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Full text of "Revue des langues romanes"

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REVUE 


LANGUES   ROMANES 


M"N|I'KI.I.1KI:.    [MPKIMKRIK    l  ENTIIALK    1>U    MIDI,    IIAMKI.IN    FRKKK 


REVUE 


LANGUES  ROMANES 


PUBLIEK 


PAR     LA    SOCIÉTÉ 

POUli  L'ÉTUDE  DES  LANGUES  KOiVUNES 


D  e  u  Jc  i  è  m  e      Série 

TOME    CINQUIÈME 
(t.    \nf   DK   LA   coi.lkction) 


MONTPELLIER 

AU  BUREAU    DES    PUJiLlCATiONS 
DE  LA    SfJGlÉTÏ: 

VOUli    L'kIUDIC    DKS    LaVXGUKS    R05IASE.'; 


PARIS 

MAISON  NEUVE  ET  G*'' 

Lnu!\ii;i;s-Ki)iTEDits 
25,  gUAI   VOLTAIRE,  ih 


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REVUE 


DES 


LANGUES  ROMANES 


DIALECTES   MODERNES 

ÉTUDES 

SUR  i/histoire  de  quelques  mots  romans 

I     "^    DAMEJANE 

«  Damp>jeanne  (da-me-jà-n'),  s.  /.  Sorte  de  très-grosse  bou- 
>)  teille  en  terre  ou  eu  verre,  qui  sert  à  garder  et  à  trans- 
»  porter  du  vin  ou  des  liqueurs,  et  qui  est  ordinairement  de  la 
»  contenance  de  50  à  60  litres. Dans  la  marine,  grosse  bou- 
»  teille  de  verre  de  la  contenance  de  17  à  18  litres,  garnie  de 
»  natte  et  servant  à  la  distribution  de  l'équipage.  —  Au  plur. 
»  Des  dames-jeannes. . .  —  Etjm.  Dame  et  Jeanne.  »  (Littré.) 

Littré  ajoute,  dans  le  Supplément  de  son  Dictionnaire  : 

«  Bame-jeanne.  —  Etym.  A.u  lieu  de  ce  qui  est,  lisez  ;  Mot 
»  arabe  introduit  par  le  commerce  du  Levant  :  Notre  vin  était 
»  dans  de  grands  flacons  de  verre,  damajanes,  dont  chacun  te- 
»  nait  vingt  bouteilles.  Niebuhr,  Voy.  en  Arabie,  t.  I,  p.  171 
»  (édit.  de  1776).  Le  dict.  arabe -français  de  Kasimirski  a  da- 
»  majan,  dame-jeanne,  bocal.  » 

L'étymologie  arabe  n'est  pas  mieux  fondée  que  celle  ae 
Dame  Jeanne,  caiV  damaj an  ne  se  rattache,  pour  le  sens,  à 
aucune  racine  arabe  ou  sémitique;  et,  si  ce  mot  est  en  usage 


Ô  DIALECTES  MODERNES 

chez  los  Orientaux,  ainsi  ijne  le  constate  Kasimirski,  c'est 
qu'ils  l'ont  pris,  comme  tant  (raut"es  mots  grecs,  latins  et 
romans,  des  marins  italiens,  provençaux  ou  catalans. 

Damejane  ou  dumajùna  est  le  féminin  de  l'adjectif  roman 
deniija  ou  demi/an,  fcm.  deinijàna,  formé  du  latin  dimidius  ou 
dimidianus,  a,  um,  et  ce  mot  est  d'origine  méridionale,  puis- 
que la  langue  d'oïl  n'en  a  obtenu  que  la  forme  moyen , 
moyenne  '.  Le  sens  et  la  formation  sont  tellement  évidents  que 
toute  discussion  serait  inutile.  Il  n'y  a  donc  qu'à  rechercher 
l'histoire  du  mot,  et  ilsuftirade  citer  les  documents  du  dialecte 
catalan  du  Roussillon. 

Le  latin  medianus,  dérivé  de  médius  (sanscrit  madhya),  a 
donné  en  provençal  meian,  et  en  catalan  mijà  *  ou  mijan  et  mi- 
jf'nia,  «  moyen,  moyenne  »;  mijanar,  «  partager  par  le  milieu  », 
Qimijania,  «  milieu  ",  qui  sont  tous  employés  dès  le  XIII":  siècle 
et  se  conservent  encore  en  catalan.  Dans  l'ancien  temps,  ces 
formes  étaient  employées  simultanément  et  dans  le  même 
sens  avec  demïg,  demija,  demijà,  demijàna,  qui  sont  évidem- 
ment l'origine  de  notre  «  dame-jeanne.»  Les  voyelles  de  dimi- 
(//«savaientétédéjàaltérées  anciennement  par  l'usage  vulgaire, 
comme  on  le  voit  au  IX®  siècle  par  les  Préceptes  orthograph. 
publiés  par  P.Meyer  [Recueil,  p.  3)  :  dimidius  non  dcmidius. On 
lit  dans  un  acte  de  1112  :  et  dimedia  eiminade  ordeo  (Arch.  des 
Pyr.-Or.  B,  65). Quant  aux  e  et  i  de  demidius  ou  dimedius,  de- 
venus a  dans  damajana,  il  n'y  a  rien  de  plus  commun  en  ca- 
talan '. 

La  forme  mijà,  mijàna,  n'a  jamais  cessé  d'être  employée 
en  catalan;  mais  il  n'en  a  pas  été  de  même  pour  demiy  et  de- 
mijà, quiont  complètement  disparu  dans  la  laague écrite  après 

'  Liltré  cite,  il  est  vrai  (v.  JWoj/en),pour  le  XIV*  siècle  :  «petites moione*, 
prans,  agues  »  (H.  de  Moudevilio,  f"  30),  mais  il  donne  moiiennes  dés  le 
XIll*  el  dans  tous  les  autres  exemples. 

-  C'est  j)ar  erreur  que  Litlré  cite  parmi  les  étymologies  de  «  moyen  > 
le  catalan  média,  qui  ne  se  trouve  pas  dans  les  textes  anciens  ou  dans 
ia  langue  acinolli-,  quoiqu'il  y  ait  medi,  «  moyen»,  substantif. 

3  En  catalan,  on  prononce  damajana  avec  le  son  o  bien  marqué  pour 
da  l't  ja,  mais  avec  celui  d'un  a  h.  uf  et  presque  muet  pour  ma  et  na.  Il 
ne  faut  pas  oublier,  d'ailleurs,  que  l'e  de  médius  est  devenu  o  dans  le  fran- 
çais moyen.  , 


ETUDES  SUR  QUELQUE?    MOTS    ROMANS  7 

le  XIll*  siècle,  sans  laisser  d'autres  traces  que  la  locution  ca- 
talane endcmig,  al  endemig,  en  aquest  endemig  (  qui  se  trouve 
déjà  dans  B.  Des  Clôt,  capit.  47,  et  ailleurs),  et  le  gros  vase 
dir  dumejâna,  resté  dans  la  langue  populaire,  mais  dont  je  ne 
connais  aucun  exemple  dans  les  écrits  avant  1700. Voici  les 
exemples  de  demig  et  demijn  que  j'ai  pu  recueillir  dans  les 
anciens  documents  du  Roussillon. 

Dans  un  acte  de  vente  faite  à  Salses  en  Roussillon,  en  1120, 
il  est  fait  mention  de  «  m.  alnaset  demiga  de^  nadiu.  »  (Archiv. 
des  Pyr. -Orient.,  B,  35.) 

Un  capbreu  (papier  terrier)  de  Saint-Féliu-d'Avall  en  Rous- 
sillon, de  Tan  1150  environ,  et  dont  il  existe  deux  rédactions 
contemporaines,  emploie  indifféremment  et  presque  à  chaque 
article  médius  ou  dimidius;  mais  on  lit  à  l'article  31  :  donnt 
terciam  pùrtem  de.i.tnigej'am  devino  et  de  demig  sester  de  blado. 
(Arch.  des  Pyr.-Or.,B,  50.) 

En  1283,  dans  le  capbreu  catalan  de  la  Vall  de  Ribes  :  i. 
sester  e  demig  de  ciuada.  (Revue  des  lang.  rom.J 

En  1292,  dans  le  capbreu  latin  d'xVrgelès  en  Roussillon,  une 
propriété  située  loco  vocato  loPuig  demiga  Arch.  des  Pyr.-Or,, 
B  30,  f  18).  Ce  même  Puig  Demiga  de  12^2  est  ainsi  désigné 
en  1360:  loch  apellat  Puyg  Miygan,  dans  e  cartulaire  catalan 
de  CoUioure,  f°  8  (Arch.  de  Collioure)  -. 

Enfin,  en  1384,  on  lit  dans  le  reg.  m  de  la  Procuracio  real 
(f°  1):  la  obra  que-i/  es  tengut  fer  als  malins  demigans  de  Salses. 
11  est  vrai  que  le  scribe  a  ensuite  barré  le  de  ;  mais,  puisqu'il 
avait  d'abord  écrit  demigans,  ne  peut-on  pas  présumer  que 
cette  forme  archaïque  était  encore  employée  dans  la  langue 
vulgaire,  quoiqu'on  eût  soin  de  l'éviter  dans  la  langue  écrite, 

•  Il  n'y  a  guère  d'autre  élyiiioiogia  possible  pour  nadiu  que  celle  de 
neo,  nés.  nevi.  ndam,  a  filer  »,  et,  si  on  l'admet,  netus  ou  *netivus,  «  filé 
tissu  »,  ollrirait,  pour  ce  mot  aujourd'hui  perdu,  un  exemple  remarquaiile 
du  changemeul  de  e  en  a  dès  l'an  1112. 

- 11  y  a  aussi,  en  1168,  un  mansuiii  de  m'ujana.  et  en  1267  un  mansus 
qui  dicilur  de  Meya  {Lib.  feudorum.  A,  f°  10);  mais  il  n'y  a  sans  doute  ici 
que  la  prépos.  dy  et  i'adject.  mija.  Les  masos  ou  métairies  sobirans, 
mijans  m  jusans,  sonl  d'ailleurs  innombrables  en  Roussillon,  ù  toutes  les 
époques;  mais  je  n'en  trouve  aucun  pour  lequel  on  ait  conservé  la  déno- 
mination de  dêmijâ,  qui  a  pu  cependant  être  fort  commune  à  l'origine. 


8  DIALECTES     MODERNES 

qui  s'en  tenait  à  la  forme  équivalente  mija'f  Ne  faut-il  pas  at- 
tribuer au  même  purisme  l'exclusion  du  mot  damejana  par 
tous  les  scribes  du  moyen  âge,  quoique  cette  espèce  de  bou- 
teille ou  de  vase  existât  alors  comme  aujourd'hui. 

La  capacité  de  la  damajana  se  rapporte  probablement  à 
l'ancienne  charge  de  vin,  qui  est  aujourd'hui  de  120  litres  en 
Roussillon,  et  dont  la  moitié  forme  bien  les  50  à  GO  litres  in- 
diqués par  Littré  ;  mais,  en  Roussillon,  la  damajana  actuelle 
ne  contient  guère  plus  de  40  litres.  Il  devait  bien  exister  un 
vase  de  capacité  identique  dans  l'ancien  temps,  mais  quel 
nom  portait-il?  On  connaît  bien  la  niigerola,  à  Marseille,  vers 
1300;  mais,  en  Catalogne,  il  n'y  avait  que  la  migera  pour  le 
vin  (cette mesure  n'a  d'ailleurs  aucun  rapport  avec  l-àdama- 
jana  pour  la  capacité)  et  le  miger  pour  les  grains.  Quant  à  la 
damajana,  on  n'en  connaît  aucune  mention  dans  les  textes 
anciens;  mais  ce  vase  existait,  en  Roussillon,  sous  le  nom  de 
mijana,  et  il  était  en  bois,  et  non  en  verre  comme  la.  damajana 
actuelle.  En  voici  la  preuve.  On  lit  dans  un  règlement  du 
3  août  1311,  relatif  à  la  forêt  de  Sant-Guillem,  dans  la  vallée 
de  Prats  de  Mollô  :  Que  tôt  hom  qui  fas&a  caxels,  butam  o  mi- 
ganes  de  royre  en  los  boschs  de  la  Vaylde  Pratz  e  Sent  G.  pacli 
per  cascuna  somada  ii.  s  Barc.  (Arch.  des  Pyr.-Or.,  Procuracio 
real,  reg.  xvii,  f^  13;;  et  dans  une  ordonnance  du  3  août  1321: 
Que'l  s.  rey  ni  hom  per  et  no  do  licencia  a  negun  tiom  [que]  no 
gaus  taglar  ni  fer  migans  ni  semais  ni  cornaleres  ni  escaunes  en 
lo  bosch  de  Comalada  (ibid.,  f"  65j.  Dans  ces  deux  exemples, 
les  migans  ou  miganes  sont  compris  dans  la  vaisselle  vinaire 
{oaxels,  botàm  et  semais)  et  assimilés  à  des  meubles  façonnés 
[coimalercs  et  escaunes);  on  peut  en  conclura  que  la  mijana 
était  un  vase  ou  tonneau  fermé,  distinct  de  la  semai,  qui  est 
découverte,  mais  de  même  capacité,  autrement  dit  la  grosse 
bouteille  que  le  vulgaire  a  toujours  appelée  damajana.  Il  en  a 
été  de  ce  mot  comme  de  cent  autres,  tels  que  predicar,  odi, 
noblessa,  bellesa,  pedra,  nuga,  jndici,  etc.,  pour  lesquels  la  lan- 
gue vulgaire  du  Roussillon  n'emploie  encore  que  la  forme 
archaïque,  au  lieu  des  formes  preycar,  oy,  noblea,  bellea,  pera, 
nôuyjuy,  etc.,  qui  sont  à  peu  près  les  seules  employées  par 
les  écrivains  du  moyen  âge.  Alart. 


LETTRES  A  GRÉGOIRE 
SUR   LES  PATOIS   DE   FRANCE 

[Suite) 


Sous-dialecte  du  Dauphiné 

La  petite  lettre  que  voici  est  du  conventionnel  Colaud  de  la 
Salcette  (  1733-1796);  c'est  l'œuvre  d'un  observateur  qui  ai- 
mait à  se  rendre  compte  des  choses  et  qui  ne  se  payait  pas  de 
grands  mots,  comme  tant  d'autres  de  ses  contemporains.  Elle 
est  de  1792,  mais  c'est  une  réponse  à  la  circulaire  de  1790. 
Ea  marge.  Répondu  le  18  février  1792  (note  de  Grégoire) 

Frère  et  ami, 
A.yant  une  fort  mauvaise  santé  depuis  mon  retour  de  Pa- 
ris, j'espérais  toujours  pouvoir  me  livrer  au  travail  que  vous 
exigiez  de  moi;  mais,  quand  j'ai  voulu  l'entreprendre,  j'ai  vu 
qu'il  était  au-dessus  de  mes  forces;  le  peu  de  ressources  qu'on 
trouve  dans  les  livres  qui  parlent  du  pays  que  j'habite,  et  qui 
n'est  pas  le  mien,  me  forcera  à  répondre  d'une  manière  très- 
imparfaite  aux  éclaircissements  que  vous  demandez,  et  sans 
suivre  l'ordre  indiqué  dans  votre  imprimé. 

1.  —  L'usage  de  la  langue  française  est  universel  ;  tout  le 
monde  l'entend  dans  le  district  de  Die  et  dans  tout  le  dépar- 
tement de  la  Drôme.  Le  patois,  dans  presque  tout  le  départe- 
ment, a  peu  de  différences;  le  seul  district  de  Nions  et  le  Buis 
ont  plus  de  ressemblance  avec  le  provençal. 

2.  —  Le  patois  a  une  origine  très-ancienne,  et  on  ne  sau- 
rait fixer  son  époque. 

3.  —  Il  dérive  en  totalité  du  français,  à  quelques  motsprès 
qui  dérivent  du  latin  ;  on  n'en  sera  pas  surpris  quand  on  saura 
que  Die  et  Vaison  sont  deux  villes  des  Voconces  et  que  les 
Romains  j  envoyèrent  des  colonies. 

4. —  On  ne  connaît  point  le  droit  coutumier;  tout  le  Dau- 
phiné, jadis,  et  aujourd'hui  les  trois  départements  de  l'Isère, 
la  Drôme  et  les  Hautes-Alpes,  sont  régis  par  le  droit  romain. 

5.  —  Tous  les  paysans  parlent  patois,  même  dans  les  villes! 


10  DIALECTES    MODERNES 

mais  tous,  comme  je  l'ai  dit,    entendent  le  français,  et  plu- 
sieurs le  parlent  avec  facilité. 

G.  —  Le  patois  n'est  pas  plus  abondant  en  mots  que  le  fran- 
çais, et  les  paj'sans  sont  fort  libres  en  rendant,  presque  sans 
pudeur  entre  eux  et  en  leur  langage,  les  idées  obscènes. 

7.  —  Les  finales  du  patois  sont  presque  toutes  voyelles. 

8.  —  Le  caractère  de  la  prononciation  est  doux  et  très- 
accentué. 

9.  —  L'écriture  en  patois  est  la  même  qu'en  français. 

10. —  On  a  prêché  en  patois  ;  mais,  depuis  plus  de  trente  ou 
quarante  ans,  l'usage  en  est  aboli,  excepté  dans  le  district  de 
Nions,  voisin  de  la  Provence,  où  il  arrive,  mais  rarement,  de 
prêcher  en  patois. 

11.  —  On  n'a  point  ou  peu  d'ouvrages  patois,  et  qui  sont 
sans  valeur,  excepté  dans  le  département  de  l'Isère,  où  il 
existe,  à  Grenoble  surtout,  quelques  ouvrages  patois  assez 
bons.  Je  ne  connais  ni  dictionnaire,  ni  grammaire  en  patois. 

12. — Les  habitants  ont  beaucoup  de  proverbes  dont  le  grand 
nombre  dérive  des  proverbes  français  ;  ils  en  ont  qui  sont  plus 
énergiques  en  patois  qu'ils  ne  le  seraient  en  français.  Par 
exemple,  en  parlant  d'une  femme  qui  dit  qu'elle  ne  voudrait 
point  d'amant,  ou  d'un  homme  qui  assure  qu'il  ne  voudrait 
point  d'emploi,  la  réponse  en  proverbe  patois  est  celle-ci: 
Autant  plou  que  comme  terro  beourio  ;  ce  qui  veut  dire:  S'il 
pleuvait  autant  d'eau  que  la  terre  en  boirait. 

13.  — -Il  ne  serait  de  nulle  importance  de  détruire  le  patois; 
tous  entendent  également  le  français  et  le  patois. 

14.  —  L'enseignement  se  fait  en  français,  et  les  livres  sont 
uniformes. 

15.  —  Les  villages  un  peu  considérables  ont  des  maître^ 
d'école  depuis  la  Toussaint  jusqu'au  printemps.  Les  maî- 
tres d'école  viennent  du  Briançonnois  (département  des  Hau- 
tes-Alpes );  ils  arrivent  quand  tous  leurs  travaux  sont  finis 
dans  leurs  montagnes,  à  la  fin  de  l'automne,  et  s'en  retour- 
nent à  la  fin  de  mai.  Il  n'y  a  point  de  maîtresses  d'école.  On 
enseigne  à  lire,  écrire,  chifl"rer,  et  le  catéchisme,  qui  mettait 
au  nombre  des  commandements  de  l'Eglise  le  payement  de 
la  dîme,  quod  notan/lum. 


LETTRES  A  GREGOIRE  11 

16.  —  Les  curés  ont  peu  la  surveillance  des  écoles  payées 
par  les  communes;  les  officiers  municipaux  trouveraient  mau- 
vais les  soins  du  curé,  avec  d'autant  plus  de  raison  qu'il  est 
des  villages  où  il  n'y  a  presque  point  de  catholiques,  et  qu'il 
en  est  où  le  maître  d'école  est  protestant. 

17.  —  Les  curés  ont  peu  de  livres,  et  les  paysans  aiment 
peu  la  lecture  ;  les  calvinistes,  qui  sont  nombreux,  sont  très- 
exacts  à  se  procurer  une  Bible. 

18.  —  Les  habitants  ont  peu  de  préjugés  et  peu  de  religion. 
11  n'en  existe  que  de  deux  sortes:  la  catholique  et  le  calvi- 
nisme, et  cette  rivalité  conduit  nécessairement  les  gens  peu 
éclairés  au  doute  ;  de  là  naît  l'insouciance.  Aussi,  dans  nos 
villages,  les  écrits  incendiaires  contre  la  religion  ne  font  point 
de  prosélytes.  Le  discrédit  des  assignats  est  d'une  autre  con- 
séquence. Les  habitants  sont  éclairés  ;  leurs  mœurs  sont  dé- 
pravées. 

19.  —  La  Révolution  a  fait  grand  plaisir,  mais  le  défaut  de 
numéraire  fatigue  les  citoyens  ;  et  il  est  surprenant  que,  dans 
notre  district,  le  ministre  n'ait  point  encore  envoyé  des  sols, 
conformément  au  décret. 

20.  —  L'intérêt  est  plus  fort  que  le  patriotisme  ;  ils  laissent 
à  présent  les  nobles  tranquilles,  mais  ils  ne  payent  pas  les 
rentes  foncières.  Les  maires  et  les  municipalités  n'excèdent 
pas  leurs  pouvoirs.  Au  surplus,  je  suis  suspect,  je  suis  officier 
municipal.  Tous  les  ecclésiastiques  fonctionnaires  publics  ont 
prêté  serment  dans  le  district,  et  il  n'y  a  eu  personne  à  rem- 
placer. 

Mes  éclaircissements,  mon  cher  collègue,  se  ressentent  de 
ma  paresse  et  d'une  tête  encore  fatiguée  ;  mes  réponses  ne 
sont  point  exactement  analogues  à  vos  questions,  mais  on  peut 
y  trouver  quelques  solutions.  Je  le  désire,  comme  aussi  de 
conserver  une  place  dans  votre  amitié.  Comme  sous-diacre, 
j'offre  mon  respect  à  M.  l'évêque  de  Blois  ;  comme  votre  con- 
frère, attachement  sincère  à  mon  ami  Grégoire,  que  j'aime  de 
tout  mon  cœur. 

COLAUD  LA  SaLCETTE. 

Die,  le  12  janvier  1792.  District  de  Die,  département  de  la  Drôme, 
l'an  IV  de  la  liberté. 

Compliment  à  M.  Brisson  ;  c'est  à  lui  que  je  prends  la  liberté 


W  DIALECTES    MODER^ES 

d'adresser  votre  lettre.  Tous  les  patriotes  et  les  amis  de  la 
Constitution  doivent  être  empressés  de  s'obliger. 

Nous  avons  dans  notre  ville,  où  il  n'existe  plus  de  couvent 
de  dominicains,  deux  religieux  qui  en  portent  toujours  le 
costume  ;  il  me  semble  qu'ayant  abandonné  les  maisons  de 
l'ordre,  ils  ne  devraient  plus  en  porter  l'uniforme.  Ils  font 
tout  le  mal  qu'ils  peuvent  ;  leurs  pouvoirs  sont  heureusement 
petits. 

Dialecte  provençal 

Les  admirables  travaux^ de  la  philologie  moderne  ont  trop 
bien  fait  connaître  la  langue  et  la  littérature  de  la  Provence 
à  toutes  les  époques,  pour  que  nous  ayons  à  regretter  d'avoir 
si  peu  de  documents  sur  cette  région  au  début  de  la  Révolu- 
tion française.  C'est  même  à  titre  de  simple  renseignement 
([ue  nous  donnons  la  petite  Grammaire  provençale  qu'on  va 
lire.  Elle  a  été  composée  au  mois  d'avril  1794,  au  plus  fort 
de  la  Terreur,  et  le  nom  de  son  auteur,  Achard*,  bibliothécaire 
national  à  Marseille,  peut  contribuer  à  la  rendre  intéressante. 
On  y  verra  d'ailleurs  quelques  fragments  de  la  poésie  proven- 
çale au  XVIII*  siècle. 

Adressé  au  Comité  d'instruction  publique  et  inscrit  sous  le 
n"  2894  (ce  qui  prouve  à  tout  le  moins  que  l'on  travaillait  en- 
core, même  à  cette  époque  de  désolation),  l'opuscule  d'Achard 
fut  renvoyé  à  Grégoire  le  49  floréal  an  II,  comme  l'indique  une 
petite  note  marginale,  signée  Plaichard.  Il  est  probable  que 
la  marche  des  événements  ne  permit  pas  à  Grégoire  d'en  faire 
usage,  et  qu'il  est  ainsi  demeuré  dans  ses  papiers,  au  grand 
chagrin  de  l'auteur. 

'  Achard  (Claude-François),  né  à  Marseille  en  1751,  mort  en  1809,  fut 
secrétaire  de  l'Académie  et  bibliothécaire  de  la  ville  de  Marseille.  On  lui 
doit  :  le  Dictionnaire  de  la  Provence  et  du  Comtat  Venaissin  (vocabu- 
laire fiançais-provençal  et  provençal-français),  178"),  2  vol.  in-4o;  une 
Description  historique,  géographique  et  topograjihique  de  la  Provence  et 
du  Comtat  Venuissin,  etc.;  un  Tableau  de  Marseille  ei  divers  autres  ou- 
vrages. (A.  R.-F.; 


LETTRES  A  GREGOIRE  13 

SYNTAXE  DE  L'IDIOME  PROVENÇAL 
Présentée  au  Comité  d'instruction  publique 

INTRODUCTION 

Lorsque  je  publiai  le  Vocabulaire  provençal,  je  m'étais 
proposé  d'j  joindre  la  syntaxe  de  cet  idiome  ;  mais  les  sa- 
vants que  je  consultai  alors  me  conseillèrent  de  me  borner  à 
quelques  remarques  sur  la  prononciation.  J'oubliai  dans  mon 
portefeuille  mes  recherches  sur  l'inflexion  des  verbes,  et  je  ne 
les  ai  retrouvées  qu'avec  peine  ;  je  me  suis  fait  un  devoir  de  les 
mettre  en  ordre  et  de  les  présenter  au  Comité  d'instruction 
publique,  qui  invite  les  citoyens  des  départements  à  s'occu- 
per de  recueillir  les  syntaxes  des  idiomes  vulf^'^aires  ;  mon  zèle 
sera  bien  récompensé  si  le  Comité  daigne  approuver  mes  fai- 
bles travaux. 

Je  ne  répéterai  pas  ici  ce  que  j'ai  dit  de  la  formation  et  de 
l'origine  de  la  langue  française  ;  on  y  trouve  des  mots  grecs, 
latins  et  celtiques;  il  en  est  quelques-uns  qui  paraissent  dé- 
rivés de  l'hébreu  ;  mais,  dans  un  idiome  qui  a  éprouvé  des 
changements  aussi  multipliés  et  qui  est  aujourd'hui  bien  dif- 
férent de  ce  qu'il  était  dans  son  origine,  il  serait  difficile 
d'appliquer  à  chaque  terme  l'époque  de  son  introduction  dans 
le  langage  du  pays. 

Il  me  reste  à  exposer  la  méthode  que  j'ai  employée  dans  ce 
petit  ouvrage.  Je  le  divise  en  deux  parties,  dont  l'une  com- 
prend ce  qu'il  y  a  de  plus  nécessaire  à  connaître  pour  les  noms 
et  les  verbes  considérés  séparément;  la  seconde  partie  expli- 
que la  propriété  des  mots  dans  la  liaison  du  discours. 


PREMIERE     PARTIE 
Chapitre   premier 

DES    LETTRES    ET    DE    LA    PRONONCIATION 

Les  Provençaux  emploient  les  mêmes  lettres  que  les  Latins 


14  DIALECTES  MODERNES 

et  les  Français.  Ils  font  sonner  toutes  les  lettres  et  n'aspirent 
pas  17*.  Aussi  voyons-nous  que  la  plupart  des  écrivains  pro- 
vençaux ont  retranché  dans  leurs  ouvrages  les  lettres  finales 
qui  ne  se  prononcent  que  lorsque  le  mot  est  suivi  d'une 
voyelle. 

DES    VOYELLES 

A  se  prononce  comme  en  français. 

E  se  prononce,  en  provençal,  de  deux  manières:  lorsqu'il  se 
trouve  à  la  fin  des  mots,  il  se  prononce  toujours  comme  Vé 
fermé  du  français;  il  est  cependant  d'usage  de  ne  pas  l'ac- 
centuer. L'è  ouvert  est  toujours  prononcé  fortement,  comme 
celui  que  nous  indiquons  par  un  accent  circonflexe.  Exemples: 
Addusès,  venguet,  //n^e; prononcez  adûzë,  vènguê,  Imgé.  11  faut 
observer  quel'e  suivi  d'une  consonne  se  prononce  toujours  de 
même  que  s'il  était  seul.  Ainsi,  dans  le  mot  venguet,  que  j'ai 
cité,  il  ne  faut  pas  dire  vangué,  mais  vé-ngué,  comme  nous 
prononçons  ennemi  et  non  pas  annemi. 

I  se  prononce  comme  en  français,  et  il  se  prononce  comme 
en  latin  dans  les  monosyllabes  im,  in,  et  dans  les  mots  qui  en 
sont  composés, 

0.  Cette  voyelle,  dans  les  mots,  a  la  même  prononciation 
qu'en  français,  mais  à  la  fin  des  mots  elle  remplace  Ve  des 
Français.  Ainsi  il  est  reçu  d'écrire  verguo,  qui  se  prononce 
comme  vergue  en  français. 

U.  La  voyelle  u  n'a  rien  de  particulier,  si  ce  n'est  qu'il  faut 
prononcer  w  dans  le  mot  un  comme  nous  le  prononçons  dans  le 
mot  une,  et  ne  pas  le  changer  en  la  diphthongue  eun,  comme 
le  font  les  Français. 

DES    DIPHTHONGUES,    ETC. 

Les  diphthongues  sont  Kunion  de  deux  voyelles  qui  ne  for- 
ment qu'une  seule  syllabe.  Voici  les  principales: 

Ai,  que  l'on  prononce  ahi] 

Au,  qui  se  prononce  ahou, 

Ei,  prononcez  ehi, 

la,  —  iha,        ^  mais  par  un  simple  son. 

lé,  —  ihé, 

lOf  —  iho, 

Oi,  —  ohi,  etc. 


LETTRES    A    GREGOIRE  1! 


Lesdiphthongues  et  les  quadriphthongues  sont  aussi  usitées 
en  provençal  : 


Aou    pour  au,       prononcez  ahou. 


hou.       \ 
uhou,    [ 


Uou       ou     uhou,         —         In ,    , 

rr   1  ;    •;  i    ■  ?  d'un  seul  son . 

ileil       ou     uinni.         —  lira,         / 

Yenu  —          hieou.     ) 

DES    CONSONNES 

Les  seules  consonnes  dont  la  prononciation  diffère  de  la 
sj'ntaxe  française  sont  le  G  et  1'/  consonne.  Les  Provençaux 
])rononcent  ces  lettres  mouillées  comme  les  Italiens.  Il  en 
est  de  même  du  CH;  mais  il  est  impossible  de  donner  cette 
prononciation  à  un  homme  qui  n'a  jamais  entendu  parler  un 
Provençal  ou  un  Italien,  par  de  simples  caractères  ;  il  ne  con- 
naîtra pas  la  façon  de  prononcer  ces  lettres  en  plaçant  un  d 
devant  le  g,  ni  un  t  devant  le  cli.  Il  faut,  pour  le  mettre  au 
fait,  l'inviter  à  prononcer  ces  lettres  très-lentement,  comme 
on  le  fait  en  français  :  qu'il  observe  le  mouvement  de  la  lan- 
gue, et  nous  lui  ferons  sentir  la  différence. 

Le  Français,  pour  prononcer  le  y  ou  le  /,  porte  le  bout  de 
la  langue  au  palais,  à  peu  près  à  la  racine  des  dents  de  la  mâ- 
choire supérieure.  Le  Provençal  et  l'Italien  poussent  le  bout, 
de  la  langue  jusques  aux  dents,  relèvent  un  peu  la  langue  et 
prononcent  plus  de  la  bouche  que  du  gosier.  Au  reste,  une 
seule  fois  qu'on  entende  prononcer  cette  lettre,  on  en  saura 
plus  qu'avec  les  plus  longues  explications.  La  même  chose  doit 
être  appliquée  au  ch. 

Il  ne  faut  pas  oublier  de  dire  ici  que,  lorsqu'un  mot  pro- 
vençal a  deux  /  mouillées,  on  prononce  comme  le  peuple  de 
Paris.  Ainsi  mouille  ou  mouilhe  se  prononce  en  provençal 
comme  si  l'on  écrivait  mouj/é,  et  comme  ceux  qui  parlent  mal 
le  français  prononcent  Va.djeciiî  mouillé. 

Chapitre  II 

DES     ARTICLBS 

L'idiome  provençal  a  deux  articles  :  /ou,  le,  pour  le  mas- 
culin, et  la  pour  le  féminin.  Au  pluriel,  l'article  leis,  qu'on  pro- 


16  DIALECTES    MODERNES 

nonce  lei  devant  une  consonne,  sert  pour  les  deux  genres. 
L'article  lou  et  l'article  la  s'élident  devant  un  mot  qui  com- 
mence par  une  voyelle;  ainsi  Ton  dit  l'ai,  l'âne,  et  non  pas 
loti  ai  ;  l'anduecho,  l'andouille,  et  non  pas  la  andnecho. 
■  Les  Provençaux  ne  changent  pas  leurs  terminaisons  dans 
les  déclinaisons,  en  cela  nous  ne  différons  pas  de  la  langue 
française.  Exemple  : 


Singulier 

masculin 

féminin 

Nom. 

Franc. 

le 

prov 

lou         Fr. 

la 

prov. 

la 

Gén. 

du 

donu  ou  dau 

de  la 

de  la 

Dat. 

au 

aou  ou  au 

à  la 

à  la 

Ace. 

le 

lou 

la 

la 

Voc. 

6 

à  . 

ô 

ô 

Abl. 

du 

doou  ou  dau 
Pluriel 

de  la 

de  la 

masculin  et  féminin 

Nom. 

Français 

les 

provençal     leis 

prononcez 

lei 

Gén. 

des 

deis 

— 

- 

dei 

Dat. 

aux 

eis 

— 

ei 

Ace. 

les 

leis 

— 

lei 

Voc. 

6 

à 

— 

ô 

Abl. 

des 

deis 

— 

dei 

Tous  ces  mots  sont  monosyllabes. 
Chapitre  III 

DES    NOMS 

Tous  les  noms  prennent  l'article  devant  eux,  excepté  les 
noms  propres  et  ceux  que  l'on  prend  indéterminément,  comme 
députa,  administratour;  député,  administrateur. 

La  particule  de  remplace  souvent  l'article  en  provençal  ; 
aussi  les  Provençaux  font-ils  beaucoup  de  provençalismes  en 
parlant  français,  par  l'habitude  qu'ils  ont  de  leur  idiome- 
Donnez-moi  d'eau,  de  vin,  diront-ils,  au  lieu  de  dire  donnez- 
moi  de  t  eau,  du  vin;  cela  vient  de  ce  que  le  Provençal  dit 
dounas-mi  d'aiguo,  de  vin,  etc. 


LETTRES    A    GREGOIRE  17 

H  n\y  a  pas  de  règle  générale  pour  les  genres  des  noms; 
presque  tous  les  mots  français  masculins  sont  du  même  genre 
dans  leurs  correspondants  provençaux.  Il  y  a  cependant  des 
exceptions  :  ainsi,  le  sel  est  masc.  en  français,  et  la  saou  est  f. 
en  provençal;  l'huile  est  fém.,  ioli  ou  rholi  est  masc;  le  peigne 
se  rend  par  la  /nyno  ;  le  balai  par  l'escoubo,  fém.,  et  quelques 
autres  de  même. 

Les  terminaisons  des  noms  varient  beaucoup,  de  même  que 
dans  le  français  ;  mais  elle  est*  presque  toujours  la  même  au 
pluriel  et  au  singulier.  Ainsi  chivau,  cheval,  fait  au  pluriel 
chivaus,  et  se  prononce  comme  au  singulier.  De  là  vient 
encore  que  les  enfants  disent  ici  très-communément  en  parlant 
français,  le  clievau  ou  les  chevals. 

Les  substantifs  masc.  forment  quelquefois  des  substantifs  f. 
d'une  terminaison  différente.  En  général,  les  noms  qui  se  ter- 
minent par  une  n  donnent  un  fém.  en  y  ajoutant  un  o  qui 
équivaut  à  notre  e  muet.  Par  exemple:  couquin,  masc;  cou- 
quino,  fém.;     -  landrin,  masc;  landrino,  fém. 

Les  mots  terminés  en  r  changent  cette  dernière  lettre  en  la 
syllabe  *"o  .•  vouliir,  vouluso,  fém.;  recelur,  receluso,  fém.,  etc. 

Les  mots  français  terminés  en  aire  sont  assez  ordinaire- 
ment terminés  en  ari  dans  l'idiome  provençal. 

Les  adjectifs  sont  également  très-variés;  ils  ont  un  rapport 
direct  avec  ceux  de  la  langue  française.  Ceux  qui  se  terminent 
en  é  pour  le  masc,  et  en  ée  pour  le  fém.,  se  rendent  en  pro- 
vençal par  la  terminaison  at,  ado  :  fortuné;  fortunée,  fourtunat, 
fourtunado. 

Les  adjectifs  terminés  par  un  e  muet  en  français  se  termi- 
nent de  mémo  au  fém.  provençal,  mais  au  masc.  ils  ont  un  é 
fermé.  Ainsi  invulnérable  {ait  au  masc.  invulnérable,  et  au  fém. 
invulnerablo,  que  l'on  prononce  tout  comme  en  français. 


'  Ici  l'auteur  a  oublié  que  le  sujet  do  la  phrase  '^st  au  pluriel  ;  lisez  : 
elles  sont     . 


18 


DIALECTES    MODERNKS 


Chapitre  IV 

DES       PKONOMS 

Il  y  a,  flans  les  pronoms,  des  observations  importantes  à  faire 
sur  la  (lilférence  qui  existe  entre  le  français  et  le  provençal. 
Je  donne  d'abord  la  déclinaison  des  pronoms  personnels: 

Singulier.  Nom.  Je  o\x  moi,  yeou. 

Gén.    de  moi,  de  yeou,  sans  élision. 

Dat.     à  moi.  à    yeou,   ou   mi.    en    quelques 

lieux  me. 

Ace.     moi,  mi.  ou  me,  et  yeou  dans  le  pléo- 

nasme. 

Abl.     par  moi,       per  yeou. 

Il  me  conduisit  moi-même,  Mi  menet  yeou-iaème,  ou  M'aduguel 
y  eau- même. 


Singulier 

.Nom. 

Tu,  toi. 

tu. 

Gén. 

de  toi. 

de  tu. 

Dat. 

à  toi. 

à  tu,  ou  ti,  en  quelques  lieux  te. 

Aco. 

toi  ou  te, 

ti,  ou  te. 

Abl, 

par  toi, 

per  tu. 

Sing-. 

Nom. 

Gén. 

de  soi. 

de  si,  mieux  de  si-même. 

Dat. 

à  soi, 

à  si,  ou  si,  ou  se. 

Ace. 

soi. 

si,  ou  se. 

Abl. 

par  soi, 

per  si-même. 

Pluriel. 

Nom. 

Nous, 

nautreis,  qui  signifie  nous  autres. 

Gén. 

de  nous, 

de  nautreis. 

Dat. 

à  nous, 

à  nautreis,  ou  nous. 

Ace. 

nous, 

nautreis,  ou  nous. 

Abl. 

pa)'  nous, 

per  nautreis. 

Plur. 

Nom, 

.    Vous, 

vautreis. 

Gén. 

de  vous, 

de  vautreis. 

Dat. 

à  vous. 

à  vautreis,  ou  vous. 

Ace. 

Vous, 

vautreis,  ou  vous. 

Abl. 

par  vous. 

per  vautreis. 

Il  vous  a  donné,  v'a  dounat.  Il  nous  accuse,  n'accuso. 


LETTRES  A    GREGOIRE  19 

Ces  exemples  sont  faits  pour  faire  connaître  (jue  le  pro- 
vençal fait  une  élisiou  de  trois  lettres  devant  un  mot  qui  com- 
mence par  une  voyelle,  lorsqu'il  est  précédé  d'un  pronom  plu- 
riel. 

Le  pronom  se  est  le  même  au  pluriel  qu'au  sinf^ulier. 

Sing.  Nom.  Lui,  eoii,  elle,  ello. 

Gén.     de  lui,  d'enu,  d'elle,  d'ello. 

Dat.      à  lui,  an  eau,  à  eou,  li,  à  elle,  an  ello,  ou  li. 

Ace.     lui,  eou,  ou  lou,  la,  la. 

Abl.     par  lui,  per  cote,  par  elle,  per  ello. 

Plur.  Nom.  Eux,  elleis,  elles,  elleis. 

Gén.    d'eux,  d' elleis,  d'elles,  d' elleis. 

Dat.     à  eux,  an  elleis,  ou  li,  à  elles,  an  elleis,  ou  li. 

Ace.     eux,  elleis,  leis,  elles,  elleis,  leis. 

Abl.     par  eux,  par  elleis,  par  elles,  per  elleis. 

PRONOMS    POSSESSIFS 

Les  pronoms  possessifs  sont  mieou,  tieou,    sieou,  nouestre, 

vouesire  ;  ils  sont  précédés  de  l'article  et  prennent  les  deux 
genres  : 

Lou  mieou,  la  mieouno,  le  mien,  la  mienne. 

Lou  tieou,  la  tieouno,  le  tien,  la  tienne. 

Lou  sieou,  la  sieouno,  le  sien,  le  leur;  la  sienne,  la  leur. 

Lou  nouestre,  la  nouestro,  le,  la  notice. 

Lou  vouettre,  la  vouestro,  le,  la  vôtre. 

PRONOMS    DÉMONSTRATIFS 

Il  j  a  deux  pronoms  démonstratifs  :  aqueou,  qui  fait  au  fé- 
minin aquelo,  et  aquestou,(\m  fait  au  fém.  aquesto,  c'est-à-dire 
celui-ci,  celle-ci;  celui-là,  celle-là. 

PRONOMS    RELATIFS 

Lequel,  laquelle,  louquoou,  laqualo,  se  déclinent  avec  l'ar- 
ticle ;  ç-m'  se  traduit  par  quu  ou  ^a.v  que .  Les  composés  sont 
queque  sieque,  quoi  qu'il  en  soit  ;  quelqu'un,  quelqu'une,  quau- 
-qu'un,  quaouqu'uno.  Ex.:  l'homme  qui  vint,  lltome  que  vcnguet. 
—  Ce  qui  me  surprend,  ce  que  m'estouno.  —  Qui  est  là?  quu 
es  aqui? — Qui  va,  qui  vient?  quu  va,  quu  ven? 


?(i  DIALECTES    MODERNES 

Chapitre  V 

DES       VERB  ES 

Le  provençal  a  des  verbes  auxiliaires,  des  actifs  et  des  pas- 
sifs. On  appelle  verbe  auxiliaire  celui  qui  sert  à  former  les 
temps  des  autres  verbes,  comme ^'a?,  ai;  je  suis,  sieou. 

Les  verbes  actifs  peuvent  être  réduits  à  deux  conjugaisons 
principales,  qui  se  connaissent  par  l'infinitif:  les  verbes  qui  se 
terminent  à  l'infinitif  on  at^,  et  ceux  qui  finissent  par  un  e  ou 
en  ir. 

Tous  les  verbes  en  ar  font  le  participe  passé  en  af,  les  au- 
tres le  font  en  it  ou  en  ut. 

Commençons  par  les  verbes  auxiliaires. 

Ave}',  inf.  avoir,  dérivé  du  latin  Iiabere.—  Ind,  prés.  Ai,  as, 
a,  aven,  avés,  a/z;  j'ai,  tu  as,  etc. — Imparf.  Avieou,  aviès,  avié, 
nvian,  avias,  afî'en  ;  j'avais,  etc.  —  Parf.  Ai  agut  ou  agueri, 
as  agut  ou  agueres,  a  agut  ou  aguet,  aven  agut  ou  aguerian, 
avès  agut  ou  aguerias,  an  agut  onagueroun;  ysii  eu,  etc. — Plus- 
que-parf.  Avieou  agut,  aviés  agut,  etc.;  j'avais  eu,  etc. —  Fut. 
Aurai,  auras,  aui^a,  auren,  aurés,  au^'au;  j'aurai,  etc.  — Impér. 
Agues,  que  ague;  aguen,  agués,  que  aguoun,  aie,  etc.  —  Subj. 
prés.  Que  agui,  que  agues,  que  ague,  que  aguen,  que  agués,  que 
aguoun;  que  j'aie,  etc.  — Imparf.  Aguessi  o\i  aurieuu,  aguesses 
ou  auriés,  aguesse  ou  aurié,  aguessian  ou  aurian,  aguessias  ou 
aurias,  aguessoun  ou  aurien;  (jue  j'eusse  ou  j'aurais,  etc.  — 
Parf.  Que  agui  agut,  agues  agut,  ague  agut,  aguen  agut,  agusé 
agut,  aguoun  agut;  que  j'aie  eu,  etc.  —  PI. -q. -parf.  Aguessi 
ou  aurieou  agut,  etc.;  que  j'eusse  ou  j'aurais  eu,  etc.  —  Fut, 
Aurai  agut,  etc.;  j'aurai  eu,  etc. — Inf.  prés.  Ai;er,  avoir. — Parf. 
Aver  agut,  avoir  eu.  —  Gérondif.  Per  aver,  à  avoir.  —  Part, 
prés.  Ayent,  ajant.  —  Part,  passé.  Aijent  agut,  ayant  eu. 

Le  Verbe  Etre 

Ind.  prés.  Sieou,  sies,  es,  sian,  sias,  soun. 
Imparf.  Eri,  ères,  ero,  erian,  erias,  eroun. 
Parf.  Sieou  estât,  sies  estât,  etc.,  ou  fougueri,  fougueres,  fou- 
guet,  fouguerian,  fougucrias,  fouguerouv. 


LETTRES  A    (JREQOIRE  21 

PI.- (|. -part".  E ri  estât,  e)-es  estai,  etc. 

Futur.  Sarai,  saras,  sara,  saren,  sarés,  saran. 

Impcp.  S/'pyiK.'s,  si''tjue,  s'wQuen,  si.et/iiés,  siegoun. 

Subj.  prés.  Que  sieijm',  siegues,  sieyue,  sieynen,  siegués,  sicgoiin. 

Imparf.  Fouyuessi,  fouguesses,  fouguesse,  fouguessian,  fou- 
gn'ssias,  fnugui'ssioun,  on  san'rou,  sany's,  snrié,  snrian,  sarias, 
sa  rien. 

Parf.  Que  siegui  estât,  siegues  estât,  etc. 

PI. -q. -part".  Fouguessi  estât,  ou  sarieou  estât,  etc. 

Futur.  Sarai  estât,  saras  estât,  etc. 

luf.  prés.  Estre,  ou  esse. 

Parf.  Estre  estât. 

On  voit  que  l'auxiliaire  avcr  n'entre  pas  dans  la  conju- 
iraison  provençale  du  verbe  estre.  C'est  ce  qui  nous  fait  en- 
tendre 1^  provençalisme  impardonnable  :  Je  suis  été,  pour  dire  : 
Jai  été. 

Tableau  des  conjugaisons  des  verbes  actifs 

1  "■"    C  O  N  .J  U  G  .\  1  s  O  N  2"    CONJUGAISON 

Verbe  Adoûrar  Vei'be  Estendre 

Ind.  près. 

Adori,  Adoûran,  Estêndi,  Esténden, 

Adores,  Adoùras,  Estèndes,  Esténdes, 

Addro.  Adoroun.  Estênde,  Esténdoun. 

Imparf 

Adouràvi,       Adouràvian,          Esteadienu,  Estcndtan, 

Adourâois,      Adourdvias,           Estendies,    «  Estendias, 

Adourâvo,      Adouràvovn.         Estendié,  Estendian. 

Parfam' 
Aiadourat,    As  adourat,  etc.,  Ai  es  tendu  t,  etc., 
ou  Adourèri,       Adoiweriaa,     ou  Estenderi,  Estenderian, 

Adoureres,      Adourerias,  Estenderes,        Estenderias, 

Adoilrel,         Adoureroun.  Estendet,  Estenderoun. 

Plus-q.-parf. 
Avieou  adourat,  Avieou  estendui, 

A  vies  adourat,  etc.  Aviès  estendut,  etc. 


22  DIALECTES    MODKRNES 

Futur 

Adoxirarui,     Adourarcn,  Estendrai,         Estendren^ 

Adournras,     Adonrnr'.'s.  Estcndras,        Esfendrés, 

Adourara,      Adouraran.  Ei^tendra,  Esfendron. 

Impératif 

Adôro,  Es  tende, 

Quadore,  Questendc, 

Adoûren,  Estenden, 

Adowas,  Esleîidés, 

Quadoroun.  Questendoun. 

SUBJ.  PRÉS, 

Quadori,         Quadouren,         Qu'estendi,         Qu  estenden, 
adores,  adourés,  estendes,  (stèndcs, 

adore,  adoroun.  estende,  estêndouu. 

Imparfait 
Qn'ndouressi,  Quadouressian,  Qaestendesd,  Qu'estendessian, 

—  esses,       —     essias,       —        esses,       —     essias, 

—  esse,        —     essoun.  esse,        —     essotin. 
ou  Qn'adourarieou,  Quadourarian,  ou  Qu'estendrieou,  Questen- 

darian, 

—  aînés,  —     arias,  —     ariés,  —   arias, 

—  arié,  —     arien.  —     arié,     —  arien . 

Passé 
Que  agui  adourat,  etc  .  (Jue  ayoi  estendui,  etc. 

Plus-q.-parf. 
Que  ayuessi  adourat,  etc.  Que  ayuessi  estendut,  etc. 

ou  Aurieou  adourat,  etc.  ou  Aurieou  eslcndut,  etc. 

Futur 
Aurai  adourat,  etc.  Aurai  eslendut,  etc. 

Infin.  prés. 
Adourar.  Es  tendre. 

Passé 
Aver  adourat.  Aver  esiendut. 

Pakt.  pkés. 
Adourant.  Estendent. 


LETTi;i:s   A    GKRGOIRE  23 

Le  passif  se  conjug'ue  par  rauxiliairc  esfre,  en  ajoutant  le 
participe  passif  adourat,  astendiit,  etc.  Sieou  admirât,  neoa 
estendut,  etc. 

On  a  vu  que  la  seule  difFérence  de  terminaison  des  verbes 
se  trouve  dans  l'imparfait,  où  les  verbes  qui  ont  Fintinitif  en 
ar  font  ce  temps  en  nvi,  et  ceux  qui  ont  une  autre  terminai- 
son font  l'imparfait  en  leou.  D'après  cela  il  est  facile  de  connaî- 
tre \e<  conjugaisons  provençales.  Il  est  bien  quelques  verbes 
irréguliers;  mais,  comme  ils  ont  un  rapport  direct  avec  leurs 
correspondants  français,  il  est  inutile  d'en  faire  mention  ici. 


SECONDE  PARTIE 


Chapitre  premier 

La  syntaxe  d<-'  la  langue  provençale  a  Tant  de  rapports  avec 
la  française  qu'il  n'y  a  point  de  règles  à  donner,  mais  seu- 
lement des  observations  à  présenter  sur  les  tournures  des 
phrases. 

DES    ARTICLES 

On  met  quelquefois  l'article  avant  l'adjectif,  au  lieu  de  le 
mettre  avant  le  substantif.  C'est  une  chose  qui  nous  est  com  - 
mune  avec  les  Grecs,  et  certainement  c'est  d'eux  que  nous 
tenons  cette  façon  de  nous  exprimer.  Lou  mieou  héou!  Mon 
beau;  Lou  mieou  bel  enfant.  Mon  bel  enfant;  Lou  sieou  fraire,  Son 
fi'ère,  etc. 

DES    NOMS 

J'ai  dit  plus  haut  que  les  noms  ne  changeaient  pas  de  ter- 
minaison dans  les  nombres,  et  qti'il  était  même  reçu  de  ne 
pas  ajouter  Ys  final  pour  désigner  le  pluriel,  à  moins  que  le 
mot  suivant  ne  commence  par  une  voyelle.  Mais  cette  règle 
n_'est  pas  encore  générale  ;  on  dit  bien  leii^  ais,  prononcez  lei- 
zai,  mais  on  ne  dit  pas  leis  ais  avien  en  prononçant  lei-zai- 
zavien,  m.-A[=i  lei-zai-ainen  ;  en   sorte  qu'il   faut  nécessairement 


24  DIALECTES    MODERNES 

entendre  parier  le  provençal,  ou  Téorire  coname  on  le  parle. 
C'est  un  défaut  de  la  langue,  défaut  qui  ne  doit  pas  sur- 
prendre ceux  qui  savent  que  les  idiomes  vulgaires  n'ont  ]>as 
de  règles  bien  certaines,  et  que  l'usage  est  la  première  de  ces 
règles. 

Les  Provençaux  ne  connaissent  pas  de  mot  (jui  forme  seul 
un  comparatif.  C'est  une  faute  de  dire  en  provençal  milhour 
que  l'autre,  piegi  que  vous;  meilleur  que  vous,  pire  que  vous  ;  il 
faut  dire  plus  milhour,  plus  piegi,  ce  qui  en  français  serait  un 
pléonasme  détestable. 


Chapitre  II 

DES     PRONOMS 

Les  pronoms  personnels  se  sous-entendent  toujours  devant 
les  verbes,  comme  on  l'a  vu  dans  les  conjugaisons  que  j'ai 
placées  en  leur  lieu.  Ainsi  on  dit  vendrai,  Je  viendrai  ;  es 
veray,  il  est  vrai,  etc. 

Lorsqu'on  parle  de  plusieurs  personnes,  on  emploie  toujours 
le  pronom  soun,  sa,  comme  s'il  ne  s'agissait  que  d'une  seule  : 
Us  viennent  de  leur  maison  de  campagne,  Venoun  de  sa  bastido. 

De  même  l'on  dit  pour  les  deux  nombres:  Li  ni  dounat,  Je.  lui 
ai  ou  Je  leur  ai  donné  ;  Li  digueri,  Je  lui  on  Je  leur  dis,  etc. 

Lorsque  l'on  parle  indéterminément  de  quelque  chose,  on 
emploie  la  particule  va  au  lieu  de  l'article  Ion,  le.  Ex. -.Le  croyez- 
vous?  Va  cresez?  ou  Va  creses-ti?  Je  le  ferai,  Va  farai.  Mais, 
s'il  était  question  d'une  personne  on  dirait  :  Lou  veiray.  Je  le 
verrai. 

L'adverbe  relatif  y,  qui  signifie  en  cet  endroit-là,  s'exprime 
en  provençal  par  li.  Veux- tu  y  aller?  Li  voues  anar?  J^fyjirai, 
L'anarai;  Passe-s-y,  Passas-li;  Prends-y  garde.  I*ren-li  gardo. 

Le  relatif  ^;«'  s'exprime  par  ^?/i<  toutes  les  fois  qu'il  y  a  inter- 
rogation. Quu  piquo?  Qui  frappe?  Mais  dans  le  cours  d'une 
phrase  il  se  rend  parle  mot  que  :  Aqueov  que  doncrme,  Celui  qui 
dort;  Lou  cavuou  ou  Lou  c/nuau  que  vendra,  Le  c/aval qui  viendra. 


LETTRES  A    GREGOIRE  25 

Chapitre  III 

DES    VERBES 

Le  nominatif  procùde  toujours  le  verbe  ;  cependant  j'ai  sou- 
vent entendu  les  gens  de  la  campagne,  et  surtout  les  enfants,  . 
dire:  A  dick  moun paire,  pour  Moun  paire  a  dich. 

Lq  \Qvhe  estre,  être,  s'emploie  ordinairement  comme  gou- 
vernant l'accusatif:  Si  je  fusse  (sic)  en  leur  place,  Se  fouguessi 
elleis.  On  dit  aussi  Se  fouguessi  d'elleis,  en  sous-entendant  en 
plaço. 

Les  inlinitifs  forment  tout  autant  de  noms  substantifs  ;  on 
dit  lou proumenar  pour  la  proumenado,  lou  dourmir  ^onv  lou 
souen,  etc.:  il  semble  même  que  cette  façon  d'exprimer  les 
choses  est  plus  énergique. 

Il  est  d'usage  encore  d'employer  le  pronom  si,  se,  à  la  pre- 
mière personne  du  pluriel:  Nous  nous  reverrons,  Si  vereins  ; 
Allons-nous-en,  S'en  anan  ou  Enanen  s'en. 

On  dit  aussi  Sau  pas  ce  que  si  fa,  Il  ne  sait  pas  ce  quil  fait. 
Quelle  àeirre  est-il?  Quant  soun  d'houro?  ce  qui  signifie  littéra- 
lement Combien  e%f-il  dlieures? 

Je  ne  dirai  rien  des  adverbes  et  des  prépositions,  mais  il 
y  aurait  encore  beaucoup  de  choses  à  dire  sur  les  tournures 
des  phrases.  J'ai  cru  qu'il  ne  serait  pas  hors  de  propos  de 
donner  une  courte  notice  de  la  poésie  provençale  et  de  citer 
ici  quelques  morceaux  qui  n'ont  pas  été  livrés  à  l'impression. 
Leur  lecture,  jointe  à  la  traduction  que  j'ai  mise  à  côté,  fera 
connaître  le  génie  de  la  langue  de  mon  pays,  bien  mieux  que 
les  plus  longues  dissertations  ne  pourraient  le  faire. 

DE    LA    POÉSIE    PROVENÇALE 

Les  vers  provençaux  font  connaître  les  beautés  d'une  lan- 
gue qui  fut  longtemps  la  langue  de  plusieurs  provinces,  et 
qui  servit  à  créer  la  langue  française,  l'italienne,  etc. 

Les  vers  provençaux  ne  consistent  que  dans  une  mesure 
égale  de  syllabes  et  dans  la  rime.  Il  y  a  des  rimes  masculines 
et  des  féminines;  on  suit  assez  communément,  dans  notre  poé- 
sie, les  lois  et  les  règles  do  la  poésie  française;  mais  les  rimes 


26  PIALF.CTRS     MODERNES 

suiii  moins  pénible-;  parce  ([ue,  en  écrivant  comme  on  parle, 
un  substantif  singulier  peut  rimer  avec  un  pluriel  de  la  même 
terminaison.  Marchand  rimera  avec  galants  et  avec  le  verbe 
anar an,  ils  iront  ;  àe  sorte  qu'on  peut  établir  comme  règle 
générale  nue  la  rime,  dans  nos  vers,  n'est  nue  pour  l'oreille. 
*  Depuis  longtemps  on  n'a  plus  fait  des  tensons  ni  des  pièces 
devers-dans  le  style  des  troubadours,  Nos  poésies  modernes 
sont  presque  toutes  légères  et  amusantes.  Le  modèle  de  ce 
genre  est  F.  T.  Gros,  dont  les  poésies,  imprimées  à  Marseille 
en  1734  et  réimprimées  en  1763  avec  quelques  additions,  at- 
tireront toujours  l'estime  des  vrais  connaisseurs.  Germain  a 
fait  aussi  une  ode  intitulée  la  Bourridn  deis  Dious,  qui  a  beau- 
coup de  sel,  mais  ses  autres  poésies  n'ont  presque  pas  de  mé- 
rite. 

Les  vers  de  douze  syllabes  sont  les  moins  usités  en  pro- 
vençal; on  emploie  le  plus  souvent  ceux  de  huit  syllabes. 

Je  vais  donner  quelques  pièces  de  poésie  pour  les  faire  con- 
naître à  mes  lecteurs  ;  j'y  joindrai  à  côté  la  traduction  fran- 
çaise littérale  et  la  traduction  avec  les  termes  et  les  tour- 
nures qu'exige  la  pureté  du  français.  .Je  m'étais  proposé, 
dans  le  temps  que  je  fis  imprimer  le  Vncabukiire  provençal,  de 
])ublier  un  recueil  des  poésies  et  des  morceaux  de  prose  les 
plus  recherchés  dans  l'idiome  provençal,  mais  les  dépenses  que 
je  fis  alors  m'ont  empêché  de  satisfaire  mon  désir. 

/.4  suivre)  A.  Gazier 


LOU  PECH-TRINAL 

A    Mi>IN    CAR     NEHOLT     ALUKlfl 

Quand  loLi  tems  es  siaud,  un  mati  d'abrial, 
l)ins  iou  rousal  tVesc,  al  claus  de  la  LcUido, 
Sus  garrabiés  blancs  qu'i  fan  uno  brando, 
Fier,  Iou  roussignol  dis  soun  cuit  nouvial  ; 

Dal  rec  secarous,  raijant  coumo  un  liai, 
Qu'apelan,  aissi,  la  Ribieirx)-G-rando, 
Das  oumats  ramuts  que  l'edro  engarlando, 
bas  bousquets  d'èusis  e  das  camps  de  sial, 

Das  malhols  galhards  e  de  las  auserdos, 
Dal  cel  clar  e  blu,  de  las  tounos  verdos, 
Das  peclis,  de  las  vais,  de  las  founts,  das  rieus, 

Yen  de  lais  d'amour,  de  crids  de  batalho. 
De  gaios  cansous.  Tout  ris,  tout  cascalho 
Dejoust  Iou  soulel,  clar  regard  d'un  Dieus. 

Cl  ai'  Cti-eizos.  ' 
Azilhanet,  30<d'abrial  1871 

LE  PUY-TRINAL 
A  Mn^'  CHER  NnvEu  Albt.rt 

Quand  le  temps  est  calme,  un  matin  d'avril,  —  dans  la  rosée 
fraîche,  au  clos  de  la  I>ande, —  sur  les  églantiers  blancs  qui  lui  iont 
una  bordure,  -  heureux,  le  rossignol  dit  son  champ  nuptial; 

Du  ruisseau  desséché,  coulant  (meim)  comme  un  (il, —  que  nous 
appelons,  ici,  la  Rivière-Gr mde, —  des  ormeaux  feuillus  que  le 
lierre  eniruirlande,—  des  bosquets  d'yeuses  et  des  cliamps  de  sei- 
gle, 

Des  jeunes  vignes  luxuriantes  et  des  luzernières, —  du  ciel  clair 
bleu,  et  d3s  voûtes  de  verdure,  —  dos  puys,  des  vallées,  des  fontai- 
nes, des  ruisseaux, 

Sortent  dos  lais  d'aaiour,  des  cris  do  bataille, —  de  gaies  chan- 
sons,  Tjit  rit,  toit  gazouille  —sous  le  soleil,  clair  regard  d'un 
Dieu 

(llair  Cii.KYZES. 
ÀZillanet,  le  30  avril  1871. 


BEUxMOUNO 


0  chato!  fres  rasin  ouate  voudi-iéu  beca! 
Uno  fai  mi  délice  e  me  poung  d'amaresso  ; 
Sis  iiie  verd  coume  l'aigo,  un  hrisounet  maca, 
Treluson  d'ignourènço  e  d'estranjo  arderesso. 

Soun  viésti  lôugeiret  noun  semblo  la  touca  ; 

Lou  fichu  clarinèu  à  poulit  plet  caresso 

Soun  sen  arredouni  que  se  vèi  boulega . 

Un  vèspre,  n'aviéu  fam,  e  dins  rai  bras  Fai  presso, 

L'ai  erapourtado  au  founs  di  lèio...  Li  viôulouii 
Jougavon.  danserian:  elo,  sus  mouu  espalo, 
Revessant  tendramen  sa  tèsto  fine  e  palo  : 

léu  à  long  flot  bevènt  l'oundo  de  si  peu  blound, 
Que  lou  vaji  de  la  danso  à  mi  bouco  enmandavo; 
E  de  si  grands  iue  verd,  rnuto,  me  regardavo. 

Teodor  a  t;  ban  EL 
(Provençal    Avigno:i  et  les  bords  du  Rhône). 

BELMONE 


0  jeune  fille  !  frais  raisin  où  je  voudrais  mordre! —  Une  fait  mes 
défices  et  me  poind  d'amertume  :  —  ses  yeux  verts  comme  l'eau, 
un  peu  battus,—  scintillent  ■riLt:ioranc>?  et  d'étrange  ardeur. 

Son  vêtement  léger  ne  semble  pas  la  toucher;  ~  le  iïchu  trans- 
parent à  plis  cbarmants  caresse  —  le  sein  arrondi  que  l'on  entre- 
voit remuer. —  Un  soir  j'avais  f;iim  d'elle,  et  dans  mes  bi-as  je  l'ai 
prise, 

Je  l'ai  emportée  au  fond  des  allées.  .  .  Les  violons  —  jouaient, 
nous  dansâmes:  elle,  sur  mon  é[)aule,—  renversaiiî  tendrement  sa 
tète  fine  et  pâle  : 

Moi  à  longs  flots  buvant  l'onde  de  ses  blonds  cheveux,  —  que 
l'élan  de  la  danse  envoyait  à  mes  lèvres  ;  —  et  de  ses  grands  yeux 
veris,  muette,  elle  me  regardait. 

TutODORK  AUBANEL 


LOU  GARDA-MAS 


(Fin) 

End  aquel  rôdou,  mai  quicon  lou  destrassouna; 
N'a  pas  ime  de  qu'es.  Sariè-ti  lou  labech 
Que  gandis  tout  escàs  de  vers  la  Magalouna, 
E  que,  tant  lèu  çai  estre,  emb  soun  alen  doucet 
Gouma  lou  d'un  enfant  ou  de  la  femna  aimada, 
.\uboura  lou  fiolhan  de  Tespessa  ramada, 
Zouzouna  à  soun  ausida,  afresqueiris  soun  front, 
E,  de  soun  peu  de  nèu  regoulant  à  flecadas, 
A  l'entour  de  soun  col  brandis  las  aneladas? 
Sariè-ti  lou  labech  qu'afach  acô,  de  bon  ? 
Ou  be  lou  roussignôu?  Dau  tems  que  tout  paupava, 
Tristàs,  bec  alandat,  dins  la  rama  chaumava  ; 
Juste  s'aviè  lou  vanc  d'escampà  dins  lou  siau 
\jn  quiconque  retrai  au  graulà  dau  grapaud. 
Mais  tant  lèu  qu'a  sentit  la  fresca  labechada, 
S'escarrabiliia,  vai,  aduse  la  becada 

LE    GARDE-MAS 

(Fin) 

Ici,  de  nouveau  quelque  criose  l'éveille  en  sursaut. — Il  ne  sait  pas 
ce  que  c'est.  Serait-ce  la  brise  —  qui  se  lève  mollement  du  côté  [de 
l'ile]  de  la  Maguelone,  —  et  qui,  en  arrivant  avec  son  souffle  aussi 
doux  —  que  celui  d'un  enfant  ou  de  la  femme  aimée,  —  soulève  le 
feuillage  de  l'épaisse  tonnelle, —  murmure  à  son  oreille,  rafraîchit 
son  front,  —  et,  de  ses  cheveux  de  neige  ruisselant  en  spirale,  — 
tout  autour  de  son  cou  secoue  les  longues  boucles  ? —  Serait-ce  la 
brise  qui  a  fait  cela,  bien  vrai? —  ou  bien  le  rossignol?  Au  temps 
où  tout  était  calme,  —  triste,  le  bec  ouvert,  dans  la  feuillée  il  se 
tenait  tapi  ;  —  il  avait  seulement  la  force  de  jeter  dans  le  silence — 
quelque  chose  de  semblable  au  coassement  du  crapaud. —  Mais, 
djjs  qu'il  a  senti  la  fraîche  brise,  —  il  se  déu,ourdit,  va  porter  la 
becquée  —  à  la  couveuse  [assidue]  au  nid,  qui  se  trémousse, 
l'admire  et  le  suit   avec  ses  yeux  de  jais.  —  Alors,  sautillant  de 

3 


30  DIALECTES    MODERNES 

A  racouïda  as  iôus,  qu'en  fasent  graumilhet, 
Lou  bada  e  lou  seguis  emb  sous  iols  de  jaiet. 
Adounc  sautourlejant  per  grillious  et  branquilhas, 
Reprend  sous  cants  d'amour.  Sariè  sas  bêlas  trilhas 
Que  Tan  destracassat  ?  Ven-ti  de  l'acanau  ? 
D'un  nis  de  giroundouns,  lou  paure  caga-trauc 
A  vist  un  à  per  un  s'envoulà  sous  frairetas. 
N'a  be  la  petelega,  ai  !  mais  de  sas  aletas 
A  paura  fe;  tabé,  sus  lou  berle  dau  nis 
Es  aqui  que  prend  vanc,  tremola,  s'escarnis  : 
L'espaça  ie  fai  pôu;  mais  lou  paire  e  la  maire, 
i^er  força  ou  per  bon  grat,  l'an  enbandit  dins  l'aire, 
E  lou  paure  alateja  e  s'arqueta  e,  pieu-pieu, 
Un  vol  à  soun  entour  roda  per  lou  mantene. 
Maugrà  'c6,  de  pieula  noun  se  pot  mai  destene 
S  lou  vol  ie  respond....  Mais,  nou;  despioi  un  brieu, 
Dau  caire  d'en  amount  s'auboura  una  chamada  : 
Es  d'aqui,  de  segu,  que  lou  destourbe  ven. 
Galina,  gai,  guindard,  cascalhou,  pieulou  'nsen. 
La  clouca  çai  reven,  la  plouma  e^foulissada. 
Couchant  sa  cloucadeta  en  foga  à  l'endavans, 
Couma  lou  pastourel  quand  fugis  la  groupada. 

brancholtes  en  brindilles,  —  il  reprend  ses  chants  d'amour.  Sc- 
raient-ce  ses  belles  trilles  —  qui  l'ont  distrait?  Est-ce  le  bruit  qui 
vient  des  cheneaux?  —  D'un  nid  déjeunes  hirondelles,  le  pauvre 
dernier  éclos  —  a  vu  ses  petits  frères  s'envoler  à  lahle.  —  il  a 
bien  le  désir  d'en  faire  autant  ;  oui,  mais  dans  ses  faibles  ailes  — 
il  a  peu  de  contiance:  aussi,  sur  le  rebord  du  iiid,  — il  reste,  es- 
sayant de  prendre  son  essor  :  il  tremble,  se  décourage;  —  l'espace 
ré|iouvante.  Mais  le  père  et  la  mère, —  de  force  ou  de  bon  gré, 
l'ont  lancé  dans  l'air, — et  le  pauvre  petit  agite  ses  ailes,  s'arc-boute 
et,  piaulant, — une  volée  [d'hirondelles]  circule  autour  de  lui  pour 
l'encourager.  —  Malgré  cela,  il  ne  peut  s'empêcher  de  crier,  — et 
la  volée  lui  répond...  Mais, non,  depuis  quelque  temps  —  du  côté  du 
nord  s'élève  une  grande  clameur  : — c'est  de  là,  liien  sûr,  que  vient 
l'interruption. —  Poule,  coq,  dinde,  jabotent,  piaillent  à  la  fois.  — 
La  couveuse  se  retourne,  la  plume  hérissée,  en  chassant  sa  couvée 
avec  vigueur  devant  elle,  —  comme  le  berger  quand  il  luit  l'averse; 
—  elle  fuit,  parce  que  le  coq  et  le  dindon  sont  aux  prises.  —  Toute 


I.OU    GARDA.-MAS  31 

Fug-is  per  que  lou  gai  emô  iou  guindard  n'an  ; 

E  la  cournada  en  plen,  pareis,  s'en  embarrassa. 

Belèu  una  lingousta,  un  venue,  una  torassa, 

Soun  Tencausa  de  tout  aquel  rabaladis, 

Couma  que  siegue,  un  cop  que  se  soun  ben  sarcits, 

Lou  guindard  tout  sannous  à  Tescart  se  pavouna, 

Dau  tems  que  lou  galastre  es  quilhat,  glorious, 

Sus  la  parct,brandanteme  un  vanc  nervious 

Sas  alassas,  e  canta,  e  boumba,  e  dessambrouna 

Lous  ressouns  de  Tentour.  Mais,  encara  enclausit 

De  soun  pantai,  lou  viel  a  pas  pus  lèu  ausit 

Lou  cant  de  soun  vesiat  que,  torna  mai  sounjaire 

E  brandilhant  la  testa,  à  mots  entrecoupats  : 

—  (c  0  França!  barboutis,  moun  païs,  paura  maire  !  n 

Una  larma  perleja  à  sous  lois  miech-barrats, 

Atravès  sa  parpela  un  bricoun  enaigada. 

A  miech  entravalat,  vei  be  toujour  soun  gai, 

Lou  vei  b'alatejà  ;  i'ausis  be  sa  cantada. 

Mais  couma  on  vei  una  oumbra  au  vespre  en  ailaval; 

Esoun  cantassourdant  e  soun  flajelà  d'ala 

Retrasoun  dins  soun  ime  à  la  cansoun  troumfala 

Mandada  à  plen  galet  dins  lou  tron  das  canouns, 

la  basse-cour  s'en  mèie,  il  paraît.  —  Peut-être  une  sauterelle,  un 
ver,  une  grosse  chenille,  —  sont-ils  la  cause  de  tout  ce  tumulte.  — 
N'importe,  après  s'être  bien  déchirés,  —  le  dindon  tout  san2;lant 
fait  la  roue  à  l'écart, —  pendant  que  le  coq  est  perché,  orgueilleux, — 
sur  la  muraille,  secouant  d'un  mouvement  fébrile  —  ses  grandes 
ailes,  et  qu'il  chante,  et  qu'il  frappe,  et  qu'il  réveille  —  les  échos 
d'alentour.  Mais,  encore  sous  le  charme —  de  son  rêve,  le  vieillard 
n'a  pas  plutôt  entendu  —  le  chant  de  son  préféré,  qu'il  redevient 
rêveur, —  et,  secouant  la  tête,  s'interrompant  à  chaque  mot  :  « —  O 
France!  balbutie-t-il,  mon  pays,  pauvre  mère!» — Une  larme  scin- 
tille à  ses  yeux  demi-clos,  —  à  travers  sa  paupière  tant  soit  peu 
humide;  —  à  demi  endormi, il  voit  toujours  son  coq,  —  il  le  voit 
bien  secouer  ses  ailes,  il  entend  bien  son  chant, — mais  comme  on 
voit  une  ombre  le  soir  dans  le  lointain; —  et  son  chant  éclatant  et 
,  ses  battements  d'aile — ressemblent,  dans  sa  pensée,  à  la  chanson 
triomphale  —  jetée  à  plein  gosier  dans  le  tonnerre  des  canons; — 
rien  que  d'y  penser  seulement,  on  se  sent  frémir. — Et  l'ombre  croît 


32  DIALECTES    MODKRNES 

Que  de  ie  pensa  soûl  dona  lous  fernissouns. 
E  l'ourabra  crei  e  crei,  escala  e  rcbecina 
Sa  testa  lins  au  ciel,  dedins  Tauba  clarina  ; 
Negreja  couma  un  fum  ques'auboura  en  tems  siau 
D'un  cros  de  crema-sôuda,  ou  couma  una  tourrassa 
Que  monta  dau  pounentun  jour  de  caumagnassa. 
Majencant  en  silence  e  lou  tron  e  l'ilhau. 
Mais,  en  s'esperloungant  dins  Fautura  enlusida, 
Pauc  à  pauc  dau  gai  perd  estampadura  e  biais; 
Pioi  de  tout  en  per  tout,   lou  tems  soûl  de  dire:  Ai! 
De  Tome  a  près  la  forma  e  la  cara  espourapida, 
E  Tome  espetaclous  qu'es  alin  ie  retrai. 
Endacô  pioi  se  môu  e,  de  sas  grands  cambadas, 
Afranquisla  planura,  e  mounts,  e  valounada. 
A  cade  pas  que  fai,  bourjant  à  plenaman 
Dins  un  semenadou  penjoulat  de  biscaire, 
Escampa  à  plens  pougnats  la  semença  dins  l'aire; 
Sous  brausents  cops  de  bras,  dau  pounent  au  levant, 
Dralha  un  miech  ceucle  inmense  ;  on  diriè  qu'à  la  terra 
Ensegna  soun  camin.  Alin,  la  bestia  fera 
Devès  l'escuresina  as  quatre  sauts  fugiS, 
Souta  soun  pas  pesuc  s'aterris  la  roucalha, 

et  croît,  et  s'élève  et  redresse  —  sa  tète  jusqu'au  ciel  ot  dans 
l'aube  brillante; — brunit  comme  la  fumée  qui  s'élève  par  un  temps 
calme — d'une  fosse  où  l'on  brûle  la  soude,  comme  un  grand  nua^e 

—  qui  s'élève  du  ponentun  soir  de  cbaleur  étouffante, —  préparant 
en  silence  le  tonnerre  et  l'éclair. —  Mais,  en  s'élevant  dans  l'es- 
pace lumineux,  . —  peu  à  pou  elle  perd  du  coq  la  structure  et  la 
forme,  —  puis,  tout  d'un  coup,  le  temps  de  faire  un  soupir,  —  de 
l'homme  elle  a  pris  la  forme  et  la  face  épanouie,  —  et  l'homme  gi- 
gantesque qui  est  là  lui  ressemble;  —  euimite  il  se  met  en  mou- 
vement, et  de  ses  grandes  enjambées  —  il  franchit  la  plaine,  les 
monts  et  les  vallons.  —  A  cliaque  pas  (ju'il  fait,  puisant  à  pleine 
main  —  dans  le  semoir  suspendu  à  son  côté,  —  il  répand  à  plei- 
nes poignées  la  semence  dans  l'air; —  son  rapide  mouvement  de 
bras,  du  ponent  au  levant,  —  décrit  un  immense  demi-cercle;  on 
dirait  qu'à  la  terre — !!  montre  son  chemin.  Au  loin,  la  bête  sauvage 

—  vers  l'obscurité  s'enfuit  en  toute  hâte; —  sous  son  pied  pesant  la 
roche  s'elVrite; —  le  ruisseau  débordé  rejirend  de  nouveau  sa  voie; — 


LOU    GARDA-MAS  33 

Lou  rajùu  desmairat  retorna  dins  sadralha. 
La  lona  s'apradis,  l'armas  s'agarachis  ; 
La  mar,  Taurag-e  même,  ansin  que  lou  terraire, 
Tout  ce  qu'es  d'aiçaval,  pas  pus  lèu  que  parei 
Emb  soun  pas  soubeiran,  emb  soun  anà  troumflaire, 
Clena,  fai  siau,  coungria  ou  fuch  davans  soun  rei. 
E  zou,  toujour,  avans  e  bresseja  e  camina, 
E  la  semença  à  floc  s'escampilha  e  brounzina, 
Beluguejanta  ansin  que  pampalhetas  d'or. 
Pioi,  gran  per  gran,  au  sou  reboumbis,  sautourleja, 
Couma  Fenfantounet  qu'en  lou  mudant  cambeja, 
Mais,  pas  pus  lèu  au  sen  de  sa  maire,  s'endor. 
S'endor  be,  mais  ben  lèu  sarà  derevelhada. 
Laissas  que  lou  bouirac  l'âge  ben  acatada 
Jouta  soun  coubertoun  blet,  imouisse  e  tebés  ; 
Laissas  qu'à  la  sournuda  âge  à  bêles  pauquets 
Poumpat  rimou  daû  sôu,  pounit  sa  racineta  : 
Lou  veirés  pounchejà  fora  sa  bressouleta 
Per  s'abeurà  d'aigage,  e  d'aire,  e  de  sourel. 
Tabé,  dins  l'iôu  qu'an  mes  sout  la  clouca  acouïda, 
Lou  pouletou  doyrmis  ;  amai  e  despèr  el, 
Quand  lou  tems  es  vengut  de  fa  soun  espelida, 

le  marais  devient  pré,  la  lande  est  défrichée  ;  —  la  mer,  l'orage 
même,  ainsi  que  le  territoire,  —  tout  ce  qui  est  d'ici-bas,  dès  qu'il 
apparaît, — avec  son  pas  souverain,  avec  sa  pose  triomphale, —  s'in- 
cline, se  tait,  se  multiplie  ou  fuit  devant  son  roi. —  Et  toujours  en 
a\ant  il  agite  ses  bras  et  chemine  ;  —  et  la  semence  à  profusion 
se  répand  et  bruit,  —  étincelante  ainsi  que  des  paillettes  d'or;  — 
ensuite,  grain  à  grain,  rebondit  à  terre,  sautille —  comme  le  jeune 
enfant  qui  agite  ses  jambes  lorsqu'on  l'emmaillotte.  —  mais  qui 
s'endort  aussitôt  qu'il  est  au  sein  de  sa  mère. —  Elle  s'endort  bien, 
mais  bientôt  elle  se  réveillera. —  Attendez  que  le  bouvier  l'ait  bien 
recouverte  —  sous  sa  couverture  molle,  moite  et  tiède; —  attendez 
qu'en  cachette  elle  ait,  petit  à  petit,  —  absorbé  l'humidité  du  sol, 
formé  sa  petite  racine  :  —  vous  la  verrez  poindre  au-dessus  de  son 
berceau,  —  pour  s'abreuver  de  rosée,  et  d'air,  et  de  soleil.  —  De 
même,  dans  l'œuf  que  l'on  met  sous  la  poule  couveuse,  —  le  petit 
poussin  dort;  cependant  et  de  lui-même,  —  quand  le  temps  est 
venu  de  faire  son  éclosion,  —  avec  son  petit  bec  il  perce  la  coque. 


34  DIALECTES    MODERNES 

Embé  soun  bequetou  trauqailha  lou  cruvel, 
E  per  d'aut  la  ploumada  e  las  alas  caudetas 
De  la  maire  ajoucada,  urousa  que  noun  sai, 
Branquejoun  bequetous  e  poulidas  testetas, 
Enmascadetas  d'estre  e  vieure.  0  dous  pantai  ! 
Que  lous  lauraires  vengou'  e  vendran...  Ah  !  pas  mai. 
De  fet,  de  tras  en  tras,  lou  valent  semenaire 
Devistalou  masiè  sous  très  garruts  maiôus, 
Reguejant  Tabladat  cadun  emb  soun  araire, 
Doublisses  roussegats  per  de  coubles  de  miôus, 
Repoufant  per  la  narra  aura,  fum  e  flamada  ; 
Detràs  lous  doublissiès,  de  touta  l'encountrada, 
Çai  ven  d'aucelounets  à  vol,  voulatejant; 
Pioi  dins  lous  tais  douberts  bequejoun,  fan  mangilha 
De  cadela,  babot,  courcoussoun  ou  canilha, 
Tout  ce  que  debouris  e  pampa,  e  grel,  e  gran. 

Tems  linde  e  grèu  !  Alena  un  pauc  de  la  marina. 
Bèu  tems  per  la  grelhada  !  à  travès  lous  trauquils, 
Lou  nourrigat  lou  sent  dau  founs  de  sa  jassina  ; 
Adounc  se  derevelha,  embugat  de  ttanspils, 
Beâ  en  lach,  grelha  e  nai  :  causa  merevilhousà. 

—  et  au-dessus  de  la  plume  et  des  aiies  chaudes  —  de  la  mère 
couchée,  heureuse  comme  on  ne  peut  plus,  —  s'agitent  petits  becs 
et  jolies  petites  tètes,  — toutes  surprises  d'être  et  de  vivre.  Oh! 
doux  rêve! —  que  les  laboureurs  arrivent. et  ils  viendront  sans  nul 
doute. . . —  En  effet,  à  la  suite  du  vaillant  semeur  —  le  garde-mas 
aperçoit  ses  trois  robustes  fils, —  sillonnant  le  champ  semé  dru, 
chacun  avec  sa  charrue;  —  charrue  au  double  collier,  traînée  par 
des  couples  de  mulets  —  répandant  par  les  naseaux  vent,  fumée  et 
flamme  ;  —  derrière  les  couples,  de  tous  les  alentours, —  des  petits 
oiseaux  à  volée  tourbillonnent, —  qui,  dans  les  tranchées  ouvene? 
becquètent.  se  rassasient  de  charançon,  de  chrysalide,  de  bruche, 
de  chenille, —  tout  ce  qui  dévore  et  feuille,  et  bourgeon,  et  grain. 

