di  ferro  Longobarda;  Milan,  1 860, 
in- 8"  d'une  feuille. 

Ty"].  Oreste  Raggi,  Délia  corona  di  ferro, 
Firenze,  Barbera,  1861,  in-8''  de  36  pages. 

38.  Bombelli,  Storia  délia  corona  ferrea, 
Florence,  1870. 

39.  Zerbi  (Luigi),  La  corona  ferrea  ai 
funebri  nazionali  di  Vittorio  Emmanuelle 
II,  re  dltalia:  considerazioni storiche  docu- 
mentale;  Monza,  1878,  in-80  de  68  pag., 
avec  une  gravure  de  la  couronne. 

40.  Labruzzi  di  Nexima,  Délia  origine 
italiana  délia  corona  ferrea,  studio  storico- 
critico,  apud  //  Buonarotti,  Roma,  1 898, 
t.  XII. 

De  Mély,  La  couronne  de  fer  et  la  dona- 
tion Constantinie7tne,  Paris,  1897,  in-8*^  de 
4  pag,  Extr.  de  la  Gazette  des  Beaux- Arts, 
viP  du  i"  mai. 


20 


3Bi.t'ti\K  lie  rSvr  tljvfttcn. 


M°: 


XIV.  —  Fontanini. 

ONSEIGNEUR  Fontanini,  camé- 
er  d'honneur  de  Clément  XI, 
comme  il  s'intitule  dans  sa  dissertation  {A 
cubiculo  liono7'ario  Sanctissimi,,  Domini 
Nostri  Clcnientis  papce  XI),  puis  évoque 
titulaire,  tient  une  place  trop  considérable 
dans  la  bibliothèque  de  la  Ste  Couronne, 
pour  que  je  ne  cherche  pas  à  exposer  sa 
thèse,  quelle  qu'elle  soit.  Voici  le  résumé 
qu'en  a  fait  Léon  Palustre  : 

Dans  sa  préface,  il  dit  que  l'on  a  voulu 
récemment  détruire  le  culte  rendu  à  la  cou- 
ronne de  fer  «  avant  S.  Charles,  par 
S.  Charles  et  après  S.  Charles  ».  Il  paraît 
que  les  théologiens  se  sont  prononcés  à  ce 
sujet,  et  dès  lors  la  question  est  tranchée, 
puisque  S.  Augustin  a  écrit  :  «  Ouid  adhuc 
quaeris  examen,  quod  jam  factum  est  apud 
Apostolicam  Sedem  ?  » 

«  C'est  ainsi  qu'au  XV!  1 1"  siècle,  on  fai- 
sait de  l'archéologie.  Il  faut  avouer  que  la 
tâche  était  facile. 

«  P.  2.  Fontanini  attribue  les  doutes  éle- 
vés sur  l'authenticité  de  la  couronne  de  fer 
à  la  jalousie  des  Milanais  ('). 

«  P.  5.  Il  cite  les  fragments  suivants  du 
discours  de  S.  Ambroise  De  obiiu  Tlieodosii 
iiiagni  :  «  Ouctsivit  clavos  etc.  »  ('),  «  de 
ALTERO  diadema  intexuit  (nempe  intiis 
texîiit)  ». 

«  Corona  de  cruce  (ideo  de  clavo  crucis).  » 
«  Fontanini  ajoute  :«  Libuillongiusculum 
Ambrosii  testimonium  recitare,  ut  diadema 
ab  oratore  sanctissimo  pro  Corona  directe 
sanctum  patefieret.  Ouare  vox  diadematis 
ab  Ambrosio  usurpaia  levé  est  argumentum 

1.  Labarte  .en  a  parlé,  disant  que  cette  opinion  a  été 
combattue  par  le  cardinal  Tolomei,  l'ierre  Paul  Rosca,  le 
P.  .Mlegranza,  Giusto  Fontanini,  archevêque  d'Ancyre,  et 
Frisi.  De  Linas  rapporte  ce  jugement  dans  son  Orfèvre- 
rie  chnsonnce,  publiée  dans  la  Revue  de  l'Art  chrétien. 

2.  Le  texte  étant  reproduit  plus  haut,  je  n'en  retiens  ici 
cjue  les  deux  passages  commentés  par  l'auteur. 


adversus  Coronam  fei'ream  Modoetiensem. 

Si  enim  clavus    in   circulum    seu  rotundam 

laminam    versus,    et  coronrc   imperiali    ab 

Helena     intextus,     vertici    Constantiniano 

aptari  potuit,  cur  hanc  laminam  ferream  co- 

ronse  Modoetiensi  regum  italicorum  inser- 

tam.a  corona  seu  diademateConstantiniano, 

qure   promiscue   usurpavit  Ambrosius,   ab- 

horrere  putabimus  ?  Hoc  idem  ab   Helena 

çevDuis    ijisignitnui     testatur     Ambrosius. 

Gemmis  et  auro  ibidem  insignita  est  corona 

Modoetiensis.  Utraque  regiis  capitibus  cin- 

gendis  extructa,  ita  ut  unam  ab  altéra  di- 

versam  haud  temere  quispiam  existimet.  » 

«  P.  22, il  dit  :«  Hac  ex  parte  clavi  Domi- 

nici  munus  Theodolindae  factum   a  Magno 

Gregorio  verisimile  omnino  videtur.  » 

«  Mais  à  cette  époque  le  clou  ne  faisait 
donc  pas  partie  de  la  couronne  ou  il  s'agit 
alors  d'un  second  clou.  N'y  a-t-il  pas  oppo- 
sition entre  la  p.  5  et  la  p.  22  ?  Il  parle  de 
constans  fama  et  de  rerttin  vetttstas  qui, 
d'après  Baronius,  valent  mieux  que  des 
scripta. 

«  Une  nouvelle  couronne  de  fer  fut  faite 
pour  l'empereur  Henri  VIII.  Qu'est  elle 
devenue  ?  » 

Je  continue  personnellement  la  critique 
de  l'ouvrage  : 

Mgr  Fontanini,  p.  16  de  sa  dissertation, 
a  écrit  ceci  avec  beaucoup  trop  d'assurance  : 
«  In  sacello  ad  Levani  majoris  Basilicai 
Modoetiensis  etiamnum  spectatur  egregia 
in  rem  nostram  pictura  A.  I).  1444  confecta, 
ubi  arca  sacrorum  pignonim  reserata  coram 
Theodolinda  et  Adalwaldo  regibus,  Medio- 
lanensi  antistite  aliisque  Ecclesiœ  et  aulae 
ministris,  noniiulli  sacra  vasa  et  crucem  ma- 
nibus  gerunt,  sanclo  Gregorio  pontifice  co- 
ronam regiam  preeferente,  qure  a  ferrea  non 
discrepat,  quamvis  pictor  pro  sua  audendi 
potestate  in  ea  efformanda  ingenio  nonnihil 
indtilserit.  Nullam  porro  coronam  per  Gre- 


iLa  Couronne  De  fer,  au  trésor  de  £©on3a. 


21 


gorium  ad  Theodolindam  missam  fuisse 
legimus  prseter  ferream.  Ouid  clarius  ad 
evincendum  A.  D.  1444  coronam  Modoe- 
tiensem  inter  sacra  lipsana  publiée  recensi- 
tam.  » 

L'archéologie  a  au  moins  cela  de  bon 
qu'elle  apprend  à  voir  clair  et  donne  la 
possibilité  de  réfuter  les  plus  mauvais  argu- 
ments. D'abord,  où  lit-on  que  S.  Grégoire 
ait  envoyé  la  couronne  de  fer  à  Théode- 
linde  ?  Fontanini  a-til  cité  un  seul  auteur 
contemporain  ou  à  peu  près  du  fait  ?  Jamais. 
Il  s'étaie  de  textes  postérieurs  à  la  fresque 
elle-même  et  surtout  de  l'autorité  «  de  Si- 
gonio,  qui,  selon  l'érudit  Aguilhon,  n'en 
parle  que  d'une  manière  tout  à  fait  induc- 
tive  ».  De  plus,  la  fresque  en  question  ne 
représente  que  les  objets  du  trésor,  nulle- 
ment les  reliques  ;  la  scène  de  la  donation 
de  celles-ci  est  à  part.  Or  Fontanini  fait  ici 
allusion,  à  ne  pas  s'y  méprendre,  à  un  ta- 
bleau que  j'ai  décrit  dans  mon  ouvrage  sur 
Monza  et  qu'il  n'a  pas  du  tout  compris.  En 
effet,  il  transforme  l'archiprêtre  en  S.  Gré- 
goire, celui  qui  reçoit  en  celui  qui  donne. 
Et  à  qui  donnerait-il  ?  Non  pas  à  un  ecclé- 
siastique, mais  à  un  serviteur.  Et  que  donne- 
t-il  ?  Non  pas  une  couronne  quelconque, 
mais  la  poule  et  les  poussins!  Quant  à  l'ar- 
chevêque de  Milan,  ce  ne  peut  être  qu'un 
des  chanoines  ashistants,  peut-être  celui  qui 
est  chape. 

Aguilhon  poursuit:  «  Il  y  a  un  autre 
moyen  de  réfuter  le  prélat,  c'est  la  disposi- 
tion elle-même  des  divers  tableaux  qui 
composent  la  fresque.  Les  gestes  de  la  reine 
sont,  en  efiet,  figurés  en  plusieurs  zones 
superposées,  qui  se  déroulent  de  gauche  à 
droite,  comme  dans  un  livre.  Nous  voyons 
d'abord  la  reine,  se  reposant  dans  une  iorêt 
avec  ses  dames,  et  contemplant  la  colombe 
qui  lui  désigne  le  lieu  où  elle  devra  bâtir 
l'église  qu'elle  a  vouée  à  S.  Jean  ;  puis  les 


ouvriers  travaillant,  par  ses  ordres,  à  briser 
l'idole  d'or  à  laquelle  Agilulf  rendait  hom- 
mage, avant  sa  conversion  ;  les  orfèvres, 
dans  leurs  ateliers,  exécutant  les  divers 
objets  destinés  au  culte  ;  l'acte  de  donation, 
dicté  par  la  reine  à  un  notaire  qui  écrit  sur 
ses  genoux  ;  enfin  la  remise  elle-même  du 
trésor  à  l'archiprêtre  et  au  chapitre.  »  Cette 
scène  fait  donc  une  suite  naturelle  aux 
précédentes  et  les  complète.  Fontanini  a 
mal  vu  ou  il  s'est  fié  à  des  correspondants 
mal  renseignés,  peut-être  même  prévenus 
et  interprétant  de  parti  pris. 

Je  termine  par  cette  considération  :  Fon- 
tanini, p.  44  et  suiv.,  cite  deux  textes  qui  ne 
prouvent  pas  la  thèse  impossible  qu'il  sou- 
tient :  l'un  est  la  lettre  de  l'empereur  Hen- 
ri VII  ("),  demandant  en  13 10  qu'on  le  ren- 
seigne exactement  sur  la  cérémonie  du  cou- 
ronnement :  «  Committimus  vobis  et  man- 
damus  ut  archipresbyter  cum  tribus  aliis 
senioribus  qui  sciunt  quid  opus  sit  ad  coUa- 
tionem  coronai  ferrea;,  sine  ulla  dilatione  ve- 
niant  ad  nos,  portantes  omnia  privilégia  et 
instrumenta  quct  apud  vos  Modoeti^e  asser- 
vantur.  »  Le  cardinal  Arnaud  de  Pellegrue, 
légat  du  Saint-Siège,écrit  aussi  aux  religieux 
du  monastère  de  Saint-Ambroise  à  Milan  : 
«  Sane  quum  idem  Dominus  rex  ad  exqui- 
rendum  ubi  et  in  quo  loco  sit  corona  ferrea 
quam  habiturus  est  suique  habuerunt  prœ- 
decessores,  necnon  ad  perscrutandum.scien- 
dum  et  se  plenius  informandum  de  modo 
et  forma  tenendis  in  coronatione  jam  dicta. 


I.  Le  chroniqueur  Rolandino  de  Padoue,  qui  écrivait 

dans  la  seconde  moitié  du  XI II'' siècle,  atteste  comme 
un  fait  public  le  couronnement  à  Monza  avec  la  couronne 
de  fer  :  «  Burgum  Modiciani  attentavit  (Henricus  VII) 
intrare,  volens  eam  privare  forsitan  illa  nobili  dignitate 
corouEp  ferrea:,  quas  illic  est  ab  antiquis  nostris  in  hono- 
rem  Lombardicœ  libertatis  hac  de  causa  reposita.ut  scili- 
cet  quandocumque  fuit  Romanorum  imperator  electus 
légitime,  posl  electioneni  de  se  factam  in  regem  Alaman- 
norum,  hic  idem  corona  ferrea  primitus  coroiietur,deinde 
pergens  Romam  sumat  coronam  auream  ab  Apostolica 
dignitate  ».  (Rer.  Italie.  Script.,  t.  VIII,  p.  347.) 


22 


îRcbuc  ïie  ran  chrétien. 


mittatad  vos  venerabilem  virum  magistrum 
Galassum  de  comitibus  de  Mangone,  cano- 
nicum  Cameracensem,  domini  papecappel- 
lanum,  ipsius  domini    régis   consiliarium  et 

familiarem mandamus  quatenus  eidem 

magistro  Galasso  ubi  sil  corona  praedicta  et 
scripta  quaelibet  necessaria  ad  modum  et 
formam  tenenda  et  quidquid  scitis  vel  scire 
potestis  per  vos  et  alios,  circa  coronationem 
eamdem  referatis  eumque  informetis  plena- 
rie,  ut  in  reditu  suo  sciât  dicto  domino  régi 
referre  per  ordinem,  nullo  dimisso,  omnia 
quœ  circa  coronam  et  coronationem  hujus- 
modi  sint  agenda.  5» 

Ainsi  la  couronne  était  perdue  et  la  tra- 
dition interrompue.  L'orfèvre  Lando,  de 
Sienne,  fut  chargé  en  conséquence  de  fabri- 
quer une  nouvelle  couronne  ('),  «  coronam 
ferream  lauream  »,  qu'un  chroniqueur  sem- 
ble avoir  vue,  car  il  la  décrit  minutieuse- 
ment :  «  Ex  nitido  chalybe  fabricatam  in- 
star serti  laurei  quo  triumphatores  augusti 
olim  coronabantur  et  lapillis  pretiosis  orna- 
tam.  )>  Si  c'est  une  couronne  laurée  à  la 
façon  de  celles  de  l'antiquité,  il  faut  avouer 
que  nous  n'en  avons  plus  le  type  ;  mais 
peut-être  ces  paroles  pourraient-elles  con- 
venir à  la  couronne  figurée  sur  le  bas-relief. 
En  effet,  nous  y  voyons  des  gemmes  au 
bandeau  et,  au-dessus,  des  feuillages  qui 
suffisent  à  indiquer  des  lauriers.  Il  ne  faut 
non  plus  demander  aux  textes  une  précision 
trop  rigoureuse. 

I.  Luigi  de  Angelis,  dans  ses  Osservazioni  critiche  so- 
pra  una  crw^  r//  rawc  (Sienne,  1814,  pag.  29),  attribue 
cette  couronne  à  «  Maestro  Lando,  orafodi  Enrico  III  >, 
cité  par  l'abbd  Cristofano  Amaduzzi,  dans  ses  I.ettere 
Sanesi,  t.  II,  fol.  12.  L'empereur,  après  son  couronnement 
comme  septième  roi  d'Italie,  fit  porter  «  par  ses  deux 
médecins  la  couronne  de  fer,exécutée  par  Lando,  à  Astol- 
phe  de  Lampignano,  abbé  du  monastère  de  St-Ambroise 
de  Milan,  voulant  qu'on  l'y  conservât  en  perpétuel  souve- 
nir de  son  couronnement  >. 

Frisi,  I,  173,  cite  ce  texte  qui  nomme  Maître  Lando 
lors    de  la  remise  faite  .'i    l'abbé   Astolfe  :  «    Pr;csente 

magistro  Lando  de  Sennis,  aurifabro qui  priudictam 

coronam  propriis  manibus  fabricavit  ». 


XV.  —  Opinion  De  ffi.  KonDakoto. 

/"^ETTE  notice  était  écrite  depuis  plu- 
^-^  sieurs  années,  quand  a  paru  le  splen- 
dide  ouvrage  de  M.  Kondakow  sur  les 
émaux  byzantins.  Comine  il  n'est  pas  dans 
le  commerce  et  qu'il  n'a  été  tiré  qu'à  un 
nombre  très  limité  d'exemplaires,  je  crois 
utile  d'en  donner  ici  un  long  extrait,  qui 
justifiera  pleinement  ma  manière  de  voir. 

«  Labarte  essaie  d'appuyer  son  hypothèse 
sur  la  couronne  de  fer  italienne  (fig.  68),  à 
laquelle  nous  donnons,  nous  aussi,  bien  en- 
tendu, la  première  place  parmi  les  couron- 
nes émaillées,  puisqu'elle  est  le  plus  ancien 
monument  byzantin  de  cette  espèce  (').  Elle 
consiste  en  un  bandeau  d'or  circulaire  ou 
plutôt  ovale  (0,53  m.  de  haut  sur  0,15  et 
0,17  m.  de  diamètre),  qui  se  compose  de 
six  parties  (plaques)  mobiles,  réunies  par 
des  charnières.  A  l'intérieur,  il  est  doublé 
d'un  cercle  en  fer  qui,  suivant  la  tradition, 
serait  forgé  d'un  clou  de  la  Vraie  Croix, d'où 
ce  nom  curieux  de  Couronne  de  fer  (').  On 
lui  donne  aussi  le  nom  de  Conronne  lombarde, 
en  vertu  de  celte  autre  tradition,  consi- 
gnée dans  les  chroniques,  d'après  laquelle 
elle  serait,  avec  les  autres  richesses  de 
Monza,  un  don  de  la  reine  des  Lombards 
Théodelinde  (fi^  625),  fondatrice  de  la  cathé- 
drale de  Monza.  La  tradition  assure,  en 
outre,  que  cette  reine  reçut,  à  titre  de  pré- 
sent, différentes  saintetés  (sic)  du  pape  Gré- 
goire le  Grand  qui, lorsqu'il  était  encore  légat 
du  pape  Pelage  H,  les  avait  reçues,  de  son 
côté,  de  l'empereur  grec  Constantin  Tibère. 

1.  «  Elle  est  conservée  dans  une  chapelle  de  la  cathé- 
drale de  Monza,  près  Milan  ;  on  la  garde  d.ins  un  reli- 
quaire spécial  du  XVI 11°  siècle.  Muratori  et  Frisi  en 
donnent  une  reproduction  inexacte  ;  la  chromolithogra- 
phie de  Fr.  Bock  est  assez  bonne  (voyez  son  ouvrage  : 
Klcinodien  des  Hciligcn  Roinischcn  Reiches  Dcutscher  Na- 
tion. Wien,  1SS4,  gr.  in-fol.,  planche  XXXI II,  49.  > 

2.  <  D'après  Bock,  l'expression  corona  ferrca  apparaît 
pour  la  première  fois  dans  une  chronique  de  la  fin  du 
XIII'  siècle.  » 


îLa  Couronne  tie  fer,  au  trésor  tie  £©on3a. 


23 


Labarte  se  borne  à  montrer  l'analogie  de 
cette  couronne  avec  celle  qui  figure  dans  un 
bas-relief  au-dessus  de  la  porte  d'entrée  de 
la  même  cathédrale  (bas-relief  qu'il  attri- 
bue d'ailleurs  faussement  au  VI^  siècle),  et 
il  est  convaincu  de  cette  haute  ancienneté 
de  la  couronne  qui  nous  occupe.  Fr.  Bock 
fait  observer,  non  sans  raison,  que  le  petit 
diamètre  laisserait  supposer  plutôt  un  ex- 
voto  qu'une  véritable  couronne  ('),  qui,  tou- 
tefois, ne  daterait  pas  d'avant  le  IX^  siècle, 
et  qui,  selon  toute  probabilité,  provient  de 
la  chapelle  construite  par  le  roi  Bérenger 
(►î<  924)  à  la  collégiale  de  Monza. 

«  Tout  en  admettant  les  principales  idées 
de  Bock,  qui  est  un  profond  connaisseur 
du  moyen  âge,  nous  ne  pouvons  cepen- 
dant partager  son  opinion  sur  un  point.  Ce 
savant  considère  cette  couronne  comme  un 
travail  byzantin,  très  semblable  au  reli- 
quaire grec  de  la  cathédrale  d'Aix-la-Cha- 
pelle ;  nous  croyons,  au  contraire,  en  raison 
de  sa  grande  analogie  avec  le  retable  de 
Milan,  qu'elle  est  d'origine  lombarde.  En 
ce  qui  concerne  le  reliquaire  du  trésor  de  la 
cathédrale  d'Aix,  il  ne  date  que  d'avant  le 
XI^  siècle  et  ne  peut,  comme  nous  le  ver- 
rons plus  loin,  entrer  pour  nous  en  ligne  de 
compte.  L'ornementation  de  cette  couronne 
est  extrêmement  simple,  même  pauvre  ; 
elle  correspond  parfaitement  au  style  lourd 
romano-chrétien  des  VI^  et  VII^  siècles,  tel 
qu'il  domine  dans  les  sculptures  de  Ra- 
venne.  Au  milieu  de  chaque  plaque  de  la  cou- 
ronne brille  un  gros  cabochon  (émeraude, 
améthyste  ou  grenat);  de  là  partent  quatre 

I.  C  Bock  compare  cette  couronne  à  deux  bracelets  {ar- 
millœ)  (fig.  69  et  70)  en  or,  ornés  d'émaux  et  qui  ont  été 
trouvés  en  1730  près  de  Kazan  (voyez  Bayer,  De  duobtis 
diadematibus^  dans  les  Cominentaf  ii  Académies  Petropo- 
litanœ,  t.  VI 11,  1736).  Mais  il  est  probable  que  ces 
deux  cercles  étaient  des  couronnes  votives,  comme  toutes 
celles  du  fameux  trésor  de  Guarrazar,  près  ToIède,offertes 
aux  églises  d'Espagne  par  les  rois  Wisigoths.  » 


rosettes  à  sept  feuilles  ;  leur  dessin  et  leur 
gravure  sur  or  assez  grossiers  rappellent 
les  diptyques  et  les  ouvrages  d'or  barbares. 
De  cette  espèce  sont,  par  exemple  deux 
boucles  d'or  trouvée^s  à  Ravenne  et  qui 
avaient  appartenu  à  une  cuirasse  gothique 
complètement  détruite  {').  Une  sorte  d'en- 
taille qui  termine  les  traits  de  ciselure  rap- 
pelle beaucoup  cette  facture  barbare  que 
l'on  rencontre  depuis  le  V^  jusqu'au  VI I^ 
siècle  dans  toute  la  Russie  méridionale,  sur 
les  bords  du  Danube,  en  Hongrie,  comme 
aussi  dans  l'Italie  du  Nord.  Les  pierres 
fines  sont  serties  dans  de  simples  alvéoles 
ou  chatons  bien  polis,  tout  entourés  de 
branches  de  palmier  ciselées  ou  d'ornements 
pareils  à  ceux  du  reliquaire  d'Herford.Dans 
les  intervalles,  ou  plutôt  sur  le  fond  entre 
les  rosettes,  on  voit  (comme  autant  d'émaux 
de  plique)  de  petites  plaques  aux  bords  sail- 
lants et  repliés  toutes  couvertes  d'émail.  Ces 
plaques  sont  fixées  au  cercle  au  moyen 
de  crochets  spéciaux  [^).  Le  dessin  de  cet 
émail  correspond  aux  rosettes  qui  ont  des 
ramifications  de  perles  (émail  blanc)  ou  de 
lierre  (émail  bleu  clair).  Le  fond  est  vert 
émeraude  translucide.  Les  bandelettes  très 
épaisses  représentent  des  feuilles,  pousses  et 
bourgeons  etse  terminentpardes points  d'or, 
comme  ?,\xx\ç.Paliotlo  de  Milan. Toute  la  fac- 
ture, le  type  général  et  l'extrême  simplicité 
de  ces  émaux  indiquent  qu'ils  sont  du  IX^ 
ou  bien  du  commencement  du  X^  siècle.  L'é- 
mail blanc  sur  fond  émeraude  se  distin- 
gue par  un  ton  assez  criard.  11  n'y  a  d'émail 
bleu  cendré  que  sur  les  baies  ;  partout  ail- 
leurs on  ne  voit  que   l'émail    brun   pourpre 

1.  «  Voyez  Charles  Diehl,  Ravenne,  Paris,  1886,  p.  79. 
Voyez  ibidem  les  rosettes  sur  le  siège  de  l'évêque  Maxi- 
mien, du  VI"  siècle  (p.  151).  » 

2.  «  Il  y  avait  peut-être  en  dessous  des  dessins  ciselés, 
et  ces  petites  plaques  appartiennent  peut-être  au  IX'=  siè- 
cle, tandis  que  le  cercle  lui-même,  beaucoup  plus  ancien, 
n'avait   primitivement  aucune  décoration  d'émail.  » 


24 


Bcbuc  De  ravr  cbvctinu 


ou  écaille,  toujours  transparent.  La  cou- 
ronne de  fer  lombarde  n'a  rien  de  commun 
avec  les  couronnes  impériales,  royales  ou 
ducales:  les  petits  trous,  percés  de  dislance 
en  distance  au  bord  du  bandeau,  prouvent 
d'ailleurs  d'une  manière  irréfutable  que 
nous  sommes  en  présence  d'une  couronne 
votive,  qui  fut  ornée  d'émaux  au  IX'^  siècle, 
à  l'occasion  de  quelque  sainte  relique  con- 
tenue dans  son  intérieur.  Il  n'y  a  du  reste 
aucune  raisoa  pour  mettre  en  doute  cette 
croyance  très  ancienne  que  le  cercle  de  fer 
intérieur  avait  un  sens  sacré  ;  cependant  il 
est  hors  de  doute  que  dans  le  principe  ce 
cercle  avait  été  uniquement  destiné  à  con- 
solider et  à  maintenir  les  plaques  mobiles 
du  bandeau  d'or.  » 

[Hisloirc  et  viomunents  des  émaux  hyzan- 
ti'ns,  par  Kondakow,  Francfort,  1892,  pages 
222-225.) 

M.  Kondakow  donne,  de  grandeur  natu- 


relle, une  bonne  gravure  de  la  couronne  de 
Monza  et  il  ajoute,  en  confirmation  de 
son  opinion,  deux  autres  gravures  des  cou- 
ronnes de  Kazan,  qui  ont  avec  elle  une 
grande  analogie  de  style  et  qui,  comme  elle, 
ont  leurs  plaques  reliées  à  l'intérieur  par 
un  cercle  de  fer. 

Page  86,  il  écrit  :  «  Le  monument  émail- 
lé  translucide  le  plus  ancien  est  \ç. paliotto 
de  l'église  de  St-Ambroise  de  Milan.  Puis 
vient  la  couron  le  de  fer.  »  Et  page  108  : 
«  Le  monument  le  plus  ancien  de  l'émail- 
lerie  cloisonnée  byzantine  qui  porte  une 
date  est  le  paliotto  ou  retable  de  San  Am- 
brogio  de  Milan,  dont  l'inscription  contient 
le  nom  de  l'évêque  Angilbert  (environ  835 

après  Jésus-Christ) Le  dessin  le   plus 

caractéristique  est  celui  des  panneaux Il 

y  a  quelque  chose  d'analogue  sur  la  fameuse 
couronne  de  fer  .» 

Mgr  X.  Bariiif.r  de  Montault. 


i 


A^%<  A^^ViU  >M*.  a'^-*  Jt^-A  *^  *^^  JC^  W^  K^A  A^>A  A^^  A^  ;t^^  A^^  ^ 

-1.-   ~ ■- - .^r-,*»»!.  nrTTTTT  I  I    IITITtT»^ITT-|TT"rT^TTTTTTrirTrTTTTTYTTTTTTT»TTTTTTTTTTTTTrT   f  I  T  I  I  T  1  I  f  T  T  TT  T  T  T~rTT  T  T  T  T  rVTTTm  r^m:  I 


TÏHI-IP'^"  '"^'TTIIl  inCIlJlltJillIIIIllLtlXIIIXlCIXIJIIIXJIJILriJlLIiriTT-rYTTTTTTTyTTTTTTTTTTTTTrT   f  I  T  I  I  T  1  I  f  T  T  yT  T  T  T^rTT  T  T  T  T  rVTTTm  r^m:  I 


Gôsai  sur  la  tiétoration  arc!)ttettoniqtie  ^'\ 


<tziii±i.i2Lii-iiiTr-r^Ti-i'iTiri:TT.ziiii:iJiiiJ.i:ni.iTiTiii:iiiLi-rLni 


nrrirTTTT  fiTriTTTTfTrTTTTryTTiiiii:[TTiiiiixiiiiiii  rii-iiiii:tximn  ciiriTxi:  Ji 


*;i5^  ^Afcl-*  ^i^-^  *i^î^  *Atl^  ^i^-^  ^itl-^  "^"^  ^^"^  *^^  *Aèl-*  ^^^  ^Ai^"'  *Aii-^  ''^^  * 


EPRENONS  la  suite  intein-om- 
pue  des  ornements  végétaux  com- 
binés. Nous  avons   fait  connaître 
la  guirlande,  dont  voici  (fig.  §j) 
un    nouvel    exemple.    Nous   avons   cité    la 


chute,  assemblage  analogue  suspendu  par 
un  bout,  comme  le  montre  la  figure  54,  qui 
n'a  pu  trouver  place  à  la  fin  de  notre 
premier  article. 

Le  rinceau  (v.  plus  haut,  fig.  43)  est  une 


F'g-   53- 

branche  enroulée  et  courante.  Le  rinceau  a 
pris  son  origine  dans  l'art  grec  ;  l'acanthe 
en  a  fourni  les  premiers  emplois.  On  le 
voit  aussi  comme  élément  courant  dans  quel- 
ques frises;  il  se  développe  surtout  dans  les 
frises   romaines  (/ig.   §§).    Il    subsiste    au 


Fig.    54.  —  Chute. 

moyen  âge  comme  à  la  Renaissance,  et 
constitue  un  des  motifs  les  plus  constants, 
les  plus  riches  et  les  plus  aisés  à  déve- 
lopper de  l'art  décoratif. 

I.  Voyez  la  i"  partie,  p.  481,  igoo. 


Uni»'"' Wi, 

^i&'  55-  —   Corniche  du  théâtre  d'Arles. 

La  figure  56  nous  montre  une  bande  de 
bouquets. 

\-! arabesque  (fig.  ^y)  désigne  une  combi- 
naison de  branches  végétales  mêlées  parfois 
de  motifs  vivants  et  d'objets  artificiels.  Ces 

ornements  furent   imités  des      

décorations  sarrasines,  per- 
sanes et  arabes.  Ce  nom  a  été 
donné  assez  improprement 
par  les  traducteurs  deVitruve, 
au  XVI*^  siècle,  aux  motifs 
qui  garnissent  les  frises  et 
montants  des  peintures  gré- 
co-romaines et  les  panneaux 
de  stuc  ;  il  est  appliqué  aux 
mosaïques  byzantines,  où  des 
rinceaux  grecs  à  volutes  alter- 
nent avec  des  vases,  des 
médaillons,  des  bestioles.  A 
la  Renaissance  en  Italie,  ce 
nom  se  confondit  avec  celui 
de  ^r^^é?.y^?^^i' donné  aux  imi- 
tations des  rinceaux  mêlées  de  génies, 
trouvés  dans  les  grottes   d'où    furent    ex- 


Fig.  56. 
Bande  de  bouquets. 


REVUE   DE   L  ART  CHRETIEN. 
igoT.    —    l'"*    LIVRAISON. 


26 


3Re\)ue  lie  T^rt  cbvctien. 


^v.^ 


humées  les  ruines  du  palais  de  Titus  à 
Rome. 

Pabnettes.  —  La  fleur,  dans  son 
mode  en  quelque  sorte  impersonnel 
et  de  convention,  se  présente  encore 
sous  l'allure  de  la  palmette. 

Le  mot  palmette,  en  terme  de 
décoration,  vient  non  de  palmes 
(palniitis),  branche  de  palmier, 
comme  on  le  croit,  mais  àç.  paliua 
(-aXajjiy.),  paume  de  la  main,  et  par 
extension,  main  ouverte. 

En  réalité  ce  terme  s'applique 
surtout  à  des  fleurons,  dont  les 
tifjes  radient  d'un  pied  unique. 

Suivant  son  développement  plus 
ou  moins  grand,  la  palmette  va  de 
la  roue  complète  à  l'éventail,  à  la 
huppe  et  jusqu'à  la  simple  aiguille. 

La  palmette  est  symétriquement 
construite  par  rapport  à  un  axe  ver- 


0  '-i  I 


Pi 

'M 


:Jj!)^\    tical.  Elle  comprend  des  branches 


^'g-57-     dont   les  axes  rayonnent  d'un  cen- 

Tombeau  -v  ^       i       i 

romain  de   tre.   Cc  Centre  peut  être   a  la  base 

de  la  figure  (4)  (Jïg.  S^),   ou  plus 

bas  (2),  ou  plus  haut  que  la  base  (3).  De  là, 

trois  types  de  palmettes  correspondant    à 


Al/ 


aIa 


>     xM//   y.<_  y/-^ 


') 


âié  ê\\  â&  ^^  ^^ 


.Wl, 


1 


10 


11 


iX 


Fig.  58. 

trois    réseaux    différents.    Dans    le    second 
cas  la  palmette  part  d'une  sotuhe  (2). 

Considérons  le  réseau  (i).  Il  donne  di- 
verses variétés  de  types,  selon  que  les  rais 
sont  rectilignes,  ou  à  crosse  enroulée  exté- 


Fig.  59- 


rieurement  (5),  ou  intérieurement  (6),  ou 
courbés,  cintrés  soit  extérieurement  (8),  soit 
intérieurement  (9)  ou  en  S  (7). 

Telles  sont  les    principales  variétés   du 
réseau  simple. 

On  forme  ainsi    six   réseaux  du  premier 
genre  ;   on  en   formerait  six  autres  avec  le 
centre   plus  bas  que   la  base 
(ou  à  souche)  (8  et  9),  et  en- 
core six  avec  le  centre   plus 
haut. 

A  côté  des  palmettes 
doubles  et  symétriques  il  y 
a   des  demi-palmettes  (fig.  60). 

Des  palmettes  plus  complexes  dérivent 
de  la  superposition  de  deux  réseaux  sem- 
blables (10) de  rayons  différents, 
et,  dans  le  décor  peint,  de  cou- 
leurs consonnanles  ou  contras- 
tantes. Si  les  deux  palmettes 
ont  un  nombre  égal  de  rais,  l'effet 
est  plus  sévère;  s'il  est  différent 
(ij),  il  en  résulte  parfois  une 
eurythmie  moins  absolue,  qui 
suffit  à  garder  la  cadence  mais 
donne  plus  de  silhouette  à  cha- 
cune séparément,  sans  rompre 
le  lien  qui  les  unit.  Cette  sorte 
de  consonnance  est  plus  gaie. 
On  peut  faire  alterner  les  rais 
des  deux  réseaux  (12)  au  lieu 
de  les  superposer. 

Axe.  —  L'axe  est  un  des  rayons  domi- 
nants, mais  pas  autre  chose  que  le  prin- 
cipal des  rayons.  Il  doit 
donc  rester  pareil  aux  au- 
tres, tout  au  plus  être  un 
peu  plus  important,  plus 
riche  ou  plus  développé.  Il 
en  est  de  lui  comme  de  la 
clef  d'une   voûte.    Parfois  Fig.  61. 

on  l'a  constitué  de  la  réu- 
nion de  deux  éléments  latéraux  (fig.  62)^ 


Fie.  60. 


6ssat  0ur  la  décoration  arcl)itectontque. 


27 


ou  bien  on   l'a  quelque  peu  épanoui.  La  li- 
mite de  ce  développement  consiste  à  faire 


Fig.  62. 

de  cet  élément  central  la  fleur  d'une  plante, 
dont  les  autres  rayons  sont  les  feuilles. 


Fig-  63. 

Centre,  —  Le  centre  de   la  palmette  ne 
coïncide   pas  toujours   avec    le    centre    de 


Fig.  G4. 

rayonnement  de  ses  rais.  Dans  le  cas  des 
palmettes  à  souche  il  est  au  milieu  de  la 
souche. 


Le  centre,  où  l'œil  se  porte  naturelle- 
ment, qui  est  le  point  le  plus  en  vue,  est 
souvent  occupé  par  quelque  motif  intéres- 


Fig.  65. 

sant.  Il  est  marqué  par  une  rose,  un  disque, 
un  fer  de  lance  (fig.  ^ç),  une  feuille  (fig.  61), 


Fig.  65. 


67. 


un  culot  (fig.  6j),  un  médaillon,  un  masque 
(fig.  68),  etc. 


Fig.  68.  —  Antéfixe. 


La  souche  peut  être  marquée  par  une 
combinaison  de  volutes  accouplées  (fig-  62 
et  6§)  ou  formée  par  les  rampants  d'un 
fronton,  une  bague,  etc. 


28 


^tWt  te  rart  cbvctieii. 


g  III.  —  OBJETS  ARTIFICIELS. 

Les  œuvres  de  l'homme  sont  introduites 
dans  le  décor  principalement  à  titre  d'aJ- 
tribîits.  Alors  que  les  formes  expressives  et 
symboliques  simples  marquent  le  début  des 
sociétés,  il  semble  que  la  profusion  des  at- 
tributs en  caractérise  la  décadence.  L'art 
des  belles  époques  cherche  plutôt  à  accuser 
la  perfection  de  la  forme  et  à  faire  jaillir 
de  l'œuvre  elle-même  sa  vertu  et  l'impres- 
sion qu'elle  doit  produire  sans  avoir  re- 
cours à  la  voie  détournée  des  emblèmes.  La 
profusion  de  ces  emblèmes  et  leur  emploi 
comme  pur  décor  se  voit  aux  plus  mauvaises 
époques  de  l'art;  les  Romains,  peuple  fas- 
tueux et  peu  artiste,  les  prodiguent  comme 
les   Français    des    deux    derniers    siècles, 


Fig.  70. 
Baguette  à  ruban. 


Fig.   6g.    —    Ruban  ou  spirale. 

qui  les  groupent  en  trophées 
et  en  remplissent  les  pan- 
neaux. Après  les  grandes  con- 
quêtes, sous  les  Césars  et 
sous  Louis  XIV,  ce  ne  sont  qu'emblèmes 
de  la  guerre  et  de  la  victoire  :  casques, 
épées,  boucliers,  quadriges,  palmes  et  cou- 
ronnes, couvrent  les  arcs  de  triomphe  et 
les  portiques  des  édifices. 

Le  moyen  âge,  comme  l'époque  grecque, 
s'en  montre  avare.  Les  martyrs  sont  figurés 
avec  leurs  palmes,  les  souverains  avec  leurs 
couronnes,  les  saints  avec  leur  «  caracté- 
ristique »  iconographique,  etc.,  mais  les 
emblèmes  isolés  ne  se  promènent  point  par- 
tout sur  les  murs. 

La  renaissance  italienne  reprend  tous 
les  oripeaux  antiques  et  mêle  aux  attributs 
païens  les  pièces  du  mobilier  liturgique  et 
du  costume  sacerdotal. 


En  France  les  attributs  et  les  trophées 
font  leur  entrée  sous  Henri  II  et  enva- 
hissent sous  Louis  XIV  tous  les  édifices  ; 
avec  les  amours  apparaissent  les  arcs,  les 
carquois,  les  cornes  d'abondance,  les  flam- 
beaux, les  instruments  de  musique  et  des 
arts  :  lyre  et  clairon,  palette  et  chevalet, 
maillets  et  ciseaux,  livres  et  rouleaux,  torses 
et  masques,  équerres  et  compas,  fil  à  plomb 
et  plans  déroulés,  tables  et  balances,  etc. 

L'attribut  nous  inonde.  Les  corps  de 
métier,  les  sciences,  le  droit,  le  commerce, 
l'agriculture,  les  beaux-arts,  nous  offrent  à 
l'envi  leurs  emblèmes,  qui  deviennent  trop 
souvent  des  énigmes,  et  leurs  groupements, 
des  rébus  incompris  (i). 


j,,! :ni;nil»il0Mlll««il|«}i;!M*:'g|3i:iliJM 


Fig.  71. 

Parmi  les  produits  de  l'industrie  humaine 
qui  ont  fourni  au  décor  des  types  (nulle- 
ment emblématiques  d'ailleurs),  citons  d'a- 
bord comme  un  des  plus  simples  le  ru- 
ban (fig.  6g).  Les  moulures  antiques  com- 
portent des  baguettes  à  ruban  (fig.  jo).  On 
dit:  un  fût  de  colonne  rnbannée;  les  bouquets 
sont  liés  avec  des  rubans  (fig.  yi). 

Le  ruban  s'enroule  en  spire  sur  des 
baguettes  et  des  tores  (fig.  jo)  ;  il  se  replie 
en  nœud  aux  points  d'attache  des  guir- 
landes (fig.  53). 

Les  bandelettes  sont  de  larges  rubans, 
qui  servent  à  rattacher  les  guirlandes,  à 
serrer  la  tête  des  bucranes,  etc. 

Quand  le  ruban  est  lui-même  orné,  il 
prend  le  nom  de  galon  ;  le  galon  est  sou- 
vent garni  de  perles  (fig.  J2). 

I .  V. G.  Guicestre,  Encyclopédie  ifarchitectuie,\.  1 1, p. 92. 


€Q&ai  sur  la  tiécoration  arcl)itectoiuque. 


29 


Les  galons,  dans  le  décor,  forment  ordi- 
nairement des  entrelacs,  qui  abondent  dans 
le  style  romano-byzantin  (JΣ:  jy  et  /2). 

La  cordelière,  lien  banal  du  décor,  est 
employée  ici  (fig.  yj),  comme  attribut  hip- 
pique, parfois  comme 
emblème  du  veuvage  ; 
c'est  à  ce  dernier  titre 
qu'elle  sert  d'emblème  à 
Anne  de  Bretagne. 

La  torsade  est  l'imita- 
tion   d'un  double  câble 

Fig.  72.—  Galon  perlé  et    tCndu   (fig,    'J4). 
entrelacé.  T  a  ;  / 

Le  cable  est  une  mou- 
lure à  baguette  ornée  de  saillies  imitant  les 
torons  de  la  corde. 

La  tresse,  l'image  de  deux  mèches  de 
cheveux    croisées,    est  un    motif  décoratif 


Fig.  73.  —  La  frise  en  grès  éraaillé. 

essentiellement  oriental  ;  cette  décoration 
provient  de  Ninive  ;  elle  a  été  propagée  en 
Occident  au  temps  des  croisades.  Au  moyen 


Fig.   74.  —  Câble. 

âge  la  tresse  est  employée  dans  le  décor  des 
manuscrits. 

Les  tctes  de  clou  constituent  l'élément 
bien  modeste  d'un  ornement  employé  avec 
beaucoup  de  succès  par  les  romans,  dans 
des  décors  inspirés  de  la  charpenterie  ;  par- 
fois ils  étaient  globuleux  et  ornés. 

Il  en  est  de   même   du  fitscaii.  On  orne 


les  moulures  creuses  d'ornements  dits  fu- 
selés, reproduisant  une  série  de  fuseaux 
de  fileuse  soudés  bout  à  bout. 

Les  matières  précieuses  servant  à  re- 
hausser les  œuvres  d'orfèvrerie  ont  été  imi- 
tées dans  le  décor  architectonique  avec  une 
certaine  prédilection,  à  cause  de  l'idée  de 
noblesse  qui  leur  est  inhérente.  Telles  sont 
\ç.?,  gemmes,  \qs  pierreries,  les  cabochons,  les 
piastres  (fig.  js). 

La  strigile  était  une  sorte  d'étrillé,  à  la- 


Fig.   75.   —   Gemmes,  cabochons. 

nières  de  cuir,  dont  les  athlètes  se  servaient 
pour  essuyer  la  poussière  qui  les  couvrait 
après  la  lutte.  La  ligne  ondulante  de  la 
lanière  donna  l'idée  des  stries  ou  cannelures 
en  S,  figurées,  chez  les  Romains  du  Bas- 
Empire,  sur  des  sarcophages,  sur  les  frises 
des  entablements  (fig.  yô),  etc. 

Le  fiabellnm,  l'éventail  antique,  est  un 
signe  de  respect,  un  attribut  auguste. 

L'artiste  imite  jusqu'aux  constructions 
elles-mêmes  pour  décorer  la  construction. 
C'est  ainsi  que  l'ornement  essentiel  des 
voûtes  mauresques  est  une  sorte  de  petites 
voûtes,  nommées  pendentifs  à  stalactites, 
multipliées  à  l'infini  sous  l'intrados  des  cou- 
poles et  constituant  comme  une  aggloméra- 
tion d'alvéoles, d'un  effet  très  puissant,  (^/v^. 
77.  7Set  7ç.) 

Dans  un  autre  ordre  d'idées  nous  avons 
à  signaler  les  draperies.  On  les  voit  imitées 


30 


3Rcbuc  tie  r^vt  £j)vtticiu 


en  sculptures  sur  les  parois  du  soubassement 
de  la  cathédrale  de  Paris  et  de  celle  de 
Reims  (fig.  So).  Elles  servent  surtout  très 
couramment  comme  motif  de  décor  du  bas 
de  murs  intérieurs  dans  la  décoration  mu- 
rale. 

C'est  une  sorte  de  draperies,  que  la  ser- 
viette imitée  dans  les  panneaux  de  menuise- 
rie  gothique  et  que  l'on  remplace   parfois 


Fig.    76.    —   Entablement  romain.  Frise  à  strigiles. 

par  l'imitation  d'un  parchemin  ou  d'un  cuir. 
La  médaille,  qui  fut  à  l'aurore  de  la  re- 
naissance italienne  un  produit  d'art  fort  cul- 
tivé, devint  en  quelque  sorte  un  commode 
véhicule  des  conceptions  artistiques.  Copiée 
à  l'envi  par  les  sculpteurs, 
les  médailles  engendrèrent 
les  médaillons  qui,  en  mul- 
titude, ornent  les  pan- 
neaux des  façades  de  la 
première  renaissance  dans 
le  Nord  de  l'Italie  et  en 
France  ;et  ce  \ViO\!\{(fig.8i) 

Fig.   77.  -   stalactites  ^^-^^^  ^^^i^^   ^^    désué- 

arabes.  ^ 

tude.  Ce  n'est  pas  qu'il 
fût  inconnu  des  Gothiques,  mais  ceux-ci 
ne  l'employaient  qu'exceptionnellement. 
Toutefois  il  faut  rapprocher  des  médaillons, 
les  ornements  encadrés  dans  un  champ  cir- 
culaire ou  quadrilobé  qui  garnissent  souvent 
les  tympans  de  leurs  arcades  ;  comme  par 
exemple  au  cloître  de  Saint-Jean  des  Vignes 
à  Soissons. 

Le  vase  et  Vurne  jouent  dans   le  décor 


moderne  un  rôle  exagéré  ;  très  souvent  le 
vase  figure  comme  acrotère  à  la  base  des 
pignons  comme  on  le  voit  à  la  cathédrale  de 
Versailles  (//g.  82),  ou  bien  il  surmonte  les 
bahuts   interrompant    les   attiques.    Uurne 


Fig.   78.  Fig.  7g. 

stalactites. 

funéraire  est  un  emblème  très  expressif  sur 
les  tombeaux.  La  torche  (fax)  (fig.  8j)  sym- 
bolise fréquemment  la  lumière  intellec- 
tuelle. La  lampe  (fig.  Sj),  le  candélabre 
(fig.  Sj),  peuvent  avoir  un  sens  analogue. 


Fig.  80.  —  Reims,  détail  du  grand  portail  de  la  cathédrale. 

La  panse  du  vase,  les  moulures  annelées 
du  candélabre  se  retrouvent  dans  une  mul- 
titude d'organes  d'architecture  (fig.  86)^ 
depuis  le  grand  porte-mât  de  la  place  St- 
Marc    de    Venise  jusqu'au    plus    modeste 


essai  sur  la  tiécoration  arcl)ttrctoiuque. 


31 


montant  de  rampe  d'escalier;  on  les  retrouve 
dans  les  colonnettes  de  la  Renaissance 
(fig.  102),  les  pieds  de  table,  etc. 


Fîg.  81.  —  Médaillon. 

Notons  encore  les  treilles  qui  garnissent 
les  fonds  et  les  faisceaux  (fig.  84),  bottes 


Fig.  83. 


Fig.  84. 


de  baguettes  liées  par  une  courroie,   qu'on 
portait  devant  les  magistrats  romains. 

Les  paroles  attri- 
buées aux  person- 
nages dans  les  com- 
positions symboli- 
ques du  moyen  âge 
sont  souvent  inscri- 
tes sur  des  bandero- 
les placées  près  des 
lèvres  ;  d'une  ma- 
nière moins  naïve 
on  met  aussi  dans 
leurs  mains  un  phy- 
ladère  portant  le 
texte  qui  leur  est 
attribué.  Parfois  en- 


Fig.  85. 


fin  des  inscriptions  explicatives  d'un  sujet 
Bottent  ou  se  déroulent  d'une  manière  orne- 
mentale autour  de  l'objet  à  expliquer  (fig. 
88,  8ç),  ou  s'inscrivent  dans  des  médaillons 
(fig.  ço)  ou  des  panneaux  (fig.  çi ).  Le  bla- 


son a  de  même  employé  la  banderole  pour 
y  marquer  des  devises,  des  cris  de  guerre, 
etc.    Quand  elle  est    utilisée    comme    pur 


Candélabres. 


Fig.  87.  —  Torche. 


ornement,  plissée,  contournée,  ondulée,  par- 
fois échancrée,  la  banderole  se  confond  avec 
le  ruban  et  avec  la  courroie  (fig.  çj). 


V\c.    88.  —  Banderole  ou  phylactère. 

Panneaux.  —  Dans  l'antiquité  les  ins- 
criptions lapidaires  étaient  logées  très  sou- 
vent dans  des  registres  rectangulaires  tra- 
ditionnellement encadrés  d'une  moulure  à 


Banderoles. 


Fig.  90. 


Cl  ossettes  rappelant  le  chambranle  des  baies 
ou  garnis  de  deux  appendices  en  queue  d'a- 
ronde.  Cette  forme  semble  consacrée  soit 
pour  les  plaques  de  pierre  ou  de  métal,  soit 
pour  les  écriteauxportés  au  bout  d'une  hasle. 
Lesuns  disent  que  ce  sont  des  tenons  à  l'aide 
desquels  la  plaque  était  scellée,  d'autres,  que 


l^tWt  ïje  rSvt  cljvctten. 


ces  ajoutes   rappellent   la  hache  du  licteur 

portée  à  titre  d'insigne  du  pouvoir. 

Parfois  encore  le  cadre  était   agrémenté 

de  deux  paires  de  volutes. 

L'espace   mis  en  évidence  et  destiné  à 

recevoirune  inscription  ou  un  attribut  prend 
surtout  la  forme  du  cartouche 
ou  cartel,  qui  est  un  panneau 
de  forme  variée,  générale- 
ment ovale,  dont  \ç.  champ  est 
plane  ou  bombé.  Chez  les 
Égyptiens  le  cartouche  était 
dessiné  par  un  ovale  encadré 
dans  un  roseau  et  placé  dans 
le  sens  vertical  ;  chez  les 
'g-  91-  Grecs,  c'était  un  dessin  imité 

du  bouclier;  chez  les  Romains,  il  affectait  la 

forme  de  la  table  dont  nous  avons  parlé  ; 

chez  lesByzantins,  c'était  une  bande  horizon- 


tale encadrée  d'un  galon  entrelacé  et  sans 
fin,  tourné  circulairement  à  son  bout.  Au 
moyen  âge,  c'est  un  disque,  un  quatre-feuil- 
les  (Jig.  Ç2),  ou  plus  souvent  il  se  confond 
avec  l'écu.  A  la  Renaissance,  le  cadre  du 
cartouche   imite  une   pièce  de  cuir  découpé 


Fia 


Panneau. 


(fig.  ç§),  avec  des  échancrures  et  des  bords 
contournés,  enroulés,  rappelant  la  targe 
des  tournois  exposée  au  soleil  et  gauchie. 
Le  nom  lui-même  du  cartouche,  dérivé  de 
cartuccio,  signifie  cuir  roulé  et  tortillé  (fig. 
ç6).  Les  découpures  engendrent  de  vraies 


Fig.    93.  —  Panneau  entouré  de  lanières. 


lanières  entrecroisées  (fig-  ç6);  les  enroule- 
ments prennent  parfois  l'allure  de  volutes  ; 
les  cuirs  sont  modelés  et  garnis  d'ornements 


Fig.  94.  Fig.  93. 

Cartouches. 

agrémentés  de  figures,  doublés  d'un  cartel 
en  arrière-plan.  En  Allemagne  et  en  Flan- 
dre  les   formes  sont  découpées    à  l'excès, 


véritablement  déchiquetées.  Finalement  le 


Fig.  96.  Fig.  97. 

Cartouches. 

champ  se  bombe,  se  bossue  jusqu'à  imiter 


€ssat  sur  la  Décoration  arcl)ttectomque. 


33 


un  globe   (fig.    çy).    Sous    Louis  XIV   les 


Fig.  9S. 
formes   architecturales  se  greffent  au    car- 
touche ;  les    moulures 
et   les   volutes  classi- 
ques, les  acanthes   et 
les  écailles,  les  chutes, 
les  palmes,  les  rubans, 
les  aigrettes,  les  mas- 
ques s'y  ajoutent.  L'é- 
poque Louis  XV  voit 
éclore  des  cartouches 
rocaille,  dissymétriques, 
aux    courbes     tourmen- 
tées. Le  cartouche  oublie 
sa  fonction,  qui  est  celle 
d'un  cadre  et  devient  un 
pur  ornement  au  champ 
vide;  on  en  a  fait  jusqu'à 
des  pieds  de  table. 

Parmi  les  ornements 
tirés  des  armes  et  armu- 
res, le  bouclier  est  un  des 
plus  usités  parmi  les  plus 
nobles.  Il  est  souvent 
rond  dans  les  monu- 
ments grecs  (Jio-.  55^, 
parfois  allongé  comme 
celui  qui  a  donné  nais- 
sance à  Véc7i.  \J uinbo  est 

Fig.   100. -Rinceau  et  écus.     UU       CÔne       OCCUpant       Ic 

centre   du  bouclier  ;    cette  partie  centrale, 


dans  les  armes  de  parade,  était  ornée  d'un 
motif  spécial,  tel  qu'une  tête  de  Méduse. 

De  \écu  dérivent   les   armoiries  propre- 
ment   dites,   avec  tous    leurs    accessoires. 


Fig.    loi.   — Écu  avec  cimier  et  lambrequins. 

meubles  héraldiques,  portants  {fig.  102), 
cimiers  (fig  loi ),  lambrequins,  etc.,  pour 
lesquels  nous  nous  contenterons  de  ren- 
voyer aux  traités  spéciaux. 

Insistons  cependant  sur  le  parti  que  tire 

JllLIIIi: I   .1     .       \\\\     r      ...     I     '    ;    li-t-ll    1  i|il^3w"-'l     l 


Fig.   102.  —  Écu  couronné  et  portants, 
(Hôtel  des  princes  de  Longueville  à  Neucliatel. 

l'architecture  de  cet  ornement  expressif  au 
plus  haut  point. 

Un  accessoire  important  de  l'écu  est  le 
heaume  avec  son  lambrequin  (fig.  loi  et 
/07), c'est-à-dire  la  coiffe  de  cuir  qui  recouvre 
le  heaume  et  dont  les  décorateurs  anciens 


KKVUe    DE    L  ART    CHRËTIEN. 
1901.    —    I^^    LIVRAISON. 


34 


Bcbuc  ïjc  ra^vt  cbrctten. 


ont  eu  le  talent  de  développer  d'une  manière 
admirable  le  bord  festonné.  Par  une  exten- 
sion tout  artistique,  ils  ont  donné  à  ce  feston 
ou  lambrequin  plus  d'importance  qu'à  l'objet 
lui-même  et  ses  festons  ont  été  transformés 
en  bandes  redentées.contournées,  enroulées, 


Fig.  103.  —  Écu  avec  cimier. 
(Jouée  de  stalle  à  Heinsberg.) 

feuillagées,  se  ramifiant,  se  répondant  dans 
le  champ  réservé  aux  armoiries  à  l'instar 
d'un  ornement  végétal. 

Le  bouclier  était  chez  les  Grecs  un  simple 
disque;  \^\pelte  des  Romains  était  elliptique 
avec  deux  échancrures  demi  circulaires;  il  a 


Fig.  loç. 


Mutule  à  pelte. 


donné  lieu   à  un  ornement   classique  très 
usité  reproduit  ci  dessus  (fig.  104  et  JO§). 

Le  trophée  est  un  assemblage  pittoresque 
d'armes  disposées  avec  art  de  manière  à 
garnir  un  panneau.  Le  trophée  monumental 
est  l'imitation  d'un  assemblage  décoratif 
d'armes  ou  attributs  divers  (Jig.  106)  grou- 


pés dans  un  panneau.  Les  Romains  ornè- 
rent leurs  arcs  de  triomphe  de  trophées  de 
bronze  et  de  marbre.  Le  pilastre  composite 


Fig.  106.  —  Trophée. 

de  l'arc  dit  des  orfèvres  à  Rome  était  orné 
de  trophées  comprenant  une  «  chute  »  d'ai- 
gles, de  casques,  de   cuirasses,  de  carquois. 


Fig.  107. 

etc.  Remarquables  sont  les  trophées  en  bas- 
relief  du  piédestal  de  la  colonne  Trajane. 
Au  moyen  âge  le  trophée  fut  remplacé  par 
les  éléments  du  blason.  Ce  n'est  qu'à  partir 


(!B00at  sur  la  Décoration  arcl)(tectontquc. 


35 


d'Henri  IV  que  les  trophées  sont  en  hon- 
neur en  France.  Casques  et  cuirasses  imités 
de  l'antique  fournissent  de  vigoureuses 
silhouettes  aux  Lemercier,  aux  Mansart, 
aux  Lepautre.  On  voit  un  beau  type  de 
trophée  à  la  porte  de  Saint- Denis.  Le 
siècle  des  t''ophées  est  naturellement  celui 
de  Louis  XIV  ('). 

Les  rostres,  imitation  ornementale  d'une 
proue  antique  avec  éperon  constituent  le 
principal  emblème  naval.  Les  colonnes  ros- 
trales  sont  celles  qui  sont  ornées  d'éperons. 

Les  couronnes  interviennent  fréquemment 
dans  les  compositions  héraldiques  et  symbo- 
liques. On  distingue  dans  l'antiquité  des 
couronnes  trioviphales,  à  feuilles  de  laurier, 
ovatiles, ornè&s  de  myrte,  ^zz^z^/z^jr,  garnies  de 
feuilles  de  chêne,  obsidionales  ou  couronne 
de  gazon,  navales,  nnirales,  garnies  de  cré- 
neaux et  tourelles,  etc.,  au  moyen  âge, 
celles  des  rois,  des  princes,  des  ducs,  des 
barons,  des  comtes,  des  marquis. 

A  côté  des  ornements  héraldiques  pren- 
nent place  les  sujets  symboliques,  tels  que 
les  monogrammes  et  les  atlributs  person- 
nels, dont   le   nombre  est   infini   (Jig.    iç). 

Dans  l'antiquité,  le  trident,  fourche  à 
trois  dents,  est  l'emblème  de  Neptune,  le 
dieu  des  eaux,  la  talonnière  est  la  chaussure 
ailée  de  Mercure,  dieu  du  commerce.    Le 

I.  V.  E.  Rivoalen,   Eîicyclopcdic  cTarcIiitect.  de  Plavatj 
t.  VI,  p.  659. 


Caducée  à.^?,  Phéniciens  ('),  attribut  du  même 
dieu,  est  en  outre  le  symbole  de  la  paix  ; 
c'est  une  verge  ailée  autour  de  laquelle 
s  enlacent  deux  serpents. 
Apollon  fit  don  à  Mercure 
d'une  verge  de  coudrier  qui 
avait  pour  vertu  de  récon- 
cilier les  hommes  et  avec 
laquelle  Mercure  touche 
les  hommes  ;  il  fit  de  leur 
commerce  leliendu  monde. 
Voici  une  composition 
relative  aux  arts  mécani- 
ques et  marchands  où  l'on 
a  groupé  des  objets  emblé- 
matiques tels  que  l'engre- 
nage, le  balancier  régula- 
teur, l'ancre  etc.,  avec  d'au- 
tres symboles  d'une  ex- 
pression plus  intellectuelle, 
une  paire  d'ailes  rappelant 
la  vitesse  des  transports, 
des  cornes  d'abondance  fai-  ^'S-  'o^- 

sant  allusion  aux  richesses  engendrées  par 
la  navigation  à  vapeur,  le  tout  bien  appro- 
prié à  l'ornementation  d'un  bureau  de  com- 
merce ('). 

(A  suivre.)  L.  C LOQUET. 

1.  V.  Goblet  d'Alviella,  La  Jiiigration  des  symboles. 

2.  Auteur    M.    Enriqiie    Repullès,    d'après    Ragiienet, 
Monographie  d'un  bâliDunt  moderne. 


Fig.  109.  —  Arbre  mystique  des  Assyriens 
en  forme  de  palmette. 


&v  >Ma  a^^  a^x  a^a  a^»>a  :t^»-^  A^v:^  ;t^^  ;t^vU  a^^  a'^a  A^viU  j>^î^  a'^vI^  \^^ 


imTnmxrTTiTxiiiiTi  rrrKiiiiiiitirriTTixTTrrrrrxiiiTiirJiTriiiiiiirriTixiiiiiiiriiiTiiixiiiixiiiiiiiiiririJiririiiiiiirjiiixri 


^    m^^m  Jxà  tat{)ctirale  lie  liaon. 


V^V^^  ^Ail^  ^^^  ^:^-^  ^iiï^  ^S^  ^iiî*  ^itl^  ^i^  *iî^  ^X^^  *ï*J*  ^J*î^  *il^*  *^^ 

I.  —  Origine  De  !a  catbéorale. 


;^^aî:';jïœîiittg 'ORDONNANCE     de 
la   cathédrale  de   Laon 
révèle    un    art    primitif 
dont  cet  édifice  est  une 
des  plus  belles  créations. 
Sa  longue  suite  de  pi- 
j:p3pnH+'«'-i^"M'Wî^   Ijers  et  d'arcs  brisés  qui 
commence   avec   la  nef  pour  finir  au  mur 
droit  qui  termine  le  chœur,  la  coupure  du 
transept  disparaissant  dans  la  perspective, 
rappelle  la  simplicité  pleine  de  grandeur 
des  premiers   monuments   grecs  dont   les 
colonnades  sont  tant  admirées.  On  sent  que 
le  constructeur  de  Notre-Dame  de  Laon, 
comme  tous  les  maîtres  d'un  art  à  son  ori- 
gine, n'avait  en  vue  que  le  ôcau  dans  toute 
sa  pureté,  et  ne  pensait  à  aucune  recherche, 
à  aucune  disposition  visant  à  l'effet.  Si  l'on 
considère   ensuite  la  galerie  qui   surmonte 
ces  grandes  arcades,  le  triforium  qui  vient 
après,  les  hautes   fenêtres  et  la   voûte,    on 
voit  que  tout,  malgré  certaines  dissemblan- 
ces qui  s'effacent  dans  l'ensemble,    s'har- 
monise en  une  telle  justesse  de  proportions, 
que,  par  suite  de  cette  harmonie,  la  voûte 
dont  la  hauteur  ne  dépasse  pas  vingt-quatre 
mètres,  paraît  en   avoir   beaucoup  plus,  la 
longueur    et    la  largeur  du   vaisseau  étant 
calculées   de  façon   à   ne   pas  nuire   à  son 
élancement,    ce    qui    est    capital    dans   les 
églises  gothiques. 

L'e.Ktérieur  de  la  cathédrale,  avec  ses 
quatre  tours  ajourées,  n'est  pas  moins 
saisissant  que  son  intérieur.  Posé  à  l'extré- 
mité d'une  montagne  isolée,  cet  édifice,  vu 
de  loin,  fait  penser  à  l'Acropole  d'Athènes, 
avec  cette  différence  qu'au  lieu  de  dominer 
les  flots   bleus   de  la  mer  Egée,  il  domine 


une  des   plus   belles   plaines  de  la  vieille 
Gaule. 

Ainsi  que  beaucoup  d'autres  cathédrales, 
celle  de   Laon   nous  a  caché   la  date  de  sa 
naissance.  Parlant  d'elle   en    1851,    M.  de 
Caumont  disait  qu'elle  était  un  mystère  en 
pierre.  Aujourd'hui  le   mystère  commence 
à  s'expliquer  et  on  est  certain  que  l'édifice 
date  du  milieu  du  XI I^  siècle,  bien  qu'il  ne 
soit  pas  possible  de  préciser  l'année  de  sa 
fondation.  Quicherat,  il  est  vrai,  lui  donnait 
pour    date  initiale    1170,   mais    M.    l'abbé 
Bouxin(')a  démontré  d'une  façon  très  claire 
que  la  fondation  de  la  cathédrale  remontait 
soit  aux  dernières  années  de  l'épiscopat  de 
Barthélémy  de  Vire,  qui   occupa   le   siège 
de  Laon  de  1113a  1 1  50  ;  soit  à  l'épiscopat 
de   Gautier  de    Saint- Maurice,   qui   siégea 
de  I  I  5  I  à  1 1  55  ;  soit  sûrement  au  commen- 
cement de  l'épiscopat  de   Gautier  de  Mor- 
tagne  qui  siégea  de  i  i  55  à  1 1  74.  Son  suc- 
cesseur Roger  de  Rozoy,  qui  fut  évêque  de 
Laon   de  1174a   1207,    vit   commencer   le 
nouveau   chœur  à   chevet   carré,   qui  rem- 
plaça une  abside  circulaire  élevée  sous  son 
prédécesseur.  D'ailleurs  pour  dater  Notre- 
Dame    de    Laon,     il    existe    un    point    de 
comparaison   d'une   indéniable   valeur  :    ce 
point,    c'est    Notre-Dame    de    Paris.     Or, 
quand   on   compare   les  deux    cathédrales, 
tant  au   point  de  vue  de  la  construction, 
qu'au   point  de   vue  de  l'ornementation,  il 
semble  bien  que  celle  de  Laon  est  d'environ 
dix  ans  plus  ancienne  que  celle  de   Paris. 
Cette   dernière    ayant  été  commencée   en 
1163,   il    en    résulte    que    Notre-Dame   de 
Laon  pourrait  avoir  pour  date  initiale  1153, 
alors  que  siégeait  Gautier  de  Saint-Mau- 

I.   Abbé   Bouxin,  La   catlMrale  de    Notre-Dame    de 
Laon,  i8go. 


3La  catl)éîirale  tie  ilaon. 


37 


rice.  Il  esl  vrai  qu'un  texte  dit  que  Gautier 
de  Mortagiie  vit  commencer  cet  édifice. 
Mais  comme  ce  personnage  faisait  déjà 
partie  du  chapitre  de  Laon  sous  Barthélémy 
de  Vire,  il  put  voir  en  1 153  jeter  les  fonde- 
ments de  la  cathédrale. 

Maintenants!  Notre-Dame  de  Paris  peut 
nous  aider  à  dater  Notre-Dame  de  Laon, 
celle  ci,  à  son  tour,  nous  fait  comprendre 
l'existence  du  croisillon  sud  du  transept  de 
la  cathédrale  de  Soissons,  croisillon  qui  est 
antérieur  au  reste  de  l'édifice.  Nous  avons 
dit,  en  étudiant  ici  cette  cathédrale  ('),  que 
ce  croisillon  fut  l'œuvre  première  de  l'édifice, 
et  que  les  constructeurs,  voulant  ensuite 
donner  à  la  cathédrale  de  plus  grandes 
proportions,  le  raccordèrent  assez  habile- 
ment avec  la  nef  et  le  chœur  plus  élevés 
que  lui.  Toutefois,  malgré  les  explications 
fournies  à  l'appui  de  cette  assertion,  on  pou- 
vait persister  à  trouver  singulier  que  l'on 
eût  commencé  la  cathédrale  par  un  bras  du 
transept.  Eh  bien!  M.  l'abbé  Bouxin  nous 
montre,  avec  sa  science  et  sa  clarté  d'ex- 
position, que  les  parties  les  plus  anciennes 
de  la  cathédrale  de  Laon  sont,  précisément, 
le  transept  et  les  trois  premières  tiavées 
du  chœur  qui  faisaient  partie  de  l'abside 
primitive  remplacée,  au  commencement  du 
XI 11^  siècle,  par  le  chœur  actuel,  ainsi  que 
nous  venons  de  le  dire  ;  et,  selon  nous, 
lorsqu'on  étudie  le  transept,  on  voit  que  le 
croisillon  nord  a  un  caractère  encore  plus 
ancien  que  le  croisillon  sud  et  les  trois 
premières  travées  du  chœur.  Donc  la  ca- 
thédrale de  Laon  a  dû  être  commencée  par 
le  croisillon  nord  du  transept,  et  peu  après, 
lorsque  furent  jetées  les  fondations  de  celle 
de  Soissons,  on  éleva  d'abord  le  croisillon 
sud  de  son  transept.  C'est  ainsi  que  par 
l'étude  comparée  des   édifices,  on   arrive  à 

I.  Revue  de  F  Art  chrétien,  t.  I.X,  6"  livraison,  1898. 


expliquer  des  choses  qui,  à  première  vue, 
paraissaient  inexplicables.  En  résumé  la 
cathédrale  de  Laon  date  de  i  1  53  ou  i  i  55; 
son  transept,  sa  nef  et  son  portail,  sauf  les 
deux  tours,  sont  du  XI I^  siècle;  son  chœur, 
à  part  les  trois  premières  travées,  est  du 
commencement  du  XI 11^  siècle,  ainsi  que 
les  tours  du  portail  ;  et  les  deux  tours  du 
transept  sont  de  peu  d'années  moins  an- 
ciennes que  les  premières.  Ceci  dit,  péné- 
trons dans  l'édifice. 

II.  —  Intérieur  De  la  catbcDrale. 

Nef. 

LA  nef  de  la  cathédrale  est  précédée 
d'un  porche  n'ayant  qu'une  travée,  et 
limité  par  ses  deux  piles.  Cette  travée  est 
soutenue  par  un  grand  arc  très  surbaissé. 
Au  fond  de  la  tribune,  contre  le  mur  inté- 
rieur du  portail,  on  aperçoit  une  galerie 
formée  de  cinq  arcades,  et  au-dessus  la  rose 
brillant  du  plus  vif  éclat. 

Alors  commence  cette  nef  merveilleuse 
formée  de  onze  travées  régulières  qui  cou- 
rent jusqu'aux  piles  du  transept.  Les  piliers 
des  arcades  sont  monocylindriques.  Ils 
portent  alternativement  des  chapiteaux  à 
tailloirs  carrés,  avec  saillie  de  même  forme 
sur  la  partie  regardant  la  nef,  et  des  cha- 
piteaux à  lailloirs  octogonaux.  Leurs  bases 
répondent  à  leurs  chapiteaux  et  sont  alter- 
nativement aussi  carrées  et  octogonales. 
Les  bases  carrées  ont  des  pattes  ou  feuilles 
recourbées  à  leurs  angles.  La  corbeille  de 
tous  les  chapiteaux  est  couverte  de  feuil- 
lages que  nous  essayerons  plus  loin  de 
déterminer.  Les  septième  et  neuvième 
piliers,  à  droite  et  à  gauche,  sont  accom- 
pagnés de  cinq  colonnettes  détachées,  dont 
quatre  s'élèvent  des  angles  de  la  base  aux 
angles  du  tailloir  du  chapiteau  ;  la  cinquième 
est  posée  un  peu  en  saillie  sur  le  milieu  de 
la  face  du  pilier  regardant  la  nef  Ces  colon- 


38 


3Rebue  lie  T^rt  cbrctien. 


Laon.  —  Intérieur  de  la  cathédrale,  nef  et  chœur. 


nettes  sont  annelées.  Cette  disposition  louée 
par  les  uns,  a   été   blâmée  par   les  autres. 


Nous   la  trouvons  gracieuse  en  elle-même, 
et  ne  nuisant  en  rien  à  l'harmonie  de  l'en- 


3La  côtl)éîirale  tie  ilaon. 


39 


semble,  à  la  netteté  des  lignes.  Sur  les 
chapiteaux  carrés  portent  cinq  colonnettes  ; 
et  sur  les  chapiteaux  octogonaux,  trois 
colonnettes,  qui  toutes  s'élèvent  jusqu'à  la 
voûte  pour  recevoir  sur  leurs  petits  chapi- 
teaux les  retombées  de  ses  arcs.  Ces  colon- 
nettes ont  cinq  anneaux  entre  le  chapiteau 
qui  les  supporte  et  la  voûte.  Cela,  croyons- 
nous,  ne  se  voit  pas  ailleurs.  Les  grands 
arcs  qui  surmontent  les  piliers  sont  des  arcs 
brisés  équilatéraux  fort  simples.  Ils  ont  pour 
tout  ornement  un  plat,  un  cavet  et  un  tore. 
On  est  frappé  de  la  ressemblance  de  ces 
arcs  avec  ceux  du  chœur  de  Notre-Dame 
de  Paiis.  Les  arcs  des  cinq  dernières  tra- 
vées, qui  sont  les  plus  proches  du  transept, 
ont  un  peu  moins  de  hauteur  que  ceux  des 
sept  premières  ;  mais  cette  différence  est  si 
petite  qu'il  faut  savoir  qu'elle  existe  pour 
s'en  apercevoir.  Il  est  à  remarquer  que  les 
piliers  accompagnés  de  colonnettes  déta- 
chées font  partie  de  ces  cinq  travées,  évi- 
demment construites  aussitôt  après  le 
transept.  11  y  a  donc  là  certaines  précautions 
prises  en  vue  d'assurer  la  solidité  de  la 
construction,  et  qui  furent  abandonnées 
lorsque  l'architecte,  hésitant  d'abord,  se 
trouva  maître  de  lui-même. 

Au-dessus  des  grandes  arcades  vient  la 
galerie,  large  et  belle,  ayant  deux  élégantes 
arcades  par  travée,  et  rappelant  en  tout 
point  celle  de  Notre-Dame  de  Paris.  Aussi, 
plus  on  étudie  la  cathédrale  de  Laon,  et  plus 
on  est  persuadé  que  le  constructeur  de  la 
cathédrale  parisienne  a  dû  connaître  les 
plans  et  les  dessins  de  cet  édifice,  attendu 
que  de  pareilles  ressemblances  ne  peuvent 
être  l'effet  du  hasard.  Un  triforium,  présen- 
tant trois  petites  arcades  par  section,  règne 
au  dessus  de  la  galerie.  Arrivent  ensuite 
les  hautes  fenêtres  formées,  chacune,  d'une 
seule  verrière. Enfin  s'élève  la  voûte,  svelte 
et  élégante.  Chacune  de  ses  sections  com- 


prend deux  travées  de  la  nef.  Par  suite  de 
cette  disposition,  la  section  a  non  seulement 
ses  deux  arcs  ogives,  et  les  deux  arcs-dou- 
bleaux  qui  l'encadrent,  mais  encore  un 
doubleau  de  recoupement  séparant  les  deux 
parties  ou  travées  de  la  section.  Là  où 
retombent  les  arcs  ogives,  les  doubleaux 
d'encadrement  et  les  formerets  des  fenêtres, 
sont  les  cinq  colonnettes  qui  portent  sur 
les  chapiteaux  carrés  des  piliers,  et  là  où 
retombent  seulement  le  doubleau  de  recou- 
pement et  les  formerets  des  fenêtres,  sont 
les  colonnettes  qui  portent  sur  les  chapi- 
teaux octogonaux  de  ces  mêmes  piliers. 

Cette  nef  a  deux  bas-côtés  dont  la  lar- 
geur n'est  ni  trop  grande  ni  trop  petite. 
Au  XIV'=  siècle  on  fit  à  Laon  comme  dans 
plusieurs  autres  cathédrales,  on  ajouta  des 
chapelles  à  ces  bas-côtés.  A  la  Renaissance 
elles  furent  closes  de  claires  voies  dont 
quelques-unes  ne  sont  pas  sans  mérite. 
Toutefois,  comme  le  style  de  ces  clôtures 
se  trouve  en  désaccord  avec  celui  de  l'édi- 
fice, il  est  heureux  qu'elles  disparaissent  un 
peu  dans  la  perspective. 

Transept. 

Le  transept,  en  harmonie  parfaite,  comme 
largeur  et  comme  hauteur,  avec  la  nef  et 
le  chœur,  a  neuf  travées.  Chaque  croisillon 
en  compte  quatre.  Sur  la  cinquième,  celle 
du  milieu,  s'élève  une  tour  évidée,  de  forme 
carrée,  dite  lanterne,  dont  la  voûte  est 
suspendue  à  40  mètres  du  sol.  Un  collatéral 
contourne  ce  transept  sur  toutes  ses   faces. 

Nous  avons  dit  que  cette  partie  de  la 
cathédrale  était  la  plus  ancienne.  Aussi 
présente-t-elle  encore  l'arc  plein  cintre  mêlé 
à  l'arc  brisé.  Le  transept  de  Laon  fait  pen- 
ser à  la  cathédrale  de  Noyon.  Quand  on 
étudie  les  monuments  de  la  période  de 
transition,  il  semble  bien  que  les  construc- 
teurs romans  ont  gardé  le   plus  lontemps 


40 


3Rcbur  De  rSrt  cljvcticu. 


possible  l'ancienne  tradition.  En  effet,  leur 
action  se  retrouve  avec  persistance  dans 
la  forme  des  arcs  et  dans  l'ornementation. 
Il  en  est  ainsi  à  Laon.  Les  deux  pre- 
mières travées  de  chaque  croisillon  du 
transept,  ont  l'arc  brisé  aux  grandes  arcades 
et  aux  voûtes,  mais  l'arc  plein  cintre  à  la 
galerie,   au   triforium   et    aux  fenêtres  ;  les 


autres  travées  ont  l'arc  brisé  partout.  Sur 
chacune  des  travées,  placées  aux  deux 
extrémités  est  du  transept,  s'ouvre  une  jolie 
chapelle  construite  en  hémicycle.  Cette 
chapelle  se  répète  dans  la  galerie.  La  lan- 
terne a  une  galerie  intérieure  comptant 
vingt-quatre  arcades,  c'est-à-dire  six  par 
côté.  Huit  fenêtres,  deux  par  côté,  éclairent 


Laon. 


Intérieur  de  la  cathédrale,   chœur  et  nef. 


la  lanterne  au-dessus  des  arcades.  La  voûte 
présente  huit  nervures  réunies  à  leur  som- 
met par  une  clef  ornée  de  feuillage.  Quatre 
de  ces  nervures  retombent  sur  des  colonnet- 
tes  élevées  au  milieu  de  chaque  face  de  la 
lanterne,  entre  les  fenêtres,  et  supportées 
par  des  figures.  Les  quatre  autres,  qui  sont 
les   nervures   d'angle,    retombent    sur    des 


colonnettes  faisant  partie  des  piles  du  tran- 
sept et  du  chœur. Ces  colonnettes  qui  parient 
du  sol  et  s'élancent  d'un  seul  jet  jusqu'à  la 
voûte  sont  admirables  de  grâce  et  de  har- 
diesse. On  a  souvent  dit  que  la  tour  carrée 
placée  sur  le  milieu  du  transept,  était  un  des 
caractères  particuliers  du  gothiquenormand. 
La  tour  carrée  de  Laon  nous  montre  qu'il  ne 


3La  catl)éDrale  de  JLaon, 


4' 


faut  pas  prendre  cette  assertion  trop  à  la 

lettre,  vu  qu'elle  est  à  peu  près  du   même 

temps   que  celle  de   Lisieux.  En    réalité,  à 

chacune  de   ses   périodes,    le  gothique    ne 

diffère  guère  d'une  province  à  l'autre. 

Au-dessus  de  la  porte  du  croisillon  nord, 

existe  un  rang  de  fenêtres  que  surmonte  une 

fort  belle  rose  du  XI 1^  siècle,  et  au-dessus 

de   la   porte  du   croisillon  sud  on  voit  une 

haute  et  large  fenêtre  du  XIV"  siècle,  sur 

laquelle  sont  jetés   des  trèfles,  des  quatre- 

feuiiles,  des  roses,  le  tout  ajouré  et  du  plus 

riche  dessin. 

Chœur. 

Le  choeur  de  la  cathédrale  présente, 
sauf  pour  le  chevet,  l'ordonnance  de  la  nef. 

Les  trois  premières  travées  formaient  la 
partie  droite  du  chœur  primitif  dont  la 
partie  circulaire  fut  démolie  au  XI 11*^  siècle 
pour  faire  place  à  sept  travées  qui  vinrent 
s'ajouter  aux  trois  premières,  pour  finir  au 
mur  droit  qui  termine  l'édifice.  Selon  M. 
Anthyme  Saint-Paul  ('),  ce  travail  s'exécuta 
entre  12 15  et  1225  environ.  La  conserva- 
tion de  ces  trois  travées  n'est  pas  douteuse, 
car  le  socle  du  3^  pilier  de  droite,  et  celui 
du  3<=  pilier  de  gauche  ont  une  légère  flexion 
qui  indique  que  la  courbe  de  l'abside  com- 
mençait à  ces  piliers.  Les  vestiges  de  cette 
courbe  ont  été  retrouvés.  Ils  décrivent  un 
demi-cercle  qui,  partant  des  deux  piliers, 
s'arrondit  jusqu'à  la  6'  travée  actuelle.  Le 
chœur  a  donc  dix  travées  rectilignes,  faisant 
suite  à  celles  de  la  nef,  et  formant  avec  le 
mur  droit  un  magnifique  carré  de  pierre.  Ce 
mur  est  percé  de  trois  immenses  lancettes, 
qui  en  occupent  toute  la  largeur  et  qui 
montent  jusqu'au  petit  triforium.  Elles  sont 
encadrées  par  trois  arcades  dont  les  arcs 
brisés  retombent  sur  les  chapiteaux  de 
minces  colonnettes  partant  du  sol  et  s'éle- 

I.  Anthyme  Saint-Paul.    Laon.    Dictionnaire   géogra- 
phique de  la  France  de  A.  Joanne. 


vant,  d'un  seul  jet,  jusqu'à  ces  arcs.  Les 
arcades  ont  une  épaisseur  très  prononcée 
qui  leur  donne  de  la  solidité  et  leur  permet 
de  soutenir  la  partie  supérieure  du  mur 
occupée  par  une  superbe  rose  qui  regarde 
à  cent  onze  mètres  de  distance  celle  du 
grand  portail,  dont  elle  reproduit  le  dessin. 
La  saillie  des  arcades,  à  la  base  de  la  rose, 
forme  un  passage  naturel  faisant  communi- 
quer les  deux  parties  du  triforium.  Ce 
chevet  plat  de  Laon  est  certainement  le 
plus  beau  qui  existe  ;  il  a  une  originalité 
indiscutable.  Une  disposition  du  chœur  de 
Laon  qui,  peut-être,  n'a  pas  été  assez 
remarquée,  c'est  que  les  bases  de  ses  piliers 
reposent  sur  un  socle  continu,  en  suréléva- 
tion du  sol  des  collatéraux,  ce  qui  donne  à 
la  construction  un  aspect  de  force  semblable 
à  celui  des  monuments  antiques.  Six  chapi- 
teaux de  la  construction  primitive  ont  été 
réemployés  au  XIII"  siècle,  et  couronnent 
les  piliers  des  4^  5'=  et  6'  travées.  Ceux  des 
7^  8^  et  9'  travées  sont  bien  du  XI I  L  siècle, 
de  sorte  que  sur  les  dix-huit  piliers  mono- 
cylindriques du  chœur,  douze  ont  des 
chapiteaux  du  XI L  siècle,  et  six  des  chapi- 
teaux du  XI I  Y. 

Les  collatéraux  de  cette  partie  de  l'édifice 
vont  jusqu'au  mur  droit  du  chevet,  mais  la 
dernière  travée  du  chœur  n'étant  pas  prise 
par  le  sanctuaire,  il  en  résulte  que  cette 
travée  est  libre  et  permet  de  passer  derrière 
le  sanctuaire,  comme  dans  les  édifices  à 
absides  circulaires.  Ces  collatéraux  ont  des 
chapelles  dont  les  clôtures  sont  semblables 
à  celles  de  la  nef.  Toutefois  au  départ  des 
collatéraux,  les  chapelles  ordinaires  sont 
remplacées  par  deux  grandes  salles  à  deux 
travées,  qui  vont  rejoindre,  dans  la  lon- 
gueur du  transept,  les  deux  chapelles  en 
hémicycle  qui  le  terminent. 

La  cathédrale  est  magnifiquement  éclai- 


REVUE   DE   L  ART  CHRÉTIEN, 
igOI.    —    l'*^    LIVRAISON. 


42 


ISitWt  lie  ravt  cf)rctieu. 


rée  par  la  rose  du  grand  portail,  les  lancettes 
et  la  rose  du  chevet,  la  rose  dii  portail  nord, 
les  verrières  du  portail  sud,  et  les  fenêtres 
de  la  nef,  des  galeries,  du  chœur,  des 
chapelles, au  nombre  total  de  cent-cinquante! 
La  rose  de  la  grande  façade,  les  lancettes 
et  la  rose  du  chœur,  ainsi  que  la  rose  du 
portail  nord  ont  seules  des  vitraux  de  cou- 
leur. Le  bleu  qui  nous  semble  dominer  dans 
ces  vitraux,  inonde  le  vaisseau  d'une  clarté 
vraiment  céleste.  La  rose  du  portail,  qui 
est   moderne,    mais    fort    belle    cependant. 


chapiteau  de  nénuphai'. 

donne  X^:.  Jugement  dernier  ;  ceW^  du  portail 
nord  les  Arts  libéraux  ;  celle  du  chœur  est 
consacrée  à  la  Glorification  de  la  Vierge, 
et  dans  les  trois  lancettes  qu'elle  surmonte, 
on  voit  :  dans  celle  du  milieu  la  Passion,  la 
Résurrection  et  X  Ascension  du  Saîivetir  ; 
dans  celle  de  droite  le  Martyre  de  saint 
L  tienne,  et  la  légende  de  Théophile,  et  dans 
celle  de  gauche  les  principales  Scènes  de  la 
vie  de  Marie.  Ici  nous  avons  encore  un 
rapprochement  à  faire.  Le  dessin  des  roses 
de  Notre-Dame  de  Laon  a  dû  certainement 


inspirer  celui  des  petites  fenêtres  rondes  ou 
rosaces  qui  existèrent  primitivement  à 
Notre-Dame  de  Paris  audessousde  courtes 
lancettes,  et  qui  furent  supprimées  au 
XII  L'  siècle  quand  on  voulut  allonger  ces 
lancettes.  On  voit  encore  ces  rosaces,  dans 
la  grande  cathédrale,  à  l'intersection  de  la 
nef,  du  transept  et  du  chœur. 

Les  dimensions  principales  de  Notre- 
Dame  de  Laon  sont  : 

Longueur  totale  à  l'intérieur  1 1 1  mètres. 

Largeur  totale,  nef,  bas-côtés  et  chapelles  30  m.  65  c. 
Hauteur  sous  voûte  24  m. 

Hauteur  de  la  lanterne  40  m. 

Tel  est,  rapidement  esquissé,  l'intérieur 
de  la  cathédrale  de  Laon,  et  M.  Cloquet  est 
absolument  dans  le  vrai  lorsqu'il  dit  :  «Que 
«  cet  édifice  crucifère,  magistral  en  ses 
«  lignes  simples  et  pures,  s'imposant  par 
«  ses  nefs  à  étages  et  sa  longue  série  de 
«  piliers,  est  un  des  plus  admirables  monu- 
«  ments  de  l'architecture  française  au 
«  XII'  siècle  ('),  )) 

1 1 1.  —  ertériciir  De  la  catbcDralc. 

Grand  PortaiL 

S'IL  faut  admirer  sans  réserve  l'inté- 
rieur de  Notre-Dame  de  Laon,  et 
l'effet  que  cet  édifice  produit  à  distance,  nous 
disons  nettement  que  son  grand  portail  est 
loin  de  produire  sur  nous  une  pareille  im- 
pression. Villard  de  Honnecourt  a  dit  : 
«J'ai  esté  en  mult  de  tieres  et  aucun  lieu  on- 
ques  tel  tore  ne  vi  come  en  celé  de  Laon.» 
Traduites  en  français  moderne  ces  paroles 
signifient  :  «J'ai  été  en  beaucoup  de  terres, 
et  en  aucun  lieu  je  n'ai  vu  des  tours  comme 
celles  de  la  terre  de  Laon.  »  On  s'est  ap- 
puyé sur  ce  texte  pour  dire  que  la  façade 
de    notre    cathédrale  était    en    tout   point 

I.  Cloquet,  Les  grandes  Cathédrales  du  Monde  catho- 
lii/ue,  p.  148. 


3La  catl)éDrale  tie  Haon. 


43 


remarquable.  A  notre  avis  on  a  eu  tort  : 
d'abord  parce  que  Villard  de  Honnecourt 
ne  parle  que  des  tours  ;  ensuite  parce  que 
si  ces  tours  sont  effectivement  très  belles, 
ainsi  que  la  rose  et  les  fenêtres  qui  l'accom- 
pagnent, la  partie  basse  de  cette  façade 
laisse  beaucoup  à  désirer. 

La  porte  centrale  et  les  deux  portes  laté- 
rales sont  précédées  de  profondes  voussures 
dont  les  parois  restent  lisses  sur  plus  de  la 
moitié  de  leur  profondeur.   Aux   portes   se 
voient  de  secondes  voussures,  décorées  de 
cordons  de  statuettes,  les  tympans  qu'elles 
encadrent,  et    les    grandes   figures  qui   se 
dressent  dans  les  ébrasements.  Les  arcs  des 
premières  voussures   sont  des   arcs  brisés, 
évasés  à  leurs  reins.  Nous  les  avons  déjà  si- 
gnalésauportail  de  Soissons(').Des  frontons 
triangulaires,  mais  très  courts, les  surmontent. 
Or,  la  forme  de  ces  arcs,  l'exiguïté  de  leurs 
frontons  et  les  parties  lisses  des  voussures 
donnent  un  ensemble  lourd,  disgracieux  et 
que  ne  relèvent  pas   les  quatre   clochetons 
posés  entre  les  arcs.  De  tous  les  portails  de 
cathédrales  que  nous  avons  vus,  celui-ci  est 
certainement  le  moins  séduisant.  La  porte 
centrale  et  la  porte  gauche  sont  consacrées 
à  la  Vierge   dont  elles  racontent  toutes  les 
gloires,  depuis  \' Annonciation  jusqu'à  son 
Couronnement  dans  le  ciel.  La  porte  droite 
est  consacrée  au  Christ  et  présente  le  Juge- 
ment dernier.  Nous  n'entrerons  pas  dans  le 
détail  de  cette   sculpture  :   d'abord,   parce 
que  les  sujets  qu'elle  met  sous  les  yeux  des 
fidèles  sont  ceux  que  l'on  trouve  aux  por- 
tails de  toutes  les  cathédrales,  ensuite  parce 
que,ayant  été  presque  complètement  refaite, 
elle  n'a  plus  d'intérêt  archéologique.   Il  faut 
dire  qu'au  moment  où  fut  décidée  la  restau- 
ration   de  la  cathédrale,   le    grand  portail 
était  dans   un  pitoyable  état.  La  tour  du 

I.  Revue  de  l'Art  chrc/ien,  t. XI,  6'  liv.,  1898. 


Nord,  en  particulier,  avait  l'aspect  d'une 
ruine.  Quant  aux  grandes  statues  des  portes, 
elles  n'existaient  plus  ;  et  les  statuettes  des 
voussures  étaient  décapitées.  Une  photo- 
graphie du  portail,  prise  dès  le  commence- 
ment des  travaux, ne  laisse  aucun  doute  à  cet 
égard.  II  fallait  donc  tout  refaire.  Malheureu- 
sement l'inspiration  manquant  à  nos  artistes 
pour  créer  des  figures  originales  dans  le  style 
du  XI  Ile  siècle,  on  s'imagina  de  copier,  en 
les  modifiant  quelque  peu,  certaines  statues 
de  Reims  et  de  Chartres.  Ce  singulier  tra- 
vail n'a  rien  donné  de  bon,  et  le  portail  avec 
son  gothique  du  XIX^  siècle,  est  loin  de 
charmer  le  spectateur.  Derrière  les  frontons 
ou  gables  des  voussures  on  aperçoit  un 
rang  de  fenêtres.  Puis  une  première  frise  de 
feuillage,  courant  dans  toute  la  largeur  de  la 
façade,  en  termine  cette  première  partie. 

Au-dessus  de  la  frise  s'épanouit  la  grande 
rose,  et  de  chaque  côté  de  cette  rose  se 
trouve  une  élégante  lancette.  Il  est  regret- 
table que  rose  et  lancettes  soient  au  fond  de 
voussures  lisses,  profondes,  rappelant  celles 
des  portes,  d'autant  plus  que  les  voussures 
proprement  dites  des  fenêtres  sont  ornées 
de  sculptures  remarquables  qui  ont  échappé 
au  marteau  révolutionnaire.  Dans  la  vous- 
sure de  la  lancette  gauche  il  faut  signaler 
spécialement  dix  statuettes  représentant  les 
Arts  libéraux,  et  dans  celle  de  la  lancette 
droite  la  Création  du  monde  qui  leur  fait 
pendant.  Une  deuxième  frise  de  feuillage 
limite  cette  seconde  partie  du  portail.  En- 
suite vient  une  galerie  formée  de  jolies 
arcades  et  portant  quatre  clochetons.  Elle 
occupe  toute  la  largeur  de  la  façade  et  offre 
cette  particularité  que  la  section  posée  au- 
dessus  de  la  rose  est  plus  élevée  que  les 
sections  posées  au-dessus  des  lancettes. 
Cette  disposition  n'était  pas  déjà  très  heu- 
reuse lorsque,  pour  achever  de  rendre  cette 
galerie    désagréable     à    l'œil,     l'architecte 


44 


3Rebuc  lie  r^^rt  cbiétieu» 


restaurateur  s'est  amusé  à  construire  sur  la 
section  du  milieu,  celle  qui  se  trouve  entre 
les  deux  tours,  une  seconde  galerie,  très 
petite  et  portant  une  statue  de  la  Vierge 
entre  deux  anges.  Cette  adjonction  que  rien 
ne  motivait,  a  eu  pour  unique  résultat  de 
diminuer  la  largeur  du  portail.  Au-dessus 
de  la  première  galerie  s'étend  une  troisième 
frise  de  feuillage,  qui  indique  que  dans  la 
pensée  du  premier  constructeur,   c'était    là 


Chapiteau  de  plantain. 

que  devait  finir  la  troisième  partie  du  por- 
tail. Cette  frise  justifie  notre  critique.  Arri- 
vons aux  tours. 

Ces  tours  .sont  des  chefs-d'œuvre.  A 
partir  du  point  où  elles  se  détachent  de  la 
masse  de  la  façade,  elles  ont  deux  étages. 
L'étage  inférieur  est  sur  plan  carré.  Il  est 
percé  de  chaque  côté  de  deux  lancettes 
géminées  et  llanqué  de  quatre  contreforts 
qui  montent  seulement  jusqu'à  l'étage  supé- 
rieur. Une  petite  frise  souligne  ce  premier 
étage  ou  plutôt  le  couronne.  L'étage  supé- 
rieur est  sur  plan  octogonal.  Chacune  de  ses 
quatre  faces   principales  est   percée  d'une 


lancette,  partant  de  la  petite  frise  qui  vient 
d'être  indiquée,  pour  s'élancer  d'un  seul  jet 
jusqu'à  la  seconde  petite  frise  qui  couronne 
la  tour  au-dessous  de  la  balustrade  termi- 
nale. Ces  lancettes  font  penser  à  celles  que 
nous  avons  admirées  au  clocher  de  Senlis('). 
Les  quatre  autres  côtés,  correspondant  aux 
contreforts  de  l'étage  inférieur,  sont  égale- 
ment percés  de  longues  baies,  mais  devant 
ces  baies  s'élèvent  les  tourelles  à  jour  qui 
font  l'originalité  des  tours.  Ces  tourelles 
se  divisent  elles-mêmes  en  deux  parties 
dans  la  hauteur  de  ce  second  étage.  Les 
arcades  de  la  partie  inférieure  portent  sur 
le  sommet  des  contreforts  du  premier  étage 
de  la  tour,  et  les  arcades  de  la  partie  supé- 
rieure portent  sur  le  petit  entablement 
surmontant  celles  de  la  partie  inférieure. 
Dans  les  tourelles  de  la  partie  supérieure, 
on  aperçoit  des  bœufs  de  taille  colossale, 
huit  pour  chaque  tour,  qui  avancent  leur 
tête  cornue  en  dehors  des  arcades.  Avant 
la  Révolution,  la  tour  droite  avait  sa  flèche; 
nous  le  savons  par  d'anciens  dessins.  Pour- 
quoi cette  flèche  fut-elle  démolie?  Peut-être 
en  vertu  du  principe  de  l'égalité  qui  défen- 
dait à  une  tour  de  dépasser  l'autre.  Les 
hommes  de  i  793,  ceux  que  l'on  appelle  pom- 
peusement les  grands  ancêtres,  étaient  bien 
capables  de  se  laisser  diriger  par  cette  sotte 
idée.  Il  est  certain  que  la  flèche  a  disparu, 
et  c'est  probablement  en  la  démolissant 
que  la  tour  droite  a  été  à  moitié  ruinée. 
Quatre  autres  tours,  placées  dans  les  angles 
du  transept,  devaient,  avec  celle  du  milieu, 
si  elle  avait  été  achevée,  compléter  la  déco- 
ration extérieure  de  la  cathédrale.  De  ces 
quatre  tours,  les  deux  qui  se  trouvent  aux 
angles  de  la  nef  et  du  transept  ont  été  ter- 
minées, les  deux  autres,  posées  aux  angles 
du  transept  et  du  chœur,  ne  dépassent  pas  la 


I.  Revue  lie P Art  chrétien,  t.  I.X,  4=  liv.,  1898. 


3La  catl)éDrale  De  3Laon. 


45 


masse  de  l'édifice.  A  part  des  différences  de 
détail  dans  la  construction,  les  deux  tours 
terminées,  celle  du  Nord,  dite  toiir  Saint- 
Pa7il,  et  celle  du  Midi, dite  tour  de  l' Horloge, 
ont  été  élevées  sur  le  modèle  de  celles  du 
grand  portail.  Elles  les  dépassent  même  en 
hauteur.  Aussi,  quand  on  arrive  le  matin,  par 
un  temps  clair,  au  bas  de  la  montagne  de 
Laon,  et  que  l'on  voit,  à  son  sommet,  se 
dresser  ces  quatre  tours  dont  les  longues 
baies  semblent  tapissées  par  le  bleu  du  ciel, 
on  s'arrête  pour  admirer  ce  tableau  unique. 
On  peut  dire  avec  assurance  que  si  la  cathé- 
drale de  Laon  n'est  pas  un  colosse  qui 
étonne,  elle  est  du  moins  un  édifice  dans 
lequel  l'art  du  moyen  âge  a  déployé  toute 
la  simplicité,  toute  la  grâce  et  toute  la 
délicatesse  de  son    premier   printemps. 

Ici  une  question  se  pose.  Pour  quel  motif 
a-t-on  mis  au  haut  des  tours  de  Notre-Dame 
de  Laon,  comme  à  la  place  d'honneur,  ces 
bœufs  d'un  effet  tout  à  la  fois  si  étrange  et 
si  pittoresque  ?  La  réponse  à  cette  question 
nous  semble  facile,  et  toute  idée  de  sym- 
bolisme ou  de  commémoration  d'un  miracle, 
c'est-à-dire  d'un  fait  particulier,  doit  être 
écartée.  Les  constructeurs  de  la  cathédrale 
en  mettant  à  cette  hauteur  autant  de  bœufs 
que  l'ordonnance  des  tours  le  permettait, 
ont  voulu  témoigner  de  leur  gratitude  en- 
vers ces  bons  et  robustes  animaux  qui, 
pendant  tant  d'années,  les  avaient  aidés  à 
transporter  au  sommet  de  la  montagne  les 
pierres  et  autres  matériaux  nécessaires  à  la 
construction  de  l'édifice;  et  vu  les  difficultés 
énormes  que  présentait  ce  transport,  l'hom- 
mage n'a  rien  d'excessif  Aussi,  est-ce  avec 
la  plus  vive  sympathie  que  du  pavé  de  la 
place  nous  avons  salué  ces  nobles  bêtes. 

Portails  latéraux. 
Le  portail  du  croisillon  nord  du  transept 
offre  un  caractère  archaïque   qui  irappe  au 


premier  abord.  On  comprend  que  l'on  est  là 
en  présence  de  la  partie  la  plus  ancienne  de 
la  cathédrale. On  y  accède  par  un  large  esca- 
lier dont  les  marches  très  peu  hautes  sont 
douces  à  monter.  La  première  partie  du 
portail  se  compose  de  deux  grandes  portes 
semblables,  s'ouvrant  l'une  à  côté  de  l'autre, 
et  divisées,  chacune,  par  un  trumeau.  Leurs 
voussures  sont  simples  et  retombent  sur 
les  chapiteaux  de  minces  colonnettes.  Deux 
arcs  brisés  tracés  sur  leurs  tympans  en  sont 
l'unique  ornement.  Une  frise  de  feuillage 
surmonte  ces  portes.  Puis  viennent  les 
fenêtres  surmontées  d'une  deuxième  frise, 
et  la  belle  rose  dont  il  a  été  question  plus 
haut.  Sur  la  droite  de  la  rose  existe  un 
commencement  de  travail  indiquant  qu'au 
XIV"  siècle  on  voulut  faire  subir  à  ce  por- 
tail une  transformation  semblable  à  celle 
qui  eut  lieu  au  portail  du  croisillon  sud. 
Heureusement  que  des  circonstances  res- 
tées inconnues  ne  permirent  pas  de  réaliser 
ce  projet.  Au-dessus  de  la  rose  court  une 
troisième  frise.  Enfin  ce  beau  portail  se 
termine  par  une  galerie  richement  sculptée 
que  couronne  un  quatrième  cordon  de 
feuillage. 

Le  portail  du  croisillon  sud,  dépouivu 
d'escalier,  est  loin  d'avoir  le  grand  air  du 
précédent.  Cependant  il  a  sa  valeur.  Sa 
première  partie  se  compose,  comme  celle 
du  portail  nord,  de  deux  grandes  portes 
juxtaposées.  Elles  ont  également  des  vous- 
sures simples  retombant  sur  les  chapiteaux 
de  fines  colonnettes.  Sur  ces  voussures  sont 
deux  frontons.  Les  tympans  des  portes 
sont  découpés  à  jour.  Au-dessus  des  portes 
se  trouve  la  haute  et  large  fenêtre  déjà 
décrite.  Ce  portail,  refait  au  XIV'  siècle,  a 
conservé  quelques  vestiges  de  sa  construc- 
tion primitive.  Il  finit  par  une  galerie  dont 
les  arcades  sont  très  élancées. 


46 


3Rebue  îje  r^vt  cljrétieu. 


Chevet. 

Le  chevet  plat  de  la  cathédrale,  soutenu 
à  droite  et  à  gauche  par  de  solides  contre- 
forts, est  fort  pittoresque.  Sa  partie  basse  et 
sa  partie  moyenne  sont  prises  par  les  trois 
grandes  lancettes.  Puis  vient  une  frise  de 
feuillage.  Au-dessus  s'étale  la  rose  et  sur 
cette  rose  est  posée  une  jolie  galerie  limi- 
tée à  ses  extrémités  par  deux  clochetons. 
Le  tout  finit  par  un  pignon  triangulaire  au 
milieu  duquel  existe  une  niche  portant  une 
petite  flèche. 

L'extérieur  de  la  cathédrale,  ainsi  que 
l'on  peut  s'en  rendre  compte  par  ce  simple 


Chapiteau  de  fougère. 

coup  d'œil,  possède  une  grande  originalité. 
Le  côté  sud,  masqué  par  les  bâtiments 
de  l'ancien  cloître  jusqu'à  son  portail,  et 
après  ce  portail  par  des  maisons  particu- 
lières, est  peu  visible  ;  mais  le  côté  nord 
est  dégagé  jusqu'à  son  portail,  et  après 
ce  portail  on  le  voit  bien  de  la  cour  de 
l'ancien  évêché  qui  est  aujourd'hui  le  palais 
de  justice  de  Laon.  Or,  rien  n'est  beau 
comme  cette  longue  file  de  contreforts  et 
d'arcs  boutants  encadrant  symétriquement 


les  hautes  fenêtres  qui  de  loin  semblent 
serrés  les  uns  contre  les  autres.  Ici  encore 
nous  ferons  une  remarque  que  nous  prions 
nos  lecteurs  de  ne  pas  oublier. On  a  souvent 
dit  qu'au  point  de  vue  de  l'esthétique,  les 
contreforts  et  les  arcs  boutants  étaient  le 
côté  défectueux  de  l'architecture  gothique. 
Or,  cette  doctrine  est  absolument  fausse. 
En  effet,  prenez  une  cathédrale,  enlevez- 
lui,  par  la  pensée,  ses  contreforts^  ses  arcs 
boutants,  ses  clochetons,  et  vous  verrez 
quelle  figure  elle  fera  !  Ce  sera  comme  un 
aigle  gigantesque  auquel  vous  aurez  coupé 
les  ailes.  L'aspect  de  la  Sainte-Chapelle  de 
Paris  produit  un  peu  cette  impression.  Le 
plan  de  l'édifice  ne  comportant  pas  de  col- 
latéraux, l'architecte  a  pu  lui  donner  son 
élévation  avec  de  simples  contreforts  ap- 
pliqués aux  murs  de  clôture  et  sans  arcs 
boutants.  Eh  bien  !  nous  le  disons  franche- 
ment, au  risque  de  soulever  des  protesta- 
tions, la  Sainte-Chapelle,  malgré  son  indis- 
cutable beauté,  nous  semble  incomplète,  et 
nous  enlève  moins  que  certaines  églises  de 
campagne  présentant  avec  leurs  collatéraux, 
leurs  contreforts  et  leurs  arcs  boulants  un 
ensemble  parfait. 

IV.  —  XTa  Flore  De  la  catbcDrale. 

LA  flore  de  Notre-  Dame  de  Laon  est  très 
intéressante  à  étudier,  parce  qu'elle  est 
du  commencement  de  la  première  période 
de  la  flore  gothique,  période  dite  de  l'inter- 
prétation. Puis  au  feuillage  de  la  seconde 
moitié  du  XI I"  siècle  et  des  premières 
années  du  XIl  I^  viennent  s'ajouter,  dans  les 
parties  refaites  au  XIV'',  les  feuilles  ondu- 
lées,plissées,de  la  deuxième  période  de  cette 
flore.  Elles  sont  toutefois  peu  nombreuses 
dans  l'intérieur  de  l'édifice  et  disparaissent 
dans  la  masse  du  feuillage  primitif. 

La  flore  de   Laon   est  aussi   très  variée. 


ILa  catl)éDrale  îie  3laon, 


47 


On  y  voit  l'acanthe  aux  dents  pointues  de 
l'époque  purement  romane,  c'est-à-dire  du 
XI"  siècle  ;  l'acanthe  aux  dents  rondes  du 
XI 1°  siècle,  laquelle,  ainsi  que  nous  l'avons 
dit  plusieurs  fois,  paraît  être  un  premier 
essai  de  vigne,  précédant  la  vigne  primor- 
diale et  indiscutable  du  même  siècle.  Pour 
rendre  l'idée  avec  concision,  on  peut  donner 
à  l'acanthe  ronde  le  nom  d'acanthe-vigne. 
Ensuite  viennent  les  plantes  purement 
gothiques  :  le  nénuphar,  le  plantain,  la  fou- 
gère, la  vigne  primordiale  et  le  chêne.  Ce 
dernier  n'apparaît  ici  qu'au  XI V"  siècle. 

Sur  les  chapiteaux  des  gros  piliers  de  la 
nef,  du  transept  et  du  chœur,  on  ne  trouve 
que  du  nénuphar  et  du  plantain.  Un  seul 
chapiteau,  appartenant  au  chœur,  présente 
de  la  fougère.  Ces  feuilles  de  nénuphar  et 
de  plantain  sont  alignées  sur  deux  rangs, 
mais  leur  extrémité  inférieure  n'existe  pas, 
sauf  pour  quelques-unes  seulement.  Cette 
coupure  des  feuilles  a  un  inconvénient,  celui 
de  jeter  le  doute  sur  celles  du  plantain.  En 
effet,  il  est  assez  étrange  que  l'arum,  cette 
feuille  du  gothique  naissant,  qui  existe  à 
Notre-Dame  de  Paris,  n'ait  pas  été  repro- 
duit à  Laon.  Serait-il  confondu  ici  avec  le 
plantain.'*  C'est  peu  probable,  bien  que  l'ex- 
trémité supérieure  des  deux  feuilles  ait  une 
certaine  ressemblance,  surtout  lorsqu'elles 
sont  sculptées.  A  Soissons  ('),  où  la  disposi- 
tion des  feuilles  des  gros  chapiteaux  a  été 
évidemment  copiée  sur  celle  de  Laon,  nous 
nous  sommes  trouvé,  par  suite  de  la  coupure 
des  feuilles,  en  présence  de  la  même  diffi- 
culté.Cette  feuille  pointue  à  trois  ou  quatre 
nervures,  était-elle  une  l'euille  d'arum  ou 
une  feuille  de  plantain  .''  Nous  avons  conclu 
en  faveur  de  l'arum.  A  Laon  nos  hésitations 
ont  redoublé,  mais  étant  donné  que  les  feuil- 
les complètes,  c'est-à-dire  non  coupées,  qui 

I.  Revue  de  l'Art  chrdlien,  t.  IX,  6"=  livraison,  1S9S. 


apparaissent  sur  deux  ou  trois  chapiteaux, 
sont  bien  des  feuilles  de  plantain,  nous  pen- 
sons que  toutes  les  autres  sont  également 
du  plantain. On  peut  ajouter  que  les  artistes 
de  Laon  et  de  Soissons,  qui  étaient  indé- 
pendants, ont  pu  ne  pas  reproduire  l'arum, 
malgré  la  préférence  qu'eurent  pour  lui  les 
sculpteurs  de  l'Ile-de-France  aux  premiers 
jours  du  gothique. 


Chapiteaux  et  iiiice.iu  de  vigne 

On  ne  trouve  pas  sur  les  chapiteaux  de 
Notre-Dame  de  Laon  ces  compositions  si 
savamment  étudiées  qui  se  voient  à  Notre- 
Dame  de  Paris,  ainsi  que  dans  beaucoup 
d'édifices  procédant  de  la  grande  cathédrale. 
Mais,  devant  ces  larges  et  fortes  feuilles  qui 
s'étalent  sur  la  corbeille,  on  sent  que  l'on  est 
là  en  face  d'un  art  nouveau,  art  robuste, 
plein  de  sève  et  de  vie,  qui  donne,  dès  son 
éclosion.des  œuvres  d'une  ampleur  et  d'une 
vigueur  remarquables.il  y  a,  en  effet,  parmi 


48 


Ee\)uc  tjc  r^lvt  djvctien 


les  gros  chapiteaux  de  nénuphar  et  de  plan- 
tain de  Notre-Dame  de  Laon,  plus  d'un 
chef-d'œuvre.  La  sculpture  de  Notre-Dame 
de  Paris  n'est  peut-être,  en  réalité.que  celle 
de  Notre-Dame  de  Laon  arrivée  à  sa  per- 
fection sous  l'incomparable  coup  de  ciseau 
des  artistes  parisiens. 

Dans  la  galerie  et  dans  le  triforium,  on 
aperçoit,  avec  le  nénuphar  et  le  plantain, 
l'acanthe    pointue,    l'acanthe-vigne,  la  fou- 


gère et  la  vigne  primordiale.  La  section  de 
la  galerie  appartenant  au  croisillon  nord  du 
transept,  possède  des  chapiteaux  historiés 
présentant  des  personnages  étranges,  des 
animaux  fantastiques  enlacés  dans  des 
branches  d'acanthe,  sujets  qui  indiquent 
que  ce  croisillon,  ainsi  qu'il  a  été  dit  plus 
haut,  est  bien  la  partie  primitive  de  la 
cathédrale. 

Il  convient   de  dire   ici  qu'il  existe  dans 


Chapiteaux  de  fougère  et  de  vigne. 


l'édifice  un  certain  nombre  de  chapiteaux 
d'acanthe  qui,  eux  aussi,  sont  des  chefs- 
d'œuvre,  ils  sont  disséminés  dans  les  colla- 
téraux de  la  nef,  du  transept,  du  chœur  et 
dans  la  galerie.  La  beauté  de  ces  chapiteaux 
n'a  rien  qui  puisse  surprendre.  Au  moment 
où  fut  construite  la  cathédrale,  la  sculpture 
ornementale  de  l'époque  romane  était 
arrivée  à  son  apogée,  et  dominait  partout. 
Aussi  semble-t-il  que  les  artistes  romans 
ont  lutté  longtemps  avant  de  céder  le  ter- 
rain aux  gothiques  ;    et  il  faut  leur  rendre 


cette  justice, c'est  qu'avec  lafeuille  d'acanthe 
(]ui  fut  presque  la  seule  qu'ils  reproduisirent, 
surtout  dans  le  Nord  de  la  France,  ils  ont 
créé  des  merveilles. 

Et  maintenant  que  dire  de  la  flore  exté- 
rieure du  monument,  ilore  qui  se  compose 
des  feuilles  ou  de  la  plupart  des  feuilles 
déjà  indiquées  ?  Détailler  les  frises  qui 
marquent  les  divisions  des  portails,  les 
rinceaux  qui  encadrent  les  fenêtres  et  qui 
sertissent  les  roses,  toutes  ces  compositions 
d'un  art  qui  est  arrivé   ici   à  son  épanouis- 


5La  catl)éîirale  de  Haon, 


49 


sèment,  nous  entraînerait  trop  loin.  Une 
cathédrale  est  tout  un  monde,  monde  de 
statues,  de  feuillages  surtout,  et  Ion  ne 
s'imagine  pas  ce  qu'il  existe  de  sculpture 
floralesur  Notre- Dame  de  Laon!  Le  tableau 
qui  suit  en  fera  connaître  au  moins  les 
grandes  lignes. 

Les  plantes  désignées  dans  ce  tableau 
comme  formant  crochet  sont  celles  qui  s'en- 
roulent sur  elles-mêmes  à  leur  extrémité 
supérieure,  car  il  n'y  a  pas,  croyons-nous, 
à  Laon,  de  crochet  formé  d'une  plante 
piquée  sur  une  autre.  La  feuille  désignée 
comme  simple,  est  celle  qui  ne  s'enroule 
pas  en  crochet. 

iPâbleau  ûe  la  Pore  De  la  cat^éûrale  ûe  liaon. 

INTÉRIEUR. 

Nef. 
Piliers  de  gauche.  Piliers  de  droite. 

1.  Plantain  formant  cro-  i.  Nénuphar  formant  cro- 
chet à  sa  partie  supé-  chat  à  sa  partie  supé- 
rieure,                                         rieure. 

2.  Plantain   avec    bandes  2.  Nénuphar  simple. 

de  nénuphar  formant 
crochet  à  leur  extré- 
mité. 

3.  Nénuphar  et  plantain.         3.  Plantain  formant  cro- 

chet. 

4.  Plantain  simple  et  4.  Plantain  formant  cro- 
plantain  formant  cro-  chet  et  plantain  simple, 
chet. 

5.  Plantain  simple.  5.   Nénuphar    simple     et 

petites  feuilles  de  plan- 
tain. 

6.  Nénuphar  formant  cro-        6.  Plantain    sur   3   rangs 

chet.  exceptionnellement. 

7.  Nénuphar  formant  cro-  7.  Nénuphar  formant  cro- 
chet, chet. 

8.  Nénuphar  formant  cro-  8.  Nénuphar  simple. 

chet. 

9.  Plantain  simple.  g.  Nénuphar  formant  cro- 

chet. 
10.  Nénuphar  simple.  lo.  Nénuphar  et  plantain. 

Transept. 

Croisillon  gauche.  Croisillon  droit. 

Piliers  dit  côté  de  la  nef.  Piliers  du  côté  de  la  nef. 

1.  Nénuphar  simple  et  i.  Nénuphar  s'enroulant 
nénuphar     s'enroulant  en  arrière. 

en  arrière  ;  plantain. 

2.  Plantain  simple.  2.  Plantain  simple. 


Piliers  du  côté  du  chœur.      Piliers  du  côté  du   chœur. 

1.  Nénuphar  simple.  i.  Nénuphar  simple. 

2.  Nénuphar  en  branche.        2.  Nénuphar  simple. 

Pilier  faisa7ii  face  au  mur      Pilier  faisant  face  au  mur 
de  clôture.  de  clôture. 

Plantain  formant  crochet.      Nénuphar  formant  crochet 

sur  les  cinq  colonnettes. 

Chœur. 

Piliers  de  gauche.  Piliers  de  droite. 

1.  Nénuphar  formant  cro-         i.  Nénuphar  simple  avec 

chet.  bandes    de    nénuphar 

s'enroulant  à  leur  ex- 
trémité. 

2.  Fougère.  2.  Nénuphar  en  branche. 

3.  Nénuphar  simple.  3.  Nénuphar  formant  cro- 

chet. 

4.  Nénuphar    s'enroulant        4.  Nénuphar  simple, 
en  arrière. 

5.  Nénuphar  simple.  5.  Nénuphar  en  branche. 

6.  Plantain  simple.  6.  Plantain  formant  cro- 

chet. 

7.  Plantain  formant   cro-         7.  Plantain   formant  cro- 
chet, chet  et  nénuphar  sim- 
ple. 

8.  Plantain  formant   cro-        8.  Plantain  simpleetplan- 
chet.  tain  formant  crochet. 

9.  Plantain  formant   cro-        9.  Plantain   formant   cro- 
chet, chet  et  nénuphar. 

Chapiteaux  remarquables  en  dehors  des  grandes  lignes 
de  l'édifice  : 

1"  Chapiteaux  d'acanthe-vigne,  de  plantain  et  de 
nénuphar  des  piliers  de  la  chapelle  des  Fonts  dans  le 
collatéral  droit  de  la  nef. 

2"  Chapiteau  d'acanthe-vigne  du  pilier  placé  à  gauche 
de  la  chapelle  du  croisillon  sud  du  transept. 

3°  Chapiteaux  d'acanthe-vigne  et  chapiteaux  de  vigne 
et  de  chêne  du  XIV^  siècle  de  plusieurs  piliers  situés  du 
côté  de  la  nef  dans  le  croisillon  nord  du  transept. 

4°  Chapiteaux  de  fougère  et  de  vigne  du  XI 1"  siècle  du 
pilier  séparant  les  deux  portes  de  ce  même  croisillon 
nord. 

5"  Chapiteaux  historiés  de  plusieurs  colonnettes  de  la 
galerie  du  transept. 

6°  Chapiteaux  d'acanthevigne  et  d'acanthe  pointue  de 
plusieurs  piliers  du  pourtour  du  chœur. 

EXTÉRIEUR. 
Grand   Portail. 


Grands  rinceaux  surmon- 
tant les  trois  portes. 

Frise  courant  au-dessus  des 
portes. 

Rinceau  encerclant  la  rose. 

Rinceaux  encadrant  les 
deux  fenêtres. 


Vigne  du  XI P'  siècle. 

Fougère. 

Fougère. 
Fougère. 


KKVUE    DE    L'aKT    CHUéTIEN. 
1901.     —    I*^^    IIVRAISON. 


50 


Bebue  ïic  rart  cbvctten. 


Grands   rinceaux   surnion-  Fougère, 
tantlaroseet  les  fenêtres. 

Frise  au-dessus  de  la  rose;  Nénuphar  découpé  en  for- 
sous  la  galerie.  me  de  trèfle. 

Frise  au-dessus  de  la  gale-  Même  feuillage. 
rie. 

Cette  sculpture  se  reproduit  sur  les  tours  et  sur  les 
parties  de  la  cathédrale  qui  n'ont  pas  été  refaites  au 
XIV=  siècle. 

Portail  nord. 


Chapiteauxdes  colonnettes 

de  la  porte  droite. 
Chapiteauxdes  colonnettes 
de  la  porte  gauche. 


Acanthe,  vigne  et  fougère. 

Acanthe,  vigne,  fougère  et 
vigne  du  XIV  siècle. 


Cette  sculpture  dont  le  caractère  est  tout  à  fait  ar- 
chaïque vient  encore  confirmer  ce  qui  a  été  dit  sur  l'an- 
cienneté du  croisillon  nord. 

Portail  sud. 


Chapiteaux  des  colonnettes 

de  la  porte  droite. 
Chapiteaux  des  colonnettes 

de  la  porte  gauche. 


Chapiteaux  des  colonnettes 
de  la  tour  de  l'Horloge. 

Rinceaux  de  cette  même 
porte. 


Vigne  et  chêne  ondulés  du 
XIV  siècle. 

Vigne  et  chêne  ondulés  du 
XIV'=  siècle  ;  vigne  et 
chêne  simples  du  XIII  = 
siècle. 

Acanthe,  vigne  et   fougère. 

Armoise  ou  vigne  pointue 
du  XIV'  siècle  ;  rosier 
et  feuilles  de  renoncule 
découpés  comme  du 
chardon. 

Cette  sculpture  est  du  XIV''  siècle,  mais  on  y  retrouve 
quelques  vestiges  des  feuillages  primitifs. 


Conclusion. 

L'ARCHITECTE  qui  a  donné  le  plan 
de  Notre-Dame  de  Laon  est  resté 
inconnu, ainsi  que  celui  qui  modifia  le  chœur, 
et  le  fit  semblable  à  la  nef.  Mais  bien  que 
leurs  noms  ne  soient  pas  parvenus  jusqu'à 
nous,  il  faut  reconnaître  qu'ils  furent  des 
hommes  de  génie.  Le  premier  commença 
l'œuvre,  et,  chose  rare,  le  second  l'acheva, 
lui  donna  la  perfection,  en  reprenant  préci- 
sément l'idée  de  son  prédécesseur.  Il  sut 
comprendre  tout  ce  qu'il  y  avait  de  beau 
dans  la  création  de  la  nef,  et  il  continua 
cette  création  jusqu'au  point  terminal.  En 
construisant  ces  deux  longues  files  de 
piliers  et  de  grands  arcs  qui  font  de  la 
cathédrale  une  des  œuvres  les  plus  pures 
du  gothique  à  son  origine,  on  se  demande 
si,  du  haut  de  leur  montagne,  ces  deux 
constructeurs  n'ont  pas  eu  la  vision  de 
l'Hellade,  et  n'ont  pas  voulu  élever  sur  le 
sol  gaulois  un  édifice  pouvant  rivaliser  pour 
l'ordonnance,  en  mettant  à  l'intérieur  ce 
qui  dans  les  monuments  grecs  se  trouve  à 
l'extérieur,  avec  ceux  de  la  patrie  de 
Périclès.'*  Telle  est  pour  nous  l'impression 
qui  se  dégage  de  cette  étrange  et  merveil- 
leuse cathédrale. 

Emile   Lambin. 


&»A^»?^  ^^mU  K^^  A^-^  A^^  A^V?^  A^Vk  A^^  ;t^  K^*U  A^^  A^y^  A^Vihc  X^U  A^-A  ' 


irirTTTnrriTTrirrriTïTTiglliiiIIIilIIïTixiiiiiiTiiiiiJiiriiiiriritJi: 


?SK©^@s@^s)®^§)^^  ffîélanges.  m^^më^mMmBm 


ntnmnxi^^^mi-ii  1 1 1 1 1  ixixxjux^ximxit 


ITl  1  I  iTTIXrmntTTTTnrTTTTTTnf  1  1  1 1  T  tm  H  I  I  T  iTTTTTTTTTTTTTT-IXmHIIILl: 


TTTTTTTTI  1  1   I  r  tlTTTTTTTI 


A  Semaine  du  fidèle,  1898,  p.  572, 
donne  le  texte  de  l'inscription  fondue 
sur  la  cloche  de  l'église  de  Challes,  au 

"  diocèse  du  Mans  : 


le  dimanche  de  la  sainte-trinité 
j'ai  Été  bénite  par  m.-  le  chanoine  gouin  vicaire  général 

[honoraire. 

j'ai  EU   POUR  PARRAIN,  M.   ROBERT  CHASTENET  COMTE  DE 

[puységur, 
et    pour    marraine,  madame   félix    roche,   née    félicie 

[gizolme. 

j'ai  ÉTÉ  nommée  :  YVONNE-MARIE-JEANNE-FÉLICIE-ANTOINETTE- 

[SUZ  ANNE-CLÉMENTINE. 
—  M.  MÉTAIS  ÉTANT    MAIRE    DE    CHALLES,    M.  L'ABBÉ    CLÉMENT 

[BAUCHÉ,  CURÉ. 

Cette  rédaction  provoque  de  ma  part  quel- 
ques observations,  qui  pourront  profiter  à  d'au- 
tres ;  en  conséquence,  je  crois  devoir  signaler  ses 
irrégularités,  afin  qu'on  les  évite  à  l'avenir. 

N'est  pas  épigraphiste  qui  veut,  et  on  aurait 
tort  de  s'imaginer  qu'une  prose  correcte  suffit 
pour  exprimer  sa  pensée  ;  il  y  faut  bien  aussi, 
sinon  de  la  science,  au  moins  quelque  expé- 
rience. 

La  croix  initiale  était  de  rigueur  autrefois. 
Pourquoi  s'en  dispense-t-on  si  facilement  ? 

On  ne  saurait  être  trop  précis  quand  il  s'agit 
de  commémorer  un  fait.  Z?  dimanche  de  la  Ste- 
Trinité  <tiXh\ç.n  vague  et  n'apprendra  rien  aux 
générations  futures,  quand  il  eût  été  aussi  utile 
que  facile  d'ajouter  la  date  de  la  bénédiction, 
qui  a  eu  lieu  le  5  juin  de  cette  année. 

Je  proteste  contre  l'emploi  de  bénite  :  le  par- 
ticipe du  verbe  /;/«/;■  réclamait  bénie  ;  bénite  ne. 
convient,  exceptionnellement,  que  pris  adjective- 
ment. Il  n'y  a  pas  lieu  d'étendre  outre  mesure 
les  irrégularités  de  la  grammaire. 

M.  le  chanoine  Gouin.  Monsieur  n'est  pas  un 
titre  ecclésiastique.  La  seule  formule  du  pro- 
tocole est  Très  Révérend. 

Gouin  tout  court,  sans  nom  de  baptême,  est 
du  pur  gallicanisme,  formellement  réprouvé  par 
Pie  IX. 


.  ^S.""  ^S^  ^S^  *i^^  ^ië^  ^S^  ^S^  ^S^  ^S^  ^sB^  ^S^  *À^^  »AiI^  ^é^  y^à^ 

CInC  inscription  De  ClOCfjC.  vicaire  générai  honoraire   flattera    l'officiant, 

mais  ne  remplace  pas  la  mention  de  la  délégation, 
car  le  chanoine  n'a  pu  agir  qu'en  vertu  d'une 
délégation  spéciale  de  son  évêque;  l'un  et  l'autre 
étaient  à  mentionner,  comme  acte  épiscopal. 

f  ai  été  (bis)  et  j'ai  eu  peuvent  être  bons  pour 
un  procès-verbal  :  en  épigraphie,  on  parle  autre- 
ment et  surtout  on  ne  se  répète  pas. 

Comme  ce  sont  les  parrain  et  marraine  qui 
nomment,  il  y  avait  moyen  d'abréger  :  il  eût 
été  moins  encombrantde  formuler  ainsi  -.J'aiéte 

nommée par....   et Les  honneurs    étant 

pour  la  cloche,  à  elle  de  figurer  au  premier  rang, 
avant  ceux  qui  la  patronnent  et  présentent. 

Sept  noms,  n'est-ce  point  trop  quand  un  seul 
eût  suffi,  deux  au  plus  ;  un  pour  la  marraine  ; 
deux  pour  le  parrain  et  la  marraine,  qui,  d'ordi- 
naire, assignent  leurs  prénoms  ?  Tenons-nous  à 
Yvonne. 

La  cloche  est-elle  municipale  ?  Alors  je  con- 
çois l'introduction  du  nom  du  maire.  Mais  l'ar- 
ticle dit  qu'elle  est  le  produit  d'une  «  souscrip- 
tion paroissiale  »,  faite  exclusivement  par  «  le 
digne  et  zélé  curé  de  Challes  »,  qui  a  été  trop 
humble  en  la  circonstance,  puisqu'il  n'intervient, 
quoique  chez  lui,  qu'après  un  fonctionnaire  de 
l'ordre  civil,  qui  n'a  que  faire  ici.  Le  président 
de  la  fabrique  y  eût  été  mieux  à  sa  place  et  la 
générosité  de  la  paroisse  valait  au  moins  une 
mention. 

La  rédaction  est  franchement  laïque.  Le  curé 
est  non  seulement  Monsieur '^]'a.ôÀ?,  on  disait  en 
France  Messire),  mais  encore  Yabbé,  ce  qui,  de- 
puis la  constitution  civile  du  clergé,  équivaut 
à  citoyen.  Curé  est  une  désignation  très  vague  ; 
le  contexte  suppose  comme  complément  de 
Challes,  mais  en  style  ecclésiastique  on  ne  doit 
pas  omettre  le  saint  titulaire  de  l'église. 

Autre  effet  de  la  laïcisation  à  outrance  :  pas 
la  moindre  sentence  religieuse,  allusive  aux 
vertus  surnaturelles  de  la  cloche.  Nos  anciennes 
cloches  nous  révèlent  qu'on  n'y  manquait  jamais 
aux  temps  de  foi. 

La  conclusion  pratique  est  que  toute  inscrip- 
tion doit  être  préalablement  soumise  à  l'appro- 


52 


Bcbue  De  V^xt  t\)xititn. 


bation  de  l'évêque,  qui,  pour  la  contrôler  effica- 
cement, aura  près  de  lui  un  ecclésiastique  com- 
pétent en  la  matière,  lequel,  au  besoin,  fournira 
un  avis  motivé. 

X.  Barbier  de  Montault. 


Xià  Dalmatiquc  Du  trésor  De  St^fiierre. 

ANS  son  rapport  sur  le  11*^  Congrès 
d'archéologie  chrétienne,  avril  1900, 
Mgr  A.  Battandier  parle  de  la  soi- 
disant  dalmatique  de  Charlemagne 
du  trésor  de  Saint-Pierre  de  Rome,  et  il  rapporte 
l'opinion  de  M.  Colasanti,  qui  date  le  vêtement 
des  dernières  années  du  XI«  siècle.  Me  trouvant 
à  Rome,  il  y  a  deux  ans,  je  me  suis  attaché  à 
une  étude  particulière  de  la  dalmatique  vaticane, 
dont  j'ai  publié  le  résultat  inattendu  dans  un 
article  de  la  Revue  allemande  des  Pères  Jésuites 
Die  Stiminen  ans  Maria-Laacli,  année  1889, 
vol.  2,  p.  575  et  ss. 

Quatre  points  sont  en  question    concernant 
la  dalmatique  : 
.    i)  A-t-elle  appartenu  à  Charlemagne? 

2)  A-t-elle  été  du  moins,  comme  on  l'a  pré- 
tendu, en  usage  chez  les  empereurs  allemands  au 
jour  de  leur  sacre  et  à  l'occasion  de  leur  assis- 
tance à  la  messe  solennelle  à  Saint-Pierre  ? 

3)  Quel  a  été  le  caractère  primitif  du  vêtement? 

4)  A  quel  siècle  doit-on  attribuer  la  dalmatique? 
Voici  les  réponses  qu'il  convient  de  faire  à  ces 

questions. 

I.  La  dalmatique  de  Saint-Pierre  n'a  jamais 
été  portée  par  Charlemagne.  Pour  établir  ce 
point,  je  ne  veux  pas  m'en  rapporter  à  la  forme 
et  aux  autres  particularités  de  l'ornement,  tout 
à  fait  étrangères  aux  dalmatiques  romaines  du 
commencement  du  IX^  siècle,  bien  connues 
par  les  mosaïques  de  ce  temps  et  les  descriptions 
de  Raban  et  d'Amalaire.  Cela  ne  me  paraît  pas 
nécessaire  ;  les  inventaires  de  la  Basilique  vati- 
cane prouvent  à  l'évidence  que  la  dalmatique  n'a 
fait  partie  du  trésor  de  Saint-Pierre  qu'à  partir 
de  la  seconde  moitié  du  XV^  siècle  ('). 

i.  Les  inventaires  ont  i\.è  publiés  par  MM.  E.  Muntz  et  A.  L. 
Frothingham  clans  \Archivio  delta  Sociela  Komnna  diStorla  Patria 
vol.  VI.  p.  I  sv,  (Rome,  1883) sous  le  titre:  //  Tesoro  délia  Basilka 
di  S.  Pietro  in  Vaticxno  dal  XI U  al  XV  secolo. 


Ni  l'inventaire  de  1361,  ni  celui  de  1436,  ni 
celui  de  1454-55  ne  mentionnent  la  dalmatique, 
quoiqu'ils  enregistrent  d'une  manière  exacte  et 
fort  détaillée  les  vêtements  qui  se  trouvaient 
alors  dans  la  sacristie  de  Saint-Pierre,  surtout 
l'inventaire  de  I36r,  dont  les  descriptions  com- 
prennent quelquefois  de  treize  à  quinze  lignes. 
Si  la  dalmatique  avait  déjà  existé  à  Saint-Pierre, 
l'inventaire  de  1361  l'aurait  certainement  men- 
tionnée. 

Cet  inventaire  nomme  et  décrit  à  la  vérité 
une  «  dalmatica  imperialis  sollemnissima,  que 
dicitur  Constant(ini)  de  dyaspero  albo  laborato 
ad  rotas  de  auro  et  serico,  in  quibus  sunt  grifo- 
nes  et  pappagalli  et  aquile  cum  duobus  capiti- 
bus,  crucibus  in  medio  de  auro  et  serico  cum 
fimbriis  et  manicis  deauratiscum  figuris  in  rôtis 
ad  perlas  et  cum  duobus  cordis  de  perlis  circum- 
circa.  Cum  armato  ad  collum  et  ad  spatulam  ad 
filum  ornatum  de  perlis,  foderat  (sic)  de  sindone 
rubeo  (i).  »  Mais  évidemment  ce  vêtement  est 
entièrement  différent  de  la  soi-disant  dalma- 
tique de  Charlemagne. 

C'est  dans  l'inventaire  de  1489,  que  nous  ren- 
controns pour  la  première  fois  ce  célèbre  orne- 
ment. Sous  le  titre  «  Paramenta  asurrea,  gailla 
(galla),  pavonachia  et  viridia  1>  nous  y  lisons  : 
«  Una  dalmatica  de  colore  celesti  contexta  cum 
figuris  aureis  et  arge/iieis,  que  in  una  parte  habet 
figurain  dei  et  pluriunt  aliorum  sanctoriim,  in 
altéra  parte  ?,\m\\\\.&x  h^het  figura  m  Xti  sedentis 
in  throno  cum  angelis  circunicirca  et  cum  criice 
super  caput  ex  opère  Grèce  cum  stola  if).  »  Il 
n'est  pas  difficile  de  reconnaître  dans  cette  des- 
cription la  dalmatique  du  trésor  de  Saint-Pierre. 
Cette  description  n'est  pas  complète,  mais  elle 
est  suffisante  pour  ne  laisser  aucun  doute  sur 
l'identité  de  la  dalmatique  de  Charlemagne  et 
celle  décrite  dans  l'inventaire  de  1489. 

Il  est  très  remarquable  que  l'inventaire 
n'ajoute  pas  le  moindre  mot  pour  attribuer  l'or- 
nement à  Charlemagne,  quoiqu'il  indique  dans 
beaucoup  d'autres  cas  le  nom  de  ceux  auxquels 
on  assignait  certains  parements,  p.  e.  planeta 
Pape  Nicolai  V,  pluviale  Sixti  IV,  etc.,  et  même 

1.  Le.,  p  38.  Peut-6tre  la  dalmatique  est  appelée  «  imperialis  » 
parce  qu'on  l'attrilitiait  à  l'empereur  Constantin. 

2.  L.  c. ,  p.  117. 


£0élanges. 


53 


pallhnn  Cojistnntini.  C'est  la  preuve  évidente 
qu'alors  on  ne  connaissait  pas  encore  la  légende, 
qurveut  que  la  dalmatique  ait  été  portée  par 
Charlemagne   le  jour  de  son  sacre. 

2.  La  dalmatique  n'a  jamais  été  employée 
comme  ornement  par  les  empereurs  allemands. 
La  dernière  fois  que  le  sacre  d'un  empereur  alle- 
mand a  eu  lieu  à  Saint-Pierre,  —  c'était  celui  de 
Frédéric  III  en  1452,  —  le  vêtement  en  question 
ne  se  trouvait  pas  encore  dans  la  sacristie  de 
Saint-Pierre.  Peut-être  quand  Frédéric  III  est 
venu  à  Rome  pour  la  deuxième  fois,  en  1468, 
la  dalmatique  s'y  trouvait-elle  déjà.  Mais  nous 
savons  par  le  récit  que  fait  Patritius  du  séjour 
de  l'empereur  à  Rome,  que  celui-ci,  chantant 
l'évangile  à  la  messe  solennelle,  n'était  revêtu 
que  de  l'aube,  de  l'étole  et  de  la  chape,  et  non 
d'une  dalmatique. 

C'est  le  docteur  Bock  principalement  qui  a 
appelé  la  dalmatique  de  Saint-Pierre  «  dalma- 
tique impériale»,  et  c'est  à  cause  de  cette  pré- 
tendue attribution  qu'il  l'a  reproduite  et  décrite 
avec  les  ornements  impériaux  dans  son  célèbre 
ouvrage  :  Die  Kleinodien  des  heiligen  rœniischen 
Reiches  deiitscher  Nation.  Il  pensait  que  l'orne- 
ment avait  été  apporté  à  Saint-Pierre  vers  le  com- 
mencement du  XIII<=  siècle,  c'est-à-dire  après  la 
prise  de  Constantinople  par  les  Latins.  L'opinion 
du  docteur  Bock,  cent  fois  répétée  par  d'autres 
auteurs,  ne  peut  plus  être  maintenue  aujour- 
d'hui. La  dalmatique  est  venue  à  Saint-Pierre 
entre  les  années  1454  et  1489,  c'est-à-dire  après 
la  prise  de  Constantinople  par  les  Turcs,  sans 
doute  par  des  fugitifs  grecs,  dont  un  grand 
nombre,  ayant  quitté  leur  patrie,  vint  en  Italie, 
l'enrichissant  de  nombreux  manuscrits  et  d'ou- 
vrages d'art  byzantins. 

3.  Les  scènes  brodées  sur  la  partie  antérieure 
et  postérieure  ainsi  que  sur  les  épaules  de  la  dal- 
matique prouvent  qu'elle  a  été  faite  pour  servir 
d'ornement  liturgique. 

Le  docteur  Bock  et  d'autres  savants  ont  ex- 
primé l'opinion  que  le  vêtement  a  été  un  saccos 
grec,  alors  privilège  des  patriarches  et  des  métro- 
polites. L'inventaire  de  1489  rend  cette  hypo- 
thèse certaine.  Car  après  avoir  décrit  la  dalma- 
tique il  ajoute  immédiatement  :  Scapulare  iinuni 
si7niliier  coniextum.  Qe   scapulaire,   qui  apparte- 


nait sans  doute  comme  complément  à  la  dalma- 
tique, de  laquelle  l'inventaire  vient  de  parler,  ne 
peut  être  un  autre  ornement  que  l'omophorion 
c'est-à-dire,  le  pallium  épiscopal  grec.  Mais  si  le 
«  scapulaire  »  doit  être  considéré  comme  l'omo- 
phorion grec,  la  dalmatique  de  l'inventaire  est 
certainement  le  saccos  grec. 

Il  est  vrai  que  dans  l'inventaire  le  vêtement 
est  nommé  dalmatique,  mais  il  n'en  faudrait  pas 
conclure  qu'il  a  été  une  dalmatique  latine.  La 
soi-disant  dalmatique  de  Charlemagne  n'a  pas 
de  manches;  on  y  a  substitué  des  pièces  d'étoffe, 
qui  couvrent  les  bras.  Cependant,  dans  la  seconde 
moitié  du  XV«  siècle,  la  dalmatique  avait  encore 
partout  en  Occident  de  véritables  manches.  Ce 
n'est  qu'au  XVI 1*=  siècle,  qu'on  les  a  transfor- 
mées en  France,  en  Espagne  et  en  Allemagne  — 
mais  pas  en  Italie,  où  on  a  conservé  les  manches 
jusqu'à  présent,  —  en  pièces  d'étoffe  rectangu- 
laires. Le  vêtement  est  appelé  dalmatique  dans 
l'inventaire,  parce  qu'il  n'existe  pas  d'autre 
terme  latin  et  qu'il  y  a  une  certaine  ressemblance 
entre  le  saccos  grec  et  la  dalmatique  occi- 
dentale. 

4.  On  sait  que  l'art  byzantin  n'a  subi  que  fort 
peu  de  changements  depuis  le  XI^  siècle  jusqu'à 
la  fin  du  moyen  âge.  Il  est  donc  extrêmement 
difficile  de  fixer  la  date  des  monuments  grecs 
et  on  peut  y  appliquer  bien  souvent  le  proverbe  : 
Quot  capita  tôt  sensus.  Il  serait  à  souhaiter 
qu'on  fût  un  peu  plus  circonspect  en  fixant 
l'âge  des  monuments  grecs.  En  général  on 
incline  trop  à  leur  assigner  des  dates  aussi 
reculées  que  possible. 

La  dalmatique  de  Saint-Pierre  a  été  attribuée, 
à  diverses  époques,  par  les  uns  au  IX"^,  les 
autres  au  XI^,  au  XI I^  ou  au  commencement  du 
XlIIe  siècle. 

Cependant  il  n'est  pas  possible  que  la  dalma- 
tique soit  l'ouvrage  du  IX«  siècle. Le  caractère  du 
vêtement,  qui  n'était  pas  encore  alors  en  usage, 
aussi  bien  que  le  style  des  broderies  s'y  op- 
posent catégoriquement.  Je  n'oserai  pas  même 
l'attribuer  simplement  au  XI«  ou  au  XI I^  siècle. 
Je  ne  veux  pas  nier  absolument  la  possibilité 
d'une  telle  date,  mais  d'autre  part  je  ne  vois  pas 
de  raison  péremptoire  pour  l'adopter.  Ni  la  forme, 
ni  l'étoffe  de  la  dalmatique,   ni    la    technique,  ni 


54 


Bcbuc  tic  r2lit  (Ijvcticu. 


l'exécution  parfaite  des  broderies,  ni  le  style,  ni 
l 'iconographie  des  scènes  représentées  n'exigent 
qu'on  attribue  le  vêtement  à  une  époque  si  recu- 
lée. En  ce  qui  me  concerne,  j'incline  à  penser  que 
la  dalmatique  n'est  guère  antérieure  anKY*"  siècle. 
Il  n'est  pas  inutile  de  remarquer  que  l'inven- 
taire n'a  pas  placé  la  dalmatique  sous  le  titre  : 
antiqua    oinaineiita,    ni    lui    a    ajouté    la    note 


«  antiquum  »,  comme   à    d'autres  vêtements  (•)• 

Jos.  Braun,  s.  J. 

I.  Ayant  écrit  ces  lignes,  je  vois,  après  coup,  que  dans  la  revue 
allemande  Repertorium  fiir  Kiinstgeschichte,  vol.  XV,  p.  515,  la 
dalmatique  est  attribuée  au  XV»  ou  au  XVI=  siècle.  Malheureuse- 
ment on  n'en  donne  pas  de  raisons,  mais  on  s'en  rapporte  simple- 
ment à  deux  livres  russes,  qui  ne  sont  pas  à  ma  disposition,  Pro- 
choroff.  Antiquités  chrétiennes  et  Archéologie  chrétienne  ( iSS^j. 
1.  3,  p. 47  et  VoV.xo\^^\,L' Évangile,  p.  284.  Évidemment  le  vêtement, 
existant  déjà  en  1489,  ne  peut  pas  être  daté  du  XVI"=  siècle,  mais 
j'accepte  bien  volontiers  le  XV=.  Je  suis  bien  aise  de  trouver  que 
mon  opinion  a  été  applaudie  aussi  dans  la  revue  Byzantinische 
Zcitschrijt,  vol.   IX  (1900),  p.  607. 


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Italie. 

Xta  peinture  murale  à  l'huile  en  Italie  au  xv=  Mt\i. 


ORSQU'ON  habite  l'Italie  et  qu'on  la 
parcourt  en  tous  sens,  on  éprouve 
maintes  surprises  en   rapprochant  les 

'  œuvres  d'art  des  écrits  qui  les  concer- 


nent. 

Je  ne  parle  pas,  bien  entendu,  des  divergences 
d'opinions  sur  la  valeur  d'un  ouvrage,  mais  des 
méprises  sur  des  faits  matériels. 

Je  viens  d'avoir  un  nouvel  étonnement  à  la 
lecture  d'un  travail  de  M.  Fierens-Gevaert  ('). 

Dans  une  partie  de  l'article,  l'auteur  montre 
l'influence  que  la  couleur  à  l'huile,  inventée  ou 
perfectionnée  par  Van  Eyck,  a  exercée  sur  les 
peintres  italiens. 

Cette  influence  est  connue  et  n'a  jamais  été  niée 
sérieusement,  mais  dans  le  but  fort  honorable 
d'augmenter  encore  la  gloire  qui  en  rejaillit  sur 
les  peintres  de  son  pays  natal,  M.  Fierens-Gevaert 
a  avancé  des  faits  dont  je  me  permets  de  contes- 
ter l'exactitude. 

Parlant  de  la  couleur  à  l'huile  et  du  peintre 
Alessio  Baldovinetti  (1427- 1499),  il  écrit:  «De  son 
côté  Baldovinetti  l'applique,  le  premier,  avec 
succès  à  la  peinture  murale.  » 

Il  est  regrettable  que  l'auteur  n'ait  pas  indiqué 
dans  quelle  peinture  murale  disparue  ou  encore 
existante  Baldovinetti  a  si  bien  réussi. 

La  mode  d'affirmer  un  fait,  sans  fournir  de 
preuves,  ou  tout  au  moins  des  présomptions,  se 
généralise  dans  la  critique  d'art  française  et  étran- 
gère ;  je  pourrais  en  citer  de  nombreux  exemples; 
elle  est  fort  commode,  sans  doute,  mais  inad- 
missible. 

Les  seules  décorations  murales  de  Baldovinetti 
qui  subsistent  se  trouvent  à  Florence. 

Ce  sont  : 

—  L' Annonciation    sur    un    mur    droit,  et  les 

I.  Revue  des  Deux  Mondes,  15  juin  1900.  De  Van  Eyck  à  Van 
Dyck. 

La  Revue  de  l'Art  chrétien  de  septembre  1900  a  donné  un  extrait 
de  cet  article. 


Évangélistes,  Prophètes  et  Anges  sur  le  plafond  de 
la  chapelle  du  cardinal  de  Portugal  à  San  Mi- 
niato. 

—  La  Madonna  délia  Cintola  à  l'église  San 
Niccolo. 

—  n Adoration  des  Bergers  dans  l'atrium  de 
l'église  de  la  Santissima  Annunziata. 

—  La  Résurrection  du  Christ  dans  la  chapelle 
dite  du  tombeau,  près  de  San  Pancrazio. 

—  Quelques  traces  de  paysage  au  haut  du 
chœur  de  l'église  de  la  Santa  Trinità. 

Dans  aucun  de  ces  ouvrages  il  n'y  a  de  couleurs 
à  l'huile.  C'est  l'opinion,  à  Florence,  de  ceux  qui 
s'occupent  de  la  technique  des  fresques,  et  on  ne 
peut  méconnaître  que  cette  cité  est  exception- 
nellement pourvue  d'artistes,  de  praticiens,  et  de 
cultori  dell'arte  ayant  acquis,  soit  par  profession, 
soit  par  goût,  une  compétence  en  cette  matière. 

Non  seulement  Baldovinetti  n'a  pas  peint  sur 
mura  l'huile,  mais  aucune  de  ses  fresques  n'a  été 
ultérieurement  recouverte  de  couleurs  à  l'huile, 
comme  cela  est  arrivé  pour  d'autres  fresques  du 
XV"^  siècle;  on  observe  sur  quelques-uns  de  ses 
tableaux,  comme  sur  d'autres  de  la  même  époque, 
une  légère  couche  de  vernis  posée  sur  la  détrempe, 
longtemps  après  coup,  mais  dans  aucun  le  vernis 
n'a  été  mélangé  avec  la  couleur. 

La  couche  de  peinture  à  l'huile  sur  les  fresques, 
comme  aussi  le  vernissage  sur  la  tempera  avaient 
un  but  de  préservation  ;  mais  le  calcul  n'a  pas 
été  bon,  et  il  s'en  est  suivi  des  écaillages. 

Lorsque  l'occasion  se  présente,  et  que  la  chose 
est  possible  sans  danger,  on  a  soin  maintenant  de 
débarrasser  les  peintures  de  ces  couvertes. 

A  défaut  de  la  peintuie  murale  à  l'huile  exé- 
cutée par  Baldovinetti,  il  semble  que  M.  Fierens 
aurait  pu  indiquer  sur  quels  témoignages  écrits 
il  s'est  appuyé:  il  ne  le  fait  pas. 

Il  y  a  cependant  dans  feu  J.  Burckhardt  ('),  à 
l'article  Baldovinetti,  une  indication  à  noter. 

De  ce  peintre  et  des  couleurs  à  l'huile  l'éminent 
professeur  à  l'université  de  Bâle,  écrit  : 

«  Il  cherche  à  appliquer  les  nouveaux  procé- 
«  dés  jusque  dans  la  peinture  murale.  L'exemple 

i.  Le  Cicérone,  guide  de  l'art  antique  et  de  l'art  moderne  en  Italie. 


56 


3^ct)ue  lie  V^xt  djrétien. 


«  le  plus  connu  et  le  plus  intéressant  à  cet 
«  égard  est  la  fresque  de  X Adoration  des  Bergers 
«  (1460)  dans  le  vestibule  de  \' Aiuninziata.  Les 
«  figures,  il  est  vrai, sont  très  laides  et  tellement 
«  éparses  qu'il  n')^  a  pas  de  composition  propre- 
«  ment  dite.  » 

Remarquons  que  Burckhardt  va  beaucoup 
moins  loin  que  M.  Fierens-Gevaert;  il  ne  dit  pas 
que  Baldoviiietti  a  employé  avec  succès  les  nou- 
veaux procédés,  il  se  contente  de  marquer  qu'il  a 
cherché  à  les  appliquer;  il  ajoute  même  que  les 
figures  sont  laides. 

Comme  dans  aucune  de  ses  peintures  Baldo- 
vinetti  n'a  fait  de  figures  laides,  il  est  fort  proba- 
ble que  Burckhardt  a  voulu  dire  que  dans  les 
figures  de  l'Annunziata,  le  peintre  n'avait  pas 
réussi  avec  ses  essais. 

Cela  saute  aux  yeux.  A  l'Annunziata  la  place 
des  visages  est  seulement  marquée  ;  sous  un  très 
léger  frottis  on  voit  l'enduit  ;  les  figures  ne  sont 
ni  laides  ni  belles  elles  n'existent  pas  pour  ainsi 
dire;  visiblement  l'ouvrage  a  été  laissé  inachevé 
intentionnellement. 

Pourquoi  ? 

Je  vais  essayer  de  le  montrer. 

Ici  il  me  faut  entrer  dans  le  détail.  Depuis  plu- 
sieurs années,  j'ai  fait  de  la  technique  des  fres- 
ques une  de  mes  études  préférées  ;  je  ne  me  suis 
pas  contenté  de  compulser  les  écrits,  mais  j'ai 
fréquenté  les  opérateurs  sur  leurs  échafaudages. 
Les  occasions  ne  m'ont  pas  manqué  ;  il  y  a  pres- 
qu'en  permanence  en  Toscane  des  artistes  occu- 
pés sur  d'anciennes  fresques,  soit  pour  enlever  la 
poussière  et  les  impuretés,  soit  pour  les  débar- 
rasser du  badigeon  qui  les  recouvre,  soit  pour 
consolider  l'enduit  sur  lequel  elles  sont  peintes, 
soit  enfin  pour  les  déplacer  tout  à  fait. 

Je  me  suis  d'autant  plus  attaché  à  ces  travaux 
que  j'ai  souvent  constaté  qu'en  France,  la  tech- 
nique des  fresques  était  assez  peu  connue,  et  que 
les  écrits  sur  la  matière  renfermaient  des  erreurs 
et  étaient  très  en  retard  sur  les  progrès  réalisés 
en  Italie  de  notre  temps. 

Notre  indifférence  à  l'égard  des  fresques  est 
telle,  que  nombre  de  nos  écrivains  ont  dénaturé 
le  sens  du  mot;  on  trouve  constamment  l'expres- 
sion :  la  fresque  du  Panthéon  de  Paris,  alors  qu'au 
Panthéon    il  n'y  a    pas    de  fresques,  mais  des 


peintures  sur  toile  appliquées  contre  le  mur  par 
marouflage. 

La  fresque,  le  buon  frcsco,  comme  on  dit  en 
Italie,  est  une  peinture  exécutée  sur  un  enduit 
frais,  au  moyen  de  couleurs  préparées  à  l'eau. 

Il  arrive  parfois  que  la  peinture,  étant  sèche, 
ne  donne  pas  entière  satisfaction  au  peintre, 
en  ce  cas,  il  la  retouche, sur  l'enduit  sec,  à  tempera, 
c'est-à  dire  avec  des  couleurs  préparées  au  jaune 
d'œuf,  ou  à  la  colle,  ou  avec  d'autres  matières 
agglutinatives. 

Si  la  tempera  donne  des  facilités  au  peintre, 
elle  présente  en  revanche  de  graves  inconvé- 
nients,si  bien  que  parfois  il  fallait  pour  l'employer 
une  convention  spéciale.  Dans  le  traité  passé,  en 
1483,  entre  le  patricien  Tornabuoni  et  Domenico 
Ghirlandaio  pour  la  décoration  du  chœur  de 
l'église  Santa  Maria  Novella,  à  Florence,  il  est 
spécifié  que  le  peintre  pourra  travailler  a  tempera. 

Du  reste,  quelques  couleurs,  certains  rouges  et 
verts  et  surtout  le  bleu  d'outre-mer,  ne  pouvaient 
être  employés  qu'à  tempera. 

Les  tons  de  la  tempera  sont  plus  ternes  que 
ceux  du  buon  frcsco,  mais  ceci  est,  en  somme, 
assez  secondaire  ;  le  défaut  capital,  c'est  que  la 
tempera  déteint  à  l'eau,  alors  que  le  buon  fresco 
résiste. 

On  sent  le  danger,  surtout  lorsque  la  fresque 
est  exposée  à  la  pluie,  comme  dans  les  taberna- 
cles sur  rues,  et  dans  les  cloîtres  ouverts,  si  fré- 
quents en  Italie. 

Il  y  a  aussi  les  risques  que  l'ignorance  peut 
faire  courir  à  la  fresque  ;  ceux  qui  s'intéressent 
particulièrement  au  genre  ont  souvent  observé, 
à  côté  de  parties  encore  en  bonnes  colorations, 
d'autres  où  l'enduit  est  apparent.  A  la  Char- 
treuse de  Pavie  notamment,  le  fond  bleu  des 
grandes  fresques,  exécutées  vers  1490  par  Am- 
brogio  Borgognone,  a  presque  complètement 
disparu  à  la  suite  d'un  lavage  inconsidéré,  ce  qui 
nuit  beaucoup  à  l'harmonie  de  l'ensemble. 

A  cette  occasion,  j'ai  remarqué  avec  peine  que 
plusieurs  écrivains  français  distingués  protes- 
taient contre  les  restaurations  et  qu'ils  ont  été 
jusqu'à  dire  que  restaurer  c'est  détruire. 

Il  y  a  cependant  des  restaurations  indispen- 
sables, aux  édifices  surtout  qu'on  ne  peut  pas 
abandonner  à   une   ruine   certaine,  et  aussi  aux 


Correspontiance, 


57 


peintures.  Me  trouvant  à  Padoue,  il  y  a  quelques 
années,  j'ai  vu  avec  plaisir  des  praticiens  repren- 
dre le  fond  bleu  des  fresques  de  Giotto  à  la 
chapelle  de  la  Madonna  de  l'Arena  ;  tout  en  étant 
à  l'abri  des  intempéries,  la  couleur,  après  six 
siècles,  avait  fini  par  s'écailler  et  tomber  par 
endroits  ;  le  devoir  strict  était  de  remédier  au 
mal,  autrement  les  fresques  se  seraient  enlevées 
sur  des  fonds  blancs,  ce  qui  eût  été  contre  le 
parti  adopté  par  Giotto. 

Il  n'est  pas  besoin  de  dire  que  de  tout  temps, 
les  peintres  de  fresques  ont  été  frappés  de 
l'inconvénient  de  la  tempera  et  qu'ils  ont  cher- 
ché à  la  rendre  aussi  résistante  à  l'eau  que  l'est 
le  buoH  fresco. 

Toutes  les  tentatives  ont  été  jusqu'à  présent 
infructueuses  ;  les  inventeurs  n'ont  pas  manqué, 
on  le  pense  bien,  mais  aucun  des  procédés  pré- 
conisés n'a  donné  de  résultats  satisfaisants. 

Parmi  ces  inventeurs  se  trouve  précisément 
Baldovinetti.  C'est  Vasari  (1511-1574)  qui  nous 
l'apprend  ('). 

Peintre  médiocre,  excellent  architecte, écrivain 
d'art  hors  ligne,  Vasari  a  fait  dans  les  Vite  des 
erreurs  biographiques  et  a  montré  de  la  partialité 
pour  les  peintres  toscans,  mais  il  a  une  qualité 
incontestée  :  dans  les  arts  qu'il  a  exercés,  il 
connaît  la  technique.  Il  a  bâti  très  solidement 
et  a  peint  à  fresque,  a  tempera,  à  l'huile  sur 
murailles,  d'une  façon  très  pratique  ;  ses  décora- 
tions à  l'huile  sur  les  murs  des  chambres  du  Vieux 
palais  de  Florence,  dites  quartier  de  Léon  X,  en 
sont  le  témoignage  ;  depuis  plus  de  trois  siècles, 
elles  sont  là  bonnes  comme  au  premier  jour. 

Vasari  raconte  que  Baldovinetti  fut  chargé  de 
peindre  quelques  scènes  de  l'Ancien  Testament 
dans  l'église  de  la  Santa  Trinità  à  Florence  ;  il 
commença  à  biion  fresco  et  termina  à  tempera 
avec  des  couleurs  au  jaune  d'œuf  mélangées  con 
vernicc  fatta  a  fuoco  avec  un  vernis  fait  au  feu  ; 
il  pensait  par  ce  moyen  mettre  la  tempera  à  l'abri 
des  atteintes  de  l'eau  ;  mais  la  peinture  craquela 
et  le  peintre,  qui  croyait  avoir  trouvé  un  raro  e 
bellissimo  segreto,  resta  avec  son  erreur  riinase 
délia  sua  opinione  ingannato. 

Il  n'y  a  pas  de  discussion  et  d'interprétation 
possibles. 

I.  Vasari,  Le  Vite  dei  pik  ceUbri  pittoriy  scultûri  e  arckiit-tti, 
(première  édition  en  1550). 


Les  termes  sont  formels  ;  ici  Vasari  ne  pro- 
nonce pas  le  mot  /utile  qu'il  emploie  ailleurs 
lorsqu'il  y  a  lieu  ;  il  dit  vernice  et  pas  autre 
chose.  Dans  le  reste  de  la  bibliographie  de  Bal- 
dovinetti, on  ne  trouve  pas  la  moindre  allusion 
à  un  usage  quelconque  qu'il  aurait  fait  des  cou- 
leurs à  l'huile. 

Baldovinetti  était  un  lutteur  obstiné  et  tenace  ; 
il  est  infiniment  probable  qu'à  l'Annunziata  il  a 
recommencé  ses  expériences  de  la  Trinità, 
d'autant  plus  que  son  Adoration  des  Bergers  éX'sXX. 
alors  dans  un  portique  ouvert  ;  n'ayant  pas 
réussi,  il  a  tout  lâché. 

Baldovinetti  n'ayant  pas  employé  l'huile  dans 
les  peintures  murales,  on  ne  peut  lui  donner  la 
priorité  que  lui  accorde  M.  Fierens. 

A  qui  appartient-elle  en   Italie? 

Je  n'en  sais  rien,  et  ce  que  j'ai  lu  m'a  laissé 
dans  l'incertitude. 

Ce  qu'il  y  a  de  certain,  c'est  que,  vers  1499, 
époque  présumée  où  Léonard  de  Vinci  acheva, 
à  peu  près,  sa  Cène  au  couvent  de  Santa-Maria 
delleGrazieà  Milan,  les  procédés  de  la  peinture 
à  l'huile  étaient  mal  connus.  Par  malheur,  Léo- 
nard s'obstinait  dans  cette  pratique  ;  aussi  moins 
de  cinquante  ans  après,  la  peinture  fut  presque 
entièrement  perdue  ;  personne  aujourd'hui  ne 
peut  plus  soutenir  que  la  dégradation  a  pour 
cause  l'humidité  du  réfectoire,  puisqu'en  face 
du  Cenacolo,  la  médiocre  Crucifixion  de  Monto- 
farno,  peinte  à  fresque,  a  résisté. 

M.  Fierens-Gevaert  nous  ménage  encore  d'au- 
tres surprises. 

«J'ai  dit,  écrit-il,  que  les  primitifs  italiens, 
comme  les  miniaturistes  et  les  gothiques  fla- 
mands, peignaient  leurs  tableaux  au  moyen 
d'un  pinceau  très  fin  et  traçaient,  pour  indiquer 
les  reliefs  lumineux  ou  certaines  ombres  dans 
les  plis  des  étoffes,  ces  virgules  colorées  que  les 
hommes  du  métier  appellent  hachures.  Ce  pro- 
cédé est  constant  chez  les  Cimabue,  Giotto,  Duc- 
cio,  Memmi,  Lippi,  les  Ambrogio,  Sano  di  Pietro, 
jusqu'à  Fra  Angelico,  chez  tous  les  peintres 
italiens  qui  peignaient  à  la  couleur  à  l'œuf  ou  à  la 
gomme.  Or,  à  partir  du  moment  où  la  peinture  à 
l'huile  pénètre  en  Italie,  les  hachures  disparais- 
sent  peu    à  peu  des    tableaux.  Au  commence- 


REVUE    UE    L  AKT  CHRETIEN. 
1901.    —    l'*^    LIVRAISON. 


58 


3Rebur  De  V^xt  cl^rctien. 


ment  du  XVI<^  siècle  la  méthode  primitive  est 
complètement  abandonnée  par  les  Italiens,  tandis 
que  les  Flamands,  Quentin  Matsys  entre  autres, 
en  font  encore  parfois  usage.  » 

Que  les  hachures  aient  été  pratiquées  en  Ita- 
lie, surtout  pour  passer  du  clair  à  l'obscur,  ce 
n'est  pas  douteux  et  pas  n'est  besoin  d'être  grand 
clerc  en  peinture  pour  le  constater. 

Que  cette  pratique  ait  été  constante  chez 
Giotto,  Memmi,  Lippi,  c'est  exagéré,  car  il  y  a 
des  tableaux  de  ces  peintres  avec  hachures  et 
d'autres  qui  n'en  ont  pas. 

Que  c'est  à  l'introduction  de  la  peinture  à  l'huile 
en  Italie  qu'on  doit  attribuer  la  suppression  pro- 
gressive de  la  hachure,  ce    n'est  pas  soutenable. 

Même  au  XIV«  siècle,  on  a  peint  en  Italie 
des  tableaux  à  pleine  brosse,  sans  hachures. 

En  voici  quelques  exemples  pris  seulement  à 
la  Galerie  des  Offices  et  à  l'Académie  de  Flo- 
rence. 

—  Giotto  (►!<  1337). 

Jésus  aujatdin  des  Oliviers  (Offices,  n°8). 
La  Madone  et  r Ettfani  {A.caLàém\e,  n°  103). 
Faits  delà  vie  de  Jésus  (Académie,  n°  104  et 
suite). 

—  Daddi  (Bernardo)  (►{<  1348). 

La  Madone  avec  l' Enfant  (Offices  ii°  26). 

—  Lorenzetti  (Ambrogio)  (►j^  1350). 
La  Madone  et  l Enfant  (Offices,  n°  15). 

La  Présentation  au  temple  (Académie  n°  134). 

—  Lippo  Memmi  ((j^  1357). 
L'Annonciation  (Offices,  n°  23). 

—  Gaddi  Taddeo  (►J<i366). 
Jésus  W(?r/ (Académie,  n°  116). 

Il  serait  facile  de  multiplier  ces  preuves  et  de 
les  pousser  jusqu'au  moment  où  la  peinture  à 
l'huile  a  été  connue  en    Italie,   mais  c'est  inutile. 

Les  peintres  que  je  viens  de  citer  ayant  tra- 
vaillé avant  la  naissance  de  Jean  Van  P^yck, 
qu'on  met  entre  1381  et  1395,  la  démonstration 
est  suffisante. 

Florence  octobre.  GeRSPACH. 


DEPUIS  la  publication  de  la  note  sur  cinq 
cloches  du  centre  de  la  France  pourvues  de 
l'inscription  MENTEM  SANCTAM  SPONTANEAM 
{Revue  de  F  Art  chrétien,  année    1900,    p.  428), 


M.  Camille  Enlart  a  eu  l'obligeance  de  nous 
signaler  deux  autres  inscriptions  analogues  : 
l'une  se  lit  sur  un  bassin  conservé  au  musée 
d'Amsterdam.  Ce  bassin  porte  une  légende  en 
lettres  gothiques  qui  paraît  avoir  été  défigurée 
par  l'artisan  qui  l'a  gravée.  En  voici  le  texte  : 
«  MENTEM  SANCTA  SPONTANIA  ONOREM  DEI 
PATREM  LIBERATIONIS.  »  L'autre  se  trouvait 
sur  une  cloche  de  l'abbaye  cistercienne  de  Valvi- 
sciolo  en  Italie  et  sa  description  nous  est  conser- 
vée dans  la  Chronique  manuscrite  de  Pantanelli 
sur  SerJHoneta.  «  On  lisait,  dit-il,  sur  la  robe  de 
cette  cloche  l'oraison  à  S.  Michel  contre  la 
foudre  :  MENTEM  SANCTAM  SPONTANEAM  HO- 
NOREM  DEO  ET  PATRIE  LIBERACIONEM.  »  Cette 
cloche  était  datée  de  1244  et  signée  'S  F  (^). 

N.  Thioluer. 


Cléry,.iS  juillet  1900. 
Monsieur  le  Secrétaire, 

Si  je  connaissais  l'adresse  exacte  de  Monsieur 
Emile  Lambin,  qui  a  écrit  une  admirable  étude 
sur  la  cathédrale  de  Rouen  dans  la  livraison  de 
juillet  1900  de  r^r/f/^/vV/^;/, j'oserais  lui  faire  une 
remarque  sur  ce  que  je  lis  à  la  page  304  de  cette 
livraison  :  «  Il  est  fort  douteux  que  le  chou  frisé 
fût  connu  en  France  au  XV^  siècle.  > 

Notre  basilique,  construite  sous  Louis  XI,  de 
1460  à  1480,  possède  une  flore  assez  riche  et  le 
chou /;■«/,  très  tourmenté  même,  y  abonde  ;  il  y 
est  en  bien  plus  grande  quantité  que  le  houx, 
le  houblon,  le  chardon,  la  vigne  et  le  chêne. 

Je  me  permets  bien  humblement  cette  remar- 
que par  amour  pour  la  vérité  que  cherche  et 
qu'aime  votre  excellente  Revue. 

Veuillez  agréer,  Monsieur,  l'expression  de  mes 
dévoués  sentiments. 

L.  Saget, 

Curé-Doyen  de  Notre-Dame 

de  Cléry  (Loiret). 


I.  Cf.  d'Allemagne,  Notice  sur  un  bassin  en  cuivre  exécuté  pour 
Hugues  I V  de  Litsi^^nan,  roi  de  Chypre  ffj2^-f^6ij.  parue  en 
appendice  au  travail  de  M.  Enlart  :  L'art  gothique  et  la  /Renais- 
sance en  Chypre,  Paris,  1899,  pp.  755-756. 


Corre0pontiaitce. 


59 


Clamart,  le  6  octobre  1900. 
Monsieur  le  Secrétaire, 

Je  vous  remercie  d'avoir  bien  voulu  me  com- 
muniquer la  lettre  de  M.  l'abbé  Saget,  Curé- 
Doyen  de  Notre-Dame  de  Cléry.  Je  suis  heureux 
que  mon  étude  sur  la  cathédrale  de  Rouen  ait 
obtenu  son  suffrage  :  cela  prouve  qu'aujourd'hui 
encore  il  existe  des  personnes  qui  voient  dans 
une  cathédrale  autre  chose  qu'une  œuvre  pure- 
ment architecturale.  Maintenant  je  dois  ajouter 
que  ce  modeste  travail  est  loin  de  mériter  le  qua- 
lificatif dont  M.  !e  Curé-Doyen  de  Notre-Dame 
de  Cléry  a  cru  devoir  l'honorer. 

En  ce  qui  touche  le  chou  frisé  considéré  comme 
une  des  plantes  reproduites  dans  nos  églises  par 
les  artistes  du  XV°  siècle,  voici  ce  que  je  puis 
dire  : 

Le  chou  frisé,  d'après  les  botanistes,  paraît 
être  originaire  de  Sibérie,  et  n'a  pu  venir  en 
France  qu'au  XVI I^  siècle.  En  effet,  on  ne  le 
trouve  mentionné  ni  dans  le  capitulaire  de  Char- 
lemagne  ayant  pour  titre  De  Villis,  ni  dans  les 
plus  anciens  livres  français  traitant  de  botanique. 
Il  est  donc  hors   de   doute  que  la  plante  repro- 


duite par  les  sculpteurs  du  XV<^  siècle  et  que  l'on 
nomme  le  chou  frisé,  n'est  pas  cette  plante.  C'est 
très  probablement  la  chicorée  ou  le  chou  ordi- 
naire dont  les  premières  feuilles  s'enroulent  un 
peu  sur  elles-mêmes,  et  dont  les  grosses  côtes 
semblent  reproduites  dans  les  crosses  du  XV« 
siècle. 

M.  le  Curé-Doyen  de  Notre-Dame  de  Cléry 
nous  dit  que  le  chou  frisé  très  tourmenté  abonde 
dans  son  église  construite  de  1460  à  1480.  Je 
n'ai  pas  eu  l'avantage  de  voir  cet  édifice,  mais 
d'après  une  photographie  mise  sous  mes  yeux, 
j'ai  reconnu  que  dans  la  partie  de  l'édifice  don- 
née par  cette  photographie,  se  trouvait  la  plante 
sculptée  partout  pendant  la  dernière  période  de 
l'époque  gothique.  Il  faut  donc,  je  crois,  renoncer 
à  voir  dans  Notre-Dame  de  Cléry,  comme  ail- 
leurs, le  fameux  chou  frisé.  C'est  une  erreur  évi- 
dente et  d'autant  plus  difficile  à  déraciner  qu'elle 
a  pour  auteurs,  ainsi  que  cela  arrive  souvent,  des 
hommes  que  leur  science  et  leurs  travaux  ont 
rendus  justement  célèbres. 

Agréez,  je  vous  prie,  Monsieur  le  Secrétaire, 
l'hommage  de  mes  sentiments  les  plus  dévoués. 

Emile  Lambin. 


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i 


Trabau):  lies  JSocictés  savantes.  €^iis 


Société  des  Antiquaires  de  France.  — 
Scattce  du  7  novembre  içoo.  M.  Blanchet  entre- 
tient la  Société  de  diverses  pierres  gravées  an- 
tiques considérées  comme  préservatifs  contre  les 
maladies. 

M.  Omont  présente  un  fac-similé  du  manuscrit 
de  Phèdre  de  St-Remi  de  Reims  exécuté  au 
XVI IP  siècle,  récemment  acquis  par  la  Biblio- 
thèque Nationale.  Le  manuscrit  original  a  été 
brûlé  en  1774. 

Séance  du  14.  novembre.  —  M.  Germain  Bapst 
fait  une  communication  sur  deux  bustes  de 
Pigalle  représentant  l'un  le  M-i'  de  Saxe,  l'autre, 
le  M'^'  de  Lôwendal,   qui   se  font  pendant. 

M.  Mowat  communique  les  inscriptions  de 
deux  tablettes  commémoratives  de  la  fondation 
et  de  la  réparation  d'édifices  publics  par  les 
préfets  de  Rome  Albinus,  Basilius  et  Annius 
Symmachus,  dont  il  a  trouvé  le  dessin  dans  le 
recueil  manuscrit  de  Bascas  de  Bagaris. 

M.  Mowat  signale  ensuite  les  restes  d'une 
inscription  gravée  au  bas  de  la  statue  du  Mer- 
cure gaulois  de  Lezoux  exposée  dans  une  galerie 
du  Petit  Palais. 

Séance  du  21  novembre.  —  Lecture  est  donnée 
de  la  lettre  par  laquelle  M.  Pallu  de  Lessert  pose 
sa  candidature  à  la  place  laissée  vacante  par  la 
mort  de  M.   Samuel  Berger. 

M.  Henri  Stein,  membre  résidant,  communique 
la  photographie  d'un  dessin  exécuté  en  1621 
d'après  une  tapisserie  représentant  la  bataille  de 
Formigny  et  qui  ornait,  au  début  du  XVI  I*=  siècle, 
la  chambre  de  S.  Louis  et  la  pièce  voisine  au 
château   de   Fontainebleau. 

M.  Vitry,  associé  correspondant,  propose  d'at- 
tribuer à  Lemoyne  le  buste  du  Maréchal  de  Lô- 
wendal du  musée  de  St-Jean  à  Angers  dont 
M.  Germain  Bapst  avait  entretenu  la  Société 
dans  la  dernière  séance  et  qui  était  jusqu'ici  attri- 
bué à  Pis7alle. 


Académie  des  Inscriptions  et  Belles-Let- 
tres. —  Séance  du  7  septembre  içoo.  —  La  stèle 
des  Vautours. —  M.  Ileuzey  entretient  l'Académie 
d'un  travail  de  reconstitution  du  grand  bas- 
relief  historique  du  roi  Eannadou,  découvert  en 
Chaldée  par  M.  de  Sarzec,  et  connu  sous  le 
nom  de  «  stèle  des  Vautours  ». 

Grâce  à  cette  restitution  matérielle,  établie 
avec  des  moulages,  la  place  des  sept   fragments 


jusqu'ici  retrouvés  a  pu  être  déterminée  avec 
certitude. 

Un  petit  fragment,  dont  le  moulage  a  été 
envoyé  très  obligeamment  par  le  British  Muséum, 
a  contribué  à  cette  confirmation.  Il  donne,  en 
effet,  le  pied  droit  de  la  grande  figure  de  la  divi- 
nité qui  tient  les  prisonniers  enfermés  dans  une 
sorte  de  cage.  Or,  en  rétablissant  le  tracé  des 
losanges  qui  forment  le  treillis  de  cette  cage,  on  a 
obtenu,  géométriquement,  la  hauteur  de  la  figure 
principale. 

Sur  la  face  opposée,  le  même  fragment  est 
venu  compléter  une  des  scènes  les  plus  curieuses: 
la  représentation  des  funérailles  après  le  combat. 
A  côté  de  la  pyramide  de  cadavres  humains,  on 
voit  maintenant  un  entassement  d'animau.x  im- 
molés, sur  lesquels  un  homme  complètement  nu 
était  monté  pour  procéder  au  rite  de  la  libation. 
Cet  acte  religieux  s'accomplit  suivant  le  rite 
chaldéen,  c'est-à-dire  que  la  libation,  au  lieu  de 
se  perdre  à  terre,  est  versée  sur  des  bouquets  de 
branches  de  palmiers,  avec  leurs  régimes  de 
dattes.  Ces  gerbes  végétales  sont  placées  dans 
deux  grands  vases  auprès  du  taureau  couché, 
qui  est  la  principale  victime  offerte. 

L'  «  Enfant  à  l'oie  ».  —  M.  S.  Reinach  com- 
munique un  mémoire  sur  l'Enfant  à  l'oie. 
Suivant  lui,  le  groupe  bien  connu,  copie  d'un 
bronze  du  sculpteur  grec  Boéthos,  que  possède 
le  nuisée  du  Louvre,  n'est  pas  une  simple  œuvre 
de  fantaisie,  ni  la  représentation  d'une  lutte 
espiègle  entre  un  enfant  et  une  oie.  Il  est  fondé 
à  croire  qu'il  s'agit  d'Esculape  enfant  qui,  attaqué 
par  une  oie  sauvage,  en  a  raison  et  en  fait  par  la 
suite  son  animal  familier.  M.  Reinach  s'appuie 
sur  ces  différents  faits  qu'il  y  avait  des  oies  gué- 
risseuses dans  les  temples  d'Esculape,  que  celui 
de  l'île  de  Cos  renfermait  le  groupe  de  Boéthos, 
et,  enfin,  que  ce  sculpteur  lui-même  est  nommé, 
dans  une  inscription  grecque,  comme  l'auteur 
d'une  statue  célèbre  d'Esculape  enfant. 

L'Hermès  de  Théodoridas.  —  M.  Héron  de 
Villefosse  annonce  qu'il  vient  de  retrouver,  au 
musée  du  Louvre,  une  base  en  marbre  portant 
une  inscription  grecque  où  se  lit  le  nom  de 
Théodoridas,  fils  de  Laistratos  ;  le  monument 
était  connu  depuis  la  découverte  à  Milo  de  la 
fameuse  Vénus  par  le  dessin  d'un  officier  de 
marine,  nommé  Vautier,  qui  avait  assisté  à  la 
trouvaille  de  ladite  Vénus  et  de  deux  Hermès, 
l'un  imberbe,  l'autre  barbu,  tous  deux  conservés 
au  Louvre.  La  base  avait  été  malencontreusement 
séparée  de  l'Hermès  barbu,  et  l'importance  capi- 


Cra^au;r  Des  Sociétés  savantes. 


6i 


taie  de  la  communication  de  M.  Héron  de  Ville- 
fosse  consiste  en  ce  fait  qu'elle  doit  en  être  rap- 
prochée. La  mémoire  de  Vautier  se  trouve  donc 
lavée  du  reproche  d'inexactitude  dont  on  l'avait 
chargée,  et  les  historiens  de  l'art  tireront  de  cette 
constatation  un  réel  profit. 

C'est  ce  que  M.  S.  Reinach  s'empresse  de 
mettre  en  lumière,  en  félicitant  M.  Héron  de 
Villefosse  de  sa  communication.  «  Désormais, 
dit-il,  il  faut  écarter  l'opinion  de  M.  Furtvvœngler, 
qui  datait  la  Vénus  de  Milo  de  l'an  loo  avant 
J.-C,  et  voir  se  confirmer  l'hypothèse  qu'il  a  mise 
en  avant,  à  savoir  que  la  Vénus  et  le  Neptune 
de  Milo  datent  de  380  environ  avant  J.-C.  Ce 
Neptune,  en  effet,  a  été  offert  par  le  même  Théo- 
doridas  qui  a  consacré  la  base  de  l'Hermès 
retrouvée  par  M.  de  Villefosse,  laquelle,  d'après 
les  caractères  de  l'inscription  est  antérieure  à 
l'année  350.  » 

Séance  du  20  septembre.  —  ^  M.  Homolle 
rend  compte  des  travaux  de  l'École  française 
d'Athènes  dont  il  est,  comme  on  sait,  directeur, 
au  cours  de  l'année  1900.  Il  rend  hommage  au 
zèle  dont  ont  fait  preuve  les  membres  et  entre- 
tient la  Compagnie  des  fouilles  faites  ou  con- 
tinuées en  Thrace,  en  Crète,  à  Delphes. 

M.  Héron  de  Villefosse  lit  un  rapport  du 
P.  Delattre  sur  les  dernières  fouilles  pratiquées 
par  ce  savant  à  Carthage. 

Séance  du  2S  septembre.  —  M.  E.  Babelon 
présente  à  l'Académie  deux  disques  ou  rondaches 
en  argent  doré,  de  travail  oriental,  ornés  sur  leur 
surface  de  scènes  de  chasse  en  relief,  au  repoussé, 
qui  rappellent  la  décoration  de  certaines  coupes 
sassanides. 

Ces  deux  disques  étaient  probablement  des 
umbo  de  boucliers.  Sur  celui  qui  est  le  mieux 
conservé,  on  lit  deux  inscriptions  grecques  : 
Sanctuaire  d'Artémis  et  Des  offrandes  du  roi 
Mitliridate.  Ce  roi  Mithridate  est  probablement 
Mithridate  le  Grand,  le  terrible  adversaire  des 
Romains.  Quant  au  temple  d'Artémis,  il  s'agit  de 
la  déesse  Ma  ou  Emyo,  de  Comana,  dans  le  Pont, 
où  ces  deux  monuments  ont  été  découverts. 

Séance  du  iç  octobre.  —  Fouilles  de  Tunisie.  — 
M.  Cagnat,  au  nom  de  M.  Gauckler,  communique 
à  l'Académie  le  résultat  des  fouilles  entreprises 
par  M.  le  lieutenant  Gombeaud  dans  le  poste 
romain  de  Ksar-Rhelân,  dans  le  Sahara  tunisien. 

Le  déblaiement  de  ce  poste  a  amené  la  décou- 
verte de  toute  la  série  des  chambres  qui  consti- 
tuaient la  caserne,  d'un  réduit  central  réservé  au 
commandant  du  poste  et  de  constructions  an- 
nexes situées  à  quelque  distance  du  fortin.  De 
plus,  on  y  a  trouvé  une  inscription  donnant  le 
nom  antique  de  la  localité  :  Tisavar. 


Les  Types  féminins  de  Lysippe.  —  Dans  une 
communication  sur  les  types  féminins  de  Ly- 
sippe, M.  S.  Reinach  remarque  d'abord  que  les 
historiens  de  l'art  grec  ne  s'occupent  habituel- 
lement que  des  types  virils  créés  par  Lysippe, 
tandis  que  les  textes  antiques  lui  attribuent 
aussi  les  figures  de  femmes  et  que,  dans  l'œuvre 
immense  qu'il  a  laissée,  ces  figures  doivent 
occuper  une  place  importante. 

Prenant  pour  point  de  départ  la  copie  de 
X  "i poxyomcne  de  Lysippe  du  Vatican,  qui  est 
admirablement  conservée,  M.  Salomon  Reinach 
essaye  d'établir  que  les  caractères  particuliers  de 
cette  sculpture,  notamment  la  forme  et  les  dimen- 
sions relatives  des  traits  du  visage,  se  retrouvent 
dans  plusieurs  têtes  de  femmes  en  marbre,  no- 
tamment dans  la  prétendue  Oniphale  d'une  col- 
lection anglaise  et  les  statues  drapées  du  musée 
de  Dresde,  qui  ont  été  découvertes  à  Hercula- 
num.  Il  exprime  l'avis  que  ces  trois  statues 
représentent  Mnémosyne  accompagnée  de  deux 
Muses  et  sont  les  copies  exactes  d'un  groupe  en 
bronze  de  Lysippe,  qui  était  conservé  à  Megare. 

Au  sujet  des  copies  en  marbre  des  statues  de 
bronze,  M.  Salomon  Reinach  croit  pouvoir  poser 
en  principe  que  les  statues  de  bronze  seules 
étaient  moulées  dans  l'antiquité,  celles  de  marbre 
étant  soustraites  à  cette  opération,  qui  en  aurait 
gâté  la  polychromie.  Donc,  toutes  les  fois  qu'on 
trouve  deux  ou  plusieurs  répliques  exactement 
concordantes  d'une  figure  antique,  il  faut  admet- 
tre que  l'original  était  en  bronze. 

Ce  principe  entraîne  des  conséquences  impor- 
tantes pour  l'histoire  de  l'art.  Il  oblige,  notam- 
ment, à  rapporter  à  un  original  en  bronze,  et  non 
à  un  marbre,  d'Alcamène  ou  de  Pra.vitèle,  le 
beau  type  dit  de  la  Vénus  genitri.v,  dont  il  existe 
de  très  nombreuses  répétitions. 

Séance  du  2J  octobre.  —  L'illustration  des 
œuvres  de  Pétrarque.  —  M.  Muntz  lit  un  nouveau 
chapitre  du  travail  considérable  auquel  il  s'est 
consacré  sur  l'illustration  des  œuvres  de  Pé- 
trarque, du  XIV<^  au  XV  siècle.  Cette  fois,  il 
s'occupe  du  traité  De  remediis  utriusquc  fortunœ. 
A  la  différence  des  Triomphes,  ce  traité  n'est 
pas  interprété  par  ses  nombreux  illustrateurs 
avec  esprit  d'unité,  Les  plus  remarquables 
compositions  auxquelles  il  ait  donné  lieu  en 
France  sont  une  série  de  miniatures  du  temps 
de  Louis  XII,  conservées  dans  un  manuscrit  de 
la  liibliothèque  Nationale. 

En  Allemagne,  le  traité  des  Remèdes  inspira 
plus  d'artistes,  grâce  aux  illustrations  d'un  gra- 
veur de  l'école  de  Burgkmair,  qui  parurent  à 
Augsbourg  en  1532  et  furent  réimprimées  une 
dizaine  de  fois  jusqu'au   milieu  du  XVI I-^  siècle. 


62 


9Rc\)uc  lie  rSrt  cbrctieu. 


Congrès  des  Sociétés  savantes  et  réunion 
des  Sociétés  des  Beaux-Arts  des  Départe- 
ments. —  Le  mardi  5  juin  s'est  ouvert,  à  la 
Sorbonne,  pour  se  clôturer  le  9  juin,  le  Congrès 
des  Sociétés  savantes.  Voici  la  nomenclature  des 
travaux  qui  ont  été  lus  dans  la  section  d'archéo- 
logie. 

Mardi  ^  juin.  —  M.  l'abbé  Hamard  lit  un  mé- 
moire sur'une  statue  équestre  romaine  en  pierre 
qu'il  a  découverte,  brisée,  dans  les  fouilles  de 
Hermès  (Oise)  et  sur  une  bague  antique  en  or 
trouvée  dans  les  mêmes  fouilles. 

Lecture  d'une  étude  de  M.  Barrière-Flavy  sur 
l'industrie  des  barbares  alamans. 

M.  l'abbé  Brune  fait  une  communication  sur 
plusieurs  statues  anciennes  conservées  dans  quel- 
ques églises  de  villages  du  Jura. 

M.  Pilloy  lit  un  mémoire  sur  divers  objets 
découverts  dans  les  cimetières  romains  ou  francs 
du  département  de  l'Aisne  et  sur  lesquels  on  lit 
de  courtes  inscriptions. 

Lecture  d'un  mémoire  de  M.  de  Rouméjoux 
contenant  la  description  d'une  maison  de  cam- 
pagne sise  dans  un  faubourg  de  Cahors  et  qui  a 
appartenu  à  la  famille  Issala. 

M.  Guignard  rend  compte  des  dernières  fouilles 
opérées  à  Averdon  (Loir-et-Cher). 

Mercredi  6  juin  —  M.  Joubin  communique 
une  série  de  photographies  de  monuments  grecs 
inédits  de  l'ancienne  collection  Radowitz,  acqui- 
ses en  1894,  par  le  musée  de  Constantinople. 

M.  Bousrez  signale  l'abside  polygonale  de  la 
petite  chapelle  Saint-Genest  à  Perrusson  (Indre- 
et-Loire). 

M.  Jules  Gauthier  lit  une  étude  archéologique 
sur  la  cathédrale  de  Saint-Étienne  de  Besançon, 
—  puis  sur  les  pièces  d'honneur  et  les  jetons  de 
la  cité  de  Besançon  frappés  dans  l'atelier  moné- 
taire de  la  ville  et  destinés  aux  co-gouverneurs 
et  administrateurs. 

M.  Jules  Pilloy  lit  une  étude  sur  l'orfèvrerie 
cloisonnée  de  la  période  barbare  des  Gaules. 

Lecture  d'un  mémoire  de  M.  Robert  Roger 
sur  les  églises  fortifiées  de  l'Ariège. 

Lecture  d'un  travail  de  M.  Henry  Corot,  con- 
sacré à  la  description  des  vases  de  bronze  préro- 
mains, cistes  et  œnochoés,  trouvés  en  France. 

M.  Julien  Feuvrier  rend  compte  des  fouilles 
qu'il  a  opérées  dans  un  cimetière  burgonde  dé- 
couvert à  Chevigny  (Jura),  en  1899. 

M.  Léon  Coutil  rend  compte  des  fouilles  qu'il 
a  exécutées  à  Pitres  (l'Lure). 

M.  le  vicomte  de  Rochemonteix  donne  lecture 
d'un  important  mémoire  sur  les  caractères  qui 


distinguent  les  églises  romanes  des  arrondisse- 
ments de  Saint-Flour  et  de  Murât  des  églises 
romanes  de  l'arrondissement  de  Mauriac. 

Séance  du  jeudi  y  Juin.  —  M.  Louis  Bousrez 
décrit  une  série  de  tronçons  de  colonnes  décorés 
d'imbrications  qui  ont  été  convertis  en  bénitiers 
et  qui  se  trouvent  en  Touraine. 

M.  Gaston  Gauthier  fait  un  rapport  sur  les 
fouilles  gallo-romaines  de  Champvert  (Nièvre), 
qu'il  dirige  depuis  1896. 

M.  Masfrand  rend  compte  des  fouilles  qu'il 
poursuit  depuis  plusieurs  années  à  Chassenon 
(Charente). 

M.  Alphonse  Gosset  présente  un  ouvrage  orné 
de  quarante  planches,  consacré  à  la  description 
de  l'église  Saint-Remi  de  Reims.  Nous  en  ren- 
drons coinpte. 

M.  le  commandant  Bordier  expose  le  résultat 
des  fouilles  qu'il  a  faites  en  Tunisie  sur  l'empla- 
cement des  villes  antiques  de  Siagu  et  de  Pupput. 

M.  Gaston  Bonnery  entretient  la  section  d'une 
trouvaille  de  monnaies  gauloises  faite  en  novem- 
bre 1899  à  Francueil  (Indre-et-Loire). 

M.  Alphonse  Martin  lit  une  étude  archéolo- 
gique sur  le  château-fort  d'Orcher  (arrondisse- 
ment du  Havre). 

M.  Emile  Perrier  communique  des  notes  sur 
deux  sceau.x  inédits  et  très  intéressants  des 
XII F' et  XV<=  siècles. 

M.  Joseph  Poux  lit  une  étude  sur  les  fortifi- 
cations de  la  ville  de  Foix  et  le  quartier  de 
r.Arget,  de  1446  à  1790. 

M.  L.  Quarré-Reybourbon  lit  un  mémoire  sur 
Martin  Doué,  peintre,  graveur,  héraldiste  et  gé- 
néalogiste lillois. 

M.  l'abbé  Bossebceuf  présente  quelques  consi- 
dérations sur  les  constructions  militaires  du 
Mont-Saint-Michel. 

M.  Eugène  Thoison  communique  des  frag- 
ments de  poteries  romaines  recueillies  à  Larchant 
(Seine-et-Marne). 


Congrès  des  Sociétés  savantes  à  Nancy  en 
1901.  —  C'en  est  fait  :  La  tentative  de  décentra- 
lisation du  Congrès  des  Sociétés  savantes  qui  a 
si  bien  réussi  en  1899,  grâce  au  chaleureux 
accueil  fait  à  ces  Sociétés  par  la  population 
toulousaine,  se  continue  et,  en  1901,1e  Congrès 
se  tiendra  à  Nancy,  ville  au  reste  admirablement 
choisie  à  cet  effet. 

Le  programme  du  Congrès  vient  d'être  édicté 
par  le  Comité  des  travaux  historiques  et  scienti- 
fiques: il  comprend  à  côté  des  questions  d'his- 
toire, d'archéologie,  de  sciences  et    d'économie 


Cratjaujc  Des  Sociétés  satianteô. 


63 


sociales  proposées  par  le  Comité,  des  sujets  de 
communications  proposés  par  les  Sociétés  sa- 
vantes de  Nancy  et  de  la  région. 

Au  nombre  de  ces  sujets,  nous  relevons,  en 
archéologie,  le  classement  des  anciennes  églises 
de  la  région,  d'après  leur  style,  et,  en  économie 
sociale,  le  mode  d'habitation  en  Lorraine  et  dans 
les  Vosges. 

Dans  les  questions  posées  par  le  Comité,  il 
faut  surtout  citer  en  archéologie,  les  questions 
toujours  maintenues  au  programme  et  relatives 
aux  caractères  qui  distinguent  les  écoles  d'archi- 
tecture religieuse  à  l'époque  romane,  question 
qui,  si  l'on  s'attache  à  répondre  aux  desiderata 
du  programme,  doit  amener  avec  le  temps  la 
monographie  de  toutes  les  églises  romanes 
encore  existant  en  France. 

En  économie  sociale,  une  question  du  plus 
haut  intérêt  pour  le  développement  des  loge- 
ments salubres  des  travailleurs  est  ainsi  libellée: 
Exposer  dans  quelles  mesures  et  sous  quelles 
conditions  il  est  permis  en  France  et  à  l'étranger 
d'employer  les  fonds  et  la  fortune  personnelle 
des  Caisses  d'Epargne  à  la  construction  d'habi- 
tations à  bon  marché. 

Enfin  dans  la  section  des  sciences  oîi  sont  de 
plus  en  plus  traitées  les  questions  d'hygiène,  il 
faut  relever  les  questions  relatives  à  la  salubrité 
dans  les  milieux  habités  et  à  la  loi  de  la  santé 
publique,  loi  votée  il  y  a  plusieurs  années  déjà 
par  la  Chambre  des  députés,  mais  à  la  suite 
d'études  insuffisantes,  et  à  laquelle  une  Com- 
mission sénatoriale  propose  d'apporter  d'impor- 
tants amendements  (i). 

Commission  diocésaine  des  monuments. 
—  Mgr  Fallières,  évéque  de  Saint-Brieuc,  vient 
de  créer  dans  son  diocèse  une  Commission  qui 
devrait  exister  partout  en  France.  Aucune  con- 
struction, aucune  restauration,  nulle  démolition, 
pas  la  moindre  aliénation  de  mobilier  religieux 
ne  pourront  avoir  lieu  sans  l'avis  de  cette  Com- 
mission, composée  d'archéologues  et  de  lettrés 
bretons. 

Pareilles  Commissions  fonctionnent  également 
dans  les  diocèses  belges. 


La  Commission  royale  des  monuments  de 
Belgique  a  tenu  en  octobredernier,sonas.semblée 
générale  annuelle,  sous  la  présidence  de  M.  La- 
gazse-de  Locht,  auprès  de  qui  avaient  pris  place 
au  bureau  M.  Van  der  Bruggen,  ministre  de 
l'agriculture  et  des  beaux-arts  ;  M.  le  gouverneur 
de  la  Flandre  orientale  ;  MM.  Helbig,  vice-pré- 
sident,   et    Massaux,    secrétaire,  MM.   Reusens, 

I.  La  construction  tnoderne. 


Van  Ysendyck,  Bordiau,  Van  Wint,  Blomme, 
Van  Assche,  Acker  et  Verlant. 

M.  van  der  Bruggen  ouvre  la  séance,  et  déplore 
la  perte  de  M.  Albrecht  de  Vriendt. 

Il  est  donné  lecture  du  rapport  annuel  de  la 
Commission  centrale,  rendant  compte  des  tra- 
vaux accomplis  pendant  l'exercice  écoulé.  Elle 
a  tenu  48  séances  et  a  fait  127  inspections.  Il 
exprime  le  regret  que  l'on  ne  soumette  pas  à 
l'examen  de  la  Commission  les  projets  des  mo- 
numents, dépendant  de  l'administration  des 
chemins  de  fer.  Il  demande  qu'on  s'occupe  de 
conserver  les  ruines  de  l'abbaye  d'Orval  et  qu'on 
rédige  une  monographie  de  l'abbaye  de  Villers, 
que  restaure  en  ce  moment  M.  Licot. 

L'assemblée  entend  ensuite  les  rapports  des 
Comités  de  province.  Celui  d'Anvers,  par  l'organe 
de  M.  Donnet,  regrette  la  disparition  inévitable 
de  la  tour  de  la  vieille  église  d'Arendonck,  contre 
la  démolition  de  laquelle  le  Comité  s'était  pro- 
noncé. 

M.  l'architecte  provincial  Dumortier,  rappor- 
teur du  Comité  du  Brabant,  développe  la  question 
de  la  conservation  des  monuments  publics.  Le 
rapport  fait  allusion  aussi  à  l'inventaire  des 
objets  d'art  de  la  province. 

M.  Bethune,  rapporteur  de  la  Flandre  occiden- 
tale, étant  indisposé  et  son  rapport  n'étant  point 
parvenu  au  président,  la  parole  est  donnée  à 
M.  De  Ceuleneer,  rapporteur  de  la  Flandre  orien- 
tale, qui  parle  de  la  restauration  des  tableaux 
d'église. 

L'orateur  se  prononce  contre  l'organisation 
d'expositions  jubilaires  ou  commémoratives  des 
maîtres  anciens,  comme  l'exposition  Van  Dyck, 
à  cause  de  la  détérioration  des  toiles  causée  par 
le  transport,  ou  de  la  destruction  possible  par 
l'incendie  de  tout  l'œuvre  d'un  artiste. 

On  entend  encore  M.  Tandel,  rapporteur  du 
Luxembourg  ;  M.  Hubert,  rapporteur  du  Hai- 
naut  ;  M.  Lohest,  rapporteur  de  la  province  de 
Liège  ;  M  l'abbé  Daniels,  rapporteur  du  Lim- 
bourg  ;  M.  Boveroulle,  rapporteur  de  la  province 
de  Namur. 

La  question  principale  inscrite  à  l'ordre  du 
jour  :  «  Conditions  et  circonstances  dans  lesquel- 
les est  recommandé  l'emploi  :  a)  de  la  mise  du 
verre  en  plomb  ;  b)  du  vitrail  incolore  ;  c)  de  la 
grisaille  ;  (^/)  du  vitrail  coloré,»  est  renvoyée  à 
l'assemblée  prochaine,  afin  de  permettre  à  M. 
Bethune  d'achever  le  travail  qu'il  prépare  sur 
cette  question  —  et  la  séance  est  levée  après 
quelques  communications  diverses. 


Académie  royale  d'archéologie  de  Bel- 
gique. —  Séance  du  y  octobre  içoo.  —  M.  l'in- 
génieur Louis  Siret,  qui  dirige  en  Espagne  une 


64 


3Rcbue  De  V^xt  cbvctieu. 


importante  exploitation  minière,  profite  de  son 
passage  à  Anvers  pour  faire  part  à  ses  collègues 
de  ses  dernières  trouvailles  archéologiques,  com- 
plément heureux  à  celles  qu'il  avait  faites  autre- 
fois avec  tant  de  succès,  de  concert  avec  son 
frère,  M.  Henri  Siret. 

M.  F.  Donnet  fait  connaître  et  commente 
quelques  lettres  inédites  relatives  à  Hélène  Four- 
ment,  la  femme  de  Rubens. 

M.  le  chan.  Van  Caster  développe  ensuite 
la  thèse  que  dans  les  monuments  du  moyen  âge 
les  peintures  murales  n'étaient  pas  exécutées 
d'après  un  plan  d'ensemble  conçu  par  l'architecte 
de  l'œuvre.  Il  prouve  qu'il  est  naturel  d'orner  les 
murs  de  décorations  polychromes  et  que  cet 
usage  a  été  universel.  Il  fait  toutefois  des  distinc- 
tions entre  la  peinture  murale  proprement  dite 
et  la  polychromie.  Il  fait  remarquer  qu'en  général 
les  artistes  n'ont  pas  cultivé  simultanément  et 
avec  un  égal  succès  diverses  branches  ;  rarement 
ils  excellent  en  plusieurs  à  la  fois,  mais  bien 
souvent  au  contraire  ils  doivent  recourir  à  l'aide 
de  confrères. 

L'orateur  s'efforce  ensuite  de  prouver  que  lors 
de  l'édification  des  monuments,  les  architectes 
ne  se  sont  pas  préoccupés  des   peintures  et   que 


celles-ci  ont  été  exécutées  sans  plan  d'ensemble 
et  au  fur  et  à  mesure  des  circonstances. 

M.  Helbig  est  d'avis  que  la  thèse  précédente 
comporte  de  nombreuses  réserves.  D'après  lui 
les  décors  picturaux  s'imposent,  ce  sont  les  der- 
niers revêtements  de  l'architecture.  Il  fait  remar- 
quer que  dans  leur  conception  il  y  a  lieu  de  tenir 
compte  de  l'élément  religieux,  puisque  dans 
beaucoup  de  cas  la  décoration  s'effectue  sous  la 
direction  de  prêtres  et  de  théologiens.  Enfin,  il 
cite  de  nombreux  exemples  empruntés  surtout 
aux  monuments  religieux  allemands  et  italiens, 
par  lesquels  il  prouve  que  des  peintures  murales 
ont  été  exécutées  d'après  un  plan   d'ensemble. 

M.  le  chan.  van  den  Gheyn  fait  remarquer 
que  les  deux  orateurs  trahissent  dans  leurs 
opinions  de  nombreux  points  de  contact,  et  que 
malgré  leurs  conclusions  contraires  ils  pourraient 
arriver  à  une  solution  commime.  Si  les  peintures 
murales,  dans  beaucoup  de  cas,  ont  été  exécu- 
tées d'après  un  plan  d'ensemble,  rien  ne  prouve 
que  ce  plan  émane  de  l'architecte  du  monument. 
L'orateur  rencontre  l'adhésion  unanime  quand  il 
propose,  vu  l'importance  de  la  question,  de  con- 
tinuer dans  une  prochaine  séance  cette  intéres- 
sante discussion  avec  tous  les  développements 
qu'elle  comporte.  P. 


^ 


i^WWW^WWWWWWWWWWWWW^WWWWWWW 


RACCOLTA  DI  DIVISE  O  MOTTI  ARALDICI, 

par  G.  PiETRAMELLARA  ;  Roine,  Propagande,  in  8"  de 
94  pag. 

^^^^^f*'E  recueil  sera  fort  utile  à  consulter- 
W  II  contient,  par  ordre  alphabétique, 
j^  toutes  les  devises  que  fournit  le 
\\î;  blason  italien.   A  la  fin,  une   table, 

iSfWWî^^ii  également  alphabétique,  donne  les 

noms  des  familles  citées. 

Les   devises  sont  généralement  en  latin,  très 

souvent    en    français,    moins    fréquemment    en 

italien    et   rarement    en    espagnol  ;    le    grec    et 

l'allemand  sont  l'exception. 

D'ordinaire,  elles  sont  courtes,  consistant  en 
deuxou  trois  mots.  En  latin,  elles  procèdent  soit 
de  l'Écriture  sainte,  soit  des  poètes  :  parfois  on 
abrège  la  citation. 

Amat,  en  Sardaigne,  emprunte  ce  texte  aux 
Psaumes  de  David  :  «  Loquebar  de  testimoniis 
tuis  in  conspectu  regum  >.  Noto,  de  Palerme,  dit 
avec  Virgile  :  «  Avulso  uno  non  déficit  alter  ». 
La  phrase  est  écourtée  pour  Franchi,  de  Turin  : 
«  Audio,  video,  taceo  donec  »,  le  sens  exige 
pour  finir  loquar  ipse. 

La  liturgie  a  fourni:  «  Virga  Jesse  floriiit,Auyi 
Palasco,  de  Côme  ;  Te  Démit  laudaviiis,  aux 
Maggi,  de  Crémone  ;  In  labore  feç!eùs,ai\K  délia 
Valle,  en  Piémont. 

Certaines  devises,consistant  en  lettres  initiales, 
sont  énigmatiques  :  il  eût  été  bon  de  les  accom- 
pagner d'un  commentaire.  «  M,  Mellini,  di  Vel- 
letri  »  ;  «  A.  V.  L  S.  A.  dell'  Isola,  di  Chivasso  ». 
On  trouve  même  les  premières  lettres  de  l'alpha- 
bet :  <•<  A.  B.  C.  D.  E.  F.,  Orseninghi,  di  Treviso  », 
devise  qui  conviendrait  bien  à  un  maître  d'école. 

La  devise  se  règle  sur  le  nom  :  «  Arcliiniea 
laus,  Archinto,  di  Milano  »  ;  «  Et  inundo  corde, 
Alimonda,  di  Genova  »  ;  «  Laboraiite  oiiinia, 
Laboranti  »  ;  «  Gradatini,  Scala,  di  Firenze  », 

Il  eût  été  bon  d'indiquer  le  pourquoi  de  cer- 
taines devises.  Les  Montalto,  de  Sicile,  qui  se 
rattachent  aux  Montault  de  France,  portent,  non 
pas  Duriora  conco.xit,  mais  Diiriora  decoxi,  car 
c'est  le  griffon  du  cimier  qui  parle,  montrant  le 
biscaïen  qu'il  tient  dans  une  de  ses  pattes. 

Les  devises  ne  sont  pas  toujours  uniques  :  il 
y  a  lieu  de  rechercher  qui  a  commencé  et  qui  a 
copié.  Au  XVI'=  siècle,  l'amiral  de  Bonnivet  avait 
pris  Festina  lente,  qui,  actuellement,  est  revendi- 
qué par  les  Malpenga,  les  Vallesa  et  les  Vitulo. 
A  la  même  date,  les  de  Gouffier  inscrivaient  sur 


leur  superbe  château  d'Oiron  (Deux-Sèvres)  le 
virgilien  Teiinimis  Iiœret,  que  je  retrouve  chez  les 
Claretti,  de  Nice. 

L'opuscule  est  clos  par  la  liste  des  devises  des 
ordres  chevaleresques,  anciens  et  modernes. 

X.  B.  DE  M. 


BIBLIOGRAPHIE  DES  INVENTAIRES. 

1.  — •  MOBILIER  DE  DEUX  CHANOINES, 
ET  BIBLIOTHÈQUE  D'UN  OFFICIAL  DE 
NEVERS,  EN  1373-1382,  par  René  DE  LespinaSSE, 
dans  le  Bulleiiri  de  la  Société  Nivernm'se,  1899,  pp.  44-71. 

Ces  deux  inventaires  peuvent  être  considé- 
rés comme  n'en  faisant  qu'un,  car  ils  se  rap- 
portent l'un  et  l'autre  à  des  chanoines  de 
Nevers  et  datent  du  XIV^^  siècle.  Précédés  d'une 
excellente  introduction  et  d'un  résumé  substan- 
tiel, ils  ont  leurs  articles  numérotés,  un  peu 
trop  parcimonieusement  toutefois,  car  les  n°s 
se  rapportent  à  des  séries  et  non  à  des  objets 
séparés,  ce  qui  eût  mieux  valu  pour  les  citations. 
Cherchons-y  des  mots  qui  sont  de  nature  à 
compléter  le  Glossaire  arcliéologique. 

Acerine,  hachette  :  «  une  acerine  de  fer  ». 

Andier,  d'où  latidier,  en  y  incorporant  l'arti- 
cle. V.  Gay  s'arrête  au  XIII'^  siècle  :  «  une  père 
de  andiers  ». 

Atarge,  bourse  :  «  en  une  atarge  maille,  qui 
estoit  emmurée  en  la  cheminée  de  la  dicte 
estude  ». 

Beuverie,  cellier  ;  «  En  la  beuverie  dessus  la 
cave  ». 

Cerf  :  «  Une  corne  de  cerf.  Une  corne  de  cerf 
pendue  àchainnes  de  fer.»  Ce  bois  devait  entrer 
dans  la  composition  d'un  candélabre,  comme 
on  en  voit  dans  le  Nord. 

Chape.  Le  costume  canonial  complet  compor- 
tait à  Nevers  la  chape  ou  manteau,  qui  couvrait 
le  corps  ;  le  cauiail,  qui  couvrait  les  épaules, 
et  Y  au  musse,  qu'on  portait  au  bras  ou  sur  la  tête. 
La  chape  des  Dominicains,  avec  son  chaperon, 
donne  une  idée  exacte  de  la  chape  et  du  camail 
réunis. 

Chapelle  :  «  En  la  chappelle,ung  chétif  autel.  » 
Chaque  chanoine  avait  la  sienne  dans  sa  maison, 
il  en  était  ainsi  à  Angers. 

Garde  manger.  «  Ung  garde  manger  de  cuir 
ferré  ».  Gay  le  définit  «  une  bouteille  de  cuir». 
Est-ce  bien  exact  ? 


KKVUH    UE    L  AKT    CHKETIEN. 
I9OI.    I^*^    LIVRAISON. 


66 


9Elet)uc  lie  V^vt  t^vétten. 


Robbe  de  cardinal,  soutane  que  portent  encore 
les  chanoines  de  Nevers,  aux  solennités  ;  «  La 
robe  du  cardinal  entière  et  forée  (fourrée)  ». 

More,  boisson  d'eau  de  miel  :  «  II  mourez  de 
despanse  »,quede  Ste-Falaye  appelle  «  breuvage 
de  dépense  »  ou  piquette. 

Roue,  bibliothèque  tournante  :  «  En  l'estude, 
une  roe,  avecque  la  chère  de  l'estude  ». 

2.  —  INVENTAIRE  DU  CHATEAU  D'AN- 
NECY EN  1393, par  M.Max  BRUCHET,dans  le  Bulletin 
archéologique,  1S9S,  pp.  369-371. 

Cet  inventaire,  précieux  en  lui-même,  devient 
encore  plus  intéressant  par  la  façon  dont  il  est 
publié.  Je  n'ai  que  des  éloges  à  décerner  à  l'au- 
teur pour  son  introduction,  qui  résume  et  ex- 
plique le  document  et  les  annotations  dont  sont 
accompagnés  les  articles,  tous  numérotés  :  leur 
total  se  monte  à  209.  Comme  tout  a  été  dit  et 
bien  dit,  je  n'ai  plus  aucune  observation  à  pré- 
senter, sinon  sur  le  mot  orfroi,  interprété  dans 
le  sens  de  «  bordure  »  et  de  «  galon  »  :  ce 
n'est  pas  cela,  mais  une  bande  riche,  qui  fait 
valoir  l'ornement  et  varie  d'aspect  suivant  la 
pièce.  «  Unam  capellam  parvam  portativam,  de 
panno  sericis  rubeo,  offroisiato  offroisiis  de  Luca 
(n°  122).  »  Il  s'agit  d'une  chapelle  d'ornement 
en  soie  rouge,  avec  orfrois  de  drap  d'or  de  Luc- 
ques,  car,  plus  haut,  au  n°  102,  une  autre  cha- 
pelle est  dite  «  de  panno  auri  de  Luca  ». 
J'appellerai  l'attention  sur  certains  termes  : 
Burettes,  elles  ont  deux  noms  :  «  Duas  parvas 
canetas  capelle  argenti.  Duo  paria  parvarum 
vinagiarum  argenti  albarum  »  (no^  100,  193). 

Camelot  de  Reims  :  «  Curtine  de  cameloto  de 
Remis  »  (n»»  4,  8,  ii). 

Chandelier  de   cristal  :  «  Duo  parva  candela- 

bra   de   cristali,  quorum   unum   est   de    duobus 

peciis  et  habent  pedes  argenti   operati  »  (no  91). 

Épée  de  Bordeaux  :  «  Unum    gladium    Burde- 

galis  »  (n"  200). 

Œuvre  d'Afigleierre  :  «  de  opère  Anglie 
terre  »  (n°  28);  ce  sont  des  broderies  dont  M.  de 
Farcy  a  parfaitement  déterminé  le  genre  en 
citant  les  chapes  de  St-Jean  de  Latran,  d'Anagni, 
de  Pienza,  de  St-Hertrand  de  Comminges,  etc. 

Œuvre  de  Naples  :  «  Culcitram  pictam  operis 
de  Neapoli  »  (n°  13). 

Os,  dont  on  fait  une  selle  :  «  Unam  sellam 
equi,  factani  et  operatam  ossibus  albis  »  (n°  82). 
On  l'employait  par  économie,  à  défaut  d'ivoire. 
Ser,§-e  d'Allemagne,  «  Sargia  de  Alamania  » 
(n°  161)  et  de  Reims,  <i  quatuor  pecias  sargie 
Remensis  »  (n°  186).  On  l'emploie  à  clore  des 
fenêtres  sans  vitrage  :  «  Quatuor  sergias   anti- 


quas,  fuerunt  tradite  pro  capella  Domini,...  pro 
coperiendo  altare  et  faciendo  verrerias  »  (n°  62). 
Toile    de     Bourgogne  :     «   Quatuor    mappas 
grossas   de  tela  Burgundie  »  (n"  191). 

3.  — COMPTE  DES  FOURRURES  DES  ROBES 
DU  COMTE  ET  DE  LA  COMTESSE  D'ANGOU- 
LÈME,  DE  M«"'  D'ALBRET  ET  DE  MADE- 
LEINE DE  GÉRIS,  EN  1481,  dans  le  Bulletin  men- 
suel de  la  Société  archéologique  de  la  Charente,  1900, 
n°  8,  pp.  7-8. 

Les  fourrures,  énumérées  dans  ce  compte,  sont 
au  nombre  de  huit  :  «  Aigneaulx  blancs  », 
«  Aigneaulx  noirs  »,  «  Fouynes  »,  «  Gennetes  », 
«  Gris  »,  «  Martres  subelines  »,  «  Menu  ver  »  et 
«  Rampans  ».  ' 

4.  —FRAGMENT  D'UN  INVENTAIRE  ESTI- 
MATIF   DU     TRÉSOR    ROYAL     DE     FRANGE 

(\"  tiers  du  XV^  siècle),  par  LAliANliE,  dans  le  Bulletin 
archéologique  du  Comité  des  travaux  historiques,  1878, 
pp.  126-129. 

Les  articles,  peu  nombreux,  ne  sont  pas  nu- 
mérotés et  guère  annotés.  Voici  les  mots  les 
plus  saillants  : 

Cage  à  oiseaux.  «  Une  cage  d'or  quarrée  à 
broches,  oij  dedens  sur  la  perche  sont  deux 
oiseaulx,  laquelle  est  garnie  de  perles,  esmeraul- 
des  et  saphirs.  » 

Cure-dents.  «  Deu.x  ongles  à  furgier  dens, 
dont  l'un  est  blanc  et  l'autre  noir,  garniz  d'ar- 
gent esmaillez  de  blanc  et  pendant  chacun  à 
un  lacet  de  soye,oii  pend  en  chascun  ung  noyau 
de  perles.  » 

Escliiquetle,  manque  dans  le  Glossaire  :  «  Un 
viel  coffre  de  soye  vieille  escluquette,  à  une 
petite  serreure  d'argent.  » 

Encrier:  «  Ung  encrier  d'argent  doré,  carré, 
ouvré  à  la  façon  de  Venise,  pendant  à  ung  ias- 
set  vert  haiclié  à  fleurs  de  lis.  » 

Lanterne  :  «  Une  lanterne  de  cuir  noir  camos- 
syé  (chamoisé),  garnie  d'or  par  dehors  et  dedens 
d'argent.  » 

Saphirs  du  Puy  :  «  Ung  camahieu,  enchâssé 
en  «r  en  fasson  de  Damas,  bordé  d'or  à  IIII 
perles,  IIII  grenatz  et  IIII  saphirs  du  Puy,  pen- 
dant à  ung  las  de  soye.  » 

5.  —  LE  TRÉSOR  DES  ÉGLISES  DE  GASSE- 
NEUIL  ET  DE  TOURNON  (Lot-et-Garonne),  AU 
Xvr  SIÈCLE,  par  M.  (leorges  Thoi.in,  dans  le  Bul- 
letin archéologique  du  Comité  des  travaux  historiques, 
1898,  pp.  444-449- 

Il  y  a  là  deu.x  documents.  Le  premier,  posté- 
rieur à  [550,donne«  l'Inventaire  des  reliques  de 


Bibltograp{)te. 


67 


l'esglise  de  Sainct  Barthélémy  de  Tournon  )),où 
figure  en  tête  «  un  reliquaire  de  cuivre,  dans  le- 
quel il  y  a  de  la  peau  de  Sainct  Barthélémy  », 
car  il  fut  écorché.  «  Et  sur  le  dict  christallin  a 
une  petite  image,  ayant  un  Pater  noster  blanc 
sur  la  teste»  (n°  i).  Serait-ce  une  couronne  de 
perles  ? 

Le  «  procès  verbal  de  remise  du  trésor  de 
l'église  de  Casseneuil,  par  les  consuls  de  cette 
ville  aux  desservants  de  la  dite  église  »  date  du 
6  août  1559.  Il  compte  neuf  numéros,  qui  décri- 
vent des  reliquaires  gemmés  et  contiennent  plu- 
sieurs relicques  «dans  un  sacquet  »,  mot  qui 
équivaut  à  la  bourse  de  l'inventaire  précédent. 

6.  —  L'HABILLKMENT  D'UN  GENTIL- 
HOMME CAMPAGNARD,  A  LA  FIN  DU  XVI' 
SIÈCLE,  SES  ARMES,  SON  MOBILIER,  par 
Le  Clert,  dans  le  Bulletin  archéologique  du  Comité  des 
travaux  historiques,  1898,  pp.  58-65. 

Le  document  date  de  1590,  il  est  précédé 
d'une  bonne  introduction,  mais  ses  articles  ne 
sont  pas  numérotés.  M.  Saglio,  vice-président  de 
la  section  d'archéologie  du  Comité,  y  a  ajouté  des 
notes  très  utiles. 

Je  m'arrête  au  mot  colletin,  diminutif  de 
collet,  parce  qu'il  n'est  pas  dans  Victor  Gay  : 
«  Ung  colletin  de  camelot  de  Turquie,  doublé 
de  taffetas  et  de  futaine  »  et  à  un  jeu  se  faisant 
sur  un  échiquier  :  «  Un  tablier,  avec  un  jeu  de 
limasson  et  de  renart  »  ;  il  y  aurait  lieu  d'ex- 
pliquer en  quoi  il  consistait. 

7.  —  VISITE  D'UNE  COMMANDERIE  DE 
MALTE  AU  XVII'  SIÈCLE,  PAR  JEAN  DE 
SAINT  VIANCE,  COMMANDEUR  DE  LIMO- 
GES, PROCUREUR  GÉNÉRAL  EN  1685,  par  IJ. 
DE  BoYSSON,  dans  le  Bulletin  de  la  Société  archéologi- 
que de  la  Corrèse,  1899,  pp.  11 5-1  57. 

La  commanderie  visitée  était  à  Ste-Anne,  en 
Limousin.  La  visite  est  seulement  analysée, 
ce  qui  n'est  pas  suffisant.  J'en  réclame  le  texte 
intégral,  conservé  aux  archives  du  département 
du  Rhône.  Nous  avons  seulement  les  ordonnan- 
ces rendues  par  le  visiteur.  On  y  relève  des 
détails  intéressants,  comme  la  modification  de 
l'autel  qui  sera  à  la  romaine,  c'est-à-dire  appli- 
qué le  long  du  mur  latéral,  et  par  conséquent 
désorienté,  la  diminution  systématique  des  vi- 
traux par  la  partie  inférieure,  le  blanchissage 
des  églises,  le  ciboire  disposé  à  recevoir  le  soleil, 
etc.,  toutes  choses  qui  caractérisent  l'époque  : 

«  Remettre  les  deux  autels  contre  les  pentes 
de  l'église,  à  la  Romaine  »  (p. 151). 

«  Faire  remurer  par  le  bas  de  la  chapelle  la 
fenêtre    à    2    pieds  et  demi   d'en   bas,  de  sorte 


qu'elle  soit  restreinte  de  2  pieds  yi  ',  faire  raccom- 
moder la  vitre  et  se  servir  des  verres  qui  seront 
superflus  pour  cela  »  (p.  152). 

«  Obliger  les  paroissiens  à  réparer  la  voûte 
de  la  nef  et  le  pignon  et  à  reblanchir  l'église 
dans  toute  la  nef  »  (p.  154). 

«  Changer  le  ciboire  qui  y  est  pour  un  plus 
grand  et  faire  que  sur  le  pied  on  puisse  monter 
un  soleil  d'argent  que  les  habitants  et  !e  vicaire 
ont  promis  de  donner  »  (p.  153). 

«  Plus  fournira  d'un  soleil  d'argent,  que  l'on 
montera  sur  le  pied  d'un  calice,  moyennant  que 
le  vicaire  donne  un  écu,  comine  il  l'a  promis  » 
(p.  154J. 

Les  ordonnances  fourniraient  matière  à  de 
nombreuses  annotations. 

8.  —  FRAIZ  FUNÉRAIRES  DE  FEU  S^ 
ANTOINE    PECONNET,     1685,    par    L.  GuilîERT 

(Bull,  de  la  Soc.    arch.  du    Limousin,    1898,  p.  2S5-288). 

Il  y  a  là  de  curieuses  observances  :  le  son  de 
l'agonie,  ailleurs  dit  glas  :  «  Pour  les  coups  des 
Agonisants,  S  s.  »  ;  l'annonce  de  la  mort  par  les 
rues:  «  Pour  les  clochettes  par  ville,  3  1.  »  ;  le 
réveillez-vous  âz  la  nuit  :  «  Pour  le  revelier,  2  s.  ». 

Au  luminaire,  je  note  :  «  Pour  le  candélabre, 
I  1.  »  En  quoi  consistait-il  }  Était-ce  ce  cierge 
orné  qui,  en  certains  lieux,  accompagne  la  bière? 

9.  —  MÉMOIRE  DES  FRAIZ  QUE  J'AY 
FAICT2  POUR  LE  MARIAGE  DE  MA  SŒUR 
DAM'"  LÉONARDE  PECONNET,  ARRESTÉ 
AVEC   M'  MICHEL    S'  DE   LA    BACHELERIE 

(1689),   par    L.    GuiBERT    [Bull,    de    la  Soc.    arch.   du 
Limousin,  1898,  pp.  288-290). 

On  voit  en  détail  tout  ce  qui  a  été  consommé 
au  «  déjeuner  »,  <i  disner  »  et  «  souper  »,  y  com- 
pris «  les  tambours  qui  sont  venus  à  la  porte 
le  matin  »  et  qui  ont  reçu  dix  sols.  Les  pâtis- 
series mangées  avec  les  «  confitures  »  sont  des 
«  bisquis  »,  «  retortilions,  »«  massepains  fains  », 
«  gaufres  ». 

10.  —  INVENTAIRE  DES  MEUBLES  ET 
AUTRES  CHOSES  TROUVÉES  DANS  LES 
BASTIMENS  DU  CHASTENET,  LE  15  JAN- 
VIER 1694,  par  L.  Guihert  {Bull,  de  la  Soc.  arch. 
du  Limousin,  1S98,  t.  XLVI,pp.  291-296). 

Cet  inventaire  a  des  alinéas  fréquents,  mais 
les  articles  n'y  sont  pas  numérotés.  On  y  re- 
marquera la  faïence,  qui  commence  à  se  vulga- 
riser :  «  Trois  bouteilles  ou  brocs  de  fayance;  un 
vinaigrier  aussy  de  fayance,  une  petite  esguière 
aussy  de  fayance.  » 

Notons  certains  termes  particuliers  :  «  Une 
poivrette  de   bois  »,  «  \\\\  giiimbelet  pour  percer 


68 


Hebue  iJC  ravt  cbvcticu. 


les  barriques  »,«  un  payre  de  petites  tenailles 
pour  arracher  les  dûiiails  ou  faussetz  »,  «  3  lin- 
ceux  de  boiradis  (chanvre)  »,«  un  chandelier  en 
placard  àe  fert  blanc,  sur  le  haut  de  la  porte  », 
«  deux  eyssoles  ou  planes  de  charpentier  ». 

11.  —  INVENTAIRE  AU  DÉCÈS  DE  JEAN 
PECONNET,  31  OCTOBRE  1679,  par  L.  GuiBERT 
{Bull,  de  la  Soc.  arch.  du   Limousin,  1S98,  pp.  277-284). 

Je  ne  trouve  qu'un  défaut  à  cette  reproduc- 
tion d'un  manuscrit  qui  connaît  à  peine  les 
alinéas:  pour  la  clarté,  il  eût  importé  de  distin- 
guer et  numéroter  les  nombreux  articles.  Quel- 
ques mots  méritent  une  mention  : 

Pots  de  Lorraine  :  «  Quatre  potz  de  fert,  de 
diverses  contenances,  dont  l'un  est  de  Loraine; 
plus,  deux  platz  d'airain,  plus  un  petit  pot 
de  Loraine,  contenant  une  éculée,  son  couver- 
cle d'airain  »  Ces  pots  devaient  être  fabriqués 
par  les  fondeurs  de  cloches. 

Paire  d'armoires.  «  Un  grand  payre  d'armoy- 
ses,  bois  de  noyer,  à  quatre  portes  et  deux 
tiroirs  ».  Paire  s'entend  de  volets  opposés  deux 
à  deux. 

Pistolets  de  Fore.':.  «  Un  payre  pistoletz  de 
forest  »,  provenant  de  la  célèbre  manufacture 
deSt-Etienne  en  Forez. 

12.  —  COMPTES  DE  L'ÉGLISE  DE  CHA- 
ZELLES,  DE  1705  A  1741,  dans  le  Bulletin  de  la 
Société  archéologique  de  la  Charente,  6"  sér.,  t.  VII,  pp. 
41-43. 

«  Fait  recouvrir  l'esglise  et  blanchir  et  fait 
griffonner  de  chaux  et  de  sable  la  fassade  de  la 
dite  esglise,  a  cousté  28  1. 

«,  Fait  renfermer  de  balustre  les  fonds  bap- 
tismaux de  l'esglise,  15  1. 

«  Un  petit  surplis  pour  porter  le  Saint  Sa- 
crement, I  1. 

«  Cierges  blancs  pour  jours  solennels,  16  1. 

«  Six  cierges  pour  le  grand  autel  pour  les 
jours  solennels,  3  1.  » 

X.  Barbier  de  Montault. 


LES  RELIQUES  DE  L'ABBAYE  DE  BAUME- 
LES-MESSIEURS  (Jura),  par  M.  l'abbé  Bkunk. 
Paris,  Imp.  nat.,  1899. 

NOUS  avons  signalé  naguère  cette  notice 
parue  dans  le  Bull.  archéoL,  et  qui  fait 
l'objet  d'une  brochure  enrichie  de  planches  repré- 
sentant les  intéressantes  étoffes  dans  lesquelles 
sont  contenues  les  reliques  de  Beaune. 


STATUES  DE  L'ÉCOLE  DIJONNAISË  DANS 
L'ÉGLISE  DE  MIÈGES  (Jura),  par  le  même.  Lons- 
le-Saulnier,  Declume,  1900. 

M.  Brune  a  découvert  dans  une  modeste  église 
les  deux  figures  d'une  intéressante  Annonciation 
du  XVe  siècle,  tout  à  fait  analogues  à  celles  que 
nous  avons  jadis  signalées  dans  l'église  de  Ste- 
Marie-Madeleine  à  Tournai. 


LES  ÉGLISES  ROMANES  ET  L'ARCHITEC- 
TURE RELIGIEUSE  DANS  LE  JURA,  par  le 
même.  Caen,  Delesques,  1894. 

Ce  mémoire,  déjà  résumé  dans  nos  colonnes, 
constitue  une  page  instructive  de  l'histoire  des 
écoles  romanes  d'architecture. 

LA  RELIQUE  ET  LE  RELIQUAIRE  DE 
SAINT-JUSTE  A  CH ATEAU-GHALON,  par  le 
même.  Lons-le-Saulnier,  Declume,  1900. 

Deux  reliques  insignes  sont  conservées  à 
Château-Chalon:  une  sainte  épine  enfermée  dans 
une  monstrance  du  XVI'"  siècle  et  la  jambe  de 
saint  Juste,  contenue  dans  une  curieuse  boîte 
toute  couverte  de  polychromie  et  de  fine  pein- 
ture historiée  de  la  fin  du  XV*"  siècle. 


LE  MOBILIER  ET  LES  ŒUVRES  D'ART  DE 
L'ÉGLISE  DE  BAUME  -  LES  -  MESSIEURS 
(Jura),  par  le  même.  Inip.  nationale. 

Dans  cet  important  mémoire  bien  illustré  se 
trouvent  décrits  un  retable  sculpté  et  peint 
d'origine  flamande  d'une  extrême  richesse,  de 
fort  jolies  stalles  gothiques,  vrais  modèles  pour 
églises  de  second  ordre,  une  série  de  tombeaux 
remarquables  et  de  bons  morceaux  de  sculpture. 

On  le  voit,  M.  Brune  est  un  archéologue  actif; 
ses  notices  sont  écrites  avec  entente  et  érudition. 

L.  C. 

MONUMENTS  DU  VELAY,    p.ir   A.    TlIIOLLIKU. 

M.  Thiollier  a  inauguré  une  bien  louable  en- 
treprise de  vulgarisation  art  héologique,  en  don- 
nant dans  un  (juotidien  de  la  Haute-Loire  (')de 
courtes  et  substantielles  monogia[)hies  desinonu- 
nients  féodaux  et  religieux  que  l'Auvergne  pos- 
sède si  nombreux,  et  spécialement  de  ses  vieilles 
églihcs  parmi  lesquelles  plusieurs  remontent  à 
l'époque  romane. 

Signalons  celle  de  Chamalières-sur- Loire,  la 
plus  intéressante  du  Velay  après  la  merveilleuse 

I.  l.c  Mimoiuil  de  la  Loire  à  Saint-Ltienne. 


BibUograpl)(e. 


69 


cathédrale  du  Puy,  avec  son  chœur  en  conque 
plus  iar^e  que  la  nef  et  ses  bas-côtés  réunis;  on  y 
admire  une  curieuse  porte  en  bois  du  XII*^^  s.  et 
des  peintures  murales  relevées  par  M.  Yperman. 
Celle  de  Champ-Dieu,  église  fortifiée,  avec  tran- 
sept et  voûtes  en  coupole  possède  une  curieuse 
crypte.  Romane  aussi  et  intéressante  est  celle  de 
Beausac,  sous  laquelle  une  crypte  a  été  décou- 
verte en  T  847.  Celle  de  Riotord  est  un  monument 
assez  connu  de  la  fin  du  XI<=  siècle,  avec  une 
belle  tour  cariée  à  deux  étages  de  lumières  et  des 
absidioles  aux  croisillons  du  transept,  rareté  que 
des  archéologues  abusés  ont  signalée  comme 
ancienne.  Du  XI^^  siècle  également  est  l'église 
des  Rosiers-Côtes-d'Aurec.  Bien  conservée  est 
l'église  romane  des  Dunières  ;  moins  entière  est 
la  collégiale  romane  de  Saint-Paulin,  toute 
décorée  d'incrustations  de  pierres  multicolores  ; 
un  des  bras  du  transept  était,  comme  à  Briosède 
et  au  Puy,  divisé  en  deux  étages  et  surmonté 
d'une  salle.  La  Chaise-Dieu  est  assez  connue. 
Citons  encore  les  églises  gothiques  de  Périgueux, 
de  Maroles,  de  Saint-Symphorien-sur-Loire,  etc. 

L.  C. 

LA  STATUE  DE  TONNERRE  —  LA  VIERGE 
ET  LE  BUISSON  ARDENT,  par  le  chan.  Mar- 
SAUX.  Beau  vais,  Avonde  et  Bachelier,  1900. 

Le  buisson  ardent  a  été  pris  pour  symbole  de 
la  Virginité  Immaculée  de  Marie.  Cette  tradition 
iconographique,  ancienne  et  poétique,  M.  Mar- 
saux  vient  la  confirmer  par  un  monument  sécu- 
laire et  authentique,  la  Vierge  de  Tonnerre,qui  se 
voit  accostée  de  la  figure  biblique  en  question. 
Encore  un  service  rendu  à  l'iconographie  chré- 
tienne par  notre  éruditami. 

L.  C. 

LES  SECRETS  DU  COLORIS  RÉVÉLÉS  PAR 
L'ÉTUDE  DU  SPECTRE,  par  G.  DE  LeSCLUZE, 
1886.  In-8°  200  pp.  Roulers,  de  Meester,  1900. 

Une  couleur  est  une  sensation  du  nerf  optique 
causée  par  la  vibration  de  l'éther.  La  qualité  essen- 
tielle d'une  couleur  est  sa  irfraiigibilite  â\si'\nz\.e; 
ses  qualités  accidentelles  sont  la  saturation  ou  la 
désaturation,  et  l'état  vif  ou  rompu  d'une  teinte. 
L'auteur  établit  une  échelle  de  12S  couleurs,  ran- 
gées sous  les  numéros  i2Sà  255,  lesquels  corres- 
pondent proportionnellement  aux  nombres  de 
vibrations  qui  donnent  lieu  aux  couleurs  respec- 
tives ;  il  les  définit  par  les  nombres  exprimant 
leur  degré;  il  ajoute  des  noms  littéraires  tirés  des 
fleurs  ou  des  désignations  du  commerce. 

Chose  extrêmement  intéressante,  il  est  permis 
d'énoncer  cette  règle:  tel  le  rapport  entre  les  nom- 
bres, telle  r harmonie  entre  les  coiilejirs;  chaque  fois 


que  les  nombres  sont  en  rapport  simple,  les  cou- 
leurs forment  un  accord.  M.  De  Lescluze  ajoute  : 
les  couleurs  qui  correspondent  aux  nombres  qui 
sont  en  rapport  simple  se  tiennent  sur  un  même 
plan;et,dans  un  tableau  nommé  Table cf harmonie, 
il  fournit  la  réalisation  complète  de  ces  rapports 
simples.  «  Jamais,  assure-t-il,  peintre  n'a  créé, 
jamais  peintre  ne  créera  un  accord  élémentaire 
simple  qui  n'y  soit  indiqué  ».  Il  admet  des  gammes 
de  couleurs,  qui  comportent  des  dissonances  à  côté 
des  consonnances.  Une  gamme  est  une  série  de 
nuances  dont  le  nombre  de  vibrations  se  suivent 
cotnme  32  est  à  33  à  3^;  à  35,  etc.  jusque  64.  Les 
gammes  employées  par  les  grands  peintres  ont  32 
degrés  ou  32  nuances  au  grand  complet.  Il  y  a 
en  tout  128  gammes.  Les  principales  sont  celles 
qui  sont  développées  sur  un  des  chiffres  12S-256 
pris  de  quatre  en  quatre,  ce  qui  donne  32  gammes 
principales.  Parmi  ces  32  gammes  l'art  n'en  con- 
naît que  cinq,  savoir  : 

1°  La  tonalité  espagnole  obtenue  en  disant, 
i6o  est  à  sa  gamme  comme  32  :  33,  etc. 

2°  La  tonalité  Rubens  (224  est  à  sa  gamme 
comme  32  :  33,  etc.) 

3°  La  tonalité  Jordaens  (144  est  à  sa  gamme, 
etc.) 

4°  La  tonalité  Rembrandt  (20S  est  à,  etc.) 

5°  La  tonalité  italienne  (166  est  à,  etc.) 

L'auteur  ajoute  à  cette  liste  la  tonalité  vert 
192,  qu'il  a  cru  observer  dans  les  vestiges  de 
l'ancien  art  gothique. 

Nous  avons  voulu  reproduire  les  principaux 
principes  qui  servent  de  bases  à  la  curieuse  théorie 
de  l'abbé  D'  Lescluze;  nous  n'avons  pas  la  compé- 
tence voulue  pour  les  apprécier  à  fond  ;  le  lecteur 
en  sera  juge  lui-même  pour  autant  qu'il  soit 
initié  à  cette  terminologie  un  peu  spéciale.  Nous 
sommes  convaincu  qu'il  seia  enchanté  de  voir 
se  soulever  à  ?es  yeux  un  coin  du  voile  qui  couvre 
l'attachante  question  des  lois  de  l'harmonie  des 
couleurs,  et,  disons  plus,  d'y  voir  une  lumière 
nouvelle.  Les  coloristes  qui  interprètent  la  nature 
seront  satisfaits  de  pouvoir,  à  l'école  de  notre 
savant  auteur,  se  rendre  compte  des  effets  dus 
à  leur  talent  ;  peut-être  le  décorateur  tirera-t-il 
de  cette  théorie  une  utilité  plus  immédiate  ;  en 
réglant  ses  gammes  d'après  des  lois  si  positives 
et  si  simples,  il  pourra  éviter  des  écueils  et  régler 
l'expression  de  son  inspiration. 

Il  y  a  d'autres  résultats  pratiques  de  cette 
théorie  ;  au  moyen  des  gammes  de  M.  De  L.  il 
est  possible  d'écrire  la  coloration  d'un  tableau  et 
de  la  faire  revenir  de  son  analyse  à  peu  près  aussi 
exactement  qu'une  épreuve  photographique. 

Comme  exercice  curieux,  signalons  la  transpo- 
sition qu'on  peut  faire  d'un  tableau  d'une  gamme- 
dans  une  autre. 


70 


Bcbue  De  V^xt  t\)xttm\. 


L'analyse  qu'on  peut  ainsi  faire  des  œuvres 
des  maîtres  est  du  plus  grand  intérêt. 

Rarement  nous  avons  lu,  sur  les  matières  qui 
confinent  aux  Beaux-Arts,  un  ouvrage  d'un  si 
vif  intérêt  que  l'Étude  de  M.  De  Lescluze,  lequel 
est  présenté  sous  le  patronage  compétent  du 
D''  A.  Charpentier,  professeur  à  l'Université  de 
Nancy. 

L.  C. 


MONOGRAPHIE  DE  L'ÉGLISE  DE  RÉTHEL 
(ARDENNES),  par  H.  Jad.\rt  et  P.  Demaison.  — 
In-S"  de  loopp.  illustré.  Paris,  Picard,  1899. 

La  Bibliothèque  des  monographies  des  an- 
ciennes églises  françaises  se  constitue  par  un 
travail  spontané,  lent  mais  continu,  de  nos  ar- 
chéologues de  province,  et  les  meilleurs  s'atta- 
chent à  cette  méritoire  besogne  :  tels  MM.  Jadart 
et  Demaison.  Celle  de  Réthel  est  loin  d'être  de 
premier  ordre,  mais  elle  offrait  au.x  auteurs  un 
beau  sujet,  car,  chose  rare,  son  histoire  est  bien 
documentée. 

L'église  de  Réthel  est  d'ailleurs  vaste  et  riche- 
ment décorée.  Elle  est  formée  de  la  juxtaposition 
de  deux  églises  presqu'égales,  ayant  chacune 
une  nef  principale  avec  une  abside  et  un  colla- 
téral, l'un  du  XIIL"  siècle,  l'autre  du  XVP.  Bien 
qu'orientée,  elle  ouvre  son  portail  flamboyant  au 
Midi,  vers  la  ville;  à  l'angle  S.-O.  se  dresse  une 
tour  monumentale  du  XVI I*^  siècle.  L'église  con- 
tient des  pierres  tombales  et  un  intéressant  mobi- 
lier. Le  tout  est  décrit  avec  la  précision  que  savent 
y  mettre  les  paléographes  distingués  auteurs  de 
cette  excellente  monographie. 

L.  C. 


INSTRUCTIONS  ET  CONSTITUTIONS  DE 
GUILLAUME   DURAND    LE   SPÉCULATEUR, 

par  Jos.  Berthelé  et  M.  Valmary,  publiées  d'après  le 
manuscrit  de  Cessenon.  —  Montpellier.  Delord-Boe- 
lin,  1900.  In-8°de  150  pp.  et  phototypies  (Extrait  des 
Mémoires  de  l'Acud.  des  Sciences  et  Lettres  de  Montpel- 
lier). 

La  savante  étude  ci-dessus  intitulée  ne  con- 
cerne que  bien  indirectement  l'art  chrétien  ;  ce- 
pendant il  n'est  guère  d'archéologue  chrétien  qui 
ne  s'intéresse  à  la  liturgie  et  ne  connaisse  l'auteur 
du  célèbre  Pontifical.  C'est  un  de  nos  callabora- 
teurs,  qui,  de  concert  avec  son  disciple  M.  Val- 
mary, nous  fait  connaître  un  manuscrit  ignoré 
(non  inédit)  du  grand  évêque,  naguère  découvert 
fortuitement  parmi  les  parchemins  du  village  de 
Cessenon.  Les  prescriptions  qu'il  contient  sont  à 
l'usage  du  clergé  de   Mendc.  Les  Instructions 


se  rapportent  aux  Sacrements,  aux  Constitutions 
à  la  discipline  ecclésiastique. 

L.  C. 


REPRÉSENTATION  PRÉSUMÉE  DE 
JEANNE  D'ARC  SUR  UNE  TAQUE  DE  FOYER, 

par  M.  I-.  Germain.  —  UNE  TAQUE  SYMBO- 
LIQUE DU  XVII''  SIÈCLE,  par  M.  F.  Donnet. 
—  Broch.  Anvers,  De  Backer,  1900.  —  (Extrait  des 
Annal,  de  l'Acad.  royale  d^arch.  d'Anvers.) 

M.  Germain,  à  la  suite  de  M.  le  baron  de  Ri- 
vières, a  signalé  une  prétendue  représentation  de 
Jeanne  d'Arc  figurant  sur  des  taques  de  foyer 
rencontrées  en  diverses  contrées  de  la  France,  et 
il  y  voit  une  imitation  de  la  Liberté  hollanJaise. 
M.  Donnet  vient  confirmer  cette  interprétation 
et  la  précise  d'après  des  exemplaires  flamands. 
La  pucelle  hollandaise  est  coiffée  d'un  chapeau; 
cet  emblème  de  liberté  rappelle  le  chapeau  de 
l'homme  libre  que  portait  l'esclave  libéré  sur  la 
tête  rasée  en  signe  d'affranchissement.  Elle 
est  assise  dans  une  enceinte  clayonnée,  repré- 
sentation du  patrimoine  national  de  la  patrie 
hollandaise.  A  sa  droite  se  dresse  le  lion  néerlan- 
dais armé  d'un  glaive  et  serrant  de  l'autre  patte 
un  faisceau  de  5  flèches  correspondant  aux  5  pro- 
vinces qui  les  premières  se  fédérèrent  après  avoir 
secoué  le  joug  espagnol  :  la  Gueldre,  la  Hollande, 
la  Zélande,  Utrecht  et  la  Frise. 

Voilà  du  beau  symbolisme  s'il  en  est.  Les 
notices  de  MM.  Germain  et  Donnet  sont  de  na- 
ture à  raviver  singulièrement  l'intérêt  d'une  série 
d'objets  restés  dans  l'ombre  jusqu'ici. 

L.  C. 


LA   TOURAINEETLE  PETIT  PALAIS,  parle 

C'°  Ch.    DE  Beaumont,    brochure,   Tours,    Dubois, 
1900. 

M.  le  comte  de  Beaumont  a  voulu  que  la  Tou- 
raine  profitât  de  l'exhibition  faite  à  Paris  de  ses 
chefs-d'œuvre  d'art  ancien,  et  que  l'intérêt  admi- 
ratif  qu'ils  ont  inspiré  au  public  international  eût 
son  retentissement  dans  la  province  même  de  leur 
origine.  C'est  pourquoi  il  a  décrit  dans  un  pério- 
dique local  ce  qui  formait  le  contingent  de  cette 
région  dans  cette  revue  des  joyaux  nationaux. 
Il  ne  s'est  du  reste  pas  borné  à  des  extraits  du 
catalogue  ;  son  travail  en  est  au  contraire  un 
commentaire  érudit,  intéressant  et  parfois  très 
piquant. 

L.  C. 


Bibliograpl)ie. 


71 


LA  BELGIQUE  ILLUSTREE,  ses  monuments, 
ses  paysages  et  ses  œuvres  d'art,  publiée  sous  la  direc- 
tion de  M.  E.Bruylant.  Bruxelles.  3  vol.  grand  in-40. 
Prix  :  100.00  fr. 

La  Belgique  est  richement  partagée  en  beautés 
naturelles,  en  œuvres  artistiques  et  en  richesses 
industrielles.  Il  ne  lui  manque  rien  de  ce  qui  peut 


rendre  une  terre  enviable  :  industries  prospères, 
villes  opulentes,  monuments  magnifiques  anciens 
et  modernes, sites  pittoresques,  plages  riantes, etc. 
Il  n'est  guère  dans  le  monde  un  aussi  petit  pays 
égal  en  opulence.  De  toutes  ces  merveilles, 
M.  Briiylant  a  formé  un  recueil  artistiquement 
édité,  qui  chante  la  gloire  de  la  patrie  et  remé- 
more les  beautés  de  la  nature  et  de  l'art  répandues 


Musée  de  Bruxelles.  —  Memliug:.  —  Portrait  d'homme. 


dans  ses  villes  et  jusque  dans  ses  villages  les 
plus  reculés.  Une  cohorte  d'érudits  distingués 
lui  ont  prêté  leur  plume  et  lui-même,  s'adressant 
aux  maîtres  de  la  gravure  plutôt  qu'au-x  photo- 
graphes, a  semé  leurs  textes  d'une  multitude  de 
vignettes  artistiques  telles,  que  de  longtemps  l'on 
ne  vit  semblable  recueil  aussi  richement  illustré. 
Parmi  les  écrivains  qui  ont  prêté  leur  talent  à 
cette  œuvre,  M.  E.  Leclercq  se  distingue  surtout 


par  le  vif  sentiment  des  beautés  monumentales, 
la  sagacité  de  la  critique  et  la  vivacité  du  style  ; 
il  s'est  chargé  de  mettre  eil  valeur  les  beautés 
du  Brabant  et  de  sa  brillante  capitale,  aidé  de 
MIVI.  Van.  Bemmel,  H.  Hymans,  G.  WiUame, 
E.  de  Taye  et  M.  Fétis,  qui  présente  aux  lecteurs 
les  joyaux  des  musées  bruxellois.  M.  Van  Even 
décrit  Louvain  et  ses  environs  et  raconte  en  éru- 
dit  l'histoire  de  ses  vieux  édifices.  M.  L.  Thooris 


72 


îRcbuc  ÏJC  l'^vt  cbrcticn. 


passe  en  revue  les  incomparables  rues  de  Bruges; 
M.   A.  Vandenpeereboom,  l'iiistoriographe    des 


monuments   yprois,  nous  en  donne  un  aperçu. 
Les  petites  villes  de  la  Flandre  Occidentale  sont 


Louvain.  —  Église  St-Pierre.  —  Stalles  du  chœur. 


A,  4^ 


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Nivelles.  ■—  Châsse  de  sainte  Gertrude. 


présentées   par   M.   Van    Heerswynghels    et   le 
littoral,  par  M.  M.  Heins.  Ce  sont  deux  écrivains 


de   marque,  MM.  Wagener    et     Fredericq,    qui 
s'occupent  de  Gand,  et  feu  H.  Van  Duyse,  de  la 


Bîbltograpl)ie. 


73 


province  flamande  orientale.  Mons  est  l'apanage 
de  M.  Dommartin,  le  Borinage,  celui  de  M.  A.  du 
Bois  ;  Tournai  et  ses  environs  sont  célébrés  par 
feu  J.-B.   Delmée  le   chansonin'er  journaliste.  M. 


Th.  Jouret  parcourt  les  petites  villes  du  Ilainaut 
M.  Clément  Lyon  parle  en  connaisseur  du  pays 
de  Charleroi   et  M.    G.   Boulmont    de    l'Entre- 
Sambre-et-Meuse.  Les  articles  sur  le  Namurois 
sont   signés   M.  L.  Dommartin  ; 
M.  Pergameni  traite  du  Condroz; 
MM.  P.  Hymans  et  Greyson  dé- 
crivent les  beautés  de  la  Meuse 
J      et  de  la  Lesse,  son   pittoresque 
affluent.  MM.  E.  Landoy  et  A.Le 
Roy  dépeignent  la  province  de 
Liège  et  son  aimable  chef-lieu  ; 
M.   le    chev.    L.    de  Thiers    est 
chargé  de  Huy,  M.  Leclercq,  de 
Verviers.  Citons  encore   le  Lim- 
bourg,   par  MM.  E.  Landoy   et 
H.  Van  Neuss,   le  Luxembourg 
par  MM.  Landoy,  Keiffer   et  du 
Bois. 

On  reconnaîtra  que  l'éditeur 
n'exagère  que  d'un  peu,  en  se 
prévalant  du  concours  «  des  prin- 
cipaux écrivains  et  artistes  du 
pays  ». 


Le  «  Groeningenhof  »  à  Aertselaer  (campine  anversoise). 


L'éditeur  a  bien  voulu  mettre  à  notre  disposi- 
tion quelques-uns  de  ses  clichés.  Voici  d'abord 
le  superbe  portrait  bien  connu,  dû  au  pinceau  de 
Hans  Memling,  que  possède  le  musée  de  Bruxel- 
les. Nous  donnons  ensuite  un  fragment  des 
stalles  conservées  dans   le  chœur  de  l'église   de 


Saint-Pierre  à  Louvain,  qui  comptent  parmi  les 
plus  anciennes  de  la  Belgique  ;  elles  furent  exé- 
cutées vers  1440  par  Nicolas  de  Bruges  et  Gérard 
Georis  de  Bruxelles.  Après  la  peinture  et  la  me- 
nuiserie, voici  un  chef-d'œuvre  d'orfèvrerie,  la 
châsse  de  sainte  Gertrude  à  Nivelles.  Le  premier 


REVUE    DE   L  AKT  CHRÉTIEN. 
190I.    —    l""*^    LIVRAISON. 


74 


3Rebue  lie  T^rt  c!)vctien» 


rang  est  occupé  dans  le  domaine  de  la  peinture 
par  le  polyptyque  de  l'adoration  de  l'Agneau 
mystique,  œuvre  des  frères  Van  Eyck,  dont 
s'enorgueillit  la  cathédrale  de  ,Gand.  Comme 
art  monumental,  nous    donnons  enfin    un    des 


ravissants  coins  du  vieux  Bruges,  la  rue  de 
l'Ane  aveugle,  et  la  vue  pittoresque  d'un  ancien 
manoir  rural,  le  Groeningenhof,  à  Aertselaer,  en 
Campine. 

L.  C. 


^Mn  y^i^EjitX  /*"'■*> 


WÊ^ 


Gand.  —  Adoration  de  l'Agneau,  des  frères  Van  Eyck. 


LA  BELGIQUE  PITTORESQUE  ET  MONU- 
MENTALE, album  photographique  de  250  vues. 
Bruxelles,  Rubens. 

Il  y  a  cinquante  ans, les  reproductions  couran- 
tes que  les  gravures  nous  donnaient  des  monu- 
ments et  des  sites  étaient  des  à  peu  près  le  plus 
souvent  infidèles  et  incorrects,  parfois  la  cari- 
cature des  choses.  Que  les  temps  sont  changés, 
depuis  que  la  photogravure  met  à  la  portée  de  , 
tous  une  multitude  de  reproductions  absolument 
exactes  !  Quel  puissant  enseignement  intuitif 
résulte  de  ces  abondantes  et  véridiques  illustra- 
tions, qui  se  multiplient  sous  forme  de    cartes    ' 


postales  ou  d'albums-panorama  !  L'esthète,  l'ar- 
chéologue et  l'artiste  en  font  surtout  leur  profit, 
et  c'est  à  ce  titre  que  nous  signalons  ici  le  recueil 
édité  par  M.  Rubens  des  principaux  monuments 
de  la  Belgique.  L.  C. 

LES  TORCHES  DES  COMMUNAUTÉS  LA- 
VALLOISES  AUX  PROCESSIONS  DE  LA  FE- 
TE-DIEU DU  XVir  SIÈCLE,  paij.  .M.  Richard. 
—  In  8°.  Laval,  Lelièvre. 

C'est  une  calamité  et  une  honte  pour  la  France, 
que  la  procession  de  la  Fête-Dieu  ait  été  interdite 


■f: 


•v^. 


iiîiiiiiiiiiiiiîîiiiîiiiïi:' 


Rue   de  l'Ane  aveugle  à  Bruges. 


76 


3Rcbue  ïie  V^xî  c!)vcticu. 


et  que  Notre-Seigneur  ne  puisse  plus  parcourir, 
suivi  d'un  cortège  de  fidèles,  les  rues  des  villes  et 
les   chemins   des   villages.  L'antique    institution 
de  la  procession  du  «  Vcncmble   Sacrement  1>  ne 
reste  plus  que  comme  un  souvenir  poétique  à  nos 
contemporains;  c'est  de   plus  un  beau  souvenir 
artistique  pour  les  érudits  comme  M. J.M.Richard, 
qui  ont  la  mémoire  séculaire   qui   se   nourrit   de 
documents  d'archives.  Beaucoup  se  souviennent 
des  rues  tendues  à  ciel,  à  l'aide  de  ces  toiles  (dont 
l'industrie  a  fait  la  fortune  des  Lavallois)  étalées 
sur  des  cordes  tendues  au  travers  des    rues,  et 
de  ces   maisons  tapissées  de  feuillages,  tendues 
d'étoffes  aux  couleurs  vives,  de  ce  sol  jonché  de 
fleurs.  Mais  qui  se  souvient  encore  des   proces- 
sions autrement  belles  des  siècles  passés,  rehaus- 
sées de  groupes  costumés,  jouant  des    mystères, 
et  des  corporations   marchant  en  costume   avec 
leurs  attributs,  leurs  guidons  et  leurs  drapeaux? 
Plusieurs  avaient   aussi   des  {{gros  cierges  ou 
torches  »,  portées  par  les  plus  jeunes  membres  du 
métier,  et  ornées  de  l'image  du  saint  Patron  de  la 
corporation.  C'étaient  de  véritables  objets  d'art, 
qui  représentaient  chaque  année  de  nouvelles  et 
curieuses  «  histoires  ».  Leur  exhibition   avivait 
l'intérêt  et  excitait  l'émulation.  On   s'efforçait  de 
représenter  chaque  année  un    sujet   inédit.  Les 
personnages,  qui  atteignaient  trois  pieds  de  haut 
et  plus,  étaient  entièrement  ou  partiellement  faits 
de  cire;  les  groupes  étaient  portés  sur  des  bran- 
cards. 

M.  J.  M.  Richard  a  retrouvé  de  curieux 
contrats  relatifs  à  des  torches  confectionnées  au 
XVI  I«  siècle.  On  y  trouve  tout  le  décor  pom- 
peux de  l'époque  servant  de  cadre  à  des  scènes 
telles  que  Les  trois  Maries  au  tombeau  du  Christ, 
Le  roi  Josias  se  faisant  lire  la  table  de  la  Loi, 
L'Enfant  prodigue,  l'Annonciation,  l'Aveugle- 
né,  etc.,  on  rencontre  même  des  sujets  profanes 
comme  le  triomphe  d'Alexandre,  ou  l'apothéose 
de  la  reine  Marie-Thérèse,  ainsi  que  des  allégo- 
ries ;  exemple  :  Salomon  et  la  sagesse  renversée. 
L'auteur  analyse  une  longue  série  de  ces 
marchés  passés  au  XVI I^  s.  par  les  commu- 
nautés des  tissiers,  des  boulangers,  des  serruriers, 
des  cordonniers,  etc.,  ou  des  maîtres  ciriers, 
comme  Jean  Bodard  et  Jean  Mériale.  Cet  usage 
pittoresque  disparaît  au  XVII L  siècle,     j     ^ 


LE  MONUMENT  DU  CARDINAL  LAVI- 
GERIE  A  SAINT-LOUIS  DE  CARTHAGE.  par 
M.  D'Ansp;lme  de  Puisave.  —  In-8',  Paris,  Leroux. 

Les  salons  privés,  les  places  publiques  et  les 
galeries  d'expositions  et  de  musées  regorgent 
d'œuvres  d'art,  œuvres  presque  exclusivement 
profanes.  L'esprit  profane,  sinon  païen,  envahit 


même  les  églises.  Où  sont  les  vraies  œuvres  de 
l'art  chrétien  .'  Elles  sont  si  rares,  que  nous  n'en 
avons  presque  pas  à  signaler  dans  nos  livraisons. 
—  Cependant  ne  faut-il  pas  ranger  parmi  elles  les 
somptueux  cénotaphes  que  de  temps  à  autre  on 
voit  élever  à  quelque  prince  de  l'Église?  En  réa- 
lité, non  ;  nos  évêques  eux-mêmes  n'ont  presque 
jamais  l'honneur  d'une  tombe  à  la  fois  artistique 
et  vraiment  chrétienne. —  Aussi  nous  abstenons- 
nous  généralement  de  mentionner  les  mausolées 
d'évêques,qui  rentrent,  par  leur  conception  habi- 
tuelle, dans  la  classe  des  statues  profanes  en 
dépit  de  leur  destination.  Nous  avons  pris  le  parti 
de  ne  plus  chagriner  les  habiles  praticiens  qui 
exploitent  cette  branche  de  l'art  contemporain. 

M.  D'Anselme  de  Puisaye  n'a  pas  la  résignation 
aussi  facile,  et,  avec  une  noble  énergie,  il  a  voulu 
dire  une  bonne  fois  la  vérité  sur  cet  abaissement 
de  notre  art  funéraire.  —  Il  s'est  attaqué  pour 
cela  à  une  grande  œuvre,  de  manière  à  frapper  un 
grand  coup,  c'est-à-dire  au  monument  du  grand 
cardinal  Lavigerie,  œuvre  vraie  et  somptueuse, 
et  en  quelque  sorte  historique.  En  se  plaçant,  il 
est  vrai,  à  un  point  de  vue  plus  philosophique  que 
religieux,  il  montre  l'inanité  d'une  œuvre  qui  ne 
tend  pas  directement  à  l'expression  de  la  beauté 
morale,  et  qu'à  bon  droit  il  compare  à  un  temple 
sans  dieu. 

L.  C. 


©crioïiiques. 


ANNALES   DE    ST-LOUIS   DES    FRANÇAIS, 

1899,  livr.  de  janv. 

VIDAL,  L'émeute  des  pastoureaux  en  IJ22. 
Lettres  du  pape  Jean  XXII,  déposition  du 
juif  Baruc  devant  l'inquisition  de  Pauiiers 
(p.  121-174):  d'après  un   ms.  du  Vatican. 

Tostivint,  Siège  et  prise  de  Jérusalem,  en  l'an 
J  de  Jojakim  (p.  175-202). 

De  Suyyc\,  Histoire  de  la  persécution  et  de  l'émi- 
gration des  religieuses  de  la  Province  de  Charle- 
î^///^  (p.  203-255)  :  d'après  un  ms.  de  la  Biblio- 
thèque Victor-Emmanuel,  à  Rome. 

Eraikin,  Bulles  inédites,  extraites  d'un  matius- 
crit  de  la  Bibliothèque  Barberini{ç.  257-275)  :  de 
^•S8ài2i9.  X.  B.   DEM. 

ANNALES     DE    ST-LOUIS     DES    FRANÇAIS, 

1900,  4'^  fasc. 

J.  M.  Vidal,  La  poursuite  des  lépreux,  d'après 
des  documents  nouveaux,  extraits  des  Archives 
du  Vatican,  p.  419-478. 


Btblto(ïrapl)ie. 


77 


L.  Giiérard,  Notes  sjir  quelques  inventaires  des 
Archives  pontificales  (p.  479-508). 
Jérôme  A/cander,  par  ].V!iq\.\\er( Bibliographie). 

L'AMI    DU   CLHRGÉ. 

Erreurs  sur  la  proclamation  du  dogme  de 
l'Immaculée  Conceptiofi.  ■ —  \J Ami  du  clergé,  ra- 
contant la  vie  de  l'abbé  de  Geslin,  cite  ce  passage, 
oià  il  décrit  la  fête  de  la  proclamation  du  dogme 
de  l'Immaculée  Conception  :  «  Au  moment  où  la 
dernière  parole  sortait  de  la  bouche  auguste  du 
Pontife,  le  voile  qui  dérobait  aux  regards  de  la 
foule,  dans  le  fond  de  l'abside,  la  représentation 
vénérée  de  Marie,  le  voile  tombait,  et  au  milieu 
de  rayons  lumineux  apparaissait  l'image  rayon- 
nante de  la  Reine  de  la  terre  et  du  ciel.  Et  à  cet 
instant,  de  cent  mille  poitrines  s'élevait  vers  la 
voûte  du  saint  Temple  le  Te  Deum,...  couvrant 
les  détonations  du  fort  St-Ange,  les  mugisse- 
ments de  l'orgue.»  Il  y  a  là  une  quadruple  erreur, 
ce  témoin  oculaire  a  mal  vu  et,  comme  j'assistais, 
moi  aussi,  à  la  cérémonie,  je  puis  dire  plus 
exactement  ce  qui  s'y  est  passé. 

L'abaissement  d'un  voile  recouvrant  une 
image  ne  se  pratique  qu'aux  béatifications.  Il 
n'y  a  rien  eu  de  semblable  ce  jour,  et  la  chose 
était  impossible,  puisque  le  trône  pontifical 
tournait  le  dos  à  l'abside. 

Les  rayons  lumineux  supposent  une  illumi- 
nation qui,  certainement,  n'existait  pas. 

Les  «  mugissements  de  l'orgue  »  sont  une  autre 
fantaisie,  car  cet  instrument  est  proscrit  des  cha- 
pelles papales, où  qu'elles  se  tiennent. A  St-Pierre, 
il  n'y  a  que  de  petites  orgues  pour  l'office  cano- , 
niai. 

Le  chiffre  de  cent  mille  assistants  est  exagéré 
des  trois  quarts. 

L'art  n'est  pas  plus  précis  dans  ses  représen- 
tations et,  ni  la  fresque  de  N.-D.  de  la  Drèche 
(Tarn),  ni  le  vitrail  de  la  chapelle  du  séminaire 
de  Nantes  ne  reproduisent  le  pape  avec  le  cos- 
tume qu'il  portait  en  la  circonstance  ;  c'est  donc 
à  tort  qu'on  l'a  figuré  avec  la  tiare,  au  lieu  de  la 
mitre  de  drap  d'or,  et  une  chape  violette,  en  place 
d'une  chasuble  blanche,  seule  couleur  liturgique 
que  comportât  la  solennité. 

X.  B.  DE  M. 


BULLETIN    MONOMENTAL, 

n°  506,  1899-1900. 

Ce  numéro  marquera  dans  les  annales  de  la 
Société  française  d'archéologie  une  page  de  deuil, 
car  elle  contient  le  compte  rendu  des  funérailles 
du  regretté  comte  de  IVIarsy  et  les  discours  où 
sont  consignés  les  hommages  dus  à  sa  mémoire. 
Il  marque  au   surplus   la   vitalité   dans  laquelle 


l'ancien  directeur  du  Bulletin  monumental  laisse 
cet  important  organe.  Fort  curieuse  est  la  notice 
de  M.  H.  Jadart  sur  les  anciennes  halles,  eu  forme 
de  hangars  en  charpente,  que  possèdent  la  petite 
ville  de  Rethel  et  maintes  autres  localités  de  la 
région.  —  Importante  et  remarquable  est  l'étude 
de  M.  le  chan.  Porie  sur  la  statuaire  ancienne  en 
Normandie.  Nous  trouvons  encore  dans  la  même 
livraison  la  suite  de  l'intéressante  série,  exhibée 
par  M.  V.  Mortet,  d'anciens  marchés  et  devis 
relatifs  à  des  constructions  languedociennes  du 
XII"=  au  XIV'5  siècle.  — •  Il  sera  permis  au  sous- 
signé de  ramener  à  cette  occasion  l'intérêt  public 
sur  le  plus  considérable  des  devis  de  l'espèce  con- 
servés dans  une  autre  région,  celle  du  Tournaisis  ; 
il  s'agit  du  devis  détaillé  de  la  construction  du 
chœur  de  l'église  St-Jacques  à  Tournai  en  1373, 
écrit  sur  un  rouleau  de  parchemin  de  3  mètres  de 
longueur.  J'ai  publié  ce  rare  document  dans  la 
monographie  de  ladite  église  (').  L'original, 
gardé  au  presbytère  de  l'église,  mérite  d'être 
conservé  avec  sollicitude. 

L.  C. 

SCIENCE  CATHOLIQUE,  juillet  1900. 

PARMI  les  théories  sur  le  Beau,  nous  de- 
vons mentionner  celle  que  sous  une  forme 
poétique,  M.  H.  Menés  a  exposée  récemment 
sous  ce  titre  :  Au  pays  de  l'idéal  (^Science  catholi- 
que, année  1900,  p.  695)  ;  elle  nous  paraît  heu- 
reuse dans  sa  clarté  et  vraie  en  bonne  partie. Elle 
s'applique  à  la  Beauté  dans  la  nature  et  dans 
l'art,  et  peut  se  résumer  en  ces  termes  : 

Une  créature  est  d'autant  plus  belle,  qu'elle 
est  plus  conforme  à  son  modèle,  qui  est  dans 
l'intelligence  divine.  Trois  éléments  constituent 
le  Beau  :  Yintégritc  de  l'être,  la  proportion  des 
parties  et  X'éclat.  —  Le  principe  de  la  proportion 
n'est  autre  chose  que  l'adaptation  de  l'être  à  sa 
fin  ;  toutes  les  créatures  sont  proportionnées  à 
leur  fin,  mais  à  des  fins  qui  ne  sont  pas  égale- 
ment nobles. 

L'art  est  l'expression  du  beau  par  une  forme 
sensible.  La  nature  est  l'art  de  Dieu,  et  l'imita- 
tion de  la  nature  constitue  l'art  humain.  Toute- 
fois la  nature  étant  déchue,  elle  n'a  de  beauté 
complète  que  dans  l'ensemble  des  espèces  ;  les 
individus  sont  frappés  d'imperfection  et  souvent 
laids.  L'art  doit  s'efforcer  de  concevoir  et  de 
rendre  le  type  même  des  choses,  c'est-à-dire 
V  idéal. 

Ici  notre  auteur  énonce  une  triple  loi,  qui 
manque  de  rigueur  à  nos  yeux  :  celles  de  la 
structure    extérieure,  de    \' alternance    symétrique. 


I.    L.  Cloquet,    Monographie   de   l'église  St-Jacques.     Tournai, 
Desclée,  De  Brouwer  et  Ci=. 


78 


ISitWt  lie  r^rt  t\)vttitn* 


et  de  y  ornementation,  et  il  s'attache  à  en  mon- 
trer l'application  commune  aux  arts  divers.  — 
Nous  avons  fait  consister,  avec  plusieurs  philo- 
sophes, le  gracieux,  le  beau  et  le  sublime  dans 
la  manifestation  de  trois  activités  différentes. 
M.  Menés  définit  autrement  ces  termes,  il  en  fait 
trois  degrés  du  beau,  par  le  mélange,  à  pro- 
portions différentes,  de  deux  éléments  du  beau  : 
la  grandeur  et  la  variété  ;  dans  le  gracieux  il  y 
a  peu  de  grandeur  et  plus  de  variété  :  dans  le 
beau,  beaucoup  de  variété  et  autant  de  gran- 
deur ;  dans  le  sublime,  beaucoup  de  grandeur  et 
peu  de  variété.  C'est  ingénieux,  mais  on  avoue- 
ra que  la  grandeur,  dans  sa  présente  acception, 
demande  à  être  définie,  ce  qui  serait  peut-être 
difficile  ;  et  que  la  variété  est  une  qualité  bien  peu 
primordiale,  pour  en  faire  un  des  deux  éléments 
essentiels  du  Beau. 

L.  C. 

REVUE  DE  L'AGENAIS. 

MM.  Tholin  et  Lauzun  s'adonnent  à  l'étude 
de  l'architecture  féodale  de  la  Gascogne  et  de 
l'Agenais  ;  ils  ont  publié  dans  la  Revue  précitée 
la  monographie  du  château  de  Perricard,  d'Er- 
tillac  et  de  Gavaudun. 

BULLETIN  MONUMENTAL,  n"  4,  1899. 

Le  présent  numéro  est  le  dernier,  que  nous 
verrons  émaillé  du  monogramme  M,  au  bas  des 
articles  du  vaillant  directeur  de  la  Société  fran- 
çaise d'archéologie,  feu  de  Marsy,  qui  dépouillait 
d'une  manière  si  intéressante  les  annales  des 
Sociétés  savantes,  et  rendait  compte  avec  tant  de 
soin  des  nouvelles  publications  archéologiques. 
Son  remarquable  résumé  du  grand  ouvrage  de 
M.  E.  Lefebvre-Pontalis  sur  la  cathédrale  de 
Noyon,  que  contient  en  outre  ce  numéro  même, 
aura  été  son  dernier  travail  notable.  Le  sérieux 
intérêt  archéologique  qu'il  excite  est  tout  mé- 
langé de  mélancolie.  Dans  le  même  numéro 
M.  Merlet  trace,  avec  grande  compétence,  un  bel 
itinéraire  aux  membres  du  Congrès  de  Chartres 
de  cette  année.  Nous  avons  signalé  au  chapitre 
Bibliographie,  l'étude  de  M.  E.  Soil  sur  la  tapis- 
serie de  la  cathédrale  de  Sens. 

ZEITSGHRIFT     FUR    CHRISTLICHE    KUNST 
(XIII''  année,  2°  fascicule). 

Le  P.  S.  Beissel  publie  un  intéressant  travail 
sur  les  représentations  peintes  ou  sculptées  dites 
«  images  du  Rosaire  »  aux  environs  de  1500, 
images  où  l'on  voit  d'ordinaire  la  Vierge  figurée 


au  milieu  d'une  couronne  de  roses  ou  d'un  rosaire 
ou  environnée  des  principaux  épisodes  de  sa  vie 
et  de  celle  du  Christ.  La  reproduction  de  deux 
sculptures  de  ce  genre  :  un  panneau  richement 
travaillé  conservé  au  Musée  germanique  de  Nu- 
remberg et  une  Madone  plus  simple,  en  bas-relief, 
au  couvent  de  Saint-Jean,  à  Schleswig,  accom- 
pagnent cet  article. 

M.  W.  Schnyder  continue  son  étude  historique 
sur  V Église  Santa  Maria  in  Cosinedin,  à  Rome 
(5  grav.  et  plan). 

M.  le  chan.  Schnutgen  s'occupe  d'un  projet  de 
monument  à  Thomas  à  Kempis,  pour  l'église  de 
Kempis,  œuvre  du  sculpteur  W.  Mengelberg. 

(Cliron.  des  Arts.) 

BULLETIN  ARCHÉOLOGIQUE,  1899,  n°  l. 

L'abbé  Chartraire,  Une  statue  de  saint  Thomas 
Beckct,  archevêque  de  Cantorbéry,  de  la  fin  du 
XII<=  siècle,  pp.  24  à  27  et  pi.  —  L'abbé  Fillet, 
La  tour  de  Chamaret  (Drôme),  pp.  28  à  57.  — 
Le  Clert,  L'habillement  d'un  gentilhomme  cam- 
pagnard à  la  fin  du  X  VI'^  siècle,  ses  armes,  son 
mobilier,  pp.  58  à  65.  —  F.  de  Mély,  La  date  de 
la  réception  de  la  Sainte  Couronne  à  Paris  (19 
août  1239),  pp.  66  à  69.  —  E.  Thoison,  Notes  sur 
cinquante-quatre  fondeurs  de  cloches,  pp.  70  à  83. 

—  L.  Demaison,  Les  chevets  des  églises  Notre- 
Dame  de  Châlons  et  Saint-Remi  de  Reims,  pp.  84 
à  107.  —  L'abbé  P.  Brune,  Les  reliques  de  l'ab- 
baye de  Beaune-les- Messieurs  (Jura)  et  leurs 
anciens  authentiques,  pp.  108  à  121,  5  pi.  et  grav. 

—  G.  Villers,  L^a  tour  de  Vauban,  à  Port-en- 
Bessin  (Calvados),  pp.  122  à  126.  —  L.-H.  La- 
bande,  Fragment  d'un  inventaire  estimatif  du 
trésor  royal  de  France  (f^""  tiers  du  XV"^  siècle), 
pp.  126  à  12g.  —  C"^  de  Grasset,  La  croix  de 
Lorraine,  pp.  130  à  132. 

KUNST  UND   KUNSTHAND'WERK 

(111°  année,  5'  fascicule). 

M.  Cari  Drexler  consacre  au  monastère  de 
Klosterneuburg,  près  Vienne,  et  aux  nom- 
breuses œuvres  d'art  qu'il  renferme,  un  intéres- 
sant travail,  accompagné  de  28  reproductions  de 
l'abbaye  elle-même,  de  l'intérieur  de  son  église, 
de  style  rocaille  :  chapelles,  grilles,  plafonds, 
stalles,  etc.,  et  d'objets  d'art  conservés  dans  le 
trésor,  gravures  parmi  lesquelles  on  regrette  tou- 
tefois de  ne  pas  trouver  l'admirable  autel  émaillé 
de  Nicolas  de  Verdun,  qui  est  la  plus  belle 
richesse  artistique  du  monastère. 


Btbltogiapl)te. 


79 


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XxxttX  btbl(ograpl)ique» 


:?trtl)éologie  et3Beaiu-':arr0'\ 

=^=^=    jFiancc.  ^==— 

Babeau  (A.).  —  Les  vieilles  enseignes  de 
Troyes,  dans  le  Mémorial  de  la  Sociélc  acadhniqtie 
d^ agriculture  du  département  de  V Aube,  t.  LXI. 

Battandier(A.).  —  La  médaille  juive  de  Notre- 
Seigneur  dans  le  Cosmos,  4  mars  189g. 

*  Beaumont  (Le  comte  Ch.  de).  —  La  Tou- 
raine  et  le  petit  palais.  —  Brochure  in-8^',  Tours, 
Dubois. 

Beaurepaire  Froment  (de).  —  Le  Saint  Sé- 
pulcre DE  MoissAC,  dans  L'œuvre  d'art,  15  juin  1899. 

*  Berthelé  (Jos.)  et  Valmary  (M.).  —  In- 
structions et  constitutions  de  Guillaume  Du- 
rand LE  Spéculateur. —  In-8°  de  150  pp.  et  photo- 
typies.  Montpellier.  Delord-Boelin.  (Extrait  des  Mé- 
moires de  l'Acad.  des  Sciences  et  Lettres  de  Montpellier.) 

Bonnet.  —  L'église  Saint-Pierre  de  Provins, 
d'après  un  inventaire  inédit  de  1782.  —  In-8°,  Paris, 
Imp.  Nat. 

Bouillet.  —  L'ÉGLISE  de  Laval-Dieu  (Arden- 
nes),  et  SES  BOISERIES  SCULPTÉES.  —  In-8°  et  grav. 
Paris,  Pion,  Nourrit  et  C''. 

*  Bruchet  (Max).  —  Inventaire  du  château 
d'Annecy  en  1393,  dans  le  Bulletin  archéologique, 
1898,  pp.  369  371. 

*  Brune  (L'abbé).  — ■  Les  reliques  de  l'Ab- 
baye de  Baume  les-Messieurs  (Jura).  —  In-8°. 
Paris,  Irap.  Nat. 

*  Le  même.  —  Statues  de  l'école  dijonnaise 
dans  l'église  de  Mièges  (Jura).  —  In-8°.  Lons-le- 
Saulnier,  Declume. 

*  Le  même.  —  Les  églises  romanes  et  l'ar- 
chitecture religieuse  dans  le  Jura.  —  In-8°. 
Caen,  Delesques. 

*  Le  même.  —  La  relique  et  le  reliquaire 
de  Saint-Juste,  a  Chateau-Chalon. —  In-8".  Lons- 
le  Saulnier,  Declume. 

*  Le  même.  —  Le  mobilier  et  les  œuvres 
d'art  de  l'église  de  Baume-les-Messieurs  (Jura). 
—  In-8°.  Paris,  Imp.  Nat. 

Carpentier  (C).  —  Historique  de  l'Hôtel  de 
Ville  de  Roye.  —  In-8°  av.  grav.  Montdidier, 
Carpentier. 

I.  Les  ouvrages  marqués  d'un  astérisque  (*)  ontété,  sont  ou 
seront  l'objet  d'un  article  bibliographique  dans  la  Revue. 


Cleveland  (C.-M.).  —  Half  hour  at  Rouen 
cathedral.  —  In-i6.  Rouen,  Leprétre. 

*  Comptes  de  l'Église  de  Chazelles,  de  1705  a 
1741,  dans  le  Bulletin  de  la  Société  archéologique  de  la 
Charente,  6"  sér.,  t.  VII,  pp.  41-43. 

*  Compte  des  fourrures  des  robes  du  comte 
et  de  la  comtesse  d'Angoulème,  de  m'="=  d'Albret 
ET  de  Madeleine  Décéris,  en  1481,  dans  \t  Bulletin 
de  la  Société  archéologique  de  la  Charente,  1900,  n°  8, 
pp.  7-8. 

*  D'Anselme  de  Puisaye.  —  Le  Monument 

DU    CARDINAL  DE    LaVIGERIE    A  SaINT-LoUIS  DE  CaR- 

thage  —  In-8°.  Leroux. 

*  De  Boysson  (B.). —  Visite  d'une  co.mmande- 
RiE  DE  Malte  au  XVII=  siècle,  par  Jean  de  Saint- 
ViANCE,  commandeur  de  Limoges,  procureur 
GÉNÉRAL  EN  16S5,  dans  le  Bulletin  de  la  Société  ar- 
chéologique de  la  Correze,  1S99,  pp.  115-157. 

Depoin  (J.).  —  La  reconstruction  de  l'Hôtel 
archiépiscopal  de  Pontoise  par  le  cardinal 
d'Estouteville.  —  In-8".  Versailles,    Cerf. 

Devaux  (L.).—  Église  de  Vichères. —  In-8°  av. 
grav.  Nogent-le-Rotrou,  Hamavd. 

Didron  (E.).  —  Le  Vitrail,  conférence  faite 
A  LA  Société  de  l'Union  centrale  des  Arts  déco- 
ratifs. —  In-40  et  grav.  Paris,  J.  Rouam. 

Edmond  (F.).  —  La  médaille  de  Notre-Sei- 
gneur,  dans  le  Cosmos.  11-25  mars  et  i"  avril   1899. 

Frézon  (V.).  —  Historique  de  l'ancien  Hôtel 
de  Ville  de  Montdidier.  —  In-8°  av.  grav.  Mont- 
didier, Carpentier. 

Gauthier  (J.).  —  L'ancienne  collégiale  de 
Sainte-Madeleine  de  Besançon  et  son  portail  a 
figures  du  XIIP  siècle.  —  In-8°  et  pi.  Besançon, 
Dodivers. 

Granges  de  Surgères  (De).  —  La  cathédrale 
DE  Nantes.  Documents  inédits  (1631).  —  In-8°. 
Paris,  Pion,  Nourrit  et  C''^. 

*  Guibert  (L.).  —  Fraiz  funék aires  de  feu  s. 
Antoine  Peconnet,  1685,  dans  le  Bull,  de  la  Soc. 
arch.  du  Limousin,  189S,  pp.  285-288. 

*  Le  même.  —  Mémoire  des  fraiz  que  j'ay 
faictz  pour  le  mariage  de  ma  sœur,  dam="'=  Léo- 
narde  Peconnet,  arresté  avec  M.  Michel  s'' de 
la  Bachelerie,  dans  le  Bull,  de  la  Soc.  arch.  du 
Limousin,  t.  XLVI  (1S98),  pp.  288-290. 

*  Le  même.  —  Inventaire  des  meubles  et 
autres  choses  trouvées  dans  les  bastimens  du 
Chastenet,  le  15  janvier  1694,  dans  le  Bull,  de  la 
Soc.  arch.  du  Limousin,  1898,  pp.  291-296. 

*  Le  même.  —  Inventaire  au  décès  de  Jean 
Peconnet,  31  octobre  1679,  dans  le  Bull,  de  la  Soc. 
arch.  du  Limousin,  1898,  pp.  277-284. 


8o 


B^cliuc  îie  r^rt  cJjicttcn. 


Herbet  (F.).  —  L'église  Saint-Louis  de  Fon- 
tainebleau ET  SON  architecte  dans  les  Annales  de  la 
société  liisiorique  et  archéolcgique  du  Gatinais,  3"= 
trimestre,  1898. 

Hinzelin  (E.).  —  La  vraie  Croix,  dans  la 
Nouvelle  Revue,  i"  mai,  1899. 

*  Jadart  (H.)-  et  Demaison  (P.).  —  Mono- 
graphie DE  l'Église  de  Réthel  (Ardennes).  — 
In-S"  de  100  pp.  illustré.  Paris,  Picard. 

*  Koechlin  (R.)  et  Marquel  de  Vasselot  (J.). 

—  La  Sculpture  a  Troyes  au  XVI=  siècle.  —  In-8° 
Jésus,  116  fig.  phototyp.  Paris,  A.  Colin. 

*  Labande.    —    Fragment   d'un  inventaire 

ESTIM.VrlF  DU  TRÉSOR  ROYAL  DE  FrANCE,  I"  TIERS  DU 

XV<=  SIÈCLE,  dans  le  Bulletin  archéologique  du  Comité 
des  travaux  historiques,  1878,  pp.  126-129. 

Laforgue  (R.).  —  Portrait  de  Jésus  a  Mon- 
TAUBAN  KT  A  RoME,  dans  le  Bulletin  de  la  Société 
archéologique  de  Tarn-et-Garo7ine,  4'=  trimestre  189S. 

La  lance  du  Calvaire  dans  Intermédiaire  des 
chercheurs  et  des  curieux,  30  avril  1899. 

Lauzun  (P.).  —  Ch.^teaux  gascons  de  la  fin 
DU  XIIP  siècle,  avec  introd.  de  M-  G.  Tholin.  — 
In  8°.  Auch,  Foix. 

*  Le  Clert.  —  L'habillement  d'un  gentil- 
homme campagnard,  a  la  fin  du  XVP  siècle,  ses 
ARMES,  SON  MOBILIER,  dans  le  Bulletin  archéologique 
du  Comité  des  travaux  historiques,  1898,  pp.  5S-65. 

Le  MYSTÈRE  DE  Saint-Gwenolé  A  Ploujean-Mor- 
LAix,  dans  le  Tour  du  Monde,  15  octobre  1898. 

*  Lespinasse   (René  de).  —  Mobilier  de  deux 

CHANOINES,       ET      BIBLIOTHÈQUE     d'UN     OFFICIAL     DE 

Nevers,  EN  1 373-1 382,  dans  le  Bulletin  de  la  Société 
Nivernaise,  1899,  pp.  44-7  i- 

Maître  (L.).  —  Une  église  carolingienne  a 
Saint-Philibert-de-Gkandlieu     (Loire  Inférieure). 

—  In-8°  et  fig.  Caen,  Delesques. 

Maie  (E.).  —  Quomodo  sibyllas  recentiores 
artifices  repr^sentaverint.  —  In  8°.  Paris, 
Leroux. 

*Marsaux  (Le  chan.).—  La  statue  de  tonnerre 

—  La  Vierge    et  le   buisson   ardent.  —    In-S". 
Beauvais,  Avonde  et  Bachelier. 

Mouget  (C).  —  La  Chartreuse  de  Dijon, 
d'après  les  documents  des  archives  de  Bourgogne.  — 
In-S"  et  fig.  J.  NeuvillesousMontreuil,  Arnauné. 

Ranquet  (H.  du).  — L'église  DE  Saint-Nectaire. 

—  In-8'.  Caen,  Delesques. 

Remy  (E.).  —  Monographie  du  palais  de  J  ustice 
DE  Grenoble.  —  In-S"  avec  grav.  Grenoble,  Gratien 
et  0\ 


*  Richard  (J.  M.)!  —  Les  Torches  des  com 
munautés  lavalloises  aux  processions  de  la 
Fête-Dieu  du  xvii<=  siècle. —  In-8°.  Laval,  Lelièvre. 

Rochebriine  (O.  de).  —  La  Vendée  qui  s'en 
VA  :  le  Château  de  Saint-Pompain.  —  In-8°.  Van- 
nes, Lafolye. 

Rochemonteix  (A.  de).  —  La  chapelle  de  la 
Vierge  de  la  Font-Sainte,  en  Haute-Auvergne. 
—  In-8°.  Caen,  Delesques. 

Rouvier  (F.).  —  Les  grands  sanctuaires  de 

LA    TRÈS    SAINIE    ViERGE  EN  FRANCE.  In-4'"    aveC 

grav.  Tours,  Mame. 

*  Thiollier  (A.).  —  Monuments  du  Velay,  dans 
le  Mémorial  de  la  Loire  à  St-Etienne,  journal  quotidien. 

*  Tholin  (M.  Georges).  —  Le  trésor  des  égli- 
ses DE  Casseneuil  et  de  Tournon  (Lot-et-Garon- 
ne), AU  XVP  siècle,  dans  le  Bulletin  archéologique 
du  Cotnité  des  travaux  historiques,  1898,  pp.  444449. 

Tortel.  —  Notice  historique  sur  l'église 
Sainte-Marie  de  Toulon.  — ■  In-8°  avec  grav.  et 
plans.  Toulon,  Imp.  catholique. 

Viatte  (J.).  —  L'église  de  Saint-Julien-le- 
Pauvre  de  Paris.  Monographie  de  l'église  et  de 
ses  environs.  —  In-S"  av.  14  planches.  E,  Paul  fils 
et  Guillemin. 

Voillery.  —  Monographie  de  l'église  de  Pom- 
mard. —  In-8°  et  grav.  Beaune,  Batault. 


gïUcmiJanc. 


Braun  (Le  P.  J.).  —  La  chasuble  de  saint 
Sixte  a  Munster,  dans  Zcitschrift  /tir  Christliche 
Kunst,  V  livr.  XIP  année  (1899). 

Fischer  (F.).  — Die  Marienburg,  illustrierter 
FuEHRER  durch  die  Geschichte  und  Raeume  der 
bedeutendsten  deutschen  Ivulturstaette  der 
Ostmark.  —  In-i2,  II  fig.  et  i  pi.  Grandenz,  J.  Gae- 
bel. 

GeymûUer  (H.  von).  —  Handbuch  der  Archi- 
tektur,  VI.  I.  Die  Baukunst  der  Renaissance  in 
Frankreich.  I.  Historisclie  Darstellung der  Entwicke- 
luyig;  des  Baustils.  —  In-8°  et  66  fig.  Stuttgart,  Berg- 
striisser. 

Gerhardt  (F.).  —  Schloss  und  Schlosskirche 
zu  Weissenfels.  —  In-8"  et  7  pi.  Weissenfels,  Lehm- 
stedt. 

Hunecke  (W.).  —  Das  Kloster  Lilienthal 
UND  DIE  Gemeinde  Falkenhagen.  —  In-8°  av.  i  grav. 
Detmold,  Hinrichs. 

Malthaed  (.\d.).  —  Beitraege  zur  Kun.stge- 
schichi)')  Schi.eswiu-Hoi.steins.  Zur  Kenntnis  der 
mittelalteri.ichen  Schnitzaltaere  Schi.eswig- 
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BibUograpï)te. 


8i 


Oidtmann  (H.).  —  Vitraux  rhénans  du  XVP 
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d'Ehrkshoven)  dans  Zeilschrift  fur  Christliche  Kutist, 
2'  livr.  XIP  année,  1899. 

Schubring  (Paul).  —  Altichiero  und  seine 
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Leipzig,  Hiersemann. 

Rôhricht.  —  Geschichte  der  Kreuzzuege  im 
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Bielefeld,  Velhagen  und  Klasin". 


Angleterre. 


Cliflon  (A.-B.).  —  The  cathedral  Church  of 
Lichfield.  —  In-8"  avec  39  ill.  London,  G.  Bell. 

Kendrich  (A.-F.).  —  The  cathedral  Church  of 
Lincoln,  a  History  and  Description  of  its  Fabric. 
—  In-8°  et  fig.  London,  Bell. 

Mac  Gibbon  (D.)  et  Rosa  (T.)  —  The  eccle- 
siastical  Architecture  of  Scotland,  from  the 
earliest  times  to  the  seventeenth  Century, 
t.  III.  —  In-8°.  Edinburgh,  D.  Douglas. 


Italie. 


Armellini  (Mariano).  —  Lezioni  di  archeolo- 
GiA  CRiSTiANA  ;  OPERA  POSTUMA.  —  In-8°  et  fig.  Roma, 
Filippo  Guggiani. 

BofFa  (S.).  —  I  Maestri  Campionesi  :  Marco 
(DuoMO  di  Milano),  Jacopo  (Certosa  di  Pavia), 
ÀIatteo  (Basilica  di  Monza)  ed  altri.  —  In-8''. 
Milano,  Ulrico  Hoepli. 

Broglio  (T.).  —  La  cattedrale  di  Arezzo  e  i 
disegni  della  sua  fracciata  ;  note  ed  impressioni. 
—  In-8°  et  fig.  Arezzo,    Sinatti. 

Cavallucci  (C.  J.).  —  Manuale  di  storia  del- 
l'arte.  III.  (II  risorgimento  in  Italia).  —  In-i6. 
Firenze,  Le  Monnier. 

*  Pietramellara  (G.).  —  Raccolta  di  divise  o 
motto  araldici.  —  In-8°  de  94  pag.  Rome,  Propa- 
gande. 


Tanfani  Centofantl  (L.).  —  Notizie  di  artisti 
tratte  dai  documenti  pisani.  —  In-8°.  Pisa,  Enrico 
Spoerri. 


Cspagne. 


Arco  y  Molinero  (A.  del).  —  Restos  artisti- 

COS  É  INSCRIPCIONES    SEPULCRALES    DEL    MONASTERIO 

DE  PoBLET.  —  In  4  "  et  fig.  Barcelona,  Susany. 

Noguera   Camoccia  "(J)-    —   Escorial  a  la 

VISTA.      GUIA  DESCRIPTIVA    DEL    ReaL    MoNASTERIO, 

Templo  y  Palacio  de  San  Lorenzo  del  Escorial. 
—  In-i2  et  fig.  Madrid,  Felipe  Marques. 


TPelgique. 


Bethune(Le  baron). —  Epitaphes  et  monuments 

des  ÉGLISES  DE  LA  FLANDRE  DU  XVI"=  SIÈCLE,  d'APRÎîS 
les  manuscrits    DE    CORNEILLE    GaILLARD  ET  D'aU- 

tres  auteurs.  2"=   partie  (West-Flandre,  partie  méri- 
dionale); —  In-4°.  Bruges.  L.  De  Plancke. 

*  Bruylant  (E.).  —  La  Belgique  illustrée,  ses 
monuments,  ses  paysages  et  ses  œuvres  d'art.  — 
3  vol.  grand  in-4°.  Bruxelles.  Prix  :   100  fr. 

Les  secrets  du  coloris 
spectre.  —  In-8°,  208  pp. 


*  De  Lescluze  (G.). 
révélés  par  l'étude  du 
Roulers,  de  Meester. 


*  Germain  (L.)  et  Donnet  (F.).  —  Représi:n- 
tation  présumée  de  Jeanne  d'Arc  sur  unetaque 
DE  foyer.  —  Une  taque  symbolique  du  xvii^  siè- 
cle. —  Broch.  Anvers,  De  Backer,  1900.  (Extrait 
des  Aimai.  del'Acad.  royale  d' arch.  d  Anvers.) 

Guerlin  (R.).  —  Congrès  d'Arlon  et  séance 
solennelle  de  l'académie  royale  d'archéologie 
DE  Belgique.  —  Broch.  Amiens,  Yvert. 

*  La  Belgique  pittoresque  et  monumentale, 
album  photographique  de  250  vues.  —  Bruxelles, 
Rubens. 

Le  symbolisme  et  les  symbolistes  dans  Le  Messa- 
ger du  Nord,  octobre,  novembre,  décembre  1898. 

Nève  (J.).  —  Le  Martyre  de  saint  Sébastien, 
tableau  de  Memling  au  Musée  de  Bruxelles.  — ■ 
In-8"  3  pi.  Bruxelles,    V=  J.  Baertsoen. 

Vlaminck  (A.  de).  —  L'église  collégiale  Notre- 
Dame  A  Termonde  et  son  ancien   obituaire.  

In-8°  et  fig.  Termonde,  de  Schepper-Philips. 


■^ 


KKVUK    DB    L  AKT   CURÉTrEN. 
I9OI.    —    i""^    LIVRAISON. 


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<Ct)VOnlClUC,  SOMMAIRE  :  RESTAURATIONS  MONUMENTALES:  Réponse  à 
M  Fierens-Gevaert;  vandalisme  en  France;  restaurations  en  Belgique.^  ŒUVRES  NOU- 
VELLES :  église  St-Anselme  à  Rome  ;  vitraux  ;  calvaire  à  Lourdes.  —  DÉCOUVERTES  : 
fresques,  etc.   -  VARIA.   -  NÉCROLOGIE 


Albrecht  De  Vriendt. 


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BLcstauration9  monumentales. 


teur. 


ONSIEUR  Fierens-Gevaert  est  un 
Flamand  qui,  à  Paris,  a  su  se  créer  une 
notoriété  par  ses  études  sur  l'art  an- 
_,  cien  dont  il  se  montre  fervent  admira- 
Nmis  avons  éprouvé  le  plus  vif  plaisir  à 
entendre  ses  conférences  sur  Van  Dycketsurles 
primitifs  de  la  peinture  l'an  dernier  à  Anvers, 
à  Gand,  à  Bruxelles.  Il  est  probable  qu'il  étudie 
beaucoup;  il  est  certain  qu'il  écrit  davantage 
et  que  ses  informations  manquent  de  sûreté.  Dans 
le  présent  fascicule  de  la  ReTue  de  V Art  chré- 
tien notre  collaborateur,  M.  Gerspach,  remet  au 
point  des  faits  entièrement  inexacts  avancés  par 
M.  Fierens-Gevaert  dans  son  article  :  De  Van 
Eyck  à  Van  Dyck,  celui-ci,  notamment  :  que 
Baldonnetti  aurait  été  le  premier  à  appliquer  avec 
succès  les  couleurs  à  l'huile  à  la  peinture  mu- 
rale (i). 

Dans  un  nouvel  article  que  M.  F.-G.  vient  de 
publier  dans  la  Chronique  des  Arts,  et  que  nous 
avons  tenu  à  reproduire  ci-après,  il  s'occupe  de 
ce  qui  se  fait  présentement  dans  son  propre  pays. 
Il  n'y  montre  ni  l'exactitude  ni  le  calme  que 
réclame  une  critique  honnête.  Un  homme  d'Etat 
a  dit  un  jour  que  le  dénigrement  est,  chez  les 
Belges,  une  caractéristique  nationale.  Une  fois 
de  plus  il  a  raison.  M.  Fierens-Gevaert,  rentré 
d'un  séjour  au  pays  natal,  s'empresse  de  dé- 
noncer aux  journaux  de  Paris  le  vandalisme  des 
Belges;  sa  critique  est  amère  et  singulièrement 
injuste. 

Il  ne  reproche  pas  aux  Belges  de  négliger 
leurs  monuments  anciens,  d'en  méconnaitre  la 
valeur  artistique,  de  manquer  de  soin  à  leur 
égard.  Bien  au  contraire,  il  les  traite  de  Van- 
dales, parce  qu'ils  ne  les  laissent  pas  tomber  en 
ruines  ! 

Nous  tâchons  de  sauver  ce  qu'il  en  reste  et 
nous  nous  reprochons  d'y  avoir  pensé  trop  tard  ; 
nous  sommes  navrés  d'avoir  vu  s'effondrer  les 
superbes  voûtes  de  l'abbatiale  de  Villers,  d'avoir 
laissé  s'en  aller  pierre  par  pierre  ces  murs  véné- 
rables, jusqu'au  jour  où  l'Élat  a  pu  enfin  devenir 
propriétaire  d'un  terrain  sacré  pour  l'art.  Nous 
déplorons  d'être  arrivés  trop  tard  à  Aulne  pour 
sauver  le  beau  pignon  occidental  de  l'église. 

I.  Lire  dans  la  présente  livraison  «  Correspondance  d'Italie  », 
par  Gerspach.  p.  55. 


Mais  nous  nous  félicitons  d'avoir  pu  prévenir 
au  moins  l'effondrement  du  chevet  du  chœur  de 
cette  dernière  et  la  chute  d'un  pan  de  mur  qui 
contient  encore  un  dernier  spécimen  des  baies 
du  XI 11^  siècle.  Nous  avons  tenu  à  sauver  le 
réfectoire  d'une  ruine  imminente  en  remplaçant 
deux  colonnes  fêlées  et  en  bouchant  les  trous 
béants  des  voûtes  ruinées  par  une  végétation 
parasite.  Si  l'on  s'y  était  pris  vingt  ans  plus  tôt, 
combien  de  beaux  fragments  de  l'art  monu- 
mental on  aurait  pu  garder,  qui  sont  disparus 
pour   toujours  ! 

Mais  c'est  justement  là  notre  crime.  Si  M.  Fie- 
rens  avait  été  le  maître,  il  y  a  20  ou  40  ans,  il  se 
serait  bien  gardé  d'opérer  le  sauvetage  que  nous 
reprochons  à  nos  devanciers  d'avoir  négligé.  Au- 
jourd'hui encore  il  ne  ferait  rien  pour  conserver 
à  la  postérité  ce  qui  reste  de  ces  ruines,  qui  pour- 
tant le  passionnent.  Il  fallait  les  laisser  mourir  de 
leur  belle  mort,  car  :  «  on  ne  restaure  pas  les 
ruines.  » 

Non,  on  ne  restaure  pas  les  ruines,  mais  on  les 
conserve,  quand  ce  sont  des  vestiges  inestimables 
de  notre  ancien  art,  comme  des  reliques  pré- 
cieuses ;  on  consolide,  on  soustrait  au  ravage 
rapide  des  intempéries  les  murs  lézardés,  trem- 
pés par  l'eau  du  ciel,  ébranlés  par  le  temps  ;  on 
remet  en  place  les  pierres  tombées,  on  déblaye 
les  décombres  amoncelés,  on  dégage  de  belles 
pierres  enfouies,  on  remet  au  jour  des  galeries 
ensevelies. 

On  fait  plus,  et  l'on  a  raison;  on  répare  les 
dégâts  causés  par  le  teinps  et  les  vandales,  on 
bouche  des  brèches.  On  raffermit  des  murs  bran- 
lants, même  on  remet  au.K  verrières  leurs  presti- 
gieuses résilles  qui  se  découpent  sur  le  ciel  en  si 
riches  dentelles  et  l'on  repose  sur  leur  base  les 
fûts  exhumés  des  colonnes,  qui  désormais  jalon- 
neront la  vieille  nef  et  rappelleront  l'ordonnance 
du  majestueux  vaisseau.  Eh  bien,  tout  cela  c'est 
l'abomination  de  la  désolation  pour  M.  Ficrens, 
qui  va  jusqu'à  blâmer  l'idée  qu'on  a  eue  de  rap- 
procher les  claveau.x  des  ogives,  de  manière  à  re- 
produire sur  le  sol  leur  cintre  géant  et  d'empiler 
avec  ordre  certaines  pierres  retrouvées  qui  con- 
stituent des  documents  arcliitectoniques. 

Il  se  trouve  chez  nous  de  bons  confrères  qui 
s'attachent  aux  étrangers  de  passage  pour  leur 
dénoncer  les  méfaits  de  leurs  compatriotes  et 
leur  dictent  des  catilinaires  à  insérer  dans  les 
journaux  de  Paris,  repris  ensuite  dans  nos  ga- 
zettes.  Ainsi    faisaient    naguère   des    membres 


CDromque» 


83 


de  la  Société  pour  la  protection  des  Sites,  dont 
nous  avons  ici  même  relevé  les  erreurs  ;  ainsi 
faisaient  également  des  «  amis  »  du  dernier 
Congrès  d'architecture  à  Bruxelles  dont  nous 
avons  dû  également  rectifier  les  dires.  C'est  ce 
que,  semb!e-t-il,  quand  au  moyen  d'informations 
erronnées,  on  a  voulu  documenter  M.  Fierens. 

C'est  l'École  de  St-Luc  que  l'on  a  coutume  de 
charger  des  péchés  d'Israël.  M.  Fierens,  dans  sa 
loyauté,  nous  saura  gré  de  le  détromper  et  de  lui 
apprendre  que  l'école  de  St-Luc  n'a  rien  à  voir 
ni  à  la  restauration  de  Villers,  ni  à  celle  du 
Sablon  à  Bruxelles,  ni  à  celle  du  château  des 
Comtes  à  Gand.  Sans  être  sorti  de  cette  école,  je 
l'estime  trop  pour  m'en  séparer  à  propos  d'Aulne. 
M.  Verhaegen  sera  sans  doute  dans  le  même 
cas  en  ce  qui  concerne  le  Gerardsteen. 

Il  ne  reste  donc  au  passif  de  cette  école,  parmi 
les  griefs  articulés,  et  nullement  fondés  d'ailleurs, 
que  la  restauration  de  St-Pierre  de  Louvain.  Or, 
j'estime  qu'elle  n'a  pas  à  rougir  de  ce  remarquable 
travail,  une  des  meilleures  restaurations  qui 
aient  été  exécutées  en  Belgique.  Nous  pourrons 
en  reparler  s'il  y  a  lieu.  Enfin  Saint-Martin  de 
Saint-Trond,  église  moderne,  n'a  rien  à  voir  avec 
la  question  des  restaurations.  Je  n'entreprendrai 
pas  aujourd'hui  de  réfuter  les  attaques  de  M.  Fie- 
rens contre  l'enseignement  des  Écoles  de  Saint- 
Luc.  Je  ferai  cependant  une  remarque.  L'école  de 
Saint-Luc  est  une  école  libre  et  spéciale  d'art 
chrétien  ;  son  enseignement  est  basé,  comme  il 
convient,  sur  nos  traditions  nationales.  Toutefois 
celles-ci  régnent  d'une  manière  moins  absolue, que 
l'archéologie  gréco-romaine  n'a  longtemps  régné 
et  ne  règne  encore  dans  la  plupart  des  académies 
publiques  et  officielles  et  dans  toutes  les  écoles 
des  Beaux-Arts  de  Belgique  et  de  France. 

En  outre  je  demanderai  comment  un  homme 
de  la  valeur  de  M.  Fierens  peut  faire  entendre, 
que  l'étude  de  l'archéologie  est  funeste  à  ceux  qui 
sont  appelés  à  restaurer  nos  anciens  monuments 
ou  même  à  ceux  qui  doivent  y  faire  œuvre  d'ar- 
tistes fidèles  aux  traditions  dont  ces  édifices  sont 
imprégnés. 

Voici  l'article  paru  dans  la  Chroiique  des  arts. 

L.  C LOQUET. 

Les  restaurateurs  n'ont  pas  encore  épuisé  la  série  de 
leurs  méfaits  en  France,  et  la  Chronique  s'est  vue  con- 
trainte encore,  la  semaine  dernière,  de  signaler  leur  zèle 
malveillant.  On  peut  constater  du  moins  avec  joie  que 
leurs  reconstitutions,  réparations,  consolidations,  tous 
leurs  pastiches  ingénieux  et  glacés,  exécutés  sous  prétexte 
de  conserver  les  monuments  aux  générations  futures,  ne 
se  commettent  plus  impunément.  L'architecte  qui  entre- 
prend une  restauration  est  un  homme  hardi.  Le  prestige 
des  restaurateurs  s'évanouit.  L'industrie  des  arrangeurs 
de  vieilles  pierres  est  en  baisse.  Elle  sévit  encore,  par 


suite  d'une  certaine  force  acquise.  Il  n'est  plus  personne 
qui  consente  à  la  défendre. 

Plût  au  ciel  qu'il  en  firt  de  même  en  Belgique. 

Ce  charmant  pays  où  la  vie  sociale  et  l'art  traversent 
en  ce  moment  une  période  si  brillante,  est  resté,  par  une 
contradiction  tout  à  fait  paradoxale,  l'Éden  des  restaura- 
teurs. Je  viens  de  m'y  promener  pendant  cinq  semaines. 
Hélas  !  il  n'est  pas  de  ville,  pas  de  village  où  les  restau- 
rateurs n'aient  laissé  des  traces  de  leur  passage.  Toutes 
les  églises,  tous  les  édifices  présentant  un  caractère  d'art 
sont  signalés,  par  des  comités  provinciaux,  à  la  commis- 
sion royale  des  monuments  ;  celle-ci,  pour  prouver  son 
activité  et  «  assurer  la  parfaite  conservation  »  de  l'édifice 
signalé,  ne  trouve  généralement  rien  de  mieux  que  d'en 
demander  une  restauration  totale,  —  vœu  toujours  ratifié 
par  le  gouvernement. 

Par  qui  les  restaurations  sont-elles  dirigées  ? 

Nous  avons  le  malheur  de  posséder  en  Belgique  une 
«  école  d'art  >,  dite  école  de  Saint-Luc,  où  les  jeunes  ar- 
chitectes, sculpteurs,  peintres,  s'exercent  exclusivement 
à  imiter  les  styles  morts  —  particulièrement  le  roman  et 
le  gothique,  jadis  si  florissants  dans  les  provinces  wallon- 
nes et  flamandes.  Cet  institut  archéologique  forme  un 
nombre  considérable  d'élèves,  souvent  habiles,  mais  qui 
ne  possèdent  aucun  des  dons  de  l'artiste.  Toute  origina- 
lité est  morte  pour  eux.  En  auraient-ils  conservé  la  moin- 
dre parcelle,  qu'ils  chercheraient  avec  soin  à  l'éteindre 
pour  réaliser  l'idéal  du  parfait  copiste  prêché  par  leurs 
maîtres.  Ils  ne  conçoivent  point  la  possibilité  d'une  créa- 
tion personnelle.  Ils  sont  vieux  de  trois  ou  quatre  siècles. 
Ils  vivent  dans  un  passé  lointain.  Leur  travail  a  quelque 
chose  de  funéraire.  Et  ils  sont  ainsi  plusieurs  centaines  à 
enrayer  la  vie  dans  l'art  de  leur  pays,  à  recevoir  des  som- 
mes considérables  pour  leurs  besognes  néfastes,  tandis 
que  les  vrais  artistes  obtiennent  avec  peine  quelques  mi- 
sérables subsides.  Car  c'est  dans  les  ateliers  ou  classes 
de  cette  Académie  du  pastiche  que  se  recrute  la  légion 
compacte  des  restaurateurs  belges. 

Les  élèves  de  Saint-Luc  ont  une  carrière  assurée.  Ils 
restaurent  les  églises,les  reconstruisent  au  besoin  entière- 
ment dans  le  style  ancien,  taillent  des  autels,  exécutent 
des  retables,  des  peintures  murales,  en  s'inspirant  des 
«  meilleurs  modèles  >.  Leurs  travaux  corrects  sont  mor- 
tellement ennuyeux.  On  en  trouve  partout  ;  c'est  une  ob- 
session. Cette  imitation  servile  est,  en  réalité,  un  acte  de 
parfaite  déloyauté.  On  ne  ravit  pas  aux  morts  leur  idéal 
de  beauté  avec  un  cynisme  aussi  tranquille.  Cela  révolte, 
et  l'on  se  prend  à  regretter  le  «  mauvais  goût  »  du  siècle 
dernier  en  présence  de  ce  néant,  de  cette  impuissance, 
de  ce  vide  funèbre.  Je  suis  de  l'avis  de  Flaubert,  qui  pen- 
sait qu'avoir  du  mauvais  goût,  c'est  encore  avoir  de  la 
poésie  dans  la  cervelle.  Or,  nos  bons  pasticheurs  belges 
s'appliquent  précisément  à  tuer  toute  la  poésie  des  vieux 
monuments  de  leur  pays.  Les  stucs,  les  applications  de 
bois  peint,  de  marbres  blancs  et  noirs,  tout  ce  faux  décor, 
derrière  lequel  les  Jésuites  cachaient  les  pierres  gothiques, 
ont  moins  défiguré  les  églises  de  la  Belgique  que  les  res- 
pectueuses et  mortelles  reconstitutions  des  architectes 
modernes. 

Assez  de  théories  ;  passons  aux  faits. 

L'une  des  façades  de  l'église  du  Sablon  à  Bruxelles  vient 
d'être  complètement  grattée,  nettoyée,  réparée  (').  Elle  est 
d'une  blancheur  éclatante.  Plus  la  moindre  trace  de  pous- 
sière dans  les  crochets,  les  pinacles,  les  moulures.  Les 
bourgeois  et  les  ménagères  s'émerveillent  de  cette  pro- 
preté. Plus  la  moindre  dégradation,  plus  la  moindre  bri- 

1.  Par  un  architecte  qui  n'a  rien  de  commun  avec  l'École  Saint- 
Luc.  N.  D.  L.  R. 


84 


WitWt  De  V^xt  thxitmh 


sure  ;  cela  sort  d'une  boîte.  Impossible  de  rêver  pâtisserie 
plus  charmante,  plus  fondante  ;  c'est  la  crème  des  restau- 
rations. On  assure  que  toute  l'tîglise  subira  le  même  sort. 
En  attendant,  la  façade  nouvelle  «  hurle  »  à  côté  des  an- 
ciennes. A  Sainte-Gudule  (cathédrale  de  Bruxelles)  on  a 
placé  sur  un  portail  latéral  une  \'ierge,  toute  fraîche,  qui 
parait  bien  ennuyée  de  se  trouver  si  en  vue  dans  un  décor 
vétusté.  11  y  a  un  certain  nombre  d'années,  Sainte-Gudule 
avait  déjà  été  mise  dans  un  état  pitoyable  ;  les  arêtes  des 
gables,  des  pignons,  des  pyramidions  avaient  été  considé- 
rablement amincis  ;  on  avait  voulu  rafraîchir  le  monument. 
Ces  bonnes  traditions  se  perpétuent. 

Il  n'y  a  pas  que  les  églises...  Les  édifices  civils  n'échap- 
pent point  à  ce  vandalisme  conservateur.  On  a  entière- 
ment reconstruit  le  beau  chemin  de  ronde  du  magnifique 
burg  des  comtes  de  Flandre  :  'S  Graveiisleen,  conservé  à 
Gand  (").  11  y  a  deux  ans,  en  signalant  ce  superbe  type 
de  l'architecture  militaire  du  XIl"  siècle,  nous  avons  sup- 
plié les  architectes  de  ne  point  toucher  aux  échauguettes 
si  joliment  posées  sur  la  muraille  d'enceinte.  Elles  ont 
été  impitoyablement  refaites.  Nous  avons  eu  tort  de  nous 
en  mêler,  sans  doute.  Les  restaurateurs  n'aiment  point 
que  l'on  mette  le  nez  dans  leurs  affaires.  Notre  prière  aura 
louetté  leur  zèle  réparateur.  Notez  qu'on  les  avait  chargés 
tout  simplement  de  désencombrer  les  ruines  du  manoir 
comtal.  Ils  n'ont  pas  encore  reconstitué  le  donjon.  Ne  dé- 
sespérons point  :  cela  ne  saurait  tarder  et  le  château  des 
Comtes  sera  bientôt  un  '\  vestige  »  aussi  odieux  que  le 
^■/i?^»  de  Gérard  le  Diable,  autre  monument  de  Gand  res- 
tauré jadis  d'une  manière  abominable. 

Les  villes  flamandes  rivalisaient  autrefois  de  zèle  pour 
élever  des  édifices  plus  somptueux  les  uns  que  les  autres. 
Aujourd'hui  elles  s'enorgueillissent,  senible-t-il,  de  dépen- 
ser beaucoup  d'argent  pour  les  restaurations  —  ou  d'en 
faire  dépenser  par  le  gouvernement.  Louvain  ne  veut  pas 
se  laisser  éclipser  par  Gand.  On  y  restaure  abondamment: 
les  chœurs  de  l'église  Saint- Pierre,  et  tout  un  côté  de 
l'hôtel  de  ville.  Cette  e.xquise  maison  communale  avait 
été  bien  malmenée  par  les  arrangeurs  officiels  il  y  a  qua- 
rante ou  cinquante  ans.  On  posa  sur  les  consoles  de  la 
façade  principale,  de  hideuses  statuettes  que  l'on  préten- 
dait inspirées  par  un  «  intelligent  souci  archéologique  ». 
Aujourd'hui,  pour  éviter  ces  erreurs,  on  reconstruit  une 
façade  depuis  le  sol  jusqu'à  la  pointe  extrême  du  pignon. 
Et  tout  Louvain  applaudit.  A  Malines  on  nettoie,  on  ame- 
nuise l'énorme  tour  de  Saint-Rombaut.  Sans  doute  la 
trouve-t-on  un  peu  lourde.  On  cherche  à  lui  donner  un  air 
coquet,  aimable.  On  la  corrige,  on  lui  voudrait  de  belles 

manières 

Vous  savez  quelles  sont  les  réponses  des  architectes  à 
qui  l'on  adresse  ces  critiques  :  l"  Les  pierres  tombaient 
sur  la  tête  des  passants  ;  2°  la  pluie  filtrait  à  travers  les 
voûtes  des  édifices  ;  3°  dans  une  vingtaine  d'années  les 
parties  leconstruites  seront  identiques  aux  parties  an- 
ciennes, il  ne  sera  plus  possible  de  les  distinguer  les  unes 
des  autres  ;  etc.  Pour  les  deux  premiers  cas,  une  répara- 
tion légère,  ([uelques  pierres  adroitement  remi)lacées,  un 
peu  de  ciment  dans  les  lézardes,  suffiraient  souvent.  Mais 
dès  qu'un  architecte  «  tient  >  un  monument,  il  ne  le 
«  lâche  >  plus.  11  promet  quelques  renouvellements  im- 
perceptibles, —  il  change  tout  l'édifice.  La  troisième  excu- 
se des  restaurateurs  est  la  plus  mauvaise  et  la  moins  sou- 
tenable.  Jamais  le  pastiche  ne  trompera  personne.  Il  est 
faux  que  l'on  finisse  par  confondre  la  copie  avec  l'original. 
Nous  en  avons  à  Paris  la  preuve  flagrante.  La  sacristie 
de  Notre-Uame,  construite  par  Lassus  et  Viollet-le-Duc, 
a-t-elle  jamais  réussi  à  se  faire  prendre  pour  une  con- 

I.  Également  par  un  architecte  qui  n'a  rien  de  commun  avec 
l'École  Saint-Luc.  N.  D.  L.  8. 


struction  du  XII I^  siècle  et  ne  continue-t-elle  pas,  malgré 
les  années,  à  porter  la  marque  indélébile  de  la  contre- 
façon (■)  ? 

A  la  très  grande  rigueur  (■'),  et  avec  d'innombrables 
réserves,  on  peut  admettre  que  des  églises  encore 
livrées  au  culte  et  des  monuments  civils  habités  par 
des  administrateurs  soient  restaurés.  Mais  où  la  raison 
se  perd,  où  l'on  ne  trouve  plus  l'ombre  d'explication, 
où  l'on  se  sent  en  présence  d'une  négation  absolue  non 
seulement  de  l'art,  mais  du  i)his  simple  bon  sens,  c'est 
devant  les  restaurations  de  ruines  !  On  restaure  les 
ruines  des  célèbres  abbayes  d'Aulne  et  de  Villers.  C'est 
un  crime,  une  profanation.  11  n'y  a  donc  personne  en 
Belgique  parmi  les  membres  du  gouvernement  et  des 
commissions  compétentes  pour  sentir  le  profond  ridicule 
qui  s'attache  à  la  réunion  de  ces  mots  :  restauration  de 
ruines  ?  Une  ruine  restaurée  est-elle  encore  une  ruine? 
N'est-ce  pas  proprement  une  aberration  de  vouloir  ar- 
ranger, relever,  rejointoyer,  ravaler  de  vieilles  pierres 
dont  la  séduction  consistait  précisément  dans  un  désordre 
imprévu,  qui  tiraient  leur  charme  tragique  de  leurs  bles- 
sures mêmes,  des  traces  de  la  dévastation  et  du  temps? 
Et  ne  sait-on  pas  ciue  l'on  détruit  la  beauté  des  paysages 
environnants  —  ceux  de  Villers  et  d'Aulne  sont  admi- 
rables —  en  se  livrant  à  ces  reconstitutions  sacrilèges  ? 

A  Villers,  le  chœur  de  l'église  abbatiale  est  occupé  par 
un  énorme  échafaudage  qui  ne  disparaîtra  peut-être  plus. 
Ne  vaudrait-il  pas  mieux  que  les  murailles  fussent  per- 
dues ?  Un  rédacteur  du  Petit  Bleu  de  Bruxelles  écrivait 
ces  jours  ci  :  «  Il  y  a  dans  le  chœur  de  l'église  un  formi- 
dable échafaudage,  dressé  là  depuis  le  commencement 
des  travaux,  qui  a  dû  coûter  cher,  qui  n'a,  paraît-il,  jamais 
servi  et  qui  est  aujourd'hui  si  moussu,  si  moisi,  qu'aucun 
entrepreneur  soucieux  de  la  vie  humaine  n'oserait  per- 
mettre à  ses  ouvriers  de  s'en  servir.  > 

La  restauration  de  l'abbaye  d'.Aulne  est  conduite  avec 
science,  je  n'en  disconviens  pas.  Mais  quelle  joie  a-t-on  à 
contempler  les  immenses  câbles  qui  traversent  l'église  et 
retiennent  les  meneaux  des  grandes  ogives?  quel  plaisir 
d'art  peut-on  éprouver  à  voir  des  tronçons  de  colonnes 
rangés  symétriquement  dans  les  nefs  ?  Les  corniches  du 
chœur  et  du  transept  sont  égalisées,  certaines  voûtes  sont 
reconstruites.  Ce  n'est  plus  une  ruine,  ce  n'est  pas  une 
reconstitution.  En  réalité,  on  a  l'air  de  visiter  un  chantier 
de  construction  abandonné  depuis  la  veille  par  les  mar- 
briers et  tailleurs  de  pierre.  L'église  est  devenue  un  local 
idéal  pour  conférences  sur  l'art  du  moyen  âge. 

Mais  c'est  à  la  ville  de  Saint-Trond  que  revient  la  pal- 
me. L'église  Saint-Martin  a  été  tout  simplement  détruite 
et  on  a  construit  une  nouvelle  église  «  romane  *  à  la 
place  !  Au  moins,  là,  on  n'a  pas  cherché  les  compromis  ; 
on  a  agi  avec  une  franchise  cynique. 

Si  l'on  ne  fait  cesser  promptement  ces  massacres,  la 
Belgi(|ue  monumentale  ne  sera  bientôt  plus  qu'un  cime- 
tière archéologique. 

Je  parlerai  prochainement  des  sculptures  et  des  pein- 
tures. 

Le  mauvais  goût  de  nos  \'andales  patentés  s'y  exerce 
avec  non  moins  d'ardeur.  Je  sujjplie,  en  attendant,  mes 
confrères  belges,  à  quelque  parti  (|u'ils  appartiennent, 
d'écouter  mon  cri  d'alarme  et  d'unir  leurs  efforts  pour 
arracher  les  glorieux  monuments  flamands  et  wallons  des 
mains  infatigables  de  ces  artistes-fossoyeurs.  Ce  n'est  pas 
seulement  une  question  de  vaine  esthétique  ;  c'est   aussi 

1.  La  Sacristie  de  N.  -D.  de  Paris  n'offre  le  cas  ni  d'une  restaura- 
lion,  ni  d'une  restitution,  ni  d'une  copie;  c'est  une  bâtisse  entière- 
ment originale  de  Viollct-lc-Duc;  alors,  que  signifie  cet  exemple!' 

2.  M.  F.  G.  est  bien  bon  de  ne  pas  exiger  que  l'on  habite  de 
vraies  ruines. 


Cljrontque. 


85 


une  question  de  gros  sous.  Le  devoir  des  autorités  est 
d'enrayer  par  des  remèdes  radicaux  cette  épidémie  restau- 
ratrice qui  dévore  les  budgets  et  anéantit,  tout  Moisir,  un 
illustre  patrimoine  d'art. 

H.  Fierens-Gevaert. 

France.  Le  vandalisme  en  France  semble  devoir 
être  inguérissable. 

A  Avignon,  le  maire,  qui  a  déjà  fait  abattre  la 
porte  Limbert,  vient  de  procéder  à  la  destruction 
d'une  autre  porte,  la  porte  de  Loull,  en  attendant 
la  démolition  complète,  lùyà  antioncée.  Il  s'agit 
d'obtenir  un  élargissement  de  4  mètres. 

A  Soissons,  la  municipalité  fait  raser  les  restes 
d'une  basilique  découverte  il  y  a  quelques  années 
et  abattre  une  tour  à  laquelle  s'attachaient  des 
traditions  locales. 

A  Orléans,  les  édiles  encore  décident  la  mu- 
tilation du  cloître  d'un  ancien  cimetière  où  se 
trouvaient  —  justement  dans  la  partie  sacrifiée 
—  des  restes  assez  bien  conservés  d'anciennes 
peintures. 

On  sait  que  la  maison  de  la  rue  Saint-Romain 
de  Rouen,  et  les  vieilles  murailles  de  Péronne, 
d'Aigues-Mortes,  sont  menacées   de  destruction. 

A  Clermont-Ferrand,  on  vient  de  commencer 
la  démolition  de  la  maison  où  Pascal  vit  le 
jour,  rue  des  Gras, près  de  la  cathédrale.  \J Avenir 
du  Puy-de-Dôme,  qui  proteste  contre  cette  ab- 
surde destruction,  demande  qu'on  conserve  au 
moins  un  corps  de  logis  auquel  il  n'a  pas  encore 
été  touché  et  qu'on  y  installe  un  musée  pascalien. 
Nous  nous  associons  chaleureusement  à  ce  vœu. 


LES  architectes  de  la  ville  de  Paris  sont  en 
train  de  restaurer  le  cloître  des  Billettes, 
ce  bijou  du  XIV'^  siècle  dont  les  piliers  et  les 
voûtes  menaçaient  ruine. 

Ce  cloître  fut  bâti  par  un  bourgeois  de  Paris, 
un  antisémite  du  temps,  sur  l'emplacement  d'une 
maison  qui  appartenait  à  un  riche  Israélite  nom- 
mé Jonathas  ;  ce  dernier,  accusé  d'avoir  percé 
de  son  canif  une  hostie  et  de  l'avoir  jetée  dans  une 
chaudière  d'huile  bouillante,  fut  dépouillé  de  ses 
biens  au  profit  de  l'église  de  Saint-Jean.  Un  cou- 
vent fut  fondé  dans  la  rue,  qui  prit  le  nom  pitto- 
resque de  rue  «  Où  Dieu  fust  bouilli.  »  On  fit  venir 
de  Châlons  des  religieux  hospitaliers,  les  Carmes 
Billettes,  ainsi  nommés  d'une  partie  de  leur 
vêtement,  une  sorte  de  scapulaire  en  forme  de 
billettes.  Le  couvent  fut  supprimé  en  1790. 


A  Florence,  le  Marzocco  signale  le  danger  qui 
menace  une  œuvre  admirable  de  Brunelleschi, 
le  cloître  de  Santa  Croce  :  le  Conseil  municipal 
de  Florence  a  projeté  d'élever  là  la  nouvelle 
bibliothèque,  dont  la  masse  énorme,  suspendue 
sur  le  cloître,  l'écraserait  de  son  ombre.  D'ailleurs, 
deux  autres  œuvres  de  Brunelleschi  sont  déjà 
abîmées  depuis  longtemps  :  à  la  sacristie  de  St- 
Laurent,  les  sculptures  de  Donatello  dorment 
depuis  un  siècle  sous  un  épais  badigeon  et  la 
lanterne  qui  surmonte  l'édifice  est  aveuglée  ;  au 
palais  des  Guelfes,  une  des  plus  belles  salles  du 
monde,  percée  de  fenêtres  gigantesques,  est  divi- 
sée, dans  sa  hauteur,  en  trois  étages  partagés 
entre  une  caserne  de  pompiers  et  les  écoles 
communales. 

Belgique.  —  La  collégiale  de  Huy  réclame  une 
restauration  urgente,  vu  l'état  de  délabrement 
de  certaines  parties  de  maçonneries. 

A  l'intérieur  de  l'édifice,  il  est  question  de 
supprimer  le  jubé  actuel  et  de  le  placer  avec  le 
buffet  d'orgues  dans  un  autre  endroit  de  l'église, 
afin  de  rendre  au  vaisseau  dont  la  grande  tour 
forme  la  continuation,  toute  son  ampleur  et  sa 
belle  perspective.  En  outre,  l'autel  majeur  qui  a 
été  avancé  dans  le  sanctuaire,  devra  reprendre 
sa  place  normale  dans  l'abside  où  se  trouvent 
encore  ses  fondations. 

— }®^— K^H- 

Le  retable  de  'S  Heeren-Elderen.  —  'S  Heeren- 
Elderen  (Limbourg)  possède  dans  son  église  un 
retable  de  grande  dimension  — •  il  mesure  2'".  15 
de  large  —  que  d'aucuns  attribuent  à  l'art  rhénan, 
d'autres  à  l'art  mosan. 

L'œuvre  avait  subi  «  du  temps  l'irréparable 
outrage  ».  Elle  était  devenue  une  chose  informe, 
et,  à  raison  des  mignonnes  statuettes  et  figurines 
qui  la  composaient,  les  habitants  du  village  ne 
la  désignaient  autrement  que  sous  le  nom  irres- 
pectueu.x  de  Poppenkas,  l'armoire  aux  poupées. 
Et,  en  effet,  ce  n'était  plus  qu'un  assemblage  de 
statuettes  défigurées,  mutilées,  d'abord  par  les 
iconoclastes  du  XVP  siècle,  ensuite  par  les 
septembriseurs  de  la  Convention,  et,  enfin,  par 
des  prétendus  restaurateurs,  ravageurs  artis- 
tiques. 

De  hautes  influences  intervinrent  ;  M.  le  député 
Helleputte  éveilla  la  sollicitude  du  gouvernement, 
et  grâce  à  l'appui  obtenu  de  celui-ci,  le  Poppenkas 
d'hier  se  trouve  transformé  aujourd'hui  en  une 
des  plus  belles  productions  de  l'art  chrétien  du 
milieu  du  XVl'^  siècle. 

Le  travail  de  restauration  a  été  confié  à  deux 
de  nos  concitoyens  :  à  M.  Léon  Bressers  pour  la 


86 


îRebue  lie  r^vt  cJ)ictieiu 


peinture  et  la  polychromie,  et  à  M.  Léopold 
Blancliaert  pour  la  sculpture  et  la  statuaire. 

Le  retable  de  l'église  de  'S  Ileeren  Elderen 
retrace  avec  grande  profusion  mais  bien  artis- 
tiquement ordonnancée  d'accessoires  et  de  dé- 
tails, la  vie  de  N.-S.  Jésus-Christ  ;  la  nativité, 
l'adoration  des  mages,  la  circoncision,  la  chute 
sous  la  croix  sur  la  voie  sanglante,  le  calvaire, 
l'ensevelissement.  Autour  de  ces  groupes  domi- 
nants, des  sujets  en  mignonne  création  repré- 
sentant des  scènes  de  l'ancienne  Loi  :  le  serpent 
d'airain,  le  sacrifice  d'Abraham,  Caïn  et  Abel, 
l'Arche  de  Noé,  les  prophètes,  etc. 

Il  y  a  là  une  accumulation  de  plus  de  300 
personnages,  parmi  lesquels  nous  signalerons 
tout  spécialement  le  groupe  des  saintes  femmes 
au  pied  de  la  Croix.  Tous  ces  groupes,  tous  ces 
personnages,  il  a  fallu  les  restaurer,  les  ressus- 
citer en  quelque  sorte.  Après  de  longues  études, 
de  laborieuses  recherches  et  un  travail  ininter- 
rompu de  sept  mois  avec  quatre  ouvriers  d'élite, 
nos  concitoyens  sont  parvenus  à  réédifier  ce 
remarquable  spécimen  de  l'art  rhénan  ou  mosan 
—  nous  ne  nous  prononçons  pas  —  qui  date  de 
I540-I545,et  ils  se  sont  acquittés  de  la  tâche 
ardue  que  le  gouvernement  leur  a  confiée  avec 
une  science  et  un  art  qui  touche  à  la  perfection, 
et  qui  leur  vaudra  la  reconnaissance  de  tous  les 
amis  de  l'art  chrétien  médiéval. 

(Bien  Public.) 

Le:  nii)ies  de  Franchimont.  —  M.  le  ministre 
de  l'agriculture  vient  de  décider  la  consolidation 
des  ruines  du  château  de  Franchimont  acquises 
par  l'État. 

Franchimont  est  un  beau  style  de  forteresse 
du  moyen  âge  d'une  disposition  originale  et 
d'aspect  imposant.  Vue  des  hauteurs  de  la  route 
qui  se  dirige  vers  Polleur,  sa  silhouette  ne  le 
cède  en  rien  à  celle  des  ruines  les  plus  remar- 
quables des  bords  du  Rhin.  Elle  s'élève  sur  un 
plateau  an  point  de  rencontre  de  deux  vallées  et 
domine  toute  la  contrée  environnante. 

Avant  la  Révolution  française,  elle  servit  de 
prison  d'État.  Sous  la  République,on  y  établit  une 
fabrique  de  salpêtre.  Deux  explosions  successives 
l'ont  mise  dans  l'état  oîi  elle  est  aujourd'hui. 

L'exécution  de  travaux  de  conservation  est 
urgente.  Elle  a  été  confiée  à  M.  l'architecte 
Lohest,  l'habile  restaurateur  du  château  de 
Bouillon. 

A  JOURNEE  depuis  longtemps,  faute  de 
X  1.  crédits,  la  restauration  de  la  vieille  église 
S^int-Tierre  de  Montmartre,  la  plus  ancienne  de 


Paris,  va  être  très  prochainement  commencée  ; 
83,610  francs  viennent  d'être  mis  à  la  disposition 
de  l'architecte,  M.  Houvard,  pour  procéder  à  la 
restauration  du  chœur  seulement. 


DES  restaurations  nombreuses  sont  en  voie 
de  réalisation  à  Bruxelles. 

Celle  de  l'église  du  Sablon,  suspendue  durant 
quelques  mois,  vient  d'être  reprise.  Les  travaux 
du  Sablon  coûteront  1,800,000  francs,  dont  la 
moitié  est  supportée  par  la  ville  de  Bruxelles,  et 
l'autre  moitié  par  l'État  et  la  Province. 

On  achève  en  ce  moment  la  restauration  de 
la  superbe  église  d'Anderlecht,  à  l'ombre  de 
laquelle  se  trouve  le  castel,  rempli  d'antiquités, 
de  M.  Vandenpeereboom,  l'ancien  ministre  des 
chemins  de  fer. 

A  Ste-Gudule,  on  restaure  la  façade.  —  On 
devrait  songer  à  dégager  le  chevet  de  la  splendide 
collégiale.  Il  y  a  là  un  mur  abominable  auquel 
est  adossé  le  plus   malencontreux   des  kiosques. 

Quant  aux  restaurations  de  la  Grand'PIace, 
elles  se  poursuivent  avec  méthode.  En  ce  moment, 
on  achève  la  restauration  de  la  Maison  des  Bras- 
seurs, surmontée  de  la  statue  équestre  de  Charles 
de  Lorraine,  et  on  commence  la  démolition  de 
la  Maison  des  Boulangers.  Cette  dernière  restau- 
ration, qui  coûtera  au  delà  de  300,000  francs, 
donnera  une  superbe  allure  au  côté  occidental 
de  la  Place,  qui,  outre  la  Maison  des  Bojilangers, 
comprend  Le  Renard,  Le  Cornet,  La  Louve,  Le 
Sac  et  La  Brouette  ou  La  Presse. 

Sur  la  façade  de  la  Maison  des  Boulangers, 
on  replacera  le  buste  de  Charles  II  d'Espagne 
encadré  d'un  trophée  guerrier.  Un  dôme  octogo- 
nal dominera  le  toit,  et  six  figures  allégoriques 
orneront,  comme  jadis,  la  balustrade  de  la  cor- 
niche. On  va  aussi  restaurer  prochainement  Le 
Cygne,  qui  était  autrefois  le  siège  de  la  fameuse 
corporation  des  bouchers.  Sur  la  toiture,  on 
replacera  les  grandes  figures  allégoriques  d'autre- 
fois. En  attendant,  elles  se  trouvent  dans  la  cour 
et  dans  un  des  vestibules  de  l'hôtel-de-ville. 

On  poursuit  également  la  restauration  de  ce 
vénérable  monument.  Actuellement  on  travaille 
à  l'aile  gauche,  c'est-à-dire  du  côté  de  la  rue  de 
la  Tête  d'or.  Puis,  ce  sera  au  tour  du  toit,  dont 
on  va  refaire  les  trois  étages  de  lucarnes.  Lorsque 
toutes  ces  restaurations  seront  achevées,  d'ici  à 
deux  ou  trois  ans,  la  Grand'PIace  de  Bruxelles 
sera  réellement  merveilleuse.  Ce  sera  la  Grand' 
Place  telle  qu'elle  existait  il  y  a  deux  cents  ans. 


Cl)rontaue« 


87 


LE  Congrès  international  des  sciences  ethno- 
graphiques a  émis  à  l'unanimité,  un  vœu 
relatif  à  la  conservation  en  France  de  la  col- 
lection de  tissus  et  costumes  du  III'^  au  XIII^ 
siècle,  reconstituée  à  la  suite  de  son  séjour  dans 
la  Haute-Kgypte,  par  M.  Albert  Gayet,  et  expo- 
sée au  Palais  du  Costume. 


GGiiUrcs  nouvelles. 

La  consécration  de  V église  de  Saint- Anselme  à 
Rome.  Le  10  novembre  le  cardinal  Rampolla, 
assisté  de  16  prélats  de  l'Ordre  de  Saint-Benoît, 
a  consacré  la  nouvelle  église  du  collège  bénédic- 
tin de  Saint- Anselme,  bâti  sur  l'Aventin,  d'après 
les  plans  du  R™'=  P.  de  Hemptinne,  Abbé  primat 
de  l'Ordre  de  Saint-Benoît,  le  monument  le 
mieux  réussi  de  la  nouvelle  Rome.  Quand  on 
arrive  par  la  voie  de  Civita-Vecchia,  on  est  frappé 
de  ses  dimensions  imposantes,  et  de  la  disposi- 
tion harmonieuse  de  toutes  ses  parties.  L'intérieur 
répond  pour  le  fini  d'exécution,  le  soin  des 
détails,  à  ce  que  promet  l'extérieur,  et  il  est  assez 
vaste  pour  pouvoir  loger  200  religieux. 

La  consécration  a  été  faite  par  S.  Em.  le  car- 
dinal Rampolla.  Le  souverain  pontife  s'étant 
réservé  le  protectorat  de  l'Ordre  de  Saint-Benoît, 
devait,  naturellement,  faire  la  consécration  de 
l'église  qui  devenait  le  centre  de  l'Ordre,  mais  les 
conditions  des  temps  l'avaient  forcé  de  déléguer 
son  aller  ego,  le  cardinal  secrétaire  d'Etat. 

Plus  de  80  abbés  de  l'Ordre  de  Saint-Benoît, 
en  chape  et  en  mitre,  formaient  le  chœur  ;  une 
vingtaine  d'archevêques  et  d'évèques  rehaussaient 
cette  cérémonie  de  leur  présence,  et  je  renonce 
à  compter  la  multitude  des  prélats,  de  supérieurs 
d'Ordres  religieux  qui  y  assistaient. 

Léchant  était  celui  de  Dom  Pothier,  magnifi- 
quement exécuté,  sous  la  direction  de  Dom 
Janssens,  par  les  Bénédictins  de  Saint-Anselme, 
et  tout  le  monde  a  pu  goûter  la  beauté  des  mélo- 
dies grégoriennes  exécutées  avec  une  maestria  et 
un  talent  que  l'on  trouve  rarement. 

Voici  quelques  indications  sur  l'architecture 
du  nouveau  monastère.  Le  collège  qui  couvre 
6,000  mètres  carrés  de  terrain  est  construit  dans 
le  pur  style  roman  du  XIII''  siècle;  il  charme 
l'œil  par  le  choix  intelligent  des  matériaux  et  par 
l'harmonieuse  proportion  de  ses  parties. 

De  longs  cloîtres,  coupés  à  angle  droit  par 
d'autres  cloîtres,  donnent  accès  aux  différentes 
salles.  Ce  qui  distingue  cette  construction,  c'est 
son  cachet  de  simplicité  monastique  unie  à  une 
grande  perfection  dans  les  détails.  C'est  un  rien, 
une  serrure,  un  fer  qui  retient  une  porte,  une 
lampe, une  rampe  d'escalier,  mais  ce  rien  est  traité 


suivant  le  style  de  l'époque  et  révèle  la  main  d'un 
artiste. 

Quand  on  arrive  à  Rome  par  la  ligne  de  Civi- 
ta  Vecchia,  on  est  frappé  des  imposantes  dimen- 
sions de  ce  bâtiment  qui  domine  toute  la  plaine. 
Ses  quatre  tours  en  brisent  les  angles  et  lui 
donnent  l'aspect  d'un  château-fort,  mais  le 
clocher  de  l'église,  plus  élevé,  et  plus  élancé  grâce 
à  ses  fenêtres  ajourées,  a  bien  vite  fixé  le  voya- 
geur sur  la  destination  de  l'édifice  ;  c'est  bien  un 
monastère  bénédictin.  Les  monuments  de  la  nou- 
velle Rome  sortis  déterre  après  1870,  enfermant 
en  quelque  sorte  la  vieille  ville  dans  une  couronne 
de  maisons  et  d'édifices,  n'a  pas  beaucoup  de 
beaux  palais.  Les  Italiens  ont  cherché  avant  tout 
à  faire  des  maisons  de  rapport.  Sauf  le  palais 
de  la  Banque  d'Italie,  le  palais  Boncompagni, 
il  n'y  a  rien  qui  fixe  et  arrête  l'attention.  Le 
collège  de  Saint-Anselme  est  venu  rompre  cette 
monotonie,  et  grâce  aux  Bénédictins,  l'Eglise 
comote  à  Rome  un  monument  digne  de  ce  grand 
Ordre. 

Le  toit  de  l'église,  de  style  basilical,  en 
montre  à  découvert  la  charpente,  comme  c'est 
l'usage  dans  les  anciennes  basiliques.  Les  murs 
sont  encore  nus,  mais  lisseront  plus  tard  décorés 
de  peintures,  et  peut-être  de  mosaïques. 

Le  maître-autel  est  surmonté  du  baldaquin  ou 
dais  traditionnel  dans  le  style  du  XIV»^  siècle  et 
tous  les  autels  ont  été  faits  dans  ce  style.  Le 
Rév.  Abbé-Primat  a  eu  une  heureuse  idée.Prenant 
à  la  lettre  ce  verset  de  la  Genèse  tpasuit  lapident 
in  titulum  fimdens  oleum  desiiper  "j),  \\  a  voulu 
réaliser  ce  concept.  Les  autels  de  la  crypte,  au 
nombre  de  16,  se  composent  d'un  bloc  massif  de 
granit.  Au  milieu  a  été  creusé  le  sépulcre  où  re- 
poseront les  reliques,  enfermées  dans  une  boîte 
d'argent.  Le  sépulcre  lui-même  est  clos  par  une 
plaque  de  granit.  Cette  pierre,  ce  bloc  a  reçu 
l'onction  sainte.  Une  croix  de  cuivre  doré,  des- 
sinée artistiquement,  s'applique  en  relief  sur  le 
devant  de  l'autel  et  rompt  l'uniformité  de  la 
surface  sans  dessins  ni  moulures.  On  ne  pouvait 
unir  plus  de  simplicité  à  plus  de  grandeur. 

— }@i  "   i©f- 

M.  Ed.  Didron  vient  de  mettre  en  place  dans 
l'église  Notre-Dame  de  Beaune,  une  nouvelle 
verrière.  Elle  remph't  une  fenêtre  partagée  en  trois 
lancettes  surmontées  d'un  beau  réseau  flammé, 
et  raconte  le  martyre  de  saint  Floscel,  qui  est  très 
honoré  à  Beaune.Traité  en  grisaille, copieusement 
rehaussée  de  jaune  d'argent  et  dans  le  style  de 
la  première  Renaissance,  le  nouveau  vitrail  repré- 
sente, au  centre,  la  scène  du  martyre  ;  à  droite 
la  translation  des  reliques  à  Beaune  ;  à  gauche, 
une  scène   contemporaine,  mais  traitée,  bien  en- 


88 


HRcbuc  lie  r^rt  t})rttien. 


tendu,  dans  le  même  style  ancien,  la  remise  d'une 
partie  des  reliques  à  l'église  de  Montebourg 
(Manche),  lieu  du  martyre,  par  Mgr  Le  Nordez, 
évêque  actuel  de  Dijon,  et  natif  lui-même  de 
Montebourg.  Dans  les  flammes  au-dessus,  deux 
anges  portant  l'un  la  palme,  l'autre  la  couronne; 
enfin,  dans  le  compartiment  supérieur,  la  figure 
du  Christ  assis. 


Un  calvaire.  —  La  catholique  Bretagne  offre 
à  Notre-Dame  de  Lourdes  un  Calvaire,  qui 
s'élève  près  du  célèbre  lieu  de  pèlerinage. 

Naguère  l'amiral  de  Cuverville  écrivait  dans 
sa  lettre  ouverte  au  Président  de  la  République: 
«  La  Bretagne  a  voulu  que  le  siècle  de  l'Imma- 
«  culée  Conception  ne  se  terminât  pas  sans 
«  qu'un  monument  grandiose  de  sa  foi  et  de  son 
«  amour  s'élevât  au  lieu  même  des  apparitions  : 
«  l'un  de  ses  enfants  vient  d'achever  le  calvaire 
«  de  granit  qui  rappellera  aux  âges  futurs  la 
«  fermeté  de  nos  croyances  et  notre  espérance 
«  en  Jésus  crucifié.  )) 

Le  monument  est  digne  de  la  fière  Bretagne. 
La  base  quadrangulaire  porte  quatre  statues  de 
un  mètre  quatre-vingts  chacune  :  la  Sainte 
Vierge,  saint  Jean,  Marie-Magdeleine,  Longin. 
Sur  une  des  faces  figurent  les  noms  des  cinq 
diocèses  de  Bretagne  :  Rennes,  Saint-Brieuc, 
Nantes,  Vannes  et  Quimper.  Une  autre  repré- 
sente la  prière  «  O  Criix  ave,  spes  nnica  »  en 
langue  bretonne. Une  banderole  entourant  l'arbre 
de  la  croix,  superbe  monolithe,  proclame  le 
triomphe  de  Jésus-Christ  :  «  Cliristtis  vincit, 
régnai,  imperat.'^  Et  en  avant  se  détache  l'écusson 
de  la  province  avec  sa  devise  :  «  Potins  mori 
qnam  fœdari:  Plutôt  la  mort  que  la  souillure.  » 


!Oécouï)cctc0. 

Découverte  de  fresques.  On  a  découvert  d'in- 
téressantes fresques  pendant  les  travaux  de 
restauration  exécutés  dans  le  chœur  du  couvent 
de  Ste.-Cécile,  à  Rome. 

Le  docteur  Frédéric  Hermainn,  invité  par  la 
direction  générale  des  antiquités  et  beaux-arts  à 
donner  son  avis  sur  les  peintures  découvertes,  a 
pu  établir  qu'elles  sont  du  peintre  romain  Pietro 
Cavallini. 

Vasari  raconte,  en  effet,  que  Cavallini  «  pei- 
gnit de  sa  main  presque  toute  l'église  de  Ste-Cé- 
cile  ». 

L'importance  de  la  découverte  provient  surtout 
de  ce  qu'on  ne  connaissait  jusqu'ici  de  Cavallini 
que  les  mosaïques  de  Sainte-Marie  en  Transté- 


vère,  de  St-Chrysogone  et  de  St-Paul  hors  les 
murs,  œuvres  dans  lesquelles  l'art  du  peintre  ap- 
paraît transformé  par  les  mosaïstes. 

Dans  les  fresques  découvertes  à  Ste-Cécile,  le 
Christ  entouré  de  la  cour  divine,  l'artiste  vanté 
par  Vasari  nous  apparaît  comme  un  maître  doué 
d'une  grande  puissance,  un  émule  de  Giotto. 

Ces  fresques  doivent  remonter  à  l'an  1300, 
c'est-à-dire  à  une  époque  où  le  rénovateur  de  la 
peinture  italienne  venait  de  visiter  Rome. 


IL  y  a  quelques  mois,  on  a  découvert  à  Bosco- 
reale,  près  de  Naples,  là  d'où  est  sorti  le  fa- 
meux trésor  qu'il  y  a  trois  ou  quatre  ans  le  baron 
de  Rotschild  a  donné  au  Louvre,  un  immense 
édifice  remontant,  paraît-il,  à  une  époque  anté- 
rieure à  celle  de  Pompéi,  et  dont  les  parois  sont 
ornées  de  fresques  de  toute  beauté,  en  parfait 
état  de  conservation.  Ces  fresques  décoraient 
deux  des  salles  sur  les  vingt  qui  ont  été  décou- 
vertes. Elles  sont  de  grande  dimension,  trois 
surtout  qui  représentent  :  la  première,  une  citha- 
riste,  la  seconde,  un  gladiateur  âgé  racontant 
probablement  à  une  dame  les  exploits  de  sa 
jeunesse,  et  enfin,  la  troisième,  une  femme  qui 
paraît  écouter  une  harmonie  lointaine.  L'empe- 
reur d'Allemagne  a  fait  offrir  de  ces  fresques  une 
somme  considérable  au  propriétaire  qui  consen- 
tirait volontiers  à  les  lui  céder,  mais  l'opinion 
publique  s'est  émue  et  en  appelle  à  l'intervention 
du  gouvernement  en  demandant  en  cette  circon- 
stance l'application  de  l'édit  Pacca,  qui  interdit 
la  sortie  d'Italie  de  certains  objets  d'art  comme 
l'on  sait.  Il  y  a  de  sérieuses  difficultés  à  ce  pro- 
pos. Ainsi,  on  raconte  qu'à  l'insu  du  ministère, 
la  direction  des  fouilles  de  Naples  aurait  auto- 
risé le  propriétaire,  M.  de  Prisco,  député,  à  dé- 
tacher les  70  fresques  mises  au  jour,  dont  plu- 
sieurs grandeur  naturelle  ;  de  sorte  que,  perdant 
leur  caractère  d'immeuble,  elles  seraient  deve- 
nues meubles,  frustrant  ainsi  l'Etat  de  son  droit 
d'expropriation,  et  alors  comme  objets  d'art,  le 
propriétaire  aurait  le  droit  de  les  exporter.  Le 
ministre,  M.  Gallo,  a  désavoué  la  direction  des 
fouilles  de  Naples,  se  réservant  d'établir  la  res- 
ponsabilité individuelle  de  chacun. 

— }Qi   '■   )Q<— 

UN  tableau  attribué  à  Hugo  van  der  Goes, 
peintre  qui  n'était  pas  encore  représenté 
au  musée  de  Berlin,  a  été  acquis  récemment  par 
la  galerie.  C'est  un  groupe  de  saintes  femmes 
avec  saint  Jean,  qui  formait  le  volet  droit  d'un 
triptyque  dont  la  partie  centrale  représentait  la 
Descente  de  croix.   Mais  l'état  de  conservation 


Cl)roiuque. 


89 


assez  médiocre  de  la  peinture  ne  permet  pas 
d'affirmer  nettement  l'authenticité  de  l'attribu- 
tion. 

l£aria. 

Nouvelles  religieuses.  Reliques  de  saint  Augus- 
tin. —  Le  corps  de  saint  Augustin,  racheté  aux 
Sarrasins  par  le  roi  lombard  Luitprand,  reposa, 
pendant  des  siècles,  à  l'église  de  Saint-Pierre  in 
cield'oio  à  Pavie,  dans  un  reliquaire,  dû  au  génie 
artistique  de  Bonino  de  Campiglione,  l'auteur  du 
célèbre  tombeau  des  Scaliger,  à  Vérone. 

Cette  basilique  lombarde  ayant  été  désaffectée 
à  la  suite  des  guerres  napoléoniennes,  le  corps  de 
saint  Augustin  fut  transféré  à  la  cathédrale  de 
Pavie,  où  ses  précieuses  reliques  restèrent  dépo- 
sées pendant  près  d'un  siècle. 

La  basilique  ayant  été  restaurée  et  rendue  au 
culte,  l'autorité  ecclésiastique  a  décidé  que  le 
corps  de  saint  Augustin  y  sera  transféré  et  dé- 
posé dans  le  célèbre  reliquaire  de  Bonino,  chef- 
d'œuvre  d'une  grande  richesse,  ornée  de  290  sta- 
tues de  saints  et  figures  allégoriques,  datant  de 
1362  et  qui  vient  d'être  restauré. 

La  translation  a  eu  lieu  en  grande  pompe 
religieuse  le  dimanche,  30  septembre;  le  reli- 
quaire restauré  dépasse  en  richesse  ceux  de  saint 
Dominique  de  Bologne  et  de  saint  Pierre,  martyr, 
de  l'église  de  San  Eustorgio  de  Milan,  et  le  mo- 
nument de  Benoit  IX  à  Pérouse,  ainsi  que  le 
célèbre  monument  funéraire  de  Robert  d'Anjou. 


^  t»,  ,si.  »».  »».  <f:  '».  '».  •>».  '».  »».  '».  ■<».  o».  ».ft  ,», ,», ,».  ..y;,  4». .».  t»  <n  *».  t». 


HlûcEfljt  X)c  Vricnbt. 

LA  mort  inopinée  d'Albrecht  De  Vriencitest 
pour  l'art  belge  un  deuil  qui  sera  partagé 
par  les  pays  voisins,  où  le  peintre  a  souvent 
fait  connaître  les  œuvres  de  son  pinceau,  où  il  a 
personnellement  représenté  la  Belgique  dans  des 
circonstances  où  la  présence  d'un  artiste  était 
nécessaire.  C'était  d'ailleurs  un  peintre  de  l'an- 
cienne race  flamande  ;  studieux,  travailleur, 
dévoué  à  sa  tâche,  à  qui  l'inspiration  ne  faisait 
pas  défaut,  mais  qui  n'entendait  s'abandonner  ni 
aux  hasards  de  l'inspiration,  ni  aux  caprices  de 
la  fantaisie.  Fils  d'un  artiste  de  mérite,  il  avait 
été  à  bonne  école,  et  s'était  bientôt  rompu  aux 
difficultés  techniques  de  l'art.  Mais  s'il  était 
maître  de  son  pinceau, il  n'oubliait  jamais  qu'avant 
de  peindre  l'artiste  doit  penser.  C'est  grâce  à  ces 


qualités  acquises,  —  partagées  avec  Julien,  son 
frère  aîné,  —  que,  avec  celui-ci,  il  s'était,  dès  sa 
jeunesse,  placé  en  bon  rang  dans  la  phalange  des 
peintres  belges. 

Tous  deux  ont  déjà,  par  la  date  de  leur  nais- 
sance, échappé  aux  engouements  et  aux  séduc- 
tions du  romantisme  de  1830.  Leur  génération  a 
profité  de  la  lassitude  et  de  l'évolution  survenues 
à  la  suite  de  ce  mouvement  aussi  généreux  que 
superficiel.  Le  peintre  Leys,  après  en  avoir  subi 
la  séduction  dans  toutes  ses  conséquences,  fut, 
grâce  à  un  tempérament  robuste  et  à  une  con- 
ception élevée  de  l'art,  un  des  premiers  à  réagir 
contre  des  tendances  dont  il  avait  été  la  victime. 
Il  chercha,  au  moyen  d'une  exécution  plus  ser- 
rée, d'une  mise  en  scène  plus  sûre  et  d'études 
historiques  plus  approfondies,  enfin  par  des 
caractères  plus  fouillés,  à  pousser  l'art  flamand 
dans  une  meilleure  voie. 