Temps  limpide  et  lourd  !  Il  souffle  un  peu  de  la  mer.  —  Beau 
temps  pour  la  germination  !  A  travers  les  pores  [  de  la  terre  ],  — 
le  nourrisson  le  sent  au  fond  de  sa  couche:  —  alors  il  s'éveille, 
imbibé  d'infiltrations; — goigé  de  lait,  il  germe  et  naît:  chose  mer- 
veilleuse. —  Tandis  que  vers  le  sud  l'ombre  prodigieuse  —  marche 


LOU    GARDA-MAS  35 

De  ce  qu'en  ailaval  Toumbrassa  espetaclousa, 
Camina  e  se  marida  emb  la  fousca  lionchou, 
De  ce  que  lous  bouiracs  seguissoun  l'enregada, 
E  que  dau  semenà  la  sôuca  es  adracada, 
Lou  grel  sus  lous  acrins  çai  ven  faire  espinchou. 
Verdeja  aqui  ;  de  çai,  en  gagnant  l'autre  caire, 
Girberja,  s'amatis,  canouna,  espiga  amount. 
Una  blanqueta  flou  coubris  Fespigau  blound 
Que  blaqueja  à  Talen  dau  raagistrau  granaire  ; 
E  pioi  on  ailamount  rousseleja,  es  madu, 
E  lou  glop,  que  lou  pes  de  Tespiga  a  rendut 
Clena,  brausit  e,  lèu,  jout  lou  voulam  croussina, 
Jout  lou  voulam  brandit  per  de  valents  gavots 
Que  relents  de  susou,  la  cansouneta  as  pots, 
Envoulamoun  de  vanc,  e  la  cola  camina, 
Sas  ligairas  darriès;  aiçai  dor  lou  masiè. 
De  per  davans  lou  blat  pauc  à  pauc  s'amadura; 
En  molas  per  darriès  l'acampa  lou  soubriè, 
E  pioi  de  per  délai,  seguissent  d'amesura. 
D'enfants  entenciounats  trevoun  dins  lou  garban, 
Tout  en  espepidanfl'espiga  estrabacada. 

et  se  confond  avec  le  lointain  brumeux,  —  tandis  que  les  bouviers 
suivent  la  trace  du  sillon, — et  que  du  champ  semé  le  sillon  a  formé 
croOte,  —  sur  les  crêtes,  le  germe  vient  faire  son  apparition. —  Il 
verdoie  ici;  ailleurs,  en  allant  du  côté  opposé,  —  il  forme  gazon  ; 
il  est  touffu,  il  élève  ses  tuyaux,  il  épie  au  sommet.  —  Une 
blanche  petite  fleur  couvre  l'épi  blond,  —  qui  s'agite  au  souffle 
du  mistral,  favorable  aux  grains; — et  puis,  tout  à  fait  à  l'extrémité, 
il  est  roux,  il  est  mûr; — et  le  chalumeau,  surchargé  par  le  poids  de 
l'épi, — fléchit,  se  dessèche,  et  bientôt  craque  sous  la  faucille, — sous 
la  faucille  secouée  par  de  vaillants  montagnards, — qui,  trempés  de 
sueur,  la  chansonnette  aux  lèvres, —  scient  le  blé  avec  entrain, 
et  la  troupe  s'avance,  —  les  lieuses  après,  de  ce  côté-ci,  vers  le 
garde-mas.  — En  avant,  le  blé  peu  à  peu  mûrit.— En  arrière,  il  est 
ramassé  et  mis  en  tas  par  un  soubrier^ .—  Puis  au  dek"', suivant  pas 
à  pas,  —  des  enfants  ardents  au  travail  rôdent  dans  la  masse  des 
gerbes,  —  tout  en  glanant  l'épi  échappé  des  mains  des  moisson- 

*  Le  suubrier  est,  dans  uni'   ferme,  le  valet  'qui  remplace  indifférem- 
ment, et  au  besoin,  les  autres  valets. 


36  DIALKCTKS    MODBR^BS 

E  la  cola  camina  emb  soun  baile  davans, 
E  lagarbela  tomba,  e  tant  lèu  es  ligada. 
E  sega  e  liga  e,  zou,  canta  que  cantaràs, 
Talament  que  dau  viel  soun  ben  lèu  aqui  ras. 
Adounc  das  prefachès  las  esquinas  s'agrejoun, 
Lous  voulams  aubourats  dins  lous  aires  flamej  ou  n  : 

—  «  Ben-estre  e  longa  vida  à  nostre  majourau  !  »  — 
Crida  en  cor  la  coulada;  e  reprend  mai  soun  frau. 
Las  ligairas  après  fan  sas  revenenciatas, 

Lou  soubriè  qu'enmoulava  auboura  soun  capel, 

E  das  maissounairets  lou  graciouset  troupel, 

Un  rire  amistadous  esclairant  las  facietas, 

Sa  manada  cadun  se  sarra.  Tantequant 

Lou  paure   trementis  :  a  sentit  de  manetas 

Que  frustoun  soun  ginoùl,  pioi  de  vosses  doucetas, 

Que  ie  traucoun  lou  cor,  sonoun  :  —  «  Hôu  !  noste  grand  ! 

»  Bon  vespre,  dourmissès  ?  Es  nautres,  que  çai  sian  ! 

))Oscadous  cops!  pourtan  jougalhas  ebelesas 

»  Au  mens  una  carrada,  amai  soun  pas  fouresas.» 

S'aubourant  tout  d'un  vanc,  à  travès  Tescabour, 

Te  vei  soun  oustalada,  e,  cadun  à  sou»  tour, 

Lou  galeja  en  risent  d'una  tala  suspresa. 

neurs. — Et  la  troupe  s'avance  avec  son  chef  en  tète, —  et  la  gerbée 
tombe  et  elle  est  à  l'instant  serrée.  —  et  on  moissonne  et  on  lie, 
et  en  avant  la  chanson  !  —  Si  bien  qu'à  la  fin  ils  sont  là  tout  près 
du  vieillard. — Alors  des  ouvriers  à  la  tâche  les  reins  se  redressent, 

—  les  faucilles  soulevées  dans  les  airs  scintillent:  —  «  Bien-être 
et  longue  vie  à  notre  maître  !  »  —  crie  en  chœur  toute  la  troupe; 
et  elle  reprend  l'ouvrage  à  nouveau.  —  Les  lieuses  ensuite  le  sa- 
luent humblement. — Le soubrier qui  entassait  soulève  son  chapeau. 

—  et  des  petits  grapilleurs  la  gracieuse  troupe,  —  un  rire  d'amitié 
éclairant  leurs  jolies  figures,  —  chacun  une  poignée  d'épis  à  la 
main,  s'api)roche.  Tout  à  coup —  le  dormeur  frissonne  :  il  a  senti 
effleurer  ses  genoux  —  par  de  petites  mains;  puis  de  petites  voix 
douces — qui  lui  percent  le  cœur  l'appellent»  liolà  !  notre  grand-père, 

—  bonsoir,  vous  dormez  ?  C'est  nous  qui  sommes  ici  !  —  Oh  !  quel 
bonheur!  nous  portons  des  jouets,  de  jolies  choses, — une  charretée 
au  moins,  et  qui  ne  sont  pas  de  pacotille,  »  —  Se  soulevant  tout  à 
coup  à  travers  la  brume.  — il  voit  toute  sa  famille,  et  chacun  tour 


LOU    GARDA-MAS  :^7 

Mais  el  de  sous  félons,  ce  qu'au  mounde  mai  presa. 
Que  per  eles  fai,  dis,  de  fouliès,  de  bauchuns, 
Qu'en  desfasent  sa  vos  couma  eles  bretouneja, 
De  sous  felens  ftti  cas,  pas  mai.  Abeles  uns,    ■ 
Sus  sa  fauda  lous  prend  e  pioi  lous  poutouneja, 
Mut  e  la  larraa  as  iols.    . .  .De  qu'es  pas,  peracô! 
Aube,  lou  grand  plouret,  mais  dejoia,  aquel  cop. 

IV 

Aquela  nioch,  à  las  Aubetas, 
Lous  enfants,  dins  sas  bressouletas, 
Jaguts  cadun  emb  sous  jouguets, 
Subrant  lou  soupà  per  se  jaire, 
Fagueroun  pas  qu'un  som,  pecaireî 
De  talament  qu'eroun  lassets  ! 

A.  Langlade. 

(Languedocien,  Lansargues  et  ses  environs.) 

à  tour  —  le  plaisante  en  riant  d'une  telle  surprise.  —  Mais  lui,  de 
ses  petils-fi!s,  ce  qu'il  aime  le  plus  au  monde,  —  car  pour  eux  il 
fait  et  dit  des  folies,  des  naïvetés,  —  en  contrefaisant  sa  voix 
comme  quelqu'un  qui  bégaye,  —  de  ses  petits-fils,  il  fait  cas  seu- 
lement. L'un  après  l'autre. —  sur  ses  genoux  il  les  prend,  puis  les 
couvre  de  baisers, — muet  et  la  larme  à  lœil Ce  que  c'est  pour- 
tant !  —  Et  oui,  le  grand-père  pleura,  mais  de  joie  cette  fois. 

IV 

Cette  nuit-là.  au  mas  des  Aubes,  —  les  enfants  dans  leurs  petits 
berceaux, —  couchés  chacun  avec  ses  joujoux, —  laissant  de  côté  le 
souper  pour  se  reposer,  —  ne  firent  qu'un  somme,  les  pauvres 
enfants  :  —  tellement  ils  étaient  fatigués  ! 

A.    Langlade. 


BIBLIOGRAPHIE 


Le    Bréviaire    d'amour  de   Matfre   Ermengaïul,  publié  par  la    Société 
archéologique,  litléruire  et  sci''nlif\que  de  Bézier s,  tom.  Il,  2' livraison. 

Les  amis  de  notre  ancienne  littérature  regrettaient  vivement  que 
la  publication  du  Breviari  damor,  commencée  il  y  a  wn^  quinzaine, 
d'années,  restât  depuis  si  longtemps  interrompue.  Aussi  devons- 
nous  remercier  tout  d'abord  la  Société  archéologique  de  Béziers, 
et  particulièrement  son  savant  et  zélé  secrétaire,  notre  confrère 
M.  Azaïs,  de  ce  qu'ils  la  reprennent  aujourd'hui.  La  livraison  an- 
noncée ci-dessus  renferme  environ  5500  vers,  dont  près  de  5000 
sont  consacrés  à  la  vie  de  Jésus-ChrisL.  Je  ne  dirai  rien  ici  de  leur 
valeur  poétique,  sinon  qu'elle  est  fort  médiocre, — comme  au 
reste,  en  général,  celle  de  tout  l'ouvrage, —  malgré  la  grandeur  du 
sujet,  qui  aurait  dû,  ce  semble,  mieux  inspirer  l'auteur  et  l'élever 
un  peu  au-dessus  de  son  niveau  ordinaire;  et  je  passerai  immé- 
diatement à  l'examen  philologique  du  texte. 

J'aurais  à  soumettre  aux  éditeurs  des  remarques  assez  nom- 
breuse? ;  mais  plusieurs  pourraient  paraître  minutieuses  ;  je  me 
bornerai  aux  plus  importantes. 

V.  21282.  Elizabet  que  n'ac  sentit.  —  Ceci  ne  donne  aucun  sens 
satisfaisant.  11  fallait  lire  queu  au  lieu  de  quen.  Queu  est  pour 
que  0.  C'est  une  contraction  dont  le  catalan  offre  des  exemples 
très-nombreux,  mais  que  l'on  constate  plus  rarement  en  provençal. 
Notre  texte  en  offre,  dans  cette  livraison  même,  deux  de  plus.  C'est 
dans  les  vers  24610  et  24980.  où  l'on  a  également  pris  u  pour  n.  Il 
faut  lire,  au  premier  de  ces  deux  vers,  queu  sofrza,  et  non  quen  s.; 
au  second  :  nou  disseron  (  =  no  o  ),  et  non  pas  non  d.  J'ai  cité 
ailleurs'  des  exemples,  également  biterrois,  de  la  contraction  du 
même  pronom  avec  un  i  final  ;  quiu  =  qui  o  ;  siu,  et,  par  suite 
.<sieu  =  si  0.  Dans  le  v,  21282  ci-dessus,  au  lieu  de  queu  ac,  on 
pourrait  aussi  lire  que  v'ac,  et  l'on  y  aurait  ainsi  un  autre  exemple 
ancien  de  la  forme  co  (ou  va),  à  joindre  à  ceux  que  j'ai  relevés  dans 
le  travail  auquel  je  viens  de  renvoyer. 

21486.  Pot  esser  cauzit.  —  Le  ms.  principal  donne  ;>oo  rejeté  je 
ne  sais  pourquoi  (la  leçon  des  autres  mss.  n'est  pas  indiquée),  et 

'  Romanuj,  V,  233. 


BIBLIOGRAPHIE  39 

qui  ?eul  peut  ici  convenir,  le  contexte  exigeant  le  parfait  ou  l'im- 
parfair. 

■21770  Montcro  s'en,  VJiangel  dizen.  —  Otez  la  virgule,  dont  la  place 
est  à  la  fin  du  vers  précédent,  et  corr.  IKangel  =  li  angel,  moyen- 
nant contraction,  ou  Ihi  angel,  moyennant  élision.  La  même  faute 
se  remarque  aux  vers  '230G4,  oii.  au  lieu  de  l'haltre,  il  faut  Ih'altre, 
et  23064,  où,  au  lieu  de  l'hagro,  il  faut  IKagro.  On  en  peut  voir  un 
autre  ex.  dans  la  partie  anciennement  publiée,  v.  9831  :  fassa, 
Ihnm.  Il  est  dit  en  note  que  les  autres  mss.  omettent  l'article. 
C'est  une  erreur  de  considérer  ici  l  comme  tel  ;  il  faut  écrire  fas- 
salh  om,  ou  Ih  est  le  pronom  li  (à  lui) . 

'21833.  Vers  trop  long;  supprimez  se, (}ui  forme  pléonasme,  puis- 
f[ue  nois  =  no  se. 

"21865.  Icis  de  Betleem.  Gorr.  ieis. 

21891.  Aia  vista.  La  leçon  du  ms.  A,  rejetée  en  note,  indiquait 
la  bonne  correction  :  ai  ja.  Le  copiste  a  répété  ja,  par  méprise. 

22183.  E  vie.  C'est  la  leçon  du  ms.  C.  Mais  il  valait  mieux  vi 
forme  constante  de  ce  mot  dans  A.  et  que  donne  peut-être  ici 
également  le  ms.,  au  lieu  de  m  que  l'éditeur  y  a  lu.  —  Faute  pa- 
reille au  V.  26362,  oîi  l'on  a  inutilement  ajouté  un  c  à  vi  du  ms.: 
vi[c\ . 

22200.  Seguiro.  Leçon  du  ms.  B,  inutilement  substituée  à  se- 
giiero  de  A,  qui  n'est  pas  moins  correct. 

22299.  Despertar.  Leçon  d'un  desmss.  auxiliaires.  Le  ms  prin- 
cipal (Aj  a  descidar,  qu'il  n'y  avait  aucun  motif  de  rejeter.  C'est  un 
verbe  aussi  régulièrement  formé  que  ressidar.  Cf.  desvelhar,  à  côté 
de  revelhar. 

22359.  Dos  partz.  Leçcn  de  G.  Mais  celle  de  A,  doas  partz,  est 
bien  plus  correcte  et  devait  être  conservée,  doas  pouvant  fort  bien 
ne  compter  que  pour  une  syllabe.  On  peut  même  dire  que  c'est 
l'ordinaire.  Cf.,  d'ailleurs,  les  vv.  25739,  41,  44,  60,  où,  comme 
l'éditeur  en  avertit  lui-même,  ce  mot  n'en  doit,  en  effet,  avoir 
qu'une  seule. 

22555  Ce  vers  a  été  mal  compris.  Deh  n'y  est  pas  une  exclama- 
tion ;  c'est  simplement  deheo,  comme  au  v.  22549.  Il  n'y  avait  pas 
lieu,  conséquemment,  à  modifier  la  leçon  du  vers  précédent,  qui  est 
le  complément  de  ce  deh: 

E  al  ters  jorn  resuscitar 
Deh 

22561.  Enutz  sot. .  .ne  m'olTre  aucun  sens.  Je  corrigerais  iratit, 
d'après  le  ms.  G.  Mal  m'es  du  vers  précédent  traduit  scandaluin  est 
mihi  de  Math.,  xvi,  de  23. 


40  BlBLlOGRAPfflE 

22602.  Abusiaiz.  C'est  la  ieçon  du  ms.  principal.  Mais  celle  de 
C  {abocatz)  est  ici  certainement  la  meilleure,  comme  le  prouve  le 
passage  correspondant  de  l'évangile  (Matth.,  xvii.  6)  :  ceciderunt 
in  fadem  suain.  Sar  aboca--,  qui  manque  à  Raynouanl,  voy.  Noulet, 
Étude  sur  G. de  la  Barre,  p.  13,  et  cf.  Revue  VI,  293.  Le  même  mot 
existe  en  catalan.  On  en  trouvera  un  ex.  au  v.  647  du  Roman  des 
sept  so'jes.  publie  par  M.  Mussafia  et  dont  nous  avons  récemment 
rendu  compte. 

22780.  Vos  fiVé/^. Faute  évidente'  de  lecture  pour  niretz  =  cous 
irez.  On  voit  ici  l'adverbe  ne  déjàaussi  étroitement  uni  au  futur  irai 
qu'il  l'est  aujourd'hui,  au  moins  dans  plusieurs  dialectes,  tant  à  ce 
futur  qu'au  conditionnel  :  nirai.  nirio. 

22848.  Il  n'y  avait  aucun  motif  de  substituer  ici  la  leçon  de  C  à 
celle  de  A,  qui  est  au  contraire  plus  rapprochée  du  texte  de  Matth. 
XXI,  16.  E  qui  commence  le  vers  suivant  n'est  pas  copule.  On  le 
traduirait  bien  par  donc.  Cf.  ci- après  la  note  sur  le  v.  23161. 

22921.  Escapadamen-  Corr.  t-scampadamen,  d'après  le  ms.  C. 

22952.  Una  bella  gauda .  Je  n'ai  aucune  correction  à  proposer 
pour  ce  vers,  qui  d'ailleurs  n'en  demande  point.  Je  veux  seule- 
ment appeler  l'attention  sur  le  mot  gauda  i^vase,  bassin),  parce  que 
ce  mot  me  semble  indiquer,  avec  .«a  propre  étymologie,  qui  est  évi- 
dente (gavata).  celle  du  français  godet.  M.  Littré  propose  avec  doute 
guttus.  Mais  le  gauda  provençal  autorise  pleinement,  ce  me  semble, 
à  admettre,  en  ancien  français,  un  substantif  de  même  sens,  gode, 
dont  godet  serait  le  diminutif  normal . 

22965.  Je  n'aurais  pas  hésité  à  substituer  à  e  (in)  me  da  ms  A, 
am  me  de  C  L'évangile,  en  effet  (Joan.  xin,  8),  dit  mecum. 

23101.  Fermas,  de  A,  ne  pouvant  rimer,  on  aurait  dû  corriger 
jinas,  d'après  B  C. 

23157.  23162,  25011.  Dans  ces  trois  passages,  ieu  soi,  qui  traduit 
exactement  egoswm  de  l'Évangile  (Joan.,  xvm,  5),  a  été  changé  en 
ieu  [l]  soi  sans  nécessité  et  au  détriment  de  la  correction.  En  effet. 
l  ne  peut  être  ici  que  pour  h,  et  Ion  ne  saurait  dire  en  provençal 
ieu  lo  soi.  au  sens  de  ieu  soi  el  ;  c'est  moi)  . 

23161.  E  Jésus  lora[e]  demandât. — Ciorrection  qui  semble  indiquer 
que  l'éditeur  n'a  pas  reconnu  le  vrai  rôle  en  ce  passage  de  la  con- 
jonction e.  qui  commence  le  vers.  Cette  conjonction,  ici.  n'est  pas 

'  Faute  analogue  au  v.  2886.  où,  au  lieu  de  vagues,  il  faut  lire  n'agues. 
et  encore  au  v.  IOÎ20  .  recobrar  vas;  lis  :  recobrar  n'as.  L'inverse  se  re- 
marque, entre  autres  passages,  aux  vv.  3694-3,  où  l'on  a  imprimé  deux  fois 
dain  pour  daus. 


BIBLIOGRAPHIK  41 

copule;  on  peut  la  considérer  comme  explétive  ou  la  traduire  par 
alors.  C'est  un  emploi  qu'elle  remplit  fréquemment,  en  provençal 
comme  en  ancien  français'. 
23231.  11  faut  un  point  d'interrogation  à  la  fin  de  ce  vers. 
23240.  Vers  trop  court.;  corr  si[ieu]  die  le. . . 
23260-1 .  Ces  deux  vers   ne   riment   p;is  ;    la  bonne  correction 
était  : 

Pueis  il  vesque  conjur[er]o 
Lo  filh  Dieu  e  demand[er]o. 

Î3530.  0  Didan  doit  être  compté  pour  trois  syllabes.  »  Note  bien 
inutile,  puisque  telle  est  la  règle.  Plus  loin,  v.  2365S.  on  a  cru  que 
le  même  mot  n'en  avait  que  deux;  mais  la  mesure  et  la  rime  s'y 
opposent.  Il  faut  lui  eu  laisser  trois  et  réduire,  soit  einpero  k  pero, 
soit  lo  ùi  l. 

23760.  Lhi  siei  iiel/i.Le  ms.  a  nuelh(\[s.  vitelh),  forme  très-légitime. 
Cette  prosthèse  du  v,  aujourd'hui  si  commune,  commence  à  se 
montrer  fréquente  dès  la  fin  du  Xlll'  siècle. 

23785.  Ben  dearia[in]  donc  sovenlr. — Ben  deurla[ni]  est  une  correc- 
tion malheureuse  et  qui  fait  un  solécisme  d'une  expression  par- 
faite. L'ancienne  langue  ne  disait  jamais  je  me  souvieiis  (façon  de 
parler  dont  l'habitude  que  nous  en  avons  nous  dissimule  la  barba- 
rie), mais  «7 /?i(i«o«t'/en/.  Il  fallait  simplement,  dans  le  vers  ci-des- 
sus, conserver  la  leçon  du  ms.,  sauf  à  lire,  au  lieu  de  ôe^ts^ indiqué 
dans  la  note,  betis,  c'est-à-dire  le  nos:  Bens  deuria  donc  sovenir. 

24450.  Homes  près.  Leçon  inacceptable.  11  faut  corriger,  d'après 
le  ms.  B  :  hom  mesures. 

24581.  Qui  l'escorgues.  Ces  mots  devraient  être  placés  entre 
deux  virgules.  Le  sens  en  est  :  si  on  h  saisissait  (terme  judiciaire). 
iVescorre,  même  sens  que  encorre.  Cf.  esconlra  =  encontra,  etc.  Les 
deux  préfixes  en  et  es  se  substituent  assez  souvent  l'un  à  l'autre-. 

24671.  Quez  a  vist.  —  La  bonne  leçon  est  certainement  celle  du 
ms.  C  {quel  a  vist). 

24745.  A  dautras.  Lis.  ad  autras. 

24907.  Corr.  em  rememhran.  Avec  en,  la  phrase  n'a  pas  de  verbe. 

24920.  Piegres,  admis  dans  le  texte,  est  impossible.  Il  faut  réta- 

♦  Et  aussi  dans  l'italien  et  l'espagnol  anciens.  Ex  :  «  E  quaiido  si  sa- 
robbe  voliita  dormire  o  forse  scherzar  con  lui,  ed  egli  le  racconlava  la 
vita  di  Ghrislo»  {Decamerone);  —  a  Y  acaeciô  que  estando  un  dia  que 
tanian  ante  el  un  estormento,. .  é  el  rey  paru  mientes  »  {El  Conde  Luca- 
nor) . 

^  Cf.  estonces  =  entonces  eu  vieil  espagnol. 


42  BIBLIOGRAPHIE 

h\ir  piegers,  donl piegres  ne  peut  être   qu'une  altération   orthogra- 
phique, résultat  d'une  métathèse  inconsciente. 

24935.  Escapassem  de  A  a  été  rejeté  à  tore,  d'autant  plus  qu'on 
a  admis  plus  loin  doptassem.  Sur  ces  formes  de  subjonctif  impar- 
fait en  a,  voy.  le  Donat  prov.,  p.  16,  et  cf.  ma  G-rumm.  limousine, 
p.  282(iîeî;Me,  ^11, 164). 

25032  -  3.  Deux  vers  mai  compris,  comme  le  prouve  la  ponc- 
tuation. Ils  font  partie  de  la  réponse  de  Cléoplias,  et  doivent  être 
écrits  : 

E  no  sabes  so  que  dizem 
Quez  es  fah  lay  novelamen  ! 

Il  faut  ensuite  mettre  deux  points  à  la  fln  du  vers  suivant. 

25088.  Digs.  Je  soupçonne  ici  une  mauvaise  lecture  pour  diys, 
qui  est  une  forme  très-commune, 

25116.  Mospes  raolatz.  Lis.  mos  pes,  mo  latz. 

25187.  Tros.  Le  ms  A.  donne  tor,  qu'on  pouvait  garder,  saufày 
ajouter  une  s.  Tors  est  la  forme  jinmitive  du  mot.  On  peut  la  voir 
dans  le  Donat  provençal,  55  h. 

25204.  Cordas  du  ms.  A  est  une  faute  évidente.  La  bonne  leçon 
est  indiquée  par  les  autres  mss.  C'est  cabdatz  ou  coydatz.  (M.Joan. 
XXI,  8  :  «  longe. . . .  quasi  cuhitis  ducentis.  » 

25208. -Lo /«oc  £Zi.sse?ifZ«/.  Mauvaise  leçon,  qu'il  aurait  fallu  cor- 
riger au  moyen  de  B  C  D,  en  eyssendut  =  allumé,  de  eissendre  = 
encendre . 

25236.  La  leçon  de  A,  rejetée  en  note,  n'estpas  moins  conforme 
que  celle  de  B  G,  adoptée  par  l'éditeur,  au  texte  sacré,  où  il  y  a,  en 
premier  lieu,  pasce  agnos  meos{Joan.  xxi,  15  et  16).  Il  fallait  seu- 
lement corriger  angels  en  agnels  ou  anhels. 

25259.  11  est  impossible  de  compter ^we^s,  comme  on  le  veut  ici, 
pour  deux  syllabes.  Suppléez,  devant  eZ  ce^,  la  particule  sus,  que 
donnent  les  autres  mss. 

25391.  C'est  pure  illusion  de  prendre  segro  de  ce  vers  pour  une 
forme  du  parfait  de  esser.Ce  mot,  qui  traduit  erant  sedentes  {Act. 
apost.  II,  2),  est  simplement  la  3'  pers.  plur.,  aussi  régulière  que 
possible,  du  jtrétérit  de  sezer  (seder,  sieire),  qui  fait  au  singulier  sec. 
Il  faut  traduire  étaient  assis. 

25560.  Establis.  Le  contexte  indique  clairement  qiieestablen  des 
mss.  auxiliaires  est  ici  la  bonne  leçon.  Il  est  possible  que  le  co- 
piste de  A  y  ait  substitué  esta&^îs,  parce  qu'il  aura  cru  voir  dans 
establen  la  3e  pers  plur. île  l'ind.  présent,  au  lieu  du  participe  pré- 
sent. 


BIBLIOGRAPHIE  43 

25615.  Preicadors.  Loron  qui  fausse  \o  vers  et  ({uo  repousse  le 
contexte.  Corr.  preguadors,  d'après  les  autres  mss.Cf.  v.  25619. 

25853.  L'éditeur  remiA-MiQ  pauraguos,  qui,  dit-il,  fausse  le  vers, 
par  paoros.  Mais  ces  deux  mots  ont  l'un  et  l'autre  trois  syllabes,  et 
c'est  trois  syllabes  que  la  mesure  exige. 

25878.  Errors.  Corr.   terrors,  d'après  G. 

25909.  A  vosfaij.  Il  faut  évidemment  corrigernos.  Cf.  v.  25911. 
Le  conte.xte  indique  clairement  que  ce  n'est  pas  nos  de  ce  dernier 
vers  qui  doit  être  corrigé  vos. 

25964.  No  Fan  crezero.  Corr.  lan  ou  là" n  (la  en). 

25994.  Vers  trop  court.  Corr.  vil[à\s  ou  [e]  vils. 

26069.  iVos  don  veser  se.  Le  ms.  a  nos  de,  qui  est  excellent.  Mais 
l'éditeur  n'y  a  pas  reconnu  sans  doute  le  latin  det.  Ce  même  sub- 
jonctif se  rencontre  déjà,  à  la  première  personne,  au  commencement 
du  poëme,  v.  63  :  «  Soplegan  qu'ieu  . . .  de  doctrina   vertadieira.  » 

'2^0%.  Qu'ilh[s]  vaii  ntguar.  Adjonction,  à  cette  place,  fort  inso- 
lite et  d'ailleurs  tout  à  fait  inutile  dans  le  cas  présent.  Neguar,  en 
effet,  à  lui  seul,  signifie  se  noyer.  Les  ex.  en  sont  sans  nombre 
dans  nos  anciens  textes. 

26175.  iVu^^s  de  A  est  certainement  une  mauvaise  leçon;  il  faut 
vins,  qu'ont  les  autres  mss. 

26203.  Sufreiras.  Leçon  inadmissible.  Le  futur  de  safrir  serait 
su/riras:  mais  le  subjonctif  ici  convient  mieux;  il  faut  donc  sufras, 
comme  dans  les  autres  mss.  Pour  rétablir  la  mesure,  ajoutez  un  mo- 
nosyllabe, comme  hels  dey^wlsenher  ou  o  devant  .w/7-fl.s\ 

26409.  ^«e?  faray.  Les  autres  m?.s.  ont  quen  ,  très-préférable. 
Peut-être  quet  est-il  une  mauvaise  lecture  pour  quei.  L'échange  de 
rôles  entre  en  et  i  est  assez  fréciuent. 

20333.  La  leçon  de  A,  rejetée  en  note,  est  très-bonne;  seulement 
il  fallait  lire  (au  lieu  de  sil  voc,  etc.)  :  si  luoc  aparelhat en  vis . 

J'exprimerai  le  vœu,  en  terminant,  qne  la  Société  archéologique 
de  Béziersne  nous  fasse  pas  maintenant  trop  longtemps  attendre 
les  livraisons  suivantes  du  Breviari.  Ce  seront  de  beaucoup  les 
plus  intéressantes,  non  pas  seulement  en  raison  du  sujet  traité 
dans  les  dernières  parties  du  poëme,  à  savoir  l'amour  des  dames, 
mais  encore  et  surtout  à  cause  des  nombreuses  citations  de  poésies 
des  troubadours  que  l'auteur  y  a  semées. 

Camille   Chabane.xu. 


44  BIBLIOGRAPHIE 

Victor  Bala.guer,  De  la  Poesia  provenzal  en  Castilla  j  «n  Leoa 

Madrid,  1877;  in-12,  64  pages. 

Les  préocupations  d'une  vie  politique  agitée  n'ont  point  tari 
chez  D.Victor  Balaguer  la  source  de  l'inspiration  poétique,  et 
n'ont  pu  davantage  arracher  l'éminent  auteur  de  Vlfistoria  de  Ca- 
taluûa  aux  chères  études  de  sa  jeunesse.  Après  le  volume  des  Tru- 
jedias,  auquel  la  Revue  des  langues  romanes  consacrera  un  compte 
rendu  détaillé,  voici  un  chapitre  détaché  de  l'ouvrage  inédit  inti- 
tulé Histnria  iwlitlca  y  literaria  dels  Trovudors . 

Ce  grand  travail  contiendra  plus  de  trois  cents  biographies  de 
troubadours. Celle  d'Aimericde  Pegulhan  parait  en  ce  moment  dans 
l'excellente  revue  catalane  la  Renaixensa.  L'introduction  compren- 
dra des  études  sur  le  rôle  politique  auquel  les  troubadours  ont 
aspiré  et  sur  celui  qu'ils  ont  joué  réellement  dans  les  deux  groupes 
d'états  espagnols  :  le  groupe  castillan-léonais  et  le  groupe  arago- 
nais-catalan.  C'est  un  des  chapitres  de  cette  introduction  qui  vient 
d'être  traduit  en  castillan  et  publié  à  Madrid. 

Comme  Jovellanos,  comme  Milâ  y  Fontanals,  comme  tous  ceux 
qui  se  sont  occupés  sérieusement  de  l'histoire  du  moyen  âge,  Vic- 
tor Balaguer  a  été  frappé  des  clartés  que  la  vieille  poésie  pro- 
vençale, «  cette  liberté  de  la  presse  des  temps  féodaux  »,  suivant 
l'heureuse  expression  de  Villemain,  jette  sur  les  hommes  et  les  cho- 
ses de  son  temps.  Il  est  impossible  d'écrire  l'histoire  du  Xl'siècle 
au  XIV'=  sans  recourir  aux  sirventesdes  troubadours  comme  à.des 
chroniques  plus  vivantes,  plus  passionnées  et,  par  conséquent,  plus 
attachantes,  que  les  œuvres  historiques  proprement  dites. Victor 
Balaguer  l'a  prouvé,  en  ce  qui  concerne  les  royaumes  de  Gastille 
et  de  Léon,  dans  le  travail  intéressant  et  coloré  qui  fait  le  sujet  de 
cet  article.  Avec  la  loyauté  qui  le  caractérise,  l'auteur  de  cette 
nouvelle  histoire  des  troubadours  rend  pleine  justice  à  ses  pré- 
décesseurs. Nous  ne  pouvons  nous  empêcher  ds  citer  le  passage 
suivant,  à  l'adresse  de  l'illustre  et  vénéré  philologue  catalan,  que 
nous  avons  l'honneur  de  compter  parmi  nos  collaborateurs  et  nos 
amis  :  «  Si  sa  modestie  bien  connue,  d'honorables  scrupules,  ou 
peut-être  des  opinions  que  je  respecte  sans  les  partager,  n'avaient 
empêché  Milà  de  dire,  dans  ses  Trovadores  en  Espana,  tout  ce  qu'il 
sait  et  tout  ce  qu'il  a  à  sa  disposition  sur  cette  matière,  mon  hum- 
ble travail  serait  complètement  inutile.» 

La  nouvelle  œuvre  de  Balaguer  est  loin  d'être  inutile. L'admira- 
ble talent  d'écrivain,  qui  donnera  tant  de  charme  aux  vies  des 
troubadours  racontées  par  leur  successeur  et  leur  émule ,  con- 
tribuera à  répandre  dans  un  monde  plus  lettré  qu'érudit  des  no- 


RIBLIOORAPHTE  45 

lions  que  personne  ne  doit  ii^norer  ;  il  propagera  le  goût  des 
éludes  provençales,  et  aussi  l'iiabitudo  de  faire  de  l'histoire  en  vi- 
vant, pour  ainsi  dire,  au  milieu  des  événements  du  passé,  et  non 
en  les  considérant  à  distance,  à  travers  les  idées  et  les  préjugés  de 
notre  époque.  G.-J.  T. 

Recueil  de   versions   provençales  pour  l'enseignement  du  français 

en  Provence,  par  un  prùlessear;  troisième  partit'.  AviL,^non,   Aubanel 
frères,   1876;  in-Vl,  195-90  pages. 

Cette  chrestomathie,  où  sont  colligés  les  plus  beau.x  morc?eaux  des 
félibres  et  de  quelques-uns  de  leurs  devanciers,  a  paru  déjà  depuis 
quel(}ue  temps  ;  mais  il  n'est  jamais  trop  tard  pour  faire  con- 
naître un  livre  utile.  Son  tilre  surprendra  peut-être  certaines  per- 
sonnes.Eh  quoi!  un  recueil  de  versions  provençales  pour  l'en- 
seignement du  français!  Mais  le  provençal  existe-t-il  aujourd'hui 
comme  langue  parlée,  au  point  de  pouvoir  être  étudié  dans  les 
écoles  conjointement  à  une  autre  langue  de  môme  souche,  et  do 
fournir  ainsi  matière  à  un  parallèle  dont  toutes  deux  puissent  pro- 
Gter  ? 

Appartenant  à  une  Société  qui  a  demandé  la  création  de  chaires 
de  littérature  romane  dans  les  établissements  d'enseignement 
supérieur  du  Midi,  nous  ne  pouvons  qu'approuver  l'introduction 
d'une  étude  analogue  dans  l'enseignement  primaire.  Les  intentions 
de  fauteur  sont,  du  reste,  des  plus  modestes.  En  publiant  ces  mo 
dèles,  il  semble  avoir  eu  pour  but  principal  de  faciliter  la  connais- 
sance du  français  aux  élèves  des  écoles  .inférieures.  Rien  ne  fami- 
liarise avec  les  diffîcaltés  d'une  langue,  pense-t-il.  avec  raison, 
comme  l'effort  opéré  pour  y  transporter  d"une  façon  grammaticale 
et  Udèle  le  sens  et  la  lettre  d'un  idiome  à  tournures  quelquefois 
très-dilTérentes  i.  «  Les  sujets  recueillis,  dit-il  dans  sa  préface,  ap- 
partiennent à  l'idiome  provençal,  qui  fait  les  délices  des  lettrés 
dans  la  Finlande,  la  Suède,  l'Allemagne,  l'Angleterre,  l'Espagne, 
le  Portugal,  l'Italie  et  même  dans  le  Nouveau  Monde.  Aux  qualités 
d'une  littérature  fondée  par  des  œuvres  de  génie,  cet  idiome  join- 
dra, pour  le  Midi,  un  privilège  spécial,  celui  de  venir  en  aide  au 
français,  si  difficile  pour  ceux  qui  n'apprennent  pas  le  latin  ;  il 
servira,  comme  la  langue  de  Virgile,  à  parvenir  plus  sûrement  à 
la  connaissance  du  langage  immortel  de  Racine  et  de  Bossuet- 
Les  élèves  de  l'enseignement  primaire,  n'ayant  pas  d'études  com- 


'  V.  sur  le  même  sujet,  dans  Ion  Prouvençau  (n*  du  21  janvier  1877), 
un  article  de  M.  de  Villeneuve-Esclapou. 


A^J  BIBLIOORM'HIL: 

paratives,  pourront  suppléer  à  l'insuffisance  des  exercices  classi- 
ques par  la  traduction  des  morceaux  d'une  chrestomothie  2^f'o^^Ç(f^^- 
On  ne  tardera  pas  à  reconnaître  l'utilité  de  cette  mesure,  que  l'en- 
seignement secondaire,  au  moyen  des  hmgues  mortes,  pratique  avec- 
un  succès  incontesté.  » 

Des  progrès  sensibles  ont  été  faits  dans  ce  sens.  Il  ne  paraît  plus 
étrange  d'étudier  le  provençal.  Il  y  a  quelques  mois  à  peine,  la 
Cigale  venait  de  Paris  à  Arles  fêter  le  féiibrige  et  fraterniser  avec 
lui.  La  plupart  des  recueils  de  la  capitale  ont  rondu  compte  do 
ces  réunions,  et  les  journaux  illustrés,  dans  plusieurs  numéros 
consécutifs,  en  ont  reproduit  par  le  dessin  les  principaux  épisodes. 
La  paix  est  donc  faite  et  l'alliance  signée  entre  deux  littératures  qui 
peuvent  se  regarder  en  face.  La  chanson  de  Magali  se  chantera 
bientôt  à  Paris,  comme  au  Brésil,  dans  l'idiome  d'Arles  et  d'Avi- 
gnon ;  et  qui  sait  si  l'on  n'y  verra  pas  bientôt  des  opéras  composés 
par  les  maîtres  de  la  musique  contemporaine  sur  des  paroles  pro- 
vençales ?  Cela  ne  vaudrait-il  pas  certaines  œuvres  lyriques,  oiî  les 
tragédies  de  nos  grands  auteurs  sont  converties  en  lihretti  qui  ne 
donnent  souvent  de  l'original  qu'une  idée  assez  imparfaite? 

Le  choix  des  versions  a  été  fait  avec  soin  et  ne  contient  que 
des  modèles.  Mais  pourquoi  l'auteur  n'a-t-il  pas  élargi  en  même 
temps  et  le  cadre  et  le  titre  de  son  travail,  de  manière  à  pouvoir 
l'appeler:  Recueil  de  versions  pour  l'enseignement  du  français  dans 
lespnijsde  langue  d'oc,  \Avilùl  que  dans  la  seule  Provence?  Les  sous- 
dialectes  de  la  Provence  proprement  dite  tiennent  dans  le  livre  à 
peu  près  toute  la  place.  Si  nous  avons  lien  compté,  six  auteurs 
seulement,  non  Provençaux  par  leur  naissance,  y  ont  été  admis  ; 
V.  Balaguer,  G.Azaïs,  A.  Mii-,  A.  A  ma  vielle,  Jasmin  et  Mathieu; 
et  encore,  sur  sept  pièces  à  eux  empruntées,  trois  sont-elles  écrites 
en  provençal.  Sans  doute  la  langue  dont  les  grands  maîtres  se  ser- 
vent a  naturellement  plus  de  chance  d'expansion  et  de  durée.  A  ce 
titre,  le  provençal  contemporain,  qui  a  produit  des  chefs-d'œuvre 
que  le  temps  respectera,  ne  peut  manquer  d'exercer  une  iniluence 
sur  les  autres  variétés  de  la  langue  d'oc  ;  mais  laissons  à  chacun 
sa  liberté  philologique,  et,  en  attendant  que  l'œuvre  de  génie  ail 
imposé  sa  forme  à  tous  les  dialectes,  n'ensevelissons  pas  dans 
l'oubli  des  productions  respectables.  C'est  un  sentiment  de  cette 
nature  qui  inspirait,  le  25  mars  1877,  M.  de  Tourtoulon,  lorsque, 
aux  applaudissements  d'un  auditoire  venu  d'un  peu  partout,  il 
disait  : . .  .Se  se  coiàta  dins  quaucas  unas  de  nostras  escolus  d'escrivans 
d'elei,  se  n'en  sourtîs  d'ohras  mujouralas,  veiren  las  parladuras  d'alentour 
retraire  de  mai  en  mai  au  parla  d'aquela  cscola  ; e  lous 


BlFiLIOGRAPHlK  47 

dialeites  que  saupran  pas  proudure  seran,  embé  lou  tcms,estovfat.<!  smm 
qu'ajoun  lou  drech  ni  lou poudé  de  seplagne. 

Dounàs-nous  de  cops  dohra,  e  vosfra  parladura  sera,  inmourtala . 

N'y  avait-il  rien  à  citer  dans  tout  l'œuvre  de  Favre,  bien  que 
cet  auteur  ait  eu  le  tort  de  consacrer  uniquement  à  la  parodie  et  à 
la  farce  un  t;Uent  capalile  de  productions  plus  élevées;  dans  Pey- 
rottes,  le  potier  clerraontais,  qui  a  maintenu  la  tradition  à  une  épo- 
([ueoù  elle  semblait  prête  à  ûnirAlont  Roumanille  a  inséré,  en  1852, 
trois  jolies  pièces  dans  li  Prouvencnlo,  et  auquel  M.  de  Berluc-Pe- 
russis  a  rendu  toute  justice  dans  son  discours  prononcé  le  10  sep- 
tembre 1877,  aux  jeux  floraux  de  Sainte- Anne  d'Apt^;  dans  l'auteur 
de  Promvença,  du  Roumieu,  du  Michant  Rêve,  du  Brinde  à  las  racas  la- 
tinas,  qui  a,  le  premier,  ainsi  qu'on  l'a  si  bien  dit.  élevé  jusqu'à 
l'ode  le  langage  populaire  de  Montpellier-  ? 

A  part  les  plus  beaux  morceaux  des  félibres,  l'auteur  a  eu  l'heu- 
reuse idée  de  rééditer  quelques  pièces  rares  et  moins  connues  que 
les  précédentes,  telles  que  Hbu  de  l'oustau  de  Saboly,  et  les  Ar- 
moumo  d'iino  nîue  de  mai  de  Castil-Blaze  ;  mais,  sans  remonter  aux 
troubadours,  dont  l'idiome  trop  dissemblable  de  la  langue  d'oc 
actuelle  rebuterait  les  écoliers,  n'aurait-il  pas  pu  reproduire  quel- 
ques pièces  de  la  Beliaudière,  de  Gros  et  de  Bellot,  et,  parmi  les 
auteurs  étrangers  à  la  Provence,  Goudelin,  Bonnet  (de  Béziers), 
Foucaud,  Jacques  Azaïs,  etc.,  ne  pouvaient-ils  rien  lui  fournir? 

Un  lexique  et  la  traduction  française  de  tous  les  morceaux  con- 
tenus A!ins\i\.  chreslomathie  terminent  l'ouvrage.  Nous  n'avons  rien 
à  dire  du  premier,  sinon  qu'il  n'aurait  rien  perdu  à  contenir  un 
plus  grand  nombre  de  mots.  Les  secondes  sont  généralement  exac- 
tes; mais  parfois  l'auteur,  se  méfiant  trop  delà  langue  française, 
la  croit  impuissante  à  rendre  quelques  figures  provençales  qui  ne 
sont  pas  pourtant  d'une  hardiesse  excessive,  et  il  ne  serre  pas,  ce 
nous  semble,  le  texte  d'assez  près.  Entre  les  helles  infidèles  de 
Perrot  d'Ablancourt  et  le  rigorisme  littéral  de  M.  Leconte  de  l'Isle, 
il  est  des  limites  rationnelles.  Voici  deux  exemples  qui  justifieront 
peut-être  notre  dire: 

Tei  perfum  aboun  lous  poutounejon  la  narro  (p.  12)  ; 
Eigrejanllei  pestèu  de  l'Ouilmpe  auturous  (p.  140). 


•  Ce  discours  est,  comme  plusieurs  écrits  analogues  sortis  de  la  plume 
du  même  auteur,  un  fin  morceau  d'histoire  littéraire.  {Lou  Prouvençau 
du  30  septembre  1877.) 

-  G.  de  Tourtouîon.  Rev  t,e  dos  lan.y  les  roinane.^i,  t.  f,  p   119;  1870. 


1^  BIBLIOGHAI'HIK 

Traduction.  —  Te?  parfums  abondants  sont  délicieux;  —Péné- 
trant dans  l'Olympe  élevé  (p.  5et  (iG  des  traductions). 

C'est  le  sens,  mais  un  peu  trop  condensé. 

L'autour  s'est  attaché  à  n'introduire  dans  son  recueil  que  des 
morceaux  pouvant  être  lus  par  des  enfants.  On  peut  le  dire  à 
l'honneur  du  félibrige,  ses  productions  n'ont  rien  de  commun 
avec  les  crudités  et  les  licences  que  la  littérature  méridionale 
prodiguait  à  ses  lecteurs  aux  XVI 1° et  XVIIP siècles. Mais  si, parmi 
les  vers  d'une  pièce  admirée  pour  la  beauté  de  la  poésie  et  la 
pureté  du  langage,  il  s'était  glissé  quelque  peinture  trop  expres- 
sive, sa  suppression,  dans  un  livre  classique,  ne  devrait  blesser 
liorsonnc.  En  suivant  cette  méthode,  l'auteur  n'a  fait  que  se*  con- 
former aux  traditions  de  l'enseignement  secondaire,  et  il  a  publié 
un  véritable  Selectœ  e  provençalibus . . .  assimilable  aux  ouvrages  de 
môme  nature  dont  nous  avons  usé  au  collège  pour  l'étude  des 
autours  anciens.  A.  E. 

Coanteis  e  Viorlas. . .  per  .\ugusto  Ghastanet,  felibre  majourau. 
Rebcirac,  iii-8°. 

M.  Auguste  Ghastanet,  qui  s'est  placé  d'emblée,  il  y  a  trois  ans, 
par  son  charmant  poëme  lous  Bouqueis  de  la  Jano,  au  premier  rang 
de  nos  modernes  troubadours,  a  réuni  dans  la  brochure  que  nous 
avons  le  plaisir  d'annoncer  ici  une  fable  et  diverses  anecdotes 
plaisantes,  fort  agréablement  rimées. 

Les  lecteurs  de  la.  Revue  y  retrouveront  plusieurs  pièces  dont  ils 
ont  eu  la  primeur,  et  dans  le  nombre  ce  piquant  récit,  Un  tour  de 
Moussu  Rnumieu  S  qui  suffirait  seul  à  prouver  que  l'auteur  est  un 
des  meilleurs  ouvriers  que  possède  aujourd'hui  la  langue  d'oc  dans 
l'art  d'écrire  en  vers.  Les  autres  pièces  du  recueil  achèveront  au 
besoin  la  démonstration,  particulièrement  la  première,  dédiée  à 
Mistral,  et  qui,  dans  trente  strophes  de  dix  vers,  d'une  très-exacte- 
et  très-habile  facture,  développe  avec  esprit  et,  —  vers  la  fin  sur- 
tout, —  avec  une  poétique  éloquence,  l'Iiistoire,  si  répandue  dans 
nos  campagnes,  du  curé  de  Pierre  Buffière^. 

G.  G. 

•  Voy.  Revue,  X,94. 

-Cette  hi«t.oirose  lit  d<''jâ,  ea  français  et  en  limousin,  dans  V  Apologie 
pour  Hérodote  de  Henri  Estienne.Je  transcris  ici  tout  le  passage,  d'après 
la  1"  édition  (ir>66).  pp.  450-451  : 

«  Mais,  sur  le  propos  des  aines  données  en  garde  aux  curez,  je  fernis 
Riand  tort  au  curé  de  PierrebufQère,  au  haut  Limosin,  si  je  l'oubliois. 
Ce  bon  personnage,  pour  mieux  exhorter  ses  parroiciens  à  bien  vivre,  leur 
dict  entr'aulres  choses,  Quand  le  jour  du  jugement  sera  venu.  Dieu  vou- 


PERIODIQUES 


Romania,  22. —  P.  Uil,  A.  Wosselofsky,  Z,?  7)^7  r/?  l'empereur 
Constant.  M.  A.  W.  édite  pour  la  première  fois  ce  court  poëme  de 
630  vers  octosyllabiques,  et  le  rapproche  des  autres  légendes  ana- 
logues qui  ont  eu  cours  à  différentes  époques  et  dans  différents 
pays. —  P.  199,  F.  d'Ovidio,  Délie  Voci  italiane  che  raddoppiano 
una  consonante  prima  délia  vocale  accenlata. —  P.  212,  Gosquin, 
Contes  populaires  lorrains ,  recueillis  dans-  un  rillage  en  Barrais,  à 
Montiers  sur-Saulx  (Meuse).  Suite  d'une  étude  comparative  très- 
soignée.  Cette  partie  contient  les  contes  suivants  :  le  Prince  et  son 
cheval,  les  Trocs  de  Jean-Baptiste,  le  Fils  du  Diable,  les  Dons  des  trois 
animaux,  la  Fille  du  meunier,  l  Oiseau  de  vérité,  le  Pou  et  la  Puce  (ce 
dernier  en  patois  lorrain). — P.  247,  Mélanges:  1"  les  noms  propres 
latins  en  ittus,  itta,  et  les  diminutifs  romans  en  ett  (i.  Cornu); 
1°  tanit  =  tenehatàvin^  les  Serments  (J. Cornu).  M.G.revientincidem- 


dra  que  je  luy  rende  comte  de  vous  autres,  et  m'appellera,  Curé  de  Pierre- 
buffière,  qu'as  lu  faict  de  tes  brebis  '.'  Et  moy  mot.  Or  dict-il  ceci  ])ar  trois 
fois,  se  cachant  en  la  chaire  chasque  fois  qu'il  disoit  Et  moy  mot.  Mais 
puis  il  leva  la  teste,  et  vint  a  dire:  Je  sçay  bien  que  je  lui  respondray, 
Bestes  vous  me  les  avez  baillées,  bestes  je  les  vous  ren.  Vray  est  que  cec, 
ne  peut  avoir  telle  grâce  ainsi  traduit,  qu'il  a  eu  sa  propre  langue,  a  sça- 
voir  estant  couché  en  nayfs  atticismes  limosins:  et  pourtant  je  me  suis 
faict  bailler  par  un  du  lieu  l'original,  qui  est  tel,  Quan  se  vendro  loujour 
deu  jugamen,  Dieu  me  demandero  que  you  li  rende  comte  de  vou  autre  : 
et  me  apelaro,  Chapelo  de  Peyrebufieyro,  en  quai  eytat  son  ta  olia?  Et 
you  ny  mol.  Et  eu  m'apelaro  enquero,  et  dire,  Chapelo  de  Peyrebufieyroi 
en  quai  eytat  soi  ta  olia?  Et  you  ny  mot.  Et  enquero  eu  me  dire,  Chapelo 
de  Peyrebufieyro,  en  quai  eytat  son  ta  olia?  Jusque  a  tre  viage.  Et  you 
11  reypondray,  Seigne,  beytia  la  m'a  beylada,  et  beylia  la  te  rendi.  » 

Ce  curieux  texte,  qui  remonte  à  plus  de  trois  cents  ans,  nous  fournit  la 
preuve  que  le  parler  du  haut  Limousin  a  à  peine  varié  depuis  lors. Un  de 
ses  caractères  essentiels,  l'horreur  de  1'^  finale,  même  devant  les  voyelles, 
y  est  déjà  bien  marqué  (  la  olia.  vou  autre,  etc.  ).  On  y  remarquera  en- 
core es  devenu  ei  (eytat),  mais  seulement  dans  le  corps  des  mots  ;  en  fi- 
nale, ce  groupe  laisse  simplement  tomber  1'  s  (  Ire  viage  au  lieu  de  trei 
viagei,  qu'on  dit  aujourd'hui).  Relativement  à  l'orthographe,  il  faut  noter 
l'o  simple  maintenu  par  tradition  au  lieu  de  ou,  surtout  devant  n  (  son, 
reypondray,  aussi  olia),  ce  qui  a  duré  jusque  vers  1650  au  moins  (  cf. 
Revue,  X[I,  I9ô),  et  l'emploi  de  g  pour  J  (jugamen),  abus  fort  ancien  et 
dont  les  exemples  sont  encore  assez  fréquents  dans  les  actes  limousins  de 
la  même  époque  ou  un  peu  antérieurs,  publiés  par  Leymarie  et  Ruben. 


50  PERIODIQUES 

moni  sur  dixi  (!os  Serments,  qu'il  lit  difl.  J'ai  déjà  eu  occasion  de 
f.iiro  oliserver  que  le  i^roiiiie  latin//  ne  flevait  pas  être  connu  des 
ropistes  de  ce  temps-là,  puisqu'ils  lui  substituaient  pt.  Du  reste, 
M.  C.  semble  reconnaître,  tout  le  premier,  que  cette  combinaison 
ne  se  rencontre  pas  ailleurs.  Quant  au  rapprochement  que  M.  C. 
fait  entre  i'inil  et  lenefiit.  il  ne  me  paraît  pas  fondé.  Tenehat  aurait 
produit  alors  tnnie  ou  lam'p,  ou  encore  peut-être  tanîef,  taneet;  mai? 
il  est  inadmissiide  ([ue  Va  atone  ait  pu  disparaître  aussi  complète- 
ment à  cette  époque.  \i\\  forme  s/V,  qu'il  cite  à  l'appui,  ne  prouve 
rien  ;  c'est  le  latin  tout  pur  tombé  sans  changement,  dans  un  texte 
en  lamjue  vulgaire,  comme  7kw/7v»,  nunqunm  et  iJoninn.  La  terminai- 
son /(  de /flniV  |teut  n'être  qu'une  épave  de  l'orthographe  mérovin- 
gienne, qui  substituait  très-volontiers   ce  groupe  à  et.  J'avais  déjà 
rapproché  tan  de  cet  autre  tan  qu'on  retrouve  d%ps  l'italien   in- 
rontniienle  (Revue  dea  l.  rom.,  1876,  p.  18).  Dans  ce  même  article, 
j'ai    |iro|iosé   de   losfanif,    rapproché    de   losfing  (Saint  Léger),  une 
explication  qui  dilYere  de  celle   qu'en  a  donnée  Diez.  3"  Spigolature 
]>rnrenftaH   fPio  Rajna).  A  signaler   l'article  excellent  dans  lequel 
M.  P.  R.  réfute   l'opinion  reçue  jusqu'ici,  relativement  à  la  pré- 
tendue abbaye  de  filles  publiques  fondée  à  Niort  par  Guillaume  IX, 
comte  de   Poitiers.  4o  Dédlnaison    de   l'article  maintemie  jusqu'à  ce 
OUI-  d'in.1  le  rcdiis](J.   (lornu).   Clonstatation    très-curieuse  d'une 
très-ancienne  habitude,  qui  ne  semble   pas  avoir  laissé  de  trace 
ailleurs.  5o  Fraïujais  R  pour  D  (L.   Havet).  6^  Un  nuovo  cndice  di 
chansons  de  Geste  del  ciclo  di  Gaglielmo  (P.  Rajna) .  7o  Du  Passage 
d'S  Z à  R  et  d'R  aSZ{\.  Thomas).  Utile  complément  des   ar- 
ticles   fie  .M.  P.   Meyer    sur  les   mêmes  matières.  8»  Termes   de 
pêche  :  jarret,  Imiguière  (J.  Dauquier).  9°  Une  ballade  hippique  (G. 
P-)-  —  P-   Comjttes  rendus  :  Hermanus  Ilagenus,   Carmina  inedii  œvi 
maj-imum  partent  inalita  (L,  Havet).  .Article  soigné  et  intéressant. 
2o  A.  L.  Sardou,  le  Martyre  de  sainte  Agnès  (P.  M.)    Défavoralile. 
3»  Adolf  Mussalia,  Die  Cal-danische  metrische  Version  der  siehen  Wei- 
sen  Meixtrr  (G.  P.).  Favorable.  4°  Ernest  Sabatier,  la  Reine  Esther, 
tragédie  provençale  (P.  M.)    5oG.  Flechia,  Lilorno  ad  una  peculia- 
rilà  di  ficssione  rerbale  in  alcuni  dialetti  lomhardi  (G.  P.).  — P.  303, 
Périodiques..-^  P.  310,  Chronique. 

A.  B. 

Remania.  -23.  —  P.  32 1,  L.  Havet,  la.  Prononciation  de  lE  en 
fraiiçaig.  —  P.  328,  A .  Weber,  la  Vie  de  .saint  Jean  Bouche-d'Or. 
Poème  pieux  de  870  vers  octosyllabiques,  par  Renaut,  extrait  du 
ms.  B.  L.  fr.  283,  fol*  78,  vo  (Bibl.  de  l'Arsenal).  L'auteur  pré- 
tend avoir  |.ris  .son  sujet  dans  la  «  Vita  patrum  ».  Mais  M.  Webej 


PERIODIQUET  jl 

ne  se  tie  guère  à  cette  assertion.  L'éditeur  s'est  à  peu  près  borné  à 
la  reproduction  du  texte,  qu'il  a  corrigé  en  plusieurs  endroits,  en 
ayant  soin  tl'indiquer  en  note  la  leron  du  uis.,  chaiiue  fois  (ju'il  Ta 
changée.  Voici  les  remarques  cjue  j'ai  laites  en  le  lisant.  Pourquoi, 
V.  9,  laisser  arme  =  anima  et  rimant  avec  rfame,  lorsque  ailleurs, 
par  exemple  au  v.  52,  l'éditeur  écrit  ame.  V.  67,  ne  faut-il  pas  lire 
sainteé  =  sanctitaiem.  en  élidant  e  de  que  devant  il?  V.  73,  il  n'est 
pas  absolument  nécessaire  de  changer  est  en  erfj  puisque  le  vers 
précédent  contient  un  verbe  au  présent  ;  cf.  le  v,  347.  Au  v.  154, 
je  changerais  l'invraisemblable /ji<e«/He/i<  en  xxiteusement,  et  rétabli- 
rais le  vers  tout  entier  d'après  le  v.  783:  Si  li  dist  moult  piteusement. 
V.  340,  aoruient  vaut  mieux  que  aorerent.  V.  390,  je  lirais  Por  en- 
trer en  haute  bataille,  et  je  mettrais  un  point  à  la  fin  de  ce  vers. 
V.  438,  contradictoire,  pour  la  correction  de  que  en  qui,  avec  le 
v.491,  où  l'éditeur  n'a  rien  changé  à  la  leçon  du  ms.  —  P.  341. 
P.  Meyer,  Traités  catalans  de  grammaire  et  i/e  poétique.  M.  P.  M.. 
utilisant  le  ms.  étudié  par  M.  Milà  y  Fontanals  (li'erista  de  Ar- 
chivos,  Bihliotecas  y  Ifuseos,  1876),  publie  une  nouvelle  leçon  des 
Reglas  de  trobar  de  Raimon  Vidal,  qui,  bien  que  souvent  incorreoto 
et  incomplète,  servira  à  la  constitution  définitive  de  ce  texte  im- 
portant.—  P.  359,  Pio  fîajna^  Nocella  hoccacccsca  del  Saladino .  — 
P.  369,  J  Cornu,  Phonologie  du  Bagnard.  Travail  très-soigné. 
P.  375,  horateyre  doit  avoir  la  même  origine  que  Muter,  blutoir.  Ca- 
tyeyre  ne  présuppose-t-il  pas  un  b. -latin  *captaria,  analogue  pour 
le  sens  à  ca/;sa?-mTO  =  garde-robe  ?  P.  378,  *  lacticellum  ne  corres- 
pond guère  à  ahle.  Peut-être  vaut-il  mieux  suitposer  *  latiium. 
P.  402,  quelques  négligences  «seau  ci  porter  àmangerauxcochons», 
«  s  devant  les  voyelles  s'endurcit  en  •'•.  »  Ibid.  faute  d'impression; 
ii  seyto,  faucheur»,  ^our  xeyto.— V .  428,  V.  Smilh,  la  Romance  de 
Clotilde .  Ce  sont  trois  variantes  de  la  chanson  dite  de  Clotilde,  en 
patois  lozérien,  publiée  pour  la  première  fois  par  M.  Cayx,  de  Mar- 
véjols.  M .  Smith  prouve  que  le  vrai  litre  de  celte  chanson  n'a  rien 
à  voir  avec  Clotilde,  fille  de  Clovis  et  femme  d'Amalaric.  —  P.  432, 
Mélanges.  1"  Cclubra  en  roman  (  L.  Havel).  t°  Soucy,  solside,  somsir 
(G.  P.  ).  Je  verrais  dans  soucy,  solside,  des  dérivés  de  *soliscidium, 
(préférable  k  solicidium,  donné  par  M.  P.  Meyer),  déchirure  du  sol. 
Je  séparerais  de  ce  groupe  sumsir,  somsir,  somsitz,  que  je  ratta- 
cherais à  sumere  par  l'intermédiaire  du  supposable  * sumescere, 
*  sumescire.  Sorpsir,  que  cite  M.  C.  P. ,  se  laisse  ramener  sans  diffi- 
culté à  sorbere  par  sorbescere.  *sorbes(^re.  Sorjisus,  ou  plutôt  le  supin 
sorpsum,  n'aurait  pu  former  qu'un  verbe  de  la  première  conjugai- 
son. 3o  La  Ville  de  Pul  dans  Mainet  (G.  A.),  4o  2Y,  signe  d'interro- 
gation (G.  P.).  5°  Ti  interrogatif  en  provençal  moderneiC  Chabaneau). 


HKRIODIQI'KS 

M.  (;.  P.  01  M.  C.  (lonnoiu  cliacuii  une  cKidicalion  différente  du 
mùme  |ilu'iioméne.  Celle  du  second  me  parait  plus  vraisemblable. 
Dans  tous  les  cas,  il  n'est  guère  admissible  que  les  dialectes  méri- 
dioniiux  aient  einprunié  l'emploi  de  celte  particule  au  français, 
comme  on  le  dit  en  note  (  p.  442),  puisque  ces  mêmes  dialectes 
ilu  Midi  sont  jusqu'à  [»résent  les  seuls  qui  donnent  des  exemples 
anciens  de  cette  particularité.  Voir,  notanmient,  le  vers  de  Flamenca 
cité  par  M.  C.  60  Da  Traitement  des  labiales  P,  B,  V,  F,  dans  le  rou- 
main populaire  ;A.  Lambrior).  7o  Métaihèse  de  TS  en  ST,  etdeDZ 
en  ZD  (  J.  Cornu  ).  J'avais  indiqué  le  même  rapprochement  dans 
mon  compte  rendu  de  \a.  Jiomonia  {Revue  des  langues  romanes,  2'  sé- 
rie, t.  m,  p.  138  ).  8°  Un  extrait  du  Roman  de  la  Rose  (  P.  M.  ).  — 
P.  450,  Corrections  sur  le  Dnnat  proensal  (B.-J.  Banquier).  Bon 
article.  10-11.  Il  faut  lire  Icevis,  lisse.  —  P.  454,  Comptes  rendue . 
1»  Histoire  de  la  langue  et  de  la  littérature  française  au  moiien  âge,  par 
Cil.  Aubertin,  recteur  de  l'Académie  de  Poitiers  (G.  P.).  Article 
favorable,  avec  certaines  réserves.  2°  Etude  hiatorique  et  littéraire 
Kiir  l'ouvrage  latin  intitulé  Vie  de  saint  Guillaume,  par  Ch.  Révillout 
(G.  P.).  Très-favorable.  —P.  472,  Périodiques.  —P.  479,  C/im- 
nique.  A.  B. 

Archivio  glottologico  italiano.  vol.  IV,  putitata  seconda. — 
G .  Morosi.  Il  Vocalismo  del  dialelto  leccese.  L'auteur  a  étudié  sur  place 
ledialecteiiont  il  parle. — P.  145,  F.  d'Ovidio,  Fonetica  deldialetto  di 
Campohnsso.  Travail  analogue  au  précédent,  et  composé  d'après  les 
mêmes  principes  de  précision  rigoureuse  et  de  classement  métho- 
dique.— P.  185,  Vincenzo  Joppi,  Testi  inediii  friulani  dei  secoli  XIV 
alXJX.  Utile  recueil  précédé  d'une  courte  notice  historique  sur  le 
dialecte  frioulan.  A.   B. 


Le  i/érnnt  rexponsabi''  :  Eiîne.«t  IIamilin 


Montpellier,  Imp.  centrale  du  Mkli. —  H amelin  frères. 


DIALECTES  ANCIENS 


POETES   LYRIQUES  CATALANS 


En  1868,  nous  avons  fait  de  longs  extraits  de  quatre  re- 
cueils de  poètes  catalans,  que  l'on  pourrait,  en  souvenir  des 
deux  savants  qui  en  ont  été  les  derniers  possesseurs,  nommer 
C kansonniers  Vega-AguilôK  Ajournant  d'autres  projets  ad  ka- 
lendas  grœcas,  nous  nous  servons  aujourd'hui  de  ces  extraits 
pour  le  petit  travail  suivant,  qui  comprend  un  index  généraP 
et  une  collection  de  pièces  inédites.  Dans  le  texte  de  ces 
pièces,  nous  hasardons  des  rectifications  souvent  plus  que 
douteuses  ;  mais,  dans  les  notes,  nous  donnons  les  passages 
correspondants  tels  que  les  porte  notre  copie. 

Chansonnier  A 

—  fccLi,  v°  Tornada.  En  lieys  seruir. 

ccLii,  v**  Tornada.  Prix  unolar  (ni  uoler?),  engeny,  seny  ni 
sciença. 

ccLiii. . .  Finit  une  autre  chanson. 

ccLiiii...  Los  angells...  Los  apostois...  Los  martris... 
Les  vergens. 

ccLV,  v°  Si  m'auets  toit  amor  del  tôt  la  pensa. 

ccLvii  Amarch  penser  m'a  venguts  sobtament. 

ccLiii  Joj  [])  ne  sogorn. 

'  Voyez  la  Codolada,  etc.,  pag.  39.  Ces  chansonniers  appartiennent 
tous  au  XV'  siècle  :  mais  nous  croyons  A  et  B  antérieurs  par  le  fond, 
C  et  D  (plus  semblables  à  ceux  de  Paris  et  de  Saragosse)  postérieurs 
à  l'année  1450. 

-  -  Nous  signalons  par  — ,  au  commencement  des  lignes,  les  interruptions 
provenant  de  feuilles  coupées,  perdues  ou  en  tout  ou  en  partie  non  écrites, 
et  par  ...  les  passages  où  l'écriture  est  effacée  ou  peu  lisible.  Nous 
notons  la  numération  (romaine  ou  arabe),  quand  il  y  en  a  dans  le  ms. 

5 


54  DIALECTES    ANCIENS 

ocuii,  v°  lui  sav  un  prat  hon  ha  fulhas  e  flors. 

ccLX  Resposta  de  .lohan  d'OHuella. . ,  Auty^e  réponse. 

"ccLX  Altre.  Jach.  Bonet.  Resposta  primera  de  Mossen  Sant 
Dainis  (?).  Autre  réponse.  Feuille  coupée  qui  peut-être  avait  été 
la  dernière  du  ni  s. 

—  ...  2'  strophe.  Mas  quant  mos  prechs  no  vol  auzir. 

xxi  Kiï  mi  donch  (dons  ?)  vey  bondat  e  cortesia . 

XXI,  v". . .  2"  str.  E  quant  vas  autre  no  crey 

Froxita. . .  2*  str.  Quay  (Guay?)  sim  mostra  brau  aquelli 

Sparsa.'Be  volgr'  esser  tan  beneuenturos 

P.  Dels  parladors  vulh  per  tôt  temps  mal  dir 

F.  Si  le  mon  perre  (!)  deuia 

F.  Si  par  sentir  de  cor  e  de  voler. 

Autre  pièce.  . .  Per  gran  pena 

P.  Sparsa.  Puys  he  d'amor  co  qu'auer  ne  solia 

P.  Dels  aymadors  so  li  pus  cossiros. 

P.  Dona  del  mon  nos  pens  que  per  amors. 

Madré  por  no  me  dar  nada.  Pièce  castillane;  écrit,  plus  mo- 
de7'ne. 

Cobles  de  la  ballesta.  Vna  ballesta  fas  fer. 
Guillem  de  Cabestang.  Lo  dois  cossire. 

Fragment  d'une  autre  pièce, 

Esparça.  Mant  homens  son  en  est  mon  quez  stan. 

Fartimens  Amich   nArnaut  cent  domnes    de   peratge  [Lo 
Coms  de  Proensa]. 

Atressim  pren.  . .  2"  etc.  Souen  me  fay  (!)  [li]  mey  ulh  men- 
songer, 

Amor  e  com  es  de  me  [Cadenet], 

Aici  com  sel  quiz  aim'e  no's  amat  [A.  de  Maroill]. 

Mossen  F,  March,  Al  punt  c'om  naix, 

M.  F,  M.  [Jom  merauell]. 

M.  F.  M.  Dona  val  tan  com  de  far  mal  s'esta. 

.M.  F.  M.  Donam  platz  ben  arreada. 

Siruentesch  de  F.  M.  Tots  grans  senyors. 

Fnif/mes.  V.  Revue  des  langues  romanes,  2e  se,  III,  5. 

C. .  .fan  . . .,  2«  str.  Ab  tal  voler  fes  amor  autreyar. 

Fer. . .  2e  str.  Mas  com  nom  par  puscats  fer  falhiment. 

Si  tôt  me  suy  [F.  de  Marselha]. 


i 


POETES  LYRIQUES  CATALANS  55 

Très. . .  Tornada  A  la  valent  comtesa  de  Proensa. 

Axi  com. . .  2^  str.  Si  col  signes  que  no  canta  ni  crida. 

Autra.  Ben  fayts  pernen  (!)  amer  que  paueh  vos  costi. 

Autra.  Axi  cant.  .  .  Tornada  Als  set  senyors  trameti  mon 
complany. 

Autra.  Si  com  per  dol  fenix  quant  es  antich. 

Autra.  Ab  joj  mou  lo  vers  al  comens  [B.  de  Ventadorn]. 

A  Dieu  coman  vostra  valor  e  vos. 

f .  Ixxi.  La  Reyna  de  Mallorques. 

Ixxi,  v°  Ja  no  es  hom  tan  prous  ni  tan  pr.esan. 

Ixxiii.  Eras  diraj  ço  queus  dej  dir. 

Ixxv.  Arnaut  Daniel.   Lo  ferm  voler  que   dins  el  cor  me 
iutra. 

Ixxvu.  Bernart  de  Ventadorn.  Amors  e  que  m'es  vijaire. 

Ixxix.  Guillem  de  Sant  Leidier.  Dompna  yeu  vos  soy  mes- 
satgiers. 

Ixxx.  Amor  com  faitz  amar  tan  aut. 

Ixxxi.  Andreu  Fabrer.   Sobrel  pus  naut   alament  de  tots 
quatre. 

Ixxxii.  A.  F.  Ja  perdi  vos  mon  cor  e  mon  talan. 

Ixxxiii.  A'itra.  Lo  tal  (fol?  )  dezir  qu'amor  me  fai  intrar. 
Endressa  :  Na  Beatriu. 

Ixxxv.  A.  F.  Elas  amors  tan  pauc  vos  cal  de  me. 

Ixxxvi.  A.  F.  Del  cor  pregon  mi  parton  li  sospir. 

Ixxxvn.  A.  F.  Domna  lo  jorn  que  me  perti  de  vos. 

Ixxxiii.  A.  F.  Si'n  lo  mon  fos  gentilesa  perduda. 

Ixxxix.   Serventes  fet  per  A.  F.  per  lo   passatge  de  Bar- 
beria. 

xc.  A.  F.  Pus  que  stors  suy  del  lach  de  la  mar  fonda. 

CI  (sic).  A.  F.  Combas  e  valhs,  puys,  montanhas  e  cols. 

cil.  A.  F.  Balada.  Ay  cors  auar  sias  rich  de  merce. 

cm.  A.  F.  Del  cor  me  cuidave  lexar. 

ciiii  v»  A.  F.  Aram  plats  be  com  Tafan  el  martire. 

A.  F.  Amors  qui  tost  fer  quant  li  play. 

—  Dança  e  scordit  (scondit)  i"  couplet.  Lo  jorn   qu'ieu 
vi  vostra  cor  gay . 
'  Cobles.  No  m'azaut  d'om  (Mossen  Jordi  ). 

Ya  donal  mon  nom  fara  del  blauch  groch. 


56  DIALECTES    ANCIENS 

.  . .  E  per  pasor.  Voir  plus  bas  Pus  vey. 
.  .  .  2'str.  Essen  pcr  los  fins  amans.  Tornada.  Tal  senyor  ai. 
...  2"  str.  Aylas  quant  cuidave  sauber. 
...  2*  str.  Li  auzelets  vey  que  per  semblant  festa. 
Lamia(?)  No  me  le  digais  mal.  Pièce  castillane  ;  écriture  plus 
moderne. 
Riambau  de  Vaqueiras.  Bona  domna  un  conseil  vos  deman 
R.  de  V.  S  [ieu]  ai  perdut  mon  sauber. 
R.  de  V.  Ar  pren  comiatper  tostemps  de  xantar, 
cxxvii. . .  del  Velhat.  En  breu  veirem  unafragor  (?)  abatre. 
Li  fait  de  Dieu  son  scur. 
Nuls  hom  no  val  ni  deu  esser  presats. 
cxxxiv.  De  pena'n  mal  e  de  mal  en:martire.  Tornada.  Na 
sobreprets  [Serueri?] 

Com  sia  just  que  per  gran  mantenensa.  Commentaire  mar- 
ginal. 

Cercats  duy  may  jan  siats  bella  e  pros  [Lo  Mercader  mal- 
lorqui] . 
Cel  qui  s'irais  ni  guerreg'ab  amor  [A.  de  Peguillan]. 
—  CLV. . .  Tornada.  Mos  irays  désirs  la  vostra  senyoria. 
Luis  Icart  e  Rejadell.  [Tenso]  2®  str.  Mon  crusells  plany. 
. . .  Dona  presan  on  gran  valor  s'alberga. 
Consolacio  ô  avis  d'amor.  Malaut  e  greujats 
Autra.  Icart  Eras  quan  vey  dels  brots  [caure]  la  flor  Tor- 
nada Castells  d'onor. 
L.  L.  Deux  sparses. 

Johan...  2"  str.  Dons  elhas  fan   de  lur  cor  lur  ministre 
Sparça. 

Canso.  Bacet.  Una  canso  novellavuU  xantar. 
B.  Temps  ha  que  gran  malaltia. 
Coble  del  cor.  Creure  podets  senyora  valerosa. 
0  vida  mia  oygats.  Quelques  lignes  en  prose. 
Senyora  valen. 
Sparsa. 

Dança  de  Nostra  Dona.  Ab  letras  d'aur  per  mesura. 
Mayres  de  Deu  valerosa  princesa. 
Astres  nos  fuig  (?)  pus  tan  sabers  se  planta 
Cobla  sparsa  diminutiva.  Autre  sparsa. 


POETES  LYRIQUES  CATALANS  57 

Bacet.  Dir  me  conve  si  bom  tinch  l'engony  flach 
Plant  fet  per  la  mort  del  Reuerent  Cardinal  de  Tholosa  fet 
per  fra  B.  Terribles  crits  agrès  provocataris. 
Dansa.  B, .  .  Tornada.  Bella  ses  frau  gloriosa. 
Un  drach  fe[r]aus  va  pel  mon  tôt  correns.  Endressa. 
Al  naut  prélat  Bisbe  de  Barchinona. 

Letoari  que  fra  B.  ha  fet  per  Garau  de  Massanet.  Coraus 
amichs. 
Amar,  seruir,  honran,  presan  e  tembre. 
. .  .2*  couplet.  Eras  perdenmon  repaire.  Tornada.  Bella  ses 
frau.  Parle,  comme  existant,  du  schisme  d'Occident. 
B.  Yeu  vos  requir. 
Pus  auets  bontats  despesa 

—  Lijaltats  ....  nda.  2°  str.  Li  auzelet  vej  que  per  sem- 
blant festa 
Sparsa  Ja  donal  mon. 
Car  vej  en  Peronej  (?) 

Autre.  Atressi  com  Tolifant  [R.  de  Barbezill]. Tornada.  Tal 
senjor  ai. 

Si  naj  perdut  mon  sauber. 

Amoros  joj.  Tornada.  Corals  blanchs  dins  vostr'agnella. 
Senyen  Bernats  dues  puncelles  saj,  Jacme.  Respon  vos 
donchs  puisque  ve'l  temps  de  mai.  Bernats.  Mos  jutges  pros  en 
aquestpartimen.  Jacme,  MossenRamon  que  bon  entendemen. 
Sentensa  donada  per  los  jutges  ço  es  per  los  vu  mantenedors 
de  Tholosa  lo  jorn  de  Santa  Creu  de  maj  ab  la  quai  fou  con- 
demnat  Bernât. 

E  quant  m'es  greu  quant  no  remire. 
Disputa  dels  hulhs  ab  lo  cor  e  parla  primer  lo  cor. 
Totes  ensemps  no  valen  tan  com  una. 
Un  xipellet  de  vu  flors  enramat. 
Eres  quant  vey  los  arbres  gen  florir. 
Tôt  lo  voler. 

Puigs  (  Puijs  ?  )  per  amors  fos  près  e  mantenguts. 
En  amors  es  gaug  e  tôt  alegriers. 
'  Trasfort  (?).Jovencel  qui  no  a' jmia. 
Père  Trasfort.  Ab  fletxes  d'aur  untas  d'erba  amorosa. 
L'estat  d'onor  e  d'amor  fet  per  Moseu  Jordi.  No  pot  ren  dir 


58  DIALECTES    ANCIENS 

ni  far.  Honor,  Amor,  etc.  Tornada.  Reina  d'honor  excellent 
Marf?arita . 

Domna  lot  jorn  vos  vajpregan. 

Chansonnier  B 

[  Eu    me  cuydej  que  nom  pogues. 

Qu'amor  val  (  Qui  amor  vol  ?  )  gen  retenir.  Tornada.  Reina 
d'onor. 

Eras  quant  vey  arbres  e  brots  florir. 

Feuilles  numérotés  (qui avaient  peut-être  appartenu  àun  autre 
chansonnier)  depuis  ccliv  à  ccclxxx  (?)  avec  de  considérables  in- 
terruptions.Fra,ncesch.  de  la  "Via.  Senyoradevalor.  La  Senyora. 
Dixmossen  sotsueguer,  etc.  Longue  pièce  en  forme  de  procès. 
Le  poète  est  qualifié  de  sotsvaguer  de  Gerona. 

Vers  tractant  de  la  salutacio  angelical  fet  per  en  Gabriel 
Ferruç  ab  lo  quai  guanya  joja.  Sancta  dels  sants  excellent  e 
suprema. 

Requesta  d'amor  tençonada  per  en  G.  F.  ab  la  quai  guanya 
a  joya  Reyna  de  prêts  doctrina  dels  saubers. 

G.  F.  Plus  flach  son  que  nulha  stopa  [  Dansa  ]. 

G.  F.  Complanffet  perla  mort  de  Rey  en  Feri-ando  {-\-  1410) 
en  personade  la  Reyna. 

Tenso  moguda  per  en  Gabriel  Moger  contfa  eu  G.  F.  stant 
en  Mallorques  per  les  dones  de  la  dita  ciutat.  Senyor  Ferruç 
vos  qui  tenits  procura. 

Tenso  moguda  per  en  G.  F.  an  Garau  de  Massanet.  Amich 
Garau  en  cuy  fis  près  sagensa.  //  propose  de  choisir  «  Bandos 
ho  playts  e  ses  nulha  valensa.  » 

Bernât  Metge  Seguiscal  temps. 

B.  M.  Jats  queu  sia. 

Aci  comença  una  ventura  la  quai  feu  en  Vicens  Comes. 

Aici  comensa  una  requesta  la  cual  trames  un  frare  a  una 
monge. 

Passio  amoris  studens  Ouidium . 

Aici  comença  la  faula  den  Torroella. 

Amis  mon  cuer  e  tout  a  ma  pensée.  Suivent  le  titre  Cen[t] 
balades  et  plusieurs  pièces  françaises,  la  plus  grande  partie  de 
(îranson.  Parmi  ces  pièces  se  trouve  le  nom  de  Jach.  Scriua(!) 


POETES    LYRIQUES    CATALANS  59 

Dansa  de  Figueres  (avec  une  autre  écriture).  Si  mor  sim 
planch  no  vaig  ploros. 

Clam  de  amor  fer  per  F.  Mort  cuyt  las. 

Lo  bell  guarda-cors  que  feu  fraRamon  de  Cornet.  Lo  meu 
car  fill  un  noble  garda-corps.  Preanibol;  13  strophes. 

Jaume  Rouira  en  lahor  de  uirtut^.  Qui  vol  al  mon  délits 
prêts  fama  granda. 

Seruentesch  tôt  uniçonant  fer  per  en  Père  Cardenal.  Si 
tots  temps  vols  viure  valens  e  pros. 

Prose  ajoutée.- Miracles  de  Notre-Dame.     . 

Aci  commensa  la  historia  de  Amich  et  Melis  [Écriture  du 
XVI 1"^  siècle  ?)  Une  jiage. 

Chansonnier  C  ' 

P.  March.  lommeravell. 

P .  M .  Al  punt  com  naix . 

--Strophe  d'une  poésie  incomplète.  Tots  los  potents  plens 
d'ergull  et  de  vent  (De  P.  M ,  ?j . 

—  Lo  dit  Mossen  Johan  Berenguer  de  Masdouelles.  Merce 
de  mi  hajes  mon  sol  senjor. 

Lo  dit  J.  B  de  M.  Dins  un  grau  prat  a  totes  parts  e  caire. 
Poésie  allégorique  :  elle  parle  rfes  septlops  mais  [les  sept  péchés). 

Maldit  fet  per  lo  dit  M.  Pus  dau  raho  a  mi  de  mal  perlar. 

Altre  maldit  fet  per  lo  dit  M.  Ara  conech  ço  que  no  co- 
nexia. 

Lo  dit  M.  Amich  mostrau  haver  que  us  vulla  be. 

Lo  dit  M.  Perquem  digues  que  sens  vostre  voler. 

Complants  per  depertiments.  Un  jorn  mirant  axi  con  far 
solia. 

Loament.  Lo  dit  M.  Certes  a  tots  quamor  es  cosa  pura. 

Lo  dit  M.  Si  prest  nom  val  la  vostra  gentilesa. 

Lo  dit  M.  Pus  per  amor  he  de  morir. 

Lo  dit  M.  Ja  que  lo  temps  nos  vuv  tal  com  solia. 

Lo  dit  M  .  Jo  vull  y  am  la  pus  bella  ques  mir. 

Lo  dit  M.  Ara  pus  son  si  forts  enamorats. 

Lo  dit  M.  Unissonant.  De  vos  amor  no  puch  ningun  be  dir. 

Lo  dit  M.  Caualler   Amor  me  te  incessantment  iunjat, 

Lo  dit  M.  Pus  nom  feu  be  ni  fer  nol  me  voleu. 

Lo  dit  M.  So  que  no  vol  ma  disposicio. 


60  DIALECTES    ANCIENS 

Rosposta  fêta  à  la  predita  obra  per  Mosaen  Marti  Gralla. 

Lo  dit  M.  Resposta.  Mossen  Francesch  lo  nohible 'guillo . 

Lo  dit  M.  Despuis  partim  de  la  bona  ciutat. 

Lo  dit  M.  Destret  damor  ab  cuytat  anament. 

Lo  dit  M.  Pusque  sabi  la  vostra  senjoria. 