Leys  se  souvint  qu'il  était  de  la  race  des  Fla- 
mands, mais  de  ces  Flamands  antérieurs  aux 
peintres  de  la  Renaissance  ;  de  ceux  qui,  restés 
chez  eux,  n'ont  pas  subi  l'influence  de  l'Italie. 

C'est  à  ces  peintres  qu'il  alla  demander  conseil, 
un  appui,  des  exemples.  Il  se  mit  à  regarder  très 
attentivement  les  panneaux  des  Van  Eyck,  des 
Quentin  Metsys,  des  Memling  et  d'autres  pein- 
tres de  race  germanique. 

On  sait  combien  le  succès  répondit  à  cette 
nouvelle  orientation.  L'exemple  de  Leys  ne  fut 
pas  perdu  pour  plusieurs  artistes  richement  doués 
de  la  jeune  génération  :  Joseph  Lies,  Hendricx, 
les  frères  De  Vriendt,  suivirent,  sans  rien  abdiquer 
de  leur  personnalité,  une  voie  sinon  identique, 
du  moins  parallèle. 

Albrecht  De  Vriendt  est  un  de  ces  peintres 
qui,  en  conservant  l'admiration  la  plus  convain- 
cue pour  les  vieux  Flamands,  cherchèrent,  non 
moins  sincèrement,  à  rester  fidèles  à  eux-mêmes. 
Les  partis  pris,  les  excentricités  voulues,  les  sou- 
bresauts et  le  charlatanisme  de  la  peinture  ultra- 
moderne n'eurent  aucune  prise  sur  lui.  C'était  un 
travailleur,  je  viens  de  le  dire;  il  appliqua  son 
généreux  labeur  à  cultiver,  à  perfectionner,  à 
mettre  en  valeur  le  riche  fond  que  la  nature 
avait  déposé  en  lui.  Il  parvint  à  acquérir  un  ta- 
lent vraiment  historique  ;  c'est-à-dire  qu'il  réussit 
à  faire  revivre  sur  la  toile  les  scènes  de  l'histoire 
par  des  conceptions  que  le  spectateur  était  tenu 
d'accepter. 

C'est  ainsi  que  l'on  doit  à  Albrecht  De  Vriendt 
une  série  de  tableaux  qui,  tout  en  marquant  les 
progrès  successifs  de  sa  carrière,  lui  assureront 
une  place  distinguée  parmi  les  peintres  de  la  se- 
conde moitié  de  ce  siècle  :  Jacqueline  de  Bavière 
et  Philippe  le  Bon  (Musée  de  Liège),  Charles- 
Quint  au  couvent  de  St-Juste,   l'Excommunica- 


REVUE  DR  l'art  CHRÉTIEN. 
igol.  —  1'^   LIVRAISON. 


90 


îRcbuc  Ijc  rSvt  cl)vcticu» 


tion  de  Bouchard  d'Avesnes,  le  beau  tableau  du 
Musée  de  Bruxelles:  «  les  Flamands  venant  offrir 
leurs  hommages  et  leurs  dons  à  Charles-Quint 
enfant  »  et  d'autres  toiles  de  valeur. 

Que  dire  maintenant  de  sa  dernière  grande 
œuvre,  les  peintures  murales  de  la  salle  de  l'Hô- 
tel de  ville  de  Bruges  que  sa  main  défaillante 
vient  de  quitter  ?  Œuvre  poursuivie  pendant  plu- 
sieurs années  avec  une  persévérance  soutenue, 
longuement  méditée,  reprise  toujours  avec  en- 
train et  joie;  et  que  le  peintre  se  réjouissait  tant 
de  voir  terminée  au  cours  de  l'année  prochaine  ! 
Œuvre  de  prédilection,  dont  il  aimait  à  prévoir 
tous  les  effets,  à  fixer  d'avance  tous  les  détails  ! 
dont  il  aimait  à  parler  avec  ses  amis  et  sur  la- 
quelle il  revenait  toujours  !  Elle  reçut  son  dernier 
coup  de  pinceau,  et  c'est  dans  la  salie  de  Bruges 
que  De  Vriendt  ressentit  les  premières  atteintes 
du  ma!  inexorable  qui  devait  l'enlever  si  rapide- 
ment. 

S'il  est  profondément  triste  de  penser  qu'Ai- 
brecht  De  Vriendt  n'a  pu  mettre  la  dernière 
main  à  ces  peintures,  il  ne  faudrait  pas  s'exagérer 
les  lacunes  que  sa  mort  va  y  laisser.  Les  parties 
essentielles  sont  achevées,  et  l'ensemble  est  trop 
avancé  pour  qu'il  soit  possible  d'en  dénaturer 
l'aspect  et  le  caractère. 

Deux  grands  panneaux  restent  à  peindre  au 
fond  de  la  salle  ;  dans  la  pensée  de  l'artiste  ils 
devaient  être  exécutés  pendant  l'année  1901. 
Heureusement  les  études  pour  ces  deux  pan- 
neaux qui  complètent  le  cycle  des  peintures 
historiques  sont  très  avancées.  Albrecht  De 
Vriendt  mettait  grand  soin  à  préparer  son  travail 
par  des  esquisses  très  arrêtées,  très  achevées, 
peintes  à  l'échelle  déterminée,  n'abandonnant 
rien  à  une  interprétation  éventuelle.  Ces  esquisses 
ont  été  peintes  cette  année  de  la  main  du  maître. 
Il  suffira  de  les  agrandir  et  de  rester  dans  la 
tonalité  établie,  pour  qu'il  n'y  ait  à  redouter  rien 
de  disparate  dans  cette  partie  de  l'ensemble. 

Tous  les  yeux  et  tous  les  vœux  d'ailleurs  se 
tourneront  vers  un  artiste  de  même  valeur  dans 
l'espérance  qu'il  reprendra  d'une  main  fraternelle 
l'œuvre  que  le  défunt  n'a  pu  achever. 

Albrecht  De  Vriendt  était  depuis  une  série 
d'années  directeur  de  l'Académie  d'Anvers,  et 
son  action  comme  «  éducateur  »  n'a  pas  été  sans 
importance.  Cependant,  chose  étrange,  il  avait 
peu  de  confiance  dans  le  système  de  l'enseigne- 
ment académique.  Avec  son  profond  sens  de  l'art, 
il  savait  que  c'est  la  Providence,  que  c'est  Dieu 
qui  crée  les  artistes,  et  que  la  qualité  essentielle 
de  leurs  œuvres,  celle  qui  y  donne  le  charme  et 
la  valeur,  est  précisément  la  chose  qu'on  ne  peut 
leur  apprendre. 


Le  directeur  de  l'Académie  d'Anvers  était  très 
amical,  presque  paternel  avec  ses  élèves  ;  il  ne 
leur  imposait  ni  ses  vues,  ni  une  manière  déter- 
minée. Il  s'attachait  à  les  diriger  conformément 
à  leur  génie  personnel,  cherchant  surtout  à  les 
préserver  des  écarts  qui  pouvaient  les  éloigner 
du  but  à  atteindre. 

Albrecht  De  Vriendt  est  mort  trop  tôt  pour 
son  pays  qu'il  pouvait  encore  enrichir  d'œuvres 
excellentes  ;  pour  l'art  sur  lequel,  par  ses  conseils 
et  par  ses  exem|)les,  il  pouvait  exercer  une  in- 
fluence si  heureuse.  Il  est  mort  trop  tôt  pour  ses 
amis  qui  prisaient  à  leur  valeur,  les  qualités  de 
son  caractère  ;  il  est  mort  trop  tôt  pour  sa  fa- 
mille surtout,  dont  tous  les  membres  connais- 
saient les  trésors  de  son  cceur. 

Cependant,  il  fut  un  heureux  de  ce  monde  ;  je 
dirai  presque  un  enfant  gâté  de  la  fortune. 

Il  fut  heureux  dans  son  art,  où  chaque  pas 
accusait  un  progrès,  et  où  les  succès  ne  lui  furent 
ménagés  ni  dans  sa  patrie,  ni  dans  la  plupart 
des  pays  de  l'Europe.  En  Belgique,  comme  à 
l'étranger,  il  a  obtenu  à. peu  près  toutes  les 
distinctions  qu'un  artiste  peut  rcver.  Dans  ses 
travaux,  il  avait  tout  à  côté  de  lui  un  autre  artiste 
dont  les  conseils,  dictés  à  la  fois  par  l'affection 
fraternelle  et  par  une  haute  intelligence  de  l'art, 
devaient  être  d'autant  plus  précieux  à  ses  yeux 
qu'il  pouvait  à  son  tour  les  rendre  à  celui  dont 
il  les  recevait.  Il  avait  trouvé  une  compagne 
digne  de  lui,  et  déjà  il  se  voyait  entouré  d'enfants 
qui  lui  donnaient  plus  que  des  promesses.  Enfin, 
par  un  privilège  bien  rare,  il  avait  conservé  sa 
vieille  mère,  qui,  parvenue  à  un  âge  très  avancé, 
a  gardé  toute  son  intelligence.  L'artiste  n'en 
parlait  qu'avec  une  sorte  de  fierté,  empreinte  de 
la  plus  filiale  tendresse.  Assurément,  si  l'on  ne 
peut  se  reporter  qu'avec  les  sentiments  d'une 
condoléance  émue  vers  ceux  qui  l'entouraient, 
on  peut  dire  du  défunt  avec  le  poète  :  «  Douce 
est  la  mort  qui  vient  en  bien  aimant.  » 

Albrecht  De  Vriendt  était  âgé  de  57  ans.  Mais 
il  paraissait  beaucoup  [ilus  jeune  ;  la  vie  débor- 
dait en  lui.  Dans  la  conversation,  surtout  lorsque 
les  intérêts  de  l'art  semblaient  en  jeu,  ses  yeux, 
naturellement  brillants,  illuminaient  son  visage. 
Son  verbe,  si  franc,  allait  droit  au  but,  expri- 
mant la  sincérité  de  ses  convictions.  L'on  sentait 
alors  comme  un  souffle  de  vie  et  de  jeunesse  qui, 
en  général,  n'appartient  qu'aux  robustes,  destinés 
à  une  longue  carrière.  Après  avoir  beaucoup 
donné,  l'artiste  semblait  beaucoup  promettre 
encore,  et  nul  ne  se  doutait  qu'il  était  prêt  à 
s'échapper  vers  ces  régions  où  ne  peuvent  le 
suivre  que  nos  souvenirs  et  nos  prières. 


Jules  Hflbig. 


Imprimé  par  Desclée.  De  Brouwer  &  C'«,   Bruges. 


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livraison.  —  ffîars  190|.  ï^liS 


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lies  Hctes  Des  Hpôtres,  — Tapisseries  d'après  Bapl)aëL 


PRÈS  les  nombreux  tra- 
vaux parus  sur  la  plus 
célèbre  de  toutes  les 
tentures  de  tapisserie, 
il  y  aurait  de  ma  part 
témérité  à  publier  une 
nouvelle  étude,  si  je 
n'avais  soin  de  me  mettre  à  des  points  de 
vue  qui,  à  mon  sens,  n'ont  pas  été  suffisam- 
ment envisagés. 

Je  me  propose  d'examiner  les  cartons 
de  Raphaël  comme  modèles  de  tapisseries  ; 
de  juger  les  tapisseries  dans  leur  exécution 
technique,  et  d'apprécier  la  tenture  dans 
son  rôle  décoratif. 

Accessoirement  je  relèverai  diverses  ob- 
servations notées  au  cours  de  mes  lectures 
des  écrits  sur  les  Acies  des  Apôtj'cs,  et  je 
donnerai  quelques  détails  sur  l'état  matériel 
de  la  tenture,  avant  les  réparations  dont 
elle  est  actuellement  l'objet. 

Je  ne  dissimule  pas,  —  on  le  verra  bien 
du  reste,  —  que  sur  divers  points  je  suis  en 


désaccord  avec  les  éminents  savants  qui 
ont  traité  la  question  ;  ces  divergences  ré- 
sultent d'abord  des  points  de  vue  spéciaux 
auxquels  je  me  suis  placé,  puis  aussi  de 
certaines  appréciations  d'ordre  général  que 
je  ne  puis  partager,  malgré  mon  respect 
pour  leurs  auteurs. 

Je  dois  dire  aussi  par  quelles  circons- 
tances particulières  j'ai  été  conduit  à  m'oc- 
cuper  des  Actes  des  Apôtres. 

Comme  presque  tous  mes  prédécesseurs 
à  la  Direction  de  la  Manufacture  des  Go- 
belins,  je  me  suis  trouvé  en  pénurie  de 
modèles  nouveaux,  et  pour  ne  pas  laisser 
les  métiers  en  chômage,  j'ai  dû  recourir  à 
des  modèles  anciens. 

En  1890,  j'ai  conçu  le  projet  de  re- 
prendre quelques  pièces  des  Actes  des 
Apôtres. 

J'ai  été  guidé  dans  ce  choix  par  le  motif 
qu'aucune  des  nombreuses  répliques  de  la 
tenture  n'est  absolument  complète  ;  dans 
toutes  il  manquait  le   Tremblonent  de  terre, 


REVUE  DE  l'art  CHRÉTIEN. 
I90I.    —   2'"^    LIVRAISON. 


92 


3^e\)ur  be  [*art  cbicttcu. 


sans  doute  à  cause  de  la  moindre  importance 
de  la  pièce. 

Au  Vatican  même,  dans  la  suite  originale, 
la  moitié  inférieure  d'EIyinas  frappe'  de 
cécité  fait  défaut. 

Au  mobilier  national  de  France,  les  séries 
n'étaient  pas  entières  ;  la  Conversion  de 
saint  Paul,  la  Lapidation  de  saint  Etienne, 
le  Tremblement  de  terre  n'étaient  pas  re- 
présentés ('). 

Je  pensais  qu'il  serait  intéressant  et  méri- 
toire pour  notre  administration  de  pouvoir 
montrer,  soit  dans  les  Expositions,  soit  dans 
un  musée  de  tapisseries,  qui  reste  toujours 
à  créer,  la  seule  suite  des  Actes  avec  ses  dix 
pièces,  complète  par  conséquent. 

Il  est  clair  que  la  tenture  n'eût  pas  été 
homogène  de  fabrication,  mais  mieux  valait, 
à  mon  sens,  subir  cet  inconvénient  que  de 
présenter  les  Actes  avec  des  lacunes. 

Pour  conduire  ce  travail  technique  autant 
que  possible  dans  l'esprit  de  Raphaël,  ou, 
comme  on  disait  jadis  en  France,  dans  V in- 
telligence des  modèles,  je  me  suis  rendu  à 
Londres,  au  South  Kensington  Muséum. 

On  sait  que  Sa  Majesté  la  Reine  Victoria 
a  autorisé  le  dépôt  dans  ce  musée  des 
modèles  de  Raphaël  qui  sont  sa  propriété 
particulière. 

Je  n'ignorais  pas  que  Rubens  n'avait  pu 
acquérir,  en  1630,  pour  le  compte  du  roi 
d'Angleterre,  que  sept  des  dix  originaux, 
que  précisément  les  trois  qui  manquaient 
étaient  ceux  que  je  voulais  reproduire,  et 
qu'à  leurs  places  au  Muséum  il  n'y  avait 
que  de  fort  médiocres  copies  modernes. 

Mais  je  savais,  par  expérience,  que  pour 
l'exécution    en    tapisserie    d'une    draperie 

i.J'ai  mis  sur  métier,  en  iSgi,\a.  Conversion  de  saini 
Paul  et  le  Trcmbloiicnt  de  terre.  La  première  pièce  a  cté 
faite  d'après  une  copie  conserve'e  à  la  cathédrale  de  Meaux 
dont  il  sera  question  plus  loin  ;  la  seconde,  d'après  une 
copie  exécutée  sur  la  tapisserie  du  Vatican,  par  M. Danger, 
pensionnaire  de  l'Académie  de  France  à  Rome. 


rouge  par  exemple,  on  peut  s'inspirer  d'une 
draperie  verte, puisqu'il  ne  s'agit, en  définitif, 
que  d'observer  la  hauteur  des  couleurs,  le 
nombre  des  passages  du  grand  clair  à 
l'obscur  et  les  rapports  des  diverses  colo- 
rations entre  elles. 

J'avais  déjà  précédemment  pris  des  notes 
au  Vatican  sur  les  tapisseries  mêmes,  et 
depuis  que  j'habite  l'Italie  j'ai  à  plusieurs 
reprises  complété  mes  observations. 

Ce  sont  mes  carnets  que  je  vais  dé- 
pouiller ;  c'est  dire  que  de  l'histoire  de  la 
tenture  et  de  la  composition  des  pièces  je 
me  bornerai  au  strict  nécessaire,  cette  his- 
toire ayant  été  faite  dans  les  écrits  sur 
Raphaël  et  sur  l'art  de  la  tapisserie. 


I 


LE  pape  Léon  X, guidé  par  le  goût  pour 
les  arts  et  le  faste  de  tradition  dans 
la  famille  des  Médicis,  veut  des  tapisseries 
pour  décorer,  à  la  chapelle  Sixtine,la  plinthe 
qui,  à  partir  de  la  balustrade  de  marbre, 
règne  au-dessous  des  fresques  des  parois 
latérales  et  du  mur  du  fond  alors  décoré  de 
trois  peintures  de  Pérugin,  qui  malheureu- 
sement ont  été  grattées  pour  faire  place 
au  Jugement  dernier.  Le  pape  choisit  pour 
thème  les  Actes  des  Apôtres  et  confie  à 
Raphaël  les  modèles  au  nombre  de  dix.  Il 
lui  commande  en  plus  le  Couronnement  de 
la  Vierge  ;  cette  tapisserie  devait  servir  de 
fond  à  l'autel  ;  c'est  à  tort  qu'elle  a  été 
parfois  comprise  dans  la  suite  des  Actes. 

Raphaël  exécuta  les  modèles  en  1  5  1 5  et 
en  1516,  temps  très  court  pour  une  si  im- 
portante entreprise, d'autant  plus  que  simul- 
tanément Raphaël  travailla  à  la  chambre  de 
X Incendie  du  Bowg  au  Vatican  et  à  d'autres 
peintures  pour  des  particuliers. 

Les  modèles  sont  envoyés  dans  les 
Flandres,  à  Arras,  a-t-on  cru,  jusqu'à  ce  que 


ILts  Zttt^  Des  :apôtre0. 


93 


M.  Muntz  ait  démontré  d'une  façon  abso- 
lument décisive  que  ce  ne  fut  pas  à  Arras 
mais  à  Bruxelles  que  les  Ac/es  ont  été 
mis  en  œuvre  ('). 

Malgré  les  preuves  de  M. Muntz,  l'erreur 
persiste  non  seulement  dans  le  public  mais 
dans  quelques  écrits. 


Une  autre  erreur,  encore  plus  répandue, 
veut  que  le  mot  Arazzo,  usité  en  Italie  pour 
désigner  la  tapisserie  de  haute  et  de  basse 
lisse,  date  de  l'époque  où  les  Actes  des 
Apôtres  sont  arrivés  à  Rome,  c'est-à-dire  de 
l'année  1519- 

Il  n'en  est  rien. 


La  chapelle  Sixtine,  construite  sous  le  pape  Sixte  IV,  en  1475,    P-i'   '-^«.o  Pinte...... 

{Photographie  d'ALlNAKi  de  Florence.) 


J'ai  trouvé  ce  mot  dans  un  discours,  pro- 
noncé par  Savonarole,  en  1498,  à  la  cathé- 

I.  E.  Muntz,  Raphaël  :  sa  vie,  son  œuvre  et  son  temps; 
1886;  —  Les  tapisseries  de  Raphaël  au  Vatican  et  dans 
les  principatix  musées  et  collections  de  r Europe. 


drale  de  Sainte-Marie  des  Fleurs  de  Flo- 
rence. 

S'élevant  contre  le  luxe,  le  fougueux 
Dominicain  signale  «/?  mura  délie  case loro 
copcrte  darazzi  e  di  tappeti  e  insinie  aile 
mure  tutte  ornate  ». 


94 


3Rebue  lie  T^it  cl)rctien. 


Savonarole  parlait  au  peuple  dans  le  lan- 
gage usuel,  le  peuple  connaissait  donc  le 
mot  arazzo,  —  sans  doute  déjà  longtemps 
en  usage  en  raison  des  rapports  commer- 
ciaux entre  Florence  et  les  Flandres  ('). 

La  prédication  de  Savonarole  n'eut  pas 
du  reste  des  résultats  efficaces  en  ce  qui 
concerne  le  luxe  et  l'emploi  des  tapisseries, 
puisque  les  Médicis  s'en  servirent  pour 
couvrir  les  mulets  de  leurs  équipages  ;  je 
lis,  en  effet,  dans  l'inventaire  du  duc  Cosme 
ler,  dressé  en  1553  au  Palais  de  la  Seigneu- 
rie, la  mention  suivante  :  «  Otto  panni  d'à- 
razzo  con  l'arme  ducali  a  uso  di  coperte  da 
niula.  » 

Evidemment  ce  mot  arazzo  n'est  pas 
juste,  puisqu'Arras  n'a  été  que  l'un  des 
centres  renommés  de  la  fabrication  des 
tapisseries, mais  enfin  il  vaut  mieux  que  les 
expressions  en  usage  dans  les  autres  pays. 

En  Angleterre  tapestry,  en  Allemagne 
tapete  s'appliquent  à  des  tissus  de  diverses 
espèces.  En  France  le  mot  tapisserie  est 
donné  non  seulement  à  la  haute  et  à  la 
basse  lisse  (°),  mais  au  travail  sur  canevas 
au  petit  point,  à  certaines  broderies  et 
même  aux  étoffes  et  cuirs  qui  tapissent  les 
murailles. 

I.  Au  moment  de  mettre  sous  presse,  le  savant  M.  Jo- 
doco  del  Badia,  des  Archives  de  l'État  à  Florence,  veut 
bien  me  faite  savoir  qu'il  a  trouvé  le  mot  arazzo  dans 
plusieurs  documents  antérieurs  à  la  prédication  de  Savo- 
narole en  1498. 

Il  existe  dans  une  lettre  écrite  de  Valence  (Espagne),le 
28  avril  I4t6,  par  Lorenzo  di  Matteo  Strozzi  à  sa  mère, 
Alessandra  Macinghi,  à  Florence. 

On  le  lit  également  dans  un  document  où  il  est  ques- 
tion d'une  renime: L' Histoire  de  Sansnri^ay  d'une  suite: /.rt 
Faille  de  Pliaéton. 

La  lettre  datée  <le  Bruges,  22  juin  1448,  est  adressée  à 
Giovanni  di  Cosimo  de'  Medici,  à  Florence;  elle  porte  la 
signature  :  tuo  Fruoximo  in  Brugia. 

2.0nsaitque  lemot  lisse  vientde  liciciiim,  on  écrit  aussi 
lice\  c'est  l'orthographe  lisse  qui  se  trouve  dans  l'édit  de 
Louis  XIV  sur  la  création  de  la  manufacture  royale  des 
meubles  de  la  couronne.  On  sait  aussi  que  la  haute  lisse 
se  fait  sur  un  métier  vertical  et  la  basse  lisse  sur  un 
métier  horizontal. 


Delà  des  confusions  qui  datent  de  loin, 
car  dans  les  plus  anciens  écrits  il  en  est  de 
même,  ce  qui  rend  difficile  l'histoire  des 
origines  de  la  tapisserie  proprement  dite. 

Avec  le  mot  arazzo  on  sait  du  moins  à 
quoi  s'en  tenir. 

II 

LES  dix  pièces  des  Actes  des  Apôtres 
ont  reçu  des  dénominations  diverses, 
contradictoires,  absurdes  en  quelques  cas: 
à  côté  de  variantes  admissibles,  car  elles 
ne  peuvent  donner  lieu  à  aucun  doute  sur 
le  sujet,  il  est  des  titres  qui  dénotent 
l'ignorance  du  rédacteur  des  inventaires; 
le  plus  souvent  ce  ne  sont  que  des  scribes 
qui  ne  voient  dans  un  objet  d'art  qu'un 
article  de  comptabilité,  mais  alors  leurs 
chefs  devaient  les  surveiller  ;  il  est  utile,  je 
crois,  de  signaler  ces  bévues. 

La   PccJie   niiracitleiise. 

On  dit  aussi  la  Navicellc ;  les  deux  titres 
sont  justes.  Apparition  de  [ésus-Christ  à 
saint  Pierre  n'est  pas  suffisamment  expli- 
cite. 

La  Vocation  de  saint  Pierre. 

On  dit  aussi  Paissez  mes  brebis  ;  Conduis 
mon  troiipeau.Y^t  titre  Saint  Pierre  recevant 
les  clefs  du  Paradis  peut,  en  certains  cas, 
donner  lieu  à  erreur,  car  il  est  des  répli- 
ques de  la  tapisserie  où  les  clefs  ne  figurent 
pas. 

La  Guérison  du  paralytique. 

On  trouve  aussi  le  Temple  ;  saint  Pierre 
et  saint  Jean  ^U('rissa7it  le  paralytiqtie  à 
la  porte  du  Temple  ;  quelquefois  possédé 
remplace  paralytique,  et  fésns-Christ  ou 
saint  Pliilippe  sont  à  la  place  des  apôtres 
Pierre  et  Jean. 

La  Mort  d' Ananie. 

On  lit  aussi  \ Histoire  dAnanie  ;  la  Mort 
d' Ananie  et  de  Saphire;  la  Punition  d' Ana- 
nie et   de    sa  femme.   Dans   un   inventaire 


3le0  :acte0  des  3lpôtre2^, 


95 


administratif,  cette  pièce  est  marquée  la 
Guéi'ison  dti  possédé  ;  cette  erreur  ne  serait 
pas  croyable,  si  le  pointage  ne  démontrait 
que  c'est  bien  de  la  Mort  d Ananie  qu'il 
s'agit. 

La    Lapidation    de    saint   Etienne.    Les 
variantes  de  détail  n'ont  pas  d'importance. 


La  Conversion  de  saint  Paul,  même  ob- 
servation. 

Elynnas  frappé  de  cécité.  Ici  on  trouve  : 
Saint  Paul  interrogé  devant  le  p7'OConstil  ; 
Saint  Paul  convertissant  le  proconsul  Ser- 
giiis  ;  ces  titres  s'expliquent  à  la  rigueur, 
mais  ce  qui  est  singulier,  c'est  l'erreur  com- 


La  Vocation  de  saint  Pierre.  (Photographie  cI'Alinari  oe  Florence.) 


mise  par  Prud'hon,  l'un  des  peintres  les 
plus  distingués  de  France  ;  étant  à  Rome 
en  1785  et  jugeant  les  Actes,  il  ècrhà'Ely- 
mas  :  «  Saint  Paul  guérissant  un  aveugle  en 
«  présence  d'un  consul  ou  tribun  ou  quel- 
«  qu'autre  romain  en  dignité  dont  j'ignore 
«  le  nom.  » 

Raphaël  avait  pour  thème  le  texte  sui- 
vant des  Actes  des  Apôtres  : 

«  Elymas  le  magicien,  ayant  tenté  de 
«  détourner  de  la  foi  le  proconsul  Sergius, 


«  homme  sage  et  prudent,  saint  Paul  ayant 
«  les  yeux  fixés  sur  lui,  lui  dit  :  «  Homme 
«  rempli  de  toutes  sortes  de  ruses  et  de 
«  perfidies,  fils  du  diable,  ne  cesseras-tu 
«  point  de  pervertir  les  voies  du  Seigneur 
«  qui  sont  droites.''  C'est  pourquoi  voici  dès 
«  maintenant  la  main  du  Seigneur  sur  toi, 
i  et  tu  seras  aveugle  et  tu  ne  verras  pas  le 
«  soleil  jusqu'à  un  certain  temps. 

«  Et  aussitôt  l'obscurité  et  les  ténèbres 
<(  tombèrent  sur  lui  ;   et  allant  çà  et  là  il 


96 


9Rc\Juc  Dr  rSlrt  cljrcticu. 


«  cherchait   qui   lui    donnerait   la    main.   » 

Prud'hon,  il  est  vrai,  n'a  vu  que  la 
partie  supérieure  de  la  tapisserie,  mais 
l'expression  du  visage  d'Elymas  marque 
bien  «  et  aussitôt  l'obscurité  et  les  ténèbres 
tombèrent  sur  lui  ».  Et  puis,  n'est-il  pas 
naturel  qu'avant  de  juger  comment  l'artiste 
a  interprété  un  texte,  on  prenne  connais- 
sance de  l'écrit  ? 

Saint  Paul  et  saint  Barnabe  à  Lystre. 

Variantes  :  le  Sacri/icc  du  veau  ;  les  Is- 
raélites  retombant  dans  r idolâtrie;  le  Sacri- 
fice de  saint  Paul  ;  Saint  Paul  déchiratit 
ses  vêtements. 

Saint  Paul  à  V Aréopage. 

On  dit  aussi  Saint  Paul  à  Éphèsc;  dans 
l'inventaire  de  Léon  X,  cette  tapisserie 
est  désignée  d'une  singulière  façon  :  Saint 
Paul  prêchant  à  l'aveugle  qui  recouvre  la 
vue,  avec  une  idole  d' Hercule  qui  soutient 
le  ciel  dans  la  bordure.  La  bordure  est  tou- 
jours contre  Saint  Paul  à  l' Aréopage  ;  l'er- 
reur de  l'inventaire  ne  s'explique  pas,  sur- 
tout dans  un  document  aussi  officiel. 

Saint  Paul  en  prison. 

Variante  :  Le  Tremblement  de  terre. 

Après  les  inventaires,  voici  quelques- 
unes  des  confusions  et  des  erreurs  des 
écrivains. 

Ouatremère  de  Ouincy,  dans  son  cha- 
pitre sur  les  tapisseries  d'après  Raphaël  ('), 
ne  cite  pas  la  Conversion  de  saint  Paul,  la 
Lapidation  de  saint  Etienne  et  Saint  Paul 
en  prison,  et  ne  fait  pas  de  distinction  entre 
la  suite  des  Actes  des  Apôtres  et  les  autres 
tapisseries  d'après  Raphaël  ;  on  ne  peut 
faire  fond  sur  cet  écrivain,  du  moins  en  ce 
qui  concerne  les  Actes. 

Le  marquis  de  Laborde,  dans  sa  Renais- 
satice  des  arts  à  la  cour  de  France,  met  à 

I.  Quatremère  de  Quincy,  Histoire  de  la  vie  cl  <ies 
œuvres  de  Raphacl.  1824. 


onze  le  nombre  des  pièces  des  Actes  des 
Apôtres.  Cette  erreur  a  été  commise  par 
d'autres  auteurs,  soit  qu'ils  aient  compris 
dans  les  Actes  le  Couronnement  de  la  Vierge, 
qui  cependant  n'est  arrivé  à  Rome  qu'en 
1537,  soit  qu'ils  aient  inexactement  inter- 
prété une  note  de  paiement  publiée  par 
Gaye  dans  son  Carteggio,  où  il  est  écrit 
que,  le  21  avril  1518,  on  a  acquitté  les  frais 
de  transport  de  onse  tapisseries  venant  des 
Flandres  par  Lyon  ;  à  cette  date  l'envoi  ne 
pouvait  contenir  que  sept  tapisseries  des 
.4^/^j,lestrois  autresn'étaient  pas  terminées. 
Passavant  (')  a,  selon  mon  opinion,  été 
beaucoup  trop  affirmatif  dans  ses  attribu- 
tions des  bordures  aux  diverses  tapisseries  ; 
je  traite  plus  loin  en  détail   la  question  des 

bordures. 

III 

SEPT  pièces  des  Actes  arrivent  à 
Rome  en  i  5  i  S. 

La  Mort  d' Ananie,  Saint  Paul  à  l' Aréo- 
page, le  Tremblement  de  terre  sont  reçues 
l'année  suivante. 

Le  26  décembre  15  19,  jour  de  la  fête  de 
saint  Etienne,  Léon  X  inaugure  la  tenture 
à  la  Sixtine. 

Dans  quel  ordre  les  tapisseries  étaient- 
elles  disposées  contre  les  trois  parois  de  la 
chapelle  ? 

Aucun  document  contemporain  ne  four- 
nit de  renseignement  ;  nous  savons  seule- 
ment, à  cause  de  leurs  dimensions,  que  la 
Lapidation  de  saint  Etienne  était  placée  sur 
la  paroi  de  gauche,  au  fond,  et  que  le  Trem- 
blement de  terre  occupait,  à  droite,  l'étroit 
espace  qui  sépare  la  tribune  des  chanteurs 
de  la  balustrade. 

Bunsen   (°)  cependant,  dans  la  Descrip- 

1.  Passavant,  Raphacl  d  Urhin,  1839  et  1856. 

2.  Platner,  Bunsen,  Gherard  Roestell,  Bcschreibung 
dcr  Stadt  Rome.  Ouvrage  collectif  dont  le  premier  vo- 
lume est  de  1829  ;  le  volume  où  Bunsen  s'occupe  des 
Actes  est  de  1832. 


3le0  :^cte0  îie0  i^pôtres. 


97 


tion  de  la  Ville  de  Rouie,  a  essayé  de  déter- 
miner les  places  ;  l'auteur  a  fait  autorité, 
en  ce  sens  que  ce  qu'il  a  écrit  sur  les  Actes 
a  été  accepté  par  Passavant  et  que  Passa- 
vant, plus  connu  que  Bunsen,  a  été  accepté 
par  presque  tous  les  auteurs  qui  ont  écrit 
sur  le  sujet. 

Voici  ce  que  dit  Bunsen  : 

A  partir  de  la  balustrade,  à  gauche  : 


Ananie, 

La  Gîiéi-ison, 

Saini  Etienne, 

La  Vocation. 

A  droite: 

Le  Tre^nblenient  de  terre, 

L' Aréopage, 

Lystre, 

Elymas. 


La  mort  d'Ananie.  (Photographie  d'Aur. 


ce.) 


Sur  les  deux  côtés  de  l'autel  : 

La  Conversion  de  saint  Paul, 

La  Pêche  miraculeuse. 

Pour  cette  répartition  Bunsen  s'appuie 
simplement  sur  une  hypothèse;  il  suppose 
quon  a  dû  placer,  sauf  pour  la  Lapidation 
de  saint  h  tienne,  ces  tapisseries  dans  un 
ordre  rationnel,  c'est-à-dire  grouper  d'un 
côté  les  faits  relatifs  à  saint   Pierre  et  de 


l'autre  les  faits  relatifs  à  saint  Paul. 

C'eût  été  en  effet  très  logique,  mais  rien 
ne  démontre  qu'il  en  a  été  ainsi;  on  peut 
même  faire  observer  que  la  division  loo-j- 
que  des  tapisseries  n'a  jamais  été  suivie  ul- 
térieurement dans  les  diverses  salles  du 
Vatican  ornées  par  les  tentures. 

Il  est  regrettable  que  Bunsen  se  soit 
abstenu  de  donner  les  dimensions  exactes 


3Rcbue  ÏJe  TSlrt  cbvctien. 


des  pièces  et  celles  des  panneaux  de  la  plin- 
the. C'eût  été  un  argument  solide  en  faveur 
de  son  hypothèse;  mais  l'auteur  se  plaît 
dans  les  suppositions  et  les  à  peu  près  très 
à  la  mode  de  son  temps,  et  se  contente 
de  dire  que  chaque  panneau  a  environ  vingt 
pieds  allemands  de  long  (ce  qui  fait  6 
mètres  22),  sauf  le  petit  panneau  de  gauche 
qui  a  environ  un  tiers  de  moins  que  les 
autres. 

L'hypothèse  de  Bunsen  n'a  pas  eu  du 
reste  de  conséquence,  puisque,  je  le  répète, 
elle  n'a  pas  été  admise  par  le  Vatican  pour 
les  dispositions  adoptées  plus  tard;  ce  qu'il 
dit  des  pilastres  et  des  bordures  sera  appré- 
cié plus  loin. 

Les  tapisseries  ne  sont  pas  restées  long- 
temps à  la  Sixtine. 

En  I  5  2  r ,  elles  sont  enlevées  et  mises  en 
gage. 

En  1527,  pendant  le  sac  de  Rome,  elles 
disparaissent  en  partie;  la  moitié  inférieure 
é'E/ymas  est  coupée  et  sans  doute  brûlée 
pour  recueillir  l'or  de  la  trame. 

On  veut  que  le  pape  Clément  VII  eut 
l'intention  de  les  racheter  à  Lyon,  où  elles 
étaient  en  1530,  et  que  le  pape  Paul  111 
(pontificat  de  1535  à  1550)  les  fit  disposer 
dans  diverses  salles  du  Vatican,  et  qu'il 
prit  l'habitude,  maintenue  pendant  long- 
temps, de  les  faire  tendre  au  dehors  de  la 
basilique  de  Saint-Pierre  pour  la  proces- 
sion de  la  Fête-Dieu. 

D'un  autre  côté,  Vasari,  dans  sa  vie  de 
Raphaël,  écrit:  «  Si  conserva  ancora  nella 
capella  papale.  »  Or,  la  première  édition  de 
Vasari  est  de  1550;  il  avait  été  à  Rome 
vers  1529,  puis  en  1538,  en  1544  et  en 
1546,  c'est-à-dire  au  moment  où  il  rédigeait 
son  ouvrage;  en  1550,  le  pape  Jules,  qui 
le  connaissait  particulièrement,  l'invite  à 
assister  à  son  couronnement. 


Vasari  est  de  nouveau  à  Rome  dès 
l'avènement  du  pape  Pie  V,  en  1565;  sa 
seconde  édition  paraît  à  Florence  en  1568 
et  contient,  comme  la  première,  la  mention 
«  si  conserva  ancora  nella  capella  papale  »; 
l'auteur  ne  fait  pas  d'allusion  au  rapt  de 
1527,  nia  la  restitution  faite  par  le  con- 
nétable de  Montmorency, en  1553,  au  pape 
Jules  III  de  deux  au  moins  des  pièces  en- 
levées. 

En  1798,  la  tenture  est  de  nouveau 
volée,  puis  mise  en  vente  à  Paris  par  des 
brocanteurs. 

Enfin,  en  1808,  le  pape  Pie  VII  put  réu- 
nir toutes  les  pièces  au  Vatican,  sauf  la 
partie  inférieure  à! Elymas. 

Vers  18 18,  Pie  VII  les  fit  placer,  avec 
d'autres  tapisseries,  dans  les  appartements, 
dits  de  Pie  V,  situés  au-dessus  de  la  cha- 
pelle Sixtine. 

Elles  sont  mises  là  sans  ordre  rationnel 
et  mêlées  par  des  pièces  étrangères  aux 
Actes. 

Le  pape  Grégoire  XVI  les  fit  établir 
dans  la  Galerie  où  elles  sont  encore  avec 
les  tapisseries  de  la  Sciiola  nuova,  ainsi 
désignées  par  opposition  à" la  Scuola  vecchia, 
terme  réservé  aux  Actes. 

Dans  cette  galerie  des  tapisseries,  les 
Actes  étaient  disposés  comme  il  suit  : 

x'I  ofauche  en  entrant  : 

La  Mort  d'Ananie, 

La  Vocation  de  saint  Pierre, 

Saint  Panl  à  [Aréopage, 

Saint  Patcl  et  saint  Barnabe  à  Lystre. 

Adroite  en  entrant  : 

La  Conversion  de  saint  Panl, 

La  Gjiérison  du  paralytique, 

La  Pêche  miraculeuse, 

La  Lapidation  de  saint  Etienne, 

Saint  Paul  eji  prison. 


iLtQ  ^ctcg  i)e0  :^pôtrejs^. 


99 


Sur  le  côté  droit,  plusieurs  tapisseries  qui 
ne  font  pas  partie  des  Actes,  étaient  inter 
calées  dans  la  suite,  comme  dans  les  appar- 
tements de  Pie  V. 

La  partie  supérieure  à'Elymas  était  hors 
de  la  galerie,  au-dessus  de  la  partie  des  salles 
des  cartes  de  géographie. 


L'ordre  n'est  plus  le  même  que  dans  les 
appartements  de  Pie  V.  mais  il  n'est  pas 
plus  logique. 

J'ai  mentionné  avec  détail  les  deux  seules 
anciennes  dispositions  qui  nous  sont  con- 
nues, parce  qu'elles  ont  de  l'intérêt  pour  les 
attributions  des  bordures. 


Saint  Paul  et  saint  Barnabe  à  Lystre.  (i'Iiulugrapliic  d'ALi.NAia  de  tluieai.ej 


IV 

APRES  avoir  servi  à  la  tenture  de  la 
Sixtine,  les  modèles  des  tapisseries 
et  des  bordures  restèrent  dans  les  Flandres, 
sauf  la  Conversion  de  saint  Paul,  en  la  pos- 
session, dès  1521,  du  cardinal  Grimani  à 
Venise  ;  ce  qui  indique  que  les  premières 


répliques    de    cette    pièce    ont    été    faites 
d'après  une  copie. 

On  ne  comprend  pas  comment  ces  mo- 
dèles ont  été  ainsi  abandonnés.  Peut-être 
Léon  X  a-t-il  eu  l'intention  de  les  faire 
remettre  sur  les  métiers  .'*  Mais  après  lui  le 
Saint-Siège,  dont  ils  étaient  la  propriété, 
aurait  dû  les  réclamer. 


KKVUE    DB    L  AKT    CHKËTIEN. 
1901.    —   2™^    LIVRAISON. 


lOO 


3Rebttr  tie  T^rt  cbrétten. 


Il  n'entre  pas  dans  mon  cadre  de  relater 
même  les  principales  répliques  de  la  tenture 
exécutées  dans  les  Flandres  et  ailleurs,  soit 
sur  les  originaux,  soit  sur  des  copies  faites 
d'après  les  modèles  ou  d'après  des  tapisse- 
ries (')  ;  ce  qui  n'est  pas  douteux,  c'est  que 
les  cartons  qui  avaient  servi  à  Van  Aelst 
sont  restés  plus  d'un  siècle  dans  les  Flan- 
dres, et  que,  durant  cette  période,  trois 
cartons  et  les  bordures  ont  disparu. 

En  1630,  ils  arrivèrent  en  Angleterre, 
découpés  par  bandes,  dans  le  sens  vertical, 
piqués  de  coups  d'épingles,  usés  en  partie, 
repeints  par  endroits,  fatigués  par  le  service; 
quelques-uns  furent  envoyés  à  la  manufac- 
ture de  tapisseries  de  Mortlake  pour  être 
mis  en  œuvre. 

Puis  on  rassemble  les  morceaux  ;  l'opéra- 
tion fut  généralement  bien  faite  ;  cependant 
quelques  bandes  n'ont  pas  été  ajustées  avec 
assez  de  soin. 

Les  modèles  ainsi  reconstitués  furent 
placés  dans  divers  palais,  notamment  à 
Hamptoncourt  dont  ils  prirent  le  nom. 
Grâce  à  S.  M.  la  Reine  Victoria,  ils  sont 
maintenant  dans  un  musée  public. 

Là,  comme  précédemment,  ils  ont  été 
l'objet  de  nombreuses  études.  Ce  n'est  pas 
ici  le  lieu  de  passer  en  revue  même  les  plus 
sérieuses  critiques  qui  ont  été  faites('');  il  suf- 
fira de  dire  que  tous  les  auteurs  admettent 
la  collaboration  de  Penni,  de  Jean  d'Udine, 

1.  Les  répliques  ont  été  mentionnées  dans  les  ouvrages 
de  Passavant,  de  Miintz  ;  Mgr  Barbier  de  Montault,  dans 
son  hmentaite  dis  tapisseries  de  hitiite-lisse  à  Rome,  a 
marqué  deux  pièces  :  la  Vocation  et  I.ystre,  qui  sont  en 
double  au  Vatican,  mais  qui  ne  sont  pas  de  l'atelier  de 
Van  Aelst. 

2.  En  1891  on  a  exposé  à  Paris  une  suite  de  toiles 
peintes  dites  les  toiles  de  Loukhmanott'  du  nom  du  mar- 
chand russe  qui  en  avait  été  propriétaire  ;  on  a  publié  en 
même  temps  un  travail  du  professeur  Schevyreff,  de 
l'université  de  Moscou,  ayant  pour  but  de  prouver  que  ces 
toiles  étaient  les  modèles  originaux  des  Actes  des  Apôtres. 
Je  fus  chargé  par  le  ministère  des  Beaux  Arts  de  France 
de  faire  un  rapport  sur  les  toiles.  Je  suis  donc  tenu  sur 
la  question  à  la  discrétion  professionnelle. 


de  Jules  Romain,  non  seulement  pour  les 
colorations  mais  pour  une  partie  des  com- 
positions et  des  figures.  Quelques  écrivains 
ont  été  entraînés  par  une  mode  de  plus  en 
plus  en  usage,  qui  consiste  à  enlever  des 
ouvrages  à  un  artiste  pour  les  donner  à  un 
autre  :  M.  Hermann  Dollmayr,  dans  son 
Rafaels  JVerksfaefic,  déclare  carrément  et 
sans  donner  de  preuve  à  l'appui  que  la 
Vocatio7i  de  saint  Pierre  et  la  Pêche  mira- 
ciileîise  ne  sont  pas  de  Raphaël  mais  de 
Penni  dit  Fattorino  ;  l'auteur  avoue  qu'il 
n'a  pas  eu  le  temps  d'aller  étudier  les  mo- 
dèles à  Londres  et  les  tapisseries  au  Vati- 
can ! 

Il,  n'a  vraiment  pas  eu  de  chance  dans 
son  choix  :  les  deux  pièces  qu'il  cite  sont 
parmi  les  meilleures  de  la  série. 

Que  dans  les  Actes  il  y  ait  des  inégalités, 
c'est  évident  :  la  Conversion  de  saint  Paul 
et  la  Lapidation  de  saint  Etienne,  sauf  pour 
la  figure  du  saint,  sont  médiocres,  on  ne 
peut  le  méconnaître. 

Que  Raphaël  se  soit  fait  aider,  ce  n'est 
pas  contestable  ;  le  temps  lui  aurait  manqué 
pour  les  achever  seul.  Je  crois  que  dans 
l'état  de  repeint  où  sont  les  modèles,  il 
est  bien  hasardé  de  dire  quelles  sont  les 
parties  où  ont  mis  la  main  Penni,  Jean 
d'Udine  et  Jules  Romain. 

Après  tout,  peu  importe. 

Raphaël  a  accepté  la  commande  de 
Léon  X  ;  il  a  touché  le  prix  de  son  travail; 
si  dans  les  cartons  il  en  est  d'une  valeur  fort 
contestable,  c'est  qu'il  lésa  jugés  dignes  de 
lui  ;  il  a  couvert  de  son  grand  nom  tous  ses 
collaborateurs;  cela  suffit,  il  est  responsable. 

Il  n'est  pas  possible  de  parler  des  cartons 
sans  citer  Vasari. 

«  Similmente  venne  volontà  al  papa  di 
«  far  panni  d'arazzi  ricchissimi  d'oro  e  di 
'?  sera  in  filaticci  ;  perche  Raffaello  fece  in 
«  propria   forma  e  grandezza   tutti   di   sua 


ites  Ztttts  îie0  apôtres. 


lOI 


«  mano  i  cartoni  coloriti,  i  quali  furono 
«  mandati  in  Flandra  a  tessersi,  e  finit!  i 
«  panni  vennero  a  Roma.  » 

De  Giovanni  Francesco  Penni,  dit  II  Fat- 
tore,  Vasari  rapporte  que  Raphaël  le  prit 
chez  lui  avec  Jules  Romain  et  qu'il  tenait 
les  deux   comme  ses   fils.  Penni   dessinait 


dans  la  manière  de  Raphaël  à  s'y  mépren- 
dre comme  en  font  foi  les  dessins  du  /l'ôro 
de  Vasari  ;  il  travailla  aux  loges  avec  Gio- 
vanni da  Udine  et  Perino  del  Vaga  ;  il 
excellait  dans  la  peinture  à  l'huile,  à  la 
fresque  et  à  la  détrempe,  «  onde  fu  di 
«  grande   aiuto  a   Raffaello    a   dipingnere 


La  Gtiérison  du  paralytique.  (Photographie  d'.^LiNARi  de  Florence.) 


«  gran  parte  de'  cartoni  dei  panni  d'arazzo 
«  délia  capella  del  papa  e  del  consistoro  e 
«  particolarmente  le  fregiature  ». 

Donc,  d'une  part,  Vasari  assure  que  Ra- 
phaël a  fait  les  cartons  à  la  grandeur  de 
l'exécution  et  les  a  peints  de  sa  propre 
main,  et  d'autre  part,  il  laisse  entendre  que 
Penni  a  été  d'un  grand  secours  à  Raphaël 


en  peignant  une  grande  partie  des  cartons, 
et  particulièrement  les  bordures. 

Il  y  a  contradiction,  c'est  clair,  mais 
seulement  pour  la  mise  en  couleur  ;  nulle 
part  Vasari  laisse  entendre  que  Raphaël  a 
eu  des  collaborateurs  pour  les  composi- 
tions. 


I02 


îRcbuc  De  l'^vt  cbrcticn. 


V 


CE  n'est  pas  en  critique  d'art,  ni  en 
esthète  que  j'ai  été  étudier  les  car- 
tons de  Raphaël,  mais  en  homme  pratique, 
et  au  seul  point  de  vue  de  leur  fonction 
essentielle,  qui  était  de  servir  de  modèles 
de  tapisserie. 

Avant  d'entrer  dans  quelques  détails,  je 
dois  expliquer  la  signification  des  termes 
que  je  vais  employer  ;  c'est  nécessaire, 
parce  que  ces  termes  ne  sont  pas  compris 
par  tout  le  monde  de  la  même  façon.  Les 
mots  sont  ceux  qui  ont  été  adoptés  par 
l'illustre  Chevreul  qui,  de  1824  a  1883,  fut 
directeur  des  teintures  aux  Gobelins  ;  ils 
sont  restés  dans  l'usage  de  la  manufacture. 

Les  tons  d'une  coîdcnr  sont  les  différents 
degrés  d'intensité  dont  cette  couleur  est 
susceptible,  suivant  que  la  matière  qui  la 
représente  est  pure  ou  simplement  mélan- 
gée de  blanc  et  de  noir. 

La  p'amine  est  l'ensemble  des  tons  d'une 
même  couleur.  La  couleur  pure  ou  franche 
est  le  ton  normal  de  la  gamme:  une  gamme 
peut  être  composée  d'un  très  grand  nombre 
de  tons,  cent,  si  l'on  veut,  et  même  plus. 
Dans  la  pratique  de  la  tapisserie  une  gam- 
me d'une  quarantaine  de  tons  est  regardée 
comme  très  forte  ;  à  mon  sens,  une  gamme 
de  dix  tons  du  clair  à  l'obscur  est  suffisante 
en  tapisserie.  Dans  une  gamme  bien  faite 
les  tons  doivent  être  gradués  de  façon  à 
se  tenir  tous  à  égaie  distance  les  uns  des 
autres. 

Les  nuances  d'une  cou/eur sont  les  modi- 
fications que  cette  couleur  éprouve  par 
l'addition  d'une  autre  couleur  qui  la  change 
sans  la  ternir. 

La  gamme  rabattue  est  celle  dont  les  tons 
clairs  comme  les  tons  foncés  sont  ternis 
par  du  noir. 


Dans  les  parties  les  plus  saines  des  car- 
tons de  Raphaël,  c'est-à-dire  dans  celles  qui 
paraissent  n'avoir  pas  été  repeintes,  ou  qui 
l'ont  été  avec  intelligence,  on  remarque 
l'absence  de  gammes  rabattues. 

Du  grand  clair  à  l'obscur  d'une  draperie, 
il  y  a  le  moins  possible  de  tons  intermédiai- 
res et  les  deux  extrêmes  ne  sont  jamais  aux 
deux  bouts  de  la  gamme. 

Supposons  une  gamme  de  dix  tons,  le 
numéro  i  correspondant  au  ton  le  plus  clair 
et  le  numéro  lo  au  ton  le  plus  foncé.  Ra- 
phaël n'a  pas  été  au  delà  du  n°  3  pour  le 
clair  et  du  n°  8  pour  le  foncé  ;  pour  le  pas- 
sage il  n'a  pas  employé  tous  les  tons  repré- 
sentés par  les  numéros  4-5-6-7. 

J'ai  noté  des  draperies  à  trois  tons  seule- 
ment y  compris  le  clair  et  l'obscur  de  la 
même  couleur;  c'est  précisément  la  manière 
de  Massacio  dans  la  chapelle  Brancacci  à 
Florence,  où  Raphaël  a  étudié.  Dans 
d'autres  j'ai  compté  quatre  tons  de  la  même 
couleur  pour  l'obscur  et  la  demi-teinte  et 
deux  tons  d'une  autre  couleur  pour  les 
parties  claires. 

Ce  parti  de  mettre  les  lumières  dans  une 
couleur  différente  est  assez  fréquent  ;  dans 
Saint  Paul  à  l' Ai-copage,  par  exemple,  une 
draperie  verte  dans  le  creux  des  plis  passe 
au  jaune  franc  dans  les  parties  saillantes. 
Le  jaune  n'est  pas  venu  là  pour  simuler  un 
tissu  à  reflets,  mais  par  procédé  décoratif 
d'un  effet  certain  dont  on  trouve  de  nom- 
breux exemples  dans  les  mosaïques. 

Les  tuniques  des  vieillards  de  l'Apoca- 
lypse, dans  l'arc  triomphal  de  Galla  Placidia, 
du  V^  siècle,  à  Saint- Paul  hors-les-murs, 
à  Rome,  sont  bleues  dans  le  fond  des  plis 
et  blanches  en  avant. 

On  observe  dans  beaucoup  de  mosaïques 
des  traits  d'or  dans  les  vêtements.  Ce  n'est 
nullement   pour   imiter  des  tissus  brochés 


îles  ^cte0  Des  :^pôtres. 


103 


d'or,  puisque  l'or  est  également  employé 
dans  les  accessoires,  les  meubles  et  même 
les  parquets  et  les  terrains,  c'est  tout  sim- 
plement pour  accentuer  les  lumières. 

Raphaël    a    donc   visiblement   traité  ses 
cartons  avec  une  grande  sobriété  ;  on  peut 


même  dire  que.dans  certains  cas, il  a  poussé 
sa  sobriété  trop  loin. 

Ainsi  pour  les  carnations  il  n'a  employé 
que  quatre  colorations:  l'une  pour  les  vieil- 
lards et  les  malades,  une  autre  pour  les 
hommes   adultes,    une  troisième    pour   les 


Saint  Paul  à  1  Aréopage.  (PI 

femmes  et  la  quatrième  pour  les  enfants  ; 
encore  celles  des  femmes  et  des  enlants  sont 
très  voisines;  comme  pour  les  draperies  les 
tons  sont  pris  dans  lamoyenne  de  lagamme. 
La  même  observation  se  fait  dans  d'au- 
tres ouvrages  de  Raphaël,  surtout  dans  les 
carnations  des  personnages  de  la  Sainte 
Cécile  du  musée  de  Bologne.  Seulement 
là  les  tons,  vraiment  par  trop  pareils,  sont 


otogr.iphie  d'Ai  INAKI  de   Florence.) 


pris  dans  les  numéros  accentués  de  la 
ofamme  ;  cette  uniformité   nuit    au  tableau. 

Dans  certaines  carnations  des  Actes  on 
trouve,  comme  dans  les  draperies,  des 
coups  de  pinceau  trop  énergiques  et  posés 
avec  une  sorte  de  brutalité;  sans  aucun 
doute  ce  sont  des  retouches  de  quelque 
iinbrattatore  barbouilleur. 

Je  n'ai  découvert  dans  aucun  des  cartons 


104 


ISitWt  île  r^rt  cf)rcticn. 


l'intention  de  Raphaël  de  voir  introduire 
dans  le  tissu  de  la  soie  et  de  l'or. 

Si  c'est  à  dessein  qu'il  n'a  pas  marqué 
les  places  de  l'or  et  de  la  soie,  cela  prouve- 
rait, à  mon  sens,  que  Raphaël  a  eu,  soit  par 
intuition,  soit  à  la  suite  d'observations,  un 
très  juste  sentiment  de  ce  que  doit  être  une 
interprétation  textile. 

Je  ne  crois  pas  avec  Passavant  que  les 
étoiles  d'or  de  la  robe  du  Christ  dans  la 
tapisserie  la  Vocaiioti  de  saint  Pierre  soient 
de  l'invention  de  Raphaël  et  que  par  l'usage 
elles  aient  été  effacées  du  modèle;  la  pein- 
ture n'en  porte  pas  la  moindre  trace;  on  ne 
les  retrouve  pas  dans  une  réplique  de  la 
tapisserie  qui  est  dans  la  même  galerie  du 
Vatican. 

Depuis  bien  longtemps  il  est  dans  l'usage 
de  ceux  qui  veulent  vanter  une  tapisserie 
de  faire  remarquer  «  qu'elle  est  tissue  de 
soie  et  d'or»;  cette  prétendue  qualité  est,  à 
mes  yeux,  un  défaut. 

Une  tapisserie,  comme  une  peinture,  doit, 
autant  que  possible,  résister  à  l'action  que 
le  temps  exerce  sur  ses  colorations  ;  si  la 
résistance  des  couleurs  est  inégale  il  s'en 
suivra  nécessairement  une  rupture  de  l'har- 
monie générale. 

Hé  bien,  alors  même  que  la  tapisserie  est 
exclusivement  tissue  de  laines,  la  rupture 
a  lieu  après  que  la  pièce  2.  fait  son  jcjc, 
comme  on  dit  dans  les  ateliers. 

J'ai  à  cet  égard  des  notes  nombreuses  et 
probantes  ;  il  me  serait  facile  de  citer  des 
tapisseries  modernes  où  les  laines  ont  subi 
des  altérations  de  couleur  quelques  an- 
nées après  l'achèvement  de  la  pièce,  et 
quelquefois  même  pendant  que  la  pièce 
était  encore  sur  métier. 

Pour  ne  pas  faire  le  procès,qu'elle  mérite 
bien  cependant,  à  la  chimie  tinctoriale  de 
notre    temps,   car  est    elle    inférieure  aux 


procédés  des  Coptes  du  commencement 
de  notre  siècle,  et  à  ceux  des  Flamands  du 
beau  temps,  je  vais  analyser  une  tapisserie 
d'après  Le  Brun,  tissée  aux  Gobelins  en 
1676:  l'Audience  donnée  par  /e  Roi  Louis 
XIV  à  Fontainebleau  au  carditial  Chigi, 
légat  dîc  pape,  de  la  suite  célèbre  : 

\J  Histoire  du  Roi. 

En  comparant  l'envers  de  la  tapisserie, 
toujours  tenue  à  l'abri  de  la  lumière,  avec 
l'endroit,  et  en  admettant  la  gamme  de  dix 
tons,  j'ai  constaté  que  les  violets  et  les 
bleus  avaient  baissé  de  trois  tons,  les  car- 
nations, les  jaunes  et  certains  rouges  de 
deux  tons,  alors  que  les  orangés,  les  verts, 
les  gris  et  certains  rouges  sont  restés  à  la 
hauteur  primitive. 

Et  qu'on  remarque  bien  que  \ Audience 
est  parmi  les  tapisseries  des  Gobelins  les 
mieux  conservées  et  que  sous  Louis  XIV 
l'atelier  de  teinture  était  infiniment  mieux 
dirigé  que  bien  souvent  depuis  cette 
époque. 

La  fugacité  de  certaines  couleurs,  la 
résistance  d'autres  couleurs  est  chose  con- 
nue depuis  qu'on  teint  des  matières  textiles, 
mais  jamais  les  peintres  de  modèle  de 
notre  temps  n'ont  voulu  tenir  compte  des 
observations  qu'on  leur  a  faites  à  ce  sujet. 

Le  chimiste  Roard,  directeur  de  la  tein- 
ture aux  Gobelins,  de  1803  à  1816,  a  écrit 
à  ce  propos,  en  parlant  des  peintres  de 
l'école  de  David  :  «  Je  leur  ai  fait  observer 
((  que  pour  nous  rapprocher  le  plus  possible 
«  de  leurs  tableaux,  nous  ne  pouvions  don- 
«  ner  aux  tons  si  clairs  qu'ils  demandaient 
<i  la  même  solidité  et  la  même  durée  à 
«  l'air  que  celles  des  demi-teintes  et  des 
€  couleurs  foncées  ;  qu'après  un  temps  assez 
«  court,  l'harmonie  qui  existait  primitive- 
«  ment  serait  détruite  et  qu'enfin  par  leur 
«  faute   on   dirait  plus  tard  que  l'art  de  la 


ILtô  ZtttQ  Des  :^pôtrcs. 


105 


«  fabrication  des  tapisseries  a  rétrogradé 
«  malgré  les  perfectionnements  nouveaux 
«et  très  importants  apportés,  tant  dans 
«  cette  même  fabrication,  que  dans  les  tein- 
«  tures.  Cependant  on  ne  tint  aucun  compte 
«  de  ces  motifs  si  positifs;  l'administration 
«  des  Gobelins  fut  obligée  de  céder  au  dé- 
((  sir  de  ces  grands  peintres  et  de  se  con- 
«  former  à  leurs  exigences.  )) 

En  ce  qui  concerne  la  résistance  des 
couleurs  et  les  prétentions  des  peintres, 
Roard  a  parfaitement  raison;  il  se  trompe 
étrangement  lorsqu'il  parle  des  perfection- 
nements dans  la  fabrication  des  tapisseries 


et  des  progrès  dans  l'art  de  la  teinture, 
dans  la  première  période  duXlX^  siècle. 
Les  Gobelins  étaient  depuis  longtemps, 
à  ce  double  point  de  vue,  bien  au-dessus 
des  anciens  ateliers  flamands  et  français. 

Tous  ceux  qui  ont  observé  les  degrés  de 
résistance  des  laines  et  des  soies  teintes, 
ont  constaté  qu'à  couleurs  égales  et  à  con- 
ditions d'âge  et  de  milieu  pareilles,  les- soies 
teintes  perdent  plus  vite  leur  intensité  que 
les  laines  :  si,  par  exemple,  la  laine  descend 
de  trois  tons  sur  dix,  la  soie  descendra  de 


cmq  a  six  tons. 

Sans    doute    l'introduction    de 


la    soie 


Élymas  frappé  de  cécité-  (Photographie  d'AnNARl  de  Florence.) 


donne,  dans  les  commencements,  à  la  tapis- 
serie plus  de  brillant,  mais  l'éclat  n'a  pas 
de  durée;  par  suite  l'harmonie  des  colora- 
tions, si  nécessaire  cependant,  sera  rompue, 
et  le  dommage  sera  en  raison  de  la  quan- 
tité de  soies  mêlée  aux  laines. 

On  peut  en  dire  autant  de  l'usage  des 
fils  d'or;  l'or  se  ternit  vite  et  le  fil  si  écla- 
tant au  début  prend  un  aspect  métallique 
terne  et  indécis. 

Du  reste  l'expression yf/î  d'or  n'est,  très 
généralement,  que  de  style,  ces  fils  étant 
d'habitude  des  brins  de  soie  recouverts. 

La  dissection  et  l'analyse  des  fils  d'or  de 
la   tapisserie   \' Ajidience  du  légat  a  donné 


pour  un  poids  de  494  les  résultats  suivants: 
Soie,  157  — ^  argent,  310  —  cuivre,  024  — 
or,  003. 

Je  n'ai  pu  faire  analyser  les  fils  d'or  des 
Actes,  mais  certainement  ils  ne  sont  pas  de 
bon  aloi,  et  c'est  fort  heureux. 

On  croit  que  la  partie  inférieure  ^Elymas 
frappé  de  cécité  a  été  brûlée  dans  l'espoir 
de  recueillir  l'or  dont  était  tissée  l'inscrip- 
tion du  socle  sur  lequel  est  posé  le  siège 
du  proconsul;  la  fonte  a  sans  doute  donné 
des  résultats  à  peu  près  nuls,  après  quoi  on 
aura  renoncé  à  l'incinération;  le  même  fait 
est  arrivé  plus  tard,  lors  du  rapt,  en  1798, 
des  tapisseries  de  la  imova  scuola 


io6 


l^tWt  ïie  rart  cljvttien. 


On  sent  ma  conclusion. 

La  meilleure  tapisserie  est  celle  qui  est 
faite  exclusivement  avec  de  la  laine  et  avec 
le  moins  de  couleur  possible. 

Je  sais  bien  que  je  prêche  dans  le  dé- 
sert en  un  temps  où,  les  défauts  en  art  étant 
souvent  pris  pour  des  qualités,  bien  des 
gens  donnent  la  préférence  aux  tapisseries 
qui  présentent  avec  des  carnations  déco- 
lorées, des  couleurs  décomposées,  des  tons 
heurtés  et  une  accumulation  de  fils  métal- 
liques cuivreux  introduits  dans  le  tissu  sans 
raisons  plausibles;  toutes  ces  incohérences 
sont  pour  les  amateurs  de  cette  école  les 
bienfaisants  effets  de  la  patine  du  temps  ! 

Voyons  maintenant  le  parti  que  les  tapis- 
siers des  Flandres  ont  tiré  des  modèles  de 
Raphaël. 

VI 

Au  cours  de  l'année  15  15,  les  modèles 
sont  confiés  aux  ateliers  de  Van  Aelst 
établi  à  Bruxelles  et  réputé  le  meilleur 
tapissier  du  temps. 

Il  faut  croire  cependant  qu'à  Rome  on 
n'était  pas  sans  quelques  craintes  sur  les 
capacités  de  Van  Aelst,  car  Bernard  Van 
Orley,  élève  et  ami  de  Raphaël,  fut  chargé 
de  suivre  les  travaux. 

On  a  dit  que  Michel  Coxcie  fut  adjoint 
à  Van  Orley  ;  c'est  évidemment  une  erreur. 
Coxcie  étant  né  en  1499,  était  beaucoup 
trop  jeune  ;  la  méprise  vient  sans  doute  de 
ce  que  Coxcie  était  élève  de  Van  Orley  et 
dans  son  atelier  au  moment  du  tissage  des 
tapisseries. 

A  la  fin  de  l'année  1518,  la  Péc/ie  mira- 
culeuse, la  Vocation  de  saisit  Pierre,  la 
Lapidation  de  saint  Etienne,  !a  Conversion 
de  saint  Paiil,  la  Guérison  du  paralytique, 
Elymas  frappé  de  cécité.  Saint  Pajil  et  saint 
Barnabe  à  Lystre,  étaient  sur  les  murs  de 


la  Sixtine.  Les  trois  autres  pièces  arrivèrent 
à  Rome  l'année  suivante. 

Nous  ne  savons  pas  dans  quel  mois  de 
l'année  15 15  les  tapisseries  ont  été  mises 
sur  métiers  ni  dans  quels  mois  des  années 
1 5 1 8  et  1 5  1 9  elles  ont  été  levées  cependant 
la  durée  du  travail  peut  être  estimée  ap- 
proximativement à  trois  ans. 

Pour  réaliser  la  tenture  dans  ce  délai,  il 
a  fallu  nécessairement  monter  chaque  pièce 
sur  un  métier  à  part  ;  il  est  même  probable 
que  les  bordures  ont  été  tissées  sur  des 
chaînes  spéciales. 

Les  modèles,  sans  bordures,  ont  été  pour 
les  besoins  de  la  fabrication,  coupés  en 
bandes  verticales  à  raison  de  quatre  à  cinq 
par  pièce  ;  par  suite  le  tissage  a  eu  lieu 
dans  le  sens  horizontal  ;  comme  dans  la 
verticale  les  modèles  ont  3  m.  65  cm.,  c'est 
sur  cette  limite  que  les  tapissiers  ont  pu  se 
mouvoir  en  largeur,  ce  qui  donne  trois 
ouvriers  par  métier  ;  à  moins  de  cas  excep- 
tionnels, il  faut  d'habitude  à  chaque  tapis- 
sier un  peu  plus  d'un  mètre  pour  travailler 
sans  être  gêné  dans  ses  mouvements. 

Van  Aelst  a  donc  dû  mettre  à  l'ouvrage 
environ  vingt-cinq  à  trente  tapissiers  si- 
multanément et,  quelque  bien  monté  que 
pouvait  être  son  atelier,  il  est  fort  probable 
qu'il  n'avait  pas  à  sa  disposition  un  pareil 
nombre  de  tapissiers  de  première  qualité; 
cela  se  voit  bien  au  surplus.  Il  y  a  dans 
l'exécution  des  différences  très  sensibles 
d'une  pièce  à  l'autre  et  même  dans  les 
diverses  parties  d'une  même  pièce. 

Le  temps  approximatif  de  la  durée  du 
tissage,  le  nombre  probable  d'ouvriers 
employés  sur  chaque  métier  ne  sont  pas 
suffisants  pour  apprécier  le  plus  ou  moins 
de  rapidité  de  l'exécution  ;  il  nous  manque 
un  facteur  important  :  le  métrage  exact  de 
la  tenture. 

J'en  fais  l'aveu  ;  ici  le  bât  me  blesse. 


3Les  ZtttQ  hîQ  ^patrc0. 


107 


Malgré  mon  désir,  mes  tentatives,  mes 
calculs,  je  ne  suis  pas  arrivé  à  un  résultat 
satisfaisant. 

Mon  ambition  était  d'avoir  : 
i"  les  mesures  justes  des  modèles, 
2°  les  mesures  des    tapisseries   avec    et 
sans  les  bordures. 


3°  les  mesures  des  panneaux  latéraux  de 
la  Sixtine, 

4''  les  mesures  des  pilastres  peints  qui 
partagent  et  terminent  les  panneaux. 

N'ayant  pas  eu  la  bonne  fortune  de  pou- 
voir prendre  moi-même  ces  mesures,  j'ai 
cherché  si  d'autres  avaient  été  plus  heureux. 


La  Conversion  de  saint  Paul.  (l'holographie  (J'Alinaki  de  Kloience.) 


J'ai  trouvé  qu'en  général  les  auteurs 
dont  je  connais  les  travaux,  avaient  évité 
ces  questions,  et  s'éiaient  contentés  de  dire 
que  les  tapisseries  avaient  des  dimensions 
différentes  —  ce  qui  saute  aux  yeux  pour 
qui  les  a  regardées.  Quelques-uns  ont 
donné  la  mesure  de  la  plinthe  depuis  la 
barrière  jusqu'au  fond,  mais  n'ont  pu  natu- 


rellement fournir  de  note  sur  les  surfaces 
occupées  par  les  tapisseries  sur  le  mur  où 
a  été  peint  le  Jiigement  dernier.  Plusieurs 
ont  fourni  les  dimensions  des  tapisseries  ; 
j'ai  trouvé  de  tels  écarts  entre  ces  mesurages 
que  je  suis  bien  certain  que  les  mesures  ont 
été  prises  de  façons  très  diftérentes  :  sans  les 
bordures;   avec  les    petites  bordures  inté- 


REVUE    UE   L  ART  CHKÉTIEN. 
190I.    —   2""^    LIVRAISON. 


io8 


Be\)ue  ïie  l'art  cbictteiu 


rieures  seulement  ;  avec  les  petites  et  les 
grandes  bordures. 

Je  n'ai  pas  besoin  de  faire  remarquer 
que  pour  les  dimensions  relatives  des  ta- 
pisseries et  des  modèles,  il  ne  faut  tenir 
aucun  compte  des  reproductions  résultant 
des  photographies  ou  des  dessins.  Aucune 
reproduction,  —  les  miennes  pas  plus  que 
les  autres,  —  ne  donne  la  suite  des  Actes  à 
une  échelle  déterminée.la  même  pour  toutes; 
c'est  fâcheux,  puisqu'ainsi  une  tapisserie 
de  5  mètres  de  large  est  de  la  même 
grandeur  qu'une  autre  de  4  mètres  ;  mais 
si  on  ne  peut  faire  un  reproche  à  ceux 
qui  se  sont  servis  de  photographies,  on  peut 
regretter  que  les  auteurs  qui  ont  eu  la 
chance  d'employer  des  dessinateurs,  n'aient 
pas  recommandé  d'observer  les  proportions. 

Mais  enfin,  quoique  critiquant  chez  les 
autres  le  procédé  par  à  peu  près,  je  vais 
suivre  les  mêmes  errements  ;  je  le  fais  à 
simple  titre  de  renseignement. 

N'ayant  pu,  à  mon  grand  regret,  mesurer 
les  tapisseries  le  mètre  à  la  main,  j'ai  opéré 
de  visu,  aidé  de  divers  renseignements 
qu'on  m'a  donnés  au  Vatican  ;  je  parle  de 
quelques  tapisseries  seulement  et  sans  les 
bordures. 

La  plus  large  est  Elymas  ;  toutes  les 
mesures  lui  donnent  5  mètres  15  ctm. 

Après  viennent  :  la  Giiérison,  A  naine, 
la  Vocation  d'une  largeur  de  5  mètres  à 
5  m.  10. 

]J Aréopage  n'a  plus  que  4  m.  20  à 
4  m.  25. 

La  Pêche  mesure  3  m.  90,  ou  4  mètres. 

Saint  Paul  en  prison  n'a  plus  que  o  m. 
80  à  o  m.  90. 

Tout  cela  sous  bénéfice  d'inventaire,  bien 
entendu. 

Les  hauteurs  devraient  être  toutes  les 
mêmes,  c'est-à-dire,  toujours  sans  bordures, 
de  3  mètres  65  ;  il  y  a  cependant  des  diffé- 


rences de  10  à  15  centimètres,  je  crois.  Je 
ne  puis  attribuer  ces  écarts  à  la  négligence 
des  tapissiers  ;  je  pense  qu'ils  résultent  du 
plus  ou  moins  de  relâchement  de  la  chaîne. 

Pour  le  carré  de  l'ensemble  de  la  tenture 
je  me  suis  livré  à  bien  des  calculs  ;  je  n'ai 
été  satisfait  d'aucun,  m'étant  heurté  à  la 
question  des  bordures  verticales  dont  nous 
ne  connaissons  pas  le  nombre  primitif 
exact  ;  je  me  hasarde  cependant  à  supposer 
que  les  Actes  peuvent  représenter  de  240  à 
260  mètres  carrés. 

Pour  un  temps  de  trois  ans  environ, 
pour  neuf  ou  dix  métiers  activés  par  vingt- 
cinq  ou  trente  tapissiers,  ce  carré  repré- 
sente par  ouvrier  une  production  d'environ 
2  mètres  ■ /,  carrés  par  an  ('). 

Ni  Van  Orley,  ni  Van  Aelst  n'ont  été  à 
la  hauteur  de  l'importante  mission  que 
Léon  X  leur  avait  donnée. 

Les  modèles  de  Raphaël  n'ont  pas  été 
traduits  avec  le  respect  qu'ils  méritaient  et 
peut-être  aurait-on  mieux  fait  de  les  confier 
à  l'un  des  ateliers  qui  fonctionnaient  alors 
en  Italie  sous  la  direction  des  tapissiers 
Mamands. 

On  relève  dans  les  tapisseries  des  fautes 
de  dessin  et  des  fautes  dans  les  colorations. 

Les  premières  sont  excusables,  car  aucune 
n'est  choquante,  et  c'est  évidemment  par 
jalousie  de  métier  et  en  exagérant,  qu'en 
15 19,  Sébastien  del  Piombo  écrivait  à 
Michel-Ange, après  avoir  vu  les  Actes  à  la 
Sixtine  :  «  E  credo  la  mia  tavola  sia  me- 
glio  disegnata  che  i  panni  arazi  che  son 
venuti  da  Flandra.  »  Sebastien  faisait  allu- 
sion à  son  tableau  la  Ré-iurrcction  de  Lazare. 

I.  Pendant  le  règne  de  Louis-Philippe  on  a  repris  aux 
Gobelins  quelques  pièces  des  Actes  d'après  les  modèles 
déposés  à  la  cathédrale  de  Meaux.  La  production  moyen- 
ne annuelle  par  tapissier  a  été  de  la  moitié  d'un  mètre 
carré.  Cette  faiblesse  tient  à  la  minutie  de  l'exécution  à 
la  mode  alors  et  surtout  à  ce  fait  que  les  tapissiers 
n'étaient  pas  payés  aux  pièces  comme  jadis,  mais  au  mois, 
en  leur  qualité  d'employés  de  la  liste  civile  ! 


ILzQ  :^ctes  îïes  :^pôtreg. 


109 


Il  est  rare  de  trouver  une  tapisserie  d'une 
correction  de  dessin  absolue,  et  cela  s'ex- 
plique. 

On  commence  par  prendre  un  calque 
sur  le  modèle  ;  la  chose  était  regardée 
comme  délicate,  car  elle  était  confiée  à  un 
dessinateur  spécialement  chargé  des  traits. 

Puis  on  reporte  les  traits  sur  une  chaîne 
tendue  mais  (lexible  ;  on  ne  dessine  pas  sur 
une  nappe  pareille  avec  autant  de  sûreté 
que  sur  une  surface  solide  ;  c'est  par  des 
pointillés  que  l'on  procède. 

Ensuite  les  fils  de  chaîne  sont  envelop 
pés  par  les  fils  de  trame  roulés  sur  une 
broche  manœuvrée  par  le  tapissier  ;  le  poin- 
tillé n'est  qu'un  repère,  et  la  broche  est 
pour  le  tapissier  ce  que  le  pinceau  est  pour 
le  peintre. 

On  sent  les  difficultés  :  il  est  utile  que  le 
tapissier  sache  dessiner  ou  tout  au  moins 
qu'il  ait  le  sentiment  des  formes  ;  mais  tous 
les  tapissiers  n'ont  pas  ces  qualités  au  même 
degré. 

Il  n'y  a  donc  pas  lieu  de  faire  un  crime 
à  Van  Orley  et  à  Van  Aelst  d'avoir  laissé 
passer  quelques  incorrections  dans  les 
traits,  d'autant  plus  qu'en  définitive  elles  ne 
portent  pas  une  atteinte  sérieuse  à  la  com- 
position et  à  l'esprit  des  modèles. 

Pour  les  colorations,  on  a  le  droit  d'être 
plus  sévère. 

Je  tiens  compte  bien  entendu  des  diffi- 
cultés du  métier. 

L'entrepreneur  n'est  pas  toujours  assuré 
du  degré  de  résistance  aux  actions  de  l'air, 
de  la  lumière  et  du  temps,  des  couleurs 
qu'il  emploie  ;  il  peut  de  bonne  foi  croire 
qu'une  couleur  est  solide  alors  qu'elle  est 
fugace.  Il  ne  connaît  pas  non  plus  les 
résultats  de  la  mue  de  certaines  couleurs  ; 
il  est  arrivé,  par  exemple,  même  aux  épo- 
ques de  bonnes  teintures,  que  le  brun  foncé 
s'est  décomposé  et  a  tourné  au  rouge  vif. 


D'un  autre  côté,  le  tapissier  n'a  pas 
toujours  à  sa  disposition  des  couleurs  qui 
correspondent  exactement  à  celle  du  modèle 


^ 


-,?1| 


.igS-" 


MMSUSÎ115Ï1J 


Saint  Paul  en  prison. 
(Photographie  d'AnNAUi  de  Florence.) 


et  le  teinturier  ne  peut  pas  toujours  les  lui 
fournir. 

En  tenant  un  compte  équitable  de  ces 


1  lO 


3Rc\)uc  lit  rart  cljrctitn. 


considérations,  je  suis  arrivé  aux  conclu- 
sions suivantes  : 

Il  y  a  dans  les  Acfes  des  morceaux  con- 
formes aux  colorations  des  modèles. 

Il  y  en  a  d'autres  qui  s'éloii^nent  beau- 
coup trop  du  modèle  en  ce  sens  d'abord, 
que  le  tapissier,  au  lieu  d'user,  comme 
Raphaël,  de  trois  tons  seulement  du  grand 
clair  à  l'obscur,  a  employé  six  et  même  sept 
tons  de  la  même  couleur  et  qu'ensuite,  au 
lieu  de  rester  dans  la  moyenne  de  la  gamme, 
il  est  allé  aux  numéros  extrêmes  ;  et  malgré 
cette  multiplication  des  tons  on  remarque 
des  passages  brusques  et  heurtés. 

Ailleurs  le  tapissier  a  juxtaposé  des  cou- 
leurs qui  ne  s'harmonisent  pas,  ce  qui  ne 
se  voit  jamais  dans  les  ouvrages  de  Raphaël, 
fresques  ou  peintures. 

Les  carnations  sont  dans  toutes  les  tapis- 
series, les  parties  les  plus  faiblement  trai- 
tées. Dans  les  visages,  les  pommettes  sont 
en  général  beaucoup  trop  accentuées  et  font 
taches  ;  autour  d'elles  le  tapissier  a  fait  un 
cercle  plein  d'un  ton  plus  faible  que  la  partie 
saillante,  et  autour  de  ce  premier  cercle  il 
en  a  mis  un  autre  plus  faible  encore  ;  l'effet 
est  désagréable. 

Quelques  parties  des  tapisseries  sont 
traitées  avec  une  extrême  minutie  et  un 
détail  absolument  inutiles. 

Enfin  il  y  a  abus  de  l'or  ;  on  en  a  mis 
jusque  dans  les  terrains  ! 

Tout  ceci  est  la  faute  de  Van  Orley  et 
de  Van  Aelst. 

Il  était  de  leur  devoir  de  surveiller  l'é- 
chantillonnage, d'obliger  les  tapissiers  à 
une  plus  grande  sobriété  et  au  besoin  de  dé- 
truire l'ouvrage  mal  fait. 

La  sobriété  n'aurait  nullement  gêné  les 
tapissiers  ;  elle  était  de  coutume  dans  les 
Flandres  avant  l'arrivée  des  Actes  et  elle  a 
été  pratiquée  après. 


En  résumé,  la  technique  des  Acfes  n'est 
pas  bonne  en  général  ;  avec  les  modèles  de 
Raphaël  on  pouvait  faire  mieux  ;  les  Flan- 
dres ont  produit  au  XVI'=  siècle  des  ou- 
vrages bien  supérieurs  comme  fabrication. 

VU 

CEPENDANT  les  tapisseries  sont 
accueillies  à  Rome  avec  la  plus  grande 
faveur. 

Paris  de  Grassis,  maître  des  cérémonies 
de  Léon  X,  les  qualifie  dans  son  journal 
«  pulcherrimos,  pretiosos,  de  quibus  tota 
«  capella  stupefacta  est  in  aspectu  illorum, 
«  qui,  ut  fuit  universale  judicium,  sunt  res, 
«  qua  non  est  aliquid  in  orbe  nunc  pul- 
«  chrius.  » 

Vasari  en  parle  avec  le  même  enthou- 
siasme: «  Le  quale  opéra  fu  tanto  miracolo- 
«  samente  condotta,  che  reca  mariviglia  di 
«  vederla  ed  il  pensare  come  sia  possibile 
«  avère  sfilato  i  capelli  e  le  barbe  e  datocol 
«  filo  morbidezza  aile  carni  ;  opéra  certo 
«  piuttosto  di  miracolo  che  di  artificio 
«  umano,  perche  in  essi  sono  acque,  ani- 
«  mali,  casamenti,  e  talmente  ben  fatti,  che 
«  non  tessuti,  ma  paiono  veramente  fatti 
«  con  pennello.  Costoquesta  opéra  settanta 
«  mila  scudi,  e  si  conserva  ancora  nella 
«  cappella  papale.  » 

Si  Vasari  crie  au  miracle,  c'est  qu'il 
estime  qu'une  tapisserie  est  d'autant  plus 
parfaite  qu'elle  imite  davantage  la  peinture. 
Il  avait  la  même  conception  des  majoliques 
peintes  à  plat  ;  parlant  des  plaques  dipensc 
itel piano  dont  Luca  délia  Robbia  a  décoré 
le  tombeau  de  1  evêque  Federighi,  il  écrit  : 
«festoni  e  mazzi  di  frutti  e  foglie  si  vive  e 
«  naturali  che  col  pennello  in  tavola  non  si 
«  farebbe  altrimenti  a  olio  ;  ed  in  vero  questa 
«  opéra  è  maravigliosa.  » 

Ce  n'est  pas  l'effet  décoratif  qu'il  admire, 
c'est  la  virtuosité. 


îles  :^cte0  hts  :^pôtres. 


I II 


Par  malheur  pour  ce  grand  art  de  la 
tapisserie,  l'opinion  de  Vasari  a  fini  par 
prévaloir,  et  les  ateliers  arrivèrent  à  con- 
centrer leurs  travaux,  presqu'exclusivement, 


dans  la  reproduction  des  tableaux  ;  ils  y 
étaient  encouragés  de  tous  côtés.  De  notre 
temps  M.  Ingres,  l'illustre  peintre  français, 
professait  que  le  rôle  de  la  tapisserie,  de  la 


L  H^ 


•firpr 


»?!aîi~ilEr-ÎI^SIS 


La  Pêche  miraculeuse-  (Photographie  i!'Alinaki  de  Florence.) 


mosaïque,  de  la  céramique  était  de  re- 
produire les  chefs-d'œuvre  de  la  peinture, 
afin  de  prolonger  leur  existence. 

La    réaction    contre    le    genre    faux    de 


l'imitation  servile  de  la  peinture  est  arrivée: 
les  directeurs  de  manufactures  réclament  des_ 
modèles  conçus  en  vue  de  l'interprétation 
textile;  en  ce  qui  me  concerne,  mon  modèle 


I  12 


îRebuc  tie  rart  cbrcticn. 


préféré  serait  celui  où  la  figure  humaine  ne 
tiendrait  qu'un  simple  rôle  décoratif;  c'est 
avouer  que  les  cartons  de  Raphaël  ne  sont 
pas  mon  idéal  ;  ce  sont  des  tableaux  d'his- 
toire, presque  tous  dignes  du  grand  homme 
qui  les  a  composés  sur  un  programme 
arrêté  par  le  pape.  II  est  probable  que  si 
Raphaël,  l'auteur  des  Loges  du  Vatican, 
avait  été  libre,  il  aurait  conçu  autrement 
une  tenture  de  tapisserie. 

Les  prix  payés  par  Léon  X  pour  la 
tenture  n'ont  aucune  importance  ;  il  faut 
cependant  citer  les  auteurs  qui  les  ont 
mentionnés. 

Paris  de  Grassis,  en  15 19,  dit  :  2,000  du- 
cats en  or  pour  chaque  pièce. 

Marc  Antoine  Mihiel  dit,  également  en 
15 19  :  A  Raphaël  100  ducats  en  or  par 
modèle  ;  pour  le  tissage  1.500  ducats  par 
tapisserie. 

Panvinio  et  P.  Giovio  disent  :  50.000 
ducats  pour  le  tout. 

Vasari  dit  :  70,000  ducats. 

Il  y  a  donc  des  écarts  considérables,  mais 
aurions-nous  un  seul  chiffre  réel  que  nous 
ne  serions  guère  plus  avancés,  puisque  les 
économistes  ne  sont  pas  d'accord  sur  la 
décroissance  du  pouvoir  de  l'argent,  même 
depuis  le  commencement  de  notre  siècle,  à 
fortiori  depuis  le  XV I^  A  cette  époque 
le  ducat  d'or  de  la  chambre  apostolique 
pesait  3  Yz  grammes  ;  les  uns  admettent 
qu'il  représentait  une  valeur  de  60  francs 
en  monnaie  actuelle,  les  autres  ne  vont 
qu'à  30  francs. 

Je  ne  connais  rien  à  ces  affaires,  mais  ici 
des  personnes,  qui  ne  sont  pas  économistes 
de  profession,  pensent  que  la  seconde  éva- 
luation est  plus  près  de  la  réalité  que  la 
première.  Elles  se  basent  sur  les  prix  des 
choses  nécessaires  à  la  vie  au  XV 1*^  siècle, 
prix  que  l'on  connaît  assez  bien,  et  les 
comparant   aux    prix    payés    actuellement 


dans  les  mêmes  pays,  elles  concluent  que 
pour  vivre  de  la  même  façon  dans  la  même 
contrée,  il  faudrait  au  plus  un  revenu 
triple. 

Du'reste  le  prix  vénal  d'une  œuvre  d'art 
ne  signifie  rien.  Un  État  paie  d'habitude 
moins  qu'un  particulier.  Un  artiste,  selon  sa 
situation  pécuniaire  du  moment  ou  son 
ambition,  prend  plus  ou  moins  cher.  Il  est 
des  cas  oij  le  prix  d'un  ouvrage  résulte  d'un 
sentiment  supérieur.  Lorsque  Pra  Angelico 
acceptait  une  commande,  il  demandait'un 
prix  plus  élevé  que  celui  des  peintres  de 
son  temps  ;  aux  objections  qu'on  lui  faisait 
il  répondait  que  l'argent  n'était  pas  pour 
lui,  car  il  le  consacrait  à  la  glorification  de 
Dieu! 

VIII 

J'ABORDE  maintenant  la  difficile  ques- 
tion des  bordures  ;  elle  n'a  pas  été 
jusqu'à  présent  posée  sous  tous  ses 
aspects,  peut-être  à  cause  des  problèmes  et 
critiques  qu'elle  soulève  ;  je  vais  l'attaquer 
de  front  et  je  débute  par  avouer  que  je  vais 
être  en  bien  des  points  en  contradiction 
avec  les  écrivains  mes  prédécesseurs. 

Une  tapisserie  peut  être  sans  bordures, 
elle  se  présente  moins  bien;  mais  enfin  on 
peut  la  concevoir  ainsi  ;  du  moment  où  on 
l'encadre,  elle  doit  logiquement  avoir  quatre 
bordures  d'une  importance  à  peu  près  égale, 
deux  horizontales  et  deux  verticales. 

A  la  vérité  les  Actes  étaient  bien  munis 
partout  d'un  premier  petit  encadrement 
intérieur  composé  d'un  listel,  d'un  chapelet 
d'oves  et  d'une  torsade,  mais  comment  ex- 
pliquer que  Raphaël  ait  négligé  de  poser 
sur  la  ligne  horizontale  supérieure  de  larges 
bordures  semblables  à  peu  près  à  celles  des 
lignes  verticales  .'' 

C'est  une  faute  sans  excuses. 


ILes  ;^cte0  Des  :^pôtre0. 


"3 


La  Lapidation  de  saint  Etienne,  (l'hutugrapliie  d'AtiNAKi  de  blorcni.c.) 


La  raison  que  la  place  a  manqué  n'a  pas 
de  poids  ;  il   suffisait  de  prendre  un   peu 


dans  le  champ  du  haut  des  tapisseries  et 
de  diminuer  l'importance  des  horizontales 


114 


3Rcbuc  t)e  ravt  cbvtticu. 


inférieures  qui  sont  sensiblement  plus  dé- 
veloppées que  les  montantes. 

La  seconde  erreur,  à  mon  sens,  c'est 
d'avoir  donné  aux  bordures  horizontales  du 
bas,  un  caractère  distinct,  celui  d'un  support 
en  relief  en  façon  de  bronze  rehaussé  d'or. 
On  s'accorde  à  penser  que  Raphaël  n'est 
pour  rien  dans  ces  camaïeux,  c'est  possi- 
ble ;  mais  il  les  a  acceptés  et  par  consé- 
quent il  en  a  pris  la  responsabilité. 

Que  Léon  X  lésait  exigés  pour  rappeler 
quelques  épisodes  de  sa  vie.  c'est  encore 
possible. 

Quoi  qu'il  en  soit,  au  point  de  vue  de  la 
fonction  décorative,  ces  bordures  sont  inso- 
lites. 

L'opinion  que  j'émets  est  contraire  aux 
idées  d'un  artiste  très  distingué,  le  chevalier 
Bernin,  l'auteur  de  la  belle  colonnade  de  la 
place  Saint- Pierre  à  Rome. 

En  1 665  le  chevalier  fut  appelé  en  France 
par  Louis  XIV,  pour  dresser  les  plans  d'une 
partie  du  palais  du  Louvre  ;  M.  de  Chante- 
lou,  chargé  d'accompagner  le  chevalier,  a 
tenu  au  jour  le  jour  \ç:  Journal  du  J^oyage  ('). 
Dans  cet  écrit  je  trouve  un  passage  se 
rapportant  aux  bordures  des  Aclcs. 

«  En  parlant  des  tapisseries,  le  chevalier 
«  a  dit  qu'on  n'y  doit  jamais  faire  de  bor- 
«  dures  de  fleurs  ni  d'autres  choses  écla- 
«  tantes  ;  que  Raphaël  a  eu  une  grande 
«  considération  dans  celle  qu'il  a  fait  exécu- 
«  ter  pour  le  pape,  n'y  ayant  fait  mettre 
«  aux  bordures  que  de  l'or  et  du  marbre, 
«  afin  que  le  trop  grand  éclat  et  la  variété 
«  ne  nuisissent  pas  au  corps  de  la  tapisserie 
€  et  que  la  bordure  ne  sert  que  de  terme  et 
«  de  finiment  comme  aux  tableaux  ;  qu'il 
«  faut  dans  tous  les  ouvrages  donner  les 
«  choses  les  plus  dégagées  de  confusion  et 

I.  Le  Journal  du  voyage  du  chevalier  Bernin  rédigé 
par  de  Chantelou  a  clé  publié  par  M.  Ludovic  Lalanne. 


«  les  plus  nettes  qu'il  se  peut,  que  ce  pré- 
«  cepte  entre  dans  tout,  même  dans  les 
«  affaires  du  monde.  J'ai  dit  que  c'est  à 
«  même  fin  sans  doute  que  M.  Poussin  prie 
«  toujours  qu'à  ses  tableaux,  l'on  ne  mette 
«  que  des  bordures  bien  simples  et  sans  or 
«  bruni,  et  que  c'est  aussi  la  raison  pourquoi 
«  Michel  Ange  ne  voulait  point  qu'on  ornât 
«  les  niches  et  disait  toujours  que  la  figure 
«  était  l'ornement  de  la  niche.  Mathie  (') 
«  a  ajouté  qu'à  Saint-Pierre  on  ne  voyait 
«  aucune  niche  qui  soit  ornée.  » 

Le  Vatican  conserve  sept  bordures  mon- 
tantes ;  je  les  désigne  par  leurs  sujets  et 
non  par  les  tapisseries  qu'elles  côtoient 
présentement,  car  j'ai  des  réserves  à  faire 
sur  les  places  qu'on  leur  attribue  générale- 
ment. 

Grotesques  (n"  i)  (au  bas  deux  inscrip- 
tions). 

Les  Vertus  théologales. 

Grotesques  (n°  2). 

Hercule  portant  le  globe  céleste. 

Les  Heures. 

Les  Parques. 

Les  Saisons  ('). 

Les  Grotesques  n°  i  portent,  dans  les 
parties  inférieures,  une  double  inscription 
tissée  et  ajoutée  par  couture. 

La  première  porte  les  armes  de  la  famille 
de  Montmorency  et  les  mots  : 

«  Urbe  capta  partem  auleorum  a  praedo- 
«  nib.  distractorum  conquisitam  Annac 
«  Mommorancius    gallicae    militiae    praef. 

1.  Mathie  était  l'un  des  élèves  du  Bernin. 

2.  Trop  tard  pour  y  remédier  et  évidemment  par  suite 
de  photographies  égarées  en  route,  nous  remarquons  que 
dans  les  reproductions  des  bordures  il  en  manque  deux  : 

Les  Heures,  la  pièce  est  car.ictérisée  par  un  cadran  à 
24  heures. 

Lci,  (.iro/csi/iics  \\"  I.  la  bordure  composée  d'arabes- 
ques, d'édicules  et  de  génies  de  petites  dimensions,  est 
dans  le  génie  des  Grotesques  n"  i  placés  contre  \ Aréopage. 

(Note  de  la  Direction.) 


Heg  :actes  t)ts  Zpùtvts. 


115 


«  resarciendam  atq.  Julio  III  P.  M.  resti- 
«  tuendam  curavit,  1553.  » 

Au-dessous  de  ce  témoignage  de  recon- 
naissance pour  la  restitution  faite  par  le 
connétable  de  Montmorency,  une  autre 
inscription  rappelle  que  les  tapisseries  ont 
été  disposées  dans  la  galerie  en  18 14  par 
ordre  du  pape  Pie  VII. 

((  Magni     Raphaelis    Sanctii    Urbinatis 


«  picturas  textis  aulaeis  expressas  iubente 
«  Leone  X  P.  M.  ad  Vaticani  ornamentum 
«  Plus  VII  P.  M.  sumptu  non  exiguo  re- 
«  demptas  et  instauratas  in  splendidiorem 
«  locum  artium  commoditati  collocandas 
«  mandavit  A.  MDCCCXIV.  » 

La  bordure  Hercule  porta7it  le  globe 
céleste  a  également  dans  le  bas  une  pièce 
rapportée  avec  les  armes  de  Montmorency 


Tapisserie  de  Bruxelles,  XVI"  siècle.  (Galerie  des  tapisseries  de  Florence.)  (l'holographie  d'Ai.iNARl  de  Florence  ) 


et  l'inscription  commémorative  de  la  resti- 
tution. 

On  a  remarqué  que  Bernin  ne  fait  pas 
la  moindre  allusion  aux  montantes  ;  bien 
plus,  il  félicite  Raphaël  d'avoir  évité  des 
bordures  de  fleurs  et  d' autres  choses  éclatan- 
tes :  cette  omission  résulte  ou  d'un  défaut 
de  mémoire  peu  probable,  ou  du  fait  qu'à 
l'époque  de  Bernin,  les  bordures  verticales 
étaient  détachées  des  tapisseries. 

On  observe  aussi  l'absence  des  bordures 


dans  les  copies  des  Actes  faites  au  Vatican, 
de  1664  à  1673,  psi"  'ss  pensionnaires  du 
roi  de  France  à  Rome  (")  ;  c'est  peut-être 
encore  un  motif  pour  admettre  qu'alors  ces 
ornements  n'étaient  pas  contre  les  tapisse- 
ries, ou  que  tout  au  moins  ils  étaient  tenus 
comme  choses  négligeables. 


I.  Les  copies  avaient  été  déposées  à  la  cathédrale  de 
Meaux  sur  la  demande  de  l'évêque,  Mgr  de  la  Roche- 
Fontenille,  aumônier  de  Madame  Adélaïde,  fille  du  roi 
Louis  XV  ;  elles  ont  été  transportées  à  Paris  en  1899. 


KKVUE    DU    L  AKT   CHKETIEN. 

igol.  —  2'"*^  r.lvHAisON. 


ii6 


j|Re\)ue  lie  T^vt  cj)rcttrn. 


Dans  un  recueil  de  gravures,  publié  à 
Rome,  en  1776,  sous  le  titre  Loggie  di 
Rafaele  7iel  Vaticano,  du  graveur  Volpato, 
on  trouve  les  Vertus,  les  Heures,  Hercule, 
les  Saisotis  et  les  Pai'çues,  mais  nullement 
au  titre  de  bordures  des  Actes. 

Le  recueil  est  conçu  d'une  singulière 
façon  ;  les  planches  sont  composées  au 
moyen  d'éléments  choisis  dans  l'œuvre  de 
Raphaël  et  de  ses  collaborateurs  dans  les 
diverses  localités  du  Vatican  et  rassem- 
blées sans  aucun  souci  de  la  réalité;  ainsi 
les  reproductions  des  bordures  des  Actes 
sont  entourées  de  motifs  absolument  étran- 
gers à  la  tenture  dont  il  n'est  même  pas 
fait  mention  ;  ces  motifs  sont  du  reste  si 
bien  choisis,  qu'on  pourrait  croire  que  les 
planches  donnent  un  ensemble  homogène. 
L'écusson  de  Léon  X  a  été  supprimé,  le 
génie  ailé  du  bas  de  la  bordure  à' Hercule 
se  présente  en  pied;  au  lieu  de  tenir  les 
armes  de  Montmorency  et  l'inscription,  il 
porte  une  corbeille  de  fleurs. 

Les  bordures  des  Actes,  les  montantes 
surtout,  n'ont  pas  fait  grand  bruit  jadis.  Je 
crois  que  Bunsen,  vers  1830,  est  le  premier 
auteur  qui  s'en  soit  spécialement  occupé  ; 
non  seulement  il  décrit  les  motifs,  mais  il 
fait  la  répartition  des  montantes  par  tapis- 
series. Ses  attributions  ayant  été  adoptées 
sans  discussion  par  les  écrivains,  notam- 
ment par  Passavant,  on  est  arrivé  à  dési- 
gner les  bordures  par  le  nom  des  tapisse- 


ries. 


J'ai  toujours  tenu  la  répartition  pour 
arbitraire  et  comme  j'étais,  je  crois,  l'uni- 
que contradicteur  de  Bunsen,  j'entre  dans 
le  détail. 

Voici  la  répartition  de  Bunsen  : 

La  Pêche  mirac2ileiise, 

Une  montante.  Les  Grotesques  {pP \.)  {'). 


I.  J'ai  désigné  les  deu.\  bordures  en  grotesques  par 
les  n"'  I  et  2,  simplement  pour  les  distinguer. 


Horizontale  :  Jean  de  Médicis  allant  à 
Rome  après  la  mort  de  Jules  11,  pour  as- 
sister au  conclave.  11  est  élu  pape  sous  le 
nom  de  Léon  X  et  reçoit  l'hommage  des 
cardinaux  {1513). 

La  Vocation  de  saint  Pierre, 

Deux  montantes  :  Les  Parques  —  Les 
Saisons. 

Horizontale  :  Pillage  du  palais  des  Médi- 
cis; fuite  de  Jean  de  Médicis  habillé  en 
moine  (1494). 

La  Lapidation  de  saint  Etienne, 

Pas  de  montantes. 

Horizontale:  Entrée  à  Florence  du  car- 
dinal Jean  de  Médicis  comme  légat  du 
pape  (1492). 

La  Guérison  du  Paralytique, 

Pas  de  montantes. 

Horizontale  :  Le  cardinal  Jean  de  Mé- 
dicis est  fait  prisonnier  à  la  bataille  de 
Ravenne. — Il  s'échappe  de  sa  prison{  1512). 

—  Entre  les  deux  sujets:  lions  et  lauriers. 
La  Mort  d' Atianie, 

Une  montante  :  Les  Vertus  théologales. 

Horizontale:  Le  gonfalonier  Ridolfi  ha- 
rangue les  habitants  de  Florence.  —  Le 
cardinal  Jean  de  Médicis  entre  à  Florence 
(1512). 

La  CoJivcrsion  de  saint  Paul, 

Pas  de  montantes. 

Horizontale:  Persécution  des  chrétiens 
par  Saiil. 

Elyinas  frappé  de  cécité, 

Pas  de  montantes. 

Pas  d'horizontale  ;  la  tapisserie  ayant 
été  coupée  en  deux,  il  n'existe  aucun  indice 
du  sujet  de  cette  bordure. 

Saint  Paul  et  saint  Barnabe  à  Lystre, 

Une  montante:  Les  Grotesqties  vS>2. 

Horizontale:  Saint  Jean  quitte  Antioche. 

—  Saint  Paul  prêche  dans  une  synagogue. 

—  Entre  les  deux  sujets  :  lions  et  les  trois 


JLtô  :^ctes  hzs  i^pôtres. 


17 


plumes  retenues  par  une  bague,  l'un  des 
emblèmes  des  Médicis. 

Saint  Paul  à  l Aréopage, 

Deux  montantes  :  Les  Heures  —  Her- 
cule. 

Horizontale  :  Saint  Paul  dans  son  mé- 
tier de  tisserand.  —  Saint  Paul  à  Corinthe 
est  la  risée  des  Juifs.  —  Saint  Paul  impose 


les  mains  aux  convertis.  —  Saint  Paul  au 
tribunal  du  gouverneur  de  l'Achaïe. 

Saint  Paul  en  prison, 

Pas  de  montantes. 

Horizontale  :  un  personnage  assis,  un 
autre  debout;  sans  signification. 

11  n'y  a  aucune  remarque  à  faire  sur  les 
explications  de    Bunsen   des   sujets  traités 


Tapisserie  de  Bruxelles,  XVI'    siècle  (Galerie  des  tapisseries  de  Florence.)  (Photograjitiie  d'Ai.ixAKi  de  Florence.) 


dans  les  bordures  du  bas  qui,  pour  la  plu- 
part, ne  paraissent  pas  avoir  été  séparées 
des  tapisseries;  je  ne  veux  pas  dire  par  là 
qu'elles  aient  été  tissées  sur  la  même 
chaîne;  c'est  possible,  mais  il  est  possible 
aussi  qu'elles  aient  été  jointes  par  la  rentrai- 
ture  ;  nous  parlons  plus  loin  de  ce  moyen. 

Pour   les    montantes,  les  attributions  de 
Bunsen  sont  sujettes  à  de  sérieuses  critiques. 

D'abord   il  ne   produit  aucun  argument 


en  faveur  de  son  opinion,  et  il  néglige  de 
dire  qu'il  a  purement  et  simplement  noté 
ce  qu'il  a  vu  lorsqu'il  a  étudié  les  tapis- 
series au  Vatican  ;  l'aveu  eût  été  prudent. 

Il  n'a  pas  réfléchi  qu'à  la  Sixtine  une  bor- 
dure unique  servait,  dans  la  plupart  des  cas, 
à  deux  tapisseries  voisines,  et  que  dès  lors 
il  n'y  avait  aucune  raison  pour  attribuer 
cette  bordure  plutôt  à  la  tapisserie  de  gau- 
che qu'à  celle  de  droite. 


ii8 


îRebue  ÎJe  V^xt  t\)xitim. 


II  n'a  pas  songé  que  les  tapisseries  ayant 
été  maintes  fois  déplacées,  quelques  bor- 
dures, simplement  cousues  contre  la  tapis- 
series ou  clouées  contre  le  mur,  ont  pu 
être  posées  au  hasard  pour  remplir  un  espace 
vide  ;  il  n'a  pas  remarqué  que  quelques 
bordures  étaient  plus  courtes  que  les  pièces 
qu'elles  côtoyaient  ;  ces  faciles  observations 
auraient  dû  le  mettre  en  méfiance. 

Du  reste  les  attributions  de  Bunsen,  si 
elles  ont  été  toutes  admises  comme  article 
de  foi  par  les  écrivains,  n'ont  pas  eu  la 
même  fortune  au  Vatican. 

Avant  le  remaniement  actuel,  plusieurs 
bordures  n'occupaient  déjà  plus  les  places 
indiquées  par  l'auteur. 

Dans  la  nouvelle  disposition  on  n'a  pas 
tenu  compte  davantage  de  lopinion  de 
Bunsen. 

Les  deux  bordures  des  Grotesq21.es  et 
celle  des  Heures  ne  sont  plus  contre  des 
tapisseries  mais  tout  à  fait  isolées. 

Le  Vatican  n'a  pas  non  plus  admis  le 
système  de  Bunsen  qu'à  la  Sixtine  des 
faits  relatifs  à  saint  Pierre  étaient  d'un  côté 
et  les  faits  relatifs  à  saint  Paul  d'un  autre 
côté,  puisqu'il  a  disposé  les  pièces  comme  il 
suit.  Sur  une  muraille.  La  Vocation,  la  Cul'- 
rison,  Lystre,  \ Aréopage;  en  face  :  Aiianie, 
la  Conversion,  la  Lapidation,  la  Fcclie. 
Élynias  et  saint  Paul  en  prison  sont 
isolés  ('). 

IX 

LA  question  des  places  des  bordures 
est  rendue  encore  plus  difficile  par 
l'incertitude  où  nous  sommes  du  nombre 
des  montantes. 

On  veut  que  la  fonction  des  bordures  ait 
été  de  recouvrir  les  pilastres  peints  sur  les 
plinthes. 

I  Le  Couronnement  de  la  Vierge,  quoique  ne  faisant 
pas  partie  des  Actes,  a  été  placé  entre  Ananie  et  la  Con- 
version. 


En  quel  nombre  étaient  ces  pilastres  ? 

Passavant, répétant  Bunsen, écrit:  «  L'es- 
«  pace  intérieur  de  la  chapelle  jusqu'à  la 
«  grille  est  divisé  par  dix  pilastres  en  au- 
«  tant  de  panneaux  de  différentes  largeurs. 
«  Les  tapisseries  devaient  correspondre  à  la 
«  mesure  de  ces  panneaux,  quatre  de  cha- 
«  que  côté  et  deux  au  fond  près  de  l'autel 
«  où  Michel-Ange  a  peint  plus  tard  le 
«  Jugement  dernier.  » 

Le  nombre  de  dix  panneaux  est  hors  de 
discussion,  puisque  pour  les  garnir  on  a  de 
fait  dix  tapisseries. 

Mais  je  ne  puis  m'expliquer  les  dix  pi- 
lastres peints. 

A  gauche  il  y  a  bien  quatre  pilastres,  y 
compris  celui  qui  est  en  partie  caché  parle 
trône  du  pape,  mais  adroite  il  n'y  en  a  que 
trois. 

Pour  le  mur  du  fond  les  auteurs  admet- 
tent deux  pilastres  seulement  pour  les 
deux  tapisseries  qui,  selon  Bunsen,  étaient 
la  Pêche  ^X.  la  Conversion  ,■  ma.is  alors  les  ta- 
pisseries séparées' l'une  de  l'autre  par  l'es- 
pace réservé  au  Couronnement  de  la  sainte 
Vierge  n'auraient  été  encadrées  que  d'un 
seul  côté,  ce  qui  n'est  pas  admissible. 

Le  chiffre  adopté  par  Bunsen  de  dix 
pilastres  résulte  donc  d'abord  d'une  erreur 
matérielle  commise  en  comptant  les  pilas- 
tres latéraux,  et  puis  d'une  simple  supposi- 
tion sur  le  nombre  des  pilastres  du  mur  du 
fond. 

Je  ne  comprends  pas  davantage  com- 
ment Passavant,  qui  admet  dix  pilastres  et 
qui  ne  mentionne  que  sept  bordures  pour 
les  recouvrir,  n'ait  pas  fait  observer  que 
plusieurs  bordures  ont  disparu  ou  que  peut- 
être  elles  n'ont  pas  été  faites. 

L'on  peut  objecter  que  jamais  il  n'a  été 
fait  mention  de  plus  de  sept  bordures  ;  cela 
ne  prouve  rien,  puisque  jusqu'à  Bunsen 
personne  n'a  songé  à  les  compter. 


iles^^ctes  Des  :^pôtre0. 


119 


L'on  peut  dire  aussi  que  sur  les  nom- 
breuses répliques  de  la  tenture,  on  n'en 
connaît  que  deux  qui  présentent  avec  des 
variantes  quelques-uns  des  sujets  des  mon- 
tantes conservées. 


La  suite  dite  de  Mantoue,  depuis  1866 
à  "Vienne,  montre  :  Les  Parques,  les  Vertus, 
les  Heures,  Hercîtle. 

La  suite  de  Madrid  montre  :  \&s  Panjues, 
les  Vertjis,  les  Heures,  Hercule,  les  Saisons. 


Tapisserie  de   Bruxelles,  XVI-^   siècle,    (Galène  des  tapisseries  du   Horence.)  (l'I.otogiaphie  d'A.  iNAlil  de  Florence.) 


On  a  observé  que  les  deux  bandes  com- 
posées de  grotesques  n'existent  dans  aucune 
réplique  et  que  les  bordures  n'ont  pas  été 
appliquées  contre  les  tapisseries  selon  la 
répartition     de    Bunsen.    Mais    à    Vienne 


contre  Saint  Paul  à  l'Aréopage  il  y  a  une 
bordure  qui  n'est  pas  représentée  au  Va- 
tican et  qu'on  voit  également  à  Florence 
dans  une  suite  de  trois  tapisseries  con- 
servées   au    musée    de    la    Crocetta  ;    elle 


120 


3Rcbur  lie  T^^rt  c|)rcticn» 


représente  \  Aritlmiétique,  Y  Astronomie,  la 
Musique,  la  Géométrie  ;  on  pourrait  la  dé- 
nommer les  Sciences,  quoique  la  musique  y 
figure. 

Je  reproduis  les  trois  pièces  de  Florence; 
elles  représentent  :  un  Tournoi,  le  Pillage 
d'un  ca7)ip,  le  Passage  d'une  rivière  par  une 
trotipe  armée  ;  les  personnages  sont  habillés 
à  l'antique. 

Contre  le  Toiirnoi  se  trouvent  des  deux 
côtés,  en  sens  opposés,  les  Parques  avec 
des  variantes  ;  contre  le  Passage  sont  les 
Heures  également  avec  quelques  modifi- 
cations ;  contre  le  Pillage  sont  les  Sciences. 

Ces  tapisseries  sont  du  milieu  du  XVI' 
siècle,  je  crois  ;  elles  portent  la  marque  de 


Bruxelles  et  le  sigle 


+ 


K 


c 


^ 


Du  moment  où,  à  Vienne,  la  bande  des 
Sciences  accompagne  quelques  bordures  du 
Vatican  et  qu'à  Florence  il  en  est  de  même, 
il  me  paraît  que  les  Sciences  pourraient  bien 
représenter  l'une  des  bordures  perdues  des 
Actes;  et  de  fait  cette  bande  remplirait 
aussi  bien  sa  fonction  que  les  Parques  et 
les  Vertus. 

Négligeant  le  Tremblement  de  terre,  trop 
étroit  pour  comporter  des  moulantes  his- 
toriées, j'estime  que  pour  encadrer  ration- 
nellement les  neuf  autres  tapisseries  il  a 
fallu  treize  montantes,  en  admettant,  bien 
entendu,  une  bordure  unique  pour  deux  ta- 
pisseries voisines.  Ces  treize  bordures  ont- 
elles  été  tissées  ? 

C'est  fort  probable. 

Les  Sciences  fournissent  déjà  un  indice 
adnu'ssible  ;  peut  être  qu'une  heureuse  dé- 
couverte viendra  confirmer  mon  opinion  ; 
l'immense  fonds  de  documents  conservés 
en  Italie  et  ailleurs  est  loin  d'être  épuisé. 


X 

/^~^OMME  pour  les  tapisseries  on  discute 
^-^  sur  la  part  prise  par  Raphaël  aux 
modèles  des  bordures  et  sur  les  collabora- 
teurs qu'il  a  pu  s'adjoindre  ;  un  seul  de  ses 
aides,  Penni,  est  cité  par  Vasari  ;  pour  les 
autres  on  en  est  aux  hypothèses. 

Comme  pour  les  tapisseries  je  ne  connais 
que  Raphaël  ;  s'il  a  accepté  les  travaux  de 
ses  collaborateurs,  c'est  qu'il  les  a  trouvés 
suffisants.  On  a  remarqué  que  c'est  l'avis 
de  Bernin  qui,  en  parlant  des  bordures 
horizontales,  n'a  cité  que  Raphaël. 

Je  trouve  que  les  bordures  des  Actes  ne 
méritent  pas  les  grands  éloges  qu'on  leur 
accorde  d'habitude. 

Les  horizontales  sont  médiocres  tant 
comme  parti  d'imiter  des  bas-reliefs  que 
par  certaines  de  leurs  compositions  qui 
sont  confuses  ou  même  inexplicables, comme 
celle  du  Tremblement  de  /ét;'^  /  quoiqu'ap- 
pliquées  à  des  tapisseries  où  les  personnages 
sont  à  peu  près  à  une  échelle  uniforme, 
elles  sont  d'échelles  différentes.  Il  n'y  a  pas 
eu  là  de  plan  d'ensemble  pas  plus  du  reste 
que  dans  les  montantes. 

Evidemment  on  trouve  dans  ces  mon- 
tantes des  bandes  vraiment  belles,  mais  il 
y  en  a  de  fort  mesquines  ;  de  plus,  elles  sont 
à  des  échelles  par  trop  disproportionnées; 
il  suffit  de  comparer,  pour  s'en  convaincre, 
Hercule  ou  les  Heures  avec  les  Grotesqties 
ou  les  Vertus. 

Aucune  bordure  n'est  adéquate  aux  tapis- 
series; aucune  n'a  de  rapports  avec  la  pièce 
qu'elle  accompagne;  elles  auraient  pu  servir 
aux  Loges,  aussi  bien  que  nombre  de  pilas- 
tres des  Loges  auraient  pu  servir  aux  ta- 
pisseries. 

Et  puis  pour  l'Italie  elles  n'ont  rien  de 
surprenant. 


3les  Ztttë  ties  :^pôtrej3;. 


121 


L'Italie  dans  ses  églises  et  ses  couvents 
nous  présente  en  profusion  de  superbes 
bordures. 

Il  suffit  de  citer  l'encadrement  des  fres- 
ques de  Giotto,  dans  la  voûte  d'Assise,  et 
ceux  de  la  chapelle  des  Espagnols  à  Flo- 
rence ;  les  bordures  des  portes  Ghiberti  au 
baptistère  ;  le  Campo  Santo  de  Pise,  et,  à 
Rome  même,  la  porte,  posée  en  1445,  à  la 
basilique  de  Saint-Pierre,  qu'Antonio  Fila- 
rète  a  entourée  de  motifs  empruntés  à 
l'ancien  Testament  et  surtout  à  la  mytho- 
logie. 

Ce  sont  là  des  exemples  qui  prouvent 
que,  bien  avant  Raphaël,  l'art  des  bordures 
était  arrivé  à  un  haut  degré  de  perfection. 

XI 

JE  passe  à  l'état  où  se  trouvaient  les 
tapisseries  et  les  bordures  avant  la 
réfection  dont  elles  sont  actuellement 
l'objet. 

En  1866,  le  pape  Pie  IX  en  ordonna  la 
réparation  à  la  manufacture  pontificale  de 
Saint- Michel  ;  après  les  événements  de 
1870,  le  travail  fut  continué  au  Vatican, 
mais  il  fut  suspendu  ;  il  a  été  repris  en  1899 
sur  l'ordre  du  souverain  pontife  Léon  XIII, 
qui  veille  avec  une  sollicitude  éclairée  sur 
les  œuvres  d'art  des  palais  apostoliques. 

Je  prends  les  tapisseries  dans  l'ordre  où 
elles  étaient  disposées  dans  la  galerie. 

Mais  auparavant  il  me  faut  encore  entrer 
dans  des  détails  techniques  arides  mais 
nécessaires. 

La  tapisserie,  on  le  sait,  comporte  une 
chaîne  et  une  trame  ;  les  fils  de  trame  en- 
veloppent complètement  les  fils  de  chaîne, 
les  deux  éléments  font  corps  et  forment  le 
tissu.  Mais  il  peut  arriver  à  la  longue,  sur- 
tout lorsque  la  tapisserie  n'étant  attachée 
qu'en    haut   est    presque   flottante,   que  la 


chaîne  se  fronce  et  que  la  trame  se  tasse  ; 
la  tapisserie  est  alors  par  endroits  comme 
désagrégée  par  disjonctions  ;  cet  effet  peut 
aussi  résulter  de  la  mauvaise  qualité  des  fils 
de  chaîne,  de  leur  rupture  pour  cause  d'hu- 
midité ou  du  fait  des  insectes. 

Une  tapisserie  peut  à  la  rigueur  être 
tissée  d'un  seul  venant  dans  toute  sa  sur- 
face, mais  dans  la  pratique  il  n'en  est  pas 
ainsi.  Pour  faciliter  au  tapissier,  en  certains 
cas,  les  changements  de  couleurs  ou  de 
dessin  on  opère  par  relais.  Le  relais  donne 
lieu  à  une  solution  de  continuité  dans  la 
trame,  à  une  fente  d'ordinaire  de  petite 
étendue.  Lorsque  la  pièce  est  enlevée  du 
métier,  on  procède  dans  un  atelier  spécial 
à  la  recherche  des  relais  et  par  coutures  on 
supprime  les  solutions  de  continuité. 

Pour  activer  la  fabrication  on  peut  tisser 
les  bordures  sur  un  métier  à  part.  Lorsque 
les  deux  parties  sont  terminées,  on  rattache 
la  bordure  à  la  tapisserie  par  rentraiture. 
La  rentraiture  est  une  sorte  d'épissure 
comme  en  font  les  marins  pour  souder  les 
fragments  d'une  corde  ;  on  pourrait  même 
la  comparer,  dans  une  certaine  mesure,  à 
la  greffe  végétale. 

Le  rentraieur  allonge,  par  des  additions, 
les  fils  de  chaîne  de  la  bordure,  les  fait 
pénétrer  dans  la  chaîne  de  la  tapisserie,  et 
les  fixe  ;  il  fait  de  même  pour  la  tapisserie 
par  rapport  à  la  bordure.  Lorsqu'une  ren- 
traiture est  bien  faite,  il  est  à  peu  près 
impossible  d'en  reconnaître  l'existence  en 
regardant  la  tapisserie  à  l'endroit  ;  il  fau- 
drait pouvoir  l'examiner  à  l'envers,  ce  qui, 
lorsqu'on  ne  commande  pas,  est  fort  malaisé, 
la  tapisserie  pouvant  être  pourvue  d'une 
doublure  ou  fixée  contre  son  support. 

On  peut  aussi  par  rentraiture  incorporer 
dans  le  champ  de  la  tapisserie,  des  pièces 
nouvelles  en  remplacement  des  morceaux 
disparus  ou  en  trop  mauvais  état. 


122 


3Rebue  tic  T^rt  rbrttîrn. 


II  est  fréquent  de  trouver  d'anciennes 
tapisseries  où  les  bordures  n'ont  pas  été 
ajoutées  par  rentraiture  mais  seulement  par 
un'e  simple  couture. 

Ceci  dit,  passons  en  revue  les  tapisseries 
et  les  bordures. 

Il  faut  remarquer  d'abord  que  la  tapisse- 
rie complète  est,  en  outre  des  bordures 
principales,  entourée  d'un  listel  et  d'une 
torsade,  et  qu'au  bas  de  la  bordure  horizon- 
tale inférieure  il  y  a  une  grecque  qui  est 
prolongée  sous  les  montantes  (voir  la  Voca- 
tion). 

Il  faut  remarquer  également  que  les 
bordures  montantes  complètes,  comme  les 
Parqiccs  de  la  Vocation,  sont  limitées  sur  les 
quatre  côtés  par  un  listel  décoré  d'un 
chapelet  d'oves. 

Si  j'insiste  sur  ces  ornements,  qui  dans 
l'ensemble  de  la  composition  sont  secon- 
daires, c'est  que  leur  absence  ou  la  façon 
défectueuse  dont  ils  sont  joints  à  la  pièce, 
prouve  les  déplacements  et  les  lacérations 
des  bordures. 

La  Mort  d'Ananie. 

Bon  état  ;  a  été  très  habilement  restaurée 
par  le  chevalier  Gentilli,  directeur  de  la 
manufacture  pontificale  de  tapisseries. 

La  bordure  les  Vertus  théologales  s'ac- 
corde avec  la  tapisserie. 

Sur  l'autre  verticale  la  photographie 
montre  les  Parques  ;  la  bande  ne  s'accorde 
pas  avec  la  tapisserie,  elle  n'a  pas  son  cha- 
pelet d'oves  et  ne  correspond  pas  exacte- 
ment avec  la  bordure  inférieure. 

La  Vocation  de  saint  Pierre. 

Le  tissu  est  resté  assez  ferme,  mais  les 
couleurs,  surtout  dans  les  draperies,  ont 
subi  de  graves  altérations. 

Deux  montantes  :  les  Parqties  et  les  Sai- 
sons ;  les  deux  bordures  cadrent  avec  la 
tapisserie. 


Saint  Paul  à  l' Aréopage. 

La  tapisserie  est  en  médiocre  état,  sur- 
tout dans  les  fonds  et  les  architectures  ;  les 
draperies  sont  moins  abîmées  ;  les  colora- 
tions sont  relativement  assez  bien  conser- 
vées. 

La  bande  Herctde  était  déjà  contre  la 
tapisserie  au  temps  de  Léon  X;  elle  est 
restée  adhérente  dans  la  partie  supérieure 
jusqu'au-dessus  du  globe  supporté  par  Her- 
cule ;  à  cet  endroit  elle  a  été  coupée.  Plus 
tard  un  morceau  enlevé  a  été  remplacé  par 
une  pièce  dont  la  coloration  est  bien  plus 
faible  dans  le  chapelet  d'oves  dont  le  bas 
a  été  remplacé  par  un  morceau  de  toile 
peinte. 

Dans  la  partie  rapportée.  Hercule  est 
d'une  bonne  facture,  mais  le  génie  qui 
tient  les  armes  de  Montmorency  est  fort 
médiocre  ;  la  pièce  est  cependant  d'un  seul 
venant.  La  différence  de  qualité  entre  les 
figures  prouve  que  le  morceau  a  été  fait 
par  deux  tapissiers:  un  habile  ^owx Hercule, 
l'autre  très  ordinaire  pour  le  Génie. 

La  bordure  inférieure  a  aussi  été  coupée  ; 
puis  mal  ajustée  :  une  partie  de  la  torsade 
a  été  refaite  à  une  échelle  plus  grande. 

Saint  Paul  et  saint  Barnabe  à  Lystre. 

Dans  cette  tapisserie,  les  figures  sont 
assez  bien  conservées,  mais  tout  le  reste 
est  en  mauvais  état. 

La  Conversion  de  saint  Paul. 

Bon  état  ;  a  été  restaurée  par  M.  Gen- 
tilli. 

Pas  de  montantes. 

La  Guérison  du  paralytique. 

C'est  la  plus  malade  de  tous  les  Actes  ; 
elle  est  dans  un  état  déplorable,  surtout 
dans  les  fonds  et  les  architectures. 

Pas  de  montantes. 

La  Pêche  miraculeuse. 

Bon  état  ;  a  été  fort  bien  restaurée  par 
M.  Gentilli. 


îLe0  ZzttQ  Dc0  3pôtre0» 


123 


Deux  montantes:  Les  Heures  et  les 
Grotcsqtces  n°  i. 

J'ai  déjà  fait  remarquer  que  les  Heures 
étaient,  par  Bunsen  et  les  autres  auteurs, 
attribuées  à  \ Aréopage  ;  il  est  probable 
qu'elles  ont  été  contre  cette  tapisserie,  mais 
elles  n'y  sont  plus  et  s'accordaient  mal  avec 
\ Aréopage  ne  reposant  pas  sur  la  grecque. 
Les  Grotesques  (n"  i)  étaient  simplement 
clouées  ;  le  raccord  de  la  pièce  avec  l'ins- 
cription relative  au  connétable  de  Mont- 
morency est  mal  joint. 

La  Lapidation  de  saint  Etieiine. 

Assez  bon  état  relativement. 

Pas  de  montantes. 

Saint  Paul  en  prison. 

Etat  médiocre. 

Pas  de  montantes,  la  tapisserie  n'en 
comportant  pas. 

Elymas  frappé  de  cécité  était  placée  hors 
de  la  galerie  au-dessus  de  la  porte  des 
cartes  géographiques.  La  moitié  supérieure, 
qui  seule  est  conservée,  est  en  bon  état. 

Pas  de  bordures. 

J'ai  indiqué  sommairement  l'état  des 
Actes,  ne  pouvant  ici  entrer  dans  des  dé- 
tails de  métier  ;  en  général,  sauf  dans  les 
pièces  restaurées  par  M.  Gentilli,  les  re- 
lais ont  besoin  d'être  repris  et  les  autres 
coutures  remplacées  par  des  coutures  nou- 
velles ;  il  est  visible  que  les  tapisseries  ont 


I    été  déjà  recousues,  mais  on  a  travaillé  avec 
:    négligence  et  avec  du  fil  mauvais  teint. 

La  chaîne,  en  bien  des  endroits,  doit  être 
!    renouvelée,  et  il  y  a    même  des  morceaux 
qui  devraient  être  refaits  entièrement  par 
I    rentraiture. 

J'ignore   les    intentions    du  Vatican  sur 
I    cette  question  de  réparations;  à  la  rigueur 
on   peut   pour  le  moment  se  borner  à  des 
consolidations  par  coutures. 

En  somme,  quoique  le  mal  soit  grand  il 
n'est  pas  irréparable,  et  la  preuve  en  est 
dans  le  travail  accompli  par  M.  Gentilli 
sur  la  Pêche,  la  Conversion  et  Ananie. 

Les  bordures  exigent  une  attention  par- 
ticulière :  plusieurs  sont  en  très  mauvais 
état  ;  quelques-unes  ne  correspondent  pas 
en  hauteur  avec  les  tapisseries  ;  le  travail 
ne  présente  aucune  difficulté  sérieuse. 

Je  me  résume. 

Sans  me   laisser   éblouir   par  les  grands 

I    noms  de  Raphaël  et  de  Léon  X,  et  en  ju- 

(    géant  les  Actes  des  Apôtres  tant  au  point 

de  vue  de  leurs  fonctions  décoratives  qu'à 

celui  de  la  technique,  j'estime  que  la  tenture 

ne  mérite  pas  les  éloges  qu'on  lui  décerne  ; 

on  a  mieux  fait  au  XV  L  siècle. 


Gerspach. 


Florence,  rgoo. 


REVUE   DE    L  ART  CHRÉTIEN. 
1901.    —    2'"'^    LIVRAISON. 


ë 


?<feV  A-CJ^  >M-A  A^V:^  A^X  A^^  a"^  A^VC  A-^^  A^^  A^  a  ^^*  A^yU  A^-A  A^^  A^^  ^^ 


ITTTTTIXIIIIJirTIXIJXriYTITIIIITTTI^ITriXII^ITTTTTTTTIIXIIIIIIJXIlJXIIIJIIXXIIJXlIlIJIIXIIXXII^ 


lies  peintures  Des  maîtres  iiuonnus. 


Tableau  attribué  à  Roger  Van  ùer  Wepden. 


I 


Sfe  V>^  *sé"*  '^^  ''S:''  ^A^*  ^^*l-^  *-4i^  ''S''  ^^-^  ^iil-'^  ^i^  ^iè^'f  ^^^'f  *.iî^  ^iÔ^Â^ 


^gï^îtttt^  E  beau  tableau  que  nous 
reproduisons  en  tête  de 
cette  notice,  vendu  au 
commencement  du  siè- 
cle dernier  comme  une 
oeuvredeJeanvanEyck, 
a  été  attribué  par  son 
acquéreur,  le  baron  van  Keverberg  van  Kes- 
sel, à  Memling,  attribution  qui  a  été  mainte- 
nue pendant  de  longues  années  après  que,  en 
1 827,  letableau  fut  acquis  par  le  roi  des  Pays- 
Bas  (').  Le  D'"  Waagen  l'ayant  examiné  en 
1860  l'attribua  à  Roger  van  der  Weyden("). 
Depuis  ce  temps  l'attribution  a  été  conser- 
vée, notamment  dans  le  catalogue  (n°55) 
du  musée  de  La  Haye.  En  1893,  M.  A.  J. 
Wauters,  dans  ses  Éludes  pour  servir  à 
l'histoire  de  Memling  (f),  le  mentionne 
comme  un  panneau  important  de  ce  maître, 
et  prétend  que  c'est  l'œuvre  inscrite  dans 
un  inventaire  de  l'église  de  Middelbourg  en 
Flandre, dressé  en  1653,  comme«  un  tableau 
représentant  iJ/rt;7'zV,yt^x«i-  avec  saint  Pierre 
et  saint  Pault-  Il  se  demande  si  ce  ne  serait 
pas  là  le  tableau  offert  à  l'église  par  son  pa- 
tron spirituel,  l'abbé  miiré  de  Saint-Bavon. 
M.  Kaemmerer,  trompé  par  Wauters,  dit  ('') 
qu'il  provient  apparemment  de  Middel- 
bourg, mais  il  n'accepte  pas  son  attribution  à 

1.  Le  i"  octobre  1827,  au  prix  de  2,000  florins.  Nous 
devons  ce  renseignement  à  l'obligeance  du  savant  direc- 
teur delà  Galerie,  M.  C.  Hofstede  de  Groot. 

2.  Handhook  of  Painting,  pp.  69.  London,  1860. 

3.  Sept  Études,  Bruxelles,  1893,  p.  38.  Il  est  regrettable 
que  M.  Wauters  n'a  pas  donné  le  texte  exact  de  cette 
mention.  Ne  serait-ce  pas  une  traduction,  et  le  tableau 
dont  il  est  question  ne  représenterait-il  pas  Notre-Dame 
entre  les  deux  saints  apôtres,  patrons  de  l'église  de  Mid- 
delbourg ? 

4.  Memling,  pp.  11  et  14.  Bielefeld,  1899. 


Memling  de  ce  panneau;  il  le  croit  l'œuvre 
d'un  inconnu  qui  aurait  Heuri  entre  ce  maî- 
tre et  Van  der  Weyden.  Or  ce  tableau  doit 
avoir  été  peint  dans  les  dix  premières 
années  du  X  V  P  siècle.  Le  prélat,  qui  y  est  re- 
présenté à  genoux,  est  un  luxembourgeois, 
Nicolas  Le  Ruistre,  prévôt  de  l'église 
Saint-Pierre  à  Louvain,  chanoine  de  Ter- 
monde,  et  archidiacre  de  Bruxelles  ;  il  fut 
sacré  évêque  d'Arras  en  150 1,  et  décéda  à 
Malines,  le  9  novembre  1509.  Il  a  fondé 
dans  cette  dernière  année  le  Collège  d'Arras 
à  Louvain,  et  ce  tableau  ornait  l'autel  de  la 
chapelle  de  cette  institution  jusqu'à  sa  sup- 
pression. 

Peinte  sur  un  panneau  de  chêne  qui  a 
78  centimètres  de  haut  sur  1  mètre  29  cen- 
timètres de  large,  la  composition  représente 
la  Déposition  du  Christ,  avec  le  donateur 
protégé  par  les  saints  apôtres  Pierre  et  Paul. 

La  scène  se  passe  au  pied  du  Calvaire  ; 
le  montant  de  la  Croix  s'élève  au  milieu 
sur  un  monticule  rocailleux  ;  à  droite  se 
trouve  la  partie  inférieure  de  l'échelle  au 
moyen  de  laquelle  la  descente  du  corps  du 
Christ  a  été  faite  par  Joseph  d'Arimathie  et 
Nicodème. Ceux-ci,  le  portant  sur  un  linceul, 
le  déposent  à  terre  au  premier  plan,  Joseph 
le  soutenant  encore  sous  les  bras  avec 
une  tendre  sollicitude.  A  gauche  du  Christ, 
la  Sainte  Vierge,  plongée  dans  la  plus  pro- 
fonde douleur,  l'adore  en  se  penchant  en 
avant  ;  elle  est  soutenue  par  saint  Jean  qui 
se  tient  debout  à  sa  droite.  Derrière  Joseph, 
une  des  saintes  femmes,  le  bras  gauche  posé 
sur  l'échelle,  les  mains  jointes  et  comme 
crispées,  paraît  accablée  par  la  douleur  ; 
une    autre    des  saintes  compagnes  de  la 


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iles  peintures  ties  maîtres  inconnus. 


12: 


Vierge,  à  genoux,  la  main  sur  la  poitrine, 
détourne  la  tête.  A  l'extrême  droite,  un  peu 
en  arrière,  sainte  Marie-Madeleine,  debout, 
essuie  ses  larmes  avec  son  manteau.  A 
gauche,  Nicodème,  debout,  la  tête  appuyée 
sur  la  main  droite,  tient  encore  l'extrémité 
du  linceul.  A  l'avant-plan,  le  donateur  à 
genoux,  revêtu  des  ornements  pontificaux, 
chape  en  brocart  de  velours  cramoisi  et 
or  avec  orfrois  historiés  des  figures  des 
apôtres,  maintenue  par  une  bille  en  or 
ornée  de  la  statuette  de  Notre-Dame 
tenant  l'Enfant  entre  les  bras  adoré  par 
deux  anges.  L'évêque  est  coiffé  d'une  mitre 
blanche  enrichie  de  pierreries,  et  porte  des 
gants  avec  deux  anneaux  sur  le  premier  et 
le  cinquième  doigts  ;  sa  crosse  est  posée 
contre  son  épaule  droite.  Derrière  lui  saint 
Pierre  et  saint  Paul  tenant  les  clefs  et  le 
glaive  qui  les  caractérisent.  —  Le  fond  est 
un  paysage  charmant,  où  l'on  voit  des  che- 
mins serpentant  entre  des  arbres,  animés  de 
cavaliers  et  de  piétons,  un  château  entouré 
d'eau  où  nagent  des  cygnes  ;  au  lointain, 
à  droite, une  ville  avec  plusieurs  tours,  et  à 
l'extrême  gauche,  sur  une  colline,  un  grand 
pigeonnier. 


La  composition  de  ce  tableau  est  excel- 
lente ;  les  figures,  groupées  avec  un  talent 
supérieur,  rappellent  à  certains  égards  Ro- 
ger, mais  le  peintre,  tout  en  variant  les 
expressions  de  la  douleur,  a  évité  les  mou- 
vements exagérés  qui  déparent  parfois  les 
fipfures  dans  les  tableaux  où  le  maître  tour- 
naisien  a  traité  le  même  sujet  ;  la  touche 
est  aussi  plus  moelleuse,  les  contours  moins 
durs,  les  draperies  mieux  jetées,  avec  moins 
de  plis  anguleux  ;  certains  détails,  tels  que 
la  fourrure  de  la  femme  auprès  de  l'échelle, 
rappellent  Quentin  Metsys.  Le  paysage 
fait  penser  à  Thierry  Bouts,  mais  le  coloris 
semble  plutôt  avoir  été  inspiré  par  l'étude 
des  œuvres  de  Jean  van  Eyck  et  de  Pierre 
Cristus.  Il  serait  à  désirer  qu'on  retrouve 
le  nom  du  peintre,  bien  probablement  men- 
tionné dans  le  compte  des  exécuteurs 
testamentaires  de  Nicolas  Le  Ruistre,  ou 
dans  un  inventaire  du  mobilier  du  Collège, 
très  probablement  conservé  dans  l'un  ou 
l'autre  dépôt  d'archives. 

W.-H    James  Weale. 


;S&y  ;w^»k  »^v^  iMn  A^-A  iJ^U  A^vlhc  A^^r^  A^vihc  »^^  a'^-vc  Jt^v^  a"^  A^A^v-k  \^yU  »<g 


(|^  Bra0  reliquaire  a  vtçim  BtXlitolaQ  dc  Valenctennes. 


rriirînriiiiiiTj'mmuT 


§ 

'  -f^^  ^Af5-^  V>*  *;i5''  *i*'>^  *x*^  VJ^  VJ-*  ^x^  ^xiT^  'x^l*  ^y^t^  'i^'*  'x'-J''  *^^ 


fe 


n  était  pas  nécessaire  | 
aux  artisans  du  moyen 
âge  d'employer  des  ma- 
tières premières  rares 
ou  coûteuses  pour  pro- 
duire de  véritables  ob- 
jets d'art  ;  des  éléments 
les  plus  simples  ils  tiraient  les  effets  les 
meilleurs.  C'est  là  une  observation  que  l'on 
a  faite  bien  des  fois  déjà  et  qui  trouve 
dans  le  bras-reliquaire  de  l'église  Saint- 
Nicolas,  à  Valenciennes,  une  nouvelle  et 
exacte  confirmation. 

Ce  reliquaire  se  compose  d'une  âme  en 
bois  de  chêne,  longue  d'environ  o.'"-35c., 
figurant  assez  sommairement  un  avant-bras 
revêtu  d'une  manche,  plus  large  vers  le 
coude,  plus  étroite  vers  le  poignet  et  dont 
la  section  donne  un  ovale  aminci  vers  la 
partie  externe  du  bras.  Des  traces  nom- 
breuses d'une  peinture  rouge  montrent  que 
jamais  le  bras  ne  fut  entièrement  recouvert 
de  métal  ;  des  applications  de  cuivre  en  font 
toute  la  décoration. 

Trois  bandes  de  cuivre  cerclent  le  bras 
au  milieu  et  aux  deux  extrémités  ;  mainte- 
nues entre  elles  par  deux  autres  bandes 
verticales,  elles  circonscrivent,  sur  chaque 
face,  deux  espaces  carrés  qui  laissent  place 
à  d'autres  ornements. 

Ces  bandes,larges  de  o.'"03c-,ont  été  fon- 
dues, retouchées  habilement  au  ciseau  et 
dorées.  Entre  leurs  bords  extérieurs  laissés 
nus  et  le  long  desquels  apparaissent  sans 
aucune  dissimulation  les  clous  qui  les  fixent 
au  bois,  se  détache,  en  un  très  léger  relief 
accentué  par  le  ciseau  et  sur  un  fond  fine- 
ment quadrillé  de  hachures  serrées  et 
profondes,  toute  une  suite  de  figures  de  la 
plus  amusante  variété:  des  têtes  d'animaux 


bizarres,  d'hommes  encapuchonnés,  de 
femmes  voilées,  de  chevaliers  coiffés  de 
heaumes  surmontant  des  corps  d'oiseaux 
à  pattes  de  quadrupèdes  terminés  par  des 
queues  extraordinaires,  ou  même  par  une 
autre  tête  plus  ou  moins  grimaçante.  Entre 
chacun  de  ces  curieux  petits  monstres  ont 
été  réservés  des  espaces  circulaires,  que 
viennent  recouvrir  des  cabochons  de  diffé- 
rentes grandeurs.  Les  pierres  ne  sont  guère 
que  des  verroteries  bleues  ou  violettes  :  ce- 
pendant, à  la  face  principale  du  bras,  on  a 
employé  quatre  intailles  antiques:  une  tête 
fruste,  une  louve,  un  Bacchus,  un  paysan 
portant  un  enfant  dans  une  hotte;  ces  deux 
dernières  sont  d'un  travail  assez  fin. 

La  bande  supérieure  dépasse  légèrement 
l'âme  de  bois  et  protège  le  fond  du  reliquaire 
couvert  d'une  plaque  de  cuivre  gravé  :  un 
losange  inscrit  dans  un  quatrefeuille  encadre 
une  figure  de  moine  assis  —  un  bénédictin 
semble-t-il  —  bien  drapé  dans  un  froc  aux 
plis  nombreux  et  soufflant  dans  une  buisine. 
Des  arbrisseaux  très  stylisés  remplissent 
symétriquement  les  vides  compris  entre  les 
lobes  du  quatreft  jille  et  les  angles  du  losan- 
ge qui  les  pénètre.  Comme  ce  motif —  dont 
l'ordonnance  générale  s'inscrit  dans  un  cer- 
cle — -  ne  saurait  suffire  à  décorer  toute  la 
surface  de  la  plaque,  un  trèfle  formé  de  trois 
ovales  garnis  de  feuillages  complète  la  com- 
position, dont  le  dessin  correct,  rendu  par 
des  traits  continus,  ressort  en  réserve  sur 
un  fond  strié  de  lignes  brisées  très  rappro- 
chées. 

De  la  bande  supérieure  à  laquelle  il 
adhère  en  un  point  de  son  pourtour,émerge, 
pour  figurer  le  poignet,  un  cercle  de  cuivre 
orné  de  cannelures  horizontales  et  surmonté 
d'une  plus  étroite  bande  rehaussée  de  cabo- 


Bra0'reltquane  à  l'égïise  ^t  il^tcolas  De  lîalenctennes. 


127 


chons.  Cette  sorte  de  douille  servait  à  fixer 
la  main  bénissante  ;  par  ce  côté  aussi  étaient 
introduites   des  reliques  disparues  aujour- 


d'hui, mais  dont  1  enumération  se  lit  dans 
une  inscription  placée  d'une  manière  assez 
particulière  :  elle  est  gravée  au  revers  d'un 


128 


jRrtuc  ïic  r^vt  cbvctieu. 


des  ornements  plaqués  au  milieu  des  espaces 
carrés  formés  par  l'intersection  des  bandes 
de    cuivre. 

On  peut  comparer  ces  ornements  aux 
reliquaires  portatifs  désignés  sous  le  nom 
àç.  phylactères  ;  ils  en  ont  l'apparence  :  dans 
une  lame  de  cuivre  quadrilobée  aux  bords 
repoussés  en  biseau,  on  a  tracé  quatre  cer- 
cles ;  l'intérieur  évidé  de  chacun  d'eux 
entoure  une  série  de  petites  arcatures  trilo- 
bées découpées  comme  une  rose  sans  rayons. 
Des  pierres  montées  lourdement,  comme 
toutes  celles  qui  entrent  dans  la  composition 
du  reliquaire,  rehaussent  également  le  cen- 
tre de  l'ornement  et  d'autres  points  de  sa 
surface. 

Une   mince  feuille   de  cuivre  appliquée 
contre  le  bois  fait  un  fond  et  donne  l'illusion 
d'un  travail  fondu  ou  ciselé  dans  une  masse 
pleine.  Au  phylactère  supérieur  de  la  face 
principale,    cette   lame,  parce   qu'elle  peut 
devenir  visible   tout  entière,  a    été  nette- 
ment découpée  en  un  quatrefeuille  relevé 
de  quelques  dessins  très  simples  ;  elle  est 
percée  en  son  centre  d'une  ouverture  qua- 
drilobée. A  cette  place  sans  doute  on  baisait 
les  reliques,  —  sans  rien  en  voir  d'ailleurs, 
—  car  ce  simulacre  d'ouverture  ne  commu- 
nique nullement  avec  la  cavité  intérieure  : 
ce  n'est  pas  un    morceau  de   verre    qui  la 
recouvre,  mais  seulement  un  fragment  très 
usé  d'une   étoffe  de  velours  rouge  (').   Sur 
cette  feuille,  avec  laquelle  il  coïncide  exacte- 
ment, un  ornement  de  tous  points  semblable 
aux  trois  autres,  se  rabat  avec  une  charnière 
et  se  fixe  par  une  goupille,  l'une  et  l'autre 
pratiquées  sur  la  tranche  des  deux  bandes 
verticales.  Pour  donner  plus   de   rigidité  à 
ce  couvercle  mobile,  on  l'a  renforcé  d'une 

I.  La  présence  d'un  tissu  à  cette  place  mieux  protégée 
pourrait  faire  croire  que  tout  le  bois  avait  été  recouvert 
d'étoffe,  mais  on  n'en  distingue  aucune  autre  trace  sous 
les  bandes  ou  applications  métalliques. 


lame  de  cuivre  dont  la  surface  lisse  s'est 
trouvée  très  propre  à  recevoir  une  inscrip- 
tion conçue  en  ces  termes  : 

De  le 
Coulombe  u 
Diex  ^  fu  loiés 
Dou  brac.  S.  Lo- 
renc.  De  le  piere 
sour  coi  li  sains  Jhesu-Cri- 
st  kei  (').  Dou  brac.  S.  Bertrem- 


^CnFl 


ieu.  Dou  brac.  S.  Phelipe.  De.  S. 
Andriu.  De  se  crois.  De  S.  Ni- 
caise.  Dou  sépulcre  Nost- 
re  Sign  \eur'\.  De  le  Magdel- 
aine.  Des  d- 
ras  Nostr- 
e  Dame. 


I.  De  la  pierre  sur  quoi  le  sang  de  J.  C.  chut.  Dans  le 
voyage  bien  connu  de  Bernard  de  Breidenbach,  édition 
imprimée«/>^^  Erluudumde  Rcuiuididc  Traiecto inferiori 


Bras  reliquaire  à  VtQiist  ^t-iBicolas  tie  31laleiictennej&. 


129 


Les  formes  dialectales  de  cette  inscrip- 
tion, que  sa  rédaction  en  langue  vulgaire 
rend  plus  intéressante  encore,  permettent 
d'attribuer  à  la  Flandre  wallonne  ou  au 
Hainaut  la  fabrication  du  reliquaire.  Il 
serait  téméraire  de  préciser  davantage.  A 
la  vérité,  pour  se  procurer  les  parcelles  des 
nombreuses  reliques  énumérées  plus  haut, 
il  aurait  suffi  de  s'adresser  aux  églises  et 
couvents  de  Valenciennes  dans  l'ensemble 
desquels,  —  différents  inventaires  le  mon- 
trent, —  on  aurait  pu  trouver  la  plupart  des 
éléments  de  cette  collection. Toutefois  aucun 
document  ne  fait  mention  de  ce  bras-reli- 
quaire. Il  était  relégué  dans  une  armoire  ; 
depuis  plusieurs  années  la  main  qui  le  ter- 
minait avait  été  vendue  à  un  brocanteur, 
parce  qu'elle  était  d'ivoire,  à  ce  que  l'on 
rapporte.  Un  savant  ecclésiastique,  M.  le 
D>'  Desilve,  le  découvrit  par  hasard  et  en 
fit  connaître  la  valeur  au  clergé  de  St- 
Nicolas  ('). 

Comment  est-il  arrivé  dans  cette  église  ? 
D'où  provient-il  .■*  On  ne  sait;  St-Nicolas, 

in  civitate  Moguntina,  anno  salutis  M.   CCCC 

LXXXVI  Februarii  >,  au  bas  d'une  gravure  remarqua- 
blement exacte  pour  l'époque  et  qui  représente  le  parvis 
de  l'église  du  Saint-Sépulcre,  se  trouve  cette  légende  : 
Ante  templum  sepiilchri  domini  localus  est  lapis  iste 
super  quo  Christus  crucem  bajulans  cecidit.  Quelques 
pages  plus  loin,  au  chapitre  De  egrcssti  ex  templo 
dominici  sepulchri,  on  lit  :  Item  ante  tempbtm  ad 
decem  passus  est  lapis  quidam  positiis  in  signum  qiiod 
Christus  ibi  crucem  bajulans  pre  amentia  et  debilitate 
cecidit  in  terra  sub  cruce.  Alius  quoque  tapis  ostenditur 
ptope  murum'  qui  adhuc  sanguinis  Clirisli  vestigia  et  in- 
signia  prefert.  C'est  sans  doute  de  cette  dernière  qu'il  est 
question  ici. 

I. Mentionné  par  Mgr  Dehaisnes,Z,£  Nord  monumental, 
p. 133,  il  avait  été  signalé  déjà  dans  la  Gasette  des  Beaux- 
Arts,  1875,  t.  XI,  P-  156-  Exposition  de  Lille,  pur  A.Dar- 
cel,  qui  en  attribue  la  possession  à  l'église  StNicolas 
d'Arras. 


érigé  en  paroisse  lors  du  Concordat,  était 
autrefois  l'église  du  Collège  des  P  P.  Jésuites  ; 
si  un  tel  objet  était  venu  en  la  possession  de 
ces  religieux,  ils  en  auraient  probablement 
enlevé  les  reliques  pour  les  transférer  dans 
quelque  vase  plus  conforme  au  goût  de  leur 
temps  que  ne  l'était  ce  travail  de  bois  et  de 
cuivre  dont  il  n'y  avait  rien  à  tirer  une  fois 
qu'il  était  hors  d'usage.  C'est  même  à  son 
peu  de  valeur  intrinsèque  qu'il  a  dû  sans 
doute  d'échapper  aux  brise-images  des 
XVIe  et  XVI I  le  siècles  et  d'arriver  jusqu'à 
nos  jours,  à  peu  près  intact  depuis  le  milieu 
du  XI I  le.  On  peut,  en  effet,  malgré  un  carac- 
tère d'archaïsme  dû  à  la  présence  des  cabo- 
chons, et  si  l'on  en  juge  d'après  différents 
détails  dans  les  dessins  et  l'inscription,  faire 
descendre  à  cette  époque  la  composition  du 
reliquaire  de  St-Nicolas. 

Assurément  ce  n'est  pas  un  chef-d'œuvre. 
Bien  que  dans  le  fini  des  gravures  et  la 
correction  du  dessin,  on  retrouve  quelques- 
unes  des  qualités  qui  signalent  des  travaux 
remarquables  exécutés  dans  la  réeion  au 
même  temps,  il  faut  avouer  que  la  monture 
en  est  très  peu  soignée  —  on  croirait  même 
qu'il  a  été  remottté  par  des  mains  inhabiles. 
La  décoration  toute  profane  n'a  guère  de 
rapport  avec  l'objet  et  ses  fantaisies  seraient 
aussi  bien  à  leur  place  pour  bander  un 
coffret  ou  cercler  un  oliphant  :  de  tels  mo- 
dèles devaient  être  d'un  emploi  courant 
dans  l'atelier  où  fut  exécuté  à  peu  de  frais 
ce  reliquaire  «  de  fabrication  économique  », 
mais  d'aspect  très  décoratif. 

Louis  Serbat. 


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fe 


Quelques  observations  sur  le 
''  ffiemling  "  De  ffi.  Jï.  lïacmmerer. 

|E  volume  sur  Memling  publié  par 
M.  L.  Kaemmerer  a  déjà  fait  le  sujet 
d'une  notice  dans  cette  Revue.  Cette 
publication  est  certes  la  meilleure  et 
la  plus  complète  de  toutes  celles  qui  ont  paru 
sur  ce  maître; cependant  elle  renferme, outre  des 
attributions  et  des  appréciations  discutables,  un 
certain  nombre  d'assertions  dont  je  crois  utile, 
dans  l'intérêt  de  l'histoire,  de  démontrer  l'inexac- 
titude. 

M.  Kaemmerer  (p.  70)  dit  que  les  deux  pan- 
neaux appartenant  autrefois  au  poète  Rogers, 
ensuite  à  M.  Vernon  Smith  et  faisant  actuel- 
lement partie  de  la  collection  de  M.  Kahn  à 
Paris,  sont  les  volets  du  tableau  donné  en  1478 
par  le  miniaturiste  Guillaume  Vrelant  à  la  Gilde 
de  Saint-Jean  et  de  Saint-Luc  à  Bruges,  pour 
orner  l'autel  de  la  chapelle  de  cette  corporation 
dans  l'église  abbatiale  de  Saint-Barthélemi  dite 
del'Eeckhout.U  assure  (p.  97 j  que  c'est  par  erreur 
que  le  tableau  de  la  Passion  de  Notre-Seigneur, 
actuellement  dans  la  Galerie  royale  de  Turin, 
passe  pour  être  le  tableau  donné  par  Vrelant, 
tandis  qu'il  est,  au  contraire,  celui  qui  se  trouvait 
dans  la  possession  de  Côme  de  Medicis  (p.  96). 
Il  est  à  remarquer  tout  d'abord  qu'un  seul 
tableau  fut  donné  par  Vrelant,  et  que  sur  ce 
tableau  était  peint  son  portrait  et  celui  de  sa 
femme.  Les  anciens  de  la  Gilde  se  réunirent  chez 
Vrelant  en  1478,  et  là  ils  firent  un  accord  avec 
Memling  pour  la  peinture  des  volets  intérieurs 
destinés  a  protéger  le  tableau.  Celui-ci  fut  en- 
cadré aux  frais  de  la  Gilde  qui  paj'a  cinq  escalins 
de  gros  au  menuisier  la  confection  du  cadre  et 
des  volets  qui  furent  remis  à  Memling,  lequel 
reçut  quatre  livres  deux  escalins  de  gros  en 
rémunération  du  travail,  qui  l'occupa  pendant 
deux  ans.  La  Gilde  fît  faire  ensuite  deux  autres 
volets  extérieurs  pour  protéger  les  premiers  qui 
doivent  avr)ir  été  peints  des  deu.x  côtés.  En 
1480,  le  polyptyque  était  placé  sur  l'autel  ;  en 


1490,  le  tableau  et  les  deux  volets  furent  nettoyés 
et  revernis,  aux  frais  de  la  Gilde  ;  à  cette  oc- 
casion, le  doyen  de  la  Gilde,  Arnould  Basekin,  et 
le  relieur,  Jean  Le  Clerc,  firent  peindre  en  gri- 
saille, à  leurs  frais,  les  figures  de  saint  Arnould 
et  de  saint  Nicolas  sur  la  face  des  volets 
extéiieurs. 

Dans  un  inventaire  du  mobilier  de  la  Gilde, 
dressé  en  1619,  le  tableau  de  Memling  est  appelé 
le  tableau  des  Douleurs  de  la  sainte  Vierge. 
Cette  même  année, la  Gilde  fit  peindre  un  tableau 
d'autel  à  la  mode  du  jour  par  Guibert  Janssens 
au  prix  de  16  livres  de  gros  ;  c  est  alors  que  le 
tableau  de  Memling  fut  placé  contre  le  mur 
latéral  de  la  chapelle.  En  1624,  il  fut  vendu  afin 
de  faire  place  à  un  buffet  d'orgues.  J'ignore  quel 
en  fut  l'acquéreur,  mais,  en  1637,  Pierre  van 
Nieuwmunster  et  Hélène  van  Crombrugge,  sa 
femme,  en  firent  faire  une  copie  légèrement 
agrandie.  L'original,  exporté  du  pays,  fut  donné 
au  couvent  des  Frères  Prêcheurs  à  Bosco  près 
d'Alexandrie  dans  le  Piémont.  Lors  de  l'inva- 
sion de  l'Italie  par  les  Républicains  français,  il 
échappa  heureusement  au  pillage,  et,  pins  tard, 
fut  acquis  par  le  roi,  qui  le  plaça  dans  la  Galerie 
royale  où  il  se  trouve  encore. 

Je  ferai  encore  remarquer  une  particularité 
qu'offrent  les  panneaux  de  la  collection  Kahn 
(Kaemmerer,  p.  47),  c'est  le  portrait  de  la  dame 
peint  sur  le  volet  de  droite  ;  celle-ci  devait  se 
nommer  Anne,  et  elle  est  bien  plus  âgée  que 
l'homme  représenté  sur  le  volet  gauche,  qui  doit 
être  le  portrait  de  son  fils.  Vrelant  était  déjà 
établi  comme  miniaturiste  avant  1454  et  fut  un 
de  ceux  qui,  cette  année,  se  constituèrent  en 
Gilde  ;  il  mourut  le  jour  de  saint  Boniface, 
5  juin  i4Si,sa  femme  lui  survécut  jusqu'en  1494. 

A  la  page  1 10,  M.  Kaemmerer,  parlant  du  por- 
trait de  Marie  Morccl,  plus  connu  sous  le  nom 
de  la  Sibylle  Sambetha,  qui  lui  est  donné  depuis 
le  XVI«  siècle,  dit  qu'elle  est  revêtue  du  costume 
des  sœurs  de  l'hospice  Saint- Julien  et  que  sa 
mère,  la  femme  du  riche  banquier  et  bourg- 
mestre, Guillaume  Moreel,  se  mit  aussi  au  ser- 
vice de  cette  institution.  M.  Kaemmerer  doit  se 


£©élanges. 


131 


faire  une  idée  singulière  de  la  vie  des  sœurs  qui 
se  consacraient  aux  soins  à  donner  aux  pèlerins 
et  à  quêter  des  aumônes  en  faveur  de  l'hospice. 
Du  reste,  le  Règlement  du  7  septembre  1331, 
qui  était  encore  en  vigueur  en  1600,  leur  prescrit 
un  habit  blanc  et  gris;  tandis  que  cette  demoiselle 
porte  une  robe  garnie  de  fourrure,  une  coiffure  à 
la  mode  du  jour  et  orne  son  costume  d'un  riche 
joyau  suspendu  à  une  chaîne  d'or,  et  ne  porte  pas 
moins  de  six  bagues  à  ses  doigts.  A  la  page  i  iS, 
nous  lisons  que  Martin  van  Nieuvvenhove,  de 
même  que  Guillaume  Moreel,  fut  tuteur  de  cet 
hospice,  auquel  il  donna  comme  souvenir  de  son 
administration  le  diptyque  actuellement  conservé 
l'hôpital  Saint-Jean.  La  liste  complète  des  tu- 
teurs de  cette  institution,  conservée  aux  archives 
des  Hospices  civils,  démontre  que  ni  l'un  ni 
l'autre  de  ces  deux  hommes  n'ont  rempli  ces 
fonctions.  Nous  croyons  que  le  diptyque  était 
primitivement  placé  dans  la  chapelle  de  chan- 
trerie  de  la  famille  à  l'église  Notre-Dame,  et 
qu'il  a  été  transporté  à  l'Hospice  Saint-Julien 
en  1579.  pour  l'y  mettre  à  l'abri  des  iconoclastes. 
Il  est  possible  toutefois  que  Jean  van  Nieuwen- 
hove,  fils  de  Martin,  le  donnât  à  l'Hospice  dont 
il  fut  tuteur  en  1505- 1506. 

Le  saint  à  la  droite  de  saint  Christophe  n'est 
pas  saint  Benoît  (p.  116),  mais  bien  saint  Maur, 
et  la  fille  aînée  du  donateur  ne  porte  pas  le  cos- 
tume des  sœurs  de  l'hôpital  Saint-Jean,  mais 
l'habit  dominicain.  Le  saint  qui  protège  la  femme 
de  Jacques  Floreins  n'est  certainement  pas  saint 
Benoit, mais  probablement  saint  Dominique.  Le 
tableau  reproduit  à  la  page  1 1  ne  provient  pas 
de  l'église  de  Middelbourg,  mais  bien  de  la  cha- 
pelle du  Collège  d'Arras  à  Louvain,  ainsi  que  je 
l'ai  démontré  dans  un  article  précédent  de  cette 
livraison. 

Ce  n'est  pas  le  frère  Jean  Floreins  qui  remplit 
les  fonctions  du  jaugeur  de  vin  auprès  de  la 
Grue,  au  fond  du  tableau  du  maitre-autel  de 
l'hôpital  Saint-Jean,  mais  le  frère  Josse  VVillems, 
maître  de  Ihôpital  depuis  l'année  1475  jusqu'en 
1488.  Cette  erreur  a  sa  source  dans  la  «  Notice 
sur  les  tableaux  du  Musée  de  l'Hôpital  »,  publiée 
par  M.  le  vicomte  de  Croeser,  administrateur  de 
cette  institution. 

Il  n'est  peut-être  pas  inutile  de  relever  encore 


quelques  légères  erreurs  qui  se  sont  glissées, 
probablement  par  inadvertance:  pp.  30-3  i,  il  faut 
lire  Barbe  au  lieu  de  Katherine  et  Katherine 
pour  Barbe  ;  p.  40,  prince-évêque  pour  arche- 
vêque de  Liège;  p.  122,  Kerniel  dans  la  pro- 
vince belge  de  Limbourg,  pour  Limbourg  ; 
p.  107,  Anne  de  Blasere  fut  la  femme  de  Jean, 
fils  de  Michel  van  Nieuwenhove,  dont  Martin 
était  le  fils  aîné. 

Une  question  assez  importante  est  soulevée 
par  M.  Kaemmerer  (p.  14)  ;  il  dit,  en  effet,  qu'en 
1459  il  y  avait  au  service  de  Roger  de  In  Pastiire 
à  Bruxelles  un  jeune  peintre  nommé  «  Hayne  », 
qui  peignit  l'extérieur  des  volets  d'un  retable 
livré  par  Roger  à  l'église  Saint-Aubert  à  Cam- 
brai. M.  Kaemmerer  remarque  que  dans  le  pays 
rhénan  le  diminutif  «  Henné  »  était  fréquem- 
ment employé  au  XV=  siècle  comme  diminutif 
de  Hans,  et  que  «  Hayne  »  en  est  l'équivalent 
phonétique  français.  Je  dois  faire  remarquer 
d'abord  que  l'interprétation  du  passage  dans  les 
Mémoriaux  de  l'abbé  Jean  Robert,  est  tout  à 
fait  fausse.  D'abord,  le  peintre  Hayne  ne  peignit 
pas  l'extérieur  des  volets,  mais  seulement  le 
cadre,  le  couronnement  et  la  boiserie  qui  séparait 
le  retable  des  stalles  du  chœur,  et  qu'il  fit  ce 
travail  non  pas  pour  Roger,  mais  à  la  demande 
de  l'abbé  (').  Ensuite,  chose  plus  importante  à  re- 
marquer, ce  Hayne  n'était  aucunement  au  service 
de  Roger,  mais  un  jeune  peintre  de  Bruxelles, 
qui  habitait  Valenciennes  depuis  1454,  et  qui,  au 
cours  de  cette  année,  peignit  pour  la  fabrique  de 
la  cathédrale  de  Cambrai,  «  xij  ymages  de  Nostre 
Dame  à  couleur  d'oie  et  bien  estoffées  »,  au  prix 
d'une  livre  la  pièce. 

Si  donc  ce  Hayne  est  bien  Hans  Memlinc,  il 
doit  avoir  quitté  Bruxelles  en  1454,  ou  avant 
cette  date,  pour  se  rendre  à  Valenciennes.  Là, 
dans  ces  quatre  ans,  il  doit  avoir  connu  Simon 
Marmion,  si  même  il  n'a  pas  travaillé  comme 
aide  sous  ses  ordres,  ce  qui  expliquerait  la 
ressemblance  entre  certains  groupes  du  diptyque 

I.  Le  tableau  fut  livré  à  Cambrai  par  la  femme  et  les  ouvriers  de 
Roger,  le  8  juin  1459.  Le  6  août,  il  fut  payé  «  à  Pierart  Kemon, 
pour  une  reprise  et  une  liste  de  bos,  mis  et  assiz  desoubz  et  deseure 
le  dit  tableau,  i  lyon  d'or  de  1.  s.  t.  Item  fu  depuis  payet  à  Hayne, 
jone  pointre,  pour  poindre  autour  dudit  tabliau  le  liste  et  le  deseure 
et  jusques  as  cayères  de  cuer,  LX  s.  du  nostre.  tt  Mémoriaux  de 
Jean  Robert,  abbé  de  Saint-Aubert,  dans  De  Laborde,  Les  Ducs 
Je  Bourgogne.  Preuves,  I,  li.\.  Paris,  1849. 


KHVUK    DK    L  AKT    CHRÉTIEN. 
I9OI.    —    2™*    LIVRAISON. 


132 


3Re\)uc  De  ravr  cbvctieu. 


peint  par  Marmion  (?)  pour  Jeanne  de  Bourbon 
et  les  tableaux  de  Pesth  et  de  Lubeck.  Un 
examen  des  archives  de  Valenciennes  pourrait 
amener  la  découverte  d'un  document  qui  résou- 
drait cette  question. 

\V.  H.  James  Weale. 


Ostensoir,  style  Du  XV^  siècle. 

—  ('Brc;s(or  ûc  ïîotrc=X)flme  de  Clérii.)  — 


E  vase  sacré  est  en  vermeil,  d'une  hau- 
teur de  80  centimètres.   Sa  forme  est 
celle   d'une    monstrance    rayonnante 
du  XV'^  siècle. 
M.  Renouard,  artiste  peintre  d'Orléans,  qui  en 
a  conçu  et  dessiné  le  plan,  s'est  inspiré,  pour  le 


Ostensoir  au  trésor  de  Notre-Dame  de  Cléry  (XV  siècle). 


Mélanges. 


133 


couronnement,  d'un  pilier  dont  on  admire  les 
pinacles  et  le?  fenestrages,  dans  la  chapelle  des 
Dunois-Longueville  ;  tous  les  motifs  décoratifs 
sont  inspirés  du  style  de  l'église  de  Cléry. 

C'est  M.  Favier,  de  Paris,  qui  a  fondu  et  ciselé 
cette  belle  pièce  d'orfèvrerie. 

Au  premier  coup  d'œil  on  est  frappé  de  la 
beauté  des  proportions,  de  la  pureté  des  lignes,  et, 
après  examen,  on  admire  la  richesse  de  l'orne- 
mentation. 

On  peut  dire  qu'il  est  à  tous  les  titres  un 
ex-voto  :  le  métal,  or  et  argent,  dont  il  est  fait, 
provient,  comme  tout  ce  qui  le  décore,  de  dons 
offerts  à  Notre-Dame  de  Cléry.  Aussi,  sous  le 
pied,  sont  gravées  ces  paroles  :  «  Vanitates  di- 
vitiasque  suas  ut  sint  divincB  majestati  tlironus 
gloriœ,  per  Mariant  obtuleriint.  » 

Le  pied,  entouré  à  sa  base,  de  grains  de  corail, 
est  orné  d'émaux,  de  médaillons  et  de  croix  de 
la  Légion  d'honneur.  Les  médaillons,  œuvre  de 
M.  Louis  Bourdery,  de  Limoges,  conservateur 
des  émaux  du  Louvre,  reproduisent  le  sceau  du 
chapitre  de  Cléry,  le  sceau  pour  frapper  les  mé- 
réaux  des  chanoines,  celui  du  doyen  avec  le 
contre-sceau  ;  la  finesse  du  dessin  et  les  nuances 
de  l'émail  sont  au-dessus  de  tout  éloge. 

Les  croix  représentent  les  différents  régimes 
de  la  France  aux  pieds  du  Christ-Roi,  depuis  la 
croix  de  Saint-Louis  jusqu'à  celle  de  la  Légion 
d'honneur  de  la  troisième  République. 

Le  nœud,  de  même  que  le  centre  du  soleil,  sont 
garnis  de  pierres  précieuses  :  rubis,  améthystes, 
topazes,  provenant  de  chatons  d'anciennes 
bagues. 

Le  plateau  sur  lequel  s'appuie  le  couronnement 
est  soutenu  par  deux  anges  qui  portent  le 
monogramme  de  Notre-Dame  en  lettres  d'or  sur 
fond  émail  bleu.  Sur  le  bord  de  ce  plateau  une 
feuille  en  or  tombe  comme  une  grâce  du  cœur 
du  Christ. 

Le  croissant,  orné  de  huit  diamants  entremêlés 
d'opales,  est  supporté  par  une  broche  ajourée  en 
or,  dans  laquelle  est  enchâssé  un  sceau  également 
en  or,  sur  les  deux  faces  duquel  est  ciselée  une 
fontaine,  symbole  de  la  source  des  grâces.  Six 
petites  tètes  de  chérubin  entourent  le  cercle  qui 
doit  recevoir  l'hostie. 

Parmi  les  nombreux  bijoux  (il  y  en  a  près  de 


deux  cents)  qui  ornent  le  pied  et  le  plateau,  on 
remarque  un  magnifique  camée  orné  de  trente- 
deux  perles  fines  et  des  broches  de  prix  dont 
l'une  représente  un  ange  aux  ailes  éployées.  La 
croix  en  or,  fleurdelisée,  qui  est  au  sommet  de 
l'ostensoir,  est  ancienne  ;  sur  ses  deux  faces,  elle 
porte  le  Christ  et  la  Vierge. 

Cette  œuvre  d'art  fait  honneur  à  ceux  qui 
l'ont  conçue  et  exécutée,  et  est  d'un  prix  inap- 
préciable. 

Saget. 


3ics  principes  De  Part  au  mopen  âge  et 
les  .fantaisies  De  la  Décoration  moDerne. 


ANDIS  que  nous  assistons  au  déve- 
loppement, toujours  croissant,  de  l'é- 
tude de  notre  art  national,  de  cet  art 
chrétien  du  moyen  âge,  que  nous 
voyons,  dans  presque  toute  l'Europe,  honoré 
comme  il  convient,  compris  par  le  peuple  et 
provoquant  l'admiration  universelle;  nous  cons- 
tatons d'autre  part,  et  non  sans  regret,  les  ten- 
tatives prétentieuses  de  certains  esprits  pour 
faire  prévaloir  un  art  indépendant  de  toute  règle, 
de  toute  tradition,  de  toute  morale,  de  toute 
logique. 

Qu'on  nous  pardonne  d'avoir  laissé  échapper 
de  la  plume  le  mot  «  art  ».  Ce  genre  moderne  sur 
lequel  nous  allons  jeter  un  coup  d'œil,  très  briè- 
vement, ne  mérite  pas  ce  titre,  car  il  ne  réunit 
aucune  des  conditions  requises  pour  être  appelé 
un  art. 

«  L'art,  dit  Gaborit,  est  un  ensemble  de  règles 
pratiques  employées  pour  produire  un  effet  soit 
utile  ou  agréable.  » 

Dans  la  décoration  moderne  telle  que  souvent 
elle  est  conçue  de  nos  jours,  toute  règle  est  ban- 
nie, et  assurément  l'effet  produit  n'est  ni  utile  ni 
agréable  ;  loin  de  là,  il  est  hiéroglyphique.  Sans 
le  beau  il  n'y  a  pas  d'art. 

Examinons  d'abord  rapidement  les  principes 
du  moyen  âge,  comparés  à  ceux  de  ces  dessina- 
teurs modernes,  si  ce  n'est  faire  affront  au.x  pre- 
miers de  tenter  pareille  comparaison. 

Les  artistes  du  moyen  âge  ont  exalté  ce  qui 
est  immortel  ;  ils  ont  idéalisé  l'homme  en  retra- 


134 


3Rcbur  ïjc  rSrt  cbvctten. 


çant  en  lui  l'image  affaiblie  de  l'Idéal  insaisis- 
sable, le  Créateur;  ils  le  faisaient  comme  planer 
au-dessus  de  ce  qui  est  mortel,  en  vue  de  la 
destinée  future  du  Chrétien. 

Qu'y  a-t-il  d'étonnant,  dès  lors,  que  les  œuvres 
principales  des  plus  beaux  siècles  de  l'art  soient 
empreintes  de  tant  de  grandeur,  de  caractère  et 
de  force?  qu'elles  arrachent  à  la  fois  l'admiration 
et  des  aveux  d'impuissance  à  la  critique  mo- 
derne lorsqu'elle  est  impartiale  ? 

«  Le  style,dit  C.  Blanc, est  le  reflet  de  l'âme  de 
l'artiste  dans  l'exécution  de  son  œuvre.» 

Qu'on  ne  vienne  pas  objecter  que  le  moyen 
âge  repoussait  le  naturel  ;  loin  de  là,  les  belles 
œuvres  de  cette  époque  réfutent  d'elles-mêmes 
cette  critique.  Naturel  n'est  pas  naturalisme. 
C'est  une  interprétation  savante,  idéale  et  non 
la  copie  servile  de  la  nature  qui  doit  guider 
l'artiste  dans  son  œuvre.  L'art  n'est  pas  fait  pour 
tenir  compte  uniquement  des  beautés  de  la  terre. 
Le  moyen  âge  s'est  toujours  efforcé  de  repro- 
duire des  êtres  conformes  à  la  nature,  et  quand 
ils  se  trouvaient  distants  de  l'œil,  l'artiste  em- 
ployait même  tout  son  talent  et  son  expérience, 
pour  que,  disproportionnée,  vue  de  près,  l'image 
prît  les  proportions  les  plus  exactes,  vue  à  dis- 
tance. Peut-être  objectera-t-on  que  cet  art  fut 
exclusivement  religieux,  qu'il  ne  se  prêtait  nulle- 
ment aux  représentations  de  scènes  profanes. 
Cette  objection  se  détruit  par  le  seul  examen 
des  œuvres  du  moyen  âge,  les  jardins  d'amour, 
les  soties,  fabliaux,  etc.,  qui  y  abondent. 

L'artiste  voulait  mettre  son  œuvre  à  la  portée 
des  plus  ignorants  ;  pour  ceux-ci,  l'art  était  sou- 
vent la  seule  source  de  leurs  connaissances.  «  Heu- 
reux, dit  E.  Renan,  celui  qui  est  assez  grand 
pour  que  les  petits  l'admirent  ;  la  vraie  grandeur, 
c'est  d'être  vu  grand  par  l'œil  des  humbles.  » 

Il  serait  inutile  de  s'étendre  davantage  sur  le 
développement  des  idées,  sur  les  voies  suivies  par 
les  vrais  grands  artistes  pour  atteindre  leur  but. 
Bien  d'autres  plus  autorisés  que  nous,  ont  déve- 
loppé d'une  manière  savante  les  principes  de 
l'art  du  moyen  âge.  L'exposé  des  théories  et  des 
résultats  de  quelques  dessinateurs  à  la  mode  fera 
plus  clairement  ressortir  la  grandeur  des  pre- 
miers, par  ce  contraste  frappant. 

L'impression     résultant    de    l'examen    de    la 


plupart  des  peintures  modernes,  affiches,  illus- 
trations, vitraux,  prétendument  artistiques,  est 
qu'on  se  trouve  en  présence  d'une  lutte  préten- 
tieuse d'individu  à  individu.  La  base  de  ces  pro- 
ductions n'est  plus  celle  de  nos  devanciers,  soumis 
à  des  lois,  unissant  leur  action  pour  atteindre 
plus  sûrement  le  beau,  partant  de  l'idéal  religieux. 

La  foi,  seule  créatrice  du  sublime,  est  chose 
trop  banale  pour  ces  grands  esprits  ;  on  veut 
s'affranchir  de  ce  lien  que  l'on  trouve  humiliant 
pour  de  si  hautes  intelligences  ;  en  sa  place  on 
fait  parade  de  personnalité  et  d'indépendance 
artistique,  c'est  de  mode  actuellement. Heureuse- 
ment les  écarts,  aboutissement  fatal  de  cette  voie 
nouvelle,  viennent  presque  toujours  témoigner 
de  son  absurdité. 

L'art  sans  Dieu  n'existe  pas.  Sans  lui,  plus 
d'école, plus  d'unité,seuls  le  caprice  et  la  fantaisie, 
parfois  tristement  dévoyés,  servent  de  guide. 
L'homme  se  sent  trop  grand,  trop  épris  de  son 
talent,  pour  se  plier  à  des  règles  un  peu  saines. 
Pour  lui,  nous  sommes  des  copistes,  des  pasti- 
cheurs du  moyen  âge  ;  son  génie,  à  lui,  n'admet 
pas  cette  servitude,  il  est  créateur,  personnel, 
indépendant  de  toutes  lois.  L'art  pour  l'art!  voilà 
le  grand  mot  !  Idéal  !  voilà  le  but  visé  !  et  sous 
prétexte  d'idéal,  le  naturalisme  perce  partout,  et 
les  sentiments  les  moins  dignes,  les  passions  les 
plus  viles  ne  se  font  jour  que  trop  souvent, 
hélas  !  à  travers  ces  voiles,  bien  minces,  dont  on 
veut  bien,  au  hasard  de  la  brosse,  recouvrir  ces 
scènes  modernes.  La  personnalité  !  nos  artistes 
du  moyen  âge  n'avaient-ils  donc  pas,  eux  aussi, 
leur  personnalité?  Mais,  sensés,  ils  savaient  se 
conformer  aux  formules  traditioimelles  de  leur 
époque,  faire  concorder  le  but  et  les  moyens. 

En  conséquence,  le  vague,  l'indécis,  un  esprit 
rêveur,  égaré  même,  se  trahissent  dans  ces  com- 
positions et  semblent  être  très  ardemment  re- 
cherchés par  ces  cultivateurs  du  beau.  La  figure 
humaine,  comme  mue  par  un  ressort  automati- 
que, se  dégage  d'un  corps  qui  va  se  perdre  dans 
l'espace,  ou  un  semblant  de  nuages  ;  elle  plane, 
indécise,  négligente,  les  yeu.x  maladifs,  les  che- 
veux épars,  au  milieu  de  plantes  enchevêtrées 
comme  à  plaisir,  pour  être  le  plus  méconnais- 
sable possible.  Ce  corps  est  mou,  sans  vie,  la 
chair  y  est,  mais  c'est  tout  ;  les  règnes  végétal  et 


£©élaiige0. 


135 


animal  sont  complètement  travestis,  mécon- 
naissables. Mais  que  dire!  c'est  l'idéal  de  M.  X. 
M. Z., plus  génial,  fera  plus  inintelligible  encore;... 
l'idéal  est  mieux  atteint!  Ne  vous  étonnez  pas  de 
rencontrer  le  pot  à  fleurs  idéal,  la  cafetière  idéale, 
des  ustensiles  de  toutes  sortes  idéaux.  Heureux 
l'homme  dont  l'intelligence  sera  sufifisamment 
développée  pour  saisir  l'idéal  qui  s'y  trouve 
caché  ! 

Le  dessin  doit  être  une  langue  claire,  compré- 
hensible pour  tous.  Dans  ces  productions  moder- 
nes il  est  insaisissable  à  presque  tous  les  hommes, 
même  doués  d'une  intelligence  développée  ;  à 
plus  forte  raison  doit-il  être  énigmatique  pour 
le  peuple  ;  heureusement  pour  le  peuple  ! 

L'art  moderne  n'est  plus  populaire,  ce  n'est 
qu'un  caprice,  un  orgueil  fantaisiste,  une  mode  ! 
Au  lieu  de  guider  le  siècle,  il  le  suit,  sans  se 
préoccuper  de  ses  travers,  de  ses  tendances  ma- 
térialistes qu'il  pourrait  redresser  ;  il  s'y  plaît  au 
contraire  et  les  favorise  ;  il  a  créé  l'idéal  animal  ; 
qu'on  nous  pardonne  ce  mot  !  L'art  moderne 
s'est  mis  à  genoux  pour  adorer  la  nature.  La 
mode  !  Combien  il  est  triste  de  voir  l'art  ravalé 
aux  caprices  d'une  mode,  et  des  hommes  de 
talent,  car  il  faut  certainement  le  reconnaître 
pour  quelques-uns,  y  consacrer  leur  temps  et 
leur  travail.  Et  que  dire  de  l'emploi  de  la  symé- 
trie? quels  abus!  là  oi^i  la  symétrie  est  inutile,  elle 
est  fade. 

L'exécution  moderne  n'est  pas  l'interprétation 
d'un  idéal  ;  son  origine  n'a  pas  de  base  sérieuse 
et  d'ordre  supérieur  ;  elle  est  l'effet  d'une  préoccu- 
pation personnelle  prétentieuse,  indépendante 
de  toute  règle. On  peut  dire  avec  M  Day  :  «  c'est 
de  l'anarchie  artistique  ». 

Nous  ne  nous  en  prenons,  évidemment,  dans 
notre  appréciation,  qu'à  ces  œuvres  dégagées  de 
tout  esprit  pondéré,  telles  que  la  mode  les  a  con- 
quises, c'est-à-dire  à  ces  illustrations,  affiches, 
vitraux  énigmatiques,  devant  représenter  des 
rêves,  des  visions  saugrenues,  des  végétaux  sans 
nom,  tantôt  grouillant  sur  le  sol,  tantôt  élançant 
leurs  tiges  et  leurs  feuilles  effilées,  étiolées  dans 
l'espace,  telles  des  ficelles  sans  lien  et  sans  signifi- 
cation ;  à  ces  animaux  bizarres  dans  lesquels  on 
ne  trouve  qu'une  combinaison  incohérente,  d'au- 
tant plus  originale   qu'elle   est   invraisemblable. 


Seul,  l'art  gothique,  après  le  XVIII<=  siècle,  put 
se  relever  de  ses  ruines  sur  lesquelles  la  renais- 
sance avait  passé  comme  une  importation  étran- 
gère, sans  durée.  L'Angleterre,  l'Allemagne,  la 
France,  la  Hollande,  la  Belgique  rouvrirent  d'im- 
portantes écoles,  à  l'art  national,  elles  le  reprirent 
au  moment  de  sa  plus  belle  floraison,  alors  que  la 
Renaissance  avait  cru  l'étouffer  pour  toujours;  et 
bientôt,  l'on  vit  apparaître  des  œuvres  nouvelles, 
basées  sur  les  principes  du  moyen  âge;  capables 
de  soutenir  la  comparaison  avec  ces  dernières. 

L'artiste  pénétré  des  vraies  traditions  de  l'art 
regrettera  toujours  les  écarts  que  nous  signalons  ; 
il  ne  saurait  y  tomber,  ces  principes  lui  étant  plus 
sacrés  qu'une  orgueilleuse  indépendance.  Il  re- 
connaîtra que  seul,  le  point  de  vue  chrétien,  met- 
tant l'image  de  Dieu  dans  l'homme,  et  consé- 
quemment  en  faisant  le  siège  des  vertus  les  plus 
pures  et  les  plus  héroïques,  peut  le  conduire  au 
vrai  beau,  à  l'idéal,  au  sublime.  Ses  personnages 
seront  empreints  d'une  sorte  de  grandeur  divine  ; 
les  végétaux  dans  leur  simplicité,  les  animaux 
dépeints  dans  le  rôle  que  Dieu  leur  a  assigné, 
rediront  les  magnificencesde  l'œuvre  du  Créateur 
et  nous  donneront  par  la  seule  contemplation, 
un  avant-goût  de  l'union  à  ce  grand  Artiste, 
source  des  plus  belles  inspirations  de  l'art. 

Joseph  O.STERRATH. 


Ire  monumcmt  De  fligr  Hioet  à  »i)on. 


|E  jeudi  27  décembre  1900,  en  l'église 
cathédrale  Saint-Bénigne  de  Dijon,  a 
été  solennellement  inauguré  par  l'évè- 
que  actuel,  Mgr  Le  Nordez,  le  monu- 
ment élevé  par  le  diocèse  à  celui  qui,  pendant 
plus  de  45  ans,  en  fut  le  très  digne  et  très  vénéré 
pasteur. 

Né  à  Saînt-Germain-en-Laye,  le  13  prairial 
an  IV  —  i«f  juin  1796  —  François- Victor  Rivet 
reçut  la  prêtrise  le  4  juin  18  19.  Il  était  curé  de 
Notre-Dame  de  Versailles,  lorsqu'une  ordon- 
nance royale  du  10  mai  1838  l'appela  au  siège 
de  Dijon  en  remplacement  de  Mgr  Claude  Rey, 
démissionnaire  ;  il  eut  ses  bulles  en  septembre, 
fut  sacré  à  Notre-Dame  de  Versailles  le  21  oc- 
tobre, et  fit  son  entrée  dans   sa    ville   épiscopale 


i^^6 


i^ebuc  De  rSvt  cbvctieu. 


le  3 1 .  Des  archevêchés,  entre  autres  celui  de  Tou- 
louse, furent  offerts  à  Mgr  Rivet  au  cours  d'un 
long  épiscopat,  mais  il  ne  voulut  pas  d'autre 
épouse  que  son  église  de  Dijon  et  mourut  plein 
de  jours  et  d'oeuvres  le  12  juillet  1884,  à  l'âge  de 
88  ans. 

Mon  objet  ne  saurait  être  de  dire  ici  ce  que 
fut  la  carrière  épiscopale  de  Mgr  Rivet  ;  ce  devoir 
a  été  rempli  à  la  perfection  en  la  forme  comme 
au  fond  par  Mgr  Perraud,  évêque  d'Autun, 
aujourd'hui  cardinal,  qui  prononça  l'oraison 
funèbre  ;  en  cette  revue,  plus  spécialement  vouée 
aux  arts,  je  ne  parlerai  que  du  monument  lui- 
même. 

Dans  un  ouvrage  décoratif  et  historique  — 
Dijon,  nionuiiients  et  souvenirs  —  publié  en  1S94, 
j'écrivais  ceci  :  «  Quarante-cinq  ans  du  plus  digne 
épiscopat  ne  mériteraient-ils  pas  au  vieil  évêque 
une  statue  dans  l'église  haute?»  Cette  parole 
n'était  que  l'expression  d'un  sentiment  dès  lors 
unanime  de  reconnaissance  et  de  respect  :  aussi 
lorsque  Mgr  Oury,  évêque  de  Dijon,  aujourd'hui 
archevêque  d'Alger,  prit  l'initiative  d'une  sou- 
scription pour  élever  dans  sa  cathédrale  un 
mémorial  à  son  prédécesseur,  la  somme  jugée 
nécessaire  fut-elle  réunie  en  quelques  semaines. 

Ce  monument  ne  devait  pas  correspondre  au 
cercueil  enseveli  ;  conformément  à  ses  dernières 
volontés,  Mgr  Rivet  repose  dans  la  crypte,  c'est- 
à-dire  dans  l'étage  inférieur  de  la  rotonde  élevée 
au  Xl'=  siècle  par  l'abbé  Guillaume  de  Saint- 
Bénigne,  derrière  le  chevet  de  l'église  abbatiale. 
Ce  précieux  monument  d'art  et  d'histoire,  le 
plus  respectable  de  la  province  et,  pour  le  plan 
et  la  structure,  unique  en  France,  avait  été  dé- 
truit en  1791,  sans  nécessité,  pour  rien,  pour  le 
plaisir  de  mal  faire,  malgré  les  protestations 
énergiques  de  l'académie  de  Dijon.  Mais  on  se 
contenta  de  défoncer  les  voûtes  de  l'étage  sou- 
terrain et  de  combler  celui-ci  sans  le  détruire  ;  si 
bien  qu'en  1858,  les  fouilles  pratiquées  pour 
asseoir  la  nouvelle  sacristie  mirent  au  jour  les 
colonnes  robustes  qui  avaient  porté  les  étages 
aériens  ;  on  retrouva  également  une  partie  du 
sarcophage  que  depuis  plus  de  quinze  siècles  la 
Bourgogne  chrétienne  révérait  comme  celui  de 
l'apôtre  venu  d'Orient  [)our  l'évangéliser  et  subir 
à  Dijon  même  le  martyre.  C'est  dans  la  crypte 


restaurée,  aux  pieds  du  saint  tombeau,  que  vou- 
lut reposer  Mgr  Rivet,  sous  une  simple  dalle 
noire  où  la  vie  du  vénéré  prélat  est  racontée 
dans  une  inscription  du  meilleur  style  lapidaire, 
composée  par  feu  M.  l'abbé  Carra,  alors  aumônier 
du  lycée  de  Dijon,  plus  tard  recteur  de  l'Uni- 
versité catholique  de  Lyon. 

La  crypte  ainsi  exhumée  a  été  restaurée  avec 
son  annexe,  cette  mystérieuse  chapelle  Saint- 
Jean,  dont  les  maçonneries  barbares  sont  plus  an- 
ciennes encore  et  remontent  peut-être  à  l'ori- 
gine même  du  christianisme  en  Bourgogne.  Mais 
l'œuvre  de  réparation  fut  entreprise  dans  des  con- 
ditions fâcheuses.  Mgr  Rivet  tenait  à  sa  sacristie, 
et  malgré  toutes  les  représentations  des  archéo- 
logues, voulait  que,  conformément  au  dessin 
primitif,  elle  fût  superposée  à  la  crypte.  Pour 
porter  la  nouvelle  construction  il  fallut  jeter 
parmi  la  double  précinction  de  l'abbé  Guillaume 
deux  gros  massifs  de  pierre  qui  déshonorent  à 
jamais  un  monument  rare  entre  tous.  Entendez 
que  la  sacristie  pouvait  aussi  bien  être  mise 
ailleurs  ;  on  peut  même  penser  que  jeté  derrière 
l'abside  polygonale  du  XII I*^  siècle,  ce  rectangle 
de  pierre  n'est  pas  d'un  heureux  effet.  Et  puis, 
quelle  pauvreté,  quelle  disgrâce  dans  ces  couloirs 
brisés  qui  raccordent  les  salles  de  service  avec 
l'église  !  On  ne  commettrait  peut-être  plus  cette 
faute-là  aujourd'hui,  maison  en  commet  d'autres, 
et  à  tout  prendre,  je  ne  crois  pas  que  les  restau- 
rateurs actuels  aient  rien  à  reprocher  à  ceux 
qui  les  ont  précédés.  Seulement  ils  écoutent 
moins  les  évêques,  ils  n'écoutent  même  per- 
sonne, pas  même  ceux  qui  sont  des  payeurs  en 
même  temps  que  des  conseilleurs.  Pour  conclure, 
il  est  permis,  sans  toucher  à  la  plus  respectable 
mémoire,  de  dire  que  Mgr  Rivet  n'était  pas 
artiste  et  commit  ce  jour-là  une  grave  erreur  de 
goût.  Mais  que  penser  des  architectes,  Viollet-le- 
Duc  en  tête,  qui  se  montrèrent  si  mal  à  propos 
complaisants  ? 

J'en  reviens  au  motiument  dûà  la  collaboration 
de  M.  Charles  Suisse,  architecte  du  gouverne- 
ment, chargé  des  travaux  de  Saint-Bénigne,  et 
de  M.  Paul  Gasq,  sculpteur,  né  à  Dijon  et  grand 
prix  de  Rome  ;  il  s'élève  dans  le  collatéral  du 
Nord  et  est  appliqué  au  mur  de  la  troisième 
travée.  Composé  dans  le  style  du  XVI  P'  siècle,  il 


flgélanges, 


137 


présente  un  socle  rectangulaire  sur  lequel  quatre 
griffes  posées  supportent  le  sarcophage  figuré. 
Selon  la  belle  formule  qui  commence  d'être 
adoptée  à  la  Renaissance  et  succède  à  celle  du 
gisant,  le  prélat  est  agenouillé,  les  mains  jointes; 
à  ses  pieds  sont  la  crosse  et  la  mitre  ;  en  arrière 
ondule  la  traîne  de  la  robe  épiscopale,  longue 
et  débordant  le  sarcophage.  Cependant,  de- 
bout sur  le  socle,  et  dans  une  attitude  à  demi 
ployée  de  respect  et  de  douleur,  une  figure  de 
femme  en  bronze  fauve  tend  à  deux  mains  des 
fleurs  au  prélat  ;  à  ses  pieds  est  l'écu  aux  armes 
de  Mgr  Rivet  et  entouré  d'une  banderole  où  est 
inscrite  la  devise  qui  résume  cette  belle  vie  de 
pasteur,  Oinnia  fit  omnibus. 

Toute  la  partie  monumentale  est  faite  d'un 
calcaire  rougeâtre  fort  dur  et  d'aspect  porphy- 
rique,  dont  les  carrières  sont  à  une  dizaine  de 
kilom.  au  Sud  de  Dijon,  à  Brochon.  Cette  pierre 
peut  recevoir  le  plus  beau  poli  et  en  variant  le 
degré  de  polissage,  on  est  arrivé  à  un  effet  des 
plus  heureux  sans  porter  atteinte  à  la  gravité  de 
l'ensemble.  Ainsi  le  socle  brillant  comme  une 
glace  montre  le  Brochon  avec  son  ton  de  vieux 
vin  d'Espagne,  et  tout  nuage  de  jaune  orangé. 
Les  griff'es  non  polies  sont  d'une  nuance  cendrée 
et  claire  ;  enfin  le  sarcophage  présente  en  mat 
ses  cannelures  et  les  feuillages  stylisés  de  ses 
angles. 

Dans  la  statue  agenouillée  en  Carrare  clair, 
mais  dont  le  travail  n'a  pas  été  poussé  jusqu'au 
poli  savonneux  de  Canova,  M.  Gasq  nous  a  donné 
une  des  plus  nobles  effigies  que  l'art  ait  produites 
dans  ces  dernières  années.  Quelques-uns  ont 
trouvé  que  la  statue  faisait  l'évêque  plus 
grand  qu'il  n'était  en  réalité  ;  l'observation  est 
vraie,  Mgr  Rivet  était  de  taille  très  moyenne  et, 
surtout  dans  les  dernières  années  de  sa  vie,  un  peu 
entassé,  comme  aurait  dit  Saint-Simon.  Mais  je 
n'estime  pas  que  dans  les  statues  historiques,  il 
soit  à  propos  de  perpétuer  ces  caractères  très 
adventices  et  secondaires  de  l'individu.  D'ailleurs, 
si  Mgr  Rivet  était  plutôt  petit,  il  y  avait  en  lui 
tant  de  dignité,  de  noblesse  simple,  qu'il  y  fallait 
réfléchir  pour  s'apercevoir  de  ce  qui  lui  pouvait 
manquer  en  stature. 

La  figure  de  femme  en  bronze  est  très  belle 
dans  sa  signification  un  peu  imprécise,  ce  qui  n'est 


pas  pour  me  déplaire.  On  comprend  qu'elle  per- 
sonnifie l'hommage  reconnaissant  et  attristé  du 
diocèse  ;  cela  me  suffit  et  je  craindrais  que  l'on 
inscrivît  un  nom  quelconque  sous  ce  long  voile 
qui  déborde  un  peu  du  socle.  Elle  ne  dirait  plus 
qu'une  chose;  en  l'état,  elle  en  dit  mille. 

Les  deux  talents  amis  de  M.  Suisse  et  de  M. 
Gasq  ont  su  se  fondre  en  une  seule  âme  pour 
nous  offrir  un  monument  d'une  unité  parfaite, 
dont  sous  tous  les  angles  de  vision,  les  lignes  se 
présentent  harmonieuses  et  nobles.  Mais  ce  mo- 
nument de  grande  valeur  artistique  a-t-il  le 
caractère  absolument  religieux?  Ici  on  a  fait 
une  réserve  ;  rien  à  dire  assurément  de  la  figure 
agenouillée;  belle  et  grave,  elle  est  ce  qu'elle  doit 
être,  et,  tout  en  étant  très  moderne  d'accent,  peut 
soutenir  sans  infériorité  la  comparaison  avec  les 
plus  nobles  morceaux  de  même  famille  que  nous 
ont  laissés  les  siècles  antérieurs.  Aucun  chiffbn- 
nement,  aucune  manière  dans  la  pose  et  les 
draperies,  sur  ce  point  essentiel  tout  le  monde 
est  d'accord.  Mais  l'opinion  admet  moins  faci- 
lement la  figure  de  femme;  sans  nier  la  beauté, 
ce  qui  serait  impossible,  ni  même  la  chasteté  de 
ces  longs  voiles  enveloppant  la  forme  sans  l'ac- 
cuser, de  ces  bras  nus  chargés  de  fleurs,  on  estime 
qu'elle  enlève  quelque  chose  à  l'expression  austère 
d'un  monument  élevé  à  un  vieil  et  digne  évêque. 
Évidemment  cette  figure  trouverait  tout  aussi 
bien  sa  place  sur  une  place  publique  appuyée  à 
la  stèle  d'un  littérateur,  d'un  artiste,  voire  même 
d'un  homme  politique.  C'est  là  un  demi-défaut, 
et  les  exemples  invoqués,soit  de  l'art  italien,  soit 
de  l'art  français  des  XVII«  et  XVIII<=  siècles,  ne 
feront  pas  modifier  cette  manière  de  voir. 

Que  de  choses,  au  surplus,  n'y  aurait-il  pas 
lieu  de  dire  sur  certains  monuments  funèbres 
destinés  à  des  églises  .'  Celui  du  cardinal  La- 
vigerie,  par  exemple,  est  d'une  somptuosité 
sans  égale,  mais  M.  L.  Cloquet  —  Reime  de  V Art 
chrétien,  t.  XI  I«,  p.  75  —  remarque  avec  raison 
qu'il  a  le  caractère  moins  religieux  qu'historique. 
Pour  ce  qui  est  du  monument  à  Bossuet,  qui  va 
s'élever  dans  la  cathédrale  de  Meaux,  et  dont 
le  modèle  était  à  l'exposition  universelle,  M. 
Ernest  Dubois  l'a  traité  comme  un  biscuit  de 
Sèvres  ;  je  défie  le  spectateur  le  plus  perspicace 
de   deviner  que  ces   figures  groupées  à    la  base 


138 


IRebur  ïic  V^n  cbrcticn. 


du  cippe  qui  porte  la  statue,  sont  destinées  à 
une  église  et  à  un  monument  funèbre.  Il  tombait 
cependant  sous  le  sens  que  la  cathédrale  de 
Meaux  ayant  l'honneur  de  posséder  les  restes 
mortels  du  grand  évêque,  le  monument  devait 
être  conçu  comme  un  tombeau,  magnifique  et 
grave,  mais  du  plus  grand  caractère  religieux, 
ainsi  qu'il  convient  à  un  tel  lieu  et  à  une  telle 
mémoire.  Au  lieu  de  cela  on  nous  donne  une 
composition  absolument  profane  et  faite  plutôt 
pour  une  promenade  publique  et  mondaine  que 
pour  une  église. 

Si  cette  critique  ne  s'adresse  que  dans  une 
mesure  extrêmement  atténuée  au  monument  de 
Dijon,  je  devais  à  la  vérité  d'exprimer  une  réserve 
faite  par  plusieurs  au  sujet  de  la  figure  de  femme, 
tout  en  reconnaissant  qu'en  fait  de  profane  et  de 
païen  les  siècles  passés  nous  en  ont  fait  voir  bien 
d'autres.  Mais  notre  époque  est  heureusement 
revenue  à  des  idées  plus  graves,  et  telles  figures 
de  Canova,  par  exemple,  nous  paraissent  à  bon 
droit  peu  acceptables  aujourd'hui  dans  une  église. 

Le  monument  de  Mgr  Rivet  est  placé  fort 
mal  dans  une  nef  obscure  où  la  lumière  arrive 
de  différents  côtés  et  de  partout  mauvaise  et 
insuffisante.  Pour  comble  de  malheur,  il  se  trouve 
sous  une  fenêtre  à  verres  blancs  dont  les  irradia- 
tions éteignent  toutes  choses.  Il  ne  manquait 
pas  cependant  de  meilleures  places  dans  la  cathé- 
drale, mais  l'aréopage  parisien,  qui  préside  en 
dictateur  aux  destinées  des  édifices  diocésains, 
n'en  a  pas  voulu  entendre  parler.Cela  aurait  porté 
atteinte  aux  lignes  sacro-saintes  de  la  structure. 
Entendons-nous  bien  cependant,  personne  ne 
demandait  que  l'on  rompît  l'harmonie  générale 
de  l'intérieur  ;  mais  la  plantation  im  peu  libre  des 
monuments  adventices  est  pour  une  église  une 
source  de  beauté  morale,  parce  qu'elle  met  la 
vie  dans  ces  vaisseaux  que  les  restaurations  in- 
tensives de  notre  temps  réduisent  trop  souvent  à 
leur  seule  beauté  géométrique.  Or  celle-ci  n'est 
pas  la  seule,  peut-être  même  n'est-ce  pas  la 
bonne  ;  il  faut  bien  reconnaître,  en  effet,  que 
pour  si  habiles  qu'elles  soient,  les  restaurations 
dirigées  par  la  très  méritante  Commission  fran- 
çaise des  Monuments  historiques,  ont  plus  de 
succès  auprès  des  archéologues  et  surtout  d'elle- 
même  que  des  littérateurs,  des  artistes  et  des 
poètes. 

Henri   CllABEUK. 
Janvier   1901. 


©iscoiirs 

proioncc  le  jo  juillet  ipoo  à  la  distribution  des 
prix  de  l'École  Saint-Luc  à  Bruxelles,  pttr 
M.  H.  Carton  de  IViart,  membre  de  la  Chambre 
des  Représentants  de  Belgique. 

ETTE  belle  allocution  est  celle  d'un 
esthète  qui  fut  éclectique  et  que  le 
sens  du  Beau  et  du  Vrai  ramène  à 
l'art  chrétien,  «  comme  l'oiseau  mi- 
grateur, fatigué  des  aventures  des  pays  exotiques, 
revient  toujours  à  son  ciel  natal  ».  M.  Carton  de 
VViart  a  d'abord  traité  d'une  façon  spirituelle 
et  sagace  de  la  question  si  actuelle  de  1'  «  art 
nouveau  »  issu  du  préraphaélisme  anglais  tra- 
vesti par  le  commerce  continental. 

On  sait  quelle  fut  la  vogue,  déjà  déclinante, 
de  ce  style  étrange,  qu'on  eut  l'outrecuidance  de 
nommer  le  style  «  esthétique  »  !  Style  anglais, 
style  moderne,  style  esthétique,  on  n'en  voulut 
plus  d'autre.  Alors  on  vit  naître  des  créations 
hybrides,  où  se  mariaient  les  formes  de  jadis  et 
les  motifs  à  la  mode,  les  rocailles  Louis  XV  et 
les  cartouches  Renaissance, avec  «  le  tibia  stylisé  » 
et  «  le  cartouche  japonais  ».  Ce  ne  furent  partout 
que  «  vitrines  ornées  de  serpentins  et  de  délinéa- 
ments macaroniques,  céramiques  anémiées,  boi- 
series vert  pomme,  charpentes  en  bois  courbé 
orné  comme  de  la  terre  glaise,  loall papers  ryth- 
més aux  nappes  artistiques,  grès  lumineux 
comme  des  verres,  verres  opaques  comme  des 
grès,  canapés  qui  sont  des  bibliothèques,  lits  qui 
sont  des  étagères.  »  Ce  bel  engouement  dure 
depuis  cinq  ans,  mais  le  public  commence  à 
flairer  une  vaste  mystification. 

Il  constate  combien  ce  style  est  déjà  poncif  et 
banal,  combien  ces  structures  sont  irrationnelles, 
combien  ces  meubles  aux  formes  plastiques  sont 
incommodes,  combien  ces  raffinements  coûteux 
et  ces  illusions  de  luxe  sont  éloignés  du  concept 
d'un  art  vraiment  populaire,  et  que  ces  nouveaux 
prophètes, qui  devaient  mettre  l'art  a  la  portée  des 
foules,  ont  retardé  pour  longtemps  la  vraie  re- 
naissance attendue. 

«  Quel  autre  enseignement  d'art  populaire  les 
artisans  du  moyen  âge  nous  ont  légué,  dit  l'ora- 
teur, eux  dont  l'art  enveloppait  la  vie  et  les 
besoins  de  chacun  et  qui  surent  faire  descendre 


£!Bélanges. 


139 


l'harmonie  de  la  ligne  et  de  la  couleur  jusque 
dans  les  demeures  les  plus  humbles  ! 

«  Hélas  !  ces  leçons,  il  faudra,  mes  chers 
Frères,  que  vous  les  rappeliez  bien  haut  et  sans 
relâche,  —  car  le  flot  des  imitations  et  de  la 
médiocrité  qui  nous  submerge  accuse  de  plus  en 
plus  leur  méconnaissance.  Et  c'est  pour  avoir 
méconnu  en  même  temps  d'autres  principes  chers 
aux  gothiques  et  à  votre  école,  —  principes  de 
goût,  principes  de  construction,  —  que  l'art  dé- 
coratif nouveau  s'est  déconsidéré  par  toutes  ces 
productions  hâtives  et  incommodes  dont  je 
dressais  tantôt  l'inventaire  et  le  réquisitoire. 

«  En  s'y  exerçant,  ils  auraient  pu  sans  doute, 
ces  décorateurs,  ces  artisans,  reproduire  des 
meubles  anciens  dont  on  sait  les  mesures,  les 
proportions,  la  structure  intime... 

«  Dédaigneux  du  modèle,  ils  ont  voulu  créer. 
«  Créer  !  Et  cela,  sans  avoir  appris  à  connaître 
la  nature  des  matériaux,  leurs  propriétés,  leurs 
ressources,  leurs  résistances,  —  sans  avoir  le 
souci  suffisant  de  l'appropriation  de  l'objet,  de  sa 
convenance,  de  son  adaptation  parfaite  à  une 
utilité  déterminée. 

«  L'échec  était  fatal.  En  décoration  on  ne 
supplée  pas  à  l'insufifisance  de  l'éducation  pro- 
fessionnelle par  l'imagination. 

«  Dès  aujourd'hui  toutes  ces  aberrations  sont 
jugées. 

«  Elles  peuvent  bénéficier  encore  du  sursis 
que  leur  accorde  la  naïveté  de  quelques-uns, 
mais  elles  sont  marquées  pour  la  mort.  Comme 
ont  passé  les  manches  à  gigot  et  les  crinolines, 
ainsi  ce  «  style  moderne  »  ou  soi-disant  tel, 
passera  à  son  tour.  Et  qui  sait  ?  Peut-être  le  goût 
public,  corrigé  par  cette  salutaire  épreuve,  va-t-il 
se  ressaisir? 

«  On  ne  vous  a  jamais  ménagé  les  objections 
et  les  reproches,  mes  chers  Frères...  Et  je  vous 
en  félicite.  Car  vous  savez  qu'on  peut  mesurer 
les  grandes  œuvres  aux  critiques  qu'elles  pro- 
voquent, comme  on  peut  mesurer  les  monuments 
à  l'ombre  qu'ils  projettent  sur  le  sol. 

«  Or,  parmi  ces  reproches,  j'ai  entendu  qu'on 
vous  adressait  parfois  celui  de  rester  trop  obsti- 
nément fidèles  aux  principes  de  l'art  médiéval. 
La  division  du  travail,  les  conditions  modernes 
de  la  production  ne  s'accommodent  plus,  disait- 


on,  de  cette  patiente  étude  des  matériaux,  de 
cette  recherche  approfondie  des  formes  qu'ils 
comportent  et  des  applications  auxquelles  ils 
sont  destinés.  Ah!  vous  voici  bien  vengés,  et  je 
pense  que,  malgré  votre  charité  naturelle,  un 
sourire  un  peu  narquois  vous  sera  parfois  monté 
aux  lèvres. 

«  C'est  précisément  à  ces  principes  de  l'art 
médiéval,  aux  vôtres,  que  l'art  décoratif  moderne, 
s'il  veut  survivre,  doit  revenir  après  les  expérien- 
ces malheureuses  auxquelles  il  vient  de  se  livrer! 
C'est  à  ces  principes  qu'il  reviendra.  La  vague 
s'était  éloignée  d'eux.  Une  autre  vague  s'en  rap- 
proche. N'est-ce  pas  une  loi  éternelle  de  toutes 
les  bonnes  causes  : 

L'Idéal  est  fidèle  autant  que  l'Atlantique. 
11  fuit  pour  revenir...  Et  voici  le  reflux  !    » 

«  Le  reflux  !  Oui,  je  l'entends  qui  monte!  J'en- 
trevois pour  demain  le  développement  d'un  art 
décoratif  et  d'un  art  architectural  moins  préten- 
tieux et  plus  logiques,  déjà  préparés  et  manifestés 
par  votre  enseignement  fécond,  et  oii  les  principes 
que  vous  défendez  auront  reconquis  toute  leur 
prépondérance. 

«  Vous  ne  prétendez  pas,  vous  ne  pouvez  pas 
prétendre  ressusciter  ce  passé.  Les  hommes  ne 
ressuscitent  pas  les  morts.  Mais  vous  voulez,  et 
vous  avez  mille  fois  raison,  en  reprendre  la  tra- 
dition. Comment  continuer  cette  tradition,  sinon 
en  pénétrant  votre  activité  et  votre  enseignement 
artistiques  des  principes  dérobés  aux  anciens 
âges  ! 

«  Ces  principes,  vous  n'avez  rien  à  y  changer. 
Les  lois  du  Beau  sont  éternelles.  Elles  ne  relèvent 
ni  de  la  mode  ni  des  écoles.  C'est  seulement  dans 
les  applications  nouvelles  de  ces  principes  que 
la  vie  veut  être  reconnue,  et  qu'elle  réclame  de 
votre  œuvre  comme  de  toutes  les  œuvres,  de 
l'art  chrétien  comme  de  l'Église  elle-même,  cette 
perpétuelle  adaptation  aux  contingences  de 
chaque  jour,  sans  laquelle  votre  archaïsme  ne 
serait  que  l'archéologie.  La  fidélité  à  vos  prin- 
cipes, l'observance  de  vos  méthodes,  le  respect 
des  traditions  iconographiques  même,  ne  vous 
imposent  ni  stéréotypes  ni  canons  inflexibles. 

«  Les  bons  ouvriers  d'autrefois  connaissaient 
et  regardaient  aussi  les  belles  œuvres  dont  ils 


REVUE    UE   l'art  CHRÉTIEN. 
190I.    —   2"**^    LIVRAISON. 


I40 


3Rc\)Uc  tic  rart  cbvctieu. 


étaient  entourés.  Mais  jamais  leur  art  ne  se  figea 
dans  l'imitation.  Jamais  il  ne  se  réduisit  à  la 
sèche  répétition  des  œuvres  de  leurs  devanciers. 
La  cathédrale  de  Reims  ne  reproduit  pas  la  ca- 
thédrale de  Chartres...  Et  vous  méconnaîtriez 
l'exemple  de  ces  bons  ouvriers,  votre  état  d'âme 
serait  indigne  du  leur,  si  vous  vous  borniez  à  la 
copie  des  œuvres  qu'ils  vous  ont  léguées. 

«  Pour  vous  comme  pour  eux,  la  tradition  se 
complète  et  s'enrichit  chaque  jour  par  la  vision 
de  la  nature.  Nul  art  ne  fut  plus  près  de  la  vie 
que  l'ancien  art  gothique.  Nul  ne  puisa  plus  lar- 
gement aux  sources  de  l'observation  judicieuse 
des  êtres.  Et  l'on  ne  sait  pas  assez  à  quel  point 
le  concours  du  réel  contribua  à  la  vitalité  et  à  la 
popularité  de  notre  art  chrétien.  » 

M.  Carton  de  Wiart  développe  cette  der- 
nière idée,  en  analysant  les  beautés  de  la  flore 
médiévale,  à  laquelle  la  Revue  de  V Art  chrétien 
a  consacré  de  nombreux  articles.  Il  oppose  à  la 
décoration  si  réaliste  de  nos  contemporains,  telle 
par  exemple  que  celle  du  palais  du  mobilier  à 
l'Esplanade  des  Invalides,  l'admirable  intelli- 
gence des  gothiques  interprétant  la  nature. 

«  L'art  est  la  vérité,  sans  doute,  mais  «  la 
vérité  choisie  »,  suivant  le  mot  d'Alfred  de  Vigny, 
la  variété  appliquée  à  une  matière  destinée  à  un 
usage  précis. 

«  Vous  ne  trouverez  jamais  chez  les  gothiques, 
même  chez  les  flamboyants,  cet  emploi  irrationnel 
de  l'ornement. 


«  La  décoration  n'est  jamais  chez  eux  que  le 
développement  de  la  pensée  créatrice  de  l'archi- 
tecte. Elle  fait  corps  avec  les  organes  qu'elle 
revêt,  elle  est  régie  par  les  lignes  de  ces  organes. 
Chaque  détail  est  un  morceau  de  l'ensemble. 
On  ne  pourrait  l'amputer  sans  blesser  celui-ci 
jusqu'aux  sources  de  la  vie.  C'est  une  masse 
fondue  d'un  jet  avec  .ses  irrégularités,  ses  excrois- 
sances, ses  cavités.  Vienne  la  Renaissance,  les 
saillies  seront  des  superfétations.  Ce  ne  seront 
plus  les  traits  du  visage,  mais  des  taches  de 
beauté  ou  des  verrues.  Le  décorateur  se  bornera 
souvent  à  dessiner  sur  les  surfaces,  quelles 
qu'elles  soient,  des  attributions  parasitaires.  Et 
c'est  encore  la  faute  des  prétendus  novateurs 
d'aujourd'hui  qui  prodiguent  indifféremment  le 
même  tournesol  sur  le  plan  d'une  façade,  le  dos 
d'une  chaise,  le  manche  d'un  parapluie  et  le  tissu 
d'un  mouchoir.» 

Il  n'est  point  banal  de  voir  un  littérateur 
comme  M.  Carton  de  Wiart,  esthète  affiné, 
mais  étranger  à  la  pratique  de  l'art,  se  rendre 
compte  avec  tant  de  pénétration  des  secrets 
intimes  de  l'art  décoratif  sainement  entendu  ;  il 
est  rare  d'entendre  un  exposé  si  plein  de  charme 
de  ces  questions  si  importantes  et  essentielles 
de  l'esthétique  pratique.  Nous  félicitons  l'École  de 
Saint-Luc  d'avoir  rencontré,  en  face  de  tant  de 
détracteurs  jaloux,  un  défenseur  aussi  autorisé 
et  aussi  éloquent. 

L.  Cloquet. 


t^i^lii^ii^i^-^^  .^  .^  :^  .^  :^  .^  :;^  .^t  :^^  .^  ^^.^  ^  .^  .^^^  ^.  ^.  ^.  -^ 


^^^5^^g^^^  Ccrresponliante.  ^^^^^^^^ 


Italie. 

lialliD  (prolifnrc  ûc  Bcrgame):  Keatautation  ae 
freequEs.  —  Gjî^anaroolia  (ffiarrfjcjf)  :  Httributione  nc 
freaqufs.  —  BarDalgnc  :  Drcoiibrrtc  D'une  statue  te 
ÏJino  Eisano.  —  arblno  ;  ©ccoubette  Dano  les  arcljibes 
D'un  peintre  inconnu.  —  Boiiu'  :  Trabaur  Bana  lea  éalisco. 
—  JSatione  :  Déplacement  n'une  ftesquc. —  liorfto  :  lia 
Cbapellc  Des  Françaia.  —  Florence  ■■  Goliae  JSan  Hm= 
btoeio. 

Lallio. 

ETTE    localité    possède    une    petite 
église,  fondée  et  dotée  par  un  fidèle, 
en  1450,  en  l'honneur  de   saint  Ber- 
nardin  de  Sienne,  qui    résida  à  Ber- 
game  de  141 1  à  1430. 

L'oratoire  primitif  était  décoré  de  fresques  ; 
de  ces  peintures  du  XV<=  siècle,  il  ne  reste  qu'une 
figure  de  Saint  Sebastien  et  une  Madone  avec 
l'Enfant. 

Ce  morceau,  daté  de  1454,  a  été  déplacé  au 
XVI''  siècle  ;  les  autres  peintures  ont  été  dé- 
truites ou  recouvertes  de  nouvelles  fresques  à 
partir  de  1532. 

Plus  tard,  l'église  a  été  abandonnée  et  conver- 
tie en  magasin  de  céréales,  et  en  lazaret. 

En  1895,  on  a  commencé  les  restaurations  de 
maçonnerie,  d'architecture  et  de  peinture  ;  elles 
sont  terminées. 

Les  fresques  du  XVI''  et  du  XYII^  siècle  ont 
été  consolidées,  et  nettoyées,  par  M.  Valentino 
Bernardi,  de  Bergame.  Ce  vaillant  artiste  s'est 
acquis  une  juste  réputation  par  l'habileté  tech- 
nique et  le  goût  qu'il  met  dans  ses  travaux  de 
restauration  d'anciennes  peintures,  tableaux  et 
fresques. 

La  décoration  recouvre  toutes  les  surfaces  du 
sanctuaire. 

Elle  comprend  une  trentaine  de  compositions 
relatives  aux  faits, de  la  vie  de  la  Vierge,  de 
Notre-Seigneur  et  de  saint  Bernardin  de  Sienne, 
et  de  plus,  une  centaine  de  figures  isolées  de 
Saints,  de  Prophètes  et  de  Sibylles. 

Trois  peintres  surtout  ont  contribué  à  ces 
travaux  ;  l'un  d'un  médiocre  talent,  qui  a  signé 
T.  L.,  est  inconnu  ;  il  a  travaillé  vers  1619. 


Un  autre  a  signé  : 

Hieronintus  de  Colleoni  pinxit  1532.  Il  a  fait 
les  scènes  de  la  Vie  de  Jésjis- Christ,  une  Ataion- 
ciation  et  une  vingtaine  de  figures  isolées. 
Siret,  dans  son  Dictionnaire,  dit  de  lui  ; 
«  Élève  de  Titien  ;  peu  apprécié  dans  sa  patrie 
«  (Bergame),  il  alla  s'établir  à  Madrid  et  ne 
<<  laissa  en  Italie  qu'un  cheval  peint  sur  une 
«  façade  avec  cette  inscription  :  Nevio  fropheta 
i  in  patria.  1> 

Baschenis    (Évariste)    (1617-1677)  a    fait     la 
Vie  de  saint  Bernardin,  une    Annonciation,  et 
une  trentaine  de  figures  isolées. 
Siret  dit  de  lui  : 

«  Instruments  de  musique,  fruits,  nature 
«  morte  ;  vérité  extraordinaire  ;  relief  magni- 
«  fique  ;  ses  petits  tableaux  furent  nommés  des 
«  trompe-l'œil.  » 

On  voit,  d'après  ce  que  je  cite  de  Siret,  très 
consciencieux  cependant,  combien  il  est  difficile 
de  faire  un  Dictionnaire  des  Peintres  et  combien 
il  serait  nécessaire  qu'un  éditeur  entreprît  un 
nouvel  ouvrage  de  ce  genre. 

J'insiste  sur  cette  question  ;  il  me  semble 
qu'une  Société  de  Beaux- Arts  ou  un  Syndicat 
de  sociétés  pourraient,  à  défaut  d'un  éditeur,  se 
mettre  à  la  tête  d'une  pareille  entreprise  ;  ce 
serait  un  grand  service  à  rendre  à  l'histoire  de 
l'art. 

Des  fresques  de  Colleoni  et  de  Baschenis  il  n'y 
a  rien  à  dire  de  spécial  ;  elles  sont  dans  le  goût 
du  temps,  mais  sans  exagérations  de  gestes,  ce 
qui  est  un  mérite  pour  l'époque  ;  ce  sont  d'hono- 
rables peintures. 

La  fresque  :  La  Madone  et  l'Enfant,  de  1454, 
avait  été  repeinte,  partie  à  tempera,  partie  à 
l'huile.  Le  fait  n'est  pas  très  rare,  mais  il  est  bon 
de  le  signaler.  La  critique  d'art  se  fait  souvent  à 
la  légère,  et  il  est  possible  qu'en  présence  de  cet 
ouvrage,  et  de  cette  date,  un  écrivain  à  courte  vue 
aurait  conclu  que,  dès  le  milieu  du  XV"^  siècle, 
on  peignait  en  Italie  à  l'huile  sur  les  murailles  ; 
on  a  imprimé  des  erreurs  de  cette  force. 

Le  peintre  qui  a  repeint  cette  Madone  et  l'En- 
fant n'a  pas  même  observé  les  couleurs  de  la 
fresque  ;  la  tunique  de  l'Enfant  était  jaune,  il  l'a 


142 


3Rel)uc  ïie  V^xt  cf)vctieu» 


mise  en  blanc  avec  ornements  noirs  ;  le  manteau 
de  la  Madone,  qui  était  blanc,  a  été  repeint  en 
bleu  ;  le  fond  également  a  été  modifié.  M.  Va- 
lentino  Bernardi  a  très  habilement  enlevé  cette 
seconde  couche  et  rétabli  la  fresque  dans  son 
état  primitif. 

Esanatoglia  (Marches). 

Ce  ne  sont  pas  des  découvertes  de  peintures 
qu'on  signale  de  cette  localité,  mais  l'existence 
d'ouvrages  qui  ne  paraissent  pas  avoir  été  men- 
tionnés jusqu'à  présent. 

Dans  l'église  désaffectée  de  Sainte-Catherine, 
et  convertie  en  écurie,  on  voit  une  grande  fres- 
que, divisée  en  compartiments,  représentant  la 
Crucifixion,  avec  la  Vierge,  les  saints  Tean-Bap- 
tiste,Antoine  de  Padoue,  Anatole,  Antoine  abbé, 
et  sainte  Catherine  ;  sous  le  motif  central  se 
trouve  en  caractères  du  temps  l'inscription  rom- 
pue suivante  : 

...  IVI  ...  LXVI  ...  OP  ...  aTa:  s.  ANTÔÏT 

FRCI  RICCAR  ...  HANC.  BASILICAM. 

FABRICAVIT.  MCCCLXII 
d'où  on  a  conclu  que  l'église  a  été  construite  en 
1362,  et  la  peinture  exécutée  en  1366. 

La  fresque  est  en  assez  bon  état. 

Par  analogie  de  style,  on  pense  que  le  peintre 
est  Diotisalvi  di  Angeluziode  Esanatoglia,  élève 
de  Francescuccio  Chisi  da  Fabriano  ;  ce  Dioti- 
salvi a  peint  vers  la  même  époque  des  fresques 
dans  l'église  de  Saint-François  à  San  Séverine 
(Marches)  comme  l'indique  l'inscription: 

HOC  OPVS  FECIT  FIERI  NOBILIS  ET 
POTENS  VIR  ISMEDVTIVS  PER  MANVS 
DETTALEVE  ANGELVTI  DE  SA  ANATOLIA 
AN.  DMI  MCCCLXXII  DIE  XXIV  MENSIS  MAIJ. 

Dettaleve,  Diotisalvi, ou  Diotallevi, comme  on 
lit  ailleurs,  est  le  même  homme. 

Et  voilà  encore  des  noms  pour  le  futur  Dic- 
tionnaire des  Peintres. 

Ile  de  Sardaigne. 

On  a  trouvé,  dans  un  magasin  de  l'ancien  cou- 
vent de  San  Francesco  in  Oristano,  une  statue 
représentant  un  évoque,  à  mi-grandeur  de  na- 
ture, en  très  bon  état  de  conservation. 

Sur  le  socle  : 

NINVS  :  MAGISTRI  :  ANDREE  :  DE  : 
PISIS  :  ME  :  FECIT 


Nino  Pisano,  fils  du  célèbre  Andréa  Pisano,  a 
laissé  plusieurs  sculptures  à  Pise  ;  il  a  travaillé 
avec  son  père  à  la  porte  du  baptistère  de  Saint- 
Jean  à  Florence,  fondue  en  1332. 

C'était  un  excellent  sculpteur,  mais  la  gloire 
de  son  père  a  éclipsé  le  renom,  qu'au  dire  de 
Vasari,  il  devrait  tenir  dans  la  sculpture  toscane 
du  XIV«  siècle. 

Urbino. 

On  trouve  fréquemment  en  Italie  des  pein- 
tures dont  les  auteurs  sont  inconnus,  mais  plus 
rarement  des  peintres  dont  les  peintures  sont 
perdues  en  totalité. 

Le  cas  vient  de  se  présenter  à  Urbino  ;  dans 
les  archives  locales  on  a  constaté  l'existence  de 
Jacomo  de  Mastro  Piero  ;  ce  peintre  était  un 
frère  de  la  compagnie  de  saint  Antoine  abbé  ; 
de  141 1  à  1434  il  a  exécuté  des  travaux  pour  sa 
Confrérie,  pour  les  églises  d'Urbino,  et  peut-être 
pour  la  cité  de  Bologne. 

Les  archives  d'Urbino  mentionnent  un  Saint 
Jacques,  une  Crucifixion  et  Vinsegna ,  la  ban- 
nière de  sa  confrérie. 

La  découverte  a  de  l'intérêt  pour  Urbino,  car 
du  premier  peintre  de  cette  cité,  Giuliano,  qui 
travaillait  en  1366,  au  second,  Salimbene,  qui  a 
terminé  en  1416  les  fresques  de  l'église  Saint- 
Jean,  il  y  avait  une  lacune. 

Rome.  —  Restaurations  d'églises. 

Nous  avons  annoncé  que  le  ministère  de  l'In- 
struction publique  faisait  restaurer  les  églises  : 
Sainte-Cécile,  Gesù,  Sainte-Marie  in  Via,  Saint- 
Martin  ai  monti  ;  Sainte-Marie  délia  Scala, 
Sant-Onofrio. 

A  cette  liste  il  faut  ajouter  : 

Sainte- Marie  sur  Minerve:  les  travaux  con- 
sisteront à  mettre  l'extérieur,  fort  peu  digne  du 
monument  et  des  œuvres  d'art  qu'il  renferme, 
un  peu  plus  en  rapport  avec  la  richesse  de  l'inté- 
rieur. 

Sainte-Marie- Madeleine.  Cette  église  est  peu 
visitée  ;  elle  a  été  construite  sous  le  pape  Inno- 
cent XI  (pontificat  de  1676  à  1689)  à  côté  du 
couvent  des  Pères  ministres  des  infirmes,  fondé 
en  1484  par  saint  Camille  de  Lellis. 

L'église  renferme  de  nombreuses  peintures 
dont  une  a  joui  d'une  certaine  célébrité.  C'est 


Corres^ponliante. 


143 


le  Saint  Laurent  Giiistiniani  par  le  chevalier 
Lucca  Giordano  (1632-1705). 

On  veut  que  cette  peinture  ait  été  exécutée  en 
une  seule  nuit,  et  c'est  à  cette  circonstance  que 
le  tableau  a  dû  son  renom.  Les  tableaux  de  ce 
peintre  se  comptent  par  centaines,  il  travaillait 
tellement  vite  qu'en  Italie  on  lui  a  donné  le  sur- 
nom de  Fa  Presto.  Son  style  maniéré  est  con- 
damné maintenant,  mais  de  son  vivant  il  lui  a 
valu  une  très  grande  célébrité. 

Giordano  est,  avec  beaucoup  d'autres  peintres, 
un  exemple  de  la  fragilité  des  réputations. 

S  a  voue. 

Le  peintre  Paul  Jérôme  Hrusco  (1742-1S20) 
avait  peint  à  Savone,  vers  la  fin  du  siècle  der- 
nier, dans  l'église  des  Saints-Jean  Baptiste-et- 
Dominique,  une  fresque  représentant  l'apothéose 
de  saint  Dominique.  La  peinture,  étant  en  péril, 
a  été  transportée  sur  toile  par  le  professeur 
Bigoni  de  Modène  ;  l'opération  a  très  bien 
réussi  ;  elle  mérite  d'être  citée,  la  fresque  mesu- 
rant environ  vingt-huit  mètres  carrés. 

C'est  par  erreur  que  Siret  a  écrit  Brusca. 

Il  ne  faut  pas  confondre  Brusco  de  Savone 
avec  le  hollandais  Poelenburg,  surnommé  Brusco 
en  Italie,  à  cause  de  son  mauvais  caractère. 

Cette  recommandation  peut  paraître  puérile  ; 
mais  il  y  a  dans  les  écrits  sur  l'art  tant  d'erreurs! 

Loreto. 

M.  Charles  Lameire,  le  peintre  français  bien 
connu  par  ses  peintures  murales  et  ses  composi- 
tions inspirées  d'un  profond  sentiment  chrétien, 
a  passé  les  mois  de  septembre,  d'octobre  et  de 
novembre  à  Lorette  à  travailler  aux  peintures 
de  la  chapelle  française,  dédiée  à  saint  Louis, 
roî  de  France. 

Les  principaux  sujets  confiés  à  M.  Lameire 
sont  :  Sa27it  Louis,  Les  Croisades,  La  France 
ckre'tienne. 

Nous  reviendrons  sur  les  très  importants  tra- 
vaux de  cet  artiste  et  sur  toute  la  nouvelle  dé- 
coration de  l'église,  d'autant  plus  qu'une  des 
chapelles  a  été  réservée  à  la  Belgique. 

L'Italie,  l'Espagne,  la  Hongrie  ont  également 
leurs  chapelles  dans  la  célèbre  basilique. 

Florence. 

L'église  San  Ambrogio,  qui  était  fermée  depuis 
quelque  temps  pour  réparations  intérieures,  est 
de  nouveau  ouverte. 


Elle  est  peu  visitée  par  les  voyageurs,  bien- 
qu'elle  mérite  l'attention. 

Son  origine  remonte  au  X«  siècle,  mais  depuis 
elle  a  subi  des  modifications  qui  en  ont  changé 
le  caractère. 

Elle  renferme  deux  ouvrages  d'art  très  remar- 
quables. 

Un  autel  en  marbre  par  Mino  da  Fiesoîe 
exécuté  en  1481. 

C'est  l'occasion  de  faire  remarquer  que  le  mot 
da  devant  le  nom  d'une  localité  veut  dire  géné- 
ralement que  la  personne  dont  il  est  question 
est  native  de  cet  endroit  ;  mais  il  y  a  des  excep- 
tions ;  Mino  n'est  pas  né  à  Fiesole  mais  à  Poppi 
dans  le  Casentin  ;  il  s'est  illustré  pendant  qu'il 
demeurait  à  Fiesole,  d'oia  son  nom  de  Mino  da 
Fiesole. 

L'autre  ouvrage  est  une  fresque  par  Cosimo 
Roselli,  peinte  en  i486  ;  elle  montre  une  proces- 
sion de  la  Fête-Dieu.  Roselli  a  d'autres  ouvrages 
à  Florence  :  des  tableaux  à  la  galerie  des  Offices 
et  dans  diverses  églises.  Dans  l'atrium  de  la 
Santissima  Annunziata,  il  a  peint  Saint  Philippe 
Beniszi prenant  l'habit  des  Servîtes  ;  cette  fresque 
fait  partie  de  la  suite  célèbre  où  Andréa  del 
Sarto  a  représenté  la  Vie  du  Saint,  l'un  des 
fondateurs  de  l'Ordre  florentin  des  Servîtes,  qui 
a  conservé  les  fonctions  du  culte  à  la  Santissima. 

Malheureusement  la  Procession  de  Roselli  est 
en  très  mauvaise  lumière  ;  c'est  un  très  bel  ou- 
vrage. Vasari  !e  tient  pour  le  meilleur  du  peintre: 
'i  il  le  fit,  écrit-il,  pour  les  religieuses  de  Saint- 
«  Ambroise  ;  un  nombreux  clergé  accompagne 
«  le  prêtre,  qui  est  suivi  d'une  infinité  d'hommes 
«  et  de  femmes,  selon  la  coutume  du  temps  ;  plu- 
«  sieurs  personnages  sont  des  portraits  pris 
«  d'après  nature  ;  on  remarque,  entre  autres,  celui 
«  de  Pic  de  la  Mirandole,  qui  est  tellement  res- 
«  semblant,  qu'on  croirait  le  voir  lui-même.  » 

Le  célèbre  philosophe  est  représenté  dans  la 
fresque  en  pourpoint  rouge  et  bonnet  violet. 

La  Procession,  très  populaire  à  Florence,  avait 
pour  objet  la  présentation  au  peuple  du  calice 
dans  lequel  le  prêtre  Uguccione  avait  trouvé  du 
sang  divin. 

L'autel  de  Mino  avait  été  édifié,  sur  la  com- 
mande de  l'abbesse  Barbadori,  pour  renfermer  le 
calice. 


144 


9^rl)uc  tic  r^vt  c!)vctieu. 


L'église  de  Saint- Ambroise  conserve  les  restes 
d'artistes  célèbres  :  Mino,  sculpteur(  1 43 1  ►!<  1484); 
Granacci  (Francesco),  peintre  (1447  -i*  I543); 
Simone  del  PoUajulo,  dit  Cronaca(  1457  ►!<  1508), 
architecte  ;  Verrocchio,  peintre  et  sculpteur 
(1435  ►{.  1488). 

Sur  la  proposition  d'un  érudit  florentin,  très 
dévoué  à  la  gloire  de  la  cité,  M.  Pietro  Fran- 
ceschini,  les  membres  du  Cercle  des  Artistes  et 
de  l'Académie  de  dessin  vont  faire  poser  dans 
le  sanctuaire  une  plaque  de  marbre  commémo- 
rative  en  l'honneur  des  illustres  défunts. 

C'est  un  bon  exemple  à  signaler  ;  ce  genre  de 
manifestations  vaut  mieux  que  des  discussions 
sur  l'esthétique  et  la  philosoiihie  de  l'art,  trop 
fréquentes    aujourd'hui    dans    les    Sociétés    de 

Beaux  Arts. 

GERSPACH. 
Florence,  décembre  1900. 


Tableau  DcDicatoirc  De  la  cl)apelle  De 
la  Saintc=Trinitc  à  Hublin. 

(Boj,iflume  Oe  Eoloonc.) 

YANT  trouvé  dans  la  MonograpJiie 
des  églises  catholiques  du  royaume  de 
Pologne,  la  description  d'un  vieux 
tableau  dédicatoire  du  XIV''  siècle, 
j'ai  pu  en  obtenir  une  copie  faite  spécialement  à 
l'intention  de  \2.  Revue  de  l' Art  chrctien;)c  l'ajoute 
à  la  description  de  la  peinture,  rédigée  par  l'artiste 
Joseph  Smolenski,  auteur  de  la  trouvaille,  auquel 
je  laisse  la  parole. 

«  Le  26  février  1899,  visitant  la  chapelle  du 
château  deLublin,  j'aperçus  à  l'endroit  d'oia  venait 
de  se  détacher  un  gros  morceau  de  plâtre,  un 
ancien  motif  d'ornementation.  Piqué  de  curiosité, 
avec  grande  précaution,  je  détachai  le  plâtre  sur 
toute  la  surface,et  j'aperçus  un  tableau  tout  entier. 
Il  était  impossible  de  le  photographier,  le  tableau 
n'étant  pas  peint  sur  une  surface  plane,  mais  sur 
une  tour  ronde,  d'un  diamètre  de  16  à  20  pieds, 
liante  de  30  pieds  environ.  J'en  fis  donc  une  copie, 
que  je  joins  ici. 

«  L'entrée  de  la  tour  est  surmontée  d'une 
arcade:  elle  est  étroite  à  l'intérieur,  évasée  exté- 
rieurement. Elle  sert  à  la  fois  d'entrée  au  chœur, 
où  se  trouvait  l'orgue,  aujourd'hui  disparu. 


«  La  galerie  du  chœur,  en  bois  de  mélèze,  est 
garnie  de  poutres  sculptées  de  style  gothique, 
avec  des  rosaces  aux  joints. 

«  La  tour  se  rétrécit  vers  le  haut;  elle  n'a  rien 
de  commun  avec  l'architecture  de  la  chapelle  et 
ses  profondes  fondations  sont  indépendantes  de 
celles  des  caveaux  de  l'église.  On  pouvait  sup- 
poser que  c'est  une  des  anciennes  tours  du  châ- 
teau de  bois. 

«  A  l'époque  oij  le  château  fut  rebâti,  et  oîi  la 
chapelle  fut  construite,  l'architecte  du  roi  de 
Pologne,  Casimir  le  Grand,  utilisa  cette  ancienne 
tour,  pour  en  faire  le  point  d'appui  de  la  galerie 
du  chœur. 

«  Le  tableau  découvert  est  peint  au  moyen  des 
procédés  de  la  fresque,  en  usage  depuis  de  longs 
siècles  :  sur  un  crépi  de  chaux,  on  étendait  une 
fine  couche  de  mortier,sur  laquelle,  encore  fraîche, 
on  exécutait  la  peinture.  Les  couleurs  sont  si 
adhérentes,  qu'il  est  impossible  de  les  laver;  la 
couleur  verte  particulièrement  s'est  conservée 
jusqu'ici  dans  une  fraîcheur  étonnante. 

«  Sur  les  murs,  à  la  même  hauteur,  suivent 
d'autres  compositions.  Elles  forment  un  cycle 
représentant  les  principaux  événements  du  règne 
de  Ladislas  Jagellon.  La  disposition  symétrique 
des  panneaux,  l'harmonie  des  ornements  et  des 
motifs  romano-gothiques  appliqués  à  l'architec- 
ture, la  perfection  de  la  perspective  et  du  jeu 
des  lumières,  le  sentiment  de  la  couleur,  enfin  la 
connaissance  des  règles  de  l'iconographie,  nous 
confirme  dans  la  conviction  que  l'auteur  était  un 
artiste  de  profession. 

«  Bien  plus,  étant  donnés,  d'une  part,  les  procè- 
des employés,  et  d'autre  part,  le  fait,  que  Ladislas 
Jagellon  reconstruisit  la  chapelle,  on  peut  ad- 
mettre que  l'auteur  des  fresques  fut  Wladyck, 
ruthénien  de  Kiew,  dont  parle  le  baron  Rasta- 
wiecki,  dans  son  Dictionnaire  des  peintres 
polonais.  Cette  supposition  est  confirmée  par 
l'abbé  A.  Wadowski,  connu  dans  l'histoire  des 
églises  du  diocèse  de  Lublin,  et  qui  assure  que 
les  peintures  seules,  et  non  les  constructions, 
furent  exécutées  sous  ce  monarque. 

«  L'aspect  général  des  peintures  nous  autorise 
à  croire  que  l'artiste  y  donne  en  quelque  sorte 
un  type  de  la  polychromie  gothique.  Le  ton  du 
ciel  est  gros  bleu   foncé  :  le  château,  crénelé  au 


CorreeponDance, 


145 


haut  des  murs,  est  garni  de  nombreux  contre- 
forts. (Au  grenier  du  château  actuel  se  trouvent 
les  traces  d'une  communication  avec  les  nou- 
veaux murs  du  pignon  bâti  au  commencement 
du  XIX^  siècle.)  La  couleur  du  château  est  rouge 
brique,  l'encadrement  des  fenêtres  et  de  l'embra- 
sure des  canons  est  couleur  de  pierre  :  l'église 
sur  le  tableau  est  également  d'un  ton  rouge  :  elle 
est,  ainsi  que  les  contreforts,  couverte  de  tuiles. 
(Le  fronton  de  la  chapelle  actuelle   a  été  refait, 


dans    le    style    de    la    renaissance    italienne    du 
XVL  siècle.) 

«  La  principale  figure  du  tableau  est  la  sainte 
Vierge  avec  l'Enfant  Jésus  sur  les  bras.  Elle  est 
assise  sur  un  trône  d'or  de  style  roman  :  son 
manteau  est  de  couleur  amarante  foncé  à  bor- 
dure d'or,  la  robe  bleu  clair.  L'Enfant  Jésus  porte 
un  manteau  de  drap  d'or,  une  robe  blanche  semée 
d'étoiles  rouges;  il  tient  à  la  main  un  volumen  de 
parchemin. 


l^^^^-!^'^'l^:!^:^\l^:S^'l^:m'^'-:^:!^if^ 


Peinture  murale  dédicatoire  à  Lublin. 


«  A  gauche  du  tableau  se  tient  S.  Clément,  pa- 
tron des  Slaves,  ou  bien  le  fondateur  de  l'Ordre 
des  Basiliens,  S.  Basile.  Le  saint  est  blond,  il  est 
coiffé  d'un  bonnet  jaune  clair  à  liserés  bleus,  sem- 
blable à  ceux  que  porte  le  peuple  dans  le  Gou- 
vernement de  Lublin.  Il  est  vêtu  d'un  manteau 
couleur  chair  et  d'une  robe  violette,  il  tient  à  la 
main  un  cartel. 

«  A  gauche,  un  second  personnage,  probable- 
ment S.Nicolas,  pour  quiLadislasJagellon  profes- 
sait une  dévotion  particulière,  en  chape  de  drap 
d'or  et  en  pallium  archiépiscopal  de  laine  blanche, 
timbré  de  croix  noires,  sous  lesquelles  sont  visi- 
bles en  vert  les  signes  de  svastica.  Le  pallium  se 
termine  par  des  franges  noires. 


«  Le  personnage  agenouillé  devant  la  Ste 
Vierge  représente  probablement  le  roi  Ladislas; 
sa  tête,  d'une  calvitie  naissante,  est  plus  achevée 
que  les  autres.  Sa  chevelure  est  de  couleur  châtain 
foncé,  les  traits  sont  expressifs.  Il  est  revêtu  d'un 
manteau  de  pourpre,  doublé  d'hermine,  d'une 
longue  robe  noire,  retenue  par  une  ceinture  in- 
crustée d'or.  Le  page  blond,  debout  derrière  le 
roi,  l'épée  sur  l'épaule,  porte  un  manteau  rouge, 
et  une  cuirasse  :  sa  tunique  courte  est  verte, 
bordée  de  jaune,  ses  chausses  grises  sont  collan- 
tes ;  la  chaussure  est  nouée  avec  des  courroies  ; 
il  porte  au  côté  une  escarcelle  jaune. 

«  Derrière  lui  se  tient  debout,  l'air  humble,  un 
homme  blond  à  barbe,  en  robe  et  manteau  gris. 


146 


îRêbue  tie  l^^rt  cbréricn. 


«  Le  terrain  du  tableau  est  vert  clair,  encadré 
d'une  large  bande  rouge  bordée  d'une  ligne 
blanche.  Au  bas  sous  cette  bande,  on  voit  une 
frise  noire,  bordée  en  haut  et  en  bas  de  blanc  ; 
elle  est  recouverte  d'ornements  gris  de  style 
roman. 

«  Sous  la  frise  se  trouve  également  une  bande 
rouge,  sur  laquelle  sont  tracées,  avec  un  instru- 
ment aigu,  des  signatures  en  langues  polonaise, 
ruthène,  allemande,  grecque  et  latine.  Ces  signa- 
tures, dont  quelques-unes  accompagnées  d'ar- 
moiries, sont  suivies  de  dates  depuis  le  X  V^  siècle 
jusqu'au  commencement  du  XVI<". 


«  Sous  la  bande  rouge,  est  peinte  une  baguette 
jaune,  où  sont  enfilés  des  anneaux  servant  à 
suspendre  un  rideau  jaune  foncé  qui  termine  l'en- 
semble. 

«  L'entrée  de  la  cage  de  l'escalier  se  trouve 
sous  le  tableau.  Elle  est  ornée  d'un  encadrement 
de  bandes  rouges.  Sur  la  frise  noire  court  une 
ornementation  blanche  en  forme  de  serpent.  Sur 
les  chambranles  sont  peintes  des  rosaces  multi- 
colores à  ornements  noirs.  > 

A.  Brykczynski. 

Curé  de  Goworowo. 


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Trabauv  Des  Sociétés  savantes.  ^^^^ 


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Société  des  Antiquaires  de  France.  — 
Séance  du  28  novembre  içoo.  —  M.  le  général  de 
La  Noë  produit  deux  fragments  vitrifiés  confir- 
mant la  théorie  de  la  vitrification  accidentelle 
des  enceintes  fortifiées. 

M.  Héron  de  Villefosse  présente  quelques  ob- 
servations sur  les  deux  bas-reliefs  de  Varbely, 
portant  des  représentations  du  «  dieu  au  mar- 
teau »  publiées  en  1892,  par  M.  Blanchet,  dans 
le  Bulletin  delà  Société. 

M.  Collignon  communique  de  nouvelles  remar- 
ques sur  le  torse  Clazomène,  appartenant  au 
mu.sée  d»i  Louvre,  que  vient  compléter  aujour- 
d'hui un  fragment  de  la  partie  inférieure. 

M.  Paul  Girard  présente  l'estampage  d'un  frag- 
ment de  marbre  antique  conservé  au  musée  de 
Saint-Malo  et   représentant  une  scène  d'adieux. 

Séance  du  iç  décembre.  —  M.  Durrieu  signale 
dans  un  manuscrit  de  la  bibliothèque  d'Albi 
deux  portraits  de  Jacques-Antoine  Marcello, 
général  vénitien  connu  pour  avoir  eu  avec  le  roi 
René  des  relations  d'amitié  très  intéressantes  au 
point  de  vue  de   l'histoire  littéraire. 

M.  Maurice  fait  une  communication  sur  le 
parti  que  l'on  peut  tirer  de  la  classification  chro- 
nologique des  monnaies  de  quelques  ateliers 
(Rome-Tarragone-Londres)  pour  déterminer  la 
politique  de  l'empereur  Constantin  pendant  les 
premières  années  de  son  règne. 

M.  Héron  de  Villefosse  communique  à  la 
Société  des  moules  provenant  d'une  trouvaille 
faite  à  Tortose  fSyrie)  et  qui  paraissent  consti- 
tuer le  matériel  d'un  orfèvre. 

M.  Paul  Monceau  entretient  la  Société  -de 
diverses  marques  de  carrière  se  trouvant  sur  des 
blocs  de  marbre  provenant  de  .Synnada  et  les 
compare  à  des  marques  de  carrière  d'autre  pro- 
venance. 

M.  le  D"^  Capitan  présente  à  la  Société  un 
casque  de  bronze  appartenant  au  D'  Bonneau 
de  Mantes,  trouvé  à  Raugiport  et  dont  la  date 
paraît  incertaine. 

Séance  du  .^janvier  içoi.  —  M.  de  Lasteyrie, 
élu  président,  fait  l'éloge  de  son  prédécesseur, 
M.  de   Barthélémy. 

M.  Hamy  communique  une  élégante  minia- 
ture, découverte  par  M.  Gustave  Schlumberger 
dans  la  collection  du  comte  de  Ganay  au  château 
de  Courances,  et  qui  représente  un  groupe  de 
guerriers  en  costume  du  temps  de  Charles  IX, 
conduits  par  un  chef   indien  devant  un  pilier  de 


pierre  aux  armes  de  France,  entouré  de  sauvages 
qui  lui  rendent  hommage.  Cette  scène  est  l'exacte 
traduction  d'un  des  récits  de  voyage  en  Floride 
du  capitaine  Landonière,  amené  ainsi  par  le 
chef  Satouriona  devant  \s. padron  dressé,  quatre 
ans  auparavant,  par  Jean  Ribault.  Cette  jolie 
peinture  a  pour  auteur  le  peintre  de  l'expédition. 
Le  Moyne  de  Morgues  ;  elle  a  été  gravée  par 
Th.  de  Bry  dans  la  seconde  partie  de  son  Amé- 
rique, publiée  en  1591. 

M.  l'h.  Berger  fait  passer  sous  les  yeux  de 
l'Académie  une  cymbale  avec  inscription  phé- 
nicienne, qui  a  été  trouvée  par  le  P.  Delattre  au 
cours  de  ses  fouilles  à  Carthage.  D'après  l'exa- 
men de  cette  cymbale  et  d'autres  semblables,  il 
y  aurait  lieu  de  conclure  qu'on  s'est  trompé  en 
considérant  comme  un  poids  ou  une  sous-coupe 
de  candélabre  l'objet  généralement  connu  sous 
le  nom  de  «  Poids  d'Iôl  »  ;  cet  objet  n'est  autre 
chose  qu'une  véritable  cymbale  du  même  genre 
que  celle  du  P.  Delattre. 

M.  Héron  de  Villefosse  commutn'que  des  ren- 
seignements précis  sur  la  célèbre  inscription 
bilingue  de  Malte,  aujourd'hui  conservée  au 
musée  du  Louvre. 

M.  HomoUe,  directeur  de  l'École  d'Athènes, 
rend  compte  des  fouilles  exécutées,  au  cours  de 
l'année  dernière,  par  les  membres  de  l'Ecole, 
notamment  en  Grèce  et  en  Crète,  et  signale  les 
principales  découvertes. 


Académie  des  Inscriptions  et  Belles- 
Lettres.  —  Séance  du  2j  novembre  içoo.  — 
M.  de  Lasteyrie,  en  l'absence  du  président, 
adresse  à  M.  Wallon,  secrétaire  perpétuel,  une 
allocution  a  l'occasion  du  cinquantenaire  de  son 
élection  comme  membre  de  l'Académie. 

Après  ce  discours,  accueilli  par  de  vifs  applau- 
dissements, M.  Wallon,  très  ému,  prend  la  parole 
pour  remercier  l'Académie  de  ce  témoignage  de 
sympathie  ;  il  lit  ensuite  une  notice  sur  Quatre- 
mère  de  Quincy  qu'il  remplaça,  il  y  a  cinquante 
ans,  et  il  insiste  particulièrement  sur  sa  vie  poli- 
tique pendant  la  période  révolutionnaire. 

M.  S.  Reinach  étudie  une  inscription  grecque, 
connue  seulement  par  des  copies,  qui  surmontait 
l'entrée  de  la  niche  où  fut  découverte  la  Vénus 
de  Milo.  Il  propose  une  restitution  nouvelle  et 
insiste  sur  ce  fait,  à  ses  yeux  certain,  que  cette 
inscription  n'a  rien  de  commun  avec  la  Vénus 
de  Milo. 


REVUE  DR  l'art   CHRÉTIEN. 
1901.    —    a'"^    LIVRAISON. 


148 


WitWt  lie  r^rt  cbrctieiu 


M.  Reinach  parle  ensuite  des  inscriptions  gra- 
vées sur  les  bases  des  deux  hermès  trouvés  avec 
la  Vénus  de  Milo  et  affirme  qu'elles  aussi  sont 
tout  à  fait  étrangères  à  cette  statue.  Celle  de  la 
base  d'Héraklès  jeune  doit  appartenir  à  une 
sculpture  toute  différente  et  d'au  moins  un  siècle 
postérieure  au  chef-d'œuvre  du  Louvre. 

S/ance  du  30  novembre.  —  M.  le  docteur 
Hamy  fait  hommage  d'une  gravure  très  rare  de 
Girardot  et  que  ne  possédait  pas  la  bibliothèque 
de  l'Institut,  représentant  la  première  séance 
tenue  par  l'Institut  au  Louvre,  dans  la  salle  des 
Cariatides,  le  15  germinal  an  IV. 

Séance  du  5  décembre.  —  Il  est  procédé  au  re- 
nouvellement du  Bureau  et  à  l'élection  d'un  mem- 
bre résidant,  en  remplacement  de  M.  Samuel 
Berger. 

Séance  du  7  décembre.  —  Après  un  comité 
secret,  il  est  procédé  à  l'élection  d'un  membre 
ordinaire,  en  remplacement  de  M.  Ravaisson. 
M.  L.  Léger,  professeur  de  langue  et  littérature 
slaves  au  Collège  de  France  est  élu. 

Séance  du  ji  janvier  içoi.  —  M.  Heuzey  fait 
connaître  un  travail  qu'il  a  fait  conjointement 
avec  M.  de  Sarzec,  sur  une  «Villa  royale  chal- 
déenne  vers  l'an  4000  avant  J.-C.  ».  Cette  villa  fut 
mise  au  jour  par  les  fouilles  qu'a  fait  exécuter 
M.  de  Sarzec  depuis  1888,  pour  la  mission  fran- 
çaise de  Chaldée,  sur  une  station  historique  la 
plus  ancienne  qu'on  ait  découverte  dans  ce  pays. 

M.  Reinach  commente  le  sujet  d'un  des  deux 
bas-reliefs  du  musée  de  Constantinople  dont  il  a 
déjà  parlé  à  l'Académie.  Ce  bas-relief  archaïque, 
découvert  à  Chalcédoine,  représente  Jupiter 
accouchant  de  Minerve  entre  deux  divinités  de  la 
délivrance. 

Séance  du  18 janvier.  —  Le  président  donne 
lecture  d'une  lettre  de  M.  Huillier,  notaire  à 
Paris,  accompagnant  le  texte  d'un  testament  par 
lequel  M""^  Pellechet  lègue  à  l'Académie  des 
Inscriptions  et  Belles- Lettres  une  somme  de 
300,000  francs  qui  sera  em[)loyée  à  conserver 
les  monuments  existant  en  France  et  aux  co- 
lonies présentant  un  intérêt  historique  ou  archéo- 
logique. 

M.  S.  Reinach  donne  lecture  d'une  lettre  de 
M.  Cavvadias,  directeur  des  antiquités  en  Grèce, 
sur  la  découverte  de  statues  et  de  fragments  en 
marbre  et  en  bronze  recueillis  dans  la  mer,  à 
quarante  mètres  de  profondeur,  près  de  la  petite 
île  de  Cerigotto,  et  provenant  d'un  naufrage  qui 
date  de  l'époque  romaine. 

M.  Clermont-Gaiineau  fait  une  communication 
sur  un  sceau  de  l'époque  des  croisades  provenant 


de  la  léproserie  de  Saint-Lazare  de  Jérusalem, 
que  lui  a  envoyé  le  l'.  Paul  de  Saint-Aigiian  et 
qui  représente  un  lépreux. 

M.Antoine  Cabaton,  membre  de  l'École  fran- 
çaise d'Extrême-Orient,  rend  compte  de  la  visite 
archéologique  qu'il  a  faite  des  monuments 
khmers  de  la  province  de  Bâti  et  de  Kompong- 
Cham. 

Séa7ice  du  2^  janvier.  —  M.  H.  de  La  Tour 
présente  à  l'Académie  la  reproduction  d'une 
monnaie  de  bronze  découverte  à  Gergovia;  c'est 
la  première  frappée  dans  la  colonie  fondée  par 
les  Romains  près  du  confluent  du  Rhône  et  de 
la  Saône,  sur  l'emplacement  de  la  vieille  localité 
gauloise  appelée  Lugdunum. 

L'étude  de  cette  médaille  a  permis  à  M.  de 
La  Tour  de  préciser  la  date  de  la  fondation  de 
Lyon,  qui  doit  être  fixée  entre  le  mois  d'avril  et 
le  mois  de  septembre  de  l'an  43  avant  Jésus- 
Christ. 


Société  historique  et  archéologique  de 
l'Orne.  —  Cette  Société,  émue  des  actes  de  van- 
dalisme trop  souvent  perpétrés  contre  nos  vieux 
monuments  et  résolue  à  y  mettre  obstacle  le  plus 
possible  dans  la  région  qui  la  concerne,  vient  de 
créer  une  «  Commission  de  protection  des  monu- 
ments ornais  ))  qui,  sous  la  présidence  de  M.  H. 
Tournouer,  veillera  à  la  préservation  et  à  la 
conservation  des  anciens  monuments,  suscitera 
la  création  de  musées  locaux,  constituera  une 
collection  de  vues,  dessins,  gravures  et  photogra- 
phies, des  richesses  historiques  et  archéologiques 
de  la  région  et  en  dressera  l'inventaire. 

On  ne  saurait  trop  applaudir  à  une  semblable 
initiative  ('). 

Comité  des  travaux  historiques.  —  Divers 
érudits  continuent  d'approfondir  l'histoire  de 
l'art  roman  français,  dont  il  est  si  souvent  ques- 
tion dans  nos  colonnes.  M.  A.  de  Rochemonteix, 
qui  a  déjà  consacré  une  monographie  aux  églises 
de  l'arrondissement  de  Mauriac  (^),  s'occupe  à 
présent  de  celles  de  Saint-Flour  et  de  Murât  (3), 
toutes  différentes  de  celles  de  l'Auvergne. 

L'architecture  romane  du  Cantal  se  distingue 
par  la  voûte  médiane  à  berceau,  fractionnée  par 
des  doubleaux  légèrement  brisés,  des  bas-côtés 
voûtés  en  quart  de  cercle,  des  absides  circulaires 
sur  leurs  deux  faces  interne  et  externe,  des  cou- 


1.  Les  personnes  désireuses  d'adhérer  à  cette  Société  sont  priées 
de  s'adresser  à  M.  l'abbé  Letacq,  secrétaire,  isi''''i  rue  du  Mans,  à 
Alençon. 

2.  Revue  de  t  Art  chrétien,  année  1899,  p.  347. 

3.  Bullel.  du  C.  des  Irav.  kist.,  1900,  2=  livr. .  p.  203. 


pôles  octogonales  sur  trompes,  des  clochers  à 
huit  pans  à  la  croisée,  des  contreforts  avec  co- 
lonnes engagées,  des  modillons  très  particuliers  ; 
bref,  le  mélange  des  écoles  auvergnate,  limousine 
et  poitevine;  la  voûte  médiane  est  poitevine  et 
limousine,  les  voûtes  latérales  et  la  coupole  sont 
auvergnates. 

Or  cette  architecture  cantalienne  s'unit  à 
d'autres  voisines.  L'école  limousine  intervient 
avec  ses  chevets  droits,  ses  archivoltes  lobées,  son 
doubleau  brisé  ;  la  bourguignonne,  avec  ses  pi- 
lastres ;  la  provençale,  avec  ses  archivoltes  mu- 
rales inférieures, ses  clochers  à  pignons, ses  absides 
à  pans,  ses  décorations  flabelliformes,  ses  absi- 
dioles  empâtées.Il  se  fait,  en  outre,  une  infiltration 
méridionale  ;  l'Auvergne  fournit  les  absidioles 
rayonnantes,  les  contreforts  perdus  dans  la 
corniche,  les  matériaux  polychromes. 

Le  chœur  de  Saint-Urcize  est  inscrit  dans  huit 
colonnes  comme  celui  de  Conques  et  les  chapi- 
teaux pseudo-corinthiens  rappellent  l'Aquitaine; 
Auriac-l'Église  a  la  coupole  et  les  chapiteaux 
en  éventail  de  la  Provence  ;  Bredons  dérive  de 
Mauriac,  ainsi  que  Molompize,  mais  beaucoup 
d'autres  églises  restent  indépendantes  de  toutes 
écoles,  grâce  à  leur  simplicité. 

M.  l'abbé  P.  Brune  s'occupe  de  l'orfèvrerie  en 
Franche-Comté.  Il  indique  les  courants  reli- 
gieux, populaires  et  commerciaux  qui  ont  donné 
naissance  aux  types  de  cet  art,  les  centres  de 
fabrication,  et  les  caractères  de  leurs  produits  ; 
puis  il  met  en  lumière  quelques  reproductions 
choisies,  notamment  la  croix-reliquaire  de  Saint- 
Ferréol-lez-Besançon,  la  croix  processionnelle  de 
Rougemont,  et  celles  d'Ornans  (Doubs),  le  chef 
de  saint  Léger  à  Chaux-en-Montagne  et  le  reli- 
quaire de  la  Sainte-Épine  à  Château-Chalon,  le 


reliquaire  de  Nevy-sur-Selle,  et  celui  des  saints 
Maurice  et  Georges  à  Soucia. 

L.  C. 


L'Art  chrétien.  —  Une  importante  réunion 
de  la  Société  diocésaine  d'art  chrétien  a  été  tenue 
à  Namur,  sous  la  présidence  de  Mgr  Heylen,  le 
révérendissime  évêque,  en  janvier.  M.  le  chanoine 
Sosson  présidait. 

Mgr  l'évêque  a  répondu  par  un  discours  sub- 
stantiel. Il  a  loué  la  Société  diocésaine  d'art  chré- 
tien, à  laquelle  il  portera  le  plus  grand  intérêt, 
parce  que  l'art  élève  à  Dieu  et  y  conduit  les  âmes; 
parce  que  la  Société  veut  connaître  les  richesses 
artistiques  diocésaines,  lesquelles  sont  un  patri- 
moine commun  laissé  par  les  ancêtres  et  qu'il 
faut  conserver.  C'est  d'ailleurs  ce  que  recherche 
'  la  Société  d'art  chrétien,  et  c'est  ce  dont  la  féli- 
cite Monseigneur.  Il  promet  qu'il  l'aidera  de  tout 
son  pouvoir,  et  il  désire  voir  bientôt  paraître  l'in- 
ventaire des  œuvres  d'art  que  possèdent  les  égli- 
ses du  diocèse.  On  a  beaucoup  applaudi  Sa 
Grandeur. 

M.  Nifle,  secrétaire,  a  fait  ensuite  une  longue 
et  intéressante  conférence  sur  les  verres  églomi- 
sés.  M.  le  chan.  Sosson  a  fait,  lui,  une  causerie 
charmante  sur  certaines  églises  qu'il  a  visitées 
dans  le  diocèse,  et  qui  sont  riches  souvent  d'ob- 
jets de  grande  valeur. 

Il  a  fallu  ajourner  à  une  séance  ultérieure  la 
conférence  que  M.  le  curé  de  Saint-Germain 
(Leuze)  avait  préparée  sur  son  église,  une  très 
vieille  basilique  classée  dans  la  troisième  catégo- 
rie des  monuments  nationaux,  et  qui  va  être  re- 
construite avec  goût  et  intelligence. 

C'est  au  Luxembourg,  probablement  à  St- Hu- 
bert ou  à  Bastogne,  que  la  Société  d'art  chrétien 
tiendra  sa  seconde  réunion  statutaire  annuelle. 


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L'ANCIEN  TRÉSOR  DE  L'ABBAYE  DE 
SILOS,  par  Doni  Eugène  RoULiN,  bénédictin  de  la 
Congrégation  de  Solesmes.  —  In-f°,  124  pp.,  avec 
seize  planches  et  vingt  figures  dans  le  texte.  Paris, 
Ernest  Leroux,  1901. 

^f^^^^T^RACE  aux  travaux  publiés  dans 
W  notre  Revue,  par  Dom  Roulin,  une 
'^  partie  de  la  savante  publication 
li^.  dont  le  titre  figure  en  tête  de  ces 
Pîf^'iu  lignes,  est  déjà  connue  de  nos  lec- 
teurs. Elle  se  compose  en  réalité  de  l'étude  très 
détaillée,  très  documentée  et  accompagnée  d'ex- 
cellentes planches,  d'une  vingtaine  d'objets  dont 
plusieurs  peuvent  être  considérés  comme  de 
véritables  inonuments  ;  l'auteur  leur  consacre 
XVII  chapitres,  qui  forment  autant  de  mono- 
graphies. Il  nous  est  d'ailleurs  facile  d'en  faire 
apprécier  la  valeur,  trois  de  ces  études  ayant  paru 
dans  nos  colonnes. 

Nos  lecteurs  se  rappellent  sans  doute  que 
l'abbaye  de  Silos,  située  dans  la  Vieille-Castilie, 
au  milieu  de  montagnes  sauvages,  à  peine  acces- 
sible par  de  rares  voies  de  communication,  est 
restée  peu  connue  pendant  longtemps  de  ce  côté 
des  Pyrénées,  malgré  l'éclat  que  répandit  sur 
elle  au  XI<^  siècle  saint  Dominique,  et  au  XIII<^ 
D.  Rodrigue  Yemguez  de  Gusman.  Depuis  peu 
d'années  seulement  elle  a  trouvé  un  historien 
digne  d'elle  en  Dom  Férotin  qui  lui  a  consacré 
deux  volumes  pleins  de  recherches  et  d'une 
science  très  sûre  ;  l'ouvrage  a  été  couronné  ré- 
cemment par  l'Académie  des  Inscriptions  et 
Belles  Lettres,  et  des  savants  de  premier  ordre, 
comme  MM.  Léopold  Delisle  et  Morel  Fatio, 
lui  ont  rendu  pleine  justice. 

Un  côté  de  l'histoire  de  l'abbaye  de  Silos 
n'avait  pas  été  éclairé  par  l'ouvrage  de  Dom 
Férotin  :  C'est  l'étude  des  monuments  de  l'art 
qui  formaient  autrefois  le  riche  trésor  de  l'ab- 
baye. Cette  tâche  était  réservée  à  notre  savant 
collaborateur,  qui,  après  avoir  déjà  fait  connaître 
isolémentquelques  pièces  de  cetterichecollection, 
malheureusement  divisée  actuellement,  la  réunit 
et  l'examine  dans  son  ensemble  par  la  publication 
sur  laquelle  je  tiens  à  appeler  l'attention  de  nos 
lecteurs. 

Le  nombre  des  objets  principaux  étudiés, 
décrits  avec  un  grand  soin  et  reproduits  par  des 
planches  très  fidèles,  est  de  dix-sept,  parmi  les- 
quels il  en  est  plusieurs  d'inédits,  et  dont  d'autres, 
de  la  plus  haute  valeur,  n'ont  été  publiés  que 
d'une  manière  insuffisante.  Une  douzaine  de  ces 


objets  se  trouvent  encore  à  l'abbaye  de  Silos  et 
la  plupart  y  sont  encore  en  usage.  Les  autres  ont 
été  incorporés  au  musée  provincial  de  Burgos, 
à  une  date  relativement  récente. 

Parmi  les  pièces  les  plus  remarquables  de  la 
collection,  je  ne  citerai  que  pour  mémoire  le 
calice  ministériel,  publié  et  reproduit  dans  notre 
Revue  (').  Le  lecteur  se  rappellera  sans  aucun 
doute  que  c'est  à  la  fois  une  œuvre  d'art  très 
remarquable,  un  peu  bizarre  par  la  forme,  et  un 
monument  historique  ;  il  a  été  exécuté  sous 
l'abbatiat  de  saint  Dominique  de  Silos  (1041- 
1073),  et  on  ne  peut  guère  expliquer  les  pro- 
cédés de  fabrication  et  le  style  du  décor  arabe 
que  par  des  influences  locales  qui  paraissent 
manifestes.  Il  semble  probable  que  le  travail 
aurait  été  fait  à  Silos  même,  par  des  prisonniers 
maures,  restés  au  service  à  l'abbaye.  On  se  rap- 
pellera qu'il  servait  à  distribuer  le  vin,  selon  les 
rites  de  la  liturgie  gothique  ou  mozarabe,  en 
vigueur  à  Silos  au  XI*'  siècle. 

Deux  monuments  de  la  plus  haute  importance 
de  cette  collection  sont  des  tables  d'autel  ou 
frontaux,  dont  l'un  déjà  publié  par  M.  Rupin  (2). 
De  caractère  et  de  décor  très  différents,  ils  sont 
cependant  tous  deux  du  XII"=  siècle  et  de  fabri- 
cation limousine.  Le  premier,  très  richement 
émaillé,  fait  aujourd'hui  partie  du  musée  de 
Burgos.  C'est  une  osuvre  particulièrement  remar- 
quable par  son  grand  style  et  la  richesse  de  son 
ornementation.  M.  Rupin  assure  que  jamais  les 
Limousins  n'ont  rien  produit  de  plus  parfait  que 
ce  travail  ;  la  gravure,  dont  le  cliché  a  été  mis 
gracieusement  à  notre  disposition,  permet  d'ap- 
précier, à  toute  leur  valeur,  le  caractère  des 
figures  d'apôtres,  qui,  au  noinbre  de  six  de  chaque 
côté  du  Christ  en  majesté  placé  au  centre  de  la 
table,  sont  l'objet  principal  de  la  composition, 
ainsi  que  le  décor  architectonique  très  particulier 
qui  encadre  les  figures.  L'abbaye  de  Silos  a  heu- 
reusement conservé  le  second  retable  en  cuivre 
gravé,  moins  riche  d'aspect,  mais  non  moins 
intéressant  par  le  grand  style  des  figures  d'apô- 
tres qui  y  sont  gravées. 

D'autres  objets  seraient  à  citer.  La  planche 
V^II  représente  en  héliogravure  une  patène  mi- 
nistérielle que,  très  probablement,  il  faut  égale- 
ment faire  remonter  au  XI 1"^  siècle.  Elle  est 
décorée  de  filigranes,  de  pierres  précieuses  et 
d'intailles  antiques.  L'ornementation  révèle  un 
savoir    faire   exquis,  un  goût  parfait   et  un   art 

1.  Année  1898,  pp.  35B  et  ss.  grav.  pi.  XVIII. 

2.  L'Œuvre  de  Limoges,  pp.  197  et  198. 


Bibliographie. 


Détail  du  frontal  ëniaillé. 


— K"^^z_^£-.  c 


151 


consommé  :   c'est    un   objet  à  placer  au  premier 

rang  des  pièces  d'orfèvrerie  ornées  de  filigranes 

D'après  Dom  Roulin  et  d'autres  archéologues 


qui  l'ont  étudiée,  cette  patène  serait  également 
de  fabrication  limousine.  En  ajoutant  la  patène 
aux  deux  frontaux,   il   faut   croire  qu'il   y  a   eu 


152 


jl^ebuc  ïie  rart  chrétien. 


Monstrance  eucnaristique  (XVF  sièclK) 


2dtbltograpl)ie. 


153 


au  XI I"^  siècle,  entre  l'abbaye  de  Silos  et  Li- 
moges, des  rapports  fréquents,  qui  ont  donné  lieu 
aux  commandes  d'une  série  d'œuvres  de  la  plus 
haute  valeur,  qui  toutes  n'ont  pas  été  conservées. 
Deux  petites  châsses  limousines,  également  re- 
produites, et  dont  l'une  existe  encore  à  Silos, 
tandis  que  l'autre  se  trouve  au  musée  de  Burgos, 
semblent  établir  que  ces  rapports  ont  continué 
au  XIII<=  et  jusqu'au  XIV' siècle.  Ces  châsses 
appartiennent  cependant  à  un  ordre  de  travaux 
beaucoup  plus  ordinaires. 

Un  magnifique  coffret  en  ivoire, de  travail  arabe 
du  XI*^  siècle,  mais  avec  garniture  fabriquée  à 
Limoges,  et  un  étrange  étui,  également  arabe, 
dont  on  a  fait  plus  tard  un  reliquaire,  sont 
également  à  citer  ;  les  reproductions  de  ces  deux 
objets  sont  excellentes. 

Les  notices  sur  une  main-reliquaire  et  sur 
deux  devants  d'autel  ont  été  publiées  dans  notre 
Revue  ('). 

Avec  la  main-reliquaire  se  marque  dans  le 
domaine  de  l'orfèvrerie  une  période  de  déca- 
dence, à  Silos,  comme  partout.  Les  traditions, 
comme  les  principes  particuliers  à  chaque  art, 
s'effacent  et  se  confondent.  Au  simple  examen 
d'une  reproduction,  on  en  vient  à  se  demander  si 
l'on  a  affaire  à  un  travail  d'orfèvrerie,  de  me- 
nuiserie ou  d'architecture  ;  on  en  vient  aussi  à  se 
demander  quelle  est  la  destination  de  l'objet  que 
l'on  a  sous  les  yeux. 

Je  suis  heureux  de  pouvoir  offrir  à  nos  lecteurs 
la  reproduction  d'un  petit  monument,  style  de 
la  Renaissance,  dont  le  dessin  ne  manque  pas 
d'élégance.  Il  date  de  la  fin  du  XVI'=  siècle.  Je 
pourrais  laisser  deviner  si  cet  édicule  est  destiné 
à  un  mausolée,  à  une  caisse  d'horloge,  ou  bien  à 

un  vase  sacré Mais,  afin   de  ne  pas  laisser 

le  lecteur  dans  l'embarras,  j'aime  mieux  dire 
tout  de  suite  que  c'est  une  monstrance. 

Ce  petit  édifice  a  90  cent,  de  hauteur  ;  il  est 
en  argent  et  bronze  doré.  Il  est  conservé  à  la 
salle  des  archives  de  Silos,  et  le  jour  de  la  Fête- 
Dieu  on  y  abrite  la  sainte  hostie  pour  la  porter 
solennellement  à  travers  les  rues  ;  naturellement 
il  est  placé  sur  un  brancard,  à  la  mode  espa- 
gnole ;  on  ne  pourrait  le  transporter  autrement. 
Cependant,  pour  l'Espagne,  les  dimensions  sont 
relativement  modestes. 

On  le  voit,  l'étude  publiée  par  Dom  Roulin 
sur  l'ancien  trésor  de  Silos,  est  pleine  d'intérêt 
et  d'enseignement  ;  les  planches,  je  le  répète, 
sont  excellentes,  et  le  volume  est  imprimé  avec 
un  soin  et  un  goût  qui  doivent  lui  assurer  bon 
accueil,  dans  toutes  les  bibliothèques. 

J.  H.  Helbig. 

I.   Voir  année  i8g8,  pp.  450  et  452. 


DE  OUDE  BRUGSCHE  BOU"WTRANT  EN  DE 
VLAAMSCHE  RENAISSANCE,  par  A.  VaN  DE 
Velde.  —  Bruges,  H.  Van  MuUem,  igoi. 

IL  est  des  styles  qui  exigent  des  matériaux 
coûteux  pour  produire  de  belles  façades. 
Tel  n'est  pas  le  vieux  style  brugeois,  qui  fut 
pratiqué  d'une  si  magistrale  façon  par  les  maçons 
de  l'endroit,  du  XV'^  au  XVII«  siècle.  Au  moyen 
de  briques  diversement  profilées, ils  ont  su  donner 
à  leur  architecture  des  forines  adéquates  aux 
simples  maisons  ouvrières  comme  aux  demeures 
patriciennes  les  plus  cossues.  C'est  ce  que  nous 
montre  M.  Van  de  Velde  dans  son  charmant  opus- 
cule, gentiment  illustré  par  M.  H.  Van  Huile.  Le 
livre,  spécialement  écrit  pour  faciliter  le  tra- 
vail des  architectes  dans  l'élaboration  des  projets 
de  maisons  en  style  local,  n'est  pas  moins  inté- 
ressant pour  tous  ceux  qui  s'intéressent  aux 
belles  choses  de  l'art  flamand  ;  il  met  en  évi- 
dence la  perfection  de  la  technique  des  maçon- 
neries en  briques  dans  les  pignons,  tourelles, 
cheminées,  etc.,  là  oîa  les  touristes  en  général  se 
contentent  d'admirer  simplement  le  pittoresque 
des  constructions. 

E.  C. 


ESTHÉTIQUE  FONDAMENTALE,  PRÉCÉ- 
DÉE D'UNE  LETTRE  DE  M.  EUG.  GUIL- 
LAUME, DE  l'iNSTlTUT,  par  Ch.  Lacouture, 
S.  J.  —  Librairie  V.  Retaux,  Paris.  Un  vol.  grand 
in-8°  de  422  pp.  Imprimerie  Jobard,  à  Dijon. 

ON  n'a  jamais  tant  écrit  sur  les  arts  que  de 
notre  temps,  jamais  si  peu  sur  l'art.  De 
patients  archivistes  nous  apprennent  par  qui, 
en  quel  temps,  pour  qui  fut  exécutée  telle 
œuvre  sur  laquelle  s'égarait  la  tradition,  et  ainsi 
se  constitue  peu  à  peu  l'état  civil  de  nos  richesses 
artistiques  ;  en  même  temps  des  musées  d'étude 
nous  permettent  d'établir  des  comparaisons  et 
des  rapprochements  utiles.  Mais  il  ne  s'agit  que 
des  manifestations  extérieures,  on  dresse  des 
catalogues  raisonnes,  et  c'est  tout  ;  «  les  arbres, 
comme  dit  le  proverbe  allemand,  empêchent  de 
voir  la  forêt.  » 

Pourquoi  une  œuvre  d'art  est-elle  belle?  En 
dehors  de  la  sensation  de  plaisir  éprouvée,  existe- 
t-il  des  règles  positives  pour  déclarer  telles  formes 
belles  et  telles  autres  non  ?  L'art  enfin  est-il  un 
spectacle  dont  chacun  jouit  selon  sa  réceptivité 
propre,  ou  derrière  le  voile  des  formes  et  des 
couleurs  devons-nous  chercher  une  beauté  intel- 
ligible dont  elles  seraient  seulement  l'expression 
sensible,  comme  le  visage  humain  révèle  l'être 
moral  qui  est  en  nous?  Questions  de  tout  temps 
posées,  mais  que  n'aime  pas  à  remuer  une  époque 


154 


Brliuc  t)c  V^xt  cbvctten. 


éprise  de  faits  et  de  documents.  Se  donner  la 
peine  de  chercher  le  pourquoi  du  beau  et  des 
sensations  qu'il  nous  donne,  est  un  trop  f^rand 
effort  pour  nos  volontés  lassées.  Surtout,  au 
Français  de  ce  siècle  commençant,  ne  demandez 
pas  de  réagir  par  la  raison  contre  les  impressions 
du  moment;la  doctrine  que  toute  passion  est  légi- 
time et  a  le  droit  de  se  satisfaire  est  pleinement 
victorieuse  en  matière  d'art  ;  le  plaisir  variable 
chez  chaque  horhme,  et  chez  chaque  homme 
selon  le  moment,  le  chatouillement  sensuel  et 
imaginatif  que  nous  causent  un  tableau,  une 
statue  ou  un  morceau  de  musique,  voilà  les  seules 
lois  du  beau  que  l'on  reconnaisse.  Autant  dire 
qu'il  n'existe  point  par  lui-même  ;  de  même  que 
la  couleur  est  seulement  une  excitation  de  la 
rétine. 

Il  apparaît  cependant  quelques  symptômes 
d'une  réaction  spiritualiste;  les  articles  de  M.  Ro- 
bert de  la  Sizeranne,  dans  la  Revue  des  Deux- 
Mondes,  ont  touché  à  ces  questions,  sinon  pour 
les  résoudre,  du  moins  pour  les  agiter,  et  voici 
du  P.  Lacouture  un  livre  tout  rempli  de  faits, 
mais  aussi  de  doctrine,  où  l'écrivain  affirme  que 
le  beau  n'est  pas  une  impression  subjective  pro- 
duite sur  nos  yeux,  mais  une  réalité  objective. 
Dès  lors,  il  y  a  une  science  du  beau,  et  «  comme 
«  toute  science,  l'esthétique  ne  se  contente  pas 
«  de  constater  le  fait,  elle  en  recherche  le  poiir- 
«  quoi,  les  lois.  L'art  a  précédé  la  science,  mais 
•i  les  progrès  de  la  science  donnent  à  l'art  un 
«  nouvel  élan.  »  C'est  en  ces  termes,  que  dès  les 
premières  lignes,  l'auteur  pose  le  problèine  de 
l'esthétique.  Si,  en  effet,  la  beauté  est  un  caractère 
des  choses,  comme  l'étendue, comment  la  définir 
et  la  déterminer  .'  C'est  ici  que  commence  le  rôle 
de  la  science. 

Personne  ne  saurait  tirer  tout  de  soi-même  et 
l'on  a  toujours  plus  ou  moins  le  temps,  le  sien  et 
le  passé,  pour  collaborateur.  Le  P.  Lacouture  a 
procédé  par  ces  dénombrements  complets,  dont 
Descartes  a  fait  un  des  principes  de  la  méthode, 
et  sa  documentation  va  de  Platon,  d'Aristote, 
de  saint  Thomas  d'Aquin,  à  Ruskin,  àTh.  Jouf- 
froy  et  même  à  Topffer,  le  spirituel  et  subtil 
auteur  des  Menus  propos,  pour  en  arriver  aux 
tout  derniers  venus,  à  MM.  Richard  Kralik  et 
Robert  de  la  Sizeranne.  Par  des  réductions  suc- 
cessives de  tant  d'éléments  ainsi  coUigés  et  étu- 
diés, le  P.  Lacouture  en  vient  à  condenser  toutes 
les  définitions  dans  cette  formule  :  «  le  beau  est 
la  splendeur  de  l'ordre  ».  Or,  qui  dit  ordre,  dit  à 
la  fois  unité  et  variété,  puisque  l'ordre  est  l'orga- 
nisation du  multiple. 

Le  type  en  est  donné  par  le  spectacle  de  l'Uni- 
vers, où  la  plus  infinie  variété  se  résout  dans 
l'ordre  le  plus  parfait,  puisqu'il  est  œuvre  divine. 


Et  cet  ordre  est  fait  aussi  de  splendeur,  c'est-à- 
dire  de  force,  de  clarté  et  de  lumière.  Eh  bien, 
l'art  s'élèvera  d'autant  plus  qu'il  se  rapprochera 
davantage  de  cet  ordre,  de  cette  splendeur  qui 
sont  dans  l'Univers.  Et  cela  nous  donne  encore 
un  des  éléments  du  beau,  la  vérité  :  «Toute  beauté 
doit  ressembler  à  ce  qui  vit  »,  dit  Aristote. 

De  même  que  dans  l'Univers  créé  il  y  a  plu- 
sieurs ordres,  ainsi  il  y  a  autant  d'espèces  de 
beau.  Bien  entendu  l'auteur  ne  s'occupe  pas,  si 
ce  n'est  pour  le  citer  en  passant,  de  ce  diminutif 
du  beau  qm'  est  \e  joli  et  dont  le  trop  charmant 
XVI II >^  siècle  a  fait  sa  chose.  Il  y  a  le  beau  visible 
et  qui  est  seulement  un  spectacle,  le  beau  de 
Paul  Véronèse,  par  exemple  ;  et  cependant, 
comme  il  est  impossible  qu'une  œuvre  de  l'hom- 
me n'exprime  pas  quelque  chose,  ce  qui  éclate  à 
l'esprit  dans  les  grandes  ordonnances  de  Véro- 
nèse, c'est  la  joie  de  vivre  et  de  jouir  du  riche 
Univers  que  Dieu  a  fait  pour  l'homme. 

Beaucoup  estiment,  avec  Théophile  Gautier, 
qu'il  n'y  a  rien  au  delà  de  ce  beau  matériel  et 
visible.  Le  P.  Lacouture,  il  est  à  peine  nécessaire 
de  le  dire,  pense  autrement  ;  pour  lui,  il  y  a  un 
beau  intelligible  révélé  par  les  formes  qui  tom- 
bent sous  les  sens,  de  même  que  dans  la  vie  ter- 
restre l'âme  se  révèle  à  l'esprit  par  le  corps.  Mais 
l'auteur  est  un  prêtre,  et  si  le  caractère  sacerdotal 
apparaît  seulement  à  l'état  du  spiritualisme  le 
plus  élevé  quand  il  ne  s'agit  que  des  formes,  au 
seuil  de  son  chapitre  sur  le  beau  intelligible  il  se 
prosterne  devant  Dieu,  source  de  toute  beauté 
parce  qu'il  l'est  de  toute  vérité.  Puis,  descendant 
de  ces  hauteurs  vers  la  nature  créée,  il  montre 
l'esprit  divin  donnant  sa  forme  à  celle-ci  en  em- 
ployant toujours  la  voie  la  plus  simple,  ce  qui 
revient  à  la  théorie  de  la  moindre  action  des 
philosophes. 

Et  l'auteur  en  vient  alors  à  étudier  le  beau 
intelligible  dans  les  sciences,  dans  les  arts  utiles 
ou  industriels.  Ce  qu'il  en  dit  est  d'une  finesse 
neuve  et  rare  ;  ainsi,  à  propos  de  la  locomotive, 
il  se  rencontre  avec  Viollet-le-Duc  pour  montrer 
que  ce  chariot  monstrueux,  mais  non  informe, 
dont  les  anciens  auraient  fait  un  fils  du  feu  et  de 
l'eau,  a,  comme  toutes  nos  machines,  sa  beauté 
projjre,  parce  qu'il  est  ce  qu'il  doit  être  pour 
remplir  sa  fonction  d'engin  de  mouvement  et  de 
force. 

Puis,  s'élevant  de  l'industrie  aux  beaux  arts, 
voici  d'abord  l'architecture,  dont  le  point  de  dé- 
part est  l'utile.  A  ceux  qui  demanderaient  quelle 
expression  peut  avoir  un  édifice,  on  n'aurait  qu'à 
les  inviter  à  la  contemplation  des  cathédrales  du 
moyen  âge  ;  dans  l'art  de  construire,  elles  sont 
le  triomphe  du  beau  intelligible.  Ce  beau  que 
l'adaptation  parfaite  de  l'édifice  à  la  destination, 


au  climat,  aux  matériaux,  aux  conditions  de 
statique  et  de  solidité  qui  impliquent  la  durée, 
met  aux  œuvres  de  l'architecture,  ne  peut 
être  absent  de  la  peinture  et  de  la  sculpture, 
dont  l'objet  est  d'exprimer  cette  vérité  humaine 
faite  du  vrai  de  l'âme  comme  du  vrai  du  corps. 
Oui,  tout  n'est  pas  dans  la  forme  et  la  couleur, 
et  un  tableau  est  quelque  chose  de  plus  qu'un 
harmonieux  tapis  d'Orient  ;  seulement  les  arts 
ne  doivent  pas  empiéter  l'un  sur  l'autre,  et  il  ne 
faut  de  pensée  dans  un  tableau  que  ce  qui  en 
peut  être  intelligible.  Une  œuvre  trop  pleine 
d'intentions  a  toutes  les  chances  d'être  un  tableau 
médiocre,  et  je  pense  à  ces  tapisseries  dont  parle 
Rabelais,  où  l'on  voyait  peintes  les  idées  de 
Platon  et  les  catégories  d';\ristote. 

Au-dessus  du  beau  intelligible  est  le  beau 
moral  qui  n'est  plus  alors  <<  la  splendeur  du 
vrai  »,  mais  celle  du  bien.  Je  sais,  on  nie  volon- 
tiers que  ces  choses-là  soient  belles,  cependant 
le  sentiment  populaire  y  voit  plus  clair  que  les 
philosophes;  <<  c'est  un  beau  trait  »,  dit-on,  en 
présence  d'un  acte  de  dévouement  et  d'héroïsme. 
Et  au-dessus  du  beau  moral  humain,  l'auteur 
vénère  le  beau  moral  religieux. 

Ce  beau  moral  existe-t-il  dans  les  arts  ?  Oui, 
et  j'en  reviens  à  nos  cathédrales  ;  un  homme  qui 
n'était  pas  un  croyant,  David  d'Angers,  leur  a 
reconnu  ce  caractère  et  à  elles  seules  dans  la 
série  du  temps.  Ici  une  remarque  :  L.  Vitet,  cité 
par  l'auteur,  a  pensé  qu'en  consultant  la  nature, 
la  naïveté  de  l'imagier  du  XII I^  siècle  s'est  plus 
rapprochée  de  Phidias,  c'est-à  dire  de  la  beauté 
pure  que  tel  habile  praticien  d'Athènes  ou  de 
Sicyone  travaillant  pour  les  rois  grecs  d'Asie  ou 
pour  les  Antonins.  Et  cependant  ils  n'auraient 
jamais  été  en  contact  avec  l'art  antique.  Cela  ne 
me  paraît  pas  exact  ;  d'abord  la  naïveté  des  ima- 
giers, si  naïveté  il  y  a,  est  faite  d'un  sentiment  très 
élevé  mais  aussi  très  subtil  et  sans  mélange 
d'ignorance.  Ensuite  ils  connaissaient  l'antique  : 
en  effet,  jusqu'à  la  fin  du  moyen  âge,  la  F"rance 
était  couverte  d'œuvres  gallo-romaines,  édifices 
et  sculptures,  celles-ci  le  plus  souvent  médiocres, 
excepté  dans  les  villes  importantes,  mais  où  se 
retrouvait  cependant  le  reflet  du  grand  style  et 
même  ce  beau  canon  de  la  forme  grecque  qui, 
suivant  une  parole  précieusement  recueillie  par 
moi  de  la  bouche  de  M.  Eugène  Guillaume,  s'était 
conservé  à  travers  les  siècles  jusqu'au  XV"^.  Ainsi 
le  merveilleux  groupe  de  la  Visitation  à  la  cathé- 
drale de  Reims,  où  la  Vierge  est  noble  comme 
une  vestale,  et  sainte  Elisabeth,  comme  une  ma- 
trone, mais  avec  la  pureté  chrétienne  en  plus, 
est  visiblement  inspiré  des  figures  antiques  en- 
core existantes  parmi  les  restes  de  la  civitas 
Remomm. 


Comme  exemples  de  cette  union  de  la  pensée 
et  de  la  forme,  le  P.  Lacouture  cite  la  Madeleine 
de  Canova,  le  Bien  et  le  Mal  d'Orsel,  le  Saint 
Augustin  et  la  sainte  Mottique  d'Ary  Scheffer. 
Peut-être  pour  que  les  preuves  fussent  plus  vic- 
torieuses, aurait-il  fallu  chercher  non  dans  les 
régions  moyennes  de  l'art,  mais  sur  les  plus  hau- 
tes cimes.  Après  tout,  le  résultat  aurait  bien  pu 
être  de  constater  que  les  très  grands  parmi  les 
artistes  ont  mis  plus  de  forme  et  de  couleur  que 
de  pensée  dans  leurs  œuvres. 

La  conclusion  à  en  tirer  est  que  la  poésie  est 
le  premier  des  arts,  parce  que  la  pensée  s'y  dégage 
de  ces  liens  terrestres  où,  plus  ou  moins  prison- 
nière, elle  se  débat  dans  les  arts  plastiques. 

Dans  la  musique,  le  P.  Lacouture  proclame 
justement  la  noblesse  et  la  beauté  morale  du 
plain-chant. 

Le  livre  III  est  consacré  à  la  Gradation  du 
beau.  En  Dieu  est  la  beauté  absolue,  et  l'homme 
ne  peut  connaître  ou  créer  que  le  beau  relatif;  le 
beau  intelligible  est  supérieur  au  beau  visible,  le 
beau  moral  au  beau  intelligible.  Dans  les  choses 
et  dans  les  êtres,  la  beauté  croît  du  minéral  à 
l'homme  en  passant  par  le  végétal  et  l'animal, 
parce  qu'elle  croît  à  mesure  que  diminue  la  dé- 
pendance pour  arriver  à  cette  indépendance  de 
l'esprit  qui  est  la  marque  du  règne  hoininal  ou 
règne  humain.  Et  dans  l'homme  ce  qui  rend  beau 
le  visage,  c'est  qu'il  est  le  voile  transparent  de 
l'âme  ;  le  curé  d'Ars  était  la  parfaite  image  de 
Voltaire,  quelle  différence  physique  entre  eux 
pourtant  !  aussi  grande  qu'entre  leurs  natures 
morales.  C'est  sur  toutes  les  autres  la  supériorité 
de  cette  beauté  chrétienne,  telle  que  l'a  évoquée 
Flandrin,dans  ses  frises  sereinesde  Saint-Vincent 
de  Paul  et  au  delà  encore,  l'auteur  entrevoit  cette 
beauté  du  Christ  et  de  la  Vierge  dont  les  plus 
grands  artistes  n'ont  pu  nous  donner  qu'un  reflet 
affaibli. 

Passant  ensuite  au  subjectif,  l'auteur  étudie, 
dans  son  livre  IV,  l'impression  du  beau  ;  contre 
l'opinion  de  Guyau  et  du  professeur  R.  Kralik, 
il  ne  pense  pas  que  les  sens  du  toucher,  de  l'odo- 
rat et  du  goût  aient  rien  à  faire  avec  le  beau  ;  ils 
donnent  des  sensations  agréables,  rien  de  plus. 
Seules  font  naître  l'impression  du  beau  la  vue  et 
l'ouïe,  parce  qu'à  peu  près  indifférentes  à  la  souf- 
france et  au  plaisir  physique,  elles  font  la  plus 
grande  part  possible  à  l'objet  lui-même  ;  ce  sont 
donc  les  plus  importants  des  sens  et,  par  là,  les 
seuls  qui  soient  esthétiques. 

De  là,  l'auteur  passe  au  rôle  de  l'imagination 
et  de  la  mémoire  ;  la  première  est  l'intermédiaire 
entre  la  sensibilité  organique  et  l'intelligence, 
mais  ne  vient  qu'après  celle-ci  dans  l'impression 
du  beau.  Toutefois,  elle  en  fait  un  facteur  néces- 


REVUE  DR  l'art  CHRÉTIEN. 
1901.   —   2"*^    LIVRAISON. 


156 


IRebue  lie  P^rt  cbrétien» 


saire  et,  comme  le  dit  Emerson,  «rien  n'est  vrai- 
ment beau  qu'autant  qu'il  parle  à  rimaginHtion>. 
La  mémoire  prolonge  les  sensations  et  les  éveille 
par  association. 

Si  l'autorité  suprême  appartient  dans  l'esthé- 
tique à  l'intelligence,  c'est  qu'elle  est  le  juge  de  la 
beauté  en  étant  celui  de  l'ordre,  de  la  proportion 
et  de  la  justesse,  «  choses  que  seul  l'esprit  peut 
concevoir»,  dit  Bossuet.  Ainsi  est-il  des  lois  diver- 
ses qui  ne  sont  que  les  éléments  de  l'ordre,  lois 
de  continuité, de  répétition,  de  symétrie.à  prendre 
ce  dernier  terme  non  au  sens  étroit  des  modernes, 
mais  dans  celui  d'équilibre  et  d'harmonie  comme 
l'entendaient  les  Grecs.  Enfin,  suivant  une  remar- 
que profonde  de  M.  Brunetière,  l'intelligence,  et 
c'est  la  probité  du  critique,  doit  réagir  contre  les 
entraînements  de  l'imagination. 

Le  parallélisme  est  plus  libre  que  la  symétrie; 
lorsqu'il  se  produit  dans  les  idées,  non  dans  les 
lignes,  c'est  le  symbolisme. 

L'auteur,  pour  ne  rien  omettre  de  son  sujet, 
effleure  en  passant  le  prétendu  sens  esthétique 
des  animaux,  une  simple  amusette  de  savants,  et 
en  vient  à  l'action  de  la  volonté.  Motrice  de 
l'âme,  en  présence  de  la  beauté,  elle  entre  aussitôt 
en  fonctions  pour  en  jouir  par  la  contemplation, 
non  pour  se  l'approprier  ;  comme  l'autre  amour, 
l'amour  du  beau  est  une  aspiration  à  l'union  mais 
qui  se  réalise  seulement  dans  l'intelligence.  L'a- 
mour sexuel  est  donc  l'antipode  de  l'amour 
esthétique,  et,  aux  belles  époques  de  l'art,  les 
Grecs  n'ont  jamais  cherché  à  exciter  les  sens  par 
le  spectacle  de  la  beauté. 

L'impression  du  beau  peut  être  définie,  selon 
l'auteur,  «la  jouissance  de  la  perception  de  l'ordre 
«dans  sa  splendeur».  Elle  est  intuitive  parce 
qu'elle  atteint  directement  son  objet  sans  inter- 
médiaire, tandis  que  la  connaissance  est  généra- 
lement discussive,  c'est-à-dire  qu'elle  se  produit 
médiatement.  Cette  nature  intuitive  de  la  per- 
ception du  beau  a  été  sentie  par  les  platoniciens 
et  surtout  par  les  néoplatoniciens,  proclamée  chez 
les  modernes  par  saint  Thomas,  Kant,  Schopen- 
hauer,  et  sa  noblesse  vient  précisément  de  ce  que 
contempler  la  beauté  c'est  la  posséder. 

Mais  comme  toutes  les  impressions  celle  du 
beau  a  besoin  d'être  cultivée  ;  trop  préoccupée 
du  soin  de  plaire,  de  la  peur  de  déplaire,  la  femme 
l'a  peu.  Des  hommes,  même  parmi  les  plus  grands, 
ne  l'ont  pas  eue,  ou  imparfaite. 

Selon  le  1\  Lacouture,  saint  Bernard  l'avait, 
mais  s'en  privait  ;  j'avoue  être  en  doute  sur  ce 
point,  et  l'auteur  me  paraît  sur  un  terrain  plus 
solide  quand  il  exalte  l'exquise  sensibilité  esthé- 
tique de  saint  François  d'Assise,  qu'il  met  fort 
au-dessus  de  ce  dilettantisme  impassible  d'un 
Renan  et  d'uii  Leconte  de  Lisie,  réfugiés  déses- 
pérés dans  la  contemplation  d'un  beau  stérile. 


Mais,  étant  donnée  l'incertitude  des  jugements 
humains,  comment  apprécier  le  beau  ?  Voltaire, 
comme  toujours,  se  tire  d'affaire  par  une 
plaisanterie,  en  nous  parlant  de  la  beauté  selon 
le  Hottentot  ;  ce  n'est  pas  répondre  que  d'invo- 
quer le  témoignage  d'une  race  à  peu  près  aussi 
étrangère  à  la  notion  du  beau  qu'un  animal  supé- 
rieur. Et  cependant  il  y  a  une  sorte  de  consensus 
universel  qui  peut  servir  de  point  de  départ  ;  tous 
les  hommes,  même  les  plus  déshérités,  sont  plus 
ou  moins  sensibles  à  un  glorieux  coucher  de 
soleil,  au  spectacle  de  la  nature.  Et  si  nous  nous 
élevons  dans  la  sphère  supérieure  des  races 
aryennes,  ne  pourrons-nous  pas  dire  que  l'art  grec 
est  l'art  universel  du  monde  civilisé  .■' 

Il  y  a  dans  la  splendeur  de  l'ordre  trois  espèces 
d'ordres  correspondant  aux  trois  espèces  de  beau. 
Une  sorte  de  laideur  matérielle  peut  coexister 
avec  la  beauté  intelligible,  quand  le  but  de  la 
forme  est  complètement  atteint  ;  on  dit  «  un  beau 
porc  »,  et  le  langage  populaire  ne  se  trompe  pas. 
Quand  les  yeux  des  hommes  se  seront  habitués 
aux  formes  de  la  construction  en  fer,  qui  sait  si 
par  le  rythme  logique  de  ses  lignes  et  ses  courbes 
de  plus  grande  résistance,  la  tour  Eiffel  ne  paraî- 
tra pas  belle  ?  L'habitude  la  fait  déjà  paraître 
tout  autre  à  nos  yeux  qu'il  y  a  dix  ans  ;  il  lui 
manque  surtout  d'être  utile.  Mais  faites-en  un 
phare,  ou,  comme  l'espère  le  P.  Lacouture,  élevez 
au  sommet  la  croix  victorieuse,  elle  aura  tout 
aussitôt  sa  beauté,  parce  qu'elle  sera  devenue 
expressive. 

Des  objets  vulgaires  imités  nous  plaisent, 
d'abord  parce  que  l'artiste  y  a  mis  de  sa  vision 
particulière  des  choses,  —  «  l'art  est  l'homme 
ajouté  à  la  nature,  »  a  dit  Bacon  —  ensuite  par 
la  ressemblance  avec  la  réalité  et  la  vie,  enfin  par 
la  difficulté  vaincue  d'exprimer  la  forme.  Jamais 
le  vrai  désordre  ne  peut  être  beau  ;  au  contraire, 
le  désordre  voulu  le  sera  souvent  ;  ainsi  dans 
l'Hercule  Farnèse,  où  l'exagération  de  la  muscu- 
lature comparée  avec  l'exiguïté  du  crâne  donne 
précisément  l'impression  qu'a  voulu  produire 
l'auteur.  Et  je  pense  à  cette  parole  de  Mérimée 
qu'aimait  à  répéter  Delacroix  :  «  L'art  est  l'exa- 
gération à  propos.  » 

Il  y  a  dans  le  beau  une  loi  hiérarchique,  la 
beauté  d'un  être  est  celle  qui  correspond  au  rang 
qu'il  occupe  dans  l'échelle  des  êtres  ;  la  plante 
est  belle  dans  son  libre  épanouissement,  l'animal 
dans  le  mouvement  et  la  passion,  l'homme  dans 
l'intelligence  et  la  vertu.  Mais  la  vie  étant  la 
condition  des  êtres,  il  n'y  a  pas  de  beauté  sans 
elle,  et,  pour  l'exprimer,  l'artiste  ne  craindra  pas 
de  mettre  dans  son  œuvre  quelqu'une  de  ces 
légères  irrégularités  qui  rendent  plus  vivantes  la 
Vénus  de  Milo  et  les  Vierges  de  Raphaël.  Les 
anciens  ont  cherché  le  beau  dans  ce  calme  qui 


25tbUograpl)tc. 


157 


est  l'idéal  de  la  vertu  païenne,  l'art  chrétien,  celui 
de  Fra  Angelico  et  de  Raphaël  qui  ajoute  l'an- 
tique au  Pérugin,  l'a  mis  plus  haut. 

La  beauté  d'un  objet,  d'un  être  surtout,  doit 
être  conforme  au  type  défini  qui  vient  de  l'étude 
de  la  nature  et  de  la  tradition  artistique,  et  en 
même  temps  au  type  idéal  ;  c'est  ce  que  l'on  peut 
nommer  le  modèle  extérieur  et  le  modèle  inté- 
rieur. Les  réalistes  n'admettent  que  le  premier, 
sous  prétexte  que  seul  il  existe.  Dans  le  sens 
matériel  du  terme,  oui,  mais  c'est  par  la  compa- 
raison avec  le  n:\odele  extérieur  que  se  crée 
l'autre  et,  dès  lors,  l'on  ne  peut  dire  que  celui-ci 
.soit  une  créature  arbitraire  de  l'imagination.  La- 
mennais fait  cette  remarque  que  la  beauté  vient 
de  ce  que  dans  l'être  les  parties  sont  le  plus  ap- 
propriées à  leurs  fonctions  ;  c'est  précisément  par 
là  que  la  structure  aisée,  le  port  dégagé,  la  tête 
développée  de  l'Aryen  sont  plus  beaux  absolu- 
ment que  celle  du  Hottentot  ou  de  telle  autre 
race  dégradée.  C'est  la  loi  que  l'auteur  appelle  la 
loi  typique  du  beau. 

Voici  maintenant  une  loi  psychologique  :  tout 
ce  qui  dans  un  objet  nuit  à  la  jouissance  offerte 
nuit  à  la  beauté.  L'architecture  ne  doit  nous 
causer  aucune  inquiétude  ;  or,  la  tour  penchée  de 
Pise,  le  jubé  aérien  de  Troyes,  les  clés  pendantes 
de  certaines  églises  inquiètent  le  regard  et  la 
pensée.  L'observation  est  juste  ;  seulement  les 
adversaires  de  l'art  ogival  l'appliqueront  tout 
aussitôt  à  ces  étais  permanents  que  sont  les  arcs- 
boutants.  Il  ne  faut  pas  non  plus  déconcerter  les 
regards  ;  le  plaisir  de  la  surprise  se  tourne  facile- 
ment en  inquiétude.  L'auteur  ajoute  avec  sagesse 
qu'il  y  a  pour  chaque  objet,  pour  chaque  être  un 
milieu  propice  ;  le  chameau  et  la  girafe  peuvent 
avoir  leur  beauté  en  leur  habitat  ;  transportés 
chez  nous,  ils  semblent  plutôt  ridicules.  Enfin, 
il  ne  faut  pas  demander  trop  d'effort  à  l'ima- 
gination esthétique  ;  une  œuvre  d'art  qu'il 
faut  longuement  expliquer  n'atteindra  jamais  à 
la  beauté  complète.  Mais  l'effort  que  l'on  doit 
exiger  de  tout  homme,  c'est  de  s'élever  au-dessus 
de  son  goût  personnel,  de  ses  préjugés  d'éducation 
et  d'habitude,  surtout  au-dessus  de  la  mode  du 
jour,  de  cette  opinion  factice  qui  est  souvent  faite 
par  des  marchands.  Par-delà  toutes  ces  contin- 
gences, il  faut  s'élever  jusqu'au  style  absolu, 
c'est-à-dire  l'élévation  dans  l'inspiration,  et  com- 
prendre cet  autre  style  qui  est  la  vision  particu- 
lière que  chacun  a  des  choses  et  des  êtres.  On  a 
dit  qu'un  paysage  était  un  état  d'âme  ;  on  le  peut 
dire  d'un  portrait  et  de  toute  œuvre  du  pinceau 
ou  du  ciseau  ;  combien  plus  encore  des  beautés 
flottantes  de  la  musique  ! 

Toutes  ces  lois  sont  surtout  faites  pour  les 
critiques,  c'est-à-dire  pour  ceux  qui  demandent 


seulement  à  l'art  les  nobles  jouissances  de  la 
contemplation  ;  mais  elles  ne  doivent  pas  être 
méconnues  par  les  artistes,  c'est  en  les  observant, 
en  se  faisant  soi-même  un  idéal  élevé  que  l'on 
travaillera  pour  cette  durée,  qui  est  l'éternité  des 
choses  humaines.  Ces  lois  ne  seront  jamais  des 
entraves  pour  le  génie,  ni  même  pour  le  talent  ; 
au  contraire,  l'artiste  y  trouvera  la  véritable  in- 
dépendance, celle  qui  consiste  à  savoir  se  plier 
à  la  nature  des  choses  et  rejeter  le  joug  des  pré- 
jugés, de  la  mode  et  des  idées  toutes  faites.  Peut- 
être,  et  je  relève  cette  observation  dans  la  ma- 
gistrale préface  de  quelques  pages  que  M.  Eu- 
gène Guillaume  a  mise  en  tête  du  livre,  en  con- 
seillant à  l'artiste  de  ne  pas  livrer  toute  sa 
pensée,  de  laisser  travailler  celle  du  critique  sur 
son  œuvre,  l'auteur  sera-t-il  trop  aisément  écouté 
par  tant  d'improvisateurs  dont  l'impuissance 
érige  en  principe  le  droit  souverain  de  la  facilité 
et  de  l'à-peu  près.  Telle  n'est  pas  assurément  la 
pensée  du  P.  Lacouture,  mais  en  la  poussant  à 
l'extrême,  les  partisans  de  l'art  trop  aisé  pour- 
raient y  trouver  un  argument  et  une  approbation. 
Un  dernier  chapitre  a  pour  objet  la  classifica- 
tion des  arts  —  arts  rythmiques  :  la  poésie,  la 
musique,  la  danse,  —  arts  du  dessin  :  architecture, 
peinture,  sculpture  ;  on  pourrait  appeler  les 
premiers,  arts  de  succession,  puisque  à  l'opposé 
des  autres,  les  impressions  se  produisent  en 
séries.  Enfin,  le  P.  Lacouture  propose  un  second 
groupement  :  de  l'architecture  avec  la  poésie  ;  de 
la  peinture  avec  la  musique,  on  a  constitué,  en 
effet,  un  clavier  des  couleurs  comme  il  en  est  un 
des  sons  ;  de  la  danse  avec  la  sculpture,  parce  que 
celles-ci  ont  pour  moyen  commun  d'expression 
les  attitudes  et  le  geste. 

Tel  est  ce  livre  construit  selon  les  lois  les  plus 
rigoureuses  de  la  méthode  scientifique,  écrit 
dans  un  langage  clair,  toujours  approprié,  ni  trop 
agréable,  ni  trop  abstrait,  un  livre  rare  et,  pour 
tout  dire,  la  tentative  la  plus  réussie  que  je  con- 
naisse pour  constituer  la  science  de  l'esthétique. 
L'auteur  est  un  savant  qui,  dans  son  Répertoire 
chromatique,  a  fortement  étudié  les  lois  des  cou- 
leurs ;  c'est  un  érudit  aussi,  qui  de  son  sujet 
connaît  toutes  les  parties  et  les  ouvrages  cités 
formeraient  une  ample  bibliothèque.  Un  souffle 
puissant  d'idéalisme  anime  ce  livre  et  cet  idéa- 
lisme est  plus  que  philosophique  ;  bien  qu'il  se 
rencontre  sans  cesse  avec  le  spiritualisme  profane, 
il  est  chrétien,  je  dirai  presque  sacerdotal.  Et  je 
suis  touché  de  voir  le  caractère  du  prêtre  si  pro- 
fondément empreint  dans  l'œuvre  d'un  prêtre, 
d'autant  plus  qu'il  n'enlève  rien  à  l'indépendance 
d'un  esprit  élevé  qui  remue  toutes  les  questions 
et  les  discute  avec  la  plus  entière  sérénité  de 
pensée  et  de  langage. 


158 


WitWt  lie  rSrt  cbrétirn. 


Mais  j'ai  employé  le  mot  de  tentative  et  je 
dois  l'expliquer  ;  c'est  que  dans  ma  manière  de 
voir,  la  quasi-impuissance  de  la  démonstration 
fera  toujours  de  l'esthétique  une  demi-science, 
comme  l'histoire,  comme  la  médecine.  «;  Il  n'y  a 
de  science  que  du  général  >,  a  dit  profondément 
Aristote  ;  en  d'autres  termes  il  n')-  a  de  science 
vraie  que  de  ce  qui  pour  tout  homme  a  été,  est 
sera  toujours.  L'esthétique  n'a  pas  tout  à  fait  ce 
caractère,  et  c'est  ce  qui  me  l'a  fait  rapprocher  de 
l'histoire  et  de  la  médecine. 

Il  me  reste  à  m'excuser  auprès  de  mes  lecteurs 
d'avoir  si  longtemps  retenu  leur  attention  ;  mais 
dans  un  livre  d'une  structure  si  rigoureuse,  il 
faut  ou  le  faire  connaître  superficiellement  ou 
l'analyser  page  par  page.  La  chaîne  des  idées  est 
trop  solide  pour  qu'on  en  puisse  détacher  un 
chaînon  isolé,  il  faut  donc  prendre  le  tout  ou  se 
contenter  d'un  jugement  formulé  en  quelques 
mots.  Après  tout  le  meilleur  article  à  faire  serait 
encore  de  transcrire  les  quelques  belles  pages 
d'introduction  qu'a  mises  en  tête  du  livre  M.  Eu- 
gène Guillaume,  non  pour  en  faire,  comme  moi, 
l'analyse,  mais  pour  le  présenter  aux  lecteurs. 


Henri  Chabeuf. 


Bien  Public,  de  Dijon. 


BIBLIOGRAPHIE    DES    INVENTAIRES. 

1.  —  LKS  COMPTES  DU  DIOCÈSE  DE  BOR- 
DEAUX DE  1316  A  1453,  d'aprh  les  Archives  de  la 
Chambre  apostolique,  par  Fraikin,  dans  les  Annales  de 
St- Louis  des  Français,    1900,  livr.  d'octobr.,  pp.  5-74. 

IL  y  a  peu  à  glaner  dans  ces  comptes,  curieux 
surtout  pour  l'énumération  si  variée  des 
pièces  de  monnaie  qui  avaient  cours  alors.  Quel- 
ques dettes  sont  acquittées  en  nature,  par  exem- 
ple :  «  Unum  calicem,  cum  patena,  argenti 
deauratum.  Item,  in  Loquearibus,  quodam  gobe- 
letto  et  quodam  pectorali  mulicbri  de  argento. 
Duas  albas  lineas  sacerdotales.  Unum  manipu- 
lum,  stolam  et  zonam  de  filo.  » 

Il  est  question  d'une  provision  de  poissons 
frais  ou  salés  pour  le  palais  du  pape  :  «  Provi- 
sionem  merluciorum  et  allecium  pro  palatio 
d.  nostri  pape.  Provisione  piscium  salsorum  facta 
Burdegale.  » 

On  achète  pour  796  florins  de  drap  à  donner 
en  aumône  :  «  Pro  pannis  emendis  pro  eleemo- 
sina  necessariis.  » 

2.  —  COMPTES  DU  ROI  RENÉ  POUR  LA 
CONSTRUCTION  DE  DEUX  CARAVELLES, 
EN  1478,  par  Jos.  FouRNiER,  dans  le  Répertoire  des 


travaux  de  la  Société  de  statistique  de  Marseille,  1900, 
PP-  39>-399 

Ces  deux  navires  se  nommaient  la  «  Made- 
leine »  et  la  ^  Sainte-Marthe  »,  noms  chers  à  la 
Provence.  Les  pièces  de  ce  genre  sont  rares  et 
ont  un  langage  à  part  qui  doit  intéresser  les 
gens  du  métier.  Je  limite  mes  notes,  qu'il  serait 
facile  de  multiplier,  à  trois  mots  : 

Bannières.  «  Pour  l'achat  de  certaine  quantité 
de  taffetas  et  autres  draps  de  soye,  prins  en 
Avignon,  pour  faire  les  bsnnières  des  dites  cara- 
velles ». 

Chaleur.  «  Par  le  commandement  de  Monsei- 
gneur, pour  XII II  cannes  de  toille,  pour  garder 
du  chault  Jarotin  et  les  autres  ouvriers  qui 
besoingnent  à  la  pynace  de  Monseigneur.  » 

Serpentine,  pièce  d'artillerie;  «  A  Maistre 
Jehan  d'Orgon,  bombardier,  pour  acheter  une 
serpentine.  » 

3.  —  INVENTAIRE  DE  NOTRE-DAME  DE 
FONTENAY  (Vendée),  par  René  Vallette,  dans  la 
Revue  du  Bas-Poitou,  1537,  1900,  pp.  144-147. 

Il  s'agit  uniquement  du  «  trésor  »,  dont  les 
pièces  sont  dispersées  en  trois  «  armoyres  »,  dé- 
nommées de  l'autel  qu'elles  accompagnent.  Le 
numérotage  se  fait  par  armoires,  ce  qui  n'est  pas 
suffisant  ;  il  le  fallait  progressif. 

Aii::anne,  pour  kosanne,sYnonym&  du  dimanche 
des  Rameaux,  où  se  portait  cette  croix  :  «  Une 
croex  auzane,  de  cuyvre  doré,  fort  vieille.  » 

Calice.  Il  prend  son  nom  de  celui  qui  l'a  donné, 
en  1487,  Artus  de  Richemond,  qui  y  employa 
sa  propre  coupe  :  «  Ung  calice  d'or  fin,  appelé 
Coulpede  Monseigneur  Artus,  et  sa  plactayne.  » 

0'(?/.t',  à  double  croisillon,  d'origine  orientale: 
«  Une  grand'  croex  d'argent  doré,  à  deux 
croezions,  6  pierres  et  camahyeux,  que  l'on  nome 
de  Monsieur  Jehan  le  Masle,  en  son  vyvant 
évesque  de  MaiUezoy  »  (de  1384  à  1421). 

Monstrance,  simple  reliquaire,  contenant  une 
relique  de  la  Vierge,  exposée  à  l'Assomption  : 
«  Une  monstrance  d'or  fin,  que  l'on  nome  de 
l'Assomption.  » 

«  Placts  d'offrandes  »,  en  dinanderie  :  j'en  ai 
publié  un  de  ce  genre  en  1900  dans  la  Revue 
d' A  rclu'ologic  poitevine. 

Vaisseau  n'indique  pas  la  forme  :  «  Le  vayseau 
d'or  fin,  que  l'on  porte  le  Corpus  Doinini.  —  Ung 
aultre  petit  vayseau  d'or  fin,  ouquel  a  un  mor- 
ceau de  la  vray  croex.  » 

4.  —  PROCÈS-VERBAL  DE  VISITES  DE  PA- 
ROISSES AU  xviir  SIÈCLE,  édité  par  M.  Tho- 


Bibltograpl)te. 


159 


rel-Terrin,   nnnoté  par   M.   le   chanoine   Marsaux  ; 
Beauvais,  1900,  in- 8"  de  11  pages. 

Au  milieu  d'une  foule  de  renseignements  cu- 
rieux, je  distingue  ce  qui  concerne  le  dais  et  le 
soleil. 

Le  dais  de  l'autel  existe  et  semble  obligatoire, 
quoiqu'une  fois  le  visiteur  propose  de  le  démolir. 
«  Il  n'y  a  pas  de  dessus  d'autel,  un  petit  moineau 
est  tombé  presque  dans  le  calice  »  (p.  5).  —  «  J'ay 
remarqué  qu'au-dessus  de  la  chapelle  de  la  Ste- 
Vierge,  il  y  a  une  espèce  de  dais  de  bois,  soutenu 
par  quatre  piliers  de  bois  d'une  ancienne  struc- 
ture et  très  malpropre.  Il  seroit  plus  décent  de 
l'enlever,  la  chapelle  en  seroit  plus  propre  » 
(p.  8).  —  «  Un  dais  de  bois  »  (p.  9). 

«  J'ay  trouvé  un  soleil  très  malpropre  et  cras- 
seux. Dans  le  tabernacle,  les  deux  glaces  ne 
tiennent  pas  et  tombent  pour  le  peu  qu'on  y 
touche  ;  le  croissant  est  d'argent.  Au  lieu  d'une 
fiche  ou  cheville  de  cuivre  ou  une  chaîne  pour 
fermer  la  Ste  Hostie,  j'y  ai  trouvé  de  cheville  de 
bois»  (p.  8).  La  note  porte  :  «  Au  XVIII"=  siècle, 
on  croyait  bien  faire  en  ornant  le  tabernacle 
comme  un  salon.  Les  glaces  étaient  de  mode.  Un 
livre  imprimé  à  Besançon,  en  1772  :  Méthode  de 
la  direction  des  âmes,  recommande  «  les  glaces 
et  la  dorure  »  pour  le  tabernacle.  Ce  n'est  pas 
ici  le  cas  ;  il  ne  s'agit  pas  du  tabernacle-meuble, 
mais  du  tabernacle-  (expression  du  Pontifical) 
ostensoir.  Le  contexte  le  dit  clairement  :  croissant 
pour  l'hostie,  sphère  en  soleil,  cheville  pour  la 
fermeture  ;  les  «  deux  glaces  »  ou  vitres  garnis- 
sent la  sphère  de  deux  côtés  et  protègent  l'hostie. 

5.  —  INVENTAIRE  DU  MOBILIER  DE 
L'ÉGLISE  PAROISSIALE  DE  MAZAMET 
(TARN),  L'AN  II,  dans  Y Albia  chnstiana,  1899, 
p.  168). 

Ce  texte  est  peu  important.  Deux  mots  seu- 
lement sortent  de  l'ordinaire.  Ce  sont  les  «  biens 
du  bassin  du  Purgatoire»,  immeubles  fournissant 
des  revenus  à  cette  caisse;  «  7  grands  bassins  de 
laiton,  2  petits  bassins  en  cuivre». 

A  cause  de  sa  forme,  la  lampe  du  St-Sacrement 
est  appelée  «  Cul  de  lampe,  avec  chainettes  en 
laiton  ». 

6.  —  LES  RICHESSES  ARTISTIQUES  DE 
MARSEILLE  EN  1791,  par  Em.  Perrier,  dans  le 
Répertoire  des  travaux  de  la  Société  de  statistique  de 
Marseille,  1900,  p.  408-451. 

Ce  travail,  très  important  pour  l'histoire  de 
l'art  et  parfaitement  annoté,  comprend  trois 
parties  :  i.  Déclaration  faite  par  les  officiers  de 
l'Académie  de  peinture,  sculpture,  architecture 
civile  et  navale,  sur  les  ouvrages   en  peinture  et 


sculpture  qui  se  trouvent  dans  les  maisons  des 
religieuses  de  Marseille  ;  2.  Supplément  de  relevé; 
3.  Monuments  méritant  d'être  conservés  et  qui  se 
trouvent  dans  diverses  églises  ou  couvents  de 
Marseille  supprimés  ou  qui  peuvent  être  dans  le 
cas  de  l'être. 

7.  —  INVENTAIRE  DU  CHATEAU  DE 
BOURG-CHARENTE,  EN  1792,  dans  le  Bulletin 
delà  Société  archéologique  de  la  Charente,  6"  série,  t.  VII, 
p.    LXXXVIII  LXXXIX. 

Malheureusement  les  extraits  qui  en  ont  été 
faits  sont  trop  peu  nombreux,  c'est  le  texte  lui- 
même  qu'il  importait  de  publier.  A  noter,  pour 
l'industrie  locale,  des  «  serviettes  en  toile  de 
Béarn  »,  des  «porcelaines  de  Limoges  »;  pour 
les  lits  :  «  un  lit  à  la  polonaise,  dont  les  rideaux 
et  les  garnitures  sont  en  perse,  ainsi  que  les  ten- 
tures de  l'appartement  »,  «  un  lit  à  la  turque,  en 
moire  et  en  tapisserie». 

X.  Barbier  de  Montault. 


LES  SAINTS  DE  LA  MESSE  ET  LEURS  MO- 
NUMENTS, par  MM.  Ch.  et  G.  Rohault  de 
Fleury.  Paris,  1900,  in  4°.  t.  VIII. 

Le  tome  VIII  vient  de  paraître.  En  dire  tout 
le  bien  que  j'en  pense  serait  me  répéter,  car  je 
n'ai  pas  manqué  de  rendre  compte,  avec  force 
éloges,  des  volumes  précédents,  au  fur  et  à  mesure 
de  leur  apparition.  Comme  antérieurement, 
l'érudition  la  plus  sûre  et  la  plus  variée  y  déborde 
et  est  admirablement  complétée  par  une  illustra- 
tion qui  ne  laisse  rien  à  désirer  au  lecteur  le  plus 
exigeant. 

La  première  partie  est  consacrée  à  S.  Jean 
Evangéliste  ;  elle  comprend  31  pages  de  texte, 
illustré  de  17  vignettes  et  accompagné  de  61 
planches,  où  sont  à  signaler,  pour  leur  fidélité  :  à 
Rome,  les  églises  de  St-Jean  de  Latran  et  de 
St-Jean  Porte  Latine  et,  à  Poitiers,  l'abbaye  de 
Montierneuf. 

A  cet  ensemble,  si  largement  compris,  il  ne 
manque  que  ces  monuments  :  pour  Angers,  l'hô- 
pital St-Jean,  qui  est  une  superbe  construction 
du  XII^  siècle,  où  la  chapelle  est  tendue  de 
tapisseries  d'Aubusson  du  XVIIe,  relatant 
sa  vie  ;  à  la  cathédrale,  dans  le  transept  sud,  un 
beau  vitrail  de  la  fin  du  XI 11^  siècle,  à  médaillons 
légendaires,  qui  a  longtemps  intrigué  Didron, 
mais  dont  il  est  venu  à  bout,  à  force  de  science 
et  de  patience  ;  enfin  les  célèbres  tapisseries  de 
l'Apocalypse,  don  de  René  d'Anjou. 

J'insisterai  sur  deux  reliques  qui  méritaient 
une  mention  :  la  coupe,  où  S.  Jean   but  le  breu- 


i6o 


jRrbue  tie  rSrt  cbrcttcn. 


vage  empoisonné  et  qui  est  conservée  à  la  basi- 
lique de  Latraii  ;  la  manne  qui  a  coulé  de  son 
tombeau  et  dont  parlent  souvent  les  inventaires. 

On  se  tromperait  si  on  croyait  que  la  palme, 
un  des  attributs  de  l'apôtre,  fait  allusion  à  son 
martyre  ;  j'y  vois  plutôt  celle  qu'un  ange  lui 
remit  pour  porter  devant  le  cercueil  de  la  Vierge 
à  son  enterrement. 

Enfin,  il  eût  été  bon  de  ne  pas  omettre  les 
fonts  baptismaux  de  Liège,  œuvre  du  X 1 1'^  siècle, 
en  bronze,  que  le  F.  Cahier  a  reproduits  et  com- 
mentés dans  les  Mélanges  d'arclu'ologie,  t.  IV. 
Un  des  bas-reliefs  est  dans  les  An/iales  archcolo- 
o-iques,  t.  V,  p.  31  ;  cette  intéressante  sculpture 
représente  le  baptême  de  Craton   le  philosophe. 

Dans  la  deuxième  partie,  relative  au  frère  de 
S.  Jean,  S.  Jacques  majeur,  nous  avons  51  pages 
de  texte,  1 1  vignettes  et  40  planches. 

Parmi  les  églises  dédiées  à  l'apôtre,  il  y  a  lieu 
de  signaler  St-Jacques  d'Aubeterre  (façade  du 
XI I<^  s.),  la  cathédrale  de  Compostelle  (vue 
intérieure  et  porche  de  la  Gloria,  XII<=  s.),  St- 
Jacques  de  Dieppe  (XIII*^  s.)  et  St-Jacques  de 
Louvain  (XVI^  s.). 

Dans  cet  ensemble  si  complet,  je  ne  vois  qu'une 
petite  lacune,  qui  est  l'omission  du  Pas  de 
S.  Jacques,  vénéré  à  BuxeroUes,  près  Poitiers, 
par  les  pèlerins  du  moyen  âge. 

On  ne  sait  qu'admirer  le  plus  de  la  fécondité, 
vraiment  prodigieuse,  de  l'auteur  ou  de  la  multi- 
tude de  renseignements  qu'ont  accumulés  ses 
voyages,  ses  lectures  et  sa  vaste  correspondance. 
Daigne  Dieu  lui  accorder  encore  de  longs  jours 
pour  l'instruction  des  savants  et  la  gloire  de 
l'Église  1 

X.  B.  DE  M. 


LA  SCULPTURE  A  TROYES  ET  DANS  LA 
CHAMPAGNE  MÉRIDIONALE  AU  XVl'  SIÈ- 
CLE, élude  sur  la  Transition  de  T art  'gothique  à  T Ita- 
lianisme, par  Ravmond  K<kchlin  et  Jkan  Marquet 
IJE  Vasselot,  attaché  aux  musées  nationaux,  —  Paris 
Armand  Colin  et  C'",  éditeurs,  5,  rue  de  Mézières, 
1900. 

VOILA  un  excellent  ouvrage.  Il  est.en  effet, 
le  (ruit  d'un  long  labeur,  entrepris  dans 
les  meilleures  dispositions  que  l'on  puisse  exiger 
des  chercheurs.  «  Nous  avons  parcouru,  nous 
disent  les  auteurs,  le  département  de  l'Aube  et 
les  arrondissements  voisins,  visitant  commune 
aprèscommune,  église  après  église,  et  ne  laissant 
passer  aucun  morceau  de  quelque  intérêt  sans 
le  photographier.  %  MM.  Kœchlin  et  Marquet  ne 
se  sont  pas  crus  dispensés  cependant  de  mettre  à 
profil  les  travaux  de  leurs  devanciers.  Ils  ont  lu. 


analysé  et  apprécié  avec  beaucoup  de  soin  tous 
les  ouvrages  relatifs;!  la  sculpture  troyenne  et  ils 
se  sont  appliqués  à  mettre  en  parfaite  lumière  les 
objets  de  leurs  investigations.  Ils  ont  multiplié 
les  reproductions  des  monuments  les  plus  carac- 
téristiques. Epris  de  leur  sujet,  ils  ont  reconstitué 
le  milieu  religieux,  artistique,  économique  et 
social  où  se  sont  épanouis  ces  modestes  et  labo- 
rieux artisans  troyens. 

Le  tableau  est  si  complet,  que  leur  livre  devient 
une  source  d'informations  aussi  bien  pour  l'his- 
torien que  pour  l'esthète  et  le  critique  d'art.  Que 
de  détails  précieux  non  seulement  sur  les  sculp- 
teurs mais  aussi  sur  les  architectes,  les  peintres, 
les  verriers,  etc.  !  On  se  rend  compte  à  merveille 
de  l'étroite  intimité  qui  régnait  entre  les  divers 
métiers.  En  réalité  leurs  rapports,  leurs  emprunts 
étaient  constants  et  ils  étaient  vraiment  soli- 
daires les  uns  des  autres. 

«  C'est  cette  influence  réciproque  des  divers 
métiers  qui  donne  à  l'art  troyen  son  unité,  et  si, 
comme  nous  le  croyons, la  part  des  imagiers  a  été 
prépondérante  dans  la  formation  de  ce  style 
local,  si  ce  sont  eux  qui  en  ont  été  les  créateurs, 
les  «situer»  dans  leur  milieu,  ainsi  que  nous 
avons  tenté  de  le  faire  entre  les  autres  métiers 
qui  les  imitaient  et  les  bourgeois  dont  ils  reflé- 
taient le  goût,  est  pour  mieux  faire  comprendre 
et  apprécier  leurs  œuvres.  » 

Avec  quel  attrait  on  s'initie  aux  côtés  intimes 
de  ces  existences  d'artistes  exempts  de  cupidité 
et  de  prétentions.  On  trouvera  peut-être  que 
cette  abondance  d'informations  surcharge  le 
tableau.  Pour  ma  part,  je  m'en  voudrais  d'en 
faire  un  grief  aux  auteurs  tant  j'ai  trouvé  d'agré- 
ment à  les  suivre  dans  leur  enquête.  D'ailleurs  ils 
considèrent  bien  leur  ouvrage  comme  une  étude 
et,  à  cet  égard,  ils  ont  [ileinement  atteint  leur 
but.  Leur  méthode  est  excellente  :  composition, 
choix  de  types,  modelé,  draperies,  exécution, 
polychromie,  bref  tous  les  éléments  de  la  sta- 
tuaire troyenne  sont  analysésetscrutésavec  beau- 
coup de  précision  et  de  sagacité.  Il  n'entre  pas 
dans  le  cadre  de  ce  rapide  compte  rendu  de 
discuter  certains  points. 

En  tous  cas,  les  auteurs  me  semblent  exempts 
de  [larti  pris.  C'est  ainsi  qu'ils  reconnaissent  fort 
bien  l'influence  du  Nord  dans  le  domaine  artis- 
tique du  pays  de  Troyes  ainsi  que  l'intervention 
étrangère  qui  s'y  fait  sentir  depuis  le  XIV'=  siècle. 
Celle-ci  est  également  constatée  au  XV^  et 
même  au  début  du  XVI=  siècle.  C'est  ainsi  que 
l'on  peut  noter  l'action  exercée  par  tels  monu- 
ments appartenant  à  la  plastique  flamande  ou 
brabançonne. 

«  Le  XVIe  siècle,  nous  disent  MM.  Kœchlin  et 
Marquet,  est   en  vérité  le   plus  important  de  la 


Btbltograpt)ie, 


i6i 


sculpture  troyenne,  et  c'est  celui  où  elle  acquiert 
son  originalité.  Auparavant  l'art  troyen  se  con- 
fondait un  peu  dans  le  grand  courant  de  l'art 
français  et  les  qualités  propres  que  nous  y  avons 
pu  démêler  n'étaient  guère  que  des  nuances  ; 
durant  la  renaissance  qui  suivit  les  guerres 
anglaises  et  bourguignonnes,  un  caractère  très 
particulier  se  fit  jour,  au  contraire,  chez  les  ima- 
giers de  Troyes  et  une  véritable  école  naquit, 
parfaitement  distincte  de  toutes  celles  qui  se 
développaient  dans  d'autres  provinces.  Un  de  ses 
traits  les  plus  remarquables  est  la  fécondité,  et 
dans  toute  la  région  troyenne  c'est  du  XVI'=  siècle 
que  toutes  les  églises  renferment  des  ouvrages  ; 
aucune  autre  école  peut-être  n'a  autant  produit.et 
les  ateliers  troyens  durent  être  des  centres  d'acti- 
vité vraiment  merveilleux.  Mais  ce  qu'il  y  a  de 
plus  remarquable,  c'est  que  cette  activité  ne  s'é- 
puise pas  avec  la  génération  qui  l'avait  créée. 
Les  œuvres  de  cette  première  génération  sont 
reconnaissables  par  le  sentiment  purement  go- 
thique qui  les  inspire  et  par  l'absence  de  tout 
alliage  étranger.  > 

Malheureusement  cette  belle  école  régionale 
fut  mise  en  échec,  dès  le  milieu  du  XVI'=  siècle, 
par  l'Italianisme  représenté  par  Dominique  le 
florentin  et  sa  suite.  Des  exemples  nombreux 
et  probants  permettent  aisément  au  lecteur  de  se 
rallier  à  l'avis  de  guides  si  bien  informés.  Il  serait 
superflu  d'insister  davantage  sur  les  mérites  de 
l'étude  de  MM.  Kœchlin  et  Marquet,  et  nous  ne 
croyons  pas  nous  tromper  en  la  citant  comme 
un  modèle  au  point  de  vue  de  la  méthode  et  de 
l'agrément  de  l'exposition. 

Joseph   DestrÉE. 

LA  STATUAIRE  EN  NORMANDIE.  —  Dis- 
cours de  M.  le  chanoine  Porée,  directeur  de  la  Société 
des  Antiquaires  de  Normandie.  Caen,  Uelesque,  1900. 

ON  a  considéré  jusqu'ici  comme  négligeable 
la  statuaire  en  Normandie,  à  côté  de  celle 
de  Paris,  d'Amiens  et  de  Chartres  ;  on  a  fait 
entendre  qu'elle  n'est  rien  :  M.  le  chanoine  Porée, 
sans  la  surfaire,  prétend  qu'elle  est  quelque  chose. 
Les  plus  anciennes  sculptures  normandes, 
comme  celles  de  la  nef  de  Biyeux, semblent  con- 
firmer l'origine  indo-scandinave  attribuée  aux 
Normands.  La  crainte  de  l'idolâtrie  constitua 
longtemps  un  préjugé  hostile  à  la  représentation 
des  figures  des  Saints  ;  de  là  la  gaucherie  qu'elle 
offrait  encore  au  XI1'=  siècle.  L'influence  cliar- 
traine  apparaît  à  la  porte  de  l'abbatiale  d'Ivry, 
un  peu  postérieure  à  la  porte  de  la  salle  capitu- 
laire  de  Boscherville,  dont  il  a  été  question  dans 
la  Revue  de  l'Art  chrétien  (année  1899,  p. 466); 
nous     avons    reproduit    notamment    le   fameux 


chapiteau   des    musiciens   conservé  au  musée  de 
Rouen. 

Mais  bientôt  la  métropole  rouennaise  ouvre  un 
vaste  champ  d'études.  Les  sculptures  des  portes 
latérales  dérivent  de  l'école  de  Chartres.  La 
sculpture  décorative  de  Lisieux  est  identique 
comme  caractère  à  celle  de  Rouen.  A  la  même 
influence  appartient  la  sculpture  bien  normande 
de  Séez.  Partout  !a  sculpture  décorative  et  his- 
toriée fait  partie  intégrante  de  l'architecture. 

Un  instant  étouffé  par  la  vigoureuse  poussée 
de  l'architecture  de  l'Ile-de-France,  le  style  nor- 
mand se  réveille  à  partir  de  1230,  et  s'incarne 
dans  des  types  qui  sont  à  Fécamp,  à  Caen,  à 
Bayeux,  à  Eu,  à  Séez,  à  Coutances  :  arcs  en  tiers- 
point  aigus  et  fort  moulurés,  chapiteaux  à  aba- 
ques ronds, chapelles  en  hémicycle,  tours  carrées  à 
l'abside,  rosaces  redentées, cordons  de  quatrefeuil- 
les  aveugles,  tympans  fleurages,  grandes  verrières 
remplaçant  les  roses,  tels  sont  les  traits  saillants, 
développés  avec  un  retard  marqué  sur  l'art  du 
domaine  de  la  Couronne.  Mais  bientôt  les  portails 
de  la  Calende  et  desLibraires  àRouen  surpassent 
en  richesse  tout  ce  qu'on  fait  ailleurs  ;  on  constate 
maintenant  l'influence  de  la  statuaire  de  Reims  ; 
l'art  des  sculpteurs  se  soutient  plus  longtemps 
que  dans  le  reste  de  la  France  et  brille  surtout 
dans  la  statuaire  des  tombeaux.  Il  survit  à  la 
Renaissance.  M.  Porée  examine  la  part  de 
Jean  Goujon  dans  l'œuvre  du  tombeau  de  Brézé. 
Il  relève  les  traits  de  l'influence  italienne  chez 
les  sculpteurs  de  l'ère  nouvelle.  li  insiste  sur 
l'école  de  Gisors  et  sur  celle,  moins  connue, 
de  Verneuil.  Tel  est,  rapidement  résumé,  le  sujet 
du  discours  par  lequel  le  président  des  Anti- 
quaires de  Normandie  a  ouvert  la  session  de 
l'année  écoulée. 

L.  C. 

BULLETIN  DE  LA  SOCIEDAD  ESPANOLA 
DE  EXCURSIONES.  Madrid,  impr.  de  St-Fran- 
çois  de  Sales. 

Ce  sont  des  touristes  sérieux,  des  amis  de  la 
science  et  de  l'art,  qui  se  rangent  et  pérégrinent 
sous  ce  vocable.  Dans  la  livraison  d'octobre 
dernier  de  leur  Bulletin,  que  dirige  avec  dis- 
tinction M.  Enrique  Serrano  Fatigati,  nous  trou- 
vons notamment  une  étude  de  M.  J.  Ramon 
Mélida  sur  des  fibules  ibériques  en  forme  de 
cheval  de  bataille,  une  autre  de  M.  R.  Ramirez 
de  Arellano  sur  plusieurs  artistes  inconnus 
(artistas  exhumados),  une  description  de  l'église 
major  de  Libérija  par  M.  A.  F.  Casanova  et 
enfin  une  importante  étude  du  directeur  de  la 
Revue  sur  les  sculptures  romanes  en  Espagne. 
Elle  est  accompagnée  de  belles  et  curieuses 
reproductions  photographiques. 


102 


Brbuc  De  rSrt  cl)rcticn. 


G.  VAN  CASTER.  MATHIEU,  JOSEPH  CHAR- 
LES HUNIN,  graveur  (1770-1851)  et  PIERRE- 
PAUL- ALOUIS  HUNIN,  peiatres  de  genre 
(1808-1856),  par  M.  le  chan.  Van  Caster.  Broch. 
Malines,  Godenne.  1900 

Parmi  les  vues  de  la  cathédrale  de  Malines 
qui  lui  ont  servi  à  établir  ses  études  intéressantes 
sur  la  tour  Saint-Rombaut,  le  respectable  pré- 
sident de  V Académie  archéologiqi4e  en  possédait, 
qui  faisaient  partie  de  son  héritage  familial  ;  il 
compte  parmi  ses  parents  l'auteur  d'une  des 
planches  qu'il  a  publiées  :  c'est  le  graveur  Jos. 
lîuniii  ;  nous  sommes  d'ailleurs  en  présence 
d'une  famille  d'artistes.  Joseph  était  fils  d  orfèvre 
et  fut  le  père  du  peintre  Alouis.  M.  V.  C.  leur 
consacre  d'intéressantes  notices.  L.  C. 

L'ART  DES  JARDINS,  par  G.  RiAT,  Petit 
in-8°,  de  400  pp.,  nombreuses  gravures.  Paris,  May, 
1900.  —  Prix  3,50. 

L'éditeur  L.  H.  May,  successeur  de  Quantin, 
vient  d'ajouter  un  volume  à  la  collection  si  appré- 
ciée de  la   Bibliothèque  de    l'enseignement  des 


Beaux-Arts,  dont  nous  avons  présenté  déjà  de 
nombreux  volumes  à  nos  lecteurs. 

IJart  des  Jardins,  traité  comme  il  l'est  par 
M.  Riat  au  point  de  vue  rétrospectif,  voilà  un 
sujet  bien  propre  à  intéresser  plus  ou  moins  une 
multitude  de  lecteurs  ;  nous  pourrions  ajouter 
que,  traité  au  point  de  vue  pratique,  il  en  intéres- 
serait un  plus  petit  nombre,  d'une  manière  beau- 
coup plus  vive  peut-être  ;  mais  l'éditeur  n'a 
entrepris,  en  sa  belle  série,  de  développer  que 
r histoire  de  l'art. 

D'ailleurs,  il  est  fort  instructif  d'apprendre 
comment  furent  les  jardins  de  l'antiquité,  de- 
puis les  fameux  jardins  suspendus  de  Baby- 
lone  dont  nous  parle  Hérodote  et  les  jardins  de 
l'antique  Egypte  dont  la  vignette  ci-contre(fig.  I), 
d'après  des  peintures  murales,  donne  q^uelqu'idée, 
jusqu'aux  parcs  publics  des  Grecs  et  aux  ma- 
gnifiques villas  romaines,  dont  on  entrevoit 
l'ordonnance  dans  les  historiens  et  les  poètes  du 
temps.  Comme  l'auteur  s'appuie  en  tout  sur  des 
documents  positifs,  il  s'interdit  modestement  de 


')jMi»iafïiïfSiïiiw#iW 


^Hî 


^•' 1   I   ,     1    I    ,    I    1    I    i    I   ■    I    I    ■   I    I    I  .1    ■'•...  -  TT 


1  I   I  i! 


I    J    I    1    )    1    J    J   1  Ai 


Fig.  I.  —  Plan  d'une  maison  thébaine  avec   jardin. 


nous   décrire,  pour   commencer,  le  paradis  ter- 
restre. 

Le  chapitre  consacré  au  moyen  âge  contient 
des  indications  peu  connues.  Les  moines  furent 
les  ancêtres  de  nos  horticulteurs.  Le  jardin  du 
monastère  renfermait  des  légumes,  des  herbes 
aromatiques  ou  médicinales,  mais  aussi  des  parcs 


ombragés  ainsi  que  des  fleurs  destinées,dit  Albert 
le  Grand,  au  plaisir  des  yeux  et  de  l'odorat  et  à 
la  décoration  des  autels.  Le  capitulaire  de  Char- 
lemagna  De  villis  imperialibus  énumère  les  plan- 
tes, herbes  et  arbres  fruitiers  à  planter  dans  les 
domaines  impériaux.  Le  potager  devient  jardin 
au  XI''  siècle  et  les  documents  littéraires  four- 


Dissent  des  exemples   de  jardins   seigneuriaux, 
ecclésiastiques,  bourgeois.  Dans  les  chansons  du 


moyen  âge, il  est  souventquestion  d'un  verger  plein 
d'arbres  fruitiers  avec  une  fontaine  entourée  d'un 


4v 


II.  —  Un  coin  du  jardîu  de  Caprarola. 


tapis  émaillé  de  fleurs,  où  se  promène  un  paon  ; 
souvent  régnait  autour  de  la  fontaine   un  banc 


ayant   pour   dossier   un   mur   bas   à   trois  pans, 
et  pour  siège  une  banquette  de  gazon. On  y  voyait 


Fig.  III.  —  Montargis.  —  Jardin  en  éventail. 


aussi  des  tonnelles,  des  treilles,  des  courtilles,  des 
labyrinthes   ou  iitaiso?is   de  Dœdalos.  On    avait 


déjà  conçu  l'idée  grotesque  de  tailler  des  arbres 
en   forme  de  vase  ou   même  d'animal. 


REVUE   DE    L  ART  CHRETIEN. 
190t.    —    2'"'^    LIVRAISON. 


i64 


Bebue  De  T^vt  fl)rctten. 


C'est  en  Espagne  qu'on  trouve  les  vrais  monu- 
;nts  de  l'art  horticole,  à  l'Alhambra  et  au  Gé- 


néralife   de  Grenade,  à  l'Alcazar   de  Séville,  etc. 
A   la    Renaissance,  les  papes  ressuscitent  les 


& 


Fig.  IV.  —  Paris.  —  Jardin  des  Colombier. 


jardins  à  l'antique  selon  le  inonde  impérial.  Tout 
s'y  trouve  compassé,  régulier,  tiré   au   cordeau  ; 


les  parcs  sont  meublés  de  vasques,  de  fontaines 
—  peuplés  de  Termes   (fig.  II),  divisés  en   ter- 


Jardin  du  Luxembourg: 


fasses  rachetées  par  de  larges  escaliers  à  rampes 
bordés  de  balustrades,  agrémentés  de   statues, 


accompagnés    d'exèdres,   de  grottes,    de    bâti- 
ments ;   le  jardin    est   en    quelque    sorte    bâti. 


BtbHograpl)te, 


165 


Les  lignes  d'architecture  commandent  les  lignes 
générales  des  parterres  et  des  bosquets,  les 
ronds-points,  les  carrefours,  les  étangs.  Les  allées 
convergent  vers  des  points  d'un  caractère  monu- 
mental. Le  tout  est  arrangé  dans  une  distribution 
panoramique  et  symétrique.  L'ensemble  est  froid, 
mais  embelli  en  Italie  par  le  lointain  des  mon- 
tagnes et  de  la  mer  ;  sans  quoi  l'impression 
en  eût  été,  selon  la  remarque  de  Burckhardt, 
lourde  et  pesante  comme  de  Versailles.  Il  faut 
citer  parmi  les  monuments  les  parcs  grandioses 
de  Caprarola,  d'Esté  à  Tivoli,  de  Colonna, 
de  Madama,  de  Médicis,  de  Torlonia,  de  Barbe- 
rini  à  Rome  et  la  villa  Ludovisi,  dont  Le  Nôtre 
s'inspira. 

L'ancien  jardin  français  était  calqué  sur  la 
maison  plutôt  que  sur  le  site,  témoin  le  curieux 
jardin  en  éventail  de  Montargis  (fig.I  II).  A  la  re- 
naissance encore  se  multiplient  les  ordonnances 
savamment  régulières  à  compartiments  géomé- 
triques, dans  lesquelles  s'inscrivent  des  planta- 
tions à  dessins  compliqués,  sortes  de  broderies 
dessinées  comme  les  ornements  d'un  tapis  (fîg. 
IV)  et  semées  d'arbres  en  boules  ou  en  pyrami- 
des, de  vraies  sculptures  végétales.  Les  sites  où 
s'élèvent  les  châteaux  de  la  Loire  ont  été  juste- 
ment nommés  le  jardin  de  la  France.  M.  Riat 
nous  décrit,  d'après  les  contemporains,  les  jardins 
de  Blois,  Chenonceau,  et  nous  fait  connaître  les 
architectes  des  jardins  de  l'époque,  qui  ont  nom 
Mollet,  Boysseau,  Palissy,  Ducerceau,  etc. 

Au  XVI I^  siècle,  Le  Nôtre  mit  les  parcs  royaux 
en  harmonie  avec  le  faste  de  la  cour  du  Roi 
Soleil  ;  il  créa  les  ailées  larges  et  sans  fin,  les 
vastes  pelouses,  les  riches  parterres,  les  théâtrales 
ordonnances  de  Versailles,  du  Trianon,  de  Chan- 
tilly, de  Clagny,  de  Marly,  où  la  nature,  domptée 
par  l'homme,  se  fait  courtisane.  Il  créa  le  jardin 
régulier,  o\x  jardin  français  (fig.  V).  La  géométrie 
y  gouverne  bosquets  et  parterres;  le  jardinier  y 
traite  les  arbres,  comme  le  coiffeur  les  cheveux 
et  la  barbe  ;  l'eau  n'y  existe,  dit  M.  Dujardin,  que 
pour  mettre  en  valeur  l'art  du  fontainier. 

Avec  le  XVI 1 1<=  siècle,  intervient  la  théorie  des 
jardins  paysagers  des  Anglais,  d'après  le  système 
de  William  Kent  et  de  Brown.  De  leurs  parcs 
pittoresques  les  Anglais  ont  fait  des  microcosmes 
avec  des  fermes,  des  ruines,  des  moulins,  voire 
des  tombeaux.  Le  modèle  du  genre  est  en  France 
le  hameau  factice  du  Petit  Trianon. 

L'ouvrage  se  termine  par  des  considérations 
sur  le  genre  mixte  qui  caractérise  le  XIX^  siècle 
et  l'auteur  nous  quitte  sous  les  ombrages  modé- 
rément naturalistes  du  Bois  de  Boulogne. 

L.  C. 


ÉPITAPHES  ET  MONUMENTS  DES  EGLISES 
DE  LA  FLANDRE  AU  XVI-  SIÈCLE,  par  le 
baron  J.  Bethune,  Société  d' Emulation,  Bruges,  1900. 

Corneille  Gaillard  naquit  vers  1520.  Après  des 
voyages  en  Italie  et  en  Terre-Sainte,  il  s'adonna 
aux  recherches  généalogiques  et  à  des  études 
héraldiques  circonscrites  à  la  Flandre  et  aux 
provinces  voisines;  il  devint  héraut  d'armes  de 
l'empereur  Charles-Quint  et  mourut  à  Bruges 
en  1563.  MM.  Van  Maldeghem  et  Van  HoUebeke 
ont  dressé  un  catalogue  de  celles  de  ses  œuvres, 
dont  les  manuscrits  sont  conservés  à  la  Biblio- 
thèque de  Bourgogne.  Depuis,  s'y  est  ajouté 
V Epitaphier  de  Bruges. 

Mais  un  autre  document  avait  échappé  aux 
recherches  des  biographes  de  Corneille  Gaillard. 
C'est  en  1893,  que  M.  Ferd.  Van  der  Haeghen 
eut  la  bonne  fortune  de  découvrir  et  d'acquérir 
pour  la  bibliothèque  gantoise  un  recueil  relatif 
aux  épitaphes  et  monuments  de  la  Flandre  au 
XVI'=  siècle,  coristituant  en  quelque  sorte  la  suite 
de  YÉpitaphier  de  Bruges. 

C'est  une  série  de  notes  transcrites  au 
XVI 11'=  siècle,  que  le  baron  Bethune,  avec  la 
grande  compétence  qui  le  distingue  et  non  sans 
solides  arguments,  restitue  à  notre  héraut  d'ar- 
mes. Elles  sont  d'autant  plus  intéressantes  que 
l'auteur  s'y  montre  doué  de  connaissances  ar- 
chéologiques peu  répandues  à  cette  époque. 
Lorsque  Gaillard  parle  de  «  lourds  casques,  tels 
qu'on  les  portait  au  milieu  du  XII'=  siècle  », 
de  «  tombes  à  la  façon  du  temps  du  comte 
Louis  de  Nevers  »,  de  «  statues  peintes,  qui  sem- 
blent remonter  à  trois  siècles  au  moins  »  ;  on 
croirait  entendre  un  de  nos  archéologues  con- 
temporains. 

La  biographie  du  héraut  d'armes  Gaillard, 
l'étude  de  ses  œuvres,  celle  des  manuscrits  dont 
le  baron  Bethune  s'est  aidé  pour  élucider  des 
points  douteux  et  en  compléter  d'autres,  tout 
cela  offre  l'intérêt  d'une  page  d'histoire  locale  et 
familiale  très  vivante  et  parfaitement  fouillée. 

L'utilité  de  la  publication  ressortira  surtout 
après  l'achèvement  du  quatrième  et  dernier  fas- 
cicule, qui  contiendra  la  table  des  noms  et  per- 
mettra aux  familles  flamandes  de  retrouver, 
grâce  à  Corneille  Gaillard  et  à  son  érudit  édi- 
teur, le  baron  Bethune,  de  nombreux  renseigne- 
ments que  la  révolution  religieuse  du  XVI'' siècle 
et  les  vicissitudes  ultérieures  ont  fait  disparaître 
des  églises  et  des  monuments  publics  de  la 
Flandre. 

En  attendant,  nous  félicitons  notre  savant 
collaborateur  d'avoir  ajouté  un  important  volume 
à  l'ensemble  déjà  considérable  de  ses  recherches 
historiques  et  de  ses  études  archéologiques. 

L.  C. 


i66 


Bc\)uc  lie  r^vt  cbvcttcu* 


SAINTE  FOY,  VIERGE  ET  MARTYRE  ('\  par 

MM.  A.  BouiLLET  et  L.  Servièrf.s.  Rodez,  Carrère, 
1900.    Grand  in-4    de   780   pp.,    richement  illustré. 


Prix  :   30  francs.  (En  vente  chez   A.  Picard,  82,  rue 
Bonaparte,  Paris). 

Parmi  les  tininbreuses  monographies  d'églises 


Plan  de  l'église  Saiute-Foy  de  Conques  (Aveyrony,  (XÎ'^-XIP  siècle.) 


I.  Cet  ouvrage  a  été  honoré  d'une  médaille  de  vermeille  (fondée  en  mémoire  du  regretté  C"  de  Marsy)  au  Congrès  de  la  Société  française 
d'archéologie,  tenu  à  Chartres  en  1900. 


L'église  de  Conques'(Aveyron)  vers  1820. 


Restes  du  cloître  de  l'abbaye  de    Conques  (XI T'  siècle). 


i68 


WitWt  lie  V^ït  cbrcttciu 


anciennes  que  nous  nous  plaisons  à  enregistrer, 
le  volume  de  luxe  que  nous  devons  à  MM.  Bouil- 
let  etServièresest  une  desplus  importantes  à  tous 
ég;ards.  Le  monument  qui  en  est  l'objet  représente 
d'ailleurs  par  son  architecture  et  par  son  trésor 
un  des  joyaux  du  style  roman.  Il  est  consacré  à 


une  sainte  enfant  martyre,  qui  fut  grande  aux 
yeux  de  Dieu,  quoique  petite  aux  yeux  des 
hommes,  et  dont  la  mémoire  reste  entourée  d'une 
grande  vénération.  La  basilique  élevée  pour  abri- 
ter ses  reliques,  est  un  édifice  unique.  «  Issu  de 
cette  école  d'architecture  qui  a  couvert  le  sol  de 


Reliquaire  du  grand  voile  de  Sainte-Foy  (XIX''  siècle).  Trésor  de  Conques. 


l'Auvergne  de  tant  de  monuments  d'un  très  haut 
intérêt,  elle  marque  une  étape  caractéristique  et 
décisive  dans  la  voie  de  perfectionnement  et  de 
progrès, qui  devait,  par  Saint-Sernin  de  Toulouse, 
aboutir  à  Saint-Jacques  de  Compostelle.  » 

Quant  au   trésor  de  Conques,  dont  les  pièces 
capitales  ont  émerveillé  les  visiteurs  de  l'Exposi- 


tion   de   1900,  il  n'est  rien  moins  qu'un  des  plus 
riches  de  l'univers. 

L'ouvrage  est  très  complet.  Il  contient  l'iiis- 
toire  de  la  Sainte  étudiée  dans  toutes  ses  mani- 
festations, et  l'histoire  de  l'abbaye  élevée  sous 
son  vocable  ;  l'étude  archéologique  de  son  église, 
la  description   de   son   trésor,  une  monographie 


Btbltograpl)îe. 


169 


du  culte  de  sainte  Foy  dans  les  sanctuaires 
de  la  chrétienté  et  les  actes  de  son  martyre.  Il 
se  termine  par  le  Livre  des  miracles  de  sainte 
Foy  d'après  les  diverses  versions  et  manuscrits, 
suivi  de  la  liturgie  de  la  Sainte  et  de  documents 
divers.  En  deux  mots,  c'est  un  chef-d'œuvre  du 
genre.  ^     ç- 


LES  CHEFS-D'ŒUVRE  DES  MUSÉES  DE 
FRANCE:  LA  PEINTURE,  par  Louis  Gonse. 
Paris,  L.  Henry  May,  1900.  ln-4°,  270  vignettes, 
30  pi.  hors  texte.  Prix,  broché,  50  francs  ;  relié, 
60  francs. 

En  lisant  ce  titre  légèrement  inexact, on  s'atten- 
dra   à   un  recueil  dans   lequel   la  grande   place 


La  Vieige  entre  deux  Saints,  par  le  Peiugin  (Musée  de  Bordeaux). 

est    prise    par    les    chefs-d'œuvre    de    l'opulent    |    quelques  musées  de  second  ordre  comme  annexe. 


musée  du  Louvre,  avec  le  dessus  du  panier  de    |    Hâtons-nous  de  dire  que  le  Louvre  en  est  exclu, 


lyo 


îlXcbuc  t)c  V^n  cbvcticiu 


et  qu'il  ne  s'agit  que  des  musées  de  province. 
Mais  sait-on  que  la  France  possède,  disséminés 
sur  son  territoire,  trois  cent  soixante  et  quelques 
musées,  recelant  des  trésors  ignorés,  contenant 
une  somme  de  40,000  tableaux  anciens,  parmi 
lesquels  tous  les  maîtres  de  la  peinture  sont  re- 


présentés ?  Aucun  autre  pays  n'offre  au  curieux 
de  semblables  richesses,  presque  inexplorées.  La 
réunion  de  ces  petits  musées  formerait  un  en- 
semble unique  en  Europe. 

On  devine  l'intérêt   d'un  livre  qui   décrit  ces 
trésors,  surtout   s'il    est   écrit   par   le  charmeur. 


Glorification  de  l'Immaculée  Conception,  di]il\tnic  de  Jean  Iîei.lkgamhe  (Musife  de   Douai). 


qu'est  l'auteur  de  VAr/  gothique,  de  la  Sculpture 
française,  et  de  Y  Art  Japonais  :  il  est  édité  avec 
un  luxe  au  moins  égal  à  celui  des  volumes  que 
nous  venons  de  rappeler. 

M.  Gonse  nous  présente  une  sorte  de  Salon 
carré,  un  salon  de  300  chefs-d'œuvre,  qui  consti- 
tue comme  une  des  plus  belles  galeries  du  monde. 


Que  de  rencontres  imprévues,  que  de  révélations 
piquantes,  depuis  Rubens  jusqu'à  Ingres,  en 
passant  par  Véronèse,  Rembrandt,  Watteau,  Vé- 
lasquez,  les  Le  Nain,  La  Tour,  Nattier  et  tant 
d'autres  !  L'École  française  cjccupe  naturellement 
le  premier  plan. 

Les  gravures  ont  été  obtenues  directement, 


Blbltograpl)tc» 


lyi 


d'après  les  photographies  sans  retouche,  exécu- 
tées sous  la  direction  de  l'auteur.  Les  quatre 
planches  gravées  sont  dues  à  la  pointe  habile  de 


M.  Jean  Wybaud,  et  les  26  héliogravures  hors 
texte  sont  de  chez  Georges  Petit.Il  serait  difficile 
de  rencontrer  des  traductions  de  tableaux  plus 


L  Adoration  de  l'Enfant  Jésus.  (Art  italo-flamand  du  XV^  siècle,  Musée  d'Avignon.) 


souples,  plus  colorées    et  en    même  temps  plus 
documentaires. 

Nous  exprimerons  le  regret,  que  l'éditeur  n'ait 
pas  éliminé  de  ses  illustrations  quelques  nudités 
lestes, sinon  grossières  (rares  d'ailleurs),  telles  celle 
de  la  p.  71.  Nous  aurions  alors  pu  présenter  sans 
réserve  ce  savoureux  volume  comme  digne  d'être 
introduit  dans  les  familles  pour  contribuer  à 
l'éducation  artistique  de  la  jeunesse. 

L.   C. 

ICONOGRAPHIE  ET  BIBLIOGRAPHIE  DE 
N.-D.  DE  LA  TREILLE,  par  L.  QuaRRÉ-ReyBOUR- 

BON.  Broch.  Lille,  Quan,  1900. 

La  notice  de  M.  Q.  R.  a  servi  d'annexé  à 
\ Histoire  de  la  collégiale  de  Saint-Pierre  de  Lille, 
complétée  par  V Histoire  de  N.-D.  de  la  Treille  de 
Mgr  Hautcœur. 


f 


On  y  trouve  un  inventaire  bibliographique  de 
ce  qui  se  rapporte  au  culte,  à  l'histoire,  à  l'ico- 
nographie de  la  madone  lilloise,  dont  on  connaît 
la  popularité  parmi  les  fidèles  de  la  région  du 
Nord,  et  à  l'honneur  de  qui  l'on  a  commencé, 
depuis  40  ans  d'élever  une  cathédrale  digne  du 
XI Ile  siècle.  (V. /?^7'//^  Jg  l'Art  chrétien,  année 
1894,  p.  415) 

L'œuvre  se  poursuit  avec  lenteur,  par  des 
temps  néfastes  pour  l'Église  française  ;  néanmoins, 
en  1897,  l'on  a  inauguré  la  chapelle  du  chevet 
dédiée  à  N.-D.  de  La  Treille.  Cette  chapelle  en 
remplace  une  autre,  élevée  au  XV«  siècle  en  la 
collégiale  de  Saint-Pierre.  L'ouvrage  ancien 
dont  la  gravure  ci-contre  reproduit  le  type,  se 
rencontre  pour  la  première  fois  dans  un  manuscrit 
de  1592. 

L.  C. 


-Kï 


REVUE    DE    l'art    CHRÉTIEN. 
19OI.    —    2™^    LIVRAISON. 


172 


•3Rtl)ue  Dr  V^xt  cbrctien. 


ZEITSCHRIFT    FUR   CHRISTLICHE    KUNST. 

(XI II"-'  année,  3'  fasc.) 

I'^OUTE  cette  livraison  est  occupée  par  une 
savante  et  intéressante  étude  du  P.  Beissel 
sur  l'Évangéliaire  de  Henri  III  provenant  de  la 
cathédrale  de  Goslar,  actuellement  à  la  Biblio- 
thèque d'Upsal,  et  sur  les  manuscrits  apparte- 
nant au  même  cycle.  Une  planche  hors  texte 
et  S  gravures  reproduisent  des  miniatures  de  ce 
précieux  ouvrage  du  XI'-  siècle. 

(4<=  fasc).  —  Description,  par  M.  VVùscher- 
Becchi,  de  peintures  murales  du  XV=  siècle,  ré- 
cemment découvertes  dans  une  chapelle  de  l'é- 
glise paroissiale  de  Stein-sur-le-Rhin  (2  reprod.). 

—  Notice  du  P.  Braun  sur  l'aube  de  saint 
François  d'Assise,  conservée  à  l'église  Santa- 
Chiara  de  cette  ville  (3  reprod.). 

—  Article  de  M.  G.  Jacob  sur  les  statues  dites 
Les  Quatre  rois  à  cJieval  à  la  façade  de  la  cathé- 
drale de  Ratisbonne,  qui  viennent  d'être  restau- 
rées ;  il  détermine  le  sens  de  ces  sculptures,  qui 
lui  semblent  représenter  les  quatre  animaux  fan- 
tastiques vus  par  Daniel  et  personnifiant  les 
quatre  royaumes  chaldéen,  mède,  perse  et  gréco- 
macédonien. 

(5e  fasc).  —  M.  A.  Bertram  donne  des  célè- 
bres fonts  baptismaux  en  bronze  (fin  du  XIII^ 
siècle)  de  la  cathédrale  de  Hildesheim  une 
description  détaillée,  accompagnée  de  3  plan- 
ches publiées  dans  la  livraison  suivante  avec  la 


fin  de  ce  travail,  et  de  S  gravures  dans  le  texte, 
reproduisant  le  monument  sous  toutes  ses 
formes. 

(6«  fasc).  —  Supplément  au  travail  de  M.  H. 
Semper  sur  les  ouvrages  rhénans  en  ivoire  et  en 
os,  des  XI<=  et  XII<=  siècles,  avec  reproduction 
d'un  beau  reliquaire  appartenant  à  ce  groupe  et 
conservé  au  Cabinet  des  antiques  de  Stuttgart. 

—  Description,  par  M.  H.  Derix,  d'anciens 
vitraux  du  XV*"  siècle  à  la  cathédrale  de  Xanten 
(planche  hors  texte  reproduisant  trois  de  ces 
vitraux). 

(7=  fasc).  —  Sièges  cpiscopaux  et  ambons  en 
Apulie,  par  M.  P.  Schubring  (avec  reprod.  du 
siège  épiscopal  de  saint  Nicolas  de  Bari  (XI^ 
siècle),  de  fragments  des  ambons  de  Bitonto  et 
de  la  cathédrale  de  Bari  (XII I<=  siècle)  et  de  la 
chaire  de  l'église  Saint-Basile,  à  Troia  (XVI^ 
siècle). 

—  Note  de  M.  Schniitgen  sur  un  parement 
brodé  du  XV*=  siècle  conservé  au  Musée  des  arts 
industriels  à  Vienne  (reprod.). 

(8e  fasc). —  Le  Goût  en  art,  par  L.  M.  K. 

—  Le  P.  Sœrensen  nous  fait  connaître  une 
Pietà  (reprod.  dans  cet  article)  conservée  dans 
la  sacristie  de  l'église  du  couvent  de  Weert  (Lim- 
bourg  hollandais)  et  qui  lui  semble  devoir  être 
attribuée  à  Quintin  Matsys. 

—  M.  L.  von  Fisenne  donne,  avec  commen- 
taires, plusieurs  plans  d'églises  à  deux  nefs  des 
provinces  rhénanes  et  de  Westphalie  ('). 


I.   Chronique  des  Arts. 


^.  ^.  ^^^.  ^.  ^.  ^^.  ^  ^  ^.  ^.  ^.  ^  ^.  ^.  ^.  ■^.  ^.  ^.  ^.  ^.  ^.  ^.  ■^.  ^^. 


Vrt)rOnlQUC.  sommaire:  œuvres  NOUVELLKS  :  Le  monument  de  Bossuet 
à  Meaux.  —  MUSÉES.  —  RESTAURATIONS  :  cathédrales  de  France,  vieux  Rouen,  tour 
de  Vësone  à  Périgueux,  Commissions  diocésaines  des  monuments,  Notre-Dame  du  Sablon 
à  Bruxelles,  —  NOUVELLES  :  art  protestant,  fresques  anciennes,  gares  gothiques  —  NÉCRO- 
LOGIE :   M.    H. -A.    Revoil. 


Œutires  nouticllcs. 


^E  M onument  de  Bossuet  à  Meaux.  — 
Dans  le  Grand  Palais  des  Champs- 
Elysées,  dressé  comme  un  autel  sur  le 
seuil  de  cette  abside  où  s'inscrit  l'es- 
Cdiier  en  fer  à  cheval  conduisant  aux  galeries 
hautes, on  voyait  le  mémorial  de  Bossuet,  œuvre 
de  M.  Ernest  Dubois,  destinée  à  la  cathédrale  de 
Meaux.  Il  était  là,  faisant  face  au  monument 
triomphal  de  Victor  Hugo,  et  cette  place  émi- 
nente  il  la  devait  à  l'importance  du  morceau, 
une  des  plus  grandes  «  machines  »  assurément 
de  cet  immense  fouillis  qu'était  le  hall  du  Grand 
Palais. 

Au  moment  où,  grâce  à  l'initiative  de  Mgr  Le 
Nordez,  évéque  de  Dijon,  va  enfin  être  réalisé  le 
projet  depuis  si  longtemps  cher  aux  cœurs  dijon- 
nais  d'un  monument  au  plus  illustre  des  enfants 
de  Dijon,  il  n'est  pas  sans  intérêt  d'examiner 
comment  a  été  traité  le  sujet  dans  le  mémorial 
destiné  à  la  cathédrale  de  Meaux.  Eh  bien,  je 
n'hésite  pas  à  le  dire,  l'artiste  qui  a  bien  réussi 
le  monument  des  frères  Joseph  et  Xavier  de 
Maistre,  à  Chambéry,  s'est  trompé  cette  fois, 
avec  tout  le  talent  que  l'on  voudra,  mais  enfin 
l'erreur  est  à  mes  yeux  complète. 

De  1679  à  sa  mort,  survenue  à  Paris  dans  un 
hôtel  de  la  rue  Sainte- Anne,  le  I2  avril  1704, 
Bossuet  a  été  évêque  de  Meaux,  et  c'est  dans  sa 
cathédrale  qu'il  repose  sans  que,  jusqu'aujour- 
d'hui, un  monument  funèbre  désigne  le  lieu  où 
gît  son  cercueil.  On  croyait  même  que  les  restes 
mortels  du  grand  évêque  avaient  été  profanés  ; 
mais,  il  y  a  quelque  quarante-cinq  ans,  une  fouille 
fit  retrouver  sous  le  pavé  du  sanctuaire  le  cer- 
cueil iîitact.  On  eut  même  la  curiosité  de  l'ouvrir, 
et  la  momie  apparut  ;  pendant  quelques  instants 
nos  contemporains  ont  pu  contempler  ce  qui 
restait  de  Bossuet. 

Dès  lors,  le  programme  était  tout  tracé  ;  il 
s'agissait  de  réparer  l'oubli  de  deux  siècles — je 
ne  parle  pas  de  la  statue  insignifiante  que  vit 
Victor  Hugo  en  1838.  —  V.  Le  Rhin,  t.  I,  p.  38, 
—  et  d'élever  à  Bossuet  le  monument  funè- 
bre noble  et  grave  auquel  a  droit  cette  grande 
mémoire.  Et  même,  étant  donnée  notre  impuis- 
sance actuelle  à  avoir  un  style,  le  mieux  était  de 
s'en  tenir  à  l'ancien.  Ainsi,  le  monument  devait 
être  tel  que  par  les  mains  de  Girardon,  de  Coy- 
sevox   ou  de  Coustou   aurait  dû  lui  consacrer  le 


XVIfle  siècle  commençant.  Suivant  la  très 
noble  formule  du  tombeau  français,  de  la  Renais- 
sance aux  temps  contemporains,  je  vois  donc, 
sur  un  sarcophage  de  marbre  noir  ou  de  porphy- 
re sombre,  Bossuet  agenouillé  devant  un  prie- 
Dieu  à  ses  armes,  les  mains  jointes,  la  tête  haute 
et  largement  drapé  dans  sa  robe  à  longue  traîne. 
A  la  base,  lui  font  cortège,  assises,  la  Théologie, 
V Eloquence  et  V Histoire,  qui  pourraient  très  bien 
être  traitées  non  tout  à  fait  dans  la  manière  de 
Coustou,  mais  avec  une  certaine  adaptation  per- 
sonnelle, comme  l'a  fait  M.  Paul  Dubois  pour 
les  incomparables  figures  du  tombeau  de  Lamo- 
ricière.  Il  est  manifeste  qu'un  monument  à  Bos- 
suet, fût-il  destiné  à  une  place  publique,  ne  doit 
pas  être  conçu  dans  les  mêmes  données  que 
celui  qui  serait  élevé  à  un  poète  ou  à  un  auteur 
dramatique.  Mais  du  moment  qu'il  s'agit  de  le 
placer  dans  une  église,  je  ne  puis  admettre  qu'une 
œuvre  ayant  le  caractère  religieux  ;  et,  dans 
l'espèce, c'était  évidemment  le  type-tombeau  qu'il 
fallait  adopter. 

J'ai  examiné,  avec  l'intérêt  qu'inspire  à  tout 
Dijonnais  le  grand  nom  de  Bossuet,  le  modèle 
du  monument  destiné  à  la  cathédrale  de  Meaux, 
et  j'ai  eu  le  regret  d'éprouver  une  déception  com- 
plète. L'œuvre  n'est  qu'un  grand  biscuit  de  Sè- 
vres, sans  style  monumental  et  surtout  sans 
l'ombre  de  sentiment  religieux  ou  funèbre.  L'ar- 
tiste n'a  pas  voulu  d'allégories  jugées  vieux  jeu, 
mais  les  a  remplacées  par  quelque  chose  de  non 
moins  vu.  Au  pied  d'un  cippe  sur  lequel,  concep- 
tion malheureuse,  Bossuet  est  représenté  assis, 
sont  groupées  quatre  figures  d'hommes  et  de 
femmes  dans  le  costume  du  temps  et  représentant 
les  personnages  qui  ont  eu  le  plus  de  rapports 
avec  Bossuet.  On  connaît  ce  thème  substitué  aux 
bas-reliefs,  imaginé  pour  la  première  fois,  je  crois, 
par  Rauch  pour  la  statue  équestre  du  grand  Fré- 
déric à  Berlin,  maintes  fois  repris  depuis,  notam- 
ment pour  le  monument  d'Alexandre  Dumas 
père,  à  Paris,  et  du  général  Chanzy  au  Mans. 
Mais  les  monuments  de  Berlin  et  du  Mans  sont 
traités  dans  le  style  héroïque,  et  si  le  d'Artagnan, 
assis  au  pied  de  l'image  de  celui  qui  fut  son  créa- 
teur, n'est  qu'une  figure  d'anecdote  historique,  il 
n'avait  pas  besoin  de  viser  plus  haut. 

Il  n'en  est  pas  de  même  des  figures  groupées 
par  M.  Ernest  Dubois  au  pied  de  son  Bossuet  ; 
il  fallait  ici  du  plus  grand  style,  et  l'artiste  ne 
nous  a  donné  que  des  statuettes  amplifiées  et 
dans    les    attitudes    les    plus    familières.   Aussi, 


174 


îRebue  îie  V^xt  c!)rétteiu 


malgré  des  dimensions  monumentales,  cela  est 
petit  ;  l'ideri  iitagnus,  sentiri  parviis,  parce  que 
la  conception  est  petite,  et  que  sous  les  voûtes 
graves  et  fatiguées  du  XIII<=  siècle,  on  aura  beau 
entasser  les  matériaux  et  les  formes,  on  n'aura 
jamais  qu'un  joujou  agrandi,  une  anecdote  en 
marbre,  dont  le  plein  air  ne  laisserait  rien  et  dont 
la  cathédrale  ne  conservera  pas  grand'chose.Pour 
le  Bossuet  assis  et  qui  semble  parler  ou  ensei- 
gner, j'ai  déjà  dit  que  c'était  une  conception 
malheureuse  ;  on  ne  perche  si  haut,  en  effet,  que 
des  figures  debout,  de  style  historique  et  non  un 
personnage  assis  dans  un  fauteuil,  ce  qui  im- 
plique nécessairement  le  plainpied  et  le  terre-à- 
terre.Puis  on  me  dit  que  cette  attitude  est  réservée 
aux  saints  et  aux  papes. 

Ma  conclusion  est  que  l'absence  de  style  et  de 
gravité  sont  des  défauts  essentiels  que  ne  saurait 
pallier,  —  je  fais  très  sincèrement  la  partie 
belle  à  M.  Ernest  Dubois,  —  la  plus  parfaite 
exécution  matérielle,  et,  pour  tout  dire,  la  France 
va  posséder  un  monument  manqué  de  plus.  On 
me  dira  que  dans  le  nombre  ce  n'est  pas  une 
affaire. 

Henri  Chabeuf. 


ffiui5ée0. 

(E  Musée  du  Louvre  a  reçu  des  étrennes 
princières. 

La  Société  des  Amis  du  Louvre  lui 

a  fait  don  d'une  admirable  tapisserie 

de  haute  lisse,  représentant  \&  Jugement  dernier, 
exécutée  au  XV^  siècle,  à  Bruxelles,  sur  les  car- 
tons très  probablement  de  Ouintin  Matsys. 

La  composition,  à  très  nombreux  personnages, 
est  d'une  superbe  et  riche  ordonnance.  Les  cou- 
leurs en  sont  conservées  à  merveille.  Elleprovient 
de  la  collection  espagnole  du  duc  d'Albe  et  fai- 
sait partie,  chez  ce  dernier,  d'une  série  de  cinq 
pièces  dont  deux  appartiennent  aujourd'hui  à 
des  particuliers,  deux  autres  au  musée  d'Am- 
sterdam. 

Cette  pièce  de  la  plus  haute  rareté  a  coûté 
10,000  fr.  Le  Comité  consultatif  des  musées  et  le 
Conseil  des  musées  ont  donné  leur  pleine  adhé- 
sion à  l'acceptation  du  don  des  Amis  du  Louvre. 

ON  procède  en  ce  moment  à  la  manufacture 
des  Gobelins,  à  la  confection   de  la  plus 
grande  tapisserie  connue. 

Cette  œuvre  d'art,  qui  mesurera  13'"  de  long 
sur  S"!  de  hauteur,  est  destinée  à  décorer  le  grand 
panneau  de  fond  de  la  salle  des  fêtes  du  XIII^ 
arrondissement. 


...  L'exécution  du  modèle  a  été  confiée  au 
peintre  Jean-Paul  Laurens,  qui  s'est  mis  immé- 
diatement à  l'œuvre  ces  jours  derniers. 

Le  sujet  de  la  tapisserie  choisi  par  M.  Guiffrey 
représente  l'Apothéose  de  Colbert.  Tous  lescorps 
d'Etat,  porteurs  de  palmes,  viennent  saluer  la 
statue  du  grand  ministre  de  Louis  XIV. 

La  confection  de  ce  merveilleux  chef-d'œuvre 
demandera  six  années  de  travail  consécutif  à 
six  ouvriers  de  la  manufacture. 

{  Petit  Journal.) 

— »©{-— s©^-' 

ON  n'hésitait  pas  quelquefois  au  moyen  âge 
à  tisser  des  morceaux  plus  considérables 
encore.  Nicolas  Bataille, célèbre  tapissier  parisien, 
fournit  à  Louis  I^^  duc  d'Anjou,  de  1377  à  1379, 
cinq  des  sept  pièces  de  la  tenture  de  l'Apoca- 
lypse, encore  conservée  en  grande  partie  dans  la 
cathédrale  d'Angers. 

Cinq  d'entre  elles  n'avaient  pas  moins  de  24 
mètres  de  long  sur  5""  60  environ  chacune. 

Les  amateurs  de  tapisseries  anciennes  atten- 
dent avec  impatience  la  savante  dissertation  de 
M.  Léopold  Delisle  sur  les  manuscrits  à  vignette 
de  l'Apocalypse,  comparés  à  la  tapisserie  d'An- 
gers, dans  laquelle  il  établit  que  l'auteur  des 
cartons  n'a  pas  suivi  le  Manuscrit  403  de  la 
Bibliothèque  Nationale,  mais  une  autre  collec- 
tion de  miniatures  d'un  type  bien  distinct,  dont 
le  volume  manuscrit  de  la  bibliothèque  de  Cam- 
brai est  un  des  meilleurs  exemples.  Ce  travail 
décisif  sur  cette  question  doit  paraître  au  cours 
de  l'année  dans  l'un  des  volumes  de  la  Société 
des  anciens  textes. 

L.  DE  F. 


BLestautations. 


'ANS  sa  séance  du  23  novembre,  la 
Chambre  des  députés  a  voté,  sans 
discussion,  le  budget  affecté  au  service 

des  cultes.  Deux  chapitres  de  ce  bud- 
get fixent  les  crédits  alloués  pour  1901  aux 
grosses  réparations  des  édifices  diocésains  et  les 
crédits  spéciaux  pour  diverses  cathédrales. 

Les  premiers  crédits  proposés  s'élèvent  à  la 
somme  de  875,000  frs,  comme  l'année  dernière. 

Les  crédits  spéciaux  aux  cathédrales,  qui 
étaient  pour  1900  de  325,000  francs  ont  été 
réduits  de  30,000  francs.Cette  réduction  porte  sur 
les  dépenses  afférentes  aux  cathédrales  de  Mar- 
seille et  de  Séez. 

Voici  quels  sont  les  travaux  auxquels  sont 
affectés  les  crédits  votés. 


Cl)romque. 


175 


Catlu'drale  de  Gap.  Far  décret  du  2  mai  1866, 
la  reconstruction  de  la  cathédrale  de  Gap  fut 
déclarée  d'utilité  publique.  Les  travaux  furent 
commencés  dès  1866.  Depuis  cette  époque 
jusqu'en  i899,ilsont  coûté  3  millions  130,328  fr. 
Le  crédit  porté  au  budget  de  1901  permettra 
l'achèvement  du  clocher.  Il  ne  restera  plus  à 
construire  que  le  porche. 

Cathédrale  de  Marseille.  En  1852,  un  décret 
impérial  ouvrit  un  crédit  de  2,500,000  francs  pour 
la  construction  d'ime  nouvelle  cathédrale  à  Mar- 
seille. Les  travaux  commencèrent  en  1854  et  se 
sont  continués  jusqu'à  ce  jour,  payés  au  moyen 
de  crédits  variables  de  300,000  francs  et  de 
250,000  fr.,  réduits  ensuite  à  150,000  fr.,  puis  à 
100,000  fr.  et  enfin  à  20,000  fr.  La  ville  de  Mar- 
seille a  contribué  à  ces  travaux  pour  3,300,000  fr. 
Les  dépenses  se  sont  élevées  à  13,579,878  fr. 
L'édifice,  ouvert  au  culte  depuis  plusieurs  années, 
paraît  achevé  à  tous  les  points  de  vue,  mais  l'au- 
torité diocésaine  réclame  l'entreprise  d'une 
sacristie  nouvelle  qui  était  prévue  dans  le  projet 
primitif  de  l'architecte  Vaudoyer.  Actuellement 
il  existe,  adossée  à  la  nouvelle  cathédrale,  une 
partie  de  l'ancienne  cathédrale  classée  au  noiTibre 
des  monuments  historiques,  appelée  la  Major, 
qui  sert  de  sacristie.  La  Commission  a  proposé  de 
supprimer  le  crédit  de  20,000  fr.  affecté  à  une 
construction  nouvelle. 

Cathédrale  de  Séez.  Les  travau.K  de  restaura- 
tion delà  cathédrale  de  Séez  ont  été  commencés 
en  1870  par  le  transept  nord.  Puis  on  a  dû  démo- 
lir et  reconstruire  le  chreur  avec  ses  chapelles 
en  partie  sur  l'emplacement  des  sacristies.  De 
1870  à  1898  les  dépenses  se  sont  élevées  à 
I  460.899  fr.  Le  crédit  de  l'exercice  1900  sera 
employé  à  la  reprise  de  plusieurs  arcs-boutants 
et  à  la  reconstruction,  avec  le  concours  de 
l'évêque,  des  sacristies  démolies. La  Commission 
du  budget  et  la  Chambre  ont  estimé  que  le  cré- 
dit de  cette  année  pouvait  être  réduit  à  20,000  fr. 

Cathédrale  d'Evreux.  Commencée  en  1874,  la 
restauration  de  la  cathédrale  d'Evreux  a  entraîné 
jusqu'en  1899  une  dépense  de  1,301,500  fr.  89. 
Bien  que  cet  édifice  ait  été  complètement  res- 
tauré, il  reste  encore  à  y  reprendre  la  porte 
nord,  dont  le  devis  s'élève  à  environ  100,000  fr. 

Cathédrale  de  Reims.  De  1843  à  1874,  il  a  été 
dépense  plus  d'un  million  pour  diverses  répara- 
tions à  la  cathédrale  de  Reims,  notamment  pour 
l'abside.  En  1875,  on  résolut  de  restaurer  sérieu- 
sement ce  magnifique  édifice,  et  un  crédit  annuel 
de  200,000  fr.  fut  voté  pendant  dix  ans.  Fuis 
ce  crédit  fut  réduit  à  lOOOOO  fr.  De  1875  à  1899, 
les  dépenses  se  sont  élevées  à  3-499-790  fr. 
Le  crédit  de  1901  et  les  crédits  suivants  seront 
surtout  employés  à  la  restauration  de  la  façade. 


On  a  commencé  par  la  tour  sud,  mais  il  reste 
encore  énormément  à  faire,  notamment  à  la  tour 
nord  et  à  la  grande  rose,  dépense  qu'on  peut 
évaluer  à  plus  de  500,000  fr.Le  concours  financier 
sollicité  auprès  du  Département  et  de  la  Ville 
afin  de  hâter  l'exécution  de  ces  travaux  n'a  pas 
été  obtenu. 

Cathédrale  de  Bourges.  Les  faibles  crédits 
(50,000  francs,  puis  25,000  francs)  affectés  à  la 
restauration  de  cet  édifice  entrepris  sur  la  pro- 
duction d'un  devis  de  1,545,1 10  francs  obligent  à 
aller  lentement.  Les  dépenses  se  sont  élevées  de 
1882  à  1899  à  522,334  fr. 

Cathédrale  de  Rouen.  Depuis  1896,  un  crédit  de 
30,000  francs  est  inscrit  chaque  année  pour  la 
restauration  de  la  façade  de  la  cathédrale  de 
Rouen.  Grâce  aux  concours  locaux,  les  dépenses 
se  sont  élevées  de  1896  à  1S99  à  207,882  fr.  Cette 
restauration  devant  entraîner  une  dépense  de 
600,000  fr.,  l'Etat  a  recherché  des  concours 
locaux  afin  de  ne  pas  faire  durer  trop  longtemps 
les  travaux.  Le  Conseil  général  du  Départe- 
ment a  promis  en  cinq  annuités  :  100,000  francs. 
Le  Conseil  municipal  de  la  Ville  de  Rouen 
une  pareille  somme  de  100,000  francs.  L'auto- 
rité diocésaine  a  aussi  offert  une  somme 
de  100,000  francs  payable  en  plusieurs  annuités. 
(80,000  francs  sont  versés).  Dans  l'ensemble,  les 
fonds  de  concours  s'élèvent  à  300,000  francs. 

Cathédrale  de  Mende.  Sur  l'engagement  de 
l'autorité  diocésaine  de  contribuer  à  la  dépense 
pour  100,000  francs,  un  crédit  spécial  de 
20,000  francs  fut  inscrit  au  budget  de  1899.  La 
dépense,  pour  cette  première  année  s'est  élevée  à 
2!, 106  fr.  27.  Pour  cette  année  1900,  il  sera 
dépensé  environ  60,000  francs  dont  40,000  ver- 
sés par  l'évêché. 

— »Qi     "     ■t&r- 

ON  annonce  que  le  Conseil  municipal  de 
Rouen,  qui  avait  promis  de  conserver  la 
vieille  rue  Saint- Romain,  voisine  de  la  cathé- 
drale, revient  sur  les  intentions  qu'il  avait  mani- 
festées et  abandonne  à  son  malheureux  sort  ce 
quartier  si  pittoresque,  qui  seul  peut  donner  une 
idée  de  Rouen  au  temps  de  Jeanne  d'Arc,  con- 
damnée à  mort  dans  cette  rue  (?).  La  Société  des 
Amis  des  monuments  parisiens,  convoquée  par 
son  président,  M.  Charles  Normand,  vient  d'en- 
voyer à  la  Société  des  Amis  des  monuments 
rouennais,  dont  il  est  le  président  honoraire,  ses 
félicitations,  au  nom  des  artistes  et  des  touristes, 
pour  avoir  repris  le  bon  combat  «  contre  les  van- 
dales ».  M.  Charles  Normand  dans  son  allocu- 
tion s'est  étonné  qu'en  trois  ans  la  direction  des 
cultes,  propriétaire  de  plusieurs  maisons  de  la 
rue  Saint-Romain,  n'ait  pu   assurer  le   maintien 


176 


Brbtir  lie  T^rt  cbrcticn. 


définitif  et  intégral  du   cadre  nécessaire    qu'elle 
forme  à  la  cathédrale. 

Les  édiles  rouennais,  a-t-il  ajouté,  ne  sont-ils 
pas  satisfaits  d'avoir  dégagé  l'église  Saint-Ouen, 
d'avoir  démoli  tant  de  quartiers  nécessaires  au 
maintien  du  prestige  et  des  intérêts  de  Rouen, 
d'avoir  laissé  tomber  la  maison  du  Grand  Cor- 
neille? Pourquoi  les  touristes  iraient-ils  encore 
enrichir  Rouen,  dépouillé  chaque  jour  de  ses 
curiosités,  ou  portées  en  débris  dans  des  musées, 
quand  elles  doivent  nous  permettre  de  restituer 
l'aspect  des  cités  de  nos  ancêtres  et  de  faire  vivre 
les  contemporains  en  y  attirant  les  étrangers? 


LA  vieille  tour  de  Vésone,  à  Périgueux, 
curieux  et  imposant  édifice  circulaire  dans 
lequel  on  a  cru  reconnaître,  à  tort  ou  à  raison,  la 
«  cella  »  de  quelque  temple  disparu,  est  menacée 
de  suppression  à  peu  près  complète.  Cette  ruine 
majestueuse  qui  se  dresse  au  Sud  de  la  ville,  près 
de  la  voie  du  chemin  de  fer,  à  l'Est  d'une  caserne 
d'infanterie,  a  été  récemment  isolée  au  milieu 
d'un  jardin  public.  Or  la  municipalité  vient  de 
décider  de  faire  construire  une  aile  nouvelle  à  la 
caserne  qui,  en  empiétant  sur  le  jardin,  englobe- 
rait l'ancienne  tour  et  la  cacherait  presque  en- 
tièrement. Les  amis  des  monuments  protestent 
contre  la  décision  prise  par  la  municipalité  péri- 
gourdine. 


A  L'EXEMPLE  de  NN.  SS.  les  évêques  de 
Saint-Brieuc  et  du  Mans,  ainsi  que  de  Mgr  Le 
Nordez,  évêque  de  Dijon,  qui  ont  pris  récemment 
des  mesures  pour  préserver  les  trésors  d'art  qui  se 
trouvent  dans  les  églises  de  leurs  diocèses,  Mgr 
Dubillard,  évêque  de  Ouimper,  vient  de  prendre 
également  des  dispositions  tendant  à  la  conser- 
vation des  monuments  religieu.x  et  des  trésors 
archéologiques  si  nombreux  dans  le  Finistère. 

Par  une  circulaire.  Sa  Grandeur  prescrit  à  son 
clergé  de  veiller  soigneusement  à  l'entretien  des 
calvaires  bretons  et  à  la  garde  des  objets  précieux 
du  mobilier  liturgique  ancien,  et  elle  crée  au 
grand  séminaire  une  chaire  d'archéologie  reli- 
gieuse dont  le  titulaire  .sera  le  savant  abbé  Ab- 
grall  ;  elle  institue  dans  son  diocèse  une  Commis- 
sion spéciale,  composée  de  laïques  et  d'ecclésias- 
tiques, pour  veiller  au  bon  entretien  des  monu- 
ments religieux  de  toutes  les  époques  d'art,  des 
chaires,  autels,  retables  et  mobiliers  des  églises 
et  sacristies,  et  sans  l'autorisation  de  laquelle 
aucune  reconstruction,  aucune  vente,  ou  aucun 
échange  d'objets  artistiques  ne  pourra  avoir  lieu  ; 
enfin,  elle  donne    refuge   dans  son    évêché  aux 


vieilles  statues,  témoignages  intéressants  de  l'art 
breton,  délaissées  dans  presque  toutes  les  pa- 
roisses pour  les  images  de  pacotille,  en  attendant 
que  l'influence  intelligente  du  haut  clergé  soit 
arrivée  à  inculquer  à  tous  le  respect  des  œuvres 
religieuses  du  passé  si  pleines  du  plus  noble  sen- 
timent, que  c'est  autant  un  crime  contre  Dieu 
d'en  dépouiller  sa  maison,  qu'un  crime  contre 
l'art. 


La  Restauration  de  l'Église  de  N.-D.  du  Sablon 
à  Bruxelles.  —  On   lit  dans  le  A'A''"=  siècle  : 

Certains  journaux  ont  annoncé  que  les  travaux  de  res- 
tauration de  l'église  de  N.D.  du  .Sablon  vont  bientôt  être 
poussés  activement  et  que  leur  achèvement  sei  a  prochain. 

Nous  avons  tenu  à  être  renseigné  exactement  h  ce 
sujet  et  voici  ce  que  nous  avons  appris  à  très  bonne 
source  : 

Comme  on  se  le  rappelle  sans  doute,  la  restauration  de 
l'église  coûtera  une  somme  totale  de  1,400,000  francs, 
répartie  en  dix  exercices  annuels  de  140,000  francs 
chacun.  C'est  la  \'ille  de  Bruxelles  qui  assume  cette 
charge,  avec  les  subsides  de  la  province  et  de  l'Etat, 
mais  sans  le  concours  financier  de  la  fabrique. 

Les  plans  ont  été  approuvés  par  elle,  il  y  a  un  peu  plus 
de  trois  ans.  Les  travaux  ne  doivent  être  terminés  que 
vers  igo6.  Il  est  donc  inexact  de  prétendre,  comme  cer- 
tains journaux  l'ont  fait,  que  la  restauration  sera  achevée 
prochainement. 

Actuellement  sont  seuls  terminés  les  travaux  extérieurs 
de  la  nef  du  côté  du  Grand-Sablon  et  le  portail.  Or,  sui- 
vant les  instructions  données,  toute  une  série  de  travaux 
auraient  dû  être  terminés  avant  cet  hiver  :  la  restauration 
de  la  sacristie,  celle  de  l'abside  et  la  construction  du 
calorifère.  Au  mois  d'avril  dernier,  M.  l'échevin  Leurs, 
impatienté  des  retards,  avait  convoqué  dans  son  cabinet, 
à  l'hôtel  de  ville,  l'architecte,  AL  \'an  Ysendyck,  les  fabri- 
ciens  et  les  chefs  de  son  personnel  technique.  Il  mit 
l'architecte  en  demeure  de  terminer  au  plus  tôt  la  série 
de  travaux  que  nous  avons  cités.  Les  fabriciens  insis- 
tèrent également.  Cependant,  à  l'heure  actuelle,  on 
n'a  pas  encore  établi  le  plus  petit  échafaudage. 

On  pourrait  donc  croire  que  les  annonces  de  travaux 
prochains  qui  paraissent  périodiquement  dans  certains 
journaux,  ne  sont  insérées  que  pour  leurrer  les  intéressés 
et  le  public  et  pour  leur  faire  prendre  patience. 

On  a  formulé  diverses  critiques  à  propos  de  la  res- 
tauration de  l'église,  critiques  portant  aussi  bien  sur  l'en- 
semble que  sur  le  détail.  Nous  n'insisterons  pas  sur  ce 
point  aujourd'hui.  Qu'il  nous  suffise  de  dire  qu'il  existait 
dans  les  cartons  d'un  architecte  de  la  fabrique  de 
l'église,  mort  depuis  queU|ues  années,  des  projets  très 
intéressants.  11  paraîtrait  même  qu'on  s'en  serait  servi, 
mais  maladroitement,  pour  la  restauration  actuelle. 

Un  mot  encore  à  propos  de  celle-ci.  Lorsque  la  nef  du 
côté  du  l'etit-Sablon,  la  sacristie  et  les  côtés  du  portail 
seront  achevés,  il  restera  encore  .\  terminer  la  restaura- 
lion  intérieure  de  l'édifice,  ^  réparer  le  toit  et  à  cons- 
truire le  clocheton.  L'on  sait,  en  effet,  que  le  petit  campa- 
nile où  sonnent  actuellement  les  cloches,  est  destiné  îl 
disparaître  et  fera  place  à  une  jolie  flèche  semblable  à 
celle  qui  domine  le  transept  de  l'église  Sainte-Ciudule. 


Cl)romque. 


177 


lîoimelles. 

lOUS  avons  parlé  naguère  des  tenta- 
tives de  M.Ë.Miintz  en  vue  de  ramener 
les  protestants  à  une  conception  nnoins 

glaciale  de  l'art  religieux.    Son    appel 

n'est  pas  resté  sans  écho  ;  il  est  intéressant  de 
suivre  les  efforts  des  disciples  de  Luther  et  de 
Calvin  pour  sortir  de  la  torpeur  oîi  les  ont  tenus 
des  siècles  leurs  décevantes  erreurs. 

C'est  en  Suisse  que  se  manifeste  cette  réaction. 
Dans  le  canton  de  Zurich,  beaucoup  de  temples 
commencent  à  recevoir  une  décoration  de  cou- 
leurs :  tels  celui  de  Neuchâtel  et  celui  de  Lau- 
sanne, où  la  Bible  de  Doré  a  été  traduite  en 
vitraux.  Le  jeune  pasteur  du  canton  de  Vaud 
commence  à  admettre  des  vitraux.  A  Horgen  on 
est  allé  plus  loin  ;  on  peut  voir  sur  les  murs  deux 
tableaux  bibliques.  Ailleurs  on  remet  au  jour 
des  fresques  cachées  sous  le  badigeon. 

Le  mouvement  artistique,  confiné  jusqu'ici 
dans  la  région  zvvinglienne  ou  luthérienne,  gagne 
la  région  calviniste,  «  Le  calvinisme,  écrit 
M.  Miintz,  avait  supprimé,  ou  peu  s'en  faut,  toute 
manifestation  d'art,  presque  tout  culte  extérieur, 
et  Genève  était  devenue  une  nouvelle  Thébaïde. 
A  Bâle,  à  Zurich,  à  Berne,  au  contraire,  des 
peintres  de  la  valeur  de  Hans  Holbein,  de  Ni- 
claus  Manuel  Deutsch,  de  Hans  Asper,  conti- 
nuaient à  mettre  au  jour  des  tableaux  pleins 
de  sève  et  de  piquant.  La  Suisse  entière  com- 
mence à  comprendre  la  mission  éducatrice  de 
l'art. 

Voici,  d'autre  part,  ce  qu'écrit  un  collabora- 
teur anonyme  de  la  Gazette  des  étrangers  de  Lau- 
sanne (10  novembre)  sur  ce  sujet. 

...  <î  II  est  certain  que  la  réaction  calviniste  a  été  très 
préjudiciable  au  développement  des  arts  dans  la  Suisse 
occidentale,  et  M.  le  pasteur  Bornand  a  mille  fois  raison 
quand  il  écrit  que  ^<  ce  serait  une  tentative  absurde  que  de 
vouloir  innocenter  les  réformateurs,  Calvin  en  particulier, 
d'avoir  banni  l'art  hors  des  églises  et  de  l'avoir  même,  en 
quelque  sorte,  mis  au  ban  de  la  chrétienté.  »  Luther 
n'a  eu  garde  de  tomber  dans  une  erreur  aussi 
funeste.  Sans  doute,  les  statues  de  la  Vierge  et  des  saints, 
les  cierges,  l'encens  et  les  enfants  de  chœur  ont  disparu 
des  églises  luthériennes,  mais  les  peintures  murales  et  les 
vitrau.x  sont  restés  et,  en  général,  les  temples  luthériens 
sont  extérieurement  plus  gracieux  et  intérieurement  plus 
confortables  etmieu.\  ornés  que  les  nôtres.  En  outre,  on  y 
fait  de  bonne  musique,  et  c'est  à  quoi,  justement,  nous 
voulons  en  venir.  5) 


A  Niederzell,  près  de  Constance,Grand-Duché 
de  Bade,  on  vient  de  découvrir  dans  l'église  une 
grande  décoration  murale  de  caractère  roman, 
datant  probablement  du  XI'  siècle,  qui  cou- 
vre entièrement  l'abside.   Cette  frise,    l'une   des 


plus  importantes  de  toutes  celles  qui  existent 
sans  doute  en  Allemagne, représente  le  Christ  en 
gloire  entouré  des  symboles  des  quatre  Évangé- 
listes  et  des  deux  patrons  de  l'église,  saint  Pierre 
et  saint  Paul;  puis,  à  droite  et  à  gauche,  deux 
séraphins  ;  au-dessous,  encadrés  dans  des  arca- 
des, sur  deux  rangées  superposées,  se  voient  les 
Apôtres  et  les  Prophètes.  D'autres  peintures 
moins  bien  conservées,  datant  pour  la  plu- 
part de  la  première  époque  gothique  et  repré- 
sentant la  Madone,  divers  saints  et  des  scènes 
de  la  vie  de  la  Vierge,  ont  été  découvertes  dans 
d'autres  parties  de  l'église. 


Les  peintures  de  Louvain.  Une  découverte  de 
peintures  murales  dans  l'église  Saint-Pierre  fait 
grand  bruit  dans  le  monde  des  archéologues, nous 
écrit  notre  correspondant  de  Louvain.  Ces  pein- 
tures à  fresque  ont  été  trouvées,  à  l'occasion  de  la 
restauration  de  l'église,  à  la  voûte  d'une  des  cha- 
pelles absidales,  exactement  derrière  le  maître- 
autel.  Elles  représentent  des  anges,  autour  des- 
quels courent  des  nervures  dorées  fort  bien 
conservées  ;  elles  sont  d'une  extrême  finesse  et 
peuvent  être  considérées  parmi  les  plus  belles 
qui  aient  été  découvertes  dans  nos  églises  belges. 

La  Commission  des  Monuments,  qu'accom- 
pagnaient MM.  le  député  Helleputte,  le  cha- 
noine Reusens,  Van  Even,  archiviste,  Dumortier, 
architecte  provincial,  et  Langerock,  architecte 
chargé  des  travaux  de  restauration,  a  examiné 
ces  curieuses  fresques.D'après  M. Van  Even,  dont 
l'avis  a  été  partagé  par  les  visiteurs,  ces  peintures 
dateraient  de  1440,  et  devraient  être  attribuées 
au  peintre  Hubert  Sturbout,  contemporain  du 
peintre  louvaniste  Bouts.  M.  l'architecte  Lange- 
rock  est  persuadé  que  les  recherches  feront  dé- 
couvrir des  peintures  semblables  dans  d'autres 
parties  encore  de  notre  vieille  collégiale. 

GARES  gothiques.  —  Nous  trouvons  dans 
un  journal  belge,  «  Le  Patriote  »  {n°  du 
14  octobre),  la  lettre  d'un  architecte  qui  n'est  pas 
signée,  et  dont  nous  avons  par  conséquent  le 
regret  de  ne  pas  nommer  l'auteur. 

Cette  lettre  commente  un  discours  que  S.  M.  le 
roi  des  Belges  aurait  tenu,  à  l'occasion  de  certai- 
nes irrégularités  qui  se  sont  produites  dans  le 
service  des  chemins  de  fer  de  son  royaume. 

Nous  ne  savons  si  le  discours  royal  a  été  exac- 
tement reproduit.  Mais  les  observations  que  ce 
discours  a  suggérées  sont  tellement  marquées  au 
coin  du  bon  sens  —  ce  sens  commun  qui  devient 
de  plus  en  plus  rare  —  que  nous  nous  faisons  un 


178 


l^t\}X\t  lie  rart  cbvctten. 


véritable  plaisir  de  communiquer  la  lettre  à  nos 
lecteurs. 

J'ai  lu  avec  infiniment  d'intérêt  le  petit  discours  qu'on 
met  dans  la  bouche  du  Roi,  au  sujet  de  la  désorganisation 
du  service  des  trains.  Ma  profession  m'oblige  à  me  servir 
fréquemment  du  raiiway  national  ;  et  les  tracas  ,  les  pré- 
occupations qui  constituent,  de  ce  chef,  le  lot  ordinaire 
de  mon  existence,  contribuent  certainement  à  abréger 
celle-ci  :  ce  qui  est  bien  fâcheux  pour  moi,  vous  en  con- 
viendrez. C'est  donc  vous  dire  que  le  langage  que  le  Roi 
a  tenu,  d'après  les  journaux,  h  M.  Raemackers,  secrétaire 
général  du  département  des  chemins  de  fer,  m'apporte 
quelque  réconfort  et  même  quelque  joie. 

Mais  pourquoi  faut-il  que  cette  joie  soit  gâtée  par  le 
restant  du  discours  !  Serait-ce  possible  que  Sa  Majesté 
ait  dit  textuellement  : 

«  Il  faudrait  nous  donner  de  bonnes  gares,  pratiques, 
confortables,  d'accès  facile  en  toutes  leurs  dépendances, 
au  lieu  de  nous  faire  d'importants  monuments,  inutiles, 
dans  lesquels  on  sacrifie  le  confort  à  l'aspect  monumen- 
tal de  l'extérieur.  Les  gares  gothiques,  par  exemple,  coû 
tent  bien  cher  et  ne  répondent  guère  à  leur  destination.» 

(Qu'est-ce  que  les  «  gares  gothiques»  viennent  faire  en 
tout  ceci?  M'est-il  pas  évident,  en  principe,  qu'une  gare 
peut  être  en  n'importe  quel  style  —  grec,  romain,  byzan- 
tin, oriental,  indou,  «  gothique  »  si  l'on  veut  —  et  con- 
stituer en  même  temps  une  excellente  gare,  une  gare  qui 
réponde  à  tout  ce  qu'on  peut  légitimement  en  exiger,  au 
point  de  vue  du  pratique  et  du  confortable  ? 

Il  est  non  moins  évident  que  des  gaffes  peuvent  être 
commises  dans  les  constructions  de  tous  les  styles.  Les 
styles  ne  sont  pas  responsables  des  gaffes  —  mais  bien  les 
architectes  et  les  constructeurs.  Pourquoi  s'en  prendrait- 
on  au  style  d'une  gare  si  cette  gare  est  défectueuse  ? 

En  fait,  tous  les  styles  se  prêtent  à  la  construction 
d'une  bonne  gare  ;  en  tenant  compte,  bien  entendu,  des 
matériaux  à  employer,  du  climat,  des  mœurs  d'un  peuple, 
etc.  L'aménagement,  le  confort,  ça  c'est  l'affaire  de  l'archi- 
tecte et  du  constructeur.  Une  gare  «gothique  »,  comme 
une  gare  «  Renaissance  »,  peut  donc  parfaitement  répon- 
dre à  sa  destination. 

Et  l'argument  du  coût  !  Mais  n'est-il  pas  clair  comme 
le  jour  qu'une  gare  de  n'importe  quel  style  coûtera  aussi 
peu  qu'on  voudra,  ou  aussi  cher  qu'on  voudra  ?  Faites- 
vous  simple?  Le  prix  de  votre  édifice  se  ressentira,  quel 
qu'en  soit  le  style,  de  votre  décision.  Faites-vous  luxueux? 
Voulez-vous,  par  exemple,  une  gaie  où  il  y  ait  autant  de 
statues  qu'au  Dôme  de  Milan?  11  faudra  les  payer.  Coni 
prenons  donc  bien,  une  fois  pour  toutes,  que  tout  cela  est 
relatif  —  et  n'ayons  pas,  de  grâce,  de  paiti-pris  ! 

Sa  Majesté  ne  sait  peut-être  pas  qu'il  y  a  comme  une 
idée  fixe,  chez  certains  sectaires,  de  qualifier  avec  mé- 
pris de  «  gothiques  »  tous  les  facteurs  de  la  véritable  Re- 
naissance nationale  à  laquelle  nous  assistons.  Cet  art 
qu'ils  disent  «  gothique  »,  cioyant  avoir  ainsi  tout  dit,  est 
en  réalité,  un  art  rationnel,  logique,  raisonné;  un  art  s'in- 
spirant  de  la  vie,  des  nécessités  de  la  vie,  des  exigences 
les  plus  modernes  de  la  vie.  Voyez  les  merveilleuses  et 
splendides  applications  de  cet  art  «  gothique  5>  h  l'électri- 
cité —  la  plus  contemporaine  de  nos  conquêtes  ! 

Des  mois,  tout  cela.  Ces  sectaires  s'inspirent  malheu- 
reusement de  préoccupations  étrangères  à  l'art.  L'art 
«  gothique  »,  l'art  national,  est  brillamment  représenté  en 
Belgique  par  des  religieux.  Les  sectaires,  méconnaissant 
l'Histoire,  oubliant  que  d'humbles  Fra  Angelico,  que  des 
saints  ont  créé  d'immortels  chefs-d'œuvre,  n'en  revien- 
nent pas.  Ils  nous  donnent  ainsi  le  spectacle  de  lamen- 
tables niaiseries. 


Or,  comme  pareil  état  d'âme  n'est  certes  pas  celui  du 
Roi,  je  suis  convaincu  que,  sur  ce  point,  on  lui  attribue  â 
tort  les  paroles  que  je  viens  de  relever  :  il  est  trop  bâtis- 
seur pour  ne  pas  savoir  ce  que  valent  les  rengaines  des 
«  antigothiques  ».  Le  Roi,  «:  belge  de  cœur  et  d'âme  », 
doit  aimer  notre  art  national,  comme  les  Allemands, 
comme  les  Anglais  aiment  le  leur  et  le  glorifient.  D'au- 
tant plus,  on  ne  saurait  trop  le  répéter,  que  le  nôtre  a 
pour  lui  la  raison  et  la  logique. 

Agréez,  monsieur  le  Directeur,  etc. 

X 


B-cstauration  Des  ruines. 

Nous  avons  eu  à  soutenir  dans  la  livraison 
précédente  une  polémique  avecM.Fierens- 
Gevaert  sur  cette  intéressante  question.  Cette 
polémique  a  eu  une  suite  dans  la  Clironique  des 
Arts;  pour  des  raisons  que  nous  ferons  connaître, 
nous  devons  remettre  notre  réplique  au  prochain 
numéro.  L.  C. 

■a  '».  «y.  <».  »^.  «a»,  «y.  .y.  ^.  »y  «y  >s^.  ^  .y,  .y,  .y,^,  .j».  ^w,  «y.  .y.  »».  ^«y.  «ae, 


€^i^S)I>fcrologîe.  ^iBm 


... & 

ffi.  tiemi=Hntainc  RcIidîï. 


M.  Henri  Antoine  Revoil,  architecte,  vient  de 
mourir  dans  sa  propriété  de  Servanes,  aux  envi- 
rons de  Mouriès  (Bouclies-du-Rhône).  Il  demeu- 
rait à  Nîmes,  dont  il  était  l'architecte  des  monu- 
tnents  historiques,  en  même  temps  qu'il  était  le 
doyen  des  architectes  du  gouvernement.  Il  était 
né  à  Ai.x  le  19  juin  1822.  Élève  de  Caristie,  il 
était  entré  à  l'École  des  Beaux- Arts  le  31  octo- 
bre 1845.  Il  a  e.xposé  au  .Salon  de  1846,  L'état 
actuel  et  la  resta?iration  de  l'abbaye  de  Montina- 
joiir,  près  d'Arles,  et.  des  travaux  relatifs  à  des 
restaurations  de_  monuments  du  Midi,  faites  pour 
le  compte  de  l'État,  à  tous  les  Salons  de  Paris 
jusque  vers  1880.  Il  a  publié  aussi  différents  ou- 
vrages, notamment  L'architecture  romane  du 
Midi  de  la  France.  A  l'exposition  universelle 
de  1900,  où  il  obtint  une  médaille  d'or,  il  avait 
envoyé  des  œuvres  intitulées  :  Ciborium  du 
maître  autel  de  la  catln'drale  de  Marseille.  En 
récompense  des  longs  et  remarquables  services 
rendus  par  lui  à  l'art  français,  le  Gouvernement 
venait  de  l'élever  au  grade  de  commandeur  de  la 
Légion  d'honnetir.  Il  était  chevalier  depuis  1865 
et  il  avait  été  promu  officier  en  1SS9,  à  l'occasion 
de  l'Exposition  universelle,  où  il  avait  obtenu  une 
médaille  de  bronze. 


Imprimé  p.ir  DescMc,   De  lirouwer  et  Cie,  Bruges. 


^^   3'"^  livraison.   —   ffîai  (90^.  4^| 


¥n¥n^Yn¥mwi¥W?^wi^¥nwiWi 


Jjc  Trésor  Dc  régUsc  aôbatialc  DcHt'^ffîatl)taS,  à TrèlJCS  (Crusse). 


g^mfAfe:^^^gA  grande  et  belle  église 
bénédictine  de  Saint- 
Mathias  est  veuve  des 
moines  qui  l'ont  édifiée  ; 
depuis  la  révolution, elle 
est  tombée  du  rang  éle- 


vé d'abbatiale  à  celui 
bien  modeste  de  paroissiale.  Néanmoins, 
comme  elle  a  la  valeur  d'un  monument 
historique,  sa  conservation  et  son  entre- 
tien ne  laissent  rien  à  désirer. 

Sa  situation  en  dehors  de  la  ville  de 
Trêves,  à  l'extrémité  d'un  faubourg,  fait 
qu'elle  est  souvent  oubliée  par  les  touristes. 
Le  Guide  pour  Trêves,  qu'on  distribue  à 
l'hôtel  Rothes  Hmis,  dit  qu'elle  est  «  encore 
aujourd'hui  lieu  de  destination  de  pèlerinage 
au  tombeau  de  l'apôtre  (S.  Mathias)  et  de 
grandes  reliques,  dont  une  particulièrement 
est  remarquable,  une  parcelle  de  la  croix, 
en  riche  décoration  duXI*^  siècle  ». 

Le  corps  de  S.    Mathias  (')  repose   dans 

I.  Un  intéressant  ouvrage,  publié  à  Coblentz  en  1855, 
sous  le  titre  :  Metropolis  Ecclesiœ    Treverica,  par  Bro- 


un  sarcophage  de  marbre,  daté  de  1786, 
exhaussé  sur  quatre  grandes  colonnes,  en 
arrière  du  maître-autel,  en  sorte  qu'on  peut 
passer  dessous,  suivant  une  pratique  an- 
cienne, pour  se  mettre  sous  la  protection 
directe  de  l'apôtre. 

Quant  aux  «  grandes  reliques  (")  »,  elles 
n'existent  qu'en  partie,  à  part  la  vraie  croix, 
réellement  digne  d'attention  par  ses  dimen- 
sions et  son  reliquaire,  qui  date  du  XI 11^ 
siècle  et  nullement  du  Xî^,  ce  qui  est  une 
erreur  grave  pour  des  Allemands,  d'ordi- 
naire mieux  renseignés. 

Après  le  trésor  de  la  cathédrale,  on  ne 
songe  guère  à  celui  de  St-Mathias  ;  c'est  à 
tort,  car  il  contient  quelques  curiosités 
qui  ne  sont  pas  à  dédaigner.  Il  est  assez  mal 
installé,  dans  une  salle  haute,  qui  aurait 
besoin  d'être  nettoyée  et  aménagée  plus 
convenablement,  pour  l'œil  aussi  bien  que 

weret  Masen,  donne  ces  détails  :  Le  corps  de  S.  Mathias 
fut  retrouvé  en  1053,  il  distillait  de  l'huile  :  <  Inven- 
torem  ejus  ex  contacta  siillantes  oleo  digitos.  > 

I.  Les  reliques  étaient  si  nombreuses  que  le  pape 
Honorius  III  avait  permis  de  dire  le  Gloriu  en  carême. 


KKVUE    DK    l'aKT   CHRérlEN. 

igoi.  —  3*"^  r.iVRAisON. 


i8o 


Bebue  îie  V^vt  cbrétien. 


pour  la  commodité  des  visiteurs.  Ayant  eu  ' 
le  loisir  de  l'étudier  minutieusement,  grâce 
à  la  recommandation  de  Mgr  l'évêque  au- 
près d'un  des  vicaires,  je  vais  en  dresser  le 
catalogue,  dans  le  but  de  le  faire  mieux 
connaître  au  loin  et  de  lancer  dans  le  do- 
maine de  la  science  les  renseignements 
utiles  qu'il  fournit  à  l'archéologie. Ce  sera  un 
moyen  efficace  de  payer  ma  dette  de  recon- 
naissance envers  ceux  qui,  appréciant  l'op- 
portunité de  mes  travaux,  m'ont  si  gracieu- 
sement donné  facilité  de  les  poursuivre  en 
toute  liberté  ;  la  sympathie  fait  toujours 
plaisir  à  l'étranger. 

I.  —  Ceinture  De  S.  OstoalD  ( vi  i^  siècle). 

Long.  :  i'",43  :  Larg.  :  o"',o3. 

VOICI  la  copie  de  l'authentique,  qui 
remonte  à  l'an  1478  : 

«  Iste  est  cingulus  sancti  Oswaldi  ('),  ré- 
gis Anglorum  et  martyris,  qui  ex  nimia 
vetustate  confractus,  hic  expositus  est, 
scilicetanno  Domini  MCCCC  LXXVIII. 
Argentum  deauratum  cum  quo  ornatus  fue- 
rat,  id  est  das  ùess/a^,poshum  est  super  ein 
schwai'tz geveb  ad  concedendum  populo.  Iste 
est  ergo  verus  cingulus  in  corio  et  in  illo 
cingulo  verus  ornatus  istius  cinguli.scilicet 
sancti  Oswaldi  gurtels  besslag.  » 

Cette  ceinture  est  en  cuir,  recouvert  d'un 
tissu  de  soie  noire  (")  formant  un  dessin 
régulier  en  manière  de  treillis,  avec  cinq 
raies  unies,  légèrement  en  relief  tranchant 
sur  le  fond.  Toute  l'ornementation,  clous  ('), 
rosettes  (•'),   en  argent  doré,  a  été  enlevée 

1.  «  S.  Oswald,  Cj-îfa/(/?<j,  roi  des  Northumbres  et  mar- 
tyr, né  en  604,  tué  le  5  août  642.  >  (Die t.  hagiogr.  de 
M  igné). 

2.  «  Une  escharpe  d'or,  toute  de  besans  branlants,  de 
boillons  et  de  lozenges,  ferrés  sur  un  tissu  noir  et  pour  l'or 
de  lad.  ceinture,  4  o,  8  est  >  {Argenterie  de  la  Reine,  1401.) 

3.  <  Unecourroye  de  cuir  de  lion,  sans  nulle  ferrure.  > 
(Invent,  de  Charles  V,  1380,  n°  78.) 

4.  ((  Ferrure,  garniture  métallique,  ajipliquée  sur  une 
ceinture  et  comprenant  les  clous,  rosettes,  boucles,  mor- 
dants et  passants.  >  (Gloss.arch.) 


systématiquement  pour  en  faire  don  aux 
dévots  :  cette  mutilation  peu  respectueuse 
est  des  plus  regrettables,  car  elle  altère  no- 
tablement le  caractère  propre  de  la  relique, 
qui  n'a  plus  que  l'aspect  d'un  objet  ordinaire, 
sans  aucune  de  ces  marques  de  luxe  qui  en 
faisaient  véritablement  un  insigne  royal. 

La  relique  est  enfermée  dans  une  bourse 
de  parchemin,  qui  date  du  XV^  siècle.  Après 
l'avoir  dépouillée,  on  pouvait  lui  donner 
une  enveloppe  plus  digne,  car  on  s'est  con- 
tenté de  détacher  une  feuille  d'un  missel, 
que  l'on  a  recouverte  de  cette  étoffe  légère 
qu'on  nommait  voile  et  qui,  manquant  de 
consistance  par  elle-même,  avait  besoin  de 
renfort  à  l'intérieur.  Elle  se  termine  par  une 
houppe  de  soie  verte.  Un  cordonnet  de 
même  nuance,  avec  bouton  tressé,  servait 
à  la  suspendre,  et  deu.x  autres  boutons,  de 
qualité  analogue,  fermaient  la  partie  supé- 
rieure qui  se  rabattait  sur  l'ouverture,  à  la 
façon  des  aumônières. 

II.  —  Fragments  De  cljàsscs 

(fin  du  XW  siècle). 

QUATRE  plaques  carrées  en  cuivre 
ont  survécu  à  la  destruction  des 
châsses  qu'elles  ornaient.  Elles  sont  couver- 
tes de  filigrane  en  argent  doré  et  rehaussées 
de  cinq  cabochons,  un  gros  entre  quatre 
petits. 

Le  trésor  de  la  cathédrale  nous  apprend 
l'usage  de  ces  plaques  qu'on  disposait  en 
bordure  sur  les  couvertures  des  évangé- 
liaires;  ailleurs, elles  formaient  des  bandeaux 
sur  les  châsses.  Elles  alternaient  toujours 
avec  des  plaques  émaillées. 

III.  —  fiitacium  (XII r  siècle). 

P 77^^  C/<7iî/ signifie  étiquette  (■). 
On    nomme  ainsi,    dans   le  langage 
ecclésiastique,  la  bande  de  parchemin  écrit 

I.  Voir  mes  Π tvr.  compL,  .\,  42. 


ile  trésor  De  Vtqiist  t)t'5©atl)(a0,  à  Zxt\)ts,      iSi 


et  la  tablette  de  marbre  ou  de  plomb  gravé, 
qui,  dans  une  châsse  ou  un  reliquaire,  ser- 
vent à  désigner  la  relique  qui  y  est  conser- 
vée. Ce  n'est  pas  un  authentique  en  forme, 
lequel  ressemble  à  une  charte  ou  à  une  let- 
tre testimoniale,  mais  une  simple  et  brève 
indication  d'identité. 

Les  deux  pitacium,  détachés  des  reliques 
qu'ils  accompagnaient, sont  en  plomb,gravé 
au  XII P  siècle,  en  belle  gothique  ronde. 
Le  premier  mesure  en  carré  o"\65  sur  cha- 
que côté.  On  y  lit  : 

•  I^  ■  ÏÏ  _MODES 

•  TI   •  EPI  ■ 
TREVIRz  (') 

Le  second,  large  de  o'",65  et  haut  de 
o"',04,  porte  : 

•  l^  ■  s"  ■  ivs 

TI  •  Miç  •  n 

Les  reliques  abondent  à  St-Mathias  :  un 
grand  nombre  est  exposé,  un  peu  confusé- 
ment, dans  de  grandes  vitrines  fixées  à 
l'entrée  du  chœur;  d'autres  sont  dans  le 
trésor,  enfermées  dans  des  caisses  de  fer 
blanc.  Voici  l'indication  des  principales. 

S.  Materne  {')  et  S.  Euchaire  {'). 

1.  Reliquiœ  sancti  Modesti  episcapi  Treviroruin.  — <  S. 
Modeste,  évêque  de  Trêves  et  confesseur,  florissait  dans 
le  V  siècle,  24  février.  (Dict.  hagiographique.) 

2.  Reliquia  sancti  Justi  inartyris. —  Les  saints  martyrs 
du  nom  de  Just  ou  Juste  sont  au  nombre  de  douze,  l'iden- 
tification de  ces  reliques  est  donc  impossible. 

3.  «  S.  Materne,  évêque  de  Cologne  et  de  Trêves,  que 
le  Martyrologe  romain  fait  disciple  de  ,S.  Pierre...  Son 
corps,  qui  avait  été  inhumé  à  Trêves,  dans  l'église  de 
St-Mathias,  fut  transféré,  en  1037,  dans  l'église  métropo- 
litaine par  Poppon,  archevêque  de  cette  ville,  14  septem- 
bre. »  (Dict.  hagiogr.) 

4.  <L  S.  Euchaire,  Eiicharius,  premier  évêque  de  Trêves. 
Il  bâtit,  près  d'une  des  portes  de  la  ville,  un  oratoire  qu'il 
dédia  sous  l'invocation  de  S.  Jean-Baptiste  et  dans  lequel 
il  fut  enterré.  Cet  oratoire  fut  changé  plus  tard  en  une 
église  qui  porta  le  nom  de  S.  Eucaire.  La  congrégation 
de  clercs  qui  la  desservait  donna  naissance  au  monastère 
de  St  Eucaire  et  ensuite  de  St-Mathias,  8  décembre.  » 
(Dict.  hagiogr.).  —  «   S.  Euchaire  est   le    patron   de    la 


De  tunica   S.    Pétri,  morceau  de    laine 


grisâtre. 


Brachiurn  cum  manu  de  Innocentibus:  la 
main  est  entière  avec  sa  peau,  ses  doigts 
sont  repliés  sur  la  paume  ('). 

De  capite  S.  Lasari,  evajtgelici,  fratris 
SS.  Marthe  et  M.  Magdalene,  episcopi 
Massiliensis:  ouire  le  chef  presque  entier, 
il  y  a  deux  fémurs  de  S.  Lazare  et 
plusieurs  gros  ossements  de  ses  sœurs,  Ste 
Marthe  et  Ste  Madeleine  (^). 

De  lapide  ipsiiis  tunuili  sancti  Lazari, 
queni  Dotninus  siiscitavit. 

Une  grande  partie  du  corps  de  l'apôtre 
S.  Philippe,  entre  autres  un  bras  et  un 
fémur. 

Crâne  d'un  martyr  inconnu,  tranché  par 
un  coup  d'épée. 

IV.  —  jpaûlcait  De  la  Vraie  croir 

(XI  Ile  siècle). 

Hauteur  :  o'",73S  ;  largeur  :  o™,55  ;  épaisseur  :  o'",o5. 

I.    T     E  tableau  rectangulaire,  dans  lequel 

1 j  est  exposée  et  encadrée   la  Vraie 

Croix,  a  une  large  bordure,  où  les  plaques 
filigranées  et  gemmées  alternent  avec  les 
plaques  émaillées,  pour  produire  une  agréa- 
ble variété. 

Les  émaux  champlevés,  de  l'école  des 
bords  de  la  Meuse,  ont  des  dessins  géomé- 
triques multiples.  Au  nombre  de  dix,  ils 
sont   opposés  deux  à  deux  :   des  feuillages 


collégiale  fondée  par  Pierie  de  Eri.xey  (évêque  de  Toul 
de  u68  à  1191),  dans  l'église  de  Liverdun  ».  (Bretagne  et 
Briard,  Note  sur  une  troiivaille  Je  monnaies  lorraines, 
p.  25.) 

1.  Le  musée  de  Trêves  possède  un  élégant  petit  ber- 
ceau, en  os  peint  et  sculpté,  de  la  fin  du  XV=  siècle,  qui 
a  pu,  comme  en  d'autres  endroits,  contenir  quelque  re- 
lique des  saints  Innocents.  — Voir  mes  Œuvr.  complètes, 

X,  517. 

2.  Voir  Œuvres  complites,  St  Lazare  (XII,  525),  Ste  Ma- 
deleine fXI,  3),  Ste  Marthe  (XII,  567;. 


l82 


îRclJUc  tie  ravt  chrétien. 


rompent  la  monotonie  des  lignes  droites  ou 
courbes,  tracées  par  la  règle  et  le  compas. 
On  y  compte  sept  nuances  :  blanc  laiteux, 
rouge  terreux,  vert,  jaune,  jaune  de  brique, 
bleu  lapis  et  bleu  cendré.  Malheureusement, 
ces  émaux  sont  de  mauvaise  qualité,  pleins 
de  bulles  d'air  qui  ont  crevé  à  la  cuisson, 
médiocres  comme  composition  et  ternes 
comme  aspect.  Ils  détonnent  véritablement 


Reliquaire  de  la  Vraie  Cruix    FaCi. 

au  milieu  de  l'exubéfcint  éclat  qui  les  envi- 
ronne. 

Les  plaques  filigranées  exhibent  un  se- 
mis de  cabochons  et  deux  camées  an- 
tiques. 

Le  glacis  qui  rejoint  le  fond  du  tableau 
est  découpé  à  jour.  Dans  son  enchevêtre- 
ment de  feuillages  courants  se  mêlent  et 
rampent,  se  poursuivent  et  s'attaquent,  bon- 
dissent et  volent,  une  foule  d'animaux  et 
d'oiseaux  de  toute  sorte  :  lion,  grifton  (dont 
un  encapuchonné),    singe,   sanglier,    loup, 


renard,  cerf,  chien,  bélier,  chèvre,  colombe, 
aigle,  etc.  C'est  la  nature  tout  entière  qui 
exalte  son  auteur. 

Une  frise  niellée  nomme  le  donateur  et 
précise  la  date  de  la  donation.  Elle  est  fixée 
par  de  petits  clous  sur  l'âme  en  bois  du 
tableau  et  une  feuille  sépare  presque  cons- 
tamment les  caractères  les  uns  des  autres. 

►î<  ANNO  ■  AB  •  rNCARNATIONE  •  DOMINI  - 
MCCVII    ■  HENRICVS  ■ 

AB  ■  VLMENA  ■  ATTVI.IT  -  LIGNVM  •  SCE  • 
CKVCIS      DE  ■  CIVITATE  - 

CONSTANTINOPOLITANA  ■  ET  -  HANC  •  FOR- 
TIONEM         ISTIVS    • 

SACRI  LIGNI  ECCLESIE  •  SANCTI  •  EVCHA- 
KII    •   CONTVLIT  ('). 

Ce  texte  est  très  important,  parce  qu'il 
affirme  et  surtout  par  ce  qu'il  ne  dit  pas. 
Henri  d'Ulmen  parait  n'avoir  donné  que  la 
vraie  croix,  qui,  suivant  la  tradition,  pro- 
viendrait de  la  basilique  de  Ste-Sophie.  S'il 
eût  fait  exécuter  en  même  temps  le  tableau 
pour  la  contenir,  l'inscription  n'aurait  pas 
omis  un  don  aussi  précieux  ;  de  plus,  ses 
armes  y  auraient  été  inévitablement  appo- 
sées et  son  effigie  eût  été  ajoutée  à  celle 
des  bienfaiteurs.  La  date  de  1207  se  rap- 
porte donc  exclusivement  à  l'acte  même  de 
la  donation,  non  à  l'exécution  du  tableau, 
qui  ne  concorde  pas  avec  ce  millésime.  En 
effet,  son  style  reporte  plutôt  vers  le  milieu 
du  XI  II"  siècle  et,  sous  ce  rapport,  nous 
sommes  parfaitement  à  l'aise  pour  prendre 
nos  coudées  franches,  puisque  l'abbé  qui  est 
figuré  au  revers  ne  mourut  qu'en  1257. 
Mais  voici  une  autre  preuve  non  moins 
décisive  :  cet  abbé,  nommé  Jacques,  ne  fut 


I.  De  Linas  {Revue  de  t Art  chn't.,  X.\XI,  67)  a  lu  faii- 
tivenient  r/(.'  Uliiiena  cli/>S!Us.  Il  se  trompe  aussi  en  attri- 
buant ce  reliquaire  i<  à  l'aube  du  .XIIl"  siècle  >.  Il  a  dû 
copier  Aus'm  Weerth,  qui  fait  les  mcmes  fiutes,  en  y 
ajoutant  /tanc  magnant  et  qui  reproduit  le  C"'  Riant  dans 
ses  Exuviœ  sacrœ  Constantinopolitanœ,  II,  17S. 


JLt  trésor  De  régltse  ^t^^atl)tas;,  à  Crèt)es.       183 


élu  qu'en  i  2  1 1,  c'est-à-dire  quatre  ans  après 
la  donation. 

La  croix  occupe  en  entier  le  champ  du 
tableau,  délimité  par  un  bandeau  filigrane  et 
gemmé.  Elle  est  cantonnée  de  vingt  locules 
carrés,  circonscrits  par  des  bandes  sem- 
blables à  la  précédente,  mais  plus  étroites. 
Sous  le  cristal,  taillé  en  table,  on  distingue 
des  suaires  de  soie  ou  de  toile,  et  une  éti- 
quette en  parchemin  désigne  les  reliques 
qui  y  sont  enfermées. 

Ces  reliquaires,  huit  dans  le  haut,  à  droite 
et  à  gauche  de  la  tête  de  la  croix,  douze 
dans  le  bas,  près  de  la  tige,  escortent  la  reli- 
que par  excellence,  qui  est  la  croix  du  Sau- 
veur. S.  Paul  l'avait  dit  dans  une  de  ses 
épîtres:  Les  Saints  ont  participé  à  la  pas- 
sion de  leur  Maître,  il  est  donc  juste  qu'ils 
soient  associés  à  son  triomphe  (').  Ici  le 
symbolisme  marche  de  pair  avec  l'esthé- 
tique. 

Didron  avait  bien  raison,  en  faisant  gra- 
ver la  face  du  tableau,  ds  l'accompagner  de 
cette  note  enthousiaste  :  «  Dites  si  vous 
connaissez  une  œuvre  d'orfèvrerie  plus  déli- 
cate, plus  riche  et  plus  belle,  que  cette  table 
d'or, d'émail  et  de  pierreries.;)  [Anua/.arc/i., 
t.  XIX,  p.  226.)  Non, certes, nous  ne  croyons 
pas  que  l'art  du  XI 1 1*=  siècle  ait  été  poussé 
plus  loin  et  ait  produit  un  monument  plus 
véritablement  beau  dans  son  ensemble  et 
ses  détails  (-). 

2.  Une  forte  lame  de  cuivre, gravé  etdoré, 
d'un  caractère  magistral,  fait  le  fond  du  re- 
vers du  tableau,  auquel  elle  adhère  par  une 
série  de  petits  clous  à  tête  ronde.  Si  le  ta- 
bleau eût  été,  en  toute  circonstance,  adossé 
à  la  muraille,  l'artiste  n'aurait  pas  songé  à 
lui  faire  un  revers  aussi  riche  que  celui  que 

1.  «  Scienies  quod  sicut  socii  passionum  estis,  sic  eritis 
et  consolationis.  »(//*;</  Corintli.,  i,  7.) 

2.  Léon  Palustre  a  fait  du  tableau  cinq  photographies, 
que  nous  avons  publiées  dans  le  Trésor  de  Trêves. 


nous  admirons.  A  certains  jours,  le  reliquaire 
devait  été  porté  en  procession  et  exposé 
sur  le  maître-autel,  très  certainement  isolé, 
comme  il  l'est  encore  aujourd'hui  :  il  fallait 
donc  que  le  tableau  fût  montré  et  vu  par 
ses  deux  faces.  Comme  il  n'a  pas  de  pied  ou 
que,  s'il  y  en  avait  un,  ce  que  rend  fort  pro- 
bable le  tableau  du  S.  Corporal,  à  Orvieto 
(État  pontifical),  il  était  alors  mobile  ;  deux 
anneaux,  placés  sur  les  côtés,  nous  indiquent 
le  mode  de  fixation,  à  l'aide  de  courroies  de 
cuir  ou  de  cordons  de  soie,  sur  un  brancard 
ou  à  l'autel. 

Dès  lors  que  le  tableau  comportait  une 
décoration  au  revers,  cette  partie  devait 
s'harmoniser,  pour  la  composition,  avec  la 
partie  antérieure,  sous  peine  de  rompre 
l'équilibre  esthétique  et  de  constituer  une 
disparate  choquante.  L'artiste  a  compris  la 
difficulté  et  s'en  est  tiré  habilement.  Il  est 
parti  de  cette  idée,  fournie  par  l'Evangile, 
que  la  croix  paraîtra  au  dernier  jour  pour 
être  la  règle  d'après  laquelle  sera  jugé  le 
genre  humain (').  La  représentation  du  juge- 
ment dernier  s'imposait  donc  pour  ainsi  dire 
comme  suite  de  l'iconographie  de  la  face 
principale  ;  on  l'avait  déjà,  sous  cette  même 
forme,  aux  portails  romans  des  cathédrales 
d'Angers,  de  Chartres  et  du  Mans. 

La  plaque  est  composée  d'une  large 
zone,  serrée  entre  deux,  bandeaux  étroits, 
le  tout  historié.  Une  croix  feuillagée,  du 
style  le  plus  gracieux  et  le  plus  souple, 
traverse  la  zone  centrale  :  le  milieu  est  coupé 
par  un  losange,  sur  chacun  des  côtés  du- 
quel se  soude  un  disque.  Le  losange  en- 
veloppe le  Christ  comme  une  auréole  :  le 
champ  en  est  étoile,  car  il  figure  le  ciel.  Le 
Sauveur,  pieds  nus,  avec  le  nimbe  crucifère, 

I.  «  Et  tune  parebit  signum  Filii  hominis  in  crelo  et 
tune  plangent  omnes  tribus  terrre,  et  videbunt  Filium 
hominis  venientem  in  nubibus  cœli  cum  virtute  niulta  et 
majestate.  »  (5.  Mattli.,  xxiv,  30.) 


i84 


WitWt  lie  r^lrt  cljrctten. 


deux  signes  disiinctifs  de  la  divinité,  est 
assis  sur  un  trône;  sa  main  droite  levée 
bénit  a  la  manière  latine  et  sa  gauche  élève 
le  globe  du  monde,  parce  qu'il  l'a  racheté 
par  sa  mort. 

Les  quatre  animaux  prennent  place  dans 
les  quatre  médaillons,  selon  l'ordre  ration- 
nel :  l'homme  vis  à  vis  l'aigle  et  le  lion  en 
face  du  bœuf. 

En  haut,  une  arcature  courante,  en  plein 
cintre,  abrite  sept  saints  :  les  trois  premiers 
sont  seuls  nimbés,  quoique  tous  aient  leur 
nom  précédé  du  qualificatif  sanc/us  qui  en 
est  l'équivalent.  Au  milieu  siège  la  Vierge, 
►î<  SANCTA  MAKiA,  qui  tient  d'une  main  sur 
son  genou  droit  son  Fils  bénissant  et  de  l'au- 
tre présente  la  pomme  fatale  dont,  nouvelle 
Eve,  elle  annihile  l'effet  par  le  fruit  de  ses 
entrailles. A  sa  droite  se  succèdent:  S.  Pierre, 
avec  ses  deux  clefs  symboliques  et  la  croix 
de  son  martyre,  >i<  ses  •  petrvs  ;  S.  Valère, 
►î<  SCS  •  VALERivs  ;  S.  Nicolas,  ►!<  ses  ■  nico- 
LAVs  ;  à  gauche,  S.  Jean  l'évangéliste,  âgé, 
barbu  et  pieds  nus,  son  évangile  en  main  ; 
►î<  SCS  •  lOHANNEs  ■  Ev  ;  S.  Materne,  >i*  ses  ■ 
M.\TERNVS  et  s.  Agricius,  ►!<  ses  •  agri- 
cius  >i>.  Tous  ces  évêques  sont  vêtus  pon- 
tificalement,  en  chasuble,  mitre  et  crosse 
tournée  en  dedans  et  munis  du  livre  de  la 
doctrine  sainte  qu'ils  ont  enseignée.  S.  Va- 
lère ('),  S.  Materne  et  S.  Agricius  (')  ont 
occupé  le  siège  de  Trêves.  Là  est  repré- 
senté le   ciel   des  élus.    Dans   l'office  des 

I.  <  s.  Valère,  Valerius,  évêque  de  Trêves,  succéda  à 
S.  Euchaire.  Il  fut  enterré  auprès  de  son  prédécesseur 
dans  l'église  de  St-Mathias  et  bientôt  après  on  l'honora 
comme  saint,  puisqu'on  lit  son  nom  dans  le  Martyrologe 
de  .S.  Jérôme.  Son  corps  fut  transféré  à  Goslar,  dans  le 
XI'  siècle,  par  les  soins  de  l'empereur  Henri  III.  29  jan- 
vier >.  {Die t.  hagio^r.) 

1.  <  S.  Agrèce,  Aj;rcecius,  évêque  de  Trêves  et  succes- 
seur de  S.  Florentin,  appartenait  au  clergé  de  Rome, 
lorsque,  sur  la  demande  de  l'impératrice  Ste  Hélène,  il 
fut  placé  sur  le  siège  de  Trêves,  en  314,  par  le  p,ipe  S.Sil- 
vestre.  Il  mourut  vers  l'an  332  et  il  eut  pour  successeur 
S.  Maximin,  son  disciple.  13  janvier  >.  {Dict.  hagiogr.) 


morts, à  l'antienne  de  la  communion. l'Église 
demande  pour  les  défunts  qu'ils  jouissent 
avec  les  saints  de  la  lumière  éternelle  : 
«  Lux  aeterna  luceat  eis.  Domine,  cum 
sanctis  tuis  in  sternum.  »  Le  rapproche- 
ment est  encore  plus  évident  quand  on 
constate,  sur  le  bandeau  inférieur,  le  groupe 
des  bienfaiteurs  de  l'abbaye.  Huit  arcades 
cintrées  les  abritent. 

S.  Mathias,  >^  ses  mathias,  nimbé,  le 
livre  de  l'apostolat  en  main,  se  tourne,  à 
droite,  vers  l'empereur  Henri,  >^  henricvs, 
IMPERATOR,  couronné,  qui  offre  sur  un  mé- 
daillon la  représentation  du  château  de 
Vilmon  sur  Lahn  ;  suit  la  comtesse  Jutta, 
►J.  IVTTA  eoMiTissA,  dont  le  médaillon  porte 
le  nom  de  lieu  cvbes,  qui  constitue  une 
autre  propriété  territoriale  de  l'abbaye  ; 
puis  vient  l'abbé  Jacques,  ^  iacobvs  .\bkas, 
tête  nue,  en  chasuble  et  crosse,  descendant 
des  ducs  de  Lorraine  et  XVH^  abbé  de 
St-Mathias,  de  121 1  à  1257.  A  gauche  de 
l'apôtre,  on  voit  S.  Euchaire,  ►î"  ses  evcha- 
Rivs,  mitre,  crosse  et  bénissant  ;  S.  Lut- 
win  ('),  évêque  de  Trêves  au  VHI^  siècle, 
►i<  ses  LVTVViNvs,  mitre  et  en  chasuble, 
qui  offre  sur  un  médaillon  le  territoire  de 
STEM  ;  Everard,  évêque,  mort  en  1056, 
EVERHARDVS,  mitre  et  crosse,  qui  présente 
POLCHE  comme  don,  et  enfin  le  prieur  Isen- 
bard,  Hf*  isenbardvs  •  prior  ►!<,  les  deux 
mains  enveloppées  d'un  linge  par  respect 
pour  la  vraie  croix  qu'il  montre. 

3.  Le  bois  de  la  vraie  croix  mesure  o"',40 
de  hauteur  et  sa  largeur  est  de  o"*,  12  au 
petit  croisillon  et  de  o'",28  au  grand. 

La  forme  est  celle  que  l'Orient  a  cons- 
tamment donnée  à  la  relique   de  l'instru- 


I.  <  S.  Lutwin,  Ludwin  ou  Lui  vin,  Ludovintts,  évêque 
de  Trêves,  fut  élevé  à  Trêves  par  S.  Basin,  son  oncle, 
qui  en  était  évêque.  Il  mourut  vers  l'an  71S  et  fut  enterré 
à  Methloc,  où  l'on  garde  ses  reliques,  i"  juillet  et 
29  septembre.  »  (Dict.  hagiogr.) 


ite  trê0or  îie  l'église  ^t  £@atl)tas,  à  Crètîes.       185 


ment  du  salut,  c'est-à-dire  qu'elle  est  à 
double  traverse  ;  l'une,  plus  large,  repré- 
sente l'endroit  où  le  Christ  étendit  ses  bras 
et  l'autre  rappelle  le  titre,  légèrement  dé- 
veloppé. Son  origine  ressort  donc  de  sa 
forme  même,  qui  porte  ainsi  en  elle  un 
cachet  indéniable  d'authenticité. 

En  Occident,  nous  exposions  volontiers 
la  vraie  croix  dans  un  reliquaire  de  même 
forme.  Le  contenant  indiquait  aussitôt  la 
nature  du  contenu.  En  Orient,  on  préféra 
la  forme  en  tableau.  C'est  la  plus  ancienne 
et  aussi  la  plus  récente,  comme  en  témoi- 
gnent, pour  le  Vie  siècle,  le  reliquaire  de 
Ste-Croix  de  Poitiers,  envoyé  par  l'empe- 
reur Justin  à  Ste  Radegonde,  et,  pour  le 
XI V*^,  le  charmant  triptyque  gravé  dans  les 
Antiales  ai^c  hé o  logique  s,  t.  II,  p.  281,  et  qui 
appartint  en  dernier  lieu  au  chanoine 
Bouiillier,  curé  de  Coulanges  (Nièvre)  ('). 

Bien  que  le  tableau  dans  lequel  la  vraie 
croix  fut  apportée  n'existe  plus,  nous  savons 
sa    configuration     par    celui    que    possède 

I.  <  La  table  marquée  par  derrière  d'un  grand  A,  a  été 
faite  du  temps  de  Dom  Radulphe,  XV  abbé  de  Clair- 
vaux.  Il  a  placé  dans  le  milieu  de  cette  table  un  philac- 
tère  ou  reliquaire  quarré,  couvert  d'une  lame  de  vermeil. 
Dom  Artaudus,  chevalier  du  Temple,  puis  moine  de 
Clairvaux,  y  apporta  ce  philactère.  11  contient  des  reli- 
ques de  saints  au  nombre  de  vingt-quatre,  sous  vingt- 
quatre  petites  cellules.  Dans  ce  philactère  il  y  a  un  mor- 
ceau de  bois  de  la  vraie  croix,  à  nud,  sous  la  forme  de 
croix  patriarchale  à  deux  croisons,  donné  par  le  même 
dom  Artaudus.  —  La  seconde  table,  marquée  derrière 
d'un  B,  a  été  faite  du  temps  de  Dom  Radulphe.  Il  y  a 
trente-cinq  saphirs  et  cinq  tant  émeraudes  qu'autres 
pierres  précieuses  et  plusieurs  autres  d'un  moindre  prix. 
Le  fond  est  de  lames  d'argent  doré.  Et  en  cette  table  est 
un  morceau  de  la  vraye  croix  de  N.-S.  En  la  table  qui  est 
en  bas,  il  y  a  trois  rangs  de  reliques  avec  leurs  écriteaux 
sur  petites  lames  d'argent  en  lettres  gothiques.  —  La 
troisième  table,  marquée  d'un  grand  C,  est  couverte  d'une 
feuille  d'argent  doré,  divisée  en  sept  rangs,  chacun  des 
quels  contient  douze  cabinets.  Les  ossements  des  saints 
y  paraissent  nuds,  enchâssés  sous  de  petites  arcades, 
avec  des  écriteaux  à  l'entour  des  reliques.  Cette  châsse 
a  été  faite  du  temps  dudit  dom  Radulphe,  abbé  de  Clair- 
vaux,  vers  l'an  1225.  —  La  quatrième  table,  marquée  D. 
Ouvrage  grec.  C'est  Artaudus,  chevalier  du  Temple, 
moine  cellerier  de  Clairvaux,  qui  a  apporté  des  reliques 
et   le  reliquaire  d'Orient  ;  il   les  avait    reçus  de  Louis, 


l'église  de  Limbourg  (')  et  qui  provient  de 
l'abbaye  de  Stuben.  Même  en  le  renouve- 
lant, pour  le  mettre  à  la  mode  du  jour,  on 
tint  à  conserver  l'aspect  primitif  :  l'orne- 
mentation seule  varia. 

Par  une  intelligente  précaution,  le  bois 
sacré  ne  fut  pas  fixé  à  demeure  dans  son 
cadre  de  métal,  mais  simplement  encastré 
dans  une  cuvette  creusée  exprès  au  milieu 
du  tableau.  La  face  antérieure  fut  laissée  à 
nu  ;  au  commencement  du  XI V^  siècle,  on 
trouva  que  c'était  inconvenant  et  irrespec- 
tueux, et  alors  on  se  décida  à  la  couvrir 
d'une  feuille  d'argent,  gravée  et  rehaussée 
de  gemmes,  que  des  goupilles  maintinrent 
aux  extrémités,  mais  de  façon  à  pouvoir  les 
enlèvera  volonté. 

Sur  le  bois  même,  au  point  de  jonction 
des  traverses,  pour  les  orner  et  consolider 
en  même  temps,  on  fixa  deux  cabochons, 
flanqués  de  pierres  plus  petites.  La  croix 
fut  ensuite  emprisonnée  dans  un  réseau 
filigrane  et  gemmé,  qu'enserra  une  seconde 
bordure  extérieure  faite  au  repoussé. 

Le  bois  est  d'une  teinte  claire  ('):  il  sem-^ 
ble,  par  ses  veines  serrées  et  presque  droi- 
tes,   appartenir   à  la  classe  des    conifères. 


comte  de  Blois.  Il  paraît  que,  dans  le  milieu  de  la  table, 
il  y  a  eu  une  grande  croix  qui  n'y  est  plus  depuis  fort 
longtemps.  — ■  Il  y  a  encore  une  table  d'argent,  fermante 
à  deux  portes...  couverts  de  feuilles  d'argent  et  remplis 
de  reliques.  Au  milieu  est  une  croix  à  deux  croisons,  où 
il  y  a  du  vray  bois.  >  (Inv.  de  Clairvaux,  1741,  n"'  46, 
47,  48,  49,  5°-) 

1.  Annales  aich.,  XVI II,  374.  —  «  Le  contenu  est,  à 
tous  égards,  digne  de  cette  enveloppe  magnifique.  Le 
morceau  capital  est  une  croix  de  bois,  ayant  o"',35  de  hau- 
teur sur  o'",20  de  largeur...  .Selon  Browere,  un  chevalier 
allemand,  Henri  d'Uhnen,  réussit  à  s'emparer  de  ce 
reliquaire  et  de  plusieurs  autres,  les  rapporta  dans  son 
pays,  fit  don  de  celui  qui  nous  occupe  en  ce  moment  au 
couvent  de  Stuben.  »  (/te/.,  XVII,  341,  342.)  —  La  croix 
de  Limbourg,  à  double  traverse,  est  figurée  dans  le 
Mi'moire  sur  les  instruments  de  la  Passion,  par  Rohault 
de  Fleury,  pi.  XV,  et  décrite  p.  142. 

2.  «La  relique  se  compose  de  quatre  morceaux  dis- 
posés en  forme  de  croix...  La  couleur  paraît  plus  rou- 
geâtre  que  celle  de  Paris.  »  (Rohault  de  Fleury,  p.  146.) 


i86 


^tWt  ^t  ratt  cbrctieti. 


qui  est  l'essence  reconnue  pour  les  reliques 
de  ce  genre  (').  La  croix  est  formée  de  huit 
morceaux,  de  deux  centimètres  d'épaisseur 
et  d'inégale  longueur.  La  surface  est  polie, 
comme  une  tablette  menuisée. 

Le  revers  de  la  croix  a  aussi  son  intérêt 
particulier.  Les  contours  sont  dessinés  par 
un  fil  d'or,  puis  par  une  bande  saillante  et 
à  jour  où  les  animaux  et  les  oiseaux  de  toute 


Reliquaire  de  la  Vraie  Croix  ;  Revers. 

sorte  jouent  au  milieu  des  feuillages.  A 
l'intérieur  court  un  élégant  rinceau  de  fili- 
grane d'or,  qui  a  certainement  une  signifi- 
cation symbolique.  Dans  les  miniatures  et 
les  vitraux  des  XI I^  et  XI 1 1^  siècles,  la 
croix  sur  laquelle  meurt  le  Sauveur  est 
constamment  verte  et  diaprde,  suivant  l'ex- 
pression du  blason.  Ce  n'est  donc  pas  un 
bois  mort,  desséché,  bon  à  jeter  au  feu,  mais 
un  bois  plein  de  sève,  de  vigueur  et  de  vie, 

I.  «  On  peut  affirmer  que  le  bois  de  la  croix  prove- 
nait d'un  conifère  et  on  ne  peut  douter  que  ce  conifèrc 
ne  soit  du  pin.  La  Judée  en  produisait.  >  {[bid.,  p.  63.) 


qui  se  pare  de  verdure  et  d'une  abondante 
frondaison.  Le  moyen  âge  l'avait,  en  con- 
séquence, qualifié  arbir  de  vie,  parce  qu'il 
est  réellement  vivant  et  qu'il  rend  la  vie  à 
l'humanité  qui  l'avait  perdue  par  le  péché. 
On  peut  dire  de  lui  ce  que  S.  Thomas 
disait  du  pain  eucharistique  :  «  Panis  vi- 
vus,  vitam  prsestans  homini  »  (').  et  encore 
avec  le  même  poète  théologien  :  «  Mors 
est  malis,  vita  bonis  »  ('). 

La  vie  n'est  que  pour  les  bons,  les  justes, 
les  élus  et  c'est  la  croix  qui,  au  dernier  jour, 
après  les  avoir  jugés  à  sa  mesure,  les  sépa- 
rera des  réprouvés  pour  qui  elle  est  la 
mort  éternelle. 

Quel  délicieux  revêtement  pour  l'ado- 
rable croix  du  Sauveur  !  A  la  face  anté- 
rieure, elle  se  montre  radieuse,  étincelante 
et  brillante  comme  un  trophée  de  victoire 
qui,  lui  aussi,  participe  aux  honneurs  de  la 
résurrection  et  du  triomphe  :  au  revers,  elle 
est  tapissée  d'une  végétation  qui  atteste 
quel  effet  produit  sa  vertu  dans  le  monde 
régénéré. 

4.  Après  avoir  décrit  l'ensemble  de  cette 
orfèvrerie  incomparable,  revenons  sur  ses 
détails  multiples,  qu'il  est  opportun  de  bien 
faire  saisir  dans  leur  forme  ingénieuse. 

Deux  anges,  en  ronde  bosse,  sont  age- 
nouillés aux  extrémités  des  croisillons  d'en 
haut;  ils  encensent  la  croix.  Leur  attitude 
dénote  le  respect  profond  et  l'adoration  qui 
sont  dus  au  bois  sacré,  instrument  de  notre 
rédemption  ;  leur  acte  peut  aussi  s'inter- 
préter dans  le  sens  de  la  prière,  puisque 
l'encens  lui  est  comparé  par  la  liturgie  {^). 
L'orfèvre  a  donc  exprimé  de  la  sorte  le 
culte  spécial  dont  la  vraie  croix  est  l'objet 

1.  T)a.x\s\'Adnro  te  lievûte. 

2.  Dans  le  Lauda  Sion. 

3.  Le  prêtre,  à  l'encensement  de  l'autel,  pendant 
l'offertoire  de  la  messe,  dit  cette  prière  :  <  Dirigatur,  Do- 
mine, oratio  mea  sicut  incensum  in  conspectu  tuo  ». 


JLt  trésor  De  Téglise  ^PS^aîW^  à  Créées.        rsy 


dans  l'Église  catholique,  c'est-à-dire  l'ado- 
ration et  l'invocation  ('). 

La  croix,  qui  produit  la  vie,  est  entourée 
de  feuillages.  Les  locules  des  saintes 
reliques  ont  aussi  leur  encadrement  rehaus- 
sé de  feuilles  et  de  fleurettes,  car  selon  la 
parole  de  la  S'^  Écriture,  les  ossements  des 
saints  vivent  dans  l'éternité  :  «  Ossa  eorum 
pullulent  de  loco  suo.  »  (Bcc/es.,  xlvi,  14.) 

Remarquez  encore  le  perlé  qui  contourne 
la  croix  et  les  panneaux  :  c'est  un  fil  qui  a 
pour  mission  d'accuser  les  lignes  principales 
du  tableau  en  leur  enlevant  la  sécheresse 
d'angles  aigus. 

Le  filigrane  a  cessé  comme  sur  les  cou- 
vertures d'évangéliaires,  d'être  un  fil  tordu 
à  plat  sur  le  fond  qu'il  embellit.  Ici,  il  est 
plus  serré  encore  :  ses  vrilles  et  ses  feuilles 
plus  rapprochées  laissent  moins  d'ajours, 
et,  pour  lutter  d'effet  avec  le  repoussé,  il 
s'enlève,  s'arrondit,  ce  qui  ne  pouvait  s'ob- 
tenir qu'à  la  fonte.  Enfin,  ses  tiges  si- 
nueuses se  terminent  en  grappes  de  raisin. 

Le  moyen  âge  aimait  la  couleur  et  il  la 
demandait  à  la  fois  aux  émaux  et  aux  gem- 
mes. Le  tableau  est,  pour  ainsi  dire,  cons- 
tellé de  pierres  précieuses  et  de  perles  :  il  y 
en  a  de  toutes  les  tailles,  depuis  les  grosses 
jusqu'aux  petites.  Nous  en  avons  compté 
405,  dix-sept  petites  seulement  font  défaut. 
Elles  sont  ainsi  réparties  :  douze  à  chaque 
angle,  onze  dans  les  milieux  latéraux  du 
cadre,  quatre  fois  répété  ;  quatre-vingt-dix- 
huit  au  pourtour  et  cent  trente-deux  pour 
la  croix. 

Les  grosses  pierres  sont  des  cristaux 
de  roche.  Le  cristal  revient  encore  plusieurs 
fois,  surtout  de  chaque  côté  des  deux  ca- 
mées. Pour  le  reste,  ce  sont  des  améthystes, 

1.  Dans  l'office  de  l'Exaltation  de  la  croix  revient  sou- 
vent cette  formule  :  «  Adoramus  te,  Christe,  et  benedici- 
mus  tibi,  quia  per  crucem  tuam  redemisti  niundum  ». — 
€  Per  signum  crucis  de  inimicis  nostris  libéra  nos.  Do- 
mine, y 


rubis  balais,  saphirs,  émeraudes,  topazes, 
chrysolithes,  grenats,  plasmes,  cornalines, 
calcédoines,  aigues-marines,  opales,  nicolo, 
cailloux  du  Rhin.  La  forme  est  très  varia- 
ble: ronde,  ovale,  oblongue,  carrée,  triangu- 
laire, baroque  ;  quant  à  la  taille,  elle  est 
toujours  en  cabochon,  autrement  dit  à  sur- 
face arrondie. 

La  monture  est  une  bâte  à  bords  rabat- 
tus, quelquefois  munie  de  quatre  griffes 
tréflées  ;  mais  alors  il  s'agit  d'une  restau- 
ration faite  au  XI V^  siècle. 


Reliquaire  de  la  Vraie  Croix.  Détail  de  la  face. 

Plusieurs  pierres  et  perles  sont  percées 
de  part  en  part  ;  indice  certain  d'une  desti- 
nation différente  à  l'origine,  comme  serait 
un  collier.  Cette  particularité  est  souvent 
relevée  dans  les  inventaires  ('). 

I.  «  Un  saphir  d'Orient  percié.  »  (/«i/.  (fe  Clémence  de 
Hongrie,  1328,  n°  17.) 

«  Unus  alius  anulus  de  auro  de  meta,  cum  lapide  forato 
cujusdam  zaffiri.  »  (//«'.  de  Vévcquc  d'Orvieto,\z(^^,r\''  x^b.) 

<L  Un  autre  annei  d'or  esmaillié,  ouquel  a  une  faulce 
pière  pertuisée.  »  (/«?/.  du  duc  d'Orléans,  1393,  n°  523.) 

«  Un  petit  reliquaire  d'or,  où  il  a  une  des  dens  de 
l'enfance  Nostre  Dame,  garni  d'un  saphir  longuet  per- 
cié. >  {Inv.  du  duc  de  Berry,  1414,  (n"  20).  —  «  Une  belle 
aiguière  d'or...  et  ou  fretelet  du  couvercle  a  un  gros  sa- 
phir longuet  percié.  »  [Ibid.,  n"  786.)  —  «  Un  gros  saphir 
percié...  d'une  salière  de  cassidoyne.  >  {Ibid.,  1401, 
n"  226.) 

«  Ung  yinage  de  Nostre  Dame,  d'argent  doré...,  tenant 


REVUE  DE  l'art  CHRÉTIEN 
1901.   —  3'"*^   LIVRAISON, 


i88 


3Rrbur  ïic  V^xt  cbrcticn» 


Toute  l'armature  du  tableau  est  en  cuivre 
estampé,  seules  les  plaques  filigranées  sont 
en  aroent  doré.  On  a  donc  intentionnelle- 
ment limité  la  dépense,  quoique  le  monas- 
tère fût  riche. 


Etui  de  la  Croix. 

La  tranche  est  également  en  cuivre,  avec 
feuillages  tréilés,  enfermés  dans  une  série 
d'arcades. 

Le  tableau  est  estimé  60,000  marks, 
soit  75,000  francs. 

en  sa  main  une  fleur  de  lis  de  fin  or,  garnie  de  sept  perles 
et  ung  saphir  perse.  5>  (Inv.  de  l'abbaye  de  Maubuisson, 
1463,  n°  12.) 

<  Ung  gros  ballay  parssé.  >  (/«z/.  de  la  duchesse  d'Or- 
léans, 1476,  n"'892.) 

<  .Magistro  Caradosio,  gioylerio  S""'  D.  N.,  pto  pretio 
trium  saphirorum  in  modiim  piri  perforatoriim,  ad  usuni 
rose  ponlificalis  emptorum.  >  {Compte  royal  de  150g.) 


5.  Le  reliquaire  de  S.  Mathias  compte 
parmi  ses  ornements  deu.x  camées  et  vingt- 
deux  intailles,  le  tout  antique.  Comme  la 
glyptique  romaine  n'est  nullement  ma  spé- 
cialité, j'ai  prié  mon  docte  ami  Léon  Pa- 
lustre de  vouloir  bien  me  venir  en  aide 
avec  son  obligeance  habituelle  ;  ce  qui  suit 
est  donc  entièrement  de  sa  main,  et  je  ne 
puis  mieux  finir  ma  description  de  cette 
œuvre  d'art. 

«  Le  camée,  placé  au  centre  de  la  bor- 
dure supérieure,  figure,  taillé  dans  une  aga- 
teonyx,  un  buste  d'empereur  romain,  jeune, 
lauré,  drapé  et  cuirassé,  à  gauche.  Nous 
croyons  y  reconnaître  les  traits  de  Com- 
mode à  l'âge  de  dix-neuf  ou  vingt  ans.  Un 
bronze  de  175  après  Jésus-Christ,  gravé 
dans  Cohen  (t.  II I,  p.  257,  2^  édit.),  peut 
servira  établir  la  ressemblance.  Commode,  à 
cette  date,  avait  déjà  reçu  le  titre  de  César 
depuis  neuf  ans, 

«  Dans  le  camée  inférieur,  on  a  voulu  voir 
«  Romulus  apprivoisant  l'aigle  de  Rome  ». 
(Didron,  Annales  archéologiques,  t.  XIX, 
p. 227).  Nous  pencherions  plutôt  pour  Ga- 
nymède  donnant  à  boire  à  l'aigle  de  Jupi- 
ter (■).  Le  costume  qui  rappelle  celui  de 
Paris  convient  parfaitement  au  jeune  prince 
troyen.  Sardonyx  à  trois  couches,  malheu- 
reusement mutilée. 

«  Une  seule  des  intailles  est  remarquable 
par  son  exécution.  Elle  mesure  dans  son 
grand  diamètre  seize  millimètres  et  repré- 
sente un  buste  de  femme  diadème,  à  droite. 
Du  même  côté,  en  demi-cercle,  le  mot  grec  : 
ACATI,  qu'il  faut  peut-être  lire   ITACA 


t.  De  Linas  ccrivait,  en  18S1,  dans  la  Revue  de  l'Art 
chrétien,  X.\.\l,  68  :  <.<  liuste  lauré  d'un  jeune  empereur; 
Hébé,  assise,  abreuvant  l'aigle.  Le  personnage  est  vêtu 
d'une  longue  robe  de  femme,  mais  il  semble  coitïé  du 
bonnet  phrygien  ;  serait-ce  Ganymcde  dans  un  costume 
que  je  ne  crois  pas  avoir  jamais  rencontré  ailleurs.'  Les 
baguettes  intérieures  ofirent  quelques  intailles,  entre 
autres  un  Pégase  et  un  Mars.  i> 


(pour  lOay.ri),  ce  qui  fait  songer  à  l'île  d'Itha- 
que. 

«  Quant  à  l'inscription  clavdia  sancta, 
gravée  sur  deux  lignes  et  qui  remplit  tout 
le  champ  d'un  petit  nicolo,  elle  rappelle 
le  nom  d'une  dame  romaine.  Disons  à  ce 
sujet  que  sancta  est  un  cognouien  connu 
dans  les  Gaules,  particulièrement  par  les 
inscriptions  de  Périgueux. 

«  Les  autres  intailles  appartiennent  tou- 
tes aux  bas-temps  et  présentent  un  intérêt 
fort  médiocre.  En  voici  la  description  : 

«  I.  L'Abondance,  debout  à  gauche,  te- 
nant des  épis  et  la  corne  d'Amalthée. 

«  2.  L'Équité,  debout  à  gauche,  tenant 
une  balance  et  un  bouclier. 

«  3.  Vieillard  assis,  auquel  un  homme 
debout  apporte  une  couronne. 

«  4.  Deux  chevaux  lancés  au  galop. 

«  5.  Mars  debout,  à  gauche. 

«  6.  Mercure  debout,  à  gauche. 

«  7.  Guerrier  debout,appuyé  sur  sa  lance. 

«  8.  Dauphin,  enroulé  autour  d'un  bâton. 

«  9.  Une  Victoire,  à  droite. 

«  10.  Enfant  nu,  debout,  tenant  une 
coupe  de  la  main  droite. 

«  II.  Guerrier,  armé  de  la  lance  et  du 
bouclier,  courant  à  droite. 

«  12.  Deux  mains  croisées  au-dessus  d'un 
autel  et  surmontées  d'un  oiseau  et  d'une 
tête  d'enfant;  au-dessous,  deux  cornes  d'a- 
bondance. 

«  13.  Une  femme  à  droite,  occupée  à  ra- 
masser des  épis,  peut-être  Gérés. 

«  14.  Deux  globes  juxtaposés. 

«  15  et  16.  Homme  debout,  casqué,  lan- 
çant une  flèche. 

«  17.  Cheval  marin,  monté  par  un  triton. 

«  18.  Un  cavalier  au  repos. 

«  19.  Une  perdrix. 

«  20.  Cheval  au  trot,  sur  la  tête  duquel 
est  attachée  une  branche  d'olivier.  » 


6.  Le  texte  de  l'inscription  établit  claire- 
ment ce  fait  que  le  ligmim  sanctce  crucis, 
qui  était  à  Constantinople,  fut  apporté  tout 
entier  par  le  chevalier  croisé,  qui  n'en  donna 
qu'une  portion,  hanc  portioneni  istius  sacri 
/z^«/,  à  l'église  St-Euchaire.  Il  importe  de 
rechercher  les  autres. 

Le  baron  de  Roisin  a  inséré  cette  note 
dans  les  Annales  archéologiques,  XVII, 
342  : 

«  Ulmen  est  dans  l'Eiffel,  l'ancien  pays 
des  Ripuaires,  près  de  Kelberg,  district  de 
Cochem.  Par  une  route  creuse,  en  pente  et 
à  parois  volcaniques,  on  arrive  à  un  petit 
lac  circulaire,  qui  dort  dans  le  cratère  d'Ul- 
men.  Ce  lac  est  encadré  de  maisons  villa- 
geoises, d'une  église  et  de  deux  manoirs, 
dont  un  en  ruines.  Henri  d'Ulmen,  Hein- 
rich  ab  Ulmena,  assista  à  la  prise  de  Cons- 
tantinople en  1208.  II  passa  l'acte  de  dona- 
tion du  reliquaire  (de  Limbourg)  au  cou- 
vent des  Dames  nobles  de  Stuben.  Il  donna 
un  reliquaire,  moins  splendide  mais  fort 
remarquable,  à  l'église  de  St-Mathias  de 
Trêves,  où  on  le  conserve  encore.  11  fit  don 
d'un  troisième  à  St-Sévère  de  Munster- 
Maifeld  et  d'un  quatrième  à  l'abbaye  du 
Laacherzée.  » 

Riant  appelle  Henri  d'Ulmen  «le  dévas- 
tateur de  Ste-Sophie  »  [Exuvm,  I.xxxiv), 
et  ajoute  (clxiii)  :  «  11  retourna  en  Orient 
pour  accomplir  son  vœu,  prit  part  à  la 
cinquième  croisade,  fut  fait  prisonnier  et 
mené  au  Caire.  » 

La  seconde  portion  du  bois  sacré  était  à 
l'abbaye  de  St-Nicolas  de  Steuben,  comme 
en  fait  foi  cette  attestation  du  donateur, 
rapportée  par  Riant,  II,  82  : 

«  Féliciter  terrena  possidet  qui  terrenis 
celestia  possidere  intendit.  Hujus  igitur 
felicitatis  consideratione  motus  et  divina 
inspiratione  commotus,  ego,  Henricus  de 
Ulmene,  super  omnes  terrenas  possessiones 


190 


3Ret3ue  lie  T^rt  c!)rétten. 


cordi  meo  semper  dulcissimum,  videlicet 
sanctuarium  S.  Crucis  et  plures  reliquias, 
cum  omnibus  pertinentiis,  libéra  volun- 
tate  et  communi  manu  heredum  meorum, 
ecclesie  beati  Nicolai  in  Stupa  pro  remedio 
anime  uxoris  mee  Imgardis,  sub  tali  pacto 
contuli  ut  nulla  alicujus  occasione  necessi- 
latis  ab  ecclesia  aiienetur  aut  impignore- 
tur...  (")» 

On  lisait  ces  vers  à  Laach  (Lacus),  «  in 
scypho  verre  crucis  »  pour  attester  le  don  de 
la  troisième  portion  de  la  vraie  croix  (Riant, 
il.  176)  : 

Vir  meritis  clarus,  Henricus,  in  Ulmene  natus, 
Contulit  hoc  lignum  nobis,  veneramine  dignuni, 
Quod,  Grecis  victis,  advexit  partibus  islis: 
Albertus,  claustro  quo  tempore  piefuit,  auro 
Sic  exornavit,  Deus  hoc  quod  gloiificavit. 

Comme  à  Trêves,  disent  les  deux  der- 
niers vers,  le  reliquaire  fut  l'œuvre  de 
l'abbé  Albert. 

La  quatrième  portion,  selon  la  chronique 
de  Trêves,  était  à  Cologne,  dans  l'église  de 
St-Pantaléon  (Riant,  II,  282)  : 

«  Henricus  de  Ulmena,  Constantinopoli 
capta,  reliquias,  magnam  partem  Crucis 
Dominice  deportavit  et  très  partes,  unam 
ad  S.  Mathiam,  alteram  ad  monasterium 
quod  Stupa  dicitur,  tertiam  ad  S.  Pantha- 
leonem  in  Colonia,  cum  capite  S.  Pantha- 
leonis,  condonavit.  » 


i.Les  Cesta  Treviiorum  ont  une  note  à  ce  sujet  (Riant, 
11,282):  «Nec  pretereundum  videtur  quod  in  diebus  istis 
civitas  ConstantiiiopoUtanaaTheutonibus  et  Francis  cap- 
ta est,  anno  videlicet  Dominice  Incarnationis  MCCIIII... 
Henricus  .lutem  de  Ulmena,  prefectus  imperatoris,  cleno- 
dium  illud  exiinium,  videlicet  tabulamelectrinam  niirifici 
operis,  cum  reliquiis  rétro  contentis,  et  portione  magna 
Ligni  Dominici  inde  asportavit  et  illud  cenobio  monialium 
quod  Insula  sive  Slupa  vocatur,  supra  Mosellani  situm, 
cnnlradidit  >.  D'après  ce  texte,  c'est  du  reliiiuaire  cmaillé 
de  Sluben,  qui  est  resté  intact,  qu'auraient  élc  détachées 
les  trois  autres  croix  de  Iréves,  de  Laach  et  de  Cologne. 


V.  —  Tableau  De  la  crucifirion 

(XlVe  siècle). 

CE  tableau  surmonte  l'autel  du  fond  de 
l'abside,  nommé  dans  les  anciens  tex- 
tes autel  tnatutinal,  parce  qu'il  servait  à 
l'office  moins  solennel  des  heures  de  la 
nuit,  le  grand  autel,  placé  à  l'entrée  du 
chœur,   étant  réservé  aux  offices  du  jour. 

11  est  en  cuivre  repoussé  et  formé  de 
pièces  de  rapport  :  la  bordure  remonte  au 
XI 11*^  siècle;  le  tableau  lui-même,  avec 
ses  pierres  précieuses,  est  attribuable  au 
X1V'=  et  la  crucifixion  qui  y  est  appliquée 
n'est  pas  antérieure  au  XVI^,  date  du  ma- 
gnifique vitrail  qui  le  surplombe. 

Tout  autour  du  chœur  une  série  de  ta- 
bleaux, sculptés  au  XV I"  siècle,  et  encadrés 
seulement  au  XVI 11%  donne  en  détail  la 
vie  du  Christ.  Bien  des  particularités  de- 
vraient y  être  relevées,  contentons-nous 
d'une  seule:  à  la  descente  aux  limbes, Adam, 
une  croix  et  une  pomme  en  main,  est  déjà 
sorti  ;  Eve  l'accompagne  ;  le  Christ  prend 
un  autre  patriarche  par  la  main  ;  S.  Jean- 
Baptiste,  au  second  rang,    attend  son  tour. 

VI.  —  Boîtes  De  consécration 

(XV-^-XVP  siècle). 

CHAQUE  fois  qu'un  évêque  consacre 
un  autel,  il  dépose  dans  la  partie 
creuse  qu'on  nomme  si'pîi/cre,  des  reliques 
de  martyrs  qu'il  authentique  de  son  sceau, 
en  ayant  soin  d'y  joindre  un  petit  procès- 
verbal  de  la  cérémonie  dont  le  Pontifical 
Romain  donne  la  formule.  En  vertu  d'un 
induit  apostolique,  l'abbé,  qui  a  le  privilège 
des  pontificaux,  peut  procéder  à  une  con- 
sécration, mais  seulement  dans  l'enceinte 
de  son  monastère  ou  le  lieu  de  sa  juridic- 
tion, s'il  est  plus  étendu. 

D'un  autel  de  la  fin  du  XV'  siècle,  après 
sa   démolition,   on   a   gardé  simplement   le 


He  trésor  de  régltse  â)t4Patl)îa0,  à  Crètjes.       191 


sépulcre,  qui  consiste  en  un  bloc  de  tuf, 
large  de  o"\  1 7,  haut  de  o"\20  et  épais  de 
o"\  1 5.  Il  est  clos  par  une  planchette  qui 
entre  dans  une  feuillure,  et  porte  le  sceau  du 
consécrateur  empreint  sur  cire.  A  l'intérieur 
est  une  petite  boîte  de  bois  qui  contient  les 
reliques  et  est  munie  du  même  sceau. 

Ce  sceau  représente  l'abbé  Antoine  Le- 
venius,  qui  siégea  de  1484  à  15 19,  age- 
nouillé, avec  sa  crosse,  devant  l'apôtre 
S.  Mathias,  tenant  d'une  main  un  livre  et 
de  l'autre  la  hallebarde  (hache  à  long 
manche),  instrument  de  son  supplice.  En 
exergue  :  s.  anthonii  abbaiis  monasterii 
sci  mat/lie. 

L'étiquette,  un  peu  mutilée,  est  ainsi 
libellée  :   «    (Reliquie    saiicti)   Magni    mar- 

tiris    posite     in    hoc    altare    Anno  

II  idibus  augusti  sub  Domino  Anthonio 
abbate.  » 

Une  autre  étiquette  nous  reporte  à  l'an 
15  13  :  «  Reliquie  plurimorum  Scor  invente 
in  nostra  hac  ecclesia  an  do  MCCLIX  VIII 
kl'  maii  posite  in  hoc  altare  an  do  MDXI 1 1 
idibvs  augusti.  » 

Une  boîte  de  consécration,  en  plomb 
très  épais  et  d'un  travail  grossier,  haute  de 
o™,  10  et  large  de  o^^.og,  affecte  la  forme 
d'un  cylindre.  Un  parchemin  nomme  le  con- 
sécrateur: «  Anno  ■  I  ■  5  ■  5  ■  5  ■  Reveren- 
dus  Dominus  Henricus  Confluentie  abbas 
posuit.  >>  Parmi  les  reliques  nous  relevons 
ces  deux  étiquettes  :  «  De  Presepio  Do- 
mini  »,  «  De  altare  sancti  Michahelis  quod 
est  in  monte  Gargano  (')  >),  en  écriture  de 
la  fin  du  XI 1"  siècle. 

Une  autre  boite  de  même  forme  et  du 
même  temps  nous  rappelle  les  boîtes  du 
musée  de  Trêves. 


r.  Sur  le  Mont  Gargan  et  l'autel  de  S.  Michel,  voir  mes 
Œitvres  complètes,  t.  XI,  pp.  132-137. 


VII.  —  CbaSUtJlC  (XVP  siècle). 

ELLE  se  fait  remarquer  par  ses  bro- 
deries et  sa  croix  à  bras  obliques. 
On  y  voit  le  Père  éternel,  issant  des  nuages, 
chape,  bénissant  et  tenant  le  globe  du 
monde  ;  au-dessous,  sur  une  croix  verte  et 
écotée,  le  Christ  mort  ;  quatre  anges  re- 
cueillent dans  des  coupes  le  sang  qui  coule 
de  ses  plaies  et  la  Vierge  tombe  en  pâmoi- 
son entre  les  bras  de  S.  Jean  et  des  saintes 
femmes. 

VIII.  —  calice  (xvi^  siècle). 

IL  est  en  cuivre  doré  et  haut  de  o™,  20. 
Le  pied  forme  une  rose  à  six  lobes.  La 
tige  porte  inscrit  le  nom  de  Jésus  et  cette 
inscription  énigmatique  :  ihnmae.  Sur  les 
saillies  du  nœud  se  répète  le  nom  de  Jésus  : 

IHESVS. 

N'oublions  pas  d'enregistrer  un  autre 
calice,  en  argent  doré,  de  style  rococo,  mais 
d'un  beau  travail. 


r 


IX.  —  CÎjaSUblC  (XVI L-  siècle). 

ETTE  chasuble  ressemble  à  toutes 
celles  que  le  XVII'  siècle  a  brodées 
et  qui  sont  encore  si  communes  en  France. 
Sur  un  fond  de  damas  sont  jetées  des  fleurs, 
imitées  au  naturel  en  soies  de  diverses 
teintes  et,  au  milieu  de  l'orfroi,  brille  le  nom 
de  Jésus,  accompagné,  suivant  l'iconogra- 
phie du  temps,  d'un  cœur  percé  de  trois 
clous. 

Les  deux  dalmatiques   sont  assorties  à 
l'ornement  principal. 

X.  —  cartons  D'autel  (xviii^  siècle). 

LES  trois  cartons  dont  on  pare  le 
maître-autel  aux  solennités  sont  écrits 
à  la  main  sur  parchemin.  La  plume  y  a 
tracé,  en  rouge  et   noir,  une  bordure  assez 


192 


5Rrbuc  tic  r^rt  cbréttctL 


mesquine,  où  se  succèdent,  par  allusion  au 
martyre  de  S.  Mathias  et  aux  espèces  eu- 
charistiques, des  roses,  des  épis  et  des  rai- 
sins. 

Le  cadre  est  en  argent. 

Le  carton  du  milieu  porte  les  initiales  et 
le  litre  de  l'abbé,  la  date  d'exécution  et  de 
donation,  ainsi  que  les  armes  de  l'abbaye. 
L'écusson,  accosté  de  deux  palmes  mon- 
tantes, est  circulaire  ;  il  se  blasonne  :  De... 
à  tine  hache  de...  et  îine  crosse  fourjiée  en 
dedans  de...  en  sautoir,  accompagnées  en 
chef  d'une  mitre  précieuse  de... 

L'inscription  se  lit  : 
A  •  \V. 

A  •  S  •  M  (Abbas  Sancti  Matthia)  1772. 


Il  ne  reste  des  anciens  livres  de  chœur 
qu'un  manuscrit  sur  papier,  daté  de  1725. 

XL  —  encensoir  (Xix»  siècle). 

CET  encensoir,  en  cuivre  argenté,  est 
une  imitation  récente  d'un  modèle  du 
XV"  siècle.  Le  pied  est  rond  et  perlé,  la 
cassolette  et  le  couvercle  sont  hexagones. 
La  partie  supérieure  se  termine  en  pyra- 
mide, avec  fenêtres  flamboyantes  au  tam- 
bour et  bouton  au  sommet.  Pièce  d'un  des- 
sin sobre  et  d'une  facture  élégante. 

X.  Barbier  de  Montault. 


?^  A^yl^  j>^y^  A^vU  ^^  >^y^  iM^  x^U.  jMa  x^yU  A^yk  x^»^  v^  a^»:^  a^^  x^?^ 


.TiixiiiJiiiiinrTr 


TiiLXtxirmtiiriiinxxuxmTTiiitiyr 


TiTTiTixiiim  cnriTii  c 


nrrrrn      ^ 


|è  ^^^^^  Ggltge  tre  ffîeggtneg>  ^^^^^ 


3f     Carixiirrixixiirriiirrixxixi. 


ŒiTŒiiiJXLgiiJJLriixiriiiiixrrixniTyiiriiii^rrTTTT^^  ^ 

'^-^  ^iÔ-^  ^iil^  *^-*  *i^^  ^JÔ-^  Viil^  ^iÔ^  *iAl^  *i*ï^  ^iil'f  ^i*î^  V^^];^ 


ONDÉE,  vers  1060, 
par  Adèle  de  France, 
fille  du  roi  Robert  le 
Pieux  et  épouse  de 
Baudouin  V,  qui  tint 
le  gouvernement  de  la 
fWWm^^î^fsmw^^  Flandre  comme  comte 
héréditaire  et  celui  de  la  France  en  qualité 
de  tuteur  de  son  neveu,  le  roi  Philippe  I^'', 
l'abbaye  de  Mecines  (')  occupe  pendant 
sept  siècles,  une  place  importante  dans 
l'histoire  religieuse  et  politique  du  pays 
flamand. 

Une  gracieuse  légende  enveloppe  les 
origines  du  monastère  (^). 

A  l'endroit  où  s'élevèrent  les  vastes  bâti- 
ments de  l'église  et  du  cloître,  trois  humbles 
filles  des  champs  —  trois  «  mechines  » 
comme  disent  les  chansons  de  geste  (2), 
«  diie  meissine  »  comme  le  rapportent  les 
chroniques  flamandes,  —  surprises  dans 
la  forêt  par  des  malfaiteurs,  auraient  préféré 
le  sacrifice  de  leur  vie  à  celui  de  leur  hon- 
neur (").  Des  prodiges  plusieurs  fois  renou- 

1.  L'historiographe  de  Messines,  M.  Diegerick,  fait  ob- 
server que  €  dans  les  chartes  du  XI"  et  du  XII"  siècle,  le 
nom  s'écrivait  régulièrement  «  jl/i7a«/^  comme  substantif, 
Meiinencis  comme  adjectif...,  conservant  toujours  le  c 
primitif  et  ne  présentant  jamais  \'s  ou  les  ss  seules  ». 

2.  Dans  les  archives  de  Messines,  il  est  parlé  des 
«  maisines  et  serviteurs  de  Madame,  des  religieuses,  du 
couvent.  >  (  Ordonnances  faites  dis  l'institutiou  el  fonda- 
tion, ms.    de  la   fin    du   XV=  siècle,    Inventaire  Terrier, 

n°  39) 

3.  Voir  du  Cange  ;  Glnssariiim,  v°  Miscitinus. 

4.  Les  restes  des  trois  «  mechines  »  reposent  dans  une 
châsse  couverte  de  broderies,  au  côté  du  maître-autel, 
dans  l'église  de  Messines.  Par  lettres  du  23  octobre  1591, 
Pierre  Sinions,  évêque  d'Ypres,  fait  connaître  qu'il  a 
examiné  les  reliques  authentiques  des  trois  vierges  de  Mes- 
sines, qui,  depuis  un  temps  immémorial,  avaient  été  con- 
servées au  monastère.  Il  déclare  les  avoir  déposées  dans 
une  nouvelle  châsse,  non  pas  afin  qu'on  les  honore  comme 
on  honore  les  reliques  des  autres  saints,  puisqu'il  n'est 
pas  tout  à  fait  certain  que  ces  vierges  soient  des  saintes 


velés,  auraient  marqué  à  un  cuisinier  de  la 
comtesse  Adèle,  la  volonté  céleste  de  voir 
élever  en  ce  lieu  un  foyer  de  prières  et  de 
vie  religieuse.  La  princesse,  après  avoir  été 
prendre,  à  Rome,  l'avis  du  souverain  pon- 
tife, se  serait  décidée  à  réaliser  cette  œuvre. 

Un  diplôme  de  Drogon,  évêque  des 
Morins,  en  date  du  5  des  kalendes  de  juin 
1065  ('),  confirma  l'institution  nouvelle  et 
lui  attribua  de  précieuses  immunités.  Le 
roi  Philippe  I^""  de  France,  par  lettres  don- 
nées à  Furnes,  l'année  suivante,  sanctionna 
ces  privilèges  ('). 

Après  la  mort  de  Baudouin  V,  sa  veuve 
prit  le  voile  à  Messines  et  fut,  en  1079, 
inhumée  dans  l'église  (')  qu'elle  avait  fondée 
et  construite  jusqu'à  deux  fois. 

En  effet,  l'irascible  belle-fille  d'Adèle,  la 
comtesse  Richilde,  avait,  en  1071,  mis  le  feu 
au  pieux  asile  et  à  la  bourgade  environ- 
nante (^),  après  y  avoir  fait  décapiter  soi- 
xante citoyens  d'Ypres.  Plus  tard,  l'altière 
princesse  revint  à  Messines,  pour  y  chercher 


rangées  parmi  les  bienheureux  du  l'aradis,  mais  afin  de  les 
conserver,comme  elles  l'ont  été  jusque-l.\.«On  croit, ajoute 
l'évêque,  que  ces  trois  vierges  furent  si  agréables  à  Dieu 
que,  pour  les  défendre  contre  la  violence  de  quelques 
libertins  qui  en  voulaient  à  leur  chasteté,  la  terre 
s'entr'ouvrit,  les  reçut  dans  son  sein  et  les  préserva  de 
toute  atteinte.  C'est  dans  ces  conditions  extraordinaires 
que  moururent  et  furent  ensevelies  ces  trois  jeunes 
filles.  >  (Archives  de  l'abbaye,  Inventaire  Terrier,  n"  60.) 
On  conserve  dans  les  archives  un  reliquaire  du  XVI= 
siècle,  en  bois,  sur  les  parois  duquel  sont  peintes  les 
scènes  de  la  légende  des  trois  jeunes  filles.  Il  est  probable 
que  leurs  pieux  restes  y  étaient  placés  avant  la  translation 
faite  en  ;59i. 

1.  Cette  pièce  remarquable  est  munie  du  sceau  épisco- 
pal  ;  elle  se  conserve  en  original  dans  les  archives  de 
Messines. 

2.  Diegerick,  Inventaire  des  archives  de  l'ancienne 
abbaye  de  Messines,  n°'  i  et  2. 

3.  Gailliard,  Epitaphes  et  monuments  des  ifglises  de 
Flandre,  p.234.  —  Diegerick,  p.  Xiv. 

4.  Despaers,    Clironycke  van    l'iaeiideren,  t.  I.  p.  196. 


194 


3Rrbuc  lie  V^xt  cbvcttcn. 


dans  la  pratique  d'austérités  effrayantes  ("), 
le  pardon  de  ses  crimes,  puis  la  paix  du 
tombeau. 

Plusieurs  filles  des  comtes  de  Flandre, 
plusieurs  princesses  du  sang  royal  de  France 
figurent  au  catalogue  des  abbesses  et  des 
moniales  de  Messines.  Aussi  comprend-on 
aisément  que  l'abbaye  ne  tarda  pas  à  obte- 
nir une  situation  privilégiée  et  à  acquérir 
d'importantes  possessions. 

En  sa  qualité  de  comtesse  de  Messines 
et  de  princesse  de  Croisettes,  Madame 
l'abbesse  jouissait  d'une  juridiction  seigneu- 
riale considérable.  Elle  n'était  tenue  de 
«  faire  feaulté  ne  hommage  a  personne  quy 
vive,  hors  que  chascune  nouvelle  doibt 
baisier  les  pieds  de  Nostre  Dame  de  Mes- 
sines (')  ».  Elle  avait  aussi  le  gouvernement 
du  chapitre,  qui  se  composait  de  trente 
religieuses  et  de  douze  chanoines,  parmi 
lesquels  était  élu  un  prévôt. 

Malgré  les  guerres  et  les  révolutions 
dont  la  ville  et  l'église  eurent  maintes  fois 
à  souffiir,  l'antique  «  chanesie  »  subsista 
jusqu'en  1776.  A  cette  époque,  l'impératrice 
Marie-Thérèse  d'Autriche,  avec  le  consen- 
tement des  dernières  chanoinesses  et  l'as- 
sentiment de  l'évêque  d'Ypres,  transforma 
l'abbaye  en  un  établissement  d'éducation 
pour  les  enfants  des  soldats  de  ses  armées. 
L'  «  Institution  royale  de  Messines  »  s'est 
maintenue  jusqu'aujourd'hui  sous  cette  for- 
me. Elle  est  installée  dans  les  vastes  édi- 
fices claustraux,  tandis  que  l'église  sert  aux 
offices  de  la  paroisse. 

Les  annales  de  l'antique  monastère  ont 
fait  l'objet  d'une  publication  importante  ('), 

1.  Li  estore  des  comtes  de  Flandre,  cité  par  Diegerick, 
p.  XVI. 

2.  Chronique  de  r abbaye,  citée  par  Diegericli. 

3.  Inventaire  analytique  et  chronologique  des  chartes 
et  documents  appartenant  aux  archi^/es  de  l'ancienne 
abbaye  de  Messines.Ui\xgts,  1876,  678  pp.  in-4",  avec  trois 
planches  de  sceaux. 


pour  laquelle  M.  J.  L.  A.  Diegerick,  archi- 
tecte et  bibliothécaire  de  la  ville  d'Ypres, 
réunit  de  nombreux  documents  dans  la  pré- 
cieuse collection  d'archives  que  possède 
l'établissement.  Les  chroniques  du  monas- 
tère relatent  qu'au  décès  de  chacune  des 
abbesses,  on  s'empressait  de  mettre  sous 
scellés  les  coffres  renfermant  les  titres  et 
papiers  de  la  communauté.  C'est  à  cette 
circonstance,  sans  doute,  qu'est  due  la  con- 
servation du  remarquable  chartrier  de  Mes- 
sines. 

\J Inventaire  ana/ytique  de  M.  Diegerick, 
si  riche  de  renseignements  au  point  de  vue 
historique,  ne  fournit  toutefois  que  peu  de 
données  relatives  à  la  construction  et  aux 
modifications  successives  des  édifices  claus- 
traux, notamment  de  l'église.  Les  questions 
d'art  et  d'architecture  tenaient  évidemment 
moins  de  place  dans  les  préoccupations  des 
dames  chanoinesses,  que  les  débats  de  pro- 
priétés ou  les  querelles  de  préséance.  Quant 
aux  documents  de  comptabilité,  qui  consti- 
tuent une  partie  notable  de  l'ancien  fonds 
d'archives,  ils  n'ont  pas  jusqu'ici  fait  l'objet 
d'un  examen  attentif,  au  point  de  vue  qui 
nous  aurait  plus  particulièrement  intéressé. 

Glanons  dans  les  chroniques  abbatiales 
de  Messines  quelques  faits  relatifs  à  l'an- 
tique édifice. 

Il  est  fait  mention,  à  diverses  époques, 
d'incendies  qui  ravagèrent  le  monastère  pri- 
mitif. Outre  le  désastre  causé  par  la  com- 
tesse Richilde,  en  1071,  semblables  cala- 
mités sont  encore  marquées  aux  années 
1127  et  1195  ('). 

Il  y  avait,  dès  le  XI I" siècle,  deux  églises 
à  Messines  ;  l'une,  dédiée  à  saint  Nicolas, 
servait  aux  offices  de  la  paroisse  ;  elle  était 
située  au  marché  et  fut  démolie  en  1685. 
La  «  grande  église  »,  consacrée  à  Notre- 

I.  Diegerick,  p.  XV. 


€glt0e  de  £©e00tnes. 


195 


Dame,  appartenait  au  chapitre  (').  Dans 
cette  dernière,  les  documents  mentionnent, 
à  la  même  époque,  la  «chapelle  des  cha- 
noines (')  »  et  l'autel  de  Saint  Benoît  qui, 
avant  11 64,  était  consacré  au  service  cu- 
rial  {'). 

Au  commencement  du  XII  I<=  siècle,  l'ab- 
besse  Elisabeth,  sœur  du  comte  Philippe 
d'Alsace,  autorise  le  chanoine  Gérard  à 
réédifier  la  chapelle  Saint-Michel,  à  l'orner 
perpiilchre  satis  et  decenter  et  à  y  instituer 
une  chapellenie  (*). 

Par  son  testament,  fait  en  1328.  l'abbesse 
Aëlis  d'Auchy  «  requiert  le  couvent  de 
vouloir  payer  toutes  les  dettes  qu'elle  a 
contractées  pour  le  profit  et  la  restauration 
de  l'église  (5)». 

La  guerre  entre  les  Anglais  et  les  Fran- 
çais, dont  le  siège  d'Ypres  (1383)  constitue 
un  des  principaux  épisodes  dans  nos  provin- 
ces, exposa  Messines  à  bien  des  épreuves. 
La  ville  fut  mise  à  sac  et  à  feu  par  les 
Anglais,  «  de  telle  manière  que  des  deux 
mille  maisons  dont  elle  se  composait,  il 
n'en  resta  qu'une  ou  deux  »  (*).  L'abbesse 
Marguerite  d'Oultre  mit  le  monastère  en 
état  de  défense,  en  l'entourant  de  fortes 
murailles,  commandées  par  deux  grosses 
tours  (^). 

Un  siècle  plus  tard,  durant  les  sanglants 
débats  qui  suivirent  la  mort  de  Charles  le 
Téméraire,  le  feu  désola  encore  une  fois 
l'abbaye  et  le  bourg.  Par  lettres  du  10  juil- 
let 1481,  l'archiduc  Maximilien  et  Marie 
de  Bourgogne,  son  épouse,  autorisèrent 
l'abbesse  Agnès  d'Averoult  à  faire,  dans 
tous  les  pays  de  leur  domination,  une  quête 

1.  Diegerick,  p.  71  (Charte  de  126s). 

2.  Ibid.,  p.  60  (125S). 

3.  Ibid.,  p.  72.  —  Ordonnances  faites  dès  Pinstitution, 
nis.  cité,  p.  5. 

4.  Ibid.,  p.  30. 

5.  Ibid.,  p.  104. 

6.  Ibid.,  p.  XL. 

7.  Ibid.,  p.  XL. 


afin  de  subvenir  à  la  réédification  des  égli- 
ses, du  couvent  et  de  la  ville,  incendiés 
par  les  Français  (').  Peu  d'années  aupara- 
vant (1464-1466),  on  avait  reconstruit  la 
chapelle  du  Saint-Esprit,  qui  fut  désormais 
spécialement  consacrée  à  Notre-Dame  de 
Messines  (^). 

Semblables  calamités  accablèrent,  de  re- 
chef le  monastère  et  la  petite  cité  vers  le 
milieu  du  XVI^  siècle,  sous  l'abbatiat  de 
Jeanne  de  Ghistelles,  dont  la  chronique 
relate  le  zèle  et  l'industrieuse  énergie  pour 
relever  le  clocher  et  enrichir  la  sacristie  {"). 
«  En  1541,  l'abbaye  fut  brûlée,  et  onze  ans 
plus  tard,  toute  la  ville,  avec  plus  de  trois 
cents  boutiques  de  drap,  fut  détruite  par  un 
feu  de  méchef  (■•).  » 

A  peine  le  monastère  avait-il  été  rebâti, 
que  les  excès  des  iconoclastes,  en  1568,  le 
ruinèrent  de  nouveau.  «  Non  seulement  les 
sectaires  avaient  chassé  les  religieuses, 
saisi  et  confisqué  leurs  biens...,  mais  ils 
avaient  aussi  détruit,  brûlé  et  ruiné  de  fond 
en  comble  la  belle  église  et  le  cloître,  de 
sorte  qu'il  n'y  restait  ç\\iun  jiioiit  de  pierres 
et  de  cailloux  »  (^),  selon  les  expressions  de 
la  chronique  abbatiale.  L'abbesse  Jacque- 
line de  Haynin  obtint  du  roi  Philippe  II, 
en  1587,  l'autorisation  de  réédifier  l'église 
et  le  cloître  «  en  son  vieux  et  anchien 
lieu  ». 

Les  travaux  de  reconstruction,  un  mo- 
ment interrompus  par  les  dévastations  cau- 
sées par  les  «  mutinés  d'Ostende  »,  en  1 596, 
furent  activement  poursuivis  sous  le  régime 
de  Jeanne  de  Bailliencourt  (1610-161S),  qui, 
selon  la  chronique,  rebâtit  le  chœur  des 
religieuses  et  la  chapelle  Saint-Benoît. Nous 

1.  Diegerick,  pp.  XLIX  et  15t. 

2.  Ibid.,  pp.  y.\N-X\-.V\.—  Mémoire  de  le  édification 
de  la  nouvelle  chapelle  Nostre  Dame,  Inv.  Terrier,  n"  39. 

3.  Diegerick,  p.  LXI. 

4.  Chronique  m  s.  de  l'abbaye. 

5.  Diegerick,  p.  LXII. 


REVUE    DE    L  ART  CHRETIEN. 
1901.    —    3""^    LIVRAISON. 


196 


Be\)ue  De  TSlrt  cbrcticn. 


verrons  tantôt  que  la  majeure  partie  du 
vaisseau  de  l'église  date  de  la  même  épo- 
que. 

Cette  abbesse  fit  aussi  placer  sur  le 
maître-autel,  un  retable  peint  par  «  m" 
Vaast  Bellegambe,  demeurant  à  Douay, 
selon  le  patron  qu'il  a  laissé  entre  les  mains 
de  madicte  dame  ».  Le  contrât  avenu  à  cet 
effet  décrit  minutieusement  le  travail  de 
l'artiste,  qui  reçut  de  ce  chef  600  florins  (')• 

Au  cours  du  XVI I^  siècle,  les  réparations 
ou  les  reconstructions  dans  l'église  et  dans 
le  monastère,  alternent  avec  les  désastres 
amenés  par  les  guerres  continuelles  entre  la 
France  et  l'Espagne.  Mais  hélas!  les  unes 
autant  que  les  autres  étaient  néfastes  au 
vieux  monument,  dont  les  curieux  vestiges 
disparurent,  cette  fois,  sous  la  surcharge 
d'ornements  en  plâtras  selon  le  goût  du 
jour. 

Bornons-nous  à  noter  ici  le  nom  de 
l'abbesse  Marie- Louise-Victoire  de  Créquy, 
qui,  «  le  2  avril  1685,  plaça  la  première 
pierre  des  fondements  des  murailles  de 
rallongement  du  grand  chœur  de  l'église, 
où  son  nom  :  Créquy,  est  gravé  au  bas  d'un 
nom  de  Jésus  {'')  ».  La  charpente  et  la  voûte 
en  pierres  du  nouveau  sanctuaire  furent 
terminées  avant  la  fin  de  cette  année. 
Madame  «  fit  tailler  aux  pieds  de  ladicte 
voûte  des  personnages  en  pierre  blanche, 
et  aux  coins  ses  armes  avec  celles  de  la 
fondatrice  {')  ».  Ces  encorbellements  des 
bandeaux  de  la  voûte  existent  encore,  de 
même  que  l'orgue,  donné  par  Madame 
de  Créquy  en  1686. 

Parmi  les  travaux  exécutés  sous  son  gou- 
vernement, il  faut  encore  noter,  d'après  la 

1.  Archives  de  l'abbaye,  Inventaire  Terrier,  n"  79.  La 
quittance,  en  date  du  26  octobre  1617,  est  signée  du  mo- 
nogramme de  l'artiste  (un  V,  un  croissant  et  une  iielU 
jambe). 

2.  Chronique  citée  par  Diegerick,  p.  LXXXl. 

3.  Diegerick,  p.  LXXXll. 


chronique  du  monastère,  qu'en  1684,  on 
renouvela  une  partie  des  combles  et  des 
murs  de  la  chapelle  de  la  paroisse  ;  en 
1692,  on  dut  «  lier  avec  des  bandes  de  fer  » 
une  des  tourelles,  où  des  lézardes  s'étaient 
produites  à  la  suite  d'un  tremblement  de 
terre  ('). 

L'ameublement  de  l'église  et  de  la  sacris- 
tie furent  aussi  l'objet  de  grandes  dépenses, 
sous  l'abbatiat  de  Marie-Louise  de  Créquy. 
Mais  les  parties  qui  en  subsistent  sont 
trop  peu  en  harmonie  avec  les  vestiges 
anciens  de  l'édifice,  pour  que  nous  ayons  à 
nous  en  occuper  davantage. 

Après  tant  de  vicissitudes,  de  ruines  et 
de  remaniements,  on  se  demandera  peut- 
être  quels  souvenirs  archéologiques  dignes 
d'attention  offre  encore  l'ancienne  église 
abbatiale  de  Messines. 

Les  notes  qui  suivent  permettront  de 
répondre  à  cette  question. 

Dans  l'ordre  chronologique,  les  différen- 
tes parties  de  la  construction  actuelle  s'in- 
diquent comme  suit  (-)  : 

CONSTRUCTIONS  PRIMITIVES 

(vers  1070). 

Le  transept  (A-C)  ; 

La  tour  centrale  (B)  ; 

Les  deux  tours  latérales  (D-E)  ; 

Nous  étudierons  plus  loin,  en  détail,  ces 
parties  principales  de  l'édifice. 

La  chapelle  méridionale  (F)  ; 

L'autel  de  cette  chapelle  est  dédié  actuel- 
lement aux  âmes  du  Purgatoire. 

Est-ce  l'ancienne  chapelle  Saint-Benoît, 
qui  servait  à  la  paroisse,  avant  1 164?  L'au- 
tel consacré  au  patriarche  des  moines  se 
trouve   maintenant  non  loin  de  là,  contre 

1.  Ibid.,  p.  LXXXIV. 

2.  Les  plans  architectoniques,  qui  accompagnent  cette 
étude,  sont  dus  à  M.  H.  Geernaert,  architecte  k  Gand, 
charge  de  diriger  les  travaux  de  restauration.  Nous  lui 
offrons  ici  l'expression  de  nos  sincères  remerciements. 


eqiist  De  £©e00ine0. 


197 


la  paroi  méridionale  du  transept.  Déjà  en 
1445, le  tableau  des  chapellenies(')  mention- 
ne que  celle  de  Saint- Benoît  était  fixée 
à  l'autel  du  même  nom,  t'ft  navi  ecclesiœ. 

Peut  être  cependant  faut-il  reconnaître 
ici  la  chapelle  Saint-Jean,  mentionnée  dans 
le  relevé  des  bénéfices,  en  T445,  comme 
ayant  eu  sa  chapellenie  fondée  dès  1182, 
et  où  les  religieuses  venaient  «  recevoir  le 
Sacrement  »  avant  de  procéder  à  l'élection 
d'une  nouvelle  abbesse  (°). 

La  crypte,  établie  sous  l'abside,  appar- 
tient probablement  aussi  aux  constructions 
primitives  ;  mais  elle  a  dû  être  remaniée  à 
différentes  époques  et  ne  présente  pas  de 
formes  architectoniques  bien  caractérisées. 
Il  est  d'ailleurs  difficile  d'en  faire  l'examen, 
car  elle  sert  aujourd'hui  de  cave  aux  pom- 
mes de  terre  ! 

C'est  là  qu'on  a  exhumé,  il  y  a  une  dizaine 
d'années,  les  restes  de  la  comtesse  Adèle, 
en  même  temps  qu'un  ais  de  chêne  et 
quelques  ferrures  du  cercueil.  Le  millésime 
1079  taillé  sur  cette  planchette  en  chiffres 
romains,  ne  permet  guère  de  croire  qu'elle 
ait  appartenu  à  l'enveloppe  primitive  du 
cadavre  de  la  princesse.  Cette  planche  fai- 
sait peut-être  partie  de  la  tombe  jadis  élevée 
au  milieu  du  chœur  ;  celle-ci,  au  rapport  de 
Corneille  Gailliard,  qui  la  vit  vers  1560, 
était  de  bois  de  chêne  peint  en  bleu  {^).  Le 
monument  de  la  fondatrice  ne  fut-il  pas 
enlevé  du  sanctuaire  et  ses  restes  déposés 
dans  la  crypte,  lors  de  la  reconstruction,  en 
1685? 

CONSTRUCTION   DU  XIII*^  SIÈCLE. 

Le  chœur  septentrional  (G)  ; 

Il  est  désigné  dans  les  anciens  documents 

I.  Registre  B  de  l'Inventaire  Terrier. 

2. Relation  des  funérailles  de  l'abbesse  Agnès  de  Ciaon, 
en  1466  ;  ms.  (Inventaire  Teirier,  n"  36.) 

3.  «  In  de  middel  van  de  choor,  een  tombe  van  eecken 
houtte  blau  gheschildert.  »  {Epitapkes et  monuments  delà 
Flandre  au  XVlc  siècle,  p.  234.) 


SOUS  le  nom  de  «  chœur  des  chanoines  » 
(Heeren  choor).  On  y  trouvait  un  autel 
auquel  étaient  attachées  trois  chapellenies  : 
celle  de  Sainte- Madeleine,  fondée  en  1182  ; 
celle  dite  :  de  Roosebeke,  fondée  en  1292  ; 
et  celle  de  Sainte-Catherine,  fondée  en 
i3i2('). 

A  l'époque  où  l'abbesse  de  Créquy  entre- 
prit la  reconstruction  du  grand  chœur  de 
l'église,  elle    résolut  également  de   transfé- 


Plan  terrier  de  l'église. 

rer  dans  le  «  vieux  chœur  des  chanoines  » 
les  services  paroissiaux  dont  le  siège,  nous 
l'avons  vu,  se  trouvait  dans  la  chapelle 
Saint-Nicolas,  qui  tombait  en  ruines.  Les 
chanoines  se  virent  relégués  dans  la  cha- 
pelle Notre-Dame,  dont  nous  parlerons 
tantôt  ;  mais  ces  messieurs,  plutôt  que  de 
s'assembler  dans  «  cette  espèce  de  trou  ou 
cave  »,  décidèrent  de  ne  plus  chanter  les 
heures  canoniales  et  portèrent  leurs  doléan- 

I.  Registre  van  de  beneficien,  dressé  en  1445.  (Inventaire 
Terrier,  B.) 


198 


Brtuc  tie  l'^vt  cbrétten. 


ces  devant  le  parlement  de  Tournai.  La 
sentence,  qui  intervint  le  8  janvier  i69i("), 
contient  d'intéressants  renseignements  sur 
les  travaux  exécutés  alors.  On  y  lit  notam- 
ment que  le  sol  fut  abaissé  de  cinq  pieds 
dans  le  «  chœur  des  chanoines  »,  afin  de 
«  ne  plus  empêcher  la  lumière  du  jour  sur 
le  maître-autel.  » 

Le  9  septembre  1686,  le  doyen  de  la 
chrétienté  de  Warneton  bénit  «  le  chœur  de 
la  collégiale  des  chanoines,  qui  servira  éga- 
lement d'église  paroissiale,  à  la  plus 
grande  gloire  de  Dieu  et  en  l'honneur  de 
saint  Nicolas  et  de  sainte  Marie-Made- 
leine {')  ».  Depuis  lors,  cette  partie  de  l'église 
porte  le  nom  de  :  chapelle  de  la  paroisse. 

Au  devant  du  chœur  des  chanoines  se 
trouvait  une  «  petite  chapelle  »,  à  l'autel  de 
laquelle  fut  fondée,  en  1257,  une  chapel- 
lenie  en  l'honneur  de  saint  Jacques  {'). 

Ce  bénéfice  avait  reçu  le  surnom  de 
«la  cuisine  »  (da  coquina),  ou  de  la  cuiller 
à  soupe  (pollepel),  parce  qu'on  y  joignit  le 
fief  de  la  cuisine  de  l'abbaye  et  que  le  titu- 
laire était  tenu  de  faire  célébrer  une  messe, 
tous  les  dimanches  et  jours  de  fête,  pour  le 
cuisinier  et  les  domestiques  du  monastère. 
Le  nom  de  «  chapelle  du  Poeleple  »  semble 
même  avoir  été  donné  au  chœur  des  cha- 
noines (■•),  qui  se  trouvait  adjoint  à  cet  autel. 

CONSTRUCTION   DE  1464. 

La  chapelle  Notre-Dame  (M); 

Située  au  midi  du  grand  chœur,  cette 
absidiole  sert  aujourd'hui  de  sacristie.  Un 
petit  manuscrit  intitulé  :  Mémoire  de  le 
édification  de  la  nouvelle  chapelle  Nostre 
Dame  et  de  la  translation  de  lyma^e  Nostre 

1.  Inventaire  Terrier,  iV  143. 

2.  Ibid,  n"  135. 

3.  <{Ten  outareint  cappelleken  voorden  iieeren  clioor.  » 
(Registre  van  de  bene/icieti,  de  1443.) 

4.  Mémoire  de  le  édification  de  la  nouvelle  chapelle,... 
p.  6. 


Dame  en  ycelle  chapelle  ('),  nous  apprend 
que  «  la  dessusdicte  nouvelle  chapelle  de 
Nostre  Dame  a  été  faicte  et  édifyé  en  la 
plache  de  la  chapelle  de  St  Esprit,  come 
on  le  peult  voir  a  lœl,  audict  an  LXIIII  » 
(1464). 

Lors  de  la  nouvelle  bâtisse  du  chœur, 
l'abbesse  Marie-Louise  de  Créquy  sollicita 
du  vicariat  d'Ypres,  en  même  temps  que  la 
bénédiction  du  nouveau  maître-autel,  celle 
de  «  l'hostel  de  certaine  chapelle  joignant 
de  midi  audit  cœur,  lequel  elle  at  aussy  fait 
restablir  après  avoir  fait  démolir  le  vieu 
hostel  et  relevé  cielle  chapelle  par  une 
voûte  ou  cave  à  proportion  dudit  cœur  » 
Nous  avons  dit  que  les  chanoines  refusèrent, 
en  1685,  d'accepter  cette  chapelle  pour  y 
chanter  leurs  heures. 

CONSTRUCTION    DE  16I2-16I4. 

La  nef  (I)  ; 

Après  les  ravages  qui  marquèrent  la 
seconde  moitié  du  XV'l"  siècle,  l'abbesse 
Jeanne  de  Bailliencourt  entreprit  la  res- 
tauration du  transept  et  la  reconstruction  du 
vaisseau. 

Celui-ci  forme  une  nef  unique,  couverte 
intérieurement,  par  une  voûte  fort  élevée. 
Trois  fenêtres  ogivales  l'éclairent,  sur  le 
côté  ;  une  grande  baie  occupe  le  centre  de 
la  façade,  au-dessus  de  la  porte  d'entrée. 
Toutes  ces  constructions  sont  en  briques 
et  d'un  style  fort  simple.  On  a  toutefois 
pris  soin  de  leur  donner  un  certain  décor, 
grâce  à  la  polychromie  naturelle  des  maté- 
riaux. Les  plats  des  murs,en  briques  rouges, 
s'amortissent  aux  angles  par  des  chaînages 
en  briques  blanches  ;  les  encadrements  des 
fenêtres  offrent  une  alternance  des  deux 
teintes  ;  les  meneaux  sont  entièrement  en 
briques   blanches.    Sur    la  façade    se   des- 


I.  Iinentairo  Terrier,  n"  3g. 


€gli0e  De  Hgesstnes. 


199 


sinent  en  grande  dimension,  à  l'aide  de 
briques  blanches,  les  initiales  I.  B.  et  la 
date  1614. 

Antérieurement  aux  dévastations  des 
iconoclastes,  l'église  abbatiale  avait  des  pro- 
portions beaucoup  plus  vastes.  La  partie  an- 
térieure du  vaisseau  comprenait  trois  nefs, 
dont  la  hauteur  sous  clef  devait  être  consi- 
dérable, et  elle  s'étendait  vers  l'Ouest  beau- 
coup au  delà  du  pignon  actuel.  Il  est  facile 
de  s'en  assurer,  puisque  deux  anciennes 
arcades  des  travées  sont  demeurées  debout, 
encastrées    aujourd'hui    dans     le    mur    qui 


Vue  de  l'église  (côté  nord). 

longe  le  parvis  devant  l'entrée  de  l'église. 
Ces  arcs  doubleaux  sont  tracés  en  tiers- 
point  et  construits  en  pierre  blanche  appar- 
reillée,  de  même  que  les  colonnes  sur  les- 
quelles ils  reposent.  Ilsdatent  certainement 
de  l'époque  où  l'abbesse  Marguerite  d'Ave- 
roult  réédifia  son  église,  car  les  multiples 
moulures  des  bases  et  les  formes  déprimées 
des  corbeilles  des  chapiteaux,  accusent  la 
dernière  période  ogivale.  Le  type  de  ces 
chapiteaux  est  cependant  intéressant,  en  ce 
qu'il  dénote  la  recherche  d'une  transition 
rationnelle  du  plan  circulaire,  qui  est  celui 
du  fût,   au  plan  octogonal  que  comporte  la 


combinaison  des  méplats  avec  les  angles 
chanfreinés  des  arcs  doubleaux. 

Actuellement  la  porte  (J)  donne  accès  du 
cloître  de  l'abbaye  dans  un  vestibule  d'où 
une  série  d'escaliers  mène  à  la  nef  de 
l'église. 

Une  sacristie  sépare  ce  vestibule  de  la 
chapelle  intérieure  du  monastère  (K),  qui 
sert  aujourd'hui  d'oratoire  pour  les  élèves 
de  l'Institution  royale. 


Chapiteau  de  l'ancienne  nef  (vu  du  parvis). 

CONSTRUCTION    DE   1685. 

L'œuvre  de  madame  Marie- Louise  de 
Créquy,  dont  nous  avons  précédemment 
parlé,  comprend  le  chœur  (L)  avec  les  stal- 
les, et  le  sanctuaire  (M),  au  fond  duquel 
s'élève  le  maître-autel. 

La  disposition  actuelle  ne  correspond 
pas  à  celle  qui  existait  jadis,  car  l'abbesse 
constate  dans  une  requête  au  vicariat 
d'Ypres,  qu'  «  elle  a  fait  abbattre  l'hostel 
et  en  partie  le  grand  cœur  de  son  église  et 
ensuitte  l'a  fait  ralonger  et  rediffier  en  place 
convenable  l'hostel   dudit  cœur.  ^>    On  voit. 


200 


2Rebue  De  T^rt  chrétien. 


au  surplus,  dans  le  registre  des  chapellenies, 
qu'il  existait,  en  1445,  un  autel  nommé  :  de 
Salve,  derrière  le  maître-autel  {'). 

Notons  ici  que  le  même  document  ren- 
seigne encore  deux  autels  dont  l'empla- 
cement exact  n'est  plus  connu  :  l'autel  de 
la  Sainte-Croix  (dans  la  nef  gauche),  dont  la 
fondation  remonte  à  1212  ;  et  l'autel  Saint- 
Barthélémy,  contre  un  pilier  à  gauche  (^). 


Vue  ÏDtérteure  du  chœur. 

Parmi  tant  de  constructions  diverses, 
celles  qui  remontent  au  XI'=  et  au  XI 11^ 
siècle,  doivent  seules  retenir  l'attention  de 
l'archéologue.  Nous  limiterons  donc  notre 
étude  au  transept,  au  chœur  des  chanoines 
et  au  campanile  de  l'église  de  Messines. 

I.  —  TRANSEPT. 

DE  la  primitive  basilique  abbatiale,  il  ne 
reste  debout  que  la  croisée  du  vais- 
seau. C'est  peut-être   la   plus   ancienne   et 
assurément    une    des     plus    remarquables 
constructions  que  possède  laWest-Flandre. 
Ses  proportions  considérables,  sa  maçon- 

1.  <  De  cap"''  van  Sal-ue,  ten  outaer  van  .S'rt/7/i',  b.ichten 
den  hoghen  outare.  > 

2.  K  De  cap"'=  van  den  Heleghen  Cruce,  ten  outaere  in 
navi  eccUsiœ  sinistrorsum  onder  't  Crucifix.  » 

<  Ten  outare   van   Ste   Il'telmeus  in  navi  ecclcsiœ  an 
eenen  pilaer  sinistrorsum.  > 


nerie  aux  lourdes  assises,  les  dimensions 
colossales  du  campanile  central  et  des  tours 
adjacentes,  ont  défié  les  ravages  du  temps, 
des  incendies  et  des  guerres.  11  semble  que 
le  roi  de  France  et  les  princes  de  Flandre 
qui  présidèrent  à  la  fondation  de  l'église  et 
du  monastère,  y  aient  imprimé  la  marque 
de  leur  puissance  et  le  cachet  de  leur  géné- 
rosité. 

Le  transept  mesure  (compté  extérieure- 
ment) 34  mètres  de  long  sur  9'"5ode  large. 
La  hauteur  sous  clef  est  de  17  mètres.  Les 
murs,  construits  en  grès  ferrugineux  de  la 
contrée, ont  prèsde  deux  mètres  d'épaisseur. 

Le  centre  de   la   croisée,  établi   sur  plan 


Coupe  d'un  pilier  à  rentrée  du  chœur. 

carré,  est  déterminé  par  quatre  arches- 
maîtresses.  Celles-ci  sont  portées  sur  des 
faisceaux  de  colonnettes  engagées,  réunies 
par  groupe  de  trois  et  juxtaposées  de 
manière  à  ce  que  le  dé  de  chacun  des  pieds- 
droits  de  la  tour  s'accuse  dans  la  masse 
constructive  par  des  angles  à  vive  arête. 

Lesvingt-quatre  colonnettes  de  la  croisée 
offrent  uniformément  le  type  du  chapiteau 
cubique  rhénan.  L'astragale  se  compose 
d'un  simple  tore  ;  le  tailloir,  très  saillant, 
s'évase  en  doucine  pour  se  terminer  par  un 
méplat.  Les  bases,  à  double  tore,  reposent 
sur  un  dé  étage  en  deux  assises  carrées  que 
marque  un  chanfrein. 

La  corbeille  des  chapiteaux  ne  porte 
aucune  ornementation  taillée.  On  a  cepen- 
dant retrouvé  au-dessous  du  badigeon,  sur 


€gli0e  De  S^tQQints. 


20 1 


la  colonne  médiane  à  l'entrée  du  chœur, 
côté  du  Midi,  un  décor  tracé  au  cinabre  ;  il 
représente  une  palmette  renversée  aux 
volutes  capricieusement  contournées  (').  Ce 
curieux  vestige,  dont  nous  pouvons  donner 
ici  l'esquisse,  d'après  un  calque  pris  par  M. 
l'inspecteur  provincial  Naert,  est,  d'ailleurs. 


le  seul  élément  décoratif  que  l'on  ait  relevé 
lors  des  travaux  récents  de  restauration. 
Constitue-t-il  une  ébauche  d'ornementation 
picturale  ou  une  indication  pour  la  sculp- 
ture des  chapiteaux  ?  Nous  n'oserions  nous 
prononcer  à  cet  égard. 

Les  archivoltes  des   quatre  arches  de  la 


vers  le  chœur. 


Coupe  sur 


B 

le  transept 


vers  la  nef. 


croisée  comportent  un  triple  rouleau  de 
claveaux  concentriques.  Les  voussures  sont 
à  vive  arête,  mais  leur  saillie  diminue  très 
sensiblement,  en  raison  inverse  du  dévelop- 
pement de  leur  rayon. 

La  voûte  croisée,  qui  couvre  le  milieu  du 
transept,  est  de  construction  récente.  Elle 
a  été  érigée  par  l'abbesse  de  Créquy,  en 
1685  e). 

De  chaque  côté  de   ce  croisillon  s'étend 

1.  Le  dessinateur  a  omis  une  série  d'oves  esquissées  à  la 
partie  inférieure  de  la  corbeille.  Des  traces  confuses  d'un 
décor  similaire  apparaissent  encore  sur  les  chapiteaux 
voisins. 

2.  Diegerick,  p.  LXXXI. 


une  travée  barlongue,  mesurant  (à  l'inté- 
rieur) 9'", 60x6, 30.  Le  mur  terminal  ne 
comporte  d'autre  décor  qu'une  fenêtre 
ogivée,  de  date  assez  récente,  dont  nous 
parlerons  en  décrivant  le  pignon  exté- 
rieur. 

Dans  chacun  des  bras  du  transept,  la 
paroi  orientale  offre,  adjacente  au  retour 
d'angle  du  terminal,  une  large  arcature 
cintrée,  soutenue  latéralement  par  une  co- 
lonnette  engagée,  dont  le  type  est  identique 
à  celui  de  la  croisée,  bien  que  d'un  quart 
moins  élevée.  Ici  aussi,  l'archivolte  à  triple 
rouleau  est  construite,  comme  les  maî- 
tresses-arches, à  arêtes  vives. 


202 


BRcbue  De  l'^rt  cfjrttien. 


Dans  la  travée  méridionale,  cette  arca- 
ture  correspond  à  une  absidiole  de  forme 
barlongue,  au  fond  de  laquelle  l'autel  occupe 
un  évidement  ménagé  dans  l'épaisseur  du 
mur.  Cette  chapelle,  couverte  d'une  voûte 
romane,  ne  reçoit  d'autre  lumière  que  par 
le  transept.  L'autel  est,  comme  nous  l'avons 
dit  plus  haut,  consacré  actuellement  aux 
âmes  du  purgatoire. 

L'arcature  qui  fait  vis-à-vis,  dans  le  bras 
septentrional,  menait  peut-être  primitive- 
ment à  une  absidiole  semblable  ;  dès  le 
XII I^  siècle,  elle  servit  à  mettre  l'église  ab- 
batiale en  communication  avec  la  vaste  cha- 


pelle où  se  trouvait  le  chœur  des  chanoines. 

L'espace  existant  entre  les  chapelles  la- 
térales et  le  grand  chœur  de  l'église  est 
occupé,  de  chaque  côté,  par  un  énorme  dé 
de  maçonnerie  ;  ceux-ci  servent  de  base 
aux  deux  tours  latérales.  Au  centre  de  cha- 
que massif,  un  escalier  en  pierre,  à  moyeu 
central,  donne  accès  au  campanile  principal 
et  aux  combles  de  l'édifice.  Dans  la  tou- 
relle méridionale  cet  escalier  a  été  enlevé 
pour  donner  entrée  à  la  chapelle  Notre- 
Dame,  aujourd'hui  transformée  en  sacristie. 

Vis-à-vis  des  tours  latérales,  on  remarque 
dans   les   parois  occidentales  du  transept, 


Chapiteaux  à  l'entrée  du  chœur. 


deux  arcatures  actuellement  murées  mais 
qui  devaient  former  l'extrémité  des  bas- 
côtés  de  l'édifice  primitif 

Ces  arcatures,  dont  la  hauteur  et  la  lar- 
geur sont  considérablement  moindres  que 
les  baies  donnant  accès  aux  absidioles,  en 
diffèrent  aussi  notablement  par  l'aspect 
architectural.  On  y  retrouve  la  triple  archi- 
volte bandée  et  les  mêmes  formes  pour  les 
chapiteaux  et  les  bases  des  colonnes  de 
support  ;  mais  celles-ci  sont  de  dimensions 
beaucoup  plus  trapues  et  elles  sont  grou- 
pées par  faisceaux  de  trois,  offrant  ainsi  la 
même  disposition  que  les  maîtresses-arches 
dont  elles  sont  voisines. 


Les  dimensions  restreintes  des  arcs  d'en- 
trée vers  les  bas  côtés  semblent  indiquer 
le  peu  d'importance  des  collatéraux  de  la 
nef  primitive.  Ceux-ci  ont  disparu  en  même 
temps  que  le  vaisseau  et  n'ont  pas  été, 
comme  lui,  réédifiés  au  commencement 
du  XV Ile  siècle,  n  f-jm  croire  que  c'est 
particulièrement  en  parlant  de  la  partie 
antérieure  de  l'église,  que  la  chronique  ab- 
batiale mentionne  qu'  «  il  n'y  restait  qu'un 
mont  de  pierre  et  de  cailloux  »  après  le  sac 
de  1568. 

Des  deux  pignons  terminaux  du  tran- 
sept, celui  vers  le  Midi  est  adjacent  aux 
bâtiments  de  l'ancienne  abbaye.  Son  archi- 


Cgltse  tie  Sl^tssintô. 


203 


lecture  est  semblable  à  celui  vers  le  Nord, 
dont  nous  joignons  ici  l'élévation  exté- 
rieure. 

On  remarquera,  tout  d'abord,  la  noblesse 
des  lignes  et  l'élancement  de  cette  construc- 
tion. Cependant  les  remaniements  qu'elle  a 
subis,  notamment  dans  le  profil  des  gables, 
lorsque  les  voûtes  et  les  toitures  furent  re- 
nouvelées après  la  tourmente  des  icono- 
clastes, lui  ont  fait  perdre  quelque  peu  de 
sa  hauteur.  On  retrouve,  en  effet,  sur  la 
paroi  de  la  tour,  les  traces  des  anciens 
solins,  qui  accusent  une  hauteur  d'un 
mètre  environ  au-dessus  de  la  faîtière 
actuelle. 

Pour  étançonner  ce  haut  pignon,  on  a 
établi  à  chaque  extrémité,  un  massif  contre- 
fort posé  en  retour  d'angle.  L'heureuse 
disposition  des  lignes  donne  à  ces  pieds- 
droits  un  aspect  svelte  et  harmonieux. 
Tandis  que  l'étage  inférieur  monte  à  plus 
de  six  mètres,  les  deux  suivants  n'en  comp- 
tent guère  qu'un,  et  le  plus  élevé  trois  envi- 
ron. Ces  étages  sont  marqués  par  des  lar- 
miers moulurés,  couverts  par  un  glacis.  Les 
pleins  de  maçonnerie  sont  bâtis  en  retraite 
pour  chaque  gradin  ;  ainsi  l'ensemble  du 
contrefort  offre  le  type  d'une  pyramide 
solidement  assise,  qui  rompt  l'aspect  mo- 
notone du  profil  perpendiculaire. 

Une  porte  donnait  jadis  accès  dans  le 
transept  ;  la  silhouette  en  est  encore  fort 
apparente  et  les  détails  architecturaux  en 
sont  nettement  conservés.  Les  jambages 
ménagés  dans  la  maçonnerie  du  mur,  n'ac- 
cusent aucune  ligne  moulurée  ;  le  linteau 
plat,  en  pierre  non  chanfreinée,  s'avance, 
de  part  et  d'autre,  assez  loin  dans  le  plein 
du  mur.  Le  tympan  est  marqué  par  un 
cintre  dont  le  diamètre  dépasse  la  perpen- 
diculaire des  pieds-droits  de  la  porte  ;  il 
semble  qu'il  n'ait  reçu  aucune  ornementa- 
tion spéciale.  L'arcature  en  est  accusée  par 


I I    I 


Élévation  du  transept  nord. 


REVUE  DE  l'art  CHRÉTIEN 
igOI.    —   3'"^^    I-IVKAISON. 


204 


Bebue  De  V^xt  ti)xttm\. 


un  double  rang  de  claveaux,  entre  lequel 
on  a  ménagé  un  larmier  sculpté,  dont  la 
gorge  moulurée  est  parsemée  de  blochets 
posés  en  chevrons. 

Cette  porte  a  été  établie,  non  au  milieu 
de  la  paroi  du  terminal,  mais  à  côté  du  con- 
trefort occidental.  Faut-il  voir  dans  ce 
détail  une  précaution  de  l'architecte,  qui 
songeait  à  ne  pas  affaiblir  l'aplomb  du  mur 
formant  pignon  .''  Le  maître  de  l'œuvre  a-t-il 
obéi  plutôt  à  la  convenance  de  causer  moins 


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Détail  de  la  porte. 

de  trouble  aux  fidèles  réunis  dans  cette 
partie  de  l'édifice,  par  l'arrivée  des  derniers 
venus  ?  Il  serait  téméraire  d'en  juger;  mais 
il  est  permis  de  constater,  une  fois  de  plus, 
le  peu  de  contrainte  qu'inspirait  le  souci  de 
la  symétrie,  lorsqu'il  existait  quelque  motif 
d'y  déroger. 

On  rencontre  dans  toute  la  maçonnerie 
primitive,  mais  plus  spécialement  dans  les 
assises  inférieures  du  terminal  nord,  des 
briques  et  des  tuiles  mélangées  au  blocage 
en  gris  brun.  A  en  juger  par  le  grain  et  la 
forme  de  ces  briques,  elles  remonteraient 
à  une  époque  fort  ancienne,  peut-être  bien 
à    la   période    romaine.  Il  s'en    trouve   qui 


mesurent  o'",36  de  long.  o'",32  de  large  et 
seulement  o"\052  d'épaisseur. 

La  partie  médiane  du  pignon  a  été  pro- 
fondément modifiée  par  l'insertion  d'une 
grande  et  svelte  fenêtre,  couronnée  en 
osfive.  Cet  ouvrasse  a  été  exécuté  vers  l'an 
i6i2,  ainsi  que  l'indiquent  les  meneaux  en 
briques  moulurées,  dont  le  tracé  gracieux  et 
la  bonne  construction  méritent,  d'ailleurs, 
d'être  signalés. 

Primitivement  il  existait  probablement 
là  une  fenêtre  cintrée,  de  proportions  beau- 
coup moindres,  fianquée  de  deux  arcatures 
semblables,  dont  le  tracé  est  encore  facile  à 
reconnaître  dans  chacun  des  murs  termi- 
naux. Ces  trois  baies  occupaient  la  partie 
centrale  du  panneau;  la  base  de  celui-ci  est 
marquée  par  un  talus  qui  accuse  une  retraite 
de  la  partie  supérieure  de  la  muraille,  et 
le  haut  est  séparé  du  sommet  du  pignon 
par  un  larmier  horizontal.  Le  triangle  supé- 
rieur porte  un  grand  oai/us,  simplement 
accusé  dans  la  maçonnerie. 

II.  — ANCIEN  CHŒUR  DES  CHANOINES. 

A  COTÉ  des  massives  et  grandioses  con- 
structions du  vaisseau  primitif,  s'élève 
dans  l'angle  formé  par  le  chœur  et  le  tran- 
sept nord,  une  vaste  chapelle,  dont  l'archi- 
tecture simple  et  gracieuse  reflète  les  meil- 
leures inspirations  du  style  ogival  primaire. 

Il  serait  difficile,  nous  n'hésitons  pas  à 
le  dire,  de  trouver  quelque  chose  de  mieux 
proportionné,  de  plus  noble  et  de  moins 
banal  que  cet  ancien  sanctuaire.  Réduit 
aujourd'hui  à  1  état  de  ruine,  il  n'en  de- 
meure pas  moins  un  type  particulièrement 
digne  de  servir  de  modèle  à  nos  archi- 
tectes contemporains,  car  il  réunit  le  mérite 
d'une  construction  parfaitement  comprise, 
à  celui  d'une  dépense  restreinte  au  strict 
minimum. 

.Ainsi  que  l'indique  le  plan,  cette  chapelle 


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205 


forme  une  seule  travée,  mesurant  intérieu- 
rement 28  mètres  de  long  sur  8  mètres  de 
large. 

La  construction  est  tout  entière  en  pierre 
de  Tournai,  d'appareil  moyen  assez  ré- 
gulier. 

Le  seul  décor  qu'accuse  l'architecture, 
consiste  dans  le  tracé  des  fenêtres.  Sur 
chacun  des  longs  côtés,  deux  groupes  de 
lancettes  géminées,  que  séparent  de  larges 
trumeaux;  derrière  l'abside,  un  triplet  dont 
la  lancette  médiane  est  surélevée. 

Les  pieds  droits,  qui  forment  l'accotement 
chanfreiné  de  chaque  lumière,    sont   ornés, 


Elévation  extérieure  de  l'ancien  chœur  des  chanoines. 

vers  l'intérieur,  d'élégantes  colonnettes 
annelées,  dont  la  base  pose  sur  un  dé  carré 
et  dont  le  chapiteau  est  garni  de  volutes 
végétales.  Sur  le  tailloir  vient  s'amortir  la 
voussure  toreutique  qui  encadre  l'arc  en 
tiers  point  du  tympan.  Le  seuil  des  fenêtres 
se  profile  en  une  moulure,  prolongée  sur 
le  plat  du  mur  en  forme  de  cordon. 

Extérieurement  les  lancettes  géminées 
n'offrent  d'autre  ornementation  que  leur 
rebord  biseauté.  Un  cordon  mouluré  se  des- 
sine également  à  la  hauteur  des  seuils  et  se 
poursuit  sur  les  trumeaux  et  les  contre-forts. 
Une  seconde  bande  horizontale  semblable 
est  établie  à  la  hauteur  des  arcs  d'ogrive 
et  contourne  leurs  sommets  en  guise  de 
larmier. 


Des  contre-forts,  de  types  divers,  butent 
extérieurement  la  paroi  septentrionale.  Le 
premier,  vers  l'ouest,  est  plus  épais  et  d'une 
seule  venue  ;  il  appartient,  semble-t-il,  à 
une  construction  plus  ancienne,  ainsi  que 
la  porte  cintrée  voisine.  Le  second  contre- 
fort, bâti  sur  plan  triangulaire,  s'étage  en 
deux  ressauts  et  s'amortit  en  pyramide;  le 
dernier,  formant  croix  avec  l'anorle  du  mur, 
correspond,  pour  la  disposition  des  lignes, 
au  précédent. 

On  remarque,  notamment  au  mur  du  che- 
vet, que  la  construction  originale  de  cette 
chapelle  devait  comporter  quelques  assises 


Coupe  longitudinale  de  l'ancien  chœur  des  chanoines. 

de  plus;  elle  se  terminait  probablement  par 
une  corniche  moulurée.  La  toiture  actuelle, 
fort  ravalée,  dénote  un  remaniement  qui 
doit  être  contemporain  des  bouleverse- 
ments opérés  par  l'abbesse  Marie- Louise 
de  Créquy  (').  Du  même  temps  date  la 
voûte  en  bardeaux,  dont  le  profil  accuse 
le  souci  d'une  stricte  économie  plus  que 
celui  de  l'élégance  des  lignes. 

A  quelle  époque  remonte  la  construction 
de  cette  élégante  chapelle  .'' 

I.  <  Le  7  de  7bre  1686  fut  tout  achevé  le  chœur  des 
chanoisne,  que  Madame  at  faict  rebatire,  lequel  ser  des- 
glise  paroissiale,  elle  i  fit  mettre  la  vielle  table  dhostel  du 
grand  hostel  et  lacomodit  d'hornement  sans  i  estre  obligé. 
Lon  i  transportât  la  cloche  de  la  paroisse  et  Ion  la  mit  au 
cloché  dudit  chœur  que  M""^  i  fit  fair  par  bonne  volonté.» 
Journal  autographe  de  Pabbesse  Marie-Louise  de  Créquy. 
n°  140  de  l'Inventaire  Terrier.  ) 


206 


Bebuc  ÎJC  r^rt  cbrcticn. 


La  réponse  serait  aisée  si  l'on  pouvait 
identifier  l'ancien  «  chœur  des  chanoines  » 
avec  la  chapelle  Saint-Michel,  que  le  cha- 
noine Gérard  reconstruisit  et  décora  per- 
pulchre  satis  ac  decenter  (')  sous  l'abbatiat 
d'Elisabeth  de  Flandre,  entre  1 187  et  i  224. 
Cette  opinion  ne  paraît  pas  improbable,  bien 
qu'aucun  document  n'autorise  à  l'affirmer. 

D'après  cette  indication,  la  chapelle  date- 
rait donc  du  premier  quart  du  XII I"^  siècle. 


Coupe  transversale. 

A  ceux  qui  s'étonneraient  de  voir,  dès 
cette  date,  s'élever  dans  nos  provinces  une 
construction  où  s'accentuent  déjà  si  com- 
plètement les  formes  de  l'ogival  primaire, 
on  peut  répondre  que  ce  style  était  déjà  en 
pleine  efflorescence  dans  l'Ile-de-France. 
Les  influences  françaises,  à  cette  époque, 
étaient  prépondérantes  parmi  les  dames  de 
Messines,  qui  avaient,  pendant  de  longues 
années, été  régies  par  des  princesses  du  sang 
royal.  La  signature  de  l'ex-abbesse  Agnès, 

I.  Diegerick,  Carlulaire,  p.  30. 


qui  appartenait  à  la  dynastie  régnante, 
figure  au  bas  de  la  charte  citée;  n'est-elle 
pas  un  indice  que  l'œuvre  du  chanoine 
Gérard  se  fit  sous  les  auspices  de  cette 
pieuse  «  fille  de  France  »,  peut-être  avec 
le  concours  d'artistes  qu'elle  avait  fait  venir 
pour  embellir  son  monastère  ? 


III. 


TOUR. 


A  PLUSIEURS  kilomètres  de  distance, 
on  voit  se  profiler,  au-dessus  du 
bourg  de  Messines,  la  masse  imposante 
de  l'antique  tour  abbatiale.  Assise  sur  un 
tertre   dont  l'altitude  est  de  65  mètres  en- 


\      m\.     / 


Détail  de  la  corniche  de  la  tour. 

viron,  elle  s'élève  à  45  mètres  de  hauteur, 
dominant  ainsi  les  verdoyants  pâturages 
de  la  Haute-Lys  et  la  région  boisée  du 
«  paysd'Ypres  ». 

La  tour  de  Messines  forme  un  bloc 
carré,  dont  la  construction  cyclopéenne 
défie  depuis  huit  siècles  la  violence  des 
ouragans  et  la  lime  du  leiiipus  edax  rerutii. 
Elle  est  tout  entière  construite  en  gros 
blocs  du  grès  de  la  région,  fort  dur  et  de 
couleur  brune.  11  en  est  de  même  des  deux 
tourelles  moindres  qui  la  cantonnent  dans 
les  angles  vers  l'Est.  Les  trois  clochers 
datent  donc  de  la  même  époque  que  les 
parties  primitives  de  l'église  et  il  n'est  pas 
improbable  que  nous  devions   le  maintien 


Cglise  ht  ^e00ines. 


207 


de  celles-ci  au  désir  de  conserver  le  cam- 
panile auquel  elles  servent  de  base. 

Rien  n'a  été  sacrifié  à  la  décoration 
dans  l'architecture  de  cette  massive  et  rude 
bâtisse.  A  peine  a-t-on  ménagé  sur  chacun 
des  pans  de  la  grande  tour  deux  panneaux 
adjacents,  dont  le  couronnement  est  tracé 
en  ogive.  La  forme  en  tiers-point  de  ces 
arcatures  est  assurément  digne  d'être  notée, 
vu  l'époque  où  elles  furent  construites.  On 
remarquera  que  les  seuils  de  ces  panneaux 
sont  de  hauteur  inégale. 

Sur  les  faces  latérales,  on  trouve,  à  la 
partie  inférieure  des  panneaux,  des  fenes- 
irelles  de  style  roman,  toutes  simples,  d'ail- 
leurs, dans  leur  construction. 

La  corniche  affecte  la  forme  très  primi- 
tive d'un  bandeau  soutenu  par  un  congé; 
elle  repose  sur  des  corbeaux  taillés  en 
quart  de  rond.  Seuls  les  deux  modillons 
situés  à  l'angle  sud-est  offrent  des  masques 
humains  grossièrement  sculptés. 

La  toiture  en  ardoises,  dont  le  rebord 
recouvre  la  corniche,  a  certainement  été 
refaite.  L'œuvre  actuelle  paraît  dater  du 
XVI I^  siècle  ;  mais  —  fait  très  remarquable 
et  sur  lequel  nous  reviendrons  tantôt  —  elle 
doit  rappeler  néanmoins  la  silhouette  de  la 
couverture  primitive. 

Cette  toiture,  carrée  à  la  base,  s'élève  à 
l'octogone  par  l'insertion  de  pans  triangu- 
laires, à  la  pointe  inférieure  desquels  sont 
établies  quatre  petites  pyramides  ardoisées. 
Celles-ci  constituent  certainement  un  sou- 
venir d'anciennes  tourelles  d'angle.  La 
partie  octogonale  se  couronne  par  un  étage 
ajouré,  composé  de  montants  en  bois,  entre 
lesquels  s'agencent  les  sautoirs  d'une  balus- 
trade. Au-dessus  de  cette  lanterne  s'élève 
une  coupole  sphéroïdale,  à  la  naissance  de 
laquelle  règne  une  seconde  galerie  en  bois. 
La  croix  terminale  porte  le  millésime  : 
1604. 


Les  deux  tours  adjacentes  au  campanile 
ne  comportent  guère  de  description,  car 
leur  bâtisse  est  des  plus  simples. Sur  chaque 
face,  un  panneau  rectangulaire  est  ménagé 
dans  la  maçonnerie.  La  couverture  consiste 
en  une  simple  pyramide  ardoisée.  Dans 
chacune  de  ces  tours  était  établi  un  esca- 
lier donnant  accès  au  donjon  central. 


Tour  (vue  de  l'Ouest). 

Il  semblerait,  à  première  vue,  que  le  plan 
primitif  de  l'église  comportât  la  construc- 
tion de  deux  autres  tours  secondaires,  à 
l'Ouest  du  transept.  L'église  de  Messines 
eût  ainsi  présenté  un  aspect  analogue  aux 
fameux  «  choncq  clotiers  »  de  Tournai. 
Toutefois  la  position  des  arcatures  qui 
donnaient  jadis  accès  du  transept  dans  les 
bas-côtés  de  la  nef,  ne  permet  guère  d'ad- 
mettre cette  hypothèse,  et  l'on  est  amené  à 


208 


3Re\)ue  lit  V^xt  cl)vctten. 


croire  que  le  grand  clocher  de  Messines 
avec  ses  deux  acolytes,  se  présente  à  nos 
yeux  tel  que  l'a  projeté  le  primitif  maitre 
de  l'œuvre. 

Nous  avons  écrit  tantôt  que  la  couverture 
de  la  tour,  bien  que  de  date  assez  récente, 
rappelait  le  galbe  de  la  toiture  qui  l'avait 
précédée.  Nous  possédons  à  cet  égard  des 
indications   assurément    curieuses     et    sur 


lesquelles  il  nous  faut  revenir  en  terminant 
cette  notice. 

Ceux  qui  liront  ces  lignes  verront  que 
les  petits  monuments  de  la  sphragistique 
peuvent  apporter  parfois  un  utile  concours 
à  la  solution  des  problèmes   archéologiques. 

Grâce  à  la  parfaite  obligeance  de  M.  Ter- 
rier, secrétaire-trésorier  de  l'Institution 
Royale,  nous  pouvons  donner   ici  la  repro. 


Sceau  des  échevins  de  Messines.  1256 


duction  de  trois  anciens  scels  de  Xi'cltevinage 
de  Messines  ('). 

Le  premier  appartient  évidemment  au 
XI 11^  siècle  ;  on  le  trouve  appendu  à  une 
charte  datée  de  novembre  1256.  Il  est 
orbiculaire  et  mesure  o'",o65  de  diamètre. 
La   matrice   en    cuivre   est  conservée  aux 


I.  Le  sceau  de  l'abliaye  représentait  la  \'ierge  debout 
dans  le  champ,  tenant  de  la  main  droite  un  rameau,  de 
la  gauclie  un   livre    fermé.   Légende  :   ►J^  .KiltUIiiIi'V" 

H.  ffiHHXe  JBeciDeDJSiB  eccxie.  11  date  du 

XII'  siècle  (1164)    et  a  été  reproduit  dans   Diegerick, 
p.  CCIX. 


archives  de   l'établissement,    mais  la  gra- 
vure a  perdu  de  sa  finesse. 

Sur  ce  sceau,  la  partie  gauche  du  champ 
est  occupée  par  une  figure  féminine,  assise 
sur  un  trône  que  supporte  un  large  escabeau. 
Vêtue  d'une  robe  échancrée  au  cou  et  d'un 
simple  manteau,  la  dame  porte  sur  la  tête 
une  de  ces  coiffures  basses  en  forme  de  mor- 
tier, que  Ouicherat  (')  désigne  sous  le  nom 
de  «  chapel  de  soie  ))  ;  au-dessous  paraît  un 
voile    tombant  sur    les    épaules.    Le    bras 

I .  Histoire  du  costume  en  France,  p.  1 88. 


Cgltse  De  S^es^stnes. 


209 


droit  est  levé  dans  le  geste  de  la  bénédic-  ' 
tion  ;  la  main  gauche  tient  une  cassette  (ou 
un  livre  fermé)  et  un  rouleau.  Le  trône  a 
l'aspect  d'un  fauteuil,  dont  le  dossier  est 
formé  par  une  série  de  balustres  simulant 
des  arcatures  cintrées  et  dont  les  montants 
se  terminent  par  des  pommeaux  coniques. 

Cette  image  représente-t-elle  la  Sainte 
Vierge  Marie,  patronne  de  l'abbaye,  ou  bien 
la  princesse  Adèle,  fondatrice  du  monastère? 
Il  serait  difficile  d'en  décider.  Observons, 
en  effet,  que  la  tète  n'est  pas  auréolée  du 
nimbe  et  que  la  coiffure,  de  même  que  les 
objets  tenus  dans  la  main  gauche,  donnent 
quelque  vraisemblance  à  la  seconde  hypo- 
thèse. 

Devant  cette  dame  est  placée  l'image 
d'un  édifice,  qui  occupe  tout  le  côté  droit  du 
champ.  Ce  bâtiment  rappelle  assez  bien, 
dans  ses  lignes  idéalisées,  la  porte  symbo- 
lique de  la  cité  telle  qu'on  la  voit,  au  XI 1 1^ 
siècle,  sur  les  sceaux  des  villes,  notamment 
dans  les  domaines  impériaux  d'Allemagne. 
Ici  l'édifice  est  représenté  par  une  arcade 
trilobée,  dont  les  pieds  droits  supportent 
une  toiture  en  pente;  au-dessus  de  celle-ci, 
on  distingue  une  haute  galerie,  composée 
d'une  série  d'arcatures  cintrées  et  couverte 
d'un  toit  en  dôme,  dont  les  segments  sont 
disposés  en  côtes  de  melon.  Une  grande 
boule  couronne  l'édifice. 

Le  champ  du  sceau  est  parsemé  de  gros 
pois.  La  légende,  inscrite  entre  un  double 
cercle  perlé,  porte  : 

►î^  S  :  SCABINORVM  :  DG  MecINeS  :  IN  FLANDRIA. 

Le  contre-sceau  montre  une  fleur  de 
lys,  avec  la  légende  : 

►î-  CVSTOS  SIGILLI. 

Le  type  de  cette  «  clef  du  scel  »  s'est 
maintenu  jusqu'au  XVI  Ile  siècle,  et  actuel- 
lement encore    la  commune  de    Messines 


porte  pour  armes  :  d'azur  à  la  fleur  de    lys 
d'or. 

Le  second  sceau  —  ou  plutôt  le  signet  — 
que  nous  avons  à  décrire,  offre  encore 
une  fois  le  type  de  la  galerie  à  arcatures, 
surmontée  d'une  coupole  ;  les  segments  de 
celle-ci  ne  sont  guère  apparents,  mais  elle 
se  termine  par  une  longue  croix, dont  le  som- 
met porte  un  coq  en  guise  de  girouette.  La 
toiture,  qui  sert  de  base  à  la  galerie,  est  ici 
mieux  proportionnée;  les  pans  en  sont  net- 
tement dessinés  et  couverts  d'un  chevronné, 
qui,  sans  doute,  figure  les  lignes  d'ardoises. 
A  la  naissance  de  cette  toiture  on  voit,  de 
part  et  d'autre,  le  comble  des  tourelles,  de 
forme  conique  et  surmonté  d'une  croisette. 
Cette  fois,  l'image  de  la  partie  supérieure 
du  campanile  figure  seule  dans  le  champ 
du  scel  échevinal.  La  légende,  dont  le  com- 
mencement est  marqué  par  le  coq  de  la 
girouette,  porte  : 

SLe  STeDe  van  œiesiNH 

Segheh  ( der)  siede  ran  Miesine.  —  Sceau  (de  la)  i<ille 
de  Messines. 

Ce  signet  se  trouve  appendu  notamment 
à  un  acte  de  cession  de  rente,  «  fait  l'an  de 
grâce  mil  CCC  trente  et  siis,  le  nuit  saint 
Pierre  en  février  »  (').  Il  est  imprimé  en  cire 
brune,deforme  orbiculaire  et  mesure  o'",027 
de  diamètre. 

Le  type  du  troisième  scel  scabinal  ne  dif- 
fère du  précédent  que  par  quelques  détails. 
C'est  encore  le  dôme  de  l'église  qu'on  voit 
représenté  dans  le  champ  ;  mais  ici  la  galerie 
ajourée  est  réduite  dans  sa  hauteur,  tandis 
que  la  toiture  inférieure,  de  même  que 
la  coupole,  affectent  des  proportions  plus 
grandes.  D'autre  part,  le  couronnement  des 
tours  latérales  est  figuré  par  des  flèches 
élancées  et  terminées,  semble-t-il,  par  une 

I.  Repris  à  X Inventaire  de  M.Diegeiick,  sous  le  n°  205. 


2IO 


3ae\)ur  lie  V^xt  tbxitkn. 


étoile.  Il  ne  reste  de  la  légende  que  les  mots 
tulle  mcfinenf 

On  trouve  ce  scel  appendu  à  une  charte 
datée  de  1566,  qui  porte  le  n"  53  dans  1'/;^- 
zr«/tj/';'^  complémentaire,  dressé  récemment 
par  M.  Terrier,  pour  les  pièces  non  encore 
cataloguées.  L'exemplaire  du  sceau  est  mal- 
heureusement assez  usé  et  en  partie  brisé  ; 
son  diamètre  devait  être  d'environo™,035('). 

Si  nous  nous  sommes  assez  longuement 
arrêtés  à  la  description  de  ces   petits  mo- 


numents sphragistiques,  c'est  parce  qu'ils 
fournissent,  pensons-nous,  des  renseigne- 
ments curieux  et  pertinents  sur  la  forme 
qu'affectait  primitivement  la  tour  de  Mes- 
sines. 

En  effet,  l'analogie  constante  du  type 
dans  les  trois  sceaux  officiels  dont  les  éche- 
vins  de  Messines  firent  successivement 
usage,  au  XI I  le,  au  XI  Ve  et  au  XVIe  siècle, 
mène  à  cette  conclusion  qu'on  y  doit  recon- 
naître   la    reproduction    du   campanile   qui 


B  A 

A/  Sceau  des  échevins  de  Messines  en  1336.  —  B/  Idem  en  1566. 


dominait  la  petite  cité.  C'était  bien  /£•«;- tour 
et  non  une  tour  quelconque,  prise  comme 
symbole  du  pouvoir  municipal,  que  ces  ma- 
gistrats avaient  voulu  voir  figurer  sur  les 
documents  émanés  de  leur  juridiction. 

Les  échevins  de  Madame  l'abbesse  n'é- 
taient pas  seuls,  d'ailleurs,  à  ressentir 
pour  leur  grandiose  campanile  un  véritable 

I.  Nous  devons  la  reproduction  photographique  de  ces 
sceaux  à  l'obligeance  de  notre  ami,  M.  Ernest  Fraeys, 
conseiller  provincial  et  échevin  de  la  ville  d'Ypres.  Les 
pi.  II,  IV,  XVIII  ont  été  gracieusement  mises  à  notre 
disposition  par  M.  Terrier,  secrétaire  de  l'Institution 
Royale. 


«amour  de  clocher».  Les  chanoinesses  vou- 
lurent, de  leur  côté,  traduire  ce  sentiment, 
en  faisant  confectionner  un  précieux  reli- 
quaire, qui  reproduisait  la  silhouette  du  mo- 
nument. Nous  avons  trouvé,  à  ce  sujet,  dans 
le  manuscrit  intitulé  :  JMévioire  de  le  édifica- 
tion de  la  nouvelle  chapelle  Nosire  Dame  ('), 
la  curieuse  annotation  que  voici  : 

«  Item  en  lan  LXIX  (^)  la  dessusdicte 
demoiselle  Margrete  de  Noyelle,  Treso- 
riere,  fist  faire  une   belle   grande  nouvelle 

1.  Inventaire  Terrier,  n°  39. 

2.  En  l'année  1469. 


Cglise  îic  S0tssims, 


21  I 


relique  d'argent  quy  est  plaine  de  reliques, 
aiant  ladicte  relique  la  manière  des  tours  de 
leglise  de  Messines  et  le  conte  Bauduin  et 
la  contesse  Adèle  quy  firent  faire  et  fonder 
ladicte  Eglisede  Messines. Laquelle  relique 
peise  XXXVI II  onches  XII  estail  dargent 
quy  vallent  au  pris  de  XLII  sols  lonche, 
LXXIX  livres  parisis  monnoye  de  Flandre. 
Et  la  fasson  cousta  LXXII  livres  parisis 
monnoye  dicte,  font  ensamble  CLVI  livres 
dicte  monnoye  quy  valent  XIII  livres  de 
gros.  » 

D'autre  part,  il  résulte  de  la  similitude 
du  type  figuré  sur  ces  trois  scels,  que,  dès 
le  XI Ile  siècle,  ig  couronnement  de  la  puis- 
sante tour  du  monastère  de  Messines,  con- 
sistait en  une  coupole  sphérique,  portée  sur 
une  sorte  de  lanterne  ou  de  oaJerie  en  bel- 
védère.  La  flèche  actuelle  n'est  donc  pas, 
comme  on  le  pourrait  supposer,  une  forme 
imao-inée  au  XVI I^  siècle,  mais  la  reconsti- 
tution,  plus  ou  moins  fidèle,  de  celle  que 
l'architecte  primitif  avait  conçue. 

Assurément  cette  galerie  ouverte  et  cette 
coupole  sphérique  constituent  un  t)pe  ex- 
ceptionnel dans  l'architecture  flamande.  Il 
semble  qu'on  y  doive  chercher  quelque  ré- 
miniscence des  traditions  monumentales 
importées  de  Byzance  ou  des  contrées  mé- 


ridionales de  l'Europe.  Cependant  on  ne 
retrouve  dans  les  annales  de  Messines 
aucun  fait  indiquant  que  des  relations  fré- 
quentes aient  mis  ce  monastère  en  rapport 
avec  les  hommes  de  l'Orient  ou  les  idées 
rapportées  en  suite  des  croisades  (').  Bien 
qu'aucune  raison  spéciale  n'apparaisse  pour 
justifier  la  construction  de  pareil  campanile, 
dont  les  formes  étranges  sont  cependant 
clairement  accentuées  sur  les  anciens  scels 
que  nous  venons  de  décrire,  il  n'en  est  pas 
moins  établi  ainsi  par  des  documents  gra- 
phiques incontestables  que,  dès  le  XI 11^ 
siècle,  le  type  de  couverture  à  coupole, 
fréquent  dans  d'autres  régions,  se  retrou- 
vait aussi  en  Flandre. 

Ce  sont  là  pour  l'archéologue  de  pré- 
cieuses indications,  car  elles  dépassent  les 
termes  d'une  simple  monographie  locale  et 
pourraient  trouver  leur  application  ailleurs 
encore  que    dans    l'humble    bourg   auquel 


nous  avons  consacre  ces  lignes. 


gon  Bethune. 


I.  On  sait  que  la  chapelle  du  Saint- Sang  ainsi  que 
l'église  de  Jérusalem  à  Bruges  possèdent  des  campaniles 
avec  galerie  ouverte  et  surmontée  d'une  coupole.  Mais, 
pour  ces  deux  édifices,  il  est  aisé  de  rendre  compte  des 
motifs  qui  ont  fait  adopter  les  traditions  d'un  style  rap- 
pelant au  peuple  les  souvenirs  de  l'Orient. 


Vue  générale  de  l'abbaye  (prise  du  Midi). 


BEVUE   UE    l'aKT  CHRÉTIEN. 
1901      —    3'"-    LIVRAISON. 


W  A^*  A^A  A^A  A^  *  A^*  A^U  A^*  *^VU  A^?I^  xg^*  *^»Ia  A^*  A^^  A^^  \^U  ^ 


M  Gôsat  sur  la  tJéccration  arcbitcctonique 

**  H — 


I  I  I  1 1  I  ifTTTTTlITTimirrTTTTTlllEIIXHII^CTIXXXtimmUXIlIJ 


Chapitre  IL  —  lia  flore. 

(Suite  des  Sources  de  décor.) 
g  I.  —  STYLISATION    DE   LA   FLORE. 

LES  types  hiératiqites.  —  D'après  cer- 
tains auteurs,  notamment  selon  M. 
Goodyave,  le  lotus  (fig.  loç  et  iio)  aurait 
eno-endré  les  principaux  types  des  premiers 
décors  humains,  dont  la  tradition  s'est  per- 
pétuée jusqu'à  nos  jours. 


Fig.  109.  —  Lotus 
au  naturel. 


Fig.   110.  —  Lotus 
stylisé. 


Le  lotus  vu  de  dessus  présente  un  dis- 
que, et  ses  pétales  se  groupent  autour  du 
noyau  de  la  fleur  comme  les  rais  d'une 
étoile  autour  de  son  centre.  Voici  (fig.  1 1 1) 
une  amulette  en  forme  d'étoile  ou  à'aster, 
qui  date  de  plus  de  3000  ans  av.  J.-C,  et 
qui  figure  la  fleur  du  lotus  vue  de  dessus. 


Fig.  III.  Fig.  112. 

Amulettes  égytiennes. 

Vus  de  côté,  les  pétales  s'ouvrent  en 
éventail,  tandis  que  les  sépales  du  calice 
se  recourbent  et  s'enroulent  en  volutes. 
Ainsi   s'engendre  le  type  ionique  du   lotus 


I.   Voyez  la  1"=  partie,  p.  481,  1900,  et  la.  2""  partie, 
p.  25,  îgoT. 


dans  sa  forme  si  caractéristique  de  l'antéfixe 
grec,  mais  qui  existait  en  Egypte  dès  la 
I  2' dynastie,  témoin  l'exemple  que  repro- 
duit la  fig.  112.  Ici  apparaissent  à  la  fois 
la  palme t te  (fig.  iij)  et  la  volute  (fig.  126  et 
I2J  plus  loin);  celle-ci  engendre  la  spirale. 


Fig.   113.    —  Palmette  grecque. 

D'un  autre  côté  le  bouton  du  lotus  parait 
avoir  engendré  Xove  ionique  (').  Cela  sem- 
ble peu   admissible  « /^r?'or/,- cependant  le 


Fig.  114.  —   Bouquet  de  lotus  égyptien. 

bouton  du  lotus  (fig.  114)  jouait  un  rôle 
important  dans  la  toilette  des  Égyptiens, 
témoin  ce  collier  (fig.  11  j)  dont  les  grains 


Fig.  115.  —  Collier  égyptien  orné  de  boutons  de  lotus  (.'). 

imitent  des  boutons  de  lotus;  ce  bouton  est 
considéré  par  l'auteur  précité  comme  l'ori- 


1.  Nous  avons  donné   l'ove   précédeiiinient  {Rrvne  de 
r Art  chrétien,  année  1900,  p.  485,  fig.  21.) 

2.  D'après  \ Architectural  Record. 


€00at  sur  la  Décoration  arcl)ttectomque. 


213 


gine  des  globules  désignés  plus  tard  sous 
le  nom  d'oves. 

A  coté  du  lotus,  on    rencontre   un   autre 
idéogramme,  c'est  la  double  volute  ou  volute 


Fîg.  116. 


en  S  (fig.  116  et  117).  Ce  signe  apparaît  en 
Écrypte  sur  un  scarabée  remontant  à  3900 
av.   J.-C.  (5^  dynastie).    Les   Grecs  en   ont 


tiré  de  superbes  motifs  de  méandres;"  en 
voici  un  exemple  combiné  avec  \aster. 
M.  W.  H.  Goodyave  a  écrit  un  volume 
pour  prouver  que  cette  spirale  dérive  elle- 
même  du  lotus,  comme  les  anneaux  concen- 
triques et  même  le  chevron,  par  suite  de 
certaines  combinaisons  de  feuilles  de  lotus, 
telles  qu'on  en  voit  au  bas  du  fût  et  dans 
le  chapiteau  de  la  colonne  égyptienne  ('). 
La  double  volute  engendre  le  méandre 
courant  et  le  guillochis,  ainsi  que  les  flots 
grecs  (fig.  riS). 


JUDU.t^    yj  o\ajX*- 


iT^e  tt-'Tvti 


^J: 


.ee^jLL. 


G\D(d\s  |^X5VAy|  ^XXXX. 


Fig.  II S. 


Un    troisième   idéogramme,    qui   mérite 
notre   attention,  est   le   Siuastika   ou   croix 


P 


jip 
iîoii 


Fig.  119. 

gammée  (fig.  120.  121  et  11  g),  d'où  dérive 
la  grecque,  et  qu'on  peut  assimiler  aussi 
au  méandre  brisé. 

Ff    m 

Fig.  120.  Fig.  121. 

Swastika. 

Ces  types  peu  nombreux  ont  suffi  à  en- 
gendrer tout  un  monde  d'ornements. 

L'ornement,  dans  l'histoire  de  l'art,  ap- 
paraît comme  l'application  complexe  de 
principes  simples  et  comme  le  résultat  d'une 
convention  perpétuée  par  la  tradition,  C'est 
ce  qu'a  établi  Owen  Jones.  Parmi  les  pro- 
duits d'art  qui  nous  inondent,  pourrait-on 


dire,    nous  retrouvons   toujours   les   types 
primitifs;    ces    vieux    motifs    traditionnels 
légués  par   le  passé  continueront  indéfini- 
ment à  constituer  le  fond  de  notre   gram- 
maire   décorative,     enrichie     rarement    de 
quelques   types    nouveaux    puisés   dans    la 
nature.  A  de  rares  époques  seulement,  à  des 
époques   d'apogée   artistique,   l'homme   re- 
tourne  au    réservoir   de   la    nature  pour  y 
puiser  directement  des  éléments  décoratifs. 
C'est  ce  qu'ont  fait  les  Egyptiens  avec  une 
extrême  réserve,   en   créant  les  ornements 
nombreux   tirés    du  seul  lotus:    l'étoile,   la 
palmette,  les  volutes.  C'est  ce  qu'ont  fait  les 
Grecs  (^)  plus  directement  encore,  en  tirant 
de  la  feuille  ôi  acanthe,  ce  somptueux  décor 
qui  suffit  à  tous  les  besoins  des  décorateurs 
grecs   et  romains.   C'est  ce  que  firent  plus 
tard  avec  un  art  sans  pareil,  beaucoup  plus 
que  leurs  prédécesseurs,  les  grands  artistes 
du  XII I^  siècle,  en  créant   la   fiore   monu- 
mentale la  plus  riche  qui  existe,  flore  qu'ils 
empruntèrent  aux   plantes    familières    des 
bois,  des  champs  et  des  jardins. 

1.  V.  Gondyave,  Graminar  of  the  lotus. 

2.  V.  La  décoration  monumentale  en  Griee  par  Fergus- 
son  ( Moniteur  des  Architectes,  1897,  p.  43.) 


214 


ISitWt  tie  rart  cbrctirn. 


Une  fois  produits,  ces  types  créés  par  le 
génie  subsistent  pour  toujours,  maintenus 
par  la  routine  ou  par  la  tradition. 

\J imitation  de  la  nature.  —  On  ne  pourra 
jamais  assez  admirer  la  richesse  et  la  fécon- 
dité infinie  de  la  nature  et  les  ressources 
inépuisables  que  l'art  peut  y  trouver.  Com- 
bien sont  vraies  les  belles  paroles  de  l'Ecri- 
ture :  «  Considérez  les  lis  des  champs, 
comme  ils  croissent:  ils  ne  travaillent  pas, 
ils  ne  filent  pas;  et  Salomon  dans  toute  sa 
gloire  n'a  pas  été  vêtu  comme  l'un  d'eux.  » 

Si  l'on  observe  la  plante,  si  l'on  se  rend 
compte  de  son  organisme,  de  son  expres- 
sion, de  ses  mille  variétés  de  formes,  des 
merveilles  de  sa  conformation,  de  son  colo- 
ris, de  son  développement,  quel  trésor  d'in- 
spirations n'y  trouve-t-on  pas  (')  ? 

Aujourd'hui,  surtout,  que  nous  sommes 
blasés  de  l'imitation   des  styles  passés,  las 


I.  «  Aucune  tribu  de  fleurs  de  John  Ruskin  n'a  eu  une 
aussi  ijrande,  aussi  varie'e  et  aussi  saine  iniluence  sur 
l'homme  que  le  grand  groupe  des  Drosid;e,  influence 
résultant  non  tant  de  la  blancheur  de  quelques-unes  de 
leurs  fleurs  ou  de  l'éclat  des  autres,  que  de  cette  forte  et 
délicate  substance  de  leurs  pétales,  qui  leur  permet  de 
prendre  des  formes  d'une  inflexion  élastique  impeccable, 
soit  en  coupes  comme  le  safran,  soit  en  clochettes  épa- 
nouies comme  le  vrai  lis,  soit  en  clochettes  semblables  à 
la  bruyère,  comme  la  jacinthe,  soit  en  étoiles  brillantes  et 
parfaites,  comme  l'épi  de  la  Vierge,  ou  bien,  lorsque  ces 
fleurs  sont  aflectées  par  l'étrange  reflet  de  la  natiire  du 
serpent,  qui  forme  le  groupe  labié  à.e.  toutes  les  fleurs,  se 
résolvant  dans  des  formes  d'une  symétrie  gracieusement 
fantastique,  dans  le  glaïeul.  Placez  à  leurs  côtés  leurs 
sœurs  Néréides,  les  nénuphars,  et  vous  aurez  en  elles  les 
formes  les  plus  exquises  du  dessin  ornemental  et  les 
mythes  floraux  les  plus  puissants  qu'aient  jamais  connus 
jusqu'ici  les  esprits  humains,  parus  sur  les  bords  du  Gange 
ou  du  Nil,  de  l'Arno  ou  de  l'A  von. 

«  Considérez,  en  effet,  ce  que  chacune  de  ces  familles 
a  signifié  pour  l'esprit  de  l'homme.  D'abord,  dans  leur 
noblesse,  les  lis  ont  donné  le  lis  de  l'Annonciation  ;  les 
asphodèles,  la  fleur  des  Champs-Elysées;  les  iris,  la  fleur 
de  lis  de  la  chevalerie;  et  les  amaryllidées,  «  le  lis  des 
champs  >  du  Christ  ;  tandis  que  le  jonc,  toujours  foulé  aux 
pieds,  devient  l'emblème  de  l'humilité  (*).  » 

Article  de  la  Revue  des  Deux-Mondes,  par  M.  Robert 
de  la  Sizeranne.  —  N"'  des  i'"'  décembre  1S95  et  r'' juin 
1896.  La  Religion  de  la  Beauté,  étude  sur  John  Ruskin. 


*  Traduction  de  M.  de  la  Sizeranne. 


de  leur  demander  des  idées  toutes  faites  et 
des  motifs  de  décor  surannés,  il  ne  faut  pas 
oublier  que  nous  avons  à  nos  côtés  des  réser- 
voirs de  beauté,  des  trésors  d'idées,  des 
sources  intarissables  d'inspiration.  Tour- 
nons-nous vers  la  création,  considérons  la 
plante,  sa  magnifique  parure,  ses  fraîches 
couleurs,  ses  merveilleuses  variétés.  Faisons 
ce  qu'on  a  fait  à  toutes  les  grandes  époques, 
puisons  directement  à  la  nature.  Faisons 
comme  le  moyen  âge,  qui  s'est  inspiré  des 
produits  de  la  création  pour  les  fixer  sur 
ses  ornements,  ses  étoffes,  ses  monuments, 
ses  frises  sculptées,  ses  murs  peints  et  ses 
vitraux. 

Application  de  l' oi-neinent  végétal.  — 
Mais  gardons-nous  de  prendre  le  corps  sans 
l'âme,  de  copier  la  lettre  sans  l'esprit  : 
l'ornement  végétal  doit  être  interprété  et 
stylisé;  foin  de  l'imitation  servile  qui  mène 
à  un  désolant  réalisme!  Idéalisons  nos  mo- 
dèles et  adaptons  le  sujet  que  nous  fournit 
la  nature  à  la  destination  de  l'œuvre  d'art,  à 
la  matière  mise  en  œuvre,  à  notre  propre 
idéal.  Faire  œuvre  personnelle,  c'est  une 
condition  essentielle  de  l'art  !  Telle  est  la 
voie  de  l'avenir. 

Cette  voie  a  été  ouverte  aux  élèves  des 
écoles  du  dessin  de  Paris.  Feu  Ruprich- 
Robert  a  doté  l'enseignement  d'un  livre 
utile  :  La  Flore  orneuicntale,  basé  sur 
une  doctrine  excellente.  11  a  analysé  les 
beautés  de  la  flore  et,  avec  un  sentiment 
profond  de  ses  expressions  si  intéressantes, 
il  a  montré  par  une  multitude  d'exemples 
quelles  applications  nouvelles  l'art  peut  en 
tirer.  Son  ouvrage  contient  une  magistrale 
analyse  du  règne  végétal  et  une  méthode 
pour  son  interprétation.  Il  a  établi  la  théo- 
rie du  décor  végétal,  approprié  surtout  à 
l'art  plastique,  en  sa  qualité  d'architecte. 

C'est  dans  la  même  voie  que  (irasset 
a  poussé  avec   un  grand  succès  son  ensei- 


€00at  0ur  la  décoration  arcl)ttectomque. 


215 


gnement  à  Paris,  en  visant  plus  particuliè- 
rement les  applications  picturales,  lui  qui 
était  peintre  de  profession,  et  en  complétant 
ainsi  l'œuvre  de  Ruprich-Robert. 

M.  Grasset  prend  une  fleur;  il  la  choisit 
de  préférence  parmi  les  essences  les  plus 
familières,  parmi  celles  qui  nous  entourent 
et  qui  ont  pour  notre  esprit  une  significa- 
tion précise,  pour  nos  yeux  un  charme  accru 
par  une  fréquente  contemplation.  Il  l'ana- 
lyse, il  l'étudié  sous  tous  ses  aspects,  dans 
toutes  ses  parties,  mettant  en  évidence  des 
beautés  intimes,  des  détails  inaperçus,  des 
manières  d'être  pleines  de  caractère,  des 
poses  de  prédilection,  des  variétés  d'allure. 
Il  appelle  à  son  aide  le  charme  du  coloris, 
dont  la  fleur,  sinon  la  plante,  est  insépa- 
rable et  dont  Ruprich-Robert  avait  fait 
abstraction,  ne  considérant  en  quelque  sorte 
que  le  côté  plastique  de  l'ornement  végétal. 
Dégageant  du  type  végétal  la  quintessence 
de  la  ligne  et  le  caractère  typique,  il  en  fait 
des  applications  pleines  de  style  à  la  pein- 
ture murale,  à  la  céramique,  à  la  composition 
des  vitraux,  au  décor  de  tentures,  etc.,  voire 
même  des  papiers  peints. 

Plus  anciennement  encore  le  même  mode 
d'étude  était  instauré  dans  les  Écoles  Saint- 
Luc  en  Belgique,  où  la  flore  est  stylisée 
d'après  les  principes  du  moyen  âge.  Nous 
signalons  ici  que  beaucoup  de  ceux-là  même 
qui  décrient  d'une  manière  acerbe  les  efforts 
des  disciples  de  Béthune  pour  régénérer 
l'art  chrétien,  ont  emboîté  le  pas,  sur  pres- 
que tous  les  terrains,  à  l'École  de  Saint- 
Luc,  qui,  la  première,  a  pratiqué  la  styli- 
sation de  la  plante  en  même  temps  que  la 
structure  apparente  dans  l'architecture. 

La  plante  et  la  fleur  introduites  dans  le 
décor  architectural  y  jouent  un  rôle  double: 
symbolique  et  ornemental. 

Le  symbolisme  des  végétaux  appartient  à 


un  ordre  d'idées  particulier,  dont  nous  ne 
traiterons  pas  ici.  Il  y  a  là-dessus  des  con- 
ventions vulgaires  et  d'autres  mystiques, 
consignées,  dans  les  traités  du  «  langage  des 
fleurs  »  et  d'iconographie,  à  l'aide  desquels 
l'artiste  décorateur  pourra  fixer  son  choix 
pour  chaque  application  déterminée  ("). 

Au  point  de  vue  ornemental  l'emploi  du 
végétal  réclame  la  stylisation. 

Stylisation. —  L'imitation  pure  et  simple, 
comme  on  la  pratique  beaucoup  de  nos 
jours,  n'a  presque  jamais  été  le  point  de 
vue  choisi  par  les  artistes  anciens.  Appli- 
quées à  l'architecture,  à  la  sculpture  et  à  la 
peinture  monumentales,  les  plantes  ont  dû 
affecter  une  allure  particulière  et  s'adapter 
intimement  au  caractère  des  ouvrages 
qu'elles  ornaient.  La  nature  doit  être  trans- 
formée dans  la  mesure  dont  l'artiste  qui 
s'en  inspire  est  le  maître. 

Quand  il  envisage  un  végétal,  il  y  perçoit 
une  qualité,  il  y  trouve  une  expression  qui, 
selon  ses  vues,  pourra  être  rendue  de  ma- 
nière à  produire  l'effet  qu'il  recherche  dans 
l'œuvre  construite.  Il  dégage  cette  expres- 
sion avec  clarté,  et  pour  cela  il  doit  faire  en 
partie  abstraction  des  autres  caractères 
parmi  lesquels  celui  qu'il  a  en  vue  se  trouve 
comme  noyé.  Donnons  un  exemple. 

Si  l'on  considère  un  arbre  quelconque, 
on  observe  que  toute  la  ramification  s'est 
développée  de  manière  que  les  plus  petits 
rameaux  puissent  respirer  librement,  sans 
se  gêner  l'un  l'autre;  de  là  une  séparation 
rationnelle  des  branches,  qui  peut  frapper 
un  décorateur  et  lui  inspirer  un  tracé  de 
ramification  décorative,  tandis  que  d'autres 
particularités  propres  à  l'essence  de  notre 

I.  Nous  renvoyons,  à  cet  égard,  à  nos  études  antérieures, 
parues  ici  même  sur l'iconoi^f aphte  chréitcnne,  a.nné^  1887, 
p.  183  et  suiv.  V.  X.  Barbier  de  Montault,  Traiti  d'icono- 
graphie. —  L.  Cloquet,  Eléiiieiits  d'iconographie  chré- 
tienne. Désolée,  Bruges.  —  F.  Verneuil,  Dictionnaire  des 
syinboles,  etc.  Laurens,  Paris. 


2l6 


jRel)ue  tie  V^xt  cl)rctten. 


arbre  le  laisseront  indifférent,  telles  que 
certaine  allure  compliquée  de  la  ramifica- 
tion, propre  plutôt  à  introduire  une  con- 
fusion nuisible  à  son  dessin.  Il  négligera 
ce  caractère  ou  d'autres,  qu'il  ne  pourrait 
peut-être  pas  rendre  avantageusement  avec 
les  moyens  dont  il  dispose,  comme  encore 
la  ténuité  remarquable  de  certains  rameaux 
extrêmes  ('). 

Surtout  s'il  veut  utiliser  ce  modèle  dans 
un  décor  plat,  il  se  gardera  de  reproduire 
perspectivement  toutes  les  branches  super- 
posées. Il  est  clair  que  l'artiste  sera  ainsi 
amené  à  faire  des  sacrifices  nécessaires,  ou 
utiles  et  à    introduire    dans   le   détail    une 


régularité,  un  rythme,  qui  n'est  pas  évident 
ni  même  apparent  dans  le  modèle  (/ig  122). 

D'autre  part,  la  matière  dans  laquelle 
l'artiste  réalisera  son  décor  lui  imposera  ses 
sujétions.  Ce  sera,  par  exemple,  un  champ 
de  mosaïque  sur  lequel  les  lignes  contour- 
nées ne  peuvent  être  reproduites  avec  les 
courbures  exactes  ;  il  y  substituera  des  lignes 
brisées  aux  lignes  infléchies.  Peut-être  aussi 
devra-t-il  modifier  la  couleur,  tout  au  moins 
simplifier  la  gamme  des  tons  et  des  nuances. 

Enfin  il  aura  sa  manière  personnelle  de 
voir  et  de  comprendre  les  choses,  que  tra- 
hira son  œuvre. 

On   le   voit,  fatalement  il    v    aura   inter- 


mms^S^sm-f'^^^p^ç'rt^ 


Fig.    122.   — Frise  au  pochoir  par  M.  F.  Aubert  (d'après  IMr/f/t'rorrt^:/). 


prétation,  et  de  là  résulte  que  l'œuvre  aura 
du  caracth-e,  du  style. 

Cette  interprétation  se  rencontre  à  un 
degré  inattendu  pour  ceux  qui  sont  peu 
familiarisés  avec  les  arts  décoratifs,  dans  les 
monuments  des  différents  peuples.  Pour 
apprécier  combien  l'œuvre  de  l'ornemaniste 
diffère  de  celle  du  paysagiste,  il  faut  rap- 
procher, par  exemple,  comme  l'a  fait  Ru- 
prich- Robert  dans  l'ouvrage  cité,  des  arbres 
tirés  de  monuments  assyriens,  égyptiens, 
grecs,  ou  du  moyen  âge.Très  différents  tous 
du  modèle  naturel,  très  différents  entre  eux, 
ils  présentent  tous  de  grandes  analogies 
quant  au  travail  de  stylisation. 

Simplification  du  dessin,  —  Ainsi  donc 
l'artiste,  quand  il  imite,  transforme  :   car  il 

I.  V.  Kuprich-Robert,  La  flore  ornaiientalc ,  p.  3. 


imite  une  créature,  une  fleur  par  exemple, 
dans  le  but  d'exprimer  une  pensée,  sa 
pensée.  En  outre,  il  l'imite  dans  une  matière 
déterminée  ;  cette  matière  lui  offre  une 
résistance  qu'il  doit  vaincre,  mais  elle  ne 
perd  pas  sa  nature,  avec  laquelle  il  faut 
compter:  le  fer  ne  peut  pas  être  traité 
comme  le  marbre,  ni  le  bois  comme  la  terre 
glaise.  De  cette  union  de  \a  pensée  et  de  la 
matière  naît  V expression,  qui  est  une  con- 
dition de  beauté  dans  l'art. 

En  général  il  faut  rechercher  la  simplicité 
de  la  forme.  «  La  nature,  dit  Fontenelle,  est 
«  d'une  épargne  extraordinaire  ;  tout  ce 
«  qu'elle  pourra  faire  d'une  manière  qui  lui 
«  coûtera  un  peu  moins,  quand  ce  moins  ne 
«  serait  presque  rien,  soyez  sûr  qu'elle  ne  le 
«  fera  que  de  cette  manière-là.  Cette  épargne 
«  néanmoins   s'accorde  avec  une   magnifi- 


(Bssâi  0ur  la  Décoration  arcl)ttcctontque. 


217 


«  cence  surprenante  qui  brille  dans  tout  ce 
«  qu'elle  fait.  C'est  que  la  magnificence  est 
«  dans  le  dessein  et  l'épargne  dans  l'exécu- 
«  tion.  Il  n'y  a  rien  de  plus  beau  qu'un 
«  grand  dessein  qu'on  exécute  à  peu  de 
«  frais.  Nous  autres  nous  sommes  sujets  à 
«  renverser  tout  cela  dans  nos  idées  !  Nous 
«  mettons  l'épargne  dans  le  dessein  qu'a 
«  eu  la  nature  et  la  magnificence  dans 
((  l'exécution.  » 

Il  ne  faut  jamais  perdre  de  vue  ce  prin- 
cipe de  la  siuiplicité  dans  Fexpresswn. 

Dans  la  composition  décorative  la  plante, 
très  irrégulière  dans  la  nature,  est  assu- 
jettie à  des  contours  donnés  par  le  cadre 
qu'elle  occupe,  par  sa  fonction  ornemen- 
tale, par  sa  position  dans  l'œuvre.  De  là  des 
formes  plus  régulières,  idéalisées  dans  un 
sens  géométrique. 

Le  plus  souvent  la  plante,  le  rameau,  le 
bouquet,  la  feuille,  s'inscrivent  dans  une 
lig7te  enveloppante  (")  et  leurs  parties  se 
dirigent  suivant  des  courbes  d'axe  plus  ou 
moins  régulières  (Jîg-  lyj  pins  loin).  On 
supprime  ainsi  le  désordre  provenant  de 
causes  accidentelles  et  l'on  introduit  un 
ordre  inhérent  à  l'ouvrage  auquel  s'ap- 
plique le  décor. 

En  matière  de  flore  ornementale  l'ex- 
pression gît  surtout  dans  le  dessin,  dans  un 
dessin  relativement  simple  et  clair.  «  Le 
dessin,  dit  Toppfer,  est  la  pensée  elle-même 
et  la  couleur  n'est  qu'un  moyen  de  la  com- 
pléter (').  »  «  Le  dessin,  dit  à  son  tour 
Lamennais,  a  un  rapport  direct  avec  la 
pensée  ;  la  couleur,  un  rapport  direct  avec 
la  sensation.  »  «  Avec  le  dessin  on  ex- 
prime une  émotion  :  c'est  l'élément  moral  ; 
avec  la  couleur,  qui  est  un  complément  plein 
de  charme,  on  exprime  une  sensation  (').  » 

1.  V.  fig.  76,  77  et  78  de  Ruprich-Robert. 

2.  Menus  propos. 

3.  Ruprich-Robert. 


§  II.  —  HISTORIQUE  DE  L'ORNEMENT 
VÉGÉTAL. 

L'ornementation  végétale  des  anciens  se 
caractérise  par  un  petit  nombre  de  types  et 
d'abondantes  répétitions  d'ornements  très 
stylisés  et  distribués  suivant  des  ordonnan- 
ces eurythmiques.  Rien  de  plus  frappant 
sous  ce  rapport  que  l'art  de  l'Egypte  et  celui 
de  la  Grèce.  Les  Egyptiens  ont  surtout 
représenté  le   lotus  ('). 


I  2 


Fig.  123.  —  Éléments  variés  des  palmettes  gfrecques. 

On  serait  tenté  de  croire  que  les  Grecs 
se  sont  inspirés,  en  outre,  de  la  fleur  du 
chèvre-feuille  pour  varier  leurs  palmettes 
(fis-  ^^^  '^  ^30),  dérivées  apparemment 
elles-mêmes  du  lotus  (").  Celles-ci  sont 
formées  de  quelques  types  de  pétioles  : 
droits  (  1  ),  ondulés  (2),  enroiilés  en  crosses  (3), 
arrondis  (4),  aigus  (fig  I2j).  Les  palmettes 


'V 


m. 


\r}}< 


L\l  '^^ 


Fig.  124.  —  Acanthe. 


Fig.  125.  —  Feuille  d'acanthe. 


que  les  Grecs  ont  composées  avec  des  élé- 
ments si  simples  sont  remarquables  par  leur 

\.  M.  Architectural  Record,  mars  1894,  p.  263,  et  sept. 
1890,  p.  88. 

2.  Toutefois  plusieurs  auteurs,  notamment  Owen-Jones, 
croient  que  la  palmetle  grecque  est  une  création  pure 
sans  imitation  du  chèvrefeuille. 


2l8 


3Reliue  De  T^rt  cbrctieu* 


élégance,  leur  gracilité  et  la  jolie  pondéra- 
tion des  pleins  et  des  vides. 


Fiç.  126. 


Un   autre   type   végétal   qui   prend  chez 
les  Grecs  une  place  aussi  importante  que  la 


Fi" 


palmette,  c'est  la  fetiille  iV acanthe  (fig.  12^ 
et  I2§),  qui   croissait  en   abondance  sur  le 


Fig.  128.  —  Halmettes  grecques. 

sol  de  l'Hellas.  L'acanthe  est  à  la  sculpture 
ce  que  la  palmette  est  à  la  peinture.  Cette 


belle  feuille,  si  large  dans  son  ensemble,  si 
richement  dentelée  et  nervée,  satisfit  pleine- 


Pig.   129.  —   Palmettes  et  culots. 

ment  les  sculpteurs  et  les  architectes  grecs 
plus  amoureux  de  pure   beauté  que  de  va- 


riété, et  ils  cherchèrent  peu  à  varier  le  cha- 
piteau corinthien  dont  elle  fut  l'ornement 
caractéristique. 


Fii^.   1)1.    —   Cymaise    omaine  ornée  d'acanthes. 

On  distingue  l'acanthe   épineuse  et  sau- 
vage (branche   ursine)  et  l'acanthe    molle 


Fig.  132.  —  Crosse  d'acanthe  de  la  Renaissance. 
Cathédrale  de  Tours. 

(sans  épines).  Les  deux  variétés  furent  em- 
ployées chez  les  Grecs  et  chez  les  Romains. 


€ssài  0ur  U  décoration  arcl)ttectoiuque. 


219 


Depuis  que  Callimaque  en  garnit  le  chapi- 
teau corinthien,  l'acanthe  se  multiplia  dans 
le  décor  antique  :  elle  fournit  l'ornement 
des  antéfixes,  des  cymaises  (JΣ:  131).  des 
modillons,  le  fleuron  du  monument  de  Lysi- 


Fiu 


Rinceau,  culots. 


Frise  au  château  de  Vaux  de  Ceruay- 

crate,  les  roses  des  caissons  du  Parthénon, 
les  culots  et  les  feuilles  des  rinceaux  et  des 
frises,  etc.  On  la  retrouve  dans  les  rinceaux 
sassanides  et  dans  les  chapiteaux  byzantins. 
A  la  Renaissance  elle   redevient   l'élément 


inévitable  de  toute  composition  feuillée 
(fig-  132)- 

Ce  n'est  que  dans  les  derniers  temps  de 
l'art  grec  qu'apparaissent  les  rinceaux  en- 
roulés qui  devaient  prendre  un  si  grand  dé- 
veloppement dans  le  décor  architectural 
des  Romains  (fig.  T34  et  135)  ("). 

Chez  ces  derniers  la  beauté  sagement  con- 
tenue des  Grecs  est  remplacée  par  un  luxe 
exubérant.  Les  éléments  du  décor  devien- 
nent des  feuillages  développés,  de  véritables 
frondaisons  formées  de  l'acanthe  comme 
essence  ordinaire.  On  représente  aussi  de 
grosses  guirlandes  de  laurier,  de  chêne,  etc., 
et  l'on  mêle  à  la  feuille  la  fleur  sous  forme 
de  roses  très  complexes,  appelées  surtout  à 
décorer  le  fond  des  caissons. 

Les  Byzantins  reprennent  l'ornementa- 
tion de  l'Asie  et  de  Rome. 


Fig.  134.  —  Frise  romaine  peinte. 


Les  Arabes,  très  pauvres  au  point  de  vue 
floral,  empruntent  leur  ornement  principal 
à  la  fougère  argentée. 

Flore  médiévale.  —  Le  moyen  âge  a 
adopté  un  principe  tout  nouveau  :  les  plantes 
sont  employées  en  nombre  infini  d'espèces 
et  prises  dans  la  flore  locale.  Toutefois, 
comme  l'a  justement  fait  remarquer  M.  F. 
Lambin,  à  qui  nous  ferons  de  nombreux 
emprunts,  l'on  s'en  tient  à  l'imitation    de  la 


feuille,  à  l'exclusion  presque  complète  de 
la  fleur,  du  moins  dans  la  sculpture  monu- 
mentale ;  et  l'on  en  tire  de  si  merveilleux 
effets,  que  la  dernière  période  est  qualifiée 
de  gothique  fleuri,  bien  que  la  fleur  n'y 
figure  pas.  Crochets,  fleurons,  culots,  rin- 
ceaux ne  sont  formés  que  de  feuilles  cour- 
bées, recourbées,  épanouies    en    bouquets, 

I.  V.  Moniteur  des  architecles,  année  1874.  Propylées  — 

1870,  Temple  lie  la  Vicloire. 


REVUE  UE  l'art  CHRÉTIEN 
I9OI.    —    3""^    LIVRAISON. 


220 


îRrbuc  îJC  V^xt  cbicticn. 


donnant  l'idée  d'une  efflorescence  véri- 
table (yî£:  136). 

D'ailleurs  la  fleur  était  rare  à  cette  épo- 
que, comme  on  peut  en  juger  par  les  jardins 
figurés  comme  fonds  de  tableaux  dans  les 
manuscrits.  Elle  n'apparaît  abondante  que 
dans  les  miniatures,  mais  sous  des  traits  tout 
conventionnels. 

L'ornement  végétal  roman  ne  nous  four- 
nit que  quelques  types  élémentaires,  comme 


Fit;.  I 


Bande  verticale. 


prélude  aux  richesses  de  la  flore  qui  tapisse 
les  piliers  des  cathédrales  gothiques  (').  Elle 
n'a  guère  connu  d'essence  vivante  que  l'a- 
canthe, dont  elle  tira  un  parti  superbe.  Ce- 

I.  L'étude  de  la  flore  gothique  avait  éié  quelque  peu 
négligé  :  jusqu'ici.  Desmoulins  *  lui  a  consacré  une  notice 
d'une  vingtaine  de  pages  ;  Laubinet  a  déterminé  25  es- 
sences de  la  cathédrale  de  Reims  ;  E.  Woillez  **  a  donné 


*  Ch.  Desmoulins,  Cofisidérations  iur  la  Jîore  murale  dans  le 
Bull,  monumental,  t.  XI,  1845. 

*•  E.  Woillez,  Iconographie  des  plantes  anïdes  figurées  au  moyen 
âge  en  Picardie,  etc.,  dans  le.<i  Mém.  des  Antiquaires  de  Picardie, 
U  IX.  1848. 


pendant,  à  la  veille  de  la  transition,  cette 
plante  exotique  connaît  deux  rivales  indi- 
gènes, l'arum  et  le  nénuphar. 

Les  sculpteurs  romans  mêlent  ces  deux 
feuilles  d'eau  à  la  feuille  d'acanthe,  qui  se 
transforme  graduellement  en  feuilles  de 
vigne. 


FifJ.  I  >6.  —  Épis  gothiques  fleuragés. 

h,'arniii  (ou  pied  de  veau  ou  oonct)  croît 
dès  le  printemps  dans  les  endroits  humides, 
dans  les   bois  ombragés,   sur  le  bord  des 


Feuille   d'arum- 
Naturel.  Fig. 


38.  —  stylisée  (O- 


ruisseaux.  Il  paraît  avoir  été  pris  au  moyen 
âge  pour  le  symbole  de  la  puissance  créa- 
trice   de    l'homme  (^).    La    feuille    é'arum 


une  notice  sur  les  aroïdes  ;  voilà  tout  ce  qui  avait  paru,  en 
outre  des  belles  pages,  quelque  peu  erronées  d'ailleurs, 
de  \'iollet-Ie-Duc,  sur  la  Flore*.  M.  Lambin  a  été  bien 
inspiré,  en  reprenant  ce  beau  sujet  dans  sa  Flore  go- 
thiquc. 

:.  D'nprès  ^L  E.  Lnmbin. 

2.  Woillez,  Iconographie  des  plantes  aroïdes  figurées  au 
moyen  ât^e  en  Picardie.  (Mém.  des  antiquaires  de  Picar- 
die), t.  IX.  1848. 

*  Dictionnaire  rais,  d'archil.,  art.  Flore. 

J.  B.  Giraud.  Documents  pour  servir  à  l'histoire  de  l'ornement  au 
moyen  âge  et  à.  la  Renaissance. 


€ssat  sur  la  Décoration  arcl)itectoiuque. 


221 


(fig.  ijy  et  ij8)  est  la  feuille  primordiale 
de  l'ornement  gothique.  C'est  elle  qui  a 
formé  le  décor  à  crochets  des  chapiteaux 
que  l'on  rencontre  partout.  Au  sommet  de 
cette  feuille  s'épanouit  souvent  une  grappe, 


Fig,  139.  —  Nénuphar.  Lavacrum 
de  l'abbaye  de  St-Bavon  à  Gand. 

un  bouquet  d'une  essence  plus  riche,  vigne, 
trèfle,  renoncule,  chêne,  etc.  Dans  l'inter- 
prétation romano-gothique  elle  prend  une 
forme  en  fer  de  lance. 


Fig.  140.  —  chapiteau  de  la  cathédrale  de  Meaux, 
d'après  M.  l'abbé  JoLV. 

On  en  voit  un  bel  exemple  dans  des  cha- 
piteaux de  la  cathédrale  de  Meaux.  (Voir 
Revue  de  f  Art  chrétien,  année  1898,  p.  501.) 


Le  nénuphar  {fig.  142  et  i^j)  étale  sur  les 
étangs  sa  large  feuille  plate  et  ovale,  et  sa 
fleur  blanche  et  touffue;  il  est  l'emblème  de 
la  pureté  chrétienne  (').  Sa  feuille,  au  large 
contour  sévère,  se  prête  à  des  applications 
décoratives  monumentales  (fig-  141  )• 

Le  nénuphar  apparaît  dans  la  sculp- 
ture de  la  deuxième  moitié  du  XI I«^  siè- 
cle (fig.  ijç  à  144).  Les  artistes  de  cette 
époque  l'ont  fortement  stylisé  et  interprété 
d'une  manière  parfois 
bizarre.  Tantôt  ils  pré- 
sentent    la    feuille     de 


/ 


-K 


•^^M:. 


Fig.  142. —  Nénuphar  au  naturel. 

face,  tantôt  en  la  cou- 
pant en  deux  et  chaque 
moitié    ressemble  à  un 


Fig.   143.  —   Nénuphar  stylisé. 

'     cimier    de    casque.    On 

Fig.  141.  -  Rinceau  de  voit    à    Saint -JuHen-le- 
nénuphar  (miniature).      Pauvre  à  Parls  un  cha- 

piteau  présentant  une  des  plus  belles  appli- 
cations du  nénuphar. 

Essences  gothiques.  —  Bientôt  appa- 
raissent le  plantain  des  champs  et  la 
fougère  des  bois.  A  partir  de  ce  moment  la 
nature  devient  pour  l'artiste  un  trésor 
inépuisable. 

Viennent    bientôt,  à  peu  près    par  ordre 

I.  Viollet-le-Uuc,  Dict.  rais,  d'arcliit. —  V.  le  Coloriste, 
15  mai  1896,  p.  15. 


222 


3Rcbue  ïic  r^rt  cbrctien» 


chronologique,  le  trèfle,  la  renoncule,  la  ché- 
lidoine  {ou  l'éclair  des  montagnes),  Yancolie, 
le  chêne,  le  figuier,  le  lierre  et  le  rosier. 
Telles  sont  les  plantes  qui  forment  le  fond 
de  la  flore  romano-gothique.  En  générai 
elles  ne  sont  pas  symboliques. 


Fig.  144. 

Visne.  — 


~  Nénuphar.  Église  de  Lillers  (Nord). 

Au  moment  où  le  style  ogival 


se   déo-aee   définitivement    du    roman,    dit 
M.  Lambin,  apparaît  dans  la  sculpture  une 


Fig.  145- 


Fig.  146. 


feuille  qui  laisse  loin  derrière  elle  l'acanthe 
grecque  dont  elle  paraît  dériver,  et  qui  est 
la  base  de  la  flore  gothique,  c'est  la  vigne 


(fig.  i-fs  et  /-/6j  (').  apportée  d'Orient  en 
Gaule.  On  la  trouve  partout  depuis  l'humble 
église  de  village  jusque  dans  la  cathédrale. 
Cette  prédilection  a  une  double  raison 
d'être.  C'est  la  plante  symbolique  et 
mystique  par  excellence  ;  elle  est,  par  son 
fruit,  l'emblème  de  la  sainte  Eucharistie  ; 
jadis   elle    avait    été    le    symbole    préféré 


Fig.   147. 

de  Bacchus.  Toujours,  pour  les  poètes,  elle 
a  figuré  l'automne  en  rappelant  les  ven- 
danges. 

Quand  elle  se  substitua,  au  XII"  siècle,  à 
l'acanthe  antique,  elle  était  à  deux  échan- 
crures,  et  à  trois  groupes  de  lobes  (fi^g  W^)- 
La  vigne  du  XI 1 1'  siècle  (fig.  i^g)  tend  à 
revenir  à  la  nature (7%".  156);  celle  du  XI V^ 
tient  le  milieu  entre  la  nature  et  l'interpré- 
tation et   se   distingue  parfois    par  quatre 


Fig.  I4S.  —  Rinceau  de  vigne  ondulée  (2). 


échancrures  et  un  dentelé  plus  prononcé 
(fig.  i^-j  et  148).  Enfin,  au  XV^  siècle,  ap- 
paraît la  feuille  de  vigne  naturelle,  mais 
ondulée  et  déchiquetée. 

La  vigne,  bien  à  sa  place  en  Champagne, 
s'étale   triomphante  sur   les  chapiteaux  de 


la    cathédrale    tle    Reims,    surtout    sur  le 
fameux  chapiteau  dit  des  Vendanges  {f). 

1.  D'après  M.  Lambin. 

2.  D'après  Viollet-le-Duc. 

3.  V.  Revue  de  l'Art  chrHien,  année   1895,   p.  152   et 
année  1897,  p.  230. 


€ssat  mv  la  décoratton  arcl)itectontque. 


223 


Dans   la   fig.  154   on  la  voit  appliquée  à       f^^.  /J//  On   le   voit  aussi   dans   le   beau 

ornement  de  la  menuiserie.  !   chapiteau  de  la  cathédrale  de  Meaux,  des- 

Tj'è/it'.  —  Le  trèfle  (/!£:  ijo),   symbole    |    sine  par  M.    le  chanoine   Jouy,   que  nous 


Fig.  149.  —  Vigne  stylisée  par  simplification. 

trinitaire  et  emblème  de  la  Verte  Érin, 
est,  avec  la  vigne,  en  quelque  sorte  le  type 
des   fleurs  styUsées.  Ses  feuilles  abondent 


Fig.   150. 

Trèfle  au  naturel.  Trèfle  stylisé. 


sur  les  chapiteau.x  de  N.-D.  d'Amiens.  On 
le  voit  au  deuxième  pilier  de  droite  de  la 
nef  de  N.-D.   de  Paris,  et  au  premier  de 


Fig.  151.  —  Église  de  Sébourg. 

gauche,  battu  par  le  vent  ;  ce  chapiteau  fait 
l'admiration  des  connaisseurs  (').  Il  décore 
le  chapiteau  ci-contre  de  l'église  de  Sébourg 

I.  V.  E.  Lambin,  otiv.  cité. 


avons   reproduit   autrefois  (')  et   dans  une 
miséricorde  de  stalle  (fig.  153)- 


Fig.   152.  —  Renoncule.  —  Cathédrale  de  Chartres. 

Renoncule.  —  II  y  a  deux  sortes  de  re- 
noncules dans  la  nature  :  l'une,  très  décou- 
pée avec  les  deux  lobes  inférieurs  détachés 
à  la  base  du   lobe  du  milieu  ;   l'autre,  avec 


Fig.  153    —  Miséricorde  d'une  stalle,  ornée  de  trèfles. 

les  trois  lobes  qui  se  tiennent.  Les  sculpteurs 
gothiques  ont  reproduit  les  deux.  On  en 
voit  dans  les  galeries  sous  la  rose  de  S.  Jean 


Fig.   154.  —  Corniche  en  bois,  ornée  de  feuilles  de  vigne. 

des  Vignes  à  Soissons  et  à  N.-D.  de  Paris. 
La  Sainte-Chapelle  de  Paris  en  est  remplie, 
ainsi  que  la  cathédrale  de  Meaux.  En  voici 

I.  V.  Revue  d';  l'Art  chrétien,  année  1898,  p.  306. 


224 


BRrliuc  De  T^rt  c!)rctieiu 


un  bouquet   superbe   tiré   du   portail   nord 
de  Clnartres  (fi(^.  155). 


m 


Fig.   155.  —  Renoncule.  Cathédrale  de  Chartres. 

Chélidoine.  —  Rien  de  plus  charmant  que 
la  feuille   de   chélidoine  (fig.   138  el  /jç), 


r  Ig.   l  56.  —  Eglise  de  Chennevièr 


dont  les  lobes  â  dents  rondes  ont  une  grâce 


Fie.  157.  —  Chélidoine  du  XIV  siècle,  à  Saint-Jean  des 
Vignes  à  Soissons,  d'aprcs  M.  Lamhin. 

parfaite  et  dont  le  port  est   plein   de   ma- 


jesté. Aussi  les  sculpteurs  du  moyen  âge 
l'ont-ils  traitée  d'une  façon  très  remarqua- 
ble; ils  en  ont  fait  un  chef-d'œuvre  dans  le 


Fig.  158. 
Chélidoine  stylisée. 


Fig.  15g. 

Chélidoine  au  naturel. 


chapiteau  du  premier  pilier  qui  sépare  les 
deux  nefs  latérales  droites  de  N.-D.  de 
Paris.  Sur  la  façade,   les  grands  bandeaux 


Fig.  160. 
Ancolie  stylisée. 


Fig.  l6l. 
Ancolie  au  naturel. 


de  chélidoine  occupent  toute  la  largeur  du 
monument.  Notre-Dame  de  Paris  est  la 
cathédrale  de  la  fougère,  de  la 
chélidoine  et  de  la  vigne  ('). 
Retournée  sur  elle-même  cette 
feuille  donne  d'admirables  cro- 
chets. 

Ancolie.  —  L'ancolie  (fig. 
160  el  161)  offre  une  Heur 
complexe,  mais  qui  donne  à 
l'analyse  des  formes  expres- 
sives et  gracieuses.  Les  pétales 
roulés  en  forme  de  cornet  se  LJ 
tournent   vers   la  terre,  tandis     ^^'?-'^-- 

Cathédrale   de 

que  leurs  extrémités  arrondies        Chartres, 
se  relèvent  vers  le  ciel  avec  un  air  de  dé- 
mence (^),  ce  qui  a  fait  adopter  cette  fleur 
comme  emblème  de  la  folie. 

1.  D'après  le  F.  Mares. 

2.  E.  Marchand,  dans  le  Coiorisle  Enlumineur. 


C00ai  sur  U  Décoration  arcftitectontquc. 


225 


La  feuille  est  richement  découpée  en 
trois  lobes  redentés,  comme  ceux  de  la 
renoncule  et  de  la  chélidoine  ;  mais  ils  sont 
très  détachés,  et  les  lobes  latéraux  ont  au- 
dessous  une  large  échancrure. 


Fig,  163. 
Chêne  stylisé. 


Fig.  164. 
Chêne  au  naturel. 


L'ancolie  a  fourni  les  feuilles  et  les  cro- 
chets du  premier  pilier  de  gauche  du  chœur 
de  Saint-Denis,  qui  est  un  des  plus  beaux 
piliers  qu'on  puisse  voir.  Elle  a  été  employée 


Fig.  10;. 


Chêne  au  naturel. 


dans  la  miniature  dès  le  XI I^  siècle  (').  On 
la  voit  à  la  cathédrale  de  Chartres  (Ji<r.r62 ). 
Clicnc.  —  Consacré  à  Jupiter,  le  chêne 
(fig.  i6j.  164  et  16^)  est  l'emblème  de  la 
force  ;  autrefois  les  couronnes  civiques 
étaient  tressées  de  chêne;  c'était  la  marque 

I.  Marchand,  Coloriste,  1896,  p.  2.  V.  Grasset. 


la  plus  éclataïue  de  la  valeur  du  soldat.  Ce 
fut  l'arbre  national  de  la  Gaule,  et  le   gui, 


Fig.  166.  —  Glands  de  chêne  ('J 

parasite  du  chêne,  fut  la  plante  sacrée  des 
Druides. 


Fig.    167. 


Il   a  été   reproduit  avec  art  à    Bourges 
et  surtout  à  Chartres    avec    prédilection.  Il 


Fig.  168 

Chêne. 
Vignette. 


Fig.   169.  —  Les  stalles  de  Cornelymunster 
(d'après  M .  de  Kizenne). 


abonde  au  XIV^  siècle.  Au  X\'^  il  se  voit 
accompagné  du  gland.  II  est  alors  allongé, 


I.  E.  Lambin,  loc.  cit. 


220 


Bcbuc  Dr  r^rt  cbrctiea. 


pointu  et  se  rapproche  comme  aspect  du 
chardon.  Voici  (fig.  i66)  un  joli  décor 
de   panneau   de  menuiserie   fait  avec   son 


Fig.  170.  —  Figuier  au  naturel. 


gland,  du  F.  Mares,  directeur  des  Écoles 
St-Luc  et  (Jig:  i6ç)  une  miséricorde  de 
stalle  ornée  de  sa  feuille. 


Fig.  171. 


Figuier  au  naturel. 


Figuier  stylisé. 


\^&  figuier  (fig.  ijo  et  iji)  signifie  dou- 
ceur,  fécondité.   Il    est   resté    l'arbre   sacré 


Fig.  172. 

Lierre  au  naturel.  Lierre  stylisé. 

des  Indiens,  qui  le  plantent  près  de  leurs 
temples  et  dfe  leurs  tombeaux.  Ses  larges 
échancrures  lui  donnent  un  aspect  sévère. 


Le  moyen  âge  l'a  simplifié  dans  la  sculp- 
ture ;  il  est  rendu  avec  art  en  particulier 
dans  la  cathédrale  de  Bourges. 


Fig.  173.  —  Lierre  stylisé. 

'L.^  lierre  grimpant  (fig.  //2)est  le  sym- 
bole des  affections  impérissables;  il  meurt 


Fig.  174.  —  Lierre  au  naturel  et  lierre  stylisé. 

OÙ  il  s'attache.  Il  tapisse  les  murs;  il  est  un 
accessoire  naturel  du  décor  des  édifices.    Il 


Fig.  175.  —  Lierre  stylisé  (vignette). 

était  consacré  à  Bacchus.  En  Grèce,  l'autel 
de  l'Hyménée  était  entouré  de  lierre,  et  l'on 


€S0at  sur  la  Décoration  arct)irectoiuque. 


2.2- 


en  présentait   une    branche   aux  nouveaux 
époux   comme   symbole    d'un   nœud   indis- 


Fi*J.  176.  —  Cathédrale  de  M^aux,    —  Chapiteau  oriié  de  lierre. 

soluble.  On  a   quelquefois   représenté  l'in- 
oratitude  sous  la  figure  du  lierre  qui  étouffe 


Fig.  177.  —  Églantier  à  N,-D.  de  Paris. 

son  soutien.  Sa  forme  simple,  inscrite  dans 
un  pentagone,  est  très  décorative  (fig.  i'/2 
à  176). 


Fig.   I7S.  —  Rose  symbolique  (vignette). 

Le  rosier  (fig.  lyy  et  ijS)  figure  au 
moyen  âge  avec  ses  feuilles  plus  souvent 
qu'avec  sa  fleur.  Aujourd'hui  celle-ci  est  la 
reine   des   fleurs,  symbole   de   l'amour  ,   et 


ses  épines  figurent  les  peines  inséparables 
des  joies  terrestres.  Le  rosier  sauvage  ou 
l'églantier  se  voit  à  la  porte  rouge  de 
N.-D.  de  Paris,  à  Chartres,  sur  la  porte  de 


Fig.  179.  —  Chicorée  à  la  cathédrale  de  Troyes- 

N.-D.  de  Boulogne.  La  rose  signifiait  au 
moyen  âge  le  sang  des  martyrs.  «  La  rose 
s'épanouit  près   des   eaux   vives  (").    »     La 


Fig.   180.  —  Fougère  stylisée. 

rose  mystique  était  l'emblème  de  la  Vierge 
Marie. 

La  chicorée  abonde  au  XV^  siècle. 

Sur  les  rampants  des  frontons  (fig.  ijg) 

I.  Spicit.  Solesm.^  t.  II,  p.  414. 


REVUE   DE  l'art  CHRÉTIEN. 
190I      3""-'    LIVRAISON. 


228 


îRcbuc  tic  l^^vt  cljrctiru. 


Fig.   loi. 

et  des  pinacles  sa  feuille  apparaît  en  forme 


Fig.   182.  —  Vigne  allongée.  -  Cathédrale  de  Meaux. 

de  tête  de  dauphin  ;  c'est  un  des  caractères 
distinctifs  de  l'époque. 


Mentionnons  encore  Winnoise  qui 
se  rencontre  à  la  cathédrale  de  IMeaux 
et  à  celle  de  Chartres;  Vananas  qui, 
comme  l'ariichaiit  de  nos  jardins,  a 
donné  un  des  plus   beau.\   motifs  figu- 


Fig.   1S3. —  Crochets  de  pignons  ;i  feuilles  de  mufflier. 

rant  dans  les  diaprages  des  peintures 
murales  comme  des  tissus;  \ aulne  dont 
la  feuille  simple  garnit  les  chapiteaux 
de  l'abbaye   d'Aulne  ;  la  grande  berce. 


Fig.  1S4. 
Chapiteau  de  léglise  de  Champigny,  d'apris  M.  K.  Lambin. 

qui  a  fourni  un  si  beau  décor  à  certain  cul  de 
lampe  de  Saint-Jean  des  Vignes  à  Soissons 
(v.  Revue  de  t Art  chréliett,  année  1896, 
p.  328);  le  cresson,  dont  voici  (fig.  184)  une 
application  charmante  ;  \crable,  qui  orne 
la  clef  de  voûte  qu'on  trouvera  ci-après 
(fig.  i8§),  le  imifflier,  qui  décore  souvent 
les  crochets  des  chapiteaux  et  des  pignons 


€ssat  e^ur  la  îiccoratton  arcWectoinquc 


229 


(fio.    jSj);   \2i  fougère,    sur  laquelle    nous 
devons  insister. 

Fougcre.  Le  long  d'une  tige  qu'un  duvet 
recouvre    encore,    sont   attachées    d'autres 


Érable. 


tiges  minuscules    parallèlement   disposées, 
qui,   elles   aussi,  s'arrondissent  et  se  recro 
quevillent  (Jig.  iSi).  Les  feuilles  basses  sont 


.^^ 


%  >;'^.7i 


Fig.   I S6    —  Chapiteau  de  fougère. 

déjà  développées  alors  que  les  extrémités 
des   volutes   ne  sont   encore   que   des  em 
bryons  enveloppés  dans  une  ouate  protec- 
trice.   Cette   crosse  gracieuse   (')  a  donné 

I.  E.  Marchand,  Le  Coloriste  Enlumineur. 


l'idée  des  crochets  enroulés  qui  décorent 
les  angles  des  chapiteaux  et  qui  garnissent 
les  rampants  des  pignons.  Parfois,  comme 


Fig,  1S7. 


on  le  voit  dans  la  figure  167,  on 
l'ensemble  de  la  feuille,  mais  en 
singulièrement   sa   forme,   à   tel 


représente 
simplifiant 
point   que 


pjcr.  188.  —     Lis  au  naturel. 


chaque  tige  latérale  n'est  rappelée  que  par 
un  lobe  ;  et  l'on  ne  reproduit  que  l'allure 
de  l'ensemble. 

M.  Lambin  a  présenté  à  nos  lecteurs  des 


230 


îRcbuc  Dr  I'9rr  fbvrticn. 


spécimens  de  fougère  stylisée  dans  des 
chapiteaux  de  la  cathédrale  de  Laon  (')  ; 
nous  croyons  devoir  reproduire  l'un  d'eux 
(fig.  i86). 


et  chères  à  l'art  nouveau,  l^'iris  fut  utilisé 
à  l'époque  de  la  transition  romano-gothique. 


Fig.   1S9.  —  Lis  stylisé. 


I  cjû.  —  Lis  stylisé. 


UJris  (fig.  iSj),  une  des  Heurs  les  plus 
opulentes  de  forme,  présente  en  outre  des 
feuilles  rubannées,  aux  courbes  gracieuses 


Fig.  191.  —  Hépathique  de  N,-D.  de  Paris. 

On  dit  qu'il  a  donné  naissance  au  lis  héral- 
dique; d'aucuns  revendiquent  cet  honneur 


Fif.  102   (°).  ■•  Sainte-Chapelle  de  Paris.  —  2.  Diplôme  de  Charles  V.  —  3.  Château  d  Amboise  (Charles  VII).  — 

4.  Château  de  Versailles  (Bourbons). 


pour    l'antique    lotus.    L'église  de    Saint- 

1.  V.  Revue  de  PArl  chrétien,  année  rgoi,  p.  46. 

2.  D'après  E.   Marchand. 


Germain  des-Prés,  à  Paris,  est  pleine  d'iris. 

V: hépathique    (fig-    içr)    est  une  petite 

feuille  simple  et  gracieuse,  qui  ressemble 


(BQSai  sur  la  tiécoration  ardîitectontque. 


231 


au  lierre  et  au  trèfle.  Les  sculpteurs  du 
moyen  âge  l'ont  imitée  sur  leurs  chapiteaux 
et  en  ont  fait  aussi  de  gracieux  bandeaux. 
On  la  voit  à  Saint-Pierre  d'Ivry  (Seine). 
Le  //s  (fig.  iSS),  symbole  de  pureté, 
emblème  des  vierges,  fut  stylisé  à  diverses 
époques.  Nous  en  avons  donné  un  bel 
exemple  {fig.  611,  t.  I),tiré  du  soubassement 
de  la  façade  de  N.-D.  de  Paris.  Voici 
(fjg.iSç)  le  tracé  élémentaire  d'un  lis  stylisé 
pour  le  décor  mural  etfy^.  iço) 
un  lis  héraldique  sculpté. 

La  scabieuse  se  voit  sculptée 
à  la  cathédrale  de  Bourges. 


"^   / 


% 


fig.  I93. 

Le  chrysanthème,  si  ap- 
précié de  nos  jours  pour  sa 
fleur  opulente,  aurait  été,  selon 


Fig.  19J. 


Viollet-le-Duc,     cultivé    déjà 
par  les  artistes  gothiques,  mais 

sagittaire.  r        -ii  ..  .. 

pour  sa  feuille,  notamment 
dans  certain  chapiteau  de  la  cathédrale  de 
Meaux  ;  M.  Lambin  fait  observer  que  cette 
plante  n'est  connue  en  France  que  depuis 
le  XVII L  siècle. 

Plantain.  —  Le  plantain  (fig.  IÇ3)  est 
représenté  souvent  sur  la  corbeille  des 
chapiteaux  les  plus  simples  de  l'époque 
romane.  Les  sculpteurs  ont  su  tirer  un  parti 
charmant  de  cette  modeste  plante.  Ils  ont 
composé  avec  elle  les  chapiteaux  du  chœur 


de  N.-D.  de  Paris.  Il  accompagne  souvent 
le  nénuphar.  Quelquefois  il  se  montre  avec 
ses  nervures,  quelquefois  interprété  et  sim- 
plifié (Jig.  IÇ4). 


Fig.  196.   —   Houx. 

Qui  ne  connaît  le  sagittaire  (fig.  içs),  à 
la  tige  droite  émergeant  des  eaux  tran- 
quilles, à  la  grande  feuille  à  pointe  de  dard, 
aux  petites  feuilles  massivement  groupées  } 
On  le  voit  figuré  à  la 
cathédrale  de  Reims 
parmi  les  feuillages 
encadrant  les  bas-re- 
liefs de  la  paroi  inté- 
rieure du  grand  por- 
tail. 

Procédés  décoratifs. 
—  Le  XI  IL  siècle 
prendses  modèles  par- 
mi les  jeunes  pousses 
de  petites  plantes  et 
r*^  les  interprète  selon 
les  besoins  du  décor. 
Au  XIV'',  on  repro- 
duit la  végétation 
dans  sa  maturité  et  les 


Fig.  19S. 

Chardon 
stylisé. 


Fig.    197. 

Ondulation. 
Hôpital  de  Lou- 
vain.    végétation  ...  ,  _ 

bouclée  etdéchi-  tcuilles  au  nature), saut 

quetée. 

les  modifications  com- 
mandées par  l'art  sculptural  ;  X ondulation 
accentue  le  modèle;  on  marque  les  nervures' 
des  feuilles  en  creux;  on  les  aligne  en  deux 
rangs  de  bouquets  dans  les  chapiteaux  ;  on 
leur  laisse  la  liberté  dans  les  rinceaux  et  les 
frises.  Le  XV'^  siècle  applique  les  procédés 


2  •^2 


3Rrbur  tir  l'?lrr  cbvcticn. 


de  mutation  et  Aç.  section  des  feuilles.  Alors 
on  abandonne  les  essences  précédentes, 
sauf  le  chêne  et  la  vigne  dont  les  lobes 
deviennent  aigus,  et  la  belle  Hore  vigou- 
reuse du  XlVe  siècle  fait  place  à  des  es- 
sences plus  déchiquetées,  au  Ii07ix{fig.  iç6). 
au  chardon  (fig.  içS),  au    houblon  (Saint- 


Fie.  199.  —  Musée  des  Augustius,  Toulouse. 

Ouen  de  Rouen,  culsde-lampe  des  nefs), 
à  la  chicorée,  aux  algues  marines. 

On  découpe  profondément  les  nouvelles 
feuilles  (fig.  içjet  200),  qu'on  accompagne 
souvent  des  fruits  de  la  plante. 

A  la  fin  du  XV^  siècle  la  végétation  ap- 
paraît flétrie,  desséchée,  bouclée  et  amaigrie. 
On  compare  cette  végétation  à  des  ouvra- 


Fif.  200.  —  Sculpture  à  Caen. 

ges  de  dentelles,  ce  qui  n'est  pas  en  faire 
l'éloge.  Les  sculpteurs  de  la  première  épo- 
que avaient  montré  une  préférence  marquée 
pour  les  petites  plantes  ;  ceux  de  la  dernière 
s'attaquent  aux  gros  végétaux  et  les  rendent 
avec  exactitude  :  chêne,  érable,  hêtre,  poi- 
rier, châtaignier,  saule,  lierre,  l'hellébore, 
liseron,  le  chanvre. 


Insistons  sur  les  procédés  à'intcrprc'tation 
employés  au  moyen  âge.  Pour  donner  au 
végétal  la  forme  sculpturale,  on  supprime  les 
détails  peu  appréciables,  on  fait  souvent 
disparaître  les  dents  de  la  feuille,  on  re- 
tranche les  parties  pouvant  nuire  à  la 
netteté  de  l'aspect,  on  élargit  le  pétiole, 
mais  on  conserve  les  grandes  échancrures 
et  surtout  le  mouvement  de  la  feuille  et  de 
la  fleur. 

Parfois  on  combine  différents  végétaux. 
Le  crochet  du  chapiteau  est  souvent  formé 
d'une  large  feuille  d'arum  au  sommet  de 
laquelle  s'épanouit  une  fleur  de  mufflier  ou 
des  feuilles  de  vigne  enveloppant  du  raisin, 
ou  encore  un  bouquet  de  trèfles  comme  on 
le  voit  à  N.-D.  de  Paris  (■). 

D'ailleurs  les  procédés  d'imitation  varient 
avec  les  applications.  Nous  venons  de  par- 
ler de  ceux  de  la  sculpture  ;  ceux  de  la  pein- 
ture sont  autres,  et  consistent  à  aplatir  la 
feuille,  à  dégager  la  fleur  de  sa  tige,  à  adop- 
ter des  tracés  géométriques. 

Dans  la  miniature,  on  emploie  les  procé- 
dés des  replis  et  des  ret roussis,  nés  des  effets 
accidentels  produits  dans  les  herbiers. 

I.  Voici,  selon  M.  Lambin*,  les  procédés  à'iiiUrprc'Ia- 
tio7i  de  la  feuille  usités  au  moyen  âge. 

a.  —  Simplifier  la  forme  en  gardant  le  contour 

l'échancrure. 
le  mouvement. 

},_  —  Élargir  le  pétiole  pour  donner  une  base  en  rapport 
avec  les  contours. 

c,  —  Présenter  la  feuille  tantôt  de  plat,  tantôt  de  dos. 

Présenter  de  plat  le  lobe  du  milieu  et  de  dos  les  autres 
côtés  ou  inversement. 

cl_  _  Donner  au  milieu  du  chapiteau  le  type  de  la 
feuille  dans  toute  son  ami)leur  ;  disposer  les  autres 
feuilles  d'une  manière  mouvementée. 

Le  plus  souvent  le  chapiteau  est  formé  de  feuilles 
d'arum  dégénérant  à  l'extrémité  en  un  bouquet  formé  de 
feuilles  interprétées  sur  la  corbeille. 


L'interprétation  est   la   règle  au  XIII'-'  s. —  Au  .MX" 
elle  fait  place  à  f  imitation  cii\xCa\x\é^  avec  tondulation. 
XIV"  s.        Onduler.  On  ne  fait  subir  aux  feuilles  que 


Lajhrc  des  ^i^nifidfs  catiiédrala. 


€00ai  0ur  la  Décoration  arcl)ttectontqiie. 


0-T-) 


Le  sculpteur  gothique  a  tiré  de  la  feuille 
presqu'exclusivement  tous  les  plus  riches 
effets  du  décor.  L'enlumineur  a  commencé 
à  faire  apparaître,  d'abord  modestement,  la 
fleur  et  ses  richesses  de  couleur  au  milieu 
des  végétations  tout  idéales,  aux  feuilles 
multicolores  elles-mêmes,  du  décor  des  ma- 
nuscrits. Au  XVIe  siècle,  la  fleur  était 
encore  d'une  simplicité  extraordinaire. 

A  la  Renaissance,  l'emploi  plus  fréquent 
de  la  fleur  amollit  l'ornement.  On  com- 
mence à  la  considérer  dans  sa  valeur 
propre,  plutôt  que  comme  motif  décoratif 
assujetti   au   cadre.  On   lui  donne  de   l'air 

les  simplifications  commandées  par  l'art  sculptural  ;  mais 
on  ondule,  on  plisse  les  feuilles  de  manière  à  donner  un 
modèle  vigoureux. 

Nerver  en  creux. 

Aligner.  —  On  aligne  les  feuilles  sur  deux  rangs  dans 
les  chapiteaux  ;  on  leur  laisse  la  liberté  dans  les  rinceaux 
et  les  frises. 


XV=  s.  —  Au  XV"  siècle  prévalent  les  principes  de 
intiliilion,  de  section  et  de  découpage. 

Mutation.  —  Sauf  la  vigne  et  le  chêne,  on  abandonne 
les  essences  précédentes  pour  les  remplacer  par  des 
espèces  à  lobes  pointus 

Section  et  découpage.  —  Découper  profondément  les 
feuilles  ;  c'est  une  manière  particulière  d'interprétation. 
La  vigne  ressemble  au  houx. 

Le  fruit  accompagne  souvent  la  plante. 


dans  les  panneau.x  qu'elle  occupe  et  ainsi 
s'altère  le  sentiment  de  son  rôle.  Bientôt  la 
plante  fleurie  prolongera  ses  tiges  et  les  fera 
s'élancer  avec  une  extrême  liberté  aux  ex- 
trémités de  la  composition,  où  elles  iront 
finir  leur  course  en  s'évanouissant  comme 
un  son  qui  s'éteint  dans  le  lointain. 

L'application  de  la  fleur  s'accentue  à  la 
fin  du  XVI"  siècle:  beaucoup  de  fleurs 
sont  importées  d'Italie.Pierre  Vallet  publie 
«  Le  jardin  dit  roy  très  chrélien  Henry  II», 
puis,  Daniel  Robel,  le  «  Tlicatruni  florae  ». 
Plus  tard  Gaston  d'Orléans  s'entoure  de 
peintres  de  fleurs  et  fait  faire  un  recueil 
de  peintures  de  toutes  les  fleurs  des  jardins 
de  Blois.  Ce  (at  l'origine  de  /a  co//ecù'on  des 
vélins,  conservée  au  Muséum  d'histoire 
naturelle. 

Au  XVI  P  siècle  l'application  artistique 
de  la  fleur  se  ressent  de  sa  figuration 
appropriée  à  l'étude  de  la  botanique.  On 
tire  de  la  fleur  sans  modification,  sans  styli- 
sation, des  effets  décoratifs  s'appliquant  à 
tout.  B.  Monnoyer  fut  le  maître  de  cette 
école  réalistique. 

L.  Cloquet. 
(A  sttivre.) 


ERRATA.  —  A  la  page  35  de  la  livraison  de  janvier,  20°  ligne  de  la  1™  colonne,  an  lieu  de  :  au  moyen  âge, 
lisez  :  aux  sticles  passés. 


^  i.^A  A^  A  ^^A  X^*  >Ma  A^  a  A^^  A^^  A%A  iM-A  A^^  A^X  A^A  A^A  A^A  »^j^ 


V      H;iiiriTTxrixriTiTTixiiiiirirrrrrTrTiiiir]ixiiiriixrriiiirïi3iiriri  iiiii)iiiiiiii;[iiiin{iiinTrx:iiiiiixiii"rxiiiiiiiiii):iiixiiiî  iiiiriTiXx: 


fe 


j^^^  y^it>v  y^*)Jf  y^^^Jf  v^;j^  y^jx  y^^x  v^aj  v  y^*^  v  v,/.]  y  y,A>v  y^  *  v.a)  v  v^*.}  v  y,^  v  y^*  X^ 


!Oc  la  restauration  Des  Monuments 
en  Belgique  et  ailleurs. 

A  restauration  des  monuments  que  nous 
a  légués  le  moyen  âge  a  le  don  de 
faire  surgir  de  temps  à  autre  des  polé- 
miques ardentes  et  des  jugements  qui 
dénotent  une  passion,  parfois  un  peu  factice.  La 
passion  prend  les  allures  de  la  conviction,  elle 
donne  un  certain  mouvement  au  style,  l'écrivain 
paraît  inspiré  par  l'amour  de  l'art.  Au  bnn't  qui 
se  fait  à  propos  de  questions  qui  peuvent  être 
examinées  avec  calme  et  à  l'aide  d'arguments 
fondés,  on  est  surpris  par  tant  de  véhémence  ; 
ce  sont  souvent  des  objurgations,  des  clameurs, 
des  afifiriuations  indignées  qui  ont  quelque  chose 
d'étrange  ;  ce  ton  n'a  rien  de  cominun  avec  une 
discussion  qui  aurait  pour  objet  d'aboutir.  On 
pourrait  se  demander  s'il  s'agit  de  sauver  les 
monuments  historiques  par  les  procédés  qui  ont 
sauvé  jadis  le  Capitole  de  Rome,  ou  bien  si  les 
auteurs  de  tout  ce  bruit  n'ont  d'autre  but  que 
d'appeler  l'attention  sur  leur  propre  personne,  et 
de  se  créer  ainsi  une  notoriété  utile.  Le  moyen 
a  déjà  servi  quelquefois,  et  c'est  peut-être,  pour 
les  impatients,  un  des  plus  commodes. 

C'est  ainsi  qu'un  périodique  français,  La  C/iiv- 
7ii(]iie  des  Arts,  a  publié,  il  y  a  quelque  temps, 
une  suite  d'articles  sur  tout  ce  qui  se  fait  en  lîel- 
gique  dans  le  domaine  de  l'art,  et  notamment 
sur  la  restauration  des  monuments.  La  ]3elgique 
est  un  petit  pays,  très  vivant,  très  artiste,  et  qui, 
malgré  les  ravages  des  Gueux  au  XVI^  siècle,  les 
invasions  de  la  Révolution  avec  ses  vandalismes 
et  ses  démolitions,  a  conservé  encore  un  très 
grand  nombre  de  monuments,  pour  la  plupart 
des  églises  encore  consacrées  au  culte,  ou  des 
objets  d'art  qui  en  proviennent.  C'est  aussi  un 
pays  très  religieux  dans  les  masses  ;  le  peuple, 
et  ici  j'entends  toutes  les  classes  de  la  société, 
s'accommoderait  fort  mal  d'un  régime  qui  ne 
verrait  dans  les  édifices  du  culte  que  diis  monu- 
ments du  passé,  n'existant  que  pour  le  plaisir 
des  curieux  et  des  archéologues  :   ce  sont  à  ses 


yeux  des  monuments  vivants  ;  le  peuple  y  va 
prier,  méditer  et  rendre  gloire  à  Dieu,  comme 
l'ont  fait  les  générations  qui  l'ont  précédé  ;  il 
veut  les  entretenir,  les  conserver  et  les  orner, 
pour  les  générations  qui  viendront  s'y  age- 
nouiller à  leur  tour. 

J'admets  qu'il  peut  y  avoir  dans  la  minière  de 
réparer,  de  consolider,  de  restaurer,  —  puisque 
c'est  le  mot  consacré, —  les  monuments,  certaine 
divergence  de  vues.  Un  architecte  de  beaucoup 
de  talent,  mais  surtout  archéologue  de  haute 
science,  VioUet-le-Duc,  écrivait,  il  y  a  quarante 
ans,  en  parlant  de  «  restauration  »,  que  le  mot 
et  la  chose  sont  modernes.  Cela  est  exact.  Mais 
après  bien  des  tâtonnements,  des  erreurs  et  des 
systèmes,  on  est  généralement  d'accord  aujour- 
d'hui sur  les  principes  d'une  bonne  restauration. 

En  Belgique,  les  travaux  d'entretien,  de  déco- 
ration et  de  restauration  des  édifices  du  culte  et 
des  monuments  publics,  se  font  sous  la  sur- 
veillance de  la  Commission  royale  des  monu- 
ments, aidée  des  Comités,  de  correspondants 
provinciau.K  ;  naturellement,  on  choisit  pour  les 
travaux  de  cet  ordre,  les  arciiitectes  les  plus 
capables,  et,  notamment,  les  artistes  qui  se  re- 
commandent par  leurs  études  archéologiques. 

A  lire  les  articles  de  la  Chronique  des  Arts, 
tout  ce  qui  se  fait  dans  ce  domaine  est  mauvais, 
de  tous  points  blâmable. 


*  * 


«  En  Belgique,  dit  l'écrivain  belge  qui  tient  la 
plume  à  la  Chronique  des  arts  et  de  la  curiosité, 
toutes  les  églises,  tous  les  édifices  présentant  un 
caractère  d'art  sont  signalés  pir  des  Comités 
provinciaux  à  la  Commission  royale  des  monu- 
ments ;  celle-ci,  pour  prouver  son  activité  et 
assurer  la  parfaite  conservation  de  l'édifice  si- 
gnalé, ne  trouve  généralement  rien  de  mieux 
que  d'en  demander  une  restauration  totale,  — 
vœu   toujours  ratifié  par  le  gouverneinent.  » 

Ce  sont  là  autant  d'erreurs  (jue  de  mots. 
M.  h'icreus-Gevaert  a  le  malheur  d'affirmer  tou- 
jours  sans   rien    prouver.   Il   s'avance   avec    une 


£0élange0. 


o  o  r 

^o5 


étourderie  vraiment  incroyable  sur  des  terrains 
qui  lui  sont  inconnus,  et  croit  suppléer  à  des 
informations  précises  par  des  objurgations  et  des 
critiques  qui  n'ont  aucun  fondement.  Il  parle  des 
monuments  belges  et  de  leur  restauration,  comme 
il  écrivait  naguère  de  l'introduction  de  la  couleur 
à  l'huile  dans  la  peinture  murale  en  Italie  par 
Baldovinetti.  —  Un  de  nos  collaborateurs,  M. 
Gerspach,  qui  connaît  la  Toscane  et  ses  peintres 
au  bout  des  doigts,  s'est  chargé  de  lui  démontrer 
combien  l'assertion  était  inexacte. 

Aujourd'hui  je  suis  obligé  de  répondre  à 
M.  F.-G.  que  tout,  dans  le  passage  cité,  est 
inexact  ('). 

La  Commission  royale  des  monuments  est  une 
commission  consultative  ;  elle  a  très  rarement  une 
initiative  à  prendre,  en  ce  qui  concerne  la  res- 
tauration des  monuments  ;  encore  moins  les 
Comités  provinciaux.  Elle  donne  son  avis,  lorsque 
le  ministre  le  lui  demande  ;  elle  examine  les  plans 
qui  lui  sont  soumis,  et  en  surveille  au  besoin 
l'exécution.  Tous  ceux  qui  connaissent  l'esprit 
qui  anime  cette  Commission,  savent  qu'il  est 
essentiellement  conservateur  ;  son  principe  est 
qu'au  point  de  vue  des  restaurations,  c'est  dans 
le  monument  même  qu'il  faut  en  chercher  les  élé- 
ments, comme  style,  comme  matériaux  et  comme 
dispositions.  Elle  sait  parfaitement  que  la  restau- 
ration la  plus  sobre  est  toujours  la  meilleure. 

Mais  encore  une  fois,  les  édifices  civils  et 
religieux  en  usage,  les  hôtels  de  ville,  les  églises 
affectées  au  culte  doivent  être  traités  dans  des 
conditions  particulières.  On  ne  peut  les  con- 
sidérer comme  objets  de  musée  intangibles,  ni 
comme  l'ornement  d'un  paysage  dont  le  but 
suprême  serait  d'alimenter  les  rêveries  du  tou- 
riste. Une  paroisse  devient  plus  populeuse,  sou- 
vent i!  faut  agrandir  l'église  —  cela  s'est  fait 
partout  et  à  toutes  les  époques  de  l'art.  Pour 
conserver  un  monument  civil  longtemps  aban- 
donné, ou  qui  a  servi  de  magasin,  il  faut  lui 
trouver  une  affectation  et  l'approprier,  dans  les 
meilleures  conditions  de  l'art,  à  sa  nouvelle  desti- 
nation. Cela  est  élémentaire;  et  presque  toujours 
un   architecte  habile   peut   concilier  l'esprit    de 

I.  Notre  Secrétaire,  M.  Cloquet,  a  convaincu  d'inexactitude 
M.  F.-G.  par  une  série  de  faits,  dans  notre  fascicule  de  janvier, 
pp.  82  et  ss.  Il  les  précise  encore  davantage  dans  la  présente 
livraison. 


conservation  et  le  respect  de  l'art  avec  les  con- 
ditions d'utilité. 


En  se  livrant  à  ses  passes  d'armes  contre  tout 
ce  qui  se  fait  dans  son  pays  pour  la  conserva- 
tion et  la  restauration  des  monuments,  le  grand 
redresseur  de  torts  prend  devant  les  lecteurs 
de  la  Chronique  des  arts  des  attitudes  un  peu 
risquées,  et  qui  ne  laissent  pas  d'inspirer  une 
certaine  gaîté. 

On  sait   que   la   Belgique  possède  encore  un 
petit    nombre    de    ruines    d'abbayes,    d'églises, 
de  châteaux  féodaux,  pittoresques,  intéressantes 
au  point    de  vue  de  l'histoire,  souvent  instruc- 
tives pour   l'archéologue  et    l'artiste.    L'état   de 
ruine    de    ces    monuments    date    généralement 
de    la    même    époque,    celle    de   la    Révolution, 
et  si  on    les   abandonne  à  leur  destinée,  ils   ne 
tarderont  pas  à  disparaître  du  sol,   après   avoir 
figuré  quelques  années  comme  amas  de  décom- 
bres. Les  plus  remarquables  sont  les  abbayes  de 
ViUers,  d'Aulne   et    d'Orval  ;    les   châteaux    de 
Bouillon,  des   comtes  de   Flandre    à    Gand,    de 
Franchimont  près  de  Spa,  de  Moha  et  de  Logne 
dans   la  province   de   Liège.  Les  antiquaires   et 
tous   ceu.x   qui  s'intéressent  à  l'histoire  du  pays, 
se  sont  émus  à  juste  titre,  voyant   d'année  en 
année  s'amoindrir,  tomber  pierre  à  pierre  et  enfin 
s'écrouler   ces   restes   encore    imposants   et,    au 
point  de  vue  de  l'art   architectural,  d'une  haute 
valeur. 

Le  Gouvernement,  d'ailleurs  incité,  sollicité  de 
toutes  parts,  a  consenti, —  non  à  la  restauration 
de  ces  ruines,  —  mais  il  a  accordé  des  alloca- 
tions pour  des  travaux  de  consolidation,  de 
soutènement,  de  déblais  et,  dans  certains  cas, 
de  fouilles.  Ces  travaux  se  font  sous  la  surveil- 
lance de  la  Commission  royale  des  monuments, 
avec  le  concours  de  tous  les  hommes  soucieux 
du  passé  ;  ils  sont  dirigés  avec  prudence  et 
économie. 

Semblable  préoccupation  et  les  soins  donnés  à 
la  conservation  de  cette  catégorie  de  monuments 
ne  semblent  pas  le  fait  d'esprits  terre  à  terre, 
absorbés  tout  entiers  par  le  soin  des  intérêts  ma- 
tériels. Il  semble  qu'il  y  aurait  lieu  d'applaudir 
à  des  travaux  de  cette  nature  et  de  savoir  gré  à 


KttVUK    DE    LAKT   CHKÉliEN. 
IQOI.    —    3""®    I.IVKAISON. 


236 


jRebue  ïir  l'^rt  rbrcttcu. 


un  gouvernement  qui  y  consacre  les  allocations 
nécessaires.  Ce  n'est  pas  ainsi  que  l'entend 
l'écrivain  de  la  Chronique  des  arts:  à  la  vue 
de  ces  travaux,  il  est  sur  le  point  de  tomber 
en  pâmoison;  il  avoue  ingénument  qu'il  en  perd 
la  tête;  écoutez  plutôt  : 

«  Mais  où  la  raison  se  perd,  où  l'on  ne  trouve 
plus  l'ombre  d'une  explication,  où  l'on  se  sent  en 
présence  d'une  négation  absolue  non  seulement 
de  l'art,  mais  du  plus  simple  bon  sens,  c'est 
devant  les  restaurations  de  ruines  !  On  restaure 
les  ruines  des  célèbres  abbayes  d'Aulne  et  de 
Villers.  C'est  un  crime,  une  profanation.  Il  n'y  a 
donc  personne  en  Belgique  parmi  les  membres 
du  Gouvernement  et  des  Commissions  compé- 
tentes pour  sentir  le  profond  ridicule  qui  s'at- 
tache à  la  réunion  de  ces  mots  :  restauration  de 
ruines  !  » 

Pardon,  il  y  a  en  Belgique,  même  dans  les 
Commissions  compétentes,  des  hommes  parfaite- 
ment à  même  de  voir  le  ridicule  où  il  se  trouve, 
et  même  de  s'amuser  beaucoup  de  ces  écrivains 
indignés  s'armant  de  leur  plume  comme  d'une 
férule,  qui  pourrait  leur  être  appliquée  à  leur 
tour.  Les  étrivières  sont  parfois  un  très  bon 
instrument   d'éducation. 


* 
*  * 


L'éducation  artistique  de  M.  F.-G.  n'est  pas 
encore  complète.  On  me  permettra,  pour  y 
ajouter  quelque  chose,  de  recourir  à  quelques 
souvenirs  de  voyage  : 

Il  y  a  dix-huit  mois  à  peine  que,  revenant  de 
Constantinople  et  me  trouvant  à  Athènes, 
comme  tous  les  voyageurs,  mon  premier  soin 
fut  de  monter  à  l'Acropole. 

Ce  n'est  jamais  sans  émotion  et  sans  un  véri- 
table recueillement  que  l'artiste,  l'archéologue, 
ou  simplement  l'homme  instruit,  aborde  cette 
incomparable  citadelle  athénienne,  véritable 
sanctuaire  de  ce  que  l'antiquité  nous  a  laissé  de 
plus  magnifique,  réunion  d'édifices  échelonnés 
le  long  de  la  voie  sacrée,  sinon  les  plus  anciens, 
du  moins  les  plus  célèbres  du  monde!  Avant 
d'arriver  aux  Propylées,  qui  forment  comme  le 
frontispice  de  cet  ensemble  de  tant  de  ruines  et 
de  tant  de  grandeurs,  je  fus  obligé,  à  mon  regret, 


j'en  conviens  volontiers,  de  longer  un  petit  che- 
min de  fer  de  service,  où  une  série  de  wagonnets 
chargés  de  blocs  de  marbre  etd'autres  matériaux, 
se  trouvaient  en  destination  de  la  montagne 
sacrée.  Je  me  souvins  alors,  qu'il  y  aura  bientôt 
un  siècle.  Chateaubriand,  passant  par  le  même 
chemin,  devait  enjamber  les  décombres  clas- 
siques, et  chercher  parmi  les  bastions  turcs  et 
les  batteries  garnies  de  canons,  les  temples 
dévastés  et  les  monuments  en  ruines  du  temps 
de  Périclès  et  de  Phidias.  Les  souvenirs  de 
ritiuéraire  de  Paris  à  Jérusalem  me  revenaient 
à  l'esprit,  et  j'avoue  que  j'eusse  préféré  peut-être 
accompagner  l'auteur  du  Génie  du  Christianisme 
dans  l'étude  des  monuments  que  j'allais  com- 
mencer. 

Mais  enfin  les  braves  Turcs  ayant  été  balayés 
un  beau  jour,  on  balaya  ensuite  leurs  installa- 
tions belliqueuses,  leurs  batteries,  leurs  retran- 
chements, les  travaux  si  pittoresques  de  leur  éta- 
blissement, on  démolit  la  mosquée  qui,  dans  le 
Parthénon  même,  avait  succédé  à  l'église  byzan- 
tine établie  par  les  ducs  d'Athènes.  La  civilisa- 
tion et  la  science  de  l'antiquité  s'établirent  sur  le 
plateau  sacré.  11  y  avait  beaucoup  à  faire.  Aussi 
les  travaux  commencés  depuis  plus  d'un  demi- 
siècle  se  poursuivent  encore.  J'ai  trouvé,  hélas! 
bonne  partie  de  la  façade  ouest  du  Parthénon 
échafaudée  !  Une  partie  était  étrésillonnée  au 
moyen  de  croix  de  Saint-André  établies  entre 
les  colonnes  en  marbre  pentélique,  dont  plu- 
sieurs sont  cerclées  en  fer,  avec  des  coins  de 
bois  chassés  dans  les  cannelures  ! 

En  examinant  l'une  après  l'autre  ces  admi- 
rables ruines,  je  pus  me  convaincre  qu'on  y 
travaillait  ;  je  savais  d'ailleurs  que  la  plupart 
avaient  été  l'objet  de  quelque  chose  de  plus  que 
des  réparations.  Je  vais  citer  quelques-unes  de 
ces  «  réfections  ».  Aussitôt  que  l'on  est  arrivé  aux 
Propylées,  par  le  passage  que  l'on  nomme  la 
porte  Beulé,  nom  du  savant  qui  a  fait  de  si  sa- 
vantes études  sur  les  monuments  grecs,  on  arrive 
au  charmant  petit  temple  de  la  Victoire  Aptère 
(la  Victoire  sans  ailes),  dont  la  construction  est 
probablement  antérieure  à  Périclès  ;  il  se  dresse 
presque  fièrement,  et  comme  en  vedette,  auprès 
des  Propylées. 

Or  ce  petit  temple  avait  été  démoli   en  1617, 


£©élanges. 


'■6i 


(en  1751,  on  n'en  voyait  plus  que  les  fondations 
à  ras  du  sol).  Il  a  été  relevé  dans  les  années 
'S3S-36,  par  l'archéologue  L.  Rofs,  et  deux 
architectes  du  nom  de  Schaubert  et  Hansen  ;  ils 
en  avaient  recherché  tous  les  fragments  avec 
grand  soin  dans  les  décombres,  et  surtout  dans 
les  débris  d'une  batterie  turque  élevée  en  1687. 
Cette  restitution  s'est  poursuivie  avec  un  tel  désir 
de  rétablir  ce  qui  a  préexisté,  qu'une  partie  de  la 
frise  qui  courait  autour  du  temple  au  Nord  et  à 
l'Ouest  ayant  été  enlevée  par  lord  Elgin,  et  se 
trouvant  actuellement  au  Musée  britannique,  on 
a  fait  exécuter  à  Londres  des  moulages  en  terre 
cuite,  pour  les  mettre  à  la  place  des  sculptures 
originales  ! 

Les  travaux  de  consolidation,  qui  se  faisaient 
au  Parthénon  au  moment  de  ma  visite,  sont  dus 
en  grande  partie  à  l'initiative  de  M.  Magne;  ils 
ont  été  commencés  au  mois  de  janvier  1896. 

On  travaille  encore  à  l'Erechthéion,  ce  temple 
si  original,  avec  son  délicieux  portique  aux 
cariatides. Cette  besogne  de  longue  haleine  a  été 
commencée  en  184,?.  C'est  à  l'initiative  de  la 
France  que  le  travail  a  été  entrepris;  le  déblai,  qui 
a  duré  quatre  ans,  s'est  fait  sous  la  direction  de 
M.  Paccard,  qui  fit  relever  le  célèbre  portique 
dont  on  voit  aujourd'hui  des  moulages  dans  tous 
les  musées  importants  de  l'Europe.  L'Angleterre 
contribua  à  cette  réparation  par  le  moulage, 
également  en  terre  cuite,  de  l'une  des  cariatides, 
dont  l'original  se  trouve  au  Musée  britannique. 

Enfin,  si  nous  descendons  de  l'Acropole 
dans  l'ancienne  ville  d'Athènes,  nous  trouvons 
dans  la  rue  des  Trépieds,  le  monument  si  connu 
de  Lysicrate, appelé  aussi  la  lanterne  de  Diogène; 
lord  Byron  avait  eu  l'idée  originale  d'y  établir 
sa  bibliothèque,  qui,  alors,  ne  devait  pas  être 
bien  volumineuse  ;  le  monument  a  été  réparé 
deux  fois  au  siècle  dernier,  en  1845  et  en  1892 
aux  frais  du  gouvernement  français,  dont  il  est 
resté  la  propriété,  constatée  par  une  inscription  ; 
la  France,  ajuste  titre,  s'en  fait  un  honneur.  Elle 
n'a  pas  fait  l'acquisition  du  temple  pour  le 
dépecer  et  en  emporter  les  débris  chez  elle, 
mais  elle  le  couvre  de  sa  protection,  le  conserve 
et  le  répare  à  ses  frais,  lorsque  cela  devient 
nécessaire. 

Je  pourrais  continuer  pendant  quelques  co- 
lonnes l'histoire  de  <i  la  réparation  de  ruines  »  ; 


mais  je   pense   qu'en  voilà   assez   pour  imposer 
une  sourdine  aux  clameurs  de  M.  F.-G. 

Si  nous  ajoutons  maintenant  qu'Athènes  est 
devenu  depuis  de  longues  annéesl'objectif  de  tous 
les  savants  du  monde,  que  ses  monuments  sont 
l'objet  d'études  continuelles,  persévérantes,  pour- 
suivies avec  piété,  je  dirais  presque  avec  idolâtrie; 
qu'il  existe,  dans  cette  ville,  une  École  d'Athènes 
française,  un  institut  archéologique  allemand, 
que  les  élèves  de  l'École  française  à  Rome  )'  ont 
fait  une  série  de  restaurations  sur  le  papier  des 
monuments  les  plus  remarquables,  et  qu'enfin 
tous  les  travaux  de  réparation,  de  consolidation, 
de  fouilles  et  de  réfection,  comme  on  voudra  les 
appeler,  se  poursuivent  depuis  plus  de  60  ans 
sous  les  yeux  d'archéologues  d'une  autorité  in- 
contestable et  incontestée,  on  peut  juger  l'impor- 
tance que  l'on  ajouterait  aux  objurgations  de 
M.  F.-G.  citées  plus  haut.  C'est  tout  au  plus  si 
on  les  accueillerait  avec  un  rire  qui,  pour  rester 
dans  le  ton  local,  serait  «  homérique  ». 

Et  que  l'on  ne  s'imagine  pas  que  ces  travaux 
destinés  à  conserver  des  monuments  qui  ont  plus 
de  vingt-cinq  siècles  d'existence,  compromettent 
l'impression  produite  sur  l'âme  du  spectateur  : 
l'effet  reste  imposant,  grandiose,  saisissant!  C'est 
à  peine  si  le  visiteur  de  l'Acropole,  même  pré- 
venu, s'en  aperçoit  ;  n'étaient  les  rails  du  chemin 
de  fer  dont  il  vient  d'être  question,  et  quelques 
blocs  de  marbre  dont  la  blancheur  trop  éclatante 
détonne  auprès  de  ces  colonnes  aux  tons 
d'ambre  avec  des  reflets  roses,  le  voyageur  qui 
survient  à  l'heure  oii  les  ouvriers  ne  sont  pas  à 
leur  besogne,  peut  croire  que  presque  rien  n'a  été 
fait  pour  conserver  les  ruines  grandioses  à  la 
science  de  l'antiquité  et  aux  générations  futures; 
l'impression  reste  prestigieuse. 

Je  n'en  veux  d'autre  preuve  que  les  accents 
pleins  de  lyrisme  d'un  voyageur  qui  a  visité  le 
Parthénon,  il  y  a  deux  ans  :  écoutez  plutôt. 

«  Ah  !  que  Renan  a  raison  quand  il  écrit  :  «  Il  y 
a  un  lieu  oi^i  la  perfection  existe  :  il  n'y  en  a  pas 
deux  :  c'est  celui-là.  Je  n'avais  jamais  rien  imagi- 
né de  pareil.  L'idéal  cristallisé  en  marbre  pen- 
télique  qui  se  montrait  à  moi.  Jusque-là  j'avais 
cru  que  la  perfection  n'est  pas  de  ce  monde... 
Voici  que  se  révélait  à  moi  le  miracle  grec,  une 
chose  qui  n'a  existé  qu'une  fois,  qui  ne  se  reverra 
plus,   mais   dont   l'effet  durera  éternellement,  je 


238 


iltbuc  tic  V^xt  cbvcricu. 


veux  dire  un  type  de  beauté  éternelle,  sans  nulle 
tache  locale  ou  nationale...  »  L'image,  la  photo- 
graphie, le  tableau,  la  description,  tout  cela  est 
absolument  impuissant  à  donner  l'impression  de 

la  réalité.  Il  faut  voir 

«  Le  Parthénon,  chef-d'œuvre  de  grandeur  et 
de  force  :  l'Erechtéion,  réalisation  de  l'idéal 
ionien.  Le  Parthénon  et  l'Erechthéion  :  double 
cristallisation  du  génie  grec   (').  » 


* 
*  * 


* 
*   * 


Mais  avant  de  s'en  prendre,  avec  autant  d'au- 
dace que  de  légèreté,  à  des  travaux  de  même 
nature,  entrepris  dans  son  propre  pays,  avec 
infiniment  plus  de  réserve  et  de  circonspection, 
l'auteur  des  articles  de  la  Chronique  des  Arts 
devrait,  non  aller  en  Grèce  et  en  Turquie,  — 
dans  ce  dernier  pays  on  suit  le  système  de 
conservation  qu'il  préconise  —  ce  serait  peut- 
être  le  condamner  à  un  voyage  un  peu  lointain. 
Le  gouvernement  belge  fait  en  ce  moment  répa- 
rer, consolider,  étançonner  les  ruines  de  quelques 
abba}-es  qu'il  est  très  désirable  de  conserver  le 
plus  longtemps  possible.  Mais  que  M.  F.  G. 
prenne  donc  la  peine  de  passer  la  Manche  et  de 
voir  ce  qui  se  passe  en  Angleterre,  le  pays  le 
plus  intelligemment  conservateur,  le  plus  sou- 
cieux de  ses  anciens  monuments,  qui  existe. 

Là,  il  trouvera  une  série  de  ruines  grandioses 
d'abbayes  qui,  pour  la  plupart,  appartiennent  à 
des  particuliers  ;  on  ne  les  restaure  pas,  à  la  vé- 
rité, pas  plus  que  l'on  ne  songe  à  restaurer  les 
ruines  d'abbayes  en  Belgique  ;  mais  on  a  eu  soin 
d'en  déblayer  les  décombres,  d'étayer  les  murs 
menaçant  ruine,  de  replacer  les  pierres  qui  tom- 
bent, en  un  mot,  de  les  entretenir  et  de  prendre 
toutes  les  mesures  nécessaires  pour  en  assurer 
la  durée. On  les  entoure  de  plantations  charman- 
tes, et  si  peut-être,  comme  l'église  de  rabba}'e. 
d'Aulne,  elles  semblent  parfaitement  disposées 
pour  y  donner  des  conférences  sur  l'art,  elles 
peuvent  aussi,  tout  en  conservant  la  poésie 
qu'inspirent  les  ruines,  surtout  lorsqu'elles  sont 
entourées  de  végétation,  être  étudiées  avec 
grand  fruit  par  les  architectes  anglais,  qui  ne 
s'en  font  pas  faute,  et  par  les  archéologues  de 
toutes  les  nations. 

I.  Cyr.  Van  Overbergh,  Dans  le Levani ;  SraxeUes,  1899,  p.  205. 


Mais  en  Belgique  on  commet  encore  cette 
chose  insensée,  ce  crime,  cette  profanation  de 
restaurer  les  ruines  de  quelques  châteaux 
féodaux  !  A  Gand,  on  a  déblayé,  dégagé  par  des 
fouilles,  le  château  des  Comtes  qui,  enterré  sous 
des  décombres,  enfoui  sous  d'infectes  masures, 
caché  par  d'affreux  bouges,  était  ignoré  de  tout 
le  monde  ;  on  a  mis  au  jour  et  consolidé  les  murs 
branlants  et  dégagé  une  série  de  constructions 
grandioses  dont  l'étude  forme  une  véritable  évo- 
cation de  l'histoire  ;  tout  ce  travail  a  été  conduit 
avec  infiniment  de  soin,  de  tact  et  de  discrétion 
par  M.  l'architecte  de  Waele,  qui,  dans  les  cas  où 
une  reconstruction  était  nécessaire,  a  cherché 
dans  le  monument  lui-même  les  détails  de  la 
restauration.  Il  en  est  de  même  du  château  de 
Gérard  le  Diable,  restauré  avec  beaucoup  de 
science  par  M.  Verhaegen. 

Tout  cela,  comme  d'ailleurs  tout  ce  qui  se  fait 
en  Belgique  dans  ce  genre,  ne  vaut  absolument 
rien  ;  car  c'est  chose  convenue  :  restaurer  des 
ruines  est  une  aberration  qui  ne  peut  se  justifier 
aux  )'eux  du  bon  sens. 

Puisque  M.  F.-G.  a  le  bonheur  d'être  éclairé 
par  le  soleil  de  la  France,  ce  qui  lui  donne 
assurément  une  supériorité  manifeste  sur  les 
régions  brumeuses  où  il  a  eu  l'inconvénient  de 
naître,  je  vais  lui  signaler  quelques  excursions  où, 
sans  sortir  du  pays  où  paraît  La  Clironùpie  des 
Arts,  il  pourra  trouver  l'occasion  de  s'élever 
contre  l'absurde  manie  de  restaurer  des  ruines. 
Qu'il  prenne  un  beau  matin  le  train  à  Paris  :  en 
peu  d'heures  il  pourra  se  transporter  au  château 
de  Pierrefonds,  dont  ce  malheureux  VioUet-le- 
Duc  a  complètement  restauré  les  ruines,  au  point 
de  les  rendre  habitables. 

—  Si  M.  F.-G.  préfère  prendre  une  autre 
direction,  qu'il  aille  en  Normandie,  où  un  archi- 
tecte dont  il  ignore  probablement  le  nom,  M. 
Ruprich-Robert,  a  été,  dès  1864,  chargé  de 
restaurer  les  ruines  du  château  de  Falaise. 

Après  avoir  reconnu  combien  ce  travail  est 
insensé,  il  pourra  continuer  sa  route  jusqu'au 
Mont  St-I\lichel,  oîi  depuis  une  série  d'années 
on  commet  le  double  sacrilège  tie  restaurer  un 
monument  qui  est  à  la  fois  une  abbaye  et  un 
château-fort.  Ce  travail  absurde  a  été  confié  à  des 


09é!ange0. 


239 


hommes  sans  valeur  comme  MM.  Corroyer  et 
Petitgrand.  Si  M.  F.- G.  tient  à  trouver  les  élé- 
ments d'un  nouveau  réquisitoire  contre  la  restau- 
ration des  ruines  en  se  dirigeant  vers  le  Midi,  je 
lui  enseignerai  les  remparts  de  Carcassonne, 
restaurés  par  les  soins  de  Viollet-le-Duc,  déjà 
nommé. 


Je  pourrais  continuer  encore  quelque  temps  le 
répertoire  des  méfaits  de  même  nature,  perpétrés 


en  dehors  de  Belgique.  Mais  je  remarque  que 
mes  souvenirs  de  voyage  m'ont  vraiment  entraîné 
si  loin  que  le  lecteur  pourrait  bien  ne  plus  me 
suivre.  Il  me  faudra  cependant  bien  rentrer  dans 
ce  pays  pour  y  examiner  à  la  suite  de  M.  F. -G. 
tous  les  actes  qui,  sous  prétexte  de  restauration, 
se  commettent  avec  le  concours  des  Commis- 
sions officielles,  sous  les  yeux  du  gouvernement. 
Je  compte  y  revenir  dans  un  prochain  fascicule 
de  cette  Revue. 

J.  Helbig. 


■■':^  ^^  ^  ^^  ^  ^^  -'^  ^.  ^  ^  ^  ^  "^  -^^^  -^^  ^^.^^^^  ^^  ^  ^^  ^^:^^^kj^^ 


wm^^mmm^  Ccrrcspoulianfe.  wmwmmmwm 


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Italie,  -v^.— .— -— — 


HlorfiifC  :  lia  cloche  Bu  Ealaia  Bu  BoBcetat.  —  lia 
Cantoria   Bc    DonatcUo.  Ita  manufacture    ropaU   te 

picma  Burca. —  lîaplcjf  :  lia  peinture  Be  Boscoreale. — 
Un  tableau  Be  JSimonc  ffiartino.—  Boinc  :  liea  ftraquca 
Bc  l'ccliat'  Bc  Bamte=CeciIc.  —  Ji'roliae  Bc  Saint» 
BilUCfltrc.  —  lica  bécouocrtca  Dana  l'ésliec  jSaintc^ffiaiic 
liiberatricc  au  Eotum.  -  li'eBliac  JSainte^HBnèa.  — 
lie  château  Saint^Hnee.  ~  Bf^'e  :  lica  freaquca  Bc 
BcnoMo  Oloiîoli. 

J^/o/i'/u'e. 

Î'AI  reproduit  dans  la  livraison  de 
juillet  de  notre  i'?^'?'//^  l'inscription  de 
la  cloche  de  San  Severino  (Marches). 
Depuis  lors  la  Revue  a  fait  connaître 
d'autres  inscriptions  de  ce  genre  ;  en  voici  une 
dont  on  a  parlé  dans  ces  derniers  temps,  la 
cloche  ayant  sonné  le  passage  du  XIX«  au  XX^ 
siècle. 

A  la  vérité  c'est  une  cloche  laïque,  mais  elle 
présente  néanmoins  de  l'intérêt. 

Le  palais  du  Podestat  à  Florence,  également 
nommé  Bargello,  est  muni  d'une  tour  qui  ren- 
ferme une  cloche  portant  en  relief  l'inscription 
suivante  :• 

A.  D.  MCCCLXXXI 
Mentem.  Sanc'tam.  Spontaneam 

HONOREM      DEO    AC     PATRIE    LIBERATION  EM. 

M.\TTEO   DEL   TEGIIIA 

LINAIUOLO   GONFALONIERE   DI   GIU.STIZIA 

Francesco  DI  Giovanni  di  ser  Sengnia 

PlETRO    DATINI    I3ICHIERAIO 

Mesere  Giovanni  Rinucci 

Mesere  Gucci  coregiaio 

Mesere  Pazzino  degli  Strozzi 

Léo  di  Lapo  di  Neri    rimediatore 

Giovanni  di  Niciiola   tintore 

Giovanni  Giuntini 

Maestro  Riciio  di  Lapo 

Domenico  suo  kigliui.o  da  Firenze 

ME  FECIT. 

Voilà  donc  une  cloche  fondue  en  l'iionneur  de 
Dieu  et  de  la  liberté  de  la  Patrie,  sur  l'initiative 
de  quelques  citoyens,  dont  plusieurs  ont  eu  soin 
de  marquer  leurs  professions  ;  dans  nos    mœurs 


actuelles,  elles  peuvent  nous  paraître  dépourvues 
de  prestige,  mais  alors,  au  XIV'=  siècle,  tous  les 
inétiers  étaient  honorés  à  Florence,  car  tous 
prenaient  une  part  plus  ou  moins  grande  au 
gouvernement  de  la  République. 

On  remarquera  que  Matteo  del  Teghia,  Gon- 
falonier  de  justice,  était  liiiaiii/o,  fabricant  de  lin  ; 
Datini  était  bicliicraio,  cabaretier  ;  Gucci  était 
coregiaio,  bourrelier  ;  Nicholas  était  tintore,  tein- 
turier; Lapo  di  Neri  était  rimediatore,  ravaudeur. 
Tous  faisaient  partie  des  Arti,  corporations, 
qui  ont  administré  Florence  et  sa  politique  pen- 
dant plus  de  deux  siècles,  et  qui  ont  puissam- 
ment contribué  à  la  floraison  des  beaux-arts  et 
notamment  à  l'édification  et  à  la  décoration  des 
églises. 

Je  me  propose  de  publier,  cette  année,  dans  la 
Revue,  un  travail  sur  ces  Arti  en  général  et  par- 
ticulièrement sur  l'église  d'Or  San  Michèle,  qui 
leur  doit  les  statues  qui  décorent  ses  surfaces 
extérieures. 

Le  musée  national  de  Dublin  a  acheté  la 
reproduction  de  la  Cantoria  de  Donatello  que  la 
maison  Bondi  de  Signa,  près  de  Florence,  avait 
envoyée  à  l'Exposition  de  Paris. 

Donatello  et  Luca  délia  Robbia  avaient  été 
chargés  de  deu.x  tribunes  d'orgue  pour  Sainte- 
Marie  des  Fleurs  ;  elles  furent  placées  en  1433 
et  143S. 

Enlevées   en    16S8,   elles  ont  de  notre  temps 

été  mises  au   Musée  ilu  Bargello,  puis  au  Musée 

de  l'Opéra  du  Dôme,  où  elles  sont  actuellement. 

Le   musée  de   Dublin   a  été  bien  inspiré  ;  la 

reproduction  est  d'une  fidélité  absolue. 

Les  deux  tribunes  sont  des  ouvrages  absolu- 
ment hors  ligne  ;  les  bas-reliefs  très  accentués 
présentent  des  groupes  d'enfants  symbolisant  la 
musique  sacrée. 

J'ai  déjà  eu  l'occasion  de  signaler  la  transfor- 
mation opérée  dans  l'organisation  de  la  Manu- 
facture royale  de  pierres  dures  de  Florence, 
fondée  comme  institution  d'Etat,  en  1588,  par  le 
grand-duc  P'erdinand  de  Médicis. 

On  a  senti  que  le  travail  d'incrustation  de 
pierres  dures   avait    fait    son    temps,    l'industrie 


Correspondance. 


241 


étant  arrivée  à  la  perfection  du  genre  et  n'ayant, 
par  suite,  plus  besoin  d'être  guidée  par  un 
établissement  officiel. 

La  Manufacture  alors,  pour  justifier  son  exis- 
tence, se  mit,  sous  l'habile  direction  du  chevalier 
Marchionni,  à  la  restauration  d'anciens  ouvrages 
de  céramique,  de  marbre,  de  métal,  de  mosaïque, 
etc.;  elle  a  travaillé  pour  Ravenne,  Poppi,  Al- 
benga,  Livourne,  la  chartreuse  d'Ema,  les  églises 
Santa  Croce  et  San  Ambrogio  de  Florence,  etc., 
etc.  Comme  ouvrage  de  fond  et  de  longue 
haleine,  elle  a  entrepris  le  parquet  de  la  cha- 
pelle des  princes  à  Saint-Laurent  de  Florence 
et  la  restauration  de  l'importante  mosaïque  du 
baptistère  de  Saint-Jean  ;  ce  dernier  travail  l'oc- 
cupera encore  au  moins  huit  ans  ;  nous  y  revien- 
drons. 

Il   faut    reconnaître    que  l'idée   d'abandonner 
une  fabrication   surannée  et  de  la  remplacer  par 
des  travaux  utiles,  est  des  plus  heureuses. 
Naples. 

Les  peintures  murales  de  Boscoreale.  Il  a  été 
beaucoup  question  de  cette  découverte,  mais, 
comme  d'habitude,  du  reste,  les  journaux  se 
sont  trop  hâtés  de  conclure. 

M.  de  Prisco,  député  au  parlement  italien,  est 
propriétaire  du  sol  près  de  Pompei  où  la  décou- 
verte a  été  faite  ;  il  nie  absolument  avoir  reçu 
une  offre  d'acquisition  de  l'empereur  d'Alle- 
magne. 

On  a  dit  que  les  parois  décorées  de  peintures 
ayant  été  détachées  de  l'immeuble,  sont  par  ce 
fait  devenues  meubles  et  que  par  suite  M.  de 
Prisco  était  libre  de  les  exporter  à  l'étranger  ; 
c'est  une  erreur. 

D'après  la  loi  italienne  en  vigueur,  aucun  objet 
d'art  antérieur  au  XIX*=  siècle  ne  peut  être 
exporté,  sans  autorisation  préalable  du  gouver- 
nement. 

On  a  parlé  des  édits  des  cardinaux  Doria  et 
Pacca,  ignorant  ou  oubliant  que  ces  édits,  non 
abrogés  à  la  vérité,  n'étaient  applicables  qu'aux 
anciennes  provinces  pontificales,  et  que  par 
conséquent,  ils  ne  peuvent  atteindre  les  objets 
existant  à  Boscoreale. 

L'église  San  Lorenzo  Maggiore  de  Naples 
possède  un  tableau  du  peintre  de  Sienne 
Simone  Martino  (1284- 1340),  représentant  saint 


Louis  de  Toulouse  assis  sur  son  trône  épiscopal, 
en  action  de  remettre  la  couronne  de  Sicile  à 
son  frère  Robert  d'Anjou  ;  sur  la  prédelle  sont 
peints  divers  épisodes  de  la  vie  du  Saint  ;  le 
tableau  porte  :  SIMONE  de  SEXIS  ME 
PINXIT.  L'ouvrage  est  réclamé  par  le  musée 
royal  de  Naples  ;  en  principe  il  est  à  désirer 
que  les  tableaux  restent  dans  les  églises,  mais  à 
San  Lorenzo  la  peinture  en  question  est  placée 
dans  une  chapelle  obscure  où  on  a  de  la  peine 
à  la  découvrir. 

Nul  saint  d'origine  française  n'a  en  Italie  un 
aussi  grand  nombre  d'effigies  que  saint  Louis, 
évêque  de  Toulouse.  On  le  trouve  soit  en  robe 
de  franciscain,  soit  en  habits  pontificaux  dans  la 
basilique  d'Assise  par  le  même  Simone  ;  à  Santa 
Croce,  à  Florence,  par  Giotto,  à  Pistoia,  à 
Atezzo,  à  Citta  di  Castello,  à  Trevi,  etc.,  etc. 

Donatello  a  fait  deux  fois  sa  statue  ;  l'une  est 
à  Santa  Croce  de  Florence,  l'autre  à  Saint-An- 
toine de  Padoue. 

Le  Saint,  qui  avait  été  fait  évêque  à  l'âge  de 
vingt  ans  par  le  pape  Boniface  VII I,  a  été  cano- 
nisé en  13  17.  Il  a  relativement  peu  vécu  en  Italie, 
mais  ses  vertus  et  sa  charité  l'ont  vite  rendu  très 
populaire. 

Rome. 

La  découverte  récente  de  fresques  à  l'église 
Sainte-Cécile  a  donné  lieu  à  des  erreurs,  même 
dans  les  journaux  italiens,  et  le  sujet  a  été  très 
incomplètement  décrit  ;  je  complète  et  je  rectifie. 

La  fresque  représente  Jésus-Christ  sur  un 
trône  décoré  de  pierres  précieuses  ;  au-dessus  du 
Sauveur  planent  huit  anges,  quatre  de  chaque 
côté. 

A  droite  du  trône  était  la  Vierge  en  prière, 
mais  une  partie  de  la  peinture  est  perdue  ;  saint 
Paul  et  cinq  apôtres  subsistent. 

A  gauche  :  saint  Jean-Baptiste,  saint  Jean 
évangéliste  et  quatre  apôtres. 

Tous  les  apôtres  sont  assis. 

Il  ne  paraît  pas  contestable  que  la  fresque  soit 
de  Pietro  Cavallini  (1260- 1344),  mais  ce  qui  est 
difficile  de  comprendre,  c'est  qu'on  ait  imprimé 
qu'on  ne  connaissait  jusqu'à  présent  de  Cavallini 
que  les  mosaïques  de  Sainte-Marie  au  Transte- 
vère,  de  Saint-Paul-hors-les-Murs  et  de  Saint- 
Chrysogone. 


242 


Btliuc  tie  rSvt  cbvcticu. 


Pour  la  vie  de  la  Vierge,  ce  n'est  pas  douteux  ; 
les  six  tableaux  en  mosaïque,  —  car  ce  sont  déjà 
des  tableaux, —  sont  incontestablement  de  Caval- 
lini  ;  de  ce  qu'il  a  pu  faire  à  Saint- Paul-hors-les- 
Murs,  il  ne  reste  rien,  l'incendie  de  1823  ayant 
presque  tout  détruit  de  l'ancienne  décoration 
peinte  ou  en  mosaïque.  La  mosaïque  de  l'église 
Saint-Chrysogone  est  du  XI I"  siècle,  elle  montre 
la  Madone  sur  un  trône,  entre  l'éponyme  et 
saint  Jacques  ;  les  figures  sont  vulgaires  et  roides, 
sans  aucune  analogie  avec  le  style  de  Cavallini, 
souple  et  manifestement  inspiré  par  l'étude  de 
la  nature. 

Certes  un  grand  nombre  de  peintures  de 
Cavallini  sont  perdues,  mais  dire  que  ce  peintre 
n'est  connu  que  par  ses  mosaïques,  c'est  aller 
vraiment  trop  loin. 

Des  nombreuses  peintures  qu'il  a  exécutées  à 
Florence,  il  reste  à  l'église  San-Marco  une  Aniioit- 
ciation,  toujours  recouverte  et  le  musée  de  l'Aca- 
démie conserve  une  grande  icône  provenant 
de  la  basilique  de  Santa  Maria  Novella  ;  elle 
montre  en  trois  compartiments  :  V Annonciation 
et  des  groupes  de  Saints. 

Mais  c'est  dans  l'église  inférieure  d'Assise  que 
Cavallini  se  manifeste  surtout  ;  il  a  peint  là 
une  Crucifixion  de  grande  beauté,  con  lioinini  a 
cavallo  armati  in  varie  foggie,  e  con  iiiolta  varieta 
d'abiti  stravaganti  e  de  diverse  nazioni  straniere, 
comme  l'écrit  Vasari. 

Je  ne  parle  que  des  peintures  de  Cavallini  que 
je  connais,  mais  probablement  il  en  existe  d'au- 
tres. 

A  la  liste  des  églises  déjà  indiquées  qui  sont 
l'objet  de  restaurations,  il  faut  ajouter  San  Syl- 
vestre in  Capite,  située  près  du  Corso.  Des  tra- 
vaux d'édilité  exécutés  contre  le  campanile  ont 
rendu  nécessaire  la  consolidation  du  monument. 

L'origine  de  l'église  est  incertaine,  mais  elle 
est  regardée  comme  une  des  plus  anciennes  de 
Rome.  On  croit  qu'elle  fut  édifiée  en  261,  par  le 
pape  S.  Denis,  et  restaurée  par  le  pape  Sym- 
maque,  en  500.  Abandonnée  ou  concédée  à  des 
moines  grecs,  le  pape  S.  Paul  la  fit  reconstruire 
en  757.  Abandonnée  de  nouveau,  le  pape  Inno- 
cent III  en  ordonna  la  réparation  en  iigSà 
l'architecte  Marchioni  d'Arezzo  ;  c'est  de  cette 
époque  que  date  le  campanile.  Au  XVIIe  siècle 


le  pape  Innocent  XI  la  concéda  aux  religieuses 
de  Sainte-Claire  qui  la  firent  décorer  de  tableaux 
du  temps  ;  la  façade  de  la  fin  du  XVI L'  siècle 
est  de  Jean  de  Rossi. 

L'église  est  dédiée  à  saint  Sylvestre,  pape,  et  à 
saint  Etienne  ;  elle  est  cardinalice. 

Elle  conserve  les  restes  de  plusieurs  papes  et 
la  tète  de  saint  Jean-Baptiste  depuis  le  XIII^ 
siècle,  d'où  son  nom  in  Capite. 

J'ai  déjà  dit  quelques  mots  des  découvertes 
faites  dans  la  démolition  de  l'église  Sainte-Marie 
Libératrice  au  Forum. 

En  raison  de  l'importance  exceptionnelle  de 
cette  excavation,  le  ministre  a  nommé  une  com- 
mission spéciale  composée  d'architectes,  d'ar- 
chéologues et  de  peintres  pour  étudier  les  moyens 
de  conservation  des  fresques. 

La  commission  a  décidé  que  les  fresques  et  les 
autres  objets  découverts  devaient  rester  en  place 
et  être  mis  à  l'abri  sous  un  édicule. 

Une  inscription  provenant  sans  doute  d'un 
ambon  en  marbre  porte  en  latin  et  en  grec  : 

>b  JOHANNES  SERVVS  SCAE  MARIAE 

►J.  hJANNOV  AOVVOV  THC  eEtJïOKOV 

Les  archéologues  sont  d'accord  sur  la  portée  de 
ce  texte  :  l'église  est  du  pape  Jean  VII  (pontificat 
de  705  à  707)  ;  elle  est  mentionnée  au  Liber 
Pontificalis  au  chapitre  de  ce  pontife. 

Je  vais  aller  exprès  à  Rome,  pour  étudier 
ces  fresques  ;  mais  je  suis  informé  qu'il  n'en 
existe  pas  de  photographies  et  qu'il  est  défendu 
d'en  faire. 

Aux  églises  de  Rome,  mentionnées  précé- 
demment, comme  étant  l'objet  de  restaurations 
il  convient  d'ajouter  l'église  de  Sainte-Agnès, 
située  sur  la  place  Navona.  (Circo  Agonale.) 

La  sainte  vierge  et  martyre  est  particulière- 
ment vénérée  à  Rome. 

L'empereur  Constantin,  à  la  prière  de  sa 
fille  Constance,  fit  bâtir  sur  la  voie  Nomentane 
une  église  en  son  honneur,  dans  le  cimetière  où 
fut  trouvé  le  corps  de  la  Sainte. 

Dans  l'intérieur  de  Rome,  le  pape  Sixte  V 
(pontificat  de  1585  à  1 590)  éleva  sur  la  place 
Navone  un  petit  temple  à  l'endroit  où  sainte 
Agnès,  selon  la  tradition,  fut  conduite  pour  être 


Correspondance. 


243 


flétrie,  mais  elle  fut  sauvée  du  déshonneur  mi- 
raculeusement. 

Le  pape  Innocent  X  (pontificat  de  1644  à 
1655),  dont  la  famille  Pamphili  possédait  un 
palais  attenant  an  temple,  fit  démolir  entière- 
ment l'édifice  de  Sivte  V  et  construisit  une  église 
nouvelle;  il  voulut  y  être  enterré  ;  son  tombeau 
est  de  J.-B.  Maini. 

Les  peintures  de  la  coupole  sont  de  Ciro 
Ferri  (1634  >i*  1689),  l'auteur  de  plusieurs  modè- 
les de  mosaïque  de  la  basilique  de  Saint- Pierre, 
notamment  de  celles  de  la  chapelle  du  chœur 
représentant  VÉternel  sur  un  trône,  soutenir 
par  des  nuages  et  les  animaux  évangéliques  selon 
le  texte  de  l'Apocalypse;  cette  mosaïque  compte 
parmi  les  bonnes  de  la  basilique. 

La  peinture  de  Ciro  Ferri  est  le  meilleur  ou- 
vrage d'art  de  l'église  de  Sainte- Agnès. 

Le  château  Saint-Ange,  l'ancien  mausolée 
d'Adrien,  est  peu  visité  ;  on  ne  peut  le  reprocher 
aux  touristes,  ils  ont  tant  à  faire  à  Rome! 

L'administration  militaire,  qui  détient  le  mo- 
nument, en  a  facilité  la  visite. 

Ceux  qui  en  ont  le  temps  pourront  aller 
revoir  l'appartement  du  pape  Paul  III  (Alexan- 
dre Farnèse)  —  pontificat  de  t535  à  1550  — 
décoré  de  peintures  par  Pierino  del  Vaga,  Jean 
d'Udine  et  d'autres  peintures  du  XVI'=  siècle. 
Comme  dans  bien  d'autres  localités,  plusieurs 
fresques  ont  été  recouvertes  d'un  badigeon  ;  on 
se  préoccupe  de  les  remettre  au  jour. 


Pise. 

Le  Campo  Santo  ne  cesse  depuis  bien  des 
années  de  donner  grand  souci  à  l'office  des 
Monuments  nationaux  chargé  de  sa  conserva- 
tion. 

Les  murailles  prennent  l'humidité,  et  les  fres- 
ques se  détériorent. 

J'ai  indiqué,  dans  la  Revue  de  mai  1899,  les 
procédés  employés  par  M.  Fiscali  pour  sauver 
les  fresques  d'Antonio  Veneziano  (i3i9*î<  1383), 
représentant  la  mort  de  San  Ranieri,  patron  de 
Pise. 

Maintenant  ce  sont  les  fresques  de  Benozzo 
Gozzoli  (1420  <^  1498)   qui  sont  en  péril. 

On  sait  qu'elles  montrent  l'histoire  de  Noé, 
celles  d'Abraham,  d'Isaac  et  de  Rébecca,  de 
Jacob  et  d'Esau,etc.,  etc. 

Les  peintures,  qui  demandèrent  à  Gozzoli 
seize  ans  de  travail,  sont  d'une  main  légère  et 
d'une  coloration  adoucie.  Elles  ont  donné  lieu 
déjà  à  bien  des  tentatives  de  conservation  ;  une 
fois, notamment,  en  ce  siècle,  on  les  a  recouvertes 
en  partie  d'une  sorte  de  vernis  qui  n'a  eu  qu'une 
portée  éphémère  et  probablement  nuisible. 

A  présent  il  faut  des  remèdes  efficaces  ;  le 
ministère  des  Beaux-Arts,  dans  cette  vue,  a 
nommé  une  commission  spéciale  composée  des 
hommes  les  plus  compétents  en  cette  matière 
particulièrement  difficile. 

Gerspach. 

(Florence,  mars.) 


BEVUE  DE  l'art  CHRÉTIEN 
1901.    —    3""'    LIVRAISON. 


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Société  des  Antiquaires  de  France.  — 
Séance  du  23  janvier  içoi.  —  M.  Durrieu  signale, 
comme  un  fait  curieux  pour  l'histoire  de  la  li- 
brairie parisienne  dans  la  première  moitié  du 
XlVe  siècle,  la  présence  à  Paris,  à  cette  époque, 
d'un  nombre  considérable  de  copistes  anglais. 

Séance  du  jo  janvier.  —  Présidence  de  M.  Ba- 
belon.M.  Monceau  discute  les  traditions  relatives 
à  la  légende  des  Martyrs  d'Utique. 

M.  L.  Poinsot  fait  connaître  et  commente  des 
inscriptions  latines  provenant  de  Mesiè  et  four- 
nissant des  renseignements  sur  la  mythologie 
des  provinces  danubiennes,  en  particulier  sur  une 
forme  locale  du  culte  d'Hercule. 

M.  Vitry  étudie  des  inscriptions  plus  ou  moins 
intelligibles  en  lettres  très  ornées  qu'on  voit  sur 
la  bordure  des  manteaux  de  certaines  statues  de 
la  fin  du  XV-^  siècle  et  du  début  du  XVI<^  siècle. 

Séance  du  6  février.  —  M.  de  Manteyer  pré- 
sente l'empreinte  d'un  sceau-matrice  provenant 
d'une  collection  italienne,  et  qu'il  attribue  à 
Foulque  le  Jeune,  comte  d'Anjou. 

M.  Omont  communique  un  recueil  d'anciennes 
écritures  formé  en  vue  de  constituer  une  sorte  de 
traité  de  paléographie  et  dû  à  Pierre  Hamon, 
maître  d'écriture  de  Charles  IX  et  plus  tard  se- 
crétaire de  la  chambre  du  roi  de  Jérusalem. 

Séatice  du  13  février.  —  M.  Durrieu  étudie  les 
inscriptions  tracées  sur  les  vêtements  par  des 
peintres  miniaturistes  français  du  XV^  et  du  dé- 
but du  XVI«  siècle, 

M.  Marquet  de  Vasselot  signale  un  portrait 
d'enfant  du  XVI<=  siècle,  conservé  au  Musée  de 
Versailles  et  qui  paraît  être  celui  d'Eléonore,fille 
de  Philippe  le  Beau,  plus  tard  reine  de  France. 

M.  Pallu  de  Lessert  commente  une  inscrip- 
tion latine  du  IV''  siècle  qui  semble  devoir  être 
attribuée  au  consul  LoUianus  Marvotius. 

Séance  du  2ù  février.  —  M.  Cagnat  commu- 
nique une  inscription  des  ruines  de  Lebda  en 
Tripolitaine,  d'après  le  Mercure  galant  de  1694. 

M.  de  Manteyer  présente  de  nouvelles  obser- 
vations sur  le  sceau-matrice  de  t'oulque  le  Jeune, 
d'Anjou 

M.  Prou  étudie  les  conditions  dans  lesquelles 
a  été  rédigée  une  charte  fausse  relative  à  la  fon- 
dation de  l'église  St-Léonard  de  Bellême(Ornc). 

Séance  du  27  février.  —  M.  Poinsot  commente 
quelques  inscriptions  latines  de  Kon  Hovitza 
(Médie  inférieure). 


M.  Delaborde  signale  un  diplôme  aujourd'hui 
perdu  par  lequel  Philippe- Auguste  confirme,  en 
II 79,  un  accord  entre  Hebes  de  Charenton-sur- 
Cher  avec  l'abbaye  de  St-Sulpice  de  Bourges. 

M.  Monceau  étudie  la  Vita  Cypriaiii  du  diacre 
Pontius  et  montre  que  cette  relation  est  indépen- 
dante des  Acta  Cypriani. 

M.  Toutain  fait  la  critique  des  te.xtes  sur  les- 
quels on  s'appuie  d'ordinaire  pour  établir  l'exis- 
tence des  Druidesses  dans  la  Gaule  romaine. 

Séance  du  6  mars. — -M. Tardif  communique  la 
photographie  d'une  inscription  du  moyen  âge 
trouvée  à  Saint-Pair  (Manche). 

M.  Blanchet  signale  un  dessin  ancien  du  sceau 
de  Foulques  le  Jeune,  reproduit  dans  une  publi- 
cation de  M.  Marchegay. 

M.  Roman  signale  les  ruines  d'un  hypocauste 
décoratifà  Briançon. 

Séance  du  /j  mars.  —  M.  Lafaye  communique 
des  photographies  présentant  des  mosaïques  ro- 
maines découvertes  à  Villelaure,  arrondissement 
d'Apt  (Vaucluse). 

M.  Monceau  signale  un  texte  daté  du  début 
du  V'=  siècle  et  qui  permet  de  préciser  l'emplace- 
ment du  tombeau  de  saint  Cyprien. 

M.  Maurice  montre,  d'après  des  légendes  de 
monnaies,  à  quelle  époque  l'empereur  Constantin 
construisit  la  forteresse  de  Constantiniana 
Daphné  à  la  frontière  du  pays  des  Goths. 

Académie  des  Inscriptions  et  Belles-Let- 
tres. —  Séance  du  /"'février  içor.  —  M.  Babe- 
lon  lit  un  Mémoire  sur  «  la  Silique  et  le  denier 
de  la  loi  des  Francs-Saliens  ». 

M.  Héron  de  Villefosse  transmet,  de  la  part 
de  M.  L.  Lex,  l'estampage  d'une  inscription 
récemment  découverte  à  Saint- Marcel-lès-Cha- 
lon  :  Aug  {usto)  sacr  {uni)  deœ  Temusioni  Janua- 
ris  Veri  fin  (its)  ex  voto  v{ptU7tî)s  iolvit)  l  (Jbens) 
)ii  (erito).  Le  mérite  de  cette  trouvaille  réside 
dans  le  nom,  inconnu  jusqu'ici,  de  la  déesse 
Temusio. 

M.  Théodore  Reinach  communique  deux  cu- 
rieuses inscriptions  grecques  de  la  basse  époque, 
récemment  découvertes.  L'une  d'Argos,  fait  con- 
naître le  nom  d'un  nouveau  statuaire,y\rchélaiis, 
et  un  nouveau  proconsul  de  Grèce,  Phosphonus, 
que  M.  Reinach  propose  d'identifier  avec  l'aïeul 
du  fameux  orateur  Symmaque.  L'autre,  de  Vyn- 
dos,  en  Cane,  découverte  par  M.  Paton,  confirme 


Crat)au;i*  ties  Sociétés  gatiaiites. 


245 


le  témoignage  du  premier  livre  des  Machabées 
sur  l'existence  d'une  communauté  juive  dans 
cette  localité  ;  elle  fournit  un  nom  inédit,  Theo- 
pimpta,  et  un  nouvel  exemple  d'une  femme  ar- 
chisynagogue,  c'est-à-dire  chef  honoraire  de  la 
Synagogue. 

M.  Thureau-Dangin  présente  un  essai  de  tra- 
duction de  l'inscription  où  le  souverain  chaldéen 
Gondia  raconte  un  songe  que  les  dieux  lui  ont 
suggéré  pour  l'avertir  de  construire  un  temple. 

M.  de  Barthélémy  présente  une  brochure  de 
M.  Adrien  Blanchet,  les  Camées  de  Bourges.  C'est 
une  note  intéressante  sur  les  gemmes  qui,  jus- 
qu'à la  fin  du  XVIIIs^  siècle,  ornaient  un  reli- 
quaire dit  de  la  Croix  aux  camées,  appartenant 
à  la  cathédrale  de  Bourges. 

Séance  du  8 février.  —  M.  Oniont  communi- 
que une  lettre  de  M.  J.-J.  Smirnoff,  conserva- 
teur du  musée  de  l'Ermitage  àSaint-Pétersbourg, 
qui  signale  l'existence  au  musée  du  Gymnase  de 
Marioupol,  au  Nord  de  la  mer  d'Azov,  d'un 
feuillet  isolé  du  manuscrit  pourpre  en  lettres 
onciales  d'or  de  l'Évangile  de  saint  Matthieu, 
découvert  à  Sinope,  et  acquis,  l'an  dernier,  par  la 
Bibliothèque  nationale.  Ce  nouveau  feuillet,  dont 
une  photographie  a  été  communiquée  par  M.  D. 
Aïnaloff,  professeur  à  l'Université  de  Kazan,  à 
la  Société  impériale  archéologique  russe  de 
Saint-Pétersbourg,  le  4  février  dernier,  contient 
le  texte  des  versets  9  a  16  du  chapitre  18  de 
l'évangile  de  saint  Matthieu. 

M.  Ph.  Berger  communique  une  lettre  de  M. 
Perdrizet,  relative  à  une  inscription  latine  décou- 
verte par  le  P.  Ronzevalle,  dans  laquelle  il  a  pu 
retrouver  la  triade  qui  était  adorée  à  Baalbek. 
Cette  triade  se  composait  de  Jupiter,  Vénus  et 
Mercure.  M.  Perdrizet  explique  par  là  la  pré- 
sence de  l'aigle  tenant  dans  ses  serres,  au  lieu 
de  la  foudre,  le  caducée,  sur  le  soffite  de  la  porte 
d'entrée  d'un  des  temples  de  Baalbek. 

M.  de  Vogué  présente,  au  nom  des  auteurs, 
MM.  R.  Dussaud  et  F.  Mackler,  un  volume  ren- 
fermant le  résultat  de  l'exploration  qu'ils  ont 
faite  en  commun  du  Safa  et  du  Diebel-ed-Draz, 
région  explorée  il  y  a  près  de  quarante  ans  par 
M.  de  Vogiié  et  M.  Waddington.  De  nombreuses 
inscriptions  nabatéennes  et  safaïtiques  ont  été 
rapportées,  qui  complètent  les  collections  anté- 
rieures. 

L'abbé  Thédenat,  après  avoir  rendu  hommage 
à  la  mémoire  de  M.  Emile  Pierre,  dont  la  mort 
récente  a  été  une  grande  perte  pour  l'archéologie 
de  l'Est  de  la  Gaule,  présente  plusieurs  antiquités 
que  le  regretté  archéologue  lui  avait  commu- 
niquées. 

M.  P.  Foucart  lit  une  note  sur  une  statue 
égyptienne  découverte  en  Crète  par  M.  Evans. 


Séance  du  15  février.  —  M.  S.  Reinach  commu- 
nique le  croquis  de  la  partie  supérieure  d'une 
statue  de  bronze,  de  grandeur  naturelle,  décou- 
verte dans  la  mer  auprès  de  l'île  de  Cérigo.Cette 
statue,  représentant  Hermès  dans  l'attitude  de 
l'orateur,  paraît  être  un  chef-d'œuvre  de  l'art  du 
IV=  siècle;  c'est,  d'autre  part,  la  première  statue 
de  bronze  de  grandeur  naturelle  et  de  l'époque 
classique  qui  ait  été  découverte  en  Grèce.M. Rei- 
nach la  rapproche  d'une  statue  analogue,  qui  a 
été  découverte  en  Autriche  et  se  trouve  aujour- 
d'hui au  musée  de  Vienne. 

M.  l'abbé  Thédenat  s'occupe  d'une  bague  en 
bronze,  trouvée  à  Naix  (Meuse).  L'intérêt  excep- 
tionnel de  cette  bague  consiste  dans  ce  fait  que 
c'est  le  seul  monument  connu  qui  donne  la 
preuve,  jusqu'ici  inutilement  cherchée,  que  les 
Romains  ont  fait  usage  de  caractères  mobiles. 

M.  Viollet  donne  lecture  d'une  étude  sur  les 
États-Généraux  du  XIV'=  siècle. 

M.  Bertrand  présente,  au  nom  de  l'auteur, 
M.  Forestier,  un  opuscule  intitulé  la  Roue,  étude 
paléotechnique.  On  y  suit  les  transformations  de 
la  roue  depuis  les  temps  préhistoriques  jusqu'à 
nos  jours  ;  ce  travail  est  illustré  de  cent  soixante 
et  une  figures,  dont  quelques-unes  sont  particu- 
lièrement curieuses. 

M.  Ph.  Berger  dépose  sur  le  bureau  les  Anti- 
quités puniques  du  musée  Lavigerie,  publiées  par 
les  soins  du  ministère  de  l'instruction  publique, 
dans  la  collection  des  musées  de  l'Algérie  et  de 
la  Tunisie.  Les  monuments  de  la  période  romaine 
et  ceux  de  l'archéologie  chrétienne  avaient  déjà 
paru.  Une  introduction  de  M.  Héron  de  Ville- 
fosse  retrace  l'histoire  de  ce  musée,  dû  à  l'initia- 
tive du  cardinal  Lavigerie,  et  donne  une  idée 
d'ensemble  des  collections  qui  y  sont  réunies.  Il 
suffit  de  parcourir  les  planches  pour  se  rendre 
compte  du  progrès  considérable  que  les  fouilles 
de  Carthage  ont  fait  faire  à  notre  connaissance 
de  l'antiquité  punique.  Rien  ne  saurait  mieux 
démontrer  combien  l'Académie  a  été  heureuse- 
ment inspirée  en  subventionnant  si  largement, 
depuis  nombre  d'années,  les  fouilles  du  P.  De- 
lattre. 

Séance  du  22  février.  —  M.  Enlart  commente 
divers  débris  d'édifices  français  découverts  ré- 
cemment à  Nicosie  de  Chypre  et  dont  le  major 
Chamberlayne  lui  a  envoyé  des  dessins  et  des 
photographies.  Il  signale, notamment, une  sculp- 
ture gothique  du  XV«  siècle  représentant  un 
masque  de  satyre  grec.  La  plus  importante 
de  ces  découvertes  est  celle  des  substructions  du 
monastère  de  Saint-Dominique  où  furent  enter- 
rés les  rois  de  Chypre,  un  fils  de  saint  Louis  et 
d'autres  personnages  illustres.  Des  portions  du 


246 


Bebue  De  l'^lvr  cbvétieu. 


cloître  du  XIV'^  siècle  ont  été  retrouvées  et 
sont  intéressantes  par  leur  ressemblance  avec 
le  cloître  de  Lapais,  bâti  également  par  le  roi 
Hugues  IV. 

M.  Wallon,  secrétaire  perpétuel,  présente,  au 
nom  de  M.  Mùntz,  un  ouvrage  de  IVI.  Ch.  Nor- 
mand, la  Côte  nonnande  à  travers  les  âges,  un 
nouveau  guide  artistique  et  archéologique,  avec 
de  nombreuses  illustrations  reproduisant  même 
les  édifices  disparus. 

M.  S.  Reinach  donne  lecture  d'une  lettre  de 
M.  Cavvadias,  directeur  général  des  antiquités 
en  Grèce,  au  sujet  de  quatre  grandes  statues 
de  bronze  qui  viennent  d'être  retirées  de  la 
mer  près  de  Cérigo.  Une  de  ces  statues,  repré- 
sentant Hermès  orateur,  ou  un  éphèbe  tenant 
une  balle,  est  le  spécimen  le  plus  parfait  que 
l'on  connaisse  de  l'art  des  bronziers  grecs  au 
IV""  siècle. 

La  lettre  de  M.  Cavvadias  est  accompagnée 
de  photographies  qui  seront  publiées  dans  le 
Bulletin  de  l'Académie. 

Miniatures  du  Musée  Condé.  —  M.  Léon  Dorez 
essaye  d'établir,  à  l'aide  d'un  travail  de  M.  le 
docteur  J.  de  Schlosser,  que  les  peintures  sur 
parchemin  contenues  dans  les  manuscrits  du 
Musée  Condé,  à  Ciiantilly,  ont  servi,  pour  ainsi 
dire,  de  «  carton  »  à  l'auteur  des  fresques  de  la 
chapelle  des  Cortellieri,dans  l'église  des  Emeri- 
tani  de  Padoue,  exécutées  vers  1370. 

Séance  du  S  mars.  —  M.  S  Reinach  commu- 
nique une  étude  très  documentée  sur  les  différents 
portraits  de  l'empereur  Julien.  Une  série  de  dé- 
ductions lui  permet  d'écarter,  faute  de  ressem- 
blance, les  deux  statues  conservées  à  Paris  :  l'une 
au  Louvre,  l'autre  aux  Thermes,  que  l'on  donne 
généralement  coinme  représentant  cet  empereur. 
En  revanche,  il  exprime  le  vœu  que  la  Ville  de 
Paris  obtienne  de  la  Ville  d'Acerenza,  en  Apu- 
iie,  le  moulage  d'un  buste  de  Julien,  conservé 
dans  la  cathédrale  de  cette  ville,  et  qui  est  cer- 
tainement authentique. 

Sociedad  esparlola  de  excursiones.  — 
L'excellent  Boletin  de  la  dite  Société,  année  1900, 
(264  pp.,  35  planches  hors  texte  et  nombreuses 
figures  dans  le  texte),  renferme  un  bon  nombre 
d'études  qui  ne  doivent  pas  rester  inconnues  des 
amateurs  d'art  et  d'archéologie,  étrangers  à  l'Es- 
pagne. 

Nous  réclamons,  ailleurs,  que  les  titres  des 
ouvrages  soient  donnés  dans  la  langue  où  ils  sont 
écrits,  quand  les  indications  bibliographiques 
ont  place  dans  des  travaux  sérieux.  Mais  un  arti- 
cle comme  celui-ci  peut  avoir,  en  français,  les 
titres   des  études  parues  dans   le   Boletin  ;  de  la 


sorte,  les  lecteurs  de  la  Revue  les  comprendront 
immédiatement. 

Dans  la  partie  intitulée  :  Excursions,  voici  les 
articles  publiés  :  Excursion  à  travers  l'Espagne 
arabe,  par  D.  Luis  Cabello  ;  — Excursions  archéo- 
logiques, par  D.  Enrique  S.  Fatigati  ;  —  Impres- 
sions d'une  visite  à  Ségûvie,  pAr  D.  Alonzo  Jara  ; 

—  Olmedo  par  D.  José  Igual  ;  —  Notes  d'une 
excursion  à  Coca,  par  D.  .Alonzo  Jara  ;  —  Voyage 
des  Ducs  d' Alhrantes  au  Saint  Désert  des  Barnecas 

—  Excursion  à  Sotosalvos,  par  D.  V.  Escolar. 

La  section  des  Sciences  historiques  comprend  : 
Souvenirs  de  Tolède  au  Moyen  Age,  par  D.  R. 
Amador  de  los  Rios  ;  —  Notes  pour  l'histoire  de 
t  Architecture  en  Espagne,  par  D.Pedro  .V.  Beren- 
guer  ;  —  Safo,  par  D.  Benito  Vila  ;  —  Doua 
Maria  Henriquez  y  Toledo,  par  le  marquis  de 
Serralbo  ;  — •  Epigrapliie  arabe,  par  D.  R.  Ama- 
dor de  los  Rios  ;  —  Le  Cavalier  ibérique,  par  D. 
José  Ramon  Melida;  —  La  Sculpture  romane  en 
Espagne,  par  D.  Enrique  S.  Fatigati  ;  — •  Reliefs 
de  chapiteaux,  par  le  même. 

Dans  la  section  des  Beaux- Arts  :  Les  an- 
ciennes peintures  sur  bois,  du  Musée  du  Prado,  par 
D.  Narcisso  Sentenach  ;  —  Inventaire  graphique 
des  monuments  espagnols,  par  D.  Enrique  Serrano 
Fatigati  ;  —  Les  anciens  tableaux  iC origine  étran- 
gère, an  Musée  du  Prado,  par  D.  Narcisso  Sente- 
nach ,  —  Artistes  exhumés,  par  D.  Raphaël  Ra- 
mirez  de  Arellano  ;  —  Sculptures  du  XII'^  siècle 
et  du  XI IP,  par  D.  ICnrique  S.  Fatigati. 

Les  conférences  données  à  la  Société  com- 
prennent les  sujets  suivants  :  Ciudad- Rodrigo , 
par  D.  Felipe  B.  Navarro  ;  —  f^e  Byzantinisnie 
dans  l' Architecture  chrétienne  espagnole,  par  D. 
Vicente  Lamperez  ;  —  L'église  majeure  de  Lebri- 
da,  par  D.  Adolfo  F.  Casanova. 

Presque  tous  ces  articles  mériteraient  une  men- 
tion particulière.  A  notre  vif  regret,  nous  ne  pou- 
vons l'accorder  qu'à  un  nombre  fort  limité  d'entre 
eux.  Ce  nous  est  un  bonheur,  par  exemple,  de 
signaler  les  nouvelles  étuiles  de  D.  Enrique  S. 
Fatigati,  sur  la  sculpture  romane.  Les  bas-reliefs 
examinés  sont  nombreux  ;  beaucoup  d'entre  eux, 
non  seulement  de  l'Espagne,  mais  de  la  France, 
que  l'infatigable  professeur  connaît  très  bien, 
sont  cités  à  propos  et  lui  suggèrent  nombre  de  ré- 
flexions ingénieuses  et  précises.  —  Excellente  et 
savante  étude  que  celle  de  D.  José  Ramon 
Melida  sur  le  Cavalier  ibérique.  Les  monuments 
figurés  dans  cet  article  sont  d'un  choix  très  heu- 
reu.x;  les  ouvrages  cités  sont  itidiqués  d'une  façon 
exacte  et  complète  dans  leur  brièveté  ;  l'exem- 
ple est  à  signaler  au.x  collaborateurs  du  Boletin. 

Nous  applaudissons  à  l'idée  qu'a  eue  D.  Narci- 
so  Sentenach  d'examiner  rapidement  les  pein- 
tures sur  bois,  conservées  au  Prado  ;  les  unes  sont 


%xa\)à\ix  lïe0  t)octété0  gatjautes. 


247 


espagnoles,  bien  qu'un  certain  nombre  d'entre 
elles  portent  la  marque  des  arts  italien,  flamand 
ou  allemand  ;  d'autres  appartiennent  sans  con- 
teste à  ces  divers  arts,  par  exemple,  une  Annon- 
ciation de  Fra  Angelico,  et  différentes  œuvres  de 
Peter  Christus,  de  Van  der  Weyden,  de  Quin- 
tin  Metsys,  etc..  La  critique  moderne  a  cessé 
d'attribuer  plusieurs  œuvres  capitales  du  Prado 
à  Van  Eyck  ou  à  Van  der  Weyden,  et  D.  Nar- 
cisse Sentenach  s'incline  devant  l'opinion  des 
vrais  spécialistes  en  la  matière.  C'est  la  preuve 
d'un  amour  sincère  et  loyal  de  la  vérité.  —  D. 
N.  Sentenach  aurait  donné  à  ses  études  plus  de  va- 
leur scientifique,  s'il  avait  cité  plus  souvent  et  très 
exactement  les  ouvrages  des  écrivains  belges  et 
français  auxquels  il  fait  allusion.  Mais,  malgré 
cette  lacune,  les  deux  articles  sont  excellents, 
et  nous  espérons  que  l'auteur  qui  a  un  faible 
pour  les  anciennes  peintures,  saura  exploiter  le 
terrain  si  riche  qui  s'offre,  en  Espagne,  à  de  pa- 
reilles investigations. 

A  signaler  encore  la  conférence  très  intéres- 
sante que  D.  Felipe  B.  Navarro  a  donnée  à  la 
Société  sur  Ciudad-Rodrigo.  Les  monuments 
de  cette  petite  ville  y  sont  décrits  avec  le  soin 
et  la  précision  qui  caractérisent  le  savant  espa- 
gnol. Notons,  en  particulier,  le  long  passage 
consacré  aux  signes  lapidaires,  trouvés  sur  les 
murs  de  la  cathédrale  et  de  plusieurs  autres 
monuments.  D.  Felipe  B.  Navarro  s'est  voué  d'une 
façon  spéciale  à  l'étude  de  ces  signes,  presque 
toujours  incompréhensibles.  Contrairement  à  son 
dire,  nous  avons  le  ferme  espoir  que  le  résultat 
de  ses  recherches  ne  lui  vaudra  pas  «  un  diploma 
de  perfecto  visionario  », parce  qu'il  les  poursuivra 
avec  la  prudence  qui  convient  en  pareils  sujets. 
Pourquoi,  même,  s'il  se  trouve  engagé  dans  les 
sentiers  d'un  labyrinthe  mystérieux, ne  quitterait- 
il  pas  cette  voie  qui  pourrait  facilement  abou- 
tir à  des  résultats  stériles,  sinon  à  des  déceptions 
pénibles  ? 

Enfin, nous  signalons, recommandons  et  louons, 
comme  elle  le  mérite,  l'étude  singulièrement 
attachante  de  D.  Vicente  Lamperez  y  Romea  : 
Le  Byzantinisme  dans  l'architecture  espagnole. 
Rien,  dans  tout  le  Boleiin,  nous  l'avouons,  ne 
nous  a  charmé  et  retenu  comme  cette  conférence 
si  intéressante  pour  tous  ceux  qui  aiment  l'art 
byzantin  —  et  ils  deviennent  nombreux,  —  sur 
un  sujet,  en  grande  partie  inconnu  en  France,  où, 
cependant,  les  études  qui  se  rapportent  à  l'art  de 
la  vieille  Hyzance  sont  à  l'ordre  du  jour.  —  Nous 
avons  dit  autrefois  à  D.  Vicente  Lamperez  que, 
sur  tel  et  tel  point  relatif  à  l'église  romane  de 
Silos,  nous  ne  partagions  pas  tout  à  fait  ses 
idées.  Cette  réserve  faite,  l'étude  de  l'auteur  nous 
paraît   toujotirs  très  ingénieuse  et  appuyée  sur 


de  solides  raisons.  D'excellents  petits  dessins 
ajoutent  leur  intérêt  à  celui  que  leur  donnait 
déjà  la  compétence  d'un  homme  du  métier,  d'un 
architecte  qui  a  vu  et  comparé  la  plupart  des 
églises  à  coupole  de  la  péninsule. 

La  direction  du  Boletin  nous  permettra  de  for- 
muler quelques  désirs  :  que  les  vignettes,  dissé- 
minées dans  le  texte, portent  toujours  une  légende 
et  que  les  planches  soient  numérotées,  afin  que 
les  auteurs  puissent  sans  peine  y  renvoyer  les 
lecteurs  ;  puis,  que  des  tables  de  cette  double 
classe  de  documents  se  trouvent  à  la  fin  de 
chaque  voulume.  Ces  ainéliorations  seront  un 
secours  pour  ceux  qui  veulent  profiter  des  études 
du  bulletin  espagnol,  —  et  nous  sommes  du  nom- 
bre. Une  Revue  doit  offrir  ces  avantages  aux 
lecteurs,  pour  être  classée  parmi  les  publications 
utiles  et  sérieuses. 

Dom  E.  RoULiN. 


Gilde  de  Saint-Luc  et  de  Saint-Joseph  à 
Gand.  —  Les  anciens  élèves  de  l'Ecole  de  Saint- 
Luc  ont,  depuis  longtemps  déjà,  formé  sous  ce 
titre  un  cercle  ayant  pour  objet  des  relations  mu- 
tuelles amicales,  la  défense  des  intérêts  de  l'école 
et  l'étude.  Cette  vivante  confrérie  a  pour 
«  Doyen  »  le  distingué  architecte  provincial  de 
Gand,  M.  Et.  Mortier. 

La  Gilde  vient  de  publier  un  fascicule  de  ses 
modestes  mais  intéressants  travaux. Nous  y  trou- 
vons un  aperçu,  au  point  de  vueartistique,  de  l'ex- 
position de  Paris, par  M. Van  Houcke,et  une  notice 
du  même  auteur  sur  l'hôtel  de  ville  de  Binche, 
restauré  par  un  membre  de  la  Gilde,  .\L  Lange- 
rock.  La  double  planche  qui  est  jointe  à  cet  article 
est  des  plus  curieuses  ;  elle  montre  l'aspect  du 
petit  hôtel  municipal  avant  et  après  la  restaura- 
tion, qui  a  été  faite,  disons-le  en  passant,  de  main 
de  maître.  On  ne  peut  se  figurer  plus  complète 
métamorphose;  jamais  on  n'a  pu  voir  un  édifice 
médiéval  plus  curieusement  travesti  que  ne  l'avait 
été  celui-ci.  La  moitié  du  comble  et  les  deux 
tiers  de  la  svelte  tour  avaient  disparu  sous  une  fa- 
çade postiche  précédéed'un  portique  classique  et 
agrémentée  de  fenêtres  à  la  romaine,  couronnée 
d'un  entablement  complet  avec  architrave,  frise 
et  corniche.  Si  les  Binchois  n'avaient  assisté  au 
travail,  ils  devraient  croire  qu'on  leur  a  escamoté 
pendant  leur  sommeil  leur  hôtel  de  ville  pour  y 
substituer  un  autre  édifice,  ou  qu'il  a  été  rasé  et 
rebâti  de  neuf  II  n'a  été  que  déshabillé  de  son 
burlesque  accoutrement  et  habilement  restauré 
par  un  de  ces  néfastes  «  pasticheurs  >  de  Saint-Luc 
qui  font  le  désespoir  de  AL  Fierens  Gevaert.  Pen- 
sez donc!  On  a  détaché  de  la  façade  ces  avant- 
corps  en  plâtre  surmontés  de  frontons  ou  de 
larmiers, dans  lesquels  s'ouvraient  des  baies  plein- 


248 


Bcl)ue  De  rSvt  cbvctien. 


cintre  à  chambranles,  et  l'on  a  rétabli  lestrois 
grandes  arcades  en  cintre  brisé  formant  un  triple 
portail.  Au  lieu  de  ressembler  à  une  demeure 
bourgeoise  bien  close  du  XVII 1=  siècle,  l'édifice 
s'annonce  maintenant  comme  la  maison  com- 
mune, longue  et  ouverte  à  tout  venant.  Des 
croisées  à  meneaux  éclairent  abondamment  la 
salle  de  l'étage  ;  une  jolie  corniche  à  corbeaux, 
interrompue  par  une  fenêtre  de  toit,  souligne  le 
grand  comble  hérissé  de  lucarnes  ;  le  pignon  est 
découpé  en  gradins.  L'élégant  beffroi  se  voit  à 
présent  fièrement  planté  en  façade  comme  une 
ajoute  coquette  de  la  première  renaissance.  Des 
bas-reliefs  héraldiques  et  des  ancres  ouvragées 
décorent  la  façade,  en  pierrede  Bray,  savamment 
appareillée.  C'est  un  vrai  scandale  pour  les  ad- 
versaires de  toute  restauration,  mais  c'est  pour 
beaucoup  d'autres  une  résurrection  charmante, 
inespérée,  dont  la  jolie  cité  de  Binche  a  le  droit 
d'être  fière,  ainsi  que  M.  Langerock,  ancien  élève 
de  Saint-Luc.  L.  C. 