Lo  dit  M.  Tant  he  soffert  que  pus  anant  (  auant?)  sofferre 

Lo  dit  M.  Si  James  puch  del  tôt  aconseguir. 

Lo  dit  mossen  M.  Quant  me  sove  d'aquelljorn  que  parti. 

—  P.  March  Be  sabem  tots. 

Mossen  Jacme  March.  Cobles  de  fortuna.  Quant  heu  cus- 
sir. 

Blay  Cesolles  (Ceselles).  Dona  gentil  e  dexellent  natura. 

Mossen  Jordi  de  Sant  Jordi.  En  mal  poders. 

Les  annuigs  de  Mossen  Jordi. 

Mossen  P.  Dez  Puig  caualler.  Pus  que  bontats. 

Mossen  Auzias  March.  Molt  he  tardât. 

Pastrana.  Ara  mon  cor  me  coue  descubrir.  Tenson  entre  lo 
cor  et  lo  cors. 

Tresfort  notari  Gran  carrech  han  huy  tuyt  lom  de  peratge. 

Père  Johan  de  Masdouelles.  Dona  donor  qui  viure  vol  ho- 
nesta. 

Cobla  segons  laqualitat  d'un  fat  gros  qui  pensa  molt  saber 
lo  quai  no  vull  dir,  fêta  per  lo  dit  Père. 

Johan.  Tôt  ignorant  se  pense  molt  saber. 

Cobla  sparsa  fêta  per  un  home  d'onor  qui  ha  perduda  la 
vergonja  fêta  per  lo  dit  P.  J.  L'ome  d'onor  qui  trenqua  la  pe- 
raula. 

Maldit  fet  per  lo  dit  P.  J.  Temps  es  estât  quen  anaueu 
pescar. 

Altre  maldit  fet  per  en  P.  Johan  en  la  setmana  santa  Liu- 
radeus  sou  a  mi  no  per  amor. 

Johan  Fogassot.  Si  be  non  sent  enves  lo  foch  d'amor. 

—  Tornada  d'une  autre  pièce.  No  se  quius  sou  ni  quius 
vullau. 

Resposta  denG-uillem  Tinter  (?). Per  lo  just  do  que  demanau. 
Tornada.  Fra  Vilagut. 

Guardia.  Monsenjer  meu  per  conseguir  (  Dansa)  Tornada. 
Bon  caualler  no  sia  smair. 

Johan  Fogassot,  Fins  aci  me  'beu  mostrada. 


POETES  LYRIQUES  CATALANS  61 

Senyora  pus  pietat. 

Lo  conort  de  Francesch  Ferrer. 

De  gran  dolor  cruzel  ab  mortal  pena. 

Laj  de  Père  Torroella,  Qui  podra  veurem(sic)  en  pobre  stat. 

Luis  de  Vilarasa.  Les  V  balades. 

P.  Torroela.  Si  voleu,  enamorats. 

Luis  deVillarasa  obra  unissonant.  Quant  yo  no(!)  pens  que 
ya  no  puch entendre. 

Père  Torroella  ma  fêta.  Enamorats   los  qui  per  ben  amar. 

Mossen  Jordi  caualler  no  sia  smair  (!)Enyorament  ennuig 
dol  et  dezir. 

Comiat  de  M.  J.  Souint  sospir  domna  per  vos  de  luny. 

M.  J.  caualler.  Dauer  lo  nom  e  lo  dret  tall  daymia. 

M.  J.  caualler.  Ara  hoyats, 

Mossen  P.  de  Queralt  caualler.  Ses  pus  tardarraen  e  de  vos 
partir 

Vilarasa.  Lennuig  es  meu  e  vostrel  dan. 

Mossen  Anzias  March.  Deux  pièces  connues. 

Rambautde  Vaqueiras.  Bona  dompnaun  conseil  vos  deman. 

Mossen  Jordi  de  Sent  Jordi.  Tots  jornsaprench. 

Ramon  de  Cardona  preuera.  Lo  vostre  sguart  ences  Tau- 
trir  gran  flama. 

R.  de  C.   Amant  amor  d'amor  suy  ben  amats. 

Deseximent  e  comiat  fet  per  Blay  Seselles.  Per  a  tots  temps 
hay  cremat  Tincensary. 

Pau  de  Belliure.  Domna  gentil  vos  m'encolpats  a  tort. 

Lo  setje  d'amor  fet  per  mossen  Jordi. 

Coble  equivocada  fêta  per  mossen  Jacme  March  a  mossen 
Père  March.  Resposta  fêta  per  m.  P.  M.  à  m.  J.  M. 

Mossen  Jordi.  Un  cors  gentil. 

M.  J.  Désert  d'amichs. 

Mossen  Bernât  Serra.  Pus  soy  destrets. 

Chansonnier  D     '    ' . 

f.  25  Perello  [nom  ajouté  en  écriture  moderne)...  perque 
dells  veritat   podeu  creure. 

26. . .  [p]  assat  yo  viu  Guillem  de  Capestany.  Fragment  de 
la  Gloria  de  Amor  de  Rocaberti. 

26  V  Macies  Pus  veho  que  mi  dolor  {pièce  castillane). 


fi?  DIALECTES     ANCIENS 

35  (?)  Obra  fêta  per  mossen  Auzins.  March  coronada. 

Fs  rc.|Uosta  de  amor  de  Madame  sans  Merci  {en  écriture 
/iliis  modfrne  .  No  ha  gran  temps  caualquant  io  pensaua[7VflC?. 
r/'.'l .  Chartres,  par  Oliver). 

'M  v„  Auzias  March.  Quelques  pièces  connues. 

15  Mossen  Jaume  March.  [D]os  sou  los  alts  segons  lo  meu 
parer. 

46  Auzias  March. 

51  Mossen  Jachme  March.  Un  sobres  pler  mes  vengut  per 
lo  veuie. 

55  Auzias  March 

03  (?)  Complanta.  Délit  nom  ve  per  me  dir  gran  tristura. 

Sparça  de  P.Torroella.  Per  très  migans  son  poder  abilita. 

Complanta  de  la  mort.  93  v».  Ho  (?)  [mon]  car  fill  continuu 
per  tu  mor. 

94  Lahors  de  P.  Torroella.  Callen  aquells  abzegats  per 
anior. 

95  v»  Figueres.  Lahors  de  sa  senyora.  Enteniment  saber  ne 
sentensia  (?  lisez  fentesia). 

96  vo  Obra  de  Figueres  ab  la  sua  oracio 

97  Maldit  en  cobles  de  Masdouelles.  Pus  dau  raho  a  mi 
de  mal  perlar.  —  Suit  Masdouelles. 

Débat  de  mossen  Masdouelles  ab  amor.  Parla  primer  lo  dit 
M.  13  répliques  avec  leurs  tornades. 

133  Canco  damor  tençonada  fêta  per  Arnau  March. 

134  Mossen  Bernât  Serra.  Pus  so  destret  nom  lengats  a 
follia. 

134  Vo^  Mossen  Jordi.  Désert  daraichs. . . 
135 vo  M.  J.  Un  cors  genill.  .  . 
136  vo  [L]  ennuig  es  meu   e  vostrel  dan. 
138  Obra  fêta  per  Ffranci  Guerau  perlahor  de  la  nobladona 
Leonor  de  Cardona.  Quim  pora  [dir]  donzella  virtuosa. 

138  v»  Altra  fêta  per  lo  dit  Ffranci  Guerau.  Si  col  malalt 
(juant  la  febrel  combat. 

l-»9Sparca  com  lo  questa  sentenciat  a  mort. 

139  vo  Altra  obra  fêta  per  lo  dit  Ffranci  Guerau.  Un  gua- 
rant  (sic)  enuig. 


POETES   LYRIQUES    CA.TAIANS  d^ 

140  Comiat  de  mossen  Jordi. 

140  voCobla  equivocada  fêta  per  mossen  Jachme  March,  etc. 

141  \ltra  sparsa  fêta  per  fra  Vilagut.  Cei'tes  dich  pus  que 
la  millor. 

/4M^/'(îssparses  de  mossen  Corella,  Luis  de  Requesens,  Franci 
Guerau . 

144  Mossen  Jordi.  Aiustat  vey. 

Mossen  P.  de  Queralt  caualler.  Sens  vos  {lisez  pus)  tardar 
me  ve  de  vos  partir. 

145  Mossen  Jordi  de  Sent  Jordi.  Tots  jorns  aprench. . 

146  Desaximent  e  comiat  d'amor  fet  per  Blaj  Seselles. 

14(3  yo  Pau  de  Belluire.  Dompna  gentil  vos  m'inculpats  a 
tort. 

147  En  Guillem  de  Berguedaan  Père  de  Gauseran.En  Gau- 
seran  gardats  cal  es  lo  pes.  Respos  den  Père  de  Guauseran. 
Sener  Guillem  lo  pes  que  dit  maues.  Cette  pièce  a  été  ajoutée. 

147  Vo  Lay  de  Père  Torroella. 

152  Vo  Lay  de  Marti  Garcia. 

153  v"  Obra  figurativa  ab  rims  estrams  en  y  lahor  del  Rcj 
fêta  per  Dionis  Guiot,  notari  de  Valencia.  Rejs  magnifichs 
trop  me  per  causa  folla. 

154  v°  Mossen  P.  Marcli.  Quant  eu  cussir? 

157  v°  Blay  Cassolles  (sans  doute  Cesselles;.  Ubra  encaJc 
nada,  corrigé,  cruada  Dona  gentil  e  d'accellent  natura. 

158  Altre  obra  fêta  per  mossen  Jordi  de  sant  (?)  [Jordi]  Uni- 
çonant  aperiada  la  mejtat  En  mal  podiers . 

158  vo  Mossen  P.  des  Puig  caualler  seruentesch.  Pus  que 
bondats. 

159  Débat  del  cor  ab  lo  cors  encadenat  e  unissonant  fet  per 
en  Pastrana. 

160  Trasfort  notari  unissonant  croada.  [G]ran  correg  han. 

161  Johan  Roquafort  solta  e  eroada.  [Ejnamorat  no  fou 
mes  de  I  solda . 

161  Depertiment  fet  per  soit  et  encadenat.  Tots  mes  desigs 
e  pensa  tan  jojosa. 

162  Luis  de  Vilarasa.  Les  V  balades. 

164  Gabriel  Ferruig  requesta  damor  ab  rims  crohats  e 
encadenats  ab  ampelt  e  bioch  tôt  soit  e  capfinit,  Rejna  de 


61  DIALECTES    ANCIENS 

prots  doctrina  dels  sabens.  Resposta  de  la  enamorada.  Repli- 
cacio  del  enamorat.  Replicacio.  Tornada.  Resposta. 

1C4  V  Johan  Fogassot  notari  en  lahor  de  la  veiiguda  del 
Rej  solta  ab  rims  crohats  e  un  perdut.  Rey  virtuos. 

106  Valmanja. 

160  V"  P.  Torroella.  No  m'aiut  Deu. 

167  P.  T.  No  sent  ne  veig. . . . 

167  v°  Ara  pots  fer  amors  tes  voluntats. 

108  vo  No  so  partit  e  partint  me  partia. 

Fraucesch  Ferrer.  Qui  be   serueix  lexan  que  grat   ne  ten. 

169  v°  F.  F.  [D]  e  fi  en  fi  uos  am  tan  finament. 

. . .  193  Altra  obra  so  es  maldit  fetper  en  Simon  Pastor.  Per 
diuulgar  lapractica  maluada, 

193  v"  Anthoni  Valmanya  obra  intitulado  Sort,  etc.? 

200  V  Altra  obra  fêta  per  lo  dit  V.  per  una  senjora  que 
repta  son  enamorat  de  desconexensa.  [Q]uala  vuj  es  que  per 
amor  lenguesca. 

208  Altra  obra  apellat  escondit  ab  la  quai  obra  Tenamorat 
demunt  dit  se  escusa  de  la  colpa  falsament  imposada  per  sa 
'namorada.  Quai  es  aquell  ennemis  (?)  qu'a  bastat.  Unisonant 
et  mandat  compas. 

209  v°  Altra  scondit  fet  per  lo  dit  V.  scusantse  e  desan- 
colpantse  de  una  colpa  falçament  imposada.  Novellament 
he  sentida  Tempresa.  Dans  la  marge.  Fou  espandida  la  pré- 
sent escusacio  diumenge  a  vi  de  maig  any  mcccclviii  per  mi 
A.  V.  en  lo  cor  de  Valldoncella  bon  se  ténia  consistori  de  la 
canco  (tanço  ?)  del  sastre  e  del  argenter  quai  offici  merexia  mes 
hoiire[s]. 

211  V.  Junt  es  lo  temps  fer  de  ma  dolor  crida. 

1.    —   GuiLLEM   DE    BeRGADAN    AN    PeRE    GaUSEKAN 

En  Gauseran,  gardats  quai  es  lo  pes 

Que  porti  eu  ses  poderlo  tocar; 

Pousar  nom  play,  vull  o  no  pusch  portar, 

I''  sil  me  lunj  ser[t]  saj  que  mes  me  pes. 

Lop  es  nomnat,  lop  es  e  lop  no  es  ; 

Mas  so  quel  fech  clapat  de  nègre  e  blanch 


POETES    LYRIQUES    CATALANS  6f» 

Desigs*  en  mays  qui  est  fait'  de  carn  e  sanch 
Qu'eu  desiguantz  pendre  fuj  primer  pes. 

Respos  d'en  Père  de  Gauseran 

Sener  Guillem,  lo  pes  que  dit  m'aves 
Gint  portaray,  sil  pusch  ferm  abras[s]ar, 
I  enquer  grieu  mort  me  playra  sufertar. 
Pus  deftallins  sobre  lo  pes  caigues. 
Vos  forets  gay  s'est  lop  l'anquam  '.mordes, 
leu  si  mon  cor  ab  fort  arrap  m'arranch  ; 
Son  bell  clapat  ha  fayt  catiu  de  franch 
A  uos  assats  y  assats  à  mi  de  mes\ 

2.  —  Tenso" 
(Senyer  en  Peyres ) 

Car  vey  en  Peyronet  ^  ploran 
Venir  ab  n'  Arnau  tritxador, 
De  tots  mos  amichs  ay  pasor 
E  demandels  ab  regart  gran  : 
Diatz,  amich,  e  com  estan 
Mes  payres  '  el  Rey  mon  senhor  ^  ? 

Sius  han  fait  onta  ne  dan, 
Ni  hauets  trobat  robadors  ®, 
Diatz  ho,  car  vengar  vos  han 
Mant  homs  *"  que  sia  de  valors  ; 
E  tornatz  vostra  *'  plor  en  xant, 
E  parlem  d'armes  e  d'amors. 

'  Ms.  se  deig  f  —  -  Ms.  fanch  —  »  Ms.  lenquatn.  —  *  Cette  énigme 
n'a  pas  le  sens  aussi  mauvais  que  le  pouvait  faire  croire  le  nom  de  Ber- 
gadan;  il  s'agit,  à  ce  qu'il  parait,  de  célébrer  un?  dame  appelée  Lop 
{on  se  souvient  de  la  fameuse  Loba  de  Penaultier)  et  ayant  une  tache 
(clapat)  de  celles  qu'on  attribue  à  un  désir  ('iesig)  de  femme  enceinte. 

-  â  Le  Chansonnier  A  contient  deux  transcriptions  de  cette  pièce.  La  pre- 
mière {Al  a  perdu  les  deux  premiers  vers  et  conserve  seulement. . .  e  per 
pasor  E  demandels.. .  des  deux  suivants.  Nous  donnons  la  seconde  dans  le 
texte.  —  6  Peyroney  {pour  Peyronell  )?—  ~  A.  parens.  —  "  A.  sonyors. 
Toutes  ces  finales  en  or  devraient  être  sans  s.—  '^A.  raubadors.-  'o^.  hom. 

—  **  4  vostre. 


DIALECTES    ANCIENS 

(  Peyronet) 

Major  pasar  agues  eritan', 
C'om  vis  fugir  en  mil  sols  d'or-, 
Can^  la  bandera  de  color 
D'A-nglesola  vos  vis  denan; 
Seny'  en  Peyres,  pats  ab  ajtan 
Pusch  *  dir  a  bon  entendor  ■'. 

D'Anglesola  trasques  entan 

Senyor  li  vostra  posador 

A  despit  ez  a  desonor  '^, 

E  no  li  hauetz  fait  deman; 

Perqu'  jeu  hich''  suy  vengutz  ploran 

Ez  ab  mi  n'  Arnau  tritxador. 

3.  —  La  Reyna  de  Mallorques  * 

Ez  yeu  am  tal  que  's  bo  e  belh, 

E  suy  gaya  col  blanch  auzelh  ^ 

Que  per  amor  cria  son  chant, 

E  suy  senyora  e  capdelh. 

Eu  vueylh  qu'en  am[or]  (?)nos  n'apelh. 

Car  sus  totes  suy  mils  aman, 

Que  chausit  ay  lo  pus  presan 

Et  mils  del  mon,  e  l'ame  tant 

Quez  en  pensan  lo  cuey  veser 

E  car  tenir  ; 

E  cant  no  's  ver 
Un  desesper  me  fer  ten  gran  *°, 
Cant  lo  say  lay  ves  Ffrança. 
L'anyorament  el  gran  désir 
Qu'ieu  ai  pei*  vos,  me  cuid'  alcir, 


"  .1.  MaJor  pasor  agues  l'altr'  an.—-  A.  ves  fugir  ab  mil  sous  d'or  {lisez 
inilsolilor  .  —  ^  A   c:\v.d  —  '•  A.  Pux.  —  ■■  A.  ontonrlnflor.  —  *'•  A.  e  a  d. — 

A.  hic  —  >*  Nous  croyons  qii  on  peut  lire  arec  sûreté  lUynaetnonpas 
Ffemnaou  Damna, et  que  celte  reine-poëte  fut  Constance. fi'le  d'Alphonse  IV 
d'Aragon,  laquelle  se  maria  en  1325  avec  Jacques  II  de  Mayorqae.— 
''  Us.  solelh    —  "'  if*.  L-eii. 


POETES    LYRIQUES    CATALANS  ù'i 

Mou  dois  senjor  e  car, 
E  ben  Uey  poray  tost  mbrir 
Per  vos  qu'ieu  am  tan  e  dezir, 
Si  breu  deçay  nous  vey  tornar, 
Que  tant  me  tarda  Tabressar 
El  raysonar 
E  tota  res  ; 
E  quant  me  pens  queus  n'ets  anats 

E  no  tornats, 
E  quan  lunyats  vos  etz, 
Desesperatz  caix  viu  mon  cor: 

Per  pauc  no  mor, 
Si  breu  no  n  ay  guirença. 

Tornada 
Merce,  mairits,  que  sufrenpas 
Los  mais  quera  dats  e  donchs  tornats, 
Que  nulh  trésor 
No  val  un  cor 
Que  per  vos  mor 
Ab  amorosa  pensa. 

4.  —  Dança  de  Nostra  Don 
Bacet* 

Ab  letras  d'aur  per  mesura 
Seruiray  lausors  notables 
De  vos,  humils  verges  pura, 
Mayresde  Dieu  redutables'-. 
Fflors  mot  belha  d'auta  planta, 
Vegats  quem^  fay  vostra  forma  : 
Can  myr  luy  elha  diforma  (!) 
Mos  grieus  mais  e  ma  complanta: 
E  per  santedat  queus  mura 
De  virtuts  inceparables 
Trespessats  tota  natura, 
Mayres  de  Dieu  redutables. 
Peyra  fina  pr-eciosa, 

«  Ce  poêle  était  presque  inconnu  ;  c'est  pourquoi  nous  donnons  cette 
pièce,  qui  n'est  pas  des  meilleures  en  son  genre. —^  Ms  re.iublables.  — 
^  Ms    quom. 


as  DIALECTES    ANCIENS 

Despuys  que  Dieu  fech  lo  segle, 
"Van  per  dret  compas  e  règle 
Le  trobador,  Virtuosa, 
Lausans  tug  vostra  figura 
Ab  novelhs  chants  e  agréables, 
E  de  vos  laus  nols  fretura, 
Majresde  Dieu  redutables. 
Tots  vostres  laus  quils  por  dire  ? 
Qu'autre  mays  Dieus  nols  diria, 
Tants  son  e  de  tal  valia, 
Quel  pus  mendres  sech  remire 
A  sent  Bernât,  que'b'  gran  cura 
Vos  lausa  d'innumerables, 
E  fech  sagrad'  escriptura, 
Mayres  de  Dieu  redutables. 

Tornada 

Belha  ses  frau,  vestidura 
Dels  paubres  nuts  misérables, 
DesUiurats  nos  de  tristura, 
Majres  de  Dieu  redutables. 

Eodressa 

Cauelheresa  d'altura 
De  rendiment  (?)  onorable 
Madona  Costabeura  (??) 
Legits  los  prédits  vocables. 

5.  —  Pau  de  Belluiure-  [Chans.  C) 

Dompa  gentil,  vos  m'enculpats  à  tort  : 
Si''  m'aiut  Deus  sotsne  mal  informada. 
Car  per  Tristanj  no  fon  sa  don'amada 

'  Que'b  ou  qn'eb  pour  qu'ab.  On  trouve  souvent  dss  cas  setnblables 

-  On  connaissait  un  seul  couplet,  souvent  cité  par  une  allusion  au  Vir- 
gile m  igicien,  de  ce  poète,  qui,  d'après  Aiizias  Mardi,  pi^r  aninr  sa  dona 
lui-n:i  foll.  l.a  pièci'  qu'on  va  lire  ne  manque  pas  d' intérêt  ■  nicdheureuse- 
iwnt  nous  avons  oublié  de  noter  les  variantes  du  chansonnier  D. 

•  Ms.  E  si. 


POETES   LYRIQUES   CATALANS  69 

Mils  ne  tant  ferm  ne  pus  leyal  ne  fort, 
Que  n'es  per  mi  la  dona  qu'es  leyal, 
Can  jeu  vey  cert  qu'en  vol  hu  a  cabal; 
Mas  quant  eu  vey  dos  pardals  en  l'espiga 
Reneg  d'amor  e  dig  vos  que  no  liga. 

Parque  no  preu  lo  valent  d'una  figa 
Dona  del  mon  ne  val  [pjoyrida*  malla, 
Qu'en  Yny  d'altri  veu  patita  palla, 
Ez  en  lo  seu  no  veu  la  grossa  biga  ; 
Ans  la  preu  menys  que  fanch  ne  podrit  fems 
E  vull  la  mal  com  marinier  mal  temps, 
E  crech  que  [a]  Deu  sia  caus'anuyosa 
Dompna  vestir  la  pel  de  la  rabosa. 

Nou  hu  dich  per  vos  car  say  qu'ets  valerosa, 
Mas  parle  tan  per  les  que  fan  malesa 
Rompent  l'estil  de  vera  gentilesa, 
Dans  fel  per  mel  e  carn  pudent  per  rosa  ; 
Les  quai  no  vull  amar,  ans  las  desam, 
Puiys  fan  ab  art  dos  pejs  caur'en  un  am, 
E  simbell  fan  d'amor  ab  traydor  loure'  ; 
E  no  stan  belis  dos  coltells  en  un  foure. 

La'  cruseltals  de  dompna  que  nom  planya 
Qu'ab  un  sguart  tôt  sol  me  pot  ser  metje, 
E  nou  vol  far,  com  si  fos  hun  aretge 
Contra  la  fe,  de  merce  fora  stranya. 
Donchs  perqueu  fayts  ?  cuydats  fer  benefici 
En  dar  l'amor  [a]  hun  sol  vassall  afflicte, 
Qu'ieu  contra*  vos  jamay  no  fi  delicte 
Perquem  tingats  en  hoy  hi  en  deffici. 

De  Dieu  tôt  cert  e  de  gents  haurets  blasrae, 
C'aissim  fassats  morir  en  crusel  signe; 
E'squassejant  me  d'un  sguart  bénigne 
Portât  m'auets  al  derrer  punt  de  spasme 

*  Dans  le  ms. .  la  première  lettre  de  ce  mot  a  été  biffée. 

2  James  Falcô  no  vench  taul  prcst  al  loure...  Em  ieu  simbell  d'una 
alcandora  linda.  F.  Lavia. 

3  Ms.  A.  —  ^  Ms.  coneix. 

6 


70  DIALECTES    ANCIENS 

Qui  s'es,  iiis  pus*  Tenerbat  colp  profonde  ; 
E  si  merce  ab  vos  breu  nom  recorre 
Morray  sobtos,  pus  vey  la  mort  quim  corre, 
Mas  sius  volets  quitim  farets  e  monde. 

Tornada 
De  vostre  tort  a  vos  mateix'  en  clam 
Dienme  fais  qu'en  diverses  lochs  am, 
Ajci  com  mants  qu'en veje  los  fa  moure  : 
No  menjen  l'os  nel  volen  lexar  roure. 

6. —  MossEN  Jaume  March^ 

[Djos  son  los  alts  segons  lo  meu  parer 

Ab  que  amor  fa  sa  perfeta  obra, 

E  del  hun  sols  alqun  pora  esser 

Un  poch  temps  près,  ma  salibertat  cobra; 

Que  no  stan  ^  pus  lo  durar  d'un  cars  tal 

Sino  en  tant  com  se  tardai  partir, 

Si  sta  be*  l'als  don  l'altr'  ait  deu  venir, 

Sens  lo  quai  res  noy  ha  perfet  ni  val . 

Siy  son  abduy  vos  dich  que  ['s]  cas  mortal, 
E  tal  que  ans  vos  porieu  morir 
Que  'ver  remey,  si  s'en  volgues  jaquir 
Amor  axi  sens  [cjobrar  pus  j  ornai  ; 
Per  que  nos  pot  fer  sens  una  manera 
Qu'ell  ha  de  far  una  tal  egualtat, 
Quel  loch  don  ve  l'occasio  primera 
Haials  dos  alts  e  no  si  a  scusat. 

D'aquest  dos  alts  lo  primer  [es  lo  fat  (?)] 
Qu'om  ha  tantost  sol  vehent  la  persona, 
Jove  gentil  ab  gest  pie  d'onestat 
E  moltde  bens  de[ls]  que  natura  dona. 
Aquest  aytals  mou  del  ulls  e  primer 
DeLu]  dar  al  cor  que  altre  mouiment, 

'  Ms.  mis  po3  ? 

•  On  connaît  peu  de  poéxies  de  ce  célèbre  chevalier,  auteur  d'un  Dic- 
tionaire  de  rimes  et  l'un  des  fondateurs  du  Consistori  del  gay  saber  de 
Barcelone.  — »  Seau?  —  ^  H  parait  que  le  sens  exige  :  Si  no  sta. 


POBTES    LYRIQUKS    CATALANS  71 

Per  que  tal  ait  sino  's  primerament 
No  pot  depuys  esser  tan  vertader. 

Enapres  ve  Taltre  queus  dich  darrer 
Quen  Tesperit  fa  son  bon  fonament, 
Car  vol  bondat,  graci'  e  sentiment 
Ab  gentil  cor,  seny,  vertut  e  saber. 
De  cosas  tais  e  semblants  s'acontenta 
L'enteniment  hi  s'i  va  délitant  : 
Aquest  es  l'ait  que  dona  la  empenta 
E  des  amar  (?)  ver'  amor  reffermant. 

Tais  son  los  alts  e  semblant  virtut  han 
Que  daros  fa[n]  la  bona  soldadura, 
Ab  que  d'amor  soldats  amig  fan  gran  * 
Los  dos  volers  e  [s]  fa  l'obra  que  dura  ; 
E  jo  per  ço  li  suplich  tan  com  sce 
Que  pus  en  mi  vol  tan  perfet  obrar, 
Dantmels  dos  alts  que  nos  vuUa  cansar, 
Ans  lia  on  sap  los  vuUa  dar  tambe. 

Tornada 

Digna  de  molt,  eu  a  vos  ^  clam  merce, 
Que  si  amor  demius  voira  tocar, 
No  li  vuUau  gens  en  res  contrestar, 
Ne  guardeu  so  si  marescli  tan  de  be. 

7.      MossEN  Père  March 

Dona  val  tan  com  de  far  mal  s'esta  % 
Ez  a  coselh  de  bon  hom  vol  atendre, 
Es  ^  guard  d'aço  que  mal  la  pot  apendre 
E  ques  albir  si  fa  mal  ques  sabra  ; 
E  que  bes  guard  de  tôt'  auinentesa 
E  davol  gest  e  de  mal  perlamen, 
E  tema  Dieu  el  marit  examen 
E  quen  bondats  pensa  mais  quen  bellesa. 


*  Ms.  anuig  (?)  afan  yran.  —  *  Ms.  cabos. 
•'  Ms.  c'eata.—  "^  Ms.  Ez. 


78  DIALECTES    ANCIENS 

S.  —  MossEN  Pere  March 

Dompnain  platz  ben  arreada 

E  caualhier  ben  armât, 

E  donzella  enfresada 

E  seruen  arremengat 

E  caual  ab  gran  illada, 

Ardit  e  be  afFrenat 

E  sufren  la  trenujtada. 

[Em  platz  veser  liost  parada] 

En  loch  pla  e  ben  p[elat], 

E  veser  foch  e  fumada 

Es  enemich  assenât 

C'aia  tenir  tots  jorns  bada, 

E  no  si'asegurat 

Si  donchs  no'sta  dins  murada. 

E  platzme  '  la'nemorada 
Ab  lo  cors  prim  e  delgat, 
Ab  ques  tinga  per  pegada 
De  me  per  enamorat, 
E  quem  fassa  gran  hulhada 
Per  tener  mel  cors  ^  pegat 
Ela  quan  sera  preyada. 

Enquer  hi  a  plus  quim  agrada 
Senyor  ben  amesurat, 
C'om  noi  seruesca  de  bada, 
Ardit  e  franch  ses  barat, 
E  que  tinga  gran  maynada 
Segons  Tesser  que  es  dat, 
Que  Tais  es  causa  trop  fada. 

[Tambem  platz  grossa  cassada, 
L'exir]  del  sol  esp[erat], 
E  que  fos  aperelhada 
Missa  [per]  clerga  espectat, 

'  Ms   plalme.  —  -  Cor  '?  Ce  serait  plus  digne  de  celui  que  Santillann  qua- 
lifie d'auteur  de  proverbes  de  grande  moralité. 


POETES    LYRIQUES   CATALANS  73 

Baxa  que  no  pas  cansada, 

Sino'n  dia  feriat 

Per  fer  la  festa  honrada. 

9. —    ESCONDIT    FET    PER    MOSSEN   JORDi' 

Tan  son  li  mais  quem  fay  sofrir 
Com  nom  cresets,  dona  valen, 
Que  de  cert  vos  am  leyalmen, 
Quel  cor  del  cos  me  vol  sortir. 

Lo  jorn  qu'eu  vi  vostre  cors  gaj 
Al  pun[tj  quem  mis  en  vos  amar 
Mon  cor  nos  pot  certes  lunjar 
Un  punt  de  vos  per  autra  may, 
Donchs  cresets  me  qu'ai  no  désir 
Ne  tinch  null  altre  pensamen 
Mas  sol  qu'en  puxa  finamen 
A  vos  amar  e  car  tenir. 

Si  nous  dich  ver  que  (eu?)  prech  aDeu 

Que  [de]  tal  crim  si'  acusats 

Don  prenga  -  mort  apedregats 

Per  mans  d'un  malestruch  jueu, 

Si  que  planguts  d'aycell  martir 

No  sia  pas  de  nulla  gen, 

Ans  me  censelmen  mal  disen  *, 

E  ma  fas  vengan  escupir. 

Si  non  dich  ver,  qu'ans  de  ma  fi 

Ab  ira  fort  me  desesper, 

Que  l'arma  [e]l  cors  ab  Lucifer 

Dimonis  mil  porten  prop  si, 

E  nom  puixem  may  sabollir, 

Ans  per  tots  temps  haje  turmen[t], 

'  Cet  escondit,  quoique  différent  dans  la  forme  métrique,  est  très-sem- 
blable dans  le  fond  à  ceux  de  B.  de  Born.  Petrarca  et  Mallol.  On  peut 
observer  que  les  deux  poètes  catalans  se  permettent  des  menaces  encore 
plus  horribles  que  celles  de  leurs  modèles.  —  -  Ms.  jirenga.  —  ■'  Ms. 
Ans  mal  disent  me  censelmen.  Nous  ne  connaissons  pas  ce  verbe,  qui  est 
P"ut-être  corrrimpu. 


74  DIALKCTES  ANCIENS 

E  110  trop  amich  ne  paren, 
Qucm  vulla  be  sino  mal  dir. 

Tornada 

Castells  d'[h]onor  prech  Deu  m'asir 
Ab  tots  les  Sants,  si  coralmen 
Nous  80  fis  com  leyal  seruen, 
Eus  vulla  amar  sens  defallir. 

10.  —  ...   DK  Yelhat  (?)  * 

En  breu  veurem  una  fragor  (?j^abatre 

De  vas  mig  jorn  que[ll  mar  fondra  pels  camps 

La  flor  el  frug,  puys  sera  tans  grieus  fams 

Que  d'alguns  bens  costaral  dine[r]  quatre  ; 

Apres  la  mort  perseguira  tan  vida 

Quels  pochs  e  grans  alcira  vint  à  vint, 

Si  que  dels  vins  no  restaran  lo  quint 

Del  solelh  colch  tro  l'infernal  pertida. 

Car  us  grius  vey  que  sus  TEsglesia  crida 
Ffaren  del  bech  al  portai  de  la  fe, 
Hon  poch  a  poch  lo  pilar  quil  soste 
S'aflequeseix  e  chay  deuers  l'asida. 
Perque  Testors  met  la  perditz  a  clusa 
Sus  Taltar  vil  (?),  on  se  beura  del  sanch 
L'ajgla  gentil  que  sap  visar  al  ranch, 
On  ronicornpels  aguilospren  musa. 

Pero  nol  val  doctrina  d'art  confusa, 
Si  manifest  non  adust  per  simbell 
Lo  cor,  el  fren  dun  blanch  laupart  nouell 
Noyrit  de  leyt  o  de  carn  d'orne  crusa, 
Neta  de  crims',  sens  carnal  payre  nada 
En  temps  d'iuerns  e  de  guerres  duptos, 
Ez  autremen  non  aura  dels  ayglos 
Tro  si'  ab  *  joy  la  colompna  dressada. 

'  Cette  innce,  déjà  naturellemenl  obscure,  l'est  devenue  davantage. 
yi.ir  la  corruption  de  son  texte.  —  -  Ms.  frayor?  —  '  Ms  crins  -  '•  JW*. 
si  dd. 


POETES    LYRIQUES    CATALANS  75 

Mas  dubtans  [cors  que]  triga  la  Jornada 

Cessiran  trop,  car  un  drach  molt  cruzel 

[Veuran]*  orat  volar  sus  vas  lo  cel, 

Que  geta  foch  stant  gola  badada  ; 

Lo  quai  foch  creix  e  destrutz  e  derrocha 

Viles  e  borchs  e  castells  e  ciutats 

E  trencha  murs  e  portais  e  valhats 

El  plus,  el  mils  del  remanen  que  tocha. 

Par  ayços  pert  sobrel  fluvi  la  rocha 
Per  on  s'enclau  lagran  vapor  del  fum, 
El  golf  stern  don  spirital  lum 
SotratsT  aurelh'  a  la  serpent  badocha, 
Moren  Testorç-  en  la  val  tenebrosa 
^   Qui's  Tabre  vert,  per  qui  fonch  peradis 
Ubert  ab  gaug  als  deuots  pelagris 
Ques  eren  filhs  de  virginal  sposa. 

[Tornada] 
Mos  belhs  saffirs,  vos  ets  mar  preciosa 
Qu'esta^  forest  enclau  e'  ncircuncis. 
Or.  crex  le  past  que  Tolifan  nojris 
Qui  deu  portar  als  franchs  vide  joyosa. 

11 .  —  Anonyme 

D'un  xipelet  de  vu  flors  enramat 
Vos  flu  presen  per  vostra  cap  garnir, 
E  son  les  flors  la  blanca  flor  de  lir, 
L'autra  gessem  plena  de  gran  beutat  ; 
La  tersa  es  una  belha'  nglantina, 
La  quarta  es  la  gentil  clauellina, 
La  quinta  es  viola  ben  olen, 
Les  autres  son  gaug  e  rosa  brulhen, 

Del  liri  flor  s'enten  quez  est  molt  bella, 
E  del  gessem  s'enten  quez  est  molt  blancha, 
La'nglentina  qu'est  conexens  e  francha, 
E  del  clauell  qu'est  ferma  ses  parelha  ; 
Acompar  [a]  la  viola  saber, 
E  la  del  gaug  que  sots  blanda  y  ver  ; 
'  Ms.  .  .en  —  -  Ms.  iesturç.  —  *  Ms.  quenta 


75  DIALECTES  ANCIENS 

Lo  roser  es  quez  aculhir  sabetz 

De  totes  gens  segons  valen  lurs  prêts. 

Margarida,  lo  xipellet  vos  do 
Car  er  jsnell  y  dret  (?)  sobre  la  testa 
Qu'eu  cuit  *  de  flor  de  flors  deu  esser  lesta, 
E  vos  belha  prenetz  '  lo  sius  par  bo  ; 
Be  que  milhors  lo  merexets  cent  tan, 
No  guardau  elh  mas  sol  [lo]  bon  telan 
Qu'ay  de  seruir  vostre  cors  auinen, 
Valense  bell,  grasit  de  tota  gen. 

Tornada 

Belha  dompna,  vostre  cors  ben  stan 
Enten  e  pot  e  sab  e  val  aytan 
Que  tôt  lo  mon  n'es  d'ujmay  conaxen  ; 
De  mius  recort  qui  suj  vostre  siruen. 

12 .  — Andreu  Febrer^ 

Si'n  lo  mon  fos  gentilesa  perduda 
Eu  saj  lo  cap  de  la  fon  qui  la  dona, 
Qu'ins  en  Tostal  del  pros  coms  de  Cardona 
La.  trobarets  que  nos  camge  nés  muda  ; 
On  près,  dompne^^s  e  valor  fan  hostatge 
E  nojrimens  e  man  faits  ben  stants 
Que  saubon  far  les  pros  dompnes  presans 
Qu'en  celha  cort  menon  gran  alegratge. 

Qu'anch  pus  Artus  fech  d'aquest  mon  pessatge 

No  crej  que  fos  cort  de  tanta  vaiia, 

Ni  ten  plasens,  ten  gaya,  ten  jolia 

Ne  ten  gentils,  tan  baud'a  mon  uisatge  ; 

Car  noy  veyrets  arguU,  cima  ne  brancha, 

Mas  l'acculhir  honest  e  gracies, 

El  gen  perlar,  el  gay  dits  amoros 

Als  strangers,  ez  humil  cara  francha. 

«  ils.  quez  autf  —  -  prouetz  (?). 

1  Andreu  Fabrer  0»,  m«e«5c,  Febrcr.  «£  célèbri' commu  traducteur  de 
Dnntp.  On  ne  connaissait  de  lui  d'autre  œuvre  originale  qu'une  strophe 
rUée  dans  le  poème  coUectij  de  Torroella. 


POETES    LYRIQUES  CATALANS 

E  tôt  primer  a  qui  beutat  no  mancha 

Lay  trobarets  l'auta  valent  comptessa, 

Qui  de  valor  e  de  grandaproesa 

Val  mavs  qu'Isolt  ne  Screna  la  blancha. 

A  luy  va  be  semblant  dona  Johana, 

Que'b  belhs  aculhs  e  grecios  peruent 

Se  faj  gresir,  amar  a  tota  gen 

E  plus  d'ajcellis  ques  de  terra  londana. 

Nom  lays  a*  dir  cellia  qu'es  la  fontana 

De  gaj  comport  :  c'es  (?)  dona  Francesquina, 

Car  sus  la  flors  es  viol'  argentina 

Qu'el  temps  gentil  naix  et  floreix  e  grana. 

Na  Sobre-Joy  mirai  de  gentilesa, 

Don'  Elfa  us  dich,  que  Deus  voch  ton  bell  far, 

Lo  sieu  gay  cors  de  prêts  sobrepugar 

Qu'el,  mon  no  crey  altra  pas  de  belhesa. 

Altra  n'i  say  en  qui  natur'  a  mesa 
Gentils  faisos  e'morosa  peruensa, 
Don'  Yolant  que'b  gaya  captenensa 
Ab  dois  sguart  mostra  sa  gran  noblesa. 
Na  Beatris  d'Anglesola  s'auansa 
Lossanamen  los  stranys  aculhir 
E  Johana  Pineda  qui  felhir 
No  sap,  n'enquer  Elphita  la  de  Ffrança. 

[Endressa] 

Vaiten  xanso  lai  on  valor  s'atança 
Al  Coms  dels  Carts  qui  sab  prêts  mantenir; 
E  s'en  no  say  tôt  son  laus  expendir, 
Yeu  io  sopley  que  nol  venga  pesança. 

[Tornada] 

Angel,  noy  ay  alors  ma  confiança 
Mais  solamen  en  vos  quim  fayts  jequii- 
D'ira,  d'esmay,  de  dol  et  de  cozir, 
Can  me  soue  de  la  vostr'  amistansa. 


Ms.  lay&sa 


7»»  niALKCTES  ANCIENS 

l;i.    —  SiRl.'ENTESCH    FET    PER    AnDREI"    FaBRER 
PER    I.U    PASSATGE    DE    BaRBARIA 

Doloros  crits,  ab  vots  '  braua,  terribla, 
Fellonament  de  vas  mig  iorn  nos  crida  ; 
0  crestians  !  fenits  tots  vostra  vida, 
0  recobratz  Dieu  veray  impassible, 
Ques  a  nos  han  ^  près  en  ^  gran  vituperi 
Li  *  Serazi  fors  de  son  tabernacle, 
E  tornats  lo  laut  (?)  denant  lo  trinacle, 
O'n  la  pena  del  segrat"  ciminteri. 

Qu'er  es  lo  temps  pel  diuinal  misteri 

Predestinats,  e'n  coue  morts  abatre 

Tots  los  Infels  qu'en  las  parts  del  mon  quatre 

Del  Crucifix  metreso  Faut  imperi  ; 

Say  comensant  per  terra  de  Granada, 

E  discorrent  tota  la  Barbaria, 

Que  del  sol  colch  tro  lay  on  naix  lo  dia 

Non  reman  us  de  lor  secta  maluada. 

E  donchs  prengam  tuyt  la  santa  cruzada, 
E  comensem  crusel  batalha  fera. 
Car  lonch  temps  a  que'b  gran  joy  nos  espéra 
La  grand'[h]onor  quins  sta  aparelhada; 
Car  lay  veyrem  trocegar  [e]  scuxendre  * 
Morts  per  quartiers  e  volar  caps  e  troces, 
Intrar  murs  forts,  torrçe  '  castells  per  forces, 
Que  nos  pora  res  contra  nos  deflfendre. 

La  nos  dira  que  no  pot  mays  compendre 
Lo  preyon  pots  del  infernal  abisma 
Dels  sperits  qu'exiran  del  morisme, 
Car  al  intrar  feran  lo  portai  fendre, 
K  noy  haura  Satans  qui  plus  ne  vulha 
Ans  diran  tots  :  gitat  los  al  *  defora  ; 

'  Ms.  velz.    —  -  Ms.  que  ce  no  say.  —  '  Ms.  e.  —  *  Ms.   E.  —  ^  Ms. 
[lonat  del  ccgrat. 
^  Vostre  cors  vey  e  trenrar  e  scuxendre.  Anonyme  :  O  gran  dolor. 
•  M  s   lorç  e  (  tore  et)  —  "  .v;<.  lor  los. 


POETRt    LYRIQUES    CATM-ANS  ^ 

E  li  crusats  cridaran  ar  es  l'ora 

Que'l  lach  d'infern  tots  los  moros  aculha. 

E  tombaran  coin  fay  la  sequa  fulha 

Dels  cims,  dels  branchs  quel  forts  vent  enderrocha, 

Barbres  e  turchs,  alarps  els  de  Marrocha, 

E  nos  firen  pendrem  la  lur  despulha, 

Meten  a  fons  e  gitan  foch  e  flama, 

Viles  e  borchs,  lochs  ciutats  e  mesquites 

E  no  curets  que  ne  sia  ia  quites 

Si  donchs  lo  nom  de  Ihesuxrits  no  clama. 

Mayres  de  Deu,  a  vos  sola  reclama 
Qu  ets  segurs  port  de  la  nostra  ventura 
Lo  pobleXrist,  quel  guardets  de  pressura 
Dels  inimichs  quels  peccador[s]  aflama, 
Sopleyan  cel  qui  fon  sus  la  colonda 
Greument  batutz  per  Famor  quens  hauia, 
Qu'entre  los  sants  benehuyrada  sia 
En  Peradis  nostra  vida  segonda. 

[Tornada] 
Angel,  per  ço  que  Taspra  mort  nom  tonda 
Digats  per  mi  cent  jorns  TAue  Maria 
Quem  promates,  car  en  la  companyia 
Dels  sants  crusatz  passi  delay  vas  Fonda. 

14.     Anurku  Fabrer 
Pus  qu'estorts  suy  dellacli  de  la  mar  fonda 
Mayre  de  Deu,  reclaman  vostr'  aiuda, 
Mos  genolhs  flechs,  ab  cor  ferm  qui  nos  muda, 
Rendi  merces  a  vos,  pura  flor  monda, 
Quins  hauets  trayts  de  perilh  ten  saluatge 
De  l'aspre  mort  e  del  aygue  pregon 
O  s'erem*  tots  cabuçatins  al  fon 
Quan  vos,  Verges,  nos  trasquetsdel  pelatge. 

Se  fo  celh  jorn  que  seguin  lo  viatge 
Us.  îerani 


no  DIA.LECTES  ANCIENS 

Dels  sants  crusats,  fom  lay  deuan  Mallorques, 
Quan  l'enamich  nostres  mayres  exorques, 
Volch  de  nos  far,  gitan  nos  a  carnatge; 
E  l'aura  forts  ab  molt  gran  felhonia 
E  mar  traues  nos  saltet  al  deuan, 
On  tuit  forçat  Verge  vos  recla[majn 
Desemperem  tuyt  nostre  companya 

E  cridan  tuit:  valons  Santa  Maria, 
La  mar,  el  vent  pugan  tostemps  a  Torça 
Tota  la  nuyt  tro  que  per  fina  força 
Tornam'  atras  layssan  la  dreta  via; 
E  perilhan  sus  l'onda  quins  portaue 
A  golf  lanssat  nos  lexena  correr  jus, 
Mas,  Verges,  uos  nos  vinguets  al  dessus 
Quins  deslluiresde  Taygua  quins  sobraue. 

Car  per  mants  lochs  saltan  nos  trespessaue 
L'onda  corren  de  proa  fins  à  popa 
Que  nons  fech  ^  ges  calafatar  d'estopa 
Postes  ne  trauchs,  car  dedins  nos  intraue  ; 
On  fayta  fon  entre  nos  mortal  crida 
Merce  claman  ab  gran  plants,  ab  gran  votz 
A  vos,  Mayre  del  Senyor  sobre  tots, 
Qu'en  aquelh  cas  saluassets  nostra  uida. 

Car  le[s]  satans  fais  hauia  bastida 

Celha'cayso  per  torbar  nostra  'npresa, 

Per  que  no  fos  crestiandat  estesa 

Entre  la  gent  que  lay  l'an  scarnida 

De  ves  Marrochs,  on  tost  perdra  la  renda 

Del  Serazis  que  lay  teu  alcegats, 

Ois  tindra  tost  en  infern  cadenats 

Car  Dieu  nol  vol  mays  lur  sectas'estenda. 

1 5 .  — An DREu  Febrer 

Sobrel  pus  naut  alament  de  tots  quatre, 
Propdel  cendier  on  la  jusana  roda 

*  Ms.  Tornaa.  -   ^  Ms  tcch  ? 


POETES   LYRIQUES   CATALANS  81 

Celestials  uaui  ub  sa  tVedor  temi-rc 

Perqu'cu  pogues  d'aut  abax  apercebre 

Montech  amors  ymaginant  ma  pensa 

L'autrir  e  vi  set  contra  set  combatre; 

Mas  de  valor  vengren  en  egual  pati, 

Nos  pogren  ges  senyorejar  per  força 

Es  us  sol  cors  hac  lo  pris  de  quatorsa 

Pels  prims  set  prench  set  moumeuts  mombles 
Qu'ins  lo  gran  torn  de  la  mundana  spera 
Son  colhocat  pel  Vagilant  i  '  Fabra 
Distinctamen  en  set  grausper  dreg  orde. 
Al  prims  del  quais  pus  baix  la  Luna  régna 
E  le  [selgon  Mercurius,  pus  Venus 
Qu  es  le  terciers,  lo  quart  loch  senyorea 
Le  Solelhs  clars  [e]  lo  quint  Mars  ocupa  ; 
Pus  Jupiter,  pus  naut  sta  Saturnus. 

Per  l'un  d'ajcests  segons  cors  de  natura 
En  aquestmoncal  que^  [tôt]  mortals  visque 
Per  calitat  ab  que  fay  acordansa 
Al  punt  que  naix  ab  la  sua  planeta  ; 
E  puis  obran  mal  o  be,  ques  que  face, 
Si  tôt  Deus  fe  tota  res  que  fos  bona, 
De  lay  de  cay  \  per  virtut  causitiva  ;     . 
Donchs  tuyt  li  be  que  son  fayt  en  lo  segle 
Han  près  de  tal  materia  lur  torma. 
Li  autre  set  que  'b  lur  manauen  ^  guerra, 
Qui  de  valor  portauen  sobreuesta, 
Ay  ben  ausit  que  foron  vu  regines 
Ezenea" ,  Dehiphile,  Sinope, 
Semiramis,  Tauraris  e  Lampheto 
E  la  valen  de  cor  Pantasilea, 
Qu  ins  lo  palais  de  gloria  mundana 
Foro  per  vu  miralls  del  mon  sentes; 
'       On  près  gran  laus  natura  femenina. 


>  ?  Ms.  magilanti'?-  «  Ms.  calsque.  -^  Ms.  cay 
Ifs.  Ez  enea. 


__  '•  Ms.  manamen. — 


-<•>  DIALECTES    ANCIENS 

Aquestes  vu  de  tan  com  pot  spandre 
Vas  orien  ne  mig  iorn  que  mils  tancha 
Torra  ne  mar,  ne  les  palus  d'Uzerna 
Del  Port  del  Ferr  ultra  la  Mar  de  Caspis, 
Part  Camballesch  tro  la  regio  freda, 
Per  llur  esforç  e  batalhe  mot  aspra 
Donan,  gastan  ab  franquesa  motgranda 
Hagron  lo  pretz  e  Tauta  senyoria, 
On  foron  dreig  al  prims  vu  con^.perades. 

Celha  qu'ohtench  lo  prêts  de  vu  parelhes 

Vesem  trastuvt  cajs  dins   lo  coiisistori 

Qui  sobrel  sol  la  Luna  goasanya 

De  resplandor,  mas  no  tem  que  s'éclipsa, 

Com  d'anduj  l'a  sa  gran  beutat,  nés  muda*. 

Venus  me  par  que  d'amor  sobremunta 

Car  tota  n'es  del  pe  tro  al  cim  cuberta, 

Ecuj  feris  de  s'amorosa  tralha 

Crey  no  sanar  plus  tosf-  que  de  cop  d'herba. 

Mercurius,  planeta  fortunada, 

Passa,  car  es  remey  contra  fortuna; 

Jupiter  venç  d'umilitat  benigna 

Sos  dolçs  esguarts  ab  que  s'atray  es  tira 

Man  cor  altiu^  ;  Mars  de  poder  abaixa, 

E  l'altitud  de  Saturnus  enfoscha 

Per  l'auta  sanch  quel  vedeson  linatge; 

Car  dels  primers  hereters  del  Sépulcre 

Venc  lo  començ  de  sa  naturalesa. 

Tornada 
Reina  'xcelhens,  senyora  del  Trinacle, 
Los  reynes  set  son  la  vostr'  auanguarda 
Que  vos  pessats  de  renom  e  de  fama, 
E  passarets  sils  amichs  de  Mahoma 
Fats  abaxar  de  lur  maluadasecta. 

[Endressa] 
Londan'  amor  *,  del  vostre  'beceduri 

'  Ms.  uoâ  ninda  (?  mes  linda?).  —  ''  Ma.  lart.  -    '  Ms.  aiçui.  —  ^  Mi. 
Loy  iJanamor. 


l'UETES  LYRIQUES  CATALANS  83 

Trasch  les  vertuts  don  les  alires  adorni; 
Parlai"  uo  pueis  que  nous  tengu  'n  la  bocha, 
Par  quel  jorn  d'uej,  pus  que  fassa  ne  diga, 
Vostre  roman,  que  nom  tors  ni  biaxi. 

16.  — Andreu  Fabrer 
Combas  e  valhs,  pugs,  montanyes  e  cols 
Vey  ja  vestits  de  comblais  e  de  neus, 
Boys  e  jardis  tots  despulhats  de  rams, 
L'ayre  cubert  de  vents  plugs  e  de  grops 
El  mar  tôt  blanch  d'escuma  per  mal  temps, 
E  tuyt  Tausel  star  en  terra  mut, 
Qui  perTiuern  no  mono  xants  ne  crits; 
Mas  ieu  suy  cals  quan  Taltri  bufon  Tungla 

Tornada 

Londan'  amor,  un  Ifurt  entretostemps 
Vos  hay  yeu  fayt,  nom  sie  maltengut, 
Com  yeu  vos  pris  del  vn  dels  vostres  dits 
Celadamen  lo  gay  joyell  del  ungla. 
L'aut  rey  guerrier  vulh  seruir  altre  temps 
Qui  pels  tirans  es  lur  mal  grat  temut[z] 
Vas  Mongibel,  quels  ben  e  mal  vestutz 
Fay  mantes  vetz  bufar  lo  cap  de  Tungla*. 

M.   MlLA   Y  FONTANALS. 

Vilafranca-del-Panadés,  août  1877. 


'  Dans  l'index,  on  peut  voir  la  première  ligne  des  autres  pièces  de  ce 
poëte.  Nous  donnons,  de  pins,  deux  petits  passages  qui  nous  paraissent 
remarquables,  l'un  par  son  caracièie  personnel,  et  l'autre  par  l'allusion 
classique  : 

Qu'ieu  mainte?  vêts  axi  pensant  m'oblit 
Tan  lort  que  sim  saluda[n]  ne  respon. 
Don  li  piusor  dison  qu'erguUos  son. 

Ja  i^erdi  vos. 
Qu'ieu  suy  pus  rich,  dona,  d  aço  queus  quir 
No  fo  Jason  del  velhor  conquist.ir 
Quan  les  périls  del  drach  fier  poch  obrar, 
E  mays  del  bous  quel  cuidaven  auci'  . 
Del  cor  pregon. 


DIALECTES   MOKEIINES 


.--■wû«*rftfc--îr  - 


LOUS  BORDS  DAU  LEZ^ 

Ribada  de  moun  poulit  Les 
Per  que  flourejà  tant  serena; 
Per  que  cantà,  gents  aucelets, 
Quand  moun  cor  es  coumoul  de  pena  ? 
Lou  trauca,  toun  gazoulhadis, 
Aucel  dau  rounzàs  espignaire  : 
Me  bremba  moun  gaud  fugidis .... 
Per  tourna  jamai  pus,  pecaire  ! 

Per  tous  dougans,  moun  poulit  Lez, 
Quand  las  rosas  se  Jïiaridavoun, 
Qu'ensen  aven  trepat  de  fes  ! 
(Lous  amours  das  aucels  cantavoun); 
Lou  cor  gai  culisse  una  flour 
Douça  sus  soun  ram  espignaire  : 
Mais  El,  michant,  raubet  ma  flour-,   . . 
Me  quitant  l'espigna,  pecaire  ! . .  - 

LiDiA  DE  Ricard. 
(Languedocien,  environs  de  Montpellier.) 

LES  BORDS  DU  LEZ. 

Rive  de  mon  joli  Lez,  —  pourquoi  lleurir  si  sereine; — pourquoi 
chanter,  gentils  oiselets, —  quand  mon  cœur  est  plein  de  peine?  — 
Il  le  transiierce,  ton  gazouillis, — oiseau  delà  ronce  épineuse  :  — il 
me  rappelle  ma  joie  enfuie. —  pour  ne  plus  jamais  revenir,  hélas  ! 

Par  tes  berges,  mon  joli  Lez, —  quand  les  roses  se  mariaient,  — 
qu'ensemble  nous  avons  erré  de  fois  !  — (les  amours  des  oiseaux 
chantaient). —  Le  cœur  gai,  je  cueille  une  fleur  — douce  sur  sa  tige 
épineuse:  —mais  Lui,  méchant,  vola  ma  fleur,  —  me  laissant 
l'épine,  hélas  !  Lydie  ub  Ricard 

<  Poésie  nuitée  de  Burns  (1758.1796). 

•  Celte  monorime  existe  dans  le  t^xte  écossais 


LE     VINCEDOU 

A  LA.  BATESTO  DE  POULHS 
d'En  Alecsandre  Falguiero,  estatuari  toulousan 

A  'N  Rémi  Marcelin 

Aviat  tant  pla  qu'une  matrassino, 

Uno  cambo  en  l'aire,  estirant  Tesquino, 

Fa  peta  les  digts,  le  bras  adreitat  ; 

Es  nud  coumoun  verm,  linge,  pie  de  gracie; 

Filo  as  quatre  peds,  a  d'alos  ;  —  sa  facio 

S'enlusis  d'un  gauch  coumoul  de  fiertat. 

Le  valent  mainage  espingo,  fresino, 
Sens  buf  e  le  cor  tustant  la  petrino, 
Le  poulh  enjoucat  sul  sieu  bras  esquer  ; 
L'aucel  de  coumbat!  rourgulli  Tapitarro! 
Tantost  se  palaiso  e  tantost  se  carro, 
L'uelh  escarcalhat,  dambe  un  laucet  fer. 

LE    VAINQUEUR 

AU   COMBAT    DE    COQS 

d'Alexandre  Falguière,  statuaire  toulousain 
A  M.  Rémi  Maucklin 

Lancé  aussi  bien  qu'une  ilèctie,  —  une  jambe  en  l'air,  étirant 
l'échiné,  ~  il  fait  claquer  les  doigts,  le  bras  dressé;  -r-  il  est  nu 
comme  un  ver,  svelte,  plein  de  grâce  ;  —il  file  [comme  s'il  avait] 
quatre  pieds  ;  il  a  des  ailes  ;  —sa  face  s'illumine  d'une  joie  com- 
ble de  fierté. 

'  Le  vaillant  enfant  gigotte,  frémit;  —  sans  soufOe  et  le  cœur 
beurtant  [contre]  la  poitrine,  —le  coq  juché  sur  son  bras  gauche. 
—  L'oiseau  de  combat!  l'orgueil  le  soûle  1  —  Tantôt  il  se  prélasse 
et  tantôt  il  se  carre,  —l'œil  écarquillé  avec  un  éclair  sauvage. 


DIALECTES    MOOeRNES 

Brandis  la  barbolo,  airisso  la  cresto, 
Boiilcgo  r  pluinalh  coumo  à  la  batesto, 
Le  garrou  sannous,  le  paf  bategam, 
Soun  ka-karaka  souno  la  victorio  ; 
L'arditI  a  raubat  un  ram  à  la  glorio 
Qu'intre  sous  arpieus  semblo  foulcejant,, 

Cauto  :  «  0  ma  patrio  !  0  ma  terro  maire  ! 
Que  le  soulelhet  toutjoun  vous  esclaire, 
Dins  la  pax  sereiio  e  la  poutestat  ! 
Salut!  E  'stripat  les  de  Fescurino; 
—  Me  truli  del  gorp  e  de  la  mourino! 
Soun  le  pichou  gai  de  la  Libertat. 

»  Le  pople  à  la  fi  te  vei  trioumflanto, 

0  Divesso  fiero  e  reviscoulanto  ! 
Dambe  toun  aie  musicaire  e  pur, 
Que  butb  à  plasé  vam  as  trabalhaires 
E  que  me  fregant  m'anausso  pes  aires, 
Ves  tu,  Libertat,  que  t'as  le  bouuur, 

n  Les  omes  uùlhous  o  las  nacieus  belos, 

1  oundrejant  le  frount  de  fuelhos  nouvelos 
E  mai  de  vertut  fflaufissent  Ihour  cor; 


Il  Itrandit  la  fraise,  hérisse  la  crête.  —  remue  les  pennes  [de 
SCS  ailesj  comme  à  la  lulte,  —  Fergot  saignant,  le  jabot  pantelant. 
—  Son  ka-karaka  sonne  la  victoire;  —  le  Hardi!  il  a  dérobé  un 
rameau  à  la  gloire,  —  qui  entre  ses  griffes  semble  foudroyant. 

Il  chante  :  «  0  ma  patrie .'  O  ma  terre  mère  !  —  Que  le  soleil 
toujours  vous  éclaire,  —  dans  la  ;iaix  sereine  et  la  puissance!  — 
Salut!  J'ai  étripé  ceux  de  l'obscurité;  — je  me  ris  du  corbeau  et  de 
ce  qui  fait  mourir!  —  Je  suis  le  petit  coq  de  la  Liberté. 

ï)Le  peuple  enfin  te  voit  triomphante,  —  ô  Déesse  fîère  et  revi- 
viliante!  — avec  ton  haleine  harmonieuse  et  pure,  —  qui  souffle  à 
plaisir  courage  aux  travailleurs,  —  et  qui,  me  frôlant,  me  hausse 
jtar  les  airs,  —  vers  toi,  Liberté,  qui  fais  le  bonheur, 

ïLes  hommes  meilleurs  et  les  nations  belles,  —  leur  ornant  le 
front  de  feuilles  nouvelles  —  et  même  de  vigueur  remplissant  leur 


A    TRENCH    D  AUBA  87 

O  lura  I  que  jamais  toun  tlam  noii^s'escounde! 
Sus  toun  pedestalh  d'ount  gaitos  le  mounde, 
Veni,  Libertat,  pansa  moun  ram  d'or.  » 

A.  FouRÈs. 
Sflembre  1877. 

cœur;  —  ô  lumière!  que  jamais  ton  éclat  ne  disparaisse!  — Snr 
ton  piédestal  d'où  tu  regardes  le  monde, —  je  viens,  Liberté,  poser 
mon  rameau  d'or.  » 

A..  FounÈs. 
Septembre  1S77. 

A   TRENCH    D'ÀUBA 

Ja  de  ta  finestreta 
Trucant  als  vidres  entelats,  lo  dia 

Te  ve  à  oferir,  nineta, 

Un  mon,  com  no  '1  podria 
Ni  en  somnis  fabricar  ta  fantasia. 

Son  canastrell  de  perles 
Bujdant  festiua  va  per  ell  Faurora, 

Y  rossinj-ols  y  merles 

Ab  gajs  cantars,  â  l'hora 
I.a  llum  saludan  que  'Is  espajs  colora, 

Saltant  grahons  de  molsa 
A  I/AUBE 


Déjà  de  ta  pcùlc  fenèlre, —  frappant  aux  vitres  ternies,  le  jour — 
vient  t'offrir,  enfant.  —  nn  monde  tel  qu'elle  ne  pourrait  jamais,  — 
ton  imagination,  en  créer  de  semlîlable  par  les  songes. 
'Sa  corbeille  do  perles,  —  l'allègre  aurore  la  verse  dans  le  monde, 

—  et  les  rossignols  et  les  merles, —  de  leurs  gais  refrains,  à  la  lois. 

—  saluent  la  lumière  qui  co'ore  l'espace. 

Baignant  la  verte  mousse,  —  la  fontaine  joyeuse  et  riante  coule, 


88  DIALECTES    MODERNES 

Corra  la  l'ont  alegre  y  riallera, 
Deixant  de  sa  véu  dolça 

Y  sa  jlusiô  primera; 
Escumes  j  remors  per  la  pradera. 

Y  escampa  Foretjada 
Ruixats  de  perles  trontollant  les  fulles, 

En  tan  que  à  la  besada 
Del  Uabi  séu,  remuUes, 
Les  flors  despertan  de  perfums  curulles. 

Amor,  natura  tota 
Engalanada  ab  sos  jojells  desperta, 

Y  riu,  flayra  o  rebrota 

Y  un  cântich  dolç  concerta 
Que  al  esperit  del  leixuch  jou  iliberta. 

Corrents  d'or  fus  y  ratxes 
De  tebis  flajres  per  tôt  Uoeh  rodolan, 

Y  mentres  valls  j  platxes 

Y  serres  s'arrebolan, 
Relilan  gralles  y  oranells  pidolan . 

Deixa  donchs  ta  cambreta 
Y  en  lo  festi  de  Tauba  à  barrejarnos 
Corrém,   que  alli,  amoreta, 


—  laissant  de  son  doux  murmure  —  et  de  sa  j  remière  illusion  — 
l'écume  et  le  bruit  qui  résonne  dans  la  prai'-ie. 

1/air  frais  répand, —  en  agitant  les  feuilles,  une  grêle  de  perles; 
— liindis  que,  sousuu  doux  baiser, —  le  zéphyr  humecte  ses  lèvres, 

—  les  tleurs  s'ouvrent  à  l'aurore  et  parfument  les  airs. 
L'amour  réveille  la  nature  entière, — embellie  de  tous  ses  atours; 

— elle  rit,  elle  respire  et  bourgeonne; — puis,  par  un  doux  cantique, 
elle  ordonne  —  que  l'esprit  soit  affranchi  de  tout  joug  pesant. 

L'or  coule  on  ruisseaux  limpides,  —  de  doux  parfums  s'exiialent 
partout  ; — et,  tandis  que  les  vallées,  les  plages  — et  les  montagnes 
se  colorent, —  les  cornemuses  résonnent  et  les  hirondelles  pé- 
pient. 

Quitte  donc  ta  petite  chambre,  —  et  au  festin  de  l'aube  allons 
nous  mêler;  —  courons  ;  là,  mon   amie,  —   nous  pourrons  nous 


I 


A    TRENCH    D  AUBA  89 

Podrém  d'amor  parlarnos 

Y  ab  roses  l'un  al  altre  coronarnos. 

Lo  bpaç  à  les  espatUes 

Y  unides  per  l'oreig  les  cabelleres, 

Aném,  com  dues  guatlles 
Saltironant  lleugeres, 
CoiTent  les  hortes  y  trascant  les  ères. 

Y  alli,  al  cim  de  l'altura 
D'aquella  serra  liont  te  mes  llum  lo  (lia, 

Lo  cel  blavor  mes  pura, 

Y  l'ayre  que  destria 

Los  brins  dels  pinatells  mes  armonia  ; 

Alli  podré  en  mos  polsos 
Sentir  lo  nou  bateig-  d'ajgua  sagrada. 

Que  de  tos  llabis  dolços, 

La  fout  may  estroncada, 
Prodig-a  dona  al  qui  't  té  fe  jurada. 

En  pach  de  mer  ce  tanta, 
Ta  falda  ompliré  jo  de  fruits  gustosos 

De  tota  lley  de  planta, 

De  flors,  y  de  xamosos, 
Nius  de  pardals  axiribits  y  hermosos. 

parler   d'amour  —   et  nous   couronner  mutuellement   de  roses. 

Les  bras  enlacés,  —  les  boucles  de  nos  chevelures  par  l'air  mê- 
lées,—  allons  comme  deux  cailles.  —  qui,  sautant  légèrement,  -- 
parcourent  les  vergers  et  traversent  les  airs. 

Et  là,  tout  en  haut,  sur  le  sommet — de  cette  montagne  où 
plane  la  lumière  du  jour,  —  où  le  ciel  est  d'un  bleu  plus  pur,  —  où 
l'air  qui  se  joue  — dans  les  branches  des  pins  a  le  plus  d'har- 
monie, 

Là  je  pourrai,  sur  mon  front,  —  sentir  le  nouveau  baptême  de 
l'eau  sacrée,  — qui,  de  tes  douces  lèvres,  —  fontaine  toujours  fé- 
conde,—  coule  avec  abondance  sur  celui  qui  t'a  juré  sa  foi. 

En  récompense  de  tant  de  bonheur. —  à  tes  pieds  je  déposerai 
les  fruits  les  plus  savoureux.  —  les  plantes  de  toute  espèce^ —  les 
fleurs  les  plus  belle.-;  —  et  des  nids  d'où  s'échappent  des  gazouille- 
ments enchanteurs 


90  DIALP]CTES    MODERKES 

Y  anant  tôt  de  passada 
Esbarjint  jo  papallonets  j  abelles 

Que  al  veurer  ta  faldadada 
Voldrant,  per  se  mes  belles, 
Floi's  de  tes  galtes,  cada  jorn  novelles  ; 

Se  'n  tornarem  à  vila 
Gantant  abdos  une  tonada  ajrosa 

Com  lo  jovent  estila,.. 

Jo  ab  veu  del  cor  conmosa 
Y  tù,  roja  del  sol,  com  maj  hermosa. 

Amor,  Fauba  garrida 
A  ta  porteta  s'ha  vingut  à  seure, 
Per  darte,  desseguida 
Que  '1  cap  t'hi  veja  treure, 
La  dolça  copa  del  plaher  à  beure. 

Obrala  donchs,  totduna 

Corra  à  mos  braços,  beu,  y  una  glopada 

Deixan,  amor,  sols   una, 

Pel  qui  no  surt  Taubada 

Mentres  no  sent  Tescalf  de  ta  mirada. 

Francesch  Ubach  y  Vinyeta. 


Puis,  lorsque  nous  cheminerons,  — j'écarterai  les  papillons  ei 
les  abeilles,  — qui,  en  voyant  ton  bouquet,  —  choisiront,  les  trou- 
vant plus  belles, —  les  fleurs  de  tes  joues,  à  chaque  jour  nouvelles. 

Nous  retournerons  au  village,  —  chantant  tous  deux  une  gra- 
cieuse chanson, — de  celles  que  chiinte  la  jeunesse. . .  —  Moi, 
d'une  voix,  comme  mon  cœur^  émue  ;  —  toi,  rouge  par  le  soleil, 
mais  plus  belle  que  jamais. 

Mon  amour,  l'aube  charmante, —  à  ;ta  petite  porte  est  venue  gra- 
s'asseoir,  —  alin  de  t'olTrir,  aussitôt  — que  tu  t'en  approcheras,  — 
la  coupe-  du  bonheur  pour  y  boire  à  longs  traits. 

Ouvre-la  donc;  viens  vite,  —  cours  à  mon  bras  ;  approche  tes 
lèvres  de  la  coupe  enchanteresse;  —  mais  laisses-y,  mon  amour, 
une  goutteUîtlfi  —  pour  ceux  qui  ne  verront  pas  briller  l'aurore, — 
lorsqu'ils  jouiront  (lu  doux   feu  de  ton  regard. 

l''rancois  Ubach  y  Vinyeta. 


LOUS    POULEITS 


Unafemaa,  autreis  cops,  pounava  à  soun  curet, 
Au  coumençament  de  Tannada, 

Un  parei  de  pouleits.  Daus  paubreis  de  l'endret 
Qu'era  la  renta  acoutumada. 

De  soun  paniè  quand  lous  tiret, 

La  marchandiô  gaire  presava. 

Lou  curet,  que  lous  sôupesava 
E  qu'aviô  Ter  de  lous  troubà  pitits,     . 

Li  disset  :  «  Eitranuden-t-is  ?  » 

E  la  femna,  que  s'eitounava 
De  la  question,  li  disset;  «  Nou.  »  —  ^  Tant  piei  ! 
Li  disset-eu,  co  fai  pas  lur  eiloge. 
Ma  brava  femna  ;  un  auriù  lou  plasei 

De  lur  reipoundre  :  «  Dieu  vous  froje  !  » 

A.  Chastanet. 

(Périgourdio,  Musïidan  et  ses  environs  } 

LES   POULETS 

Une  femme  portait  autrefois  à  son  curé,  —  au  commencement 
de  l'année, — une  paire  de  poulets.  Des  pauvres  de  l'endroit — c'était 
la  redevance  accoutumée. 

Quand  elle  les  sortit  de  son  panier, — la  marchandise  n'avait  pas 
bonne  apparence. — Le  curé,  qui  les  soupesait — et  qui  semblait  les 
trouver  petits, —  lui  dit  :  «  Éternuent-ils  ?» —  Et  la  femme,  qui  s'é- 
tonnait—  de  la  question,  lui  dit  :  «  Non.  »  —  «  Tant  pis  !  —  lui 
dit-il,  cela  ne  fait  pas  leur  éloge, —  ma  brave  femme  ;  on  aurait  du 
plaisir —  à  leur  répondre  :  «  Dieu  vous  profite!  » 

A.  Chast.\ni:t. 


BIBLIOGRAPHIE 


CORRECTIONS    DU    TEXTE    d'eSTIENNE    DE   FOUGERES 

(Addenda  à  l'article  de  M  Boucherie) 

C'est  à  M.  Boucherie  que  l'on  doit  la  première  notice  sur  un  ou- 
vrage qui  est  de  la  plus  grande  importance  pour  l'étude  du  dia- 
lecte normand,  le  Livre  des  manières  d'Etienne  de  Fougères,  évê- 
que  de  Rennes,  qui  vivait  au  milieu  du  XII»  siècle.  Tandis  que 
M.  Boucherie  en  préparait  une  édition,  M.  Talbert,  ignorant  ce 
détail,  publiait  la  sienne  (Angers,  1877,  in-4o).  Dans  ce  début  de 
l'éditeur,  connu  d'ailleurs  par  son  travail  sur  le  dialecte  blaisois, 
se  trouvent  un  grand  nombre  de  fautes  de  lecture  qui  trahissent 
une  inexpérience  paléographique  peu  commune.  La  Revue  de 
Montpellier  publia  dans  son  numéro  de  juin  1877  (n"  6),  p.  252-262, 
une  étude  remarquable  de  M.  Boucherie  sur  ce  texte,  suggérée 
ou  par  la  comparaison  de  sa  copie  avec  le  texte  autographié  ou 
par  ses  solides  connaissances  philologiques. 

C'est  avec  un  extrême  intérêt  que  j'étudiai  et  le  texte  de 
M.  Talbert  et  l'article  de  M.  Boucherie.  Malheureusement  il  se 
trouvait  qu'il  restait,  après  tout,  beaucoup  d'endroits  corrompus 
et  de  mots  énigmatiques  qui  réclamaient  impérieusement  des 
éclaircissements. Me  trouvant  en  ce  temps,  par  hasard,  pas  trop  loin 
d'Angers,  je  résolus  d'examiner  de  nouveau  le  manuscrit,  ce  que 
je  fis  au  commencement  de  septembre.  Cet  examen  a  donné  lieu 
à  maintes  corrections,  qui  malheureusement  ne  portent  souvent 
que  sur  l'orthographe  du  texte  (l'éditeur  s'est  laissé  entraîner 
trop  souvent  par  l'orthographe  actuelle).  Je  me  suis  assuré  que 
l'éditeur  avait  eu  une  tâche  ardue,  le  manuscrit  étant  écrit  jjar 
un  copiste  négligent,  et  à  ce  qu'il  paraît  très-pressé,  dont  l'é- 
criture, en  certains  endroits,  ressemble  tout  simplement  à  un 
griffonnage  presque  illisible.  C'est  précisément  dans  de  tels  en- 
droits que  l'éditeur  montre  quelquefois  une  rare  pénétration,  qui 
nous  fait  très-bien  augurer  des  travaux  semblables  qu'il  prépare 
pour  l'avenir. 

Les  lignes  suivantes  contiennent  le  relevé  de  ma  collation, 
auquel  j'ai  ajouté  quelques-unes  de  mes  corrections.  J'ajoute  que, 
une  fois  le  mauvais  état  du  ms.  constaté,  je  n'ai  consacré  que 
deux  heures  à  son  examen,  d'autant  plus  que  M.  Talbert  nous  pro- 


BIBLIOGRAPHIE  93 

met  une  seconde  édition  de  ce  texte.  Cette  édition  ne  devrait  pas 
manquer  d'un  glossaire,  qui  apporterait  à  lui  seul  plus  de  mots 
nouveaux  qu'une  douzaine  d'autres  textes  de  la  même  étendue. 
Je  ne  relève  pas  les  passages  et  mots  corrigés  par  M.  Boucherie, 
sauf  les  cas  très-rares  où  il  doute  de  sa  leçon  et  où  il  y  a  quelque 
remarque  à  faire. 

3.  enivre]  eiurej  ms.  —  il.  moult],  7nlt  (avec  l'abréviation  habi- 
tuelle) ;  c'est  sous  cette  forme  que  le  m.';,  présente  le  plus  souvent 
le  mot  qui  doit  être  écrit  molt  et,  pour  la  lin  du  XII*  siècle,  mouf. 
— 32.  Corriger  la  virgule  après  deceiventen  ])oint. —  40  {b21).Etrebei- 
vent  cel  qu'il  (corr.  que  il)  hrascent.  M.  Talbert  corrige  cel  en  ce;  cel 
(neutre)  n'est  pas  moins  bon,  bien  que  cette  forme  ne  soit  pas  si- 
gnalée dans  les  grammaires.  Le  premier  qui  l'ait  relevée  est,  à  ma 
connaissance,  M.  Mali  dans  son  Comput,  p.  108,  qui  cite  jjot  cel 
estre,  etc.;  comp.  le  Traité  du  pronom  en  français  de  M.  Gessner, 
I,  p.  32;  s.  Brandan  1708.  Bartsch,  123,  30.  De  même  cest,  ibid., 
93,  10.  —  45.  fensor  (=trésor),  V.  s. -Brandan  1754,  répond  au  latin 
thensaurus,  et  s'est  maintenu  dans  le  breton  tensaour ;  voy.  Dioz, 
Dict.  étym.  —  18.  Tort  un  bestenc,  en  marge:  subj .  pr.  de  torner. 
Je  ne  connais  pas  la  locution  torner  un  bestenc  (:=dispute)  et  je 
corrigerais  tort  en  sort  (surgit). — 50.  malveise]  mulueisse.  —  55. 
vençon]  tencon  {^t  p:)inié,u  au-dessus). —  bl.  2ieis]peiz. — J8.  La  corr.  de 
M,B.  est  bonne,  mais  non  nécessaire;  l'hiatus,  après  les  mono- 
syllabes s^,  sej  ni,  ne,  qui,  que,  etc.,  est  légitime.  —  59.  coueitisse. 
— 63  Les  maus  tondre  et  estaucier.  M.  Bouclierie  préfère  esUmcicr 
=  arrêter.  Le  sens,  il  est  vrai,  serait  excellent  ;  mais  il  l'est  aussi 
si  l'on  garde  la  leçon  du  ms.  Il  y  a  un  verbe  estaucier,  synonyme 
de  bertauder,  reognier  =  tondre,  couper.  Cliget,  19il.  Et  cil  fièrement 
hs  enchaucent  Qui  les  reoignent  et  estaucent.  Barbazan,  lil,  80,  135. 
Ces  biaus  crins  a  fait  reoignier,  Corne  valiez  fu  estauciée.  Dora  Car- 
pentier  se  trompe  (Du  Cange,  VII, s.  v.  estauceure),  quand  il  donne 
au  verbe  estaucier  la  signification  de  parer,  habiller,  ce  qui  a  été 
répété  sans  aucune  critique  par  Roquefort,  Henschel  et  Hip- 
peau.  il  suffit  de  lire  les  passages  cités  d'un  fabliau  qui  se  trouve 
dans  Barbazan,  III,  78,  77,  et  dont  nous  venons  de  citei-  un  autre 
exemple.  —  6i.  cerf]  cers.  —  65.  desconvenue]  descouenue.  — 66. 
corr.  enoinz.  —  67  gens]  genz.  —  69  dis]  di  —  que  a.  —  71 .  Dont' 
Dom,  ce  qui  se  trouve  souvent  dans  les  textes  normands. — 75  ben] 
bien.  —  76.  peut]  pient.  —  77  raison]  raisson.  —  78.  sans]  sanz.  — 
80.  messon.  —  94.  lia.  — 94.  Esgaugrinier.  —  99.  enn  a]  en«a,  m.^., 
c'est-à-dire  enn'a ;  inde  =  inné,  enne,  qui  a  donné  les  deux  formes 
en  et  ne  en  vieux  français,  mais  dont  la  première  seule  a  survé'^u. 


9 1  BIBLIOGRAPHIE 

—  I07.  Nendis,  je  propose  ne  neis  ;  de  môme  v.  1154.  Nentets  — 
11  i.  cuivert],  le  ms.  donne  cuurert,  ce  qui  est  faux. —  118.  ip6rt\ 
ipp'^itt  (8  |iointé).  —  121 .  mortel]  mortoZ.— rl23.  A  sonjor  en  avra  sa 
tche.  (lonip.  pour  le  sens  Besant  173-  (quand  il  mourut),  N'otque 
.tiet  pifiz  tant  solemenf,  A  tant  revint  son  tenement,  et  la  noie  de 
M.  -Martin  —  I26.  La  correction  de  M.  Boucherie  {fols,  est  excel- 
lente.—  [3i.  pécheras.  —  142.  ms.  <ent?/'e  (^  pointé  et  surmonté  de  c) 
1  îG.  net]  nez. —  148.  dont  le]  dom  li  —  corr.  princes.  —  151 .  corteiz] 
cnrteis.  —  162.  corr.  nen  est.  —  163.  le(s)  cOmons  moz  (m  biffé  et 
surmonté  de  m),  1.  voa(*vôtos)  —  164.  too2  (avec,  o  fermé)  ?.  — 170. 
grans]  granz  —  172.  ent]  enz — le  vers  178  se  trouve  placé,  dans  le 
nisc.  après  180,  à  la  fin  de  !a  strophe. — 186  eteive]  7  em',  c'est-à- 
dire  et  mer  {et  deux  fois).  —  196.  aurunt]  aurut;  le  copiste  a  oublié 
le  trait  au-dessus  d'«.  —  200.  ms.  îioaZa,  avec  abréviation  au-dessus 
de  z  —  203.  qui  enpeire],  msc  qui  est  (biffé)  êpe{p  barré). — 204.  Et 
cels  que  donne  le  msc.  est  faux  ;  lire  ou  avec  M.  B.  Icels  ou  203. qui 
est  peire  De  cels.  Écrire  encore  201.  avolteire  202.  teire  à  cause  de 
la  rime. —  209.  Lor  soignanz  peissent,  lor  mestriz,  Del  patremuine  au 
criicefiz.  Qu'est-ce  que  mestriz?  Il  est  clair  que  c'est  un  synonyme 
de  soignanz  (maîtresse).  Mestriz  du  msc.=  metriz  (comp.  mestre  aii 
V,  172  =  mettre,  mittere),  qui,  à  cause  de  la  cacophonie  produite 
pir  les  deux  r  du  mot  originaire,  est  pour  mertriz  =  meretricem; 
comp.  serouge:^  serorge,  abre  ^=  arbre,  preste  =  prestre.  Le  génie  de 
l.i  laiiLTue  a  trouvé  encore  un  autre  moyen  pour  éviter  le  son  dé- 
sairréable  de  deux  r  dans  un  seul  mot.  Comme  au  lieu  de  j?ermK 
forterece,  miserere,  cribre,  berfroi,  on  disait  pèlerin  on  perelin.  for telece. 
misereie  crible,  bel/roi,  on  trouve  de  même  la  forme  meltrizan  lieu  de 
mertriz.  (jui  donne  (conformément à  l'analogie  de  bels=biaûs,)miau- 
triz,  mautris;  p.  ex.  Gaydon  130.  Aliscans  80.— 220.1.  Qu'au. —  222. 
Qui  de  usure  nen  a  roable.  Je  doute  que  l'éditeur  ait  compris  ce  vers, 
(lu'il  n'a  ])as  bien  lu  ;  le  msc.  donne  la  bonne  leçon  :  Qui  de  usure. 
(lisez  :  d'usure)  rien  aroable.  Voici  le  sens  :  Les  prêtres  anathémati- 
senl  celui  qui  amasse  (aroabler)  quelque  chose  {rien)  par  usure(rf'«- 
sure).  Roable,  en  bas-latin  rotahdum;  dans  Caton,  Suétone,  etc.,  ru- 
fabulum,  paraît  aujourd'hui  un  terme  vieilli  (il  man  quedans  Littré, 
se  trouve  dans  Sachs,  mais  le  mot  s'est  conservé  dans  la  forme 
contractée  râble),  d'oîi  aroabler  =  propr.  ramasser  avec  un  râ- 
teau.—22i.  de  monte  et,comp.  63. 172.233.699, etc. On  sait  qu'il 
y  a  des  textes  qu;  permettent  l'hiatus,  quand  l'emuetdu  premie 
mot  est  appuyé  d'une  consonne  double  —  231 .  au  lieu  de  ci  ceste 
ice,  que  donne  l'éditeur,  il  y  a  dans  le  msc.  ci  cestior,  qui  me  pa- 
raii  irréprochable.   L  objet  du  verbe  creire  se  trtiuve  dans  le  vers 


BIBLIOCtRAPHIP:  95 

suivant,  cest  ior,  c'est  l'accusativus  iemporis,  ci  =  ici-bas, chez  nous 
—  232.  moine]  monie.  —  233.  Arcediacre  et  deien   Icil  sunt  el  biensei 
queien.  J'avoue  que  je   n'y  comprends  rien  du  tour.  Heureusement 
les  mêmes  mots  énlLrmatiques  se    retrouvent  v.  96".  Le  for/et  re- 
vient au  deien.  Si  refetplor  ne  sei  queien  :  ici  je  comprends  :  i)leur  ne 
sais   lequel  !  On  connaît  l'adverbe  queinemenf,  queinnement,  qui  est 
très-fréquent  dans  un  texte  normand,  la  Chronique  de  Beneit  ;  ici 
nous   trouvons  l'adjectif  dans  sa  forme    primitive    queien,  que  je 
m'explique  de  quid-anus,  cf.  meanus.  Pour  en  revenir  au  v,  234,  je 
propose  donc  de  lire,  en    attendant  mieux  :  Arcediacre  et  deien  [i] 
Cil  sunt  el  bien   {ne)  sei  queien  =  non    sapio.  quales.  c.-à-d.  =  ne 
v.ilent  pas  grand'chose. —  238.  Il  est  plus  simple  de  lire  ici  au  lieu 
de  ci. —  240.  si  est  meilor  que  sainte  Jame.  Il  est  inutile  de  chercher 
cette   nouvelle    sainte  dans   un  martyrologe  ;  il   faut  lire  jame  = 
gemma.  —  Après   cette  strophe   je  suppose  une  lacune.  C'est  ce 
doyen  qui  vient  à  la  maison   du  curé,  soupçonné  ou  accusé  d'avoir 
des  maîtresses,  à  cause   de  l'enquête   pour  constater  le  fait.  Or 
suit  V.  241  .  qui  ne  s'accorde  pas  avec  le  texte  de  M.  Talbert.  J'ai 
lu  :  Orri  comandent  (co  surmonté  du  tiret  horizontal)  con  (en  abrégé) 
augie — r.  — 242.  estragier  ;  on  pourrait  lire  aussi  bien  oltragier . 
245.  Après  ce  vers,  on    lit   dans  le   msc  :  que  lostel  en  ser—a.   Suit 
246:  Quel'ostel  en  sera  curé,  c.-à-d.   de  la  maîtresse.  Cwrer  =  net- 
toyer; V.  Littré  et  Mir.  N.-Dame,  11,  p.  353,  v.  125. — 249.  clierc. 
— 251 .  famé.  — 271 .  msc  :  l  copase  {co  surmonté  du  tiret  horizontal) 
tôt  a  (a  pointé)  a  auour  (?)  —  272.  secon]  seron,  bonne   forme,  qui 
se  trouve  Mont-s. -Michel,   1085.    soron,   Disme  de  pénit.  503.    se- 
ront: secundum  a  donné  \.segont,  segoyii.  *seon,  forme  hypothétique, 
qui  s'infère  de  la  forme  son,  som.  3.  se-r-  on,  Vr   étant  intercalé 
pour  détruire  l'hiatus,  comme  l'a  démontré   M.   Tobler  (Zsch.  f. 
vgl.  Sprachf..  III.  4.),  comp.   estuire,  remire,  etc.  4.   selon  avec  le 
changement  ordinaire  d'r  en  l.  —  En  ce  qui  concerne  cette   stro- 
phe. M.  Boucherie  avait  raison  de   la  qualifier  d'obscure,  «  même 
après  les   corrections   de   M.  T.  «J'aimerais  mieux    dire  que  les 
corrections   sont  toutes  impossibles  el   ne  donnent  aucun  sens  ; 
d'ailleurs,  elles  pèchent  contre  la  rime.  La  rime  est  en  ou,  non  pas 
dans   la  prononciation    française   moderne  (  =  w   allemand),  mais 
comme  diphlhongue  avec    la   prononciation    de   I'om  (ôom)  en  pro - 
vençal.Ou  pourrait  répondre  au  latin  OÛ=ô,  comme  le  croit  M.  T., 
corrigeant yowr,  ^owr,  amour;  mais   alors /o«r  ^  furnum,  fr.  four. 
-  Dans  notre  cas.  c'est  plutôt  =  ô,  cf.  1091.  1113.  1117.  etc.,  soi! 
qui  se  produit  du  latin   ')  au  '^),  ô  en  position  et  ^),  hors  de  posi- 
tion, ijuand  il  ne  diphtbongue  pas. 