Société  d'archéologie  de  Bruxelles.  —  Le 
t.  XIII  (1899)  contient  un  important  travail 
de  M.  J.  Destrée  sur  la  sculpture  brabançonne 
au  moyen  âge.  La  première  partie  de  ce  travail 
a  paru  en  1896. 

M.  Destrée  rend  au.K  ateliers  brabançons  de 
sculpture,  trop  négligés  jusqu'ici,  la  place  qu'ils 
méritent  dans  l'histoire  de  l'art,  en  montrant 
«  qu'à  partir  du  XI  Vi?  siècle,  il  a  existé  en  Bra- 
bant  une  école  florissante  de  sculpture  dont 
l'influence  au  XV<î  siècle  a  été  prépondérante.  » 

Avant  le  XI V'^  siècle,  l'art  indigène,  placé  en- 
tre les  influences  allemande  et  française,  ne  se 
révèle  que  par  intermittences  ;  mais  au  XIV<= 
siècle  l'école  régionale  est  en  pleine  prospérité, 
ses  œuvres  se  multiplient  et  se  répandent  dans 
les  pays  voisins;  ses  élèves  sont  à  la  tête  du 
mouvement  artistique  et  en  tiennent  la  direction 
jusqu'au  milieu  du  XV«  siècle.  M.  Destrée  étu- 
die notamment  les  retables  de  Megen  (proprié- 
té du  comte  de  Nahuys)  et  de  Villers-la-Ville, 
ainsi  que  certains  monuments  funéraires,  entre 
autres  des  œuvres   auxquelles  Jacques  de   Geri- 


nés  a  attaché  son  nom,  tel  le  célèbre  tombeau 
de  Louis  de  Maele,  à  Lille. 

M.  Th.  de  Raedt,daiis  sa  notice  sur  la  peintu- 
re murale  à  l'huile  de  la  grande  boucherie  à  Gand, 
prétend  que  cette  peinture  n'a  plus  de  valeur  do- 
cumentaire. Les  restaurations  qu'elle  a  subies  au 
XVII'"  et  au  XI.X'^'  siècle,  ne  permettraient  plus 
d'y  étudier  la  peinture  à  l'huile  et  ses  procédés 
au  XVe  siècle.  Cette  opinion  est  loin  d'être 
admise  à  Gand. 

Dans  le  t.  XIII,  M.  Raeymaekers  étudie  les 
fonts  baptismaux  de  l'ancienne  église  de  Ruinmen 
(canton  de  Léau).  M.  Raeymaekers  décrit  ces 
fonts  remarquables,  qu'il  croit  devoir  attribuer 
au  XIII"=s.,et  qui  sont  peut-être  plus  anciens('). 

M.  Edgar  Baes,  sous  le  titre  Gérard  David  et 
Vêlement  étranger  dans  la  peinture  flamande  du 
XV'  au  XVI'  siècle,  a  réuni  une  série  de  notes 
sur  G.  David  et  J.  Joest.  En  voici  la  conclu- 
sion :  «  la  situation  politique  de  nos  provinces  a 
toujours  formé  nos  artistes  à  une  espèce  de  su- 
bordination envers  l'étranger,  tandis  que  ce  der- 
nier venait  presque  en  conquérant  profiter  des 
fruits  plantureux  produits   par  notre  sol.  » 

Cercle  archéologique  d'Enghien.  —  Dans 
\es  annales,  très  tardivement  parues  l'année  1894- 
1898,  signalons  de  M.  l'abbé  C.  Diijardin  (ancien 
curé  du  lieu)  (2)  Dates  mémorables  de  l'histoire 
de  Braine-le  Comte.  Ce  sont  des  éphémérides  de 
cette  commune;  du  même,  en  collaboration  avec 
M.  l'abbé  Croquet  :  Glossaire  toponymique  de  la 
ville  de  Brainede-Comte,w\\  des  meilleurs  travaux 
de  ce  genre  et  qu'on  peut  offrir  en  modèle;  de 
MM.  Delvin  et  Guignies  :  Notice  historique  sur 
la  commune  de  Rievcnc,  étude  importante  et  bien 
faite;  de  M.  E.  Matthieu  :  L'ancienne  grange  -des 
pauvres  à  Braine-le-Comte,  de  M.  le  comte 
Maurice  de  Naliuis  :  Plaque  de  cheminée  aux 
armes  de  Ch.Attg.  auc  d A renberg  {lô^yiôSi). 

L.  C. 


1.  V.  Revue  de  C  Art  chrétien,  année  1900,  p,  270. 

2.  La   paroisse   di    Braine-lcComle.   Souvenirs   historiques   et 
religieux  :  elles  sont  suivies  d'une  biographie  brainoise.   1889. 


^i^:i^i,:^^^i^tÉk^MMMMMMM;^^^^^^^^^^^ 


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DIE  WANDGEMAELDE  IM  KREUZGANGE 
DES  EMAUSKLOSTERS  IN  PRAG,  VOn  D' 
Joseph  Neuwirth  mit-34  Tafeln  und  13  Abbildangen 
im  Texi.  Prag,  Joseph  Koch,    1898. 

LES  PEINTURES  MURALES  DU  CLOITRE 
DE  L'ÉGLISE  D'EMMAUS,  A  PRAGUE,  avec 
34  planches,  et  13  figures  dans  le  texte. 

•a.îa&sa^:î*j£j^\  une  première  fois  nous  avons 
^  rendu  compte  dans  la  Revue  d'un 
travail  considérable  de  M.  le  docteur 
Neuwirth  surlss  peintures  qui  déco- 
*^^^^ ^p.W'^A  raient  autrefois  le  célèbre  château 
de  Karlstein  en  Bohême,  dont,  heureusement, 
bonne  partie  est  encore  conservée  (■).  A  cette 
première  étude,  qui  assurément  forme  une  con- 
tribution importante  à  l'histoire  d'une  école  de 
peinture  alors  encore  imparfaitement  connue,  le 
même  auteur  a  ajouté  depuis  des  recherches  nou- 
velles, tout  aussi  approfondies  et  de  même  va- 
leur. Si  nous  sommes  en  retard  pour  appeler 
l'attention  sur  la  publication  dont  le  titre  figure 
en  tête  de  ces  lignes,  c'est  que,  malheureusement, 
il  n'est  pas  toujours  possible,  en  présence  des 
livres  nombreux  et  de  véritable  mérite  qui  sur- 
gissent de  toutes  parts  sur  l'histoire  des  arts,  de 
demeurer  au  courant,  comme  cela  serait  bien  dé- 
sirable. Ceux  de  M.  Neuwirth,  fort  heureuse- 
ment, ne  vieillissent  pas  en  peu  d'années  ;  il 
épuise  la  matière  qu'il  traite,  il  n'y  a  pas  à 
craindre  que,  de  sitôt,  on  cherche  à  les  refaire 
au  moyen  d'études  plus  fouillées  et  de  recher- 
ches plus   approfondies. 

Voici  en  peu  de  mots  l'historique  du  monu- 
ment dont  le  cloître  contient  les  peintures  mu- 
rales décrites  et  reproduites  dans  l'ouvrage  de 
M.  Neuwirth. 

En  1348  fut  fondée  à  Prague,  sur  le  désir  du 
roi  Charles  IV  et  de  l'assentiment  du  pape  Clé- 
ment IV,  une  abbaye  bénédictine.  Cette  commu- 
nauté, ayant  pour  objet  d'amener  à  l'Église 
catholique  les  populations  slaves,  la  plupart  des 
religieux  étaient  de  cette  nationalité  ;  ils  en  ob- 
servaient les  rites  particuliers  et  se  servaient, 
autant  que  possible,  de  la  langue  slave.  La 
nouvelle  maison  était  fondée  sous  le  vocable  des 
Saints  Cosme  et  Damien,  et  la  première  pierre 
fut  posée  solennellement  en  présence  du  roi  de 
Bohême. 

La  construction  de  l'abbaye  et  de  son  église 
réclama  un  quart  de  siècle  :   la   consécration   ne 

1. Revue  de  C Art  chrétien,  année  1897,  pp.  93-98,  215-220. 


put  avoir  lieu  que  le  lundi  de  Pâques  de  l'an  1373. 
L'abbaye  paraît  avoir  été  bâtie  avec  un  certain 
faste  ;  on  sait  que  les  toits  étaient  couverts  en 
tuilesde  couleur,  et  lesflèches  destours  en  feuilles 
de  plomb  dorées  qui  étincelaient  au  loin.  A 
cause  du  jour  choisi  pour  la  consécration,  l'ab- 
baye prit  dans  la  bouche  du  peuple,  le  nom 
d'Emmaiis,  et  ce  nom  lui  est  resté. 

Malheureusement  les  religieux  par  leur  vie  et 
le  peu  de  régularité  de  leur  discipline,  ne  parais- 
sent pas  avoir  répondu  aux  intentions  des  fon- 
dateurs. 

Le  16  octobre  1419,  une  troupe  armée  de  Hus- 
sites  vint  assaillir  la  maison  religieuse  et  lui 
imposa,  sous  menace  de  pillage,  l'obligation 
d'introduire  le  rite  de  la  communion  sous  les 
deux  espèces.  L'abbé  semble  avoir  cédé  à  cette 
injonction  sans  trop  de  difficulté,  et  sous  le  régime 
des  Hussites,  la  communauté  déclina  toujours 
davantage  jusqu'à  l'avènement  de  Rodolphe  II. 

Sous  le  règne  de  cet  empereur,  qui  fut  un 
grand  protecteur  des  beaux-arts  en  Bohême,  et 
qui  à  cet  égard  peut  être  regardé  comme  le  con- 
tinuateur du  roi  Charles  IV,  l'abbaye,  redevenue 
catholique,  reprit  un  régime  régulier. 

En  161 1,  la  maison  fut  pillée  complètement 
d'abord  par  les  soldats  hongrois  de  l'empereur 
Mathias,  et  ensuite  par  les  protestants.  Enfin, 
après  bien  des  destinées  adverses,  l'abbaye  est 
de  nouveau  échue  en  18S0  au.x  religieux  béné- 
dictins de  la  communauté  de  Beuron,  et  sous  la 
direction  de  Dom  Wolter,  elle  reprit  toutes  les 
anciennes  traditions  de  l'Ordre. 

L'auteur  auquel  nous  empruntons  ces  données 
historiques,  se  plaît  à  rendre  justice  aux  nou- 
veaux habitants  d'Emmaiis,  en  ce  qui  concerne 
leursollicitude  pour  lesœuvres  d'art  qui  existent 
dans  leurs  maisons.  Malgré  les  vicissitudes  de 
toute  nature,  les  troubles  et  les  pillages,  l'en- 
semble des  constructions  de  l'abbaye  n'a  pas 
subi  d'importantes  modifications,  à  l'exception 
des  tours  qui  ont  été  bâties  en  1712. 

Le  cloître,  notamment,  qui  contient  les  peintures 
murales  auxquelles  est  consacrée  l'étude  que 
nous  analysons,  n'a  subi  aucun  changement  dans 
ses  dispositions  primitives  ;  il  est  établi  au  côté 
méridional  de  l'église.  Le  vaste  cycle  de  pein- 
tures se  trouve  aujourd'hui  dans  un  état  qui, dans 
maint  détail,  raconte  les  douloureuses  destinées 
de  la  maison.  Si  dans  son  ensemble,  il  date,  à  peu 
d'années  près,  de  l'achèvement  du  monument,  il  a 
dans  certaines  parties,  subi  im  certain  nombre 
d'additions    postérieures  et   de   réparations  sur 


250 


Bclluc  lie  ravt  cljrcticn. 


lesquelles  nous  allons  revenir  ;  mais  malgré  ces 
outrages,  des  retouches  et  des  violences  de  toute 
sorte,  les  peintures  du  cloître  de  l'abbaye  d'Em- 
maiis  offrent  dans  leur  ensemble  l'œuvre  la  plus 
importante  de  ce  genre  qui  se  trouve  de  ce 
côté-ci  des  Alpes.  Telle  est  du  moins  l'opinion  de 
Schnaase,  de  Janitschek  et  d'autres  archéologues 
allemands,  qui  les  ont  étudiées  avec  soin. 

La  pensée  qui  relie  entre  elles  les  compositions 
de  ce  vaste  cycle,  est  la  même  qui  a  inspiré  les 
images  si  populaires  des  Biblia  paupeimn  et  des 
Spectiltiin  himiame  salvatioiiis;  comme  dans  ces 
recueils,  leur  objet  est  l'enseignement,  l'édifica- 
tion, la  méditation  du  chrétien  qui,  en  les  contem- 
plant, vient  en  quelque  façon  nourrir  sa  piété  et 
inspirer  son  oraison.  A  chacun  des  côtés  du 
cloître,  l'artiste  a  voulu  développer  une  idée  con- 
crète,une  pensée  d'ensemble, laquelle  vient  ensuite 
se  rattacher  au  thème  général  qui  relie  entre  eux 
les  différents  chapitres  de  cette  «  histoire  ».  L'aile 
méridionale  offre  une  série  d'images  représentant 
l'attente,  la  préparation  à  l'avènement  du  Christ; 
celle  de  l'Ouest  retrace, dans  une  suite  d'épisodes, 
la  Nativité  du  Sauveur  et  la  préparation  à  la  vie 
publique  jusqu'au  baptême  et  sa  tentation  par 
le  démon.  Au  .^Jord  du  cloître,  l'artiste  a  figuré  la 
vie  active  du  Messie,  sa  vie  publique,  ses  prédi- 
cationsappuyées  par  des  miracles;  à  l'Orient  enfin, 
c'est  l'entrée  triomphale  à  Jérusalem  qui  sert 
comme  de  prologue  aux  scènes  de  la  Passion 
douloureuse,  puis  enfin  vient  la  Glorification  du 
Fils  de  Dieu  et  la  Descente  du  Snint-Esprit  sur 
les  apôtres.  Dans  les  angles  de  ce  quadrilatère 
sont  peintes  des  scènes  servant  en  quelque  sorte 
de  transition  entre  les  images  appartenant  aux 
différents  ordres  d'idées  que  nous  venons  d'indi- 
quer. Comme  dans  les  Biblia  pauperum,  les 
grandes  scènes  de  la  Passion  du  Christ  sont  mi- 
ses en  relation  et  en  quelque  façon  commentées 
par  les  figures  et  les  événements  de  l'ancien  Tes- 
tament. A  ce  point  de  vue  surtout,  ce  cycle  est 
de  la  plus  haute  importance.  Quelques  peintures 
représentant  des  Saints  d  Ordres  religieux  ou  de 
nationalité  slave  viennent  interrompre  d'une  ma- 
nière assez  malencontreuse  les  développements 
du  grand  thème  de  cet  ensemble  si  logiquement 
établi  ;  M.  Neuwirth  les  considère  à  juste  titre 
comme  des  interpolations  introduites  après  coup. 

Les  planches,  qui  initient  le  lecteur  de  l'étude 
de  M. Neuwirth  au  caractère  et  a  la  valeur  réels 
du  cycle  monumental  d'Einmaiis,  sont  remarqua- 
bles; elles  sont  exécutées  avec  une  conscience, un 
soin,  j'allais  écrire,  une  piété  qui  méritent  une 
mention  d'autant  plus  honorable  que  la  tâche 
était  plus  ardue  et  plus  ingrate. 

Il  faut  se  rappeler  tout  d'abord  que  ces  pein- 
tures datent  du  troisième  quart  du    .XIV""  siècle. 


et  que  la  plupart  d'entre  elles  ont  d'autant  plus 
souffert  qu'elles  ont  été  exposées  aux  agents  de 
destruction  d'un  climat  rigoureux  ;  aussi  ont- 
elles  été  l'objet  de  quatre  restaurations  succes- 
sives; notamment  au  .XV  11'=  siècle,  elles  ont  été 
repeintes  deux  fois. 

Il  en  résulte  naturellement  que  la  finesse  du 
trait,  l'intensité  des  expressions, la  délicatesse  de 
la  technique  et  de  la  coloration  primitives  ont 
disparu.  Plusieurs  des  tableaux  ne  sont  plus  dé- 
chiffrables ;  d'autres,  dont  on  devine  encore  quel- 
ques contours  et  quelques  taches  colorées,  appa- 
raissent comme  l'ombre  d'un  réve.Un  assezgrand 
nombre  d'artistes  ont  dû  travailler  simultanément, 
sans  doute,  sous  la  direction  d'un  maître  unique, 
pour  créer  dans  un  temps  relativement  limité  une 
série  de  compositions  aussi  considérables  de  mé- 
rite inégal;  il  est  impossible,  dans  l'état  où  se  trou- 
vent ces  peintures,  de  chercher  des  attributions 
et  de  faire  la  part  distincte  des  artistes  qui  ont 
pu  y  collaborer. 

Cependant,  malgré  les  lacunes,  les  outrages  du 
temps,  les  restaurations  et  les  repeints,  ces  pein- 
tures ont  conservé  dans  l'ordonnance,  souvent 
dans  le  style  et  le  dessin  des  figures,  le  cachet,  le 
caractère  de  l'époque  où  le  pinceau  de  l'artiste  les 
a  tracées  sur  le  mur;  les  attitudes,  les  gestes  ex- 
pressifs et  la  disposition  des  groupes,  parfois  le 
jeu  des  draperies  s'y  lisent  encore  avec  intérêt  et 
sont  éminemment  suggestives.  Un  dessinateur 
médiéviste  au  crayon  exercé  trouverait  encore 
matière  à  croquis  intéressants,  à  des  ensem- 
bles pleins  de  verve  et  d'éloquence.  On  doit  donc 
être  reconnaissant  au  savant  professeur  de  l'Uni- 
versité allemande  de  Prague,  d'avoir,  par  les  ex- 
cellentes planches  de  son  livre,  assuré  une  nou- 
velle existence  à  ces  peintures  si  compromises, 
et  de  les  avoir  rendues  accessibles  à  un  plus 
grand  public. 

Nous  ne  pouvons  le  suivre  dans  l'étude  com- 
parative qu'il  fait  des  peintures  du  cloître  d'Em- 
maiis  avec  les  miiuatures  sur  vélin  des  manus- 
crits contemporains  conservés  dans  plusieurs 
bibliothèques  de  Bohême.  De  l'ensemble  de  ces 
peintures  on  doit  reconnaître,  même  dans  les 
reproductions  si  fidèles  de  leur  état  actuel,  des 
influences  très  diverses  qui  s'expliquent  d'ailleurs 
par  le  nombre  d'artistes  de  tous  pays  réunis 
en  Bohême  sous  le  règne  de  Charles  IV,  et  qui 
ont  dû  participer  aux  peintures  des  cloîtres 
d'Emmaiis.  A  côté  de  types  et  de  caractères 
de  l'école  nationale,  on  reconnaît  des  influen- 
ces italiennes  et  comme  les  inspirations  de  pein- 
tres de  Sieime.  En  donnant  plusieurs  planches  en 
chromo,  M.  Neuwirth  a  voulu  faire  connaître 
enfin  le  sj'stème  de  coloration  de  ces  peintures. 
Un  crucifiement,  assez  bien  conservé,  donne  l'im- 


215tbliûgrapl)(e, 


251 


pression  d'une  tonalité  grave  et  harmonique. 
Mais  là  encore,  il  convient  de  faire  la  part  de 
l'action  du  temps  et  de  l'influence  des  repeints. 
Telles  qu'elles  sont,  ces  planches  en  couleurs 
permettent  au  lecteur  de  se  faire  une  idée  plus 
précise  du  cycle  de  peintures  si  soigneusement 
décrit. 
J-  H. 

LE  COFFRET  DE  SAINT-NAZAIRE  DE  MI- 
LAN ET  LE  MANUSCRIT  DE  L'ILIADE  DE 
L'AMBROSIENNE  A  MILAN,  par  F.  DE  MÉLY. 
—  Extrait  des  Monuments  et  Alémoires  publiés  par 
l'Académie  des  Inscriptions  et  Belles-Lettres. 

Très  intéressant  et  savant  travail,  orné  de 
trois  planches  excellentes,  par  lequel  M.  de  Mély 
fait  connaître  un  de  ces  monuments  si  rares 
où  le  christianisme  se  revêt  encore  des  formes 
de  l'art  classique.  Cette  époque,  où  les  formes 
deviennent  plus  barbares  à  mesure  que  la  foi 
s'empare  de  plus  en  plus  des  populations,  et  où 
se  préparent  mystérieusement  les  germes  d'un 
art  nouveau,  est  d'une  étude  particulièrement  ar- 
due, et  ce  n'est  guère  que  depuis  un  petit  nombre 
d'aimées  que  la  lumière  s'y  fait.  Notre  collabo- 
rateur date  le  coffret  de  Saint-Nazaire  des  pre- 
mières années  du  V'=  siècle  ;  il  y  a  tout  lieu  de 
croire  qu'il  ne  trouvera  pas  de  contradicteurs  ; 
les  reliefs  du  coffret  se  rapprochent  en  effet  de  la 
plastique  des  premiers  sarcophages  chrétiens  et 
semblent  un  peu  antérieurs  aux  sculptures  des 
portes  de  Ste-Sabine  à  Rome,  récemment  étu- 
diées par  le  P.  Grisar  et  le  D'^  Wiegand.  C'est  donc, 
en  ce  qui  concerne  l'étude  des  monuments  pri- 
mitifs du  christianisme,  un  chaînon  nouveau  que 
M.  de  Mély  introduit  dans  la  série  des  œuvres 
connues. Tous  ceux  qui  étudient  particulièreirient 
cette  époque,  d'un  si  haut  intérêt,  apprécieront 
hautement  le  mérite  de  son  travail. 

J.  II. 


LA  TIARE  PONTIFICALE,  DU  VII^  AU 
XVI»  SIÈCLE,  par  Eug.  MÙNTZ.  —  Paris,  Impri- 
merie Nationale  et  Klincksieck.  (Extrait  des  Mémoires 
de  l'Académie  des  Inscriptions  et  Belles-Lettres, 
t.  XXXVI,  i"^''  partie,  1S97),  gr.  in-4°,  94  pp. 

IL  est  certains  sujets  que  leur  importance 
comme  leur  notoriété  ont  tellement  mis  en 
évidence  qu'il  semblerait  que  tout  doit  avoir  été 
dit  sur  eux.  Loin  de  là.  Leur  très  copieuse 
bibliographie,  les  longues  pages  qui  leur  ont 
été  consacrées  ne  sont  réellement  qu'un  trompe- 
i'œil.  Le  travail  d'un  premier  auteur  a  simple- 
ment été  répété,  commenté,  délayé  par  ceux 
qui  sont  venus   après   lui  :  loin  de  s'accumuler, 


les  documents  originaux  ont  été  de  plus  en 
plus  laissés  de  côté,  les  sources  négligées,  si 
bien  qu'actuellement,  lorsqu'on  veut  les  aborder, 
on  ne  trouve  en  réalité  que  le  vide  dans  des 
redites  sans  valeur.  La  tiare  pontificale  était  dans 
dans  ce  cas.  Aussi  M.  Eug.  Miintz,  en  reprenant, 
avec  l'autorité  et  le  sens  critique  qui  en  font  un 
des  maîtres  incontestés  de  l'archéologie,  l'histoire 
de  cette  coiffure  liturgique,  en  précisant  ses 
origines,  en  la  suivant  dans  ses  développements, 
dans  son  symbolisme,  en  décrivant  son  écono- 
mie artistique  et  les  richesses  dont  les  Pontifes 
se  plurent  à  l'orner  dans  ses  successives  trans- 
formations, vient-il  combler  une  véritable  lacune, 
qu'au  fond  bien  peu  se  sentaient  la  force 
d'aborder. 

La  tiare  des  Papes  se  rattache  assurément  à 
la  tiare  en  usage  chez  les  peuples  de  l'Orient, 
comme  le  prouvent  la  tiare  de  Saïtaphernès  et  la 
cidaris,  coiffure  du  grand-prêtre  des  Juifs  «  envi- 
ronnée d'une  triple  couronne  d'or,  où  il  y  a  des 
petits  boutons  de  fleurs  de  jusquiame  ». 

On  a  souvent  confondu  la  tiare  avec  la  mitre, 
avec  le  cainaicnmi,  offrant  certaines  analogies 
avec  la  couronne  murale  que  les  archevêques 
de  Bénévent  s'arrogèrent  le  droit  de  porter.  Mais 
comme  un  des  titulaires  du  siège  s'était  permis 
de  comparer  sa  coiffure  au  regnum  pontifical, 
Paul  II  défendit  aux  métropolitains  de  Bénévent 
de  la  poser  désormais  sur  leur  tête;  Maximilien 
Palombara(  1574- 1607)  fut  le  dernier  à  s'en  servir. 
Le  cainaunim  ne  doit  pas  être  confondu  avec  le 
camelaucum,  que  le  pape  Constantin  porta  lors 
de  son  entrée  à  Constantinople.  Ce  dernier  était 
une  sorte  de  bonnet  oriental,  et  il  semble  bien 
probable  que  c'est  de  ce  côté  qu'il  faut  chercher 
l'origine  de  la  tiare. 

Du  V«  au  IX^  siècle,  on  ne  trouve  en  réalité 
sur  la  tiare  que  les  documents  les  plus  précaires. 
Elle  fut  très  probablement  définitivement  adop- 
tée par  les  papes,  au  moment  de  la  publication  de 
la  donation  Constantinienne.  Or,  à  quelques  an- 
nées près,  nous  sommes  d'accord  avec  M.  M.  pour 
la  dater  ;  vers  744,  comme  il  incline  à  croire,  avec 
l'abbé  Duchesne  ;  vers  800,  me  permet  d'écrire 
mon  étude  sur  la  couronne  de  Monza,  qui  dut 
faire  partie  du  prétendu  trésor  offert  par  Cons- 
tantin à  saint  Sylvestre.  Brunner  descend  même 
encore  un  peu  plus  bas,  dans  la  première  moitié 
du  IX'-'  siècle.  Mais  ce  n'est  cependant  que  dans 
l'inventaire  du  trésor  pontifical,  en  1295,  sous 
Boniface  VIII,  qu'on  vit  figurer  pour  la  première 
fois  une  tiare  enrichie  de  48  balais,  de  72  saphirs, 
de  25  émeraudes,  de  66  grosses  perles  et  d'un 
gigantesque  rubis,  fixé  à  son  soinmet  :  dans  le 
bas,  à  cette  date,  figure  un  seul  cercle  émaillé. 
Elle  sera  considérée  plus  tard  comme  la  tiare  de 


BEVUE   DE  l'art  CHRÉTIEN. 
1901     —    3""*=    LIVRAISON. 


'D- 


Bcbuc  ï)c  V^xt  djvcttru. 


saint  Sylvestre.  Très  scientifiquement  M.  Miintz 
la  rapproche  de  la  tiare  placée  sur  la  tête  d'une 
statue  conservée  à  St-Jean  de  Latran,  représen- 
tant, d'aprèb   l'opinion  commune,  le  pape  Nico- 


Statue  de  Boniface  Vlll,  à  la  cathédrale  de  Florence. 

las  IV  (1288-1292),  identique  d'ailleurs  à  celle 
de  la  statue  de  Boniface  VIII,  à  la  cathédrale 
de  Florence.  Nous  allons  la  retrouver  dans  l'in- 
ventaire de   1315-1316:   mais  à  ce  moment  elle 


porte  les   trois   couronnes    d'or,    qui    rorneront 
désormais. 

M.  M.  en  résume  ainsi  l'histoire.  La  tiare  de 
Boniface  VIII,  d'abord  conservée  à  Pérouse, 
avec  le  trésor  pontifical,  fut  envoyée  à  Lyon  en 
1305  pour  servir  au  couronnement  de  Clément  V; 
rapportée  à  Rome,  sous  Grégoire  XI,  elle  revint 
à  Avignon  avec  Clément  VII.  Ds  là,  elle  émigré 
en  Espagne  avec  Benoit  XIII,  pour  revenir  fina- 
lement à  Rome,  après  la  mort  de  ce  pape.  Ce 
joyau  eut  la  plus  triste  fin:  volé  le  22  novembre 
1485,  il  disparut  à  tout  jamais. 

Du  X«  au  XIIU"  siècle,  il  est  fréquemment 
question  de  la  tiare,  appelée  alors  corona  ou 
regniiiH  :  son  usage  coïncide  évidemment  avec  le 
nouveau  programme  politique  de  la  papauté  et 
copieuse  est  la  moisson  documentaire  de  M. M., qui 
réunit  les  textes  et  les  représentations  figurées, 
qui  forment  ainsi  une  série  presque  sans  inter- 
ruption. Fresques  de  Rome,  de  Subiaco,  d'Assise, 
de  Florence,  de  Montefalco,  sculptures  italiennes, 
françaises,  allemandes,  tombeaux  du  Vatican, 
de  Naples, d'Avignon,  de  La  Chaise-Dieu,  statues 
de  Chartres,  de  Reims,  de  Bamberg  sont  ici  re- 
produites pour  nous  faire  suivre  la  tiare  dans  ses 
formes  successives. 

Le  point  très  intéressant  à  déterminer  était 
la  date  de  la  substitution  de  la  couronne  [iropre- 
ment  dite  au  simple  cercle  d'orfèvrerie  :  tous  ces 
documents  nous  engagent  à  la  rapporter  à  Boni- 
face  VI 1 1,  qui  lui-même, à  la  fin  de  sa  vie,  y  joignit 
une  deuxième  couronne.  Mais  il  est  moins  aisé  de 
déterminer  celui  de  ses  successeuis  qui  y  ajouta 
la  troisième  couronne.  On  pourrait,  d'après  les 
inventaires  cités  plus  haut,  parler  de  Clément  V, 
sans  aucune  certitude,  par  exemple.  Mais 
pour  quel  motif  cette  troisième  couronne  ? 
M.  M.  nous  montre  que  nous  n'avons  que 
l'embarras  du  choix  ;  il  semble  cejiendant  à  peu 
près  évident  que  les  papes  voulurent  que  leur 
tiare  ressemblât  à  la  cidaris  du  grand-prêtre  des 
Juifs,  ceinte  de  la  triple  couronne. 

Quand,  à  partir  du  deuxième  tiers  du  XIV^ 
siècle,  nous  allons  prendre  tout  à  fait  pied,  une 
série  de  monuments,  absolument  authentiques, va 
nous  permettre  de  suivre  pas  à  pas  les  transfor- 
mations de  la  tiare  :  qu'elle  s'allonge  pour  se  ter- 
miner en  pointe,  comme  celle  de  Jean  XXII; 
qu'elle  s'arrondisse  comme  celle  de  BenoîtXII; 
ou  de  Clément  VII;  qu'elle  soit  un  ornement  litur- 
gique très  simple,  comme  celle  d'Alexandre  VI, 
ou  un  véritable  monument  d'orfèvrerie  comme  la 
grande  tiare  de  Jules  II,  nous  ne  devrons  pas 
oublier  que  la  partie  la  plus  neuve  de  la  disser- 
tation, la  plus  précieuse  assurément,  est  celle  qui 
traite  des  origines  :  là,  M.  M.  a  déployé  toutes 
les  ressources  de  son  érudition.  Comme  dans  ses 
plus  brillantes  études,  l'artiste    n'a   pas   manqué 


20tbUograpl)te. 


253 


de  se  révéler   en  présence  des  monuments  à  dé-    1    supérieur    lorsqu'il   a  fallu    mettre    au   point  la 
crire,  mais  l'archéologue  s'est  montré  tout  à  fait        question    historique.    Aussi   cette    dissertation, 


/^^i,-/ 


modèle  à  proposer  à  tous  les  érudits,  accom- 
pagnée des  pièces  justificatives  les  mieux  choi- 
sies, est-elle   de  celles  qui,  certainement,  main- 


La  grande  tiare  de  Jules  II. 

tiennent  au  premier  rang  la  science  française. 

F.  DE  Mély. 


254 


jRc\)uc  lie  r^rt  cl^vcttcu* 


LE  MUSÉE  DE  PORTRAITS  DE  PAUL  JOVE, 
par  Eug.  MùNTZ.  Paris,  Iinp.  Nationale  et  Klincksieck. 
(Extrait  des  Mémoires  de  l'Académie  des  Inscriptions 
et  Belles  Lettres),  1900,  in-4°. 

Suivant  les  uns,  Paul  Jove,  néà  Côme  en  14S3, 
mort  à  Florence  en  1552,  fut,  après  Tite-Live, 
le  plus  élégant  des  écrivains  ;  suivant  les  autres, 
un  auteur  dont  les  œuvres,  pleines  de  mensonges, 
furent  à  sa  cupidité  d'un  très  grand  profit  ;  mais 
il  eut  du  moins  le  mérite  incontesté  de  prendre 
parmi  ses  contemporains  une  place  considérable, 
avec  sa  galerie  de  portraits  d'hommes  célèbres, 
commencée  dès  sa  jeunesse.  Pour  la  former,  il  y 
mit  l'ardeur  opiniâtre  d'une  idée  fixe,  une  libé- 
ralité sans  pareille. 

Et  pourtant  il  n'était  pas,  de  son  temps,  le 
seul  à  rechercher  les  effigies.  Mais,  il  eut  le  talent 
de  créer  un  véritable  musée,  le  «  Musœum 
Jovianum  »,qui  devint  rapidement  célèbre,  même 
à  côté  des  séries  réunies  par  les  papes,  par  les 
rois,  par  les  ducs  d'Urbin.qui  chargèrent  cepen- 
dant les  artistes  les  plus  célèbres  de  les  composer. 

A  l'occasion  de  recherches  iconographiques 
sur  Christophe  Colomb,  M.  M.  a  trouvé  dans  la 
galerie  de  Paul  Jove,  qui  possédait  le  portrait  le 
plus  authentique  du  grand  navigateur,  les  solu- 
tions absolument  définitives  de  quelques  pro- 
blèmes, non  encore  élucidés.  Il  les  a  communi- 
quées à  l'Académie,  qui  vient  de  les  publier  dans 
ses  /lAv«(7/;^j,  d'oti  est  extraite  cette  dissertation, 
illustrée  des  nombreuses  reproductions  de  por- 
traits ayant  appartenu  à  P.  Jove. 

Pour  nous  montrer  le  goût  du  XV<"  siècle  pour 
les  portraits,  IVI.  M.  nous  rappelle  d'abord  Ra- 
phaël prenant  à  tâche  de  ne  donner  pour  base  à 
ses  évocations  du  passé  que  les  documents  les 
plus  authentiques  :  puis,  il  fait  passer  sous  nos 
yeux  les  livres  imprimés,  italiens,  allemands, 
français,  qui  depuis  le  Bréviaire  des  décrets  et 
décrétâtes,  imprimé  à  Milan  en  1478,  reprodui- 
sent les  portraits  de  leurs  auteurs  ;  enfin,  les  por- 
traits des  empereurs  et  hommes  illustres,  publiés 
en  15 17,  par  Andréa  Fulvio,  d'après  d'anciennes 
médailles.  Paul  Jove  dut  se  mettre  à  l'œuvre 
vers  cette  époque,  car,  dès  i  521,  il  possédait  déjà 
une  série  relativement  importante  de  portraits 
de  littérateurs  et  desavants.  Son  mode  de  recru- 
tement était  des  plus  simples,  «  il  mettait  à  con- 
tribution ses  ainis,  ses  protecteurs,  tous  ceux  qui 
de  près  ou  de  loin  avaient  souci  de  leur  renom- 
mée, tous  ceu.x  qui  avaient  à  compter  avec  sa 
plume  tour  à  tour  si  caressante  et  si  mordante.  » 

Comme  il  voulait  une  galerie  de  portraits  sur 
toile,  mesurant  chacun  environ  un  pied  et  demi, 
forcément  le  nombre  des  originaux  était  limité. 
Aussi  dut  il  s'arrêter  au  parti  de  faire  copier  ou 


interpréter  les  peintures,  les  documents  de  quel- 
que nature  qu'ils  fussent.  Parfois,  ajoute  M.  M., 
Paul  Jove  semble  avoir  fait  composer  une  effigie, 
à  l'aide  de  deux  ou  trois  documents  différents, 
dont  il  faisait  combiner  les  traits  essentiels.  C'est 
là  malheureusement  le  point  vulnérable  du  Mu- 
sœiun  Jovianum  ;  mais  il  fut  contrebalancé  par 
l'ardeur  et  la  clairvoyance  avec  laquelle  P.  J.  mit 
à  contribution  les  statues,  les  miniatures,  les 
médailles,  en  un  mot,  tous  les  matériaux  que  lui 
signalait  la  renommée. 

Quoiqu'évéque  de  Nocera,  il  continua  d'habi- 
ter Côme.  Il  y  installa  son  musée,  qu'il  eut 
bientôt  l'idée  de  faire  reproduire  par  la  gravure. 
En  1549,  il  en  confia  la  tâche  à  Robert  Estienne, 
assisté  de  Geoffroy  Tory.  Mais  ce  fut  l'édition  de 
1575,  exécutée  par  Pierre  Perna,  l'éditeur  bâlois, 
qui  mit  en  véritable  lumière  les  trésors  patiem- 
ment amassés  par  le  passionné  collectionneur. 
Malheureusement  P.  Jove  fut  surpris  par  la  mort, 
à  Florence  :  il  avait  cru  prendre,  pour  la  conser- 
vation de  son  cher  trésor,  les  mesures  les  plus 
prévoyantes,  en  défendant  formellement  par  son 
testament  de  jamais  aliéner  l'ensemble  qu'il 
s'était  appliqué  à  constituer  ;  mais  les  galeries 
ont  leurs  destinées  !  Celle-ci  est  maintenant  dis- 
persée; les  débris  en  sont  partagés  entre  deux 
branches  de  ses  descendants  ;  leurs  dissentiments 
rendent  fort  délicate  toute  enquête  sur  la  nature 
des  épaves  qui  en  restent. 

Heureusement  de  nombreuses  copies  en  furent 
faites.  De  1552  à  i562,Cristoforo  dell' Altissimo, 
notamment,  copia  pour  le  duc  Cosme  I  de  Médi- 
cis,  plus  de  2S0  portraits.  Quelles  étaient,  par 
exemple,  ces  toiles  ? 

Tel  est  le  problème  que  jusqu'ici  personne 
n'avait  jamais  songé  à  résoudre  et  que  M.  M. 
vient  de  dégager  en  partie.  La  solution  était 
cependant  des  plus  faciles,  dit-il  très  simplement  : 
il  ne  fallait  que  lire  Vasari,  qui  nous  donne  la 
liste  de  240  portraits  faisant  partie  du  Musée 
de  Cosme  I.  Or,  écrit  le  savant  académicien,  elle 
concorde  pour  la  presque  totalité  avec  le  cata- 
logue de  la  collection  de  P.  Jove.  C'est  parfaite- 
ment exact  :  la  chose  était  très  peu  compliquée: 
mais  encore  fallait-il  y  penser  :  de  fait,  personne 
avant  M.  M.  n'y  avait  songé. 

Bien  que  très  médiocres,  les  copies  offrent  ce- 
pendant une  écrasante  supériorité  sur  les  gra- 
vures de  l'édition  bâloise.  Elles  ont  le  grand 
mérite  d'avoir  été  prises  sur  des  originaux,  alors 
que  les  gravures  ont  été  dramatisées  ou  que 
les  autres  portraits,  conservés  à  Vienne,  ne  sont 
que  des  reproductions  des  portraits  de  Florence. 
Il  est  facile  de  comprendre,  cette  détermination 
faite,  l'intérêt  des  tableaux  de  Florence.  Le  rap- 


Bll)ltograpJ)ie. 


255 


prochement  de  ces  toiles  avec  les  gravures  de 
l'édition  bâloise  est  le  côté  tout  à  fait  nouveau 
de  la  dissertation  de  M.  M.,  qui  nous  permet 
maintenant,  pour  des  effigies  disparues,  de  re- 
courir à  des  répliques  de  première  main,  qui  les 
reproduisent  avec  une  exactitude  relative. 

On  ne  saurait  suivre  ici,  dans  1  enumération 
qui  est  iinprimée  à  la  suite,  les  rapprochements 
pleins  de  détails  précieux  qui  y  sont  insérés; 
mais  on  ne  pourra  jamais  trop  louer  la  sûreté  de 
la  critique  du  maître. 

Quant  au  texte,  je  viens  de  résumer,  en  tâchant 
d'être  moins  «  traditore  »  que  Pierre  Perna,  ses 
pages  excellentes.  Elles  sont  comme  une  intro- 
duction au  savant  Catalogue  qu'aucun  icono- 
graphe ne  pourra  maintenant  négliger. 

F.  DE  MéLY. 


SEPULVEDA  Y  SANTA  MARIA  DE  NIEVA, 
par  D.  Enrique  Serrano  F.\tigati.  Grand  in  8°, 
24  pp.,  8  phototypies,  Madrid,  1900. 

DEUX  monographies  courtes,  mais  substan- 
tielles, comme  sait  en  composer  le  docte 
professeur  de  Madrid.  —  Nous  trouvons  d'abord 
une  introduction  de  quelques  pages  :  Cuadro 
gênerai.  Que  d'aperçus  intéressants,  de  données 
précises,  d'appréciations  justes  qui  se  suivent 
dans  un  ordre  clair  et  naturel  !  En  somme, 
on  voyage  en  lisant  cette  introduction,  et  sans 
quitter  l'étroite  enceinte  de  sa  chambrette,  on 
parcourt  un  long  trajet  à  travers  las  tierras 
segovianas,  apercevant  bien  des  villes  et  villages, 
bien  des  monuments,  bien  des  objets  de  tous 
genres.  —  Puis  viennent  les  deux  monographies. 
Quelques  notes  historiques  précèdent  l'étude  des 
églises  de  Sepulveda.  Celles-ci  sont  au  nombre 
de  trois  principales  :  El  Salvador,  San  Jiisto  et 
la  Virgen  de  las  Penas.  D.  E.  Serrano  Fatigati 
les  décrit  simplement,  mais  avec  précision,  exa- 
mine les  différents  éléments  d'architecture  et  de 
sculpture,  s'abstient  prudemment  de  considéra- 
tions trop  hasardées,  en  un  mot,  fait  œuvre  de 
vrai  savant. 

J'ai  simplement  relevé  la  croyance  de  l'auteur 
aux  influences  clunisiennes  sur  les  édifices  romans 
de  l'Espagne.  Si  ces  influences  étaient  réelles, 
j'en  serais  heureux  et  fier.  Mais  n'a-t-on  pas 
démontré  qu'il  n'y  eut  point  d'école  clunisienne, 
en  fait  d'architecture  et  de  sculpture?  — En 
outre,  puisque  l'auteur  cite  la  Revue  de  l'Art 
chrétien,  il  me  permettra  de  lui  dire  qu'il  est 
conforme  aux  règles  d'une  bonne  bibliographie, 
de  donner  également  en   français  les   titres  des 


ouvrages  français,  et  non  de  les  traduire  en  es- 
pagnol. 

Santa  Maria  de  Nieva  est  déjà  connue  des  lec- 
teurs de  ce  recueil  (année  1900,  p.  250  et  s.). 
Dans  la  monographie  espagnole,  D.  E.  Se  rrano 
Fatigati  reprend  la  même  description,  mais  sur 
un  plan  nouveau. 

Les  phototypies  qui  accompagnent  l'étude  du 
savant  archéologue  sont  excellentes,  et  contri- 
buent singulièrement  à  rendre  attachantes  les 
descriptions  serrées  des  monuments. 

Dom  E.  ROULIN. 


ÉLÉMENTS  D'ARCHÉOLOGIE  CHRÉTIEN- 
NE, II.  LES  CATACOMBES  ROMAINES,  par 
H.  Marucchi.  Paris,  Desciée,  1900.  In-8''  de  450  pp. 
avec  planches. 

CE  second  volume,  complément  du  premier, 
présente  les  mêmes  qualités  de  science  et 
de  critique,  avec  la  même  abondance  de  rensei- 
gnements utiles  et  pratiques.  Il  concerne  exclu- 
sivement \çs  cimetières  romains.  J'écris  à  dessein 
cimetières,  qui  est  le  terme  propre,  et  non  cata- 
combes, xésetvé  pour  un  seul  souterrain,  celui  qui 
était  à  proximité  de  la  tombe  temporaire  des 
SS.  Apôtres  Pierre  et  Paul. 

Qu'il  me  soit  permis,  dans  l'intérêt  du  perfec- 
tionnement de  cette  œuvre  méritoire,  d'ajouter 
quelques  observations  dont  les  lecteurs  sentiront 
le  bien-fondé. 

Il  y  eut,  ailleurs  qu'à  Rome,  par  exemple,  à 
Naples,  des  cimetières  souterrains.  Un  chapitre 
supplémentaire  dirait,  d'une  manière  généiale, 
quels  ils  sont  et  en  quoi  ils  ressemblent  à  ceu.x 
de  Rome. 

Un  tableau  chronologique  eût  été  opportun 
pour  classer  les  cimetières  entre  eux,  faisant  con- 
naître l'origine  et  les  développements  successifs. 

Quand  vint  la  paix,  commencèrent  les  cime- 
tières à  ciel  ouvert.  Un  mot  sur  eux  ne  serait 
pas  déplacé. 

Les  inscriptions  cimétériales  forment  une 
catégorie  à  part  dans  l'épigraphie.  Il  manque  un 
chapitre  spécial  pour  les  relier  ensemble.  On 
apprendrait  ainsi  le  style  de  chaque  époque,  les 
variantes  des  formules,  tout  ce  qui,  en  dehors 
des  noms  des  consuls  dont  il  importerait  d'avoir 
la  liste,  sert  à  dater. 

Enfin,  l'archéologie  ayant  sa  langue  à  part, 
pour  être  bien  comprise,  un  glossaire  explicatif 
plairait  surtout  aux  novices  :  on  y  trouverait  des 
mots  tels  <:[ue  arcosoliiim,area,locitlns,  transcnna, 
etc.  Plusieurs  sont  francisés  par  l'auteur,  pas 
toujours    heureusement  :   ainsi    la    transenna   de 


256 


5^tbur  Dr  V^xt  cbvcticu. 


marbre  n'est  pas  une  grille,  qui  suppose  l'emploi 
du  fer  ;  pourquoi  pas  dire  alors  tout  simplement 
transenne  ? 

Tous  mes  vreux  pour  une  large  propagande 
sont  acquis  à  cette  œuvre  intelligente  de  vulga- 
risation, qui  se  recommande  surtout  au  clergé 
studieux,  avide  de  comprendre  ce  qu'il  a  vu  à 
Rome  et  qu'il  ne  saura  bien  qu'un  aussi  bon 
guide  à  la  main. 

X.  B.  DE  M. 


s.  PIKRRE  DE  ROME.  HISTOIRE  DE  LA 
BASILIQUE  VATICANE  ET  DU  CULTE  DU 
TOMBEAU    DE   S.    PIERRE,  parle    P.    MoRTIER, 

des  Frères-Prêcheurs;  Tours,  Marne,  1900.  Grand 
in-S°  de  616  pag.,  avec  de  nombreuses  planches  et 
vignettes. 

Cet  ouvrage  a  eu  l'immense  avantage  de  pa- 
raître à  son  heure  ;  aussi,  dès  le  début,  pouvait-on 
lui  prédire  le  succès.  Pour  les  pèlerins  qui  sont 
accourus  à  Rome  de  tous  les  points  de  la  France, 
à  l'occasion  du  jubilé,  de  la  canonisation  de 
J.-B.  de  la  Salle  et  de  la  béatification  de  trois  de 
nos  compatriotes, la  bordelaise  Jeanne  de  Leston- 
nac,  le  poitevin  Charles  Cornay  et  un  religieux 
normand,  il  leur  fournissait  à  l'avance  les  ren- 
seignements dont  ils  avaient  besoin  pour  voir 
avec  fruit  la  basilique  où  toutes  ces  belles  fonc- 
tions se  sont  accomplies  et,  au  retour,  il  aura  fixé 
et  rafraîchi  leurs  souvenirs. 

Mais  il  se  recommande  aussi  par  de  sérieuses 
qualités.  Tout  d'abord,  il  est  imprimé  avec  autant 
de  soin  que  de  luxe.  Qui  ne  connaît  les  éditions 
si  élégantes  de  la  maison  Mame  ?  Ici,  elle  a  fait 
encore  un  petit  chef-d'œuvre,  digne  d'orner  la 
table  d'un  salon,  où  les  distraits  ne  manqueront 
pas  de  le  feuilleter  pour  en  admirer  l'illustration 
abondante,  tandis  que  les  studieux  y  chercheront 
à  s'instruire. 

Le  goût  est  également  flatté  par  un  style  pom- 
peux, presque  oratoire,  qui  sent  la  chaire  du 
conférencier,  mais  très  suggestif,  car  il  inspire 
des  sentiments  et  des  réflexions.  L'auteur  semble 
même  s'y  complaire  et  il  ne  cite  pas  un  fait  im- 
portant qu'il  n'en  déduise  aussitôt  la  philosophie, 
au  point  de  vue  de  l'histoire.  Il  ne  fait  pas  de  la 
science  à  proprement  parler,  aussi  n'écrit-il  pas 
pour  les  savants  de  profession  ;  mais  il  a  bien 
pénétré  et  mûri  son  sujet  et  toujours  il  le  pré- 
sente avec  une  conviction  sincère.  Telles  sont  ses 
élucidations  sur  deux  points  importants,  l'exis- 
tence du  corps  de  S.  Pierre  seul  dans  sa  confes- 
sion et  sa  translation  temporaire  à  la  Platonia. 
Par  une  suite  de  raisonnements,  il  établit  la  date 
de  la  fameuse  statue  de   bronze,  qu'il  dit  byzan- 


tine et  du  VI*"  siècle  ;  l'archéologie  lui  eût  dé- 
montré qu'elle  n'est  pas  antérieure  au  XIII« 
siècle,  opinion  qui  semble  prévaloir  actuellement. 

Le  volume  est  grand  et  gros,  et  pourtant  il  ne 
dit  pas  tout  ce  qu'on  aimerait  savoir.  Que  le 
P.  Mortier  me  permette  de  lui  signaler  quelques 
regrettables  lacunes  qu'il  s'empressera,  je  n'en 
doute  pas,  de  combler  par  l'addition  de  nouveaux 
chapitres. 

Ainsi,  nous  parlions  tout  à  l'heure  delà  statue 
de  S.  Pierre.  Pourquoi  n'est-il  pas  dit  un  mot  de 
ces  imitations,  grandes  ou  petites,  qui  sont  si 
répandues  actuellement  et  que  Pie  IX  a  enri- 
chies d'une  indulgence  spéciale,  quand  on  en 
baise  le  pied,  absolument  comme  sur  l'original  ? 

Les  indulgences  attachées  à  la  visite  de  la 
basilique  sont  nombreuses.  Il  était  facile  et  pro- 
fitable d'en  dresser  la  liste. 

Le  livre  III  est  consacré  aux  «principales 
dévotions  autour  du  tombeau  de  S.  Pierre  >. 
Trois  seulement  sont  énumérées  :  «  Le  culte  de 
la  Ste  Vierge  >,  «  la  statue  de  S.  Pierre  »,  «  Ste 
Pétronille  et  la  France  ».  Ce  n'est  pas  suffisant. 
Que  de  reliques  réclament  une  étude  à  part  !  Par 
exemple,  les  grandes  reliques  de  la  Passion.  On 
ne  peut  omettre  la  visite  des  sept  autels  et  la 
chaire  de  S.  Pierre,  qui  méritaient  plusieurs 
planche.^. 

Au  livre  II,  voici  «  la  canonisation  des  Saints  », 
tracée  en  traits  rapides.  Avec  deux  tableaux 
annexes,  c'eût  été  parfait.  L'un  donnerait  la  série 
des  canonisations  et  l'autre  des  béatifications 
accomplies  à  St-Pierre,  avec  leur  date  et  le  nom 
du  pontife.  C'est  là  un  renseignement  de  premier 
ordre. 

Incidemment  revient  la  question  du  jubilé  et 
est  donnée  une  vue  e.xtérieure  de  la  Porte-Sainte. 
On  peut,  sans  être  difficile,  désirer  davantage. 
Pourquoi  pas  aussi  la  photographie  de  la  bulle 
de  Boniface  VIII  qui  institue  le  jubilé,  puisque 
la  charte  pontificale,  gravée  sur  marbre,  est  affi- 
chée en  permanence  à  gauche  de  la  porte  ;  et 
encore  celle  de  cette  mosaïque,  placée  à  l'inté- 
rieur, où  S.  Pierre  regarde  si  fixement  les  pèle- 
rins qu'aucun,  en  nul  endroit,  ne  peut  se  sous- 
traire à  son  regard,  ce  que  les  Romains  savent 
bien  ? 

Je  termine  en  félicitant  à  la  fois  l'éditeur  et 
l'auteur,  parce  qu'ils  ont  ensemble  mis  au  jour 
un  livre,  qui  leur  fait  honneur  à  tous  deux,  car 
ils  n'ont  rien  négligé  pour  satisfaire  leurs  lec- 
teurs, que  je  souhaite  nombreu.>:  et  choisis. 

X.   B.  DK  M. 


ai5tblioig[rapl)ie. 


257 


ANALECTA  HYMNICA  MEDII  AEVI.  SE- 
QUENTIAE  INEDITAE,  par  le  P.  Blume.  Leipzig, 
1900,  in-8"  de  306  pages. 

Ce  34e  fascicule,  non  moins  intéressant  et  rem- 
pli que  les  précédents,  se  divise  en  quatre  par- 
ties :  le  Teîiips,  la  Vierge,  les  Saints  et  le  Coni- 
mutt.  Il  contient  360  proses,  presque  toutes  tirées 
des  manuscrits. 

Les  saints  qui  figurent  ici  sont  les  suivants  : 
S.  Acace,  S.  Adalbert,  S.  Agéric,  Ste  Agnès, 
S.  Alban,  S.  Amé,  S.  Ange  gardien,  Ste  Anne, 
S-  Antonin,  Ste  Apolline,  S.  Augustin,  Ste  Bar- 
be, S.  Barthélémy,  S.  Benoît,  S.  Boniface,  Ste 
Cécile,  S.  Castor,  Ste  Catherine,  SS.  Corne  et 
Damien,  S.  Cyriaque,  Ste  Dorothée,  Ste  Elisa- 
beth de  Hongrie,  Ste  Engracie,  S.  Erasme, 
S.  Etienne,  Ste  Eulalie,  Ste  Euphémie,  S.  Eu- 
sèbe,  SS.  Fabien  et  Sébastien,  Ste  Félicité, 
SS.  Ferréol  et  Ferruce,  S.  Florin,  S.  François, 
S.  Front,  S.  Gabriel,  S.  Genès,  S.  Georges, 
S.  Géréon,  S.  Germain,  S.  Gilles,  Ste  Hélène, 
Ste  Hilde,  SS.  Innocents,  S.  Jacques,  S.  Jan- 
vier, S.  Jean-Baptiste,  S.  Jean,  év.,  SS.  Jean 
et  Paul,  S.  Jérôme,  S.  Joseph,  Stes  Juste  et 
Rufine,  S.  Laurent,  S.  Léonard,  S.  Luc,  Ste 
Lucie,  Ste  Marc,  Ste  Marguerite,  Ste  Marie 
Madeleine,  Ste  Marine,  Ste  Marthe,  S.  Martin, 
S.  Maurice,  SS.  Maxime  et  Vénérand,  S.  Mé- 
dard,  S.  Michel,  Ste  Monique,  S.  Narcisse,  Ste 
Nathalie,  S.  Nazaire,  S.  Nicet,  S.  Nicolas,  S.  Ni- 
colas de  Tolentin,  B.  Nicolas  de  la  Roche, 
S.  Norbert,  S.  Notker,  SS.  patrons  de  Hildes- 
heim,  de  Salzbourg  et  de  S.  Udalric,  S.  Paul, 
S.  Paul  ermite,  S.  Paulin,  SS.  Pierre  et  Paul, 
S.  Pierre  m.,  S.  Piat,  S.  Raymond,  S.  Remy,  S. 
Saturnin,  S.  Sébastien,  SS.  Senez  et  Théopont, 
S.  Sigismond.S.Sixte,  Ste  Tanche,  SS.  Timothée 
et  Apollinaire,  S.  Thomas,  S.  Thomas  de  Can- 
torbéry,  S.  Udalric,  Ste  Ursule,  S.  Valère,  Ste 
Vérène,  SS.  Victor  et  Ours,  S.  Vincent. 

A  titre  de  curiosité,  je  citerai  quelques  proses 
en  acrostiche,  01.1  les  initiales  de  chaque  strophe 
réunies  donnent  le  nom  de  l'auteur.  Ainsi,  pour 
S.  Jacques  (p.  203)  :  Frater  Matlieiis  fecit;  pour 
S.  Laurent  (p.  221)  :  Maremannus ;  pour  les  pa- 
trons de  Hildesheim  (p.  249)  :  Lippoldiis  Stein- 
berg. 

Les  peintres  ont  coutume  de  couronner  les 
vierges  martyres  de  roses  blanches  et  rouges. 
L'idée  a  pu  leur  en  venir  de  la  liturgie,  comme  il 
est  dit  de  Ste  Catherine  dans  le  Missel  de  Sara- 
gosse  de  I4S5,  qui  associe  les  lis  aux  roses  : 

«  Sponsa  sibi  coronatur. 

Rosis  atque  liliis, 

Rubicunda 

Tota  munda.  » 


Le  P.  Cahier,  dans  ses  Caractéristiques  des 
saints  p.  663,  dit  que  les  potiers  de  terre  ont  pour 
patron  «  S.  Bont,  Bonitus,  Bon,  évéque  :  ce  peut- 
être  parce  que  l'on  conservait  à  Clermont  (en 
Auvergne)  un  vase  oii  le  saint  s'était  lavé  les 
mains.  »  En  tout  cas,  le  fait  est  essentiellement 
local.  Je  préférerais  les  mettre  sous  le  patronage 
des  saintes  espagnoles  Juste  et  Rufine, qui  étaient 
du  métier,  puisqu'elles  faisaient  le  commerce  des 
vases  tournés,  au  rapport  du  Missel  de  Saragosse 
en  1485  : 

«  Nunquam  vacabant  otio 

Feminœ  sanctissimae  : 

Mos  erat  in  mercando 

Vascula  fictilia 

Istoque  mercimonio 

Cumegenis  maxime 

Dividebant  ministrando 

Sua  victualia.  » 

X.   B.  de  M. 


BIBLIOGRAPHIE  DES  INVENTAIRES. 

I.  —  INVENTAIRE  D'AMBOISE  ET  CHAN- 
TELOUP. 

Ainboise,  le  château,  la  ville  et  le  canton,  est  une 
superbe  publication  illustrée,  format  in-4"  (Tours, 
1897),  qui  contient  des  extraits  de  plusieurs  in- 
ventaires. Il  eût  été  certainement  plus  profitable 
de  les  donner  in  extenso  et  de  les  rejeter  à  la  fin 
du  volume  à  titre  de  documents.  Les  voici  dans 
l'ordre  où  ils  se  présentent  : 

1.  Inventaire  du  château  d'Avtboise,  fin  du 
XV«  siècle  (pp.  148-154).  J'y  relève  24  petites 
couvertures  «  façon  de  Poictou  »,  pour  lits  et 
couchettes.  Les  draps  de  toile  sont  marqués  «  à 
trois  fîeurs  de  Hz,  en  fil  tanné  >>.  . 

2.  Compte  de  Pierre  Briçonnet,  argentier  du  roi 
pour  la  dépense  des  manteaux  nécessaires  à  l'as- 
se?iiblée{àe  l'Ordre  de  St- Michel)  en  14S4  (p. 488). 

3.  Meubles  estans  en  l'armeurerie  du  château 
d  Amboise  en  14.ÇÇ.  Le  texte  est  ici  en  entier  et 
compte  34  nos  (^pp  175.178).  On  y  remarquedeux 
épées  papales  :  «  7.  L'espée  aux  armes  du  pape 
Céleste  (Calixte  IH),  le  fourreau  garny  d'argent 
doré  et  ung  chapeau  de  velours  cramoisy,  garny 
et  semence  de  perles.  —  Une  épée,  le  fourreau 
blanc,  la  poignée,  garnye  de  boys;  au  pommeau 
une  Nostre  Dame  d'un  côsté  et  un  St  Martin  de 
l'autre,  nommée  l'espée  du  pape  (Pie  II),  qu'il 
envoya  au  roy  Loys  (Louis  XI).  » 

4.  Inventaire  du  château  de  Chanteloup,  l'an  II 
(pp.  450-457).  Notons:  «  Deux  bergères  en  gros 
de  Naples,  à  fond  blanc  brodé  des  Indes,  repré- 
sentant les  Fables  de  la  Fontaine  »,  comme  au 
château  d'Abin  (Vienne). 


2=;8 


3Rrbur  tic  I^^vt  djrctten. 


5 .  Inventaire  de  Notre-Dame  du  Bout  des  Ponts 
à  Amboise,  an  IV  (p.  536). 

6.  Inventaire  de  l'église  St-Florentin,  à  Anihoise, 
an  IV  (p.  536).  A  citer  :  «  Neuf  tapisseries  entoile 
peinte,  une  bannière  de  damas  rouge.  » 

Un  voj'ageur  du  XVI I<=  siècle  dit  avoir  vu  en 
cette  église,  «  au  chœur,  derrière  le  grand  autel, 
une  châsse  d'argent,  renfermant  le  corps  de  S. Flo- 
rentin »  et  «  une  antique  et  très  riche  tapisserie 
à  fond  d'or  et  de  soie  incarnat,  avec  personnages 
d'or,  de  soie  et  d'argent  appliqués  »  donnée  par 
Louis  XII  et  qui  représentait,  «  la  vie  de  S.  Flo- 
rentin, qui  fut  du  Poitou,  d'où  il  fut  rapporté  à 
Amboise,  sous  Foulques  Nerra»  (p.  lOi). 

2.  —  LE  CHATEAU  DE  VERRES  ET  L'IN- 
VENTAIRE    DE     SON     MOBILIER,     EN      1565, 

par   F.  Frutaz,  Turin,  1900,  in-S\  de  39  pages. 

Ce  château  est  situé  dans  la  vallée  d'Aoste; 
une  inscription  le  dit  construit  en  l390.C'est  une 
vraie  forteresse,  qui  avait  sa  petite  garnison  ; 
aussi  son  ameublement  consiste-t-il  surtout  en 
armes  et  engins  de  toute  sorte,  dont  le  détail 
est  très  curieux.  Trois  pièces  ont  en  consé- 
quence un  nom  spécial  :  «  crotte  de  l'artillerie  », 
«  salle  de  la  garde,  »  «  chambre  de  la  munition». 

Le  texte,  divisé  par  n°^,  correspondant  aux 
appartements  —  ce  qui  fait  des  articles  trop 
longs  —  est  suffisamment  annoté;  toutefois,  j'ap- 
pellerai l'attention  sur  certaines  expressions,  qui 
ne  peuvent  qu'enrichir  les  glossaires  spéciaux. 

Allemagne,  lieu  de  fabrication  d'arquebuses  et 
d'un  carcan  pour  détenu.  «  Deux  rouets  d'arqui- 
bus  d'Allemaigne  avec  leurs  appartenances.  — 
Ung  collier  de  fer,  fait  en  AUemaigne,  avec 
pointes  dedans,  pour  tormenter  ung  homme  au 
col.  » 

Arche  à  poulets  :  «  Une  arche  vieillie  pour  po- 
laglies.  » 

Artillerie.  Presque  tous  les  canons  sont 
ornés  des  devises  et  armoiries  des  seigneurs,  mais 
l'une  par  la  salamandre,  rappelle  le  souvenir  de 
P^rançois  I.  «  Deulx  pièces  d'arteglerie  de  cam- 
pagne, l'une  avec  la  salamandre  de  (et)  la  corone 
au-dessus,  de  longeur  de  neufz  pieds.  » 

Bitigl.  «  Abreuvoir,  formé  ordinairement  d'un 
seul  tronc  d'arbre  :  »  >i  Ung  grand  buigl  à  (en) 
bois,  de  peu  de  valeur,  pour  tenir  l'eau  des  bor- 
neau  de  la  tour,  gasté.  » 

Crotte.  Toute  pièce  voûtée,  répond  au  français 
grotte. 

Cerf.  <(  Deux  testes  de  cerfz  —  Ung  braque- 
mard  de  chasse,  avec  sa  pugne  (poignée)  de 
corne  de  cerfz.  » 

Doil,  du  latin  dolium:  «  Deulx  grands  et  deulx 
petits  doils,  pour  tenir  huile.  » 


Forme,  bois  de  lit  :  «  Une  forme  de  lit,  vieillie 
de  sappin.  » 

Lanterne.  «  Quatre  petites  lanternes  de  corne, 
garnies  de  fer  blanc,  six  autres  plus  grandes  de 
mesmes.  —  Deulx  autres  lanternes  de  toile,  des- 
quelles l'une  est  à  baston.  » 

Tableau,  tringles  de  bois,  disposées  en  carré, 
pour  suspendre  les  tapisseries  le  long  des  murs  : 
«  Ung  grand  tableau  pour  tenir  la  tapisserie.  » 

Tenture,  improprement  appelée  tapisserie  : 
«  Deux  pièces  de  tapisserie  de  taphetas  blanc  et 
roge,  trapoinctées  et  figurées  de  lions,  relevées, 
contournée,  doublée  de  toille,  avec  leurs  franges 
alentour,  roges,  gausnes  et  verdes.  » 

Verdure.  «  Au-dessus  la  dicte  table  ung  tappis 
faict  à  verdure  gaulne,  convenable  à  la  dicte  table. 
— ■  Trois  pièces  de  tapisserie  vieillies.  —  Ung 
ciel  de  lict,  avec  son  dorsier  de  tapisserie  faicte 
en  verdure,  avec  quattre  personnages,  de  damas 
fort  usé. —  Une  pièce  de  tapisserie,  avec  un  cerfz 
au  melieu,  fait  en  verdure  et  ung  aultre  semblable, 
tous  deux  usés.  —  Une  petite  table  de  noier, 
avec  ses  deu.x  tréteaux  de  mesme,  sur  laquelle 
est  ung  vieux  tappis  fait  à  verdure.  » 

3.  —  TESTAMENT  DE  PIERRE  BERGERON, 
en  1666,  dans  le  Bulletin  historique  du  diocèse  de  Lyon, 
1900,  p.  88. 

Ce  prêtre,  qui  était  attaché  au  chapitre  de  la 
primatiale,  légua  à  1'  hôpital  du  Pont  du  Rhône 
«  sa  chapelle  d'argent,  consistant  en  un  calice, 
quatre  chandelliers,  une  croix,  deux  paires  de 
burettes,  deux  paires  boittes  à  hosties,  clochette 
et  petit  bassin,  le  tout  marqué  des  armes  dud. 
testateur;  chasuble,  aubes,  missels  du  concile, 
corporaux  et  voiles.  » 

Le  rit  lyonnais  comprenait  quatre  cierges, 
les  deux  paires  de  burettes  devaient  être  de 
rechange  suivant  les  fêtes,  car  il  y  avait  aussi 
deux  calices,  dont  un  grand  d'argent  ciselé  et 
doré,  le  bassin  servait  aux  burettes  et  si  l'on 
avait  deux  boites  à  hosties,  c'est  que  l'une  était 
affectée  aux  hosties  du  prêtre  et  l'autre  à  celles 
destinées  à  la  communion  des  fidèles. 

4.  —  INVENTAIRE  DE  L'ÉGLISE  D'ESCOUS- 
SENS,  EN  1717,  dans  VAibia  christiana,  1899, 
pp.  72-73- 

Ni  numérotage  des  articles,  que  je  suppose 
abrégés,  ni  explication  d'aucune  sorte. 

Bassin  en  dinanderie  :  «  Un  grand  bassin 
cuivre  jaune.  » 

Bouquets:  «  Vingt  bouquets  artificiels  ;  22  vases 
de  faïence,  plusieurs  bouquets  en  papier.  » 
Candélabre,  avec  le  sens  de  lustre  :  «  Un  can- 


Bibliographie. 


259 


délabre  de  cuivre  à  douze  branches,  qui  pend  de- 
vant le  maître  autel.  » 

Carreaux  ou  coussins  :  «  Deux  carreaux  pour 
le  missel.  » 

Couteaux  pour  le  pain  bénit  :  i<  Deux  couteaux, 
à  manche  de  corne,  pour  couper  le  pain  bénit.  » 

Couverte  du  pupitre  :  \<  Deux  couvertes  pour  le 
pupitre  des  chantres,  une  en  panne  rouge,  l'autre 
d'une  étoffe  à  fleurs  avec  frange.  » 

Crcdences,  près  de  l'autel  :  «  Deux  crédences 
à  fleurs  rouges.» 

Devant  d'autel  :  «  Un  de  dentelles  avec  les 
deux  crédences,  deux  en  papier,  l'un  de  toute 
couleur.  » 

Étui  :  «  Un  reliquaire  d'argent  et  son  étui. 
Une  croix  d'argent,  dorée  en  partie,  pour  les  pro- 
cessions, avec  étui.  » 

Falot  ou  lanterne  :  «  Un  falot  de  fer  blanc 
pour  les  processions,  2  petits  falots  pour  porter 
le  S.  Sacrement.  » 

Garniture  ou  parement  de  la  chaire  :  «  Une 
garniture  d'étoffe  de  laine  à  fleurs  pour  la  chaise.» 

Alouchettes,  pom  la  lampe  :«  Lampe  de  cuivre 
et  sa  conserve,  avec  trois  mouchettes.  » 

5.  —  INVENTAIRK  D'UN  FABRICANT  DE 
PAPIER,  EN  1723,  dans  le  Bidktin  de  la  Société 
archéologique  de  la  Corrèze,  1899,  pp.  609-613. 

Le  papier  se  différencie  par  sa  couleur,  «  viol- 
let  »,  «  campet  »  (campêche  .?),  «  bleuf  terne  » 
«  bleuf  trace  »  (gris),  «  vioUet  fiot  »  (couleur  de 
feu)  ;  par  sa  fabrication,  «  gros  bon  »  (bulle)  ;  par 
son  assimilation  à  l'étranger,  «  papier  Lombar  »; 
par  son  format,  «  papier  carré  fin  ». 

6.  —  DÉPENSES  DE  L'ÉVÊCHÉ  DE  CAS- 
TRES, de  1722  à  1734,  dans  Y  Albin  cliristiana,  189g, 
P-  253-254- 

L'extrait  est  très  écourté.  Aucune  explication 
n'est  fournie  sur  certains  mots  qui  appellent 
l'attention  des  lexicographes;  je  vais  y  suppléer 
par  ces  notes. 

Cre'iiiière,  vase  au  saint  Chrême  et  aussi  aux 
saintes  huiles  :  «  Des  crémières  d'étain,  36  sols  ». 

Croix  d'offrande,  que  l'on  faisait  baiser  aux 
fidèles  qui  venaient  à  l'offrande  :  <<  2  croix  d'of- 
frande, 8  I.  ». 

Etoles  doubles,  un  côté  blanc  et  l'autre  violet, 
pour  pouvoir  changer  pendant  l'administration 
du  baptême.  «  Camelot  blanc  et  violet,  avec  four- 
nitures, pour  10  étoles  à  administrer  les  sacre- 
ments, 35  1.  6  s.  —  I  étole  blanche  et  violette, 
4  1.  lOS.  ;) 

Pluvial,  du  latin  pluviale,  chape  :  «  3  plu- 
viaux ». 


Porte-Dieu,custoàe  pour  le  transport  du  S. Via- 
tique :  «  5  porte-Dieu  »,  «porte-Dieu  d'argent, 
doré  au  dedans  ». 

Rayon,  se  dit  du  soleil,  partie  supérieure  de 
l'ostensoir,  au  disque  rayonnant  et  dont  le  pied 
fut  souvent  le  ciboire  ou  le  calice.  «(  i  ciboire,  i 
rayon  »  ;  «  ciboire,  rayon  à  pied  commun  ». 

7.  —  LEGS  FAIT  A  SA  PETITE  FILLE  PAR 
HUGON  LE  ROUX,  EN  1723,  dans  le  Bulletin  de 
la  Société  archéologique  de  la  Corrèze,  1899,  pp-  518-519. 

M.  Louis  Guibert  a  trouvé  cette  énumération 
de  mobilier  domestique  dans  un  livre  de  raison 
limousin.  J'en  détacherai  les  passages  saillants 
(les  articles  ne  sont  pas  numérotés)  : 

Bergante  s'écrivait  comme  on  prononçait  :  «  Un 
chaslit  garni  de  Vergame  ».  «  Une  table  en  cou- 
lonne  torse,  couverte  de  son  tapis  de  Vergame, 
avec  ses  deux  guérindons  ». 

Cadis  :  «  Deux  beaux  chaslitz,  garnis  de  ri- 
deaux de  cadit  vert.  —  Mon  list  et  chaslit,  garny 
de  cadit  coleur  d'or.  »  Victor  Gay  ne  donne  pas 
ces  deux  couleurs  au  cadis,  mais  seulement  (^/«■«i:, 
azuré  et  violet. 

C^/^z/^r/j.  Toute  la  «  veselle  est  de  bon  estain 
commun  »,  mais  elle  est  accompagnée  de  vieux 
couverts,  «  six  ceuillères  et  six  fourchetes,de  très 
bon  argent  ». 

Dévotion.  «  A  la  cheminée,  un  tableau  de 
St  Joseph.  A  la  cheminée,  un  crucifix  ». 

Linceuls.  Les  draps  pour  les  maîtres  sont  «  de 
brain  »,  c'est-à-dire  fins,  tandis  que  sont  gros 
ceux  «  pour  valetz  »,  fabriqués  «  d'estoupes  ». 

Prie-Dieu  :  «  Mon  prie-Dieu,  à  deux  armoyres 
fermant  à  clef»,  probablement  à  deux  corps,  un 
en  bas  et  l'autre  au-dessus  de  l'accoudoir. 

Serviettes.  Comme  les  nappes,  elles  sont  de 
deux  sortes  :  «  unies  »  ou  «  ouvrées  »,  avec  des- 
sins. 

Taque.  A  ce  mot  insolite  dans  nos  contrées,  ne 
se  croirait-on  pas  en  Lorraine?  «  Dans  la  cuisine 
une  gran  taque  au  foyer  ». 

8.  —  INVENTAIRE  DE  LA  SACRISTIE  DE 
REMIREMONT,  EN  1727,  par  Didier-LaURENT 
[Pouriial  Je  la  Soc.  d'arch.  lorraine,  1899,  pp.  148-156). 

L'illustre  abbaye  nous  fournit,  dans  son  mo- 
bilier, quelques  mots  qu'il  est  utile  de  consigner, 
à  l'usage  des  futurs  lexicographes. 

Bassin.  L'affectation  au  transport  du  pain 
bénit  n'est  pas  indiquée  dans  le  Glossaire  de 
V.  Gay  :  «  Un  grand  plat  bassin  d'argent,  sur 
lequel  on  porte  les  pains  bénits»  (n°  13). 

Couronne  de  l'ostensoir.  Ce  rit,  que  j'ai  encore 
vu  usité  en  Poitou,  est  absent  du  Glossaire:  «  Une 


KKVUH    DE    L  AKT    CHRÉTIEN. 
1901.    —    3""*^    LIVRAISON. 


200 


jtRcbuc  ÏJe  rSrt  cJ)vctien. 


boîte  en  carton,  dans  laquelle  il  y  a  deux  cou- 
ronnes de  fleurs  peintes  pour  mettre  sur  le 
S.  Sacrement  »  (n"  27). 

Feinte,  nom  expressif  pour  signifier  ce  qu'on 
appelle  ailleurs  représentation,  usitée  pour  les 
anniversaires  où  le  corps  n'est  pas  présent  : 
«  Quatre  grands  chandeliers  de  cuivre  pour  la 
feinte  »  (n»  136). 

Galoji.  Ce  mot  manque  complètement  dans 
Gay.  Au  lieu  d'être  plein  comme  la  passemen- 
terie, on  le  rencontre  ici  à  Jour  :  «  Une  bourse  de 
damas  violet,  bordée  d'un  galon  d'or  à  jour  » 
(n°  69). 

Housse,  pour  protéger  l'ornement  :  «  Un  orne- 
ment d'étoffe  d'argent,...  avec  leurs  housses  de 
serge  impériale  rouge  »  (n»*  38,  39). 

Parterre,  semé  de  fleurs  :  «  Un  dez  (dais)  de 
satin  blanc,  travaillé  en  parterre,  de  velours 
cramoisy  et  argent,  sous  lequel  on  porte  le  Saint 
Viatique  »  (n°  1 15). 

Soleil,  ou  auréole  circulaire  rayonnant  autour 
d'un  Nom  de  Jésus,  comme  les  armoiries  des 
Jésuites  en  Italie  :  «  Un  voile  de  calice  de  damas 
blanc,  brodé  d'un  soleil  d'or,  avec  un  point  d'Es- 
pagne d'or  autour  »  (n°  51).  —  «  Un  autre 
voile  de  gros  de  Tours  vert,  brodé  en  or  et  en 
argent,  avec  un  soleil  au  milieu  »  (n°  58). 

9.  —  REGISTRK  DE  FAMILLE,  1727-1800, 
dans  le  Bulletin  de  la  Société  archéologique  de  la  Cor- 
rhe,  XXI,  pp.  615-624. 

La  sépulture  se  fait  «  près  notre  banc»  (1739), 
«  sous  notre  banq  »  (1751),  «auprès  de  notre 
banq  »  (1768),  pour  mieux  garder  le  souvenir 
des  défunts,  chaque  fois  qu'on  va  à  l'église. 

Il  est  question  des  «  pantion  »  des  enfants  : 
«  Aux  filles  de  Notre-Dame,  à  S.  Junien  »,  le 
prix  était  de  iio  livres  et  6  livres,  pour  le  blan- 
chissage, en  1763  ;  en  1764,  à  Limoges,  150  1., 
«  sans  le  blanchissage  ny  le  maître  d'école  » 

10.  —  INVENTAIRE  DE  LA  CHAPELLE  DE 
NOTRE-DAME  DE  PITIÉ,  AU  DIOCÈSE  DE 
POITIERS,  EN  1730,  par  Bonneau,  dans  le  Pays 
Poitevin,  1900,  p.  ii8. 

L'énumération  des  ex-voto  est  curieuse  :  «  Un 
gros  cœur,  une  oreille,  deux  petites  croix,  le  tout 
d'argent,  attachés  ensemble  par  un  ruban  rouge. 
Deux  petits  reliquaires,  une  croix  et  une  effigie 
d'Innocent  XII,  aussi  attachés  ensemble  par  un 
ruban  vert.  Plus,  sept  cœurs,  quatre  yeux  simple.^, 
un  double,  une  langue,  le  tout  d'argent  et  atta- 
chés ensemble  par  une  chaîne  aussi  d'argent. 
Un  cœur  d'or,  attaché  par  un  ruban  rouge.  Petits 
cadres  en  nombre  infiny  ». 


11.— L'ABBÉ  DE  GRÉCOURT,  INVENTAIRE 
DE  SON  MOBILIER,  par  VINCENT  {Bullet.  de  la 
Soc.  arcli.  de  Touraine,  1899,  pp.  158-173). 

«  Jean-Baptiste-Joseph  Vuillart  de  Grécourt, 
poète  français,  est  né  à  Tours  en  1684  et  mort 
en  la  même  ville  le  2  avril  1743...  Il  obtint,  à 
l'âge  de  13  ans,  un  canonicat  à  l'église  St-Martin 
de  Tours.  »  L'auteur  déclare  qu'il  omet  «  le 
mobilier  et  le  linge,  à  cause  de  sa  longueur  »  • 
c'est  bien  à  tort,  car  l'inventaire  perd  ainsi  nota- 
blement de  son  intérêt  et  reste  mutilé.  Les  deux 
pages  qu'on  en  donne  ne  compensent  qu'insuffi- 
samment cette  omission. 

Voici  ce  qui  concerne  le  costume: 

«  Une  canne  à  poignée  d'or,  aprétiée  20  livres. 

«  Une  canne  à  roseau,  avec  sa  poignée  à  lor- 
gnette. 

«  Un  bonnet  de  velours  brodé  d'or. 

i<  Une  robe  de  chambre  de  damas  bleu  et 
violet. 

«  Une  tabatière,  une  paire  de  boucles  à  sou- 
liers, une  paire  de  boutons,  le  tout  en  or. 

«  Un  anneau  d'or,  dans  lequel  est  enchâssée 
une  pierre  bleue,  61  livres. 

«  Une  montre  à  répétition  à  boîte  d'or, 
100  livres.  » 

12.  —  LIVRE-JOURNAL  DE  LA  FAMILLE 
BONNEVAL,  dans  le  Bulletin  de  la  Société  archéolo- 
gique de  ta  Corrcze,  1899,  pp.  675-689. 

En  fait  d'étoffes,  voici  le  «  velour  de  cotton  », 
la  «  flanelle  d'Engleterre  croisée  »,  le  i.  moleton 
de  cotton  »,  la  «  ratine  Châteauroux  ». 

Le  chanvre  est  de  deux  sortes,  en  1783  et 
1785  :  «  Chanvre  blanc  »,  roui  à  l'eau  et  «chan- 
vre de  la  fleur  »,  «  filasse  du  chanvre  mâle,  plus 
estimée  que  l'autre  »,  dit  l'éditeur  Delmond. 

X.  B.XRBIEK  DK  MONTAULT. 


RÉPERTOIRE  ARCHÉOLOGIQUE  DE  L'AR- 
RONDISSEMENT DE  REIMS  (département  de 
la  Marne),  publié  sous  les  auspices  de  l'.Acadcmie  de 
Reims.  —  Dixième  fascicule:  —  CANTON  DE 
BEINE,  —  par  Ch.  Givelet,  H.  Jad.vrt  et  L.  De- 
maison,  associés  correspondants  de  la  Société  natio- 
nale des  .Antiquaires  de  France.  —  Reims,  F.  Michaud, 
1900,  un  vol.  grand  in-S"  de  393  pages,  avec  25  grav. 

LF,  Répertoire  archéologiqtte  de  l'arrondisse- 
ment de  Reims,  de  MM.  Givelet,  Jadart  et 
Deinaison,  se  continue  sur  le  plan  très  complet 
d'après  lequel  il  a  été  conçu.  La  transcription  des 
textes  épigraphiques,  le  relevé  des  noms  de 
téncmcnts  intéressants,  de  rapides  aperçus  histo- 


Bibltograpl)te. 


261 


riques,  voire  des  indications  de  sources  inédites, 
s'y  ajoutent  à  la  description  minutieuse  des 
œuvres  d'architecture,  de  sculpture,  etc.,  le  tout 
additionné  d'abondantes  et  instructives  illustra- 
tions. Les  auteurs  réalisent  ainsi,  canton  par 
canton,  pour  cet  arrondissement  si  merveilleuse- 
ment riche,  le  triple  programme  archéologique, 
épigraphique  et  artistique,  proposé  naguères  à 
l'activité  des  travailleurs  de  province  par  le 
Comité  des  travaux  historiques  et  par  le  Comité 
des  Sociétés  des  Beaux  Arts  ('). 

Le  canton  de  Beine  est  <<  plein  d'attraits  » 
pour  l'archéologue.  —  «  Il  a  déjà  livré  de  nom- 
breux secrets  des  temps  antiques  aux  fouilleurs 
qui  l'ont  scruté,  notamment  à  M.  Charles  Bos- 
teaux,  maire  de  Cernay-lès- Reims.  Poursuivant, 
depuis  1870,  avec  autant  de  précision  que  de 
méthode,  ses  investigations  personnelles  dans  les 
stations  préhistoriques,  les  foyers  gaulois,  les 
sépultures  romaines  et  franques,  les  souterrains 
de  tous  les  âges,  ce  laborieux  archéologue  a 
formé  un  véritable  musée  local  avec  ses  décou- 
vertes »  (p.  6).  —  En  ce  qui  concerne  les  pério- 
des médiévale  et  moderne,  l'architecture  reli- 
gieuse a  fourni  à  MM.  Givelet,  Jadart  et  Demai- 
son  «  seize  édifices  réellement  intéressants  à  des 
titres  divers  »  (p.  8).  L'architecture  militaire  et 
l'architecture  civile,  au  contraire,  sont  pauvre- 
ment représentées  ;  «  à  part  les  traces  d'enceinte 
et  de  fossés  entourant  quelques  villages  »,  les 
auteurs  du  Répertoire  n'ont  «  rencontré  aucun 
monument  de  défense  militaire,  aucun  château 
et  en  général  fort  peu  d'anciennes  maisons  : 
bâties  en  craie,  en  terre  ou  en  bois,  les  habita- 
tions n'offraient...  la  plupart  aucune  résistance 
aux  éléments  »  (p.  7). 

«  Les  seules  richesses  à  signaler...  sont  donc 
concentrées  dans  l'architecture  ou  la  décoration 
des  anciennes  églises  que  renferme  le  canton  » 
(P-  7)- 

Architecture  religieuse.  —  Quatre  égli- 
ses sont  réellement  des  «  édifices  remarquables  »  ; 
celles  de  Beine,  de  Cernay-lès-Reims,  de  Saint- 
Masmes  et  de  Bélheniville  ». —  Beine  nous  i.  offre 
un  parfait  modèle  du  style  de  transition  du 
Xlfe  siècle  »  (cf.  pp.  23  à  30).  —  L'église  de 
Cernay-lès-Reims  occupe  «  l'un  des  premiers 
rangs  parmi  les  églises  rurales  de  l'arrondisse- 
ment de  Reims  »  ;  ses  trois  nefs  (dont  la  princi- 
pale est  voûtée  sur  croisées  d'ogives  embrassant 
chacune  deux  travées)  ont  été  construites  «  dans 
la  seconde  moitié  du  XII<=  siècle  (1180  à  1200 


I.  On  sait  que  le  Répertoire  archéologique  de  la  Fratice,  le  Recueil 
dei  Inscriptions  et  \' Inventaire  des  Richesses  d'Art  ont  dCi... 
«  suspendre  leur  publication  »,  —  peut-être  plus  encore  faute  de 
collaborateurs  que  faute  de  crédits. 


environ)  »  (pp.  102  à  114,  un  plan  et  une  coupe 
longitudinale).  —  A  Saint-Masmes,  nous  trou- 
vons un  «  édifice  de  la  fin  du  XI I^  siècle,  qui  est 
resté  intact  dans  ses  éléments  essentiels  primi- 
tifs et  qui  mérite  à  cet  égard  une  attention  par- 
ticulière, aussi  bien  que  pour  l'harmonie  de  ses 
proportions  »  (pp.  304  à  309).  — ■  L'église  de 
Bcthe ni V m e,c\a.ssés  monument  historique  comme 
celle  de  Cernay,  remonte  à  la  fin  du  XII°  siècle 
ou  au  commencement  du  XIII' (pp.  78  à  88, 
avec  un  plan). 

A  Auberive,  l'église  présente  «  un  intérêt  par- 
ticulier à  cause  des  matériaux  qui  ont  servi  à 
sa  construction  au  XP  et  au  XII' siècle  »  (pp. 
39  à  48,  avec  un  plan  et  une  vue  générale  hors 
texte).  Elle  est  en  partie  bâtie  avec  des  briques 
provenant  de  l'aqueduc  romain,  qui  amenait  les 
eaux  de  la  Suippe  à  Reims.  On  retrouve  à 
l'église  de  Prosiies  des  parties  bâties  avec  des 
briques  de  la  même  provenance  (p.  247,  etc.). 

Une  mention  particulière  est  également  due 
aux  églises  —  à'Epoye.  <  de  la  fin  du  XI=  siècle 
ou  du  commencement  du  X 1 1'^  pour  la  plus  grande 
partie»  (pp.  157  à  165,  avec  un  plan),  — de 
Nogent-l  Abbesse,  nef  du  XI"^  siècle, chevet  carré  et 
tour  de  la  fin  du  Xllf^,  bas-côtés  du  XV1«  (pp. 
199  à  206),  —  de  Berru,  XII«  siècle,  dont  la  tour 
centrale  est  «d'une  remarquable  ampleur  »  (pp. 
58  a  62),  —  de  Dontrien,  en  partie  romane,  en 
partie  du  XIII«  siècle,  avec  un  portail  du  XVI^ 
(pp.  131  à  140,  avec  un  plan  et  une  planche  hors 
texte),  —  et  de  Nauroy,  en  majeure  partie  du 
XVI<=  siècle  (pp.  184  à  193,  avec  un  plan). 

Sculpture.  —  Indépendamment  des  jolis 
chapiteaux  de  Cernay-lès-Reims,  XII''  et  XIV^ 
siècles  (pp.  112-113  et  deux  planches  phototypi- 
ques hors  texte),  —  les  sculptures  les  plus  inté- 
ressantes, tant  au  point  de  vue  de  l'art  qu'au 
point  de  vue  de  l'iconographie,  sont  :  —  au  dit 
Cernay-lès-Reims  :  une  Vierge,  du  XI V'^  siècle, 
«  d'un  haut  intérêt  artistique  »  (pp.  115-116  et 
une  planche  hors  texte);  —  à  Dontrien:  une 
autre  Vierge,  également  du  XIV"' siècle  (p.  142)  ; 
—  à  Nogent-l' Abbesse  :  une  statue  en  bois,  «repré- 
sentant un  saint  costumé  en  guerrier,  armé,  à 
cheval  ;  elle  remonte  au  XV'  siècle  et  a  été  vé- 
nérée constamment  dans  l'église  de  Nogent  sous 
le  nom  de  saint  Caprais  »,  bien  qu'elle  ne  corres- 
ponde en  rien  aux  attributs  iconographiques  de 
ce  saint  (pp.  207  à  209,  avec  une  planche  hors 
texte)  ;  —  à  Dontrien  :  une  statuette  de  la  Vierge 
debout  au  pied  de  la  croix,  «  jolie  sculpture  du 
XVl'^  siècle  »  (p.  142)  ;  —  à  Saint-Martin- 
V  Heureux  :  «une  curieuse  statue  de  sainte  Bar- 
be »,  également  du  XVI''  siècle  (pp.  299-300)  ;  — 
à  Saint- Hilaire-le-Petit  :  plusieurs  statues,  dont 


202 


Bcbuc  tjr  rart  cbvéttcn. 


une,  datée  de  1598,  représente  sainte  Agathe 
«  debout,  tenant  un  livre  de  la  main  droite,  et 
dans  la  main  gauche,  une  tenaille  avec  son  sein 
arraché  >^  (p.  289)  ;  —  à  BctJieniville,  au  tympan 
du  portail  :  une  statue  en  bois  de  sainte  Marie- 
Madeleine,  «assez  bonne  sculpture  du  XVI« 
siècle  »  (p.  88)  ;  —  à  Dontrien  :  un  saint  Laurent, 
du  XVI^  siècle  (p.  142)  ;  —  à  Selles  :  un  groupe 
en  bois,  œuvre  assez  ancienne  [  1 546  ?]  et  de  sculp- 
ture intéressante  bien  qu'assez  grossière,  qui 
représente  saint  Martin  à  cheval,  coupant  son 
manteau  à  un  pauvre  »  (p.  353)  ;  —  enfin  à  Berrii, 
dans  le  mur  d'une  maison  particulière  :  un  groupe 
de  saint  Hubert,  du  temps  de  Louis   XIII  (pp. 

/O/l). 

Vitraux.  —  Les  vitraux  se  réduisent  à  qua- 
tre fragments:  —  à  Naiiroy :  deux  panneaux,  du 
XV!*"  siècle,  représentant  l'un  la  Prédication  de 
saint  Jean-Baptiste  dans  le  désert,  et  l'autre, 
les  saintes  Femmes  se  rendant  au  Tombeau 
(pp.  193-194);  —  à  Nogcnt-l'Abbesse  :  «  deux 
remarquables  figures  de  saint  Pierre  et  de  saint 
Sébastien  »,  également  du  XVI"^  siècle  («  de 
1550  à  peu  près  »)  (p.  210). 

Orfèvrerie.  —  Le  calice  en  vermeil  de 
l'église  de  Berrîi,  qui  provient  du  Temple  de 
Reims  et  qui  porte  une  inscription  en  précisant 
la  date  (1575),  est  «  l'un  des  plus  précieux  du 
diocèse  de  Reims  »  (pp.  6^  à  65,  avec  une  plan- 
che hors  texte). 

Menuiserie  et  Ferronnerie. —  A  Certtay- 
lès-Reiiiis,  les  deux  vantaux  de  la  porte  prin- 
cipale de  l'église  «  remontent  au  moyen  âge,  au 
XIV<=  ou  au  XV*!  siècle,  ainsi  que  leurs  gonds 
et  leurs  clous  en  forme  de  quatre-feuilles  » 
(p.  117)  ;  —  les  trois  retables  de  Saiiit-Souplet 
(XVTI"=  siècle)  sont  «  d'un  caractère  particuliè- 
rement remarquable  et  imposant  »  (pp.  328 
à  331,  avec  deux  planches  hors  texte);  — à 
Dontrien,  le  fauteuil  du  célébrant  date  du  début 
du  XVI  I<=  siècle  ;  sa  décoration  offre  les  insignes 
des  pèlerins  de  Saint-Jacques  (p.  141):  —  à 
Beine,  «  les  bancs  de  la  nef  sont  ceux  du  XVII  P' 
siècle  et  portent  encore  leurs  anciens  numéros 
d'ordre  »  (p.  30)  ;  —  la  grille  d'appui,  en  fer 
forgé,  de  l'église  de  Prosnes,  est  une  «  œuvre 
assez  élégante  du  XVI 11"^  siècle  »  (p.  250). 

Fonts  baptismaux.  —  Le  canton  de  Beine 
a  conservé  trois  fonts  baptismaux  du  XI=  ou 
du  XI P  siècle,  en  pierre  noire  de  Belgique  ou 
des  Ardennes,  décorés  suivant  les  traditions  des 
ateliers  de  ce  pays.  Les  deux  plus  intéressants 
se  trouvent  à  Beine  (pp.  30-31)  et  à  Aiiberive 
(p.  49)  (cf.  pp.  179-180). 


Épigrapiiie  lapidaire.  —  MM.  Givelet, 
Jadart  et  Demaison  ont  relevé,  dans  les  églises 
du  canton  de  Beine,  —  en  outre  de  la  légende 
du  calice  de  Berru,  —  un  ensemble  de  quarante 
inscriptions  lapidaires  antérieures  à  1800  ou 
relatives  à  des  faits  antérieurs  à  cette  date,  dont 
une  du  XII^  siècle,  une  du  XIV'?,  une  du 
XV«,  dix-sept  du  XVI^,  onze  du  XVI P",  sept 
du  XVIIP  et  deux  du  XIX^. 

Sur  ces  quarante  inscriptions,  quatorze  sont 
des  épitaphes,  et  trois,  des  textes  de  fondations; 

—  dix-neuf  relatent  des  dons  ou  des  événements 
divers  ;  —  quatre  sont  des  pierres  commémora- 
tives  de  travaux  d'architecture  et  se  rapportent 
à  l'exhaussement  de  l'abside  de  l'église  â' Aube- 
rive,  en  1438,  par  le  maître  maçon  Huet  Ludin 
(pp.  44  et  51.),  —  à  la  construction  en  1507  (.'), 
de  la  chapelle  Saint-Basle  de  l'église  de  Pninay 
(pp.  279-280),  —  à  la  reconstruction,  en  1532, 
de  deux  piliers  de  l'église  iXEpoye  (p.  163), — et 
à  la  reconstruction,  en  1556,  d'un  pilier  de  l'église 
de  Nanroy,  par  le  maître  maçon  Pierre  Joli 
(p.  190).  —  Je  citerai  encore  l'abondante  série 
de  graffites(du  XVI^  au  XIX=  siècle)  de  l'église 
de  Dontrien  (pp.  144  à   150). 

Épigrapiiie  campanaire.  —  Ici  je  deman- 
derai aux  lecteurs  de  la  Revue  de  l'Art  chrétien 
la  permission  d'être  moins  laconique  et  d'ajou- 
ter à  l'analyse  du  Répertoire  de  MM.  Givelet, 
Jadart  et  Demaison  quelques  annotations  per- 
sonnelles. 

Dans  le  canton  de  Beine,  MM.  Givelet,  Jadart 
et  Demaison  ont  rencontré  une  dizaine  de 
cloches  antérieures  à  la  Révolution,  dont  plu- 
sieurs portent  des  noms  de  parrains  ou  de  mar- 
raines, marquants   dans    l'histoire  champenoise. 

—  La  plus  ancienne  est  celle  de  Saint-Martin- 
rileureux  ;  elle  date  de  1463  et  présente  la  for- 
mule «  me  levèrent...  »  (').  — ■  Vient  ensuite  la 
belle  cloche  de  Saint-Masines,  datant  de  1522. 
La  seconde  ligne  de  l'inscription  de  cette  cloche 
est  «  formée  de  lettres...  et  de  chiffres,  dont 
l'assemblage...  semble  inintelligible  »  (p.  31 1). 
Des  séries  de  lettres  analogues  se  retrouvent 
ailleurs  :  nous  avons  jadis  été  porté  à  croire,  à 
la  suite  de  feu  G.  Vallier,  qu'elles  pouvaient 
avoir  un  sens  symbolique  (-);  nous  sommes  plu- 
tôt porté  aujourd'hui  à  les  considérer  comme  un 
simple  remplissage. 

1.  Communication  de  M.  H.  Jadart  (i"  mai  1900).  —  Ollc 
cloclie  sera  publiée  dans  le  prochain  volume  du  Rdpertoirt  archéo- 
logique (canton  de  Bourgogne). 

2.  G.  Vallier,  Inscriptions  campanaires  de  l' isète,  p.  48  ;  —  Jos. 
Hertlielé,  Kecherches  pour  servir  à  r histoire  des  Arts  en  Poitou, 
[)p.  271  à  273:  —  Jos.  B...,  V A rt  campanaire  en  Poitou,  dans  le 
liultetin  archéologique  du  Comité  des  travaux  historiques,  année 
1889,  p.  300  :  —  Givelet,  Jadart  et  Demaison,  Répertoire  archéoU, 
t.  X.  p.  311,  note  2. 


Btbttograpl)te, 


263 


La  seule  cloche  signée,  antérieure  à  la  Révo- 
lution, qui  existe  encore  dans  le  canton  de  Beine, 
est  celle  de  Dontrien  ;  elle  a  été  fondue  en 
1788,  par  «  LES  ROY  ET  GURY  »(pp.  143  et  373). 
Cette  société  de  Lorrains  ambulants,  —  dont 
les  signatures  n'ont  pas  encore  été  expliquées, 
que  nous  sachions,  —  se  composait  de  trois  ou  de 
quatre  fondeurs,  dont  le  père,  le  fils  et  le  gendre. 
—  Le  père,  CïlARLES  RoY,  habita  successive- 
ment deux  villages  voisins  de  Bourmont  :  Saint- 
Thiébault  et  Gonaincourt  ;  il  est  dit  fondeur 
de  cloches,  dans  les  archives  de  Gonaincourt,  à 
partir  de  1758  ;  il  mourut  au  dit  Gonaincourt  le 
28  pluviôse  an  V,  à  l'âge  de  85  ans.  —  Son  fils, 
Joseph-Hubert  Roy,  né  à  Saint-Thiébault  le 

3  novembre  I754i  marié  à  Gonaincourt  le  9  août 
1785,  mourut  le  2  janvier  1814  au  dit  Gonain- 
court, dont  il  avait  été  maire  ou  adjoint  à  plu- 
sieurs reprises.  —  Jean-Baptiste  Guky, labou- 
reur avant  son  mariage,  fondeur  de  cloches  après, 
avait  épousé  à  Gonaincourt,  le  13  février  17S1, 
Marie  Roy,  fille  de  Charles  et  sœur  de  Joseph- 
Hubert  ;  il  mourut, lui  aussi, à  Gonaincourt,  le  25 
décembre  1813,  à  l'âge  de  70  ans.  —  Un  autre 
Gury, Nicolas, cousin-germain  de  Jean-Baptiste 
Gury,  qui  précède, et  peut-être  neveu  de  Charles 
Roy,  fut  aussi  fondeur  de  cloches  ;  il  se  maria  le 

4  février  1788,  à  Huilliécourt,  avec  Charlotte 
Morel  (>). 

Suivant  que  les  Roy  père  et  fils  eurent  avec 
eux,  en  campagne,  les  deux  Gury  à  la  fois,  ou 
bien  seulement  l'un  d'eux,  Jean-Baptiste,  les 
signatures  des  cloches  furent  libellées  :  «  les  Roy 
et  les  Gury  »,  ou  bien  «  les  Roy  et  Gury»,  ou 
bien  encore  «  les  Roy  et  J.  B.  Gury  ». 

Le  campanographe  du  Tardenois  et  de  la 
Thiérache,  M.B.Riomet,  a  signalé,  dans  la  partie 
nord  du  département  de  l'Aisne,  plusieurs  œu- 
vres de  cette  société  de  fondeurs  :  —  à  Beaumé. 
une  cloche,  encore  existante,  signée  :  LES  ROY 
ET    LES    GURY    MONT    FAITE    EN    1783(2);  —  à 

Rognj,  trois  cloches,  dont  deux  détruites  à 
l'époque  révolutionnaire;  la  survivante, qui  pesait 
260  kilog.  et  qui  a  été  refondue  en  1890  à  Mohon 
(Ardennes)par  feu  Honoré  Perrin- Robinet  et  feu 
Pol  Perrin,  père  et  fils,  était  signée,  comme  celle 
de  Dontrien  :  LES  ROY  ET  GURY  MONT  FAITE 
EN  1788(3); — k  Proisy,   une  cloche  qui   porte 


1.  -Archives  communales  de  Saint-Thiébault,  de  Gonaincourt  et 
de  Huilliécourt  (Haute-Marne),  séries  GG. 

2.  B.  Riomet,  dans  la  Thiérache,  tome  XIII,  année  1889,  p.  126. 
—  [L'abbé  Palant],  Rogtiv.  baplëme  des  cloches,  dans  la  Setnalne 
religieuse  du  diocèse  de  Soissojis  el  Laon,  n°  du  6  septembre  1890, 
p.  580  ;  tirage  à  part,  p.  6.  —  Communication  de  M.  l'abbé  Achille 
Lépissier,  curé  de  Besmont  et  Beaumé. 

3.  [L'abbé  Palant],  art.  cité,  dans  a  Semaine  religieuse,  pp.  580 
et  640  ;  tirage  à  part,  pp.  6  et  13.  —  B.  Riomet,  dans  la  Thiérache, 
tome  XI\*,  p.  5. 


comme  signature  :  «  1790  FAITE  PAR  G.  ROY  ET 

J.  E.  GURY(i)  ». 

Parmi  les  anciennes  cloches  disparues  du  can- 
ton de  Beine,  sur  lesquelles  les  auteurs  du  Ré- 
pertoire archéologique  ont  pu  recueillir  des  ren- 
seignements, les  plus  intéressantes  sont  certaine- 
ment les  trois  fondues  vers  1567- 1568  pour 
l'église  de  Prunay,  par  le  célèbre  PIERRE  DES- 
CHAMPS, auteur  du  gros  bourdon  de  la  cathédrale 
de  Reims  (p.  280).  —  A  propos  des  trois  cloches 
provenant  de  l'ancienne  abbaye  Saint-Remi  de 
Reims,  qui  se  trouvent  depuis  1804  à  l'église  de 
Cernay-lès-Reims,  MM.  Givelet,  Jadart  et  De- 
maison  donnent  (p.  120)  divers  détails  sur  les 
fontes  importantes  faites  pour  cette  abbaye  en 
1685  et  en  1736  ;  à  cette  dernière  date,  l'abbaye 
de  Saint-Remi  utilisa  le  savoir-faire  de  deux 
Lorrains  bien  connus  des  campanographes  : 
Antoine  et  Claude  Brocard.  —  A  Époye, 
dans  l'église,  un  graffite  offre  «  le  nom  de  PIE  • 
OVDIN,  suivi  de  la  figure  d'une  cloche  »  (p. 
172).  «Serait-ce  un  nom  défendeur.'»  La  chose 
est  d'autant  plus  vraisemblable,  qu'il  a  existé  au 
XVII<=  siècle  un  fondeur  de  cloches  du  nom  de 
Pierre  Oudin. 

Durant  le  cours  du  XIX«  siècle,  les  fondeurs 
qui  signent  des  cloches  pour  le  canton  de  Beine, 
sont  en  majeure  partie  des  Lorrains.  Nous  trou- 
vons ;  —  en  1807,  LES  Regnaud  et  les  An- 
toine (p.  66),  une  société  d'ambulants  que 
M.  Jadart  a  déjà  signalée  dans  les  Ardennes,  et 
que  l'on  retrouve  également  dans  l'Aisne  ;  —  de 
i8i8à  1839  [Antoine]  Antoine  et  [son  beau- 
frère]  F.  L01SEAUX  (pp.  333-334,  290,  89-90  et 
31-32),  tous  deux  domiciliés  à  Robécourt  (Vos- 
ges):—  en  1827,  i-ES  COCHOIS  [père  et  fils]  ET 
les  Barrard  FRÈRES  (pp.  281-282),  c'est-à-dire 
1°  Jean-Nicolas  Cochois,  aliàs  Cochois-Baret, 
2°  François  Cochois,  3°  Jean-Baptiste  Barrard 
raîné,aliàs  Barrard-Husson.et  4°  Pierre-François 

Barrard  le  cadet,   aliàs   Barrard-Barrard  (^)  ;* 

de  1834  a  1895,  LES  Paintandre,  de  Vitry-le- 
François  (pp.  238-239,  228-229,  237-238,  354, 
216-217  et  172-173),  c'est-à-dire  les  frères  SÉ- 
BASTIEN et  Théodore  Paintandre,  de  Breu- 
vannes  (Haute-Marne),  établis  à  Vitry  vers  1830, 
et  les  deux  fils  de  Théodore,  Paul  et  Victor, 
qui  continuent  l'industrie  paternelle  ;  ■ —  et  en 
1888,  H[ONORÉ]  Perrin  -  [Robinet]' (pp.  256- 
257),  établi  aux  portes  de  Mézières  (Ardennes). 

En  outre  des  cloches  fondues  par  des  Lorrains, 
ambulants  ou  fixés  à  plus  ou  moins  de  distance 
du  canton  de  Beine,  —  apparaissent,  en  1838  et 

1.  B.  Riomet,  dans  la  Thiérache,  tome  X'VH,  p.  65, 

2.  Cf.  Jos.  Berthelé,  Les  Cochois  et  les  Barrard,  fondeurs  de  cloches 
ambulants  dans  t' arrondissement  de  Château-Thierry.  —  Annales 
de  la  Société  hist.  et  archéol.  de  Château-Thierry,  année  1890 
pp.  61  à  68.  ^ 


>64 


3Re)Jue  De  l*^vt  cj)rétieit 


en  1852,  deux  cloches  signées:  HiLDEBRAND 
fondeur  à  Paris  (pp.  354  et  366),  —  et  en  1869, 
deux  cloches  d'acier  signées  :  jACOB  HOLTZER 
(p.  290)  et  fondues  à  Unieux  (Loire).  Ces  deux 
dernières  cloches  avaient  été  entreprises  par  un 
personnage...  de  tempérament  assez  aventureux, 
JÉRÔME  DUTOT,  qui  ne  coula  jamais  une  cloche 
de  sa  vie  (à  ce  que  m'ont  assuré  des  gens  bien 
informés),  mais  qui  ne  s'en  intitulait  pas  moins 
<i.  fondeur  de  dociles  en  bronze  et  seul  fondeur  en 
i.  France  de  cloches  d'acier  »  (p.  290). 

La  réclame  de  Jérôme  Dutot  n'est  pas  la  seule 
signature  apocryphe  que  nous  fournissent  les  bef- 
frois du  canton  de  Beine.  Les  trois  petits  timbres 
de  l'horloge  municipale  de  Pontfaverger  portent 
l'inscription  suivante  :  <i  Nous  avons  été  fondues 
«  fn  i8j^  par  M.  A.  Calaine,  ingénieur  à  Rethel, 
«  membre  de  plusieurs  académies  et  sociétés  sa- 
«  vantes  de  France  et  d' Angleterre,  médaille  d'or 
«  et  d'argent  »  (p.  239).  Ce  CalAME,  qui  était 
d'ailleurs  un  mécanicien  intelligent,  fabriquait 
des  horloges...  et  commandait  les  cloches,  dont 
il  avait  besoin,  aux  Paintandre,  à  Loiseau-Lié- 
gault,  etc.  Au  XIX"-'  siècle  aussi  bien  qu'aux 
siècles  précédents,  on  rencontre  dans  l'épigraphie 
campanaire,  un  certain  nombre  de  signatures, 
dans  lesquelles  le  nom  du  véritable  auteur  est 
ainsi  remplacé  par  celui  de  l'entrepreneur  ou  du 
vendeur.  Cette  façon  d'agir  a  toujours  été  admise 
dans  le  commerce,  et  après  tout  elle  est  légitime  ! 
Néanmoins  elle  peut,  dans  plus  d'une  occasion, 
faire  surgir  de  réelles  difficultés  sous  les  pas  de 
l'historien  et  de  l'épigraphiste.  Celles  des  substi- 
tutions de  ce  genre,  qu'il  nous  est  possible  de 
percer  à  jour,  parce  qu'elles  appartiennent  à  une 
époque  encore  voisine  de  la  nôtre,  doivent  nous 
mettre  en  garde  contre  celles  qui  peuvent  se 
rencontrer    dans    les    textes    d'une    date     plus 

reculée.  ,        „ 

Jos.  Berthelé, 


''^m  BcrioÏJiques» 


BULLETIN  MONUMENTAL,  année  1901,  n'  i. 

M.  Lefèvre-l'ontalis,  devenu  à  la  fois  Direc- 
teur de  la  Société  française  d'archéologie  et  de 
son  organe  le  Bulletin  monumental,  marque  son 
avènement  par  une  impulsion  nouvelle  donnée  à 
ce  dernier  périodique.  11  vient  de  paraître,  chose 
insolite,  pas  trop  en  retard  sur  sa  date  régle- 
mentaire ;  il  est  plus  intéressant  que  jamais,  et 
M.  L.-P.  ouvre  lui-même  la  livraison  par  une  ex- 
cellente monographie  de  la  petite  église  de  Chars 
(Seine  et  Oise), charmant  édifice  du  XI  I-XIlI'^s., 
à  trois  nefs,  avec  chœur  entouré  d'un  large 
déambulatoire  à  tribunes  et  de  cinq  chapelles 
rayonnantes.  La  nef  centrale  est  étranglée  (elle 
n'a  guère  que  4  m.  de  largeur),  mais  le  détail  de 
l'architecture  est  d'une  extrême  élégance  :  belles 
moulures  toriques,  curieuse  clef  de  voûte,  des 
angles  de  laquelle  émergent  quatre  couronnes, 
superbes  chapiteaux  romans  à  feuilles  d'acanthe, 
jolie  rose.  L'article  est  bien  illustré,  mais  l'on 
regrette  de  n'y  pas  trouver  une  coupe  sur  les 
nefs. 

M.  A.  de  Rochemonteix  donne  à  son  tour 
une  notice  de  l'église  de  Sarcelle  (Cantal),  antique 
et  minuscule  sanctuaire  offrant  un  exemple  d'ab- 
side demi-ronde,  carrée  au  dehors. 

Il  y  eut  aux  XlV'^etXV'^  siècles  une  fabrication 
quasi  industrielle  de  panneaux  de  retable  en  al- 
bâtre. Darcel  croyait  qu'ils  provenaient  d'ateliers 
flamands  :  Feu  Courajod  et  M.  J.  Destrée  leur  ont 
attribué  une  origine  italienne  ;  M.  A.  Bouillet 
pense  avoir  trouvé  la  trace  d'un  atelier  flamand 
établi  à  Lagny  (Seine  et  Marne). 


Bil)ltograpl)te. 


265 


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^rcl)éologic  et  Beaiu'-^rts  ' \ 

— =—    JFvancc.  — =— 

Allard  (P.).  —  Études  d'histoire  et  d'archéo- 
LOGiK.  —  In-iS°.  Paris,  Lecoffre. 

Babelon  (Ê.).  —  Catalogue  des  intailles  et 

CAMÉES  DONNÉS  AU  DÉPARTEMENT  DES  MÉDAILLES  ET 
ANTIQUES     DE    LA     BIBLIOTHÈQUE      NATIONALE     (Coll. 

Pauvert  de  la  Chapelle).   —  In-8''  avec   fig.   et   pi. 
Paris,  Leroux. 

Barbier  de  Montault  (X.).  —  Chapiteaux  du 

XVI=  SIÈCLE    DU    CHATEAU    DE    LAUDIFER     (Maltie-et- 

Loire),  dans  Notes  d'art  et  d'arckéologie,   septembre- 
novembre  1899. 

Baudot  (A.de)  et  Perrault-Dabol  (A.).  —  Ar- 
chives DE  LA  COMMISSION  DES  MONUMENTS  HISTORI- 
QUES, t.  I".  —  In-fol.  avec  100  planches.  Paris,  Lau- 
rens. 

Bellouard  (L'abbé). —  Histoire  de  l'abbave  de 
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richement  illustré.  Rodez,  Carrère. 

Bourdery  (L.).  — Catalogue  des  émaux  peints 
appartenant  a  la  société  des  Antiquaires  de 
l'Ouest,  a  Poitiers.  —  In-8°.  Poitiers,  Biais  et 
Roy. 

I.  Les  ouvrages  marqués  d'un  astérisque  (*)  ontété,  sont  ou 
seront  l'objet  d'un  article  bibliographique  dans  la  Revue. 


Brlcqueville  (Eug.  de). —  Notes  historiques  et 
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Fischbacher. 

Buhot  de  Kersers  (A.).  —  Histoire  et  statis- 
tique monumentale  du  département  du  Cher, 
T.  VIII,  32''  et  dernier  fascicule.  —  In-4».  Bourges, 
Tardy-Pigelet. 

Crosnier  (Le  P.  J.) —  La  chapelle  Saint-Sau- 
veur AU  CHATEAU  DE  La  Bourgonnière  (Maine-et- 
Loire),  et  le  Christ  en  robe,  dans  Notes  d'art  et 
d'archéologie,  février  1900. 

Demaison.  —  Les  chevets  des  églises  de  N.-D. 
DE  Chalons  et  de  Saint-Remi  de  Reims.  (Extrait  du 
Bulletin  archéologique, i?><)<).) —  In-8".  Pans,  Imp.  Nat. 

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drale  d'Angers,  trésor,  tapisseries,  vitraux. — 
In-8''.  Paris,  Laurens. 

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*  Didier- Laurent.  —  Inventaire  de  la  sa- 
cristie DE  Remiremont,  en  17  24,  dans  \ç.  Journal  de 
la  Soc.  d'arc,  lorraine,  1900,  pp.  148-156. 

Étude  sur  l'ancienneté  de  la  chapelle  de 
FoURviÈRE,  et  principalement  de  la  nef  Saint- 
Thomas.  —  In-8°,  avec  gr.  Mâcon,  Protat. 

*  Fournier  (Jos.).  —  Comptes  du  roi  René 
POUR  LA  construction  de  deux  caravelles,  en 
147S,  dans  le  Répertoire  des  tiaraux  de  la  Société  de 
Marseille,  1900,  pp.  391-399. 

*  Givelet  (Ch.),  Jadart  (H.)  et  Demaison  (L.). 

—  RÉPERTOIRE    archéologique     DE     l'aRRONDISSE- 

ment  de  Reims,  dixième  fascicule  :  canton  de 
Beine.  —  Un  vol,  gr.  in-8°  de  393  pp.  avec  25  grav. 
Reims,  F.  Michaud. 

Gonse  (Louis).  —  Les  chefs-d'œuvre  des  mu- 
sées DE  France:  la  peinture.  —  Iii-4%  27°  vignet- 
tes,  30   pi.  hors   texte.   Paris,    L.  Henry  May. 

Prix,  broché,  50  francs  ;  relié,  60  francs. 

Granges  de  Surgères  (Le  marquis  de)  —  La 

cathédrale  DE  Nantes,  documents  inédits  (1631). 

—  In-8=.  Paris,  Pion,  Nourrit  et  CK 

Heuzé  (Lionel).  —  Croquis  d'architecture  au 
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avec  fig.  et  2  pi.  Paris.  Leroux. 

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siale de  Mazamet  (Tarn),  l'an  ii,  dans  VAlbia  chris- 
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*  Inventaire  du  château  de  Bourg-Charente, 
EN  1792,  dans  le  Bulletin  de  la  Société  archéologique  de 
la  Charente,  6=  série,  t.  VII,  p.  lxxxviii-lxxxix. 

*  Inventaire  d'Amboise  et  Chanteloup. 

*  Inventaire  d'un  fabricant  de  papiers,  en 
1723,  dans  le  Bulletin  de  la  Société  archéologique  de  la 
Correze,  1898,  pp.  609-613. 


266 


îRebuc  tie  l'^^rt  cbrcticn. 


*  Inventaire  de  l'église  d'Escoussens,  en  1717, 
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Champagne  méridionale  au  xvi'=  siècle,  étude  sur 
la  Transition  de  l'art  ^^olhii]t4e  à  l' Italianisme.  — 
Paris,  Armand  Colin  et  C'=. 

*  Lacouture  (Ch.),  S.  J.  —  Esthétique  fonda- 
mentale, précédée  d'une  lettre  de  m.  Eug.  Guil- 
laume, de  l'Institut.  —  Un  vol.  grand  in-8°  de 
422  pp.  Imprimerie  Jobard,  à  Dijon.  Librairie  V.  Re- 
taux, Paris. 

*  Legs  fait  a  sa  petite-fille  par  Hugon  le 
Roux,  en  1723,  dans  le  Bulletin  de  la  Société  atchéo 
logique  de  la  Corrcze,  1899,  PP-  5iS'Si9- 

Les  monuments  constantixiens  de  Jérusalem 
reproduits  sur  une  mosaïque  du  IV=  siècle  dans 
l'église  de  Sainte-Pudentienne  a  Rome,  dans 
La  Terre  Sainte,  Revue  illustrée  de  l'Orient  chrétien 
(i  avril  1900). 

*  Livre-journal  de  la  famille  Bonneval,  dans 
le  Bulletin  de  la  Société  archéologique  de  la  Corrcze, 
1899,  pp.  675-686. 

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d'après  le  Saint-Suaire  de  Turin.  —  In-8°,  Paris  et 
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inédites  de  dom  Grappin,  bénédictin  de  Besançon, 
a  l'abbé  Grandidier,  historien  de  l'église  de 
Strasbourg,avec  les  réponses  également  inédites 
DE  Grandidier.  —  In-S",  Paris,  Picard  et  fils. 

Mac  Swiney  de  Mashanaglass  (Le  marquis). 
—  Le  Portugal  et  le  Saint-Siège.  I.  les  épées 
d'honneur  envoyées  par  les  papes  aux  rois  de 
Portugal,  au  XVP  siècle.  II.  Les  langes  bénits 
envoyés  par  les  papes  aux  princes  royaux  de  Por- 
tugal. —  Deux  vol.  in-8°,  Paris,  A.  Picard  et  fils. 

Maçon  (G.).  —  Note  sur  le  «  Mystère  de  la 
Résurrection  »  attribué  a  Jean  Michel.  —  In-80 
Paris,  Techener. 

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toresque, dans  la  Gazette  des  Beaux-Arts.  —  In-8", 
avec  9  grav.  et  i  pi.  Paris. 

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chrétienne,  II.  Les  catacombes  romaines.  —  In-8° 
de  450  pp.  avec  planches.  Paris,  Desclée. 

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Leroux.  (Extrait  de  la  Revue  archéologique,  1900.) 

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de  Milan  et  le  manuscrit  de  l'Iliade   a  l'Am- 


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in  4°,  3  planches  hors  texte.  Paris,  Leroux. 

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Histoire  de  la  basilique  vaticane  et  du  culte  du 
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avec  de  nombreuses  planches  et  vignettes.  Tours, 
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Paris,  Davy. 

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AU  XVP  SIÈCLE.  —  (Extrait  des  Mémoires  de  V Aca- 
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1"=  partie,  1897),  gr.  in  4°,  94  pp.  Paris,  Imprimerie 
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Paul  Jove.  —  (Extrait  des  Mémoires  de  l'Académie 
des  Inscriptions  et  Belles-Lettres'),  1900,  in-4°,  Paris, 
Impr.  Nationale  et  Klincksieck. 

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Prix  3,50. 

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de  la  messe  et  leurs  monuments.  —  In-4",  t.  VIII. 
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ches et  vingt  figures  dans  le  texte.  Paris,  Ernest  Le- 
roux. 

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dans  le  Bulletin  historique  du  dioche  de  Lyon,  1900, 
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Bibliograpl)te. 


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122  grav.  hors  texte  et  dans  le  texte.  Berlin,  Wasniuth. 

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ZANZ.  — ■  In-8°  Berlin,  Behr. 

Petrus  Pictor  Burgensis.  —  De  propectiva 
pingendi.  Nach  dem  Codex  der  Kônigl.  Biblio- 
thek  zu  Parma  nebst  deutscher  Ubersetzg.zum 
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Voege  (W.).  —  Les  sculptures  de  la  cathé- 
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senschaft,  fasc.  2,  t.  XXI  (1899). 

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Wûscher-Becchi  (T.).  — Origine  de  la  tiare 

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temp.  practical  Treatise  on  quattrocento  Pain- 
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Allen. 

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Leeds,  John  Whitehead  and  Son. 

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illustrations.  London,     Mitchell   and  Hughes. 

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Art  in  England. —  Impérial  8°,  avec  environ  300  il- 
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1901     —    3"^*^    LIVRAISON. 


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Firenze,  Le  Monnier. 

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SOITO  NEL  BrESCIANO  E    IL    PERIODO    ENCOLITICO    IN 

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SECOLO  XV.  —  InS°,  Firenze,  Tip.  Florentina. 

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=— ^=  Bcl0iqiic=ii)ollanDc.  =^^= 


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ments   DES   ÉGLISES  DE  LA  FlANDRE  AU  XVP  SIECLE, 

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auteurs.  Société  d' Emulation  (Bruges),  1900. 

Blanchet  (Emile).  —  L'art  en    Flandre.  Les 

MUSÉES  ET  LES   ÉGLISES  DE  BELGIQUE.  —  In-l6.  Paris, 

Boullay. 

Brouwer  Ancher  (A.-J.-M.).  —  Les  cloches 
ET  carillons  d'.'\msterdam,  et  leurs  fondeurs, 
dans  Oud  Holland,  3=  liv.,  1898. 

Hans  Memling.  —  Livraison  IV:  Chapelle  de 
Greverade  de  la  cathédrale  de  Lueeck(i4  pi.)  : 
livraison  V:  la  chapelle  de  Sainte  Dorothée  dans 
l'église  a  Dantzig  et  le  musée  royal  a  Bruxel- 
les (9  pi.). —  In-folio,  Haarlem,  H.  Kleinmann  et  C'^ 

Moerman(L.).  —  Hôtels  de  ville  et  beffrois 
de  Belgique.  23  eaux  fortes  avec  texte.  —  In-folio, 
Bruxelles,  Havernians. 

Overvoorde  (J.-C).  —  Notre-Dame  de  Dor- 
DRECHT,  dans  Oud  Holland,  4"  livraison,  1898. 

Piot  (C).  —  La  CHAIRE  a  prêcher  du  couvent 
DE  Leliendael,  A  Malines,  àa.n%\Q  Bulletin  de  l'Aca- 
démie royale  de  Belgique,  n    s,  1900. 

Visser  (J.  Th.  de).  —  Hebreeunche  archaeolo- 
GiE.  —  In-8°.  Utrecht,  Kennink. 

*  Van  Caster  (Le  chan.).  —  Mathieu-Joseph- 
Charles  HuNiN,  graveur  (1770-1851)  et  Pierre- 
Paul-Alouis  Hunin,  peintre  de  genre  (1808-1856). 
—  Broch.  Malines,  Godenne. 


^^^.^  ^  ,^t  ^  ^^^^,  :^  :,^  .,^.  :,^  ,^  .,;^  :^  ,^  ,^  ,^  .^  ..^  ,^  ^^^^^ 


Cbrontque.  soi 


>MMAIRE  :  RKSTAURATION  des  ruines,  réponse  à  M.  Fierens- 
Gevaert.  —   RESTAURATIONS   DIVERSES.   —  VARIA.   —  NÉCROLOGIE. 


wwwwwwwwwwwwwwwwwwwwwwww^ 


Hcstauration  Des  ruines. 

î^N  même  temps  que  je  répondais  ici  aux 
critiques  de   M.  Fierens-Gevaert  diri- 


gées contre  la  restauration  des  ruines 
d'Aulne,  j'ai  tenu  à  défendre  l'École 
de  Saint-Luc  injustement  attaquée  par  lui  (V. 
Revue  de  l'Art  chrétien,  n°  i  de  1901,  p.  82).  Mon 
iionorable  contradicteur  a  riposté  sur  ce  point 
dans  la  Chronique  des  Arts  (p.  46  de  cette  année). 
Avant  de  reprendre  la  discussion  dans  les  co- 
lonnes de  la  Revue  de  l'Art  chrétien,  il  m'impor- 
tait de  savoir  quel  serait  le  sort  d'une  lettre,  que 
j'ai  cru  devoir  adresser  à  la  Chronique  des  Arts, 
et  que  celle-ci  a  fini  par  reproduire  en  partie. 

Parmi  les  dix  exemples  que  M.  F. -G.  avait  cités 
de  monuments  qui  auraient  été  mis  à  mal  par  les 
élèves  de  cette  «  pépinière  de  pastiches  »,  j'en  ai 
cité  deux,  spécialement,  dont  les  restaurateurs 
n'ont  rien  de  commun  avec  l'école  mise  eu  cause. 
Les  incriminations  manquaient  donc  d'exacti- 
tude autant  que  d'équité.  M.  F.-G.  s'est  donné 
là-dessus  le  facile  triomphe  de  conclure,  que  les 
autres  ont  donc  «  quelque  chose  de  commun 
avec,  etc..  »  Il  m'a  fallu  mettre  les  points  sur 
les  i;  j'ai  prouvé  que  sur  ces  dix  cas  cités,  deux 
seulement  peuvent  être  mis  à  l'actif  d'un  élève 
de  Saint-Luc  (').  Une  fois  de  plus  il  est  démontré 

I.  Voici  la  lettre  que  j'ai  adressée  à  la  Chronique  ttes 
Arts  et  que  l'on  a  reproduite  en  partie. 

Monsieur  le  Directeur  de  la  Chronique  des  Arts  et  de  la 
Curiosité, 

Votre  très  estimé  journal  a  publié  deux  articles  de  Monsieur  Fierens- 
Gevaert  sur  les  restaurations  monumentales  exécutées  en  Belgique 
et  sur  la  part  prétendument  funeste  qu'y  prend  l'École  de  Saint- Luc. 
Le  premier  m'atteignait  indirectement  en  critiquant  les  travaux 
exécutés  à  l'abbaye  d'Aulne  sous  ma  direction.  J'y  ai  répondu  dans 
la  Revue  de  l' A  rt  chrétien  en  reproduisant  in  extenso  l'article  en  ques- 
tion de  M.  F.-G.  Celui-ci  m'a  répliqué  dans  vos  colonnes  en  jiie  nom- 
mant, et  sans  reproduire  mes  argimients.  Je  me  dois  de  lui  répondre 
devant  vos  lecteurs. 

Le  premier  article  de  M.  F.-G.  était  criblé  d'inexactitudes,  fâcheuses 
parce  qu'elles  servaient  à  étayer  une  amère  critique  d'une  très  esti- 
mable institution.  J'ai  supposé  que  son  auteur  était  documenté  par 
des  tiers;  il  proteste,  tant  pis  pour  lui  ! 

Il  a,  en  effet,  présenté  comme  imputables  aux  élèves  de  l'Ecole  de 
Saint-Luc  des  restaurations  faites  à  dix  monuments.  J'ai  rectifié  ses 
dires  pour  quelques-ims  de  ceux-ci;  il  triomphe  et  me  proclame  en 
aveu  pour  les  autres.  Je  suis  obligé  de  mettre  les  points  sur  les  /  et  de 
déclarer  que  sur  les  dix  monuments  en  question  deux  seulement,  la 
Collégiale  et  l'Hôtel-de-Ville  de  Louvain,  sont  restaurés  (et  d'une 
manière  remarquable  d'ailleurs)  par  un  ancien  élève  de  l'école  incri- 
minée :  M.  Langerock.  Voici  quels  sont  les  autres  monuments 
cités  : 

Eglise  du  Sablon  à  Bruxelles  (architecte,  M.  Van  'Vsendyck). 
Église  de  Sainte-Gudule  (M.  F.-G.  Ait.  cathédrale)  de   Bruxelles. 
Je  nie  qu'elle  soit  restaurée  par  un  ancien  élève  de  Saint- Luc. 

Château  des  Comtes  de  Gand  (architecte,  M.  J.  de  Waele,  élève  et 
professeur  de  l'Académie  des  Beaux-Arts  de  Gand). 


avec  quelle  aveugle  animosité  l'on  s'en  prend  à 
cette  école,  qui  heureusement  ne  s'en  porte  pas 
plus  mal.  Mais  il  faut  ajouter  que  les  deux  cas 
qui  seuls  regardent  l'école  incriminée,  à  savoir 
ceux  de  la  collégiale  et  de  l'Hôtel-de- Ville  de 
Louvain,  font  grandement  honneur  à  celle-ci,  et 
à  son  élève  M.  Langerock.  M.  F.-G.  ne  trouvera 
pas  en  France  une  seule  restauration  monumen- 
tale effectuée  avec  une  plus  parfaite  correction 
archéologique  que  celle  de  Saint-Pierre  de  Lou- 
vain. A  l'Hôtel-de-Ville,  deux  architectes  étran- 
gers à  Saint-Luc  avaient  commis  des  fautes 
regrettables;  on  ne  pourra  pas  faire  le  même 
reproche  au  restaurateur  actuel. 

J'ai  défendu  l'école  de  Saint-Luc,  parce  qu'elle 
avait  été  systématiquement  et  méchamment  atta- 
quée. Il  est  juste  de  défendre  aussi  plusieurs  des 
autres  restaurateurs  des  monuments  belges;  nous 
attendrons  pour  cela  que  M.  F.-G.  allègue  des 
faits  précis.  M.  André  Hallays  reprend  sa  thèse 
dans  \z  Journal  des  Débats  (')  et,  du  même  cœur 
léger,  prétend  qu'on  a  «  iinpitoyablement  démoli 
des  parties  anciennes  du  Gravensteen  ».  On  n'a 
démoli  au  Château  des  Comtes  qu'une  partie  de 
tour  qui  allait  s'écrouler,  et  pour  sauver  les  parties 

Steen  de  Gérard  le  Diable  à  Gand  (architecte  M.  ,A.  Verhaegen, 
ingénieur  honoraire  des  Ponts-et-Chaussées). 

Cathédrale  de  Malines  (architecte,  M.  H.  Meyns,  étranger  à  Saint- 
Luc). 

Abbaye  de  Villers  (architecte,  M.  Licot,  étranger  à  Saint-Luc). 

Abbaye  d'Aulne  (architecte,  votre  serviteur,  élève  et  professeur  de 
l'École  du  Génie  civil  de  Gand). 

Église  de  Saint- Martin  à  Saint-Trond  (édifice  moderne,  donc  hors 
de  cause). 

M.  Fierens-Gevaert  s'est  prévalu  de  dix  exemples  pour  établir,  à 
l'aide  des  résultats  obtenus,  l'influence  funeste  de  cette  «  trop  célèbre 
académie,  pépinière  la  plus  florissante  des  pasticheurs  et  copistes 
belges  ».  Des  dix  exemples,  huit  sont  imputables  à  des  architectes 
qui  n'appartiennent  pas  à  cette  école.  J'espère  que  M.  F.-G. 
regrettera  la  légèreté  de  ses  attaques. 

Après  avoir  réglé  ce  dififérend,  où  j'ai  été  personnellement  cité,  je 
ne  veux  pas.  Monsieur  le  Directeur,  abuser  de  vos  colonnes  en  y 
abordant  l'intéressante  question  de  principe  qui  est  soulevée. 

Je  compte  retrouver  M.  F.-G.  ailleurs. 

Agréez,  je  vous  prie.  Monsieur,  mes  meilleurs  sentiments. 

L.  Cloquet. 
Gand,  3  mars  1901. 

A  quoi  M.  F.-G.  répond  : 

<i.  Ne  voulant  pas  encombrer  la  Chronique  d'une  trop  longue 
réponse,  je  me  contente  de  remarquer  :  1°  que  M.  Cloquet  est  confé- 
rencier de  Saint-Luc,  2"  que  j'ai,  dès  le  premier  jour,  signalé  l'église 
de  Saint-Martin  de  Saint-Trond  comme  un  édifice  moderne,  30  que 
je  me  suis  élevé  surtout  contre  l'abus  des  restaurations  et  que  la 
question  des  attributions  n'ayant  aucune  importance  dans  l'espèce, 
la  liste  fournie  par  M.  Cloquet  n'enlève  rien  aux  conclusions  de  mon 
article.  » 

Nos  lecteurs  ont  pu  lire  dans  notre  livr.  de  janvier,  p.  83,  l'article 
de  M .  F.  -G.  et  ils  peuvent  y  vérifier  que  notre  liste  enlève  toute  valeur 
aux  incriminations  violentes  du  correspondant  de  la  Chronique  des 
Arts  QonUe  l'excellente  institution  de  Saint-Luc. 

I.  N°  du  15  inars. 


270 


Bebue  bc  r^rt  chrétien. 


voisines  ;  elle  a  été  fidèlement  réédifiée.  Nous 
prions  M.  Hallais  de  nous  dire  ce  que  l'on  aurait 
pu  faire  de  mieux,  et  ce  que  l'on  aurait  fait  en 
France  ? 

M.  F.-G.  revient  sur  les  travaux  des  ruines 
d'Aulne.  Il  se  scandalise  de  ce  que  l'on  empile 
avec  ordre  certaines  pierres  retrouvées  qui  cons- 
tituent des  documents  architectoniques  ;  il  croit 
me  confondre  en  citant  un  archéologue  qui,  décri- 
vant l'état  actuel  de  l'abbatiale,  s'exprime  ainsi  : 
«  en  posant  le  pied  sur  le  sol  de  l'antique  nef  de 
l'église  Notre-Dame  d'Aulne,  on  se  croit  tout 
d'abord  au  beau  milieu  d'un  édifice  en  pleine 
construction  ».  La  remarque  est  naïve  ;  M.  l'abbé 
B.  et  M.  F.  voudraient-ils  par  hasard  que  les 
travaux  nécessaires  pour  tenir  debout  des  murs 
qui  s'effondrent  se  fissent  sans  échafaudages, 
sans  ouvriers  et  sans  engins  ? 

Laissons  de  côté  ces  critiques  dénuées  de  toute 
valeur,  et  revenons  aux  principes.  Entre  deux 
partis  il  fallait  choisir  ;  ou  bien,  il  fallait  laisser 
crouler  les  derniers  murs  de  la  fameuse  abbaye 
avec  les  curieux  vestiges  de  l'art  ancien  qu'ils 
recèlent,  pour  ne  pas  déranger  un  instant  ce 
pittoresque  et  chaotique  aspect  de  la  nature 
sauvage  qui,  à  la  joie  des  snobs  du  pittoresque, 
se  développait  au  sein  des  débris  amoncelés. 

Ou  bien,  il  fallait  interrompre  un  instant  cet 
envahissement  des  végétaux  parasites  et  l'action 
délétère  des  intempéries,  pour  procéder  à  la 
réparation  urgente  des  ruines  et  les  consolider 
avant  de  les  rendre  à  la  nature. 

Dans  le  premier  cas,  c'était  la  transformation  à 
bref  délai  d'un  chef-d'œuvre  d'architecture  en  un 
amas  de  décombres,  embellis,  je  le  veu.x  bien, 
par  des  tapis  de  gazons  et  de  mousses,  des  vête- 
ments de  lierre  et  de  belles  poussées  d'herbes,  de 
buissons  et  d'arbres  enracinés  aux  murs.  C'était 
l'anéantissement  rapide  de  l'œuvre  humaine  par 
l'œuvre  de  la  nature. 

Dans  le  second  cas,  c'était  la  conservation  d'une 
prestigieuse  ordonnance  monumentale, rehaussée 
de  ce  que  la  nature  saura  bien  y  ajouter  (après 
la  restauration  tout  comme  après  la  destruction 
première),  de  vénérable  patine,  de  décor  végétal 
et  d'allure  pittoresque.  Seulement,  nous  garde- 
rons longtemps  encore  ce  chœur  dont  les  contre- 
forts n'auraient  pas  vu  le  XX*^  siècle  ;  nous  n'au- 
rons pas  laissé  disparaitre  cette  curieuse  fenêtre 
du  transept  nord  (côté  ouest),  unique  spécimen 
de  tout  le  système  des  verrières  de  la  grande 
nef  primitive  ;  le  sol  déblayé  nous  aura  rendu  la 
statue  du  prince  de  Ligne  et  la  superbe  dalle 
funéraire  de  Louant,  le  grand  bâtisseur  ;  nous 
aurons  exhumé  les  nervures  avec  leurs  clefs,  qui, 
reconstituées  sur  le  terrain,  indiquent  toute  la 
superstructure,  et   la   crypte    funéraire    régnant 


sous  la  nef  ;  et  la  base  des  grands  piliers  et  la 
partie  inférieure  des  galeries  d'un  cloître  gigan- 
tesque entièrement  enfoui.  Serait-ce  donc  un  sa- 
crilège d'avoir  pour  cela  troublé  quelque  temps 
le  désordre,  qui  fait  rêver  les  poètes  au  clair  de  la 
lune?  Et  puis,  n'est-ce  rien  d'avoir, en  rétablissant 
le  niveau  primitif  du  sol,  rendu  ses  proportions 
à  toute  l'architecture  ?  Le  Gouvernement  belge 
et  spécialement  M.  le  ministre  De  Bruyii  en  ont 
jugé  autrement  que  M.  Fierens-Gevaert. 

On  peut  dififérer  d'avis  là-dessus,  et  le  dire 
Libre  à  M.  F.-G.  d'opter  pour  le  premier  parti. 
Mais  qu'il  garde  son  opinion...  et  aussi  ses  ob- 
jurgations, et  qu'il  laisse  en  paix  l'excellente 
école  de  Saint-Luc,  dont  les  élèves  ont  mille  fois 
raison  d'étudier  l'architecture  du  moyen  âge,  non 
seulement  pour  être  à  même  de  restaurer  cons- 
ciencieusement les  monuments  de  cette  époque, 
mais  encore  pour  s'inspirer  des  mêmes  principes 
et  des  mêmes  traditions  en  construisant  des 
édifices  conformes  à  la  foi  dont  ils  sont  animés. 

L.  CloquET. 


Kcstaurations  Dioerscs. 

E  Nouvelliste  de  Rouen  du  24  février 
nous  donne  les  renseignements  sui- 
vants sur  la  restauration   de  la  cathé- 

drale.  Un  comité  a  été  constitué  dans 

le  but  de  provoquer  une  souscription  publique 
destinée  à  aider  à  la  restauration  du  grand  por- 
tail. Les  travaux  indispensables  à  la  simple  con- 
servation du  portail  ont  été  évalués  à  600,000 
francs.  La  ville  de  Rouen  s'est  obligée  à  fournir 
une  contribution  de  100,000  francs,  payable  en 
dix  annuités;  le  département  s'est  engagé  pour 
pareille  somme,  payable  en  cinq  ans;  le  diocèse, 
de  son  côté,  a  promis  un  concours  de  100,000 
Irancs  à  recueillir  par  voie  de  souscription  ;  l'État 
doit  fournir  le  reste.  Le  comité  de  souscription  a 
recueilli  82,140  francs.  Il  ouvre  une  souscription 
pour  les  17,860  francs  qui  restent  à  recouvrer  (•). 


LA  cathédrale  de  Strasbourg  va  être  restau- 
rée; le  Conseil  municipal  de  cette  ville  a 
évalué  la  dépense  que  nécessiteront  les  travaux 
de  restauration  à  2,253,000  francs;  vingt  années 
seront  nécessaires  pour  rendre  à  l'admirable  édi- 
fice son  ancienne  splendeur. 

Le  Conseil  municipal  est  d'avis  que  l'Alsace- 
Lorraine  et  l'Allemagne  doivent   participer   aux 

I.  Les  souscriptions  sont  reçues  :  au  secrétariat  de  l'arclievêché, 
chez  les  membres  du  comité,  dans  les  presbytères  et  dans  les 
bureaux  des  journaux  du  département  qui  voudront  bien  prêter  leur, 
concours. 


chronique 


271 


frais  de  ces  travaux,  la  conservation  de  la  cathé- 
drale de  Strasbourg  intéressant  non  seulement  la 
ville,  mais  la  province  et  l'État. 

—i<S<    •    l©«— 

BIENTOT  sera  terminée  la  restauration  des 
restes  de  la  célèbre  abbatiale  bénédictine 
d'Etival-en-Charnée  (Sarthe),  restauration  due 
à  l'initiative  de  MM.  Robert  Triger  et  du  marquis 
de  Beauchesne,  et  aux  générosités  de  MM.  Sing- 
her,  Chappée,  Galpin,  etc.,  du  duc  des  Cars,  des 
bénédictins  de  Solesmes.  Les  travaux  sont  diri- 
gés par  M.  Triger.  On  a  dégagé  une  absidiole  du 
XII<^  siècle, des  peintures  murales, une  belle  statue 
de  la  Vierge  en  terre  cuite.  Le  R.  P.  Dom 
Guilloreau,  de  Solesmes,  prépare  une  monogra- 
phie de  l'édifice. 


LA  vieille  maison  de  la  rue  Saint-Romain,  à 
Rouen,  pour  laquelle  ont  combattu  tant 
d'artistes  et  d'archéologues,  d'érudits  et  de  sim- 
ples touristes,  est  sauvée.  Elle  a  pu  être  rachetée 
par  la  Société  des  Amis  des  monuments  rouen- 
nais,  et  le  Conseil  municipal  de  Rouen,  à  la  suite 
de  pourparlers  avec  le  ministère,  a  décidé  de 
modifier  son  projet  d'édilité. 


ON  exécute,  en  ce  moment,  dans  les  ateliers 
d'un  ferronnier  liégeois,  un  grillage  en  fer 
forgé  destiné  à  entourer  l'église  collégiale  de 
Huy. 

Oh  mettra  prochainement  en  adjudication  les 
travaux  de  restauration  de  la  basse-nef  méridio- 
nale, près  de  la  grande  tour,  et  la  reconstruction 
de  l'ancien  portail  du  XIV<^  siècle,  découvert  lors 
des  derniers  travaux. 

-^t  ■•  }©f- 

LA  restauration  des  célèbres  maisons  de  la 
Grand'Place  de  Bruxelles  se  poursuit  ;  bien- 
tôt l'ensemble  sera  achevé.  On  entreprend  actuel- 
lement des  travaux  à  la  maison  /e  Pigeon  et  à  la 
maison  du  duc  de  Bavière. 

La  première  est  située  à  droite  de  la  Maison 
du  Roi.  Elle  a  appartenu  à  la  corporation  des 
peintres,  puisa  celle  des  arbalétriers.  On  lui  ren- 
dra l'aspect  qu'elle  possédait  lors  de  l'entrée  à 
Bruxelles  de  l'archiduc  Ernest. 


Varia. 


'ADEMOISELLE  Pellechet,  biblio- 
thécaire bibliophile,  qui  a  laissé  un 
^L^l  legs  important  à  la  Bibliothèque  na- 
v^r^gaâl  tionale,  a,  par  son  testament,  légué, 
en  outre,  à  l'Académie  des  Inscriptions  et  Belles- 
Lettres  un  capital  de  300,000  francs.  Les  intérêts 
de  cette  somme  doivent  être  employés  à  con- 
server les  monuments  existants  en  France  et  aux 
colonies,  qui  présenteront  un  intérêt  historique 
ou  archéologique.  Le  but  que  s'est  proposé  la 
défunte  est  surtout  de  venir  en  aide  aux  monu- 
ments historiques  non  classés  ou  à  ceux  classés 
dont  l'Etat  se  désintéresserait  et  non  de  faire 
travail  d'entretien  et  de  restauration  pour  un  seul 
monument. 

LA  Société  des  Amis  du  Louvre  a  offert  au 
musée  national  une  importante  tapisse- 
rie flamande  du  XV*^  siècle,  qui  ne  mesure  pas 
moins  de  huit  mètres  de  long  etvaut  70,000  francs. 
Elle  ïsçvéscnXe  Le  Jugement  deriiici:  \^Q  Christ, 
assis  au  sommet  de  la  composition,  est  envi- 
ronné d'anges  déroulant  des  banderoles  et  son- 
nant de  la  trompette;  à  ses  pieds,  deux  figures 
allégoriques  :  l'une,  placée  à  la  droite  du  Christ, 
symbolise  la  Vertu;  elle  lève  d'une  main,  vers  le 
Souverain  Juge,  le  lis,  emblème  de  l'innocence 
et,  de  l'autre  main,  invite  à  s'approcher  les  bons, 
à  qui  des  anges  distribuent  des  couronnes;  la 
seconde  est  \a.  Justice,  qui  menace  de  son  glaive 
vengeur  les  méchants  épouvantés.  Aux  deux 
extrémités  de  la  composition,  on  voit  encore 
deux  prophètes,  assis  dans  de  hautes  chaires 
sculptées,  et  déployant  des  phylactères  où  se 
lisent  des  textes  sacrés.  Une  merveilleuse  bor- 
dure, toute  ornée  de  fruits  et  de  fleurs,  encadre  ce 
tableau,  dont  l'état  de  conservation  est,  pour  ainsi 
dire,  parfait.  Elle  semble  avoir  été  tissée  à  la  fin 
du  XVe  siècle  et  avoir  appartenu  à  la  maison 
d'Albe.  D'après  le  type  des  figures  et  l'arrange- 
ment des  draperies,  il  y  aurait  lieu  d'en  attribuer 
la  composition  à  Quintin  Matsys.  C'est  une 
œuvre  d'une  grande  valeur  artistique. 

MONSIEUR  G.  Vergaud  vient  d'offrir  au 
musée  de  Cluny  une  boîte  à  boussole  du 
XVII"  siècle,  en  ivoire  gravé,  ornée  d'arabesques 
et  d'armoiries,  ainsi  qu'une  statue  polychrome  de 
la  Vierge  tenant  l'Enfant  Jésus,  en  pierre,  du  com- 
mencement du  XVe  siècle,  mesurant  0,70  centi- 
mètres. Cette  statue  est  un  beau  et  curieux  spé- 


272 


3&rbuc  ïie  V^xt  t\)xttitn. 


cimen  de  l'art  primitif  de  cette  époque  en   Lor- 
raine. 

— }0<   ■■   >04— 

LE  gouvernement  espagnol  se  proposerait  de 
^suivre  l'exemple  de  l'Italie,  de  la  Grèce  et 
de  l'Egypte,  et  de  prohiber  désormais  l'exporta- 
tion d'aucun  objet  d'art,  ni  d'aucune  antiquité  de 
l'Espagne;  la  prohibition  s'étendrait  également 
aux  livres,  documents,  manuscrits,  coins,  mé- 
dailles, armes,  armures,  etc.,  etc. 

— i©<— ^€M— 
ROBERT    DE     LUZARCHES. 

M.  Jean  Rameau  écrit  dans  le  Gaulois,  à 
propos  de  la  statue  qu'il  est  question  d'élever  à 
Jehan  de  Meung,  le  continuateur  du  Roman  de  la 
Rose,  les   lignes  suivantes  : 

Nos  écrivains  du  moyen  âge  sont  obscurs,  ou  grossiers, 
ou  pédants;  ils  piétent  tous  par  quelque  coté  à  la  critique. 
Les  architectes  de  la  même  époque  sont  lumineux  et  purs 
comme  le  ciel,  vers  lequel  ils  dressaient  leurs  flèches 
extatiques;  et  l'admiration  impérissable  des  siècles  est 
acquise  à  leurs  travaux. 

Notre-Dame  de  Paris  et  la  Sainte-Chapelle  honorent 
autant  notre  génie  que  le  Ri>i)ian  de  la  Rose  et  celui  du 
Renard.  Je  cherche  en  vain  cependant,  sur  les  places  de 
Paris,  des  monuments  élevés  à  la  gloire  de  Maurice  de 
Sully  et  de  Pierre  de  Montereau. 

Je  pense,  pour  ma  part,  que  Robert  de  Luzarches,  à  qui 
nous  devons  la  miraculeuse  nef  d'Amiens,  mère  de  toutes 
les  belles  nefs  de  la  chrétienté,  est  plus  digne  de  nos 
louanges  et  de  notre  vénération  que  Michel-Ange,  Raphaël, 
Léonard  de  Vinci  et  tous  les  artistes  de  tous  les  pays  et 
de  tous  les  temps.  Et  si  quelques  Parisiens  trouvaient 
mon  enthousiasme  un  peu  exagéré,  qu'ils  interrogent  les 
archéologues  anglais  ou  allemands,  et  ils  verront  que 
Robert  de  Luzarches  est  une  de  ces  figures  qui  méritent 
de  faire  à  jamais  l'étonnement  du  monde.  Je  ne  vois  pas 


pourtant  beaucoup  de  statues  élevées  en  France  à  la  mé- 
moire de  Robert  de  Luzarches. 

Je  vois  un  peu  partout  s'ériger  des  monuments  pour 
célébrer  le  génie  de  gens  qui  firent  des  mairies,  des 
théâtres,  des  marchés  au  poisson,  des  égouts  collecteurs; 
mais  Robert  de  Coucy  et  Jean  d  Orbais,  qui  travaillèrent 
■\  la  prodigieuse  cathédrale  de  Reims,  n'en  ont  pas  ; 
Enguerrand  et  Cormon,  qui  travaillèrent  au  chœur  de 
Beauvais,  le  plus  beau  du  monde,  n'en  ont  pas  ;  Jean  de 
Beauce,  qui  fit  le  clocher  de  dentelle  à  la  cathédrale  de 
Chartres,  n'en  a  pas;  Guillaume  de  Sens,  qui,  non  con- 
tent d'illustrer  son  pays,  passe  pour  avoir  bâti  la  plus 
magnifique  cathédrale  de  T.-Xngleterre,  n'en  a  pas. 

Il  y  a  là  une  injustice  révoltante,  et  l'on  s'indigne  de 
voir  prodiguer  le  bronze  ou  le  marbre  pour  tant  de  pein- 
tricules  ou  d'écrivaillons,  ciuand  on  ne  met  même  pas 
une  inscription  sur  une  plaque  pour  honorer  les  maîtres 
de  l'art  national,  ces  géants  du  moyen  âge  auprès  des- 
quels les  architectes  de  Rome  et  d'Athènes  ne  paraîtront, 
un  jour,  que  de  petits  enfants. 

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'^m  Nécrologie.  ^^ 


LA  Revue  de  l'Art  chrétien  vient  de  faire 
une  des  pertes  les  plus  sensibles  qu'elle 
ait  essuyées  depuis  sa  fondation,  par  la  mort 
inopinée  de  Mcin.seigneur  X.  Barbier  de  Montault, 
le  doyen  de  ses  collaborateurs. 

Le  trépas  l'a  surpris  en  pleine  activité,  à  tel 
point  qu'il  laisse  inachevé  plusieurs  articles  qu'il 
préparait  pour  la  Revue  et  dont  l'impression 
était  commencée. 

Nous  recommandons  son  âme  aux  prières  de 
nos  abonnés. 

Le  temps  nous  faisaiit  défaut,  nous  remettons 
à  la  prochaine  livraison  un  article  consacré  à  sa 
mémoire. 


Imprimé  par  Desclée,  De  Brouwer  &  C'"=. 


Be\)ue  îie 


l'Hrt  chrétien 


f>  yaiaiosant  tans  les  ùtiiy.  moîô. 
44'"^  Hnnéc.  —  5^  Série. 

Came  XII  (1.=  ùe  (a  lolicctianj.      4< 

4'"'-' livraison.  —  -.ïiiiUcr  \^)o\.  4( 


Wi¥^^^i¥nYnWiWiWiWiWi¥^¥n 


^m^mM^m^m^m^  Jlt  ©érxigin»  mm^m^ 


H  propos  D'un  litire  récent.  —  ca  jeunesse  Du  fiérugin  et  les  Origines  De 
réCOle  Ombrienne  ('),  par   l'abbé  Broussole,  aumônier  du  Lycée  Michelet. 


H^fe^j  E  Pérugin  est,  dans  le 
mouvement  de  la  Re- 
naissance italienne,  un 
artiste  dont  la  valeur 
J  ne  semble  pas  encore 
Il .  ^Miiiissr^ir  bien  fixée.  Il  est  né  à 
^^^^^f^^wH  la  période  la  plus  bril- 
lante de  ce  mouvement  ;  par  son  enfance, 
ce  maître  appartient   encore  à  la  première 

I.  Paris,  Oudin,  éditeur,  1901  ;  pp.  550,  130  grav.  et 
fig.  dans  le  texte. 

Notre  article  était  écrit  lorsque  nous  avons  reçu  de 
M.  Chabeuf,  notre  savant  et  dévoué  collaborateur,  le 
compte  rendu  du  livre  de  M.  l'abbé  Broussole,  que  nos 
lecteurs  trouveront  à  l'article  Bibliographie. 

Nous  avons  accueilli  avec  gratitude  ce  travail,  qu'on 
lira  avec  l'intérêt  qu'inspirent  toutes  les  communications 
que  M.  Chabeuf  veut  bien  nous  faire.  Dans  les  considé- 
rations qu'il  émet  sur  «  La  jeunesse  du  Pérugin  »,  nous 
sommes  d'accord  avec  lui  sur  plus  d'un  point.  Sur  d'au- 
tres, notre  point  de  vue  diffère  ;  à  cet  égard  nos 
lecteurs  trouveront  sans  doute  que  les  deux  études,  que 
nous  donnons  sur  le  même  livre,  ne  font  pas  double 
emploi.  N.   D.  L.  K. 


moitié  du  XV^^  siècle,  si  merveilleu.x  par 
les  chefs-d'œuvre  de  la  peinture  qu'il  a 
produits  en  si  grand  nombre.  Mais,  malgré 
son  illustre  disciple,  qu'il  a  vu  grandir  et 
mourir,  on  peut  se  demander  si  le  Pérugin 
a,  par  ses  travaux,  contribué,  d'une  manière 
sensible,  au  développement  de  l'art  dans 
une  voie  déterminée.  On  doit  reconnaître 
en  lui  un  grand  artiste;  je  crois  qu'il  serait 
difficile  de  voir  en  lui  un  peintre  original, 
un  créateur,  une  grande  figure. 

Son  temps  l'a  hautementprisé  et  surchargé 
de  commandes;  mais  de  Citta  délia  Pieve  à 
Rome,  de  Rome  à  Pérouse,  de  Pérouse  à 
Florence,  il  semble  avoir  subi  des  influen- 
ces, sans  en  imposer  aucune.  Homme  la- 
borieux, peut-être  à  l'excès,  on  lui  doit  quel- 
ques pages  de  haute  valeur;  mais,  tout  adulé 
qu'il  fut  par  ses  contemporains,  il  a  pu,  à 
l'apogée  de  sa  carrière,  voir  effacer  à  Rome, 


KEVUE  DE  l'art  CHBÉIIEN 
I9OI.    —    4""^    LIVRAISON. 


274 


Belluc  tJe  r^vt  cbrcttnu 


dans  la  chapelle  Sixtine,  quelques-unes  de 
ses  fresques  que  l'on  disait  des  meilleures, 
pour  faire  place  au  Jugement  dernier  de 
Michel-Ange. 

L'ouvrage  qui  vient  de  paraître  étudie  le 
maître  sous  un  angle  particulier;  il  reste  à 
examiner  s'il  en  donne  la  figure  avec  la 
netteté  désirable  et  en  juge  l'œuvre  avec 
équité. 

Si,  il  y  a  un  demi-siècle,  on  avait  annoncé 
sous  le  titre  «  La  jeunesse  du  Pérugin  » 
un  volume  de  plus  de  cinq  cents  pages,  on 
aurait  cru  certainement  à  la  publication 
de  quelque  roman  plus  ou  moins  historique, 
dont  le  maître  de  Raphaël  d'Urbin  serait 
le  héros.  Comment,en  effet, se  serait-on  dit, 
trouver  matière  à  un  gros  et  fort  étoffé 
volume,  sur  la  première  partie  de  la  biogra- 
phie d'un  artiste  mort  en  1524,  et  auquel 
Vasari,  né  en  1512,  encore  son  contempo- 
rain, par  conséquent,  et  son  compatriote,  ne 
consacre  qu'une  demi-douzaine  de  pages  ? 

Cependant,  si  les  recherches  faites  en 
Italie  par  les  savants  «  cultori  dell'Arte  >> 
ont  amené  au  jour  un  certain  nombre  de 
renseignements  documentés,  ce  n'est  pas 
précisément  sur  le  Pérugin  et  sa  biographie 
que  les  érudits  ont  fait  de  nombreuses 
trouvailles.  On  ne  saurait  même  dire  que, 
dans  les  fluctuations  du  goût  qui  se  sont 
produites  à  l'endroit  des  œuvres  de  plusieurs 
artistes,  celles  du  Pérugin  aient  perdu  ou 
gagné.  Ses  tableaux  valent  encore  dans 
l'estime  du  monde,  ce  qu'ils  valaient  il  y  a 
un  demi-siècle,  ni  plus,  ni  moins.  On  est 
donc  presque  surpris  de  voir  le  vieux  Va- 
nucci  et  son  œuvre  l'objet  d'une  aussi  com- 
pendieuse  étude.  Mais  hâtons-nous  d'ajou- 
ter, pour  être  juste  envers  l'auteur,  qu'il  y 
a  un  sous- titre,  «  Les  Origines  de  l'école 
Ombrienne  »  et  que  M.  l'abbé  Broussole 
s'est  attaché  à  justifier  par  une  étude  très 
fouillée.  Ce  n'est,  en  effet,  qu'après  la  lecture 


de  240  pages  que  le  lecteur  arrive  à  l'en- 
fance ou  plutôt  à  la  naissance  du  Pérugin. 

L'auteur  a  beaucoup  parcouru  l'Ombrie, 
en  touriste,  en  fouilleur  d'archives,  même 
dans  les  localités  les  plus  modestes,  et  c'est 
là  l'un  des  charmes  de  son  livre  ;  il  n'a  pas 
toujours  suivi  les  sentiers  battus,  et,  chemin 
faisant,  il  révèle  le  nom  de  peintres  peu 
connus;  il  décrit  des  fresques,  des  tableaux 
et  des  bannières,  qui  le  sont  moins  encore. 
Il  rattache  toutes  ses  études  à  son  thème 
général,  et  souvent  il  le  fait  au  moyen  de 
déductions,  d'hypothèses  et  de  rapproche- 
ments qu'il  faut  bien  accepter,  car  peu 
d'hommes  ont  suivi  tous  les  chemins  qu'il 
a  parcourus,  et  ont  fait  avec  ces  régions 
écartées  la  connaissance  intime  que  l'abbé 
Broussole  a  tenté  de  faire.  Ajoutez  à  cela 
que  nous  avons  affaire  à  un  érudil  ;  il  a 
lu  sur  l'art  antérieur  à  la  Renaissance  à  peu 
près  tout  ce  qui  a  été  écrit  avant  lui,  sans 
excepter  les  recherches  des  Allemands  et 
des  Anglais. 

Il  étudie  ainsi  successivement  l'architec- 
ture et  la  sculpture  de  l'Ombrie  avant  la 
période  de  la  renaissance  ;  les  anciennes 
peintures  de  l'Ombrie  et  des  environs  de 
Rome  ;  les  peintures  de  l'aimable  Gentile 
da  Fabriano,  d'Ottaviano  Nelli,  de  Boc- 
cati  da  Camerino,  de  Giovanni  Santi,  le 
père  de  Raphaël,  —  dont  il  parvient  à  re- 
constituer l'œuvre  beaucoup  plus  considé- 
rable qu'on  ne  le  croit  généralement  —  , 
de  Benedetto  Bonfigli,  de  Florenzo  di  Lo- 
renzo,  de  Nicolo  Alunno.  Il  jette  un  coup 
d'œil  sur  les  peintres  contemporains  de 
Florence,  de  Sienne,  même  sur  les  Fla- 
mands auxquels  il  découvre  certaines  ana- 
logies avec  les  peintres  de  l'Ombrie.  Nous 
arrivons  ainsi  à  la  fin  de  la  première  partie 
de  l'ouvrage,  à  peuprès  la  moitié  du  volume. 

L'auteur  s'attache  d'abord  à  fixer  les 
limites  géographiques    de  l'Ombrie,  et  ce 


île  î^érugtn. 


275 


soin  n'est  pas  inutile  ;  dans  l'esprit  de  la 
plupart  des  lecteurs  ces  limites  ont  quelque 
chose  d'indécis,  de  Hottant,  qu'il  importe 
de  préciser.  Il  convient,  dit  M.  l'abbé  Brous- 
sole,  de  donner  à  l'Ombrie  artistique  tout 
au  moins  les  limites  que  le  hasard  de  la 
politique  attribue  aujourd'hui  à  la  province 
de  Pérouse,  mais  il  ajoute  qu'il  n'est  pas 
possible  d'arrêter  scientifiquement  les  li- 
mites de  l'art  de  l'Ombrie.  Cependant,  il 
finit  par  conclure  que  l'art  de  l'Ombrie 
sera  pour  lui  l'art  même  de  l'Église,  qu'il 
le  considère  principalement  en  tant  qu'il 
s'est  développé  dans  les  trois  villes  de 
Gubbio,  de  Pérouse  et  de  Foligno  ;  c'est  là 
que  se  trouvait  en  réalité  le  centre  de  l'État 
pontifical,  son  cœur  sinon  sa  tête. 

L'art  de  l'Ombrie,  ajoute-t-il  plus  loin, 
c'est  donc  par  excellence  l'art  romain,  l'art 
de  l'Église,  et  ses  limites  ne  peuvent  être 
autres  que  les  limites  du  domaine  de  la 
Papauté. 

Voilà  pour  les  limites  géographiques  :  on 
voit  que  l'auteur  comprend  l'art  de  l'Om- 
brie d'une  manière  assez  différente  que  ne 
l'ontcompris  laplupart  de  ses  prédécesseurs, 
et  notamment  Rio. 

Mais  en  Italie,  les  écoles  d'art  se  pénè- 
trent réciproquement,  et  les  peintres  étant 
souvent  nomades,  il  en  naît  aisément  une 
certaine  confusion  lorsqu'il  s'agit  de  fixer 
le  domaine  de  leur  action.  Il  importe  peut- 
être  davantage  de  bien  établir  le  caractère 
de  ces  écoles.  Voilà  l'opinion  de  M.  l'abbé 
Broussole  sur  l'école  qu'il  étudie  particuliè- 
rement. 

«  Si  j'ai  bien  compris  le  caractère  général 
de  l'art  ombrien,  je  dirai  qu'il  est  l'héritier 
le  plus  authentique  de  l'art  chrétien  pri- 
mitif, lequel  fut  romain  avant  tout,  et  sous 
toutes  ses  formes  ;  que  ses  limites  semblent 
avoir  été  à  peu  près  celles  de  l'Etat  ponti- 
fical,  et  qu'enfin,    s'il    n'a   pas    réussi   à   se 


développer  également,  et  à  toutes  les 
époques,  dans  le  sens  de  ses  pures  origines, 
ce  fut  à  cause  des  influences  qui  le  vinrent 
entraver,  tout  en  paraissant  quelquefois 
destinées  à  le  renouveler. 

«  Parmi  ces  influences,  la  plus  désastreuse 
fut  celle  de  l'art  florentin.  Pour  l'achever 
tout  à  fait,  comme  il  lui  restait  le  tout  puis- 
sant patronage  des  Pontifes  romains,  il  ne 
lui  fallut  rien  moins  que  les  règnes  succes- 
sifs de  deux  papes  florentins  de  goût  et  de 
convictions  ;  l'agonie  de  l'art  ombrien 
commence  sous  Léon  X,  Jean  de  Médicis, 
—  et  s'achève  avec  Clément  VII,  — Jules 
de  Médicis   (■). 

Voilà  donc  le  lecteur  à  peu  près  renseigné 
sur  la  région  de  l'Italie  où  l'art  ombrien  a 
pris  naissance  et  s'est  développé,  sur  ses 
origines  et  son  caractère,  et  enfin  sur  le 
terme  de  son  existence.  Malheureusement, 
il  arrive  à  l'auteur  de  modifier  son  point  de 
vue  à  cet  égard. 

De  la  jeunesse  du  Pérugin  —  qui,  ne 
l'oublions  pas,  fait  l'objet  du  livre  de  M. 
l'abbé  Broussole,  —  on  ignore  presque  tout. 
On  sait  seulement  qu'il  naquit  à  Castello 
del  Pieve,  et  non  à  Pérouse,  comme  le 
rapporte  Vasari,  de  parents  peu  fortunés  et 
qu'il  quitta  dès  l'enfance.  On  ne  connaît  pas 
exactement  la  date  de  sa  naissance  que,  très 
probablement,  il  faut  rapporter  à  l'année 
1446  ;  mais  on  sait  que,  déjà  en  1455,  il 
n'était  plus  à  Citta  délia  Pieve.  Les  recher- 
ches de  l'auteur,  pour  trouver  le  premier 
initiateur  de  Pietro  Vanucci  à  l'art  qui 
devait  l'illustrer,  sont  restées  infructueuses. 
«On  ne  peut  rien  affirmer  à  ce  sujet,  dit-il, 
comme  aussi  il  est  permis  de  tout  imaginer.» 
Si  le  procédé  n'est  pas  strictement  conforme 
aux  principes  de  la  critique  historique,  on 
suit  cependant  volontiers  l'auteur  dans  ses 

I.  P.  35. 


276 


3Rc\jue  tir  rSit  chrétien. 


imaginations  et  ses  déductions,  parce  qu'il 
les  donne  pour  telles,  et  que  généralement 
elles  paraissent  plausibles. 

On  ne  sait  où  le  jeune  peintre  se  rendit  en 
quittant  le  toit  paternel  ;  serait-ce  à  Sienne, 
qui  n'en  est  pas  bien  éloignée?  Rien  ne 
prouve  que  la  jeunesse  tout  entière  de 
Pietro  ne  se  soit  passée  à  Florence  :  le 
Pérugin,  par  son  éducation,  n'a-t-ii  pas  été 
d'abord  siennois,  ou  florentin  ?  C'est  tou- 
jours l'auteur  qui  pose  ces  questions.  Mais, 
en  présence  de  ces  incertitudes,  n'est-il  pas 
étrange  d'entreprendre  un  livre  sur  la 
jeunesse  d'un  maître,  alors  que  l'on  ignore 
même  où  cette  jeunesse  s'est  passée  .''... 

Il  n'entre  pas  dans  mes  intentions  d'en 
suivre  les  développements  lorsqu'il  aborde 
l'étude  des  oeuvres  du  peintre  et  les  phases 
mieux  connues  de  son  existence.  Le  livre 
est  particulièrement  intéressant  dans  l'exa- 
men des  travaux  exécutés  à  Florence  et 
dont  une  partie  notable  a  malheureusement 
disparu,  du  vivant  de  leur  auteur,  à  la  suite 
de  la  destruction  du  couvent  des  Jésuates. 

C'est  dans  ce  couvent  aussi,  où  les  reli- 
gieux avaient  un  atelier  de  peinture  sur 
verre,  que  le  Pérugin  dessinait  des  cartons 
pour  leurs  vitraux. 

Avant  d'aborder  cette  période  de  la  vie 
du  maître,  M.  l'abbé  Broussole  avait  fait, 
à  propos  de  l'influence  florentine, une  remar- 
que trop  juste,  pour  ne  pas  la  rapporter  ici. 

«  A  l'époque  de  la  Haute-Renaissance, 
quand  la  civilisation  païenne  eut  pénétré 
très  profondément  dans  tous  les  esprits, 
nulle  part,  comme  à  Florence,  on  ne  sut 
l'accommoder  aussi  délicatement  avec  les 
exigences  de  la  culture  religieuse  et  chré- 
tienne. Un  parfum  d'élégance  y  atténue  la 
senteur  malsaine  des  plus  évidentes  turpi- 
tudes. » 

On  ne  saurait  mieux  dire. 


En  réalité,  nous  l'avons  dit,  les  recherches 
modernes  résumées  par  M.  l'abbé  Brous- 
sole ne  semblent  pas  ajouter  beaucoup  à  la 
biographie  du  Pérugin,  écrite  peu  d'années 
après  sa  mort  par  Vasari.  Malgré  certaines 
inexactitudes,  et  des  affirmations  parfois 
émises  légèrement,  celle-ci  reste  encore 
la  source  la  plus  sûre,  et  certainement  la 
plus  abondante,  sur  l'existence  et  les  œuvres 
du  maître.  Cependant,  Vasari  n'aimait  pas 
le  Pérugin.  Il  attribue  le  travail  acharné 
auquel  le  peintre  s'est  livré  pour  atteindre 
aux  sommets  de  l'art,  à  l'avarice  et  à  la 
soif  de  l'or  :  sans  exprimer  le  moindre 
regret,  il  rapporte  qu'une  série  des  meil- 
leures fresques  peintes  dans  la  chapelle 
pontificale  au  Vatican,  à  la  demande  de 
Sixte  IV,  furent  détruites  sous  le  pontificat 
de  Paul  III,  afin  de  faire  place  au  grand 
Jugement  dernier  de  Michel-Ange  ;  mais, 
chose  plus  grave,  il  l'accuse  d'avoir  eu  peu 
de  religion,  et  de  n'avoir  jamais  voulu 
croire  à  l'immortalité  de  l'âme.  Nous  allons 
revenir  sur  cette  assertion. 

Malgré  ses  recherches  et  sa  science,  l'au- 
teur laisse  souvent  le  lecteur  dans  le  doute 
et  dans  l'indécision.  Je  constate  des  con- 
tradictions, des  conjectures  hasardées  et  des 
fictions  ;  parfois  des  exagérations  auxquel- 
les on  ne  saurait  adhérer.  Nous  lisons,  dès 
la  première  page,  que  le  Pérugin  est  le 
«fondateur»  de  l'école  Ombrienne.  Le 
fondateur,  nous  l'avons  vu,  subit  assez  for- 
tement l'influence  de  Rome  et  surtout  de 
Florence  ;  nous  ne  sommes  pas  même  cer- 
tain que  ce  n'est  pas  dans  cette  dernière 
ville,  si  fascinante,  que  s'est  passée  la  meil- 
leure partie  de  la  jeunesse  de  l'artiste  :  il 
est  certain  que  plus  tard  il  y  a  exécuté  ses 
travaux  les  meilleurs  et  les  plus  vantés  ; 
d'autre  part,  on  nous  dit  que  l'art  ombrien 
sous    Léon  X  est  déjà  à  l'agonie,    Pérugin 


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277 


ayant  encore  bien  des  années  à  vivre.  A 
ce  compte  là,  l'école  Ombrienne  n'a  pres- 
que pas  existé.  Elle  se  résume  dans  le 
Pérugin,  puisque  celui  ci  en  est  «  le  fon- 
dateur »,  et  elle  meurt  avant  le  Pérugin, 
car  l'auteur,  non  sans  raison,  assure  que 
la  dernière  partie  de  la  carrière  du  maître 
aboutit  à  une  déplorable  décadence 

Il  est  difficile  aussi  de  souscrire  au  juge- 
ment de  M.  l'abbé  B.  quand  il  écrit  que  le 
Pérugin  «  a  inventé  la  peinture  d'extase  et 
de  ravissement  ».  Dans  bien  des  têtes  de 
ses  peintures,  d'ailleurs  belles,  et  qui  incli- 
nées dans  un  raccourci  souvent  répété,  jet- 
tent le  regard  au  ciel,  animées  d'une  expres- 
sion un  peu  convenue  et  qui  semble  avoir 
conscience  du  spectateur,  on  ne  peut  plus 
retrouver  le  sentiment  profond  et  vrai  des 
maîtres  antérieurs  à  la  Renaissance  :  dire 
que  «  la  fresque  de  Sainte  Madeleine  de 
Pazzi  »  est,  dans  l'ordre  de  la  peinture 
contemplative,  le  chef-d'œuvre  incontes- 
table de  l'art  chrétien,  semble  l'exagération 
manifeste  d'un   moment  d'engouement. 

Assurément,  au  point  de  vue  religieux, 
celte  fresque  ne  peut  être  comparée  au 
grand  Crucifiement  et  à  l'admirable  Des- 
cente de  croix  de  Fra  Angelico. 

Ce  qui  est  peut-être  plus  regrettable  en- 
core, c'est  que  l'auteur  ne  semble  pas  atta- 
cher grand  prix,  ni  à  ses  préférences,  ni  à 
ses  propres  jugements  ;  il  s'abandonne  aux 
fluctuations  des  impressions  et  des  in- 
fluences. C'est  ainsi  qu'il  a  demandé  à  la 
plume  éloquente  de  l'auteur  de  La  cathé- 
drale la  préface,  dont  un  livre  de  recherches 
et  d'érudition,  d'ailleurs  d'une  valeur  réelle, 
semblait  pouvoir  se  passer.  Dans  la  préface 
d'un  livre,  comme  dans  l'ouverture  d'un 
opéra,  on  aime  à  trouver  l'harmonie  qui 
doit  exister  entre  les  différentes  parties  d'un 
ensemble;  l'indication  des  motifs  qui  seront 
développés  et  au  moins  quelques  fleurs  du 


parterre  où  l'on  va  conduire  le  lecteur.  La 
préface  de  M.  Huysmans,  loin  d'aider  à 
l'unité  du  livre  et  d'en  faire  pressentir  l'esprit 
et  les  conclusions,  ajoute  à  la  perplexité  du 
lecteur.  Le  point  de  vue  de  l'écrivain  n'est 
certainement  pas  celui  de  M.  l'abbé  Brous- 
sole.  M.  Huysmans  semble  admirer  fort  peu 
les  œuvres  du  maître  auquel  celui-ci  a  con- 
sacré ses  longues  études  et  son  livre.  Je  vais 
citer  son  jugement  à  cet  égard, et  transcrire, 
chose  plus  remarquable  encore,  l'opinion 
de  M.  Huysmans,  sur  le  plus  beau  titre  de 
gloire  du  Pérugin  —  son  immortel  disciple, 
Raphaël  d'Urbin  : 

«  Pour  ne  prendre  que  ses  œuvres  du 
Louvre,  nous  sommes  en  face  de  Madones 
et  de  Saints  qui  n'en  sont  pas.  Ce  sont  des 
Apollon  et  des  Aphrodite  ;  ses  toiles  sont 
tout  ce  que  l'on  voudra,  sauf  de  l'art  catho- 
lique et  mystique  ;  et  après  lui,  ce  fut  son 
élève,  l'odieux  Raphaël  qui,  avec  ses  mado- 
nes douceâtres  et  ses  nourrices  purement 
humaines,  nous  conduisit  par  une  longue 
filière  et  toutes  les  transitions  aux  épou- 
vantables niaiseries  des  marchands  de 
sainteté  de  la  rue  St-Sulpice  et  de  la  rue 
Madame  (').  » 

Que  de  fois,  en  Italie  surtout,  on  a  écrit  : 
le  divin  Raphaël  !  je  n'ai  jamais  pu  adorer 
en  Raphaël  une  idole  ;  je  ne  saurais  oublier 
que  lui  et  l'irrésistible  milieu  qui  l'entourait, 
ont  beaucoup  fait  pour  dévoyer  la  peinture 
relio-ieuse  et  la  faire  descendre  des  sommets 
qu'elle  a  atteints  avant  lui.  Mais  il  ne  faut 
pas  avoir  parcouru  les  chambres  du  Vatican, 
il  faut  ignorer  les  portraits  des  contem- 
porains que  le  pinceau  de  Raphaël  nous  a 
transmis,  il  ne  faut  pas  même  avoir  jeté  les 
yeux  sur  ses  panneaux  du  Louvre,  pour  ne 
pas  admirer  dans  le  célèbre  Urbinate,  un 
grand,  un  très  grand  peintre  !  Ses  créations 

I.  Préface,  p.  vn. 


278 


3Rel)ut  lie  V^xt  tbvttitn. 


ont  fait  la  joie  et  l'admiration  des  généra- 
tions qui  lui  ont  succédé.  On  ne  peut  que  se 
sentir  froissé,  comme  d'une  brutalité,  de  la 
boutade  que  M.  l'abbé  B.  a  eu  le  tort  de 
laisser  au  frontispice  de  son  livre,  d'autant 
plus  sensible,  que  trois  pages  plus  loin,  il 
écrit  du  même  Raphaël,  ces  lignes  : 

«  Il  devint  ainsi  l'artiste  chrétien  par 
excellence,  également  capable  de  traduire 
les  aspirations  de  l'âme  qui  prie,  de  racon- 
ter les  histoires  qui  sont  le  capital  de  la  foi, 
et  aussi  d'en  célébrer  les  plus  glorieux 
triomphes.  » 

L'éloge  est  excessif  dans  un  sens  opposé. 
On  ne  saurait  voir  en  Raphaël  l'artiste 
chrétien  par  excellence.  Si  c'est  une  répa- 
ration, que  ÎNI.  l'abbé  B.  a  voulu  tenter,  mieux 
eut  valu  ne  pas  permettre  l'outrage.  Mais 
le  lecteur,  en  présence  de  l'injure  échappée 
à  la  plume  de  M.  Huysmans,  et  le  pané- 
gyrique de  l'auteur,  doit  demeurer  perplexe 
et  se  demander  à  qui  il  faut  entendre,  et 
quelles  sont  en  réalité  les  convictions  de 
l'auteur  ? 

Lorsque  l'on  étudie  une  époque  de  l'art 
encore  controversée,  cherchant  à  la  résu- 
mer, pour  ainsi  dire,  dans  un  artiste,  dont  les 
origines  sont  douteuses  et  les  éléments  qui 
ont  participé  à  sa  formation  peu  connus,  — 
comme  c'est  le  cas  pour  la  période  d'ap- 
prentissage du  Pérugin  —  il  y  a  du  mérite 
à  recueillir  les  recherches  de  la  science, 
et  à  faire  l'examen  critique  des  œuvres  de 
cet  artiste  ;  tout  cela  donne  de  la  valeur 
à  un  livre  d'art.  Mais  si  celui-ci  doit  inspi- 
rer confiance  au  lecteur,  il  faut  quelque 
chose  de  plus.  Le  lecteur  demandera  des 
principes  qui  donnent  à  un  livre  l'unité 
désirable,  et  des  convictions,  sans  lesquelles 
il  n'y  a  pas  d'autorité. 

Comme  beaucoup  d'écrivains  qui  ont 
étudié  la  vie  du  Pérugin,  l'auteur  est 
amené  par  l'information  donnée  par  Vasari, 


à  examiner  la  question  de  savoir  si  l'artiste 
a  été  inspiré  par  la  foi  du  chrétien.  Il 
écrit  même  tout  un  chapitre  sur  «  La  reli- 
gion du  Pérugin  ».  11  s'agit  de  savoir  si  le 
peintre,  dont  il  étudie  la  jeunesse,  fut  un 
incrédule  : 

Il  le  nie,  «  mais  mollement  »,  dit  l'auteur 
de  la  préface.  Assurément  la  manière  dont 
il  le  défend  de    cette  accusation   est  assez 


étrange. 


J'en  transcris  quelques  lignes  : 

«  II  n'y  a  pas  d'art  sans  convictions.  Mais 
il  suffit  à  l'artiste,  quand  il  veut  parler  des 
choses  les  plus  belles,  de  ce  genre  de  con- 
victions très  particulières  dont  l'expression 
sera  peut-être  d'autant  plus  éloquente 
qu'elles  restent  plus  à  tieur  de  conscience 
et  ressemblent  moins  à  la  vertu,  laquelle 
est  une  conviction  d'habitude  se  traduisant 
dans  les  actes  quotidiens  et  non  dans  les 
créations  de  l'art.  » 

Si  je  comprends  bien  cette  remarquable 
théorie,  l'artiste  peut  avoir  plusieurs  genres 
de  convictions  qui  se  superposent  par 
couches.  L'une  qui  restera  à  fleur  de  con- 
science, et  qui  lui  servira  à  exprimer  les 
choses  les  plus  belles,  les  plus  éloquentes. 
Son  travail  fini,  il  la  déposera,  en  même 
temps  que  sa  palette  et  ses  pinceaux  ;  — 
pour  reprendre  la  couche  de  convictions 
inférieure,  sur  laquelle  il  réglera  les  actes 
quotidiens  de  la  vie. 

C'est  assurément  fort  ingénieux,  et 
j'ajouterai  que  pour  l'artiste  qui  voudrait 
s'adonner  à  la  peinture  religieuse  sans  être 
gêné  par  «  les  convictions  d'habitude  qui 
peuvent  ressembler  moins  à  la  vertu  »,  c'est 
très  commode.  Heureusement  il  n'en  est 
rien.  Je  préfère  m'en  tenir,  à  cet  égard,  à 
l'opinion  que  Jean  de  Fiesole  exprimait 
avec  une  simplicité  bien  digne  du  religieux 
et  de  1  artiste,  en  disant  :  «  C/ic  chi fa  cose 
di  Cristo,  con  Crisio  deve  star  sempre.  » 


îLe  j^érugm. 


279 


Un  archéologue  allemand,  qui  a  fait  de 
la  peinture  en  Italie  une  étude  très  appro- 
fondie, dans  laquelle  les  œuvres  du  maître 
de  Pérouse  prennent  la  place  qui  leur  est 
due,  réfute  (en  examinant  la  fresque  que 
M.  l'abbé  Brousolle  prise  si  haut,  le  grand 
Crucifiement  de  l'église  Santa- Maddalena 
de  Florence),  l'opinion  de  Vasari  et  les 
écrivains  qui  l'ont  suivi,  dans  des  termes 
que  je  vais  traduire  : 

((  La  figure  du  Sauveur  est  peut-être  la 
plus  belle  qui  soit  sortie  du  pinceau  du 
Pérugin.  Dans  la  pureté  des  formes  se 
manifeste  cet  idéal  d'humilité  et  d'esprit  de 
sacrifice  que  cherchait  Fra  Angelico,  et  qui 
prouve  que  même  l'ami  de  l'art  ancien  pou- 
vait trouver  son  expression  dans  les  lois  et 
les  formules  d'un  art  nouveau.  Les  figures 
de  saints  qui  entourent  la  croix  expriment 
le  deuil  le  plus  profond.  On  y  sent  une  telle 
vérité,  une  telle  intensité  de  sentiment, 
qu'en  présence  de  semblable  confession  il 
semble  inutile  de  répondre  à  la  question 
posée  par  Burkhard  :  «  Qu'y  a-t-il  dans  ses 
œuvres  qui  soit  vraiment  de  pur  et  bon 
aloi  ?  »  (')  Pour  celui  qui,  des  profondeurs 
de  l'âme,  sait  puiser  l'expression  avec  une 
plénitude  si  convaincante,  la  fable  de  Vasari 
qui  prétend  «  que  le  Pérugin  n'aurait  pas 
eu  de  foi  et  aurait  nié  l'immortalité  de 
l'âme  »  ne  saurait  trouver  créance  (").  Un 
peintre  incrédule  peut  bien  donner  une 
formule  à  des  motifs  religieux  —  mais  leur 
transmettre  l'âme  qui  se  communique  au 
spectateur  et  qui  le  subjugue  dans  l'inti- 
mité de  son  cœur  — •  cela  n'est  possible  qu'à 

1.  Le  Cicérone,  Guide  de  l'art  aniigue  et  moderne  en 
Italie.  Paris,  Didot,  1898,  II,  p.  584. 

2.  Voici  le  passage  de  Vasari  ;  Fu  Pietro  persona  di 
assai  poca  religione,  e  non  se  gli  potè  mai  far  credere 
l' immort  alita  delP  anima  :  anzi  con  parole  accommodate 
al  stio  cervello  di  perfido  ostinissimamente  riciiso  agtii 
buona  via. 

Edition  de  Bologne  MDCXL  VII.  Parte  seconda.,  p.  41S. 


une  imagination  toute  vouée  à  Dieu  (')  ». 

Le  Pérugin  est,  paraîf-il,  mort  sans  rece- 
voir les  sacrements.  M.  l'abbé  Broussole 
fait  remarquer  avec  beaucoup  de  raison, 
qu'il  mourut  à  Fontignano,  village  près  de 
Pérouse.  Le  vieux  peintre  y  mourut  de  la 
peste,  et,  comme  un  pestiféré,  probable- 
ment abandonné  de  tout  le  monde  ;  il  fut 
enterré  hors  du  village  selon  ia  coutume, 
afin  d'éviter  ia  contagion.  Il  n'y  a  aucune 
induction  à  tirer  de  ce  fait  contre  sa  foi, 
d'autant  que  l'on  ne  tarda  pas  à  donner 
à  son  corps  une  sépulture  honorable  en  le 
transportant  au  cimetière  de  Fontignano. 
Neuf  ans  avant  sa  mort,  le  Pérugin  avait 
acheté  une  sépulture  dans  l'église  de  l'An- 
nunziata  à  Florence,  ce  qui  n'est  assuré- 
ment pas  un  indice  de  scepticisme  et  d'in- 
crédulité. 

Mais  l'auteur  s'est  privé,  ce  me  semble, 
du  meilleur  argument  en  faveur  de  la  reli- 
gion du  Pérugin,  en  ne  «  voulant  pas  se 
hasarder  à  juger  de  la  religion  d'un  artiste, 
d'après  les  qualités  de  ses  tableaux  ». 

S'il  s'agit  de  qualités  techniques,  de  vir- 
tuosité et  de  charme,  il  a  certainement 
raison. 

Mais,  comme  le  fait  observer  le  savant 
que  nous  venons  de  citer,  il  y  a  dans  le 
sentiment  intime  de  l'œuvre  d'un  artiste 
convaincu  une  éloquence  qui  n'appartient 
pas  à  la  virtuosité  de  la  palette,  ni  même 
à  la  maîtrise  d'un  talent  consommé. 

Il  y  a  eu  assurément  au  XV*  siècle, 
comme  il  y  a  eu  de  nos  jours,  des  peintres 
très  habiles  qui  ont  abordé  les  scènes  de 
l'Èvangile  et  les  mystères  de  notre  foi, 
comme  ils  auraient  peint  les  fables  de  la 
mythologie,  mais  il  est  bien  rare  que  ces 
tableaux  puissent  donner  le  change  sur  les 

I.  D' Erich  Fiantz.  Geschichte der  Christlichen  Malerei. 
Herder,  Fribourg  im  Breisgau,  II,  p.  390. 


28o 


Withxit  lie  rSrt  chrétien. 


convictions   des  artistes   qui   les   ont    pro 
duits  ! 

S'il  est  malaisé  de  pénétrer  aujourd'hui 
dans  le  for  intérieur  des  peintres  de  la 
Renaissance  et  de  connaître  leur  religion, 
nous  sommes  heureusement  très  bien  ren- 
seigné sur  l'esprit  de  foi  des  meilleurs 
peintres  religieux  de  notre  temps,  et  parmi 
eux,  il  n'en  est  aucun,  que  je  sache,  qui  ait 
été  même  soupçonné  d'hypocrisie  !  On  peut 
conclure  de  l'harmonie  qui  existe  entre 
leurs  œuvres,  leur  vie  et  leur  foi,  à  cette 
même  harmonie  chez  leurs  prédécesseurs 
du  XV'=  siècle. 

En  France,  le  peintre  le  plus  sincèrement 
religieux  de  notre  temps,  n'est-ce  pas  le 
bon  et  simple  Flandrin  qui,  en  écrivant  à 
ses  parents,  se  recommandait  à  leur  prière 
du  soir,  et  dont  on  a  pu  écrire  que  «  chaque 
heure  qui  s'écoule  à  l'atelier,  ou  sur  les 
échafaudages  d'une  église,  est  un  hommage 
rendu  par  le  chrétien  convaincu  à  la  vérité 
évangélique  et  par  le  peintre  à  la  dignité 
de  son  art  (').  »  On  pourrait  citer  d'autres 
peintres  français  de  notre  temps,  tout  aussi 
sincères  que  H.  Flandrin.  N'avons  nous 
pas  vu,  à  Rome,  une  pléiade  de  peintres 
comme  Overbeek,  Cornélius,  Hubner  et 
bien  d'autres,  reprendre  les  meilleures  tra- 
ditions de  la  peinture  religieuse  du  moyen 
âge,  tout  en  conformant  leur  vie  aux  strictes 
préceptes  de  la  religion  catholique  ?  Les 
peintres  Veith  etSteinle,  à  Francfort,  n'ont- 


I.  Lettres  et  pensées  d' Hippolyte  Flandiin,  prdcéd. 
d'une  notice  biographique  par  le  V'"'  Henri  Delaborde. 
Paris,  Pion,  1865. 


ils  pas  laissé  des  œuvres  sincères,  con- 
vaincues, en  harmonie  de  tout  point  avec 
une  vie  religieuse,  édifiante  .'' 

N'en  a-t  il  pas  été  de  même  du  groupe 
de  peintres  catholiques  à  Dusseldorf,  les 
Deger,  les  Muller,  les  Ittenbach,  les  Sette- 
gast  ?  Tous  ces  hommes,  nos  contempo- 
rains, ont  toujours  mis  d'accord  l'exercice 
de  leur  art  et  les  préceptes  de  leur  foi.  Ils 
auraient  cru  forfaire  gravement  à  celle-ci  en 
se  contentant  d'une  «  conviction  actuelle 
chaque  fois  qu'ils  mettaient  la  main  à  leurs 
pinceaux  »  ('). 

La  vie  et  les  travaux  de  ces  vaillants, 
dont  plusieurs  nous  étaient  personnelle- 
ment connus,  projettent  une  certaine  lu- 
mière sur  les  pénombres  de  l'histoire  du 
passé 

Lorsqu'un  peintre,  comme  le  Pérugin,  a 
vécu  d'une  vie  laborieuse,  presque  toujours 
en  contact  avec  les  prêtres  et  les  religieux, 
peignant  dans  les  couvents  et  dans  les 
églises  les  scènes  les  plus  touchantes  de  la 
vie  du  Christ  et  des  saints,  et  parvenant 
souvent  à  donner  à  ses  conceptions  un 
caractère  d'intime  conviction,  comme  dans 
le  Crucifiement  de  Santa-Maddalena,  dont 
nous  donnons  la  reproduction  d'après  une 
bonne  photographie  d'Alinari,  on  ne  risque 
pas  de  s'éloigner  de  la  vérité  en  adoptant 
le  jugement  de  M.  Erich  Frantz  et  en 
rangeant  parmi  les  fables  l'accusation  de 
Vasari. 

J.  Helbig. 

1.  F.  497- 


K^fh-  a'^  a'^-^  A^-jt  K^^  A^ A  \^^  ;t^^  a'^  A^-A  A^A  A^^  A^v)^  A^vI^A  A^^  ^^ 


r-tiïTTi  f:ii 


iiiiii]Œijjxxixiixi_iiiJ:iiiriiii[iiiiiJJLXiiiJiii:;iiiTiiiriiTTi3iixriTrïJiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiirxiiriiJiiiiiirLriJiixjiJxiiriiii 


Pince  et  fer  à  \)ostitQ  au  ffîu0ée  tie  Bribe  (Gorvèse). 


^^*  V)  ^  VI  ^  ^-^  ''S''  "f^-^  ^x*5^  ^-^  ^i^  '^^  ^i^-^  ^iÔ^  ^iô-^  ^iÔ^  ^^-^  *^ 


ES  moules  destinés  à 
fabriquer  et  à  cuire  les 
hosties  qui  servent  au 
Sacrifice  de  la  messe, 
à  la  communion  des 
fidèles,  à  la  réserve 
eucharistique  et  à  l'ex- 
position du  Saint-Sacrement,  sont  faits 
depuis  longtemps  de  la  même  façon  et  avec 
la  même  matière. 

Ce  sont  des  instruments  en  fer  forgé  {'), 
composés  de  deux  palettes,  le  plus  souvent 
rectangulaires.  Rarement  elles  sont  car- 
rées (=)  ;  du  XVI le  au  XIX'=  siècle  elles 
affectent  une  forme  ovale,  ou  elliptique. 
Les  palettes  sont  munies  chacune  d'un 
manche  de  même  longueur  ;  ces  manches 
sont  réunis  entre  eux,  dans  la  partie  supé- 
rieure, par  une  goupille  autour  de  laquelle 
les  palettes  peuvent  tourner  pour  s'ouvrir 
ou  se  resserrer  à  volonté. 

L'une  des  palettes  est  unie  (-)  ;  mais 
l'autre  est  gravée  et  présente  presque 
toujours  deux  grandes  et  deux  petites  hos- 
ties (■»). 


1.  On  peut  citer,  comme  exception,  un  moule  à  hosties 
conservé  au  Musée  du  Louvre  ;  il  est  en  terre  cuite, 
provient  du  Laurium,  en  Grèce,  et  porte  l'inscription  : 
EVAOriA  KVPlOr  E<Ii-HMAS.  Bu//,  de  /a  Soc.  des  Anti- 
quaires de  France,  an.  1893,  p.  142. 

2.  Fera  hosties  de  Brigueuil  (Charente),  dernier  quart 
du  XI IP  s.  Bu//,  de  la  Soc.  arc/i.  etliist.  de  /a  C/iareiiie, 
an.  1895. 

3.  Par  exception,  sur  un  moule  à  hosties  du  Musée  d'Or- 
léans, les  deux  palettes  sont  gravées  ;  sur  l'une,  se  trouvent 
les  grandes  hosties  ;  sur  l'autre,  les  petites. 

4.  Un  fer  à  hosties,  du  XI 11^  s.,  conservé  dans  l'église 
de  Mailhac  (Haute-Vienne)  offre  une  forme  exception- 
nelle, car  il  n'a  été  destiné  qu'à  la  communion  des  fidè- 
les. Les  petites  hosties,  larges  de  0.027  ni-  sont  disposées 
au  nombre  de  18  sur  trois  rangs  de  6  chacun  ;  elles  alter- 
nent la  Crucifixion  et  le  monogramme  IHS. 

Mgr  Barbier  de  Montault,  qui  a  décrit  cet  objet  liturgi- 
que dans  le   Bu//,  de  ia  Soc.  arch.  et  hist.  du  Limousin, 


On  ferme  les  palettes  en  rapprochant  les 
deux  tiges  que  l'on  fixe  au  moyen  d'un 
anneau,  et  cet  anneau  réunissant  les  deux 
extrémités  empêche  tout  écartement.  A 
l'aide  de  ces  tiges  on  peut  maintenir  les 
palettes  sur  le  feu  pour  opérer  la  cuisson 
de  la  pâte. 

On  sait  avec  quel  respect  on  s'appliquait 
autrefois  à  la  préparation  de  la  farine  et 
du  pain  qui  devait  servir  à  l'oblation  de  la 
messe.  Des  religieux  et  des  religieuses 
choisissaient  les  grains  de  froment  en  réci- 
tant des  prières,  les  broyaient  et  en  sépa- 
raient la  farine,  toujours  en  priant.  Sainte 
Radegonde,  à  Poitiers,  aimait  à  passer  une 
grande  partie  de  son  temps  à  préparer  les 
pains  d'oblation.  On  conserve  encore  l'ins- 
trument avec  lequel  elle  imprimait  dessus 
le  signe  de  la  croix  ('). 

Dom  Martène  donne  à  ce  sujet  des  dé- 
tails qu'il  est  intéressant  de  rappeler  (')  : 
«  On  faisait  des  hosties  dans  les  monas- 
tères toutes  les  fois  qu'on  en  avait  besoin. 
Il  y  avait  néanmoins  deux  époques  princi- 
pales destinées  à  ce  travail,  savoir  :  un  peu 
avant  Noël  et  avant  Pâques. 

«  Les  novices  triaient  le  froment  sur  une 
table  grain  par  grain  ;  on  lavait  ensuite 
ces  grains  et  l'on  les  étendait  sur  une 
nappe  blanche  pour  les  faire  sécher  au 
soleil.  Celui  qui  les  portait  au  moulin  lavait 
les  meules,  se  revêtait  d'une  aube  et  mettait 
un  amict  sur  la  tête. 

an.  1888,  p.  268,  fait  observer  qu'on  ne  lui  connaît  pas 
de  similaire,  sinon  dans  un  texte  italien  qui  réduit  à  6  le 
nombre  des  petites  hosties  :  «  Una  alia  forma  ferrea  pro 
hostiis  parvis conficiendis,  videlicet  sex  pro  vice  >.  Invent. 
de  /a  cat/iédra/e  de  Parme,  1483. 

1.  Bourassé,  Coll.  Migne,  Diction.  darckéoiog,ie  sacrée, 
t.  II,  col.  220. 

2.  De  antiq.  monaclior.  ritibus,  11,8. 


REVUE   DELAKT   CHRETIEN. 
1901.    —    4""^    LIVRAISON. 


282 


Bcbue  De  r^vt  cl)vét(eu. 


«Le  jour  de  faire  le  pain  étant  venu,  trois 
prêtres  ou  trois  diacres,  avec  un  frère  con- 
vers,  après  l'office  de  la  nuit,  mettaient 
des  souliers,  se  lavaient  les  mains  et  le 
visage,  se  peignaient  et  récitaient  en  parti- 
culier dans  une  chapelle  l'office  des  laudes, 
les  sept  psaumes  et  les  litanies.  Les  prêtres 
et  les  diacres,  revêtus  d'aubes,  venaient 
dans  la  chambre  où  la  confection  des  pains 
devait  avoir  lieu  ;  le  frère  convers  y  avait 
déjà  préparé  le  bois  le  plus  sec  et  le  plus 
propre  à  faire  un  feu  clair.  Tous  quatre 
gardaient  un  silence  absolu  ;  l'un  répan- 
dait  la  fleur  de  farine  sur  une  table  polie, 
propre,  réservée  exclusivement  à  cet  usage, 
et  dont  les  bords  étaient  relevés  afin  de 
contenir  l'eau  qu'on  jetait  sur  cette  farine 
pour  délayer  la  pâte.  C'était  de  l'eau  froide 
afin  que  les  hosties  fussent  plus  blanches. 
Le  convers,  avec  des  gants,  tenait  le  fer  et 
faisait  cuire  les  hosties  six  à  la  fois.  Les 
deux  autres  coupaient  ces  mêmes  hosties 
avec  un  couteau  fait  exprès  ('),  et  à  mesure 
qu'elles  étaient  coupées,  elles  tombaient 
dans  un  plat  couvert  d'un  linge  blanc.  Ce 
travail  prenait  un  certain  temps  dans  les 
grandes  communautés  et  néanmoins  se  fai- 
sait à  jeun.  » 

L'inventaire  des  ornements  conservés 
dans  la  trésorerie  de  l'abbaye  de  Saint- 
Martial,  à  Limoges,  dressé  sous  l'abbé 
Raymond,  qui  occupa  le  siège  de  1226  à 
1245,  contient  six  articles  qui  semblent  se 
référer  à  la  fabrication  des  hosties  : 

Concha  argentea  cum  talpa  (couvercle). 

Major  cutella  (sic  pour  scutella)  et  minor, 
argentece. 

Unum  coclear  magnum  argenti. 

Vas  argenieum  cum  quo  ostie  in  refecto- 
rio  portantur. 

I.  L'abbé  Martigny,  auquel  nous  empruntons  cette  ci- 
tation, Dut.  tics  Antiq.  chrét.,  p.  464,  donne,  au  mot 
Lance,  le  dessin  d'un  de  ces  couteau.\  eucharistiques. 


Duo  parva  coclearia  de  argento. 

Molle  (■)  ferreum,  cum  quo  fiunt  ostie  ('). 

Pour  compléter  le  détail  des  ustensiles 
employés  à  la  fabrication  des  hosties,  nous 
relaterons  les  textes  suivants  : 

1578.  «  4  fers  à  faire  hosties,  les  fers  à 
compas  pour  ronder  icelles,  qui  sont  ung 
compas  et  platine  à  ce  servant,  et  2  ron- 
deaulx,  l'ung  pour  les  grandes  hosties  et 
l'autre  pour  les  communes  (').  » 

1 618.  «  2  fers  avec  la  pièce  de  cuivre  pour 
rongnier  les  hosties  (M.  » 

1790.  «  Un  fer  pour  faire  les  hosties, 
deux  fers  pour  les  couper  (=^).  » 

1790.  «  Un  fer  à  faire  les  hosties,  un 
petit  fer  pour  couper  les  hosties,  avec  la 
plaque  de  cuivre  (*).  » 

Ces  citations  montrent  avec  quel  pieux 
respect  on  procédait  à  la  fabrication  des 
hosties.  Le  grain  était  broyé  et  recueilli 
dans  une  écuelle  plus  petite;  on  le  jetait 
peu  à  peu  dans  la  grande  conque  où  il 
était  délayé  au  fur  et  à  mesure  avec  de 
l'eau.  La  cuiller,  qui  était  en  argent,  servait 
à  prendre  et  à  verser   le  liquide  sur  le  fer 

1.  On  a  dit  aussi  au  moyen-âge  hostiarittm  ;  «  Item, 
tria  hostiaria,  vel  instrumenta  ad  faciendum  ostias  ». 
Invent,  de  Vabb.  de  Silvacane,  12%().  Mollii  ferreum  ào\\. 
aussi  se  traduire  par  moule  enfer.  Mgr  Barbier  de  Mon- 
tault  fait  remarquer  que  pincettes  se  dit  en  Italien  molle, 
et  que  les  moules,  comme  les  ustensiles  de  foyer  et  de 
cuisine,  sont  munis  de  deux  bras  ou  pinces. />«//.  delaSoc. 
arch.  et  hist.  du  Limousin,  an.  18SS,  p.  252,  note  4.  —  Le 
mot/i?;-,quia  prévalu  dans  la  dénomination  de  l'ustensile 
est  aussi  très  ancien,  puisqu'on  le  constate  dès  le  XI  II"' s.: 
«  Fro  ferris  ad  panem  faciendum  pro  cantare  ».  Compte 
dcl'abbayc  de  Si- Denis,  1 290  :«  Ferra  ad  faciendum  panem 
seu  hostias  pro  celebrando  ».  Iiivent.  de  la  Stc-CIiapelle, 

1325- 

2.  Duplès-Agier,  Chron.  de  Saint- Martial  de  Limoges, 
pp.  312  et  315. 

3.  Invent,  de  la  collégiale  de  Salins,  p.  149.  Cit.  de 
Victor  Gay,  Glossaire,  p.  700. 

i,.  Invent.de  St- Louis  des  Français  à  Rome,  p.  52.  Cit. 
de  Victor  Gay,  Glossaire,  p.  700. 

5.  Invent,  du  couvent  des  Visitandines  à  Tulle.  René 
Fage,  Le  vieux  Tulle,  p.  364.  Tulle,  Crauffon,  impr.  1888. 

6.  Invent,  du  monastirc  des  Claiisses  à  7 '«//c.  Fage, 
loc.  cit.,  p.  31 1. 


I^ince  et  fer  à  l)ogties  au  £@u0ée  îre  mviMt. 


283 


que  l'on  mettait  ensuite  sur  le  feu  pour  la 
cuisson.  Puis  on  prenait  les  hosties  que 
l'on  découpait,  primitivement  avec  un  cou- 
teau spécial,  et  plus  tard  avec  un  compas, 
pour  mieux  former  cette  rondeur  requise 
par  le  symbolisme  (').  Enfin  les  hosties  cou- 
pées étaient  empilées  dans  un  vase,  qui  se 
conservait  dans  une  des  armoires  du  réfec- 
toire, lieu  d'ordinaire  sain  et  sec  et  où  les 
espèces  ne  pouvaient  pas  moisir  et  se  cor- 
rompre. De  là  on  les  tirait  pour  les  besoins 
du  culte. 

La  platine  (plataine,  en  latin  platina), 
dont  il  est  fait  mention  dans  l'inventaire  de 
1578,  n'est  autre  que  le  vase  sacré,  en 
forme  de  petite  assiette,  qui  sert  à  couvrir 
le  calice  et  à  recevoir  l'hostie  ;  ses  bords 
coupants  indiquent  et  préparent  les  divi- 
sions de  l'hostie  qui  sera  séparée  par  le 
prêtre  pendant  le  sacrifice  de  la  messe. 

Dans  la  suite,  toutes  ces  cérémonies  reli- 
gieuses ont  été  supprimées,  mais  chaque 
église,  séculière  et  régulière,  avait  son  fer 
à  hosties,  et  c'était  au  prêtre  qu'incombait 
spécialement  le  devoir  de  préparer  la  ma- 
tière du  sacrifice,  ou  tout  au  moins  d'en 
surveiller  la  fabrication.  De  cette  façon 
toute  erreur  ou  fraude  devenait  impossible, 
et  le  sacrement  ne  risquait  pas  d'être  nul, 
faute  de  l'élément  nécessaire  à  la  consécra- 
tion, car,  d'après  le  droit  canonique,  les 
hosties  doivent  être  toujours  en  pure  farine 
de  froment  et  de  fabrication  récente  (°). 
Aujourd'hui,    malgré    les    inconvénients 

1.  «  L'hostie  est  ronde,  parce  que  la  terre  appartient 
au  Seigneur  avec  tous  les  pays  qu'elle  renferme  dans  son 
cercle  et  avec  tous  ceux  qui  l'habitent  ;  et  la  forme  même 
de  l'hostie  représente  Celui  qui  n'a  ni  commencement  ni 
fin,  puisqu'il  est  l'alpha  et  l'oméga,  le  commencement  des 
commencements  et  la  fin  des  fins  {Apocalypse,  ch.  l)  :  et 
comme  la  figure  ronde  est  formée  point  pur  point,  cela 
veut  dire  que  tout  part  de  lui  et  que  tout  retourne  à  lui.  » 
Guill.  Durand,  Ration.  1.  IV,  c.  XXX,  n"  8. 

2.  Barbier  de  Montault,  Le  fer  à  hosties  de  Château- 
ponzac,  dans  le  Bull,  de  la  Soc.  arch.  et  hist.  du  Limousin, 
an.  18S8,  p.  253. 


qui  peuvent  en  résulter,  on  préfère  acheter 
des  hosties  toutes  faites  et  s'éviter  la  peine 
de  leur  fabrication.  lien  résulte  que  les  fers 
à  hosties^  qui  étaient  autrefois  si  communs, 
tendent  de  plus  en  plus  à  disparaître.  Ils  ne 
sont  plus  d'aucun  usage,  et,  si  on  ne  les 
vend  point,  on  les  relègue  dans  la  cuisine 
du  presbytère  et  bientôt  la  rouille  les  enva- 
hit. Aussi  est-il  important  de  rechercher  et 
de  décrire  ceux  qui  sont  encore  conservés. 
Dans  un  délai  plus  ou  moins  rapproché,  ces 
petits  monuments  gravés  seront  une  véri- 
table rareté. 

Nous  avons  vu  le  soin  apporté  dans  la 
fabrication  des  hosties.  On  évitait  avant  tout 
de  les  toucher  avec  la  main  dont  le  contact 


Instrument  en  fer  pour  prendre  les  hosties.  (Musée  de  Brive.) 

aurait  pu  les  souiller  ;  on  allait  jusqu'à  se 
servir  d'une  cuiller  d'argent  pour  les  mettre 
sur  la  patène  (').  Il  est  probable  qu'on  de- 
vait user  des  mêmes  précautions  pour  pren- 
dre les  hosties  coupées  au  sortir  du  moule 
et  les  déposer  dans  la  boîte  qui  devait  les 
recevoir.  Nous  ne  connaissons  aucun  texte 
relatant  ce  fait,  mais  le  Musée  de  Brive, 
dans  la  Corrèze,  possède  un  de  ces  petits 
ustensiles  qui  nous  renseigne  complètement 
sur  ce  point. 

Ce  petit  instrument,  dont  nous  donnons 
le  dessin,  a  été  trouvé  à  Brive;  il  est  en  fer 
et  mesure  26  centimètres  en  longueur.  Il  se 
compose  d'une  palette  fort  mince,  rectangu- 
laire, légèrement  arrondie  à  son  extrémité 
et  d'une  pince  à  deux  branches  terminées 

I.  «  Vasa  quoque  lignea,  tornatili  opère  facta,  quibus 
oblatœ  servantur,  cum  cochleari  argenteo  quo  in  patena 
ponuntur.  »  Tabiilar.  inonast.  S.  Theofredi  in  Vclaunis. 
Du  Cange,  verbo  Cochlear. 


284 


3SitWt  lie  r^rt  cJ)rétien. 


par  une  petite  spatule.  La  palette  et  la  pince 
sont  munies  d'un  manche  et  réunies  par  une 
goupille,  autour  de  laquelle  elles  peuvent  se 
mouvoir  pour  s'écarter,  se  rapprocher  et 
saisir  des  objets.  On  faisait  glisser  la  palette 
sous  l'hostie  posée  sur  une  table,  et  les 
petites  spatules  venaient  la  fixer  lorsque,  au 
moyen  de  la  main,  on  rapprochait  les  bran- 
ches de  l'instrument.  Cet  intéressant  objet, 
dont  nous  ne  connaissons  aucun  autre 
exemple,  paraît  appartenir  au  XYIII^siècle. 

L'usage  de  faire  cuire  l'hostie  entre  deux 
fers  remonte  au  moins  au  IX^  siècle,  ainsi 
que  le  prouve  la  vision  d' Eldefonsc,  publiée 
par  Mabillon,  à  la  suite  de  la  dissertation 
sur  les  azymes.  Après  avoir  dessiné  la  dou- 
ble figure  de  l'hostie  qui  lui  apparut  un 
dimanche  de  novembre  de  l'année  845, 
Eldefonse  écrit  :  «  Ces  deux  roues  gravées 
par  deux  fers  appartiennent  toujours  à  un 
même  pain,  faites  entre  deux  fers  (').  »  Plus 
loin,  traitant  de  la  fabrication  de  plusieurs 
hosties  à  la  fois,  notre  auteur  parle  encore 
d'un  seul  fer,  mais  grand. 

L'iconographie  des  fers  à  hosties  est  un 
sujet  d'étude  fort  curieux  qui  n'a  pas  encore 
été  traité  d'une  façon  complète.  On  ne 
pourra  l'entreprendre  qu'après  avoir  réuni 
de  nombreux  matériaux  et  nous  savons  que 
depuis  fort  longtemps  Mgr  Barbier  de  Mon- 
tault  s'efforce  d'arriver  à  ce  résultat  ("). 

1.  «  Igitur  istae  duœ  rotx  duobus  ferris  incisœ  ad  unum 
panem  pertinent  semper,  inter  utramque  partem  fact,x>.  > 
Rcvelatio  quœ  ostensa  est  episcopo,  à  la  fin  de  la  disserta- 
tion de  Mabillon. 

Mabillon,  qui  a  relevé  ce  texte  sur  une  copie  d'un  ma- 
nuscrit du  Vatican,  cherche  à  prouver  que  cet  écrit  appar- 
tient aux  temps  voisins  de  Charlemagne.  Mais  un  manus- 
crit de  la  fin  du  IX'  siècle,  conservé  à  la  bibliothèque 
nationale  (Paschasius  Radertus  in  Eucharislia. Ane. Fonds 
latin,  n"  2855)  lève  tout  doute  à  cet  égard.  Darcel,  Ann. 
ar-chéolog.,\..  XXVII,  pp.  278  et  279. 

2.  On  a  déjh  de  cet  auteur  :  Descripl.  iconog.  de  quelques 
fers  de  /'AitjO!t,Angers,  1 880.  Les  fers  à  hosties  du  dioche  de 

P'erdun  ;  Les  fers  â  hosties  du  Musée  d'Orléans;  Les  fers 
à  hosties  de  la  Saintonge.  La  Rochelle,  i8go.  Le  s  fers  à 
hosties  de  l'arrondissement  de  Confolens  (Charente),  1895. 


En  ce  qui  concerne  l'ornementation  des 
fers  à  hosties,  on  peut  d'ores  et  déjà  faire 
les  constatations  suivantes  : 

Aux  XII°  et  XI II"  siècles,  les  petites 
hosties  portent  comme  motifs  d'ornemen- 
tation les  monogrammes  du  Christ  sous  les 
formes  I.  X.  {/estts  Christus)  ('),  IHS  ('), 
XPS  ('),  parfois  surmontés  d'un  crucifix  (■•)  ; 
le  Christ  en  croix,  représenté  tantôt  seul  (5), 
tantôt  accosté  du  soleil  et  de  la  lune  C"),  ou 
des  lettres  IS,  l'initiale  et  la  finale  du  nom  de 
Fesiis  (')  :  et  la  Sainte  Face  (^). 

Sur  les  grandes  hosties  on  trouve:  leChrist 
cloué  sur  la  croix,  souvent  avec  le  titulus 
IN  RI  (lesusNazarenus  Rex  ludseorum)  (''), 
et  les  inscriptions  IHS,  XPS,  gravées  dans 

Le  fer  à  hosties  de  Châleaupomac  et  les  fers  du  Limousin, 
Limoges,  18S8.  Voir  aussi  ses  Œuvres  complètes,  t.  VI, 
p.  178. 

1.  Fer  à  hosties  de  Saint-Maigrin,  en  Saintonge. 

2.  IHS  est  pour  IHesuS  qui  a  fait  passer  dans  l'usage 
latin  la  forme  grecque  plus  caractérisée  dans  le  second 
monogramme  XPS,  dont  la  finale  est  un  sigma  en  C.  .\PC 
signifie  .XPistoc,  pour  XPistuC. 

On  lit,  à  ce  sujet,  dans  le  Rational  ou  manuel  des  divers 
offices  (liv.  II,  ch.  I)  de  Guill.  Durand  :  «  Pour  ce  qui  est 
du  nom  de  Jésus,  Porphyre,  philosophe  versé  dans  les 
langues  grecque  et  latine,  l'écrivait  Icsus  et  en  grec  par 
un  h,  qu'on  emploie  en  cette  langue  pour  un  i  long.  Voil.\ 
encore  pourquoi  il  y  en  a  qui  prononcent  Gysus  ;  mais  les 
Latins  se  servent  de  \'e  long.  II  parait  plus  raisonnable 
d'écrire  ce  nom  ainsi  :  Yhs,  en  se  servant  de  l'abréviation 
grecque,  que  par  Hiesus,  avec  l'aspiration  latine.  Et 
comme  C/«r/j/ est  grec,  on  l'écrit  en  abréviation  de  cette 
langue  :  XP.S,  car  les  Grecs  emploient  .V  pour  chi,  P  pour 
r  et  C  pour  s.  Mais  si  on  l'écrit  par  s,  il  finit  par  la  termi- 
naison latine.  Donc,  si  on  l'écrit  par  un  mode  long,  on  le 
représente  ainsi  par  aspiration  :  Christus  >.  Trad.  par 
Ch.  Barthélémy,  t.  I,  p.  149. 

L'interprétation  y««j/'flw/««w  Snlvator  (\\\'o'[\  a  voulu 
donner  à  ce  monogramme  ne  paraît  pas  antérieure  au 
XVI  I"  siècle.  Elle  a  dû  cire  popularisée  par  les  Jésuites 
eux-mêmes  (|ui  ne  comprenaient  plus  leur  chiffre.  Les 
trois  lettres  IHS  devenant  alors  trois  initiales,  on  les  sé- 
parait souvent  par  des  points. 

3.  Fers  à  hosties  des  églises  de  Coutures,  en  Anjou  et 
de  Hiesse,  dans  la  Charente. 

4.  Fer  à  hosties  de  l'église  de  Coutures,  en  Anjou. 

5.  Fer  à  hosties  à  Gourgé  (Deux-Sèvres). 

6.  Fer  à  hosties  du  Musée  d'Orléans. 

7.  Fer  à  hosties  de  MazeroUes  (Charente). 

8.  Fer  à  hosties  de  Mouzon,  cant.  de  Montembœuf 
(Charente). 

9.  Fer  à  hosties  de  l'église  de  Coutures,  en  Anjou. 


î^tnce  et  fer  à  l)O0ttes  au  abusée  De  Brtbe. 


^85 


le  champ  (')  ;  quelquefois  les  lettres  DNS 
[DoiiiiNiiS)  s'ajoutent  à  celles  de  IHS 
(Dominusiesus)  (').  D'autres  fois  le  soleil  en 
étoile  et  la  lune  en  croissant  dominent  la 
croix  (3),  au-bas  de  laquelle  apparaissent 
fréquemment  la  Vierge  et  saint  Jean  (^). 
On  trouve  encore  la  Résurrection  (')  ;  le 
Christ  de  gloire  majestueusement  assis, 
bénissant  de  la  main  droite  et  tenant  dans 
la  gauche  un  globe  surmonté  d'une  croix  (*). 
Le  Christ  de  gloire  est  représenté  sur  cer- 
tains fers  sans  jambes  ni  pieds.  On  a  voulu 
l'immatérialiser  ainsi  le  plus  possible,  tout 
en  lui  conservant  la  forme  humaine.  Les 
pieds  font  songer  aux  choses  de  la  terre  à 
laquelle  ils  adhèrent  en  marchant.  Dieu 
étant  considéré  comme  pensée  et  amour,  on 
ne  lui  attribue  que  les  organes  auxquels 
correspondent  ces  deux  qualités  souverai- 
nes :  la  tête,  siège  de  l'intelligence  ;  la  poi- 
trine, où  bat  le  cœur.  Cette  singularité  est 
fréquente  sur  les  fers  poitevins.  On  la  trouve 
sur  ceux  de  Bouchet,  des  Trois- Moutiers, 
de  la  Trémouille,  d'Arçay,  de  Dissais,  de 
Bonnes  et  de  Messemé,  pour  le  XT I  L  siè- 
cle ;  et  sur  ceux  de  Saint- Léger,  de  Curçay 
et  de  Baudimont  pour  le  XIV"  (').  Quelque- 
fois, de  chaque  côté  de  la  croix,  s'élève  sur 
le  sol  un  vigoureux  rosier  fleuri  ('). 

Enfin  on  reconnaît  encore  sur  les  fers  à 
hosties  de  cette  époque  :  la  Sainte-  Face  (')  ; 
l'Agneau  pascal  ("');  et  une  fleur  de  lis  ("). 

1.  Fer  \  hosties  à  Saint-Maigrin,  en  Saintonge. 

2.  Fer  à  hosties  à  Gourgé  (Deux-Sèvres). 

3.  A  Mazerolles  (Charente). 

4.  A.  Chassenon,  cant.  de  Chabanais  (Charente). 

5.  A  Esse  et  à  Brigueuil,  cant.  de  Confolens  (Charente). 

6.  Fer  à  hosties  de  Dampierre  sur  Boutonne,  en  Sain- 
tonge. 

7.  Barbier  de    Montault,   Le  Fer  à  hosties  de  Château- 
ponsac,  loc.  cit.,  p.  263. 

8.  A  Alloue  (Charente). 

9.  A  St-Germain  de  Seudre,  en  Saintonge. 

10.  A  Alloue  et  à  Brigueuil  (Charente). 

11.  A  Chizé  (Deu.x-Sèvres). 


Le  lis  est  l'emblème  du  Christ,  «  Ego  flos 
campi  et  lilium  convallium  »  (Cant.  Cantic, 
II,  i)  ;  il  l'est  aussi  de  la  royauté. 

Ajoutons  que  dans  ces  différentes  repré- 
sentations, on  rencontre  de  fois  à  autre  les 
lettres  H  et  X  du  monogramme  du  Christ, 
qui  se  prolongent  en  une  branche  terminée 
par  une  grappe  de  raisin,  ou  sous  sa  forme 
la  plus  rudimentaire,  qui  est  le  triangle.  Le 
raisin  a  ici  sa  signification  ;  symboliquement 
il  a  été  pris  par  les  Pères  de  l'Église  pour 
figurer  le  Sauveur  sur  la  croi.x. 

Souvent  aussi  le  soleil,  qui  accoste  avec 
la  lune  les  bras  de  la  croix,  n'est  reproduit 
que  par  une  étoile  à  six  rais,  pour  montrer 
que  les  rayons  sont  moins  éclatants  et  rap- 
peler les  ténèbres  subites  qui  accompagnè- 
rent la  mort  du  Fils  de  Dieu. 

A  ces  motifs  de  décoration  viennent 
s'ajouter  : 

Au  XI  V°  siècle  :  pour  les  petites  hosties  : 
l'Agneau  pascal  (')  ;  Notre-Dame  de  Pitié 
tenant  sur  ses  genoux  le  corps  inanimé  de 
son  fils  {')  ;  et  pour  les  grandes  hosties  : 
la  Flagellation  (^)  ;  le  Portement  de  la 
croix  (^)  ;  la  Crucifixion  à  laquelle  assistent 
la  Sainte  Vierge  et  saint  Jean  {^)  ;  la  Ré- 
surrection (*)  ;  le  Jugement  dernier  ('). 

Au  XVe  siècle,  on  trouve  en  outre  :  la 
Trinité  (^)  ;  le  Christ  sur  la  croix  entre  les 
deux  larrons  ;  le  Christ  debout  dans  son 
tombeau  et  entouré  des  instruments  de  la 
Passion  (s). 

1.  Église  de  Thouarcé,  en  Anjou. 

2.  Collection  Maxe-W^erly,  à  Bar-le-Duc. 

3.  A  Neufour,  diocèse  de  Verdun  ;  à  St-Barthélemy  de 
Confolens. 

4.  Église  d'Auzéville,  au  diocèse  de  Verdun. 

5.  Église  d'Auzéville. 

6.  Collection  Maxe-Werly,  à  Bar-le-Duc. 

7.  Collection  Maxe-Werly. 

S.  Église    abbatiale  de    St-Jouin-les-Marnes     (Deux- 
Sèvres), 
g.  Église  de  Couvertoirade,  dans  le  Rouergue. 


286 


Eebue  île  VSixt  thvttmh 


Au  XVI''  siècle,  apparaît  la  scène  de  la 
Nativité  ('). 

Au  XVI  le,  la  Cène  (=)  ;  l'Adoration  du 
Saint-Sacrement  {^)  ;  la  représentation  des 
instruments  de  la  Passion  (').  Dès  le  com- 
mencement de  ce  siècle,  le  crâne  d'Adam 
se  montre  quelquefois  sous  les  pieds  du 
Christ  en  croix  (=). 

Enfin,  au  XVI 1 1"  siècle,  on  rencontre  des 
motifs  nouveaux  empruntés,  non  à  la  tra- 
dition qui  régissait  jusque-là  l'exécution  des 
fers,  mais  aux  idées  dominantes  et  aux 
tableaux  en  vogue.  Les  hosties  de  cette 
époque  portent  souvent  comme  empreinte  : 
un  cœur  surmonté  de  trois  clous  (*)  ;  les 
cœurs  de  Jésus  et  de  Marie  (^)  ;  l'Agneau 
de  Dieu  immolé  sur  un  autel  (^)  ;  et  la 
Madeleine  attristée,  agenouillée  au  pied  de 
la  croix  ('). 

L'iconographie,  comme  on  le  voit,  s'est 
directement  inspirée  de  la  liturgie.  L'hostie 
est  marquée  du  monogramme  de  Jésus  ou 
de  celui  du  Christ,  pour  indiquer  la  présence 
réelle  dans  le  sacrement  eucharistique.  La 
représentation  de  l'Agneau  pascal  rappelle 
les  paroles  prononcées  par  l'officiant  en 
montrant  l'hostie  :  «  Ecce  Agnus  Dei,  ecce 
qui  tollit  peccata  mundi.  »  L'Agneau  ar- 
bore la  croix  à  étendard,  qui  est  le  trophée 
de  la  victoire  ;  il  détourne  la  tête  en  arrière 
pour  inviter  à  le  suivre. 

La  Sainte-Face  est  un  souvenir  de  la 
douloureuse  Passion,  qui  est  aussi  exprimée 
par  les  scènes  de   la  Flagellation  et  de  la 


1.  Musée  diocésain,  à  Angers. 

2.  Coll.  Alph.  de  la  Guère,  à  Bourges. 

3.  Église  de  Montreuil-Bellay,  en  Anjou. 

4.  Les  Islettes,  au  diocèse  de  Verdun. 

5.  A  Cherves-Chatelars,  cant.  de  Montenibœuf  (Cli.i 
rente). 

6.  Musée  d'Orléans. 

7.  .St-Laurent  de  Céris,cant.  de  St-Claude  (Charente). 

8.  .St-Christophe  de  Confolens  (Cliarente). 

9.  Église  de  Segonzac  (Charente). 


Crucifixion.  Le  Christ  debout  dans  le  tom- 
beau affirme  la  dévotion  au  mystère  de  la 
Passion  qui  s'était  spécialement  étendue  au 
XV'"  siècle. 

La  Résurrection  est  motivée  par  la  prière 
que  récite  le  prêtre  après  l'Élévation  : 
«  Unde  et  memores...  necnon  et  ab  inferis 
resurrectionis  ».  La  Majesté  est  le  complé- 
ment de  la  Résurrection  qui  ouvre  la  série 
des  mystères  glorieux.  Si  le  Christ  ressus- 
cité monte  au  ciel,  c'est  pour  régner  après 
avoir  souffert.  Le  Christ  est  assis  sur  un 
trône  bénissant  le  monde  qu'il  a  racheté  et 
conservé.  Comme  sur  le  fer  à  hosties  d'Esse 
(Charente),  il  a  à  ses  pieds,  pour  attribut, 
un  chandelier  parce  qu'il  est  la  lumière 
spirituelle  «  /ux  Incis  et  fous  lummis  ».  Les 
roues  et  les  rosiers  qui  décorent  les  bor- 
dures, ou  accompagnent  la  croix,  sont  un 
souvenir  de  la  Passion,  suivant  l'allégorie 
de  saint  Bernard. 

Quant  aux  Sacrés  Cœurs  de  Jésus  et  de 
Marie  et  à  l'Adoration  du  Saint-Sacrement, 
ils  expriment,  ainsi  que  nous  l'avons  déjà 
dit,  d'une  façon  mesquine  ou  fautive,  une 
dévotion  contemporaine  et  ne  devraient 
point  figurer  sur  les  hosties  ('). 

Le  Musée  de  Brive  possède  un  fer  à 
hosties  qui  se  rapporte  à  trois  des  sujets 
de  décoration  qui  viennent  d'être  énumérés, 
mais  qui  s'en  distingue  par  un  autre  motif 
tout  à  fait  nouveau  :  celui  du  chiffre  des 
religieux  réformés  de  l'Ordre  de  saint 
François,  dits  des  Récollets.  C'est  dans 
l'ancien  couvent  bâti  à  Brive  par  ces  reli- 
gieux, en  16 13,  que  ce  fer  a  été  trouvé. 

Il  dessine  une  ellipse,  c'est-à-dire  qu'il 
est  courbe  sur  toute  l'étendue  de  son  pour- 
tour et  mesure  dix  centimètres  sur  vingt. 
Sur  l'une  des  palettes  se  trouvent  gravées 

I.  Barbier  de  Montault,  Les  fers  à  hosties  de  Varrond. 
de  Confolens  (Charente.) 


0tnce  et  fer  à  l)o0t(eg  au  SJ^n^tt  De  Brtïje. 


287 


quatre  hosties  :  deux  grandes,  et  deux 
petites  pour  la  communion  des  fidèles, 
posées  verticalement  entre  les  grandes.  Les 
grandes  hosties  ont  o""  086  de  diamètre  ; 
les  petites  o""  032. 

La  Crucifixion  occupe  l'une  des  deux 
grandes  hosties.  La  croix,  dont  le  titulus 
porte  l'inscription  IN  RI,  est  plantée  sur  un 
sol  rocailleux.  Le  corps  du  Christ  est  à 
peine  couvert  par  un  linge  étroit  et  flottant  ; 


la  tête  est  légèrement  inclinée  du  côté 
droit  ;  les  bras  ne  sont  pas  étendus  hori- 
zontalement, mais  fléchissent  un  peu  sous 
le  poids  du  corps  ;  un  seul  clou  perce  les 
pieds  vus  de  profil.  Entre  une  série  de  cer- 
cles concentriques,  formant  bordure,  appa- 
raissent des  têtes  d'anges  ailées  au  milieu 
d'étoiles  à  cinq  rais. 

Sur  l'autre  hostie  figure  le  nom  de  Jésus 
sous  sa  forme  monogrammatique  IHS.  La 


Fer  à  hosties  au   Musée  de   Brive  (Corrèze). 


traverse  de  la  lettre  médiane  H  se  relève 
en  accolade  pour  servir  de  base  à  un  cruci- 
fix. Au-dessous  de  ce  monogramme  sont 
gravés  les  trois  clous  de  la  Passion  réunis 
par  la  pointe.  Un  semis  d'étoiles  et  de  bou- 
tons de  rose,  décoré  de  quatre  têtes  d'anges 
ailés,  occupe  la  bordure. 

L'Agneau  pascal  est  représenté  sur  l'une 
des  petites  hosties  ;  il  est  couché,  ce  qui  est 
une  faute,  car  saint  Jean,  dans  sa  vision,  le 
vit  debout  :  «  Agnum  stantem  tanquam 
occisum  »  [Apocalyp.,  v,  6).  Sa  tête,  non 
nimbée,   se  détourne  ;  une  de  ses    pattes 


soutient  la  hampe  d'une  grande  croix  pro- 
cessionnelle. Il  repose  sur  un  sol  parsemé 
de  boutons  de  rose  ;  une  rangée  d'étoiles 
délimite  le  pourtour  supérieur  de  l'hostie. 

Les  armes  des  religieux  Récollets  se 
trouvent  gravées  sur  la  quatrième  hostie  : 
une  croix  soutenue  par  un  dextrochère  et 
un  sénestrochère. 

Ce  fer,  intéressant  au  point  de  vue  ico- 
nographique, n'offre  aucun  caractère  artis- 
tique ;  il  relève  de  l'industrie  qui  en  a  confié 
l'exécution  à  des  mains  peu  expérimentées. 
Usé  en  certains  endroits  par  un  long  service 


288 


Bebue  De  T^rt  cJ)rctieiu 


et  surtout  par  la  rouille,  il  ne  fournit  plus 
aujourd'hui  qu'une  empreinte  très  mutilée. 
En  terminant  cet  article,  nous  donnons  la 
reproduction  d'un  autre  fer  à  hosties  que 
conserve  la  petite  église  de  Pazayac,  canton 
de  Terrasson  (Dordogne).  Il  est  gravé  de 
deux  grandes  hosties  et  de  deux  petites, 
mesurant  les  premières  o"  06  de  diamètre, 
les   secondes  o"  035.  Le  corps  du  Christ, 


réduit  à  l'état  de  squelette,  ce  qui  est  peu 
gracieux  et  nullement  exact,  est  attaché  à 
la  croix  par  des  clous  très  apparents.  La 
tête  nimbée  est  entourée  du  soleil  et  de  la 
lune  ;  la  Vierge  et  saint  Jean  figurent  aux 
côtés  de  la  croix.  Le  soleil,  au  lieu  d'avoir 
six  rayons,  comme  on  le  représente  habi- 
tuellement, n'en  a  que  cinq. 

Sur    l'autre    grande    hostie,    le     Christ, 


Fer  à  hosties  de  l'église  de  Pazayac  (Dordogne). 


tenant  dans  la  main  gauche  un  globe  sur- 
monté d'une  croix,  est  debout,  sur  un  autel, 
entre  deux  chandeliers  qui  se  terminent 
par  une  fleur  de  lis.  Ces  motifs  sont  inscrits 
dans  trois  cercles  concentriques,  formant 
encadrement  ;  celui  du  milieu  est  orné  de 
petites  aspérités,  rappelant  la  couronne 
d'épines. 

Sur  les  petites  hosties  sont  représentés 
le  monogramme  XPS,  formé  de  lettres 
entrelacées,  au-dessus  d'une  petite  rose,   et 


une  croix  à  branches  inégales,  cantonnée 
de  deux  fleurs  de  lis  et  de  deux  roses.  Trois 
petifs  points  terminent  les  extrémités  de 
la  traverse  horizontale. 

Ce  fera  hosties  paraît  remonter  au  XV I  i  I^ 
siècle.  Le  dessin  est  gravé  assez  profondé- 
ment, mais  il  est  mauvais,  naïf  et,  dans  tous 
les  cas,  des  plus  étranges.  A  ce  dernier 
titre  il  méritait  d'être  publié. 

Ernest   Rupin. 


■^ 


'  A^yik  A^^  A^^  ^^*  A^Vk  A^V^  A^^  A^gx  A^»:^  VÏ^A  A^I^  A^^  A^vt  A^vk  X^U 


::cixiiii33:iiiiiTixiiiTiiiJ.iiiiiiii[rïiiiTiiii^TiiiiJciijiiïr][riiiirr](TiriiirKriTïTii:Li3J3JxijcTTTrTTT:tiiiiiii  craiinxi 


mm;LXiTrTxr]Lixi.xn-i)ti3]  £ 


Gôsai  sur  la  décoration  arc!)itectonique(suite) 


(0 


DmTIiriJJl  'TTTnrriTTTI  TirTTTTTTTin 


nrrrm-mrTTTTTTTin 


rirTTTT-m-nTTTTTTTT'yTT^"i;n 


g  III.    APPLICATIONS   MODERNES. 


LES  artistes  modernes  sont  retournés 
à  la  source  primitive  du  décor,  qui  est 
la  nature,  mais  trop  longtemps  ils  l'ont 
copiée  d'une  manière  toute  réalistique. 
Depuis  quelque  temps  un  grand  nombre  ont 
compris  toute  l'importance  d'une  interpré- 
tation décorative.  Bouvard  n'a-t-il  pas  orné 
la  coupole  du  Champ  de  Mars,  en  1889,  de 
riches  vitraux  représentant  les  principaux 
végétaux  du  sol  français  :  blé,  orge,  chan- 
vre,  etc.  ?  Les  néo-gothiques,   français   et 


Fig.  201.   —  Ananas  stylisé. 

belges,  les  préraphaélistes  anglais  et  les 
fervents  de  «  l'art  nouveau  »,  ont  surtout 
contribué  à  ce  retour  aux  meilleures  pra- 
tiques. Seulement  beaucoup  ont  le  grand 
tort  de  styliser  insuffisamment  la  plante, 
comme  l'animal.  Un  autre  tort  bien  plus 
grave,  un  abus  trop  fréquent,  c'est  de  donner 
aux  objets,  comme  forme  principale,  celle 
d'une  créature.  Passe  encore  pour  les  objets 
emblématiques  et  pour  ceux  de  fantaisie, 

I.  Voyez  la  i'=  partie,  p.  481,  1900;  la  a""'  partie,  p.  25 
et  la  3"'=  partie,  p.  212,  1901. 


comme  un  insigne  ou  un  bijou.  Mais  que 
dire  d'un  vase  affectant  la  forme  d'un  cJiou- 
cabîis,  ou  d'un  guéridon,  que  publiait,  l'autre 
jour,  une  revue  d'art  avec  admiration,  et 
dont  les  pieds  sont  formés  de  trois  libel- 
lules gigantesques  }  Actuellement  on  donne 
souvent  aux  montants  de  menuiserie,  aux 
pieds  de  tables,  etc.,  des  formes  réelles  de 
tiges  végétales,  avec  leurs  nodosités  bour- 


Fig.  202.  —  Ananas  au  naturel. 

geonnantes.  Tout  cela  constitue  l'abus. 
Tenons-nous-en  à  l'usage  raisonnable  de 
l'ornement  végétal.  On  trouvera  plus  loin 
des  exemples  de  plantes  heureusement 
stylisées  de  nos  jours. 

Imitant  les  tissus  du  moyen  âge,  à 
diverses  époques  récentes,  on  a  tiré  de 
V ananas  (fig.  202)  et  de  \ artichaut  de  su- 
perbes sujets  pour  le  décor  des  tissus 
(fig.  201). 


KaVUE   DK    l'art   CHRÉTIEN. 
I901.    —   4™^    LIVRAISON. 


290 


dSitWt  De  ravt  c!)iétien. 


A  la  suite  des  Chinois  et  des  Japonais.nos 
décorateurs  ont  abondamment  reproduit  le 
camélia  (fig.  20j),  cette  belle  tleur  au  con- 
tour simple,  que  de  tout  temps  les  Orientaux 
ont  mêlée  à  leurs  décors  et  que  des  mission- 
naires ont  introduite  en  Europe   en    i739- 


sier,  aux  longues  feuilles  doublées  et  aux 
fruits  semblables  à  des  pierres  précieuses, 
si  régulièrement  groupés  (Jîg.  20^).  —  La 
clématite  est  remarquable  aussi  par  la  noble 


Fig.  203.  —  Camélia  au  naturel. 

Les  Japonais  en  ont  fait  un  témoignage 
d'affection  à  cause  du  lent  épanouissement 
de  son  bouton  et  de  la  persistance  de  sa 
fleur  sur  la  tige. 

Dans  le  décor,  les  fleurs  les  plus  simples 
trouvent    de  jolies    applications,     telle    la 


Fig.  204.  —  Cerisier.  Sculpture  en  bois,  d'après  le  1'".  Mares. 

capucine  (dite  mastouche),  que  M.  Grasset 
a  si  joliment  stylisée  en  son  recueil  (').  La 
campanule  aux  fleurs  à  clochettes,  dont  une 
variante  s'appelle  catnpanule  carillon\\ç.  ceri- 


1 .  La  plante  ornementale. 


P'ig.  205.  —  Campanule  carillon  au  naturel. 

simplicité  de  sa  feuille  lancéolée,  la  régularité 
géométrique  de  sa  fleur  pentagonale,  au 
calice  allongé.  Le  cognassier,  simple  de 
forme  et  collé  à  des  rameaux  pauvres  de 


'\'g.  206.  —  Dahlia  au  naturel. 


feuillage,  offre  un  grand  caractère  par  le 
contraste  de  sa  fleur  délicate  et  de  ses 
branches  rugueuses.  Il  est  l'objet  d'une 
grande  prédilection  de  la  part  des  Chinois  ; 


€g0ai  mx  la  décoration  arcl)ttectomque, 


291 


une  branche  fleurie  de  cet   arbre  est  chez 
eux  un  signe  de  bienvenue. 

Le  coq^telicot  rouge  des  champs  offre  une 
fleur  brillante  et  régulière,  portée  fièrement 
sur  une  belle  tige. 

Le  daJilia  (fig.  206)  peut  aussi  se  comp- 
ter parmi  les  fleurs  massives,  géométriques, 
régulières,  favorables  à  l'interprétation 
décorative  en  relief. 

l^ç.  fraisier,  3.  la  triple  feuille  festonnée, 
on  ne  peut  plus  gracieusement  penchée  sur 
une  tige  fine.est  un  des  types  les  plus  répan- 
dus dans  le  décor  plat  des  tentures  et  des 
étoffes  meublantes. 

Le  groseiller  est  bien  intéressant,  avec 
sa  large  feuille  à  quatre  échancrures  et  à 
festons,  comme  celle  de  la 
vigne,  et  avec  ses  groupes  de 
fruits  pareils  à  des  perles 
de  la  couleur  des  rubis. 

La  giroflée  de  jardin  est 
une  de  ces  fleurs  modestes, 
douées  d'un  éclat  durable  ; 
elle  garde  toute  l'année 
ses  belles  fleurs  rouges  pyramidales  et  par- 
fumées. La  giroflée  des  murailles,  soli- 
taire, croît  dans  les  fentes  des  vieux 
murs  et  sur  les  tombeaux.  Les  anciens 
troubadours  portaient  une  branche  de  gi- 
roflée comme  emblème  d'une  affection  qui 
survivait  au  malheur. 

«  Sensible  giroflée,  amante  des  ruines.  » 

(Treneuil.) 

\J héliotrope,  dont  la  fleur  violette  est 
douée  d'un  parfum  enivrant,  prétendu 
mortel,  a  reçu  son  nom  du  botaniste  Jussieu, 
en  1770,  parce  qu'elle  se  tourne  au  soleil, ce 
qui  lui  donne  une  valeur  symbolique 
particulière. 

hdi Jonquille,  nommée  narcisse  des  prés, 
si  modeste,  est  décorative  entre  toutes.  Sa 
feuille  comme  sa    fleur  fournissent  les  plus 


Fig.  207. 
Pavot. 


élégants  ornemets.  Sa  feuille  est  un  ruban  ; 
sa  fleur  se  présente,  de  flanc,  comme  un  cor- 
net, de  dessus,  comme  un  disque  dentelé 
entouré  de  feuilles  pointues. 

Le  laurier  (fg  208)  est  depuis  l'antiquité 
l'emblème  de  la  gloire  terrestre  ou  céleste. 
On  en  tressait  autrefois  des  couronnes  aux 
conquérants  ;  les  faisceaux  des  empereurs 
en  étaient  garnis.  Il  figure  l'hiver,  temps 
du  repos  qui  termine  l'année. 


Fig.  208.  —  Laurier  stylisé. 

Le  myrilie,  signe  de  triomphe,  partage 
le  privilège  du  laurier,  d'orner  le  front 
des  guerriers  vainqueurs.  Cet  arbuste,  con- 
sacré autrefois  à  Vénus  victorieuse,  offre 
une  verdure  perpétuelle,  des  branches  sou- 
ples chargées  de  fleurs  parfumées. 

La  gracieuse  et  humble 
feuille  de  lin  est  l'emblème 
de  l'industrie  textile  et  de 
l'activité  domestique. 

Le  liseron  (fig.  210)  est 
une  des  plus  gracieuses  es- 
sences que  l'artiste  puisse 
imiter,  remarquable  par  ses 
fleurs  en  disques  blancs  ou 
roses,  au  contour  très  délicatement  dessiné, 
par  ses  tiges  enroulées,  prêtes  à  s'accrocher, 
et  par  ses  feuilles  triangulaires  et  on- 
dulées. 

La  marguerite  des  prés,  ou  pâquerette, 
est  une  fleur  décorative  simple  qu'affection- 
nent les  décorateurs.  Les  Chinois  lui 
donnent    le    nom    d'astre    et    nos    archéo- 


Fig.  209. 
Œillet  stylisé. 


?92 


3Rebuc  lie  T^rt  cbvétien» 


logues  l'appellent    aster.  C'est    chez    nous    1    reux  qui  l'effeuillent.  Une   miniature  bien 
l'oracle  des  champs,  consulté  par  les  amou-    I    connue  du  XVP  siècle   représente  Henry 


Fi^.  2IO     —  Liseron  au  naturel. 


d'Albret  trouvant  la  marguerite,   la    perle 
des  perles,  dans  les  jardins  d'Orléans. 

Plus  majestueuse  et  brillante,  la  reine 
marguerite  rayonne  comme  l'étoile  fy^.  211 
et  212).  Sa  culture  fut  introduite  en  Europe 
par  le  Père  d'Incarville,  qui  en  envoya,  vers 
1 700,  la  graine  au  jardin  du  roi.  Ses  variétés 


des  fleurs  en  clochettes  rangées  en  grappes 
au  long  de  la  tige.  Ses  fleurs  s'ouvrent  au 
premier  rayon  du  soleil  de  mai.  On  le  voit 
sculpté  aux  arcades  du  cloître  de  Saint- 
Jean  des  Vignes  à  Soissons  (fig.  21^)  ;  le 


Marguerites 
stylisées. 


Fig. 


offrent  toutes  les  couleurs  de  l'arc-en-ciel. 

La  mative  offre  des  tiges  jolies,  où  les 
feuilles  plissées  et  les  fleurettes  aux  cinq 
pétales  séparés  et  contournés  en  cœur 
alternent  régulièrement. 

Le  vmguct  (fig.  21^),  ou  lis  des  vallées  et 
des  bois,  plante  aux  feuilles  allongées,  offre 


Fig.  213.  —  Muguet  stylisé. 

voici  appliqué  à  un  papier  peint  (fig.  2ij). 
Les  jolies  fleurettes  du  myosotis  (fig.  216), 
brillent  au  mois  de  juillet  d'un  bleu  de  ciel 
et  se  penchent  en  se  mirant  au  bord  de 
l'eau.  On  connaît  la  légende  allemande  du 
fiancé  qui  se  noie  en  voulant  le  cueillir,  et 
le  jette  en  s'écriant:  «  Vergiss  mein  nicht». 


Fig.  214.  —  Mug-uet  au  naturel. 


A  son  complet  épanouissement,  l'extré- 
mité de  ses  pétales  se  recourbe  légèrement 
vers  le  cœur,  comme  faisant  un  retour 
sur  elle-même  ;  de  là  un  procédé  de 
stylisation  fort  joli,  également  appliqué  à 
la  rose  (fig.  212).  Dans  le  myosotis  sau- 
vage, dont  la  petite  fleurette  rose  et  bleu- 
pâle  se  balance  sur  une  tige  grêle  garnie 
d'un  rare  feuillage,  les 
quatre  pétales  sont  sé- 
parés par  autant  de  sé- 
pales longs  et  effilés,  d'un 
vert  vigoureux.  Du  cœur, 
jaune  de  Naples,  très 
frêle,  s'échappent  trois 
pistils  gris  ;  les  feuilles 
sont  lourdes,  velues  et  dentelées. 

Symbole  d'égoisme,  le  narcisse  offre  une 
couronne  d'or  au  centre  d'une  large  fleur 
blanche,  penchée  et  parfumée.  Cette  fleur 
aime  l'ombre  et  la  fraîcheur  des  eaux. 
La  mythologie  parle  du  jeune  berger  qui 
s'éprit  de  sa  propre  image  aperçue  dans  le 
miroir  des  eaux  du  Styx,  y  mourut  et 
fut  changé  en  cette  fleur.  Depuis,  les 
Euménides  paraient  leur  front  d'une  cou- 


ronne de  cette  fleur  consacrée  à  l'égoïsme. 
Noisetier  (fig.  21S).  En  blason,  on  donne 


a>.^fy 


Fig.  215. 


Fig.  217. 


Myosotis  au  naturel. 


Fig.  216. 


le  nom  de  coqtierelle  à  l'assemblage  de  trois 
noisettes. 


294 


Bebue  te  rSrt  cl)rctten» 


Fig.  218.—  Cathé- 
drale  de  Meaux. 


XJœillet,    fleur    introduite    en    Occident 

par  le  bon  roi   René  d'Anjou,  devenue  un 

symbole    d'amour,    présente     des    feuilles 

à   rubans  d'un    vert   gris   bleu,    des  fleurs 

parfumées  aux  pétales  déchiquetés,  variées 

de  couleurs,  portées  sur  des  tiges  élancées 

par  un  culot  bien  rond.  Elle  a  été  souvent 

stylisée  (fig.  20c). 

Uolivier,     emblème     de 

la  paix,  consacré  jadis  à 
Minerve,  servait  chez  les 
Romains  à  couronner  les 
généraux  qui  obtenaient  le 
petit  triomphe.  Les  Grecs 
en  couronnaient  les  vain- 
queurs des  jeux  olympiques. 
Ses  feuilles  allongées  et 
pointues,  ses  fruits  en  boules 
oblongues,  sont  d'une  reproduction  facile 
et  claire. 

L.e. palmier,  ou  dattier,  était  l'arbre  favori 
des  muses  antiques  :  il  servait  d'insigne 
aux  vainqueurs  des  jeux  olympiques. 
Comme  signe  d'allégresse,  le  peuple  le 
jetait  sur  les  pas  du  Christ  à  Jérusalem. 
Les  palmes  furent,  comme  la  couronne  de 
laurier,  un  emblème  de  la  victoire  et  spécia- 
lement du  martyre.  Le  palmier  avait  dans 
l'antiquité  la  réputation  de  renaître  de  lui- 
même,  comme  le  phénix,  et  les  Grecs  l'ap- 
pelaient le  phénicien.  Il  est  l'image  du 
paradis  et  de  la  terre  promise.  C'est  parfois 
l'arbre  \i2.rd.à\s\-àc\\iç..( Quasi palma  exaltata). 

La  parnassée  des  marais,  qui  croît  et 
fleurit  dans  la  fange,  est  l'image  de  la  vertu 
triomphant  de   la  corruption  qui  l'entoure. 

La  pervenche  (fig.  2iç),  aux  feuilles  tou- 
jours vertes  et  luisantes,  à  la  fleur  bleue  ou 
blanche,  souple  de  forme,  avec  des  pétales 
qui  se  chevauchent,  s'attache  fortement 
au  sol  qu'elle  tapisse,  image  des  premières 
affections. 


Le  perce-neige  apparaît  au  milieu  des 
glaces  et  brave  les  frimas  avec  ses  blanches 
fleurs  portant  dans  leur  sein  un  léger  point 
de  verdure,  comme  marquée  par  l'espérance. 
Elles  semblent  vouloir  nous  consoler  de 
l'absence  des  beaux  jours. 

Le  pissenlit,  si  vulgaire,  est  d'une  grande 
richesse  de  dessin  par  le  déchiqueté  de 
ses  longues  feuilles  étagées  vers  le  haut,  par 
le  globe  ouateux  de  ses  semences,  et  par  les 
divers  états  de  sa  fleur  dorée.  Ses  fleurs, 
qui  s'ouvrent  et  se  ferment  à  heures 
fixes,     sont    l'horloge    des    bergers.     Ses 


Fig.  219.  —  Pervenche  au  naturel. 

boules  légères,  petites  sphères  transpa- 
rentes, sont  formées  de  petits  volants 
qu'on  envoie  dans  l'air  comme  des  mes- 
sagers de  tendresse.  S'il  reste  une  de 
ces  aiguilles,  c'est  signe  qu'on  n'est  pas 
oublié. 

V.Ç.  platane  se  dresse  au-dessus  des  eaux: 
quasi platamis  exaltata  swiijitxta  aquas  ('). 
Il  est  le  symbole  de  l'intelligence  et  de 
la  pureté  du  cœur.  Ses  larges  feuilles  dé- 
coupées à  angles  vifs,  à  échancrures  peu 
profondes,  ne  manquent  pas  de  caractère. 

I.  EccL,  XXIV,  19. 


essai  sur  la  îiécoration  arcl)itectomque. 


295 


La  primevère  annonce  le  printemps, 
comme  l'indique  son  nom  populaire.  Déjà 
les  sculpteurs  gothiques  en  faisaient  usage, 

VUmviortelle  est  consacrée  aux  morts, 
non  par  antithèse,  mais  par  allusion  à  l'im- 
mortalité de  l'âme. 

\Jif  est  le  symbole  de  l'immortalité,  à 
cause  de  son  feuillage  toujours  vert,  sym- 
bole de  deuil,  à  cause  de  sa  couleur  sombre  ; 
c'est  l'arbre  funéraire.  Il  partage  ce  privi- 
lège avec  le  cyprès,  qui  élève  vers  le  ciel 
ses  longues  et  sombres  pyramides  agitées 
par  le  vent.  Il  se  lève  comme  un  emblème 
funèbre  au  milieu  de  bosquets  fleuris,  mais 
surtout  près  des  tombeaux.  Les  anciens 
l'avaient  consacré  aux  Parques  et  à  Pluton. 

Et  toi,  triste  cyprès. 

Fidèle  ami  des  morts,  protecteur  de  leur  cendre. 

Sa  longévité,  son  impérissable  verdure 
lui  donnent  tous  les  titres  à  cet  usage. 
C'est  aussi  l'arbre  paradisiaque  et  une  es- 
sence mystique.  (Quasi  cupressus  in  monte 
Sion).  (■) 

La  flore  de  nos  jardins  et  de  nos  serres, 
devenue  merveilleusement  riche,  offre  des 
espèces  somptueuses,  difficiles  à  styliser  ; 
néanmoins  nos  artistes  si  habiles  en  ont 
parfois  fait  des  merveilles. 

Le  chèvre- feuille  des  jardins,  qui  s'ac- 
croche aux  murs  et  aux  arbres,  et  qui,  selon 
le  poète  : 

«  Monte,  s'attache  et  s'enlace  au  treillage  ». 

symbolise  l'amour  fraternel  et  les  liens 
d'amour.  Son  imitation  a  déjà  tenté  les 
Grecs.et  les  modernes  en  ont  tiré  beau  parti. 
Réservé  pour  nous  consoler  des  fleurs 
disparues,  à  l'approche  de  l'hiver,  le 
superbe  chrysanthème  se  colore  de  tous  les 

I.  Ecd.,  XXIV,  17. 


tons  ramassés  avec  peine  aux  pâles  rayons 
des  derniers  beaux  jours.  Celui  de  Chine  est 
le  plus  riche.  Jaune,  quand  il  fut  introduit 
en  Europe,  il  offre  à  présent  toutes  les 
couleurs,  souvent  mélangées,  et  il  a  inspiré 
aux  peintres  décorateurs  des  compositions 
parfois  superbes  ('). 


Fig.  220.  —  Digitale  au  naturel. 

Le  cyclamen  est  majestueux  par  son  port 
et  ses  larges  feuilles  tachetées  ;  sa  fleur 
pourpre  et  charnue  fournit  des  thèmes  de 
grand  style. 

La  digitale  dresse  fièrement  ses  tiges 
pyramidales,  où  s'accrochent  ses  cornets 
pourpres  ou  blancs  inclinés  (fig.  220). 

I.  Voir  Grasset  et  Molkenbœr. 


296 


3Rr\jur  tir  V^xt  cf)vctieu. 


Lefnc/ism  présente  des  fleurs  semblables 
à  d'admirables  pendeloques,  motif  d'un 
emploi  tout  indiqué. 

Le  géranium  sauvage  (fig.  221)  possède 
de  merveilleuses  fleurettes  roses,  joliment 
crroupées  sur  une  tige  légère,  et  des  feuilles 
fortement  découpées  ;  tandis  que  le  géra- 
nium des  jardins  a  des  feuilles  massives, 
richement  panachées  et  déployées  en  éven- 
tail :  autant  de  traits  heureux  pour  les 
applications  ornementales. 


Fig.  22 


^.21. glycine,  qui  tapisse  si  bien  les  murs  de 
ses  opulentes  grappes  violettes,  est  tout 
indiquée  comme  un  des  meilleurs  sujets  de 
décor  mural. 

Le  lliy)jt  signifie  activité.  Abeille,  pa- 
pillon, mouches  de  toutes  sortes,  environ- 
nent ses  toufïes  fleuries.  Les  Grecs  regar- 
daient cette  plante  comme  symbole  de 
l'activité.  Les  femmes  brodaient  sur  l'é- 
charpe  de  leur  chevalier  une  abeille  bour- 
donnant autour  d'une  branche  de  thym. 


Le  tournesol,  fleur  énorme,  qui  se  tourne 
vers  le  soleil,  symbole  tout  indiqué  de  la 
prière.  Le  tournesol  nous  vient  du  Pérou, 
où  sa  fleur  était  honorée  comme  l'image 
du  soleil  ('). 

Baucis  fut  changée  en  tilleul  :  essence 
bienfaisante,  odorante,  butinée  par  les 
abeilles  ;  emblème  de  l'amour  conjugal.  On 
boit  l'infusion  de  ses  fleurs,  on  fîle  son 
écorce,  on  en  fait  des  cordes  et  des  cha- 
peaux; les  Grecs  en  faisaient  du  papier.  Ses 
fleurs  sont  fines  comme  la  soie. 


KiÊf.  222. 

La  tulipe  importée  de  l'Orient  en  France 
au  XV le  siècle,  est  un  emblème  de  la 
renommée.  Le  turban  ou  tulipien  des 
Turcs  est  une  imitation  de  la  tulipe;  ceux-ci 
célèbrent  sa  fête  au  printemps. 

Symbole  de  la  fidélité  féminine,  la  V(fro- 
nique  signifie  en  Orient  :  don  du  cœur.  La 
véronique  des  bois  (Veronica  officinalis,  ou 
spicata)  est  une  plante  décorative,  connue 
des  gothiques. 

La  verveine  (Verbena  officinalis),  est  un 
symbole  de  l'enchantement.  Avec  le  myrthe, 

I.  V.  Revue  des  Arts  décoratifs^  1899,  p.  232. 


€00at  sur  la  îiécoratton  arcftttectontque. 


297 


elle  formait  la  couronne  de  Vénus.  Elle  fut 
sculptée   par   les   gothiques.    La   verveine 


Fig.    223.   —   Clématite  au  naturel. 

servait  chez  les  anciens  à  toutes  sortes  de 


Fig.   224.    —   Odontoglossum. 

divinations.  Les  Allemands  offrent  un  cha- 
peau de  verveine  aux  nouvelles  mariées. 


On  s'accorde  à  voir  l'image  de  l'humilité, 
de  la  modestie  dans  la  violette  (viola  odo- 
rata),  cette  plante  modeste,  à  courte  tige, 
cachant  sous  son  feuillage  sombre  des 
fleurs  que  trahit  seul  leur  parfum  suave. 

L'obscure  violette,  amante  des  gazons, 
Aux  pleurs  de  leurs  roses  entremêlant  ses  dons, 
Semble  vouloir  cacher,  sous  un  voile  propice. 
D'un  prodigue  parfum  les  discrètes  délices. 

(M.  BoisjOLiN.) 


Fig.    225.  —  Feuilles  de  marronnier  stylisées. 

'\Jiris  que  les  artistes  gothiques  avaient 
interprété,  nous  l'avons  vu,  dans  le  sens 
symbolique  et  sévère,  est  reproduit  par  les 
ornemanistes  modernes  dans  tout  l'éclat  de 
la  beauté.  Avec  sa  feuille  rubannée,  sa  fleur 
opulente  d'allure  et  de  couleur,  cette  plante 


Fig.  226.  —   Feuilles  de  marronnier  au  naturel. 

est  pareille  à  une  grande  dame  à  la  mine 
élégante.  On  la  figure  tantôt  en  plante 
touffue,  tantôt  en  tiges  isolées;  on  prend  ses 
fleurs  à  leurs  différents  états  de  développe- 
ment, sous  des  aspects  divers,  et  l'on  en  fait 
soit  des  ornements  de  sculpture,  soit  des 
bordures  de  vitraux,  soit  des  décors  peints. 


REVUE  DE  l'art  CHRÉTIEN 
I9OI.   —  4"'*=    LIVRAISON. 


298 


llel)ut  ïJe  rart  chrétien. 


en  variant  les  jeux  de  dessin  et  de  couleurs, 
suivant  la  technique. 

Le  marronnier  de  l'Inde  (fig.  225,  226 
et  22"/),  introduit  dans  nos  pays  depuis 
deux  siècles,  sert  à  décorer  les  parcs  et  les 
allées.  Aux  premiers  jours  du  printemps,  ce 
bel  arbre  se  couvre  tout  à  coup  de  verdure. 
Rien  n'est  comparable  à  l'élégance  de  sa 
Heur   pyramidale  et   à  la   richesse  de    ses 


Fig.  227.   —    Marronnier  au  naturel. 

sextuples  feuilles  qui  le  font  ressembler  à 
un  lustre  couvert  de  girandoles.  Ses  bou- 
quets de  Heurs  majestueuses  comme  des 
candélabres,  ses  fruits  en  boules  à  picots, 
d'un  aspect  très  décoratif,  et  ses  larges 
feuilles  s'étalant  en  pattes  sont  autant 
d'éléments  d'une  grande  richesse  au  point 
de  vue  ornemental. 

La  superbe  passijlore,  ou  fleur  de  la  Pas- 
sion, est  une  des  plus  décoratives  de  toutes, 
très  significative  comme  emblème  religieux. 
Cette  fleur,  avec  ses  boutons  comme  héris- 


sés de  clous,  est  entourée  comme  d'une  cou- 
ronne d'épines,  qui  évoque,  d'une  manière 
frappante,  le  souvenir  de  la  couronne  qui 
ceignit  la  tête  du  divin  Sauveur  et  des 
instruments   de    la    Passion.    Ses    pétales 


Fig.  228. —  Pétunia  au  naturel. 

réguliers,  sa  tige  à  vrille,  sa  belle  feuille 
à  cinq  longs  pétales  très  échancrés,  sont 
sans  pareils  pour  les  applications  orne- 
mentales. Nous  donnons  dans  la  planche 


Pavot. 


Fig.  229. 


Fig.  230 


ci-contre  deux  exemples  des   applications 
décoratives  qu'on  en  peut  faire  soit  à  la 
peinture  décorative,  soit  à  la  sculpture  des 
bois. 
Le  sceau  de  Salomon,  avec  une  longue  tige. 


'\ln\m  k  l'Hrl:  ilinticti 


'm.v 


J^iiincau  i>c  menuiserie  scufiitc. 


RMôMSSiSiSœMSïîSiiS^^ 


"ri:c  oc  rcmtmv   ntunifc . 


'Ij-'lillcatiotis  î'c  Iri  pursiflovc  sUL'iîcc 


€00at  sur  la  Décoration  arcftttectomque. 


299 


d'où  les  fleurettes  pendent  en  branches,  et 
que  les  feuilles  hérissent  en  panache,  offre 
un  sujet  de  décor  grandiose,  mais  difficile  à 
traiter. 

Voici  le  pavot  (fig.  20'j,  22g  et  2jo)  à  la 
feuille  mouvementée,  contournée,  déchi- 
quetée, à  la  tige  élégante  et  fine,  à  la  fleur 
en  calice,  au  bouton  bulbeux  surmonté 
d'une  couronne  ;  on  ne  sait  si  c'est  le 
bouton,  la  fleur  ou  la  feuille,  qui  fournit 
les  plus  riches  ornements,  tant  cette  plante 
est  décorative.  Aussi  en  a-t-on,  dans  ces 
derniers  temps,  usé  et  abusé  comme  décor. 


Il  symbolise  le  sommeil  au  physique  et 
au  moral,  à  cause  des  propriétés  morphi- 
ques  de  sa  semence. 

V.Ç: petîinia  (fig.  228)  présente  une  corolle 
en  cornet  chiffonnée  sur  ses  bords  épanouis, 
de  couleurs  variées  dont  le  sculpteur  pour- 
rait tirer  le  parti  le  plus  riche. 

La  clématite  (fig.  22j),  aux  pétales  dis- 
posés en  étoile,  offre  une  forme  régulière 
très  avantageuse  également  au  point  de 
vue  décoratif. 


(A  suivre.) 


L.  Cloc^uet. 


Fig.  231. 


|<^V  A^X  >^^>^^fU\^h^  A^-^  iM*  \^^  >M^  >M'A  A^X  ^^-A  A^V-^  ^^V:^^  A^^  k"^ 

jt  ^^1^TTTt-;rITTTTTT^TTTT^^TTTTTT^lTlfTT^-r^TTTTTTTTTTTIIIIII^XII^IXIrIIIXII^X^IIX^^X^^^J-^AIl-l^^%^^ 

^\  Jjts  frc0que0  îie  Tégltse  Hanta  ffîarta  Hnttqua, 


au  Forum  Romain.  —  Carnet  De  Vopage.  ^s® 


W  UIIIIIITIIIirTTTTIIIIIT»TTTTT^TyTTrTTTrTTTTTTTTTT^TTTTrrrTIIlIIU-IJ.lJTrXIIJIXIIXriJlJIlXIIIIXIJiriJII^ 

^^^-'f  *^^  ^.iî-*  ^x^  ^i^*  '^fi-*  *AÏ^  ^x*I^  ^A^-^  ^iiï''  ^itï^  ^^-^  ''xt^  ^xtî^  *^^x 


ORSOU'ON  a  le  bon- 
heur d'avoir  des  loisirs 
et  d'être  épris  d'une 
étude  d'art  spéciale,  il 
est  bien  difficile  de  se 
soustraire  à  une  obses- 
SmwWWKWAWwS  sion  ;  malgré  des  con- 
ditions défavorables  je  n'ai  pu  résister  au 
désir  d'aller  à  Rome,  pour  examiner  les 
fresques  de  Santa  Maria  Antiqua,  décou- 
vertes au  Forum. 

L'importance  de  ces  peintures  est  con- 
sidérable pour  l'histoire  de  l'art,  et  particu- 
lièrement pour  l'art  chrétien;  c'est  à  dessein 
cependant  que  j'écris  Carnet  de  Voyage, 
comme  pour  mes  précédentes  excursions. 

Ce  n'est  pas,  en  effet,  une  relation  que  je 
me  propose  ;  il  faudrait  pour  la  faire  une 
compétence  que  je  ne  possède  pas,  et  atten- 
dre la  solution  de  nombreuses  questions 
à  l'étude  et  que  d'autres  découvertes  feront 
naître  sans  doute. 

Ce  sont  simplement  des  notes  prises  sur 
place  et  des  remarques  recueillies  dans 
les  opuscules  et  les  articles  parus,  que  je 
résume  présentement. 

Je  ne  suis  ni  archéologue,  ni  architecte, 
ni  paléographe,  mais  j'ai  fait  du  caractère 
et  de  la  technique  des  anciennes  fresques 
mon  étude  de  prédilection  et  comme  il 
m'a  semblé  que,  dans  les  écrits  publiés 
jusqu'à  ce  jour  sur  Santa  Maria  Antiqua, 
ces  questions  n'avaient  été  qu'effleurées,  je 
m'y  suis  d'autant  plus  appliqué. 


L 


I 

'HONORABLE  M.  Baccelli,  étant 
ministre  de  l'Instruction  publique  et 
des  Beaux-Arts,  entreprit  le  projet  de  com- 
pléter une  voie  qui  allait  du  Capitole  à 
l'Arc  de  Titus,  en  suivant  la  déclivité  du 
Palatin  ;  sur  le  chemin  était  située  l'église 
Santa  Maria  Libératrice  dont  la  démolition 
devint  nécessaire  ;  elle  fut  accomplie  en 
1900. 

Sur  l'origine  de  cette  église  on  est  réduit 
à  des  conjectures. 

Selon  la  tradition  qui  ne  repose  que 
sur  une  légende  fabuleuse,  elle  n'aurait  été 
d'abord  qu'une  petite  chapelle  élevée  à 
l'occasion  d'une  délivrance  ;  elle  était  au 
niveau  du  Forum,  à  côté  du  temple  de 
Castor  et  PoUux.  Là,  dans  une  caverne 
habitait  un  dragon  que  les  devins  nourris- 
saient de  victimes  humaines  et  qui  parfois 
sortait  de  son  antre  et  infectait  l'air  d'éma- 
nations pestilentielles.  On  fit  appel  à  saint 
Sylvestre,  pape  de  314  à  336,  et  grâce  à 
son  intervention,  le  monstre  ne  parut  plus. 
Cette  histoire  du  dragon  se  retrouve  dans 
la  vie  de  plusieurs  saints  et  quelques  écri- 
vains placent  son  antre,  non  près  du  temple 
de  Castor  et  Pollux,  mais  au  pied  du  Mont 
tarpéien,  mais  ceci  n'a  aucun  intérêt,  la 
légende  étant  du  domaine  de  la  fable. 

En  fait,  l'église  Santa  Maria  Libératrice, 
sous  le  nom  de  Santa  Maria  de  Inferno, 
sans  doute  en  souvenir  de  la  légende,  est 
mentionnée  pour  la  première  fois  vers  le 
milieu  du  XIV^  siècle,  non  pas  à  l'ancien 
niveau  du  Forum,  mais  sur  les  remblais 
qui  mirent  le  sol  à  peu  près  à  la  hauteur  des 


ILtë  fresques  De  l'église  t)aiita  ®aria  :^ntiqua. 


301 


rues  de  Rome.  D'anciennes  gravures  mon- 
trent devant  le  monument  la  partie  supé- 
rieure des  trois  colonnes  corinthiennes,  qui 
subsistent  encore,  du  temple  de  Castor  et 
Pollux.  On  a  discuté  sur  les  divers  noms 
que  cette  église  a  pu  porter  :  Sau  Silvest7-o 
in  lacu,  San  Salvadore  in    lacu. 

Silvestro,  à  cause  du  pape  ;  Salvadore  à 
cause  de  moines  qui  venaient  y  officier;  lacu 
par  allusion  au  marais,  ou  gouffre  dans 
lequel  se  précipita  le  jeune  Curtius,  360  ans 
avant  notre  ère,  pour  sauver  sa  patrie  de 
la  colère  des  dieux  infernaux.  Ce  gouffre 
cependant  était  au  centre  du  Forum  et  non 
aux  pieds  du  Palatin;  aussi  a-t-on  pensé 
que  le  mot  lactt,  devait  se  rapporter  avec 
beaucoup  plus  de  raison  à  l'eau  Giuturna 
qui  vient  d'être  mise  à  jour.  A  la  vérité,  ce 
n'est  pas  un  lac,  mais  un  simple  bassin  de 
fontaine  de  quelques  mètres  de  côté,  en- 
touré de  plaques  de  marbre  et  situé  près 
du  temple  de  Castor  et  Pollux. 

Quelques  écrivains  ont  intitule  l'église 
Santa  Âlaria  di  Canepai'ia.M.a\s,  en  défini- 
tif, c'est  le  titre  de  Santa  Maria  Libératrice 
qui  est  resté  ;  il  résulte  de  l'abréviation  de 
Santa  Maria  Libéra  nos  a  Pcenis,  inscrip- 
tion qui  se  lisait  encore  sur  la  façade  au 
moment  de  la  démolition. 

L'église  paraît  avoir  été  délaissée  pen- 
dant quelque  temps  ;  il  en  est  cependant 
question  sous  Martin  V  (pontificat  de  1417 
à  1431). 

En  1 550,  le  pape  Jules  1 1 1  la  concède  aux 
religieuses  oblates dites  de  Torre  de  Speccki, 
mais,  la  localité  étant  malsaine,  les  reli- 
gieuses abandonnèrent  le  couvent  qu'elles 
possédaient  à  côté,  tout  en  conservant  ce- 
pendant l'église. 

En  1583,  un  noble  et  riche  Romain, 
Michèle  Lante,  prescrit  dans  son  testament 
la  reconstruction  de  l'édifice  ;  l'oncle  du 
défunt,  le  cardinal  Marcellus  Lante,  le  fit. 


sinon  rebâtir  entièrement,  du  moins  com- 
plètement restaurer  en  161 7.  C'est  dans  ce 
dernier  état  qu'il  se  trouvait  lorsqu'il  fut 
démoli  en  1900. 

Les  religieuses  ont  traité  à  l'amiable 
avec  le  ministre;  elles  ont  reçu  une  indem- 
nité de  300,000  lires  et  le  droit  d'emporter 
les  objets  et  les  peintures  qui  garnissaient 
le  temple.  Les  meilleures  peintures  sont  du 
Français  Parrocel  {^  i  78 1  )  et  l'objet  le  plus 
intéressant,  la  grande  croix  de  bois  qui 
existait  jadis  au  centre  du  Colysée. 

On  doit  toujours  regretter  la  suppression 
d'une  église  ;  cependant  la  destruction  de 
Santa  Maria  Libératrice  n'a  été  blâmée  par 
personne,  surtout  après  qu'on  a  connu  les 
heureuses  conséquences  de  la  démolition. 

II 

AU  cours  de  travaux  exécutés,  en  1702, 
dans  un  jardin  situé  derrière  l'abside 
de  Santa  Maria  Libératrice,  on  trouva  à 
environ  cinq  mètres  de  profondeur,  une 
autre  abside  décorée  de  fresques  ;  le  pape 
Clément  XI  voulut  la  dégager,  mais  il  ne 
donna  pas  suite  à  son  projet  à  cause  des 
difficultés  de  l'entreprise. 

En  1885,  on  déblaie  un  grand  édifice 
carré,  situé  derrière  le  temple  de  Castor  et 
Pollux,  et  on  reconnaît  une  partie,  décorée 
de  fresques,  de  l'église  dont  l'abside  avait 
été  signalée  en  1702. 

La  découverte  ne  paraît  pas  avoir  fait 
alors  une  vive  sensation,  mais  une  dizaine 
d'années  plus  tard,  une  ardente  polémique 
surgit  entre  les  savants  et  les  archéologues 
de  Rome  sur  le  point  de  savoir  quelle  était 
cette  église. 

Était-elle  Santa  Maria  Nuova,  ou  Santa 
Maria  Antiqua  "^ 

Je  n'ai  pas  à  résumer  les  discussions 
engagées  à  ce  sujet,  la  question  ayant  été 
définitivement  résolue  par  le  dégagement 


302 


Bebue  lie  V^vt  c{)rétien. 


de  l'édifice  opéré  en  1900,  sous  la  savante 
et  sagace  conduite  de  M.  le  commandeur 
G.  Boni,  l'éminent  directeur  des  travaux  du 
Forum. 

Notre  illustre  compatriote,  Mgr  Du- 
chesne,  protonotaire  apostolique,  direc- 
teur de  l'école  de  France  à  Rome,  avait 
pris  part  à  la  lutte. 

Mgr  Duchesne  démontra  victorieuse- 
ment que  le  sanctuaire  avait  été  d'abord 
dédié  à  saint  Antoine,  puis  à  la  Vierge  et 
qu'il  n'était  autre  que  l'église  de  Santa 
Maria  Antiqua,  dont  il  est  plusieurs  fois 
question  dans  le  Liber  Pontificalis,  comme 
on  le  verra  plus  loin. 

On  sait  que  Mgr  Duchesne  a  publié  le 
texte  du  Liber,  travail  extrêmement  im- 
portant, qui  honore  grandement  l'auteur  et 
l'érudition  française  ("). 

Avant  de  pénétrer  dans  l'intérieur  de 
Santa  Maria  Antiqua,  il  est  nécessaire  d'in- 
diquer où  elle  se  trouve. 

En  venant  des  pentes  du  Capitole,  on 
prend  l'escalier  provisoire  qui  donne  accès 
au  Forum  ;  on  tourne  à  droite,  et  à  peu  de 
distance,  on  est  aux  restes  du  temple  de 
Castor  et  Pollux,  puis  un  peu  au  delà  on 
se  trouve  devant  une  haute  construction 
antique,  les  vestiges  du  temple  d'Auguste. 
C'est  là,sur  une  voie,  la  Via  nuova, qu'est 
l'entrée  de  l'église  à  droite  ;  elle  est  de 
plain  pied  avec  le  sol  du  l'"orum. 

Santa  Maria  Antiqua  n'est  pas  l'église 
souterraine  de  Santa  Maria  Libératrice  ; 
il  n'y  a  entre  ces  deux  édifices  aucun 
rapport  comparable  aux  églises  super- 
posées de  Saint-Clément,  par  exemple. 
Ceux  qui  ont  construit  Santa  Maria  Libé- 
ratrice sur  le  remblai  ne  se  doutaient  pas 
de  Santa  Maria  Antiqua,  et,  comme  l'a  fait 

I.  Liber  PontiHcalis.  Texte,  introduction  et  commen- 
taires par  l'abbé  L  Duchesne.  ;  2  vol.  Paris,  Tliorin 
1S86-1892. 


observer  justement  Mgr  Duchesne,  l'église 
du  haut  ne  couvre  pas  exactement  l'aire  de 
l'église  du  bas  et  les  plans  des  deux  sanc- 
tuaires ne  concordent  pas. 

De  l'origine  première  de  Santa  Maria 
Antiqua  on  ne  sait  rien  ;  il  est  visible,  par 
l'appareil  des  murailles,  qu'elle  a  été  éta- 
blie dans  un  édifice  antique,  sans  doute  au 
Vie  siècle,  époque  où  les  chrétiens  prirent 
pour  sanctuaires  certaines  localités  antiques 
abandonnées. 

Si,  par  les  découvertes  de  1702,  de  1885 
et  par  le  Liber  Pontificalis,  on  connaissait 
l'existence  de  Santa  Maria  Antiqua,  on 
ignorait  absolument  celle  d'un  autre  sanc- 
tuaire chrétien  voisin  que  les  fouilles  récen- 
tes ont  mis  au  jour;  il  est  en  face  de  l'église, 
sur  la  même  Via  nuova,  mais  orienté  dans 
un  sens   différent  ;  j'y  reviendrai. 

L'église  Santa  Maria  Antiqua  est  oblon- 
gue  ;  le  mur  de  droite  est  adossé  au  tem- 
ple d'Auguste:  le  fond  est  contre  le  Palatin; 
l'entrée  est  sur  la  Via  nuova  qui  longe 
également  le  mur  de  gauche  et  monte  en 
rampe  au  Palatin  ;  cette  rue  a  une  largeur 
d'environ  3  mètres  50. 

Les  mesures  que  je  donne  n'ont  pu  être 
prises  le  mètre  à  la  main  ;  elles  ont  été 
appréciées  au  pas  pour  le  terrain  et  à  la 
vue  pour  les  hauteurs  ;  elles  ne  sont  donc 
qu'approximatives;  j'ai  lieu  cependant  de 
les  croire  assez  justes  pour  donner  une  idée 
de  l'ensemble. 

Toutes  les  mesures  ont  été  prises  à  l'in- 
térieur ;  l'observation  est  nécessaire,  car  les 
murailles  dégagées  sont  très  fortes  et  at- 
teignent parfois  jusqu'à  i  mètre  50  d'épais- 
seur. 

La  droite  et  la  gauche  sont  celles  du 
spectateur  qui  pénètre  dans  l'église  par  la 
porte  d'entrée. 

A  mon  grand  regret,  je  n'ai  pu  me  pro- 
curer les  photographies  des  fresques,  ni  en 


3les  fre0que0  ht  VcQim  ^anta  avaria  :^nttqua 


303 


faire  faire  ;  il  existe  bien  quelques  photo- 
graphies, mais  elles  sont  d'ensemble  et 
ont  été  prises  avant  l'achèvement  des  fouil- 
les ;  elles  sont  trop  incomplètes  pour  être 
reproduites  utilement. 

L'aire  de  l'église  est  divisée  en  trois 
parties  distinctes. 

En  entrant  par  la  Via  nuova,  on  se 
trouve  dans  le  narthex,  lieu  de  réunion 
des  fidèles. 

Puis,  après  avoir  traversé  un  espace 
vide,  on  passe  dans  le  presbytérium  qui 
se  terminait  au  fond  par  un  arc  triomphal, 
dont  il  ne  reste  que  les  bases  en  maçonne- 
rie. Là  se  trouvent  les  bases,  également 
en  maçonnerie,  des  ambons  cornu  epistolce 
et  cornu  evangelii,  des  traces  de  ce  qui 
pouvait  être  la  tribune  des  chanteurs  et 
quatre  colonnes  corinthiennes,  isolées  et 
placées  en  carré  oblong. 

Puis,  après  un  autre  espace  vide,  on  pé- 
nètre dans  le  chœur  qui  se  termine  par  une 
abside  hémisphérique  ;  à  chaque  côté  du 
chœur  il  y  a  une  chapelle. 

Du  narthex  on  pouvait  passer  dans  le 
chemin  en  rampe  qui  monte  à  gauche  au 
Palatin  ;  on  avait  aussi  accès  à  cette  rampe 
par  un  escalier  placé  à  l'entrée  du  chœur. 

Du  seuil  de  la  porte  d'entrée  par  la  Via 
nuova,  au  fond  de  l'abside,  il  y  a  environ 
51  mètres. 

Le  narthex  mesure  à  peu  près  19  a  20 
mètres  de  long. 

Le  presbytérium  est  d'environ  un  quart 
moins  long. 

Le  chœur  mesure  de  7  à  8  mètres  en 
profondeur. 

La  largeur  des  deux  premières  divisions 
est  uniformément  de  1 8  mètres  à  l'intérieur. 

Le  chœur,  y  compris  les  deux  chapelles, 
est  un  peu  plus  étroit. 

Les  hauteurs  sont  difficiles  à  apprécier, 
puisque  la    toiture  n'existe  plus  au-dessus 


du  narthex  et  du  presbytérium,  mais  on 
peut  en  avoir  une  idée  par  la  hauteur  des 
quatre  colonnes  corinthiennes  qui  mesu- 
rent environ  six  mètres  avec  leurs  bases. 

Les  plafonds  étaient-ils  plats  .-'  ce  n'est 
pas  probable  ;  à  en  juger  par  un  édicule 
peint  dans  les  mains  d'un  personnage 
dont  il  sera  question,  le  toit  devait  être 
cintré. 

En  tout  cas,  l'abside  hémisphérique  était 
voûtée  ;  du  sol  au  sommet  de  la  partie  de 
la  voûte  qui  subsiste,  il  m'a  paru  qu'il  peut 
y  avoir  une  dizaine  de  mètres. 

Tels  sont  les  seuls  renseignements  archi- 
tectoniques,  que  mon  incompétence  en  ces 
matières  me  permet  de  fournir. 

Nous  sommes  bien,  on  le  voit,  dans  la 
primitive  Église  chrétienne,  avec  ses  trois 
divisions  bien  tranchées. 

Peut-être  Santa  Maria  Antiqua  est-elle 
maintenant  la  plus  ancienne  de  nos  églises 
mises  au  jour,  sans  avoir  subi  d'altérations 
dans  sa  forme  ?  Elle  est  certainement  la 
plus  simple  de  toutes,  car  elle  n'a  ni  por- 
tique à  l'entrée,  ni  nefs  latérales  ;  mais  si 
son  architecture  est  des  plus  élémentaires,  il 
n'en  est  pas  ainsi  de  sa  décoration. 

Ici  j'aborde  un  sujet  où  je  me  sens  plus 
à  l'aise  que  dans  les  précédentes  descrip- 
tions. 

111 

SAINT  Grégoire-le-Grand,  pape  de  590 
à  604,  a  dit  <?  que  la  peinture  remplisse 
«  les  églises,  afin  que  ceux  qui  ne  connais- 
«sent  pas  leurs  lettres  puissent  au  moins 
«  lire  sur  les  murailles  ce  qu'ils  ne  peuvent 
«  lire  dans  les  manuscrits  ». 

Cette  prescription  a  eu  pour  l'art  d'incal- 
culables résultats  ;  elle  était  du  reste  con- 
forme au  sentiment  chrétien  manifesté 
dans  les  catacombes. 


304 


jIRcllue  Ifr  l'^rt  rbréticn» 


Le  concile  de  Nicée,  en  787,  reprend  la 
pensée  de  saint  Grégoire-le-Grand.  «  Par 
«la  peinture  nous  pouvons  toujours  penser 
«à  Dieu,  car  lorsque  dans  les  temples  sa- 
«crés  la  parole  se  tait,  le  spectacle  des  ima- 
i.  ges  fixées  aux  murs  nous  raconte  encore 
«et  nous  enseigne,  le  matin,  le  midi, le  soir, 
«  la  vérité  de  ses  actes.  » 

A  l'église  Santa  Maria  Antiqua  ces 
paroles  de  saint  Grégoire-le-Grand  ont  été 
fidèlement  suivies. 

Du  sol  au  faîte,  l'église  était  décorée  de 
fresques  ;  la  prodigalité  de  ces  peintures 
est  telle  qu'il  n'y  a  pas,  je  crois,  dans  toute 
l'Italie,  un  pareil  exemple  à  citer. 

La  peinture  recouvrait  non  seulement 
les  murs  droits,  et  les  voûtes,  mais  les  co- 
lonnes, les  embrasures  des  portes  et  les 
bases  des  sièges  et  des  ambons. 

Les  conditions  défectueuses  de  la  localité 
ont  causé  des  ravages. 

En  maints  endroits  l'enduit,  sur  lequel  la 
fresque  a  été  peinte,  s'est  détaché  du  mur. 
Ailleurs  l'enduit  a  résisté,  mais  il  a  été  en- 
vahi par  de  petits  cryptogames  touffus  qui 
recouvrent  les  peintures  comme  d'un  tapis 
végétal  ;il  y  a  des  pans  de  murs  entiers  ainsi 
tapissés  ;  d'autres  murailles  n'ont  été  at- 
teintes que  partiellement.  Sur  divers  points, 
les  couleurs  ont  été  afîfliiblies  en  totalité  ou 
en  partie.  Par  bonheur,  plusieurs  fresques, 
et  non  des  moins  importantes,  sont  restées 
dans  un  étal  de  conservation  remarquable 
et  aussi  fraîches  que  les  mieux  conservées 
du  XIV^'  siècle. 

La  chute  de  nombreux  fragments  d'en- 
duit, l'affaiblissement  de  certaines  colora- 
tions, les  moisissures,  la  disparition  d'une 
fraction  de  l'abside  hémisphérique  et  des 
parties  supérieures  des  chaires  et  des  am- 
bons, sont  très  regrettables  sans  doute, 
mais,  malgré  ces  dégradations,  on  peut  se 


rendre  parfaitement  compte  de  la  valeur  de 
la  décoration  et  des  procédés  techniques 
qui  ont  été  employés. 

IV 

AVANT  de  mentionner  quelques-uns 
des  sujets  représentés,  —  car  tous 
n'ont  pu  être  spécifiés  jusqu'à  présent  du 
moins  —  et  de  noter  les  procédés,  il  con- 
vient de  faire  connaître  à  quelle  époque 
nous  nous  trouvons. 

Par  une  rare  bonne  fortune,  il  n'est  besoin 
ici  de  nulle  hypothèse  et  aucune  discussion 
sérieuse  n'est  possible. 

L'église  était  dépendante  d'une  diaconie 
et  desservie  par  des  moines  grecs  ;  la  géné- 
ralité des  fresques  est  accompagnée  d'ins- 
criptions en  lignes,  ou  en  lettres  superpo- 
sées ;  presque  toutes  ces  inscriptions  sont 
en  caractères  grecs,  elles  étaient  en  nombre 
inusité,  puisque,  malgré  les  dégradations, 
on  en  compte  encore  au  moins  cent  cin- 
quante, les  unes  très  lisibles,  les  autres  en 
partie  effacées.  Elles  se  rapportent  soit 
aux  sujets  représentés,  soit  à  des  papes, 
à  des  donateurs  et  à  des  saints. 

On  a  trouvé  également  quelques  frag- 
ments de  marbre  avec  des  inscriptions  se 
rapportant  à  l'église. 

Plusieurs  de  ces  indications  concordent 
avec  le  texte  du  Liber  Pontificalis,  qui  par 
trois  fois  mentionne  l'église,  et  avec  d'autres 
documents  authentiques. 

Les  plus  anciennes  mentions  sont  du 
temps  du  pape  Jean  VII  (pontificat  de  705 
à  708). 

Le  Liber  Po7ilificalis  dit  : 
Joannes  natione  grecus . . .  vir  erudissitnus 

et  facundus  eloquentia Fecit  ecclesias 

quas,  quicwnque  liasse  desidcrat  in  cis  eius 
vîcltuDi  depictîun  repperit.  Basi/icam  itaqne 
Sanct(C  Dei  Genitricis  qui  antiqua  vocatiir 


îles  fresques  îie  Tegltse  ^anta  £©am  :antîqua. 


305 


pictura  decoravit,  ilHcque  ambonem  noviter 
fecit  et  super  eadem  ecclesiam  episcopium 
qumitum  ad  se  construere  maluit,  illicque 
pOJitificali  sui  te^iipiis  vitamfinivit. 

Un  fragment  de  l'ambon  dont  il  est  ques- 
tion a  été  retrouvé  dans  l'église;  il  est  en 
marbre  blanc  avec  l'inscription  bilingue, 
latine  et  grecque. 

Joatmes  Servus  Sce  Mariœ  ('). 

Jean  VII,  vir erudissimus,  est  connu,  dans 
l'histoire  de  l'art  de  la  mosaïque,  par  la 
décoration  qu'il  fit  faire  dans  la  chapelle 
de  la  Vierge  de  l'ancienne  basilique  de 
Saint-Pierre  ('). 

La  protection  qu'il  a  accordée  à  Santa 
Maria  Antiqua  s'explique  facilement.  Il 
était  fils  de  PIatone(>î<687),intendantdu  Pa- 
latin où  il  y  avait  encore  des  palais  à  l'usage 
des  représentants  de  l'empereur.  Jean  VII 
voulut  demeurer  au  Palatin  et,  comme  le 
dit  le  Liber  Poiitificalis,  il  se  fit  construire 
au-dessus  de  l'église  une  résidence,  où  il 
finit  ses  jours  ;  il  s'en  suit  que  le  sanctuaire 
devint  l'église  du  pontife  ;  aussi  la  désigne- 
t-on  maintenant  à  Rome  sous  le  nom  de 
Cappella palatina,  ce  qui  la  distingue  nette- 
ment des  autres  ésflisesdu  Forum  chrétien. 

Jean  VII  fit  également  bâtir,  vers  l'arc 
de  Titus,  la  Torre  chartularia,  dont  une 
partie  servit  aux  archives  pontificales  jus- 
qu'au X<^  siècle. 

Aucune  mention  de  Santa  Maria  Antiqua 
ne  se  trouve  dans  le  Liber  Pontificalis 
depuis  708,  année  de  la  mort  de  Jean  VII, 
jusqu'au  pontificat  de  Léon  tll  (795-816), 
mais  cela  ne  prouve  rien,  le  Liber  ne  don- 
nant pas  le  détail  de  tous  les  travaux 
ordonnés  par  les  papes  ;  ainsi  le  Liber  passe 
sous  silence  les  peintures  exécutées  à  Santa 

1.  Pour  simplifier  je  donne  les  inscriptions,  non  avec 
leurs  caractères  originaux,  mais  en  lettres  ordinaires. 

2.  Je  reproduirai  prochainement  un  important  morceau 
de  cette  mosaïque,  conservé  à  Florence. 


Maria  Antiqua,  sous  le  pape  saint  Zacharie 
(741-752),  et  cependant  ce  pontife  en  fit 
faire  de  très  importantes;  la  preuve  subsiste, 
puisqu'il  est  figuré,  dans  une  fresque,  en 
nimbe  carré  avec  son  nom  en  lettres  super- 
posées. 

De  même  pour  le  pape  saint  Paul  I^'' 
(757-767),  qui  est  également  représenté  en 
nimbe  carré,  dans  une  fresque. 

D'autres  papes  du  VI 11^  siècle  ont,  selon 
le  Liber,  fait  des  munificences  à  Santa 
Maria  Antiqua,  mais  dans  les  mentions  il 
n'est  pas  question  de  peintures  murales  ; 
il  faut  cependant  observer  que  dans  les 
fresques  on  trouve  quelques  effigies  en 
partie  détruites,  avec  des  inscriptions  incom- 
plètes, se  rapportant  à  des  pontifes. 

Au  IX^  siècle,  il  y  a  lieu  de  croire  que 
le  pape  S.  Léon  IV  (847-855)  fit  recons- 
truire une  partie  du  sanctuaire  et  que  saint 
Nicolas  I'^''  (858-867)  y  ordonna  aussi  des 
travaux. 

Tel  est  en  résumé  l'état  actuel,  en  ce 
qui  tient  à  la  chronologie  des  papes  ;  les 
points  obscurs  seront  probablement  éclair- 
cis,  mais  ce  qui  est  dès  à  présent  hors  de  dis- 
cussion, c'est  que  nous  sommes  en  présence 
de  fresques  du  VII 1^  siècle,  et  que  la  plus 
importante  et  par  bonheur  la  mieux  con- 
servée a  été  peinte  entre  les  années  741 
et  752. 


AU  juger,  j'estime  au  moins  à  trois 
cents,  le  nombre  de  figures  entières 
ou  partielles,  groupées  en  tableaux,  alignées 
sur  files,  isolées,  qui  subsistent  dans  la 
décoration  des  deux  édifices  et  j'apprécie  à 
un  pareil  nombre  les  effigies  disparues,  par 
suite  de  la  chute  de  quelques  murailles,  du 
détachement  de  l'enduit  et  de  l'envahisse- 
ment de  la  moisissure. 


KKVUK    DE   L  ART   CHRETIEN. 
igOI.    —    4™^    LIVRAISON. 


3o6 


Bcbue  tir  V^n  cbveticiu 


Il  m'eût  été  agréable  d'entrer  dans  le 
détail  en  mentionnant  les  sujets  qui  ont  été 
spécifiés  jusqu'à  présent  et  en  marquant  les 
places  respectives  qu'ils  occupent. 

Mais  j'ai  reconnu  qu'un  pareil  travail 
était  au-dessus  de  mes  moyens,  faute  d'un 
plan  d'ensemble  et  de  relevés  géométriques 
des  murailles  et  des  pans  de  murs  ;  si,  en 
effet,  les  lignes  essentielles  de  l'église  sont 
simples,  les  détails  sont  plus  compliqués  ;  il 
y  a  là  des  pans  de  murs  en  redans  à  la 
limite  des  divisions,  des  bases  d'arcs  et 
d'ambons,  de  grandes  niches  oblongues 
pratiquées  dans  le  fond  des  chapelles,  de 
petites  niches  hémisphériques  creusées  dans 
les  murs.  Ces  petites  niches  mesurent 
environ  un  mètre  de  haut  et  0,30  ctm.  de 
profondeur  ;  on  peut  supposer  qu'à  l'époque 
où  l'édifice  était  païen,  elles  servaient  aux 
urnes  cinéraires,  la  localité  ayant  été  un  lieu 
de  sépulture,  comme  l'indiquent  les  sarco- 
phages qu'on  y  a  trouvés  ;  des  tombeaux 
chrétiens  ont  aussi  été  découverts  dans 
l'église  et  aux  abords. 

Sans  être  appuyée  de  tracés  graphiques, 
une  description  détaillée  ne  pouvait  être  que 
confuse  ;  j'y  ai  donc  renoncé  :  je  me  borne 
à  des  vues  d'ensemble  et  à  l'indication  des 
sujets  les  plus  importants. 

Le  parti  décoratif  est  simple  ;  il  a  été 
observé  à  peu  près  partout. 

Une  première  division  de  l'espace  part 
du  sol  jusqu'à  environ  i  mètre  50  de  hau- 
teur ;  elle  est  peinte  de  draperies  plissées 
relevées  symétriquement  et  décorées  d'or- 
nements divers. 

Au-dessus  de  cette  zone,  apparaît  parfois 
une  suite  de  personnages  debout,  rangés  sur 
les  côtés  du  trône  du  Rédempteur,  ou  de  la 
Madone. 

Cette  frise  est  surmontée  de  tableaux  en 
compartiments  montrant  des  histoires  tirées 
des  Écritures  et  du  martyrologe  des  saints  ; 


par  endroits  ces  tableaux  sont  surmontés 
d'une  autre  suite  de  tableaux. 

Lorsque  la  frise  de  personnages  debout 
n'existe  pas,  les  tableaux  sont  tangents  à 
la  draperie. 

Le  choeur  et  l'abside,  les  niches  et  les 
parois  des  deux  chapelles  sont  revêtus  de 
peintures,  ainsi  que  les  petites  niches  hémis- 
phériques des  murailles  ;  il  en  est  de  même, 
comme  je  l'ai  indiqué  déjà,  des  embrasures 
de  portes,  des  bases  des  arcs  et  des  ambons 
et  des  murs  en  redans. 

Pour  donner  une  idée  de  l'ampleur  de  la 
décoration,  je  prends  l'un  des  murs  du 
presbytérium  et  l'une  des  chapelles  du 
chœur. 

Sur  la  zone  inférieure  de  la  muraille  du 
presbytérium  court  une  draperie  plissée  et 
relevée  symétriquement. 

Au-dessus,  une  frise  de  personnages, 
peints  à  grandeur  naturelle  ;  elle  représente 
le  Rédempteur  avec  le  nimbe  crucifère  ; 
il  est  assis  sur  le  trône  ;  de  la  main  droite  il 
bénit  à  la  façon  latine,  dans  la  gauche  il 
tient  un  livre  relié  luxueusement  :  à  ses 
côtés  se  tiennent  debout,  d'une  part,  onze 
saints  latins,  de  l'autre,  neuf  saints  grecs. 
Ils  sont  revêtus  de  vêtements  épiscopaux, 
portent  le  pallium  et  tiennent  la  crosse 
d'une  main  et  un  livre  de  l'autre  ;  leurs 
noms  en  lettres  grecques  superposées  sont 
tous  lisibles. 

Au-dessus  de  cette  division  est  figurée 
l'histoire  de  Joseph  en  sept  tableaux,  dont 
quatre  sont  suffisamment  conservés;  ils 
montrent  : 

Le  banquet  de  Pharaon. 

Joseph  et  la  femme  de  Putiphar. 

Joseph  conduit  en  prison. 

Joseph  près  du  puits. 

Des  trois  autres  tableaux  il  ne  reste  que 
quelques  figures  insuffisantes  pour  détermi- 


3Le0  fresques  De  réglise  t^anta  S^aria  Zntiqm. 


307 


ner  le  sujet  ;  plusieurs   compartiments   ont 
encore  leurs  légendes  en  partie. 

Une  quatrième  zone  de  peintures,  divi- 
sée en  sept  tableaux,  se  trouvait  au-dessus 
de  l'histoire  de  Joseph  ;  l'enduit  est  tom- 
bé presque  partout  ;  les  quelques  figures 
qui  subsistent  ne  permettent  pas  de  fixer 
le  sujet  ;  on  distingue  une  personne  cou- 
chée endormie  et  une  vue  de  mer. 

Malgré  la  chute  de  quelques  morceaux 
de  l'enduit,  l'une  des  deux  chapelles  du 
chœur,  dont  je  vais  tenter  la  description, 
est  de  la  plus  haute  importance,  tant  pour 
les  sujets  représentés  que  pour  la  tech- 
nique des  fresques  et  la  conservation  des 
couleurs. 

La  décoration  montre  : 

La  Crucifixion  de  Jésus-Christ. 

La  JVladone  allaitant  l'Enfant. 

Divers  personnages  isolés. 

L'histoire  de  sainte  Giulitta  et  de  son 
fils  saint  Ouirico,  martyrisés  dans  les  pre- 
mières années  du  IV^  siècle. 

Le  Rédempteur  est  attaché  à  la  croix 
les  pieds  séparément  cloués  ;  il  est  revêtu 
d'une  longue  robe  étroite,  d'un  ton  bleu, 
ornée  d'un  galon  jaune  ;  les  bras  sont  nus 
et  allongés  sur  le  bois  équarri.  Il  est  vivant  ; 
au  ciel,  la  lune  et  le  soleil  apparaissent 
obscurcis. 

Au  bas  de  la  croix,  et  de  petite  taille, 
Longinus,  marqué  par  son  nom  et  un  autre 
pharisien, 

D'un  côté  de  la  croix,  la  Madone,  debout, 
vêtue  de  noir. 

De  l'autre  côté  Jean,  très  jeune. 

La  scène,  qui  est  peinte  dans  une  niche 
oblongue  {'),  est  encadrée  de  palmiers  por- 
tant des  fruits. 


1.  A  la  vue,  elle  a  environ  2  mètres  25  de  large  et   3,50 
de  haut. 


'  Parmi  les  figures  isolées  l'une  d'elles  a 
une  importance  capitale  ;  elle  représente 
un  pape  en  nimbe  bleu  carré  ;  l'inscription 
Zaccharia  papa,  en  lettres  grecques  super- 
posées, ne  laisse  aucun  doute  sur  l'identité 
du  personnage  et  la  date  de  la  peinture. 

L'autre  figure  montre  Theodotus  ;  l'ins- 
cription est  en  partie  mutilée. 

Elle  a  été  facilement  rétablie.  Theo- 
dotus était  primicerius  defensoniiu,  di- 
gnité élevée  de  la  cour  pontificale  ;  l'ins- 
cription lui  donne  ce  titre  et  apprend  qu'il 
était  dispensatore,  administrateur,  delà  dia- 
conie  de  Santa  Maria  Antiqua. 

Le  personnage  est  nimbé  en  carré,  il  est 
vêtu  d'un  manteau  rouge  et  d'une  aube 
blanche  ;  dans  les  mains  il  tient  un  édicule 
à  toit  cintré,  qui  est  l'église. 

D'autres  personnages  sont  encore  figurés  : 
plusieurs  sont  vêtus  à  peu  près  comme 
Theodotus  ;  d'autres  sont  parés  avec  luxe  ; 
sauf  sainte  Giulitta  et  saint  Ouirico,  la 
Madone  et  l'Enfant,  on  n'a  pu  les  spécifier, 
les  inscriptions  étant  tombées  ainsi  qu'une 
partie  des  figures. 

Au-dessous  de  la  Crucifixion,  est  peinte 
en  un  tableau  la  Madone  assise  sur  un 
trône,  avec  l'Enfant  dans  ses  bras. 

Sur  les  murailles  latérales  se  développe 
l'histoire  du  martyre  de  sainte  Giulitta  et  de 
son  fils  Quirico. 

Giulitta,  pour  échapper  à  la  persécution 
contre  les  chrétiens,  s'enfuit  d'Iconium  en 
Asie  Mineure,  vers  l'an  304,  avec  son  fils 
Quiricus,  âgé  de  trois  ans,  et  se  réfugia 
d'abord  àSéleucie,  puisa  Tarse,  capitale  de 
la  Cilicie.  Reconnue,  elle  fut  conduite  de- 
vant le  gouverneur  Alexandre,  qui  la  fit 
frapper  à  coups  de  nerfs  de  bœuf;  il  vou- 
lut s'emparer  de  Quiricus.  L'enfant  lui 
résista,  le  gouverneur  le  fit  flageller  ;  Qui- 
ricus criait  :  «  Je  suis  chrétien  »,  répondant  à 


sa  mère  qui  répétait  :  «  Je  suis  chrétienne  ». 
Alexandre  fit  arracher  la  langue  à  l'enfant 
qui,  malgré  cette  mutilation,  criait  toujours 
«  Je  suis  chrétien.  »  Les  deux  martyrs 
succombèrent. 

Leur  histoire  est  retracée  en  six  tableaux 
pourvus  d'inscriptions  en  partie  détruites, 
ainsi  que  plusieurs  figures. 

Giulitta  et  son  fils  conduits  devant  le 
gouverneur,  praeses,  assisté  de  deux  per- 
sonnes. 

Les  deux  chrétiens  sont  en  prison. 

Alexandre  attire  à  lui  l'enfant  conduit 
par  deux  soldats  armés  de  lances. 

Flagellation  de  Quiricus. 

Le  martyre  de  l'enfant  en  présence  de 
sa  mère  ;  avant  d'expirer,  il  bénit  son  bour- 
reau. 

Un  sixième  tableau,  presque  entièrement 
ruiné,  ne  peut  être  expliqué  par  l'inscription 
dont  il  ne  reste  que  quelques  mots. 

Divers  épisodes  du  martyre  des  deux 
saints  sont  encore  représentés  dans  une 
autre  suite  de  dimensions  plus  petites. 

Les  fresques  de  l'abside  hémisphérique 
et  des  murs  latéraux  du  chœur  de  l'église 
ont  beaucoup  plus  souffert  que  celles  de  la 
chapelle  de  la  Crucifixion.  Cependant  on 
distingue,  dans  la  conque,  le  Christ  assis  sur 
un  trône  ;  la  figure,  de  bien  plus  grande 
dimension  que  les  autres,  est  entourée  d'an- 
ges et  de  divers  personnages  en  partie  dé- 
truits mais  dont  l'un  est  fort  heureusement 
encore  appréciable;  c'est  le  pape  Paul  ler, 
et  en  nimbe  carré  bleu,  avec  l'inscription 
Sanctissunus  Pan/us  P.  P.  Roma  (iius). 

Je  ne  puis  que  mentionner  brièvement 
les  scènes  et  les  figures  qui  subsistent  en 
totalité  ou  en  partie  sur  les  autres  murail- 
les du  sanctuaire. 

Jésus-Christ  sur  un  trône,  entouré  de  la 
Vierge  et  de  saint  Jean,  ou  d'anges,  ou  de 


divers  personnages,  est  représenté  quatre 
fois  encore. 

Scènes  de  la  vie   de   Jésus  ;  Crucifixion. 

Adoration  des  Mages. 

Les  Evangélistes. 

Scènes  tirées  des  Actes  des  Apôtres. 

David  et  Goliath. 

Isaïe  prédisant  à  Ézéchias  sa  mort. 

La  Madone  sur  un  trône  se  trouve  trois 
fois. 

Sainte  Anne,  avec  l'Enfant. 

Sainte  Anne,  avec  saint  Joseph. 

Sainte  Anne,  sainte  Elisabeth  et  la 
Vierge. 

Sainte  Agnès. 

Sainte  Cécile. 

Saint  Abbaciro. 

Saint  Biaise. 

Saint  Basile. 

Saint  Laurent. 

Saint  Cristoforus. 

Saint  Benoît. 

Saint  Matthieu, 

Saint  Démétrius. 

Saint  Grégoire. 

Saint  Augustin. 

Saint  Paul. 

Saint  André. 

Saint  Jean- Baptiste. 

Saint  Bartholomé. 

Ces  personnages  sont  indiqués  par  des 
inscriptions,  mais  il  en  est  un  grand  nom- 
bre qui  n'ont  pu  être  identifiés. 

Ayant  fait  une  étude  spéciale  du  beau 
sujet  de  \ Annonciation,  je  ne  puis  omettre 
celle  que  j'ai  relevée  à  Santa  Maria  Anti- 
qua. 

La  Vierge  est  assise  sur  un  siège  peint 
en  jaune  et  brun,  garni  d'un  coussin  rond, 
rouge  avec  des  galons  blancs  ;  malheureu- 
sement le  haut  du  corps  n'existe  plus. 

L'ange  Gabriel  est  vêtu  à  l'antique,  en 
blanc  légèrement  bleuté  dans   les   ombres; 


Hes^  fresques  de  Tégltse  t)anta  S^avià  i^nttqua.       309 


il  n'est  pas  ailé,  mais  il  a  un  nimbe  à  fond 
bleu  serti  en  brun.  De  la  main  droite  en 
avant,  il  bénit  à  la  manière  grecque  ;  de  la 
main  gauche,  il  tient  un  long  bâton  appuyé 
sur  son  épaule. 

Il  est  jeune  et   porte   une   barbe   légère. 

Le  fond  de  la  composition  est  uni  ;  dans 
la  partie  supérieure  il  est  d'un  ton  rougeâ- 
tre,  au  bas  il  est  blanc  (').  Une  inscription 
en  lettres  grecques  donne  la  Salutation. 

VI 

J'AI  indiqué  que  sur  la  Via  Nuova,  en 
face  de  l'église  Santa  Maria  Antiqua, 
il  existe  un  autre  sanctuaire. 
Cet  édifice  était  absolument  inconnu  avant 
les  fouilles  actuelles  ;  il  affecte  la  forme 
d'un  parallélogramme  de  douze  mètres  en- 
viron sur  sept  et  demi  ;  sur  le  grand  côté, 
en  face  de  la  porte  d'entrée,  se  trouve  une 
abside  en  conque  d'une  ouverture  de 
quatre  mètres  et  demi  à  peu  près. 

Toutes  les  surfaces,  même  celle  du  mur 
extérieur,  étaient  recouvertes  de  fresques. 
Elles  sont  maintenant  fort  endommagées, 
et  cependant  il  est  possible  encore  de  dis- 
tinguer quelques  compositions. 

On  voit  le  Sauveur  entouré  de  Saints  ; 
des  groupes  de  personnages  ;  les  traces 
d'une  Anjionciation  ;  àes  ornements  figu- 
rant des  draperies  ;  de  grandes  croix  ornées 
de  pendants,  des  agneaux  et  le  paon 
triomphal. 

Mais  la  représentation  essentielle  consis- 
te dans  un  groupe  compact  et  serré  de 
jeunes  hommes  à  moitié  nus,  qui  sont  sous 
la  garde  de  soldats.  Les  inscriptions  sont 
presque    toutes   effacées  ;   quelques    noms 

i.Dans  la  Crucifixion  peinte  par  Fra  Angelico,  dans  la 
salle  du  chapitre  du  couvent  San  Marco  à  Florence,  on 
remarque  de  même  un  fond  en  partie  rouge  et  blanc.  Je 
n'ai  pas  trouvé  d'explication  suffisante  à  cette  disposition. 


cependant  sont  restés,  notamment  celui  de 
Kyricon  en  grec. 

Ce  nom  et  la  scène  représentée  indiquent 
qu'on  est  en  présence  des  quarante  martyrs 
de  Sébaste,  martyrisés  par  ordre  de  Luci- 
nius  Lucinianus,  qui  fut  mis  à  mort  en  324 
par  ordre  de  Constantin,  dont  il  avait  été 
l'associé  à  l'empire  et  ensuite  l'adversaire. 
Les  jeunes  chrétiens,  sommés  de  renoncer 
à  leur  foi,  avaient  été  submergés  dans  un 
étang  glacé  ;  à  côté  se  trouvaient  des  bains 
chauds  pour  ceux  qui  reviendraient  au 
paganisme;  ils  refusèrent  et  succombèrent; 
peu  après  leur  mort  ils  devinrent  très  popu- 
laires. 

VIT 

J'AI  donné  tant  bien  que  mal —  beau- 
coup plus  mal  que  bien  —  une  idée 
approximative  de  la  décoration  à  fres- 
que des  deux  sanctuaires. 

Il  resterait  beaucoup  à  dire. 

En  ce  qui  concerne  l'iconographie,  mon 
incompétence  m'interdit  de  l'aborder  ;  je 
n'ai  du  reste  remarqué  que  peu  de  détails 
qui  ne  se  trouvent  pas  ailleurs  dans  les 
monuments  antérieurs. 

Pour  les  inscriptions  je  suis  au  même 
point.  J'ai  observé,  comme  tout  le  monde, 
que  le  pape  Jean  VII  (705-708)  est  quali- 
fié à'episcopus,  tandis  que  le  pape  S.  Zacha- 
rie,  qui  a  occupé  la  chaire  de  saint  Pierre 
trente-trois  ans  plus  tard,  porte,  à  côté  de 
son  effigie,  le  titre  Papa. 

Les  procédés  de  peinture  m'ont  occupé 
davantage  ;  ils  sont  intéressants  à  étu- 
dier. 

Rappelons  que,  soit  par  le  Liber  Pontifi- 
calis,  soit  par  les  effigies  et  les  inscriptions, 
nous  savons  que  Jean  VII  (705-70S),  saint 
Zacharie (741-752),  et  saint  Paul  I^""  (757- 
767),  ont  fait  exécuter  des  fresques  à  Santa 
Maria  Antiqua. 


,IO 


9Rc\)ue  lie  V^xt  t\)xttmh 


Au  siècle  suivant,  saint  Léon  IV  (847- 
855)  et  saint  Nicolas  I^''  {858-867),  ont 
ordonné  des  réparations,  mais  on  ignore 
de  quelle  nature  elles  étaient  ;  il  est  pro- 
bable cependant  qu'elles  s'appliquaient  en 
partie  aux  fresques. 

En  effet,  avec  un  peu  d'attention  on 
remarque  que  dans  quelques  groupes,  il  y 
a  des  figures  peintes  sur  un  enduit  visible- 
ment mis  à  la  place  d'une  couche  précé- 
demment appliquée  et  que  l'humidité  avait 
fait  tomber. 

Ailleurs  ce  sont  des  motifs  complets  qui 
ont  été  refaits  :  la  scène,  par  exemple,  de 
V Annonciation  a  été  tout  entière  peinte 
à  la  place  d'une  fresque  antérieure. 

Mais,  dans  ces  reprises,  je  n'ai  pas  trouvé 
de  différences  notables  entre  les  procédés 
du  Ville  siècle  et  ceux  qui  ont  pu  être 
suivis  au  IX^. 

On  observe  avant  tout  l'harmonie  des  co- 
lorations entre  elles,  non  seulement  dans  un 
même  sujet,  mais  dans  une  suite  de  sujets 
décorant  un  pan  de  mur  ou  une  chapelle. 

Dans  chaque  localité,  qu'elle  soit  peinte 
dans  une  gamme  relativement  douce  ou 
dans  une  note  plus  accentuée,  l'ensemble 
est  à  une  même  hauteur  de  tons  ;  point  de 
heurts,  ni  d'éclats,  tout  se  tient  harmonieu- 
sement. 

La  remarque  m'a  paru  nécessaire,  car, 
jusqu'à  présent,  on  a  généralement  admis 
que  du  VI^  siècle  au  XIII'  et  même  au 
XIV<^,  les  décorations  murales  étaient  pri- 
vées de  cette  qualité  essentielle,  l'harmonie 
dans  les  colorations. 

A  Santa  Maria  Antiqua,  la  teinte  plate, 
c'est-à-dire  l'emploi  des  couleurs  sans  mo- 
delé n'existe  qu'exceptionnellement. 

Dans  les  étoffes  des  soubassements,  les 
plis  vont  de  l'obscur  au  clair,  par  tons 
dégradés    et     fondus  ;  quelquefois    cepen- 


dant, ils  sont  marqués  par  un  simple  trait 
noir  ('). 

Les  modelés  dans  les  carnations  s'affir- 
ment d'une  façon  très  particulière. 

Dans  un  assez  grand  nombre  de  têtes, 
on  remarque  que  les  pommettes  des  joues 
sont  très  saillantes  et  colorées  en  rouge  ; 
pour  les  rattacher  au  ton  du  visage,  le  pein- 
tre a  usé  de  trois  etmême  de  quatre  couleurs 
de  passage  se  fondant  l'une  dans  l'autre. 

J'ai  observé  avec  grand  intérêt  les  pro- 
cédés de  peinture  suivis  dans  les  chevelures, 
et  ce  n'est  pas  sans  surprise  que  j'ai  trouvé 
à  Santa  Maria  Antiqua  une  pratique  que 
j'avais  remarquée,  notamment,  dans  la  che- 
velure du  Christ  de  la  mosaïque  du  XIII«= 
siècle  à  Saint-Jean  de  Latran. 

Une  bonne  fortune  m'avait  conduit  à 
Rome  au  moment  où  on  réparait  cette 
mosaïque  ;  j'avais  obtenu  l'autorisation  de 
monter  sur  l'échafaudage  et  ainsi  j'ai  pu 
examiner  de  près  une  technique  impossible 
à  saisir  d'en  bas. 

Pour  donner  à  la  longue  chevelure  noire 
du  Sauveur  l'apparence  fluide  des  cheveux 
vivants,  le  mosaïste  ne  s'est  pas  contenté 
d'émaux  noirs  à  des  degrés  d'intensité  diffé- 
rents; il  a  intercalé  dans  les  mèches  noires, 
d'étroites  mèches  bleues,  rouges  et  brunes. 
De  près  ces  mèches  sont  très  distinctes  ; 
à  distance  elles  disparaissent  et  forment  une 
masse  noire,  transparente  et  fluide;  ce  résul- 
tat n'aurait  pas  été  obtenu  avec  une  couleur 
homogène. 

Dans  cette  ingénieuse  pratique  le  mosaïs- 
te de  Saint-Jean  a  été  devancé,  de  cinq 
siècles,  par  plusieurs  des  peintres  de  Santa 
Maria  Antiqua.  Il  y  a  là  des  chevelures 
obtenues  par  différentes  couleurs  agglomé- 
rées,   mais  non   intimement  mélangées  ;  la 


I.  Ce  simple  trait  s'observe  dans  les  mosaïques,  no- 
tamment de  la  chapelle  Saint-Zénon  du  l.X'^  siècle,  à 
Sainte- Praxède  .'i   Rome, 


iLes  fresques  tie  régltse  é>anta  £©ana  :^nttqua. 


3 


I  I 


brosse  devait  être  courte  et  dure  et  maniée 
en  pleine  pâte. 

Je  me  suis  assuré  que  ces  chevelures 
n'ont  pas  été  retouchées  ;  elles  ont  été  faites 
du  premier  coup  en  vraie  fresque,  c'est-à- 
dire  sur  enduit  humide. 

Toutes  les  fresques  n'ont  pas  été  traitées 
avec  cette  habileté  au  moins  égale  à 
celle  du  XIV^  siècle  ;  il  en  est  qui  sont 
moins  souples. 

Dans  l'histoire  de  Joseph,  par  exemple, 
les  contours  des  figures  sont  arrêtés  par  un 
serti  qui  devait  être  trop  accentué,  même 
lorsque  les  colorations,  très  affaiblies  main- 
tenant, étaient  dans  leur  premier  état. 
L'exagération  du  serti  se  remarque  du 
reste  encore  dans  certains  ouvrages  de 
Giotto  au  XIV^  siècle. 

Ces  inégalités  sont  inévitables;  une  déco- 
ration aussi  complète  a  été  nécessairement 
exécutée  par  plusieurs  peintres,  qui  ont 
travaillé  les  uns  simultanément,  les  autres 
successivement. 

L'état  de  conservation  des  couleurs  de 
plusieurs  fresques,  surtout  de  celles  de  la 
chapelle  de  la  Crucifixion,  est  vraiment  sur- 
prenant et  témoigne  de  l'excellence  de  la 
peinture  à  fresque,  lorsque  le  peintre  sait  en 
faire  valoir  les  qualités  expressives. 

Il  y  a  dans  cette  chapelle,  peinte  de 
741  à  752  et  non  retouchée,  des  peintures 
d'une  fraîcheur  dont  nombre  de  fresques  du 
XVe  siècle  sont  privées  ;  par  une  fortune 
singulière,  elles  n'ont  pas  été  envahies  par 
cette  humidité  permanente  qui  a  affaibli  les 
colorations  dans  d'autres  parties  de  l'édifice. 
C'est  une  joie  pour  le  regard  de  con- 
templer cette  décoration  vieille  de  plus  de 
onze  siècles,  et  dont  l'aspect  est  resté  tel 
qu'à  son  origine. 

J'ai  pu  constater  sur  divers  points  des 
couleurs  à  tempera,  c'est-à-dire  à  la  colle  ou 
à  l'œuf,  posées  sur  l'enduit  sec  ;  toutefois  il 


m'asembléque  ce  ne  fut  pas  comme  retouche, 
mais  en  suite  d'une  nécessité  technique  ; 
toutes  les  couleurs,  le  bleu-clair  surtout,  et 
quelques  bruns  ne  s'obtiennent  pas  à  btion 
fresco,  c'est-à-dire  à  l'eau  simple. 

C'est  la  première  fois  que  j'ai  reconnu  la 
tempera  à  une  époque  aussi  reculée,  ce  qui 
ne  veut  pas  dire  qu'elle  n'ait  pas  été  em- 
ployée ailleurs  et  avant  le  VI  IL  siècle, 
mais  je  n'ai  pas  eu  l'occasion  de  vérifier 
partout  où  je  l'aurais  voulu. 

A  Santa  Maria  Antiqua,  la  tempera  a 
servi  à  peu  près  dans  les  mêmes  conditions 
que  dans  les  fresques,  récemment  débar- 
rassées du  badigeon  qui  les  recouvrait  à 
Santa  Croce  de  Florence  et  qui,  à  mon 
avis,  ont  été  peintes  par  Taddeo  Gaddi, 
vers  1340. 

J'estime  qu'il  faut  apprécier  une  époque 
ou  un  artiste,  non  point  en  faisant  une 
moyenne  des  qualités,  mais  par  le  point 
culminant  qui  a  été  atteint. 

Ainsi  jugée  et  en  prenant  la  chapelle  de 
la  Crucifixion,  je  conclus  qu'en  ce  qui  tient 
à  l'emploi  des  couleurs  a  bîiott  fresco  et  au 
choix  des  colorations  en  vue  de  l'harmonie 
générale,  la  fresque  au  VI IL  siècle  était 
aussi  avancée  qu'au  XIV^  siècle,  sauf  pour 
la  diversité  des  couleurs  ;  mais  la  richesse 
de  la  palette  n'est  pas  un  indice  de  supé- 
riorité, et  je  suis  de  ceux  qui  pensent  qu'en 
décoration,  elle  est  plus  nuisible  qu'utile. 

L'enduit,  il  est  vrai,  a  généralement 
ma!  résisté  à  Santa  Maria  Antiqua  ;  cela 
tient  peut-être  à  sa  composition,  mais  de 
pareils  accidents  sont  arrivés  à  toutes  les 
époques  pour  la  même  raison.  La  cause 
essentielle  de  la  chute  de  l'enduit  vient  de 
l'humidité;  le  Forum  a  toujours  été  humide, 
comme  le  prouvent  les  égouts  déjà  connus 
et  ceux  qu'on  vient  de  découvrir  récemment. 
Notre  église  était  particulièrement  exposée 
à  l'humidité,  étant  en  contre-bas  du  Palatin. 


312 


3Êlebue  lie  V^xt  (l)iétien. 


vni 


LA  malheureuse  Italieétaitaccabléesous 
un  déluge  de  calamités  qui  avait 
anéanti  ses  édifices  et  ses  artistes,  nous  dit 
Vasari,  «  quando,  come  Dio  voile  nacque 
«  nella  città  di  Fiorenza,  l'anno  1240,  per 
«  dar  i  primi  lumi  all'arte  délia  pittura, 
«  Giovanni  cognomianato  Cimabue  ». 

Les  cris  de  douleur  et  de  joie  de  Vasari 
étaient  sincères  ;  l'écho  s'en  est  prolongé 
jusqu'à  nos  jours. 

Sauf  de  très  rares  exceptions,  les  auteurs 
ont  répété  à  l'envi  :  que  du  VP  au  XIII'' 
siècle  l'art  de  la  peinture  était  tombé  en 
Italie  au  dernier  degré  de  la  décadence  et 
de  la  barbarie  ;  que  l'influence  grecque  était 
devenue  alors  souveraine  non  seulement 
par  les  procédés  techniques  mais  dans  le 
style  ;  que  l'Église  étouffait  les  artistes 
indigènes  en  les  enfermant  dans  d'étroites 
formules  d'expression  et  dans  une  exécution 
dont  la  richesse  était  l'essentiel. 

Les  auteurs  ont  manqué  de  prudence  et 
se  sont  beaucoup  trop  inspirés  les  uns  des 
autres. 

Il  eût  été  plus  sage  d'être  moins  affir- 
matif,  de  faire  quelques  réserves  et  d'ad- 
mettre la  possibilité  des  découvertes  nou- 
velles. 

Quelques  érudits  sont  restés  persuadés, 
cependant  que  de  l'admirable  et  bien  latine 
mosaïque  du  V^  siècle  de  l'église  Sainte- 
Pudentienne  de  Rome,  aux  peintures  de 
Cimabue,  Giotto,  Duccio,  l'esprit  latin  a 
persisté  malgré  les  calamités,  les  Grecs  et 
les  aberrations  dont  les  mosaïques  donnent 
tant  d'exemples. 

Et  ils  ont  eu  raison. 

Quelques  anneaux  de  la  chaîne  du  V^au 
XI 11=  avaient  déjà  été  signalés  dans  les 
fresques  de  l'Italie  méridionale. 


L'une  des  plus  importantes  manifes- 
tations de  la  persistance  de  l'esprit  latin  est 
visible  dans  les  peintures  trop  peu  étudiées 
de  l'église  Sant'-Angelo  in  Formis,  près  de 
Capoue.  Didier,  abbé  du  Mont-Cassin,  avait 
confié  en  1073  à  des  peintres  grecs  la 
décoration  de  ce  sanctuaire  ;  ces  artistes, 
car  c'étaient  des  artistes  et  non  des  imbrat- 
/a//«rz  (barbouilleurs),  ont  fait  là  une  œuvre 
absolument  latine  de  style  et  de  sentiment. 

On  a  beaucoup  trop  tablé  sur  le  texte  de 
la  décision  du  Concile  de  Nicéede  787,011 
il  est  dit  que  «la  disposition  des  images  n'est 
«  pas  de  l'invention  des  peintres  ;  que  c'est 
«  une  législation  et  une  tradition  approu- 
«vée  par  l'Église  catholique.  Et  cette  tra- 
«  dition  ne  vient  pas  du  peintre  car  la 
«  pratique  seule  est  son  affaire,  mais  de 
«  l'ordre  et  de  l'intention  des  saints  Pères 
«qui  l'ont  établie». 

Le  concile  a  été  très  sage  dans  cette  dé- 
cision ;  il  a  simplement  recommandé  aux 
peintres  de  suivre,  dans  la  représentation 
des  figures,  une  iconographie  traditionnelle 
et  de  composer  leurs  scènes  d'après  un 
programme  arrêté  par  l'Église. 

Il  n'y  a  rien  là  de  spécial  au  VI I  P  siècle  ; 
les  artistes  ne  sont  pas  tenus  d'être  des  sa- 
vants et,  de  notre  temps  encore,  nous  trou- 
vons des  exemples  de  programmes  de  déco- 
ration arrêtés  par  les  érudits  et  suivis  par 
les  artistes  ('). 

Je  reviens  à  Santa  iVIaria  Antiqua. 

Les  partisans  de  l'inlluence  grecque  vou- 
dront certainement  la  trouver  dans  quel- 
ques peintures,  notamment  dans  la  grande 
frise  du  presbytérium  dont  j'ai  indiqué  le 
sujet:  au  centre,  Jésus-Christ, est  assis  sur  un 
trône  ;  sur  ses  côtés,  en  deux  groupes  sy- 


I.  La  façade  du  dôme  de  .Sainte-Marie  de  la  Fleur, 
inaugurée  en  1887,  a  été  exécutée  d'après  un  programme 
arrêté,  pour  les  statues  et  les  mosaïques,  par  le  professeur 
Auguste  Conti. 


3lt0  fresques  îie  régltse  ^anta  ^aria  ;3lntiqua. 


313 


métriques,  les  saints  se  tiennent  debout  et 
immobiles. 

La  disposition  des  personnages  alignés 
en  parade  autour  du  Maître  n'est  pas  essen- 
tiellement du  style  byzantin  ;  elle  est  com- 
mandée d'abord  par  la  division  de  l'espace 
qui  n'accorde  au  peintre  qu'une  zone  allon- 
gée et  relativement  étroite,  puis  par  le 
sujet  même.  On  ne  comprendrait  pas  des 
assistants  en  mouvement  et  distraits  au  mo- 
ment solennel  où  Jésus-Christ  lève  la  main 
pour  les  bénir.  Du  reste,  ni  dans  la  noble 
figure  du  Sauveur,  ni  dans  celles  des 
évêques,  on  ne  relève  les  contours  secs,  les 
formes  maigres,  l'absence  de  vie,  qui  carac- 
térisent le  style  byzantin. 

Je  ne  puis  décrire  ici  toutes  les  scènes 
où  les  figures,  loin  de  rester  figées,  sont 
dans  un  mouvement  parfois  très  accentué  ; 
dans  l'histoire  de  Joseph  et  le  martyre 
de  Giulitta,  l'action  est  menée  avec  entrain 
et  vivacité,  comme  les  sujets  le  comportent. 

Pour  l'expression  des  sentiments  deux 
fresques  m'ont  particulièrement  ému. 

Dans  la  chapelle  de  la  Crucifixion  le 
Sauveur  en  croix  est  mourant  ;  la  tête,  lé- 
gèrement penchée,  ne  porte  pas  l'effroi  de 
la  mort  ;  les  yeux  ouverts  ont  une  expression 
de  tristesse,  mais  non  d'angoisse  ;  toute  la 
physionomie  est  empreinte  d'une  douleur 
résignée. 

L'atmosphère  est  en  accord  :  les  disques 
du  soleil  et  de  la  lune  se  distinguent,  mais 
leurs  lumières  sont  affaiblies  et  sur  le  point 
de  s'éteindre. 

La  Madone  est  debout  au  pied  de  la 
croix  ;  elle  tient  les  mains  jointes  sous 
un  long  vêtement  de  deuil  ;  son  visage 
marque  une  tristesse  profonde,  concentrée  ; 
tout    en    elle,   attitude    et    jusqu'aux    plis 


de  sa    robe,   dénote    son    état    d'âme    ('). 

Les  deux  figures  sont  en  tous  points 
dignes  de  Giotto;  je  trouve  même  que  pour 
l'expression  de  la  douleur  elles  se  rappro- 
chent beaucoup  de  Fra  Angelico. 

Dans  V Annonciation  on  ne  peut  juger  la 
Vierge,  l'enduit  où  était  peint  le  haut  du 
corps  étant  tombé,  mais  l'ange  Gabriel  est 
là  pour  montrer  combien  le  peintre  a  bien 
compris  la  scène.  Le  divin  messager  vient 
de  s'arrêter,  il  s'incline  respectueusement 
devant  la  Vierge,  et  avant  de  lui  faire  part 
de  son  message,  il  allonge  le  bras  et  la  bénit. 
La  physionomie  est  jeune  et  sérieuse,  on 
sent  que  l'ange  a  la  conscience  de  son 
mandat.  Les  mouvements  sont  très  justes 
et  souples  et  les  draperies  bien  adaptées 
aux  mouvements. 

Dans  mes  recherches  sur  les  Annoncia- 
tions  peintes  en  Italie  depuis  les  catacom- 
bes jusqu'au  XVI L  siècle,  cette  figure 
compte  parmi  les  meilleures. 

Je  termine  mon  récit;  il  a  été  rapide- 
ment écrit  ;  il  est  décousu  et  incomplet, 
j'aurai  sûrement  l'occasion  de  le  reprendre, 
mais,  tout  en  étant  fort  imparfait,  il  donne 
du  moins  assez  exactement  l'impression  que 
j'ai  ressentie  à  la  vue  des  fresques  de 
Santa  Maria  Antiqua. 

Cette  découverte  restera  mémorable. 

Elle  montre  qu'à  l'époque  où  l'art  parais- 
sait anéanti,  il  y  avait  en  Italie  des  peintres 
indigènes  soucieux  de  la  vérité  et  animés 
d'un  profond  sentiment  chrétien. 

C'est  une  page  nouvelle  et  de  grand  in- 
térêt à  ajouter  à  l'histoire  de   la    peinture. 

(Rome-Florence,  1901.)  GeRSPACH. 


I.  Des  reproductions  eussent  été  infiniment  plus  pro- 
bantes que  tout  ce  que  je  puis  dire  ;  si  plus  tard  je  puis 
m'en  procurer,  je  ne  manquerai   pas  de  les  donner. 


REVUE  DE  l'art  CHRÉTIEN 
igoi.  —  4""=   LIVRAISON. 


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ï)c  la  ïlcstauration  Des  ffîonumcnts 
en  Belgique  et  ailleurs. 


N  France,  grand  pays,  riche  en  motni- 
ments  de  premier  ordre,  de  style,  de 
matériaux,  d'époques  et  d'écoles  très 
variés,  leur  restauration  se  centralise 
entre  les  mains  de  quelques  architectes  célèbres, 
vivant  à  Paris,  agissant  souvent  par  des  sous- 
ordres,  et  dirigeant  de  haut  et  de  loin.  Pendant 
longtemps  c'est  à  Viollet-le-Duc  qu'incomba  non 
seulement  la  surveillance,  mais  même  la  direction 
effective  des  traveaux  à  un  très  grand  nombre 
d'églises  et  de  monuments  diocésains. 

Malgré  sa  prodigieuse  science  d'archéologue 
et  son  talent  de  dessinateur,  il  ne  pouvait  suffire 
à  une  tâche  aussi  complexe,  aussi  étendue.  Le 
temps  lui  manquait  pour  étudier  avec  la  maturité 
voulue,  les  édifices  à  restaurer  :  si  ses  théories 
souvent  sont  excellentes,  en  pratique  ses  travaux 
ont  soulevé  des  objections  fondées  et  même  les 
critiques  les  plus  vives.  En  réalité,  surtout  vers  la 
fin  de  sa  carrière,  il  se  mettait  trop  à  l'aise  avec 
les  monuments  dont  la  restauration  lui  était  con- 
fiée. M.  Anthyme  Saint-Paul,  dans  un  livre  dont 
on  ne  saurait  trop  recommander  la  lecture  ('),  fit 
ressortir  avec  infiniment  d'autorité  et  de  science, 
s'appuyant  sur  des  documents  irréfragables,  ce 
qu'il  y  avait  d'erroné  dans  ses  déductions  histo- 
riques et  notamment  d'inexact  dans  l'étrange 
assertion  qui  attribue  exclusivement  à  des 
architectes  laïques  les  magnifiques  cathédrales 
françaises  et  le  grand  essor  de  l'architecture  dont 
elles  sont  la  riche  floraison.  D'autres  archéo- 
logues s'attaquèrent  aux  restaurations  dirigées 
par  Viollet-le-Duc.  Les  critiques  s'élèvent  parfois, 
avec  une  âpreté  très  grande,  appuyées,  il  faut 
en  convenir,  sur  des  arguments  solides.  Parmi  les 
archéologues  français  qui  se  prononcèrent  avec  le 
plus  d'énergie  contre  les  restaurations  de  Viollet- 
le-Duc,   il  convient  de  citer,  en  première  ligne, 

1.  Viollet-le-Duc,  ses  travaux  et  son  système  archiologique.  Paris, 
.i88i.  Bureaux  de  V Année  archiologique. 


Raymond  ]îordeaux,  et  ce  n'était  pas  là  un 
adversaire  à  dédaigner.  Ses  critiques  égalèrent 
plus  d'une  fois  en  véhémence  celles  que  M. 
Fierens-Gevaert  dirige  contre  les  restaurations 
qui  se  font  en  Belgique.  Mais  Raymond  Bordeaux 
était  un  homme  qui  connaissait  la  matière  dont 
il  écrivait  ;  il  avait  publié  plusieurs  ouvrages 
dont  l'un  est  particulièrement  recommandabie  ('), 
il  était  bon  dessinateur  et  connaissait  les  monu- 
ments de  son  pays,  au  rebours  de  l'auteur  belge 
qui  les  a  étudiés  «  pendant  cinq  semaines  ». 

En  Belgique,  le  système  de  centralisation  de 
la  restauration  des  grands  monuments  du  pays, 
entre  les  mains  de  quelques  architectes  réputés, 
n'est  heureusement  pas  possible.  Chaque  localité, 
petite  ou  grande,  aime  ses  monuments,  et  porte 
une  affection  particulière  à  son  église.  Et  ceci 
est  dans  l'ordre  des  choses,  puisque  bonne  partie 
de  la  population  y  passe  ses  meilleures  heures, 
notamment  les  dimanches  et  jours  de  fête.  Si  ces 
populations  n'ont  pas  toujours  l'intelligence  de 
la  beauté  de  ces  monuments,  elles  en  ont  du 
moins  l'instinct,  le  sentiment  ;  elles  en  ont  assuré- 
ment l'amour.  Elles  n'admettraient  guère  que  leur 
église  à  restaurer  appartînt  à  l'architecte  envoyé 
par  le  Gouvernement,  comme  le  malade  appar- 
tient au  médecin.  L'architecte  n'est  jamais  nom- 
mé par  le  Gouvernement  ;  et  le  règlement  de  la 
Commission  roj'ale  des  Monuments  lui  interdit 
formellement  d'intervenir  à  cet  égard.  Ce  sont 
les  Conseils  de  fabrique  qui  choisissent  librement 
l'artiste  auquel  ils  jugent  à  propos  d'accorder 
leur  confiance.  Il  appartient  à  la  Commission 
des  Monuments  de  contrôler  son  travail.  En 
Belgique,  il  existe  d'ailleurs  un  autre  élément 
dont,  toutes  les  fois  qu'il  s'agit  des  édifices  du 
culte,  il  convient  de  tenir  compte.  C'est  le  clergé 
diocésain  et  paroissial.  Aujourd'hui,  la  plupart 
des  évcchés  ont  des  comités  diocésains,  composés 
de  prêtres  et  de  laïcs,  qui,  avant  les  commissions 
gouvernementales,  examinent  les  plans  de  con- 
struction   des    édifices    du    culte,    ou    ceux    de 

I,  Traité  de  la  réparation  des  églises  et  des  principes  darchéologit' 
pratique.    Evreux,  1862.  Ce  livre  a  eu  plusieurs  éditions. 


£@élange0. 


315 


restauration.  Ces  comités  rédigent  un  rapport 
sur  le  travail  proposé,  lequel,  généralement,  est 
transmis  aux  commissions  officielles,  dont  très 
souvent  il  facilite  la  mission.  Très  rarement 
ces  différents  examens,  faits  à  des  points  de  vue 
différents,  donnent  lieu  à  des  conflits. 


Mais  ce  n'est  pas  seulement  par  l'action  des 
Comités  diocésains  qu'en  Belgique  le  Clergé 
exerce  une  influence  directe  dans  la  construction, 
l'entretien  et  le  décor  des  églises.  Presque  chaque 
curé,  chaque  desservant,  a  l'amour,  on  pourrait 
dire  parfois,  la  passion  de  son  église.  Il  la 
regarde  un  peu  comme  son  domaine,  et  non 
sans  raison.  En  France,  il  n'en  est  pas  de  même. 
Je  me  souviens  que,  visitant  un  jour,  accom- 
pagné par  le  secrétaire  de  l'évêché,  une  des 
majestueuses  cathédrales  de  l'Est  de  la  France, 
je  fis  quelques  observations  sur  une  partie 
nouvellement  restaurée  qui  ne  me  semblait  pas 
à  l'abri  de  sérieuses  objections.  Mon  conducteur 
admit  très  facilement  le  bien  fondé  de  celles 
que  je  venais  de  formuler,  en  ajoutant  que  tout 
dans  ce  magnifique  édifice  se  faisait  sous  la 
direction  immédiate  de  la  Commission  des  mo- 
numents historiques.  Nous,  ajouta-t-il,  membres 
du  Clergé  diocésain,  nous  ne  pourrions  mettre 
un  clou  dans  la  cathédrale.  Je  n'ai  pas  à 
examiner  ici  si  la  conservation  des  monuments 
religieux  s'en  trouve  mieux  ;  mais  je  doute  fort 
que  l'exercice  du  culte  et  l'action  du  clergé  sur 
les  populations  y  gagnent.  En  Belgique,  le  Gou- 
vernement ne  pourrait  ainsi  exproprier  le  prêtre 
du  temple  pour  cause  d'utilité  monumentale.  En 
fait,  le  clergé  intervient  souvent  pour  une  large 
part  par  les  ressources  qu'il  saitobtenir  desfidèles, 
par  ses  propres  sacrifices,  si  cela  lui  est  possible, 
à  la  construction,  à  l'entretien,  à  l'ornement  des 
églises  nouvelles  et  anciennes.  Je  n'oserai  pré- 
tendre que  cela  se  fasse  en  toutes  circonstances 
avec  tout  le  discernement  et  les  connaissances 
archéologiques  désirables.  Mais  enfin,  le  sen- 
timent qui  anime  à  cet  égard  les  prêtres  est  une 
piété  pleine  de  zèle  et  rarement  ils  peuvent  agir 
sans  contrôle.  D'ailleurs,  il  existe  à  Louvain  un 
bon  enseignement  archéologique,  et  plusieurs 
séminaires  épiscopaux  ont  organisé  des  cours  de 


même   nature,  qui  ont  déjà  produit  des  résultats 
appréciables. 


On  sait  d'ailleurs  qu'il  existe  dans  ce  pays, même 
en  dehors  des  administrations  gouvernementales, 
dans  chaque  province, des  Sociétés  archéologiques 
qui  font  des  monuments  de  leur  région  une 
étude  assez  approfondie  pour  qu'il  ne  soit  pas 
possible  de  les  abandonner  ou  d'y  porter  atteinte 
par  des  restaurations  maladroites,  sans  soulever 
des  réclamations  qui  trouveraient  de  l'écho  dans 
toute  la  presse. 

Ces  monuments  avaient  donc  quelque  chance 
de  rester  debout,  et  d'échapper  à  d'épouvantables 
mutilations,  même  sans  l'étude  de  plusieurs 
semaines  que  M.  F.-G.  a  bien  voulu  leur  con- 
sacrer, et  les  remarquables  articles  publiés  par 
la  Gai;ette  des  arts  et  de  la  curiosité'. 

Nos  lecteurs  connaissent  déjà  la  valeur  de  ces 
invectives  ;  vitupérer  est  plus  aisé  que  de  raison- 
ner ;  et  souvent  la  véhémence  des  -épithètes  est 
destinée  à  masquer  l'indigence  extrême  de  la  cri- 
tique. Après  avoir  démontré  ce  que  vaut  la 
science  archéologique  de  M.  F.-G.,  nos  lecteurs 
nous  en  voudraient  de  le  prendre  au  sérieux. 
Nous  avons  vu  qu'il  perd  de  vue  non  seulement 
ce  qui  s'est  fait  pour  la  conservation  des  monu- 
ments de  l'antiquité  classique,  mais  il  semble 
même  ignorer  ce  qui,  pour  les  édifices  du  moyen 
âge,  se  fait  en  Allemagne,  en  Angleterre  et  en 
France  même. 

En  Belgique,  la  plupart  de  ses  chefs  d'accusa. 
tion  portent  sur  l'école  de  St-Luc.  Il  confond  les 
travaux  des  élèves  de  celle-ci  avec  ceux  d'artistes 
qui  n'ont  rien  de  commun  avec  elle,  et  qui  même 
sont  considérés  comme  leurs  antagonistes  dé- 
clarés. Il  en  est  de  même  pour  la  peinture  ;  à 
l'abbaye  de  Maredsous,  les  peintres  de  l'école  de 
Beuron  sont  encore  mis  sur  le  même  pied  que 
ceux  de  St-Luc.  Nous  avons  affaire  à  un  critique 
qui  n'a  pas  appris  à  voir  et  qui  ne  prend  pas  le 
temps  de  regarder. 

Nous  ne  le  suivrons  donc  pas  dans  l'intéres- 
sante excursion  dont  les  lecteurs  de  la  Chronique 
des  arts  ont  eu  la  relation,  mais  nous  examinerons 
encore  quelques-uns  des  points  particulièrement 
lumineux    de    ses    études.    Généralement,   nous 


l'avons  vu,  c'est  la  critique  et  la  critique  de 
principe  qui  déborde  de  l'âme  sensible  du  voya- 
geur. Les  restaurations  multiples  qu'il  voit  par- 
tout compromettent,  à  l'en  croire,  le  patrimoine 
artistique  du  pays  ! 


M.  F.-G.  s'est  arrêté  quelque  temps  à  St- 
Trond. 

Dans  son  examen  des  monuments  de  cette  ville, 
il  s'abandonne  à  un  mouvement  d'enthousiasme 
que  je  suis  heureux  de  signaler,  mais  dont  il  est 
permis  de  s'égayer. 

L'admiration  qu'il  éprouve  en  présence  de  la 
petite  église  de  St-Pierre  fait  plus  honneur  à 
son  goût,  en  effet,  qu'à  sa  perspicacité  archéolo- 
gique, et  surtout  à  la  fixité  de  ses  principes  en 
matière  de  restauration.  Dans  «  l'exquise  église 
romane  de  St-Pierre,  faubourg  de  St-Trond 
(une  adorable  merveille  qui  mérite  d'être  célèbre, 
et  qui  le  sera  un  jour)  — c'est  M.  F.-G.  qui  parle 
—  on  a  placé  devant  le  chœur  une  chaire  ou 
ambon  en  marbre  blanchâtre...  qui  produit  l'ef- 
fet d'une  véritable  incongruité.  » 

Laissons  «  l'incongruité  »  et  arrêtons-nous  un 
instant  à  «  l'adorable  merveille  ». 

J'ai  vu  l'église  de  St-Pierre,  qui  est  effec- 
tivement un  monument  fort  intéressant,  dans 
un  état  d'abandon  complet.  Devenue  propriété 
particulière,  elle  ne  servait  plus  guère  au  culte 
et  semblait  abandonnée  à  une  ruine  immi- 
nente ;  mais  c'était  une  ruine  poétique,  comme 
M.  Fierens-Gevaert  les  aime,  avec  des  mousses 
et  des  plantes  pariétaires  sur  les  murs,  et  à 
l'intérieur  d'intéressantes  peintures  murales  fort 
oblitérées  ;  dans  la  nef,  on  voyait  encore  des 
médaillons  représentant  les  Vierges  sages  et  les 
Vierges  folles  —  à  l'extérieur,  des  détails  de 
sculpture  décorative  finement  fouillés... 

L'église  était  dans  cet  état  lorsque  son  pro- 
priétaire jugea  opportun  d'en  faire  don  au 
Conseil  de  fabrique  de  l'église  Xotre-Dame, 
dont  le  desservant  était  heureusement  alors  un 
prêtre  distingué,  M.  le  Doyen  Cartuyvels,  qui 
sans  retard  s'occupa  de  sauver  l'église  romane 
en  ruine  ;  après  avoir  accepté  ce  cadeau  embar- 
rassant et  surtout  dispendieux,  il  s'adressa  au 
Gouvernement  pour  obtenir  les  subsides  impor- 


tants, mais  indispensables  à  la  réfection  générale, 
devenue  urgente.  Une  allocation  proportionnée 
aux  dépenses  à  faire  fut  consentie;  et  M.  l'archi- 
tecte Van  Assche,  depuis  membre  de  la  Com- 
mission royale  des  monuments,  fut  chargé  des 
travaux  de  restauration,  entrepris  sans  retard. 

Ah  !  si  M.  Fierens-Gevaert  était  survenu  au 
moment  où  l'on  dressait  les  premiers  échafau- 
dages, quelle  belle  occasion  de  pousser  des  cris 
et  des  protestations  !  car  nous  savons  combien  il 
est  insensé  de  restaurer  des  ruines  ! 

Cette  restauration  cependant  fut  faite  ;  c'est 
grâce  à  elle  que  M.  F.-G.  a  pu  admirer  une  «  ado- 
rable merveille  »  à  laquelle  il  promet  une  célé- 
brité, que  sans  doute  l'église  devra  en  bonne 
partie  aux  articles  retentissants  de  la  Chronique 
de   la   curiosité. 

On  pourrait  peut-être  signaler  dans  la  restau- 
ration plus  d'un  détail  incorrect  de  la  sculpture 
récente,  mais  puisque  cela  a  passé  comme  tra- 
vail original,  nous  ne  troublerons  pas  M.  F.-G. 
dans  son  admiration. 

Mais  à  St-Trond,  cela  va  de  soi,  il  n'y  a  pas 
seulement  à  admirer. 

Tous  ceux  qui  connaissent  les  monuments  de 
cette  ville  depuis  un  certain  nombre  d'années, 
savent  combien  l'église  de  St-Martin  était  insi- 
gnifiante ;  c'était  une  construction  sans  style,  aux 
murs  salpêtres,  n'offrant  plus  de  solidité  et  qu'il 
fallait  bien  démolir  ;  on  a  eu  soin  cependant  de 
conserver  la  façade  et  la  tour,  assez  intéressante 
et  d'un  aspect  original. 

Cela  n'empêche  pas  M.  F.-G.  de  s'écrier  :  C'est 
à  la  ville  de  St-Trond  que  revient  la  palme  : 
l'église  de  St-Martin  a  été  tout  simplement  dé- 
truite, on  a  reconstruit  une  nouvelle  église 
romane  à  sa  place  ! 

St-Trond,  cité  ancienne  presque  rurale  et  qui 
contient,  nous  l'avons  dit,  plusieurs  édifices  histo- 
riques, a  eu  une  bonne  part  de  l'étude  de  cinq 
semaines  que  M.  F.-G.  a  consacrée  aux  monu- 
ments de  son  pays. 

Naturellement,  il  y  a,  comme  partout,  constaté 
douloureusement  l'influence  néfaste  de  l'école  de 
St-Luc.  C'est  aux  travaux  de  la  peinture  qu'il 
s'en  prend,  à  l'église  Notre-Dame  de  St-Trond, 
et  c'est  pour  lui  l'occasion  de  développer  une 
théorie  fort  intéressante  sur  la  manière  de  décorer 


Mélanges. 


317 


les  édifices  et  d'utiliser  les  modèles  que  nous  ont 
laissés  les  XIV'=etXV«  siècles.  Je  n'ai  nullement 
l'intention  de  défendre  les  peintures  incriminées. 
Je  ferai  seulement  observer  qu'elles  comptent 
parmi  les  anciennes  exécutées  en  Belgique  au 
siècle  dernier,  et  qu'elles  n'ont  certainement  pas 
subi  l'influence  de  St-Luc,  par  la  raison  que 
cette  école  n'existait  pas  encore.  J'ai  appris  qu'en 
ces  temps-là  ce  travail  était  subventionné  par 
le  Gouvernement  ;  les  peintures  furent  examinées 
par  le  peintre  Navez,  directeur  de  l'Académie 
de  Bruxelles,  qui  se  montra  fort  élogieux  à 
leur  égard.  D'autres  notabilités  du  domaine  de 
l'art,  même  étrangères,  vinrent  les  voir  ;  parmi 
ceux-ci,  on  peut  citer  Auguste  Reichensperger 
et  Victor  Hugo.  Un  journal  de  Bruxelles  a  pu- 
blié récemment  des  lettres  que  Victor  Hugo 
adressa  à  rartiste,qui, comme  jugement  et  comme 
style,  n'ont  rien  de  commun  avec  les  articles  de 
M.  F.-G.  Quant  au  peintre  de  !a  cathédrale  de 
Liège,  il  n'a  jamais  été  ni  élève,  ni  professeur 
à  une  Académie  de  St-Luc.  Mais  nous  n'en 
sommes  plus  à  regarder  aux  inexactitudes! 

Avant  de  quitter  St-Trond,  je  ne  voudrais 
pas  laisser  échapper  l'occasion  de  me  trouver 
d'accord  avec  notre  touriste  dans  son  apprécia- 
tion sur  les  statues  du  chœur  de  l'église  de 
Notre-Dame  «  imitant,  lourdement  et  gauche- 
ment, la  naïveté  des  images  gothiques  '».  Seule- 
ment encore  une  fois,  ces  figures  n'ont  rien  de 
commun  avec  l'école  incriminée;  elles  sortent  de 
l'atelier  fort  académique  du  sculpteur  Geefs,  qui 
les  a  façonnées  à  une  époque  où  il  n'était  pas 
question  de  l'école  de  St-Luc!  D'ailleurs,  à  au- 
cune époque  de  sa  carrière,  il  ne  s'est  préoccupé 
d'imiter  la  statuaire  gothique  ('). 

M.  F-G.  est  particulièrement  intéressant  par 
les  informations  qu'il  offre  aux  lecteurs  de  la 
Chronique  de  la  curiosité.  En  voici  une  digne, 
de  tout  point,  d'y  figurer. 

«  En  excursionnant  sur  les  bords  de  la  Meuse, 
j'ai  appris  que  l'on  conserve  l'abbaye  de  Flône. 
—  Quelle  reconstitution  nous  prépare-t-on,  mon 
Dieu  ! —  et  qu'on  allait  abattre  à  Dinant  deux 
belles  maisons  du  XVH^  siècle,  etc.  » 

L'abbaye  de  Flône  ! 

I.  Joseph  Geefs,  professeur  de  r.'\cadémie  d'Anvers  ;  les  statues 
des  quatre  évangélistes  ont  été  exécutées  en  1856. 


Le  corps  de  cette  abbaye  a  été  rebâti  en  1660, 
dans  le  style  le  plus  banal  de  cette  époque. 
L'ensemble  des  constructions  a  été  vendu  comme 
bien  national  à  la  Révolution.  Après  avoir 
passé  entre  les  mains  de  plusieurs  propriétaires, 
le  bâtiment  principal  fut  acheté  par  un  banquier 
de  Liège  (').  Avant  lui  déjà  on  avait  fait  du 
corps  principal  une  vaste  maison  de  campagne, 
qui  depuis  cette  époque  ne  s'appelle  plus  l'abbaye 
mais  le  château  de  Flône.  Il  s'agit  donc  d'un 
très  aimable  séjour  d'été,  fort  habitable  et  très 
habité  ;  ce  n'est  plus  une  abbaye,  et,  comme  on 
voit,  c'est  très  loin  d'être  une  ruine.  Cela  n'a  ja- 
mais été  un  monument.  Le  voyageur  qui  de  Bel- 
gique se  rend  à  Paris  parla  ligne  du  Nord  belge, 
en  voit  à  sa  droite  la  façade  étendue  et  assez  mo- 
notone, percée  de  fenêtres  carrées  en  longues  files 
bien  régulières,  très  proprement  peinte  à  l'huile 
en  couleur  beurre  frais,  dont  les  couches  sont 
renouvelées  aussi  souvent  que  la  propreté  l'exige. 
Assurément  les  propriétaires  actuels  sont  loin 
de  se  douter  des  soucis  que  donne  leur  immeuble 
à  un  archéologue  aussi  distingué  et  à  ses  lecteurs. 
Il  est  peu  probable  que  le  Gouvernement  fasse 
intervenir  la  Commission  royale  des  Monuments 
pour  opérer  le  prochain  peinturage  qui  doit 
«  conserver  l'abbaye  de  Flône  ». 

En  réalité,  M.  Fierens-Gevaert  ne  connaît  pas 
un  traître  mot  de  l'abbaye  de  Flône,  dont  il  a 
écrit  le  nom  au  hasard,  ne  doutant  de  rien  et  ne 
se  doutant  de  rien,  ne  se  préoccupant  nulle- 
ment de  commettie  une  ...  inexactitude  de  plus. 
Quant  aux  deux  belles  maisons  du  XVII^  siècle 
«  de  Dinant  »,  j'avoue  ne  pas  connaître  en  cette 
ville  de  maisons  remarquables.  Mon  ignorance 
à  cet  égard  est  aussi  grande  que  celle  de  M.  F.-G. 
en  ce  qui  concerne  l'abbaye  de  Flône  ;  aussi 
j'évite  d'en  rien  écrire. 

Mais  quand  cela  serait,  croit-on  qu'en  Belgique 
on  puisse  empêcher  le  propriétaire  d'une  maison 
dont  il  ne  peut  plus  se  servir  de  la  démolir?  Et 
que  prouvent  ces  accusations  sans  fondement 
aucun,  et  ces  blâmes  qui  ne  reposent  sur  rien  ?  — 
Ils  témoignent  simplement  d'une  légèreté  puérile 
et  d'un  parti  pris  qui  naïvement  se  dévoile  et 
malgré  lui,  devient  inoffensif 

I.  Le  regretté  M.  Jules  Frésart,  amateur  d'art  et  collectionneur 
distingué. 


On  n'en  finirait  pas  si,  à  la  suite  de  M.  F.-G. 
il  fallait  passer  en  revue  toutes  les  ënormités 
monumentales  qui  se  commettent  dans  son  pays. 
Nous  en  avons  vu  assez  pour  juger  l'écrivain  et 
l'esprit  qui  l'anime.  Mais  cet  esprit  de  parti  pris 
et  de  dénigrement  devient  surtout  manifeste.lors- 
que,  sortant  du  domaine  des  monuments  anciens 
et  de  leur  restauration,  l'auteur  s'en  prend  à  un 
édifice  récent  qui,  ne  doit  rien  à  l'intervention 
officielle,  et  qui,  de  l'aveu  de  presque  tous  ceux 
qui  l'ont  visité,  belges  ou  étrangers,  est  une  des 
plus  nobles  constructions  érigées  en  Belgique  de- 
puis un  demi-siècle  ;  je  veux  parler  de  l'abbaye 
de  Maredsous,  dont  feu  le  baron  Bethune  est 
l'architecte.  Ici  encore  il  faut  citer  : 

«  Le  pastiche  architectural,  sculptural  y  tient 
du  prodige.  Il  ne  s'agit  ici  ni  d'une  restauration, 
ni  d'une  reconstruction,  mais  d'une  construction 
entièrement  nouvelle  et  toute  récente,  exécutée 
jusque  dans  ses  moindres  détails  en  style  gothi- 
que primaire.  Décoration  ornementale,  boiserie, 
mobilier,  tout  est  conçu  suivant  les  principes  sé- 
vères de  l'architecture  cistercienne.  L'impression 
est  paradoxale,  on  ne  peut  croire  à  la  réalité  et 
à  la  contemporanéité  d'un  tel  monument.  Les 
bénédictins,  aidés  sans  doute  de  quelques  célé- 
brités de  l'école  de  Saint-Luc,  ont  ressuscité  une 
abbaye  du  XIII<=  siècle.  Mais  à  quoi  bon  tant  de 
science?  Le  résultat  reste  fort  discutable.» 

M.  F.-G.oublie  de  nous  dire  où  se  trouve  l'ori- 
ginal de  ce  pastiche  monumental.  Mais  on  doit 
le  plaindre  de  ne  pas  avoir  su  reconnaître  l'œu- 
vre pleine  de  sève  et  de  conviction  d'un  artiste 
qui,  ayant  à  créer  un  édifice  à  l'usage  de  religieux 
de  l'ordre  le  plus  historique  du  monde,  a  voulu 
bâtir  dans  l'esprit  de  leur  institut,  conformément 
à  ses  règles  et  à  ses  nécessités.  11  a  accompli  sa 
tâche  avec  un  talent  auquel  ont  rendu  justice 
tous  les  hommes  qui  savent  voir. 

Nous  ne  suivrons  pas  plus  loin  La  Chroni- 
que des  arts  et  de  la  curiosité  ni  son  réqui- 
sitoire contre  tout  ce  qui  se  fait  en  Belgique  dans 
le  domaine  de  la  construction  et  de  la  restaura- 
tion des  monuments.  Nos  lecteurs  sont  édifiés 
sans  aucun  doute  sur  la  compétence  de  l'auteur 
comme  sur  la  valeur  de  ses  informations  et  de 
ses  jugements. 

En  Belgique,  pays  resté  fidèle  à  sa  foi,  et  tou- 


jours fécondé  par  l'esprit  du  catholicisme,  il  est 
aisé  de  reconnaître  que  les  monuments  sont  con- 
servés, réparés,  entretenus  dans  le  même  esprit 
qui  les  a  édifiés.  C'est  là,  en  général,  la  cause  des 
critiques  qui  s'élèvent  de  temps  à  autre  avec 
autant  d'intempérance  que  d'impéritie.  Ces  sortes 
de  critiques  sont  toujours  accueillies  avec  avi- 
dité par  une  certaine  presse  ;  plus  elles  témoi- 
gnent de  l'ignorance  de  leurs  auteurs,  et  plus 
elles  trouvent  d'écho  auprès  de  l'ignorance. 

C'est  pour  cela  qu'il  faut  parfois  accepter  la 
tâche  rebutante,  mais  utile,  d'examiner  de  près  ce 
qu'il  y  a  de  fondé  dans  ces  déclamations.  En 
Belgique,  heureuseiTient,on  ne  se  laisse  pas  faci- 
lement éblouir.  On  trouve  assez  naturel  que  ceux 
qui  ne  fréquentent  pas  les  églises  et  qui  ne  voient 
dans  les  anciens  sanctuaires  que  le  décor  d'un 
site  ou  l'ornement  d'un  paysage,  aimeraient  à  les 
voir  abandonner  a  l'action  du  temps  ;  lorsque 
celui-ci  en  aura  fait  des  ruines,  le  décor  n'en 
paraîtra  que  plus  beau  à  leurs  yeux.  Mais  nous 
qui,dans  ces  sanctuaires,  allons  entretenir  la  vie 
de  notre  âme,  nous  ne  sommes  pas  d'humeur  à  les 
abandonner  aux  esthéticiens  de  passage,  et  à  ces 
archéologues  qui,  par  leurs  critiques  sans  mesure, 
ont  la  candeur  de  nous  donner  la  mesure  de  leur 
compétence. 

J.  Helbig. 


Ira  \s\z  et  les  cruures  Des  granos  maîiics 
renoues  populaires  (■)• 

ES  entreprises  récentes  de  la  librairie, 
qui,  secondées  par  une  élite  d'écrivains 
d'art,  ont  pour  objet  de  rendre  popu- 
laires la  vie  et  les  travaux  des  grands 
maîtres,  sont  remarquables.  C'est  un  mouvement 
intéressant,  digne  de  l'approbation  et  de  l'intérêt 
de  tous,  d'autant  qu'il  se  manifeste  par  des  livres 
édités  avec  élégance,  écrits  avec  science,  enri- 
chis de  nombreuses  gravures,  et  paraissant  dans 
des  conditions  de  bon  marché  qui  les  rendent 
facilement  accessibles.  Depuis  un  quart  de  siècle, 
la   littérature  et  les  recherches  historiques  con- 

I.  Greatmasiersin  Painliiig  and  Sculpture  ;  Les  grands  maîtres 

peintres  et  sculpteurs  ;  Londres,  George  liell  and  sons.   Hans  .V/em- 
Une,  par  James  Weaie. 


£PéIaiigts, 


319 


cernant  les  arts  ont  pris  un  développement 
énorme,  et  les  efforts  pour  y  intéresser  toutes  les 
classes  de  la  société  sont  assurément  à  signaler. 
C'est  tout  d'abord  une  sorte  de  propagande 
contre  les  livres  frivoles  ou  mauvais,  qui  a  bien 
son  mérite.  La  vie  d'un  grand  artiste,  racontée 
par  une  plume  honnête,  a  toujours  un  côté  mo- 
ral, en  ce  sens  qu'elle  fait  l'apologie  du  travail, 
car  sans  travail  persévérant,  quotidien,  ayant 
toujours  le  but  en  vue,  il  n'y  a  pas  de  grand 
artiste.  Les  dons  les  plus  brillants  départis  par 
la  nature  ne  suffisent  pas.  D'autre  part,  les  livres 
d'une  lecture  agréable  qui  répandent  largement 
l'intelligence  des  œuvres  d'art,  qui  en  dévelop- 
pent le  goût  dans  les  masses,  font  du  bien  à  la 
société.  C'est  multiplier  ses  jouissances  permises 
et  élever  son  niveau  intellectuel.  C'est  donc  faire 
acte  de  philanthropie,  ou  mieux  encore  œuvre  de 
charité  spirituelle,  car  c'est  inviter  à  participer  au 
festin  de  l'art  le  plus  de  convives  possible. 

Nous  avons  signalé  à  nos  lecteurs  quelques- 
unes  des  monographies  de  peinture  publiées  en 
Allemagne  sous  la  direction  de  M.  Knackfuss, 
avec  le  concours  d'autres  savants,  parmi  lesquels 
se  distingue  M.  Kâmmerer,  notamment  par  ses 
monographies  d'artistes  néerlandais  antérieurs 
à  la  Renaissance. La  collection  a  augmenté  consi- 
dérablement et  se  poursuit  avec  un  succès  de 
bon  aloi.  On  peut  y  trouver,  sur  les  artistes  dont 
la  bibliographie  a  paru,  à  peu  près  tout  ce  que  les 
recherches  les  plus  récentes  ont  apporté  de  lu- 
mière sur  leur  vie  et  leurs  travaux.  Le  public  a 
répondu  avec  d'autant  plus  d'entrain  à  cet  essai 
de  vulgarisation,  que  chaque  fascicule  est  riche- 
ment orné  de  reproductions  obtenues  par  les 
différents  procédés  de  la  photographie  et  qui,  par 
conséquent,  sont  d'une  fidélité  incontestable. 

Il  y  a  lieu  d'espérer  que  ce  mode  de  rendre 
accessible  à  tous  la  connaissance  de  la  vie  des 
grands  maîtres  et  de  leurs  attrayants  travaux,  se 
propagera  de  plus  en  plus.  A  ce  point  de  vue,  il 
me  semble  intéressant  de  signaler  une  publica- 
tion qui  vient  de  paraître  à  Londres,  éditée  par 
la  firme  de  Bell  and  sons,  sous  le  titre  de  «  Gi'eat 
masters  in  painting  and  sculpture  »,  les  Grands 
maîtres  de  la  peinture  et  de  la  sculpture. 

Le  premier  volume  paru  (pp.  XXIV-iiO,  38 
planches)  est  consacré  à  Hans  Memling.  On  ne 


pouvait  mieux  inaugurer  la  série  des  grands 
maîtres  que  cette  publication  doit  mettre  en  lu- 
mière. 

Si  la  vie  de  ce  peintre  est  peu  connue,  il  n'en 
est  guère  dont  les  tableaux  exercent  un  charme 
plus  attractif.  Il  n'est  pas  d'artiste  dont  les  œu- 
vres aient,  autant  que  les  siennes,  gagné  une 
valeur  aussi  continuellement  ascendante  depuis 
un  demi-siècle.  Ses  peintures,  en  effet,  inspirent 
une  religieuse  sympathie,  et  de  plus  en  plus 
on  les  regarde  avec  cette  sorte  de  tendresse 
qu'elles  expriment  elles-mêmes.  Pour  assurer  à 
cette  figure  d'artiste  tout  le  relief  désirable,  c'est 
à  M.  James  Weale  que  les  éditeurs  anglais  ont 
confié  la  tâche  de  la  retracer. 

Ils  ont  été  bien  inspirés  ;  à  vrai  dire,  Memling 
appartenait  à  M.  Weale,  sinon  par  droit  de  nais- 
sance, du  moins  par  droit  de  conquête.  Il  a  été,  en 
effet,  le  premier  à  faire  sortir  l'histoire  de  cet 
artiste  des  brumes  de  la  légende  aussi  sotte 
qu'invraisemblable,  dont  quelques  écrivains,  no- 
tamment Decamps,  l'avaient  entourée,  légende 
dont  Alfred  Michiels  s'était  fait  dans  ses  Pein- 
tres brugeois  le  complaisant  narrateur,  un  peu 
au  risque  de  devenir  légendaire  à  son  tour,  tant 
il  a  mis  d'inspiration  personnelle  dans  son  récit. 

Par  des  recherches  poursuivies  pendant  nom- 
bre d'années  dans  les  différents  dépôts  d'archi- 
ves de  la  ville  de  Bruges,  où  Memling,  déjà  en 
pleine  possession  de  son  talent,  est  venu  se  fixer 
à  une  époque  qui  n'a  malheureusement  pu  être 
établie,  M.  Weale  est  parvenu  à  trouver  quelques 
faits  précis,  et  quelques  dates  certaines,  qui  font 
connaître  un  artiste  laborieux,  vivant  dans  une 
situation  aisée,  habitant  une  maison  qui  était  sa 
propriété,  marié  à  une  brugeoise  ;  il  était  père  de 
trois  fils  qui,  à  la  mort  de  Memling,  étaient  encore 
mineurs,  c'est-à-dire  âgés  de  moins  de  vingt- 
cinq  ans. 

Par  les  documents  retrouvés,  M.  Weale  avait 
établi  que  l'artiste  était  décédé  avant  l'année 
1495,  et  de  l'étude  attentive  de  ses  peintures,  il 
avait  conclu  à  l'origine  germanique  de  l'artiste, 
ou  tout  au  moins  à  l'influence  de  l'école  de 
Cologne  sur  sa  formation. 

Les  recherches  poursuivies  par  d'autres  érudits 
et  par  quelques  fouilleurs  d'archives  locaux  ont 
peu  ajouté  aux  renseignements  désormais    ac- 


320 


3^c\)ue  lie  ravt  cbvéticn. 


quis  ;  un  seul  fait  de  réelle  importance  a  été  dé- 
couvert par  le  R.  P.  Henri  Diisart.  jésuite,  dans 
un  manuscrit  conservé  à  la  bibliothèque  commu- 
nale de  St-Omer.  Les  notes  tenues  par  Romuald 
de  Dopper,  notaire  ecclésiastique  à  Bruges,  et 
écrites  dans  les  années  1491-1498,  consignent, 
entre  autres  faits,  la  mort  survenue  à  Bruges,  le 
1 1  du  mois  d'août  1494,  de  Maître  Jean  Mem- 
linc,  considéré  comme  le  peintre  le  plus  habile 
et  le  plus  excellent  de  toute  la  chrétienté.  Il 
était  originaire  de  Mayence,  et  a  été  enterré  au 
cimetière  de  l'église  Saint-Gilles. 

Cette  trouvaille,  faite  en  1S89,  très  intéressante 
en  elle-même,  n'infirmait  pas,  elle  confirme,  au 
contraire,  les  renseignements  et  les  inductions  de 
M.Weale.  On  sait,  d'ailleurs,  que  dans  le  domaine 
de  l'ancien  Électorat  de  Mayence,  se  trouve  une 
petite  rivière  du  nom  de  Memling,  et  un  village 
qui  porte  également  ce  nom,  dont  le  peintre  est 
probablement  originaire.  Ce  fait  nous  porte  à  ne 
pas  suivre  l'orthographe  de  «  Memlinc  »  que 
M.  Weale  a  adoptée  ;  rien  en  général  n'est  plus 
variable  que  l'orthographe  des  noms  patronymi- 
ques d'artistes  à  une  époque  où  ils  l'écrivaient 
eux-mêmes  de  plusieurs  manières  différentes  ; 
il  semble  plus  logique  de  conserver  au  nom 
.de  Memling  la  forme  qui  accuse  son  origine  ger- 
manique, de  préférence  à  l'orthographe  flamande, 
résultat  d'une  corruption  consacrée,  il  est  vrai, 
par  l'usage  du  pays  où  il  a  vécu  en  dernier  lieu. 

Memling  vint  s'établir  à  Bruges  en  1477,  peut- 
être  avant  ;  quelques  années  plus  tard,  on  ignore 
la  date  précise,  il  épousa  Anne,  fille  de  Louis  de 
Valkenaere  ;  M.  Weale  dresse  ensuite  une  table 
chronologique  relative  à  la  vie  et  aux  travaux 
du  peintre. 

Ce  sont  là  des  renseignements  précis  qui  for- 
ment en  quelque  sorte  la  charpente  du  livre  dont 
le  reste  se  compose  de  l'étude  des  œuvres  consi- 
dérables et  variées  de  l'artiste. 

Cette  étude  que  l'auteur  divise  en  deux  par- 
ties :  les  peintures  authentiques  du  maître  et  celles 
qui  lui  sont  attribuées,  est  d'un  grand  intérêt. 
De  la  plupart  des  panneaux,  exécutés  à  Bruges, 
l'auteur  connaît  l'histoire,  les  personnages  qui  en 
ont  fait  la  commande  et  les  circonstances  qui 
s'y  rattachent.  Souvent  M.  Weale  décrit  les  pan- 
neaux de  Memling  avec  une  minutie  amoureuse. 


avec  la  charmante  précision  des  détails  et  le  ca- 
ractère des  physionomies  et  des  portraits.  Il  y  a 
plaisir  à  les  revoir,  accompagné  d'un  guide 
aussi  disert.  Les  panneaux  du  maître  sont  vrai- 
ment historiques  à  plus  d'un  titre.  S'ils  racontent, 
en  de  multiples  épisodes,  la  vie  du  Christ, comme 
dans  cet  admirable  tableau  de  la  Pinacothèque 
de  Munich  que  M.  Weale  intitule  «  Le  Christ, 
lumière  du  monde  »,  ou  dans  cette  autre  compo- 
sition si  riche  de  la  galerie  de  Turin  où  se  dérou- 
lent les  différentes  scènes  de  la  Passion,  ou  bien 
encore,  sur  la  célèbre  châsse  de  l'hôpital  St-Jean 
à  Bruges  où  se  lisent  les  chapitres  émouvants  de 
la  légende  de  sainte  Ursule,  —  on  se  trouve  d'au- 
tre part  transporté  en  plein  dans  la  vie  de  la 
seconde  moitié  du  XV«  siècle.  On  y  trouve  le 
caractère  calme,  recueilli  et  pourtant  énergique 
des  physionomies  de  cette  époque  complexe  ; 
on  y  voit  les  costumes,  le  mobilier,  souvent  l'ar- 
chitecture et  la  manière  de  disposer  les  parcs  et 
les  jardins  autour  des  habitations  seigneuriales. 
Tout  cela  est  vécii^  transporté  sur  ces  panneaux 
au  moyen  d'admirables  photographies  coloriées 
dont  l'œil  de  l'artiste  a  été  le  vivant  objectif;  sa 
main  nous  offre  des  clichés  d'une  fidélité  absolue, 
illuminés  d'une  splendide  couleur  et  de  la  vie  de 
l'âme  que  le  génie  seul  peut  donner. 

En  terminant  son  étude,  M.  Weale  cherche  à 
établir  les  «caractéristiques  »  du  maître,  le  pla- 
çant dans  son  milieu  chronologique,  c'est-à-dire, 
en  mesurant  sa  hauteur  à  l'échelle  des  meilleurs 
peintres  qui  ont  vécu  au  même  siècle,  et  qui,  dans 
une  certaine  mesure,  appartiennent  à  la  même 
école.  Il  établit  d'abord  que  le  chef-d'œuvre  des 
frères  Van  Eyck,  l'.Adoration  de  l'Agneau,  n'a 
pas  été  surpassé.  «  Quoique  Memling,  dit-il, 
n'ait  jamais  produit  de  création  semblable,  il  s'est 
montré  certainement  supérieur  aux  autres  pein- 
tres de  l'école.  Jean  Van  Eyck  l'a  surpassé,  à  la 
vérité,  dans  l'exécution  technique,  par  le  modelé 
plastique  des  figures,  par  l'habileté  consommée 
avec  laquelle  il  a  su  rendre  l'aspect  et  la  nature 
du  moindre  détail  :  mais  dans  la  manière  de  corn-' 
prendre  et  de  traiter  les  sujets  religieux,  un 
monde  sépare  les  deux  artistes.  Jean  Van  Eyck 
voyait  avec  ses  yeux,  Memling  voit  avec  son 
âme.  Jean  étudiait,  il  copiait,  il  savait  repro- 
duire avec  une  exactitude  merveilleuse  le  modèle 
qu'il  avait  sous  les  yeux.   Memling  assurément 


£©élanses. 


321 


étudiait  et  copiait  aussi,  mais  il  faisait  quelque 
chose  de  plus  ;  il  réfléchissait  et  méditait  ;  son 
âme  tout  entière  passait  dans  son  œuvre,  et  le 
modèle  qui  posait  devant  lui  réapparaissait  sur  le 
panneau  idéalisé,  glorifié,  transfiguré...  A  ce 
point  de  vue,  ses  peintures  montrent  dans  la 
conception  et  l'idéalisation  un  réel  progrès;  bien 
des  sujets,  représentés  par  son  pinceau,  n'ont 
plus  jamais  trouvé  une  expression  aussi  délicate, 
aussi  délicieuse  dans  l'art  d'aucun  peintre,  si  ce 
n'est  peut-être  dans  celui  de  Fra  Angelico. 
Comparé  aux  autres  maîtres  de  l'école  néer- 
landaise, il  est  le  plus  poétique,  le  plus  harmo- 
nieux, le  plus  musical  de  tous  ;  beaucoup  de  ses 
peintures  sont  de  petits  bijoux  d'une  entière 
perfection.» 

Il  n'est  pas  probable  que  personne,  après  avoir 
fait  une  étude  attentive  de  l'œuvre  du  maître, 
vienne  s'inscrire  en  faux  contre  ce  jugement. 

J.  H. 

Au  moment  de  mettre  ces  lignes  sous  presse,  nous 
apprenons  que  M.  Weale  vient  de  publier  un  petit 
volume  intitulé:  Hans  Memlinc. Biographie.  Tableaux 
conservés  à  Bruges. 

Cet  ouvrage,  basé  sur  de  nouvelles  recherches  faites 
dans  les  Archives  de  l'hôpital  St-Jean,  mises  récem- 
ment à  la  disposition  de  l'archéologue,  formera  un 
guide  de  l'étranger,  notamment  dans  l'étude  des 
oeuvres  du  maître  que  possède  Bruges,  dont  les  pan- 
neaux de  Memling  forment,  comme  on  sait,  les  joyaux 
les  plus  précieux. 

Nous  pouvons  donc  espérer  y  trouver  des  rensei- 
gnements nouveaux,  à  ajouter  à  ceux  de  la  mono- 
graphie dont  il  vient  d'être  rendu  compte. 


Fragments  D'un  "  Bbpsioloçïus  " 
Du  Xlle  siècle,  à  ffion?a. 


jE  Physiologus,  qui  répond  à  notre  His- 
toire naturelle,  comprenait   au   moyen 
âge  trois  sections  distinctes  :  les   bctes 
(d'où  le  nom  de  Bestiaire),  les  plantes 
et  \es  pierres  précieuses  (ou  Lapidaire). 

Plusieurs  ont  été  publiés,  entre  autres,  par  le 
P.  Cahier,  l'archiprétre  Ambrosiani,  etc. 


Celui  du  trésor  de  Monza  est  encore  inédit.  II 
y  a  donc  lieu  de  le  tirer  de  l'oubli.  La  copie  que 
j'en  reproduis,  à  l'usage  des  studieux,  a  été  faite, 
à  ma  demande,  par  Dom  Achille  Varisco  ;  qu'il 
trouve  ici  l'expression  bien  sentie  de  mes  remer- 
ciements pour  les  nombreux  services  qu'il  m'a 
rendus  sur  place  et,  depuis,  par  sa  correspon- 
dance. 

Malheureusement  le  manuscrit  est  très  incom- 
plet, mais  les  variantes  qu'il  fournit  ont  leur  uti- 
lité. Il  date  du  XII'=  siècle  et  a  pour  titre  Liber 
scintillarum.  C'est  une  longue  compilation  des 
textes  des  saints  Pères,  principalement  sur  des 
sujets  mystiques,  qui  comprend  une  vingtaine 
d'opuscules  différents. 

Les  trois  parties  se  réduisent  à  peu  de  chose. 
Pour  le  Bestiaire  (pages  235-239,),  nous  avons 
seulement  l'aigle  et  le  serpent  ;  pour  les  plantes 
(pages  228-232),  à  la  suite  d'un  «  Sermo  sancti 
Cœsarii  »,  Vomie  et  la  vigne,  opuscule  qui  reste 
inachevé;  pour  le  Lapidaire  (pages  213-216), 
deux  séries  qui  se  complètent  mutuellement  et 
qui  sont  entières. 

Le  symbolisme  donn  e  une  grande  valeur  à  ces 
documents,  car  il  aide  singulièrement  à  l'intelli- 
gence des  monuments  du  moyen  âge,  oti  sont  si 
souvent  figurées  des  bêtes  et  des  plantes,  avec  une 
intention  qui  souvent  nous  échappe,  et  de  l'orfè- 
vrerie médiévale,  presque  toujours  constellée  de 
gemmes. 

Je  ne  me  livre  à  aucun  commentaire,  car  ce 
serait  allonger  démesurément  cet  article  qui  n'a 
d'autre  but  que  de  présenter  de  nouveaux  maté- 
riaux aux  travailleurs. 

L  Incipit  de  Aquila. 

T~\IC1T  David  in  psalmo  :  Renovabitur  sicut  aquila 
-*-^  juventus  tua.  —  Aquila,  cum  senuerit,  gravantur  ala- 
ejus,  et  querens  fontem  aqu:B,ut  iiitingat  alas  suas  et  bap- 
tizetur  ter,et  volans  in  aéra,  sole  fuliginem  oculorum  suo- 
rum  discutit,  et  renovatur,  et  nova  efficitur. 

Et  tu  ergo  qui  habes  vesteni  veteiem  et  caligant  oculi 
cordis  tui,qu;Ere  spiritualem  fontem  Uominum,qui  di.\it  ; 
Me  dereliquerunt  fontem  aquiu-  viv^u. 

Et  iterum  volans  in  ahitudinem  solis  justifia'  Christi, 
incende  vestem  diaboli  et  veterem  conversationem.  Prop- 
terea  duo  presbiteri  in  Danihele  audierunt  :  Inveterate 
dierum  maloruni.  Baptiza  ergo  te  in  sempiterno  fonte,  ex- 
polia  te  veterem  hominem  cum  actibus  ejus,  indue  te 
novum  hominem  qui  secundum  Deum  creatus  est.  Prop- 
terea  David  dixit  :  Renovabitur  ut  aquila  juventus  tua.  Et 


KltVUe    UE    L  ART  CHKeTIEN. 
I90I.    —   4""^   LIVRAISON. 


322 


îRebue  îïe  V^vt  cl)rétien. 


Salvator  in  evangelio  dixit  :  Potestatem  habeo  ponendi 
animam  meam  et  iterum  potestatem  habeo  accipere  eam, 
et  Judei  irati  sunt  in  verbo  ejus. 

De  Serpentis  Natura. 

Salvator  in  evangelio  dixit  :  Estote  vigilantes  sicut  ser- 
pentes et  simplices  sicut  columbœ.  —  Prima  ejus  natura 
hase  est  :  Cum  senuerit  et  caligant  oculi  ejus,  et  voluerit 
novus  fieri,  abstinet  se  et  jejunat  quadratjinta  diebus 
donec  pellem  relaxât,  et  qiierit  fissuram  angiistam  in  petra 
et  intrat  in  fissuram,  et  contribulans  se  deponit  pellem 
veterem.  Et  nos  per  multam  abstinentiam  et  tribulationem 
per  Christum  deponemus  veterem  hominem  et  indumen- 
tum  ejus.Et  querens  spiritualem  petram  Christi  et  angus- 
tam,  id  est  angustam  portam  qiuc  ducit  ad  vitam  et  pauci 
introeunt  per  eam. 

Secunda  ejus  natura  est  :  Cum  venerit  ad  flumen  bibere 
aquam,  non  affert  secum  venenum,  sed  in  fovea  sua  depo- 
nit illud.  Debemus  autem  et  nos  cum  imus  in  coUectam, 
aquam  vivam  spiritualem  et  sempiternam  audientes,  et 
cumdivinumsermonem  et  c.xlestem  in  ecclesia  audiremus 
venenum  deponere,  hoc  est  terrestres  et  malas  concupi- 
scentias.  Multi  enini  insipientes  in  spiritualem  venire  no- 
luerunt.  Aliqui  ex  ipsis  juga  bovum  probantes,  alii  agrum 
ementes,  alii  mulieres  ducentes.  Sicut  Apostolus  dixit  : 
Reddite  ergo  omnibus  débita  ;  cui  tributum  tributum,  cui 
timorem  timorem,  cui  honorem  honorem. 

Tertia  ejus  natura  est  :  Si  viderit  nuduni  eum,  timet 
eum.  Si  autem  viderit  vestitum,  exilit  in  eum.  Sic  et  nos 
spiritualiter  intelligamus  :  quoniam  prinius  homo  pater 
noster  Adam  nudus  in  paradiso  fuit,  prsevaluit  serpens  exi- 
lire  in  eum.  Sedquando  tunicam  indutus  est,  hoc  est  mor- 
talitatem  corporis,  tune  exilivit  eum  serpens.  Si  ergo  et  tu 
habes  vestem  mortalem  et  veterem,hoc  est  pristinam  con- 
versationem,  et  vis  audire  inveterate  dierum  malorum, 
exiliat  in  te  intellectualis  serpens.  Si  autem  expolies  te  in- 
dumentum  tuum  pristinum,et  potentes  ssculi  rectores  te- 
nebrariim  istarum,  et  spiritus  nequitiïe  in  caelestibus  sicut 
apostolus  dixit  ;  tune  non  poterit  exilire  ad  te  antiquus 
serpens.  Finit. 

II.  Ejusdem  (S.  Cesarii)  de  slmilitudine  Ulmse 
arboris  et  de  Vite. 

LEGIMUS  in  quodam  libro,  fratres  karissimi,  de 
Ulmo  et  Vite  propositam  nobis  similitudinem,  quam 
qui  diligenter  osiendit  non  parvam  anima;  sueu  œdificatio- 
nem  inveniet.  Nam  arbor  ulmic  et  vitis  satis  sibi  conve- 
nientes  esse  videntur. 

Arbor  enimulmea.licet  sitamicnaet  in  sublime  porrecta, 
nullum  tamen  fruclum  habere  probatur.Vitis  vero,quamvis 
sit  parva  et  similis  (humilis),  fructibus  plena  esse  cognos- 
citur.  Qui  fructus  nisi  quolicumque  ligno  levantur  in  alto, 
in  terra  putrescunt  atque  deperiunt.  Si  vero  ulnuis  exten- 
dit  ramos  suos  et  erigit  vilem,  et  se  ornât  et  illam  de  putre- 
dine  libérât.  Quare  ista  similitude  posita  diligenter  osten- 
damus.  Arbor  ulmea  significat  hominem  divitem  in  hoc 
mundo.  Sic  arbor  illa  sublimis  est  et   ama^na  et  huniida 


et  tatnen  fructibus  vacua  ;  ita  et  quicumque  dives  saeculi 
hujus  quamvis  sublimetur  honoribus  in  multis  facultati- 
bus,  et  amasnus  et  jucundus  esse  videatur,  tamen  si  ad 
vitem,  id  est  ad  pauperem  Christi  elemosinarum  brachia 
quasi  ramos  piissimos  humiliter  non  expandit,  a  fructibus 
a3tern;ï  vitx  vaeuus  remanebit.  Vitis  autem  significat  ser- 
vos  Dei  vocatos  et  doctrin»  jugiter  insistentes  et  si  quos 
sunt  alii  similes  horum,  qui  contempto  mundo  Deo  die 
noctuque  deserviunt,  quo  servicio  in  œterna  beatitudiue 
uberes  fructus  habere  creduntur. 

Ac  si  divites  hujus  niundi  habundant  in  hoc  sœculo,  et 
pauperes  Christi  in  caslo.  Ouod  ergo  futurum  est  ut  nec 
arbor  ulmea,  sine  fructu  remaneat,  nec  vitis  in  terra  pu- 
treseat  ;  hoc  enim  expedit  fieri  ut  quomodo  arbor  ulmea 
extendit  ramos  suos  et  erigit  vel  sustinet  vitem,  sic  dives 
saîculi  hujus  porrigat  ramos  suos,  id  est  ramos  plenos 
ructibus  agri  sui  et  sustineat  pauperes  Christi  ;  quod  si 
fecerit  in  hoc  mundo,  sine  dubio  ab  ipsis  pauperibus 
Christi  multipliciter  illi  rependebitur  in  futuro.  Nec  de- 
dignetur  dives,  aut  injuria  sibi  retineat  facta  quia  hoc 
modo  arbori  comparatus  est.  Sed  audiat  Dominumdicen- 
tem  :  Arbor  bona  fructus  bonos  facit,  mala  autem  arbor 
malos  facit.  Sed  magis  illud  quod  sequitur:  Omnis,  inqiiit, 
arbor  qui  non  facit  fructum  bonum  excidetur  et  in  ignem 
mittetur. 

Extendat  ergomanus  suas  ad  elemosinas  ut  possit  eva- 
dere  œternas  flammas.  Omnes  ergo  divites  timeant  exem- 
plum  illius  arboris  infructuosas  et  sterilis,  id  est  illius  qui 
purpura  et  byssis  induebatur  ;  arbor  enim  ama'na  et  su- 
blimis erat  in  mundo,  sed  quia  ramos  misericordia?  non 
expandit  ad  Lazzarum  flammas  reciperemeruit  in  inferno, 
et  ab  illo  petebat  guttam  cui  negaverat  micam.  Hoc  ergo 
cogitent  divites  qui  se  de  rébus  suis  dum  suse  sunt  redi- 
mère  nolunt,  ut  non  faciant  talia,  ne  taliafaciantur.  Dives 
fuit  de  quo  loquimur  :  sunt  et  alii  divites  ad  quos  nunc 
loquimur  ;  unius  sunt  nominis,  caveant  ne  sint  unius  con- 
ditionis.  Cum  hajc  ita  sint,si  illi  qui  divites  sunt  avidaset 
contractas  manus  habuerint  ad  elemosinas  faciendas,  et 
quibuscumque  servis  Dei  vigiliis,  lectionibus  vel  orationi- 
bus  insistentibus  qure  suntcorpori  necessaria  dare  nolue- 
rint,  efficientur  velut  ulmus  sterilis  qu;c  vitem  sustinere 
dissimulât. 

Et  cum  dives  pauperibus  Christi  nihil  dederit,  qui 
necessitate  in  opéra  terrena  plus  quam  solebant  exercent, 
et  dum  mundanis  actibus  occupantur  orationi,  lectioni, 
jejuniis  et  vigiliis  insistunt;  necesse  est  ut  fructus  illorum, 
quomodo  vitis  in  terra  jacet,  ex  parte  aliqua  minuatur, ac 
sibi  tantum  sufficiant,  et  nihil  divitibus  largiantur.  lieatus 
enim  apostolus  Paulus  dum  divites  mundi  hujus  pro  sus- 
tentandis  Christi  pauperibus  admoneret,  quasi  divitem 
loquebatur  ad  arborem,  id  est  pro  Christi  paupere  loque- 
batur  ad  divitem.  Vestra,  inquit,  habundanlia  sit  ad  illo- 
rum inopiam,  ut  et  illorum  habundantia  veslr;e  inopiœ  sil 
sublevamentum.  Quam  rem  ut  omnes  intelHgant  apertius 
insinuare  debemus.  Divites  mundi  habundant  in  hoc 
mundo  pecunia:  pauperes  Christi  habebunt  in  ca:lo  vitam 
asternam.  Distribuant  ergo  divites  in  mundo  pecuniam,  ut 
recipiant  in  ca;lo  vitam  ieternam. 


^©élanges. 


323 


Divites  mundi  friimentum,  vimini,  oleum  in  horrea  vel 
in  cellario  copiose  reponunt  ;  pauperes  Christi  orando, 
vigilando,  jejunando  spirituales  thesauros  in  cjelo  recon- 
dunt.  Faciant  ergo  sibi  quosciimque  serves  Dei  divites 
hujusmodi  de  terrena  facultate  participes,  ut  illi  eossibi 
in  cselesti  thesauro  faciant  collaudes.  Divites  mundi  hujus 
dum  aliquoties  nimium  se  terrenis  actibus  obligant  quan- 
tum illis  oportet  vigilare,  légère  et  orare  vel  jejunare  non 
possunt.  Unde  timendus  est  ne  forte  aut  pro  peccatis  mi- 
nime ofFerant,  aut  non  tantum  quantum  expedit  in  the- 
sauro caslesti  reponant.  Pauperes  Christi  his  fruclibus 
Deo  jugiter  vacando 

III. 

JASPIS  viridis  colore,  hoc  est  herbae  quando  venit  in 
florem.  Hoc  est  fides  immarcescibilis  quae  est  in  sancta 
ecclesia  quam  in  baptismo  promisit,  observet  illam  bene 
usque  in  finem. 

Saphirus  tantus  est  extimandus  sicut  est  thronus  ubi 
Deus  sedet  ;  hoc  est  Moyses  et  Ezechiel  illuc  invocantes 
cum  duo  adsunt.  Qui  suam  spem  semper  habet  in  Deum 
non  plus  in  terra  est  quam  in  ctelo. 

Kalcedonius  in  umbra  lucidissimus  significat  illos  ho- 
mines  taies  qui  in  flagellis  semper  sunt  parati,  et  veram 
prehendunt  confessionem  de  suis  peccatis  quas  recognos- 
cunt. 

Smaragdus  est  viridis  tantum  quantum  jaspis  unde  nos 
diximus  antea.  Significantur  illi  homines  taies  qui  stant 
grandes  in  veritateet  in  ratione,  sunt  blandi  in  sermone 
vel  in  humilitate  aut  peromnia. 

Sardonius  très  habet  colores,  blancus  et  inter  rubicum 
ille  candidus  est  ;  illa  puritas,  ista  mira  est  humilitas. 

Rubidus  est  communie  vel  pertinet  ad  martyrium. 

Sardius  talem  habet  colorem  quomodo  rosa  quando  in 
imberno  floret.  Hoc  est  pretiosa  mors  sanctorum  qui  sunt 
occisi  pro  Christi  amore;  in  hoc  sasculo  sunt  flagella  et  in 
altero  sunt  corona;. 

Chrisolitus  potest  designare  septem  dona  spiritualia  : 
scintillas  habet  ille  aureas,  quas  désignant  miracula  quse 
Deus  ostendit  per  suos  servos  qui  bene  observant  sua 
prascepta. 

Berillus  habet  viridem  colorem  et  multumjuvat  contra 
solem  ;  hoc  désignât  taies  homines  qui  alteros  docent 
bene  ;  quia  satis  ille  est  perfectus  in  opère  qui  alterum 
illuminât  hominem. 

Topatius  talem  habet  colorem  qualem  lux  cum  cselum 
est  bene  purum:  ille  pra;signat  homines  mortales  qui  ha- 
bent  in  se  grandem  sanctitatem  contemplativœ  vitae,  lux 
taies  désignât  illos  claros. 

Crisoprasus  est  viridis,  talem  habet  colorem  quomodo 
purpura  :  illum  hominem  signât  qui  vitam  terrestrem  pro 
Christi  amore  disperdit, et  per  illam  vitam  prceparat  se  ad 
martyrium. 

Jacintus  habet  colorem  talem  quem  habet  cselum  cum 
volet  mutari  ;  hoc  désignât  illos  homines  taies  qui  sunt 
perfecti  in  charitate,  et  quantum  illi  possunt  tantum   fa- 


ciunt,  et  bonitatem  non  faciunt  per   laudem   sed  tantum 
per  Deum. 

Amethistus  tradit  in  rubrorem  rosse  suum  colorem,  hoc 
significat  illos  homines  taies  qui  semper  vivunt  per  humi- 
litatem,  qua  plus  dignus  ille  erit  ad  Deum  quam  minus 
se  débet  glorificare. 

Cotnmentum  de  gemmis  sichemachlae. 

I''^  Jaspis  viridis,  per  quem  lapidem  viridem  Christus 
intelligitur,  in  quo  refectio  sanctorum  est,  sive  electorum 
qui  in  viriditate  fidei  permanent. 

II"'.  Saphiris  aerei,  idest  blavi  coloris,  significat  electos 
caslestiapetentes. 

ni"'.Calcedonius  colorem  habet  lucernœ  pallentis,tant£e 
duritiœ  est  ut  a  nuUo  possit  puliri  :  significat  fortissimos 
electos.  Pallens  dicitur  propter  humilitatem,  quia  licet 
sint  fortes,  humiles  sunt  mente. 

IV"'.  Smaragdus  nimia?  viriditatis  est,  et  in  desertis 
locis  in  Scythia  reperitur,  ubi  sunt  griphes  qui  significant 
dœmones,  contra  quos  pugnant  Arimaspi  unum  habentes 
oculum  ut  possint  lapidem  accipere.  Significat  dominum 
Christum,  qui  in  deserto  mentis  nostrre  habitat.  Unde 
Psalmista  ait:Ecce  elongavi  fugiens  et  mansi  in  solitudine. 
—  Per  griphes  qui  obsident  illa  loca  significantur  dœmo- 
nes,  cum  quibus  pugnant  Arimaspi,  id  est  electi  habentes 
oculum  mentis. 

V"^  Sardonix  compositum  est  ex  honice  et  sardonico, 
cujus  gênera  plurima  sunt  ;  tamen  unius  generis  trium 
colorum  est  :  nigri,  candidi  et  rubri  ;  cui  ccmparantur 
sancti,  passione  rubicundi,  puritate  mentis  candidi,  sed 
humilitate  sibimet  despecti. 

Vl"^  Sardius  sanguinei  coloris  est  ;  significat  martyres. 

VII"'.  Crisolitus  quasi  aurum  fulget,  et  videtur  emit- 
tere  scintillas  ardentes  :  cujus  specie  figurantur  electi,  qui 
intellectu  suprema;  sapientiœ  refulgentes  suas  virtutes  at- 
que  verba  exhortationis  quasi  scintillas  in  proximos  effun- 
dunt;  de  quibus  fuit  Paulus  cœterique  taies  cœlestia  ten- 
dentes. 

VI IT".  Berillus  duo  colores  habet  ;  viridem  et  pallen- 
tem.  Significat  electos  virides,  in  fide,  pallentes  in  humi- 
litate. 

IX"'.  Topazius  omnium  lapidum  habet  colores  in  se  : 
significat  perfectos,  qui  omnes  virtutes  habent. 

X"'.  Crisoprasus  aurei  coloris  est  et  viridis  :  significat 
electos  sapientia  refulgentes  et  viriditate  fidei. 

XI"'.  Jacintus  similis  est  aquas  perfusœ  radio  solis  :  si- 
gnificat electos  omni  sapientia  perfusos. 

XIP".  Amethistus  purpureum  colorem  habet.  Significat 
sanctos,qui  purpureum  id  est  Citlestem  habitumgerunt  in 
terris;  unde  in  evangelio:  Neque  nubent,  neque  nubentur, 
sed  sunt  sicut  angeli  Dei  in  cœlo.  Ipse  lapis  roseum  colo- 
rem habet,  id  significat  dilectioneni  sanctorum  ;  unde  : 
Majorem  hac  dilectione  nemo  habet  quam  ut  animam 
suam  quis  ponat   pro  amicis   suis.   Vel   etiam   significat 

martyrium. 

X.  Barbier  de  Montault. 


324 


Bebue  lie  T^rt  cbrétien. 


ane  monstrancc  flamanDc  à  ScDan. 

iETTE  monstrance  est  un  travail  fla- 
mand de  la  fin  du  XV'  siècle,  ou  du 
début  du  XVI'',  dans  le  style  Renais- 
sance. Elle  a,  de  la  base  au  sommet, 
SI  centimètres.  Le  pied  est  en  vermeil;  il  rap- 
pelle par  sa  forme  générale  les  pieds  de  calice  de 
l'époque  gothique  à  son  déclin. 

Le  soubassement  se  découpe  en  six  lobes  qui 
saillissent  en  accolades  ;  la  tranche  moulurée 
admet  comme  décor  une  série  de  perles  allon- 
gées, séparées  par  une  perle  ronde  d'infime 
dimension. 

Cette  première  rangée  de  perles  est  surmontée 
d'une  sorte  de  tranche  unie,  dont  les  renfonce- 
ments, qui  dessinent  une  seconde  rangée  de 
lobes,  sont  marqués  par  des  ornements  affectant 
alternativement  la  forme  d'une  coquille  et  d'une 
feuille  trilobée.  Enfin,  une  troisième  rangée  de 
lobes  laisse  voir,  aux  enfoncements,  des  angles 
en  saillie  dans  lesquels  s'incruste  une  feuille 
allongée  et  assez  profondément  découpée.  Cette 
dernière  rangée  de  lobes  ne  présente,  comme 
ornement,  qu'un  motif  au  sommet  des  angles  et 
une  croix  gravée  dans  le  lobe  du  milieu. 

Une  couronne  ciselée,  surmontée  d'une  large 
moulure,  termine  le  sommet  du  soubassement. 

Au-dessus,  une  mince  tige  à  six  pans  unis 
supporte  une  couronne  d'anges  d'un  fort  joli 
travail.  Chacune  de  ces  têtes  gracieuses  est  ap- 
puyée sur  des  losanges  en  pointes  de  diamant, 
séparés  les  uns  des  autres  par  des  feuilles  refen- 
dues, l'une  en  haut,  l'autre  en  bas,  et  dont  l'ex- 
trémité se  rencontre  vers  le  milieu  du  losange 
supportant  les  têtes  d'anges. 

Au-dessus  de  la  couronne  d'anges,  la  tige  à  six 
pans  se  continue  sur  la  hauteur  d'un  centimètre  et 
demi,  et  se  termine  par  une  moulure  supportant 
une  couronne,  dans  laquelle  s'enfonce  l'ostensoir 
proprement  dit. 

Une  tige  à  six  pans,  en  argent,  plus  larges 
dans  le  haut,  en  forme  la  base  que  surmonte  une 
galerie  ajourée.  Plus  haute,  dans  sa  partie  supé- 
rieure, cette  galerie  se  présente  renversée  dans 
sa  partie  inférieure. 

Le   cylindre  de    cristal  s'emboîte   dans   des 


galons  découpés  en  feuilles  à  la  base  et  ajourés 
au  sommet. 

La  partie  supérieure  de  l'ostensoir  est  d'un 
travail  plus  fin  encore  ;  la  galerie  du  haut  est 
une  dentelle  d'argent  au  pied  du  clocheton  prin- 


I  Monstrance  flamande  à  Sedan. 

cipal.  Ce  dernier  est  une  sorte  de  niche,  formée 
par  sixcolonnettes  et  surmontée  d'un  dais. 

A  l'intérieur  de  la  niche  apparaît,  dans  une 
gloire,  une  Vierge  portant  dans  sa  main  droite 
un  sceptre,  dans  sa  gauche,  l'Enfant  Jésus.  Une 
croix  de  vermeil  fleuronnée,  avec  un  Christ  sur 
chacune  de  ses  faces,  domine  le  clocheton,  et 
forme  le  sommet  de  l'ostensoir. 


H^élange©. 


325 


La  base  de  l'ostensoir  et  la  galerie  supérieure 
sont  reliées  de  chaque  côté  par  un  contrefort 
finement  décoré,  et  terminé  à  la  base  par  un 
pendentif  fleuronné  en  vermeil,  et,  en  haut,  par 
un  pinacle,  également  en  vermeil. 

A  la  base  de  ce  contrefort,  des  niches  gothi- 
ques abritent  d'un  côté  :  à  droite  et  à  gauche,  des 
évêques  en  saillie  dont  la  physionomie  est  parti- 
culièrement fine  ;  de  l'autre  côté,  à  droite,  une 
Vierge  portant  l'Enfant  Jésus  sur  le  bras  gauche  ; 
à  gauche,  une  sainte,  la  tête  ornée  d'un  diadème 
et  tenant  à  la  main  un  panier  (').  Au-dessus  de 

I.   Probablement  Ste  Dorothée.  Collectiofi  de  .l/i's  Daireà  Torcy- 
SedaK  (Ardennes). 


ces  niches,  dans  le  montant  du  contrefort,  qui  est 
chevronné,  un  buste  de  Vierge,  tenant  l'Enfant 
Jésus  sur  le  bras  gauche,  se  détache  dans  une 
sorte  de  croissant. 

La  partie  latérale  du  contrefort  répète  les 
mêmes  motifs  :  d'un  côté,  une  Vierge  avec  un 
voile,  tenant  l'Enfant  Jésus  sur  le  bras  droit  ; 
de  l'autre,  la  sainte  déjà  mentionnée. 

Dans  l'intérieur  de  l'ostensoir,  et  abrité  par  un 
cylindre  en  cristal,  se  trouve  un  croissant  en 
vermeil,  dont  le  lobe  uni  est  soutenu  par  une 
console  finement  ciselée. 

M.  D. 


1A 

■? 


^^l^^L^^^^^^  .^  .^  .^  :^  ,^  .^  ..^  .^  .^  :^j^  :,:fe  .,^  ^.^  .^  ,^  ,,^  ,,^  ,^  ,,,jy^ 


^)^^)^^)^^j^  Correspontiaïue.  wmmmmmmm 


^.^  .^^  .^  .y^  ,i^-  :J^  .,^  .,y  :^^  :,^  .,>^  :,>^^  .,>^  ,)^  ,.^  .,>^  .,>^  ,j^  .,,^  .,1^  ^^^^  ^^  ^,>^  ^^^ 


BoiTiC  :  Etes  frfaquca  te  la  tfjapclle  JSancta  Banctorum 
et  Oc  l'fclier  JSaint.JSaba.  —  HrrjiO  :  li'feliac  Santa 
ffiariaocClc  Srajic.  -  BlorciKf  :  lia  façaBc  ne  l'roliec 
Kaint-Iiaurcnt.  —  Ice  ncttopaoc  ïfo  frcaquea  ;  noubcau 
vmm.  —  lits  ÎRiiorfa  Bu  Vatican. 


OUS  sommes  à  une  époque  si  fertile 
en  découvertes  d'anciennes  fresques 
que,  l'an  passé,  je  n'ai  pu  que  signaler, 
en  quelques  mots,  les  peintures  des 
salles  qui  se  trouvent  au-dessous  de  la  Sca/a 
Santa,  dans  la  chapelle  du  Sancta  Satictoriim. 

Grâce  à  un  savant  et  complet  travail  publié 
par  M.  Th.  Lauer  dans  les  Mélanges  d'archéologie 
et  d'histoire  ('),  je  puis  à  présent  entrer  dans 
quelques  détails. 

M.  Lauer  a  conduit  les  opérations  de  déblaie- 
ment et  de  fouilles  ;  il  a  dégagé  les  salles  en- 
combrées, redressé  des  erreurs  et  découvert  des 
fresques  inconnues. 

Je  m'en  tiens  au.x  fresques, mon  étude  préférée. 
Les  piliers  qui  soutiennent  les  voûtes  paraissent 
être  du  LX^  siècle,  mais  M.  Lauer  pense  que  les 
peintures, qui  les  recouvrent  en  partie,  sont  moins 
anciennes  et  en  ont  remplacé  d'autres  détruites 
par  l'humidité  ou  la  chute  de  l'enduit. 

Sur  l'un  des  piliers  on  voit  en  peinture  des 
colonnes,  quelques  ornements,  une  sorte  d'animal 
semblable  à  un  loup  ;  les  images  sont  grossières, 
et  leur  date  importe  peu. 

Mais  le  même  pilier  montre  une  fresque  in- 
téressante. C'est  un  saint  nimbé  couché  dans  un 
cercueil  ;  il  est  vêtu  d'une  tunique  blanche  et 
drapé  dans  un  linceul  rougeâtre.  Le  corps  n'a 
pas  la  rigidité  cadavérique,  les  bras  étant  ouverts 
et  les  jambes  ployées  ;  M.  Lauer  croit  que  c'est 
S.  Jean  l'Évangéliste.  A  côté  du  cercueil  sont 
deux  clercs  en  longues  robes  jaunâtres,  ornées 
de  dessins  géométriques  ;  des  aubes  blanches 
paraissent  vers  le  cou  et  les  poignets.  L'un  des 
clercs  porte  un  cierge,  l'autre  un  encensoir.  Les 
plis   des  vêteinents  sont  marqués  par  de  simples 


I.  Fascicule  d'avril-juillet  1900.  U  recueil  est  l'organe  de  l'École 
française  de  Rome,  palais  Farncse. 


traits  ;  les  pommettes  des  joues  sont  saillantes  et 
teintées  de  rouge. 

Sur  un  autre  pilier  sont  peints  deux  papes 
avec  des  nimbes  ronds  ;  l'un  porte  la  tiare  en 
forme  —  qu'on  me  pardonne  la  comparaison  — 
de  bonnet  de  coton,  haut  et  conique  ;  il  a  le 
pallium,  la  planeta  rouge,  l'aube  blanche;  chez 
l'autre  on  ne  voit  plus  que  des  traces  de  la 
tiare  et  du  pallium.  Entre  les  deux,  il  y  a  une 
inscription  qui  peut  être  -S".  Stefanus  PP. 

D'autres  peintures  montrent  :  Jésus-Christ 
bénissant  à  la  façon  grecque;  un  saint  nimbé 
vêtu  comme  le  pape  ;  deux  saintes  portant  des 
couronnes    d'oblation. 

Toutes  ces  peintures  sont  en  médiocre  état, 
plusieurs  sont  incomplètes  et  ont  été  retouchées; 
elles  avaient  déjà  été  signalées  avec  plus  ou 
moins  d'exactitude.  M.  Lauer  les  a  fait  photo- 
graphier, les  a  spécifiées  autant  qu'il  est  possible 
et  les  décrit  en  détail. 

Il  estime  qu'elles  sont  du  XI<=  siècle  ;  il  appuie 
son  opinion  sur  les  analogies  de  caractère,  de 
costumes  et  d'accessoires  avec  les  fresques  de 
l'église  souterraine  de  Saint-Clément  et  notam- 
ment avec  l'Enterrement  de  Saint-Cyrille. 

Sur  ce  point  on  peut  faire  quelques  observa- 
tions. 

D'abord  la  discussion  sur  l'époque  des  fresques 
de  Saint-Clément  n'est  pas  close. 

Puis  les  plis  des  vêtements  marqués  par  un 
simple  trait,  et  les  pommettes  saillantes  teintées 
de  rouge  ne  sont  pas  caractéristiques  du  XI"^ 
siècle  ;  je  les  ai  constatés  dans  quelques  fresques 
de  l'église  Santa  Maria  Antiqua,  peintes  au 
VIII<=,  et  dans  les  mosaïques  du  IX*",  dans  la 
chapelle  Sainte-Praxède. 

La  tiare  conique  se  trouve  à  d'autres  époques 
et  encore  dans  la  statue  du  pape  Boniface  VIII 
(  1 294- 1 303),  jadis  sur  l'ancienne  façade  de  Notre- 
Dame  de  la  Fleur  à  Florence,  maintenant  dans 
l'intérieur  du  dôme. 

L'effigie  du  pape  Etienne  ne  prouve  rien  en  ce 
qui  concerne  la  date  de  la  peinture  ;  elle  n'est 
pas  nimbée  en  carré,  comme  il  était  d'usage  de  le 
faire  pour  les  papes  en  vie  au  moment  de  l'exé- 


CorresponDance. 


327 


cution  du  travail  ;  puis  il  y  a  eu  deux  papes  du 
nom  d'Etienne  au  IX*^  siècle,  trois  au  X^,  deux 
au  XI*^  et  un  au  XI I^ 

En  somme,  l'attribution  des  fresques  de  la 
chapelle  Saiicta  Sanctoritin  au  XI^  siècle  prête 
à  la  discussion. 

Ces  observations  ne  portent  pas  la  moindre 
atteinte  aux  services  rendus  par  M.  Lauer, 
d'autant  plus  qu'il  ne  s'est  pas  borné  à  explorer 
les  parties  du  Sancta  Sanctoniin  déjà  connues 
à  peu  près,  mais  que  poussant  plus  loin  ses  in- 
vestigations il  a  fait  de  véritables  découvertes. 

On  abuse  fréquemment  de   ce  mot  décoîiverte. 

Signaler  une  chose  que  d'autres  ont  déjà  vue 
plus  ou  moins  bien,  mais  qui  est  fort  peu  connue 
cependant,  n'est  pas  faire  une  découverte. 

Trouver  une  chose  que  personne  n'a  vue  aupa- 
ravant, dont  il  n'y  a  aucune  trace  dans  les 
documents  ou  dans  les  souvenirs,  c'est  faire  une 
véritable  découverte. 

C'est  le  cas  de  M.  Lauer. 

En  creusant  plus  profondément,  il  a  rencontré 
des  murs  peints  à  fresque. 

L'une  de  ces  peintures  montre  les  fragments 
d'une  draperie  à  plis  décorée  de  rosaces.  Depuis 
cette  découverte,  des  draperies  semblables  ont 
été  constatées  à  l'église  de  Saint-Saba  dans  une 
fresque  placée  au-dessous  du  sol  actuel  et  aussi 
sur  presque  toutes  les  bases  des  murailles  de 
l'église  Santa  Maria  Antiqua  du  Forum  ro- 
main. 

M.  Lauer  a  aussi  mis  à  jour  une  autre  fresque 
d'un  intérêt  de  premier  ordre. 

C'est  un  personnage  sans  nimbe,  vêtu  de  la  toge 
classique,  avec  le  clavus  surl'épaule;  ilest  assis  sur 
un  siège  en  bois,  aux  pieds  croisés  et  courbés, 
et  à  haut  dossier  (')  ;  devant  lui,  sur  un  pupitre, 
est  placé  un  livre  ouvert  vers  lequel  le  person- 
nage tend  la  main  droite  ;  de  la  gauche  il  tient 
un  rouleau.  Une  inscription  indique  que  le  per- 
sonnage est  un  Père  qui  a  écrit  en  latin  des 
ouvrages  mystiques,  mais  elle  semble,  par  la 
forme  des  lettres,  être  antérieure  au  VII^  siècle 

M.  Lauer  estime  que  le  personnage  est  saint 
Augustin  {fi*  430)  et  qu'il  a  été  peint  un  peu 
plus  décent  ans  après  sa  mort. 

I.  Dans  le  langage  usuel,  ce  siège  est  nommé  Savonarole  ;  on  en 
fabrique  toujours  en  Toscane,  mais  les  dossiers  sont  plus  bas. 


«  La  peinture,  dit  M.  Lauer,  est  encore  d'ins- 
piration antique,  sans  influence  byzantine.» 

L'observation  est  fort  juste  ;  rien  dans  la  phy- 
sionomie, la  pose,  les  vêtements  ne  se  rapporte 
au  style  qu'on  est    convenu  d'appeler  byzantin. 

La  découverte  est  très  précieuse  ;  elle  fournit 
un  argument  de  plus  à  ceux,  dont  je  suis,  qui 
pensent  qu'on  a  exagéré  l'influence  des  Grecs, 
et  qu'après  les  Catacombes  l'art  italien  a  per- 
sisté non  seulement  dans  certaines  mosaïques 
mais  dans  la  peinture. 

Il  faut  donc  savoir  grand  gré  à  M.  Lauer 
d'avoir  découvert  dans  l'histoire  de  l'art  une 
étape  inconnue. 

Je  n'ai  pas  manqué  d'aller  à  l'église  Saint- 
Saba,  isolée  sur  la  colline  du  Cœlius,  pour  voir 
les  fresques  qui  ont  été  découvertes  sous  le  sol 
actuel. 

L'église  est  très  ancienne  ;  elle  a  été  rebâtie 
en  1465  ;  elle  est  dédiée  à  un  abbé  de  Cappadoce 
et  a  été  jadis  desservie  par  des  moines  Grecs. 

Les  fresques  visibles  jusqu'aux  fouilles  actuel- 
les sont  de  la  fin  du  XV  siècle  et  du  XVIe  ; 
les  peintures  découvertes  récemment  peuvent 
être  du  VI'^  et  du  VIL'. 

J'ai  été  informé,  par  le  gardien,  que  le  R.  P. 
Grisar,  qui  dirige  les  travaux,  devait  faire  une 
conférence  sur  le  sujet. 

Par  suite  j'ajourne  le  relevé  de  mes  notes. 

A  rezzo. 

La  charmante  petite  église  Santa-Maria  délie 
Grazie,  située  hors  de  la  ville,  est  l'objet  de  ré- 
parations. Elle  renferme  des  œuvres  d'Andréa 
délia  Robbia  (1435-1525). 

Les  Pères  carmélites  Scalzi,  qui  desservent 
l'église  par  délégation  de  la  Commune,  ont  donné 
500  lires,  et  un  particulier,  le  colonel  Testamanzi, 
en  a  fait  autant. 

On  a  toujours  plaisir  à  signaler  de  pareils 
actes  de   générosité. 

Florence. 

Le  concours  annoncé  pour  la  façade  de  l'église 
Saint-Laurent  a  eu  lieu  ;  75  projets  ont  été  en- 
voyés. 

L'ensemble  a  été  très  satisfaisant. 

Le  jury  international  a  réservé  neuf  projets 
pour  l'épreuve  définitive  qui  aura  lieu  au  mois 
d'octobre. 


328 


3Rebuê  tic  rart  cbvétieu. 


J'en  rendrai  compte;  et  dès  à  présent  on  peut 
être  assuré  que  la  basilique  aura  enfin  sa  façade. 

Le  nettoyage  des  fresques. 

J'ai  donné  dans  la  Revue,  en  1898,  des  rensei- 
gnements sur  le  nettoyage  des  fresques. 

Le  ministre  des  travaux  publics  de  Belgique 
a  bien  voulu  faire  delà  substance  de  ces  articles 
une  circulaire  à  ses  agents,  ce  dont  j'ai  été  très 
flatté. 

Dans  ces  importantes  opérations,  des  progrès 
s'accomplissent  sans  cesse  mes  notes  de  1898 
sont  par  suite  déjà  en  retard  ;  je  les  continue 
aujourd'hui. 

Le  plus  redoutable  ennemi  des  fresques  est 
l'humidité  permanente  :  elle  engendre  des  moi- 
sissures, qui,  peu  à  peu,  envahissent  toute  la 
peinture  et  finissent  par  détruire  les  colorations. 

Le  travail  de  cette  lèpre  peut  durer  des  siècles, 
car  son  action  est  très  lente  et  même  après  un 
millier  d'années,  il  arrive  parfois  que  lescouleurs 
ne  sont  pas  complètement  dévorées. 

Nous  en  avons  des  exemples  dans  l'église  de 
Santa  Maria  Antiqua  au  Forum  romain,  dont  les 
fresques  du  VIII^  siècle  viennent  d'être  rendues 
au  jour. 

La  destruction  des  moisissures  avait  été 
fréquemment  tentée,  généralement  avec  peu  de 
succès  ;  lorsqu'on  parvenait  à  enlever  la  lèpre, 
on  enlevait  souvent  la  couleur  en  même  temps. 

Mais  voici  qu'un  nouveau  procédé  vient  d'être 
appliqué. 

On  stérilise  la  fresque  au  moyen  d'un  lavage 
d'eau  étendu  de  formaline.  Je  ne  puis  dire  la 
composition  de  cette  substance,  n'entendant 
rien  à  la  chimie  ;  tout  ce  que  je  sais,  c'est  que 
dans  cette  matière  il  entre  de  l'hydrogène,  de 
l'oxygène  et  du  carbone,  et  que  c'est  un  poison 
violent. 

J'ai  vu  le  résultat  d'un  essai. 

On  a  expérimenté  sur  un  fragment  de  fresque 
du  VIII'=  siècle  envahi  par  la  moisissure,  mais 
dont  les  colorations  n'étaient  pas  complètement 


mangées  ;  la  moitié  du  morceau   a  été  laissée  en 
l'état,  l'autre  moitié  a  été  lavée  à  la  formaline. 

Lorsque  je  l'ai  vue,  il  y  avait  trois  mois  que 
le  fragment  était  à  l'air  et  que  le  lavage  avait 
été  fait.  Sur  tout  le  côté  lavé  la  moisissure 
n'existait  plus  et  les  couleurs  étaient  revenues 
non  à  leur  éclat  primitif,  mais  à  une  intensité 
suffisante. 

On  peut  donc  dire  qu'au  moyen  de  la  forma- 
line il  est  possible  de  débarrasser  la  fresque  des 
cryptogames  qui   la  recouvrent,  sans  faire  dis- 
paraître en  même  temps  les  couleurs. 
C'est  un  beau  résultat. 

Je  crois  cependant  qu'il  faut  agir  avec  pru- 
dence et  s'assurer  avant  le  lavage  que  la  fresque 
est  exempte  de  couleurs  à  la  tempera,  c'est-à-dire 
préparées  à  la  colle  ou  à  l'œuf,  car  certainement 
elles  ne  résisteraient  pas  au  lavage. 

On   constate    la   nature     des   colorations    en 
frottant  la  couleur  avec   un   linge  blanc  imbibé 
d'eau;  si  l'étoffe  prend  une  teinte,  il  y  a  tempera. 
Muse'es  du    Vatican. 

Sa  Sainteté  le  pape  Léon  XIII  a  donné  aux 
collections  du  Vatican  une  nouvelle  preuve  de 
sa  sollicitude. 

Il  a  acheté,  pour  le  cabinet  numismatique, 
les  monnaies  pontificales  réunies  par  feu  le  Car- 
dinal Randi  ;  la  collection  du  cardinal  était  com- 
posée de  22,000  pièces. 

Dans  les  années  ordinaires  la  taxe  d'entrée 
dans  les  galeries  de  sculpture  produit  de  35  à 
40,000  francs;  en  1S90,  en  raison  de  l'année 
sainte,  la  recette  est  montée  à  75,000  francs. 

La  taxe  est  établie  depuis  dix  ans  ;  elle  est 
parfaitement  justifiée,  puisque  le  gouvernement 
l'a  établie  dans  ses  musées  royaux. 

Le  curie  se  contente  de  la  percevoir  au  musée 
de  sculptures  ;  elle  pourrait  l'étendre  au  groupe 
de  la  Sixtine,  des  apparteinents  Borgia  et  de  la 
Pinacothèque  dont  la  visite  est  gratuite.  On  ne 
ferait  ainsi  qu'imiter  ce  qui  se  passe  au  Palais 
Ducal  de  Venise. 

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Société    des    Antiquaires    de    France.    — 

Séance  du  20  mars  içoi.  —  M.  Michon  fait 
une  communication  d'une  tête  en  bronze  du 
musée  de  Belgrade  qui  est  sans  doute  un  portrait 
de  l'empereur  Constantin. 

M.  Ul.  Robert  entretient  ses  confrères  d'un 
tombeau  disparu  de  Philibert  de  Châlons,  prince 
d'Orange,  et  de  quelques  portraits  de  ce  person- 
nage. 

M.  de  l'Espinasse  présente  plusieurs  fragments 
de  poteries  estampillées  provenant  des  fouilles  de 
Champvert  (Nièvre). 

Séance  du  2j  mars.  —  Lettre  du  R.  P.  Delattre 
relatant  la  découverte  importante  faite  par  lui 
d'une  colonnade  sur  les  ruines  de  Cartilage. 

M.  Mlintz  montre  par  divers  rapprochements 
que  la  fresque  de  l'hospice  de  Palerme  représen- 
tant le  triomphe  de  la  mort  n'est  pas  une 
œuvre  flamande,  mais  une  œuvre  italienne  de 
l'école  de  Pisanello. 

M.  Blanchet  présente  une  bague  et  des  fîbules 
en  forme  d'oiseau  trouvées  aux  environs  d'Is- 
soudun. 

M.  l'abbé  Bouillet  présente  une  petite  plaque 
d'agrafe  en  bronze  provenant  d'un  fermoir  de 
livre  et  représentant  une  jonque  analogue  à  un 
type  fréquent  au  moyen  âge. 

M.  Hauvette  présente  quelques  observations 
sur  une  restitution  douteuse  dans  l'inscription 
connue  sous  le  nom  de  Marbre  de  Paros. 

M.  Héron  de  Viilefosse  lit  une  note  de  M. 
Dechelette  sur  les  vases  antiques  à  obturateurs 
percés  de  trous. 

Séance  du  10  avril.  —  M.  Durrieu  entretient 
la  Société  d'un  beau  manuscrit  de  la  bibliothèque 
de  l'Escurial  venant  de  la  maison  de  Savoie  :  une 
Apocalypse  avec  peintures.  L'illustration  de  ce 
volume  est  due  à  trois  artistes,  dont  le  plus  récent 
est  un  maître  de  l'école  de  Tours,  Jean  Colombe. 

M.  Vitry  montre  la  photographie  d'une  vasque 
de  la  grande  fontaine  donnée  au  cardinal  d'Am- 
boise  par  les  Vénitiens  et  provenant  du  château 
de  Gaillon  ;  elle  est  conservée  aujourd'hui  dans 
le  parc  du  château  de  Liancourt  (Oise). 

Séance  du  IJ  avril.  —  M.  Mlintz  étudie  un 
grand  médaillon  du  musée  de  Vienne,  daté  d'une 
manière  certaine  et  qui  présente  au  droit  le  buste 
de  l'empereur  Constance  II  à  l'âge  de  16  ans 
environ,  au  revers  Constantin  entouré  de  ses 
deux  fils  Constantin  II  et  Constance  II. 


M.  l'abbé  Bouillet  analyse  un  mémoire  de 
M.  Destrée  relatif  à  une  riche  série  de  petits 
monuments  religieux  en  albâtre  datant  du 
moyen  âge  et  provenant  de  la  région  de  Nothin- 
gham. 

M.  Guiffrey  signale  un  vieil  usage  du  pays 
basque  consistant  à  graver  des  inscriptions  sur  la 
façade  des  maisons  rustiques. 

Séance  du  8  mai.  —  M.  Selbman  présente  deux 
objets  provenant  d'Angleterre  et  faisant  actuelle- 
ment partie  de  sa  collection,  à  savoir  une  enseigne 
romaine  et  un  siège  pliant  en  fer  incrusté  d'or  et 
d'argent  qui  paraît  être  une  sella  castrcnsis. 

M.  de  Rochemontaix  signale  la  découverte, 
entre  Antibes  et  Cannes,  de  pierres  sculptées 
représentant  des  trophées  guerriers,  restes  d'un 
monument  d'époque  romaine. 


Académie  des  Inscriptions.  —  Séance  du 
j  avril  içoi.  —  Société  iiiternatiotiale  des  études 
iconographiques.  —  M.  Mlintz  signale  une  fonda- 
tion nouvelle,  sans  caractère  officiel,  mais  qui 
n'en  est  pas  moins  appelée  à  resserrer  les  liens 
entre  les  érudits  de  tous  les  pays  et  à  diriger 
leurs  efforts  vers  un  but  commun. 

La  Société  internationale  des  études  icono- 
graphiques, qui  compte  parmi  ses  adhérents 
lesarchéologues  les  plus  autorisés  del'AUemagne, 
de  l'Autriche,  de  la  Belgique,  de  la  Suisse,  de 
l'Angleterre,  de  l'Italie,  de  la  Scandinavie,  de  la 
Russie,  et  qui  a  réservé  à  la  France  une  place 
des  plus  honorables  dans  son  comité  directeur, 
se  propose  de  faire  pour  l'antiquité  chrétienne 
ce  qui  a  déjà  été  réalisé  avec  tant  de  succès 
dans  le  domaine  de  l'antiquité  classique. 

Le  programme  de  la  Société  nouvelle  comporte 
l'étude  des  croyances,  des  mythes,  des  thèmes 
littéraires  de  toute  nature  qui  s'incarnent  dans 
un  tableau,  une  sculpture,  une  gravure.  Elle 
s'occupera  tour  à  tour  des  œuvres  d'art  aux- 
quelles ont  donné  naissance  soit  l'histoire,  soit  la 
légende  d'un  personnage  déterminé,  de  l'icono- 
graphie d'un  poème.  Ses  recherches  porteront  sur 
les  chefs-d'œuvre  du  grand  art  aussi  bien  que  sur 
les  manifestations  les  plus  humbles  de  l'art  po- 
pulaire. C'est  à  ces  divers  titres  que  M.  Mlintz 
signale  cette  intéressante  entreprise  à  l'Acadé- 
mie. 

Les  fouilles  d'Algérie.  —  M.  Cagnat  lit  une 
note  sur  les  fouilles  exécutées  en  1900  par  le 
service  des  monuments  historiques  en  Algérie. 


KEVUE  UE  l'art  chrétien 
19OI.    —   4'"^^    LIVRAISON. 


330 


ÎRcbue  lie  V^xt  cbittten. 


Grâce  aux  nouveaux  crédits  accordés  par  le 
Parlement,  on  a  pu,  cette  année,  fouiller  sur 
plusieurs  points  à  la  fois  et  ouvrir  des  chantiers 
dans  les  trois  départements  en  même  temps. 

Le  plus  grand  effort  a  porté,  comme  précé- 
demment, sur  les  ruines  de  Timgad.  L'espace 
qui  sépare  le  théâtre  du  Capitole  est  entière- 
ment occupé  par  des  maisons;  on  en  a  découvert 
de  nouvelles  cet  été.  Près  de  la  porte  Nord  de  la 
ville,  on  a  mis  au  jour  un  splendide  établisse- 
ment de  bains  composé  de  35  salles,  le  tout 
disposé  symétriquement  de  chaque  côté  de  l'axe 
transversal.  Nulle  part,  dans  la  ruine,  les  murs 
ne  sont  aussi  bien  conservés  qu'ici.  Beaucoup 
ont  gardé  leurs  enduits  et  les  graffitti  que  les 
baigneurs  y  avaient  gravés  pour  occuper  leurs 
loisirs. 

Le  service  des  monuments  historiques  a  égale- 
ment fait  des  recherches  sur  l'emplacement  de 
l'ancienne  Cuicul  et  de  l'ancienne  Tliubursicum 
Nianidantm. 

Chacune  de  ces  villes,  qui  étaient  fort  impor- 
tantes, possédait  un  théâtre.  Dans  les  deux 
endroits,  on  s'est  attaqué  à  la  scène  et  à  l'or- 
chestre qu'on  a  déblayés  en  partie.  Les  recher- 
ches vont  continuer  cet  été  sur  ces  points,  ainsi 
qu'à  Lambèse,  Cherrhel,  Tébessa. 

M.  Perrot  présente  quelques  observations  au 
sujet  de  cette  communication. 

Communications  diverses.  —  M.  Adrien  Blan- 
chet  fait  une  communication  relative  à  l'origine 
du  gros  tournois.  Il  démontre  que  cette  moniiaie 
d'argent,  créée  par  saint  Louis,  a  emprunté  ses 
types  du  droit  et  du  revers  à  ceux  du  denier 
tournois.  La  bordure  de  douze  lis  qui  complète 
le  revers  de  cette  monnaie  a  été  introduite  dans 
le  but  de  marquer  la  valeur  de  douze  deniers 
qui  est  celle  du  gros  tournois. 

M.  Clermont-Ganneau  fait  une  communica- 
tion sur  la  destruction  de  l'église  du  Saint-Sépul- 
cre à  Jérusalem. 

Monuments  indo-lwuddhiques.  —  M.  Charles- 
Eudes  Bonin,  vice-résident  de  France  en  Indo- 
Chine,  fait  une  communication  sur  le  monument 
archéologique  le  plus  important  qu'il  ait  exploré 
au  cours  de  sa  dernière  mission  officielle  en  Asie 
centrale.  Ce  sont  les  grottes  des  Mille  Bouddhas, 
près  de  Shatchéou  (Kanson),  cryptes  bouddhi- 
ques, ornées  de  fresques  de  style  hindou  que  M. 
Bonin  considère  comme  le  spécimen  le  plus  an- 
cien de  l'art  indo- bouddhique  en  Chine.  Les  ins- 
criptions qu'il  a  rapportées  de  cette  contrée  ont 
été  étudiées  par  M.  Chavannes,  professeur  au 
Collège  de  France,  qui  a  communiqué  le  résultat 
de  ses  observations  dans  la  séance  de  l'Académie 
du  8  février  dernier.  M.  Bonin  communique  au- 


jourd'hui les  photographies  de  ces  monuments, 
en  fait  l'historique  et  appelle  l'attention  de  l'Aca- 
démie et  des  savants  sur  son  importance  unique 
pour  l'histoire  des  religions  asiatiques. 

Séance  du  12  avril.  —  Découverte  d'une  mo- 
saïque à  Jérusalem.  —  Le  R.  P.  Lagrange,  supé- 
rieur du  couvent  des  dominicains  de  Saint- 
Etienne,  à  Jérusalem,  écrit  à  M.  Clermont-Gan- 
neau qu'on  vient  de  découvrir  dans  le  quartier 
juif  de  cette  ville,  au  Nord  de  la  porte  de  Damas, 
légèrement  à  l'Ouest,  à  peu  près  à  moitié  chemin 
de  la  porte  au  couvent,  une  fort  belle  mosaïque. 

Le  sujet  principal  :  Orphée  jouant  de  la  lyre  ; 
à  ses  pieds,  un  centaure  et  un  silène,  différents 
animaux  ;  sur  le  devant,  deux  femmes  accolées, 
séparées  par  une  sorte  de  faisceau-chandelier  ; 
l'une  tient  à  la  main  une  fleur  de  lotus  (?),  l'autre, 
un  oiseau.  Les  têtes  sont  comme  nimbées  avec 
deux  inscriptions.  Serait-ce  un  sujet  mytholo- 
gique traité  selon  la  symbolique  chrétienne  ?  On 
le  croirait,  à  juger  par  ces  deux  figures  allégo- 
riques ;  mais  tout  est  si  païen  ! 

Séance  du  10  mai.  —  Prix.  —  Le  prix  Allier 
de  Hauteroche  (numismatique  ancienne),  dont  la 
valeur  est  de  1,000  fr.,est  attribué  à  MM.  Michel 
Rostovtzew  et  Maurice  Prou,  pour  leur  ouvrage 
intitulé  :  Catalogue  des  plombs  de  l'antiquité,  du 
moyen  âge  et  des  temps  modernes,  conservés  au 
déparlement  des  médailles  et  antiques  de  la  Biblio- 
tlièque  Nationale. 

Une  somme  de  1,000  francs  est  attribuée  à 
M.  Barrière-Flavy  pour  son  ouvrage  Les  Arts 
industriels  des  peuples  barbares  de  la  Gaule. 

miroirs  funéraires  chinois.  —  M.  E.  Guimet 
présente  des  miroirs  funéraires  en  bronze  de 
l'époque  des  Han  (302  av.  à  220  ap.  J.-C). 

Les  plus  anciens  ont  des  décors  symboliques 
chinois  et  des  caractères  mystiques.  Sous  les  Han 
postérieurs,  l'ornementation  s'inspire  subitement 
de  l'art  grec  et  représente  surtout  des  raisins  avec 
des  animaux  variés. 

Cette  transformation  coïncide  avec  la  date  de 
l'introduction  de  la  vigne  en  Chine,  et  avec  l'épo- 
que des  relations  établies  entre  Alexandrie  et 
Canton  d'une  part,  et  la  Perse  et  Si-ngan-fou  de 
l'autre,  circonstances  affirmées  à  la  fois  par  les 
auteurs  grecs  et  les  auteurs  chinois. 

Congrès  des  Sociétés  savantes  de  Paris  et 
des  départements  à  Nancy.  —  Le  Congrès 
des  Sociétés  savantes  de  Paris  et  des  départe- 
ments s'est  tenu  cette  année  à  Nancy,  du  9  au 
13   avril  dernier.  Voici  (.')  la  nomenclature  des 


D'après  le  Courrier  de  l'Art. 


%và\}ànx  Des  Sociétés  ©atlantes. 


331 


communications    sur  des   sujets   artistiques  qui 
ont  été  faites  dans  la  section  d'archéologie  : 

Mardi ç  avril.  —  M.  C.  Drioton  lit  un  mémoi- 
re sur  plusieurs  retranchements  calcinés  des 
environs  de  Dijon  et  soumet  quelques  fragments 
de  poteries  recueillis  dans  ces  enceintes. 

M.  R.  Maire  donne  lecture  de  trois  mémoires 
de  M.  Aug.  Casser  consacrés  à  la  description  des 
antiquités  provenant  des  fouilles  qu'il  a  prati- 
quées à  Mantoche  (Haute-Saône),  entre  autres 
d'une  mosaïque  romaine. 

M.  Chevreux  lit  un  mémoire  sur  les  antiquités 
du  mont  Denon  près  de  Schirmeck  (Alsace-Lor- 
raine) et  spécialement  sur  le  bas-relief  représen- 
tant le  combat  d'un  lion  et  d'un  taureau,  avec 
l'inscription  Bellicus  Surburo  conservé  au  musée 
des  Vosges,  à  Épinal. 

Mercredi  10  avril.  —  M.  Cozette  signale  les 
carreaux  de  terre  vernissée  de  la  salle  du  trésor 
de  Noyon,  de  l'abbaye  d'Ourscamp  et  de  l'église 
de  Bailly,  publiés  par  M.  L.  Le  Clert. 

M.  Ch.  Denis  lit  une  note  sur  un  mortier  de 
bronze  fondu  à  Lunéville,  en  1771,  par  J.-B. 
Fourno,  comme  l'indique  une  inscription. 

M.  l'abbé  Brune  lit  une  notice  sur  l'église 
Saint-Just,  d'Arbois(Jura). 

M.  Cliquet  présente  au  nom  de  M.  Descours- 
Desacres  une  série  d'aquarelles  reproduisant  des 
carreaux  vernissés  du  XIII^  au  XVII'-  siècle  des 
fabriques  du  pays  du  Pré-d'Auge  et  de  Manerbe 
(Calvados). 

M.  L.  Germain  appelle  l'attention  sur  les  pla- 
ques en  fonte  désignées  sous  le  nom  de  «taques», 
dont  de  belles  collections  existent  au  Musée 
lorrain  à  Nancy,  et  chez  feu  M.  Metz,  aux  forges 
d'Eich,  près  de  Luxembourg. 

M.  L.  Maître  expose  le  résultat  de  ses  ob- 
servations sur  les  cryptes  de  Saint-Victor  de 
Marseille. 

M.  R.  Figer  lit  un  mémoire  sur  le  donjon  ro- 
man dp  Beanmont-sur-Sarthe.  La  section  émet 
un  vœu  pour  la  conservation  des  ruines  de  ce 
donjon,  un  des  spécimens  les  plus  intéressants  de 
l'architecture  militaire  du  XIII"  siècle,  dans  le 
département  de  la  Sarthe. 

M.  de  la  Bouralière  lit  une  note  sur  un  bas- 
relief  provenant  de  la  commanderie  du  Temple 
de  Nontgauguier  (Vienne). 

Jeudi  II  avril.  —  M.  de  Gastebois  donne  lec-, 
ture  d'une  notice  de  M.  le  chanoine  Bottier,  con- 
sacrée à  une  croix  processionnelle  du  XIV^ 
siècle,  en  bois  recouvert  d'argent  doré  et  estampé, 
ornée  à  ses  extrémités  d'émaux  translucides,  et 
conservée  à  l'église  de  Parizot(Tarn-et-Garonne). 


M.  Cournault  lit  un  mémoire  relatif  aux 
nielles  des  objets  de  fer  de  l'époque  franque  et 
aux  incrustations  d'or  et  d'argent  sur  les  objets 
persans,  arabes  et  hindous. 

M.  Demaison  lit  un  travail  sur  l'histoire  de  la 
construction  de  la  cathédrale  de  Reims. 

M.  Lefèvre-Pontalis  expose  les  résultats  des 
fouilles  qu'il  a  pratiquées  dans  la  nef  de  la  cathé- 
drale de  Chartres  et  grâce  auxquelles  il  a 
retrouvé  l'emplacement  exact  des  anciens  por- 
tails de  cette  église. 

M.  L.  Germain  communique  le  résultat  des 
études  qu'il  poursuit  sur  les  tabernacles-édicules 
de  la  Renaissance. 

M.  L.  Coutil  lit  un  mémoire  sur  les  parures 
Scandinaves  trouvées  dans  les  départements  de 
l'Eure  et  de  la  Seine-Inférieure. 

M.  L.  Maître  lit  un  mémoire  sur  les  substruc- 
tions  d'un  édifice  heptagonal  à  double  enceinte 
découvert  au  Mur,  en  Carantoir  (Morbihan). 

M.  J.  Beaupré  présente  une  liste  des  enceintes 
préhistoriques  dont  les  traces  ont  été  relevées  en 
Lorraine. 

M.  Alb.  Martin  lit  un  mémoire  sur  les  armes 
défensives  du  guerrier  à  l'époque  homérique. 

Vendredi  12  avril.  —  M.  L.Germain  énumère 
et  décrit  les  fonts  baptismaux  les  plus  intéres- 
sants de  la  Lorraine. 

M.  de  Gastebois  lit  une  notice  de  M.  le  cha- 
noine Bottier  sur  les  tissus  qu'il  a  découverts 
dans  les  reliquaires  de  l'abbaye  de  Grandselve  et 
dans  le  trésor  de  Montpezat  (Tarn-et-Garonne). 

M.  Jadart  présente  une  série  de  reproductions 
des  sceaux-matrices  de  la  collection  de  la  biblio- 
thèque de  Reims. 

M.  Prou  rend  compte  d'un  travail  de  M.  Mas- 
frand,  qui  est  un  catalogue  raisonné  des  sépul- 
tures préromanes  du  département  de  la  Haute- 
Vienne. 

M.  l'abbé  Morel  lit  un  mémoire  sur  le  Saint- 
Suaire  de  l'abbaye  de  Saint-Corneille  de  Com- 
piègne. 

M.  l'abbé  Arn.  d'Agnel  lit  un  rapport  sur  les 
fouilles  qu'il  a  faites  en  collaboration  avec  M. 
L.  Allée  dans  une  station  préhistorique  jusqu'ici 
inexplorée,  sise  sur  le  plateau  de  Vachères  (Bas- 
ses-Alpes). 

M.  L.  Germain  entretient  la  section  des  recher- 
ches qu'il  a  faites  sur  le  croissant  dans  la  symbo- 
lique chrétienne. 

M.  Em.  Bonnet  lit  un  mémoire  sur  les  mon- 
naies des  évéques  de  Lodève. 

M.  Prou  rend  compte  de  deux  travaux  trans- 
mis par  M.  l'abbé  Poulaine,  à  savoir  :  un  catalo- 


3Rc\)uc  tie  r^rt  chrétien. 


crue  de  monnaies  gauloises  recueillies  dans 
l'arrondissement  d'Avallon,  et  un  relevé  des  sé- 
pultures préromanes  signalées  dans  le  même 
arrondissement. 

Le  samedi  13  avril  a  eu  lieu,  sous  la  présidence 
du  ministre  des  Colonies,  remplaçant  le  ministre 
de  l'Instruction  publique  et  des  Beaux-Arts  em- 
pêché, l'assemblée  générale  de  clôture. 


Société  des  Lettres,  Sciences  et  Arts  de 
Bar-le-Duc.  —  M.  H.  Labourasse,  membre 
correspondant,  a  détaché  quelques  pages  d'un 
travail  considérable  qu'il  prépare  depuis  plu- 
sieurs années,  sur  les  Anciens  Us,  Coutumes, 
Légendes,  Superstitions,  Préjugés,  etc.  du  départe- 
ment de  la  Meuse. 

Les  Observations  sur  les  médailles  de  Benoîte- 
Vaux  à  propos  d'un  travail  récent,  communiquées 
par  1\L  L.  Germain,  se  rapportent  à  l'étude  que 
M.  Max-Werly  vient  de  publier  dans  la  Revue 
belge  de  numismatigue  (i  899-1900).  M.  Liénard 
avait  fait  connaître  21  médailles  de  ce  pèlerinage, 
mais  n'en  avait  reproduit  que  douze  ;  M.  Max- 
Werly  en  publie  une  trentaine,  dont  les  revers 
sont  très  variés. 


Société  d'Emulation  de  Cambrai,  t.  LUI, 

Cambrai,  1890  (Mémoires).  —  M.  le  chanoine  Mar- 
gerin,  sous  ce  titre  :  Les  cloches  et  le  clocqueman  de 
l'ancienne  église  métropolitaine  de  Cambrai,  publie 
des  notes  intéressantes  sur  les  cloches  et  les 
usages  liturgiques  d'après  un  curieux  manuscrit 
d'un  clocqueman. 


Commission  départementale  des  Monu- 
ments historiques  du  Pas-de-Calais,  t.  Il, 
2=  livraison.  Arras,  lyoo  (Mémoires).  —  M.  le  comte 
A.  de  Loisore  publie  une  étude  sur  les  vêtements 
pontificaux  d'un  évéque  d'A  rras  à  la  fin  du  XIII' 
siècle.  Il  fait  connaître  un  acte  du  mois  de  dé- 
cembre 1279  par  lequel  Pierre  de  Noyon,évêque 
d'Arras,  au  moment  d'abandonner  son  siège, 
avait  fait  donation  à  son  chapitre  de  ses  orne- 
ments ;  les  vêtements  pontificaux  énumérés  dans 
cet  acte  font  l'objet  d'un  bon  commentaire. 

Comité  des  travaux  historiques.  Bulletin, 
1900,  3nie  livr.  —  M.  L.  Maître  a  retrouvé  dans 
les  substructions  de  l'église  de  Cellier  (Loire- 
Inférieure)  qui  vient  de  disparaître,  les  restes 
d'une  tour  romaine  qui  fut  transformée  en  clocher, 
et  à  Saint-Herblon,  les  substructions  d'un  petit 
oratoire  carolingien. 

M.  R.  Drouault  signale  le  bénitier   «  des  lé- 


preux» encore  conservé  à  l'église  de  Milhac-de- 
Vontron.  M.  l'abbé  Chartraine  s'occupe  de  deux 
statues  de  la  Vierge  assise,  conservées  à  l'arche- 
vêché de  Sens,  d'un  grand  mérite  artistique. 
M.  l'abbé  Poulain  signale  divers  carrelages  peints 
anciens. 

L'église  de  Deas,  à  Saint-Philbert-de-Grandlieu, 
avec  son  vaisseau  large,  élancé,  ne  ressemble 
guère  à  ces  lourdes  églises  du  XI'^  siècle  faites 
pour  être  voiitées  ;  et  cependant,  à  certains  airs 
de  vétusté,  M.  L.  Maître,  qui  en  donne  une 
curieuse  vue  intérieure,  croit  y  reconnaître  un 
édifice  antérieur  à  l'an  mille.  A  l'encontre  de 
M.  Brutails,  il  veut  trouver  des  preuves  de  cette 
antiquité  dans  les  particularités  de  la  crypte,  <L  à 
compartiments  fermés,  munis  à'oculi  et  àefenes- 
rellœ%,  caractéristiques  à  son  avis  ;  avec  «  confes- 
sion distincte  en  rapport  avec  l'autel  majeur  de 
l'église  supérieure  »,  avec  «  sa  petite  fenêtre 
voisine  de  la  tête  du  tombeau»  qui  rappelle  les 
rites  de  la  primitive  église.  Notre  impression  est 
que  M.  L.  Maître  raisonne....  de  sentiment,  s'il 
est  permis  d'ainsi  parler.  —  lia  des  arguments 
surprenants,  comme  celui-ci  :  «  Ermentaire  nous 
dit  que  l'édifice  bâti  en  S15,  était  en  forme  de 
croix  :  or  le  chœur  allongé  que  nous  voyons, 
simulait  bien  avec  ses  deux  branches  une  croix 
de  saint  Antoine.  »  N'est-ce  pas  le  tau  de  saint 
Antoine  qu'il  faudrait  dire? 

De  la  vaste  cathédrale  de  Saint-Etienne  à 
Besançon,  achevée  en  1048  et  rasée  par  Vauban 
de  1674a  1678,  il  ne  reste  pierre  sur  pierre,  comme 
du  temple  de  Jérusalem.  On  avait  jusqu'ici 
vainement  tenté  d'en  reconstituer  les  lignes 
architecturales.  M.  J.  Gauthier  y  réussit,  à  l'aide 
d'une  gravure  ancienne  et  de  divers  documents 
écrits.  Il  lui  a  fallu  pour  cela  vingt  ans  de 
patientes  recherches,  à  reconstituer  le  plan  rai- 
sonné de  l'église,  des  chapelles  et  des  cloîtres  de 
Saint-Etienne. C'est  un  plan  fiMt  curieux  que  celui 
du  vaste  vaisseau  à  trois  nefs,  la  centrale  voûtée 
en  travées  barlongues,  les  latérales  à  croisées 
d'ogives  carrées  avec  des  chapelles  latérales  de 
double  profondeur,  des  bras  de  transepts  saillants 
et  un  chœur  à  chevet  plat  accosté  de  deux  ab- 
sides ;   le  cloître  placé  derrière  le  chevet. 

M.  L.  B.  Labordc  décrit  un  pied  de  croix  du 
(XIV'^  siècle)  de  l'ancien  monastère  de  Saint- 
Véran  près  d'Avignon. 

M.  l'abbé  Brune  signale,  au  point  de  vue  de 
l'iconographie,  quelques  statues  des  églises  du 
Jura,  celles  de  saint  Lautein,  des  saints  martyrs 
Speusippe,  Eleusippe  et  Mélasippe,  appelés  les 
saints  Jumeaux,  et  de  leur  aïeule  sainte  Léonille, 
celle  probable  de  saint  Méen  et  celle  de  saint 
Pierre  de  Vérone. 


Cra\3aujc  îies  t)OCtétés  satiantes. 


333 


Congrès  d'Archéologie  et  d'Histoire.  — 
Le  4  août  1901  aura  lieu  à  Tongres  le  XV^ 
Congrès  annuel,  sous  la  direction  de  la  Société 
scientifique  et  littéraire  du  Limbourg,  qui  fête, 
cette  année,  le  50^  anniversaire  de  sa  fondation. 

Des  excursions  seront  organisées  à  Tongres, 
en  vue  de  l'étude  de  l'antique  ville  romaine,  de 
ses  environs,  ainsi  que  du  réseau  des  voies 
romaines. 

Une  excursion  aura  lieu  par  la  vallée  du  Jaer 
à  Maestricht  et  aux  environs. 

La  ville  de  Tongres  elle-même,  qui  a  enrichi 
quantité  de  musées  européens  des  trouvailles 
provenues  de  son  sol,  possède  aujourd'hui  encore 
des  curiosités  et  des  richesses  de  premier  ordre. 

Le  comité  d'organisation  du  Congrès  s'effor- 
cera de  les  faire  valoir  par  des  conférences  et 
des  excursions. 

Voici  les  principales  questions  à  l'ordre  du  jour 
concernant  les  arts  et  l'archéologie  : 

I.  Nos  premiers  miniaturistes  subirent-ils  l'influence 
de  l'art  franc,  tel  qu'il  nous  est  connu  par  les  bijoux  du 
VI^  siècle,  recueillis  dans  les  tombes  franques  découver- 
tes dans  notre  pays  ? 

Maeterlinck. 

I I.  Quelles  sont  les  règles  à  suivre  dans  la  restauration 
des  édifices  ? 

Helleputte. 

III.  Du  rôle  et  de  l'importance  de  la  polychromie  dans 
les  églises  du  moyen  âge. 

Helleputte. 

IV.  De  quelle  époque  datent  les  remparts  qui  envelop- 
pent actuellement  la  ville  de  Tongres  ? 

Helleputtk. 

V.  Quelles  sont  les  principales  découvertes  de  peintu- 
res murales  faites  dans  les  églises  du  Luxembourg?  Que 
peut-on  conclure  de  ces  découvertes  quant  à  la  question 
de  la  polychromie  des  églises  .'' 

Abbé  Daniels. 

VI.  La  tradition  locale  attribue  à  saint  Monulphe  la 
construction  de  l'église  St-Servais  à  Maestricht,  avant 
son  remaniement  à  la  dernière  époque  ogivale.  Cette 
opinion  est-elle  soutenable  ? 

Abbé  Daniels. 

VIL  Renseigner  les  monuments  d'architecture  romane 
existant  clans  le  pays  de  Looz  et  déterminer  le  caractère 
propre  de  cette  architecture. 

Abbé  Daniels. 

VIII.  Les  principes  des  proportions  des  majeures  et 
mineures  proportionnelles  ont-ils  été  d'application  con- 
stante pendant  le  moyen  âge  dans  l'art  de  l'architecte, 
du  sculpteur  et  du  peintie  ? 

Ces  proportions  peuvent-elles  être  traduites  par  un 
tracé  géométrique  ? 

Jajiine. 

IX.  L'article  5  de  l'arrêté  royal  du  16  août  1824  est-il 
suffisant  pour  obtenir  la  conservation  des  objets  d'art  ou 
monuments  historiques  placés  dans  les  églises  ? 

Saintenoy. 


X.  Étude  de  la  restauration  des  peintures  murales. 

GlELEN. 

XI.  De  quels  moyens  l'architecte  archéologue  dispose- 
t-il  pour  stimuler  le  zèle  des  autorités  dans  la  restaura- 
tion des  monuments  historiques  en  général  et  des  ruines 
des  châteaux  féodaux  et  particulier  .' 

Arendt. 

XII.  Existe-t-il  dans  l'architecture  wallonne  du  XVI* 
siècle  des  détails  capables  de  la  caractériser?  Comment 
se  sont  répandus,  notamment  dans  une  partie  de  la 
Belgique,  au  cours  des  siècles  suivants,  certains  motifs 
ornementaux  qui  ont  leur  origine  à  Liège  et  dans  ses 
environs  ? 

D' JORISSENNE. 

XIII.  Étude  relative  aux  statues  et  images  de  la 
Vierge  et  du  serpent. 

Germain  DE  Maidy. 


Académie  royale  d'Archéologie  de  Bel- 
gique. —  La  polychromie  monumentale,  telle 
qu'on  l'a  comprise  au  moyen  âge,  est  une  chose 
superbe,  encore  incomprise  de  nos  jours.  Etrange 
oblitération  du  sens  esthétique,  tout  le  monde 
admet  l'union  de  la  sculpture  et  de  l'archi- 
tecture, on  répugne  encore  à  y  joindre  la  pein- 
ture et  à  parfaire  cette  trilogie  nécessaire,  qui 
est  dans  la  nature  des  choses  comme  elle  a  été 
dans  la  pratique  universelle.  Les  uns  vont  stig- 
matisant comme  une  monstruosité  ce  procédé  si 
puissamment  expressif  et  essentiellement  na- 
turel, tandis  que  c'est  leur  propre  sens  esthé- 
tique qui  est  altéré  ;  d'autres  cherchent  des 
compromis  entre  le  préjugé  moderne  et  l'évi- 
dence historique,  surtout  quand  il  s'agit  de 
monuments  anciens.  M.  le  chanoine  Van  Caster 
a  remarqué  que  dans  les  églises  brabançonnes 
on  ne  rencontre  guère  de  décoration  poly- 
chrome complète  ni  systématique,  mais  beaucoup 
de  peintures  fragmentaires,  votives,  etc.,  et  il  a 
cru  voir  dans  cette  circonstance  un  fait  général 
«  pour  nos  contrées  »,  sinon  une  règle  artistique. 
Voici  sa  thèse  :  En  gâicyal  les  peintures  murales 
historiées,  dans  les  églises  du  moyen  âge,  n'ont  pas 
été  dirigées  par  les  architectes  de  ces  monuments, 
ni  exécutées  d'après  un  plan  d'ensemble,  du  moins 
dans  nos  contrées. 

J'ai  cru  devoir  intervenir  dans  cette  discussion 
au  Congrès  de  Malines  en  1897, et  je  crois  l'avoir 
fait  dans  les  termes  les  plus  corrects  et  sans  me 
départir  du  respect  sympathique  que  m'inspire 
l'érudit  archéologue  malinois.  Ma  réplique  lui  a 
été  désagréable  ;  je  le  regrette  vivement.  Aussi, 
j'ai  volontiers  laissé  place  à  d'autres,  plus  auto- 
risés que  moi  d'ailleurs,  dans  cette  polémique. 
M.  J.  Helbig  a  repris  l'intéressante  controverse  ; 
nous  la  suivrons  pour  nos  lecteurs  (i).  Quant  à 

I.  Je  me  permetirai  toutefois  ici  un  mot  d'observation  personnelle 
dans  l'aparté  decebasde  page.  Qu'a  bien  voulu  dire  M.  le  chanoine 


334 


3Rebur  ïje  r^rt  chrétien. 


l'incident  de  Malines,  il  paraît  qu'il  n'est  pas 
épuisé.  M.  V.  C.  me  demande  une  rectification 
que  je  ferai  bien  volontiers.  On  la  trouvera  à  la 
fin  de  ce  compte  rendu. 

M.  V.  C.  établit  que  la  décoration  des  murs 
répond  à  un  besoin  esthétique  naturel.  Puis,  il 
distingue  entre  \a. peinture  et  X'S. polychromie. 

«  Peindi-e,  dit-il,  c'est  représenter  une  personne 
ou  une  chose  par  des  lignes  et  des  couleurs  \poly- 
c/iromer,  c'est  appliquer  des  couleurs  sur  un  objet. 
La  peinture  s'exécute  sur  des  surfaces  unies, 
tandis  que  la  polychromie  se  contente  d'orner 
de  couleurs  les  parties  saillantes.  Si  elle  fait  plus, 
elle  devient  de  la  peinture,  mais  décorative  seu- 
lement, qu'il  faut  éviter  de  confondre  avec  la 
peinture  historiée  (').  » 

La  polychromie  est  de  la  compétence  de  l'ar- 
chitecte ;  elle  est  le  complément  logique  de 
son  œuvre.  A  côté  des  parties  architecturales, 
des  lignes  saillantes,  il  y  a,  dit  M.  V.  C,  des 
parties  unies  ;  celles-ci  échappent  à  la  compé- 
tence de  l'architecte  (-). 

Or  l'architecte  n'est  généralement  pas  un 
peintre  ;  peu  d'artistes  peuvent  exceller  dans 
plusieurs  arts  à  la  fois.  Aussi  M.  V.  C.  croit-il 
que  les  architectes  du  moyen  âge  ne  se  sont  pas 
préoccupés  de  la  peinture  historiée  des  monu- 
ments qu'ils  érigeaient.  Dans  la  période  gothique 
avancée  les  membres  d'architecture  développent 
un  décor  structural  qui  absorbe  les  champs  unis 
et  élimine  la  peinture  historiée.  11  n'est  donc 
pas  étonnant  que  les  architectes  n'aient  fait  que 
de  la  polychromie.  Ils  ont  laissé  entièrement 
libre  le  peintre  proprement  dit.  Celui-ci  a  géné- 
ralement peint  des  sujets  isolés,  sans  souci  de  les 
accorder  ensemble  en  vue  d'un  effet  décoratif 
général. 

En  résumé,  M.  V.  C.  est  d'avis  que  les  archi- 
tectes de  nos  anciens  monuments  ont  pu  diriger 


V.  c.  en  cette  phrase  que  je  lis  à  la  première  page  de  son  mémoire: 

<( Aussi  ne  répondis-je  point  à  la   réplique  que  l'on  me  fit  alors, 

parce  que,  sans  l'animosilé  avec  laquelle  elle  fut  dite,  j'aurais  dû  la 
prendre  comme  une  agression  qu'il  serait  diflicile  de  justifier.  » 

On.  c'est  l'écrivain  de  ces  lignes.  M.  V.  C.  reproduit  sa  réplique. 
Les  lecteurs  du  BuUelin  de  t .■iradéinic  royale  d Archéologie  qui 
voudront  la  relire  jugeront  si  elle  contient  l'ombre  d'une  agression, 
si  elle  respire  l'animosité,  si  elle  trahit  même  la  nervosité. 

i.Nous  proposons  d'autres  définitions  :  Peindre  c'csK  appliquer  des 
couleurs  sur  un  objet,  l.a  peinture  peut  être  décorative  ou  imita- 
tive. 

On  a.'ç^AXi  polychromie  une  peinture  décorative,  soit  à  tons  plats, 
soit  ornementale,  soit  historiée,  qui  a  pour  but  un  effet  de  coloration 
harmonisée,  par  opposition  avec  la  peinture  en  trompe  l'œil. 

C'est  une  erreur  de  croire  que  la  polychromie  «  se  contente 
d'orner  de  couleurs  les  parties  saillantei  ]). 

2.  M.  Van  Caster  suppose  que  toute  surface  murale  plate  doive 
nécessairement  être  traitée  en  peinture  historiée,  et  il  admet  que 
celte  peinture  historiée  n'intéresse  pas  directement  l'architecte. 
N'est-il  donc  pas  possible  de  rehausser  des  murs  plats  de  motifs 
purement  décoratifs?  S'ils  sont  historiés,  ne  sont-ils  pas  encore 
décoratifs  par  destination  ?  L'architecte  peut-il  se  désintéresser  de  la 
décoration  de  son  oeuvre? 


ce  qu'ils  appellent  la  polychromie  de  leurs 
œuvres  (c.-à-d.,  la  peinture  décorative  des  mem- 
bres d'architecture,  à  l'exclusion  des  champs 
unis  des  murs).  En  fait,  les  décorations  de  ce 
genre  n'ont  été  que  rarement  exécutées  avant 
le  XIII<:  siècle. 

A  partir  de  cette  époque,  les  architectes,  en 
multipliant  les  lignes  structurales,  paraissent 
avoir  voulu  exclure  l'art  du  peintre.  Les  faits 
prouvent  que  les  architectes  n'ont  presque  rien 
fait  pour  la  peinture  des  églises.  (Ces  conclusions 
restent  d'ailleurs  en  deçà  du  titre  de  la  dis- 
sertation, beaucoup  plus  catégorique  :  Les  pein- 
tures murales  du  moyen  âge  n'étaient  pas  exécutées 
d'après  un  plan  d'ensemble,  dans  nos  contrées.) 

Répondant  à  M.  Van  Caster,  M.  J.  Helbig 
affirme  à  son  tour  qu'il  est  naturel  de  décorer 
les  murs.  Il  conteste  la  distinction  faite  par 
M.  V.  C.  entre  la  polychromie  et  la  peinture  ; 
la  polychromie  n'est  autre  chose  que  de  la  pein- 
ture. La  peinture  s'exécute  aussi  bien  sur  des 
surfaces  unies  que  sur  d'autres.  La  polychromie, 
au  sens  de  M.  V.  C,  a  souvent  orné  des  surfaces 
planes  :  rinceaux,  arcatures,  étoffes,  etc. 

Rarement  l'architecte  est  capable  de  concevoir 
la  synthèse  de  son  œuvre;  mais  quand  il  est  le 
vrai  maître  de  l'œuvre,  il  lui  revient  de  diriger  le 
travail  du  peintre. 

Certes,  les  circonstances  ont  rarement  permis 
l'achèvement  du  décor  conçu  par  les  pieux 
auteurs  des  grandes  églises  du  moyen  âge,  et 
l'exécution  des  peintures  s'est  souvent  trouvée 
abandonnée  à  l'initiative  des  décorateurs  et  des 
donateurs  particuliers.  Mais  vouloir  réduire  à 
ces  peintures  fragmentaires  le  rôle  de  la  peinture 
murale  au  moyen  âge,  regarder  comine  des  ex- 
ceptions les  cas  où  le  grand  art  répond  à  sa 
véritable  destination,  c'est  méconnaître  l'esprit 
du  moyen  âge. 

C'est  ce  que  M.  M.  établit  par  de  nombreux 
exemples.  Il  invoque  le  témoignage  du  moine 
Ernold  Migellus  (8o6)  décrivant  les  peintures 
murales  de  la  chapelle  palatine  d'Ingelheim,  celui 
d'Ekkehard  (1031-1051),  traçant  le  programme 
des  peintures  de  la  cathédrale  de  Mayence,  et  du 
chroniqueur  Gilles  d'Orval,  décrivant  l'ensemble 
des  peintures  de  la  catliédrale  bâtie  par  Notger 
(970-1008)  que  le  feu  venait  de  détruire.  Puis  il 
cite  les  peintures,  murales  des  cathédrales  de 
Brunswick,  de  Nuremberg,  de  Constance,  de  Co- 
logne. 

Des  archéologues  éminents,  comme  Essenwein 
et  Reichensperger,  ont  proclamé  que  de  pareilles 
peintures,  se  rapportant  à  une  idée  d'ensemble, 
supposent  des  plans  préconçus,  une  conception 
décorative  systématique. 


%và\3imx  î5es  ^ociétég  0at)antcs. 


10  C 


Telles  sont  encore  les  peintures  murales  des 
églises  de  Schwarz  Rheindorf  (i  15  i)  et  de  St- 
Georges  à  Oberzell,  de  plusieurs  églises  de  West- 
plialie,  de  celle  de  St-Nicolas  de  Soest  et  de  Met- 
teler  près  de  Dortmund. 

En  France,  on  peut  citer  Saint-Savin,  la  Sainte- 
Chapelle  de  Paris,  et  bien  d'autres. 

En  Italie,  on  n'a  que  l'embarras  du  choix  le 
plus  riche  :  Parme,  Assise,  Sienne,  Padoue,  Flo- 
rence, Rome,  offrent  en  foule  de  ces  ensembles 
de  décorations  picturales, à  la  fois  historiées  et  dé- 
coratives, qui  ne  font  qu'un  avec  la  construction, 
qui  épousent  les  lignes  et  la  surface  de  l'archi- 
tecture, et  font  partie,  avec  la  structure,  d'un  vé- 
ritable composé  organique  d'une  parfaite  unité. 

!..    C LOQUET. 

Rectification  demandée.  —  L'an  dernier  j'ai 
rendu  compte  de  la  si  intéressante  notice  de 
M.  le  chanoine  Van  Caster  relative  aux  restes  de 
peintures  murales  découvertes  à  Saint- Rombaut 
de  Malines  (').  J'ai  cru  devoir  alors  revenir  sur 
l'incident  rappelé  plus  haut.  J'avais  dit  au  Con- 
grès, que  la  polychromie  des  édifices  a  été  une 
pratique  universelle  de  tous  les  peuples,  dans 
tous  les  temps  et  dans  tous  les  styles,  sauf  chez 
nous,  pendant  les  deux  derniers  siècles.  Dans  ma 
pensée  les  mots  ici  soulignés  (peu  exacts  peut- 
être),  signifiaient  dans  nos  contrées  (France, 
Belgique,  etc.).  —  M.  V.  C.  me  citant  dans  sa 
notice,  a  voulu  préciser  et  a  imprimé  sauf  en 
Belgique.  A  mon  avis  c'était  altérer  ma  pensée 
et  mettre  dans  ma  bouche  une  grosse  erreur; 
une  énormité,  disait  une  phrase  de  mon  compte 
rendu  (-). 

Seulement  cette  phrase  était  mal  tournée  ;  on 
y  lit  :  «  sauf,  ajoute  M.  Van  Caster,  en  Belgique, 
etc.  »  On  pouvait  croire  que  M.  V.  C.  avait 
ajoute  un  mot  à  ce  que  j'avais  dit  ;  il  n'en  est  rien, 
il  n'a  fait  que  modifier  un  mot  de  ma  phrase  ;  il 
n'y  a  pas  grande  différence,  mais  ce  n'est  pas  la 
même  chose. 

Lui  ayant  communiqué  l'épreuve  avant  tirage, 
M.  V.  C.  m'avait  demandé  de  changer  mon  texte. 
J'avais  supprimé  l'équivoque,  adouci  le  terme 
«  énormité  »  et  d'autres  encore. . .  sur  une  épreuve 
qui  malheureusement  a  été  perdue  de  vue  par 
le  typographe,  l'insertion  de  l'article  ayant  été 
ajournée. 

Cette  fois,  j'espère,  voilà  les  choses  remises  au 
point  à  la  satisfaction  de  M.  le  chan.  Van  Caster. 

L.  C. 

Conférence  d'histoire  et  d'archéologie  du 
diocèse  de   Meaux.   —  Cette  Société   modèle 

1.  V.  Revue  de  V .4rt  chrétien,  année  igoo,  p.  533. 

2.  V.  Ibid. 


publie  un  bulletin  qui  peut  servir  de  type  aux 
publications  similaires.  Sous  son  impulsion,  les 
ecclésiastiques  du  diocèse  étudient  l'art  ecclésias- 
tique et  fouillent  leurs  archives.  On  remet  au 
jour  bien  des  choses  intéressantes  oubliées,  ou 
cachées.  M.  Avalard,  curé  de  Saint-Nicolas  à 
Meaux, déterre  deux  bas-reliefs  de  la  Renaissance 
encore  pieuse,  représentant,  selon  la  tradition, 
la  descente  de  croix  et  la  mise  au  tombeau  du 
Christ.  M.  G.  Leroy,  bibliothécaire  de  la  ville 
de  Melun,  exhume  la  copie  de  l'obituaire  dis- 
paru de  l'abbaye  de  Marbeau.  M.  A.  Vernon 
poursuit,  d'après  le  compte  de  la  Marguillerie, 
l'histoire  de  l'église  de  Saint-Denis  de  Coulom- 
miers,  durant  les  quatre  derniers  siècles.  M.  O. 
Estournet  décrit  une  cloche  de  1687,  etc.  Notons 
encore  une  étude  sur  l'iconographie  de  sainte 
Geneviève,  où  l'on  signale  une  déformation  de  la 
belle  et  simiile  légende  populaire  de  la  prétendue 
bergère.  Parmi  les  comptes  rendus  bibliographi- 
ques, signalons  la  reproduction  en  gravure  d'une 
remarquable  statue  de  saint  Mammès,  martyr 
(111=  siècle). 

L.  C. 


Institut  Archéologique  du  Luxembourg, 
t.  XXXV,  Arlon,  1900  {Bulletin).  —  Deux  spé- 
cialités constituent  l'intérêt  du  musée  archéolo- 
gique d'Arlon  :  les  inscriptions  romaines  et  les 
taques  de  foyer  historiées.  IVI.  J.  B.  Sibenaler 
donne  une  bonne  description  de  ces  dernières; 
il  nous  renseigne  sur  l'activité  des  forges  luxem- 
bourgoises  au  XVL',  auXVII^  et  au  XVIIIe 
siècle. 

M.  Van  Werveke  donne  wne  Notice  sur  la 
vallée  de  l'Eissch,  Luxembourg,  Remich  et  Nennig. 
M.  Tandel  reproduit  un  rapport  que  M.  Charles 
Lagasse-De  Locht,  président  de  la  Commission 
des  Monuments,  a  fait  au  gouverneur  de  la  pro- 
vince sur  l'église  d'Attert. 


Société  historique  et  littéraire  de  Tournai. 

Les  archéologues  tournaisiens  ont  célébré  le  2 

juin  le  jubilé  de  cinquante  ans  comme  membre, 
de  leur  vénérable  président,  M.  le  comte  de 
Nédonchel,  et  le  jubilé  de  vingt-cinq  ans  de  fonc- 
tions de  leur  distingué  secrétaire  M.  Soil. 

La  journée  a  débuté  par  une  cérémonie  offi- 
cielle à  l'Hôtel  de  Ville,  où  se  trouvaient  réunis 
aux  côtés  des  jubilaires,  outre  les  membres  du 
Conseil  communal,  les  membres  de  la  Société 
archéologique  de  Tournai,  M.  le  sénateur  comte 
de  Limbourg-Stirum,  M.  le  représentant  Du- 
quesne,  M.  le  baron  du  Sart,  gouverneur  du 
Hainaut  ;  MM.  le  vicomte  de  Ghellinck  et  Don- 
net,  président  et  secrétaire  de  l'Académie  royale 


336 


Brtut  lit  r^vt  cbrctien. 


d'archéologie  de  Belgique  ;  des  députations  des 
sociétés  archéologiques  de  Gand,  de  Mons,  de 
Douai,  de  Soignies,  de  Namur,  de  la  Commission 
royale  des  monuments,  de  la  Gilde  de  Saint- 
Thomas  et  de  Saint-Luc,  de  la  Société  numis- 
matique de  Bruxelles  ;  des  membres  du  tribunal 
civil,  de  nombreux  membres  du  clergé,  du  bar- 
reau, etc. 

M.  le  comte  du  Mortier,  président  du  comité 
organisateur,  en  remettant  aux  héros  de  la  fête 
des  médailles  d'or  frappées  à  leur  effigie,  a  fait 
l'éloge  du  vénérable  président  et  du  dévoué 
secrétaire  qui  ont  tant  contribué  à  la  prospérité 
de  la  Société  et  au  développement  du  mouve- 
ment artistique  dans  la  région  tournaisienne. 

M.  le  bourgmestre,  au  nom  de  l'Administra- 
tion communale,  a  uni  ses  félicitations  à  celles 
de  la  société  et  M.  le  baron  du  Sart,  à  son  tour, 
s'est  déclaré  heureux  de  pouvoir  assister  à  cette 
fête  en  sa  qualité  officielle  d'abord,  mais  surtout 
comme  Tournaisien. 

M.  le  chanoine  Van  den  Gheyn,  de  Gand,  dans 
un  discours  très  éloquent,  a  félicité  les  jubi- 
laires au  nom  des   sociétés  étrangères  et    MM. 


de  Nédonchel  et  Soil  ont  remercié  chaleureuse- 
ment toutes  les  notabilités  du  monde  officiel  et 
artistique  qui  s'étaient  associées  à  la  manifesta- 
tion organisée  en  leur  honneur. 

Lesorateurs  ont  fait  ressortir  l'extrême  vitalité 
de  la  société  archéologique  de  Tournai,  qui  n'a 
pas  publié  moins  de  55  beaux  volumes  sur  l'his- 
toire, l'archéologie,  les  arts  industriels  tournai- 
siens  et  les  arts  décoratif  et  monumental. 

Elle  a  été  aussi  pour  beaucoup  dans  l'œuvre 
de  la  restauration  de  la  cathédrale,  dont  elle 
poursuit  le  dégagement  avec  la  plus  grande 
énergie,  dans  la  conservation  du  Pont-des- 
Trous,  de  la  Tour  Henri  VII,  des  tours  de  Mar- 
vis  ;  dans  la  création  des  musées  communaux, 
dans  l'organisation  du  Congrès  archéologique 
de  1895. 

A  notre  tour,  nous  présentons  nos  filicitations 
à  rémittent  et  tant  estimé  comte  de  Nédonchel 
et  à  M.  Soil,  un  des  collaborateurs  de  la  Revue 
de  l'Art  clirctien,  l'écrivain  archéologue  estimé, 
dont  nos  lecteurs  connaissent  l'érudition. 

L.  C. 


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^m^m^^^^m  !6ibltograp!)ie.  ^ 


LE  DIX-NEUVIEME  SIECLE.  LES  MCEURS 
LES  ARTS,  LES  IDÉES.  —  Paris,  Hachette 
1901,  gr.  in-4°. 


S'IL  est  un  âge  de  l'histoire  peu  connu,  c'est 
assurément  la  période   la  plus   voisine   de 
nous.   La   distance  nous  permet  seule,  en  effet, 


Le  Pain  bénit,  par  Dai;nan-Rou\'ebet. 


REVUE  UE  l'art  CHRÉTIEN 
1901.    —    4'""^    nVRAIPON. 


338 


Bcbuc  br  r^rr  cbvcticiu 


de  dégager  les  grands  faits,  trop  nombreux,  trop 
touffus  quand  il  s'agit  de  nos  contemporains  et 
de  notre  vie  quotidienne.  Aussi  ce  XIX«  siècle, 
si  luxueusement  édité  par  la  librairie  Hachette, 
est-il  une  véritable  fête  pour  les  yeux  et  pour 
l'intelligence  de  ceux  qui  aiment  à  revivre  les 
jours  si  rapidement  écoulés. 

Les  premières  années  du  siècle  passé  sont  déjà 
du  domaine  réel  de  l'histoire,  car  bien  rares  sont 
ceux  qui  ont  aperçu  Napoléon  l",  Jokséphine,  la 
Cour  impériale  ;  mais  il  en  reste  qui  ont  vu 
Charles  X,  Louis-Philippe  ;  nombreux  enfin  sont 


Gallia,  p.ar  MokKAf-VAUTHiER. 

ceux  qui  ont  connu  Napoléon  III.  Et  le  dévelop- 
pement des  chapitres  qui  leur  sont  consacrés  est 
justement  en  raison  inverse  de  leur  éloignement. 
C'est  surtout  avec  le  second  Empire  que  se 
développe  ici  curieusement  la  vie  tout  entière 
d'une  société  élégante,  aujourd'hui  disparue  ;  les 
arts  si  protégés  dans  la  deuxième  moitié  du  siècle 
y  sont  longuement  étudiés,  et  pour  n'être  pas  de 
l'archéologie,  on  n'en  est  pas  moins  heureux  de 
revoir  passer  sous  ses  yeux,  les  chefs-d'œuvre 
qui,  de  1800  à  1900,  illustrèrent  une  époque 
éprise  d'art  et  de  science. 

F.  DE  M. 


BIBLIOGRAPHIE  DES   INVENTAIRES. 

1.  —  COMPTES  DE  MÉNAGE  DE  JEANNE 
DE  LAVAL  (1455-1459),  par  le  P.  Ubald  d'Alen- 
çoN,  capucin,  dans  Y  Anjou  historique,  1901,  pp.  394- 
406. 

CE  document  existe  manuscrit  à  la  biblio- 
thèque d'Angers.  Au  lieu  de  le  reproduire 
textuellement,  quitte  à  supprimer  les  répéti- 
tions et  les  inutilités,  l'auteur  n'en  donne  que 
des  e.xtraits,  entremêlés  à  sa  prose.  S'il  s'en  con- 
tente personnellement  et  si  ses  lecteurs  trouvent 
de  la  sorte  la  lecture  plus  agréable,  je  ne  puis 
taire  que  pareil  procédé  n'est  nullement  scienti- 
fique ;  tout  au  plus  pourra-t-on  voir  là  une  intro- 
duction à  une  édition  complète. 

En  1456,  René  d'Anjou  avait  peint  un  porte- 
ment de  croix.  Les  frères  mineurs  de  Laval,  à 
qui  il  offrit  ce  tableau,  l'en  remercièrent  par 
une  lettre  qui  en  fait  l'éloge  :  «  Ung  imaige  de 
pitié  portant  la  croix,  le  plus  piteux,  le  mieux 
portraict  selon  la  réale  vérité  du  fait  que  tous 
ceulx  qui  le  regardent  en  font  grande  admiration 
et  en  le  regardant,  ont  de  leur  rédempteur  moult 
grand  compassion.  »  Jeanne  fit  faire  le  cadre. 

Elle  fit  exécuter  en  cire,  par  maître  Odinet, 
imagier,  et  peindre  par  Jean  Coppicii,  un  «  veu  » 
ou  ex-voto,  qu'elle  donna  à  «  l'église  des  frères 
prescheurs  de  nostre  ville  de  S.  Maximin.  »  Le 
bougran  sur  lequel  le  tableau  fut  appliqué  reçut 
les  armes  du  roi  et  de  la  reine  de  Sicile. 

2.  —  INVENTAIRE  DE  LA  MAISON  CU- 
RIALE  DE  LA  CROUSILLE,  EN  1459,  par  SaLA- 
BERT,  dans  le  Bulletin  de  la  Société  arclicologique  du 
Midi,  1900,  pp.  Il  2- Il  6. 

Cet  inventaire  ne  compte  que  33  articles  non 
numérotés.  Écrit  en  latin,  il  n'a  été  traduit  qu'à 
peu  près  ;  un  mot,  qui  revient  deux  fois,  à  la 
suite  du  linge,  est  inconnu  des  glossaires  :  «  Una 
botana  senex,  longitudinis  duarum  cannarum 
vel  circa,  listrata  diversis  listris  lividi  coloris. 
Item  plus,  alla  botana  senex,  longitudinis  septem 
palmarum  vel  circa,  modo  simili  listrata.  » 

La  toile  est  de  Bourgogne,  du  pays  ou  de 
France.  «  Quatuor  lintheamina  nova  telc  prime 
vocate  de  Borgonha.  Alia  quinque  lintheamina 
tele  Uni  presentis  patrie.  Unam  longieram  novam 
canapis,  operis  Fransie.  » 

Cette  toile  est  de  deux  qualités  :  prime  ou 
fine  et  à'ctoupes,  grossière  :  «  Mape  tele  lini  de 
stopis.  Longieram,  orditam  fili  priini  et  textam 
de  stopis.  » 

3.  —  INVENTARIO  DELLE  ARMI  E  DELLE 
MUNIZIONI     DA    GUERRA    CONSEGNATE    A 


2l5ibUograpl)te. 


339 


GIUSKPPE  SGARABELLI,  SKNIORE  DEL 
DUC  A  ALESSANDRO  H  PICO,  dans  le  Giornale 
araldico,  Pise,  1899,  pp.  237  238. 

Ces  armes  et  munitions  se  trouvaient  réparties 
entre  trois  arsenaux,  à  Mirandola.  L'inventaire 
est  surtout  curieux  par  les  noms  donnés  aux 
engins  de  guerre.  Il  y  a  des  cannoni,  des  mezzi 
cannoni,  des  cannoni  basiai-di,  des  falernetti,  des 
sagri,  etc. 

Les  boulets  sont  de  fer  ou  de  marbre,  les 
canons  de  bronze  ou  de  fer. 

Les  inortari  servaient  pour  les  bombe  et  les 
viortaretti  pour  les  fêtes.  On  y  trouve  aussi 
24  lances  pour  le  jeu  de  la  quintaine,  quintana. 
Les  fochi  artificiali  étaient  gardés  dans  des  barils 
cerclés  de  fer.  Je  m'arrête,  car  beaucoup  d'autres 
mots  ne  peuvent  intéresser  que  des  spécialistes. 

4.  —  LIVRE  DE  RAISON  DE  JEAN  DE  MA- 
TEAU,  DE  GOULLES  (1729-1740),  par  Louis 
GuiBERT,  dans  le  Bulkt.  de  la  Soc.  arch.  de  Brive, 
1900,  pp.  508-515. 

Il  débute  par  cette  pieuse  formule  :  In  nomine 
Doviini,  amen.  Lausque  divœ  Triadi. 

5.  —  LIVRE  DE  COMPTES  DE  LA  FAMILLE 
MAUFLE  (1740-1825),  par  Louis  Guibert,  dans  le 
Bullet.  de  la  Soc.  arch.  de  Jh-ive,  1900,  pp.  516-520. 

N'a  d'intérêt  que  pour  le  prix  du  bétail,  les 
fermages  et  les  gages  des  domestiques.  Une 
servante  reçoit,  en  1795  :  «  8  aunes  toille,  dont 
4  étoupe  et  4  mêlés,  un  cotillon  de  droguet  mêlé, 
une  brassière  de  droguet  bleu  »  ;  mais  elle  n'a 
droit  qu'à  «  la  moitié  des  pratiques  »  ou  pour- 
boires donnés  à  l'occasion  de  la  vente  «  des 
cochons  »,  qu'elle  est  chargée  d'élever. 

6.  —  LIVRE  DE  RAISON  DE  JOSEPH  LEY- 
NIA,  JUGE  DE  BEAUMONT  (1741-1801),  par 
Champeval,  dans  le  Bullet.  de  la  Soc.  arch.  de  Brive, 
1900,  pp.  521-522. 

En  1745,  un  domestique  recevait  :  «  27  liv. 
argent,  20  sols  pour  chapeau  et  sabots,  plus  i  liv. 
laine,  4  aunes  toile  bouiradisse  et  i  de  grosse.  > 
La  fille  n'avait  que  «  9  liv.  argent,  4  aunes  toile 
bouiradisse,  i  de  brin,  I  tablier  droguet,  I  liv. 
laine,  plus  15  s.  pour  sabots  ».  En  1783,  les 
«  sabots  de  domestique  »  coûtaient  «  20  sols  » 
et  la  «  ferrure  de  sabots  de  femme,  7  sols  ».  Les 
pièces  se  nomment  ici  aventures. 

7.  —  INVENTAIRE  DES  MEUBLES  DU 
CHATEAU  DE  JARNAC,  DRESSÉ  LE  29  NO- 
VEMBRE 1762  ET  JOURSSUIVANTS,  PUBLIÉ 
D'APRÈS  UN   MANUSCRIT    AUTHENTIQUE, 


AVEC  UNE  HÉLIOGRAVURE,UNFACSIMILE 
ET  UNE  NOTICE  HISTORIQUE,  par  Ph.  Dela- 
main;  Niort,  Clauzot,  1900,  in-4"'  de  XVIII-i2r  pag. 

Ce  château  était  situé  dans  la  Charente,  la 
Révolution  l'a  détruit.  Il  appartenait  aux  comtes 
de  Jarnac  et,  par  substitution,  aux  de  Rohan- 
Chabot.  Les  articles  de  l'inventaire  de  1762 
montent  à  395,  dont  251  pour  Jarnac  et  le  reste 
pour  le  «  château  de  la  Vénerie  »,  qu'il  eût  été 
mieux  de  numéroter  à  part. 

La  publication  est  très  soignée  comme  édition 
et  elle  figurera  bien  sur  la  table  d'un  salon.  J'y 
aurais  voulu  ce  double  complément  indispen- 
sable :  une  table  alphabétique  des  mots  employés, 
auxquels  parfois  on  recourra  pour  expliquer  des 
documents  analogues,  et  quelques  annotations, 
pour  donner  la  signification  de  certains  termes 
peu  usités  et  qu'on  ne  trouve  pas  toujours  dans 
les  Glossaires.  A  ce  titre,  je  vais  en  citer  quatre. 

Badine,  espèce  de  tisonnier  en  fer  mince,  sem- 
blable à  une  baguette,  appelée  vulgairement  de 
ce  nom  :  «  Une  petite  pincette  ou  badinne  de 
cuivre  jaune  »  (n°  11).  —  i.  Une  pelle,  des  pin- 
cettes et  des  badinnes  »  (n°  79). 

Biribi,  sorte  de  jeu,  qui  reste  à  déterminer  : 
«  Un  jeu  de  biriby,  avec  plusieurs  de  ses  instru- 
ments »  (n°  16). 

Grimace.  «  Plus,  une  table  de  toilette,  avec 
son  tiroir...  De  laquelle  commode  ayant  fait 
ouverture,  s'y  est  trouvé...  une  grimasse  ou  pe- 
lotte,  le  tout  servant  à  la  toilette  de  la  dite 
dame  ».  Ce  mot  s'emploie  encore  à  Poitiers  dans 
les  communautés.  Furetière  en  a  donné  cette 
définition  :  «  Grimace  est  une  toile  couverte 
d'étoffe,  dont  les  dames  se  servent  à  leur  toilette 
et  au  couvercle  de  laquelle  il  y  a  une  pelotte  pour 
mettre  des  épingles  ». 

Sauterelle.  «  Une  sphère,  un  globe,  une  saute- 
terelle  et  autres  instruments  servant  à  la  géomé- 
trie, le  tout  au  nombre  de  quatre  pièces  ».  Con- 
sultons encore  Furetière  :  «  Sauterelle,  instru- 
ment de  géométrie,  fait  de  deux  règles  mobiles 
et  assemblées  par  un  de  leurs  bouts  en  charnière 
comme  un  compas  ». 

8.  —  COMPTE  D'APOTHICAIRE,  de  1766  à 
1777,  par  Delmond,  dans  le  Bullet.  de  la  Soc.  arch.  de 
Brive,  1900,  pp.  613-617. 

Ce  «  Mémoire  des  drogues  et  médicamens 
fourni  à  M.  Lacombe  de  Bonneval  »  présente 
quelques  particularités  curieuses.  Ainsi  la 
<i  morue  »,  qui  revient  souvent,  est  considérée 
comme  remède  :  «  une  morue  »,  «  10  sols  de 
morue  ».  Ce  qui  est  plus  étonnant,  c'est  de  voir 
employer  \ç.sAgHus,  chose  sacrée  qui  ne  pouvait 


540 


jRebue  De  rSrt  cj)vctten. 


pourtant  pas  se  vendre  :  «  deux  onces  agnus 
dei,  \6  sols  y>.  La  «  poudre  de  vipère  »,  prise  par 
«  once  »,  au  prix  de  2  livres,  était  «  un  spéci- 
fique contre  le  venin  et  propre  à  purifier  le  sang, 
à  guérir  la  petite  vérole,  les  fièvres,  la  ladrerie 
et  le  scorbut  »  (Nie.  Lemery,  Traite  des  drogues 
simples,  Paris,  17 14).  La  «  segniée  »  se  prati- 
quait, non  seulement  «  au  bras  »,  mais  aussi  «  à 
la  langue  ».  La  «  thériaque  »  figure  seule,  ou 
mélangée  «  d'huile  d'amande  et  autant  eau  de 
fleur  d'orange  ». 

9.  —  INVENTAIRE  DE  L'ÉGLISE  DE  VIL- 
LETTE,  AN  11(1793),  dans  le  Recueil  de  mémoirei, 
et  documents  de  l'Académie  de  la  Val  d'Iscre,  Moutiers, 
1900,  pp.  360-362. 

J'ai  écrit  inventaire,  à  cause  de  la  série,  mais 
le  vrai  titre  est  Procès-verbal  du  Juge  de  paix\ 
chargé  par  «  l'administration  »  de  rechercher 
«  dans  chaque  commune  »,  «  la  vaisselle  et  vases 
d'or  et  d'argent  et  autres  effets  précieux  des 
églises  ».  La  déception  fut  grande,  car  il  n'y  avait 
à  Villette  que  deux  calices  d'argent,  «  un  osten- 
soir d'argent  »  et  «  une  boîte  où  est  le  S.  Crème 
d'étain  ».  Ce  peu  de  vases  dénote  une  grande 
pauvreté  au  milieu  de  ces  montagnes  de  la 
Tarentaise. 

X.  B.  DE  M. 


RÉPERTOIRE  GÉNÉRAL  DES  COLLEC- 
TIONNEURS ET  DES  PRINCIPAUX  ARTIS- 
TES, LETTRÉS,  SAVANTS  ET  CURIEUX  DE 
LA  FRANCE,  LA  BELGIQUE  ET  LA  SUISSE, 
par  E.  Renard,  avec  un  AVANT-PROPOS,  par 
Ris-Paquot.  Paris,  1901,   in- 12  de  XXVI-yoS  pages. 

Ce  gros  volume  est  indispensable  à  tous  les 
amateurs,  qui  y  trouveront  à  se  renseigner  com- 
plètement sur  les  collectionneurs  et  leurs  collec- 
tions. Personne  n'a  été  oublié  dans  ce  vaste  re- 
cueil, qui  paraît  pour  la  seconde  fois  et  qui  sera 
continué  ultérieurement,  afin  de  tenir  le  public 
toujours  au  courant.  Des  signes  spéciaux  pré- 
cisent chaque  genre  de  collections,  histoire  natu- 
relle aussi  bien  qu'archéologie,  bibelots  et  biblio- 
thèques, etc.  Le  classement  permet  de  s'y  retrou- 
ver aisément,  car  il  procède  par  départements 
et,  dans  chacun,  par  localités,  selon  l'ordre 
alphabétique.  A  la  fin  vient  une  «  Liste  des 
marchands,  avec  adresses  et  professions  ».  Tout 
cela  est  très  pratique  et  se  recommande  de  soi. 
Nous  félicitons  du  succès  obtenu  l'infatigable 
travailleur  qui  n'a  pas  reculé  devant  un  pareil 
labeur  à  l'avantage  de  la  science  et  du  progrès. 

X.  B.  DE  M. 


LA  JEUNESSE  DU  PÉRUGIN  ET  LES  ORI- 
GINES DE  L'ÉCOLE  OMBRIENNE,  par  M.  l'abbé 
Broussolle,  aumônier  du  lycée  Michelet  à  Paris, 
avec  préface  de  J.  K.  Huysmans.  —  i  vol.  in-8°  de 
561  pp.,  avec  de  nombreuses  reproductions  d'après  la 
photographie.  Paris,  H.  Oudin,  1901. 

VOICI  un  livre  aux  grandes  lignes  unpeu  flot- 
tantes, mais  tel  qu'on  en  voudrait  posséder 
sur  toutes  les  écoles  primitives.  Sur  le  XVL'  siècle 
italien,  il  n'y  a  plus  grand  chose  à  dire,  ou  du 
moins  l'on  ne  semble  pas  très  disposé  aujourd'hui 
à  approfondir  le  sillon  déjà  tracé.  Avouons-le 
donc,  peut-être  parce  qu'il  semble  avoir  livré 
tous  ses  secrets,  l'admirable  XVI'^  siècle  n'est 
plus  à  la  mode  ;  à  beaucoup  il  ne  paraît  pas  assez 
chrétien,  à  d'autres,  épris  du  détail  curieux,  de 
la  patiente  ciselure  de  l'exécution,  de  la  vérité 
la  plus  anecdotique,  trop  oratoire,  pas  assez 
intime  et  voisin  de  nous.  Et  telle  est  la  réaction 
actuelle  que  dans  la  préface,  mise  en  tête  du 
présent  volume,  M.  Huysmans  va  jusqu'à  re- 
procher à  «  l'odieux  Raphacl  »  ses  madones 
«  douceâtres  »  et  ses  <i  nourrices  purement  hu- 
maines ».  Il  est  difficile,  on  le  sait,  de  plaire  à 
l'auteur  de  la  Cathédrale,  et  la  seule  chose  à  faire 
est  de  lui  laisser  la  responsabilité  de  ses  épithètes. 
Je  ne  puis  cependant  ne  pas  faire  remarquer  que 
celle  de  «  douceâtre  »  est  au  moins  singulière, 
appliquée  à  des  figures  comme  la  Vierge  à  la 
Chaise,  la  Madone  de  Saitit- Sixte  et  la  Vierge 
aux  Poissons. 

La  vérité  est  que  Raphacl  subit  le  contre- 
coup d'un  double  mouvement  des  esprits.  II  y  a 
d'abord  la  demi-défaveur  dans  laquelle  est  tombée 
l'antiquité  ;  ensuite  le  retour  d'une  génération 
blasée  vers  la  naïveté  des  origines.  Je  m'expli- 
que :  assurément  l'art  grec  n'a  pas  cessé  d'être 
l'art  commun  des  peuples  civilisés,  et  on  ne  l'a 
pas  fait  déchoir  du  rocher  glorieux  de  l'Acropole. 
Sans  doute  aussi  on  n'a  jamais  mieux  connu 
l'antiquité  dans  ses  profondeurs,  mais  jamais 
aussi  l'archéologie  ne  l'a  plus  librement  discutée, 
la  critique  n'a  établi  plus  de  divisions  et  de 
rangs  ;  elle  n'est  plus  intangible  et  sacrée,  rien 
ne  l'est  plus,  à  vrai  dire,  en  ces  temps  de  dis- 
cussions à  outrance,  et  peut-être  paye-t-elle  ainsi 
le  fétichisme  dont  elle  a  été  si  longtemps  l'objet. 
D'autre  part,  comme  à  toutes  les  époques  d'ex- 
trême raffinement,  on  demande  à  l'art  les  im- 
pressions les  plus  subtiles,  les  plus  nouvelles,  et 
c'est  ainsi  qu'il  est  de  mode  de  trop  aimer  Botti- 
celli  si  parfaitement  inconnu  au  grand  public,  il 
y  a  un  demi-siècle.  On  se  plaît  aux  naïfs  et 
aux  compliqués,  c'est  souvent  tout  un,  enfin  on 
raffole  des  énigmatiques  ou  prétendus  tels.  C'est 
le    propre   des   âges    où    l'invention    se   dérobe 


B(bliograpl)te, 


341 


épuisée,  que  cette  passion  pour  les  époques  loin- 
taines, de  sincérité  naïve,  un  peu  gauche  mais 
émue,  parce  que  le  propre  de  l'homme  est 
d'aimer  ce  qui  lui  manque  le  plus. 

L'Ombrie  est  le  domaine  de  M.  l'abbé  Brous- 


solle  ;  il  l'a  parcourue  à  maintes  reprises  en  tous 
sens,  à  la  manière  d'un  pèlerin  qui  cherche  les 
sanctuaires  les  plus  ignorés,  les  plus  obscurs  de 
la  piété  et  de  l'art.  Aussi  bien,  nous  avons  de 
lui    un    volume    publié   en    1896  —  Pèlerinages 


cJ  laiic    (--citlutU.  et  Oitiinu 


É,ci5c& 


ombriens,  études  d'art  et  de  voyages  —  dont  la 
Revue  de  r Art  cJirétien  A.  rendu  compte  en  son 
temps.  L'auteur  nous  avait  donné  là  un  de  ces 
livres  patients,  consciencieux  et  sagaces,  d'une 
marche  un  peu  incertaine  comme  l'avait  été 
celle  du  voyageur  lui-même,  mais  plein  d'idées 


et  de  faits,  à  tout  prendre,  d'une  qualité  supé- 
rieure et  rare. 

Sans  être  d'une  structure  entièrement  irrépro- 
chable, celui  d'aujourd'hui  est  beaucoup  mieux 
fait  et  plus  important  en  faits  comme  en  idées 
et  en  pieuves.  Il  ne  s'agit  plus,  cette  fois,  d'œu- 


542 


3^e\)uc  ïje  T^rt  cbrctien. 


vres  rencontrées  au  hasard    d'une   longue   pro- 
menade en  zigzags  à  travers  une  région  déter- 


minée, mais  d'une  synthèse  générale  à  laquelle 
concourent  des  comparaisons  entre  des  œuvres 


Ottavio  Nelli.  —  Rencontre  à  la  Porte  d'Or.  —  Fresque  de  Foligno. 


dispersées  dans  toute  l'Europe.  Et  les  idées  per- 
sonnelles   de   l'auteur  sont    soutenues    par    une 


documentation  telle  qu'on  ne  pourra  désormais 
écrire  sur  ce  sujet  sans  consulter  son  livre. 


Gentile  da  Fabriano.  —  La  Présentation.  —  Prédelle  à  Paris. 


Pour  M.  l'abbé  Broussolle  l'Ombric  artistique 
forme  au  Nord  de  Rome,  dans  les  anciens  États 


de  l'Église,  une  sorte  d'île  aux  contours  onduleux 
dont    les    lignes   seraient    déterminées    par    les 


2d(bltograpl)te. 


343 


voies  ferrées  de  l'Italie  centrale.  Il  en  résulte 
une  sorte  de  quadrilatère  fort  irrégulier  coupé 
par  l'embranchement  de  Terontola  à  Foligno,  en 
passant  par  Pérouse,  la  métropole  artistique  de 
la  région.  Cependant  ce  titre  lui  pourrait  être  dis- 
puté par  Assise,  le  lieu  natal  de  saint  François, 
à  la  double  et  merveilleuse  église,  éclose  comme 
une  fleur  de  foi,  d'art  et  de  beauté  sur  le  tombeau 
de  celui  qui  a  été  sur  la  terre  la  moins  imparfaite 
image  du  divin  modèle.  C'est  une  région  aux 
reliefs  modérés,  aux  sites  faits  de  paix  et  de 
grâce,  sous  la  douce  lumière  italienne  ;  les  pay- 
sages de  l'Ombrie  sont  ceux  que  l'on  voit  aux 


tableaux  du  Pérugin  et  de  Raphaël,  dans  ses 
premières  années. 

Nulle  mollesse,  d'ailleurs,  dans  la  race  qu'il  ne 
faudrait  pas  juger  sur  l'art  ombrien  de  la  fin  du 
XV*^  siècle  et  du  commencement  du  XVI^.  Ho- 
mmes postretna  meminere,  cette  parole  si  juste 
de  Tacite  s'applique  pleinement  ici  ;  le  doux  et 
calme  décor  artistique  de  l'école  péruginesque 
masque  aux  yeux  celui  de  la  période  précédente. 

Tout,  en  effet,  ne  fut  pas  sourire  dans  la  pein- 
ture ombrienne  du  XV"^  siècle,  qui  a  pour  repré- 
sentant le  plus  connu,  non  le  plus  grand  peut- 
être,  Gentile  da  Fabriano.  Aux  fresques  du  palais 


Mezzastri. 


Madone  et  Anges.  —    Fresque  à  Foligno. 


Trinci  à  Foligno,  inspirées  des  naïfs  évangiles 
apocryphes  qui  ont  tant  charmé  les  artistes  du 
moyen  âge,  Ottavio  Nelli  fait  preuve  d'un  natu- 
ralisme à  la  fois  religieux  et  rude.  Il  y  a  plus  de 
tendresse  dans  ce  Benedetto  Bonfigli  à  qui 
M.  l'abbé  BroussoUe  attribue  la  Vierge,  fort  belle 
d'ailleurs,  récemment  entrée  au  Louvre  comme 
une  œuvre  de  Piero  délia  Francesca,  né  en  1416, 
un  de  ces  peintres  qui  sont  grands  non  seulement 
par  leurs  œuvres,  mais  aussi  par  le  pas  qu'ils  ont 
fait  faire  à  l'art.  Encore  un  très  grand  artiste,  ce 
Melozzo  da  Forli,  né  en  1438,  mais  qui  ne  peut 
qu'assez   artificiellement  être   rattaché  à  l'école 


ombrienne;  toutefois  il  ne  pouvait  être  passé 
sous  silence  dans  une  revue  aussi  générale.  A  la 
bibliothèque  du  Vatican,  sa  fresque.  Sixte  IV 
avec  ses  neveux  et  le  bibliothécaire  Platina,  est  une 
des  plus  belles  du  palais  pontifical.  On  peut 
donner  les  mêmes  éloges  à  ces  têtes  d'apôtres  et 
de  musiciens  que  l'on  voit  dans  la  sacristie  de 
Saint-Pierre,  restes  de  la  décoration  du  sanc- 
tuaire de  l'église  des  Saints-Apôtres,  démoli  en 
171 1.  Un  peu  au-dessous,  et  cette  fois  bien  de  l'é- 
cole ombrienne,  voici  Boccati  da  Camerino,  enfin 
Nicolo  Alunno,  de  presque  grands  peintres,  mais 
dont  les  noms  sont  à  peine  connus  hors  de  la 


344 


ISitWt  lie  rart  rfjrcticu. 


région  qu'ils  ont  rennplie  de  leurs  œuvres.  A  la  pi- 
nacothèque de  Pérouse,  Giovanni  Boccati  a  une 
Vierge  dont  M.  l'abbé  Broussolle  dit  qu'elle  est 
«  une  belle  vision  du  paradis  ».  Nicolo  Alunno, 
qui  travaillait  à  Foligno,  et  dont  le  Vatican  pos- 
sède deux  œuvres  importantes,  a  quelque  chose 
de  la  mélancoh'e  flamande.  Et  les  ressemblances 
sont  telles  ici  que  M.  l'abbé  Broussolle  croit  à 
une  influence  directe,  non  à  ce  parallélisme  qui 
fait  souvent  apparaître  les  mêmes  caractères  dans 
des  œuvres  écloses  en  même  temps  dans  des 
pays  fort  éloignés  et  sans  rapports  essentiels 
entre  eux. 


Or  cette  influence  est  fort  probable  ;  les 
peintres  du  Nord  étaient  connus  et  appréciés  en 
Italie  au  'X.V'^  siècle;  le  plus  grand  d'entre  eux, 
depuis  la  mort  des  Van  Eyck,  Rogier  van  der 
Weyden,  était  venu  à  Rome  ;  Juste  de  Gand  a 
vécu  plusieurs  années  à  la  cour  du  duc  Frédéric, 
à  Urbino,  où  il  existe  de  lui  un  très  beau  tableau 
la  Ccite.  Les  grands  amateurs  italiens  aimaient 
ces  œuvres  patientes  et  vraies  qui,  pour  des  raf- 
finés de  leur  sorte,  avaient  une  saveur  exotique 
et  piquante.  Ainsi  Richard  Portinari  faisait  venir 
de  Bruges  cette  Adoration  des  bergers,  qui  est 
l'œuvre  capitale  de  Hugo  van  der  Goes  et  l'un 


Boccati  da  Camerino.        Vierge  et  Saints  à  Pérouse. 


des  chefs-d'œuvre  des  écoles  septentrionales  que 
possède  Florence.  Il  est  assez  singulier  que  la 
Flandre  lointaine  exerce  une  telle  influence  en 
Ombrie,  alors  qu'on  n'en  constate  aucune  de 
Florence  toute  voisine  ;  M.  l'abbé  Broussolle 
admettrait  plus  volontiers  une  certaine  action  de 
l'école  siennoise. 

En  dehors  des  limites  géographiques  et  artis- 
tiques de  l'Ombrie,  l'auteur  distingue  un  homme 
qui  appartient  manifestement  à  la  famille  om- 
brienne, Giovanni  Santi.  I!  ne  fut  guère,  à  vrai 
dire,  qu'une  sorte  d'entrepreneur  de  tableaux  et 
de  fresques  sur  commande,  rôle  qui  est  du  reste 
celui  de  beaucoup  de  peintres  italiens  en  ce 
temps  et  en  d'autres,  improvisateurs  habiles,  sur 
des    thèmes    qui    ne    variaient    pas    beaucoup. 


d  œuvres  votives  dont  la  piété  des  particuliers 
couvrait  à  l'envi  les  murs  des  églises.  II  me 
semble  que  le  procédé  ex[:)éditif  et  primesautier 
de  la  fresque  est  le  grand  facteur  de  cette  facilité 
qui  est  le  caractère  général  de  l'art  italien.  Mais 
Giovanni  Santi  n'est  autre  que  le  père  de  Ra- 
phaël, et  l'artiste  obscur  d'Urbin  souffre,  dans 
sa  rénommée,  de  cette  évolution  du  langage 
populaire  qui  a  transformé  son  nom  de  Santi  en 
Sanzio.  Il  était  né  avant  1446,  et  en  1469  nous 
le  trouvons  établi  à  Urbino  dans  une  maison  à 
lui,  celle  où,  en  1483,  de  son  mariage  avec  Magia 
Ciarla  naîtra  Raphaël.  Nombreuses  sont  les 
peintures  de  Giovanni  Santi,  mais  ce  qu'il  nous 
a  laissé  de  plus  précieux  est  peut-être  cette  Chro- 
nique riinée,  dont  Passavant  a  donné    de  notables 


BtbUograp|)îe. 


345 


extraits  et  qu'il  serait  intéressant  de  voir 
publier  en  entier  ;  dans  cette  œuvre  qui,  selon 
M.  Broussolle,  n'est  pas  aussi  médiocre  qu'on  le 
veut  bien  dire,  Giovanni  Santi  parle  avec  admi- 
ration de  Jean  van  Eyck  et  de  Rogier  van  der 
Weyden  et  dit  d'eux  qu'ils  ont  «  quelquefois 
surpassé  la  nature  :  Che  Itaii  superato  spesse  volte 
il  vero.  1> 

Évidemment  il  est  ici  l'écho  de  l'admiration 
que  dans  ce  pays  d'improvisateurs  excitaient  ces 
œuvres  lentes,  précises  et  sincères  ;  il  les  con- 
naissait et  peut-être  avait-il  été  en  contact  avec 
quelques-uns  de  ces  peintres  attirés  du  Nord  vers 
l'Italie  lumineuse. 


Toute  cette  première  partie  du  livre  de  M. l'abbé 
Broussolle  est  neuve,  amplement  documentée 
et  à  peu  près  excellente. 

En  abordant  la  seconde,  nous  nous  trouvons 
sur  un  terrain  plus  connu  et  déjà  maintes  fois 
exploré,  non  encore  épuisé  toutefois.  Aux  ap- 
proches du  XVI'  siècle,  dans  ce  premier  renou- 
veau de  1  antiquité  éveillée  de  son  long  sommeil, 
la  pieuse  rudesse  du  premier  âge  ombrien  va  se 
tourner  en  douceur,  en  élégance  un  peu  banale, 
moins  intimement  personnelle  à  coup  sûr,  et  dont 
le  Pérugin  sera  l'expression  accomplie.  Très 
admiré  au  commencement  du  XIX^  siècle,  si 
bien  que  les  commissaires  chargés  de  pourvoir 


Nicolas  Aluiino.  —  Martyre  de  S.  Barthélenii. 


l'empire  français  de  chefs-d'œuvre  arrachés  à 
l'inépuisable  Italie,  acheminaient  par  charretées 
ses  œuvres  de  Pérouse  vers  Paris  ;  fort  célébré 
par  Rio,  du  moins  dans  la  première  édition  de 
son  Art  chrétien,  le  Pérugin  a  perdu  beaucoup 
de  terrain  depuis  un  demi-siècle.  On  ne  consi- 
dère plus  que  la  peinture  moderne  date  de  lui  et 
l'on  appelle  à  la  lumière  comme  les  vrais  primi- 
tifs, les  vrais  et  pieux  ingénus,  ces  prétendus 
barbares  qui  se  révèlent  à  nous  bien  autrement 
savoureux  et  personnels.  Le  Pérugin  n'est  qu'un 
homme  de  la  transition  entre  l'art  primesautier 
des  premiers  Ombriens  et  celui  de  Raphaël. 
Déjà  il  a  reçu  quelque  clarté  de  l'antique,  il  y 


paraît  à  une  certaine  plénitude  de  formes,  à 
une  simplicité  plus  apaisée  répandue  dans  ses 
œuvres.  Toutefois  M.  Huysmans  va  beaucoup 
trop  loin  en  prétendant  que  ses  Vierges  sont 
des  Vénus  et  son  saint  Sébastien  un  Apollon. 

Ce  fondateur  de  la  nouvelle  école  ombrienne 
fut-il  un  grand  artiste?  Non,  en  vérité,  il  donne 
trop,  pour  l'être,  l'impression  du  déjà  vu,  du  tou- 
jours la  même  chose.Du  charme,oui,de  l'émotion, 
non  ;  et  peut-être  ce  défaut  tient-il  à  la  tiédeur 
religieuse  que  son  siècle  lui  a  reprochée.  Vasari 
va  même  jusqu'à  l'accuser  formellement  de  maté- 
rialisme, ce  qui  parait  à  bon  droit  exagéré  à 
M.  l'abbé  Broussolle.  Mais  il  n'en  est  pas  moins 


REVUE  DE  l'art  CHRÉTIEN 
I9OI,    —  4""^    LIVRAISON. 


346 


Bebue  De  T^it  thvttitn. 


certain  que  le  Pérugin  ne  fut  pas  un  de  ces  ar- 
tistes pour  qui  le  travail  était  une  prière,  un 
acte  de  foi  et  d'amour  ;  ceux-ci,  dont  le  plus 
noble  a  été  le  Bienheureux  Angelico,  ont  pu  être 
de  moins  habiles  praticiens  que  le  Pérugin,  ils  ont 
été  plus  grands  parce  qu'ils  furent  plus  sincères 
et  surtout  plus  émus.  Pérugin,  qui  fit  de  l'art  un 
métier,  ne  fut  donc  qu'un  artisan  supérieur,  et 
j'en  atteste  cette  facilité  souriante,  ces  expres- 
sions imprécises  et  banales  qui  dans  les  in- 
nombrables tableaux  votifs  de  l'école  péru- 
ginesque  vont  désormais  régner  après  lui  et 
d'après  lui. 

Le  livre  de  M.  l'abbé  BroussoUe  n'est  pas  de 
ceux  qui  se  lisent  en  courant,  comme  les  pauvres 
monographies  de  vulgarisation  dont  se  compose 
\ Histoire  des  peintres  de  Charles  Blanc,  ce  La- 
rousse de  l'art.  C'est  un  de  ces  ouvrages  d'érudi- 
tion, mais  aussi  d'idées  générales  et  particulières, 
documentés  sans  pédantisme,  consciencieux  sans 
lourdeur,  qui  sont  trop  rares  en  France.  J'ai  déjà 
dit  que  comme  construction  il  laissait  un  peu  à 
désirer,  et  c'est  là  un  défaut,  un  demi-défaut 
plutôt,  mais  il  n'y  a  rien  ici  du  pêle-mêle  de  ces 
livres  mal  faits,  dont  on  dit  volontiers  qu'ils  sont 
comme  une  bibliothèque  renversée.  On  lira  aussi 
avec  intérêt  la  préface  de  M.  Huysmans,  bien 
entendu  sans  en  accepter  les  idées  et  sans  croire 
que  l'auteur  a  vu  et  admiré  à  Gand  des  panneaux 
de  Van  Eyck  qui  sont  à  Berlin. 

De  nombreuses  reproductions,  d'après  les  ex- 
cellentes photographies  de  la  maison  Alinari  de 
Florence,  documentent  graphiquement  ce  beau 
et  bon  volume  que  l'on  quitte  ayant  beaucoup 
appris,  avec  des  idées  saines  autant  qu'élevées 
sur  l'art  religieux.  C'est  un  plaisir,  un  enseigne- 
ment que  je  dois  à  M.  l'abbé  BroussoUe  et  dont 
je  suis  heureux  de  le  pouvoir  remercier  publi- 
quement. 

Henri  Chabeuf. 


LKS  ARCHIVES  DE  LA  COMMISSION  DES 
MONUMENTS  HISTORIQUES,  par  A.  Pkrrault- 
DABOT,  Paris,  Lechevalier,  1900. 

L'ÉTAT  DES  MONUMENTS  HISTORIQUES, 
par  L.  Pâté,  Paris,  Picard,  1900. 

CRÉÉE  en  1837  et  réorganisée  en  18S9,  la 
Commission  des  monuments  historiques  a 
bien  mérité  de  la  patrie.  Les  incomparables  mo- 
numents anciens  dont  la  France  est  si  riche 
étaient,  au  commencement  de  ce  siècle,  bien  ex- 
posés à  diparaître.  Le  premier  cri  d'alarme  fut 
poussé,  en  1 83 1 ,  par  feu  Vitet  dans  un  mémorable 
rapport  adressé  au  ministre  de  l'Intérieur.  Vitet, 
et  après  lui,  Mérimée,   furent   les  sauveurs  des 


monuments  incompaiables  du  moyen  âge  et 
de  la  Renais.'^ance  dont  la  conservation  est  à 
présent    assurée. 

La  Commission  a  opéré  le  classement  et 
assuré  la  restauration  des  monuments  de  tout 
style  qui  couvrent  le  sol  de  la  Gaule  et  des  colo- 
nies. Elle  a  constitué  pour  leur  garde  et  leur 
étude  un  groupe  de  protecteurs  éclairés,  tels 
que  Ch.Lenormand,F.  de  Lasteyrie,  A.  de  Long- 
périer,  Guilhermy,  J.  Quicherat,  du  Sommerard, 
A.  Darcel,  L.  Courajod.  Elle  a  amassé  en   même 


■'4Wl^fi'--j|  lî' 


y- 


Jubé  de  Saint-Etienne  du  Mont  à  Paris. 

temps  ses  précieuses  Archives,  qui  sont  présen- 
tement publiées  sous  la  direction  de  M.  Perrault- 
Dabot.  Celles-ci  comprennent  une  collection  de 
photographies  prises  avant  restauration,  comp- 
tant environ  25000pièces,dont  plus  de  3000  sont 
mises  à  la  disposition  du  public.  Elle  possède, 
en  outre,  de  remarquables  relevés  d'architectes. 
Dès  i845,Vaudoyer  relevait  les  célèbres  maisons 
d'Orléans,  de  Ciuny,  de  Troj-es,  de  Provins,  de 
Rouen,  de  Perpignan,  de  Dijon,  de  Tours,  de 
Vienne  et  de  la  Vendée  ;  à  ces  relevés  s'ajoutè- 
rent les  dessins  de  grands  monuments,  notam- 
ment des  cathédrales,  dues  à  Bocswilwald,  à 
Duban,   à  Lassus,  à  Questei,  à  Abadie,  à   Ru- 


ll5tbltograpl)te. 


347 


prich-Robert,  etc.  Amassés  en  un  demi-siècle, 
ces  dessins  forment  un  trésor  graphique  de  plus 
de  1 2000  pièces  de  valeur, sous  la  garde  de  la  Com- 
mission des  uioniiinents  historiques,  sans  compter 
de  nombreuses  reproductions  de  peintures  mura- 
les qui  sont  au  Trocadéro,  avec  les  précieux 
dessins  de  Viollet-le-Duc.  En  outre,  une  biblio- 
thèque contenant  3000  ouvrages  spéciaux,  est 
ouverte  aux  chercheurs. 


Façade  de  Saint-Étienne  du  Mont  à  Paris. 

La  publication  des  principaux  documents  des 
Archives  fut  commencée  en  1S52  ;  en  28  ans  on 
mit  sur  pied  4  volumes  ;  cette  publication  se 
complète,  en  ce  moment,  par  l'impression  de 
5  volumes  in-folio  de  100  pi.  chacun.  Trois  vo- 
lumes ont  paru  déjà  ;  le  4^  est  sous  presse. 

L.  C. 

LES  SCULPTURES  EN  PLEIN  AIR  A  BRU- 
XELLES, guide  explicatif,  par  Pol.  Meirsschaut. 
Édition  de  luxe. —  Un  vol.  in-8°  de  XVI-2 1  2  pp.,  illus- 
tré de  121  photogravures  en  teintes  variées.  Brugland, 
Bruxelles,  1901.  —  Prix  :  fr.  7,50  ('). 

^  I.  En  vue  de  permettre  aux  Administrauons  communales  et  aux 
Etablissements  d'instruction  de  donner  cet  ouvrage  en  prix,  il  en  a 
été  fait  une  édition  ordinaire  à  5  francs  l'exemplaire. 


Aux  bonnes  époques  de  l'art  monumental,  la 
statuaire  faisait  partie  intégrante  des  édifices. 
C'est  quand  elle  se  greffe  à  l'architecture  qu'elle 
prend  sa  plus  haute  expression  et  qu'elle  est  le 
mieux  comprise  du  public.  Ainsi  l'entendait-on 
sous  Périclès  comme  sous  saint  Louis.  La  Re- 
naissance, en  divisant  les  arts  et  en  créant  les 
genres  distincts  cultivés  par  les  virtuoses  au  nom 
de  l'art  pour  l'art,  a  fini  par  donner  naissance  à 
une  statuaire  sans  destination,  qu'on  ne  saurait 
où  remiser,  si  l'on  n'avait  créé  pour  elles  des  asi- 
les de  charité,  qu'on  appelle  des  musées. 

Celles  qu'on  a  laissé  errer  sur  les  places  publi- 
ques ont  souvent  l'air  dépaysé,  à  moins  qu'elles 
ne  soient  fortement  empreintes  et  affectées  à  un 
usage  monumental. 

A  cet  égard  de  grands  progrès  se  sont  accom- 
plis au  cours  du  siècle  qui  vient  de  finir,  et  nous 
arrivons  à  une  époque,  où  se  refait  l'union  entre 
la  sculpture  et  l'architecture.  C'est  ce  progrès 
que  l'on  peut  suivre  en  France  surtout  et  consta- 
ter à  Bruxelles  aussi,  en  comparant  par  exemple 
le  parc  avec  le  square  du  Sablon. 

Quoiqu'il  en  soit,  rien  de  plus  intéressant  que 
le  recueil  fort  joliment  illustré,  que  M.  P.  Meirs- 
schaut a  consacré  à  la  sculpture  en  plein  air,  qui 
décore  les  monuments  et  promenades  de  Bruxel- 
les, et  auxquels  on  doit  l'aspect  pittoresque  du 
Petit  Sablon,  du  Jardin  botanique,  du  Quartier 
Nord-Est,  de  l'Avenue  Louise,  ainsi  que  la  déco- 
ration sculpturale  des  monuments  publics  les  plus 
récents,  surtout  de  l'Hôtel  de  Ville  et  des  Mai- 
sons de  la  Grand'Place. 

L'auteur  passe  en  revue  plus  de  700  œuvres 
dues  à  146  sculpteurs  appartenant  à  trois  siècles. 
M.  Meirsschaut  conduit  le  flâneur  d'abord  au 
Parc,  où  48  sculptures  (quelques-unes  sont  abso- 
lument ignorées  du  public)  se  cachent  dans  la 
verdure  ;  puis  au  Palais  des  Académies,  au  palais 
des  Beaux-Arts,  au  Petit  Sablon,  avec  son  pan- 
théon national  ;  à  la  Colonne  du  Congrès  ;  à  l'é- 
glise Sainte-Gudule,  etc.  Deux  chapitres  ont 
pour  objet  la  Grand'Place  et  son  merveilleux  ca- 
dre, qui  se  compose  d'une  trentaine  de  maisons 
de  Corporations. 

L.  C. 


UZESTE  ET  CLÉMENT  V,  par  l'abbé  LE  BrUN. 

—  Bordeaux,  Foret,  1S99,  in-8°,  175  pp.  illustrées. 

Uzeste  est  célèbre  pour  avoir  été  probable- 
ment le  berceau  (')  et  avoir  reçu  la  sépul- 
ture d'un   pape,  dont  la  mémoire,  salie  par  les 

I.  Si  ce  n'est  Uzeste,  c'est  la  paroisse  voisine  de  Villandrant. 


248 


3Rel)ue  ÏJC  T^rt  c|)rctiea» 


ennemis  de  l'Église,  est  aujourd'hui  presqu'en- 
tièrement  réhabilitée. Uzeste  possède, en  outre, une 
église  fort  remarquable.  L'histoire  de  la  paroisse 
et  la  monographie  de  l'église  ont  été  traitées 
dans  ce  livre,  qui  a  vu  sa  seconde  édition,  chose 
bien  rare  pour  une  publication  de  l'espèce.  C'est 
que  son  auteur  est  un  bon  écrivain,  et  qu'il  a  eu 
pour  collaborateur  un    maître   en    archéologie, 


M.  Brutails,  bien  connu  de  nos  lecteurs.  Celui-ci 
leur  a  fourni  quelques  pages  de  description 
technique  qui  sont  des  modèles  de  clarté  et  de 
précision.  Le  texte  de  M.  Br.  nous  montre  sans 
obscurité  des  choses  qu'il  ne  semble  possible 
d'exprimer  que  par  le  dessin  ;  il  est  vrai  que 
quelques  vignettes  auraient  pu  remplacer  de 
longues    pages,    mais    nous    aurions  perdu    ces 


Plan  de  l'église  d'Uzeste. 


pages,    qui    sont    d'un    virtuose    dans    l'art    de 
décrire  les  formes. 

Sur  les  fondements  d'un  oratoire  roman,  dont 
on  a  retrouvé  la  crypte.  Clément  V  éleva,  au 
XIV'  siècle,  l'église  d'Uzeste,  dont  !e  chevet 
épouse  la  forme  semi-circulaire  de  l'abside  pri- 
mitive. Cet  édifice,  classé  parmi  les  monuments 
historiques,  est  gracieux  et  intéressant.  Il  est 
dominé,    presque  écrasé  par    une    tour   carrée 


puissante,  un  peu  lourde  à  sa  base,  couronnée 
d'élégantes  balustrades,  percée  de  jolies  fenêtres, 
couverte  d'une  flèche  en  pierre,  aux  huit  arêtes 
fleuronnées,  un  peu  légères  pour  la  tour. 

Le  plan  est  original  :  les  trois  chapelles  du 
chevet  sont  greffées  directement  sur  l'abside  ;  ou, 
si  l'on  veut,  le  déambulatoire  et  les  absidioles 
à  trois  pans  qui  le  bordent  sont  compris  sous 
les  mêmes  voûtes  à  six  compartiments  que  se- 


Biblto5rapl)ie, 


349 


parent  des  doubleaux  dirigés   dans    le    prolon- 
gement  des  rayons  de  la  courbe  du  chœur.  En 
outre  des  voûtes  nervées  àdoubleaux  de  recoupe- 
ment   couvrent    les    travées   de   la  grande    nef, 
posant  sur    des   piles  alternativement   fortes  et 
faibles,  flanquées  de  sveltes  colonnettes.  Les  voû- 
tes dece  système  ont  été  généralement  combinées 
avec  des  voûtes  de  bas-côtés  carrées  et  deux  fois 
plus  nombreuses.  Ici,  chose  curieuse,  les  voûtes 
des  collatéraux  sont  du  même  système  que  celles 
des  nefs  et,  par  suite,  très  allongées.  Il  en  résulte 
dans  la  projection  horizontale  des  nervures  au- 
tour des    piles,  de  grandes  inégalités   dans  les 
angles  compris  entre  les  plans  de  direction  de 
ces    nervures    et,    par    suite,    des    complications 
dans  les  retombées  qui  s'égrènent,  comme  dit  M. 
Brutails,  à  différents  niveaux,  et  ont  été  réalisés 
par  des  expédients  divers.  Il  y  a  là  de  curieuses 
combinaisons,  que  M.    Brutails    analyse    d'une 
manière  serrée,  avec  la  lucidité  qui  le  caractérise. 
M.    l'abbé    Brun   nous   décrit   en    détail    son 
église  dont  il  est  épris,  ainsi  que  le  tombeau  de 
Clément  V  avec  la  statue  couchée,  malheureuse- 
ment décapitée    par  les   Vandales,   et   diverses 
sculptures,  notamment  une  statue  romane  d'un 
évêque  bénissant,  et  celle  de  la  belle  Vierge  tant 
vénérée  des  pèlerins,  puis  détruite  par  les  Hu- 
guenots et  dont  M.  le  curé  Brun  a  recueilli  les 
débris  épars.  Il  a  pu  reconstituer  cette  intéres- 
sante statue  du  XIII<=  siècle,  qualifiée  en   1623 
par  l'archevêque  de  Bordeaux,  de  «  désagréable 
et  indécente  ».  Signalons  encore  une  belle  porte 
historiée,  avec  rosace  élégante,  des  clefs  de  voûte 
et  des  chapiteaux  à  sujets  symboliques,  et  des 
marques  détacherons  du  XII«  et  du  XII  I<=  siècle. 

T..  C. 


HISTOIRK  DE  LA  CATHEDRALE  DE 
NOYON,  par  Eug.  Lefèvre-Pontalis.  Paris,  1900, 
Bibl.  de  l'Ecole  des  Chartes. 

La  monographie  que  nous  annonçons  est  une 
des  plus  remarquables  parmi  les  études  de  l'es- 
pèce que  nous  aimons  tant  à  enregistrer.  Elle 
est  due  au  nouveau  Directeur  de  la  Société 
française  d'archéologie. 

Une  gracieuse  légende  rapporte  que  la  pre- 
mière cathédrale  de  Noyon,  bâtie  par  saint  Éloi, 
étant  devenue  la  proie  des  flammes  en  6^6,  la 
vierge  Godeberte  arrêta  l'incendie  d'un  signe  de 
croix.  Sans  doute  la  sainte  fut  appelée  un  peu 
tard  ;  car  saint  Mummolin  (^  685),  selon  M. 
Lefèvre-Pontalis,  eut  à  reconstruire  une  seconde 
cathédrale  entière,  dans  laquelle  Charlemagne 
fut  sacré  en  768.  Détruite  par  les  Normands  au 
siècle  suivant,  elle  fut  probablement  relevée  de 
ses  ruines  au  commencement  du  X^  siècle  et 


reconstruite  encore  par  Hardouin  de  Croy,  dans 
la  première  moitié  du  XI^  siècle  ;  elle  fut  enve- 
loppée dans  l'incendie  qui  réduisit  en  cendres 
presque  toute  la  ville  de  Noyon  en  1131.  Enfin, 
Simon  de  Vermandois  se  mit  à  l'œuvre  pour 
élever  l'édifice  dont  une  partie  subsiste:  c'est  ce 
que  notre  savant  auteur  établit  à  l'encontre  de 
Levasseur  et  de  Vitet.  Quoi  qu'en  ait  pensé  ce 
dernier,  le  chevet  actuel  de  N.-D.  de  Noyon 
devait  être  à  peu  près  terminé  en  1 157,  lorsqu'eut 
lieu  la  déposition  dans  une  nouvelle  châsse  des 
ossements  de  saint  Éloi.  L'architecture  du  chœur 
corrobore  les  déductions  tirées  de  l'histoire. 
M.  L.-P.  fait  remarquer  l'analogie  étroite  de  cette 
construction  avec  l'abside  de  Saint-Germain- 
des  Prés  (i  163)  et  avec  quelques  autres  construc- 
tions du  milieu  du  XIP  s.,  notamment  l'église 
de  Dommartin,  consacrée  en  1163. 

Baudouin  II  fit  bâtir  la  salle  du  Trésor  et 
commença  les  travaux  du  transept,  qui  furent 
terminés  vers  1170.  Renaud,  successeur  de  Bau- 
douin II,  reprit  vers  1180  les  travaux  de  la  nef 
Etienne  de  Nemours  a  dû  trouver  en  1188  la  nef 
presque  achevée  avec  ses  bas-côtés  ;  à  partir  de 
cette  époque  on  constate  une  reprise  ;  le  décor 
se  modifie  alors  et  comporte  de  nouvelles  espèces 
végétales  que  notre  collaborateur  M.  Lambin 
étudiera  prochainement  dans  nos  colonnes.  Les 
proportions  s'allongent,  les  piles  deviennent 
moins  trapues,  mais  l'ordonnance  antérieure  est 
respectée  et  présente  le  prototype  de  celle  de 
la  cathédrale  de  Senlis,  consacrée  en  II91  et  de 
celle  de  Laon. 

Ce  n'est  qu'au  milieu  du  XIII^  siècle  que 
s'édifia  le  cloître.  L'incendie  de  1293  ne  détruisit 
qu'une  partie  de  la  cathédrale,  avec  le  cloître 
et  la  salle  capitulaire,  savoir  la  charpente,  les 
voûtes  et  l'arc  triomphal.  M.  L.-P.,  par  une  judi- 
cieuse critique,  rectifie  ici  les  erreurs  des  annalis- 
tes. Après  ce  sinistre  eut  lieu  le  remaniement  du 
triple  portail  de  la  façade,  la  reconstruction  sur 
plan  barlong  des  voûtes  de  la  nef  et  celle  des 
arcs-boutants  dont  le  nombre  fut  doublé.  La 
grosse  tour  du  Nord  commencée  alors  fut  termi- 
née en  1320.  Enfin,  vers  1333,  furent  édifiés  les 
deux  éperons  bâtis  en  dehors  du  porche  pour 
contrebuter  les  voûtes.  L'église  fut  flanquée  de 
chapelles  latérales  au  cours  du  XIV'=  siècle. 

Nous  ne  suivrons  pas  le  savant  monographe 
dans  l'étude  critique  très  serrée  qu'il  continue  à 
faire  de  l'histoire  d'un  des  plus  importants  monu- 
ments de  la  France  au  moyen  âge.  Il  redresse 
des  erreurs,  précise  des  points  douteux,  apporte 
des  données  nouvelles,  et  nous  fait  regretter  que, 
par  cinq  fois  déjà,  l'on  ait  prématurément  entre- 
pris, sans  y  être  assez  préparé,  l'étude  d'ensemble 
qui  aurait  dû  lui  être  réservée.  Il  a  cru  devoir 


350 


3Rcbue  ï)C  r^rt  cl)vcticn. 


se  contenter  d'un  modeste  mais  substantiel 
mémoire  où,  durant  cent  pages,  il  étudie  la  vieille 
cathédrale  sous  tous  ses  aspects,  et  cette  étude 
captive  par  la  précision  de  son  contenu,  bien 
qu'elle  soil  menée  tout  d'une  haleine,sans  l'ombre 
d'une  subdivision,  d'un  sous-titre,  d'un  simple 
blanc  entre  les  alinéas. 

Les  croisillons  du  transept  de  Noyon  furent  ar- 
rondis comme  ceux  de  la  cathédrale  de  Tournai, 
qui  portent  l'empreinte  d'un  style  plus  archaïque, 
car  leur  construction  remonte  au  second  tiers  du 
Xlle  siècle.  «L'influence  germanique  se  fit  donc 
sentir  dans  le  plan  du  transept  de  Notre-Dame 
de  Noyon,  comme  dans  .certains  clochers  du 
Vermandois  et  de  la  Champagne  ;  mais  si  les 
croisillons  arrondie  de  plusieurs  églises  des  bords 
du  Rhin,  comme  celles  des  Saints-Apôtres  et  de 
Sainte-Marie  du  Capitole  à  Cologne,  sont  anté- 
rieurs à  ceux  de  Tournai,  il  est  juste  de  faire  ob- 
server que  cette  forme  dérive  du  plan  des  cha- 
pelles trichores  élevées  à  Rome  par  les  premiers 
chrétiens  (').  » 

M.  L.-P.  cite  ici  les  chapelles  à  absides  trifo- 
liées de  Saint-Sixte,  de  Saint-Soter  et  de  Sainte- 
Symphorose  à  Rome,celles  d'Algérie  et  de  Tunis, 
signalées  par  M.  Gsell,  celles  de  Saint-Laurent 
de  Grenoble  (2),  de  Germigny-les-Prés,  de  Saint- 
Satire  de  Milan,  de  Saint-Michel-d'Aiguilhe  au 
Puy,  etc.  Il  rappelle  enfin  que  l'abbatiale  de 
Saint-Lucien  de  Beauvais  (i^r  quart  du  XII^  s.) 
présentait  également  des  croisillons  arrondis. 
De  même  il  établit  la  filiation  de  cette  forme 
caractéristique,  depuis  Rome  et  le  premier  siècle 
chrétien  jusqu'au  XI=  siècle,  et  l'on  ne  voit  pas 
ce  qui  l'empêche  de  conclure,  comme  j'ai  cru 
pouvoir  le  faire  à  propos  de  Tournai  (3),  que  le 
groupe  si  caractérisé  d'églises  romanes  du  Nord 
de  la  France,  auquel  appartient  Tournai,  pourrait 
dériver  en  ligne  droite  du  style  lombard  au  même 
titre  que  les  églises  du  Rhin.  Ce  groupe  a  ses 
caractères  propres,  distincts  du  rhénan;  il  peut 
devoir  directement  à  la  Lombardie  les  traits 
qui  l'apparentent  à  l'école  rhénane,  et  l'on  ne 
nous  a  jamais  montré  clairement  les  traces  de 
l'influence  de  celle-ci  sur  les  premiers. 

L'alternance  de  colonnes  et  de  piles  cruci- 
formes, par  exemple,  que  le  savant  maître  attri- 
bue à  cette  influence  «  germanique ou  nor- 
mande »  a  pu  être  empruntée,  comme  il  l'observe 
lui-même,  aux  constructeurs  lombards  ;  je  note 
avec  plaisir  cette  remarque,  et  cette  autre,  que  la 
dite  alternance  fut  appliquée  peut-être  pour  la 
première  fois  (en  France)  dans  la  nef  de  l'abba- 
tiale de  Jumièges  (1067).  On  la  retrouve  à  N.-D. 

1.  Lefèvre-Ponlalis,  Ouv.  cit.,  p.  17. 

2.  V.  Revue  de  /'Art  chrétien,  année  1894,  p.  75. 

3.  laid  ,  année  1893,  p.  216, 


du  Pré  au  Mans,  à  Saint-Nazaire  de  Carcassonne 
comme  à  Soignies  en  Belgique,  et  en  Angleterre. 

L.  C. 

L'abondance  des  matières  nous  oblige  à 
ajourner,  quoique  composés,  plusieurs  articles 
bibliographiques,  notamment  le  compte  rendu 
par  M.  Chabeuf  de  la  belle  Histoire  de  Saint- 
Bénigne  de  Dijon,  par  M.  le  chan.  Chomton. 


©ériotitqttes. 


L'ART  ET  L'AUTEL.  (N^  i,  mai  igoi.) 

C'est  le  titre  d'une  nouvelle  revue  illustrée, 
fondée  pour  la  rénovation  de  l'art  chrétien 
et  qui  se  propose  de  combattre  le  mauvais  goût 
presque  général  des  œuvres  d'art  religieux  con- 
temporaines pour  y  substituer  en  architecture, 
en  sculpture,  en  peinture  et  en  musique  un  stj'le 
plus  pur  et  plus  artistique.  Les  divers  articles  de 
ce  premier  numéro  sont  consacrés  surtout  à  ex- 
poser ce  programme  sous  ses  différentes  formes. 

Revue  d' archéologie  poitevine.  —  Ce  périodique, 
dû  à  l'initiative  de  notre  'regretté  collaborateur 
Mgr  Barbier  de  Montault,  est  tout  plein  de  ses 
savantes  communications.  Signalons  les  derniè- 
res que  nous  aurons  l'occasion  d'y  rencontrer. 
C'est  d'abord  une  note  sur  une  applique  d'émail 
champlevé  du  XII 1*=  siècle  ;  elle  méritait  d'être 
signalée,  mais  elle  est  d'un  caractère  banal  com- 
me tant  d'œuvres  de  Limoges.  L'érudit  prélat, 
comme  feu  de  Linas,  son  émule,  fait  ressor- 
tir le  contraste  qui  s'accuse  entre  de  nombreux 
objets  mercantiles  et  sans  destination  à  priori, 
sortis  des  mains  d'émailleurs  limousins,  et  les 
travaux  originaux  et  de  grande  envergure  aux- 
quels se  livraient  leurs  confrères  des  bords  du 
Rhin.  —  Plus  loin  nous  trouvons  une  communi- 
cation d'ordre  liturgique  sur  la  prière  «  Avete  » 
pour  les  défunts  et  la  description  succincte  d'un 
missel  poitevin  du  XV^  siècle,  puis  l'inventaire 
de  l'église  de  Lonzy  en  1624. 

Mgr  Barbier  de  Montault  a  fait  école,  et  c'est 
dans  le  même  esprit  scientifique  qui  caractérise 
ses  travaux,  que  sont  conçues  les  notices  de  ses 
collaborateurs  :  {'Encensoir  de  Varennes,  par  M. 
J.-B.  de  la  Rennerie,  Un  Reliquaire-cœur  à  Poi- 
tiers, par  M.  de  Fredilly,  Un  architecte  loudnnois 
au  XVI F'  siècle  par   Dom  Rasquin. 

Semaine  religieuse  de  Soissons  et  Laon. —  A 
propos  des  cloches  de  Charlj'-sur-Marne,  M. 
Jos.  Berthelé  donne  une  intéressante  leçon 
de  paléographie  à  M. L.B.  (no  du  26  janvier  1901). 


20tbltograpl)te» 


351 


XiiDeji*  biblîograpl)(qiie. 


(5 


B  •*:  «Sî'  «Se  «ïc  •'^c  •'*;  »!tt  •'«  ^«  «^  «'Ji:  •!«  •'«  ^jc  «Si;'  •■«  «'^  «iii!  •'>i:  •'«  ^*r  ♦'«  «'^  (? 

:^rcl)éologie  etiideaiu*  :art0^'\ 

==^    JFrancc.  = 

Adam  (L'abbé  A),  Avoine  (J.),  de  Beaure- 
paire  (C.-E.  G.  et  J.),  Boscq  de  Beaumont  (G.), 
et  Bouillet  (l'abbé),  etc.  —  La  Normandie  monu- 
mentale El'  PITTORESQUE.  Édifices  publics,  églises, 
CHATEAUX,  manoirs,  etc.  Manche,  i'"  et  2"^  parties. — 
Gr.  in-folio  avec  grav.  et  96  pi. 

Alcanter  de  Brahm.  —  L'église  Saint-Julien- 
LE- Pauvre,  dans  Le  Parisien  de  Paris,  1S98,  n^  89. 

Alis  (R.-L.).  — •  Histoire  de  la  ville,  du  châ- 
teau et  des  seigneurs  de  Caumont.  —  In-8°,  Agen, 
Ferran  ;  Saint-Colomb,  au  Presbytère. 

Allemagne  (H.-R.-d').  —  Un  bassin  de  Hugues 
IV,  roi  de  Chypre  et  de  Jérusalem  (1324-1359). 

—  In-S",  avec  iig.  et  planches.  Paris,  Leroux. 

Babeau  (A.).  —  Le  Musée  de  Troves.  —  In- 
8°  avec  11  gr.  Paris,  dans  la  Gazette  des  Beaux-Arts. 

Barbier  de  Montault  (Mgr  X.).  —  Le  trésor 
liturgique  de  Cherves  en  Angoumois.  —  In  4°, 
Angoulème,  Constantin. 

Bazin  (A.).  —  Notice  historique  et  descrip- 
tive de  l'église  Saint-Paul-Saint-Louis.  —  In- 
16,  163  pp.  Paris,  Leroy.  Prix  :  2.  50  fr. 

Bertaux  (Emile).  —  Les  saints  Louis  dans 
l'art  italien,  dans  la  Revue  des  deux  Mondes,  i" 
avril  1900,  p.  616. 

Bonne  (L'abbé  A.).  —  La  collégiale  royale  de 
Saint-Martin  de  Champeaux,  dans  le  Bu/l.  de  la 
Soc.  i'hist.  et  d'archécl.  de  Provins,  III,  pp.  55-84  et 
tirage  à  part. 

Boucher  (G.).  —  Saint-Étienne  de  Niort.  — 
In-8",  et  7  grav.  Ligugé,  Bluté. 

Bouillet  (L'abbé).  —  Au  pays  du  frère  Hugo, 
dans  les  Notes  d'art  et  d'archéologie,  avril  1900. 

Le  même.  —  Les  églises  paroissiales  de 
Paris.  V  :  La  Sainte  Chapelle.  VI  :  Notre-Dame 
d'Auteiiil.  —  II  fasc.  gr.  in-8°,  Paris. 

Le  même.  —  Les  églises  paroissiales  de 
Paris.  VIII,  Saint-Germainl'Auxerrois.  —  In-8°, 
avec  grav.  Paris,  Rondelet. 

Brandicourt  (V.).  —  Les  labyrinthes  d'église, 

—  dans  le  Cosmos,  13  janv.  1900. 

Braquehaye  (C).  —  Documents  pour  servir 
a  l'histoire  des  arts  en  Guyenne.  T.  III.  Les 
peintres  de  l'hotel-de-ville  de  Bordeaux  et  des 

I.  Les  ouvrages  marqués  d'un  astérisque  (')  ont  été,  sont  ou 
seront  l'objet  d'un  article  bililiographique  dans  la  I\evue. 


ENTRÉES    ROYALES    DEPUIS    1525. In-S",   314  pp.    et 

planches  hors  texte.  Paris,  Pion,  Nourrit  et  C'".  Bor- 
deaux, Feret  et  fils. 

*  Broussolle  (M.  l'abbé), —  Huysmans  (J.  K.). 

—  La  JEUNESSE    DU     PÉRUGIN     et  LES    ORIGINES    DE 

l'École  ombrienne.  —  Paris,  H.  Oudin,  1901. 

*  Cabrol  (Le  R.  P.  dom  F.).  —  Le  livre  de  la 
prière  antique.  — In-12,  XVII-573pp.  Paris,Oudin, 
1900. 

Canatde  Chizy  (N.).  —  Études  sur  le  servi- 
ce des  travaux  publics  et  spécialement  sur  la 
charge  de  maître  des  œuvres  en  Bourgogne,  sous 
les  ducs  de  la  race  de  Valois  (1363-1477).  —  In- 
8%  Caen,  Delesques. 

Carot  (H.).  —  Vitraux  des  églises  de  Paris. 
Commission  du  vieux  Paris.  Procès-verbal  de 
1898,  N"  3,  p.  4-5  ;  N°  4,  p.  3-7  ;  N°  9,  p.  1-2. 

Chevalier  (Le  chan.  Ul.).  —  Étude  critique 
de  l'origine  du  s.  Suaire  de  Lirey-Chambery. 
Turin.  —  In-8°,  Paris,  Picard. 

Le  même.  —  Le  Sanctuaire  de  Turin  est-il 
l'original  ou  une  copie.  —  In-8°.  Chambery, 
Menard. 

*  Chevalier  (V.). — Les  rues  de  Romans,  frag- 
ments historiques.  —  les  consuls  de  Romans. 

Le  même.  —  L'abbaye  de  Notre-Dame  de 
Valcroissant,  au  diocèse  de  Die.  —  In-8',  Valence. 

*.Chomton(L'abbé  L.).  —  Histoire  de  l'église 
Saint-Bénigne  de  Dijon.  —  In  4°  de  470  pages 
avec  trente  planches  hors  texte. 

Coutan.  —  L'architecture  religieuse  dans 
l'ancien  diocèse  de  Soissons  aux  XI'  et  XIP 
SIÈCLES,  dans  le  Bulletin  monumental,  1899,  N°  2. 

Crocodiles  empaillés  dans  les  églises,  dans 
V Intermédiaire  des  chercheurs  et  des  curieux,  7  août 
1899. 

Daux  (L'abbé  C).  —  Le  pèlerinage  a  Compos- 
telle  et  la  confrérie  de  Mgr  Saint-Jacques  de 
MoissAC  (1523-1671-1S30).  —  In  8°,  XVIII-351  pp. 
avec  planches,  chansons  notées  et  carte  routière. 
Paris,  Champion. 

*  Delamain(Ph.). — Inventaire  des  meubles  du 

CHATEAU    DE  JaRNAC,   UNE    HÉLIOGRAVURE.    —    In-4° 

deXVIII-i2i  pages,    1900.  Niort,  Chanzot, 

Denais  (J.).  —  Monographie  de  la  cathédrale 
d'Angers.  —  In-8",  de  499  pp.  7  planches,  i  plan. 
Paris,  1899. 

*DeImond. —  Compte  d'apothicaire  de  1766  a 
1777,  dans  le  Bullet.  de  la  Soc.  arch.  de  Brive, 
pp.  613-617,  igoo. 

*  Desvaux  (L'abbé  A.) —  Le  mobilier  d'art  du 
Val-Dieu.  Mortagne,  G.  Meaux,  1901. —  Excursion 
archéologique  a  Bellère.  Alençon,  A.  Manier, 
1900. 


352 


î^ebue  i)e  rSrt  c!)réticn* 


Didiot  (J.).  —  Le  culte  oriental  de  saint 
IULiEN  DU  Mans,  dans  la  Revue  historique  et  archéolog. 
du  Maine.  4<^  livraison  i  S99. 

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REVUE    DEL  ART  CHRETIEN, 
igoi.    —   4"^*=    LIVRAISON. 


^  ^^^  ^.  ^  ^  ^^.  ^.  ^.  ^  -^.  ^^  ^  ^  ^,  ^  ^  ^  ^  ^  ^^  ^':^  ^  ^M^ 


Cl)rOntClUt.  sommaire  :  LÉON  XIII  ET  LE  CHANT  GRÉGORIEN.  —  PLAIN 
CHANT:  le  monopole  des  éditeurs  liturgiques.  —  RESTAURATIONS:  cathédrale  de 
Rouen  ;  Monuments  belges:  Soignies,  Bruge:,,  Hoogstraeten,  Châtelet,  Enghien,  Diest,  Binche, 
etc.  —   NOUVELLES.  —   NÉCROLOGIE. 


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Hcon  XIII  et  le  cbant  GrcBoricn. 


os  lecteurs  sont  pour  la  plupart  de  ceux 
qui  se  sont  intéressés  avec  la  plus  vive 
sympathie  aux  belles  études  de  Dom 
Pothier  sur  l'ancien  chant  grégorien 
et  à^la  réforme  introduite  par  les  PP.  Bénédictins 
dans  la  musique  liturgique.  Nulle  œuvre  d'art 
chrétien  plus  haute  et  plus  méritoire  n'a  été 
accomplie  au  cours  du  XIX^  siècle.  Mais  ce 
retour  aux  meilleures  traditions,  s'il  était 
partout  réalisable  au  début  dans  les  cloîtres, 
n'était  pas  moins  désirable  dans  les  églises  sécu- 
lières, où  il  a  rencontré  tant  d'obstacles.  Nous, 
chrétiens  d'une  génération  qui  s'en  va,  nous 
désespérions  de  voir  s'accomplir  de  notre  vivant 
ce  progrès  tant  souhaité,  et  dont  le  spectacle 
semblait  réservé  à  une  génération  ultérieure. 
Grâce  à  S.  S.  Léon  XIII,  nous  verrons  du  moins 
les  préludes  de  la  réforme.  C'est  ce  que  semble 
du  moins  nous  promettre  le  bref  suivant  adressé 
par  le  Souverain  Pontife  au  révérendissime  Dom 
Delatre.  C'est  pour  l'éminent  abbé  de  Solesmes 
et  pour  les  religieux  de  la  célèbre  abbaye,  un 
heureux  événement  dont  nous  les  félicitons. 

LÉON  XIII,  PAPE, 
Cher  Fils, 

Salut  et  bénédiction  apostolique. 

Nous  connaissons  et  avons  loué,  en  d'autres 
circonstances,  les  efforts  intelligents  que  vous 
avez  déployés  dans  la  science  de  ces  chants 
sacrés  qui  doivent  être  rapportés  à  Grégoire 
le  Grand,  leur  auteur,  d'après  la  tradition. 

De  même.  Nous  ne  pouvons  qu'approuver  les 
travaux  si  laborieux  et  si  persévérants  que  vous 
avez  consacrés  à  rechercher  et  à  répandre  les 
anciens  monuments  de  ce  genre.  Les  fruits 
divers  de  ces  labeurs.  Nous  les  voyons  contenus 
dans  ces  volumes  assez  nombreux  que  vous  Nous 
avez  adressés  à  diverses  époques  et  que  Nous 
avons  reçus   comme   un    bien   agréable  présent. 

Ces  ouvrages,  —  nous  l'avons  appris,  —  sont 
désormais  largement  répandus  au  grand  jour, 
frappent  les  yeux  du  public  et  sont,  en  beaucoup 
d'endroits,  d'un  quotidien  usage.  Tout  le  zèle 
dépensé  dans  l'illustration  et  la  propagation 
de  cette  compagne  et  auxiliaire  des  rites  sacrés 


doit  être  loué,  non  seulement  à  cause  du  talent 
et  de  l'ingéniosité  qui  s'y  emploient,  mais  en- 
core, —  ce  qui  importe  bien  davantage,  —  à 
cause  du  développement  que  l'on  en  espère  pour 
le  culte  divin. 

En  effet,  les  chants  grégoriens  ont  été  com- 
posés avec  beaucoup  d'habileté  et  de  goût  pour 
éclairer  le  sens  des  mots.  Il  existe  dans  ces 
chants,  pourvu  toutefois  qu'ils  ne  soient  pas  mis 
en  œuvre  sans  art,  une  suavité  merveilleuse, 
mêlée  de  gravité,  et  qui,  pénétrant  facilement 
l'âme  des  auditeurs,  peut  très  à  propos  faire  naître 
en  eux  de  pieux  mouvements,  et  y  nourrir  des 
pensées  salutaires. 

Il  convient  donc  que  to'.is  ceux,  quels  qu'il 
soient,  surtout  appartenant  à  l'un  et  à  l'autre 
clergés,  qui  se  sentent  capables  d'obtenir  quelque 
résultat  dans  cette  science  ou  dans  cet  art,  y 
travaillent  avec  zèle  et  hardiment,  chacun  selon 
son  pouvoir.  Pourvu  qu'on  sauvegarde  la  charité 
mutuelle,  la  soumission  et  le  respect  qui  sont  dus 
à  l'Église,  les  travaux  d'un  grand  nombre 
d'hommes  en  une  même  matière  peuvent  produire 
beaucoup  de  fruits,  ainsi  que  le  firent  jusqu'à  ce 
jour  vos  propres  études. 

Comme  gage  des  grâces  divines,  et  aussi  de 
Notre  paternelle  bienveillance.  Nous  accordons 
très  affectueusement  dans  le  Seigneur  la  béné- 
diction apostolique  à  vous,  cher  Fils,  et  à  vos 
frères. 

Donné  à  Rome,  près  Saint-Pierre,  le  17  mai 
1901,  en  la  vingt-quatrième  année  de  Notre 
pontificat. 

LÉON  XIII,  PAPE. 

D'autre  part  on  lit  dans  Le  XX'  siècle. 

On  a  beaucoup  parlé  de  la  nomination  d'une  commis- 
sion pour  le  plain-chant  à  Rome  et  les  journaux  ont  tiré 
de  cette  nomination  des  conséquences  qui  ne  sont 
d'accord  ni  avec  la  logique,  ni  avec  la  volonté  du  Sou- 
verain Pontife.  Voici  les  faits. 

Le  privilège  ou  monopole  de  Pustet  expirait  au  premier 
janvier  de  cette  année,  et  toutes  les  instances  de  l'éditeur 
allemand  pour  obtenir  une  confirmation  de  son  privilège 
ont  échoué.  Le  .Souverain  Pontife  a  refusé  le  renouvelle- 
ment du  monopole,  et  ;i  partir  du  i"  janvier  tous  les 
diocèses  du  monde  sont  libres  d'adopter  le  chant  qu'ils 
croiront  le  plus  convenable  pour  eux  11  est  clair  que  le 
chant  des  Bénédictins  de  France,  autrement  dit  de  Dom 
Potliier,  édifié  sur  ce  magnifique  monument  historique 
que  l'on  appelle  la  «  Paléographie  musicale  >,  a  pour  lui 
la  science  et  la  tradition,  mais  il  n'est  pas  toujours  facile 
à  un  chef  de  diocèse  de  ne  considérer  que  la  question 
scienlifi(|ue.  D'autres  exigences  peuvent  se  faire  jour  et 
lui  conseiller  de  conserver  un  chant,  moins  parfait   par 


Cl)romque. 


355 


exemple,  mais  qui  ne  l'obligera  pas  à  un  remaniement  trop 
coûteux.  Quoi  qu'il  en  soit,  liberté  complète  est  laissée,  et 
elle  est  si  complète  que  Pustet  ayant  répandu  le  bruit 
que  le  Souverain  Pontife,  tout  en  déclarant  laisser  libres 
les  évoques,  désirait  «  2'«/<?//fl  »  l'adoption  du  chant  de 
Ratisbonne,  le  Pape  a  fait  démentir  ces  bruits  et  pris  des 
mesures  pour  qu'ils  ne  se  reproduisent  pas. 

Mais  le  diocèse  de  Rome  n'est  pas  dans  une  condition 
différente  des  autres  diocèses  du  monde,  et  la  question 
du  plain-chant  se  pose  à  Rome  comme  ailleurs.  C'est 
précisément  pour  la  résoudre  que  le  Souverain  Pontife 
a  chargé  le  cardinal  Respighi  de  nommer  une  commission 
spéciale  qui  lui  ferait  un  rapport  sur  les  différents  plains- 
chants.  Sur  le  rapport  de  cette  Commission,  le  Pape  dé- 
cidera pour  Rome  et  son  district.  Mais  cette  désignation 
ne  regarde  que  Rome,  et  ce  serait  dépasser  !a  pensée 
pontificale  que  de  se  croire  obligé,  dans  un  diocèse  étran- 
ger, à  suivre  le  chant  que  le  Souverain  Pontife  aura 
adopté  pour  sa  ville.  Léon  XI II  n'a  fait  qu'user  delà 
liberté  qu'il  laisse  à  tous,  et  n'a  aucune  envie  de  la  limi- 
ter directement  ou  indirectement. 

Je  ne  sais  point  quelle  décision  prendra  la  Commission 
romaine,  mais  cependant,  si  l'on  considère  sa  composi- 
tion, les  études  et  les  idées  des  personnalités  qui  en  font 
partie,  il  semble  presque  certain  que  le  chant  de  Pustet 
sera  écarté,  et  que  celui  des  bénédictins  sera  adopté. 

La  S.  Congrégation  des  Rites  a  autorisé  l'emploi  de 
la  lumière  électrique  dans  les  églises  et  les  oratoires, 
mais  seulement  «  ad  depcllcndas  tenehras  ».  Les  cierges 
restent  toujours  le  mode  d'éclairage  liturgique.  La  lumière 
électrique,  si  on  l'emploie  sous  forme  de  petits  globes, 
donne  aux  églises  l'aspect  d'une  salle  de  théâtre. 

Pour  obvier  à  cet  inconvénient,  on  propose  de  faire 
usage  des  bougies  électriques,  qui  ressemblent,  h  s'y 
méprendre,  à  des  cierges,  n'ayant  de  plus  que  les  autres 
qu'un  éclat  supérieur.  Ainsi  l'illumination  des  nefs  ne 
constrasterait  pas  avec  celle  du  chœur  et  des  autels,  et 
l'ensemble  aurait  la  gravité  requise  dans  la  maison  de 
Dieu. 


Restaurations. 

E  Nouvelliste  de  RoJien,  du  24  février, 
nous  donne  les  renseignements  sui- 
vants sur  la  restauration  de  la  cathé- 
drale. Le  Comité  constitué  par  Mgr 
Sourrieu  dans  le  but  de  provoquer  une  souscrip- 
tion publique  destinée  à  aider  à  la  restauration 
du  grand  portail  de  la  catliédrale  de  Rouen,  s'est 
réuni  le  29  janvier  1901,  avec  l'approbation  de 
Mgr  Fuzet,  archevêque  de  Rouen.  Il  a  décidé 
de  faire  un  nouvel  appel  à  la  générosité  des 
catholiques.  On  sait  que  les  travaux  indispen- 
sables à  la  simple  conservation  du  portail  ont 
été  évalués  à  600,000  francs.  La  ville  de  Rouen 
s'est  obligée  à  fournir  une  contribution  de  100,000 
francs,  payable  en  dix  annuités  ;  le  département 
s'est  engagé  pour  pareille  somme,  payable  en 
cinq  ans  ;  le  diocèse,  de  son  côté,  a  promis  un 
concours  de  100,000  francs  à  recueillir  par  voie 
de  souscription  ;  l'État  doit  fournir  le  reste.  Le 
Comité  de  souscription  a  recueilli,  en  1898,  82,140 
francs.  Il  ouvre  une  souscription  pour  les  17,860 
francs  qui  restent  à  recueillir.  Les  souscriptions 
ont  reçues  :  au  secrétariat  de  l'archevêché,  chez 


les  membres  du  Comité,  dans  les  presbytères  et 
dans  les  bureaux  des  journaux  du  département 
qui  voudront  bien  prêter  leur  concours. 


Les  monuments  belges.  —  On  s'occupe  active- 
ment de  la  restauration  de  la  collégiale  romane 
de  Saint-Vincent  à  Soignies.  Les  parements 
intérieurs  des  murs  sont  à  nu,  leur  appareil  gros- 
sier et  leurs  formes  archaïques  produisent  un 
effet  austère  et  étrange.  On  a  démoli  les  voûtes 
à  la  romaine  bandées  au  XVIII^  siècle  sur  la 
grande  nef  et  sur  les  galeries  des  petites  nefs  à 
la  place  de  l'antique  plafond  plat  (').  On  rétablit 
le  plafond  primitif  en  remplaçant  les  poutres  de 
bois  manquantes  par  des  sommiers  en  ciment 
armé. 

Rien  de  plus  rudimentaire  que  les  piles  cylin- 
driques en  pierres  à  peine  taillées,  et  que  leurs 
chapiteaux,  dont  l'échiné  en  tronc  de  cône  rap- 
pelle le  chapiteau  dorique  grec. 

On  a  découvert  dans  le  sol  les  bases  des  pilas- 
tres demi  circulaires  qui,  autrefois,  accostaient 
les  piliers  octogones.  C'est  sur  ces  bases  que  l'on 
vient  de  rétablir  les  demi-colonnes  cylindriques 
qui,  jadis,  flanquaient  les  piliers  cruciformes,  tant 
du  côté  des  basses-nefs  que  de  la  nef  centrale. 

Dans  cette  dernière  elles  montent  jusqu'à  la 
corniche  des  galeries  et  se  prolongent  ensuite  en 
pilastres  à  trois  ressauts  jusqu'au  faîte  de  l'édi- 
fice, s'y  terminant  en  forme  de  bec  de  clari- 
nette. Cette  disposition  est  du  plus  heureux 
effet.  Dans  le  bas-côté  nord  on  a  rétabli  égale- 
ment entre  les  fenêtres  les  contre-forts  à  cha- 
piteaux. 

L'extérieur  du  monument  a  déjà  reçu  aussi  de 
notables  améliorations.  Le  porche  en  style 
Renaissance  donnant  du  côté  nord  sur  la  Grand' 
Place,  a  été  démoli.  Les  fenêtres  de  la  grande 
nef,  ainsi  que  celles  des  bas  côtés,  ont  repris  leur 
forme  primitive,  avec  leur  cintre  aux  claveaux 
déversés  et  à  la  clef  triangulaire,  comme  au 
château  des  Comtes  de  Gand  (f)  ;  elles  donnent  à 
tout  l'ensemble  un  cachet  spécial  de  sévérité  et 
de  recueilleinent.  On  croyait  que  les  fenêtres  des 
galeries  se  terminaient  en  talus,  mais,  vérifica- 
tion faite,  le  talus  était  de  date  plus  récente  et 
les  fenêtres  ont  pu  être  allongées  de  vingt-quatre 
centimètres,  ce  qui  leur  donne  des  proportions 
plus  sveltes.  Elles  auront  ainsi  une  hauteur  uni- 
forme de  2'",34  sur  0"\70  de  large.  Déjà  plu- 
sieurs contreforts  extérieurs  ont  été  reconstruits. 
La  pierre  ernployée  est  le  grés  jaune-verdâtre 
retrouvé  aux  Écaussines.  M.Verhaegen  ne  néglige 
rien  pour  rechercher  des  matériaux  de  restaura- 

1.  V.   Revue  de  l'Art  chrélicn,  année  1896,  p.  422. 

2.  V.  Revue  de  t  Art  chrétien,  année  1897,  p.  437. 


356 


3Rel)ue  ïie  V^xt  cbrctieu. 


tion  conformes  à  ceux  de  la  construction  origi- 
nelle, fallût-il  pour  cela  ouvrir  une  carrière;  c'est 
ainsi  que  pour  la  restauration  du  château  des 
Comtes  de  Gand,  on  est  allé  avec  succès  à  la 
recherche  de  grés  rose  jusqu'à  Reaumont,  à  la 
frontière  française.  Autour  des  toitures  on  a 
commencé  à  rétablir  une  nouvelle  corniche  d'une 
grande  sobriété,  soutenue  par  de  simples  cor- 
beaux en  pierre  bleue  d'après  le  modèle  de  ceux 
retrouvés. 

Cette  restauration  d'un  des  plus  vénérables 
monuments  de  la  Belgique  est  tardive,  mais 
elle  n'en  sera  que  plus  correcte.  Elle  est  due  à 
l'initiative  et  au  zèle  de  M.  le  Doyen  Dujardin 
et  au  talent  de  M.  A.  Verhaegen. 

Le  premier,  qui  est  un  archéologue  de  valeur, 
a  d'autant  plus  de  mérite  d'avoir  entrepris  cette 
restauration,  que,  comme  pasteur,  il  doit  assez 
en  soufifrir.  Sa  paroisse  traverse  une  crise  au 
point  de  vue  des  pratiques  du  culte,  depuis  que 
les  fidèles,  chassés  du  vaste  vaisseau,  n'ont  plus 
à  leur  disposition  que  des  recoins  de  l'église. 

'Le  Journal  de  Bruges  a  publié  une  notice  de 
M.  Ch.  De  Wulf,  siir  le  projet  de  restauration 
de  la  Porte  des  Baudets  à  Bruges.  La  création  de 
Bruges-port  de  mer  devant  amener  le  remanie- 
ment d'une  partie  des  remparts  de  Bruges,  la 
ville  a  chargé  l'architecte  Ch.  De  Wulf  de  pré- 
senter un  projet  de  restauration  de  la  porte 
d'Ostende,  dite  des  Baudets.  M.  De  Wulf  a  pro- 
posé de  remettre  le  monument  en  l'état  où  il 
se  trouvait  au  XV*^  siècle  et,  à  cet  effet,  il  a  con- 
sulté tous  les  documents  conservés  aux  archives 
communales  relatifs  à  la  porte  d'Ostende  et 
signalés  dans  Y Inveiitaire  de  M.  GiUiodts  et  pu- 
blie une  monographie  du  monument.  La  nouvelle 
porte  des  Baudets  sera  un  des  plus  beaux  spé- 
cimens de  l'architecture  militaire  du  XV'^  siècle. 

La  Poorterslogie,  ancienne  académie  des  beaux- 
arts,  se  dresse  belle  et  pittoresque  dans  sa  nou- 
velle enveloppe  de  pierre  blanche,  mais  inachevé. 
D'après  les  plans  adoptés,  sa  gracieuse  tourelle 
octogone  doit  être  restaurée  et  surélevée  de 
15  mètres.  Une  flèche  en  bois,  à  2  étages,  sur- 
montée d'une  figure  en  cuivre  rouge  (saint  Michel 
terrassant  le  dragon),  doit  la  terminer  et  l'em- 
bellir. 

La  fourniture  des  meubles  nécessaires  à  l'in- 
stallation, au  musée  Gruutlmuse,  de  l'intéressante 
collection  d'objets  préhistoriques  recueillis  parle 
baron  Gilles  de  Pélichy,  fera  l'objet  d'une  pro- 
chaine adjudication.  Le  devis  s'élève  à  2,900  fr. 
L'offre  généreuse  du  baron  Liedts,  d'établir  à 
ses  frais  dans  la  grande  salle  à  l'étage  de  l'aile 
sud  une  seconde  collection  de  dentelles  ancien- 
nes, a  été  acceptée  avec  reconnaissance. 

La  Commission  royale  des  monuments  a 
accepté   le  principe   de    la  décoration  picturale 


de  l'intérieur  de  la  belle  église  de  Sainte-Ca- 
therine à  Hoogstraeten  (prov'^  d'Anvers).  Elle 
insiste  pour  que  la  décoration  soit  conçue  avec  la 
plus  grande  simplicité.  Pourquoi  ?  L'excès  de 
simplicité  peut  être  un  défaut  comme  l'excès  de 
richesse.  Le  préjugé  contre  la  polychromie  cède, 
mais  ne  se  rend  pas.  Il  faut  louer  la  Commission 
d'avoir  recommandé  le  déplacement  du  jubé, 
qui  masque  la  fenêtre  de  la  façade  occidentale 
de  l'église  ;  deux  emplacements  sont  possibles, 
ici  comme  dans  la  plupart  des  églises  :  l'un  au 
transept,  l'autre  entre  les  arcades  latérales  du 
chœur. 

Un  projet  de  reconstruction  de  l'église  Saint- 
Germain  (Namur)  a  heureusement  été  écarté  ; 
on  va  se  borner  à  restaurer  cet  intéressant  vais- 
seau du  Xni'=  siècle,  qui  a  été  classé  dans  la  3*^ 
catégorie  des  monuments  nationaux. 

Une  nouvelle  église  devant  être  érigée  à  Asse- 
nois,  commune  d'Offagne  (Luxembourg),  l'archi- 
tecte eut  le  bon  esprit  de  se  conformer  aux  règles 
liturgiques  quant  à  l'orientation  du  vaisseau. 
L'administration  communale  prétendit  changer 
cette  orientation  pour  élever  la  façade  principale 
en  bordure  de  la  place  publique.  L'autorité  supé- 
rieure est  intervenue,  et  a  maintenu  l'orientation 
traditionnelle.  C'est  d'un  bel  exemple,  digne 
d'être  signalé. 

Le  révérend  et distinguédoyen  de  Châtelet  vient 
de  retrouver  dans  quelque  remise  une  belle  croix 
triomphale  d'environ  7"^  de  hauteur,  ornée  aux 
angles  de  médaillons  aux  attributs  évangéliques, 
accostée  des  statues  de  S.  Jean  et  de  la  Vierge. 
Encore  une  qui  va  reprendre  sa  place  d'honneur 
sous  l'arc  majeur  de  la  belle  église  élevée  naguère, 
en  pur  style  du  XIII^  siècle,  par  feu  Carpentier. 
Nos  félicitations  à  M.  le  doyen  de  Châtelet. 

Nous  signalons  une  autre  et  belle  croix  triom- 
phale à  replacer,  celle  de  l'église  de  Givry 
(Hainaut)  avec  les  statues  de  Marie  et  de  Jean. 
Depuis  que  feu  Béthune  a  restauré  en  Belgique 
l'art  des  vitraux  de  couleurs,  ce  pays  possède 
quelques  artistes  qui,  avec  l'Angleterre,  lui 
donnent  une  supériorité  sur  ses  voisins  dans  cet 
art.  Aussi  faut-il  s'étonner  de  voir  des  ecclé- 
siastiques aller  jusqu'à  Francfort  chercher  des 
peintres  verriers  pour  orner  leurs  églises.  Outre 
que  c'est  décourager  les  louables  efforts  de  nos 
écoles  belges,  c'est  compromettre  l'intérêt  es- 
thétique de  nos  monuments.  C'est  le  cas  pour 
l'église  d'Enghien  qui  doit  à  des  ateliers  tudes- 
ques  un  nouveau  vitrail  incorrect  au  point  de  vue 
iconographique,  dépourvu  de  transparence,  vio- 
lemment jaune,  en  un  mot,  désastreux  pour  le 
monument.  Espérons  que  ce  ne  sera  qu'un 
essai  sans  suite. 

On  se  préoccupe  de  la  conservation  des  ruines 
de  l'église  Saint-Jean  à   Diest.  On  aurait  gran- 


Cl)romque. 


357 


dément  raison  de  restaurer  le  chœur  et  de  le 
convertir  en  chapelle  funéraire.  La  Commission 
des  monuments  propose  même  d'y  créer  des 
galeries  constituant  une  sorte  de  Campo  Santo  ; 
l'idée  est  excellente. 

On  s'occupe  activement  de  restaurer  l'intéres- 
sante église  brabançonne  d'Hérent  et  d' Aerschot. 

On  restaure,  en  ce  moment,  la  collégiale  Saint- 
Ursmer  ;  les  travaux  du  chœur  et  de  la  chapelle 
du  Saint-Sacrement  sont  terminés  ;  les  voûtes  ont 
été  débarrassées  de  l'épaisse  couche  de  badigeon 
qui  les  recouvrait  et  les  fenêtres  ont  été  reconsti- 
tuées comme  anciennement:  celles-ci  ont  été 
pourvues  de  riches  vitraux  d'une  tonalité  vive 
qui  fait  valoir  l'ensemble  architectural  de  l'inté- 
rieur; ils  font  honneur  à  leur  auteur  M.  J.  Casier. 
On  va  maintenant  continuer  les  restaurations  par 
le  transept.  L'édifice  sera  ensuite  complètement 
dégagé  par  la  démolition  des  bâtiments  qui  com- 
posent le  presbytère  actuel.  Ici  encore  la  croix 
triomphale  va  reprendre  sa  place  d'honneur, 
après  avoir  été  décrassée  et  polychromée.  Une 
arcade  a  été  remise  au  jour  du  côté  nord,  aux 
moulures  ornées  de  feuillages,  mutilée  en  1554 
pour  placer  des  boiseries. 

Une  autre  restauration,  dont  le  besoin  se  fait 
grandement  sentir,  est  celle  des  anciens  remparts 
de  la  ville,  qui  présentent  aux  voyageurs  passant 
en  chemin  de  fer  le  spectacle  d'un  joli  panorama. 
Malheureusement  le  panorama  est  menacé  aussi 
par  des  constructions  et  des  travaux  de  tout 
genre.  Il  est  grand  temps  que  les  autorités  pren- 
nent des  mesures  pour  la  conservation  de  ces 
restes  uniques  d'architecture  militaire  ('). 

Nous  avons  parlé,  dans  notre  précédente  livrai- 
son, de  la  belle  restauration  de  l'hôtel-de-ville  de 
Binche.  Nous  avons  oublié  de  mentionner  les 
intéressants  vitraux  de  style  civil  qu'y  a  placés 
M.  Jos.  Casier,  le  continuateur  du  célèbre  atelier 
de  maître  Jean  Béthune.  Toute  la  décoration  est 
héraldique  ;  elle  s'étend  à  tout  l'édifice.  Elle  a 
valu  à  son  auteur  de  nombreuses  félicitations, 
auxquelles  nous  joignons  les  nôtres. 

Le  même  artiste  a  placé  naguère  un  grand 
vitrail  dans  le  transept  sud  de  l'église  Saint- 
Macaire  à  Gand.  Au  centre  figure  saint  Joseph, 
patron  de  la  Belgique,  ayant  à  ses  côtés  saint 
Liévin  et  saint  Bavon,  patron  de  la  Flandre  et 
de  la  cité  gantoise. 

La  restauration  du  château  des  Comtes  de 
Gand  reste  suspendue.  Une  grosse  question  reste 
pendante. 

L'ancien  donjon  était  jadis  divisé  en  plusieurs 
étages.  Faut-il  rétablir  ces  étages  ?  Sur  un  autre 

I.   Chroniqtie  des   Tiavaux  publics. 


point  encore,  la  discussion  est  ouverte.  Faut-il 
terminer  le  donjon,  à  sa  partie  supérieure,  par 
une  plate-forme  ;  ou  faut-il  y  ajouter  une  toiture? 
L'architecte  restaurateur  est  partisan  d'une 
plate-forme. 

M.  Verhaegen,  membre  correspondant  de  la 
commission,  a  défendu  par  de  très  bons  argu- 
ments la  seconde  opinion.  On  ne  sait  pas  encore 
dans  quel  sens  se  prononcera  la  commission. 

I^ouoclles. 

ES  fouilles  viennent  d'être  commencées 
à  Saint-Denis,  sur  l'emplacement  des 
terrains  qui  bordent  la  basilique,  du 
côté  de  la  rue  de  Strasbourg  :  c'est  là 
qu'autrefois  s'élevait  l'église  des  «Trois  Patrons», 
dans  la  cour  de  laquelle  furent  enfouis  les  cer- 
cueils des  rois  de  France,  arrachés  des  caveaux 
de  la  basilique  en  1793.  On  a  découvert  des  mé- 
dailles et  des  monnaies  anciennes,  et  des  pierres 
sculptées,  qui  ont  été  recueillies  et  placées  à  la 
mairie. 

-i©t-<— J©4— 

A  NOTER  le  sujet  du  récent  concours  d'his- 
toire et  d'architecture  de  l'École  de  Beaux- 
Arts  de  Paris  «  Une  chaire  dans  une  église  du 
XI IP  siècle.  » 


ai  j,ft  »,ft  ijf.,  :i»  «y,  ^y  *%,  ti»,  tSi  »yt  *».  '».  «s  ■'».  *».*»'•»  t%  =»  ait  »y  »at,  »5t,ty 

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ffîgc  Xatiier  Barbier  De  ffiontault. 


Au  moment  où  nous  corrigions  les  pages  de 
notre  dernier  fascicule,  nous  parvenait  la 
nouvelle,  aussi  douloureuse  qu'inattendue,  de  la 
mort  du  plus  laborieux  et  certainement  d'un  des 
plus  savants  de  nos  collaborateurs  :  Mgr  Marie- 
Joseph-Xavier  Barbier  de  Montault  était  mort 
à  Blaslay  (Vienne),  le  29  mars,  dans  la  soirée, 
presqu'inopinément,  quoique  déjà  souffrant  de- 
puis longtemps  ;  ce  qui  ne  l'empêcha  pas  de 
travailler  jusqu'au  soir  même  de  sa  mort. 

Le  temps  nous  faisait  défaut  pour  retracer, 
même  brièvement,  cette  longue  et  féconde  car- 
rière qui  venait  d'atteindre  son  terme.  Aujourd'hui 
il  nous  importe  de  joindre  nos  regrets  profon- 
dément sentis  à  tous  ceux  qui  ont  été  exprimés 
par  les  amis  du  défunt  et  par  les  amis  de  l'ar- 
chéologie chrétienne.  Mgr  Barbier  de  Montault 
avait  atteint  l'âge  de  71  ans,  mais,  jusqu'à  sa 
dernière  heure,  sa  verve  studieuse  et  son  ardeur 


au  travail  ne  se  sont  pas  ralenties  un  instant.  Dans 
la  Revue  de  l'Art  chrétien  son  décès  laisse  un 
vide  immense,  qui  ne  sera  pas  comblé.  C'est  donc 
un  deuil  profond  pour  nous,  et  c'est  avec  un 
sincère  sentiment  de  gratitude  que  nous  recom- 
mandons aux  prières  de  tous  ceux  qu'  ont  profité 
de  ses  travaux,  le  repos  de  l'âme  de  ce  laborieux. 

Si  nous  ne  pouvons  même  tenter  d'écrire  une 
notice  biographique  acceptable,  nous  croyons 
cependant  que  nos  lecteurs  accueilleront  avec 
satisfaction  les  renseignements  que  nous  avons 
pu  réunir.  A  la  vérité,  l'intérêt  de  la  vie  du  prélat 
qui  vient  de  mourir  et  sa  gloire  sont  tout 
entiers  dans  ses  travaux. 

Mgr  Barbier  de  Montault  était  d'ancienne  et 
même  de  grande  famille,  sur  laquelle  les  jour- 
naux locaux  donnent  d'abondants  détails  :  il 
est  même  question  de  publier  une  étude  généa- 
logique 


Mgr  X.  Barbier  de  Montault. 

Né  à  Loudun,  le  6  février  1830,  il  était  le 
second  enfant  de  M.  Joseph  Barbier  et  de  dame 
Adélaïde  de  Montault  ;  la  famille  devint  extrê- 
mement nombreuse,  car  la  souche  était  féconde 
autant  qu'elle  était  ancienne  :  après  Xavier, 
quinze  autres  enfants  vinrent  successivement 
répandre  vie  et  joie  dans  cette  maison  patriarcale. 

Xavier  montra  de  bonne  heure  un  goût  décidé 
pour  les  études  et  les  indices  d'une  vocation 
ecclésiastique.  Ayant  été  envoyé  à  l'évêché  d'An- 
gers, chez  son  grand  oncle  Mgr  Montault  des 
Isles,  celui-ci  dirigea  son  éducation  ;  à  huit  ans, 
l'enfant  entrait  au  Séminaire  d'Angers,  où  il 
poursuivit  ses  études  jusqu'à  la  philosophie 
inclusivement.  Il  cherchait  déjà,  à  cette  époque, 
à  compléter  l'enseignement  qu'il  recevait  par 
des  lectures  faites  avec  soin,  annotant,  classant 
tout  ce  qui  avait  de  l'attrait  à  ses  yeux.  Bientôt 


il  fut  en  état  de  poursuivre  à  Saint-Sulpice  ses 
études  théologiques  qu'il  termina  avec  succès. 
Ayant  atteint  l'âge  de  vingt-trois  ans,  il  se  rendit 
à  Rome  oij  tout  l'attirait,  et  où  il  devait  d'ailleurs 
rencontrer  son  cousin,  le  prince  de  la  Tour 
d'Auvergne  qui,  à  cette  époque,  était  premier 
secrétaire  d'ambassade.  Le  jeune  abbé  suivit, 
avec  un  succès  marqué,  les  cours  de  la  Sapience 
et  du  Collège  romain.  Il  s'adonna  bientôt 
avec  une  ardeur  si  absordante  aux  études  qui 
embrassaient  à  la  fois  la  science  théologique  et 
les  recherches  de  l'archéologie,  que  sa  santé  en 
fut  altérée.  Après  quatre  années  de  travail  inces- 
sant, en  1857,  il  fut  obligé  de  quitter  Rome  pour 
rentrer  en  France.  Mais  ce  ne  fut  pas  afin  d'y 
chercher  des  loisirs  ;  dès  son  retour,  Mgr  Ange- 
bault  le  nomma  historiographe  du  diocèse  d'An- 
gers, charge  qui  l'absorba  de  1857  à  1861. 

L'activité  prodigieuse  qui  était  un  besoin  de 
sa  nature  le  poussa  à  profiter  de  sa  nouvelle 
situation,  pour  continuer,  dans  des  conditions 
différentes  et  dans  son  propre  pays,  les  études 
commencées  à  Rome.  Il  se  mit  à  fouiller  les 
archives  du  diocèse  et  à  recueillir  tous  les  maté- 
riaux, inscriptions,  monuments,  tombeaux,  reli- 
ques, qui  pouvaient  répandre  quelque  lumière 
sur  l'histoire  et  la  littérature  angevines.  Il 
poursuivit  en  même  temps  la  béatification,  à 
Rome,  de  Robert  d'Arbrissel  et  du  B.  Regnault. 
Enfin  il  fonda  un  musée  diocésain,  qui,  grâce  à 
ses  soins  et  à  ses  trouvailles,  acquit  bientôt  une 
véritable  importance  et  s'enrichit  d'un  grand 
nombre  d'objets  de  valeur  ;  M.  de  Caumont  prit 
un  intérêt  très  vif  à  cette  initiative  qui  devait 
bientôt  trouver,  en  France,  de  nombreux  imita- 
teurs. 

En  1861,  Mgr  B.  de  Montault  retourna  à 
Rome,  cette  fois  pour  y  faire  un  séjour  de 
quatorze  années.  Dans  la  Ville  éternelle, qui  avait 
toutes  ses  sympathies  et  où  il  pouvait  s'abreuver 
si  largement  à  toutes  les  sources  de  l'antiquité 
chrétienne,  il  se  trouvait  dans  son  véritable 
élément  :  comme  partout  le  travail  était  sa  vie, 
c'est  là  qu'il  acquit  ce  fond  inépuisable  d'infor- 
mations ;  cette  science  liturgique  et  cette  con- 
naissance des  antiquités  chrétiennes  qui  don- 
naient tant  de  valeur  à  ses  travaux,  et  qui  en 
faisaient  un  adversaire  si  redoutable  pour  ceux 
qui  entraient  en  controverse  avec  lui.  Il  y  prit 
l'habitude  d'écrire  avec  sûreté,  avec  autorité,  ne 
redoutant  pas  la  contradiction,  et  montrant 
volontiers  qu'il  avait  sur  bien  des  points  des  vues 
personnelles  qu'il  tenait  à  faire  prévaloir. 

Il  nous  est  impossible  de  suivre  l'existence  si 
remplie  de  Mgr  B.  de  M.  [jendant  le  long 
séjour  qu'il  fit  à  Rome  et  dans  nombre  de  villes 
les  plus  intéressantes  de  l'Italie,  ni  même 
d'énumérçr  Içs  travaux  qu'il    publia  après  son 


CÏ)ronlque. 


359 


retour  en  France.  La  collection  de  la  Revue 
de  l'Art  chrctien  donne  à  cet  égard  les  rensei- 
gnements qui  intéressent  le  plus  nos  lecteurs. 
Ce  sont  eux  qui  ont  eu  la  meilleure  part 
du  constant  travail,  de  l'esprit  d'investigation 
et  de  recherches,  enfin  de  la  fécondité  prodi- 
gieuse de  notre  regretté  collaborateur.  L'indica- 
tion sommaire  seule  de  toutes  ses  publications 
dans  les  domaines  les  plus  variés  réclamerait 
un  volume.  Il  est  peut-être  plus  intéressant  de 
connaître  comment,  dès  sa  jeunesse,  l'abbé 
Barbier  de  Montault  embrassa  avec  tant  de  zèle 
et  de  feu,  avec  tant  de  constance  et  de  succès,  la 
cause  de  l'archéologie  religieuse. 

iVIgr  B.  de  M.  appartenait  à  ce  groupe  d'hom- 
mes qui,  pleins  de  conviction,  d'élan  et  de  géné- 
reuse ardeur,  ont  trouvé  dans  \qs  Annales  archéo- 
logiques de  Didron  un  organe  digne  de  la  cause 
qu'ils  avaient  embrassée.  Il  a  dit  lui-même  que 
c'est  de  là  que  vint  l'étincelle  du  feu  sacré  qui  ne 
devait  plus  s'éteindre  en  lui  : 

«  J'avais  alors  dix-huit  ans,  l'âge  où  l'imagi- 
nation est  vive  et  l'enthousiasme  facile,  où  la 
vocation  se  dessine  et  l'avenir  s'entrevoit.  Les 
ouvrages  élémentaires  de  Bourassé,  d'Oudin  et  de 
Caumont  ne  suffisaient  plus  à  mon  avidité  et  à 
mon  besoin  d'apprendre.  Les  Annales  archéolo- 
giques, en  élargissant  mon  horizon,  furent  pour 
mon  inexpérience  une  véritable  révélation.  Dès 
lors  elles  devinrent  mon  livre  favori.  Les  planches 
m'attiraient  puissamment,  autant  que  d'autre 
part  je  me  sentais  captivé  par  les  idées  neuves  et 
originales,  le  style  vif  et  brillant  du  texte. 

«Je  me  plais  à  le  proclamer  hautement  ici,  la 
lecture  assidue  de  ce  recueil  périodique  m'a  donné 
non  seulement  le  goût,  mais  encore  la  science  de 
l'archéologie.  Aussi,  pénétré  comme  je  l'étais  de 
toute  sa  substance,  M.  Didron  n'hésita  pas  à  me 
proposer  de  rédiger  la  «  Table  »  d'une  collection 
que  j'avais  tant  de  fois  parcourue  avec  un  plaisir 
toujours  nouveau  et  un  profit  incontestable.  Je 
ne  pouvais  rien  refuser  à  celui  qui  m'en  priait 
comme  d'un  service  rendu,  à  lui  d'abord,  puis  à 
ses  fidèles  abonnés.  J'acceptai.  La  longue  maladie 
et  la  triste  mort  de  notre  cher  Directeur  m'empê- 
chèrent seules  de  donner  suite  à  ce  projet.  » 

J'ai  tenu  à  laisser  notre  regretté  collaborateur 
faire  lui-même  le  récit  de  sa  première  initiation 
aux  études  de  l'archéologie  religieuse.  Les  Anna- 
les archéologiques  avaient  été  fondées  au  mois  de 
mai  1844.  C'est,  je  pense,  au  tome  XI  (185  i),  que 
parut  la  première  étude  de  Mgr  B.  de  Montault 
sur  «Les  anciens  artistes  du  Poitou»  dans  ce 
recueil.  Dès  lors  il  demeura  aussi  fidèle  à  cette 
collaboration  qu'il  l'a  été  à  la  Revue  de  l'Art 
cJirétieu  depuis  la  fondation  de  cette  dernière  en 
1857.  Je  pense  que  ce  n'est  pas  sans  quelque 


fierté  qu'en  dressant  la  table  des  Annales  Mgr 
B.  de  Montault  put  écrire  sous  son  nom  le  titre 
de  trente-sept  études  et  articles  divers. 

Mgr  B.  de  M.  était  resté  l'un  des  derniers 
survivants  de  cette  phalange  d'écrivains  dont  la 
lutte  et  les  labeurs  ont  eu  tant  de  retentissement, 
non  seulement  en  France,  mais  dans  tous  les 
pays  de  l'Europe  où,  à  partir  de  ce  moment,  se 
manifesta  un  si  généreux  élan  pour  l'étude  et  la 
conservation  des  monuments  de  l'art  chrétien. 

Il  ne  craignit  pas  d'écrire  que  «  L'art  du 
Moyen-Age  tout  entier  est  dans  cette  collection 
précieuse.  »  Ce  fut  seulement  longtemps  après 
la  mort  de  Didron,  dans  les  loisirs  que  lui  lais- 
sèrent ses  voyages  et  ses  travaux  habituels  de 
droit  ecclésiastique  et  d'archéologie,  qu'il  se  mit 
de  tout  cœur  à  faire  la  table  de  la  collection, 
travail  de  longue  haleine;  et  c'est  seulement  après 
une  année  de  patiente  analyse  qu'il  put  achever 
une  tâche  d'autant  plus  méritoire  qu'elle  est  plus 
modeste  et  plus  utile. 

Cette  table,  que  l'on  peut  considérer  comme  un 
modèle  du  genre,  forme  un  gros  vol.  in-4°,  et 
elle  sera  toujours  consultée  avec  reconnaissance 
par  tous  les  érudits  qui  ont  recours  à  la  collection 
des  Annales,  laquelle  aujourd'hui  encore,  à  tous 
les  points  de  vue,  a  conservé  sa  haute  valeur. 

Je  me  suis  peut-être  étendu  avec  trop  de 
complaisance  sur  les  débuts  des  études  archéolo- 
giques de  notre  regretté  collaborateur,  et  sur  le 
travail  extrêmement  considérable  que,  jusqu'à  sa 
fin,  il  n'a  cessé  d'y  consacrer.  Je  sais  que  ce  n'est 
là  qu'un  des  côtés  de  la  vie  de  ce  travailleur,  mais 
c'est  le  côté  par  lequel  il  nous  appartient. 
D'autres  parleront  du  prêtre,  des  missions  qu'il 
reçut  du  Souverain  Pontife,  du  rôle  qu'il  joua  au 
Vatican  comme  théologien  de  Mgr  Desflèches, 
des  travaux  qu'il  fit  pour  d'autres  évêques, 
tantôt  pour  donner  des  consultations  canoniques, 
tantôt  pour  la  récognition  des  reliques,  le  cata- 
logue des  trésors,  les  recherches  de  toute  nature 
dans  les  dépôts  d'archives  ;  à  toutes  ces  tâches, 
qu'il  acceptait  d'ailleurs  toujours  avec  bonne 
grâce  et  accomplissait  avec  entrain,  il  a  dépensé 
un  labeur  qui,  pour  d'autres,  aurait  réclamé  toute 
une  existence  .  Jamais  son  courage  ne  se  lassait, 
jamais  son  érudition  n'était  en  défaut.  Je  n'ose 
aborder  non  plus  la  bibliographie  de  ses  publi- 
cations de  tout  genre  dont  le  simple  catalogue 
prendrait  un  espace  dont  je  ne  puis  disposer  ;  je 
me  contente  simplement  de  transcrire  ce  que  je 
trouve  rappelé  dans  une  biographie  récente, 
écrite  peu  de  temps  avant  sa  mort. 

«En  1S89,  l'infatigable  prélat  a  commencé  la 
réimpression  de  tant  d'œuvres  éparses,  les  clas- 
sant par  catégories  pour  qu'il  en  résulte  plus 
d'unité  dans  la  composition  et  plus  de  commo- 


360 


Bellut  tie  l'^it  cbvétieiu 


dite  pour  les  studieux  qui  les  consulteront  :  les 
revisant  avec  soin,  les  complétant,  les  mettant  au 
point.  Le  treizième  volume  est  actuellement  sous 
presse  chez  Biais  et  Roy  à  Poitiers.  Chaque 
volume  coûte  10  francs.  L'œuvre  complet  de 
l'écrivain  ne  comprendra  pas  moins  de  soixante 
volumes  in-8°  de  500  à  600  pages  ;  ce  sera  une 
véritable  encyclopédie  ecclésiastique,  émanée 
d'un  seul  homme.  Plaise  à  Dieu  d'accorder  au 
savant  prélat  le  temps  et  la  force  nécessaires 
pour  mener  à  son  terme  cette  entreprise 
colossale  {').  » 

Voici  maintenant  la  liste  des  principaux 
ouvrages  publiés  en  dehors  des  recueils  périodi- 
ques :  Chef,s-d'œuvke  de  la  .sculpture  a 
Rome  a  l'époque  de  la  Renaissance.  — 
Iconographie  des  Sibylles  a  Rome.  —  Les 
basiliques  mineures.  —  Traité  pratique 
de  la  construction,  de  l'ameublement  et 

DE  la  décoration  DES  ÉGLISES  SELON  LES 
règles  canoniques  et  LES  TRADITIONS  RO- 
MAINES. —  Les  gants  pontificaux.  — 
Lettres  inédites  de  Fénelon.  —  Notes 
archéologiques  surMoutiers  et  la  Taren- 
taise.  —  Les  églises  de  Rome  étudiées  au 
point  de  vue  archéologique.  —  Le  con- 
clave ET  le  pape.  —  Le  sacré  collège  des 
cardinaux.  —  Traité  d'iconographie  chré- 
tienne. —  Le  vase  de  Saint- Savin.  — 
Traité  du  chemin  de  la  croix.  —  Etudes 
SUR  LES  MOS.V1QUES   d'Aix-la-Chapelle.  — 

DÉCRETS  authentiques  DES  SACRÉES  CON- 
GRÉGATIONS ROMAINES  :  —  DE  L'IMMUNITÉ. 
—  Des  INDULGENCES.  —  DES  RITES.  —  LE 
TRÉSOR  DE  MONZA.  —  Le  COSTUME  ET  LES 
USAGES  ECCLÉSIASTIQUES  SELON  LA  TRADI- 
TION ROMAINE,  ETC.,  ETC. 

Je  ne  suivrai  pas  les  biographes  du  savant 
prélat  qui  ont  dressé  l'arbre  généalogique  de 
sa  famille  qu'ils  font  remonter  jusqu'au  X^ 
siècle,  et  je  ne  m'arrêterai  pas  non  plus  à  l'énu- 
mération  très  considérable  des  titres  de  gloire 
que  personnellement  il  a  ajoutés  à  sa  maison  : 
prélatures,  décorations  multiples,  distinctions  de 
toute  nature,  association  aux  principales  Sociétés 
savantes  de  l'Europe,  etc.;  tout  ce  brillant  décor 
est  peu  de  chose  dans  la  vie  de  l'homme  et  sur- 
tout du  prêtre  ;  à  sa  mort  il  disparaît  avec  le 
reste  de  tout  ce  qui  passe. 

Mgr  Barbier  de  IVIontault  a  été  le  plus  ancien, 
le  plus  fidèle,  le  plus  fécond  des  collaborateurs 
de  la  Revue  de  l' Art  clirétien  ;  lorsque  parut,  en 
1857,  sous  les  auspices  du  chanoine  Corblet,  le 
premier  volume  de  ce  recueil,  on  y  put  lire  déjà 

1.   Dictionnaire  biographique  dit  clergé  français,  f.  140. 


un  article  sur  la  Poésie  liturgique  du  moyen  âge, 
et  trois  études  sur  V Èpigrapliie  des  Catacombes 
de  Rome,  signées  de  son  nom,  et  aujourd'hui, 
après  une  collaboration  ininterrompue  de  qua- 
rante-quatre ans,  toujours  abondante,  toujours 
généreuse,  le  volume  actuel  commencé  le  premier 
janvier  1901,  contient  encore  une  série  de  com- 
munications de  notre  inépuisable  coopérateur. 
La  somme  de  travail  dépensé  au  profit  de  la 
Revue  est  immense  ;  immenses  aussi  étaient  son 
érudition,  les  trésors  de  sa  mémoire  et  la  fécon- 
dité de  sa  plume.  C'est  une  douleur  bien  grande 
pour  nous  de  ne  plus  pouvoir  compter  sur  un 
concours  toujours  assuré,  de  voir  disparaître 
désormais  de  nos  colonnes  un  nom  si  vénéré  dans 
la  science  catholique,  et  qui,  dans  l'archéologie 
chrétienne  prenait  une  place  si  honorée  C'est 
une  perte  irréparable  dont  le  poids  nous  acca- 
blerait, si,  de  tout  temps,  nous  n'avions  trouvé 
l'appui  souvent  inattendu  de  généreux  travail- 
leurs, et  si  l'expérience  du  passé  ne  nous  auto- 
risait à  beaucoup  espérer  de  l'avenir.  Un  seul 
mot  encore,  sur  la  dernière  phase  de  l'existence 
du  prêtre. 

Mgr  Barbier  de  Montault  s'était  de  longue 
main  préparé  à  la  mort.  11  avait  réglé  ses  affaires 
spirituelles  et  temporelles  ;  il  avait  pris  le  soin 
d'ordonner  ses  funérailles  qui  devaient  être 
modestes, et  dicté  même  les  termes  de  la  lettre  de 
faire-part  qui  devait  aiuioncer  son  décès.  Il  voulut 
que  son  corps  reposât  dans  l'humble  cimetière 
de  la  paroisse  de  Hommes  (Indre-et-Loire)  parce 
qu'il  avait  une  amitié  particulière  pour  le  curé 
le  R''  Et.  Girou  ;  il  lui  était  doux  de  devenir 
ainsi  <><  son  paroissien  ». 

Vers  la  fin,  son  médecin  lui  avait  prescrit  le 
repos  et  interdit  tout  travail.  Mais  le  travail  pré- 
cisément, nous  l'avons  dit,  c'était  sa  vie  !  Com- 
ment y  renoncer,  pour  vivre  plus  longtemps  ? 
Aussi  sa  dernière  journée,  celle  du  29  mars,  ne 
fut  pas  moins  laborieuse  que  les  autres.  C'est 
seulement  après  s'être  couché  que  le  mal  dont  il 
souffrait  depuis  longtemps, une  angine  de  poitrine, 
triompha  de  sa  robuste  nature  et  l'enleva  en  peu 
d'uistants.Une  oraison  jaculatoire  «  Mon  Dieu  !  ï> 
et  un  signe  de  croix  —  tout  était  fini  ! 

Dans  la  lettre  de  faire-part  qu'il  avait  pré- 
parée on  lit  cette  prière  : 

Tu  qui  legis  orapro  eo  et  dic  :  Anima 

EJUS  REQUIESCAT  IN  PAGE  CHRISTI  QUEM 
UNICE  DILEXIT  ET  IN  QUEM  I-TRMITER  CREDI- 
DIT  ARUENTERQUE  SPERAVIT. 


Elle  s'adresse  à  nos  lecteurs. 


J.  IIelbig. 


Iiiipriiiié  par  Desclée,  De  Brouwer  i^  C'«. 


HLcUiic  De  l'Hrt  cbrctien. 


PL.  YI. 


Iff  Couiounniunt  Uf  la  Sainte  Vifigr. 

Peint  par  Albert  CORNELIS  (1517-1522). 


kf^kUkUkf^M^k9^kUkUkUkUkU^ 


îlŒlLiT^TirTrriaiiiiiinxjriiTiTTi^mciTTrTjj^mciiriTlTirTni 
ymiTiiiît"'!  iiiiiii;c!il:iiiiiii]ti:'[imiinLJriiiiiin^gj[ 


Bel) lie  lie 


%> 


l'Hit  rljrétien 


>^  païaîssaut  toujs  les  bt'ii):  mois.  4< 

^-    ««< 

44"'^  Hiinéc.  —  5^  Séi-lc. 

tCûiiiL*  XII  (l^  ùc  (a  collection,). 
S'"'^  liur.  —  Septembre  |90(. 


;%|J^5^>^?^?WÎ^J^?^5^5^}^5^5t^ 


lie  Couronnement  lie  la  JSainte  Vierge, 

—==  peint  par  iîlbcrt  Gornelis,  1517-1522.  =— = 


Panneau   découpé  en  haut  en  forme  d'un  arc  en  accolade.   H.  i"^68.   L.  l'^-jô. 


U  haut  du  tableau  se 
trouve  un  trône  à  haut 
J  dossier  et  dais  sculpté 
g:  très  riche,  de  style  flam- 
"  boyant.  Par  devant,  les 
^  montants  latéraux  sont 
ornés    de    trois    niches 


garnies  de  statues  de  prophètes,  sous   des 
baldaquins  surmontés  d'un  pinacle. 

Sur  le  trône,  à  droite,  est  assis  le  Père 
Éternel,  représenté,  non  comme  l'Ancien 
des  jours,  mais  dans  toute  la  force  de  l'âge, 
avec  une  physionomie  sévère.  Il  est  vêtu 
d'une  tunique  bleue  et  d'un  manteau  rose 
retenu  par  une  bille  (fermoir)  en  or,  qui  a 
la  forme  symbolique  du  trèfle.  De  la  main 
droite,  il  tient  un  livre  orné  de  cinq  plaques 
en  or  richement  ciselées.  Il  a  les  pieds 
chaussés.  A  gauche  se  trouve  le  Christ,  vêtu 
d'une  tunique  et  d'un  manteau  rose  retenu 
par  une  petite  bille  en  forme  de  losange. 
Il  tient  de  la  main  gauche  un  globe  surmonté 


d'une  croix  en  or  à  hampe  torse.  Sa  figure 
est  empreinte  d'une  grande  douceur. 

Le  Père  et  le  Fils  tiennent  une  riche 
couronne  qu'ils  vont  poser  sur  la  tête  de 
Marie,  agenouillée  devant  eux,  les  mains 
jointes.  Cornelis  l'a  représentée,  tournant 
le  dos  au  trône,  inconvenance  que  n'aurait 
point  commise  un  peintre  du  XI II^  ou  du 
XIV^  siècle.  Au-dessus  de  ce  groupe  plane 
la  Colombe,  figurant  le  Saint-Esprit,  en- 
tourée d'une  auréole  jaune. 

La  Sainte  Vierge  est  vêtue  d'une  robe 
bleue  et  d'un  très  ample  manteau  de  même 
couleur  qui  retombe  en  plis  harmonieux. 
Une  longue  et  riche  chevelure  inonde  ses 
épaules. 

Autour  du  trône  sont  groupés  les  neuf 
chœurs  des  anges  ;  à  droite,  les  Séraphins, 
seraphiiii,  anges  à  deux  ailes,  complètement 
rouges  comme  le  feu.  Selon  l'étymologie  de 
leur  nom,  ce  sont  des  flammes  vivantes  qui 
brûlent  et  font  brûler  d'amour  pour  Dieu. 


KKVUE   DB  L  ART  CHRETIBN. 
1901.  —   5*"°  LIVRAISON. 


î62 


jRcbuc  tic  r^rr  cljvctieiu 


A  gauche  sont  placés  les  Chérubins,  che- 
riibim,  anges  à  deux  ailes,  complètement 
bleus,  couleur  qui  indique  leur  sagesse  ; 
ils  tiennent  chacun  un  livre,  ouvert  pour 
les  uns,  fermé  pour  les  autres. 

Les  Trônes,  thronî,  sont  rangés  en  face 
de  la  Sainte  Vierge.  Ils  sont  vêtus  d'aubes 
blanches.d'amicts  rouges  ou  bleus,  et  d'éto- 
les  vertes  croisées  sur  la  poitrine  ;  à  la 
ceinture  sont  suspendues,  au  moyen  de 
cordons,  de  petites  clochettes  en  or.  Cha- 
cun d'eux  tient  un  rouleau  de  parchemin  ; 
ils  sont  assis  sur  des  trônes  ornés  aux 
côtés   de  sculptures  en   bas-relief. 

A  droite,  derrière  les  Séraphins,  on 
voit  les  Dominations,  doniinationcs,  vêtues 
d'aubes,  d'amicts  blancs,  d'étoles  rouges 
croisées  sur  la  poitrine,  et  de  chapes  bleues 
doublées  de  fourrure  blanche  ou  brune,  ou 
de  peaux  de  léopard,  maintenues  par  des 
cordons  ou  des  agrafes.  Elles  tiennent  de  la 
main  droite  un  sceptre.  Le  plus  riche  de  ces 
sceptres  est  surmonté  d'un  groupe  de  la 
Sainte  Vierge  avec  l'Enfant  Jésus  entre 
deux  anges  adorateurs. 

Les  Vertus,  virtutes,  sont  placées  à  la 
même  hauteur  au  côté  gauche  du  tableau. 
Elles  sont  vêtues  d'aubes  et  d'amicts  verts, 
et  ceintes  d'un  cordon.  Les  unes  tiennent  un 
flacon  en  cristal  de  la  main  droite,  les  autres 
une  boîte  cylindrique  aplatie  en  argent 
ciselé. 

En  face  du  trône  de  Dieu,  derrière  les 
Trônes,  se  trouvent  les  Puissances,  pote- 
states.  Elles  sont  vêtues  d'aubes  en  batiste 
et  portent  une  armure,  couvertes  de  tu- 
niques vertes  à  rellets  des  couleurs  de 
l'arc  en  ciel.  Leurs  cheveux  sont  retenus 
par  des  diadèmes  ornés  d'une  croix  placée 
au-dessus  du  front;  les  unes  tiennent  une 
croix  à  longue  hampe  torse;  les  autres 
lèvent  un  glaive  nu. 

Derrière  les    Dominations   le   peintre  a 


placé  les  Principautés,  principatns.  Elles 
sont  vêtues  d'aubes  et  d'amicts  bleus  ;  à 
l'exception  de  trois,  elles  portent,  en  outre, 
une  tunique  bleu  verdâtre  doublée  de  rouge. 
La  plupart  de  ces  anges  tiennent  une  longue 
verge,  mais  deux  ont  pour  attribut  une 
masse  à  sommet  triangulaire,  et  une  troi- 
sième une  baguette  courte. 

Du  côté  opposé,  derrière  les  Vertus,  se 
trouvent,  agenouillés,  —  tous  les  chœurs 
précédents  sont  représentés  assis,  — 
les  Archanges,  archangcli,  habillés  d'aubes 
et  d'amicts  bleus,  avec  larges  ceintures 
garnies  tout  autour  de  pendeloques  en  or, 
et  par  devant,  de  riches  chahies.Ils  portent, 
en  outre,  des  chapes  roses  maintenues  par 
des  billes  de  différentes  formes.  Les  orfrois 
et  les  capuchons  pointus  des  chapes  sont 
ornés  de  broderies,  de  perles  et  de  pierre- 
ries ;  ceux  de  la  chape  de  saint  Gabriel 
sont  historiés.  Quelques-uns  des  Archanges 
tiennent  un  encensoir,  les  autres  une  na- 
vette avec  cuillère  :  ce  sont  les  symboles 
des  prières  des  justes  que  les  Archanges 
offrent  à  Dieu. 

Au  centre  de  l'avant-plan  se  trouvent  les 
Anges,  angeli,  groupés  autour  de  saint 
Michel,  qui,  revêtu  d'une  riche  armure,  se 
tient  debout  ;  il  porte  dans  la  main  droite 
un  long  bâton  terminé  en  croix,  tandis  que 
la  main  gauche  repose  sur  un  bouclier 
hexagone.  Sous  sa  cuirasse,  richement  ci- 
selée en  or,  il  porte  une  tunique  rose. 
L'armure  qui  recouvre  les  jambes  est  ornée 
de  têtes  de  Chérubins.  Par-dessus  l'ar- 
mure il  porte  une  riche  chape  en  brocart 
d'or,  doublée  de  vert,  à  orfrois  semés  de 
pierres  fines  et  de  perles.  Ses  cheveux  sont 
retenus  par  un  bandeau  noir  garni  de  perles 
et  orné  par  devant  d'une  croix  en  or. 

A  droite  de  saint  Michel  on  voit  cinq 
anees  vêtus  d'aubes  et  d'amicts  d'une  teinte 
bleu  pâle  ;  à  leurs  ceintures  sont  attachées 


île  Couronnement  tie  la  t)atnte  îlîterge. 


363 


des  pendeloques.  Un  de  ces  anges,  un 
genou  en  terre,  tient  dans  la  main  gauche 
un  encrier  et  un  porteplume  dont  le  cou- 
vercle est  retenu  par  quatre  cordons  bleus. 
Il  est  occupé  à  écrire  sur  une  feuille  de 
vélin  placée  sur  son  genou  droit  ;  sous 
l'aube  on  aperçoit  la  manche  ample  d'un 
vêtement  rouge.  Les  quatre  autres  anges 
tiennent  chacun  une  feuille  de  vélin.  Ces 
feuilles  sont  celles  du  Livre  des  Bien- 
heureux. Sur  la  feuille  que  porte  l'ange 
immédiatement  à  côté  de  saint  Michel  on 
peut  encore  lire  : 

Item    albertus   cornelis. 

Item  adam   g 

Item 

Item 

Item  egidius 

Item  lievin 

Item 

Item 

Item    cornelis 

Les  quatre  anges  placés  à  gauche  tien- 
nent aussi  des  feuilles  de  vélin,  mais  nous 
n'avons  pu  déchiffrer  les  noms  des  person- 
nages qui  y  sont  inscrits. 

Dans  l'angle  droit  le  peintre  a  représenté 
le  roi  David.  Dessiné  à  une  échelle  beau- 
coup plus  grande  que  les  anges,  on  ne  voit 
que  son  buste.  Il  est  revêtu  d'une  robe 
rouge  sans  manches  et  coiffé  d'un  couvre- 
chef  bleu  dont  la  pointe  tombe  par  devant 
sur  l'épaule  droite.  On  aperçoit  en  outre  les 
manches  étroites  d'une  tunique  brun  ver- 
dâtre.  Entre  les  mains  il  tient  une  bande- 
role sur  laquelle  est  inscrit  le  verset  : 
Adorate  eum  omnes  aiigeli  eius    Ps.  xvj". 

Au  coin  opposé  de  l'avant-plan  se  trouve 
le  prophète  Ezéchiel,  vêtu  d'une  tunique 
verte  à  manches  serrées,  d'une  robe  cra- 
moisie à  larges  bordures  en  fourrure  brune, 
et  de  manches  jaunes   très   larges.    Il   est 


coiffé  d'un  turban  dont  le  haut  est  violet. 
De  la  main  gauche  il  tient  une  longue 
banderole  chargée  de  la  légende  :  Beiiedicta 
gloria  doininl  de  sancto  loco  suo.  Ezech.  3'', 
qu'il  indique  de  l'autre  main. 

Par  un  acte,  daté  du  ig  novembre  i  5  i  7, 
le  peintre  Albert  Cornelis  s'était  engagé 
envers  la  gilde  de  Saint-François  (toideurs 
et  foulons)  qui  avaient  leur  chapelle  dans 
l'église  Saint-Jacques,  à  peindre  un  trip- 
tyque dont  ce  tableau  était  le  panneau 
central,  pour  la  somme  de  trente  livres  de 
gros.  Il  s'engagea,  en  outre,  à  suivre  fidèle- 
ment les  prescriptions  d'un  écrit  traduit  du 
latin  en  flamand  qui  lui  fut  remis,  et  à 
terminer  le  tableau  avant  deux  ans  à 
compter  de  la  date  du  contrat.  Maître 
Albert  n'ayant  pas  rempli  cet  engagement, 
fut  cité  devant  les  échevins,  par  le  doyen  et 
les  curateurs  de  la  gilde.  Il  allégua  pour 
excuse  qu'on  ne  lui  avait  point  payé  les 
acomptes  qu'on  était  tenu  de  lui  donner 
selon  les  stipulations  de  la  convention.  Les 
échevins  décidèrent,  le  27  janvier  1520,  que 
le  peintre  devait  achever  et  livrer  le  trip- 
tyque avant  Pâques  152  r,  sous  peine  d'une 
amende  de  six  livres  de  gros.  Cornelis, 
néanmoins,  n'acheva  pas  le  tableau  à  temps, 
mais,  le  15  avril  1522,  il  cita  le  doyen  et  les 
curateurs  de  la  gilde  devant  les  échevins, 
parce  qu'ils  ne  voulaient  pas  accepter  le 
triptyque  qui  était  enfin  terminé.  Les  éche- 
vins décidèrent  que  kl  gilde  devait  accepter 
le  triptyque,  mais  réservèrent  l'examen  de 
la  question  de  l'amende  que  le  peintre  avait 
encourue. 

Il  est  intéressant  de  noter  que  la  gilde 
allégua  que  Cornelis  avait  commandé  le 
tableau  en  sous-œuvre  à  un  autre  peintre 
pour  la  somme  de  huit  livres  de  gros. 
Cornelis  admit  avoir  agi  ainsi,  mais  soutint 
qu'il  n'était  tenu  qu'à  dessiner  la  composi- 
tion et  à  peindre  de  sa  propre  main  les  nus 


^ 


64 


9Rcl)uc  tir  V^xî  fbrcticu. 


et  parties  principales  qui  réclamaient  le  plus 
d'art. 

Il  est  à  noter  que  la  classification  des 
anges  suivie  par  Cornelis  est  celle  de 
l'auteur  du  traité  De  coelesti  hierarchia,  qui 
du  reste  est  d'accord  avec  celle  que  donne 
saint  Paul  dans  l'épître  aux  Éphésiens. 

Le  joli  tableau  dont  nous  donnons 
la  reproduction  est  le  seul  connu  de 
son  auteur,  Albert  Cornelis,  peintre  d'un 
mérite  incontestable,  dont  le  nom  ne  se 
trouve  mentionné  ni  par  Van  Mander,  ni 
par  les  autres  auteurs  qui  se  sont  occupés 
des  peintres  de  l'ancienne  école.  En  1863, 
nous  eûmes  la  chance  de  découvrir  les 
documents  qui  établissent  l'histoire  du 
tableau.  Quant  à  Cornelis,  nous  n'avons  pu 
découvrir  ni  où  il  naquit,  ni  où  il  apprit 
son  art.  Mais  il  est  probable  qu'il  vint  se 
fixer  à  Bruges  à  la  fin  du  XV^,  ou  tout  au 
commencement  du  XVI^  siècle.  Il  doit  avoir 
peint  un  grand  nombre  de  tableaux,  car,  au 
marché  qui  se  tenait  deux  fois  par  an,  pen- 
dant les  mois  de  janvier  et  de  mai,  près  du 
couvent  des  Frères  Mineurs,  il  occupait  par- 
fois jusqu'à  cinq  stalles  pour  l'exposition  de 
ses  œuvres.  En  1513,11  porta  plainte,  devant 
les  échevins  de  la  ville,  contre  Rodrigo 
Cathelaen,  négociant  qui  lui  avait  fourni 
pour  la  somme  de  30  livres,  16  escalins  de 


gros,  176  livres  d'azur  à  21  stivers  la  livre. 
Cornelis  soutenait  que  cet  azur  était  de 
mauvaise  qualité,  mais  les  échevins  décidè- 
rent que  sa  plainte  n'était  pas   fondée. 

En  15 15,  il  prit  comme  apprenti  un 
certain  Pierre  Verhaghe.  En  15 18,  il  fut  élu 
juré  de  la  corporation  des  peintres.  En  1 5  20, 
il  fut  employé  avec  un  grand  nombre 
d'autres  peintres  aux  décors  entrepris  par 
ordre  du  magistrat,  pour  la  joyeuse  entrée 
du  roi  des  Romains  qui  eut  lieu  le  24  juillet. 
En  1521,  Cornelis  est  cité  au  nombre  des 
débiteurs  de  Rodrigo  Cathelaen  pour  la 
somme  de  27  livres.  Cette  même  année,  il 
est  encore  cité  devant  le  tribunal  parce 
qu'il  se  refusait  à  évacuer  une  maison  située 
dans  la  paroisse  Saint-Gilles  et  qu'il  habi- 
tait comme  locatairede  Jérôme  Frescobaldi. 

Cornelis  épousa  Catherine  de  Ghezelle, 
une  brugeoise,  dont  il  eut  trois  enfants. 
L'un  d'eux  mourut  au  mois  d'avril  1532 
et  fut  enterré  au  cimetière  de  Saint-Gilles, 
du  côté  nord.  Lorsque  le  peintre  mourut 
en  1532,  ses  deux  autres  enfants,  Nicolas 
et  Louis,  étaient  encore  mineurs.  Sa  veuve 
épousa  en  secondes  noces  un  autre  peintre, 
Guillaume  d'Hervy.  Nicolas  Cornelis  fut 
admis  comme  franc  maitre  dans  la  Gilde 
de  Saint-Luc  en  1541. 

\V.  H.James  Weale. 


:y^ 


■»  iM-*  K^^  A^-^  A^^  Jt'^  A^^  A^^  a'^  a'^vI^  A^^  a'^-A  A^A  A^^  A^^  \^-A  ^'S^, 


^uii  I  Lix  1 1  iiniiiuiiirx  n  iir 


TIIiriTTTTITrlI-IIIriTTTTTTrTTTI-iriTTTriTl'TTTTTTTrTTITTTrTrTITTTTTTTTTTTnn-riI  [lUIUIl 


Jxt^  Origines  Ïjc  THrcbitccturc  gotfjiqur. 


Xïcs  premières  Croisées  D'Ogtues  en  Hng:lctcrre,  par  John  Brr.soN  (' 


Sf     oiIxiiixiiiiiiiiiiiiiiiixiTiiTiiffiiiiiTrTiiiiiii-rTTiiiiisiiiiiiïiiTiiiiiiiriiiirTixriiiiiirTTTiiirTiiiiiiiyiirriiTïiriiirrtîiiïiiixriiiiiitiiiii      ^ 

#Â*x6^^  réef  ^i^^^  *^^  ^A^-^  ^i^ï''  *A^'^  ^^'f  ^^^  *^^  *^^  ^A^'f  *itî^  *^^  ^i^^Â^ 


a^Tnm,gij:^rH, >;.ry^  E  dernier  mot  n'a  pas 
J  encore  été  dit  en  ce  qui 
concerne  la  question 
^  des  origines  de  l'archi- 
tecture gothique.  Il  ne 
subsiste  plus  cependant 
que  de  légères  diver- 
gences d'opinion  dans  la  question  de  savoir 
comment,  de  la  basilique  à  plafond  usitée 
dans  l'Europe  occidentale,  l'architecture  a 
évolué  pour  aboutir  à  l'église  gothique 
couverte  de  voûtes  en  pierre.  On  n'est 
surtout  pas  d'accord  sur  le  rôle  joué  par 
différentes  régions,  dans"  les  premières 
phases  de  cette  évolution.  Il  est  admis,  en 
général,  que  les  trois  éléments  caractéris- 
tiques de  l'évolution  du  roman  au  gothique 
sont  constitués  par  la  croisée  d'ogives,  l'arc 
en  tiers-point  et  l'arc-boutant,  et  que,  de  ces 
trois  éléments,  la  croisée  d'ogives  est  le 
plus  important. 

On  peut  atïirmer  dès  à  présent  que,  sitôt 
que  fut  réalisée  l'importante  découverte  de 
ces  trois  éléments,  c'est  à  l'Ile-de-France 
qu'il  faut  attribuer  le  mérite  de  leur  rapide 
et  merveilleux  développement.  Mais  la 
jeune  école  archéologique  française,  repré- 
sentée   par     M.    Lefèvre-Pontalis,    ne     se 

I.  D'après  \^  Journal  of  ihe  Royal  Institute  qf  British 
Architects,  vol.  VI,  3"  série,  p.  289. 

L'auteur  tient  à  exprimer  ses  plus  sincères  remercie- 
ments à  M.  Lionel  de  Crèvecœur  et  à  M.  Marc  Raynaud 
qui,  avec  une  extrême  obligeance,  ont  bien  voulu  se  char- 
ger de  la  traduction  de  ce  mémoire.  Il  tient  également  à 
exprimer  sa  profonde  obligation  à  son  ami  M.  C.  Enlart 
pour  l'intérêt  qu'il  a  pris  à  la  préparation  de  la  traduc- 
tion. 

La  Revue  de  VArt  chrétien,  de  son  côté,  adresse  ses 
meilleurs  remerciements  au  «  Ro5'al  Institute  of  British 
Architects  5>  qui  a  eu  la  gracieuseté  de  mettre  à  sa  dispo- 
sition les  clichés  des  belles  planches  qui  illustrent  cet 
article. 


déclare  pas  satisfaite  par  de  telles  conclu- 
sions. —  C'est  à  l'Ile-de-France  exclusive- 
ment que  ce  savant  archéologue  veut  réser- 
ver le  mérite  d'avoir  découvert  la  croisée 
d'ogives.  —  Dans  son  grand  ouvrage  sur 
les  églises  du  Soissonnais,  M.  Lefèvre- 
Pontalis  dit  :  «  La  nervure  est  une  décou- 
«  verte  essentiellement  française.  C'est  sur 
«  le  sol  de  l'Ile-de-France  qu'elle  fut  sou- 
«  mise  à  des  expériences  décisives  avant 
«  de  s'imposer  aux  écoles  des  autres  pro- 
«  vinces  et  à  celles  des  pays  étrangers  (').  » 
D'après  le  même  auteur,  Senlis  serait,  à  peu 
près,  le  centre  géographique  de  cette  aire 
de  dispersion.  —  D'après  lui  encore,  ce  fut 
dans  les  basses  vallées  de  la  Seine,  de  l'Oise, 
de  l'Aisne,  de  la  Marne  et  de  leurs  affluents 
que  cet  art  original  atteignit  rapidement  à 
un  si  haut  degré  de  perfection.  —  C'est  dans 
cette  région  que  M.  Lefèvre-Pontalis  trouve 
l'embryon  du  système  inauguré  à  Saint- 
Denis,  fait  qui  avait  échappé  à  Viollet-le- 
Duc,  et  il  représente  les  monuments  ana- 
logues qui  subsistent  dans  d'autres  provin- 
ces comme  des  emprunts  faits  à  l'Ile-de- 
France. 

Cette  manière  de  voir  n'a  pas  été  unani- 
mement adoptée.  Dans  son  beau  travail  sur 
la  Transition,  M.  Anthyme  Saint- Paul  dit: 
«  L'heure  me  semble  venue  de  nous  de- 
«  mander  s'il  faut,  oui  ou  non,  associer  la 
«  Normandie  au  mouvement  transitionnel.» 
Cet  auteur  est  convaincu  que  parmi  les 
voûtes  normandes  il  en  est  d'antérieures  à 
celles  de  Saint-Denis,  ou  tout  au  moins  de 


I.  V Architecture  reHj^icwie  datts  l'ancien  diocèse  de 
Soissons  au  XI"  et  au  XII"  siècle,  par  Euyène  Lefèvre- 
Pontalis.  Paris,  1894-1S97,  t.  I,  p.  96. 


366 


Wit\)\it  lie  r^vt  cljrctien. 


contemporaines  (').  —  Il  admet  un  i/oiiô/e 
couratU  venant,  l'un  de  la  Picardie,  l'autre 
de  la  Normandie.  —  Le  premier,  le  courant 
picard,  auquel  M.  Lefèvre-Pontalis  attribue 
une  importance  exclusive,  se  caractérise 
par  l'adoption  presque  simultanée  de  l'arc 
en  tiers-point  et  de  la  croisée  d'ogives.  — 
L'autre,  qui  s'étend  sur  toute  la  vallée  de 
la  Seine  et  dont  le  principal  monument  est 
l'église  de  Poissy,  possède  des  architectes 
comprenant  pleinement  l'importance  de  la 
croisée  d'ogives,  mais  hésitant  à  adopter 
l'arc  en  tiers-point. 

On  a  très  justement  remarqué  (')  que  la 
voûte  sexpartite  joue  un  rôle  considérable 
dans  cette  question.  —  Dans  le  groupe  fort 
important  des  églises  de  style  gothique 
primitif  dont  Noyon  est  le  type,  nous 
trouvons  la  voûte  sexpartite  accompagnée 
de  tribunes.  —  Il  est  à  noter  que,  tandis 
que  nous  cherchons  en  vain  cette  particu- 
larité dans  les  églises  de  l'Ile-de-France 
décrites  par  M.  Lefèvre-Pontalis  comme 
étant  les  devancières  de  Saint-Denis,  nous 
la  trouvons  dans  l'architecture  normande. 
—  S'il  est  vrai  que  dans  beaucoup  d'églises 
normandes,  les  voûtes  ont  été  ajoutées 
postérieurement  à  la  construction  de  la  nef, 
ce  n'est  pas  une  raison  d'affirmer  qu'elles 
sont  toutes  dues  à  des  réfections  entreprises 
dans  la  seconde  moitié  du  XIP  siècle. 

Quelques  églises  ont  certainement  reçu 
des  voûtes  dès  l'origine,  mais  malheureuse- 
ment on  ignore  la  date  de  leur  construction. 
Aussi  trouvons-nous  en  Normandie,  au 
lieu  de  la  voûte  sexpartite  habituelle,  une 
voûte  analogue  bien  que  plus  imparfaite, 
une  croisée   d'ogives  quadripartite   divisée 


1.  Revue  de  t  Arl  chrt'tien,  1895.  '"  livraison,  p.  15. 

2.  Die  Atifàiijie  des  gotkiuhen  Batislils ;  zur  Kritik  ,/es 
i^es^einuartigeii  Standes  dcr  Fra^e,  par  G.  Dehio,  dans  le 
Repertorium  fiir  Kunstwissenscha/t,  xix  JJand,  3  Hefi. 
lieiliii  et  Stuttgart,  liigô. 


par  un  arc  doubleau  portant  un  mur  de 
refend.  Il  est  certain  que  ce  système  n'eût 
pu  être  conçu  en  dehors  d'une  connaissance 
préalable  de  la  croisée  d'ogives  quadripar- 
tite. —  En  ce  qui  concerne  le  développe- 
ment de  ces  différentes  variétés  de  voûtes, 
M.  Dehio  a  constaté,  en  prenant  pour  point 
de  départ  le  plus  reculé,  la  date  de  construc- 
tion de  St-Étienne  de  Beauvais,  qu  il  a  fallu 
un  temps  tel,  pour  parfaire  cette  évolution, 
que  l'influence  de  l'Ile-de-France  n'y  peut 
être  admise.  Aussi  ne  pouvons-nous  accep- 
ter la  conclusion  de  M.  Lefèvre-Pontalis,  à 
savoir  que  la  croisée  d'ogives  a  été  une 
véritable  importation  dans  l'architecture 
normande  ('). 

Il  est  certain  que  cette  discussion  ne 
serait  susceptible  de  conclusions  précises 
que  s'il  était  possible  de  dater  exactement 
les  plus  anciens  exemples  de  croisées 
d'ogives  normandes,  ce  qui  n'est  malheureu- 
sement pas.  —  Jusqu'ici  aucun  des  érudits 
qui  ont  pris  part  à  la  discussion  n'a  eu  l'idée 
d'étudier  les  monuments  anglais,  pour  y 
trouver  des  arguments.  M.  Lefèvre-Pontalis 
s'y  réfère  bien,  mais,  selon  lui,  la  croisée 
d'ogives  n'a  été  employée  en  Angleterre 
qu'après  la  généralisation  de  son  emploi 
dans  la  France  occidentale.  —  Il  semble 
avoir  adopté  les  conclusions  de  M.  Félix 
de  Verneilh,  conclusions  dont  nous  par- 
lerons plus  loin. 

Il  serait  bien  étrange  que  cette  question 
ne  reçût  pas  quelque  éclaircissement  de 
l'étude  des  églises  normandes  d'Angleterre, 
si  l'on  considère  leur  grandeur  et  leur 
importance,  et  si  l'on  remarque  quelle 
fièvre  de  construction  régna  à  cette  époque, 
dite  époque  normande.  Il  est  vrai  que 
vingt  ou  trente  ans  après  la  conquête 
paraissent    dans    ces    monuments   certains 


I.  Die  Anfiinge  des  gothischen  Baustils. 


JLtQ  €)ngînes  tje  r:^rcl)ttecture  gott)iQue. 


367 


I 


traits  caractéristiques  dont  plusieurs  pro- 
cèdent des  traditions  architecturales  d'avant 
la  conquête,  et  que  l'on  trouve  par  consé- 
quent des  monuments  qui  suivent  d'une 
façon  moins  rigoureuse  et  moins  logique  le 
seul  type  de  plan  ou  de  construction  géné- 
ralement usité  en  Normandie.  Cependant 
il  n'en  est  pas  toujours  ainsi,  et,  pour  ce  qui 
est  de  la  construction,  les  renseignements 
évidents  que  fournissent  certaines  églises 
anglaises,  prennent  une  valeur  d'autant 
plus  grande  que  plusieurs  d'entre  elles 
peuvent  être  datées  avec  une  très  grande 
précision. 

Il  me  semble  donc  que  l'on  puisse  tenter 
de  faire  pour  l'Angleterre  une  histoire 
méthodique  de  la  construction  normande 
comportant  des  voûtes,  autant  que  le 
permettent  les  monuments  qui  nous  en  sont 
restés.  C'est  ce  que  je  vais  essayer  dans 
l'étude  suivante,  en  citant,  à  l'appui  de  ma 
thèse,  les  exemples  dont  la  plupart  peuvent 
être  datés  avec  quelque  certitude. 

Bien  que  j'aborde  un  sujet  assez  familier 
aux  érudits,  je  dois  tout  d'abord  faire 
remarquer  que  l'architecture  normande  de 
l'Angleterre  n'a  été  étudiée  que  très  peu  au 
point  de  vue  si  important  auquel  je  veux 
me  placer  (').  Je  dois  ensuite  déclarer  que 
je  ne  saurais  adopter  les  théories  (^)  qui 
donnent  à  l'architecture  gothique  une 
origine  anglaise  ;  une  telle  prétention,  il  me 
semble,  ne  tient  aucun  compte  des  données 
élémentaires  du  problème.  Dès  la  construc- 
tion de  Saint-Denis  on  ne  peut  contester  la 
supériorité  de  l'école  française.  Cependant 
l'histoire    de    l'architecture    normande    en 

I.  L'importance  de  Durham  n'a  été  saisie  ni  par  Deliio 

et  von  Bezold  (Dh'  kirchliche  Baitkiinsl  des  Abendlandes), 
ni  par  Ruprich-Robert,  dans  L'architecture  normande 
aux  XI"  et  Xll"  siècles  en  Normandie  et  en  Angleterre. 
1.  Comme,  par  exemple,  celle  qu'a  soutenue  M.  J.  H. 
Parker,  dans  l'article  intitulé  .•  On  llic  Engiish  origin  oj 
Cothic  Architecture  {Archceologia,  XLIII,  73). 


Angleterre  prouve  sa  complète  indépen- 
dance à  l'égard  de  l'école  de  l'Ile-de-France, 
et  tend  à  faire  penser  que  l'école  normande 
a  pu,  au  contraire,  influencer  l'école  fran- 
çaise. 

Au  temps  de  la  conquête  de  l'Angleterre, 
le  roman  normand  était  déjà  empreint  d'une 
puissante  originalité  et  commençait  à  se 
montrer  supérieur  aux  écoles  contempo- 
raines des  provinces  voisines.  La  caracté- 
ristique peut-être  la  plus  frappante  de 
l'architecture  normande  consiste  dans  les 
relations  parfaitement  logiques  qui  sont 
établies  entre  les  arcs,  les  voûtes  et  leurs 
supports.  Les  Normands  aimaient  déjà  à 
multiplier  les  lignes  dans  les  archivoltes  et 
les  piliers.  C'est  cette  tendance  qui  les  a 
conduits  à  employer  des  divisions  nom- 
breuses pour  orner  les  arcs  et  les  piliers 
pendant  la  première  moitié  du  XI I^  siècle, 
ainsi  que  les  riches  moulures  si  caracté- 
ristiques dans  le  gothique  anglais  même 
durant  sa  première  phase.  Les  plans  si 
rigoureusement  logiques  des  Normands 
prouvent  qu'ils  cherchaient  à  voûter  entiè- 
rement leurs  églises.  On  peut  affirmer  que 
les  bas-côtés  de  certaines  d'entre  elles 
étaient  déjà  voûtés  au  temps  de  la  conquête, 
quoiqu'en  Normandie  même  il  n'en  ait 
subsisté  que  fort  peu  auxquelles  on  puisse 
assigner  une  date  antérieure  à  1050  (').  Les 
architectes  normands  n'avaient  pas  réussi 
du  prernier  coup  à  voûter  le  vaisseau  central 
de  leurs  édifices,  mais  les  voûtes  établies 
au-dessus  de  quelques  chœurs  sont  là  pour 
nous  prouver  qu'avant  la  fin  du  XI^^  siècle 
le  problème  était  en  somme  résolu. 

Nous  ne  savons  que  fort  peu  de  chose  au 
sujet  des  grandes  églises  anglaises  anté- 
rieures à  la  conquête,  mais  les  textes  prou- 


363 


Bcbuc  tir  rart  chrétien. 


vent  que  déjà  quelques-uns   des  procédés    j 
normands  y  avaient  été  employés.  Cepen-    [ 
dant  nous  ne  saurions  affirmer  que  les  cons- 
tructions anglaises  de  cette  époque  fussent 
empreintes    des    caractères    de     précision 
et  de  logique    particuliers  aux   Normands, 
ni  que  les  architectes  anglais  eussent  à  ce 
moment  fait   aucun  pas  dans  une  direction 
qui  pût  les  amener  à  construire  des  églises 
entièrement  voûtées.  La  persistance  de  la 
tradition    de   la  charpente   apparente,   que 
l'Angleterre    avait     partagée     avec     toute 
l'Europe  du  Nord-Ouest,  se  manifeste  suffi- 
samment par  l'emploi  de  gros  piliers  cylin- 
driques supportant  les  grands  arcs,  tels  que 
nous  en  trouvons  à  Gloucester,Tewkesbury 
et   Souihwell.  C'est  là  un  type  inconnu  en 
Normandie,  sauf  dans  quelques  églises  de 
médiocre  importance.  Il  n'est  pas  impossible 
que  la  tradition  purement  anglaise  ne  puisse 
expliquer   certains    traits    particuliers    que 
présentent  les  plans  de  quelques-unes   des 
plus   grandes  églises  normandes  d'Angle- 
terre.  On  trouve,   en  effet,  dans  ces  der- 
nières certaines  dispositions  inconnues   en 
Normandie,  et  les  constructeurs  s'en  tien- 
nent généralement  à  un  type    moins  uni- 
forme. Certains  détails  indiquent  la   même 
tendance.  Le  chapiteau  cubique  est  partout 
employé  au  lieu  du  chapiteau  à  volutes  si 
fréquent  en  Normandie  ('). 

Si  l'on  étudie  l'évolution  de  la  voûte  sur 
des  types  anglais  entre  la  conquête  nor- 
mande et  le  milieu  du  Xll^  siècle,  il 
convient  de  parler  d'abord  des  voûtes  des 
parties    basses    de    l'église    (bas- côtés    et 

I.  I3ans  certaines  des  plus  anciennes  églises  de  Nor- 
mandie on  peut  trouver  des  chapiteaux  cubiques  qui 
s'arrondissent  <;raduellenient  pour  faire  corps  avec  le  fût, 
ou  dont  le  cube  a  les  angles  biseautés  (nef  de  Jumièges). 
Mais  ces  chapiteaux  ne  montrent  pas  sur  la  face  du  cube 
la  ligne  demi  circulaire  si  courante  en  Angleterre,  et  il 
est  certain  que  des  chapiteaux  de  ce  dernier  type  ont  été 
employés  en  Angleterre  avant  la  conquête. 


cryptes),  parce  que  ce  sont  ces  voûtes  qui 
nous  fournissent  des  exemples  les  plus 
anciens  et  parce  que  leur  étude  n'est  pas 
compliquée  par  les  considérations  relatives 
à  la  poussée,  qui  offrent  une  si  grande  im- 
portance lorsqu'il  s'agit  des  voûtes  hautes. 
Nous  n'avons  à  nous  occuper  que  de  la 
voûte  d'arêtes,  car  les  Normands  ont  rare- 
ment employé  la  voûte  en  berceau  dans  les 
parties  importantes  de  leurs  églises.  La 
voûte  en  berceau  existant  au-dessus  de   la 


0  1  10 

l'H'H    [    I    I    I    I    I    I    I    I 

0  12  1 

l""l""l \ \ 


^ 1 


Fig.  I.  —  Durham,  crypte  du  réfectoire. 

nef  de  la  chapelle  de  la  Tour  de  Londres  en 
est  un  exemple  rare. 

La  voûte  d'arêtes,  dans  sa  forme  la  plus 
simple,  est  engendrée  par  deux  demi-cylin- 
dres se  pénétrant  à  angle  droit,  et  est 
dépourvue  d'arcs  doubleaux  :  c'est  une 
réminiscence  de  la  voûte  d'arêtes  romaine. 
Les  bas-côtés  de  la  nef  de  la  Trinité  à  Caen 
sont  voûtés  d'après  ce  système,  plus  fré- 
quemment usité  dans  les  cryptes.  (Trinité 
de  Caen,  et  cathédrale  de  Bayeux.)  En 
Angleterre,  nous  avons  des  exemples  de 
ces  voûtes  d'arêtes  dans  les  cryptes  du 
réfectoire  de  Durham  construites  pendant 
l'exil  de  l'évêque  Guillaume  de  Saint-Calais 


3Les  €>rigine0  de  r:^rcl)ttecture  gott)tque. 


369 


(1088-1091)   ("),    et   dont   les   voûtes   sont       fy^.  /^,  ainsi  que  dans  la  crypte  s'étendant 
supportées  par  des   piliers   rectangulaires       sous  le  chœur  de  la  cathédrale  de  Roches- 


^^ 

^ 

<  1 

Où   < 

-4  a: 

<n 

H  = 

m  u 

ter,  qui  fut  construite   par   l'évêque   Gun- 

I.  Durham  Cathedra!,  par  William  Greenwell,  5=  édi- 
tion, p.  21. 


dulphe   (1077- 1082)   et  dont  les  supports 
sont  des  fûts  cylindriques  ('). 

I.  Gundu/fs  Totver  at  Rochester,  and  i lie first  Norman 


REVUE  DE  L  ART   CHRÉTIEN. 
1901.    —    5'"*^    LIVRAISON. 


370 


^ebue  ïie  T^vt  cbvctien. 


En  général  ces  voûtes  d'arêtes  sont 
renforcées  par  des  doubleaux  en  plein-cintre 
de  section  carrée,  qui  forment  sous  la  voûte 
une  sorte  de  cintre  permanent  (').  L'emploi 
de  ces  doubleaux  entraînait  cependant  des 
difficultés  considérables  pour  construire  la 
naissance  de  l'arête.  Dans  la  voûte  d'arêtes 
romaine  et  dans  ses  imitations  l'arête  part 
de  l'angle  externe  du  pilier.  Dans  plusieurs 
voûtes  normandes  primitives,  l'arête  part 
de  l'angle  interne  formé  par  la  rencontre 
de  deux  doubleaux  ou  d'un  doubleau  avec 
le  mur  (').  Étant  donné  que  les  voûtes 
étaient  construites  en  blocage,  avec  de  gros 
joints  et  couvertes  d'enduit,  celte  manière 
d'agencer  la  naissance  de  l'arête  était 
évidemment  défectueuse.  Aussi  tourna-t-on 
bientôt  cette  difficulté  en  développant  le 
plan  des  piliers.  Le  pilastre  sur  lequel  re- 
pose le  doubleau  est  flanqué  de  chaque 
côté  par  un  pilastre  secondaire  qui  forme 
pour  l'arête  un  support  indépendant  (3). 
Cette  disposition  est  employée  dans  la 
crypte  du  dortoir  de  Westminster  (conti- 
nuation de  l'œuvre  d'Edouard  le  Confesseur 
1070- 1080  environ),  où  le  pilier  et  l'arête 

Cathedral  Church  there,  par  W.  H.  St-John   Hope,   Ar- 
cluvologia,  XLIX,  323. 

1.  Les  extrémités  des  coucliis  étaient  posées  sur  l'ex- 
trados des  doubleaux.  On  voit  encore  en  place  des  frag- 
ments de  ces  couchis  dans  la  crypte  de  Lastingham 
(Yorkshire).  Cette  crypte  fut  construite  entre  1078  et  1088 
par  des  moines  venus  de  l'abbaye  de  Whitby  et  qui 
n'avaient  pas  achevé  l'église  de  Lastingham  quand  ils 
partirent  pour  fonder  l'abbaye  de  Notre-Dame  à  York. 

2.  Bas-côtés  de  la  nef  de  Lessay  (fi^.  20).  Chœur  et 
bas-côtés  de  Saint-NMcolas  de  Caen  et  de  St-Georges  de 
Boscherville  (/is^.  24).  Voir  aussi  les  pilastres  du  bras 
nord  du  transept  de  la  cathédrale  d'Ely  (/ig.  2,  VIII). 

3.  Dans  de  très  anciens  exemples,  tels  que  Bernay  et 
Tumièges,  nous  voyons  la  préparation  de  ce  système. 
Dans  le  bas-côté  sud  du  chœur  à  Bernay,  l'arête  forme  ,\ 
sa  naissance  un  angle  saillant,  mais  le  pilier  n'ofire  pas 
de  subdivision  pour  la  recevoir.  Dans  les  bas-côtés  de  la 
nef  de  Jumièges  le  support  adossé  au  mur  est  formé  par 
une  demi-colonne  engagée  dans  un  pilastre  carré  (comme 
à  Kly, /?;'■  ^,  VIII);  mais,  le  doubleau  n'occupant  pas 
toute  la  largeur  du  pilier,  les  angles  restent  disponibles 
pour  recevoir  la  saillie  des  arêtes  à  leur  naissance. 


sont  continus  et  dépourvus  d'impostes  (').  Il 
existe  d'autres  exemples  avec  imposte 
moulurée:  les  bas-côtés  de  St-Albans  (com- 
mencé par  l'abbé  Paul  de  Caen  en  1077) 
{fig.  2,  i);  la  crypte  de  la  cathédrale  de 
Winchester,  commencée  par  l'évêque  Wal- 
kelin  en  1079  (Jîg.  2,  II,  &t/ig:  j)  ;  les  bas- 
côtés  de  la  chapelle  de  la  tour  de  Londres 
(1080  environ)  ;  les  bas-côtés  de  la  nef  du 
prieuré  de  Blyth  (Nottinghamshire),  fondé 


Fig.  3.  —  Winchester,  crypte. 

en  1088  (/iq.  2,  V);  la  crypte  de  Bow- 
church  à  Londres  ('')  et  les  bas-côiés  du 
chœurde. S  t- Barthélémy  de  S  mi  thfield  fondé 
seulement  en  1123  ('). 

Dans  certaines  cryptes,  oh   les  supports 
sont  constitués  par  des   fûts  cylindriques, 

1.  Cela  n'est  exact  que  pour  les  piliers  adossés.  — 
Quant  aux  retombées  supportées  par  des  jiiles  cylindri- 
ques, l'arête  nait  un  peu  au-dessus  du  chapiteau,  dans 
l'angle  formé  par  les  doubleaux  qui  sont  en  plein  cintre 
surbaissé. 

2.  Velusla  Moiiuincnla,  V,  planche  64. 

3.  Dans  la  crypte  du  dortoir  de  Westminster,  les  bas- 
côtés  de  la  chapelle  de  la  Tour  de  Londres,  la  crypte 
de  Bowchuich  et  les  bas-côtés  du  chœur  de  St-Barthé- 
Icmy  de  .Suiiihfield,  les  voûtes  sont  munies  de  fornierets 
qui  reposent  sur  des  pilastres  distincts.  Voir  les  illus- 
trations relatives  ;\  la  chapelle  de  la  Tour  dans  les  Vciusta 
Moniiiiunta,  I V,  pi.  48  .^  5  1 . 


Hes  C>rtgtnes  De  r:^rcl)ttecture  goftique. 


371 


le  sommier  de  la  voûte  offre  des  divisions 
correspondant  aux  dispositions  que  nous 
venons  d'indiquer,  de  manière  à  four- 
nir une  saillie  spéciale  au  départ  de 
l'arête.  (Crypte  de  la  cathédrale  de  Wor- 
cester  1084  (') ,  crypte  construite  par 
Ernulphe  à  la  cathédrale  de  Cantorbéry 
(1096  environ),  chapelle  du  château  de 
Durham,  commencée  par  Guillaume  le  Con- 
quérant en  1072.) 

Un  autre  progrès  fut  réalisé  par  la 
substitution  de  colonnes  engagées  aux  pi- 
lastres carrés  qui  recevaient  les  arêtes.  Les 
voûtes  situées  sous  les  tribunes  du  transept 
à  St-Étienne  de  Caen  ont  des  supports  de 
ce  genre  (fig.  2,  III)  et,  bien  que  les 
voûtes  des  bas-côtés  de  la  nef  aient  été 
reconstruites  à  une  date  postérieure  (°),  les 
plans  des  piliers  indiquent  clairement  que 
la  même  disposition  y  avait  été  adoptée  (^\ 
La  même  méthode  est  employée  dans  les 
constructions  dues  à  l'évêque  Walkelin 
dans  les  bas-côtés  du  transept  de  la  cathé- 
drale de  Winchester  (fig.  2,  VII  ^^  fiS- 
4  ('')  ).  Nous  la  rencontrons  également  dans 
les  constructions  de  l'abbé  Siméon,  frère 
de  Walkelin,  dans  les  bas-côtés  du  transept 
de  la  cathédrale  d'Ely,  mais  ici  on  ne  ren- 
contre la  colonnette  recevant  l'arête  que 
dans  les  piliers  des  grands  arcs  et  non  pas 
dans  les  piliers  adossés  au  mur  (fig.  2, 
F///^.Dans  les  bas-côtés  de  la  nef  d'Ely  (^) 

1.  Une  excellente  étude  sur  les  voûtes  de  la  crypte  de 
la  cathédrale  de  Worcester,  due  au  professeur  Willis,  se 
trouve  dans  les  Transactions  of  Ihe  Royal  Jnstituie  of 
British  Architects,  1862-3,  p.  213. 

2.  G.  Bouet,  Analyse  architecturale  de  l'abbaye  de 
St-Étienne  de  Caen,  1868,  pp.  32  et  34,  et  dans  \e  Bulletin 
Monumental,  XXXI,  pp.  448  et  450. 

3.  Également  dans  le  bas-côté  nord  de  St-Taurin 
d'Évreux. 

4.  Également  dans  les  angles  de  la  partie  centrale  de 
la  crypte  de  Rochester,  œuvre  de  Gundulphe  [/Irchao- 
logia,  XLIX).  Dans  les  angles  des  bas-côtés  de  cette 
crypte  les  arêtes  retombent  sur  des  pilastres  carrés. 

5.  Ruprich-Robert  donne  pour  la  nef  d'Ely  les  dates 
de  1174  à  Ii8g.  Elles  ne  peuvent  s'appliquer  qu'à  la  par- 


on  rencontre  la  même  disposition,  à  cela 
près  que  les  pilastres  adossés  au  mur  ont 
une  colonne  correspondant  à  la  retombée  de 
l'arête  (fig.  2,  IX),  comme  à  Winchester. 
Dans  le  collatéral  nord  de  l'église  abbatiale 
de  St-Augustin  à  Cantorbéry,  une  colon- 
nette  reçoit  l'arête  (fig.  2,  VI),  et  le  pro- 
fesseur Willis  croit  que  l'on  adopta  le  même 
mode  de  construction  dans  les  bas-côtés  du 
chœur  de  la  cathédrale  de  Cantorbéry,  qui 


Fig.  4.  —  Winchester,  voûte  sous  la  tribune  du  transept  nord. 

sont  l'œuvre  d'Ernulphe  (').  Cet  agence- 
ment de  voûtes  et  de  supports  ne  fut 
probablement  que  peu  usité  et  bientôt 
abandonné  pour  l'emploi  de  la  croisée 
d'ogives. 

Dans  les  voûtes  situées  sous  les  tribunes 
du  transept  à  St-Etienne  de  Caen  et  dans 
les  constructions  de  l'évêque  Walkelin  à  la 
cathédrale   de  Winchester  (crypte, y%-.  j  ; 

tie  supérieure  du  transept  occidental.  Le  projet  de  la  nef 
est  certainement  dû  à  l'abbé  Richard  (i  loo-i  107),  si  même 
on  ne  peut  lui  attribuer  la  plus  grande  partie  de  la  cons- 
truction actuelle.  Voir  D.  J.  Stewart,  The  Architectural 
History  of  Ely  Caihedral,  186S,  p.  38. 

I.  Voir  R.  Willis,  The  Architectural  History  of  Canter- 
biiry  Cathedral,  1845,  p.  77. 


572 


l&thxit  ÏJC  r^lrt  cbréttcn. 


bas-côtés  du  transept,  /%•.  y)  ('),  se  trouve 
réalisé  un  progrès  important  :  les  reins  de 
la  voûte  sont  appareillés  en  moellons,  le 
reste  étant  construit  en  blocage  recouvert 
d'enduit.  Ces  progrès  relatifs  à  la  construc- 
tion de  la  naissance  des  arêtes  et  au   plan 


des  supports  sont  dignes  d'attention,  car 
ils  font  comprendre  comment  on  accueillera 
la  découverte  bien  plus  importante  de  la 
croisée  d'ogives.  Mais,  avant  d'en  venir  à 
ce  point,  qui  sera  l'objet  principal  de  mon 
étude,  il  est  nécessaire  de  parler  des  modi- 


Fig.  5.  —  Gloucester,  chapelle  sud  du  déambulatoire,  côté  nord. 


fications  que  subit  la  voûte  d'arêtes  dans 
le  cas  où  il  fallait  voûter  des  travées  de  plan 
barlong,  ou  irrégulier. 

Quelle  que  fût  la  forme  de  l'espace  à 
couvrir,  qu'on  la  suppose  barlongue,  trian- 
gulaire ou  trapézoïdale,  les  Normands  cher- 
chaient toujours  à  ne  pas  donner  aux  voûtes 

I.  Également  dans  les  voûtes  des  bas-côtés  de  la  nef 
de  Blyth  (Noltinghamshire). 


d'arêtes  une  forme  bombée  (').  Ils  attei- 
gnirent ce  but  en  surélevant  le  tracé  des 
voûtains  les  plus  étroits  de  portée.  Quel- 
quefois ces  courbes  sont  simplement  en 
plein  cintre  surhaussé  ;  le  plus  souvent  la 
courbe  adoptée  est  celle  d'une  ellipse  posée 

I.  En  Angleterre,  au  moins,  les  Normands  ne  parais- 
sent pas  avoir  adopte  l'expddient  de  bomber  la  voûte  de 
manière  à  pouvoir  donner  à  l'arcte  un  tracé  en  plein- 
cintre.  {Viol\et-le-D\xc,  Dictionnaire,  IV,  iS.) 


BLctiuc  Dc  l'Hrr  cbréticn. 


Pl.  YlII. 


HLcmic  Dc  PHrt  chrétien. 


DURHAM     CATtiEDRAL. 

HALF   CR055-5ECT10N  OF  CHOIR 
NORTH   5IDE. 


t  «^/U/*i7< 


îLe0  £)rig(ne0  De  r:^rcl)ttecture  gotl)ique. 


373 


sur  son  petit  axe.  Les  méthodes  employées 
sont  irrégulières,   car   à  ce    moment  on  ne 
réalisait  de  progrès  que  par  voie  de  tâton- 
nement.  Que  les   Normands   aient  acquis 
une  grande  habileté  avant  l'introduction  de 
la  nervure,  pour  voûter  des  travées  de  plan 
irrégulier,  cela  nous  est  prouvé  par  les  cryp- 
tes de  Winchester  (')  et  de  Worcester  ('). 
Dans  l'abside    et   le    déambulatoire   de  la 
crypte  de  Winchester  le    tracé  irrégulier 
des  travées  et  la  science  déployée   dans  la 
construction    de    leurs    voûtes     sont    très 
remarquables.  —  Les   arcs   sont  en  plein 
cintre  légèrement  surbaissé  (^),  tandis  que, 
pour  maintenir  les  clefs  à  un  même  niveau, 
il  a  fallu  que  l'on  fît  prendre  aux  voûtains 
latéraux  des   travées  les   plus  étroites  une 
haute  courbe  elliptique.  —  A  la  cathédrale 
de  Gloucester  (commencée  en  1089,  con- 
sacrée en  1 100),  dans  l'étroite  travée  qui  se 
trouve  au  côté-ouest  de  la  chapelle  absidale 
sud,  le  formeret  est  un  véritable  arc  brisé, 
bien    qu'à  son  sommet   la    lunette    de    la 
voûte  soit  arrondie  (fig.  5).   ■ —  L'extrême 
ingéniosité    dont    les    Normands    ont    fait 
preuve,  dans  l'emploi  de  la  voûte  d'arêtes, 
explique, dans  une  certaine  mesure,  pourquoi 
ils  ont  de   bonne  heure   adopté  le  principe 
de  la  croisée  d'ogives   et   lui  ont  donné  un 
développement  systématique. 

La  forme  semi-elliptique  (^)  donnée  aux 
compartiments  latéraux  des  voûtes  d'arêtes 
mentionnées  plus  haut  est  digne  d'attention, 

1.  Un  plan  de  cette  crypte  se  trouve  dans  History  and 
Antiquities  of  Ihc  Sec  and  Cathedral  chiirch  of  Winches- 
ter, par  J.  Britton  (1817),  pi.  II. 

2.  R.  Willis,  voir  plus  haut. 

3.  Le  professeur  Willis  en  parle  comme  de  courbes 
elliptiques  dont  la  portée  est  de  4  '"  57  et  la  flèche  de 
I  m  8j.  —  Voir  les  Transactions  citées  plus  haut,  p.  215. 

4.  D'après  Sir  G.  G.  Scott  (Lectures  on  Mcdiœval 
Architecture,  I,  p.  57  j,  ce  n'était  qu'exceptionnellement 
qu'on  adopta  ces  courbes,  mais  j'estime  que  les  exemples 
existants  ne  sont  pas  susceptibles  d'une  interprétation 
autre  que  celle  donnée  plus  haut.  Voir  Ruprich-Robert, 
L'architecture  normande,  p.  71. 


parce  qu'elle  démontre  qu'avant  l'introduc- 
tion de  la  nervure  les  architectes  normands 
modifiaient  déjà  la  courbure  de  ces  com- 
partiments latéraux,  de  manière  à  la  faire 
concorder  avec  la  courbe  de  l'arête.  Etu- 
dions le  cas  d'une  voûte  d'arêtes  établie  sur 
une  travée  barlongue  A  B  C  D.  (fig.  6)  : 
le  tracé  de  la  lunette  la  plus  large  est  un 
demi-cercle  A  E  B,  et  les  lignes  de  faîte 
des  voûtains  doivent  être  placées  de  niveau. 
—  Si  la  courbe  du  compartiment  latéral  est 
un  demi-cercle   surhaussé  A  F  G,  l'arête, 


F 
A 

C 

J 

\ 

\ 

/ 

H/ 

\ 

\ 


Fig.  6. 

au  lieu  de  se  trouver  dans  un  plan  vertical, 
décrira  en  projection  une  ligne  infléchie 
A  H,  B  H  (').  —  Mais,  pour  que  l'arête 
soit  contenue  dans  le  même  plan  D  H,  sa 
courbe  devra  être  une  demi-ellipse  D  K, 
et  la  projection  de  cette  courbe  sur  le  mur 
latéral  imposera  à  la  lunette  une  forme 
semi-elliptique  D  L  G.  —  Je  ne  prétends 
pas  que  ces  voûtes  primitives  aient  été  cons- 
truites avec  une  exactitude  mathématique, 
mais  il  me  semble  évident   que   c'est  afin 

I.  Voir  le  professeur  Willis  sur  les  voûtes  de  la  crypte 
de  Worcester,  Transactions  citées  plus  haut,  p.  215  et 
pi.  I. 


374 


Wit\)x\t  lie  l'^rt  cl)rcticn. 


que  l'arête  se  trouvât  à  peu  près  dans  un 
plan  vertical  que  les  compartiments  laté- 
raux ont  reçu  cette  forme  elliptique.  Après 
l'introduction  de  la  nervure,  les  comparti- 
ments latéraux  des  voûtes  barlongues 
prennent  généralement  aussi  un  tracé  ellip- 
tique, bien  que  dans  les  plus  anciennes 
croisées  d'ogives  la  nervure  ne  décrive  plus 
une  demi-ellipse  mais  un  arc  de  cercle,  dont 
le  centre  de  figure  est  placé  au-dessous  des 
impostes.  —  Désormais  la  courbe  des 
ogives  sera  le  principe  générateur  de  la 
construction,  déterminant  la  disposition 
des  compartiments  de  remplissage. 

La  croisée  d'ogives  apparaît  vers  la  fin 
du  XI"  siècle  dans  les  pays,  fort  éloignés 
les  uns  des  autres,  situés  entre  l'Italie 
septentrionale  et  la  Bretagne.  L'histoire 
de  son  évolution  dépasserait  de  beau- 
coup les  limites  de  ce  travail  où  je  ne  me 
propose  que  d'étudier  son  développement 
dans  les  monuments  anglais.  —  Mais,  quels 
qu'aient  été  l'endroit  et  les  circonstances 
dans  lesquels  sa  découverte  a  eu  lieu,  ses 
avantages  ont  dû  immédiatement  apparaître 
à  tous  les  yeux.  La  croisée  d'ogives  assurait, 
en  effet,  un  cintre  permanent  à  l'arête  qui, 
lorsqu'elle  avait  une  grande  portée,  était 
toujours  sujette  à  s'écrouler.  —  L'ogive 
complétait  donc  la  membrure  inaugurée 
déjà  par  l'adjonction  de  l'arc  doubleau  à  la 
voûte  d'arêtes  romaine.  —  Avant  la  fin  du 
XI"  siècle,  les  architectes  normands  cou- 
vraient déjà  les  chœurs  de  voûtes  d'arêtes: 
il  en  reste  quelques  exemples  dont  nous 
parlerons  plus  loin.  —  L'emploi  de  la  ner- 
vure se  recommandait  naturellement  à  une 
école  qui  eut  toujours  une  tendance  mar- 
quée à  multiplier  les  piliers  et  les  arcs  et 
qui  était  devenue  aussi  habile  à  construire 
les  voûtes  d'arêtes.  Il  ne  faut  donc  pas  nous 
étonner  de  voir,qu'en  Angleterre  aussi  bien 
qu'en  Normandie,  les  architectes  normands 


adoptèrent  volontiers  et  développèrent 
rapidement  cette  innovation. 

La  cathédrale  de  Durham  n'est  pas 
seulement  la  plus  belle  construction  romane 
que  possède  l'Angleterre,  elle  est  aussi  le 
plus  parfait  parmi  les  premiers  exemples 
de  l'emploi  de  la  croisée  d'ogives  dans 
notre  pays.  Toutes  les  parties  de  l'église  (') 
furent  voûtées  sur  croisées  d'ogives  entre 
1093  et  1133.  ^^  constatation  de  ce  fait 
est  de  la  plus  haute  importance  pour  la 
solution  du  problème  brièvement  exposé 
au  début  de  cette  étude.  Nous  pouvons 
heureusement  nous  fier  aux  témoins  qui 
l'attestent,  car  ce  sont  deux  chroniqueurs 
contemporains  dont  l'un  fut  probablement, 
et  l'autre  certainement,   moine  à  Durham. 

—  Nous  citons  du  reste  les  textes  les  plus 
importants  (").  Ils  nous  permettent  de  dater 
avec  exactitude  certaines  phases  dans  la 
marche  de  la  construction.  —  Aussitôt  après 
son  retour  de  l'exil,  l'évêque  Guillaume  de 
Saint  Calais  fit  abattre  l'église  d'Aldhun  et, 
dès  l'année  suivante,  commença  la  construc- 
tion d'une  église  plus  importante,  dont  la 
première  pierre  fut  posée  le  i  i  août  1093. 

—  Nous   n'avons  pas    de    renseignement 

1.  Excepté  peut-être  la  croisée  du  transept.  —  Nous 
n'avons  pas  de  données  certaines  à  son  sujet,  car  on 
reconstruisit  la  partie  supérieure  de  la  tour  centrale  au 
XV'=  siècle  ;  mais  les  colonnes  montées  dans  chaque 
angle  de  la  lanterne  étaient  probablement  destinées  à 
recevoir  les  ogives  d'une  voûte. 

2.  Syineonis  monachi  Duiihclni.  lihcllits  de  cxordio 
Diinhclinensis  Ecclesiae.  Ed.  Thomas  Bedford,  Londres, 
1732.  Rolls  Séries,  éd.  T.  Arnold,  1882-1885.  C'est  à  cette 
dernière  édition  que  nous  renvoyons  plus  bas.  L'histoire 
de  Symeon  s'arrête  en  1096;  celle  de  son  continuateur  en 
1144.  —  «  Ecclesiam  xcvill  anno  ex  quo  ab  Akhino  fun- 
data  fuerat,  destrui  precepit,  et  sequenti  anno  positis  fun- 
damentis  nobiliori  satis  et  majori  opère  aliam  construere 
cœpit.  —  Est  autem  incepta  MXCUj  Dominicic  incarna- 
tionis  anno,  pontificatiis  autem  Willelmi  xilj  ex  quo 
autem  monachi  in  Dunelmum  convenerant  xj  tertio  Idus 
Augusti,  feria  V.  Eo  enim  die  Episcopus,  et  qui  post  euni 
secundus  erat  in  ecclesia  prior  Turgotus  cum  cœteris 
fratribus  priinos  in  fundamento  lapides  posuerunt.  Nam 
paulo  ante,  id  est,  IV  Kal.  Augusti  feria  VI,  idem  Epis- 
copus et  prior,  facta  cum  fratribus  oratione  ac  data  bene- 


iLc0  €)rtgtne0  de  r:^rcl)itecrure  gotl)ique. 


375 


précis  sur  l'état  de  la  construction  au  mo- 
ment de  la  mort  de  l'évêque  (6  janvier 
1096).  Nous  savons  cependant  que  l'évêque 
avait  entrepris  la  construction  de  sa  cathé- 
drale en  même  temps  que  les  moines  celle 
de  leur  monastère  et  que  sa  mort  vint 
modifier  cet  état  de  choses.  — -  Désormais 
les  moines  se  consacrèrent  uniquement  à 
l'œuvre  de  la  cathédrale,  qui  avait  été  pour- 
suivie jusqu'à  la  nef  lorsque  Ralph  Flam- 
bard  accéda  au  trône  épiscopal  (1099).  Si 
nous  considérons  que  l'évêque  Guillaume 
était  d'un  caractère  énergique  et  qu'il  dis- 
posait de  grandes  ressources,  évidemment 
très  supérieures  à  celles  des  moines,  ses 
continuateurs,  nous  sommes  amené  à  cons- 
tater un  fait  nettement  indiqué  du  reste 
par  les  caractères  archéologiques  de  l'édi- 
fice: le  chœur  et  le  côté  oriental  du  transept 
jusqu'au  haut  du  triforium  sont  l'œuvre  de 
Guillaume,  tandis  que  le  côté  occidental  du 
transept  peut  être  attribué  aux  moines.  — • 
Le  chœur  était  déjà  si  avancé  en  1 104  qu'à 
cette  date  on  y  transporta  et  qu'on  1  plaça 
au  chevet  la  châsse  de  Saint-Cuthbert. 

Flambard  poussa  les  travaux:  (imodo 
intentms,  modo  remissitis  »  ;  ce  fait  s'est 
manifesté  par  certaines  modifications  appor- 


dictione,  fundamentiim  cœpeiant  fodere.  Igitur monachis 
suas  officinas  sdificantibus,  suis  Episcopus  sumptibus 
ecclesiœ  opu5  faciebat.  >  —  Syineon,  I,  128-g. 

—  Le  continuateur  parle  de  Flambard  en  ces  termes  : 
«  Circa  opus  ecclesias  modo  intentius  modo  remissius 
agebatur,  sicut  illi  ex  oblatioae  altaris  et  cœmeterii  vel 
suppetebat  pecunia  vel  deficiebat.  His  namque  sumptibus 
navem  ecclesia;  circumductis  parietibus,  ad  sui  usque 
testitiidinem  erexerat.  — Porro  pr^-cdecessor  (Willelmus  de 
S.  Carilefo)  illius  (Rannulfi),  qui  opus  inchoavit,  id  decer- 
nendo  statueiat,  ut  Episcopus  ex  suo  ecclesiam,  monachi 
vero  suas  ex  ecclesia;  collectis  facerent  officinas.  —  Ouod 
illo  cadente  cecidit.  —  Monachi  enimomissis  officinarum 
asdificationibus  operi  ecclesiis  insistunt,  quam  usque 
navem  Rannulfusjam  factum  invenit.  » —  Con/inuatio,  I, 
139-140. 

—  Après  la  mort  de  Flambard  :  «  Vacavitque  episco- 
patus  per  quinquennium.  Eo  tempore  navis  ecclesiae 
Dunehiiensis  monachis  operi  instantibus  peracta  est.  2> 
Contintiatio,  I,  141. 


tées  au  plan  primitif  de  la  nef  et  aux  parties 
hautes  du  bras  sud  du  transept...  Quand 
Flambard  mourut  en  1 1  28,  la  nef  était  ter- 
minée jusqu'à  la  naissance  des  voûtes  hau- 
tes :  dans  l'intervalle  qui  sépara  sa  mort  de 
l'élection  de  son  successeur,  Geoffroy  le 
Roux  (1133),  les  moines  achevèrent  com- 
plètement la  nef,  c'est-à-dire  qu'ils  construi- 
sirent la  voûte. 

II  semble  d'après  le  plan  ('),  du  chœur  et 
de  la  partie  orientale  du  transept,  que  l'on 
avait  bien  eu,  dès  l'origine,  l'intention  de 
couvrir  les  bas-côtés  et  les  nefs  de  voûtes 
qui  furent  alors  véritablement  construites. — 
Décrivant  plus  loin  les  voûtes  des  nefs  prin- 
cipales, nous  examinerons  d'abord  les  voûtes 
des  collatéraux  construites  par  l'évêque 
Guillaume  entre  1093  et  1096.  Ces  voûtes 
sont  figurées  dans  les  relevés  que  nous  don- 
nons d'une  des  travées  du  chœur  (Jîg.  7,  8 
et  ç)  [-).  Nous  y  joignons  un  plan  détaillé 
(Jig.  10)  sur  lequel  est  figuré  le  rabattement 

1.  Cf.  le  plan  de  la  cathédrale  dans  Architectural  Illus- 
trations and  Description  of  the  Cathedral  Church  of  Dur- 
ham,  par  R.  W.  Billings,  1843,  pi.  3  et  4,  ou  dans  The 
Bttilder,  LXIV,  p.  427.  Voir  aussi  le  plan  du  chevet  pri- 
mitif dans  VArchœotogical Journal,  LUI,  9,  pi.  2. 

2.  Les  figures  7  à  12  montrent  la  moitié  ouest  delà 
double  travée  est  du  chœur  (côté  nord).  Dans  les  fig.  7  et 
8  nous  avons  supprimé  la  voiite  actuelle  du  chœur  cons- 
truite au  milieu  du  XI 11^  siècle  ;  quelques  remaniements 
ne  sont  pas  figurés.  —  Les  formerets  AAA,  de  la  voûte  du 
Xlll'siècle  et  les  colonnes  qui  les  reçoivent, sont  indiqués 
(fig.  7)  par  des  lignes  ponctuées.  —  L'appareil  de  la  partie 
haute  du  mur  en  BB  et  CC  (fig.  7)  montre  le  tracé  de  la 
lunette  de  la  voûte  primitive.  —  Au  XIII''  siècle,  quand 
on  construisit  la  voûte  actuelle,  on  sculpta  les  chapiteaux 
des  triples  colonnes  en  D  (fig.  7),  mais  les  chapiteaux 
correspondants  de  la  double  travée  occidentale  n'ont  pas 
été  modifiés.  —  La  colonne  en  E  (fig.  7)  a  été  coupée 
pour  faire  place  aux  stalles  du  chœur,  qui  recouvrent  le 
mur  dans  toute  la  partie  où  les  joints  ne  sont  pas  indiqués. 
Le  niveau  actuel  du  dallage  du  bas-côté  donne  le  niveau 
primitif  du  dallage  du  chœur  (voir  Archaological Journal 
LUI,  6).  Les  fenêtres  du  bas-côté  nord  ont  été  remaniées; 
les  lignes  ponctuées  en  F  dans  la  coupe  transversale 
(fig.  8)  indiquent  une  fenêtre  semblable  à  celles  du  bas- 
côté  du  transept.  —  Le  banc  de  pierre  que  1  évêque  Gau- 
tier de  Skirlaw  (1388  à  1405)  a  fait  construire  dans  le 
bas-côié  nord  est  indiqué  par  des  lignes  ponctuées  en  G 
(fig.  8)- 


576 


ÎRcbut  lie  rSlrt  cJ)rétim. 


Fie.  9. 


i/<(t/  /Sf!S 


ILîQ  C>ngtne0  îie  l'3trtl)ttecture  gotl)tque. 


377 


horizontal  des  nervures  et  des  doubleaux  ('). 

I.  Dans  ces  plans  et  les  plans  suivants  les  rabattements 
sont  faits  autour  des  niveaux  des  naissances  des  nervures, 
pris  comme  axes. 


Les  doubleaux  et  les  ogives  sont  supportés 
par  des  triples  colonnes  adossées  au  mur  du 
collatéral,  ou  aux  piles  fortes  et  faibles  qui 


RKVUE   DE   l'art  CHRÉTIEI*. 
I9OI.    —   5™*^    LIVRAISON. 


378 


3Rrbut  ïic  l*^rt  cbvcttcn. 


reçoivent  la  retombée  des  orands  arcs.  A 
chacune  des  nervures  correspond  une  co- 
lonne distincte.  Le  plan  des  travées  des 
collatéraux  du  chœur  est  barlong  ('),  le 
rectangle  étant  orienté  comme  l'église  dans 
le  sens  de  sa  plus  grande  dimension.  La 
portée  des  ogives  est,  en  conséquence,  de 
plus  du  double  de  celle  des  doubleaux.  Les 
grands  arcs  sont  à  peu  près  en  plein  cintre  ; 
celui  de  la  travée  que  nous  reproduisons  a 
son  centre  de  figure  situé  à  o"''20'^  au-dessous 
du  niveau  des  impostes.  La  portée  du  dou- 
bleau  qui  retombe  au  revers  de  la  pile  fai- 
ble est  un  peu  plus  grande  que  celle  du 
doubleau  correspondant  à  la  pile  forte.  — 
De  la  sorte,  tandis  que  le  premier  est  tracé 
en  plein  cintre,  le  second  a  dû  être  sur- 
haussé d'environ  o^a^f^.  Les  courbes  des 
oeives  sont  des  arcs  de  cercle  tracés  de 
centres  situés  à  i™45*^  au-dessous  du  niveau 
de  leur  naissance  ;  les  ogives,  par  consé- 
quent, forment,  en  retombant  sur  leurs  cha- 
piteaux, un  angle  aigu  avec  les  tailloirs.  Les 
clefs  des  ogives  sont  placées  beaucoup  plus 
hautque  le  sommetdes  doubleaux;  les  lignes 
de  faîte  des  voûtains  montent  donc  vers  la 
clef  des  ogives  (').  Les  lunettes  des  voû- 
tains, sur  les  murs  goutterots,  sont  en  plein 
cintre  surbaissé  ;  sur  le  mur  du  bas-côté, 
elles  le  sont  davantage  encore.  Sur  le  mur 
latéral  du  chœur,  la  lunette  de  la  voûte  n'est 
pas  concentrique  au  grand  arc,  à  cause  de  la 
largeur  considérable  de  la  pile  forte  ;  il  fal- 
lut, en  conséquence,  laisser  un  pan  de  mur 
entre  l'extrados  de  l'arc  et  la  voûte  du  côté 


1.  Excepté  la  travée  ouest  qui  se  rapproche  davantage 
du  plan  carré,  car  c'est  la  largeur  du  collatéral  au  tran- 
sept qui  détermine  la  forme  de  son  plan.  Les  autres 
travées  sont  à  peu  près  de  largeurs  égales,  d'axe  en  axe 
des  piliers. 

2.  Les  coupes  des  clefs  de  voûtes  se  trouvent  fij^.  lo. 
Dans  la  travée  en  question  les  pentes  qu'accusent  les 
lignes  de  faîte  des  voûtains  sont  respectivement  :  de  la 
clef  des  ogives  au  mur  du  chcuur,  o"'20",  au  mur  des  bas- 
côtés,  o"'53',  aux  clefs  des  doubleaux  transversaux  o'"68^. 


de  la  pile  forte.  —  Remarquons  que,  con- 
trairement à  ce  qui  se  passe  pour  l'arête 
d'une  voûte  sans  nervures,  la  courbe  de 
l'ogive  n'est  pas  déterminée  par  l'intersec- 
tion des  compartiments  de  voûte  ;  au  con- 
traire, l'ogive  est  établie  d'une  manière  in- 
dépendante, et  c'est  sa  courbe  qui  détermine 
la  forme  des  voûtains  de  remplissage  ('). 
Ce  fait  est  très  apparent  en  ce  qui  concerne 
les  compartiments  aboutissant  aux  murs  du 
chœur  et  du  bas-côté  ;  leur  surface  a  dû  être 
considérablement  gauchie,  parce  que  le 
centre  de  figure  de  l'ogive  est  à  un  niveau 
bien  inférieur  aux  centres  des  courbes  oréné- 
ratrices  des  voûtains.  —  Le  profil  des  dou- 
bleaux se  compose  d'un  méplat  encadré  de 
deux  boudins  surmontés  de  cavets  ;  celui 
des  ogives,  d'un  gros  boudin  entre  deux 
gorges...  Les  moulures  de  l'ogive  ne  se 
dégagent  pas  bien  à  sa  naissance,  surtout 
à  la  retombée  de  la  pile  faible  (voir  les  fig. 
10.  II  et  12).  Les  ogives  et  les  doubleaux, 
ainsi  que  tous  les  arcs  du  reste,  sont  cons- 
truits en  claveaux  minces  d'une  épaisseur 
moyenne  de  o'"i8c.  Les  clefs  des  ogives 
sont  appareillées  d'une  manière  toute  pri- 
mitive :  les  faces  des  clefs  ne  se  présentent 
pas  dans  une  direction  perpendiculaire  aux 
axes  des  nervures,  mais  elles  forment  le 
prolongement  des  côtés  de  celles-ci,  de 
sorte  que  des  claveaux  triangulaires  ont  dû 
être  disposés  tout  autour  de  la  clef  pour 
opérer  le  raccordement  fyfi,''.  10)  (').  11  n'y 
a  pas  de  formerets.  Les  voûtes  des  bas- 
côtés  du  transept  sont  exactement  sembla- 
bles à  celles  des  collatéraux  du  chœur,  à 
cela  près  que  le  plan  des  travées  y  est  de 
proportions  différentes.   Toutes  ces  voûtes 

1.  Il  est  à  peine  nécessaire  de  faire  remarquer  que 
cela  seul  démontre  l'impossibilité  qu'on  ail  ajouté  ici  des 
ogives  sous  les  arêtes  d'une  voûte  originairement  cons- 
truite sans  nervures. 

2.  Les  clefs  des  autres  voûtes  de  la  cathédrale  sont 
appareillées  d'une  manière  presque  semblable. 


ILtQ  C>rigtne0  îie  r3Crcl)ttecture  gothique. 


379 


basses  font  certainement  partie  de  l'œuvre 
primitive  ;  leur  appareil  et  leurs  profils 
présentent  les  mêmes  caractères  que  ceux 
des  arcs  du  chœur,  et',  pour  des  raisons  de 
construction,  elles  ont  certainement  dû  être 
montées,  comme  à  l'ordinaire,  en  même 
temps  que  les  murs  principaux.  —  On  a  dit 
que  les  colonnes  engagées  dont  nous 
avons    parlé    plus  haut    avaient    dû   être 


Fis 


Durham,  bas  côté  du  chœur,  pile  forte. 


disposées  pour  recevoir  la  retombée  de 
voûtes  d'arêtes  semblables  à  celles  des 
cathédrales  de  Winchester  et  d'Ely,  et  que 
les  voûtes  actuelles  sont  dues  à  un  rema- 
niement postérieur.  La  construction  des 
voûtes  considérée  en  elle-même  ne  peut 
fournir  aucun  argument  à  l'appui  de  cette 
thèse.  —  Elle  se  trouve,  d'autre  part,  net- 
tement contredite  par  la  disposition  donnée 
aux  colonnes  engagées  à  l'angle  des  colla- 
téraux du  chœur  et  du  transept,  aussi  bien 


du  côté  nord  que  du  côté  sud.  Dans  le  bas- 
côté  du  chœur  ce  sont  des  groupes  de  trois 
colonnes  qui  reçoivent  comme  ailleurs  les 
deux  ogives  et  les  doubleaux,  mais  dans 
cette  première  travée  du  bas-côté  du  tran- 
sept on  n'eut  besoin  que  de  deux  colonnes, 
puisque  l'ogive  de  la  travée  commune,  de 
la  travée  de  jonction,  était  déjà  pourvue  ; 
et  le  plan  du  pilier  d'angle  fut  simplement 


Fig.    12.   —   Durham,  bas-côté  du  chœur,  pile  faible. 

modifié  par  la  suppression  de  la  colonne 
devenue  inutile  (^^.  ij)  (').  Si  l'architecte 
s'était  proposé  de  construire  des  voûtes 
d'arêtes,  il  aurait  tout  simplement  pris 
l'angle  du  mur  comme  point  de  départ  de 
l'arête  et  ne  se  serait  pas  imposé  une  diffi- 
culté pour  le  simple  plaisir  de  la  surmonter. 
Les  voûtes  des  bas-côtés  de  la  nef  de 


I.  A  une  date  plus  récente,  on  petit  reni.iiquer  Teniploi 
de  la  même  soltition  h  l'angle  des  bas  entés  du  chœur  et 
du  transept  de  la  cathédrale  de  Lisieux. 


38o 


3Re\jur  ïir  l'^vr  djrcttcu. 


Durham  sont  l'œuvre  de  l'évêque  Ralph 
Flambard  (1099-1 128),  et  comme  il  éleva  la 
nef  jusqu'à  la  naissance  des  voûtes  hautes, 
celles  des  bas-côtés  peuvent  donc  être 
attribuées  aux  vingt  premières  années  du 
XI  I«  siècle.  Leurs  caractères  sont  les 
mêmes  que  ceux  des  voûtes  des  collatéraux 
du  chœur,  à  l'exception  de  quelques  détails 
de  minime  importance.  Au  dos  des  piles 
fortes  et  vis-à-vis  d'elles,  les  ogives  et  le 
doubleau  retombent  sur  trois  colonnes 
engagées  comme   dans  les  collatéraux    du 


Fig.    13.  —  Durham,  plan  du  pilier  à  langle  des  collatéraux 

du  chœur  et  du  transept. 

chœur  et  du  transept,  mais  les  piles  faibles 
sont  simplement  cylindriques,  dépourvues 
de  colonnes  engagées  spécialement  des- 
tinées à  la  retombée  de  la  voûte,  et  les 
piliers  qui  leur  font  face  sont  constitués  par 
une  grosse  colonne  à  demi  engagée  dans  le 
mur  du  collatéral.  Les  doubleaux  corres- 
pondant aux  piles  faibles  ont  une  portée 
plus  considérable  que  ceux  correspondant 
aux  piles  fortes,  et  la  courbe  des  premiers 
a  été  modifiée  en  conséquence.  Les  dou- 
bleaux de  toutes  les  travées  des  bas-côtés 
de  la  nef  et  les  ogives  des  deux  travées 
orientales  présentent  les  mêmes  profils  que 
dans  les  collatéraux  du  chœur  et  du  tran- 


sept. Dans  les  autres  travées,  le  boudin  de 
l'ogive,  au  lieu  d'être  flanqué  de  deux 
gorges,  est  encadré  par  deux  rangs  de 
bâtons  brisés.  Les  voûtes  situées  sous  les 
tours  occidentales  sont  également  l'œuvre 
de  Ralph  Flambard;  elles  diffèrent  de  celles 
décrites  plus  haut.  Comme  les  tours  font 
une  forte  saillie  sur  l'alignement  extérieur 
du  bas-côté,  les  ogives  de  leurs  voûtes  ont 
une  portée  plus  grande  que  celles  des 
voûtes  des  collatéraux.  En  conséquence,  les 
chapiteaux  des  ogives  ont  été  placés  plus 
bas  que  ceux  des  arcs  donnant  ouverture 
sur  la  nef  et  les  bas-côtés  (fig.  i^)  et,  de 
la  sorte,  l'abaissement  du  point  de  départ 
de  l'ogive  compense  l'accroissement  donné 
à  sa  fièche.  La  même  disposition  a  été 
employée  par  Suger  à  Saint-Denis  (i  137- 
1140)  dans  les  voûtes  placées  sous  les 
tours  de  la  façade,  mais  dans  ce  dernier 
exemple  tous  les  arcs  sont  en  tiers-point. 
L'exemple  immédiatement  postérieur  de 
croisées  d'ogives  auxquelles  nous  puissions 
attribuer  une  date  presque  certaine  nous 
est  fourni  par  la  cathédrale  de  Winchester, 
dans  les  parties  de  son  transept  recons- 
truites au  Xll<ï  siècle.  La  construction 
primitive  remontait  à  l'œuvre  de  l'église 
entreprise  par  l'évêque  Walkelin,  en  1079, 
et  dont  les  moines  prirent  possession  en 
1093.  La  tour  centrale  s'écroula  en  1  107  (') 
et  les  travaux  de  reconstruction  nécessités 
par  cette  catastrophe  peuvent  être  facile- 
ment distingués  des  travaux  primitifs,  grâce 
aux  épaisseurs  des  joints  de  maçonnerie  : 
très  épais  dans  l'œuvre  de  Walkelin,  ils  sont 
au  contraire  très  étroits  dans  les  parties 
reprises    postérieurement    (').     Dans    les 

i.«  Anno  MCV'II.  Turris  ecclesi;!:  ejusdemcecidil  non.is 
Octobiis,  »  Annales  monasterii  de  Wnitonia,  dans  les 
Annales  monastici  (Rolls  séries,  éd.  H.  R.  Luard)  II.  43. 

2.  'l'he  Aichitecliiral  Histoiy  of  Winchester  Calhedral. 
par  le  prof.Willis,  Archœol.  Instit., Winchester  vol.,  p.  25. 


iLe0  C>rigme0  îie  r;?lrd;itecturc  gotl)ique. 


381 


travées  reconstruites  des  bas-côtés  du  tran- 
sept les  voûtes  primitives  furent  entière- 
ment remplacées  par  des  croisées  d'ogives 
dans  lesquelles  la  nervure  retombe  sur  les 
colonnes  qui,  à  l'origine,  recevaient  les 
arêtes  de  la  voûte  non  nervée  (fig.  ^,  VI 1  ; 
AA  sont  les  ogives  de  la  voûte  reconstruite). 
Comme  à  Durham,  la  courbe  de  la  nervure 
est  un  arc  de  cercle  tracé  d'un  centre  placé 


au-dessous  du  niveau  des  impostes.  Les 
lignes  de  faîte  des  voûtains  sont  à  peu  près 
de  niveau.  Le  profil  de  la  nervure  est  formé 
par  un  large  boudin  encadré  par  deux  pe- 
tites gorges.  A  Durham  les  voûtes  des  bas- 
côtés  nous  montrent  des  profils  sembla- 
bles, bien  que  moins  finement  exécutés  ('). 
Les  claveaux  des  nervures  sont  minces  et 
leurs  joints   étroits.  Les   clefs  sont    appa- 


Durham,  voûte  sous  la  tour  nord-ouest. 


reillées  de  manière  à  ce  que  leurs  joints 
soient  perpendiculaires  à  l'axe  de  la  ner- 
vure. La  travée  située  à  l'extrémité  nord  du 
bas-côté  est  du  transept  nord  n'a  pu  être 
atteinte  par  la  chute  de  la  tour,  et  la  voûte 
primitive  semble  avoir  subsisté  en  ayant 
toutefois  reçu  le  renfort  de  nervures  appli- 
quées sous  les  arêtes  (').    Quant  à  la  date 

1.  Les  ogives  des  voûtes  des  bas-côtés  de  Durham  ont 
o  56,  et  celles  de  Winchester  0.36  de  large. 


de  ces  voûtes  nervées,  nous  ne  pouvons 
mettre  en  doute  que  dans  une  église  aussi 
importante    que    Winchester    les     moines 


I.  Le  rapport  du  prof.  Willis  (p.  35,  ut  sitp.).  en  ce  qui 
concerne  les  travées  des  bas-côtés  nord  du  transept  qui 
ont  des  voûtes  nervées,  n'est  pas  absolument  exact.  Les 
travées  marquées  C  et  I  sur  son  plan  {fig.  j6)  ont  des 
voûtes  nervées.  Dans  la  travée  H  je  pense  que  les  nervures 
ont  dû  être  ajoutées  sous  la  voûte  d'arùte  primitive.  Les 
travées  D,  E,  F,  et  G  ont  des  voûtes  d'aiètes  primitives. 
Dans  la  travée  I  les  nervures  sont  dues  à  une  reprise  du 
XIV  siècle. 


382 


lSit\)x\t  tic  ravt  fijrcricn. 


n'aient  voulu  entreprendre  immédiatement 
la  réfection  des  dommages  causés,  et  nous 
sommes  en  droit  de  fixer  l'érection  de  ces 
voûtes  aux  deux  ou  trois  années  qui  ont 
suivi  l'an  1107,  date  de  la  chute  de  la 
tour  ('). 

I 


La  cathédrale  de  Peterborough  possède 
des  croisées  d'ogives  dont  la  date  nous  est 
donnée  par  des  documents.  L'église  fut 
incendiée  en  i  116,  et  le  monument  actuel 
commencé  en  11  17,  ou  1118  (').  En  1140 
ou  I  143  (les  deux  dates  sont  citées  par  dif- 


01234 

iiiiiiii  


O  I 

1 1 1 1 1 1 1 1 1  1 1 


234567 

I      I      I     11      I 


8       9       10 


i5  FEET 

H 

5  MÈTRES 


Peterborough,  bas  côté  sud  du  chœur.  Plan  de  la  voûte. 


I.  M.  F.  de  Verneilh  {A?inales arc/téologiqiics,  XXIV, 
234)  s'appuie  sur  le  prof.  Willis  pour  démontrer  que  ces 
voûtes  sont  d'une  date  plus  récente  que  la  construction 
primitive;  mais  il  n'est  pas  fait  mention  dans  cette 
démonstration  de  la  cliute  de  la  tour  qui  nécessita  la 
reconstruction  des  voûtes  en  question,  et  la  date  donnée 
par  cet  événement  ne  convient  pas  aux  conclusions  formu- 
lées. 

2  «  An  MC.W'I.  La  même  année  l'église  de  ISurh  fut 
entièrement  brûlée. >(.-i'/^/i5  5i(.ro«  throiiiiie^KMs  .Séries 
éd.  Henj.  Tliorpe  I.  371,  II,  213). 

i  MC.WI.  Tota  ecclesia  et  villa  combusta  est...  In  alio 
autem   anno  ipse  abbas  inchoavit  novam  ecclesiam,  et 


férents  chroniqueurs)  (^),les  moines  prirent 

jactavit  fundamentum  octavo  idus  Martii,anno  ab  Incar- 
natione  Domini  millesimo  centesimo  decimo  octavo,  et 
multum  operatus  est  in  ea,  sed  non  complevit.  »  (Hu- 
sonis  Candidi  Coenobii  Burgensis  Hisloria,  p.  72,  im- 
primé dans   les  Hisloriœ  Anglicatiœ  de  Sparke. 

«  MCXVI.  Monasterium  Burgi,  cum  magna  parte  villa: 
adjacentis,  combustum  est  secundo  nouas  Augusli,  die 
\'eneris  ».  «  MCXVII.  Kundamentum  nova;  ecclesi;c 
Hurgi  ponitur  quarto  idus  Martii  :».  (Clticmicoii  Aiii^liœ 
per  Johannem  Abbatein  Burgi  S.  f'elri.  SiiaïUe,  Hiilorice 
Aiiglhiinœ,  p.  64.) 

3.  L'abbé  Martin...  amena  les  moines  dans  le  nouveau 


JLtQ  £)nstneô  De  r:lvcl)itecture  sotï)ique. 


383 


possession  de  la  nouvelle  église.  Les  parties 
alors  terminées  comprenaient  le  chœur  et  le 
côté  est  du  transept,  sauf  peut-être  les  fe- 
nêtres hautes.  Les  bas-côtés  du  chœur  et  du 
transept  sont  voûtés  d'ogives  (JÏ£.  15). 
Les  doubleaux  et  les  ogives  retombent  sur 
un  groupe  de  trois  colonnes  adossées  aux 
murs  des  bas-côtés  (fig-  i"/}-  Les  piliers  des 
grands  arcs  sont  cylindriques  ou  de  forme 
polygonale  ;  leurs  chapiteaux  sont  subdi- 
visés de  manière  à  fournir  un  support 
distinct  à  chacune  des  nervures  des  arcs  et 
à  chacune  des  nervures  des  voûtes  des  bas- 
côtés  (fig.  16).  Les  grands  arcs  et  les  dou- 


tains  sont  sensiblement  de  niveau.  Au  dos 
de  la  nervure,  les  voûtains  offrent  une  sur- 
face gauchie  bien  que  dans  une  proportion 
moindre  qu'à  Durhani.  A  Peterborough,  en 
effet,  les  travées  se  rapprochent  beaucoup 
plus  du  plan  carré.  Les  doubleaux  sont 
décorés  d'un  boudin  à  chacun  de  leurs 
angles,  et  les  nervures  ont  pour  profil  un 
large  boudin  encadré  par  deux  méplats  {'). 
Ces  croisées  d  ogives  sont  dépourvues  de 
formerets. 

1!  nous  faut  ici  examiner  les  conclusions 
formulées  par  M.  Félix  de  Verneilh  (')  au 
sujet  de  ces  voûtes,  puisque  son  opinion 
paraît  faire  autorité  pour  M.  Lefèvre-Pon- 


I' i  .^.    16.  —  Peterborough,  bas  côté  sud  du  chœur. 

bleaux  des  voûtes  du  bas-côté  sont  en  plein 
cintre  légèrement  surhaussé.  ■ —  Les  ner- 
vures décrivent  des  arcs  de  cercle  tracés 
de  centres  placés  au-dessous  de  la  ligne 
des   impostes  ;   les  lignes  de  faîte  des  voû- 

monastère  le  jour  de  la  messe  de  S.  Pierre,  avec  de 
grandes  cérémonies.  Ce  fut  :  «  anno  ab  incarnalione 
Dom.  MC.XL,  acombustioneloci  XXIII  ».  {Anglo-Saxon 
Chronide,    I,  3S3,    II.    232.) 

«  MCXL.  Martinus  autem  abbas  sub  isto  lege... 
niulta  operatus  est,  et  presbyterium  ecclesi;u  perfecit... 
monachos  in  die  festivitatis  Sancti  Pétri  in  novam  ec- 
clesiam  cum  magno  gaudio  introduxit».  (Hugo  Candidus, 
p.  76).  Martin   fut  abbé  de  1 133  à  il 55. 

«  MCXLIII.  Conventus  iJurgi  hoc  anno  intravit  in 
novam  ecclesiam  ».  {Chron.  per  Johanneni,  p.  75.) 

i  MCXLIII.  Conventus  Burgi  intravit  novam  eccle- 
siam. >  {Chronicon  Peiroburgense,  Camden  Soc,  éd. 
Thomas  Staplelon,  p.  2.) 


Fig.   17.  —  Peterborough.  bas. côté  nord  du  chœur 

talis  à  qui  elle  suffit  pour  attribuer  les 
nervures  de  Peterborough  à  une  réfection 
accomplie  dans  la  seconde  moitié  du 
XI I^  siècle  (').  M.  de  Verneilh,  après  avoir 
fait  remarquer  que  les  bas-côtés  des  églises 
romanes  en  Angleterre  sont  couverts  de 
voûtes  d'arêtes,  dit  :  «  Par  des  motifs  de 
«  pur  embellissement,  à  ce  qu'il  semble,  on 
«  introduisit  des  nervures  sous  les  arêtes 
«  des  voûtes   primitives,   ou  l'on   remplaça 

1.  L'ancienne  porte  d'entrée  du  monastère  possède 
une  voijte  semblable. 

2.  Le  Style  ogival  en  Angleterre  et  en  Normandie .  par 
Félix  de  Verneilh,  Annales  archéologiques,  1864  XX1\', 
232  et  ss. 

3.  E.  Lefèvre-Pontalis,  op.  cit.,  I,  p.  89. 


3^4 


3Rcbur  iJt  V^xt  cbrcttrn. 


«  en  entier  ces  voûtes,  sans  rien  changer  à 
«  la  forme  et  à  la  direction  de  leurs  sup- 
«  ports     inférieurs.     Aussi,    les     colonnes 
«  engagées   qui   reçoivent  la  retombée  des 
«  nervures,  au  lieu  de  leur  faire   face,  con- 
«  formément  à  un  usage  très  général  et  très 
«  logique,    se    présentent-elles    alors    par 
«  l'angle  de  leurs  bases  et  de  leurs  chapi- 
«  teaux.  »    M.   de   Verneilh   semble  donc 
avoir  été  amené  à  douter    de  l'authenticité 
des  croisées  d'ogives  primitives  en  Angle- 
terre (y  compris  celles  de  Peterborough)  par 
ce  fait,  que   l'axe  des  chapiteaux  n'est  pas 
d'équerre  avec  celui  de  la  nervure  comme 
c'est  généralement   l'usage    dans    l'Ile-de- 
France.  Il   affirme  que  ce  détail  de  cons- 
truction   est    d'application     constante     en 
France,    sauf    des    exceptions    infiniment 
rares,    comme   dans    une    des    travées  du 
narthex    de   Suger  à    St-Denis.    Ces    ex- 
ceptions,  cependant,  ne  sont  pas  si  rares 
que  veut  bien  le  dire  M.  de  Verneilh,  car 
dans  plusieurs  des  plus  anciennes  croisées 
d'ogives    qui    ont  subsisté    dans    l'Ile-de- 
France    on   voit  les    chapiteaux    sous    les 
ogives   et   leurs  tailloirs   placés   d'équerre 
avec  le  doubleau  et  non  avec  la  nervure  ('). 
De  l'examen  des  voûtes  de  Peterborough 
M.   de  Verneilh  vient  à  conclure  que  les 
supports  étaient  agencés  pour  recevoir  les 
arêtes  saillantes  d'une  voûte  non  nervée  et 
que  les  nervures  actuelles  furent  ajoutées 
après  coup,  parce  qu'il  crut  avoir  observé 
que  les  grands  arcs  se  continuaient  derrière 
la  retombée  des  nervures,  sans  liaison  avec 
elles  jusqu'au  chapiteau.  Dans  l'état  actuel, 

1.  C'est  notamment  le  cas  en  France  à  St-Denis  (tour 
du  Sud-Ouest  et  déambulatoire),  cathédrale  de  Sens 
(bas-côtés),  St-Martin  de  Laon,  Nouvion-le- Vineux  (bas- 
côtés),  cathédrale  de  Noyon  (bras  sud  du  transept  et,  en 
partie,  bas-côtés  de  la  neO,  St-Maclou  de  Pontoise 
(déambulatoire),  St-Germain  des  Prés  à  Paris  (chœur  et 
déambulatoire),  .St-Leu-d'Ksserent  (déambulatoire),  ca- 
thédrale de  Soissons  (collatéral  du  bras  sud  du  tran- 
sept). 


àleur  naissance, les  nervures  sont  encastrées 
entre  les  grands  arcs  et  les  doubleaux,  ainsi 
que  le  montre  la  y^'.  /S  (')  ;  le  dos  de  la 
nervure  n'est  pas  aminci  de  la  même 
manière  que  nous  le  montre  le  dessin  de 
M.  de  Verneilh.  Mais,  dans  toutes  les  pre- 
mières croisées  d'ogives,  les  nervures  et  les 
arcs  ont  des  surfaces  de  raccord  très  gros- 
sières ('),  et  ce  fait  est  plutôt  un  argument 
en  faveur  de  la  date  que  nous  leur  assignons, 
car  ce  n'est  que  dans  l'ère  des  premiers  tâ- 
tonnements que  nouspouvons  nous  attendre 
à  rencontrer  de  semblables  malfaçons. 

Depuis  les  travaux  de  M.  de  Verneilh,  ce- 
pendant, la  tour  centrale  de  Peterborough 


M"l>"iï 


Fig.  l8.  —  Peterborough.  bas  côté  nord  du  chœur. 
Flan  à  la  naissance  de  la  voûte  du  bas-côté. 

a  été  démolie  et  rebâtie  ;  on  a  eu  ainsi 
l'occasion  de  s'assurer  exactement  de  la 
m.anière  dont  les  voûtes  des  bas-côtés 
avaient  été  construites.  M.  J.  T.  Irvine,  qui 
a  dirigé  les  travaux  avec  tant  d'expérience, 

1.  Je  dois  ce  relevé  à  M.  J.  T.  Irvine  ;  le  dessin  de 
VioUet-le-Duc  [Dictionnaire,  IV,  102,  fig.  54'")  montre  la 
nervure  et  le  grand  arc  comme  réunis  à  l'imposte  en  un 
seul  claveau,  ce  qui,  comme  M.  de  Verneilh  le  fait  remar- 
quer, est  tout  à  fait  inexact.  Ce  n'est  que  vers  la  fin  du 
XI F  siècle  que  fut  introduite  cette  manière  d'appareiller 
solidement  les  impostes. 

2.  Cf.  Lefèvre-Pontalis  {op.  cit.,  II.  6).  A  Bellefontaine, 
dans  la  voûte  du  chœur,  les  nervures  «  viennent  retom- 
ber maladroitement  sur  quatre  colonnettes  >. 

Dans  la  cathédrale  de  Laon,  on  peut  remarquer  un 
agencement  aussi  gauche  au-dessus  des  piliers  des  bas- 
côtés  du  chœur. 


3Leô  C>ngmes  îie  l':^rcl)itecture  gotl)uiue. 


385 


m'a  assuré  qu'on  n'observa  aucune  particu- 
larité qui  pût  corroborer  la  théorie  de 
M.  de  Verneilh.  Faisant  abstraction  de 
l'évidence  qui  ressort  de  la  simple  étude  de 
la  construction  elle-même,  cette  théorie 
n'est  pas  soutenable.  Les  nervures  ne 
peuvent  pas  avoir  été  ajoutées  sous  des 
voûtes  d'arêtes  plus  anciennes  pour  une 
raison  purement  géométrique.  L'arête  d'une 
voûte  d'arêtes  ordinaires  décrit  une  demi- 
ellipse,  tandis  que  la  courbe  actuelle  de 
la  nervure  est  un  arc  de  cercle.  Si  les  ner- 
vures avaient  été  ajoutées,  elles  auraient 
laissé,  vers  les  reins,  un  vide  à  remplir  entre 
elles  et  la  courbe  elliptique  des  arêtes  ('); 
mais  tel  n'est  pas  le  cas.  Si,  néanmoins,  les 
nervures  sont  postérieures  à  leurs  supports, 
les  voûtes  elles-mêmes  doivent  avoir  été 
entièrement  reconstruites.  Cependant  c'est 
trop  nous  demander  que  de  vouloir  nous 
faire  admettre  que  toutes  les  voûtes  primi- 
tives des  bas-côtés  du  chœur  et  celles  des 
bas-côtés  du  transept  (quatorze  travées  en 
tout)  aient  été  remaniées  un  demi-siècle 
après  leur  construction,  sans  que  nous  soit 
parvenue  aucune  trace  de  leur  état  anté- 
rieur, ni  aucun  indice  d'un  vice  de  construc- 
tion ayant  pu  rendre  leur  réfection  néces- 
saire. Il  semble  donc  bien  évident  que  les 
voûtes  de  Peterborough  sont  les  voûtes 
primitives,  car  elles  ne  constituent  pas  un 
exemple  isolé  ;  elles  sont  analogues,  par 
leur  système  de  construction,  à  un  grand 
nombre  d'autres  voûtes  qui,  dans  leur 
ensemble,  ne  peuvent  être  le  résultat  de 
refaçons  telles  que  celle  dont  M.  de  Ver- 
neilh a  émis  l'hypothèse. 

Passons  maintenant  à  l'examen  des  croi- 
sées d'ogives  similaires  dont,  faute  de  docu- 
ments, nous  devons  fixer  approximative- 
ment les  dates  d'après  les  caractères  de  la 

I.  C'est  le  cas  dans  la  tiavée  du  nord-est  du  transept 
nord  à  Winchester. 


construction.  Celles  de  ces  voûtes  qui  pa- 
raissent devoir  être  rangées  parmi  les  plus 
anciennes  se  trouvent  au-dessus  du  colla- 
téral nord  de  la  nef  dans  la  cathédrale  de 
Gloucester  (fig.  iç).  La  reconstruction 
de  l'église  abbatiale  fut  commencée  par 
l'abbé  Serlo  en  1089,  et  la  dédicace  eut  lieu 
en  1100.  Selon  toute  probabilité,  seule  sa 
partie  orientale  était  alors  achevée  ;  mais 
nous  pouvons  renfermer  dans  les  vingt  pre- 
mières années  du  XII^  siècle  la  construc- 


Fig.    19.    —   Gloucester,  bas-côté  nord  de  la  nef. 

tion  du  bas- côté  nord  et  de  ses  voûtes.  Ce 
sont  des  groupes  de  cinq  colonnes  enga- 
gées qui  reçoivent  les  retombées  des  voûtes 
sur  le  mur  du  collatéral;  le  doubleau  qui  est 
en  plein  cintre  et  de  profil  simplement  carré 
est  supporté  par  la  colonne  centrale  dont 
le  fût  est  demi  cylindrique  ;  les  deux  colon- 
nettes  engagées  qui,  de  part  et  d'autre,  re- 
çoivent les  oçrives  et  les  formerets  sont  pro- 
filées  en  quart  de  rond;  nous  en  trouvons  de 
semblables  dans  les  parties  les  plus  ancien- 
nes du  chœur.  Les  tracés  des  nervures  sont 
des  arcs  de  cercle  dont  le  centre  est  placé 
au-dessous  de  la  ligne  des  impostes.  Leur 
section  se  compose  d'une  arête  entre  deux 


REVUE  DE  l'art  CHRÉTIEN 
1901.    —    s'"'^    LIVRAISON. 


^36 


3Rebue  ïie  T^rt  chrétien. 


tores.  Les  formerets  sont  considérablement 
surhaussés.     Les    travées  sont   construites 
presque  sur  plan  carré.  Dans  quelques  tra- 
vées du   déambulatoire  de  la  crypte   (dont 
les  voûtes  les  plus  anciennes  sont  des  voû- 
tes d'arêtes),  les  piliers  ont  été  noyés  dans 
la  maçonnerie  et  les  voûtes  renforcées  par 
l'addition   de   nervures.  —  Les   profils  de 
quelques-unes  d'entre  elles  sont  simplement 
carrés  ;  les  autres  sont  décorés   d'un  gros 
boudin    entre    deux    petites    gorges.    Ces 
remaniements  paraissent   être    contempo- 
rains du  collatéral  nord  de  la  nef.    Dans  la 
petite  église  d'Avening(Gloucestershire)('), 
nous   trouvons   des  croisées   d'ogives   que 
l'on  peut   attribuer  à   une  date   voisine  de 
1120-1130  et  qui  semblent  avoir  subi  l'in- 
fluence des  travaux  des  premières  années 
du  X 1 1^  siècle  à  Gloucester.  Dans  la  travée 
occidentale  du  chœur,  les  nervures  ont  pour 
profil   un    gros    boudin   flanqué  de   petites 
o-orges  ;  sous  la   tour  centrale,   elles    sont 
carrées.  Dans  ces  deux  voûtes  les  nervures 
sont  supportées  par  des  colonnes  d'angle, 
dont  les    chapiteaux    sont    normaux  à    la 
direction  de  la  nervure. 

Les  bas-côtés  de  la  nef  de  la  collégiale 
de  Southwell  sont  couverts  de  croisées 
d'ogives  dont  la  date  doit  être  voisine  de 
1 120  (").  Les  doubleaux  sont  en  plein  cin- 
tre et  considérablement  surhaussés.  Les 
nervures  sont  des  arcs  de  cercle  tracés  de 
centres  situés  au-dessous  de  la  ligne  des 
impostes.  Comme  la  travée  est  construite 

1.  Un  article  sur  cette  e'glise  avec  plans  à  l'appui,  dû 
à  MM.  R.  Herbert  Carpeuter  et  B.  Ii);jelow,  a  été  iuipri- 
mé  dans  les  Transactions  ofllie  Brislol  and  Gloncesier- 
shire  Arclnrological  Society,  \1V,  5-13. 

2.  M.  Lefèvre-Pontalis  {op.  cit.,  I,  89)  dit  que  ces  voûtes 
ne  sont  pas  antérieures  à  la  fin  du  règne  de  Henri  I", 
mais  il  ne  donne  aucune  raison  à  l'appui  de  son  opinion. 
Le  seul  document  digne  de  foi  est  une  lettre  de  l'archevc- 
que  Thomas  (sans  aucun  doute,  Thomas  II,  1 109-1 1 14) 
demandant  des  subsides  pour  l'œuvre  de  l'éylise.  D'autre 
part  les  caractères  archéologiques  des  bas-côtés  indiquent 
ijien  que  leur  construction  a  dû  avoir  lieu  vers  1120. 


sur  un  plan  barlong  très  prononcé,  les  ogi- 
ves ont  peu  de  flèche  et  les  voûtains  affec- 
tent à  leur  naissance  une  surface  fortement 
gauchie.  Les  nervures  et  les  doubleaux  ont 
pour  profil  deux  filets  jumeaux  entre  deux 
tores.    Il  n'y  a  pas  de  formerets  ('). 

L'église  priorale  de  Lindisfarne  fut  bâtie 
par  le  prieur  Edouard  qui  mourut    proba- 
blement vers  la  fin  de  l'épiscopat  de  Ralph 
Flambard  (i  128)  (').  Reginald  de  Durham, 
qui  écrivait  vers  1 165,  nous  dit  qu'Edouard 
érigea  en    l'honneur  de  S.    Cuthbert   une 
église   entièrement  neuve  et  qu'il  l'acheva 
(coiismiDtiavit)  en  pierres  d'appareil  et  d'une 
façon    très    soignée   (').    L'église    fut    par- 
tout couverte  de  croisées  d'ogives,  et  ses 
dispositions  architectoniques  ont  été   visi- 
blement inspirées  par  celles  de   Durham. 
Les  voûtes  des  vaisseaux  principaux  seront 
décrites  dans  la  suite.  Les  piliers  des  grands 
arcs  de  la  nef  sont  alternativement  cylindri- 
ques  et  formés  de  faisceaux  de  colonnes  ; 
les  nervures  des  voûtes  du  collatéral  nord, 
(les  voûtes  du  collatéral  sud  n'existent  plus), 
sont  supportées   par  des  faisceaux  de  trois 
colonnes  alternant  avec  des  fûts  demi  cylin- 
driques  engagés,    ainsi   que   dans  les  bas- 
côtés  de  la  nef  de  Durham  ;  mais,  à  Lindis- 
farne, les  chapiteaux  de  ces  demi-colonnes 
engagées   présentent  des   divisions  corres- 
pondant aux  deux  nervures  et  à  l'arc  dou- 
bleau,   disposition  qui    marque  une  avance 
stir  Durham,  où   les  chapiteaux  des  piliers 
analogues  sont  semi  octogonaux.  Les  dou- 


1.  Pour  le  plan  de  la  collég^iale  de  Southwell  voyez  : 
Tlic  Buildcr,  LXIII,  12  ;  détail  de  la  naissance  des  voûtes 
au-dessus  des  piliers,  p.  15. 

2.  History  and  ^intiquitics  of  Notth  Diir/iain,  par  Jas. 
Raine,  p.  74.  La  date  de  la  mort  d'I^douard  ne  peut  être 
fixée  d'une  manière  très  précise  :  dans  la  liste  des  moines 
de  Durham  son  nom  suit  immédiatement  celui  de 
Symeon,  l'Historien,  qui  mourut  probablement  peu  après 
1130. 

3.  Reginaldi  Monachi,  Dunelinensis  Lity'llus,  etc.,  éd. 
Jas.  Raine,  .Surtees  Society,  vol.  I,  pp.  44-45. 


3le0  î^rtgtnes  De  r:arcl)ttecture  gotfttque» 


387 


bleaux  des  voûtes  des  bas-côtés  sont  en 
plein-cintre  surhaussé  de  la  hauteur  de  deux 
assises.  Les  nervures  décrivent  des  arcs  de 
cercle  surbaissés.  Les  doubieaux  sont  ornés 
d'un  boudin  à  chaque  angle  et  les  nervures 


ont    pour    profil    un   boudin    entre    deux 
gorges.  Il  n'y  a  pas  de  formerets  ('). 

La  nef  de  l'église  abbatiale  de  Dunferm- 
line  est  une  autre  œuvre  directement  in- 
spirée de  la  cathédrale  de  Durham.   Elle 


R0M5EY. 

CMOIR 


EASTERN  BAY5 


LE55AY, 

NAVE 


WE5TERN   BAY5 


Oi2'i456/8HIO 

l"H"H    I    I    I    I    I    I    M    I 


15  FEET 


O  I 


4' 


Fig.   20.    —   Plan  des  piliers. 


fut  probablement  érigée  peu  de  temps 
après  l'accession  au  trône  d'Ecosse  de  Da- 
vid 1er  en  1124  (").  Les  croisées  d'ogives 
édifiées  au-dessus  des  bas-côtés  rappellent 
presqu'entièrement  dans  leurs  détails  celles 
des  collatéraux  de  Lindisfarne.  Les  travées 
orientales  de  la  nef  de  l'église  abbatiale  de 
Selby  nous  montrent  aussi  d'une  manière 
évidente  l'influence  de  Durham  {^).  Les 
piliers  des  grands  arcs  de  la  nef  sont 
alternativement  constitués  par  des  groupes 

1.  Pour  le  plan  et  la  description  voyez:  The  Builder, 
LXVIII,  414.  La  vue  intérieure  représente  les  voûtes  du 
bas-côté  nord. 

2.  The  Ecclesiaslical  Architecture  of  Scotlnnd,  par 
David  Macgibbon  et  Thomas  Ross,  I,  p.  231,  etc.  Les 
relevés  des  voûtes  des  bas-côtés  sont  représentés  aux 
figures  208,  210  et  212. 