96  BIBTJOGR\PHIE 

Je  vois  dans  four  =fuer,  et  de  même  l'espour  (  c'est  comme  cela 
qup  l'on  doit  lire,  au  lion  de  les  pour,  qni  ne  donne  pas  de  sens  )  = 
Vesjmer,  employé  ici  dans  un  sens  métaphorique.  J'attends  que 
l'on  m'explique  le  dernier  mot,  qui  reste  obscur:  auour,  qui  devrait 
être  =  avuer.  que  je  ne  connais  pas  (augùrium?  cp.  dilûvium  = 
dclouve,  deluve,  et  flùvium  =  flueve,  fluve.  Comp.  oi  =  ou  et  le 
porlg.  agouro  à  côté  de  l'esp.  aguero.). —  27(3.  eraalent,  msc. 
corr.  enmallent  (  mettre  en  malle  ).  —  283.  sabandone.  —  288.  qui 
=  si  l'on. —  293.  meneir.  — 310.  Je  corrigerais  :  Penst  à  Judas  qui  V 
sfit eniendre . — 311.  Jhesu. — 315.  meitre,  v,  187.  —  326.  revirer,  qui 
signiûe  en  vieux  français  craindre,  redouter,  ne  vient-il  pas  de 
revitaref  —  330.  ^^oZe  à  côté  de  potde,  pule  ne  doit  pas  être  changé. — 
331.  toz  —  tochier. —  334.  ni]  ne  quil  ni  foche.  et  (abrégé)  uoche  msc. 
— 33.5.  quil  blasme  o  boche  (  le  6  de  blasme  était  d'abord  un  ^O-  msct. 

—  339.  n'en]  1.  nen. — 340.  suivra]  siliura  msc,  1.  sivra. —  346.  Neust. 

—  352.  communer  (co  surmonté  du  tiret  horizontal).  — 357.  Dau- 
mones  uit  aumon' (avec  une  abréviation  à  la  fin)  seit. — 365.  &one  ] 
lanf — affaire  est  en  sa  qualité  d'infinitifdevenu  substantif,  toujours 
masculin  en  v.  français.  —  383.  gueires.  —  399.  sanz.  —  400.  Toz 
cels. —  401 .  L'initiale  (A)  manque,  461.  —  deit  (t  pointé)  (=  dei). — 
408.  Le  texte  donne  tierite,  en  marge  charité.  —  413.  Nenprunt.  — 
421. con. —  424.  rZeir^/par  l'intermédiaire  de  dueire  =  duire  cf. 204, 
4'i9,  que  l'on  dérive  ordinairement  Aedûcere,  lat.  û  ne  pouvant  don- 
nor  ue,  il  vaut  mieux  prendre  dôcere,  comp.  Frag.  de  Valenc.  Pour 
la  rime,  il  faut  corriger  sofeire,  esleire,  leire;  de  même  dans  la  stro- 
]ihe  suivante  :  neîVe  (nocere),  teire  (mateire  mscr.),  despeire,  comp. 
201.  sqq.  —  441.  no  est  aussi  bon  que  do  289.  —  343.  J'hésite  si 
je  dois  lire  ou  a  tort  ou  en  acort. — 451  e]  msc.  7  {et  abrégé)  de  même 
957,  etc.  Le  msc.  donne  tantôt  cette  abréviation,  tantôt  e  et  et.  ■— 
khi.  le  {e  pointé)  apostre.  — 458.  Qua,^^  imreiliez  est  do  martire 
(  a  en  surcharge  au-dessus  d'une  lettre  empâtée  )  prima  manus. — 
kij[;  et]  est  msc.  — 467.  corr.  repentanz.  —  468.  le  msc.  semble 
plutôt  donner  roa?7er,  mais  la  leçon  n'est  pas  sûre.  — J'aimerais 
mieux  que  les  deux  strophes  cxviii  et  cxix  ne  vinssent  qu'après  le 
V.  484.  —  471.  quant]  qua  (  a  surmonté  du  tiret  horizontal).  — 
481 .  nosire.  —  kSb.  chief. — 491 .  enleidist  l'areine. —  497  .  Neuiuge  (V  — 
i99.  «m/c— 507.  corr.  £(((?)— 511.  ^7]  corr.  lui.-^hVi.  Desor]Desoz 
— rart/innZ  (écrit  d'abord  cardonal,o  pointé  et  surmonté  de  i). — 516. 
c'minaZ  (avec  abréviation  au-dessus  de  c)=creminal. — 536.  meintenir. 
—  539.  qui  msc;  on  s'attend  plutôt  à  voir  les  chevaliers  défendre 
ceux  qui  se  plaignent  des  autres  et  non  ceux  qui  font  les  autres 
'ilaiiulre.  En  outre, prendre  ei  défendre  ne  riment  pas  a.\ec  jileindre 


BIBLIOaRAPHlE  97 

et  esteindre.  Je  propose  donc  :  537.  ceiiuire.  hàH.  destreindre . —  554. 
no)i\'f  La  leçon  du  nisc.  n'est  pas  sûre;  la  première  lettre  commence 
avec  la  forme  d'un  n,  après  il  y  a  une  petite  tache. — 558.  Jl,''et.  — 
565.  smiz. —  567.  Issi  soleiz  {'i)perere  (corr.  perier)  garder. —  Les  vers 
567.8.  sont  transposés  dans  le  msc. ,  mais  leur  vraie  place  est  indi- 
quée par  un  signe  de  rappel. — hl'i.machie  .niicv. — hTi.refrapa. — 574. 
uescot  (u  souligné  et  corrigé  en  r)  tre  ^e  surmonte  d'une  abréviation) , 
— 575. >S(7(l.cil)  s'emmarit  et  cil  s'engahe=  L'un  s'en  tâche  et  l'autre 
s'en  moque. —  577.  cher]  ms.  ch'es  (avec  abréviation  entre  c/i  et  ej 
corr.  chiers. — Après  ce  vers,  on  en  lit  dans  le  ms.  un  autre  :  Quar 
li  tiilen  portât  les  sapes,  qui  est  reproduit,  mais  corrigé  dans  la  ligne 
suivante.  —  578.  somes  (  o  surmonté  du  tiret  horizontal;.  —  579. 
quant  ]  q^. — 580.  cJienallers. —  582.  crestien  suLien,  le  premier  bilIé. 

—  585.  L'initiale  manque  comme  souvent. —  6U0.  Changer  le  point 
en  virgule. —  6i9  dit  msc.  -635.  mersier]  menoier. —638.  depris.— 
648.  Corr.  ("îj  :  Qui  seront  mal  etdegeiic.  —  660.  L.  Mis''  est  justise. 

—  662.  Il  faut  lire  D'escommwvje.  —  669.  entreamer.  —  673.  Li  — 
l'hiitiale  manque  comme  801  (Usez:  [A]s),  873.  voir  la  note  de 
M.  B.,  973.  1253.  —  679.  saiis.  —  683.  seime{i  surmonté  du  tiret 
horizontal;  =  seî/i?/ie.  — 683.  hère,  corrigé  par  Téd.  en  /terce;  j'y 
verrais  volontiers  la  3.  sgl.  du  présent=ara^;  ici,  dans  le  sens  res- 
treint: recouvrir  avec  la  charrue.  — 685.  paliz.  —  697.  uigne  (i 
surmonté  du  liret  horizontal  )=  vingne,  — 69S.  enerre\.  J'ai  repro- 
duit Udèlement  les  traits  du  mi<c.,  qui  donne  plutôt  enerde.  — 699. 
grinne  =  grigne.  On  connaissait  déjà  grignier  et  grignos.  —  702. 
Ne  il,  qui  est  la  bonne  leçon,  n'est  pas  ne  illum,  mais  ille,  se. 
vilain.  —  712.  retreites.  — 719.  que]  q^K  —  723,  727.  ge.  —  728. 
quei{s)]  q°is. —  729.  parseit  ]  par  sert  ^  servit).  —  735.  quanz  g  ■  et  q 
.surmonté  du  tiret  horizontal;  semote  (o  avec  le  tiret  horizontal)  ?  — 
736.  iarbe.  —  746.  MM.  T.  et  B.  corrigent  le  vers.  Je  le  trouve 
parfait  ;  seulement  il  faut  lire  regain,  c'est  ce  que  demande  la  rime. 
Voir   le  simple  ga-i7i,  cité   par  Henschel  et  assuré    par  la  rime. 

—  747.  féal]  le  msc.  donne  juel  ou.  Jcel  =  icel.  — 749.  contout.  — 
750.  vaïr  a.  été  bien  expliqué  par  M.  B.  (  =  uic?e/-e)  ;  l'autre  mot 
qui  l'embarrasse  est  el  nombre.  —761.  A  cel  {l  q\\  surcharge)  g 
(  surmonté  de  i  )  set.  —  7C2.  goûtes.  —  766.  dôme  (  1.  deme,  comp. 
745). — lèS.Porceqnepoeut  emjoir  (?)=  Por  ce  que  n' en poeit  joir  (?;. 

—  769.  Garder  Dex:  Dieu  fut  bon  prêtre  du  don  d'Abel  (?),  puis- 
qu'il accepta  et  brida  l'ollrande.  —  770.  mein.  —  772.  Puis  lari 
tôt  osunfou  (o  au-dessus  d'un  u  pointé)  celistre. — 780.  le  sot]  losot 
(l'osait).  —  781.  enhait  en  un  mot.  — 783.  ensenble.  — 792.  sei- 
sance^  que  M.  B.  lit  reisunce,  que  je  ne  connais  pas,  est  écrit  dans 


i>8  mBLIO(iRAPHlE 

lo  ms . /eisarice,  qui  convient  partauenienl.  Ponr  son  sens,  voir  le 
^1.  fç.  de  D.-C.  s.  V.  fauancel. — 793.  fwn.i\  ms.  d  (avec  abrévia- 
tion )  =  mnt.  c'est-à-dire  ><  sunt  voi)is  maii  magistri.»  —  795.  sedes- 
tre]  je  lis  sodestre ;  je  ne  connais  ni  l'un  ni  l'autre. —  803.  segou.  — 
8U4.  leial.  —  SOj.  Menaleral. — SOS . areckeanl  msc. — SV'l . coveistise . 
— 81'4.ne  faut-il  pas  quauque  =qualenique  ? — Siô.deit. — 817.  eive. 

—  83i .  Mescil  en  reseit.  —  837  .II.  —  S'il  .D  ras  viez  si  (  insc.)  done 
fan  treis  (  msc.  t^is)  i^eire.  —  848.  la  quitance.  et  non  sa  quitance. 
(Sôy    corr.sW«  (se. sa  femme)  ni. —  86t.  Mes  face  la  beivre  a  la  jallt 

v.Diez  u  c.  et  D.G.s.v.;  c'est  le  mémo  vaisseau  qui,  865.  est 
:ioinmé/a  seille. — S^'à.acoust,  je  crois  avoir  lu  aconit;  il  me  semble 
que  le  sens  de  ce  vers  doit  être  :  et  qu'il  la  batte  ;  —  corr.  atornt. 
869.  p  mettre  (tiret  horizontal  au-dessus  du  p)  =  pi'emeitrean  lieu  de 
prametre;  cf.  tremeitre  87  2.  — 882.  M .  B.  a  bien  lu. — 885  (sa  desme 
r -nde)  Del gaain  qu'il pora  ve[e]ir  =  qu'il  pourra  apercevoir. —  888. 
aveir — S'èO. Som — ne  ne  (e  surmonté  du  tiret  horizontal)  es(ende—89\. 
ci\  si.-^S^I.  jen'en  saj,\.  sai. — 893.  =  B. — 897.  msc.  Ne  fats  (a  et  t 
pointés,  ien  surcharge=iVe^s  =  feci  [féis  serait  la  2™«  personne) — 
/et  doit  être  corrigé. — 901.  Quan. — 909. Qui  dez  (decera)  dez  p  (avec 
aitrévialion  semblable  au  8  horizontal)  {=  2Jor)yî{?) .i .fet  il  (?)preste. 

—  9\\.lede.  —  912.  ceste  (  cessitaL)ile  M  B.  exisle-t-il  réellemenl 
on  v.fç.? — 913.  ma', 8 —  924.  Parjura  s'en  v.  i.i.i.  ou  nof  ==huit  [feis\ 
ou  nof. —  933.msC.  quedoge  {que  avec  une  abréviation  qui  n'est  pas 
letiret  horizontal),  (inconnu)  —  945  '  cegoine — 9i6.  charone  (o  avec 
liret  horizontal)  —949.  vos-  950.  =  B.  — 954.  lire  avec  T.— 961 . 
=  B.  — 969-971.  nos]  vos.  — 912.  =B.— 973.  L'iniLiale  D  manque. 

—  991.  ne  voie,  voie  ne  peut  ètve  =:s  videat,  qui  donnerait  dans 
notre  texte  veie.  Corr.  nen  oie  -.=  non  audiat. —  lOOl.  que. — 1004. ^ar 
un  ^=  per  unde,  au  lieu  de  par  où  ;  voir  ma  note  dans  la  Roma- 
nische  Zeitachrift^  I.  148.  pour  le  v.  612.  — past  est  lesubj.  dépasser 

—  1032.  l'ofelte —  1035.  meniere  —  1041.  tient]  mâc.t'^lt=.  trait  — 
1048.  corr.  Que.—  1057  se]  sei  —  iOli.  prier]  p'ter  (avec  abrévia- 
tion au-dessus  du  p)  =  preier.  —1075.  trouer  du-msc.  est  tout  sim- 
plement trover  =  trouver.  —  ir,83.  isi  —  1084.  Dun  —  1104.  msc. 
ruer. —  1105.  i.jieu.  —  1109.  piquenpance .  — 1110.  sanz — 1122  crq/Te 
--H23  v.  à  peine  lisible  ;  on  voit  q.  coramo  Lunfor(?)  tet  (? , 
7  {e« abrégé)  haute  polie. —  1121.  roffle. —  1131. /«we.  — 1139.  S'unt 
j)Oint  après  guile. —  1147.  corr.  celei.  —  1156.  corr.  de.  —  1 160  re 
leison. — 1 174.  [qui  ques  (=queies)  treisse=fruisse  aa  lieu  de*lrueisse. 
— 1176.  toz. —  1185.  I.i  corr.  do  B.est  bonne,  mais  n'est  pas  néces- 
saire (quomodo  illud  cogitn,  je  peut  manquer).  — 1199  ase-ent  est  de 
trois  syllabes.  (|uoi  (ju'eii  dise  M.  T.   —  corr.  {chusteaus)  [et]  as.  — 


BIBLIOGRAPHIE  99 

1206.  Seit.  —  1216.  Cels.  —  1223.  jovenor  étant  de  deux  syllabes,  il 
faut  corr.  [Et]  U,  etc.  — 1229.  norie.  —  1233.  marchiez. —  1235.  oj7, 
cil  —  1236.  clos  et  enp.  —  1253.  L'initiale  manque. — genz  —  1263J 
osez.  —  Le  vers  1267  est  de  la  fanon  de  l'éditeur,  de  même  que  le 
V.1286.  —  1270  8M^:  mj.  —1271.  dapnez]  msc.  daguq(1)—  1279.  il 
manque  une  syllabe  (à  dreit).  —  1293./e«s]  si  je  ne  me  trompe,  le 
msc.  donne/rej2!.  —  1301.  Crapauz. —  1311.  corr.  Michiel. —  1329. 
preiere,  de  même  ViM .  noz pveieres .  — Vi'ifi . Estemure 'ï . ,  Estenvre 
B.  Esteinvre,  msc.  —  On  connaît  les  habitudes  des  copistes  nor- 
mands, qui  écrivent  te  au  lieu  de  ei,  et  vice  versa. C'est  ainsi  ([ue  la 
bonne  forme  est  Estienvre ,  qni  se  trouve,  par  exemple,  dans  le  Ro- 
man  du  Mont-Saint-Michel,  v.  65. —  1340. X>ow — 1344.  noz. 

AVendelin  Foerster. 


PERIODIQUES 


Remania,  24.  —  P.  481.  P.  Meyev,  Mélanges  de  poésie  française. 
Cet  intéressant  article  se  divise  en  quatre  parties  :  1**  Fragments 
d'une  rédattion  de  Garin  le  Lorrain  en  alexandrins  ; 'i°  le  Poème  de  la 
Croisade,  imité  de  Baudri  de  Bourgueil,  t'rairment  nouvellement  dé- 
couvert ;  3o  un  Prologue  en  vers  français  d'une  histoire  p)erdue  de  Phi- 
lippe-Auguste ;  4"  \xn  Plaidoyer  en  faveur  des  femmes.  Le  curieux  frag- 
ment du  poëme  de  la  Croisade  est  accompagné  d'un /ac-szww7e  pho- 
tographique. P.  492,  Saveir  coment  illefront,  que  M.  P.  M.  corrige  en 
Saveir  corne  le  feront,  doit  se  lire  S.  com  leferont  ou,  si  l'on  préfère  se 
tenir  plus  près  dums.,  *S'.  coment  lefront.  P.  497,  v.  33-34,  reportez 
la  virgule  du  v.  33  après  por  voir  du  vers  suivant.  P.  502,  v.  43, 
au  lieu  de  Mes  unes  jens  desloisont  la,  lisez  Mes  unes  jens  la  desloifont. 
Ibid.  Je  ne  comprends  pas  le  v.  45.  V.  48,  je  lirais  [E]priegne  d'els. 
V.  87,  il  n'est  pas  nécessaire  de  changer  la  leçon  du  ms..  la  pré- 
position «  pouvant  se  sous-entendre  en  pareil  cas. — P. 504.  A.Mo- 
rel-Fatio,  le  Roman  de  Blaquema,  notice  d'un  ms.  du  XIV''  siècle. 
Étude  irès-soignée.  M.  M. -F.  a  eu  soin  de  mettre  en  regard  le 
texte  du  ms.  Piot  et  celui  de  l'édition  de  Valence,  1521,  et,  à  la  fin 
de  son  travail,  le  texte  latin  en  regard  des  deux  autres.  Sans  entrer 
dans  des  recherches  philologiques  minutieuses,  qui  n'auraient  pas 
reposé  sur  une  base  suffisamment  étendue,  M.  M. -F.  fait  remar- 
quer que  la  langue  du  ms.  Piot  est  un  catalan  fortement  impré- 
gné de  formes  provençales.  Il  ajoute  que  cette  particularité  est  im- 


100  PERIODIQUES 

piit;i!)le  au  copiste  plutôt  ijua  l'auteur,  Ramon  Lui),  dont  un  autre 
uuvra;j;e.  le  Libre  de  maravelUs,  est  au  contraire  écrit  dans  un  cata- 
lan r-'lativenionl  trus-pur.  —  P.  529.  E.  Cosquin,  Contes pojmlaires 
lorrains  recueillis  dans  un  village  du  Barrois,  à  Montiers-sur  Sarilx 
{Meuse}  (suite).  Voici  les  titres  de  ces  différents  contes  :  le  Petit 
Bossu,  Richedeau,  la  Biche  Manche,  Jeanne  et  Brimboriau,  le  Poirier 
d'or,  avec  une  variante»  les  Clochettes  d'or»,  la  Laide  et  la  Belle, 
h'  Cordonnier  et  les  Voleurs,  le  Sifflet  enchanté,  Ropiquet,  le  Taureau 
d'tir.  la  Pouillotte  et  le  Coucherillot,  le  Foie  de  mouton,  l'Homme  de 
fer.  —  P.  588.  Mélanges:  1°  Pruehes{Gi.  P.  ).  Explication  définitive 
et  complète  de  cette  vieille  locution  française.  2o  Deux  Jeux-Partis 
inédits  d'Adam  de  la  Halle  (Gaston  Raynaud  ) .  Ces  deux  jolies  piè- 
ces avaient  été  oubliées  par  M.  de  Coussemaker,  éditeur  des  œu- 
vres complètes  du  célèbre  trouvère  artésien.  P.  593,  v.  47,  cam  est 
une  faute  de  lecture  ou  d'impression.  Lisez  tarie,  tourmente.  Z^ Le 
redoublement  des  consonnes  en  italien  dans  les  syllabes  protoniques  (Hugo 
Schuchardt).  Article  concluant  dans  sa  brièveté.  4°  CAarree(=cen- 
dre  lessivée),  (=appât)  (Gh.  Joret).  Lapremièrede  ces  étymologies 
reste  douteuse.  Joindre  aux  différentes  formes  citées  le  limousin 
tsndrier,  que  m'indique  M .  Ghabaneau.  5°  Un  débat  chanté  (V .  Smith). 
G**  Fragmentd'une  complainte  du  Juif-Errant  (  V.  Smith  ).  IM.  V.  S. 
prouve  que  certaines  allusions  à  des  faits  historiques  feraient  re- 
mouler la  composition  de  ce  fragment  à  1592  ou  1596. —  P. 
GiiO.  Corrections.  M.  P.  Meyer  revient  sur  les  textes  publiés  par 
lui  dans  la  Romania,  d'après  le  ms,  bourguignon,  addit.  15606  du 
Musée  britannique,  faisant  de  lui-même  les  corrections  que  lui  a 
révélées  une  seconde  et  plus  attentive  lecture  de  l'original.  P.  603, 
1.  31.  et  règne  avec  lui  sans  lui.  Lisez  «  et  règne  avec  lui  sans^w,  » 
P.  604  (P.-S.)  Z)e  sa  main  se  soigne.  Lisez,  avec  M.  Constants, 
seigne  =  signât.  Revertir  ne  convient  pas  autant  pour  la  forme 
que  pour  le  sens,  du  moins  si  on  le  rapproche  de  la  leçon  du 
ms.  reparir.  —  P.  605.  Comptes  rendus:  1°  A.  Darmesteter,  De 
Floooanle  vetustiore  gallico  poemate  et  de  merovingo  cyclo  (G.  P.  }. 
Compte  rendu  très-détaillé  de  la  thèse  latine  de  M.  A.  D.,  et  fa- 
vorable, sauf  quelques  réserves.  3o  E.-L.  Edstroem,  la  Passion  du 
Christ,  jioëme  jirovencal  d'ajjrès  un  ms.  inéditde  la  Bibl.  de  Tours. 
Gœteborg,  1877  (P.  M.),  Peu  favorable.  4"  Gaston  Raynaud,  Étude 
sur  le  dialecte  Picard  dans  le  Ponthieu,  d'après  les  chartes  des  XIII' 
01  XIV' siècles  (1254-1333).  Paris.  Franck  1876,  in-8«,  123  p. 
(G.  P.  ).  M.  G.  P.  reproche  à  l'auteur  un  peu  de  précipitation  et 
une  ceriaiue  obscurité,  mais  trouve  que  son  mémoire  est  bien  exé- 
cuté etapporte  des  résultats  intéressants.  5**  James-Bruys  Andrews, 


CHRONIQUE  .  101 

Vocabulaire  français -7nentonais .  Nice.  1871.  in-12,  174  p.  (P.  M.). 
Peu  favorable.  6"  Abbé  Léon  Bellanger,  Etudes  historiques  et  j)hi- 
lologiques  sur  la  rime  française.  Essai  sur  l'histoire  de  la  rime,  prin- 
cipalement depuis  le  XV*  siècle  jusqu'à  nos  jours.  Paris,  Mulot, 
1876;  in-8»,  302-26  p.  (  G.  P.  ).  Favorable.  —  P.  626.  Périodiques. 
—  P.  685.  L,hronique.  A.  B. 


CHRONIQUE 


Le  Comité  dont  nous  annoncions  la  formation  dans  l'avant- 
dernier  fascicule  de  la  Revue  s'est  donné  le  nom  de  Comité  des 
fêtes  latines,  et  il  a  constitué  son  bureau  de  la  manière  suivante  : 

Président:  M.  Charles  de  Tourtoulon.  Vice-Présidents  :  MM.  Louis 
Faliès,  Léon  Mares,  Ernest  Michel  et  Charles  Revillout. — Trésorier: 
M.  B.  Cantagrel. —  Secrétaire:  M.  Alphonse  Roquo-Ferrier. 

L'adhésion  Tédemva.eù.iàoxxwëe^diVV  Institut  des  Provinces, Idi.  Société 
de  tirde  l'Hérault,  la  Cigcde,  le  Parage,  la  Pomme  et  d'autres  associa- 
tions méridionales,  aux  fêtes  qui  doivent  solenniser  le  Concours 
latin,  ont  développé  le  programme  primitif  dans  une  telle  mesure, 
que  le  Comité  s'est  demandé  tout  d'abord  si  la  deuxième  quinzaine 
du  mois  de  mai  ne  devait  pas  être  préférée  à  la  date  déjà  tradition- 
nelle du  mardi  de  Pâques.  Sur  l'avis  de  M.  de  Quintana,  le  Comité 
s'est  rangé  à  la  première  opinion,  et  il  a  décidé  que  les  fêtes  seraient 
reportées  au  22  mai  et  dureraient  jusqu'au  27  inclus*. 

Le  programme  définitif  ne  devant  pas  être  arrêté  avant  la  fin  de 
mars,  nous  devons  nous  borner  à  signaler  les  décisions  prises 
jusqu'ici  ; 

Un  Concours  des  musiques  civiles  du  département  de  l'Hérault 
et  des  départements  limitrophes  aura  lieu  les  25  et  26  mai.  Il  sera 
complété  par  un  Concours  dehautbois  et  de  tambourins,  et  par  un 
Concours  de  musiques  militaires,  si  l'autorité  compétente  l'autorise. 
Dans  sa  séance  du  9  février,  le  Comité  a  fixé,  en  outre,  les  condi- 
tions d'un  programme  d'archéologie  et  de  critique  musicales,  por- 
tant sur  les  quatre  sujets  de  prix  qui  suivent: 

I.  Un  choix  de  chants  populaires  communs  au  bas  Languedoc, 
à  la  Catalogne  et  aux  îles  Baléares,  donnant  en  regard  du  texte  et 
de  l'air  bas-languedocien  le  texte  et  l'air  catalan,  ainsi  que  les  prin- 
cipales variantes  ; 

II.  Un  choix  de  chants  populaires  des  peuples  de  race  latine 
ayant,  comme  VEscriveta  ou  la  Pourcairouna,  dans  le  midi  de  la 
France,  une  sorte  d'intérêt  historique  ou  national.  Ce  recueil,  né- 
cessairement très-limité,  serait  accompagné  des  principales  varian- 
tes du  texte  et  de  la  musique. 

'  A  la  suite  de  cette  décision,  le  délai  d'envoi  des  manuscrits  et  des 
imprimés  au  Concours  philologique  et  littéraire  de  la  Société  des  langue 
romanes  a  été  prorogé  au  1°'  avril  prochain. 


102  CHRONIQUE 

III.  Un  ciioix  de  pièces  de  musique  inédite,  de  quelque  genre 
qu'elles  soient,  appartenant  au  midi  de  la  France  par  leur  origine 
et  antérieures  au  xviie  siècle. 

IV.  Une  étude  dos  airs  de  musique  :  Ai  un  perl  que  me  dbu,  — 
Coumpu'jnous  de  Lezignan, —  la  Giroundela  canla,  etc..  indiqués 
en  tète  îles  couplets  de  Y  Opéra  de  Frontigrian^,  de  V Opéra  d'Aubais^  . 
du  Trésor  de  Substantion^  et  des  \)tèces  de  théâtre  l)iterroises^  et 
toulousaines  des  xviie  et  xviiie  siècles.  L'auteur  de  celte  étude 
aurait  aussi  à  examiner  si  les  poètes  du  théâtre  Literrois  n'ont  pas 
quelquefois  utilisédans  leurs  comédies  des  fragments  de  véritables 
chauLS  populaires. 

Les  manuscrits  doivent  être  adressés  à  M.  Alphonse  Roque- 
Ferrier.  secrétaire  du  Comité  des  fêtes  latines  et  de  la  Société  des 
langws  romanes,  ou  bien  à  M.  Vincent,  secrétaire  de  la  Commis- 
sion de  musique  des  fêtes,  avant  le  10  mai  prochain,  terme  de  ri- 
gueur. 

A  la  première  pensée  de  ce  Concours  se  rattache  indirec- 
tement un  sujet  de  prix  proposé  par  M.  Baudouin,  secrétaire 
delà  Cigale:  une  étude  biographique  et  critique  sur  un  peintre 
de  Montpellier  ou  de  l'école  de  Montpellier  aux  deux  derniers 
siècles  ^. 

La  Société  de  tir  de  V Hérault  et  son  président.  M.  Léon  Mares,  ont 
arrêté  les  conditions  d'un  Concours  international  de  tir.  auquel 
seraient  spécialement  invités  les  tireurs  de  Barcelone,  de  Valence, 
deTarragone  et  des  îles  Baléares. 

La  coupe  votée  le  21  mai  1876.  à  Avignon,  par  l'Assemblée  gé- 
nérale du  Félibrige,  sera  remise  aux  Catalans  dans  l'enceinte  de  la 
promenade  du  Peyrou.  Elle  sera  précédée  et  suivie  de  l'exécution 
musicale  d'airs  populaires  ou  nationaux  des  pays  néo-latins. 

C'est  également  au  Peyrou.  le  samedi  25  mai,  que  l'attribution 
solennelle  du  prix  du  ChaM  du  Lafinsera  présidée  par  M.  de  Quin- 
tana. Un  compositeur  espagnol  du  plus  remarquable  mérite,  M.  Pe- 
drell,  a  mis  en  musique,  pour  cette  journée,  la  Cançô  llatina  du 
poète  et  député  de  Toroella  de  Montgri. 

Les  grands  Jeuxfloraux  duFélibrige  seront  présidés  par  M.  Mis- 
tral, le  vendredi  24  mai:  la  distribution  des  prix  du  Concours  inter- 
national de  tir,  par  M.  Mares,  le  dimanche  20.  Une  large  part  sera 
faite  aux  jeux  et  aux  divertissements  populaires.  On  veut  remettre 
en  usage  certaines  danses,  certains  jeux  du  moyen  âge:  le  che- 
valet, les  treilles,  le  perroquet,  la  danse  des  faucheurs,  les  joutes 


'  Oi)érn  langut'iocien  de  Nicolas  Fizes,  imprimé  par  M.  Léon  Gaudin 
ilans  la  liovue  des  langues  romanes  et  tiré  à  part  sous  ce  titre  l'Opéra 
de  Frounlignan.  obra  galoya.  accoumpaqnzda  de  décoiiratieous  de 
théâtre  e  de  sympliontas  escarabilladas  (1079).  publié  d'après  un  ancien 
ins.  inédit  e'  suivi  de  quelques  autres  poésies  patoises,  également  inédites, 
ilu  même  auteur;  Montpellier.  Sc'jguin,  in-8o,  120  pag. 

--^  Opéi-ab-vnudevilles  diU'abbé  Favre. 

•  Elles  ont  été  publiée»  flans  le  Bulletin  de  la  Société  archéulogique  de 
fiéziers  {\Siï  et  années  suivantes). 

•  Un  tableau  ou  un  objet  dart  sera  décerné  comme  récompense.  Le'^ 
manuscrits  doivent  être  adressés  au  Secrétaire  du  Comité  des  fêtes  latines, 
Il  .Montpellier,  avant  le  10  mai  prochain. 


CHRONIQUE  103 

nautiques. On  veut  mômp  ori^aniser,  pour  raprès-midi  du  dimanche 
20  mai,  une  entrée  successive  des  animaux  qui.  comme  la  larasque 
àTarascon,  le  (hameau  à  lîéziers,  le  bœuf  à  Mèze,  le  loup  à  l^ou- 
pian,  le  poulain  à  Saint-Thibéry  et  à  Pézenas,  l'âne  à  (iii^nac  et  à 
Lansargiies,  sont,  aujourd'hui  encore,  le  prétexte  de  fêtes  populaires 
fort  originale.s. 

Le  lundi  serait  consacré  à  la  visite  de  Maguolone  et  à  la  séance 
littéraire  du  Parage,  tenue,  selon  l'usage,  à  l'abri  des  murs  de  l'é- 
glise, en  face  du  soleil  et  de  la  mer.  M.  Roumieux  réserve  à  cette 
réunion  la  deuxième  et  la  troisième  partie  de  sa  Jarjaiado,  encore 
inédites.  Quelques  per.-onnes  étudient,  de  leur  côté,  la  possibilité 
de  faire  représenter,  avec  la  musique  du  moyen  âge,  un  des  mys- 
tères en  anciennr  langue  romane  du  midi  de. la  France. 

La  journée  du  Parage  serait  terminée  par  un  bancjuet  d'un  genre 
nouveau,  car  il  aurait  lieu  au  bord  de  la  mer  et  serait  exclusive- 
ment composé  de  poissons  de  la  Méditerranée  ou  des  étangs.  Au 
despert  seraient  lus  les  plus  beaux  sonnets  du  (Concours  sur  la  Mer 
latine,  pour  lequel  M. de  Berluc-Perussis  a  mis  une  médaille  d'or  â 
la  disposition  de  la  Société  des  langues  romanes. 

Des  excursions  particulières  sont  indiquées  pour  le  28  mai  dans 
les  bois  de  Montforrier  et  de  la  Valette,  à  la  grotte  des  Demoiselles,  à 
Saint-Guilhem-le-Désert,  etc.;  le  29,  une  grande  fête  de  nuit  serait 
organisée  dans  le  port  de  Cette,  de  manière  à  coïnciiler  avec  l'ou- 
verture de  l'Exposition  Aq  \di  Société  d'horticulture  de  l'Hérault. 

Le  lendemain,  30  mai,  jour  deTAscension.  sera  tenue  à  Béziers 
la  séance  solennelle  de  la  Société  archéologique  de  cette  ville.  Nous 
serait-il  permis  de  souhaiter  que  la  jeunesse  biterroise  pût  trouver 
dans  cette  artre  coïncidence  l'ocrasion  de  ressusciter  l'ancienne  fête 
de  Caritach,  le  jeu  du  Roumani  et  les  divertissements  si  curieux  qui 
en  formaient  autrefois  le  caractère  obligé? 


M.  Mistral  vient  de  faire  distribuer  le  prospectus  du  Dictionnairr. 
provençal-français  qui  depuis  vingt  ans,  depuis  l'apjjarition  de  Ca- 
lèndaii  surtout,  était  devenu  l'objet  principal  de  ses  travaux.  Le 
spécimen  qui  fait  suite  au  prospectus  donne  une  excellente  idée 
de  la  richesse  do  l'ouvrage  et  de  la  disposition  des  matières  qui  le 
composeront.  Ce  sera  bien  là  l'encyclopédie  alphabétique  et  popu- 
laire, le  trésor  de  ce  dialecte  provençal  (|ue  l'auteur  avait  restitué, 
comme  langue,  dans  ses  deux  grands  poèmes  et  dans  ses  Iles  d'or, 
età  qui  il  élevé  aujourd'hui  un  monument  [ihilologiiiue  d'une  im- 
portance capitale. 

Le  Dictionnaire provençal-fraDixiis,  ou  Trésor  di'ni  Fclibrige,  contien- 
dra: «tous  les  mots  usités  dans  le  midi  de  la  France,  avec  leur  signi- 
fication française,  les  acceptions  au  iu-o[)re  et  au  figuré,  les  aug- 
mentatifs et  (limiimtifs,  et  un  grand  nombre  d'exemples  et  de  ci- 
tations d'auteurs; — les  variétés  dialectales  et  archaïques  à  <^ùté  de 
-Chaque  mot,  avec  les  similaires  des  diverses  langues  romanes; — les 
radicaux,  les  formes  bas-latines  et  les  etymologies;—  la  synonymies 
de  tous  les  mots  dans  leurs  divers  sens; — le  tableau  comiiaratif  des 
irerbesauxiliaires  dans  les  principaux  dialectes;— les  jjaradigmesdes 


104  CHRONIQUE 

verbes  réguliers,  la  conjugaison  des  verbes  irréguliers  et  les  em- 

Sloi?  grammatiraux  fie  chaque  vocable; — les  expressions  techniques 
e  ragricultLire,  de  la  marine  et  de  tous  les  arts  et  métiers  ;  —  les 
termes  populaires  de  l'histoire  naturelle,  avec  leur  traduction  scien- 
tifique ;  — la  nomenclature  géographique  des  villes,  villages,  quar- 
tiers, rivières  et  montagnes  du  Midi,  avec  les  diverses  formes  an- 
ciennes et  modernes; — les  dénominations  etsobriquets  particuliers 
aux  habitants  de  chaque  localité  ; — les  noms  propres  historiques  et 
les  noms  de  famille  méridionaux  ;  — la  co'lection  complète  des  pro- 
verbes, dictons,  énigmes,  idiotismes,  locutions  et  formules  popu- 
laires ;  —  des  explications  sur  les  coutumes,  usages,  mœurs,  insti- 
tutions, traditions  et  croyances  des  provinces  méridionales:  —  des 
notions  biographiques  et  historiques  sur  la  plupart  des  célébrités,, 
des  livres  ou  des  faits  appartenant  au  Midi.  » 

Il  formera  deux  grands  volumes  in-4»  et  sera  publié  par  sous- 
cription, à  2  francs  la  livraison  de  cinq  feuilles. 

Le  nombre  des  livraisons  s'élèvera  ae  quarante  à  quarante-cinq 
environ.  Le  payement  des  souscriptions  sera  recouvrable  au  pro- 
rata delà  réception  des  fascicules. 

Le  manuscrit  de  l'ouvrage  étant  complètement  terminé,  l'impres- 
sion commencera  très-prochainement  et  sera  continuée  sans  in- 
terruption jusqu'à  la  fin. 

Nous  engageons  vivement  nos  lecteurs  à  s'associer,  par  leur 
adhésion,  au  succès  de  l'œuvre  du  grand  poëte  provençal. 

On  souscrit  par  carte  postale  chez  l'auteur,  à  Maillane,  par  Gra- 
veson  (Bouches-du-Rhône). 


Dans  le  fascicule  du  15  juillet  dernier,  nous  annonçâmes  pré- 
maturément la  distribution  des  Ordenansas  et  Coustumas  del Libre 
hlanc,  rééditées  par  M.  le  docteur  Noulet,  et  formant  le  tome  III 
des  publications  spéciales  de  la  Société.  Le  travail  de  notre  savant 
collaborateur  est  aujourd'hui  terminé;  il  forme  un  volume  d'environ 
200  pages,  comprenant,  avec  une  introduction,  le  texte  des  Orde- 
nansas, selon  l'exemplaire  unique  de  1555;  un  texte  corrigé ,  un 
glossaire  des  noms  de  rues,  des  notes  sur  les  superstitions  de 
l'époque  et  les  équivalents  qu'elles  ont  dans  VÉvangile  des  Que- 
nouilles,  un  vocabulaire  très-étendu,  presque  toujours  appuyé  surdes 
citations  empruntées  à  la  littérature  toulousaine  des  xvretxvJie  siè- 
cles, et  enfin  l'index  alphabétique  des  ouvrages  cités.  "^ 

La  troisième  livraison  du  Dictionnaire  des  idiomes  romans  du  Midi 
delà  France,  par  M.  Gabriel  Azaïs,  a  été  distribuée  au  commen- 
cement du  mois  de  janvier.  Elle  complète  le  tome  J"  de  l'œuvre  de 
M.  Azaïs,  lequel  forme  ainsi  un  volume  de  xvi-687  pages  in-S**  à 
2  colonnes. 

A.  R.-F. 


Le  géi'ant  responsable  :  Ernest  Hamelin  , 


Montpellier,  Imp.  centrale  du  Midi.—  Hamelin  Frères. 


I 


DliLECTES  ANCIENS 


—-nnMfifi/A/ 


L'EVANGILK     SELON    SAINT     JEAN 

EN    PROViiNÇ.-VL    DU    Xlll'^     SIÈCLE 

Uré  du  ins.  33  de  In  Bibliothôqaa  du  Palais  des  .VrLs,  à  Lyon 


Le  manuscrit  qui  nous  a  conservée  ce  vieux,  monument  de  la 
langue  provençale, connu  sous  le  nom  de  5//>/«?yfl!Mû?02.se, se  trouve 
à  la  bibliothèque  du  Palais  des  Arts,  à  Ljon,  dont  ii  constitue 
un  des  plus  beaux  ornements.  Il  contient  les  quatre  Évan- . 
giles,  les  Actes  des  Apôtres,  l'Apocalypse,  les  Epîtres  de  saint 
Paul  aux  Romains,  Corinthiens,  Galates,  Ephésiens,  Philip - 
piens,  Thessaloniciens,  Colossiens,  et  celle  aux  Laodicéens, 
regardée  comme  apocryphe  depuis  longtemps.  Après  suivent 
les  Epîtres  de  saint  Paul  à  Timothée,  Tite,  Philémon  et  aux 
Hébreux.  Ce  volume,  terminé  par  bon  nombre  d'oraisons, 
aura  été  peut-être  un  rituel  albigeois. 

Le  manuscrit  forme  un  petit  in-8"  à  deux  colonnes  ;  le  texte 
est  écrit  en  très-petits  caractères  minuscules  du  XIIP  siècle, 
et  l'on  n'y  trouve  que  peu  de  mots  qui  n'aient  pas  reçu  toutes 
les  abréviations  dont  ils  étaient  susceptibles.  On  comprendra 
que  la  lecture  n'en  est  pas  trop  facile  pour  un  lecteur  peu 
familiarisé  avec  cette  sorte  de  textes. 

Naturellement,  le  nôtre  ne  porte  pas  la  division  actuelle  en 
chapitres  et  versets;  celle-ci,  comme  on  le  sait,  ne  date  comme 
le  texte  même,  que  l'on  appelle  la  Vulgate  vaticane,  que  du 
XVP  siècle;celle  en  chapitres  date  du  XIIP,  il  est  vrai  ;  mais 
elle  n'a  été  généralement  reçue  que  plus  tard.  Le  Nouveau 
Testament  de  Lyon  a  une  division  à  lui  \  qui  est  marquée 
dans  le  manuscrit  par  de  grandis  lettre?  mijuscules,  dont  la 

>  La  division  da  (.e^Lî  albigeD'S  n'o^L  pas  non  plus  i  loiiLique  avec  les 
/.î'fxkxiy.  ammouio-eusébiens 

9 


106  DIALECTES     ANCIENS 

couleur  est  tour  à  tour  rouge  et  bleue  ;  en  outre,  on  y  trouve 
une  division  en  versets,  dont  un  trait  rouge  coupe  la  première 
lettre.  Nous  avons  marqué  la  première  division,  celle  en  cha- 
pitres, par  des  lettres  gras^^es,  qui,  chaque  fois  qu'elles  coïnci- 
dent avec  la  division  actuelle,  forment  un  nouvel  alinéa.  Nous 
n'avons  pas  marqué  la  seconde  division  ;  mais,  pour  faciliter 
la  comparaison  de  notre  texte  avec  laVulgate  romaine,  nous 
avons  introduit  le  numérotage  des  versets  dans  le  texte  et 
marqué  les  chapitres  d'un  chiffre  romain  mis  à  la  marge. 

La  ponctuation  du  msc.  est  très-soignée  ;  seulement  elle  ne 
correspond  pas  trop  souvent  à  la  ponctuation  actuelle.  Nous 
l'avons  respectée  autant  que  le  sens  le  permettait. 

Il  va  sans  dire  que  nous  avons  suivi  de  même  rigoureuse- 
ment l'orthographe  du  msc.  Le  texte  en  est  généralement 
très-soigné,  et  nous  n'avons  été  forcé  que  très -rarement  d'j 
introduire  des  corrections.  Les  lettres  que  nous  avons  ajou- 
tées sont  mises  entre  crochets  [  ],  les  lettres  retranchées  entre 
parenthèses  (  ).  Nous  n'avons  pas  régularisé  strictement  l'or- 
thographe, qui  n'est  pas  toujours  la  même,  ni  la  déclinaison, 
qui  se  trouve  quelquefois  violée;  là-dessus,  comme  sur  les 
autres  choses  pareilles,  on  trouvera  de  plus  amples  détails 
dans  les  remarques  grammaticales  qui  paraîtront  dans  une  des 
prochaines  livraisons,  où  nous  traiterons  les  traits  les  plus 
saillants  de  la  phonétique  et  de  la  morphologie  qui  sont  pro- 
pres au  dialecte  de  notre  Bible. 

Quant  au' texte  lui-même,  il  diffère  plusieurs  fois  sensible- 
ment de  celui  de  la  Vulgate  vaticane,  aussi  bien  que  de  celui 
de  saint  Jérôme  (on  sait  que  ces  deux  derniers  ne  concordent 
pas  toujours  ensemble)  ;  le  traducteur  n'a  pu  altérer  sciem- 
ment un  texte  canonique  généralement  reçu,  puisqu'il  n'y  en 
avait  pas  alors,  mais  il  a  suivi  une  rédaction  dont  nous  possé- 
dons assez  de  traces  dans  certains  manuscrits  latins. 

On  trouvera  la  description  de  notre  ms.  dans  GiWy  :  (lie  lio- 
maunt  Version  of  t/ie  Gospel  according  to  st.  John,  etc.;  Lon- 
dres, 1848,  p.  Lix-Lxi. Quant  à  la  note  :  «  it  (le  msc.)  is  preser- 
ved  in  the  public  library  of  Ljons  (bibl.  delà  ville),  and  its  U"  is 
00»,  il  faut  ajouter  qu'il  a  été  restitué  plus  tard  à  la  bibl.  du 
Palais  des  Arts,  où  il  se  trouve  actuellement 


EVANGII  E    SELON    SAINT  JEAN  107 

On  sait  que  le  livre  de  Gillj  (qui,  paraît-il,  est  devenu 
extrêmement  rare)  contient  le  texte  provençal  de  TÉvangile 
selon  saint  Jean  d'après  les  manuscrits  de  Dublin  et  de  Paris 
1,8086)',  ce  qui  nous  a  déterminé  à  publier,  pour  le  moment, 
la  partie  correspondante  de  la  Bible  lyonnaise,  pour  en  facili- 
ter la  comparaison. 

Il  va  sans  dire  qu'un  texte  d'une  si  grande  valeur  que  le 
nôtre  réclame  péremptoirement  une  édition  complète,  aussi 
xacte  que  possible.  Nous  nous  livrerons  à  ce  travail  et  nous 
lâcherons  de  le  rendre  digne  de  l'importance  qui  lui  est  due, 
autant  que  nos  forces  le  permettront,  quand  nous  aurons  con- 
staté qu'une  édition  complète  de  ce  texte,  coflamencée  il  y  a 
trois  ou  quatre  ans  par  une  dame  anglaise  et  interrompue  de- 
puis quelque  temps,  est  définitivement  abandonnée. 

Espérons  pourtant  que  notre  publication  de  cette  partie  du 
texte  servira  d'encouragement  à  l'éditeur  anglais  pour  persé- 
vérer dans  son  travail,  et  pour  mener  à  bout  une  entreprise 
si  utile  au  monde  savant. 

Je  m'empresse  d'adresser  ici  mes  remerciements  au  direc- 
teur de  la  bibliothèque  du  Palais  des  Arts,  à  Lyon,  le  célèbre 
poète  M.  Soalary,  à  qui  je  dois  la  permission  d'y  avoir  pu 
travailler  en  pleines  vacances  (1872).  En  outre,  c'est  un  de- 
voir sacré  que  je  vais  remplir  en  rendant  les  hommages  dus 
à  l'obligeance  du  savant  bibliothécaire  du  même  établisse- 
ment, M.  de  Valous,  qui  m'a  facilité  mes  travaux  en  me  don- 
nant les  indications  les  plus  utiles.  C'est  encore  à  lui  que  je 
dois  la  révision  du  premier  chapitre  de  notre  texte,  que  je  ne 
possédais  que  dans  la  copie  de  Gilly,  l'édition  anglaise,  qui 
fourmille  de  fautes  grossières,  ce  qui  s'explique  facilement  par 
ce  que  j'ai  dit  auparavant  de  l'écriture  du  manuscrit. 

W.  Fœrster. 


*  Ce  dernier  texle  a  été  imprimé  encore  une  fois  par  M.  Wollenberg 
(Berlin,  1868),  qui  n'avait  pas  connu  l'édition  de  Londres,  où  figure, 
en  outre,  le  premier  chapitre  de  rÉvangilo  de  saint  Jean  d'après  les  ras. 
provençiux  de  Grenoble,  Zurich,  Lyon,  Paris  (6833). 


L'EVANGILE  SELON  S.UNT  JICAN 


T  [F.  78  f)i<  ^  2j  1.  Tn  priucipioeratuerbum.  etuerbum  erat 

X  ap'KÏ  deum  e  deus  era  la  paraula. — 
2.  Aisso  era  el  comenzament  ab  dcu.  —  3.  Totas  causas  so 
laitas  per  lui.  e  senes  lui  es  fait  nient.  —  4.  Zo  qu'es  fait  en 

5  lui  era  uida  e  la  uida  era  lutz  dels  homes  —  5.  E  la  lutz  lutz 
en  tenebras.e  las  tenebras  non  la  presero.  —  6.  Vs  hom  fo 
trames  de  deui  al  quai  era  noms  Jouans.  —7.  Aquest.uenc  en 
testimoni.  que  testimoni  dones  de  lum.  que  tuit  crezesso  per 
lui.  —  8.  No  era  el  lutz.   mais  testimoni   donec  de   lum.  — 

10     1».  Era  lutz  uera  que  enlumena  tôt  home  uenent  en  aquest  mon. 

10.  El  mon  era  el  mons  es  fait  per  lui  el  mons  nol  conoc.  — 

11.  Eu  sas  propr[i]as  causas  uec  e  li  sei  nol  receubero.   -- 

12.  Mais  cantz  que  cantz  lo  receubero.  dec  ad  els  pozestat(z) 
esser  fait  filh  de  deu.  ad   aquels  que  crezo  el  nom  de  lui.  — 

15  13.  li  cal  noso  de  sanc  [78^^1]  ni  de  uolontatde  carnni  de  delet 
de  baro.  mais  de  deu  so  nat.  —  14.  E  la  paraula  es  faita 
carns  et  estec  e  nos.  E  uim  la  gloria  de  lui  enaissi  coma 
gloria  d'u-engenrat  del  paire,  ple(s)  de  gracia  e  de  ueritat. 
—    15.  Jouans  testimoni    portée    de  lui  e  cridaua   e    dizia. 

20  aquest  es  de  que  eudissi.  qui  es  a  uenir  seguentre  mi.  quar 
abantz  de  mi  es  faitz.  qui  primers  de  mi  era.  —  16.  E  de 
la  plenetat  de  lui  nos  tuit  receubem  gracia  per  gracia.  — 
17.  que  la  leg  per  iMojsen  es  dada,  gracia  e  ueritat  per  Jhesu 
Crist  es  faita.  —  18.  Ane  degus  hom  no  ui    deu.  lo  âls  us- 

25  engendratz  lo  quais  es  el  se  del  paire,  el  mezeiss  o  recontec  — 
19.  Et  aquest  es  lo  testimonis  de  Jouan.  cant  tramesero  li 
Juseui  de  Jherusalem  preueires  e  diagues  ad  el  quel  ente- 
roguesso.  quais  est  tu  ?  —  20.  E  confessée  e  no  neguec.  e  con- 
fessée   quar  eu  no  so  Cristz.  —  21.E  demandero  li.  adoncas 

30  cals  causa  ?  Helias  est  tu?  E  dix.  noso.  Propheta  est  tu  ?  E 
respos.  no. —  22.  Adoncas  dixero  a  lui.  Quais  est?  que  donem 
resposta  ad  aquestz  que  nostramezero.  que  dizetz  de  tu  [78''^2J 
mezeis?  —  23.  E  dix.  Eu  so  la  uotz  del  cridant  el  désert,  en- 
dressatzla  uia  del  senhor.  enaissi  cum  dix  Ysaias  lo  propheta. 


EVAiNOILE    SELON    SAINT    JEAN  109 

— 21.  Et  aquilhi  que  auian  estât  trameissi  era  delsFariseus. —     35 
25.  E  demandero  li  e  dixero.  adoncas  per  que  batcias  si  tu  no 
est  Cristz  ni  Elias  ni  propheta?  —  26.  Respos  a  lor  Jouans 
(lizenfz.Eu  bateigi  en  aiga.  mais  e  inej?  de  uos  esta  lo  quai  uos 
no  sabetz.  — 27.  el  es  que  après  mi  es  ucniidors  lo  quais  enantz 
de   mi  fo  faitz.   del    quai    eu  no  so    dignes    qu'eu   deslie  lo     40 
coreg  de  la  causamenta  de  lui.  —  28.  Aquestas  causas  foro 
faitas  en  Betania  part  llum  Jorda  on  era  Jouans  bateiantz.  — 
29.  El  autre  dia  ui  Jouans  .Jhesu  uinent  a  si  e   dix.    uec  uos 
Tanhel  de   deu.  uec    uos  lo  quais  toi  los  pécatz  del  mon.  — 
80.  Aquest  es  del  quai  eu  dissi.    après   mi  ue   bar  lo  quais  fo     45 
faitz  denant  mi.  quar  primers  de  mi  era.  —  .31.  Et  eu  no  sabia 
lui.  mais  que  sia  manifestatz  en  Israël,  em  per  aisso  uengui  eu 
en  aiga  bateiantz. — 32.  E  Jouans  donec  testimoni  dizenfz.  quar 
eu  ui  resper[79''  1]  it  deissendent  enaissi  coma  colomba  del 
cel  et  estec  sobre  lui.  —  33.  Et  eu  no  sabia  lui.  mais  lo  quais     50 
me  trames  bateiar  en   aiga,  el  dix  a  mi.  sobrel  quai  ueiras 
l'esperit  deissendent.  et  estant  sobre  lui.  aquest  es  que  bateia 
en  sant  esperit.— 34.  Et  eu  ui.  e  donei  testimoni.  car  aquest  es 
lilhs  de  deu.  —  35.  De  rescaps  el  autre  dia  estaua  Jouans  e 
doi  dels  decipols  de  lui.  —  36.  E  regardantz  Jhesu  anant  dix.     55 
uec  uos  Crist  l'anhel  de  deu.  ~  37.  E  li  doi  decipol  auziro  lui 
parlant,  et  seguiro  Jhesu.  —   38.  Mais  Jhesu  uiratz  e  uezentz 
aicels  seguentz  si,  ditz  ad  els.  qui  queretz  ?  —  Li  quai  dixero 
a  lui.   Rabbi.  que   es  ditz  enterpretat  maestre.  on  estas?  — 

39.  Ditz  ad  els.  uinetz  et  ueiatz.  Vengro  e  uiro  on  estaua.  et     60 
ab  lui  estero  aicel  dia.  Mais  la  ora  era  aissi  co  dezena.  — 

40.  Mais  era  Andreus  fraire  de  Simon  Peireus  dels  dos  lical 
[auian]  auzit  de  Jouan  e  Tauian  seguit.  — 41.  Aquest  atrobec 
|)rimeii'ament  Simon  lo  seu  fraire  e  dix  a  lui.  Nos  aueni  trobat 
Meissias.  [79'"2]  que  es  enterpretatz  Cristz. — 42.  Et  amenée  lo  05 
a  Jhesu.-  Mais  Jhesu  esgardantz  lui  dix.  tu  est  Simon  fils  de 
Joanna.  tu  seras  apelatz  Cephas  qui  es  enterpretatz' Peire.— 

43.  Eni'endenia  uolc  issir  en  Galilea.  et  atrobec  Philip,  e  dix 
ad  el  Jhesu.  seg  me. —  44.  Mais  era  Philips  de  Betsaida  de  la 
ciutat  d'Andreu  et  de  Peire.  —  45.  Atfobec  Philips  Nathanael  70 
e  dix  a  lui.  lo  quai  escrius  Moysen  en  la  leg  e  li  proplietas, 
atrobem  Jhesu  fil(s)  de  Josep  de  Naçaret.  —  40.  E  dix  ;i  lui 
Nathanael.  de  Nazareth  pot  esrier  alcuna  causa  de  bc  ?  Ditz  a 


lin  dialkctp:s  anciens 

lui  Philips,  uei  e  ueias.  —  47.  Vie  Jhesu  Nathanael  uinent 
75  a  si  e  dix  de  lui.  uec  uos  uerament  Israelitene  el  quai  no  es 
enfrantz.— 4S.  Dix  ad  ol  Nathanael.  don  me  conojruist?  Respos 
.Jhesu  e  dix  a  lui.  primeirament  que  Philip  te  apeles  cum  fosses 
sotz  lo  figuor  te  ni.—  49.  Repos  a  lui  Natanael  e  dix.  maestre 
tu  est  fils  de  dou.  tu  est  reis  d'Israël.  —  50.  Respos  Jhesu  e 
80  dix  a  lui.  quar  dixi  a  tu.  cum  ui  tu  sotz  lo  figuer  crezes. 
maior  causa  d'a[que]stas  ueiras.  —  51.  E  dis  ad  el(s).  Ve- 
[79^  llrament  uerament  die  a  uos.  uos  ueiretz  lo  cel  ubert 
els  angels  de  deu  puiantz  e  deissendentz  sobrel  fil  del  home. 

II         1 .   l~it  el  tertz  dia  nossas  foro  faitas  en  CanaGalilea.  et  era 

^^  XL  la  maire  de  Jhesu  aqui.  —  2.  Mais  fo  apelat  Jhesu 

e  li  decipol  de  lui  a  las  nossas.  —  3.  e  defalhent  lo  ui.  dix  la 
maire  de  Jhesu  ad  el.  No  an  ui.  —  4.  e  dix  a  lei  Jhesu.  Qui 
es  a  mi  et  a  tu,  femna  ?  Encara  no  uenc  la  mia  ora.  —  5.  Ditz 
la  maire  de  lui  als  ministres.  Qualque  causa  dira  a  uos,faitz. — 

90  C.  Mais  eran  aqui  .vi.  uaiissel  de  peira  pausatz.  segon  lo  nedeia- 
ment  dels  Juzeus,  prendentz  senglas  mesuras  o  doas  o  très.  — 
7.  E  dix  ad  els  Jhesu.  Ompletz  los  uaissels  d'aiga.  Et  ompliro 
los  entro  desus.  —  8.  E  dix  ad  els  Jhesu.  Pozatz  ara  e  portatz 
ad  archit[r]icli.  E  portero. — 9.  Mais  depuiss  que  àc  tastat  àrchi- 

95  t[r]iclis  lo  ui  fait  d'aiga.  e  no  sabia  don  fos.  mais  li  ministri  o 
sabian  que  auian  pausada  l'aiga.  archit["r]iclis  apela  Tespos. — 
10.  E  ditz  a  lui.  Totz  hom  pausa  primer  lo  [f.  79^^  2J  bo  ui. 
E  cum  seran  eniorat.  adonc  aquest  qu'es  plus  auols.  Mais  tu 
seruest  lo  bo  ui  entro  encara.  —  11.  Mas  aisso  fe  Jhesu  enco- 

100  mensamentde  signes  en  Cana  Galilea  e  manifestée  la  sua  gloria. 
ecrezeroli  decipol  de  lui. — 12.  Apres  aquestas  causas deissendec 
el  ( 'afarnaum  el  e  la  maire  de  lui .  e  li  fraire  de  lui.  e  li  decipol  de  lui 
et  estero  aqui  no  montz  dias.  -  13.  Et  era  prop  la  Pasca  dels 
Juzeus  e  Jhesu  poiec  en  Jherusalem. —  14.  E  atrobec  el  temple 

105  los  uendentz  los  bous,  e  las  ouelhas.  e  las  colombas.  els  cam- 
biadors  sezentz.  — 15.  Ecum  agues  fait  coma  coreiada  d^  cor- 
dctas,  totz  los  gitec  del  temple,  atressi  las  ouelhas  els  bous,  et 
espars  Tauer  dels  cambiadors.  e  trastornec  las  taulas,  —  16.  e 
ad  aquels  que  las  colombas  uendian.  dis.  Ostatz  aquestas  cau- 

110  sas  d'aici  e  no  uulhatz  far  la  maiso  del  meu  paire  maiso  de 
mtTcadairia.  —  17.  Mais  recordero  se  li  decipol  de  lui.  quar 


EVANGILE   SELON    SAINT  JEAN  111 

escriut  es.  la  eueiade  la  tua  maiso  maniée  [f.80'  Ij  mi.  — 
18.  Adonc  resposero  li  Jiizeu(sj  e  dixero  a  lui:  Quai  signa(s)  de- 
mostras  a  nos.  quar  aquestas  causas  fas?  —  19.  Respos  Jhesu 
e  dix  ad  els.  Delhiatz  aquest  temple,  et  e  très  dias  refarei  lo.   115 
—  20.  Adoncas  dissero  li  Juzeu.  En  .xlvi.   ans  fo  edeficatz 
aquest  tem[)le  e  tu  en  très  dias  refaras  lui?  —  21.  Mais  el  o 
diziadel  temple  del  seu  cors.  —  22.  Adonc  co  el  fos  resusitatz 
dels  morz,  li  decipol  de  lui  se  recordero  que  d'aquest  o  dizia. 
E  crezero  a  la  escriptura  et  a  la  paraula  la  quai  dis  Jhesu.  --   120 
23.  Mais   cum  fos   en  Jlierusalem  en  la  Pasca  el  dia  de  la 
festa.  mouti  crezero   el  nom  de  lui  vezentz  las  signas  de  lui 
que  fazia.  —  24.  Mais  el  mezeiss  Jhesu  no  crezia  si  mezeiss 
a  lor.  emper  aisso  que  el  los  conoissia  totz.  —  25.  e  quar  no 
era  ohs  a  lui  que    alcus  dones  testimoni  del  home,   quar  el  125 
sabia  aquo  que  era  en  home. 

l.Mais  era  us  hom  dels  Fariseus  per  nom  Nicodemus  prin-    III 
ceps  dels  Juzeus.  —  2.  Aquest  uenc  a  Jhesu  de  nuitz  e  dis  a 
lui.  Maestro  nos  sabem    que  [SO""  2]   de  deu  ueguist.  Maes- 
tro, quarnegusno  pot  far  aquestas  signas  que  tu  fas.  si  deus  130 
no   sera  ab    lui.  --3.  respos  Jhesu   e  dix  a  lui.  Verament 
uerament  die  a  tu.  si  alcus  no  serarenatz  de  rescaps  no  pot 
uezer  lo  règne  de  deu,  —  4.  ditz  a  lui   Nicodemus.  En  quai 
mesura  pot  hom  naisser  cum  sia  uelhs?  doncas  pot  intrar  de 
rescaps  el  uentre  de  la  sua  maire  e  renaisser?  —  5.  respos   135 
Jhesu.  Verament  uerament  die  a  uos.  si  alcus  no  sera  renaz 
d'aiga  e  de  .s.  esperit  no  pot  intrar  el  règne  de  deu. — 6.  Aquo 
que  es  nat  de  carn.  carn  es.  Et   aquo  que  es  nat  d'esperit. 
esperitz  es. — T.notmerauilhes.  quar  dissi  atu.Coue  uos  nais- 
ser de  rescaps.  —  8.  L'esperitz  on  uol  espira.  e  la  uotz  de  lui  140 
auzetz.  mais  no  sabs  don  uenga  o  on  ane.  Enaissi  es  totz  cel 
q  e  es  natz  d'esperit.  —  9.  Respos  Nicodemus  e  dix  a  lui.  Co 
podo  esser  faitas  aquestas  causas  ?  —  10   Respos  Jhesus  e  dis 
a  lui.  Tu  est  maestro  en  Jsrael  et  aquestas  causas mesconois- 
ses?  — 11.  Verament  uerament  die  a  tu. Quar  aquo  que(sj  sa-  145 
bem  parlam  [80'  1]  et  aquo   que  uim  testimoniiam.  el  nostre 
testimoni  no  receubetz.  —  12.  Si  eu  las  terrenals  causas  dissi 
a  uos.  e  no  crezes.  si  direi  a  uos  las   celestials,  en  quai  ma- 
nera  creizetz?  —  13.  E  negus  no  puia  el  cel.  sino  aquel  que 


112  PIALRCTKS     ANCIENS 

150  deissendoc  del  col.  lo  fils  del  home  que  es  cl  cel.  —  14.  Et 
aissi  co  Movses  eissauzec  lo  serpent  el  désert,  enaissi  coue 
csser  cissausat  lo  fil  de  deu.  —  15.  Quar  totz  aquel  que  cre 
en  lui  no  perisca.  mas  aia  uida  durabla.  —  10.  Quar  enaissi 
amec  deus  lo  mon  quel  seu  fil  .i. engendrât  dones  que  totz  cel^ 

155  que  cre  en  lui  no  perisca.  mas  aia  uida  durabla.  —  17.  Quar 
deus  no  trames  lo  seu  fil  el  mon.  que  iuge  lo  mon.  mais  que 
sia  saluatz  lo  mons  per  lui.  —  18.  Aquel  que  cre  en  lui  no  es 
iuiatz.  mais  qui  noi  cre  ia  es  iuiatz.  quar  no  cre  el  nom  del 
uengendrat  fil  de  deu.  —  19.  Mais  aquest  es  lo  iudicis,  quar 

160  la  lutz  uenc  el  mon.  et  am[er]o  li  home  plus  las  tenebras  que 
la  lutz.  quar  las  obras  de  lor  ero  malas.  —  20.  Quar  totz  cel 
que  fa  mal  açira  la  lutz.  e  no  ue  a  [80'*'  2]  la  lutz.  que  no 
sian  reprezas  las  obras  de  lui.  —  21.  Mais  qui  fa  ueritat,  ue 
a  la  lutz  que  sian  manifestadas  las  obras  de  lui,  car  en  deu 

165  so  faitas. —  22.  Apres  aquestas  causas  uec  Jhesu  ab  sos  dcci- 
pols  en  la  terra  de  Judea.  et  estaua  la  ab  lor.  e  bateiaua. — 
23.  Mais  era  Jouans  bateia[n]tz  en  Ennon  costa  Salim.  quar 
montas  aigas  cran  la.  E  uenian  et  eran  bateiat.  —  24.  Quar 
encara  Jouans  no  cra  estatz  mes  e  la  carcer.—  25.  Adonc  fo 

170  faita  questios  dels  decipols  de  Jouan  ab  los  Juzeus  de  la  puri- 
ficatio.  —  26.  E  uengro  a  Jouan  e  dixero  li.  niaestre  qui  era 
ab  tu  part  flum  Jorda.  al  quai  donest  testimoni.  vec  te  aquest 
bateia(t)  e  tuit  ueno  a  lui. —  27.  Respos  Jouans  e  dix.  Hom  no 
pot  recebre   alcuna  causa   sino  sera  donat  a  lui  del  cel.  — 

175  28.  Vos  mezeissi  donatz  a  mi  testimoni  que  eu  dissi.  eu  no  so 
Critz,  mas  que  so  trames  denant  lui.  —  29.  Qui  a  esposa  es 
espos.  mais  amix  del  espos  lo  quais  esta  ^t  au  lui,  de  gaug 
s'esgauziss  per  la  uotz  del  espos.  Em  per  aisso  aquest  gaugs 
meus  es  cump[82''  l]litz.  —  30.  Lui  coue   creisser.  mais  mi 

180  csser  amermat.  —  31.  Aquel  que  uec  desus.  sobre  totz  es. 
Qui  es  de  la  terra,  de  la  terra  es.  et  de  la  terra  parla.  Aquel 
que  uenc  del  cel.  sobre  totz  es.  —  32.  Et  aisso. que  uic  et  au- 
zi  ;  testimonieia.  e  negus  no  recep  lo  testimoni  de  lui.  — 
33,  Mais  col  que  recep  lo  testimoni  de  lui,  fa  signe,  quar  deus 

185  es  uers.  —  34.  Quar  acel  que  deus  trames,  parla  las  paraulas 
do  deu.  Quar  deus  no  dona  esperit  a  mesura.  —  35  Lo  paire 
;iiiia  lo  fil.  e  totas  causas  donec  en  la  ma  de  lui.  —  36.  Qui 
'■10  el  fil,  a  uida  durabla.  mais  qui  es  encredols  al  tih  no  ueira 
"iida.  mas  la  ira  de  deu  esta  sobre  lui. 


EVANGILE  SELON     SAINT  JR\N  11^ 

1      A  doncas  depuis  que  Jhesuconoc  quarliFariseu(s)auziro  IV  1-K) 
j\   que  Jhcsu  fa  plusors  decipols  e  bateia  que  Jouans. 

—  2.  Ja  sia  aisso  Jliesu  no  bateies  mas  li  decipol  de  lui.  — 
3.  laissée  Judea.  et  anec  de  rescaps  en  Galilea.  —  4  Mas 
couenia  lui  traspasar  per  Samaria,  —  5,  Adoncas  uenc  Jhesu 

en  laciutat  de  Samaria  la  quais  es  dîta  Sychar  decosta  l'alo  lo  195 
qualJacob  donec  a  Josep  so  fil.  —  6.  Mais  era  aqui  [82""  2] 
la  fontz  de  Jacob.  Adonc  Jhesula  (i)ssatz  del  uiage  sezia  enaissi 
sobre  la  fontz.  Mas  la  ora  era  coma  seisena.  —  7.  Et  uenc 
una  femna  de  Samaria  pozar  de  Taiga.  dix  a  loi  Jhcsu.  Dona 
a  mi  a  beure.  —  8.  Mais  li  decipol  de  lui  anero  e  la  ciutat  200 
que  compresso  maniar.  —  9.  Adoncas  dix  a  lui  la  femna 
aicela  Samaritana.Eu  quai  maneiratu  co  sias  Juzeus.  requeres 
de  mi  a  beure  que  so  femna  samaritana  ?  Quar  li  Juzeui  no 
an  paria  ab  los  Samaritas.  —  10.  Respos  Jhesu  e  dixàlei. 
Si  tu  saubesses  le  do  de  deu  e  quais  es  aquel  que  ditz  a  tu,  205 
dona  a  mi  a  beure.  tu  per  auentura  querias  de  lui  que  doues 
aiga  uiua  —  11 .  E  dix  a  lui  la  femna.  Senher  e  no  causa  as 
en  quen  pozes.  el  potz  es  nautz.  doncas  don  as  aiga  uiua? — 12. 
Doncas  est  tu  maier  del  nostre  paire  Jacob  que  dec  a  nos  le 
potz?  et  el  meteis  bec  de  lui.  e  li  fil  de  lui.  e  las  bestias  de  lui.  2iO 

—  13.  Respos  Jhesu  e  dix  a  lei.  Totz  cel  que  beura  d'aquesta 
aiga.  sedeiara  de  rescaps.  mais  qui  beura  de  Faiga  [82^  1 1 
la  quel  eu  darei  a  lui.  no  sedeiara  en  durable. —  14.  Mas 
l'aiga  qu'eu  darei  a  lui.  sera  faita  fontz  d'aiga  salhant  en  uida 
durabla.  —  15.  Mais  ditz  a  lui  la  femna.  Senher  dona  a  mi  215 
aquesta  aiga  qu'eu  no  sedeie.  ni  no  uenga  za  pozar.  -  16.  Ditz 

a  lei  Jhesu.  Vai  apela  lo  teu  marit.  e  uei  za.  —  17.  Respos 
la  femna  e  dix  a  lui.  No  ei  marit.  e  dis  a  lei  Jhesu.  be  dissist 
que  no  as  marit  —  18.  Quar  .v.  marist  aguist.  et  aquestque 
as  no  es  lo  teus  maritz.  d'aisso  uer  dissist.  —  19.  E  dis  a  lui  220 
la  femna.  Senher  eu  ueig  que  tu  est  propheta.  —  29.  Li  nostri 
pairo  azorero  en  aquest  pug.  e  uos  dizetz  qu'en  Jherusalem  es 
lo  lox  on  coue  azorar.  • —  21 .  E  dix  a  lei  Jhesu.  femna  crei  a 
mi.  quar  uenra  la  ora  quan  en  aquest  pug  ni  en  Jherusalem  no 
azoraretz  lo  paire.  —  22.  Vos  azoratz  zo  que  no  sabetz.  nos  225 
azoram  zo  que  sabem.  quar  la  [sajlutz  es  dels  Juzeus. —23.  Mais 
ue  la  ora  et  ara  es.  quan  li  uer  azorador  azoraran  lo  paire,  en 
esperit  et  en  ueritat.  Quar  el  paire  [82^  2J   quer  aitals  que 


!H  DIAI.KCTES    ANCIENS 

azorolui.  —  24.  Deus   es  l'esperitz   e  aicels  que  uzoran  lui. 
'2'.'>0  eu  esperit  et  en  veritat  coiie  azorar.   —  25.    E  dix  a  lui  la 
femna.  Eu  sei  que  Messias  ue  lo  quais  esdigs  Cristz.  atloncas 
cum  el  er  ueii.yutz.  anonciara  a  nos  totas  causas.  —  26.   Dix 
aleiJhesu.   Eu  so  el   que  parli  abtu.    —  27.   E  uiasament 
uengo  li  docipol  de  lui.   e  merauilhauan  se.  quar  ab  la  femna 
235  parlava.Empei'o  negus  no  dis,  que  queres  o  que  parla[s]  ab  ela? 
—  28.   Per  aisso   la  femna  laissée   so  uaissel.  et  anec  e  la 
ciutat.  e  dix  ad  aicels  homes.   —  29.  Vinetz  e  ueiatz  Tome 
lo  quais  me  dis  totas  las  causas  quais  que  quais  eu  fi.  doncas 
es  el  mezeiss  Cristz . — 20.  Adoncas  issiro  de  la  ciutat  e  uenian 
2t0  a  lui.  —  31.   E  domentre  aquestas  causas  parlaua  pregauan 
le  li  decipol.  e  dixero  a  lui.  Maestre  mania.   —  32.   Mas  el 
dix  ad  els.  Eu  ei   maniar  a  maniar  lo  quel  uosno  sabetz.  — 
33.  Per  aisso  li  decipol  dizio  entre  lor.  doncas  alcus  aportec 
li  a  maniar.   —  34.   E  dix  a  lor  [83""  1]  Jhesu.   Lo  meus 
245  maniars  es  qu'eu  fassa  la  uolontat  del  meu  paire  qui  mi  trames, 
e  qu'eu  acabe  la  obra  de  lui.    —  35.   Doncas  uos  no  dizesz 
que  encara  so  catre  mes.  e  la  meissos  ue.  Vec  uos  eu  die  a 
uos.  leuatz  uostres  ulhs.  e  ueiatz  las  regios,quar  ia  so  blancas 
las  meissos.   —  36.   Et  aquel  que  meissona  recep  loguer.  et 
250  aiusta  fruit  en  uida  durabla.  Quar  aicel  qui   semena.   equi 
meissona  essems  s'esgauzisca.—   37.   Quar  en  aisso  es  la  pa- 
raula  uera.  quar  autre  es  aquel  que  semena  et  autre  es  aquel 
que  meissona.   —  38.   Eu  tramese  uos  meissonar  aquo  que 
uos  no  laboretz.  Autrilaborero.  e  uos  intresz  els  labors  do  lor. 
255  —  39.   Mais  d'aicela  ciutat  mouti  crezero  en  lui  dels  Samari- 
tas  per  la  paraula  de  la  femna  donant  test'moni.  quar  dix  a 
mi  totas  las  causas  qu'eu  fi.  —  40.   Adoncas  co  fosso  uengut 
li  Samarita's)  a  lui,  preguero  lo  que  aqui  estes,  et  estec  aqui 
dos  dias.    —  41.    E  mouti  pus  crezero  en  lui  per  la  paraula 
200  de  lui.    —  42.   Et  a  la  femna  dizian.  Quar  ia  per  la  tua  pa- 
rau[83'"  2]Ia  no  crezem.  quar  nos  meteissi  auem  auzit  de  lui 
meteis.  e  sabem  quar  aquest  es  uerament  lo  saluaire  del  mon. 
—  43.  Mais  après  dos  dias  issic  d'aqui  et  anec  en  Galilea.  — 
44.  Quar  el  meteis  Jhesu  donec  testimoni.  que  propheta  no  a 
265  honor  e  sa  encontrada.   —  45.  Adonc  cum  fos  uengut  en 
Galilea.  receubrolui  li  Galileu.  co  agro  uistastotos  las  causas 
que  auia  faitas  Jhesu  en  Jherusalem  el  dia  de  la  festa.  Quar 


I-^VANGILE  SELON    SAINT   JEAN  115 

eli  uonian  al  dia  do  la  festa. —  4(5.  Adoncas  uenc  de  rescaps 
Jhesu  en  Cana  Galilea.  on  fe  de  Taiga  ui.  Et  era  aqui  us 
reigz  paux  del  quai  us  fils  era'  malautes  en  Cafarnaum.  —  270 
47.  Aquest  co  agues  auzit  que  Jhesu  uengues  de  Judea  en  Ga- 
lilea, anec  a  lui  e  pregaua  lo  que  dissendes  e  sanes  lofil  de  lui. 
Quar  comensaua  morir.  —  40.  Adoncas  Jhesu  dis  a  lui.  Si 
no  ueirez  las  signas  e  las  merauilhas.  no  crezetz.  —  49.  E 
dis  a  lui  lo  reietz.  Senher  deissent  enantz  que  moira  lo  meus  275 
fils.  —  50.  E  dix  a  lui  Jhesu.  Val  lo  teus  fils  uiu.  E  crezcc 
Tom  a  la  parau[83  v  l]la  la  quai  dis  a  lui  Jhesu.  et  anaua. 
—  51.  Mais  ia  lui  deissendent.  li  serui  coregro  encontra  a  lui. 
e  nunciero  dizent  quel  fils  de  lui  uisques.  —  52.  Adonc  de- 
mandaua  de  lor  la  ora.  en  la  quai  agra  raelhs  estât.  E  dixero  280 
a  lui  qu'era  la  ora  setena.  quel  laissero  las  febres. — 53.  Adonc 
conoc  lo  paire  que  aquela  ora  era.  en  la  quai  dix  a  lui  Jhesu. 
lo  teus  fils  uiu.  E  crezec  el  etotala  maisos  de  lui. — 54.  Aquesta 
segonda  signa  fe  de  rescaps  Jhesu  cum  fos  uengut  de  Judea  en 
Galilea.  285 


1 .     A    près   aquestas  causas  era  lo  dias  festiuals  dels  Ju-     V 
x\  zeus.  e   pugec  Jhesu  en  Jherusalem.  —  2.  Mas  pis- 
cina  sobre  esproada  es  en  Jherusalem.   la  quais  es  es  sems 
noranada   en  hebraic    Bethsaida   et  a  .v.    iutradas,  —  3.  En 
aquest  iazia  grans   mouteza  de  languentz.  de    cex.  de  ranx.   290 
de-contraitz.  esperantz  lo  mouementde  l'aiga. —  4:  Mais  Fan- 
gels  del  senhor  segon  lo  temps  deissendia  e  la  piscina  e  Faiga 
era  moguda.  E  aquel  que  primers  dissendia  e  la  piscina  après 
lo  mouement  de  Ftiiga  era  faitz  sas.  [83v  2]  de  quai    que  eter- 
metat  era  tengutz. —  5.  Mais  era  aqui  us  hom  que  auia  .xxx.  295 
viii.    ans  estât  malautes.  —   6.  Co  Jhesu  agues  uist   aquest 
iazent.  e  agueS  conogut  que  ia  auia  moût  temps,   ditzalui. 
Vols  esser  faitz  sas?  —  7.  Respos  a  lui  lo  languentz.  senher  eu 
no  eihome.  que  co  sera  turbada  Faiga  me  meta  e  la  piscina. 
Quar  domentre   qu'eu  uenc  autre  deissen  denant  mi. —  8.  Dis  300 
a  lui  Jhesu.  leua,  pren  lo  teu  leit  e  uai. —  9.  E  uiasament  fo 
faitz  sas  Fom.  e  près  sus  lo  seu  leit  et  anaua.  Mais  era  sabtes 
en  aicel  dia. —  10.  Adoncas  dizian  li  Juzeui  ad  aicel  que    auia 
estât  faitz  sas.  sabtes  es.  no  coua  a  tu  prenre  lo  teu  leit. —  1 1 . 
Mais  el  respos  ad  els.  Aicel  que  fe  mi  sa,  dix  a  mi.  pren  lo  teu  305 


116  DIALECTES    ANCIENS 

!oit  e  iiiii.  —  12.  .\doncas  flemanrloro  li.  Quais  es  aieel  hom 
(|ue  dix  a  tu.  preii  to  leit  e  uai?—  13.  Mais  aquest  que  era  faitz 
sas.  no  sabia  quis  fos.  Mais  Jhésu  départie  se  de  la  cumpanha 
ostablida  o\  loc—  11.  Aj.i'os  Jhesu  atrobec  lui  el  temple,  e  dix 

:;10  a  lui.  Vec  te  que  sas  est  [84'lJ  faitz,  ia  no  uulhas  pecar  que 
alcuna  causa  peier  no  eudeuenga  a  tu . —  15.  Anec  aicel  hom 
e  nuncicc  als  Juzeus.  que  Jhesu  eralo  cals  fe  lui  sa. — 16.  Per 
aisso  perseguianli  Juzeu  Jhesu  el  uolianaucire.  quar  aquestas 
causas  fazia  el  sabte. —  17.  mas  Jhesu  respos  a  lor.  Lo  meus 

;!  15  paire  entre  ara  obra.  et  eu  obri.  — 18.  Adoncas  peraisso 
maierment  li  Juzeui  lo  uolian  aucire.  no  solament  quar  soluia 
lo  sabte.  mais  neis  dizia  lo  seu  paire  dou,  fazentz  si  égal  a  deu. 