3.  The  Architectural  History  of  Selby  Abbey  (avec 
plan),  par  C.  C.  Hodges,  Yorkshire  Archœologi cal  Jour- 
nal, XII,  p.  344. 


de  colonnes  ou  des   piles   cylindriques,  ces 
dernières  possédant  à  leur  revers   des    fûts 


Fig.  21. 


Romsey,  bas-côté  sud  du  chœur. 


engagés  destinés  à  recevoir   les   nervures 
et  les  doubieaux  des  voûtes  du  collatéral, 


388 


9Re\)ue  ïje  V^xt  cl)ictieu» 


disposition  qui  rappelle  l'ordonnance  du 
chœur  de  Durham,  bien  qu'à  Selby  la  cons- 
truction soit  empreinte  d'un  caractère  plus 
avancé.  Les  voûtes  primitives  subsistent 
encore  au-dessus  des  deux  travées  orien- 
tales du  collatéral  sud.  —  Au  dos  du  pilier 
situé  le  plus  à  l'Est,  le  doubleau  retombe 
sur  deux  demi-colonnettes,  séparées  par  un 
filet,   et   engagées  dans  un  pilastre  carré. 


Le  doubleau  en  plein-cintre  offre  un  profil 
correspondant;  les  nervures,  dont  la  courbe 
est  surbaissée,  sont  décorées  d'un  gros  bou- 
din, encadré  de  chaque  côté  par  un  méplat, 
et  retombant  sur  des  colonnettes  flanquant 
de  chaque  côté  le  pilastre  dont  il  a  été 
question  plus  haut  ('). 

Les  voûtes   des  bas-côtés   du  chœur  de 
l'église  abbatiale  de  Romsey   sont  conçues 


5  METRES 


Fig.    22.   —   Église  Saint-Jean  à  Devizes.  Plan  de  la  voûte  du  chœur. 


exactement  de  la  même  manière.  Les  piliers, 
cependant,  étaient  évidemment  destinés  à 
supporter  des  voûtes  d'arêtes  ;  leur  plan 
nous  montre  un  pilastre  saillant  avec  une 
seule  colonne  engagée  f/îo-.  20),  ce  qui 
constitue  pour  le  doubleau  d'une  voûte 
d'arêtes  un  support  rationnel.  On  n'avait 
rien  prévu  pour  recevoir  la  nervure  qui 
actuellement  retombe  sur  un  petit  corbeau 


placé  transversalement  au-dessus  de  l'angle 
formé  par  les  tailloirs  (fig.  21).  Dans  les 
parties  les  plus  occidentales,  qui  ont  été 
édifiées  les  dernières,  le  constructeur  a 
ménagé  en  certains  endroits  un  groupe  de 
trois  colonnes  engagées  destinées  à  recevoir 

I.  Il  est  à  peine  nécessaire  de  faire  remarquer  à  quel 
point  CCS  exemples  confirment  la  réfutation  que  nous 
avons  exposée  plus  haut,  de  la  théorie  attribuant  les  voû- 
tes de  Uurham  à  une  réfection. 


îles  C>rtg(ne0  îie  r^rcl)îtecture  gotl)ique. 


389 


les  ogives  et  le  doubleau  (').  A  Lessay,  en 
Normandie,  les  croisées  d'ogives  qui  sub- 
sistent au-dessus  du  chœur,  du  transept  et 
des  travées  orientales  de  la  nef,  retombent 
gauchement  sur  des  colonnes  enofagfées, 
disposées   en  vue  de  voûtes  d'arêtes  sem- 


blables à  celles  qui  ont  été  effectivement 
construites  au-dessus  des  bas-côtés.  Dans 
les  travées  occidentales  de  la  nef  le  plan 
des  piliers  fut  modifié,  par  la  substitution  à 
la  colonne  unique  d'un  pilastre  saillant,  avec 
une   colonne   engagée   aux   trois   quarts   à 


Malmesbury,  bas-côté  sud  de  la  nef.  Plan  de  la  voûte. 


chacun  de  ses  angles;  ce  qui  fournit  {fig. 
20)  aux  ogives  et  au  doubleau  de  la  voûle 
haute,  un  support  mieux  approprié.  Ces 
exemples    sont    intéressants    en    ce    qu'ils 

I.  Dans  la  partie  orientale  de  l'église  cette  méthode 
de  construction  n'est  pas  toujours  suivie.  Cependant, 
aux  piliers  qui  séparent  le  chœur  du  déambulatoire,  il  y 
a  des  colonnes  destinées  à  recevoir  les  nervures,  de  même 
qu'au.f  angles  occidentaux  des  collatéraux  du  chœur,  tou- 
chant le  transept.   Les  arcs   doubleaux  de  ces    voûtes 


nous  montrent  comment  s'est  introduit  le 
facteur  nouveau  de  la  voûte  sur  croisée 
d'ogives  au  cours  de  la  construction  d'édi- 

offrent  une  section  carrée  sans  moulures  ;  les  nervures 
ont  pour  profil  un  tore  entre  deux  petites  gorges,  comme 
h  Winchester.  Nous  n'avons  aucun  document  qui  nous 
permette  d'établir  la  date  à  laquelle  l'église  de  Romsey 
a  été  édifiée  ;  mais,  d'après  les  caractères  de  la  construc- 
tion, on  peut  admettre  qu'elle  a  été  commencée  vers  1 1 10. 
Pour  le  plan  et  la  description  de  l'église,  voxxThe  Builder, 
LXIX,  p.  236. 


39° 


jRebue  ïie  r!3rt  fljrétirn. 


fices  dont  le  plan  primitif  ne  comportait  que 
des  voûtes  d'arêtes. 

Les  deux  églises  de  Devizes  (Wiltshire) 
nous  offrent  des  exemples  de  chœurs 
dépourvus  de  collatéraux  et  couverts  de 
croisées  d'ogives.  Ces  travaux  peuvent  être 
attribués  avec  quelque  vraisemblance  à 
levêque  Roger  de  Salisbury,  et  on  peut 
leur  assigner  comme  date  approximative 
les    années    voisines    de    1125    ou     1150, 


St-Jean  étant  légèrement  antérieurà  Notre- 
Dame.  Dans  chacune  de  ces  églises,  le 
chœur  est  divisé  en  deux  travées  barlon- 
gues.  Les  doubleaux  séparant  ces  deux 
travées  sont  supportés  par  des  fûts  accou- 
plés rtanqués  de  colonnes  qui  reçoivent 
les  nervures  supportées,  d'autre  part,  dans 
les  angles  du  chevet,  par  des  colonnes 
correspondantes.  Dans  l'église  St-Jean 
(fig.  22),  les  doubleaux  en  plein  cintre  sont 


F  ig.  24.  —  Cathédrale  de  Durham.    -  Transept  sud  et  nef.  (D'après  une  photographie  de  M.  C.  C.  Houcbs.) 


de  section  simplement  carrée  ;  les  nervures 
sont  décorées  d'un  large  boudin  flanqué  de 
deux  petites  gorges.  A  Notre-Dame,  le 
profil  du  doubleau  présente  deux  gros  bou- 
dins séparés  par  une  arête  et  encadrés  de 
chaque  côté  par  une  gorge  et  un  filet.  Le 
profil  de  la  nervure  est  un  gros  boudin 
encadré  de  deux  petites  gorges  et  de  deux 
ressauts.  Les  claveaux  des  ogives  sont  en 
pierres  minces,  et  les  clés  sont  appareillées 
comme   on   peut   le  voir  (^g-.  22).  II  n'y  a 


pas  de  formerets,  et  les  lunettes  latérales 
des  voûtes  décrivent  sur  les  murs  des 
courbes  semi-elliptiques.  Dans  ces  deux 
églises  le  sommet  des  voûtes,  à  la  clé  des 
ogives,  est  placé  à  un  niveau  un  peu 
supérieur  à  la  clé  du  doubleau  ;  la  différence 
est  de  o  '",  30  c.  dans  l'église  Saint-Jean  et 
de  o  "\  13  c.  dans  l'église  de  Notre-Dame. 
Nous  remarquons  ici  une  tendance  à  per- 
fectionner la  courbe  décrite  par  la  nervure. 
Dans  toutes  les  croisées  d'ogives  anglaises 


que  nous  avons  décrites  plus  haut,  la  courbe 
de  la  nervure  est  un  arc  de  cercle  dont  le 
centre  est  placé  au-dessous  de  la  ligne  des 
impostes.  Ce  tracé  n'est  pas  satisfaisant 
pour  l'œil,  puisque  la  nervure,  à  son  départ 
du  mur  ou  du  pilier,  forme  avec  la  verticale 
un  angle  obtus.  C'est,  en  outre,  une  mé- 
thode de  construction  vicieuse,  parce  que  la 
poussée  de  l'arc  ogive  se  trouve  augmentée 


sans  nécessité  ;  aussi  dans  quelques  exem- 
ples plus  tardifs  trouvons-nous  les  ogives 
tracées  suivant  une  courbe  semi  elliptique, 
alors  que  les  doubleaux  sont  encore  en  plein 
cintre  (').  Dans  le  chœur  de  l'église  St-Jean 
à  Devizes,  la  courbe  de  la  nervure  est 
un  peu  plus  ouverte  qu'un  arc  de  cercle. 
A  Notre-Dame,  la  courbe  approche  da- 
vantage d'une  demi-ellipse  (').  Au  prieuré 


Fig. 


Cathédrale  de  Durhain.   —  Nef.  (Daprès  une  pliotogiapliie  de  M.  C.  C.  Hodges.) 


de  Dunstable,  les  voûtes  du  collatéral  sud 
de  la  nef  constituent  un  exemple  plus  tardif 
dans  lequel  on  peut  encore  observer  l'emploi 
de  la  courbe  semi-ellipiique  dans  le  tracé 
des  ogives. 

Les  difficultés  auxquelles  se  sont  heurtés 
les  architectes  de  ces  croisées  d'ogives 
primitives, tant  qu'ils  ont  seulement  employé 
le  plein-cintre  et  les  courbes  elliptiques 
dans  la  construction  des  arcs,  disparurent 
absolument  du  jour  où  ils  adoptèrent  l'arc 


en  tiers-point  ;  il   devint  dès    lors   possible 
de    construire   les    ogives    en    plein-cintre 

1.  Dans  la  région  de  Caen  les  croisées  d'ogives  portent 
la  trace  de  nombreux  tâtonnements  dans  le  tracé  de  leurs 
nervures  ;  les  unes  sont  en  plein-cintre  surhaussé  ou 
surbaissé  ;  au  contraire,  les  autres  ofiVent  une  courbe 
semi-elliplique. 

2.  11  existe  sous  la  tour  centrale  de  l'église  St-Jean  h 
Uevizes  des  arcs  brisés  qui  peuvent  être  cités  comme  un 
exemple  ancien  de  leur  emploi,  en  dehors  du  système  des 
voûtes  ;  la  tour  offre  plus  de  largeur  du  Nord  au  Sud  que 
de  l'Est  à  l'Oueit.  Aussi,  tandis  que  les  arcs  est  et  ouest 
sont  en  plein  cintre,  les  arcs  nord  et  sud  sont  en  tiers- 
point. 


392 


3Rrbur  tir  r^vt  cbrctirn. 


sans  élever  la  clé  de  la  voûte  à  une  hauteur 
considérable  au-dessus  des  clés  des  dou- 
bleaux.  On  a  fréquemment  cité  les  croisées 
d'ogives  qui  couvrent  les  collatéraux  de  la 
nef  dans  l'église  abbatiale  de  Malmesbury, 
comme  l'exemple  le  plus  ancien  que  l'on 
rencontre  en  Angleterre  de  cette  nouvelle 
méthode  de  construction  (')  ;  elles  ont  été 
attribuées  à  l'évêque  Roger  de  Salisbury  ; 
en  effet  le  caractère  très  soigné  de  la  cons- 
truction  rentre  bien  dans  les  termes  de  la 
description  que  William  de  Malmesbury 
nous  a  laissée  de  l'œuvre  due  à  l'évêque 
Roger  ;  il  est  peu  probable  que  la  construc- 
tion de  l'église  ait  été  commencée  avant  la 
mort  de  l'évêque  survenue  en  i  139;  elle 
doit  cependant  avoir  suivi  de  près  cet 
événement,  et  on  ne  peut  assigner  à  la  nef 
existante  une  date  postérieure  au  milieu  du 
XII"  siècle  (-).  Les  voûtes  des  bas-côtés 
(fis-  ^3)  ^^"'^  supportées,  d'une  part,  par  les 
grandes  piles  cylindriques  des  grands  arcs, 

1.  Pour  le  plan  de  Malmesbury,  voyez  The  Builder, 
LXVIII,  p.  164.  Des  relevés  de  la  nef  ont  été  publiés 
dans  les  V'etusta  Montiiiienta,  V,  planches  1-9. 

2.  Le  passage  qui  se  rapporte  à  l'œuvre  Je  l'évêque  Ro- 
ger dit:  i  Pontifex  magnanimus,  et  nullis  unquam  parrens 
sumptibus,  dum  qutt  facienda  proponeret,  ;i;dificia 
prœsertim,  consummaret  :  quod  cum  alias,  tuni  maxime 
in  Salesberia  et  Malmesberia  est  videre.  Fecit  enim  ibi 
aedificia  spatio  diffusa,  numéro  pecuniarum  sumptuosa, 
specie  formosissima  ;  ita  juste  coniposito  ordine  lapidum, 
ut  junctura  perstringat  intuitum,  et  totam  maceriam  unum 
meutiatur  esse  saxum.  Ecclesiam  S.ilesberiensem  et  no- 
vani  fecit  et  ornamentis  excoluit,  ut  nulli  in  Angliacedat, 
sed  multas  prœcedat  ;  ipseque  non  falso  possit  dicere 
Dec  <  Domine,  dilexi  decorem  domus  tuii:  ».  Willelmi 
Malmesbiriensis  Monachi,  De  Gestis  Regum  Anglorum, 
lib.  V.  5;  40S  ;  Rolls  séries,  édit.  \Vm.  Siubbs,  II  p.  4S4. 
(Voyez  aussi  Historia  Sovcllti,  lih.  II,  §  4S1,  p.  558,  dans 
le  même  vol.)  Les  mots  :  «  et  Malmesberia  S>  dans  le  pas- 
sage cité  ci-dessus  sont  omis  dans  plusieurs  des  manus- 
crits et  s'ils  sont  une  leçon  authentique  ils  se  réfèrent 
probablement  au  château  que  l'évêque  Roger  avait  bâti 
à  Malmesbury,  plutôt  qu'à  l'église  de  ce  lieu.  William  de 
Malmesbury  dans  son  Histoiia  Novella  (qui  se  termine 
en  1142)  ne  fait  mention  d'aucune  construction  dans 
l'église,  quoiqu'il  raconte  comment  le  monastère  recouvra 
son  indépendance  en  1 140.  Il  est  probable  que  la  recons- 
truction de  l'église  fut  entreprise  peu  après  cet  événe- 
ment. 


et  de  l'autre,  par  trois  colonnes  adossées  au 
mur  latéral.  Les  grands  arcs  de  la  nef  et  les 
doubleaux  des  bas-côtés  sont  en  tiers- 
point  (')  et  ces  doubleaux  sont  de  section 
simplement  carrée.  Les  ogives  sont  en 
plein-cintre  ;  elle  sont  formées  d'un  groupe 
de  trois  tores,  séparés  par  deux  baguettes. 
Les  clés  des  ogives  sont  placées  à  un  niveau 
supérieur  à  celui  des  clés  des  grands  arcs 
et  des  doubleaux.  Dans  la  travée  dont  nous 
donnons  le  plan,  l'intrados  de  la  voûte  pré- 
sente entre  la  clé  des  nervures  et  les  som- 
mets des  doubleaux,  celui  du  grand  arc  et  la 
lunette  de  la  voûte  sur  le  mur  latéral,  une 
différence  de  niveau  qui  est  respectivement 
de  o™,43  et  de  o"\6i.  M.  C.  H.  Moore  (') 
dit  que  ce  système  de  voûtes  est  une  imi- 
tation des  croisées  d'ogives  françaises,  mais 
c'est  là  une  simple  affirmation,  et  il  ne  peut 
invoquer  de  preuves,  de  quelque  ordre 
qu'elles  soient,  à  moins  que  nous  n'ad- 
mettions que  l'arc  brisé  ait  été  directement 
importé  de  l'Ile-de-France  (').  La  forme 
bombée  de  la  voûte  que  M.  Moore  semble 

1.  On  doit  remarquer  qu'à  Malmesbury  les  arcs  en 
tiers-point  sont  seulement  employés  dans  les  voijtes  des 
bas-côtés.  Les  autres  arcs  sont  en  plein-cintre. 

2.  Development  and  Charucte}' of  Gothic  Arehitecture,  par 
C.  H.Moore(i89o)  pp.  124-127.  M.  Moore  paraît  accepter  la 
date  habituellement  attribuée  à  Malmesbury  ;  il  en  parle 
comme  d'un  monument  presque  contemporain  de  St-Den:s 
et  fait  remarquer,  ce  dont  nous  sommes  en  droit  de  nous 
étonner, que  Malmesbury  est  un  exemple  isolé  et  sans 
précédents  en  Angleterre  ;  je  pense  avoir  suffisamment 
montré  à  quel  point  cette  opinion  est  erronée.  Le  dessin 
qu'il  donne  du  collatéral  (ng.  68,  p.  124)  n'est  pas  exact 
dans  le  détail  et  les  nervures  sont  plus  saillantes  qu'il  les 
représente.  M.. Moore  cite  les  bas-côtés  de  la  nef  de  l'abbaye 
de  Fountains  comme  un  exemple  typique  de  voûtes  anglai- 
ses du  milieu  du  .Xll"  siècle  ;  en  fait,  le  système  des  ber- 
ceaux brisés  perpendiculaires  à  l'axe  de  la  nef  et  ren- 
forcés par  des  doubleaux  transversaux  n'est  pas  du  tout 
anglais,  mais  bien  une  importation  des  Cisterciens  de 
Bourgogne.  (Cf  Pietionnaire  de  ['iatlet-le-Duc,  I,  p.   179, 

l'b'-  14-) 

3.  L'arc  brisé  apparaît  dans  la  voûte  de  la  nef  à  Dur- 
liain,  qui  est, comme  nous  le  verrons,  un  monument  exac- 
tement daté  et  antérieur  à  Malmesbury.  L'emploi  de 
l'arc  brisé  est  toutefois  beaucoup  plus  méthodique  à 
Malmesbury  qu'à  Durham. 


considérer  comme  une  caractéristique 
spéciale  aux  croisées  d'ogives  françaises, 
se  rencontre  en  Angleterre,  dans  plusieurs 
des  plus  anciennes  croisées  d'ogives  qui 
nous  soient  restées,  et  notamment  d'une 
manière  très  suflisamment  marquée  dans 
les  premières  d'entre  elles  édifiées  à  Dur- 
ham  ('), au-dessus  des  collatéraux  du  chœur. 

1.  La  double  inclinaison  présentée  par  l'intrados  de  la 
voiite  dans  le  sens  de  l'axe  de  l'église  est  presque  la 
même  qu'à  Malmesbury  ;  dans  cette  dernière  église, 
toutefois,  l'inclinaison  des  voûtains  est  plus  forte  dans  le 
sens  transversal  (c'est-à-dire  de  la  clé  des  grands  arcs 
au  sommet  de  la  lunette  du  mur  latéral,  en  passant  par 
la  clé  des  ogives). 


Quant  à  son  style,  l'église  de  Malmesbury 
est  cependant  bien  anglo-normande,  et 
nous  n'y  trouvons  nulle  trace  d'une  in- 
fluence pouvant  émaner  d'oeuvres  fran- 
çaises, telles  que  la  chapelle  de  Bellefon- 
taine  ou  l'abbatiale  de  St-Denis.  Néan- 
moins les  voûtes  de  Malmesbury  nous 
amènent  à  un  point  oli  il  ne  manque  pres- 
que rien  au  système  des  voûtes  gothiques 
pour  être  complet,  et  cela,  au  moment 
même  où  l'influence  française  a  commencé 
à  se  faire  sentir  en  Angleterre. 

(A  suivre.) 


KBVUlf    UK    l'aKT   CHKéTlEN. 
1901,    —    s'"'^    1-IVRAISON. 


A^^  X^iL  A^^  A-^^  A^X  A^X  A^X  A^^  A-^A  vl^A  A^A  ^^A  A-^^  a'^A  a'^A  ^^.^ 


i 


^1  11  I  I  ITTriITTTIItJiriIlXl.IIIIIII'l(lIlIÎII»IITirTT^TITTITTirTTT7TTTTT-tTTTTrTTTrTTIÏi:ILItII.I)IIirTriI:tIHÏIII 


I 


IXJClI_IIIIIXIIXIIIIUlllIllJLIl)r! 


Gssai  sur  la  ïicroration  arcljitcctoniqtie. 


*f     "aj-ij-Li-iJ-tLiAiJJJiiiiiii)rririxiixj^i-LAjjj-)aijijijxitiiiii]ajixiJi::a^^  V 

S^  'Ai)^  ^.«-'f  ^itl^  »*^  ^Ail^^  ^^"^  *iiî^  *AiI^  V^^'f  ^^^  ^S'^  V^-^  ^^^  ^^^  l'^^  3^ 


I 


Z^j  soui'ces  du  décor  (suite)  ('). 

Chap.  III.  —  Xa^  créatures 
alliantes. 

g  I.  —  LES   ANIMAUX. 

NOUS  avons  montré,  par  un  grand 
nombre  d'exemples,  quelles  ressour- 
ces les  décorateurs  de  toutes  les  époques 
ont  trouvées  dans  le  monde  végétal.  Ils  en 
rencontrent  d'autres  non  moins  riches  dans 


la  zoologie,  dans  la  faune  fantastique  et 
parfois  hybride  des  mythologies  anciennes, 
dans  le  symbolisme  de  l'iconographie 
chrétienne  et  dans  le  monde  naturel,  qui 
sollicite  l'esprit  d'observation  et  la  con- 
templation souvent  ravie  des  véritables 
artistes. 

Les  Orientaux  des  premiers  âges  ont 
élevé  à  la  fonction  monumentale  le  taureau, 
le  lion,  l'aigle,  l'éléphant,  les  types  divers 


Fig.  232.  —  Décor  sculpté  au  soubassement  de  la  cathédrale  de  Paris. 


de  la  force;  les  Assyriens  ont  affectionné  le 
taureau  androcéphale  (fig.  2jj);  les  Égyp- 
tiens ont  fisfuré  d'une  manière  Sfrandiose 
dans  des  monuments  de  tout  sfenre  le  lion, 
le  bélier,  l'épervier,  le  vautour,  l'ibis,  etc. 

Les  animaux  fantastiques  et  des  espèces 
conventionnelles,  fabuleuses,  furent  d'au- 
tant plus  volontiers  employées,  qu'elles  ou- 

I.  Voyez  la  impartie,  p.  481,  1900;  la  2""  partie,  p.  25, 
la  3°"  partie,  p.  212  et  la  4'°=  partie,  p.  289,  1901. 


vraient  un  plus  vaste  et  plus  libre  champ 
aux  fantaisies  de  l'imagination  et  qu'il  s'y 
attachait  un  symbolisme  connu  et  un  sens 
religieux.  Les  artistes  de  l'époque  romane 
en  ont  fait  surtout  grand  usage;  ils  aimaient 
à  orner  de  figures  fantastiques  les  corbeaux 
qui  portaient  les  corniches,  comme  on  le  voit 
à  l'abside  de  I  racy-le-Val,  où  apparaissent 
dans  une  même  rangée  une  tête  de  bouc,  un 
colimaçon,  un  masque  humain  et  d'autres 


€SQài  Sur  la  îiécorattoit  arcl)ttectontque. 


395 


figures  étranges,  propres  au  génie  de   ces 
Barbares  civilisés  {'). 


Fig.  233.  —  Kérubin  assyrien. 

Les  ornements  animaux  s'emploient  seuls 


*  Fig.  2^4   —  Grotesques  de  la  Renaissance. 

OU  associés   aux   ornements  végétaux;  on 

I.  V.  Raguenet,  Petits  édifues  Iiistoiiqucs. 


voit  de  curieux  exemples  de  ce  mélange 
dans  les  grotesques  de  la  première  Renais- 
sance (Jt^.  2J4),  comme  dans  des  frises 
romanes  ou  gothiques;  tels  les  trois  remar- 
quables bandeaux  de  N.-D.  de  Dijon  que 
nous  reproduisions  récemment  ('). 

Donnons  par  quelques  exemples  une  idée 
des  types  usités  et  de  la  manière  dont  on 
les  interprète. 

Les  Grecs,  absorbés  dans  l'idéalisation  du 
type  humain,  ont  négligé  la  forme  animale  ; 
ils  ont  donné  le  jour  à  quelques  monstres 
fabuleux  dont  nous  parlerons  plus  loin  :  le 
griffon,  les  syrènes,  etc.  Toutefois  ils  ont 
parfois  tiré  le  plus  beau  parti  du  décor  ani- 
mal, notamment  dans   les   mufles  de    lion 


Fig.  235.  —  Sphinx  égyptien. 

greffés  comme  gargouilles  en  bordure  de 
leurs  chéneaux  (Jîo-.  jjSJ.  Les  Romains  ont 
repris  les  éléments  grecs  de  l'ornement  avec 
quelques  ajoutes,  telles  que  l'aigle  triom- 
phale fyf^.  262).  Leurs  portes  de  bronze 
sont  ornées  de  têtes  de  lion  comme  attaches 
des  poignées. 

Les  sculpteurs  romans  ont  emprunté  à 
l'Orient,  à  titre  purement  ornemental,  plu- 
sieurs thèmes  décoratifs.  C'est  ainsi  que  l'on 
voit  sur  leurs  chapiteaux  des  lions  disposés 
symétriquement,  de  chaque  côté  d'un  arbre, 
copiés  des  animaux  qui  veillent  sur  le 
/lom,  l'arbre  sacré  de  l'Iran  (').    Le  griffon 

1.  V.  Revue  de  l'Art  îhrétien,  année  1900,  p.  474. 

2.  Lenormant  a  prouvé   que  ce  tlième  fut  copié  sur  les 
étoffes    fabriquées     à   Constantinople  d'après  de  vieux 


396 


3Rel)ue  îie  T^rt  c!)rétien. 


buvant  à  une  coupe  est  la  reproduction  d'un 
mythe  barbare.  Bien  souvent  les  animaux 
reproduits  à  cette  époque  sont  des  symboles 
en  même  temps  que  des  décors,  comme  les 


bêtes  évangélistiques.  Divers  monstres  fi- 
gurent Satan  (tels  ceux  dont  on  a  garni  la 
cuve  baptismale  ci-contre  (fig.  2j6)  et 
ceux  auxquels  les  bestiaires  attribuaient  un 


Fi;^.  236. 

sens  mystique  dans  de  naïves  et  poétiques 
légendes.) 

modèles  persans.  —  V.  Mélaiii^nx  d'A>-Mologic  des  PP. 
Cahier  et.M  irtin.  I'"  série.  — V.  Co)-respondince  Iiisloriquc 
et  archéologique,  25  décembre  1894. 


Fonts  de  Nordpeene. 


Mais  l'époque  gothique  se  dégage  de  ce 
symbolisme  compliqué  et  ne  cherche  dans 
l'imitation  de  l'animal  qu'un  sujet  ornemen- 
tal gracieux.  C'est  ainsi  que  l'on  voit  le  sou- 


€0s^ai  sur  la  liécoratîon  archîtectontque. 


397 


bassement  du  portail  de  la  cathédrale  de 
Lyon  orné  de  médaillons  où  se  jouent  des 
bestioles  d'un  beau  réalisme  :  un  poulet 
qui  se  gratte,  une  patte  engagée  dans  les 
plumes,  des  écureuils  qui  sautillent  parmi 
les  branches  d'un  noisetier,  un  corbeau  se 


dressant  sur  un  lapin  mort,  un  oiseau  pê- 
cheur tenant  dans  son  bec  une  anguille,  un 
escargot  qui  chemine  sur  des  feuilles,  une 
tête  de  porc  apparaissant  entre  des  branches 


Fig".  23/.  —  Bases  ornées  d'animaux,  crypte  fie  Rolduc  ;  d'aprts  M.  J.  Cu^I'Eks. 


de  chêne  (').  Au  portail  de  la  Calende  de 
Rouen,  comme  au  soubassement  de  N.-D. 
de  Paris  (fg.  2J2)  des  êtres  fabuleux  ou 
naturels  apparaissent  comme  purs  orne- 
ments ;  un  centaure,  une  syrène,  un  cerf, 
le  pélican,  des  êtres  naturels  ou  hybrides, 
étranges  mais  gracieux.  Ailleurs,  ce  sont 
des  monstres  fantastiques  faisant  fonction 
de  gargouilles,  accrochés  aux  corniches  et 
hurlant  dans  les  hauteurs. 


I.  V.  E.  Maie,  L'art  religieux  au  XIII'  siècle,  p.  75. 


S  n. 


LES  ANIMAUX  FABULEUX. 


U aspic  des  bestiaires  du  moyen  âge  est 
une  espèce  de  serpent  préposé  à  la  garde 
de  l'arbre  à  baume.  Pour  en  approcher,  il 
faut  que  l'homme  endorme  le  serpent  par 
enchantement.  Mais  celui-ci,  pour  se  sous- 
traire à  l'incantation,  se  bouche  une  oreille 
avec  sa  queue  et  remplit  l'autre  de  terre 
en  se  vautrant,  image  de  ceux  qui  restent 
sourds  aux  commandements  du  Seigneur. 
Il  figure  aussi  le  démon,  sous  les  pieds  du 
Christ;  au  portail  d'Amiens,  par  exemple, 
il  se  voit  sous  le  Beau  Dieu. 

Leâasi/ic  (fig.  2jç  et  2^0),  selon  Vincent 
de  Beauvais,  a  par  devant  la  forme  d'un 
cocj,  par  derrière  celle  d'un  serpent.  Il  était 


398 


WitWt  lie  r^rt  cljréticn. 


censé  provenir  d'un  œuf  couvre  par  un  rep- 
tile. Il  passait  au  moyen  âge  pour  avoir  le 
pouvoir  de  tuer  du  regard  ;  c'est  une  des 
images  du  mauvais  esprit.  11  figure  aussi 
sous  les  pieds  du  Christ.au  portail  d'Amiens. 
La  caladre  (fi^.  2j8),  l'oiseau  fabuleux 
du  moyen  âge,  dont  le  regard  guérissait 
les  malades,  symbolise  l'amour. 


Fia 


Le  caméléon  fabuleux  est  un  animal  à 
deux  pieds,  à  queue  de  saurien,  couvert 
d'écaillés.  La  faculté  qui  lui  était  attribuée 


B^^'LÎ 

~^^      ' 

% 

^ 

^ 

1 

Flg.  239.  —  Basilic. 

de  changer  de  couleur  en  fait  l'emblème  de 
la  versatilité  et  de  l'hypocrisie. 

Le  capricoi'ne  fabuleux  se  distingue  par 
un  corps   de  chèvre  dégénérant  en  queue 


^^^^'^[*.rt=.^i^  .»«> 

1 

■■■■■II^H 

wà 

Fig.  240.  —  Basilic,  sculpture  romane. 

de  dragon.  Il    figure   un   des  douze  signes 
du  zodiaque. 


Le  centaure  de  l'antiquité  a  la  figure  d'un 
quadrupède  à  buste  humain;  il  est  le  sym- 
bole des  passions  sauvages  et  aussi  de  la 
puissance  corporelle.  Il  figure,  comme  tel, 
sur  un  chapiteau  de  l'église  de  Montivilliers 
(Seine  Inf.),  au  tympan  du  portail  de  l'église 
d'Erville  (Manche),   sur  un   chapiteau    de 


Fig.  241.  —  Grififons  affrontés. 

l'église  de  Sainte- Marie  -  du -Mont,  à  la 
crypte  de  Saint- Parèze-le-Chatel,  etc. 
Giotto  l'a  peint  dans  ses  fresques  d'Assise, 
où  il  a  représenté  saint  François  triom- 
phant des  passions  ("). 


Fig.  242. 

\J hippocentaure  a  par  devant  le  corps  de 
l'homme  et  dans  l'arrière-train,  les  membres 
du  cheval.  La  centauromachie  (combat  des 
Centaures  et  des  Lapithes)  décorait  les 
métopes  du  Parthénon. 

Le  cocabicx  des  bestiaires  du  moyen  âge 

I.  V.  Didron,  Manuel  de  l'art  chtHien.  —  Gazette  ar- 
chéologique, année  1S85,  p.  165.  —  P.   Cahier, C«wx/'/e'V 

tnyste'riciises,  p.  262. 


€s&âi  mv  la  îiccoratton  arcî)ltectontiiue< 


399 


figure   sur   un    plafond   du   XV^   siècle   au 
P!.y  ('). 

La  chimh'e  antique,  terrassée  par  Bel- 
lérophon,  symbolise  la  ruse.  La  fable  lui 
donne  une  tête  de  lion,  un  corps  de  chèvre, 
une  queue  de  serpent.  Les   modernes  ont 


243- 


créé  des  chimères   variées,  à  corps  de  lion, 
à  tête  de  femme. 

Le  dragon.  L'art  héraldique  représente 
le  dragon  (fig.  24J,  244,  24s)  avec  la 
tête,  la  poitrine  et  les  pattes  de  devant  du 
griffon,  sauf  la  langue  en   dard;  avec  des 


ailes  de  chauve-souris  et  un  tronc  dégé- 
nérant en  queue  de  serpent. 

L'antiquité  lui  attribuait  la  garde  des  tré- 
sors; un  dragon  veillait  à  l'entrée  du  jardin 
des  Hespérides  et  gardait  la  Toison  d'or. 

Selon  les  légendes  du  moyen  âge,  c'est  le 
grand  serpent,  ailé,  crête,  armé  de  dents  et 


Flg.  244.   —  Entrait  de  charpente  à  tête  de  guivre. 
Église  de  N.-D.  du  Tertre  (Côte-d  Or)  ('). 

pourvu  de  pieds  et  d'une  queue  aux  enlace- 
ments redoutables  ;  c'est  le  léviathan  bibli- 
que, le  dragon  infernal  de  l'Apocalypse,  la 
figure  de  Satan  (^). 

Dans    les    miniatures    du    moyen     âge, 


Fig.  245.  —  chenet  en    orme  de  dragon.  Dessin  de  M.  Jackson  Q\ 


comme  dans  le  décor  Scandinave,  sa  queue 
démesurément  allongée  donne  naissance  à 
une  flore  conventionnelle,  à  un  feuillage 
spécial,  ou  bien  elle  entre  dans  la  composi- 
tion même  du  motif  ornemental. 

I.  V.  L.  Giron,  Congrès  des  Soc.  sav.,  1895. 


Le  griffon  (fig.  241  ),  l'antique  gardien 
des  trésors  de  l'Asie,  aux  ailes  puissantes,  au 
bec  crochu,aux  serres  ravissantes  de  l'aigle. 


1.  V.  Gélis-Didot,  Hisl.  de  la  peinture. 

2.  V.  Le  Coloriste,  juin  l8g6,  p.  1 1. 

3.  D'après  Tiie  architectural  Record. 


400 


3Rct)uc  tJC  r^vt  fl^rcttcn. 


au  corps  de  lion,  a  toujours  deux  oreilles 
aiguës  et  droites,  qui  l'ont  fait  nommer 
aiiridis.  Il  symbolise  la  vigilance,  du  moins 
la  vigilance  de  l'avare  qui  veille  à  son  trésor 
et  par  suite  l'avarice.  Au  moyen  âge  il  figure 
les  ravisseurs  et  le  démon.  Les  traits  qui 
lui  sont  attribués  sont  ceux  qui  conviennent 


F"ig.  246.  —  Hydres  et  Sirènes.  Bas-reliefs  de  l'arc  de 
triomphe  romain  de  Saint-Remi. 


à  un  gardien  :  les  ailes  marquent  la  dili- 
gence; il  a  la  force  du  lion;  le  bec  acéré 
symbolise  la  prudence.  Il  est  bien  à  sa  place 
comme  portant  d'armoiries,  dans  les  armes 
de  la  ville  de  Malines.  Il  se  voit  à  la  cathé- 
drale de  Sens. 

La  gîiivre  (fig.  2^^)  est  une  sorte  de 
couleuvre,  adoptée  comme  emblème  de 
Valentine  de  Milan. 


La  harpie,  oiseau  à  tête  de  femme, 
toujours  affamé,  figure  le  démon  ravisseur 
des  âmes.  On  en  voit  de  beaux  exemples 
aux  quatre  angles  d'un  chapiteau  de  l'église 
St-Julien-le- Pauvre  à  Paris  et  dans  des 
peintures  ornant  un  plafond  du  XV'^  siècle 
au  Puy  (').  On  la  représentait  avec  le  buste 
d'une  jeune  femme,  le  tronc  ou  les  ailes  du 
vautour  et  la  queue  du  serpent. 

V! hydre  (Jïg.  2^6)  est  une  variété  du 
dragon.  L'hydre   de  l'antiquité  ;  le  monstre 


Fig.  247. 

de  Lerne  tué  par  Hercule,  avait  sept  têtes  ; 
quand  on  en  coupait  une,  on  en  voyait  naître 
autant  qu'il  en  restait. 

La  licorne  (fig.  248)  est  un  cheval  blanc 
fantastique,  portant  une  corne  au  milieu  du 
front.  Selon  une  fable  gracieuse  du  moyen 


Fig.  248.  —  Lie 


âge,  ce  monocéros  indomptable  défiait  tout 
chasseur,  mais  à  la  vue  d'une  vierge,  il  se 
réfugiait  dans  son  giron  ;  il  s'agit  d'une  chasse 
mystique  où  la  licorne  figure  de  manière 
très  poétique  le  mystère  de  l'Incarnation. 


Au  déclin  du  moyen  âge  ce  thème  a  donné 
lieu  à  des  produits  artistiques  innombrables 
et  charmants  ;  il  apparaît  dans  les  vitraux, 
dans  les  tapisseries  (témoin  la  fameuse  ta- 

I.  V.  L.  Giron,  Congris  des  Sociétés  savantes,  1898. 


€6Sai  sur  la  Dccoration  arcbttectonique. 


401 


pisserie  de  la  Dame  à  la  Licorne  conservée 
au  Louvre)  dans  les  reliures,  dans  les  mi- 
niatures et  dans  les  sculptures. 

La  manicore  est  encore  une  des  formes  du 
démon.  Cette  figure  hybride  a  le  visage  de 
l'homme,  le  corps  du  lion,  la  queue  du  scor- 
pion, le  vol  de  l'oiseau  ;  elle  figure  la  triple 
concupiscence  (').  (Abbatiale  de  St-Denis, 
sculpture  du  XIV*^  s.  ;  église  romane  de 
Souvigny)  ;  à  la  cathédrale  de  Cahors,  la 
figure  peinte  de  Jérémie  est  accompagnée 
d'une  manicore  ou  mmidicore,  qui,  selon  les 
bestiaires,  habite  les  parties  profondes  de 
la  terre  ('). 

Le  niinolaure,  que  le  moyen  âge  confon- 
dait avec  le  centaure,  se  rattache  au  mythe 
du  labyrinthe  souvent  représenté  sur  le  pavé 
des  églises,  mais  avec  un  sens  nouveau 
depuis  l'époque  carolingienne  (').  La  signi- 
fication de  ce  symbole  est  indiquée  dans  ces 
vers  connus  : 

Hune  mundum  typice  labyrinthus  dénotât  iste 
Inlranti  largus,  redeunti  sed  nimis  arctus. 

\J onocentaure  est  un  pseudocentaure, 
cheval  marin  (fig.  2^g),  à  queue  de  poisson  ; 


Fig.  24J.  —   Cheval  marin. 

moitié  homme,  moitié  âne,  il  abonde  dans 
les  peintures  murales  de  Pompei. 

1.  \.  Eosc,  Dict.  d'archéûL,  p.  363. 

2.  Elle  est  ainsi  le  symbole  de  la  fosse  de  boue  où  fut 
jeté  le  prophète  et  l'emblème  de  l'erreur. 

3.  V.  Bulletin  monumental^  1899,  p.  336.  —  E.  Miintz, 
Étude  archéol.  et  icono^r.  sur  le  moyen  âge,  Paris,  1877, 
p.  17.  —  Campi,  DelVistoria  eecl.  di  Parense,  p.  241.  — 
de  Rossi,   Bull.  dall.  ht..  1S52,  p.  25. 


Le  phénix  est  l'oiseau  unique  et  immortel 
de  l'antiquité,  qui  vivait  315  ans  et  renais- 
sait de  ses  cendres  après  trois  jours  ('). 
On  le  figure  perché  sur  un  pahuier  ('),  en- 
touré de  fiammes,  le  regard  fixé  sur  le 
soleil,  dont  il  est  un  emblème  ;  parfois 
nimbé  et  posé  sur  un  bûcher.  II  personnifie 
\-à.  résurrection.  11  a  été  reproduit  dans  l'ico- 
nographie chrétienne  comme  emblème  de 
l'immortalité.  Il  abonde  sur  les  lampes  chré- 
tiennes retrouvées  à  Carthage.  Le  phénix 


Fig.  250. 

figure  dans  les  décors  de  la  Renaissance 
comme  l'attribut  d'Éléonore  d'Autriche. 
Le  sagittaire  (fig.  2^1)  est  un  cheval  à 
tête  humaine,  tendant  son  arc  et  lançant  sa 
flèche  contre  un  cerf.  Cet   emblème  païen 


Fig.  251. 

constitue  un  des  signes  du  zodiaque  (Cloiire 
de  St-Aubin  à  Poitiers,  XII^  s.).  Il  était 
l'image  de  la  nature  humaine  révoltée  contre 
l'esprit. 

La  salamandre,  sorte  de  reptile  ailé 
respirant  des  flammes  et  vivant  dans  le  feu, 
était  le  roi  de  cet  élément.  A  la  Renais- 
sance, la  salamandre,  emblème  héraldique 

1.  Vitraux  de  Lyon,  de  Hourges,  du  Mans  de  Chartres. 
V.  Rose,  p    58. 

2.  En  grec,  le  palmier  s'appelait  du  même  nom. 


REVL'E  UK  L  ART   CIIUEI  lEN 
I9OI.    —    5""-'    IIVIJAI^ON. 


402 


5Rrl)ur  tic  rSrt  cl)vcticu. 


de   François   l^'\  prend   une  grande  place  j    composition     relative    à    la    Salamandre, 

dans    la   décoration.    En   voici    (/o:   2^0)  Le.sa/;'r(?estrhomme-bouc  de  l'antiquité, 

un   exemple    emprunté    à    l'Hôtel-de-Ville  devenu  l'emblème  de  l'impudicité   chez  les 

de   Beaugency,   et    (Jlg.  2^2),    toute    une  1    chrétiens. 


Fi".  252.  —  Tableau  de  salamandre.  Broderie  italienne  du  XVr  siècle. 


Le  scorpion  est  le  nom  d'une  constella- 
tion  céleste,    et    figure    dans   le   zodiaque. 
De  tous  les  mythes  de  l'aniique  Egypte, 


l-'ig-  2  53- 

le  sphinx  est  le  plus  important  :  il  offre  la 
tête  humaine  sur  le  corps  du  lion,  réunissant 
la  plus  haute  expression  de  la  force  muscu- 
laire avec   la    puissance    intellectuelle.    Le 


sphinx  qui  se  dresse  au  pied  de  la  grande 
pyramide  de  Chéops  (Jig.  2jj)  est  consi- 
déré comme  la  plus  ancienne  sculpture  du 
monde. 

Le     sphinx    égyptien    avait    une     tête 


M 


Fig.  254 

d'homme.  Les  Grecs  en  firent,  dans  la  lé- 
gende d'(I'"dipe,  un  lion  ailé  (aux  ailes 
d'aigle),  ou  aptère  à  buste  féminin. 


essai  sur  la  Décoration  arcl)itectonûiue. 


403 


La  sirène  est  un  animal  à  tête  de 
femme,  ou  une  femme  à  queue  de  poisson. 
Les  sirènes  musiciennes,  symbole  des  vo- 
luptés du  monde,  selon  le  sermonnaire 
d'Honorius  d'Autun,  sont  sculptées  comme 
tel  au  portail  de  la  cathédrale  de  Lyon  ('). 
A  la  façade  de  la  cathédrale  de  Sens,  la 
sirène  symbolise  l'Océan  ('). 

Le  vavipirc  est  souvent  figuré  comme 
une  femme  ailée  et  furieuse,  semblable  aux 
harpies. 


,^  m. 


ANIMAUX  REELS. 


Parmi  les  animaux  réels,  il  y  en  a  de 
nobles,  spécialement  dignes  d'entrer  dans 
l'art  monumental. Ce  sont  d'abord  les  prin- 
ces des  animaux:  le  lion,  l'aigle,  le  dauphin. 

Le  lion  est  reconnu  comme  le  roi  de  tous 
les   animaux.  Emblème  de   la  force,  il  re- 


^'S-  -55- —  Montant  de  cheminée 
provenant  de  Berg-op-Zoora. 


Fig.  256.  —  Arc  romain 
de  St-Ciiamas  (l'rovence). 


présente    l'autorité    de    la  justice.    Douze 
lionceaux  ornaient  les  degrés  du  trône  de 

1.  Maie,  otivr.  cité,  p.  60. 

2.  Sur  une  crosse  de  1200  environ,  trouvée  à  la  cathé- 
drale d'Albi,  on  voit  la  sirène-oiseau  d'Ovide,  sorte  de 
harpie,  symbole  de  tous  les  vices  en  même  temps  que  la 
sirène-poisson  figurant  particulièrement  la  tentation  des 
plaisirs  ;  celle-ci  tient  un  sceptre,  emblème  de  sa  puis- 
sance. 


Salomon.  Les  porches  des  basiliques  d'I- 
talie, sous  lesquels  se  rendait  la  justice, 
avaient  des  colonnes  posées  sur  des  lions. 


Lion  lîéraldique 


25*5.  —  Lion,  figure  divine. 


Le  lion  est  le  symbole  de  la  bravoure  et 
l'un  des  meubles  héraldiques  les  plus  fiers 
(fig.  2^y).  Il  figurait  aux  pieds  des  images 
funéraires  des  preux  morts  au  champ 
d'honneur. 

Dans  l'iconographie  mystique,  il  est  une 
figure  du  Christ  (Jig:  2jS)  et  l'emblème  de 
l'évangéliste  saint  Marc  fy%-.  262J,  et, 
comme  tel,  de  la  République  de  Venise. 


F'g-  259.  —  Gargouille  grecque. 

L'art  assyrien  l'a  rendu  d'une  manière 
remarquable  fy%-.  260).  Il  faut  admirer 
la  lionne  blessée  qui  figure  dans  un  bas-relief 
assyrien  conservé  au  British  Muséum. Très 
remarquables  étaient  les  deux  lionnes  de  la 
porte  de  Mycènes  (fig.  261).  Des  mufles 
de  lion  formaient  les  gargouilles  des  tem- 
ples grecs  et  romains,  au  Parthénon,  à 
Métaponte,  comme  à  la  basilique  d'Antonin 
à  Rome,  et  la  poignée  des  portes  de  bronze 
des  temples  romains. 


404 


ISitWt  tic  rart  djrctini. 


Fig.  260.  —  Tête  de  lion  assyrienne. 

Le  lion  sert  souvent   d'emblème   héral- 
dique très  noble,  ou  de  portant  d'armoiries. 


•^'Fft' 


à-mm 


s.-^-'-^-r'- 


Fig.  261.  —  Bas-relief  de  Mycènes. 

\Jaigle,  symbole  de  génie  ('),  emblème 
de  la  puissance  militaire  et  impériale,  do- 


Fig.  262.  —   Lion,  figure  évangélistique. 

minait  les   attributs   militaires  des   monu- 
ments somptuaires  romains  (fig.  2^6  et  26j), 


1.  V.  Annaks  archéoL,  art.  aigle. 


et  surmontait  les  enseignes  militaires.  On  le 
sculptait  dans  les  frontons  des  temples 
dédiés  à  Jupiter,  dont  il  était  l'attribut. 
11  est  l'emblème  des  empires  français  et 
germanique. 


Fig.  263.  —   Aigle  romaine. 

Roi  des  airs,  il  figure,  parmi  les  quatre 
éléments  de  la  nature,  le  domaine  de  l'at- 


l' ig.  264.  —  Aig-le,  figure  divine.    Fig.  265.  —  Aigle  héraldique. 

mosphère.  Dans  les  monuments  chrétiens, 
l'aigle  couronné,  fixant  le  soleil,  est  l'image 


Fig.    266    —  Aigle,  figure  évangélistique. 

du  Christ  (fig.  26^);  portant  un  livre  ou  le 
phylactère  (fig.  266),  il  figure  l'évangéliste 
S.  Jean.  L'aigle  est  un  des  meubles  héral- 
diques les  plus  nobles  (fig.  26^). 

Le  dmiphin  est  un  type  d'ornement  très 
usuel  ;  c'est  un  mythe  païen  introduit  par 
la  poésie  dans  le  répertoire  de  la  sculpture 
courante.  Il  représente  le  roi  des  mers,  il 


€ssai  sur  la  DécoratîoiT  arcl)ttectonique. 


405 


symbolise  l'Océan  (fig.  26S),  les  eaux,  et 
figure,  à  ce  titre,  dans  les  décors  des  fon- 
taines, sur  le  bord  des  piscines,  etc  ;  cou- 
ronné, il  est  l'emblème  du  Christ. 


Fig.  267. 

Marque  de  la  Société  de  Saint-Jean  l'Evangéliste. 

Il  a  été  figuré  souvent  dans  l'art  ro- 
main, où  il  rappelait  la  légende  du  poète 
Arion  de  Méthymne,  qui,  menacé  de 
mort  par  de  cupides  matelots  et  s'étant 
jeté  à  la  mer,  fut  porté  au  rivage  par  un 
dauphin.  La  réminiscence  de  cette  gra- 
cieuse légende  paraissait  dans  les  peintures 
des  catacombes  de  Rome.  L'aimable  cétacé 


Fig.  268. 

Dauphin,  peinture  des  catacombes. 

figure  dans  la  scène  de  la  migration  des 
âmes  figurées  par  des  colombes  qu'il  guide 
vers  le  port  du  salut. 

Délaissé  par  le  moyen  âge,le  type  si  déco- 
ratif du  dauphin  eut  une  vogue  extraor- 
dinaire à  la  Renaissance.  Depuis  lors  on  le 
trouve  partout,  à  propos  et  hors  de  propos. 


\Jabeille  est  le  symbole   du   travail,  de 
l'abnégation.    L'ordre   qui    règne    dans    la 


Fig.  269.  —  Lions  et  aigles,  tenture. 

ruche  en  a  fait  dans  les  anciens  bestiaires 
un  des  emblèmes  de  la  justice. 

'L'agneau    apocalyptique  est,  chacun    le 
sait,    le    symbole    très    ancien     du  Christ 


lUt&îi» 


(/ig.  2yr).  C'est  par  milliers  de  fois,  qu'on 
l'a  figuré  comme  tel  au  frontispice  des 
églises,  ou  qu'on  en  a  décoré  des  clefs  de 
voûtes.  Dans  la  Bible,  le  peuple  de  Dieu 
est  comparé  à  des  agneaux,  à  des  brebis  ('). 
Comme  symbole  eucharistique,  l'agneau 
joue  un  rôle  important  dans  l'art  chrétien. 
Au  sens  vulgaire,  l'agneau  figure  /a  dou- 
ceur. 

I.   V.  DiLlioiiiiaiic  de  lu  Bible,  avi.  Brebis. 


4o6 


3Rcbur  iJC  T^rt  f})vctiru. 


Uâne  a  son  sens  mystique  :  à  côté  du 
bœuf,  image  des  Juifs  endurcis,  il  figure 
les  gentils  près  de  la  crèche  du  Sauveur. 
Par  contre,  là  où  le  bœuf  représente  le  sa- 
cerdoce, il  figure  la  gent  laïque  et  igno- 
rante. L  anesse  sert  de  monture  à  la  figure 
allégorique  de  la  Synagogue,  en  qualité  de 
bête  obstinée  comme  le  peuple  juif.  Quel- 
quefois l'âne  indique  la  paresse  ou  la  paix. 

La  baleine  est  un  des  emblèmes  du 
démon  ;  sa   gueule  ouverte   figure  parfois 


Flg.  2/1. 

l'entrée  de  l'enfer.  Dans    le  symbolisme  de 
l'histoire  de  Jonas,  elle  symbolise  la  mort. 

Le  bélier  remplace  souvent  l'agneau, 
comme  symbole  du  Sauveur,  ou  la  brebis, 
comme  image  des  fidèles.  Par  contre,  il 
se  trouve  parmi  les  figures  des  vices  et  re- 


Fig.  272. 

présente,  grâce  à  ses  cornes,  la  lutte  contre 
la  grâce.  Il  est  aussi  l'emblème  de  la  stu- 
pidité ,  sa  tête  très  énergique  s'interprète 
avantageusement  dans  les  décors.  Le  bélier 
est  la  figure  d'une  des  constellations  du 
zodiaque. 


La  bicke  se  désaltérant  aux  sources  des 
eaux  du  salut  symbolise,  comme  le  cerf, 
l'âme  fidèle,  parfois  l'Église,  la  bonté,  la 
timidité. 


Flg.  273.  —  Tour  de  Laoïi. 


Le  bœuf,  avec  le  taureau,  est  vulgaire- 
ment considéré  comme  l'emblème  de  la 
force   matérielle.  Modèle  de    patience,  les 


essai  sur  la  Décoratiott  arcl)ttectoiuque. 


407 


écrivains  sacrés  en  ont  fait  parfois  celui 
des  justes.  Les  païens  l'ont  choisi  pour 
serviteur  de  la  lune,  dont  il  traîne  le 
char.  Les  chrétiens  y  voient  la  figure  des 
Juifs  servilement  attachés  aux  observances 
de  l'ancienne  loi.  Les  commentateurs  re- 
connaissent les  douze  apôtres  dans  les 
douze  taureaux  de  bronze  qui,  dans  le 
temple  de  Jérusalem,  portaient  la  «  mer 
d'airain  ». 

Nous  trouvons  au  moyen  âge  le  bœuf 
treize  fois  figuré  au  sommet  de  la  tour  de  la 
cathédrale  de  Laon  (Jiç.  2jj),  pour  rap- 
peler  les    immenses    services    rendus   par 


Fig.  274.  —  Bucràne,  frise  romaine. 

cette  vaillante  bête  de  somme,  qui  éleva 
sur  la  montagne  tous  les  matériaux  de  ce 
monument. 

Pris  en  mauvaise  part,  le  taureau,  à  la  tête 
cornue  et  à  l'allure  fougueuse,  symbolise 
l'orgueil. 

Le  bœuf  est  un  emblème  évangélistique, 
celui  de  S.    Luc  (Jig.  2J2). 

Le  taureau  fut  chez  les  Assyriens  et  les 
Perses  le  sujet  de  figurations  monumen- 
tales de  premier  ordre,  dont  les  animaux 
ailés  qui  gardaient  l'entrée  des  temples 
(fig.  2jj).  Il  fournit  le  décor  principal  des 
colonnes  persépolitaines. 

Les  bucrânes  (fig.  2/./.)  sont  des  têtes  de 
boeufs  offertes  en  holocauste  et  décharnées, 
garnies  de  leurs  bandelettes,  habituellement 
représentées     alternativement     avec     des 


guirlandes,  dans  la  frise  des  entablements 
classiques  ('). 

Le  bouc,  au  regard  oblique,  emblème 
de  réprobation,  figure  les  pécheurs  qui 
seront  au  jugement  dernier  séparés  des 
brebis.  Ce  sens  subsiste  même  dans  les 
sujets  où  le  bouc  figure  le  Sauveur,  vic- 
time expiatoire  comparée  au  Botcc  émis- 
saire. 

Le  cerfi,  selon  une  parole  du  psalmiste  (-), 
a  soif  de  l'eau   des   fontaines,    comme   le 


Fig.  275.  —  Cerf  héraldique.       Fig.  276.  —  Cerf,  figure  divine. 

fidèle  aspire  à  l'onde  du  baptême.  Aussi 
a-t-on  donné  la  forme  de  cet  animal  aux 
vases  liturgiques  nommés  aquamanile. 

Dans  les  peintures  chrétiennes,  le  cerf 
se  désaltérant  à  la  fontaine  est  un  emblème 
divin  (fig.  2/6). 


Fig.  277.  —  Cerfs  au  naturel. 


I.  V.  Dictionnaire  archéologique,  p.  log. 
I.    Ps.    XII,  2. 


4o8 


Htbue  lie  r^rt  c!)rctien. 


La  figure  277  représente  quatre  figures 
de  cerfs,  d'attitudes  variées,  tirées  des 
sculptures  de  la  cathédrale  de  Paris. 

Le  cerf  accosté  de  limiers  se  silhouette 
de  belle  façon  au-dessus  du  pavillon  de 
chasse  de  Fontainebleau. 

Le  voici  qui  fournit  le  décor  d'un  cul-de- 
lampe  (^^.  2j8). 


Fig.  27S. 

Le  c/iainean,  modèle  de  sobriété  et  de 
docilité,  sert  d'attribut  à  l'Obéissance,  dans 
lés  sculptures  de  Notre-Dame  de  Paris.  Il 
figurait  jadis  la  colère,  le  garnal  ancien 
passant  pour  avoir  des  colères  inexorables. 

Le  chat,  cet  hôte  de  nos  foyers,  person- 
nifiait   autrefois     l'esprit    d'indépendance. 


Fig.  279. 

Dans  l'art  héraldique,  les  chats  passants, 
effarcnichés,  courants  font  allusion  à  la 
liberté  noble  et  fière.  Dans  le  pavillon  de 
la  laiterie  suisse  (architecte  M.  Bonet)  à 
l'Exposition  de  Paris,  le  chat,  perché  sur  les 
gouttières,  aux  gradins  des  pignons,  un  peu 
partout,  jouait  un  rôle  décoratif  des  plus 
gracieux. 


Fig.  280. 
Maison  Boulevard  du  Nord  à  Bruxelles,  par  Iîevaekt. 

Feu  Beyaert  se  plaisait  à  représenter  des 
chats  autour  des  lucarnes  de  ses  construc- 
tions (Jîg.  2S0). 


Fig.  2S1. 


D'autre    part,    voici    une    retombée    de 
larmier,  à  une  ancienne  maison  de  Bourges 


V 


Fig.  282.  —    Colonne  de  la  crypte  de  Rolduc. 

(fig.  2jç),  ayant  pour  amortissement  un 
chat  qui  se  raidit  d'une  manière  bien  ex- 
pressive sous    l'effort  que  son  échine   est 


€0Saî  mx  là  htcoïàtion  arcl)ttecî:omque. 


409 


sensée  supporter.  Le  cloître  roman  du  Puy 
est  rempli,  dans  ses  sculptures,  d'individus 
de  l'espèce  féline  domestique. 

Le  c/ia^  huant  (fig.  2S1  )  est  une  figure 
du  démon  et  un  emblème  d'hypocrisie. 

Le  cheval  a  noble  place  dans  l'art  monu- 
mental. Les  Romains  le  figuraient  sur  pié- 
destal aux  côtés  des  grands  perrons  de 
leurs  temples.  On  le  voit  sculpté  sur  les 
quatre  faces  d'un  chapiteau  romain  à  la 
crypte  de  Rolduc  (fig.  2S2).  Attelé  aux 
quadriges,  il  couronne  les  édifices  somp- 
tueux  de    style    classique   (fig.  2Sj),  et  il 


J 


dans  ceux  de  la  ferronnerie,  sculpté  en 
relief  dans  la  menuiserie  et  l'orfèvrerie  des 
siècles  suivants.  Ce  fidèle  ami  de  l'homme 
méritait  certes  cette  marque  de  préférence 
à  cause  de  ses  qualités  remarquables  et, 
entre  tous,  le  lévrier  qui,  dans  la  gent 
canine,  représente  la  figure  aristocratique 
par  excellence.  Aussi  les  trouve-t-on  par- 
tout :  au  pied  du  candélabre  de  Milan,  dans 
,  les  meubles  du  blason,  sur  les  tombeaux 
sculptés,  aux  pieds  des  chevaliers  ou  de 
leurs  dames,  où  ils  rappelaient  leur  ver- 
tueuse fidélité. 

Le  chien  est  le  gardien  des  troupeaux  ; 
les  canes  dominici  figurent  les  prêtres,  pas- 
teurs préposés  à  la  garde  des  brebis  chré- 


Fig.  2S3. 

Quadrige  du  '<  Monument  national  .,  à  Berlin,  par  J.  Goth  ('j. 

lutte  d'importance  avec  les  personnages 
qu'il  porte  dans  les  statues  équestres.  Les 
Scandinaves  aiment  à  le  représenter  à  la 
crête  de  leurs  isbas. 

Aux  X"  et  XL  siècles,  c'est  le  chien 
qui  semble  être  l'animal  sur  lequel  s'est 
portée  plus  particulièrement  l'attention  des 
artistes.  Ils  l'ont  fait  entrer  dans  de  nom- 
breuses compositions.  Malgré  les  formes 
diverses  qu'ils  lui  ont  données,  il  n'est  pas 
douteux  que  ce  soit  la  silhouette  du  chien 
qui  ait  servi  à  composer  leurs  dessins. 
On  le  voit  d'ailleurs  souvent  répété,  gravé 
dans  les  travaux  de  la  céramique,    forgé 


I.  D'après  VAcadeiny  architecture. 


Fig.  284. 

tiennes.  Cette  allégorie  décore  une  frise  au 
haut  de  la  tour  de  l'église  de  Neuss,  comme 
les  fresques  de  la  chapelle  des  Espagnols 
à  Florence.  De  même  le  chien  Fo  de  la 
Corée  est  le  gardien  des  temples  ('). 

La  chouette(fig.  2S4),  l'oiseau  de  Jupiter, 
emblème  de  la  sagesse,  figure  la  nuit. 

1.   Di  IVTély,  Revue  de  V Art  chrétien,  septembre  1S90. 


KBVUE    UK   1.  AKT   CHKBTIBN, 
1901.    5"*®    LIVRAISON. 


4iô 


î^cbue  iJe  T^rt  cljrcttcn. 


La  colombe,  emblème  de  l'Esprit-Saint 
(fig.  28^),  symbole  de  la  douceur  et  de  la 


l'isj.    28v 


simplicité,  a  donné  sa  forme  aux  anciennes 
custodes  eucharistiques.  Elle  fut  dans  les 
catacombes  la  figure  de  l'âme  chrétienne. 

Le  coq  (fig.  286,  28y,  288)  est  le  symbole 
de  la  vigilance  et  de  la  prière.  On  chante, 


Notre-Seigneur  au  coq  matinal,  qui  arrache 
les  hommes  au   sommeil.  11   rtyure  encore 


287. 


Ftise  murale. 


un  des  dons  du  Saint-Esprit,  l'intelligence, 
Qîiis  dedil  gallo  intclligciitiani  (')  }  Pris  en 
mauvaise  part,  il  est  l'emblème  de  la  colère. 
Comme  modèle  ornemental,  le  coq  re- 
monte à   l'antiquité.     Le   British    Muséum 


1 1-.  20S. 

conserve  une  belle  frise  trouvée  à  Xanthos 
(Lycie)  représentant  un  combat  de  coqs  ('). 
Le  coq  est  aussi  l'emblème  de  la  Gaule,  et 
quand  il  se  dresse  fièrement,  jetant  son  cri 
vainqueur,  ayant  pour  crête  une  couronne, 
il  est  digne  de   figurer  la  nation    française, 


Fig.  286.  —  Tissu  conservé  au  Musée  de  Wismar. 

aux  laudes  du  dimanche,  Siirgaiinis  ergo, 
galltis  jacenlcs  excitât.  Il  signale  le  lever 
du  jour  et  la  joie  caractérise  son  chant.  Il 
annonce  ou  figure  la  Résurrection,  ce  réveil 
suprême.    Aussi   Prudence    a-t-il    comparé 


Fig.  2S9. 

comme  il  le  fit  si  crânement  dans  le  décor 
de  l'Exposition  internationale  de  1900.  Le 

1.  Job,  xxvui. 

2.  Les  chefs-d'œuvre  de  la  sculpture.  2"  vol.  Ibid.,  X. 


(B^Qai  mv  la  îiécorarton  arcDitcctoiuque, 


411 


voici  figuré  dans  une  tenture  ancienne. 
.  Feu  Beyaert  a  stylisé  le  coq  gaulois, 
d'une  manière  très  remarquable,  à  l'un  des 
frontons  de  la  banque  nationale  d'Anvers. 
Les  Japonais  l'ont  reproduit  dans  leurs 
dessins  d'une  manière  admirable. 


Fig.  290. 

XJdlc'pJiant  (fig.  28c)  est  vénéré  dans 
l'Orient.  Aussi  le  voyons-nous  figurer  avec 
honneur  sur  d'antiques  tissus.  Les  anciens 


Fig.   291.  —  Chapiteau  de  la  crypte  de  Roldiic. 

l'avaient  adopté  comme  la    figure  d'un  des 
quatre  éléments. 

Le ///;7.J5i7;^  comme  attribut  de  Louis  XI I, 
X'hennine,    comme    emblème    d'Anne    de 


Bretagne  ;  la  levrette  fournissent  de  char- 
mants décors  dans  les  ouvrages  d'archi- 
tecture et  le  mobilier  de  la  première  Renais- 
sance. 

Le  hiboti  (fig.  2Ç2),  l'oiseau  nocturne, 
symbolise  la  nuit  et  l'ignorance  ;  il  en  est 
de  même  de  la  chauve-souris. 


Fig.  292. 


Uours  lui  même,  si  peu  élégant,  a  été 
stylisé  avec  science  ;  on  le  voit  figurer  ici 
dans  un  chapiteau  roman  (fig.  2çi),  là 
dans  le  fond  d'un  vitrail  gothique. 


Fig.  293.  —  Graffiti  de  M    Crespin. 

M.  Crespin  a  décoré  une  façade  de  feu 
Hankar  de  graffiti  où  Vo7trs,  Wcnretiil 
(fig.  2Ç3)  et  le  lapin  se  jouent  parmi  les 
feuillages. 


Parmi  les  volatiles,  citons  \efiiiisan,  aux 
formes  élérantes  et  au  coloris  brillant  ;  le 
cygne  (fig.  2Ç4.  et  2ǧ).  à  l'élégante  enco- 
lure, à  la  blancheur  immaculée,  qui  a  fourni 
le  magistral  motif  d'une  ancienne  et  célèbre 
image  de  la  Grand'  Place  à  Bruxelles  (fi'g. 
2ç§)  et  qui,   parmi  les  emblèmes  des  élé- 


412 


2Rel)ue  ÏJC  T^rt  chrétien. 


ments  de  la  nature  figure  l'eau,  son  do- 
maine ;  la  cJiouetle,  oiseau  de  Minerve, 
emblème  de  la  nuit. 


Fig.  295. 
Enseigne  de  la  miison  :  ^(  Au  Cygne  »,  Grand' place  à  Bruxelles  ('). 

Le  paon  superbe  dont  la  roue  orgueil- 
leuse, inimitable  pour  la  peinture,  offre  un 
des  plus  beaux  motifs  de  décor  que  l'on 
puisse  concevoir,  est  considéré  dans  l'icono- 
graphie chrétienne  comme  le  symbole  de  la 
Résurrection  et  de  la  gloire  immortelle.  On 
en  a  un  bel  exemple  à  l'ambon  de  San 
Salvatore,  à  Brescia.    Il  était  fréquemment 


Fig.  296 

figuré  sur  les  chancels  des  anciennes  basi- 
liques (').  Il  abonde  sur  les  anciens  tissus. 
L'élégance  de  son  port  altier  et  la  splendeur 
de   sa  roue  déployée  en  font   un   des   plus 


1.  D'nprhsVAri  //uâ/ic. 

2.  V.  Bullclin  îiipnttiiiottal,  1890,  p.  336. 


beaux  sujets  que   la  Zoologie   fournisse    à 
l'art  décoratif. 

'L.ç. pélican  (fig.  2çy)  avait,  au  moyen  âge, 


Fig.  297. 

la  réputation  de  nourrir  ses  petits  de  sa 
propre  substance, ou  plutôt  de  rendre  la  vie 
à  ses  petits   que  le    serpent  a  tués  (').  Il 


Fig.  298. 

est  par  là  l'emblème  de  l'Eucharistie  et  de 
la  Résurrection. 


Fig.  299.  —   Bourse  de  Madrid  (archit.  M.  RepuUès  y  Vargas). 

Le    serpent,    attribut   d'Esculape,    dans 

I.  V.  les  PP.  Martin  et  Cahier,  Sur  quelques  points  de 

Zoologie  viYSliqiic  de  Tait  mit.  Paris,  Didot,  1842. 


€SQai  sur  la  décoration  arcl)ttcctonique. 


413 


l'antiquité  ;  symbole  du  démon  tentateur, 
dans  l'iconographie  chrétienne,  familier  au 
génie  des  ornemanistes  francs,  insinue  par- 
tout dans  l'art  ses  formes  enroulées. 

Le  serpent  infernal  enlace  ses  anneaux 
autour  de  la  croix  et  en  mord  le  pied. 

II  forme  les  enroulements  de  la  croix  des 
évêques,  aux  prises  avec  l'agneau  figure  du 
Christ.  Cette  figure  est  rapprochée  du  ser- 
pent d'airain  élevé  par  Moïse. 


Le  serpent  s'enlace  autour  des  bras  de 
la  figure  antique  de  la  Terre,  ou  souvent 
se  nourrit  à  son  sein.  —  La  médecine  a 
pour  attribut  le  serpent  sortant  d'une 
coupe. 

Comme  application  d'ensemble  des  sujets 

animaux   nous   donnons   le  zodiaque  de  la 

cathédrale  de  Paris. 

L.  Cloquet. 

(^  sjiivrc.) 


Fig.    300.    —   Le  zodiaque  de  Notre-Dame  de  Paris. 


»'^^  A^X  K^H  X^*  A^^  )J*JrA  *'^*  a'^1*  A^^  a'^  a'^  a'^  a'^  a'^^  a'^X  ^' 


^^ 


^^î)^^©i©^©^:@ïiKg)r©  ffîclaugcs.  ^©^^SKg5^mg5^^K©© 


V     '    ■'oXXIXriîiriIIITrxlilIIllXIIITTIlXilIIIlXaiIXIIIXIIXUIIXrillIIIÏIIlirciIIIJII-.CTITTTXITIITITXIIIXIII^ 

Kl^*;iî^  *i^>*  "xÛ""  ''S''  *^^  *At).*  ^;*5  *  ^i^*  *^"î^  ^i^-'f  ^A^î^  ^^î^  *iiï-*  ^Jiî^  ^i^f  A' 


.Ua  maison  Du  François  T"  à  Hblicuiilc- 

X  moine  picard,  le  bénédictin  D.  Gre- 
nier, né  à  Corbie,  en  1725,  mort  en 
1789,  a  constaté  que  les  sculptures 
sur  bois  étaient  en  très  grand  honneur 
à  Abbeville,  et  qu'aucune  antre  ville  de  Picardie 
ne  possédait  autant  de  maisons  en  bois  du  XV h' 
siècle  à  façade  sculptée. 

Le  nombre  de  ces  maisons  est  aujourd'hui 
considérablement  réduit.  Parmi  celles  qui  sub- 
sistent encore,  il  convient  de  placer  en  première 
ligne  la  maison  dite  à  tort  de  François  V'^,  rue 
de  la  Tannerie,  n°  29,  qui  a  été  bien  des  fois 
reproduite,  et  qui,  pendant  la  bonne  saison,  attire 
les  touristes. 

Dans  son  excellent  ouvrage,  La  Topographie 
d' Abbeville  (I,  403  et  suiv.),  M.  E.  Prarond  a 
donné  de  cette  construction  conteinporaii.e  du 
roi-chevalier  une  description  exacte  et  minutieuse 
que  nous  reproduisons  en  entier,  parce  que  nous 
ne  saurions  faire  aussi  bien  {fig.  i ). 

La  façade  sur  la  rue  de  la  Tannerie  n'est  pas  très  re 
marquable. Elle  donnait  sur  la  rivière  comblée  aujourd'hui; 
Cette  position  justifie  la  sobriété  sculpturale  de  l'archi- 
tecte, qui  n'a  laissé,  en  guise  de  préface,  qu'une  jolie 
pone,  une  filière  entourant  la  base  du  premier  étage  et 
des  mascarons  grotesques  collés  sur  l'entablement  uni 
qui  supporte  le  toit. 

Sous  la  porte  cochère,  on  voit,  engagées  dans  le 
mortier  d'un  plafond  de  fraîche  date,  les  pointes  en 
pierre  d'un  support  de  balcon  ;  le  pignon  dans  lequel 
elles  sont  incrustées  devait  terminer  le  corps  piincipal. 

A  l'intérieur,  la  disposition  piimitive  est  changée. 
L'aile  gauche  a  été  appuyée  sur  le  corps  principal  dont 
elle  masque  le  tiers  de  la  largeur;  la  corniche  du  toit  de 
ce  dernier  corps  continue  sa  course  sous  la  tuile  ;  l'esca- 
lier lui-même  n'est  point  à  la  place  où  il  a  été  construit  ; 
au  premier  étage, la  rampe  s'arrête  brusquement,  tranchée 
par  une  scie  barbare  ;  nous  croyons  qu'il  a  fait  partie 
d'une  tour  et  n'a  dû  qu'à  son  utilité  d'avoir  échappé  h 
la  démolition. 

Le  sculpteur  a  déployé  dans  l'exécution  de  la  cage  et 
de  la  porte  de  cet  escalier  les  trésors  infinis  de  l'art 
arabe  ;  les  quatre  panneau.\  du  pourtour  sont  d'un  dessin 
correct  et  délié,  où  l'entrelacs  suit  les  plus  capricieux 
détours  ;  une  cordelière,  terminée  par  deux  glands,  unit 
les  lettres  d'un   monogramme  mystérieux  ;  le  demi-relief 


de  ces  panneauv  est  du  plus  charmant  effet  ;  il  contraste 
avec  la  sculpture  fouillée  de  la  filière  servant  d'appui 
aux  dentelles  supérieures  dont  les  colonnes  seules  sont 
restées. 

La  porte,  en  anse  de  panier,  est  entourée  d'un  ruban 
de  liserons  de  haut  relief  terminé  par  deux  glands  ;  au- 
dessus,  un  entrelacs  de  brandi iges  bien  évidés  forme  le 
socle  d'une  statue  absente  ;  le  clocheton  qui  surmonte  la 
niche  est  du  gothique  le  plus  pur  ;  il  se  détache  sur  un 
reste  de  dentelles  très  finement  découpées,  où  l'arabesque 
le  dispute  au  gothique  de  caprice  et  de  fantaisie. 

Dans  toute  cette  œuvre,  on  reconnaît  les  signes 
caractéristiques  de  l'architecture  transitoire  du  siècle  de 
Louis  XII.  Les  arcs  en  anse  de  panier,  le  gothique, 
l'arabesque,  le  plein  cintre  dans  les  détails  des  filières,  y 
sont  délicieusement  unis  sous  l'inspiration  d'un  ciseau 
savant. 

Le  bâtiment  principal  est  régulier.  Du  sol  à  la  toiture, 
la  façade  est  rayée  de  nervures  pentagones  rapprochées 
et  seulement  interrompues  par  la  double  filière  de  pam- 
pres et  de  houx  qui  ceint  le  premier  étage.  Les  fenêtres 
du  rez-dechaussée  sont  surmontées  de  filigranes  qui  font 
l'effet  des  franges  d'un  store  replié  ;  de  jolis  rinceaux 
parent  les  pilastres  soutenant  la  saillie  du  premier.  L'en- 
tablement reproduit  les  figures  bouffonnes  du  côté  de  la 
rue,  séparées,  au  milieu,  par  une  rosace  délicate  figurant 
assez  bien  une  marguerite  sextuple. 

Maintenant,  que  notre  imagination  colore  cette  ra- 
pide esquisse  avec  le  pinceau  éclatant  des  architectes 
d'alors.  Ces  grappes  violettes  à  demi  cachées  sous  une 
feuille  jaunie,  ce  houx  vert  aux  graines  pourpres,  ces 
nervures,  ces  chiffres  dorés  comme  le  sont  les  draperies 
sculptées  de  la  porte  qui  termine  l'escalier  ;  toutes  ces 
magnificences  de  sculpture  peinte  et  dorée  ne  piêtent- 
elles  pas  à  cette  demeure  le  charme  d'une  retraite  desti- 
née à  de  tendres  visites  ? 


Cette  maison,  avons-nous  dit  au  début,  est 
désignée  à  tort,  dans  notre  ville,  sous  le  nom  de 
Maison  de  François  I".  C'est  le  P.  Ignace,  qui, 
croyons-nous,  a  créé  cette  légende,  bien  des 
fois  reproduite  ;  cet  liistorieii  dit,  en  effet,  dans 
son  Histoire  des  ina'ieurs  d' Abbeville,  publiée  en 
1657,  qu'à  l'occasion  du  mariage  de  Louis  XII 
avec  Marie  d'Angleterre,  célébré  à  Abbeville  en 
15 14,  «  le  duc  d'AngouIesme,  premier  prince  du 
sang  (ce  fut  depuis  le  Roy  François  premier, 
gendre  du  Roy  Louis  XII),  estoit  logé  en  une 
maison  oti  demeure  à  présent  le  sieur  Claude 
Gaillard  d'Ambreville,  et  y  entroit  par  une  porte 


a^êlaiigcs. 


répondante  sur  la  rue  St-Gilles,  où  on  a  basty 
une  maison  dans  laquelle  a  demeuré  plusieurs 
années  Monsieur  de  Launay,  commandant  pour 
le  Roy  à  AbbeviUe.  On  voit  encore  dans  la 
maison  dudit  sieur  Gaillard,  en  la  Tannerie, 
une  ancienne  montée  faite  de  ce  temps-là,  qui 
est  une  pièce  rare  pour  sa  structure.  » 

Plus  tard,  un  autre  Abbevillois,  Hermant, 
procureur  fiscal,  disait,  dans  une  Histoire  du 
Pontliieii  demeurée  jusqu'ici  manuscrite  :  «  Le 
duc  d'Angoulême,  premier  prince  du  sanp;,  de 
puis  François  !•='",  fut  logé  en  une  maison  où  a 
demeuré  depuis  le  sieur  Gaillard  d'Ambreville, 
dont  le  jardin  s'étendait  jusqu'à  la  rue  Saint- 
Gilles.  Ma  grand'mcre  l'a  occupée,  et  c'est  à 
présent  M.  Dufour,  dans  la  Tannerie.  » 

Ce  passage  est  certainement  emprunté  à  l'ou- 
vrage du  P.  Ignace.  Or,  pour  la  notice  que  nous 
avons  consacrée  au  mariage  de  Louis  XII  avec 
Marie  d'Angleterre,  nous  avons  soigneusement 
dépouillé  les  comptes  des  argentiers  d'Abbe- 
ville,  et  nous  avons  relevé  cette  mention,  qui  est 
en  désaccord  avec  le  dire  du  P.  Ignace  :  «  Pour 
deux  autres  fallotz  à  main,  lesquelz  ont  esté  dé- 
livrez aux  gens  et  pour  l'iiostel  de  monseigneur 
Monsieur,  lui  estant  logé  au  'prieuré  de  Saint- 
Pierre  de  cette  dicte  ville,  à  six  soulz  pièce, 
XII  sous.  » 

Ce  passage  du  compte  des  argentiers  est  irré- 
futable et  détruit  la  légende  dont  le  P.  Ignace 
s'est  fait  l'écho,  et  qui  se  répète  encore  de  nos 
jours. 

Mais,  si  François  F''  n'a  pas  eu  pour  logis  la 
maison  de  la  Tannerie  en  1514,  peut-être  y  serait- 
il  descendu  dans  l'un  des  fréquents  séjours  qu'il 
fit  dans  la  capitale  du  Ponthieu  après  son  avène- 
ment au  trône  ;  de  1517  à  1542,  le  roi-clievalier 
devait  venir  sept  fois  à  Abbeville.  Pour  trois  de 
ces  voyages,  le  logis  du  roi  est  indiqué  par  les 
registres  de  l'échevinage  :  il  descendit  à  l'hôtel 
de  la  Gruthuse,  situé  rue  St-Gilles.  Les  mêmes 
registres  sont  muets  sur  le  logement  occupé  par 
François  I"  lors  des  autres  séjours  qu'il  fit  dans 
la  capitale  du  Ponthieu. 

Au  mois  de  juin  15 17,  François  I^^"^  arrivait  à 
Abbeville  avec  la  reine  et  toute  sa  cour  dans 
quatorze  gribannes  richement  décorées.  Les  sou- 
verains logèrent  à  l'hôtel  de  la  Gruthuse  ;  pen- 


4i6 


3Rcbur  lie  rart  cbvctîni. 


dant  son  séjour,  le  roi  présida  les  États  de 
Ponthieu  et  y  publia  son  ordonnance  sur  l'ami- 
rauté de  France.  Au  mois  de  décembre  1531, 
François  l'^''  se  rendant  à  Calais,  pour  y  conférer 
avec  le  roi  d'Angleterre,  s'arrêta  à  Abbeville  et 
logea  à  l'hôtel  de  la  Gruthuse  avec  sa  seconde 
femme,  Éléonore  d'Autriche. 

Les  comptes  des  argentiers  nous  font  con- 
naître le  nom  de  l'hôtel  où  descendirent  les  sou- 
verains lors  de  ces  deux  voyages,  parce  qu'ils 
furent  reçus  avec  magnificence  aux  frais  de  la 
ville,  attendu  qu'en  1517,1e  roi  faisait  sa  pre- 
mière entrée  officielle  depuis  son  avènement, et 
qu'en  1531,1a  reine  Éléonore  était  reçue  pour 
la  première  fois  à  Abbeville. 

François  P"'  avait  séjourné  avec  la  reine  dans 
la  même  ville  au  mois  de  juillet  I S 19  ;  ils  y  reve- 
naient le  16  mai  de  l'année  suivante,  en  se  ren- 
dant au  Camp  du  drap  d'or  ;  à  leur  retour,  ils 
s'arrêtèrent  à  Abbeville  et  s'embarquèrent  sur  la 
Somme,  dans  le  Rivage,  pour  se  rendre  à  Amiens. 
Le  25  mai  1535,  le  roi  et  la  reine  Éléonore  d'Au- 
triche, sa  seconde  femme,  assistèrent  à  la  messe 
en  l'église  Saint-Georges,  et  suivirent  ensuite  la 
procession  du  Saint-Sacrement  qui  se  fit  autour 
de  la  place  du  marché,  que  l'on  avait  jonchée 
de  verdure  ;  le  cardinal  de  Bourbon,  archevêque 
de  Sens,  portait  le  Saint-Sacrement  ;  le  poêle 
était  porté  par  les  trois  fils  du  roi  et  le  fils  du 
duc  de  Vendôme  ;  François  I^"  suivait  tête  nue, 
tenant  un  cierge  de  cire  vierge  à  la  main  ;  la  reine 
et  les  princes  de  la  cour  venaient  derrière  por- 
tant de  grands  cierges  allumés.  Au  mois  de  juin 
1540,  le  roi  séjournait  à  Abbeville  et  à  Nouvion  ; 
il  y  revenait  pour  la  dernière  fois  en  1542.  Pour 
ces  différents  séjours,  les  registres  de  l'éche- 
vinage  et  les  comptes  des  argentiers  sont  abso- 
lument muets  à  propos  du  «  logis  »  où  descendit 
le  souverain,  car,  pour  chacune  de  ces  entrées,  la 
ville  n'avait  plus  de   réception  officielle  à  faire. 

Il  est  permis  de  conjecturer  qu'à  chacun  de 
ses  voyages  à  Abbeville,  François  I"  dut  des- 
cendre à  l'hôtel  de  la  Gruthuse  ;  ce  magni- 
fique palais  avait  été  commencé  par  Philippe 
de  Crèvecœur,  seigneur  d'Esquerdes,  gouver- 
neur d'Abbeviile  de  1475  à  1494,  et  terminé 
par  son  beau-frère  Jean  de  Bruges,  seigneur  de 
la  Gruthuse,  gouverneur  d'Abbeviile   de    1502 


jusqu'à  sa  mort,  arrivée  en  15  12.  C'est  dans  cet 
hôtel,  le  plus  vaste  et  le  plus  somptueux  de  la 
ville,  que  Louis  XI 1  descendit  en  1514.  L'année 
suivante,  il  devenait  une  des  demeures  des  rois 
de  France,  et,  après  des  changements  et  des 
augmentations,  il  était  affecté  à  la  recette  du 
Ponthieu,  puis  au  bailliage,  au  présidial  et  à 
l'élection  ;  pendant  la  Révolution,  il  devint  le 
siège  du  district  et  fut  incendié  dans  la  nuit  du 
4  au  5  janvier  1795. 

Il  est  logique  de  supposer  que  cet  hôtel,  tom- 
bé dans  le  domaine  royal,  devait  servir  de  rési- 
dence, à  l'exclusion  de  tout  autre,  aux  souverains 
de  passage  à  Abbeville. 

Une  autre  objection  peut  être  invoquée  à  l'ap- 
pui de  notre  thèse  que  François  L'  n'aurait 
jamais  habité  la  maison  à  laquelle  a  été  donné 
son  nom. 

Dans  le  principe,  la  rue  de  la  Tannerie  s'ap- 
pelait rue  Cache-Cornaille  ;  cette  dénomination 
lui  venait  de  ce  que  les  corbeaux  —  corneilles 
ou  cornaiilcs  en  patois  picard,  —  étaient  attirés 
dans  cette  rue  par  les  peaux  des  tanneries,  et 
qu'on  les  y  cachait,  —  chassait  ('). 

Ce  quartier  formait  comme  une  petite  Venise. 
La  rue  Cache-Cornaille  était  occupée  dans  son 
milieu  par  un  des  bras  de  la  Somme,  appelé  la 
rivière  de  la  Plume,  d'une  largeur  de  dix  mètres. 
Le  passage  d'un  cortège  royal  par  cette  rue 
aurait  manqué  de  prestige,  et,  rien  que  pour  cette 
raison,  a  dû  être  écarté  par  la  municipalité. 

Le  P.  Ignace  ajoute  bien,  il  est  vrai,  que  l'on 
entrait  dans  la  maison  de  la  rue  de  la  Tannerie 
«  par  une  porte  répondante  sur  la  rue  St-Gilles  ». 
Mais  aucun  document  n'est  venu  jusqu'ici  con- 
firmer cette  supposition. 

En  1620,  dit  M.  E.  Prarond,  d'après  Collenot, 
il  y  avait  à  Abbeville  quarante  maîtres  tanneurs, 
qui  habitaient,  sinon  tous,  du  moins  le  plus  grand 
nombre,  la  rue  de  la  Tannerie.  Il  est  de  tradition 
que  ceux  qui  s'enrichissaient  dans  cette  industrie 
achetaient  les  propriétés  qui  faisaient  suite  aux 
leurs  et  donnaient  sur  la  rue  Saint-Gilles,  et  qu'ils 
y  faisaient  élever  des  hôtels  plus  ou  moins  vastes  ; 
c'est  là  qu'ils  habitaient  après  qu'ils  s'étaient 
retirés  des  affaires  et  ajoutaient  à  leur  nom  pa- 
tronymique un  nom  de  fief  ou  de  seigneurie. 

I.   E.  Prarond,  Topographie  d'AbèeviUe  [l.  ^00]. 


Mélanges. 


417 


Or,  si  un  hôtel  était  construit  rue  Saint-Gilles 
à  la  suite  de  la  inaison  dite  de  François  1"^^,  c'est 
dans  cette  habitation  que  ce  roi  serait  descendu 
et  non  dans  les  dépendances  de  la  rue  de  la 
Tannerie;  mais  si  cet  hôtel  n'était  pas  construit, 
les  moyens  de  communication  entre  les  deux 
propriétés  ne  devaient  guère  être  faciles.  Il  est 
vrai  que,  suivant  une  tradition,  une  ruelle  lon- 
geant la  propriété  de  la  maison  dite  de  Fran- 
çois I^""  faisait  communiquer  la  rue  Saint-Gilles 
avec  la  rue  de  la  Tannerie  ;  mais  cette  voie  devait 
être  fort  étroite  et  d'assez  longue  étendue;  aussi 
dut-on  se  garder  de  la  faire  suivre  par  le  roi. 

De  l'examen  attentif  des  lieux  et  de  l'étude 
minutieuse  des  documents  qui  relatent  les  diffé- 
rents séjours  de  François  I<'''  à  Abbeville,  il  res- 
sort clairement  pour  nous  que  ce  roi  n'a  jamais 
habité  la  maison  qui  porte  son  nom. 

D'où  viendrait  cette  appellation?  Nous  avons 
entendu  dire  par  des  personnes  âgées  de  notre 
ville  que  l'escalier  sculpté  qui  se  trouve  dans 
cette  maison  y  aurait  été  rapporté  d'une  habita- 
tion où  aurait  logé  François  h''.  Cela  est  peu 
probable.  Les  autres  sculptures  de  cette  maison 
portent  bien  l'empreinte  de  la  même  époque,  et, 
comme  le  roi-chevalier  a  dû  habiter  l'hôtel  de  la 
Gruthuse  dans  chacun  de  ses  voyages  à  Abbe- 
ville, —  sauf  pour  celui  de  15  14,  —  il  est  plus 
que  certain  que  cet  escalier  ne  fut  pas  enlevé  de 
l'hôtel  de  la  Gruthuse. 

Nous  émettrons  une  hypothèse  qui  nous  paraît 
plausible.  La  construction  de  la  maison  de  la  rue 
Cache-Cornaille  fut  commencée  sous  le  règne  de 
Louis  XII;  elle  appartenait  sans  doute  à  un  offi- 
cier royal  quelconque,  ou  au  maïeur  en  charge 
en  I S  1 7  ;  or,  c'est  en  cette  année  que  François  I'^'' 
fit  sa  première  entrée  solennelle  à  Abbeville  ; 
pour  récompenser  les  services  rendus  par  l'un  de 
ses  officiers,  ou  en  reconnaissance  de  la  magnifi- 
cence déployée  par  la  municipalité,  on  peut  sup- 
poser que  le  roi  a  pu  faire  quelque  libéralité  au 
propriétaire  de  cette  maison  pour  son  complet 
achèvement.  De  là  serait  venue  l'appellation  qui 
s'est  perpétuée  jusqu'à  nos  jours. 


villois,  E.  Poilly,  et  appartient  à  la  Société 
d'Émulation  d'Abbeville  ;  cette  planche  et  une 
autre  figurant  une  filière  et  des  mascarons  ont 
été  insérées  dans  le  volume  des  mémoires  de 
cette  Société  en  1833,  mais  sans  être  accom- 
pagnées d'aucun  texte. 

La  maison  dite  de  François  L''  et  son  escalier 
figurent  dans  le  tome  1'^''  de  la  Picardie  du  baron 
Taylor,  publié  en  1835. 

Depuis,  des  reproductions  plus  ou  moins 
exactes,  plus  ou  moins  fantaisistes,  accompagnées 
de  textes  d'une  inexactitude  flagrante,  ont  été 
faites  de  cette  curieuse  maison  dans  des  publi- 
cations qu'il  n'est  point  nécessaire  de  nommer. 


* 
*   * 


L'une  des  deux  figures  ici  reproduite  (Ji£^.  2) 
est  la  réduction  d'un  cuivre  gravé  par  un  Abbe- 


Pour  terminer,  nous  dirons  que  l'escalier  de 
cette  maison  a  été  reproduit  par  la  peinture. 
Charles-Edouard  de  Beaumont,  né  à  Lannion, 
mort  à  Paris  le  13  janvier  18S8,  élève  de  Boisse- 
lier,  a  exposé  au  Salon  de  1873  un  tableau  de 
genre  fort  apprécié;  sous  le  titre  :  Fin  d'une  chan- 
son, l'artiste  a  représenté  un  jeune  homme  et  une 
jeune  femme  étendus  morts  au  pied  de  l'escalier 
à  l'intérieur  de  la  maison  dite  de  François  I". 

Alcius  Ledieu. 


REVUE  DE  l'art  CHRÉTIEN 
1901.  —  5'"*^   LIVRAISON. 


4i8 


Bcbue  iie  T^rt  cbvctten. 


H'art  et  l'autel. 


[I.  a  paru  récemment  une  nouvelle 
revue  d'art  chrétien  :  L  Art  et  F  Autel. 
Nous  nous  sommes  procuré  ce  petit 
et  élégant  périodique,  qui  paraît 
appelé  à  faire  beaucoup  de  bien.  Il  nous  semble 
bien  inspiré,  très  bien  intentionné,  et  bien  fait 
pour  vulgariser  les  meilleures  idées  d'art  chrétien. 
Dans  les  trois  premières  livraisons,  nous  trouvons 
de  belles  illustrations,  d'excellents  articles,  et 
rien  à  critiquer,  si  ce  n'est  peut-être  certain  projet 
de  peinture  murale  fait  à  distance  pour  une 
chapelle  en  style  Louis  XIV,  et  une  réclame  en 
faveur  d'un  fournisseur  de  plantes  stérilisées, 
préconisées,  avec  un  à-propos  contestable,  pour 
la  décoration  à  demeure  des  sanctuaires.  Ajou- 
tons une  petite  critique  encoie  ;  M.  J.  de  Bonne- 
fon,  le  directeur  distingué  de  cette  belle  publi- 
cation, termine  un  excellent  article  résumant 
l'histoire  de  l'autel  chrétien  par  des  conseils 
pratiques  étranges.  Il  regrette  le  fastueux  autel 
Louis  XIV  qui  abîmait  jadis  le  chœur  de  Notre- 
Dame  de  Paris,  et  signale  comme  un  chef- 
d'œuvre  de  bon  goijt  un  autel  ayant  pour  retable 
la  table  même  de  la  Cène,  avec  le  Christ  et  les 
Apôtres  en  grandeur  naturel 

Uart  et  l'autel  gémit,  à  bon  droit,  de  l'ineptie 
des  fabricants  d'objets  religieux  et  du  manque 
absolu  de  bon  goiît,  de  sentiment  chrétien  et  de 
valeur  artistique  qui  caractérise  tous  les  produits 


actuels    du    genre     orfèvrerie,    statuaire,   ima- 
gerie, etc. 

Il  faut  dire  que  le  marasme  de  l'art  religieux 
n'est  pas  aussi  complet  qu'on  veut  bien  le  dire. 
On  feint  d'ignorer  bien  des  efforts  intéressants, 
bien  des  œuvres  de  valeur,  et,  par  une  véritable 
conspiration  du  silence,  on  semble  vouloir  dé- 
courager ce  qui  se  fait  de  meilleur  en  matière 
d'art  religieux.  On  s'extasie,  légitimement  d'ail- 
leurs, devant  telle  statue,  tel  reliquaire,  telle  mi- 
niature du  moyen  âge,  auxquels  on  trouve  un 
monde  de  naïveté  charmante,  de  sentiment  ex- 
quis, de  caractère  et  de  style.  Mais  que  des  ar- 
tistes actuels  pratiquent  le  même  art  chrétien  et 
produisent  des  œuvres  neuves,  animées  du  même 
sentiment  traditionnel,  on  leur  tombe  dessus  en 
traitant  leurs  produits  de  pastiches  et  de  magots. 

Le  crucifix, que  nous  donnons  aujourd'hui, serait 
certainement  loué  et  peut-être  admiré,  s'il  se 
rencontrait  tout  patiné  dans  un  coin  de  sacristie, 
ou  sur  les  rayons  d'un  musée,  car  il  est  du  plus 
beau  style  médiéval,  et  au  surplus,  d'une  fière 
distinction  de  forme  et  d'un  sentiment  profond. 
Ne  voulant  pas  faire  de  réclame,  nous  ne  dirons 
pas  de  quel  atelier  il  provient.  Les  lecteurs  de  la 
Revue  de  l'Art  chrétien  qui  voudraient  mettie 
en  place  d'honneur  une  belle  image  du  Sauveur, 
seront  sans  doute  heureux  de  rencontrer  un 
excellent  produit  de  cuivre  ouvragé  ;  il  est  dans 
le  commerce,  avec  d'autres  ouvrages  non  moins 
recommandables. 

L.  C 


ïlc\juc  De  Vmt  cîjréticn. 


Pl.  IX. 


^.^  .5^  .^  ^.^  :,^  .5^  .^  .^  .^  .^  .^  ^..^  .^  .^.,^^;^^  .^  ^,  ^,  ^  ^^ 
I 


^■wwwwwwwwwwwwwwwwwwwwwww^ 


Italie. 


Hlorenrr  :  lia  ffiiscticomia  ;  lifa  Bcliqimitcc  ;  une 
nnnonciation  Bc  Caballtni.  —  fficprisc  îi'autciir.  —  HfB 
ffioniimnuB  dnrtifns  cur  \za  fflontaenra.  —  Bonie  : 
flaucrc  noiiucau  rt  nom  noubrau,  —  EtirilIC  :  Tiîi>  fresques 
ne  Corrroc  au  Dôme. 

Florence  :  La  IMisericordia. 

FA  vénérable  archiconfiateinité  de  la 
I\Iisericordia  de  Florence  célèbre  di- 
vers anniversaires  au  conrs  de  l'année. 
Le  jour  de  l'octave  de  la  Fête-Dieu, 
elle  expose,  à  l'extérieur  de  son  siège,  un  grand 
tableau  peint  par  Lodovico  Cardi,  dit  Cigoli 
(1559  '^  1613). 

La  toile  représente  la  peste  de  1348,  et  les 
membres  de  la  confrérie  occupés  à  remplir  leur 
triste  mission,  le  transport  des  malades  et  des 
morts. 

Cette  exposition  publique  est  la  conséquence 
d'un  don  fait  à  la  confrérie. 

En  1765,  un  confrère  donna  le  tableau  de 
Cigoli  à  la  compagnie,  à  la  condition  qu'il  serait 
exposé  au  public  à  l'octave  du  Corpus  Doiiiini  ; 
le  confrère,  homme  de  précaution,  ajouta  qu'en 
cas  de  pluie  ou  de  vent  le  tableau  ne  serait  pas 
mis  au  dehors. 

Cette  fois,  le  temps  a  été  très  beau  et  j'ai  vu 
avec  plaisir  que,  comme  les  années  précédentes, 
le  peuple  en  foule  respectueuse  était  venu  rendre 
hommage  à  la  plus  populaire  des  sociétés  de 
charité  de  la  cité. 

La  Misericûrdia  mérite,  en  effet,  le  respect  de 
tous. 

Elle  doit  son  origine  à  un  simple  ouvrier  en 
laine,  Pietro  Bordi. 

En  1240,  ce  brave  homme  fonda  avec  quelques 
camarades  une  petite  association  de  piété  et  de 
charité  chrétienne. 

Le  sociétaire  qui  blasphémera  paiera  une 
amende  ;  avec  les  recettes  on  achètera  des  lits 
pour  les  malades  et  on  pourvoira  à  la  sépulture 
des  morts. 


L'œuvre  de  Bordi  prit  une  grande  importance 
après  1326,  année  funeste,  où  sévit  pour  la 
première  fois  la  peste,  qui  par  vingt  fois  devait 
affliger  la  cité. 

Trois  ans  aprè';,  la  société  prit  le  nom  touchant 
de  Misericordia  et  reçut  de  la  Seigneurie  une 
existence  légale.  En  1425,  elle  fusionna  avec  la 
confrérie  dite  du  Bigallo. 

Depuis, la i^//5£';7V^;7//rt n'a  cessé  defonctionner; 
elle  compte  environ  cinq  cents  membres  recrutés 
dans  tous  les  rangs  :  famille  royale,  épiscopat, 
aristocratie,  bourgeoisie,  ouvriers. 

Les  confrères  sont  d'abord  novices  ;  ils  passent 
ensuite  par  une  hiérarchie  et  arrivent  au  grade  de 
Capi  Guardia,  dont  le  nombre  cependant  est 
limité  à  soixante  et  douze  en  souvenir  des  dis- 
ciples de  Jésus-Christ. 

Comme  marque  d'égalité,  les  confrères  en 
fonctions  portent  tous  le  froc  et  le  capuchon 
noir  qui  recouvre  toute  la  tête  sauf  les  yeux. 

Le  jour  de  la  Purification,  ils  reçoivent  deux 
cierges  ;  le  jour  de  la  fête  de  leur  patron,  saint 
Sébastien,  on  leur  distribue  des  petits  pains. 

A  chaque  service,  le  confrère  est  reçu  par  la 
salutation  : 

Dio  gli  ne  renda  mérita  e  San  Bastiano. 

A  quoi  l'on  répond  : 

Ancora  a  lei  (')• 

Depuis  1576,  la  Misericordia  occupe  un  bâ- 
timent sur  la  place  du  Dôme  en  face  du 
campanile  de  Giotto.  Il  y  a  là  des  civières,  une 
ambulance,  et  une  chapelle  ;  des  serviteurs 
sont  de  garde  en  permanence. 

En  cas  d'urgence,  on  sonne  une  cloche  spéciale 
placée  dans  le  campanile. 

Comme  beaucoup  d'œuvres  pies,  la  Miseri- 
cordia possède  des  ouvrages  d'art. 

I.  Traduction  ;  Dieu  vous  en  fera  un  mdrilc  et  de  même  saint 
Sebastien. 

—  Et  aussi  à  vous. 

Ce  remerciement  est  également  en  usage  chez  les  Ordres  qui 
demandent  la  charité  k  domicile,  avec  modification  du  nom  du 
patron. 

Pendant  un  voyage  en  Dalmatie,  j'ai  reçu  le  même  remerciement 
dans  une  contrée  très  pierreuse  ;  le  pauvre  a  ajouté  :  Et  que  Dieu 
vous  donne  de  la  terre  verte. 


420 


îXrbur  lie  r^rt  djvcttcn. 


Elle  conserve  des  sculptures  dont  les  plus 
remarquables  sont  :  un  autel  avec  la  Madone  et 
des  Saints  en  terre  émaillée,  par  Andréa  délia 
Robbia(i435Ȕ'i525)  ;  deux  anges  d'une  pareille 
fabrication  ;  une  petite  statue  en  marbre  de 
saint  Sébastien  par  Benedetto  da  Maiano 
(1442- 1497),  et  une  statue  inachevée  de  la  Vierge 
du  même  sculpteur. 

Outre  le  tableau  de  Cigoli,  elle  possède  d'au 
très  peintures  modernes  etanciennes;  on  distingue 
notamment  un  saint  Sébastien  par  Santi  di  Titto 
(1536-1603),  une  Madone  avec  l'Enfant  et  saint 
Jean  par  Andréa  del  Sarto  (1486-1  53  1),  et  une 
suite  de  portraits  des  hauts  protecteurs,  princes 
de  la  famille  de  Médicis,  de  la  maison  de 
Lorraine  et   de   la  dynastie  de    Savoie. 

L'effigie  du  fondateur,  Pietro  Bordi,  occupe  la 
place  d'honneur  ;  il  est  vêtu  du  lucco,  longue  robe 
rouge  ;  ce  n'est  pas,  à  la  vérité,  le  simple  costume 
que  portaient  les  ouvriers  en  laine  au  XII 1'=  siècle, 
mais  il  faut  voir  l'intention  et  ne  jamais  re- 
procher à  la  reconnaissance  un  excès  de  grati- 
tude. 

Les  reliquaires. 

L'inauguration  d'un  buste  de  Benvenuto  Cel- 
lini  sur  le  Pont-Vieux  de  Florence,  toujours 
occupé  par  des  boutiques  d'orfèvres,  a  donné 
l'occasion  d'organiser  une  exposition  d'un  genre 
original  et  pratique. 

La  Société  italienne  de  l'Art  public,  dont  le 
siège  est  à  Florence,  aurait  bien  voulu  faire  une 
exposition  spéciale  à  Cellini,  mais  l'Italie  ne 
possède  pas  une  seule  pièce  d'orfèvrerie  authen- 
tique du  célèbre  artiste. 

Du  reste,  dans  le  monde  entier,  et  quoi  qu'on  en 
dise,  il  ne  reste  de  Cellini  qu'un  seul  ouvrage 
d'orfèvrerie  :  la  salière  du  trésor  impérial 
d'Autriche  conservée  à  Vienne. 

C'est  surprenant,  mais  c'est  ainsi,  et  Florence, 
très  jalouse  cependant  de  ses  artistes,  en  convient. 

Mais  à  défaut  d'orfèvreries  de  Cellini  la 
Société  de  l'Art  public  a  eu  l'heureuse  idée  de 
demander  aux  églises  de  Florence  de  mettre  sous 
les  yeux  du  public  les  pièces  d'orfèvrerie  reli- 
gieuse qu'elles  possèdent. 

Le  temps  lui  a  manqué  pour  faire  des  recher- 
ches dans  les  églises  des  environs  de  la  cité  et  de 
diverses  localités  de  la  Toscane,  qui,  paraît-il, 
détiennent  des  objets  remarquables. 


Les  pièces  de  diverses  églises  ont  éié  groupées 
au  musée  de  l'Opéra  du  Dôme,  et  dans  les 
sacristies  des  églises  de  Santa  Maria  Novella,  de 
la  Santa  Trinità  et  de  San  Lorenzo  ;  de  plus  le 
cabinet  des  argenti  du  palais  Pitti  avait  été 
ouvert  au  public. 

Je  n'essaie  pas  de  décrire  ces  objets  ;  mais 
comme,  sauf  au  palais  Pitti,  il  est  difficile  de  les 
voir  et  qu'on  ignore  même  où  ils  se  trouvent,  je 
vais  au  moins  citer  les  églises  qui  les  possèdent  ; 
cette  indication  pourra  peut-être  servir  un  jour  à 
un  confrère. 

Dôme  de  Notre-Dame  de  la  Fleur. 

Église  de  Santa  Maria  Novella. 

Église  San  Marco. 

Église  Ognissanti. 

Église  San  Remigio. 

Église  San  Lorenzo. 

Église  Santa  Trinità. 

Église  San  Stefano  délia  Badia. 

Église  San  Frediano  in  Cestello. 

Église  San  Pier  Gattolino. 

Église  Santa  Lucia  di  Magnoli. 

Église  Santa  Félicita. 

Église  San  Ambrogio. 

Église  San  Michèle  Visdomini. 

Église  San  Giovanino  dei  Cavalieri. 

Ces  églises  ont  exposé  environ  soixante  et 
quinze  pièces  du  XIV'=  au  XVI  F'  siècle,  mais 
il  y  a  à  Florence  d'autres  églises  qui  n'ont  pas 
participé  à  l'Exposition. 

La  cathédrale  de  Sainte-Marie  de  la  Fleur 
détient  dans  son  trésor  les  reliquaires  du  Baptis- 
tère de  Saint-Jean. 

Voici  la  liste  sommaire  des  principales  pièces 
de  ce  trésor,  désignées  par  les  dénominations 
des  reliques  qu'elles  renferment. 

Saint  Zanobi,  XIV'^^ 
Saint  Philippe  apôtre,  XIV^ 
Saint  Simon  Stylite,  XI  V= 
Saint  Jean-Baptiste,  XIV« 
Saint  Jérôme,  XV'' 
Sainte  Reparata,  XV"" 
Chaîne  de  saint  Pierre,  XV^ 
Bois  de  la  vraie  croix,  XV<^ 
Instruments  de  la  Passion,  XV»; 
Saint  Jean,  XVI« 


Correspondance. 


421 


Saint  Antoine,  abbé,  XYI^ 
Saint  Jean,  XVP 
Bois  de  la  vraie  croix,  XVII'' 
Saint  Jean,  XVI  I« 

Il  y  a  de  plus  les  reliquaires  de  saint  Philippe 
Néri,  sainte  Marie-Madeleine,  saint  Giusto 
évêque,  «^"'nt  Sébastien,  martyr. 

Le  reliquaire  dit  del  libretto,  de  la  fin  du 
XV<=  siècle,  qui  renferme  des  fragments  des 
instruments  de  la  Passion,  est  particulièrement 
précieux.  Il  est  nommé  dd  libretto,  parce  que 
les  reliques  sont  dans  un  petit  coffret  en  forme 
de  livre  ;  le  coffret  a  appartenu  à  Charles  V,  roi 
de  France  ;  plus  tard  il  fut  mis  dans  le  reliquaire- 
tabernacle  où  il  est  encore. 

Uargeiitaria  du  Palais  Pitti  conserve  les  pare- 
ments et  l'orfèvrerie  religieuse  de  l'ancienne 
chapelle  des  Médicis  ;  ces  objets  étaient,  non  du 
domaine  de  l'Etat,  mais  la  propriété  de  la  famille. 
En  1737,  meurt  Jean-Gaston,  le  dernier  grand 
duc  des  Médicis,  sans  laisser  d'héritier  à  la 
couronne  ;  sa  sœur,  Anna  Lodovica,  électrice 
palatine,  hérite  de  tous  ses  biens.  Par  un  acte 
d'une  grandeur  et  d'une  générosité  mal  reconnues, 
elle  donne  à  l'Etat  de  Toscane  les  immenses 
richesses  d'art  réunies  par  les  Médicis  et  à  leurs 
frais  et  spécifie  particulièrement  le  très  riche 
trésor  de  la  chapelle. 

Une  Annonciation  de  Cavalliiti  {i2'i()>h  1344). 
Vasari  rapporte  que  Cavallini,  l'un  des  meilleurs 
élèves  de  Giotto,  vint  à  Florence  pour  voir  les 
peintures  de  son  maître. 

Il  peignit  dans  cette  cité  un  grand  nombre  de 
figures  à  l'église  de  San  Marco. 

En  1550  déjà,  date  de  la  première  édition  de 
Vasari,  les  peintures  de  Cavallini  ne  se  voyaient 
plus,  l'église  ayant  été  blanchie  ! 

Une  seule  avait  échappé  au  badigeon  ;  c'était 
une  Annonciation,  mais  Vasari  nous  apprend 
qu'elle  était  recouverte  et  par  conséquent  invi- 
sible. 

Elle  l'est  restée  jusqu'à  présent  ;  j'ai  interrogé 
bien  des  personnes,  aucune  n'a  jamais  vu  cet 
ouvrage  et  n'a  pu  me  dire  pour  quelle  raison  il 
était  caché. 

Je  me  suis  appliqué  à  le  faire  découvrir,  et  j'ai 
enfin  eu  la  satisfaction  de  réussir. 


Les  peintures  de  Cavallini  sont  très  rares, 
quoiqu'il  en  ait  exécuté  beaucoup. 

La  mauvaise  chance  a  poursuivi  ce  peintre  ;  il 
ne  reste  de  lui  qu'une  Crucifixion  superbe  dans 
l'église  inférieure  d'Assise  ;  une  grande  ancone 
avec  V Annonciation  et  des  saints  au  musée  de 
l'Académie  à  Florence,  et  les  fresques  récemment 
découvertes  à  Sainte-Cécile  à  Rome. 

Il  est  connu  surtout  par  sa  mosaïque  de 
Sainte-Marie  en  Transtevere,  montrant  en  six 
tableaux  la  vie  de  la  Vierge. 

Lorsque  la  photographie  de  l'Aimonciation 
sera  faite  nous  la  reproduirons  avec  quelques 
explications. 

Méprise  d'auteur. 

Dans  son  livre  Le  Puits  de  sainte  Claire, 
M.  Anatole  France,  membre  de  l'Académie 
française,  raconte  qu'au  XIV<=  siècle  le  peintre 
«  Buffalmaco  fut  appelé  de  Florence  dans  la 
«  ville  d'Arezzo  par  le  seigneur  évéque,  qui  lui 
«  demanda  d'orner  de  peintures  les  salles  de 
«  l'évêché.  Buffalmaco  se  chargea  de  ce  travail  et 
«  sitôt  que  les  murailles  furent  enduites  de  stuc, 
«  il  commença  de  peindre  l'Adoration  des 
«  mages.  » 

Puis  M.  Anatole  France  rapporte  les  méfaits 
d'un  singe  qui   regardait  travailler   Buffalmaco. 

«  Que  le  peintre  maniât  les  couleurs,  battit  les 
«  œufs,  ou  mît  avec  le  pinceau  les  touches  sur 
«  l'enduit  encore  frais,  l'animal  ne  perdait  pas  un 
«  seul  de  ses  mouvements.» 

Et  plus  loin  : 

<!,  Il  le  laissait  libre  d'errer  dans  les  salles  et 
«  dans  les  jardins  où  l'animal  ne  cessait  point  de 
<i  faire  quelque  malice.  Un  dimanche, en  l'absence 
«  du  peintre,  il  grimpa  sur  l'échafaud,  prit  les 
i.  tubes,  mélangea  les  couleurs  à  sa  fantaisie, 
i  cassa  les  œufs  qu'il  trouva  et  commença  de 
«  promener  le  pinceau  sur  le  mur,  ainsi  qu'il 
«  l'avait  vu  faire.  Il  travailla  sur  le  roi  Melchior 
«  et  sur  le  cheval  et  n'eut  de  cesse  qu'après 
«  avoir  tout  repeint  de  sa  main.  » 

Donc,  d'après  M.  Anatole  France, 

1°  L'évêque  fit  enduire  les  murailles  de  stuc 
et  Buffalmaco  peignit  à  fresque  sur  cette  matière. 

Or  il  est  impossible  de  peindre  à  fresque  sur  le 
stuc. 

2°  Buffalmaco  se  servait  de  couleurs  en  tubes. 


Or  les    tubes  sont    une    invention    moderne. 

3°  Buffalmaco  préparait  ses  couleurs  à  l'œuf 
pour  peindre  sur  un  enduit  frais. 

Or  la  peinture  sur  enduit  frais  se  faisait  alors 
et  se  fait  encore  maintenant  avec  des  couleurs 
préparées  à  l'eau. 

Les  couleurs  préparées  à  l'œuf  ne  servent  qu'à 
la  peinture  exécutée  sur  un  enduit  sec. 

De  sorte  que  les  lecteurs  du  Puits  de  sainte 
Claire  auront  une  idée  complètement  fausse  sur 
les  procédés  de  la  peinture  à  fresque. 

Les  monuments  chrétiens  sur  les  montagnes. 

J'ai  déjà  parlé  de  divers  monuments  élevés  sur 
les  Alpes  et  les  Apennins,  en  l'honnenr  de  Notre- 
Seigneur  et  de  la  Madone  ;  l'impulsion  donnée 
il  y  a  deu\  ans  s'est  généralisée  ;  on  cite  notam- 
ment le  Mont  Cervin,  hîut  de  4482  mètres. 

Un  Comité  s'est  formé  en  vue  de  la  création 
d'un  type  de  statue  ;  il  a  réuni  une  somme  suffi- 
sante pour  faire  placer  vingt  effigies  du  Rédemp- 
teur d'un  modèle  uniforme,  sur  les  plus  hautes 
cimes  de  l'Italie.  La  statue  est  l'œuvre  du  sculp- 
teur Aure'.i  ;  le  premier  exemplaire  a  été  remis 
au  palais  du  Vatican. 

Rome:  ttouveaux  musées  et  mot  nouveau. 

M.  Boni,  l'éminent  directeur  des  fouilles  du 
Forum,  va  organiser  au  Forum  même  un  musée 
des  objets  de  tous  genres  que  les  travaux  qu'il 
conduit  mettent  à  jour  et  qu'il  y  aurait  péril  à 
laisser  en  plein  air. 

Le  musée  sera  établi  dans  l'ancien  couvent  des 
Olivétains  attenant  à  l'église  de  Santa  Francesca 
Romana, située  près  de  la  basilique  de  Constantin. 

Le  sénateur  Barraco  a  fait  don  à  la  cité  de 
Rome  de  son  importante  galerie  de  sculptures 
antiques;  le  donateur  fera  élever  à  ses  frais  un 
édifice  sur  un  terrain   municipal. 

M.  Boni  préconise  une  expression  nouvelle  : 
archconomie. 

L'archéonomie  est  une  branche  de  l'archéo- 
logie ;  elle  a  pour  but  la  reconstitution  de  la  vie 
politique,  religieuse,  civile,  domestique  des 
peuples  disparus,  au  moyen  des  objets  de  tous 
genres  que  les  fouilles  mettent  à  jour. 

Parme.  Les  fresques  de  Corrige. 

Il  y  a  bien  des  années  qu'on   répète  que  les 


fresques  de  la  coupole  du  dôme  sont  en  partie 
compromises,  et  c'est  vrai. 

Allegri,  dit  Corrège,  les  peignit  de  1526  à  1530; 
le  sujet  donné  était  V Assomption  de  la  Vierge. 
Corrège  l'a  traité  avec  une  hardiesse  inusitée 
alors,  mais  dépourvue  de  sentiment  religieux.  Un 
contemporain,  qualifié  pour  juger  le  travail,  dit 
au  peintre  une  parole  qui  est  restée:  «  Vous  avez 
«  fait  là  un  plat  de  grenouilles  »,  allusion  à 
l'enchevêtrement  des  jambes  et  des  bras,  des 
raccourcis  et  des  contorsions  des  nombreux  anges 
qui  planent  dans  l'air. 

En  réalité,  la  fresque,  cependant  si  célèbre, 
cau^e  une  désillusion  ;  on  ne  la  comprend  pas 
bien  et  elle  n'est  pas  à  l'échelle  de  la  voûte,  défaut 
capital  dans  une  décoration  murale. 

Néanmoins,  on  s'est  grandement  alarmé  de 
l'état  de  perdition  oij  elle  se  trouve  et  un  remède 
a  été  jugé  nécessaire. 

Des  praticiens  furent  mis  à  l'ouvrage,  mais 
bientôt  une  clameur  s'éleva  ;  les  artistes  furent 
accusés  d'avoir  fait  plus  de  mal  que  de  bien,  et 
de  violentes  polémiques  s'engagèrent. 

Pour  en  finir  le  ministre  nomma  une  Commis- 
sion compétente  qui  vient  de  déposer  son  rapport. 

Aucune  retouche  de  peinture  n'a  été  faite, 
comme  on  l'avait  assuré. 

L'affaiblissement  des  couleurs  a  détruit  en 
plusieurs  parties  l'harmonie  générale  ;  cet  affai- 
blissement provient  de  l'envahissement  du  nitre 
dû  à  l'humidité  qui  a  atteint  l'enduit. 

Il  n'y  a  donc  rien  à  reprocher  aux  opérateurs. 

On  se  bornera  dorénavant  à  consolider  l'enduit 
dans  les  endroits  où  il  y  a  crainte  qu'il  se  détache. 

Aucun  coup  de  pinceau  ne  sera  donné  à  la 
fresque,  excepté  cependant  sur  les  bords  des 
crevasses  qui  se  sont  produites. 

La  Commission  a  été  sage. 

L'humidité  est  pour  les  fresques  un  ennemi 
mortel.  On  peut  la  vaincre  en  isolant  l'onduit  de 
la  muiaiUe,  comme  cela  a  été  fait,  par  M.  Fiscali, 
au  Campo  Santo  de  Pise,  pour  la  fresque 
d'Antonio  Veneziano  représentant  l'histoire  de 
saint  Renier  (voir  la  Revue  de  mai  1899)  ;  mais 
l'opération  est  très  difficile.  Si  on  ne  veut  pas  la 
tenter,  il  faut  laisser  aller  les  choses  et  se 
contenter  de  consolider  l'enduit. 


Correspondance 


423 


Des  retouches  de  peinture  ne  seraient  qu'un 
expédient  inutile  ;  d'abord  elles  pourraient 
altérer  le  caractère  général  de  la  fresque,  puis 
elles  seraient  mangées  par  l'humidité  comme  les 
couleurs  primitives. 

Gerspacii. 
(Florence,  août.) 


NOUS  avons  reçu  l'agréable  lettre  ci-après, 
accompagnée    de    feuilles    vivantes,    que 
nous  reproduisons  en   croquis. 


Cher   Monsieur, 


;i  mai  1901. 


VOTRE  dernier  article  sur  la  flore  de'corative  du 
moyen  âge  dans  la  Revue  de  PArt  chrétien  est  plein 
d'intérêt,  pour  moi  surtout.  Continuez,  je  le  souhaite. 

Je  vous  envoie  de  jeunes  pousses  de  deux  fougères, 
indigènes  en  Ardenne  ;  j'espère  qu'elles  vous  arriveront 
non  fanées.  Le  Polypode  vuXga^we.  (  Polypodiiim  vii/gate) 
en  flamand  Roomvarcn,  est  commun  dans  presque  toute 
la  Belgique  ;  vous  remarquerez  combien  ses  petites 
crosses  sont  simples,  décoratives  et  en  même  temps 
faciles  à  interpréter,  pour  des  crochets  en  pierre  par 
exemple.  L'autre  est  la  Langue  de  Cerf  ou  Scolopendre 
{Scolopeiidrimii  viilgare  Sm).  Ces  jeunes  frondes  pro- 
viennent d'un  pied  que  j'ai  un  jour  transplanté  des  rochers 
de  la  Semois  dans  notre  jardin.  Mais  j'en  ai,  l'an  dernier, 
observé  de  bien  plus  belles,  qui  rappelaient  d'une  façon 
frappaiile  c&riaXns  crochets  de  la  plus  belle  époque.  Cette 
plante  n'est  pas  spéciale  à  la  .Semois  et  elle  se  rencontre 
même  dans  le  plat  pays,  au  moins  à  l'état  subspontané 
ou  naturalisé.  Je  l'ai  observée  notamment  à  Havre, 
tapissant  les  parois  d'un  puits,  où  elle  trouvait  l'ombre 
et  la  fraîcheur. 

C'est  une  question  bien  complexe  et  bien  difficile,  que 
de  savoir  où  les  anciens  imagiers  prenaient  leurs  inspira- 
tions. D'où  vient  réellement  la  fleur  de  lys  et  le  beau 
crochet  classique  du  XIII=  siècle?  Moi  qui  fais  de  la 
botanique,  je  vous  avoue  que  je  me  prends  parfois  à  douter 
des  opinions  les  plus  accréditées,  et  je  me  dis  que  le 
dernier  mot  sur  ces  questions  si  intéressantes  n'est  peut- 
être  pas  encore  prononcé.  Mais  ce  n'est  pas  une  raison 
pourne  pas  continuer  vos  recherches  si  bien  commencées; 
au  contraire.  Ces  articles  si  bien  illustrés  ont  déjà  un 
grand  mérite  au  point  de  vue  des  jeunes  artistes  qui,  au 
lieu  de  rester  courbés  sur  leur  planche  de  dessin,  feraient 
bien  d'observer  d'un  peu  plus  près  notre  flore  indigène, 
en  faisant  des  rapprochements  avec  les  beaux  modèles  du 
passé. 


Et  puis,  qui  nous  délivrera  des  élucubrations  de 
ce  style  «serpentin» que  vous  avez  très  bien  baptisé,  et  qui 
ne  vaut  quelque  chose  que  lorsqu'il  s'inspire  de  la  nature 
en  l'interprétant  précisément  d'après  les  règles  etlesprin- 
cipes  d'autrefois.'  Mais  :  «  Confetti  —  monnaie  du  diable 
et  serpentins  —  flore  du  diable  ».  S'il   n'a  que  cela  à  nous 


m 


Scolopendre. 
(Langue  de  cerf.) 


Fougère. 
(Pûlypode  vulgaire.) 

donner,  qu'il  demeure  en  enfer,  n'est-il  pas  vrai  ?  Mais 
vous  nous  donnez  autre  chose,  cher  Monsieur  Cloquet, 
et,  je  vous  le  dis,  votre  dernier  article  m'a  comblé  de  joie, 
moi  qui  ne  sais  ce  qu'il  faut  le  plus  admirer,  des  végétaux 
vivants  créés  par  Dieu,  ou  des  mêmes  végétaux  changeant 
de  rôle  et  de  forme  pour  glorifier  encore  une  fuis  le 
Créateur. 

Pardonnez-moi  ces  quelques  réflexions.  J'espère  qu'elles 
vous  encourageront  dans  cette  bonne  et  belle  voie. 

Eugène    H. 


-^ 


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Tvabauv  ttcs  JSocittcs  saluantes. 


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Société  nat=''=  des  Antiquaires  de  France. 
—  Séance  du  /j  mai  igoi .  —  M.  Lefèvre-  Pontalis 
communique  les  résultats  des  fouilles  qui  ont  été 
exécutées,  sous  sa  direction,  au  mois  de  février 
dernier,  dans  la  nef  de  la  cathédrale  de  Cliartres. 

M.  le  capitaine  Espérandieu  communique 
deux  inscriptions  latines  provenant,  l'une  de 
Lectoure,  l'autre  d'Annecy. 

Scance  du  3  Juin  —  M.  Stein  signale  un  nou- 
veau document  qui  éclaire  la  vie  et  les  travaux 
du  sculpteur  Barthélémy  du  Tremblay,  célèbre 
artiste  de  l'époque  de  Henri  IV,  l'auteur  de  la 
décoration  sculpturale  de  la  chapelle  du  château 
de  Fontainebleau. 

M.  Monceau  présente  quelques  observations 
sur  les  origines  de  la  Bible  latine  ;  il  admet  que 
Tertullien  avait  sous  les  yeux  des  traductions 
latines  de  quelques  livres  sacrés. 

Séance  du  u  juin.  —  M.  Lafaye  communique 
de  la  part  de  son  fière  M.  R.  Lafaye  le  texte 
d'une  inscription  latine  trouvée  il  y  a  une  ving- 
taine d'années  à  Montlazi.  Elle  porte  les  mots  : 
Fulgur  divon 

M.  Cagnat  met  sous  les  j-eux  de  ses  confrères 
une  cornaline  talismanique  avec  caractères  ara- 
bes qui  appartient  au  commandant  Fa.xges  de 
Constantine. 

M.  Prou  entretient  la  Société  de  deux  diplô- 
mes du  roi  Philippe  I*^''  conservés  dans  l'ancienne 
abbaye  de  Messines  près  d'âpres.  L'un  d'eux 
serait  un  faux  fabriqué  au  temps  même  de 
Philippe  \". 

M.  Michon  fait  une  lecture  sur  une  statue 
d'Apollon  provenant  de  Nîmes  et  conservée  au 
Musée  du  Louvre. 


Congrès  de  la  Société  française  d'ar- 
chéologie. —  La  Société  française  d'archéo- 
logie a  tenu  son  congrès  annuel  à  Agen,  puis  à 
Auch,  du  1 1  au  i6  juin,  sous  la  présidence  de  M. 
Lefèvre-Pontalis. 

Plusieurs  discours  ont  été  prononcés  ayant 
pour  but  d'inviter  les  représentants  de  la  science 
archéologique  à  veiller  sur  les  monuments  que 
menacent  de  coupables  négligences.  M.  Héron  de 
Villefosse,  qui  représentait  le  ministre  de  l'Ins- 
truction publique,  a  rappelé  à  ce  propos  les  dan- 
gers que  courent  les  remparts  d'Avignon  et  la 
tour  de  Vésone,  à  Périgueux. 


M.  Lefèvre-Pontalis  a  exposé  les  travaux  de  la 
Société  depuis  l'année  dernière,  consacré  un  sou- 
venir ému  à  ceux  de  ses  membres  qui  sont  morts, 
notamment  au  comte  de  Marsy,  son  prédécesseur, 
et  indiqué  les  travaux  qui  peuvent  solliciter  la 
curiosité  des  archéologues  dans  l'Agenais. 

M.  Momméja  a  hi,  ensuite,  un  mémoire  très 
intéressant  sur  les  ateliers  de  sculpture  de  la 
région. 

M.  Lauzun  a  donné  communication  de  deux 
notes  de  RL  C.  Julian,  professeur  à  la  Fa- 
culté des  lettres  de  Bordeaux,  sur  le  culte  des 
déesses  Tutelles  dans  le  Sud-Ouest  et  l'origine  du 
nom  d'Agen.  11  estime  qu'il  y  a  connexité  en- 
tre les  deux  questions,  et  que  dans  la  forme 
antégauloise  Aginnuni  on  doit  retrouver  un 
souvenir  de  culte,  d'hommage  à  une  fontaine, 
à  une  source,  également  divinisée  à  l'éjjoque  anti- 
que sous  le  nom  de  Tutelle. 

Signalons  ensuite  les  communications  de  MM. 
P.  Longin  et  le  chan.  Pottier  concernant  l'his- 
toire des  églises,  des  châteaux  et  forts  de  la 
région  ;  une  étude  de  M.  A.  Hlanchet  sur  la  pho- 
thographie  d'un  dessin  de  la  collection  Gai- 
gnières,  exécuté  entre  1700  et  1710,  représen- 
tant dans  son  état  primitif  le  château  de  Mon- 
taner,  aux  environs  de  Pau,  construit  en  1375 
par  ordre  de  Gaston  Phœbus,  comte  de  Foix,  et 
dont  il  ne  reste  plus  aujourd'hui  que  des  ruines; 
des  études  de  M.  Brutails  sur  les  églises  à  cou- 
poles, de  M.  Momméja  sur  l'architecture  de 
l'Agenais  et  les  carrelages  vernissés  ;  des  notices 
de  MM.  Ouarré  sur  un  voyage  à  Agen  en  1690; 
de  M.  Courreau  sur  l'église  de  Clermont-Des- 
sous  ;  etc. 

Les  congressistes  étaient  très  nombreux. 
Ils  ont  visité  dans  le  Lot-et-Garonne  et  le  Lot 
des  châteaux  féodaux,  dont  les  ruines  sont  encore 
imposantes,  et  des  églises  romanes,  sous  la  direc- 
tion de  M.  Lefèvre-Pontalis. 

La  cathédrale  actuelle  d'.Agen  (l'ancienne 
église  abbatiale  de  Saint-Caprais)  a  attiré  leur 
attention  par  son  plan  qui  comportait  évidem- 
ment des  coupoles,  remplacées  au  XIV"^  siècle, 
faute  de  ressources, par  des  croisées  d'ogives;  ainsi 
que  l'église  des  Jacobins,  intéressante  par  son 
plan,  analogue  à  ceux  de  leur  église  de  Paris 
aujourd'hui  détruite  et  de  leur  grande  et  belle 
église  de  Toulouse,  plan  à  deux  nefs  parallèles 
séparées  par  un   alignement  de  colonnes. 

L'église  et  surtout  le  portail  de  Moissac,  ainsi 
que  le  cloître  très  bien  conservé,  ont  suscité  deg 
discussions  intéressantes. 


%va\iànx  ties  ^octété0  gatjantes. 


425 


La  visite  de  la  cathédrale  d'Auch  avec  ses 
superbes  vitraux  a  terminé  cette  fête  de  l'art. 

Il  convient  de  mentionner,  parmi  les  récom- 
penses qu'a  accordées  la  Société  d'aixhéologie, 
la  médaille  offerte  à  M"«  Louise  Carreau,  qui  a 
acheté  les  vieux  murs  du  château  de  Modaillan 
et  pris  toutes  les  mesures  pour  les  préserver  de  la 
destruction. 


Société  archéologique  du  Midi  de  la 
France.  —  La  laborieuse  société  que  dirige  M. 
J.  Mérimée  se  distingue  paria  variété  des  études 
de  ses  membres.  Parmi  les  travaux  de  l'année 
écoulée,  signalons  trois  communications  de  M. 
l'abbé  Auréol,  l'une  relative  à  une  miniature 
figurant  l'Immaculée  Conception,  l'autre  sur  un 
fer  à  hosties  du  XV^  siècle,  une  troisième  sur 
quelques  dévotions  pendant  le  XV^  siècle,  inté- 
ressante au  point  de  vue  de  l'art  et  de  l'icono- 
graphie; d'intéressantes  remarques  du  baron  de 
Kivières  sur  les  plus  anciennes  sculptures  roma- 
nes du  Midi  et  de  Toulouse;  une  étude  du  baron 
Desazars  de  Montgaillard  sur  les  origines  de 
Toulouse;  des  recherches  de  M.  B.  Dupuy  des 
Grais  sur  l'histoire  de  Toulouse  ;  la  publication 
par  M.  de  Lahondès  d'une  inscription  funéraire 
du  XI V'^ siècle;  un  mémoire  important  du  même 
auteur  sur  les  châteaux  de  Cabaret  (Aude),  et 
un  autre  sur  d'anciennes  maisons  de  Toulouse. 
Ce  dernier  offre  un  intérêt  spécial  à  notre  point 
de  vue.  La  Revue  de  l'Art  chrétien  s'est  plusieurs 
fois  occupée  de  l'architecture  domestique  au 
moyen  âge.  Cette  architecture  n'a  guère  produit 
de  plus  charmants  spécimens  que  les  demeures 
modestes  publiées  par  M.  de  Lahondès  ;  signa- 
lons la  principale  et  la  plus  ancienne  de  Toulouse, 
sise  rue  Croix-Baragon  et  remontant  au  XIV<= 
siècle.  Elle  présente  au  rez-de-chaussée  deux  lar- 
ges boutiques  abritées  sous  des  arcades  ogivales. 
Le  premier  étage  est  éclairé  par  une  rangée  de 
cinq  fenêtres  géminées. On  accédait  aux  boutiques 
directement  de  la  rue,  ou  par  un  couloir.  La  salle 
de  l'étage  était  l'âme  du  logis,  la  grande  pièce 
servant  de  réfectoire  et  parfois  de  dortoir  et  aussi 
de  salle  de  réception  intime.  On  y  accédait  par 
une  vis  au  fond  du  couloir  ;  des  appartements  de 
derrière  prenaient  jour  sur  la  cour.  Une  aile  de 
derrière  était  au  moyen  âge  toujours  ménagée  au 
fond  de  la  cour  ;  on  y  plaçait  la  cuisine  et  les  ser- 
vices ;  on  y  accédait  par  un  passage  couvert  du 
rez-de-chaussée  et  de  l'étage,  par  une  galerie. 
Quelquefois  un  entre-sol  était  ménagé  an-dessus 
des  boutiques.  La  maison  avait  un  second  étage. 
Nous  engageons  M.  Fierens-Gevaert,  si  sévère 
pour  ses  compatriotes  et  avec  qui  nous  polémi- 
quions naguère,  à  diriger  son  attention  vers  le 
Midi  de  la  France  ;  il  trouvera  à  la  cathédrale 


d'Albi  de  quoi  exercer  sa  verve.  On  a  démoli 
les  tourelles,  sauf  deux.  A  la  place  de  celle  qui 
servait  autrefois  de  vigie  et  oîi  depuis  on  a  mis  le 
timbre  de  l'horloge,  on  en  a  élevé  une  nouvelle, 
toute  de  fantaisie.  Les  contre-forts  ronds  n'ont 
plus  de  couronnement.  Un  mur  monotone  a  fait 
place  à  la  balustrade,  supprimée  par  motif  d'éco- 
nomie !  On  a  introduit  de  la  pierre  blanche,  là 
où,  respectant  la  nature  des  matériaux  origi- 
nau.x,  C.  Daly,  autrefois,  avait  eu  soin  d'em- 
ployer de  la  brique  et  de  la  pierre  de  Plaisance. 
Telles  sont,  du  moins,  les  doléances  qu'un  homme 
très  entendu,  M.  le  baron  de  Rivières,  faisait 
naguère  entendre  à  ses  confrères  de  Toulouse. 

M.  l'abbé  Cau -Durban  fait  connaître  l'exis- 
tence dans  le  passé  d'une  collégiale  tombée  dans 
l'oubli,  celle  de  Massât  et  fournit  des  renseigne- 
ments à  son  sujet.  M.  l'abbé  Auriol  lit  un  mémoire 
sur  la  fondation  de  la  Chartreuse  de  Toulouse. 

A  la  séance  annuelle,  M.  le  prof  Mérimée  a 
prononcé,  en  un  discours  de  grande  élégance  lit- 
téraire, l'éloge  de  l'archéologie...  et  des  archéo- 


k,  ,,;iwvi%*^^Éi|l 


-%r. 


Figr.  I.  —  Chapiteaux  de  l'église  SaintNazaire  à  Carcassonne. 

logues  toulousains  ;  M.  E.  Cartailhac  a  traité  de 
l'histoire,  de  l'état  et  du  rôle  des  musées. 

Signalons  encore  une  étude  de  M.  de  Lahondès 
sur  la  cathédrale  de  Saint-Nazaire  à  Carcassonne. 
On  aimait  à  insérer  dans  la  construction  des 
églises  romanes  quelques  restes  choisis  des  sanc- 
tuaires antiques  qu'elles  remplaçaient.  C'est  ainsi 
que  l'on  peut  voir  dans  l'église  de  St-Nazaire 
trois  chapiteaux,  les  premiers  vers  le  chœur,  pro- 
venant d'une  église  antérieure,  que  l'on  sait,  par 
un  parchemin  de  85 1,  avoir  été  élevée  à  la  même 
place.  Ils  rappellent  ceux  de  Ravenne  et  de 
St-Ambroise  à  Milan,  c'est  dire  combien  ils 
sont  intéressants  ;  nous  croyons  bien  faire  d'en 
reproduire  deux  (Jig.  i ). 

Rappelons  l'allure  générale  de  l'édifice.  St- 
Nazaire  diffère  essentiellement  de  Saint-Sernin 
de  Toulouse,  sa  voisine.  Tandis  que  celle-ci, 
élevée  suivant  le  mode  auvergnat,  présente  des 
demi-berceaux  contrebutant  la  grande  voûte 
au  dessus  des  bas-côtés,  on  voit  à  la  cathédrale 
carcassonnaise  les  deux  petites  nefs  montées  jus- 


revue  DE  l'art  chrétien. 
1901.    —    5™*^    LIVRAISON. 


426 


jRrbuc  lie  r^rt  cbvcttcn. 


qu'à  )a  hauteur  de  la  nef  centrale,  selon  le  mode 
du  Poitou  (ex.  :  St-Savin).  Le  chœur  fut  construit 
vers  1267. 

Le  charme  suprême  du  chœur  de  St-Nazaire 
vient  de  ses  vitraux  ;  on  ne  voit  que  du  verre  coloré 
entre  les  minces  colonnettes  qui  séparent  les  ver- 
rières ;  la  richesse  de  leur  coloration  est  incom- 
parable. 

De  plus, la  cathédrale  de  Carcassonne  s'enrichit 
d'une    statuaire    vraiment    supérieure,    la    plus 


Fig.  2.  -    Le  Christ. 

belle  que  le  XIV»'  siècle  ait  laissée  à  la  pro- 
vince (131 5-1326).  Vingt  statues  entourent  le 
chœur  ;  elles  représentent  notamment  la  Vierge 
(même  inspiration  que  celle  de  la  porte  dorée 
d'Amiens),  et  le  Christ,  resté  inaperçu  de  Viollet- 
le-Duc  par  suite  de  cette  circonstance  étrange, 
qu'il  est  de  taille  inférieure  à  celle  des  trois 
statues  de  la  Vierge,  de  S.  Nazaire  et  de  S. 
Gimer  (fig.  2).  C'est  une  figure  superbe,  que  nous 
avons  fait  reproduire.  Puis  viennent  les  apôtres. 
Ces  statues  ont  une  attitude  simple  et  noble,que 
le  vêtement  suit  avec  aisance  ;  elles  ont  plus  de 
délicatesse  que  de  grandeur  ;  on  y  voit  poindre 
le  réalisme  de  l'époque   et   elles   doivent    être 


l'œuvre  d'artistes  du  Nord.  Elles  étaient  poly- 
chromées.  Elles  sont  à  rapprocher  de  celles  de  la 
chapelle  de  Rieux,  actuellement  au  cloître  des 
Augustins,  un  peu  plus  réalistes. 

Dans  sa  très  belle  étude,  M.  de  Lahondès  a 
glissé  une  assertion  qui  nous  paraît  étrange. 
«  L'essor,  parti  des  provinces  françaises,  de  la 
Bourgogne  surtout,  avait  gagné  les  Flandres...  » 
Ce  serait  une  théorie  bien  neuve  et  digne  d'être 
démontrée,  que  celle  qui  ferait  naître  l'école 
flamande  de  la  bourguignonne  ?  Jusqu'ici  l'in- 
verse a  toujours  été  admis. 

L.  Cloquet. 


Société  d'archéologie  de  Bruxelles.  —  Le 
t.  XV  des  Annales  {\\,  1901)  contient  une  notice 
de  M.J.Van  der  Linden  sur  quelques  œuvres  d'art 
de  l'église  d'Opwyck,  en  Brabant,  édifice  élevé 
du  XlV'=  au  XV'=  siècle,  et  qui  possède  trois  ta- 
bleaux de  Crayer,  des  statues  en  bois  d'Ant. 
Faydherbe,  et  un  ostensoir  du  XVI^  siècle,  de 
l'orfèvre  Jooris  Van  Horenbeke. 

M.  P.  Combrez  étudie  les  restes  des  remparts 
de  Bruxelles,  et  en  particulier  de  la  Steenpoort. 


Société  d'histoire  et  d'archéologie  de 
Gand.  —  Le  musée  germanique  possède  un 
tableau  flamand  du  XV'^  siècle,  représentant  la 
Mort  de  Cynis,  sujet  puisé,  comme  le  montre 
M.  le  prof.  G.  Hulin,  dans  le  Spéculum  hiunanœ 
Salvationis. 

De  patientes  recherches  ont  amené  M.  Hulin 
à  la  conviction,  que  ce  tableau  provient  de  l'an- 
cien palais  épiscopal  de  Gand  ;  il  est  attribué 
jusqu'ici  à  un  anonyme,  auteur  du  célèbre  retable 
provenant  de  l'abbaye  de  Flemalle,  conservé  au 
musée  Staedel  de  Francfort. 

En  outre,  M.  Hulin  avance  comme  une  con- 
jecture très  probable  et  singulièrement  intéres- 
sante, que  le  «  maître  de  Flemalle  »  n'est  autre 
que  le  peintre  tournaisien  Jacques  Daret. 

En  présence  de  cette  hypothèse,  qui  donne 
un  nouveau  relief  au  maître  tournaisien,  nous 
croyons  intéressant  de  reproduire  ici  les  rensei- 
gnements que  nous  avons  naguère  réunis  sur  ce 
peintre,  en  collaboration  avec  feu  A.deLagrange. 

Les  Daret  ont  formé  une  des  lignées  d'artistes  tour- 
naisiens  les  plus  remarquables.  Le  plus  ancien  et  le  plus 
intéressant  de  ses  membres  est  Jacques  Uaret  ('),  pro- 
bablement fils  de  Jehan,  l'escrinier.  Entré  le  12  avril  1427 
comme  apprenti  dans  l'atelier  de  maître  Robert  Campin, 
il  fut  re<;u  à  la  maîtrise  le  iS  octobre  1432.  et  d'emblée 
nommé  prévost  de  la  confrérie  de  St-Luc.  Il  eut  à  son 

I.  Il  était  signalé  dès  i865  par  M.  Genard.  (V.  Compte-rendu  du 
Congrès  archéologique  d'Anvers.) 


%va\)ànx  Oes  Sociétés  satjautes. 


427 


tour  pour  élève  Jehan  le  Bacrele  Jeune,  et  à  son  service, 
comme  varlet,  en  1462,  Hans  de  Strasbourg. 

Appelé  au  loin,  partout  où  l'on  a  besoin  d'un  talent 
éprouvé,  nous  le  voyons  travailler  à  Bruges,  à  Lille,  à 
Arras.  En  1441,  il  est  fixé  à  Arras  ;  il  séjourne  longtemps 
dans  cette  ville,  où  il  occupe  de  1446  à  t458  la  maison  de 
l'Écurie  ('}.  11  reparaît  à  Tournai  en  1459.  Il  y  mourut  en 
1466,  selon  un  renseignement  que  nous  tenons  de  M.  le 
comte  B.  du  Mortier.  C'était,  comme  nous  allons  le  voir, 
un  artiste  de  premier  ordre.  Il  faisait  à  Arras  des  cartons 
pour  les  hautelisses  historiées.  Les  comptes  de  l'abbé  du 
Clercq,  de  Saint-Vaast  ("'),  contiennent  cet  article  intéres- 
sant au  sujet  de  ses  travaux. 

«  Item  payé  p.ir  mondit  Seigneur  l'abbé, comme  dessus, 
à  Jacques  Daret,  paintre,  le  VI I'^  jour  de  juillet  mil  IlII" 
XLIX,  pour  ung  patron  de  toille  de  couleur  à  destempre 
contenant  XI 1  aulnes  de  lonc  et  IIII  aulnes  de  larghe 
ou  environ  ouquel  est  listoire  de  la  Résurrection  Nostre 
Seigneur  Jhesu  Christ  bien  pointe  et  figurée  sur  lequel 
patron  a  esté  faict  un  tapis  de  hauteliche  de  ladite  Résur- 
rection lequel  patron  est  et  a  esté  mis  par  l'ordonnance 
dudit  monseigneur  l'abbé  en  la  Galle  quarrée.  En  ce 
comprins  XXXVI  aulnes  de  kanevach  sur  lequel  kane- 
vach   fu  fait   ledit   patron,  la  somme  de   X.VHI   livres 

XV  S.  monnoie  dite.  » 

On  le  voit  collaborer  dans  l'Artois  aux  œuvres  du 
fameux  fondeur  tournaisien  Michel  de  Gand,  dont  il 
fournit  les  patrons.  Ainsi,  c'est  d'après  ses  dessins  que  ce 
dernier  exécuta  pour  le  chœur  de  l'abbatiale  de  Saint- 
Vaast,  un  lampier,  ainsi  que  la  croix  monumentale  qui 
s'élevait  au  milieu  de  la  place  de  Saint-Vaast  {'=).  Ainsi 
encore  il  dora  la  «  coulombe  (colonne)  candeliers  et 
croche  »  servant  à  suspendre  à  l'autel  du  chœur  de  l'église 
précitée  la  réserve  eucharistique,  ouvrages  du  même 
fondeur  {*). 

Pendant  son  séjour  à  Arras,  Daret  fut  appelé  à  Lille 
pour  les  préparatifs  de  la  fête  du  Vœu  du  Faisan,  en 
1454  (5).  Voici  l'extrait  des  comptes  de  ce  banquet  qui  le 
concerne  : 

«  A  Jacques  Daret,  aussi  pointre,  pour  lui  et  quatre 
varlets  de  mestier,  qui  ont  ouvré  audit  lieu,  savoir  :  les 
deux  onze  jours  et  les  autre  deux  dix-neuf  jours  auxquels 
a  été  tansée,  à  savoir  ;  audit  maistre,  chacun  jour,  vint 
sols,  font  XI  francs  ;  à  ses  compagnons,  les  deux  premiers, 
de  onze  jours  chacun  huit  sols  par  jour,  font  VIII  francs, 

XVI  sols  et  les  autres  deux  pour  dix-neuf  jours,  a  prix  de 
six  sols  par  jour  valent  CXIIII  sols.  » 

Avec  lui  furent  employés  Lablié  et  Cauntrain,  «  aussi 
pointre  demeurant  à  Tournai  »,  qui  y  travaillèrent  douze 
jours  au  prix  de  8  sols  par  jour. 

Vers  la  fin  de  sa  vie  (1468),  Daret  se  rendit  à  Bruges 
à  la  tête  de  plusieurs  autres  peintres  pour  prendre  part  à 
la  «  décoration  de  l'ostel  de  monseigneur  le  duc  de  Bour- 
gogne ».  Il  fut  taxé  en  cette  circonstance  à  vingt-sept  sous 
par  jour,  somme  relativement  très  importante,  puisque  la 
plupart  des  autres  artistes  et  ouvriers  n'en  gagnaient  que 
dix,  et  que  Hugo  \'an  der  Goes  lui-même,  malgré  sa  ré- 
putation et  son  talent,  n'en  recevait  que  quatorze  (").  Avec 
lui  travaillait  un  peintre  nommé  Massin  de  Tournai. 

Ce  maître  forme  un  trait  d'union  entre  l'école  de  Tournai 
et  celle  d'Anvers.  On  trouve  parmi  les  peintres  qui  tra- 

1.  V.  A.  Guesnon,  Décadence  des  tapisseries  d' Arras. 

2.  H.  Loriquet,  Note  sur  les  tentures  de  hautelisse  possédées  par 
l'abèave  de  Saif/t-  Vaast. 

3.  V.  C.   de  lÀnas,  Revue  de  l'Art  chrétien,  OCX.   1885. 

4.  V.  Jbid. 

5.  De  Laborde,  Histoire  des  ducs  de  Bourgogne. 

6.  L'art  chrétien  en  Flandre,  par  le  chan.  Dehaisne. 


vaillaient  sous  ses  ordres  :  Jean  Snellaert,  Godefroy 
d'Anvers,  Jean  Thomas,  Jacques  Thony,  Henri  Bastin, 
Adrien  Gerop,  Luc  Adrien,  Jean  Casyn  Vinckaert,  Guil- 
laume Guddeman,  etc.,  qui  en  1453  contribuèrent  à 
l'institution  et  à  la  réorganisation  de  la  Gilde  de  Saint- 
Luc  à  Anvers  ('). 

En  1461  Jacques  Daret  travaille  à  la  peinture  décora- 
tive d'un  des  quatre  personnages  sculptés  placés  au 
sommet  de  l'une  des  tourelles  du  beffroi  de  Tournai. 

Cet  artiste  avait  un  frère,  Danelet  (Daniel)  Daret,  qui 
commença  ses  études  en  1432  avec  lui.  Il  fut  reçu  à  la 
maîtrise  de  Saint- Luc  le  10  février  1440.  Il  succéda  à 
Jean  Van  Eyck  lui-même,  en  1449  (après  neuf  ans  de 
vacation  de  la  charge),  dans  les  fonctions  de  peintre  offi- 
ciel du  duc  Philippe-le-Bon.  Pinchart  a  reproduit  l'ordon- 
nance relative  à  cette  nomination  (■). 

En  même  temps  que  Jacques,  un  Jehan  Daret,  peintre, 
demeurant  à  Tournai,  travaillait  aux  entremets  de  Lille 
en  1454,  où  il  était  occupé  avec  deux  varlets  ('). 

Nous  avons  longuement  parlé,  dans  notre  premier 
volume  des  Études  sur  l'Art  à  Tournai  (p.  170;,  du 
sculpteur  Jehan  Daret,  de  son  fils  Martin,  et  de  Jacques 
Daret,  aussi  sculpteur  employé  à  Lille  en  15  16  par  le  duc 
de  Bourgogne,  tous  trois  contemporains  des  peintres  dont 
nous  venons  de  nous  occuper,  ainsi  que  de  Oste  Daret, 
tailleur  d'images  du  XVI'^  siècle. 

A.  Pinchart  nous  apprend  (<)  qu'un  Jacques  Daret,  peut- 
être  un  fils  de  notre  Jacques,  fournit  en  1520  difterents 
patrons  à  l'occasion  du  couronnement  de  l'empereur 
Charles-Ouint  à  Aix-la-Chapelle.  Il  dessina  notamment 
le  harnais  du  cheval  monté  par  le  souverain. 

Citons  en  passant,  à  cause  de  la  quasi  similitude  de 
nom,  Estiévenart  Dare,  qui  en  1406  est  chargé  par  la 
Ville  de  «  poindre  et  former  un  mapemonde  de  le  scitua- 
tion  de  ladite  ville  de  Tournay,  qui  est  confrontans  aux 
pays  de  l'empire,  Hénau,  Braibant  et  autre  pays,comment 
elle  est  environnée,  les  villes,  pays  et  notables  cités  par 
où  on  va  et  entre,  et  les  rivières  qui  y  sont,  à  quatre 
journées  près  de  ladite  ville  de  Tournay,  pour  icellui  ma- 
pemonde baillier  à  maître  Jacques  d'Aosti  par  courtoisie 
à  lui  faite.  XXV  S.  » 

Guillaume  Daret,  faiseur  de  cartes,  natif  de  Tournai, 
fils  du  sculpteur  Martin,  acheta  la  bourgeoisie  le  4  décem- 
bre 1510  ;  il  était  arbalétrier  du  Grand  Serment.  Un  autre 
Martin  Daret  est  employé  comme  ouvrier  peintre  en 
146S  à  Bruges,  aux  décors  exécutés  pour  les  noces  de 
Charles- le-Téméraire. 

Un  peintre  du  nom  de  Jean  Daret,  né  à  Bruxelles,  peut- 
être  originaire  de  notre  pays,  était  établi  au  XVI I"  siècle 
à  Aix,  en  Provence.  Il  peignait  à  la  manière  du  Guerchin; 
le  musée  de  cette  ville  garde  de  lui  des  toiles  qu'on  dit 
remarquables  ("). 

M.  G.  du  Plessis,  dans  son  Dictiormaire  des  marques 
et  iiifluograiiDiies  de  graveurs,  parle  de  «  Jean  Daret, 
peintre,  graveur  français,  travaillant  en  1658,  et  de  Pierre 
Daret,  né  à  Paris  en  1610,  mort  vers  1675.  »  C'est  ce  que 
relève  Ch.  de  Linas  C^),  et  il  ajoute  :  «  Les  personnages  en 
question  ne  descendraient-ils  pas  du  peintre  tournaisien 
Jacques  Daret,  ou  de  son  compatriote  l'imagier  Jean 
Daret,  qui  vivaient  tous  deux  au  XV=  siècle?  Vers  cette 

1.  V.  Genard,  Congrès  archéol.  d' Anvers,  1866. 

2.  Pinchart,  Documents  relatifs  au.x  frères  Van  Eyck  et  à  Roger 
Vanderweyden.  Bruscher. 

3.  .'\rchives  du  Nord.  t.  IV  de  l'Inventaire  sommaire. 

4.  V,  Archives  des  arts. 

5.  V.  Messager  des  sciences,  1S53,  p.  498  ;  Bulletin  archéologique, 
II  vol.  p.  576. 

6.  Revue  de  l'Art  chrétien,  1887,  p.   224. 


428 


îRebtte  lie  T^it  c|)rctien. 


période  on  a  des  exemples  d'artistes  tournaisiens  émigrés 
h  Paris,  témoin  l'ivoirier  Jean  Aiiberl. 

Dans  la  même  Société  s'est  soulevé  à  plusieurs 
reprises  un  intéressant  débat  sur  la  question  du 
maintien  ou  de  la  suppression  des  clôtures  en 
style  renaissance  qui  enveloppent  le  chœur  go- 
thique de  la  cathédrale  de  Saint-Bavon. 

Tout  le  monde  paraît  d'accord  pour  maintenir 
comme  très  intéressantes  les  clôtures  ajourées, 
d'un  style  fâcheux  mais  d'une  grande  richesse 
matérielle  et  d'une  valeur  artistique  sérieuse,  qui 
ferment  les  travées  du  rond-point.  M.  Van  Bies- 
broeck  a  plaidé  avec  une  grande  éloquence  la 
cause  de  ces  œuvres  intéressantes  ;  avec  un  talent 
digne  d'une  meilleure  cause,  il  a  proclamé,  au 
surplus,  l'intangibilité  sacrée  de  la  plate,  froide, 
énorme  et  affreuse  enceinte  de  marbre  noir  et 
blanc  qui  constitue  la  partie  antérieure  de  cette 
clôture,  et  fait  retour  sur  le  devant  du  chœur  ; 
ce  mur  aveugle,  sans  aucun  mérite  artistique 
en  lui-même,  constituant  esthétiquement  une 
monstruosité,  qui  enveloppe  les  colonnes  du 
chœur,  s'élève  jusqu'au-dessus  des  chapiteaux 
et  soustrait  aux  yeux  la  superbe  ordonnance  d'un 
des  plus  beaux  chœurs  gothiques  qu'on  puisse 


voir.  Nous  nous  étonnons  de  voir  un  homme  de 
goût  comme  M.  Van  Biesbroeck  prendre  la  dé- 
fense de  cette  aberration  architecturale.  Il  est 
vrai  qu'il  a  pour  lui  tous  les  suffrages  des 
archéologues  gantois  ;  c'est  selon  nous  un  triste 
symptôme  de  l'esthétique  courante. 

L.   C LOQUET. 


Société  des  Mélophiles  de  Hasselt.  36«  v. 
Hasselt,  1900.  — •  F.  Straven  donne  une  Notice, 
historique  sjn-l'cglise  de  St-Gangulphe  à  St-  Trond. 
Cette  église  est  une  de  celles  qui  furent  édifiées 
par  l'abbé  Adéiard  II  ;  elle  fut  érigée  en  paroisse 
en  1133.  M.  Straven  a  recueilli  sur  l'église  et  la 
paroisse  une  ample  moisson  de  renseignements, 
dressé  une  liste  des  curés  depuis  le  XIII*=  siècle 
et  publié  dix-sept  épitaphes  conservées  dans  la 
collection  de  tombes  du  baron  de  Herckenrode,  ou 
dans  le  recueil  confectionné  en  1698  par  le  notaire 
Van  de  Walle.  Il  est  à  regretter  que,  sauf  pour  les 
épitaphes, M. Straven  néglige  complètement  d'in- 
diquer la  source  où  il  a  puisé  ses  renseignements. 


(V.  Arcliives  historiques^ 


^^^^^.0)t  ^  ^  .^  ^,^^J^  :^^  ^  ^  ^^^  ^  :^^  ^  ^^  ^^,  ^  -^^  ^ 


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^:§Kg5^©s©^§K©^®i©  BiMiogvapJ)ie.  ^^sk^^^k©^©^^©^ 


IGLESIAS  ESPANOLAS  DEL  SANTO  SEPUL- 
CRO.  LA  VERA  CRUZ  Y  EUNATE,  par  D.  E. 
Serrano  Fatigati  {La  Ilicstracion  espaTiola  y  ame- 
ricaita,  1900,  N°  13). 

SEGOVIA.  PORTIGOS  DE  SUS  IGLESIAS 
ROMANICAS,  par  le  même  {La  Llustracion  espai'wla 
y  aiiui'icafui,  igoo,  N°  20). 

^ra^^^i^^  ne  reste  plus  en  Espagne  que  deux 
«  églises  édifiées  pour  rappeler  celle 
%  du  Saint-Sépulcre  de  Jérusalem. 
%  Toutes  les  deux  semblent  remonter 
èt^WS^4^  à  la  fin  du  XII«  siècle.  L'une  s'ap- 
pelle la  Vera-Crn::  et  se  voit  à  Ségovie  ;  l'autre, 
qui  porte  le  nom  à'Einiate,  est  située  près  du 
village  de  Muzurabal,  dans  la  Navarre.  Ces  deux 
églises  sont  soigneusement  décrites  par  M.  D. 
E.  Serrano  Fatigati  et  son  article  comporte 
d'excellentes  figures  (ensemble  et  détails). 

Mêmes  qualités  d'illustration  et  de  rédaction 
dans  l'article  consacré  aux  portiques  ou  sortes  de 
cloîtres  extérieurs  qui  longent  un  côté  des  églises 
de  Ségovie.  La  galerie  de  San  Millau  a  été 
publiée  par  Gailhabaud  {L'architecture  et  les  arts 
giii  en  dépendent,  t.  1'='^),  et  dernièrement  M.  G. 
Rohault  de  Fleury  a  fort  bien  reproduit  par 
l'eau-forte  celle  de  San  Esteban  {Les  Saints  de  la 
messe  et  leurs  monuments,  t.  V). 

E.  R. 


LE  LIVRE  DE  LA  PRIERE  ANTIQUE,  par  le 
R.  P.  Dom  F.  Cabrol,  bénédictin  de  Soiesmes,  prieur 
de  Farnborough  (Angleterre).  —  In-12,  XVII-573PP. 
Paris,  Oudin,  1900. 

VOICI  un  titre  qui  étonnera  plus  d'un  lec- 
teur de  la  Revue,  accoutumé  aux  comptes- 
rendus  d'ouvrages  d'art  et  d'archéologie.  Dus- 
sions-nous les  étonner  davantage  encore,  nous 
leur  dirons  que  le  volume  annoncé  est,  en  réalité, 
un  des  plus  utiles  qu'ils  puissent  consulter. 

L'art  religieux,  aux  différentes  époques,  s'est 
assez  inspiré  de  la  Liturgie,  pour  que  tous  ceux 
qui  étudient  les  monuments  chrétiens,  petits  et 
grands,  aillent  également  puiser  aux  sources 
vivifiantes  de  cette  Liturgie  catholique  et  connais- 
sent l'usage  qu'elle  fait  de  la  Bible,  l'agencement 
de  ses  prières  et  de  ses  fêtes,  la  genèse  des  livres 
qu'elle  emploie  (Missel,  Bréviaire,  Pontifical, 
Rituel,  Cérémonial  des  évêques  et  Martyrologe), 
le  culte  qu'elle  rend  à  Notre-Seigneur  et  aux 
Saints,  la  direction  qu'elle  imprime  à  l'architec- 
ture et  à  la  construction  des  églises.  Tout  cela,  et 
bien  d'autres  choses  encore,   est  expliqué   par 


l'auteur,  avec  une  science  consommée  du  sujet 
et,  cependant,  dans  un  style  sobre  et  clair  qui 
fait  de  ce  travail  un  livre  à  la  portée  de  la  masse 
des  lecteurs.  Ajoutons  que  les  indications  biblio- 
graphiques sont  nombreuses  et  les  sources  bien 
indiquées. 

Je  signalerai  d'une  façon  particulière  le  chapi- 
tre VII'î  :  Une  messe  à  Rome,  au  commencement 
du  HI^  siècle  ;  le  VIII<=  :  Les  attitudes  durant  la 
prière,  les  gestes  liturgiques,  le  signe  de  la  croix  ; 
le  XIX^:/:*?  Christ,  centre  de  la  Liturgie  ;  le  XX=  : 
La  Vierge  Marie  dans  la  Liturgie  ;  le  XXI"^  :  le 
culte  des  martyrs,  des  apôtres,  des  confesseurs  et  des 
vierges  ;  le  XXII°  :  la  maison  de  Dieu:  le  XXI ¥*=; 
sanctification  des  éléments  {Veau,  L huile,  le  sel,  les 
cendres,  le  feu  et  les  lumières,  l'encens,  les  cloches). 
Bien  d'autres  chapitres  seraient  à  mentionner. 
Dans  chacun  d'eux,  on  trouvera  lumière  pour 
l'intelligence,  nourriture  pour  l'âme,  réconfort 
pour  le  cœur,  —  sans  compter  que,  des  prières 
antiques  publiées  par  l'auteur  et  des  belles  expli- 
cations qu'il  en  donne,  se  dégage  un  parfum 
d'une  vigueur  et  d'un  charme  tout  particuliers. 

L'ouvrage  de  Dom  Cabrol  a  paru  en  1900  et, 
avant  la  fin  de  la  même  année,  l'éditeur  publiait 
le  troisième  mille.  Rien  n'était  à  changer,  semble- 
t-il,  dans  les  volumes  du  premier  tirage,  sauf  un 
certain  nombre  de  fautes  dans  les  textes  grecs  ; 
la  plupart  ont  été  soigneusement  corrigées  dans 
le  troisième  mille.  —  L'écoulement  si  rapide  de 
la  première  édition  d'un  livre  si  excellent,  sérieu- 
sement conçu  et  fort  documenté,  présage  un 
magnifique  succès  pour  l'ouvrage,  en  même 
temps  qu'il  prouve  que,  dans  notre  société,  en 
apparence  bien  frivole,  se  trouve  encore  bon  nom- 
bre de  personnes  qui  savent  goûter  la  solide  piété 
unie  à  la  vraie  érudition. 

G.  A. 

HISTOIRE  DE  L'ÉGLISE  SAINT-BÉNIGNE 
DE  DIJQN,  par  l'abbé  L.  Chomton,  chanoine  hono- 
raire de  Dijon  et  de  Nantes.  Dijon,  imprimerie  et 
lithographie  JODARD,  MDCCCC.  Un  vol.  in-4°de47o 
pages,  avec  trente  planches  hors  texte. 

Mie  chanoine  Chomton  donne  enfin  au 
public  cet  ouvrage  important,  fruit  de 
longues  années  de  travaux  documentaires  pa- 
tiemment poursuivis  à  la  bibliothèque  publique 
de  Dijon,  aux  archives  départementales,  et 
sans  cesse  contrôlés  par  l'étude  du  monument 
lui-même.  L'œuvre  me  paraît  être  la  plus  consi- 
dérable qui,  depuis  les  anciçns  bénédictins,  ait  été 
publiée  sur  l'histoire  religieuse  de  la  Bourgogne; 


j'ajoute  que  par  la  science  des  textes,  la  méthode,  ' 
le  style  toujours  grave  mais  aisé,  sans  dogma- 
tisme comme  sans  recherche,  le  Saint-Bénigne 
est  digne  de  la  science  bénédictine  ancienne  et 
moderne.  L'auteur  s'y  montre  fidèle  aux  métho- 
des éprouvées  du  passé,  mais  il  sait  aussi  profiter 
de  l'expérience  du  présent,  avec  cette  probité  du 
savant  qui  ne  veut  rien  ignorer  ou  écarter  des 
éléments  de  son  sujet.  Si  le  mot  définitif  avait 
une  signification  absolue  en  ces  matières,  je 
l'emploierais  ici  ;  je  me  contente  d'affirmer  que  i 
les  découvertes  peu  probables,  possibles  après 
tout,  de  l'avenir,  ne  feront  pas  fléchir  les  grandes 
lignes  d'un  tel  livre  ;  que  tout  au  plus  la  mise  au 
jour  de  quelque  document  ignoré  pourra  modifier 
sur  quelque  point  de  détail  une  parole.une  déduc- 
tion, affaiblir  un  anneau  de  l'argumentation  la 
plus  serrée  et  la  plus  libre.  J'insiste  sur  ce  dernier 
point  ;  un  tel  livre,  écrit  par  un  prêtre,  ne  peut  être 
tout  d'abord  qu'un  acte  de  foi.  Mais  ayant  à  dis- 
cuter des  contingences  historiques,  des  traditions, 
des  faits  qui  ne  touchent  ni  au  dogme  ni  à  l'es- 
sence même  de  la  croyance  ;  ne  cherchant  parmi 
les  ténèbres  lointaines  que  la  vérité  ou  cette  demi- 
certitude  qui  en  est  la  seule  image  réelle  en  his- 
toire, M.  le  chanoine  Chomton  a  traité  toutes  les 
faces  de  son  sujet  avec  une  indépendance  d'esprit 
entière  autant  que  respectueuse. 

La  critique  s'exerce  surtout  dans  l'introduction 
consacrée  au  récit  du  martyre  de  S.  Bénigne,  à 
ses  actes,  comme  on  dit  dans  le  langage  ha- 
giographique. Avec  un  sens  très  droit,  l'auteur 
dépouille  la  vie  de  l'apôtre  bourguignon  de  tou- 
tes les  adjonctions  légendaires.  Pour  lui,  l'Au- 
relianus  des  Actes  n'est  ni  Marc-Aurèle  — 
j'en  suis  bien  aise  pour  le  grand  empereur  stoï- 
cien —  ni  ce  rude  soldat  qui  fut  Aurélien  ;  l'Au- 
relianus  du  cycle  bénignien  serait  plutôt  un 
nom  type  que  l'on  retrouve  souvent  dans  les  actes 
généralement  rédigés  vers  le  V*^  siècle.  Peut- 
être  les  déductions  permettent-elles  de  pla- 
cer sous  Caracalla,  pendant  le  fastueux  voyage 
qu'il  fit  dans  les  Gaules,  le  martyre  et  la  mort  de 
S.  Bénigne;  mais,  et  une  telle  modestie  n'appar- 
tient qu'aux  vrais  érudits,  l'auteur  ne  risque  au- 
cune conclusion  positive.  «C'est  agir  sagement, 
dit-il,  c'est  faire  œuvre  de  critique,  que  de  conser- 
ver ces  vieux  documents,  si  défectueux  qu'ils 
soient,  dans  ce  qu'ils  offrent  de  vraisemblable,  et 
d'attendre  que  le  jour  se  lève  sur  ces  ténèbres, 
grâce  à  une  inscription  qui  surgira  du  sol.  Alors, 
peut-être,  aura-t-oii  le  mot  de  l'énigme.  » 

Compris  encore  dans  Y  Introduction,  le  chapitre 
qui  suit  est  intitulé  :  Origines  de  Dijon.  Ce  n'est 
ni  un  récit  continu,  ni  un  tableau  d'ensemble  ; 
divisé  en  sous-chapitres,  ayant  chacun  son  inti- 
tulé, il  se  présente  plutôt  comme  un  assemblage 
de  courtes  monographies  historiques  et  descrip- 


tives conduisant  les  annales  dijonnaises  de  la 
naissance  obscure  et  incertaine  de  Divio  à  la 
réunion  de  la  Bourgogne  à  la  France,  après  l'ex- 
tinction de  la  seconde  race  ducale. 

Le  chapitre  I'^''est  consacré  à  la  Première  basi- 
lique bâtie  au  VI'=  siècle  par  S.  Grégoire,  évêque 
de  Langres,  et  à  la  fondation  de  l'abbaye,  la  se- 
conde en  ancienneté,  la  première  en  dignité  des 
quatre  abbayes  mérovingiennes  de  l'ancien  dio- 
cèse de  Langres.  L'auteur  nous  dit  les  libéralités 
du  roi  Gontran  ;  l'institution  du  Laus pcrennis  ; 
la  consécration  de  l'abbaye  à  S.  Maurice  comme 
second  patron  ;  les  invasions,  les  ruines  maté- 
rielles et  morales,  les  spoliations  princières. Enfin 
il  décrit  d'après  les  documents  cette  ancienne 
basilique  disparue  dont  quelques  vestiges  se 
voient  encore  dans  la  crypte,  un  des  plus  anciens, 
un  des  plus  vénérables  monuments  de  la  France 
du  Nord. 

Au  chapitre  II,  surgit  la  grande  figure  de  l'abbé 
Guillaume  ;  elle  est  très  haute,  très  noble,  faite  à 
la  fois  de  rigueur  et  de  charité,  rigueur  pour  les 
religieux  et  pour  lui-même, surtout  pour  lui-même, 
charité,  douceur  infinie  pour  les  pauvres  et  les 
humbles.  Joignez-y  la  hardiesse  devant  les  prin- 
ces et  les  puissants,  et  vous  aurez  le  portrait  du 
grand  abbé  dont  le  labeur,  l'intelligence  et  la 
vertu  un  peu  âpre  firent  refleurir  non  seulement 
à  Saint-Bénigne,  mais  encore  en  maintes  maisons 
religieuses,  la  pure  règle  de  S.  Benoît  à  demi 
tombée  dans  la  négligence  et  l'oubli. 

L'abbé  Guillaume  fut  le  constructeur  de  la 
seconde  église,  celle  du  XI*'  siècle,  et  de  la  roton- 
de à  trois  étages  dont  un  souterrain,  qui  la  pro- 
longeait à  l'Est. La  restitution  qu'en  donne  M.  le 
chanoine  Chomton  est  aussi  satisfaisante  qu'in- 
génieuse, et  rien  d'aussi  complet  n'a  été  publié 
sur  ce  sujet  jusqu'à  ce  jour. 

Le  chapitre  III  est  consacré  à  Saint-Bénigne 
pendant  la  grande  période  romane  ;  là  paraissent 
deux  des  hommes  les  plus  remarquables  de  l'his- 
toire abbatiale, les  abbés  Halinard  et  Jarenton.De 
grands  travaux  de  construction  furent  exécutés 
dans  cette  période,  notamment  après  l'incendie 
de  Dijon  en  1137  ;jeme  borne  à  signaler  un  fait 
peu  connu,  l'écroulement  de  la  tour  centrale  de 
l'église  vers  1 100,  événement  qui,  avec  des  consé- 
quences plus  graves,  se  reproduira  en  1 271.  Cette 
tour  était  certainement  établie  en  porte-à-faux; 
mais  l'expérience  de  1 100  fut  perdue  pour  les  nou- 
veaux constructeurs  qui  préparèrent  ainsi  une 
nouvelle  catastrophe  ;  du  moins  celle-ci  se  fit- 
elle  attendre  plus  d'un  siècle  et  demi. 

C'est  aux  réfections  auxquelles  donnèrent  lieu 
les  dommages  causés  par  le  grand  incendie  de 
1 137,  que  remontent  le  narthex  qui  prolongea 
d'une  travée  environ  l'église  romane  à  l'Ouest,  et 


Btbltograplîle, 


431 


l'ample  imagerie  du  portail  dont  la  beauté  ne 
nous  est  plus  connue  que  par  une  ancienne  gra- 
vure, mais  est  attestée  par  le  style  ornemental 
des  bases  encore  en  place.  Cette  page  magnifique 
d'art  chrétien,  comparable,  semble-t-il,  à  ce  que 
l'on  voit  de  plus  beau  à  Vézelay,  à  Autun  et  à 
Moissac,  a  été  exterminée  sous  le  proconsulat  ré- 
volutionnaire du  représentant  Bernard  de  Saintes. 
On  a  conservé  du  moins  les  tympans  des  deux 
portes  secondaires,  celle  du  réfectoire,  qui  montre 
une  très  intéressante  représentation  de  la  Cène  et 
celle  du  cloître,  où  l'on  voit  le  Christ  bénissant 
entouré  des  symboles  évangéliques.  Ces  deux 
précieux  morceaux  sont  au  musée  delà  Commis- 
sion des  antiquités  à  Dijon. 

On  lira  avec  intérêt  le  tableau  de  la  vie  mo- 
nastique à  Saint-Bénigne  pendant  cette  période; 
c'est  une  véritable  résurrection,  mais  sans  rien 
d'oratoire.  M.  le  chanoine  Chomton  cherche  la 
vérité,  non  le  pittoresque  et  ce  n'est  pas  un  ro- 
mantique attardé, toujours  porté  à  sacrifier  l'exac- 
titude à  l'effet  des  mots  ou  à  la  couleur.  Le 
chapitre  se  termine  à  la  seconde  chute  de  la 
tour  centrale,  survenue  le  14  février  1271,  et  qui 
consomma  la  ruine  définitive  de  l'édifice  roman. 

Le  I V^  chapitre  a  pour  objet:  L Eglise  ogivale, 
œuvre  de  l'abbé  Hugues  d'Arc.  L'étude  de  ce  mo- 
nument, encore  debout  et  à  peu  près  intact.donne 
à  l'auteur  l'occasion  d'exprimer  ses  idées  sur  l'art 
ogival.  Selon  lui,  les  architectes  du  XIII<^  siècle 
ont  trop  méconnu  la  valeur  des  lignes  horizon- 
tales en  architecture  et  tout  sacrifié  aux  éléments 
vertigineux  en  hauteur.  Il  y  a  du  vrai  dans  cette 
observation  appliquée  à  certains  édifices  où, 
comme  dans  la  cathédrale  de  Beauvais,  le  maître 
de  l'œuvre  a  volontairement  altéré  toute  échelle 
humaine  en  verticale  et  conçu  un  édifice  qui 
paraît  fait  pour  des  êtres  d'autre  taille  que  la 
nôtre.  Mais  des  églises  du  même  style,  notam- 
ment les  cathédrales deStrasbourg  et  deChartres, 
ont  des  proportions  différentes,  et,  comme  ce 
sont,  la  seconde  surtout,  des  chefs-d'œuvre  de 
l'art  ogival,  on  en  peut  conclure  que  l'exagération 
dans  la  verticalité  des  lignes  n'est  pas  inhé- 
rente au  XII h' siècle.  Le  défaut  de  Saint-Bé- 
nigne, selon  moi,  et  c'est  par  là  qu'il  me  paraît 
fort  inférieur  à  sa  voisine  et  aînée, Notre- Dame  de 
Dijon,  est  surtout  dans  ceci  que  les  arcs  prennent 
leur  point  d'appui  beaucoup  trop  haut.  Il  en 
résulte  quelque  chose  de  démesuré,  de  fatigant 
pour  l'œil  dans  les  longues  lignes  rigides  sans 
ressaut,  de  la  croisée.Le  chœur  n'en  est  pas  moins 
un  beau  morceau,  et  il  est  fâcheux  que  le  style 
fléchisse  dans  le  transept  pour  décliner  tout  à 
fait  dans  la  nef.  L'auteur  établit  un  parallèle 
entre  la  cathédrale  Notre-Dame  et  l'église  abba- 
tiale Saint-Nicaise  de  Reims  ;  mais  ici  nous 
sommes  un  peu  dans  le  domaine  des  hypothèses, 


puisque  la  seconde,  <L  la  perle  de  Reims  »,  comme 
on  disait  il  y  a  un  siècle  et  demi,  a  été  détruite 
à  la  Révolution  et  que  la  façade  nous  en  est 
seule  connue  par  l'image  du  grand  portail  qui 
figure  dans  une  gravure  fort  rare  de  1625,  signée 
A^.  de  Son,  Rémois.  Contrairement  aux-  habitudes 
des  dessinateurs  du  temps,  le  style  du  monument 
est  parfaitement  compris  et  nous  pouvons  appré- 
cier pleinement  la  perte  irréparable  qu'ont  faite 
l'art  et  la  ville  de  Reims  par  la  destruction  d'un 
tel  chef-d'œuvre.  On  a  transporté  à  la  cathédrale 
la  pierre  tombale  de  l'architecte,  Hugues  Liber- 
gier,  un  nom  à  mettre  parmi  les  plus  grands  de 
l'art  médiéval,  de  l'art  tout  court. 

M.  le  chanoine  Chomton  décrit  ensuite  la 
châsse  de  S.  Bénigne,  les  modifications  apportées 
au  inartyi'iu/n,en(in  les  tours  de  la  façade  occiden- 
tale ;  Viollet-le-Duc  déclare  celles-ci  d'un  pauvre 
style,  ce  à  quoi  je  ne  contredis  pas  ;  toutefois 
telle  est  la  vertu  de  cet  art  admirable  du  moyen 
âge,  que,  même  dans  ses  œuvres  inférieures,  il  se 
montre  encore  imposant,  monumental  et  noble. 
Sur  la  tour  du  Sud  régnent  deux  frises  dont  l'une 
présente  de  belles  sculptures,  figures  et  feuillages 
stylisés. 

Telle  est  à  Saint-Bénigne  la  pauvreté  orne- 
mentale de  la  nef,  que  l'on  s'est  demandé  si  les 
bénédictins  n'avaient  pas  eu  l'idée  saugrenue, 
et  en  partie  réalisée, d'épurer  leur  église  en  raclant 
soigneusement  toutes  les  saillies,  chapiteaux 
feuillages  et  moulures,  selon  les  doctrines  pro- 
fessées par  l'abbé  Laugier  dans  son  livre,  Oâ- 
servations  sur  V architecture,  Paris,  1765.  Seule- 
ment l'opération  sacrilège  n'aurait  pas  dépassé 
la  nef.  Naguère  le  fait  était  accepté  sans  con- 
testation ;  mais  par  des  raisons  géométrique- 
ment déduites  de  l'étude  du  monument,  l'auteur 
contredit  formellement  M.  l'abbé  Bougaud,  mort 
en  ce  siècle  évêque  de  Laval,  qui,  l'un  des  pre- 
miers, avait  affirmé  le  prétendu  vandalisme  mo- 
nacal. Peut-être  l'absence  de  documents  écrits 
n'est-elle  pas  en  soi  une  preuve  absolument  con- 
vaincante; ce  qui  a  plus  de  force,  c'est  l'étude 
minutieuse,  épidermique  pour  ainsi  dire,  qu'a 
faite  du  monument  M.  le  chanoine  Chomton.  On 
pourrait  dire  aussi  que  cet  aspect  veule,  sucé  des 
moulures,  qui  impressionne  si  désagréablement 
dans  le  beau  vaisseau  de  Saint-Bénigne,  se  re- 
trouve dans  les  baiesdes  tours,qued'autreséglises, 
pauvrement  construites,  présentent  les  mêmes 
misères  ornementales,  par  exemple,  Saint-Jean 
Baptiste  de  Chaumont.  Enfin,  et  ceci  paraît  pé- 
remptoire,  l'œil  des  gens  du  métier  ne  reconnaît 
nulle  trace  de  parties  ainsi  rabotées  ;  sur  ce  point, 
l'examen  auquel  ont  permis  de  se  livrer  les  tra- 
vaux en  cours  d'exécution,  dans  le  collatéral  du 
Nord,  donne  raison  à  M.  le  chanoine  Chomton. 
Je  passe  sur  les  notices  biographiques,  dont  la 


432 


îRebue  lir  T^rt  cl)rétten. 


principale  est  assurément  celle  du  roi  de  Pologne, 
Wladislas  le  Blanc,  mort  sous  le  froc  à  Saint- 
Bénigne,  après  une  vie  qui  serait  un  invraisem- 
blable roman  d'aventures.  Le  temps  me  presse 
et  je  ne  puis  tout  dire  ;  je  mentionnerai  seulement 
des  articles  :  sur  le  trésor,  pour  lequel  l'auteur  fait 
des  emprunts  loyaux  à  un  savant  volume,  publié 
à  Dijon  en  1874,  —  Le  Trésor  de  l'abbaye  St- 
Bénigne  de  Dijon,  —  par  M.  Bernard  Prost,  ins- 
pecteur général  des  archives  et  bibliothèques  ; 
sur  la  vie  littéraire  à  Saint-Bénigne  ;  sur  la  fon- 
dation de  nouvelles  chapelles  ;sur  l'iconographie 
de  St-Bénigne  ;  sur  les  rouleaux  des  morts,  ces 
manuscrits  de  circulation  par  lesquels  les  com- 
munautés religieuses  se  notifiaient  entre  elles  les 
décès  de  leurs  membres  ;  enfin,  sur  les  travaux 
exécutés  à  la  fin  du  XV''  siècle  et  au  commen- 
cement du  XVI«,  dont  le  principal  est  la  flèche 
dorée  que  l'abbé  Claude  de  Charmes  dressa 
au-dessus  de  la  croisée  pour  remplacer,  plus  riche 
et  plus  haute,  celle  que  la  foudre  avait  détruite 
en  1506. 

Le  chapitre  V,  Saint-Bénigne  sous  la  coin- 
viende,  montre  dans  le  premier  des  abbés 
commendataires,  Frédéric  Frégose,  un  prélat 
digne  de  porter  la  crosse  de  l'abbé  Guillaume. 
L'église  lui  dut  une  décoration  importante,  la 
réfection  des  stalles,  œuvre  d'un  menuisier,  c'est- 
à-dire  d'un  sculpteur  en  bois,  originaire  de 
Troyes,  Jean  Boudrillet,  qui  fut  le  maître  et  le 
beau-père  du  Comtois  Hugues  Sambin,  venu  de 
Gray  à  Dijon,  où  il  se  fixa  et  y  devint  l'homme 
universel  dans  les  arts.  Commencées  en  1528, 
terminées  en  1535,  les  nouvelles  stalles  étaient 
«  à  l'antique»  ;  c'est-à-dire  de  ce  goût  charmant 
oîj,  dans  la  plus  heureuse  dissonance,  l'art  con- 
fond les  anciennes  et  les  nouvelles  formes.  Les 
stalles  de  Saint-Bénigne  devaient  donc  être  en 
bois  ce  qu'est  en  pierre  la  partie  inférieure  du 
portail  de  l'église  Saint-Michel  de  Dijon,  œuvre 
très  ornée  et  datée  de  1537,  mais  que  M.  le 
chanoineChomton  attribue  un  peu  témérairement 
à  Hugues  Sambin  qui,  par  les  dates  connues  de 
sa  vie,  comme  par  la  nature  de  son  talent,  est 
un  homme  de  la  seconde  Renaissance  et  non  de 
la  première.  On  peut  admettre  à  la  rigueur  que, 
comme  l'assure  la  tradition,  à  la  vérité  dénuée 
de  toute  preuve  documentaire,  Sambin  soit 
l'auteur  des  tours  de  Saint-Michel  et  de  toute  la 
partie  au-dessus  des  trots  grandes  baies  infé- 
rieures. Mais  celle-ci  est  encore  trop  à  demi  go- 
thique pour  appartenir  à  un  artiste  dont  les 
œuvres  authentiques,  monuments  ou  livres,  sont 
d'un  style  tout  différent. 

Les  guerres  de  religion  amenèrent,  en  1566,  la 
spoliation  du  trésor,  et,  de  par  la  volonté  royale, 
furent  envoyées  à  la  fonte  des  merveilles  faites 
d'un  peu  de  métal  précieux  et  de  beaucoup  d'art. 


Ce  vandalisme  a  sévi  de  tout  temps  en  France 
et  on  sait  quelles  misérables  ressources  financières 
il  a  produites.  Au  commencement  duX\'1 1 'siècle, 
la  bibliothèque  janinienne,  ainsi  nommée  de 
l'abbé  Nicolas  Jeannin,  le  fils  du  grand  ministre 
de  Henri  IV,  et  dont  les  manuscrits  avaient  été 
inventoriés  par  un  érudit  dijonnais,  Paul  Dumay, 
fut  en  partie  dispersée  dans  des  conditions 
demeurées  obscures.  Sous  le  neveu  et  successeur 
de  Nicolas  Jeannin,  Nicolas  de  Castille,  il  fut 
question  de  séculariser  Saint-Bénigne,  qui  serait 
devenu  la  cathédrale  d'un  nouveau  diocèse  dé- 
membré de  celui  de  Langres.  Mais  la  résistance 
de  l'évèque  de  Langres  fit  échouer  la  tentative  ; 
on  se  contenta,  en  1651,  d'introduire  dans  l'ab- 
baye la  réforme  de  Saint-Maur. 

En  1625  la  foudre  avait  détruit  la  flèche  de 
Claude  de  Charmes,  aussitôt  remplacée  par  une 
aiguille  de  style  moderne,  qui  dura  jusqu'au 
17  août  1738.  Renversée  alors  par  un  cyclone, 
on  éleva  une  haute  flèche  ardoisée  d'une  pauvre 
structure,  qui,  avec  des  modifications  assez  mal- 
heureuses, dura  vacillante  jusqu'à  la  fin  du 
XIX<=  siècle.  Le  XVIHe  avait  vu  reconstruire  la 
plus  grande  partie  des  bâtiments  claustraux  et 
réunir  la  mense  abbatiale  à  l'évéché  de  Dijon 
créé  en  1731,  toutefois  sans  diminution  de  la 
conventuelle. 

Le  chapitre  VI,  Saint-Bénigne  et  la  Révolution, 
n'est  pas  moins  intéressant,  mais  toute  cette 
partie  de  l'histoire  du  monument  a  été  fouillée 
dans  ses  profondeurs  et  l'inédit  est  moins  abon- 
dant que  dans  les  autres.  Sans  doute  on  connais- 
sait déjà,  on  n'en  relira  pas  moins  avec  un  amer 
regret  l'histoire  de  la  démolition  de  la  rotonde 
en  1791,  un  des  actes  du  vandalisme  le  plus 
stupide,  le  plus  parfaitement  inutile  que  l'on 
puisse  imaginer.  Disons  pourtant,  à  la  vérité  la 
consolation  est  mince,  qu'il  souleva  l'opposition 
indignée  de  tout  ce  que  Dijon  comptait  alors 
d'hommes  intelligents  et  soucieux  de  la  beauté 
comme  de  la  dignité  de  leur  ville.  Dans  l'église, 
le  jubé,  les  stalles  de  Boudrillet,  les  clôtures  en 
pierre  hérissées  de  pinacles  sculptés  auxquelles 
elles  s'adossaient,  disparurent  sans  laisser  de 
trace  ;  nous  n'en  avons  même  pas  un  dessin. 

Le  chapitre  VII  a  pour  titre  :  U Église  cathé- 
drale. On  y  rencontre  l'histoire  navrante  des 
travaux  de  soi-disant  restauration  dont  le  mo- 
luiment  a  été  la  victime  pendant  le  XIX=  siècle 
presqu'entier.  Sous  l'Empire,  on  accommoda  en 
gothique,  et  quel  gothique!  la  grande  porte  occi- 
dentale exterminée  par  le  marteau  révolution- 
naire ;  mieux  eût  valu  cent  fois,  comme  à  Notre- 
Dame  de  Dijon,  laisser  visibles  les  plaies  faites 
au  monument.  On  y  encastra,  mais  en  l'augmen- 
tant des  deux  côtés,  ce  à  quoi  il  n'a  pas  gagné, 
le  bas-relief  exécuté  en  1720  pour  l'église  Saint- 


Btl)liograpl)ie, 


433 


Etienne  par  le  sculpteur  Jean-Baptiste  Bouchar- 
don,  aidé  de  son  fils  Edme,  alors  âgé  de  vingt- 
deux  ans.  Sous  la  Restauration,  Mgr  de  Bois- 
ville  permit  l'entrée  au  musée  des  deux  retables 
en  bois  sculpté  et  doré  provenant  de  la  Char- 
treuse, et  qui  sont  l'œuvre  du  sculpteur  flamand 
Jacques  de  Baërze  ;  on  sait  que  l'un  d'eux  a  con- 
servé ses  peintures  extérieures  dues  à  Melchior 
Broederlam,  peintre  du  duc  de  Bourgogne,  Phi- 
lippe le  Hardi  ;  au  témoignage  de  M.  Waagen, 
ces  panneaux  sont  l'œuvre  capitale  de  l'art  fla- 
mand, dans  les  toutes  dernières  années  du  XIV^ 
siècle.  En  1857,  sous  le  long  et  exemplaire 
épiscopat  de  Mgr  Rivet,  la  découverte  de  l'étage 
souterrain  de  la  crypte,  où  se  rencontrèrent  les 
restes  du  tombeau  de  S.  Bénigne,  amena  la 
restauration,  aujourd'hui  terminée,  du  sanctuaire 
le  plus  vénéré  de  la  Bourgogne.  Mais  tout  aussi- 
tôt il  fut  irrémédiablement  gâté  par  la  planta- 
tion parmi  la  double  précinction  de  colonnes, 
de  deux  gros  massifs  en  pierre  de  taille,  destinés 
à  supporter  le  poids  de  la  nouvelle  sacristie.  On 
aurait  pu  placer  celle-ci  ailleurs  et  mieux  ;  mal- 
heureusement la  volonté  de  Mgr  Rivet  prévalut 
sur  celle  des  archéologues  et  des  architectes, 
même  sur  celle  de  Viollet-le-Duc. 

La  fin  du  XIX«^  siècle  a  vu  restaurer  encore 
une  fois,  mais  par  des  mains  autorisées  et  sa- 
vantes, celles  de  M.  Charles  Suisse,  architecte 
en  chef  des  monuments  historiques,  le  chœur 
et  les  quatre  piliers  de  la  croisée.  Le  nouveau 
sanctuaire  fut  inauguré  pour  les  fêtes  de  Noël 
1892  ;  à  7  heures  du  soir,  les  ouvriers  besognaient 
encore  pour  achever  la  réédification  du  maître- 
autel  ;  à  10,  les  cloches,  sonnées  à  toute  volée, 
appelaient  à  Saint-Bénigne  le  clergé  et  les  fidèles 
à  l'office  de  minuit.  Quatre  ans  plus  tard  s'élevait 
la  nouvelle  et  belle  flèche  du  transept,  œuvre  de 
M.  Charles  Suisse,  secondé  par  M.  Monduit  de 
Paris,  pour  l'exécution  des  statues  et  de  l'orne- 
mentation en  cuivre  repoussé,  et  par  MM.  Billet, 
charpentier,et  Chaussenot, serrurier, l'un  et  l'autre 
de  Dijon.  L'autel,  si  mal  placé  en  1802  au  centre 
de  la  croisée,  a  été  reporté  dans  la  première 
travée  du  sanctuaire  ;  beaucoup  ont  regretté 
alors  qu'on  ne  lui  eût  pas  rendu  sa  place  primi- 
tive sous  la  rose  feuillagée  qui  réunit  et  scelle 
les  nervures  du  chevet.  On  trouve  aussi  que 
les  belles  boiseries  du  XVII«  siècle  —  et  non  de 
la  Renaissance,  comme  le  dit  par  inadvertance 
l'auteur  —  provenant  de  l'église  cistercienne  de 
la  Charité  près  de  Vesoul,ont  perdu  à  être  divi- 
sées de  manière  à  former  des  panneaux  s'inscri- 
vant  isolés  et  trop  sagement  entre  les  piliers,  au 
lieu  de  former  un  ensemble  continu. 

Il  reste  encore  beaucoup  à  faire  à  Saint- 
Bénigne,  ne  fût-ce  que  pour  la  simple  consolida- 
tion d'un  édifice  dont  les  fondations  ont  été  mal 


établies  aux  XIII^  et  XIV^  siècles  ;  le  collaté- 
ral du  Nord  est  livré  en  ce  moment  aux  ouvriers 
qui,  avec  une  lenteur  prudente  et  sous  la  direction 
de  M.  Charles  Suisse,  opèrent  pièce  à  pièce,  pierre 
par  pierre,  le  remplacement  d'un  appareil  disso- 
cié et  croulant.  Quand  ces  travaux  seront  termi- 
nés, il  restera  à  guérir  la  vieille  église  des  plaies 
que  lui  ont  faites  les  architectes  vandales  de  la 
première  moitié  du  XIX^  siècle,  notamment  aux 
pignons  du  transept.  Dans  celui  du  Sud,  on  aura 
une  inqualifiable  sottise  à  réparer  ;  il  y  a  une 
trentaine  d'années,  en  effet,  alors  qu'était  singu- 
lièrement relâchée  la  tutelle  des  édifices  diocé- 
sains, j'y  ai  vu  apparaître,  à  l'intérieur,  les  restes 
d'une  très  belle  porte  à  feuillages  sculptés  et 
peints.  J'espère  que  les  maçons  se  sont  contentés 
de  voiler,  sans  le  détruire  ce  morceau  qui  était 
dans  le  style  d'une  très  belle  clé  de  voûte  déposée 
aujourd'hui  au  musée  archéologique  et  qui  de- 
vrait reprendre  sa  place  dans  la  chapelle  du 
Saint-Sacrement  oil  elle  est  remplacée  par  un 
misérable  oculus  en  verre  dépoli  ;  je  m'associe 
pleinement,  sur  ce  point  comme  sur  tant  d'autres, 
au  vœu  exprimé  par  l'auteur  qui  est  un  artiste 
autant  qu'un  érudit.  Les  musées  archéologiques 
sont  des  cimetières,  aussi  nécessaires  sans  doute 
que  les  cimetières  d'hommes.mais  où  nousn'avons 
que  les  débris  de  ce  qui  a  eu  corps  et  vie  autre- 
fois, disjecti  inembra  poetae.  Lamartine  n'aimait 
pas  les  musées  tout  court,  et  son  imagination 
sentait  ce  qui  leur  manque  pour  donner  cette 
sensation  artistique  complète  reçue  seulement 
des  objets  demeurés  en  la  place  pour  laquelle 
ils  ont  été  faits.  Sans  aller  peut-être  aussi  loin 
que  le  poète,  on  éprouve  dans  les  musées  archéo- 
logiques cette  impression  un  peu  déconcertante 
que  donnent  les  fossiles  étiquetés  sur  les  tablettes 
d'un  muséum. 

J'en  reviens  au  livre  de  M.  le  chanoine  Chom- 
ton  et  je  conclus  en  disant  que  cette  œuvre  lente 
—  je  prends  ce  mot  dans  le  meilleur  sens,  bien 
entendu  —  est  d'une  science  à  décourager  ceux 
qui  se  mêlent  d'écrire  sur  l'histoire  locale.  Rien, 
ici,  je  l'ai  dit,  d'oratoire,  de  grandiloquent,  de  pit- 
toresque, et  cependant  on  lit  l'ouvrage  entier 
avec  l'intérêt  le  plus  soutenu,  le  plus  captivé. 
Seuls,  peut-être,  les  érudits  purs  et  les  liturgistes 
interrogeront  l'appendice  tout  en  pièces  justifica- 
tives et  en  nomenclatures  établies  de  la  manière 
la  plus  rigoureuse,  qui  ne  comprend  pas  moins 
de  123  pp.;  le  corps  même  du  livre  est  accessible 
à  tous.  En  1892,  lors  de  la  cérémonie  inaugurale, 
j'ai  entendu  ce  cri  jeté  à  la  vue  de  Saint-Bénigne 
restauré  :  «  Je  ne  le  croyais  ni  si  grand  ni  si 
bien  !  »  Eh  bien  !  il  n'est  lecteur  de  cet  excellent 
livre  qui  ne  le  fermera  sans  se  dire  qu'il  ne  croyait 
pas    notre     vieille   abbatiale    si  insigne   par    la 


REVUE   DE   l'art   CHRÉTIEN. 
I901.  —  5"°  LIVRAISON. 


434 


jElcbuc  De  rsâvt  (l)vcticiu 


beauté  et  la  grandeur  des  souvenirs  religieux, 
historiques  et  artistiques. 

Trente  planches  en  lithographie  ou  photogra- 
phie, plans,  restitutions,  vues  perspectives  et  d'en- 
semble, forment  hors  texte  le  complément,  le 
commentaire  graphique  du  texte.  Dans  les  res- 
titutions d'après  les  documents  écrits,  de  ce  qui 
a  péri  sans  retour  et  sans  laisser  de  trace,  il  y  a 
toujours  une  part  d'hypothèse  ;  la  preuve  en  est 
que  les  meilleurs  archéologues  ne  s'entendent 
jamais  sur  la  traduction  par  le  crayon  de  la 
description  la  plus  minutieuse.  Il  en  est  ainsi 
pour  la  Minerve  du  Parthénon,  le  char  funèbre 
d'Alexandre,  la  villa  de  Pline  à  Laurentum,  le 
temple  de  Salomon,  et,  dans  les  temps  chrétiens, 
des  belles  basiliques  détruites,  par  exemple,  celle 
de  Saint-Martin  de  Tours,  je  parle  bien  entendu 
de  la  basilique  mérovingienne.  La  raison  en  est 
très  simple  :  ceux  qui  ont  décrit  ces  œuvres  du 
passé  étaient  des  historiens,  des  lettrés,  non  des 
artistes  et  des  géomètres.  Il  faut  donc  laisser 
une  certaine  part  à  l'imagination  servie  par  l'éru- 
dition, comprendre  surtout  que,  et  c'est  ici  une 
observation  très  générale,  si  notre  conception 
archéologique  des  choses  nous  paraît  meilleure 
que  celle  de  nos  prédécesseurs,  les  érudits  de 
l'avenir  en  auront,  à  coup  sûr,  une  autre,  et  qu'ils 
croiront  meilleure  que  la  nôtre.  A  tout  prendre, 
en  l'état  de  la  science,  j'estime  qu'il  est  difficile 
de  ne  pas  accepter  dans  leur  ensemble  les  resti- 
tutions de  M.  le  chanoine  Chomton  ;  je  fais  bien 
volontiers  abstraction  des  détails  sur  lesquels  on 
peut  formuler  des  réserves.  Ainsi,  je  présenterai 
une  critique  minuscule,  mais  très  nette  au  sujet 
de  la  pi.  XIV,  Le  tombeau  de  saint  Bénigne  de 
1016  à  102S;  la  porte  d'accès  du  viartyrium 
présente  un  linteau  horizontal  beaucoup  trop 
faible  pour  supporter  le  poids  du  plein  au-dessus. 
J'ajoute,  pour  descendre  à  un  détail  infinitésimal, 
que  l'arcature  qui  porte  la  châsse  devrait  être 
extradossée,  ce  que  n'indique  pas  le  travail  du 
crayon.  Dans  la  pi.  XVI,  Le  tombeau  de  saint 
Bénigne  aux  XII'  et  XIII'  siècles,  l'autel  placé 
aux  pieds  est  trop  saillant  et  j'ai  des  doutes  sur  le 
gradin  portant  le  Crucifix  entre  deux  fîambeaux. 
J'en  ai  également  sur  cette  succession  de  gables  à 
trilobés  en  plein  cintre,  qui  orne  le  coffre  même, 
de  la  châsse.  Ce  sont  là  des  minuties,  et,  en  défi- 
nitive,je  suis  heureux  de  pouvoir  dire  que  l'exécu- 
tion des  dessins  inspirés  de  près  par  M.  le  cha- 
noine Chomton,  fait  honneur  à  M.  Louis  Chapuis, 
de  Dijon.  L'ensemble  constitue  une  véritable 
monographie  monumentale  de  Saint-Bénigne  à 
travers  les  âges  ;  toutefois,  je  regrette  de  ne  pas 
y  rencontrer  le  beau  tympan  de  la  porte  du 
cloître,  le  Christ  entouré  des  symboles  évangé- 
liques,  et  la  clé  de  voûte,  au  feuillage  poly- 
chrome, dont  il  a  été  parlé  plus  haut.  Par  contre. 


voici,  pi.  XVII,  celui  du  réfectoire,  dans  lequel 
M.  Edouard  Didron,qui  connaît  si  bien  dans  ses 
profondeurs  l'iconographie  du  moyen  âge,  voit 
une  des  plus  précieuses  et  des  plus  anciennes  re- 
présentations qui  existent  de  la  Cène  dans  la 
sculpture  occidentale.  J'appelle  aussi  l'attention, 
même  page,  sur  la  tête  mutilée  de  saint  Bénigne  ; 
c'est  tout  ce  qui  subsiste  de  la  statue  du  trumeau 
de  la  porte  occidentale,  et  par  la  grandeur  du 
style  on  peut  rapprocher  ce  morceau  de  certaines 
statues  de  Chartres,  au  porche  septentrional  ; 
elles  sont  de  la  même  époque,  c'est-à-dire  des 
dernières  années  du  XII^  siècle. 

Il  me  reste  à  parler  de  la  présentation  typo- 
graphique de  tous  points  excellente.  Iinprimé 
en  beaux  caractères  sur  deux  colonnes,  le  texte 
est  la  perfection  même  et  fait  honneur  à  la 
maison  Jobard,  de  Dijon,  à  qui  appartient  aussi 
l'impression  lithographique  des  dessins  de 
M.  Louis  Chapuis. 

Henri  Chabeuf. 


L'ARTE  DI  BENVENUTO  GELLINI.  par 
J.  B.  SupiNO,  conservateur  du  Musée  national  du 
Bargelio.  —  Florence,  Alinari,  éditeur,  igoi. 


B' 


ENVENUTO  Cellini  est  l'un  des  artistes 
italiens  dont  on  parle  le  plus...  sans  con- 
naître ses  ouvrages,  sauf  le  Persée. 

Comme  sculpteur,  il  a  fait  le  Persée  très  discu- 
table, deux  bustes  et  la  nymphe  dite  de  Fontai- 
nebleau conservée  au  musée  du  Louvre. 

Comme  orfèvre,  il  a  fait  une  quantité  de  pièces, 
toutes  perdues  sauf  sa  salière  du  trésor  de  Vienne, 
très  discutable  aussi. 

Cela  n'empêche  pas  qu'on  le  proclame  le  roi 
des  orfèvres  du  XVI^  siècle  ! 

De  ses  dessins  il  n'en  reste  pas  un  seul. 

A  quoi  donc  tient  cette  étonnante  popularité  ? 

D'abord  aux  propres  écrits  de  Cellini  dans 
lesquels  il  a  su,  comme  personne,  se  tailler  une 
réclame. 

Puis  à  ses  aventures,  fort  peu  édifiantes  du 
reste. 

Puis  aux  poésies,  aux  drames,  aux  images  qui 
l'ont  pris  pour  objet. 

Mais,  enfin,  un  orfèvre  qui  a  reçu  des  com- 
mandes des  papes,  des  rois,  des  patriciens,  devait 
certainement  être  de  premier  ordre  dans  son 
art,  on  ne  peut  en  douter. 

Après  d'autres  écrits  sur  Benvenuto  Cellini, 
M.  J.  B.  Supino  vient  de  publier  un  nouveau 
travail  chez  M.  Alinari,  qui  ne  se  contente  pas 
d'être  le  premier  photographe  de  l'Italie,  mais 
qui  prend  rang  parmi  les  premiers  éditeurs  de 
livres  d'art  de  son  pays. 


Btbliosrapl)ie. 


435 


L'érudit  M.  Supino  met  au  point  juste  la 
personnalité  de  Cellini,  comme  homme  et  comme 
artiste. 

Il  l'a  fait  avec  compétence  et  indépendance, 
sans  l'ombre  d'adulation. 

Il  a  annexé  au  volume  l'inventaire  inédit  de 
VArgenteria  de  \di  gitarda  robe  du  grand-duc  de 
Toscane,  François  I",  dressé  en  1587,  en  ne 
mentionnant  que  les  pièces  ayant  un  caractère 
d'art. 

Dans  la  nomenclature  il  n'y  a  rien  de  Ben- 
venuto  Cellini,  ce  qui  montre  une  fois  de  plus 
qu'aucun  des  objets,  intéressants  du  reste,  con- 
servés dans  \' Argeiiieria  du  Palais  Pitti,  n'est 
de  lui  ;  ils  proviennent  d'orfèvres  italiens  et 
allemands  qui  probablement  ont  été  inspirés  par 
l'œuvre  de  Benvenuto  Cellini. 

Gerspach. 

le  salairk  dk  la  trahison  de  judas. 
LE  CRUCIFIX.  —  Broch.,  Imprimerie  marseillaise, 
igoi. 

L'AUTEUR  anonyme  de  cette  plaquette  est 
pénétré  de  l'idée,  que  trente  deniers  auraient 
constitué  un  salaire  insuffisant  pour  la  trahison 
de  Judas,  étant  donnée  la  rapacité  probable  de 
riscariote  et  l'opulence  des  Juifs  acharnés  contre 
le  Sauveur.  Il  s'efforce  d'établir  que  les  deniers 
traditionnels  doivent  avoirétédes  talents  d'argent. 
Il  accumule  autour  de  cette  thèse  quantité  d'argu- 
ments tendancieux, dont  aucun  n'est  péremptoire. 
Le  principal  est  faux  :  on  se  sera  trompé  sur  la 
valeur  du  prétendu  denier,  puisqu'on  s'est  trompé, 
à  la  Renaissance,  sur  la  figuration  du  crucifiement. 

Le  Saint-Voult  nous  est  témoin,  dit  l'auteur, 
que  le  Christ  fut  mis  en  croix  vêtu  de  la  tunique  ; 
ce  n'est  qu'à  la  Renaissance  qu'on  a  supprimé  la 
tunique. 

Rien  de  tout  cela  ne  se  tient.  A  part  le  type 
exceptionnel  du  Saint-Voult,  les  crucifix  les  plus 
anciens  offrent  le  colobium  ;  dès  l'époque  romane 
apparaît  \ç.  perizoïiiiun  ;  la  Renaissance  n'a  rien 
innové  quant  au  costume. 

La  question  du  denier  reste  entière  ;  l'auteur 
ne  semble  pas  l'avoir  avancée  d'un  pas  (').  Toute- 
fois son  opinion  paraît  très  plausible.  Elle  a  déjà 
été  développée,  et  d'une  manière  beaucoup  plus 
probante,  par  M.  F.  de  Villenoisy  {-),  dans  un 
travail  qu'il  aurait  dû  consulter,  ainsi  que  les 
études  de  M.  de  Mély  (3)  et  de  Mgr  X.  Barbier  de 


Montault. 


L.  C. 


1.  A  signaler  une  erreur  grossière  de    calcul,  p.  21  :1a  drachme 
vaut  94  centimes,  donc  7000  drachmes  valent  près  de  7000  francs. 

2.  Le  dciiier  de  Judas  du  Couvent  des  Capucins  d' Enghien.   Con- 
grès archéol.  d' Enghien,  Enghien,  Spinet,  1900. 

3.  V.  la  Revue  de  Numismatique  et  les  Bulletins  de  la  Société  na- 
tionale des  Antiquaires  de  France. 


LE   MOBILIER  D'ART   DU    VAL-DIEU.  Mor- 
tagne,  G.  Meaux,i9oi.  —  EXCURSION  ARCHÉO- 
LOGIQUE A  BELLÊME,  par  l'abbé  A.  desvaux. 
Alençon.  A.  Manier,  1900- 

Dans  la  première  de  ces  brochures,  M.  le 
curé  de  Verrières  fournit  des  renseignements 
inédits  sur  la  Chartreuse  du  Val-Dieu  et  son 
mobilier  ;  il  fait  notamment  l'histoire  du  taber- 
nacle exécuté  par  le  sculpteur-ciseleur  L.  F. 
Laytié  de  Paris. 

La  seconde  décrit  les  antiquités  des  environs  de 
Bellêmeen  Perche,  la  chapelle  romane  de  Saint- 
Sanctin,  alias  Notre-Dame  du  Vieux-Château, 
l'église  Saint-Sauveur,  édifice  du  XVI*=  siècle, 
le  donjon  deBellême,  la  collégiale  de  Saint-Léo- 
nard, etc. 

Ces  deux  notices,  fort  bien  écrites,  montrent 
une  fois  de  plus  combien  les  ecclésiastiques  éru- 
dits  peuvent  recueillir  autour  d'eux  en  province 
de  précieux  renseignements  archéologiques. 

L.  C. 

TRAVAUX  EXÉCUTÉS  PAR  DU  RIF,  MAI- 
TRE SCULPTEUR,  DANS  LES  SALLES  DU 
COUVENT  DES  GRANDS  AUGUSTINS  (Paris. 
1734),  par  F.  Mazerolle  —  Paris,  Pion,  1900. 

Millin  avait  dit  quelques  mots  des  embellisse- 
ments apportés  aux  salles  du  couvent  des  Grands 
Augustins  affectées  par  Henri  JVà  l'Ordre  du 
Saint-Esprit,  et  depuis  à  des  réunions  du 
Parlement  et  de  la  Chambre  des  Comptes.  Notre 
collaborateur  fournit  sur  ces  travaux  d'art  des 
détails  précis  ;  il  a  été  assez  heureux  pour  décou- 
vrir le  nom,  jusqu'à  présent  inconnu,  de  l'artiste 
qui  enrichit  de  sculptures  la  salle  des  chevaliers. 

L.  C. 


LES  RUES  DE  ROMANS.  FRAGMENTS 
HISTORIQUES.—  LES  CONSULS  DE  ROMANS, 
par  U.  Chevalier. 

Ces  pages  d'histoire  et  d'archéologie  locale,  que 
publie  un  érudit  très  connu  de  nos  lecteurs,repré- 
sentent  l'accumulation  de  très  multiples  notes  et 
documents  récoltés  à  la  longue,  comme  peut  seul 
le  faire  un  patient  chercheur  amoureux  d'une 
vieille  cité.  Pareil  ouvrage  se  prête  mal  à  l'ana- 
lyse, mais  il  mérite  d'être  signalé  comme  un  des 
meilleurs  parmi  ceux  qui  transmettront  à  la 
postérité  la  connaissance  du  passé  de  nos  villes 
anciennes.  Il  contient  une  multitude  de  données 
sur  les  rues,  les  abbayes,  les  églises,  les  monu- 
ments civils,  les  fortifications,  les  corporations, 
ainsi  que  sur  les  institutions  et  les  usages  de 
Romans. 

L.  C. 


436 


ÎRebue  lie  V^vt  cbrétten» 


HISTOIRE   DES  BEAUX-ARTS  EN    TRENTE     | 
CHAPITRES,    par    Paul  Rouaix.  2  volumes  in-S" 
carré  contenant   490  gravures.  Broché,  15  fr.  Relié, 
18  fr.  H.Laurens,  Paris,  1901. 

Ces  deux  beaux  volumes  constituent  un  traité 
substantiel  et  des  plus  instructifs.  Ils  témoignent 
d'une  vaste  érudition  ;  ils  renferment  une  mine 
de  renseignements.  La  matière,  très  condensée, 
est  présentée  sous  une  forme  élégante,  parfois 
originale  et  très  personnelle. 

Le  sujet  est  redoutable  par  son  étendue  et  sa 
profondeur.  Félicitons  l'auteur  de  s'être  tiré 
avec  certain  succès  d'une  tâche  aussi  considéra- 
ble. Son  livre  mérite  d'être  loué  et  recommandé, 
mais  non  sans  réserves.  Notre  rôle  de  critique 
sincère  nous  oblige  à  en  indiquer  les  défectuosi- 
tés ;  qu'on  veuille  toutefois  ne  pas  mesurer  l'im- 
portance de  nos  observations  à  la  longueur 
inévitable  de  leur  exposé. 

Le  second  volume,  consacré  à  la  Renaissance 
et  à  l'époque  moderne,  est  surtout  attachant  ;  l'au- 
teur s'y  meut  à  l'aise  dans  des  questions  qui  lui 
sont  familières.  Mais  le  premier  offre  des  parties 
faibles,  d'autres  trop  touffues  ;  on  voudrait  plus 
d'ordre,  plus  de  méthode  et  des  subdivisions  plus 
nettes  des  chapitres. 

Il  y  en  a  trente,  tous  de  24  pages.  Pour  l'his- 
toire, en  réalité  si  peu  artistique,  des  silex  taillés 
et  autres  monuments  préhistoriques,  qui  forme 
le  premier,  c'est  trop  ;  c'est  trop  peu  pour  le 
grand  art  égyptien,  embrassant  toute  l'antiquité, 
qui  vient  ensuite.  Encore  ce  chapitre  trop  court 
est-il  bourré  de  notions  mythologiques  vague- 
ment relatives  à  l'art,  dont  le  sujet  principal 
ne  se  dégage  guère.  On  s'attarde  à  l'histoire  des 
découvertes  ;  on  glisse  sur  des  notions  essentielles, 
comme  le  culte  des  morts,  l'influence  des  castes, 
les  types  primordiaux  de  la  construction  en 
limon.  On  mentionne  a  peine  la  prestigieuse 
décoration  polychrome,  on  ne  parle  même  pas 
des  syringes.  L'architecture,  qui  domine  l'art  des 
Pharaons,  n'est  l'objet  d'aucune  description  ;  ce 
qu'on  en  dit  est  contestable  (').  L'hiératisme  est 
expliqué  seulement  par  cette  raison  :  «  l'art 
égyptien  est  une  écriture  »,  explication  ingé- 
nieuse, mais  qui  n'est  pas  la  principale. 

Le  chapitre  Assyrie  appelle  des  remarques 
semblables  ;  après  l'avoir  parcouru,  le  lecteur,  qui 
n'aurait  à  sa  disposition  que  cet  ouvrage,  n'aurait 
aucune  idée  concrète  du  palais  de  Khorsabad, 
pas  plus  que  le  précédent  chapitre  ne  lui  permet 
de  se  figurer  le  temple  de  Karnak.  Énormément 

I.  Est-il  vrai  que  la  pyramide  égyptienne  procède  du  tumulus  ? 
(p.  9)...  que  l'obélisque  soit  un  pilier...  une  colonne  ?  (le  pilier  et  la 
colonne  sont  dos  itifif'Or/s),  qna  les  pylônes  soient  des  pyramides 
tronquées?  (géométriquement,  oui;  au  point  de  vue  structural, 
erreur.) 


de  détails  instructifs,  mais  aucun  exposé  large 
donnant  des  vues  d'ensemble.  On  n'insiste  pas 
assez  sur  l'allure  caractéristique  des  murs  en 
briques  plats  et  crénelés,  décorés,  ni  surtout  sur 
le  talent  des  sculpteurs  assyriens  comme  ani- 
maliers. 

Nous  pourrions  faire  des  observations  analo- 
gues sur  les  chapitres  relatifs  à  la  Perse  et  à 
l'Inde.  Le  suivant  :  Chine  et  Japon,  au  contraire, 
loin  de  sentir  la  compilation,  est  un  travail  ori- 
ginal d'un  grand  intérêt,  à  tel  point  que  nous 
croyons  bien  faire  de  le  résumer  pour  nos  lec- 
teurs. 

La  Chine  est  la  préface  du  Japon,  —  ce  que  l'E- 
gypte est  à  la  Grèce.  La  chronologie  est  précise, 
mais  suspecte.  Des  systèmes  religieux  successifs 
se  sont  implantés  et  ont  coexisté  ;  ils  ne  donnent 
guère  de  critérium  pour  le  classement  ;  ils  n'in- 
téressent que  par  leur  iconographie,  qui  forme 
le  fond  hiératique  de  l'art  sino-japonais.  Les 
sectes  de  Confucius  et  de  Lao-Tsé  datent  du 
Vis  s.  avant  notre  ère  et  sont  purement  chinoises 
d'origine.  La  troisième,  le  bouddhisme,  importée 
de  l'Inde  vers  la  fin  du  P'' siècle  de  l'ère  chré- 
tienne, fleurit  surtout  au  VI''.  Bouddha  s'appelle 
Fo  en  Chine,  Bouts  au  Japon. 

C'est  de  Lao-Tsé  que  sort  l'émancipation  de 
l'art  dans  le  sens  de  la  vérité  et  le  courant  japo- 
nais. 

Il  y  a  tout  un  olympe  du  bibelot  qui  domine 
l'art  sino-japonais.  Le  grand  n'y  est  que  l'ampli- 
fication du  petit.  La  maison  même  est  une  sorte 
de  meuble  laqué  de  grandes  dimensions.  Dans 
l'œuvre  d'art  le  détail  l'emporte,  se  juxtaposant 
à  un  autre  détail. 

La  faune  symbolique  a  pour  principaux  types 
Fo,  le  chien  de  Bouddha,  et  le  dragon  hérissé, 
contorsionné,  furieux,  qui  se  démène  parmi  des 
nébules.  Il  faut  y  ajouter  le  phénix,  la  licorne  et 
la  tortue  à  large  queue.  Parmi  les  ornements 
purs  la  grecque  domine. 

Le  Chinois  enferme  l'art  dans  la  permanence 
routinière  des  traditions  et  des  décors  consa- 
crés. Les  arts  décoratifs  et  l'architecture  ont  leur 
protocole  comme  le  costume.  La  construction 
privée  ne  sort  pas  d'un  type  à  peine  varié  par  la 
position  sociale  de  l'habitant. Toujours  petite,  elle 
se  distingue  par  une  légèreté  peut-être  due  à 
l'instabilité  du  sol  et  par  une  régularité  dissymé- 
trique. Une  sorte  de  balcon  bas  s'abrite  sous  la 
saillie  de  la  toiture  soutenue,  sans  architrave,  par 
un  nombre  réglementaire  de  poteau.x.  L'angle 
droit  des  raccords  est  égayé  par  un  motif  ajouré. 
Le  toit,  un  peu  lourd,  infléchi,  est  couvert  de 
tuiles    brillantes,    hérissé  de  bêtes  fantastiques 


Btbliograpl)te. 


437 


au  faîte  et  aux  arêtiers.  Rarement  il  y  a  un  étage. 
Les  maisons  se  groupent,  ou  s'isolent  dans  des 
jardins  tout  en  courbes  et  en  bosses,  garnis  de 
ponts  minuscules  et  de  kiosques. 

Si  les  palais  sont  grands,  ce  n'est  que  par 
juxtaposition,  ou  superposition.  Le  palais  est  un 
temple  ;  il  prend  l'allure  de  la  pagode  indoue. 
Aux  XI>^  et  XI 1=  s.,  les  empereurs  se  passionnent 
pour  les  tours  hautes  de  lOO  et  même  de  130  m., 
et  surmontées  d'un  kiosque.  Elles  ont  été  dé- 
truites. La  plus  célèbre  fut  la  tour  de  porcelaine 
élevée  au  XV'ï  s.  et  détruite  vers  1860.  Chacun 
des  huit  étages  avait  son  toit. 

La  plupart  des  temples  chinois  sont  disposés 
à  l'instar  des  pagodes  bouddhiques  de  l'Inde,  mais 
contiennent  des  constructions  dans  le  style  des 
maisons  chinoises;  point  de  dômes.  On  y  accède 
par  des  portiques  et  par  un  pont.  L'autel  est  une 
pyramide  remplaçant  le  dagouba  en  dôme.  Les 
temples  sont  précédés  de  portiques,  tout  en  sur- 
face, sans  épaisseur,  souvent  en  bois. 

Les  monuments  funéraires  sont  des  pyramides 
ou  des  sortes  de  dagoubas;  sur  un  tertre  arrondi 
se  dresse  une  espèce  de  balustre;  l'ensemble  a  la 
silhouette  d'une  carafe. 

Les  Chinois  connurent  la  voûte  ;  ils  em- 
ployèrent l'arcade  dans  les  ponts. 

La  sculpture  monumentale  n'existe  pas  en 
Chine,  sinon  à  l'état  barbare.  La  peinture  est 
purement  décorative,  et  là  est  le  triomphe  de 
l'art  chinois,  surtout  dans  le  décor  céramique. 

Les  Japonais  sont  autrement  artistes  que  les 
Chinois.  Ils  se  sont  approprié  les  habiletés  tech- 
niques de  ceux-ci.  Ils  possèdent  le  métier,  sans 
être  possédés  par  lui. 

Le  Japonais  est  éloigné  de  l'idéal  grec,  au  type 
général  et  symétrique  entièrement  équilibré.  Il 
aime  le  beau  particulier,  occidental,  pittoresque  et 
la  nature.  Sa  mythologie  s'harmonise.  Aux  sept 
dieux  bons  enfants  s'ajoute  le  symbole  de  la 
patrie,  le  Fushi-Jarna,  le  mont  sacré,  occupant 
le  fond  des  tableaux,  donnant  sa  forme  aux 
objets. 

Néanmoins,  la  sculpture  japonaise  est  faible  ; 
elle  n'a  guère  que  ses  masques  de  théâtre,  réa- 
listes et  grimaçants.  Le  métal  est  travaillé  avec 
une  prodigieuse  habileté.  La  céramique  est  plus 
variée,  plus  artistique  qu'en  Chine,  dans  ses  dif- 
férentes espèces,  qui  sont  le  Kanga  (décor  rouge 
et  or  sur  fond  crème),  l'Imari  (décor  bleu,  rouge 
et  or  sur  fond  blanc),  l'Ovari  (décor  bleu  sur 
fond  blanc),  le  Satsouma  (multicolore  sur  crème), 
la  plus  belle  céramique  japonaise.  Le  décor 
abonde  en  bestioles  parmi  les  branches  fleuries 
de  chrysanthème.  L'ornement  linéaire  comprend 
des  flots  superposés    comme   des   écailles,    des 


grecques  répandues  en  labyrinthes.  L'art  est 
propagé  par  des  albums  et  des  Kakémonos.  La 
peinture  décorative  égale  la  nôtre  par  certains 
côtés,  surtout  dans  le  rendu  des  animaux. 

Parmi  les  artistes  trois  noms  caractérisent  et 
résument  l'art  japonais  récent:  Outomaro  (1754- 
1806),  le  dessinateur  de  genre,  Horoshigué  (1797- 
1858),  le  paysagiste,  et  surtout  Hokousai  (1760- 
1849),  le  peintre  poétique  de  la  nature. 

Mais  reprenons  notre  rôle  de  critique. 

Avec  l'architecture  grecque,  M.  Rouaix  «  entre 
dans  la  Beauté  »  et  son  allure  s'en  ressent;  il 
nous  donne  un  chapitre  bien  composé,  vraiment 
didactique.  Regrettons  l'absence  d'une  vue  d'en- 
semble du  trésor  d'Atrée,  et  surtout  du  plan  par 
terre  du  Parthénon,  et  ne  chicanons  pas  sur  des 
erreurs  de  détail  ('). 

Deux  mots  à  propos  des  Étrusques.  On  ne 
peut  plus  dire  aujourd'hui  que  les  Étrusques  ont 
peut-être  inventé  la  voûte;  n'est-ce  pas.'  (v.  p.  198) 
Il  est  constant  qu'elle  existait  déjà  sous  l'ancien 
empire  égyptien.  Depuis  les  fouilles  effectuées,  en 
1900,  au  Forum  romain,  il  est  au  moins  douteux 
que  la  voûte  que  les  ciceroni  indiquent  le  long  de 
la  basilique  Julienne  comme  étant  une  partie  du 
cloaca  inaxinia  remonte  aux  Etrusques.  L'aque- 
duc des  Tarquins  est  sans  doute  celui  qu'on 
a  récemment  découvert  et  qui  traverse  oblique- 
ment le  forum  (ibid.).  Nous  n'admettons  pas  que 
les  Romains  aient  tiré  du  principe  de  la  voûte 
«  tout  ce  qu'on  pouvait  en  tirer  ».  Alors  il  faut 
biffer  la  construction  médiévale!  Il  est  vrai  que 
l'auteur  en  fait  bon  marché,  comme  on  le  verra 
plus  loin. 

Des  chapitres  notablement  insuffisants  sont 
ceux  qui  sont  réservés  à  X Art  chrétien.  Dès  la 
seconde  page  se  rencontre  une  expression  impar- 
donnable à  un  lettré  de  la  valeur  de  M.  Rouaix; 
nous  lisons  «  les  illettrés,  les  pauvres  d'esprit 
n'ont  point  de  culture  intellectuelle.  »  (Il  s'agit 
des  esclaves  et  des  barbares)  ;  les  bienheureux 
de  l'Évangile  ne  sont  pas  ce  que  l'auteur  pense. 
D'autre  part,  le  témoignage  prophétique  des 
Sybilles  n'est  pas  si  méprisable  qu'il  le  croit.  Mais 
ce  qui  mérite  une  vive  protestation  de  notre  part, 
c'est  cette  allégation  étrange  :  «  Pour  le  chris- 
tianisme primitif,  Jupiter,  Vénus,  Apollon  et  les 
autres  dieux  païens  existaient  réellement,  étaient 
puissants.  »  Ce  que  dit  M.  Rouaix  du  type  pri- 
mitif du  Christ  est  à  négliger  ;  il  est  mal  informé. 


I.  Le  coin  d'entablement  de  la  fig.  9  ne  peut  pas  provenir  du  mo- 
nument de  Lysicrate,  qui  n'a  pas  de  coin. Comment  peut-on  trouver 
«  inintelligible  »  l'origine  des  volutes,  et  nommer  leur  combinaison 
un  «  baudrier  »  ?  (p.  20).  N'est-ce  pas  une  erreur  de  dire  «  une  statue 
QXi  ckryst'Uphantiiie  (p.  12-1S0,  p.  16-184  et  p.  19-187).  Le  mot  est 
d'ailleurs  employé  comme  adjectif  à  la  p.  218,  conmie  substantif  trois 
lignes  plus  loin,  mais  dans  un  troisième  sens. 


438 


ISitWt  lie  rart  tfjrétten. 


Il  est  inexact  encore  quand  il  assure  que  les 
caractères  de  la  basilique  primitive  sont  devenus 
méconnaissables  à  travers  les  transformations 
ultérieures  :  n'avons-nous  pas  encore  le  type 
fidèle  du  premier  siècle  dans  St-Paul-hors-les- 
murs,  dans  St-Clément,  dans  Ste-Marie  in  Cos- 
medin?  —  Quand  on  écrit  une  histoire  générale 
des  Beaux-Arts,  on  ne  peut  faire  fi  de  l'architec- 
ture au  point  de  passer  sous  silence  le  rôle  de  la 
voûte  sphérique  sur  pendentifs,  qui  fut  l'âme  des 
grandes  ordonnances  des  styles  byzantin  et 
musulman.  L'auteur  semble  étranger  à  cette 
révolution  technique,  qui  créa  un  abîme  entre  la 
pesante  coupole  du  Panthéon  romain  et  les  har- 
diesses des  coupoles  orientales.  Il  est  trop  in- 
juste envers  le  style  byzantin,  dont,  par  contre, 
M.  Gosset  est  trop  épris,  selon  nous. 

Du  style  roman,  avec  ses  enfantements,  ses 
progrès  admirables  qui  préparent  tout  l'art  mo- 
derne, M.  R.  ne  voit  que  l'apparence  superfi- 
cielle. L'évolution  du  plan,  les  développements 
rationnels  du  chœur,  ses  accroissements  logiques, 
l'adjonction  du  déambulatoire,  l'épanouissement 
des  absidioles,  tout  cela  lui  semble  des  anoma- 
lies, «  une  moitié  du  temple  plaquée  sur  l'autre,.. . . 
une  foule  de  chapelles  qui  sortent  de  l'église,  en 
crèvent  les  murs....  »  Il  ignore  la  merveilleuse 
genèse  de  la  croisée  d'ogives,  ou  la  croit  indigne 
d'être  esquissée. 

Passons  l'intéressant  chapitre  de  l'art  musul- 
man, qui  est  fort  réussi  et  arrivons  à  l'architec- 
ture gothique.  L'auteur  exprime  éloquemment 
l'importance  absorbante  de  l'église.  Il  exagère 
toutefois,  quand  il  avance  que  tout  s'y  fait,  que 
la  communauté  y  délibère,  qu'on  y  conserve 
jusqu'aux  contrats  de  vente.  C'est  du  Viollet-le- 
Duc  outré.  S'occupant  de  l'origine  du  style 
ogival,  il  en  est  encore  à  prendre  l'arc  brise 
(improprement  appelé  ogive)  comme  un  des 
principes  générateurs  du  style  ;  il  définit  le  cintre, 
à  la  page  322,  en  dix  lignes  de  charabias.  Il 
ajoute,  il  est  vrai,  qu'il  ne  faut  pas  voir  seulement 
dans  le  cintre  des  baies  la  caractéristique  du 
style;  mais  il  n'indique  pas  un  autre  facteur  de  la 
transformation  radicale  qui  signale  l'époque  go- 
thique. Il  ne  s'occupe  pas  des  voûtes,  qui  sont  le 
pivot  du  système  de  construction  d'alors  ;  même 
il  confond  (p.  324)  /a  croisée  d'ogives  avec  la 
croisée  du  transept;  c'est  très  curieux  !  Il  croit  de 
bonne  foi  que  c'est  à  Morienval  que  s'est  ren- 
contré le  premier  «  arc  brisé  ». 

Nous  ne  suivrons  pas  l'auteur  dans  le  second 
volume,  où  il  est  mieux  sur  son  terrain  et  ne 
mérite  guère  que  des  éloges.  Cette  principale 
portion  de  son  œuvre,  très  substantielle,  très 
documentée,  constitue  un  résumé  utile  à  la 
vulgarisation  du  développement  de  l'art  moderne 
et  contemporain. 


Une  dernière  critique  :  les  gravures  sont  mé- 
diocres et  peu  adéquates  au  texte. 

L.  Cloquet. 


LOUIS  COURAJOD.  LEÇONS  PROFESSEES 
A  L'ÉCOLE  DU  LOUVRE  (1887-1896),  publiées 
par  MM.  H.  I.emonnier  et  A.  Michel.  //  Origines 
de  la  Renaissance.  —  In-8°,  687  pp.  Paris,  Picard, 
1901. 

Nous  n'avons  plus  à  faire  l'éloge  du  sympa- 
thique et  chaleureux  conférencier  que  l'École  du 
Louvre  a  perdu,  et  qui  avait  donné  une  allure 
presqu'émouvante  à  son  enseignement,  par  la 
hardiesse  et  la  nouveauté  de  ses  idées  émises  et 
la  chaleur  de  ses  exposés.  Nous  sommes  de  ceux 
qui  avons,  dès  le  début  de  son  enseignement, 
suivi  celui-ci  avec  le  plus  vif  intérêt,  et  adhéré 
à  plusieurs  de  ses  idées  quelque  peu  révolution- 
naires. Nous  nous  bornerons  à  résumer  le  second 
volume  de  ses  leçons,  comme  nous  avons  fait 
du  premier. 

Nous  avons  les  premiers  fait  connaître  la 
matière  des  leçons  qui  ont  pour  objet  les 
origines  de  la  Renaissance  en  France  aux  XIV<= 
et  XV''  siècles,  d'après  des  épreuves  que  l'écrivain 
avait  eu  la  bonté  de  nous  communiquer.  Courajod 
a  montré  que  la  Renaissance,  qu'on  faisait  com- 
mencer au  XV  fs  siècle,  doit  être  reportée  à  cet 
instant  de  l'histoire  où,  aux  spéculations  imma- 
térielles, aux  idées  mystiques  et  chevaleresques, 
succèdent  la  curiosité  de  la  nature,  l'analyse 
sceptique  des  choses,  le  goût  des  palpables  réa- 
lités. Un  élément  nouveau  s'est  introduit  au 
cœur  de  la  France;  Paris  est  devenu  le  centre 
artistique  où  l'influence  flamande  est  puissante  ; 
le  naturalisme  de  l'école  du  Nord  prend  racine 
dans  la  capitale,  encouragé  par  la  cour  des 
^Valois  ;  le  portrait  est  sa  préoccupation.  C'est 
l'aurore  d'une  ère  nouvelle,  qu'on  n'avait  voulu 
saluer  que  dans  son  plein  Midi,  lequel  s'est 
appelé  la  Renaissance.  L'individualisme  et  le 
naturalisme  régnent  presque  sans  partage  dans 
la  seconde  moitié  du  XVI'=  siècle.  C'est  la  renais- 
sance franco-flamande,  sans  influence  ultramon- 
taine,  et  qui  devance  d'un  siècle  la  Renaissance. 
C'est  la  première  période. 

L'art  flamand,  naturalisé  français,  eut,  dès  le 
début  du  XV=  siècle,  son  foyer  en  Bourgogne  ; 
c'est  la  seconde  phase  de  la  renaissance  française. 
A  partir  des  soixante  dernières  années  du 
XV"  siècle,  il  se  répand  sur  toute  la  surface  de 
la  France.  Il  est  contemporain  du  réveil  de 
l'Italie  au  sentiment  de  l'art  antique. 


2dtbltograpl)te. 


439 


La  troisième  phase  est  celle  où  l'art  italien 
s'introduit  d'abord  lentement,  furtivement,  en 
France,  puis  bruyamment  importée  par  les  rois 
et  détermine  ce  qu'on  a  eu  l'habitude  d'appeler 
jusqu'ici  exclusivement  la  Renaissance. 

Le  mélange  de  ces  deux  éléments,  l'art  bour- 
guignon et  l'invasion  de  l'influence  italienne, 
amendés  par  l'éclectisme  français,donnanaissance 
à  l'école  de  la  Loire,  qui,  à  la  fin  du  XV^  siècle 
et  au  commencement  du  XVL,  complète  la 
physionomie  de  la  véritable  et  définitive  renais- 
sance française. 


Courajod  s'est  vivement  intéressé  aux  tombes 
du  XIV«  siècle  ;  leurs  caractères  uniformes  ré- 
vèlent une  industrie  spéciale.  Parmi  les  tombiers 
du  XIV'^  siècle,  il  distingue  Jean  Pépin  d'Huy, 
originaire  d'un  «  village  près  Liège  »  (sic),  qui 
s'intitule  «  tombier  et  bourgeois  de  Paris  »,  au- 
teur de  la  statue  de  Robert  l'enfant,  conservée 
à  Saint-Denis  (artiste  que  M.  Richard  a  mis  en 
lumière),  Robert  de  Launoy  (révélé  par  M.  Bor- 
dier), originaire  d'Arras, Guillaume  deNormandie, 
et  R.  de  Hondicourt,  ses  compatriotes  et  collabo- 
rateurs, enfin  Pierre  de  Bruxelles.  Leur  art  était 
d'origine  flamande.  Il  en  est  de  même  et  plus 
spécialement  des  tombes  gravées,  dont  M.  Cou- 
rajod fait  ressortir  le  puissant  intérêt.  «  C'est 
peut-être  l'examen  de  cette  classe  de  monuments 
qui  nous  fait  pénétrer  le  plus  avant  dans 
l'esthétique  de  l'art  du  moyen  âge»,  parce  qu'ils 
fournissent  la  quintessence  de  la  ligne  du  dessin, 
et  que  le  dessin  livre  l'âme  de  l'artiste.  «  Je  ne 
connais,  dit-il,  pas  une  seule  époque  de  l'art  qui 
puisse  dépasser  la  beauté,  la  science,  la  noblesse, 
la  grandeur,  la  fierté,  la  simplicité  de  ces  dessins 
par  traits  massés.  C'est  de  l'art  absolument  con- 
sommé. » 

* 
*  * 

Nous  avons  considéré  l'art  flamand  ou  franco- 
flamand. Tournons-nous  un  instant  avec  Courajod 
vers  l'Italie.  Nicolas  de  Pise,  auteur  de  la  chaire 
de  la  cathédrale  de  Sienne,  artiste  sans  doctrine, 
avait  pastiché  l'art  antique  avec  une  virtuosité 
merveilleuse  ;  mais  son  initiative  resta  isolée.  Son 
fils  Giovanni,  auteur  de  la  chaire  de  Pise,  fonda 
l'école  gothique  :  il  fut  brutal,  réaliste  et  gran- 
diose. Andréa,  à  son  tour  (l'auteur  des  portes  de 
bronze  du  baptistère  de  Florence),  regarde  la 
nature  avec  les  yeux  d'un  gothique,  mais  la 
rend  avec  une  sobriété  harmonieuse.  L'art  nou- 
veau, qui  avait  apparu  avec  Giovanni,  rentre  avec 
Andréa  sous  la  férule  dogmatique  ;  un  dogme 
est  créé,  sous  lequel  l'Italie  vivra  un  siècle. 

Ce  n'est  pas  de  l'école  de  Pise  que  la  Renais- 
ance  devait  sortir.  L'ombre  de  Giotto  s'étend 


sur  le  XIV^  siècle  italien.  Le  naturalisme  relatif 
du  maître  de  Sienne  était  tel  que  celui  des  grands 
imagiers  du  XIIL  s.  ;  c'était  ce  naturalisme  sage, 
qui  ne  va  pas  jusqu'à  copier  l'individu,  mais  s'ar- 
rête à  un  type  humain  convenu  et  transfiguré 
par  une  opération  de  l'esprit  ;  c'est  un  natura- 
lisme tempéré  par  un  rationalisme  décidé  ;  après 
lui,  dans  son  école,  son  idéal  s'immobilise. 
Giotto  n'avait  aff'ranchi  l'art  qu'à  demi  ;  il  l'avait 
arraché  aux  traditions  byzantines,  mais  il  leur 
imposa  son  style  mystique  ;  l'Italie,  jusqu'à  la 
fin  du  XIV<=  siècle,  reste  dominée  par  cette  tra- 
dition. Qui  remonta  le  courant  et  renouvela  la 
peinture  italienne  en  la  ramenant  vers  l'antique? 
Masaccio,  répondent  les  dictionnaires. — Erreur  ! 
dit  Courajod.  «  Le  vrai  point  de  séparation  entre 
le  vieux  monde  gothique  et  le  monde  moderne  n'a 
pas  été  l'introduction  du  goût  antique  ni  l'avè- 
nement de  l'ornement  classique,  mais  une  con- 
ception nouvelle  des  lois  de  l'art.  »  C'est  la  subs- 
titution du  naturalisme  au  spiritualisme  même 
en  Italie  ;  même  à  Rome,  la  Renaissance  n'a  pas 
eu  pour  cause  unique  l'imitation  de  l'art  antique. 
Et  en  vérité,  l'art  nouveau  n'a  pas  pour  berceau 
l'Italie  seule.  Le  XIV*^  siècle  est  caractérisé  par 
un  effort  collectif  de  l'Europe  pour  créer  cet  art, 
l'art  moderne,  en  prenant  pour  base  l'art  gothique; 
toute  cette  époque  a  besoin  d'être  étudiée  d'une 
façon  internationale.  A  partir  de  Giovanni  Pisano 
et  de  Giotto,  l'Italie,  tout  en  empruntant  à  l'an- 
tique, s'attache  de  plus  en  plus  au  style  go- 
thique. On  dit  quelquefois  que  l'Italie  n'a  pas 
eu  de  style  gothique  ;  c'est  une  énorme  erreur! 
Rome,  selon  notre  auteur,  est  l'une  des  villes 
les  plus  gothiques  de  l'Italie.  L'école  gothique 
s'efforce  de  se  régénérer  par  l'étude  de  la  nature, 
en  Italie  comme  en  France  et  en  Flandre  ;  et  l'on 
voit  à  ce  moment  des  artistes  du  Nord,  des  Te- 
desco  et  autres,  faire  sentir  leur  influence  artis- 
tique à  Florence  et  ailleurs,  des  J.  délia  Ouercia 
pratiquer  une  sculpture  inspirée  des  écoles  de 
Bourgogne  et  de  Flandre,  témoin  la  manière  de 
traiter  les  draperies,  témoin  l'introduction  des 
paysages  à  la  flamande  dans  les  bas-reliefs  de 
Ghiberti.  «  Nous  prétendons,  dit  M.  C,  qu'il  y  a 
des  sculptures  italiennes  du  premier  tiers  du 
XV^  siècle,  qui  témoignent  d'une  communication 
entre  l'école  italienne  et  l'école  du  Nord.  » 

Ceci  nous  ramène  au  style  flamand,  auquel 
Courajod  s'est  attaché  avec  tant  de  prédilection. 
L'art  flamand  est-il  sorti  de  l'école  de  Cologne? 
Non  !  L'école  de  Cologne  se  développa  parallè- 
lement à  celle  de  la  Flandre,  mais  en  sens  opposé; 
la  première,  dans  le  sens  mystique,  la  seconde, 
dans  le  sens  naturaliste.L'école  flamande  et  bour- 
guignonne exerça  en  Europe,  pendant  près  de 
deux  cents  ans,  un  empire  puissant.  Un  seul  pays, 
après  en  avoir  reçu  l'impulsion,  lui  résista.  Tou- 


440 


jlRebur  De  V^xt  cl)vctien. 


tefois  le  branle  fut  donné  au  mouvement  italien 
par  le  réveil  prématuré  de  la  F"landre.  Il  y  a  deux 
courants  dans  le  mouvement  de  la  Renaissance  : 
le  courant  flamand,  naturaliste,  et  le  courant  ita- 
lien, antique.  Mais  «  l'idée  d'après  laquelle  le 
mouvement  de  la  Renaissance  n'existe  que  depuis 
la  communication  définitive  du  style  antique  à 
l'art  moderne  et  depuis  l'entrée  en  scène  de 
l'Italie,  est  une  idée  fausse  dictée  par  la  pé- 
dagogie classique  ».  L'influence  de  l'école  fla- 
mande sur  l'école  italienne  comme  sur  toutes  les 
autres  écoles  de  l'Europe,  de  la  fin  du  XI  V<=  siècle 
ou  du  commencement  du  XV'=,  était  une  vérité, 
reconnue  en  plein  XVI<=  siècle,  qu'a  proclamée 
Lambert  Lombard.  «  Il  résulte  de  l'ensemble  des 
textes  de  Cyriaque  d'Ancône,  de  Fazio,  de  Fila- 
rete  et  de  Santi,  a  dit  A.  Pinchart,  qu'en  Italie, 
au  XlVe  siècle,  la  réputation  des  deux  grands 
maîtres  de  l'école  flamande  primait  celle  de  tous 
les  autres  peintres.  »  De  Laborde  avait  déjà  fait 
la  même  observation,  que  Courajod  développe 
d'une  manière  complète,  sur  l'histoire  du  courant 
flamand  auquel  l'Europe  doit  en  grande  partie 
son  art  moderne. 

Revenons  maintenant  en  France.  Le  grand  art 
du  XI V*^  siècle,  sorti  des  ateliers  parisiens,  franco- 
flamands  d'origine,  l'art  de  Beauneveu,  des  Jean 
de  Liège,  l'art  des  vitraux  de  Bourges,  des  scul- 
ptures de  la  Ferté-Milon,  des  peintures  de  Broe- 
derlam,  l'art  des  draperies  amples  et  souples, 
du  naturalisme  grandiose,  art  qui  avait  créé  une 
première  renaissance,  se  voit  remplacé  par  cet 
art  naïf,  tendre,  timide  à  la  fois  et  audacieux, 
robuste,  sincère,  spontané,  un  peu  gauche,  c'est- 
à-dire,  l'art  bourguignon.  C'est  l'art  démocratique 
qui  remplace  l'art  de  cour  ;  c'est  l'art  de  Claus 
Sluter.  On  peut  dire  que  Courajod  a  réhabilité 
cet  art  bourguignon,  si  intéressant  par  sa  sincère 
et  libre  émotion.  Il  s'attache  longuement  à  son 
étude,  à  la  description  de  ses  chefs-d'œuvre. 

Sous  Charles  VII,  le  siège  de  la  monarchie 
est  déplacé  ;  Paris  perd  son  titre  de  capitale  ; 
Charles  VIII  n'est  longtemps  que  le  roi  de 
Bourges  ;  le  centre  de  la  France  est  le  Berry  et 
la  Touraine,  provinces  soumises  à  l'art  bour- 
guignon. L'art  du  XV"^  siècle  se  développe  dans 
le  Berry  et  surtout  dans  le  bassin  de  la  Loire. 
C'est  là  que  la  Renaissance  italienne  est  venue 
se  marier  avec  lui,  et  cette  union  fait  le  triomphe 
de  Michel  Colombe, qui  introduit  des  idées  de  mo- 
dération, de  conviction,  que  l'Italie  avait  apprises 
de  l'antiquité.  C'est  l'école  franco-italienne  du 
XV"^  siècle.  Le  maître  fait  maintenant  l'histoire 
de  la  pénétration  italienne,  comme  il  a  fait  l'his- 
toire de  la  pénétration  flamande  ;  il  signale  le 
voyage  de  Jean  Fouquet  en  Italie,  il  montre 
le  rôle  du  roi  René,  décrit  le  milieu  tourangeau 
et  expose  l'influence  de  Bourdichon. 


Ici,  les  notes  recueillies  religieusement  par 
MM.  H.  Lemonnier  et  A.  Michel  deviennent 
rares  et  incomplètes.  Une  série  de  leçons  est  con- 
sacrée à  montrer  la  lutte  entre  l'art  méridional 
et  l'art  du  Nord,  qui  se  mesurent  dans  une  ba- 
taille suprême.  Celui  du  Midi  longtemps  réuni  à 
son  rival,  a  pris  une  tardive  mais  définitive 
revanche  et  préparé  la  domination  qu'il  étendit 
sur  le  monde  entier.Le  maître  fait  le  procès  à  la 
pédagogie,  et  aux  procédés  d'enseignement  par 
lesquels  elle  a  exaspéré  les  esprits.  Nous  avons 
dans  le  temps  relaté  ce  procès  et  reproduit  les 
éloquentes  plaidoiries  de  C.  Depuis  trois  siè- 
cles, dit-il,  la  pédagogie  classique  nous  fabrique 
de  faux  titres  de  noblesse  pour  nous  rattacher  à 
une  civilisation  inférieure  à  la  nôtre  ;  elle  a  arra- 
ché au  peuple  les  consolations  de  l'art  en  en 
faisant,  non  la  satisfaction  d'un  besoin  universel, 
mais  l'expression  du  luxe  et  l'apanage  des  lettrés. 
Elle  a  mis  la  femme  hors  de  l'art  en  faisant 
parler  à  l'art  une  langue  qu'elle  ne  comprend 
pas.  Dans  le  domaine  de  l'art  presque  toutes  les 
conquêtes  morales  et  sociales  du  christianisme 
sont  compromises.  Pour  les  retrouver,  l'humanité 
devra  revivre  son  histoire  du  moyen  âge.  Arrê- 
tons-nous sur  cette  belle  et  généreuse  conclusion, 
et  louons  le  vaillant  qui  a  osé  la  proclamer  du 
haut  de  la  chaire  du  Louvre. 

L.  Cloquet. 

LES  VILLES  D'ART  CÉLÈBRES  —  BRUGES 
YPRES,  par  M.  H.  Hymans,  Paris,  Laurens,  1900. 

Il  existe  pas  mal  de  descriptions  de  la  noble 
cité  de  Bruges,  et  plus  d'une  excellente.  Le  mo- 
deste guide  de  M.  James  Weale  est  d'une  haute 
valeur  documentaire  avec  ses  informations  con- 
cises, sûres  et  souvent  inédites  et  ses  apprécia- 
tions sagaces;  celui  de  M.  le  chanoine  Duclos 
donne  au  touriste  l'impression  communicative 
d'un  Brugeois  épris  de  ses  vieilles  rues,  et  fami- 
liarisé avec  leur  histoire  intime  ;  la  sémillante  pla- 
quette de  M.  Ch.  de  Pion,  si  joliment  illustrée,  a 
aussi  son  charme  particulier. 

Néanmoins  le  livre  de  M.  Hymans  est  aussi 
nouveau  que  si  l'on  n'avait  pas  encore  traité  le 
sujet.  On  éprouve  une  sensation  vive  de  littéra- 
ture et  d'art,  à  ces  pages  qui  sont  d'un  esthète 
délicat,  d'un  connaisseur  ayant  sa  manière  à 
lui  de  voir  les  choses  anciennes  et  modernes  et 
excellant  à  distinguer  les  perles  dans  cet  écrin  : 
à  raviver  l'intérêt  des  objets  et  des  monuments 
par  des  rapprochements  historiques,  à  carac- 
tériser leur  valeur  avec  un  goût  très  sûr.  Quant 
à  l'illustration,  elle  est  une  œuvre  d'art,  quoique 
photographique;  le  choix  des  sujets  et  des 
points  de  vue  trahit  le  fin  connaisseur,  et  l'exé- 
cution est  le  dernier  mot  du  progrès. 


Btbliograpl)te. 


441 


D'ailleurs,  les  descriptions  tant  de  fois  faites 
ne  sont-elles  pas  à  refaire,  aujourd'hui  que  les 
recherches  récentes  ont  tant  augmenté  nos  con- 
naissances sur  les  artistes  et  leurs  œuvres,  que 
le  goût  public  avivé  a  modifié  des  appréciations, 
détruit  des  préjugés  déplacé  les  points  de  vue? 
N'est-ce  pas  d'hier,  que  la  critique  apprécie  à  leur 
valeur  les  primitifs,  et  que  l'on  connaît  à  peu 
près  leur  histoire?  La  vieille  ville  achève  à  peine 
la  restauration  de  ses  vieux  pignons  et  la  série 
de  ses  constructions  archaïques,  pleines  de  saveur, 
qui  sont  comme  une  résurrection  du  passé.  L'on 
doit,  pour  une  bonne  part,  ce  retour  au  passé  à 
l'ancien  architecte  de  la  ville,  Rudd  (1792-1870) 
et  à  feu  Jean  Béthune,  qui  fut,  soit  dit  en  passant, 
l'ami  de Welby  Pugin,mais  non  son  élève,  comme 
le  croit  M.  Hymans.  Le  premier  releva  et  sauva 
plusieurs  anciens  monuments,  notamment  le 
palais  du  Franc;  le  second  propagea  les  prin- 
cipes dont  l'architecture  brugeoise  est  la  si  lidèle 
expression  ;  le  type  d'édifices  que  son  école  mit 
en  honneur  dérive  directement  de  Bruges,  et  c'est 
la  forme  idéale  de  la  construction  en  brique  ; 
nous  l'avons  démontré  ailleurs  (i).Quant  aux  em- 
bellissements nouveaux,  si  conformes  à  l'esprit 
ancien,  qui  se  sont  produits  dans  ces  dernières 
années,  l'on  en  est  redevable  à  deux  hommes 
de  goût  et  de  talent,  les  architectes  Delacenserie 
et  de  Wulf. 

Mais  tout  Bruges,  magistrat  et  particuliers,  a 
le  culte  de  l'art  ancien.  C'est  un  prodige,  re- 
marque M.  Hymans,  que  la  châsse  merveilleuse 
de  sainte  Ursule  ait  pu  traverser  les  siècles  et  les 
tourmentes  sans  jamais  changer  de  place,  alors 
que  tant  d'œuvres  d'art  ont  pris  le  chemin  de 
l'étranger.  Mais  aussi  avec  quelle  sollicitude  les 
Sœurs  Ursulines  ont  veillé  jalousement  sur  le 
trésor  confié  à  leur  garde  !  La  salle  des  malades 
est  toujours  là,  exactement  telle  qu'au  XIV^ 
siècle,  avec  ses  deux-cent-quarante  lits,  «  évoca- 
tion absolument  frappante  de  ces  établissements 
hospitaliers  du  moyen  âge,  si  fréquemment 
aperçus  dans  les  tableaux  et  les  miniatures;  et  à 
côté,  la  pharmacie,  encore  comme  au  temps  de 
Van  Eyck  et  de  Memling,  desservie  par  les 
sœurs.  Ensemble  délicieux,  avec  ses  antiques  pots 
d'apothicaire  en  faïence  de  Nevers,  ses  immenses 
mortiers  en  cuivre  aux  délicates  ciselures,  ses 
multiples  et  pittoresques  ustensiles. 

Nous  devons  insister  sur  le  très  vif  intérêt 
de  la  description  de  tant  d'anciennes  pein- 
tures qui  forment  la  richesse  de  Bruges,  sous  la 
plume  d'un  des  plus  fins  connaisseurs  de  tableaux 
anciens  de  la  Belgique,  pour  ne  pas  dire  plus. 
Aussi,  sommes-nous  embarrassé   de    remplir  ici 

I.  V.  L.  Cloquet,  Traité  d'architecture,  t.  Il,  p.  6i.  Revue  de 
l'Art  chrétien,  année  1893,  p.  288. 


notre  devoir  de  critique,  à  moins  de  chercher  la 
petite  bête  et  de  faire  des  réserves  de  détail, 
comme  par  exemple,  quand  M.  Hymans  trouve 
réussie  la  superstructure  moderne  de  la  grande 
tour  de  Saint-Sauveur. 


Façade  de  la  maison  dite  des  Templiers,  rue  de  Lille  a  Ypres. 
État  avant  restauration  (1899). 

A  Ypres,  si  l'attention  charmée  se  disperse 
sur  une  multitude  de  maisons  anciennes, l'admira- 
tion est  absolue  pour  les  Halles,  qui  offrent,  selon 
un  écrivain  français,  la  majesté  des  cathédrales  et 
qui  rivalisent  avec  les  palais  vénitiens.  Le  cœur 
se  serre  quand  on  pense  que  ce  monument,  sans 


RKVUE    DE   l'art   CHRÉTIEN. 
1901.    —   5"^*-"    LIVRAISON. 


442 


Brbue  Dr  r^rt  chrétien. 


J  arlie  -reùervn 

recbprcbes 
^ou-i  le  'iol 


- 1  l'i^f  F'H  PfI  ilT3  y[  "  1  f    L  t! 

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Ancienne  Halle  de  la  rue  de  Lille  à  Ypres.  Restitution  de  la  façade  complète,  par  les  architectes  L.  Cloquet  et  E.  Moktikr. 


Bibltograpl)le, 


443 


rival  au  monde,  faillit  être  abattu  par  les  révolu- 
tionnaires français!  M.  Hymans  apprécie  favo- 
rablement les  peintures  décoratives  de  M.  Del- 
beke,  qui  ont  été,  un  peu  partout  et  ici  même, 
l'objet  de  vives  critiques  (i). 

L'auteur  n'accorde  que  quatre  lignes  (non 
compris  quatre  autres  exprimant  la  défiance  en- 
vers les  restaurateurs)  à  la  maison  dite  des  Tem- 
pliers, qui  fut  en  réalité  une  superbe  petite  halle, 
avec  sa  façade  jadis  plus  que  double  de  celle  qui 
subsiste,  avec  son    rez-de-chaussée  analogue  à 


I.  V.   Revue  de  l'Art  chrétien,  année  18 


P-  538- 


celui  de  la  Boucherie,  avec  ses  deux  étages  pareils 
à  l'étage  unique  des  grandes  halles,  avec, enfin, une 
corniche  crénelée  identique  au  superbe  couron- 
nement du  palais  communal.  Encore  faut-il  noter 
que  les  trois  fenêtres  ogivales  qui  subsistent  sont 
intactes,  tandis  que  pas  une  des  baies  des  grandes 
halles  ne  contient  son  ancien  fenestrage.  Nous 
croyons  pouvoir  garantir  que  pas  une  pierre  de 
la  ruine  actuelle  n'en  sera  enlevée  pour  autant 
qu'elle  puisse  encore  tenir. 

L.  C. 


444 


jRcbue  ïje  T^rt  chrétien. 


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Xi\t}tx  bibliographique. 


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;^rcl)tologte  ttmtaiix^^vtë'\ 

=^^=—   jFrancc.  ==— ^= 


Aubry  (Pierre).  —  La  musicologie  médiévale, 
Histoire  et  méthodes,  —  In-4°  de  135  pp.  Paris, 
Welter. 

Avril  (A.  d').  —  Une  histoire  de  l'art  chrétien, 
dans  la  Revue  des  questions  historiques,  octobre  1899. 

Barbier  de  Montault  (X.).  —  Curiosités  ar- 
chéologiques de  l'église  paroissiale  deChaudron 
(Maine-et-Loire).  —  Broch.  in-8".  Angers,  Siraudeau. 

Le  même.  —  La  loi  des  chapeaux  dans  l'art 
héraldique.  —  In-8°.  Vannes,  Lafolye. 

Bernard  (M.).  —  Autour  de  la  Méditerranée; 
LES  cotes  orientales.  Terre  sainte  et  Egypte. 
(De  Jérusalem  a  Tripoli).  —  In-8°.  Paris,  Laurens. 

Berthelé  (Jos.). —  Clochers  divers  de  l'arron- 
dissement de  Château-Thierry.  —  Broch.  Château- 
Thierry,  Lacroix. 

Le  même.  —  La  cloche  italienne  de  Charly- 
sur-Marne. 

Blanchet  (Emile).  —  L'art  en  Flandre.  Les 
musées  et  les  églises  de  Belgique.  —  In-i6.  Paris, 
Boullay. 

Bobeau  (Octave).  —  Notes  sur  des  sépultures 
de  la  seconde  moitié  du  IIP  siècle,  découvertes 
a  la  Croix,  canton  de  Bléré  (Indre-et-Loire).  — 
In-S",  de  8  pp.  (Extr.  du  Bulletin  arch.  1900.) 

Bourdais.  —  Notes  d'art  chrétien.  La  Ré- 
demption d'après  les  textes  p.ieliques  dans  les 
mosaïques  Vénéto-Byzantines,  dans  la  Revue  des 
sciences  ecclésiastiques^  septembre  1899. 

Chappée  (J.)  —  La  lanterne  des  morts  a  Pa- 
rigné-l'Évêque,  dans  la  Revue  historique  et  archéolo- 
gique du  Maine,  2"  livraison,  1899. 

Chauvin  (P.).  —  L'étoile  des  Mages,  dans 
la  France  illustrée,  du  13  janv.  1900. 

*  Chomton  (L'abbé  L.). —  Histoire  de  l'église 
Saint-Bénigne  de  Dijon.  —  In-folio,  470  pp.,  30 
planch.  Dijon,  Jobard. 

Combes  (L.  de).  ^  Enfouissement  et  décou- 
verte DE  LA  VRAIE  croix  DU  CaLVAIRE  ET  DU  SaINT- 

SÉPULCRE,  dans  \' Université  catholique,  janvier  1901. 

I.  Les  ouvrages  marqués  d'un  astérisque  (*)  ont  été,  sont  ou 
seront  l'objet  d'un  article  bibliographique  dans  la  Revue. 


Dupont  (L'abbé).  —  L'abbaye  royale  de  Saint- 
Evroult,  paroisse  de  Touquette-en-Ouche. —  In- 
18,  Jésus,   2'  édition,  Impr.de  N.-D.  de  Montligeon. 

Le  même.  —  Histoire  de  Notre-Dame  de 
Touquette,  depuis  son  origine  jusqu'à  nos  jours. 
—  In-i6.  La  Chapelle-Montligeon,  Imp.  de  Notre- 
Dame  de  Montligeon. 

Eglises  ayant  conservé  des  jubés,  dans  y  Inter- 
médiaire des  chercheurs  et  des  curieux,  22  août  1899. 

Errard  (Charles).  —  L'art  byzantin,  d'après  les 
monuments  de  l'Istrie  et  de  la  Dalmatie.  Texte  par 
Al.  Gayet.  Tome  I  :  Venise.  La  basilique  de  Saint- 
Marc.  —  In-folio  de  XL-44  pages  avec  29  planches, 
dans  un  cartonnage  toile.  Paris,  Société  française 
d'éditions  d'art. 

Extraits  d'un  inventaire  des  châteaux  de 
Saulsures  et  Malroy  en  juin  et  juillet  1783  et 

DU  CHATEAU    DE    BoUSSENOIS,  CANTON    DE  SeLONGEY 

(Côte-d'Or),  en  avril  et  mai  1784.  —  In-8°.  Langres, 
Imp.  du  Spectateur. 

*Galabert. — Inventaire  de  la  maison  curiale 
DE  LA  Cronsille,en  1449,  dans  le  Bulletin  delà  So- 
ciété archéologique  du  Midi,  1900,  pp.  ii2-it6. 

Garcin  (L.).  —  Les  crucifix  émaillés  d'Angou- 
LÊ11E,  dans  Notes  d'art  et  d'archéologie,  juillet  1S99. 

Gassies  (G.).  —  Coup  d'œil  sur  l'archéologie 

DU  moyen  AGE,  d'après  LES  MONUMENTS  FRANÇAIS, 
ET  EN  PARTICULIER  d'APRÈS  CEUX  DU  DÉPARTEMENT 
DE  SeINEET-MarNE  et  DE  LA    RÉGION    AVOISINANTE. 

(Brie,  Champagne,  Soissonnais,  Beauvoisis,  etc.)  — 
In-8°  avec  grav.,  Meaux,  Le  Blondel. 

Gauthier  (J.).  —  L'ancienne  collégiale  de 
Sainte-Madeleine  de  Besançon  et  son  portail  a 
FIGURES  DU  XIIP  siècle. —  In-8°,  16  pp.  et  planches. 
Besançon,  Dodivers. 

Le  même.  —  Nouvelle  série  de  tombes  franc- 
comtoises  INÉDITES  (XIIL'-XVIIP  siècle).  —  In-8°, 
avec  grav.,  Besançon,  Jacquin. 

Le  même.  —  Notes  sur  le  château  de 
Vaite,  son  histoire  et  ses  ruines,  dans  \ Annuaire 
du  Doubs,  1899. 

Gautier  (L'abbé).  —  Saint  Marcoul,  abbé  de 
Nanteuil  ;  sa  vie,  ses  reliques,  son  culte  a  Cor- 
beny,  Chanay,  Archelange,  Bueil,  Notre-DaiME- 
du-Pré  au  Mans  et  Notre-Dame  d'Angers.  —  In- 
16,  78  pp.  Angers,  Germain  et  Grassin. 

Genty  (L'abbé  A.-E.).  —  Livry  et  son  abbaye. 
Recherches  historiques.  —  In-8°,  146  pp.  Paris, 
Mouillot. 

Girieud  (J.).  —  Rouen  et  ses  monuments.  — 
In-4°,  Rouen,  Girieud. 


Blbltograpl)(e. 


445 


Gosset  (B.).  —  La  basilique  de  Saint-Remi  a 
Reims.  —  In-folio,  90  pp.,  40  pi.  Paris,  Imprimeries 
réunies. 

Granges  de  Surgères  (Le  marquis  de).  —  Les 
artistes  nantais  (architectes,  armuriers,  bro- 
deurs, MONNAYEURS,  MUSICIENS,  ORFÈVRES,  etc),  DU 
MOYEN  AGE  A  LA  RÉVOLUTION  ;  NOTES  ET  DOCUMENTS. 

—  In-8°,  XII-456  p.  Paris,  Charavay  frères. 

Hardel.  —  L'église  de  Notre-Dame  de  Bourg 
Moyen  de  Blois.  —  Petit  in-8".  Blois,  Migault. 

Harmel  (A.).  —  Saint  Antoine,  d'après  un  ma- 
nuscrit DU  XV=  siècle,  dans  La  Quinzaine,  i"=''  sep- 
tembre 1899. 

Hoppenot  (J.).  —  Le  Crucifix  dans  l'histoi- 
re et  dans  l'art,  dans  l'ame  des  Saints  et  dans 
notre  vie. —  In-8°,  Paris,  Maison  de  la  Bonne-Presse. 

Inventaire  religieux,  superstitieux  et  mysti- 
que, ordonné  par  Bonaparte  en  1800,  dans  V In- 
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—  In-fol.  509  pp.  200  fig.  Mamers. 

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l' Abbaye,  depuis  les  temps  les  plus  anciens,  avec 

UNE  monographie  COMPLÈTE  DE  l'ANCIENNE  ÉGLISE 
abbatiale  ET  DE  l'ÉGLISE  ACTUELLE  DE  LONLAY,  ET 
UNE  HISTOIRE  DU  FIEF  DE  FrEDEBISE,  DE  LA  VILLE 
ET    CHATEAU    DE    DOMFRONT     ET     NoTRE-DaME-SUR- 

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ET   des  communes  DU  DÉPARTEMENT  DE  LA  SEINE.  — 

In-4°,  Paris,  Le  Progrès  fina?tcier. 

Picardie  (la)  historique  et  monumentale. 
Arrondissement  d'Amiens  :  canton  de  Molliens- 
Vidame,  notices  PAR  R.  de  Guyencourt  ;  canton 
d'Hornoy  et  d'Oisemont,  notices  par  A.  Janvier  ; 
canton  de  Corbie,  notices  par  H.  Josse.  —  In-4°, 
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Recherches  sur  les  pèlerinages  manceaux. 
Notices  sur  tous  les  pèlerinages  connus,  anciens, 
modernes  et  contemporains  du  DiociiSE  DU  Mans, 
par  un  pèlerin  raanceau.  —  In-8'',  Le  Mans,  Roulier. 


Riat  (G.). 
Paris. 


Les   villes    d'art   célèbres. 


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EN  trente  chapitres.  —  2  volumes  in-8°  carré  con- 
tenant 490  gr.  Paris,  H.  Laurens. 

Broché,  15  fr.  ,  relié,  18  fr. 

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et  300  gr.  Tours,  Marne. 

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dans  \a.  Revue  des  Bibliothlques,  1898,  pp.  33-57. 


Tradition  (La)  au  pays  Basque.  Ethnographie, 
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d'Isabelle  de  Lorraine,  et  le  to.mbeau  d'Ulger  a 
la  cathédrale  d'Angers.  —  In-8°,  12  p.  avec  fig. 
Paris,  Impr.  Nationale. 

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=^==—  ailcmagne.  —=^=^ 


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I.  .Se  vend  au  profit  des  Œuvres  dominicaines,  222,   faubourj; 
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Bibltograpl)te, 


447 


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Avec  des  notes  inédites  de  Schœpflin.  —  Grav. 
in-8°.  Colmar,  H.  Hiiffel. 

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33  pi.  Bonn,  Georgi. 

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Kônigsberg  (vu  395  p.  av.  fig.;  4  pi.  et  2  plans).  VIII  : 
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in-8°. 

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Angleterre. 


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448 


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Espagne. 


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Lamperez  y  RoMEA  (V.).  —  les  catedrales  es- 
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*Serrano  Fatigati(D.  E). — Iglesias  espanolas 

DEL  SANTO  SEPULCRO.    LA  VEKA    CRUZ  Y    EUNATE,   dans 

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=  Puisse.  = 


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wil),  dans  V Indicateur  tV Antiquités  suisses,  1899,  n°  i. 

==—= =    Eussie.    ==^=^= 


Schmidt  (James  von).  —  Die  Altare  des  Guil- 
laume DES  Perriers  und  verwandte  Werke  :  EIN 
Beitrag  zur  Geschichte  der  romische  Quattro- 
centoplastik.  —  In-4°,  St.  Petersburg,  Jossé. 

Sumtsov  (N.  F.).  —  Leonardo  da  Vinci.  — 
In-8°,  Khartov,  Impr.  de  la  Société  d'édition. 

^=—  3iîclgiquc=lt)oIlanDc.  — = 

Barbier  (Victor).  —  Le  couvent  des  Domini- 
cains de  Namur  (1649  1797). —  In-8°de  173  pp.  Na- 
mur,  Douxfils. 

Destrée  (Joseph).  —  L'industrie  de  la  tapis- 
serie A  Enghien  et  dans  la  seigneurie  de  ce  nom. 
—  In-8°  de  52  pp.  et  3  pi.  Enghien,  Spinet. 

Habets  (J.)  et  Flament  (A.J.-A.).  —  De  Ar- 
chieven  van  het  kapittel  der  vorstei.ijke  rijks- 
abdij  Thorn.  —  2  vol.  in-S"  et  un  atlas.  Limbourg,  La 
Haye. 

*  Meirsschaut(Pol.).  — Les  sculptures  en  plein 
AIR  A  Bruxelles.  —  Un  vol.  in-8°  de  XVI-212  pp. 
illustré  de  121  photogravures  en  teintes  variées.  Brug- 
land,  Braxelles.  —  Prix:  fr.  7,50. 

Moerman  (L  ). —  Hôtels  de  ville  et  beffrois 
DE  Belgique.  —  In-folio,  23  eaux  fortes  avec  textes, 
Bruxelles,  Havermans. 

Pholien  (F.).  —  La  Verrerie  au  Pays  de 
Liège.  Étude  rétrospective.  —  In-8°,  de  198  pp. 
(Nombreuses  illustrations.)   Liège,   A.  Bénard. 

Van  Assche  (A.).    —    Recueil    d'églises   du 

MOYEN  AGE  EN  BELGIQUE.   MONOGRAPHIE  DE  l'ÉGLISE 

Saint-Nicolas  a  Gand.  —  Un  volume  in-8°  de  26 
pages  et  15  planches  dont  4  doubles.  A.  Siffer,  a 
Gand.  Prix  :  25  fr. 

Vos  (Le  chan.).  —  Les  paroisses  et  les  curés 
DU  diocèse  actuel  de  Tournai.  —  Tom  I,  II, 
III,  Doyennés  de  Tournai.  —  Antoing,  Ath,  Belœil. 


~40^ ^Of- 


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\Lt)rOnlQUC.    SOMMAIRE:    CHANT  GRÉGORIEN.  —   MONUMENTS   ANCIENS. 
SOLESMES.   —   NOUVELLES. 


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w 


Cbant  grégorien. 


On  lit  dans  le  XX<'  Siècle. 


Rome,  le  14  juin  1901. 


ARMI  les  différentes  questions  qui  s'agitent 
à  Rome,  il  en  est  une  qui  mérite  d'être  traitée 
spécialement  à  cause  de  la  tournure  qu'elle 
prend  actuellement  et  de  son  importance  : 
c'est  la  question  de  la  restauration  du  chant 
ecclésiastique. 

Sans  revenir  sur  l'histoire  du  monopole  concédé  à 
M.  Pustet  pour  son  édition  médicéenne,  on  sait  que  ce 
privilège  avait  soulevé  de  nombreuses  réclamations,  sur- 
tout en  France.  Les  Français  ne  voulaient  pas  être,  sur 
ce  point,  tributaires  de  l'Allemagne.  Le  décret  (Juod 
Sanctus  Augiesiinus,  rendu  par  la  S.  Congrégation  des 
Rites,  à  la  date  du  7  juillet  1S94,  après  avoir  fait  l'histo- 
rique de  la  question,  concluait  en  ces  termes  :  «  La  Con- 
grégation laisse  aux  Ordinaires  la  liberté  de  conserverie 
chant  dont  se  servaient  leurs  Églises,  mais  elle  les  exhorte 
fortement,  en  vue  d'opérer  l'unité  dans  le  chant,  à  adopter 
l'édition  de  Pustet.  Elle  ne  leur  fait  pas  pourtant  une 
obligation  formelle  de  cette  adoption.  » 

La  question  ainsi  posée  était,  par  là  même,  pratique- 
ment résolue,  car  le  chant  de  Pustet  s'imposait  forcément 
aux  évêques,  désireux  de  suivre  en  cette  matière  les  dé- 
sirs du  Souverain  Pontife  sans  se  contenter  d'obéir  seule- 
ment à  ses  ordres. 

C'est  vers  cette  époque  que  commença,  en  France,  une 
forte  campagne.  Un  laïque,  instruit  comme  un  bénédictin, 
très  au  courant  de  toute  cette  question,  groupa  dans  une 
action  commune  les  industries  du  livre.  Des  mémoires 
furent  rédigés,  présentés  à  la  Chambre,  et  le  ministère 
des  affaires  étrangères  en  saisit  la  Secrétairerie  d'État. 
A  tort  ou  à  raison,  —  c'est  une  chose  sur  laquelle  je  ne 
veux  point  me  prononcer  —  M.  Lefebvre  de  Béhaine, 
ambassadeur  de  France  à  Rome,  fut  accusé  sinon  de 
complicité,  au  moins  de  combattre  mollement  le  mono- 
pole Pustet.  L'homme  qui  conduisait  cette  campagne,  — 
M.  Bourgeois  était  alors  ministre,  —  résolut  de  frapper 
un  grand  coup.  Parle  moyen  d'un  député  connu,  M.  Jour- 
dan  (de  La  Lozère),  il  fit  faire  une  interpellation  à  la 
Chambre  française  sur  les  agissements  de  l'ambassade  à 
Rome,  à  propos  de  cette  question.  M.  Bourgeois,  le  jour 
même  de  l'interpellation,  fit  mander  M.  Jourdan  et  lui 
demanda  de  retirer  son  interpellation,  l'assurant  que  toute 
satisfaction  lui  serait  donnée  et  que  IVE.  de  Béhaine  quit- 
terait l'ambassade.  C'est  en  effet  ce  qui  fut  fait.  iVL  de 
Béhaine  dut  demander  sa  mise  à  la  retraite  et  c'est  une 
question  de  musique  sacrée  qui  a  enlevé  à  Rome  un  am- 
bassadeur qui  avait  eu,  jusque-là,  le  rare  talent  de  se  faire 
bien  agréer  du  Souverain  Pontife,  qui  l'estimait  haute- 
ment, et  d'avoir  représenté  pendant  douze  ans  la  France 
à  Rome.  Preuve,  évidemment,  que  le  quai  d'Orsay  était 
content  de  ses  services. 

La  secrétairerie  d'État  dut  alors  déclarer  officiellement 
à  l'ambassadeur  de  France  que  le  monopole  Pustet,  qui 
expirait  en  1901,  ne  serait  pas  renouvelé.  C'était  une  pre- 
mière victoire. 

Si  le  chant  de  Pustet  avait  été  si  favorablement  accueilli, 
c'est  qu'il  reproduisait  l'édition  médicéenne,  qui  était 
l'œuvre  de  Pier-Luigi  de  Palestrina.  Rien  que  ce  nom 


suffisait  à  faire  son  éloge.  Mais  voilà  que  Mgr  Respighi, 
cérémoniaire  pontifical,  publie  des  brochures  qui  démon- 
trent, en  s'appuyant  sur  des  documents  inédits,  que  jamais 
Pier-Luigi  de  Palestrina  n'a  collaboré,  même  de  loin,  à 
l'édition  médicéenne.  Le  fondement  scientifique  de  cette 
édition  venait  donc  à  lui  manquer  complètement. 

D'autre  part,  Dom  Pothier  avait,  depuis  une  dizaine 
d'années,  commencé  ses  études  sur  les  mélodies  grégo- 
riennes. Ne  s'attachant  à  aucune  édition  connue,  il  remon- 
tait aux  sources,  fouillait  les  plus  anciens  manuscrits  de 
chant,  ceux  de  Saint-Gall  entre  autres, qui  sont  du  IX'=  siè- 
cle, et  arrivait,  comme  conséquence  de  ces  confrontations, 
à  une  notation  qui  s'approchait  aussi  complètement  que 
possible  de  celle  de  saint  Grégoire,  si  elle  n'était  point  la 
mélodie  grégorienne  pure.  Il  y  avait  donc  lutte  entre 
l'édition  médicéenne,  ou  de  Pustet,  et  les  grégoriens. 

Le  chant  de  Solesmes  ne  pouvait  avoir  la  faveur  de  la 
Congrégation  des  Rites,  liée  qu'était  celle-ci  par  les  brefs 
précédents  accordés  à  Pustet.  Aussi,  le  cardinal  Pitraeut 
toutes  les  peines  du  monde  à  obtenir  un  bref  en  faveur 
de  Dom  Pothier.  A  peine  l'avait-il  en  sa  possession,  que, 
quatre  jours  après,  le  cardinal  Bartolini,  alors  préfet  des 
Rites,  obtenait  une  nouvelle  lettre  dans  laquelle  le  Sou- 
verain Pontife  déclarait  qu'en  louant  le  travail  des  Béné- 
dictins, il  n'avait  nullement  entendu  recommander  leur 
édition,  et  que  les  décrets  des  Rites  qui  régissent  la  ma- 
tière conservaient  toute  leur  vigueur. 

Nous  sommes  ainsi  arrivés  au  i"'  janvier  de  l'année 
1901,  date  à  laquelle  cessait  officiellement  le  monopole 
Pustet.  Celui-ci  était  terminé,  mais  le  décret  Q'^tod sanciiis 
Aiigustinus,  précédemment  cité,  qui  exhortait  les  évêques 
à  adopter  la  notation  de  Pustet,  subsistait  encore.  C'était, 
au  fond,  le  monopole  sous  une  forme  plus  adoucie. 

Les  industries  du  livre  à  Paris  s'émurent  de  nouveau 
de  cette  situation  qui  pouvait  priver  une  classe  impor- 
tante de  travailleurs  d'une  source  non  indiftérente  de 
bénéfices.  Une  grande  maison  de  librairie  catholique, 
voyant  que  les  éditions  dont  on  se  servait  en  France 
étaient  épuisées,  résolut  de  s'occuper  d'une  nouvelle  édi- 
tion des  livres  de  chant.  Elle  voulait  la  faire  suivant  la 
méthode  des  bénédictins,  avec  l'aide  de  Dom  Pothier,  et 
en  appelant  tous  les  savants  qui  se  sont  occupés  des  mé- 
lodies grégoriennes  à  une  dernière  refonte  de  ces  études, 
pour  arriver  à  une  édition  scientifiquement  aussi  exacte 
que  possible.  Toutefois,  avant  de  se  lancer  dans  cette 
entreprise  considérable,  il  fallait  s'assurer  si  le  .Souverain 
Pontife  verrait  avec  plaisir  ce  mouvement  de  retour  à  la 
tradition,  et  s'il  agréerait  l'usage  que  les  éditeurs  catho- 
liques feraient  de  la  liberté  c|ui  leur  serait  laissée.  On  ne 
pouvait  détruire  le  décret  (2uod  Sanctics  Aiigus/inits,  mais 
le  Souverain  Pontife  pouvait  en  annuler  pratiquement 
refi'et,en  déclarant  qu'il  voyait  d'un  œil  favorable  ce  retour 
aux  vieilles  mélodies  qui  avaient  soutenu  et  fortifié  la  foi 
de  nos  pères. 

Un  premier  pas  dans  ce  sens  a  été  fait  récemment  par 
la  publication  du  bref  aux  Bénédictins  de  Solesmes.  Diffé- 
rentes influences  ont  bien  fait  remanier  ce  bref  pour  en 
diminuer  l'importance,  mais  enfin  le  Pape  y  affirme  nette- 
ment la  liberté  du  chant  et  loue  ceux  qui  cherchent  dans 
l'antiquité  liturgique  les  sources  les  plus  pures  de  la  mélo- 
die grégorienne. 

Ce  premier  mouvement  vient  d'être  suivi  de  deux  faits 
significatifs.  Le  cardinal  Vaughan  avait  installé  dans  sa 
cathédrale  de  Westminster  des  bénédictins  de  l'abbaye 
de  Solesmes.   Naturellement,  ils  chantaient  le  grégorien. 


WEVUE   DEL  ART  CHRETIEN. 
1901.    —   S'"*^    LIVRAISON. 


450 


îRctour  tic  V^xt  i\)xititn. 


et  le  cardinal  voulait  étendre  cette  mesure  h.  tout  son 
archidiocèse,  mais  la  prudence  l'avait  jusqu'ici  retenu. 
Ayant  consulté  h.  ce  sujet  le  cardinal  Respighi,  vicaire  de 
Sa  Sainteté,  celui-ci  répondit  que  le  Souverain  Pontife, 
dans  le  bref  aux  bénédictins  de  Solesmes,  confirmait  de 
nouveau  la  liberté,  et  que  le  cardinal  était  parfaitement 
libre  d'employer  une  notation  qui  venait  d'être  publique- 
ment louée  par  le  Souverain  Pontife. 


Le  cardinal  Gibbons  se  trouvant  récemment  à  Rome 
dans  une  séance  qu'on  donna  en  son  honneur  au  Collège 
Américain  du  Sud,  les  élèves  chantèrent  devant  lui  plu- 
sieurs morceaux  de  chant  grégorien  suivant  la  méthode 
de  Dom  Pothier.  Le  cardinal  fut  enthousiasmé  de  ces 
mélodies,  et,  dans  sa  réponse  aux  discours  qui  lui  avaient 
été  adressés,  il  annonça  sa  résolution  d'introduire  le  chant 
grégorien  des  Bénédictins  dans  son  grand  séminaire  de 
Baltimore.  Cette  mesure  est  évidemment  le  prodrome  de 
l'extension  de  ce  chant  à  tout  son  diocèse,  et  quand  on 
réfléchit  à  la  grande  popularité  dont  jouit  ce  cardinal 
aux  États-Unis,  il  est  à  croire  que  le  mouvement  dont  il 
se  fait  l'initiateur  aura  de  nombreux  imitateurs  dans  les 
80  diocèses  qui  se  partagent  la  grande  république. 

Les  Français  cependant  demandent  autre  chose  que  le 
bref  de  Solesmes.  Les  industries  du  livre  veulent  du  tra- 
vail, et,  s'étant  agitées  une  première  fois,  elles  voudraient 
de  nouveau  forcer  la  main  aux  pouvoirs  publics  pour  ob- 
tenir une  solution,  non  plus  officieuse,  mais  officielle,  à 
des  réclamations  qu'elles  croient  d'une  absolue  légitimité. 
Une  interpellation  est  préparée  pour  être  présentée  à  la 
Chambre  française  et  faire  protéger  le  livre  par  une  dé- 
claration officielle  du  Pape  attestant  que  la  France  peut 
imprimer  tel  chant  qui  lui  plaira  et  que  le  monopole, 
maintenant  terminé  de  Pustet,  ne  la  lie  plus  en  quelque 
manière  que  ce  soit.  Le  Pape  n'a  pas  intérêt  à  ce  qu'une 
pareille  question  soit  déférée  à  la  Chambre,  surtout  en 
ce  moment  où  des  luttes  autrement  graves,  grosses  de 
bien  plus  douloureuses  conséquences,  attirent  toute  son 
inquiète  sollicitude.  Si  l'on  en  croit  les  bruits  qui  circulent, 
le  Souverain  Pontife,  qui  s'est  exclusivement  réservé 
cette  question,  publierait  sous  peu  un  document  qui  don- 
nerait tou'e  satisfaction  aux  maisons  catholiques  d'édi- 
tions, et  leur  assurerait  la  liberté. 

Tel  est  actuellement  l'état  de  cette  question,  qui  n'in- 
téresse pas  seulement  la  France,  mais  tous  les  pays,  car 
la  liberté  proclamée  pour  un  éditeur  est  par  là  même 
promulguée  pour  tous  ;  et  ce  sera  partout  une  noble  ému- 
lation pour  puiser  aux  meilleures  sources  le  chant  tradi- 
tionnel de  l'Église.  On  fêtera  solennellement  en  1904  le 
quinzième  centenaire  de  la  mort  de  saint  Grégoire  le 
Grand,  et  la  meilleure  manière  d'honorer  le  grand  Pape 
est  d'étendre  l'étude  et  l'exécution  des  mélodies  dont  il 
est  l'auteur.  Elles  sont  à  l'ensemble  de  la  liturgie  ce  que 
la  fleur  est  à  l'arbre  et  le  parfum  au  fruit. 

D'autre  part,  la  Croix,  en  publiant  le  bref  du 
Saint  Père  à  Dom  Delatte,  l'a  fait  précéder 
des  réflexions  suivantes  : 

Les  savants  travaux  de  Dom  Pothier  ont  opéré,  nos 
lecteurs  le  savent,  une  véritable  révolution  dans  le  chant 
liturgique,  mais  révolution  qui,  à  l'encontre  des  autres, 
ne  pouvait  amener  que  de  bons  résultats. 

Depuis  longtemps  on  avait  perdu  l'intelligence  de  ces 
vieilles  mélodies  grégoriennes,  le  déchant  et  le  mauvais 
goût  des  liturgies  jansénistes  du  XVIIP  siècle  avaient 
absolument  relégué  aux  rangs  des  énigmes  les  pages  de 
nos  vieux  manuscrits. 


Aussi,  les  éditions  de  chant  publiées  alors  furent 
pitoyables.  Embarrassés  des  «  neumes  »  qu'ils  ne  savaient 
comment  traduire,  les  éditeurs  sabraient  à  tort  et  à  travers, 
retranchaient  Ih,  ajoutaient  ici,  suivant  leur  caprice.  Du 
rythme  qui  est  l'âme  de  la  musique,  il  n'en  était  plus 
question,  et  on  en  vint  à  ne  voir  dans  les  mélodies  an- 
ciennes qu'un  chant  à  notes  égales,  lourd,  sans  âme,  sans 
vie,  exécuté  par  d'âpres  gosiers  qui  semblaient  devoir 
s'épuiser  sur  chaque  note. 

Les  éditions  publiées  en  France  dans  le  XIX"'  siècle 
n'eurent  pas  beaucoup  plus  de  mérite,  sauf  celle  de  la 
Commission  de  Reims  qui  se  rapprochait  plus  conscien- 
cieusement des  manuscrits.  Mais  cette  édition  elle-même 
n'en  était  que  plus  indigeste  parce  qu'elle  ne  donnait  pas 
les  règles  d'exécution. 

Ce  fut  le  grand  mérite  de  Dom  Pothier  de  rechercher 
dans  les  livres  anciens  les  mélodies  telles  qu'elles  étaient 
sorties  de  l'âme  de  leurs  auteurs.  11  exhuma  des  vieux 
traités  du  moyen  âge  les  règles  d'exécution  dont  la  trace 
était  perdue. 

On  hésita  d'abord,  mais  la  pureté  des  mélodies,  le 
rythme  qui  leur  donne  une  âme  eurent  vite  raison  des 
objections.  Il  fallut  se  rendre.  Sans  doute,  le  dernier  mot 
n'est  pas  encore  dit;  de  tel  ou  tel  perfectionnement  dans 
l'interprétation  surgiront  de  nouvelles  découvertes.  La 
méthode  est  susceptible  de  progrès. 

Mais  déjà  les  preuves  historiques,  les  preuves  techni- 
ques sont  surabondantes  pour  rendre  indiscutable  le  sys- 
tème du  savant  Bénédictin.  Aussi,  les  controverses  vin- 
rent moins  du  côté  des  artistes  compétents  que  du  côté 
des  liturgistes  à  outrance. 

Peu  avant  l'apparition  du  graduel  bénédictin,  l'éditeur 
catholique  Pustet  de  Ratisbonne  avait  reçu  du  Saint-Siège 
le  privilège  d'être  l'éditeur  officiel  des  livres  du  culte.  Un 
décret  postérieur  avait  prescrit  de  n'imprimer  dans  le 
missel  que  le  chant  de  Ratisbonne.  On  se  retrancha  der- 
rière ce  caractère  officiel  pour  écarter  l'édition  bénédictine 
devant  l'édition  prétendue  obligatoire  ;  mais  les  mélodies 
grégoriennes  s'imposaient  d'elles-mêmes.  Le  privilège 
temporaire  de  l'éditeur  Pustet  est  depuis  quelque  temps 
périmé  et  n'a  pas  été  renouvelé.  Le  chant  de  Dom  Pothier 
s'est  propagé  depuis  en  toute  liberté  et  a  été  admis  dans 
nombre  de  Séminaires  et  d'Ordres  religieux. 

Le  dernier  bref  de  S.  S.  Léon  XIII  adressé  à  Dom 
Delatte,  daté  du  17  mai  dernier,  en  même  temps  qu'il  est 
le  digne  couronnement  des  efforts  des  Bénédictins  pour 
'  la  restauration  du  chant  traditionnel,  précise  la  liberté 
laissée  à  tout  effort  «  en  vue  de  nouveaux  résultats  à  ob- 
tenir dans  cette  science  ou  dans  cet  art,  pourvu  qu'on 
sauvegardela  charité  mutuelle,  la  soumission  et  le  respect 
qui  sont  dus  à  l'Église.  > 

Il  ne  sera  plus  permis  de  dire  désormais  (ce  fut  jadis 
une  objection  courante)  que  l'exécution  des  mélodies  est 
presque  impossible,  car  les  ouvrages  publiés  par  les  Béné- 
dictins i.  sont  désormais  répandus  au  grand  jour  et  sont 
dans  beaucoup  d'endroits  d'un  quotidien  usage  ».  Enfin, 
connue  on  le  voit  dans  le  texte  lui-même  du  Bref,  le  Pape 
fait  ressortir  la  grande  puissance,  le  mérite  merveilleux 
de  ces  mélodies. 

Nous  sommes  sûr  que  ce  chant  se  répandra  bien 
davantage  et  que  nous  entendrons  enfin  dans  nos  églises 
de  vraies  mélodies  ayant  un  sens,  un  rythme  et  un  chant 
qui  parlent  à  l'âme  et  au  cœur. 


chronique. 


451 


ffionumcnts  anciens. 


LA  suite  d'une  visite  faite  à  Angers 
par  M.  Roujon,  directeur  des  Beaux- 
Arts,  ont  été  classés  parmi  les  monu- 

ments   historiques    le    logis    Barrault 

(musée  actuel  d'Angers),  les  ruines  de  l'impor- 
tante abbaye  Toussaint,  célèbres  par  leurs  voûtes 
hardies,  originales  et  typiques,  si  pittoresques 
dans  leur  vêtement  de  verdure  qu'on  en  fait 
présentement  un  parc  public,  et  l'ancienne  église 
Saint-Martin,  occupée  actuellement  par  le  dépôt 
des  tabacs. 

Dans  sa  dernière  séance,  la  Société  des  Amis 
des  momuiicnts  s'est  occupée  de  deux  questions 
qui,  pour  le  moment,  intéressent  vivement  l'opi- 
nion publique.  D'abord,  elle  a  tenu  à  renouveler 
les  protestations  qu'elle  avait  déjà  maintes  fois 
élevées  contre  toute  altération  du  palais  de  la 
place  de  la  Bourse,  et  elle  a  exprimé  le  vœu  que 
l'Administration  de  la  Ville  et  le  Conseil  muni- 
cipal reviennent  sur  les  décisions  qu'ils  ont  déjà 
prises  à  ce  sujet.  Puis,  à  propos  de  la  question 
des  remparts  d'Avignon,  elle  a  décidé  de  trans- 
mettre à  M.  le  ministre  de  l'Intérieur,  président 
du  Conseil,  la  protestation  suivante  : 

«  La  Société,  pénétrée  des  intérêts  de  l'art  et  de 
l'histoire  de  la  France,  proteste  contre  toute  démolition 
de  l'enceinte  d'Avignon,  démolition  qui  violerait  le  droit 
de  propriété  indiscutable  de  l'État  et  serait  pour  toutes 
les  municipalités  de  France  le  pire  des  exemples.  » 

La  démolition  d'une  grande  partie  des  rem- 
parts d'Avignon  vient,  en  effet,  d'être  décidée 
entre  le  ministère  de  l'Instruction  publique  et 
des  Beaux-Arts  (qui,  l'an  dernier,  se  déclarait 
«  résolu  à  s'opposer  par  tous  les  moyens  légaux 
à  toute  mesure  tendant  à  l'exécution  de  ce  pro- 
jet »)  et  la  municipalité  d'Avignon,  avec  l'agré- 
ment de  la  Commission  des  Monuments  histo- 
riques. 

C'est  là,  remarque  le  Courrier  de  l'Art,  une  vio- 
lation flagrante  de  la  loi,  qui  ne  permet  pas  à 
l'État  d'aliéner  quoi  que  ce  soit  de  son  domaine, 
sans  y  être  autorisé  par  un  acte  législatif. 

Sur  l'intervention  de  la  Commission  du  Vieux- 
Paris,  on  va  procéder  à  la  restauration  de  la 
belle  verrière  de  Saint-Germain-l'Auxerrois  re- 
présentant X Incrédulité  de  saint  Thomas, 

Une  proposition  ayant  pour  objet  la  création 
d'une  Commission  archéologique  du  département 
de  la  Seine,  vient  d'être  soumise  au  Conseil 
Général.  Cette  commission,  analogue  à  celle  du 
Vieux- Paris  dont  les  travaux  sont  limités  à  la 
Ville  de  Paris  même,  permettrait  dans  certains 
cas  d'agir  plus  facilement  dans   toute   l'étendue 


du  département  de  la  Seine,  où  la  Commission 
du  Vieux-Paris,  rencontre  parfois  des  mauvais 
vouloir.Cette  Commission  départementale  serait 
divisée  en  quatre  sections  comprenant  chacune 
vingt  membres.  Quinze  membres  seraient  choisis 
parmi  les  archéologues  locaux  et  les  artistes 
désignés  par  le  préfet  de  la  Seine  ;  les  cinq  der- 
niers membres  seraient  pris  parmi  les  membres 
de  la  Commission  du  Vieux-Paris.  M.  Mithouard, 
auteur  de  cette  proposition,  après  l'avoir  déve- 
loppée dans  la  séance  du  Conseil  de  mercredi,  a 
obtenu  qu'elle  fût  renvoyée  à  l'administration 
pour  y  être  sérieusement  étudiée. 


La  Commission  royale  des  monuments  de 
Belgique  a  appelé  l'attention  sur  la  curieuse 
église  de  Forest,  qui  a  failli  faire  place  à  une 
neuve,  mais  qu'il  importe  de  conserver. 

On  a  classé  l'église  de  Sensenruth  (Belgique), 
qui  remonte  au  XV"^  siècle  ;  ses  fenêtres  ont  des 
meneaux  d'un  tracé  original  ;  elles  gardent  un 
panneau  de  vitrail  du  XVI*'  siècle  ;  la  base  des 
fonts  remonte  à  l'époque  romane  ;  ils  étaient  à 
support  central  accosté  de  quatre  colonnes  ;  un 
morceau  de  la  cuve  est  encastré  dans  le  mur  à 
l'extérieur,  de  même  qu'à  Lessines. 

M.  l'abbé  P.  Daniels  a  décrit  dans  un  rapport 
adressé  à  M.  le  Gouverneur  de  la  province  de 
Limbourg,  les  peintures  murales  qu'il  a  découver- 
tes dans  l'église  de  Zepperen.  Elles  sont  de  1 509, 
et  représentent  le  Jugement  dernier.  Les  murs 
de  l'église  étaient  polychromes  «  d'une  manière 
systématique    ». 

Des  peintures  murales  ont  été  naguère  décou- 
vertes dans  l'église  de  Wuestwezel  (Anvers). 
Signalons  que  cette  église  a  gardé  la  croix 
triomphale,  reléguée  dans  la  tour  ;  encore  une  à 
remettre  en  place. 

A  Alost  aussi  (église  St-Martin)  ont  été  mises 
à  nu  des  fresques  décorant  la  voûte  du  pourtour 
du  chœur;  elles  datent  du  XVI^  siècle. 

L'église  d'Havré(Mons),  encore  gothique,  date 
de  la  seconde  moitié  du  XVI'"  siècle  ;  elle  est 
digne  d'une  bonne  restauration  ;  on  va  y  pour- 
voir. 

L'église  d'Hoegard  (Brabant)  du  XVII !« 
siècle,  a  été  classée  dans  la  s'"'^  catégorie  des 
monuments.  Elle  garde  des  fonts  romans.  Elle 
est  accostée  d'un  intéressant  presbytère  de 
l'époque  Louis  XV,  un  type  également  classé. 

La  Commission  des  monuments  s'est  intéressée 
aux  restes  de  l'abbaye  des  Dames  Nobles  de 
Herckenrode  (Limbourg).  On  y  voit  un  vaste 
porche  d'entrée  du  XV  siècle,  surmonté  d'un 
clocheton  original,  type  superbe  du  style  liégeois. 


452 


Bebur  De  V^xt  cbrctten. 


L'abbaye  a  été  détruite  lentement,  sans  nécessité. 
Les  démolisseurs,  pris  de  scrupule,  ont  épargné 
une  ravissante  cage  d'escalier,  à  voûte  rampante, 
du  XV'=  siècle.  On  pourrait  sauver  ce  qui  reste 
en  l'affectant  à  une  école  agricole. 

Après  avoir  restauré  le  chœur  de  la  belle 
abbatiale  de  Lisseweghe,  on  va  s'occuper  de  ses 
trois  nefs,  qui  ont  été  grattées.  On  rétablira  les 
arcatures  décorant  les  murs  des  bas-côtés  ;  on 
couvrira  le  vaisseau  d'un  plafond  en  bois. 

La  vaste  abbatiale  de  Saint-Hubert,  à  cinq 
nefs,  est  aussi  en  voie  de  restauration.  C'est  un 
des  plus  majestueux  vaisseaux    de  la   Belgique. 

L'Hôtel-de- Ville  de  Looz,  qui  date  de  1680, 
réclame  une  restauration.  L'église  de  cette  loca- 
lité remonte  à  l'époque  romane,  mais  elle  est 
moderne,  la  tour  est  ogivale  ;  on  garde  les  restes 
d'un  ancien  cloître  ;  elle  va  être  classée. 


Solcsmcs. 

OUS  avons  entretenu  jadis  nos  lec- 
teurs de  l'érection  de  l'abbaye  de  So- 
lesmes;(que  leurs  pieux  habitants  vont 
peut-être  devoir  quitter  pour  l'exil, 
grâce  à  la  liberté  large  dont  jouissent  présente- 
ment les  sujets  de  la  République  française)  (') 
dont  nous  avons  donné  le  plan,  d'après  le  dessin 
de  deux  architectes  de  ce  remarquable  monu- 
ment, le  R.  P.  Dom  Mellet  et  M.  Mellet,  archi- 
tecte à  Rennes.  Ce  dernier  est  aujourd'hui  Vice- 
Président  de  la  Société  des  architectes  de  Rennes; 
son  aîné,  le  moine,  en  est  membre  honoraire.Voici 
ce  qu'on  lit  à  ce  sujet  dans  XArcliitechire,  \\°  26. 

Une  partie  de  ce  monastère  subsistait,  consistant  en 
d'assez  grands  corps  de  bâtiments  construits  sous  Louis 
XIV.  Nos  confrères  y  ont  ajouté,  sur  un  plan  réellement 
magistral,  des  constructions  considérables  et  une  église, 
tous  ouvrages  traités  dans  le  style  des  premiers  temps 
du  moyen-âge.  Il  leur  avait  sans  doute  semblé,  à  eu.K- 
mêmes  et  à  la  communauté  dont  ils  étaient  les  archi- 
tectes, qu'une  religion  aujourd'hui  consacrée  par  la  foi  des 
multitudes  de  générations  qui  se  sont  succédé  dans  le 
monde  entier  et  sur  notre  sol  de  France,  depuis  près  de 
deu.x  mille  ans,  appelait,  pour  l'habitation  des  membres 
de  l'un  de  ses  ordres  monastiques  les  plus  anciens  et  les 
plus  illustres,  la  réalisation  d'une  manière  d'art  confinant 
à  son  origine,  manifestement  écluse  du  pur  sentiment 
qu'elle  a  créé,  et  répondant  à  son  idéal  avec  des  intensi- 
tés d'expression  qui  n'ont  jamais  été  surpassées  dans 
aucun  des  styles  d'architecture  inventés  depuis  cette  épo- 
que lointaine. 

Nous  devons  dire,  quoi  qu'il  en  soit,  que  cette  ré- 
surrection des  formes  romane  et  ogivale  a  donné  lieu  à 
un  édifice  très  remarquable,  à  coup  sîir  extraordinaire- 
ment  imposant  dans  la  campagne  où  il  est  élevé. 

Figurez-vous,  tout  près  d'un  petit  village,  sur  une  rive 
de  la  Sarthe,  de  hautes  murailles  épaisses,  encore  conso- 


j.  V.  Revue  de  l'Art  chrilien,  années  1899,  p.  435  et  1900,  p.  160. 


lidées  par  des  contreforts  puissants,  avec  çà  et  là  des 

baies  géminées,  sous  des  arceaux  bas,  ou  bien  des  tours, 
des  avant-corps,  des  nus  de  pierre  tout  unis  d'une  con- 
struction bien  accusée,  somme  toute,  un  édifice  ayant 
les  apparences  d'un  de  ces  monastères  fortifiés  qui  ser- 
vaient de  refuge  aux  familles  des  paysans  d'alentour,  en 
un  temps  troublé  par  des  guerres  continuelles. 

A  l'intérieur,  ce  sont  des  désirs  d'air  et  de  lumière,  le 
souci  d'une  vie  calme,  paisible,  recueillie,  qui  ont  déter- 
miné les  formes  des  cloîtres  tout  à  jour,  des  hauts  réfec- 
toires voûtés  sur  des  colonnes  trapues,  des  salles  d'assem- 
blée des  religieux  et  de  leurs  cellules. 

Les  architectes  ont  d'ailleurs  soudé  à  leurs  ouvrages, 
avec  une  grande  habileté,  les  constructions  du  temps  de 
Louis  XIV,  traitées  plutôt  en  façon  de  château  rural,  et 
ont  parfaitement  compris  et  rendu  les  quelques  adjonc- 
tions de  même  style  que  nécessitaient  les  raccords.  Ils 
ont  encore  imaginé  des  aménagements  de  détails  en  rap- 
port avec  les  usages  de  la  vie  de  notre  temps,  notamment 
une  usine  d'électricité,  mais  sans  jamais  perdre  de  vue  la 
vérité,  la  sincérité,  la  pure  loyauté  de  leur  point  de  dé- 
part, sans  rien  sacrifier  au  piètre  gothique  de  convention 
si  souvent  pratiqué  aujourd'hui.  La  note  d'art  qu'ils  ont 
réalisée  est  saine,  dénote  une  élévation  de  pensée  et  de 
sentiment  peu  commune.  Je  prie  ces  messieurs,  en  rece- 
vant ce  témoignage  si  moderne  de  l'estime  de  leurs  con- 
frères de  la  Société  centrale,  de  croire  à  notre  profond 
respect  pour  l'idée  maîtresse  qui  les  a  guidés  dans  tous 
leurs  travaux  de  l'abbaye  de  Solesmes. 


KoutJcUcs. 

N  comité  vient  de  se  constituer  dans 
le  but  d'organiser  l'an  prochain,  à 
l'École  des  Beaux-Arts,  .une  expo- 
sition rétrospective,  historique  et  tech- 
la  gravure  sur  bois,  envisagée  au 
double  point  de  vue  de  l'estampe  et  de  l'illustra- 
tion du  livre  ;  il  a  pour  président,  M.  Auguste 
Lepère,  pour  vice-présidents,  MM.  Henri  Béral- 
di,  Roger  Marx  et  Jean  Masson.  Afin  de  donner 
à  cette  manifestation  tout  l'éclat  qu'elle  doit 
comporter,  le  Comité  organisateur  adresse 
un  chaleureux  appel  aux  amateurs  possédant 
des  estampes  gravées  en  bois,  du  XV«  à  la  fin 
du  XVJe  siècle,  ou  des  livres  à  figures  sur  bois, 
français  et  étrangers.  Le  Comité  acceptera  avec 
reconnaissance  les  indications  de  nature  à  lui  per- 
mettre de  rendre  aussi  complète  que  possible 
l'exposition  projetée.  Toutes  les  coininunications 
doivent  être  adressées  au  siège  social  du  Comité, 
67,  rue  Sainte-Anne,  chez  M.  Loys  Delteil,  l'un 
des  secrétaires. 

* 
*  * 

M.  Sellier,  membre  de  la  Commission  du 
Vieux-Paris,  qui  depuis  quelque  teinps  fait  pro- 
céder à  des  recherches  historiques  dans  les  sous- 
sols  d'une  ancienne  église,  y  a  découvert  récem- 
ment plusieurs  sarcophages.  Dans  l'un  d'eux  se 
trouvaient  de  nombreuses  pierreries  cloisonnées 


nique 


d'or,  parmi  lesquelles  une  broche  mérovingienne 
et  une  agrafe  en  or  ayant  servi  À  un  manteau 
royal  de  la  même  époque.  Dans  un  autre  sarco- 
phage, M.  Sellier  a  découvert  quatre  crânes,  des 
débris  d'ossements  humains,  des  aiguières  en 
bronze  de  l'époque  gallo-romaine.  Toutes  ces 
trouvailles  ont  été  envoyées  au  musée  déjà  établi 
chez  M.  Delaize,  rue  de  la  République. 


Le  bruit  qui  se  fait  depuis  quelque  temps 
autour  de  l'installation,  au  musée  Guimet,  des 
découvertes  de  M.  Albert  Gayet,  et  notamment 
de  la  présence  parmi  ces  découvertes,  des  restes 
de  Thaïs,  chrétienne  du  IV^  siècle,  a  attiré 
l'attention  du  cardinal-archevêque  de  Paris,  Mgr 
Richard.  D'après  les  pourparlers  entre  les  repré- 
sentants de  Mgr  Richard,  M.  l'abbé  Audollant 
et  M.  Gayet,  il  semblerait  résulter  que  la  Thaïs 
du  musée  Guimet  d'abord  prise  pour  une  célèbre 
courtisane  est  bien  la  Thaïs  chrétienne  du  IV"^ 
siècle.  Quant  au  Sérapion,  qui  fait  partie  aussi 
des  découvertes  dont  il  s'agit,  il  s'est  élevé  des 
doutes  très  sérieux  sur  son  identité.  Il  a  existé, 
paraît-il,  au  moins  deux  cent  soixante-douze 
Sérapion  qui  ont  été  anachorètes. 


La  Bibliothèque  de  l'École  des  Beaux-Arts 
vient  de  s'enrichir,  grâce  à  la  libéralité  de  la  Direc- 
tion des  Beau.K-Arts,  d'une  magnifique  série 
de  dessins  originaux,  exécutés  par  M.  Gélis- 
Didot  d'après  les  peintures  décoratives  françaises 
du  XVIe  au  XVIII"-'  siècle.  Cette  collection,  qui 


comprend  169  pièces  en  couleurs  ou  en  noir, 
complète  à  souhait  une  suite  plus  ou  moins  nom- 
breuse, conservée  dans  le  même  dépôt  et  repro- 
duisant les  chefs-d'œuvre  de  notre  peinture  dé- 
corative du  XI'^  au  XVI'^  siècle. 


La  coUectiond'objets  d'art  rapportée  de  Russie 
par  le  savant  explorateur,  M.  le  baron  de  Baye, 
et  offerte  par  lui  à  la  Ville  de  Paris,  est  depuis 
plusieurs  jours  exposée  au  musée  Galliera.  Une 
salle  très  artistiquement  aménagée  par  le  con- 
servateur du  musée,  M.  Ch.  Formentin,  lui  est 
tout  entière  consacrée.  On  y  voit  groupés  tous 
les  échantillons,  anciens  et  modernes,  de  l'art 
industriel  russe,  depuis  les  bijoux  qu'on  fabrique 
au  Caucase  jusqu'aux  broderies  exécutées  par 
des  paysannes  de  la  Petite  Russie. 


Une  découverte  d'une  grande  valeur  artistique 
a  été  faite  à  Venise  dans  l'église  des  Frari,  qui 
renferme,  parmi  d'autres  tombeaux,  celui  de 
Jacopo  Marcello,  le  vainqueur  de  la  bataille  de 
Gallipoli,  mort  en  1484.  En  nettoyant  le  mur  de 
l'église  derrière  ce  tombeau,  on  a  mis  au  jour 
une  magnifique  peinture  à  fresque  représentant 
Jacopo  Marcello  à  cette  bataille,  plus  un  grand 
nombre  de  soldats,  de  chevaux,  de  prisonniers 
de  guerre,  et  un  char  triomphal.  On  attribue 
cette  œuvre  à  Giovanni  Bellini  (plus  connu  sous 
le  nom  de  Gianbellino)  qui  fut  le  réformateur  de 
l'École  vénitienne  et  le  précurseur  de  Titien. 


Imprimé  par  Desclée,  De  Brouvver  &  €'■=,  Bruges. 


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nLiixxjij.-m:j.ii-iiir;nn.rtiriii]i-]LLlJtJ-iiJnriaiiiiir;  -rti 
ilr  II  1 1  r  II  r.'i  I  ;  1 111  i.r?iii  1 1 1 1 tiiti'i.  1  iiiii t irgifTTTmnf?'! 


B>§»  pacairisaiit  tomî  les   bcuic  m 

=  >^ ^ 

5)^     44"'«  Hnnce.  —  5'  Sene. 

"^      Conu-  XII  ri.--  tie  (a  codcction). 


E  I  I  juillet  dernier  est 
mort  à  Bruxelles  l'ar- 
tiste dont  ma  plume 
vient  de  tracer  le  nom. 
Il  me  semble  opportun 
de  lui  consacrer  un  sou- 
venir dans  cette  Revue: 
moins  peut-être  à  cause  de  l'originalité  et  de 
l'envergure  de  son  talent,  mais  parce  que, 
par  la  pureté  de  sa  vie  et  la  noblesse  de  ses 
aspirations,  il  offre  un  modèle  qu'il  est  bon 
de  recueillir.  On  peut  appliquer,  dans  une 
certaine  mesure,  à  Guffens  ce  que,  peu  de 
temps  après  la  mort  d'Hippolyte  Flandrin, 
—  avec  lequel  son  œuvre  n'est  pas  sans 
analogie  —  on  a  écrit  de  ce  dernier.  «  Sa 
vie  n'intéressait  pas  seulement  le  progrès 
de  notre  art  national,  elle  était  aussi  un 
bon  conseil,  une  leçon  pour  tout  le  monde, 
depuis  les  jeunes  artistes  auxquels  elle 
enseignait  le  dévouement  passionné  au 
devoir,  jusqu'aux  artistes  plus  avancés  dans 
la  carrière  qu'elle  pouvait  rappeler  à  la  bien- 
veillance envers  les  rivaux,  à  la  générosité 


envers  les  adversaires,  et  quelquefois  au 
respect  de  leur  propre  indépendance  (').  » 
Godefroid  Guffens,  —  l'artiste,  en  vrai 
Flamand,  signait  Godfried,  nom  qui  peut  se 
traduire  «  la  paix  en  Dieu», qui  lui  convenait 
de  tout  point  —  est  né  dans  une  condition 
voisine  de  la  pauvreté,  àHasselt,  le  22  juillet 
1823.  Cette  ville,  on  le  sait,  est  située  à 
peu  de  lieues  de  Maes-Eyck  où  sont  nés 
les  deux  frères  qui  en  ont  immortalisé  le 
nom,  et  c'est  dans  cette  même  région  qu'ont 
vu  le  jour  Paul  de  Limbourg  et  ses  frères, 
les  admirables  artistes  qui,  au  service  du 
duc  de  Berry,  ont  peint  le  chef-d'œuvre 
connu  sous  le  nom  de  livre  d'heures  de  la 
Bibliothèque  de  Chantilly.  Guffens  était 
donc  l'enfant  d'un  sol  qui  a  produit  de  très 
grands  artistes  et  dont  la  fécondité  ne 
semble  pas  épuisée.  Son  père,  issu  d'une 
des  bonnes  familles  de  la  ville,  avait  perdu 
ses  parents  à  l'âge  de  sept  ans  ;  abandonné 
à  lui-même,  son  éducation  était  ce  qu'elle 

I.  Lettres  et  pensées  d'Hippolyte  Flandrin,  par  le  Vie'' 
Henri  Delaborde.  Notice  biographique,  p.  i. 


REVUE   DE    I.'aRT    CHRÉTIEN. 
1901.    —   6"**^    LIVRAISON. 


456 


îRcbuc  br  rSvt  tlKCttcn, 


avait  pu  devenir.  Il  s'était  marié  jeune,  et 
pour  subvenir  à  la  subsistance  de  la  famille 
qu'il  venait  de  fonder,  il  établit  une  bou- 
langerie. 

Si  le  patrimoine  était  maigre,la  bonne  fée, 
qui  sans  doute  avait  été  invitée  à  temps  au 
baptême  du  premier  enfant  né  de  cette 
union,  ne  permit  pas  qu'il  sentît  les  étrein- 
tes de  l'indigence.  Le  père  ne  pouvait  guère 
lui  donner  une  éducation  qu'il  n'avait  pas 
reçue  lui-même,  mais  la  maison  qu'il  habi- 
tait étant  spacieuse, il  en  loua  une  partie  à 
une  dame  du  nom  de  Soiron,  qui,  dans 
l'appartement  qu'elle  occupait,  ouvrit  une 
école  pour  jeunes  filles.  La  dame  était  ins- 
truite et  de  bonnes  manières;  son  institut 
fut  bientôt  fréquenté  par  les  jeunes  person- 
nes des  meilleures  familles  de  Hasselt. 
Voyant  le  jeune  Godefroid  un  peu  aban- 
donné, attirée  d'ailleurs  par  le  caractère 
simple  et  aimable  de  l'enfant,  elle  le  prit  en 
affection,  et  bientôt  commença  son  éduca- 
tion en  lui  apprenant  à  lire  et  à  écrire.  Seul 
de  son  sexe,  il  fut  admis  à  fréquenter  la 
classe  des  fillettes  ;  il  s'y  trouva  naturelle- 
ment un  peu  en  enfant  gâté.  La  direction 
maternelle  de  la  maîtresse  et  la  société  de 
ses  petites  compagnes  exercèrent  une  in- 
fluence durable  sur  le  caractère  doux  et 
réservé  du  petit  intrus.  Voulant,  de  son 
côté,  se  rendre  utile  à  l'établissement  où  il 
était  si  généreusement  accueilli,  il  taillait 
les  plumes  des  élèves,  —  à  cette  époque  on 
ne  connaissait  pas  l'usage  des  plumes 
métalliques,  —  et  il  crayonnait  des  dessins 
de  broderie  à  leur  usage.  C'était  la  première 
clarté  des  vues  de  la  Providence  sur  l'ave- 
nir de  l'enfant. 

Madame  Soiron  ayant  reconnu  ses  dis- 
positions pour  le  dessin,  l'envoya  à  une 
école  du  soir  tenue  par  un  peintre  décora- 
teur qui  passait  pour  avoir  une  bonne  mé- 
thode   d'enseignement.    Conformément    à 


l'usage  suivi  alors  par  toutes  les  académies, 
il  mit  le  débutant  au  dessin  des  principes, 
c'est-à-dire  qu'il  lui  fit  crayonner  les  dif- 
férentes parties  du  visage  humain:  pour  son 
début  Guffens  eut  à  dessiner  un  œil  ;  il  s'y 
mit  avec  un  tel  entrain  que,  longtemps 
avant  la  fin  de  la  leçon,  son  papier  était 
couvert  d'une  collection  d'yeux,  tous  plus 
exacts  les  uns  que  les  autres.  Sa  prestesse 
causa  une  révolution  parmi  les  gamins  qui, 
observant  le  nouveau  venu,  s'étaient,  à  son 
insu,  groupés  autour  de  lui.  Quand  le  petit 
Godefroid  s'en  aperçut,  il  fut  pris  de  con- 
fusion et  n'osait  lever  la  tète  de  dessus 
son  papier.  Dès  ce  moment,  il  fit  de  rapides 
progrès,  tout  en  continuant  à  composer  des 
dessins  de  broderies  pour  ses  compagnes 
de  la  classe  du  jour. 

Ce  fut  une  de  ces  compositions  qui  lui 
gagna  un  protecteur,  dont  la  générosité  lui 
permit  de  suivre  un  enseignement  d'ordre 
plus  élevé,  à  l'Académie  d'Anvers. 

Le  propriétaire  du  château  de  Herc- 
kenrode,  tout  proche  de  Hasselt,  dont 
la  fille  était  élève  de  Madame  Soiron, 
M.  Ulysse  Claes,  était  un  ami  des  arts  : 
à  cette  époque,  il  se  faisait  un  plaisir  de 
recevoir  chez  lui  les  artistes  les  plus  con- 
nus, notamment  les  musiciens.  Servais, 
Vieuxtemps,  Léonard,  Blaes  formaient  le 
cercle  de  son  choix  ;  un  soir  où  ces  mes- 
sieurs se  trouvaient  réunis  au  château,  la 
jeune  fille  de  leur  hôte  travaillait  à  une 
broderie  dont  le  dessin  attira  l'attention. 
On  trouva  le  modèle  excellent,  décelant 
chez  son  auteur  un  véritable  talent:  lorsque 
la  jeune  personne  fit  connaître  les  débuts 
de  l'enfant  qui  l'avait  tracé,  on  fut  unanime  à 
croire  que  tous  les  indices  annonçaient  un 
artiste.  Le  projet  d'envoyer  le  jeune  dessi- 
nateur à  l'Académie  d'Anvers  pour  y  faire 
des  études  en  rapport  avec  ses  dispositions 
surgit  naturellement,  et  ce  fut  le  maître  de 


dBodefrott)  6gtt)e  (I5iiffcn0. 


457 


la    maison    qui    résolut  de  réaliser    cette 
pensée. 

Peu  de  temps  après,  M.  Ulysse  Claes,  ac- 
compagné de  son  fils,  voulut  conduire  lui- 
même  Guffens,  alors  âgé  de  quinze  ans,  à 
l'Académie  d'Anvers.  Le  ii  octobre  1838, 
ils  montèrent  ensemble  dans  la  diligence 
qui  les  transporta  à  Louvain  pour  prendre 
le  train  d'Anvers,  où  ils  arrivèrent  dans 
l'après  midi.  Ils  descendirent  à  l'hôtel  des 
Pays-Bas,  fréquenté  par  les  artistes  et  ils 
dînèrent  le  jour  même  avec  Dekeyser,  Leys 
et  Godecharles,  qui  tous  trois  jouissaient 
déjà  d'un  véritable  renom. 

Guffens  fut  immédiatement  admis  à  fré- 
quenter l'atelier  de  Dekeyser,  où  se  trou- 
vaient une  trentaine  d'élèves,  tous  plus  âgés 
que  lui,  tous  plus  avancés  dans  l'étude  de 
l'art;  aussi   les  débuts  lui  semblèrent  durs. 

Mais  à  l'académie  les  places  étaient 
occupées.  Dans  son  désir  d'y  trouver  admis- 
sion, le  nouveau  débarqué  s'y  rendait 
chaque  soir  pendant  trois  semaines,  mais 
revenait  toujours  tristement,  n'ayant  pu 
aboutir.  Enfin  M.  Corr,  professeur  de  la 
classe,  touché  de  la  persistance  de  Guffens 
et  du  chagrin  que  lui  causaient  ses  décon- 
venues, demanda  à  un  élève  du  nom  de 
Jean  Swerts,  si,  se  gênant  un  peu,  il  ne 
pouvait  lui  céder  la  moitié  de  sa  place. 
Swerts  accéda  de  bonne  grâce  ;  ce  mouve- 
ment d'obligeante  camaraderie  fut  le  point 
de  départ  d'une  amitié  étroite  et  fidèle 
jusqu'à  la  mort.  Elle  aboutit  en  peu  d'années 
à  une  collaboration  des  plus  fécondes. 

Guffens  arrivait  à  Anvers  au  bon  mo- 
ment. C'était  une  époque  de  fermentation, 
d'enthousiasme,  d'essor.  C'était  l'entrain  de 
la  jeunesse  de  la  patrie  et  du  renouveau  de 
l'art.  Le  respect  des  traditions  du  passé 
illuminait  les  espérances  de  l'avenir.  De- 
keyser ouvrait  l'horizon  aux  plus  belles 
visions   des  jeunes,    et  les   vieux  étonnés 


avaient  applaudi  à  ses  débuts.  Son  atelier, 
nous  venons  de  le  voir,  était  encombré 
d'élèves.  Guffens  apprenait  à  y  monter  sa 
palette  en  même  temps  que  Verlat,  le 
brosseur  merveilleux, le  fougueux  animalier. 
Un  grand  nombre  de  jeunes  artistes  qui 
ont  marqué  dans  l'histoire  moderne  de 
l'école  flamande,  en  étaient  à  leurs  premiers 
essais.  C'était  l'époque  des  débuts  de  Leys 
qui  fit  école,  de  Joseph  Lies,  peintre  excel- 
lent, quoique  peu  productif,  du  pieux  et 
tendre  Hendricx,  le  maître  du  chemin  de 
la  croix  de  Notre-Dame  d'Anvers  et  de 
nombre  d'autres  peintres  qui  presque  tous 
avaient  ce  qui  s'est  perdu  depuis,  des 
convictions,  de  l'ardeur  au  travail  et  le 
désir  de  reprendre  la  palette  chatoyante  de 
l'école  flamande. 

A  tout  cela  se  mêlait  bien  une  certaine 
dose  de  romantisme  qui  devait  bientôt  se 
volatiliser  et  s'assagir.  Guffens  peignit 
alors  son  tableau  «  Rouget  de  l'Isle,  chan- 
tant la  Marseillaise  »  exposé  à  Paris  en 
1849,  et  acquis  pour  le  Musée  de  Philadel- 
phie ;  en  1845,  il  avait  déjà  envoyé  au  Sa- 
lon de  Paris  un  saint  Paul,  et  puis  «  une 
marchande  de  crevettes  d'Anvers  ».0n  voit 
qu'il  s'essayait  un  peu  à  tous  les  genres,  et 
dès  le  commencement  les  succès  ne  lui 
manquèrent  point.  Il  fit  plusieurs  voyages 
à  Paris,  ce  qui  lui  procura  l'occasion 
de  connaître  Ary  Scheffer  dont  il  avait  le 
talent  en  très  haute  estime;  dans  la  sincère 
admiration  que  lui  inspiraient  les  œuvres 
religieuses  du  maître, il  trouva  peut-être  des 
lumières  pour  la  voie  qu  il  devait  suivre  lui- 
même.  Aussi,  tout  en  se  faisant  connaître 
dans  les  expositions  du  pays  et  de  l'étran- 
ger, en  peignant  des  tableaux  de  chevalet 
et  des  portraits,  l'horizon  des  idées  du  jeune 
peintre  s'élargissait,  ses  aspirations  vers  le 
but  qu'il  entrevoyait  s'élevaient.  Les  con- 
versations qu'il  avait  avec  son  ami  Swerts, 


458 


3Rr\)uc  De  V^vt  chrétien. 


étaient  de  nature  à  le  fortifier  encore  dans 
le  désir  de  donner  un  but  déterminé  à  ses 
rêves  d'avenir.  Vers  1850,  les  deux  frères 
d'armes,  alors  déjà  en  pleine  possession  des 
procédés    techniques  de    leur  art,    fortifiés 
par  quelques  succès,  mais  avides  de  progrès, 
entreprirent  en  Allemagne  et  en  Italie  un 
voyage    qui   dura   deux  ans.   Si   naturelle- 
ment leur  enthousiasme  pour  l'art  s'exalta 
à  la  vue  des   œuvres  des  grands   maîtres 
du  pays  où  fleurissent  les  orangers,  et  si 
dans  mainte  fresque  ils  puisèrent  de  pré- 
cieux   motifs    d'étude,    ils    trouvèrent    «n 
Allemagne   les   peintres   vivants   dont   les 
œuvres    les   stimulaient   à   un    haut   point. 
Grâce  aux  pages  monumentales  des  Over- 
beck,   des   Cornélius,    des    Kaulbach,   des 
Rethel    et  de    beaucoup    d'autres  artistes 
aux    grandes    vues,    il   s'était    produit    un 
mouvement  en  faveur  delà  peinture  monu- 
mentale, des  fresques  et  de  la   décoration 
murale  au  moyen  de  compositions  religieu- 
ses et   historiques,  qui  impressionna  vive- 
ment les  deux  flamands  cherchant  leur  voie. 
Ayant  une  haute  idée  de  la  mission  de  l'art, 
ils  voulurent  s'inspirer  des  mêmes  principes 
et  résolurent,  sans  désavouer  leur  nationa- 
lité, sans  faire  violence  à  leur  tempérament 
personnel,  d'importer  dans  leur  pays  un  art 
qui,  en  Allemagne,  avait  produit  des  œuvres 
dignes  de  leur  admiration.  L'esprit  méditatif 
et    l'intelligence    très    compréhensive    de 
Guffens   le  portaient  naturellement  à  voir 
les  choses  d'un  point  de  vue  que  l'on  ne  pou- 
vait taxer  d'exclusivement  professionnel. 

Pour  lui,  comme  pour  son  confrère,  la 
peinture  murale  devait  être  pour  le  peuple, 
—  et  par  ce  mot  ils  comprenaient  toutes  les 
classes  de  la  société,  —  une  source  d'édifi- 
cation, d'enseignement,  de  méditation,  à 
l'église  ;  et,  dans  les  monuments  civils,  — 
une  incitation  aux  idées,  un  enseignement, 
le  moyen  de  renouer  les  traditions    du  pa- 


triotisme  et   d'alimenter  l'amour   du  pays 
natal. 

De  retour  en  Belgique,  ils  se  mirent 
énergiquement  au  travail.  Les  peintures 
murales  de  l'église  paroissiale  de  la  ville  de 
St-Nicolas  furent  un  début  qui  rencontra 
le  succès  et  obtint  des  encouragements. 
Adolphe  Siret,  dans  \ç.  Journal  des  Beaux- 
Arts,  se  montra  l'appui  fidèle  des  peintres, 
et  le  juge  sympathique  de  leur  tendance 
qui,  en  Belgique,  ne  répondait  peut-être 
pas  de  tout  point  aux  traditions  reçues, 
et  au  tempérament  national,  bien  que  Por- 
taels  eût,  de  son  côté,  tenté,  à  cette  époque, 
quelques  essais  de  peinture  monumentale. 
Après  l'église  de  N.-D.  de  St-Nicolas,  les 
deux  peintres  entreprirent  le  décor  de 
l'église  de  S  t-Georges  à  An  vers  (1859- 1868). 
Dans  ce  cycle  considérable, qui  ne  comporte 
pas  moins  de  quatre-vingts  panneaux,  les 
artistes  voulurent  grouper  leurs  composi- 
tions de  façon  à  représenter  les  trois  gran- 
des phases  de  l'Église  militante,  souffrante 
et  triomphante.  Au  cours  de  l'exécution  de 
ce  vaste  ensemble,  les  artistes  n'ont  peut- 
être  pas  su  s'affranchir  assez  complètement 
du  modelé  et  des  effets  trop  concentrés 
de  la  peinture  de  chevalet. 

De  même  que  son  frère  d'armes  Jean 
Swerts,  Guffens  n'était  pas  seulement 
praticien  habile,  enthousiaste  de  l'art,  c'était 
encore  un  penseur,  un  esprit  cultivé,  qui 
savait  au  besoin  recourir  à  la  plume  lorsque, 
mieux  que  le  pinceau,  cet  instrument  con- 
venait plus  à  la  diffusion  des  idées  qu'il 
voulait  faire  triompher.  On  doit  à  la  colla- 
boration de  Guffens  et  de  Swerts  plusieurs 
essais  littéraires  qui  sont  loin  d'être  dénués 
de  mérite  et  peuvent  encore  être  lus  avec 
intérêt,  surtout  au  souvenir  des  circonstan- 
ces qui  les  ont  fait  naître.  C'est  ainsi  que 
l'on  doit  aux  deux  amis  :  Souvenirs  diin 
voyage  artistique  en  Allemagne.  C'est,   en 


Hetiuc  Dc  l'Hrt  cïjtcticn. 


Pl.  X. 


Goïirfroiti=6giïic  (âuffms. 

La  sainte  Vierge  et  saint  Jean  au  pied  de  la  Croix. 

{Peinture  murale  de  l'église  N.-D.  à  Saint-Nicolas.) 


(15ot)efroîti'6gîde  6uffen0. 


459 


vérité,  un  rapport  détaillé  au  ministre  de 
l'intérieur  de  Belgique,  qui  lui  fut  adressé 
à  l'occasion  de  l'Exposition  universelle  de 
Paris  en  185S  (').  Un  travail  de  même 
nature  est  le  Rapport  sur  t Exposition 
historiipie  de  Munich  (').  Cette  exposition, 
très  remarquable,  avait  été  organisée  par 
l'Académie  de  Munich,  qui,  voulant  fêter 
le  cinquantième  anniversaire  de  son  exis- 
tence, avait  ainsi  résumé,  pour  ainsi  dire, 
l'histoire  de  l'art  allemand,  pendant  le 
dernier  demi-siècle.  Il  y  figurait  1762  ta- 
bleaux, cartons,  aquarelles  et  gravures,  138 
sculptures  et  310  dessins  d'architecture. 
Malgré  le  ton  un  peu  enthousiaste  de  cette 
revue,  on  y  trouve,  dépouillée  des  formules 
officielles,  l'impression  des  auteurs  et  on  ne 
peut  qu'admirer  la  forme  variée  de  leurs 
jugements  où  la  critique  n'a  pour  ainsi  dire 
aucune  part,  en  présence  de  la  multitude 
d'oeuvres  passées  sous  leurs  yeux.  Il  y  a  là 
de  la  jeunesse, de  la  sève,  et  pourtant  le  désir 
d'être  équitable.  D'autres  petits  travaux, 
Lettres  sur  t  Ile  de  Capri,  et  Lettres  stcr 
Naples,  sont  des  impressions  de  voyage,  et 
ont  été  lus  avec  intérêt,  à  l'époque  où  ils 
ont  paru. 

Je  pense  que  ce  sont  aussi  les  deux  ar- 
tistes qui  ont  réuni  en  brochure  et  publié 
l'intéressante  discussion  sur  la  peinture 
murale  qui  se  poursuivit  à  la  Chambre  des 
représentants  de  Belgique,  du  24  au  27 
février  de  l'année  1863. 

Les  peintures  murales  qu'ils  avaient  exé- 
cutées étaient  à  la  fois  un  signe  de  force  et 
le  manifeste  d'une  conviction.  La  peinture 
sacrée  convenait  de  tous  points  au  génie 
de  Guffens  à  la  fois  méditatif  et  travailleur, 
dont  l'énergie  ne  redoutait  pas  les  thèmes 
les  plus  complexes  de  l'histoire  religieuse. 
Quelques-unes  de  ses  compositions  devin- 

1.  Messager  des  sciences,  Gand,  185g. 

2.  Monileur,  1858. 


rent  populaires;  elles  attirèrent  sur  l'artiste 
l'attention   de    ses   compatriotes   et   même 
l'admiration  des  étrangers.  C'est  ainsi  que 
Mi^e  Jameson,  dans  son  intéressant  livre 
The  history  0/  our  Lord,  passant   en   re- 
vue  les   peintures  par  lesquelles  plusieurs 
des  anciens  maîtres  d'Italie  et  de  la  Flandre 
ont  représenté  le  grand  drame  du  Golgotha, 
dont  elle  donne  des  reproductions  gravées, 
y  ajoute  la  réflexion  suivante  :  «  Plusieurs 
peintres  modernes   ont  voulu    représenter 
laVierge  Marie, accompagnée  par  saint  Jean, 
après  le   supplice  du  divin   Crucifié.    Mais 
leur  douloureux  adieu  au  Calvaire  n'a  guè- 
re été  tenté  que  par  M.  Guffens  d'Anvers, 
dans  la  fresque  de  l'église  St-Georges  de 
cette  dernière  ville,  représentant  la  sainte 
Vierge    saisissant  la  main    du   fils   qu'elle 
vient  d'adopter,  tandis  que  tous  deux,  sous 
le    bois    de  la  croix,   sont  courbés  par  la 
douleur.  La  scène  est  si  touchante  et  d'un 
sentiment  si    vrai   qu'il    est   difficile  de  la 
voir  sans  émotion  ('))).  Nous  reproduisons 
cette    composition,    d'après    une    gravure 
déjà  ancienne,  éditée  par  la  Société  pour 
la  diffusion  des  bonnes  images,  de  Dussel- 
dorf. 

Au  cours  de  sa  laborieuse  carrière  Guf- 
fen  sa  peint  un  certain  nombre  de  portraits. 
Parmi  les  personnages  qui  ont  posé  devant 
lui,  on  cite  feu  Thonissen,  ancien  ministre 
en  Belgique,  la  princesse  Nathalie  Esch- 
born,  duchesse  de  Wurtemberg,  le  comte 


I.  But  their  tearful  greeting  before  they  left  Calvary 
has  scarcely  been  attempted  but  by  M.  Guffens  of.'\nt- 
werp,  whose  fresco  in  St.  George's  Churcli  in  that  city, 
representing  the  Virgin  takingtlie  liand  of  her  just-adopt- 
ed  son,  eacli  bowed  with  grief,  is  so  touching,  and  so  pro- 
bable in  sentiment  that  no  one  can  look  at  it  unmoved. 
<L  The  history  of  our  Loni,  tomincitced  by  the  late  M'''  Ja- 
meson, continucd and  compleied  by  Lady  Easttake.  >  Lon- 
don,  Longman,  Green  and  C,  1872,  t.  II. 

Il  est  assez  étrange  que,  dans  le  texte  du  volume, 
p.  159,  la  fresque  est  désignée  comme  se  trouvant  à 
l'église  St-Georges,  d'Anvers^  tandis  que  la  gravure  dé- 
signe la  peinture  comme  e.xistant  à  l'église  de  N.-D.  de 
St-Nicolas  ;  ce  qui  est  e,\act. 


460 


îRcbuc  ïie  rSrt  t{)réttetu 


et  la  comtesse  Emile  deT'Serclaes,le  comte 
Duval  de  Beaulieu,  le  baron  Orban  de  Xi- 
vry,  gouverneur  du  Luxembourg  et  beau- 
coup d'autres  notabilités. Les  portraits  sont 
en  général  la  pierre  de  touche  de  la  j)uis- 
sance  technique  de  l'artiste,  de  sa  force 
d'interprétation  en  présence  de  la  nature. 
Les  portraits  de  Guffens  donnent-ils  bien 
la  mesure  de  son  talent:  sont-ilsvivants, ont- 
ils  tout  le  relief  plastique  nécessaire,  et 
mettent-ils  en  présence  d'uncaractère, d'une 
personnalité  ?Je  n'oserais  l'assurer.  L'artiste, 
dans  sa  simplicité,  disait  que  ses  portraits 
avaient  toujours  l'approbation  des  mem- 
bres de  la  famille  du  personnage  qu'il 
venait  de  peindre,  mais  que  ce  succès  ne 
s'affirmait  pas  lorsque  le  même  portrait  fi- 
gurait aux  expositions  publiques.  Cette 
appréciation  caractérise  assez  bien  la  ma- 
nière du  peintre  dans  ce  genre  particulier. 
Il  y  avait  toujours  de  la  noblesse  dans  la 
conception  ;  mais  il  y  a  aussi  une  certaine 
négligence  voulue  des  détails  qui,  pour  être 
caractéristiques,  tendent  parfois  à  rendre  la 
physionomie  vulgaire.  Guffens  n'avait  pas 
l'intention  de  flatter,  mais  il  généralisait  ;  il 
voulait  élever  son  point  de  vue.  A  vrai  dire, 
ses  portraits  constituent  pour  les  familles  un 
souvenir  précieux.  Ils  gagnent  de  la  réalité 
lorsque  le  modèle  n'est  pas  présent  pour 
servir  de  point  de  comparaison,  ou  qu'il 
n'est  plus  ;  ils  prennent  de  la  vie  lorsque 
celui  qu'ils  représentent  a  cessé  de  vivre. 
C'est  l'harmonie  fine  existant  entre  l'âme  et 
la  dépouille  passagère  qui  séduisait  l'artiste. 
C'est  ainsi  qu'on  aime  à  retrouver  l'image, 
comme  entourée  d'une  sorte  d'auréole,  de 
ceux  que  l'on  ti  aimés.Je  me  souviens  avoir 
vu  le  portrait,  posthume  si  je  ne  me  trompe, 
d'un  jeune  homme  dont  l'artiste  avait  fait  à 
plusieurs  reprises  le  portrait  aux  différentes 
phases  de  son  adolescence  et  qui.  .'ils 
unique,  avait,  à  l'âge   de  trente  trois  ans. 


été  enlevé  à  l'amour  de  sa  mère,  à  l'amour 
des  pauvres  dont  il  s'était  fait  l'ami  et 
aux  bonnes  œuvres  dont  il  était  l'âme  (').  Le 
portrait  était  placé  sur  un  chevalet,  dans  le 
cabinet  de  travail  de  la  dame,  et  un  bou- 
quet de  fleurs,  chaque  jour  renouvelées, 
était  placé  devant  l'image  du  défunt.  Dans 
une  autre  circonstance,  j'ai  vu,  dans  un 
château  au  bord  d'im  des  affluents  de  la 
Meuse,  le  portrait  d'une  jeune  fille,  remar- 
quable par  sa  beauté  comme  parla  sainteté 
qui  caractérisait  sa  physionomie.  La  toile 
était  placée  dans  une  sorte  d'oratoire,  à 
côté  de  la  chambre  de  la  mère,  où  celle-ci 
allait  dire  ses  prières  du  matin  et  du  soir,  y 
associant  sans  doute  l'image  de  sa  fille  qui 
semblait  chercher  le  pardon  d'une  sépara- 
tion peut-être  cruelle,  par  une  irrésistible 
vocation.  Voilà  l'atmosphère  qui  semble 
convenir  aux  portraits  de  Guffens  ;  ils  ne 
sont  pas  destinés  au  public.  L'image  doit 
évoquer  l'âme  de  ceux  qui  ne  sont  plus  au 
cœur  de  ceux  qui  les  ont  aimés.  On  ne  sera 
pas  surpris  d'apprendre  que  souvent  Guf- 
fens est  resté  l'ami  des  familles  où  il  a  peint 
des  portraits.  Guffens  a  fait  son  propre 
portrait  pour  le  Musée  d'Anvers,  où, comme 
à  Florence,  on  cherche  à  réunir  les  effigies 
des  peintres  tracées  par  leur  propre  pinceau. 

Le  cadre  de  cette  notice  ne  me  permet 
guère  d'entrer  dans  l'examen  des  travaux 
considérables  exécutés  en  collaboration 
par  Guffens  et  Swerts.  Les  deux  peintres, 
étaient  très  laborieux,  et  quoique  leurs 
compositions  fussent  châtiées  et  suffisam- 
ment achevées,  leur  manière  de  peindre, 
grâce  à  des  carions  très  étudiés,  était  ex- 
pédiiive. 

Il  faut  citer  cependant  les  peintures  mu- 
rales de  la  salle  gothique  de  l'hôtel  de  ville 
de  Courtrai,  où  Guffens  a  cherché  à  carac- 

1.  Le  comte  de  Stainlein  Saalenfeld,  ►J»  le  21  août  1SS2. 


d^odefroiti  CgiDe  (^uffens;. 


461 


tériser  les  types  de  la  Société  du  moyen 
âge;  le  Clergé,  la  Noblesse, la  Bourgeoisie; 
les  peintures  delà  chapelle  de Well-Bundel, 
en  Angleterre  ;  une  via  crucis'k  l'église  St- 
Ignace  à  Anvers  ;  les  peintures  murales  du 
chœur  de  l'église  St-Joseph  et  les  panneaux 
de  la  chapelle  Ste  Barbe  à  Louvain  ;  les 
peintures  monumentales  de  l'une  des  salles 
de  l'hôtel  du  baron  de  Schilde  à  Anvers  ; 
elles  représentent  l'histoire  de  la  famillevan 
de  Werve.  Enfin,  il  est  impossible  d'oublier 
l'épisode  si  douloureux  de  la  collaboration 
des  deux  artistes  qui,  de  1855  à  1S58,  vouè- 
rent un  travail  exclusif  et  persévérant  à  ce 
qu'ils  regardaient  comme  une  œuvre  de  pré- 
dilection, les  peintures  murales  de  la  cham- 
bre de  commerce  à  la  Bourse  d'Anvers  ; 
à  peine  terminé,  ce  cycle  de  peintures,  dans 
le  terrible  incendie  qui  dévora  tout  l'édifice, 
devint  la  proie  des  flammes.  Cette  catas- 
trophe attrista  profondément  les  deux 
collaborateurs,  mais  ne  les  découragea  pas. 
Leur  travail  en  commun,  dans  des  œuvres 
de  même  nature,  continua  jusqu'en  1874, 
époque  où  Jean  Swerts  accepta  la  direction 
de  l'Académie  de  Prague. 

S'il  fallait  suivre  pas  à  pas  les  différentes 
phases  de  l'existence  de  Guffens  et  l'histoire 
de  ses  travaux,  on  trouverait  que  sa  biogra- 
phie se  lie  assez  intimement  à  l'histoire  de  la 
peinture  en  Belgique  dans  la  seconde  moitié 
du  dix-neuvième  siècle,  et  cependant  ses 
aspirations  les  plus  intimes  trouvaient  une 
satisfaction  bien  incomplète  dans  les  tradi- 
tions comme  dans  les  voies  nouvelles  de 
la  peinture  flamande.  Son  but  avait  été  de 
rendre  à  l'art  national  une  ampleur  que  la 
peinture  murale  seule  peut  donner,  un  nou- 
vel essor  par  l'alliance  plus  intime  de  la 
peinture  avec  l'architecture. 

Dans  son  ensemble  la  carrière  de  Guf- 
fens fut  heureuse  ;  si,  comme  tous  les  vérita- 
bles artistes,  il  ne  réalisa  pas  dans  sa  pléni- 


tude l'idéal  qu'il  avait  rêvé,  les  succès  et 
les  distinctions  de  toute  nature  ne  lui  furent 
pas  refusés.  Il  était  membre  de  l'Académie 
royale  de  Belgique,  correspondant  de 
l'Institut  de  France,  membre  d'honneur  des 
Académies  royales  d'Amsterdam,  de  Baviè- 
re et  de  Saxe,  commandeur  de  l'Ordre  de 
Léopold,  officier  et  chevalier  de  plusieurs 
Ordres  étrangers  ;  mais  ces  distinctions, 
qui  souvent  éblouissent  ceux  qui  en  sont 
l'objet,  ne  portèrent  aucune  atteinte  à  sa 
modestie  naturelle  et  à  sa  simplicité. 

La  dernière  période  de  la  vie  de  Guffens 
n'a  pas  été  la  moins  laborieuse  ;  elle  n'est 
pas  non  plus  la  moins  intéressante  à  étu- 
dier, bien  que,  comme  peintre,  il  eût  cessé 
d'être  lui-même,  c'est-à-dire  de  donner  la 
forme  et  la  vie  à  ses  propres  inspirations. 
L'âge  était  survenu,  mais  les  années  ne  lui 
avaient  apporté  ni  le  dégoût  du  travail,  ni  le 
besoin  de  repos.  Il  se  fit  copiste,  mais  copiste 
inspiré,  amoureux  des  grands  maîtres  ita- 
liens, des  quatrocentistes  particulièrement; 
il  reproduisait  leurs  créations  avec  ardeur, 
avec  intelligence;  dans  l'étude  intime  de 
leurs  œuvres,  il  se  délectait,  parce  qu'en  elles 
il  voyait  réalisée  dans  toute  son  ampleur, 
la  peinture  de  grand  style  qu'il  avait  rêvée. 

Pour  beaucoup  ce  changement  de  travail 
et  cette  sorte  d'abdication  parut  une  énig- 
me. On  pouvait  se  demander  ce  qui  por- 
tait l'artiste  septuagénaire,  déjà  souffrant 
d'une  première  atteinte  du  mal  auquel  il 
devait  succomber,  à  renoncer  au  genre  de 
peinture  qui,  jusque-là,  avait  rempli  sa  vie. 
Ce  ne  pouvait  être  l'esprit  de  lucre  assu- 
rément, le  placement  de  copies  étant  tou- 
jours chose  douteuse;  sa  situation  le  rendait 
d'ailleurs  indépendant  du  produit  de  son 
travail.  Ce  ne  pouvait  plus  être  le  désir 
d'étudier  les  grands  maîtres  pour  surpren- 
dre les  secrets  de  leurs  procédés  techniques, 
de  se  pénétrer  de  leur  style  et  de  la  formule 


462 


Wit\)m  ïic  r^rt  cljrcttnu 


de  leurs  conceptions   en    vue    des   travaux 

d'un  avenir  que  Guffens  ne  pouvait  espérer: 

le  mobile  de  ce  travail  poursuivi  avec   une 

singulière  persévérance    devait  être  d'une 

tout  autre  nature. 

En  réalité,  l'artiste  était  dérouté  et  même 

dégoûté    des    évolutions     rapides,    parfois 

insensées   dans    leurs  excès,    de  l'art  qu'il 
*  ... 

voyait    pratiquer   autour    de    lui  ;    il    était 

fatigué  des  utopies  suivies  de  déceptions  de 
Tart  nouveau.  Il  sentait  la  jeune  généra- 
tion, en  proie  à  l'anarchie  des  idées  et  des 
principes  d'art,  lui  échapper  et  c'est  avec 
raison  qu'il  prévoyait  que  de  moins  en 
moins,  il  trouverait  un  public  apte  à  com- 
prendre et  à  goûter  les  grandes  pages  mo- 
numentales, correctes,  d'un  style  châtié  qui 
avaient  servi  à  l'expression  de  son  art  à  lui, 
et  dont,  pendant  une  série  d'années,  on 
avait  vu  les  cartons  figurer  avec  succès 
aux  expositions  du  pays  et  de  l'étranger. 

C'est  à  ce  retour  aux  enthousiasmes  de 
ses  années  d'études  que  l'on  doit  quelques 
excellentes  copies  incorporées  aujourd'hui 
au  Musée  de  la  peinture  monumentale  du 
Parc  du  Cinquantenaire  à  Bruxelles  :  saint 
Laurent  distribuant  les  aumônes  aux  pau- 
vres de  la  chapelle  de  Nicolas  V  au  Vatican, 
par  Jean  de  Fiesole  ;  le  pape  Sixte  IV  avec 
Platina,  de  Melozzo  da  Forli,  au  même 
palais;  l'Annonciation  et  la  Fuite  en  Egyp- 
te, par  Giotto,  de  la  Chapelle  de  l'Arena  à 
Padoue,  et  bon  nombre  d'autres  fresques, 
rendues  dans  leur  esprit,  leur  style  et  leur 
tonalité. 

Cet  exil  que  le  peintre  s'imposait  chaque 
année  six  ou  huit  mois,  accompagné  de  sa 


fille  Hubertine.  laquelle  est  aussi  artiste,  et 
qui  tout  en  l'aidant  dans  son  travail,  sem- 
blait son  ange  gardien,  était  pour  son  âme 
une  sorte  de  fontaine  d(î  Jouvence  où  il  re- 
trempait ses  forces  et  les  joies  de  ses  jeunes 
ans  !  Rentré  dans  son  atelier  avec  les  œu- 
vres des  maîtres  qu'il  avait  fait  siennes,  il 
organisait  une  exposition  à  laquelle  il  con- 
viait ses  amis  et  tous  ceux  qu'il  croyait  à 
même  d'apprécier  l'expression  du  génie  des 
siècles  passés.  Avec  quelle  joie  il  en  dis- 
sertait et  cherchait  à  en  faire  ressortir  les 
grandeurs!  Malgré  la  difficulté  qu'il  avait 
à  s'énoncer,  à  la  suite  d'une  crise  qui  cepen- 
dant n'avait  eu  aucune  prise  sur  son  intel- 
ligence, son  œil  pétillait  lorsqu'il  voyait  que 
son  travail  était  compris  et  son  admiration 
partagée  ('). 

La  dernière  fois  que  je  l'ai  vu,  il  était 
couché  sur  son  lit  de  douleur  ;  une  nouvelle 
atteinte  du  mal  dont  il  souffrait  avait  pa- 
ralysé tout  le  côté  gauche  et,  en  constatant 
qu'il  ne  pouvait  plus  tenir  la  palette,  une 
larme  furtive  perlait  sous  sa  paupière  ; 
mais  dans  le  regard  il  y  avait  encore  cette 
résignation  du  chrétien  qui  ne  renonce  pas 
à  l'espérance. 

II  ne  devait  plus  reprendre  ses  pinceaux. 
Les  copies  rapportées  de  son  dernier 
voyage  en  Italie  étaient  le  chant  du  cygne 
d'une  vie  d'artiste  laborieuse  et  bien  rem- 
plie, arrivée  aux  termes  de  ses  joies  et  de 
ses   épreuves. 

Jules  Helbig. 


1. 'Voyez  Revue  de  t Art   c/irt'lie>t,  année    1S98,  p.  114 
et  ss. 


V  A^Vik  >.^^  A^Vt  \^A  >Ma  A^A  iMi^  A^gx  i^^X  A^^  A^A  a'^  A^V^  A^iC  A^V^  >^ 


tTTTTTTt-lfTTTTTTTTrïTTTTTTrTTTTTIÏTTirTrTrTrrriITTTTrTrrtrmrTTtnTTTTrTrin 


II  iirrrrxizrjiXiriiiiicTiirm  2 


lies  Origines  ïie  rHrcf)itecture  got{)ique 


Hcs  Kcemicrcs  Croisées  O'OgiDcs  en  Hnglctcrre,  par  John  Bilsox. 


□cTiixrTrjtTiixTjriixiiirxiTiiiirKiijiiintiiiiriTxiiJiiiixiiixiiiiiiii:ixi3Liixiii3LLiiiiiirxj^ 


niTTnnnt] 


I 

intii  iTTTrm-ii'^      ^ 


^^Atl-^  ^iil^  ^A^l^  ^S.''  ^S:'<  *A^1^  *A*Î^  ^aAI^  ^^^  ^Atl*  ^Ail^  ^Aiî^  ^^^  ^Ail^  ^A^^:^ 

pal.  Les  piliers  du  chœur  de  l'église  St-Ni- 
colas  à  Caen  et  ceux  de  St-Georges  de 
Boscherville  (/j^.  26.)  peuvent  être  pris 
comme  un  exemple  frappant  à  l'appui  de 
ce  fait  (').  Nous  y  trouvons  de  chaque  côté 
du  massif  du  pilier  un  groupe  de  trois 
colonnes  engagées  destinées  à  recevoir  la 
retombée  des  grands  arcs  qui  sont  doublés. 
Une  colonne  est  disposée  pour  recevoir  le 
doubleau  des  voûtes  d'arête  du  collatéral, 
et  il  existe  symétriquement,  du  côté   de  la 


BANDONNONS     maintenant 
cette    partie  de  notre   sujet   pour 
étudier     les    voûtes    lancées    au- 
dessus  du  vaisseau  central  des  églises. 

J'ai  dit,  plus  haut,  que  le  but  des  archi- 
tectes normands  ne  consistait  à  rien  moins 
qu'à  couvrir  de  voûtes  de  pierre  toutes  les 
parties  de  leurs  églises.  La  disposition  des 
piliers  nous  indique  très  clairement  qu'après 
avoir  voûté  les  bas-côtés,  ils  ont  immédiate- 
ment cherché  à  voûter  le  vaisseau  princi- 

5AINT- NICOLAS.  CAEN 


5AINT-CE0RCE5  de  B05CHERVILLE 


Fig   26.    —   Plans  des  piliers  des  chœurs. 


nef,  une  colonne  correspondante.  Si  nous 
tenons  compte  de  la  logique  remarquable 
et  très  caractéristique  que  les  constructeurs 
normandsont  toujoursobservée  dans  l'agen- 
cement des  supports,  en  vue  de  la  retom- 
bée des  arcs  et  des  voûtes,  il  semble  bien 
que  cette  colonne  engagée  que  l'on  trouve 
dans  la  nef  sur  la  face  des  piliers  ne  puisse 
avoir  d'autre  fonction  que  de  recevoir  une 
voûte  (').  Cela  ne  peut  être  mis  en  ques- 

1.  2'""'  partie  ;  voyez  la  i'"  partie,  page  365. 

2.  On  ne  trouve  pas  de  colonnes  dans  le  vaisseau  cen- 


tion  pour  les  deux  monuments  cités,  dont  les 
chœurs  ont  conservé  les  restes  des  voûtes 
d'arête  primitive  ;  d'autres  exemples  analo- 

tral  des  monuments  aussi  anciens  que  la  Basse-Œuvre 

à  Beauvais,  ou  encore  dans  la  nef  de  Bernay  où  existe 
seulement  une  charpente  apparente.  On  n'en  rencontre 
pas  non  plus  dans  les  églises  suivantes  du  .Soissonnais, 
citées  par  M.  Lefèvre-Pontalis  et  attribuées  par  lui  à  la  fin 
du  XI'  siècle  :  Berneuil  sur-Aisne,  Montlevon,  Jouaignes, 
Oulchy-le-Château  et  St-Léger-aux-Bois.  Il  en  subsiste 
des  traces  dans  la  nef  de  Morienval(milieu  du  X!=  siècle), 
et  M.  Lefèvre-Ponialis  suppose  que  cela  indique  peut- 
être  chez  l'architecte  Fintention  de  couvrir  la  nef  d'une 
voûte  qu'il  n'aurait  pas  osé  construire  {o/>.  cit.,  I,  p.  196). 
I.  Cf.  nef  de  Lessay,  fig.  20. 


RKVUE    OE    l'aKT   CHRÉTIEN, 
igoi.    —     6'"*^    LIVKAtSON. 


464 


3Rrbuc  lir  V^vt  cbréticiu 


gués  subsistent,  du  reste  en  Normandie, 
dans  les  chœurs  de  Noire-Dame-sur-l'Eau 
de  Domfront  et  de  la  Trinité  à  Caen  ('). 
Il  est  vrai  que  dans  la  majorité  des  édifices 
anglais,  dans  lesquels  on  l'observe,  cette 
colonne  ne  supporte  pas  présentement  de 
voûte,  mais  qu'elle  est  simplement  montée 
jusqu'en  haut  du  mur  et  quelquefois  se 
termine  sous  la  charpente  d'une  manière 
peu  logique.  Quoi  qu'il  en  soit,  le  but 
poursuivi  en  disposant  cette  colonne,  ne 
peut  certainement  avoir  été  de  supporter 
simplement  l'entrait  de  la  charpente,  ainsi 
qu'on  l'a  souvent  affirmé  ;  il  faut  donc 
accorder  aux  architectes  qui  l'ont  systéma- 
tiquement prévue  dans  leurs  constructions, 
l'intention  de  voûter  le  vaisseau  central, 
quoique,  dans  beaucoup  de  cas,  ils  n'aient 
osé  poursuivre  jusqu'au  bout  l'exécution  de 
leurs  plans.  Le  demi-berceau  qui  existe 
encore,  derrière  le  triforium  du  chœur,  dans 
la  cathédrale  de  Gloucester  ('),  semble  avoir 
été  disposé  pour  contrebuter  la  voûte  haute 
du  chœur  ;  nous  n'avons  toutefois  aucun 
moyen  de  savoir  si  cette  dernière  a  jamais 
été  exécutée.  Ainsi  qu'on  peut  l'observer 
dans  plusieurs  monuments,  le  chœur  était 
voûté,  alors  que  la  nef  et  le  transept  étaient 
seulement  couverts  de  charpentes  appa- 
rentes ;  malheureusement,  la  partie  des 
églises  qui  a  été  le  plus  souvent  remaniée 
à  une  époque  postérieure,  est  précisément 
le  chœur.  Il  n'est,  du  reste,  pas  téméraire 
de  supposer  que  ce  soit  la  ruine  de  ces 
voûtes  anciennes  qui,  dans  un  certain 
nombre  de  cas,  ait  pu    rendre  ces  recon- 

r.  Le  chœur  de  St-(jeor<;es-de-Bosclierville  est  proba- 
blement des  piemicres  années  du  XII''  siècle  et  les  trois 
autres  datent  du  courant  du  .XI"  siècle.  Rupricli-Robert 
assigne  rojo  environ  comme  date  à  Notre- Dame-sur- 
l'Eau  à  Domfront. 

2.  Cf.  La  voûte  en  demi-berceau  au-dessus  des  tribunes 
de  la  nef  à  St-Etienne  de  Caen.  Les  amorces  d'une  voûte 
similaire  subsistent  encore  à  Cerisy-la- Forêt,  dans  la 
tribune  du  chœur. 


structions  nécessaires.  Que  cette  raison 
soit  exacte,  ou  que  la  tradition  de  la 
couverture  en  charpente  soit  demeurée 
prépondérante  en  Angleterre,  il  nous  reste 
très  peu  d'exemples  de  ces  voûtes  primi- 
tives jetées  au-dessus  des  nefs  principales. 
Celles  d'entre  elles  qui  subsistent  sont  tou- 
tes des  plus  précieuses  ;  mais  il  se  pourrait 
que  des  recherches  plus  étendues  viennent 
encore  ajouter  aux  données  que  nous  pos- 
sédons à  leur  égard. 

A  ma  connaissance,  l'exemple  le  plus 
ancien  d'une  croisée  d'ogives  édifiée  au- 
dessus  d'une  nef  principale,  dont  le  souvenir 
nous  ait  été  conservé  en  Angleterre,  se 
trouvait  dans  le  chœur  de  la  cathédrale  de 
Durham  ;  cette  voûte  primitive  a  été  recon- 
struite au  XI 11^  siècle.  Aussi  la  plus  an- 
cienne croisée  d'ogives  qui  subsiste  encore 
en  Angleterre  est  probablement  celle  qui  se 
trouve  dans  le  bras  nord  du  transept  de 
cette  même  église.  Les  caractères  de  la 
construction,  l'analogie  de  toutes  les  voûtes 
de  ce  monument  remarquable,  les  données, 
enfin  fournies  par  les  documents,  nous 
permettent  de  parler,  avec  quelque  pré- 
cision, des  dispositions  primitives  et  de  la 
date  de  la  voûte  élevée,  dès  l'origine, 
au-dessus  du  chœur.  J'ai  établi  plus  haut 
qu'en  1104  le  chœur  était  assez  avancé 
pour  que  l'on  pût  opérer  la  translation  du 
corps  de  S.  Cuthbert  dans  une  châsse 
placée  au  chevet.  William  de  Malmesbury 
rapporte  un  fait  miraculeux  qui  se  serait 
produit  à  l'occasion  de  cette  cérémonie. 
S.  Cuthbert  lui-même  aurait  déplacé  le 
cintre  en  charpente  de  la  voûte  située 
au-dessus  de  sa  châsse  (').  Ce  récit  nous 
indique  que  les  voûtes  du  chevet  venaient 
d'être    achevées    à    cette    époque.     Il   est 

I.  «  Materia  lignorum,  quiE  recentem  piesbyterii  testu- 
ilineui  susliuebat  ».  /A'  Geslis  Ponliliciim,  lib.  III,  §  135  ; 
Rolls  séries,  éd.  Hamilton,  p.  276. 


3tES  £)rtg(nes  De  l':^rcl)itecturc  gotl)lque. 


465 


probable    qu'il    en    était    de    même    pour 
l'ensemble  des  voûtes  du  chœur,  car  il  n'y 
a  aucune  raison  de  croire   que  toute  cette 
partie  de  l'église  n'ait  été  entreprise   à   la 
fois.  Des  indulgences,  remontant  au  second 
quart     du    XII I^     siècle,    nous    indiquent 
qu'alors   ces   volâtes    menaçaient    ruine   — 
l'une  d'entre  elles  nous  les   décrit   comme 
des    voûtes    de  pierre  (')  ;   —   elles   furent 
depuis  lors  démolies  et  remplacées  par  les 
voûtes  qui  subsistent.  Privé  de  son  abside, 
aujourd'hui  détruite,   le  chœur  de   Durham 
se  compose  actuellement  de  deux  doubles 
travées  ;    c'est  là  une  variété  de  plan  qu'à 
une    époque    plus    tardive     nous    sommes 
habitué  à   rencontrer  associé    à    la    voûte 
sexpartite.  Il  ne  peut  cependant  être  ques- 
tion ici  d'une  voûte  de  ce  genre,   car  nous 
nous  trouvons  pour  cela  à  une  époque  trop 
peu  avancée.  Il  est  bon  de  noter  que  cette 
double  travée  n'est  pas  sur  plan  carré,  mais 
forme   un   rectangle   allongé,    sa   longueur 
étant  beaucoup  plus  grande  que  la  largeur 
du  chœur  (').    S'il  eût  été  question  de  cou- 
vrir la  double  travée  avec  une  seule  croisée 
d'ogives  quadripartite  ou  sexpartite,  le  plan 
barlong    de     la     travée    n'aurait    pas    fait 
disparaître  la  difficulté  à  laquelle  on  s'était 
efforcé  d'obvier  par  l'emploi  d'une  double 
travée  sur  plan  carré.  Sur  la  face  des  piles 
fortes,  un  faisceau  de  trois  colonnes  enga- 
gées   s'élève    du    sol    à  la    naissance    des 
voûtes  et  recevait,  dans  l'état  primitif,   un 
doubleau  doublé,  ainsi  qu'on  peut  encore  le 
voir  dans  le  transept.  Les  piles  faibles  sont 

I  <  Ubi  supra  sacrum  illius  sepulchrum  devocio 
veterum  lapideas  erexit  testudines,  qiue  jam  nunc  plenœ 
fissuiis  et  riiinis  dissoliitioiiem  sui  indicant  imminere  >. 
Indulgence  de  Hugh  de  Northvvold,  évêque  d'Ely,  datée 
de  1235  ;  Trésor  de  Durham,  mise,  chart.  N°  15 12  (im- 
primé dans  le  Saint  Cutlihert,  de  M.  Raine,  Appendice, 
p.  7  ;  voir  aussi  pp.  101-3,  d'autres  indulgences). 

2.  On  trouve  quelques  exemples  anciens  de  la  même 
disposition.  Dans  la  nef  de  N.-D.  du  Pré,  au  Mans,  par 
exemple. 


cylindriques   et    renforcées,  à  leur  revers, 
d'un  groupe  de  trois  colonnes   destinées  à 
recevoir  les  nervures  et  les  doubleaux  des 
voûtes  des   collatéraux.    A  la  hauteur  du 
triforium,  le  parement  du  mur  se  trouve  en 
retrait  de  28  centimètres,   et  c'est   sur  cet 
espace    que   reposent   les   colonnettes    qui 
recevaient  primitivement  les  retombées  des 
voûtes    hautes  ;  elles  sont  au   nombre  de 
deux,  de  part  et  d'autre  des  piles   fortes, 
et    de    trois    au-dessus    des    piles    faibles, 
c'est-à-dire    au    milieu   de  la    travée.     Les 
traces  de  la  reprise  exécutée  au  XI 11^  s., 
lorsqu'on  édifia  la  voûte  actuelle,  sont  encore 
bien    visibles    à   droite    et     à    gauche    de 
toutes  les  piles  fortes,   (fig.  7,  BB  et  CC). 
Le   rejointoiement  de  ces   deux  maçonne- 
ries d'époques  différentes  nous   permet   de 
reconstituer    le    tracé    de    la    lunette    des 
voûtes  primitives  ;   c'était,  comme  dans  les 
voûtes  du  transept,  une  haute  courbe  ellip- 
tique ;   nous   ne   pouvons  douter   que   ces 
voûtes    originales    du    chœur    ne    fussent 
nervées,  car  nous  ne  saurions  admettre  que 
des    architectes,     ayant    déjà    édifié    des 
croisées  d'ogives  au-dessus  des   bas-côtés, 
en  soient  revenus  à  l'emploi   de  la   voûte 
d'arêtes  pour  voûter  le  vaisseau  central.  La 
conclusion  qui  s'impose,  est  que,  dans   son 
état  primitif,    le    chœur    était  couvert    de 
doubles    croisées    d'ogives    quadripartites, 
correspondant  à  chacune  des  doubles   tra- 
vées, disposition  identique  à  celle  que  l'on 
peut  observer  dans  le  bras  nord  du  transept, 
qui,  selon  toute  vraisemblance,  a  dû   être 
construit    presqu'immédiatement    après  le 
chœur.  Le  triplet  de  colonnettes  qui  existe 
au  milieu  de  chacune  des  doubles  travées, 
semblerait    conçu    pour    supporter   la    re- 
tombée d'un  doubleau  intermédiaire  et  plus 
faible  que  les  doubleaux  principaux  ;  mais, 
comme  aucune  des  voûtes  hautes  ne  nous 
oiïre  l'exemple  d'une  semblable  disposition, 


466 


3Rcbue  ï!e  T^rt  cbvctien. 


il  est  probable  que  ces  trois  colonnettes 
recevaient  seulement  la  retombée  des  deux 
nervures.  Les  deux  colonnettes,  qui  les 
remplacent  dans  le  transept,  ont  dû  être 
adoptées  comme  constituant  un  support 
plus  rationnel.  La  coupe  transversale  du 
chœur  (fig.  S)  nous  montre  comment  les 
voûtes  étaient  épaulées  par  des  arcs  en 
plein  cintre,  portant  le  rampant  du  toit  des 
tribunes.  Au  centre  de  la  double  travée, 
l'épaisseur  de  ces  arcs  est  de  i  m.  52  cm; 
ils  reposent  de  part  et  d'autre  sur  des 
pilastres  carrés.  Au  dos  des  piles  fortes, 
existent  de  larges  contreforts  desquels  se 
détachent  les  pilastres  supportant  des  arcs, 
et  dont  l'épaisseur  s'élève  ici  à  t  m.  87  c. 
(fig.  ç).  11  est  important  de  noter  que  les 
contreforts,  les  pilastres,  les  arcs  de  butée 
qu'ils  supportent,  forment  partie  intégrante 
de  la  construction  et  ne  sont  pas  des 
additions  postérieures.  Le  tracé  de  ces 
derniers  arcs  n'est  pas  convenablement 
conçu  pour  neutraliser  la  poussée  des 
voûtes  ;  aussi,  malgré  la  grande  épaisseur 
des  murs,  s'est-il  produit  des  déformations. 
Les  faces  est  des  bras  du  transept  repro- 
duisent presqu'exactement  la  disposition  du 
chœur,  mais  les  travées  y  sont  beaucoup 
plus  étroites  et  varient  de  largeur  (').  D'au- 
tre part,  comme  nous  l'avons  dit,  ce  sont 
deux  colonnettes,  et  non  trois,  comme  dans 
le  chœur,  qui  reçoivent  la  retombée  des 
nervures  au  milieu  de  la  travée.  Les  arcs 
de  butée  placés  derrière  le  triforium  sont 
bien  contemporains  de  la  construction  ;  leur 
existence,  la  disposition  des  piliers  prouvent 


I.  Cette  irrégularité  de  plan  ne  provient  pas,  comme 
l'ont  avancé  quelques  écrivains  trop  fantaisistes,  du  désir 
d'augmenter  le  pittoresque  de  la  construction.  La  largeur 
de  la  demi-travée  qui  touche  le  carré  du  transept  est  déter- 
minée par  la  largeur  du  collatéral  du  cliicur  ;  les  trois 
autres  demi-travées  semblent  avoir  été  obtenues  en  divi- 
sant également  l'espace  compris  entre  le  milieu  des  piliers 
et  le  milieu  du  mur  du  pignon. 


que,  dès  l'époque  à  laquelle  les  murs  orien- 
taux du  transept  furent  édifiés,  on  avait 
prévu  des  voûtes  hautes.  Cependant,  du 
côté  ouest  du  transept  [voir  fig.  2^,  p.  jço 
de  la  livraison  de  sept?),  nous  ne  trouvons 
que  les  trois  colonnes  engagées  destinées  à 
recevoir  les  doubleaux.  A  la  hauteur  du 
triforium,  il  n'y  a  pas  de  colonnettes  dis- 
posées en  vue  de  la  retombée  des  nervures. 
Nous  avons  des  raisons  de  croire  que  le 
projet  de  voûter  le  transept  fut  temporai- 
rement abandonné  lorsque  les  murs  ouest 
furent  édifiéspar  les  moines, dans  l'intervalle 
qui  sépara  la  mort  de  l'évêque  William 
(1096)  de  l'avènetnent  de  Flambard  (1099). 
En  effet,  dans  le  bras  sud  du  transept, 
l'étage  des  fenêtres  était  décoré  d'une  arca- 
ture  continue,  ce  qui  impliquait  évidemment 
l'emploi, comme  couverture,  d'une  charpente 
apparente,  bien  qu'aucune  trace  de  cette 
disposition  ne  puisse  être  relevée  dans  le 
bras  nord  du  transept.  Il  paraît  donc  cer- 
tain que  le  projet  primitif  de  construire  des 
voûtes  fut  repris  alors  que  les  travaux  de 
cette  partie  de  l'église  étaient  encore  ina- 
chevés. Le  caractère  de  simplicité  qu'of- 
frent les  voûtes  du  bras  nord  du  transept 
(fig.  2/'),  l'absence,  dans  l'ornementation 
des  nervures,  des  bâtons  brisés  qui  décorent 
les  nervures  des  bas  côtés  de  la  nef,  sem- 
blent prouver  que  ces  voûtes  ont  dû  être 
édifiées  peu  après  l'achèvement  des  voûtes 
du  chœur,  en  i  104.  La  double  travée  con- 
tiguë  à  la  croisée  du  transept  est  couverte 
d'une  double  voûte  quadripartite,  sans  dou- 
bleau  intermédiaire.  La  double  travée  sui- 
vante, la  plus  au  nord,  n'est  couverte  que 
d'une  simple  voûte  quadripartite  ;  cette  mo- 
dification a  évidemment  son  origine  dans 
l'extrême  étroitesse  des  travées  et  les  deux 
colonnes  qui  les  séparent,  devenues  inutiles, 
sont  simplement  montées  jusqu'à  la  lunette 
de  la  voûte.  Comme  dans  les  bas-côtés,  le 


îles  £)rîstnes  ht  r^rcljitecture  gotl)ique. 


467 


profil  de  la  nervure  est  composé  d'un  gros 
boudin  entre  deux  gorges.  Les  voussoirs 
internes  du  doubleau  sont  moulurés  de  sem- 
blable façon,  alors  que  les  voussoirs  externes 
sont  seulement  équarris.  Le  doubleau  est  en 
plein  cintre  alors  que  les  ogives  sont  proba- 
blement des  arcs  surbaissés  comme  dans  les 


collatéraux,  mais  à  cause  de  l'étroitesse 
des  travées,  et  spécialement  de  celles  qui 
touchent  à  la  croisée,  la  courbe  des  nervu- 
res se  rapproche  sensiblement  du  plein 
cintre.  A  la  hauteur  de  l'étage  des  fenêtres, 
les  retombées  de  la  voûte  sont  fortement 
gauchies.  Dans  les  étroites  travées  contiguës 


Durham.  transept  nord,  côté  est. 


au  carré  du  transept,  la  lunette  de  la  voûte 
décrit  une  demi-ellipse  extrêmement  haute. 
Du  côté  ouest  de  ce  bras  du  transept  les  ner- 
vures retombent  sur  des  corbeaux  qui  ont 
été  ajoutés  lorsque  le  mur  s'élevait  déjà  à 
la  hauteur  des  fenêtres  hautes.  Le  mur  de 
l'étage  des  fenêtres  lui-même  semble  toute- 
fois être  de  la  même  date  que  la  voûte. 


Dans  le  bras  sud  du  transept,  le  profil 
des  nervures  est  composé  d'un  gros  boudin 
encadré  de  bâtons  brisés.  Les  voussoirs 
internes  du  doubleau  doublé  sont  ornés 
d'un  boudin  entre  deux  gorges,  et  les  vous- 
soirs externes,  de  bâtons  brisés.  En  dehors 
de  ces  différences  dans  les  détails  et  dans 
la  disposition  de  la  claire-voie,  dont  il  a  été 


468 


5Rr\jur  De  r^rt  cbrcttcu. 


parlé  plus  haut,  les  voûtes  du  bras  sud  du 
transept  présentent  les  mêmes  caractères 
que  celles  du  bras  nord.  Elles  sont  d'une 
date  évidemment  un  peu  postérieure,  anté- 
rieure toutefois  à  celle  des  voûtes  de  la  nef. 
Nous  remarquons  de  même,  dans  la 
nef,  que  le  projet  de  construire  des  voûtes 
fut  abandonné,  puis  repris  pendant  le  cours 
des  travaux,  ainsi  que  dans  le  transept. 
A  la  hauteur  du  triforium,  les  colonnes 
prévues  dans  le  chœur  pour  la  retombée  de 
voûtes  n'existent  pas  dans  la  ï\ç.{(i'ûirjîg.2^ 
page  jçi  de  la  livraison  de  sept.).  La  paroi 
du  mur  est  sur  le  même  alignement  que  le 
tympan  des  grands  arcs,  et  une  colonne 
supplémentaire  est  disposée  en  vue  du 
doublement  de  l'arc  du  triforium.  Par 
conséquent,  il  n'existe  aucun  fût  destiné  à 
recevoir  les  nervures  diagonales.  Il  existe, 
d'autre  part,  dans  la  maçonnerie  de  deux 
doubles  travées  joignant  le  carré  du  tran- 
sept à  la  hauteur  des  fenêtres  hautes,  des 
indices  permettant  de  conclure  au  projet 
d'une  couverture  en  charpente.Ce  dispositif 
est  en  lui-même  assez  probable,  car  nous 
savons  que  lors  même  que  le  chœur  d'une 
grande  église  était  voûté,  la  charpente 
apparente  était  encore  la  couverture  la 
plus  habituellement  employée  au-dessus 
de  la  nef  et  du  transept.  A  cet  égard,  le 
continuateur  de  Symeon  ne  nous  dit-il  pas 
expressément  que  Flambard  procédait  pour 
les  travaux  :  «  modo  intentius  modo  remis- 
sius  »,  ce  qui  permettrait  de  supposer  des 
hésitations  et  des  changements  dans  le  plan 
primitif?  Il  est  tout  à  fait  certain  que  le 
triforium  fut  achevé  jusqu'au  niveau  des 
fenêtres  hautes  avant  qu'aucune  disposition 
ait  été  prise  en  vue  des  voûtes,  caries  cor- 
beaux qui  reçoivent  les  nervures  ont  été 
insérés  après  coup  entre  les  arcs  du  trifo- 
rium. On  ne  peut  guère  douter,  d'autre 
part,  que  la  disposition  de  l'étage  des  fenê- 


tres n'ait  été  agencée  en  vue  des  croisées 
d'ogives  existantes  ;  en  fait,  ces  différentes 
parties  de  la  construction  doivent  être  con- 
temporaines. 

Les  voûtes  de  la  nef  (fig.  28)  (')  mon- 
trent une  avance  remarquable  sur  celles  du 
transept.  Le  plein  cintre  y  est  employé  non 
dans  les  doubleaux,  comme  jusqu'alors, 
mais  dans  les  ogives.  C'est  là  un  progrès 
qui,  selon  Viollet-le-Duc,  constitue  la  seule 
innovation  des  premiers  constructeurs  de 
voûtes  gothiques  (").  En  conséquence,  l'arc 
brisé  dut  être  adopté  pour  les  doubleaux. 
Ici,  toutefois,  leur  courbe  est  gauche,  car 
elle  est  tracée  de  centres  situés  considéra- 
blement au-dessous  de  la  ligne  des  impostes. 
On  peut  facilement  admettre  que  cette 
innovation  dans  la  construction  des  voûtes, 
ne  prit  pas  tout  de  suite  en  Angleterre  le 
remarquable  développement  qui  marqua 
son  adoption  dans  l'Ile-de-France  ;  mais  cet 
exemple  si  primitif  de  croisées  d'ogives  est 
précieux  en  ce  qu'il  prouve  l'indépendance 
des  efforts  d'une  école  architecturale  qui  ne 
devait  rien  à  l'influence  française. 

Comme  le  transept,  la  nef  est  couverte  de 
doubles  voûtes  quadripartites  sur  chaque 
double  travée,  sans  doubleau  intermédiaire. 
Les  voûtes  sont  légèrement  bombées  ; 
leur  lunette  décrit  une  demi-ellipse,  et  il 
n'existe  pas  de  formerets  ;  les  doubleaux 
sont  doublés  ;  le  doubleau  intérieur  est  orné 
d'un  gros  boudin  entre  deux  gorges,  le  dou- 
bleau extérieur  est  orné  de  bâtons  brisés. 
Le  sommier  de  chacun  de  ces  doubleaux 
extérieurs  est  plus  large  que  les  autres 
voussoirs,  qui  ont  dû  être  réduits  de  manière 
à   dégager  la    naissance   des  ogives.    Les 

1.  C'est  à  M.  ce.  Hodges,  d'Hexham,  que  je  dois  la 
permission  de  reproduire  les  photographies  qu'il  .ivait 
prises  des  voûtes  du  transept  et  de  la  nef  (fig.  24,  25,  27 
et  28). 

2.  Dictionnaire,  IV,  p.  35. 


iles  £)ngme0  De  r:^rcl)itectuit  goîl)ttiue. 


469 


nervures  présentent  un  gros  tore  flanqué 
de  bâtons  brisés  de  chaque  côté.  La  voûte 
est  épaulée  p^r  des  arcs  en  quart  de  cercle 
placés  au-dessous  du  toit  du  triforium  ('). 
Ce  procédé  est  de  beaucoup  supérieur,  pour 


neutraliser  la  poussée,  à  l'arc  en  plein  cintre 
qui  est  employé  dans  le  chœur  et  le  transept. 
Ces  arcs,  qui  ont  i'"52  c. de  largeur,  naissent 
de  plinthes  chanfreinées  adossées  au  mur 
extérieur  du  triforium.  Ces  plinthes  et  les 


¥\s.   2S.    —     Dnrham,   voûte  de  la  nef,   côté  nord- 


assises  placées  immédiatement  au-dessus 
d'elles  paraissent  faire  partie  de  la  construc- 
tion primitive,  mais  les  arcs  eux-mêmes 
semblent   avoir    été    construits    en     même 


\.  Diirhain    Ca/kednil,  par  R.  W.    Billings,   pi.    XIII, 
XLIII. 


temps  que  les  voûtes.  De  semblables  arcs- 
boutants,  aussi  rudimentaires,  existent  dans 
la  nef  de  la  Trinité  à  Caen  ('). 

Les  voûtes  de  la  nef  de  la  cathédrale  de 
Durham  ont  été  attribuées  avec  persistance 


I.  L'architecture  normande,  I,  p.  139,  p.  141. 


470 


îRcbuc  lir  V^xt  cbrcttca. 


au  milieu  du  XI 11'^  siècle,  apparemment 
sur  la  foi  d'un  vague  rapport  de  Leland 
dans  la  Collectanea  (').  Billings  affirme 
qu'elles  ont  été  construites  entre  1233  et 
1244,  dans  le  style  normand  (').  Si  cette 
date  est  exacte,  ce  serait,  comme  il  le  dit 
lui-même,  un  fait  unique  dans  l'histoire  de 
l'architecture  du  moyen  âge.  Son  erreur 
ayant  été  répétée  par  des  écrivains  posté- 
rieurs, qui  auraient  dû  être  mieux  informés, 
il  est  nécessaire  d'affirmer  positivement 
que  son  assertion  n'a  absolument  aucune 
autorité.  —  En  dehors  de  ce  fait  seul  que 
les  architectes  médiévaux  n'avaient  pas 
accoutumé  d'imiter  des  œuvres  vieilles  d'un 
siècle,  la  voûte  du  XII 1°  siècle  existant 
encore  au-dessus  du  chœur,  nous  montre  ce 
qu'aurait  été  la  voûte  de  la  nef,  si  elle  datait 
de  l'époque  à  laquelle  Billings  l'attribue. 
Les  passages  déjà  cités  du  continuateur 
de  Symeon  prouvent  que  la  nef  fut  voûtée 
entre  1128  et  11 33.  Le  chroniqueur  nous 
dit,  en  propres  termes,  que  Flambard  bâtit 
la  nef  :  «  usque  testidunem  »,  et  que 
pendant  l'intervalle  qui  sépara  la  mort  de 
Flambard(i  i28)deravènementdeGeoffroy 
Rufus  (1133),  la  nef  fut  achevée  par  les 
moines.  Selon  toute  évidence,  seule  la 
voûte  manquait  à  cette  partie  de  l'édifice; 
en  dernière  analyse,  le  caractère  de  la  con- 
struction confirme  absolument  cette  hypo- 
thèse. Les  nervures  nous  montrent  le  lay- 
age  en  diagonale  caractéristique  de  cette 
époque  ;  leurs  voussoirs  sont  étroits  comme 
d'habitude,  leur  largeur  étant  seulement  de 
o"i(5  c.  La  maçonnerie  présente  donc  les 
mêmes  caractères  dans  les  voûtes  que  dans 
la  partie  haute  des  murs  Ils  n'ont  rien  de 
commun  avec  ceux  des  œuvres  exécutées  à 

1.  Durham  Cathédrale  pai  William  Greenwell,  5'"=  éd., 
PP-  37-38.  Je  dois  beaucoup  de  données  à  cet  excellent 
ouvrage. 

2.  Billings,  op.  cil.,  p.  16. 


l'intérieur  et  autour  de  l'église  par  l'évêque 
Hugues  de  Puiset  et  ses  successeurs. 

Durham  donc  nous  fournit  complète- 
ment la  preuve  que  les  architectes  nor- 
mands étaient  capables  de  construire  des 
voûtes  au-dessus  du  vaisseau  central  d'une 
grande  église,  et  de  contrebuter  la  poussée 
de  ces  voûtes  par  des  arcs  situés  à  la 
hauteur  du  triforium,  et  dont  les  arcs-bou- 
tants  sont  simplement  le  perfectionnement. 
Les  témoignages  écrits  déjà  invoqués 
semblent  bien  indiquer  que  la  voûte  du 
chœur  fut  construite  en  1104.  —  La  date 
de  la  voûte  du  bras  nord  du  transept  peut 
être  fixée  aux  dix  premières  années  du 
XI 1^  siècle,  et  celle  du  bras  sud  au  premier 
quart  du  même  siècle.  —  Quant  à  la  voûte 
de  la  nef,  avec  ses  doubleaux  en  tiers-point, 
elle  fut  construite  entre  1 128  et  1 133. La  lar- 
geur du  vaisseau  que  franchissent  ces  voû- 
tes mérite  d'être  notée  ;  entre  les  murs,  celle 
du  transept  est  de  io"\28,  celle  de  la  nef, 
de  9"\85.  En  ce  qui  concerne  l'attribution 
exclusive  à  l'Ile-de-France  de  la  découverte 
des  voûtes  sur  croisées  d'ogives,  nous  de- 
vons noter,  au  passage,  une  remarque  de 
M.  Lefèvre-Pontalis.  Il  reconnaît  que  les 
églises  rurales  du  Soissonnais,  même  dans 
la  seconde  moitié  du  XI  le  siècle,  étaient 
généralement  couvertes  de  charpentes  ap- 
parentes, et  avance,  qu'à  cette  époque, 
l'emploi  de  la  croisée  d'ogives  nécessitait 
la  faible  largeur  des  nefs  ;  à  l'appui  de  son 
dire,  il  cite  quelques-unes  des  nefs  les  plus 
anciennement  voûtées  dans  le  Beauvaisis('), 

1.  op.  cit.,  I,  p.  90.  La  largeur  de  la  nef  de  Cam- 
bronne  est  entre  les  murs  de  3'",gi,  celle  de  la  nef  de 
Bury  de  4"',8o.  M.  Lefèvre-Pontalis  dit  que  Cambronne 
ne  peut  pas  être  postérieur  .i  1 1  25.  Oes  deux  exemples  rudi- 
mentaires  de  croisées  d'ogives  qu'il  incline  à  attribuer  à 
la  fin  du  .\I  siècle,  celle  de  Rhuis,  près  Verberie,  est 
une  simple  travée  d'un  bas-côté  et  s'élève  au-dessus  d'un 
espace  carré  de  2'°,2o  décote.  Celle  d'Auvillers,  près  Cler- 
mont-en-Beauvaisis,  est  située  sous  un  clocher  et  n'a 
qu'une  portée  de  2"',6o. 


iles  £)rîgîne0  De  r^lrcbitecture  gothique. 


471 


qui  ne  sont  guère  plus  larges  que  les  bas- 
côtés  de  Durham. 

Dans  l'église  du  prieuré  de  Lindisfarne 
les  vaisseaux  principaux  furent  Couverts  de 
croisées  d'ogives,  qui  du  reste,  comme  l'en- 
semble de  l'église,  furent  visiblement  ins- 
pirées de  la  cathédrale  de  Durham.  Les 
retombées  des  voûtes  du  chœur,  du  tran- 
sept et  de  la  croisée  existent  encore.  Le 
chœur  était  couvert  de  voûtes  quasi-quadri- 
partites, sans  doubleaux.  Les  nervures  ont 
pour  profil  un  boudin  entre  deux  gorges. 
Chacun  des  bras  du  transept  était  couvert 
d'une  simple  voûte  quadripartite  avec  des 
nervures  présentant  le  même  profil  que  ci- 
dessus.  Ce  sont  des  corbeaux  qui,  dans  le 
chœur  comme  dans  le  transept,  reçoivent 
les  nervures.  La  croisée  possédait  aussi  une 
voûte  quadripartite  dont  les  nervures  sor- 
taient de  culs-de-lampe  ;  une  de  ces  ner- 
vures est  encore  en  place.  Sa  partie  inté- 
rieure est  décorée  de  bâtons  brisés  et  Sa 
partie  extérieure  de  moulures.  Les  voûtes 
n'ont  pas  de  formerets.  Il  ne  reste  plus  de 
la  voûte  de  la  nef  qu'un  rang  de  voussoirs 
dessinant  la  lunette  au  haut  du  mur  occi- 
dental. Dans  son  ensemble,  la  construction 
paraît  un  peu  postérieure  à  la  nef  de  Dur- 
ham, mais  aucune  de  ses  parties  ne  semble 
dater  d'une  époque  plus  récente  que  le 
milieu  du  XII''  siècle. 

L'église  de  Warkworih  (Northumber- 
land)  est,  sur  une  plus  petite  échelle,  un 
morceau  d'architecture  qui  est  aussi  certai- 
nement dû  à  l'influence  de  Durham.  Le 
chœur,  long  de  9"'',75  sur  5^,03  de  largeur, 
et  divisé  en  deux  travées,  est  couvert  d'une 
double  croisée  d'ogives  quadripartite  et 
dépourvue,  à  l'origine,  de  doubleau  in- 
termédiaire (■).  Les  nervures  reposent  sur 


I.  Le  doubleau  existant  est  une  addition  postérieure. 

L'église  est  examinée  et  décrite  dans  A  Histoiy  of  Nor- 
ihiimbtrland,  V,  p.  170. 


de  courtes  colonnettes  partant  d'une  cor- 
niche qui  court  au-dessous  de  l'appui  des 
fenêtres,  et  qui  porte  en  arrière  la  paroi  du 
mur,  exactement  comme  dans  le  triforium 
du  chœur  et  le  côté  est  du  transept  à  Dur- 
ham. II  y  a  une  seule  colonne  dans  chacun 
des  angles  du  chœur  et  un  groupe  de  deux 
au  milieu  de  chacun  des  murs  latéraux  ; 
chacun  des  fûts  reçoit  une  nervure.  Le  pro- 
fil de  ces  dernières  est  composé  d'un  gros 
boudin  encadré  de  bâtons  brisés  de  chaque 
côté.  Les  nervures  sont  en  plein-cintre 
surbaissé.  Le  tracé  de  la  voûte  a  été  dis- 
posé en  suivant  l'arc  en  plein-cintre  du 
chœur.  Les  voûtes  sont  léeèrement  bom- 
bées  ;  la  différence  de  niveau  entre  la  clé 
des  nervures,  celle  de  l'arc  du  chœur  et  le 
sommet  de  la  lunette  sur  les  murs  latéraux 
est  respectivement  de  o"\  10  et  de  o'",23. 
La  lunette  elle-même  décrit  sur  les  murs 
latéraux  une  demi-ellipse.  Les  nervures 
sont  composées  de  voussoirs  minces,  dont 
l'épaisseur  moyenne  est  de  o'",  I  7.  11  n'y  a 
pas  de  formerets.  La  date  de  cette  église 
peut  être  fixée  approximativement  entre 
I  I  20,  et   1 130. 

En  dehors  de  la  cathédrale  de  Durham, la 
nef  d'une  autre  grande  église  cathédrale  fut 
aussi  voûtée  avant  le  milieu  du  XI  L  siècle. 
La  nef  de  la  cathédrale  de  Lincoln  (bâtie 
par  l'évêque  Rémi  et  consacrée  en  1092) 
fut  incendiée  en  1141  ;  Giraud  le  Cambrien 
(GiraldusCambrensis)  nous  rapporte  qu'elle 
fut  voûtée  par  l'évêque  Alexandre  (').  Henry 
de  Huntingdon,  qui  place  la  date  de  ces 
travaux  en  1146,  dit  qu'Alexandre  la  fit 
plus  magnifique  que  lorsqu'elle  était  nou- 
vellement bâtie,  et  qu'elle  n'était  inférieure 
à    aucune  autre  construction   du  royaume 

I.  «  Ecclesiam  tamen  Lincolniensem  casuali  igné  con- 
sumptam  egregie  reparando  lapideis  fideliter  vollis  pri- 
mus  involvit.  »  Giraldi  Cauibrensis  Vita  S.  Remigii, 
Rolls  Séries,  éd.  J.  F.  Dimock,  cap.  XXII  (vu,  33). 


REVUE  DE  L  ART  CHRETIEN. 
1901.    —  6"*^   LIVRAISON. 


472 


îRrliuc  ïir  rairt  clircttcn. 


d'Angleterre  (').  Il  ne  reste  plus  qu'un 
fragment  de  la  nef  édifiée  par  l'évéque 
Renii  dans  la  travée  située  entre  les  clochers 
occidentaux  ;  au-dessus  s'élève  l'étage  des 
fenêtres  construit  par  l'évéque  Alexandre 
et  sur  le  mur  duquel  on  peut  encore  voirie 
tracé  semi-elliptique  de  la  lunette  de  la 
voûte  détruite  (').  Le  chœur  de  l'église 
de  Stow  (Lincolnshire)  nous  montre  ce 
qu'était  très  probablement  cette  voûte  ;  par 
ses  détails  il  ressemble  d'assez  près  à  l'œu- 
vre d'Alexandre  à  Lincoln  pour  qu'on  puis- 


itm — I — \ — I — h 


+ 


_|FEET 
MÈTRES! 


Fig.  29.  —  Christchurch,  chapelle  est  du  transept  sud. 

se  l'attribuer  à  la  même  école.  Le  chœur 
de  Stow  se  compose  de  trois  travées  et  a 
7™32'=  de  large.  Les  travées  sont  divisées 
par  des  triplets  de  colonnes  adossées,  un  fût 
distinct  reçoit  chacun  des  arcs  de  la  voûte  ; 
il  y  a  aussi  une  colonne  engagée  dans  cha- 
cun des  angles  du  chevet  pour  la  retombée 
des  oofives.  La  voûte  elle-même  est  une 
reconstruction  moderne  ;  on  y  a  réemployé 
des  voussoirs  anciens  trouvés  dans  les  par- 

1.  *  Ecclesiam  vero  suam,  quse  combustione  detuipata 
fuerat,  subtili  artificio  sic  reformavit,  ul  pulchrior  quam 
in  ipsa  siii  novitate  compareret,  nec  ullius  redificii  struc- 
tura- intra  fines  AnsliiE  cedeiet.»  Henrici  Aichidiacoiii 
Huntendunensis  Historia  Anglorum,  Rolls  séries,  éd. 
Tlios.  Arnold,  pp.  278  9. 

2.  AnhϞlo;rical Journal,  .VI.,  p.  I'J2,  pi.  Il  (.X). 


ties  supérieures  des  murs  ;  quelques-unes 
des  nervures  n'ont  pour  profil  qu'un  boudin 
entre  deux  eorees  ;  d'autres  sont  ornées  de 
bâtons  brisés.  Selon  toute  apparence,  les 
voûtes  construites  par  l'évéque  Alexandre, 
au-dessus  de  la  nef  de  Lincoln,  étaient  des 
croisées  d'ogives. 

L'étude  des  croisées  d'oQ^ives  lancées  au- 
dessus  d'un  vaisseau  central,  comme  nous 
en  trouvons  dans  les  chœurs  de  Kirkstall 
et  de  Ste-Croix  près  Winchester  et  qui  ont 
des  doubleaux  en  tiers-point,  excéderait  les 
limites  de  cette  étude.  Aussi  loin  qu'ont 
pu  s'étendre  mes  observations  en  Angle- 
terre, je  n'ai  pu  relever,  en  dehors  de 
Ste-Croix,  d'édifice  plus  ancien,  indiquant 
chez  son  auteur  quelque  connaissance  des 
travaux  contemporains  exécutés  dans  l'Ile- 
de-France  ;  néanmoins,  à  Ste-Croix,  les  dé- 
tails 'portent  bien  l'empreinte  du  style 
Anglais.  —  Les  édifices  de  la  période  de 
transition  en  Angleterre  n'ont  guère  été 
jusqu'ici  étudiés  à  ce  point  de  vue.  Dans 
les  travaux  dont  ils  feront  encore  l'objet,  il 
serait  à  souhaiter  que  l'on  donnât  place  à 
l'analyse  de  l'influence  indéniable  exercée 
par  r  Ile-de-France, aussi  bien  qu'à  l'histoire 
de  la  renaissance  cistercienne  dont  les  effets 
n'ont  été  que  très  insuffisamment  indiqués. 

Il  nous  reste  à  passer  en  revue  les  an- 
ciennes croisées  d'ogives  édifiées  au-dessus 
des  absides  de  quelques  églises.  Nous  en 
trouvons  une  dans  la  petite  chapelle  absi- 
dale,  qui  s'ouvre  sur  le  bras  slrI  du  tran- 
sept, dans  l'église  de  Christchurch  (Hauts) 
(fig.  2ç).  Elle  paraît  dater  des  premières 
années  du  XI L  siècle.  Le  rond-point  est 
divisé  en  trois  travées  par  des  colonnes 
adossées  à  des  pilastres  carrés  ;  les  nervu- 
res présentent  un  profil  analogue.  L'arc  en 
plein  cintre  qui  s'ouvre  sur  le  transept  est 
très  épais,  et  son  tableau  est  orné  à  chaque 
angle  d'un  gros  boudin  de  même  diamètre 


3le0  îcDnstnejS  U  r:^rcl)ttecture  gotUique, 


473 


que  ceux  des  nervures,  et  qui  correspond 
à  des  colonnes  engagées  ;  deux  nervures  se 
réunissent  à  la  clé  de  l'arc.  Cette  dernière 
est  de  très  grande  dimension,  alors  que  les 
nervures  sont  appareillées,  comme  d'habi- 
tude, en  claveaux  minces.  La  chapelle 
absidale  qui  s'ouvre  de  même  sur  le  bras 
sud  du  transept,  dans  l'église  abbatiale  de 
Tewkesbury,  est  couverte  d'une  voûtes  em- 
blable,  mais  les  nervures,  dont  le  profil  est 
un  simple  chanfrein,  sortent  directement 
du  mur  pour  se  réunir  à  la  clé  d'un  doubleau 
en  plein  cintre  non  mouluré.  L'abbatiale 
ayant  été  consacrée  en  i  i  23,  on  peut  admet- 
tre que  cette  chapelle  a  été  construite  dans 
les  vingt  premières  années  du  XII"^  siècle. 
Une  voûte  semblable,  édifiée  au-dessus 
d'une  abside,  se  voit  dans  l'église  de  Bir- 
kin  (Yorkshire),  mais  elle  ne  remonte  qu'au 
milieu  du  XI I"  siècle;  les  nervures  ont 
pour  profil  trois  tores  séparés  par  des  filets 
(^^.  ji)  ;  la  lunette  de  la  voûte  est  dessi- 
née par  l'archivolte  de  la  fenêtre  qui  est 
en  plein  cintre  ;  la  voûte  dans  son  ensemble 
offre,  pour  ainsi  dire,  l'aspect  d'une  coupole. 
Bien  qu'élevée  sur  plan  carré,  la  voûte 
octopartite  de  la  salle  du  Trésor,  dépen- 
dant de  la  cathédrale  de  Cantorbéry,  pré- 
sente les  mêmes  caractères  ('). 

La  salle  capitulaire,  dépendant  de  la 
cathédrale  de  Durham,  possédait  une  voûte 
absidale  de  plus  grande  importance  et  d'une 
construction  plus  parfaite.  Sa  date  est  con- 
nue, la  maison  du  chapitre  ayant  été  termi- 
née par  l'évêque  Geoffroy-le-Roux  qui 
occupa  le  siège  épiscopal  de  1 133  à  i  i4o('). 
Elle  fut  partiellement  détruite  en  1 796,  mais 

1.  T/ie  Architectural  History  of  the  Conventual  Build- 
ings of  the  Mo7iastery  of  Christ  Church  in  Canterbury, 
par  prof.  Willis,  fig.  6  et  p.  77.  Le  Tiésor  fut  probable- 
ment bâti  peu  après  1130. 

2.  <  Ipsius  (Gaufridi)  tempore  capitulum  nionachorum 
consummatum  est  1>.  Symeoii,  Continuatio,  Rolls  Séries, 
éd.  T.  Arnold,  I,  p.  142. 


les  dessins  de  Carter  en  ont  conservé  une 
reproduction  fidèle  (').  L'abside  était  divi- 
sée en  cinq  travées  (fig.  30)  ;  les  nervures 
de  la  voûte  étaient  supportées  par  des  culs- 
de-lampe,  desquels  trois  ont  été  conservés 
dans  la  bibliothèque  du  chapitre  ;  la  clé  de 
voûte  existe  encore.  Le  profil  de  la  nervure 
était  un  tore  entre  deux  rangs  de  bâtons 
brisés.  La  clé  A  ne  coïncidait  pas  avec  le 
centre  du  rond- point,  et  la  voûte  était  cons- 
truite de  telle  sorte  que  les  nervures  i  et  5 
et  2  et  6  étaient  respectivement  dans  le 
prolongement  les  unes  des  autres.  Elles 
étaient  par  conséquent  de  longueurs  inéga- 


Fig.  30.  —  Durham,  abside  de  la  salle  capitulaire. 

les.   La  largeur  de  la  salle   capitulaire  est 
de  io"^52c  entre  les  murs. 

Il  ne  nous  reste  plus  qu'à  dire  quel- 
ques mots  au  sujet  de  l'importance  que 
peuvent  avoir  les  monuments  anglais  que 
nous  venons  d'étudier  relativement  au  pro- 
blème général  des  origines  de  l'architec- 
ture  gothique.  Avant  l'introduction  de  la 
nervure,  les  Normands  développaient  déjà 
l'ossature  de  leurs  constructions  dans  des 
proportions  tout  à  fait  inconnues  dans 
l'Ile-de-France,  à  en  juger  d'après  les  plus 
anciens  monuments  cités  dans  l'ouvrage  de 
M.  Lefèvre-Pontalis.  Les  premières  croi- 
sées  d'ogives   décrites   plus   haut   et   dans 


I.  Les  dessins  de  John  Carter  ont  été  publiés  par  la 
Société  des  Antiquaires  en  1801.  Une  vue  intérieure  de  la 
maison  du  Cliapitre  est  donnée  dans  Durham  Cuthedral, 
par  Billings,  pi.  LU. 


474 


î^ebue  De  V^xï  cljvcttcu. 


lesquelles  les  nervures  sont  en  plein  cintre 
surbaissé,  nous  montrent  un  système  de 
construction  légèrement  moins  av^ancé  que 
celui  d'après  lequel  sont  conçues  les  voûtes 
qui  couvrent  les  bas-côtés  à  St- Etienne  de 
Beauvais.  Dans  ces  dernières,  les  doubleaux 
sont  considérablement  surhaussés  de  ma- 
nière à  ce  que  la  nervure  ait  pu  être  tracée 
en  plein  cintre,  ou  peu  s'en  faut.  D'autre 
part,  le  grand  nombre  de  croisées  d'ogives 


BERNIERE5 

MAVE  A15LE5 


5A!NT-ET!ENNE,CAEN 

NAVE 


CANTERBURY 

TREA5UKY 


BIRKIN 

AP5E 


.FEET 


I  I     I  I     I  I     I  I 


J L 


J L 


I, METRE 


subsistant  encore  en  Angleterre  prouve 
l'existence  d'une  école  active,  qui  avait  déjà 
accompli  de  grands  progrès  avant  l'intro- 
duction de  l'arc  brisé.  Il  est  remarqu.ible 
que  toutes  les  voûtes  que  nous  avons  pu  ob- 
server soient  quadripartites.  Nous  n'avons 
rencontré  aucun  exemple,  soit  de  voûtes 
sexpartites  ('),  soit  de  la  forme  intermé- 
diaire :  une  voûte  quadripartite  édifiée  sur 

I.  Au  moment  où  ce  travail  a  élc  écrit  je  ne  con- 
naissais pas,  en  Angleterre,  de  voûtes  sexpartites  plus 
anciennes  que  celles  édifices  à  Cantorbéry  par  (iuillaunie 
de  Sens.  —  .Mais  le  choeur  de  la  petite  église  de  Ticken- 
cote  (Rutland)  est  couvert  d'une  voûte  sexpartite,  qui 
doit  dater  du  milieu  du  XII'-"  siècle.  Toutes  les  nervures 
sont  ornées  de  bâtons  brisés. 


une  double  travée  et  divisée  par  un  arc 
doubleau  secondaire  portant  un  mur,  deux 
genres  de  voûtes  qui  ont  été  employés  en 
Normandie  dans  la  région  de  Caen.  —  En 
conséquence,  il  est  permis  de  considérer  la 
voûte  quadripartite  comme  constituant  la 
forme  primitive  de  la  croisée  d'ogives,  et, 
comme  le  dit  M.  Dehio,  les  autres  variétés 
de  voûtes  n'auraient  pu  se  développer  si  la 
voûte  quadripartite  n'avait  d'abord  été  con- 
nue. En  étudiant  les  divers  profils  employés 
dans  les  nervures,  nous  sommes  amenés  à 
la  même  conclusion.  Si  l'on  se  base  sur 
leurs  caractères  généraux  aussi  bien  que 
sur  leurs  profils,  les  premières  croisées 
d'ogives  anglaises,  qui  ont  été  décrites  plus 
haut,  peuvent  être  comparées  aux  voûtes 
quadripartites  de  Lessay  et  appartiennent 
à  un  état  architectural  antérieur  à  celui 
auquel  se  rapportent  les  croisées  d'ogives 
du  groupe  d'églises  environnant  Caen.  Ces 
dernières,  qu'elles  soient  sexpartites  ou  de 
la  forme  intermédiaire  (voûte  quadripartite 
coupée  par  un  doubleau  secondaire),  nous 
montrent  une  série  de  profils  d'ogives 
faciles  à  classer  (fig-3t),  et  qui  constituent 
un  type  plus  affiné  et  plus  clairement  posté- 
rieur à  tout  ce  que  nous  pouvons  trouver 
en  Angleterre,  jusqu'à  l'époque  où  fut  con- 
struite la  voûte  octopartite  du  Trésor  de 
la  cathédrale  de  Cantorbéry,  c'est-à-dire, 
selon  toutes  les  probabilités,  peu  après  i  1 30. 
En  l'absence  de  tout  témoignage  précis,  la 
date  approximative  de  1130,  proposée  (') 
pour  les  voûtes  les  plus  anciennes  du  groupe 
de  Caen,  semble  assez  vraisemblable  et  les 
expériences  que  les  constructeurs  de  ces 
voûtes  firent  en  variant  les  tracés  adoptés 

I.  Le  profil  de  St-Étienne  de  Caen  se  rencontre  aussi 
dans  les  grands  arcs  de  la  nef  de  l'église  de  New  Shore- 
liam.  M.  Edniund  Sliarpe  assigne  h  ceté  lifice  la  date  de 
1 1 30  (  The  A rchitccitir, il  Ilisloiy  ofSI-Maiy's  Chiirch,  New 
Shorehim,  par  Kdniund  Sliarpe,  1861  ;  croquis  supplémen- 
taire, p.  6). 


3Le0  £>rigineô  ht  r:^rcl)ttecture  gotl)tiiut. 


475 


pour  les  courbes  des  nervures,  prouvent 
qu'ils  n'adoptèrent  pas  un  procédé  de  con- 
struction déjà  fixé  et  expérimenté  ailleurs. 

Cependant,  même  en  ne  prenant  en  con- 
sidération que  les  seuls  monuments  anglais, 
les  dates  précises  des  plus  anciennes  croi- 
sées d'ogives  que  nous  y  rencontrons  ren- 
dent tout  à  fait  impossible  l'hypothèse  d'une 
influence  venant  de  l'Ile-de-P'rance  ;  leur 
étude  nous  permet  d'affirmer  positivement 
l'indépendance  complète  de  l'école  norman- 
de jusqu'à  la  fin  du  premier  tiers  du  XI I" 
siècle.  Quant  à  déterminer  quel  rôle  ont 
pu  jouer  les  influences  normandes  dans  la 
transition  française,  c'est  un  point  difficile 
à  fixer.  A  première  vue,  il  semble  que  ces 
influences  ont  été  beaucoup  plus  considé- 
rables que  bien  des  archéologues  français 
n'ont  voulu  l'admettre  jusqu'à  présent. 

■ —  C'est  l'espoir  de  contribuer,  dans  quel- 
que mesure,  à  la  solution  définitive  de  la 
question,  qui  m'a  amené  à  donner  une 
étude  méthodique  des  monuments  anglais 
qui  renferment,  comme  on  l'a  pu  voir,  bien 
des  éléments  du  problème. 

Xiotz  aDOitionncllc  relative  aur  tioûtcs 
Oc  la  catbcDralc  De  ï)urf)am. 

CETTE  note  est  une  réponse  aux 
critiques  qui  ont  été  formulées  au 
cours  de  la  discussion  soulevée  par  l'ar- 
ticle qu'on  vient  de  lire,  et  qui  se  référaient 
aux  dates  assignées  par  moi  aux  voûtes 
hautes  de  la  cathédrale  de   Durham. 

11  me  semble  que  les  objections  que  l'on 
m'a  faites  se  réduisent  simplement  à  ceci  : 
à  savoir  que  c'est  une  chose  discutable 
que  des  architectes  se  soient  trouvés  en 
mesure  de  construire  des  croisées  d'ogives 
dès  le  commencement  du  XII'' siècle,  car 
cela  ne  s'accorde  pas  avec  l'opinion  géné- 
ralement   admise    en   ce    qui    concerne    le 


développement  delà  construction  de  voûtes 
dans  l'Europe  occidentale  pendant  la  pé- 
riode de  transition.  —  Il  serait  impossible 
de  discuter  ici  l'exactitude  de  cette  opinion 
sans  dépasser  les  limites  de  cette  étude. 
Cependant,  je  tiens  à  citer  un  passage  de 
MM.  Dehio  et  von  Bezold  qui  est  digne 
d'être  noté,  d'autant  qu'ils  ne  reconnais- 
saient pas  la  cathédrale  de  Durham  comme 
constituant  un  des  facteurs  du  problème 
consistant  à  voûter  en  pierres  le  vaisseau 
principal  de  nos  églises.  Voici  ce  qu'ils 
disaient  :  «  Les  grands  monuments  archi- 
«  tectoniques  du  XI^  siècle  n'ont  pas  fourni 
«  la  solution  de  ce  problème,  mais  l'ont 
«  préparée  dans  toutes  ses  parties.  Aussi, 
«  au  seuil  du  siècle  suivant,  l'école  nor- 
«  mande  fut-elle  la  première  à  atteindre 
«  le  but  sur  lequel  se  sont  concentrés 
«  longtemps  les  efforts  de  toutes  les  écoles 
«  de  la   France  septentrionale  (').  » 

On  a  émis  l'hypothèse  que  les  voûtes 
de  Durham  fournissaient  peut-être  l'exem- 
ple d'une  contradiction  entre  les  conclusions 
auxquelles  pouvait  nous  conduire  l'examen 
de  l'édifice,  et  les  faits  avancés  par  les 
documents  écrits.  Si  l'on  examine  ces 
deux  sortes  de  documents,  il  ne  peut  y 
avoir  ici  de  conflit  dans  le  résultat  de  la 
confrontation.  Connue  on  l'a  si  bien  dit, 
la  base  même  de  l'histoire  de  l'architecture 
ne  peut  être  déterminée  qu'à  l'aide  des 
documents  écrits.  Dans  le  cas  qui  nous 
occupe,  les  documents  écrits  sont  contem- 
porains de  l'édifice  ;  l'auteur  a  rédigé  son 
œuvre  sur  les  lieux  mêmes  et  il  n'y  a 
aucune  raison  de  douter  de  son  exacti- 
tude. Si  l'on  considère  seulement  les 
caractères  archéologiques  de  la  construc- 
tion, l'histoire  de  l'édification  successive 
des   voûtes  hautes  et  de  leur  liaison  avec 

I.  V/i:  Kircliliclic  Buiikiinsl,   I,  p.   279. 


476 


Withxit  îie  rSvt  cbrctien. 


le   reste  de  l'église    nous  apparaît  comme        tenl  simplement  à  même  de  dater  certaines 
parfaitement  claire.  Les  chroniqueurs  met-    1    étapes  de  la  construction.   Voici  ce  qu'est 


^/^k^^ 


SI 


DE 


SOUTH   TRAN5EPT  VAULT,  DIAGONAL  RIB. 


SOi'RT 


SOlViT 


NAVE  VAULT  (II2Ô-1133),  DIAGONAL  RIB. 


SIDE 


SOFFIT 


DIAGONAL  RIB  OF  OBLONG    BAY5 
\ 


RIB5  OF  AF5E 


.^^^J 


50FFIT 

CHAPTER-H0U5E  VAULT  (1153-1140). 

0  1  2 

1  '    '    I    '    I    I    I    '    I    M    I    __ . ^ 


ARCADE  IN  CA5TLE.. 
500N  AFTER  1155 

3  FEET  . 


1  METRE 


Fig.  32.   —  Durham,  catliédrale  et  château. 


en   réalité  la  question  :  ces  voûtes  hautes 
sont-elles,  oui  ou  non,   la  couverture  primi- 


tive de  l'église?  Mon  o[)inion,  tirée  du  seul 
examen    de   l'édifice,  est  que  oui,   excepté 


iles  €)ngmes  De  r^ixl)ttecture  gûtl)tque. 


477 


peut-être  la  voûte  du  bras  sud  du  transept, 
et  réserve  faite  que  la  voûte  actuelle  du 
chœur  est  du   XI 11^  siècle. 

Dans  le  chœur,  le  plan  général  prouve 
de  la  façon  la  plus  claire  l'intention  de 
couvrir  le  vaisseau  principal  de  voûtes 
dont  on  peut  voir  encore  les  traces  dans 
la  claire-voie.  Si  l'on  admet  que  les  croisées 
d'ogives  des  bas  côtés  du  chœur  (où  les 
travées  ont  7'^,  21  de  long)  datent  de  l'ori- 
gine, est-il  vraiment  si  difficile  d'admettre 
la  possibilité  de  construire  une  croisée 
d'ogive  sur  le  chœur  qui  a  une  largeur 
de  9'",  96  ;  étant  donné  surtout  qu'un  peu 
plus  de  cent  ans  après  sa  construction  cette 
voûte  menaçait  déjà  ruine  ?  Il  est  bon  de 
se  souvenir,  en  effet,  que  dans  une  église 
normande,  achevée  quelque  vingt  ans  plus 
tôt,  Saint-Nicolas  de  Caen,  un  chœur  de 
8i",69  de  large,  comportant  des  bas  côtés 
et  une  claire-voie,  a  été  couvert  de  voûtes 
d'arêtes.  Ce  n'est  pas  le  seul  exemple  de 
ce  genre  qui  subsiste.  La  voûte  originale 
du  chœur  de  Durham  a  dû  presque  cer- 
tainement précéder  celle  du  bras  nord  du 
transept.  Lhabitude  fut  tellement  répan- 
due de  voûter  le  chœur  seul,  et  de  couvrir 
le  reste  de  l'église  avec  une  charpente  ap- 
parente, que  nous  avons  peine  à  croire  que 
l'ordre  habituel  ait  été  interverti  ici.  La 
disposition  du  côté  est  du  transept  dénote 
l'intention  de  construire  une  voûte  comme 
dans  le  chœur.  Dans  le  bras  sud  du  tran- 
sept qui  aurait  été  construit  avant  le  bras 
nord,  le  cloître  et  les  bâtiments  étant  du 
côté  sud,  le  projet  de  voûtes  fut  abandonné 
et  la  claire- voie  disposée  pour  supporter  une 
charpente  apparente  ;  il  fut  peut-être  à  cette 
époque  effectivement  couvert  de  cette 
manière.  A  cette  période  de  l'œuvre,  on 
eut,  à  ce  qu'il  semble,  l'intention  de  renon- 
cer à  lancer  des  voûtes  au-dessus  du  reste 
de  l'église  (transept  nord  et  nef)  pour  em- 


ployer les  charpentes  apparentes  d'un 
usage  général  dans  les  parties  analogues 
des  édifices  religieux. 

Nous  avons  cependant  des  preuves  su- 
rabondantes que  cet  abandon  des  projets 
primitifs  n'a  pu  être  que  temporaire,  et  ici 
le  caractère  des  détails  de  la  voûte  demande 
toute  notre  attention.  Il  y  a  des  différences 
de  détails  qui  seraient  de  peu  d'importance 
si  on  les  rencontrait  dans  des  ouvrages 
séparés,  mais  qui  deviennent  très  significa- 
tives lorsqu'on  les  trouve  dans  un  ensemble 
de  bâtiments,  œuvre  d'une  même  école 
d'architectes.  Lorsqu'il  fut  question  de 
couvrir  le  bras  nord  du  transept,  on  con- 
struisit une  voûte  qui  ressemble  par  ses 
détails  aux  voûtes  les  plus  anciennes  de 
l'église,  celles  des  bas-côtés  du  chœur  et  du 
transept,  et  qui  est  dépourvue  des  bâtons 
brisés  dont  on  a  usé  si  librement  dans  la 
nef  due  à  l'évêque  Flambard.  La  voûte  du 
bras  sud  est  un  peu  plus  récente  que  celle 
du  bras  nord,  mais  les  bâtons  brisés  des 
nervures  sont  aussi  simples  que  partout 
ailleurs  dans  ï église  {voy.  Jl^.  j 2),  tandis 
que  les  bâtons  brisés  des  arcs  doubleaux 
de  cette  voûte  sont  du  même  modèle  que 
ceux  des  giands  arcs  de  la  nef.  La  voûte 
de  la  nef  est  encore  un  peu  postérieure  et 
nous  montre  l'arc  brisé  employé  avec  une 
curieuse  inexpérience,  ce  qui  tendrait  à 
confirmer  l'hypothèse  de  son  ancienneté 
relative  ;  les  bâtons  brisés  des  nervures 
{voyez/lg.  J2  et  la  première  photographie 
dans  layf^.  jj)  (')  sont  encore  très  simples, 
et  pourtant  le  sont  déjà  un  peu  moins  que 
ceux  des  nervures  du  transept  sud.  Enfin, 
nous  avons  la  voûte  de  la  salle  capitulaire, 
d'une  portée  plus  grande  que  la  largeur  de 
la  nef  elle-même,  et  quelle  que  soit  l'inter- 
prétation donnée  aux  documents  relatifs  à 

I.  Je  dois  cette  photograpliie  au  professeur  Baldwin 
Brown. 


478 


ÎRrDuc  lie  riait  cljvctieu. 


l'église,  nous  possédons,  en  ce  qui  la  con- 
cerne, une  preuve  indiscutable  et  certaine 
qu'elle  a  été  achevée  sous  l'épiscopat  de 
Geoffroy-le-  Roux  (  i  133-11 40).  Quoique  les 
doubleaux  soient  en  plein  cintre, les  croisées 
d'ogives  de  la  salle  capitulaire  ont  été  con- 
struites sur  plan  quadripartite  ordinaire  et 
ne  reproduisent  pas  la  disposition  que  nous 
trouvons  dans  le  transept  ainsi  que  dans  la 
nef  et  qui  comporte  la  suppression  du  dou- 
bleau  intermédiaire  au  centre  de  la  double 
travée.  Une  simple  comparaison  des  bâtons 
brisés  qui  décorent  les  nervures  de  la  salle 
capitulaire  (Jig.j2)  avec  ceux  des  nervures 
de  la  nef  fait  clairement  apparaître  la  date 


Fig.   '}>})■  —  Cathédrale  de  Durham, 
Nervure  diagonale  des  voûtes  de  la  nef  (1128-1133). 

plus  reculée  de  cette  dernière.  Sur  les  ner- 
vures des  travées  barlongues  les  bâtons 
brisés  sont  d'un  modèle  semblable  à  ceux 
qui  se  trouvent  sur  les  nervures  des  bas- 
côtés  de  la  nef,  mais  leur  détail  est  toute- 
fois plus  soigné  et  le  tore  affecte  légère- 
ment la  forme  en  amande  ;  sur  les  nervures 
de  l'abside  les  bâtons  brisés  sont  encore 
d'un  caractère  plus  avancé  que  ceux  de  la 
nefC). 

I.  Les  ogives  des  travées  barlongues  (fig.32.)  ont  pu  être 


Un   autre    point    important,  que   le   seul 
examen  de  la  construction  élucide  complète- 
ment, est  que  (excepté  le  bras  sud  du  tran- 
sept)  les    claires-voies   sont    de   la    même 
époque  que  les  voûtes.  Dans  le   chœur,  ce 
fait  apparaît   suffisamment   dans   la    travée 
représentée  par  may/V  7    (p.  -iyT^-  ante)  :  la 
fenêtre  de  la  claire-voie  n'est  pas  dans  l'axe 
de  l'ouverture  du   triforium  ;  au  contraire, 
sa  position  est  évidemment  déterminée  par 
la  voûte  (voir  aussi  Diirhain  Cathedra!,  par 
Billings,  pi.  XI).  Les  claires-voies  de  la  nef 
se  raccordent  si  bien  avec  les   voûtes,  qu'il 
est  difficile  de  croire  qu'elles  ont  été  édifiées 
séparément,  mais,  en  outre,  nous  avons  des 
preuves  précises  de  la  contemporanéité  de 
leur  construction.    C'est    dans    la   seconde 
travée  à  partir  de   la  façade  qu'on  le  voit 
le  plus  clairement  ;  dans  cette  travée,  sim- 
plement barlongue,  le  pilier  de  la  tour  pré- 
sente une  colonne  supplémentaire  qui  reçoit 
les  nervures  du  côté  ouest  ;  du  côté  est  de 
la  travée,  la  nervure  sort  d'un  cul-de-lampe 
comme  dans  le  reste  de  la  nef.  Le  milieu 
du    triforium    coïncide    avec   le    milieu   de 
l'espace  séparant    les   piliers  :    l'axe  de  la 
voûte  est  nécessairement  placé  au  milieu 
du  pilier  ouest  et  de  l'encorbellement  est  ; 
il  n'en  est  pas  ainsi  dans  l'axe  du  triforium 
et  du   grand  arc   situé  au-dessous  (voyez  : 
Dtcrham  Cathedral,\)AX  Billings,  pi.  X).  Or, 
l'axe  de  la  claire-voie  n'est  pas  dans  l'axe  du 
triforium   mais   coïncide  avec    celui   de  la 
lunette  de  la  voûte  ;  ce  qui  [M'ouve  péremp- 
toirement que  claire-voie  et  voûte  ont  été 


mesurées  dans  toutes  leurs  dimensions  grâce  à  un  de  leurs 
voussoirs  trouvé  dans  le  cours  de  la  restauration  récente  ; 
au  reste  beaucoup  des  anciens  voussoirs  ont  pu  cire 
utilisés  dans  les  voûtes  nouvelles.  —  C'est  d'après  l.i  clé 
de  voûte  (à  A.  fie;.  30,  p.  77J  aiitc)  qu'ont  pu  être  déter- 
minées les  dimensions  des  nervures  de  la  voûte  absidale. 
—  C'est  à  M.  J.  Freeman,  sacristain  de  la  cathédrale,  que 
je  dois  la  photographie  de  cette  clé  de  voûte  (fig.  34), 
ainsi,  du  reste,  que  celles  de  l'ornementation  en  bâtons 
brisés  du  narlhex. 


Iles  £)ngtiies  îie  r;arcl)itecture  gotl)ique. 


479 


construites  simultanément.  Dans  toutes  les 
autres  travées  de  la  nef  (excepté  peut-être 
dans  la  moitié  de  la  travée  est,  contiguë  à  la 
croisée  du  transept),  l'axe  de  la  voûte  n'est 
pas  dans  celui  du  triforium,  puisque  le 
cul-de-lampe  d'où  sort  la  nervure  au-dessus 
des  piles  fortes  est  plus  près  de  l'axe  du 
triforium  que  le  cul-de  lampe  placé  au-des- 
sus des  piles  faibles  ;  en  tous  cas,  l'axe  de 
la  claire-voie  coïncide  avec  celui  de  la  voûte 
et  non  avec  celui  du  triforium.  Dans  le 
transept  nord,  la  travée  la  plus  proche  de  la 
croisée  nous  fournit  une  preuve  semblable, 
et  dans  la  travée  du  nord  (côté  est)  la  claire- 
voie  ne  peut  avoir  été  construite  qu'en  vue 
de  la  voûte  existante.  Dans  la  claire-voie  de 
la  nef  (la  moins  ancienne),  le  style  des  dé- 
tails s'accorde  avec  le  travail  de  la  partie 
inférieure  et  tous  les  chapiteaux  sont  de 
simples  chapiteaux  cubiques. 

La  seule  conclusion,  à  mon  avis,  est  que 
les  voûtes  encore  existantes  du  transept 
nord  et  de  la  nef  de  la  cathédrale  de  Dur- 
ham  ont  couvert  dès  l'origine  ces  parties  de 
l'église  et  sont  contemporaines  des  claires- 
voies.  Si  on  veut,  cependant,  discuter 
cette  conclusion,  nous  somme.'^,  je  pense, 
en  droit  de  demander  quelque  chose  de 
plus  qu'une  critique  purement  négative.  11 
nous  faut  une  analyse  de  l'histoire  de  ces 
voûtes  qui  puisse  s'accorder  avec  l'étude 
du  monument,  les  documents  fussent-ils 
laissés  entièrement  de  côté.  En  effet,  les 
voûtes  du  transept  et  de  la  nef  existent  ;  il 
faut  analyser  leur  histoire,  et  non  seulement 
la  leur,  mais  celle  des  claires-voies  qui  (ex- 
cepté dans  le  transept  du  sud)  sont,  sans 
conteste,  contemporaines  des  voûtes.  Pre- 
nons la  nef,  par  exemple;  si  «  testudo  »  dans 
le  passage  déjà  cité  (note  2  p.  375  préc.) 
signifie  un  toit  ou  un  plafond  de  bois  et 
que  l'on  suppose  que  ce  plafond  ait  été 
posé   au-dessus  du   triforium,    alors   on    ne 


peut  admettre  que  le  chroniqueur  nous 
donne  l'église  comme  achevée  en  1 133.  Si 
ce  plafond  a  été  posé  au-dessus  de  la  claire- 
voie,alors  cette  dernièretout  entièreadûêtre 
reconstruitelorsde  l'add  il  ion  des  voûtes.  Con- 
séquemment,  la  reconstruction  des  claires- 
voies  et  l'érection  de  voûtes  au-dessus  d'une 
église  qui  mesure  presque  120  mètres  de 
long,  auraient  dû  être  une  opération  d'une 
importance  considérable  et,  non  seulement 
les  documents  écrits,  qui  nous  donnent  de 
la  construction  une  histoire  comme  on  en 
rencontre    rarement    d'aussi    complète,   ne 


FlJJ,  34-  —  Cathédrale  de   Durhani. 
Clef  de  la  voûte  de  l'abside  du  chapitre  (1133-1140). 
(Geoffroy-Ie-Rcux,  évêque.) 

nous  laissent  aucune  indication  à  ce  sujet, 
mais  l'édifice  lui-même  ne  nous  montre 
aucune  trace  d'une  reprise  de  ce  genre, 
alors  qu'il  est  facile  de  remarquer  un  rema- 
niement analogue  dans  le  bras  sud  du  tran- 
sept, où  le  projet  d'une  charpente  apparente 
a  certainement  précédé  l'érection  des  voûtes 
actuelles.  La  seule  hypothèse,  qu'on  nous 
ait  jusqu'ici  soumise,  est  que  les  voûtes 
hautes  furent  bâties  au  temps  de  l'évêque 
Hugues  de  Puiset(i  i6o  environ).  11  n'existe 
aucun  document  qui  corrobore  cette  opi- 
nion, et  elle  est  amplement  contredite  par 
le  caractère  facilement  reconnaissable  des 
constructions  dues  à  cet  évêque,  tant  dans 
la  cathédrale,  que  dans   le  château  de  Dut- 


revue  DE  l'art  chrétien. 

igOI.    —  6™^   LIVRAISON. 


48o 


B.cbuc  ÏJC  ravt  cbvctien. 


ham  et  à  Auckland,  Sherburn,  et  Darling- 
ton.  Le  bâton  brisé  représenté  dans  la 
fioure  J2  est  pris  dans  ce  qu'on  appelle  au 
château  de  Durham  :1a  Galerie  normande. 
C'est  la  première  connue  des  constructions 
qu'a  fait  élever  Hugues  de  Puiset  ;  elle  fut 
nécessitée  par  un  incendie  qui  eut  lieu  peu 
de  temps  après  son  avènement,   en  1153. 


Fig-  33-  —  Cathédrale  de  Durham. 

Arcades  principales  du  galilée,  1175  environ  (Hugues  de  Puiset, 

évtque.) 

Le  narthex,  dit  «  galilée  »,  de  la  cathédrale 
(fi"'-  35)  (')■  ^^^  ^^^  ouvrage  plus  récent  de 
ce  prélat,  et  date  de  i  175  environ.  L'évi- 
dence matérielle,  qui  découle  de  l'examen 
de  ces  quelques  détails,  sera  sans  doute 
suffisamment  convaincante  sur  ce  point.  Il 
est  cependant  prématuré  de  discuter  une 
hypothèse  de  ce  genre,  avant  qu'une  étude 
approfondie  nous  donne  de  ces  voûtes  une 
analyse  en  rapport  avec  les  constatations 
matérielles  qu'on  peut  faire  sur  le  monu- 
ment. 

I.  Pour  le  détail  des  arcs  du  narthex,  voyez  Durham 
Calhedral,  par  R.  \V.  Dillings,  pi.  XXXV. 


On  nous  a  aussi  fait  l'objection  qu'à 
notre  connaissance  ces  voûtes  n'ont  pas 
été  copiées  ailleurs.  J'ai  déjà  (p.  463  an/c) 
fait  quelques  rapprochements  qui  me  sem- 
ble contredire  cette  opinion,  et  sa  valeur 
est  bien  diminuée  si  l'on  remarque  combien 
peu  de  chœurs  construits  en  Angleterre 
pendant  la  première  moitié  du  XII<=  siè- 
cle, ont  subsisté  sans  avoir  subi  des  rema- 
niements, ou  sans  avoir  été  entièrement 
reconstruits  ;  ce  qui  rend  souvent  impos- 
sible de  dire  comment  Ils  étaient  voûtés  à 
l'origine.  On  a,  d'autre  part,  peu  de  chances 
de  rencontrer  des  croisées  d'ogives  au-des- 
sus de  transepts  et  de  nefs  ;  à  cet  égard, 
l'intention  de  couvrir  les  principaux  vais- 
seaux de  l'église  de  Norwich,  intention 
que  M'  W.  H.  St.  John  Hope  nous  fait 
remarquer,  n'est  pas  seulement  intéressante 
en  elle-même,  mais  aussi  parce  que  des 
piliers  de  cette  église  offrent,  par  leur 
agencement,  une  ressemblance  frappante 
avec  ceux  du  chœur  de  Durham.  L'objec- 
tion mentionnée  ci-dessus  me  paraît  donc 
perdre  toute  sa  force,  surtout  si  l'on  étudie 
les  voûtes  anglaises  en  les  comparant  à 
celles  de  Normandie  ;  on  ne  peut  les  con- 
sidérer autrement  que  comme  les  travaux 
d'une  même  école  d'architectes.  M.  An- 
thyme  St-Paul  [La  Transi/ ion,  chap.  VI) 
incline  à  penser  que  la  cathédrale  d'.Evreux 
avait  des  croisées  d'ogives  avant  1 130.  Il  y 
a  les  voûtes,  incontestablement  primitives, 
de  Lessay  et  des  exemples  plus  récents, 
comme  le  transept  de  Montivilliers,  qui 
représentent  un  type  moins  développé  que 
le  groupe  important  de  Caen  et  de  ses 
environs. 

John    liii.soN. 


A^^  X?^  iif^  A'^-Jt  K^^  kM*  \^^  AJ^VU  i>fYU  Ariy*  A^Jx  K^A  \^^  A^^  A^^ 


^'TTTyiTTI  TTTTTTïr^''^^^TTTT^-TIII-I^T^-^^TTTlT^[T^ïTTTr:^I^I^TT^yTT^TTT^:  i-TTTTirTtriJiiiiiJiiiiiIffriTII^ 


txiiimr-a 


nniniHî(-ii;p 


i^i    6s0ai  sur  la  ticcorattcn  arrI)ttcctoniquc» 


'uixiiii  [:TX3iLiiijaTJiiii]:iiriJii:LiiiiiTi^.Tiirixi:cii3JXiJ]:iiiiiJi:^[rixiriicixi:iiiixjiiiiii.[:xjij:xxi  tuiiiir.cxi-iiiii  niiiiu  ctiiuiï  tniixrï  txit) 


jfe  *Atl  'f  ^A^^f  ^A*!^  *AÔ*  *AiI*  ^Ail^'f  *Atl*  *AiI^  *:AÏ^  *iiï'f  *^^  ^iil''  *^^  ^^'f  *iil''  *^ 


I 

A 


Soîirces  de  décor  {?.u\^€). 
LA  FIGURE  HUMAINE. 

COMME  couronnement  de  notre  collec- 
tion de  sujets  vivants  se  présente  la 
figure  humaine. 

Entière  et  dégagée  (en  haut  relief),  elle 
s'ajoute  à  l'architecture  sous  la  forme  de 
statues  (ou  de  groupes)  portées  sur  piédes- 
tal, encadrées  dans  une  niche,  se  dressant 
au-dessus  d'une  corniche,  planant  même  au 
faîte  d'un  comble,  comme  l'ange  de  l'anté- 
fixe  du  chœur  de  N.-D.  de  Paris  et  ceux 
des  pinacles  de  la  cathédrale  de  Reims, 
comme  le  saint  Michel  de  bronze  au  sommet 
de  la  tour  de  l'Hôtel-deVille  de  Bruxelles, 
et  le  Hanske  de  Kryger,  le  porte-bannière 
du  beffroi  d'Audenarde  (Jig.  joi ). 


Fig.  301. 

Remarquons  tout  d'abord,  ici  que  cer- 
taines des  figures  que  nous  venons  de  citer 
comme  exemples  remplissent  un  rôle  à  la 
fois  fonctionnel  et  décoratif;  le  personnage 
humain  devient  un  organe  élégant,  artis- 
tique, mais  reste  un  organe  de  l'édifice  ; 
ainsi  en  est- il  des  cariatides  et  des  statues 
servant  d'épis  de  combles,  d'amortissements 
de  pinacles  (Jîg.  J02),  etc.  Dans  ce  cas, 
elles  ont  à  la  fois  tous  les  mérites  des  formes 


de  convenance,  de  structure  et  d'expression. 
D'autres,  placées  sur  un  piédestal,  sous  un 


Fig 


baldaquin,  sont  ajoutées  plutôt  que  soudées 
au   monument,   et   en  constituent  des  élé- 


Flg.  ^O'^.  —  Statue  du  Chiist  à  Saint-Nazaire  de  Carcassonne. 

ments  moins  essentiels  mais  non  dépourvus 
de  convenance.  Encore  faut-il  qu'elles  ne 


482 


l^rbuc  ïic  V^xt  cbvcttcn. 


se  substituent  pas  K  un  membre  de  la  struc- 


^  'rï-  3'^4-  —  Détail  du  grand  portail  de  la  cathédiale  de  Reims. 

ture,  de   mnnière   à    en    usurper   la   place  ; 


dans  l'œuvre  bâtie  et  la  gâtent  au  lieu  de 
l'orner.  Nous  ne  pouvons  nous  empêcher 
de  songer  ici  à  la  mode  fâcheuse,  qui  sévit 
actuellement,  de  jucher  des   statues  colos- 


certaines  statues  interviennent  brutalement 


Fig.  306.  —  Musée   de  Toulon. 

sales  au  sommet  des  tours  d'églises.  Ces 
aberrations  sont  dues  à  d'impérieux  caprices 
de  goût  de  la  part  de  personnes  étrangères 
à  l'esthétique  monumentale. Nous  plaignons 


Fig.  2^7'  —  Porte  (1  un  palais  de  Géiie.<!. 

les  architectes  qui  se  laissent  violenter  par 
l'autorité,  quand  elle  est  si  mal  inspirée. 

La  statue  gothique  se  dresse  d'habitude 
sur  un  cul  de  lampe  et  s'abrite  sous  un  bal- 
daquin  (v.  fig.  303  et  305). 


€ô0at  0ur  la  ùécorattoii  arcl)ttectontqiie. 


483 


Dans  le  style  classique,  des  personnages 
humains  se  voient  souvent  étendus  en  pen- 
dants sur  les  deux  rampants  d'un  fronton, 
ou  même,  plus  intimement  soudés  à  l'ar- 
chitecture, ils  constituent  des  supports  an- 
thropomorphes, ou  se  dressent  en  caria- 
tides, comme  à  l'Erechteion  d'Athènes, 
où  ils  prennent  la  place  de  pilastres,  ou  rem- 
plissent la  fonction  de  grandes  consoles  sous 
un  avant-corps,  comme  à  la  célèbre  porte 
de  Puget  à  l'Hôtel-de-Ville  de  Toulon  et  à 


celle  d'un  palais  génois  figiin'e  ci-contre 
(fis-  3^7}-  ^'^  apparaissent  même,  dans  les 
gaines  et  les  termes,  à  mi-corps  ou  en 
bustes  (fig.  Jjoç). 

Aux  trumeaux  et  aux  ébrasements  des 
portails  des  grandes  églises  gothiques  se 
dressent  ordinairement  des  personnages  qui 
comptent  parmi  les  plus  beaux  exemples  de 
piliers  anthropomorphes  f/ig.  jo^  et  308). 

Isolées  et  groupées,  plusieurs  figures  com- 
posent des  ensembles  architectoniques  du 
même  ordre  dans  des  monuments  tels  que 


le  fameux  groupe  dit  des  Trois  Grâces,  que 
Germain  Pilon  composa  pour  le  monument 
de  Henri  II,  ou  la  fontaine  dite  de  Moïse  à 
Dijon, qu'on  trouve  reproduite  à  la  page  157 
de  l'année  1896  de  la  Revue  de  l' Art  chré- 
tien. Ajoutons  encore  un  exemple  emprunté 
à  l'époque  romane,  savoir  un  pilier  du 
cloître  roman  de  Moissac,  qui  représente 
lin  évangéliste  (année  1899,  p.  35).  Remar- 
quons que  les  prophètes  de  Dijon  et  l'évan- 
géliste  de  Moissac  constituent  des  figures 
décoratives  et  symboliques  incorporées  à  un 


^'g-  3^9-  —  Maison  B'i  du  Nord  à  Bruxelles,  par  Bp.vaert. 

pilier,  non  des  figures  fonctionnelles  identi- 
fiées à  l'organe  de  structure  comme  le  sont 
les  cariatides.  On  trouvera  de  vraies  et 
splendides  cariatides  aux  accoudoirs  de 
stalles  publiés  naguère  ici  (fig.  p.  73  de 
l'année  1898  de  la  Revue  de  l' Art  chrétien). 

Au  lieu  d'être  isolée,  en  ronde  bosse, 
comme  disent  les  sculpteurs,  dégagée  de  la 
pierre,  la  figure  peut  encore  être  tr.iitée  en 
bas-relief  ;  elle  s'unit  alors  plus  intimement 
à  l'œuvre  construite,  dont  elle  occupe  des 
parties  bien  délimitées,  le  plus  souvent  des 


484 


Bcbuc  tic  r^vt  fbrcttciu 


Fiar.  iio 


Hôtel  des  Postes  de  Toulouse  ;  arch.  :  M.  H.  Maurette  ('). 


panneaux.  Voici  par  exemple  fy^^.  J/o)  dans    |    un  panneau,  un  cadran  d'horloge  accosté  de 


L'Architecture. 


La  Sculpture. 


L:i  Peinture. 


Fig.    31  r.    —    Église  Saint  Epvre  à  Na 


personnages   en    demi-bosse;   des   quatre-  1  feuilles  en   panneaux   rentrés  (^/^>.  7//^  où 

,  r»',,,,à.  M  TJo„        .    ,r  77-    Z    777-      7  sont  sculptées  les  fio[ures  allégoriques  de 

i.L)  après  M.  Kaguenet,  Monographtes  des  bâlnnetits  !                           ^^                         '^                                    . 

modernes.                                 '  '  l'architecture,  de  la  sculpture,  de  la  peinture 


€S0ai  0ur  la  îDécoration  arcl)ttcctoiuque. 


485 


et  de  la  musique;  un  Hanc  de  sarcophage 
chrétien  (fii^.  312)  offrant  en  bas-reHef  une 
collection  de  personnages;  des  dossiers  de 
stalles  (fig.  313)  où,  sous  des  arcatures,  des 
figures  de  saints  sont  taillées  dans  le  chêne; 
enfin  une  façade  en  pans  de  bois  (fig-  314) 


où  l'allège  des  fenêtres  est  orné  de  person- 
nages sculptés. 

La  têle  seuld  apparaît  souvent  dans  les 
médaillons  ( fïg-  315),  ornement  favori  de  la 
renaissance,  répandu  à  l'infini  sur  les  fa- 
çades, dans  les  écoinçons,  les  frises,  les  pan- 


neaux de  menuiserie,  contenant  des  figures 
en  demi-relief,  ou  gracieuses  ou  plaisantes; 
ou  encore,  à  la  seconde  période  de  la 
renaissance,  dans  des  mascarons,  des 
masques  souvent  grimaçants  fyf^.  31b  à 
31S.  322  à  324). 


Les  romans  aussi  et  les  gothiques  ont  fait 
un  usage  abondant  de  la  tête  et  du  masque, 
non  pas  tant  comme  motifs  ornementaux 
appliqués  aux  façades  et  destinés  à  combler 
des  vides,  ce  qui  constitue  un  emploi  tout 
à  fait  inférieur  au  point  de  vue  esthétique. 


mais  comme  forme  animée  et  poétique 
donnée  à  des  éléments  utiles  de  la  construc- 
tion, notamment  à  des  corbeaux.  Ils  font 
reposer  des  corniches  sur  des  modillons  à 
masques  humains,  arnortissent  des  larmiers 
sur  des  têtes  gracieuses,  donnent  à   leurs 


Fig.  313- 


dégorgeoirs  de  descente  d'eau  la  forme 
d'une  face  crachante,  et  décorent  de  mas- 
ques fantastiques  ou  jolis  des  clefs  de 
volâtes,  des  bouts  de  poinçons,  etc. 

Le  arand  art  de   l'ornemaniste   consiste 
ici  à  bien  incorporer   l'œuvre  de  sculpture 


486 


î^cliuc  tir  V^xt  fbvcticn. 


à    l'édifice.    Une    grande    leçon    nous    est 
donnée  à  cet  égard  par  les  Égyptiens  dans 


,^^:ç==^.«sS;j~.•■^^««aiaS!!^;^,j||l|| 


.,:'***'^"«lSiHl& 


Ï"   '  iiif  -^=--^4  4M4'  w^ 


pjCT.   ^11.  Composition  de  M.  Percy.   E.  Newtan. 

leurs  décorations  murales  à  fleur  de  paroi, 
si  savantes,  si  nobles,  si  puissamment  déco- 


Fig.  315- 


ratives.  On  ne  peut  assez  admirer  comment 
ils  ont  su  exprimer  leurs  magistrales  con- 


,—  _■ ,  s--.  ;■-;  »t;*î-,  -;XJu'^-P^-  f?WD.;;j;ii^.y.ii5S5>.'W^saîHs3? 


ceptions  dans  une  sorte  degravure  analogue 
à  celle  des  médailles,  où  des  tableaux 
grandioses   sont   rendus   en   relief   à  l'aide 


d'un   renfoncement    de    la   paroi   de    quel- 
ques millimètres  seulement. 

Dans  la  figure  326  on  voit  l'exemple 
d'un  décor  formé  d'une  tête  noyée  dans  les 
fleurs,  collée  à  la  muraille  de  la  façon  la 
moins  judicieuse;  c'est  un  décor  plaqué. 


Fig.  3'S. 


Fi. 


i>9- 


Dans  la  figure  325,  le  masque  est  adapté 
en  guise  de  clef  à  une  archivolte  par  l'inter- 
médiaire d'un  cartouche  de  forme  com- 
pliquée. On  a  voulu  greffer  le  décor,  mais 
on  l'a  fait  d'une  façon  incohérente,  qui  ne 


Fig.  320. 


F.g. 


vaut   guère   mieux    que    le    plaquage    pré- 
cédent. 

Nous  avons, dans  ce  quiprécède, envisagé 
surtout  l'ornement  sculpté  ;  dans  le  décor 
peint,  la  figure  humaine  prend  une  place 
plus  importante  encore,  soit  comme  orne- 
ment pur,  soit  comme  entrant  dans  les 
sujets    historiés.  Elle   y   est  souvent    plus 


(Bssài  mv  là  îiécoratiou  arcljitectoiiîque.  487 


complètement  stylisée    que    dans  la  seul-    |    tion  symbolique,  historique  ou  pittoresque. 

(i 


ri#^J^'»/l 


Fig.  322  et  323.  —  Un  corbeau  du  Pont-Neuf. 

pture  ;  elle  y  joue  un  rôle  important  tantôt 


Fig.   324.  —  stalles  de  Lanjese. 

comme   pur  décor,   tantôt    comme  figura- 


^h-  325- 
Avec  ce  genre  de  composition  nous  sortons 


~éi 


du  domaine  architectonique  dont  nous  ne 
voulons  pas  dépasser  les  limites. 

L.  Cloquet. 


HnvUE    DE   L    ART  CURBTtEN. 
I9OI.    —    6""^    LIVRAISON. 


^»  K^^  A^yik  A^^  \^A  A^X  A^VU  A^^  A^  A  A^A  A^X  it^^  ^^V^  ^^»^  A^A  A^^ 

^Tï^xxTIx^IITIIrrTTIlI^rxTIrIIlIIIIIIII^xT^IlI^IXIII^IlIJITT^TIITXIIIlIIlIITITrTrTIIIllIIl;IIIIIIITIlïIIIJ[]IIIIIII^XI3IIIIl^IIlllI  miiiii^nm' 
n .^ -  ..1  ■  ■  I  —Il  G 


^ 


©u  vole  îit  l'avum  ïians  la  Flore  gotijtque. 


i^      t^[ii_iijïrrii3iriiTztiiiitrxiiiiiiiJ(iiiiiiixiiiiiiixiiiiiiiïriiiiii)iiiiiiiisiiiiiiiïiiiiiii;iiiiiiiixiiiiiirMiiiiiijïiiiiiiiiiiiiiiixiiii)iiiii;u 

É^  ^S:''  ^Atl^^  *Atl^  ^A^^  ^S""  *^-^  *i4ï-^  ^iÔ-'f  *i^^  *AÔ^  ^Atl^  ^iiî-^  ^A^^  ^A^'^  ^.-^1^  V 


I 

.-:/  y?  6^ J  /  :  7/  /i,^  (7  ;'^  dont 
\ar21111  macïilalnm  est 
une  variété,  peut  être 
considéré  comme  la 
plante  qui  a  donné 
la  feuille  primordiale  de 
^^m^^^  la  Flore  gothique.  I,es 
botanistes  nous  disent  que  cet  arum  est  le 
type  des  plantes  désignées  sous  le  nom 
iïaroïdées.  Sa  racine  est  bulbeuse.  Ses 
feuilles  sont  d'un  vert  tendre  très  brillant, 
et  ressemblent  à  un  fer  de  lance.  Aussi  les 
appelle-t-on  feuilles  hastées.  De  leur  ner- 
vure centrale  partent  de  petites  nervures 
qui  viennent  finir  à  une  autre  nervure  péri- 
phérique qui  borde  le  contour  de  la  feuille. 
La  fleur  de  l'arum  se  nomme  spathe.  C'est 
une  membrane  qui  enveloppe  le  spadice, 
partie  delà  plante  de  forme  conique,  portée 
sur  une  hampe  à  la  base  de  laquelle  se 
trouve  le  fruit.  Ce  fruit,  un  peu  ovoïde,  se 
compose  de  petites  baies  rondes,  rouges,  et 
se  tient  également  sur  une  tige  droite  et 
ferme.  L'arum  est  une  plante  tout  à  fait 
printanière.  Aussitôt  que  la  chaleur  se  faii 
sentir,  la  spathe  devient  violette,  se  flélrit, 
et  laisse  voir  le  spadice,  légèrement  violet 
aussi,  ainsi  que  le  fruit  qui  n'est  pas  sans 
avoir  quelque  ressemblance  avec  la  grappe 
de  raisin.  Puis  les  feuilles  disparaissent  à 
leur  tour  pour  renaître  au  printemps  sui- 
vant. L'arum  paraît  donc  annoncer  le  réveil 
de  la  nature. 

Il  croît  au  fond  des  bois,  dans  les  endroits 
humides,  sur  le  bord  des  ruisseaux,  dès  le 
commencement  d'avril.  La  seule  différence 
qui  existe  entre  \ antiii  inadtlaluin  que  nos 
archéologues  donnent,    par   erreur,  comme 


le  type  des  aroïdées,  et  Xariiiii  vtilgarc,  qui 
en  est  le  type  réel,  c'est  que  les  feuilles  du 
premier  portent  des  taches  d'un  très  beau 
violet  foncé,  taches  qui  n'existent  pas  sur 
celles  du  second.  Voyons  maintenant  à 
quelle  époque  l'arum  fit  son  apparition  dans 
la  sculpture  ornementale  de  nos  édifices  re- 
ligieu.x  du  moyen  âge. 

II 

QUELLPL    que  soit   notre  admiration 
pour   les   Gothiques,  la    vérité   nous 
oblige  à  dire  que  c'est   aux  Romans 
que  revient  l'honneur  d'avoir  les  premiers 


Arum  nature]  tel  qu'il  pousse  dans  les  bois. 

trouvé  et  interprété  la  feuille  d'arum.  Viol- 
let-le-Duc  nous  a  donné  quatre  motifs 
d'arum,  qui  nous  paraissent  indiscutables, 
relevés  par  lui  dans  la  grande  église  de  Vé- 
zelay  (').  Là,  avec  la   feuille,   se   trouve   le 

I.  VioUetle-Duc,  Diclinitnuii  e  raisonné  de  l' Architec- 
ture fr.tiicaisc  du  XI'  au  XVI'  sihle,  t.  V^.  Au  mot  Flore^ 


2Du  rôle  îie  l'arum  îïan0  la  jfiore  gotl)iiiue. 


489 


fruit  granulé.  Or,  comme  ces  motifs  sont 
pris  sur  des  chapiteaux  de  la  nef,  partie  ro- 
mane de  l'édifice  qui  date  de  la  seconde 
moitié  du  XP  siècle,  il  en  résulte  que  c'est 
bien  alors  que  l'arum  apparut  dans  l'orne- 
mentation de  nos  églises. 

Cette  observation  s'applique  également 
au  nénuphar.  En  effet,  le  nénuphar,  qui 
peut  être  considéré  comme  la  deuxième 
plante  de  la  Flore  gothique,  s'est  introduit 
en  même  temps  que  l'arum  dans  l'ornemen- 
tation romane.  Ainsi  que  pour  l'arum,  Viol- 
let-le-Duc  nous  a  donné  deux  motifs  de 
nénuphar  relevés  sur  les  chapiteaux  de  la 
nef  de  Vézelay  (').  La  feuille  est  représentée 
plissée  au  sortir  de  l'eau.  On  voit  ensuite 
le  nénuphar  avec  l'acanthe  dans  la  plupart 
des  églises  du  commencement  du  XI I^  siè- 
cle. A  ce  moment  il  a  la  forme  d'une  feuille 
à  peu  près  carrée,  dont  la  partie  supérieure 
se  divise  le  plus  souvent  en  deux  enroule- 
ments, et  retombe  lourdement  sur  elle- 
même.  Il  est  à  remarquer  que  le  nénuphar 
est  plus  commun  dans  la  première  moitié  du 
XI P  siècle  que  l'arum  qui  est  extrêmement 
rare. 

Ici  nous  nous  trouvons  en  présence  de  la 
doctrine  du  docteur  Eugène  Woillez,  que 
notre  sujet  nous  oblige  à  examiner  et  à  dis- 
cuter, pour  ainsi  dire,  pied  à  pied.  Mais  il  ne 
faudrait  pas  se  méprendre  sur  les  sentiments 
que  nous  professons  pour  la  mémoire  de 
l'éminent  archéologue  de  l'Oise.  lia  été  un 
de  ces  piemiers  maîtres  que  nous  devons 
toujours  saluer  avec  respect,  et  s'il  lui  est 
arrivé,  à  lui  comme  à  tant  d'autres,  de  com- 
mettre une  erreur,  il  n'en  est  pas  moins  vrai 
que  ses  travaux  nous  ont  ouvert  la  voie,  et 
qu'il  a  droit  à  notre  reconnaissance. 

En  1848,  Eugène  Woillez  présenta  à  la 
Société   des  Antiquaires  de   Picardie  une 

I.  V'ioUet-le-Duc,  loc.  cit.,  p.  494. 


étude  intitulée  :  Iconographie  des  plantes 
aroïdes  figurées  au  Moyen  Age  eti  Picardie 
et  considérées  comme  origine  de  la  fleur  de 
lis  de  France.  Ce  travail  parut  dans  les 
Mé)ïioires  de  la  Société  et  eut  un  grand  re- 
tentissement (■),  non  pas  tant  à  cause  delà 
thèse  héraldique  soutenue  par  l'auteur,  que 
par  suite  de  considérations  originales  sur 
l'arum,  qui  firent  sensation  à  une  époque 
où  la  Flore  gothique  était  à  peine  connue. 
Or,  si  nous  acceptons  la  doctrine  de  Woil- 
lez en  ce  qui  touche  l'arum  présenté  comme 
feuille  primordiale  de  la  Flore  gothique, 
bien  qu'à  la  rigueur  le  nénuphar  puisse  être 
mis  sur  le  même  rang,  il  nous  est  impossible, 
sauf  pour  deux  motifs,  d'accepter  les  exem- 
ples que  l'éminent  archéologue  apporte  à 
l'appui  de  ce  sentiment.  Ce  qui  peut  éton- 
ner, c'est  que  ViolIet-le-Duc  ait  accepté  le 
tour,  sans  voir  combien  les  exemples  d'arum 
produits  par  Woillez  différaient  des  siens  ; 
et  que  M.  Lefèvre-Pontalis  se  soit  rallié  à 
la  doctrine  de  cet  auteur  sans  faire  de  res- 
trictions (').  Pour  nous,  après  avoir  étudié 
dans  tous  leurs  détails  les  chapiteaux  et 
motifs  divers  figurés  sur  les  dix  planches 
qui  accompagnent  le  texte  du  mémoire  de 
Woillez,  nous  sommes  arrivé  à  la  conclu- 
sion que  voici  :  trois  petits  chapiteaux  d'un 
même  pilier  donnent  de  l'arum  incontes- 
table ;  un  chapiteau  présente  des  feuilles 
en  ruban  qui  peuvent  être  des  feuilles  d'a- 
rum ou  de  sagittaire  ;  deux  chapiteaux 
offrent  des  feuilles  de  nénuphar  primitif  ; 
un  chapiteau  est  formé  de  feuilles  de  vigne, 
et  tous  les  autres  dessins  sont  des  motifs 
d'acanthe  simple  ou  d'acanthe  arrangée 
d'une  façon   plus   ou   moins  fantaisiste  par 


1.  Mémoires  âe  la  Société  des  Antiquaires  de  Picardie, 
t.  IX,  1S48. 

2.  Eugène  Lefèvre-Pontalis,  Larchilecticre  raligieuse 
liaiis  l'ancien  diocèse  de  Soissons  au  XI'  et  au  X/l"  siècle, 
V  part.,  chap.  \'l  II. 


490 


Urbur  tic  T^lit  rbrcttcn. 


les  artistes  de  la  fin  du  XI^  ou  de  la  pre- 
mière moitié  du  XII^  siècle.motifs  que  l'on 
rencontre  dans  la  plupart  des  édifices  dont 
ces  artistes  ont  créé  l'ornementation.  Quant 
au  fruit  qui  accompagne  presque  toujours 
la  feuille,  et  que  Woillez  affirme  être  celui 
de  l'arum,  il  est  de  forme  si  variée  que  tan- 
tôt on  peut  le  prendre  pour  le  fruit  de  celte 
plante,  tantôt  pour  la  pomme  du  pin,  et 
souvent  aussi  pour  la  grappe  de  raisin, 
attendu  que,  dans  la  seconde  moitié  du 
XII'  siècle,  on  le  retrouve  avec  la  feuille  de 
fougère  et  la  feuille  de  vigne.  Par  consé- 
quent sa  présence  est  loin  de  prouver  que 
les  feuilles  qu'il  accoinpagne  sont  des  feuil- 
les d'arum.  Voici  plus  détaillés  et  avec 
indication  permettant  de  les  retrouver  faci- 
lement dans  l'ouvrage  de  W'oillez,  les  cinq 
motifs  dont  nous  venons  de  parler  : 

1°  Trois  petits  chapiteau.x  d'un  même 
pilier  de  l'église  de  Cambronne  (Oise), 
Planche  VIII,  figure  38,  qui  donnent  de 
l'arum  indiscutable,  mais  de  l'arum  naturel, 
c'est-à-dire  non  interprété  comme  celui  de 
l'église  de  Vézelay,  et  tel  qu'il  pousse  dans 
les  bois  ; 

2"  Un  chapiteau  de  l'église  d'Avrechy 
(Oise),  PI.  V.  fig.  23,  qui  présente  des 
feuilles  en  ruban  qui  peuvent  être  des 
feuilles  d'arum  ou  de  sagittaire,  mais  plu- 
tôt de  sagittaire,  étant  donnée  leur  lon- 
gueur ; 

3°  Un  chapiteau  de  l'ancienne  église  des 
Minimes  de  Compiègne  (Oise),  PI.  VI,  fig. 
28,  dont  les  feuilles  sont  des  feuilles  de 
nénuphar  si  bien  caractérisées  que  l'auteur 
hésite  à  les  donner  pour  de  l'arum,  et  dit 
qu'elles  pourraient  bien  être  des  feuilles 
d'eau,  ce  qui  est  vrai  ; 

4°  Un  chapiteau  de  l'église  de  Saint- 
Évremont  de  Creil  (Oise),  PI.  VI,  fig.  29, 
qui  porte  des  feuilles  de  gros  nénuphar  pri- 
mitif, tellement   nettes  qu'on  se  demande 


comment  Woillez  a  pu  voir  en  elles  des 
feuilles  d'arum  ; 

5°  Un  autre  chapiteau  de  l'église  de  Cam- 
bronne, PI.  VIII,  fig.  T^y,  qui  offre  des 
feuilles  de  vignes  indéniables,  mais  que 
l'auteur  déclare  être,  sinon  de  l'arum,  du 
moins  des  feuilles  d'une  espèce  voisine, 
espèce  qu'il  n'indique  pas,  parce  que  sur 
leur  bord  existe  la  petite  nervure  périphé- 
rique que  l'on  voit  sur  l'arum  naturel,  la- 
quelle n'est  là  très  probablement  qu'une 
simple  fantaisie  d'artiste. 

En  somme,  de  tous  les  exemples  d'arum 
présentés  par  Woillez,  il  n'y  en  a  qu'un  seul 
qui  soit  absolument  sûr,  c'est  l'arum  natu- 
rel de  l'église  de  Cambronne. 

Comme  type  de  son  arum  prétendu,  qui 
remplit  presque  à  lui  seul  les  di.x  planches 
joiiUes  à  son  mémoire,  Woillez  indique  les 
figures  8,  9  et  10  de  la  planche  III.  Mal- 
heureusement il  suffit  de  regarder  ces  trois 
motifs  pour  se  convaincre  de  suite  que  l'on 
a  sous  les  yeux  de  la  belle  et  bonne  acanthe. 
Ajoutons  que  les  trois  inotifs  n'en  forment 
qu'un,  en  réalité,  les  différences  existant 
entre  eux  n'ayant  aucune  importance. 

Eugène  Woillez,  il  faut  bien  le  dire,  est 
assez  flottant  dans  sa  doctrine.  Il  commence 
par  nous  dire  que  le  type  des  aroidées 
est  y  Arum  iiiaciilaiuin,  connu  aussi  sous 
les  noms  de  Gotiet  ou  Pied  de  veau,  et  tout 
semble  indiquer,  au  commencement  de  son 
travail,  que  c'est  cette  plante  que  nos  pre- 
miers sculpteurs  ont  interprétée.  Puis,  tout 
à  coup,  il  la  laisse  de  côté  pour  nous  ^xk.- 
s&n\.tiv\G  Ca//a  cf/iiopica,  Anou  d Ethiopie, 
comme  ayaiit  d'abord  inspiré  ces  artistes. 
Enfin,  il  nous  dit  qu'.ui  XIII"  siècle  nos 
sculpteurs  abandonnèrent  la  plante  exo- 
tique pour  prendre  le  Gouet.  Tout  cela  est 
inacceptable.  Le  Calla  ethiopica  n'ayant 
été  connu  en  P>ance  qu'au  XVI 1 1*^  siècle,  il 
est  impossible  que  les  sculpteurs  du  moyen 


Du  rôle  De  rarum  îian0  la  jflore  gotl)tque,        491 


âge  l'aient  reproduit  dans  nos  églises  des 
XI"  et  XIJs  siècles,  pour  lui  substituer, 
au  XIII',  notre  arum  indigène.  Woillez  ne 
domine  pas  son  sujet,  il  est  au  contraire 
dominé  par  lui.  Il  voit  de  l'arum  partout  et 
encore,  au  lieu  de  s'en  tenir  à  celui  de  nos 
bois,  il  va  en  chercher  en  Ethiopie. 

Maintenant  si  nous  étudions  les  offands 
monuments  de  la  première  période  gothi- 
que, nous  serons  complètement  fixé  sur 
la  valeur  de  la  thèse  que  nous  combattons. 
Prenons  d'abord  l'égalise  abbatiale  de  Saint- 
Denis,  édifice  type  regardé  comme  le  pre- 
mier des  monuments  gothiques. 

Dans  ses  parties  les  plus  anciennes  datant 
de  l'abbé  Suger,  l'abbatiale  de  Saint-Denis 
a    l'ornementation    romane    du    milieu    du 


XI I*^  siècle.  Examinons  donc  cette  orne- 
mentation, en  ayant  sous  les  yeu.x  les  plan- 
ches du  mémoire  de  Woillez. 

Au  portail  les  frises  qui  ornent  les  tail- 
loirs des  chapiteaux  des  quatre  colonnettes 
de  l'ébrasement  droit  de  la  porte  centrale, 
sont  formées  du  motif  de  Woillez  avec  la 
longue  tige  que  l'on  voit  supportant  ce  mo- 
tif dans  beaucoup  des  exemples  donnés  par 
notre  auteur.  Les  frises  qui  ornent  les  tail- 
loirs des  chapiteaux  des  quatre  colonnettes 
de  l'ébrasement  gauche  de  la  même  porte, 
sont  formées  de  feuilles  d'acanthe  posées 
droites  sur  un  seul  rang  et  accompagnées 
de  pommes  de  pin.  tellement  ressemblantes 
à  la  pomme  de  pin  naturelle  que  toute  né- 
gation est  impossible.  Mais  le  plus  curieux, 


Acanthe  que  le  D'^  Woillez  prétend  d'être  de  l'aruii 


c  est  que  les  personnages  qui  occupent  le 
premier  rinceau  de  la  voussure,  sont  enlacés 
dans  de  longues  tiges  semblables  à  celles 
dont  nous  venons  de  parler,  et  à  l'extrémi- 
té desquelles  fleurit  le  motif  de  Woillez. 
Aux  portes  latérales  le  même  motif  se  re- 
trouve également  dans  l'ensemble  de  la 
sculpture.  Sous  le  porche  intérieur,  dans  la 
première  travée,  qui,  ainsi  que  le  portail, 
date  de  Suger,  sous  la  tour  méridionale,  sur 
les  chapiteaux  des  colonnettes  posées  de 
chaque  côté  de  la  petite  fenêtre  existant  au- 
dessus  de  la  porte  droite  du  portail,  on  aper- 
çoit de  l'acanthe  et  le  motif  de  Woillez  avec 
tige  et  sans  tige.  Dans  la  partie  nord  de  la 
même  travée,  partie  qui  supportait  autrefois 
la  belle  flèche  qu'aimaient  tant  les  Parisiens, 
sur  les  chapiteaux  du  deuxième  gros  pilier, 
on  voit  une  feuille  droite,  bien  développée, 
au  milieu  de  laquelle  se  dresse,sur  sa  hampe. 


le  fruit  que  Woillez  dit  être  celui  de  l'arum. 
Sur  les  mêmes  chapiteaux  on  voit  également 
deux  tiges  réunies  par  une  bague,  formant 
une  croix  de  Saint-André,  tiges  au  bout  des- 
quelles fleurit  encore  le  motif  de  Woillez. 
Enfin,  dans  le  pourtour  du  chœur,  qui,  lui 
aussi,  a  été  édifié  par  le  grand  Abbé,  sur  des 
chapiteaux  de  colonnettes  existant  dans  les 
première  et  deuxième  chapelles  du  côté 
nord,  et  deuxième,  et  troisième  chapelles  du 
côté  sud,  on  distingue,  autant  que  l'obscurité 
qui  règne  dans  ces  chapelles  le  permet,  des 
tiges  enroulées  portant  toujours  la  même 
feuille.  Tels  sont  les  motifs  qui  se  voient  à 
Saint-Denis.  Or,  comme  ces  motifs  ressem- 
blent exactement  à  la  feuille  d'acanthe  ro- 
mane, et  qu'ils  font  partie  intégrante  de 
l'ornementation  d'acanthe  du  portail,  du 
porche  intérieur  et  du  pourtour  du  chœur, 
il  est  évident  qu'ils  sont  aussi  de  l'acanthe 


492 


î^rbuc  tic  l'^vt  cbrcticu» 


et  non  de  l'arum.  Les  séparer  de  la  masse 
sculpturale  qui  les  entoure  pour  voir  en  eux 
une  feuille  autre  que  celle  de  l'acanthe,  se- 
rait une  opération  absolument  arbitraire  et 
que  rien  ne  pourrait  justifier. 

Après  avoir  étudié  Saint-Denis,  étudions 
Notre-Dame  de  Paris. 

Si  Saint-Denis  nous  offre  l'ornementation 
d'acanthe  du  milieu  du  XI I*^  siècle, la  grande 
cathédrale  nous  présente  la  Flore  gothique 


Chapiteau  de  Saint  Benoit  sur-Loiie.  Porche  XU'-  siècle. 

primitive  dans  toute  sa  pureté  et  toute  sa 
grandeur.  La  partie  la  plus  ancienne  de 
l'édifice  est  l'abside.  Aussi,  dans  la  galerie 
ou  triforium  de  cette  abside,  on  retrouve 
avec  un  peu  de  nénuphar  et  de  plantain, 
une  épaisse  floraison  d'acanthe.  Or,  si  nous 
montons  dans  cette  galerie,  nous  voyons 
sur  la  colonnette  isolée  de  la  travée  termi- 
nale, juste  dans  l'axe  de  l'édifice,  un  très 
beau  chapiteau  d'acanthe,  et  à  gauche  de 
cette  colonnette,  sur  la  première  du  groupe 
gauche  de  la  travée,  un  autre  chapiteau  sur 
lequel  est  sculptée  une  petite  téie  d'homme 


tirant  la  langue,  et  sous  cette  tête  le  motif 
de  Woillez  Dans  la  même  galerie,  sur  un 
des  chapiteaux  de  la  quatrième  travée  du 
côté  sud,  on  retrouve  le  même  motif,  un  peu 
moins  fini  comme  tr.ivail,  et  trois  feuilles 
posées  droites,  complètement  développées. 
Celle  du  centre,  surmontée  d'une  petite  tête 
de  monstre,  n'a  rien  devant  elle  ;  mais  les 
deux  autres  ont  devant  elles,  posé  sur  sa 
hampe, le  fruit  que  Woillez  considère  comme 
le  fruit  de  l'arum.  Enfin,  sur  un  chapiteau 
de  la  première  travée  du  côté  nord,  on  voit 
encore  le  motif  de  Woillez, formé  ici  de  deux 
feuilles  qui  se  regardent,  ayant  devant  cha- 
cune d'elles  le  fruit  en  question  toujours 
posé  sur  sa  hampe.  Cette  composition  est 
très  gracieuse.  Eh  bien  !  quand  on  compare 
ces  motifs  avec  la  niasse  d'acanthe  qui  cou- 
vre les  autres  chapiteaux  de  la  galerie  ;  en 
voyant  qu'ici, comme  à  Saint-Denis, ce  sont 
les  mêmes  lobes  pointus  et  nervés  en  creux, 
le  même  contour,  le  même  mouvement,  en 
un  mot  la  même  ressemblance  parfaite  avec 
l'acanthe  qui  les  entoure,  on  ne  peut  douter 
que  ces  motifs  soient  eux-mêmes  des  motifs 
d'acanthe.  Il  faut  connaître  la  doctrine  de 
Woillez  pour  que  l'idée  de  les  regarder 
comme  une  autre  plante  puisse  venir  à  l'es- 
prit. Ajoutons  que  ce  motif  de  W^oillez  se 
rencontre  partout  où  la  feuille  d'acanthe  ro- 
mane orne  nos  édifices  religieux.  11  existe 
aussi  bien  sur  les  chapiteaux  de  Saint- 
Benoît-sur-Loire,  que  sur  ceux  des  églises 
de  l'Oise.  Cette  ornementation  d'acanthe  a, 
en  réalité,  une  allure  générale  assez  païenne. 
On  sent  que  tout  cela  a  été  inspiré  par  la 
sculpture  antique,  dont  les  débris  n'étaient 
pas  rares  en  Gaule.  On  ne  voit  rien  dans  ces 
feuillages  qui  ait  un  caractère  vraiment  na- 
tional. Cependant  l'esprit  gaulois  s'y  révèle 
déjà  par  la  variété  des  compositions,  et 
par  l'introduction  au  milieu  de  l'acanthe  de 
personnages  étranges,  grotesques  ou    fan- 


2DU  rôle  De  l'arum  ham  la  jflore  gotliique. 


493 


tastiques,  que  l'on  aimait  beaucoup  à  cette 
époque. 

Nous  n'avons  pas  à  examiner  ici  la  doc- 
trine d'Eugène  Woillez  sur  l'arum  considéré 
comme  origine  de  la  fleur  de  lis  de  France, 
d'autant  plus  que  son  arum  prétendu  n'é- 
tait que  l'acanthe  ;  sa  doctrine  n'a  aucune 
base.  Mais  ce  qu'il  dit  de  la  perpétuité  jus- 
qu'au XII^  siècle  et  même  jusqu'à  nos  jours, 
d'une  tradition  païenne  faisant  de  l'arum 
naturel  le  symbole  du  réveil  de  la  nature  et 
de  la  puissance  génératrice  de  l'homme, 
nous  paraît  admissible.  Nous  avons  essayé 
de  démontrer  ailleurs  (')  que  le  chêne  abon- 
dant, qui  couvre  les  chapiteaux  de  la  cathé- 
drale de  Chartres,  était  là  en  vertu  d'une 
tradition  celtique,  et  que  la  coutume  d'ado- 
rer les  fontaines,  les  arbres  et  les  pierres 
persista  en  Gaule  jusqu'à  la  fin  du  VIII<= 
siècle,  ainsi  que  le  démontrent  les  Capitu- 
laires  de  Charlemagne  d'Aix-la-Chapelle, 
789,  et  de  Francfort,  794,  Il  n'y  aurait  donc 
rien  de  surprenant,  en  ce  qui  touche  l'arum, 
à  ce  qu'une  tradition  païenne,  de  source 
romaine,  se  fût  glissée  dans  les  traditions 
celtiques  pour  se  perpétuer  avec  elles  à  tra- 
vers les  âges.  Quand  on  voit  l'arum  pousser, 
se  développer  et  fleurir  dans  les  bois  aux 
premiers  jours  du  printemps,  alors  que  les 
bourgeons  des  autres  plantes  commencent 
à  peine  à  s'ouvrir  ;  quand  on  voit  la  forme 
de  son  spadice,  on  s'explique  sans  effort  que 
cet  arum  ait  été  remarqué  dans  les  temps 
anciens  et  qu'on  lui  ait  attribué  le  symbo- 
lisme dont  parle  Woillez. 

III 

NOUS  avons  vu,  au  commencement 
du  paragraphe  précédent,  que  l'a- 
rum trouvé  par  les  Romans,  pouvait,  à  la 
rigueur,    être  considéré    comme   la   plante 

I.  Dans  La  Flore  des  grandes  catJicdrales  de    fraïue, 
p.  44,  et  la  nule. 


primordiale  de  la  flore  gothique.  Il  faut 
toutefois  reconnaître  que  des  motifs  simi- 
laires à  ceux  relevés  par  Viollet-le-Duc 
dans  l'église  de  Vézelay,  doivent  être  très 
rares  et  n'exister  que  dans  les  édifices  de 
l'époque  romane  ;  car  nous  n'avons  trouvé 
sur  les  chapiteaux  des  gros  piliers  de  nos 
cathédrales  les  plus  anciennes,  aucune 
composition  d'arum  avec  son   fruit   se  rap- 


Cliapiteau  de  Saint  Benoîtsiir-Loire.  Porche  XU""  siècle. 

prochant  de  celles  de  la  grande  église  bour- 
guignonne. Discutant  ensuite  la  doctrine 
d'Eugène  Woillez,  nous  croyons  avoir  dé- 
montré que  la  feuille  qu'il  pensait  être  de 
l'arum,  était  de  l'acanthe. 

Mais  alors,  dira-t-on,  quelle  est  donc  la 
feuille  d'arum  de  l'époque  gothique  .''  C'est 
ici  que  notre  sujet  devient  intéressant. 
La  feuille  d'arum  de  l'époque  gothique  est 
d'abord  la  feuille  d'arum  naturelle,  c'est-à- 
dire  reproduite  par  la  sculpture  telle  que  la 
nature  la  donne.  L'exemple  le  plus  ancien 
de   cette    reproduction    est    probablement 


494 


3Re\)uc  tir  r9rt  djrctien. 


celui  de  l'église  de  Cambronne  qui  date  de 
1130  environ.  Ici,  nous  sommes  dans  la 
période  dite  de  Transition  parce  qu'elle  vit 
le  passage  du  roman  au  gothique.  Puis,  on 
trouve  cet  aruni  traité  avec  beaucoup  plus 
d'art,  sur  un  chapiteau  de  l'église  de  Mantes, 
église  contemporaine  de  Notre-Dame  de 
Paris,  c'est-à-dire  de  la  seconde  moitié 
du  XI I^  siècle.  L'arum  ici  est  posé  gra- 
cieusement sur  une  feuille  de  nénuphar.  On 
le  voit  encore  sur  la  grande  colonnette  de 
l'étage  supérieur  du  clocher  de  Saint-Spire 
de  Corbeil,  clocher  de  la  fin  du  XI  V  siècle  ; 
sur  deux  chapiteau.x  du  triforium  de  l'église 


Arum  interprété  de  1  église  de  Bagneux. 

de  Bagneux  (Seine),  église  des  dernières 
années  du  XII^  siècle  ou  des  premières  du 
XI 1 1"  ;  sur  un  petit  chapiteau  du  bas  côté 
sud  de  la  nef  de  Saint- Léger  de  Soissons, 
chapiteau  du  XI  II"  siècle;  sur  les  petits  cha- 
piteaux d'un  gros  pilier  de  la  nef  de  l'église 
de  Chambly  (Oise),  nef  qui  est  de  la  fin  du 
XI  II"  siècle  ;  enfin  sur  les  deux  chapiteaux 
des  deux  premiers  piliers  du  pourtour  du 
chœur  de  Notre-Dame  de  Paris,  côté  nord, 
et  sur  le  chapiteau  du  deuxième  pilier  du 
même  pourtour,  côté  sud.  A  Chambly  et  à 
Notre-Dame  de  Paris,  l'arum  est  ondulé  se- 
lon la  manière  des  artistes  de  la  fin  du  X 1 1  P 
siècle  et  du  XIV".  Aussi  est-il  hors  de 
doute  que  les  chapiteaux  de  Notre-Dame 
présentant  un  feuillage   ondulé   auront  été 


refaits  à  cette  époque.  Outre  les  exemples 
que  nous  citons,  l'arum  naturel  doit  exister 
dans  beaucoup  d'autres  monuments. 

Après  la  feuille  d'arum  naturel,  ou  en 
même  temps  qu'elle,  les  Gothiques  mirent 
sur  leurs  chapiteaux  une  feuille  d'arum  in- 
terprétée. Cette  interprétation  n'est  plus 
celle  des  Romans.  Ces  derniers  avaient  pris 
la  feuille  de  l'arum  avec  son  fruit  pour  créer 


Arum  ondulé  de  1  église  de  Chanildy. 

des  motifs  variés,  ainsi  qu'en  témoignent 
les  exemples  de  Vézelay.  Les  Gothiques 
se  contentèrent  de  créer  avec  la  feuille 
seule  ces  admirables  crochets  qui  ornent 
les  chapiteaux  de  nos  églises  et  de  nos 
cathédrales.  Voici  ce  qu'ils  firent  :  ils  con- 
servèrent la  nervure  centrale  de  la  feuille, 
nervure  unique,  vu  que  la  nervure  périphé- 
rique ne  compte  pas,  mais  ils  supprimèrent 
ses  petites  ondulations  naturelles,  que  les 
dessinateurs  exagèrent  d'ailleurs  lorsqu'ils 


2Du  rôle  de  l'arum  dans  la  jflore  gotljtque. 


495 


reproduisent   la  plante,   et   arrondirent  les 
pointes  de  son  extrémité  inférieure  par  une 
courbe  gracieuse  venant  joindre  le  pétiole. 
Parfois,  aussi,  ils  se  bornèrent  à   diminuer 
les  pointes  sans  les   arrondir,  ce  qui  donne 
à  la  feuille  l'aspect  d'un   fer  de  lance.  Puis, 
ceci  fait,  ils  inclinèrent  légèrement  en  avant 
la  partie  supérieure  de  la  feuille  ;   ou  bien 
l'enroulèrent  sur  elle-même  ;  ou  encore  lui 
attachèrent  une  ou  plusieurs  petites  feuilles 
empruntées  à  une  autre  plante  et   formant 
aussi  crochet. On  appelle  souvent  bourgeons 
ces   feuilles  ajoutées.   C'est,  croyons-nous, 
Viollet-le-Duc  qui,  le  premier,  leur  a  donné 
ce  nom  ;  et,   bien   entendu,    on    l'a  accepté 
sans  examen.   Or,  c'est   une  erreur.    Si  ces 
feuilles  sont  petites,  elles  sont  développées, 
complètes,   et,  par  conséquent,  ce   nom  de 
bourgeons  ne  doit   pas  leur   être   appliqué. 
Sous    la    feuille   ou    les  feuilles  ajoutées   à 
l'arum,    particulièrement  sous    la   fougère 
et  sous  la  vigne,  on  voit  du  raisin.  Parfois, 
aussi,  entre  deux  feuilles  d'arum  en  crochet 
se  dresse  sur  sa  hampe  le  fruit   dont  nous 
avons  parlé,  en  examinant  la   doctrine  de 
Woillez.  Il   a   le  plus   souvent   l'aspect  du 
raisin.  Toutefois,  ainsi  qu'il  a  été  dit  plus 
haut,  il  est  difficile,  surtout  après   les  grat- 
tages qu'ont   dû  subir  nos   églises,  de  dire 
d'une  façon  affirmative  si  ce  fruit   est  celui 
de  l'arum, de  la  vigne,  ou  du  pin.  Les  princi- 
pales feuilles  ajoutées  pour  former  des  cro- 
chets sont  à  peu  près   par   ordre  chronolo- 
gique :1a  fougère,  la  vigne,  le   trèfle,  la  re- 
noncule, la  chélidoine,  l'ancolie,  le  chêne  et 
le  lierre.  Quand  le  crochet  est  fait  de   plu- 
sieurs petites  feuilles,  il  ressemble  à  un  joli 
bouquet. 

Mais,  dira-t-on,  on  a  fait  des  feuilles  en 
crochet  avec  le  nénuphar  et  le  plantain. 
Cela  est  vrai,  aussi  faut-il  ne  pas  les  con- 
fondre avec  les  feuilles  en  crochet  d'arum. 
La  feuille  faite  avec  le  nénuphar  se  recon- 


naîtra à  sa    largeur,  à  la  grosseur  de  son 
crochet,  et  lorsque  sa   partie  inférieure   est 
reproduite, elle  présente  de  chaque  côté  du 
pétiole  une  courbe    rentrante    en   quart  de 
cercle. On  trouve  aussi,  sur  des  petits  chapi- 
teaux, une  feuille  plus  étroite  et  plus  allon- 
gée que  l'arum,  dont  la  partie  inférieure  et 
surtout  le  pétiole  forment  de    chaque  côté 
une  courbe  rentrante  en  demi-cercle  qui  se 
lie  à  la  même   courbe  des  feuilles  voisines, 
de  sorte  que  ces  feuilles  ont  un  peu  l'aspect 
d'une  couronne.On  a  là  une  jolie  interpréta- 
tion de  nénuphar  se  rapprochant  de  l'arum. 
Maintenant  la  feuille  faite  avec  le  plantain 
est    caractérisée     par    trois    nervures.    Le 
plus  souvent  sa  partie  inférieure  s'arrondit 
comme  l'arum  en  venant  toucher  le  pétiole; 
quelquefois  elle  garde  ses  deux  pointes,  ce 
qui  lui  donne  la  forme  hastée.  Cette  feuille 
ne  diffère  de  l'arum  que  par  le  nombre  de  ses 
nervures,  car  elle  aussi  s'incline  simplement 
en  avant,  s'enroule  sur  elle-même  et  présen- 
te des  crochets  de   petites   feuilles   prises 
aux  plantes  que   nous  venons   d'énumérer. 
Jusque  dans  ces  derniers  temps  nous  avions 
pensé   qu'elle   était    de   l'arum,  et   que   les 
feuilles  d'angle  des  chapiteaux  qui  ont  trois 
nervures  en    étaient  également.  Mais  nos 
idées  sur  ce  point  se  sont  modifiées  et  au- 
jourd'hui   nous    distinguons    la    feuille    de 
plantain   en  crochet,  de  la  feuille  d'arum  de 
même  forme,  d'après   le  nombre   des  ner- 
vures. 

Tel  est  notre  sentiment  sur  la  feuille 
d'arum  interprétée  par  les  Gothiques.  S'il 
n'était  pas  accepté,  il  ne  faudrait  alors  ne 
reconnaître  pour  arum  que  la  feuille  rendue 
telle  que  la  nature  la  domie.  Dans  ce  cas,  le 
rôle  de  l'arum  dans  la  Flore  gothique  serait 
singulièrement  diminué.  Mais  les  crochets 
ont  leur  langage,  et  à  ceu.K  qui  les  étudient 
avec  attention,  ils  disent  que  la  feuile  d'arum 
est  bien  celle  qui  leur  a  donné  naissance. 


REVUE    DE    l'art   CHRÊIIEN. 
igoi.    —  6'"'^    LIVRAISON. 


496 


îRrliur  Dr  r^rt  cbrctîcu» 


Les  chapiteaux  d'arum  en  crochet  sont 
extrêmement  simples  et  élégants.  Ce  carac- 
tère d'élégante  simplicité,  qui  est  celui  de 
toute  chose  primitive,  permettrait, à  lui  seul, 
de  voir  dans  l'arum  la  première  plante  choi- 
sie par  les  Gothiques  pour  orner  leurs  édi- 
fices. Cette  sculpture  égale  parla  pureté  de 
son  dessin,  la  grâce  de  ses  lignes,  et  aussi 
par  la  vigueur  de  son  modelé,  la  sculpture 
antique.  C'est  principalement  dans  l'Ile- 
de-France,  l'Attique  de  notre  pays  au 
moyen  âge,  pendant  la  seconde  moitié  du 
XI I^  siècle  et  la  première  du  XI IF,  que 
l'arum     apparaît     d'abord     dans    toute    sa 


Chapiteau  de  l'église  de  Taverny,  formé  d'arum  s'enroulant 
sur  lui-même. 

beauté,  et  donne  ensuite  sa  plus  riche  flo- 
raison. On  le  trouve  non  seulement  dans 
les  cathédrales,  mais  encore  dans  les 
églises  de  campagne.  Il  fleurit  sur  les  cha- 
piteaux des  gros  piliers  des  nefs  et  des 
chœurs;  il  se  presse  sur  les  petits  chapiteaux 
des  colonnes  qui  montent  jusqu'aux  voûtes 
pour  recevoir  les  retombées  des  arcs-ogives, 
et  sur  les  chapiteaux  des  colonnettes  des 
triforium.  Les  églises  si  remarquables  de 
Taverny,  de  Sarcelles,  d'Auvers-sur-Oise, 
de  Champagne,  de  Beaumont-sur-Oise,  au 
Nord  de  Paris  ;  de  Montreuil-sousBois, 
de  Champigny-sur-Marne,  à  l'Est  ;  deThi- 
verval,  de  Marciil-Marly,  à  l'Ouest  ;  de  Ba- 
gneux,  d'Arcueil,de  Palaiseau  et  d'Ilteville 
au  Sud,  pour  ne  citer  que  celles-là  entre 
mille.ont  des  chapiteaux  d'arum  en  crochet 


très  nombreux  et  d'une  absolue  perfection. 
S'il  nous  fallait  indiquer  ici  les  plus  beaux, 
la  liste  serait  vraiment  trop  longue.  D'ail- 
leurs, il  suflit  d'examiner  avec  attention  l'or- 
nementation de  ces  églises  pour  les  aperce- 
voir presque  aussitôt. 

Nous  avons  essayé  de  mettre  dans  cette 
étude  le  plus  de  clarté  possible.  Toutefois, 


afin  que  nos  lecteurs  aient,  pour  ainsi  dire, 
en   mains  le   hl    chronologique   du   travail, 
nous  donnons  le  petit  tableau  qui  suit,  avec 
lequel  il  n'est  pas  possible  de  s'égarer, 
lîn  voici  les  motifs  : 

1°  Arum  naturel,  tel  qu'il  pousse  dans  les  bois. 

2"  Arum  de  l'église  de  Vézelay  interprété  i)ar  les 
artistes  romans. 

3"  Arum  de  l'église  de  Cambronne  donnant  la 
feuille  naturelle. 


2Du  rôle  îie  Tarum  îians  la  jflorc  got!)ique» 


497 


4"  Arum  de  l'église  de  Mantes  donnant  la  feuille 
naturelle  légèrement  interprétée. 

5°  Arum  de  l'église  de  Chambly,  donnant  la  feuille 
naturelle  bien  caractérisée,  mais  ondulée  à  la  manière 
du  XIV  siècle. 

6°  Acanthe,  que  le  D""  Woillez  prétend  être  de 
l'arum. 

7°  Arum  des  églises  de  la  seconde  moitié  du  XIl"" 
siècle  et  de  la  première  moitié  du  XIII"",  interprété  et 
donnant  la  feuille  s'inclinant  sur  elle-même  en  forme 
de  crochet. 

8^  Arum  des  mêmes  édifices,  interprété,  et  donnant 
la  feuille  s'enroulant  sur  elle-même  en  forme  de 
crochet. 

9°  Arum  des  mêmes  édifices,  interprété,  et  donnant 
la  feuille  portant  à  son  extrémité  supérieure  un  petit 
bouquet  de  fougère,  et  s'inclinant  aussi  en  forme  de 
crochet. 

Conclustoii. 

D'APRES  ces  considérations,  on  voit 
le  rôle,  en  quelque  sorte  exceptionnel, 
que  l'arum  a  joué  dans  la  Flore  gothique. 
Il  apparaît  à  la  fin  du  XI^  siècle  mêlé  à 
l'ornementation  romane.  Puis  il  semble  dis- 
paraître au  commencement  du  XII"  siècle 
pour  renaître  bientôt  soussa  forme  naturelle 
et  sous  une  interprétation  différente  de  celle 
de  Vézelay.  Cette  nouvelle  interprétation 
qui  a  donné  l'arum  s'inclinant  en  avant,  s'en- 


roulant sur  lui-même,  ou  portant  un  bou- 
quet de  petites  feuilles  prises  à  d'autres 
plantes, est  certainement  une  des  plus  belles 
conceptions  de  l'art  gothique  à  son  origine. 
Des  cinq  plantes  qui  représentent  la  Flore 
primitive  de  cet  art,  c'est-à-dire  de  l'arum, 
du  nénuphar,  du  plantain,  de  la  fougère  et 
de  la  vigne, il  serait  difficile  de  dire  laquelle 
a  été  la  mieu.x  imitée,  car  avec  chacune 
d'elles  on  a  fait  des  chefs-d'œuvre.  On  peut 
cependant  affirmer  qu'à  ce  point  de  vue 
l'arum  marche  de  pair  avec  les  plantes  qui 
l'ont  suivi. Son  caractère  principal,  ainsi  que 
nous  venons  de  le  dire,  est  cette  simplicité, 
pleine  de  grandeur,  qui  lui  fait  égaler  les 
plus  belles  œuvres  de  l'art  grec. 

Et  maintenant,  pour  finir,  disons  qu'en 
dehors  de  la  question  artistique,  l'arum  a 
un  charme  particulier,car  l'on  aime  à  retrou- 
ver, soit  dans  sa  forme  naturelle,  soit  dans 
son  interprétation,  la  plante  que  l'on  va 
cueillir  au  fond  des  bois  dès  les  premiers 
jours  du  printemps,  et  qui  fut  au  moyen  âge 
un  symbole  de  réveil  et  peut-être  même 
de  Résurrection  ! 

Emile  Lambin. 


î^  \^A  \^A  \^A  yvlx  \^A  \^^  A,^jC  K^^  X^*  A^^  A^X  A^X  a'^^  A^^  a'^A  ^4^ 


ux3-i.i:um-im.iiitïn)cmiiiixiTiiiiiTiiiiiïiviiniiioiniii:  tiitTiiiiiiiiïïririnxiiiiiiiiiiiTiiiïiiiiiiixniiiiniiiiiiniimiixiiiiiin 


lia  restauration  Des  monuments  anciens 


!0 


kTÂ^^^  *AiI^  ^Ail^^  V.l^*^Al^  ^.*1^  ^^1^  ^;i)^  *^}V  V^AJV  Y,a5V  V^V  V}V  y,A)V  ^AÎV^^ 


A  restauratioti  des  monu- 
ments anciens  est  plus  que 
jamais  à  l'cirdre  du  jour. 
Après  tant  d'autres  {-), 
nous  allons  examiner  les 
principes  qui  doivent  y 
présider.  Des  polémiques 
acrimonieuses  se  sont  éle- 
vées à  ce  sujet  ;  nous  avons  eu  à  repousser  des 
attaques  personnelles,  à  réfuter  des  incrimina- 
tions passionnées,  à  faire  face  à  des  procès  de 
tendance.  Nous  reprendrons  quand  il  le  faudra 
la  polémique.  En  attendant,  il  sera  plus  utile 
d'aborder  l'étude  sereine  de  la  question. 

Pour  fixer  des  règles  en  matière  de  restau- 
ration, il  convient  de  distinguer  et  de  classer, 
comme  je  l'ai  fait  jadis,  les  monuments  en  deux 
catégories:  les  morts  et  les  vivants. 

Il  y  a  des  monuments   qui   sont   t)iorts,  en  ce 
sens   qu'ils  appartiennent   en   quelque  sorte   au 
passé,  qu'ils  ne  peuvent  plus  prétendre  à  subsister 
que   comme    des   souvenirs    d'époques    éteintes, 
comme  de  purs  documents  de  l'art. Tels  sont,  par 
exemple,  les  temples  de  l'antique  Egypte  et  de 
la   Grèce,   les   ruines   de   Pompei  et   les  amphi- 
théâtres romains,  qui  appartiennent  à  des  civili- 
sations disparues  et  jamais  plus  ne  seront  rendus 
à  leur  usage  originel  ;  telles  sont  encore  les  en- 
ceintes des  cités  du  moyen  âge,  comme  celle  de 
Carcassonne,  les  castels  féodaux  perchés  en  nids 
d'aigles  sur  les  cimes  rocheuses   veuves  de  leurs 
habitants,  les  abbayes  détruites  par  la   révolu- 
tion,  comme  Jumièges,  Villers   et   Melrose,    les 
donjons  comme  ceux  de  Coucy  et  de  Gand.  Ces 
édifices    sont   irrémédiablement  abolis    et    leurs 
restes,  qui  n'en  sont   que   plus  précieux,  ne  sub- 
sistent que  comme  des  souvenirs  et  des  reliques. 
Il   ne   peut   être   question   de  rétablir  à   neuf  le 
temple  de  Karnak,  ni  le  r.irthénon  d'Athènes,  ni 
la  Porta  nigra  de  Trêves,  pas  plus  que   les   rem- 


1.  Première  partie. 

2.  Duclos,  Bull.  Je  la  Gilde  de  SC-Thomas  et  St-Liic.  Anvers, 
année  1874.  J.  Nève,  L.  Saintenoy,  La  comeivalion  des  moniimeiils 
en  Belgique.  V.  KapnchRobevl,  lu  'luence  de  l'opinion  /lulitiquc  sur 
la  conservation  des  monuments. 


parts  d'Avignon,  ni  la  chapelle  palatine  de  Ni- 
mègue,  ni  l'abbaye  de  Villers. 

Mais  il  en  est  d'autres  qui  sont  restés  vivants 
dans  leur  vénérable  vieillesse,  comme  le  Pan- 
théon romain,  les  cathédrales  du  moyen  âge  et 
les  châteaux  de  la  Renaissance. 

Cette  classification,  que  j'ai  proposée  il  y  a 
huit  ans  ('),  j'ai  la  satisfaction  de  la  voir  adoptée, 
et  en  quelque  sorte  consacrée,  par  un  des  émi- 
nents  archéologues  et  un  des  esthètes  délicats 
de  ce  temps. 

«  A  tous  ces  trésors  si  divers,  disait  tout  ré- 
cemment M.  Auge  de  Lassus  (2),  notre  piété 
filiale  est  également  due  ;  mais  ce  n'est  pas  de 
même  qu'elle  doit  se  manifester.  Ici  et  tout 
d'abord  une  distinction  essentielle  apparaît  et 
s'impose.  Le  monument  n'est-il  plus  qu'une 
chose  du  passé....,  le  décor  est-il  seul  demeuré 
sur  la  scène  désertée  à  jamais,  est-ce  une  ruine 
qui  seule  nous  a  été  transmise  ?  —  Au  contraire, 
le  monument  n'a-t-il  pas  encore  épuisé  sa  tâche, 
demeure-t-il  associé  à  notre  vie  journalière,  est-il 
encore  vivant  d'une  vie  qui  n'est  pas  que  de  sou- 
venir ?  —  Nos  devoirs  en  l'une  et  l'autre  occur- 
rence diffèrent  absolument.  » 

Examinons  quels  sont  ces  devoirs  : 

Les  monuments  morts. 

Les  premiers  ne  sont  pas  nécessairement  des 
ruines,  m^is  ils  sont  exposés  à  la  lente  et  im- 
placable morsure  du  temps,  à  l'assaut  continu 
des  éléments  destructeurs,  sans  profiter  de  la 
défense  opposée  à  ces  dégradations  de  la  part 
des  occupants,  comme  c'est  le  cas  pour  ceux  de 
la  seconde  espèce. 

Qu'ils  soient  restés  debout  dans  leur  ensemble, 
sinon  dans  leur  intégrité,  comme  les  pyramides 
des  Pharaons  et  la  Tour  des  Vents  d'.Xthcnes,  ou 
qu'ils  ii'ofTfrentplus  que  des  restes,comnic  ri<>ech- 
téon,  le  Coliséc,  ou  l'église  de  Jumièges,  ils  consti- 
tuent en  tout  cas  des  reliques  précieuses  du  passé, 
qu'il  faut  à  tout  prix    faire  durer  le    plus    long- 

1.  V.  Bull,  du  Cercle  liisl.  et  archéol.  de  Gand.  £"  année  (1893), 
p.  31- 

2.  Journal  de  l'Art,   17  aoùl  igoi. 


3La  restauration  îïes  monuments  anciens» 


499 


temps  possible.  Ne  sommes-nous  pas  tous  d'ac- 
cord sur  ce  point? 

Non  pas,  malheureusement  !  Il  est  des  poètes 
amoureux  du  pittoresque,  qui  trouvent  un 
charme  supérieur  à  tout  dans  les  murailles  bran- 
lantes, croulantes  et  agonisantes,  et  font  consister 
la  beauté  des  ruines  précisément  dans  leur  marche 
vers  le  néant.  Ils  adorent  surtout  le  lierre  grim- 
pant au.x  vieux  murs,  les  buissons  poussant  à 
travers  les  éboulis  de  pierres,  les  arbustes  enra- 
cinés aux  voûtes  et  au  sommet  des  murailles, 
la  mousse  qui  tapisse  et  la  patine  qui  dore  les 
parois  et  jusqu'aux  monticules  accidentés  que 
forment  les  amas  de  maçonneries  écroulées  et 
ensevelies  sous  la  poussière.  Arrière  le  curieux 
qui  veut  sonder  ces  décombres  ;  l'esthète  qui  cher- 
che à  en  relever  d'artistiques  fragments;  arrière 
l'architecte  qui  veut  remettre  l'une  sur  l'autre 
les  pierres  renversées,  rétablir  une  belle  ordon- 
nance brisée  par  un  effondrement,  remettre  à  sa 
place  un  savoureux  morceau  de  sculpture  pré- 
cipité à  terre;  arrière  l'archéologue  qui  ose  profa- 
ner le  pittoresque  désordre  par  des  fouilles  entre- 
prises au  nom  de  la  science  !  «  On  ne  restaure  pas 
les  ruines.  >  Laissez  les  vieux  monuments  mourir 
de  leur  belle  mort,  parés  par  la  nature  pour  la 
tombe  éternelle.  —  Ainsi  raisonnent  de  sincères 
mais  exclusifs  amants  de  la  beauté  purement 
pittoresque,  frappés  de  certains  aspects  particu- 
liers des  choses,  fermés  aux  considérations  plus 
hautes  et  aux  idées  plus  larges.  Ils  oublient  qu'à 
côté  de  cette  triste  beauté  des  ruines  mori- 
bondes il  y  a  la  beauté  des  œuvres  de  l'art 
humain  en  voie  de  perdition. 

Cette  beauté  mourante  qui  seule  les  touche, 
qu'ils  la  cherchent  dans  la  pure  nature  oii  elle 
abonde,  dans  les  montagnes  ébréchées,  dans  les 
falaises  ravinées,  dans  les  rochers  croulants 
qu'enlace  la  verdure.  De  quel  droit  s'attachent- 
ils  aux  productions  historiques  des  plus  nobles 
industries  humaines,  ceux  qui  comptent  absolu- 
ment pour  rien  le  charme  esthétique  de  l'œuvre 
architecturale?  Il  est  peu  intelligent  d'assimilei 
les  murs  harmonieux  d'un  temple  grec,  l'ordon- 
nance prestigieuse  d'un  cloître  roman,  les  lignes 
expressives  d'un  style  historique  à  des  parois 
rocheuses  quelconques  tapissées  de  poétiques 
végétations.   Ici    le   beau    artistique    et   l'intérêt 


des  souvenirs  séculaires  priment  l'attrait  pure- 
ment pittoresque  qui  n'est  pas,  après  tout,  si  rare 
dans  la  nature,  qu'il  faille  y  sacrifier  les  leçons 
de  l'histoire,  les  beautés  et  les  documents  de 
l'art  monumental  dans  ses  restes  de  plus  en 
plus  rares. 

Il  ne  faut  pas  laisser  périr  les  ruines  histo- 
riques ;  leur  perte  serait  irréparable  ;  il  faut  les 
conserver.  Si  les  générations  passées  n'avaient 
pas  eu  à  cœur  de  nous  les  garder,  si  elles  avaient 
pratiqué  le  système  préconisé  par  nos  artistes 
et  nos  poètes,  il  y  a  beau  temps  qu'il  n'y  aurait 
plus  à  controverser  à  leur  égard. 

—  Les  ruines  ont  deux  ennemis  :  l'homme  et 
la  nature. 

L'homme  est  souvent  brutal  ;  il  exploite  les 
ruines  comme  des  carrières.  Il  dépouille  la  pyra- 
mide de  Chéops  de  son  revêtement  de  marbre 
pour  en  faire  des  maisons  au  Caire;  il  arrache  la 
façade  du  Colisée  pour  bâtir  des  palais  romains  ; 
il  démolit  les  ruines  de  l'abbaye  d'Aulne  pour 
construire  les  têtes  du  tunnel  de  la  ligne  ferrée 
de  la  Sambre  ;  il  fait  des  bornes  d'amarrage 
avec  les  tambours  des  colonnes  d'églises  et 
transforme  en  usine  le  donjon  du  château  des 
comtes  de  Gand. 

L'homme  est  maladroit  et  redoutable,  même 
quand  il  est  respectueux  du  passé.  Il  lui  arrive 
de  refaire  des  murs  gothiques  en  appareil  mo- 
derne, de  renouveler  en  pierre  d'Avesnes  les 
fenestrages  des  Halles  d'Ypres  taillés  dans  le 
grès  d'Artois.Trop  souvent  il  a  copié  gauchement 
des  profils  incompris  et  gâté  des  monuments  en 
voulant  les   réparer. 

Est-ce  à  dire  qu'il  soit  absolument  inhabile, 
et  que  la  restauration  correcte  des  monuments 
soit  pour  nous  chose  impossible  ?  En  serions- 
nous  là  après  un  demi-siècle  de  romantisme 
suivi  d'un  demi-siècle  d'archéologie?  Nous  pos- 
sédons à  fond  la  science  des  styles  ;  nous  avons 
su  faire  une  église  de  la  Madeleine  plus  romaine 
que  les  temples  d'Auguste,  comme  des  églises 
du  gothique  le  plus  pur,  et  nous  refaisons  du 
Louis  XV  avec  une  impeccable  virtuosité  !  Nous 
avons  retrouvé  l'art  de  restaurer  les  vitraux  des 
cathédrales  et  de  réparer  les  vieilles  haute-lisses. 
Serait-il  impossible  que  des  spécialistes  conscien- 
cieux, surveillés   par    des   hommes  compétents. 


500 


Withxxt  ïje  PSrt  (bvcttcn. 


parviennent  à  réparer  convenablement  nos  mo- 
numents délabrés,  et  faut-il  laisser  ceux-ci  tomber 
sous  nos  )'eiix  de  peur  de  les  altérer?  —  Dans 
aucun  domaine  on  n'oserait  faire  semblable  in- 
jure aux  capacités  de  nos  contemporains,  et  il 
faut  un  excès  de  préventions  passionnées  pour 
soutenir  cette  énormité.  Disons  hardiment  que 
nous  savons  et  devons  conserver,  réparer,  conso- 
lider nos  ruines,  entretenir  nos  monuments  morts. 

—  Mais  faut-il  les  retouclier,  les  restaurer  et 
dans  quelle  mesure? 

Les  solutions  radicales,  les  formules  absolues 
séduisent  facilement  les  esprits.  Une  de  ces  for- 
mules a  obtenu  dans  ces  derniers  temps  une 
faveur  singulière,  c'est  celle  des  archéologues 
anglais  :  «  conseiver,  non  restaurer  >.  Elle  n'est 
pas  absurdement  négative  comme  le  système  de 
nos  poètes,  mais  à  notre  avis  elle  est  encore  trop 
étroite.  Il  ne  sera  pas  difficile  de  le  montrer 
par  des  exemples  frapjjants. 

Ses  adeptes  se  résignent  aux  ravages  accom- 
plis ;  ils  laissent  par  terre  les  monuments  que  le 
temps  y  a  jetés  ;  ils  déclarent  le  désastre  irré- 
médiable. Ils  ne  relèveraient  pas  même,  comme 
on  l'a  fait  l'hiver  dernier,  les  fameuses  colonnes 
écroulées  de  la  salle  hypostyie  de  Karnak.  Mais 
la  destruction  commencée,  ils  veulent  du  moins 
l'interrompre  pour  conjurer  l'anéantissement 
suprême.  Défense  de  toucher  à  l'œuvre  d'autre- 
fois, autrement  que  pour  en  prévenir  la  chute  sur 
la  tête  des  passants  ! 

A  s'en  tenir  à  la  lettre,  la  formule  est  uto- 
pique. 

Car  comment  raffermir  une  ruine  en  la 
laissant  intacte  ?  Force  nous  est  d'y  opérer  des 
retouches  pour  la  consolider  :  ancrage.*^,  étais, 
remplages,  que  sais-je  ?  Mais  ne  voit-on  pas 
qu'il  vaut  mieux  lestituer  des  organes  essentiels 
de  la  structure  originelle,  plutôt  que  d'introduire 
des  ouvrages  de  secours  le  plus  souvent  hideux? 
Au  lieu  d'ancrer  une  voûte,  pourquoi  ne  pas  lui 
rendre  son  contrefort  ?  Au  lieu  d'étayer  une 
maçonnerie,  pourquoi  ne  pas  refaire  son  support 
naturel  ?  Au  lieu  de  boucher  brutalement  une 
brèche,  pourquoi  ne  pas  reconstituer  l'appareil 
primitif? 

Voici  un  pan  de  mur  qui  boucle  ;  comment 
prévenir  son   effondrement  sans  le  démolir  en 


partie  pour  le  refaire?  Voici  un  contrefort  lé- 
zardé; coinment  le  réparer  sans  en  dé[)oser  et  en 
reposer  les  pierres?  Voici  une  muraille  ébréchée 
qui  s'en  va  pierre  par  pierre  ;  comment  arrêter 
son  érosion,  sans  en  remplir  les  vides,  l'araser, 
la  couvrir  d'un  chaperon,  et  (pourquoi  pas  ?),  de 
[^référence,  de  sa  corniche  ?  Voici  un  parement 
dont  les  joints  délavés  et  dénivelés  n'ont  plus 
d'assiette  ;  comment  rendre  la  stabilité  à  son 
appareil  sans  procéder  à  un  bon  rejointoyage  ? 
Remarquons,  d'ailleurs,  que  certains  monu- 
ments, surtout  ceux  du  moyen  âge,  sont  con- 
stitués de  telle  sorte,  qu'aucun  membre  d'archi- 
tecture n'y  est  inutile  ;  si  un  de  ces  membres  vient 
à  disparaître,  il  faut  nécessairement  le  rem- 
placer ;  il  faut  renouveler  les  larmiers  et  les  gar- 
gouilles qui  égouttent  les  eaux,  rétablir  les  con- 
treforts qui  soutiennent  les  poussées,  etc. 

Mais  d'autres  cas  se  présentent.  C'est,  par 
exemple,  une  belle  fenêtre  gothique  privée  de  ses 
meneaux  montants,  et  dont  la  riche  résille  s'est 
maintenue  dans  le  tj'mpan  (cela  se  rencontre), 
comme  par  miracle  suspendue  sur  ses  barlotières; 
c'est  une  croisée  dont  le  linteau,  fait  de  deux 
pièces  avec  un  joint  au  milieu,  a  perdu  l'appui 
du  montant,  le  croisillon  ayant  été  arraché,  et 
reste  suspciuki  comme  par  habitude  sur  le  vide  ; 
c'est  im  arc-boutant  prêt  à  céder  sous  la  poussée 
des  voûtes  qu'il  ne  pourra  bientôt  plus  soutenir, 
parce  que  son  pinacle  s'en  est  allé  pierre  par 
pierre  ;  c'est  une  voûte  éventrée  dont  le  reinplis- 
sage  commence  à  tomber  et  va  peu  à  peu  dis- 
paraître. Quel  est  l'homme  sérieux  qui  protes- 
tera contre  l'idée  de  rétablir  les  meneaux  mon- 
tants et  le  croisillon,  de  refaire  le  pinacle  et  de 
refermer  la  voûte  ?  Mais  ces  réparations  néces- 
saires, qu'est-ce  autre  qu'un  commencement  de 
restauration,  cette  chose  honnie?  Et  pourtant, 
quel  mal  )'  a-t-il  à  ce  que  la  réparation,  tout 
en  cc)nservant  l'édifice,  lui  rende  quelques  traits 
authentiques  de  sa  beauté  passée  ?  —  Non 
seulement  des  moyens  de  réparation,  de  con- 
solidation, de  conservation  s'imposent  à  nos 
soins,  mais  il  est  impossible  de  les  séparer  radi- 
calement de  la  restauration  véritable  ;  et  l'on 
conviendra  qu'il  est  heureu.x  de  pouvoir  réaliser 
de  préférence  la  consolidation  à  l'aide  des 
membres   mêmes    de    la    structure    restitués  à 


3La  restauration  îies  monuments  anciens. 


501 


l'édifice.  Il  vaut  mieux,  encore  une  fois,  remettre 
un  meneau  que  poser  un  étançon,  élever  un 
pinacle  que  murer  l'arc-boutant. 

Oui  osera  contester  ce  qui  précède?  Mais 
alors,  où  est  la  limite  et  que  devient  la  fameuse 
formule:  conserver,  non  restaurer  1  Disons  plu- 
tôt :  conserver  avant  tout,  restaurer  avec  discrétion. 

—  La  formule  anglaise  est  au  moins  trop 
absolue  ;  ajoutons  qu'elle  est  mal  fondée. 

Si  nous  faisons  tant  de  cas  d'un  édifice  ancien, 
c'est  qu'il  a  par  lui-même  une  valeur  estliétique, 
archéologique  et  historique.  Qu'il  soit  partielle- 
ment détruit,  c'est  chose  déplorable  ;  on  doit 
regretter  de  ne  plus  le  posséder  intact.  Quel 
homme  raisonnable  ne  se  réjouirait,  si,  par  mi- 
racle, il  pouvait  nous  être  rendu  dans  son  inté- 
grité ? 

M.  Auge  de  Lassus  suppose  un  monument 
ruiné,  mais  dont  les  éléments  soient  restés  sur 
place, Il  admet,  par  exception,  qu'une  main  pieuse 
les  assemble,  les  rapproche,  les  relève.  «  Telle 
est,  dit-il,  la  logique  suprême  d'un  monument 
grec,  qu'un  tel  labeur  est  facile.  Ainsi,  l'acropole 
d'Athènes  a  pu  reprendre  possession  du  temple 
de  la  Victoire  Aptère  longtemps  rompu  et  dis- 
persé. >)  Mais,  ajoute  l'éminent  esthète,  ces  réap- 
paritions supposent  une  construction  de  blocs 
précieusement  appareillés  et  sculptés,  sans  au- 
cune aide  de  maçonnerie  grossière. Cette  réflexion 
très  juste  nous  fournit  en  quelque  sorte  la  clef 
du  vrai  système  pour  la  restauration  des  édifices 
morts. 

La  restauration  ne  doit  se  faire,  que  si  cela  se 
peut  sans  incertitude  et  sans  crainte  d'erreur 
quant  à  la  forme  et  quant  au  procédé  originels. 
Il  faut,  pour  restaurer,  être  parfaitement  maître 
de  l'un  et  de  l'autre.  La  restauration  s'impose 
alors,  si  l'on  dispose  des  matériaux  anciens  pro- 
pres à  être  remis  en  œuvre. 

Ces  conditions  sont  réalisées,  nous  l'avons  vu, 
dans  l'architecture  si  régulière  des  Grecs  ;  ce  fut 
une  idée  généreuse  et  non  pas  une  utopie,  du 
moins  au  point  de  vue  de  l'exécution,  que  conçut 
M.  Fréd.  Harrisson  quand  il  proposa  de  rétablir 
le  Parthénon,  en  rachetant  à  l'Angleterre  les 
marbres  enlevés  par  Lord  Elgin.  Il  n'en  pourrait 
être  de  même  des  monuments  romains. 


Les  monuments  des  Grecs  constituent  ce  que 
j'appelle  une  maçojinerie  ctasseinblage,une.  sorte  de 
menuiserie  en  pierre  ;  ceux  des  Romains  forment 
le  plus  souvent  une  maçonnerie  concrète,  agglo- 
mérée.Ces  derniers  n'ont  pu  que  s'abattre,  s'émiet- 
ter  ;  leur  poussière  est  dispersée,  ils  ne  sauraient 
se  redresser  d'eu.K-mêmes.  On  pourrait  seulement 
en  reconstituer  l'effigie  avec  des  matériaux  neufs 
et  par  une  technique  souvent  contestable. 

Les  édifices  du  moyen  âge  sont  d'une  espèce 
intermédiaire.  Leurs  maçonneries  irrégulières  ne 
peuvent  être  que  refaites  de  neuf,  en  pastiche  ; 
mais  leurs  œuvres  vives  peuvent  ordinairement 
être  exactement  restituées,  comme  nous  l'avons 
vu  plus  haut  dans  maints  exemples. 

—  Mais  cette  restitution  correcte  n'a  plus  du 
tout  la  valeur  d'authenticité  propre  à  l'original  ; 
vaut-elle  la  peine  de  l'entreprendre  1  Oui,  par- 
fois, et  pour  deux  motifs. 

Dans  bien  des  cas  des  réfections  partielles 
sont  nécessaires  pour  compléter  la  structure, 
augmenter  la  solidité  et  assurer  la  conservation  : 
tels  les  meneaux  remis  aux  verrières,  les  pinacles 
ajoutés  aux  arcs-boutants,  les  remplages  refaits 
aux  voûtes. 

Parfois  aussi,  exceptionnellement,  les  restitu- 
tions, à  supposer  qu'elles  puissent  être  correcte- 
ment faites,  contribuent  à  la  beauté  harmonique 
et  à  la  compréhension  des  restes  conservés. 

Il  faut  reconnaître  que  les  monuments  anciens 
relèvent  de  l'esthétique,  de  l'art,  de  l'architecture, 
plus  encore  que  de  la  nature  qui  peut  les  avoir 
envahis.  Or,  les  ordonnances  brisées,  amputées, 
déformées,  excellent  peut-être  à  alimenter  les 
rêves  vagues  des  poètes  ;  elles  restent  inexpres- 
sives à  l'œil  qui  cherche  à  retrouver  la  belle  ligne 
de  l'œuvre  originale. 

Voici  un  monument  que  la  barbarie  des  hom- 
mes et  les  injures  du  temps  ont  défiguré  dans  le 
détail,  tout  en  respectant  ses  grandes  masses; 
des  plaies,  des  brèches,  des  hiatus  rompent  la 
continuité  des  moulures  ;  les  baies  sont  murées 
et  les  façades  aveuglées  ;  des  lignes  d'amor- 
tissement énigmatiques  tendent  à  un  couronne- 
ment disparu  ;  des  membres  d'architecture  entre- 
coupés offrent  un  assemblage  biscornu  :  telle 
une  inscription    mutilée,   où    l'on  pouvait  jadis 


502 


5Rcbuc  ïir  r^rt  chrétien. 


lire  quelque  texte  émouvant,  et  où  le  passant 
ne  trouve  plus  aujourd'hui  qu'un  assemblage  de 
lettres  dépourvues  de  sens.  N'est-ce  pas  œuvre 
intelligente,  artistique,  œuvre  respectueuse  du 
monument,  œuvre  de  méritoire  vulgarisation, 
que  de  refaire,  en  comblant  les  lacunes,  la  conti- 
nuité des  lignes,  de  rendre  lisibk  l'ordonnance 
du  monument  et  expressive  sa  beauté  latente  ? 
Enfin  on  peut  aller  plus  loin,  exceptionnelle- 
ment. Souvent  des  fragments  échappés  à  la  ruine 
sont  compréhensibles  pour  les  savants  et  ils  leur 
révèlent  tout  un  ensemble  disparu,  tandis  qu'ils 
ne  représentent  au  public  qu'un  amas  de  pierres 
vénérable  mais  peu  intéressant.  Un  pan  de  mur 
d'enceinte  médiévale  est  curieux,  mais  combien 
ne  s'aviverait  pas  notre  intérêt,  si  nous  pouvions 
letrouver  le  tracé  complet  des  remparts  ?  —  Par 
d'immenses  sacrifices,  par  de  savantes  études, 
on  est  parvenu  à  dégager  les  restes  du  château 
des  comtes  de  Flandre  à  Gand.  Ses  créneaux 
curieux,  ses  demi-tourelles  sans  pareilles  ont 
réapparu  ébréchées,  mais  presqu'entières.  Con- 
sciencieusement, scrupuleusement,  sans  hâte,  on 
les  a  réparés,  complétés,  sans  rien  laisser  (c'est 
probable  et  je  le  suppose)  au  hasard,  ni  à  l'in- 
certitude ;  et  voilà  une  incomparable  et  séculaire 
relique  sauvée.  Après  cela,  quel  tort  lui  fait-on, 
si,  pour  le  public,  on  ajoute  un  commentaire  à 
cette  restauration  ;  si,  pour  expliquer  ce  qui 
reste,  on  ajoute  à  côté  la  restitution  de  ce  qui 
a  disparu  ;  si  l'on  complète  l'enceinte  ;  si  derrière 
les  tourelles  anciennes  et  authentiques  on  réta- 
blit le  chemin  de  ronde  sans  lequel  on  ne  peut 
comprendre  leur  usage  tactique  ;  si  aux  créneaux 
primitifs  et  intacts  avec  les  gonds  de  fer  des 
volets  de  défense,  depuis  longtemps  pourris,  on 
ajoute  une  restitution  de  ces  curieux  volets  ? 
Qui  pourra  se  plaindre  raisonnablement  de  cette 
résurrection  instructive  du  passé,  pourvu  que 
l'on  respecte  absolument  les  parties  originelles 
et  authentiques  ? 

Les  monuments  vivants. 

Mais,  comme  le  remarque  M  II.  Chabeuf  en 
un  article  remarquable  ('),  «  les  édifices  anciens 
ne  servent  pas  seulement  à  offrir  des  tableaux 
décoratifs  aux   artistes   et  aux   poètes,  ils   sont 

I.  Journal  des  Aris,  n°  62,   1901. 


aussi  des  œuvres  d'usage,  et  cet  usage  est  insé- 
parable de  leur  beauté  morale.  >  De  là,  pour  les 
monuments,  cette  nécessité  des  restaurations 
auxquelles  on  a  sagement  renoncé  pour  les 
œuvres  de  la  sculpture  et  de  la  peinture. 

Comment  devons-nous  traiter  les  anciens 
monuments  encore  habités,  occupés,  ou  du  moins 
utilisés,  tels  que  les  églises  romanes  et  gothiques, 
les  châteaux  de  la  Renaissance,  nos  vieux  hôtels 
de  ville,  les  très  anciennes  maisons,  etc.  ? 

Ces  édifices  ne  sont  pas,  comme  les  précédents, 
entrés  dans  le  domaine  historique,  où  archéolo- 
gues, artistes  et  touristes  se  disputent  au  sujet 
des  monuments  morts,  sans  rencontrer  d'autres 
obstacles  que  la  difficulté  de  s'entendre.  Malgré 
l'intérêt  passionné  qu'ils  leur  portent,  ces  édifices 
ne  leur  appartiennent  pas  ;  c'est  quelque  peu  en 
intrus  qu'ils  interviennent,  sous  prétexte  que 
tout  ce  qui  touche  à  l'art  les  intéresse.  Une  consi- 
dération domine  ici  les  droits  de  l'archéologie  et 
de  l'esthétique,  c'est  l'emploi  et  l'utilité  de  l'édi- 
fice, sa  destination.  Celui-ci  a  une  vie  actuelle  et 
doit  s'adapter  à  son  usage,  sauf  le  respect  dû  à  sa 
beauté  ;  il  faut  qu'il  dure,  mais  il  faut  aussi  qu'il 
serve.  On  peut  avoir  besoin  de  le  développer,  de 
l'augmenter  en  raison  de  son  affectation  mo- 
derne. Celle-ci  comporte  non  seulement  la  con- 
venance, l'utilité  d'usage,  mais  encore  parfois 
une  manière  d'être  actuelle  et  vivante  en  accord 
avec  les  mœurs  présentes,  les  besoins  nouveaux 
et  le  milieu  qui  l'entoure.  Le  point  de  vue  archéo- 
logique et  pittoresque  passe  ici  au  second  plan, 
malgré  toute  sa  valeur.  Nous  ne  sommes  plus  en 
présence  d'un  simple  document  en  pierre,  com- 
parable à  une  ruine  ou  à  un  objet  de  musée,  cette 
chose  morte  qu'on  remise  et  qu'on  met  sous 
verre  avec  une  étiquette.  Si  c'est  un  hôtel  de 
ville,  il  reste  la  maison  de  tout  le  monde,  l'organe 
central  de  la  vie  municipale  active,  comportant 
aujourd'hui  les  amples  services  modernes,  tels 
que  l'état  civil  et  autres.  Si  c'est  une  église,  elle 
reste,  comme  parle  passé,  asservie  journellement 
aux  inultiples  convenances  de  la  liturgie. 

Il  faut  faire  à  pareils  édifices  non  seulement 
les  travaux  propres  à  leur  rendre  au  besoin  leur 
physionomie  primitive  et  ensuite  à  assurer  leur 
conservation,  mais  encore  les  ouvrages  néces- 
saires pour  les  approprier  à  l'emploi  actuel,  avec 
ses    développements    normaux.    On    doit  donc- 


répudier  entièrement  ici  la  fameuse  formule  : 
conserver,  non  restaurer.  Il  faut  conserver,  res- 
taurer, et  même  parfois  agrandir. 

Ainsi,  c'est  avec  raison,  incontestablement,  que, 
pour  rétablir  dans  son  ampleur  le  culte  épiscopal 
dans  la  cathédrale  de  Cologne,  le  fameux  Doin- 
verein  a  construit  les  nefs  de  ce  colossal  monu- 
ment, que  les  siècles  passés  avaient  laissé  in- 
achevé ;  c'est  à  bon  droit,  nul  ne  le  niera,  que 
le  Gouvernement  français  a  conjuré  la  lente 
désagrégation  des  grandes  églises  du  moyen  âge 
et  les  a  mises  en  état  d'abriter,  durant  des  siècles 
encore,  sous  leurs  voûtes  déjà  séculaires,  les  céré- 
monies religieuses.  On  a  bien  fait  de  donner  à 
Sainte-Marie-de-la-Fleur  de  Florence  la  façade 
qui  lui  manquait,  et  à  Saint- Bénigne  de  Dijon, 
comme  à  la  Sainte-Chapelle  de  Paris,  l'élégant 
campanile  qui  leur  faisait  défaut.  Il  ne  convenait 
pas  à  notre  époque  éclairée  de  livrer  aux  temps 
futurs  dans  leur  état  mutilé  ces  monuments  qu'un 
passé  calamiteux  nous  avait  légués  incomplets, 
mais  encore  vivants. 

L'achèvement,  et  parfois  l'augmentation  de  ces 
édifices,  s'impose.  Pourquoi  nous  serait-il  interdit 
de  faire  ce  qu'on  a  fait  à  toutes  les  époques,  c'est- 
à-dire  d'approprier  nos  vieux  édifices  aux  besoins 
modernes, d'ajouter  des  salles  d'audience  au  vieux 
Palais  de  justice  de  Paris,  d'annexer  une  aile 
indispensable  à  un  hôtel  de  ville  devenu  insuffi- 
sant, d'adjoindre  une  sacristie  à  une  église  qui 
a  pu  s'en  passer  en  d'autres  temps,  ou  même  en 
certains  cas  de  l'agrandir  par  suite  de  l'accrois- 
sement d'une  paroisse  ? 

Néanmoins,  il  ne  faut  le  faire  que  dans  la 
mesure  du  nécessaire.  Plutôt  que  d'agrandir 
l'hôtel  de  ville  d'Arras,  qui  formait  un  tout  com- 


plet, on  a  très  sagement  reporté  les  services  ex- 
cédants dans  l'édifice  voisin,  et  l'on  fera  de  même, 
avec  raison,  à  Gand,  en  utilisant  à  cette  fin  la 
nouvelle  halle  aux  draps  restaurée.  Au  lieu 
d'abîmer  les  proportions  d'une  église  ancienne, 
devenue  trop  petite,  il  sera  quelquefois  possible 
de  dédoubler  la  paroisse. 

En  tous  cas  il  ,ie  faut  pas  perdre  de  vue  les 
égards  dus  à  im  monument  séculaire,  ni  le  haut 
intérêt  qui  s'attache  à  la  conservation  des  ves- 
tiges de  l'art  ancien  et  de  l'histoire  locale  qui 
y  restent  empreints.  Toutes  les  retouches  qu'on 
lui  fera  subir  doivent  s'inspirer  d'un  soin  pieux 
et  d'un  esprit  de  conservation  systématique.  Il 
ne  faut  pas  sans  nécessité  «  mettre  du  neuf 
parmi  ces  couleurs,  ces  formes  qui  ont  vieilli 
ensemble  »  (').  Il  faut  respecter  ce  que  nous  ap- 
pellerons l'âme  du  monument,  son  caractère 
propre,  son  style,  et  celui  qui  y  met  la  main 
doit  se  considérer  comme  le  continuateur  de 
l'artiste  qui  l'a  conçu.  Il  doit  être  réparé,  entre- 
tenu, développé  au  besoin  dans  l'esprit  de  l'œuvre 
originelle  et  avec  le  souci  de  ne  toucher  à  celle- 
ci  que  dans  la  mesure  nécessaire  à  la  fragile 
harmonie  que  le  temps  lui  a  donnée.  Ici  nous 
n'aurons  qu'à  adopter,  comme  nous  l'avons  fait 
en  1894,  la  belle  formule  de  Didron,  mais  en 
y  introduisant  une  division  :  Quand  il  s'agit  des 
monuments  morts,  il  faut,  dirons-nous,  plutôt 
consolider  que  reparer,  plutôt  nparer  que  restau- 
rer ;  et  quand  il  s'agit  des  monuments  vivants, 
plutôt  restaurer  que  refaire,  plutôt  refaire  qu'em- 
bellir. 

L.  ClO(JUET. 

(A  suivre.) 

I.    H.   Cliabeuf,  loc.   cil. 


KBVUE    DK    L  ART    ClIKIîTIEN. 
I901,    —   6"^^    LIVRAISON. 


A,^^  a'^VJ^  a'^X  K^A  iM*  >M*  \^*  \^*  A^X  A^A  k^*  k^H  i.^*  A,^tC  a'^X  ^4^ 


jt  I  cxrriixritiiiiiiiiiiiiiiiïtiiiiiiiii3iii"iixiiiirirxririiiiTiiiiiiii[iiiiiii:tiiiiiiiïiiiiiii>iïiiiiixiiiiiiiïiiiiiiixiiiii  (iiiiiimi  ii  i  i'iiittii 


i®!®îSKe3iiK@ïg®î®  ffîclanges.  ■sagingî®®®®®  ||) 


^      r'axrilix):iiiriii:c-iiiiiiï:tiiiiiii][iiiiiii  tiLiiiiiJ'.iiiiiiixiiiiiiixiiiiiiiiiiiiiriiîtiiiiiiiiixiiiiiiiïtiiiTiTixiiiiiii)  iiiiiiriiiiTTriTimiii!     JJjfi 

X^^^^  *;iî^  ^Atï^  ^.èlV  r^V  V^V  YT^V  y^-}V  V^)V  V.AlV  V,^}V  V^V  %f^^  V^V  ^:Al^I^ 


Jla  Vierge  ffîarie  et  le  Serpenr. 

Efffjcrr[)C,si  fi-onoarai,i[)iqiies?. 

(Extrait  àes  Dociiinenls  du  Congrès  arclu'ologique 
de   Tongres.) 


f^^^^^E  nos  jours,  on   représente  habitueliement  la 
]j   Vierge  Marie  debout,  ayant  le   serpent  sous 


les  pieds  ;  du  pied  droit  elle  lui  écrase  la 
tête,  tandis  qu'il  lui  mord  le  talon.  L'inter- 
prétation ordinaire  de  cette  figuration  y  fait  voir  le  sym- 
bole de  l'Immaculée  Conception,  à  cause  du  verset  i;, 
ch.  III  de  la  Genèse,  tel  qu'il  est  traJuit  dans  la  Vulgate. 
Mais  cette  traduction  n'est  pas  littérale  :  la  Vierge  ne 
saurait  être  théologiquement  considérée  comme  écrasant, 
à  elle  seule,  la  tcte  du  serpent  ;  cependant,  il  est  permis 
de  la  représenter  ainsi  h  cause  de  son  divm  Fils  et  de 
toute  l'humanité,  dont  elle  est  la  mère  spirituelle. 

Cette  relation  iconographique  du  serpent  avec  l'Imma- 
culée Conception  n'est  pas  ancienne  ;  on  ne  la  trouve  pas 
dans  la  figuration,  dite  i/tvs/ii/iit\de  cette  croyance,  figura- 
tion usitée  aux  XV'=  et  X  VI"  siècles,  oii  la  \'ierge  est  en- 
vironnée de  nombreux  emblèmes  ;  le  serpent  n'apparaît 
qu'à  l'époque  où  l'on  représenta  l'Immaculée  debout  sur 
le  monde  et  sur  le  croissant,  c'est-à-dire  vraisemblable- 
ment à  partir  du  XVI P  siècle. 

Ce  symbolisme  particulier  est  donc  récent  ;  mais  il 
n'en  était  pas  besoin  pour  figurer  le  serpent  sous  les 
pieds  de  la  Vierge,  car  cela  s'est  fait  assez  fréquemment 
depuis  le  XI 11'=  siècle,  afin  de  rappeler  qu'elle  est  la  Nou- 
velle Eve.  Je  ne  connais  pas  d'exemple  antérieur  :  sans 
doute  l'on  voulut  longtemps  éviter  de  placer,  auprès  de 
Marie,  le  symbole  du  mal,  l'image  du  démon,  figuré  an- 
ciennement sous  les  pieds  du  Christ  ;  en  outre,  la  \'ierge 
était  primitivement  représentée  assise,  tenant  sur  ses 
genoux  l'Enfant  Jésus. 


A  dater  du  XIII"'  siècle,  les  admirables  statues  de  la 
Vierge  debout  aux  portails  des  grandes  cathédrales 
(Amiens,  Reims,  etc.)  offrent  sous  ses  pieds  uu  monstre 
reptile,  souvent  à  tête  de  femme  ;  la  Vierge  ne  l'écrase 
pas,  mais  elle  marche  sur  lui,  parce  qu'il  n'a  pas  de  puis- 
sance sur  elle  ;  son  Fils  l'a  vaincu. 

Cette  figuration  continua  d'être  en  usage,  sans  néan- 
moins devenir  jamais  très  fréquente,  jusqu'au  moment  où 
on  l'adapta  plus  spécialement  à  llnimaculée  Concep- 
tion. 

Le  pape  Paul  V  (1635- 1612)  fit  élever,  devant  la  basi- 
lique de  Sainte-Marie-Majeure,  une  statue  de  la  Vierge 
portant  l'Enfant-Jésus  qui  tient  une  croix  à  longue  ham- 
pe, dont  l'extrémité  inférieure  lui  sert  comme  de  pique 
pour  transpercer  la  mâchoire  du  serpent.  Ce  type,  recom- 
mandé par  d'autres  papes,  se  répandit  au  loin  sous  le 
patronage  de  l'Ordre  de  Saint-François  et  de  la  Compa- 
gnie de  Jésus.  A  Montmédy,  un  tableau  du  X  \' 111=  siècle 
offre  une  variante  :  c'est  un  éclair,  partant  de  la  main 
droite  de  l'Enfant,  qui  va  fracasser  la  tête  du  serpent. 

A  partirdu  XVII"  siècle  se  propagea  l'image  de  Marie, 
ouvrant  les  bras  ou  joignant  les  mains,  debout  sur  le 
monde  et  sur  le  croissant,  et  ayant  sous  ses  pieds  le 
serpent,  auquel  souvent  elle  écrase  la  tête.  Saint  Pierre 
Fourier,  qui  répandit  beaucoup  en  Lorraine  la  dévotion 
à  l'Immaculée  Conception,  fit  frapper,  pour  les  confréries 
placées  sous  ce  vocable,  des  médailles  offrant  une  varian- 
te très  remarquable  :  les  pieds  de  Marie  ne  touchent  pas 
le  serpent,  qui,  beaucoup  plus  bas,  entoure  le  globe  ter- 
restre suivant  son  diamètre  horizontal  :  image  de  la  ma- 
lédiction du  monde,  à  laquelle  échappe  la  Vierge  Marie. 
Il  serait  intéressant  de  rechercher  et  de  classer  chro- 
nologiquement les  variantes  de  la  représentation  du 
serpent  relative  à  la  Vierge. 

Léon  Germ.ain  de  M.aidv. 


^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^ 


^^C  ^^t  ^'^^  ^^^  -^  ^^  '^^  '^^  ^^^^  '^  '^^^  ^^^  '-^^  :^^  WW^^W  ^^^  ^^  ^^^^  ^=vf  ^;9jr  ^^^f  ^^^ 


Italie. 


ffîilan  :  Dccoutrtte  ne  frcaqucs  par  B.  liiiiiii.  — 
Eoinc  :  Vol  D'un  tabifau  ;  le  Conor^a  itttrniational 
Dca  scicncra  ijistoriqiica. —  Gcnhu"  :  lica  pcimutca  mii  = 
ralfa  De  riîût(i=ùc-- Ville.  —  Blorenrr  :  lie  Bortc=fcu 
Bu  HameBi-.Saint  ;  la  JPvimtc  H'HtiUrca  Bel  Caaragno. 

iN  1470,1e  bienheureux  Amadeo,  clie- 
valier   portugais,   fonda   à   Milan  une 
église  et  la  dédia  à  sainte  Marie  délia 
Face,    le  but  de    la  fondation  étant 
de   rétablir  la  paix  entre  les  citoyens  de  la  cité. 
Plus  tard,  Bernardino  Luini  fut  chargé  de  pein- 
dre à  fresque  deux  chapelles  du  sanctuaire. 

L'église  fut  désaffectée  en  1S05  et  convertie,  en 
magasin  d'abord,  puis  en  manège  militaire. 

Les  fresques  de  la  chapelle  de  Saint-Joseph 
furent  détachées  et  transportées  au  musée  Brera, 
d'autres  fragments  furent  ultérieurement  remis 
au  même  musée. 

M.  Corrado  Ricci,  l'éminent  directeur  de  Brera, 
profitant  des  travaux  qui  s'exécutent  au  musée, 
s'occupe  actuellement  de  la  reconstitution  de 
la  chapelle  Saint-Joseph  dans  la  forme  qu'elle 
avait  à  Santa  Maria  délia  Pace. 
L'idée  est  excellente. 

Que  de  peintures  perdent  de  leur  intérêt  pour 
être  déposées  dans  un  musée,  sans  aucun  souci 
des  places  qu'elles  occupaient  dans  l'édifice  qu'el- 
les décoraient  primitivement  ! 

Il  est  évident  que  le  projet  de  M.Ricci  peut 
rarement  être  réalisé,  mais  lorsque  la  chose  est 
possible,  il  faut  y  applaudir. 

L'an  passé,  le  comte  Francesco  Lurani  entre- 
prit d'approprier  l'église  Santa  Maria  délia  Pace 
en  salle  de  concert  pour  l'exécution  des  orato- 
rios de  l'abbé  Perosi,  qui  ont  eu  en  Italie  un  si 
grand  succès. 

Au  cours  des  travau.K,  le  comte  découvrit  les 
fresques  de  la  seconde  chapelle  peinte  par 
Luini  ;  elles  avaient  été,  comme  beaucoup  d'au- 
tres fresques,  badigeonnées  au  lait  de  chaux  ;  la 
composition  montre  V Annonciation  dont  les  figu- 
res sont  plus  petites  que  nature,  et  plus  bas, 
sainte  Catherine  et  saint  Jean-Baptiste  de   gran- 


deur naturelle.  Le  comte  Lurani  a  pris  à  sa  char- 
ge tous  les  frais  de  la  remise  en  lumière  de  ces 
peintures. 

De  pareils  exemples  de  générosité  sont  fré- 
quents en  Italie. 

Voilà  donc  l'œuvre  déjà  si  importante  de  B. 
Luini,  augmentée  encore. 

Le  noinbre  de  peintures  exécutées  par  Luini, 
l'élève  de  Léonard  de  Vinci,  en  Lombardie  et  dans 
le  Tessin,  est  considérable.  On  en  trouve  notam- 
ment à  Milan  dans  les  églises,  à  Brera,  à  l'Am- 
brosienne  ;  dans  les  églises  de  Saronno,  de  Le- 
gnano,  de  Como  et  de  Lugano. 

Dans  cette  dernière  cité,  il  y  a  à  Santa  Maria 
degli  Angeli  les  fresques  bien  connues:  la  Cruci- 
fixion, la  Cène,  la  Madone  avec  l' Enfant  et  saint 
Jean,  mais  il  existe  de  plus,  de  Luini,  un  ou- 
vrage peu  connu  et  négligé  par  les  Guides.  Il  se 
trouve  dans  la  villa  Vedani  et  représente  la  Cru- 
cifixion en  grandeur  naturelle  avec  la  Madone  et 
saint  Jean  aux  côtés  de  la  croix.  La  fresque  était 
dans  un  couvent  voisin,  elle  a  pu  être  transportée 
sans  trop  de  dégâts  dans  le  salon  de  la  villa. 

Je  puis  citer  cette  Crucifixion  comine  un  exem- 
ple des  méprises  commises  parfois  par  les  écri- 
vains les  plus  consciencieux. 

Après  avoir  étudié  cette  fresque,  j'ai,  quelques 
années  après,  lu  dans  une  Revue  d'art  très  impor- 
tante une  description  du  sujet.  L'auteur  de 
l'article  dit  que  le  personnage  à  la  gauche 
du  Crucifié  est  sainte  Véronique  ;  or  ce  person- 
nage est  saint  Jean-Baptiste.  Le  visage  très 
jeune  porte  une  légère  barbe,  ce  qui  ne  laisse 
aucun  doute  sur  l'attribution  ;  il  est  vrai  que 
saint  Jean  tient  à  la  main  une  étoffe  blanche  qui 
ne  s'explique  pas  et  qui  sans  doute  a  donné  lieu 
à  la  méprise. 

Il  est  vraiment  singulier  que  de  Luini  on  ne 
sache  exactement  ni  l'année  de  la  naissance,  ni 
celle  de  la  mort.  On  suppose  qu'il  est  né  vers 
1470,  et  sûrement  il  est  mort  après  i  529,  puisque 
la  Crucifixion  de  Santa  Maria  degli  Angeli  porte 
cette  date. 

Sur  les  motifs  de  son  séjour  à  Lugano  on 
brode  des  histoires. 


5o6 


jRcbuc  lie  r^rt  cbrctien* 


Les  lins  pensent  qu'il  est  venu  à  la  suîte  d'une 
aventure  romanesque,  d'autres  admettent  qu'il  se 
soit  réfugié  dans  le  Tessin  afin  d'échapper  aux 
poursuites  dont  il  était  l'objet  pour  avoir  commis 
im  assassinat. 

L'exquise  douceur  de  ses  compositions,  le 
charme  de  sa  couleur,  le  sentiment  délicat  de  ses 
personnages  ne  dénotent  assurément  pas  un 
caractère  violent  ;  entre  les  deux  hypothèses 
acceptons  celle  qui  est  le  plus  favorable  à  cet 
excellent  artiste  et  mettons  l'autre  sur  le  compte 
d'une  légende. 

ROME:  Vol  d un  tableau. 

L'église  du  couvent  de  Sainte-Sabine,  située 
sur  le  mont  Aventin,  conservait  un  tableau  par 
Sassoferrato  (1605-1685)  représentant  la  Vierge 
au  Rosaire. 

Au  mois  de  juillet  dernier,  le  tableau  a  été  volé 
par  une  bande  de  malfaiteurs  qui  ont  profité  de 
ce  que  l'église  n'est  ouverte  que  le  dimanche. 

Le  tableau  est  connu  ;  il  mesure  2  mètres  15 
sur  I  mètre  10. 

Les  voleurs  trouveront  difficilement  un  acqué- 
reur, d'autant  plus  que  Sassoferrato,  jadis  en 
faveur,  n'est  plus  recherché  aujourd'hui. 

On  annonce  pour  le  printemps  de  1902  la 
réunion  à  Rome  d'un  Congrès  international  des 
sciences  historiques. 

Le  programme  comprend  quinze  sections  : 
Archéologie  classique  —  Numismatique  —  An- 
tiquités orientales  et  classiques  —  Littérature 
antique  —  Sciences  diplomatiques  du  moyen 
âge  et  moderne  —  Littérature  du  moyen  âge  et 
moderne  —  Art  du  moyen  âge  et  moderne  — 
Droit  moderne  —  Sciences  économiques  et 
sociales  —  Philosophie  et  pédagogie  —  Reli- 
gions —  Géographie  et  explorations  —  Sciences 
mathématiques  et  expérimentales  —  Art  musi- 
cal et  dramatique  —  Méthode  historique. 

Faisant  partie  de  la  section  de  l'art  du 
moyen  âge,  je  rendrai  compte  dans  notre  Revue 
des  lectures  relatives  à  l'Art  chrétien. 

La  liste  des  adhérents  compte  déjà  plus  de 
mille  personnes;  on  y  remarque  des  noms  de 
France,  d'Allemagne,  d'I-lspagnc,  d'Autriche, 
d'Alsace,  d'Egypte,  d'Angleterre,  de  Roumanie, 
des  États  Unis  d'Amérique,  de  Grèce,  de  Suisse. 


Naturellement  les  Italiens  de  tous  les  points  du 
territoire  se  sont  fait  inscrire  en  grand   nombie. 

Genève  :  Les  fresques  remises  au  jour. 

Ce  n'est  pas  à  proprement  dire  une  découverte 
qu'on  vientde  faire  à  l' Hôtel-de-ville  de  Genève 
au  mois  d'août  dernier,  car  les  peintures  murales 
rendues  à  la  lumière  étaient  mentionnées  dans 
des  documents  d'archives  et  dans  diverses  publi- 
cations sur  la  ville. 

Mais,  fait  assez  étrange,  personne  à  Genève  ne 
connaissait  leur  existence;  elles  étaient  cachées 
en  grande  partie  par  des  draperies  et  peut-être  y 
en  a-t-il  sous  des  revêtements  de  boiseries. 

La  salle  décorée  est  la  saUe  du  Conseil  d'État: 
elle  servait  jadis  aux  réunions  des  syndics  qui 
avaient  des  attributions  judiciaires;  en  1473,  le 
local  avait  été  l'objet  d'une  transformation. 

Li  peinture  occupe  une  frise  d'environ  i 
mètre  50  de  haut;  elle  représente  une  assemblée 
de  juges  et  divers  personnages. 

Les  juges  sont  au  nombre  de  sept;  dont  un 
président.  Six  juges  ont  les  deux  mains  coupées  ; 
le  septième,  qui  porte  un  sceptre,  n'a  que  la  main 
gauche  coupée. 

Parmi  les  personnages,  on  remarque  Moïse 
tenant  un  cartouche  avec  les  mots  de  l'Exode  : 

«  Tu  ne  prendras  point  de  don,  car  le  don 
aveugle  le  produit  et  renverse  la  parole  du  juste.» 

Les  autres  figures  sont  sensément  les  portraits 
de  Stace,  Salluste,  Cicéron,  Virgile,  Aristote, 
etc.,  etc.,  elles  sont  accompagnées  d'inscriptions 
tirées  des  écrits  des  auteurs.  Quelques  sibylles 
tiennent  des  phylactères  avec  des  passages 
bibliques. 

Le  Conseil  d'Etat  a  nommé  aussitôt  une  Com- 
mission poui  étudier  ces  peintures  et  procéder 
à  leur  conservation. 

En  attendant  le  rapport  de  la  Commission,  on 
peut  dire  que  les  peintures  appartiennent  à  des 
époques  et  à  des  mains  différentes  ;  les  plus  an- 
ciennes paraissent  du  dernier  quart  du  X V'=  siècle. 

On  sait,  par  des  documents  d'archives,  qu'en 
1604, un  italien,  nommé  Cesare  Julio,  a  été  chargé 
de  restaurer  la  décoration;  il  semble  qu'il  ait  fait 
là  une  mauvaise  besogne  et  repeint  à  sa  façon 
plusieurs  figures  ;  peut-être  même  une  partie  de 
la  peinture  est-elle  de  sa  composition. 


Correspondance. 


507 


N'ayant  pas  eu  le  loisir  de  me  rendre  à  Genève, 
je  me  suis  adressé  à  une  personne  compétente 
fixée  dans  la  localité. 

Selon  mon  honorable  correspondant,  il  faut  en 
rabattre  beaucoup  de  ce  qu'ont  dit  les  journaux 
et  de  l'importance  de  la  découverte  dans  l'opi- 
nion du  public. 

D'abord  la  peinture  ne  serait  pas  une  fresque 
véritable,  dite  buon  frcsco,  c'est-à-dire  un  ouvrage 
exécuté  sur  un  enduit  frais  avec  des  couleurs  à 
l'eau,  mais  un  ouvrage  peint  avec  des  couleurs 
préparées  à  l'eau  ou  à  la  colle,  du  genre  dit 
tempera  en  Italie. 

J'ai  eu  souvent  l'occasion,  dans  la  Revue  de 
V Art  chrétien,  As.  marquer  la  différence  entre  le 
buoii  frcsco  et  la  tempera,  et  si  j'ai  insisté,  c'est 
parce  que, dans  les  nettoyages  et  les  restaurations, 
il  faut  avant  tout  se  rendre  compte  du  procédé 
qui  a  été  employé,  autrement  on  risquerait  des 
dégâts. 

Puis  la  décoration  est  loin  d'avoir  les  qualités 
d'art  qu'on  lui  a  attribuées  au  premier  moment; 
il  paraît  même  que  l'exécution  en   est  médiocre. 

Je  le  regrette  pour  Genève;  mais  dans  une 
œuvre  d'art  ce  n'est  pas  seulement  le  travail 
technique  qu'il  faut  juger,  c'est  aussi  l'intention 
qui  a  donné  naissance  à  l'ouvrage.  Ici  l'intention 
est  des  plus  intéressantes  et  constitue  un  docu- 
ment précieux  pour  l'histoire  de  la  cité. 

Florence  :  Le  porte-feu  du  Samedi-Saint. 

Dans  ma  dernière  correspondance,  j'ai  men- 
tionné les  reliquaires  qui  ont  été  exposés  dans 
plusieurs  églises  de  Florence  par  les  soins  de  la 
Société  italienne  de  l'Art  public. 

J'ai  omis  intentionnellement  une  pièce  curieuse 
—  ce  n'est  pas  un  reliquaire  à  la  vérité  —  parce 
que  je  n'avais  pas  alors  de  renseignements  suf- 
fisants ;  ce  n'est  que  depuis  que  j'ai  pu  à  loisir 
étudier  l'objet. 

C'est  le  porte-feu,  il  porto-fuoco,  du  Samedi- 
Saint  à  Florence  ;  il  a  été  montré,  avec  les  reli- 
quaires, au  musée  de  l'Opéra  du  Dôme  ;  d'habi- 
tude il  est  au  presbytère  de  l'église  des  SS.  A- 
postoli,  mais  comme  on  ignore  qu'il  est  là  et  que 
un  seul  jour  par  an,  il  remplit  sa  fonction,  il  est 
fort  peu  connu. 

J'ai  décrit,  en  [896,  dans  la  Revue  de  P Art  chré- 


tien, la  cérémonie  à  la  fois  religieuse  et  patrio- 
tique du  Samedi-Saint,  unique  en  son  genre,  le 
scoppio  del  Carro,  l'explosion  du  Char. 

En  souvenir  des  prouesses  accomplies  par  un 
parti  de  jeunes  Florentins  sous  la  direction  de 
Godefroid  de  Bouillon,  lors  de  la  prise  de  Jéru- 
salem, en  1099  et  d'un  fragment  du  saint  Sépul- 
cre rapporté  à  Florence  par  Pazzino  de  Pazzi, 
la  Commune  ordonna  que  chaque  année,  le  Sa- 
medi-Saint, un  grand  char  serait  amené  devant  la 
cathédrale,  qu'elle  entendrait  la  messe,  et  qu'une 


Porte-feu  en  fer  et  cuivre,  XI V  siècle.  Eglise  des  SS.  Apostoli 
de   Florence    (Pliolographie  .\ltnaki.) 

pièce  d'artifice  en  forme  de  colombe  mettrait  le 
feu  aux  bombardes  dont  le  char  était  pourvu. 

Le  feu  provenait  du  fragment  du  saint  Sé- 
pulcre et  était  porté  à  la  cathédrale  dans  un 
porte-feu. 

Ainsi  fut  fait  et  continué. 

Je  reproduis  le  porte-feu. 

Il  n'est  pas  homogène. 

Il  est  composé  de  trois  parties  distinctes,  réu- 
nies sans  grand  soin,  à  une  époque  que  je  n'ai 
pu  déterminer. 

Le   sujet  principal  est  un  aigle  qui  étreint  un 


5o8 


5&r\)ur  tic  V^vt  fbvcttcu. 


dragon  dans  ses  serres  ;  au-dessus  se  trouve  une 
colombe  et  au-dessous  une  cassolette. 

La  hauteur  de  l'ensemble  est  de  0^50  et  la 
largeur  de  0'"35. 

L'aigle  est  l'emblème  de  la  Parte  Giielfa,  ins- 
titution très  puissante  qui  a  tenu  à  Florence  un 
rôle  politique  important  depuis  1267  jusqu'à  la 
rhute  de  la  République,  au  XYIi^  siècle. 

L'aigle,  le  dragon  et  les  volutes  sont  en  argent 
recouvert  jadis  d'émaux  rouges  et  verts,  couleurs 
du  parti. 

L'emblème  a  le  caractère  des  ouvrages  floren- 
tins du  XIV*^  siècle  ;  il  est  problable  qu'il  sur- 
montait une  bannière  de  la  Parte. 

La  colombe  est  plus  ancienne  et  traitée  plus 
sommairement. 

La  cassolette  est  plus  moderne  ;  elle  est  en 
cuivre  doré   et   aménagée  pour  recevoir  le  feu. 

Tous  les  Samedis-Saints,  le  clergé  des  SS. 
Apostoli  transporte  en  cérémonie  le  porto-fiioco 
à  la  cathédrale  et,  après  que  le  feu  a  été  mis 
à  la  Colombina  du  Carro,  le  réintègre  à  son 
presbytère. 

L'objet  appartenait  à  l'église  San-Biagio, 
paroisse  de  la  Parte  Giielfa  ;  après  un  incendie 
qui,  en  1785,  détruisit  l'église,  il  fut  déposé  aux 
SS.  Apostoli,  qu'on  croit  fondés  par  Charle- 
magne. 

Evidemment  le  porte-feu  ne  peut  pas  être 
présenté  comme  un  type  d'orfèvrerie  florentine 
caractérisée,  puisqu'il  résulte  d'un  assemblage  de 
morceaux  disparates  ;  cependant  il  est  curieux 
en  ce  sens  que  d'un  emblème  politique  on  a 
fait  une  pièce  d'orfèvrerie  religieuse.  | 

j 

La  Trinité  par  Andréa  del  Castagno. 

J'ai  annoncé  qu'en  1S99  on  avait  trouvé  sous 
un  tableau  d'autel  de  l'une  des  chapelles  de  l'é- 
glise de  la   Santissima  Annunziata   une  fresque 
d'Andréa  del  Castagno  (  1390  .'-1457)   représen-    î 
tant  la  Trinité. 

Je  n'ai  pas  dissimulé  alors  le  profond  dégoût 
que  m'mspirait  cette  fresque  réaliste  à  l'excès, 
indigne  de  l'art  chrétien,  mal  dessinée,  mal  con- 
çue, repoussante  en  un  mot. 

Je  puis  croire  que  mon  opinion  a  été  partagée, 
car  la  famille  qui  possède  d'ancienne  date  le 
patronat  de  la  chapelle,  est  en  instance   près  de 


l'autorité  compétente  pour  que  le  tableau  enlevé 
soit  remis   à  .sa  place. 

Les  yeux  des  fidèles  ne  seront  plus,  de  cette 
façon,  ofiensés  par  une  image  indigne  d'une 
enceinte  sacrée. 

Gerspacii. 


I>eintiuc5  murales  Du  XV  sicdc  à  Bcaunc. 


NE  découverte  artistique  d'un  haut 
intérêt  vient  d'être  faite  en  l'église 
Notre-Dame  de  Beaune,  dans  une 
des  chapelles  ajoutées  au  XV<=  siècle 


à  la  nef  du  XII'',  celle  dite  du  Grand  Christ,  la 
seconde  en  entrant  à  gauche. 

Quelques  morceaux  du  badigeon  étant  tom- 
bés, on  a  vu  apparaître  des  traces  d'ancienne 
peinture.  Un  enlèvement  partiel  mit  au  jour  une 
figure,  et  M.  le  chanoine  Héron,  curé-doyen  de 
Beaune,  dont  le  zèle  éclairé  pour  sa  belle  église 
paroissiale  ne  cesse  de  s'affirmer  avec  un  goût 
excellent,  autorisa  un  amateur  soigneux,  M.  Ma- 
thieu, à  entreprendre  la  tâche  difficile  et  délicate 
de  faire  revivre  l'ensemble  depuis  des  siècles 
voilé.  Ce  travail  de  patience  a  été  accompli  en 
perfection  et  l'on  se  trouva  en  présence  non  d'une 
fresque,  il  est  à  peine  nécessaire  de  dire  une  fois 
de  plus  qu'il  n'en  existe  aucune  dans  nos  églises 
bourguignonnes,  mais  d'une  ample  peinture 
murale  du  XV«  siècle. 

Elle  représente  la  Résurrection  de  Lazare  et  le 
choix  du  sujet  s'explique  par  ce  fait  que  jusqu'à 
la  révolution  de  17S9,  Beaune  a  appartenu  au 
diocèse  d'Autun,  dont  la  cathédrale  est  dédiée  à 
saint  Lazare.  Peut-être  même  faut-il  reconnaître 
Autun  dans  cette  ville  que  l'on  voit  au  fond, 
ceinte  de  murs  crénelés  avec  tours  à  faites  aigus, 
derrière  lesquels  se  dressent  de  nombreux  clo- 
chers ';  MM.  lie  la  Société  éduenne  et  de  la  So- 
ciété d'histoire  de  Beaune,  deux  des  sociétés 
érudites  les  plus  distinguées  qui  travaillent  sur  le 
passé  provincial,  nous  diront  certainement  ce  qu'il 
faut  penser  de  mon  hypothèse,  mais  en  soi  elle 
n'a  rien  que  de  très  vi  aisemblable.  En  effet, 
les  peintres  flamands  ont  le  plus  souvent 
donné  à  leurs  scènes  religieuses  le  décor  monu- 
mental   des   villes  oij  ils  habitaient.  Dans  le  ce- 


Corresponliance. 


509 


lèbre  panneau  du  Palais  de  justice  à  Paris,  le 
Christ  en  croix,  on  voit  représenté  à  gauche, 
derrièie  les  figures  de  saint  Jean-Baptiste  et  de 
saint  Louis,  le  Louvre  de  Pliilippe- Auguste  et  de 
Charles  V  avec  la  tour  de  Nesle  au  premier  plan, 
et  l'image  est  si  parfaite  que  VioUet-le-Duc  n'a 
eu  qu'à  la  transcrire  pour  ressusciter  la  résidence- 
forteresse  où  s'abrita  jusqu'à  François  X^''  la 
royauté  nationale. 

Ce  n'est  pas  une  raison  d'ailleurs  pour  faire 
une  œuvre  française,  que  dis-je  ?  parisienne,  d'un 
tableau  si  manifestement  dû  à  une  main  flaman- 
de, et   sur  ce  point  je  ne  puis  partager  l'opinion 
exprimée  par  M.  Camille  Benoît  dans  un  savant 
article  de  la  Gazette  des  Beaux- Arts,  nodu  i  août 
1901.  On  voit  au   Louvre  une  peinture  du  même 
temps,  la  Déposition  de  la  croix,  où  le  fond  repré- 
sente Saint-Germain-des-Prés,  la  Seine,  le  Louvre 
et  la  butte  Montmartre  ;  M.  Camille  Benoît  con- 
sidère aussi  comme  une  œuvre  française  ce  pan- 
neau qui  provient  de  Saint-Denis;  aucun  souvenir 
personnel  ne  me  permet   de  contredire  ou  d'ac- 
cepter une  attribution   que  je   me  borne  à  citer. 
D'une  manière  très  générale,  et  sauf  exceptions, 
comme    pour    Jean    Foucquet,   je    crois    qu'au 
XV'î  siècle  la   peinture  française  est   flamande, 
même  quand  l'artiste  est  un  Français  d'origine  ; 
ce    n'est    guère    que    dans    les   toutes   dernières 
années  du  siècle  que  le  caractère  national  s'affir- 
mera universellement,  de  manière   à   constituer 
une  école  que  l'on  peut  dire  française. 

Pour  en  revenir  à  la  peinture  murale  de  Beaune, 
sur  le  devant,  à  gauche,  la  tête  nimbée  et  vêtu 
d'une  robe  rose  brodée  d'or,  le  Christ  étend  la 
main  et  l'on  devine  qu'il  vient  de  prononcer  la 
parole  de  vie  :  Lazare,  vcni  foias  ;  il  est  entouré 
de  cinq  personnages  dont  l'un,  au  vêtement  de 
drap  d'or  à  ramages  bleus,  joint  les  mains  et  le 
regarde  avec  admiration.  Le  Lazare  est  malheu- 
reusement en  partie  effacé  ;  enveloppé  dans  son 
linceul,  il  vient  de  se  dresser  à  demi  et  se  trouve 
comme  assis  dans  un  sarcophage  en  marbre  de 
couleur  ;  il  a  les  mains  jointes  mais  encore  serrées 
dans  des  bandelettes  que  délie  un  homme  vêtu 
de  bleu.  A  droite,  une  dizaine  de  personnages 
richement  vêtus  contemplent  la  scène  miracu- 
leuse; parmi  eux,  une  femme,  en  robe  de  damas 
jaune  et  la  tête  couverte  d'une  sorte  de  capuchon 


brodé  d'or,  se  cache  le  visage  et  étend  la  main 
comme  pour  éloigner  d'elle  le  spectacle  du  mort  ; 
un  homme,  en  chape  richement  ornée  d'orfrois, 
semble  la  rassurer  en  lui  montrant  que  Lazare 
est  déjà  ressuscité  ;  en  arrière,  d'autres  person- 
nages, les  uns  coiffés  du  bonnet  pointu  des  Juifs, 
les  autres  du  tuiban,  commentent  l'événement 
dont  ils  sont  témoins.  Une  réparation  ancienne- 
ment faite  au  côté  gauche  de  la  muraille  doit 
avoir  supprimé  quelques  figures  secondaires. 

Sur  une  hauteur  de  cinq  à  six  mètres,  le  sujet 
couvre  la  surface  entière  du  mur  de  refend  en 
face  du  grand  Christ  ;  mais  la  décoration  se 
continue  de  chaque  côté  de  la  fenêtre  flam- 
boyante qui  a  reçu  récemment  un  remarquable 
vitrail  en  grisaille  de  W.  Edouard  Didron,  l'his- 
toire de  saint  Flocel.  A  gauche  est  une  sainte 
Marthe  terrassant  le  dragon  et  tenant  dans  ses 
mains  une  palme  et  un  bénitier  ;  à  droite,  sainte 
Marie-Madeleine  porte  un  livre  ouvert  et  le  vase 
à  parfums  qui  est  sa  caractéristique  ;  ces  deux 
figures  sont  fort  belles,  surtout  la  Marie-Made- 
leine, dont  le  vêtement  est  d'une  grande  richesse. 
Enfin  l'arc  de  la  fenêtre  et  les  nervures  de  la 
voûte  sont  couverts  d'ornements  polychromes  ; 
il  est  donc  très  probable  que  les  compartiments 
de  la  voûte  étaient  aussi  peints  ;  c'est  une  recher- 
che à  poursuivre. 

De  nombreuses  peintures  murales  ont  été  dé- 
couvertes en  Bourgogne  au  cours  de  ces  dernières 
années;  abolie  depuis  des  siècles  par  l'invasion  du 
badigeon,  la  polychromie  vivante  où  se  plaisaient 
nos  pères  reparaît  peu  à  peu  au  jour,  le  plus  sou- 
vent à  l'état  de  lambeaux,  mais    combien    noble 
encore  dans  sa  ruine  !  La  Résurrection  de  Lazare 
comptera  parmi  les  œuvres  les  plus  remarquables 
de  cette  famille  ;  l'expression  variée  des  figures, 
la  correction  du  dessin,  la  beauté  des  draperies  et 
des  étoffes,  enfin  la  distribution  savante  et  équi- 
librée des  groupes,  tout  révèle  ici    la  main  d'un 
maître  travaillant  pour  un  homme  considérable 
et  artiste.  Mais,  à  moins  qu'un  document  révéla- 
teur ne  sorte  quelque  jour  d'une  liasse  non  encore 
explorée    des    archives    départementales,    nous 
ignorerons  à  jamais  quel  fut  le  créateur  de  ce  bel 
ensemble.  Tout  est   anonyme,  en  effet,  dans  ces 
chefs-d'œuvre  que  le    moyen  âge   a    prodigués 
aux   discussions   des  critiques    modernes.   Mais 


lO 


3Rrbtic  ïic  l'^lrt  cbrctten. 


nous  savons  du  moins  pour  qui  travailla  le 
maître  de  Beaune;  les  écus  que  l'on  voit  aux  côtés 
de  la  fenêtre,  d'azur  à  trois  clefs  d'or  tnises  en 
pal,  et  la  devise,  Dejtvi  time,  inscrite  sur  des  ban- 
deroles, sont,  en  effet,  la  signature  du  prélat  le 
plus  qualifié  de  la  Bourgogne  au  XV^  siècle,  le 
cardinal  Jean  Rolin,  évéqne  de  Chalon-sur-Saône, 
puisd'Autun,  fils  du  fameux  chancelier  de  Bour- 
gogne, Nicolas  Rolin,  et  de  sa  première  femme 
Marie  Delandes.  Ce  Nicolas  Rolin  fit  une  trop 
grosse  fortune  au  service  du  duc  Philippe  le  Bon  ; 
toutefois  on  se  sent  porté  à  l'indulgence  envers 
celui  à  qui  Beaune  doit  son  merveilleux  Hôtel- 
Dieu  et  le  polyptyque  àwjugcineiit  dernier,  cette 
page  unique  en  France  et  que  l'on  attribue 
aujourd'hui  avec  traite  vraisemblance  à  Roger 
Van  der  Weyden. 

Le  cardinal  Jean  Rolin  était  dignitaire  du 
chapitre  de  l'^insigne»  collégiale  Notre-Dame 
et  pendant  que  son  diocèse  était  ravagé  par  les 
guerres  qui  accablèrent  la  Bourgogne  sous  Char- 
les le  Téméraire,  il  chercha  un  asile  à  Beaune  où 
on  lui  donna  pour  habitation  l'une  des  plus 
belles  maisons  canoniales  et  l'usage  d'une  cha- 
pelle. Par  reconnaissance,  il  fit  des  dons  impor- 
tants en  argent  et  en  œuvres  d'art,  entre  autres 
celui  de  son  portrait,  à  l'église  collégiale  où  il 
avait  même  l'intention  de  préparer  sa  sépulture, 
ce  qui  ne  s'exécuta  pas. 

J'ai  eu  l'occasion  de  raconter  ici  même  ('") 
comment  il  avait  commandé  au  peintre  Pierre 
Spicker  les  cartons,  ou,  pour  employer  le  terme 
du  temps,  \e.s patrons  d'une  tenture  de  tapisse- 
rie dont  le  sujet  était  la  vie  de  la  Vierge.  Elle 
devait  former  une  longue  bande  ou  litre  destinée 
à  être  tendue  aux  jours  de  grande  fête  autour 
du  sanctuaire,  mais  le  projet  ne  fut  pas  exécuté, 
du  moins  de  son  vivant.  J'ai  dit  comment  il  fut 
repris  plus  tard  par  le  do\'en  Hugues  le  Coq  qui 
y  mit  son  nom,  son  portrait,  ses  armes  et  la 
date  de  1500. 

Pour  ce  qui  est  de  Pierre  Spicker,  je  me  borne 
à  rappeler  qu'il  était  un  de  ces  artistes  flamands 
très  nombreux  alors  en  Bourgogne  et  dont  Dijon 
possédait  toute  une  colonie.  Son  père, Guillaume, 
avait  été  peintre-verrier  du  duc  Philippe  le  Bon  ; 

I.  V.  Revue  de  l'Art  cAriUieri,  année  1900,  p.  20.;. 


les  documents  français  fort  abondants  aux  archi- 
ves départementales  écrivent  toujours  le  nom 
comme  les  deux  artistes  le  prononçaient,  Spicre, 
mais  il  n'est  pas  douteux  que  la  forme  flamande 
ne  fût  Spicker.  Si,  comme  il  est  possible,  Pierre 
Spicker  est  l'auteur  des  peintures  murales  qui 
viennent  d'être  découvertes,  il  faut  lui  assigner  un 
rang  distingué  parmi  les  artistes  contemporains; 
à  une  notable  distance  pourtant,  des  tout  à  fait 
grands,  les  Van  Eyck,  Roger  Van  tier  \\'e\-den, 
Hugo  Van  der  Goes  et  Memling. 

La  notice  publiée  ici  même  sur  les  tapisseries 
de  la  collégiale  Notre-Dame  de  Beaune  a  été 
écrite  avant  que  la  série  d'Hugues  le  Coq  eût 
figuré  à  l'Exposition  universelle,  au  Petit  Palais. 
Je  crois  que  pour  l'éclat  exquisement  fané  des 
couleurs  et  pour  la  couleur  tout  court,  la  tenture 
exécutée  pour  Hugues  le  Coq  ne  le  cédait  à 
aucune  des  pièces  exposées.  Et  elle  luttait  dans 
de  bien  mauvaises  conditions,  ayant  été  placée 
beaucoup  trop  haut  et  mal  à  propos  divisée  en 
deux  tronçons. 

Henri  CllABEUF, 

Saint-Seine  r.-\bbaye  (Côte  d'Or), 
août  iqor. 


H'arcbcologic   au  Vatican. 

lE  jour  de  la  Saint-Joachim,  qui  est 
celui  de  sa  fête,  le  Souverain  Pontife 
Il  a  coutume  de  tenir  ce  que  l'on  appel- 
l^fe"^^^  le  un  circolo.  Il  réiniit  dans  sa  biblio- 
thèque privée  les  cardinaux,  archevêques  et 
évêques,  les  différents  collèges  de  la  prélature, 
les  camériers  ecclésiastiques  et  laïques,  et  là,  pen- 
dant près  d'une  heure,  cause  familièrement  avec 
les  cardinaux,  interpelle  des  prélats,  parfois 
même  de  simples  missionnaires,  passant  avec  eux 
en  revue  différents  événements  de  l'année. 

Jadis  le  .Souverain  Pontife  tenait  une  réunion 
analogue  pour  le  jour  de  son  élection  au  souve- 
rain pontificat,  mais,  l'âge  commençant  à  peser, 
il  a  supprimé,  il  y  a  quelques  années,  cette  réu- 
nion pour  ne  laisser  que  celle  du  jour  de  sa 
fête. 

A  priori,  l'Art  chrétien  et  sa  docte  Revue  n'au- 
raient rien  à  faire  dans  le  récit  de  ces  réunions. 


Correspondance. 


511 


On  y  a  souvent  parlé  d'art,  il  est  vrai,  et  je  me  \ 
souviens  qu'un  jour  le  Pape  avait  fait  porter  dans 
la  salle  de  la  réunion  une  magnifique  tapisserie 
des  Gobelins,  oubliée  et  perdue  dans  les  magasins 
du  Vatican,  et  qui  représentait  le  cardinal  de 
Fleur)-.  A  cette  occasion, Léon  XIII  fit  distribuer 
à  tous  les  prélats  assemblés  une  belle  monogra- 
phie, due  à  la  plume  de  Mgr  Davide  Farabulini: 
Uarte  degli  arazzi  e  la  nuova  G  aller  ia  dei  Gobc- 
lini  al  Vaticano,  Rome,  1884.  Mais  de  pareils 
événements  sont  une  exception  à  la  règle  ordi- 
naire, et  l'art  n'entre  dans  ces  réunions  que  d'une 
façon  tout  accessoire. 

Le  circula  tenu  dimanche  dernier,  18  août, 
avait  une  autre  portée.  L'archéologie  chrétienne, 
l'art  chrétien  en  ont  fait  les  frais,  et  raconter  ce 
qui  s'y  est  dit,  ce  qu'on  y  a  vu  ne  peut  qu'intéres- 
ser les  lecteurs  de  l'Art  chrétien.  Certes,  ce  ne 
seront  pas  pour  eux  des  choses  nouvelles  ;  elles 
ne  seront  pas  même  dites  d'une  façon  neuve,  ce 
qui  serait  encore  une  ressource,  mais  le  fait  du 
Souverain  Pontife  Léon  XIII,  prenant  quelques 
moments  sur  ses  graves  préoccupations  pour 
venir  voir  des  projections  des  catacombes  et 
écouter  les  explications  des  savants  qui  les  fai- 
saient, n'est  point  un  spectacle  banal. 

Il  avait,  d'ailleurs,  au  Vatican  une  signification 
toute  spéciale,  et  qui  aidera  à  faire  comprendre 
l'importance  réelle  de  cette  séance. 

Motifs  de  cette  séance. 

Il  y  a  quelques  mois,  les  journaux  libéraux 
menèrent  à  grand  bruit  une  campagne  contre  la 
Commission  d'archéologie  sacrée  qui  a  la  charge, 
le  soin  et  l'entretien  des  catacombes.  Ils  deman- 
daient instamment  au  gouvernement  d'enlever 
au  Pape,  qui  l'exerçait  par  cette  Commission,  la 
surveillance  de  ces  cimetières  et  de  l'assumer 
directement. 

Pour  justifier  cetle  attitude,  ces  journaux  ex- 
primaient des  craintes  de  périls  futurs  et  se  plai- 
gnaient de  l'insuffisance  du  service  actuel. 

Tout  d'abord,  il  y  avait  l'intérêt  sacro-saint  de 
la  patrie.  On  ne  voit  pas  de  prime  abord  le  rap- 
port étroit  qui  pourrait  exister  entre  les  cata- 
combes et  la  sauvegarde  de  Rome,  mais  en  y 
réfléchissant  bien,  on  s'aperçoit  que  les  cimetières 
romains  éparpillent  en  tout  sens  leurs  900  et  plus 
kilomètres  de  galeries  sous  la  campagne  romaine. 


Or,  celle-ci  a,  depuis  une  vingtaine  d'années,  été 
ornée  d'une  grande  quantité  de  forts  destinés  à 
protéger  la  ville  en  cas  d'invasion (')•  Ces  galeries 
menaçaient  l'existence  des  forts  eux-mêmes,  car 
par  elles  l'ennemi  pouvait  s'approcher  sans  que 
rien  trahît  sa  présence,  et  faire  sauter  l'ouvrage 
au  moment  où  l'on  ne  s'y  attendrait  pas. 

L'objection  était  plus  spécieuse  que  solide. 
D'abord  les  galeries  des  catacombes  ont  leurs 
ouvertures  près  des  murs  de  la  ville  et  pour  que 
l'ennemi  pût  les  utiliser,  il  faudrait  qu'il  eût  déjà 
dépassé  la  ligne  des  forts.  Mais  alors  les  forts 
étaient  pris.  De  plus,  une  carte  publiée  par  le 
Nuovo  Bollettino  di archeologia  indiquait  le  centre 
de  chaque  catacombe  en  relation  avec  les  forts 
les  plus  voisins,  et  on  voyait  aisément  la  grande 
distance  qui  existe  entre  les  uns  et  les  autres. 
Le  génie  militaire,  d'ailleurs  n'avait  point  cons- 
truit ses  ouvrages  à  l'aveugle  ;  il  s'était  parfaite- 
ment rendu  compte  de  la  proximité  plus  ou 
moins  grande  des  galeries  souterraines,  en  avait 
tous  les  plans,  et  il  a  placé  ses  fortsou  ses  batte- 
ries assez  à  l'écart  pour  qu'elles  n'eussent  rien  à 
redouter  de  ce  voisinage.  Avec  la  susceptibilité 
italienne,  si  une  ombre  seulement  de  danger 
avait  existé,  il  y  a  longtemps  que  le  ministre  de 
la  guerre  aurait  demandé  aux  Chambres,  qui  se 
seraient  empressées  de  l'accorder,  ce  que  j'ap- 
pellerais volontiers  la  militarisation  des  cata- 
combes. 

Le  premier  argument  n'eut  pas  grand  succès, 
aussi  on  en  entama  vite  un  second.  On  plaignait 
le  sort  de  la  pauvre  Commission  d'archéologie 
sacrée  qui  n'avait  pas  d'argent  pour  faire  les 
fouilles  les  plus  urgentes,  manquait  de  l'autorité 
nécessaire  pour  effectuer  les  expropriations  in- 
dispensables, et  disposait  d'un  personnel  tout  à 
fait  insuffisant  pour  la  visite  des  catacombes. 
C'est  pour  ce  motif  que  les  catacombes  étaient  si 
peu  connues,  si  peu  visitées,  tandis  que  si  elles 
tombaient  dans  les  mains  de  l'Etat,  on  verrait 
immédiatement  les  heureux  effets  de  ce  passage. 
Les  gardiens  seraient  plus  nombreux,  les  cime- 
tières plus  accessibles  recevraient  plus  de  visi- 
teurs, et  l'archéologie    chrétienne    y    gagnerait. 


i.Ces  forts  sont  au  nombre  de  quinze,  el  tracent  un  grand  cercle 
autour  de  Rome.  Tous  les  cimetières,  actuellement  fouillés  (ils  sont 
34),  se  trouvent  à  \ intérieur  de  cette  enceinte,  à  l'exception  d'un, 
celui  de  Ste-.\gathe,  situé  au-del,'i  du  fort  de  la  voie  triomphale. 


REVUE    UE    l'art   CHRÉ'I  IEN. 
I9OT.    —  6""^    LIVRAISON. 


512 


î^rliur  lir  T^vt  cbvétim. 


Le  gouvernement,  en  effet,  armé  comme  il  est  de 
la  loi  d'expropriation,  s'en  servirait  pour  mettre 
à  la  raison  les  propriétaires  qui  ne  veulent  point 
permettre  que  l'on  bouleverse  leur  sous-sol. 

Ici  la  réponse  était  plus  longue,  et  partant 
moins  facilement  compréhensible.  Il  fallait  mon- 
trer tout  ce  qu'avait  fait,  depuis  sa  fondation,  la 
Commission  d'archéologie  sacrée,  et  insister  sur- 
tout sur  ce  qu'elle  avait  fait  depuis  1S70,  époque 
où  l'invasion  italienne  lui  enlevait  forcément  les 
ressources  qu'elle  tenait  du  gouvernement  pon- 
tifical. Il  faudrait  pour  répondre  prendre  toute  la 
collection  du  Bollettino  di arcJieologia  du  regretté 
Commandeur  de  Rossi,  lire  les  comptes  rendus 
des  Conférences  d'archéologie  où  l'on  fait  con- 
naître les  fouilles  des  catacombes  et  les  résul- 
tats obtenus.  Non  seulement  ce  sont  des  cryptes 
historiques  retrouvées  et  dégagées,  comme  celle 
des  saints  Pierre  et  MarcelJin,  des  basiliques 
anciennes  qui  renaissent  en  quelque  sorte  de  leurs 
ruines,  comme  celle  de  Sainte-Pétroniile  sur  lavia 
Ardeatina,  mais  des  catacombes  entières  ouvertes 
au  public,  comme  celle  de  St-Nicomède  où  l'on 
n'osait  plus  s'aventurer  de  crainte  d'y  rester 
enseveli. 

La  Commission  d'archéologie  a  fait  plus  que 
n'aurait  fait  le  gouvernement  lui-même.  On  n'a 
qu'à  voir  à  quel  point  celui-ci  laisse  dépérir  les 
monuments  qui  sont  à  fleur  de  sol  pour  com- 
prendre avec  quelle  indifférence  il  traiterait  ceux 
que  ni  lui,  ni  le  gros  public  ne  voient  pas.  Et 
puis  l'argent  n'a  jamais  manqué  à  la  Commission 
d'archéologie,  elle  n'a  jamais  en  vain  frappé  à 
la  porte  du  Souverain  Pontife.  Le  Pape  lui  a  tou- 
jours largement  donné,  non  seulement  pour  con- 
server ce  qui  était  découvert,  mais  pour  accroître 
ces  découvertes,  et  ajouter  de  nouveaux  anneaux 
à  cette  longue  chaîne  de  nécropoles  souterraines 
où  dorment  les  chrétiens  des  premiers  siècles,  et 
où  ont  été  ensevelis  nos  plus  illustres  martyrs. 

Quelques  journalistes,  pour  ne  pas  verser  dans 
l'ornière  commune,  eurent  l'idée  de  mettre  en 
avant  un  argument  tout  différent  et  qui  battait 
en  brèche  celui  que  l'on  vient  de  développer.  On 
s'était  plaint  de  la  pauvreté  de  la  Commission 
d'archéologie  sacrée  ;  maintenant  on  la  trouvait 
trop  riche,  et  on  demandait  au  gouvernement  de 
ne  pas  laisser  cette  source  de  gain  national  aller 
à  une  institution  pontificale,    mais   de  rattacher 


les  catacombes  aux  musées,  d'y  mettre  des  tour- 
niquets et  de  percevoir  les  entrées.  T/argument 
visait,  d'ailleurs,  exclusivement  une  catacombe  : 
celle  de  Saint-Callixte,  qui,  il  y  a  une  quinzaine 
d'années,  avait  été  en  quelque  sorte  comme  im- 
posée par  le  Pape  aux  Trappistes.  Le  Pape  leur 
avait  donné  la  jouissance  de  28  hectares  de  ter- 
rains avec  l'obligation  de  bâtir  un  monastère  et 
de  se  charger  de  l'entretien  de  la  catacombe  qui 
dépérissait  par  manque  de  soins. 

Un  trappiste  ne  raisonne  pas, il  obéit;  c'est  ce 
que  fit  dom  Sébastien  Wyart,  actuellement  abbé 
général.  Il  s'installa  à  ce  que  l'on  appelle  aujour- 
d'hui Notre-Dame  des  Catacombes,  fonda  avec 
l'argent  étianger  un  monastère,  restaura  le  cime- 
tière, y  fit  des  entrées  dignes  de  cette  sainte 
nécropole,  releva  de  ses  ruines  la  basilique 
dite  de  Saint-Sixte  qui  date  du  IV°  siècle,  et 
éclaira  les  galeries  souterraines  à  l'électricité.  Le 
résultat  de  toutes  ces  mesures  fut  que  les  fidèles 
accoururent  de  jour  en  jour  plus  nomhreu.x  et 
que  la  modique  ta.xe  de  un  franc  par  visiteur  (il  y 
avait  cependant  de  bien  nombreuses  exceptions) 
devint  rémunératrice.  Mais  pour  arriver  à  ce  ré- 
sultat, les  Trappistes  avaient  perdu  quinze  d'entre 
eux  pendant  les  premières  années  ;  ils  avaient 
dépensé  une  quarantaine  de  milliers  de  francs 
dans  cette  seule  catacombe,  relevé  une  basilique, 
en  reconstruisent  maintenant  une  autre;  aussi 
se  passera-t-il  encore  de  longues  années  avant 
qu'ils  puissent  rentrer  dans  leurs  débours. 

La  campagne  cessa,  mais  elle  reprit  quelques 
mois  plus  tard, d'une  façon  moins  violente  dans  la 
forme,  quoique  plus  traîtresse  dans  le  fond.  La 
Commission  d'archéologie  se  crut  alors  obligée 
de  se  défendre  et  son  secrétaire,  Mgr  Crostarosa, 
fit  publier  une  lettre  où  il  mettait  la  question 
sous  son  véritable  point  de  vue.  Après  avoir 
relevé  les  erreurs  de  détail,  les  vices  de  logique  de 
l'attaque,  il  concluait  par  ce  dilemme:  Les  cime- 
tières souterrains  de  Rome  sont,  ou  des  reli- 
quaires, puisqu'ils  contiennent  des  corps  de  mar- 
tj'rs,  ou  des  églises,  puisqu'ils  ont  servi  et  servent 
encore  dans  un  grand  nombre  de  circonstances 
à  l'assemblée  des  fidèles,  et  qu'au  jour  de  fête 
des  martyrs  on  y  célèbre  solennellement  les 
saints  mystères.  Dans  l'une  ou  l'autre  hypothèse, 
ils  relèvent  exclusivement  du  Souverain  Pontife, 
et  toute  usurpation  sur  ce  point  serait  un   sacri- 


CorrespoiiDance. 


513 


lègeja  main  mise  du  pouvoir  civil  sur  un  lieu  reli- 
gieux protégé  par  les  lois  de  l'Église. 

Cet  argument  tranchait  définitivement  toutes 
les  difficultés,  et  en  effet  la  controverse  s'apaisa 
aussitôt.  Mais  le  Souverain  Pontife  pensa  qu'il 
fallait,  sinon  donner  une  autre  réponse,  au  moins 
la  donner  d'une  autre  manière. M.  Marucchi  et  le 
baron  Kanzler  avaient  fait,  il  y  a  quelques  mois, 
des  conférences  très  applaudies  et  très  courues, 
où  on  avait  admiré,  projetées  en  grandeur  natu- 
relle sur  un  écran,  les  plus  belles  cryptes  des 
catacombes,  l'état  des  travaux,  les  fresques,  les 
monuments  de  ces  cimetières  ;  le  Souverain 
Pontife  voulut  que  le  spectacle  se  renouvelât  au 
Vatican,  sous  ses  yeux,  et  avec  l'intervention  de 
toute  la  cour  pontificale.  C'était  non  seulem.ent 
montrer  combien  il  avait  à  cœur  ces  vénérables 
monuments  de  la  foi  de  nos  pères,  mais  encore 
faire  en  quelque  sorte  toucher  du  doigt  l'œuvre 
de  la  Commission  d'archéologie  sacrée. 

Telle  est,  en  quelques  mots,  la  genèse  de  cette 
conférence,  la  première  qui  se  tenait  au  Vatican. 
Voyons  maintenant  comment  les  organisateurs 
ont  été  à  la  hauteur  de  leur  tâche. 

Il  fallait,  pour  que  les  projections  suffisamment 
grandes  réussissent,  disposer  d'une  salle  aux 
vastes  proportions.  La  salle  dite  du  Consistoire 
secret  fut  choisie.  A  une  distance  convenable,  on 
dressa  un  grand  écran  blanc  entouré  d'une  bande 
de  velours  rouge  relevée  par  un  galon  d'or. 
Devant  était  le  trône  du  Souverain  Pontife,  à 
droite  et  à  gauche  des  fauteuils  pour  les  £""=■=*  car- 
dinaux, et  derrière  se  tenaient  les  archevêques  et 
évéques,  les  différents  prélats  de  la  cour  pontifi-  , 
cale  et  les  laïques  invités  à  assister  à  la  confé-  1 
rence.  Celle-ci  pouvait  aisément  se  diviser  en  trois 
parties  distinctes,  dont  les  deux  premières  s'en- 
tremêlaient, et  la  troisième  était  complètement 
séparée. 

Les  catacombes.  j 

On  avait  couvert  par  d'épais  rideaux  toutes  les 
fenêtres, et  des  lampes  électriques  laissaient  tom- 
ber des  plinthes  une  lumière  que  l'ampleur  de  la 
salle  rendait  fort  douce.  A  un  signal  donné  par 
le  Souverain  Pontife  les  lampes  s'éteignaient 
brusquement,  et  sur  l'écran  apparaissait  en  gran- 
deur naturelle  la  capella  greca  du  cimetière  de 
Priscille,  puis  le  baptistère  où,   suivant  une    tra- 


dition dont  M.  Marucchi  a  su  retrouver  les  tra- 
ces, l'apôtre  saint  Pierre  avait  administré  le 
sacrement  du  baptême.  Je  ne  reviens  pas  sur 
l'importance  de  cette  découverte,  qui  paraît  au- 
jourd'hui bien  solidement  établie.  Elle  n  enlève 
rien  d'ailleurs  à  la  tradition,  dont  il  existe  aussi 
des  preuves  bien  claires,  qui  veulent  que  saint 
Pierre  ait  baptisé  au  cimetière  Ostrien.  Il  est 
évident  que  l'apôtre  ne  réunissait  pas  toujours 
les  fidèles  dans  le  même  endroit,  et  que,  soit 
pour  déjouer  les  soupçons,  soit  pour  moins  in- 
commoder les  chrétiens,  il  se  rendait  au  lieu  le 
plus  voisin  et  y  célébrait  les  saints  mystères. 

On  ne  me  demandera  point  la  longue  liste  de 
tous  les  tableaux  qui  ont  défilé  sous  les  yeux  des 
assistants,  elle  n'apprendrait  pas  grand'chose.  Il 
suffira  d'indiquer  les  cimetières  dont  on  a  pu  se 
rendre  compte,  et  de  signaler  au  passage  quel- 
ques-unes des  projections  les  plus  intéressantes. 

Tour  à  tour  ont  défilé  sous  les  yeux  du  Sou- 
verain Pontife  des  parties  des  cimetières  de  Pris- 
cille, Ostrien,  de  Nicomède,de  St-Hippolyte,  des 
Saints-Pierre  et  Marcellin.de  Prétextat.de  Saint- 
Callixte  et  de  Domitille.  La  découverte  de  la 
crypte  historique  des  Saints-Pierre  et  Marcellin 
a  donné  lieu  à  d'intéressantes  projections,  qui  ont 
montré  les  différentes  phases  de  la  découverte  et 
de  la  restauration.  De  même,  on  a  pu  se  rendre 
compte  pour  la  basilique  de  Saint-Sixte  d'un 
passé  qui  heureusement  n'existe  plus.  On  vit  sur 
l'écran  l'état  de  ces  ruines  alors  qu'elles  étaient 
complètement  abandonnées.  Il  manqua  cepen- 
dant un  autre  tableau  faisant  voir  la  basilique 
complètement  restaurée  par  les  soins  des  Pères 
Trappistes,  qui  ont  dépensé  à  ce  travail  une  di- 
zaine de  milliers  de  francs.  Un  autel  de  marbre, 
tourné  vers  le  peuple,  y  est  dressé,  une  transenna 
sépare  le  clergé  des  fidèles,  les  absides  ont  été 
continuées  et  recouvertes,  et  un  toit  dit  basilical 
protège  contre  les  intempéries  de  l'air.  Les  pa- 
rois latérales  en  dehors  du  sanctuaire  ont  été 
consacrées  aux  souvenirs  chrétiens  de  la  cata- 
combe  ;  on  y  a  méthodiquement  réuni  les  diver- 
ses inscriptions  dont  on  n'avait  pas  retrouvé  la 
place  primitive,  et  un  buste  du  Commandeur  de 
Rossi  rappelle  celui  que  l'on  a  appelé  à  juste 
titre  le  Christophe  Colomb  des  catacombes. 
Il  est  à  regretter  que  l'on  n'ait   pas   adressé  un 


514 


ÎRcbur  tic  V^xt  fbvcttcu. 


mot  d'éloge  aux  humbles  religieux,  auxquels 
la  catacombe  de  Callixte  doit  tant,  et  qui,  s'ils 
n'ont  pas  eu  le  mérite  de  la  découvrir,  ont  celui 
bien  réel  de  la  conserver  et  de  la  restaurer, 

Parmi  les  intéressantes  projections  qui  ont 
passé  sous  les  yeux,  il  faut  encore  citer  celle  de  la 
basilique  de  Sainte-Pétronille  à  la  via  Ardeatina. 
On  voyait  l'état  des  premières  fouilles,  puis  les 
restaurations  successives  qui  rendaient  à  la  basi- 
lique son  ancien  aspect,  et,  enfin,  une  dernière 
photographie  montrait  cet  édifice,  où  saint  Gré- 
goire a  prononcé  une  de  ses  plus  belles  homélies 
sur  les  saints  Nérée  et  Achillée,  orné  de  verdure 
et  de  festons  pour  le  grand  office  pontifical  qu'y 
célébra,  il  y  a  quelques  mois,  le  cardinal  Satolli. 

Le  costume  des  premiers  chrétiens. 

La  succession  des  tableaux  reproduisant  les 
plus  belles  fresques  des  catacombes  pouvait  faci- 
lement engendrer  l'uniformité,  et  l'uniformité 
faire  naître  l'ennui.  Ce  pas  est  ordinairement 
vite  franchi.  On  a  habilement  évité  cet  écueil 
en  entremêlant  les  projections  des  catacombes 
d'antres  tableaux  où  ces  galeries  souterraines, 
ces  cryptes  étaient  le  théâtre  d'une  scène  chré- 
tienne traitée  comme  elle  avait  dû  se  développer 
dans  les  temps  anciens. 

Le  baron  Rodolphe  Kanzler  a  fait  des  études 
très  importantes  et  très  sérieuses  sur  l'habille- 
ment des  premiers  chrétiens  et  les  vêtements 
liturgiques  à  cette  époque. On  sait  que  les  apôtres, 
pour  célébrer  le  saint  sacrifice,  prenaient  par 
respect  pour  Notre-Seigneur,  le  costume  des 
classes  aisées,  mais  parmi  les  pièces  de  ce  vête- 
ment il  en  est  une  offrant  une  importance  spé- 
ciale: le  pallium.  Soit  qu'il  fût  dans  sa  forme 
primitive,  le  pallinm  philosophique  dont  sont 
revêtus  les  portraits  des  premiers  papes,  soit  qu'il 
ait  sa  seconde  forme,  la  bande  de  laine  blanche 
s'enroulant  autour  du  cou  et  retombant  librement 
des  deux  côtés,  on  peut  dire  que  cet  ornement 
était  le  seul  qui  fût,  à  cette  époque  reculée, 
employé  dans  les  cérémonies  religieuses.  Le  baron 
Kanzler,  pour  rendre  plus  tangible  le  fruit  de 
ses  travaux,  fit  d'abord  des  mannequins  qu'il  re- 
couvrit d'étoffes  drapées  comme  les  portaient  les 
anciens.  C'est  la  toge  blanche  agrémentée  des 
bandes  de  pourpre  qui  constitue  encore  aujour- 
d'hui la  dalmatique.  Les  peintures  des  cata- 
combes permettaient  d'en  retrouver  avec  certi- 
tude   la  forme  et  la  couleur.   Puis,  il  fitmieux  ; 


il  habilla  ainsi  quelques  personnes,  hommes,  fem- 
mes et  enfants,  les  plaça  à  certains  endroits  des 
catacombes  dans  l'attitude  que  nous  représentent 
les  fresques  qui  s'y  trouvent  et  en  prit  des  pho- 
tographies. Ces  photographies  à  personnages  ont 
passé  sous  les  yeux  du  Souverain  Pontife  et  de 
sa  cour  et  reproduisaient  les  plus  intéressantes 
scènes  des  premiers  temps  du  christianisme. 

On  y  voyait,  par  exemple,  la  célébration,  dans 
une  crypte  des  catacombes,  du  saint  sacrifice 
par  l'évêque  assisté  de  son  diacre.  L'évêque  a 
autour  du  cou  le  pallium,  il  est  debout  devant 
un  petit  autel  carré,  a  devant  lui  le  calice  et  le 
pain  ;  l'assistance,  dans  les  costumes  de  l'époque, 
est  groupée  sur  les  côtés,  soit  debout,  soit  assise 
sur  les  bancs  de  pierre  qui  s'y  trouvent  encore. 
De  même,  on  assistait  à  l'enseignement  de  la  foi 
chrétienne  donné  par  l'évêque  assis  sur  sa  chaire 
taillée  dans  le  roc,  et,  reprenant  une  description 
de  Fabiola,  le  baron  Kanzler  nous  faisait  voir  la 
prise  de  voile  d'une  vierge  chrétienne,  et  ainsi 
de  suite. 

Mais  à  côté  de  ces  tableaux  que  j'appellerais 
liturgiques,  il  y  en  avait  d'autres  qui  remuaient 
plus  profondément  le  cœur  humain.  On  voyait, 
par  exemple,  une  jeune  veuve  guidée  par  un 
fflssor  à  la  recherche  du  tombeau  de  son  mari. 
Un  autre  tableau  nous  montrait  une  jeune  femme 
répandant  des  fleurs  et  des  palmes  sur  la  tombe 
à  peine  fermée  de  celui  qui  fut  son  soutien  dans 
la  vie  et  avait  confessé  la  foi  qu'elle  partageait 
avec  lui.  Un  peu  plus  loin,  c'est  une  mère  faisant 
baiser  à  son  jeune  enfant  le  marbre  glacé,  marqué 
d'une  palme,  derrière  lequel  repose  en  paix 
l'époux  et  le  père  martyr. 

Ces  différents  tableaux  étaient  étonnants  de 
vérité  archéologique,  et  n'eût  été  l'absence  de 
couleurs,  on  aurait  cru  vraiment  assister  à  une 
scène  antique.  Ils  ont  dû  demander  beaucoup 
de  travail  et  d'art  [lour  les  conduire  à  bonne  fin, 
car  il  fallait  non  seulement  se  préoccuper  du 
groupement  des  personnages  dans  des  endroits 
où  l'espace  est  très  petit,  mais  penser  au  déve- 
loppement des  premiers  plans  qui  devaient  être 
aussi  nets  que  les  derniers,  et  bien  faire  attention 
à  l'éclairage,  ce  qiu'  était  encore  une  grosse  diffi- 
culté. Tous  ces  différents  obstacles  ont  été  si 
habilement  vaincus,  qu'il  fallait  l'œil  d'un  pho- 
tographe pour  les  sou[)Ç()nner. 

Mais  le  baron  Kanzler  a  voulu  sortir  des  cata- 
combes  et   nous  a  donné  (luelqucs  tableaux  en 


CorresponDance. 


515 


pleine  lumière.  Cette  fois  il  s'est  inspiré  du  Qiio 
vadis  de  Sinkiewicz,  et  en  a  tiré  des  scènes  en 
couleur  admirablement  réussies.  Les  personnages 
étaient  si  habilement  groupés,  la  couleur,  soit 
des  vêtements,  soit  du  milieu  où  se  développait 
la  scène,  était  si  bien  reproduite,  que  cette  resti- 
tution était  un  vrai  plaisir  pour  les  yeux.  On 
admirait  la  matrone  romaine  Lucine  enseignant, 
sous  les  colonnes  de  l'atrium,  la  foi  chrétienne  à 
son  fils  Prétextât,  puis  Lygie  traçant  sur  le  sable 
du  jardin  le  poisson  symbolique,  etc.  Ces  tableaux 
passaient  trop  vite  au  gré  des  spectateurs  et  on 
peut  dire  que  ces  reconstitutions  du  baron 
Kanzler  ont  été  le  clou  de  la  séance. 

La  restauration  de  Sainte-Cécile. 

On  sait  que  le  cardinal  Rampolia  a  voulu 
faire  fouiller  le  sol  sur  lequel  se  trouve  l'église 
de  Sainte-Cécile.  Cette  basilique  est  celle  du 
pape  S.  Pascal  L''  (S17-S24),  qui  par  conséquent 
avait  dû  enfouir  ou  détruire  l'église  primitive. 
Or  celle-ci,  d'après  les  actes  de  la  sainte,  devait 
être  sa  propre  maison,  puisqu'il  est  dit  qu'elle 
donna  sa  maison  pour  qu'on  en  fit  une  église. 
Il  y  avait  donc  un  grand  intérêt  à  vérifier 
cette  donnée  des  actes,  et  si  les  fouilles  réus- 
sissaient selon  les  désirs  du  cardinal,  elles 
devaient  remettre  au  jour  la  partie  de  la  maison 
de  la  sainte,  la  basilique  domestique,  qui  fut 
changée  en  église  après  sa  mort  et  servit  au 
culte  jusqu'au  IX^  siècle. 

Mgr  Crostarosa  fut  chargé  de  faire  les  sondages 
préalables,  et  ceux-ci  indiquèrent  comment  de- 
vait être  fouillé  le  sous-sol.  Sans  entrer  dans  les 
détails,  il  suffira  de  rappeler  que  l'on  retrouva 
toute  la  basilique  domestique  de  la  Jomus  Ccciliœ. 
Son  axe  était  à  trois  mètres  de  celui  de  la  basi- 
lique actuelle,  sa  longueur  était  la  même,  et 
comme  celle-ci,  elle  avait  trois  nefs.  Le  mode  de 
construction  la  faisait  remonter  à  l'éjioque  répu- 
blicaine. Sa  hauteur  toutefois  était  peu  considé- 
rable, car  les  piliers  (en  briques  et  non  en  marbre) 
n'avaient  que  2,60.  A  une  époque  postérieure,  le 
pavé  avait  été  relevé  de  0,80  cent,  pour  le 
mettre  à  l'abri  des  inondations  du  Tibre,  et  c'est 
pour  la  même  raison  que  plus  tard  le  pape 
S.  Pascal  I*^"^  l'avait  encore  surélevé  en  déplaçant 
son  a.xe,  pour  en  faire  la  basilique  actuelle. 

Or,  cette  église  inférieure  va  être  rendue  au 
culte,  grâce  aux  magnifiques  travaux  qu'y  a  fait 


exécuter  le  cardinal  Rampolia,  en  s'înspirant  de 
la  forme  qu'avaient  les  églises  à  Rome  aux  Vni<= 
et  IX«  siècles.  Tour  à  tour  ont  passé  devant  les 
spectateurs  différentes  vues  panoramiques  des 
restaurations  en  cours  d'exécution  :  l'église  avec 
ses  trois  nefs,  l'abside  avec  ses  fenêtres  en  marbre 
qui,  donnant  sur  le  corps  de  la  sainte,  permet- 
taient d'en  apercevoir  le  tombeau,  les  stucs  dont 
cette  abside  sera  décorée,  etc.  Ces  projections 
avaient  été  voulues  par  le  Souverain  Pontife,  qui 
s'intéresse  grandement  aux  travaux  de  son  secré- 
taire d'État,  et  voulait  que  tous  pussent  s'en 
rendre  compte  avant  que  le  public  soit  admis  à 
pénétrer  dans  la  crypte  ('). 

C'est  par  ces  projections  que  prit  fin  la  séance 
d'archéologie  donnée  au  Vatican.  On  doit  dire 
qu'elle  avait  parfaitement  atteint  le  but  que  l'on 
se  proposait,  et  tout  le  monde,  en  sortant,  était 
convaincu  de  l'énorme  labeur  auquel  s'était  livrée 
depuis  trente  ans  la  Commission  d'archéologie 
sacrée,  et  de  l'immense  résultat  qu'elle  avait 
obtenu.  Aussi  le  Souverain  Pontife  a  tenu  à  féli- 
citer publiquement  les  membres  de  cette  Com- 
mission du  zèle  qu'ils  avaient  apporté  à  remplir 
l'importante  mission  qu'il  leur  avait  confiée  ;  il 
les  a  encouragés  à  déployer  la  même  activité, 
les  assurant  qu'ils  ne  feront  jamais  appel  en  vain 
à  sa  munificence  quand  il  s'agira  des  cimetières 
et  de  leur  restauration.  Cette  année,  par  exemple, 
la  Commission  d'archéologie  sacrée  a  pu  racheter 
un  lot  important  d'inscriptions  qui  avaient  appar- 
tenu à  la  catacombe  de  Domitille,  et  avaient  été 
très  imparfaitement  copiées.  Ayant  eu  la  bonne 
fortune  de  les  retrouver,  elle  en  a  fait  l'acqiu'si- 
tion  et  les  a  remises  au  lieu  même  d'où  elles 
avaient  été  enlevées. 

Cette  séance  au  Vatican  a  été  un  événement 
pour  l'archéologie  romaine  ;  elle  est  le  digne 
comi)lément  du  grand  Congrès  d'archéologie,  qui 
s'est  tenu  l'année  dernière  sous  la  présidence  du 
cardinal  Parocchi  dans  les  locaux  du  Séminaire 
romain.  Elle  montre,  enfin,  comme  l'auguste 
vieillard,  qui  préside  de  par  Dieu  aux  destinées 
de  son  Église,  s'inquiète  autant  de  faire  revivre 
son  glorieux  passé  qu'il  se  préoccupe  de  son  état 
présent. 

Dr  Albert  Battandter. 


I.  L'église  inférieure  de  .Ste-Cécile  sera  ouverte  aux  fidèles  pour 
le  22  novembre,  jour  de  la  fête  de  la  sainte. 


5 


lO 


Belluc  Dr  l'^lrr  ffirctim. 


Florence,  15  octobre  1901. 
Cher  Monsieur, 

VOUS  avez  bien  voulu  me  comiiuiiiiquer  une 
note  qui  vous  a  été  adressée  de  Rome  à 
propos  de  mon  article  sur  les  fresques  de  Santa 
.Maria  Antica. 

Je  vous  prie  de  remercier  de  ma  part  votre 
honorable  correspondant  et  de  vouloir  bien  in- 
sérer sa  communication. 

Veuillez  agréer,  M 

Gi:rsp,\<I!. 

Voici  la  note  de  notre  correspondant  de 
Rome  : 

Le  dernier  numéro  de  la  Revue  de  F Arl  chrc- 
iien  parle  des  fresques  de  Santa  Maria  Antica;  je 


veux  relever  une  petite  erreur  qui  s'est  glissée 
sous  la  plume  de  l'auteur.  Il  dit,  page  302,  que 
Mgr  Duchesne  démontra  victorieusement  que 
l'église  que  l'on  venait  de  découvrir  n'était 
autre  que  l'église  de  Santa  Maria  Antica  :  et 
c'est  précisément  le  contraire  qui  a  eu  lieu.  Le 
Père  Grisar  soutenait  que  cette  église  était  Santa 
Maria  .Antica,  et  Mgr  Duchesne  affirmait  que 
Santa  Maria  Antica  n'était  autre  que  Santa 
Maria  Nuova,  ou   sainte  Françoise  romaine. 

La  controverse  a  duré  jusqu'au  moment  de 
la  découverte  de  la  fresque  et  de  l'inscription  de 
Thodotus,  primicier  de  l'église  de  Santa  Maria 
«  qu3e  dicitur  Antica  »  et  surtout  de  la  décou- 
verte d'un  des  ambons  de  Jean  VII. 

Inutile  de  dire  que  Mgr  Duchesne  s'est  soumis 
de   fort  bonne  grâce  :   «  îiiai^is  antica  veritas  ». 


Trabauv  tics  JSocictés  savantes. 


'rSK!»')!!^, 


^ 

^ 


^^w^^ww^w^ww^wwwwwwwwwwwww^ 


Société  des  Antiquaires  de  France.  — 
Séance  du  2^  juillet  icjoi.  —  M.  Michon  commu- 
nique un  mémoire  sur  diverses  statues  trouvées 
en  France  et  faisant  partie  de  la  collection  du 
Roi. 

M.  Adrien  Blanchct  donne  lecture  d'un  tra- 
vail sur  les  figurines  de  terre  noire  cuite  de  la 
Gaule  romaine. 

Séance  du  ji  juillet.  —  M.  Gaidoz  entretient 
la  Société  du  rôle  de  Chuchulain  dans  l'épopée 
irlandaise  au  sujet  des  exercices  de  gymnasti- 
que. Il  communique  ensuite  le  dessin  d'un  moule 
du  X'VIII'^  siècle,  qui  servait  à  la  fabrication  des 
gàteau.K  de  Nocl  dans  le  Gévaudan. 

M.  Durrieu  parle  des  concessions  territoriales 
accordées  par  Charles  I^r  d'Anjou  à  des  seigneurs 
français  dans  le  royaume  de  Naples. 

La  Société  s'ajourne  au  U'""  mercredi  de  no- 
vembre. 

M.  A.  de  Rochemonteix  décrit  une  croi.K  pro- 
cessionnelle du  XVI^  au  XVII^  s.,  en  argent  re- 
poussé, de  l'église  de  Saint-Cirgues  de  Jordanne, 
le  seul  objet  de  l'espèce  connu  dans  la  Haute 
Auvergne. 

M.  Smirnolf,  conservateur  du  musée  de  l'Ermi- 
tage impérial  de  Saint-Pétersbourg,  signale  un 
parquet  de  pierre  à  figures  incisées,  trouvé  près  de 
Sébastopol,  en  le  rapprochant  d'un  fragment 
analogue  conservé  au  Louvre.  M.  E.  Michon 
établit  que  les  deux  pièces  doivent  avoir  appar- 
tenu à  quelque  ambon  du  V"  ou  du   VI<=  siècle. 

M.  R.  de  Lasteyrie  a  retrouvé,  chez  un  mar- 
chand d'estampes,  de  vieilles  gravures  donnant  le 
château  de  Gisors  et  la  cathédrale  de  Noyon 
avec  des  détails  intéressants  et  disparus. 

M.  Destrée  a  étudié,  comme  on  sait,  les  bor- 
dures à  inscriptions  qui  ornent  la  draperie  de 
quantité  de  statues  flamandes  du  moyen  âge.  M. 
P.  Viky  en  signale  quantité  d'autres  en  France, 
et  attribue  comme  origine  à  l'emploi  de  ce  décor 
l'imitation  d'étoffes  arabes  à  textes  décoratifs. 
De  son  côté,  M.  P.  Durrieu  signale  l'emploi  fré- 
quent de  ces  ornements  chez  les  miniaturistes 
français. 

Académie  des  Inscriptions  et  Belles-Let- 
tres. —  Séance  du  2  août.  —  M.  Edmond  Pottier 
donne  lecture  d'un  travail  sur  l'attitude  de  Phèdre 
dans  la  fresque  de  Polygnote,  à  Delphes. 

Phèdre  y  étant  représentée  balancée  sur  ime 
corde,  on  peut  y  voir,  dit  M.  Pottier,  wne.  allu- 
sion au  rite  religieux  de  la  purification  par  l'air, 
une  des  formes  de  la  «  lustratio  »  antique. 


Séance  du  16  aotlt.  —  M.  Clermont-Ganneau 
communique  la  photographie  d'une  plaque  en  or, 
que  M.  Durighello  vient  de  lui  envoyer  de  Syrie. 
Trois  personnages  sont  figurés,  le  dieu  Esculape, 
la  déesse  Hygie  et  le  petit  Télesphore. 

M. Héron  de  Villefosse  donne  des  nouvelles  des 
fouilles  entreprises  au  sommet  du  Puy-de-Dôme, 
sous  la  direction  de  MM.  Ruprich-Robert  et  Ap- 
doUat.  On  a  dégagé  deux  murs,  d'une  trentaine 
de  mètres  de  longueur,  construits  en  petit  appa- 
reil et  un  dallage  à  grand  appareil  et  exhumé 
plusieurs  colonnes  brisées,  un  beau  chapiteau 
corinthien  et  des  monnaies  impériales  allant 
d'Auguste  à  Magnence. 

M.  Enlart  communique  la  reproduction  de  la 
dalle  funéraire  de  l'archevêque  de  Chypre, Thierry^ 
précédemment  archidiacre  de  Troyes,  qu'il  a  dé- 
couverte dans  l'ancienne  cathédrale  de  Nicosie;  le 
tombeau  est  du  style  du  Xni<=  siècle. 

M.  Enlart  fait  passer  sous  les  yeux  des  mem- 
bres de  l'Académie  les  restes  de  trois  manuscrits 
liturgiques  des  XHP'  et  XIV*^  siècles  découverts 
dans  la  même  église. 

Séance  du  2j  aotït.  —  M.  S.  Reinach  donne  lec- 
ture d'un  mémoire  consacré  à  Télesphore,  le  dieu 
grec  de  la  santé,  habituellement  figuré  à  côté 
d'Esculape  et  d'Hygie. 

Séance  du  jo  août.  —  M.  Reinach  tient  l'Aca- 
démie au  courant  des  fouilles  importantes  diri- 
gées par  M.  Vassits,  conservateur  du  musée  de 
Belgrade,  à  Jablanica,   en   Serbie. 

Le  P.  Lagrange  communique  les  résultats  de 
la  mission  dont  il  a  été  chargé  par  l'Académie 
pour  étudier  sur  place  la  fameuse  mosaïque  géo- 
graphique de  Mâdaba. 

Séance  du  6  septembre.  — ■  M.  Miintz  lit  un 
curieux  mémoire  sur  l'Académie  artistique  et 
scientifique,  fondée  à  Milan  vers  la  fin  du 
XVe  siècle  par  l'illustre  Léonard  de  Vinci.  Cette 
création  a  été  niée  récemment  par  un  savant 
étranger,  dont  M.  Miintz  réfute  les  assertions. 
Non  seulement  une  pareille  fondation  n'est  pas 
t;n  contradiction  avec  les  mœurs  du  temps  et  les 
tendances  du  maitre,  mais  il  faut  tenir  le  plus 
grand  compte  des  sept  gravures  portant  la  men- 
tion Academia  Lconardi  Vinci.  D'autres  témoi- 
gnages contemporains  produits  par  M.  Mûntz 
ont  aussi  une  grande  force.  Il  est  vraisemblable 
que  l'erreur  de  l'érudit  en  question  est  due  à  la 
confusion  qu'il  a  faite  entre  l'Académie  du 
XV=  siècle  et  celles  qui  existent  aujourd'hui.  A 
l'époque  de  Léonard,  les  Académies  étaient  des 


5i8 


3^rbur  lir  r^rt  cf)vctien. 


réunions  privées  et  amicales,  sans  devoirs,  mais 
sans  droits.  Ce  n'est  qu'au  siècle  suivant  que 
certaines  d'entre  elles  commencèrent  à  devenir 
des  iiibtitutions  d'État. 

Séance  du  ij  septembre.  —  M.  Héron  de  Vil- 
lefosse  communique  un  rapport  du  P.  Delattre, 
correspondant  de  l'Académie,  relatif  aux  der- 
nières fouilles  faites  à  Carthat^e  dans  la  nécro- 
pole punique  voisine  de  Sainte-Monique  et  qui, 
comme  les  précédentes,  ont  été  très  fructueuses. 
Au  rapport  sont  joints  des  dessins  et  des  photo- 
graphies reproduisant  les  priiicipau.x  monuments 
découverts,  stèles,  figurines  en  terre  cuite,  objets 
en  bronze,  parmi  lesquels  se  trouve  un  vase  très 
élégant,  muni  d'une  anse  formée  par  un  groupe 
de  deux  hommes  nus.  Plusieurs  rasoirs,  en  forme 
de  hachette,  présentent  une  décoration  gravée, 
toujours  fort  intéressante.  Un  certain  nombre  de 
monnaies  puniques  sont  sorties  de  ces  tombes, 
ainsi  que  quelques  épitaphes  qui  fournissent  des 
noms  de  métiers. 

Séance  du  20  septembre.  —  M.  Gauckler  pré- 
sente les  plans  et  photographies  de  plusieurs 
baptistères  byzantins,  ornés  de  mosaïques  riche- 
ment décorées,  récemment  découvertes  en  Tuni- 
sie dans  les  fouilles  exécutées  par  le  service  d'an- 
tiquilés.Le  plus  important  et  le  mieu.x  conservé  de 
ces  monuments,  qui  a  été  trouvé  en  1899  à  Car- 
thage,  à  peu  de  distance  des  thermes  d'Anto- 
nin,  fait  partie  d'une  luxueuse  basilique  qui 
a  été  méthodiquement  déblayée  et  qui  com- 
prend une  église  à  cinq  nefs  avec  cathèdre 
réservée  à  l'archevêque  dans  l'abside  et  autel  au 
milieu  du  chœur,  des  sacristies  et  les  diverses 
pièces  qui  constituent  le  secretarmm,  enfin  un 
atrium  central.  Le  baptistère  proprement  dit  se 
compose  d'un  oratoire  et  des  fonts  baptismaux, 
dont  la  cuve,  hexagonale  comme  celle  de 
Damons  el  Karita,  est  plaquée  de  marbre  blanc. 
Tout  1  édifice  est  pavé  de  belles  mosaïques 
décoratives  et  est  lui-même  très  richement  dé- 
coré. Les  fragments  architecturaux  recueillis 
permettent  de  le  reconstituer  dans  son  entier. 
La  basilique,  qu'il  est  impossible  d'identifier  d'une 
manière  précise,  seiuble  avoir  été  constiuite 
sous  le  règne  de  Justinien.  Elle  a  été  incendiée 
parles  Arabes,  au  moment  de  la  destruction  de 
Carthage  par  Hassan  en  69S. 

Le  baptistère  de  Siagu  dépend,  lui  aussi,  d'u- 
ne grande  basilique  qui  a  été  déblayée  en  1899- 
1900,  par  la  mission  Drude-Bordiery,  pour  le 
compte  de  la  direction  des  antiquités.  Construit 
sur  un  plan  octogonal  d'une  régularité  géomé- 
trique, il  occupe  le  fond  d'une  église  à  trois  nefs, 
avec  déambulatoire  régnant  autour  de  l'abside 
et  autel   au   milieu   du  chœur.  Un  atiiuni  carré, 


entouré  d'un   cloître  et  un  escalier  monumental 
précèdent  le  sanctuaire. 

Le  baptistère  de  l'Oued  Ramel,  découvert  en 
1S98,  occupe  un  pavillon  indépendant,  englobé 
dans  la  même  enceinte  qu'une  basilique  byzan- 
tine à  trois  nefs  el  divers  autres  bâtiments.  La 
cuve  baptismale,  semblable  à  celle  d'El  Kantara, 
dans  l'île  de  Djerba,  affecte  la  forme  d'une  croix 
grecque,  dont  une  branche  a  été  barrée  par  une 
dalle  de  marbre  remployée,  un  devant  de  sarco- 
phage païen  représentant  les  Trois  Grâces  et  les 
Quatre  Saisons.  Tout  l'édifice  est  pavé  de  riches 
mosaïques  représentant  des  figures  chrétiennes, 
telles  que  la  Colombe  du  Saint-Ksprit,  le  Pal- 
mier, le  Cerf  et  la  Biche  buvant  aux  quatre  fleu- 
ves du  Paradis. 

D'autres  baptistères,  moins  bien  conservés  que 
les  précédents,  ceux  d'Hamman-Lif,  d'Upenna, 
d'Henchir-Hakaïma,  et  les  deux  de  Sfax,  pré- 
sentent cependant  autant  d'intérêt,  car  ils  for- 
ment une  série  originale  qui  n'avait  pas  encore 
été  signalée  et  qui  semble  particulière  à  la  Tuni- 
sie. Ce  sont  des  bassins  étoiles,  à  six  ou  huit 
branches  qui  forment  autant  d'alvéoles  où  plu- 
sieurs catéchumènes  pouvaient  prendre  place 
pour  recevoir  simultanément  le  baptême. 

En  somme,  sur  onze  baptistères  relevés  jus- 
qu'ici en  Tunisie,  quatre  seulement,  dont  trois  à 
Carthage  même,  représentent  fidèlement  les 
types  classiques  de  l'école  byzantine.  Les  autres 
s'en  éloignent  plus  ou  moins  et  présentent  des 
particularités  caractéristiques  prouvant  que  les 
architectes  africains  ne  s'astreignaient  pas  à 
l'imitation  servile  des  grands  maîtres  grecs  ou 
romains,  mais  qu'ils  réussissaient,  au  contraire, 
en  modifiant  les  modèles  dont  ils  s'inspiraient, 
à  créer  de  nouveaux  types  d'une  réelle  origina- 
lité. 

M.  Homolle  entretient  l'Académie  d'une  ins- 
cription métrique  provenant  des  fouilles  de  Del- 
phes, qui  servait  de  dédicace  à  une  statue  de 
Lysandre. 

Séance  du  27  septembre.  —  M.  Clermont-Gan- 
neau  commente  un  important  monument  phéni- 
cien, dont  l'original  est  entré  dans  les  collections 
de  M.  Jacobsen,de  Copenhague.  C'est  une  gran- 
de stèle,  découverte  dans  les  environs  de  Tyr  et 
représentant,  sculpté  en  bas-relief,  un  personnage 
debout,  qui  fait  le  geste  rituel  de  l'adoration. 
La  tête  est  d'un  modelé  remarquable.  Une  ins- 
cription phénicienne  de  plusieurs  lignes  nous 
apprend  que  c'est  le  cippe  commémoratif  d'un 
haut  dignitaire  phénicien,  un  ;v?/',  nommé  Baal- 
yathon,  fils  de  Baaiyathon. 


^va\innx  ties  Sociétés  satiantcs. 


519 


Comité  des  travaux  historiques.  —  Le 
Bulletin  de  1901  (i''"  livr.)  contient  plusieurs 
travaux  intéressants  pour  nos  lecteurs.  Nous 
signalons  d'abord  la  description  due  à  M.  le 
comte  de  Loisne  et  surtout  la  reproduction  de 
deux  charmants  tableaux  flamands  (vers  1500), 
provenant  de  la  Chartreuse  de  Gosnay  et  conser- 
vés dans  l'église  d'Hesdigneul-lès-Béthune.  L'un 
représente  Ste  Ursule,  avec  huit  épisodes  de 
son  histoire,  réminiscence  dès  miniatures  de 
Memling  sur  la  châsse  de  Bruges.  Le  second,  re- 
marquable surtout  parce  qu'il  contient  des 
portraits  de  Philippe  le  Bon  et  d'Isabelle  de 
Portugal,  représente  d'un  côté  l'Annonciation, 
de  l'autre,  le  couronnement  de  la  Ste  Vierge, 
auquel  président  les  trois  personnes  de  la  Ste 
Trinité  ■.  le  Père,  vêtu  en  pape,  le  Fils,  vêtu  du 
manteau  de  pourpre  de  la  passion  et  tenant  la 
croix  hastée  (c'est  le  Christ  de  la  Résurrec- 
tion), et  le  Saint-Esprit  sous  la  forme  d'une 
colombe. 

M.  M.  F.  Lamy,  de  Clermont-Ferrand,  a  com- 
muniqué la  reprodution  en  aquarelle  d'une  des 
peintures  murales  de  la  cathédrale  de  cette  ville, 
du  XIII''  siècle;  elle  figure  un  épisode  des  croi- 
sades. 

Nous  nous  bornerons  à  signaler,  en  y  ren- 
voyant les  spécialistes,  un  important  article  de 
M.  J.  Pilloy  sur  l'orfèvrerie  lapidaire  et  l'émail- 
lerie  au  V'^  siècle.  Il  établit  une  distinction 
entre  l'orfèvrerie  franque  et  l'orfèvrerie  byzan- 
tine. 

M.  l'abbé  Chartraine  donne  la  description 
illustrée  d'une  reproduction  photographique  de 
deux  vierges  assises,  l'une  romane  et  l'autre 
gothique. 

Au  cours  de  la  restauration  de  la  cathédrale 
de  Reims,  le  percement  d'une  fenêtre,  ajoutée  au 
transept  nord  dans  un  but  de  symétrie,  amena 
la  suppression  d'une  chambre  voûtée  qui  avait 
contenu  au  moyen  âge  le  cartulaire  du  Chapi- 
tre ;  ce  changement  peu  plausible  a  fait  dispa- 
raître cette  curieuse  peinture,  dont  l'Adminis- 
tration n'a  pas  même  eu  le  soin  de  lever  une 
copie.  Heureusement  M.  Ch.  Givelet  en  prit  une 
copie,  aujourd'hui  reproduite  dans  le  Bulletin 
diL  Comité  des  travaux  Instoriques,  en  quoi  il  a 
rendu  un  grand  service  ;  d'autant  plus  que  la 
peinture  était  fort  curieuse.  Elle  représentait 
l'écolâtre  Gui  de  Villennes,  tenant  une  charte 
au  revers  de  laquelle  il  écrit,  le  grand  ar- 
chidiacre, Guillaume  de  Bray  et  Raoul,  le  tré- 
sorier. 

Signalons  encore  l'inventaire  du  trésor  de 
Saint-Saulve  de  Montreuil-sur-Mer  par  M.  le 
Comte  de  Loisne. 


Congrès  archéologique  de  France.  —  Le 
II  juin  s'ouvrait  à  Agen  la  68=  session  de  la  So- 
ciété française  d'archéologie  sous  la  sympathique 
direction  de  M.  Lefèvre-Pontalis.  Après  les  céré- 
monies officielles,  sur  lesquelles  nous  passons,  M. 
Momméja  a  donné  lecture  d'un  intérressant 
mémoire  sur  l'existence  à  l'époque  gallo-romaine 
des  ateliers  de  sculpture  à  Agen.  —  On  a  en- 
tendu un  excellent  rapport  de  M.  P.  Lauzun  sur 
l'état  des  études  archéologiques   dans  l'Agenais. 

M.  Lauzun  a  rappelé  la  fondation  du  musée 
d'Agen  et  exposé  les  travaux  scientifiques  de  la 
Socfété  locale  des  lettres,  sciences  et  arts,  qui 
s'est  attaquée  à  tous  les  sujets  d'érudition,  tels 
notamment  que  la  numismatique,  l'orfèvrerie,  la 
céramique  et  le  costume. 

M.  l'abbé  Marboutin,  curé  de  Cours,  a  lu  en- 
suite un  rapport  très  documenté  sur  les  souter- 
rains de  l'Agenais. 

Une  prernière  excursion  a  eu  lieu  vers  Mon- 
sempron-Libos.  Certaines  irrégularités  donnent  à 
l'église  de  Monsempron  son  intérêt  spécial  pour 
les  archéologues:  le  manque  d'unité  dans  la  com- 
position du  plan,  la  forme  des  colonnes,  isolées, 
appareillées  de  plusieurs  pièces,  et  enfin  les  ab- 
sidioles,  dont  l'une  surtout  est  des  plus  remar- 
quables. L'église,  avec  sa  voûte  en  berceau 
simple,  remonte  à  la  première  moitié  du  XI 1'= 
siècle  ;  le  chœur  a  été  refait  au  XV".  Des  deux 
absidioles,  celle  de  gauche,  intacte,  constitue  avec 
la  voûte  elliptique  de  son  vestibule  et  ses  arcades 
sculptées  un  modèle  vraiment  unique  et  peut  être 
considérée  comme  le  joyau  de  l'église.  Elle  est 
ouverte  à  l'extérieur  et  servait  peut-être  à  expo- 
ser des  reliques.  Monsempron  était  un  lieu  de 
pèlerinage.  Le  malheur  est  que  l'église  ait  été  si 
maladroitement  restaurée,  surtout  en  ce  qui 
concerne  l'appareil. 

La  visite  au  château  de  Bonaguil,  le  «  Pierre- 
fonds  du  Sud-Ouest  »,  fut  le  gros  morceau  de  la 
journée.  —  C'est  le  type  le  plus  parfait  en 
France  de  l'architecture  militaire  au  XV=  siècle 
par  son  système  de  défense. 

Le  donjon,  construit  vers  1250,  présente  une 
forme  bizarre,  peut-être  unique,  de  losange  irré- 
gulier, imposée  par  le  contour  capricieux  du  roc. 

Son  angle  aigu,  tourné  vers  le  Nord,  était, 
comme  à  Loches  et  à  Issoudun,  destiné  à  em- 
pêcher l'ennemi  de  se  servir  du  bélier;  il  offrait 
un    dernier    refuge,   très  solide,  aux  assiégés. 

On  se  rendit  delà  au  château  de  Perricard, 
d'un  intérêt  secondaire. 

Dans  la  séance  qui  suivit,  M.  Ouarré-Reybour- 
bon  communiqua  une  notice  sur  un  voyai^e  de 
Toulouse  à  Bordeaux  en  i6go  par  un  gentillwniuie 
lillois.  Puis  M.  le  chan.  Dubourg,  curé  de  Lay- 
rac,  produisit  une  note  très  documentée  sur  les 


KKVUK    OH    LAKT   CHKeTlEN. 
1901.  —  6""^    LIVRAISON. 


=;2o 


îRcbuc  Dr  ravt  cbrcticiu 


remparts  et  vieilles  maisons  en  pans  île  bois  de 
Caudecotte.  M.  E.  Travers  fournit  quelques 
indications  sur  le  *  Villeneuve  »  de  Normandie. 

M.  Rrulails  lut  un  résumé  de  son  travail,  bien 
connu  de  nos  lecteurs,  sur  les  églises  à  coupoles 
de  la  région  et  s'attacha  à  prouver  que  Saint- 
Front  de  Périgueux  n'est  pas  le  prototype  de  ce 
genre  d'églises  dans  la  contrée. D'après  lui, comme 
on  sait,  les  premiers  essais  se  retrouveraient  dans 
des  églises  de  moindre  importance,  et  le  vieux 
Saint-Front,  qu'il  date  de  1 120, ne  serait  pas  l'ori- 
gine des  églises  à  coupoles  en  France.  Le  travail 
de  M.  Brutails  a  paru  dans  le  Bulletin  uioniDiien- 
tal  (7"=  série,  t.  II,  62«  volume  de  la  collection). 

M.  Lefèvre-Pontalis  croit  qu'il  est  peut-être 
prudent  de  ne  pas  se  prononcer  sur  ce  point 
d'origine  de  l'introduction  de  l'art  byzantin.  M. 
le  marquis  de  Fayolle  combat  la  thèse  de  M. 
Brutails  en  s'appuyant  principalement  sur  l'opi- 
nion de  IVI.  de  Verneilh,  dont  les  travaux  con- 
cernant l'architecture  byzantine  en  France  font 
autorité.  M.  le  comte  de  Roumejoux  apporte 
sa  contribution  pour  soutenir  M.  le  marquis  de 
Fayolle. 

Une  seconde  excursion  eut  lieu  aux  églises  de 
Moirax  et  d'A'ibiac,  ainsi  qu'au  cliâteau  d'Es- 
tillac.  L'église  de  Moirax,  fondée  en  1049,  faisait 
à  l'origine  partie  d'un  magnifique  prieuré  de 
Cluny.  Elle  comprend  une  nef  flanquée  de  deux- 
bas  côtés, un  transept  comportant  deux  absidioles 
et  un  chevet  assez  allongé,  se  terminant  en 
hémicycle. 

L'intérieur  possède  de  beaux  chapiteaux  histo- 
riés dont  la  décoration, empruntée  à  la  flore  et  à  la 
faune,  est  d'une  grande  richesse.  La  nef  centrale 
est  voûtée  en  berceau  légèrement  brisé  ;  les  deux 
bas  côtés  sont  couverts  en  voûte  d'arête.  La 
partie  la  plus  caractéristique  de  cette  église  est 
la  travée  qui  précède  le  sanctuaire. 

«  Elle  est  recouverte,  dit  M.  G.  Tholin,  d'une  coupole 
sur  trompes,  sphérique  à  la  base,  conique  au  sommet, 
largement  ouverte  sous  le  campanile.  Une  double  arcade 
extradosse'e  portant  sur  des  colonnes,  un  rang  de  trois 
fenêtres  égales,  un  oculus  au  sommet  à  la  hauteur  des 
trompillcres,  donnent  trois  élages  à  cette  travée.  L'abside 
est  voûtée  en  cul-de  four.  Cinq  fenêtres  larges  et  hautes 
l'inondent  de  lumière.  Deu.\  colonnettes  dans  lesébrase- 
ments  et  des  arcades  portant  sur  des  colonnes  encadrent 
doublement  chacune  de  ces  baies.  » 

ICnsuite  les  congressistes  se  rendent  à  N.-D.- 
d'Aubiac.  Cette  église,  du  XL  siècle,  appartient 
cependant  à  une  famille  d'édifices  plus  anciens  ; 
son  plan,  ainsi  que  certains  vestiges  d'appareil 
antérieur  indiquent  que  cette  église  romane  fut 
rebâtie  sur  des  substructions  carolingiennes.  Elle 
possède  un  sanctuaire  à  plan  trifolié;  une  cou- 
pole couvre  la  croix.  L'excursion  se  termine  au 


château  d'Estillac,  qui  fut  la  demeure  du  célèbre 
Miîutluc.  Au  retour  eut  lieu  une  nouvelle  séance 
présidée  par  M.  Lefèvre-Pontalis  et  entièrement 
occupée  par  deux  conférences  faites  par  M.  le 
clianoine  Pottier  sur  l'architecture  religieuse  de 
la  région  et  par  M.  P.  Lauzun  sur  les  châteaux 
de  l'Agenais. 

Le  lendemain,  les  congressistes  repartaient 
pour  Madaillon,  dont  le  château,  datant  de  trois 
époques  principales,  XIIL,  XlV^^et  XV"=  siècle), 
a  plus  d'importance  au  point  de  vue  liistorique 
qu'au  point  de  vue  archéologique. 

De  retour  à  Agen,  on  se  rendit  à  Saint-Ca- 
prais,  église  cathédra'e  d'Agen.  L'abside  et  le 
transept  datent  de  la  seconde  inoitié  du  XIL 
siècle  et  composent  la  partie  le  plus  remarquable 
de  l'édifice.  Les  piliers  avec  leurs  chapiteaux,  les 
arcades  extradossées,  les  colonnettes  de  l'ab- 
side principale  et  des  deux  absidioles,  accusent 
les  caractères  les  plus  purs  de  la  belle  époque 
romane. 

La  salle  capitulaire  est  surtout  remirquable 
par  son  magnifique  portail  du  XI L  siècle, 
aux  chapiteaux  historiés  où  se  découvrent  des 
traces  de  décoration  polychrome  et  qui  peuvent 
rivaliser  avec  ceux  de  Moissac.  Dans  l'intérieur, 
les  belles  voûtes  d'ogives  retombant  sur  de  riches 
colonnes  de  marbre  ont  été  l'objet  de  l'attention 
de  tous. 

Les  excursionnistes  consacrèrent  encore  quel- 
ques instants  à  la  visite  des  vieilles  maisons 
d'Agen,  notamment  à  celle  dite  «  maison  du  Sé- 
néchal »,  qui  mérite  qu'on  s'y  arrête.  La  rue 
Puits-duSaumon  a  aussi  son  caractère,  avec  ses 
galeries  à  arcades  du  XIV>=  siècle. 

Puis  ils  visitent  les  églises  Sainte-Foy, 
Saint- Hilaire  et  des  Cordeliers,  enfin  l'église 
paroissiale  de  Notre-Dame,  construite  en  1254 
par  Armand  Bélenger,  bienfaiteur  du  cou- 
vent des  Dominicains.  Elle  est  peut-être,  avec 
l'église  des  Jacobins  de  Toulouse,  le  seul  type 
de  construction  établi  sur  les  données  du  maître 
par  les  disciples  de  saint  Dominique  :  un  seul 
vaisseau  rectangulaire,  divisé  en  deux  nefs  égales 
et  parallèles  séparées  l'une  de  l'autre  par  une 
rangée  de  piliers. 

Poursuivant  leurs  pérégrinations,  les  congres- 
sistes se  rendirent  à  Moissac,  et  rcçusparla^rv/t'Vt' 
archéologique  de  Tarii-€t-Garoniie,\\s  se  dirigèrent 
immédiatement  vers  l'église  latine  de  Saint- 
Martin,  antérieure  à  l'an  looo,  avec  portail  du 
XV'-'  siècle. 

La  façade,  en  petit  appareil,  flanquée  de  deux 
massifs  cylindriques,  pourrait  la  faire  remonter 
aux  temps  mérovingiens.  Il  est  cependant  plus 
prudent  de  ne  la  dater  que  de  l'époque  carolin- 
gienne, à  laquelle  était  encore  employé  ce  mode 


Cratjaur  Des  Sociétés;  0at)antes. 


521 


tout  romain  de  revêtement.  La  chapelle  de  la 
Sainte-Trinité  laisse  voir  des  traces  de  pein- 
tures murales  datant  du  XV*^  siècle  et  rappelant 
la  vie  de  Notre-Seigneur. 

Le  déjeuner  fut  servi  au  célèbre  cloître  de  l'ab- 
baj'e  de  Saint-Pierre  ;  environ  cent-vingt  convi- 
ves se  trouvaient  réunis  dans  ce  superbe  cadre. 

Puis  a  commencé  la  visite  de  l'église.  M.  le 
chanoine  Pottier,  et,  après  lui,  M.  de  Lasteyrie, 
ont  supérieurement  décrit  et  commenté  la  mer- 
veilleuse page  qu'offre  le  portail  de  l'église,  l'un 
des  plus  beaux  morceaux  d'architecture  et  de 
sculpture  romanes  que  l'on  connaisse. 

«  L'arcade  d'ouverture  repose  sur  quatre  colonnes,  aux 
chapiteaux  délicatement  fouillés.  Les  parois  latérales, 
formant  porche,  sont  revêtues  de  trois  rangées  de  sculp- 
tures figurant  des  panneaux  rapportés,  ainsi  qu'on  en  peut 
juger  par  les  agrafes  encoie  visibles.  Ces  sculptures,  du 
plus  haut  intérêt,  représentent  :  la  Visitatinn,P Atniojicia- 
tion,  la  Présetitatioii  de  Jcstis  au  Temple,  la  Fjiite  en 
Éiiypte,  la  Luxure,  l'Avarice,  la  Mort  de  l'avare,  la 
Damtiation  de  l'avare  et  de  la  femme  nnpudigue,  Lazare 
et  le  mauvais  riche,  Abraham  nimbe,  et  enfin  un  autre 
patriarche  également  nimbe. 

«  La  porte,  partie  sur  laquelle  peuvent  s'exercer  avec  le 
plus  de  fruit  l'étude  et  la  discussion,  se  compose  d'un 
trumeau  central,  avec,  h  droite  et  à  gauche,  une  large 
ouverture  aboutissant  à  deux  pieds-droits  dont  les  parois 
sont  décorées  des  statues  de  saint  Pierre  et  d'Isaïe. 

■!  Ce  trumeau,  appartenant  sans  aucun  doute  à  un  édi- 
fice d'une  époque  antérieure  et  à  une  école  de  sculpture 
étrangère  à.  la  région,  est  décoré  de  trois  couples  de 
lionnes  se  chevauchant.  Deux  gigantesque  statues  de 
prophètes  occupent  ses  faces  latérales. 

«  Les  pieds-droits  et  le  trumeau  sont  couronnés  par  un 
magnifique  linteau  en  marbre  blanc,  décoré  d'entrelacs 
et  de  superbes  rosaces,  et  que  Viollet-Le  Duc  n'hésitait 
pas  à  assimiler  aux  plus  belles  sculptures  grecques. 

«Ce  linteau  devait  appartenir  au  même  monument  que 
le  trumeau  dont  il  vient  d'être  parle  ;  en  effet,  lesrobaces 
qui  décorent  le  linteau  se  retrouvent  dans  le  trumeau, 
entre  les  lionnes  passantes. 

«  Les  dimensions  du  trumeau  n'étant  pas  exactement 
conespondantes  à  la  hauteur  sous  linteau,  les  construc- 
teurs durent  rapporter  à  la  partie  haute  de  ce  trumeau 
une  abaque  restée  brute  et  dont  le  fruste  ne  fait  que 
mieux  valoir  la  richesse  artistique  du  trumeau  et  du 
linleau. 

€  .A.u-dessus  s'étale  le  tympan,  admirablement  fouillé, 
représentant  Jésus  dans  sa  gloire,  avec,  à  ses  côtés,  les 
quatre  évangélistes,  et,  au-dessous,  les  vingt-quatre  vieil- 
lards de  l'Apocalypse.  Des  cordons  formés  par  de  lon- 
gues files  de  rats  et  de  grenouilles  (assemblage  bizarre 
qu'a  dû,  sans  doute,  inspirer  la  lecture  d'Aristophane) 
séparent  trois  rangées  de  voussures  couvertes  d'ara- 
besques. 

La  nef  unique  paraît  dater  du  X1V'=  siècle,  époque  h. 
laquelle  elle  fut  reconstruite  sur  les  débris  de  l'ancienne 
église  à  coupoles,  laquelle  avait  elle-même  remplacé 
l'église  primitive.  L'église  renferme  un  beau  tombeau  du 
VU"  siècle,  où  fut  inhumé  plus  tard,  au  .Xlll"  siècle,  l'abbé 
Raymond  de  Montpezat.  Dans  le  sanctuaire,  on  remarque 
l'inscription  dédicatoire  du  XL'  siècle,  des  sculptures  sur 
bois  du  XV''  et  les  orgues  données  par  Mazarin,  ancien 
abbé  de  Moissac. 


«  A  l'Ouest,  la  nef  est  précédée  d'une  tour  carrée  et  for- 
tifiée qui  s'élève  au-dessus  du  narthex  ;  on  y  voit  l'une 
des  premières  voûtes  d'ogives,  dont  les  nervures  reposent 
sur  des  colonnes  ornées  de  remarquables  chapiteaux. 

«  Attenant  à  l'église,  est  le  cloître,  si  souvent  décrit, 
composé  d'une  série  d'arcatures  régulières  entourant  une 
grande  cour  carrée  et  supportées  par  des  colonnes  très 
élégantes,  alternativement  simples  et  jumelées,  surmon- 
tées de  chapiteaux  à  sujets  divers,  dont  chacun  est  un 
admirable  morceau  de  sculpture. 

«  Aux  angles  et  au  milieu  de  chaque  galerie,  les  arca- 
tiires  sont  renforcées  par  des  piliers  carrés,  avec,  à 
chaque  angle,  la  statue  d'un  apôtre,  et,  au  milieu  de  la 
galerie  orientale,  celle  de  l'abbé  Durand,  constructeur  de 
l'église. 

«  Ce  cloître,  de  la  fin  du  XI"'  siècle,  fut  terminé  dans 
les  premières  années  du  XII'.  » 

Le  dimanche  16  juin,  le  Congrès  tenait  sa 
séance  de  clôture. 

M.  Courau,  architecte,  lut  une  intéressante 
étude  sur  l'église  de  Clermont-Dessous,  restaurée 
par  lui  avec  un  grand  souci  de  la  science  archéo- 
logique. 

Le  Congrès,  sur  la  proposition  très  chaleureu- 
sement exprimée  par  M.  Planté, maire  d'Orthez, 
vota  une  résolution  tendant  à  ce  que  l'adminis- 
tration des  musées  rende  au  château  de  Pau 
quatre  panneaux  de  tapisserie  qu'elle  en  avait 
retirés  pour  être  exposés,  l'an  dernier,  au  Petit 
Palais. 

Le  lendemain,  les  congressistes  restés  présents 
se  rendaient  en  excursion  à  Lectoure,  où,  sous  la 
conduite  de  M.  Lefèvre-Pontalis,  ils  visitaient 
la  cathédrale  de  Saint-Gervaiset-Saint-Protais, 
monument  plusieurs  fois  remanié,  et  dont  les 
différentes  parties  datent  des  XIII^,  XV^,  XVI^ 
et  XVI  le  siècles.  Sa  nef  centrale,  divisée  en  deux 
travées  à  peu  près  carrées,  voûtées  sur  croisées 
d'ogives,  offre  tous  les  caractères  d'une  ancienne 
église  à  coupoles  dont  les  pendentifs  devaient 
reposer  sur  les  énormes  piliers  qui  la  soutiennent 
de  chaque  côté  ('J. 


Gilde  de  Saint-Thomas  et  de  Saint-Luc.  — 
Session  de  igoi  (=).  _  C'est  vers  l'ancien  pays  de 
Clèves,  aux  confins  de  l'Allemagne  et  des  Pays- 
Bas,  que  les  membres  de  la  Gilde  faisaient  cette 
année  leur  trente-cinquième  session. 

Il  était  difficile  de  mieux  choisir.  Au  charme 
des  forêts  séculaires,  des  collines  pittoresques, 
des  riches  vallées  qu'arrose  le  Rhin  majestueux, 
s'ajoutait  l'attrait  d'une  série  de  monuments  bien 
dignes  d'un  examen  attentif 

Si  les  châteaux  de  Clèves,  de  Moyiand,  de 
Kempen  évoquaient  les  souvenirs  de  la  puissante 

1.  L'après  une  correspondance  du  liien  Public. 

2.  D'après  M,  .■\.  Besnard  dans  l'Architecture. 


522 


3Rrbur  tir  V^xt  cbrcticn. 


féodalité,  les  églises  de  Calcar,  de  Xaiiten,  d'Em- 
meiich,  d'IIochelten,  de  Kempen,  celle  d'Essen 
surtout, offraient  à  l'archéologue  et  à  l'artiste  d'in- 
comparables sujets  d'étude. 

Leur  structurearchitecturale  affecte  des  formes 
particulières  à  la  région  et  dont  le  développement 
successif  met  parfois  à  l'épreuve  la  sagacité  des 
antiquaires  ;  leur  mobilier  mérite  à  bon  droit 
d'être  examiné  et  imité  par  nos  artistes,  car  au- 
tels, tombeaux-,  jubés,  stalles,  luminaires,  etc.  sont 
demeurés  tels  que  les  avait  créés  l'art  du  moyen 
âge  ;  mais  ce  qui  laisse  surtout  d'ineffaçables  sou- 
venirs, c'est  la  richesse  des  «  trésors  »  —  le  mot 
est  vrai  dans  toutes  ses  acceptions  —  que  conser- 
vent les  sacristies  et  qui  demeurent  comme  les 
témoins  muets  de  la  piété  des  générations  pas- 
sées, de  leur  bon  goût  artistique  et  de  leur  habi- 
leté technique. 

Le  rendez-vous  des  Gil leuianncii  avait  été  fixé 
à  Nimègue  dans  la  journée  du  lundi  2  septembre. 
La  caravane,  où  prêtres  et  législateurs,  archéo- 
logues et  artistes,  hommes  d'âge  et  jeunes  gens, 
se  trouvent  amicalement  réunis,  est  placée  sous 
la  direction  de  MM.  le  baron  Bethune  de  Villers, 
président,  le  chanoine  Delvigne  et  Jules  Helbig, 
vice-présidents,  chevalier  J.-B.  de  Ghellinck 
d'Elseghem,  secrétaire,  Joseph  Casier,  trésorier. 

Vers  le  soir,  les  excursionnistes  arrivent  à  Clè- 
ves,  dont  la  situation  pittoresque,  sur  le  sommet 
de  collines  qu'encadrent  de  superbes  forêts,  offre 
un  panorama  splendide.  Du  balcon  de  l'hùtel  où 
est  installé  le  quartier-général,  on  découvre 
les  clochers  de  la  plupart  des  localités  qu'on 
doit  visiter  cette  semaine. 

A  la  séance  d'ouverture,  le  président,  après 
avoir  rappelé  que  la  Gilde  avait  déjà  parcouru 
cette  partie  de  l'Allemagne  en  1868,  tint  à  cons- 
tater combien,  depuis  lors,  l'association,  si  mo- 
deste à  ses  débuts,  a  vu  s'accroître  et  le  nombre 
de  ses  adhérents  et  son  influence  pour  la  réno- 
vation de  l'art  dans  notre  pays.  Il  émit,  en  même 
temps,  le  souhait  que  la  Gilde  sache  demeurer 
fidèle  aux  principes  et  aux  traditions  que  lui  ont 
imprimés  ses  zélés  fondateurs. 

Le  3  septembre,  après  la  messe  de  la  Gilde, 
célébrée  par  M.  le  chanoine  Delvigne,  on  étudie 
en  détail  l'église  collégiale  de  Clèves.  C'est  une 
construction  en  briques,  élevée  au  XIV°  et  au 
XVi^  siècle  et  qui  porte  bien  les  caractères  spé- 
ciaux de  l'architecture  du  pays.  Deux  grandes 
tours,  assises  aux  côtés  de  la  façade,  annoncent 
l'ancieiuie  collégiale. 

Comme  mobilier, les  tombes  des  ducs  de  Clèves, 
dont  l'une,  couverte  de  lames  de  cuivre,  est  fort 
remarquable  ;  un  tabernacle  sculpté  et  un  repo- 
soir  aux  reliques,  décorent  le  mur  nord  du  sanc- 
tuaire ;  des  sedilia  ou  sièges  pour  les  officiants, 
en  bois  finement  taillé. 


Dau.x  rétables,  portant  la  main  d'Anvers,  se 
trouvent  dans  les  chapelles  ;  l'un  d'eux  accuse 
déjà  l'influence  de  la  Renaissance  païenne.  Des 
vestiges  de  fresques,  diverses  statues  et  tableaux, 
quelques  objets  d'orfèvrerie  complètent  la  série 
des  œuvres  anciennes  que  l'église  a  conservées. 

En  effet,  le  (,<  modernisme  »  a  sévi  ici,  dans  les 
premières  années  du  X1X'=  siècle,  d'une  manière 
déplorable.  L'histoire  locale  a  gardé  le  souvenir 
des  rétables,  dont  les  statues  (jualifiées  alors  de 
«  poupées»  alimentèrent  pendant  plusieurs  an- 
nées le  poêle  de  la  sacristie,  non  moins  que  des 
manuscrits,  des  ornements  sacerdotaux,  même 
des  pierres  tombales  brocantés,  vers  la  même 
époque,  à  des  juifs  hollandais  ! 

Serait-ce  par  suite  d'une  réaction  exagérée 
contre  ces  anciens  abus  que  les  archéologues  ren- 
contrent parfois  un  accueil  peu  gracieux  à  la  sa- 
cristie de  Clèves  ? 

De  Clèves  à  Calcar,  voyage  en  pataches, 
comme  il  sied  à  des  admirateurs  du  «  bon  vieux 
temps  ». 

On  traverse  les  superbes  allées  du  beau  domaine 
de  Moyland,  —  un  nom  qui  ne  ment  pas,  —  dont 
le  propriétaire,  M.  le  baron  van  Steengracht,  a 
gracieusement  autorisé  la  visite.  Moyland  est 
un  vaste  château,  construit  au  XIV<^  siècle,  mais 
qui  a  été  victime,  passé  lui  demi-siècle,  d'une 
restauration  trop  radicale.  De  riches  collections 
de  tableaux  et  de  porcelaines  décorent  les  vastes 
appartements  où  l'on  est  quelque  peu  étonné  de 
trouver  le  fauteuil  de  Voltaire  qui  reçut  jadis  ici 
l'hospitalité  de  son  royal  ami,  Frédéric  II  de 
Prusse. 

Grâce  à  l'éloignement  des  voies  ferrées, la  petite 
ville  de  Calcar  a  gardé  un  aspect  moyenâgeux 
bien  fait  pour  plaire  aux  archéologues.  Elle  a 
gardé  aussi,  dans  l'église  paroissiale,  une  série 
incomparable  d'anciens  rétables  d'autel,  exécutés 
par  une  pléiade  d'artistes  qui  taillaient  le  bois 
avec  une  patience  et  une  habileté  non  égalées  de- 
puis et  que  l'on  désigne  habituellement  sous  le 
nom  d'  «  école  de  Calcar  ». 

Impossible  d'en  parler  ici  avec  la  compétence 
requise.  Disons  seulement  que  le  maître-autel 
renferme  plus  de  200  statuettes,  qui  représentent 
avec  un  fini  merveilleu.x  les  scènes  de  la  Passion. 
Vingt  panneaux, peints  par  Jean  Joest.surnommé 
«Jean  de  Calcar  »,  forment  les  volets  de  cet  au- 
tel ;  l'habileté  du  dessin  et  de  la  composition, 
l'énergique  sentiment  des  expressions,  la  vigueur 
et  l'harmonie  du  coloris  font  ranger  ces  tableaux 
parmi  les  meilleures  œuvres  picturales  du  com- 
mencement du  X\'l«  siècle. 

Six  autres  rétables  sculptés  et  munis  de  volets 
peints,  forment  comme  une  couronne  autour  du 
grandiose   maître-autel.  Ce   trésor  artistique   ne 


%Yii\)à\ix  tïes  ^octétéô  gat^antes. 


523 


représente  cependant  qu'une  partie  des  richesses 
que  Calcar  possédait  jadis.  Ici  aussi  on  mutila 
les  chefs-d'œuvre  anciens,  ou  on  les  vendit  à  l'en- 
can. Un  de  ces  rétables  se  trouve  aujourd'hui, 
nous  dit-on,  au  musée  d'Anvers. 

L'église  possède  encore  maints  objets  intéres- 
sants, notamment  un  lustre  colossal,  qui  est  sus- 
pendu au  milieu  delà  nef,représentant  l'arbre  de 
Jessé.  A  la  sacristie  se  trouvent  une  série  d'objets 
d'orfèvrerie  et  d'ornements  sacerdotau.\,  con- 
temporains des  anciens  rétables.  La  tour  renfer- 
me plusieurs  cloches  anciennes. 

L'Hôtel  de  ville  de  Calcar  est  une  construc- 
tion en  briques  du  XV«  siècle,  fort  simple,  mais 
grandiose  d'aspect  et  admirablement  située  sur 
la  grand'place. 

Les  membres  de  la  Gilde  y  tinrent  une  séance 
qui  fut  naturellement  consacrée,  tout  d'abord,  à 
l'examen  raisonné  des  œuvres  d'art  visitées  pen- 
dant cette  journée.  M.  le  chanoine  Delvigne  y 
présenta  une  remarquable  étude  sur  les  divers 
modes  d'éclairage  adoptés  dans  les  églises,  depuis 
l'humble  lampe  des  catacombes  jusqu'aux  scin- 
tillantes ampoules  d'Édison,  qui  commencent  à 
pénétrer  dans  nos  sanctuaires. 


Congrès  eucharistique  d'Angers.  —  Une 
innovation  du  Congrès  d'Angers  a  été  la  section 
d'art  et  d'archéologie  religieuse.  Cette  section  a 
attiré  de  nombreuses  sympathies. 

Pour  cette  section,  plusieurs  hommes  d'une 
réelle  compétence  sont  venus  à  Angers.  Parmi 
les  questions  qui  firent  l'objet  des  discussions, 
l'une  est  ainsi  formulée:  «  Quels  objets  artistiques 
se  rapportent  au  culte  du  Saint- Sacrement  ? 
Tabernacles...  crosses  et  colombes  eucharisti- 
ques ..  dais  de  l'autel  et  de  procession...  ci- 
boires...  calices...   ostensoirs,  etc. » 

On  s'y  est  posé  aussi  une  question  pratique  : 
«  N'y  aurait-il  pas  lieu  d'établir,  à  Angers,  une 
école  d'art  religieux  comme  celle  de  Saint-Luc 
à  Bruxelles,  à  Gand  et  à  Liège  .''  »  Cette  question 
a  été  résolue  dans  un  sens  affirmatif.  Nous  som- 
mes heureux  d'enregistrer  ce  nouvel  hommage 
rendu  à  l'initiative  d'une  œuvre  que  nous  appré- 
cions si  hautement. 


Gilde  de  Saint-Bernulphe  de  Hollande.  — 
L'excursion  annuelle  a  eu  lieu  dans  le  courant 
du  mois  de  juillet.  Les  membres  de  la  Gilde 
s'étaient  donné  rendez-vous  à  Bonn,  où  ils 
furent  pilotés  durant  la  première  journée  par  le 
professeur  Paul  Clemen.  Ils  y  visitèrent  l'église 
dédiée  à  S.  Florent.  C'est  une  basilique  de  style 


roman  sur  plan  en  croix  latine,  comportant  deux 
chœurs  et  cinq  tours,  dont  une  sur  l'intersection 
du  transept.  À  noter  le  Chemin  de  la  Croix 
datant  de  11 50  environ;  le  monument  a  été 
restauré  d'une  façon  satisfaisante  ;  les  vitraux 
des  collatéraux  sont  d'un  bon  style. 

La  Société  s'est  rendue,  ensuite,  en  voiture  à 
Schwarzrheindorf,  situé  en  face  de  Bonn  sur 
l'autre  rive  du  Rhin,  pour  y  visiter  l'importante 
église  St-Georges  ;  elle  fut  consacrée  en  l'an  1151 
et  fut  construite  sur  plan  en  croix  grecque,  mais 
subit  de  1151  à  1171  de  notables  modifications 
du  côté  de  la  façade  ouest.  Cette  église  est  re- 
marquable surtout  par  ses  fresques.  Le  même 
jour  la  Gilde  se  rendit  à  Maria-Laach. 

Le  lendemain  à  7  h.  j/^  fut  dite,  par  le  Rév.doyen 
Eppinck  de  Deventer,  la  messe  à  la  mémoire 
des  membres  défunts.  A  9  h.  ^^,  il  fut  donné  aux 
excursionnistes  d'entendre  la  messe  en  chant 
grégorien  dans  l'église  conventuelle  des  RR.  PP. 
Bénédictins  ;  ils  garderont  longtemps  le  sou- 
venir  de  cette  cérémonie   émotionnante. 

L'église  bénédictine  fut  fondée  en  1093  par 
le  comte  Henri  II  et  achevée  en  11 56.  C'est  une 
basilique  à  deux  chœurs,  comportant  six  tours. 
Dans  le  chœur  ouest  se  trouve  le  sarcophage  du 
fondateur  de  l'abbaye  et  devant  l'abside,  un 
petit  Chemin  de  la  Croix,  véritable  joyau  de 
sculpture  monumentale  et  d'architectureromane. 

De  là  l'on  se  rendit  à  Andernach  à  travers 
la    ravissante  vallée  du  Brôhl. 

L'église  paroissiale  de  cette  ville  est  une  basi- 
lique sans  transept,  avec  galeries  sur  les  colla- 
téraux et  ayant  quatre  tours  ;  à  remarquer  les 
fonts  baptismaux  en  pierre  datant  du  XII'^s., 
et  un  St-Sépulcre  du  XV<=  siècle.  A  Oberwesel, 
non  loin  d'Andernach,  on  visita  la  simple  mais 
belle  église  N.-D.,  bénie  en  1331.  On  y  voit  un  bel 
autel  contemporain  de  la  construction  de  l'église, 
orné  de  multiples  statuettes  polychromées  re- 
présentant des  personnages  de  l'ancien  et  du 
nouveau  testament,  ainsi  qu'un  magnifique  jubé 
du  XIV«  siècle.  On  y  conserve  également  une 
partie  du  vieux  Chemin  de  la  Croix,  ainsi  que 
deux  belles  statues  de  la  Ste  Vierge  du  XIV'^ 
siècle. 

Le  programme  officiel  de  l'excursion  était 
ici  épuisé.  Cependant  la  plupart  des  membres 
de  la  Gilde  poussèrent  jusqu'à  la  ville  voisine 
de  Kidrich  pour  y  visiter  la  remarquable  église  si 
bien  remise  en  état,  grâce  aux  largesses  de  Lord 
Sutton.  On  y  rencontre  de  remarquables  autels, 
une  chaire  de  vérité  du  XV'=  siècle  et  les  stalles 
du  chœur.  Mais  ce  qui  frappe  surtout,  ce  sont 
les  bancs  destinés  aux  fidèles  ;  ces  bancs  sont 
uniques  dans  leur  genre  par  la  sculpture  et  la 


524 


Bebuc  ïie  T^rt  cljrétteu. 


pol}chromic  primitive.  Ils  furent  exécutés  en 
15 10  par  Erliart  Salckeiier,  d'Abcnsperck  en 
Bavière,  résidant  à  Ganoderlieim. 

En  somme  et  grâce  à  l'intelligente  direction 
du  Rév.  doyen  et  du  secrétaire  de  la  Gilde 
St-Bernulphe,  cette  excursion  marquera  parmi 
les  plus  importantes  et  les  plus  instructives  que 
la  Société  ait  faites  (-). 


Gilde  de  St  Luc  et  St-Joseph  de  Gand 
(1896-1901).  —  L'anniversaire  de  cette  modeste 
société  d'artistes  amateurs  d'archéologie  et  d'art 
contient  une  notice  de  RL  J.  Coomans,  architecte 
de  la  ville  d'Ypres,  sur  la  collégiale  de  St-Martin 
de  cette  ville. 

L'auteur  y  a  joint  des  reproductions  photo- 
graphiques singulièrement  intéressantes  des 
curieux  cloîtres  de  l'ancienne  collégiale,  deve- 
nue maintenant  cathédrale.  Le  cloître,  ci-de- 
vant occupé  par  les  sœurs  Clarisses,  était  resté 
60  ans  dérobé  à  tous  les  regards  ;  depuis  peu 
de  temps  accessible,  il  va  êtie  restauré  par 
RI.  Coomans,  et  comprend  des  parties  du  XIIL' 
et  d'autres  du  XV<=  siècle. 

Profitons  de  l'occasion  pour  noter  ici  une 
rénovation  architecturale  due  à  RI.  Coomans. 
On  sait  quelle  multitude  de  beaux  pignons  en 
bois  agrémentaient  jadis  les  rues  pittoresques 
de  la  ville  d'Ypres  ;  on  n'en  garde  guère  d'autres 
souvenirs  que  la  riche  collection  de  dessins  con- 
servés au  musée  de  la  ville  et  dus  à  un  artiste  du 
commencement  du  siècle  dernier.  RI.  Coomans 
vient  d'édiiîer  sur  le  nouveau  boulevard  à  Ypres 
trois  pignons  anciens,  d'après  la  forme  tradition- 
nelle locale  ;  ils  sont  toute  une  révélation  pour 
le  public  et  un  signal  pour  les  amateurs  d'art  de 
bon  aloi. 

L.  C. 

Commission  royale  des  Monuments  de 
Belgique.  —  Le  collège  a  tenu,  en  octobre, 
l'assemblée  générale  qu'il  a  annuellement  avec 
ses  correspondants. 

RI.  Lagasse  de  Locht,  directeur  des  bâtiments 
civils,  piésident  de  la  Commission,  avait  à  ses 
côtés  au  bureau  M  RI.  le  Rlinistre  de  la  Justice, 
de  RIontpellier,  gouverneur  de  la  province  de 
Namur,  de  Kerckhove  d'Exaerde,  gouverneur  de 
la  Elandre  orientale,  le  comte  d'Ursel,  gouver- 
neur de  la  Flandre  occidentale,  lîecco,  secrétaire 
général  du  ministre  de  l'agriculture,  Ilelbig,  vice- 
président,  etc.,  Massaux,  secrétaire  de  la  com- 
mission. 

I.   U'aprcs  Het  Cetilrtivi. 


La  séance  est  ouverte  par  une  allocution  de 
RI. Van  den  Heuvel,  qui  assure  la  Commission  des 
Monuments  de  la  reconnaissance  et  des  sympa- 
thies du  gouvernement. 

On  a  entendu  le  rapport  du  secrétaire  sur  les 
travau.x  de  la  Commission. 

M.  Rlassaux  rend  hommage  à  la  mémoire  de 
RI  RI.  A.  De  Vriendt  et  Van  Ysendyck,  que  la 
Commission  a  perdus  cette  année,  et  à  celle  de 
RI.  le  docteur  Lambert,  de  Bouillon,  qui  était 
membre  correspondant.  Il  caractérise,  par  les 
chiffres  suivants,  l'activité  de  la  Commission  : 
celle-ci  a  tenu  49  réunions,  fait  no  inspections 
d'édifices  et  donné  son  avis  sur  1200  affaires;  elle 
a  eu  de  nombreuses  conférences  avec  des  artistes 
et  des  délégués  d'administrations  publiques.  Le 
secrétaire  entre  ensuite  dans  le  détail  des  tra- 
vaux de  la  Commission,  indique  ses  préoc- 
cupations en  matière  de  restauration  et  pré- 
sente, à  propos  de  celle-ci,  diverses  considéra- 
tions. 

Les  rapports  faits  au  nom  des  Comités  provin- 
ciaux ont  suivi.  Ont  lu  ces  rapports  :  RI.  l'abbé 
Van  Caster,  de  RIalines,  remplaçant  RI.  Donnet, 
pour  Anvers  ;  M.  l'architecte  provincial  Dumor- 
tier,  pour  le  Brabant  ;  M.  Van  Ruymbeke,  bourg- 
mestre d'Oedelem,  pour  la  Flandre  occidentale  ; 
RI.  De  Ceuleneer,  professeur  à  l'Université  de 
Gand,  pour  la  Flandre  orientale  ;  RI.  l'architecte- 
ingénieur  Hubert,  de  Mons,  pour  le  Hainaut  ; 
M.Lohest,  pour  Liège;  M. l'abbé  Daniels,  archéo- 
logue à  Zolder,  pour  le  Limbourg  ;  M.  Tandel, 
commissaire  d'arrondissement  à  Arlon,  pour  le 
Luxembourg;  M.  l'architecte  provincial  Bove- 
roulle,  pour  Namur. 

Une  discussion  sur  deux  questions  d'art  devait 
avoir  lieu,  d'après  le  programme  :  la  première 
question  était  celle  du  rôle  légitime  des  formes 
de  structure  simulée  dans  l'aspect  des  monu- 
ments ;  la  seconde  était  ainsi  formulée  :  «  Qu'en- 
seignent les  découvertes  de  peintures  murales 
faites  dans  les  monuments  de  la  Belgique  1  > 

Sur  la  première  question,  il  ne  s'est  trouvé 
personne  pour  prendre  la  parole.  Nous  nous 
permettons  de  signaler  une  étude  développée 
sur  ce  sujet,  contenu  dans  un  récent  ouvrage  du 
secrétaire  de  la  Revue  de  l Art  chrétien  ('). 

Sur  la  seconde,  RI.  l'abbé  Van  Caster  a  repro- 
duit l'opinion  qu'il  avait  déjà  soutenue,  dans  une 
polémique,  contre  RI.  Hclbig,  à  savoir  qu'aucune 
décoration  picturale  n'a  été  exécutée,  dans  une 
grande  église  belge,  selon  un  plan  d'ensemble;  la 
cause  en  est,  ou  que  ces  monuments  étaient  trop 
vastes, ou  que  l'édifice  était  construit  en  plusieurs 

I.    L.   Cloquet,    Tniilé  d' Archilecture,  t.   V,   pp.  75  à  86. 


%vù\}anx  Des  Sociétés  satjante©. 


525 


fois,  au  cours  de  plusieurs  siècles  ;  l'église  étant 
construite  sur  des  plans  successifs,  comment 
eût-elle  pu  être  polychromée  selon  le  plan  d'en- 
semble d'un  architecte? 

M,  l'abbé  Daniels  a  cité,  à  l'encontre  de  cette 
opinion,  l'exemple  de  l'église  de  Neeroeteren 
(Limbourg).  Il  a  fait  observer  qu'une  décoration 
d'ensemble  selon  un  plan  uniforme  pouvait  tou- 
jours avoir  eu  lieu  après  l'achèvement  de  l'église 
et  être  ainsi  plus  ou  moins  contemporaine  de 
l'église. 

M.  le  chanoine  Sosson  signale  la  polychromie 
de  l'église  de  Bourcy  (Luxembourg)  :  c'est  une 
polychromie  faite  selon  un  plan  uniforme  ;  le 
sujet  en  est  le  VI^  livre  de  l'Apocalypse. 

—  Si  on  trouve  çà  et  là  des  polychromies  dans 
des  églises,  ce  n'est  pas  une  raison  pour  poly- 
chromer  tous  les  édifices  religieux  de  Belgique, 
dit  M.  l'architecte  Bordiau. 

Plusieurs  observations  de  détail  sont  encore 
présentées.  On  décide  de  laisser  la  question  à 
l'ordre  du  jour  de  la  réunion  de  l'an  prochain,  où 
elle  fera  sans  doute  l'objet  d'une  plus  ample  dis- 
cussion. 

La  séance  se  termine  par  la  lecture  de  plusieurs 
passages  d'un  travail  envo)'é  par  M.  le  baron 
Béthune,  député  permanent  de  la  Flandre  occi- 
dentale, et  qui  traite  de  la  technique  du  vitrail. 
Ce  travail  nous  paraît  tout  à  fait  remarquable. 
Nous  comptons)'  revenir  quand  le  compte  rend- 
officiel  de  la  séance  nous  aura  permis  d'en  pren 
dre  connaissance  à  tête  reposée. 

Le  Congrès  archéologique  de  Tongres.  — 
Les  congressistes,  conduits  par  M.  le  chevalier 
Oscar  Schaetzen,  vice-président  du  Congrès, 
ont  fait  une  excursion  à  Maestricht.  Après  avoir 
été  reçus  à  l'hôtel  de  ville  par  les  autorités,  les 
congressistes  ont  visité  les  principaux  monu- 
ments de  la  ville. 

Les  sections  ont  abordé  leur  ordre  du  jour. 

A  la  i'«  section  (études  préliistoriques),  M. 
Foudrignier  discute  longuement  les  vues  émises 
au  sujet  des  bas-reliefs  de  la  Gaule-Belgique  re- 
présentant des  scènes  de  métiers;  MM.  Comhaire 
et  Bertrand  ont  traité  de  la  détermination  de  la 
verrerie  franque. 

A  la  2*=  section  (histoire),  M.  Arendt  parle  de 
la  restauration  des  monuments  et  ruines  histori- 
ques ;  M.  le  président  de  Ghellinck  lit  une  étude 
iconographique  de  M.  Germain  de  Maidy  sur  la 
Vierge  Marie  et  le  Serpent,  qu'on  trouvera  re- 
produit sous  notre  rubrique  «  Mélanges  ». 

Sur  la  proposition  de  M.  le  chevalier  Schaet- 
zen, l'assemblée  émet  le   vreu   de   voir  restaurer 


complètement  l'église  de  Notre-Dame   de   Ton- 
gres. 

M.  le  D''  Jorissenne  caractérise  l'architecture 
wallonne  du  XVIî^  siècle. 

M.  Gielen  expose  quelques  idées  sur  la  restau- 
ration des  peintures  murales. 

M.  Jos.  Hubert  montre  comment  on  peut  re- 
constituer les  porches  du  transept  de  l'église 
Sainte-Waudru  de  Mons,  d'après  les  données 
fournies  par   le  monument  lui-même. 

A  la  3e  section  (Archéologie  et  architecture), 
M.  Mathieu  traite  des  monographies  commu- 
nales. La  question  de  la  rectification  des  armoi- 
ries communales  amène  une  longue  discussion 
entre  MM.  l'abbé  Daniels,  Gielen,  De  Pauw,  che- 
valier de  Borman,  Mathieu  et  le  comte  de  Re- 
nesse.  M.  l'abbé  Nouwen  fait  une  intéressante 
causerie  sur  les  préparatifs  de  la  première  croi- 
sade. M.  Donnet  fait  ressortir  le  rôle  de  la  pa- 
pauté dans  l'organisation  de  la  croisade. 

Des  excursions  ont  eu  lieu  aux  environs  de 
Tongres  :  ruines  de  Colmont,  tumuli,  fouilles  à 
Coninxheim,  etc. 

Un  grand  nombre  de  congressistes  ont  visité 
les  enceintes  de  Tongres  et  un  tumulus  ouvert 
à  leur  intention.  Ils  ont  assisté  à  une  fouille  inté- 
ressante dans  un  champ  de  Koninxheim.  Cette 
fouille  a  donné  un  résultat  aussi  important  qu'in- 
attendu. Après  avoir  déterré  une  quantité  d'ob- 
jets ordinaires,  on  est  tombé  sur  un  tombeau  de 
femme,  renfermant  une  quantité  d'objets  en 
bronze  émaillé  de  toute  beauté,  un  petit  miroir 
circulaire,  etc.  Cette  trouvaille  a  été  une  surprise 
agréable  pour  les  excursionnistes. 

La  i>e  section  seule  a  continué  mercredi  son 
travail. 

M.  Foudrignier  a  parlé  des  découvertes  de  l'âge 
du  bronze  faites  en  Belgique,  et  M.  Montelius, 
un  Suédois,  a  présenté  quelques  observations  à 
ce  sujet.  M.  L.  Bertrand  a  parlé  de  l'homme  pré- 
historique, M.  Arendt,  de  l'utilité  des  collections 
privées. 

M.  Guignard  s'est  occupé  de  l'analogie  qui 
existe  entre  les  tumuli  de  Belgique  et  ceux  de 
France,  au  point  de  vue  de  l'âge  de  la  pierre  et 
de  l'âge  du  bronze. 

L'assemblée  générale  de  clôture  s'est  tenue  au 
palais  de  justice.  Au  bureau,  MM.  le  comte  de 
Heinricourt  de  Grunne,  président;  Ose. Schaetzen 
Montelius  et  Huybrechts. 

On  a  entendu  des  rapports  intéressants  de 
MM.  Ubrix,  Mathieu,  abbé  Remy,  et  Libot.  Puis 
on  a  déclaré  que  le  prochain  Congrès  se  tiendrait 
à  Bruges. 

M.  le  comte  de  Grunne  a  prononcé  ensuite,  au 
milieu  d'applaudissements  enthousiastes,  le  dis- 
cours de  clôture. 


528 


3Rebue  tie  Tiart  cbrctien» 


mine  le  Château  des  sept  tours,  l'ancien  Cyclobion, 
élevé  par  les  Musulmans.  Ces  murs  ont  résisté 
jusqu'ici,  mais  il  est  temps  qu'on  les  sauve! 

Emporté  par  son  enthousiasme  en  présence 
des  églises  byzantines,  M.  Soil  y  voit  le  type 
possible  d'une  rénovation  de  notre  art  du  XX'= 
siècle,  exprimant  après  M.  Gosset  une  opinion 
que  nous  avons  combattue  dans  ces  colonnes  ('). 

Sainte-Sophie  est  trop  connue  pour  que  nous 
nous  y  arrêtions,  sinon  pour  signaler  les  belles 
vues,  intérieure  et  extérieure,  qu'en  donne  notre 
voyageur  ;  celle  de  l'esonarthex  sera  une  nou- 
veauté pour  bien  des  lecteurs.  Sainte-Sophie  est 
le  chef-d'œuvre  de  l'art  byzantin,  d'un  art  en 
formation  depuis  deux  siècles.  Des  débuts  (com- 
mencement du  IV'^  siècle),  Constantinople  garde 
les  églises  de  St-Jean  Stoudios,  de  St-Théodore 
de  Tyrone,  des  SSts-Serge  et  Bacchus;  les  deux 
premières,  transformées  en  mosquées,  sont  for- 
tement remaniées.  La  troisième  est  connue  sous  le 
nom  de  petite  Ste-Sophie.  Carrée  à  l'extérieur 
(34  m.  sur  30),  elle  est  à  l'intérieur  octogonale, 
comme  St-Vital  de  Ravenne,  à  quatre  pans  plats, 
à  quatre  autres  munis  d'absidioles  ;  l'une,  al- 
longée, forme  le  chœur  ;  huit  pendentifs  sup- 
portent le  tambour  portant  la  coupole,  qui  est 
surbaissée,  à  côtes  saillantes. 

Après  Saint-Serge  vient  Sainte-Sophie,  après 
celle-ci,  Sainte-Irène,  construite  par  Justinien  et 
restaurée  au  VIII''  siècle;  simple  d'allure,  de 
forme  basilicale  allongée,  elle  offre  une  coupole 
surbaissée  sur  un  tambour  rond. 

L'église  de  la  Mère  de  Dieu,  la  Theotocos,  date 
du  X'^  siècle  ;  celle  du  Pantocrator  fut  élevée  en 
1124  ;  celle  de  la  l'anmacharistos  fut  fondée  au 
XII'^  siècle.  L'église  du  Christ,  fondée  par  Jus- 
tinien, fut  reconstruite  à  la  fin  du  XI^  siècle  ; 
précédée  d'un  double  nartiiex,  bâtie  sur  plan 
carré,  sa  coupole  porte  sur  un  tambour  ;  elle  a 
un  chœur  circulaire  en  saillie  sur  la  façade  orien- 
tale. 

Quant  aux  mosquées  musulmanes,  elles  re- 
produisent un  type  constant.  La  grande  coupole 
centrale  est  contrebutée  par  des  demi-coupoles 
secondaires,  supportées  à  leur  tour  par  des  demi- 
coupoles  basses,et  enveloppées  d'annexés  couver- 
tes d'une  série  de  petites  coupoles.  La  mosquée 
est  précédée  de  l'atrium  ou  portique,  au  centre 
duquel  s'élève  la  fontaine  aux  ablutions;  d'autres 
lavabos  sont  établis  sur  les  flancs  de  l'édifice. 
Deux,  quatre,  six  minarets  à  balcons  flanquent 
l'édifice,  qu'entourent  des  écoles,  des  hôpitaux, 
les  demeures  de  prêtres  et  des  cimetières.  C'est 
le  système  de  Ste-Sophie  développé  d'une  ma- 
nière complète.  Énumérons  les  principales  mos- 

I.  V.  Revue  de  V Art  chrétien,  année  1899,  p.  444. 


quée,s  érigées  par  les  Musulmans,  par  ordre  de 
date. 

Daoud pacha  Djaini  (mosquée)  date  de  14S2  ; 
Eyonb  Djaini,  construite  par  Mahomet  le  Con- 
quérant en  1460,  est  interdite  aux  Chrétiens. 
Mahmoud  Pacha  Djanii  (XV'^),  avec  la  Baja- 
zidié  {mosç\néç.  de  Rajazet),  sont  surtout  remar- 
quables. La  dernière  dessine  en  plan  un  carré, 
au  centre  duquel  quatre  piliers  massifs  portent, 
par  l'intermédiaire  d'autant  d'arcs,  la  coupole,  sur 
tambour  ;  sur  deu.x  côtés  s'appuyent  des  demi- 
coupoles  comme  à  Ste-Sophie  ;  sur  les  deux 
autres  régnent  des  bas-côtés  couverts  de  petites 
coupoles  ;  un  atrium   précède  l'édifice. 

La  Shali  Zadc  Djami,  élevée  en  1543  par  Soli- 
man, représente  le  type  complet  :  coupole  cen- 
trale épaulée  par  quatre  demi-coupoles, soutenues 
elles-mêmes  par  3  demi-coupoles  plus  petites,  le 
tout  inscrit  dans  un  carré  ;  portiques  ogivaux, 
minaret  élégant,  décor  délicat. 

Sidcïinanié,  mosquée  de  Soliman  le  Magni- 
fique, bâtie  de  1550  a  1566  par  le  célèbre  archi- 
tecte Sinan,  est  la  reine  des  mosquées  de  Stam- 
boul. La  coupole  centrale,  de  26  m.  de  diamètre, 
élancée,  s'appuie  sur  deux  coupoles  garnies  de 
trois  absidioles  et  aux  quatre  angles  se  dressent 
quatre  grandes  coupoles,  sans  préjudice  des 
petites.  L'ensemble  mesure  6g  mètres  sur  G}).  Ici 
apparaissent  les  stalactites. 

'L'Ahtncdié,  ou  mosquée  d'Achmet,  brûlée  en 
1610,  est  à  quatre  demi-coupoles  appuyant  le 
dôme  central  ;  ses  six  minarets  font  sa  gloire  ; 
elle  mesure  72  mètres  sur  64;  elle  a  deux  galeries 
d'étage. 

Nous  passons  sur  les  autres.  M.  Soil  décrit 
encore  les  Turbcs  (tombeaux),  les  fontaines  et 
les  autres  monuments  de  l'époque  ottomane,  et 
passe  à  la  ville  moderne. 

L.  C. 


DEFORMATION  D'UNE  LÉGENDE  DE 
SAINTE  GENEVIÈVE,  par  H.  JoUY  (Ext.  du 
Bull,  de  la  conf.  d'hisl.  et  d'arch.  de  Mcaux,  1901). 

Examinant  un  bas-relief  ancien,  M.  le  cha- 
noine Jouy  étudie  l'iconographie  de  la  patronne 
de  Paris,  abusivement  représentée  sous  les  traits 
d'une  bergère  à  partir  du  XIV'=  siècle  et  surtout 
depuis  le  poème  de  Pierre  du  Pont,  surnommé 
l'aveugle  de  Bruges.  Les  poètes  et  non  les  histo- 
riens, ni  même  les  artistes  sérieusement  docu- 
mentés, ont  travesti  en  pastourelle  la  libératrice 
de  la  P'rance.  Sa  plus  ancienne  image  connue  est 
la  statue  du  porche  de  Saint-Germain-l'Auxer- 
rois  :  tête  voilée,  un  cierge  dans  la  main  droite, 
un  livre  dans  la  main  gauche,  un  diable  sous  les 


BtbUograpl)te. 


529 


pieds  (XIII'=  s.).  La  bougie  éteinte  par  le  vent 
ou  par  le  diable,  rallumée  miraculeusement,  est 
sa  caractéristique   la  plus  précise,  à  laquelle  on 


peut  ajouter  les  clés.  La  courte  mais  substan- 
tielle notice  de  M.  Jouy,  d'une  sérieuse  érudition, 
est   un   modèle  d'étude   iconographique. 

L.  C, 


L'ABCHÉOLOGIE  DU  MOYEN  AGK  EN 
FRANCE,  par  M.  Anthyme  Saint-Paul  (Extrait 
du  Compte  rendu  des  travaux  du  Congrès  bihliographi- 
que  international àz  1898). 

Nous  devons  signaler  (il  n'est  jamais  trop  tard 
pour  bien  faire)  une  notice  ancienne  déjà,  très 
brève,  mais  trop  importante  pour  n'être  pas  notée 
dans  notre  recueil. 

Au  Congrès  scientifique  de  Bruxelles,  feu  de 
Marsy  avait  donné  un  rapport  substantiel  du 
mouvement  des  études  d'archéologie  religieuse 
en  France,  de  1S91  à  1894.  De  son  côté,  M.  A. 
S. -P.  reprend  le  mouvement  de  l'archéologie 
médiévale  durant  la  période  décennale  brillante 
qui  finit  en  1898. 

Parmi  les  périodiques,  il  fait  à  la  Revue  de 
r Art  chrétien  l'honneur  de  la  citer  en  tête,  avec  le 
Bulletin  monumental.  A  côté  de  ces  deux  revues 
viennent  se  placer  l'Ami  des  monuments  français 


de  M.  Ch.  Normand,  le  Bulletin  archcologique  et  la 
Revue  archéologique  de  Jules  Quicherat.  Puis 
viennent  le  Moyen  Age,  \ Archéologie,  la  Corres- 
pondance historique  et  archéologique  ;  les  Notes 
d'art  et  d'archéologie  de  la  Société  de  Saint-Jean. 
Parmi  les  grandes  publications  illustrées  non 
périodiques,  il  faut  mettre  hors  ligne  :  le  Dic- 
tionnaire de  la  Fratice  de  M.  Joanne  et  la  France 
artistique  et  monumentale  de  M.  Havard. 

Les  sociétés  provinciales  ont  apporté  leur 
contingent  considérable. 

La  série  des  monographies  est  surtout  remar- 
quable ;  nous  les  avons  annoncées  avec  soin  au 
fur  et  à  mesure  de  leur  apparition. 

D'une  manière  plus  spéciale,  l'art  médiéval  a 
été  étudié  par  MM.  Gonse,  Muntz,  Palustre,  de 
Lasteyrie,  Rupin,  de  Farcy,  par  Mgr  Barbier  de 
Montault  et  par  les  brillants  élèves  de  l'Ecole  des 
Chartes  :  G.  Durand,  de  Cessac,  Lefebvre-Pon- 
talis,  Virey,  Enlart,  Join-Lambert,  Thiollier,  de 
Crèvecœur,  Royet.  Il  faut  encore  citer  Corroyer, 
Brutails,  Berthelé,  Demaison,  L.  Régnier,  le  D"^ 
Coutan,  l'abbé  Bouxin,  l'abbé  Dumaine,  Mortet, 
E.  Lambin,  etc.,  et  surtout  ne  pas  oublier 
M.  Anthyme  Saint-Paul  lui-même,  l'éminent 
auteur  de  tant  d'études  approfondies,  que  résume 
son  bel  ouvrage  la  France  monumentale. 

L.  C. 


LA  BASILIQUE  DE  SAINT-REMI  A  REIMS, 
par  A.  GossET.  In-4°  de  90  pp.  et  40  pi.  —  Paris, 
Librairies  réunies,  1900. 

M.  Gosset  peut  être  considéré  comme  un  des 
plus  méritants  parmi  les  citoyens  de  la  noble  cité 
rémoise.  Auteur  de  nombreux  travaux  d'érudi- 
tion et  d'importantes  conceptions  architecturales, 
notamment  de  l'église  votive  de  Ste-Clotilde, 
il  a  consacré  aux  deux  grandes  églises  de  Reims 
des  monographies  de  premier  ordre.  Nous  avons 
jadis  fait  connaître  sa  très  belle  description  de  la 
cathédrale  ;  nous  saluons  à  présent  l'apparition 
d'un  autre  ouvrage  naguère  annoncé  à  nos 
lecteurs. 

L'église  de  St-Remi,  telle  qu'elle  existe,  est 
celle  que  reconstruisit  l'évêque  Thierry,  sacré 
en  1034,  et  que  le  pape  Léon  IX  consacra  en 
1049.  La  façade  principale,  comme  le  remarque 
l'auteur,  n'est  pas  le  monumental  frontispice  qui 
conviendrait  à  la  vaste  et  vénérable  basilique. 
Les  façades  latérales  sont  fort  modestes,  mais 
par  contre  très  instructives  ;  on  y  peut  suivre 
les  transformations  de  l'église  romane  et  l'évolu- 
tion architecturale  depuis  la  basilique  aux  murs 
épais  et  lisses  jusqu'aux  claires-voies  du  XIV^* 
siècle  et   au.x   floraisons  flamboyantes  du  XV>^  ; 


530 


3Rrl)uc  tie  V^xt  i\)Xttinh 


c'est  tout  un  exposé  de  l'histoire  de  l'architecture 
durant  cinq  siècles.  Ce  qui  distingue  surtout  St- 
Remi,  c'est  la  magnifique  abside  élevée  en  i  170 
et  sa  belle  claire-voie  mallieureusemetit  rompue 
par  des  piliers-butants,  surajoutés  et  dispropor- 
tionnés. Elle  est  contournée  par  de  curieuses 
absidioles  sur  plan  circulaire;  M.  G.  fait  claire- 
ment saisir  l'habileté  du  constructeur,  qui  a 
résolu  d'une  manière  si  particulière  une  diffi- 
culté nouvelle  et  préparé  d'autres  solutions  aux 
constructeurs  des  cathédrales  de  Paris,  de 
Bourges,  du  Mans  et  de  Tolède.  On  reconstruisit 
à  la  même  époque  les  voûtes  du  transept  et  l'on 
rebâtit  deux  travées  de  la  nef  à  la  place  du 
narthex.  Le  triforium  de  St-Remi,  d'un  effet  si 
saisissant,  est  un  des  chefs-d'œuvre  de  l'école 
champenoise.  On  trouvera  dans  l'ouvrage  la 
reproduction  et  le  commentaire  iconographique 
du  curieux  pavement  de  la  chapelle  St-Éloy, 
ainsi  que  des  fameuses  tapisseries  données  en 
1531  par  Robert  de  Lenoncourt. 

Les  planches  de  cet  ouvrage  n'ont  pas  toutes 
l'élégance  de  celles  de  la  cathédrale  ;  elles  sont 
du  moins  claires  et   singulièrement  instructives. 

L.  C. 


LA  RKCONSTRUCTION  DE  L'ÉGLISE  DE 
VINÇA  1734-1769.  (Brochure  extraite  de  la  J?evue 
d'hist.  et  d'arch'eol.  du  Roussillon^ 

M.  J.  Sarrète  fait,  d'après  des  documents  d'ar- 
chives, le  récit,  plus  intéressant  au  point  de  vue 
épisodique  et  local  qu'au  point  de  vue  de  l'art  et 
de  l'archéologie,  des  curieuses  péripéties  qui  ont 
marqué  la  reconstruction  de  cette  église. 


L.  C. 


LES  SÉPULTURES  ANTIQUES  DU  PAYS 
NANTAIS,  L'AGE  DE  L'ÉGLISE  DE  DEAS  A 
SAINT-PHILIBERT  DE  GRANDLIEU,  par 
L.  Maître.  (Brochure  extraite  du  Bulletin  archéolo- 
gique,  igoo.  Paris,  Imprimerie  nat.) 

Les  plus  anciens  tombeaux  chrétiens  en  Gaule 
sont,  comme  on  sait,  des  coffres  rectangulaires  en 
pierre  ;  le  plus  souvent  ceux  du  Midi  sont  riche- 
ment sculptés.  Le  cercueil  en  pierre  est  de  règle 
jusqu'à  l'an  Mille  ;  plus  tard  il  est  réservé  aux 
personnages;  les  simples  fidèles  se  contentent  du 
cercucil'en  bois.  Les  anciens  sarcophages  païens 
et  chrétiens,  identiques  de  forme, se  reconnaissent 
à  l'orientation  de  ces  derniers  ;  les  premiers,  aux 
vases  à  parfums  déposés  auprès  des  corps.  Telles 
sont  les  généralités  de  cette  étude,  que  feu  Ed.  Le 
Blant  a  traitée  à  fond  pour  la  Gaule,  et  que  M. 
Maître    reprend    pour    la    contrée   nantaise.    II 


signale  les  emplacements  des  anciens  cime  tières 
étudie  la  matière,  la  forme  et  la  décoration  des 
sarcophages.  L'ensemble  des  observations  qu'il 
consigne  accuse  une  population  dense  groupée 
autour  de  ses  églises  dès  les  temps  mérovingiens. 
Mais  on  est  loin  de  pouvoir  préciser  l'ordre 
chronologique  des  vestiges  recueillis,  ou  tirer  des 
déductions  historiques  positives  de  cette  étude 
encore  pleine  de  mystères. 

Nous  avons  rendu  compte  antérieurement  de 
la  notice  consacrée  par  M.  Maître  à  l'église  de 
Grandlieu  ('). 


VIEUX  COINS  EN  FLANDRE,  par  A.  IIeiNS. 
3^  livr.  de  40  pi.  petit  in-folio.  Gand,  Heins,  1901. 
Prix  :  24  fr. 

Sous  la  préoccupation  archéologique  qui  do- 
mine présentement  le  monde  des  lettré?,  une 
enquête  spontanée  s'est  ouverte  de  toutes  parts 
au  sujet  des  vestiges  de  l'ancien  art  monumental. 
Nous  disions  récemment  ce  que  MM.  Thiollier 
ont  fait  en  Auvergne  d'une  manière  accomplie, 
qui  ne  laisse  plus  rien  à  faire  après  eux.  En 
Flandre,  ce  travail  s'opère  d'une  façon  plus  dé- 
cousue, mais  se  poursuit  néanmoins  avec  succès. 
Le  baron  Bethune  a  commencé  dans  la  Revue 
de  r Art  chrétien  une  série  de  monographies 
d'églises  romanes  de  la  Flandre  occidentale. 
Depuis  longtemps  MM.  Van  Houck  et  Lange- 
rock,  dans  leur  excellente  publication:  Anciennes 
constructions  de  Flandre,  M.  Mommcns  dans  ses 
Croquis  d' Architecture,  M.  Laureys,  dans  son 
petit  recueil:  La  Belgique  au  moyen  âge,  M.  Van 
Assche  dans  quelques  belles  monographies  très 
connues,  la  Gilde  de  St-TIwinas  et  St-Luc  dans 
ses  Bulletins  si  documentés,  d'autres  encore  ont 
levé  les  plans  des  principales  églises  rurales  de 
la  Flandre  orientale  et  donné  des  notices  de 
leur  histoire.  Ces  monographies,  souvent  très 
étudiées,  sont  loin  de  former  encore  un  ensemble. 
M.  P.  Bergmans  dans  une  élégante  préface  qu'il 
a  écrite  pour  le  recueil  de  M.  Ileins  apprécie  de 
façon  trop  peu  indulgente  ces  relevés,  généra- 
lement excellents,  qui  valent  pour  l'étude  ce  que 
les  croquis  pittoresques  valent  pour  l'agrément 
et  la  vulgarisation. 

En  attendant  qu'on  en  complète  la  collection, 
M.  A.  Ileins  nous  rend  un  grand  service  en 
entreprenant  le  relevé  pittoresque  des  vieilles 
constructions  de  la  Flandre  orientale,  relevé  un 
peu  superficiel,  mais  général  et  systématique. 
Après  avoir  crayonné  les  Vieux  ceins  de  Gand, 
il  illustre  les  Vieux  coins  de  la  /province.  Ses 
planches  lithographiées  de  chic   nous  donnent 

I.  Revue  de  r  A  ri  c/trélicn,  année  1901,  p.  332. 


2i5tbliograpl)te* 


531 


des  croquis  légers,  mais  savoureux,  des  silhouet- 
tes sommaires,  mais  bien  senties,  des  impressions 
justes  et  vives.  Il  parcourt  le  pays  et  ses  recoins 
en  de  gaies  promenades,  auxquelles  on  serait 
heureux  d'avoir  le  temps  de  prendre  part  ;  rien 
n'échappe  à  son  œil  d'artiste,  et  son  alerte  crayon 
relève  tout  ce  qui  mérite  de  ne  pas  tomber  dans 
l'oubli.  Là  où  tant  d'autres  sont  passés  en 
aveugles,  il  découvre  quelque  charmant  morceau: 
un  chevet  de  chapelle  gothique,  une  tour  romane, 
une  poterne  de  manoir,  une  charmille  de  vieux 
parc,  un  reste  de  donjon,  un  vieux  pilori,  un 
banc  de  justice,  un  châtaignier  géant,  un  tilleul 
séculaire,  une  ruine  de  prieuré,  une  porte  monu- 
mentale de  vieille  auberge.  Surtout  il  nous  ap- 
porte les  croquis  d'une  multitude  de  jolies  églises 
flamandes,  et  l'on  ne  se  figure  pas  combien  on  y 
retrouve  de  restes  de  l'époque  romane  ;  combien 
surtout,  de  ces  jolies  tours  caractéristiques  de  la 
région  émergeant  de  la  croisée  du  transept,  pas- 
sant d'une  souche  carrée  à  une  lanterne  octo- 
gonale à  l'aide  de  gracieux  amortissements  en 
demi-pyramide,  et  s'ajourant  d'élégantes  baies 
géminées. 

L.  C. 


LK    MOBILIER    D'ART    DU    VAL-DIEU,    par 

M.  l'abbé  Desvaux.  Broch.  Veaux,  Mortagne,  1901. 

Quand  il  était  curé  de  la  paroisse  où  se  trouve 
le  Val-Dieu,  M.  l'abbé  Desvaux  s'est  attaché  à 
l'étude  du  monastère,  de  ses  ruines,  de  son  passé, 
et  il  a  amassé  les  matériaux  d'une  histoire, 
que,  nous  l'espérons,  Dieu  lui  donnera  le  temps 
d'écrire.  En  attendant  il  publie  des  notices  frag- 
mentaires. Nous  en  annoncions  une,  dans  notre 
dernière  livraison  (p.  435).  Sous  le  même  titre, 
depuis,  il  a  fourni  une  réponse  à  des  demandes  de 
renseignements  de  M.  Tournotier,  en  offrant  des 
détails  sur  le  mobilier  d'art  de  ce  monastère. 

L.  C. 


ROGER  VAN  DER  WEYDEN  &  LES  «  YMA- 
GIERS  »  DE  TOURNAI,  par  L.  MAETERLINCK. 
Broch.  extraite  du  t.  LX  des  Mémoires  œmvntiés  par 
r Académie  royale  de  Belgique,  1 900. 

Jean  Van  Eyck  apparaît  à  l'aube  de  la  pein- 
ture flamande,  avec  son  frère  Hubert,  comme  le 
maître  incontesté  de  l'école  flamande  ;  cependant 
un  peintre  reste  indépendant  de  ce  génial  artiste, 
c'est  le  fameux  Roger  de  la  Pasture,  pour  em- 
ployer son  nom  d'origine.  Si  le  premier  fut  le 
peintre  attitré  des  princes,  le  second  fut  celui 
du  peuple  croyant  et  souffrant  ;  son  art  est  dra- 
matique ;  ses   personnages    sont  remués  par  la 


joie  et  la  douleur  en  même  temps  qu'ils  sont 
profondément  pieux.  D'où  tient-il  des  principes 
d'art  si  absolus  ? 

L'origine  tournaisienne  de  Roger,  qu'on  a 
tant  contestée,  commence  à  être  universellement 
reconnue.  Après  A.  Pinchatt  et  Monseigneur 
Dehaisnes,  avec  feu  le  baron  de  Lagrange,  nous 
avons  montré,  comme  vient  l'attester  M.  Mae- 
terlinck, le  rôle  et  l'importance  de  l'art  sculptural 
tournaisien  dans  cette  renaissance  anticipée 
reconnue  par  L.  Courajod.  Après  avoir  résume 
le  résultat  de  nos  recherches  sur  les  anciens 
ateliers  tournaisiens  et  sur  le  vaste  débouché  de 
leurs  produits  ('),  le  distingué  conservateur  du 
Musée  de  peinture  de  Gand  en  tire  une  déduction 
des  plus  intéressantes. 

M.  A.  Philippi  avait  fait  naguère  cette  re- 
marque curieuse  : 

«  L'art  de  Roger  Van  der  Weyden  nous  rap- 
pelle qu'il  y  avait  à  Tournai  d'excellents  sculp- 
teurs »  (2);  M.  E.  Baes  reconnaît  de  son  côté,  que 
Roger  doit  être  influencé  par  l'art  sculptural  de 
Tournai  «  si  intimement  lié  à  la  peinture  ». 

M.  Maeterlinck  pousse  plus  loin  cette  impor- 
tante observation.  Examinant  la  plus  ancienne 
œuvre  connue  du  maître  tournaisien,  le  petit 
retable  de  Miraflorès,  actuellement  au  musée 
de  Berlin  (n°  534),  il  en  dégage  des  traits  d'ana- 
logie avec  les  sculptures  contemporaines  de 
l'école  de  Tournai,  et  il  constate  que  d'autres 
œuvres  du  peintre  présentent  un  caractère  sculp- 
tural ;  il  en  est  qui  produisent  l'effet  d'un  bas- 
relief  superbement  polychromé.Les  compositions 
sont  resserrées  et  symétriques,  on  y  retrouve 
souvent  les  deux  anges  soulevant  une  draperie 
si  caractéristiques  des  bas-reliefs  votifs  de  Tour- 
nai. 

L.  C. 


HISTOIRE  DE  NOTRE-DAME  DU  DÉSERT, 
par  M.  A.  J.  Devoisins.  Gr.  in-S",  illustré,  220  pp. 
—  Paris,  Lechevalier,  1901. 

Les  curés  de  campagne,  par  une  entente  tacite, 
rassemblent  pour  une  grande  part,  mais  trop 
lentement  à  notre  gré,  la  précieuse  collection 
des  monographies  paroissiales  de  France,  tâche 
qui  leur  est  naturellement  dévolue  et  réservée  : 
à  côté  d'eux,  les  médecins,  en  leur  qualité  de 
lettrés  parfois  trop  riches  de  loisirs,  sont  bien 
placés  pour  y  collaborer.  C'est  toujours  une  belle 
et  bonne  œuvre,  de  sauver  de  l'oubli  les  souve- 
nirs du  passé;  quand  on  n'a  pas  la  bonne  fortune 

1.  V.  De  Lagrange  et  Cloquet,  Études  sur  l'Art  de  Tournai. 

2.  A.  Philippi.  Die  Kunst  in  dcn  XI",  nnd  XVI  Jahrhunderl  in 
Ddictschland  und  in  den  Nederlanden.  Leipzig,  i8g8. 


532 


3artur  tir  r^lrt  tbrttten. 


d'exhumer  du  sol  des  vestiges  archéologiques  et 
des  vieux  parchemins,  des  révélations  histo- 
riques, encore  peut-on  appliquer  son  talent  à 
vulgariser  les  données  de  l'histoire  locale,  à 
faire  revivre  les  traditions,  à  perpétuer  dans  le 
peuple  l'amour  des  ancêtres,  le  culte  des  saints 
locaux,  les  poétiques  et  pieuses  histoires.  C'est  a 
quoi  s'est  appliqué  le  D'  Devoisins,  sans  préten- 
tions scientifiques,  mais  non  sans  préparation 
liistorique   et   sans  talent   littéraire. 

Il  recherche  les  traces  de  la  civilisation  anti- 
que dans  le  pays  des  Aulerques  où  les  Romains 
ont  exploité  le  fer,  et  les  souvenirs  des  premiers 
chrétiens  dans  cette  petiteThébaïde  sanctifiée  par 
Melonius,  le  futur  évéque  de  Reims.  Il  décrit  la 
crypte  de  N.-D.  du  Désert,  cet  hypogée  en 
forme  de  croix  recroisettée,  qui  ne  serait,  selon 
M.  le  chanoine  Forée,  qu'une  cave  à  vin,  mais  qui 
abrita  les  reliques  de  sainte  Suzanne.  Il  raconte 
la  vie  et  retrace  le  culte  de  cette  vierge  martyre, 
une  des  huit  que  l'Église  honore  sous  le  même 
nom.  Il  raconte  la  légende  du  grand  chêne  et 
résume  l'existence  au  Désert  de  Fulbert,  l'ancien 
évêque  d'Evreux  et  le  futur  évêque  de  Reims. 
Puis  il  fait  l'historique  de  la  fondation  du  prieuré 
de  N.-D.  du  Désert,  et  de  celle  de  l'abbaye  de 
la  Chaise-Dieu  et  de  l'abbaye  de  N.-D.  de  Lyre; 
il  poursuit  enfin  l'histoire  de  N.-D.  du  Désert. 

C'est  par  de  tels  livres,  où  l'érudition  sérieuse 
est  rehaussée  par  le  charme  littéraire,  qu'il  est  dé- 
sirable de  voir  remplacer  tant  de  pieux  libelles 
d'une  naïveté  inepte  et  désespérante. 

L.  C. 


TRAITÉ  D'ARCHITECTURE,   tome    V    (esthé- 
tique, composition  et   décoration),   par  L.  Cloquet, 
architecte,  ingénieur  honoraire  des  ponts  et  chaussées, 
professeur  à  l'Université  de  Gand.  (Paris   et   Liège,  ■ 
Ch.  Béranger,  successeur  de  Baudry  et  C'%  édit.) 

Voici  un  ouvrage  considérable  et  appelé  à  tenir 
une  grande  place.  La  littérature  de  l'architecture 
ne  PC  compose,  à  part  le  Dictionnaire  Ae.  Viollet- 
le-Duc,  que  d'un  petit  nombre  de  traités  qui  ne 
sont  guère  que  des  énumérations  de  règles  empi- 
riques et  tl'une  foule  de  travaux  d'importance  très 
diverse,  traitant  chacun  d'un  point  plus  ou  moins 
intéressant.  Il  n'existe  pas  d'ouvrage  d'ensemble, 
établissant  les  principes  de  la  composition  archi- 
tecturale, en  se  basant  sur  une  doctrine.  Ce  n'est 
que  dans  les  cours  oraux  que  l'on  peut  puiser  les 
connaissances  directrices  sans  lesquelles  l'art  de 
l'architecte  ne  s'élève  pas  au-dessus  de  la  routine. 

M.  Cloquet  a  voulu  combler  cette  grande 
lacune.  La  tâche  était  ardue  :  il  l'a  remplie  avec 
une  hauteur  de  vues,  une  méthode,  une  érudition, 
une  rigueur  de  logique  au-dessus  de  tout  éloge. 


La  première  partie  du  tome  V,  qui  vient  de 
paraître,  traite  de  l'esthétique  de  l'architecture. 
Après  un  premier  chapitre  consacré  à  l'analyse 
et  à  la  classification  des  formes  —  établie  avec 
une  grande  clarté —  l'auteur  aborde,  dans  le  se- 
cond, l'examen  des  principes  d'esthétique  archi- 
tecturale ;  il  trouve  ici,  dans  les  définitions  phi- 
losophiques du  beau  auxquelles  il  se  rallie,  la 
justification  des  conceptions  rationnelles  en 
architecture  et  la  condamnation  «  de  la  structure 
«  feinte  qui  cache  l'idée  vraie  au  lieu  de  l'expri- 
«  mer,  et  qui  supprime  l'expression  véritable  ». 
Cette  doctrine  dominera  le  livre  tout  entier. 

L'appréciation  des  formes,  qui  fait  l'objet  du 
troisième  chapitre,  fournit  d'abord  à  M.  Cloquet 
l'occasion  de  faire  justice  des  subtilités  par  les- 
quelles des  théoriciens  ont  attribué  une  expres- 
sion propre  aux  lignes  abstraites  et  de  montrer 
l'inanité  des  proportions  absolues.  Il  détermine 
ensuite  la  valeur  de  chaque  classe  de  formes  con- 
crètes :  formes  de  convenance,  formes  de  struc- 
ture réelle,  de  structure  fictive,  de  structure  trans- 
posée, formes  symboliques,  formes  décoratives. 
Les  paragraphes  concernant  les  structures  fic- 
tives, les  structures  transposées  et  les  formes 
symboliques,  sources  de  tant  d'abus,  sont  d'un 
intérêt  extrême. Un  paragraphe  est  aussi  consacré 
—  car  l'auteur  suit  son  sujet  littéralement  jusqu'à 
l'heure  où  il  écrit  —  aux  structures  «  d'organisme 
imaginaire  »,  ainsi  qu'il  les  qualifie  très  exacte- 
ment, c'est-à-dire  à  celles  de  cette  nouvelle  école, 
représentée  notamment  par  M.  Guimard,  où 
domine  la  préoccupation  de  raccorder  entre  elles 
les  lignes  et  les  surfaces  de  telle  sorte  qu'à  l'objet 
complexe,  composé  de  parties  rapportées,  soit 
substitué  un  être  doué  de  l'intégrité  propre  aux 
créatures  végétales  et  vivantes. 

Dans  le  quatrième  chapitre,  les  appréciations 
du  précédent  sont  appliquées  à  des  exemples 
connus  :  au  temple  égyptien,  au  temple  grec,  à  la 
porte  grecque,  aux  chapiteaux,  aux  nervures  et 
arcs  de  décharge,  etc. 

Le  cinquième  est  rempli  par  l'exposé  des  théo- 
ries actuelles   de    l'architecture    et,  parmi  elles, 
celle  professée  par  M.  L.  A.  Boileau,  la  théorie 
«  des  formes   construites  »,  basée   sur  l'axiome 
paradoxal  que  «  l'appropriation  de  la  forme  à  un 
but   exclusivement    utile  a    d'autant    moins    de 
rapport  avec  l'art  qu'elle  est  plus  parfaite  ».  Une 
j    large   place  est  consacrée  à  discuter,  avec  une 
i    modération  exemplaire,  cette  doctrine   qui  nous 
i    apparaît  presque  comme  uneénormité,  antithèse 
de  celle  des  formes  rationnelles,  à  laquelle  adhè- 
rent plus  ou  moins  complètement  de  lieaudot, 
Vaudremer,  Magne,  Paul  Sidille,  Corroyer,  etc., 
et  que  M.  Cloquet  adopte  dans  toute  sa  rigueur. 
Le  sixième  et  dernier  chapitre  de  la  première 


Bibltograpl)te. 


533 


partie  en  est  la  conclusion.  Quelle  voie  doit  suivre 
l'architecture  de  nos  jours  pour  enfanter  un  style 
convenant  à  notre  temps  ?  Question  cent  fois 
posée  et  jamais  résolue.  M.  Cloquet  pense  que  le 
point  de  la  tradition  par  lequel  le  présent  doit  être 
rattaché  au  passé  est  le  gothique  de  l'époque  où, 
tout  à  fait  formé,  il  n'avait  pas  encore  donné  les 
premiers  signes  de  son  déclin.  Ici,  nous  eussions 
préféré  que  l'auteur  présentât  autrement  sa  pen- 
sée. Par  les  explications  précises  qu'il  donne,  il  est 
clair  qu'il  n'entend  pas  le  moins  du  monde  que 
nous  devions  copier  les  foimes  des  gothiques  ;  il 
veut  dire  qu'il  faut  se  pénétrer  des  principes  dont 
ils  s'inspiraient,  mettre  à  profit  leurs  procédés 
constructifs  dont  l'e.xcellence  est  reconnue.  «  Il 
s'agit  —  ce  sont  ses  propres  termes  —  d'en  ex- 
traire les  principes  vivants  et  non  des  pastiches 
de  formes.  »  Ainsi  compris,  le  renouement  de  la 
tradition  se  réduit  à  la  remise  en  honneur  des 
principes  de  raison  et  de  sincérité  oubh'és  depuis 
la  Renaissance.  Il  eût  été  dès  lors  préférable  de 
ne  faire  intervenir  ici  les  gothiques  que  comme 
exemple  et  point  de  comparaison. 

Du  reste,  un  style  nouveau,  dit  l'auteur,  pour- 
rait résulter  d'éléments  existants  dans  notre 
passé  immédiat,  auxquels  s'appliquerait  l'art  de 
l'avenir.  «  L'art  véritablement  nouveau  devra 
«  son  réveil  à  quelque  principe  nouveau  de  con- 
«  struction  greffé  sur  la  technique  traditionnelle... 
«Nous  marchons  rapidement...  L'artiste  affolé 
«  suit  avec  peine  la  marche  vertigineuse  du  con- 
«  structeur  ;  il  a  peine  à  s'assimiler  les  nouveaux 
«  procédés  comme  il  a  pu  s'assimiler  ceux  des 
«  siècles  passés...  Seul,  l'ingénieur-artiste  sera 
«  préparé  à  donner  du  style  et  une  forme  artis- 
«  tique  aux  constructions  nouvelles,  à  des  fermes 
«  métalliques  aussi  bien  qu'à  des  masses  de  pierre, 
«  à  des  édifices  en  ciment  armé  comme  à  des 
«  charpentes  en  bois.  > 

Nous  avons  analysé,  dans  ce  qui  précède,  la 
première  partie  de  cet  ouvrage  considérable,  celle 
qui  traite  de  l'esthétique  dans  l'architecture. 
Cette  analyse  était  forcément  très  succincte,  et 
pourtant  les  matières  sur  lesquelles  elle  portait 
n'occupent  que  le  quart  de  ce  volume  de  620 
pages.  Pour  les  deux  autres  parties  (composition 
et  décoration),  nous  ne  pouvons  guère  que  don- 
ner une  idée  extrêmement  sommaire  de  la 
richesse  de  leur  contenu,  en  énumérant  ici  les 
chapitres  dont  elles  se  composent. 

La  deuxième  partie,  traitant  de  la  composi- 
tion architectonique,  se  subdivise  comme  suit  : 
1°  Ensembles  d'édifices,  villes  (tracés  des  rues, 
places  publiques,  groupes).  —  2°  Edifices  consi- 
dérés isolément  (étude  de  rensemble,proportions, 
symétrie,  types  généraux  d'édifices,  élaboration 
d'un   projet;.  —  3°  Étude   des  parties  (façades, 


combles,  dispositions  intérieures,  tracés  graphi- 
ques). —  4°  Conditions  particulières  (hygiène  et 
confort,  optique,  éclairage,  éclairage  artificiel, 
acoustique,  sécurité,  emploi  de  la  pierre,  emploi 
du  métal,  emploi  du  bois). 

La  troisième  partie,  concernant  la  composition 
décorative,  se  compose  des  chapitres  suivants  : 
1°  Les  sources  du  décor  (ornements  géoinétri- 
ques,  ornements  imités).  —  2°  La  fliore  (emploi 
de  la  flore  dans  le  décor,  historique  de  l'ornement 
végétal,  procédés  décoratifs,  applications  moder- 
nes). —  30  Les  créatures  vivantes  (animaux, 
figure  humaine).  —  4"  Procédés  de  la  décoration 
(fonction  et  mode  d'emploi,  procédés  rythmiques 
de  la  décoration,  échelle  décorative.  — •  5°  Déco- 
ration des  divers  membres  de  la  construction 
(décor  du  pavement,  du  mur,  des  appartements, 
du  plafond,  de  la  voûte,  frises  et  panneau.>:,  décor 
du  fronton,  du  pignon,  de  la  corniche,  des  sup- 
ports verticaux,  des  baies,  encorbellements  et 
amortissements,  décor  des  combles,  ferronnerie, 
serrurerie). 

En  résumé,  cet  excellent  traité  est  l'ouvrage 
didactique  d'architecture  le  plus  complet  jusqu'à 
ce  jour  ;  il  est  au  courant  jusqu'à  l'heure  même 
oij  l'auteur  vient  de  l'écrire  et  puise  ses  exemples 
dans  tous  les  pays  civilisés.  Dominé  de  plus  par 
les  idées  les  plus  larges  et  une  impartialité  peu 
commune,  il  a  droit  à  la  plus  haute  estime  et 
contribuera  grandement  à  épurer  l'enseignement 
de  l'architecture. 

Dans  chaque  subdivision,  M.  Cloquet  suit  le 
sujet  jusqu'à  l'heure  actuelle,  n'omettant  aucun 
des  moyens  les  plus  récents.  Au  caractère  de 
modernisme  que  l'ouvrage  revêt  par  là  s'ajoute 
celui  d'universalité, par  les  exemples  (880  figures) 
tirés  non  seulement  de  France,  mais  des  contrées 
flamandes,  d'Allemagne,  d'Angleterre,  d'Italie  et 
même  quelquefois  des  pays  les  plus  lointains. 

(Extrait  de  l'Art  décoratif^ 


^^  "Gtxioy^iqxit^.mm 


BULLKTIN    DKS    METIERS    D'ART.     —     Le 
numéro,  fr.  1,00  Vromant,  Bruxelles. 