—  19.  Emper  aisso  respos  Jhesu  e  dis  ad  els.  Verament  uera- 
ment  die  a  uos.lo  iils  no   pot  far  alcuna  causa   de  si  mezeiss. 

'.V20  sino  aquo  que  aura  uist  lo  paire  fazent(z).  Quar  quais  que  causas 
el  fe,  el  lil  fa  issament  aquestas  causas.  —  20.  Quar  lo  paire 
ama  lo  fil .  e  totas  las  causas  que  el  fa  demostra  a  lui  e  demos- 
trara  a  lui   uiaiers  obras  d'aquestas.  per  que  uos  meruilhetz. 

—  21.  Quar  aissi  cum  lo  paire  resuscita  los  mortz  e  uiuifica. 
325  enaissi    el  fils   aquels    que   uol  fa  uiure.  — 22.    Quar   [84''2] 

lo  [)aire  no  iuia  alcu.  mas  tôt  lo  iuiament  dec  al  fil.  —  23.  que 

fuit  ondresso  lo  fil.  enaissi  coma  onran  lo  paire.  Qui  no  onral 

fil.  no  onral  paire,  que  trames  lui. —  24.  Verament  uerament 

die  a  uos.  Quar  cel  que  au  la  pa(i)raula  de  deu.  e  cre  lui  que 

3:>0  mi  trames,  a  uida  durabla.  e  no  ue  en  iuziui.  mais  traspasare, 

de  mort  a  uida.  —  25.  Verament  uerament  die  a  uos.  Quar  ue 

la  ora  et  era  es  quant  li  mort  auziran  la    uotz  del  fil  de  deu  e 

li  cal  auziran  uiuran. —  26.  Quar  aissi  cum  le  paire  a  uida  e  si 

meteis.  enaissi  al  fil  donec   uida    auer  en  si  meteis. —  27    E 

;'>35  pozestat  donec  a  lui  far  iuiament.  quar  fil  d'ome  es.  —  28.  No 

uos  uulhatz  merauilhar  d'aisso.  quar  la  ora  ue  en  la  quai  tuit 

aqueli  que  so  els  monimentz  auziran  la  uotz  de  lui. —  29.  et 

issiran.  aqueli  que   fero  be  en  resurectio  de  uida.  mas  aqueli 

que  fero  mal  en  resurectio  de  mort. —  30.  Eu   no  pusc  far  de 

3  10  mi  mezeis  alcuna  causa,  mas  enaissi  co  auzigui  iugi.  El  meus 

iuiament[z]  es  iustz.  Quar  no  querilam[84vljia  uolo[n]tat.  mais 

la  uolontat  de  lui  qui  mi  trames.  —  31.  Si   eu  doni  testimoni 

de  mi  mezeis.  lo  meus  testimonis  no  es   uci'S.  — 32.  Autre  es 

!o  quais  doua  testimoni  de  mi.  c  sei  que  uers  es  lo  testimoni  que 


EVANGILE   SELON  SA.1NT    JEAN  11: 

dona  demi.—  33.  Vos  tramezes  a  Joiian  e  doiiec   testimoni  a  31") 
la  ueritat.  —  34.  Mais  eu  d'orne  no   recebi   testimoni .    mais 
aquestas  causas  die  que  nos  siat/  salui. —  35.  El  era  luzerna 
ardentz  e  luzentz.  mas  uos  nos  uolgiiesz  aleg(ijrar  az  ora  e  la 
lut/,  de  lui .  -3(3.  Mais  eu  ei  maiop  testimoni  que  Jouans.  Quar 
las  obras  las  quais  doneo  a  mi  lo  paire  qu'eu  acabe  elas.  me-  350 
zeissaslas  obras  que  eu  fasz  dono  testimoni  de  mi  quar  lo  paire 
me  trames.  —  37.  El  paire  que  me  trames  el  donec  testimoni 
de  mi.  Et  anc  la  uotz  de  lui  no  auziss.  ni  la  carade  lui  no  uistz. 
—  38,  E  la  paraula  de  lui  no  auetz  estant  e  uos.  Quar  uos  no 
crezetz  ad  aquest  lo  quai  el  trames. —  39.  E  cercatz  las  escrip-  355 
turas.  quar  uospessatz  en  elas  auer  [84^2]  ^lida  durabla.  et  elas 
so  qxre  dono  testimoni  de  mi. —  40.  E  no  uoletz  uenir  a  mi  que 
aiatz  uida.—  41 .  Clartat  no  receubi  d'ornes.  —  42.  mas  cono- 
gui  uos  que  Tamistat  de  deu  no  auetz  e  uos.  —  43.  Eu  uengui 
el  nom  del  meu  paire  eno  me  receubesz.  si  autre  uenra  el  seu  .360 
nom  lui  recebretz. —  44.  En  quai  maneira  podetz  uos  creire,  li 
quai  recebetz  gloria  Fus  de  l'autre,  e  la  gloria  que  es  de  sol 
deu  no  queretz. —  45.  No  uulhatz  cuiar  qu'eu  sia  acusaire  de 
uos  ab  lo  paire,  mas  antre  es  qui  uos  acussa.  Mojses  en  cui  uos 
esperatz. —  46.  Qaar  si  uos  crezessetz  a  Moj^sen.crezeratz  per  365 
auentura  e  a  mi.  Quar  el  escrius  de  mi.  —  47.  Mais  si  no  cre- 
zetz a  las  letras  de  lui,  cossi  crezeretz  a  las  mias  paraalas? 

1_    A   près  aquestas  causas  anec  .Jhesu  part  la  mar  de  Ga-    VE 
x\.lilea  que  es  de  Tabaria.  — 2.  E  seguia  lui  grans  cum- 
panha.  quar   uezian  las  signas  que    fazia  sobi-e   aquestz  que  370 
eran  malaute.  —  3.  Adoncas  Jhesu  pugec  el  puic  et  aqui  sezia 
ab  SOS  decipols.  —  4.  Mais  era  prop  [SS""!]  la  Pascalo  dias  de 
la  festa  dels  Juzeus. —  5.Adonc  cum  .Jhesu  agues  susleuatz  sos 
ulhs.et  agues  uist  que  moutgrans  gentz  venc  a  lui,  ditz  a  Phi- 
lip.don  cumprarempas  que  manio  aquesti? — 6. Mais  aissodizia  375 
essaianz  lui.  quar  el  sabia  que  fos   fazedor.    —  7.  Respos  a  lui 
Philips,  lipa  de  .ce.  diners  no  auondo  ad  els  que  us  quex  ne 
presseso  u  pauc.— 8.E  dix  à  lui  us  dels  decipols  de  lui,  Andreus 
lo  fraire   de   Simon  Peire,  —  9.  Aici  es  us  macips  que  a  .v. 
pas  d'ordi  e  dos  peisses.  mas  aquesta^  causas  que  so  entre  ai-  3S0 
tantz?  —  10.  Adoncas  dis  a  lui  Jhesu.  faitz  los  homes  repau- 
zar.  Mais  era  moutz  fes   elloc.  Adonc  repausero  ii  baro   per 


11^  DIALECTES?     ANCIENS 

nombre  enaissi  coma  .v.  milia.  —  11.  Adoncas  Jliesu  près  los 
pas.  0  co  aguos  faitas  gracias  donec  als  repauzantz.   issament 

;5S5  e  dels  peisses  aitant  cant  uolian.  —  12 .  Mais  depuiss  que  foro 
azemplit.  dis  a  SOS  decipols.  Culetz  las  franementas  que  so- 
brero  que  no  perisca.— 13.  Adoncas  culiroet  empliro  .xii.  co- 
fres  [SS""  2]  de  franementas  que  sobrero  dels  .v.  pas  d'ordi  ad 
aquestz  que  auian maniât.  —  14.  Em  per  aisso  aicilh  home,  co 

.'WO  agueso  uista  la  signa  que  auia  faita  dizian.  quar  aquest  es 
uerament  propheta  que  es  uenidors  el  mon.  —  15.  Adoncas 
co  Jhesu  agues  conogut  que  uenidor  fosso  quel  presesso  el 
fesso  rei.  de  rescaps  el  fugic  sols  el  puig. —  16.  Mais  depuiss 
que  sers  fo  faitz.  dissendero  li  decipol  de  lui  al  mar.  —  17.  E 

395  co  fosso  puiat  e  la  nau,  uengon  part  la  mar  en  Cafarnaum  e  ia 
eran  faitas  tenebras.e  no  era  vengutz  a  lor  .Jhesu.  —  18.  Mas 
lo  gran  uent  butant  lo  mar  se  leuaua.  —19.  Adonc  cumaguesso 
naueiat  enaissi  coma  .xx.  estadis  o  .xxx.  uiro  Jhesu  anant  so- 
brel  mar  e  prop  esser  fait  a  la  nau.  e  temso.  — 20.  Mais  el  dis 

100  ad  els.  Eu  so,  no  uulhatz  temer.  —  21.  Adonc  uolgro  recebre 
lui  e  la  nau  e  la  nau  s  fo  uiasament  a  la  terra  a  la  quai 
anauan.  —  22.  E  Fautre  dia  la  cumpanha  que  estaua  part  la 
mar  ui  que  autra  [85^  1]  naueta  no  era  aqui  sino  una.  e  quar 
no  fos  intratz  .Jhesu  ab  sos  decipols  e  la  nau.  mais  soli  li  de- 

405  cipol  de  lui  anero.  —  23.  Mais  autras  naus  sobreuengon  de 
Tabai.'ia  decostal  loc  on  auian  maniât  lo  pa  gracias  fazentz 
alsenhor.  —  24.  Adonc  co  la  cumpanha  agues  uist  que  Jhesu 
no  fos  aqui  ni  li  decipol  de  lui,  puiero  e  las  nauetas.  e  uengro 
en  Cafarnaum  querentz  Jhesu.  —  25.  e  co  l'aguesso   trobat 

410  part  la  mar  dixero  a  lui.  maestro  quan  ueguistza? — 26.  Res- 
pos  Jhesu  e  dis  ad  els.  Vcrament  uerament  die  a  nos.  uos  me 
queretz.  no  quar  uistz  las  signas,  mais  quar  raaniesz  dels  pas 
etesz  sadolat.  —  27.  obratz  nol  maniar  que  péris  mas  lo  quais 
esta  e  uidadurabla.  lo  quai  lo  fils  de  deu    dara   a  uos.  Quar 

415  aquest  senhec  deus  lo  paire.  —  28.  Adoncas  dixero  a  lui.  Qui 
farem  que  obrem  las  obras  de  deu?  —  29.  Respos  Jhesu  e  dix 
ad  els.  Aquesta  es  la  obra  de  deu.  que  uos  crezatz  eu  lui  lo 
quai  el  trames. —  30.  Adoncas  dixero  a  lui.  doncas  quai  signa 
fas  tu.  que  ueiam  e  crezam  a  tu?  que  obras?  — _31.  Li  nostre 

420  paire  man[85^2]iero  la  manna  el  désert  aissi  co  es  escriut. 
pa  del  cel  dec  ad  els  a  maniar.  -  32.  Adoncas  dis  a  lor  Jhesu. 


EVANGILE  SELON   SAINT    JEAN  119 

Verament  uerament  die  a  nos.  Moysesno  dec  auospa  del  cel. 
mais  lo  meus  paire  dona  a  uos  lo  uor  pa   del  cel.  —  33.  Quar 
pas  de  deu  es  lo  quais  deissendec  dal  cel.  e  doua  uida  az  aquest 
mon.  —  34.  Adoncas  dixero  a    lui.  Senher  dona  a   nos  totas  425 
oras  aquest  pa.  —  35.  Mais  Jliesu   dis  ad    els.  Eu  so   pa  de 
uida.  Qui  ue  a  mi  no  aura  fam.  e  qui  cre  e  mi.  no  aura  scd. — 
36.  Mais  eu  dissi  a  uos.  quar  me  uisz  e  no  crezetz.  —  37.  Tôt 
aquo  que  dona  a  mi  lo  paire  uenra  a  mi,  et  aicel  que  ue  a  mi 
ia  nol  gitarei  fora.  —  38.  Eu  deissendei  del  cel.  no  qu'eu  fassa  430 
la  mia  uolontat.  mas  la  uolontat  de  lui  qui  mi  trames.  —  39. 
Mais  aquesta  es  la  uolontatz  d' aicel  paire  qui  mi  trames,  que 
tôt  aquo  que  donec  a  mi  lo  paire,  no  perda  d'aicela.  mas  qu'eu 
la  resuscite  el  derairan  dia.  —  40,  quar  aquesta  es  la  uolon- 
tatz del  meu  paire  que  trames  mi.  que  totz    aquel  que  ue  lo  435 
[SGr  1]  fil  e  cre  en  lui.  aia  uida  durabla.  e  eu  resuscitarei  lui  el 
deraira  dia.  — 41.  Em  per  aisso  murmurauan  de  lui  li  Juzeu. 
quar  auia  dig.  Eu  so  pas  que  deissendei  del  cel.  —  42.  e  dizian. 
doncas  aquest  no  es  Jhesu  fils  de  .Josep.  del  quai  nos  conoguem 
lo  paire  e  la  maire  ?  doncas  en  quai  manera  ditz  aquest  que  del  440 
cel  deissendei?  —  43.  Adonc  respos   .Jhesu  e  dis   ad   els.   No 
uulhatz  murmnrar  entre  uos.  —  44.  nogus  no  pot  uenir  a  mi. 
sil  paire  que  mi  trames  no  aura  tirât  lui.  et  eu  resuscitarei  lui 
e  deraira  dia.  —  45.  Escriut  es  els  prophetas.  e  seran  tuit  es- 
senhable  de  deu. totz  cel  que  auzicdelfpaire  et  après,  ue  a  mi. —  445 
40. No  quel  paire  ui  alcus.  sino  aquest  lo  quais  es  de  deu.  aquest 
ui  lo  pajre. —  47.  Verament  ueramentdic  auos.  qui  cre  e  m 
a  uida  durabla.  —  48.  Eu  so  pas  de  uida.  -  49.  Li  paire  uostre 
maniero  la  manna  el  désert,  e  so  mort.  — 50.  Aquest  es  lo  pas 
deissendentz  del  cel.   que  si  alcus'  maniara  de  lui.  no  mora.  —  450 
51.  Eu  so  lo  pas  uius  que  deissendei  del  cel.  — 52.  si  alcus  man- 
iara d'aquest  pa,  uiura  en  durabletat.  el  pas  qu'eu  donarei  es 
la  mia  carns  per  la  uida  del  mon. — 53.  Em  per  aisso  tenszonauan 
li  .Juzeu  entre  lor  dizentz.   en  quai  nianeira  pot  aquest  dar  a 
nos  la  sua  carn  a  maniar? —  54.  Adoncas  dis  a  lor  Jhesu.  Ve-  455 
rament  uerament  die  a  uos.  si  uos  no  maniaretz  la  carn  del  fil 
del  home,  e  si  nobeuretzlosanc  delui.  no  auretz  uidaen  uos. — 
55.  Qui  maniara  la  mia  carn  e  beu  lomeusanc.  auidadurabla. 
et  eu  resuscitarei  lui  el  deraira  dia.  —  56.  Quar  la  mia  carns 
es  uerament  mauiars.  el  meus   sanc  es  uerament  beure[s].  —  460 


1?0  /flAl.ECTKS    ANCIKNS 

57.  Qui  mania  la  mia  carn  e  beu  lo  meu  sanc.  esta  e  rai.  et 
cil  en  lui.  —  58.  Enaissi  coma  me  trames  lo  paire  uiuens.  et 
eu  uini  per  lo  [lairo.  Et  aicel  que  mania  mi,  el  uiu  per  mi.  — 
59.  Afjuest  es  lo  pas  que  deissendec  del  cel.  no  enaissi  coma 

105  li  uosl/'i  paire  manière  la  manna.  e  so  mort.  Qui  mania  aquest 
pauiura  en  durabletat.  —  (50.  Aquestas  causas  dis  en  la  sina- 
goga  essenhantz  en  Cafarnaum.  —  61.  Em  per  aisso  mout(z) 
auzent(z)  d^ls  decipols  de  lui  dixero.  dura  [88^1]  es  aquesta 
paraula.  Quais  pot  auzir  lui?  —  62.  Mais  Jhesu  sabentz  uas  si 

i70  meteis.  quar  murmurauo  d' aisso  li  decipol  de  lui.  dis  ad  els. 
Aisso  uos  escandeliza  ?  —  63.  Em  per  aisso  si  uos  ueiretz  lo  fil 
de  deu  puiant(z)  la  on  eraprimeirament? — 64.  L'esperitz  es  lo 
quais  fa  uiure.  la  carns  no  profeita  alcuna  causa,  las  paraulas 
que  eu  parlei  a  uos.  esperitz  e  uida  so.  —  65.  Mais  so  alcanti 

475  de  uos  que  no  o  crezo,  Quar  Jhesu  sabia  del  comensament. 
qui  serian  crezent.  e  quais  séria  trazidors  lui. — 66.  edizia.Em 
per  aisso  dissi  a  uos.  Quar  negus  no  pot  uenir  a  mi.  sino  sera 
donat  a  lui  del  ineu  paire. —  67.  D'aisso  mouti  dcls  decipols  de 
lui  anero  atras.  e  ia  ab  lui  no  anauan.  —  68.  Adoncas  Jhesu 

180  dix  als  .xii.  Doncas  e  uos  uoletz  anar? — 69.  Adonc  respos  a  lui 
Simons  Peire.  Senher  al  quai  anarem  ?  tu  as  paraulas  de  uida 
durabla. —  70.  e  nos  crezem  e  conoguem  que  tu  est  Cristz  fils 
de  deu.  —  71,  Respos  a  lui  Jhesu.  doncas  eu  no  eligi  uos  .xii. 
et  us  de  uos  es  diables?  —  72.  Mais  el  o  dizia  de  Juda  Simon 

185  [86^  2]  Escariot,  quar  aquest  era  trazidors  lui,  co  fos  ,us 
dels  .xii. 

VIÏ       1 .    i  près  aquetas   causas  anaua  Jhesu  e  Galilea.  quar  no 

jTTL  uolia  en  Judea  anar.  quar  li  Juzeu  le  querian  aucire. 

— 2.   Mais  era  prop  lo  dias  festiual[s]  dels  Juzeus  Sinofugia. — 

'190  3.  Mais  dixero  az  el  li  fra[i]re  de  lui,  traspassa  d'aici  e  uai  en 
Judea.  que  li  teu  decipol  ueian  las  tuas  obras  que  fas.  — 
4.  Negus  a  certas  en  rescost  no  fa  alcuna  causa,  et  el  mczeis 
quer  esser  o  pales.  Si  aquestas  causas  fas.  manifestas  tu 
mezeis  al  mon.  --  5.  Quar  li  frairi  de  lui  no  crczian  en  lui. — 

495  6.  Adoncas  dix  a  lor  Jhesu.  Lo  meus  temps  no  uenc  encara. 
mais  lo  uostre  temps  es  totas  oras  aparefljhatz. — 7.  No  pot 
lo  raons  auer  aziratz  uos.  mas  mi  azira.  quar  doni  testimoni 
de  lui.  quar  las  obras  de  lui  so  malas.  —  8.  Vos  puiatz  ad 


EVANUILE  SEF.ON  SAINT  JEAN  121 

nquesi  .lia  l'estuial.  mas  eu  uo  puiaroi  al  (lia   aquest  festiual, 
(juar  1()  meus  temps  encara  no  es  azeinplitz.  — 9.  Co  aquestas  500 
causas  agues   ditas  ad   els.  l'I  cstec   eu   (.Talilea.   —   10.    Mas 
[87 >■  Ij  depuiss  que  puiero  li  traire  de  lui.  adoiie  et  el  puiec 
al    dia  festiual.  no    manifestament    mais  aici  eoma  en   res- 
rost.  —  11.  Adoncas  li  .luzeu(s)  lo  querian  el  dia  festiual.  e 
(lizian.  On  es  el  (  — 12.  e  grans  murmurament[z]  era  de  lui  en  505 
Il  cumpanha.  Quar  aleanti  dizian.  que  bos  es.    mas  li  autri 
liizian.  No  es.  mas  engana  las   eurapanhas.   —    13.  Empero 
degus  no  parlaua  a  pales  de  lui.  per  la  paor  dels   Juzeus.  — 
11.  Mais  la  meitat  de  la  testa  passada  puiec  Jhesu  el  temple 
et  essenhaua.  —  15.   E  merauilhauan  se  li  Juzeu  dizent.  En  510 
quai  maneira  sap  letras  aquest  co   non  aia  aprezas  ?  —  16. 
Adonc  respos  Jhesu  e  dix  a  lor.  la  mia  doct[r]ina  no  es  mia. 
mais  de  lui  qui  mi  trames.  —  17.   Si  alcus  uolra  la  uolontat 
de  lui  far,  conoissera  de  la  doctrina  si  sia  de  deu    s'en  parli 
de  mi  eiss.   —  18.  Qui  parla  de  si  mezeis.  propria  gloria  quer.  515 
Mais  qui  quer  la  gioria  de  lui  lo  quais  trames  lui.  aquest  es 
[87  "  2]  ueraix.  e  tortura  e  lui  no  es.    —  19.  Doncas   Moyses 
no  dec  a  uos  leg  ?  e  negus  de  nos  no  fa  la  leg.  Per  que  me 
queretz  aucire  ?  —  20.  Respos  la  cumpanha  e   dix  :  demoni 
as,  quais  te  quer  aucire?  —  21.  Respos  Jhesu  e   dix  a  lor.  520 
una  obra  fi.  e  tuit  merauilhatz  uos.  —  22.  Per  aisso  Moyses 
dec  a  uos  la  circumcisio.  no  quar  es  de  Moyse[n].  mais  dels 
paires.  Et  en  sabte  circumcizetz  home.  —  23.  Si  hom  recep 
la  circumcisio  el  sabte  que  no  sia  souta  la  leg  de  Moysen.  a 
mi  uos  endenhatz  quar  fi  Tome  tôt  sa  el  sabte  ?  —  24.  No  525 
uulhaz  iuiar  segon  cara.  Mais  dreiturer  iuiament   iuiatz.  — 
25.  Em  per  aisso  dizian  aleanti  de  Jherusalem.  doncas  no 
es  aquest  lo  quai  quiro  aucire?  -  26.  Vec  uos  el  parla  a  pales 
e  neguna  causa  no  dizo  a  lui.   Doncas  conogro  uerament  li 
princep  que  aquest  es  Cristz  ?  —  27.  Mais  aquest  sabem  don  530 
sia.  mas  Cristz,  co  uenra,  negus  no  sab  don  sia.  —   28.  Em 
per  aisso  Jhesu   cridaua  essenhantz  el   temple   e  dis.  E  mi 
sabetz.  e  don  eu  sia  sa[87v  l]betz  e  de  mi  mezeis  no  uengui. 
mais   es  uers  lo  quais  trames  mi.  lo  quai  uos  no  sabetz.   — 
^9.  mas  eu  sei  lui.  E  si  eu  dizia  que  no  sei  lui,  séria  semblante  535 
a  uos,  messorguers.Et  eu  sei  lui  quar  de  lui  so  et  el  me  trames. 
r—  30.  Per  aisso  querian  lui  penre.   e  negus  no  mes  las  mas 

10 


122  DIALECTES    ANCIENS 

.Ml  lui.  Quar  cnquara  no  era  uenguda  la  ora   de  lui.  —  31. 
Mais  (le  la  cuuipanlia  niouti  crezero  en  lui.  e  dizian  :  Cristz  co 

.")!()  uonra.  doncas  fara  plus  signas,  plus  que  aquest  fa? — 32. 
Auziro  li  Fariseu  la  cumpanha  murmurant  de  lui  aquestas 
causas,  e  li  princep  e  li  Fariseu  traraeiro  ministres  quel 
prezesso.  —  33.  Adoncas  dix  a  lor  Jhesu.  Encara  u  pauquet 
temps  so  ab  uos.  e  uau  a  lui  qui  mi  trames. —  34.  Quiretz  me. 

545  e  nom  atroba|re]tz.  et  aqui  on  eu  so,  uos  no  podetz  uenir.  — 
35.  Adoncas  dixero  li  .Juzeu  a  lor  meteisses.  on  es  anador[s] 
aquest  quar  no  atrobarem  lui  ?  Doncas  es  anadors  en  espar- 
zement  de  gentz.  et  essenhadors  las  gentz?  —  36.  Qui  es 
aquesta   paraula  que  dis.   quiretz  me.   e  nom  atrobarétz.  et 

550  aqui  on  eu  [87^  2]  so,  uos  no  podetz  uenir?  —  37.  Mais 
el  deraira  dia  de  la  gran  festa  estaua  Jhesu  e  cridaua  dizentz. 
si  alcus  sedeia(s)  uenga  a  mi  e  beua.  —  .38.  Qui  cre  e  mi,  si 
cum  ditz  la  scriptura,  tium  d'aiga  uiua  décora  del  uentre  de 
lui.  —  39.  Mais  aisso  dix  de  l'esperit  lo  quai  eran  recebedor 

555  li  crezent  en  lui.  Quar  encara  Fesperitz  no  era  donatz.  quar 
encara  Jhesu  no  era  gloriflcatz.  —  40.  Em  per  aisso  raouti 
d'aicela  cumpanha  co  aguesso  auzidas  aquestas  paraulas  di- 
zian. aquest  es  uerament  propheta.  — 41,  Li  autri  dizian. 
aquest  es  Cristz.  mais  alcajnjti  dizian.   doncas   Cristz,  ue   de 

560  Galilea?  —  42.  Doncas  no  ditz  la  scriptura  que  de  la  semensa 
de  Dauid  e  del  castel  de  Bethléem  on  era  Dauit  ue  Cristz  ?  — 
43.  Em  per  aisso  discordia  fo  faita  en  la  cumpanha  per  lui. 

—  44.  Mais  alcanti  de  lor  uolian   lui  penre.   mais  negus  no 
mes  sobre  lui  las  mas.  —  45.  Adoncas  uengro  li  ministri  als 

565  auesques  et  als  Fariseus.  et  eli  dixero  a  lor.  per  que  no 
adussesz  lui?  —  46.  Resposero  li  ministri.  anc  enaici  no 
parlée  hom.  coma  aquest  hom  [SS'  1]  parla.  —  47.  Em  per 
aisso  resposero  a  lor  li  Fariseu.  doncas  e  uos  esz  enganat  ? 

—  48.   Doncas  alcus  dels  princeps  (no)   crezec  en  lui.  o  dels 
.i70  Fariseus?  —  49.  mais  la  cumpanha  aquesta  que  no  conoc  la 

leg.  e  so  maldig.  —  50.  Dix  ad  els  Nicodemus.  aicel  que  era 
uengutz  a  lui  de  noitz.  que  era  us  de  lor.  —  51.  doncas  nostra 
legs  no  iuia  home  sino  auzira  de  lui  primcirament.  e  conois- 
sera  que  fasza?  —  52.  Resposero  e  dixero  a  lui.  doncas  est  tu 
olô  Galileus?  Ecerca  las  escripturas.  e  ueias  que  profeta  nos 
leua  de  Galilea.  —  53.  E  retornero  sen  us  quex  en  la  sua 
maiso. 


EVANGILE  SELON  SAINT  lEAN  123 

1.  ll/l"'>i!^  Jlicsu  anee  c  mont  Oliuet. — 2.  e  mati  de  rescaps  VIII 
lYAueuc  el  temple,  e  totz  lo  polile  iienc  a  lui.  e  sezentz 
essenhaua  els.  —  H.  Et  amenero  a  lui  li  escriua  c  li  Fariseu  580 
una  femna  preza  en  auouteri.  et  establiro  lei  e  mcg. —  4.  e 
dixero  a  lui.  Maestre  aquesta  femna   es  ara    preza  en  auou- 
teri. —  5.  mas  e  la  leg  mandée  Mojses  a  nos  d'aquesta  me- 
sura lapizar  las  auoutrairitz.  Em  per  aissotu  que  dizes  de  Ici? 
[88''  2].  —  G.  Mais  aquestas  causas  dizian  essaiantz  lui  quel  5S5 
poguesso  acusar.  mas   Jhesu  enclinantz    si   deios.  ab  lo  det 
escriuia   en  terra. —  7.  Mais    co  perseueresso  enterrogantz 
lui.  dressée  se  e  dis  ad  els.  qui   senes  pecat    es  de  uos.  pri- 
mers  gete  la  peira  en  ela. —  8.  E  de  reseaps  enclinantz  si  es- 
criuia en  terra. —  9.  Mais  auzent  us  après  u  issian.  comensantz  .590 
dels  uelhs  entro  al  derraira.  E  remes  Jhesu  sols  ela  femna  e 
meg  estantz.  —  10.  Mas  endressantz  si  Jhesu  dix  a  Ici.  femna 
on  so  aquili  que  te  acusauan?  Negus  no  te  condampnoc.    ~ 
11.  La  quais  dis.  no  degus  senher.  e  Jhesu  dis.  ni  eu  no  te 
condamnarei.  uai.   e  ia  d'aici  enant  no  uuhis  pecar.  --  12.   595 
Adonx  de  rescaps.  parlée  ad  els  Jhesu  dizontz.  Eu  so  lutz  del 
mon.  Qui  sec  mi.  no  ua  en  tenebras.  mais  aura  lum  de  uida. 
—  13.  Adonc  dixero  a  lui  li  Fariseu.  Tu  de  tu  meteis  donas 
testimoni.  lo  teus  testimonis  no  es  uers.  —  14,   Respos  a  lor 
Jhesu   e  dis.  E  si  eu  doni  testimoni  de  mi   eiss,  uers    es  lo  000 
meus  testimonis.  Quar  eu  sei  don  uengui  et  on  uau.  Mais  uos 
no  [SS'''  1]  sabetz  don  uenc  o  on   uau.  —  15.  Mais  uos  iuiatz 
segon  carn.  eu  no  iugi  alcu.  —  16.  E    si  eu   iugi  uers  es  lo 
meus  iuiamentz.  quar  no  so    sols,  mais    eu   el  paire  qui  mi 
trames.  —17,  Et  en  la  uostra  leg  es  escriut.  quel  testimonis  005 
de  dos  homes  es  uers.  — 18.  Eu  so  que  doni  testimoni  de  mi 
eiss  el    paire  qui  mi  trames  dona  testimoni  de  mi.  —  19.  Em 
per  aisso  dizian  a  lui.  On  est  tos  paire  ?  respos  Jhesu.  Ni  mi 
no  sabetz  nil  meu  paire.  Si  mi  saubessetz  per  auentura  sau- 
bratz  el  meu  paire.  —  20.  Aquestas   paraulas  parlée  Jhesu  el  <)1<) 
tesaurer  essenhantz   el  temple.  E  negus   no  près  lui.  quar 
encara  no  era  uenguda  la  ora  de  lui. —  21.  Adonc  dix  a  lor 
de  rescaps  Jhesus.  Eu  uau  e  queretz  me.  et  el  uostre  pecat 
morretz.  la  on  eu  uau  uos  no  podetz  uenir. —  22.  Em  per  aisso 
dizian   li  Juzeu.    doncas  aucira  si  meteis?  Quar  ditz,  la  on  eu  015 


121  lUALKClKS    ANCIKNS 

uaa  uos  no  podetz  iienir.  —  23.  E  dizia  ad  els.  Vos  esz  deios. 
eu  so  desobre.  Vos  esz  d'aquest  mon.  [88v  2]  eu  no  so  d'aquest 
mon  —  24 .  Em  pei'  aisso  dissi  a  uos  que  niorretz  els  uostres 
pecatz.  Quar  si  no  crezetz  que  ou  so  morretz  e  uostre  pecat. 

0::iO  — 25.  Adoncas  dizian  a  lui.  Tu  quais  est.  Dis  a  lor  Jhesu. 
Comensamentz  lo  quais  parli  a  uos.  — 26.  Moutas  causas  ei 
de  uos  a  parlar  e  iuiar.  mas  el  qui  mi  trames  es  ueraix.  et 
eu  parli  aquestas  causas  que  auzi  de  lui  el  mon. — 27.  E  no(m) 
conogro  quar  paire  dizia  a  lor  deu.  —  28.  Per  aisso  dix  a  lor 

625  Jhesu.  Co  auretz  eissausat(z)  lo  fil  del  home,  adonc  conois- 
seretz.  que  eu  mezeis  so  e  de  mi  meteis  no  fasz  alcuna  causa. 
Mais  aici  co  essenhec  a  mi  lo  meus  paire,  aici  parli.  —  29. 
Et  el  qui  mi  trames,  ab  mi  es.e  nolaisec  mi  sol.  quar  eu  fasz 
totas   oras  aquelas  causas  que  so  plazentz  a  lui.  —  30.  Lui 

630  parlant  aquestas  causas  mouti  crezero  en  lui.  —  31.  Adoncas 
•Jhesu  dizia  az  aicels  Juzeus  que  crezero  en  lui.  Si  uos  esta- 
retz  e  la  mia  paraula  uerament  seretz  mei  decipol.  —  33.  e 
conois[89  ■■  l]seretz  la  ueritat.  e  la  ueritat  afranquira  uos. 
—  33.  Respondero  a  lui   li  Juzeu  e  dixero  .  Scmensa  d'Abra- 

0.35  ham  em  nos.  et  anc  a  negu  home  no  seruim.  en  quai  maueira 
dizes  tu.  franqui  seretz?—  34.  Respos  a  lor  Jhesu.  Verament 
uerament  die  a  uos  que  totz  hom  que  fa'pecat.  es  sërus  de 
pecat.  — 35.  mas  lo  serus  no  esta  e  la  maiso  en  durable,  mas 
lo  fils  esta  en   durable.  —  36.  em  per  aisso  ^-il  fil   uos  afran- 

010  quira  uerament  seretz  franqui. —  37.  Eu  sei  que  fils  d'Abra- 
ham esz.  Mais  queretz  me  aucire.  quar  la  mia  paraula  no 
esta  e  uos. — 38.  Eu  parli  aquo  que  ui  uas  lo  meu  paire,  e 
uos  faitz  aquelas  causas  que  uisz  uas  lo  uostre  paire.  —  39. 
Resposero  e  dissero  a  lui.  Abrahams  es  nosire  paire,  e  dix 
645  ad  els  Jhesu.  Si  fils  d'Abraham  esz.  las  obras  d'Abraham 
faitz. — 40.  Mas  ara  queretz  mi  aucire.  home  que  parli  ueritat 
a  uos.  la  quai  auzi  de  deu.  aisso  no  fe  Abrahams.  — 41.  Vos 
faitz  las  obras  del  uostre  paire. Em  per  aisso  dixero  a  lui.  Nos 
no  em  naîSG'"  2]di  de  fornicatio,  .t.  paire  auem  deu.  —  42. 
050  Adoncas  dis  a  lor  Jhesu.  Si  deus  fos  uostre  paire,  ameratz 
a  certas  mi.. Quar  eu  issi  de  deu  e  uengui.  quar  de  mi  eiss 
no  uengui.  mas  el  me  trames.  —43.  Per  que  la  mia  paraula 
no  conoissetz?  quar  no  podetz  auzir  lo  meu  sermo.  —  44.  Vos 
esz  del  paire  diable  els  desirers  del  uostre  paire  uoletz  far.  quar 


EVANGILE  SRI  ON  i>AINT  JEAN  125 

el  ei-a  homiciders  del  coraenssament.  et  en  ueritat  no  estec  655 
quar  no  es  ueritatz  en  lui.  Co  parla  messorga.  de  sas  proprias 
causas  parla,  quar  messorguers  es  el  paire  de  lui. — 45.  Mais  eu 
que  die  ueritat.  no  crezetz  a  mi. —  46.  Quais  de  uos  reprenra 
mi  de  pecat?Si  eu  die  ueritat,  per  (jue  uos  no  crezetz  a  mi? — 
47.  —  Qui  es  de  deu  au  las  paraulas  de  deu.  per  aisso  uos  no  660 
las  auzetz,  car  no  esz  de  deu. —  48  Em  per  aisso  respondero 
li  Juzeu  e  dixero  a  lui.  doncas   no  dizem   nos   be  que  tu  est 
Samaritas  et  as  demoni?  —  49.  Respos  Jhesu.  Eu  no  ci  de- 
moni,  mas  ondri  lo  meu   paire,  e  uos  desondresz  me.  ^ —  50. 
Mais  eu  [89^  1]  no  queri  la  mia  gloria.  es  qui  quiira  e  iuie.   665 
—  51.  Verament  uerament  die  a  uos,   si  alcus  gai'dara  la  mia 
paraula  no  ueira  mort  en  durabletat.  —  52.   Adoncas   dizero 
li  Juzeu.  ara  conoissem  que  demoni  as.  Abrahams  es  mortz. 
e  li  propheta.  e  tu  dizes.  si  alcus  gardara  la  mia  paraula  no 
ueira  mort  en  durable.   —  53.  Doncas  est  tu  maier  del  nostre  670 
paire  Abraham  lo  quais  es  mortz  ?  E  li  propheta  so  mort,  que 
tu   meteis  te  fas?  —  54.  Respos  Jhesus.  Si  eu  glorifiqui  mi 
meteis,  la  mia^'loria  es  nientz.  Es  lo  paire  meus  lo  quais  glo- 
rifica  mi.  lo  quai  uos  dizetz  que  uostre  deus  es.  —  55.  e   no 
conogues   lui.  Mais    eu  lo  conogui.  e  si  dizia  que  no  sei  lui.  675 
séria  semblantz  a  uos,  messorguers.  Mais  eu  sei  lui.  e  gardi 
la  paraula  de  lui.  — 56.  Abraham  uostre  paire  se  alegret  que 
uis  lo  meu  dia.  e   ui  et   esgauzic  se.  —  57.  Adoncas  li  Juzeu 
dizero.  Encara  no  as.  l.  ans.  et  Abraham  uist? — 58.  Dix  ad 
els  Jhesu.  Verament  uerament  die  a  uos.  antz  que  Abrahams  680 
fos  faitz.  eu  so.  — 59.  Adoncas  prezero  peiras.  que  giteso  en 
lui.  mas  Jhesu  se  rescos  et  eissic  del  temple,  [89^'  2]. 

('.-1   suivre.) 


DIALECTES   MODERNES 


•_-l?<y*i*»«i>-5J-~-» 


ENIGMES  POPULAIRES  SICILIENNES 


Ces  énigmes  peuvent  ùlre  considérées  comme  une  suite  à  celles 
qui  ont  été  pul;hliées  par  mon  ami  Pitre,  dans  le  second  volume 
de  ses  Canti  popolari  siclliani  (Palermo.  1871). 

Elles  appartiennent  au  langage  de  Noto  (Sicile). 

M.  i)[  MAnTiNo. 


I.  Hag-ghiu  'nacosa  ca'nterra  s'agghiucca 
E  fa  lu  niru  'mmienzu  li  cuticci, 
E,  quannu  'mprena,  'mprena  r'a  vucca, 
E  quannu  figghia,  figghia  r'auricci. 

'A  vutti. 

W.  Picurai'ieddu  ri  Rausa, 
Mi  vuoi  vinniri  un  muntuni 
Cu  li  corna  atturcigghiati 
Cornu  a  cliiddi  ro  \b  patruni? 

'A  ciaramedda. 


ENIGMES  POPULAIRES  SICILIENNES 


T.  —  Il  y  a  une  chose  qui  sur  la  terre  s'accroupit  et  se  fait  un 
uni  au  milieu  des  cailloux;  et,  lorsqu'elle  devient  mère,  le  devient 
de  la  bouche,  et  lorsqu'elle  accouche,  accouche  de  l'oreille.  —  Le 
tonneau. 

II.  —  Berger  de  Raguse  *,  veux-tu  me  vendre  un  mouton  avec 
les  cornes  entortillées  comme  celles  de  ton  maître?—  La  corne- 
muse. 


'  Petite  ville  sicilienne. 


ENIGMES    POPULAIRIS  127 

III.  Rir  î^urdati  i;iraru  la  Spagna 

Pi  ghiri  a  (l'uvari  lu  re  di  la  spica, 
E  lu  truvai'u  'mmieiizu  'ua  lurtagua, 
E  eu  du'  ossa  ci  truucaru  la  vita. 

^IJ  piruoccia. 

IV.  Tuunu,  tunieddu. 
Supra  mari  va, 

Pizzica  ardenti  e  mali  nu'  ta. 

''U  sbiezzi. 

V.  0  ciovi  o  nivicasempri  è  nuvulatu, 
Arburu  siccu  è  sempri  carricatu. 

'U  tettu. 

VI.  Ri  suttasbria,  e  di  supra  maidda, 
E  di  rintra  c'è  apicciridda. 

A  scuzaria. 

VII.  Figghiu  nuccintissimu, 
Fattu  eu  'ngiegniu  er  arti: 
Nu  'mporta  se  si'  mutu, 
Ma  ou  li  mori  tuoi  cunprenniri  nù  fai. 
'ifralogghiu. 

VIII.  Trentatri  piezzi  'ncaufinati  stanuu, 
E  supra  un  lignu  ben  caru,  ben  forti, 
E  sii  binutu  ri  tantu  luntanu 


III.  —  Deux  soldats  parcoururent  l'Espagne  pour  aller  trouver 
le  roi  de  l'épi,  et  le  trouvèrent  au  milieu  d'un  lien,  et  avec  deux 
os  lui  enlevèrent  la  vie.  —  Le  pou. 

IV.  —  Rond,  rondelet,  va  sur  la  mer,  picote  acre  et  no  fait  {las 
de  mal.  —  Le  poivre. 

V. — Qu'il  pleuve  ou  qu'il  neige,  ou  qu'il  y  ait  dos  nuages,  il  est 
arbre  sec  et  il  est  toujours  chargé.  —  Le  toit. 

VI.  —  Dessous,  le  brisoir,  et  au-dessus,  la  huche,  et  dedans  il 
y  a  le  petit.  —  La  tortue. 

VII.  — Filtres-innocent,  fait  avec  talent  et  art;  peu  importe 
situes  muet,  mais,  avec  tes  façons,  fais-moi  comprendre, — L'hor- 
loge. 

VIII. —  Trente-trois  pièces  sont  enchaînées  au-dessus  d'un  bois 


128  DIALECTKS    MODEKN  b:S 

Pi  (lari  peria  a  mia,  turmientu  e  morti. 
'A  scupetta. 
IX.   Ru'  zucca,  milli  painpiiii  e'na   rosa. 

'f/  jaddu. 
X.  Supra  'il  tuuuu  spampinatu 
Ci  su  quatti'u  pipi  ardienti. 
Ju  lu  viru  quantu  è  gratu  ; 
Fa^  cam[)ari  allegramenti. 

'' il  cannilieri  a  quatt.ru  inecci. 
XL  Piccula  sugnu  iu, 

Senz'  ali  vaju  abbulannu  ; 
Unni  puosu  iu, 
Pizzicu  e  fazzu  dannu. 

M  faidda. 
Xli.  Lu  fustu  biaucu  e  lu  cuorpu  russu, 
Sugnu  ri  raghiunevuli  lunghizza; 
Chi  pi  l'affari  miei  scarcu  e  nun  tussu, 
E  lu  sputari  miu  nun  è  spurchizza. 

'A  cannila  ri  cira. 
XIIL   Unnijiti,  Signuri  Dutturi, 
Cu  un  sautu  ca  e  dà, 
Lu  mussiddu  ri  cutticciuni 
E  Tancaredda  ri  mèpapà. 

'  U  riddu. 


bien  fort  et  bien  cher:  il  est  arrivé  de  loin  pour  donner  à  moi  peine, 
tourment  et  mort.  —  Le  fusil. 

IX.  —  Deux  tiges,  mille  feuilles  et  ime  rose.  —  Le  coq. 

X.  —  Sur  une  a.ssiette  effeuillée  il  y  a  quatre  grains  de  poivre 
acre.  Je  le  vois  quand  cela  est  à  mon  gré;  il  fait  vivre  gaiement. — 
Le  candélabre. 

XL  —  Jo  suis  petite,  sans  ailes  je  vais  volant;  où  je  me  pose,  je 
jtecquète  et  je  fais  dommage.  —  La  bluette. 

XII  —  La  tige  blanche  et  le  corps  rouge,  je  suis  d'une  longueur 
convenable;  pour  mes  affaires,  je  crache  et  ne  tousse  pas,  et  mon 
crachat  n'est  pas  sale.  —  La  chandelle. 

XIIL —  Où  allez-vous,  Monsieur  le  Docteur,  avec  un  saut  çà  et 
là,  le  museau  de  caillou  et  la  jambe  de  mon  père  ?  —  Le  grillon. 


I 


ENIGMEIS    POPUI. AIRES  129 

XIV.  Haju  'il  criva  cristalliiia, 
Nun  ci  n'è 'nta  H  jardina, 
E  nun  c'è  pirsuna  nata 
Chi  'un  la  metti  'ntapignata. 

'  U  sali. 
XV.  La  mè  signura,  eu  tanti  billizzi, 

E  stà  firmata  'nta  carri  e  battazzi  {sic)\ 
Veni  lu  jornu  ca  si  tagghia  li  trizzi, 
L'uommini  beddi  li  fa  'sciri  pazzi. 

M  viyna. 
XVI.  Supra  'na  timpa' 

C'è  'na  cosa  pinta  ; 
Ne  parra,  ne  senti 
E  ciamu  a  ghienti. 

''A  campana. 
XVII.  Haju  la  navi  mia  fatia  ri  tila  ; 

Cu  vientu  o  senza  vientu,  sempri  vola. 
Chidda  ca  c'è  dintra  cianci  e  grira, 
Chidda  ca  c'è  ri  'ncianu  eanta  e  sona. 

W  naca. 
XVIII.  A  lu  trasiri,  trasiu  ; 
A  lu  nèsciri,jti  vuoju. 


XIV.  -  J'ai  une  herbe  crislalline;  il  n'y  en  a  pas  dans  les  jar- 
dins, et  il  n'y  a  personne  qui  ne  la  mette  dans  le  pot. —  Le  seL 

XV . — Ma  maîtresse,  qui  est  charmante,  est  enfermée  entre  des 
chars  et  des  hattazi  ;  il  vient  un  jour  où  l'on  coupe  ses  tresses,  et 
elle  fait  tomber  les  beaux  hommes  en  démence.   —  La  vigne. 

XVI. —  Sur  une  pierre  il  y  a  une  chose  pendue;  elle  ne  parle 
ni  n'entend  et  appelle  les  gens. —  La  cloche. 

XVII.  — J'ai  mon  navire  fait  de  toile;  avec  le  vent  ou  sans  le 
vent,  toujours  il  vole.  Celle  qui  et.t  dedans  pleure  et  crie;  celle  qui 
est  au  dehors  chante  et  sonne.  —  Le  berceau. 

XVIII.  En  entrant,  il  entra;  en  sortant:  je  veux  te  garder!  Il  se 
rouilla,  le  verrou,  il  veut  pour  lui  une  co/îsm  -  d'huile. —  La  prison. 

'    Une  variante  de  cette  énigme  a  été  publiée  par  Pitre  dans  ses  Canti 
popolari  siciliani  (  II,  1871 }. 
-'  Mesure  sicilienne  pour  l'huile. 


130  DIALECTES  MODERNES 

S'ari'upghiaju  lu  catinazzu, 
Ci  voli  un  oafisu  r'uogghiu. 

'fl  cnrziru . 
XIX.    Signuri  Dutturi,  c'  addutturiati, 

Sciughittimi  stu  dubbiii  ch'  aju'ii  testa  ; 
Vuoju  ca  tutta  a  notti  ci  pinsati  : 
Quali  armaru  è  ca  figj^hia  ra  testa? 
'A  siccia. 

XX.  Haju  la  manu  mia  lisciannarina, 

Longa  quantu  'nu  battagghiu  ri  campana. 
Cu'  mi  la  'nzerla  ci  fazzu  la  «trina, 
Ci  rugnu  tiempu:  'n  annu,  'n  misi  e'na  simana. 
'U  firiettu. 

XXI.  Haju'n  murtaru  ri  mmarmara  fina  ; 
Intra  ci  su'  vintiquattru  pistuna 
Facievunu  'na  miricina  tanta  fina, 
Ca  si  la  piggliia  la  stissa  pirsuna. 

'A  vucca  cui  rienti. 

XXII.  Uossu  r'auliva,  petra  cotta  ; 
Sugnu  vinutu  ccà  p'allucintari, 

E  sugnu'n  manu  ri'na  bedda  picciotta 
Ca  ammanu,  ammanumifa  squagghiari. 
'  U  sapuni. 


XIX. —  Monsieur  le  Docteur,  qui  faites  le  compagnon,  devinez 
le  doute  que  j'ai  par-dessus  la  tête;  je  veux  qne  pendant  la  nuit 
vous  y  pensiez  :  quel  est  l'animal  qui  accouche  par  la  tète?  —  La 
sèche . 

XX.  —  J'ai  ma  inain  lisse,  et  longue  comme  un  battant  de  clo- 
che. A  celui  qui  me  devinera 'je  donnerai  une  étrenne  .  et  je  lui 
donne  du  temps:  un  an,  un  mois  et  une  semaine.  —  Le  furet. 

XXI.  — J'ai  un  mortier  de  marbre  lin  :  dedans  il  y  a  vingt- 
quatre  pilons,  faisant  une  médecine  très-fine,  que  doit  prendre  la 
même  personne.  —  La  bouche  et  ses  dents. 

XXil.  —  Pépin  d'olivo,  pierre  cuite;  je  suis  venu  ici  pour  ren- 
dre brillant,  et  je  suis  tombé  dans  les  mains  d'une  charmante 
jeune  fille  qui  de  ses  mains  me  fait  devenir  liquide.—  Le  savon. 


ENIGMES   POPULAIRES  1?I 

XXIII.  Haju  'n  mazzu  ri  milliraillicchi  ; 
Nun  su  virdi,  e  mancu  sicchi 
Pi  lu  'niienm  e  pi  la  stati  : 
'Nzirtatimillu  pi  caritati. 

'/  capiddi. 

XXIV.  Ciii  assai  nipierdu,  ciù  assai  n'haju 

^ U  suonnu. 
XXV.  Cincu  ricotti  'nta'na  cavagna. 

V  pietn. 
XXVI.  Cu'  citrasi  eu  a  hirrita  'nta  chiesa? 

'  (/  muorfu. 

XXVII.  Oh  Diu!  clii  maravigghia  ! 

R'intra  pilusu  e  di'ncianu  scucchigghia. 
'U  carciuofulu. 

XXVIII.  Vitti  pi  strata  li  misiri  'rranti, 
Arricughiennu  li  misiri  pizienti, 

E  fa  li  figghi  suoi  bianchi  e  lattanti  : 
E  eu'  li  fa  lîlici,  e  cù  scuntienti. 

'A  littra. 
XXIX.  Rù  sui'uzzi  p'amicizia 
Iddi  'scieru  p'abballari  : 
Puoi  vinni  la  giustizia, 
E  li  fici  cuitari. 

'A  vilanza. 


XXIII.  —  .Tai  un  bouquet  de  mille-feuilles;  elles  ne  sont  pas 
vertes,  et  cependant  elles  sont  sèches  en  hiver  comme  en  été:  de- 
vinez-le moi,  par  charité.  —  Les  cheveux. 

XXIV.  —  Plus  on  en  perd  et  plus  il  y  en  a.  —  Le  sommeil. 

XXV.  —  Cinq  recuites  dans  une  planche.   —  Les  pieds. 

XXVI.  —  Qui  entre  avec'le  bonnet  dans  l'église  ?  —  Le  mort. 
XXVII. —  Mon  Dieu  !  quelle  merveille!  dedans   velu  et  dehors 

feuillu.  —  L'artichaut. 

XXVIII.  —  Je  vis  dans  le  chemin  les  misérables  errants,  ra- 
massant les  misérables  mendiants,  faisant  des  fils  blancs  et  laiteux; 
et  celui-ci  est  heureux  et  celui-ci  mécontent.  —  La  lettre. 

XXIX. — Deux  sœurs,  par  amitié,  sortirent  pour  danser;  ensuite 
vint  la  justice,  qui  les  calma  toutes  les  deux.  —  La  balance. 


13?  DIALECTES    MODEKl>iES 

XXX.   1  laiii  nr  assai'taru  iiitiu  'a  casa; 
La  casa  si  nni  sciu  ])i  li  finesci  : 
Kl-  iu  nrristai  [trif^hiunieru  e  senza  casa. 
'il  pisci''ntra'riti. 

XXXI.   Haju'iia  cosa  ch'è  fattu  a  lu  tuornii  : 
Intra  c'è  lu  quanquarancà  : 
Quantu  fazzu  tri  boti  accussî, 
'Ngloria  'n  pararisu  si  nni  va. 

'  U  crivu  eu  a  farina 

XXXII.  Minciunieddu,  chi  fai  r'arrieri  a  porte  ? 

'U pun'iddu . 


XXX.  —  Les  voleurs  massaillirent  dans  la  maison:  la  maison 
sortit  par  les  fenêtres,  et  je  restai  prisonnier  et  sans  maison. —  Le 
[)oisson  dans  les  filets. 

XXXI.  —  J'ai  une  chose  qui  est  faite  au  tour;  dedans  il  y  a 
la  quanquarancà:  lorsque  je  fais  trois  fois  de  cette  façon,  elle  s'en 
va  au   paradis.  — Le  crible  avec  la  farine. 

XXXII.  —  Sot,  que  fait-il  derrière  la  porte?  —Le  support. 


] 


A  JULl  GAUSSliNEL 

APRES    LA    LEGIDO    DE    SOUN    ABDONA 

Seguissènt  de  Miltoun  la  draio  estelejanto, 
Mountes  fins  au  celestre,  e  pièi,  Dante  nouvèu, 
l)aerbes  l'orre  poiirtau  do  la  ciéuta  cremanto, 
Mai  fort  qu'un  leiounas  o  mai  dous  que  lou  mèu  . 

La  vesioun  d'amoundaut,  que  ta  grand  gèsto  canto, 
Enebriant  noste  eime  i  pur  sourgènt  dôu  bèu, 
Nous  dis  que  sara  'n  jour  ras  de  Dieu  triounfanto, 
Touto  amo  qu'a  ploura  souto  noste  soulèu. 

Aquéli  qu'an  senti  la  boufado  divino  : 

Tasso,  Camoens,  Musset,  Brizeux,  Mistral,  Racino, 

E  Tome  mau  caussat,  lou  qu'escultè  Cinna, 

Podon,  de  dre  requist,  trelusi  dins  toun  libre. 
Mai  n'en  delembres  un,  me  lou  semblo,  o  felibre  ! 
Coume  éli,  sies-ti  pas  dôu  cepoun  d'ABooNA  ? 

Adèufe  Espagne. 
(Provençal,  Avignon  et  les  boi'ds  du  Rhône.) 

A  JULES  GAUSSINEL 

APRÈS  LA  LECTURE  DE  SON  ABDONA 

Suivant  de  Milton  la  voie  étoilée, —  ta  montes  jusqu'aux  régions 
célestes,  et  puis,  Dante  nouveau, — tu  ouvres  l'horrible  portail  de  la 
cité  brûlante,— plus  fort  qu'un  fier  lion  ou  plus  doux  que  le  miel'. 

La  vision  d'en  haut,  que  ta  grande  geste  chante,  —  enivrant 
notre  intelligence  aux  pures  sources  du  beau,  —  nous  dit  qu'[ellej 
sera  un  jour  près  de  Dieu  triomphante,  —  toute  âme  qui  a  pleuré 
sous  notre  soleil. 

Ceux  qui  ont  senti  le  souflle  divin  :—  le  Tasse,  Camoens,  Mus- 
set, Brizeux,  Mistral,  Racine,  —et  l'homme  mal  ciiaussé, celui  qui 
sculpta  Cinna, 

Peuvent,  de  droit  choisi,  étinceler  dans  ton  livre.  —  Mais  tu  en 
oublies  un,  il  me  semble,  ô  féUbre  !—  Comme  eux,  n'es-tu  pas  de 
la  lige  d'ABDONA  ?  Adelphe  Espagnk. 

'  Les  Juges   XIV,  18. 


DONEC  GRATUS  ERAM 

(UuBAci  Carm.,  III,  ix.) 

Eu.  —  Tant  que  t'agradère,  o  bello  Lidio, 

Tant  que  m'amères  miès  que  gis  d'autre  galant, 

Qu'àiéu  soulet  pourgiès  toun  bèu  bras  blanc, 
Visquère  plus  urous  que  li  rèi  do  TAslo. 

Elo.  —  Tant  que  f  agradère,  amaire  catiéu, 

Tant  que  m'amères  miès  que  ta  Cloé  tant  vano, 

Me  cresiéu  mai  qu  Ilio  la  Roumano, 
E  jamai  gis  de  noum  brihè  mai  que  Ion  miéu . 

Eu.  —  Aro  ame  Cloé,  Cloé  i'Arlatenco: 

Canto  sus  la  quitarro  e  n'en  jogo  tant  bèn  ! 

Pèr  elo,  de  mouri  me  farié  rèn, 
Amai  que  more  pas,  ma  migo,  proumierenco. 

Elo.  —  Aro  ame  Calés;  Calés  m'amo  bén, 
Calés  qu'es  dùu  Thor,  l'enfant  d'Ourniture  ; 

E  pèr  eu  mourriéu  dous  cop,  t'assegure. 
Amai  que  more  pas,  moun  ami,  proumiereu. 


HoRATius.  —  Donec  gratus  eram  tilii, 

Nec  qiiisquam  potior  hrachia  candida? 

Corvici  juvenis  dabat, 
l^ersariim  vi^ui  rege  beatior. 

r^v.ifA.  —  Donec  non  alia  magis 

Arsisti  neqiie  erat  Lydia  post  Chloën, 

Muili  Lydia  nominis, 
PioniMua  vi'jui  clarior  Ilia. 


DONEC  G  RAT  US  ERAM, 

(OuRAci  Carm.,  III,  ix.) 

OuRACi.  —  Quand  ère  de  tus  agradat, 
Que  ges  de  jouvent  préférât 
Touii  col  lis  e  blanc  abrassava, 
Mai  qu'un  rei  de  Persia  troumflave. 

LiDiA.  —  Quand  per  Tautra  cremaves  pas, 
Que  noun  aviè  Cloë  lou  pas 
Dessus  ieu  qu'Ouraci  abrassava, 
Trourallave,  urousa  Lidià, 
Mai  que  la  roumftna  Ilià, 

OuRACi.  —  Cloë  de  Tracia  ara  me  mena, 

Soun  dous  lai  canta  sus  Fourguena. 
Dieus  !  se  counservàs  mas  amours, 
Poudès  avaliscà  mous  jours. 

LiDiA.  —  D'un  fioc  parel  al  sieu  m'embranda, 
Calis,  til  d'Omis  de  Taranda. 
Dieus  !  se  counservàs  mous  amours, 
Poudès  avaliscà  ma  vida, 
Dous  cops  mai  qu'un  vous  ie  couvide. 


Hûratius.  —  Me  nunc  Thressa  Chloe  re^it. 
Diilcps  docla  modos  et  citliar;p  scieiis, 

Pro  qua  non  nietuam  mori, 
Si  parcent  anlmaî  fata  suporsliLi. 

"Lydia.  —  Me  torret  face  nuitua 
Thurini  Calais  liliiiô  Ornyli, 

Pro  quo  bis  })aliar  mori. 
Si  parcent  pupro  fala  superstiti. 


135  niAIvECTES  MODERNES 

Èv.    —  E  se  renaissien  nostis  amour  morto, 

Se  Venus  jougnié  mai  tout  co  qu'avem   disjount, 

Se  rebute  un  jour  Cloé  di  peu  blound, 
Se  rebutado  un  jour,  Lidio  ouvro  sa  porto?.  .  . 

Elo,  —  Calés  coumo  un  sôu,  segur,  es  pouli, 

Tu  sies  plus  lèu  que  suve  e  plus  marri  que  l'oundo, 

E  pamens  en  iéu  toun  amour  subroundo: 
Vole  viéure  emé  tu,  vole  emé  tu  mouri. 

V.    LlKUTAUD 

(Provençal,  Avignon  et  les  bords  du  Rhône.) 


HoRATiL's.  —  Quid,  si  prisca  redit  Venus 
Diduclosque  jugo  cogit  aheneo  ; 

Si  flava  cxcutilur  Ghloe, 
Rcjeclaeque  patet  janua  Lydi;e?.  . . 


DONEC    GRATUS    ERAM  137 

OuRACi,  —  Mais  la  Venus  cVantaii  rcveri, 
Saura  Cloc,  lèu,  lèu  vai-t'en. 
Porta,  à  Liclia  oubris-te  'ncara, 
Qu'un  joue  do  ferre  nous  ensarrc. 

LiDiA.    -^  El  es  pus  bèu  que  lou  soulèu; 
Tus,  mai  que  la  mar  roundinèu, 
E  pus  laugè  que  sieure  encara. 
Pamens,  vieure  am  tus  aimariei, 
Countenta  embe  tus  mouririei. 

Adoufe  Espagne. 

(Languedocien,  Montpellier  et  ses  environs.) 

Lydia.  —  Qiian([uam  sidero  puiclirior 
Ille  est,  tu  levier  cortice  et  improbo 

Iracundior  Hadria, 
Tecum  vivere  ainem,  tccum  obeam  libens, 


11 


BIBLIOGRAPHIE 


Die  Beiden  aeltesten  provenzalischea  Grammatiken,  Lo  Donalzproen- 
xaly  un  l  las  liasos  de  trohar,  nebsl  einem  proveiizalisch-italienischen 
Glossar,  von  neuem  getreu  und  nach  don  Hss.  herausgegcbed  von  Ed- 
mund  Slengel.  Marburg,  1878,  in-8o. 

Ci.'tt9  nouvelle  édition  des  Grammaires  provençales  répond   à  un 
besoin  réel  de  nos  études  ;  elle  sera,  je  n'en  doute  pas,  la  très-bien 
venue  auprès  de  tous  les  romanistes.  Ce  n'est  pas  encore,  à  la  vé- 
lité,  l'édition  délinitive  que  l'on  se  flattait,  un  peu  témérairement, 
il  y  a  vingt  ans,  de  mettre  au  jour.  Mais  M.  Stengel,  sans  viser  si 
haut  que  I\I.  Guessard,  nous  aura  peut-être  mieux  servi.  Son  édi- 
tion n'est  pas  définitive,  et  elle  n'y  prétend  point;  mais  elle  offre 
aux  philologues  (si,  comme  le  titre  l'annonce  et  comme  on  doit 
rosporer,  les  mss.  ont  été  fidèlement  reproduits*)  tous  les  secours 
possibles  pour  en  préparer  une  qui  ait  chance  de  l'être,  autant  du 
moins  qu'une  édition  puisse  passer  pour  telle.  M.  Stengel  ne  s'est 
pas  borné,  en  effet,  à  imprimer  in  extenso,  côte  à  côte,  le  texte  des 
deux  principaux  mss.,  tant  du  Donat  cjue  des  Rasas  de  trohar;  il  a 
donné  dans  les  notes  les  variantes  des  autres  mss.,  et  de  plus  re- 
produit, en  les  accompagnant  de  ses  propres  corrections  ou  conjec- 
tures, outre  les   leçons  de  M.  Guessard,  toutes  les  observations, 
même  les  moins  fondées  2,  qu'ont  publiées  sur  nos   deux  gram- 
maires, et  spécialement  sur  les  glossaires  du  Donat, 'S\]s\.  Galvani, 
Dicz,  G.  Paris,  Paul  Meyer,  Tobler,  J.    Bauquier  et  l'auteur  du 
présent  article''.  C'est  donc  une   véritable   édition  vanorum  que 
M.  Stengel  nous  a  donnée.  Il  en  a  encore  augmenté  l'utilité  par 
la  publication  intégrale  du  petit  glossaire  provençal-italien  qui  ac- 
compagne le  Z)o«aMan&  le  ms.  4-2-il  de  Florence,  etdontM.  Bartsch 
avait,  il  y  a  liint  ans,  au  tome  XI  du  Jahrbuch,  imprimé  seulement 
la  moitié.   Le  volume  est  terminé  par  un  double   vocabulaire  où 
sont  relevés  alphabétiquement,  avec  leur  traduction   latine  ou  ita- 


*  Il  est  fâcheux  que  l'on  n'ait  pas  trouvé  d'autre  moyen,  pour  ligurer 
lypographiqucment  les  diverses  abrcvialious  des  mss.,  que  l'emploi  dans 
tous  les  cas  d'un  seul  et  mémo  signe,  l'apostrophe. 

-  Telles  sont  sûrement,  parmi  les  miennes,  colles  qui  concernent  caf 
(  iOa,3'i  ),  bols  (5ia,i5  ),  et  probablement  aussi  quelques  autres. 

3  Voy.  Romania,  I,  23i  ;  11,  327;  VI,  136  et  450.  Je  n'ai  connu  les  re- 
marques de  Galvani,  avec  qui  je  m'étais,  à  mon  insu,  souvent  rencontré, 
que  par  les  citations  de  M.  Stengel. 


BIBLIOGRAPHIE  139 

lienne,  les  noms  propres  et  les  autres  mots  qui  composent  le  glos- 
saire italien  et  ceux,  du  Donat,  ou  qui  sont  mentionnés,  comme  exem- 
ples, par  les  deux  grammaires.  C'est  un  travail  utile  et  qui,  liien 
qu'il  donne  prise  à  la  critique  en  plus  d'un  endroit',  vaudra  à 
M.  Stengel  la  reconnaissance  des  travailleurs. 

Après  cet  e.xposé  sommaire  du  contenu  de  l'édition  de 
M  .  Stengel,  je  placerai  un  certain  nombre  de  remarques  de  détail 
faites  au  cours  de  ma  lecture.  M.  Boucherie  en  a  fait  aussi  do 
son  côté  quelques-unes  qu'il  m'a  communiquées,  et  que  j'interca- 
lerai parmi  les  miennes. 

P.  VII  de  l'introduction.  V.  3  du  fragment  tle  planli ,  i^-ahWè  là 
pour  la  première  fois.  Lusse.  La  correction  indiquée  est  lassa  et 
non  las  ieu,  puisque  c'est  une  femme  qui  parle,  et  que  d'un  autre 
côté  l'a  final,  dans  ce  texte,  est  toujours  changé  en  e.  —  V.  6.  De 
arcnavant=i  dur  en  aoant  et  non  doren  avant.  —  V.  11.  Darai  en 
tenen.  Lis.  entenen  ^ouv  entcndeii  =^  je  donnerai  à  entendre,  je  ferai 
com2)rendre. Cette  forme,  jointe  à  cpour  a  final,  à  mons  pour mos  (v. 2 
et  19),  à  l'emploi  de  x  pour  ss  (v.  20),  donne  à  penser  que  ce  texte 
a  été  altéré  par  un  copiste  catalan.  —  V.  17.  jio(l)gres.  Il  faudrait 
pogues.  —  24.  Gengua  doit  sans  doute  être  corrigé vengua. 

23,  1 1 .  Teus  .i.  timuit,  preus  .i.pressit.  — A  l'appui  de  ces  formes, 
que  ÎNI.  Guessard  avait  corrigées  tens,  ^rens, et  que  M.  Stengel, 
vu  l'accord  des  mss.,  croit  au  contraire  devoir  conserver,  on  peut 
citer  l'exemple  suivant,  tiré  du  ms.  1592  de  la  B.  N.  (Mahn, 
GedicUe,  LXII,  1): 

Greu  feira  nuills  hom  failleasa 
Si  tant  teus&es  son  bon  sen 
Gum  le  blasme  de  la  gen. 

J'ai  vu  ailleurs  un  autre  exemple  pareil,  mais  je  ne  sais  pas  le 
retrouver.  Quant  à  l'origine  de  ^^i  de  ces  formes,  il  faut  probable- 
ment la  chercher  dans  le  p  parasite  de  temps  (*temsil),  premps 
Cpremsit),  qui,  une  fois  introduit,  aura,  comme  il  arrive  en  d'au- 


<  Les  formes  fausses  n'y  sont  notéos  (voy  la  préface,  p.  xxvi)  que  dans 
le  cas  où  a  une  restitution  sûre  »  fait  défaut.  Mais  M.  Stengel  a  pu  sou- 
vent se  tromper  sur  la  valeur  des  corrections  proposées.  Le  mieux  eût 
été,  à  mon  avis,  de  reproduire  fidèlement,  dans  tous  les  cas,  le  mot  pro- 
vençal et  sa  tradaction  latine  ou  italienne,  quand  elle  existe,  tels  que  les 
mss.  les  fournissent,  en  plaçant  à  la  suite,  entre  crochets,  les  corrections 
certaines  ou  seulement  probables.  C'eût  été  plus  conforme  au  plan  de 
l'édition,  et  l'otililé  de  co  résumé  lexicographique  des  trois  ouvrages  en 
aurait  été  beaucoup  accrue. 


110  BIBLIOGRAPHIE 

1res  mots,  olmssc*  \'m  éiymologiquo  et  so  sera  ensuite  vocalisé. 
Cf.  d'une  part  esseps,  dopna ;  de  l'autre,  eus  =  e/ts  (ipse). 

28  a,  'âO.StttUis,  Gorr.  Stijndis.x.  IV.  esteules  (Boucherie). 

28  i*,  21,  note.  M.  St.  a  raison  de  no  pas  accepter  la  correction 
sosten'ar,  pour  sosteirar,  que  j'avais  un  peu  étourdiment  proposée, 
il  y  a  d'autres  exemples  dans  le  Donat  même  (M.  St.  on  relève 
plusieurs)  de  ir  =  rr*.  Mais  lairar,  qu'il  cite  en  même  temps, 
n'est  i)as  dans  le  même  cas.  L'/  y  provient  de  ^  comme  dans 
jyaire,  laire,  etc. 

28  b,  35.  Uicih.  Gorr.  ulnh? 

2'.)  a,  19.  hos  i>araît  ici  plulOt  l'abréviation  de  liospitîum  que  celle 
de  Jiostem. 

30  a,  43.  enastar.  Le  vrai  sons  est  bien  celui  Aq  mettre  à  la  broche> 
lignum  [la  lenha)  étant  le  bois  brûlant  dans  le  foyer. 

30  &,  27.  enclavar.  G'est  le  français  endouer,  au  sens  propre.  La 
trad.  est  donc  très-exacte  et  les  doutes  de  Galvani  sans  fondement. 

20  h,  43.  Etinduohus  sustentari.  Suppl.  manibus  eX  corr.  duabus. 
C'est  ce  qu'on  appelle  en  Saintonge  «  faire  le  châgne  dret  »  ;  péni- 
tence qu'on  impose  aux  fdlettes  dans  les  jeux  innocents,  quand  il 
s'agit  du  gage  touché.  Il  va  sans  dire  que,  dans  ce  cas, la  pénitence 
n'est  pas  obligatoire  (Boucherie). 

31  a,  34.  Fcrtinet  serait  ici  une  addition  inutile.  Ad  custodiam 
est  régime  de  vigilare. 

31  b,  '^'à.liurar  .i,  lucrari.  Corr.  luirar.  Cf.  luitar  =  luctan. 

32  a,  5.  Machctr,matar  .i.  percutere.  Il  n'y  a  aucune  note  sur 
ce  passage  et,  dans  son  vocabulaire,  M.  St.  interprète  machar  par 
mactare.  C'en  est  peut-être  bien  l'étymologie,  mais  non  pas  l'exacte 
traduction.  Percutere  rend  mieux  l'idée  que  nous  attachons  à  ce 
verbe.  On  est  mâché  (car  le  mot  existe  aussi  en  français-)  par  un 
instrument  contondant. 

32  a,3'3.  ebeditare.  Lis.  hebelitare,  fréquentatif  de /èeietore,  émous- 
ser  (Boucheriej . 

32  &,  M.Petaçar  est  certainement  le  même  mot  que  pedassar. 
C'est  cette  forme  même  qui  est  usitée  en  Limousin.  11  ne  faut 
donc  pas  hésiter  à  traduire,  avec  M.  Guessard,  rç^ccre  reto-a  (en 
franc.,  rapiécer''^).  Venta  du  ms.  B  n'est  pas  seulement  ridicule; 
c'est  une  leçon  absolument  inadmissible. 

'  Cf.  Revue,  XII,  19G,  1.  2  et  suiv.  —  On  peut  citer  encore  poyre  =■ 
porrum . 

-  Voy.  Boucliorie,  Etytn.  françaises  et  paloisrs  [Hevue,  IV,  553). 

■'  Pedas,  en  elTel,  est,  au  propre,  non  pas  une  cheville,  mais  un  mor- 
ceau d'étolTe  servant  à  raniécor.  Voy.  Sauvages,  au  mot  petos 


BIBLIOGRAPHIE  III 

32  b,  5.  La  le(^on  do  A,  saplnarc,  admise  an  vocalnilaire  sans 
observation,  doit  être  uno  mauvaise  lecture  de  sùimiare. 

32  b,  43.  Pon-^elar  existe  encore  (voy.  do  Sauvages,  i)Ounchcja  = 
polmlre),  Rochogude  a  eu  le  tort  d'eu  faire  deux  mots,  l'un  ponce- 
jnr,  que  M.  St.  n'a  pas  romarijué  chez  lui  et  qui  est  i)ieu  traduit  ; 
l'autre  ponzejar,  pour  lequel  le  ponere  du  Douât  l'a  fourvoyé.  La 
lor-ou  do  B  pourrait  être  corrigée,  en  remontant  de  deux  ligues  im- 
probare,  mal  à  propos  placé  après  ^jor/ar  (comme  M.  St.  l'a  fait  jus- 
tement remarquer):  Funzeiar  .i.  pungeve  vel  bénéficia  aliis  iinprobare. 

34  rt,  3.  Sostrar,  ici,  n'est  peut-être  pas  à  rejeter  (no  pas  con- 
fondre avec  un  autre  sostrar,  sousfra,  dans  Sauvages,  =  *  suhstrare 
pour  axbsternere) .  Nous  avons  en  effet  un  adjeclii somtrous  (=  sos- 
tros)  qui  sia^x\\ÇiQ  paresseux . 

35  6,  29.  Conîs.  Corr.  euneis. 

36  b,  ii.Endlr  .i.  inmltere  A.înirô  B.  —  Goi'v.liinnire.  Los  traduc- 
teurs de  A  et  de  B  n'ont  pas  vu  ici  le  mémo  mot.  Pour  A,  c'est 
endire  (indiccre  )  =  imposer. —  A  endir  ^  Iiinnire  de  B,  cf.  grondir 
=  grunnire. 

37  a,  44.  Masdir.  Cette  forme, que  M.  St.  admet  dans  son  voca- 
bulaire, ne  peut  être  qu'une  faute  de  copiste  pour  maldir. 

38  a,  8  et  12.  La  forme  de  futur  bafrei,  répétée  ici  deux  fois^  est 
changée  à  tor^  dans  le  vocabulaire,  en  bâfrai. 

41  a,  12.,/?««  cane.  —  Corr.  canna.  Voy.  Littré,  glaieul,  à  l'iiistori- 
que,  Qifinus  dans  Du  Gange. 

41  a,  38.  AU::.  —  La  rubrique  primitive  ne  pouvait  être  ah.  Ah, 
à  la  bonne  heure.  Je  me  permets  de  renvoyer  M.  Stengel,  pour 
tout  ce  qui  concerne  le  z  final,  à  mon  travail  sur  ce  sujet  {Revue, 
V,  330,  et  YL  04),  qu'il  parait  n'avoir  pas  connu.  Cf.  sur  5i  &,  13. 

42  b,  20.  Tantes.  Corr.  tannes  de  * tannnre  =  fr.  tanner  (Bou- 
cherie). 

43  rt,  2,  tanc  ;  18,  Jlars.  —  M.  Stengel  aurait  dû  mentionner, 
parmi  les  conjectures  émises  relativement  à  ces  deux  mots,  celles 
de  M.  Boucherie  (Revue,Xl,  218). 

43  a,  37.  0/afs^ici,  est  évidemment  à  supprimer  ou  à  renvoyer  à 
la  ligne  suivante,  comme  dans  l'édit.  Guessard. 

45  b,  4i.  Leis  .i.  luxas  .nus.  —  L'édit.  de  M.  Guessard  a  leis 
—  lectus,  que  M.Tobler  proposait  de  corriger /ejz's  et  que  je  croyais 
susceptible  d'être  conservé.  La  leçon  du  ms.,  aujourd'hui  connue, 
ne  fera  que  rendre  l'embarras  plus  gi'and.  Faut-il  corriger  seis  — 
se.ms.  M.  Stengel  propose ^^^m  — plexus.  Si  le  mot  était  parmi  les 
estreits,  on  pourrait  penser  à  leis  =  Uxus  (fr.  lessif). 

47  a,  13  (voy.  la   note).   Temps  est   bien   à  sa    place   parmi  les 


142  BIBLIOGRAPHIE 

rimes  étroites.  La  iirononciation  limousine   ne  connaît  pas  plus  de 
ems  que  de  en.t  larges. 

A8  Oj  10  (note).  Je  n'avais  en  vue  dans  le  passage  de  ma  Gramm. 
limousine  rapporté  ici  par  M.  Stengel,  et  qui  lui  paraît  incomplet, 
(]ue  les  mots  qui  vivent  encore.  Voici  pourquoi  je  n'y  ai  parlé  ni 
de  ver.  ni  deferir.  Mais  mème/i?rs  serait  à  rejeter,  car  la  forrae/cr, 
sous  laquelle  seulement  nous  employons  aujourd'hui  ce  mot,  a  dû 
être  prise  au  français. 

50  b,  16.  Vethz  .i.  veretrum.  Je  ne  sais  si  la  bonne  étymologie  de 
ce  mot  et  du  mot  fr.  correspondant  a  encore  été  donnée.  De 
Chcvallet,  si  j'ai  bonne  mémoire  (car  je  n'ai  pas  son  livre  sous  la 
main), la  cherche  dans  le  celtique.  Go  doit  être  simplement  le  latin 
vectis.  Ceux  qui  ont  vu,  près  d'Angoulême,  le  verrou  de  la  cha- 
pelle de  Saiht-Roch,  et  qui  connaissent  les  superstitions  qui  s'y 
rattachent,  trouveront  cette  étymologic  aussi  naturelle  qu'elle  est, 
phonétiquement,  légitime*. 

51  a,  5.  Lefhz  .i.  lex.  Je  crois  que  l'explication  proposée  par 
M.  Stengel  ^icitum)  est  la  bonne,  et  j'avoue  qu'avant  de  le  lire  j'y 
avais  pensé  moi-même.  Ni  lex  ni  legemne  pourraient  rendre  compte 
du  0 final  de  lethz{lehtz).  Il  faut  nécessairement  dans  le  mot  latin 
une  dentale  +  s,  ou  un  c  +  c  ou  i. 

51  a,  43.  Sics.  Il  faut  corriger  j^cs  sans  hésitation.  Le  mot  existe 
encore  en  limousin  comme  en  français,  au  sens  d'excroissance,  tu- 
meur. Voy./c  dans  Littré. 

52  a.  1 .  Tins  A.  tempus.  Cette  glose  paraît  confirmée  par  un 
exemple  cité  par  Raynouard  (V,  322 o);  mais  je  la  crois  néanmoins 
suspecte.  Je  penseque,  pour  l'autour  du  dictionnaire,  <îns  ëi^Mtignus- 
(le  mot  est  bien  connu,  dans  la  langue  d'oc  comme  en  français, 
avec  ce  sens),  et  que  le  traducteur,  dans  le  dialecte  duquel  proba- 
blement templa  se  disait  Un,  aura  cru  à  tort  avoir  ici  atlaire  à  ce 
dernier  mot. 

53  Z»,  18.  trois.  On  se  serait  attendu,  d'après l'étymologie admise 
(turbare  ),  à  trouver  ce  mot  parmi  les  estreits.  Mais  la  prononciation 
moderne  donne  raison  à  la  classification  du  Donat.  C'est  là  un  ar- 
gument d'un  certain  poids  (  et  de  même  l'ancien  fr. ^  treuve,  etc.) 
contre  cette  étymologie. 

53  i,  31.  Volps.  M.  Meyer  avait  justement  remarqué  que  ce  mot 


'  Un  autre  verrou  non  moins  côlébre  est  celui  de  l'église  de  t^aint- 
Léonard  (Haute-Vienne).  Voy.  h'  Bulletin  delà  Soc.  archéol.  du  Limou- 
sin, t.  Vil  (1857),  11.  9-2. 

-'  Cf.,  dans  la  même  liste,  lins  —  lignum. 


BIBLIOGRAPHIE  M3 

osL  placé  à  tort  sous  la  rubrique  larg.  La  forme  actuelle  Imtp  (Gas 
cogne),  autant  que  l'étymologie,  lui  donne  raison. 

54  a,  26.  Vols  .i.  volatm  (omis au  vocabulaire  ).  Il  me  semble  que 
cela  est  très-acceptable.  Le  sens  est  vol,  volée  (d'oiseaux).  Voy.  Du 
Gange,  volatus, 

54  b,  2î.  Fol:::  .i.  pullces.  Si  ^f.  Stongel  eût  connu  plus  tôt  l'ar- 
ticle de  M.  Banquier,  qu'il  n'a  pu  utiliser  que  pour  ses  addenda,  il 
n'aurait  pas  sans  doute  fait  difficulté  d'admettre  dans  son  glossaire 
la  covreciion  imites.  L'emploi  dans  la  traduction,  ici  comme  déjà 
plus  haut  (8,22),  du  pluriel  pultes,  au  lieu  du  sing.  jiraZs,  semble  in- 
diquer que  le  mot  devait  être  dés  lors,  comme  aujourd'hui,  usité 
seulement  au  pluriel. 

54  6,  44.  Il  n'est  pas  douteux  que  rol/a  ne  soit  en  eiïet  rotulus. 
Mais  M.  Meyer,  dans  le  passage  cité  par  M.  St.,  l'avait  déjà, ce  me 
semble,  assez  clairement  fait  entendre.  — •  Dans  l'Angoumois,  ou 
appelle  rolons{o  bref),  non  roulons,  les  barreaux  d'une  échelle. 

55  b,  32.  Conhz  .i.cum  cuneo  clnudas.  Gorr.  cudas  ?-  G'est  le  sens 
de  notre  conhar,  comme  du  fr.  cogner. 

50  a,  29.  Ors  .2,  ora  panni. — M.  Tobler  considère  ce  mot 
comme  fourvoyé  parmi  les  rims  largs,  et  l'étymologio,  à  priori,  lui 
donne  raison,  l'o  en  étant  originairement  long.  Mais  l'usage  des 
troubadours  prouve  que  le  Donat  ne  s'est  point  trompé  et  que,  par 
conséquent,  l'oralatîn,  en  prenant  chez  nous  la  forme  masculine, 
y  avait  abrégé  son  o.  Voici  des  exemples: 

Gora  qu'ieu  fos  d'amor  al  or, 
Er  sui  vengutz  del  or  al  cor. 

(B.  de  Ventadour.) 

Mas  trastolz  lo  mons  d'or  en  or 
A  jurai  l'ai  re  on  son  cor. 

(P.  Cardinal.) 
Lavas  los  totz  ben  d'or  en  or 
E  gitas  Iota  l'aiga  for. 

{Flamenca .  ) 

56  a,  33.  Preforsit.  Gorr.  perfores?  Même  ligne,  pnnciui  {\)om' 
piinctum),  omis  au  vocabulaire,  peut,  ce  me  semble,  rester  :/ors, 
substantif  de  forar,  signifierait  naturellement  trou,  point,  comme, 
par  exemple,  ceux  d'une  aiguille. 

57  6,  10.  Vorms.  Ce  doit  être  une  forme  masculine  de  vorma=h\ 
morve.  On  pourrait  traduire  morbus  ou  sanies  naris. 