NOUS  signalons  avec  plaisir  un  nouveau 
périodique  qu'on  nous  avait  depuis  très 
longtemps  promis  et  annoncé,  et  que  nous  ap- 
pelions de  nos  vœux,  l'organe  des  écoles  Saint- 
Luc.  Le  correspondant  artistique  bien  connu  du 
<i  Journal  de  Bruxelles  »,  Jean  Snob,  n'est  pas 
loin  de  trouver  qu'il  comble...  plusieurs  lacunes, 
et  il   a   raison,   car  il    sera   le   lien   unissant  les 


534 


3Rrliue  tje  V^vt  cbrctien. 


diverses  écoles  ;  il  continuera  l'enseignement  des 
maîtres;  il  sera  l'officiel  de  l'Institution  ;  il  fera 
connaître  les  œuvres  marquantes  des  artistes 
seaiiuhnii  Lncam  ;  \\  divulguera  leur  enseigne- 
ment. —  Dès  le  premier  numéro  il  se  montre 
pratique,  sérieux,  en  ses  articles  substantiels  et 
clairs.  Il  promet  d'être,  comme  dit  Jean  Snob, 
«  exactement  le  contraire  de  tant  de  papiers 
vaguement  artistiques  où  pontifient  tant  de 
blancs-becs  vaguement  esthètes,  sous  prétexte  de 
tenir  au-dessus  de  la  foule  le  sacro-saint  flam- 
beau de  l'Art  pur.  » 

Le  premier  numéro  contient,  après  l'article- 
programme  obligé,  tout  d'abord  un  hommage 
au  maître  reconnu  de  l'Ecole,  le  baron  Bethune  : 
article  bien  écrit,  dans  lequel  M.  Gevaert  expose 
à  grands  traits  les  origines  de  la  renaissance  de 
l'art  chrétien  en  Belgique  et  décrit  une  œuvre 
peu  connue  de  feu  Bethune,  mais  peut-être  la 
plus  parfaite  dans  son  unité  et  son  complet 
développement,  la  petite  église  de  Vyve-Capelle, 
où  tout  est  du  grand  artiste:  architecture,  mobi- 
lier, peinture,  vitraux,  etc. 

M.  Bâillon  traite  ensuite  de  l'enseignement 
professionnel  ;  M.  A.  Uankelman  décrit  l'élé- 
gant petit  hôlel  communal  île  Réthy,  par  M. 
Langerock  ;  puis  commence  une  étude  à  la  fois 
archéologique  et  pratique  de  M.  D.  Pauwels  : 
t  l'autel  chrétien  ».  A  signaler  tout  spécialement 
le  commencement  d'une  étude  signée  F.  F.  G. 
sur  les  éléments  de  botanique  appliqués  aux  arts 
industriels,  accompagnée  d'une  planche  des  plus 
intéressantes.  Cette  étude  promet  de  nous  révéler 
les  particularités  de  l'enseignement  de  St-Luc 
dans  ses  œuvres  les  plus  vives  et  dans  son  carac- 
tère le  plus  original,  à  la  fois  traditionnel  et 
novateur.  Ajoutons  que  la  jolie  revue  est  très 
coquettement  éditée  en  format  petit  in-4",  et 
supérieurement  illustrée. 

Et  maintenant  rendons  encore  un  instant  la 
parole   à  Jean   Snob: 

<  Vraiment,  dit-il,  cette  Revue  est  à  recommander  : 

«  Je  la  recommande  d'autant  plus  volontiers  que,  depuis 
un  certain  temps,  un  snobisme  spécial  pousse  à  mécon 
naître  les  services  de  l'Kcole  Saint-Luc.  Je  connais  des 
gaillards  bêtes  h  faire  pleurer,  écrivant  couramment  «si 
je  serais  :>  et  «  je  m'en  rappelle»  (je  vous  prie  de  croire 
que  c'est  ainsi),  qui  attaquent  le  Saint  Luquisme  (sic)  au 
nom  de  la  littérature  ;  des  snobs  de  toute  variété  et  des 
estlictes  de  tout  acabit,  qui  prennent  pour  parler  de 
r Picole  un  air  de  supériorité,  se  larguant  d'un  Art  supé- 
rieur dont  ils  auraient  le  monopole;  de  braves  bourgeois 
aussi,  au  nom  du  bon  goût  ou  simplement  du  Ijon  sens, 
daubent  volontiers  sur  le  compte  de  l'École  Saint- I.uc. 
L'ensemble  de  tout  ce  monde  fait  un  clan  d'opposants 
sérieux  par  le  nonibre,  sinon  par  le  mérite.  Les  légendes 
se  créent,  idiotes,  si  vous  voulez,  dans  le  principe,  mais 
qui  finissent  tout  de  même  parfaire  leur  petit  bonhomme 
de  chemin.  Il  est  bon  que  de  temps  à  autre  on  s'efforce  de 
remettre  les  choses  au  point.  »  L.  C. 


BULLETIN  DE  CORRESPONDANCE  HEL- 
LÉNIQUE. 

M.  Laïuent  fait  connaître  luie  statuette  de 
marbre  blanc  du  Bon  Pasteur,  conservée  au 
musée  de  Tchinli-kiosk  à  Constantinople,  trou- 
vée près  de  Brousse.  Elle  appartient  au  type  le 
plus  commun  défini  par  de  Rossi  d'après 
Strzyonski  (')  ;  elle  appartient  à  la  série  connue 
par  les  exemplaires  de  Contantinople,  d'Athè- 
nes, de  Sparte  et  de  Rome,  mais  se  trouve  être 
le  seul  exemplaire  authentique  qui  nous  soit 
parvenu  à  peu  près  intact. 

Le  nouveau  Bon  Pasteur  de  Constantino[)le 
confirme  et  la  popularité  du  Bon  Pasteiu',  et 
l'unité  du  type  artistique  dans  tout  l'empire 
romain  aux  premiers  siècles  chrétiens.  Toutefois 
il  ne  permet  plus  de  dire,  que  le  modèle 
unique  de  sculpture  soit  le  type  du  Latran  :  il 
en  diffère  notablement  et  reproduit  tme  attitude 
connue  jusqu'ici  par  la  peinture  seulement. 

Il  devait  être  placé  dans  tme  niche.  Les 
chrétiens  des  premiers  siècles  n'ont  jamais  voulu 
détacher  des  murs  et  isoler  du  reste  de  l'orne- 
mentation de  leurs  maisons  ou  des  églises  les 
figures  symboliques,  dans  la  crainte  qu'on  ne  les 
prît  pour  des  idoles,  si  on  leur  avait  accordé 
trop  d'importance. 

L.  C. 

REVUE  NÉO-SCOLASTIQUE,  —  mai  1901. 

Nous  avons  dans  le  temps  rendu  compte  du 
très  curieux  ouvrage  de  M.  Delescluze  :  «  Les 
secrets  du  coloris1>  qui  constituent  tout  au  moins 
une  hypothèse  ingénieuse,  permettant  de  coor- 
donner et  d'expliquer  les  phénomènes  de  l'har- 
monie des  couleurs  ;  c'est  le  premier  essai  sérieux 
d'une  théorie  de  l'art  du  coloris. 

Le  livre  que  nous  avons  analysé,  le  mieux  que 
nous  avons  pu,  n'est  guère  à  la  portée  des  pro- 
fanes ;  il  exige  une  certaine  préparation  pour 
être  compiis.Ceux  que  la  question  intéresse  liront 
avec  grand  plaisir  l'exposé  plus  élémentaire  que 
donne  de  la  théorie  de  M.  Delescluze,  M.  J. 
Homans  dans  la  savante  revue  thomiste  de 
Louvain. 

L.C. 

ZEITSGHRIFT  FUR  CHRISTLIGHE  KUNST 
—  (XIV  année  l"'  fasc.) 

M.  le  chan.  Schnùtgen  fait  connaître  un  cu- 
rieux tableau  à  volets  de  l'ancienne  école  bour- 
guignonne,   représentant    la     Trinité    entre    les 


I.  Hoemiichc  Quartahehrift .  IV,  p.  ion 


î5ibHogvapt)te. 


535 


quatre  Évangélistes,  conseivé  à  la  galerie  We- 
ber,  à  Hambourg. 

M.  R.  Herzig,  décrit  le  grand  lustre-couronne 
de  la  cathédrale  de  Hiïdesheini,  remontant, 
comme  ceux  du  dôme  d'Aix-!a  Chapelle  et  de 
l'abbaye  de  Komburg,  à  la  première  période  du 
moyen  âge. 

Le  P.  J.  Braun  s'occupe  de  l'étole  brodée  de 
l'archevêque  de  Trêves,  Théodoric  II  (mort  en 
1242),  trouvée  il  y  a  trois  ans  dans  son  tombeau, 
et  reproïkiit  une  étole  du  même  genre,  dite  étole 
de  saint  Bernulf  (mort  en  1054),  conservée  aux 
archives  de  l'église  janséniste  d'Utrecht. 

(2e  fasc.)  —  M.  le  chanoine  Schniitgen  com- 
pare deux  Mariages  mystiques  de  sainte  Cathe- 
rine par  le  Cortège.  Il  publie  en  outre  une  belle 
coupe  en  cristal  de  roche  ornée  d'émaux,  datant 
du  XlV'-siècle.conservéeau  musée  Poldi-Pezzoli, 
à  Milan. 

M.  H.  Semper  étudie  une  prédelle  en  bois 
ornée  de  figures  en  os  sculptées  en  bas-reliefs, 
ouvrage  vénitien  de  style  romano-byzantin, 
expo!-éau  South-Kensington  de  Londres,  auquel 
sans  dente  servirent  de  modèle  des  sculptures 
de  Saint-Marc  de  Venise,  celles  du  Vatican,  et 
des  miniatures  d'un  manuscrit  de  la  Bibliothèque 
nationale  de  Paris  (début  du  XV<=  siècle). 

M.  J.-M.-B.  Clauss  décrit  trois  reliquaires  de 
style  roman  conservés  à  l'église  de  Reingen 
(Alsace),  et  donne  des  reproductions  de  ces  trois 


NOUS  venons  de  recevoir  les  deux  pre- 
mières livraisons  de  l'annuaire  de  la  Gilde 
de  St-Luc  et  St-Joseph  à  Gand,  pour  la  période 
1896  à   1901. 

Dans  la  première  livraison,  M.  Van  Houcke 
passe  en  revue  les  monuments  de  l'exposition  de 
Paris  en  1900,  qu'il  divise  en  deux  catégories,  les 
édifices  élevés  pour  le  temps  de  l'exposition  et 
ceux  destinés  à  rester  à  demeure. 

En  peu  de  pages,  il  nous  fait  voir  les  construc- 
tions les  plus  remarquables  de  la  grande  foire 
parisienne,  et,  s'il  trouve  par  ci  par  là  des  produc- 
tions architecturales  à  louer,  il  constate  cepen- 
dant que  presque  partout  on  a  visé  à  éblouir  les 
profanes,  les  masses  qui  prennent  généralement 
le  clinquant  pour  des  chefs-d'œuvre. 

Dans  un  second  article,  le  même  auteiu-  nous 
donne  la  monographie  de  l'Hôtel-de-Ville  de 
Binche  restauré  avec  grand  talent,  comme  nous 
l'avons  déjà  dit,  par  M.  l'architecte  Langerock. 

La  seconde  livraison  renferme  une  phototypie 
de  l'Hôtel  des  Postes  de  Thuin,  ancien  refuge  de 


l'abbaye  de  Lobbes;  le  bâtiment,  après  bien  des 
vicissitudes,  fut  rendu  à  sa  destination  actuelle 
par  M.  le  ministre  Van  den  Peereboom,  après 
avoir  été  remis  en  état  par  M.  Van  Houcke. 
Nous  avons  jadis  reproduit  une  vue  de  ce  joli 
bâtiment  si  bien  restauré  par  le  distingué  ingé- 
nieur architecte  des  Postes  (').  Dans  un  autre  ar- 
ticle, M.  H.  de  Tracy  rend  compte  de  l'excursion 
de  la  Gilde  à  l'île  de  Walcheren,  à  Goes,  Middel- 
bourg  et  Vere  :  le  texte  est  abondamment  il- 
lustré par  des  esquisses  prises  sur  place  par 
MM.  St.  Mortier,  Fr.  Coppejans  et  J.  Van  den 
Bogaert. 

En  vue  de  perpétuer  le  souvenir  des  services 
rendus  par  M.  le  baron  Surmont  de  Volsberghe, 
en  sa  qualité  de  Bourgmestre,  le  Conseil  com- 
munal de  la  ville  d'Ypres  ayant  décidé  de  lui 
offrir  un  objet  d'art,  M.  le  baron  Surmont,  depuis 
ministre  de  l'Industrie  et  du  Travail,  exprima  le 
désir  de  voir  affecter  le  montant  des  souscriptions 
à  la  construction  d'une  maison  ouvrière  :  c'est 
cette  maison  ouvrière,  dont  M.  Coomans,  ingé- 
nieur-architecte, donne  les  plans  et  la  description. 
Le  coût  de  cette  élégante  construction  n'a  pas 
dépassé  4S00  frs.  Elle  a,  depuis,  échu  au  sort  à 
un  ouvrier. 

Lors  de  l'assemblée  générale  tenue  le  28  avril 
dernier,  M.  Coppejans  a  entretenu  les  membres 
de  la  Gilde  de  la  restauration  de  V Achter-Sikkel 
à  Gand,  bâtiment  destiné  à  être  incorporé  dans 
le  conservatoire  de  la  ville.  La  construction  prend 
son  nom  de  celui  de  son  premier  propriétaire 
Filip  Van  der  Zickele  (1401)  ;  elle  fit  partie  à 
l'origine  du  «  Huis  ter  Sikkelen  »,  plus  tard 
«  Stntc  Sikkel  ».  C'est  à  tort  qu'on  l'a  appelée 
Refuge  de  l'abbaye  de  St-Bavon. 

M.  Coppejans  établit  que  primitivement  les 
bâtiments  que  l'on  vient  de  dégager  donnaient 
sur  une  cour  intérieure  et  n'étaient  pas  aperçus 
complètement  de  la  voie  publique  ;  il  est  d'avis 
qu'il  conviendrait  de  remettre  les  tourelles  et  la 
charmante  petite  abside  dans  leur  cadre  originel. 
La  consciencieuse  étude  de  M.  C.  est  émaillée 
de  plusieurs  vues  photographiques  et  de  deux 
croquis  inédits  dont  le  fac-similé  d'une  esquisse 
de  P.  F.  de  Noter  (1779-1842). 

Ce  résumé  des  travaux  de  la  Gilde  de  St-Luc 
et  St-Joseph  nous  montre  cette  société  juvénile 
en  pleine  activité  ;  les  premières  livraisons  de 
l'annuaire  promettent  pour  l'avenir  plus  d'un 
travail  intéressant  et  instructif. 

E.  C. 


1.  R,,vue  de  V Art  chrélien,  année  i8y2,  p.  370. 


KBVUE    OS   L  ART   CHRETIEN. 
I9OI.  —   6"^    LIVRAISON. 


536 


jRcbur  ïie  Tî^vt  cbrcttrn. 


'&iÊj&i 


Xn^tx  bilUiograpljique. 


?i 

:^rcl)cologie  et  Beaiu*  :^rrô^'^ 

^— =^^    jTvancc.  = 

*  Anlhyme-Saint-Paul.  —  L'archéologie  du 
MOYEN  AGE  EN  FRANCE.  Extrait  dii  Compte  rendu  des 
travaux  du  Congrès  bibliographique  international  de 
iSgS. 

Bouchaud  (P.  de).  —  La  sculpture  a  Rome, 
DE  l'antiquité  a  la  renaissance,  dans  la  Revue  du 
Lyonnais,  Avril  1901. 

Bazin  (L'abbé  G.). —  L'église  Saint-Paul-Saint- 
Louis,  Notice  historique  et  descriptive.  —  In- 16,  Paris, 
Leroy. 

Chabeuf  (H.).  —  L'art  et  l'archéologie.  — 
In-8°,  Dijon,  C.  Venot. 

*  Cloquet  (I/.).  —  Traité  d'architecture, 
tome  V  (esthétique,  composition  et  décoration).  — 
Paris  et  Liège,  Ch.  Beranger,  successeur  de  Baudry 
et  C.  édit. 

*  de  Farcy  (L.).  —  Monographie  de  la  cathé- 
drale d'Angers,  en  quatre  volumes,  in-quarto  et  un 
album  in-folio,  1901,  Josselin,  Angers  (")• 

*  Desvaux  (L'abbé).  —  Le  mobilier  d'art  du 
Val-Dieu.  —  Broch.  Veaux,  Mortagne. 

*  Devoisins  (A.-J.).  —  Histoire  de  Notre- 
Dame  DU  désert.  —  Gr.  in  8°,  illustré,  220  pp.  — 
Paiis,  Lechevalier. 

Duvernoy   (Clément).  —  L'église    de    Saint- 

^LAINEŒUF  ET  LE  RETABLE  DE  SCHAUPELEIN,    dans  le 

t.  XXVI  des  Mémoires  de  la  Société  d'émulation   de 
Montbéliard  (1898). 

Fiat  (Paul). 
Paris,  Laurens. 


■  Les  premiers  Vénitiens.  —  In-4°, 


Gasté  (Armand).  —  Les  tombeaux  des  Mati- 
gnon a  ToRiGNi-suR-ViRE.  —  In-8°,  Paris,  Pion. 

Gauthier  (J.)  et  Brune  (l'abbé  P.).  —  Étude 
SUR  l'orfèvrerie  en  Franche-Comté,  du  VIP  au 
XVIII=  SIÈCLE.  —  In-8°,  Paris,  Imp.  nationale. 

Glaire  (L'abbé).  —  Les  saints  évangiles,  illus- 
trations d'après  les  maîtres  des  XIV=,  XV'  et  XVP 
siècles.  —  In-4°,  Paris,  Goupil. 

1.  I  es  ouvrages  marqués  d'un  astérisque  (*)  ont  été.  sont  ou 
seront  l'objet  d'un  article  l>il)liographique  dans  la  lievue. 

2.  I^  prix  de  l'ouvrage  est  fi.xé  à  cent  francs,  payable  par  parties, 
après   réception .  de  chaque   volume. 

Le  vol.   III,  Broderies,  Tissus,  Mobilier,  etc.  est  en  vente. 


*  Gosset  (A.).  —  La  basilique  de  Saint-Remi  a  • 
Reims.  —  In-4°  de  90  pp.  et  40  pi.  —  Paris,  Librairies 

réunies. 

Granges  de    Surgères  (Le   M'''   de).  —    Lrs 

artistes  nantais  du    moyen  AGE  A  LA  RÉVOLUTION, 

—  In  8",  Paris,  Charavay. 

Herbet  (Félix).   —  Extraits  d'actes  et  notes 

CONCERNANT    DES  ARTISTES    DE    FONTAINEBLEAU.    — 

In  S",  Fontainebleau,  Botirges. 

■*■  Jouy  (H.).  —  DÉFORMATION  d'une  légendk 
DE  SAINTE  Geneviève.  Extr.  du  Bull,  de  la  conj. 
d'hist.  et  d'arch.  de  3Jeaux,  1901. 

Lahondès  (J.  de).  —  Leschateau.x  de  Cabaret 
(Aude).  —  In-8",  Toulouse,  Chauvin. 

*  La  rlconstruction  de  l'église  de  Vinça,  i  7  34- 
1769.  —  Broch.,  extr.  de  la  Revue  d'hist.  et  d'arch. 
du  Roussilloh. 

Lasieyrie  (R.  de).  —  Quelques  notes  sur  le 
CHATEAU  DE  GisORS,  dans  le  Bulletin  monumental, 
N°  2,  1901. 

Lefèvre-Pontalis  (E.).  —  Les  fouilles  de 
LA  CATHÉDRALE  DE  CHARTRES,  dans  le  Bulletin 
motiumental,  N°  2,   1901. 

Loth  (A.).  —  Les  cathédrales  de  France.  — 
In-4'',  Paris,  Laurens. 

*  Maître  (L.).  —  Les  sépultures  antiques  du 
pays  nantais.  L'âge  de  l'église  de  Deas  a  Saint- 
Philibert  de  Grandlieu.  —  Broch.,  extr.  du  Bull. 

archéologique,  1 900. 

Mater  (D.).  —  Les  tapisseries  de  l'ancienne 
collégiale  de  Saint-Ursin  de  Bourges,  dans  les 
Congres  archéologiques  de  France  (LXV"  session).  — 
In-8°,  Paris,  Picard.  1900. 

Méloises  (Le  M'^ des). —  Les  vhraux  de  Bourges 
dans  les  Co?igrès  archéologiques  de  France  (XLV'=  ses- 
sion). —  In-8°,  Paris,  Picard,  1900. 

Naissance  et  mort  de  Jean  Goujon,  dans  Yln- 
termcdiaire  des  chercheurs  et  des  curieux,  30  décembre 
1900  et  22  janvier  1901. 

Omont  (H).  —  Inscriptions  mérovingiennes  de 
l'ivoire  Barberini,  dans  le  Journal  des  savants. 
Février  1901. 

Porée.  —  L'art  chrétien  au  pavillon  de  la 
Hongrie,  dans  Notes  d'art  et  d'archéologie,  mars  1901. 

Schneider  (Le  D'  V.).  —  Un  peu  de  théologie 

A  PROPOS  DE  R\PHAEL.   I.     La    DISPUTE  DU  SaINT-Sa- 

crement.  II.  La  transfiguration.  Traduit  de 
l'allemand,  par  T.  Richard.  —  In-8",  Paris,  Lethiel- 
leux. 

Thomas  (L'abbé).  —  Les  vitraux  de  Notre- 
Dame  DE  Diin>j.  In-r2°,  2  lithogr.  Dijon,  Jobard. 


Btbltograplîte. 


537 


*Waresquiel(Margueritede).— Le  BIENHEUREUX 

HUMBERT  DE  RoMANS,  CINQUIEME  GÉNÉRAL  DE  l'Or- 

DRE  DES  Frères-Prêcheurs.  —  En  vente  au  profit 
des  œuvres  dominicaines,  222,  Faubourg  St-Honoré, 
Paris. 

Wuescher  Becclii  (E.-P.).  —  Le  Saint-Voult 
DE  Lucques,  son  culte  et  sa  diffusion  en  Europe, 
dans  le  Cosmos  CathoUcus,    15  mars  1901. 


aUcmagnc. 


Brann  (J.). —  Le  blanc  comme  couleur  liturgi- 
que avant  l'époque  carolingienne,  dans  ZcUschrift 
fiir  KafhoUsche  Théologie,  1"='  trimestre  1901. 

Czchak  (E.  von).  —  Le  trésor  de  la  confrérie 
DE  Saint-Georges  a  Elbing  (Prusse),  dans  Zeit- 
schrift  fiir  Hldende  Kunst,  Mars  1901. 

Graeven  (Hans),  —  Trois  triptyques  d'ivoire, 
àzws,  Jahihiich  der  K.  Preiissischen  Kunstsanimlungen, 
1900,  fas.  IL 

*  Khun  (Joliann).  —  Die  Bemalung  der  Kir- 
CHLiCHEN  Moeeel  und  Sculpturen.  —  Diisseldorf, 
L.  Schwann,  igoi. 

— — =  anijlcterrc.  — 


Butler  (H.  C).  —  Scotland's  ruined  abbeys.  — 
In-i6.  Londoii,  Mac-Millan. 

Byzantine  architecture  and  the  Westminster 
basilica,  dans  Tal'let,  5  janvier  1901. 

Clinch  (G.).   —   Old  english  churches  ;  ar- 

CHlThCTURE,    FURNITUUE,    DECORATION,  MONUMENTS. 

—  In-8°.  London,  Gill. 

Massé  (H.  J.).  —  The  cathedral  church  of 
Chartres  and  oiher  churches.  —  In  16.  London 
Bell. 


Perkins  (Rev.  Thom.).  —  The  cathedral 
church  of  Rouen  and  other  churches.  —  In-i6. 
London,  Bell. 


îtallc. 


A.  V.  —  Di  UNA  cokona  della  basilica  mon- 
gese,  dans  \ Archivio  storico  lombardo,  III,  19  {1901). 

Baciocchi  (Maria).  —  Il  chiostro  verde  e  la 
cappella  degli  spagnuole  (attigui  alla  chiesa  di 
S.  Matia  Novella  in  Firenze).  Descrizione.  —  In-i6. 
Firenze,  F.  Lumachi. 

Siméoni  (Luigi).  —  Lo  scultore  Brioloto^  e 
l'iscrizione  di  s.  Zeno,  dans  le   t.   LXXIV,  3"  sér., 

des  Meiiwrie  della  Acadeinia  di  Verona. 


Belgique. 


*  Heins  (A.). — Vieux  coins   en   Flandre.  — 
3=  livr.  de  40  pi.  petit  in-folio.  Gand,  Heins. 

Prix  :  24  fr. 


Hymans  (H.).  —  Les 
Bruges  et  Ypres.  —  In-8' 


villes  d'art  célèbres 
.  Paris,  Laurens. 


Inventaire  archéologique  de  Gand.  Catalogue 
descriptif  et  illustré  des  monuments,  œuvres 
d'art  et  documents  antérieurs  a  1830,  XIX. — 
In-8°.  Gand,  M.  Heins. 

*  Maeterlinck  (L.).  —  Roger  van  der  Weyden 
ET  LES  «  YMAGiERS  »  DE  TOURNAI.  —  Broch.  extraite 
du  t.  LX  des  Mémoires  couronnes  par  V Académie  royale 
de  Belgique,  19C0. 

*  Soil  (E.).  CONSTANTINOPLE.  NOTES  AR- 
CHÉOLOGIQUES RKCUEILLIES    AU  COURS   d'UN    VOY'AGE 

EN   1899.  —   In-8°,   illustré  de    100  pi.  Anvers,   De 
Backer. 

Vlaminck  (A.  de).  —  L'église  collégiale 
Notre-Dame  a  Termonde  et  son  ancien  obituaire. 
—  In-8°.  Termonde,  De  Schepper  Philips. 


ChrOlUQUC.    SOMMAIRE  :   ÉGLISKS  NOUVELLES  :  Rome,  Luxembourg.  ^  MO-      ^^ 
NUMENTS    ANCIENS  :    Dijon,  Toulouse,    Langres,     Paris,    Biaise,   Looz,   Louvain.   -  LE 

MUSÉES.  —  PEINTURES  MURALES  :    h   Beaune, 


CHATEAU    DE     LAROCHEPOT. 

FOUILLES     DE    SAINT-DENIS.      --    NOUVELLES.     -     Mgr 
NÉCROLOGIE  :  Emile  Lambin. 


h.    Anvers,    ;\    Zepperen. 
BARBIER   DE  MONTAULT. 


Ï^ 


¥ 


i^-^^^^^^^^^^^^i^WWWWWWWWWWWWWWWWWH? 


églises  nouvelles. 

:ANS  la  séance  d'archéologie  tenue  au 
Vatican  au  mois  d'août,  dont  notre 
correspondant  romain,  Monseigneur 
Battandier,  a  donné  à  nos  lecteurs  un 
très  intéressant  compte-rendu,  le  Saint-Pere  a 
exprimé  le  désir  d'avoir  à  Rome  une  grande 
église  du  rite  oriental,  aux  cinq  coupoles  tradi- 
tionnelles et  où  les  belles  cérémonies  de  ce  rite 
pourraient  se  déployer  dans  toute  leur  splendeur. 
Elle  montrerait  aux  orientaux  dissidents  com- 
bien l'Église  romaine  tient  à  ces  rites,  et  dé- 
truirait par-là  même  un  grand  obstacle  à  cette 
réunion  des  Églises,  qui  continue  à  être  un  de 
ses  rêves  les   plus  ardents. 


ON  projette  de  construire  à  Luxembourg  une 
nouvelle  cathédrale.  Cette  construction 
répond  à  un  besoin  très  urgent.  Le  pèlerinage  de 
Notre-Dame  de  Luxembourg  prend  d'année  en 
année  une  plus  grande  extension.  Dans  la  se- 
maine du  quatrième  au  cinquième  dimanche 
après  Pâques,  on  compte  annuellement  plus  de 
60,000  pèlerins  qui  viennent  en  procession,  sans 
compter  les  autres.  La  cathédrale  actuelle,  qui 
est  en  même  temps  l'église  du  pèlerinage,  est 
trop  étroite  pour  ces  journées  de  grand  concours. 


ffiomimcnts  anciens. 

'OURAGAN  du  30  juin  a  été  rude  aux 
églises  de  Dijon, surtout  à  leurs  vitraux, 
dont  plusieurs  ont  été  criblés  comme 
une  écumoire.  Il  a  heureusement 
épargné  ceux  que  M.  E.  Didron  a  récemment 
posés  à  St-]5énigne.  Mais  à  Notre-Dame  les 
verrières  en  style  du  XI II^  siècle  exécutées 
depuis  trente  ans  par  le  même  artiste  ont  été 
fort  éprouvées  ;  toutefois  la  grande  rose  du  Midi 
reste  intacte.  Dans  la  chapelle  des  œuvres,  un 
vitrail  du  XV^  siècle  provenant  de  la  Sainte- 
Chapelle  a  été  endommagé. 

-îO< — ï©4- 

DES  vitraux,  conçus  et  exécutés  sous  la 
direction  de  M.  Didron,  viennent  d'orner 
quelques-unes  des  fenêtres  des  transepts  de  la 
basilique  Saint-Sernin  de  Toulouse.  Ce  sont  des 


grisailles  avec  scènes  dans  des  médaillons  et 
quelques  notes  de  coloration  discrète.  De  pa- 
reilles verrières  ont  l'avantage  de  laisser  pénétrer 
plus  de  lumière  que  celles  à  colorations  plus 
intensives.  Elles  sont  aussi  plus  économiques  et 
ont  leurs  avantages  surtout  dans  les  églises 
romanes  méridionales,  où  les  fenêtres  sont 
petites, 

->©^— JOi— 

LE  crédit  des  monuments  historiques  va  être 
augmenté  de  300,000  fr.  ;  il  sera,  l'année 
prochaine,  porté  de  1,127,000  fr.  à  1,427,000  fr. 
Ce  crédit  doit  pourvoir  aux  besoins  de  2,570 
édifices  classés.  Or,  non  seulement  les  res- 
sources actuelles  ne  permettent  pas  de  restau- 
rer tous  les  édifices  en  mauvais  état  de  conser- 
vation, mais  elles  ne  sont  pas  suffisantes  pour 
sauver  de  la  ruine  tous  ceux  qui  en  sont  menacés. 
On  pourra,  à  l'aide  de  l'augmentation  prévue, 
faire  exécuter  les  travaux  de  consolidation  d'une 
extrême  urgence  que  l'on  ajourne  depuis  plu- 
sieurs mois.  Mais  sera-t-il  suffisant  ? 

— }©<— »->©i— 

LE  déclassement  des  fortifications  de  Langres 
va  permettre  de  rendre  à  l'admiration  des 
savants  et  des  archéologues  la  magnifique  porte 
romaine  que  Constance  Chlore,  dit-on,  fit  élever, 
en  303,  en  souvenir  de  sa  victoire  remportée  la 
même  année  sur  les  Alamans.  Cette  porte,  véri- 
table joyau  de  l'art  gallo-romain,  et  dont  le  style 
rappelle  celui  des  portes  romaines  de  Reims  et 
d'Autun,  est  encore  aujourd'hui  bouchée  rt  en- 
castrée dans  les  remparts  de  Langres,  qui  fut, 
on  le  sait,  la  capitale  des  antiques  Liiij^viis. 
Située  à  l'Ouest  de  la  ville,  elle  se  compose  de 
deux  arcades  (celle  de  Reims  en  a  trois)  et  pré- 
sente, comme  ornement,  cinq  pilastres  corin- 
thiens. Le  Nord  de  la  France  est  trop  pauvre  en 
monuments  de  ce  genre,  pour  qu'on  ne  remette 
l)as  au  plus  tôt  en  lumière  un  tel  souvenir  artis- 
tique de  la  Gaule  romaine  ('). 


LA  restauration  de  la  délicieuse  fontaine  de 
l'ancien  jardin  de  l'archevêché  de  Paris, 
dans  l'axe  de  Notre-Dame,  est  presque  terminée. 
On  a  remplacé  toute  la  partie  moyenne  de  cette 
fontaine  sans  déplacer  la  partie  supérieure,  ni  la 

I.  Joitnial  drs  Arts. 


grande  statue  de  la  Vierge  placée  entre  les  colon- 
nades. Ces  colonnades  légères,  usées  par  le 
temps,  étaient  brisées  en  plusieurs  parties.  On 
les  a  remplacées  par  des  colonnes  d'un  seul  jet, 
qui  offriront  plus  de  résistance  que  les  ancienues 
colonnes  faites  de  pièces  cimentées.  Il  est  pro- 
bable que  les  parties  artistiques  des  colonnes 
enlevées,  et  particulièrement  les  chapiteaux, 
seront  transportées  derrière  Notre-Dame,  dans 
le  jardin  où  sont  déjà  de  nombreuses  pièces  pro- 
venant de  la  restauration  de  la  basilique. 

EN  procédant  à  l'installation  de  l'Office  des 
brevets  et  marques  de  fabrique,  récemment 
transporté  dans  une  des  salles  du  Conservatoire 
des  Arts  et  Métiers,  les  ouvriers  ont  mis  à  jour, 
en  arrière  d'une  maison  voisine  de  cet  établisse- 
ment, une  seconde  tour  de  l'ancienne  abbaye  de 
Saint-Martin  des  Champs,  dont  on  ne  soupçon- 
nait plus  l'existence.  Cette  tour,  que  l'on  déga- 
gera sans  doute  d'une  façon  quelconque,  admi- 
rablement conservée,  possède  une  frise  des  plus 
finement  sculptées. 

— f©^-<-^©f- 

ON  va  mettre  la  main  à  la  restauration  de 
l'Môtel-Dieu  de  Beaune,  cet  ensemble  ex- 
quis, unique  en  France.  Ce  travail  est  confié  à 
M.  L.  Sauvageot  et  une  somme  de  60,000  fr. 
y  est  affectée.  Le  Journal  des  Arts  du  7  sep- 
tembre contient  sur  le  monument  et  sur  la 
question  de  principe  que  soulèvent  les  restaura- 
tions de  l'espèce  un  article  des  plus  intéressants 
signé  «  André  Arnoult  »  qui  fait  suite  à  un  autre 
article  non  moins  remarquable,  donné  dans  le 
Journal,  par  M.  Auge  de  Lassus.  Nous  sommes 
heureux  de  nous  rencontrer  entièrement  avec 
ces  deux  archéologues  éminents  dans  notre  étude 
sur   la   question  qu'on  trouvera   plus  haut. 

ON  a  entamé  la  restauration  de  l'hôtel 
de  ville  de  Looz  (Limbourg). 

Le  badigeon  qui  couvrait  outrageusement 
toutes  les  parties  de  l'édifice  est  aujourd'hui  en- 
levé, de  sorte  que  les  formes  anciennes  appa- 
raissent dans  leur  élégante  beauté. 

La  Commission  des  Monuments  a  examiné  sur 
place  les  travaux  à  faire.  Elle  a  décidé  de  déga- 
ger complètement  l'hôtel  de  ville  et  de  l'entou- 
rer d'un  square.  Ce  travail  nécessitera  d'assez 
grandes  dépenses,  mais  la  ville,  escomptant  d'ail- 
leurs le  concours  du  gouvernement  qui  certes 
ne  lui  fera  pas  défaut, est  décidée  à  ne  rien  négli- 
ger pour  rendre  à  son  hôtel  communal  sa  splen- 
deur primitive. 


ON  continue  la  restauration  de  la  belle  col- 
légiale de  Louvain,  si  bien  conduite  par 
M.  Langerock,  et  si  injustement  critiquée  par 
M.  F.- G...  Une  décision  importante  vient  d'être 
prise  par  les  autorités  supérieures,  c'est  de  pour- 
suivre la  démolition  des  maisons  adossées  à 
l'édifice  et  qui  en  déparent  les  formes.  Les  som- 
mes nécessaires  à  l'achat  de  ces  immeubles  se- 
ront imputées  sur  les  fonds  de  la  restauration. 


Ee  cbâteau  oc  iraiocl)cpot. 

Onsieur  le  capitaine  Sadi-Carnot,  fils 
du  regretté  président  de  la  Républi- 
que, a  acheté,  il  y  a  quelques  années, 
les  tours  éventrées,  les  courtines  ébré- 
chées  et  les  amoncellements  de  décombres  qui 
furent  autrefois  le  château  de  Larochepot,  canton 
de  Nola)^  arrondissement  de  l^eaune,  Côte-d'Or. 
Élevée  au  commencement  du  XIII^  siècle,  la 
forteresse  fut  acquise  en  1403  par  Régnier  Pot, 
l'aïeul  de  ce  Philippe  Pot  dont  le  tombeau  est  au 
Louvre,  et  presqu'entièrement  reconstruite  sur 
les  données  de  l'art  militaire  du  temps.  Après  les 
Pot,  elle  passa  par  héritage  aux  Montmorency  et 
en  1789  appartenait  à  une  famille  de  Beaune,  les 
I^lancheton. 

M.  le  capitaine  Sadi-Carnot  a  confié  la  restau- 
ration partielle  de  ces  pierres  croulantes  à 
M.  Charles  Suisse,  architecte  en  chef  des  monu- 
ments historiques  à  Dijon  ;  son  intention  n'est 
pas  de  faire  de  Larochepot  un  Pierrefonds 
bourguignon,  mais  d'arrêter  les  progrès  de  la 
destruction,  de  déblayer  les  fossés  remplis  de 
décombres,  enfin  de  ménager  dans  une  partie  de 
l'ancienne  habitation  seigneuriale  une  retraite 
d'un  caractère  artistique  et  surtout  personnel. 
Peut-être  à  l'heure  qu'il  est,  ni  le  propriétaire 
ni  l'architecte  ne  savent-ils  où  s'arrêterala  restau- 
ration qui  se  poursuit.  Mais  quoi  qu'il  en  arrive, 
l'œuvrecommencée  et  dans  quelquesparties  ache- 
vée, fait  une  fois  de  plus  grand  honneur  à  la 
science,  à  l'ingéniosité  et  au  goût  de  M.  Charles 
Suisse  (i). 

L'église  de  Larochepot,  où,  sous  des  dalles  aux 
inscriptions  effacées,  reposent  Régnier  et  Jacques 
Pot,  l'aïeul  et  le  père  de  Philippe,  est  un  édifice 
roman  à  trois  nefs  et  à  trois  absidioles,  superfi- 
ciellement gâtée  par  une  restauration  maladroite 
sur  laquelle  il  serait  bon  de  revenir.  On  y  voit  de 

1.  Celui-ci  est  p.irfaitement  secondé,  d'ailleurs,  pour  I.1  charpente, 
par  M.  BiUiette,  de  Dijon,  qui  a  exécuté  sur  ses  plans  la  nouvelle 
flèche  de  la  cathédrale  ?auit-Bénigne  ;  pour  la  maçonnerie,  par 
MM.  Robin  et  Dolfini,  qui  ont  travaillé  sous  sa  direction  à  la  res- 
tauration du  palais  ducal  de  Dijon  ;  enfin  par  un  très  habile  scul- 
pteur dijonnais,  M.  Xavier  Schanosky.  A.  .A. 


540 


3Rr\)ur  tir  r^rt  cbvctten. 


très  curieux  chapiteaux  du  XII<"  siècle,  diîjnes 
d'être  comparés  avec  ceux  de  la  cathédrale  Saint- 
Lazare  d'Autun,  dont  Notre-Dame  de  Laroche- 
pot  est  la  fille  monumentale,  et  un  admirable 
tableau  de  l'école  italienne,  provenant,  dit-on, 
de  l'ancienne  chapelle  du  château.  C'est  une 
sainte  Catherine  en  pied,  au  tiers  de  nature  en- 
viron, d'une  couleur  éclatante  et  pourtant  douce, 
qui  fait  penser  à  l'art  vénitien  immédiatement 
antérieur  au  Titien  ('). 

L'église  de  Larochepot  renferme  encore  deux 
tapisseries  au  petit  point  du  XVII'=  siècle,  L'As- 
soniption  et  Saint  Georges,  bien  charmantes  dans 
leur  harmonie  fanée  ;  ce  sont  sans  doute  d'an- 
ciennes bannières.  Enfin,  il  s'y  rencontre  un 
vitrail,  scène  d'hôpital,  qui,  comme  mauvais, 
comme  grotesque,  comme  ridicule,  dépasse  tout 
ce  que  j'ai  jamais  vu,  et  Dieu  sait  pourtant  si  les 
vitriers  contemporains  ont  commis  des  horreurs 
en  ce  genre  !  Mais  cela  est  vraiment  et  de  beau- 
coup au-dessous  de  tout.  L'auteur  de  cette  chose 
sans  nom  l'a  signée  en  toutes  lettres  et  y  a  mis 
la  date,  1877  ;  de  plus  le  donateur  y  a  fait  pein- 
dre ses  armes,  que  je  n'ai  pas  cherché  à  déciiif- 
frer.  Et  quant  au  nom  du  vitrier,  j'aurai  la  cha- 
rité de  ne  pas  l'écrire  ici.  Je  m'empresse  d'ajou- 
ter que  cette  image,  rendue  plus  grotesque  encore 
par  la  translucidité  qui  avive  l'éclat  criard  des 
couleurs,  n'a  pas  été  posée  sous  M.  le  curé  actuel 
de  Larochepot,  qu'on  me  dit  être  un  homme  de 
goût.  Et  dire  qu'une  fois  ces  monstruosités  mises 
en  place,  il  n'y  a  plus  moyen  d'y  toucher  (2)  ! 

André  Arnoult. 


ffî usées. 

E  Louvre  vient  d'entrer  en  possession 
de  la  fameuse  collection  d'objets  d'or- 
fèvrerie religieuse  du  Moyen  Age  et  de 
la  Renaissance  que  le  baron  A.  de 
Rothschild  considérait  comme  ce  qu'il  avait  «  de 
plus  précieux  ».  Cette  collection,  unique  au 
monde,  présentera  des  merveilles  aux  visiteurs. 


I.  Toutefois  le  type  de  la  sainte  ne  semble  pas  vénitien  et,  dans 
ces  cheveux  qui  tombent  sur  les  épaules  en  opulentes  ondes  cres- 
pelées,  on  retrouve  quelque  chose  de  cette  beauté  lombarde  cliore  à 
Léonard  et  à  Luigi.  Mais  la  couleur  vive  et  franche  ne  rappelle  en 
rien  les  denii-teiutes  mystérieuses  où  s'enveloppent  les  Vierges  et 
les  Hérodiades  de  l'école.  Qu'importe  après  tout  ?  L'œuvre  est  at- 
trayante et  belle,  c'est  rcsscniiei,  et  je  suis  trop  édifié  sur  l'infailli- 
bilité des  classes  dirigeantes  en  matière  artistique  pour  m'attachcr  à 
tel  ou  tel  nom. 

Ce  très  beau  panneau  serait  intact,  h  fleur  de  coin,  si,  probable- 
ment lorsque  le  château  fut  envahi  à  la  Révolution,  im  imbécile  ne 
l'avait  raye  en  croix  de  Saint-.^ndré  par  des  coups  de  pointe  qui  font 
l'effet  de  minces  fils  blancs  appliqués  sur  la  peinture.  On  m'affirme 
que  le  dommage  souffert  est  facilement  réparable  et  sans  effleurer 
l'épiderme  merveilleusement  paliné  de  l'ensemble.  S'il  en  est  ainsi, 
va  pour  une  retouche;  sinon,  non.  A.   A. 

a.  Journal  iifs  Ar/s. 


La  plupart  sont  des  XV«  et  XVI'  siècles,  une 
partie  du  XlV'"et  queUjues-uns  même  du  XIII''. 

La  collection  se  compose  de  14  reliquaires,  10 
médaillons  et  médailles,  9  baisers  de  paix,  9  pen- 
dentifs, 6  statuettes  ou  figurines,  dont  2  réunies 
sous  un  seul  numéro,  3  croix,  3  dizaines  de  cha- 
pelets ou  rosaires,  4  plaques,  3  chandeliers,  doiit 
2  sous  un  seul  numéro,  2  triptyques,  2  ostensoirs, 
2  boîtes,  I  lot  de  chaînes  d'amulettes,  i  lot  de 
fermoirs  de  missel,  2  bagues  d'évêques,  2  hauts- 
reliefs,  I  paire  de  miniatures  sur  vélin  par  Giulio 
Clovio  (sujets  tirés  de  l'histoire  sainte)  dans  des 
cadres  de  bois  sculpté,  1  ciboire,  i  crosse  pasto- 
rale, I  navette  à  encens,  i  cuiller  à  encens,  i  mors 
de  chape,  i  collier,  i  bénitier,  i  autel  portatif, 
I  goupillon,  I  couteau,  i  retable,  i  bas-relief, 
I  noix  de  rosaire,  i  bâton  de  baldaquin,  i  statue 
de  sainte  Marguerite. 

Le  moindre  de  ces  objets  est  un  chef-d'œuvre 
d'art  séculaire  ;  tout  y  est  or,  argent,  ivoire,  bois 
sculpté,  émaux,  cristal  églomisé  ou  cristal  de 
roche  finement  taillé  et  somptueusement  serti. 

Pour  citer  seulement  quelques-unes  des  pièces 
à  sujet  les  plus  importantes,  nous  signalerons  : 

Un  reliquaire-statuette  en  argent  repoussé.  Flandre, 
XV  siècle  :  La  llc>-ge  et V Enfant  Jrsin:. 

Un  autre  reliquaire  en  argent  niellé,  de  forme  ronde. 
Italie,  X\'I'=  siècle  :  Madeleine  lavant  les  pieds  du  Christ. 

Un  baiser  de  paix  de  l'école  de  Cologne,  XV  siècle  : 
La  Vierge  assise  sur  un  trône. 

Un  autre,  en  argent  doré,  cristal  églomisé  et  émail. 
Italie,  XV' siècle  :  La  Vierge  et  les  douze  apôtres  e.\.  Le 
Portement  de  Croi.v. 

Trois  autres,  du  XVI=  siècle,  italiens  :  Saint  Léonard, 
daté  I  5  \o,Je'sus  devant  Pilate,   L' Adoration  du  Christ. 

Un  pendentif,  médaillon  ovale  avec  miniature,  de 
Giulio  Clovio. 

Un  aure pendentif,  médaillon  nvale  en  cristal  déroche. 
France,  XVI°  siècle  :  Le  Christ  et  les  instruments  de  la 
Passion. 

Un  autre  encore,  tout  en  or  ciselé.  Flandre,  XVI°  siè- 
cle :  Dieu  le  Fils  et  le  .Saint-Esprit. 

Un  pendentif,  plaquette  de  bronze.  Italie,  XV"-'  siècle  : 
La  Mise  au  Tombeau. 

Un  autel  portatif  avec  deux  colonnes  torses  et  un  ange 
en  or  éniaillé.   Italie,  XVI''  siècle. 

Des  médailles  de  formes  diverses,  en  cristal  églomisé, 
ayant  pour  sujets  :  I^e  Christ,  Le  Sacrifice  d^ Abraham,  Le 
Martyre  de  saint  Laurent,  L'Assomption,  L'Ange  a/iiion- 
ciateur,  L.a  Vie?ge,  Sainte  Madeleine  et  sainte  Monique, 
Sainte  Catherine,  Sainte  Marie,  Saint  Joseph  et  L.e  Saint- 
Esprit. 

Une  statuette  en  racine  de  buis.  Flandre,  -W"  siècle  : 
Sainte  Catherine. 

Un  retable  triptyque  en  buis,  allemand,  attribué  à 
Diirer  :  Le  Calvaire,  Le  Portement  de  Croix,  La  Résur- 
rection. 

Un  haut-relief  en  marbre,  de  Desiderio  :  La  Vierge  et 
P F.nfant  Jésus. 

Une  statue  de  sainte  Marguerite,  en  pierre  blanche. 
France,  XVI"  siècle,  avec  son  socle  en  bois  sculpté  de  la 
même  époque. 


Cl)rontque, 


54  ï 


Un  haut-relief  en  bronze  italien  de  la  fin  du  XVI"=  siè- 
cle :  La  Conversion  de  saint  Paul. 

Le  musée  de  Cluny  a  reçu,  d'autre  part,  qua- 
torze autres  pièces  qui  complétaient  la  collection 
A.  de  Rothschild  et  dont  voici  la  liste  : 

88.  Groupe  en  \i\\\%  :  Jésus  et  ses  disciples.  Fiandie, 
XVII»  siècle. 

89.  Petit  retable  en  buis,  XVI=  siècle. 

90.  Haut-relief  en  bois  sculpté  rehaussé  de  dorures 
représentant  un  saint  allemand.   Fin  du  XV"  siècle. 

91.  Canne  de  cardinal  en  bois  avec  incrustations  d'ivoi- 
re gravé.  Italie,  XVII"  siècle. 

92.  Cadre  en  bois  et  pâte  orné  de  colonnes  en  lapis  et 
contenant  deux  hauts  reliefs  en  albâtre  :  La  Résurrec/ion 
ei/ésus  déliv>a7it  les  âmes  des  Limbes. 

93.  Armoire  en  bois  sculpté,  La  Vierge,  surmontée 
d'une  couronne  royale. 

94-  Deux  moules  à  pâtisserie  en  ardoise  sculptée  en 
creu.\'.  Allemagne,  XV"  siècle. 

95.  Serrure  en  fer  forgé  ;  le  trou  de  la  clef  recouvert 
par  une  statuette  du  Christ.  France,  XV"  siècle. 

96.  Médaille  en  plomb  :  L'Adoration  des  bergers.  Au 
revers  :  L'Adoration  des  mages.  Avec  chaîne  de  suspen- 
sion. Flamande. 

97.  Plats  en  étain  :  La  Rcsurreclion.  Allemagne, 
XV  l"  siècle. 

98.  Tableau  diptyque,  peint  par  Wohlgemuth  :  Le  Con- 
cert céleste,  dans  un  cadre  gothique. 

99.  Tableau  peint  par  van  Orley  :  L'Adoration  des 
mages. 

100.  Miniature  sur  vélin.  Composition  sur  fond  or 
divisée  en  nombreux  compartiments  avec  figures  de  la 
Vierge  et  des  saints. 

loi.  Miniature  sur  vélin.  Feuilles  de  missel  :  Saint 
Jacques  de  Cotnpostelle  et  V Amionciation  de  la  Vierge  ('). 


UNE  bonne  fortune  est  échue  au  directeur 
du  musée  de  Cluny  :  le  fils  du  sculpteur 
Geoffroy  Dechaume,  qui  restaura  autrefois  la 
Sainte-Chapelle  et  Notre-Dame,  est  venu  lui 
apporter  trois  têtes,  oubliée?,  dans  ce  temps,  dans 
l'atelier  de  l'artiste,  et  qui  manquaient  à  trois, 
statues  d'apôtres  provenant  de  la  Sainte-Cha- 
pelle, déposées  au  musée  de  Cluny  dans  la  salle 
des  sculptures. 

A  SAINT-DENIS,  une  Commission  se  pré- 
occupe d'installer-  un  musée  dans  les  lo- 
caux qui  lui  ont  été  octroyés  par  la  inunicipalité 
dans  l'ancien  hôpital  de  la  rue  de  la  boulangerie. 
Le  public  sera  prochainement  admis  à  visiter  les 
différentes  collections  exposées  dans  la  chapelle 
désaffectée  et  dans  plusieurs  salles.  Dans  la 
section  mérovingienne  sont  déjà  rangés  les  sar- 
cophages reconstitués  et  provenant  des  récentes 
fouilles  pratiquées  sur  l'einplacement  de  l'an- 
cienne   église    dite     des    Trois-Patrons.    Dans 

j.  D  après  la  Chronique  des  Arts, 


d'autres    sections  sont  placées  différentes  anti- 
quités retrouvées  dans  la  ville,  ainsi  qu'une  col- 
"      minéraux    et    de    fossiles    des    plus 


lection    de 
curieuses. 


Bcinturcs  murales. 

ON  vient  de  remettre  au  jour  àl'église  Notre- 
Dame  de  Beaune,  dans  une  des  chapelles 
latérales  de  gauche,  une  peinture  murale  de 
dimensions  considérables,  qui  représente  La 
Rcsurreclion  de  Lazare.  Cette  œiivre,  d'un  très 
grand  intérêt, et  retrouvée  à  peu  près  entière, n'est 
qu'un  fragment  de  la  décoration  qui  probable- 
ment recouvrait  autrefois  la  chapelle  tout  entière. 
A  droite  et  à  gauche  de  la  fenêtre,  on  a  mis  au 
jour  également  deux  figures  :  une  sainte  JSIade- 
/^/«^  et  une  satnte  Marthe.  Les  compartiments 
de  la  voûte,  encore  cachés  sous  le  badigeon,  sont 
séparés  par  des  ornements  peints. 

Ces  peintures  sontduesàla  libéralité  du  fils  du 
chancelier  Nicolas  RoUin  qui  fonda  l'hospice  de 
Beaune,  Jean  Rollin,  évêque  d'Autunet  cardinal. 
Elles  remontent,  par  conséquent,  à  la  seconde 
moitié  du  XV=  siècle  et  furent  sans  doute  exé- 
cutées par  un  artiste  flamand. 


ON  a  découvert  récemment,  dans  une  maison 
appartenant  autrefois  à  une  ancienne  fa- 
mille patricienne  d'Anvers  et  que  l'on  est  en  train 
d'approprier  pour  y  établir  un  dispensaire  des- 
servi par  les  Sœurs  de  St  Vincent  de  Paul,  une 
série  de  peintures  murales  d'un  haut  intérêt, mais 
malheureusement  fort  endommagées. 

Trois  figures  de  femtneà  peu  près  de  grandeur 
naturelle,  sous  un  couronnement  d'architecture 
du  déclin  de  la  période  ogivale,  ont  apparu  au 
jour. Elles  sont  revêtues  du  costume  des  patricien- 
nes de  la  fin  du  XV«siècle,ou  du  commencement 
du  XVI'=  et  dénotent  un  peintre  très  distingué. 
Elles  représentent  très  probablernent  des  Sibylles 
qu'il  n'a  pas  encore  été  possible  d'identifier,  le 
crépi  qui  couvre  la  partie  inférieure  des  figures 
cachant  sans  doute  les  attributs  qui  les  caracté- 
risent. 

La  supposition  de  voir  dans  ces  figures  la  re- 
présentation de  Sibylles  est  rendue  presqu'une 
certitude,  par  une  peinture  qui  se  trouve  sur  la 
même  paroi  de  l'autre  côté  de  la  porte  donnant 
accès  à  cette  salle.  On  y  voit  la  Sibylle  de  Tivoli, 
montrant  dans  le  Ciel  la  Vierge  et  l'enfant  Jésus 
à  l'empereur  Auguste,  pour  l'empêcher  de  se 
faire  adorer  coinme  Dieu,  comme  c'était  l'inten- 
tion de  l'empereur. 


542 


Wit\)m  Dr  V^vt  fbictira. 


Il  est  très  probable  que  tout  le  décor  pictural 
de  cette  salle  avait  pour  thème  le  cycle  des  Si- 
bylles qui,  comme  on  sait.était  singulièrement  en 
faveur  dans  l'art  au  déclin  du  moyen  âge.  11  serait 
vivement  à  désirer  que  le  travail  auquel  on  va 
se  livrer  pour  remettre  au  jour  ces  précieuses 
peintures  sur  les  autres  murs  de  la  salle  aboutît 
à  en  faire  connaître  l'ensemble.  Il  s'agit,  en  effet, 
comme  il  vient  d'être  dit,  de  l'œuvre  d'un  maître 
qui  même  dans  unétatincomplet  et  fragmentaire 
intéresse  l'histoiic  de  l'art  flamand  dans  une  de 
SCS  applications  encore  peu  connues. 


EN  restaurant  l'église  paroissiale  de  Zeppe- 
ren(Be!gique)ona  découvert  des  peintures 
remarquables.  Elles  ont  été  minutieusement  dé- 
crites dans  un  rapport  envoyé  à  la  Commission 
royale  des  Monuments,  par  le  R.  abbé  Daniels, 
de  Vogelsanck. 

C'est  dans  le  transept  sud  qu'on  les  a  trouvées. 
Qu'elles  doivent  être  restaurées,  c'est  une  ques- 
tion à  examiner.  Toutes  les  autorités  ont  été 
d'accord  sur  ce  point.  Mais  voici, dit  le  correspon- 
dant du  X/X'^  Sièile,  le  fait  étrange  qui  s'est  pro- 
duit. L'église  est  l'objet  d'une  restauration 
presque  générale.  Que  fallait-il  faire  dans  la  nef? 
}5adigeonner  ?  Enlever  l'enduit  des  murs  et  des 
voûtes  et  rendre  les  matériaux  apparents  ?  Ou 
bien  l'orner  de  peintures  comme  le  transept  .'' 

Ici  les  divergences  se  manifestèrent.  La  Com- 
mission des  monuments  fut  consultée. Quelques- 
uns  de  ses  membres  furent  d'opinion  qu'il  fallait 
rendre  les  matériaux  apparents! 

L'église  se  serait  ainsi  présentée  revêtue  d'un 
habit  d'arlequin:  le  transept  orné  de  peintures,  la 
nef  en  briques  d'un  rouge  vif! 

Alors  une  proposition  transactionnelle  se  fit 
jour  :  la  nef  n'aurait  été  que  partiellement  en 
matériaux  apparents.  Au  lieu  de  deux  systèmes 
on  en  aurait  eu  trois,  une  partie  de  la  nef  devant 
conserver  son  enduit. 

Des  délégués  de  la  Commission  des  monu- 
ments revinrent  à  Zepperen.  Leur  conclusion 
fut  tout  autre  que  lors  de  la  première  visite. 
Selon  cu.x,  il  fallait  prévoir  pour  la  nef  des  pein- 
tures de  même  nature  que  celles  du  transept,  et 
il  fallait  respecter  l'intention  de  l'architecte 
primitif. 

Tous  les  archéologues  trouvent  que,  contraire- 
ment au  proverbe,  c'est  sa  seconde  idée  qui  est 
la  bonne,  et  que  la  Commission,  en  n'adoptant 
[)as  l'avis  de  ses  premiers  délégués,  a  évité  une 
faute  grave. 

-mi-    >©<— 


Fouilles  à  Saint^Ocnis. 

ES  fouilles  pratiquées  à  Saint-Denis, 
sur  le  lieu  de  sépulture  de  la  Lutèce 
des  Romains,  ont  donné  des  résultats 
des  plus  intéressants.  Saint-Denis  était 
sur  la  voie  des  tombeaux  du  bourg  des  Parisiens 
et  de  plus  cà  proximité  des  carrières.  Les  Francs 
adoptèrent  la  nécropole  des  Romains,  et  Dago- 
bert  construisit  en  cet  endroit  consacré  par  la 
sépulture  de  saint  Denis  un  tombeau  et  une 
abbaye  pour  le  garder.  Celle-ci  fut  remplacée  par 
la  basilique  élevée  par  saint  Louis.  Alors  les 
vestiges  romains  ont  été  en  grande  partie  ex- 
traits du  sol;  mais  des  restes  mérovingiens  plus 
nombreux  y  sont  restés  enfouis  jusqu'à  nos 
jours.  Voici  l'histoire  des  fouilles. 

Un  terrain  situé  entre  l'hôtel  de  ville  et  la 
basilique  se  trouva  mis  en  vente.  Il  s'y  élevait 
jadis  de  vieilles  masures  construites  avec  les 
restes  d'une  ancienne  église  que  l'on  sait  être 
celle  des  Trois  Patrons,  construite  au  XI 11^ 
siècle  et  formée  par  la  réunion  de  trois  petites 
églises  :  Saint-Michel  dii-Gré,  Saint- Dart/iclony 
et  Sainte- Geneviève. 

Leur  disparition  ne  date  probablement  que  de 
la  Révolution  ;  lors  de  la  mise  en  vente  de  ce 
terrain,  M.  Rémy,  maire  de  St-Denis,  proposa 
de  surveiller  les  démolitions  et,  diverses  pierres 
sculptées  et  peintes  ayant  été  trouvées,  on  conti- 
nua les  fouilles.  Parmi  les  pierres  découvertes, 
on  remarque  une  clef  de  voûte  en  forme  de  mar- 
guerite ;  une  pierre  tombale,  datée  de  1576,  d'un 
prêtre  enterré  dans  l'église,  des  sculptures  sur 
bois  mutilées,  plusieurs  chapiteaux  :  l'un  historié 
de  peisonnages  romains  ;  un  autre,  historié  aussi, 
mais  de  trois  saints  seulement,  ce  qui  a  pu  faire 
supposer  que  c'était  le  chapiteau  des  «Trois 
Patrons  ».  Un  autre  offre  des  particularités  by- 
zantines, tandis  qu'il  est  difficile  d'établir  le  stj'le 
d'un  dernier,  à  cause  de  sa  vague  ressemblance 
avec  ceux  du  temple  d'Edfou  en  Egypte.  Il  a  la 
feuille  de  plantin  encadrée  aux  angles  d'une 
autre  grande  feuille  qui  rappelle  celle  du  bana- 
nier. Ou  découvrit  ensuite  quantité  de  poteries 
gallo-romaines  et  mérovingiennes. 

Puis  furent  amenés  au  jour  plusieurs  sarcopha- 
ges de  la  même  époque,  tous  ornés  d'un  dessin 
particulier  :  c'est  une  sorte  de  rosace  formée  par 
l'enroulement  de  deux  lignes  parallèles  autour 
d'une  sorte  d'étoile.  Sur  la  plaque  de  fermeture 
de  l'un  d'entre  eux,  se  lisent  l'alpiiaet  l'oméga  et, 
dans  un  autre,  existe  un  oreiller  taillé  à  même  la 
pierre  et  sur  lequel  s'appuyait  la  tète  de  l'ense- 
veli. Un  sarcophage  intact  fut  ouvert  :  il  contenait 
le  squelette  aisément  reconnaissable  d'une  jeune 


CJ)ronique. 


543 


femme,  mais  qui  tomba  en  poussière  au  premier 
toucher.  Un  fragment  d'antéfixe  du  Illi^siècle  (?), 
portant  la  figure  du  Christ  surmontée  d'une  croix, 
a  été  trouvé,  ainsi  qu'une  fiole  de  verre  métallisé 
aux  irisations  multicolores.  A  remarquer  des 
boucles  de  ceinturon  en  bronze  et  une  applique 
fort  belle  en  argent  d'un  dessin  ornemental  très 
décoratif  en  sa  simplicité,  des  épées  mérovin- 
giennes, d'antiques  fers  de  framées,  des  cuillères 
de  la  même  époque. 

Il  faut  surtout  noter  trois  découvertes:  d'abord, 
une  monnaie  de  bronze,  datant  de  l'an  250:  elle 
est  de  Magnence,  lieutenant  de  Constance  qui, 
pour  remercier  celui-ci  de  l'avoir  élevé  au  capi- 
tainat,  le  fit  assassiner  ;  ensuite  une  aiguillette 
en  or,  longue  de  12  centimètres  à  peu  près,  et 
ciselée  avec  un  art  tel  qu'on  la  croirait  en 
dentelle  ;  enfin,  un  magnifique  médaillon  d'or 
cloisonné  de  près  de  10  centimètres.  De  forme 
ovale,  il  est  orné  de  rubis  et  d'agathes.  Il  est 
question  de  l'acquisition,  opérée  par  la  Ville,  du 
terrain  des  fouilles  sur  lequel  on  construirait  un 
musée  destiné  à  contenir  le  produit  de  ces  der- 
nières, en  se  servant  de  l'église  restée  encore 
debout. 


I^outicUcs. 

E  maître  de  Flcmalle.  —  Nous  avons  fait 
connaître  (■)  l'hypothèse  émise  par  le 
professeur  Hulin,  que  le  mystérieux 
anonyme  connu  sous  le  nomde  «  maître 
de  Flemalle  >,  ne  serait  autre  que  le  peintre 
Tournaisien  Jacques  Daret,  dont  nous  avons 
donné  une  esquisse  biographique.  Cette  thèse  si 
intéressante  confirme  les  nombreuses  études  qui 
ont  mis  en  relief  l'existence  de  l'École  de  Tour- 
nai, et  spécialement  celles  si  intéressantes  pu- 
bliées récemment  par  M.  Maeterlinck,  conser- 
vateur au  musée  de  peintures  de  Gand  ;  aussi  y 
revient-il  dans  la  Gazette  des  Beaux  Arts  &X.  ÔAns 
la  Chronique  des  Arts  en  un  article  que  nous 
signalons  spécialement  à  nos  lecteurs. 

-tO^ ^0^- 

ON  nous  écrit  que  des  vitraux  viennent  d'être 
posés  dans  l'église  gothique  de  la  jolie 
commune  de  Libin  (Luxembourg).  M.  l'abbé 
Paquot,  curé  de  Libin,  qui  est  doublé  d'un 
artiste,  a  voulu,  en  la  dotant  de  ce  vitrail, 
laisser  un  souvenir  impérissable  de  son  passage 
quasi  demi-séculaire  dans  cette  paroisse.  On 
vient  d'en  terminer  le  placement  admirable 
de  composition  et  de   tonalités  ;  rien   de  criard, 

I.  Revue  de  l'Art  chiéiien,  année  1901,  p.  426. 


rien  d'emporté,  rien  de  mondain.  Les  sujets  sont 
artistiquement  dessinés  et  rehaussés  de  couleurs 
bien  harmonisées.  Cette  série  de  vitraux  témoi- 
gne de  la  science  et  du  bon  goût  des  artistes 
qui  les  ont  exécutés. 

L'ameublement  est  dans  le  style  de  l'église. 

ffîgr  Barbier  De  ffîonraiilr. 

jOUS  trouvons  dans  la  Revue  de  l' Anjou 
(mai  et  juin  1901)  une  notice  biogra- 
phique de   Mgr  Barbier  de  Montault, 

J  due  à  la  plume  de  M.  Joseph  Denais. 
Quoique  cette  notice  s'attache  à  faire  ressortir 
particulièrement  ce  que  notre  regretté  collabo- 
rateur a  fait  dans  le  domaine  de  l'histoire  et 
de  l'archéologie  pour  la  province  oij  il  est  né, 
nous  en  reproduisons  les  passages  les  plus  impor- 
tants qui,  sans  aucun  doute,  intéresseront  nos 
lecteurs. 

Parmi  les  hommes  qui  ont  rendu  le  plus  de  services  à 
l'histoire  et  à  l'archéologie  angevine,  il  convient,  pour  ne 
parler  que  des  morts,  de  citer,  en  première  ligne,  avec 
M.  Godard-Faullrier  et  M.  Célestin  Port,  'W-'  X.  Barbier 
de  Montault,  historiographe  du  diocèse  d'Angers,  cre'a- 
teur  de  notre  Musée  diocésain,  l'un  des  fondateurs  du 
Répertoire  archéoloçiguc  et  l'un  des  plus  anciens  rédac- 
teurs de  la  Revue  de  P Anjou. 

Nombre  de  nos  compatriotes  lui  ont  dû  le  goiit  des  anti- 
quités de  notre  pays,  et  c'est  faire  œuvre  de  justice  et  de 
gratitude  en  même  temps,  que  de  saluer  sa  tombe,  en  énu- 
mérant  ses  tiavaux  devant  qui  peut-être  les  ignore  ou  déjà 
les  oublie.  Bien  que  la  vie  ne  soit  pas  longue,  la  mémoire 
est  encore  plus  courte.  Et  si  l'on  ne  songeait  qu'à  la  terre, 
rien  ne  serait  plus  mélancolique  et  plus  désespérant  que 
la  brièveté  du  souvenir. 

Ainsi,  eu  1876,  M'"  X.  Barbier  de  Montault  décrivit  et 
classa  le  riche  trésor  de  la  magnifique  collégiale  de  Saint- 
Nicolas  de  Bari,  en  Calabre.  Le  Chapitie  ne  savait  com- 
ment lui  témoigner  sa  gratitude, son  enthousiasme  ;  il  le 
nommait  «  surintendant  des  travaux  de  restauration  de 
l'église  »  ;  il  lui  prodiguait  les  honneurs,  les  témoignages 
d'une  reconnai^sance  qui  semblait  devoir  être  éternelle. 
Et,  vingt-trois  ans  plus  tard,  l'auteur  de  ces  lignes  essayait 
en  vain  d'évoquer  le  nom  du  savant  prélat  en  cette  même 
église  de  Saint-Nicolas  de  Bari  :  les  publications  que 
M*-''  Barbier  avait  consacrées  au  célèbre  sanctuaire  étaient 
oubliées  déjà,  ignorées  de  tout  le  clergé  !... 

Je  suis  convaincu  que  notre  province  gardera  plus  fidè- 
lement la  mémoire  de  ceux  qui,  dans  la  mesure  de  leurs 
moyens,  avec  leurs  qualités  —  et  leurs  défauts,  qui  n'en 
a  pas  ?  —  à  l'heure  où  ils  ont  vécu,  ont  contribué  plus  ou 
moins  au  progrès  des  sciences  et  des  lettres  angevines. 
Et  c'est  pour  y  aider  que  j'essaie  de  résumer,  en  quelques 
pages  succinctes,  et  en  toute  liberté,  mais  fatalement  avec 
des  omissions,  la  vie  et  les  écrits  de  l'éminent  archéo- 
logue qui  vient  de  disparaître. 

Né  à  Loudun  (Vienne),  le  6  février  1830,  l'abbé  Marie- 
Joseph-Xavier  Barbier  était  angevin  par  ses  origines 
paternelles  ;  il  l'était  un  peu  aussi  par  sa  mère,  nièce  de 
l'évêque,  Mgr  Montault.  11  avait  d'ailleurs  tenu  à  rappeler 
cette  alliance  distinguée,  non  sans  une  pointe  d'exagéra- 
tion en  ajoutant  à  son  nom  celui  de  sa  mère,  et  c'est  sous 


REVUE   DE  I-  AKT   CHRETIEN. 
1901.    —   6'"*^    LIVRAISON. 


544 


jacliur  tir  rSrr  cljvctira. 


la  signature  «  X.   Barbier  de    Montauli  >   qu'il  s'est  fait 
connaître  ('). 

Élève  du  petit  séminaire  Mongazon,  puis,  à  Paris,  du 
séminaire  Saint-Sulpice,  et,  à  Rome,  de  la  Sapience  et  du 
Collège  roniam,  il  revint  tout  jeune  h  Angers,  où  Mgr 
Angebault  voulut  se  l'attacher  avec  le  titre  d'  i.  historio- 
graphe du  diocèse  >  (1857). 

On  a  parfois  reproché  à  l'abbé  Barbier  de  paraître 
rechercher  trop  la  vanité  des  titres  et  des  dignités  ;  il 
éprouva,  en  ce  temps-là,  des  déboires  assez  cuisants,  au 
sujet  de  son  camail  de  chanoine  honoraire,  puis  de  son 
titre  de  camérier  de  Sa  Sainteté,  alors  beaucoup  plus  rare 
qu'aujourd'hui.  Mais  il  convient  de  lui  rendre  cette  justice 
qu'en  dépit  d'une  santé  assez  éprouvée,  le  jeune  préti  e  prit 
très  au  sérieux  les  obligations  de  sa  charge  d'historio- 
graphe du  diocèse. 

Les  brocanteurs  et  les  €  chineurs  >  n'avaient  pas  encore 
parcouru  toutes  les  sacristies  et  tous  les  presbytères  ;  les 
archives  de  fabrique  n'avaient  pas  toutes  été  dispersées. 
L'historiographe  se  montrait  infatigableà  la  recherche  des 
vieux  papiers  qu'  il  sauvait  du  désastre  et  qu'il  rapportait 
triomphalement  il  l'évéché,  où  on  les  voit  encore,  malheu- 
reusement insuffisamment  classés,  malgré  le  zèle  éclairé 
de  ^L  AL  Charles  Urseau  et  Pinier,  qui  avaient  commencé 
à  s'en  occuper  depuis. 

Il  relevait  en  même  temps  900  inscriptions,  qui  furent 
publiées  en  1S6S-1869  sous  le  titre  Èpii^raphic  aiii^evine. 
Il  rétablissait  d'anciens  usages  locaux,  répondant  ainsi 
par  avance  à  ceux  qui  devaient  l'accuser  plus  tard  de 
vouloir  <,<  tout  romaniser>.  Il  «  reconnaissait  »  les  reliques, 
restaurait  le  culte  des  Florent,  des  Maxentiol  et  des  Aver- 
tin,  poursuivait  le  procès  de  béatification  de  Robert 
d'Arbrissel,  le  fondateur  de  Fontevrault,  et  du  moine 
Regnault,  de  l'abbaye  de  Mélinais. 

Enfin,  ses  voyages  et  ses  excursions  dans  le  diocèse  lui 
permettaient  de  se  procurer  des  ornements  anciens,  des 
émaux,  des  vases  sacrés,  des  vitraux,  des  manuscrits, 
maints  objets  souvent  très  précieux,  parfois  aussi  de 
valeur  inégale  —  comme  il  arrive  en  pareille  occurrence 
—  mais  tous  dignes  d'être  recueillis,  conservés  et 
étudiés. 

Mgr  Angebault,  qui  n'était  point  un  artiste,  mais  qui 
savait  honorer  les  Arts,  —  c'est  à  lui,  ne  l'oublions  pas, 
que  la  cathédrale  de  Saint- Maurice  doit  son  incompa- 
rable tapisserie  française  du  XI V"  siècle,  X Apocalypse  à.^ 
Nicolas  Bataille,  —  Mgr  Angebault  écrivit,  à  ce  propos, 
une  Lettre  pastorale  (16  juillet  i  S 57),  en  faveur  de  la  créa- 
tion du  Musée  diocésain,  dont  l'évêque  fut  le  patron, 
mais  dont  l'abbé  X.  Barbier  fut  l'âme,  le  véritable  fonda- 
teur (7  novembre  1857). 

Ce  Musée  d'abord  à  ia  Psalette,  rue  Saint-Aignan.  puis 
à  l'Évèché,  contenait  en  1861,  lorsque  le  jeune  archéo- 
logue voulut  repartir  pour  Rome,  plus  de  3.000  numéros, 
et  c'est  encore  aujourd'hui  —  entre  les  mains  si  compé- 
tentes de  M.  L.  de  Farcy,  qui  le  diiige  depuis  1867  — 
le  seul  musée  de  ce  genre,  si  l'on  excepte  peut-être  une 
tentative  faite,  je  crois,  à  l'évéché  de  Tareniaise  et  h  l'ar- 
chevêché de  Bourges. 

II  est  moins  aisé  que  ne  le  pourraient  croire  les  jeunes 
gens  de  rendre  service  h  ses  concitoyens,  surtout  lorsqu'il 
s'agit  de  déranger  certaines  habitudes  apathiques  et  de 
réveiller  l'inertie. 

Ceux  qui  apprécient  le  repos  et  la  tranquillité,  ceux  qui 
craignent  les  dérangements  et  les  déceptions,  redoutent 
les  critiques  mal  fondées  ou  malveillantes,  les  quolibets 

I.  Ce  renseignement  rectifie  ce  que,  d'après  différentes  notices 
consacrées  à  Mgt  Barbier  de  Montault,  nous  avons  écrit  des  ascen- 
dants de  notre  regrette  collaborateur  ;  on  ne  doit  aux  morts  que  la 
vérité,  quelle  que  soit  la  vénération  avec  laqUL'Ue  on  conserve  leur 
souvenir.  N.  o.  t..  K. 


malicieux  ou  les  plaisanteries  épaisses,  ceux  qui  escomp- 
tent à  leur  profil  les  jouissances  de  la  sympathie  générale, 
ceux  qui  s'imaginent  enfin  qu'ils  seront  récompensés  de 
leurs  eftbrts  et  de  leurs  peines  par  les  hommages  publics, 
ou  tout  au  moins  par  une  déférence  spéciale,  ceux-I^  ne 
connaissent  point  la  vie  humaine.  Qu'ils  reviennent  de 
ces  illusions  et  sachent  envisager  les  choses  comme  elles 
sont,  ou  ne  se  prêtent  point  au  rôle,  toujours  fort  discuté 
et  fort  contesté,  de  «  bienfaiteur  de  ses  contemporains  >. 

D'abord  «  nul  n'est  prophète  en  son  pays  >,  c'est  la 
parole  d'Évangile.  Le  sage  Solon,  qui  était  païen,  dit 
aussi,  qu'en  tous  les  cas  on  •?  ne  peut  juger  le  mérite  d'un 
homme  qu'après  sa  mort  >,  ce  qui  prouve  qu'on  se  leur- 
rerait parfois,  en  pensant  recueillir  la  moisson  de  son 
vivant. 

Le  public,  appelé  à  bénéficier  de  votre  création,  s'éton- 
nera, soupçonnera,  dénigrera 

V'otre  dévouement  paraîtra  suspect,  intéressé,  vaniteux 
ou  ambitieux.  Bien  heureux  si  vos  sacrifices  d'argent  ne 
vous  sont  pas  reprochés  comme  des  spéculations  avanta- 
geuses pour  vous-même  ! 

On  vous  supposera  des  arrière-pensées  détestables. 

On  ne  se  décidera  pas  aisément  à  reconnaître,  tout 
simplement,  ce  qui  est  pourtant  vrai,  grâce  à  Dieu  !  que 
certains  hommes  aiment  à  se  dépenser  et  à  se  dévouer, 
comme  il  y  en  a  d'autres  qui  se  complaisent  à  nuire  et  à 
opprimer. 

Donc,  si  vous  entreprenez  quelque  fondation,  si  vous 
faites  efifort  pour  sortir  de  l'ornière  ou  en  faire  sortir, 
attendez-vous  à  n'être  ni  très  secondé  ni  très  apprécié. 

Il  n'y  a  pas  là  non  plus  de  quoi  se  décourager,  si  la 
gloire  ou  la  renommée,  ou  même  si  la  simple  équité  vous 
fuit  : 

Quand  l'abbé  ISarbier  entreprit  de  créer  à  Angers  le 
Musée  diocésain,  de  sauver  de  la  destruction  tant  d'objets 
intéressants  pour  l'archéologue  et  pour  l'artiste,  il  dut 
nécessairement  se  heurter  à  tous  les  ennuis,  à  tous  les 
obstacles  et  à  toutes  les  résistances  que  suscitent,  non 
seulement  le  mercantilisme  inquiet  et  jaloux,  mais  aussi 
l'ignorance  satisfaite,  l'esprit  de  contradiction,  les  calculs 
mesquins  et,  plus  tard,  les  rivalités  basses  et  les  jalousies 
implacables,  lorsque  l'œuvre,  bien  modeste  pourtant,  eut 
pris  corps  et  sembla  prospérer,  en  dépit  de  la  routine,  en 
dépit  de  tant  d  inertie  et  d'obstruction,  et  des  sarcasmes 
timides  et  des  assauts  effrontés  pour  décourager  l'initia- 
teur. D'autres  ont  connu  ces  difficultés  et  ces  luttes  et 
n'ont  pas  failli  pour  cela  ;  ne  suflirait-il  point  de  nommer 
ici  le  vénérable  AL  Godard-Faultrier,  lorsqu'il  entreprit, 
il  y  a  soixante  ans,  la  création  du  Musée  d'Antiquités 
d'Angers,  devenu  aujourd'hui  l'une  des  plus  intéressantes 
et  des  plus  utiles  collections  publiques  '1 

Il  n'y  a  pas  très  longtemps,  M.  J.-E.  Lenepveu,  le 
futur  membre  de  l'Académie  des  Beaux-Arts,  me  rappe- 
lait combien  M.  Mercier,  conservateur  du  Musée  de 
peinture,  au  logis  Barrault,  se  plaignait  amèrement  alors 
des  «  gros  cailloux  >  et  des  «  vieux  pots  »  de  cet  «  excel- 
lent M.  Godard  »,  que  l'on  tolérait  à  grand'peine,  qui  de- 
venait encombrant,  envahissant,  et  qu'on  estimait  tout 
juste  comme  un  doux  maniaque,  sinon  comme  un  em- 
ballé dont  il  fallait  modérer  l'enthousiasme  aventuieux. 

Il  n'est  i)as  donné  à  tout  le  monde  de  comprendre  tout 
de  suite  l'utilité  des  plus  anciens  monuments  de  l'art  et 
de  l'industrie  humaine,  et  plus  d'un  de  ceux  (|ui  ont  la 
prétention  d'être  universels,  sont  légèrement  déconcertés 
à  la  pensée  que  le  Musée  Saint-Ciermain,  —  le  Château 
royal  I  —  que  Cluny,  que  le  Louvre  même,  —  le  palais  de 
nos  rois  !  —  conservent  tant  de  «  gros  cailloux  >■  et  de 
«vieux  pots»  sous  vitrines, —  et  parfois  sous  vitrines 
dorées  !  —  que  le  Musée  Carnavalet  recueille  pieusement 
les  démolitions    de  Paris,  (|ue  le    Musée  de  l'.-Xrmée  col- 


chronique. 


545 


lectionne  avec   ferveur  les   vieilles   armes    et  les    vieux 
équipements. 

Aujourd'hui,  cependant,  le  public  se  rend  mieux  compte 
des  ressources  que  trouvent  l'Art  et  l'Histoire  à  l'étude 
de  certains  objets  qui,  devant  des  yeux  moins  clair- 
voyants, peuvent  paraître  inutiles  ou  puérils  ;  mais, 
qu'était-ce,  il  y  a  quarante  et  cinquante  an?,avant  la  créa- 
tion des  Musées  diocésains? 

L'abbé  Barbier,  malgré  l'appui  officiel  de  son  évêque, 
se  heurtait  à  des  préjugés  du  même  genre.  Il  ne  considé- 
rait cependant  pas  comme  absolument  perdu  tout  le 
temps  qu'il  passait  en  courses,  en  correspondances,  en 
plaidoyers,  pour  sauver  quelque  vase  sacré  ou  quelques 
débns  d'ornement  d'église. 

Il  en  profitait  pour  prendre  des  notes  qu'il  utiliserait 
ensuite  ;  mais  il  n'en  avait  pas  moins  conscience,  sans 
doute,  —  et  de  cela  aussi,  il  convient  de  lui  tenir  compte, 
—  que,  s'il  eût  employé  à  son  profit  exclusivement  per- 
sonnel les  longues  journées,  les  semaines,  les  années 
entières  qu'il  consacrait  à  cette  fondation,  bien  plus 
grand  fut  le  bénéfice  particulier  qu'il  en  eût  pu  retirer. 
D'autant  qu'il  ne  possédait  pas,  on  peut  le  dire,  de  la 
fortune,  et  qu'il  est  bien  difficile,  quand  on  n'a  point  de 
budget  —  l'Evêché  ne  pouvait  pas  lui  ouvrir  de  crédits 
sérieux,  —  de  résister  à  l'entraînement,  de  consentir  à 
laisser  échapper  telle  ou  telle  pièce  en  vente.  On  aime 
mieux  l'acquérir  à  ses  frais.  J'ai  connu  tout  cela,  pendant 
les  longues  années  —  autant  dire  ma  vie  entière  —  où 
j'ai  voulu  former  les  collections  d'histoire,  d'archéologie 
et  d'art  que  j'ai  données  à  la  ville  de  Beaufort,  en  vue  de 
contribuer  à  l'instruction  et  à  l'éducation  de  mes  conci- 
toyens. 

Ce  n'est  point  ici  le  lieu  de  rappeler  les  vicissitudes  à 
travers  lesquelles  passa  le  Musée  diocésain  depuis  1860, 
ni  de  discuter  le  point  de  savoir  s'il  n'eût  pas  mieux  valu 
réunir  toutes  ces  collections  angevines  au  Musée  munici- 
pal d'Antiquités  ;  il  y  a  des  raisons  pour  et  contre,  et,  si 
j'avais  à  émettre  mon  humbie  avis,  j'inclinerais  vers  toute 
solution  qui  permettrait  (avec  le  respect  voulu)  aux  tra- 
vailleurs et  aux  curieux  l'accès  tout  à  fait  libre  de  ces 
nionuments_  d'art  et  d'archéologie.  Je  ne  doute  pas  qu'au- 
jourd'hui l'Evêché  se  fasse  un  plaisir  d'ouvrir  ses  portes  à 
qui  le  lui  demande  ;  mais  les  collections  ne  sont  vraiment 
utiles  que  quand  le  visiteur  peut  les  considérer  tout  à 
loisir  et  sans  l'ennui  de  déranger  personne  ('). 

Quoi  qu'il  en  soit,  on  peut  diie  sans  crainte  de  se  trom- 
per que.  sans  Mgr  X.  Barbier  de  Montault,  la  plus  grande 
partie  des  objets  qui  composent  le  Musée  diocésain 
d'Angeis  seraient  aujourd'hui  perdus.  Le  prélat  n'eût-il 
rendu  à  l'Anjou  et  à  la  science  d'autre  service  que  d'avoir 
sauvé  de  la  ruine  tant  d'objets  remarquables  ou  simple- 
ment curieux,  sa  vie  n'aurait  pas  été  inutile  à  son  pays. 

Ce  fut  l'opinion  du  Gouvernement  qui  ne  tarda  pas  à 
lui  conférer  le  titre  de  correspondant  du  Ministère  de 
l'Instruction  publique  pour  les  Travaux  historiques  ;  ce 
fut  aussi  le  sentiment  de  la  Ville  d'Angers  qui  lui  décerna 
une  médaille  de  vermeil  pour  l'installation  du  Musée 
diocésain  et  pour  le  dévouement  éclairé  qu'il  apporta  à 
l'organisation  de  l'Exposition  d'Antiquités  ouverte  au 
chef-lieu  du  département  de  Maine-et-Loire,  h  l'occasion 
du  Congrès  archéologique,  tenu  sous  la  présidence  de 
M.  de  Caumont. 

Malgré  l'obligeance  du  prélat  à  mettre  ses  connais- 
sances à  la  disposition  de  quiconque  le  désirait,  ses 
collègues  du  clergé  n'appréciaient  pas  tous,  au  même  de- 
gré, les  efforts  de  l'historiographe  du  diocèse. 11  eut  aussi 
parmi  les  laïques  d'ardents  adversaires,  J'oserais  dire  des 

I.  C'est  un  point  sur  lequel  j'ai  le  plus  insisté,  pour  ma  part,  en 
donnant,  de  mon  vivant,  mes  collections  à  la  ville  de  Beaufort  :  le 
Musée  doit  être  ouvert  pubuqjietneut  ^x  graiuiUment. 


ennemis  passionnés.  L'un  d'eux  —  et  la  chose  est  assez 
piquante  pour  qu'on  la  remarque  —  se  vantait,  il  n'y  a 
pas  encore  très  longtemps,  à  qui  voulait  l'entendre  —  lui 
qui  allait  être  enterré  civilement  et  qui  proclamait 
cependant  l'abbé  Barbier  l'un  de  nos  plus  savants 
archéologues  —  d'avoir  envoyé  contre  ce  prélat  au 
ministère  des  cultes  tout  un  réquisitoire  pour  empêcher 
son  élévation  à  l'épiscopat. 

La  situation  du  leune  prélat  à  Angers  devint  assez  dif- 
ficile pour  le  décider  à  quitter  le  diocèse.  11  prit  congé  de 
Mgr  Angebault  et  retourna  à  Rome  en  1S61.  Il  y  demeura 
jusqu'en  1875,  explorant  ce  vaste  champ  d'études  d'art  et 
d'archéologie  religieuses,  amassant  des  matériaux  pour 
ses  publications  futures,  s'occupant  également  de  liturgie 
et  de  droit  canon,  faisant  preuve  d'une  érudition  sans 
cesse  en  progrès,  témoignant  d'une  fécondité  surprenante, 
bien  rarement  prise  en  défaut  d'exactitude,  jamais  sus- 
pectée pour  sa  sincérité. 

Affirmer  que  l'abbé  Barbier  fut  h  l'abri  de  la  critique, 
serait  tomber  dans  une  exagération  ridicule  ;  ce  serait 
méconnaître  la  vérité,  compromettre  la  science  et  les 
savants.  Peut  être  même  avait-on  quelque  raison  de  re- 
marquer qu'il  se  soit  montré  parfois  trop  audacieux  dans 
ses  hypothèses. 

L'archéologie  doit  être  prudente  et  même  —  qu'on  me 
le  pardonne  !  —  quelque  peu  sceptique. 

On  a  reproché  à  Mgr  Barbier,  et  ce  semble  avec  quelque 
apparence  de  raison,  de  voir  partout  du  symbolisme,  là 
même  où  l'artiste  ancien  pourrait  bien  n'avoir  pas  du  tout 
songé  à  en  mettre  :  dans  un  vitrail  du  X11I=  siècle,  il 
aperçoit  une  croix  rougi'  et  plus  bas  une  croix  l'crte,  très 
probablement  parce  ciue  le  verrier  se  préoccupait  surtout 
de  l'effet  des  couleurs  ;  Mgr  X.  Barbier,  lui,  y  voit  une 
intention  symbolique,  la  croix  «  rouge  »  par  allusion  à  la 
«  foi  ardente  »,  la  croix  «  verte  »  parce  que  le  <  bois  vert  » 
est  l'allégorie  de  la  vie,  puis  qu'il  s'agit  de  «  l'arbre  de  vie  >, 
et  non  d'une  croix  de  bois  mort...  J'indique  ici,  par  à  peu 
près,  une  forme  de  raisonnement  (|ui  a  pu  entraîner  le 
savant  archéologue  un  peu  plus  loin  que  de  raison,  sans 
que  j'estime  le  moins  du  monde  sa  méthode  a  priori 
blâmable,  et  sans  ignorer  combien  le  symbolisme  eut 
généralement  de  l'influence  sur  les  arts  du  moyen  âge. 

Pendant  le  Concile  de  1870,  Mgr  Desflèches,  vicaire 
apostolique  du  Su-Tchuen  Oriental,  le  prit  avec  lui  en 
qualité  de  théologien. 

Mais  nous  n'avons  à  nous  occuper  ici  que  de  l'érudit, 
et  spécialement  de  l'érudit  angevin. 

Lorsque  la  guerre  advint,  Mgr  X.  Barbier  de  Montault 
allait,  comme  directeur  des  travaux,  poursuivre  la  lestau- 
rationde  la  mosaïque  du  dôme  d'Aix-la- Chapelle  lAachen) 
exécutée  sous  Charleniagne  (').  Presque  en  même  temps 
il  faisait  partie,  avec  \''iollet-le-Duc,  de  la  Commission 
internationale  chargée  de  se  prononcer  sur  le  plan  de 
restauration  du  dôme  de  Cologne. 

En  Italie,  nous  le  trouvons  successivement  àEénévent 
près  du  cardinal  Carafta,  pour  étudier  les  précieuses 
archives  du  cardinal  Orsini,  plus  tard  Benoit  XIII, 
administrateur  émérite  en  son  temps  ;  à  Bari,  nous 
l'avons  dit  déjà,  pour  inventorier  le  Trésor  ;  à  Monza, 
pour  y  dresser  le  catalogue  général  des  reliques  ;  à  la 
cathédrale  de  Milan  et  à  l'église  Sainte-Marie,  piès 
.Saint-Celse  ;  puis  en  Savoie,  devenue  française,  où  ^Igr 
Turinaz  l'avait  accueilli  avec  d'autant  plus  d'empresse- 

r.  Lorsqu'il  s'est  agi  d'examiner  la  restauration  de  l'Octogone 
carolingien  d'Aix-la-Chapelle  et  de  rétablir  éventuellement  la  mo- 
saïque qui  l'ornait  primitivement,  un  jury  international  fut  institué 
pour  présider  à  cette  restauration.  Ce  jury  se  composait  de  M.  M. 
Salzenberg  (Prusse)  ;  de  Surigny  (France)  ;  Barbier  de  Montault 
(Rome)  ;  Schmidt  (.■\utriche)  ;  Parker  (Angleterre)  ;  Visconti 
(Italie);  Bethune  (Belgique).  Mais  il  n'a  jamais  été  question  de 
confier  la  direction  de  ces  travaux  .à  Mgr  Barbier  de  Montault. 


)46 


3Rcbue  lie  T^rt  cl)vctica. 


ment  que  l'éiiiinent  prélat  publiait  lui-même,  sur  la  con- 
servation lia  objets  d'art  reli(;ieii.x ,  une  lettre  appelée 
à  faire  sensation  et  que  reproduisit  \e  Niii'/etii:  Dioitiii/ieii- 
tal.  Nous  retrouvons  encore  M,t;r  Barbier  à  Albi,  et  dans 
dix  diocèses  de  France,  qui  ont  bénéficié  de  son  savoir  et 
de  sa  passion  pour  les  études  ecclésiologiques,  l'épi- 
grapbie  et  la  liturj^ie. 

Userait  impossible  de  donner  ici  toute  la  Bibliographie 
des  écrits  de  Mgr  X.  liarbier  de  Montault  :  son  légataire 
universel  ne  porte  pas  à  moins  de  700  le  nombre  de  ses 
publications  diverses,  livres,  brochures  et  plaquettes. 
En  1889,  il  eut  la  pensée  de  les  réimprimer,  en  les  coor- 
donnant, et  ses  Œuvres  complètes  n'eussent  pas  compris, 
parait  il,  moins  de  60  volumes  in-8"  de  5  à  600  pages  ;  le 
quinzième  volume  est  \  peine  terminé. 

Retiré,  en  ces  dernières  années,  dans  une  campagne  du 
Poitou,  il  ne  pouvait  se  décider  au  repos,  malgré  son  âge  et 
ses  souffrances.  Sans  avoir  été  jamais  de  l'inlimité  du 
savant  prélat,  j'étais  de  ceux  qui,  malgré  certaines  diver- 
gences, tenaient  beaucoup  à  rester  en  excellents  rapports 
avec  Mgr  Barbier,  comme  avec  .M.  Port,  dans  un  autre 
camp,  et  cela  un  peu  pour  des  raisons  du  même  ordre, 
que  j'ai  données  plus  haut,  échangeant  avec  eux  très 
volontiers,  par  hasard,  de  ces  communications  dont  les 
travailleurs  profitent  respectivement  et  dont  j'ai  dû  très 
certainement  profiler  plus  que  personne. 

Je  m'étais  fait  aussi  un  devoir  de  provoquer  l'admission 
—  ou  plutôt  la  réintégration  après  son  séjour  à  Rome  — • 
d'un  archéologue  de  la  valeur  de  MgrBarbier  de  Montault 
à  la  Société  Nationale  d'Agriculture,  Sciences  et  Arts 
d'Angers,  qui  l'accueillit  avec  empressement,  il  y  a  deux 
ans,  à  la  vive  satisfaction  du  prélat.  Se  sachant  très 
malade,  se  croyant  perdu,  il  m'avait  instamment  prié,  il 
y  a  deux  ans,  de  le  venir  voir  en  sa  solitude,  et  il  m'apprit 
qu'il  désirait  donner  au  musée  Saint-Jean  son  portrait  en 
prélat  (toile),  une  grande  partie  de  sa  bibliothèque,  tout 
ce  qui  le  concernait  comme  archéologue  et  écrivain,  ses 
manuscrits,  ses  papiers,  ses  notes  (plus  de  300,000, 
pensait-il). 

—  Vos  travailleurs  trouveront  dans  ces  matériaux  une 
mine  qu'ils  n'épuiseront  pas  tle  si  tôt,  me  disait  un  ami 
et  un  confident  du  prélat. 

Il  me  fit  part  aussi  de  divers  autres  legs  projetés  par  lui  ; 
mais  je   ne  crois  pas  qu'il  ait  pu  réaliser  tous  ses  projets. 

Mgr  X.  Barbier  de  .Montault  est  mort  le  30  mars  1901. 

Puissent  ces  lignes  conserver  près  de  nos  compatriotes 
la  mémoire  d'une  figure  très  originale,  très  personnelle, 
qui  demanderait  à  être  étudiée  mieux  qu'en  ces  courtes 
impressions,  d'un  savant  qui,  jusqu'au  delà  de  sa  mort, 
a  tenu  à  rester  angevin,  qui  eut  sa  part  de  dignités  et 
aussi  de  déceptions,  qui  était  peut-être  en  droit  de  se 
croire  appelé  à  de  plus  grandes  charges,  sinon  à  de 
plus  grands  honneurs,  mais  qui  eut  en  somme  la  meilleure 
part,  puisqu'il  a  pu  mourir  avec  les  consolations  que  doit 
donner  à  l'homme  une  longue  vie  de  travail,  avec  les 
espérances  que  doit  donner  au  chrétien,  au  prêtre,  la 
fidélité  de  sa  Foi. 

Joseph   DlfN.MS. 

^:a.-.a.-.&--2.-.&-.a.ii^-A'.£'y.'R^&«&i&-&.g.'.&*a.ia.ii&ai'.a.sa.^' 


'^m  ïîccrologte.  '^m 


eniiïc  Iinniïiin. 

La  Revue  de  l' Art  chrctien  a  été  fort  éprouvée 
au   cours  de   l'année    1901,   qui    itii   enleva   son 


plus  ancien,  son  plus  assidu  et  l'un  de  ses  plus 
éminents  collaborateurs  en  la  personne  de  Mgr 
15arbier  de  Montault.  Elle  vient  de  perdre  encore 
bien  inopinément  un  de  ses  dévoués  auxi- 
liaires; nous  avons  appris  la  mort  de  M.E.  Lam- 
bin, alors  que  nous  étions  en  pleine  correspon- 
dance avec  ce  sympathique  écrivain  au  sujet  de 
ses  travaux  en  cours  destinés  à  notre  Reinie  : 
nous  nous  étonnions  de  son  retard  à  nous  répon- 
dre ;  il  n'était  plus  de  ce  monde:  il  était  entré  le 
19  septembre  1901  dans  la  vie  éternelle,  oît  le 
Seigneur  l'aura  accueilli  avec  faveur,  nous  en 
avons  la  confiance  ;  car  il  a  aime  son  temple  et 
consacré  son  talent  a  célébrer  les  beautés  de 
l'art  chrétien  dans  les  applicatioru;  décoratives 
de  la  flore.  C'était  un  chrétien  et  un  homme 
d'une  grande  bonté. 

Emile  Lambin,  né  à  Paris  le  18  décembre 
1835,  appartint  d'abord  à  l'administration  de 
la  Préfecture  de  police.  Mais  à  sa  retraite,  en  1890, 
il  consacra  ses  loisirs  à  des  travaux  archéolo- 
giques d'une  rare  conscience,  notamment  à  des 
études  sur  la  flore  sculpturale  des  cathédrales, 
dont  bénéficia  la  Revue  de  r Art  cJirctieii  et  qui 
lui  créèrent  une  place  à  part  dans  cette  branche 
de  l'archéologie  qu'il  avait  faite  sienne.  En  même 
temps,  il  faisait  participer  à  sa  science  les  tra- 
vailleurs dans  des  conférences  très  suivies  don- 
nées à  l'Institut  populaire  du  Trocadéro.  On  a 
de  lui,  entre  autres  :  La  Flore  gothique  (1893), 
Les  Églises  de  V Ile-de-France  (  1 89S),  La  cathé- 
drale et  la  Forêt  (  1 899),  La  Flore  de  la  cathédrale  de 
ALeaux{\Ç)00),éXud^s  publiées  pour  laplupartdans 
nos  colonnes,  dans  la  Semaine  des  Constructeurs, 
V  Art  pour  tous,  etc.  Il  a  donné  à  la  Gazette  des 
Beaux-Arfs,en  1899  et  en  igoi.deux  intéressantes 
études  sur  La  Flore  sculpturale  du  moyen  Age  et 
L'Eglise  de  Saint-Lett  d' Esserent.  Il  laisse  en 
manuscrit  des  notes  sur  la  cathédrale  de  Cologne 
que  nous  publierons  prochainement  et  une  mono- 
graphie de  l'église  de  Neuilly-sur-Marne.  Il  a, 
sinon  créé  la  science  de  la  flore  médiévale, 
du  moins  donné  un  corps  aux  études  commen- 
cées sur  ce  beau  sujet.  Il  a  écrit  aussi  divers 
opuscules  historiques  :  Ajax  ;  Duguesclin,  con- 
nétable de  France  et  de  Castille ;  etc.,  et  publié  les 
cours  sur  l'histoire  de  la  Bible  professés  au 
Collège  de  France  par  Renan.  Il  était  membre 
de  plusieurs  Sociétés  archéologiques. 

L'homme  privé  n'était  pas  inoins  sympathique 
que  le  savant  et  sera  lum  moins  vivement  re- 
gretté. 


Imprimé  par  Desclée,  De  Brouwer  &  C"^,  Bruges. 


Les  roses  d'or  pontificales,  par  M.  Eug.  Muniz p. 

La  Couronne  de  fer,  au   trésor  de   Monza  (fin),  par  Mgr  X.  Barbier  de  Montault.   ...  p. 

Essai  sur  la  décoration  archilectonique,  par  M.  L.  Cloquet.  pp.   25,  212,  289,  394,  481 

La  cathédrale  de   Laon,   par  M.   Emile  Lambin p. 

Les  Actes  des  Apôtres.  —  Tapisseries  d'après  Raphaël,  par  M.   Gerspach p. 

Les  peintures  des  maîtres   inconnus.   Tableau   aitriiîué   à  Roger  Van   der  Weyden,   par 

M.   W.-H.  James  Weale.  p. 

Bras-reliquaire  à  l'église  St-Nicolas  de  Valenciennes,  par  M.  Louis  Ser bat p. 

Le  trésor   de  l'église  abbatiale  de  St-Mathias    à    Trêves,   par   Mgr   X.    Barbier    de 

Montault p. 

Eglise  de  Messines,  par  M.  le  baron  Bj'.thune.        .  .  1>. 

Le   Pérugin,   par  l'abbé  Broussole,  par  AL  J.   Hei.big.  p. 

Pince  et  fer  à  hosties  au    Musée  de  Brive,  par  M.   Ern.  Rupin ]). 

Les  fresques  de  l'église  Santa  Maria  Antiqua,  au  Forum  Romain,  par  M.  Gerspach.  p. 

Le  Couronnement  de  la  sainte  Vierge,  par  M.  W.-H.  James  Weale p. 

Les  Origines  de  l'Architecture  gothique,   par  M.  John  Bilson p|).     365,463 

G.-É.   GulTens,   par  M.  J.  Hklbig.  p. 

Du  rôle  de  l'arum  dans  la  Flore  gothique,  par  M.  Em.  Lambin p. 

La  restauration  des  monuments  anciens  (i"part.),  par  M.  L.  Cloquet p. 


12 

(fin). 
36 
9' 

124 
I  26 

179 
•93 

273 
28r 

300 

361 

(fin). 

455 
488 
498 


ffîélanges. 


Une    inscription    de    cloche  (Mgr  X.   Barbier    de    Montault) 
trésor    de   St- Pierre  (le  Père  Jos.  Braun) 


La  dalmatique  du 


Le  «  Memling  »  de  M.  Kaemmerer  (W.-H.  James  Wealh).  —  Ostensoir  de  Notre- 
Dame  de  Cléry  (M.  Saget).  —  Les  principes  de  l'art  et  les  fantaisies  modernes 
(Jos.  Osterrath).  —  Le  monument  de  Mgr  Rivet  à  Dijon  (H.  Chabeuf).  —  Discours 
de  M.  H.  Carton  de  Wiart,  à  l'École  St-Luc  à   Bruxelles  (L.   Cloquet) p. 

De  la  restauration  des  Monuments  en  Belgique  et  ailleurs  (J.  Helbic.) p. 


5t 


'34 


REVUE    DE   L  ART   CHKETllîN. 


548 


l^tWt  tir  raivt  fbrcrtcu. 


Restauration  des  Monuments  (J.  Helbig).  —  Les  grands  maîtres  rendus  populaires 
(le  même).  —  Fragments  d'un  "  Physiologus  "  (Mgr  X.  Barbier  de  Montault)   —  Une 

monstrance  flamande  (M.  D.) P-         3U 

La  maison  de  François  l'  à  Abbeville  (Aie.  Ledieu).  —  L'Art  et  l'Autel  (1,.  Cloquei).     p.         414 
La  Vierge  Marie  et  le  Serpent  (L.   Germain  de  Maidv) p.         5°4 


Gorreïî^ponDanccs. 


Lettres  d'Italie  de  M.  c;ersp.\ch pp.  55,  141,  240,  326,  419,  505 

Lettres  de  N.  Thioli.iek,   1..  Sacet  et  Ém.   I.ambix p.  58 

Tablea^l    dédicatoire    de    la    chapelle    de    la    Sainte-Trinité   à    Lublin   (Pologne) 


(A.  Brykczynski). 
Lettre  par  Eugène   H. 


Peintures    murales    du    XV     siècle    a   Beaune    (H.  C'hai'.eue;.  -       L'archéologie    au 
Vatican   (D'  Alb.    Iîattandier).  —   Lettre  de   M,   C.kkppach p, 

Tra^eiur  ùcs  Hociétés  satjantes. 


M4 
419 

508 


FRANCE.   —  Société    nationale   des    Antiquaires    <iH   France pp.   60, 

Académie  des   Inscriptions  et    Belles-Lettres p 

Congrès  des  Sociétés  savantes  et  réunion   des  Sociétés  des   Beaux- Arts   des  Dépar 
Congrès  des  Sociétés  savantes  à  Nancy  en  1901 

Commission  diocésaine  des  monuments 

Société  historique  et  archéologique   de  l'Orne 

Comité  des  travaux   historiques 

Sociéé  des  Lettres,  Sciences  et   Arts  de   Bar-le-Duc. 

Société  d'Émulation    de    Cambrai  

Commission  déparlementale  des  Monuments  historiques  du   Pas-de-Calais. 

Conférence  d'histoire  et  d'archéologie  du  diocèse   de  Meaux.  

Congrès  de  la  Société  française  d'archéologie 

Société    archéologique  du  Midi  de  la  France. 

Congrès  eucharistique  d'Angers 

BELGIQUE.   —    La  Commission  royale  des  monuments   de   Belgique 

Académie  royale  d'archéologie  de  Belgique 

I^'Art  chrétien  h  Namur 

Gilde  de  Saint-Luc  et  de  Saint-Joseph  à   Gand. 

Société  d'archéologie    de   Bruxelles 

Cercle  d'arcliéologie   d'Enghien 

Congrès  d'archéologie  et  d'histoire  à  Tongres 

Institut  archéologique  du   Luxembourg 

Société  historique  et  littéraire  de  Tournai. 
Société  d'histoire  et  d'archéologie  de  Gand. 

Société  des  Mélophiles  de  Hasselt 

Commission   royale  des   monuments   de   Belgique. 

HOLLANDE.  —  Gilde  <le   Sainl-Bernulphe 

ALLEMAGNE  et  PAYS-BAS.   —  Gilde  de  Saint-Thomas  et  de  Saint-Luc 
ESPAGNE.   —  Sociedad  espafiola  de  excursiones 


147,  244, 

32g,  424,  517 

p.  60,  147, 

244,  329,  5 '7 

rtements. 

...  p.   62 

PP-  62,  330 

...  p.   63 

p.  148 

PP 

u«,  332, 519 

■■■  P-  332 

P-  332 

P-  332 

■   P-  335 

PP-  424.  519 

...  p.  425 

■  P-  523 

p.   63 

PP-  63,  333 

...  p.  149 

PP-  247,  524 

pp.  24S,  426 

...  p.  248 

PP-  333,  525 

P-  335 

P-  335 

p.  426 

p.  42S 

P   524 

P-  523 

p.  521 

p.  246 

Cable  Des  matière0.  549 

Btliitograplnc. 

Première  liziraison.  —  Raccolta  di  divise  o  motti  araldici,  par  (1.  Pietraiiiellara.  —  Bibliographie  des 
inventaires.  —  Mobilier  et  reliques  de  l'abbaye  du  Baume-les- Messieurs,  par  l'abbé  Brune.  —  Statues 
de  l'école  dijonnaise,  par  le  même.  —  L'architecture  romane  dans  le  Jura,  par  le  même.  --  Reliquaire 
de  Saint-Juste  à  Château-Ghalon,  par  le  même.  —  Monuments  du  Velay,  par  A.  ThioUier.  —  La  Vierge 
«t  le  Buisson  ardent,  par  le  chan.  Marsau.x.  —  Les  secrets  du  coloris,  par  G.  de  Lescluze.  —  Monographie 
de  l'église  de  Rélhel,  par  H.  Jadart  et  P.  Demaison.  —  Constitutions  de  Guillaume  Durand,  par  Jos.  Berthelé 
et  I\I.  Valmary.  —  Jeanne  d'Arc  sur  une  taque  de  foyer,  par  M.  L.  Germain.  —  Une  taque  symbolique 
du  XVIl"  siècle,  par  M.  F.  Donnât.  —  La  Touraine  au  petit  Palais,  par  le  C"  Ch.  de  Beaumont.  — 
La  Belgique   illustrée,    par  M.  E.  Bruylant.  —  Les  torches  des  communautés  lavalloises,  par  J.  M.  Richard. 

—  Le    monument    du  cardinal  Lavigerie,    par   M.  d'Anselme  de  Puisaye p.         65 

Deuxième  livraison.  —  Le  trésor  de  l'abbaye  de  Silos,  par  Dom  Eug.  Roulin.  —  De  oude  brugsche 
bouwtrant  en  de  vlaamscho  Renaissance,  par  A.  Van  de  Velde.  —  Esthétique  fondamentale,  par 
Ch.  Lacouture,  S.  J.  —  Inventaires,  par  M^r  X.  Barbier  de  Monlault.  —  Les  saints  de  la  messe,  par  Ch.  et  G. 
Rohault  de  Fleury.  —  La  sculpture  à  Troyes  au  XVl"  siècle,  par  R.  Kœchlin  et  Marquet  de  V'asselot.  — 
La  statuaire  en  Normandie,  par  le  chan.  Porée.  —  Bulletin  de  la  Sociedad  espaflola  de  excursiones. — 
G.  Van  Caster  et  les  Hunin,  par  le  chan.  Van  Casier.  —  L'art  des  jardins,  par  G.  Riat.  —  Épitaphes  de 
la  Flandre  au  XVI"  siècle,  par  le  B"  Hethune.  —  Sainte  Foy,  par  A.  Bouillet  et  L.  Servières.  —  Les  chefs- 
d'œuvre  des  musées  de  France:  la  peinture,  par  L.  Gonsc.  —  Iconographie  et  bibliographie  de  N.-D. 
de    la   Treille,   par   Quarré-Reybourbon p.  150 

Troisième  livraison.  —  Les  peintures  murales  du  cloître  de  l'église  d'Emmai_is  A  Prague,  par  le  D'' 
J.  Neiiwirtb. —  Le  coffret  de  St-Nazaire  et  le  manuscrit  de  l'Iliade  de  l'Ambrosienne  à  Milan,  par  F.  de 
Mély.  —  La  Tiare  pontificale  du  VII'^  au  XVI'  siècle,  par  Eiig.  Miintz.  Le  musée  de  portraits  de  Paul 
Jove,  par  le  même.  —  Sepulveda  y  Santa  Maria  de  Nieva,  par  le  D'  Enr.  .Serrano  Fatigati.  —  Éléments 
d'archéologie  chrétienne  et  les  Catacombes  romaines,  par  H.  Marucchi.  —  St-Pierre  de  Rome.  Histoire 
de  la  basilique  vaticane  et  du  culte  du  tombeau  de  S.  Pierre,  par  le  P.  Mortier.  —  Analecta  hymnica 
Medii  .^vi.  Sequentiae  ineditae,  par  le  P.  Blume.  —  Bibliographie  des  inventaires,  par  Mgr  X.  Barbier 
de  Montault.  —  Répertoire  archéologique  de  l'arrondissement  de  Reims,  par  Ch.  Givelet,  H.  Jadart  et 
L.  Demaison p.         2^() 

Quairtème  livraison   —  Le  XI X"' siècle.   —   Bibliographie   des    inventaires,    par  Mgr  X.  Barbier  de  Montault. 

—  Répertoire  des  collectionneurs  et  des  artistes,  par  E.  Renard.  —  Jeunesse  du  Pérugin,  par  l'abbé 
Broussole  et  J.  K.  Huysmans. — Archives  de  la  Commission  des  Monuments  historiques,  par  A.  Perrault- 
Dabot.  —  Monuments  historiques,  par  L.  Pâté.  —  Les  sculptures  en  plein  air  à  Bruxelles,  par  Pol. 
Meirsschaut.  —  Uzeste  et  Clément  V,  par  l'abbé  le  Brun.  La  cathédrale  de  Noyon,  par  Eug.  Lefèvre- 
Pontalis p.         ^^7 

Cinquième  livraison.  —  Iglesias  espaîiolas  del  santo  Sepulcro.  La  Vera  Gruz  y  Eunate,  par  D.  E.  Serrano 
Fatigati.  —  Segovia.  Porticos  de  sus  Iglesias  Roinanicas,  par  le  même.  —  Le  livre  de  la  prière  antique, 
parle  R.  P.  Dom  F.  Cabrol.  —  Histoire  de  l'église  Saint- Bénigne  à  Dijon,  par  l'abbé  L.  Chnmton.  —  L'Arle 
di  Benvenuto  Cellini,  par  J.-B.  Supino.  —  Denier  de  Judas.  —  Le  mobilier  du  Val-Dieu.  Excursion 
archéol.,  par  l'abbé  .A.  Desvaux.  —  Travaux  de  Du  Rif,  par  F.  Mazerolle.  ~-  Les  Rues  de  Romans,  par 
U.  Chevalier.  -  Histoire  des  Beaux-Arts,  par  Paul  Rouaix.  —  Louis  Gourajod  (leçons),  par  H.  Lemonnier 
€t  A   Michel.     -   Bruges  et  Ypres,    par  H.    Hymans p.         jSg 

Sixième  livraison.  —  Le  Bienh.  Humbert  de  Romans,  par  M""  de  Waresquiel.—  Constantinople,  par  E.  Soil. 

—  Sainte  Geneviève,  parH.Jouy.  —  L'archéologie  du  moyen  cage  en  France,  par  Anthyme  .Saint-Paul. — 
Saint-Reml  à  Reims,  par  A.  Gosset.  -  L'église  de  Vinça,  I734-I769  ;  les  Sépultures  antiques  du  Pays 
nantais  ;  l'âge  de  l'église  de  Deas  à  Saint- Philibert  deGrandlieu,  par  L.  Maître.  —  Vieux  coins  de  Flandre, 
par  A.  Heins.  —  Le  mobilier  du  Val-Dieu,  par  l'abbé  Desvaux.  —  Roger  Van  der  Weyden,  par  L.  Maeterlink. 

—  N.-D.   du  Désert,  par  M. -.A. -J.  Devoisins.  —  Traité  d'architecture,  par  L.  Cloquet p.         526 

Périodiques pp.  76,  172.  264,  350,  533 

Index  bibliographique pp.  79,  265,  351,  444,. 536 


550 


B.ebue  tir  TSlvt  djrcticu. 


Gl)rontque. 


Première  livraison.  —  RESTAURATIONS  MONUMENTALES;  Réponse  h  M.  Fierens-Gevaert  ; 
vandalisme  en  France;  restaurations  en  Belgique.  -  CEUVRES  NOUVELLES:  église  St-Anselme  à 
Rome;  vitraux;  calvaire  à  Lourdes.  —  DÉCOUVERTES:  fresques,  etc.  -  VARIA.  —  NÉCRO- 
LOGIE;  Albrecht  De  Vriendt p.         !i2 

Deuxième  livraison.  —  CEUVRES  NOUVELLES  :  Le  monument  de  Bossuet  à  Meaux.  -  MUSÉES. 
—  RESTAURATIONS  :  cathédrales  de  France,  vieux  Rouen,  tour  de  Vésone  à  Périgueux,  Commis- 
sions diocésaines  des  nnonuments,  Notre-Dame  du  Sablon  à  Bruxelles.  —  NOUVELLES  :  art  pro- 
testant,  fresques  anciennes,   gares  gothiques.    -       NÉCROLOGIE  :   M.    H. -A.    Revoil p.  173 

Troisième  livraison.  RESTAURATION  DES  RUINES,  réponse  à  M.  Fierens-Gevaert.  —  RES- 
TAURATIONS   DIVERSES.  VARIA.    ~     NÉCROLOGIE  :    M.    H. -A.    Revoil p.  269 

Quatrième  livraison.  —LÉON  XIII  ET  LE  CHANT  GRÉGORIEN.  PLAIN  CH  A  NT  :  le  monopole 
des  éditeurs  liturgiques.  —  RESTAURATIONS:  cathédrale  de  Rouen  ;  Monuments  belges:  Soignies, 
Bruges,  Hoogstraeten,  Chàtelet,  Enghien,  Diest,  Binche,  etc.  —  NOUVELLES.  —  NÉCROLOGIE: 
Mgr  X.    Barbier  de   Montault p.  354 


Cinquième  livraison . 
NOUVELLES.      ... 


CHANT    GREGORIEN.      -   MONUMENTS     ANCIENS. 


SOLESMES.     — 

P-         449 


Si.vième  livraison.  —  EGLISES  NOUVELLES:  Rome,  Luxembourg.  —  MONUMENTS  ANCIENS  : 
Dijon,  Toulouse,  Langres,  Paris,  Biaise,  Looz.  Louvain.  —  LE  CHATEAU  DE  LAROCHEPOT.  — 
MUSÉES.—  PEINTURES  MURALES  :  h  Beaune,  à  Anvers,  à  Zepperen.—  FOUILLES  DE  ST-DENIS. 
—   NOUVELLES.—  Mgr  X.   BARBIER  DE  MONTAULT.—  NÉCROLOGIE  :  Emile  Lambin,      p.  538 


4^    WMt  hts  :Qlanc!)eg>   ^ 


I.  —   Déposition  de  la  Croix  :  'I\ihlenu  du  Musée  de  T,a  Haye. 

II.  —  Église  de   Messines.  Fenêtre  absidale  (ancien  clireur  des  clianoines). 

III.  —        Id.  Id.  Fenêtres  latérales  géminées.  Id. 

IV.  —   Pietro  Perugino.  Fresque  au  cloître  de  .Santa  Maria  Maddalena  de  Pazzi. 

V.  —  Applications  de  la  passiflore  stylisée  (menuiserie  et  peinture  murale). 

VI.  —  Le  Couronnement  de  la  sainte  Vierge,  peint  par  Albert  Cornelis. 

VII.  —  Cathédrale  de  Durham.  —  Coupe  transversale. 

VIII.   Id.  Id.  Une  travée  du  chœur. 

IX.  —  Crucifix. 

X.  —  Godefroid-Egide   GulTens.     -  T..\  s.mnte   Viergk   et  s.'vint  Jean   au   piku   de   la   Croix. 

(Peinture  murale  de  l'église  N.-I).   à   .Saint-Nicolas). 

XI.  —  Intérieur  de  la  basilique  de  Sainte-Sophie  à  Constantinople. 

Vignettes  tnterealéee;  Dans  ïe  îtxtt. 


Rose  donnée  par  Clément  V  à  la  cathédrale 

de  Bâle P-      6 

Essai    sur    la    décoration    architcctonique, 

56  vignettes pp.  25  K  35 

Laon.  —  Intér.   de  la  cathéd.   nef  et  chœur,  p.    3S 

Id.                        Id.                          chœur  et  nef.  »     40 

Id.   .       Chapiteau  de  nénuphar.         >     42 


Laon. —  Chapiteau  de  plantain 

Id.         Chapiteau  de  fougère 

Id.         Chapiteaux  et   rinceau     de    vigne. 

Id.         Chapiteaux  de  fougère  et  de  vigne. 

Portrait  d'homme,   par  Memling 

Stalles  anciennes  à  Louvain.  

Châ-sse  de  sainte  Gertrude  à  Nivelles.       .  . 


44 
46 
47 
48 

71 
72 
72 


Cable  lies  matières. 


551 


Le  «  Groeningenhof  >>  à  Aertselaer 

Tableau     de    l'Adoration    de    l'Agneau,    par 

A'an  Eyck 

Rue  de  l'Ane  aveugle  à  Bruges 

La  chapelle  Sixtine 

La  Vocation    de  saint  Paul  ;   tapisserie. 
La  Mort  d'Ananie.  Id. 

St  Paul  et  St  Barnabe  à  Lystre        Id. 
La  Guérison  dn  paralytique  Id. 

Saint  Paul  à  l'Aiéopage  Id. 

Élymas  frappé   de  ct^cité  Id. 

La  Conversion   de  saint   Paul         Id. 
Saint  Paul  en  prison  Id. 

La   Pêche  miraculeuse  Id. 

La  Lapidation  de  saint  Etienne     Id. 
Tapisserie    de    Bruxelles   (XVI"  siècle). 
Id.  Id. 

Id.  Id. 

Bras-reliquaire  à   Saint-Nicolas  de  Valen- 

ciennes.  

Id.  Id.  Id. 

Ostensoir    au     trésor    de    N.-O.     de    Cléry 

(XV=   siècle) 

Peinture  murale  dédicatoire  à  Lublin. 
Détail  de  frontal  émaillé   (Trésor  de   Silos). 
Monstrance  eucharistique  {XVI°  siècle). 
Plan   d'une   maison   thébaine  avec  jardin. 

Un  coin  du  jardin   de  Gaprarola.         

Jardin  en  éventail  de  Montargis.  

Jardin  des  Colombiers  à  Paris 

Jardin   du   Luxembourg.  

Plan   de  l'église  Sainte-Foy  de   Conques. 

L'église   de  Conques,    vers  1820 

Restes  du  cloître  de  l'abbaye  de   Conques. 
Reliquaire  du  grand  voile  de  sainte  Foy. 

La    Vierge  entre    deux    Saints 

Glorification    de    l'Immaculée    Conception. 

L'Adoration  de  l'Enfant  Jésus 

L'église  de  Saint-Mathias,  à  Trêves.  —  Re- 
liquaire de  la  Vraie  Croix,  face.  

Id.  Id.  Id.  revers 

Id.  Id.  Id.  détail  de  la  face. 

Id.  Id.  Id.  étui 

Église  de  Messines.  —  Plan  terrier 

Id.  Vue  (côté  nord) 

Id.  Chapiteau  de    l'ancienne    nef. 

Id.  Vue  intérieure  du  chœur. 

Id.  Coupe  d'un  pilier 

Id.  Coupe  sur  le  transept 

Id.  Chapiteau  àl'entrée  du  chœur. 

Id.  Élévation     du    transept   nord. 

Id.  Détail  de  la  porte 

Id.  Élévation    extér.     de    l'ancien 

chœur   des  chanoines. 

Id.  Coupe   longitudinale       Id. 

Id.  Coupe  transversale  Id. 

Id.  Détail  de  la  corniche  delà  tour. 


P-  73 


»  74 

»  75 

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»  95 

>  97 
»  99 

»  lOI 

î>  103 

>  105 
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5/  III 

»  113 

»  115 

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»  127 
••>  128 

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»  145 
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T>  162 
»  163 
»  163 
»  164 

>  164 
»  166 
»  167 
»  167 
»  168 
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l>  170 
«  171 

»  182 
»    186 

>  187 

>  1S8 
»  197 
»  199 
»  199 
»  200 
»  200 
»  201 
»  202 
»  203 
»  204 

»  205 
»  205 

«  2o5 

>  206 


Eglise  de  Messines.  —  Tour  (vue  de  l'Ouest),    p.  207 


Id. 


Id. 
Id. 
Essai    sur 


Sceau    des    éclievins    de    Mes- 
sines   1256 

Id.  Id.  1336-1566. 

Vue  générale  de  l'abbaye, 
la     décoration    architectonique, 

90    vignettes.         pp.  212 

Statue  de    Boniface    VIII,   à    Florence. 

La  grande   tiare  de  Jules  II.  

Pince  et   fer  à   hosties  au  Musée   de  Brive. 
Id.  Id.  Id. 

Id.  Id.       à  l'église  de  Pazayac. 

Essai    sur    la    décoration     architectonique, 

31  vignettes.  pp.  281 

Monstrance  flamande  à  Sedan 

Le   Pain   bénit,   tableau  de  DagnanBouveret. 

Gallia,  buste  par  Moreau-Vauthier 

Carte  de  l'Italie  centrale  et  de  l'Ombrie. 
Rencontre  h  la  Porte  d'Or,  fresque  de  Ott.  Nelli. 
La  Présentation,  tableau  de  (ient.  de  Fabriano. 
Madone  et  Anges,  fresque   de   Mezzastris. 
Vierge  et  Saints  à  Pérouse,  fresque  de  Boccati 

da  Caraerino.         

Martyre  de  S.  Barthélemi,   fresque  de  Nicolo 

Alunno 

Jubé  de  Saint-Étienne-du-Mont    à   Paris. 
Façade  Id.  Id. 

Plan  de  l'église  d'Uzeste.  .-      

Portrait  de  Mgr  X.   Barbier  de  MontauU. 

Durham,   crypte   du    réfectoire 

Id.         plan   des  piliers 

Winchester,  crypte 

Id.  voûte  sous  la  tribune 

Gloucester,  chapelle  sud  du  déambulatoire. 

Durham,  triforium 

Id.     bas-côté  du  chœur,  plan  de  la  voûte. 

Id.  Id.  piles.  

Id.     plan  d'un  pilier 

Id.     voûte  sous  la  tour  nord-est.      

Péterborougli,  plan  de  la  voûte 

Id.  bas-côté  sud  du  chœur.      ... 

Id.  bas-côté  nord  du  chœur.     ... 

Id.  Id.  Id.  plan. 

Gloucester,  bas-côté  nord  de  la  nef 

Id.  plan  des  piliers 

Romsey,    bas-côté   sud    du    chœur. 
Devizes,  église  Saint-Jean,  plan  de  la  voûte 

du  chœur 

Malmesbury,  bas-côté  sud   de   la   nef,  plan 

de  la   voûte.         

Cathédrale  de  Durham,  transept  sud  et  nef. 

Id.  Id.  nef 

Essai    sur    la    décoration    architectonique, 

78  vignettes.  pp.  394 

Porte  de   la  maison  de  François  P' à.  Abbe- 

ville 

Id.  Id.  Id. 


9 

208 

» 

210 

i» 

211 

à 

232 

P- 

252 

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2?4 

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287 

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288 

Jà 

299 

P- 

324 

> 

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338 

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341 

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343 

■•>  344 

*  345 
j>  346 

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.>  369 
»  370 

>  371 
»  372 
»  376 
»  377 
»  379 

>  380 
»   381 


>  384 

>  385 
»  387 

5>    387 

>  3S8 
■»    389 

S.  390 

»    391 

à    413 

P-  415 
..  417 


552 


BrDur  tir  l'Slrr  cbrtttcn. 


Scolopendre    (Langue  de  cerf.)     >  423 

Fougère.  (Polypode  vulgaire.^     »  423 

Chapit.  del'i^glise  St-Nazaireà  Carcassonne.  »  425 

Statue  du  Christ »  426 

Ypres,  façade  de   la  maison  des  Tenfipliers.  >  441 
Id.     ancienne  Halle,  restitution  de  la  fa- 
çade complète.           '>  442 

Plans  de  piliers »  463 

Duriiam,    transept  nord,  côté   est >  467 

Id.          voûte   de    la    nef,    côté    nord.      ...  •>  469 
Christchurcb,     chapelle    est     du     transept 

sud »  472 

Durham,  abside  de  la  salle  capitulaire.      ...  )>  473 

Profils  de  nervures  de  voûte.  474  et  476 

Durham,    nervure    de    voûte p.  478 


Durham,  clef  de  voûte p. 

Id.  arcades  principales  du  galilée.  » 
Essai  sur  la  décoration  architectonique, 

30  vignettes.          pp.  481  à 

Arum  naturel  des  bois [>. 

Acanthe   que   le  D'  Woillez   prétend  être  de 

l'arum.           *> 

Chapiteaux  de  St-Benoit-sur-Loire.     pp.  492  et 

Église   de    Bagneux.      —     Arum    interprété,  p. 

Église  de  Chambly.      —    Arum    ondulé.     ...  » 

Église   de  Taverny.  —    Chapiteau    d'arum.  » 

Différentes  formes   d'arum » 

Porte-feu  en   fer  et  cuivre,  .\1\'''  siècle.     ...  » 

Groupe  de   mosquées  à   Stamboul » 

Sainte  Geneviève.         > 


479 
4S0 

4S7 
4S8 

491 

493 
494 
494 
49Û 
496 
507 
527 


ArnOULT  (André.)  — 
B.\RDIER  DE  MONT.^U 


B.\TTAND11£R  (Dom  A 

Bekthelé  (Jos.).  —  • 
Bethune  (Le  B""). 
BiLSON  (John).  — 
BR.i^UN,  s.  J.  (Jos.).  — 
Brykczvnski  (A.).  — 

Ch.^beuf   (H.;.   — 


Cloquet  (Louis). 


DE  F.^RCY  (L.).   — 
DE    MÉLY   (F.).    — 

D  EN  Aïs  (Joseph).    — 
Destrée  (Joseph;. 
E.  C.  — 
E.  K.  — 

Germain  de  .Maiuv 
Gekspach.  — 


-i^  Table  par  uoihg  D'auteurs.  ^ 

-  Le  château  de   Larochepot  (Chronique) 

Ll(MgrX.) —  La  Couronne  de  fer,   au  trésor  de   Monza     Lombardie). 

Le  Trésor  de  l'église  abbatiale  de  Saint-Matliias,   A  Trêves  (Prusse). 

Une  inscription  de  cloche  (Mélanges) 

Fragments  d'un   «   Physiologus  »  du  Xll'  siècle,   à   Monza  (Mélanges).     .. 

Bibliographie pp.  65  à  68,  i  58  à  160,  2;?  à  ;6o. 

Périodiques.  

).  — L'archéologie  au   Vatican   (Correspondance) 

Bibliographie 

-  Église  de   Messines.  

Les  Origines  de  l'Architecture  gothique 

•    La  dalmatique  du  trésor  de  Saint-Pierre  (Mélanges). 
Tableau  dédicatoire  de  la  chapelle  delà  Sainte-Trinité  h  Lniilin  (Royaume 

de   Pologne)  (Correspondance) 

Le  monument  de   Mgr  Rivet  à   Dijon   (Mélanges) 

Peintures  murales  du   XV  siècle  à   Beaune  (Correspondance! 

Bibliographie 

Œuvres  nouvelles  (Chronique) 

Essai  sur  la  décoration  architectonique.  pp 

La  restauration  des  monuments  anciens  11'"'   partie). 

Discours  (Mélanges) 

L'art  et  l'autel    (    Id.   ) 

Travaux  des  Sociétés  savantes pp.   148,  247,  248,  333  à  336,  425  à  428, 

Bibliographie pp.  68  à  76,  161  à  171,  346  à  350,  435  h  443,  527  à 

Périodiques pp.    77,78,  533, 

Restaurations  monumentales  (Chronique) 

Restauration  des  ruines  (   Id    ) 

Chronique 

Bibliographie 

Mgr  X.   Barbier  de   Montault  (Clironique) 

Bibliographie 

Bibliographie.         ...  

Bibliographie.  p. 

(Léon).   —   La  Vierge  Marie  et   le  Serpent    (Mélanges).  .  p. 

Les   Actes  des   Apôtres.    —   Tapisseries  d'après   Raphaël.  p. 

Les  fresques  de  l'église  Santa  Maria  Antiqua,   au  Forum  Romain  (Carnet 

de  voyage).  p. 

Correspondance  d'Italie.     pp.  51;,  141.240,326,419,  505, 

Bibliographie p. 


P- 
P- 
P- 
P- 
P- 
338  a 

...   p. 

...  p. 

...  p. 

...  p. 

PP-  363. 
...  p. 

P- 

P- 

P- 

PP-  '53.  34°- 
P- 


25,  21: 


394, 
P- 
P- 
P- 


...  p. 

...  p. 

. . .  p. 

pp.  251, 

...  p. 

...  p. 

l'l>-  153. 


339 
I  2 

179 

5> 

32" 

34-:> 

76 

510 

260 

'93 

463 

52 

'44 
135 
50S 
42S 

173 
481 
498 
138 
41 S 
524 
533 
535 
82 
269 
174 
3i7 
543 
160 

535 

428 

504 

91 

300 
516 
434 


Cable  De0  matières. 


553 


G.  A.  — 

H.  (Eugène). 
Helbig  fj.}. 


Lambin  (Ém.). 


Ledieu  (Alcius).  — 
M.  D.  — 

MUNTZ    (Ellg.)-    — 
OSTERRATH  (Jos.).  - 


ROULIN  (Doni  E.).  — 

Rupin  (Ernest).  — 
Saget.  — 

Serbat  (Louis).  — 
Thiollier  (N.)  — 
Weale  (W.-H.-J.).  - 


X.  — 


Bibliographie 

Correspondance.  

Le   Pérugin      

Godefroid-Égide  Guffens 

De  la  restauration  des   monuments  en  Belgique  et  ailleurs  (Mélanges),  pp. 
La  vie  et  les  oeuvres  des  grands  maitres  rendues  populaires  (  Id.  ). 

Bibliographie pp.   150,24g, 

Nécrologie pp. 

La  cathédrale   de  Laon 

Le  rôle  de  l'arum   dans  la   Flore  gothique 

Correspondance 

La  maison   de  François  I"   h  Abbeville  (Mélanges) 

Une  monstrance  flamande  à  Sedan  (Mélanges) 

Les  roses  d'or  pontificales 

Les   principes    de    l'art   au    inoyeii    âge   et   les    fantaisies   de   la   décoration 

moderne  (Mélanges) 

Travaux  des  Sociétés  savantes.  

Travaux  des  Sociétés  savantes      

Bibliographie 

Pince  et  fer  h  hosties  au  Musée  de  Brive  (Corrèze).         

Ostensoir,  style  du   XV  siècle,  à  Notre-Dame  de  Cléry  (Mélanges) 

Correspondance 

Bras-reliquaire  à   l'église  Saint-Nicolas   de   Valenciennes 

Correspondance    

Les  peintures  des  maitres   inconnus     Tableau    attribué  à   Koger   Van    der 

Weyden 

Le  Couronnement  de  la   .Sainte   Vierge,  peint   par  Albert  Cornelis 

Quelques  observations  sur  le   '<   Memling  »   de   M.    Kaemmerer.  

Chronique 


p- 

42» 

p- 

423 

p- 

273 

p- 

455 

234 

314 

p- 

318 

251 

:;26 

•  89 

387 

p- 

36 

p- 

488 

p- 

59 

p- 

414 

p- 

324 

p- 

I 

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'33 

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63 

p- 

246 

p- 

255 

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281 

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132 

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58 

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126 

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58 

p- 

124 

p- 

361 

p- 

'3c 

p- 

177 

ERRATA. 


Page   248,    I''  col.   6   ligne,   au  lieu   de:  longue  et:  lisez:   largeineul. 

»     272,   2°      »     Nécrologie,    7°  ligne,  au   lieu  de:  achevé;  lisez:   achèves. 


A. 


Abadie,  architecte,  346. 

abbaye,  d'Angers  (Toussaint).  451  ;  —  Aulne, 
82.  84.  228,  235  238,  269.  270.  489  ;  ~ 
Baune-les-Messieurs,  68;  -  Bourges  (St-Sul- 
pice),  244  ,  —  Conques.  167  ;  — '  Emmaiis. 
249  .  —  Flémalle.  426  ;  —  Flône,  317  ;  — 
Fontains.  392  ;  —  Gianselve.  331  :  —  Her- 
ckenrode  (des  Dames  nobles),  451  ;  —  Ju- 
mièges.  438  ;  —  Klosterneubourg,  78  ;  — 
Komburg.  53=;  ;  —  Laacherzee,  189  ;  — 
Limoges (St-.\Iartial),  282  ;  —-  Maredsous, 
3Tc;,3iS;  —  Messines,  193; — ^  Melrose,  49S; 
— ~Mont-St-Michel,  238  ;  —  Moutierneuf. 
159;  —  Orval,  03.  235;  —  Ourscamp, 
331  ;  —  Prague,  249; —  Remiremont.  259; 

—  Saint-Anselme,  87  ;  —  Saint-Denis, 
282  ;  —  Silos,  150,  15T,  153  ;  —  Silvacane, 
28.^  ;  _  Stuben,  185.  189;  —  Valvisciola, 
58;  -- Villers,  63.  82,  83,  84.  235.  236.  498; 
Wiiitby,  370;  —  Yoult  (Notre-Dame), 

370- 
Abbeville,  hôtel  Gruthuse,  144.  417  ;  —  mai- 
sons en  bois,  414;  —m.  de  François  I",4ii; 

—  m.  delaTannerie,4i4.4i5;  —  porte  sculp- 
tée, 414,  415  :  —  rue  Cache-Cornaille,  416. 

abeille,  405. 

Abin  (château  d').  257. 

Abondance  (F),  189. 

abside  polygonale,  62. 

Académie,  artistique  et  scie*îtijique  de  Milan, 
527;  -des  Inscriptions  et  Belles-Lettres,  60, 
147.  244.  271,  329,  527  ;  —  royale  d'archéo- 
logie. 63.  333. 

acanthe  (feuilled'),  213.  217,  218,222,489-499. 

Acciajoli  (Nicolas),  9. 

Achmet  (mosquée  d').  538. 

Actes  des  apôtres  (tapisserie  des),  9r-T23. 

Adam,  190. 

Adoration,  des  Bergers  (Baldovinetti),  55-57; 

—  (Van  der  Goes),  344  ;  —  de  V Enfant 
Jésus.  17  r. 

Adoro  te.  ï8ô. 

Adrien,  empereur,  (mausolée  d'),  243  ;  — 
(Luc),  peintre.  427. 

Aelst(Van).  tapissier,  100,  106,  108,  109,  iio. 

Aerschot  (église  d").  357. 

Aertselaerl.  Groeningenhof,  73. 

Agathe  (statue  de  Ste).  265. 

Agen,  ateliers  de  sculpture,  519;  —  cathé- 
drale, 424,  520  ;  —  Congrès  de  la  Société 
française  d'archéologie,  424  ;  —études  ar- 
chéologiques, 519;  -  éghse  des  Jacobins, 
424  ;  —  maisons  antiques,  520  ;  —  musée, 
519  ;  —  origine  du  nom.  424  ;  —  souter- 
rains, 519. 

Agenais,  architecture.  424  ;  — ■  églises,  520  ; 
—  [Revue  de  V  ) ,  78. 

Agneau,  mystique  (adoration  de  1"),  74;  — 
pascal,  287. 

Agnès  (Ste),  242. 

ognus.  339. 

Agréées  (S).  183. 

Aguilhon,  12-14,  16,  17,  21. 

aigle  (icon.).  321.  394.  404- 

Algues-Mortes,  maisons  antiques,  85. 

Aix,  musée.  427  ;  —  reliquaire,  23  ;  —  trésor, 

25- 
Aix-la-Chapelle,  capitulaires  de  Charlemagne. 

4  ;   —  châsse  de  Charlemagne,    493  ;    — 

octogone   carolingien,    545  ;    —   reliquaire 

grec,  23. 
Albert  (l'abbé),  rgo  ;  —  duc  d'Autriche.   12  ; 


—  d'Rste  (rose  d'or  d'),  9  ;  —  le  Grand, 
162. 

Albi,  bibliothèque,  147  ;  —  cathédrale,  425  ; 

—  crosse  de  1200,  403  ;  —  manuscrit,  147. 
Alcamène,  sculpteur,  61 

Aldhun.  église,  374. 

Alexandre  IV,  526  ;  —  VI  (tiare  d'),   252. 

Algérie,  fouilles,  329. 

algues  marines  (icon.),  232. 

Allegranza.  (le  R.  P.),  20. 

Allemagne  (serge  d'),  66. 

Alost,  fresques,  451. 

Alunno  (Nie),  peintre,  274,  343,  344. 

Amboise,  château,  230,  257  ;  —  inventaire  de 
meubles  anciens,  257  ;  —  (cardinal  d'),  329. 

anibon  en  marbre  blanc,  305,  316. 

Ambroise  (S.),  De  obi  tu  Theodosii  Magni,  20. 

Ambrosienne,  manuscrits  de  la  bibl.,  18. 

Ami  dit  clergé  fl'J.  77. 

Amiens,  cathédrale,  223,  504  ;  —  portail,  397. 

amphithéâtres  romains,  498. 

Amsterdam,  musée,  58. 

amulette,  212  ;  —  égyptienne,  212. 

ananas  (décor.).  228,  289. 

Ananie(mort  d"),  94,  96.  97,  98,  108,  ir6, 
118,  122. 

Analccta,  hymnica  viœdli  œvi.  257  ;  —  Juris 
pontificii,  15.  17. 

Anatole  (S  ),  142. 

ancolie  (décor.  ),  222,  224. 

Anderlecht,  église  du  Sablon,  85. 

Andernacli,  église,  523;  —  fonts  baptismaux, 
523:  —  St-Sépulcre,  513. 

Andréa,  de  Florence,  439. 

.Andria  (duc  d')  (rose  d'or  du),  9. 

âne  (icon.),  406. 

Angibault  (Mgr).  543. 

Angelico  (Fra).  57,  i[2,  157,  217,  279,  309, 
313.  321. 

Angeli  (Luig.  de),  22. 

Angeluzzio  (Diotisaivi).  peintre,  142. 

Angers,  abbaye  Toussaint,  451  ;  —  biblio- 
thèque, 338;  —  cathédrale,  183;  —  Con- 
grès eucharistique,  512  ;  —  église  St-Jean, 
159  ;  —  église  St-Martin,  4  5  ;  —  logis 
Barrault,  451;  — Imusée  diocésain,  544. 
545  ;  —  musée  St-Jean.  60  ;  —  palais  de  la 
place  de  la  Bourse.  431;  —  tapisseries,  174: 
—  tapisserie  de  l'Apocalypse,  544  ;  —  vitrail 
du  XlIIe  siècle,  159. 

anges.  362  ;  —  adorateurs,  186  ;  —  (les  neuf 
chœurs  des).  361. 

Angleterre,  églises  normandes,  366;  —  mo- 
numents anciens,  238  ;  —  parcs  pittores- 
ques, 165;  —  premières  croisées  d'ogives, 
365  :  —  (œuvre  d'),  66. 

animaux  (icon.).  394;  —  fabuleux.  397. 

Annales  archéologiques,  185,  188,  359  ;  —  de 
St'Louis  des  Français,  76. 

Annecy,  inventaire  du  château,  66  ;  —  inscrip- 
tions latines,  424. 

Annonciation,  519;  —  (Baldovinetti),  55;  — 
(Cavallini),  421  ;  —  (Giotto),  462  ;  —  du 
XVe  siècle,  68.  76,  308. 

Anselme  de  Puysaie  (D^),  76. 

Anthyme  Saint-Paul,  4r,   314,  365,  480,  529. 

Antiquités,  chrétiennes,  329  ;  —  classiques, 
329  ;  —  puniques,  245  ;  —  à  Denon,  ^2>'^. 

Antoine,  de  Padoue  (.S.),  142  ;  —  abbé  (S.), 
142  ;  —  (tau  de)  332  ;  —  (les)  fondeurs  de 
cloches.  263. 

Antonio  Veneziano,  peintre,  24:;. 

Anvers,  banque  nationale,  411  ;  —  bourse, 
461  ;  —   chemin   de    croix,   457,   461  ;    — 


église  St-Georges,  45S  ;  —  maison  antique, 
541  ;  —  peintures,  458.  461. 

Apocalypse  en  peintures,  329. 

Apollon,  35  ;  —  (statue  d'j.  424. 

Apôtres.  514;  —  (actes  des),  tapisseries,  91- 
123. 

Apoxyamène  de  Lysippe,  61 

Apulie,  ambons,  172;  —  sièges  épiscop.,172. 

aquamanile,  407. 

aquarelle,  331 . 

Arabes  (art  des),  219. 

arabesques,  25. 

Arasso,  93,  94. 

Arbois  (Jura),  église  St-Just,  331. 

arbre  de  vie,  180. 

Arçay,  fera  hosties,  285. 

arc-boutant,  46  ;  —  brisé,  392,  468  ;  —  ro- 
main, 403  ;  —  en  tiers-point,  3OÔ. 

archanges,  362. 

Archelaûs,  statuaire,  244. 

archéologie (!'),  21  ;  —  romaine,  515. 

archéonomie,  422. 

architecte,  Abadie,  346  ;  —  Assche  (van), 
316,  530:  —  Bernin  (le  chev.),  114,  115, 
120  ;  —  Bethune  (leb*"'),  165.  211,  215.  318, 
356.  441.  530:  —  Beyaert,  408,  483;  — 
Boeswihvald,  346;  —  Boisseau,  165;  — 
Bonet,  4j8;  —  Bordeaux  (R.),  314;  —  Bou- 
vard, 80;  —  Couran,  521  ;  —  Daly  (C). 
425;  -  Duban.  346  ;  —  Ducerceau,  165  ;  — 
Dumortier,  63;  —  Gautière  (J).  332;  — 
Geernaert  (H.).  T96,  —  Guillaume  de  Raz, 
519;  —  Hansen,  197;  —  Huet  Ludin.  262; 
—  Iwine  (  ) .  T,  ),  384  :  -  Joli  (  P.  ),  262  ;  — 
Languerock,  177,  247,  248,  269,  530,  534, 
.S35.  539  :  —  Lassus.  83.  346.  498,  501.  539; 

—  Le    Nôtre,    165;   —  Libergier  (H.  i  431  ; 

—  Licot,  63  ;  —  Mallet,  T45  ;  —  Marchioni 
d'Arezzo,  242  ;  —  Maurette  (H.).  483  ;  — 
Mellet,  452  ;  —  .Michel-Ange,  274,  276  ;  — 
Monduit,  433;  —  Mortier  (Et.),  247;  — 
Naert,  201  ;  —  Newton  (K.  ),  486  ;  —  Pac- 
cand.  237  ;  —  Palissy,  165;  —  Pantilli  (Bac- 
cio),  93  ;  —  Polajuolo  (Sin-del),  144  ;  — 
Pugin  (Welby),  441  ;  —  Questal,  346;  — 
Rossi  (J.  de),  242,  512,  534  ;  —  Rudd,  441  ; 

—  Ruprich  Robert,  238.  346.  367,  371.373;  — 
Sauvageot  (L.).  528;  —  Schaubert,  227  ;  — 
Sinan,  527  ;  —  Suisse  (Ch.),  136,  137,  433. 
439  ;  —  Vaudoyer,  175  ;  —  Verhaegen,  23S. 
355-357; — VioUet-le- Duc,  154,  220,  231, 
234.  238.  239.  314,  347,  365,  372.  384.  426. 
431,  433.  468.  488.  489.  493.  495.  509  ;  — 
Waele  (de).  238  ;  —  Wulf  (Ch.  de)  456  ;  — 
Ysendyck  (Van),   176. 

architectes,  64  ;  —  alricains,  518  ;  —  anglais. 
368;  -  gothiques,  485.  494.  495;  —  mé- 
diévaux, 334,  470  ;  —  normands,  367-374, 
463,  470,  473  ;  —   romans,  485,  494,  495. 

Architectural  record,  212. 

architecture,  agenaise,  424  ;  —  auvergnate, 
168  ;  —  bourguignonne,  149  ;  — byzantine, 
520;  —  domestique,  425;  -  espagnole, 
247  ;  —  féodale,  78  ;  —  française,  42  ;  — 
gothique, 46, 365,  463-482;  —  limousine,  149; 

—  militaire,  331,  356,  519;  —  normande, 
366,  367  ;  —  provençale,  149;  —  religieuse, 
63.  68,  261  ;  —  romane,  148  ;  —  wallonne, 
333;  —  (traité  d'J.  532. 

archives  de  Bruges,  319.  321  ;  — ^  de  la  Com- 
mission des  monuments  historiques,  346  ; 

—  du  département  du  Rhône,  67;  —  rie 
Messines,   193;  —  d'Orsini  (cardinal),  445; 

—  d'Urbino,  142  ;  — de  Valenciennes,  132; 

—  du  Vatican,  2,  3,  6,  7,  76. 


TQoi.  —  Table  analytique. 


556 


9Rc\)ue  lie  T^rt  cbrctieu. 


Arcucil,  église,  496. 

Arendonck.  (vieille  tour  à),  63. 

Arendt,  5)33. 

Arezzo,  église  Santa  Mnria  délie  Grazie,  327. 

Argos.  inscriptions  grecques,  244. 

Ariège,  églises  foilifiées,  62. 

arithmétique  (l'I  (icon.),   120. 

Arles,  corniche  du  théâtre,  25. 

Arlon,  musée  archéologique,  335. 

Arménie  {roi  d'),  3-10. 

armes  guerrières  grecques,  331  ;  —  (inven- 
taire d')  339. 

armoiries,  communales,  52s  ;  —  de  Malines, 
400;  — de  Montmorency,  114;  —  de  Monza, 
12;  — desKécollets.  237;  —  de  Rivet  (Mgr), 

•37- 

armoire.  128. 

Arnould  (S.)  130;  —  (.^ndré),  539.  540- 

aroïdes  (iconographie  des  plantes),  489. 

Arras,  ancien  collège  des  Jésuites,  129;  — 
éghse  St-Nicolas,  129  ;  —  fabrication  de 
tapisseries,  94  ;  —  hôtel  de  ville,  503. 

art, allemand,  32.  458; —  arabe,  l'O,  153.331  i 

—  barbare, 23;  —  bourguignon,  440;  —  by- 
zantin, 32,53,  247.  313.  520.  528;  —  chinois, 
330,  437  ;  —  chrétien,  70.  76,  8=;.  227.  300, 
431,437.506:  —  décoratif,  25,  139;  — ecclé- 
siastique, 335  ;  —  égyptien,  32.  227.  486; 
-flamand,  32,  53,  433,  438,  439;—  floren- 
tin, 275  ;  —  franc,  333  ;  —  français,  138  ; 

—  gothique,  30.  69,  135  ;  —  grec.  2';,  28. 
32.  61,  217,  219,  340  ;  —  indoboud- 
dhique,  330  ;  —  italien,  137,327  ;  —  italo- 
flamand,  171;— japonais,  437;  —  limousin, 
150  ;  —  médiéval,  28,  31.  113  ;  —  méridio- 
nal. 440  ;  —  moderne,  135,  440  ;  —  monu- 
mental, 74  ;  —  niosan.  85  ;  —  musulman, 
438; —  national,  133,  135:  — du  Nord, 
440  ;  — normand,  i6t  ;  —  nouveau,  138;  — 
ombrien,  175,  343  ;  —  oriental,  61  ;  — 
populaire,  138;  —  romain,  32,  219;  — 
roman  français,  148  ;  —  romano-chrétien. 
23  ;  —  sinojaponais,  436;  —  syrien,  603; — 
troyen.  160  ;  —  vénitien,  540. 

Art  et  l'aulel{\'),  350.  418. 
Arthémis  (temple  d'),  6r. 
Artt  (corporation  des),  240. 
artichaut  (décor.  ).  289. 
artillerie.  258. 

artistes.  27S  ;  —  gothiques,  231. 
dernes.  284  ;  —  parisiens,    48 
48.  394- 
arts,  libéraux,  .\2,  43  ;  —  mécaniques,  35  ;  — 

(classification  des)  157. 
arum  (décor.),  220.  232,  488  498. 

aryennes  (les  races),  156. 

ascension,  42. 

Asper  (Hans),  peintre,  177, 

asphodèle,  214. 

aspic  (icon.  ),  397. 

Assche  (van),  architecte,  316,  530. 

Assenois.  éghse,  356. 

Assise,  crucifixion.  242; — église  inférieure. 
242  :  —  santa  Chiara,  172  ;  —  fresques, 
121.  252.  398. 

assomption,  422. 

Assyriens,  394  ;  —  (arbre  mystique  des),  35 

aster,  212,  213,  292. 

astronomie  (1')  (icon.),  220. 

Atarg,  65. 

Athènes,  acropole,  36,  236  ;  —  (ducs  d'),236: 

—  École  française  d'architecture, 61,  237  ; 

—  Erectheion,  237,  238,  483,  498  ;  —  Insti- 
tut archéologique  ailtmand,  -iyj  ;  —  méto- 
pes du  Panhénon,  398  ;  —  monument  de 
Lysicrate,  237  ;  —  Panhénon.  236,  403. 
498.  501  :  —  porte  Beulé.  236  ;  —  temple 
de  la  Victoire  Aptère,  236,  501  ;  —  tour 
des  Vents,  498. 

Atrée,  trésor,  437. 
Attert,  église,  335. 
attributs,  28,  35. 


207  ;  —  mo- 
—  romans. 


Auberive,  église,  261  ;  —  fonts  baptismaux, 

262. 
Aubert  (Jean),  ivoirier,  417. 
Aubeterre,  église  St-Jacques,  160. 
Aubiac,  église,  520. 
Aubusson  (tapisseries  d'),  159. 
Auch,  cathédrale,  425  ;  —  vitres,  425. 
Audenarde,  Hanske  de  Kryger,  481. 
Auge  de  Lassus.  498,  501,  539. 
Augustin  (S.),  20,  327  ;  —  (reliques  de),  89. 
Aulne,  abbaye,  228,    235,  236,  238,  269,  270. 

489  ;  — église  abbatiale,  82,  84. 
Aureli.  sculpteur,  422. 
Aurère-l'lfglise,  église.  149. 
aurttus,  400. 
autel,  en  marbre.  143  ;  —  iii.muinal,  190  ;  — 

(consécration  d")  190. 
Autun,  cathédrale,    508;   —   porte   romane 

538. 
Auvergne,  monuments  féodaux.  68. 
Auvillcrs,  église,  470. 
Auzanne,  158. 

Avallon,  monnaies  gauloises,  332. 
Aveiiing,  église,  386. 
Averdon.  fouilles,  02. 
aveugle-né  (!'),  76. 
Avignon,    musée,    171  :    —   papes,    1-3  ;    — 

porte  Liiiibei  t,  85  ;  —  porte  de  LoiiU,  85  ; 

—  tombeaux,  252  ;     -  icniparts,   424,  451. 

49B. 
Avrechy,  église.  490. 


Baaiyathon,  rab  phénicien,  518. 

Babylone,  jardins  suspendus,  162. 

Bacchus,  222.  226. 

Baërze  (Jacques  de),  sculpteur,  433. 

Baes  (E.),  248,  531. 

Bagneux,  éghse  494,  496. 

bague   antique,   329  ;  —  eu  bronze,  245  ;  — 

en  or,  62. 
baguette  à  ruban,  28. 
BaiUv.  église,  33t. 

Baldovinetti  (Alessio).  peintre.  55-57.  82. 
Bâle.  cathédrale.  7  ;    -  rose  d'or  de  Clément 

V,  6  1  —  trésor,  7. 
baleine  (icon.),  106. 
Bamberg,  statues,  252. 
bandelettes  (décor.),  28. 
banderoles  (décor.),  31. 
bannières  (décor.),   158. 
baptistères  byzantins.  ."iiS. 
V.Ax-\ii-\i\xz,SociUi  des  lettres, sciences  et  arts, 

332. 
barbares  alamans  (industrie  de) ,  62. 
Barbe  (statue  de  Ste),  261. 
Bari.  auibons,    172  ;  -  siège  épiscopal,  172  ; 

—  trésor,  543. 

Banard  des),  fondeurs,  263. 

Barthélémy  (St)(peau  de),  67;  —  (martyre  de), 
345  ;  -  de  Vire,  36,  37. 

Bartoli  de  Sienne,  orlèvre,  9,  10. 

Basclievis(livariste),  peintre,  141. 

Bazeltin  (Arnould),  130. 

Basile  (S,),  145. 

basilic  (icon.).  397,  398. 

basilique,  Reims  (St-Remi).  529;  -  Rome. 
(Ste-Julienne).  437  ;  —  (St-Paul-hors-les- 
mur-),  162,  2.(1.  242;  — Ste-Pétronille,  514; 

—  (St-Pierre),  9.    114;—  (St-Sixte).   512. 
513  ;  —  Soissons,  85  ;  -  à  plafond,    365 

—  Vaticane  (inventaire  de  la),  52. 
Basin(.S.  ),  184. 

bassin. 258,  259;  -  antique  à  Amsterdam, 58. 
Bastin  (Henri),  peintre,  427, 
Bataille  (Nicolas),  tapissier,  174. 
Baltandier  (le  docl,  Alb.),  515. 
Baiidimont,  fera  hosties,  285. 


Baune-les-Messieurs,  abbaye  (reliques  de  1"), 

68  ;    -  mobilier  de  l'égliîié,  08. 
Baye  (baron  de),  453. 
Bayeux,  cathédrale,  161,  368. 
Beau,  (dans  l'art)  (le)  154  ;  -  (gradation  du). 
155*  ~  (impression  du).  155;  —  (lois  du), 
139,  154  ;  —  moral  (le),   155  ;  —  (théorie 
sur  le),  77. 
Beaugeiicy,  hôtel  de  ville.  402. 
Beaumé.  cloche  du  XVIII=s..  263. 
Beaumont  (le  c»*^  CIi.  de),  peintre,  70,  417. 
Beauinont-sur-Sarlhe,  331. 
Beaune,    église  Notre-Dame,  508  ;  —  hôtel- 
Dieu, 539; —  peintures  nturales  du  XIK  s., 
508,  341  ;  —  Société  éduenne,   508  :  —  ta- 
pisseries, 510;  — vitrail.  S/,   509;  -  (Jean 
de),  272. 
Beausac,  église,  69. 

Beauvais,  abbatiale  St- Louis,  350;  — Basse- 
Œuvre,  463  ;  —  cathédrale,  431  ;  —  église 
St-Étienne,  366,  474. 
Beau.x-Arts  (histoire  des).  436. 
Beine,  bancs   du   Wlll"   s.,  262  ;  —  éghse, 
261  :  —  fonts  baptismaux,  2O2  ;  —  (réper- 
toire archéologique  pour  le  Canton  de), 261. 
Beissel  (le  P.),  78,  172. 

Belgique,  Commission  royale  des  monuments, 
63,  23  =  ,  451,  524  ;  —  école  de  Saint-Luc, 
215  ;  —  ruines  monumentales,  238  ;  —  res- 
tauration des  monuments,  234.  314. 
Belgique,  illuslric  (la),   71  ;  -  pillores<jue  il 

mon umentale,  74. 
Belgrade,  musée,  329. 
bélier  (icon.),  394,  406, 
Belleforuainc,  église,  384,  395. 
Bellegambe  (Jean),  peintre,  196;  —    (Vaast), 

pemtre,  196. 
Belléme,    antiquités,  435  ;  —  église  St-Léo- 

nard,  244. 
Bellérophon,  398. 
Bellini  ((iiov.  ),  peintre,  453. 
Benedetto  da  Maiano,  sculpteur,  420. 
Bénévent  (archevêques  de),  251  ;  —  archives 

du  cardinal  Orsini,  545. 
bénitier  des  lépreux,  332. 
Bénigne   (S.)  (châsse   de),  431  ;  —   (martyre 

de),  430  ;  —  (tombeau  de),  433,  434. 
Benoît  IX,  (monument  de),  89;  —  XI,  5  ;  — 
XIL  3.  8  ;  —  (roses  d'or  de), 8;  —  (tiaiede). 
252  ;  —  XIIL  252  ;  —  (rose  d'or  de).  10  ;  — 
XIV.  16  ;    —   (ordre  de  St-).    87  ;  —  (Ca- 
mille). 509. 
Benoite-Vaux.  médailles.  332. 
Benozzo  Gozzoli.  peintre,  243. 
berce  (décor.  ).  228. 

Berg-op-Zoom.  moiit.int  de  cheminée,  403. 
Bergaine,  259. 
Bergman  (P.),  530. 

Berlin,  musée.  87.  531  ;  —  quadrige  du  mo- 
nument national,  409;  —  statue  de  Frédé- 
ric le  Grand,  173. 
Bernard  (S.),  156  ;  —  de  Saintes,  431. 
Bernard!  (Valentino),  peintre,  14 1,  142. 
Bernardin  de  Sienne  (S.),  141. 
Bernay,  charpente  apparente,  463  ;  —  église, 

37°' 
Berneuil  sur  Aisne,  église,  463. 
Bernin  (lechev.),  architecte,  114,  115,  120. 
Bernulf(S.),  (étolede).  535. 
Berru,  calice  en  vermeil.  2Ô1  ;  —  église,  262 

—  statue  de  S. Hubert,  261. 
Berteaux  (Charles),  261. 
Berthelé  (Jos.  ),  70,  264. 
Bertram  (A.),  172. 
Besançon,    cathédrale,    72,    33a  ;     —  pièces 

d'honneur  et  jetons,  62. 
Bettreniville,  église,  261  ;  —  statue  en  bois, 

262. 
Bethune  (le  b°").  1Û5,  211,  215,318,  356,  .(.(i, 

530. 
Beuron  (bénédictins  de),  249. 
Beyaert.  architecte,  483. 
Bezold  (van).  367.  475. 
Bianconi,  19. 
bible  latine.  424. 


Cable  analytique. 


557 


Bibîia  pattpi'mm,  250. 

Bibliographie,    6^,   150,  248,  337,  429,  444, 

526. 
bibliotlièque,  d'Albi,  147;  —  Cambrai,  174: 

—  Carpentras,  5  ;  —  Bruxelles  (de  Bour- 
gogne), 165  ;  —  Dijon  (janinienne),  432  ;  — 
Florence  (nationale),  3  ;  —  Madrid  (Escu- 
rial),  329  ;  —  Paris  (de  l'Ecole  des  Beaux- 
Arts),  453;  -  (nationale),  60.  61,  284  ;  — 
Reims,  331  i   —  Rome  (du    \'atican),  343  ; 

—  {Victor  Emmanuel),  76;  —  Saint-Omer, 
320;  —  Upsal.  172  ;  —  du  XIV^  s..  65. 

biche  (icon,),  ^o6. 

Biesbroeck  (van),  .128. 

Bievène  (notice  hisiorique  sur),  248. 

bijoux,  du  Caucase,  4;3;  —  persans,  331. 

Billet,  charpentier.  433 

billette  (décor.),  539. 

Bilson  (John).  365,  463,  481. 

Binche,  collège  St-Ursiner,  357  ;  —  hôtel  rie 
ville.  247,  357  ;  —  vitraux,  357. 

biribi  (jeu  du),  339. 

Birkin,  église,  473 

Bitouto,  arnbon,  172,535;  — croix  triom- 
phale. 357  ;  — remparts,  '^$7. 

Blanc  (C),  134.  346. 

Blanchart  (U  ),  sculpteur.  86. 

Blanchet,  147,  245. 

Blaes,  musicien,  256. 

blason  italien  (devises  du),  65. 

Blois. jardin,  165,   233. 

iîlyth,  église,  372  ;   —   prieuré,   370. 

Boccali  d-i  Camerino,  peintre,  271.   343,  314. 

Bock  (Pr.  ),  22.  23,  53. 

Bodard  (lean),  maître  cirier,   76. 

Boe^uilwald,  architecte,  346. 

Boethas.  sculpieur  grec,  60. 

Boeto( Henri  del,  8* 

bœuf  (icon.  ),  406,  407. 

bœufs  (statues  colossales  de),  45. 

Boileau  (L.  A.  ),  532. 

botradis,  68. 

Boisselier,  i^einlre,  417. 

boite,  d(*  consécration,  T90  ;  —  polychromie 
du  VII^^s.,  68. 

BoUettiiw  diarcheoïogia,  511,  512. 

Bologne,  Sle  Ct!cile  (\q  Raphaël,   103. 

Bombelli,  rç). 

Bon  Paitenr,  statuette  en  marbre  blanc,  534. 

Bonaguil,  cliàteau,  519. 

Bonet,  archit.,  408. 

Bonfigli  (Ben.),  peintre,  274,  343. 

Boni  {le  comm,  ),  302,  422. 

Boniface,  V'I  II,  241,  256;  — {statuede),  232, 
326  ;  —  tiare,  253  ;  —  IX   (rose  d'or  de), 

9- 

Bonino  (reliquaire  de),  8g, 

Bonn,  chemin  de  croix,  523;  —  église  Sl- 
Florent,  522. 

Bonnefois  {J.  de),  418. 

Bonnes,  fera  hosties,  285. 

Bordeaux,  comptes  du  diocèse,  158  ;  —  mu- 
sée, 169  ;  —  (épée  de),  66  ;  —  (Raymond), 
architecte,  314. 

Bordi  (Pietro).  peintre.  419.420. 

Bordiau,  architecte,  ^^25. 

bordures  à  inscriptions,  527. 

Borgognone,  peinue,  56. 

Boscherville,  abbatiale,  161  ;  —  église,  370, 
463,  464  ;  —  porte,  161, 

Bosco,  couvent  des  Frères -Prêcheurs,  130, 

Bosco- Reale.  ancien  édifice,  88;  —  fresques, 
88,  241. 

Bossuet,  156  ;  —  (monument  de),  137,  173. 

bouc  {icon.),  394.  407. 

Bouchardon  (J  -B').  sculpteur,  433. 

Bouchet,  fer  à  hosties,  285. 

boucles  d'or.  23. 

bouclier,  33.  34. 

Bouddha.  436. 

boud'lhisnie,  436. 

Boudrillel(Jean).  sculpteur  sur  bois,  432. 

Bouillet  (A.).  166.  264. 

Bouillon,  château,  235. 

Boulmont  (G.).  73. 


Boulogne,  bois,   1Ô5  ;  —  égUse  Notre-Dame 

227. 
bouquets,  25.  258. 
Bourg-Charente,     inventaire     du     château, 

^59. 
Bourges,  abbaye  St-Sulpice,  244  ;  —  camées 

245;      -     cathédrale,     17;,     226,  231  ;  — 

maison  antique,   40S  ;  —   reliquaire  de  la 

Croix,  245. 
Bourgogne,  peintures  murales,  509  ;  —  (toile 

de),  333. 
Bourny,  église,  525. 
bourse  de  parchemin  du  XV"^  s..  ï8o. 
Bout  (S.),  patron  des  potiers.  257. 
Bontillier  (le  ch"^),  185. 
Bouts  (Thierry),  125,  177. 
Bouvard,  archit..  86.  289. 
Bouxin  (l'abbé),  lô,  37. 
Boysseau,   arcliitecte,  165. 
Boysson  (B.  de),  65. 
bracelets  en  or,  24. 
Braine-ie-Comte,     glossaire   topographique, 

248  ;  —   grange    des     Pauvres,     248  ;  — 

histoire,  248, 
bras-reliquaire,  126. 

Braun(Jos.),  54  ;  —  (le  R.  P.),  172,  535. 
Bredons,  église,  149. 
Brescia,  ambon  de  San  Salvator,  412. 
Biessers  (L.  ),  peintre,  85. 
Bretagne,  88. 
Brézé  (tombeau  de),  161. 
Briançon,  hypocauste  décoratif,  244. 
Brigueil,  fer  à  hosties,  281. 
Brive,  fer  à  hosties,  281-287  :  —  musée,   281- 

283. 
Brocard  (Ant.  et  Claude),  263. 
Broederlam  (Melch,), peintre,  433. 
bronze  (âge  du),  525. 
bionziers  grecs,  246. 
Broussole  (l'abbé),  273,  280,  340. 
Brown(le  prof.),  165,  477. 
Bruges,    abbatiale    de   l'Eeckout,    130;      — 

anciens  peintres,  441;  —  archives,  319,  321; 

—  chapelle  du  Sl-Sang,  211  ;  —  châsse  de 
Ste  Ursule.  320  ;  —  église  Notre-Dame, 
131  ;  —  église  de  Jérusalem,  211  ;  —  épita- 
phier,  165;  —  gildeSt-Jean  et  St-Luc,  130  ; 

—  St-Fraiiçois,  363  ;  —  St-Luc,  364  ;  — 
Gruuthuuse,  356  ;  —  hôpital  St-Jean,   131; 

—  hospice  St-Julien,  131; —  hôtel  de  ville, 
89;  —  peintures  de  Memling,  34;  — 
poorterslogie,  356  ;  —  porte  des  Baudets, 
356  ;  —  rue  de  l'Ane  aveugle,  74-75  ;  — 
tour  St-Sauveur,  431. 

Brune.  68. 

Brunelleschi,  architecte,  85. 

Brunetiêre,  156. 

Brunner,  251. 

Brunswick,    cathédrale,    334  ;    —    (duc  de) 

(rose  d'or  de),  10. 
Brusco  (Paul  Jérôme),  peintre,  143. 
Brutails.  i^fy.  348.  349. 
Bruxelles,  bibUothèque  de  Bourgogne,    165  ; 

—  congrès  scientifique,  519;  —  école  St- 
Luc,  138  ;  —  église  du  Sablon,  83,  86,  176  ; 

—  de  Ste-Gudule,  84.  86,  176  ;  —  façade  de 
maison,  408,  411  ;  —  Grande  Place,  06  ;  — 
hôtel  de  ville,  347,  481  ;  —  maisons  anti- 
ques, 271  ;  —  musée,  71,  89,  462  ;  —  quar- 
tiers pittoresques,  347  ;  —  Société  arckéo- 
logiqiie,-2.^Z,  426;  —  tapisserie  des  .<4i:^tfj(/« 
apôtres,  93  ;  —  du  XVI^  s.,  115,  117, 
119. 

Bruyland  (E.  ),  71. 

Bryckczynski  (abbé),  146. 

bucrâne  (icon.  ).  407. 

Buffalinaco,  peintre,  421. 

Bugah  (Gasp.).  dominicain,  17. 

buisson  ard'-nt,  iconographie,  6g. 

Bulletiv ,  archéologique,  78  ;  —  de  correspon- 
dajice  hellénique,  534:  — de^  métiers  d'art, 
533  ;  —  monumental.  77,   78,   264. 

Bunzen,  96,  97,  gS,   I16-119,  122. 

buon  fre<:co,  56,  57,  311,  50/. 

Burckardt  {].).  55,  56,  165,  279. 


burettes,  66. 

Burgkmair,  graveur,  61. 

Burgos,  musée,  150. 

buste,  de  Charles  lï  d'Espagne,  86;  —  Julien. 
246  ;  —  Lôwendahl  (maréchal).  60;  —  Ma- 
réchal de  Saxe,  60  ;  -  Pigula,  60. 

Bu.xerolles,  Pas  de  St-Jacques.  lôo. 

Byzautiiiisches  Zeitsckrift,  54. 

Byzantinisme  dans  l'architecture  espagnole 
(le),  247. 

Byzantins  (les),  219. 


Cabaret  (château  de),  425. 
câble  (décor.),  49. 
cabochons  (décor),  29. 
c,i.dran  d'horloge,  484. 
caducée,  35. 

Caen,  église  St-Etienne,  371.  374  ;   —  St-Ni- 
colas,  370,474  ;  —  Trinité,  368,  464,  469  ; 

—  Sculpture,  232. 

Cahier  (le  P.).  4.  160.  257,  321. 

Cahors.  cathédrale,  401  ;  —  maison  antique 

62. 
caladre  (icon.),  398. 
Calcar,  église,  522  ;  —  liôtel  de  ville,  523  ;  — 

lustre,  523  ;  —  maître  autel,  522 
calice,  ministériel,  250  ;  —  en  vermeil,  262;  — 

du  XVe  s.,  158  ;  —  du  XVK  s.,  191. 
Callimaque,  218. 
calvaire,  88. 
calvaires  bretons,  176. 
camaurum,  251. 
Cambrai,  cathédrale,    131    ;    —  chapelle    de 

N.-D.     de    la    Treille,     171  :   —   cloches 

antiques,  332;  —  collégiale  St-Pierre,  171  ; 

—  église  St-Aubert,  131  ;  —  manuscrit  de 
la  bibliothèque,  174  ;  —  Société  d'émula- 
tion, 332. 

camée,  antique,  188;  — de  Bourges,  245. 
camelaurîim.,  251. 
camellan.  398. 
camélia  (icon.),  290. 
camelot  de  Reims,  66. 
Camille  de  Lellis  (S.),  142. 
Campanula.  carillon,  290. 
Campin  (Robert),  peintre,  426. 
candélabre,  30,  31.  258. 
Cannes,  pièces  sculptées.  329. 
Canova,  peintre,  138.  153. 
Cantal,  architecte  romain,  148. 
Cantorbéry,  cathédrale,  371,  473.   474. 
Capella  greca,  513. 
Capitan  (le  D^).  147. 

Capoue,  église  Sant-Angelo  in  formis,  312. 
Caprais(S.  )  (statue  de).  261. 
Caprarola.  jardin,  163,  165. 
Capricorne,  398. 
caravelles,  158. 

Carcassonne,     cathédrale     St-Nazaire,    350. 
425  ;  —  chapit-aux,  425;  —  enceinte,  498  ; 

—  remparts.  239  ;  —  statue  du  Christ,  481  ; 

—  vitraux,  42Ô. 

Cardi  (Lod.  ),   peintre,  427. 

cardinal  (robe  de),  66. 

Carpentras,  bibliothèque,  5. 

carreaux,  259  ;   —   peints,   332  ;  —  de  terre 

vernissée.  331,  424. 
Carthage,  colonnade  antique.  329;  —cymbale 

phénicienne.  147  ;  —  fouilles.  61,  245,  517  ; 

—  lampes  chréiiennes.  401  ;  —  monument 
du  card.  Lavigerie.  76  ;  —  nécropole  puni- 
que, 518. 

Carton  de  Wiart  (H.),  138,  i  )0. 

canons  d'autel,  191, 

cartouche,  32. 

Casanova  (A.  F.).  i6ï. 

Casier  (J.),  357. 

casque  de  bronze-,  167  ;   —  du  XII<=  s.,  165. 

Casseneuil,  tn-^sor  de  l'église,  66. 

Castagno  (Aiidrea  del),  ])eintre,  508. 

Castelfranco  (le  ch,  J.-Bte),  i^. 

castels  féodau.s.  498. 


558 


3Rel)uc  Dr  l'art  cbvcticu. 


Casier  (le   ch.    van).    162,  333  —   335  ;  — 

(John).  473 
Castor  et  Pollu.v  (temple  de),  300.  301. 
catacombes.   255;   —  (cimetières  des).   511. 

513  ;    -crypte  des  Sts-Pierre-et-Marcellin, 

S'-.  5'3- 

Cathalamus  tie  Rocha.  orfèvre,  10. 

catliédrale,  Agen.  530;  —  Albi,  425;  — 
Amiens.  504;  —  Angers.  174.  183;  — 
Auch.  425  ;  —  Autim.  508  ;  —  Bàle.  7  ;  — 
Bayeux,  161,  368;  —  Beauvais.  431;  — 
Besançon.  62.  232  ;  —  Bourses.  175.  226. 
231  ;  —  BrunsHicl<.  334  ;  —  Cahors.  401  ; 

—  Cambrai,  iji  ;  —  C'anlorbéry.  371,  473. 
474  ;  —  Carcassonne.  423  ;  —  Chartres,  140, 
183.  225,  227.  228.  331.  431.  493  ;  — 
Cologne.  334,  503.  545  ;  —  Compostelle. 
160  ;  —  Constance.  334  ;  —  Durham.  368, 

374.376.391. 463.  482;  —  lily,  370.371.379; 

—  Evreux.  175,  480  ;  —  Florence,  93  ;  — 
Gand,  74,  438  ;  —  Gap,  175  ;  —  Gloucester, 

372,  373.  464  ;  —  Goslar,  172  ;  —  Laon,  36. 
230,  349.   384.  406,  407  ;   —   Lincoln.  471  ; 

—  Lisieux,  379  ;  —  Luxembotirg,  538  ;  — 
Lyon,  397,  403  ;  —  Malines,  162  ;  —  Mans, 
183  ;    -  Marseille.  175  ;  —  Mayence,  334  ; 

—  Meaiix.  92,  108.  115,  138,  221,  294  ;  — 
Milan,  227,  232  ;  —  Monza,  22  ;  —  Nico- 
sie. 517  ;  —  Noyon,  39,  78,  349,  517  ;  — 
Nuremberg,  334  ;  —   Paris,  30.  223,  224  : 

—  Peterboroiigh.  382-  385  ;  —  Puy,  69;  — 
Ratisbonne.  172  ;  —  Reims.  30.  140,  155, 
175.  222,  231.  331.  431.  48r.  504.  519;  — 
Rochester.  369.  371  ;  —  Rouen,  58.  59. 
175.  270.  355;  —  Séez,  175;  — Senlis,  349; 

—  Sens.  78,  384.  400.  403  :  —  Soissons,  37, 
43.  47.  384;  —  Strasbourg,  270.  431;  — 
Toulouse.  168  ;  —  Tournai.  335.  350  ;  — 
Tours,  218;  —  Trêves.  180;  —  Troyes, 
227  :  —  Versailles,  30;  —  Winchester,  370, 

373,  380  389;  —  Worcester,  371,  373, 
379  '•  —  Vpres.  524. 

Catherine  (Ste),  142,  540  ;  —  (mariage  mys- 
tique ,iej  $si- 

Caudecotie.  vieilles  maisons  et  remparts,  520. 

Caumont  (de),  36. 

Cauntrain.  peintre,  427. 

cavalier  hibériqite,  246. 

Cavallini  (Pietro).  peintre,  88,  241,  243,  421. 

Cellin.  église.  332  :  —  tour  romane,  332. 

Celhni  (Benv.).  420,  434. 

Ctiie  (la)  de  Léonard  de  Vinci.  57. 

centaure  (icon.  ).  398. 

céramique  japonaise,  437. 

Cercle  archéologique  d' Enghic»,  248. 

Ctifétnouitil  romain,  12. 

C'érès,  189. 

cerf  (icon  ),  65.  258.  407. 

Cerigatto,  statues  en  marbre  et  en  bronze,  T48. 

Cerigo,  statue  en  bronze,  245,  24Ô. 

cerisier  (décor.  ).  290. 

Cerisy-la-Forêt.  église,  464. 

Cernay-Iez-Reims,  chapiteaux,  261  ;  —  église, 
261:  —  vantaux' du  XIV'-' s.,  262;  —  Vierge 
du  XI V'c  s.,  262. 

Cessenon  (manuscrit  de)  70. 

Chabeuf  (H.),  138,  158,  174,  273,  346.  434, 
502,  510. 

Chaise- Dieu,  église,  69. 

Chaldée,  bas-relief  historique,  60. 

Challes,  cloche,  51. 

ChAlons.  église  Notre-Dame,  78. 

Chamalières-sur-I.oire,  église,  69. 

Chamaret.  tour.  78. 

Chambéry.  monument  des  frères  J.  et  X.  de 
Maistre.  173. 

Chamberlayne(le  major),  245. 

Chambly,  église,  494  -  496. 

Chambre  apostolique  (florin  d'or  de  la),  11. 

chameau  (icon.),  157,  408. 

Champ  Dieu,  église  fortifiée.  69. 

Champ.igne  (sculpture  dans  la),  160. 

Champigny,  église,  228,  496. 

Champvert,  fouilles  gallo-romaines,  62,  329. 


chandelier  de  cristal,  66. 

chant  liturgique.  87,  354.  449. 

Chanteloup.  inventaire.  257. 

Chantilly,  Jardin,  165  ;  —  livre  d'heures,  455  ; 

—  musée  Coudé.  246. 

Chanzy  (monument  du  général),  173. 

chape.  65. 

chapelle,'^65  :  —  à  Bruges  (.St-Sang).  an  ;  — 
Cambrai  (N.-D.  de  la  Treille,  17 1  ;  — 
Cléry  (des  Dunois-Longueville),  133  ;  — 
Dijon  (.St-îean),  136; —  Florence  (Bracacci), 
1Q2  ;  —  (des  l^spagnols).  121.  409  ;  —  (des 
Princes).  241  ;  —  (du  Tombeau).  55  ;  — 
Nimègue  (palatine).  498  ;  —  Padoue  (de  la 
Madonna  do  l'Arena).  57:  —  Paris  (la  .Ste), 
223,  230,  272,  504;  — (St-Cloud),  13;  — 
Rome  (.Sixtine),  92,  93.  99.  106,  108.  117. 
118  :  —  San-Miniato  (du  cardinal  de  Por- 
tugal). 55;  —  Tour  de   Londres.  368-370; 

—  chapelles,  à  absides  trifoliées,  350;  —  tri- 
choves.  359, 

chapiteau,  d'acanthe,  218.490.  492-497;  — 
d'arum,  490  -497;  —  byzantm.  219;  — 
corinthien,  218,  517  ;  —  de  cresson,  228  ; 

—  cubique,  368  ;  —  en  éventail.  149  ;  — de 
fougère.  46  -  48  ;  . —  historié.  520  ;  —  de 
lierre.  227;  —  des  musiciens,  161;  —  de 
nénuphar,  42.  221  ;  —  octogonaux.  37  ;  — 
de  plantain,  441; — roman,  264;  —  à  tailloir 
carré.  37  ;  —  des  vendanges,  222  ;  —  de 
vignes.  47.  48,  223  ;  —  à  volutes,  368  ;  — 
à  Carcassonne,  425  ;  —    Meaux,  221.  223  ; 

—  Messines.  199;  —  Saint- Benoit-sur- Loire. 
492  :  —  Séhourg,  223  ;  —  du  XII'^  s.  41. 
540;  —  du  XI 11"  s.,  41.  — 

chardon  (décor.).  231.  232, 

Ch,arleniagne,  349;  (châsse  de),  4;—  (capitu- 
!airesde),59. 102,  493; —  (dalmatiquede),52. 

Charleroi,  73. 

Charles,  l"  d'Anjou.  517;  —  II  d'Espagne 
(buste  de),  86; —  IV,  249;—  \' (diplôme  de). 
230  :  —  (inventaire),  11.  iBo  ;  —  VI  (inven- 
taire de),  7  ;  —  (rose  d'or  de).  7  ;  —  VII. 
441;  —  IX.  244  ;  —  Borromée  (S.).  15.  16. 
20  ;  —  Quint  (couronnement  de),  18.  427  ; 

—  le  Téméraire   (inventaire  de),   11.   195. 
Charly-sur-Marne,  cloches,  350. 
charpente  apparente,  368,  463,  468,  477. 
Chars,  église,  264. 

Chartres,  cathédrale,  140,  183,  224,  225,  227, 
228,  331,  424.  431,  493  ;  —  fouilles,  331  ;  — 
portes  sculptées,  161  ,  —  statues,  252. 

chftsse,  de  Charlemagne,  4  ;  -  d'argent,  258  ; 

—  limousine.   153  :   —  (fiagments  de)  180. 
Chassenon,  fouilles  gallo-romaines,  62. 
Chastenet  (inventaire  du).  67. 

chasuble,  du    XVI=  s..  191  ;  —  du  XVII'  s., 

191. 
chat,  408  ;  —  huant,  409. 
château,  d'Abin,  257;  —  Amboise,  230,  257  ; 

—  Annecy  66  ;  —  Beauniont-sur-Sarthe, 
331  ;  —  Bonaguil,  519  ;  —  Bouillon,  235; — 
Bourg-Charente,  159  ;  —  Gabarit,  415  ;  — 
Chanteloup,  257;  —  Clèves,  521; — Coucy, 
498  ;  —  Coutances,  147  ;  —  Durham,  371, 
476,  480  ;  —  Estillac,  78,  520  ;  —  Flône, 
317  ;  —  Fontainebleau.  60.  424  ;  —  Fran- 
chimont,  86.  235  ;  —  Gaillon.  329  ;  — 
Gand  (comtes  de  Flandre).  235.  269,  355, 
357.  498.  499.  502  ;  —  (Gérard  le  diable). 
238  ;  —  Gevaudan,  78  ;  —  Gisors,  517  ;  — 
Jarnac.  339;  — Karlstein.  249; — Kempen. 
521;  —  Larochepot,  539: —  Liancourt,329: 

—  Logne.235; —  Lublin,i44; —  Madaillan. 
425.  S20  ;  —  Moha.  235  ;  —  Myland,  521  ; 

—  Oiran.  65  ;  —  Orclier.  92  ;  —  Pau.  521  ; 

—  Pericard,  78,  519;  —  Pierrefonds.238;  — 
Vau  de  Cernay.  219  ;  Verres.  258  ;  —  Vil- 
mon  sur  Saha.  184. 

ChSteau-Chalon.  reliquaire  de  la  Ste  Epine, 

68.  1.(9;  —de  St-Just,  68. 
châteaux  féodaux.  424. 
Châielet.  croix  triomphale,  356. 
C'haumont.  église  St-Jean-Bapt.,  431. 
Chaussenot,  serrurier,  433. 


Chaux  du  Mondague.  chef  de  S.  Léger.  149. 

Chayelle.  compte  de  l'église.  68. 

chélidoine  (décor.).  222,  224. 

chêne  (décor.).  222.  225. 

Chennevières.  église,  224. 

Chenonoeau.  jardin.  165. 

Chéops,  pyramide,  402,  499. 

Cherchel,  fouilles,  330. 

chérubins.  362. 

cheval  (icon.).  409  ;  — marin.  401. 

chevelure  dans  les  mosaïques  (représentation 

delà).  310. 
Chevigny.  cimetière  burgonde.  62. 
chèvre- feuille  (décor),  217,  295. 
Chevreuil,  directeur  des  teintures  aux  Gobe- 
lins.  102. 

chicorée  (décor.),  217.  232. 

chien  (icon.  ),  409. 

chimère  antique.  398. 

Chine,  tour  en  porcelaine.  437. 

Chinois,  290-291. 

Chisi  (Francese).  peintre,  142. 

chœur  en  conque.  69. 

Chomton  (le  ch'i=).  429. 

chou  frisé  (décor.  ).  58.  59. 

chouette  (icon.).  409.  412. 

chrétiens  (costumes  des  premiers),  514. 

Christ,  adoration  des  bergers,  55-57  ;  —  as- 
cension, 62  ;  —  crucifixion.  57,  142,  190, 
242,250,  309.  313.  505.  509  ;  —déposition, 
124,  277,  509  ;  —  figure,  403.  404  ;  —  pas- 
sion. 42.  250  :  —  résurrection.  42.  55  ;  — ■ 
(robe  du).  104  ;  —  statue.  426  ;  —  vie,  190. 

Christchurch,  église,  472. 

Chronique,  des  arts  (la),  234,  269,  315;  — 
rijnt'e  344. 

chrysanthème  (décor.),  231.  295. 

chute  (décor.),  2;, 

Chypre  (royaume  de).  3. 

Cidaris.  coiffure  du  grand  prêtre  juif.  251, 
252. 

Cimabue,   peintre,  57,  312. 

cimetières  romains,  62.  255. 

cimiers,  33.  34. 

Ciro  Ferri,  peintre.  243. 

Clagny.  jardin.  165. 

Claire  (Ste)  (puits  de).  421. 

Clans  .Sluter.  440. 

Clazomene  (tasse  de),  147. 

clef  de  volîte.  479. 

clématite  (décor.).  290.  297,  299. 

Clément.  (S.).  r45  ;  —  IV.  249;  —  V.  25^, 
347  ;  —  (roses  d'or  de).  6;  —  (tombeau  de), 
349  ;  —  V[  (roses  d'or  de),  8  ;  —  VII,  3.  4, 
6,  98,  275  ;  —  (roses  d'or  de),  9  ;  —  (tiare 
de).  252  ;  —  XI.  14,  15,  20,  301. 

Cleroci  (l'abbé  de),  427. 

Clermont- Dessous,  église,  434,  521. 

Clennont-Ferrand,  maison  antique,  85  ;  — 
peintures  murales,  519. 

Cléry,  chapelle  des  Dunois-Longueville.  133  ; 
—  église  N.-D..  59;  —  ostensoir  du  XV'=s. , 
132  ;  —  trésor  Notre-Dame,  132. 

Clèves.  château,  521  ;  —  collégiale,  522  ;  — 
retable,  522  ;  —  tombeau  des  ducs.  522. 

cloche,  d'acier.  264  ;  —  antique.  58  ;  —  de 
Cambrai  332;  — de  Challes. 51;  —  de  Char- 
ly sur  Marne.  350  ;  —  du  centre  de  la 
France,  58  ;  —  du  XV''  s.,  262  ;  —  du 
XVI'-s.,  262;—  duXVlI«  .s.,  335;  — du 
XVIlI"s.,263. 

clocher,  à  huit  pans.  149  ;  —  de  Saint-Spire, 
494  ;  —  à.Senlis,  44. 

Cloquet.  35.  42.  68-78,  83.  137.  140,  161171, 
2.-I3.  =35.  =48.  269.  270,  299.  335,  336,  347- 
349.  413.  4 '8.  426.  .(28,  435-443,  487,  503, 
524.  528,  532. 

clou  de  la  Passion,  15.  17,  22. 

Clovis(Giul  )  miniaturiste,  5.(0. 

('luny.  musée.  271.  541  ;  —  rose  d'or,  7. 

Cocabiex  (icon.).  398. 

Cochois  (les),  fondeurs  de  cloches,  263, 

coffret  en  ivoire.  153. 

cognassier,  290. 

colimaçon,  394. 


Cable  analptique. 


563 


Jérémie,  401. 

Jérus^leTii,  église  St-Sépulcre,  330  ;  —  Lépro- 
serie de  St-Lazare,  148;  —  mosaïques,  330. 

]oest(J.).  peintre,  248,  522. 

Joli  (Pierre),  maitre  maçon,  262. 

Jonas,  406. 

jonquille,  291. 

Jordaeus,  69. 

Joriianne,  croix  processionnelle,  517. 

Jorissenne  (le  D'),  333.  ^      . 

Joseph  (hist    de),  306.  31 1,  313;  —  d  Arima- 
thie,  124. 

Josias  (le  roi).  76. 

Jouaigues.  église,  463. 

Jourel  (Th.),  73. 

Jouy  (le  cli""^),  223,  528. 

Jove  (Paul)  (musée  de),  254. 

jul)ilé,  256. 

ludas  (trahison  de).  435- 

Jugement  dernier,  42,  43.  94.    107,    118,  174. 
270.  274.  276. 

Jules,  II.  pape.  2. 116.  -  (tiare  de).  252.  253; 
-  Ut.  18.  301. 

Julien,  l'empereur  (portrait  de),  246. 
Iulio  (Cesare).  peintre.  506. 

Jumieges,  abbatiale,  350,  36S,  370,  .498. 

Jura,  églises  romanes,  68  ;    -  statues  ancien- 
nes, 62. 

Joste(.S.).  181.  2c;7  ;  -    (reliques  de).   68  ;  - 
de  Gand,  peintre,  344. 

Justin,  empereur.  185. 


K. 


Kaemmerer,  124,  130,  131. 

Kahn  (collection),  130. 

Kant.  156. 

Kauzler  (le  bar.),  513-515. 

Karnak.  temple,  436,  450,  498. 

Karlsiein,  château.  249. 

Kaulbach,  peintre,  458. 

Kazan,  bracelets  eu  ur,  23;  -  couronnes,  24. 

Keiffer,  73. 

Kempen.  château.  521  :  -  église.  522. 

Kempis(  Thomas  à)  (monument  de),  78. 

Kérubim  assyrien,  395. 

Kidrich.  bancs,  523  ;  -  église,  523. 

Kirk-itall, église,  472. 

Ivlosterneuburg,  monastère,  78. 

Koecklin  (Raymond),  160. 

Komburg,  abbaye,  535. 

Kon  Hovista,  inscriptions  latines,  544. 

Kon'Iakow.  22.  24, 

Korsabad,  palais,  436. 

Kralik  (le  prof.  ).  155. 

Ksar-Rlielan  (Sahara;,  poste  romain,  61. 

Kunst  iind  Kuniihxndwerk,  78. 


Laach,  190. 

Laachersee,  abbaye,  189. 

Labarde,  20,  22,  23. 

I^ablié.  peintre,  427. 

Laborde  (marqui.s  de),  96,  131,  132,  440. 

La  Chaise- Dieu,  tombeau,  252. 

Lacouture  (Ch  ),   153  156. 

Lagrange  (A.  de),   426;   —  (le  R.  P.),  330, 

La  Haye,  musée,  T24. 

Lahondès  (M.  de).  425. 

Lalanne  (Ludovic),  114. 

Lamartine,  437. 

Lanibèse,  fouilles,  330. 

Lambin  (E.)..  50.  59,  219,  222,  229,  231,  232, 

349.  497  i  —  nécrologie,  546. 
lambrequins,  33. 
Lameire  (Ch.).  peintre.  143. 
La  Moricière  (tombeau  de),  173. 
lampe,  30. 

Lamperez  y  Roniea  (D.  Vicente),  247. 
Lando  de  Sienne,  orfèvre,  22, 


Landoy  (E.  )  73. 

Langerock.   architecte,    177,   247,   248,    269, 

530-  534-  535-  539- 
Langres,  fortifications,  538;  —  porte  romaine, 

5.^8. 
La  Noue  (Gén.  de),  147. 
Lante  (Marcellus).   card,    301  ;  —  Michèle, 

301. 
lanterne.  66.  258. 
Laon,  cathédrale,  36,  230.  349,  384,  406.  407; 

—  chevet,  46  ;   —  chœur,  38.   40,    41  ;  — 

grand  portail  42  ;  —  flore,  46  ;   —  nef,   37, 

38.  40  ;  —  oriçine.  36  ;  —  portails  latéraux, 

45;  —  tour  de  l'horloge,   45;   Saint-Paul, 

4S  ;  —  transept,  39  ;  —  vitraux,  42. 
Lapais  (cloître  de),  246. 
lapin,  4  [  I. 
Lapo  de  Neri,  240. 
Larchant,  poteries  romaines,  62. 
Larochepot,  château,  539  ;  —  église,  539  ;  — 

vitraux,  539. 
Lassus,  architecte,  83,  346,  498,  501,  539. 
Laslingham,  crypte.  370. 
La  Tour,  peintre,  170. 
Laugier  (l'abbé),  431. 
Laiijrac,  stalles,  487. 
Launny  (de),  415. 
Laurens  (Jean  Paul),  peintre,  174. 
Laurent  (S.),  242  ;  —  (statue  de),  262. 
Laurentum,  villa  de  Pline,  434. 
Laureys.  530. 
laurier,  291, 

Lausanne,  temple  protestant,  177. 
Lauti  (Giov.),   peintre,  344,  345. 
I^autrin  (S.),  (statue  de),  332. 
Lauwer  (Th.  ).  326,  327. 
Lauzun,  78. 
lavacrnm,  221. 
Laval,  Frères-Mineurs,  338. 
Lavigerie  (card.),   245;    —  (monument  du), 

76,  137. 
Laylié  (L.-F.),  sculpteur  ciseleur,  435. 
Lazare,  508,   509  ;  —  (reliques  de),  i8i  ;  — 

(résurrection  de)  108. 
Lebda  (ruint-s  de),  244. 
Le  Brun,  lO-i,  347, 
Le  Cler  (Jean),  relieur,  130. 
Leclerc  (E),  71  73. 
Le  Clert,  67. 
Lecomte  de  Lisle,  156. 
Le  Coq  (Hugues).  510. 
Leclour,  cathédrale   Sts-Gervais  et   Protais, 

521  ;  —  inscriptions  latines.  424. 
Ledesma  (Alexis),   17. 
Ledieux  (Alcius).  417. 
I^efebvre    Pontalis    {E. ),   78,  264,   349,  365, 

366.383.  386.  463,   470,  473,  4S9. 
Léger  (S.  )  (chef  de),  149, 
Légnano,  église,  505, 
Lemonnier  (H,|,  438. 
Lemoyne,  sculpteur,    60  ;    —    de    Morgues, 

peintre,  147. 
Le  Nain,  peintre.  170. 
Le  Nôtre,  architecte.  165. 
Léon.  III,  305  ;  —  IV,  305,  310;  -   ÎX  (s.). 

4i  S09  ;  —  ^'  99-  100.  108,  110,    112,    114, 
122,  123,  273,  276,  —  (écusson  de),  116;  — 

(inventaire  de),  96  ;  —  XIIÏ,  121,  328,  354, 

355.  450.  5".  538. 
Léonard,  musicien,  456. 
Léonille  (ste)  (statue  de),  332. 
Lepautre,  35, 
Leroy  (G.),  355. 
Le  Roy  (A.).  73. 
Lespinasse  (  r<ené  de),  65. 
Lessay,  église  370,  387.  389.  474,  480. 
Leuze,  église  St-Germain,  149. 
Levasspur,  34g. 
levrette,  411. 

Lezoux,  inscription  gravée,  60. 
Liancourt,  château,  329. 
Libergier  (Hugues),  architecte,  431. 
Liberija.  église  majeure,  161. 
Libin,  vitraux,  543. 
librairie  parisienne  (histoire  de  la),  244. 


Libretto  (reliquaire  del).  421. 

licorne,  400,  436. 

Licot,  architecte,  6y 

Liège,  fonts  baptismaux,  160  ;  —  musée,  89  ; 

—  (province  de),  73. 
lierre.  222.  226. 

Lies  (Jos,  ).  peintre,  457. 

Lille,  tombeau  de  Louis  de  Maeie,  248  ;  — 
Vœu  des  Faisans.  427. 

Lillers  (Nord),  église,  222. 

Limbourg,  73  ;  —  croix,  185. 

Limoges,  abbaye  St-Marliaf,  282  ;  —  inven- 
taire. 282  ;  —  porcelaines,  159. 

lin.  291. 

Linas  (Ch.  de),  20,  182,  188,  350,  427. 

linceuil,  259. 

Lincoln,  cathédrale,  471. 

Lindisfarne,  église  386.  387,  471. 

lion,  394,  403,  404;  ~  Néerlandais,  70. 

Lippi,  peintre,  57,  38. 

lis,  214.  22g,  230,  231. 

liseron,  291,  292, 

Lisieux.  cathédrale,  379  ;  —  sculpture  déco- 
rative. 161. 

lisse,  94. 

Lissevveghe,  église,  452. 

lit,  2  la  polonaise,  à  la  turque,  159, 

liturgie,  de  la  présentation  delà  Rose  d'or,  3; 
béatification  et  canonisation  des  saints.  16, 
256  ;  —  Cérémonial  romain,  12  ;  —  chant 
liturgique.  387,  S-j,  449  ;  —  consécration 
d'un  autel,  190  ;  —  culte  de  la  couronne  de 
fer  de  Monza.  14-16,  20;  —  distribution  du 
vin,  150  ;  —  éclairage  liturgique,  354;  — 
exposition  des  reliques,  16;  —  hosties  (fa- 
brication des), 281  ; — Liber pontijicali^,  302- 
304;  —  iivrede  la  prière  antique  { le } ,  429; 

—  mélodies  grégoriennes.  449  ;  —  office  de 
l'exaltation  de  la  croix,  187  ;  —  pain  bénit 
(le).  337  ;  —  Plain  chant  (le),  354.  449  ;  — 
Pontifical  romain,  190  ;  —  prière  Avete, 
350  ;  —  procession  de  la  Fête-Dieu,  74  ;  — 
rite,  chaldéen,  60;  —  lyonnais,  258;  — 
oriental,  538  ;  —  Sacrée  Congrégation  des 
Rites,  14-16,  19  ;  —Saints  de  la  messe  (les), 
159  ;  — Scoppio  del  Carro,  à  Florence,  507. 

Lodève,  monnaies  d'évêque,  331. 
Logne,  château,  235. 
Loiseaux  (P.),  fondeur,  263. 
Loisne  (comte  de),  519. 
lombard  (Art),  23. 
Lombard  (Lambert),  440. 
Londres,  Bovvchurcn,  370;— Rritish  Muséum, 
60,  237  ;  —  Chapelle  de  la  Tour,  368,  370; 

—  South  Kensington  Muséum,  92,  535. 
Longhi.  gravpur,  13. 

Longinus  (S.),  307. 

Looz,  hôtel  de  ville.  452,  539;  —  (pays   de), 

architecture  romane,  333. 
Lorenzeiti  (Ambr.  )  peintre,  57, 
Loreto,  église  St-Louis  des  Français,    143  ; 

—  peintures.  143, 

Lorraine,  (croix  de),  78  ;  —  fonts  baptismaux. 
331;  —  pots,  68  ;  —  mode  d'habitation,  63. 
lotus,  212,  217. 

Louan  (dalle  tumulaire  de).  270. 
Louis,  I  d'Anjou,  174;   —  I  de  Hongrie,  8; 

—  IX,  526  ;  —  XI,  58  ;  —  XII,  258.  411. 
416;  —  XIV,  28.  33,  35.  94.  104,  114,  452; 
XV,  33  ;  —  de  lilois,  18s  ;  —  de  Bourbon, 
8;  —  de  Maele  (tombeau  de),  248;  — 
Philippe,  108;  —  de  Poitiers,  8;  — -de 
Toulouse  (s.)  (statue  de),  24c  ;  —  roi,   330. 

347- 

Louvain,  71  ;  —  collège  d'Arras,  124.  131  ;  — 
église,  St-Jacques,  160;  —  St-Pierre,  72, 
83,  84,  177.  539  ;  —  hôpital,  231  ;  —  hôtel 
de  ville,  269;  —  peintures  murales,   177. 

Louvre,  fer  à  hosties,  2S1  ;  —  musée,  169, 
174,  281,  435,  540;  —  (Palais  du),  114  ;  — 
parquet  à  ligures  incisées,  517  ;  —  tapisse- 
rie à  la  licorne.  401, 

Louzy,  inventaire  de  l'église,  350. 

Lublin,  château,  144;  — tableau  dédicatoire, 
144. 


tçoi.—  Table  analj'tiçue. 


Luc  (S.),  407  ;  —  (école  St),  215. 
Luc;i  della  Robbia,  240. 
Lugano.  église,  505  ;  —  fresques,  505, 
Luidprand,  89. 

Luini  (Rernardino).  peintre,  505. 
lumière  électrique,  355. 
Lunéville,  mortier  en  bronze,  331. 
I.urani  (Franc.),  505. 
Lutwin  (S.),  184. 

Luxembourg,  cathédrale,  538  ;  —  institut  ar- 
chéologique, 335  ;  —   peintures   murales. 

333. 

Luzarche  (Robert  de).  272. 

Lyon  (Cl.),  73. 

Lyon,  cathédrale,  397,  403  ;  —  fondation, 
148  ;  —  inventaire  de  la  cathédrale,  5  ;  — 
rose  d'or,  5  ;  —  tapisseries,  96-98. 

Lysandre  (statue  de),  518. 

Lysicrate  (monument  de),  218,  237,  437, 

Lysippe  (types  féminins  de),  61. 


M. 

Mabillon,  2.  ij.  284. 

Mackler  (Fr.  ).  245. 

Madaba,  mo.saïque  géographique,  517. 

Madaillan,  château,  415,  520. 

Madi  leine  (Sie)  (relique  de),  181. 

Madrid,  bourse,  412. 

Maeslricht.  525  ;  —église  SlServai?,  333. 

Maeterlinck,  332,  541. 

Magne  (L.),  237. 

Maiihac,  n  ouïe  à  hosties,  281. 

Main-reliquaire,  153. 

Maini(J.-a),  243 

maisons,  antiques  à  Abbeville,  414-415  ;  — 
Agen,  520  ;  —  Aigues-Mortes,  85:  —  An 
gers,  451  ;  —  Anvers.  541  ;  —  Bourges 
408;  —  Bru.xelles,  86,  271.  408  ;  —  Cahors 
62  ;  —  Caudecotle,  520:  —  Clerniond-Fer 
rand,  85  ;  —  Dinant,  317  ;  —  Orléans,  85 

—  Paiis,  5^2  ;  —  Réihel.  77  ;  —  Rouen 
85.  175.  270;  — 'l'hèbes.  162;  —  Toulouse, 
415  ;  —  Ypres,  441,  524  ;  —  en  bois,  414 

—  rustiques  (inscription  sur  façade   des), 

329- 
Maisire  (J.  et  X.   de)  (monument  de),  173. 
Maiire  (L.),  332,  530. 
niaiires,  inconnus,  124  :  —  (Vie  des  grands), 

318. 
majoiiques,  iio. 
Malampize,  église,  149. 
Maldeghem  (van),  165. 
Malines.  armoiries,  400  ;  — ■  cathédrale,  162  ; 

—  congrès,  333;  — •  peintures  murales,  335. 
Mallet,  arcliitecte,  165. 

Malmesbury,  église,  389,   390,  393. 

Malte,  cunuuanderie,  67  ;  —  inscription  bi- 
lingue, 147. 

Mainmès  (S.  )  (statue  de),  335. 

Mander  (Van),  364. 

manicore,  401. 

Mans(Le),  cathédrale,  183:  —  monument  du 
général  Chanzy,i74;  —  N.-D.  du  Pré,  350, 

365- 

Mantes,  église,  494,  496. 

Mantoche,  fouilles,  330  ;  —  mosaïque  romai- 
ne, 331. 

manuscrit,  à  Albi.  147, —  Bascas  de  Bagaris, 
60  ;  —  Cambrai,  174  ;  —  Cessenon,  70  ;  — 
Madrid,  319  ;  —  Marioupol,  265  ;  —  Milan 
(à  l'Ambrosienne),  18,  251  ;  —  Pairesc,  s  ; 

—  Vatican,  76  ;  — S.tint-Gall,  449  ;  —  du 
IX«  s..  284;  ^à  miniatures,  61;  —  de 
Phèdre,  60. 

marbre  de  Paros,  329. 
Marchioni  (lechev  ),  241,  242. 
Marcus  Sandi,  orfèvre,  9. 
Maredsous,  abbaye,  315.  318. 
Mar.il-Maily,  église,  496. 
Mares  (le  Fr.  ),  226. 
Marguerite  d'Oultre,  abbesse,  193. 


marguerite  des  prés,  291. 

Marie,  d'.Xngleterre,  414.  415  ;  —  de  Bourgo- 
gne. 105  ;  —  Madeleine,  125,  509  ;  — 
(reliquaire  de),  421  ;  —  (statue  de)  ;  262  ; 

—  Thérèse  d'Autriche,  194  ;  —  (apothéose 
de),  76. 

Maries  (les  trois),  76. 

Mariinonte,  19. 

Marioupol.  manuscrit  de  l'évangile  S.  Mat- 
thieu, 245  ;  — musée,  245. 

Marmion  jisinion).  131.  132. 

Marquet  de  Vasselot  (Jean),  160. 

marronfiier,  297,  298. 

Mars,  189. 

Marsaux  (lech"«),69,  159. 

Marseille,  catliédrale,  175  ;  —  richesses  ar- 
tistiques, 159. 

Mairy{C'e  rie),  77,  78,   166,  424,  529. 

Martène  (Dom),28i. 

Marthe  (Sic).  ^09  ;  —  {relique  de),  18  r. 

Mnrlin  (le  V.),  Ar\~  (l'abbé).  382.  383  :  — 
V,  301;  —  d'Aragon,  rose  d'or,  18  ;  —  (S.) 
(statue  de).  242. 

Marucchi  (H.),  255.  513. 

Masini  (AiU.),  18. 

masque,  486,  487. 

Massaccio.  peintre,   102. 

Massât,  coIl<?giaIi\  425. 

Massin,  peintie,   427, 

Mastro  Piero  ()acomo  de),  peintre,  142. 

Mathias,  (S).  184,  191.  192;  —  (corps  de), 
179  ;  —  (sarcophage  de),  179. 

Mathie,  114. 

Matthieu  (E.).  248. 

Maubrisson,  inventaire  de  l'abbaye,  188. 

M^ur(S.).  131. 

Maurette  (H),  architecte,  484. 

Mrturiac  (églises  de  l'arrondissement  de). 
148. 

Mauiini  (Johannes),  orfèvre,  10. 

mauve.  292. 

Maximin  (S),  184. 

Max-Werly,  332. 

May  (L.  H.),  162. 

Mayence,  caihédralr,  334. 

Mazerolle  { l'V.  ),  435. 

Mazerolles,  fera  hosties,  284,  285. 

Meaux,   bas-reliefs   de  la    Renaissance,  335  ; 
— cathédrale,   92,    108,    115.    138,  221; 
chapiteaux,   221,   223,   227.  22B,  241,  294  ; 

—  conférence   ahistoire   et    d'archéologie, 
335  ;  —  monument  de  Bossuet,  137,  173. 

Mécines,  abbaye,  193. 

médailles  anciennes,  357;    —  de   bronze,  13. 

Ménicis  (Cosme  de),  150;—  (famille des),  92, 
94.  420. 

Mégare.  groupe  en  bronze  de  Lysippe,  6i. 

Megen,  retable.  24S 

Meirsschaut  (P,  ),  347. 

Mélanges  d'archéologie  et  d'hiUoire,  326. 

Méiasi'ppe  (S.)  (statue  de),  332. 

Mellet  (Dom).  452  ;  —  architecte,  456. 

mélodies  grégcriennes.  449. 

Mclozzoda  l'orli,  peintre,  343,  462. 

Melrose.  abbaye,  498. 

Mély  (de),  19.  251.  253.  255,  257, '338,  435. 

Memling,  71,  124,  130,  131,  319,  320.  321, 
442,510.  519. 

Meninii,  pemlre,  57,  58. 

M(hnoire(la),  155. 

Mcn.le.  cathédrale,  175;—  clergé,  70. 

Mfnès(il.).  77,  78 

Mengelbert  (\V.  ),  sculpteur,  78. 

Menuchii  (Johannes),  argentier.  8. 

menuiserie  gothique,  30, 

Mérimée.  346. 

Merlet,  78. 

Mésié,  inscriptions  latines,  264. 

messe  (les  saints  de  la),  159. 

Messeré,  fer  à  hosties,  285. 

Messines,  abbaye,  424  ;  — abbesses,  194  ;  — 
ancien  chœur  des  chanoines,  204,  205  ;  — 
anciens  scels,  208  ;  —  archives,  193;  — 
constructions  primitives,  196-199:  —  cha- 
piteaux,  199,  201  ;  —  église,    193,  194;  — 


institution  royale,  194;  —  plan  terrier.  197  ; 
pilier.  200  ;  —  porte,  204  ;  —  reliquaire 
du  XVl*^  s.,  193  ;  —  transept,  200.  201  ;  — 
tour  carrée,  206;  —  (vierges  de),  193;  — 
vue  du  chœur,  200  ;  —  de  l'église.  199. 

Metsys  (Quintin),  58,  125,  172.   174. 

Metz  (M.),  331. 

meubles,  anciens.  67  ;  —  héraldiques,  33. 

Meuse  (la),  73. 

Meungijean  de)  (statue  de),  272. 

Mezzastri,   peintre,  343. 

Michta  (S.)  (statue  de).  481  ;  —(A.),  438;  — 
de  Gand,  fondeur,  427  ;  —  seigneur  de  la 
Machelerie,  67. 

Michel-Ange,  108,  114,  118,  274.  276. 

Michicls  (Alph.  ).  319, 

Middelbourg,  église,  131  ;  —  inventaire,  124. 

Mièges,  église,  68. 

Migfllos  (Krnold).  334. 

Mihiel  (Marc-Auioiiie),  1x2. 

Milan,  Académie  arti>tK|ne  et  scientifique, 
517  ;  —  candélabres,  409  ;  —  coffret  de 
St-Nazaire,  251  ;  —  coupe  en  ciistal  du 
XIV'-*  s.,  535  ;  —  couvent  Saniii  Maria 
délie  grazie,  55  ;  —  fresques.  ^,05  ;  —  Mu- 
sée Brera,  505  ;  —  Manuscrit  de  \' Iliade, 
251  ;  —  paholto,  23,  24  ;  —  Santa-Marla 
della  mare,  505. 

Milhac  de  Voulron,  bénitier  des  lépreux,  332. 

Millin.  i8. 

Milo  (Vénus  de).  60,  6t.  147,  156. 

miniature  du  XII*^  s.,  186. 

miniaturistes  français,  517. 

Mino  de  F'iesole,  sculpteur,  143,  144. 

niinolaure,  40[. 

Muatlorès,  retable,  531. 

miroirs  funéraires  chinois.  330. 

missel  de  Sarragosse,  257. 

Mithridate,  61. 

mitre,  25T. 

mobilier,  aiguières  en  bronze,  45^  ;  —  ar- 
moires, 68  ;  —  bassins  antiques,  58  ;  —  cage 
à  oiseau,  66;  —  carreaux,  peints,  332;  — 
eu  terre  vernissée,  331  ;  —  cotlret  en  ivoire, 
153  ;  —  coupe  en  cristal.  535  ;  —  coupes 
sassanides,  61  ;  —  cymbale  phénicienne, 
J47;  —  encrier,  66;  —  fauteuil,  262,  522;  — 
fibules  antiques.  329;  —  ibériques,  161  .  — 
garde-mangtr,  65;  ~  lanterne,  66  ;  —  lit, 
159;  —  miroirs  funémires  chinois,  330;  — 
montant  de  cheminée.  403  ;  —  mortier  en 
bronze,  331  ;  —  pistolets,  68  ;  —  plaque  de 
cheminée.  248  ;  —  en  fonte.  321  ;  —  porce- 
laines, 159;  —  poteries  anciennes.  331  ;  — 
estampillées,  329;. —  romaines.  62;  —  pots 
de  Lorraine,  68;  — sièges  pliants  en  fer, 
329;  —  taques  de  foyer,  70,  259,  331,  335; 

—  torches  du  XVII'^s.,  7  ;  —  vases  antiques 
à  obturateurs,  329  ;  —  de  bronze,  62  ;  — 
anciens,  67,  257  ;  —  du  XIV*^  s. ,  65. 

mobilier  liturgique,  68;  —  autel,  143,  190, 
331,  418,  420,  427.522;-  bancs.  513; — 
boîtes  de  consécration,  190;  ^calice,  150, 
158,  191,  262;  —  canons  d'autel,  191  ;  — 
chaire,  172,  439  ;  —  chandelier,  66  ;  — 
châsse.  4,  72,  153.  184.  185,  189,  244.  375, 
421,  43r,  441,  535  ;  —  chemin  de  croix,  457, 
513;  — cloche,  51,  58,  262,  263,  264,  332, 
335;  —  croix,  78,  149,  158,  179.  i8r,  182, 
185,  187,  213,  259  ;  —  crosse,  403  ;  —  dais, 
159;  —  encensoir,  192;  —  évangéliaire,  172; 

—  fer  à  hosties,  281-289,  ^25;  — jubé,  523; 

—  livre  d'heures,  455  ;  —  lustre  couronne, 
534  ;  —  missel,  257  ;  —  monsirance,  68.  152, 
153,  158,  324  ;  —  orgues,  521  ;  —  ostensoir, 
132,  426;  — ■  patène  ministérielle,  150;  — 
pied  de  croix,  332  ;  —  pince  à  hostie*^,  281. 
283  ;  —  plat  d'offrande.  158  ;  —  porte-feux, 
^07;  ^  prie- Dieu,  259;  —  reliquaire.  23,  67, 
Ô3,  89,  126,  149.  153,  168,  184.  185.  189, 
244,  421,  535  ;  —  retable.  68,  ^^,  150,  522, 
531  ;  —  sièges  cpiscopaux,  172;  — sialles, 
34.  68,  72,  225,  432,  487  ;  —  tabernacles, 
ïS9>  33^  :  —  tables  d'autel,  151. 

Modeste  (S.),  181. 


Cable  analptuiue. 


565 


Moha,  château,  235. 

Moirax,  église,  520. 

Moïse  (fontaine  de),  483. 

Moissac.  cloître  roman,  483;  —  église,  424, 
520;  ~-  orgues.  521. 

Mommers.  530 

Monceau  (P.iul).  147. 

Monduit,  architecte.  433. 

monnaies,  anciennes.  357  ;  —  de  bronze,  148  ; 
-~  wauloises,  02.  332;  —  des  évéques  de 
Lodève.  331  ;  —  impériales,  si?  ;  —  ponti- 
ficales. -28  ;  —  (classification  chronolo- 
gique des),  147. 

monogramme,  35  ;  —  du  Christ,  284. 

jîionographies,  communales,  525  ;  —  parois- 
siales, 531. 

Mons,  73;  —  église  Ste-Waudru,  525. 

Monsempron.  éi^lise,  519. 

monstrance.  eucharistique,  152,  153,  158;  — 
flamande.  324  ;  —  du  XVP  s.,  68. 

Mont  Saint-Michel,  abbaye,  238;  —  construc- 
tions militaires.  62 

Montaner,  château.  424. 

montant  de  cheminée.  403. 

Montault  (Mgr  X.  B.  de],  24.  52.  08,  76,  77, 
100.  i;9,  160.  192,  256,  257,  260,  281.  286. 

323.   340.   350.   357.   435.   543  :  —  <^«^''^^ 

complètes,  346. 
Montargis,  jardm  en  éventail,  163,  165. 
Montbrisson.  collégiale  N.-D. ,  8. 
Montebourg.  reliques,  88. 
Montefalco.  fresques.  252. 
Montefarno,  peintre.  57. 
Moniierneuf.  abbaye,  159. 
Montivilliers,  église.  398.  480. 
Montlake,  manufacture  de  tapisseries,  too. 
Montlazi,  inscription  latine,  424. 
Montlevon.  église.  463. 
Montmédy,  tableau  du  XVIIes.,  504. 
Montmorency.  539;  —  armes  de  la  famille, 

114.  1 16  ;  —  (connétable  de),  98,  115. 
Montpezat.  trésor,  331  ;  —  tissus,  531. 
Montreuil-sous-bois,  église,  496  ;  —  sur  mer, 

inventaire  du  trésor  de  St-Saulve,  519. 
Monulphe  (.S.),  333. 
monument,  de  Benoît  IX.  89;—  Bossuet,  147, 

172;  —  Chanzy.  73;  —  Damas  (Alex.),  173; 

—  Hugo  (Vict.j,  173:  —  Lavigerie,  76. 
157;  —  Lv>icrate,  218,  2^7:  —  Maîstre 
(J.  et  X.  de').  173;  —  Rivet  "(Mgr),  135. 

monuments,  anciens  (conservation  des),   148  ; 

—  (restauration  des).  314.  498.  538;  — chré- 
tiens sur  les  montagnes,  422  ;  —  grecs,  50. 
!^3.  62,  t^oi  ;  —  funéraires  chinois.  437  ;  — 
iiistoriques.  346.  538;  —indo-bouddhiques, 
^^o  ;  —  morts.  498  ;  —  religieux  en  albâtre, 
■^29  ;  —  romains,  502  ;  —  vivants,  502. 

Monza.  armoiries.  12  ;  —  cathédrale,  22  :  — 
chanoines,  14:  — couronne  de  fer,  12.  14, 
22,  251  ;  —  physiùlogits  du  XlIIe  s.,  321  ; 

—  rehques,  545;  —  sceau.  12;  —  trésor, 
12  14 

Moor  (C    H.).  392. 

Morigia  (Paul),  17. 

Morlet  (V.),  77. 

mortier  en  bronze,  331. 

Mortier  (Et.)  architecte,  247  ;  —  (le  (P.),  256. 

mosaïques,    byzantines,   25  ;   —  à   Florence, 

241  ;  —  à   lérusalem.  330;  —  à  Mantoche, 

331  ;  —  romaines,  244,  421  ;  —  (vêtements 

dansies),  102. 
mosquées  musulmanes,  527,  528. 
mouchettes.  259. 
•m  >ule  de  gâteaux  de  Noël,  517. 
Mouzon.  fer  à  hosties.  284. 
Moyland.  château,  521. 
iniiffli^'r,  228.  232. 
muguet,  292,  293. 
MuUer,  peintre,  280. 
Mum-nolin  (S,),  349. 
Munich,    exposition    de    peintures,    458  ;    — 

pinacothèque.  320. 
Munst^rm^ifeld.  reliquaire,  189. 
Miiniz(Eug  ),  4r,  93,  100.  177.  251. 
Murât  (arrondissem.).  églises,  148. 


Muratori,  18,  22, 

musée,  Aix.  427;  —  Amsterdam,  58;  —  Angers 
(St-Jean),  60;  —  (diocésain),  544.  545;  — 
Arlon  (archéologique),  335  ;  —  Avignon, 
171  ;  —  Belgrade,   329  ;  —  Berlin,  88,  53T  ; 

—  Bologne.  103  ;  —  Bordeaux.  169  ;  — 
Bruxelles.  71,  89;  — (de  la  peinture  orne- 
ment.). 462  ;  —  Burgos,  150  ;  —  Chantilly 
(Condé).  246;  —  Cluny,  7.  27t,  541;  — 
Constantinople,  62,  148;  —  (Tchinli-Kiosk), 
534;  —  Douai,  170;  —  Dresde,  61;  —  Dublin 
(national),  240  ;  —  Épinal  (des  Vosges), 
33^  ;  —  Florence  (académie),  242,421  ;  — 
(  Bargello),  260;  —  (Croceita),  iig  ;  — 
(Offices), 58  :  —  Francfort  (Staedel).  426;  — 
Jove  Paul  (de  portraits),  253  ;  —  La  Haye, 
124;  —  Liège,  89;  —  Londres,  (Briush 
muséum),  60,  237.  403;  — (South  Kensing- 
ton),  92,  535;  —  Marioup'>l,  245;  —  Milan 
(Bréra),  505;  —  Nancy  (lorrain),  331  ;  — 
Naples  (royal),  241  ;  —  Nuremberg  (ger- 
manique), 78  ;  —  Paris  (Gumet),  452  ;  — 
(Louvre),  60.  88.  169  174.  435,  540;  — 
Philadelphie,  457;  —  Rome  (Vatican),  328; 

—  Rouen.  16  ;  —  Saint-Malo.  147  ;  —  Tou- 
louse (Augustins),  232,  482;  —  Trêves  (de 
la  cathédrale),  i8r,  191;  —  Versailles,  244; 

—  Vienne,  245,  329;  —  des  arts  industriels. 
172 

musées  (entrée  gratuite  des),  545. 

Mycènes,  portes,  403. 

myosotis,  292.  293. 

myrthe,  291. 

mythologie,  Apollon,  35  ;  —  Artémis  (tem- 
ple d"),  6(  ;  —  Bacchus,  222;  —  Castor. 
300,  301  ;  —  Cérês,  189  ;  —  Kmyo,  61  ;  — 
Euménides  (les).  293  ;  —  Hercule,  114.  1 16. 
117,  T19,  120,  122,  244,  400;  —  Hespérides 
(jardin  des),  398;  —  Hygie.  527;  —  lupiter. 
148,  225.  245,  404;  —  Ma.  61  ;  —  Mercure, 
35.  189,  245  ;  —  Gaulois,  60  ;  —  Mars.  180  ; 

—  Mmerve.  148,  294,  434;  —  Neptune, 
3;,  6i  ;  —  Orphée.  330  ;  —  Parques  (les), 
114,  116,  119,  120,  122,  295;  —  Persée,  434; 

—  Pluton,  295  ;  —  Poll'ix,  300,  301  ;  — 
Sibylles,  541;  — Styx  (le).  293;  —  Téles- 
phore.  C27  :  —  Tenmsio,  244  ;  —  Tutelles 
(culte  des  déesses),  424  ;  —  Vénus,  245  ;  — 
genitrix,  61  ;  —  de  iVIilo,  60,  6r,  T47,  156, 

N. 

Naert,  architecte,  201. 

Nahuis  (le  ct«  Maurice  de),  248. 

Naix,  bague  en  bronze.  245. 

Namur,    église  Si-Germain,    366;    —  Société 

diocésaine  d'archéologie  chrétienne,  149. 
Nancy,   congrès  des  sociétés  savantes.   330; 

—  église  St-Epvre.  484  ;  —  musée  lorrain. 

331- 

Nantes,  vitrail  du  séminaire,  77. 

Naples  (royaume  de),  3  ;  —  cimetières  sou- 
terrains, 255;  —  éghse  San  Lorenzo  o 
Maggiore,  241;  —  musée  royal,  241;  — 
peimures  murales,  241;  —  (oeuvre  de),  66. 

narcisse  des  prés,  291,  293. 

Nattier,  peintre,  170. 

nature,  source  du  décor,  289;  — (imitation 
de),  214 

Xauroy,  église,  261  ;  —  vitraux,  262. 

Navarro  (D.  Felipe  B. ),  247. 

Navez.  peintre,  317. 

Nazaire  ^S.  )  (statue  de). 4  62. 

nécrologîp. Barbier  de  Montault  (MgrX.),  272, 
357:—  Lambin  fE.).  546;  —  Revoil  (Henri- 
Ant  ),  178;  —  Vriendt  (Albrecht  de),  89 

Nédonchel  (ct^  de)  335. 

Neeroelheren,  église,  525. 

Nelli  Ottaviano,  peintre.  274,  342,  343. 

nénuphar,  42,  214.  220.  221,  469. 

néo-gothiques  (les),  289. 

Neuss  (H.  vati).  73. 

Neuss,  église.  409. 

Neuwirth  (le  D"").  249,  250. 


Nevers,  inventaire  du  XI Ve  s.,  65. 

Nevy  sur-SelIe,  reliquaire,  149. 

Newton  (E. ),  architecte,  486. 

Nicée.  concile,  304.  312. 

Nicodème,  124,  125. 

Nicolas  (S.),  130,  145,  184.  305.310; — (siège 
épiscopal  de).  172  ;  —  de  Bruges,  sculpteur, 
73  ;  —  de  Pise.  sculpteur,  439  ;  —  de 
Verdun.  78  ;  —  IV,  2^2  ;  —  V,  12. 

Nicosie,  anciens  édifices  français.  245  ;  — 
cathédrale.  517  ;  —  manuscrits  liturgiques, 
517  ;  —  monastère  de  St-Dominique,  245. 

Niederzeil,  peintures  murales,  177, 

nielles  franques,  331. 

Nimègue,  chapelle  palatine,  498. 

Nivelles,  châsse  de  Ste-Gertrude,  72. 

nœud.  28. 

Nogent  l'Abbesse,  église,  261  ;  —  statue  en 
bois,  261  ;  —  vitraux,  261. 

noisetier,  293. 

Nontgauguier,  bas-relief,  331. 

Noordpeene,  fonts  baptismaux,  396. 

Normand  (Ch.)  175. 

Normandie,  statuaire  ancienne,  77,  i6r. 

Normands  (les).  161.  349. 

Norwich.  église,  480. 

Notger.  333. 

Notre-Dame,  du  Bout  des  Ponts  (inventaire), 
258  ;  —  du  Désert  (liist.  de),  531  ;  —  de 
Pitié  (invenl.).  260  ;  — de  Tertre,  église. 
398  ;  —  (monogramme  de),  133. 

Nottingham,  petits  monuments  religieux  en 
albâtre.  329. 

Nouvion  le  Vineux,  église,  384. 

Noyon.  cathédrale,  39,  78,  349,  517. 

Nuremberg,  cathédrale,  334;  —  musée  ger- 
manique, 78. 


O. 


Oberwesel,  chemin  de  croix,  523  ;  —  église, 
323  ;  — jubé  du  Xi  V'^  s.,  523, 

Oberzell,  église,  335. 

objets,  d'art  (conservation  des).  333  ;  —  arti- 
fiLiiels  (dans la  décoration  architectonique). 
28  ;  —  russes.  453. 

Odinet  (maître),  imagier,  338, 

Œdipe,  légende,  402. 

œuvre,  d'Angleterre  (broderies),  66  ;  —  de 
Naples,  66. 

oie  (l'enfant  à  1'),  60. 

Oiron,  château,  65. 

olivier,  294. 

Ombrie  artistique.  275.  341. 

onocentaure.  401. 

Opwijck,  église.  426. 

oratoire,  carolingien,  332  ;  —  roman,  348. 

Orbais  (Jean  d'),  272. 

Orban  de  Xivry  (le  baron).  460. 

Orcher.  château-fort.  62. 

ordres  mendiants,  526. 

orfèvre,  Bartoll  de  Sienne,  9.  10  ;  —  Catha- 
lanus  de  Rocha,  10;  — Cellini  (Benvenuto), 
434  ;  ^~  Domenico  di  Jacopo  de  Sienne,  7. 
8  ;  —  Favier,  133  ;  —  Horenbeke  (Jooris 
van),  426;  —  Lando  de  Sienne,  22;  — 
Marcus  Landi.  9  ;  —  Maurini  (Johannes). 
lo;  —  Mf-nuchii  (Johannes),  8  ;  —  Pampe- 
rati  (Martin),  ti  ;  —  Richo  Corboli,  7  ;  — 
Rubinus-da-Anelha,  11;  —  Taiiro  de  Sienne, 
7  ;  —  Thomas  de  Padio,  10. 

orfèvrerie,  153;  —  byzantine,  519;  —  cloi- 
sonnée, 62;  — franque,  519;   —  lapidaire, 

519- 
orfroi,  66. 
Orléans,  ancien  château.  85  ;  —  (inventaire  du 

duc  d'),  187,  188  ;  —  moule  à  hosties.  281, 

284. 
Oiiey  (Bernard  van),  peintre,   106,  108,    109. 

iio. 
orme,  322. 

Ornans  (Doubs).   croix  processionnelle.    149. 
ornemaniste,  216. 


566 


WitWt  tie  rart  cbrctteu. 


ornements,  historiques,  217;  —  végétaux, 
25.  214. 

Orphée  jouant  de  la  lyre,  330. 

Orsel.  peintre,  155. 

Orseninghi  (devise  des).  65. 

Orsini  (Raymondo),  rose  d'or,  9. 

Orsini  {archives  du  card.),  545. 

Orval,  abbaye,  63.  235. 

Orvieto,  inventaire  de  l'évéque,  187:  —  tableau 
du  S.  Corporal,  183. 

os,  66. 

ostensoir,  du  XV«s,.  132  ;  — du  XVI«s.,  426. 

Ostende  (mutinés  d").  195. 

Osierrath  (Joseph).  135. 

Oswald  (S.)  (ceinture  de).  180. 

Oudin  (Pierre),  fondeur  263. 

Oued-Kamel,  baptistère  518;  —  cuve  baptis- 
male, 518. 

Oulchy  le  Château,  église,  463. 

ours,  41 1. 

Ourscanip,  abbaye,  331. 

Outoinaro.  dessinateur  japonais,  437. 

ove  ionique.  217. 

Overbeek,  peintre,  280,  458. 

Owen  (Jones).  213,  217. 


P. 

Pacca  (édits),  88,  241. 

Paccaid,  architecte,  237. 

Padoue,  chapelle  de  la  Madonna  de  l'arenn, 
57  ;  —  fresques.  246. 

pain,  bénit  (le),  337  ;  —  d'or.  14. 

Painiandre  (les),  fondeurs,  263. 

palai**  chinois,  437. 

Palaiseau.  église,  496. 

paléographie  mu  icale,  354. 

Païenne,  frestjnes.  329. 

Palestrina  (Hier  I.uigi),  449. 

Paliotto,  de  Milan,  23,  2q. 

Palissy,  architecte,  165. 

pallium,  514, 

palmetles,  26,  212  ;  —  grecques,  217,  218, 

palmier,  294 

Palustre  (Léon),  20,  183,  188. 

Pamperali  (Martin),  ortevre,  ii. 

panneaux.  31. 

paon.  412. 

papes,  525  ;  —  d'Avignon,   i,  3. 

pâquerette,  291. 

parcs  anglais.  165. 

parement  broilé  du  XV*""  s.,  172. 

Paris.  aie;uière  en  bronze,  452  ;  —  autel 
Louis  XIV.  418  ;  —  bibliothèque,  de  l'école 
des  Beaux-Aits,  453  ;  —  nationale,  ôo,  61  ; 

—  cathédrale,  30.  394  ;  —  cloître  des 
Billelies.  85  :  —  collection  Kahn,  130  ;  — 
copies  de  tapisseries.  115;  —  couvent  des 
Grands  Augustins.  435  ;  —  décor  sculpté, 
394  ;  —  églises  :  Notre-Dame.  ^6,  yj.  3g, 
42,  47,  48,  397.  408  ;  —  Saint-Denis,  380, 
384,  393;  —  Saint-tiermain-des-Prés,  349, 
384;  Saint-Julien-le-Pauvre,  221,  400;  — 
Saint  Pierre  de  Montmartre,  86  ,  —  espla- 
nade des  Invalides.  140;  —exposition,  247; 

—  rétrospective  de  la  gravure  sur  bois,  452  ; 

—  de  toiles  peintes,  100  ;  —  fontaine  de 
l'évêché.  538  ;  —  fresques  du  Panthéon,  56  ; 

—  jardin  des  Colombiers.  164  ;  —  du 
Lu.\embourg,  164  ;  --  maisons  antiques, 
542  ;  —  nï'jnument  d'Ale.\andre-Dumas, 
173  :  —  musées  ;  Gallena.  453  ;  —  Guinet, 
452  ;  —  du  Louvre,  60,  88  ;  —  obiets  russes, 
45S  :  —  palais:  de  justice,  504.  509  ;  —  du 
Louvre,  114;  —  pierre  tombale  de  1576, 
542  ;  -  porte  St-Denis.  351  ;  ~  prédelle, 
34^  -^ —  Sainte-Chapelle,  4b,  335.  509  ;  — 
Ste-Couronne.  78  ;  —  sarcophages  anciens, 
452  ;  —  tapisseries,  98  ;  —  zodiaque  de  la 
cathédrale.  413. 

Parizot,  croix  processionnelle,  331. 
Parker  (J    H  |,  367. 
Parme,  fresques  du  Corrège,  422. 
parnassée  des  marais.  294, 


paroisses  au  XV!!*-"  s,  (visites  des),  158. 

Paros,  marbre.  329. 

Parques  ( tes),  295;  —  tapisserie,  119,  116. 
X19.  120.  122. 

parquet  à  tigures  incisées,  517. 

Parrocel,  peintre,  301. 

parterre,  260. 

Parthénon,  219  ;  — ■  (Minerve  du).  434. 

parures  Scandinaves.  331. 

Pas  de  Calais,  Commission  départ,  des  monu- 
ments historiques,  332. 

Passavant,  q6.  97,  100,  104,  ri6.  118,  344. 

passiflore,  298  -  299. 

i'assion,  42  ;  —  (clous  de  la),  15,  t7.  22  ;  — 
{reliques  de  la),  14,  256. 

Pasture  (Roger  de  la),  131. 

Paie (L.).  346. 

patène  ministérielle,   150. 

Pau,  château,  521. 

Paul  (S.),  a  r Aréopage,  tapisserie.  36  -  123  : 

—  et  St  Barnabe  à  Lystre,  tapisserie.  9Ô - 
122; — (Conversion  de),  tapisserie,  92-123, 
457;  —  en  prison,  tapisserie,  96-  123  ;  — 
Kr{s.),  305.  30S,  309;  —  II.  4.  251  ;  — 
in,  98,  243.  276;—  V,  504; —  de  Caen,  370. 

Pavie,  chartreuse,  56  ;  — église  St- Pierre,  89  ; 

—  fresques,  56 
pavot,  29T,  298,  299. 
paysage,  T57. 
paysagiste.  216. 
Pazayac,  fer  à  hosties,  288. 

peintre.  Adrien  Luc,  427;  — Alienno  (Nie), 
274.  313.  345  ;  —  Angelico  (Fr.),  57.  112. 
157,  2  17,  309,  313.  321;  —  Angehizio  (Dio 
tisalvi,  142;  —  Baldovinetti  (.Al),  55-57,  82 

—  Baschenis  (Êv.).  741;  —  Basiin  (Henry), 
427;  —  Beliegambe  ().).  170.  196;  —  Bel 
lini,  405;  —  B'^rnardi  (Val.),  141,  142  :  — 
Boccaii  da  Canierino,  274,  313.  344:  — 
Bonfigli  (Ben.),  274;  —  Horgognone,  56;  — 
Bouts  (  Thierry).  125, 175;  — Bressers(L.), 85; 

—  Brusco  (Paul.  Jér.).  143;  —  Calleoni 
(Hier,  de),  141  ;  Campain  (Robert),  426;  — 
Canova,  155;  —  Cappicii  (Jean),  338  ;  — 
Casier  (j-),357-  ~~  Castagno  (Andréa  del), 
50S  ;  —  Cautrain.  427  ;  —  Cavallieri  (Pie- 
tro).  88,  241,242;  —  Chisi  (Kr.).  142;  — 
Cimabué,  57,312;  — Ciro  Ferri,  243;  — 
Cornelis  {Alb.  ).  361-364;  —  Cornélius,  280. 
458; —  Casino  Roselii,  1.^3;  Coxie  (Mi- 
chel), io6  ;  — Crayer{de),  .|2ô  ;  —  Cristus 
(Pierre),  125,  247;  —  Dagnan  Boiiveret, 
337;  —  Dare  (Et.),  427;  —  Daret,  Jacques, 
426.543;  —  D,ivid  (G.).  104,  248;  —  Deger, 
280  ;  —  Dekeyser,  457  ;  —  Delbeke,  443;  — 
Doué(Marlin),  62  ;  —  Duccio.  57,  312  ;  ^ 
DycU  (van),  82  ;  —  Euch  (Franz),  280  :  — 
Eyck  (van).  55,  74.82,  124,  217.  320.  344. 
345.  427,441,510,531;  —  Francesco  (Pierro 
delln),  343:  —  Fiandrin.  280,  45^;  — ■  (îaddi 
(  l'addeo).  58,  311  ;  —  Gentile  da  Fabiano, 
274.  342,  3^3  ;  —  Gerop  (Adrien),  427  ;  — 
Giordano  (l.ucca),  143  ;  —  Giotio,  57,  58, 
121.  241.  311.  312.  313,  398,  439,  462  ;  — 
Giuiiano,  142  ;  —  (iodefroy  d'Anvers,  427  ; 

—  Goes  (Hugo  van  dei  ).  86.  344,  427.  510  ; 

—  Guddeman  (Guil.),  417  ;  —  Gnffens. 
455-462  ;  — Ghirîandajo  (Dom..)  56  ;  — 
H'iyne.  131  ;  —  Hendricx,  457;  —  H'^rvy 
(Guil.  d").  3Ô4  .  —  Hokousai.  437  ;  —  Hol- 
bein(Hans),  177;  —  Hubner,28o;  —  Hunin 
(P.  P.).  162;  —  Ingres,  m,  170;  —  Itten- 
bach,28o;  ^  Janssen  (Guil.).  130;  —  Jean 
de  Kiesole.  278,  462;  —  Jehan  le  Diacre  le 
Jeune,  427  ;  —  Jo-st  (Jean).  522  ;  —  Jor- 
daens.  69  ;  —  Julio  (Cesare),  506  ;  —  Kaul- 
bach,  458;  —  Ldlié,427;  —  Lameire  (Ch.), 
143; —  La  Tour.  170;  —  Laurens  (Jean 
Paul),  174;  —  Le  Corrège,  535;  —  Le 
Moyne  de  Morgues.  147;  —  Le  Nain.  170; 
Leys.  89,  457;  —  Lies  (jos.).  457;  —  Lippi, 
57»  58  ;  —  Lorenzelli  (\mbr.  ).  57  ;  —  Lo- 
renzo  di  Florenzo,  274;  —  l^uini  (Bern). 
505  :  —  Massaccio.  202  ;  —  Massin,  427  ;  — 
Mastro  Pierro  (Jacomo  de),  142  :  —   Me- 


lozzo  da  ForlI,343.462;—  Memling.  71,124, 
130,  131,  319-321. 441.  510,  519:  —  .Memmi, 
57,58;  —  Met^ys  (Quinlin).  58,125,172,174. 
247.271; —  Mezzastris,343; —  Monlefarno, 
57;  —  Muller.  280;  —  Nattiez.  170;  Navez, 
317;  —  Nelli  (Oitav.)274.  342.  343;  — 
Orley  (Bern.  van.)  106-1 10  ;  —  Orsel.  155; 

—  Overbeek.  280.  458;  --  Parrocel,  30T  ;  — 
Pasture  (Roger  de  la).  131  ;  —  Paul  de 
Linibourg.  455  ;  —    Penni,  100.  101.    120; 

—  Peretti  (Bart.  ),  5;  —  Perino  del  Vaga. 
loi,  143  ;  —  Perrugin,  92,  157,  169,  273- 
280.  343.  346;  —  Pisanello,  329;  —  Poelen- 
burg,  243  ; —  Portaels,  458;  —  Prud'hom. 
95,  96;  —  Raphaël.  115,  116.  120.  123.  15O. 
157,  277,  278  ;  —  Rembrandt.  69,  170  ;  — 
Renouard,  132;  —  Rethel.  458;  —  Robbia 
(Andréa  délia),  327:  —  (Luca).  no,  240;  — 
Romain  (Jules).  100  ;  —  Rui)ens,  69,  92, 
170;  Salimbene.  142;  — Sano  di  Pielro, 
57;  ~  Santi  (Giov.).  274.  344.  345  ;  — 
Sanzio,  344  ;  —  Sarto  {.Andréa  del),  143; — 
Sasso  Ferraio,  506;  —  Scheder  (Aug.).i55. 
457; —  Settegart,i8o;  — Simone  (Martino), 
241  ;  ^  Smoienski  (Jos. ).  i  (4;  —  Snellaert 
(Jean).  427;  —  Spiker.  510;  — Steinle,28o: 

—  Stuibout  (Hubert).  177  ;  —  Swerts.  457- 
461; —  Thomas  (Jacque.s).  427  ;  —  Thony 
(Jacques),  427  ;  —  Udine  (J.),  100,  243  ; — 
Veith.  280;  —  Velasqiiez,  170;  —  Verhage, 
(P.),  364;  —  V^erlat.  45  ;  —  Véronèse 
(Paul),  154,  170;  —  Verrochio,  144  ;  — 
Vmci  (L.),  57.505.517;  —  Vinckaert  (Jean), 
427;  —  Vriendt  (.Alb.  de).  89; —  VVatteau. 
170;  —  Weyden  (Roger  van  der),  124,  247; 

—  Wladyck.  144. 

peintres,  brugeois,  3tg  ;  —  flamands,  274  ;  — 

grecs,  312;  —  italiens,  344. 
peintres  (Dictionnaire  des),  i^i  ;  — (Histoire 

dc%),  346. 
peinture  (la),  334;  ^buon  fresco,  56.  57,507; 

—  sur  bois.  246  ;  — ■  flamande,  248  ;  —  à 
l'huile,  248;  —  murale  à  l'huile,  55; —  Om- 
brienne. 343;  — à  tempera. 55,   55,323.  507. 

peintures  murales.  64,  69.  524.  à  Anvers, 458. 
461  ;  —  Beaune.  508.  541  ;  —  Bourgogne, 
509;  —  Bruges,  321,  441  ;  — ■  Clermont- 
Ferrand,  519  ;  —  Courtrai,  460;  —  Ingel- 
heim,  334;  —  Loreto,  143;  —  Louvain,46i; 

—  Luxembourg  333  ;  —  Malines,  335  ;  — 
Naples.  241  ;  —  Niederzell.  177  ;  —  Pom- 
pei.  401;  —  Prague.  249;  —  Saint-Nicolas. 
458,  4S9  ;  —  Siein  sur  le  Rhin.  172;  — 
Well-Bundel.  411;  —  VVuestwezel,  451;  — 
Zepperen,  451,  5p  ;  —  gréco-romaines, 
25  ;  —  (restauration  des),  ^^^. 

Peiresc,  manuscrits,  5. 

pèlerinages  ombriens,  341. 

pélican,  412. 

pelte,  34. 

pendentifs  à  stalactites,  29. 

Penni,  peintre,  100.  loi,  120. 

Pépin  (Jean),  tombier,  439. 

perce-neige.  294. 

Père  éternel,  191,  3Ô1. 

Peretti  (Bastiani),  peintre.  5. 

Périgueux.  tour  de  Vérone,  176,  424. 

Périno  del  Vaga,  peintre.  101. 

périodiques.  76,  172,  264,  350.  533. 

Perizoniuni,  435. 

Perna  (Pierre),  imprimeur,  254. 

Pérosi  (l'abbé).  505., 

Pérouse,  église  Si-Etienne,  5  ;  —  Monument 

de  Bjuoit  IX,  8q;  —  rosed'or,  5;  —  Vierge 

de  Boccati  da  Camerino,  34;. 
Perraud-Dabet  (.A.),  346. 
Perricard.  château,  78,  519. 
Perrier  (Em.),  159. 
Pernn  Kobinet,  fondeur.  263. 
Perrusson,  abside  polygonale,  62. 
Perugin  (Le),  92,   157,  109.273-280.  340,  345,- 

pervenche.  294. 

Peierborough.  cathédrale,  382,  383. 

Petrowski,  54. 


%Mt  analptiquc. 


567 


Phèdre,  517  ;  —  (manuscrit  de),  60. 
phénix.  4or,  436. 
Phidias,  155,  236. 
Philadelphie,  musée,  457. 
Philippe  (S.)  (reliques de), 181,421;  —  Benizzi 
(S.).  143  ;  —  I.  193  ;  —  (diplôme  de),  424; 

—  II.  195  ;  —   Auguste  (diplôme  de),  244  ; 

—  le  Bon,  427,  510  (portrait  de),  51g. 
Phihppi  (A.).  531- 

photographies  (collection  de),  346. 

phylactères,  31,  128. 

phyiiologiis  du  XI1I«  s.,  321. 

piastres,  29. 

Pie,  V,  98  ;  —VII,  14,  98,  115;—  IX,  121,  256. 

Pterre  {'>  ).  tapisserie,  94-122. 

Pierre.  (S.),  iSi.  184.  256.  513  ;  —  (culte  du 
tombfau  de).  256;  —  (statue  de).  256;  — 
(tunique  de).  181.  184;  —  de  Brixhey.  év. 
181; —  de  Bruxelles,  tombier,  430  ;  —  Em.. 
245  ;  —  de  Noyon,  332  ;  -  de  Vérone  (S.  J 
(statue  de),  332  ;  —  du  Pont, 528. 

Pierrefonds.  château,  238. 

pierreries,  23,  29. 

pierres. gravées  antiques. 60;  — sculptées, 329; 
— •  tombales.  70. 

pieià  antique,  172. 

Pigalla  (buste  de),  60. 

piliers,  monocylindriques,  37  ;  —  anthropo- 
morphes, 483. 

Pilon  (Germain),  4S3. 

pinceà  hosties,  281,  283. 

Pinchart  (A.).  440,  531. 

Pintelh  (Bacciû),  architecte,  93. 

Pisanello.  peintre,  329. 

Pisano  (Nino),  sculpteur,  142. 

Pise,  campo  sanio,  121,  243,  422  ;  —  chaire 
à  prêclier,  439  ;  — -tour  penchée,  157, 

pissenlit,  294. 

Pitra  (le  card.).  439. 

Pitres,  fouilles,  62. 

plats  d'offrandes.  158. 

plain-chant,  354. 

plantain,  44,  221,  231. 

plaque,  syrienne  en  or,  527  ;  —  de  cheminée, 
248  ;  —  d"agrafe  en  bronze,  329  ;  —  en 
fonte.  331. 

platane.  294. 

Plessis(M.  G.  du).  427. 

plombs  antiques,  330. 

Pion  (Ch.  de),  440. 

pluviale,   259. 

Poelemberg,  peintre,  143. 

Poésie  (la),  155, 

Poilly  (E.  )-  graveur,  417. 

Poissy,  église,  360. 

Poitiers,  abbaye  de  Moniierneuf,  iS9  ;  — 
cloiirede  St-Aubin,  401  ;  — reliquaire  Ste- 
Croix,  185. 

PoUajuolu  (Simone  del),  architecte,  144. 

Pologn-,  correspondance,  144. 

polychromie,  des  églises,  332  :  —  monumen- 
tale, 333,   334,  335. 

Polygnote,  fresques,  517. 

Pompei,  ruines,  49S. 

Pontfaverger,  horloge  municipale,  264. 

Pontoise,  église,  3S4. 

Poppon,  archevêque,  181. 

Porée  (le  Chne).  77.  ^ôi. 

Port  en  Bessin.  tour  Vauban,  78. 

Portaels.  peintre,  458. 

portail  du  Xlle  s.,   520;  —  du  XIV«  s.  ,45. 

portants,  33. 

porte,  à  Athènes,  236  ;  —  Autun  (romaine), 
538  ;  —  Avignon  (Limbert),  85;  —  (Loull), 
85;  —  Boscherville,  160;  —  en  bronze. 
395.  439  :  —  Bruges  (des  Baudets).  336  ;  — 
en  bois  du  XVIe  s..  69;  —  Dijon  (en 
feuillage  sculpté),  433  ;  —  Chartres  (sculp- 
tées). 161  ;—  Florence  (Ghiberti),  121  ;  — 
(en  bronze),  439  ;  —  du  XI  Ve  s. ,  142  ;  — 
Gènes,  482  ;  —  Ivry,  lôo  ;  —  Langres 
(romaines),  538; —  Laon  (de  l'horloge),  45; 

—  (de  St-Paul),  45  ;  —  Messines,  204  ;  — 
Mycènes,403: —    Reims,    538;    —  Rome 


(St-Pierre),  121;  —  (Ste-Sabine),  251  ;  — 
Toulon,  483  ;  — 'Trêves,  498. 

porte,  — Uieu.  259;  —  mât  à  Venise,  31. 

portraits  (musée  de),  254. 

Pot  (Phil.),  tombeau,  539. 

poteries,  anciennes,  331  ;  —  estampillées, 
329;  —  lorraines,  67  ;  —  romaines,  62. 

Pothier  (Uom),  87.  354,  449,  450. 

Poulaine  (l'abbé),  331. 

Prado,  peintures  sur  bois,  246. 

Prague,  abbaye  bénédictine,  249; —  Aca- 
démie, 461  ;  —  peintures  murales,  249. 

Praxitèle,  sculpteur.  61. 

prédeile,  en  bois,  535. 

préraphaéiisies,  289. 

Présentation  (la),  342. 

prie-Dieu,  259. 

primevère.  295. 

priiniiil's  italiens.  57. 

principautés  (les),  362. 

Proisy,  cloche  du  XVI II*  s.,  263. 

Prosne,  église,  201; —  grille  en  fer  forgé,  262. 

Prou  (M.),  330. 

Prud'lioii,  peintre.  95.  96. 

Prunay.  cloche,  263. 

Pugin  (VVelby).  architecte,  441. 

puissances.  362. 

puits  de  Ste  Claire  (le),  421. 

Pupput.  villeantique,  62. 

Pustet  (le  monopole),  449.  450. 

Puy,  cathédrale,  69  ;  —  cloître  roman,  40g  ; 
—  peintures  du  XV^  ?.,  400. 

Puy  de  Dôme,  chapiteau  connthien,  527  ;  — 
fouilles,  517. 


quadrige.  409, 

Quarré-keybourbon  (tv.),  171. 
Quatreinère  de  Quincy,   96. 
Querca  (J.  délia),  43g. 
Quertei.  architecte,  346. 
queue  d'aronde.  41. 
Quirico  (S  ).  307. 
Quintin  Metsys,  247,  27t. 

R. 

Radegonde  (Ste),  185,  281. 
Radowitz  (collection),  62. 
Radulphe  (Dom),  abbé  du  XV'^s.,  185. 
Raedt  (Th.  de),  248. 
Raeyjnaekers.  248. 
Raggi  (Oreste),i9. 
Rameau  (lean).  272. 
rampe  d'escalier,  31. 

Raphaël,  91,  92.  95.  98,  100-104,  106,  108, 
H0-116,  120,  123,  156,  157,  254,   277.  27a, 

340. 
rasuirs  antiques,  518. 
Ratisbonu'-,  cathédrale,  172  ;  —   statues  des 

Quatre-Rois,  172. 
Rauch,  173. 

Raugiport,  casque  de  bronze,  147. 
Ravenne,    boucles   d'or,   23  ;  —   sculptures, 

23- 

rayon,  259. 

réalistes  (les),  157- 

Récollets  {armes  des).  287. 

Rédempteur,  306.  307  ;  —  effigie  du,  422. 

Regnaud  (les),  fondeurs,  263. 

Reichensperger.  317,  334. 

Reims,  abbatiale  St-Nicaise,  431  ;  —  biblio- 
thèque, 331  ;  —  camelot,  66;  —  cathé- 
drale, 30,  140.  155,  175.  220,  222.  231,  331, 
431,481,504.519;—  cloche, 263;  —  église  St- 
Rémi,  62,  78,  529;  — manuscrit  de  Phèdre 
60;  —  portiil.  482  ;  —  porte  romaine,  538; 
—  répertoire  archéologique,  260  ;  —  sta- 
tues, 252  .  —  tapisserie,  530. 

reine-marguerite  (la),  292. 

Reingen.  reliquaires  romans,  535. 

reliquaire,  à  Aix,  23.;  —  Bovino,  89;  —  Châ- 
teau-Chàlons,  68,  149  ;  —  Chaux-en-Mon- 


tagne,  149;  —  Conques,  168  ;  —  en  cuivre, 
67  ;  — de  la  Sie  Croix,  185.  244  ; —  de  S. 
Giusto,  421  ;  —  grec.  23;  —  Herford.  23  ; 

—  Mams,  153;  —  de  Ste  Marie- Madeleine, 
421  ;  —  à  Munstermaifeld,  189; —  Nevy 
sur  -Selle,  149  ;  —  Ormans.  149  ;  —  de  S. 
Philippe  de  Néri,  421  ;  —  à  Poitiers.  184  ; 

—  Reingen,  535  ;  —  Rougemont,  149  :  — 
de  S. Sébastien. 421;  —  A  Saint-Ferréol.  149; 

—  à  Trêves,  184  ;  —  à  Valenciennes,  126, 
127. 

reliques  (exposition  de),  lô. 

Rembrandt.  69,  170. 

Rémi  (évêque),  471  ;  —  (tombeau  romain 
de  S.).  26. 

Remiremont,  abbaye,  259  ;  —  inventaire  de- 
la  sacristie,  259. 

Renaissance,  32, 140,  233,  347;  —  en  France, 

438  ;  —  italienne.  28.30,  440. 
Renan  (E.  ),  134,  156,  237. 
Renard  {M.),  340. 

René,  d'Anjou,  294,  338  ;  —  (le  roi),  147;  — 
(comptes  du),  158,  159. 

renoncule.  222-224. 

Renoiiard.  peintre,  132. 

Répertoire  archéologique, 260. 

Repertorium  fur  Kunstgeschirh/e,  54. 

Repullès  y  Vargas,  architecte,  412. 

réàeau,  i6. 

restaurations, à  Aerschot.  357;  —  Anderlecht,- 
g(S  ;  —  Bourges,  175  ;  —  Bruges,  356  ;  — 
Bruxelles,  86.  176.   271  ;  —   Evreux,    175  ; 

—  Florence,  85  ;  —  Franchimont.  86;  — 
Gap,  175  ;  — Havre,  451  ;  —  Héreni.   357; 

—  Lallro.  141  ; —  Langres,  538  ;  —  Looz, 
539  ;  —  Marseille.    175  ;  —  Mende,    175  ; 

—  Paris,  85,  86,  538  ;  -  Reims,  175.  519; 

—  Rome,  142  ;  - —  Rouen.  175,  270,  355:  — 
Séez,  175  :  —  S'IIeeren-El'ierf  n,  85;  — 
Strasbourg,    270  ;   —    monumentales,    82, 

174.  333.  355-  493- 
Résurrection,  42  ; — (par  Baldovinetii).    55; 

—  de  Lazare,  108. 

retable,  en  cuivre  gravé,  150  ;  —  sculpté,  68, 
Rethel,  peintre,  458. 

Rélhei,  anciennes  halles,  77  ;    —  église,    70^ 
Rethy,  hôtel  de  ville,  534. 
kevoil  (Henri-Ant. ),  nécrologie,  178. 
Revue,   de   l'Agenais,    78  ;   —  d'archéologie 
poitevine,     350  ;    —    néo-scolastique,    534. 
Rheindorf,  église,  335. 
Rliône,  archives  départementales,  67. 
Rhuis.  église.  470 
Riant  (le  comiej,  182,  18g.  igo. 
Riat  (G.);  162. 
Ribault  (Jean),  147. 
Richard  (J.  M.  ),    76  ;    —    l'abbé,    371  :    — 

(Mg').45  3- 

Riclio-Carboli,  orfèvre.  7. 

Rif  (du),  sculpteur,  435. 

rinceaux,   25,  23,  219;   —  sassanides,  219. 

Rio,  345. 

Riomet  (B.),  263 

Riotard,  église,  69  ;  —  tour  carrée.  69. 

Ripamonti  (Jos),  17. 

rite,  pontifical,  2  ;  —  chaldéen,  60  ;  —  lyon- 
nais, 258  ;  —  oriental,  538. 

Rites  (Congrégation  des),  14-16,  19, 

Robbia.  (Andréa  délia),  peintre,  327,  420  ;  — 
(Luca),  iio. 

Robert,  d'Anjou,  241  :  —  (l'Enfant)  (statue 
de)  439;  —  (Etienne),  graveur,  254;  — 
Jean,  abbé,  131  ;  —  de  Launoy,  tombier, 

439  ;  —  de  Lenoncourt,  530  ;  —  le  pieux. 

193- 
R  bm,  53g. 
rocaille,  33. 

Rochemonteix  (A.  de).  264. 
Rochesier,  cathédrale,  369,  371. 
Rogney,  cloches,  263. 
Ro'iault  de  Fleury  (Ch.  et  Cî.)>  159.  185,429, 

527- 
Roism  (le  baron  de),  189. 
Rolduc,    chapiteau    romain,    409,    411  ;    — 

crypte,  397,  408,  409,  41T. 


568 


IBitWt  tir  rSrr  cl)vcticn» 


kollin.  Jeiin  (armoiries  de),  510,  541  ;  —  Ni- 
colas, 510,  541. 

Romans  (rues  de),  432. 

Komaiii,  Jules,  peintre.  loo. 

Rome,  abbaye  St-Anselme,  87  ;  —  apoxyo- 
inène  de  Lvsippe,  61  ;  —appartements  de 
Faiil  111.  2J3;  -  de  Pie  V.  98,  99  ;  —  ' 
aqueduc  des  Tarquins,  437;  -  arc.  des  j 
orlèvres.  34  ;  —  arc  triomphal  de  Gall.a  Pla- 
dia,  102  ;  — archives  du  Vatican,  2.  3.  6, 
7,  76  ;  —  basiliques  :  d'Antonin,  403  ;  — 
Ste-Julienne,  437  ;  —  St-Pierre.  9.  114  ;  — 
StPaul-iiors-ies-murs,  102.  241.  242:  — 
St-Sixte,  512;  —bibliothèque  Victor  lim- 
manuel,  70  ;  —  Capella  palatina.  305  ;  — 
Catacombes,  512;—  Sanctasanciorum,  316- 
317  :  —  chapelle  Sixtine  74  ;  —  colonnade 
de  la  place  St-Pierre,  114;  —  colonne  tra- 
jane,  34  ;  —  Colysée,  301.  498,  499  ■,  —  Com- 
m/ssion  ti'archéolfl^it  sacrée,  511,  515  ;  — 
CoH^^ri^  hiternatiouat  des  Sfieiieis  hi\tori- 
^«£•1,  50Ô  :  ^  couvent  Ste-Sabiue,  506  ;  — 
dalmatique  de  Ciiarlemagne.  52  ;  —  des- 
cription de  la  ville.  97  ;  —  églises,  Ste- 
Agnés.  242;  — Ste-Cécile,  142,  241,  5t5  ; 
— St-Chrysogone,  24t.  242;  — Gesii.  142; 
St-Jean  t'ie  Latran.  159  ;  ^  Santa- Maria 
in  Cosmedin.  78  ;  —  Ste-Marie  sur  Miner- 
ve, 142  ;  —  Marie  Madeleine,  142  ;  — San- 
ta Maria  in  Via,  142  ;  —  Ste-Marie  au 
Transtevère.  241  ;  —  .Santa  Maria  Antiqua, 
3O0,  313  :  —  Santa  M.iria  I,iberatrice  300, 
313  ;  —  Sainte-Marie  Majeure.  504  ;  San 
Silvestro  in  Capite,  242  ;  —  fortifications, 
511  ;  —  forum.  311,  437  ;  —  fresques,  88, 
241,  276.  300.  313.  326.  327.  516; — jardins, 
165  ;  —  Manutacture  pontificale  de  St- 
Miciiel.  121  ;  — logesdu  Vatican.  112;  — 
manuscrits  du  Vatican,  76  ;  —  mosaïques, 
310,  312.  421  ; —  nouveaux  musées.  421  ;  — 
palais  de  Titus,  26;  —  porte  de  St- Pierre, 
121  ;  —  porte  Ste  Sabine.  251  ;  —  Porte 
sainte.  2^6;  —  recueil  de  gravures.    116; 

—  sac.  98  ;  —  restaurations  d'églises,  142  ; 

—  tapisseries  des  Actes  au  Vatican,  92,  97, 
110  ;  —  torrechartularia,  305  ;  —  trésor  de 
St-Pierre,  52. 

Romsey,  église,  387,  388. 

rosaire  (intages  du),  78. 

roses  d'or  pontificales,  i  ;  —  formes,  4  ;  — 
origines,  4  :  —  rites,  2  ;  —  symbolisme, 
227;  —de  Benoît  XH,  8;  —  XIII.  10;  — 
Boniface  IX,  9  ;  —  Clément  V,  6  ;  VI,  8  ; 
VII.  9  ;  —  Grégoire  XI.  9  ; —  Innocent  Vi, 
9  ;  —  Jean  XXII,  7  ;  —  Urbain  V,  9  ;  — 
données  à  Acciajoli  (Nie),  9:  —  .Albert 
d'Esté.  9  ;  —  Andria  (ducd'),  9  ;  —  Astorre 
da  Bagnacavallo,  9  ;  —  .'\vangoust  (Seign. 
d'),  8  ;  —  Aymar  de  Poitiers,  3  ;  —  Bàle 
(cathédrale),  6  ;  —  Berry  (duc  de).  10  ;  — 
Boeto  (Henri  de).  8  ; —  Brunswick  (duc  de), 
10;  —  Cavilone  (Johannes).  10  ;  —  Charles 
V,  7  ;  —  Cima  da  Cingoli.  9  ;  —  Cluny.  7  ; 
^  Colonna  (Stefano).  8  ;  —  Comminges 
(C'=de),  8;  Foulques  d'Anjou,  (C'«).  4;  — 
Jean  le  Maingre,  i  t  ;  —  Jeanne  de  Sicile,  9  ; 

—  Louis  de  Hongrie.  8  ;  —  Louis  de  Poi- 
tiers, 8; —Lyon  (cathédrale),  I,  5;  — Martin 
d'Aragon.  10;  —  Montbrisson  (collégiale), 
8  ;  —  Nmibourg  (C'"'  de),  8  ;  —  Orsini 
(Rivmoiido).    9;    —    Pérouse    (église   St- 

Étienne),  5  ;    —   Portugal  iinfant  de)   40  ; 

—  Raymond-Béranger,  IV,  5  ;  —  Serre 
(Jean  de),  lo  ;  —  Souillac  (Henri  de)  8  ; 
Waldemar  IV  de  Danemark,  9. 

rosier,  222,  227. 

Rosiers-Côtes-d'Aurcc,  églis?,  69. 

Rossi  (le  Com.   J.-B.  de),  242.    512.   514;  — 

(buste  de).  513, 
Rostoutzew  (Michel),  330. 
Rotscliild,  88  ;  —  (collection),  340,  541. 
Rouais  (Paul).  436. 
roue,  bibliothèque  tournante,  56. 


Roue  (la),  245, 

Uouen  c.uliédrale,  58,  59,  475  :  —  chapi- 
teaux des  musiciens,  161  ;  -  église  St- 
Ouen.  176,  232  ;  —  maison  antique,  85, 
270;  —  musée,  181;  — portail  de  laCalen- 
de,  161.  357  ;  —  sculptures  décoratives. 
161  ;  vieille  rue  .St-Rom,ain,  175. 

Kougemoiii,  croix  processionnelle,  149. 

Rouget  de  l'Isle.  tableaux,  457. 

Rouiin    (IJom  Kug.),  150.  151,247,  255. 

Rouzevalle  (le  P.).  245. 

Roy  (les),  fondeurs  de  cloches,  203. 

ruban,  28. 

Rubens,  69,  72.  170. 

Rubinus  de  An^-IIia.  orfèvre,  n. 

kudd,  architecte.  441. 

Rufine  (Ste).  257. 

ruines  (restauration  des),  82.  178.  236.  269. 
499.  500.  525  :  —  liistoriqiies,  499,  525. 

Rum  lien,  fonts  baptismaux,  248 

Rupin  (E. ),  150.  288. 

Ruprich- Robert,  architecte,    214,   216,    237, 

3+6.  3^7.  37'.  373.  464- 
Rti:)kiii  (John),  214. 


S. 


Saget  (L.).  58.  59.  133. 

sagittaire,  231. 

Saglio.  67. 

Saint,  Agrèce,  184  ;  —  Anibroise.  20  ;  —  ."Ana- 
tole. 142  ;  —  Antoine,  abbé.  142  ;  —  An- 
toine de  Padoue,  142,  332  ;  —  .Arnould, 
130;  — Augustin.  20.  89.  327:  —  Barthé- 
lémy, 67  :  —  Basile.  245:  --  l3rsin.  184; 
Bénigne.  430  ;  —  Bernard.  1,6;  —  Ber- 
nardin de  Sienne,  141  ;   —  Bernulf,   535; 

—  Bout,  257; —  Camille  de  Leilis.  142;  — ; 
Charles  Borromée,  15.  16.  20  ;  —  Clément, 
14s  :  —  tjuthbert,  375.  38Ô.  464  ;  —  Cy- 
prien.  244;  —  Dominique.  131.  143.  150; 
Eloi.  349  ;  —  Etienne.  42,  92.  123.  242  ;  — 
Euchaire.  181,  184;  —  Élorenlin.  184.238: 

—  Floscel.  87.  50g;  —  François  d'Assise, 
1:6.  172.  ^98  :  Grégoire  le  Grand.  303- 
309.  430.  449.  450.  514  ;  —  Jacques.  i6o, 
196;  —  Jean.  t2.  n6,  159,  184,  191,  241, 
326;  —  Jean- Baptiste,  142,   190.  241,  503, 

—  Juste,   68,    iBi,  257;    —   Lazare,    181  ; 

—  Léger,    149  ;  — ■  Louis,  roi,  3^0,    348: 

—  Luc,  407  ;  —  Lutwin,  184  ;  .Mammès; 
335  ;   —   Maur,   131  ;   Materne,    181,   184  . 

—  Malhias.  179,  191,  192  ;  —  Maximin; 
184;  —  Michel,  191.  481;  —  Modeste, 
181  :  —  Muminolin,  349  ;  —  Nicolas,  1^0, 
145,  172,  184.  305.  310  ;  —  Oswald,  180, 
PascHl  I',  515;  —  Paul,  91-123,  183.  241; 
305,  308,  309.  364.  4S7  :  —  Paulin  de  NoH, 
18;  —  Philippe.  i8t  ;  —  Philippe  Béiiti, 
143;  —  Pierre,  181.  184.  256.  513;—  Pierre 
Fourrier.  504;  —  Quirico.  307:  —  Rémi, 
26  ;  Sébastien,  141  ;  — Suaire.  311  ;  —  Syl- 
vestre. 242,  252,  300  ;  —  Thonïas.  156, 
i85;  —  'l'nomas  Becket,  78  ;  —  Valère, 
184  ;  —  Zacharie,  305,  307,  309. 

Saint-.-\ubert,  égli.se.  482  ;  —  Callixte  (cata- 
combe  de).  512;  —  Chamas.  arc  romain, 
403  ;  —  Denis,  abbatiale,  491  ;  —  fouilles, 
542  ;  —  musée,  541  ;  —  Ferreol-lez-Besan- 
çon,  croix-reliquaire,  149:  —  Flour  (arron- 
dissement), églises,  148;  — Front  de  Péri- 
gueux,  église,  520  :  —  Gall,  manuscrit  du 
IX*-"  s,.  449:  —  Herblon.  332;  —  Jean 
d'Aix,  tombeau  de  R.aymoiid  Béranger 
IV,  5;  — ■  l'Evangéliste  (marque  de  la 
Société),  405;  —  Julien  (Sœurs  de).  130- 
131  ;  —  Just,  trésor,  5;  —  Louis  des  Fran- 
çais (annales  "e),  76  ;  —  Luc  (écoles  de), 
82,  315-  ii8  ;  — M.ircelles-Châlons.  inscrip- 
tion latine.  244:  —  Nicolas,  peintures  mu- 
rales, 458419;  —  Oiner,  bibliothèque, 
320  ;  —  Parère-le-Chàtel,  crypte,  308  ;  — 
Rémi,  arc  de  tri  imphe  romain,  400;  — 
siège  (archives),  2,  3,  6,  7  ;  —Simon,  137  ; 


—  Sixte,  basilique.  512.  513  ;  —  Souplet, 
retable.  262; — Irond,  église  StGangulphe. 
428  ;  —  St-Martin,  83,  84,  316  ;  —  Notre- 
I)ame,  317  ;  —  Si-Pierre,  516  ;  —  Urcize, 
chœur,  149  ;  —  V^aast.  abbatiale,  427  ;  — 
croix  monumentale,  4^7;  —  Véi"an,pied  de 
croix  du  XIV»  s..  332. 

Sainte.  Agathe.  262  ;  —  Agnès,  242  ;  — 
Barbe,  261  ;  -  Catherine,  142,  535  ;  — 
Cécile,  103;  —  Elisabeth,  155; — Foy, 
160  ;  — Geneviève,  335,  528  ;  ^  Gerlrude, 
72;  —  (imlitia,  301,  313;  — Godeberte, 
349;  —  Madeleine,  181;  — Marthe,  181, 
509;  —  Radegonde,  185,  281  ;  -  Rufine, 
257  ;  —  Suzanne,  532  ;  -  Ursule,  519  ;  — 
Véronique,  505. 

Saintenoy,  333 

saints,  de  la  messe  (les),  159  ;—  (béatification 
et  canonisation  des),  16. 

Stjîsoiis  [les),  tapisseries,    \\.\. 

Salabert,  338. 

salamandre  (icon.),  401  ;  —  (tableau  de  la), 
broderie,  402. 

Salckener  (Erhart).  sculpteur,  524. 

salière,  420,  434. 

Salimbene,  peintre,  142. 

Salomon  (temule  de),  434  ;  — (trône de),  403. 

Sambin  (Hugues,),  sculpteur.  432. 

San  Miniato.  ciiapelle  du  cardinal  de  Portu- 
&•*'■  .S5  '<  — .Severiiio.  tresqiies.  142. 

.Santi  di  Tilto,  peintre,  274,  420.  440. 

Sanzio,  peintre,  344. 

saphirs  du  Puy,  66. 

Sarcelles,  église,  264,  496. 

sarcophage,  aiititjue,  542  ;   —  chrétien,  485 

—  païen.  518  ;  —  du  XVIII<^s..  179. 
Saronno,  église.  505. 

Sarto  (Andréa  del),  peintre,  410. 

Sarzec  (de),  148 

Sasso  Ferrato,  peintre,  506, 

satyre,  402  ;  —  grec,  245. 

sauterelle,  339 

Sauvageot  (L.  ),  architecte,  539. 

Savonarole,  93,  94. 

Savone,  église  St-Jean  Baptiste,  142  ;  —fres- 
ques, 142. 

scabieuse,  231. 

.Scandinaves.  409. 

scarabée  égyptien.  213. 

sceau,  antique,  148  ;  —  de  Foulques  lejeune, 
244  ;  —  italien,  244  ;  —  (matrice  de).  331  ; 

—  Messines,  208  ;  —  .VIonza,  12  ;  —  de 
.Salomon,  298  ;  —  du  XI 1"  s. ,  62  ;  —  du 
XIII»'.  62. 

Schanosky  (Pav.  ),  .sculpteur,  539. 

Schefter  (Henry),  peintre,  155,  457. 

Schevyreff  (le  prof.  ).  100. 

Schlesswig,  madone,  78. 

Schlosser  (de),  246. 

Schnaase.  2;.o. 

Schniitgen  (le  ch.).  78,  172.  534. 

Schnyder  (W. ).  76. 

Schubring  (P.),  172. 

Schw.arzrheindorf.  église  St-Georges.  523. 

i^cieuce  eaikoliquc  (la).  77. 

Sciences  ( Ici),  tapisseries,  120. 

sculpteurs  :  .Alcamène,  61;  —  Aureli,  422  ;  — 
Baérze  (Jacq  les  de),  .133  ;  —  Blanchaert 
(L.).  86;  —  Bocihos.  68  ;  —  Bouchardon 
(J.-Bt.).  433  ;  -  B  .iidrillet  (Jean).  432  ;  — 
Broederlam  (Melchior),  433  ;  —  Uaiet. 
(lehan),  427;  —  Dechaume  (Geoffroy), 
541  ;  —  Donatello.  241  ;  —  Faydherbe 
(Ant.).  426  ;  -  Ci.isq  (Paul),  136.  137  ;  — 
Geefs.  317  ;  —  Georis  (Gér.  )  de  Bruxelles, 
73;  —  Gliiberii.  439;  —  Laytié  (I..  F.). 
435  ;  —  Le  Movne.  60  ;  —  Mengelberg 
(W.).  78  ;  —  .VIic'i  l-.'\nge.  108,  114,  118. 
438;  —  Mino  di  Fiesole,  143,  144  ;  — 
N1C0I.IS  de  Bruges,  73  ;  —  de  Pise,  439  ;  — 
Pib-ano  (Nui  1),  142  ;  —  Praxitèle,  61  ;  — 
Ril  (du).  435;    -  Salckener  (Erhart),  324  ; 

—  Samoi  i(li  ).  432;  — Schascorky  (Dav.). 
539  :  —  Verroccio.  144. 

sculpteurs,  du  XVI  s,  59  ;  —  romans,  395;— 


CaDle  analptique. 


509 


sculpture,  allemande,  252  ;  —  brabançon- 
ne, 248  ;  —  sur  bois.  414,  521  ;  —  à  Caen, 
232  :  —  chinoise.  437  ;  — décorative,  16 1  ; 
—  dijonnaise,  68  ;  —  française,  252  ;  — 
gothique,  233.  245;  —  italienne.  232,  439;  — 
japonaise,  437;  —  de  Ravenne,  23;  — 
romane,  161,  246,  425  ;  —  toscane,  152  ;  — 
troyenne.  160,  161  ;  —  du  XIII-^  s.,  221. 

Sébaste  (les  40  martyrs  de).  309. 

Sébastien  (S.),  141  ;  —  (reliquaire  de),  421. 

Sébastopol,  parquets  à  figures  incisées,  5r7. 

Sebourg,  chapiteaux.  223  ;  —  église,  223. 

Sedan,  monstrance  flamande,  324. 

Séez,  cathédrale,  175;  —  sculptures  décora- 
tives, 161. 

Ségovie.  église  Ste-Croix,  429. 

Selby,  église,  387.  38S 

Selles,  statue  St-Mariin,  262. 

Semaine  dgi  Fiiteles  (laj,  51. 

Semper  (H.).  172,  535. 

Senlis,  cailiédrale.  349  ,  —  cloclie,  44. 

Sens,  cathédrale,  384,  400,  403  ;  —  tapisserie 
ancienne,  78  ;  —  (Guillaume  de),  272. 

Sensenruth,  église,  451  ;  —  tbnt.s,  451. 

sépulcre,  190;  —  (fiiigment  du  Si).  507. 

sépultures  antiques,   530  ;    —   préromaines, 
381.  382. 

Sepulvtrda,  églises,  255. 

séraphin,  361,  453 

Serbat,  (L.),  129. 

serge  d'AllematJiie,  66. 

serpent.  322,  413. 

serpentine,  158 

Seirano  Katigati  (Enriquel,  i6r,  429. 

Servais,  musicien,  456. 

Servières  (L. ),  166. 

serviette,  30,  259. 

Settegart,  peintre,  280. 

Séville,  Alcazar,  164. 

Sfax,  baptistère,  518. 

Sha-tcheou,  grotte  des  mille  Bouddha,  330.* 

Siagu,  ville  antique,  62  ;  —  baptistère,  518. 

Sibenaler  {).- B),  335. 

Sibylles.  541  ;  —  (prophéties  des),  437. 

siège,  pliant  en  fer  incrusté  d'or,  329. 

Sienne,  peintres,  250. 

Silos,  église   romnne.  247  ;  —  trésor  de  l'ab- 
baye, 150.  151,  153. 

Simone  (Mariino),  peintre.  241. 

Sinon,  architecte  turc,  328. 

Sinope,  manusc.  de  l'évang.  S.Matthieu,  245. 

sirènes,  395,  400,  403. 

Siret.  141.  143. 

Sizeranne  (Robertde  la),  154,  214. 

Smithfield,  égUse  St  Barthélémy,  370. 

Sinolensky  (Jus.  ),  peintre,  144. 

Snellaert  (Jean),  peintre,  427. 

Sociedad  espanola  dei  excursiones,  246. 

Société,  des  amis  des  motiuments  parisiens, 
175  ; —  des  Antiquairesde  France,  60  147, 
224,  329.  424,  517  ;  —  archéologique  de 
Bruxelles,  ^■48.  426  ;  —  archéologique  du 
Midi  de  la  France,  425  ;  —  diocésaine  d'ar- 
chéologie chrétienne  de  Nanutr,  1^9  ;  — 
éduenne,  508  ;  —  d'émulation  de  Cambrai, 
332  ;  —  française  a' archéologie,  z^\(^\  — 
d'histoire  ae  Beaune,  508  ,  —  d' histoire  et 
d'archéologie  de  Gand,  426  ;  —  historique 
et  archéologique  de  l'Orne,  148  ;  —  histo- 
rique et  littéraire  de  Tournai,  335;  — 
internat,  des  études  iconogro phique^^ ,  329  ; 
—  des  lettres^  sciences  et  arts  de  Bar-le-Duc, 
332  ;  —  des  Mélophiles  de  Hasseît,  428. 
soies  teintes,  105, 

Soignies.  collégiale  St-Vincent,  355. 
Soil(E  ),  78,  335.  527. 
Soissonnais,  égUses,  463,  470, 
Soissons,  ancienne  basilique,  85  ;  —  cathédra- 
le. 37.   43.  -48,  384  :  —   cloître  St-Jean  des 
Vignes,  30,  224,  228  292  ;  — église  St-Lé- 
ger,  494  ;  —  Semaine  religieuse,  350. 
soleil,  159,  260 
Solesmes,    bénédictins,  449,    450,    452  ;    — 

chant,  449. 
Sorbonne,  congrès  des  sociétés  savantes,   62. 


souche,  27. 

Soucia,  reliquaire,  149. 

Soulhwell,  collégiale,  386. 

Souvigny,  église,  401. 

Speusippe  (S.  )  (statue  de),  332. 

sphinx  égyptien,  395,  402. 

Spicker  (Guillaume),  peintre  verrier,  510;    — 

(I^ierre).  peintre,  510. 
spirale,  28,   2T2. 
stalactites.  29,  30. 
stalles,  à  ('oriielynuinsler,  225;  —  Dijon,  432; 

—  gothiqrres,  68  ;  —  Heinsberg,  34  ;  — 
Lanjex,  487;  —  Louvain,  72. 

Stamboul,  groupe  de  mosquées,  527. 

statuaire  (la),  347  ;  —  en  Normandie,  161. 

statue,  de  Ste  Agathe,  282  ;  —  Apollon. 
424;  —  Ste  Barbe,  262  ;  —  BonifaceVIII. 
252,  326  ;  —  S.  Caprais,  262  ;  —  Christ, 
426.  481  ;  —  Durand  (abbé),  521  ;  — 
Kleusippe,  332  ;  —  évêque,  142  ;  —  Frédé- 
ric le  Grand,    173  ;  --  Ste  Geneviève,  528  ; 

—  S.  Gimer.  426;  —  Héraclès,  148;  — 
Hermès,  245  ;  —  S.  Hubeit.  202  ;  — 
S.  Laurent.  262;  —  S.  Lautein,  332;  — 
Ste  LéoniÉle,  332  ;  —  S.  Louis  de  Toulou- 
se, 241  ;  —  Lysandre.  518  ;  --  S.  Mammès, 
335  i  —  ^t*^  Marie-Madeleine.  262  ;  — 
S.  Martin,  2Ô2  ;  —  en  marbre  et  en 
bronze,  148  ;  —  Meung  (Jean),  272  ;  — 
Mélasippe,  332  ;  —  S.  Michel,  481  ;  — 
Mnémosyne,  61  ;  —  S.  Nazaue,  420  ;  — 
S.  Pierre.  256  ;  —  S.  Pierre  de  Vérone, 
332  ;  —  prince  de  Ligne.  270  ;  —  quatre 
Rois,  T72  ,  —  Raymond-Béranger  IV,  5  ; 

—  S.  Thomas  Becket,  78  ;  —  Vierge,  44, 
69.  262.  27t.  504.  538. 

statues,  anciennes  dans  le  Jura,  62  ;  —  de 
bronze,  6r  ;   —   colossales  (de  bœufs),  45; 

—  diaprées,  61  ;  —  dijonnaises,  68  ;  — 
équestre,  62. 

Stein  sur  le  Rhin,  peintures  murales,  172. 

Steinl,  pemire.  280, 

Stèle  des  Vautours  (la),  60  ;  —  phénicienne, 

518. 

Stimmeti  ans  Maria  Laach  fdiej.   52. 

Stovv,  église,  472. 

Strasbourg,  cailiédrale,  270,  431. 

Straven  (F).  428. 

strigilles.  29,  30. 

Stuben.  abbaye,  185;  —  couvent  des  dames 

nobles,  189. 
Sturbout  (Hubert),  peintre,  177. 
Siuitgart,  Cabinet  des  antiques,  172. 
style,  brugeois,  153  ;  —  esthétique,  138. 
styx,  293. 

Subiaco,  fresques,  232. 
Suger.  380.  384.  491- 

Suisse  (Charles),  architecte,  136,  137,  433,539. 
Suzanne  iSte),  532. 

Sylvestre  (S.),  242,  300  ;  —  (tiare  de),  252. 
symbolique  chrétienne  (la),  33r. 
Synnada,  blocs  de  marbre,  147. 


tabernacle,  édicule,  331  ;  —  du  XVHI'^  s.,  159. 
tableau,  258  ;   —  dédicatoire  à  Lublin,  144  ; 

—  d'église,  63  ;   -  flamand,  519, 

tables  d'autel  limousines  émaillées,  150.    151. 

tiipèfe,  94. 

tapestry,  94. 

tapisseries  94,  des  Actes  des  apôtres^  91  -  123; 

—  à  Angers,  174;  — de l' Apocalypse,  544;  — 
\ Arithmétique,  120  ;  — l  Astronomie,  120  ; 

—  à  Aubusson,  159;  Audience  du  roi 
Louis  XIV,  104,  105  ;  —  bataille  de 
Formigiiy,  60;  — à  Beaune,  510;  —  coptes, 
104  ;  flamandes,  96,  99,  100,  270  ;  —  la 
Géométrie.  120  ;  —  des  Gobelins,  511  ;  —  les 
Grotesques,  114;  —  à  Hamploncourt,  100; 

—  Hercule  portant  le  globe  céleste,  114,  122  ; 

—  les  Heures,  114  -  123;  — à  Loukmanoff, 
100  ;    — à  Lyon,  96.  98  ;  —  modernes.  104  ; 

—  à  Paris,  98  ;  —  la  musique,  120  ;  —  Les 
Parques,  1I4  -  123;  —  Passage  d'une  rivière, 


120;  —  Pillage  d'un  camp,  120;  —  au  petit 
point,  540;  —  à  Reims,  530  ;  —  la  Résur' 
rection  de  Lazare,  108  ;  —  les  Saisons,  114, 
116,  119.  122; — les  Sciences,  120;  —  àSens, 
78  ;  —  à  Tournai,  120  ;  —  à  Vienne,    119  ; 

—  les  vertus  théologales,  114,  116,  iig,  121; 

—  du  XVIc  s.,  à  Bruxelles,  115,  117.    ng. 
tapissiers,  flamands.   104,  106,   108,   no;  — 

{qualités  des),  109. 
taques  de  foyer,  70,  259  ;  —  historiées,  335  ; 

—  symboliques  du  XVH*  s.,  70. 
taureau,  394,  406  ;  —  androcéphale,  394. 
Tauro  de  Sienne,  orfèvre,  7. 
Taverny,  église,  496, 

Tebessa,  fouilles,  330. 
Tedesco,  439. 

tempera  (peinture  à),  55  -  57,  311,  328,  507. 
temples  chinois,  437. 
tenture,  258. 

tête  de  clou,  29  ;  —  en  bronze  329. 
Tewkesbury,  église  abbatiale,  473. 
Thaïs  (restes  de),  453. 
Thèbes,  maison  antique,  162. 
Théodoric  II,  (histoire  Iirodée  de),  535, 
1  héophile  (légende  de),  42. 
Thiollier  (A  ).  68,  530  ;  —  (N.),  58. 
Thiverval.  église.  496. 
Tholin  (I.),  66,  78,  520. 
Tlîomas,  (S  ),  156,  186  ;  —  Becket  (S.).  386  ; 

—  (<-taiue  de),  78  .  —  (J.).  peintre,  427  ;  — 
de  Podio,  orfèvre,  20. 

Thony(J.),  peintre  427, 

Thooris  (  L.  ),  71. 

'Ihorel-Terrin,  159- 

Thrace  (fouilles  en),  6r. 

Thuin,  refuge  de  Lobbes,  535. 

thym,  296. 

tiare  conique,  326. 

Tickencote,  église,  474. 

tilleul,  296. 

Timgad,  établissement  de  bains  antiques.  330. 

tissus  du  nr'  s.  (collection  de),  87. 

Titus  (palais  de),  26. 

Tivoli,  jardin  d'Esté,  165. 

toile  de  Bourgogne,  66. 

toison  d'or,  398. 

tombeau,  de  S.  Bénigne.  433,  434  ;  — 
Brézé,  161  ;  —  Clément  V,  349  ;  —  duc  de 
Clèves,  322;  —  Federighi,  év.  110;  — 
Innocent  X,  243  ;  — Jacopo  Marcello,  453  ; 

—  Lamoricière,  173;— Louis  de  Maele,  248: 

—  Philibert  de  Chàlons,  329; —  Pot  (P.), 
539  ;  —  Raymond  Béranger  iV.  z^;—  Ray- 
mond de  Montpezat.  521; —  romain,  26. 

tombes  (collect.  de),  42*:.;  —  du  XlVcs.,  439, 

Tongres,  congrès  d'archéologie  et  d'histoire, 
333-  525  ;  —  église  Notre-Dame,  525  ;  — 
remparts,  333;  — trouvaille  archéologique, 
525  ;  —  tumulus,  525. 

Tonnerre,  statue  de  la  Vierge,  69. 

Tcippfer.  217. 

torche.  30.  3(  ;  —  du  X\'ir  s.,  74. 

Tornabrioni.  patricien,  56. 

torsade,  29. 

Tortose  (Syrie),  matériel  d'orfèvre,  T47. 

Tory  (Geoffroy),  graveur,  254. 

Toscane,  anciennes  fresques,  56, 

Toulon,  musée,  482  ;  —  porte  de  Puget,  483. 

Toulouse,  anciennes  maisons.  425  :  —  cadran 
d'horloge,  484  ;  —  cathédrale.  168,  425  ;  — 
chartreuse,  425;  —  église  des  Jacobins, 
530; — St-Martin,  434  ; —  St-Servais,  538; 
musée  des  Augustins,  232  ;  —  vitraux,  '538. 

tour,  antique  à  Arendonck,  ô'^  ;  —  Athènes 
(t.  des  Vents),  498; —  Bruges,  44 r;  —carrée, 
161,  2c6  ;  —  Laon,  40,  44,  45  ;  — 
Lisieux,  40  ;  —  Riotard,  69  ;  —  Chamaret, 
78  :  —  Dijon.  430  ;  —  Laon,  406,  407  ;  — 
Messines,  206;  —  monumentale  du  XVIII. 
s.,  70  ;  —  Noyon,  349  ;  —  Pise  (penchée), 
157  ;  —  en  porcelaine,  437  ;  —  romaine, 
332;  —  Tournai  (Henri  VIU),  2Z5 '•  — 
Vauban  à  Port  en  Bessin,  78  ;  —  de  Vésone 
à  Périgueux,  176. 


570 


WitWt  lie  rairt  chrétien. 


Touraine,  70;  — colonnes  à  imbrications.  62, 

Tournai,  73  ;  —  beffroi.  427  ;  —  cathédrale, 

S'^S-  350  ;  ~  êglisiî  St-Jacques,  77  ;  —  Ste- 

Marie-Madeleine,  68  ;    —  poni  des  Trous, 

335  ;  —  Société  historique  et  littéraire,  33=;  ; 

—  tapisseries.  120;  —  tour  Henri  VIII, 
335  ;  —  Ymagiers,  531. 

tournesol,  296. 

Tournon,  inventaire  des  reliques,  66;  —  trésor 
de  l'église,  66. 

Tours,  cathédrale,  218. 

Tracy  le  Val,  394. 

Tracy  (de),  535. 

transenna,  256. 

Transition  (la).  365. 

travaux  des  sociétés  savantes,  ôd,  244, 329, 424. 

trèfle,  222  -  223. 

Treille,  31  ;  —  (Notre-Dame  de  la),  171. 

Tremblay  (Barthél.  du),  sculpteur,  424. 

Tremouiiie  (de  la),  fer  à  hosties.  285. 

Trente,  concile    16. 

trésor.  d'Aix.  23  ;  —  Atrée,  437  Bàle  (ca- 
thédrale). 7  ;  —  Barî,  1^43  ;  —  Casseneiiil, 
(église).  65  ;  —  Clery  (Motre-Dame),  132; 

—  Conqu'-s.  168  ;  —  Dijon  (St- Bénigne) 
432  ;  —  Fontenay,  158  ;  —  France  (royal), 
66  :  —  Guarazar.  123  ;  —  Montoezat.  ^31  ; 
Monza.  12,    14;  —   Rome  (St-Pierre).  52; 

—  Saint-lu^t.  5  ;  —  Silos,  150,  151,  153;  — 
Tournon  (église).  66  ;  —  Trêves  (St- 
Mithias),  179  ;  —  Vienne,  435. 

tresse,  29, 

Trêves,  cathédrale,  180;  — musée,  181.  iqt  ; 

—  Porta  Nigra,  498  ;  —  trésor  de  l'église 
St-Mathias.  179. 

trident,  3s 

Trigh,  architecte,  271. 

rr/v77/(la).  S08. 

Troia,  chaire  de  l'église  St-Basile,  172 

Troismoutier,  fer  à  hosties,  28c;. 

Trônes  (les).  362. 

trophées.  34  ;  —  guerriers,  329. 

Troyes,  cathédrale,  227  ;  —  jubé,  157  ;  — 
sculpture,  160. 

tulipe.  296. 

tumuli.  S25. 

Tunisie,  baptistères  byzantins,  518;  —  basi- 
lique antique.  518;  —  fonts  baptismaux, 
5t8  :  —  fouilles,  62. 

Turin    galerie  royale,  130. 

Tyr,  inscription  phénicienne,  c;i8. 


U. 


Udine  (Jean  d"),  peintre,  100. 

lunbo.  33. 

Uperna.  baptistère,  518. 

Upsal,  bibliothèque.  172. 

Urhino.  archives.  142  ;  —  cour  du  duc  Fré- 
déric. 344  ;  —  église  St-Jean.  142  ;  —  pein- 
tres inconnus,  142. 

urne.  30. 

Ursule  (Ste),  519;  —  (châsse  de),  441. 


V. 


Vachères,  fouilles,  331  ;  —  station  préhisto- 
rique, 33T. 

VaM)ieu.  mobilier  d'art,  435,  1^31. 

Valenciennes.  arcliives,  132  ;  —  reliquaire, 
126,  127 

Valére(S.).  184. 

V.^liette  (René),  158. 

Valmary,  70. 

V-iIvisciolo.  abbaye  cistercienne,  58. 

vampire,  403. 

Vandenpp^reboom  (.'\.),  71;  —  (castel  de),  86. 

van  der  Kaeghen  (Ferd.),  165. 

Vandevelde  (A.).  153. 

Van  Duyse  (H.).  72. 

Van  Kven,  70,  177. 


Varbely,  bns  relief.  147. 

Vasari,  57,  88,  98.  loo,  101.  iio  ï  12,  120,  142, 
143,  242,  254,  274-280,  312.  421. 

vase,  30  ;  —  antique  à  obturateur,  329  ;  —  de 
bronze  préromain,  62. 

Vatican,  apoxyoniène  de  Lysippe,  61  ;  —  ap- 
partement de  Pie  V,  98,  99;  — circo/o,  510; 

—  loges,  112;  —  projections  lumineuses, 
513  ;  —  séance  d'archéologie.  510,  538  ;  — 
tableaux  liturgiques,  513.  514;  — tapisse- 
ries, 92,  97.  114. 

Vaudoyer,  architecte.  175,  346. 

vautour.  344  ;   —  {la  stèle  des),  60. 

Vaux  de  S^rnay.  château,  219. 

végétaux  (stylisation  des),  215  ;  —  {symbo- 
lisme des),  215. 

Veith,  peintre.  280 

Vélasquez,  peintre,  170. 

Velay.  monuments,  68. 

Veneziano  (.Ant.  ),  peintre.  422. 

Venise,  403;  —  porte-mât,  30  ;  —  tombeau  de 
Jacques  Marielo.  453 

X'enus.  245  ;  —  tàenitrix,  61  ;  —  de  Milo,  60. 
61,  147,  156. 

verdure,  258. 

Verhage  (Pierre),  peintre,  362. 

Verha*?gen,  arciiitecte,  82,  238,  355,  356,  357. 

Verlat.  peintre,  457. 

Verneilh  (Félix  de),  366.  382-385. 

Vernon  (A).  335;  —  (Smiih).  130. 

Véronèse  (  Paul),  peintre,  154,  170. 

véronique,  296 

Véronique  (Ste),  503. 

verres  églomisés,  149. 

Verres,  château,  258;  —  inventaire  du  mobi- 
lier, 258. 

Verrochio,  peintre  et  sculpteur,  144. 

Versailles,  cathédrale,  30;  —  château,  230;  — 
jardin,  165  ;  —  musée,  244. 

Vertus  (les).  362;  — théologales  (les),  tapisse- 
ries, 114,  Tr6,  119,  122. 

verveine,  296. 

Verviers,  73, 

vêtements  du  III^  s.  (collection  de),  87. 

vêtements  liturgique  ,  dalniatique.  51  ;  — 
aube,  172;  — (iimaurum,  251;  — camelau- 
cum,  251  ;  —  chape,  65  ;  —  chasuble,  191  ; 

—  costume  canonial,  65  ;  —  dalmatique, 
52  ;  —  étole,  259,  535  ;  —  mitre,  251  :  — 
omophorion,  53;  —  pallium,  514;  —  plu- 
vial, 259;  —  )e!^num  pontifical,  251.  252; 
saccos  grec,  53;  —  tiare,  251,  326;  —  vête- 
ments pontificaux,  332. 

Victoire  aptère  (temple  de  la),  I^o^. 

Vidal  (Ci.  M  ),  76. 

Vienne,  médaillon.  329;  —  musée,  245;  —  des 
arts  industriels.  172  ,  —  salière  du  trésor 
impérial.  420.  434;  —  tapisseries.  119. 

Vierge,  124,  141,  142.  145,  184,  191,  2^2.  361, 
459!  —  annonciation,  55,  68,  76,  308,  310, 
421,  462,  soS>  519;  — assise,  332;  —  as- 
somption,  422:  —  couronnement,  92,  96, 
ç8.  118  ;  —  douleurs,  130;  —  entre  deux 
saints,  169;  —  immaculée-conception,  77, 
361,  504.  519  ;  —  glorification,  42.  170, 
425  ;  —  scènes  de  sa  vie,  42,  43  ;  —  statue, 
44,69,262,271,  504,  538;  —  Visitation,  155. 

vigne,  47,  222,  228,  322. 

villa  royale  chaldéenne,  148. 

Villard  de  Honnecourt.  42. 

villas  ronïaines,  162. 

Villefosse,  trésor.  147. 

Villelame,  mosaïques  romaines,   244. 

Villenoisy  (F.  de).  435. 

Villers,  aljbaye,  63,  235,  236.  49S  ;  —  église, 
82-84  ;  —  retable,  248. 

Villette,  inventjiire  de  l'église,  340. 

Vilmont  sur  Lalia,  château,  184. 

Vinça,  église.  540. 

Vincent  de  Beauvais.  397,  398. 

Vinci  {Léon,   de)    peintre,  57,  505.  517. 

Vinckaert  (Jean),  peintre,  417. 

violette,  296. 


I  Viollet  le  Duc,  83,  154,  220,  231,  234,  238, 
239.  314.  347.  ^^S'  il^^  384.  426,  431.  433. 
468,  488.  489,  493.  495.  509. 

VMsconti  (Fréd.).  archéoi.,  14,  15. 

l'isitntioji,  155. 

Vitet  (L.)  155.  346.  349. 

vitraux,  à  Angers.  159;  —  Auch.  425;  — 
Beaune,  87,  509.  —  Binche,  357;  —  Carcas- 
sonne,  425  ;  —  Dijon,  538;  — Enghien, 
357  ;  —  Gand,  357  ;  —  Laon,  42  ;  —  Laro- 
chepot,  539  ;  —  Lîbin,  543  ;  —  Nantes, 
77;  —  Nogent  l'abbesse,  262;  —  Paris, 
451  ;  —  Toulouse,  538  ;  du  XIL«^  s.,  186. 

vitrification  accidentdle,  147. 

Vogué  (dej,  245. 

Volpato,  graveur. 

volute,  212. 

VouU  (le  tSt-).  435- 

Voûte,  d'arêtes,  368,  370,  374-392  ;  —  en 
berceau,  148,  308  ;  —  en  coupole,  69  ;  — 
croisée,  201;  —  mauresque,  29  ;  —  norman- 
de, 365.  370;  —  oclopiiriiie,  473.  474;  —  en 
pierre, 365,  463.  465;  —  quadripartite,  46!*, 
474; —  rampante,  452";  —  romane,  355; 
—  se.ypartite,  366.  374  ;  —  sphérique,  438. 

Vrelan  (Guil.),  miniaturiste,  130. 

Vriendt  {Alb.  de),  nécrologie,  89. 

Vyve-Capelie,  église,  53J. 

W. 

Wadovv'ski  (l'abbé  A.),  144. 

Wagen  (le  Dr),  124. 

Warkworih,  église,  471. 

Watteau,  peintre,  170. 

Wauters,  124 

VVeale    (W.  H.-J.),  125,  132.  238,  319,  320, 

321,  304,  440. 
Weber,  galerie,  535. 
W'eert  ( pietà  à) -  172. 
VVell-Bundel,  peintures  murales,  451. 
Westminster,  dortoir,  370. 
Westphalie.  église  à  deux  nefs,  172. 
Weyden  (v.  der).  224,  247,  334,  345,  510,  531. 
Whitbv,  abbave,  ',70. 
Wiegand  (ie  D,),  251. 
Willame  (G  )  71. 
WiUis  (le  prof.)  371,  373. 
Winchester,  cathédr. ,  370  389;  — crypte,  370. 
Wisniar,  musée,  410  ;  —  tissu  antique,  420. 
Wladyck,  peintre,  144. 
W(>illez{K.  ),  220,  489497. 
Worcesttr,  cathédrale.  371,  373,  379. 
Wuestwezel.  peintures  murales,  451. 
Wulf  (C'h.  de),  arciiitecte,  356. 
WU-scher-Becchi.  172. 
Wyart  (I!)oni.  Sébastien),  512. 
Wybaud  (Jean),  graveur,  171. 


Xanten,  église  522  ; 
Xanthos,  frise.  410. 


-  Vitraux,  172. 


N'ork,  aithaye  N.-D.  370. 

Ypres,  cathédrale,  524  ■  —  halles.  442,  449; 
pignons  en  bois,  524;  —  trésor  dit  «  des 
Templiers  »,  441  ;  —  {siège  d'),  195. 

Ysendyck  (  Van),   architecte.  176. 


Z. 


Zacharie  (S.),  305.  307.  309. 

y.eitschrift  fur  chriitluhe  Kufisf,    78,    172, 

534- 
Zcpperen,  église,   451  ;  —  peintures  murales, 

4-;i.   S4>- 
Zeibi  (Luigi),  19. 
zodiacjuc  >ie  N.-D.  de  Paris,  413. 
Zucchi  (Bart.),  12,  ly. 


Cable  analytique. 


559    1 


collectionneurs  (répertoire  général  des),  340. 

collégiale,    de  Binche  (St-Ursmer),    357;  — 

Cambrai  (St-Pierre),   171  ;  —  Clèves,  522  , 

—  Huy,  85.  271  i  —  Louvain,  72,  83,  84, 
'^77'  539  ;  ~~  Manat.  425  ;  —  Monlbrisson 
(Nolre-Danie).  8  ;  —  Saint-Paulin.  69  ;  — 
Soignies(St-Vincent),355; — South\veU,386. 

Colleoni  {Hier,  de),  peintre,  141. 

Colmont,  ruines,  525. 

Colobium,  445. 

Cologne,  cathédrale.  334.  503,  545; — église 
des  Sts  Apôtres,  350  ;  —  de  Ste-Marie  du 
Capitole,  450  ;  —  de  St-Pantaléon,  190. 

Colomb  (Christophe),  254. 

colombe,  410. 

Colombe  (Jean),  miniaturiste,  329  ;  —  (Mi- 
chel), 440. 

Coloma  (Stefano).8. 

colonnade  antique,  329;  — grecque,  36. 

colonne  à  imbiications.  62. 

coloris  (les  secrets  du),  69,  534. 

coloristes,  69. 

comité,  diocésain.  315  ;  —  des  travaux 
historiques,  148,  332,  519. 

Commission,  archéol.  du  départ,  delà  Seine. 
451;  — département,  des  monum.  hist.  du 
Pas-de  Calais,  332  ;  —  diocésaine  des  mo- 
numents, à^  ;  —  française  des  monuments 
historiques.  136,  315  ;  —  royale  des  mo- 
numents  de  Belgique,  63. 

ComTiiode.  empereur  (portrait  de),  188. 

Como,  église.  505. 

Compiègne,  Ste  Klarie.  331. 

composition  architectonique,  532  ;  —  déco- 
rative, 532. 

Composlelle.  cathédrale.  160  ;  —  église  St- 
Jacques,  168. 

Conférence  d'histoire  et  d'archéologie  du 
diocèse  de  Meaux,  335. 

Congrès,  archéol.  de  France,  519;  —  deTon- 
gres,  s^S  ;  —  d'archéologie  et  d'histoire, 
333;  —  eucharistique  d'Angers,  522;  — 
international  des  sciences  ethnographiques, 
87  ;  —de  Malines,  333  ;  —  scientifique  de 
Bruxelles.  529  ;  —  de  la  société  française 
d'archéologie,  424; — des  sociétés  savantes, 
62.  530. 

Coninxheini.  fouilles.  525. 

Conques,  abbaye,  167;— chœur, 149;—  église 
St  Foy.  16Ô,  167  ;  —  reliquaire,  168  ;  — 
trésor'.  168 

Constfuice,  cathédrale,  334. 

Constantin,  empereur,  22,  147,  242,  251  ;  — 
(le  pape),  251,  309  ;  —  (portrait  de),  329;— 
II,  329. 

Constantiniana  Daphné,  forteresse.  244. 

Constantinople,  Cyclobion,  528;  —  églises, 
528;  —  mosquées,  527  ;  —  murailles,  527  ; 

—  musée.  62,  148,  534  ;  —  prise,  i8g  ;  — 
Ste  Sophie,  528. 

constructions,  languedociennes,  77  ;  —  mili- 
taires, 62, 

contreforts.  46. 

conversion  de  S.  Paul,  tapisserie.  92-123. 

Cappicii  (Jean),  peintre.  338, 

Coptes  (tapisseries  des),  104. 

coq  (icon.).  410, 

coquelicot  (décor.),  291. 

coquerrlle,  293. 

Corbeil,  clocher  de  St-Spire,  494. 

cordelière  (symb.),  29. 

Cormon.  272. 

cornaline  talismanique,  ^24. 

Cornelis  (Alb.).  peintre,  36r,  363,  364. 

Cornélius,  peintre,  280,  458, 

Cornelv munster,  stalles,  225. 

corniche  du  théâtre  d'Ader,  25. 

Corona  (le  P.  Fabius),  bfirnabite,  17. 

corona.  252. 

Corrège  (le),  peintre,  535;  — ^  (fresques  du), 
422. 

correspondances  d'Italie,  55.  143,  240,  326, 
419,  505  ;  —  de  Pologne,  144. 

Corroyer  (E. ),  239. 

Cosimo  Roselli,  peintre,  143. 


costume  canonial,  65. 
côte  normande  ( h:  f,  246. 

Coney,  donjon,  498  ;  —  (Robert  de).  272. 

couleur,  à  l'huile,  55;  —  (définition  de  la),  69. 

couleurs  (échelles  et  genres  des), 65.  102.  110; 
—  (résistance  des),  104,  105,  109. 

Coulommiers,  église  St-Denis,  335. 

coupe,  en  cristal,  du  XIV*^  s.,  535  ;  —  sassa- 
nide,  61. 

Courajod  (L. ),  264,  438,  439. 

Couran,  architecte,  521. 

Courances,  château,  147. 

couronne,  35  ;  —  antiques  à  Kazan,  24  ;  — 
émaillées.  22  :  —  de  fer  à  Monza,  12,  14, 
16,20,  22,  251  ;  —  impériales,  24  ;  —  lom- 
barde, 22  ;  —  d'ostensoir,  259  ;  —  (la  Ste) 
à  Paris,  78, 

couronnement  de  la  Vierge,  tapisserie,  96, 
118. 

Courtrai,  hôtel  de  ville,  460;  —  peintures 
murales,  460. 

couteaux,  159 

Coutures,  ter  à  hosties,  284. 

couverte  de  pupitre,  259. 

couverts,  259. 

Coxie  (Michel),  peintre,  106. 

Crayer  (de),  peintre,  42Ô. 

crê.iHofi   du  Monde.  43.  « 

créatures  vivantes,  394. 

crèche  du  Sauveur,  igr. 

crédences,  259. 

Creil,  église  St-Evremond,  490. 

crémière,  259. 

Crespin,  architecte.  411. 

Crète,  fouilles,  61,  147;  —  statue  égyptienne. 

245- 
Crèvecœur  (Lionel  de),  365. 
Christus  (Pierre),  peintre.  125,245, 
croisade  (rôle  de  la  papauté  dans  la  i''^).  525. 
croisées  d'ogives.  365-393,  463-481. 
croissant  (le),  331. 

croix  à  double  croisillon.    158;    —  gammée, 
2T3  ;  —  de  Limbourg,  185  ;  —  de  Lorraine, 
78.  —  monumentale.  427;  —  offrande,  259; 
—  processionnelle.  149,  331.    517  ;  —  reli- 
quaire.   149  ,    —   triomphale,    356,  357;  — 
(parcelle  de  la),  179  ;  —  (reliquaire  de  la), 
179-182;' — (tableau  de  la).  i8r,  187. 
Croix  ( La ) ,  .450. 
Croquet  (l'abbé).  248. 
crosse  de  1200.  403. 
Crostarosa(Mgr;.  512,  515. 
Crousille,  inventaire  de  la  maison  curiale,  338, 
crucifix,  418-419 
Crucifixion,     421,505;  —  (de  Montofarno), 

57  142  ;  —  (tableau  de  la).  190,  250. 
Cuicul,  fouilles,  330. 
j  culots  (décor.),  218,  219. 
I  Curçay.  fera  hosties,  285. 
1  Cuthbert  (S.),  386,  464  ;  —  (châsse  de),  375. 
[  cyclamen  (décor.),  295, 
I  cygne  (décor.),   411. 
I  cymaise  romaine,  218. 
cymbale  phénicienne,  147. 
cyprès,  295. 

Cyprien  (SV)  (tombeau  de),  244. 
Cyriaque  d'Ancône,  4^0. 
Cyrus  [ mort  de),  tableau,  426. 

D. 

Dagnan  Bouveret,  peintre,  337. 

dahlia,  290-291 . 

dais,  150. 

dalmatique,  de  Charlemagne,  52. 

dalmatiques  romaines,  52. 

Daly,  architecte,  425. 

Damou-el-Karila,  fonts  baptismaux,  518. 

Daniels,  abbé,  332,451. 

DarceUA.),  129,  264. 

Dare  (Estiévenart),  peintre,  427. 

Daret  (Danelet).  427  ;  —  (Jacques),  peintre, 

426,   543;  —  (Jehan),   sculpteur,  427;  — 

(Octe),  tailleur  d'images,  427, 


—  fresques,  517  ;  — 
518. 


I  David.  d'Angers,  155  ;    —  d'Ecosse,  387  ;  — 
I      roi,  363  ;  —  peintre,  104,  248. 
!  Deas,  église,  332. 

1  Dechaunie  (Geoffroy),  sculpteur,  541. 
décor  (sources  du).  394. 

décoration,  architectonique,  25.  212,  289, 
394.  481;  —  moderne,  133;  — picturale^ 
des  églises,  524  ;  —  polychrome,  64  ;  — 
sarrasine,  25. 

découvertes  archéologiques,  à  Anvers,  541;  — 
Heaune,  541  ,  —  Bosco-Reale.  88,  241  ;  — 
Jérusalem,  330  ;  —  Paris.  539.  542  ;  — 
Rome,  88,  242  ;  ~~  Tongres,  525  ;  —  Ville- 
larîe,  244. 

Deger.  peintre,  280. 

Dehaisnes(Mgr),  129,  531- 

Dehio,  366.  367.  474,  475. 

Dekeyser.  peintre,  457. 

Delacroix,  r56. 

Delamain  (Phd.),  33g. 

Delatte  (C.  P.).  147.  245,  354,  450. 

Delbeke.  peintre.  443. 

Delescluze,  69,  534, 

Delisle  (Léop.),  150.  174. 

Delphes,   fouilles, 
inscription  métrique, 

Delvin,  248. 

Demaison  (P.),  70,  260. 

denier,  435. 

Denis  (S.),  pape,  242. 

Denon.  antiquués,  331. 

dentelles  anciennes,  356. 

Déposition  du  Christ,  124,  509. 

Derix  (H.),  172. 

Descamps,  fondeur.  263. 

Descente  de  croix,  88,  277. 

Desilve  (le  D'),  129 

dessin  (le).  135;  —  (simplification  du),    216  ; 

—  de  1621,  60 . 

Destrée  (Jos.  ),  161,  248.  264.  329. 

Deutsch  iNic.-Man.),  177. 

devant  d'autel,  259. 

Deventer,  chemin  de  croix,   523  ;   —  église 

bénédictine,  523. 
Devizes.  église  St-Jean,  388-391;  — église  N.- 

D..  390-391- 

Devoisni  (.-\.-J.),  531, 

dévotion,  259. 

Didier,  abbé,  312. 

Didron  (E.).  87.  159,  183.  188.  359,  434.  503. 
509.  538. 

Diegerick,  193.  194. 
I  Diehl  (Charles),  23. 

Dieppe,  église  .St-Jacques,  160. 

Diert,  église  St-Jean,  357. 

digitale  (décor.),  295. 

Dijon,  bibliothèque  [aninienne.  432  ;  —  boi- 
series sculptées,  433;  -  chapelle  St-Jean,  136; 

—  église  St-Hénigne,  429-434,  504;  —  église 
N. -D. ,  430  ;  —  flèche  dorée,  432,  433  ;  — 
fontaine  de  Moïse.  483  ;  —  incendie,  430  ; 

—  porte  à  feuillages,  433  ;  —  retranche- 
ments calcinés,  431  ;  —  tour  430. 

Dinant.  maisons  antiques,  317. 

disque  en  argent,  6r. 

Dissais,  fer  à  hosties,  285. 

Doil.  258. 

Dolfini,  539. 

Dollmayer  (Herman),  loj. 

Dominico  di  Jacopo  de  Sienne,  orfèvre,  7.  8. 

Domfront,  église  N.-D.  sur  l'eau,  464. 

Dominations  (les),  362. 

Dominicains,  526;  —  (chape  des),  6^. 

Dominique  (S.),  131,  150  ;  —  (apothéose 
de),  243  ;  —le  Florentin,  161. 

Domitille   (catacombe).  515. 

Dommartin,  église,  349  ;  —  (L.  )  73. 

Domns  Cœciti(r,  515. 

Donateilo.  sculpteur,  ^t^.  240,  241. 

Donnet  (F.  ),  70. 

Dontrien,  cloche,  263;  —  église,  261  ;  — 
fauteuil  de  XVI le  s.,  262;  — graffite,  262  ; 

—  statue  de  S.  Laurent,  262  ;  —  Vierge  du 
XIV^s..  261. 


560 


3Rebur  iJC  ('2lrt  cbvctinu 


Dorez  (Léon).  246. 

Douai,  musée,  170. 

Doué  (Martin),  peintre,  62. 

doinils,  68. 

dragon  (icon.).  398,  436. 

draperies  (décor.),  29. 

Drèche  (N.-D.  de  la),  77. 

Dresde,  musée,  6r. 

Drexler(Karl),  78. 

Drosidx  (groupes  des),  214. 

druidesse.  244. 

Duban,  arcliitecte,  346. 

Dublin,  musée  national,  2to. 

Dubois  (Em.  ),  137,  173. 

du  Bois  (A.),  73. 

Duccio.  peintre,  57,  312. 

Ducerceau,  architecte,  165, 

Duchesne  (l'abbé),  251,  302,  516. 

Duclos  (le  ch"«),  440. 

Dujardin  (l'abbé),  165,  248,  356. 

Dumferniline,  église,  387. 

Dumortier,  architecte,  63. 

Dunières,  église,  69. 

Dunstable.  église,  391. 

Durand  (Gui'l.),  2,  70,  284  ;  —  (l'abbé)  (sta- 
tue de),  52t. 

Durham,  cathédrale,  368,  374,  376-391,  465- 
492  ;  —  château,  371,  476,  480  ;  —  voûte, 
377.  38i.  388,  475- 

Dusart  (le  I<.  P.  Henri),  320. 

Dussaud  (R.),  245- 

Diidot  (Jérôme),  fondeur,  264. 

Dyck  (van),  82. 


E. 


éclairage  liturgique,  355. 

école,  anversoise  de  peinture,  427  ;  —  auver- 
gnate, 168; —  bourguignonne  d'architecture, 
149  ;  —  brabançonne  de  sculpture.  248  ;  — 
dijonnaise  de  s'culptnre,  68  ;  —  française 
d'archéologie.  61,  365  ;  —  d'.architeciure, 
237  ;  —  de  peinture,  170  ;  — -  limousine  d'ar- 
chitecture, 149;  — normande  d'architecture, 
475  I  —  ombrienne  de  peinture,  273-280, 
340  ;  —  provençale  d'architecture,  149  ;  — 
rhénane  d'architecture,  350  ;  —  tournai- 
sienne  de  peinture,  427  ;  —  vénitienne  de 
peinture,  453  ;  —  de  sculpture  de  Calcar, 
522. 

écoles  d'architecture  religieuse,  63. 

écritures  anciennes,  244. 

écu,  33-34. 

écureuil  (décor.).  411. 

édifices  anciens,  502. 

Edfou,  temple,  542. 

église,  Aerschol.  357;  —  ."Mahuni,  374;  — 
Amiens,  213  ;  —  Anderlecht,  86,  — Ander- 
nach.  523  ;  —  Angers.  451,  458;  —  .Arcueil, 
496  ;  —  Àrezzo,  127  ;  —  .Arras,  129  ;  —  As- 
senois,  356;  — Assise  ;  172,  242  ;  —  Attert, 
345  ;  —  .Auberive,  161;  —  Aubeterre.  160  ; — 
Aubiac.  520  ;  —  Auriac,  523  ;  —  Auvers- 
sur-Oise.  496  ;  —  .•\uvillers.  470  :  —  Ave- 
ning.  386  ;  —  Avrechy,  490  ;  —  Bagneux, 
494.  496  ;  —  Bailly,  331  ;  —   Beaune,  508  ; 

—  Beausac.  4g;  — Beauvais,  366,  463,474; 

—  Bellefontaine.  384;  —  Bernay,  370,  463; 

—  Berneuil  sur  Aisne,  463: —  Berac.  261; — 
Betheniville,  261  ;  —  Birkin,  473  ;  —  Blyth, 
372  ;  —  Bonac,  523  ;  —  Boscherville,  370, 
463.  464: —  Boulogne.  227  ; —  Bourny,  525; 

—  Bredon  149  ;  —  Brienne,  261;  —  Bruges, 
131,224; — Bruxelles,  83,  84,  176;  —  Biuth, 
382  ;  —  Caen,  371,  463,  464.  469,  474,  477; 

—  Calcar,  522  ;  —  Cambrai.  131  ;  —  Cam- 
bronne,  470,  490,  496  ;  — Capoue,  312  ;  — 
Carcassonne,35o;  —  Cellier,  332;  —  Cerisy- 
laForêt.  464;  —  Cernay-lez- Reims,  261;  — 
Chaise-Dieu,  69  ;  —  Châlons,  78  ;  — 
Chamalières-sur-Loire,  68  ;  —  Chambly, 
494  ;  —  Champs-Dieu,  69;  —  Champigny, 
228,  496  ;   —  Chaumont,  433  ;  —  Chenne- 


vières,  224  ;  —  Cliers,  264  ;  —  Christ- 
church,   472  ;  —   Clermont-Dessous,   521  ; 

—  Clery,  69  ;  —  Cologne,  igo,  350;  — 
Como,  525;  —  Compiègne,  490;  — 
Conques,    166  ;    —  Constantinople,    527  ; 

—  Coulommiers,  335  ;  —  Creil,  490  ;  — 
Deas,  332  ;  —  Deventer,  523  ;  —  Devigne, 
388,  390,  391  ;  —  Dieppe,    160  ;  —  Diest, 

356  ;  —  Dijon,  395.  429  434.  504  ;  —  Dom- 
front,  464;  —  Oomniartin,  349;  —  Don- 
trien,  261;  —  Dumfermline,  387;  — ,Duns- 
table.  391  :  —  Emmerich,  522  ;  —  Epoye, 
261;  —  Erville,  398;  —  Esauatoglia,  142;  — 
Essen,  52^  ;  —  Eunate,  429  ;  —  Evreux, 
371  ;  —  Florence,  55-57,  93,  143,  240,  312, 
326.  327.  430,  50S;  —  Korest,  451;  —  Gand 

357  ;  —  Hairé,  451;  —  Hérent,  357;  — 
Hesdigneul-lez-Bethune,  stg  ;  —  Hochel- 
ten,  512;  —  Hoe»aerd,  451  ;  —  Hoog- 
straeten,  356  ;  —  Itteville,  496  ;  —  Ivry, 
230;  —  Jérusalem,  330;  —  Jouaignes,  463; 

—  Jumièges,  368,370,  408;  —  Kemnen, 
522  ;  —  Kidrich,  523  ;  —   Kiikstall,    472  ; 

—  Lallio,  141  ;  —  Larochepot,  539;  — 
Legnano,  505  ;  —  Less.ry,  370.  387,  389, 
474,  480  ;  —  Leuze,  149  ;  —  Lihérija,  161, 

—  Lillers  (Nord),  222;  — Lindisfarne,  386, 
387,  471  ;  —  Lisseweghe,  451  ;  —  l.oieto, 
143  ;  —  Louvain,  72,  83,  84,  160,  177  ;  — 
Lugano,  505  ;  —  Maestricht,  333  :  —  Ma- 
lanipize,  149;   —    Malmesbury,    389.  390; 

—  Mans,  350,  465  ;  —  Mareil-Marly, 
496;—  Messine.  193;  —  Middelbouig. 
131  ;  —  Mièges.  68  ;  —  Milan,  505  ;  — 
Moirac,  520  ;  —  Moissac.  520; —  Monsem- 
pron.  520  ;  —  Montivilliers,  398,  ifia  ;  — 
Montlevon.  463; —  Montreuil-sous-Bois, 
496  ;  —  Namur,  356  ;  —  Nancy,  484  ;  — 
Naples,  241  ;  —  Nauray,  261  ;  —  Neeroe- 
theren,  52^;  —  Nogent  l'abbesse.  261  ;  — 
Norwich.  480  ;  —  Nouvion  le  Poisseu,  384; 
—  Oberwezel,  563  ;  —  Oberzell,  334  ;  — 
Opwyck.  426  ;  —  Oulchy  le  Château,  463  ; 

—  Palaiseau,  496  ;  —  Paris,  30,  36-48,  86, 
230-232,  272,  349,  380,  384,  393-3g4,  397. 
408,  481,  492.  494,  499; —  Pavie.  89;  — 
Pérouse,  5;  —  Poissy,  366;  —  Pontoise, 
384  ;  —   Prosse,  261  ;  —  Reims,  62,   78  ; 

—  Rethel,  70  ;  —  Rheindorf,  334  ;  — 
Rhuis,  470;  —  Riotard,  69;  —  Rome, 
78,  87,  159,  192,  241,  242,  252,  400, 
413,  504; —  Romsey,  387,  388  ;  —  Rosiers, 
69  ;  — ■  Rouen,  232  ;  — Saint-Front  de  Pé- 
rigueux,  520  ;  —  Saint-Hubert  451  ;  — 
Saint-Léger  au  Bois,  463  ;  —  .Saint-Leu 
d'Esserent,  384  ;  —  Saint-Masme,  20r  ;  — 
Saint- Nicolas,  458,  459;  —  Sainl-Savin, 
354  ;  —  Saint-Trond,  83,  84,  316,  317,  428; 

—  Sarielles,  264,  496  ;  —  Saronno.  505;  — 
Savone.  193  ;  —  Scharz.  336;  —  Scliwarz- 
rheindorf,  523  ;  —  Sébourg,  224  ;  —  Ségo- 
vie,  429;  —  Selby,  387,  388;  — Sensenruth, 
431  :  —  Sepulveda,  255  ;  —  Silos,  245  :  — 
Sniithfield,  370  ;  —  .Soissons.  494  ;  —  Sou- 
vigny,  401  ;  —  Stow.  472;  —  Taverny.  496  ; 

—  Tewkesbury,  473  ;  — Thiveival,  496  ;  — 
Tickencote,  474  ;  —  Tongres,  525  ;  — 
Toulouse,  520;  —  Tournai,  68,  77  ;  - - 
Urbino,  142  ;  —  Uzeste,  357,  358;  —  Veze- 
lay,  488,  490,  493,  496;  —  Viuça,  530  ;  — 
Vyve  Capelle,  534  ;    —    Warkvvorth,   271  ; 

—  Xanten,  522. 

églises,  anciennes  (classement  des),  63  ;  — 
brabançonnes,  342  ,  —  byzantines,  528  ;  — 
à  coupole,  424,  520;  —  fortifiées,  62,  69  ;  — 
romanes.  62,  63,  68,  425  ;  —  (décoration 
picturale  des),  524. 

Egypte,  jardins  antiques,  162  ;  —  temples. 
4g8. 

itgyptiens,  3g4  ;. —  (toilettes  des)  212. 

éléphant  (icon.),  394,  411. 

Eleusipe  (S.)  (statue  de),  332. 

Elgm  (lord),  237,  501. 

Elisabeth,  (Ste),  155  ;  —  l'abbesse,  T96,  206. 

El-Kansara,  cuves  baptismales,  518. 


Eloi  (S  ),349. 

Ely,  cathédrale,  370,  371,  37g. 

émaillerie,  519. 

émailleurs  limousins,  350. 

émaux  byzantins.  22  ;   —    chaniplevés.   350  ; 

—  mosans,  181. 
Emmaiis,  abbaye,  249. 
Emmerich,  église,  522. 
enceintes  préhistoriques,  331. 
encrier.  66. 

encensoir  du  XI V*^  s..  192. 
enfant,  â  l'oie  (1'),  60  ;  —  prodigue,  76. 
Enghien.     Cercle    arciUologiqiic,    ;;48  ;     — 

vitraux,  356. 
Enlart  (Cani.),  58,  365. 
enseigne  romaine,  329. 
entablement  romain.  30. 

Enti"e-.Sanibre  et- Meuse,  57. 
épée,  de  Bordeaux,  66  ;  —  d'honneur,  i. 
épervier,  394. 

épigraphie,  angevine,  544;  —  campanaire,5r, 
58,  262. 

Epinal,  musée  des  Vosges,  331. 
épis  gothiques  fieuragés,  280. 
cpitaphes  de  Flandre.  165. 

Epoye,  egli.se,  261. 

Equilé(r)  (icon.),  189. 
érable  (décor.),  22S,  229. 

Ertillac,  château,  78. 

l'".rviile,  église,  398. 

Esamatoglia,    église  Ste-Catherine,  142  ;    — 

fresques    142. 
escîuijuette,   66. 

Escousseur.  inventaire  de  l'église,  258. 

Esculape.  60,  517. 

Escurial,  bibliothèque,  329. 

Espagne,  objets  d'art,  272  ;  —  sculptures  ro- 
manes, i6r. 

Esse,  fer  à  hosties.  286. 

Essen,  église.  522. 

Essenwein,  334. 

esthétique,  158  ;  —  fondamentale,  153. 

Ertillac.  château,  520. 

Etournet  (O.),  335. 

Etienne.  326;  —  (S.)  (martyre  de),  42  ;  — 
{lapidation  de)  tapisserie,  92-123,  242  ;  — 
de  Nemours,  344. 

Etival  en  Charnée,  abbatiale,  271. 

étoffes  arabes,  517. 

étole,  brodée,  535  ;  —  double,  259. 

Etrusques  (les),  437. 

études,  iconograpiiiques  (Société  internatio- 
nale des),  329  ;  —  préhistoriques,  525. 

étui,  259. 

Euchaire  (S.),   181,184. 

Euménide^  (les).    293. 

Eunate.  église,  429. 

évangéliaire  d'Henri TH,  172. 

Evangélistes(les).  55. 

Evangile  (scènes  de  r),  279. 

livans,  245. 

Eve,  190. 

Evreux,  cathédrale,  175.  480  ;  —  église  St- 
Taurin,  571. 

Exaltation  de  la  croix  (office  de  1').  187. 

exposition,  jubilaire,  63  ;  —  de  peinture,  458; 
—  rétrospective  de  la  gravure  sur  bois, 452. 

Eyck  (van),  55,  58,  74,  82,  124,  247,  320, 
3-14.  365.  427.  441.  520.  531- 


F. 


façades,  153. 
faïence,  67. 
faisan  (icon.), 
faisceaux,  31. 
falot,  259. 
Farcy  (de)  66, 


411. 


174. 


Farnèse  (l'Hercule),  156. 
Faligaii  (D.  Enriquez  de),  246,  255. 
Faucon  (Maurice),  7. 
fauteuil  du  XVH^  s.,  262. 
Favier,  orfèvre.  133. 


Cable  aitalpttque. 


56  r 


Faydheibe  (Ant.  ),  sculpteur,  426. 

Kederighi,  èv.  {tombeau  de),  110. 

feinte,  260. 

fenêtre  du  XlVe  s. ,  4t. 

fer  à  hosties,  281  -  288,  425  ;  —  iconographie. 

284  ;  —  ornementation.  284. 
Fête-Dieu  (processions  de  la),  74. 
fêtes.  71. 

fibules,  antiques,  329;  — ibériques,  j6i. 
Fierens-Gevaerl,  55   -  57,  82,  85,  118,  234  - 

349,  269,  314  -  316.  425. 
figuier,  222,  226. 

tigure,  humaine,  481-^87  ;  —  de  femmes,  541. 
figurines  en  terre  noire,  517. 
Filarète,  121,  440. 
fils  d'or,  105. 

Finistère,  richesses  artistiques,  156. 
Fisenne  (von),  172. 
flabeilum,  29. 
Flambard  (Ralph),  375,    380,  386,  466,  468, 

470'  477- 

Flandre,  épitaphes,  165;  —  tapisseries,  96, 
99,  100;  —  vieux  coins,  530. 

Flandnn,  peintre,  155,  280,  -155. 

fîcche,  dorée  à  Dijon,  432  ;  —  en  pierre,  348. 

Flémalie,  abbaye.  420;  —  (le  mailre  de),  543. 

Flône.  abbaye.  317:  — château,  317- 

rtore,  gothique,  46.  488  -  497  ;  —  de  Laon, 
49  ;  — médiévale,  140,  219;  — ornementale, 
214  ;  —  roniano  gothique,  222  ;  —  (stylisa- 
tion de  la),  212, 

Florence,  académie.  58  ;  —  annonciation. 
242;  —  archiconfrérie  de  la  Concordia,  419; 

—  -  arti.  240  ;  —  autel,  en  marbre,  143  ;  — 
en    terre    émaillée,    420  ;    —    bibliothèque 
nationale.  3  ;  —  baptistère  St-Jean,  241  ; 
cathédrale.    93,    420,    504  ;    —   chapelle, 
Brancacci,  102;  — des  Espagnols,  121.  409; 

—  des  Pierres,  241  ;    —  du  Tombeau,  55  ; 

—  cloche  du  palais  du  Podestat,  240  ;  — 
cloître  de  Santa  Croce.  S5  ;  —  crucifixion, 
279,  280  ;  —  décorations  murales  de  Baldo- 
vinetti,  55  ;  —  églises  :  de  Saint-Ambroise, 
143  ;  —  Sts-Apôires,  508  ;  —  Santa  Maria 
^Iovpila,  56  ;  —  San  Michèle,  240  ;  —  San 
Nicolo,  55  ;  —  Santissima  Annunziata,  55, 
143  ;  —  Santa  Trinita,  55,  57  ;  —  fresques, 
^43'  31Ï  ;  —  galerie,  de^  Otfices,  58;  — des 
tapisseries,  115  .  —  Guelfes,  508  ;  —  manu- 
facture royale  de  pierres  dures,  240  ;  — 
mosaïque.  241  ;  —  musée,  de  l'académie, 
242,  42(  ;  —  du  Bargello,  240;  —  de  la 
Croceita.  119  ;  —  de  l'opéra.  240  ;  —  orfè- 
vrerie, 420  ;  —  palais,  des  Guelfes,  85  ;  — 
Pitti.  420  ;  —  vieux,  50  ;  —  porte-feu,  507  ; 

—  portes,  Ghiberti,  121;  —  du  XIV^^  s., 
142;  —  rt  liquaires,  420;  —  saciistie  de 
St-Laurent,  85;  — statue.  cleBoniface  VIll, 
252  ;  —  en  marbre,  420  ;  —  tableau  de 
l'archiconfrérie  de  la  Concordia,  419. 

Florentin  (S  ),  184,  25S. 

Florenzo  de  Lorenzo.  peintre,  274. 

Floscel  (S.),  509  ;  —  (martyre  de),  87. 

Fo,  chien  de  Bouddha,  436. 

Foi  (la).  134. 

Foix,  fortifications,  62. 

Foligno,  fresciues  de  Mezzanti,  343  ;  — 
d'Ottavio  Nelli,  342. 

fondeur,  78,  Antoine  (les)  263  ;  —  Barraud 
(les),  263  ;  —  Cochois  (les),  263;  —  Des- 
camps. 263;  —  Dudot  (Jérôme).  264;  — 
Focerno,  331  ;  —  Gury  (les),  263  ;  — 
Haltzer  (J,).  26J.  ;  —  Hiidebrand,  264;  — 
Loiseau  (f.  ),  263  ;  —  Michel  de  Gand,  427  ; 

—  Oudin  (  Pierre),  263;  —  Paintaindre  (les). 
263  ;  —  Perrin  Robinet,  263  ;  —  Regnaud 
(les),  263  ;  —  Roy  (les),  263. 

fondeurs  lorrains,  263. 

Fontainebleau,  château,  60,  424  ;  —  pavillon 
de  chasse,  408. 

Fontenay,  inventaire  de  N.-D. ,  158;  —  trésor, 
158. 

Fontenelle.  216. 

fonts  baptismaux,  Andernach,  523  ;  —  Aube- 
rive.  262  ;  —   Brienne,  262  ;  —  Damou-el- 


Karita,  518  ;  —  El  Kansara,  518  ;  — 
Hildesheim,  172;  —  Hoegaerd,  451  ;  — 
Liège,  160  ;  —  Lorraine.  331  ;  —  Noord- 
peen.  396  ;  —  Oued-Ramcl,  518  ;  —  Rum- 
men,  24B  ;  —  Sensenruth,  451  ;  —  Tunisie, 

518. 

I-orest,  église,  451. 

Foretz,  manufacture  d'armes.  67. 

forges  luxembourgeoises  au  XVIe  s.,  335. 
forme,  bois  de  lit,  258. 

forteresse  du  moyen  âge,  86. 

Foucquet  (Jean),  440,  509. 

fougère,  217  ;  —  argentée,  219  ;  —  des  bois, 
225,  228.  423. 

fouilles,  Algérie.  329  ;  —  Averdon.  62:  — 
Carthage,  61,  245,  517  ;  —  Champvert,  62, 
329  ;  —  Chartres,  331  ;  —  Chassenan,   62  ; 

—  Cherchel,  330;  —  Chevigny,  62;  — 
Coninxheim,  525  ;  —  Crête,  61,  147  ;  — 
Cuicul,  330  ;  —  Delphes,  61  ;  —  Grèce,  147; 

—  Hermès,  62  ;  —  Jablanica,  517  ;  —  Ksar 
Rhelan  (Sahara),  61  ;  —  Lambèse.  330  ;  — 
Piires,  62  ;  —  Puy  de  Dôme,  517  ;  — 
Rome,  326,  437  ;  —  Saint-Denis,  357,  542  ; 

—  Tébessa ,  330  ;  —  Thrace,  61  ;  —  Tunisie, 
62;  —  Vachères,  331. 

Fourno,  fondeur,  33r. 

Fouiains,  abbaye,  392. 

Foy  (Ste),  166  ;  —  (église  de),  166. 

Fraeys  (Ern.  ),  210. 

Framkin,  76,  158. 

fraisier  (décor.),  291. 

France,  archéologie  du  moyen  âge,  529;  — 
chefs-d'œuvre  des  nmsées,  169  ;  —  restau- 
ration des  monuments,  314;  — trésorroval, 
66. 

France  (Anatole),  421. 

Francesca  (Piero  della).  peintre,  343. 

Francfort,  musée  Siaedel,  426. 

Franche-Comté,  orfèvrerie,  149. 

P'ranchimont,  château,  86,  235;  —  ruines,  86. 

François,  I^^^  258,  40:^  ;  —  (maison  de),  414- 
416  ;  —  I*^"".  de  'loscane,  435  ;  —  d'Assise 
(S.),  156; — (aube  de),  172. 

Frantz  Erich,  280. 

Francueil.  monnaies  gauloises,  62. 

Frédéric,  III,  53; — le  Grand  (statue  de),  173. 

Frésart  (Jules),  317. 

fresques,  à  Alost,  451  ;  —  Assise,  121,  252, 
398:  —  Bosco-Reale,  88;  —  Delphes,  517; 

—  Esanatoglia,  142  ;  —  Florence,  143,  252, 
31 1  ;  —  Foligno,  342  ;  —  Genève,  506  ;  — 
Lallio,  141  ;  —  Lugano,  505  ;  —  Milan, 
505  ;  —  Montefalco.  252  ;  —  Padoue,  57, 
246  ;  —  Palerme.  329  ;  —  Paris,  56  ;  — 
Pavie.  56;  —  du  Pérugin,  276-277;  — 
Polygnote,  527  ;  —  Rome,  88,  241,  256, 
276,  310  -  316,  326,  327.  516  ;  —  San-Seve- 
rino.  142;  —  Savone,  143; — Subiaco,  252. 

—  Toscane,  56  ;  —  Venise,  453  ;  —  du 
Ville:  s.,  305;  _  du  XV-^  s.,  55,  56;  — 
(nettoyage  des),  227. 

frises,  au  perchoir,  216  ;  —  romaines,  25  ;  — 

à  strigilles,  30. 
fuchsia  (décor.),  236. 
Fulvio  (Andréa),  254. 
fuseau.  29. 
Fuzet  (Mgr),  355. 


Gaborit  (l'abbé),  133. 

Gabriel,  308. 

Gaddi(Tad.),  peintre,  58,  311. 

Gaignières  (collection),  424. 

Gaillard  (Corn.),  165,  193,  197  ;  —  d'Ambre- 

ville,  414. 
Gaillon,  château,  329  ;  —  plaque  de  la  grande 

Fontaine,  329. 
Galla  Placida(arc  triomphal  de),  102. 
Galîa,  338. 

galon  (décor.),   28,  260. 
Ganay  (c'«=  de)  (collection  du),  147. 


Gand,  Achter  Sikkel,  535;  — cathédrale,  74, 
428  ;  —  château,  des  comtes,  83.  84,  235. 
238,  269,  498,  499,  502  ;  —  de  Gérard  le 
Diable.  238  ;  —  église  St-Macaire,  355-357; 
—  gilde  de  St-Joseph  et  de  St-Luc,  247, 
524.  525  ;  —  hôtel  de  ville,  503  ;  —  lava- 
crum  de  St-Bavon,  221  ;  —  peinture  à- 
l'huile  de  la  grande  Boucherie,  248  ;  —  So- 
ciété d'histoire  et  d'archéologie,  426  ;  — 
vitraux.  357. 

Gap,  cathédrale,  175. 

garde-manger,  65. 

gares  gothiques,  177. 

Garreau  (M^''^  L.  ),  425. 

Gascogne,  architecluie  féodale,  78. 

Gasq  (Paul),  sculpteur,  136,  137. 

Gaule,  Belgique,  bas-relief,  325  ;  —  romaine, 
figurines  en  terre  noire,  517  ;  —  sépultures 
antiques.  530  ;  —  (Symbole  de  la),  410. 

Gauthier  (J.  ),  architecte,  332  ;  —  de  Skirlaw 

375- 
Gavaudan,  château,  78. 
Gay  (Vict.  ),  259-260. 
Gazette  des  Beaux-Arts,  509. 
Geefs,  sculpteur,  317. 
Geernaeri  (H.  ),  architecte,  196. 
Gélis  Didot,  453. 
gemmes,  29. 

Gènes,  porte  d'un  palais,  ^82. 
Genève,  fresques,  506  ;  —  hôtel  de  ville,  506. 
Geneviève  (Ste),    335  ;  —  légende,  528  ;   — 

statue.  528. 
Gentile  da  Fabriano,  peintre,  274,  342,  343. 
Gentilli  (chev.  ),  122,  123. 
Geoffroy.  14  ;  —  le  Roux,  375.  470,  473.  478, 

479- 
Géométrie  (la),  (embl.  ).  120. 
Georis  (Gér  ),  sculpteur,  73. 
geianium  (décor.),  269. 
Gérard  (le  ch"*^),  195,  206. 
Germain  (L.),  70. 
Gerspach,    58,  82.   123.    14^.  235,   243.    313, 

328.   422,  423,  435.   508,  516. 
Gertrude  (Ste)  (châsse  de),  72. 
Geslin  (Tabbé  de),  77. 
Gevaudan,  moule  de  gâteaux,  517. 
(jhiberli,  sculpteur,  439. 
Ghirlandajo  (Dom),  56. 
Gibbon  (le  card.),  450. 
Gielen,  333. 
Gilde,  de  St-Bernulphe  de  Hollande,  523;  — 

Sf-Josepk  et  St-Luc  de  Gand,  524  ;  —  de 

St-  Thomas  et  de  St-Luc,  521. 
Gilles  d'Orval,  chroniqueur,  334. 
Gilles  de  Pélichy  (baron),  356. 
Gilliodts,  356. 
Gimert  (S.),  statue,  426. 
Giordano  (Luca),  peintre,  143. 
Giotto,  57.  58,  240,  311,  312,  313.  439,  462  : 

—  (forges  de),  121,  398. 
Giovio  (L.  ).  112. 
girafe  (icon.),  157. 
Girardot,  graveur.  148. 
Gisors,  château,  517, 
Giuliana,  peintre,  142. 
Giulika  (Ste),  307,  313. 
Giudo  (S.)  (reliquane  de),  421. 
Givelet  (Ch),  260,  519. 
Givry,  croix  triomphale, 
gland  (décor.),  225. 

Gloucester.  cathédrale,  372,  373,  385,  464, 
glycine  (décor.),  296. 
Gobelins  (manufacture  de),  91,  105,  loS,  174, 

5"- 

Godard-FauUrier,  544. 
Godeberte  (Ste),  349. 
Godefroy,    d'Anvers,     peintre,    427  ;   —  de 

Bouillon,  507. 
Goes  (Hugo  van  der),  88,  344,  427,  510. 
Gombeaud,  lieutenant,  6f. 
Gonze  (L.),  169. 
Goodyave,  212,  213. 
Goslar,  cathédrale,  172. 
Gosnay,  chartreux,  519. 
Gosset  (A.),  529. 


56^ 


îRcbur  tic  raivr  cl)rcttriu 


gothique,  anglais,  367  :  —  fleuri,  219. 

Goujon  (lean),  161. 

Gouigé.  fer  à  hosties,  284-285. 

gratïites,  262. 

Granucci  (Pr  ),  peintre.  144. 

Grandselve,  abbaye,  331  ;  —  tissus,  331. 

Grasset.  214,  215.  290. 

Grèce,  fouilles.  147  ;  —  monuments,  501  ;  — 
temples.  498. 

Grecs.  156.  294,  296,  395,  402  ;  —  (parcs  pu- 
blics des),  162. 

Grégoire  (S.),  21,  22,  303,  304,  430,  449,  450, 
514  :  —  XI.  252  ;  —  (rose  d'or  de),  9  ;  — 
XVI.  98. 

Grenade,  généralife.  164. 

Grenier  (Doni).  414. 

Gretser.  17. 

Greyson.  73. 

griffons  (icon.).  395.  398.  399. 

grille  en  fer  forgé.  262.  271. 

Grisar(le  P.).  251,  327,  516. 

grotesques.  2=;. 

Grote^qiifs  fleij.  tapisserie.  114  ;  —  de  la 
Renaissance.  395. 

Guarrazar.  trésor.  23. 

Gudderman  (Guill.),  peintre.  427. 


,  peintre.  455-462  ;  —  (por- 


Guérard  (L.).  77, 
Guffens(Ood.  E 

traits  de)  460. 
gui.  22^. 
Guibert  (Louis).  67.  248.  33g. 
Guiffrey.  174. 
Guillaume.  (Eug. ).   155,  157,  158;   —l'abbé, 

430  :  —  de   Bray,   architecte,   519- 
guillochis,  213. 

Guilloreau  (le  R.  P.  Dom).  271. 
Guimard.  532. 
^^nimheïet,  67. 
guirlande.  25. 
guivre.  409. 

Gury  (les),  fondeurs  de  cloches,  263. 
Guyau,  155. 


H. 


hachures  dans  la  peinture,  57. 

Halinard  (l'abbé).  430. 

H.allays  (André).  269. 

Hallzer  (Jac. ).  fondeur.  264. 

Hambourg  (galerie  Weber).  534. 

Hamen  (Pierre).  244. 

Haniman-Lif,  baptistère.  518. 

lïamptoncourt.  tapisseries,  100. 

Hans.  de  .Strasbourg.  417. 

Hansen.  architecte.  237. 

Hardouin  de  Croy.  349. 

harpie.  400 

Ilarrison  (Fréd.).  501. 

Hasselt.  Société  des  Mélophiles,  428. 

Hautcœur  (Mgr).  171. 

hflutelisses  historiées.  427. 

Havre,  église.  451. 

Hayve.  peintre,  131. 

heaume.  33. 

('s)  Heeren-Elderen,  retable,  85, 

Heerswingels  (Van).  72. 

Heins  (.A.).  72.  530. 

Heinsberg.  stalles.  34. 

Hclhig  (t.).  64.  go.  153.  239.  251.  280,  318, 
321.  332.  334.  360.  462.   527. 

Helleputte.  85.  333. 

héliotrope.  2g:. 

Henchir-Kakaina,  baptistère,   518. 

Hendricx.  peintre.  457. 

Henri.  1.  387  ;  —  II.  28.  523  :  —  III,  184  :  — 
(évangéliaire  de).  172  ;  —  IV.  35.  435  ;  — 
VII.  2r  ;  —  VIII.  20;  —  abbé.  loi  ;  —  de 
Souillac.  8:  —  d'Ulmen,  182,  185. 

Henry  (Guill.  d').  peintre.  364  ;  —  de  Heen- 
tinghan,  471. 

hépathîque,  230. 

Héraclès  (statue  d').  148 


héraldique  12.  33. 

Herckenrode.  abbaye  des  Dames  nobles,  451; 
—  vofite  rempante  452  ;  —  (bain  d').  428. 

Herculanum.  statues  drapées.  61. 

Hercule,  400  ;  —  (culte  d')  244  ;  —  Farnèse, 
156  ;  —  (tête  d'),  5  ;  —  portant  le  globe  ci- 
leste,  114,  115.  1T7.  ug,  120,  122;  —  (tète 
d'),  5- 

Herdigneul-Ies-Bethune.  église,  519. 

Hérent,  église,  357. 

Herford,  reliquaire,  23. 

hérisson,  411 

Hermant,  (J15. 

hermine,  ^\\. 

Hermainu  (Fréd.).  88. 

Hermès,  bague  antique  en  or,  62  ;  —  statue, 
en  bronze.  215;  —  équestre, 62;  —  de  Theo- 
doridos,  60. 

Héron  {le  ch""-"),  508  ;  —  de  Villefosse,  245. 

Heures  (les),  tapisserie,    114.    116,  117,    iig, 

I20,   123. 

hibou,  411. 

Hildebrand,  fondeur,  264. 

Hildesheini.  fonts  baptismaux,  172;  —  lustre- 
couronne,  535. 

hippocenlaure.  398. 

histoire  de  l'art,  61. 

Hochelton,  église,  522. 

Hoegaerd,  église,  ^51  ;  —  fonts  baptismaux, 
4=>i  ;  —  presbytère  Louis  XV,  451. 

Hokansai.  peintre  japonais,  437. 

Holbein  (Hans),  peintre,  177. 

HoUebeke  (van),  165. 

ham,  395. 

Hondicourt  (R.  de),  tombîer,  439. 

Hoogstraeten,  église  Ste-Catherine,  456. 

Hoozenbeke  (  Jooris  van),  orfèvre,  426. 

Hope  \V.  H.St-John.  480. 

Horgen,  fresques.  177. 

Horoshigué,  paysagiste  japonais,  437. 

hosties  (fabrication  des),  281. 

Hottentot  (le),  156,  157. 

houblon,  232. 

Houcke  (van),  247.  530,  545. 

housse,  260. 

hovix,  232. 

Hubert  (statue  de  S.),  262. 

Huet  Ludin,  maître-maçon,  262. 

Hugues,  IV,  246;  —d'Arc,  abbé.  431;  —  de 
Puiset,  év. ,  470,  479,  480. 

Hulin  (le  prof  G.)  426. 

Huile  (H.  van).   153. 

Humbert  de  Romans  (le  bon),  '^26.  527. 

Hunin  (Matthieu),  graveur,  162  ;  -  (Pierre 
Paul),  peintre.  162. 

^uy.  7Z'<  ~  collégiale,  85,  271. 

Huysmans,  277,  340,  345. 

hydres,  400. 

Hygie  {la  déesse),  517. 

Hymans  (H  ),  71,  440  ;  -  (P.).  73 

hyménée  (autel  de  1'),  226. 

hypocausle  décoratif,  244. 


Ibis.  394- 

Iconoclastes,  85,  195. 

if,  295. 

Ignace  Me  P.).  414-416. 

Me  de  France,  363  ;  —  églises,  366. 

images  (dispositions  des),  312. 

imagiers,  155:  -  du  lll*^s.,439. 

Imagination  (i"),  155. 

Immaculée  Conception,  77,  425  ;  -  (glorifi- 
cation de).  370. 

immortelle,  295. 

Incarvtlle  O**  P-  fl).  292. 

fiicendie  du  Bourg,  tapisserie,  92, 

Ingelheim,  peintures  nnirales,  334. 

Ingelo\v(H.).  386. 

Ingres,  peintre,  III,  T70. 

Innocent,  III.   242:  IV,   5.    526;    -    VI 

(roses  d'or  de),  9  :  -  X  (tombeau  de),  243; 
—  XI,  142:— XII  (effigie de),  260. 


Innocents  (saints).  181. 

uiscription.  bilingue,  147  ;  —  de  cloche,  51, 
58;  — française  du  XlV^s. ,  42<5;  —  gravée, 
60;—  grecque.ôo,  147.242,  244:  —  italienne, 
du  XlV^s.,  240;  —  latine,  142,  181,  242, 
2^4.  424;  —métrique,  si8;  —phénicienne, 
518  ;  —  duXlV^s..  128. 

inscripiious.  campanaires,  51,  58  ;  —  cime- 
lériales,  255  ;  —  grecques,  61,  244  ;  — 
indo-bouddhiques,  lapidaires,  31,  262;  — 
latines,  13,  244  ;  —  en  lettres  ornées,  244  ; 
—  nabatéennes,  245  ;  —  romaines,  335  ;  — 
safiliques.  245. 

Institut  archéologique  de  Luxembourg,  325. 

interprétation  (procédés  d-),  232. 

inventaire.  Annecy  (château  d"),  66;  —  basili- 
que vaticane,  52  ;  —  Berry  (des  ducs  de), 
i87  ;  —  Bourg-Charente  (château  de),  159; 
— Chastenet,  67;  —  Clémence  de  Hongrie, 
187;  —  Cosme  1*-'^  de  Médicis,  94  ;  — 
Crouville,  338;  —  Escoussens  (de  l'église), 
258  :  —  Fontenay  (de   Notre-Dame),  158  ; 

—  Grécourt  (abbé),  260;  —  Jarnac,  339;  — 
Léon  X,  96  ;  —  Limoges,  282  ;  —  Lonzy 
(église),  350;  —  Lyon  (cathédrale),  5  :  — 
Monbrisson  (abbaye),  187  ;  ^  Mazamet, 
159  ;  —  Middelbourg,  142  ;  —  Mobilier  de 
1629,  130  ;  ~  Montreuil  sur-mer  (trésor 
St-.Saulve).5r9;  —  Nevers  du  (XIV*"  s.,  65; 

—  Notre-Dame  de  Pitié,  2Ô0  ;  —  Notre- 
Dame  du  bout  des  Ponts,  258  ;  —  Orléans 
(duc  d').  187  ;  —  (duchesse  d'),  187  ;  — 
Orviéto  (év.  d).  187:  —  Pécounet  (Jean), 
67;—  Remiremont.  259;  — Saint-Florentin 
(église),  258  ;  —  Scarobelli,  338  ;  —  Silva- 
cane  (abbaye),  282  ;  — Terrier,  193-220;  — 
Tournon  (reliques  de),  66  ;  —  Trésor  de 
France,  66;  —  Verres,  258;  —  Viilette (égli- 
se), 340. 

invenjaires  (bibliographie  des),  65,  158,  257. 

iris,  214.  230,  237, 

Isabelle  de  Portugal  (portrait  d'),  519. 

Isembard,  prieur.  184, 

Issoudun,  bague  et  fibules  antiques,  329. 

Italie,  basiliques.  403;  —  Correspondance, 55, 

143,  240,  328,  419.  505. 
Ittenbach,  peintre,  280. 
Itteville.  église,  496 
ivoires  rhénans,  172. 

Ivry,  abbatiale,  161;  — église  St  Pierre,  230. 
Irvine  (J.-.T).  architecte,  384. 


Jablanika  (Serbie),  fouilles,  517, 

Jacob  (G.  ),  172. 

Jacobsen  (collection).  518. 

Jacques,   abbé,  184;  ^  d'Aorti,   427; —   de 

Gérin,  248  ;  —  le  Majeur  (S.),  160,  19B. 
Jadart  (IL).  70,  77,  26 j. 
Jameson  (M.)  45g. 
Jamivi.  333. 

Janssens  (Guil.),  peintre,  130. 
Japonais  (art  des).  290,  411,  437. 
jardin  (l'art  des),  162. 
Jarenton  (l'abbé),  430. 
Jean,  VU.  242,  304.  305,  309; —  (ambon  de), 

516  ;  —  XXII,  z*7  '*  —  {roses  d'or  de),  7  ; 

—  (tiare).  252  ;  —  de  Bruges,  416  ;  —  de 
Fiesole.  278.  462  ;  —  Grégoire  de  J.-C.  (le 
P.),  17  ;  —  le  Maingre,  gouverneur  de 
Gênes,  rose  d'or,  11  ,  —  d'Udine,  243  ;  — 
de  Saint-Viance,67  ;  —  (S.),  (eftigiede)  12, 
116;  —  B.ipliste  (S.),  142,  190.  241,  505;  — 
(tête  de),  242;  — évangélisle  (S.)  159,  184, 
191,  2.(1,  326;  —  (Coupe  de),  259;  — 
(Manne  de).  160. 

Jeanne.  d'Arc  (représentation  de),  70  ;  —  de 
Bailliencourt,  abbcsse,  195,  198;  —  de 
Botirbon,  8;  —  de  Ghistelles,  abbesse,  185; 

—  de  Sicile,  rose  d'or,  9. 
Joannin  (Nie),  432. 

Jehan,  le  Baere  le  jeune.  427  ;  —  le  Masle. 
év.,   158. 


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