58  b,  4.  Claiics  .i.  rlau.tis  (omi.-^  au  vocabulaire  ).  On  a  ici,  je 
pense,  une  autre  forme  de  duc,  d'où  clucar,  «fermer  les  yeux»,  si 
même  il  ne  faut  pas  simplement  rejeter  l'a  comme  fautif,  Voy.  ko- 


144  BIBLIOGRAPHIE 

chegiuic  sous  dur.  La  correction  cZ«î/sî<.s  do  M.  Guessard  serait 
ainsi  à  conserver,  sauf  à  sous-ontondre  quoique  chose  comme 
«  pertinet  ad  oculos.  » 

58  i,2G.  Chuf,  cuf  .1.  pili  super frontem, .  C'est  ce  que  le  limousin 
moderne  et  sans  doute  aussi  d'autres  dialectes  appellent  /îi/b(lat. 
tufa)^  substantif  dont  la  forme  masculine  serait /«/.  Et  c'est  aussi 
probablement  /î// qu'il  faut  lire,  au  lieu  de  cuf,  dans  le  ms.  B,  du 
Donat.  L'origine  du  mot  est  en  elTet  l'allemand  xopf  (  voy.  Litlré 
sous  touffe Qi  toupet),  d'où  se  tire  régulièrement  tuf  et  même  chuf 
(  =  tchuf,  tsuf),  mais  non  pas  cuf. 

59  b,  46.  ^«s,  que  j'avais  proposé  ici  en  place  de  lus,  est  le  sub- 
stantif ^ms  (  de  viande),  et  ne  peut,  par  conséquent,  faire  doulde 
emploi,  comme  le  croit  M.  St. ,  avec  lejua  qui  est  plus  loin,  ce  der- 
nier étant  l'adverbe. 

61  a,  10.  Lesquera.  (M.  Guessard  a  lesgera,  qui  s'expliquait  mal). 
Cette  forme  renvoie  à  un  parfait  Use  =  lat.  *Ie.ri.  Cf.  l'italien  lessi 
et  le  participe  lescut  (St  Honorât,  43  a).  On  trouve  aussi,  en  pro- 
vençal comme  en  catalan,  un  participe  lesl  {==  lescf  =  lexus?)  pour 
lectus  . 

61  a,  32.  Seriatuin.  Corr.  seriatim. 

63  Oj  37.  La  prononciation  actuelle  (oulo)  prouve  queote,  malgré 
l'étymologie,  est  bien  à  sa  place  parmi  les  estreits. 

64  b,  22,  Asta,  doit  être  entendu  ici  au  sens  de  manclie,  que  l'on 
introduit  (inseritur,  comme  a  corrigé  M.  Guessard  )  dans  la  douille, 
par  exemple  d'une  hache. 

65  b,  15.  Sesca  .i.  arundo  secans.  En  limousin,  la  seicho  (  qui  est 
notre  sesca)  est  le  nom  d'une  espèce  d'équisétacée. 

65  h,  19.  Mesca  .i.  propinet.  Cette  acception  de  miscere  se  conserve 
encore,  au  moins  dans  l'Aveyron.Voy.  le  Bulletin  de  la  Société  de 
linguistique^  III,  p.  xxxv,  où  l'on  aurait  pu  rappeler,  par  paren- 
thèse, que  meisser  est  dans  Raynouard,  et  déjà  avec  cette  unique 
signification.  C'est  aussi  dans  la  môme  acception  que  ce  verbe  fi- 
gure au  V.  58  de  la  première  des  Anciennes  Poésies  religieuses  publiées 
en  1860  par  M.  Paul  Meyer  '  {Fel  e  a^et  — U  mesquero  mesclada- 

1  Puisque  j'ai  l'occasion  de  citer  cette  pièce  intéressante,  j'y  proposerai 
en  passant  une  correction.  On  lit  dans  l'édition,  vv,  111-112  : 

E  à'e  lati  mo  carali 
Aquel  (lue  tu  m'as  faih 

Ce  qui,  pour  moi  du  moins,  n'a  aucun  sens-  Une  copie  de  la  même 
pièce,  prise  autrefois  ^ur  le  ms.  par  M.  Boucherie  et  que  j'ai  sous  les 
yeux,  porte,  au  lieu  do  scran,  senin.  qui  non  plus  ne   signifie  rien.  Je 


BIBLIOGRAPHIP:  145 

in^nt),  ainsi  que  clans  le  frairment  de  la  Vie  de  sainte  Foi  d'Agen  (v. 
6  :  E plus  que  nuls  plinens  qu'ommosca.) ,  où  tous  ceux  qui,  à  ma  con- 
naissance, se  sont  occupés  de  ce  fragment,  en  ont  méconnu  le  sens 
00  a,  \.  Saj'cina.  Je  corrigerais  farrlna  (  voy.  Du  Gange,  farcino- 
8ua\  la  mousse  étant  considérée  comme  une  sorte  de  lèpre   des 
arbres . 
06  a,  13.  Tosa.  Aioaioz  jmella,  pour  la  traduction. 
Je  réserve  pour  une  autre  occasion  mes  observations  sur  le  texte 
de  Raimon  Vidal,  et  je  termine  cet  article  par  un  petit  nombre  de 
remarques  sur  le  glossaire  provençal -italien,  qui  forme  la  troisième 
et  dernière  partie  de  la  publication  de  M.  Stengel, 

88  6,  6.  Biur.  Je  pense  qu'il  faut  corriger  buis  ou  buih  ou  buh.  Cf. 
Flamenca,  v.  7207,  pour  la  première  de  ces  formes,  et  SanctaAgncs 
804,  notes,  pour  la  dernière. 

^'èb,  10.  Brada  .i.folia.  Gorr.  branda.  Ge  mot  est  bien  connu, 
du  moins  en  Limousin,  où  on  l'applique  à  une  espèce  d'arbuste. 
(Gf.  Du  Gange,  Brandal).  Son  dérivé  brandou  désigne  particuliè- 
rement le  rameau  vert  (de  houx  le  plus  souvent)  qui  sert  d'enseigne 
aux  auberges  de  village. 

88  &,  14.   Brodels.  Gorr.  brondels. 

89  a,  9.  Covir  A.  voîgo.  Il  faut  séparer  ro  vir,  co  étant  la  con- 
jonction com  C{=  co  ou  que)  a  été  de  même  agglutiné  mal  à 
propos  aux  mots  qui    suivent,  jusqu'à  35  inclus,  sauf  28  et  29. 

89  i,  1.  Descaurir.  Inutile  de  corriger  rfesc«M^îr.  G'est  un  nouvel 
exemple  de  i-  =  z. 

89  b,  10.  Enair.  Gorr.  evair  (invadere).  M.  St.,  qui  a  eu  le-  tort 
d'admettre  dans  son  vocabulaire  cet  enair  (  comme  il  y  a  admis 
covir),  le  rapproche  de  endir,  avec  lequel  il  n'a  aucun  rapport. 

90a,  43.  Iscla  .i.  clamât.  Le  copiste  a  dû  oublier  de  répéter  l'i 
initial.  Gorr.  jiscla.  Cf.  giscla,  06  &,  7. 

90  Z»,  10.  Mère  .i.  convene.  Ge  mot  est  rattaché,  avec  raison,  par 


crois  qu'il  faut  corriger  servi  (ou  serva,  si  l'on  prend  gurpis  du  v.  108 
pour  un  subj.  présent,  cas  dont  il  y  a  d'autres  exemples).  Le  sens  sera  : 
«Et  je  conserve  (ou  que  je  conserve)  mon  caractère,  celui  que  tu  m'as  fait», 
à  savoir  le  caractère  du  chrétien,  le  baptême;  car  il  faut  voir  dans  noire 
carah,  non  pas,  avec  M.  Meyer,  un  dérivé  et  synonyme  de  cara,  mais  sim- 
plement *caractum,  substantif  dont  la  forme  féminine  se  retrouve  en 
ancien  français  [caracle  dans  Benoit  C/ir..  v.  711)  comme  en  provenr-a! 
(voy.  caracta,  L.  R.  II,  332).  Un  autre  carah,  auquel  convient  au  con- 
traire on  ne  peut  mieux  l'étymologie  de  M.  Meyer,  est  celui  dont  il  cite 
deux  exemples  de  G.  de  Rossilhn.  Ge  dernier  est  identique  à  carage,  qui 
lui-même  est  à  cara  comme  visage  est  à  vis. 


146         *  PERIODIQUES 

M.  Stençîel,  à  merir  {mereri).  Son  synonyme  mérita  est  quelquefois 
employé  aujourd'hui,  sinon  tout  à  fait  dans  la  même  signification, 
au  moins  au  sens  passif:  aquo  li  mcrUo  be  =  cela  lui  est  lùen  dû. 
—  Je  rapi)ellerai  en  passant  que  ce  même  mère  a  été  signalé  aussi 
en  italien  (  voy.  Rivista  di  filologia  romanza,  II,  109  ),  et  je  profi- 
terai do  l'occasion  pour  retirer  la  conjecture,  trop  hasardée,  que 
j'avais  émise  moi-même  touchant  son  origine  (  Revue,  IX,  236  J. 

Camille  CiunANEAU. 


PERIODIQUES 


LaRenaixensa,  vevista  catalanaihistrada. —  A.lentraren  l'any 
S"  de  sa  publicaciû  ha  eixit  ab  notatiilissimas  milioras  ,  entre  ellas  • 
obrir  un  cer<<me7i  de  3  promis  de  200  pessetas  caJa  un  à  treballs 
en  prosa  y  regalar  als  suscriptors  un  Album  artisttch  y  lo  Llihre 
d'or  de  la  moderna  poesia  catalane. . 

N"  I.  (Any  VIII,  tom.I)  :  — P.l.  .T.Coroleu  :  Ninou  (  contracciô 
d'any  nou)  frase  ab  que's  nomena  lo  dia  de  capdany.  Bonich  article 
preliminar.  —  P.  5.  Victor  Balaguer  :  Aymerich  de  Peguilhà.  Es  lo 
comens  de  la  curiosa  biografia  d'aquest  trovador  provensal  vivent 
en  lo  segle  XIII,  la  quai  es  una  de  las  300  que  contindrâ  la  His- 
toria politica  y  literaria  dels  trovadors  que  dit  Sr.  esta  escribint.  — 
P.  12. Marti  Genis  y  Aguilar  :  de  la  Batalla  de  Vich  à  la  acciô  de 
Roda.  Sentida  narraciô.  — P.  18.  Antoni  Aulestia  y  Pijoan  :  lo 
Moviment  liferari  catalù  en  1877.  Seguint  la  tasca  qu'aquest  labo- 
riôs  è  ilustrat  escriptor  emprenguè  fa  2anys,  nos  ha  donat  en  lo 
présent  un  catâlech  bibliogrûûch  de  las  obras  publicadas  durant 
l'anterior  que  pujan  à  110  (79  drâmaticas  y  37  no  dramâticas^.  y  per 
lo  tant  unaument  de  26  obras  sobre  las  de  1876  y  de  62  sobre  las 
de  lS75.Veuse  ademès  que  foren  12  los  periôdichs  que  vegeren  la 
llum  en  català,  8  los  certàmens  en  que  s'hi  premiaren  treballs  escrits 
on  la  mateixa  llengua.  y  9  las  obras  castellanas  ôfrancesasreferents 
à  Catalunya. —  P. 26.  Marian  Aguilô,  mestre  en  gay  saber:  V Arbre 
de  la  patria.  Alegoria .  Preciùs  fragment  d'una  Uarga  composicio 
poética  que  conserva  inédita  son  autor  desde  1862. —  P.  29.  Fran- 
cesch  Ubach  y  Vinycta,  mestre  en  gay  saber  :  Sombra.  A  la  me- 
vioria  de^N Felip  Pirozzini  y  Marti.  Poesia. — P.  32.  J.  Martiy  Fol- 
guera  :  la  Catedral.  Altre  poesia. —  p.  34.  J.Sardâ.  Bibliografia  de 
las  obras    catalanas  :  Odes  d'Anacreont,  traduhidas  per  Frederich 


PERIODIQTJES  147 

Henyo;  lo  i^fl/-/'e?îaf;  calcndari  puhlicat  pcr  D.ConstaïUi  Lloinliarl, 
ab  la  colaboraciô  des  escriptors  de  Valencia,  Catalunyay  las  illas 
Balears,  y  Novissim  Dicionari  manual  de  las  Ihnguas  catalana  y 
castellana,  par  D.  .Taume  Angel  Saura.  —  P.  37.  Novas. —  Accom- 
panya  à  aqucst  ni'iinoro  :  un  dibiiix  à  la  ploma  del  jovo  artista 
I).  Enrich  Serra,  pensionat  à  Roma,  que  ha  reproduhlt  la  Societat 
heliogràfica  espanyola;  y  lo  comensament  del  Libre  de  algunes  coses 
asanyalades  succehiâes  en  Barcclona  y  en  altres  jiarls  foi-mat per  Père 
Joan  Cornes  en  1583  y  recôndit  en  lo  Arxiu  delExcelcntissimAjunta,ment, 
ara  per  2^^'iniera  volta  puhlicat  ah  deguda  lUcencia  baix  la  rerisiô  de 
D.  Joseph  Puîggarij  oficial  del  susdit  arxiu,  en  quai  preliminar  fa 
dit  Senyor,  ab  l'erudiciô  que  li  es  peculiar,  una  biografi  i  docu- 
mentada  del  propi  Cornes  y  una  critica  de  tal  obra,  probant  que 
no  tè  sino  una  importancia  relativa,  puig  son  contongut  compren, 
a  estractos  bastant  poch  Gels,  sino  dissimulats  ab  intenciû  dels 
registres  del  arxiu,  titulats  Cérémonial  de  Coses  antlgues  y  mémo- 
rables y  de  algunas  altras  noticias  escampadas  en  los  registres  de 
Actas  y  delliheracions  del  Conseil,  de  que  podria  traurersen  materia 
bastant  mes  curiosa  y  compléta.  » 

N°  II. — P.  41 .  Joseph  de  Letamendi  :  Caria  à  la  Renaixensa,  trac- 
tant de  laliteraria  de  Catalunya.  — P.  44.  Joseph  Pella  y  Forgas  : 
Grans  exemples.  La  Renaixensa  de  Irlanda.  Article  histôrich,  no- 
table per  los  datos  que  reuneix  en  intéressant  conjunt.  Sos  capitols 
son  :  Carùcter  de  la  Renaixensa  de  L-landa  :  Historia  de  la  dominaciô 
inglesa. — Las  Revolucions  de  Nort- America  y  Fransa;  La  uniô  llegis- 
lativa.  CConnelL — LaJova  Irlanda.  1848:  La  «.  Tenant  Right  »;  Los 
Fenians, — M.  Biiff  :  Unib  de  protestants  y  catôlichs ;  L'u-home-rule  ». 
—  Lo  Parlament  inglés  :  Los  «  obstructionnists  ». —  P.  70.  Victor 
Balaguer,  Aimerich  de  Peguilhà.  Acabaaient  :  copia  intégra  una 
pocsia  d'est  trovador  un  xich  diferent  de  la  que  publicà  Ray- 
nouard  :  De  fin  amor  comenson  mas  causas,  etc.  —  P.  77.  M.  Genis 
Aguilar  :  De  la  Batalla  de  Vich  à  la  acciv  de  Roda.  Acabament.  — 
P.  85.  Damas  Galvet:  A  Estlier .  Recorts  d'Alemanya.  Poesia.  — 
P.  87.  Ramon  PiC(')  y  Campaniar:  Adeu!  Poesia.  —  P,  90.  J.  de 
Letamendi  :  Lo  Sobrevivent.  Soneto  dedicat  per  son  autor  à  En  Angel 
Guimerà.  Primera  poesia  catalana  que'ns  ha  fet  coneixer  lo  savi 
professor  d'esta  Facultat  de  medicina  y  que  desitjôra  no  sia  l'ul- 
tim  fruit  de  sa  inspirada  musa.  —  P.  92.  R.  Teatre  català.  Revista 
critica  del  G nntramestre,  dmmai  de  D.  Fredericli  Solor.  —  P.  94. 
Novas.  —  P,  96.  Gonsisiori  dels  jochs  fiorals  de  Barcelona.  Adiciô  al 
cartell,  per  oferta  d'altres  3  premis  extraordinaris  :  2  de  vers,  ço  es 
de  la  Diputaciô  de  las  Balears,un  pensament  d'or  y  plata,  y  del 


14S  PERIODIQUES 

Municipi  de  Fitçueras,  una  agulla  de  pit  d'iççuàls  nietalls  on  forma 
de  ploma  ab  l'cscut  de  la  Ciulat,  y  un  de  prosa,  mcdalla  de  plata 
del  Ateneo  barcelonés,  al  mcllorestudi  critich  sobre'l  tema  :  «  Tea- 
(re  catalii,  sas  tradiclons,  son  estât  actual,  0ns  ahont  os  conve- 
nient  son  conrou  »,  no  adjudicada  on  los  2  certàmons  antoriors. 
—  Ab  aquest  numéro  bi  va  adjunta  una  copia  liclio^rùlica  del 
quadro-aquarela,  il  Gontino  doFortuny,  que  possehoix  la  Excellen- 
tissîma  Diputaciô'  provincial  do  Barcelona,  y  la  conlinuacicj  per 
folletî  del  Libre  de  coses  asanyalades. 

A.  Balaguer  y  Merino. 
Barcelona,  31  de  janer  de  1878. 

Lo  Gay  Saber.  Periodich  literari  quinzenal,  fet  por  escrip- 
tors  catalans,  mallorquins  y  valencians.  —  Epoca  11,  any  1, 
nom.  I.  —  Ab  gcneral  satisfacciô  dels  catalanistas  ha  estât  salu- 
dada  la  reapariciô  del  primer  periodich  literari  de  nostre  renaixe- 
ment,  fondât  en  1868  per  lo  sempre  infatigable  ylaboriôs  escriptor 
D.  Fraiicesch  Pelay  Briz,  mestre  en  gay  saber.  En  l'article  intro- 
ductori  Lo  que  volem  (p.  1)  resumcix  sas  aspiracions  à  «  donar  à 
coneixer  las  obras  capdalts  del  ingeni  huinâ  ;  obrir  una  via  mes 
ampla  de  la  ab  que  conta  avuy.  à  la  joventut  estudiosa;  sostindré 
las  bonas  relacions  que'ns  lligan  ab  los  centres  literaris  de  alguns 
indrets  de  llunyas  terras;  ajudar  los  esforsos  dels  que  en  aras  del 
amor  à  la  llengua  se  liensan  à  travalls  aspres  de  si  y  de  poca 
esperansa  de  rehiximent  ;  en  una  paraula,  portar  à  tôt  arreu  la 
bona  llavor  del  esperit  catala.»  — Dit  Nom.  I.  conté:  p.  ^.  F. 
Maspons  y  Labrûs:  Creencias  pojnilai-s  catalanas .  Estudi  comparatiu 
de  varias,  cotojadas  ab  las  do  diversas  encontradas  de  Fransa  que 
hapublicat  la  Mélusine  de  Paris.  —  P.  5.  Adolf  Blanch,  mestre  en 
gay  saber:  En  Guillemde  Medinna.  Poesia.  —  P.  5.  Antoni  Careta 
y  Vidal:  los  Carboners.  Poema  provensal  en  XII  cants  ^jer  Félix 
Gras.  Comensament  d'una  polida  traducciô  de  la  valenta  cpopeya 
provensal  U  Carbounié,  que  premi;i  la  Société  des  langues  romanes 
on  lo  concurs  filol(')gich  y  literari  de  1875.  —  P.  6.  Joaquim  Rubiô 
y  Ors,  mostre  en  gay  saber  :  A  la  Verge  de  V Academla.  Poesia  reii- 
giosa  promiada  ab  joya  en  locertâmen  de  l' Academla  bibliogrâfica 
Mariana  do  Lleyda,  lany  1871.  — -P.  8.  Maria  de  Bcll-lloch  (pseu- 
donim  d'una  distingida  escriptora):  Vigatans  y  Botiflers.  Novela 
historica  del  temps  de  la  guerra  de  successiô  à  Catalunya  (comensa 
l'acciû  en  1713),  molt  intéressant.  Lo  titol  que  porta  es  lo  dels 
bandes  dels  partidaris  de  las  casas  d'Austria  y  de  Borbô,  que 
havian  comensat  à  puntejar  respectivament  en  las  ciutatsde  Vich  y 


PERIODIQUES  149 

(le  Cervera. —  P.  10.  Fredorich  Solor,  meslre  on  gay  saber  :  los 
Treize  l^opsiu  iiremiada  ab  joya  del  Gok'iïi  mercanlil  de  Barcolona 
i'any  1877.  —  P.  tl.  Eiirich  Franco:  Edlpo  Rey,  traducciô  de 
Sôfocles.  E^  una  vcrsiô  en  prosa  caialana  de  dita  tragedia  grega, 
ilustrada  ab  ei'uditas  notas.  —  P.  12.  F.  Pelay  Briz  :  la  Pinya  d'or. 
Gomedia  de  mâgica  en  quatre  actes  y  en  vers.  L'acciû  passa  â 
Mallorca  avans  de  la  confjuesta  (segle  XII).  — P.  14.  Curiositats. 
Testament  del  Rnd.  D'  Viccns  Garcia,  Rector  de  Vallfo(jona.  Aquest 
intéressant  document,  lins  ara  inédit,  fouotorgat  en  poder  del  No- 
tari  Pau  Marti  prevere  y  en  la  vila  de  Vallfogona  estant  malalt  lo 
Rector,  als  31  de  Agost  d'lG23,  loqual  es  un  nou  dato  pera  arguïr 
la  fetxa  controvertida  de  la  mort  del  mes  célébrât  poeta  catalâ  del 
segle  XVII,  qu'uns  suposan  ocorreguda  en  dit  any  yaltres  mes  en- 
llû  del  1G32. —  P.  15.  Nocas. 

Nom.  II.,  ]).  17.  F.  Maspons  y  Lal)rûs  :  lo  Pull  ylapussa.  (Qiïenlo 
popular  catalâ.)  Esta  comparât  ab  las  variants  francesas,  italianas 
è  inglesas.  — P.  20.  A.  Careta  :Zos  Garboners,  etc.  Conlinuaciô.  — 
P.  21.  Geroni  Rossellô,  mestre  en  gay  saber:  Sus^nrs.  Poesia. — 
P.  22.  Maria  de  Bell-lloch:  Vigatans  y  Botiflers.  Gontinuaciô. — P. 23. 
Victor  Balaguer,  mestre  en  gay  saber  :  lo  Blau  del  cel.  Poesia.  — 
P.  24.  Joseph  Fiter  o  Inglés.  Traducciô  del  Estudi  hîstôrich  cri- 
iich  sobre  'Is  Poetas  valencians  dels  seules  XIII,  XIV  y  XV,  per  en 
Rafel  Ferrer  y  Bigné,  premiat  ab  joya  en  lo  certàmen  de  la  Societat 
econûmica  d'Amichs  del  Pays  de  Valencia  en  I'any  1871,  y  pu- 
blicat  en  castellâ  per  la  mateixa  y  per  l'Atenco  d'aquella  ciutat  en 
son  boletin.  Lo  l""  poeta  de  que  tracta  es  M"  Jordi  del  Rey.  — 
P.  25.  F'rancesch  Ubach  y  Vinyeta,  mestre  en  gay  saber:  h 
Compte  d'Ampurias.  l^oesia  premiada  ab  joya  en  lo  certàmen  de 
Gerona  de  1877. — P.  27.  A.  Gareta  y  Vidal. Za  Venjansad'unpadri. 
Narraciô  en  prosa.  —  P.  28.  F.  P.  Briz:  la  Pinyad'or,  etc.  Gonti- 
nuaciô. —  P.  29.  Nocas.  P.  32.  Consîsiori  dels  Jochs  Florale  de 
Barcelona.  Gonvocatoria  pera 'Is  del  présent  any.  S'ofereixen  :  los 

3  premis  ordinaris  d'englantina  d'or,  viola  d'or  y  plata  y  tlor  na- 
tural  que  ho  es  d'honor  y  cortosia,  â  3  poesias  histôrica,  religiosa 
y  de  lliure  tema  dels  trovadors  ;  y  ademés  7  premis  extraordinaris, 

4  de  poesia,  ballesta  d'or  delà  Diputaciô  de  Gerona,  Uiri  de  plata 
de  3  flors  de  la  Lleyda,  rosa  d'or  y  plata  de  la  d'Alacant  y  brot  de 
roure  de  plata  de  la  Societat  «la  Misteriosa»,  y  3  de  prosa  que  son  : 
lapida  de  marbre  negraab  l'escut  de  l'Associaciù  catalanista  d'es- 
cursions  cientificas,  à  la  mellor  descripciô  histôrica  y  pintoresca 
d'un  monument  catalâ  ;  colecciô  d'obras  triadas  originals  de  cele- 
brats  escriptors,  qu'ofereix   lu  Renaixensa  à  la  mes  bella  narraciô 


150  PERIODIQUES 

0  aplech  de  narracions  d'e])issodis  catalans  del  segle  actual,  y  tiim- 
l)aga  d'or  alegûrica  per  la  revista  l'Art  del  Pages,  à  la  raellor  nove- 
leUi  de  costiims  del  camp.  Las  composicions  deurâii  esser  iné- 
ditas y  escrilas  en  anticli  o  modem  català  literaris  de  Catalunya 
Mallorca  o  Valencia  ,  o  en  (juanse\ol  dels  dialectes  de  nostre 
idioma,  ab  tal  que  'Is  autors,  évitant  l'influencia  d'altras  menas 
tle  parlar  estranyas  al  pais  de  la  llengua  d'Oc,  procuren  escriu- 
relas  de  la  manera  mes  semblant  al  antich  provensal  o  català  lite- 
rari.  S'adresserân  al  Secretari  del  Consistori  (  carrer  de  Jéru- 
salem, n"  32,  pis  1"",  porta  la).  Los  mantenedors  d'enguany  son  : 
J.-L.  Pons  y  Gallarza,  président;  A.  Blancb,  J.  Soler,  F.  Ubach 
y  Vinyeta,  J.  Coroleu,  J.  Riera  y  Bertran  y  A.  Guimerd,  secre- 
tari. A.  Balaguee  y  Merino. 

Homanische  Studien.  Heft  IX'.  —  Ce  fascicule  est  rempli 
tout  entier  par  un  ouvrage  très-important  de  M.  Groeber:  Die 
Liedersammlungen  des  Troubadours.  L'auteur,  après  avoir  établi 
sans  peine,  dans  les  deux  premiers  chapitres,  qu'il  a  dû  exister 
des  copies  de  chansons  isolées  et  des  recueils  particuliers  des 
poésies  de  tel  ou  tel  troubadour,  examine  successivement  les 
chansonniers  que  nous  possédons,  et  recherche  pour  chacun  d'eux 
et,  quand  il  y  a  lieu,  pour  chaque  partie  Je  chacun  d'eux,  les 
sources  médiates  et  immédiates,  prochaines  ou  éloignées,  d'oîi  il 
découle.  Ce  travail,  qui  témoigne  d'un  esprit  aussi,  pénétrant  que 
judicieux  et  méthodique,  a  été  exécuté,  autant  que  j'en  puis  juger, 
avec  le  plus  grand  soin  ;  et,  si  les  résultats  en  restent  forcément 
incertains  sur  beaucoup  de  points,  il  n'en  doit  pas  être  moins  bien 
accueilli  par  tous  ceux  qui  s'intéressent  à  notre  incomparable 
poésie  lyrique,  comme  l'un  des  plus  propres  à  en  éclairer  l'étude 
qui  aient  encore  été  publiés.  G.  G. 

Zeitschrift  fiir  romanische  Philologie.  I,  2-3.  P. 337.  —  En- 
core une  fois  :  Marie  de  Compiègne  et  l'  Evangile  auj:  femmes. 

Sous  ce  litre,  M,  Ed.  Mail  rend  longuement  compte  d'une  bro- 
chure publiée  par  moi  l'année  dernière,  et  dont  M.  Boucherie  a 
bien  voulu  parler  ici  même  (Revue  des  langues  rom.,  nouvelle  série, 
t.  11,  n°  10,  15  oct.  187G).  J'avais  déjà  oublié  cette  œuvre  de  début, 
quand  M.  Mail,  lui  donnant  plus  d'importance  que  je  n'y  en  atta- 
chais moi-même,  a  entrepris  de  renverser  l'opinion  que  j'avais 
cherché  à  étabhr  sur  l'identité  de  Marie  de  France  et  de  Marie  de 
Gompiègne.  Je  dois  reconnaître  qu'il  n'en  a  rien  laissé  debout.  A 

'Nous  n'avons  pas  reçu  les  deux  fascicules  jirécédents  de  ce  recueil. 


PERIODIQUES  151 

l'aule  d'une  critique  impiloyalilo,  il  a  dégagé  de   la  confusion    des 
quatre  manuscrits  le  texte  original,  ou  du  moins  ce  qui  semble  être 
le  texte  original  du  poëme,  et  s'est  habilement  servi  pour  cela  du 
ins.  D,  dont  il  a  emprunté  la  plupart  des  strophes.  Qu'il  me  per- 
mette à  ce  propos  de  hasarder  un  mot  de  défense,  pour  me  disculper 
du  reproche  qu'il  me  fait  {\).  353)  de  ne  pas  avoir  protité  du  ms.  D. 
Mon  travail  étant  déjà  sous  presse  quand  j'ai  eu  copie  du  texte  de 
ce  ms.,  ce  que  j'en  ai  dit  a  été  ajouté  sur  épreuve.  Comme  ce  travail 
devait  paraître  dans  le  Bidletinde  la  Société  historique  de  Comjiiègne,  je 
iieme  suis  pas  cru  le  droit  d'en  retarder  la  publication,  pourrel'ondre 
mon  travail  et  faire  œuvre  de  critique.  J'avais,  d'ailleurs,  déclaré 
formellement  que  je  laissais  à  de  plus  experts  le  soin  de  tirer  i)arti 
des  matériaux  que  j'offrais  au  public.  M.  Mail  conclut,  du  reste,  sa 
longue  et  judicieuse  dissertation  par  ces  mots  :«  Quoique  M.  Con- 
stans  se  voie  ainsi  privé  du  fruit  de  la  plus  grande  partie  de  son 
travail,  il  lui  reste  cependant  un  mérite  que  je  ne  saurais  vouloir 
lui  dénier:  en  nous  communiquant  les  textes  originaux  de  l'Evan- 
gile aux  femmes,  il  nous  a  définitivement  délivrés  du  misérable 
texte  de  Jubinal,  et  a  fourni  les  éléments  d'une  solution  exacte  de 
plusieurs  questions  importantes.  Nous  ne  saurions  lui  refuser  ici 
nos  remerciements,  malgré  les  imperfectionsde  son  œuvre.»  Je  re- 
mercie à  mon   tour  M.  Mail  d'avoir  bien  voulu  me  rendre  cette 
justice.  J'aurais  désiré  cependant  que,  prenant  en  considération  ma 
déclaration,  que  je  n'avais  point  l'intention  de  donner  un  texte  cri- 
tique, il  ne  feignît  pas  de  croire  à  des  fautes  de  lecture  plus  nom- 
breuses qu'elles  ne  sont  en  réalité  (V.  p.  339).  La  plupart  de  celles 
(ju'il   signale  se  rapportent  au  ms.  D.,  dont  la  copie  n'est  pas  de 
mon  fait;  je  n'ai  eu  ni  le  temps  de  l'étudier  sérieusement,  ni  l'in- 
tention de  la  corriger  arbitrairement^  n'ayant  pas  le  moyen  de  la 
collationner.  Les  corrections  soutivement  au  lieu  de  soutinement, 
houpius  au  lieu  de  honjnus,  avaient  déjà  été  faites  par  M.  Boucherie; 
dans  le  ms.  A,  st.  27,4,  dort  au  lieu  de  doit  est  probable.  Je  me 
propose  de  faire  une  vérihcation  pour  ce  mot,  ainsi  que  pour  un  ou 
deux  autres  pour  lesquels  M.  Mail  propose  des  corrections  qui  ne 
sont  pas  toutes  nécessaires.  Mais  il  a  tort  de  croire  qu'une  révision 
des  mss.  puisse  sensiblement   améliorer  le    texte.  Le  travail  de 
M  .  Mail  sera  un  complément  utile  à  l'édition  des  Fables  de  Marie  de 
France,k  laquelle  il  travaille  depuis  longtemps  déjà,  et  qui  est,  dit  il, 
sur  le  point  de  paraître.  L.  Constats. 

Journal  officiel  de  la  République  française  {n^  du  31  dé- 
cembre 1877). —  La  lecture  d'un  article  de  M.  Alphonse  Daudet 
nous  remet  en  mémoire  quelques  brefs  renseignements  historiques 
donnés  à  Montpelher,  en  1873,  sur  les   opéras  languedociens,  par 


15-2  PEKIODIQUES 

-M.  LéonGaudin.  Dans  sa  préface  de  V Opéra  de  Frountignan,ohra 
ijaloi/a,  accouiitpagnada  de  deeoratieous  de  théâtre  e  de  aymphonias 
escarabilladas,  1679,  d'abord  inséré  dans  cette  Revîie  et  publié  en- 
suite parla  librairie  F.  Seguin,  M.  Gaudin  nous  apprend  que, 
quelques  jours  après  les  fêtes  qui  eurent  lieu  à  Montpellier  pour 
célébrer  la  paix  de  Nimùgue,  et  au  nombre  desquelles  figurait  un 
opéra  exécuté  aux  frais  et  dans  l'hôtel  même  du  cardinal  de  Bonzi, 
Nicolas  Fizes  (de  Frontignan)  composa  l'opéra,  ou  plutôt  le  vaude- 
ville languedocien,  dont  on  vient  de  lire  le  titre,  et  que  le  souvenir 
de  cette  œuvre  fut  si  vivace  que,  prés  d'un  siècle  plus  tanl,  le 
Xarbonnais  Mondonville,  ayant  fait  représenter  à  Fontainebleau 
l'opéra  languedocien  Daphnis  et  Alcimadure,  on  lui  reprocha,  mais 
à  tort,  d'avoir  imité  la  vieille  œuvre  de  Fizes.  La  pastorale  de 
^^ondonville  fut,  malgré  sa  faiblesse,  un  événement.  GrJmm  en 
jiarla  dans  sa  correspondance  littéraire.  En  rendant  compte  d'une 
nouvelle  édition,  actuellement  publiée  par  la  hbrairie  Garnier,  de 
cette  correspondance,  M .  Alphonse  Daudet  écrit  les  lignes  sui- 
vantes: 

«  Citons  encore  de  curieuses  réflexions  sur  un  opéra  languedocien 
joué  pour  la  première  fois  à  Fontainebleau  en  1734.  Cette  pasto- 
rale avait  jjour  titre  Daphnis  et  Alcimadure,  et  l'auteur  des  paroles 
et  de  la  musique  était  M.  Mondonville,  du  Languedoc,  et  les  acteurs 
étaient  M""  Tell,  Jelyotte  et  Latour,  nés  aussi  dans  cette  province. 
Grimm,  à  propos  de  cette  pièce,  fait  une  excellente  dissertation 
sur  la  langue  française  et  sur  la  langue  d'oc.  Il  traite  le  franrais 
avec  le  plus  grand  respect;  cependant  il  laisse  percer  le  secret  pen- 
chant qu'il  aurait  pour  un  idiome  plus  musical  et  plus  poétique. 
«  Mais,  dit-on,  la  clarté,  ia  précision,  l'énergie,  font  le  mérite  de  la 

»  langue  française Soyons  de  bonne  foi,  et  disons  que  ces  at- 

•-)  tributs  font  le  mérite  des  écrivains  français,  mais  nullement  de 
»  leur  langue.  »  Il  ajoute  :  «  Qu'il  ne  faut  pas  mettre  sur  le  compte 
»  de  la  langue  ce  qui  est  le  mérite  de  ceux  qui  la  parlent.  »  Puis, 
après  avoir  loué  l'italien,  revenant  au  gascon  et  W.  comparant  à  la 
langue  française,  il  admire  la  grâce  de  ses  diminutifs,  cite  avec 
complaisance  toute  une  série  de  cette  pastorale,  qui  le  charme  par 
la  naïveté  et  la  gentillesse  de  la  poésie;  et,  quand  il  arrive  à 
l'air: 

Poulido  pastourelle, 
Perlelo  des  amours, 

il  s'écrie  :  «  On  n'a  qu'à  traduire  cet  air  charmant  en  français  pour 
»  lui  faire  perdre  toute  sa  grâce.  » 
<i  L'auteur  de  Mlrèio  et  de  Cakndau  n'aurait  pas  mieux  dit.  » 

A.   E. 


CHRONIQUE 


Une  exposition  des  beaux-arts  (peinture  et  sculpture)  vient  d'être 
décidée  à  Montpellier.  Elle  coïncidera  avec  les  fêtes  et  les  réunions 
du  Concours  du  Chant  du  Latin  (22-29  mai). 


M.  Arsène  Uarmesteier,  maître  de  conférences  à  la  Faculté  des 
lettres  de  Paris,  a  ouvert  son  cours  par  une  solide  et  brillante  leçon 
sur  l'histoire  de  la  langue  et  de  la  littérature  françaises  au  moyen 
âge.  Elle  a  paru  dans  la  Revue  politique  et  littéraire  (n"  du  11)  janvier 
1878). 

Un  philologue  espagnol,  M.  E.  Uricoechea,  met  en  souscription 
chez  MM  .  Maisonneuve,  quai  Voltaire,  25,  à  Paris,  un  Diccionario 
de  voces  de  historia  natural  (nnericanas,  qui  formera  un  volume  in-12 
de  400  pages,  à  deux  colonnes.  Le  dictionnaire  de  M.  Uricoechea 
renfermera  quinze  mille  termes  environ,  que  l'on  ne  rencontre  dans 
aucun  lexique,  et  qui  constituent,  dans  leur  plus  grande  partie,  la 
contribution  de  l'Amérique  à  l'enrichissement  de  la  langue  espa- 
gnole. 

M  Uricoechea  a  fait  entrer  dans  son  travail  la  synonymie  latine, 
française,  anglaise,  créole,  eic,  lorsqu'elle  existe,  ainsi  que  les  usa- 
ges et  les  applications  des  objets  nommés.  Les  termes  propres  à  la 
Guyane  française  n'ont  pas  été  oubliés. 

L'utilité  d'un  pareil  dictionnaire  est  évidente,  et  nous  le  recom- 
mandons aux  lecteurs  de  la  Revue. 

Le  prix  de  souscription  est  actuellement  de  quinze  francs.  Il  sera 
prochainement  porté  à  trente. 

*  * 

Publications  en  langue  d'og.  —  Le  Martyre  de  sainte  Agnès,  mys- 
tère en  vieille  langue  provençale.  Texte  revu  sur  l'unique  manuscrit  ori- 
ginal, accompagné  d'une  traduction  littérale  en  regard  et  de  nombreuses 
notes,  par  M.  Sardou  ;  nouvelle  édition,  enrichie  de  seize  morceaux  de 
chant  du  XII^  et  du  XIII^  siècle,  notés  suivant  l'usage  du  vieux  temps, 
et  reproduits eji  notation  moderne,  par  M.  l'abbé  Raillard.  Paris,  Cham- 
pion ;  in -8°.  XVI- H  2  pages. 

Sardou,  Supplément  à  l'édition  du  Martyre  de  sainte  Agnès,  publiée 
par  la  Société  des  lettres,  sciences  et  arts  des  Alpes- Maritimes .  Rectifi- 
cations et  notes  nouvelles,  d'après  la  récension  faite  par  M.  Léon  Clédat 
et  les  observations  de  M.  Camille  Chabaneau.  Nice,  Malvano-Mignon; 
in-8o,  12  pages. 

Milâ  y  Fo  n  tan  al  s.  Poë/es  lyriques  catalans.  Paris,  Maisonneuve  et 
Compe,  in-8°,  35  pages.  (Tirage  à  part  de  la  Revue  des  langues  ro- 
manes, 1878.  ) 

Smith,  Vieilles  Chansons  recueillies  en  Velay  et  en  Forez.  Paris, 
in-8o,  35  pages.  (  Extrait  de  la  Remania,  t.  VIll.  ) 

12 


154  CHRONIQUE 

Malval,  Etude  des  dialectes  romans  ou  jyatois  dehx  basse  Auvergne . 
Glcrmont-Ferrand,  VigoL  ;    in-12  long,  192  pages. 

Boucoiran,  Dictionnaire  analogique  et  étymologique  des  idiomes 
méridionau.r.  tom.  l«r  (  3^  livraison).  Paris,  Maisonneuve;  gr.  in-8" 
à  2  col. ,  p.  5GI  à  823. 

Œuvres  complètes  de  Babochi  (P.  Philij)pon) .  Brands,  chansouns, 
devis  on  patois  de  vais  Santziève,  et  Essais  de  fredons  gagas  en  quasi- 
français.  Airs  notés  par  L.  Dofrance.  Saint-Etienne,  Théolier. 
1876  ;  frontispice  et  portrait  (édition  réservée  aux  seuls  souscrip- 
teurs ). 

Toselli,  Recuei  de  3,\.7& prouverbi,  sentensa,  massima,conseu,  para- 
hola,  buoi  mot,  precet  et  die  nissart.  Nissa,  Gauvin-Empereur  ;  in- 12, 
xxxi-232  pages. 

Bonaparte-Wyse,  ZoM  Viage  di  Très  Rèi,  dedica  à  S.  G.  Mounsegne 
Dubreil,  archevesque  d'Avignoun,  musico  de  Dumont.  Avignon, 
Prévôt;  in-4°,  4  pages. 

Aubanol,  lou  Libre  de  l'Amour.  Avignoun,  Aubanel;  petit  in-folio, 
70  pages  (magnifique  édition,  tirée  à  très-petit  nombre,  de  la  pre- 
mière partie  de  la  Miougrano  entreduberto). 

Langlade,  lou  Garda- Mas,  pouëma  lengadoucian.  Mount-pelié,  Em- 
primariè  centrala  dau  Miejour  ;  in-8o,  34  pages.  (Tirage  à  part  de  la 
Revue  des  langues  romanes.  1877.) 

L.  Roumieux,  la  Lucho  d'Estello,2>ouësw  prouvençalo. M our\t.-\)e\ié, 
Empriniarié  centralo  dùu  Miejour  ;  in-8o,  10  pages.  (Tirage  à  part 
de  la  Revue  des  langues  romanes,  1877.  ) 

Jean  Laurés,  lou  Campestre,  poésies  languedociennes,  suivies  d'un 
glossaire,  avec  une  Zef^re  de  Frédéric  Mistral  ctunepréface  de  Vauteur. 
Montpellier,  Imprimerie  centrale  du  Midi  ;  in-12,  vi-304  pages. 

Maurice  Rivière,  Vienna.  Cou  dezié  umouruestsîcou.  Dijon,  Galley; 
petit  in-4",  4  pages  (texte  dauphinois  et  traduction  française), 

Alfred  Chailan,  leis  Ermitam  de  Sant-Jan-Benurous  à  Mounte  Misero. 
Marsiho.  Olive;  in-S"",  15  pages, 

Astruc,  Il  Marinié,  cansoun  di  Félibre  de  la  mar,  musico  delîuoi. 
Ais,  Remondet-Aubin  ;  in-4°,  4  pages. 

G.  G.,  la  Mounina.  Aies,  Brugiieirolle  ;  in-8o,  4  pages.  (Conte 
languedocien,  extrait  de  VAri7iana  de  Lengado,  1878). 

Aubanel,  lou  Paim  es  mort!  Vivo  lou  Papo!  Avignoun,  Aubanel; 
in-80,  4  pages. 


Poésies  et  textes  en  langue  d'oc  publiés  dans  les  journaux. — 
Lou  Tambourin  de  S.Maime  ede  Dauphin,  balado,  en  provençal  d'Aix, 
par  M.  Gaut  ;  trois  lettres  en  prose  provençale,  par  MM"  Verdot, 
F    Vidal  et  Bruneau  {Journal de  Forcalquier,  18  novembre). 

La,  Réunion  du  Parage  à  Maguelone,  article  contenant  le  préam- 
bule languedocien  du  Statut  du  Parage,  la  première  et  la  dernière 
strophe  de  lapoésie  Jffl^aZoima,  par  M.Gh.  Gros;  les  toasts  proven- 
çaux de  MM.  Bonaparte-Wyse  et  Alph.  Roque-Ferricr  ;  le  toast 
languedocien  de  M.Espagne;  un  sonnet  en  languedocien  de  Mont- 
pellier, jiar  M .  Gh.  Deloiicle,  et  un  toast  en  vers  dans  le  même 
idiome,  par  M.  Alph.  Roque-Ferrier  {Messager  du  Midi,  de  Mont- 
pellier, 24  novembre). 

Le  Parage  à  Maguelone,  article  contenant  le  Statut  languedocien 


CHRONIQUE  155 

du  Pararje,  et  le  toast  en  vers  de  M.  Roque-Ferrier,  mentionné  ci- 
dessus  {République  du  Midi,  de  Montpellier,  24  novembre). 

Li  Bibude  Camargo,  poésie  provençale  (dialecte  d'Avignon)^  par 
M.  Marins Bourrelly,  mentionnée  à  Arles  au  concours  de  la  Cigale 
{le  Forum,  d'Arles,  25  novembre). 

Fre,  sonnet  provençal  (dialecte  d'Avignon),  par  M.  Louis  Astruc 
{la  Jeune  République,  de  Marseille,  26  novembre). 

La  Réunion  du  Parafe  à  Maguelone ,  article  contenant  la  totalité 
de  la  poésie  de  M.  Gh.  Gros,  Magalouna,  signalée  plus  haut  {Petit 
Midi,  de  Montpellier,  25  novembre). 

Vldiome  niçois,  article  sur  le  récent  ouvrage  publié,  sous  le  même 
titre,  par  M.  Sardou,  de  Nice.  Contient  une  lettre  de  M.  Mistral 
sur  l'ortb.ographe  de  la  langue  d'oc  moderne  {Moniteur  des  étrangers 
de  Nice,  !«'■  décembre). 

Lettre  provençale  de  Mgr  de  Gabrières,  évêque  de  Montpellier,  à 
M.  Arnavielle,  secrétaire  de  la  maintenance  de  Languedoc  {Messager 
du  Midi,  !«''  décembre,  publiée  le  18  novembre,  par  les  Tablettes 
d'Alais,  et  le  24  novembre,  par  l'Union  nationale  de  Montpellier). 

Lou  Cabanoun,  poésie  provençale  signée  Philémoun  ;  la  Journado 
finido,  belle  poésie  provençale  (dialecte  d'Avignon),  par  lou  Felibre 
delà  Mousello  (M.  F.  Estre).  J'y  trouve  le  mot  artoun  =  pain,  que 
l'on  a  contesté  à  tort  au  vocabulaire  courant  de  la  langue  d'oc  : 
Pièi  brifo  un  tros  d'artoun,  soun  araire  reprend. 

{Journal  de  Forcalquier,  2  décembre). 

Bubochi  {P.  Philippon).  étude  littéraire  et  biographique,  signée, 
Aug.  Th.  sur  le  poëte  forèzien.  Elle  contient  d'assez  nombreux- 
extraits  de  ses  poésies.  {Mémorial  de  la  Loire,  de  Saint-Etienne, 
nos  des  13  et  14  décembre). 

Le  numéro  du  30  décembre  du  JoitrnaZ  de  Forcalquier  ?i  paru  sous 
le  titre  provençal  de  Journau  de  Fourcauquiée  de  soun  arroundimen, 
et  il  a  été  par  moitié  rédigé  en  provençal.  On  y  remarque  un  dis- 
cours compte  rendu,  par  M.  l'abbé  Emile  Savy,  des  travaux  du  Fé- 
libriye des  Alpes:  \XYve  ch.voni(\u.Q  en  prose  non  signée,  et  diverses 
poésies  par  M™*  Lazarine  Daniel,  MM.  de  Berlue- Perussis,  Anxion- 
nas,  etc. 

Un  dinna  embé  Ruumiou,  poésie  languedocienne,  par  M.  Gh. 
Gros  {Petit  Midi,  30  décembre). 

Ço  cju'amé  mai,  poésie  provençale,  par  M"<= de  Saint-Rémy 

{le  Forum,  6  janvier). 

Ma  Grando  Bruno,  poésie  provençale  (dialecte  d'Avignon),  par 
M.  Louis  Astruc  {la  Jeune  République,  12  janvier). 

A  3foussu  Briner,  Apres  la  danso  vèn  la  panso,  sonnet  provençal, 
par  M™e de  Saint-Rémy  {le  Forum,  20  janvier). 

Per  lou  Journau  de  Fourcauquié,  sonnet  provençal  signé  Francés 
lou  Cacalian  ;  la  Gi'and  Fèsto,  poésie  signée  lou  Felibre  de  la  Crous 
{Journal  de  Forcalquier ,  20  janvier). 

Nouvè  en  provençal,  par  M.  Bosse  {Journal  de  Forcalquier,  27  jan- 
vier). Ce  numéro  reproduit  le  sonnet  ^4  l'aubo,  publié  dans  la  Re- 
vue, ni>  du  15  août  1877,  et  le  fait  suivre  d'une  traduction  en  vers 
latins  par  M.  D.  Rossi. 

La  Passejado  militario,  beau   sonnet  languedocien  (  langage  de 


156  CHRONIQUE 

Castelnaudary),  par  M.  A.  Fourès  {le  Bon  Sens,  de  Carcassonne, 
6  février  ). 

A  Galileio, sonnet  provençal  (dialecte  d'Avignon),  par  M.  Astruc 
(  lu  Jeune  République.  12  février). 

La  Mountado  de  loi  Bacos,  poésie  en   dialecte  rouergat,  par  M.  le 
vicomte  d'Armagnac  *  (  Bulletin  d'Espalion,  18  février  ). 

Loa  Papo  en  mort,  sonnet  provençal,  jiar  M.  Théodore  Aubanel 
(  Gazette  du  Midi,  de  Marseille,  21  février). 

A.  R.-F. 


•  M.  d'Armagnac  est  l'auteur  d'un  recueil  de  poésies  françaises  dont  il 
a  été  rendu  compte  dans  le  lom.  X,  p.  112,  des  Procès  verbaux  des 
séances  de  la  Société  des  lettres,  sciences  et  arts  de  l'Aveyron.  (Je  recueil 
contient  déjà  une  fable  en  rouergat. 


Errata  du  numéro  de  janvier  1878 


Lou  Gàrda-Mas.  —  P.  32,  1.  3,  dedins  l'auba  clarina;  lisez:  e  dins 
l'auba  clarina.  —  L.  14,  valounada  ;  lisez:  valou- 
nadas.  —  L.  18,  sous  brausents  cops  de  bras  ; 
lisez:  soun  brausent  cop  de  bras.  —  P.  35, 1.  15, 
envoulamouu  ;  lisez:  envoulanoun. 


Le  Gérant  responsable  :  Ernest  Hamelin. 


.MONTr-ELLIEK,  IMPRIMEKIE  CENTRALE    bV    MIOl 
(Hamelin  fixies) 


DIALECTES  ANCIENS 


L'EVANGILE     SELON     SAINT     JEAN 

EN    PROVENÇAL    DU    XIH""    SIÈCLE 

tiré  du  ms.  de  la  Bibliothèque  du  Palais  des  Arts,  à  Lyon 

(Suite  et  tin) 


1.  T^  traspassantz  ■  Jhesu  ui  .i.  liome    cec  de  natiuitat.  —  IX 
Xj  2.  E  demandero  IL  sei  decipol  dizent.    maestre  cals 
pequec,  aquest  o  li  parent  de  Inique  nasqiies  cex? — 3.Rospos  685 
Jhesu.  Ni  aquest  no  pequec  ni  li  parent,  mas  que  fosso  raani- 
festadas  la  obras  de  deu  elui. —  4.  Mi  eoue  obrar  las  obras  de 
lui  qui  mi  trames  domentre  que  dias  es.  Ve  noitz  cant  degus 
no  pot  obrar. — 5.  qua[n]  longament  eu  so  el  mon.  so  lutz  del 
mon. —  6.  Co  agues  dltas  aquestas  causas  escopic  en  terra  e  690 
fe  brac  de  saliua.    et  oiss  los  ulhs  del  cec.  —  7,  c  dix  ad  el. 
Vai  e  laua  e  natatoria  de  Sjloe  que  es  apelatz  trames.  Adon- 
cas  anec  e  iauec  e  uenc  uezentz.  —  S.  Em  per  aisso  li  uezi  e 
aqueli  que  Fauian    uist  primeiraraent  quan  era  meridix   (e) 
diszian.  Doncas  no  es  aquest  que  sezia  e  mendigaua?  —  9,  Li  695 
autre  dizian.  quar  aquest  es.  mas  li  autri.  no  mas  semblantz 
es  de  lui.  mais  el  dizia.  quar  eu  so.  —  10.  Adonc  dizian  a  lui. 
en  quai  mesura  so  a  tu  ubert  li  ulh?  —  11.  Respos  el  e  dix. 
Aicel  hom  que  es  ditz  Jhesu  fe  brac  et  oiss  los  meus  ulhs  e  dis 
a  mi.  Vai  e  natatoria  de  Siloe  e  laua.  Et  [90''1]  anei  e  lauei  c  700 
ui.  —  12.  E  dixero  a  lui.  on  es  el  ?  dix  el.  no  o  sei.  — 13.  Mais 
amenero  lui  que  auia  estât  cex  als  Fariseus.  —  14.  Mais  era 
sables   quan   Jhesu   fe   lo   brac  et  ubcrc  los   ulhs  de  lui.  — 
15.  Em  per  aisso  !i  Fariseu  de  rescaps  enterogauan  lui   cossi 
ngiies  uist.  mas  el  dix  a  lor.  brac  pausec  a  mi  sobrels   îueus  705 
ulhse  lauei  e  ueg. — 16.  Adoncas  dixero  alcanti  deîs  Fariseus. 
aquest  hom  no  es  de  deu.  que  no  garda  sabte.  Li  autri  dizian. 
en  quai  maneira  pot  hom  pecaire  aquestas  signas  far?  E  dcs- 
cordia  era  entre  lor.  —  17.  Adoncas  dixero  al  cec  de  rescaps. 

13 


ir,s  nTALl::<;TES   ANai<:NS 

7  lu  ni  i[\u}  ili/.es;  lic  lui.  (lue  uberc  los  tous  uUis?  mais  el  dix  (jue 
[)iM[)liiM;i  os.  —  IS.  l'.iii  ]u'r  :iisso  li  .Iu/,eu  110  crezero  d'aicel 
([110  I". >>  ostatz  c'(?x.  c  a.u'uos  uisr.  cntro  quo  apelero  los  parentz 
i\c  lui.  li  (jual  auiap.  uist.  —  lU.  l'^t  cniL'rogero  los  dizentz.  Es 
a|Ui^st  uosti'o  lils  lu  (juals  uos  di/.ct/,.  que  ccx  nasc  ?  doricas  en 

7ir>  (juil  maneira  ara  ue  ^  —  20.  Rc.s[)Oudero  ad  els  li  j)arent  de 
lui  ('  dixoi'o.  Nos  sabem  (juo  aijUi^st  es  iiostro  lils.  e  (|uc  cex 
nasc.  —  v?l.  mais  on  ([uai  inaucira  ara  ne.  no  o  sabem.  o  quais 
ubc'i'c  [90'"2j  los  ullis  de  lui.  uos  no  o  sabem.  lui  enterogatz. 
que  ;^iMns  es  e  pot  parlai". —  '-^2.  A([uestas  causas  dixero  li  pa- 

T'JO  rout  de  lui.  quar  temian  los  .lu/.ous.  Quar  ia  auian  enpres  que 
si  alcus  col'esaua  Crist  lui,  que  l'ura  de  la    sinagoga  fos  gitatz. 

—  '2?>.  Per  aisso  li  parent  de  lui  dixero  ([ue  grans  es.  lui  en- 
tiM-oi:alz.  —  'Jl.  Ein  per  aisso  apelero  de  rescaps  Fomo  que 
auia  estât  cex.  o  dixero  a  lui.  doua  gloria  a  deu.  nos  sabem 

727)  (jue  aquest  hom(e)  es  [)ecaire.  —  v?5.  Adoneas  dix  a  lor.  si  pe- 
'•airc  es  eu  no  o  sei.  una  ro  sei.  i|uar  co  eu  fos  ccx.  ara  ueg. 

—  "JO.  Adoneas  dixero  a  lui.  Qui  fe  a  lu  l  cosi  uberc  a  tu  los 
ulhs?  —  27.  Respos  a  lor.  b^u  o  dissi  a  uos.  e  ia  o  auzitz.  per 
(lue  de  rescaps  o  uoletzauzir^  doiicas  c  uos  uolctz  esser  faitfz) 

730  deeipol  de  lui  ? — 2S.  E  nialdixeio  el  e  dissero.  Tu  sias  decipols 
de  lui.  mas  nos  eindccipol  de  Moisen.  —  29.  Nos  sabem  que 
deus  parlée  a  Moisen.  mas  afjucst  no  sauem  don  sia.  —  '30. 
Respos  aicel  liom.  e  dix  a  lor.  (juar  aisso  es  merauillia.  que  uos 
no  sabetz    don  sia.   et   uberc  los  meus  ulhs, —  31.  Quar  nos 

735  sabem  que  deus  [90v  1]  no  au  pecadors.  mas  si  alcus  es  cou- 
liuaire  de  deu.  e  la  uolontat  de  lui  l'a.  aquest  eissau.  —  32.  del 
segle  no  es  auzit  que  alcus  obrls  los  ulhs  del  ce[c]  nat.  — 
33.  si  aquest  no  l'os  de  deu.  no  jjogra.  lar  alcuna  causa.  — 
;>1.  Respondero   e  dixero  a  lui.  tu  nasquest  totz  en  pecatz.  e 

710  lu  nos  essenlias  ?  E  gitero  le  iVn-as.  —  35.  Auzic  .Tliesu  quel 
gitero  foras,  et  v.o  Tagues  atrobat.  dix  ad  el.  cres  tu  el  lilh 
de  deu  ^  —  3().  Respos  e!  e  dis.  senher  quais  es  qu'eu  creza  en 
lui  i  —  37.  E  dix  a  lui  Jhesu.  l\  uist  lui  el  quais  parla(r)  ab  tu. 
el  meteis  es.  —  38.  Mais  el   dis.  Eu    crezi   senher.    e   gitantz 

715  azorcc  le.  —  3>U.  Dix  a  lui  .Jhesu.  Eu  uengui  en  iuezi  en 
aquest  mon.  que  ai^uili  (jue  no  uezo  ueian  .  et  a(iueli  queuezo. 
sian  fait  coc.  —  U).  E  a!ca;  niti  dels  Fariseus  (jue  ero  ab  lui 
auziro  e  dixero  a  lui.  doncas  e   nos  ein  celc  ?  — 41.  Dix  a  lor 


EVANÙILE    ïïLILON    ^AIM    JK.\N  lôO 

Jliesu.  si  fossetz  ce[cj  no  agrat  pecat.  mas  ara  dizetz.  quar 
uezem.  lo  uostre  pecatz  esta.  750 

1.  Vorament  uerament  die  a  uos.  qui  no  intra  per  l'ui^is  cl  X 
parc  [90^21  de  las  ouelhas.  mas  piiia  d'autra  part,  aicel  es  furs  e 
lairc. — 2.  Mais  lo  quais  intra  perTuss.  es  pastrc  de  las  ouelhas. 

—  3.  Ad  aquost  ubrc  lo  porters.  e  las  ouelas  auzo  la  uotz  de 
lui.  c  las  proprias  ouelas  apcla  nomnadamcnt  et  amena  las.  —  755 
■1.  E  cum  las  proprias  ouelas  foras  metra.  denant  lor  ua.  e  las 
ouelas  scgo  lui.  quar  sabo  la  uotz  de  lui.  —  5.  Mais  restranh 

no  sego.  mais  fuio  de  lui,  (juar  no  conogo  la  uotz  dels  estranhs. 

—  6.  Aquesta  semblansa  dis  a  lor  Jhesu.  mais  eli  no  conogro 
quai  causa  parlaua  ad  els, — 7.  Em  per  aisso  dix  ad  els  de  res-  700 
caps  Jhesu.  Verament  uerament  die  a  uos    que  eu  so  uss  del 
pai'c .  —  8.  toti  canti  que  canti  n'i  uengro,  fur  so  e  lairo.  si  no 

les  auzo  las  ouelas.  —  9.  Eu  so   uss.   si  alcus  intrara  per  mi 
sera  saluatz.  et  intrara  et  issira.  et  atrobara  paissio. — 10.  Le 
laire  no  ne.  sino  que  pane  et  auciza.  e  destruzisca.  Eu  ucngui  705 
que  aian  uida  e  moût  plus  aian.  —  11.  Eu  so  bos  pastre,  bos 
pastre  [Gl"^!  ]  pausa  la  sua  arma  per  las  suas  ouelhas.  —  12. 
niais  le  logaders,  el  quels  no  es  pastre,  del  quai  las  ouelas  no  so 
proprias,  ue  le  lop  uenent,  e  laissa  las  ouelas  o  fug.  El  lops 
raubiss  et  espartz  las  ouelas. — 13.  Mais  le  logaders  fug.  quar  770 
logaders  es.  e  no  aperte  a  lui  de  las  ouelas. — 14,  Eu  so  le  bos 
pastre.  e  conosc  las  mias  ouelhas.  e  las  mias  ouelhas  conoisso 
aii.  —  15.  Enaici  col  paire   conoc  mi  et  eu  conosc  lo  paire, 
e  pausi  la  mia   arma  per  las  mias  ouelhas. —  iO.  Et    autras 
ouelhas  ei  que  no  so  d'aquest  parc,  et  aicelas  coue  me  adure.   775 
et  auziran  la  mia  uotz.  e  serafaitz  us  parx  et  us  pastre. — 17. 
per  aisso  lo  paire   ama  mi.  quar  eu  pausi  la  mia  arma  e  de 
rescaps  prendrei  lei.  —  18,  negus  no  la  toi  de  mi.  mais  eu 
pausi  lei  de  mi  meteis.  pozestat  ei  de  pausar  loi  e  pozestat  ei 
de  rescaps  prenre  lei.   Aquest  mandament  receubi  del  meu  780 
paire  [91'  2].  —  10.  De  rescaps  fo  faita  descordia  entre  los 
Juzeus.  per  aquestas  paraulas. — 20.  mais  mouti  de  lordizian. 
domoni  a.  e  forsena.  per  que  auzetz  lui? — 21.  Li  autri  dizian. 
'  aquestas  paraulas  no  so  d'aacjit   demoni.    no  pot  hom  ab  de- 
monis  les  ulhs  dels  cex  obrir.  —  22.  Festiuitatz  Ibro  faitas  en  785 
Jherusalem  et  era  yuerns.  —  23,  E  anaua  Jhesu  el  temple,  cl 


160  DIALECTES     ANCIENS 

I)oi'[t]ic  de  Salamo.  —  21.  Adoncas  li  Juzeu  reuironero  lui  e 
(ii/.ian  a  lui.  oi)tro  quora  tolcs  la  uostra  arma?  si  tu  est  Cristz 
«llyas  a  nos  pales.  —  25.  Respos  ad  els  Jhesu.  eu  parli  a  uos. 
790  e  no  crczetz.  las  obras  que  eu  fasz  el  nom  del  meu  paire, 
aquestas  donan  testimoni  de  mi.  —20.  mais  uos  no  crezetz. 
(juarno  esz  de  las  mias  ouelhas.  —  27.  las  mias  ouellias  auzo 
la  mia  uotz.  et  eu  conosc  las.  e  sego  me.  -28.  et  eu  doni  uida 
durabla  a  lor.  e  no  periran  en  durabletat.  et  alcus  noraubira 

795  aicelas  de  la  mia  ma.  —  29.  Aquela  causa  que  donec  a  mi  lo 
meus  paire  es  maier  de  totz  c  negus  no  pot  raubir  delà  ma  del 
m[91'l]eu  paire.  —  30.  eu  el  paire  emuna  causa. — 31.  Leuero 
peiras  li  Juzeu.  que  lapisseso  lui.  —  32.  Respos  a  lor  Jhesu. 
montas  bonas  obras  demostrei  a  uos  del  meu  paire,  per  quai 

SOO  obra  d'aquestas  me  lapizatz?  —  33.  Respondero  a  lui  li  Juzeu 
dizent.  de  bonas  obras  notlapidam.  mas  de  maldig.  e  quartu 
fas  tu  mezeis  deu.  co  tu  sias  hom.  —  34.  Respos  a  lor  Jhesu. 
doncas  no  es  escriut  en  la  uostra  leg.  quar  eu  dissi.  uos  esz 
deu?  —  35.  si  aicels  dis  deus  als  quais  lo  sermo  de   deu  fo 

805  faitz>  et  no  pot  esser  desliada  la  scriptura.  —  36.  lo  quai 
lo  paire  sanctifiquec  e  trames  el  mon.  uos  dizetz  que  mal- 
dizes.  quar  dissi.  fils  de  deu  so?  -37,  Si  no  fasz  las  obras  del 
meu  paire,  no  uulhatz  creire  a  mi.  —  38.  mais  si  eu  fasz.  e 
si  a  mi  no  uoletz  creire  crezetz  a  la[sj  obras .  que  conoscatz  e 

810  crezatz  quar  lo  paire  es  e  mi.  et  eu  el  paire.  —  39.  Em  per 
aisso  lo  uolian  prenre  [et]  issic  de  las  mas  de  lor. — 40.  Etanec 
de  rescaps  outra  lium  Jorda  en  aicel  loc  on  Jouans  era  ba- 
teia[n]tz  primerament.  et  estec  la. — 41.  E  mouti  uengon  a  lui 
e  {91^' 2]  dizian  que  Jouans  a  certas  no  fe  alcu  signe.  —  42. 

815  mais  totas  las  causas  quais  que  quais  dis  Jouans  d'aquest  so 
ueras.  e  mouti  crezero  e  lui. 

XI       1.    i\/ïais  era  us  malautes  Lazers  de  Betania.   del  castel 


M 


Maria  era  que  oiss  nostre  senhor  ab  enguent.  e  tersz  les  pes 
820  de  lui  ab  los  sens  cabelhs.  de  las  quais  era  fraire  Lazers.  et 
era  malautes.  —  3.  Adoncas  tramezero  las  serors  de  lui  az  el 
dizcntz.  senlier  uec  te  aquel  que  amas  es  malautes.  —  4.  Mais 
auzentz  Jhesu  dis  ad  els.  Aquesta  efermetatz  no  es  a  morf . 
mas  per  la  gloria  de  deu  (juc  sia  ondratz  lo  iils  de  don  per  lui. 


EVANGILE    SELON    SAINT    JEAN  161 

—  5.  Mais  Jhesu  auiaua  Mariha.  e  la  seror  de  lui  Maria  e  825 
Lazer.  —  6.  Em  per  aisso  depuis  que  auzic  que  era  malautes. 

la  donc  a  certas  estec  en  aquel  mezeis  loc  dos  dias.  —  7, 
D'aqui  endreit  après  aquestas  causas  dix  a  sos  decipols. 
Ancm  en  Judea  de  rescai)S.  —  8.  Dizo  a  lui  li  decipol.  maestre 
ara  te  querian  li  Juzcu  lapidar  e  de  rescaps  uas  la?  —  9.  830 
Respos  Jliesu.  doncas  no  so  .xii.  las  oras  del  di[92''  Ija? 
si  alcus  ira  el  dia  no  ofen.  quar  ue  la  lutz  d'aijuest  mon.  — 
10.  Mais  si  ira  e  la  noit  ofen.  quar  lutz  no  es  en  lui.  —  11. 
Aquestas  causas  dis.  e  après  aquestas  causas  dis  ad  els. 
Lazers  le  nostre  amie  dorm.  mas  uau  que  del  son  suscite  lui.   835 

—  12.  Adoncas  dissero  li  decipol  de  lui.  senhcr  si  dorm  salus 
sera.  —  13.  Mais  Jhesu  o  dizia  de  la  mort  de  lui.  mas  eli  pes- 
sero  que  del  dormir  del  son  o  disses.  —  14.  Em  per  aisso 
adonc   dix  a  lor  Jhesu  manifestamenc.   Lazers  es  mortz.  — 

15.  et  esgauzisc  me  per  uos  que  crezatz  que  eu  no  era  aqui.   840 
mas  anem  a  lui.  —  10.  Adoncas  dix  Tomas  que  es  ditz  nocre- 
zentz  als  decipols.  Anem  neiss  nos  e  moram  ab   lui.  —   17. 
Em  per  aisso  uenc  Jhesu  en  Betania  et  atrobec  lo  que  ia 
■  iiii.  dias  auia  estât  el  moniment.  —  18.  mais  era  Betania 
iosta  Jherusalem.  enaici  co   de   .xv.    estadis  .   —  19.   Mais  845 
mouti  dels  Juzeus  eran  uengut  a  Martha  e  a  Maria,  que  las 
conortesso  de  lor  fraire. —  20.  Em  per  aisso  depuiss  que  Mar- 
tha auzic  que  Jhesu  ue.  corec  contra  a  lui.  mais  Ma[92'^  2]ria 
sezia  a  maiso.  —  21.  Adoncas  dix  Martha  a  Jhesu.  senher  si 
tu  foss[es]  estatz  aici.  lo  meus  fraire  no  agra  estât  mortz. —  850 
22.  Mais  ara  sei.  quar  qualsque  causas  requerras  de  deu  dara 
a  tu  deus.  —  23.  Dix  a  lei  Jhesu.  resuscitara  lo  teus  fraire. 

—  24.  Dis  a  lui  Martha.  eu  sei  que  resucitara  e  la  resurrectio 
cl  derraira  dia.  —  25.  Dis  a  lei  Jhesu.  Eu  so  resurrectios  e 
uida.  qui  cre  e   mi.  neiss  si  sera  mortz  uiura.  —  26.  E  totz  855 
aquel  que  uiu  e  cre  e  mi.  no  morra  e  durabletat.  cres  aisso? 

—  27.  Dis  a  lui.  oc  senher.  eu  crezei  que  tu  est  Cristz  fils  de 
deu  que  uenguist  en  aquest  mon.  —  28.  E  co  aisso  agues  dig 
anec  et  apelec  Maria  sa  seror.  e  dix  li  a  coselh.  lo  maestre 

es  za  et  apeia  te.   —  29.  Mais  ela  depuiss  que  auzic  leuec  800 
uiasament.  e  uenc  a  lui.  —  30.  quar  encara  no  era  uengutz 
Jhesu  el  castel,  mas  ei'a  en  aicel  loc  encara  on  Martha  auia 
•oregut(z)  encontra  lui.—  31.  Em  per  aisso  li  Juzeu  que  eran 


1Ù3  I)IAT,ECT!OS    ANCIBNS 

ab  lei  en  la  maiso  e  conortauan  lei.  co  agu[92v  Ijesso  uista 

865  Maria  que  uiasament  se  leuec  es  n'issic.  seguiro  la  dizent. 
que  ua  al  raoniment  que  plore  aqui. —  32.  Adoncas  cum  Maria 
fos  uenguda  la  on  era  Jhesu,  uezentz  lui  cazec  als  pes  de  lui 
e  dix  a  lui.  Senher  si  fosses  estatz  aici.  no  fora  mortz  lo  meus 
frairc.  —  33.  Ern  per   aisso  Jhesu   uezentz  lei  plorant.    els 

870  Juzeus  que  eran  uengut  ab  ela  plorantz  fremic  per  esperit  e 
turbec  si  mezeis.  —  31.  e  dix.  On  pauses  lui?  dizo  a  lui. 
senlicr  uei  e  ueias.  —  35.  E  lagreraeiec  Jhesu.  —  36.  Adon- 
cas dixero  ii  Juzeu.  Vec  uos  en  quai  maneira  amaua  lui.  — 
37.  Mais  alcanti  de  lor  dizian.  no  pogra  aquest  que  uberc 

875  los  ulhs  del  cec  far  que  aquest  no  moris?  —  38.  Adoncas 
Jhesu  de  rescaps  freme[ntz]  en  si  mezeis,  uenc  al  moniraent. 
mais  era  e  la  fossa.  et  una  peira  desobre  pausada  a  lui.  — 
39.  Dis  Jhesu.  ostatz  la  peira.  dix  a  lui  Martha  sor  de  lui 
que  era  raortz.  senher  ia  put.  quar  .un.  dias  a  que  i  es.  — 

880  40.  Dix  a  lei  Jhesu.  doncas  no  dissi  a  tu,  quar  si  croiras 
ueiras  la  gloria  de  deu  ?  [92^  2],  —  41.  Adoncas  tolgro  la 
peira.  mas  Jhesu  leuatz  los  ulhs  dix.  paire  gracias  fasz  a  tu . 
quar  me  auzist.  —  42.  Mais  eu  sabia  quar  totas  oras  me 
auzes.   mas  per  lo  poble  que  en  auiro  esta  dissi.  que  creza 

885  que  tu  me  tramezist.  —  43.  Co  agues  ditas  aquestas  causas 
cridec  ab  gran  uotz.  Lazer  uei  foras. —  44.  E  uiasament  issic 
aicel  que  auia  estât  mortz  liatz  los  pes  e  las  rjas  ab  bandas, 
e  la  cara  de  lui  era  liada  el  suzari.  dix  a  lor  Jhesu.  desliatz 
le.  e  laissatz  l'en  anar. — 45.  Em  per  aisso  mouti  dels  Juzeus 

890  que  eran  uengut  a  Maria,  et  auian  uist  aicelas  causas  que  fe 
Jhesu.  crezero  en  lui.  —  46.  mais  alcanti  d'els  anero  als 
Fariseus.  e  dixero  ad  els  aicelas  causas  que  fe  Jhesu.  — 
47.  Em  per  aisso  li  auesque  e  li  Fariseu  aiustero  lo  coselh 
contra  Jhesu  e  dizian.  Qui  farem?  quar  aquest  hom  montas 

895  signas  fa.  —  48.  Si  enaici  le  laissam,  tuit  creiran  en  lui. 
e  uenran  li  Roma  e  tolran  nos  nostre  loc  e  la  gent.  —  49. 
Mais  us  de  lor  per  nom  Cayfas  co  fos  auesques  d'aicel  an.  e 
dc[93''  l]uincc  e  dix  ad  els.  uos  no  sabets  alcuna  causa  — 
.50.  ni   co.ssiratz,  quarcouc   a  uos  que   us  hom  raoira  per  ]o 

900  poble.  que  no  perisca  tota  gentz.  —  51.  Mas  aisso  de  si 
mezeis  no  dis.  mais  co  fos  auesques  d'aicel  an  prophetizec 
que  Jhesu  era  moridors  per  la  gent.  —  52.  E  no  solament 


EVANGILE    bEl.ON    SA  [NT    JEAN  163 

perla  gent  mais  que  los  fils  de  deu  que  eran  esparsi  aiustes 
en  u.  —  53.  Em  per  aisso  d'aicel  dia(s)  enant  oossirero  quel 
aucizesso.  —  54.  Adonc  Jhesu  ia  no  anaua  en  pales  uas  los  905 
Juzeus.  mas  anec  eu  la  régie  iusta  .i.  loc  erni  en  una  ciutat 
que  es  dita  Effreni  :  et  aqui  estaua  ab  los  seus  discipois.  — 
55.  Mais  era  prop  la  Pasca  dels  Juzeus.  e  mouti  puiero  en 
Jherusalem  de  la  régie  denaiit  la  Pascha  que  sanctifiquesso 
lor  raezeiss.  —  50.  Adonc  querian  Jhesu.  e  [)arlauan  essems  910 
entre  lor.  estantz  el  temple.  Qui  pessatz  quar  no  uenc  al  dia 
festin  al  ?  —  57.  Quar  li  auesque  e  li  Fariseu  auian  dat  man- 
dament.  que  si  alcus  conoissera  on  sia  o  [93''  2]  demostre 
per  zo  quel  prengan. 

XII 
1.    l~^in  per  ai>so  .Jhesu  denant  los  .vi,  dias  de  la  Pascha  915 
Xj  uenc  en  Betania  on  Lazers  auia  estât  mortz  lo  quai 
resuscitec  Jhesu. —  2.  mas  fero  a  lui  cena  aqui.  e  Martha  mi- 
nistraua.mais  Lazers  era  us  dels  repausa[n]tz  ab  lui.  —  3.  Mais 
Maria  près  enguont  liura  de  nardi  fizel  precios.  et  oiss  los  pes 
de  Jhesu.  e  tersz  ab  los  seus  cabels  los  pes  de  lui.   e  la  maiso  920 
fo  azomplida  de   la  olor  del  enguent. —  4.   Em  per  aisso  dix 
us  dels  decipols  de  lui  Judas  Escariot  que  era  a  trazirlui.  — 
5.  Per  que  aquest  enguentz  no  fo  uendutz  .  ccc.  diners.    e  fos 
datz  als  paubres  ?  —  6,  Mais  aisso  dix  no  quar   dels  paubres 
niquetaisses  a  lui.  mas  quar  laire  era.  et  auia  las  borsas.  e  zo  925 
que  metian  portaua. —  7.  Adoncas  dis  Jhesu.  laissa  loi  que  el 
dia  de  la  mia  sepultiira  lo  garde.  —  8.  Quar  totas  oras  auetz 
paubres  ab  nos.  mas  mi  no  auretz  totas  oras. —  9.  Adoncas 
conoc  la  [93^1  j  cumpanha  mout[a]  dels  Juzeus  quar  la  es.  e 
uengro  no  per  Jliesu  tant  solame[n]t.  mas   que  Lazer  uisso  lo  930 
quai  Jhesu  resuscitec  dels  mortz. —  10.  Mais  cosirero  li  prin- 
cep   dels   preueires.    que  neiss  aucizesso  Lazer. —  11.  quar 
mouti  dels  Juzeus  anauiiii  per  lui.  e  crezian  en  Jliesu.  — 12. 
Mais  Tedoma  monta  cuinpauha  ([ue  eran  ue  ngut  al  dia  de  la 
festa.  co  aguesso  auzit  queue  Jiiesu    en  Jherusalem.  —  13.  935 
preiro  rams  de  palmers    et  issiro    en  contra  a  lui  e  cridaua. 
fai  nossalus  (il  de  Dauid.  benczoctes  lo  reis  d'Israël  lo  ([uals  ue 
el  nom  del  senhor. —  14.  E  Jhesu  atrobec  .i.  asenet  e  sec  so- 
bre lui.  aicico  esescriut. — 15.  No  uulhastenier  filha  de  Sion. 
uec  te  lo  teus  reis  ue  sozentz  sobrel  poli  de  la  asena.  ~  10.   940 


164  DIALECTES    ANCIENS 

Aquestas  causas  no  cono^ro  li  decipol  de  lui  primeirament. 
mas  quan  fo  glorificatz  Jhesu.  la  donc  se  recordero.  que 
aquestas  causas  ei'an  escriutas  de  lui.  et  aquestas  causas  fero  a 
lui.  —  17.  Adoncas  donaua  testiraoni  la  cumpanha  que  era  ab 

945  lui  cant  apelec  Lazer  del  moniraent.  el  resuscitec  dels  mortz 
—  18.  Per  aquestas  [93^2]  causas  e  la  cumpanha  uenc  en  con- 
tra a  lui.  ([uar  auziro  lui  auer  fait  aquesta  signa. —  19.  Em 
per  aisso  liFariseu  dixero  a  lor  meteisses.  Adoncas  ueetz  quar 
re  no  Jios  profeita.  uec  uos  totz  lo  mon[s]  ua  après  lui. —  20. 

950  Mais  eran  paga  alca[njti  d'aquels  que  eran  puiat  que  azoresso 
el  dia  de  la  testa. —  21.  Em  per  aisso  aquesti  apropiero  a 
Philip  que  era  de  Betlisaida  de  Galilea.  e  pregauanle  dizentz. 
senher  nos  uolem  Jhesu  uezer.  —  22.  Venc  Philip  e  dix  ad 
Andreu.  Andreus  de  rescaps  e  Philips  dixero  a  Jhesu. —  23. 

955  Mas  Jhesu  respos  a  lor  dizentz.  Ve  la  ora  quel  fil  del  home  sia 
esclarçitz.  —  24.  Ve  rament  uerament  die  a  uos.  sil  gras  del 
froment  cazentz  en  terra  no  morra.  el  mezeiss  esta  sols.  Mais 
si  morra.  moût  fruit  aporta. —  25.  Qui  ama  la  sua  arma  per- 
dra la.  e  qui  azira  la  sua  arma  en   aquest  mon.  en  uida  du- 

960  rabla  garda  lei. —  26.  Qui  a  mi  seruiss.  mi  seg.  e  on  eu  so 
aqui  sera  lo  meus  siruentz.  e  qui  a  mi  seruira  ondrara  lui  lo 
meus  paire  que  es  els  cels.  -  27.  Ara  es  [Qé""  1]  torbada  la  mia 
arma,  e  que  direi?  paire  fai  me  salu  d'aquesta  ora.  mais  per 
aisso  uengui  en  aquesta  ora .  —  28.  paire  fai  clar  lo  teu  nom . 

965  Adoncas  uenc  uotz  del  cel  dizentz.  Et  esclarzi.  e  de  rescaps 
esclarzirei. — 29.  Em  per  aisso  la  cumpanha  que  estaua  e 
auia  auzit  dizia.  troneire  esser  fait.  11  autri  dizian.  angels  li 
parlée. —  30.  Respos  Jhesu  e  dix.  No  uenc  per  mi  aquesta 
uotz.  mas  per  uos. —  31.  Ara  es  iudicis   del  mon.   ara    sera 

970  gitatz  fora  lo  princeps  d'aquest  mon. —  32.  E  si  eu  serei  eis- 
sauzatz  de  la  terra,  totas  causas  tirarei  a  mi  eiss. —  33.  Mas 
aisso  dizia  significantz  per  quai  mort  fos  moridors. —  34.  Res- 
pos a  lui  la  cumpanha.  Nos  auzim  de  la  leig  que  Cristz  esta  en 
durable,  et  en  quai  maueira  dizes  tu  coue  esser  eissauzat(z)  lo 

975  fil  del  home?  quais  es  aciuest  fils  del  home? —  35.  Adonc  dis  ad' 
els  Jhesu.  Encara  es  pauquetz  lums  en  uos.  Anatz  domentre 
que  auetz  lutz.  que  [no]  uos  prengan  las  teuebras.Et  aquelque 
ua  e  tenebras.  no  sab  on  an.—  36.  Domentre  que  auetz  lutz. 
crezetz  [94''2]  en  la  lutz  que  sia[tz]  filh  de  lutz.  Aquestas  causas 


EVANGTLE    SELON    SAINT   JEAN  165 

parlée  Jhesu.  et  anec  e  rescos  se  de  lor. —  37.  mas  cum  tau-     080 
tas  signas  aguosfaitas  denant  lor.  no  crezio  en  lui. —  38.  que 
la  paraula  d'Ysaias  lo  propheta  fos  cumplida  que  dix.  Senher 
quais  crezoc  al  uostre  auziraeut?  el  brasz  del  senlior  al  quai  (o 
descubertz?  —  39.  Per  aisso  no  podian  creire.  quar  de   res- 
caps   dix  Ysaias.  E  ceguec  los  uls  de  lor.  et  endurcie  lo  cor     985 
de  lor.   que    no   ueian  ab  los  ulhs.  c  no  entende    ab  lo  eor. 
e  no  se    couertisco   e   sanee  los.    —    11  .    Aquestas   eausas 
dix   Ysaias  quan  ui   la   gloria   de    deu    e    parlée   de  lui.  — 
42.  mas  empero  mouti   dels  prineeps   crezero   en  lui.    mais 
per  los  Fariseus  no  o  cofesaua  'que  no  fosso  gitat  de  la  sina-     990 
goga.  —  43.  quar  amero  mais  la  gloria  dels  homes,  mais  que 
la  gloria  de  deu. —  44.  Mais  Jhesu  cridee  e  dix.  Qui  cre  e  mi 
no  ère  e  mi.  mas  en  lui  qui  mi  trames. —  45.  E  qui  mi  uc.  ue 
lui  qui  mi  trames. — 46.  Eu  lutz  uen[c]  dar  el  mon.  que  totz  aquel 
que  cre  e  mi.  no  estara  en  tenebras. —  47.  E  si  alcus  auzira     995 
[94^1]  las miasparaulas  e  no  las  gardara.  eu  no  iugi  lui.  Quar 
nouengui  qu'eu  iui3  lo  mon.  mais  que  fa?za  salu  lo  mon.— 48. 
Qui  mespreza  mi.  e  no  recep  las  mias  ])araulas.  a  qui  iuia  lui. 
lo  sermos  qu'eu  parlei.  el  iuiara  lui  el  deraira  dia. —  49.  Quar 
eu  no  parleide  mi  eiss.  Mais  lo  paire  qui  mi  trames,  el  donee   1000 
mandament  a  mi  que  eu    diga   e   que  ou  parle.  — 50.  e  sei 
quel  mandamcntz  de  lui  es  uida    durabla.  Adoncas  aquelas 
causas  que  eu  parli.   aici  coma  lo  paire  dis  a  mi.  enaici  parli. 

1.  Rfl'ais  dauant  lo  dia  de  la  festa  de  Pasca  sabentz  .Jhesu  XIÎI 
iVXque  la  ora  de  lui  ue  que  traspasse    d'aquest  mon  al   1005 
paire,  co  agues  amatz  los  seus  que  ero  el  mon,  en  la  li  amec 
els.  —  2.  E  faita  la  cena  cum  lo   diables  se  mes  el  cor(s)  de 
Judas  que   trazis   lui.  Judas  Simon  Escariot.  —  3.    sabentz 
Jhesu  quar  totas  causas  donec  a  lui  lo  paire  en  las  suas  mas. 
quar  de  deu  issic.  et  a   deu  ua.  —  4.  leuec  de  la  cena  e  pau-  1010 
sec  sa  uestimenta.  o   co  agues  preza  la  touala  denant   ceis 
se.  — 5.    d'aqui  en    dreit   mes  l'aiga  el  basci.  e   comenzec 
lauar  les  pes  dels  decipols  e  terzer  ab  la  touala  don   era  de- 
nant cchs.  —  6.  E  uenc  à  Simon  Peire  e  dix  a  lui.  Senher  tu 
lauas  a  mi  los  pes?  —  7.  respos  Jhesu  c  dix  a  lui.  Aquo  que   101" 
eu  fasz  tu  no    sabs  ara.  mais  sabras  o  en  après.  —  8.  Dix  a 
lui  Peire-  No  lauaras  a  mi  los  pes  en  durabletat,  respos  a  lui 
Jhesu.  Si  eu  not  lauarei  no  auras  part  ab  mi.  —  9.  dix  a  lui 


106  DIALECTES  ANCIENS 

Simons  Poire.  Sonher  non  laues  tant  solaraent  los  pes.  mas 

1020  neis  l.is  mas  el  cap.  —  10.  dix  a  lui  Jiiesii.  qui  es  lauatz  no 
bcsonha  sino  que  lauo  los  pes  et  er  totz  nedes.  e  uos  esz  ne- 
des  mas  no  tuit.  —  11.  quar  sabia  quais  séria,  lo  quais  tra- 
ziria  lui.  Per  aisso  dis.  no  esz  tuit  nede. —  12.  Adonc  depuiss 
que  ac  lauatz   los  pes  de  lor    et  el  près  sas  uestimentas.  e  co 

1025  fos  repausatz  de  rescaps  dis  ad  els.  Sabetz  quai  causa  aia  fait 
a  uos?  —  13^  Vos  me  a[95'"  llpelatz  sonher  e  raacstre.  e  be 
()  dizetz.  quar  eu  o  so.  —  14.  Em  per  aisso  si  eu  lauei  los 
uostrespes.  que  senher  c  maestre  uostre  so.  c  uos  deuetz  lauar 
los  pes  Tus  de  l'autre. — 15.  Quareissemple  donei  a  uos.  que  aici 

1030  co  eu  o  fi  a  uos.  enaici  e  uos  fasszatz.  —  16.  Verament  uera- 
ment  die  a  uos.  no  es  lo  serus  maier  del  seu  senhor.  ni  apostols 
maier  d'aicel  que  trames  lui.  —  17.  si  aqucstas  causas  sabetz 
bonaurat  serez  si  las  faretz. — IS.  No  die  a  uos  de  totz.  eu  sei 
los  quais  elegi.  mais  que  sia  cumplida  la  scriptura.  Aquel  que 

1035  mania  ab  mi  lo  pa.  leuara  contra  mi  lo  seu  talo.  —  19.  d'aici 
enant  die  a  uos.  enantz  que  sia  fait  ;  que  crezats  co  sera  fait 
qu'eu  so.  — 20.  Verament  uerament  die  a  uos.  qui  recep  los 
cals  eu  traraetrei.  mi  recep.  mais  qui  mi  recep  recep  lui  qui 
mi  trames.  —  21.  E  cumJhesu  agues  ditas  aquestas  causas  fo 

1040  torbatz  per  esperitz.  e  testimoniiec  e  dis.  Verament.  uerament 
die  a  uos.  que  us  de  uos  me  trazira.  [OB'"  2]  —  22.  Adoncas 
esgardauan  entre  lor  li  decipol  doptant  de  quai  o  dizia.  — 
23.  Adoncas  era  repausantz  us  dels  decipols  od  lui  el  peisz 
de  Jhesu  lo  quai  ama[ual  .Jhosu. — 24.  Adoncas  senecad  aquest 

1015  Simon  Peire  e  dix  a  lui.  demanda  li  quais  es  de  quai  o  ditz. 
—  25  Em  per  aisso  eo  el  fos  repausantz  sobrel  peisz  de  Jhesu 
dis  ad  el.  Senher  quais  es?  —  26.  respos  Jhesu.  aicel  es  al 
quai  eu  donarei  lo  pa  mulat.  E  co  agues  mulat  lo  pa  donec 
a  Juda  Simon  Esoariot.  —  27.  Et  après  lo  boco.  intree  en  lui 

1050  lo  diables,  adonc  dix  a  lui  Jhesu.  Aquo  que  far  u ois.  fai  o 
tost. — 28.  Mais  aisso  degus  no  saup  dels  repauzantz  (lue(s)  dis 
a  lui. — 29.  Quar  aicauti  pessauan  que  Judas  auia  las  borsas. 
que  agues  dig  a  lui  Jhesu.  cumpra  aicelas  causas  que  so  ops 
a  nos  al  dia  de  la  lesta-  o  als  paubrcs  dones  alcuna  causa.  — 

1055  30.  Adonc  co  el  agues  receubut  le  boco  issic  uiasament.  mas 
era  iioitz.  — 31.  Adonc  co  fos  issitz.  dix  Jhesu.  ara  es  es- 
clarzitz  lo  fils  del  home,  e  deus  es  esclarzitz    on  lui.  [95^  1^ 


EVANGILE    SELON    SALNT    JEAN  167 

—  32.   E  si  deus  es    esclarzitz  en  lui.    e  deus   esclarzic  lui 
en  si   meteis.  c  uiasament  esclarzic  lui.  —  '-^3.    Filheti  en- 
eara  u  pauquet  so  ab  nos.  Quiretz  me.  onaici  coma   dissi  als  1060 
Juzeus,  la  on  eu  uau  nos  no  podetz  uenir  et  a  uos  die  ara  — 

34.  mandaraent   nouol  doni  a  nos.  que  uos  ametz  entre  uos 
cnaici  co  eu  amei  nos.  que  neis  uos  uos  ametz  entre    uos.  — 

35.  En  aisso  conoisseran  luit  que  mei  decipol  csz.  si  auretz 
amor  entre  uos.  —  30.  Diss  a  lui  Simons  Peire.  Senher  on  1055 
uas?  respos  Jhesu.  la  on  ou  uau.  no  potz  mi  ara  segre.  mas 
segras  en  après.  —  37.  Dix  a  lui  Peire.  'Senher  per  que  no 
pusc  tu  segre  ara?  la  mia  armapausarei  per  tu.  —  38.  respos 
Jliesu.latua  arma  pausarafs]  per  mi?  Vcramcnt  uorament  die 

a  tu.  no  cantara  lo  gais  entro  per  très  uetz  me  abnegues.  1070 


1 .    1^  dix  a  sos  decipols.  No  sia  turbatz  lo  uostre  cor  ni  XIV 
JZ<  s'espauent-   crezetz   en   deu.    et  e  mi  crezetz.   — 

2.  e  la  maiso  del  meu  paire  so  montas  estaias.  Si  d'autra 
guiza  eu  agues  dig  a  uos.  Quar  uau  aparelhar  a  uos  loc.  — 

3.  E  si  eu  anarei.  et  aparelarei  a  uos  loc.  de  rescaps  uenrci  1075 
e  recebrei  uos  ab  mi  meteiss.  et  aqui  on  eu  so  e  uos  siatz.  — 

4.  Et  on  eu  uau  sabetz  e  la  nia  sabetz.  —  6.  Dix  a  lui 
Tomas.  senher  no  sabem  on  uas  e  cum  podem  la  nia  saber? 
—  6.  Dix  a  lui  Jhesu.  eu  so  uia  e  ueritatz  e   uida.  negus  no 

ue  al  paire,  sino  per  mi.  —  7.   Si  aguessetz   conogut  mi,  el  1080 
raeu  paire  a  certas  agratz  conogut.  e  d'aici  enant  conoisseretz 
lui.  e  uisz  lui.   —  8.   Dis  a  lui  Phelips.   senher  dcmostra  a 
nos  lo  paire,  et  auonda  a  nos.   —  9.   Dix  a  lui  Jhesu.  tant  de 
temps  so  ab  uos.  e  no  me  conogues?  Phelip  qui  ue  mi  ue  neiss 
lo  paire,  en  quai  maneira  dizestu.  demostra  a  nos  lo  paire? —   1085 
10.  No  cres  que  eu  so  el  paire  el  paire  e  mi  es?  Las  paraulas 
que  eu  parli  a  uos  de  mi  meteis  no  parli.  mais  lo  paire  e  mi 
estant/,  el  fa  las  obras.  —  11.  No  crezetz.  quar  eu  so  el  paire, 
el  paire  igB""  IJ  ese  mi?  d'autra  guiza  por  his  obras  meteissas 
crezetz.   —  12,   Verament  uorament  die  a  uos.  qui  cre  e  rai   1090 
las  obras  que  eu  fasz  et  el  fara  e  maiors  d'aqucstas  ne  fara. 
,quar  eu  uau  al  paire. —  13.  E  (jualque  causa  (luerctz  al  paire 
el  meu  nom.  el  uos  o  donara  que  sia  gloriiicatz  lo  paire  el  (il. 

—  14.  Si  alcuna  causa  me  queretz  el  meu  nom  aisso  farefi]. 

—  15.   Si  mi  aniatz  los  meusmandameniz  gardatz.     -   16.  Et  1095 


16S  DIALECTES    ANCIENS 

eu  pregarei  lo  paire,  et  autre  cofortador  dara  a  uos.  que  estia 
al)  uos  on  durableta. — 17.  esperit  [de]  ueritat  lo  quai  lo  mons 
no  ])ot  recebre.  quarno  uilui  nil  saj».  Mais  uos  lo  conoisseretz, 
quar  ab  uos  estaraet  ab  uos  sera.  — 18.  No  laissarei  uos  orphes, 

1100  uenrei  a  uos.  —  19.  Encara  u  pauquet  so  ab  uos.  el  mon  ia 
no  me  ue.  Mais  uos  uezetz  mi.  quar  eu  uiui  e  uos  uiuretz.  — 
20.  En  aicel  dia  conoisseretz  uos  qu'eu  so  el  meu  paire,  c  uos 
e  mi.  et  eu  e  uos.  —  21.  Qui  a  los  meus  mandamentz  els 
garda  aicel  es  lo  quais  amami.Mais  qui  amami  sera  amatz  del 

1105  meu  paire,  et  eu  amarei  lui.  E  manifestarei  a  lui  mi  meteiss. 
—  22.  Dis  [OB'"  2]  a  lui  Judas  no  aicel  Escariotz.  Sentier  quais 
causa  es  faita  quar  a  nos  est  manifestadors  tu  meteis.  e  no  al 
mon?  —  23.  Respos  .Jhesu  e  dix  a  lui.  Si  alcus  ama  mi  la 
mia  paraula  gardara.  El  meus  paire  amara  lui.  e  ucnrem  a  lui 

1110  et  estaia  farem  ab  lui.  —  24.  Qui  mi  no  ama.  no  garda  las 
mias  paraulas.  e  ia  paraula  que  auzit  no  es  mia.  mas  del  meu 
paire  qui  mi  trames.  --  25.  Aquestas  causas  parlei  a  uos.  ab 
uos  estantz.  —  26.  Mais  lo  cofortaire  .s.  esperitz.  lo  quai 
trametra  îo  paire  el  meu  nom.  el  uos  essenhara  totas  causas. 

1115  et  amonestara  a  uos  totas  las  causas,  quais  que  cals  eu  aurei 
ditas  a  uos.  —  27.  Patz  laissi  a  uos.  la  mia  patz  doni  a  uus 
no  en  quai  maneira  aquest  mons  la  dona,  eu  no  la  doni  a  uos. 
no  sia  torbatz  lo  uostre  cor.  ni  s'espauent.  —  28.  Auzitz 
que  eu  dissi  a  uos.  eu  uau  e  uenc  a  uos.  si  mi  amaretz  esgauzi- 

]  120  retz  uos  a  certas.  quar  eu  uau  al  paire,  quar  lo  paire  es  maier 
demi.  —  29.  E  ara  dissi  a  uos  enantz  que  sia  fait.  [96^  1] 
que  00  sera  fait  o  crezat.  —  30.  la  no  parlarei  montas  causas 
ab  uos.  quar  lo  princep  d'aquest  mon  ue.  et  e  mi  no  a  alcuna 
causa.  —  31 .  Mais  que  conosca  lo  mons  quar  eu  ami  lo  paire. 

1125  et  enaici  co  donec  mandament  a  mi  lo  paire  enaici  fa-z.  leuatz 
sus,  leuatz  sus,  anem  d'aici. 


XV  1.  "T^u  so  la  uera  uitz.  el  meus  paire  es  lo  coutiuaire.  — 
XI  2.  Totz  eissermentz  no  porta[n]tz  fruit  e  mi.  lo  paire 
tolra  de  mi.  E  totz  csl  que  porta  fruit,  lo  paire  porgara  lui.  que 
11.3()  plus  aporte  fruit. —  3.  .Ja  uos  esz  nedezi  per  laparaul[a]  que 
ou  parlei  a  uos.  —  4.  Estatz  e  mi  e  eu  e  uos.  Aici  col'eisser- 
mentz  no  pot  portar  fruit  de  si  meteis  si  no  estara  e  la  uit. 
enaici  ni  uos  sino  estaretz  e  mi.  —  5.  Eu  so  la  uitz.  e  uos  li 


EVANGILE   SELON    .-AINT   JEAN  169 

eisserment.  qui  esta  e  mi  et,  eu  eu  lui.  aquest  aporta  raout 
fruit,  (juai'  senos  mi  ro  nu  podetz  lai'.  —  6.  si  alcus  uo  estara  1135 
e  mi  sera  mes  foras  aici  co  l'eissermeatz  e  secara.  e  culhiran 
le.  e  metran  le  el  foc.  et  ardra  [96^2].  —  7.  Si  estaretz  e  mi 
e  las  mias  paraulas  estarau  e  nos.  qualque  causa  uolretz  que- 
retz.  e  sera  fait  a  uos.— 8.  Eu  aisso  es  esclarzitz  lo  meus  paire 
que  moût  fruit  aportetz.  e  siatz  fait  mei  decipol.  —  9.  Enaici  1140 
co  amec  mi  lo  paire,  et  eu  amei  uos.  estatz  en  la  mia  amôr. — 
10.  silsmeus  comandamentz  gardarez  estaretz  en  lamiaamor. 
enaici  co  eu  gardei  los  comandamentz  del  meu  paire  et  estau 
en  la  amordelui. — 11.  aquestas  causas  parlei  a  uos  quel  meus 
gaux  sia  en  uos  el  uostre  gangs  sia  cumplitz.  —  12.  Aquest  es  1145 
lo  meus  comandamentz  que  uos  ametz  entre  uos.  enaici  co  eu 
amei  uos. — 13.  Negus  no  a  malor  amor  d'aquesta.  que  s'arma 
do  alcus  per  sos  amix. — 14.  Vos  esz  mei  amie  si  faretz  aiceias 
causas  que  eu  comandei  uos. — 15.  Ja  no  die  a  uos  sers,  quar 
lo  sers  no  sap  quai  causa  fassa   lo  senher  de  lui.  Mai;^  die  a  1150 
nos  amix.  quar  totas  las  causas   quais  que  quais  auzi  del  meu 
pa[97'"  Ijire,  fi  conogudas  a  uos. —  16.  Vos  no  me  elegisz.  mas 
eu  elegi  uos.  e  pausei  uos  que  anetz.  et  aportetz  fruit,  el  uostre 
fruitz  estia.  que  cal  que  causa  quereîz  al  meu  paire  ol  meu 
nom  done  a  uos.  —  17.  Aquestas  causas  mandi  a  uos  que  uos  1155 
ametz  entre  uos.  —  18.  Sil  mons  uos  azira    sapiatz  que  enant 
de  uos  ac  mi  en  azirament.—  19.  si  fossetz  del  mon.  le  mons 
amera  aquo  que  era  seu.  mais  quar  no   esz  del  mon.  mais  eu 
elegi  uos  del  mon.  per  aisso  azira  uos  lo  mons. —  20.  Membre 
uos  de  la  mia  paraula  que  eu  dissi  a  uos.  No  es  sers  maier  de  IIGO 
so  senlior.  si  mi  encauzei-o.  e  uos  encausaran.  si-  la  mia  pa- 
raula gardero.  e  la  uostra  gardaran. — 21    Maistotas  aquestas 
causas  faran  a  uos  per  lo  meu  nom .  quar  no  conogro  lui   qui 
mi  trames,  —  22,  Si  eu  no  fos  uengutz.  e   no  agues  parlât  a 
lor.  no  agran  pecat.  mais  ara  no  an  escusament  de  lor  pecat.   1165 
—  23.  Qui  mi  azira  el  meu  paire  azira  .  —  24.  Si  eu  no  [97^  2] 
agues  obras  faitas  en  lor  las  quais  negus  autre  no  fe  no  [ajgran 
pecat.  mais   ara  uiro  mi.   et  azirero  e  mi    el  meu  paire.  — 
25.  Mais  que  sia  cumplida  la  paraula  que  en  la  leg  de  lor  es 
es&riuta.  Quar  en  azirament  agro  mi  de  grat.  —  26.  Mais  co  1170 
uenralo  cofortaire  lo  quai  eu  trametrei  a  uos  del  paire.  Tes- 
perit  de  uerita  que  issic  del  paire,  el  donoc  testimoiii  de  mi. 


170  DIALKCTES    ANCIKNS 

—  27,  E  uos   donareiz  testiiuoni.    que  del  comensameut    esz 

ab  mi. 

XVI 

1175       1.  Aquestas  causas  [)arlei"i]  a  uos  que  no  siatz  escandalizadi. 

—  2.  Gitaran  uos  do  las  sinagogas.  Mais  ue  ora  que  totz  hom 
que  uos  aucira.  sera  albirantz  de  si  seruizi  douar  a  deu.  —  3, 
Et  ai^uestas  causas  faran  a  uos.  Quar  no  conogro  lo  paire  ni 
mi.  —  -1.  Mais  aquestas  causas   parlei   a  uos.  (jue    co  uenra 

1180  la  ora  d' aquestas  causas  uos  remembre,  quar  eu  o  dissi  a  uos. 
Mais  aquestas  causas  del  comensameut  a  uos  no  dissi.  quar 
abuos  era.  — 5.  Et  ara  uau  a  lui  qui  mi  tra[97  ^Ijrnes.  e  né- 
gus de  uos  non  domanJa.  on  uas  ?  —  G.  Mais  quar  aquestas 
causas  parlei  a  uos.  tristeza  azemplic  lo  uostrc  cor. —  7.  Mais 

1185  eu  die  ucrltata  uos.  coue  a  uos  que  eu  ane.Quar  si  eu  no  irei 
lo  cofortaire  no  uenra  a  uos.  Mais  si  eu  irei.  eu  trametrei  lui 
a  uos.  —  8.  E  co  el  uenra repenra  lo  mon  de  pecat.e  de  drei- 
tura.  e  de  iuziui.  —  9.  De  pecat  a  certas.  quar  no  crezero  e 
mi.  —  10.   Mais   de  dreitura.  quar  uau  al  paire  e   ia   no  me 

11?0  ueiretz. —  11.  Mais  de  iuziui.  quar  lo  princeps  d'aquest  mon 
la  es  iuiatz.  —  12.  encara  ei  moutas  causas  a  dire  a  uos.  mais 
no  podetz  portar  ara.  —13.  Mais  co  sera  uengut  aicel  esperit 
de  ueritat.  essenhara  uos  tota  ueritat.  Quar  no  parlara  de  si 
meteis,  mais  qualsque  causas  auzira  parlara.  et  aquelas  causas 

1195  que  so  a  uenir  anunciara  a  uos.  —  14.  El  me  esclarzira.  quar 

del  meu  reccbra.  et  anunciara  a  uos.  —  15.  Totas  las  causas 

■  que  a  lo  paire,  mias  so.Per  aisso  dissi, quar  del  meu  recebra. 

et  anunciara  a  uos. —  16.  V  pauquete  ia  no  me  ueiretz.  e  de 

rcscaps  u  [97"^  2]  pauquet  e  ueiretz  me.  quar  uau  al  paire. — 17. 

1200  Adoncasdixero  dels  decipols  de  lui  entre  lor.  Qui  es  aisso  que 
ditz  a  nos.  u  pauquet  e  no  me  ueiretz.  e  de  rescaps  u  pauquet 
e  ueiretz  me,  quar  uau  al  paire?  — 18.  Adoucas  dizian.  que  es 
aisso  que  ditz  u  pauquet?  no  sabem  que  parla.  —  19.  Mais 
conoc  Jhesu  quar  uolian  lui  enterogar.  e  dix  ad  els.  d'aisso 

1205  queretz  entre  uos.  quar  dissi  u  pauquet  e  no  me  ueiretz.  e  de 
rescaps  u  pauquet  ueiretz  me  ?  — 20.  Verament  uerament  die 
a  uos  que  uos  ploraretz  e  planheretz.  mais  lo  mous  s'en- 
gauzira.  mais  uos  seretz  contristat.  mais  la  uostra  tristeza 
tornara  en  gaug. —  21.LaleaHia  co    efanta  a  trisicza    quar 

1210  ue  la  ora  de  lei.  mas  co  aura  crantaft]  rel'ant.  ia  no  li  membra 


EVANGILE    SELON    SAINT    JHAN  171 

la  dolor  per  le  gaug.  car  Totn  es  natz  el  mon.  —  22.  Et  eni 
peraisso  uos  ara  acertas  auetz  tristeza.Mais  de  rescapsueirei 
nos  el  uostre  cor  esgauzira  se.  el  uostrc  gaug  negus  no  tolra 
de  uos.  —  23.  Et  en  aicel  dia  mi  no  [jrcgaretz  alcuna  causa. 
Veramentuerament  die  a  uos.  [98"^1]  Si  alcuna  causa  queretz  121.5 
al  paire  el  meu  nom.  donara  o  a  uos- —  24.  Entro  ara  no  que- 
riss  el  meu  nom  alcuna  causa,  queretz  ereceb[r]etz  quel  uostre 
gaug  sia   [)1l;s.  —  25.  À([uestas   causas  parlei  a  uos  en  sem- 
blansas-  ue    ora  cuni    ia  no  parlarei  a  uos  en  semblansas. 
mas   a  pales  anociarei  a  uos  del  meu  paire.  —  20.  En  aicel  i's20 
dia  queretz    el  meu   nom.  e  no  die  a  uos  quar   eu  pregarei 
lo  meu  paire  de  uos.  —  27.  quar  el  metcis  lo  paire  ama  uos. 
quar  uos  me  ametz.  e  crezetz  que  eu  issi   de  deu.  —  28.  Eu 
issi  del  paire  e  uengui  el  mon.  de  reseaps  laissi  lo  mon  e  uau 
al  paire.  —  29.  Dissero  a  lui  sei   decipol.  Yec  te  ara  parlas  1225 
azubertament.  et  alcuna  scmblansa  no  dizes   — 30.  ara  sabem 
que  tu  saps  totas  causas,  e  no  es  obsa  tu  que   alcus  te  ente- 
rogue.  en  aisso  crezem  que  de  deu  issist.  —  31.  Respos  a  lor 
Jhesu.   Ara  crezetz?  —  32.  Vec  uos  ora  ue  e  ia  uenc.  que 
siatz  esparsi  us  quex  en  las  proprias  causas,  e  mi  sol  lassetz.e  1230 
noso  sols,  quarlo  paire  [98'2Jes  abmi.  —33.  Aquestas  causas 
parlei  a  uos.  que  e  mi  aiatz  patz.  El  mon  auretz  destrenhe- 
mentz.Mais  cofizatz  uos  quar  eu  uenqui  lo  mon. 

1.     A   questas  causas  parlée  Jhesu.  c  susleuatz  los  ulhs  el  XVII 
jnLcel  dix.  paire  la  ora  ue.  esclarziss  lo  teu  fil.  quel  teus  1235 
fils  te  esclarzisca. — 2.  En  aiei  co  donest  alui  poze.sta[tj  de  tota 
carn.  que  tôt  aeo  que  donest  a  lui  done  a  lor  uida  durabla.  — 
3.  Mais   aquesta  es  la   uida  durabla  que  conoscan  tu  sol  uer 
deu.  el  quai  tu  tramezist  .Jhesu  Crist. — 4.  Eu  te  esclarzi  so- 
bre terra,  la  obra  acabei  la   quai  donest  ami.  que  eu  fasza. —  1240 
5.  Et  ara  clarifica  me   tu  paire  uas  tu  meteiss  de  la  clartat  la 
quai  eu  agui  enantz  quel  monsfos  uas  tu.  —  ô.  Eu   manifestei 
lo  teu  nom  als  homes  los  quais  donest  a  nii  del  mon.  Teu  eran. 
e  donest  los  a  mi.  e  la  tua  paraula  gardero.  —  7.  Ara  conogro 
que  totas  las   causas  que  donest  a  mi  de  tu  so.  —  8.  quar  las  l24o 
'paraulas  que  donest  a  mi,  donei   ad  els.  et  eli  receubro  e  co- 
nogro uerament  [98^  1]  que  eu  issi  de  tu.  e  crezero  que  tu  me 
tramezist.  — 9.  Eu  pregui  per  lor,  no  pregui  po'  lo  mon.  mais 


172  DIALECTES    ANCIENS 

jior  aquestz  que  donest  a  mi,  quar  teu  so.  — 10.  e  las  mias 
1250  causas  totas  so  tuas,  e  las  tuas  so  mias.  e  so  csclarzitz  en  els. 
—  11 .  e  ia  eu  no  so  el  mon.  et  aquesti  so  el  mon.  et  eu  uenc 
a  tu.  Paire  sanhs  garda  aicels  el  teu  nom  los  quais  donest  a 
mi.  que  sian  una  causa  enaici  co  e  nos. —  12.  Co  eu  fos  ab  lor 
eu  gardaua  els  el  teu  nom.  los  quais  donest  a  mi  gat-dei.  e 
1255  negus  de  lor  no  peric.  si  no  lo  lilsdeperdicio.  que  la  scriptura 
sia  cumplida.  — 13.  Mais  ara  uenc  a  tu.  et  aquestas  causas 
p?.rli  el  mon.  que  aian  lo  meu  gaug  cumplit  en  lor  meteisses. 
— 14.  Eu  donei  ad  els  la  tua  paraula.  el  mons  ac  los  en  azi- 
rament.  quar  no  so  del  mon.  enaici  co  eu  no  so  del  mon. —  15. 

1260  Not  pregui    que   los  tolas  del  mon.  Mais    quels   gardes  de 

mal.  — 16.  del  mon  no  so.  aici  coma  eu  no  so  del  mon.  — 17. 

Paire   fai   els  sanhs   e   ueritat.  la   tua  paraula  es  ueritatz. 

9S^  2]  — 18.  Enaici  coma   tu  me  tramezist  el  mon.   et  eu 

tramesi  els  el  mon. — 19.  E  perlor  sanctifiqui  mi  meteiss.  que 

1265  sian  eli  sanctificat  e  ueritat.  —20.  Mais  no  pregui  tant  sola- 
ment  per  aquestz.  mais  neiss  per  aquels  que  so  crezedor  per 
!a  paraula  de  lor  e  mi.  — 21.  que  tuit  sian  una  causa,  enaici 
co  tu  paire  e  mi  et  eu  en  tu.  que  elisian  una  causa  e  nos.  quel 
mons  creza  que  tu  me  tramezist.  — 22.  Et  eu  la  clartatlaqual 

1270  donest  a  mi  donei  ad  els.  que  sio  una  causa  aici  co  tios  em 
una  causa.  —  23.  Eu  en  lor  e  tu  e  mi.  que  sian  consumadi  en 
.i .  el  mons  conosca  que  tu  mi  tramezist-  e  amest  los  enaici 
co  e  mi  amest.  — 21.  Paire  los  quais  donest  a  mi.  uulti  que 
aqui  on  eu  so.  et  eli  sian  ab  mi.  que  ueian   la  mia  clartat   la 

1275  quai  donest  a  mi.  quai-  tu  amest  mi  denant  Testabliment  de! 
mon.  —  25.  Paire  iustz  el  mons  no  te  concc.  mais  eu  te  cono- 
gui.  et  eli  conogro  que  tu  mi  tramezist.  —  26.  e  fia  lor  co- 
noisser  lo  teu  nom.  e  faiei  conoisser  que  Tamistatz  ab  la 
(|ual  me  amest  sia  en  [99""  1]  lor  et  e)i  en  els. 

XVIIÏ 

1280     1.  pinni  .Ihesuagues  ditas  aquestas  causas  issic  ab  los  sens 

\j  decipols  otra  lo  riu  de  Cedron.  on  era  ortz.  el  quai 

iiitrec  cl  c  li  decipol  do  lui.  —  2.  Mais  sabia  Judas  que  trazia 

lui  le  loc.  quar  souendeirament  s'era  aiustat  Jhesu  la  ab  sos 

decipols.  —  3.  Adonc  Judas  co  aguos  rcceubuda  la  cumpanba. 

1285  c  delsauesques  e  dels  Furiseus.  e  siruentz.  uonc  la  ab  lanternas 
et  ab  falhas  et  ab  armas.  —  4.    Em  per  aisso  Jhesu  sabentz 


EVANGILE    SELON    SAINT   J\L\K  173 

totas  las  causas  que  a  uenir  eran  sobre  lui.  issic  c  dis  ad  cls. 
quai  queretz  ?  —  5.  resposoi'o  a  lui.  Jhesu  Na/.areu.  dis  a  lor 
Jhesu  :  Eu  so.  mas   estaua  Judas  (jue  trazia  lui  ab  ois.  — (>. 
Adoncas  depuiss  que  dix  ad  els.  eu  so,  anero  arreire.    c   ca-   1290 
zéro  en  terra. —  6.  Em  per  aisso   de  rescaps  enteroguec  los. 
quai  queretz?  Mais  eli  dixero.  Jhesu  Nazareu.  —  8.  Respos 
Jhesu.  Eu  dissi  a  uos  quar  eu  so.  per  aisso  si  mi  queretz  laissatz 
aquestz  anar.  —  9 .  que  la  paraula  de  lui  sia  cumplida  que  dix . 
quar  los  quais  donest  ami.  no  perdei  alcu  [99''2]  d'ols  —  10.   1295 
Adonc  Simo  Peire  auentz  glazi  traiss  lo.  e  fcric  lo  siruent  del 
auesque.  e  trenquec  l'aurelha  de  lui  destra.  mais  eranoms  al 
siruent  Malchus.  - 11.  Adonc  dix  Jhesu  aPeiro.  metlo  teu  glazi 
elacouteleira.  lo  heure  que  donecamilopaircno  uolsque  eulo 
beua?  —  12.  Adoncas  la  cumpanha  eltribuner  e  li  siruent  dels  IciOO 
Juzeus  essoras  presero  Jhesu  e  liero  le. — 13.  etamenero  le  ad 
Aunas  primeiramont.   mas  era  sogres  de  Caifas  lo  quais  era 
auesques  d'aicel  an. —  14.  Mais  era  Cajfas  que  auia  donat  lo 
cosselh  als  Juzeus.  quar  coue  .i.  home  morir  per  lo  poble.  — 
15.  Mais  seguia  Jhesu  Simon  Peire  o  l'autre   decipol.    mais  lo  1305 
tlecipol  aicel  era  conogutz  al  auesque .  et  intrec  ab  Jhesu  o  la 
cort  del  bisbe. —  10.  mas  Poire  estaua  al  uss  déferas.  Adon- 
cas issic  lo  decipol  autre  lo  quais  era  conogutz  al  bisbe.  e  dis 
ala  porteira  e  mes  dinz   Peire. — •  17.  Adoncas  dix  a  Peire  la 
siruenta  porteira,  doncas  e  [99^1]  tu  est  dels  dccipols  d'aquost  1310 
home?  dis  el.  no  so.  —  18.  Mais  estauan  li  siruent  c  li  ministre 
a  las  brazas.  quar  fregs  era  e  calfauan  se .  mas  era  ab  lor  Peire 
estantz  e  calfantz  si.  —  19.  La  doux  Tauesqucs  enteroguec  Jhesu 
dels  sous  decipolse  de  la  doctrinadc  lui. — 20.  respos  alui  Jhesu. 
Eu  a  pales  parleialmon.  ou  totas  oras  esscnhei  e  la  sinagoga,    1315 
et  el  temple,  on  tuitli  Juzeu  s'aiustero  et  en  rescost  no  parlci 
alcuna  causa. — 21.  per  que  me  demandas?  demanda(s)  ad  aicels 
queauziro  que  parlei  ad  ois.  uecte  eli  sabo  quais  causas  dissi 
eu. —  22.  Mas  co  aquestas  causas  agues  ditas.   us  denant  es- 
tantz dels  siruentz  donec  gautada  a  Jhesu  dizentz.  Enaici  rcs-   1320 
pondes  al  bisbe?  —  23.  Respos  a  lui  Jhesu.  si  mal  parlei  dona 
testimoni  del  mal,  mais  si  be  parlei  per  quem  batz?  —  24.  E 
trames  le  liât  Annas  a  Cayfas  Tauesque .  —  25 .  Mais  era  Simo? 
Peire  estaniz  o  calf;intz  si.  adoncas  dixero  ii  lui.  doncas  c    tu 
est  dels  decipols  de  lui?  desnegucc  el  [99v2j    e  dix.  no  so.  —  1320 

14 


174  DIALECTES    ANCIENS 

20.  dix  us  (lois  siruciitzdel  auesque,  cozis  de  lui  del  quai  tren- 
quec  Poire  Taurellia.  doncas  eu  [no]  ui  tu  e  Tort  ab  lui? — 27. 
Adoiicas  de  resoaps  Peire  deneguec.  e  uiasament  lo  gais  can- 
tec. —  28.  Adoncas  amenero  Jhesu  aCajfas  elprebostat.  mais 

1330  era  matis.  eteli  no  intrero  el  prebostat.  que  no  fosse  laissadi. 
mas  que  raangesso  la  Pasca. —  29.  Adonc  issic  Pilât  a  lor  fo- 
ras e  dis.  quai  acusacio  aportatz  encontra  aquest  home?  — 
30.  respoailero  e  dixero  a  lui.  si  aquest  no  fos  malfazeire. 
nos  no  agram  luiliurat  a  tu.  —  31 .  Adoncas  dix    a  lor  Pilât. 

1335  recebetz  le  uos  e  segon  la  uostra  leg  iuiatz  le.  .\donc  dixero 
a  lui  li  Juzeu.  a  nos  no  coue  aucire  alcu.  —  32.  que  la  pa- 
raula  de  Jhesu  foacumplida  que  dis.  signifîcantz  per  quai  mort 
fos  moridors. — 33.  Adonc  inti'ec  de  rescaps  Pilât  el  prebostat. 
et  apelec  Jhesu  e  dis  a  lui.  Est  tu  reis  dels  Juzeus  ?  —  34.  E 

1340  respos  Jhesu  e  dix.  de  i^lOO""  Ij  tu  meteiss  dizes  aisso  o  autri 
disseroa  tu  de  mi?  —  35.  respos  Pilât,  doncas  so  eu  Juzeus? 
la  tua  gentz  e  li  teu  auesque  te  liurero  a  mi,  que  fist? —  36. 
Respos  Jhesu  e  dis  a  lui.  lo  meus  règnes  no  es  d'aquest  mon. 
si  d'aquest  mon  fos  lo  meus  règnes,  li  mi  siruent  a  certas  ten- 

1345  soneran  que  eu  no  fos  liuratz  als  Juzeus.  mais  aras  lo  meus 
règnes  no  esd'aici.  —  37.  Em  per  aisso  dis  a  lui  Pilât,  doncas 
est  tu  reis?  respos  Jhesu.  Tu  dizes  quar  eu  so  reis,  eu  en  aisso 
nasquei  e  az  aisso  uengui  el  mon .  que  eu  done  testimoni  a  la 
ueritat(z).  totz  aquel  que  es  de  la  ueritat  au  la  mia  uotz- — 38. 

1350  ditz  a  lui  Pilât,  que  es  ueritatz  ?  E  co  aisso  agues  dig,  de  res- 
caps issic  als  Juzeus  e  dix  a  lor.  Eu  no  atrobi  en  lui  alcuna 
causa, — 39,  Mais  costuma  es  que  eu  laisse  a  uos  .i.  ela  Pasca. 
Voletz  doncas  que  uos  laisse  lo  rei  dels  Juzeus  ?  —  40.  Adonc 
cridero  tuit  de  rescaps  dizentz.  no  aquest  mas  Barraban.  Mais 

1355  era  il00''2(  Barraban  lai re. 

XIX  1.  Adonc  em  per  aisso  Pilatz  près  Jhesu.  el  batec. —  2  e  li 
caualer  plegantz  corona  d'espinas  pausero  la  el  cap  de  lui.  et 
ab  uestinienta  uermelha  reuironero  lui.  —  3.  e  uenian  az  el  e 
dizian.  deus  te  salue  reis  dels  Juzeus.  e  dauo  a  lui  gautadas. 

J360  —  4.  De  rescaps  issic  Pilatz  foras  e  dis  ad  els.  uec  uos  eu 
ameni  a  uos  lui  foras,  que  conoscalz  que  eu  no  atrobi  alcuna 
causa  en  luj.  —  5.  Adoncs  Jhesu  issic  portantz  corona  d'es- 
pinas  e  la  uestimenta  uermelha    e  diz  a  loi'.  Vec  uos  Tome. — 


EVANGlLld    SELON    SAINT    JEAN  175 

0.  Adoncas  co  aguesso  uist  lui  li  auesque.  c  li  soruent.   cri- 
(lauan  dizontz .  Criicifica  crucificale.  disalor  Pilatz.  resebetz  13G5 
le   uos   e   ci'ucificatz   lo.  quar  eu  no  trobi  ocaizo  en  lui.  — 

—  7.  respondero  a  lui  li  Juzeu.  nos  auem  leg  e  segon  nostra 
leg  deu  morir  quar  se  te  tiis  de  deu.  —8.  Em  per  aisso  co  agues 
auzit  Pilât  aquesta  [)araula.  maiorinent  temec.  —  \K  et  intrec 

ol  pi'ebostat  de  rescaps  e  dis  [100"^1]  a  Jhesu.  don  est  tu?  1370 
mais  Jhesu  no  respos  a  lui.  —  10.  Adonc  dix  a  lui  Pilatz.  A 
mi  no  parlas?  no  saps  que  eu  ei  pozestat  crucificar  tu,  et  ei 
pozestat  laissar  tu  ?  —  11.  respos  a  lui  Jliesii.No  agras  contra 
mi  alcuna  pozestat.  sino  fos  donat  a  tu  desobre.  per  aisso 
aquel  que  me  liurec  a  tu.  a  maior  pecat. —  12.  E  d'aqui  enant  1375 
querria  Pilaz  laissar  lui.  mais  li  Juzeu  cridauan  dizent.  si 
aquest  laissas,  no  est  amix  de  César,  totz  aquel  que  se  fa 
reis  contraditz  a  César .  —  13 .  Em  per  aisso  co  Pilatz  agues 
auzidas  aquestas  paraulas.  amenée  foras  Jhesu.  e  sec  el  tri- 
bunal, el  loc  que  es  ditz  Licostratos.  mas  en  ebraic  Gabbata.   1380 

—  14.  mas  era  lo  uendres  de  Pascha.  enaici  coma  la  ora 
seizena.  e  dis  als  Juzeus.  Vec  uos  lo  uostre  rei.  —  15.  Mais 
eli  cridauan.  Osta,  osta,  cruciflca  le.  dix  a  lor  Pilât,  lo  uos- 
tre  rei   crucificarei?    respondero    li    bisbe.  No  auem   rei   si 

no  [lOO'^  2]  César.  —  16.  Em  per  aisso  adonc  lo  liurec  ad  els  1385 
que  fos  crucificutz.  Mais  receubro  Jhesu  e  menero  le  foras. 

—  17.  E  portantz  asi  la  erotz  issic  en  aicel  loc  que  es  ditz 
Caluaria.  et  en  ebraic  Golgota.  —  18.  on  lo  crucifîquero.  et 
ab  lui  autre?  dos.  desza  e  desza.  mas  e  meg  Jhesu. — 19.  Mais 
cscrius  Pilatz  le  titol.  e  pausec  sobre  la  crotz.  mais  era  la  1300 
scriptura.  Jhesu  Nazareus  reis  dels  Juzeus,  —20.  Em  per  aisso 
mouti  dels  Juzeus  ligiro  aquest  titol,  Quar  prop  la  ciutat  era 

le  loc  on  fo  cruciiicatz  Jhesu.  mais  era  escriut  on  ebi^aic.  et 
on  grec,  et  en  lati. —  21.  Em  per  aisso  dizian  a  Pilât  li 
auesque  dels  Juzeus,  No  uulas  escriure  reis  dels  Juzeus.  mas  1395 
quar  el  dix.  reis  so  dels  Juzeus.—  22.  respos  Pilât,  aquo  que 
escriussi  ei  escriut.  — 23.  Adoncas  li  caualer  co  aguesso 
crucificat  lui.  presero  las  uestimentas  de  lui.  e  fero  .iiii. 
partz.  ad  un  quec  cauaor  la  part,  e  la  gonela.  mais  era 
la  gonela  senes  [lOl'l]  cozedura  desobre  essems  tescuda  1 100 
per  tôt.  —  24,  Em  per  aisso  dixero  entre  lor.  no  la  esqui- 
cem.   mas  gitem   sort  d'ela  de   quai   sia.    que  la  escriptura 


17S  DIALKCTES    AîsClEKS 

fos  cumplida  dizentz.  Partiro  las  mias   uestimentas  asi.  et  el 
iiHMi  uestir  gitero   sort,   E  li  cauacr  a   certas  fero  aquestas 

1405  causas.  —  25.  Mais  estaua  dauaut  la  crotz  de  Jhesu  la  maire 
do  lui.  e  la  sor  de  la  maire  de  lui  Maria  Cleophe.  e  Maria 
Macdalena.  — 26.  Adonc  co  Jhesu  agues  uista  la  maire  el 
decipol  estant  lo  quai  amaua.  ditz  a  la  sua  maire,  femna 
uec  te  lo  teu  fil.—  27.  d'aqui  en  dreit  ditz  al  decipol.  Vec  te 

1 110  la  tua  maire,  e  d'aicela  ora  receub  lei  lo  decipols  e  sua.  — 
28 .  Apres  aquestas  causas  Jhesu  sabentz  que  ia  totas  causas 
so  cosumadas.  que  fos  cossumada  la  scriptura.  dix.  Sedegi. 
—  29.  Adoncas  era  us  uaissels  pausatz  pies  de  uinagre.  mais 
eli  la  spongia  plena  de  uinagre.  ab  hisop  en  auiro  pansant 

1415  ofriro  [101'2]  a  la  boca  de  lui. —  30.  Em  per  aisso  co  Jhesu 
agues  près  lo  uinagre  dis.  cosumat  es.  Et  enclinec  lo  cap 
fe]  liurec  l'esperit. — 31.  Em  per  aisso  11  Juzeu.  quar  erauen- 
dres.  que  no  remazesso  e  la  crotz  li  corsi  el  sabte.  quar  era 
grans  aicel  dia  del  sabte.  preguero  Pilât  que  fosso  fraitas  las 

1420  coissas  de  lor  els  osteso.— 32. Adonc  uengro  licauaer.e  frais- 
sero  a  certas  las  coissas  del  primer  e  de  l'autre  que  fo  cruci- 
licatz  ab  lui.  —  33.  Mas  a  Jhesu  co  fosso  uengudi  e  uiro  lo 
mort  nol  fraissero  las  coissas  de  lui.  —  34.  mais  .us  dels 
cauaers  ab  lansza  uberc  lo  costat  de  lui.  e  uiasanient  issic 

1425  sanx  et  aiga. —  35.  e  lo  quais  o  ui  douce  testimoni.  e  uers 
es  testimonis  de  lui.  el  sab  que  ueras  causas  ditz.  que  e 
nos  crezatz.  —  36.  Quar  aquestas  causas  so  faitas.  que  la 
escriptura  fos  cumplida.  Oss  no  peceiaretz  de  lui. —  37.  E 
de  rescaps  autra  escriptura.  ueiran  el  quai  io)trafiquero.,  — 

1430  38.  Mais  après  aquestas  causas  preguec  Pilât  Joseph  d'Ar- 
[101  ^' IJraathia  em  per  aisso  que  fos  decipols  de  Jhesus. 
et  en  rescost  per  paor  dels  Juzeus.  que  prizes  lo  cors  de 
Jhesu.  et  autreiec  Pilatz.  Adoncas  uenc  e  près  lo  cors  de 
Jhesu. —  39.  Mais  uenc  Nicodemus  que  era  uengutz  a  lui  de 

1435  noitz  a  Jhesu.  primeirament  aportantz  mestura  de  mirra  e 
d'aloes.  aicicoraa  .c.  liuras. —  40.  Adoncas  receubro  lo  cors 
de  Jhesu.  e  liero  lo  de  toualas  ab  onhcmentz.  enaici  coma  es 
costuma  a  Juzeus  scbclir. —  41 .  mais  era  el  loc  on  fo  crucifi- 
catz  ort  et  en  Fort  monimentz  nous,  el  quai  encara  alcu  no  fu 

1440  estât  pausatz. —  42.  Adoncas  aqui  per  Taparelhamentiz)  dels 
Juzeus.  quai-  deiosta  era  lo  monimentz.  pausero  Jhesu. 


EVANGILE   SELON    SAINT    JEAN  l77 

1 .  ll/f'^i'^  on  .i,  del  sabto  Maria  Macdaleiia  uonc  raati  co  en-  XX 
IVl  earafosso  tenebras  al  moniraent.  e  ui  lapeira  ostada 
del  monimcnt. —  2.  Per  aisso  correc  e  uenc  a  Simon  Peire  et 
a  l'autre  decipol  lo  quai  amaua  Jhesu,  e  dis  ad  els.  portero  lo  1445 
meu  senlior  dol  moniment.  e  no  sabem  on  lo  pausero.  — .'!. 
Adoncas  issic  Peire  et  aicel  autre  decipol.  e  ueniiTo  [101^2] 
al  moniment.—  4.  Adonc  corian  ili  doi  essems.  et  aicel  autre 
decipol  dauant  correc  plus  tost  que  Peire  e  uenc  primers    al 
moniment. — 5.  E  co  se  fos  enclinatz.  ui  pausadas  las  toualas.  1450 
em  per  o  no  intrec. — 6.  Adonc  uenc  Simon  Peire  seguentzlui. 
et  intrec  el  moniment.  e  ui  las  toualas  pausadas  ^-7.  el  suzari 
que  auia  estât  sobrel  cap  de  Jhesu.  no  ab  las  toualas  pausa- 
das. mas  a  part  euolopadas  en  un  loc.  —  8.  Adonc  intrec   et 
aicel  decipol  ([ueera  uenguz  primers  al  moniraent  e  ui.  e  cre-  1455 
zec.  —  9.  Quar  encara   no  sabia  la   scriptura  quar  couenia 
resucitar  dels  mortz.  —  10.  Adoncas  anero    de  rescaps  li  de- 
cipol a  lor  meteisses.  —  11 .  Mais  Maria  estaua  al  moniraent 
déferas  plorantz.  Adonc  domentro   que  plores.  enclinec  se  et 
esgardec  el  moniment.—  12.  e  ui  .ii.  anyels  en  blancas  uesti-  1460 
mentas  sezentz  .i.  al  cap  e  .i.  als  pes  on  auia  estât  pausatz  lo 
cors  de  Jhet,u,  —  13.  ili  dizian   a  lei.  femna  per  que  ploras? 
lo  quai  queres?  dix  ad  els.  Quar  portero  lo  meu  senhor.  e  no 
sei  on  lo  pausero. — 14.  Co  agues  ditas  [102'^1]  aquestas  causas 
tornada  es  arreire.  e  ui  .Jhesu  estant,  e  no  sabia  que  Jhesus  1465 
fos.  — 15.  dis  a  lei  Jhesu.  femna  per  que  ploras?  lo  cal  queres? 
ela  azesmantz  que  fos   Tortolas.  ditz  a  lui .  senhor  si  tu  l'en? 
portest  digas  o  a  mi  on  le  pausest.  et  eu  pendrei  le.  —  16.  e 
dix  a  lei  Jhesu.  Maria  tornada  quai  queres?  et  ela  dis  a  lui. 
rabi  lo  quai  es  dig  maestre. —  17.  Dix  a  lei  Jliesu.  nom  uulhas  1470 
tocar.  quar  encara  no  pugei  al  meu  paire,  mais  uai  als  meus 
fraires.  e^digas  a  lor.  Eu  pugi  al  meu  paire,  étal  uostre  paire, 
ai  meu  deu  et  al  uostre  deu.  —  18.    Venc   Maria  Macdalena 
anociantz    als  decipols.  quar  eu  ui  nostre  senlujr.  et  aquestas 
causas  dix  à  mi.  —  19.  Em  per  aisso  co  fos  sers  en  aicel  dia  1475 
en  (la)  u  dels  sabtes.  e  las  portas  fosso  clausas  aqui  on  li  deci- 
pol cran  aiustat  per  paor  dels  Juzeus.  uenc  Jhesu  et  estec  e 
hieg  e  dis  ad  els.  Patz  sia  a  nos.  —  20.  Co  agues  aquesta  causa 
dita  demostrec  ad  els  las  mas  el  costat.  Adoncas  se  enfl02''2;- 
gauziro  li  decipol  uist  lo  senhor.  —  21.  em  per  aisso  dix  ad  1480 
els  de  rescaps.  Patz  sia  a  uos.  Enaici   coma  lo  paire  me   tra- 


i:S  DIALECTES    AKCIINS 

mes,  et  eu  trameti  uos. — 22.  Co  aquestas  causas  aguesditas. 
espirec  e  dix  ad  els.  reccbetz  .s.  esperit.  —  23.  dels  quais  per- 
donaretz  los  pecatz  so   perdonat  ad  els.  e  dels   quais  los    re- 

1485  tenretz  so  retengut(z).  —  24.  Mais  Tomas  us  dels  .xii.  lo  quais 
es  ditz  nocrezentz  no  era  ab  lor  quan  uenc  .Jhesu.  —  25.  Em 
per  aisso  dixero  a  lui  li  autre  decipol.  nosuimlo  senhor.  Mais 
cl  dix  al  dels.  Si  eu  no  ueirei  e  las  mas  de  lui  la  ficadura  dels 
claucls.  c  si  no  metrei  lo  meu  dit  el  loc  dels  clauels.  e  si   no 

1490  mctroi  la  mia  ma  el  costat  de  lui  no  creirei.  — 26.  Etenapres 
.viij.  dias  de  rescaps  eran  li  decipol  de  lui  dedintz  et  Tomas  ab 
els.  Venc  Jhesu  e  ui  las  portas  clausas.  et  estec  e  meg  e  dix. 
Patz  sia  a  uos.  —  27.  d'aqui  endreitditz  a  Tomas.  aporta  de- 
dinz  lo  teu  did  za.  e  ueias  las  mias  mas.  et  aporta  la  tua  ma. 

1495  e  met  [102vl]  el  meu  costat.  e  no  uullias  esser  encrezols.  mas 
fizels. — 28.  respos  Tomas  e  dix  a  lui.  lo  meussenher  el  meu[s] 
deus. —  29.  dix  ad  el  .Jhesu.  Quar  tu  me  uist,  Tomas,  crezest. 
bonauradi  li  quali  no  me  uiro  em  crezero.  —  30.  Moutas  a 
certas  autras  signas  fe  Jhesu  en  esgardament  de  sos  decipols. 

1500  las  quais  no  so  escriutas  en  aquest  libre. — 31.  Mais  aquestas 
so  escriutas.  per  zo  que  uos  crezatz  que  Jhesu  es  Crist  fil  de 
deu.  e  que  uos  crezent  aiatz  uida  el  nom  de  lui. 

XXI  1 .  rjinapres  aquestas  causasse  manifestée  de  rescaps  Jhesu 
Xl/a  la  mar  de  Tabaria.  mais   manifestée  se  enaici.  — 

1505  2.  Eran  essems  Simons  Peire  e  Tomas  lo  quais  es  ditz  nocre- 
zent.  e  Nathanael  lo  quais  era  de  Cana  Gai  ilea.  e  li  filh  de  Ze- 
bedeu.  [et]  autri  doidels  decipols  de  lui. — 3.  dix  ad  els  Simon 
Peire.  Eu  uau  pescar.  dixero  a  lui.  E  nos  uinem  ab  tu.  et 
issiro  e  pugero  e  la  nau-  et  en  aicela  noit  no  prezero  deguna 

1510  causa.  —  4.  Mais  fait  ia  lo  mati  estec  Jhesu  el  ribage.  Em 
per  aisso  no  conogro  li  decipol  que  fos  Jhesu.  [102^  2]  —  5. 
Adonoas  dis  ad  els  Jhesu.  Macipi  doncas  auetz  cumpanage  ? 
resposero  a  lui.  no.  —  6.  dix  ad  els.  Metetz  e  la  destra  del 
naueg  lo  ret.  et  atrobaretz.   Adoncas  mesero  lo  ret.  e  ia  nol 

1515  podian  traire  per  la  mouteza  dels  peisses.  —  7.  Adoncas 
aicel  decipol  lo  (jual  Jhesu  amaua  dix  a  Peire.  nostre  senher 
es.  E  Simons  Peire  co  agues  auzit  quel  senhor  es.  sotz  ceiss 
se  la  gonela.  quar  nuitz  era.  e  mes  se  e  mar.  —  8.  Mais 
li  autri  decipol   uengro  ab  lo  naueg.  quar  no  eran  lunh  de 

1520  terra,  mas  enaici  coma  de  .ce.    coides.  tirantz  lo  ret  dels 


EVANGILE    SELON    SAINT   JEAN  179 

peisses.  —  9.  Em  per  aisso  depuiss  que  foro  deisseiidut  en 
torra   uiro  las  brazas  pausadas  el    peiss  desobre  pausat   el 
pa.   —  10.  dix  ad  els  Jliosu.  Aportatz  dels  peisses  los  quais 
ai'a  prezesz.  —  11.  Pugec   Sinioas   Peire  e  traiss  lo  ret  en 
terra   pie  de   .(;.l  iij .  grans  peisses.  e  co  fosso  tanti  no  es  1525 
esquizatz  lo  retz.  —  12.  ditz  Jhesu  ad  els,  Vinetz  e  maniatz 
e  negus  dels  repauzantz  no  auzaua  enterocar  lui.   tu  quais 
est?  sabentz  quar   lo  senlior  es   [lOS""  1].    —    13.    E    uenc 
Jhesu  e  près  lo  pa.  e  dona  ad  els  el  peiss  eissamcnt.  —  14.  En 
aquesta  tersza  uegada  ia  fo  manifestatz  Jhesu  als  seus   deci-  1530 
pois  co  agues  estât  resuscitatz  dels  mortz.  —  15.  Adoncas  co 
aguesso  maniât  dix  a  Simon  Peire  .Jhesu.  Simon  Jouan  amas 
me   pus  d'aquestz?  dix   ad  el.  oc  senher.  tu  sabs   quar    eu 
te  ami.   dix  a  lui.  Paiss  los  meus  anhels.   —  10.  dix  a  lui 
de    rescaps.  Simon  Jouan  amas  me  ?  dix  a  lui.  oc  senher.  tu  1535 
sabs  que  eu  ami  tu.  dix  a  lui.  Paiss  los  meus   anhels.  —  17. 
dix   a  lui  a   la   terza   uegada.  Simon  Jouan  amas   me?  Con- 
tristatz  t'o   Peire   quar  dix  a  lui  a  la  terza  uegada.   amas 
me  ?  dix    a  lui.   Senher  tu   conoguist  totas  causas,  tu  sabs 
quar  eu  ami  tu.  dix  a  lui  Jhesu.  Pais  las  mias  ouelhas.  —  18.   1540 
Verament  uerament  die  a  tu.  co  tu  fosses  ioues.  te  cenhias. 
et  anauas  on  te  uolias.  Mais  cum  uelheziras.  estendras  las 
tuas  mas.  et  autre  cenhera  te.  e  menara  te  la  on  tu  no  uols. 

—  19.  Mais  aquesta  causa  dix  significantz  ab    quai  [iOS""  2] 
mort  fos  esclarzidors  deu.  — 20.  E  co  aisso  agues  dig  dix  a  1545 
lui.  seg  me.  E  uiratz  Peire  ui  aicel  decipol  seguent  lo  quai 
Jhesu  amaua.  lo  quais  neiss  se  repauzec  en  la    cena  sobrel 
peitz  de  lui.  e  dis.  senher  quais  es  aquel  lo  quais  te  trazira? 

—  21.  Em  per  aisso  co  Peire  agues  uist  aquest  dix  a  Jhesu. 
senher  mas  aquest  quai  causa  '  —  22.  dix  a  lui  Jhesu.  enaici  1550 
uulh  lui  estar  entro  que  eu  uenga.  quai  causa  a  tu?  Tu  me 
seg.  —  23.  Em  per  aisso  issic  aquesta  paraula  entrels  fraires 
quar  aicel  decipol  no  mor.  E  no  dix  a  lui  Jhesu.  no  mor. 
Mais  enaici   uulh  lui  estar  entro  que  eu  uenga.    (jual  causa 

a  tu? —  21.  Aquest  es  lo  decipol  aicel  lo  quais  dona  testinioni  1555 
(Taquestus  causîis.  et  escrius  acjuestas  causas,  e  sabem  que 
uers  es  lo  testimonis  de  lui.  —  25.  Mais  so  autras  montas 
causas  las  quais  fe  Jhesu.  las  quais  si  sian  escriutas  per  se- 
glas.  eu  no  m'albiri  meteis  lo  mon  poder  caber  aicels  libres 
li  quali  so  escriuedors .  1560 


DIALECTES  MODERNES 


L'R  DES  INFINITIFS  EN  LANGUE  D'OC 


L'usage  d'écrire  les  r  des  infinitifs  en  ar  et  en  ir  fut  généra^ 
dans  le  midi  de  la  France  jusqu'aux  environs  de  1550.  Sous 
l'influence  de  la  prononciation  locale  de  diverses  régions,  et 
surtout  sous  celle  de  Toulouse,  d'Aix,  de  Marseille  et  de 
Montpellier,  les  quatre  villes  qui  ont  apporté  le  plus  d'élé- 
ments à  l'histoire  littéraire  des  trois  derniers  siècles,  l'habitude 
contraire  s'est  introduite  peu  à  peu.  Brueys,  Fabre  d'Olivet, 
Diouloufet,  Castil-Blaze,Bellot  (de  Marseille),  Damase  Arbaud 
et  bien  d'autres  qu'il  serait  oiseux  de  citer,  ont  maintenu  Yr, 
alors  que  Groudelin,  Michel,  Toussaint  Gros  et  l'abbé  Favre, 
l'abandonnaient.  Depuis  la  Renaissance  avignonaise,  cette 
consonne  finale  a  été  supprimée  par  les  félibres  *,  et  quelques- 
uns  sont  allés  jusqu'à  prétendre  qu'il  n'en  était  pas  resté  la 
moindre  trace  dans  la  prononciation  méridionale.  C'est  pour 
rectifier  cette  erreur  que  j'ai  relevé  çà  et  là  divers  exemples, 
choisis,  autant  que  possible,  dans  les  œuvres  des  poètes  et  des 
écrivains  que  l'absence  de  toute  préoccupation  orthographique 
met  à  l'abri  de  la  suspicion  des  linguistes. 

I.    —  R    DEMEURANT    3. 

A  propos  de  la  question  qui  m'occupe,  M.  Milâ  y  Fontanals 
a  remarqué  {Revue  des  langues  romanes,  no  du  15  juin  1877) 
qu'«  une  partie  du  catalan  occidental  prononce  comme  on 
écrivait  anciennement  »,   c'est-à-dire   qu'elle   maintient  Vr 


'  Elle  ost  encore  conservée,  mais  avec  des  rf'-serves  qui  faisaient  pré- 
voir son  proeliain  abandon,  dans  le  glossaire  du  rare  et  précieux  recueil 
des  Prouvençalo,  poésies  divei'ses  recueillies  par  J.  Roumauille,  et  précé- 
dées d'une  inlroducUon  par  M.  Saint-René  Taillandier.  Avignon,  Seguin, 
1852,  in- 12. 


L  R  DES   INFINITIFS  181 

dans  les  verbes  cant-ar  poil-<h\  mn-ir.  Il  est  vrai  qu'on  «  s'est 
demandé  si  le  catalan  devait  être  considéré  comme  un  dia- 
lecte de  la  langue  d'oc  au  même  titre  que  les  idiomes  du  midi 
de  la  France,  ou  bien  s'il  fallait  en  faire  un  genre  spécial  de 
la  famille  des  langues  romanes  '.  »  Quoi  qu'il  en  soit,  il  pourra 
paraître  intéressant  de  constater  qu'à  une  autre  des  extré- 
mités du  domaine  des  dialectes  méridionaux,  Vr  s'est  conservé 
à  l'infinitif  de  certains  verbes.  Un  ouvrage  paru  récemment  : 
Patois  des  Alpes  Cottiennes,  et  en  particulier  du  Queyras  -,  par 
MM.  le  docteur  Chabrand  et  de  Rochas-  d'Aiglun,  l'affirme 
d'une  manière  qui  ne  laisse  pas  de  place  au  doute. 

«  Dans  le  Queyras,  on  prononce  toutes  les  consonnes  finales  .  cop, 
coutel,  chaval,  chantar,  venir  ;  on  les  supprime  à  Bnançon  et  dans  les 
vallées  voisines  :  co,  coûté  chava,  clianlà,  veni  (p.  7).  » 

Bien  que  MM.  Chabrand  et  de  Rochas  ne  l'expliquent  pas. 
j'inclinerais  à  croire  que  cet  r  a  pris  une  valeur  euphonique. 

L'idiome  de  la  vallée  de  Pragelas  nous  fournit  (p.  153)  les 
exemples  suivants  : 

Al  ougiî're  désira  d'emplir  son  ventre  das  aglans  que  aniingiavou  lou 
courins  é  punun  m  en  donava.  (Traduction  de  la  j'arabole  de  V Enfant 
prodigue.) 

Attendre  é  pa  venir,  esse  a  leit  e  pa  durm'r,  servir  e  pa  agradir,  soun 
tre  chiosa  da  mûrir  (154)    (Proverbe)  ■■ 

Le  langage  d'Embrun  (157;  et  celui  de  Barcelonnette  (158) 
témoignent  des  mêmes  particularités.  On  trouve  même  dans 
celui  du  Monetier'^  des  exemples  d'une  mutation  dont  je  par- 
lerai tout  à  l'heure:  l'r  du  verbe  esser  (être)  de  l'ancienne 
langue  devenant  :;  devant  une  voyelle  : 

E  a  ne  siou  pas  dinié  d'essei-s-appela  vouostre  bol  (156). 

*  De  Tourtoulon,  Une  assemblée  nationale  au  XIII'  siècle  (  lievue  des 
langues  romanes,  avril-octobre  1871,  p.  144). 

-  Gre:îoble,  Maisonviile,  1877,  in-8'',  228  pages.  Le  Queyras  est  une 
sorte  de  bassin  fermé  de  toute  part  par  de  hautes  montagnes  II  forme 
aujourd'hui  le  canton  d'Aiguilles,  dans  l'arrondissement  de  Briançon 
,  (Haules-AIpeSj. 

3  Textes  donnés  à  MM.  Chabrand  et  de  Rochas  p;<r  M  l'abbé  Bourlot, 
curé  de  Fenestrelles. 

^  Chef-lieu  de  canton  dans  l'arrondissement  de  Briançon. 


1S2  DIALECTES    MODERNES 

II.   --    R  DEVENANT    Z 

M.  Paul  Meyer  a  le  premier  signalé  {Romania,  Ho  d'avril 
1875,  p.  181)  le  changement  de  Vr  en  z  et  du  :;  en  r  dans  les 
dialectes  de  la  langue  d'oc,  spécialement  dans  l'ancienne 
langue.  MM.  Alart,  Chabaneau,  A.  Thomas  et  Milâ  y  Fon- 
tanals  ont  ajouté  de  nombreux  exemples  à  ceux  qui  ont  été 
réunis  par  le  savant  romaniste  parisien.  Je  ne  crois  pas  ce- 
pendant qu'on  ait  relevé  jusqu'ici  des  exemples  de  1'  ?'  de  l'in- 
finitif devenant  z. 

Las  Noças  de  Jauselou  Roubi,  comédie  dauphinoise  composée 
par  M.  Richard,  vers  1816,  et  publiée  {Revue  des  langues  ro- 
manes, no  d'octobre  1875),  par  M.  Revillout,  en  offrent  de  fré- 
quents exemples  : 

Araavo  moch  trouvas  de  bouonas  qualilfis  (118). 
Ero  bien  rare  alors  de  trouvai  un  meinage  (1 18). 
E  peisso  irei  parlaz  au  père  Nicoulas  (119). 
Me  farei  cxpliqua-z-aco  deman  mati  (119). 
Li  a  (lungu  coumo  mi  per  gardas  un  secret  (121). 

Cette  mutation  de  1'?'  en  s  n'est  pas  spéciale  auDauphiné  et 
au  canton  de  Mens.  On  la  retrouve  dans  le  département  de 
la  Dordogne,  Un  long  noël  périgourdin,  publié  par  M.  Alcide 
Duverneuil  {Bulletin  de  la  Société  historique  et  ai'chéologique  du 
Périgord,  t.  III,  p.  215),  et  portant  la  date  de  1757,  en  ren- 
ferme des  témoignages. 

D'autres  pourraient  encore  être  glanés  dans  les  publica- 
tions, où  M.  V.  Smith  a  étudié,  avec  le  soin  et  la  compétence 
que  l'on  sait,  la  vieille  poésie  populaire  du  Forez  et  du  Velaj: 

Viens  couches;  avec  moi. 

[Germine  la  l'orcheronne,  Chansons  foréziennes 
—  Romania,  juillet  1872,  p.  358.) 

Va-t-en  chercher-.^-un  iirètro.    ... 

(Chants  du  Velau  et  du  Forpz.  —  Romania, 
juillet-octobre  1875,  p.  450.) 

Voulez- vous  pas  nnàz  à  la  guerra. . . 

(  Vieilles  Chansons  du  Velay  et  du  Forez    - 
Remania,  janvier  1878,  p.  70.) 


L  R    DES    INFINITIFS  IR% 

111.    —    R     I)KVKN\.\T     T 

Au  commencement  de  l'année  187(5,  j'eus  l'occasion  de 
parler  dans  la  Revue  des  poésies  provençales  d'un  habitant 
deVauvert,  nommé  Mcizonnet.  Je  ne  connaissais  alors  que  son 
poëme  burlesque  la  Saladn  dé  l'esfon  d'Escamnndre,  dont  le 
mérite  littéraire  est  au-dessous  de  toute  appréciation.  L'obli- 
geance de  M.  Perrier,  secrétaire  de  la  mairie  de  cette  ville, 
m'a,  depuis,  permis  de  lire  le  recueil  des  œuvres  provençales 
et  françaises  du  rimeur  vauverdois'.  La  mutation  de  l'r  en  t 
y  a  laissé  de  nombreuses  traces  : 

S'anet  vite  aclataf  ou  bord  d'una  muraya  (88). 

Mais  vole  revenir  à  nosles  jiouynes  gens  (88). 

Vous  vaou  coimtai  issot,  e  pioy  viroin  Jou  resta  (89). 

E  se  vos  évitai  contra  tus  la  poursuita  (93). 

Yeou  qu'ay  vis  avourtai,  hélas!  aqueslé  outouna  (93). 

Il  en  est  de  même  à  Lunel-Viel,  et  surtout  aux  environs  de 
Vendargues,  ainsi  que  l'attestent  ces  vers  extraits  d'une  pièce 
manuscrite  d'un  membre  de  la  Société,  M.  le  docteur  A.  Roux, 
de  Lunel-Yiel  : 

Encara  s'avien  lou  sourel  d'eslieu 
Per  se  rescaufaf  !  Ela  sVs  'n'anada 

Et  ce  qui  prouverait  que  ce  ^  a  pris  un  caractère  purement 
euphonique,  c'est  qu'ail  disparaît  dans  les  vers  suivants  : 

Embé  l'esperença.  ànjou  que  counsola, 
Veiran  carità  davalà  <!au  Ciel  ; 
Car  l'enfantounet  qu'a  fam,  que  tremola, 
Atrova  un  abri  jouta  soun  mantel  -. 

De  même  que  la  mutation  dauphinoise  de  ïr  en  :;,  la  mu- 
tation provençale  de  l'r  en  t  est  en  usage  en  Limousin.  Les 
poèmes  des  abbés  Sage  etLacombe,  composés  tous  les  doux  au 
dernier  siècle  et  analysés  par  M.  Noulet  dans  la  Hevue  des 
langues  romanes  {juillet  1874),  en  donnent  souvent  la  preuve 

loou  voon,  0  mo  moma,  domondaf  un  posti  ('234). 
Podou  pas  dumoui'at  en  possinço  un  moumen  (234). 

'  (Eavres  d(verses  en  français  H  en  patuis,  dont  les  sujets  sont  pris 
dans  Vaunert,  par  J.  Meizonnel,  (lit  Parisien.  Nîmes,  Houmieux,  1860  ; 
in-12,  155  pages. 

-  Poésies  communiquées  par  M.  le  docteur  Roux  lui-même. 


184  DIALECTES    MODERNES 

Des  l'enseigne  ments  qui  m'ont  été  transmis  par  M.  l'abbé  Jo- 
seph Roux,  dans  une  lettre  en  date  du  4  décembre  1875,  me 
permettent  d'ajouter  que  cette  habitude  linguistique  est  d'un 
usage  fréquent  aux  environs  de  Saint-Sjlvain  iCorrèze). 

En  ce  qui  touche  Vr  intérieur,  la  mutation  elle-même  a  été 
constatée  par  M,  Camille  Chabaneau  (  Grammaire  limousine, 
p.  278):  «  Dans  plusieurs  cantons  de  la  Haute-Vienne,  de  la 
Charente  et  de  la  Dordogne,  entre  autres  ceux  de  Rochechouart, 
Saint-Mathieu,  Confolens,  Montbron,  Montembœuf,  Bussière, 
ïr  est  remplacé  j)ar  un  l.  On  dit,  par  exemple  :  tu  beguetei, 
non  beguetem,voubcrfUctci,  i  begueten  =  tu  bus,  nous  bvmes,  vous 
bâtes,  ils  burent.  Il  en  est  de  même  dans  la  basse  Auvergne,  et 
cela  au  moins  depuis  le  XVIP  siècle,  comme  on  le  voit  dans  les 
noëls  de  cette  époque,  où  de  semblables  formes  se  rencontrent, 
par  exemple  :  faguetei,  diguetei,  coumencetoun  (Album  auver- 
gnat, p.  144).  0 

Il  est  inutile  de  faire  remarquer  que  l'on  prononce  un  d 
à  Montpellier,  et  que  l'on  y  dit  :  beguedem,  beguedes,  bègue  ■ 
doun,  etc. 

I6i  se  terminent  les  quelques  notes  que  j'ai  recueillies.  11 
serait  peut-être  utile  de  les  compléter  par  une  étude  sur  le 
langage  des  villes  où  la  prononciation  établit  des  catégories 
intermédiaires,  c'est-à-dire  celles  où,  au  lieu  de  dire  :  aimar 
un  home,  aimât  un  home,  aimaz  un  home,  on  dirait  :  aima  un 
home,  ou  encore  aima  'n  home.  Il  serait  surtout  curieux  de 
rechercher  si  la  métrique  de  la  poésie  populaire,  des  prover- 
bes, des  chants,  des  danses  et  des  contes  rhythmés,  est  favo- 
rable à  l'élision  ou  au  maintien  d'une  consonne  terminale 
quelconque.  Mais  c'est  une  étude  que  je  suis  contraint  de  re- 
mettre à  un  autre  moment. 

Alph.  Roque-Ferrier. 


A-N-ANFOS  TA  VAN 
APRÈS  vso  LEGiDo  D'Amour  e  Plour 


0  Tavan  !  ù  moun  frairc  !  ô  mestre  ! 
Ai  legi  toiin  Amour  e  Plour; 
Ai  vist  lou    malastre  falourd 
Picant  sus  ta  vido  à  grand  destre, 
E,  mai  doulent  que  se  pot  estre, 
Toun  cor  aimaire,  o  moun  amil 
Toun  paure  cor  Tai  vist  gémi  ! 

Ai  vist  toun  amo  en  tiou  sourrire, 
Pleno  das  raivcs  que  se  fan 
Quand  la  vido  as  iuels  de  Fefant, 
Fisançous  dau  premiè  zefire, 
S'anouncio  coumo  es  pas  de  dire  ; 
E  ta  flour,  au  matin  enca, 
Penjo  sus  soun  pecoul  maca! 

Adounc  l'auras  toute  viscudo 
Aquelo  fraso,  en  un  moument 

A  ALPHONSE  TAVAN 
APRÈS  LA  LEcrunE  D'Amour  e  Plour 


0  Tavan  !  ô  mon  frère!  ô  maître  !  — j'ai  lu  ton  Amour  et  Pleurs; 

—  j'ai  vu  la  lourde  malecliaiice  — frappant  sur  ta  vie  à  grands 
coups,  — et,  plus  dolent  qu'il  n'est  possible  de  l'être,  —  ton  cœur 
aimant,  ô  mon  ami!  —  ton  pauvre  cœur,  je  l'ai  vu  gémir  ! 

J'ai  vu  ton  àme  en  fleur  sourire,  —  pleine  des  rêves  que  l'on  fait 

—  quand  la  vie,  aux  yeux  de  l'enfant,  —  conQant  dans  le  premier 
zéphyr,  —  s'annonce  comme  on  ne  peut  le  dire;  —  et  ta  fleur,  au 
matin  encore,  —  penche  sur  sa  tige  meurtrie! 

Ainsi  tu  l'auras  toute  vécue — cette  phrase,  en  un  moment —  de 


186  DiAlECiES    MODRRNES 

De  désespéra  pensfimeiit 
De  ta  pliimo  lasso  nascudo  ! 
0,  d'aq.uelo  fraso  esmôugudo 
N'as  tout  soufri  lou  mau  cousent  : 
I/amour  e  lousplous  van  ensen  ! 

E,  paure  tu  !  dins  ta  man  tèuno 
Laissant  toumba  toun  front  pâli, 
Ount  —  coumo  un  trounc  d'aubo  adali 
Que  se  i'  arrapo  lou  fio  d'èuno  — 
Portes  sempre  la  lagno  tèuno, 
Sou  fas  :  —  «Oh  !  per  quanto  resou 
))  Endure  talo  pougnesou  ?. . . 

»  leu,  grand  assourga  d'ambrousio, 

»  Per  que  ma  bouco,  en  moussigant 

»  Lou  fru,  n'a  tasta  qu'amargant? 

»  Per  que  la  divo  Pouësio, 

))  Que  soun  iuel  sout  sa  bioundo  cillio 

»  Boujo  l'esclaire  e  lou  soûlas, 

»  N'a  per  ieu  qu'ancio  e  nivoulas? 

»  0  Naturo  !  de  (juanto  pasto 
»  Moun  cord'ome  l'as  gaubeja? 
»  Per  que,  dau  mau-sort  trepeja, 
»  Daii  mau-sort  que  lou  tarrabasto, 


penser  désespéré ,  —  née  de  la  plume  lasse  '  —  Oui ,  de  cette 
phrase  émue,  —  tu  as  souffert  tout  le  mal  cuisant:  —  l'amour 
et  les  pleurs  vont  enseml)le! 

Et,  pauvre  toi  !  dans  ta  main  frêle  —  laissant  tomber  ton  front 
pâli,  —  où,  comme  au  tronc  de  peuplier  blanc  —  s'est  attachée 
la  touffe  de  lierre,  —  tu  portes  toujours  ton  chagrin,  —  tu  dis  : 
«  Oh!  pour  quelle  raison  —  j'endure  une  telle  douleur?. . . 

»  Moi,  grand  altéré  d'ambroisie,  —  pourquoi  ma  bouche,  en 
mordant  —  le  fruit,  n'a-t-elle  goûté  qu'amertume? —  Pourquoi  la 
divine  Poésie,  —  dont  l'reil  sous  de  blonds  cils  —  verse  la  lumière 
et  la  consolation,  —  n'a-t-elle  pour  moi  qu'anxiété  et  nuages? 

«  0  Nature '.de  quelle  pftte — as-tu  modelé  mon  cœur  d'homme  ? 
—   Pourquoi,  piétiné   par    le    uiaiiviiis    suil,  —   K'   mauvai.s    sort 


A-K-ANFOS    TAVAN  1S7 

»  E  quand  dins  la  doulou  trebasto, 

»  El  oscampo  do  crids  ai-uts 

»  Au  mounde  eiicaro  incouneguts? 

»  Naturo,  ô  maire  descourado  ! 

»  Moun  crid  d'angouisso  es  per  Tausi 

»  Qu'  à  toun  aflat  as  vist  blasi, 

n  Souto  la  mort  e  sa  tourrado, 

»  Ma  caro  csperanço  flourado, 

»  E  que  moun  estre  entiè  se  dôu 

»  En  un  triste  resson  de  dôu? 

»  Resson  de  dèu  en  ieu  estable 

»  E  perdurable  d'aro-en-lai, 

)>  Desempici  lou  journas  tant  laid 

»)  Que,  lugubrament,  lou  matable 

»  Sounè  lou  clas  espaventable 

>)  De  mas  amours,  (jue,  lou  cor  gros, 

»  Anere,  ieu,  reboundre  au  cros  ! 

H  0  clas!  pamens  toun  memebrounze 

»  Semblé  'n  jour  souna  moun  bonur  : 

»  Bouco  sourrisento,  front  pur, 

»  Oudouso  coumo  flou  d'arounze, 

»  Coum'^ant  sous  ans  dous  cops  perounze, 

»  Ma  blanco  novio,  en  tremoulant. 


qui  le  ravage, — et,  quand  il  plonge  dans  la  douleur, —  jette-t-il  des 
cris  aigus—que  le  momie  ne  connaissait  pas  encore? 

»  Nature,  û  mère  sans  cœur!  —  mon  cri  d'angoisse^  —  est-ce 
pour  l'entendre  —  que  tu  as  vu  se  flétrir  à  ton  gré,  —  sous  la 
mort  et  sa  rigueur, —  ma  chère  espérance  vermeille,  —  et  que  mon 
èlre  entier   est  à]  geindre—  dans  un  triste  son  de  douleur  ?.  . . 

Son  de  douleur  stable  en  moi  —  et  durable  désormais, —  depuis 
le  jour  si  triste — oîi,  lugubrement,  le  battant  de  la  cloche  — sonna 
le  glas  épouvantable  —  de  mes  amours,  que  [j'allais],  le  cœur  gros, 
—  j'allais  ensevelir  dans  la  fosse  ! 

'  «  0  glas  !  pourtant  ton  mémo  bronze  —  sembla  sonner  un  jour 
mon  bonheur:  —  bouche  souriante,  front  pur, — embaumée  comme 
(leur  de  ronce,  —  comptant  ses  années  deux  fois  par  onze,  —  ma 


188  J)IALECTP;S    MODERNES 

»  M'acoumpapiu"'  vers  l'autar  blanc, 

»  E  passèn  poulido  joui'iuulo  ; 

»  E  lou  lendcmau,  matiniè, 

»  Nous  venguè  'n  ange  coucouniè, 

»  Gaio  lusiclo  safranado. . . 

»  Ai  !  (juau  ma  rendra  ma  mainado  ? 

»  Ma  femno,  Teste  de  mous  cants, 

»  E  ma  Mirelho  de  cinq  ans?   . . 

»  0  long  vel,  lieureio  nouvialo! 

w  0  tavaiolo  qu'ensajan 

))  Au  bel  efant  que  batejan! 

»  L'on  vous  caresso  e  Ton  vous  bialo  ; 

»  E  vesen  la  man  que  vous  flalo 

»  Que  quand  vous  a  fa,  sens  remord, 

«  0  vestis  blancs  !  lencôus  de  mort. 

»  La  vido  n'es  qu'un  long  mjsteri, 

»  E'nd'  el  de  trop  voulé  pensa, 

0  Poudriè  n'estre,  Dieu,  ôufensa  , . . 

>N  A  la  porto  dau  cementeri, 

»  Faguent  de  mous  plous  rebousteri,  • 

n  Veuse  d'amour,  à  moun  agrat, 

»  Vole  pleura,  pas  que  ploura!.    .» 

blancbe  fiancéo.   en  tremblant,  —  m'accompagna   vers    le   blanc 
autel. 

»  El  nous  passâmes  une  belle  journée  :  —  et  le  lendemain,  ma- 
tinal,— il  nous  vint  un  ange  caressant, —  éciaircie  gaie,   safranee... 

—  Ah!  qui  me  rerulra  ma  famille? — ma  femme,  l'inspiration  de 
mes  chants,  —  et  ma  Mireille  de  cinq  ans?. . . 

»  0  long  voile,  parure  nuptiale  !  —  ô  langes  pompeux  que  nous 
essayons  —  au  bel  enfant  que  nous  baptisons  !  —  l'on  vous  ca- 
resse et  l'on  vous  admire  :  —  cl  nous  ne  voyons  la  main  qui  vous 
file  —  que  lorsqu'elle  vous  a  transformés,  sans  remords  aucun,  — 
û  vêtements  blancs!  en  linceuls  de  mort. 

»  La  vie  n'est  qu'un  long  mystère,  —  et,  en  voidant  trop  y  pen- 
ser, —  Dieu  pourrait  en  être  oflensé. . .  —  A  la  })orte  du  cimetière, 

—  faisant  un  festin  de  mes  pleurs,  —  vcuFd'amoui-,  à  mon  gré,  — 
je  veux  pleurer,  rien  que  pleurer  !...  » 


A-N-ANFOS    TA  VAN  l«9 

O  Tavan  !  û  fraire  !  vai,  plouro  ! 

Toun  ploura  soûl  pot  t'assoula. 

Un  misteri  t'a  treboula  : 

Sabes  dounc  pas  que  la  malouro 

Vôu  lou  cor  que  truco  e  desflouro, 

Lou  vôu  capable  de  soufri 

Lou  mage  mau  lou  mai  afri  ? 

E  lou  pouëto,  aquelo  liro 
Facho  de  las  fibros  dau  cor, 
Es  causi  sempre  ;  e  soun  acord, 
Inmenso  angouisso  que  deliro,. 
Pus  forto  que  lous  cops  de  Tiro, 
Emplis  lou  mounde  embalausi 
Vido-vidanto  de  l'ausi. 

Oh!  plouro,  plouro  !  acô  n'en  costo, 
La  glorio  dau  pouëto  :  urous, 
Ascendès  lou  serre  auturous; 
Mais  escassament  à  miè-costo, 
Uno  man  traito  tras  la  costo 
Vous  sagato,  e  tenchas  lou  cira 
De  voste  bèu  sang  cremesin. 

Qu'enchau  lou  sang?  coumo  un  satire, 
De  se  despoutenta  d'afan, 


O  Tavan  !  û  frère  !  va,  pleure  !  —  ton  pleur  seul  peut  te  consoler. 
—  Un  mystère  t'a  troublé  :  —  tu  ne  sais  donc  point  que  lo  malheur 
— veut  le  cœur  qu'il  frappe  et  déflore, —  il  le  veut  capable  de  souf- 
frir—  le  mal  le  plus  grand  et  le  plus  cruel  ! 

Et  le  poète,  cette  lyre  —  faite  des  fibres  ducnnir,  —  est  toujours 
choisi;  et  son  accord,  —  immense  angoisse  qui,  dans  son  délire, — 
est  plus  forte  que  les  coups  de  la  colère,  — remplit  le  monde 
étonné  —  de  l'entendre  éternellement. 

Oh!  pleure,  pleure  !  cela  coûte  cher,  —  la  gloire  du  poète  :  heu- 
reux, —  vous  montez  la  montagne  altière;  —  mais,  à  peine  à  mi- 
côte,  une  main  traîtresse  vous  ouvre  le  côté, —  et  vous  teii,Miez  le 
faîte  —  de  votre  beau  sang  cramoisi. 

Qu'importe  le  sang.?  comme  un  satyre,  —  de  s'épuiser  en  cll'urts, 

15 


h«>  DIALECTES   MODERNES 

Qu'onchau  ?  I'  a'n  g-raiid  clialc,  m  Tavan  ! 
De  triounlla  dins  lou  martire. . . 
Oh!  pos  ploura.  Mais  de  mau-dire, 
Ui'ous  doulent,  engardo-te. 
Car  Dieu  t'a  marca  de  soun  det  ! 

Piouro  !  l'angouisso,  emb  sa  legremo, 
Deu  amansi  ramour  abrant  : 
Amai  l'aurige  brame  à  brand, 
Traguent  esglasi  e  terro-tremo, 
Quand  lou  sourel  en  braso  cremo. 
Es  bon  per  lou  front  qu'un  degout 
De  plejo  refresque  un  bricou. 

Piouro  !  e  ieu  vole  te  reçaupre, 
Vole  t'assoula  dins  mous  bras. 
Aqui,  piouro  que  plouraras  ! 
Qu'aqui,  moun  fraire,  tu  vas  saupre 
Lou  pus  grand  bonur  qu'on  pot  caupre  : 
Lou  bonur  que  i'a  d'endourmi 
Soun  mau  sus  lou  cor  d'un  ami  ! 

Albert  Arxavielo. 
Aies,  5  de  selembre  1877. 

(Languedocien,  Alais  cl  se?  environs.) 

(ju'iniporteV  11  y  a  un  grand  délice,  6  Tavan  !  —  à  triompher  dans 
Je  martyre. . .  —  Oh!  tu  peux  pleurer.  Mai.s  de  proférer  la  malé- 
iliction,  —  heurcu.\  dolent,  garde-t'en  bien, —  oar  Dion  l'a  marqué 
de  son  doigt! 

Pleure  !  l'angoisse,  de  sa  larme,  —  doitadoiicir  l'amour  brûlant: 
—  Quoi([ue  l'orage  hurle,  avec  fureur  —  jetant  l'épouvante  et  le 
frémissement, —  quand  le  soleil  embrasé  brûle, —  il  est  bon  pour  le 
front  —  qu'une  goutte—  de  pluie  rafraîchi  s. «c  un  peu. 

Pleure!  et,  moi,  je  veux  l'accueillir,  — je  veux  te  consoler  dans 
mes  bras.—  Là,  pleure  et  pleure  encore,  — i  car  là,  mon  frère,  tu 
vas  savoir  —  le  plus  grand  honheur  qu'on  peut  éprouver: —  le 
bonheur  (|u'ii  y  a  d'endonnir —  son  mal  sur  le  cœur  d'un  ami  ! 

Albert  ArtNAviELLK,. 
Aiais,  •">  septembre  t877. 


LOUS  DOUS  CANARDS  SAUVAGES 

FABLO 

Sul  bord  d'unestang,  un  cassaire 
Aviô  'gantât  dous  canardous, 
Dous  colverts,  encâ  trop  pichous 
Per  dins  Taire  segre  sa  maire 
--Que  farai  d'aqueles  aucels  ? 
Dis  lou  cassaire,  que  lous  sarro 
Al  founs  del  sac  ount  lous  embarro. 
De  que  ne  farai  ?. . .  De  simbels; 
Amb  eles  prendrai  de  dougenos 
De  canards  dejoust  mas  pantenos. 
E  s'en  fasiô  dejà'n  régal. 
Sens  musa  gagno  soun  houstal. 
Dins  la  cour,  qu'éro  rauralhado, 
Aviô  tout-just  uno  cloucado 
De  canards  de  mémo  groussoù  ; 
Trai  lous  autres  de  sa  prisoû 
E  lous  laclio  en  miech  de  la  bando. 


LES  DEUX  CANARDS  SAUVAGES 

l-ABLE 


Au  bord  d'un  étang  un  chasseur, — avait  pris  deux  jeunes  canards, 
—  deux  colverts,  encore  trop  petits  —  pour  dans  les  airs  suivre  leur 
mère.  «  Que  ferai -je  de  ces  oiseaux?  »  —  dit  le  chasseur,  qui  les 
serre —  au  fond  du  sac  où  illes  enferme. —  «Qu'en  ferai-je?...  Des 
appeaux, — avec  lesquels  je  prendrai  des  douzaines  de  canards  — 
dans  mes  pantières  »  ; —  et  il  s'en  faisait  déjà  un  régal.  Sans  tar- 
der il  gagne  sa  maison.  —  Dans  la  cour,  qui  était  entourée  de 
murailles ,  —  il  avait  précisément  une  couvée  de  canards  de 
même  grosseur  ;  —  il  tire  les  autres  de  leur  prison  —  et  les  lâche 


192  DIALECTES    MODERNES 

Que  Ions  guèito  d'un  marrit  nel, 
I  trauco  à  cops  de  becs  la  pel 
E  dins  un  cantoù  lous  emmando, 
Coumo  d'aucels  de  controbando, 
Mais  la  guerre  n'ajet  qu'un  temps  ; 
E  coumo  aviôu  prou  de  pitanso 
Per  toutes  ne  rempli  la  panso, 
Lèu  ensem  visquerou  countents. 
N'aviùu-t-i  pas  même  plumage, 
Lou  même  crit  e  lou  même  âge  ? 

Des  fourestiers  lou  pus  menut, 
Pla  rarement  restabomut; 
Ero  vieu,  aberit,  sauvage. 
Prisounier  dins  aquelo  cour, 
Tout  en  pensant  al  descampage, 
I  varalhabo,  nèit  e  jour, 
En  mitant  delà  canardalho, 
Que,  refaudido  sus  la  palho, 
L'uel  miech  tancat  e  lou  cap  bas, 
Sens  s'avisa  del  varalhaire, 
Dourmissiô  quand  manjabo  pas. 

N'aviô  pas,  s'en  manco,  lou  fraire, 
Lou  sang  ardent  del  cago-nis: 
Ero  tranquille  e  pausadis, 


au  milieu  de  la  !)andc,  —  qui  les  regarde  de  mauvais  œil,  —  leur 
perce  à  coups  de  bec  la  peau  —  et  les  renvoie  dans  un  coin,  — 
comme  des  oiseaux  de  contrebande.  — Mais  la  guerre  n'eut  qu'un 
temps,  —  et,  comme  ils  avaient  assez  de  pitance—  pour  s'en  rem- 
plir tous  la  panse,  —  bientôt  ensemble  ils  vécurent  contents  :  — 
n'avniont-ils  jtas  le  même  plumage, — le  même  cri  et  le  même  âge? 

Des  étrangers  le  plus  petit, —  qui  rarement  restait  muet, —  était 
vif,  éveillé,  sauvage.  —  Prisonnier  dans  cette  cour, —  tout  en  pen- 
sant à  s'échapper, — il  s'agitait  nuit  et  jour —  au  milieu  de  la  trou|)C 
des  canards,  —  qui,  accroupie  sur  la  paille,  —  l'œil  à  demi  formé 
et  la  tète  basse,  —  sans  faire  attention  à  son  rernue-ménage,  dor- 
mait quand  elle  ne  mangeait  pas. 

Il  n'avait  jjas.  il  s'en  faut  de  beaucoup,  le  fnro, —  lesangbouil- 


LOUS    DOUS    CANARDS  SAUVAGES  193 

E,  coumo  i  fasiô  Ijouiio  vido, 
S'acoustumabo  à  la  prisoi'i. 
L'autre  d'anâ  courre  bourrido 
Sempre  sentissiô  la  prusoi'i  ; 
E  cado  fes  qu'à  la  vesprado, 
De  canards  i)assabo  uno  ardado 
Sus  souu  cap,  qu'ausissio  lous  vièls, 
Enquiets,  sounâ  lous  jouvencels, 
Cercabo  à  prene  la  voulado 
Par  ategne  sous  coumpagnous;  ■ 
Mais  la  muralho  ero  trop  nauto, 
I  trucabo  soun  bec  sannous  ; 
L'alo  trop  flaco  i  fasiô  fauto, 
E  lou  paure  del  languiment 
Al  cor  sentissiô  lou  tourment. 
Ero  triste,  raanjabo  gaire, 
Pantaisabo  soûl  dins  un  caire  ; 
Vouliô   coumo  sous  parions, 
Navigâ  sus  la  mar  vesino, 
Dins  Testang,  à  l'cscuresino, 
Agantâ  cauquilhos,  peissous, 
Cagarauletos  c  gragnotos, 
Que  s'amagou  dins  las  canotos; 
A  soun  grat  nadâ,  cabussâ; 
Libre,  enfin,  pertout  s'espassâ. 


lant  du  culot:  —  il  était  tranquille  et  ami  du  repos  ,  —  et,  comme 
il  faisait  bonne  vie,  —  il  s'habituait  à  la  prison.  —  L'autre,  de  se 
sauver  —  éprouvait  toujours  la  démangeaison  ;  —  et  toutes  les 
fois  que,  le  soir,  —  de  canards  il  passait  une  volée  —  au-dessus  de 
sa  tète,  qu'il  entendait  les  vieux, —  inquiets,  appeler  les  jeunes, — 
il  cherchait  à  prendre  le  vol —  pour  atteindre  ses  compagnons  ; — 
mais  la  muraille  était  trop  haute,  —  il  y  heurtait  son  bec  saignant: 
— l'aile  trop  faible  lui  faisait  défaut, — et  le  malheureux,  de  l'ennui, 

—  au  cœur  éprouvait  le  tourment.  Il  était  irisle,  il  ne  mangeait 
guère,  —  il  rêvait  seul  dans  un  coin  ;  —  il  voulait,  comme  r.es  pa- 
reils,—  naviguer  sur  la  mer  voisine, —  attraper  coquilles,  poissons. 

—  escargots  et  grenouilles,  — qui  se  cachent  dane  les  roseaux  des 
marais;  — à  son  gré  nager,  plonger;  —  libre,  ewlin,  partout  se  pro- 
mener. 


194  DIALECTES    MODERNES 

Soun  alo,  un  jour,  fouguet  prou  forto: 
«  De  la  prisoi'i  escapem-nous  » 
(Diguet  à  l'autre),  «  Taire  es  dous, 
»  Es  lou  moument  d'and  per  orto.  -) 
Mais  aqueste,  boulzut,  sadoul 
E  countent  de  soun  ourdinàri, 
Vourguet  resta  de  p6u  d'auvàri 
E  lou  laisset  parti  tout  soûl. 
Lou  seguirem  pas  dins  sa  fugo: 
Es  urous,  a  sa  libertat. 
Tournem  à  l'autre,  qu'es  restât 
Dedins  am  sa  panso  pesugo. 

L'endemâ,  lou  mestre  a  coumptat 
Sous  canards  à  l'acoustumado  : 
In  manco  un,  lou  cerco  de-bado, 
Vei  quane  es  !  «  Poudriô  m'escapâ 
Coumo  el,  sou  dis,  soun  camarado  », 
E  subran  cerco  à  l'arrapâ. 
Ambé  soun  ventre  qu'i  ravalo, 
Aqueste  fugis  dins  la  cour. 
Ne  fa  dos  ou  très  fes  lou  tour, 
Pèi  pren  van  per  jougâ  de  l'alo; 
Mais  pot  faire  qu'un  pichot  vol 
E  miech  mort  retombo  pel  sol. 

Son  aile,  un  jour  fut  assez  forte: — «  Delà  prison  échappons-nous, 

—  dit-il  ù  l'autre  ;  le  vent  est  calme, —  c'est  le  moment  do  partir.» 

—  Mais  celui-ci,  ventru,  repu  —  et  content  de  son  ordinaire, — 
voulut  rester  par  crainte  d'accident  —  et  le  laissa  partir  seul.  — 
Nous  ne  le  suivrons  pas  dans  sa  fuite  :  —  il  est  heureux,  il  a  sa  li- 
berté. —  Revenons  à  l'autre, —  qui  est  resté  dedans  avec  sa  panse 
pesante . 

Le  lendemain,  le  maître  a  compté —  ses  canards,  comme  à  l'or- 
dinaire: —  il  en  manque  un  ;  il  le  cherche  inutilement.  — Il  voit 
quel  est  celui-là  :  «  Il  pourrait  m'échapper  comme  lui,  —  dit-il  en 
lui-même,  son  camarade  »,  —  et  il  cherche  aussitôt  à  l'attraper. — 
Avec  son  ventre  qui  traîne  à  terre,  —  celui-ci  fuit  dans  la  cour,  — 
il  en  fait  deux  ou  trois  fois  le  tour, —  puis  ii  prend  l'élan  pour  jouer 
de  l'aile; —  mais  il  ne  peut  faire  qu'un  petit  vol —  et,  à  demi  mort, 
il  retombe  à  terre.  —  Ah  !  pourtiuoi  u'a-t-il  pas  de  son  frère, — qui 


LOUS    DOUS    CANARDS    SAUVAGES  195 

Ail  !  per  que  n'a  pus  de  soun  frairc, 
Qu'en  libertat  volo  dins  Taire, 
Seguit  lou  counsel  amistous  ? 
Acô  se  penso  regretous. 
Quand  lou  raestre  lou  prend  e  plante 
Un  loung  coutel  dins  sa  garganto. 

Planguem-lou,  mais  pamens  meritabo  soun  sort. 

Atal  de  nautres La  moulesso 

Fa  perdre  à  riiome  sa  noublesso  ; 
Res  de  grand  toco  pus  soun  cor; 
Taloment  pla  qu'à  l'esclavage, 
Que  lou  meno  sempre  à  mal-port, 
Se  coumplai  dins  soun  gourrinage . 
Mais  n'es  pas  atal  l'home  fort 
Qu'a'  ho  justo  fiertat  dins  l'amo  : 
En  prisoû  gito  fioc  e  flamo. 
Per  reprene  la  libertat 
Dount  la  nature  l'a  doutât, 
E  qu'un  marrit  sort  li  a  raubado, 
Cr-ento  auvàri  ni  malparado  ; 
Crei  que  Ûiéus,  que  vei  l'estrambord 
Que  li  fa  mespresâ  la  mort, 
Assoustarâ  soun  escapado. 

G.  AzAÏs. 
(Languedocien,  Bif-ziers  et  ses  environs) 

en  liberté  vole  dans  les  airs,  suivi  le  conseil  amical  ?  —  C'est  ce 
qu'il  pense  dans  ses  regrets, —  quand  le  maître  le  prend  et  lui  en- 
fonce le  couteau  dans  la  gorge. 

Piaignons-le,  mais  pourtant  il  méritait  son  sort.  —  Il  en  est 
ainsi  de  nous  :  la  mollesse  —  fait  perdre  sa  noblesse  à  l'homme  ; 

—  rien  de  grand  ne  touche  plus  son  cœur,  —  si  bien  que  dans 
l'esclavage,  —  qui  le  mène  toujours  à  une  mauvaise  fin,  —  il  se 
complaît  dans  son  oisiveté.  —  Mais  tel  n'est  pas  l'homme  fort  — 
qui  a  une  juste  fierté  dans  l'âme; — en  prison,  il  jette  feu  etfiamme. 

—  Pour  reprendre  la  liberté  —  dont  la  nature  i'a  doté,  —  ut  (ju'un 
mauvais  destin  lui  a  ravie,  —  il  ne  craint  ni  mésaventure,  ni  con- 
tre-temps ;  —  il  croit  que  Dieu,  qui  voit  l'enthousiasme  —  qui  lui 
fait  mépriser  la  mort,  — favorisera  son  évasion. 

G.  AzAÏs. 


I   LATIN   D'AMERICO' 

A  M.   Frechette 

Pouëto  francés  e  députa  au  Parlament  canadian 

Fraire  d'alin,  e  tu  subre-tout,  Canada, 
Rampau  car  e  fegound  dôu  fier  aubre  de  Franco, 
Vosto  ramo  s'cstend,  fruchiero  à  desiranço  ; 
E  tamben  lou  troubaire  amo  à  vous  saluda. 

Ni  siècle  ni  liuenchour  vous  an  pouscu  muda  : 
De  voste  brès  latin  gardas  la  remembranço  ; 
Noste  crèire  es  parié,  pariero  Tahiranço, 
E  dins  Tobro  de  Dieu  sian  lest  à  s'ajuda. 

Que  fan  do  milo  lego,  e  la  mar,  e  li  flume, 
S'es  lou  même  soulôu  que  nous  largo  soun  lume. 
Se  dins  la  mémo  fe  li  pies  bâton  d'acord  ? 

D'enterin  que  lou  sang  au  viei  raounde  se  verso, 
Rejougnen  nôsti  man  per  dessubre  lis  erso  : 
La  soulo  vesinanço  es  aquelo  di  cor. 

A.  DE  Gagnaud. 
(Provençal,  Avignon  et  les  bords  du  Rhône.) 

xVUX  LATINS  DWMÉRIQUE 
A  M.  Frechette 

PoiJte  français  et  député  an  Parkmcnt  canadien 

Frères  lointains,  et  toi  surtout,  Canada,  —  rameaux  chers  et  fé- 
conds du  fier  arbre  de  France,  —  vos  pousses  s'étendent,  portant' 
des  fruits  abondants  ;  —  aussi  bien  le  poêle  aime  à  vous  saluer. 

Ni  les  siècles  ni  l'éloignemenl  n'ont  pu  vous  changer  :  —  de  votre 
berceau  latin  vous  gardez  le  souvenir  ;  —  notre  croyance  est  sem- 
blable, semblable  notre  haine,  —  et  dans  l'œuvre  de  Dieu  nous 
sommes  prêts  à  nous  aider. 

Que  font  les  mille  lieues,  et  la  mer,  et  les  fleuves,  —  si  c'est  le 
même  soleil  qui  nous  dispense  sa  lumière,  —  si  dans  la  même  foi 
les  poitrines  battent  d'accord? 

Pendant  que  le  sang  dans  le  vieux  monde  se  verse, —  rejoignons 
nos  mains  par-dessus  les  vagues  :  —  le  seul  voisinage  est  celui  des 
cœurs.  A.  DE  Gagnaud. 

'  Lu  le  Ift  novembre  1877,  en  séance  du  Parage,  à  Maguekne. 


BIBLIOGRAPHIE 


SEPTENTRIOUN.  pèr  William-G.  Bonaparte-Wyse.  —  Antibo,  encô  de 
J.  Marchand,  i?mpromèire-librain',   1878,  in-8°. 

U  M 

PVERI    SErXBNTRI 

DNIS     ANNORVM     XII     QVI 

ANTIPOLI  IN  THEAÏRO 

BIDVO   SALTAVIT    ET    PLA 

CVIT 

Telle  est  l'inscription  funéraire  que  M.  Bonaparte- Wyse  a  re- 
levée dans  le  chiivma.ni  petit  \i\re  Antihes  en i>o(he,  de  M"ie  C.-D. 
Coote.  Ces  quatre  lignes  lui  ont  inspiré  une  gracieuse  élégie  dans 
le  genre  de  l'antique,  une  élégie  vraiment  remarquable  par  la  cou- 
leur locale  qu'il  a  su  lui  imprimer.  Ce  n'est  pas  un  provençalisant 
de  1878  qui  écrit,  c'est  un  frère  et  un  successeur  de  Catulle.  Un 
Romain  du  secontl  siècle  n'aurait  pas  pleuré  autrement  ia  mort 
de  ce  pauvre  enfant,  l'un  des  artistes  les  plus  aimés,  paraît-il,  deces 
spectacles  mimés,  —  nous  dirions  aujourd'hui  le  ballet,  —  qui,  dès 
le  début  de  la  décadence,  eurent  la  plus  grande  vogue.  Septentrion 
dansa  sur  le  théâtre  d'Antibes,  aux  applaudissements  de  tout  le 
public:  biduo  saltavit  et  placuit,  dit  l'inscription.  Prit-il  froid  sous 
le  léger  costume  qui  devait  le  revêtir,  et  que  le  poète,  après  seize 
cents  ans  au  moins,  essaye  de  décrire  comme  s'il  l'avait  vu'?  On 
l'ignore.  Ce  qui  est  certain,  c'est  que,  après  une  courte  appari- 
tion, on  ne  l'y  revit  plus.  Ses  représentations  et  ses  succès  furent 
arrêtés  par  la  mort. 

Nous  ne  pouvons  reproduire  toute  la  pièce  de  vers;  en  voici  la  lin  : 

En  fàci  de  la  mar  e  di  nivôusi  cimo. 

Au  tealre  plan  de  trelus, 
Se  jogo  au  grand  soulèu  la  bello  |iaiitoiimiino 

Dis  amour  de  Mars  e  Venus  ; 
E  d'arliste  famous,  que  mome  Roumo  estimo, 
Disou  tout  ce  que  fau,  sens  paraulo  ni  rimo, 

Au  pople  qu'adoro  lou  nus. 

Mai  lou  galant  pichot  sautejo  emo  tant  d'amo, 

E  tant  d'abandoun  bouleguet, 
Que  lou  Proconse  aprovo,  e  li  lusènti  damo 

Zounzounon  :  «  Oh!  qu'es  poulidet!  » 


198  BIBLIOGRAPHIE 

Lou  ixjple  antiboulcn  d'un  long  acord  l'aclamo 
«  Lou  mai  bèn  dis  Amour  que  dardaion  la  flamo  », 
E  lou  porto  au  bout  de  si  det. 

La  lansenjo.  oh  !  qu'es  vano  !  e  même  li  courouno, 

Après  tout,  qu'an  pau  de  vaiour  ! 
Encaro  un  jour  de  fèsto!  encaro  di  chatouno, 

Li  douci  parauio  e  li  flour  '. 
Mai,  las  !  lou  tresen  jour,  mau  grat  li  caranchouno, 
Li  picamen  de  mau  e  l'aflat  di  p  outouno, 

Lou  pichot  n'es  pas  de  retour. 

Car  mau  grat  que  sigués  bestias  o  bèn  abile, 

La  Mort  es  un  moustre  feroun. 
La  Mort  es  uno  serp,  un  nègre  croucoudile. 

Que  souto  li  sagno  s'escound  ! . . . 
E  vaqui  sus  soun  lié,  coucha  blanc  e  tranquile, 
Au  mitan  di  beus  ile  e  mai  blanc  qu'un  bel  ile, 

Lou  poulidet  Septentrioun  ! 

A.  E. 

Catalogue  de  la  bibliothèque  de  Marseille.  —  Ouvrages  relatifs  à  ia 
l'rovi'ucc.  —  Essai  d'introduction  et  de  classement  mélhodique,  pai" 
V.  LiECTAUD,  bibliothécaire  de  la  ville  de  Marseille.  Marseille,  Granier 
nis.  1877,   m-40. 

Nous  ne  pouvons  mieux  faire,  pour  donner  une  idée  du  plan  très- 
rationnel  suivi  par  M.  Lieutaud,  que  de  reproduire  la  première 
page  de  son  exposé  : 

'.  Personne  n'oserait  aujourd'hui  contester  l'importance,  l'utilité, 
la  nécessité  des  collections  locales. 

»  Le  progrès,  en  effet,  dans  sa  marche  incessante  et  rapide,  fait 
à  notre  époque  une  étroite  obligation  de  la  spécialité,  pour  toutes 
les  branches  des  connaissances  humaines. 

»  Les  collections,  comme  tout  le  reste,  obéissent  à  cette  tendance 
moderne,  dont  rien  ne  peut  s'affranchir  désormais. 

»  D'ailleurs,  il  faut  bien  le  reconnaître,  ce  sont  les  collections 
locales  que  le  travailleur  recherche,  qu'il  aime  à  rencontrer  et  qu'il 
interroge  avec  fruit. 

»  Qne  vient  demander  le  savant,  l'amateur,  le  voyageur  même, 
aux  établissements  de  tout  ce  qui  n'est  pas  grande  capitale?  Des 
Raphaël  ou  des  Rembrandt,  des  Vénus  de  Milo  ou  des  Apollon  du 
Relvédère  ;  dos  collections  de  monuments  célèbres,  d'inscri[)tions 
capitales  ?  des  ouvrages  de  nmni  rc  scihili,  de  merveilleuses  minia- 
tures calligraphiques  ou  des  textes  antiques  conservés  par  des  ma- 
nuscrits fameux? 


BIBLIOGRAPHIE  199 

»  Bien  rares  seraient  les  établissements  assez  riches  pour  satis- 
faire à  ces  désirs.  Le  chercheur  ne  l'ignore  pas.  Il  sait  bien  que 
quelques  grands  centres  en  ont  seuls  le  privilège  ;  et,  s'il  a  besoin 
d'objets  rares,  s'il  veut  des  chefs-d'œuvre,  il  ne  s'éloignera  guère 
de  Paris,  de  Londres,  de  Florence  ou  de  Rome. 

»  A  la  ville  de  second  ordre,  à  la  capitale  de  province,  il  deman- 
dera, au  contraire,  les  monuments  et  les  travaux  relatifs  à  Ui 
contrée,  et  c'est  là  qu'il  viendra  de  préférence  les  consulter,  sou- 
vent avec  autant  de  charme  et  de  profit  que  les  merveilles  des  plus 
beaux  musées » 

Cette  idée  devrait  être  réalisée  partout.  Au-dessous  des  grandes 
œuvres  du  génie  qui  appartiennent  à  tous  les  temps  et  à  tous  les 
lieux,  les  monuments  artistiques,  historiques,  scientifiques  et  lit- 
téraires, d'une  province  ou  d'une  localité  données,  devraient  for- 
mer le  fond  naturel  et  principal  des  musées  et  rie  la  bibliothèque 
de  cette  province  ou  de  cette  ville. 

Eu  égard  au  petit  nombre  d'œuvres  intéressant  à  un  titre  quel- 
conque l'histoire  politique  ou  littéraire  de  la  cité,  les  bibliothèques 
communales  contiennent  encore  une  trop  grande  proportion  de 
documents  généraux;  l'éparpillement.  l'absence  ou  la  perle  des 
premières,  enlève  aux  histoires  provinciales  toute  variété  et  toute 
vérité.  Tout  est  fondu  dans  le  moule  d'une  unité  trompeuse,  aussi 
étrangère  à  là  réalité  que  les  latitudes  des  provinces  de  la  France 
diffèrent  entre  elles.  Les  seconds,  au  contraire,  grâce  à  la  multi- 
plicité de  leurs  dépôts,  pourraient  toujours  se  retrouver  sans  trop 
de  peine,  s'ils  venaient  à  manquer  dan?  quelque  collection  parti- 
culière. 

Ce  n'est  pas  l'origine  provençale  des  auteurs  qui  a  dicté  la  clas- 
sification do  M.  Lieutaud.  Son  catalogue  n'a  admis  que  les  ou- 
vrages «  relatifs  à  la  Provence  ou  à  des  faits  dont  elle  a  été  le 
théâtre . 

»  S'écarter  de  ce  principe  eût  été  se  jeter  dans  un  inextricable 
chaos  de  volumes  de  toute  nature.  »  Les  sujets  les  plus  divers 
ayant  été,  en  effet,  traités  par  les  auteurs  très-nombreux  que  la 
Provence  a  donnés-  à  la  France,  l'assemblage  catalogué  de  leurs 
écrits  n'aurait  aucun  caractère  méthodique  de  localisation.  Pour 
ne  parler  que  des  contemporains,  «quelle  place  pourraient  tenir, 
au  milieu  d'une  collection  locale,  les  indigestes  mémoires  de  Fortia 
d'UrL'an,  les  histoires  de  la  Rérolulion,  du  Consulat  el  de  l'Empire, 
de  M.  Thiers;  les  romans,  poèmes  et  œuvres  diverses  de  Méry,  Mi- 
gnet,  Gh.  Girauil,  Poujoulat.  Joseph  Autran,  Pontmartin,  Gozlun, 
Louise  Golet,  Zola  et  tant  d'autres  écrivains  ({u'un  rayon  de  notre 


200  BIBLIOGRAPHIE 

ardent  soleil  a  touchés,  et  qui  font  briller  à  Paris  l'esprit  et  le  génie 
(le  notre  race  ?  - 

Le  savant  bibliothécaire  de  Marseille  circonscrit  d'abord  les  H- 
miles  géographiques  de  son  sujet.  Comprenant  dans  la  Provence 
toute  l'étendue  territoriale  qui  y  a  été  attachée  aux  diverses  époques 
de  son  histoire,  il  y  fait  entrer,  en  sus  des  cinq  départements  des 
Bouches-du-Rhône,  de  Vauckise,  des  Basses- Alpes,  du  Var  et 
des  Alpes-Maritimes,  quelques  enclaves  et  extensions  qu'elles  pos- 
sédait en  Dauphiné,  dans  une  très-minime  partie  de  la  Drôme  et 
des  Hautes- Alpes.  Son  but  a  été  de  faciliter  les  études  des  tra- 
vailleurs qui  voudraient  faire  une  recherche  quelconque  sur  tout 
ce  qui  peut  se  rattacher  à  ce  pays.  Cette  concentration  de  docu- 
ments autochthones  n'a  jamais  été  mieux  justifiée  que  pour  une 
province  qui  a  joué  depuis  plus  de  deux  mille  ans  un  si  grand  rôle 
aux  points  de  vue  militaire,  religieux,  politique,  littéraire  et  com- 
mercial. L'inOuence  de  la  plupart  des  événements  accomplis  en 
Provence  ne  s'étant  pas  maintenue  dans  son  intérieur,  mais  ayant 
presque  toujours  rayonné  au  delà  de  ses  limites,  il  y  aura  tout 
avantage  à  pouvoir  consulter  sur  place  l'ensemble  des  monuments 
écrits  qui  expliquent  cette  puissance  d'expansion.  Pour  ne  parler 
que  d'un  sujet  peu  attrayant  peut-être  au  premier  abord,  mais  que 
l'on  nous  pardonnera  d'avoir  rappelé  en  raison  des  intérêts  de 
premier  ordre  qu'il  soulève,  le  rapport  des  arrivages  par  mer  et 
delà  propagation  des  épidémies,  oil  rencontrerait-on  ailleurs  qu'à 
Marseille  un  ensemble  de  documents  aussi  complet  sur  l'histoire 
des  quarantaines,  depuis  le  règlement  sanitaire  de  1683  jusqu'aux 
récentes  modifications  que  les  apparitions  cholériques  des  vingt 
dernières  années  ont  provoquées  ?  A  part  les  ordonnances  et  in- 
structions générales,  il  doit  y  avoir  toute  une  série  de  mesures  lo- 
cales dont  les  traces  ne  peuvent  se  retrouver  que  dans  cette  grande 
cité  commerciale  et  maritime.  Assurément  la  publication  des  ar- 
chives de  la  Direction  delà  santé  de  la  Méditerranée  formerait  un 
ouvrage  unique  au  monde,  qui  fournirait  des  renseignements  pré- 
cieux pour  l'histoire  des  maladies  épidémiques,  notamment  depuis 
la  grande  peste  de  172<i  jusqu'à  nos  jours.  M.  Lioutaud  a  eu  raison 
de  réserver,  aux  articles  Commerce  et  Hygiène  de  son  catalogue,  une 
place  importante  aux  documents  de  cet  ordre- 

Le  catalogue  terminé  sera  le  répertoire  d'une  vraie  encyclopédie 
provençale.  Tout  y  sera  représenté  :  la  bibliographie,  les  publica- 
tions périodiques,  l'histoire,  l'archéologie,  la  littérature  provençale 
avec  tous  ses  dialectes,  les  littératures  française,  grecque  et  latine, 
les  chants  religieux  et  populaires,  le  théâtre,  etc.  C'est  là  l'objet 


BIBLIOCiRAPHIR  201 

des  deux  premiers  livres.  l.,e  troisième,  atîecté  aux  sciences  et  aux 
arts,  comprendra  la  i>liiIosoplne,  l'économie,  politique  et  sociale, 
l'ensemble  des  sciences  piopremeut  dites  :  mathématiques,  pliy- 
siques,  naturelles  et  médicales  ;  la  philosophie  occulte,  l'astroloi^'ie 
judiciaire,  la  technologie,  les  jeux  et  la  gymnastique,  les  beaux- 
arts.  M.  Lieutaud  donne  une  grande  part  à  l'économie  politique  , 
«  cette  jeune  science,  dit-il,  qui  tend  à  résumer  et  à  absorber  en 
»  elle  toutes  les  manifestations  de  la  vie  moderne.»  11  y  comprend 
l'administration,  les  établissements  de  bienfaisance,  l'instruction 
publique,  les  finances,  l'industrie,  le  commerce,  les  travaux  pu- 
blics, les  associations.  Chacun  de  ces  chapitres  est  divisé  lui-même 
en  de  nombreuses  sous-divisions,  qui  montrent  l'immensité  des 
documents  réunis  et  le  vif  désir  de  l'auteur  de  ne  rien  oublier  de 
tout  ce  qui  peut  intéresser  l'organisation  actuelle  des  Douches-du- 
Rhône  et  des  départements  voisins. 

Suivant  la  hiérarchie  ascendante  qu'il  a  établie  pour  les  diverses 
connaissances  humaines,  il  termine  le  catalogue  jiar  le  droit  et  la 
théologie.  A  propos  de  droit,  il  relate  toutes  les  juridictions  géné- 
rales et  locales  qui  ont  régi  les  diverses  parties  de  la  Provence. 
Cette  conservation  des  anciennes  coutumes  a  un  intérêt  phis  qu'his- 
torique. Dans  plusieurs  provinces  méridionales,  certaines  d'entre 
elles  ont  encore,  à  peu  de  chose  près,  force  de  loi  et  ibrment,  de- 
vant la  juridiction  des  juges  de  paix  notamment,  une  sorte  d'an- 
nexé du  Code  civil  qui  sert  de  régie,  à  défaut  d'acte  authenti(iuo, 
dans  un  grand  nombre  de  conventions  urbaines  ou  rurales.  Des 
commissions  préfectorales  ont  réuni,  depuis  quelques  années,  ces 
restes  du  droit  coutumier  et  en  ont  formé  le  recueil  des  usages 
locaux  du  département.  Parmi  ces  usages,  les  uns  nous  ont  élé 
transmis  par  la  tradition  ;  mais  beaucoup  ne  sont  que  la  consécra- 
tion pratique  de  textes  de  lois  réguliers,  consignés  dans  quelqu'une 
de  ces  chartes  languedociennes  ou  catalanes,  telles  que  cette i^euMc 
en  a  publié  un  grand  nombre  par  les  soins  de  MM.  Léon  Vinas, 
Montel,  Alart,  etc. 

Nul  doute  que  les  textes  judiciaires  inventoriés  par  M.  Lieu- 
taud ne  contiennent  un  grand  nombre  de  pièces  en  vieux  proven- 
çal. Les  amis  des  lettres  romanes  lui  sauront  gré  de  leur  avoir 
ouvert  cette  nouvelle  source  de  recherches. 

Il  est  rare  qu'un  article  bibliographique  ne  comjiorte  pas  (jnelquo 
mot  de  critique,  si  légère  qu'elle  soit,  à  l'adresse  de  l'ouvrage  ana- 
lysé. Ce  n'est  pas  ici  le  cas.  Le  plan  du  nouveau  catalogue  de  la 
bibliothèque  de  la  ville  de  Marseille  ne  soulève  pas  d'objection  sé- 
rieuse. Espérons  que  le  courage  et  les  forces  de  l'auteur  seconde- 


202  BIBLIOGRAPHIK 

ront  son  dévouement  et  son  intelligence  et  lui  permettront  de  me- 
ner à  bonne  On  une  œuvre  aussi  difficile,  dont  «  peuvent  seuls  se 
»  faire  une  idée  ceux  pour,  lesquels  la  bibliographie  n'est  pas  un 
»  mot  vide  de  sen.- .  Quelque  longues  (|ue  fussent  les  explications, 
»  les  autres  ne  sauraient  la  comprendre.  »  Ce  sont  ses  propres  pa- 
roles. Nous  les  reproduisons,  parce  qu'elles  nous  paraissent  l'ex- 
pression de  hi  vérité.  A.  E. 

Congrès  archéologique   de  France,  XLI II' session.  Séances  générales 
tenues  à  Arles  en  1876.  etc.  Pans,   Derache,  1877;  in-8%  L-9:i2  pages. 

Emile  Fassin,  Recherches  sur  les  anciens  notaires  d'Arles,  p,  711- 
7GÛ,  travail  intéressant  et  fait  avec  soin.  M.  F.  cite,  p.  741,  d'après 
las  Annales.  Bonnemant,  un  extrait  moitié  provençal,  moitié  fran- 
çais, du  registre  des  Conseils  de  la  ville  d'Arles,  en  dat(î  du 
•2î  septembre  1521.  11  y  est  question  d'un  notaire  arlésien  accusé 
de  séduction  et  refusant  de  prêter  le  serment  que  le  viguier  lui 
avait  demandé.  Sur  le  folio  1  du  registre  de  Louis  Séguin  (années 
1374-1378),  M.  F.  a  déchiffré  des  vers  qui  paraissent  appartenir  à 
une  chanson  de  l'époque.  En  voici  le  début  : 

Porquoy  parlés  vos  mal  de  sanl  Jayme 

Je  ne  parle  pont  de  vos 
J'ay  layset  nios  gants  en  selle  fontagnc,  |  por 
J'ay  laiset  mos  gants  en  selle  foniagne 

Bien  (1.  fneus  ')  amys  abes  les  vos, 
Por 
Alons  le  fiu'jrir  en  selle  montagne  |  por 

Anas  entre  moy  e  vos 
Por 
Vous  estes  joly  et  moi  bien  jolia  |  por 
Vos  estes  joli  et  moy  plus  jolia 

Bels  amis  aves  mi  vos. 

Ce  volume  contient  de  nombreux  travaux  que  nous  sommes 
forcé  de  passer  sous  silence,  étrangers  ([u'iis  sont  à  la  destination 
AelaRemir.  A.   R.-F. 

Le  Seizième  Siècle  en  France,  tableau  de  la  'Mérature  et  de  la  langue, 
par  MM.  A   Darmksteter  et  Adolphe  Ha.tzfeld.  Paris.  Delagrave. 

■Volume  de  plus  de  600  pages  el  d'impression  compacte.  Il  com- 
prend deux  parties  à  peu  près  égales  en  étendue  et  distinctes  l'une 
de  l'autre.  La  première  contient  l'histoire  littéraire,  rapidement  mais 
pleinement  traitée,  de  la  France  du  seizième  siècle,  et  l'histoire  phi- 

'  Correction  indiquée  par  M.  Boucherie. 


PERIODIQUES  203 

lologique  corrospondante.  La  sorondo  se  compose  de  nombreux 
extraits  empruntés  aux  œuvres  les  plus  marquantes  de  cette  inté- 
ressante i)ériode.  Sans  entreprendre  une  analyse  qui  dépasserait 
le  temps  et  l'espace  dont  nous  disposons,  nous  dirons  seulement 
que  cet  ouvrage,  écrit  avec  soin  et  une  rare  compétence^  convient 
parfaitement  â  la  jeunesse  studieuse  de  nos  écoles.  Les  professeurs 
eux-mêmes  trouveront  dans  la  première  partie  des  renseignements 
nouveaux  sur  les  habitudes  orthographiques  et  grammaticales  des 
auteurs  du  XVle  siècle. 

A.  B. 


PERIODIQUES 

Remania,  25.  —  P .  1 .  Le  lai  de  l'épercier,  G .  Paris.  Jolie  pièce 
de  232  vers,  extraite  d'un  manuscrit  du  XII1"-X1V'^  siècle,  qui  ap- 
partient au  comte  de  Seyssel-Sothonod  et  qui  contient  presque 
tous  les  lais  de  Marie  de  France,  plus  huit  autres  qui  sont  inédits, 
(le  n'est  pas  un  lai  breton,  comme  ceux  de  Marie  de  France,  et 
l'auteur  a  sain  de  le  dire;  «  Le  conte  en  ai  oi  conter,—  Aies  onques 
n'en  oi  la  note  —  Eu  harpe  fere  ne  en  rote.  »  M.  G.  P.  a  com.plété 
cette  intéressante  publication  par  une  savante  étude  sur  les  ori- 
gines du  lai  de  l'Eperoier,  qu'il  rattache  à  cette  famille,  tous  les 
jours  plus  nombreuse,  de  contes  venus  de  l'Inde.  P.  5,  à  pro})OS 
de  ces  deux  vers  :  «  C'est  la  compaignie  Tassel — que  vos  me  fêles, 
benlevoi»,  M.  G.  P.  fait  en  note  l'observation  suivante:  «  Cette 
locution,  qui  n'est  pas  expliquée  jusqu'à  présent  avec  certitude,  se 
retrouve  dans  Beneeit,  Chronique,  \.  15365:  C'est  la  compaignie 
Tassel  (éd.  Tassel)  qu'il  m'afaite,  et  dans  Renart,  v.  3819:  C'est  la 
comimgnie  Tassel  que  vous  me  faites  voirement.  Le  sens  est  évidem- 
ment «  association  frauduleuse,  compagnie  de  traître.  »  Tassel  doit 
être  un  nom  propre,  celui  d'un  traître  célèbre,  mais  on  ne  connaît 
pas  son  histoire.  «  L'explication  de  cette  locution  est  toute  trouvée, 
si  l'on  se  reporte  à  la  fable  de  Marie  de  France,  intitulée:  dou 
Taissonet  dou  Porc  (  éd.  Roquefort,!.  IL  p.  320  ).  On  y  voit  que  le 
iussel  ou  blaireau,  «  s'est  acumpaignie^  »  aux  pourceaux,  et  se 
dit  pourceau  comme  eux,  pour  avoir  sa  part  de  la  glandée  com- 
mune. Mais  quand  il  les  voit  tomber  sous  le  couteau  du  boucher, 
il  proteste,  il  «  commence  à  crier,  A  renoier,  et  à  jurer  Que  tessons 
est.  »  On  voit  d'ici  le  rapport  des  deux  situations,  et  le  sens  de  cette 
locution  devenue  proverbe.  V.  41,  212,  il  n'est  pas  nécessaire  de 
supprimer  Vs  finale  qui  n'empêchait  pas  l'élision,  comme  j'ai  déjà 


204  PERIODIQUES 

ou  l'occasion  de  ï'ohacrwer  (Revue  des  langues rom.,  mai  1877,  p. 21  G) 
ot  comme  M .  Tobler  vient  de  l'observera  son  tour  (Eoniania,  n''25. 
]!.  153)  dans  le  a»  51  de  la  Gœttingische  Gelehrte  Anzeigen  —  P.  22, 
Pio  liajiia,  Una  versione  in  ottava  rimii  del  libro  dei  sette  savi.  Pre- 
mière partie  d'une  étude  philologique  et  littéraire. — P.  52,  V.  Smith, 
Vieilles  Chansons  recueillies  en  Velag  et  en  Forez .  Trente-deux  pièces 
éditées  avec  l'intelligence  et  le  soin  que  l'on  connaît.  —  P.  85. 
A.  Lambrior,  VE  bref  latin  en  rouimiin. —  P.  'èi,  Mélanges  :  1°  Turris 
Alithie  (G.  P.).  Explication  du  mot  Alithie  qui  ligure  dans  la  Con- 
^essio  Goîie  et  qui  n'avait  pas  encore  été  bien  compris.  2"  Chanson 
anonyme.  'i°  Motets  (P.  M.).  4»  Surge  (G.  P.),  laine  surge  =  lana 
sacida.  5*^  les  dix-sept  cent  mille  clochers  de  France  (P.  M.).  Le  v,  3 
est  faux.  V.  8  et  9,  jo  comprends  ce  [=se) peut  bien  lever,  se  {peut 
o\x  peuvent).  V.  13,  je  me  contenterais  de  supprimer  Dieu,  qui  fait 
double  emploi  avecJ.-C.,  ce  qui  permettrait  de  ne  rien  changer  au 
reste  et  laisserait  à  priera  sa  valeur  trisyllabique.  6"  D'un  emploi 
non  étymologique  du  t  final  en  provençal  {V .  M  .),  phénomène  déjà  étu- 
dié par  M.  Chabaneau.  7"  Glanet  aglan  (J.  Cornu).  8°  Nous  et  on 
(^L.  Havet).  —  P.  111,  Comptes  rendus  :  1°  Gustav  Lûcking,  die 
^Eltesten  franzœsischen  Mundarten.  Eine  Sprachgeschichtliche  Un- 
tersuchung  (G.  P.).  Favorable,  malgré  de  nombreuses  réserves. — 
P.  122.  Adeser  vient  en  effet,  non  de  adhœsare,  qui  aurait  produit 
aeser,  mais  de  *ad'dehœsare.  P.  131.  Oter,y.  fr.  oster,  vient  proba- 
blement de  [de]obstare  par  la  chute  de  la  préposition,  comme  dans 
ouvrir  de  [de]operire,  prov.  durhir.  2"  A.  Luchaire,  de  Lingiia  aqui- 
tanica(P.  M.).  M.  P.  M.  ne  peut  se  décider  à  accepter  les  con- 
clusions de  l'auteur.  3*  E.  Philipon  et  G,  Guigue  (Œuvres  de  Mar- 
guerite cF  Ogngt,  prieure  de  Poleteins,  publiées  d'après  le  ms.  unique 
de  la  Hibl.  de  Grenoble)  (P.  M.).  4"  Konrad  Holmann  et  Karl 
Vollmoeller,  dei-  Mi'mchener  Brut.  (G.  P.)  favorable.  —  P.  14(3, 
Périodiques.  —  P.  154,  Chronique.  A.  R. 

Mémoires  de  la  Société  des  lettres,  sciences  et  arts  de 
rAveyron,  1868-1878,  tome  X  (  Rodez,  Rathery,  1874,  in-8o). 
1-9.  Archives  de  l'hôtel  de  ville  de  Milhau.  Deux  textes  en  langue 
d'oc  (XIV"  siècle).  Le  deuxième,  de  1301-1362,  extrait  du  livre  des 
comptes  de  B.  Guisbern.  consul  boursier,  est  relatif  à  la  remise 
de  la  ville  aux  mains  de  Jean  de  Chandos,  lieutenant  du  roi  d'An- 
gleterre, après  le  traité  de  Brétigny.  Jl  serait  désirable  que  quoique 
érudit  se  chargeât  de  la  mise  à  jour  des  documents  que  possèdent 
les  archives  de  Milhau.  Les  fragments  que  nous  venons  de  signaler 
sont  fort  intéressants.  Ils  ont  été  adressés  à  la  Société  des  lettres  de 
l'Avei/ron^  par  M.  A.  Rouvelet. — 34-51.  Virenque,  des  Monuments 


PERIODIQUES  205 

dits  celtuiues  et  des  légendes  du  canton  de  Cornus;  travail  curieux,  mais 
parfois  insuffisant.  M.  V.  émet  cette  conjecture  que  certains  dol- 
mens importants  pourraient  bien  avoir  été  des  autels  druidiques. 
La  légende  de  la  commune  de  Saint-Jean-d'Alcas  rapporte  que  tous 
les  ans,  à  jour  déterminé,  on  sacrifiait  un  jeune  enfant,  et  ([ue  le 
dolmen  des  Peyrussas  servait  d'autel.  M.  V.  fait  suivre  son  mémoire 
de  cinq  contes  populaire,  qui  tous,  sauf  le  premier,  ont  rapport 
aux  fées.   —  156-157.  Sounéts  (sans  nom  d'auteur).  h'IIouome,  II. 
VAnjo  gardien.  J'ai  déjà  signalé  ces  deux  sonnets  dans  le  n°  de  no- 
vembre àe\di  Revue;  M.  Vesy,  bibliothécaire  de  la  ville  de  Hodez,  en 
est  l'auteur.  —  159-178.  L'abbé  Cabaniols,  Mémoire  sur  Carentomag. 
— 179-197.  L'abbé  Cerès,  Rapport  sur  les  fouilles  archéologiques  faites  à 
Cadayrac,  etc. — 198-214.  Le  môme,  Compte  rendu  sur  les  fouilles  pra- 
tiquées à  la  villa  romaine  du  mas  Murcou. —  Î35-282.  H.  de  Barrau,  de 
Beaumont,  Boisse,  Romain  et  Vanginot.  Mémoires  sur  le  Rouergue. 
— 283-337.  Boisse,  Antiquités  celtiques  et  gallo-romaines  signalées  dans 
VAveyron.  Travaux  étrangers  à  la  compétence  de  la  Revue.  Il  peut 
être  cependant  utile  d'en  extraire  quelques  acceptions  et  dénomi- 
nations locales  :  p.  ICI,  Strade,  voie  romaine  (environsde  Garenton, 
commune  de  Compolibat,  arrondissement  de  Villerranche).  Il  en 
est  de  même  à  Nant.  (Voy.  Revue,  VII,  93).  Le  chemin  gaulois  ou 
romain  qui  contournait  l'ancien  laça  donné  son  nom  à  une  plaine 
au  sud  de  la  ville.  P.  179.  «  Tout  monument  [du  Rouergue]  appar- 
tenant à  une  époque  quelconque,  et  n'offrant  qu'une  origine  dou- 
teuse ou  inconnue,  est  attribué,  ici  aux  Anglais,  là  à  la  puissance  de 
quelque  esprit  chimérique,  plus  loin   à  quelque  fait  plus  ou  moins 
impossible.  Ainsi  l'aqueduc  romain  qui,  très-probablement,  con- 
duisait, il  y  a  peut-être  dix-huit  siècles,  les  eaux  de  Vors  à  Rodez, 
portait  le  nom  de  cave  des  Anglais.  C'était  un  épouvantable  coup  de 
tonnerre  qui  avait  creusé  l'immense  cratère  que  nous  appelons 
avec  raison  l'Amphithéâtre  du  pré  de  la  Gomiue.  Selon  les  diverses 
locafités,  les   dolmens  et  autres  monuments   du  même  genre  por- 
taient le  nom  de  tombes  des  Anglais,  tombes  des  Géants,  maison  des 
Fées.  Les  haches  et  autres  instruments  en  pierre  qu'on  trouve  dans 
ces  sortes  de  monuments  sont  appelés  pierres  du  tonnerre  par  les 
habitants  de  nos  campagnes,  persuadés  qu'ils  sont  que    ces  objets 
sont  un  incontestable  produit  de  la  foudre.  »  P.  236.  Noms  du  seigle 
à  Rodez  et  dans  ses  environs  immédiats  :  segol^  *  sego  et  *  segodene 
d'après  M.  de  Gaujal.  P.  245  et  316.  Costo  *  roumivo,  côte  roide  et  si- 


•  Costa,  avec  la  signification  de  chemin  monlueux,  voie,  rue,  manque 
au  Dictionnaire  d'Honnorat.  Nous  avons  à  Montpellier  une  rue  Coste- 

13 


206'  CHRONIQUE 

nueuse  que  l'on  suit  pour  aller  de  Milhau  à  Lodève.  Cf.  ce  que  dit 
l'abbé  Léon  Vinas  :  Ca  rhapitrcde  l'hhtDÏre  de  Monipojrou.c.  P.  245. 
Pounche  d'agach  dénomination  locale),  sommet  d'oîi  l'on  découvre 
au  loin.  1^.  250.  *  Nac,  barque,  vaisseau,  d'après  Bosc,  Mémoires  dit 
Rouergue.  P.  276.  Gomi  f orrai,  nom  actuel  des  vestiges  de  la  voie  ro- 
maine qui  existait  autrefois  entre  Segodunum  et  Divona. — P.283.- 
287.  Le  dolmen  du  Causse  de  Bérail  (dans  le  canton  de  Bozouls) 
se  nomme  la  tombe  du  Géant.  —  294.  *  Cibournié,  nom  assez  fré- 
quemment donné  aux  dolmens  de  l'Aveyron.  — 295.  Une  pierre 
granitique  isolée  et  dressée  verticalement,  à  Lescure  (canton  de  la 
Salvetat),  se  nomme  dgnal  de  Fournhol.  —  196.  Dans  la  même 
localité,  une  pierre  levée.  Cheval  du  lley;  une  grande  dalle  de  deux 
mètres  de  long,  Peyro  jasso  (pierre  couchée).  —  308.  Un  champ 
situé  au-dessous  de  Sauclières  (canton  de  ISant)  porte  le  nom  de 
Camp  de  los  gainas'^ .^<1\  est  dominé  par  des  collines  sur  lesquelles 
existent  plusieurs  dolmens.  »  —  310.  *  Fadarelles  (fées).  —  335. 
«  La  tradition  signale  plusieurs  points  du  département  comme 
ayant  été  le  théâtre  de  grands  combats,  que  l'on  est  le  plus  souvent 
disposé  à  faire  remonter  à  l'époque  romaine.  Parmi  ces  points  l'on 
cite  la  plaine  d' Auribal,  le  Camp  hatailléj  près  de  Ginestous  d'Auriac; 
la  Dorie  blanche  'la  chaumière  blanche),  entre  Saint-Rome  et  Gozon.» 
Les  mots  précédés  d'un  astérisque  manquent  au  Dictionnaire 
d'Honnorat.  A.   R.-F. 


CHRONIQUE 


Les  Fêtes  latines  s'ouvrent  sous  les  auspices  les  meilleurs.  Ainsi 
que  nous  l'avons  souvent  répété,  elles  ont  pour  but,  et  de  solenni- 
ser  le  concours  du  Chant  du  Latin,  et  de  resserrer  les  liens  de  mu- 
tuelle sympathie  que  de  communes  origines  linguistiques  établissent 
entre  toutes  les  nations  de  race  ou  de  langue  néo -latine.  La  popu- 
lation de  Montpellier  s'est,  sans  distinction  aucune,  associée  à  ce 
mouvement,  dont  elle  apprécie  Pimportance,  capitale  pour  elle.  Le 
Conseil  général  de  l'Hérault  a  voté  2,000  fr.  en  faveur  des  fêtes,  et 
le  Conseil  municipal  de  la  ville  de  ]Monti)ellier,  plus  directement 
intéressé,  celle  de  10, 000. Malgré  la  crise  agricole  qui  sévit  si  cruelle- 
ment dans  le  bas  Languedoc,  la  souscription  publique  s'est  élevée, 

Frége,  traduite  à  tort  par  quartier  froid  dans  l'ouvrage  de  M.  Duval- 
Jouve  sur  les  Noms  des  rues  de  Monlpellier;  Montpellier,  Goulet,  1877, 
in-12.  (P.  119). 

'  Goina,  prostituée  (lionnorat,  D/c((on. ).Scrait-33  !e  champ  des  pro- 
stiluées  ? 


CHRONIQUE  207 

lians  l'espace  de  quelques  jours,  au  chifTre  considéralile  de7,UUUfr. 

Le  Concours  de  musique  et  d'orphéons  promet  d'excoUenls  ré- 
sultats :  quarante-sepi  Sociétés  du  Midi  y  ont  adhéré.  Un  Concours 
de  hauthois  et  de  tambourins  aura  lieu  en  même  temps,  c'est-à- 
dire  les  20  et  27  mai.  Les  i"ùtes  commenceront  le  "22,  à  neuf  heures 
du  soir,  par  la  réception  aux  flambeaux;  dos  t'élibres  et  des  savants 
étranixers.  Cette  réception  dépassera  en  éclat  celles  qui  furent  faites 
eu  Provence  pendant  les  trente  dernières  années.  Les  réunions 
scientifiques  serontinaui-urées,  le  lendemain,  par  la  séance  solen- 
nelle du  deuxième  Concours  triennal  de  la  Soriéir  des  langues  roma- 
nes. Les  rapporteurs  désignés  sont:  MM.  Alphonse  Roque-Ferrier 
(philologie),  Frédéric  Donnadieu  (  prose),  Antonin  Glaize  (  poésie  ). 
M,  Lieutaud,  ])ibliothécaire  de  la  ville  de  Marseille,  a  été  chargé 
par  M.  Mistral  du  rapport  sur  le  concours  des  Jeux  tloraux  du 
Félibrige. 

Ceux-ci  se  célébreront  le2i  mai,  selon  les  règles  du  cérémonial 
'catalan  et  de  la  tradition  toulousaine.  Ils  seront  naturellement 
présidés  par  M.  Mistral,  qui  prononcera  un  grand  et  important 
discours  en  langue  provençale.  L'exécution  musicale  du  chant  ca- 
nadien et  de  l'air  national  roumain  doit  précéder,  au  Peyrou,  la 
séance  solennelle  du  C/;a/ii  rf«  Zrt^m.  L'examen  sommaire  des  pièces 
envoyées  permet  de  croire  que  le  prix  de  i\L  de  Quintana  ne  sera 
vivement  disputé  que  par  les  poètes  de  la  Catalogne  et  de  la  Rou- 
manie. M.  Marchetti,  le  célèbre  compositeur  italien,  l'auteur  ap- 
plaudi de  l'opéra  de  Ruy-Blas.  a  écrit  la  musique  d'une  pièce  rou- 
maine que  recommande,  en  môme  temps  qu'un  tour  original,  une 
rare  élévation  de  poésie  et  de  pensée. 

A  cette  sénnce  du  Chant  du  Latin  seront  lues  par  des  lecteurs 
français,  espagnols,  roumains  et  italiens,  les  pièces  les  plus  remar- 
quables du  Concours  proposé  par  M.  de  Quintana.  La  cérémonie  se 
terminera  par  la  marche  du  Couronnement,  due, comma  la  musique  de 
la  Cançô  llatina^,  à  M.  Philippe  Pedrell. 

Le  Cercle  artistique  de  Montpellier,  qui  a  toujours  manifesté  ses 
vives  sympathies  à  l'endroit  de  l'idée  latine  et  de  M.  de  Quintana, 
donnera,  le  23  ou  le  26  mai,  une  grande  soirée  musicale  et  littéraire 
en  l'honneur  des  étrangers  et  des  félibres. 

Une  Exposition  de  peinture  a  été  organisée  dans  les  salons  du 
Cercle,  sous  la  direction  de  la  Société  artistique. 

Le  vendredi  27  mai,  la  Fille  de  Roland  sera  reitrésentée  en  pré- 
sence de  l'auteur,  M.  de  Bornier,  qui  a  bien  voulu  reserver  au  Con- 
grès de  Montpellier  la  primeur  d'un  prologue  particulier,  écrit 
spécialement  pour  les  F'ètes  latines. 

Les  danses  des  Treilles  et  du  Chevalet  sont  fixées  au  dimanche 
26  mai,  après  la  promenade  des  animaux  symboliques  et  légendai- 
res. 

Le  mystère  anglo-normand  à'Adam,  récemment  réédité  par 
M.  Léon  Palustre,  sera  joué  à  Maguelone  le  lendemain. 

Une  conférence  de  M.  Boucherie,  sur  le  théâtre  français  à  la  pre- 
mière époque  du  moyen  âge,  en  expliquera  préalablement  les  dif- 
ficultés de  langue  et  d'interjjrétation. 

Un  drame  d'Aubanel:  lou  Pandoupecat,  sera  représenté  à  Mont- 

*  Il  s'agit  de  la  belle  poésie  qui  parut  dans  la  Hevue  (novembre-dé- 
cembre 1877.) 


208  CHRONIQUE 

puUier,  au  retour  d'une  excursion  à  Saint-Guilhem-le-Désert.  La 
\isiio  il  l'Exposition  d'Iiorticullure  de  Cette  reste Mxée  au  ^9  mai. 

Notre  Kccue,  de  plus  en  plus  envahie  par  les  travaux  s[iéciau\, 
ne  peut^  en  ce  moment,  accorder  une  suffisante  attention  aux  tra- 
vaux des  écoles  du  FéUhrige  et  à  celles  des  Sociétés  savantes  du 
Midi.  Nous  ne  saurions  cependant  nous  dispenser  de  sit:nalcr  le 
vote  par  lequel  V Académie  des  sciences,  agriculture,  arts  et  belles- 
lettres  d'Aix,  a  mis  à  la  disposition  de  la  Société  des  langues  romane» 
une  médaille  en  or,  réservée  au  meilleur  travail  historique  ou  poé- 
tiijue  relatif  il  la  région  provençale.  Sept  délégués  représenteront 
Y  Académie  d'Aix  aux  Fêtes  latines.  Ce  sont:  M.  de  Berluc-Perussis, 
son  président;  M.  le  comte  de  Saporta,  correspondant  de  l'Institut, 
secrétaire  perpétuel  de  \' Académie  ;  M.  Clément  Simon,  procureur 
général  à  la  Cour  d'Aix  ;  M.  de  Seranon,  M.  de  Fonvert,  M.  J.-B. 
Gaut,  bibliothécaire   d'Aix,    et  M.  Guillibert. 

L''.4<Aenee de  Forçai quier  sera  représenté  par  M.  Maurel  ;  le  Féli-  , 
Irige  des  Alpes,  par  son  président,  M.  Descosse.  Ces  deux  associa- 
tions ont  aussi  voté  des  prix  au  Congrès  de  Montpellier. 

* 

♦  ♦ 

Le  Consistoire  des  Jeux  floraux  de  Barcelone  a  tenu,  le  diman- 
che 5  mai,  sa  séance  solennelle.  Ce  même  jour,  la  dépèche  sui- 
vante lui  était  envoyée  de  Montpellier,  au  nom  de  la  Société  des 
langties  romanes,  du  FéUhrige  et  du  Comité  des  Fêtes  latines. 

a  La  Société  romane  et  le  Félibrige  adressent  leurs  félicitations  à 
la  Reine  delà  Fête,  au  Consistoire  et  aux  Catalans,  et  les  convient 
aux  Fêtes  latines  et  catalanes  de  Montpellier,  le  22  mai 

Mistral,  de  Tourtoolon,  Revillout,  Boucherie, 
Alpb.  Roque-Feurier». 
* 

MM.  Paul  Glaize,  Alph.  Roque-Ferrier  et  Gratien  Charvet, 
membres  de  la  Société  des  langues  romanes,  ont  été  nommés  of- 
ficiers d'académie  par  M.  le  Ministre  de  l'instruction  publique. 

* 

♦  « 

Un  article  consacré  à  la  mémoire  de  MM.  Kiihnholtz-Lordat, 
bibliothécaire  de  l'Ecole  de  médecine,  et  Albert  Castelnau,  député 
de  l'Hérault  et  membre  du  Conseil  général,  tous  deux  membres  de 
la  Société  des  langues  ro?rta?ies, n'avait  pu,  malgré  son  peu  d'étendue, 
trouver  place  dans  notre  Chroni(iue,  de  plus  en  plus  envahie  par 
les  travaux  que  notre  Revue  est  obligée  d'insérer.  Mais  nous  n'a- 
vons jias  voulu  laisser  jiasser  les  Fctes  latines  sans  payer  au])ara- 
vaut  notre  dette  en  quelques  lignes  malheureusement  trop  courtes. 
Disons  seulement  que  M.  Kiilmholtz,  dont  la  courtoisie  égalait  le 
savoir,  a  laissé  les  meilleurs  souvenirs  chez  tous  ceux  qui  l'ont 
fréquenté,  et  plus  particuHèrement  chez  ceux  que  leurs  études 
avaient  mis  en  relation  avec  lui.  Quant  à  M.  Castelnau.  homme 
de  travail  et  d'une  rare  droiture  de  caractère,  nous  nous  contente- 
rons de  rappeler  qu'il  a  été  l'un  des  plus  lidèles  amis  â.e.\ei Société  des 
langues  romanes.  Tous  deux  manqueront  à  r\os  Fêtes  latines^  où.  ils 
auraient  si  bien  tenu  leur  place. 


Le  gérant  responsable  :  Ernest  Hamelin. 


DIALECTES   ANCIENS 

l'LXTRAlT 
u'uNE  TRADUCTION  CATALANE  DE  i,A  Légende  doréc 

M.  Biirtsch,  au  paragraphe  54  (p.  88)  de  son  utile  (irun- 
ilriss  zur  Geschichte  der  provenzalischen  LiUralur,  mentionne, 
parmi  les  textes  en  prose  du  dernier  âge  de  la  littérature 
provençale,  une  traduction  de  la  Légende  dorée  de  Jacques  de 
Voragine,  contenue  dans  le  ms.  7265-  (auj.  es/).  44)  de  la  B.  N. 
Désirant  avoir  un  échantillon  de  ce  texte,  je  priai  M.  Bouche- 
rie, qui  se  trouvait  à  Paris  aux  vacances  dernières,  de  copier 
pour  moi,  au  hasard,  une  des  vies  les  plus  courtes.  Il  eut  l'obli- 
geance de  m'envoyer  la  suivante,  qui  est  celle  de  sainte  Anas- 
Tasie. 

Le  lecteur  reconnaîtra  bien  vite  que  c'est  un  texte  catalan, 
et  non  pas  provençal,  qu'il  a  sous  les  yeux.  Ochoa  l'avait  noté 
comme  tel,  et  de  là  sans  doute  son  classement  actuel  à  la  Bi- 
Itliothèque  ;  mais  les  premiers  mots  du  commencement,  trans- 
crits par  cet  auteur,  ont,  dit  M.  Bartsch,  le  caractère  du  pur 
provençal.  C'est  sur  quoi,  n'ayant  jamais  eu  à  ma  dispositioii 
le  catalogue  d'Ochoa,  je  ne  saurais  me  prononcer. 

N'ayant  pas  non  plus  à  ma  portée  le  texte  latin  de  la  l.é- 
(jeiide  dorée,  je  n'ai  pu  en  rapprocher  notre  traduction  ;  j'ai 
dû  me  borner  à  la  comparer  à  la  version  française  de  G[us- 
tavej  B[runetj,  tom.  I,  p.  43,  qui  en  diôère  sur  quelques  points, 
dont  le  principal  est  noté  ci-après.  C.  C. 

(F"  18,  V)  De  senta  Anastasia. 

Aaastasia  es  dita  ab  atia  (jue  vol  dir  en  sus  ;  estant  o  estât 
vol  dir  estasia  ;  per  so  cor  saut'  Anestasia  *  a  en  sus  estec  en 
vertutz  guardan  simetexa  de-  pecats.  Anastasia  [era]  dona  la 

'  Ms.   sauta  nestasia.    —  -  Ms.  éd. 

17 


210  DIALECTES  ANCIENS 

pus  nobla  que  fos  dels  Romans,  que  ïo  fila  d'en  Petraxat*, 
baro  mot  noble  (jui  era  paga,  e  de  la  sua  mare  na  Fausta  qui 
era  crestiana.  Per  lo  bonauyrat  en  Guisogon  -  en  la  fe  de 
Crist  fo  enseyada,  e  pujs  fo  liurada  per  muler  a'n  PubeP. 
Laquai  disia  que  era  malaaute,  per  que  totes  ores  de  la  com- 
payia  del  seu  marit  e  del  seu  ajustament  s'abstenia.  E  quant 
lo  seu  marit  li  ^usi  parlar  de  la  fe  de  Deu  Jhesu  Crist,  ab  una 
serventa  tant  solament  en  lo  vil  abit  dels  crestians  en  una 
carcera^  la  feu  estar,  e  lurs  necessaries  les  feu  donar  e  mot 
destretament  la  feu  gardar.  En  après  el  mana  que  hom  no  li 
donas  à  menjar,  per  so  cor  la  volia  en  axi  punir  et  que  po- 
gues  les  sues  mot  nobles  possédons  aver.  Per  laquai  cosa, 
con  elas'  pensas  tost  a  mûrir,  doloroses  letres  a'n  Guisogon 
trames,  loqual  li  trames  altres  letres  de  mot  grant  consola- 
cio.  Entre  tant  lo  marit  d'elas  mûri,  per  que  ela  fo  mantenent 
de  la  carcer  deliurada.  Laquai  dona  avia  .m.  serventesmot 
bêles  que  eren  sors,  la  una  de  les  quais  avia  non  Agapeme 
l'autra  Cionia  ''  e  Faltre  Irenem  ',  lesquals  eren  crestianes. 
E^  conals  amonestamens  del  loctenent  del  seyor  de  la  ciutat 
obesir  no  volguessen,  en  una  cosa  '  les  feu  (Fo  19)  enclausir 
en  laquai  estegren  les  asines  de*"  la  cosina,  e  col  loctenent  fos 
mot  enamorat  d'eles,  a  eles  ana  per  so  que  ab  eles  la  sua  vo- 
lentat  pogues  complir.  E  quant  lains  fo  intrat,  el  fo  ses  tôt 
sen  en  tant  que,  quant  el  cuvdava  les  auties"  verges  abrassar, 
peyrols  e  pannes  e  cauderes  e  ajtals  coses  semblans  el  abras- 
sava  e  besava,  E  quant  d'aj'so  fo  sadolat,  défera ixi  tôt  soylat; 
e  quant  la  sua  compana  lo  viren  axi  adobat,  eh  se  pensaren 
que  diable  fos  lains  tornat;  per  que  fortmciut  lo  bateren  e  pujs 
lo  jaquiren  raalament  aontat,  E  con  el  al  emperador  s'en  anas 
per  so  que  d'els  se  clamas,  los  uns  lo  batien  ab  vergues  e  los 
autres  en  la  carali  escopien,  els  altressol  pois  sobre  el  gitaven, 
per  so  cor  se  pensaven  que,  si  en  axi  nol  destruiien,  que  en  lo 

1  Trulextat.  —  -  (jlirysogone.  —  -^  Publius  —  ^  Ms.  cartera.  —  =  jd^ 
comme  deux  lignes  plus  bas.  elas  =  ela  se.  —  g  Chionia.  —  '  Ms.  ite- 
nem.  C'est  l'histoire  de  ces  trois  sœurs,  avec  la  burlesque  aventure  de 
leur  amoureux,  quel'ahbesse  Hrotsvitha  a  mise  en  scène  dans  son  drame 
étrange  de  Dulcitius.  —  *•  Ms.  en.  —  '•  Pour  cova '.'  Gi^  serait  l'inverse 
du  prov .  mod.  cauvo  —.causa.  — '"  Ustensiles,  en  prov.  aizinas.  — 
"  Sur  cet  emploi  de  allor,  voy.  Diez,  Grainm.  des  1.  r.  trad  fr.AU,  76-77. 


LA    LEGENDE    DOREE  iU 

seu  offici  séria  tornat'.  Mas  el  no  podia  vescr  si  metex,  |»ei' 
laquai  cosa  el  se  meravelava  per  que  rescarnian  totz  en  axi, 
eon  el[s]  en  mot  grau  honor  lo  solguessen  aver.  Era  a  el  vi- 
gares  que  totz  los  autres  fossen  vestitz  de  motz  blancs  vesti- 
mens.  Empero  el  se  pensava  que,  con  totz  lo  tenguessen  per 
leg  e  per  aurat,  que  les  santés  verges  per  encantementragues- 
sen  en  axi  encantat.  Per  que  les  mana  denant  si  despular-  que 
nuses  les  pogues  el  esguardar.  Mas  mantenent  ab  lur  carnse 
tengren  los  vestimens  en  tal  manera  que  no  les  poc  hom  des- 
pular. El  loctenent  del  seyor  per  gran  maravela  denant  eles 
s'adormi,  en  tant  que  nol  podia  hom  despertar.  En  après  les 
verges  per  martiri  toron  coronades.  E  senta  Anestasia  fo  liu- 
rada  per  Temperador  al  loc  tenent  del  sejor  per  so,  si  la  fasia 
a  les  ydoles  sacrificar,  que  en  après  que  la  agues  per  muler. 
E  con  ela^  enclausis  en  una  cambra  e  la  volgues  abrassar, 
de  mantenent  torna  tôt  sec.  Per  que  s'en  ana  als  deus,  als 
quais  demana  si  garria  d'aquela  malautia  ni  sin  poria  escapar. 
Los  quais  li  responeren  diens  :  «  Per  so  con  senta  Anastasia 
as  tu  fêta  irada,  es  tu  a  nos  liurat  et  d'aysi  enant  ab  nos  tots 
temps  en  jfern  seras  turmentat.  »  E  quant  a  la  casa  fo  adujt, 
entre  les  mans  d'enfans  el  mûri.  E*  adoncs  sancta  Anastasia 
a  alire  loctenent  del  sejor  fo  liurada  per  so  que  la  gardas. 
E  quant  el  oy  dir  "  que  moites  possecions  avia,  privadament 
el  dix  à  santa  Anastasia  :  «  Si  tu  vols  esser  cristiana,  fe  so  quet 
mana  lo  teu  deu  et  desempara  tôt  quant  as,  per  so  cor  Deus 
diu  que  no  es  digne  d'esser  ab  el  sel  qui  renunciar  no  vol  a 
totes  les  coses  que  possedex  ;  on  per  ajso  totes  quantes  coses 
tu  as  dona  a  mi  e  paxes  ne  on  te  vules,  e  axi  tu  seras  vera 
crestiana.  »  Ai  quai  ela  respos  :  «  Lo  deus  meu  mana  a  nos 
dien  :  ven  ®  totes  les  coses  que  as,  el  preu  pujs  dona  a  po- 
bres.  No  dix  ges  a  ries,  e  con  tu  sies   rie,  contrai  manament 


*  Il  paraît  manquer  ici  quelque  chose.  Peut-être  le  texte  est-il  corrompu. 
La  trad.  franc,  n'a  rien  depareil;  à  la  place  de  ces  deux  dernières  lignes, 
depuis  els  altres  sol,  on  y  lit  :  et  on  croyait  qu'il  était  enragé.  —  -  Ms. 
despulal  —  3  Corr.  el  la  ?  —  *  Ms.  en.  —  ^'  Ms.  dit.  —  '•  Au  lieu  de  ce 
mot,  exigé  par  le  contexte  el  qu'indique  d'ailleurs  la  trad.  fr-,  il  y  a 
dans  le  ms.  deux  ou  trois  lettres  peu  lisibles  et  qui  paraissent  donner 
quelque  chose  comme  biu,  ou  biii,  ou  bin. 


■212  DIALECTES  ANCIENS 

(le  Deu  eu  faria  si  alcuua  cosa  a  tu  donava.  E  adonc  senta 
Auestasia  en  una  carcer  fo  per  el  clausida,  en  la  quai  per  fam 
la  cujdava  turmentar.  Mirac.  '  Mas  per  -  sent  Tiieodosi  ^,  que 
ja  era  per  martiri  en  lo  cel  coronat,  per  .11.  meses  dels  men- 
jars  celestials  li  dona  a  menjar.  En  après  fo  trameza  ab  .ce, 
verges  a  les  jles  Palmars,  en  loqual  loc  moites  gens  per  lo 
nom  de  Jhesu  Crist  foren  exilatz.  E  après  paucs  dies  lo  loc- 
tenent  del  seyor  denant  si  los  fe  venir  ;  e  can  fo  Anastasia 
ligada  en  pals,  ab  foc  la  feu  creraar,  els  altres  ab  diverses 
turmens  feu  mûrir,  entre  los  quais  era  .1.  home*  qui  moites 
veguades  per  amor  de  Jhesu  Crist  de  moites  riquesesera^ 
despulat.  Mas  el  tota  hora  disia  als  raubadors:  «  Al  mejns  a 
mi  no  tolretz  Jhesu  Crist.  »  En  après  n"  Apollonia  "^  lo  cors  de 
senta  Anestasia  sebeli  moût  honradament  en  lo  seu  verger, 
en  lo  quai  avia  fêta  primerament  esgleja . 


'  Les  récits  de  [ails  miraculeux  sont  ordinairement,  comme  on  le  voit 
ici,  précédés  dans  le  ms    du  mol  miracle,  abrégé  ou  en  toutes  lettres.    — 
■^  Ce  mot  est  de  trop,  à  moins  qu'on  ne  corrige  plus  bas  .ioiia  en  fo  donat. 
—  3  v;;j  Théodose   est  ici  substitué  par  erreur  à  Ste  Théodore.  —  ^  Ms 
hoîn.  — ■  Suppl.  eslal'?  —  '■  Ms.  na  polloiiia. 


DIALECTES    MODERNES 


TROIS  POESIES  MILANAISES  DE  CARLO  PORTA 


Les  trois  pièces  qui  suivent,  de  Carlo  Porta,  ont  été  déjà  impri- 
mées (1776-1821);  nous  les  reproduisons  ici  à  litre  de  spécimen  du 
langage  de  Milan . 

P.  pRtDA. 


EpITAFFI    PER    EL    CAN    d'oNA    SCIORA    MARCHESA 

Chigh'è  on  can,  che  l'è  mort  nega.a  in  la  grassa 
A  furia  de  paccià  di  bon  boccon; 
Poveritt,  che  passée,  tegniv  de  bon, 
Che  de  sto  maa  no  vee  mai  pu  su  Tassa. 

EpITAPHE  pour  le  chien    o'uNE     [|iAMK|   MAlîQUISE 

Ci-git  un  chien  qui  mourut  étouffé  '  dans  la  graisse — à  force  d'a- 
valer des  friandises  -. — Pauvres  diables  qui  passez,  rassurez-vous. 
—  car  ce  ne  sera  jamais  de  cette  maladie-là  que  vous  irez  dans  le 
cercueil  ^ . 

Maurigai. 

Ve  mandi,  el  mè  car  pader  (iarion, 
La  vostra  tabacchera 
E  on  tocch  ciel  vostTobia, 
Che  avii  desmentegaa  jer  in  cà  mia. 
L'hoo  visitada  pœu  in  tutt  i  canton 


'  Negaa.,  littéralement:  noyé.—-  Di  bon  boccon,  litt.  de  bons  morceaur^ 
—  ^  Su  l'asstA,  mol  à  mot;  sur  la  planche. 


?14  DIALECTES    MODERNES 

Pcr  vedè  de  trovà 

Quaj  coss  d'olter  del  vosi,  ma  no  ghe  n'era  ; 

De  mœud  clie  se  maifussev  rivaa  a  cà 

Senza  coo,  credi  ben  de  favv  visaa 

Che  l'hii  perduu  per  straa. 


Madrigal 

Je  vous  envoie,  mon  cher  père  Garion,  —  votre  tabatière  —  et 
lin  fragment'  de  votre  Tobie,  —  que  vous  avez  oubliés  hier  chez 
moi  -.  —  Je  ['al  fouillée  {ma  maison)  ensuite  dans  tous  les  coins,  — 
pour  voir  si  je  trouvais^  —  encore  quelque  chose  qui  fût  à  vous \ 
mais  il  n'y  avait  plus  rien"  ;  —  de  façon  que  si,  par  hasard,  vous 
êtes  arrivé  chez  vous —  sans  [votre]  tête,  je  crois  bien  devousaver- 
tir^  —  que  vous  l'avez  perdue  chemin  faisant  ''. 

SONNETT  * 

Semm  già  ai  28^  d'april,  gh'  emmla  stagion 
Che  la  p6  minga  vess  pu  mej  d'insci, 
E  no_^se  ved  à  compari  on  rondon 
Che  j'olr'  ann  Teva  ajbella  ch'even  chi. 

Cossa  dianzen  êla  la  reson? 
Stimi  quel  strolegh  ch'el  le  poda  di  ; 
Parlen  tucc,  e  tucc  parlen  a  taston, 
E  a  taston  diroo  anmi  la  mia  de  mi. 

Mi  dighi,  che  avend  vist  in  st'ann  passaa 
Corne  trattcn  con  nun  sti  car  Pattan, 
Se  sarân  resolvuu  de  voltà  straa.  * 

Putasca!  (  avaran  ditt)  se  sti  legrij 
Pelentant  de  suttir  i  cristian, 
Cossa  faran  con  nun  che  semm  usij  ? 


1  On  tocch,  un  morceau.—  -'  In  ca  mia,  lift,  dans  ma  maison.  -  'Pbr 
VEDÈ  DETROVA,  Ult.  pouv  voif  de  trouvcr .  —  '•  Quaj  coss  d'olter  del 
TOST,  litt.  quelque  chose  d'autre  à  vous. —  '  No  ghe  nera.  tl  n'y  en  avait 
pas.  -  •■'  De  favv  visaa,  de  vous  rendre  averti.—  '  Per  straa  ou  pkr 
sTRADA,  ew  route. —  **  Ce  sonnet  contre  l'administration  autrichienne  en 
Ilalie,  a  dû  être  écrit  vers  1816.  —  •'  28.  Vjntott. 


TROIS    POESTES   MILANAISES  215 

Sonnet 

C'est  déjà  le  28  d'avril  ;  nous  avons  une  saison  —  qui  ne  saurait 
être  mieux  [plus  favorable*],  —  et  [  cependant]  l'on  ne  voit  paraî- 
tre aucune  hirondelle 2,  — [tandis]  que  les  autres  années  elles 
étaient  ici  depuis  longtemps. 

Quelle  pourrait  donc  ^  en  être  la  cause  1 — J'admirerais  le  devin 
qui  saurait  le  dire  ;  —  tous  parlent,  et  ils  parlent  tous  au  hasard*  ; 
—  au  hasard  je  dirai  donc  aussi,  moi,  ce  que  je  pense". 

Je  dis  que,  ayant  vu,  pendant  l'année  passée, —  lamaniéredont 
agissent  envers  nous  ces  chers  Allemands'', —  Iles  hirondelles] 
auront  décidé  de  rebrousser  chemin. 

Parbleu'  !  se  seront-elles  dit,  si  ces  braves  gens —  plument  si 
soigneusement  les  hommes  •*,  —  que  nous  feront-ils,  à  nous,  qui 
sommes  des  oiseaux  ? 


*  La.  PÔ  MiNGA  VEss  pù.  MEJ  d'inscî  ,  lilt.  elle  ne  peul  pas  être  (plus) 
mieux  que  cela.  Minga.  comme  l'italien  mica,  n'est  ici  qu'une  par- 
ticule explétive,  qui  signifie  point.  Ce  mol  a  quelque  rapport  avec 
l'espagnol  miga,  migaja,  du  lat.  mica,  qu'on  écrivait  autrefois  migaia 
(Sanchet,  Vocabulario  de  vioces  anticuadas).  —  -  Rondon,  ital.  ron- 
done;  c'est  Ihirundo  apus  des  naturalistes,  qu'on  appelle  en  français,  si 
je  ne  me  trompe,  martinet  noir  —  •'  Dianzen,  c'est  l'it.  diacine,  diamine; 
mais  cette  interjection  n'est  ici  qu'un  mot  explétif,  destiné  à  donner  plus 
de  force  à  la  question  ;  je  l'ai  traduit  par  donc.  —  *  A  taston,  litt.  en  tâ- 
tonnant ;  ital.  tentone.  hrancolando,  a  casacc'io.  a  vanvera  (français,  au 
hasard,  à  la  boulevue.j — ■'  Diroo  anmî  la  mia  de  mî,  lilt.  je  dirai,  moi 
aussi,  la  mienne  (  opinion  )  de  moi.  C'est  un  pléonasme  très-usité  à 
Milan.  En  italien  ,  dira  iopure  la  mia.—  ^  Pattan,  terme  de  mépris  par 
lequel  on  désignait  les  Allemands,  à  l'époque  de  la  domination  au' ri- 
chienne.  J'ignore  jusqu'à  quel  point  ce  mot  peut  avoir  du  rapport  avec  le 
français  pataud  (  personne  grossièrement  faite,  lourdaud  ),  qui  signifie 
proprement  un  jeune  chien  qui  a  de  grosses  pattes  ;  mais  il  me  semble  in- 
contestable que  notre  pattan  a  été  importé  chez  nous  par  les  Espagnols, 
chez  qui  patan  signifiait  manant,  paysan,  rustaud,  d'après  la  grosseur 
des  pieds,  et  surtout  des  souliers  {que  tiene  las  patasgruesas).—'  Putasca, 
jurement  euphémique  pour  puttana.  —  •*  Gristian.  chrétien,  c'est-à- 
dire  homme,  par  opposition  à  bète.  Cette  expression,  peu  chrétienne, 
a  pris  naissance  à  une  époque  oîi  l'on  était  sans  pitié  pour  les  païens 
et  pour  les  hérétiques;  elle  est  restée  dans  l'usage  du  vulgaire,  quoique 
avec  une  acception  moins  odieuse.  A  Milan,  et  surtout  dans  la  campa- 
gne  milanaise,  chrétien  est  encore  synonyme  d'homme 


2lfi  DIALECTES    MODERNES 


RKMABQLIES    SflB    LA    PRONONCIATION 

Che,  chi,  se  prononcent  que,  qu  (  comme  en  italien  )  :  tabacchera,  che 
chi.  tocch. 

Ghe.  ghi,  se  prononcent  gué,  g  i  (comme  en  italien):  ghe  sarà  (il  y 
aura),  dighi.  strolegh . 

Ce,  ci,  cia.  cio,  se  prononcent  comme  en  italien  (  espagnol  :  che.  chi, 
cha,  cho):  cembol  ^piano),  cicciaron  (bavard),  ciar  (clef),  ctod  (clou),  pac- 
cià,  tucc. 

U  se  prononce  comme  en  français  .  lunna  (  lune  ),  lu,  (  il,  lui  ),  pu,  su, 
suttir . 

(Eu,  comme  en  français  :  œuv  (œul),  pœu.  mœud. 

E,  comme  en  italien  :  ved  (voir),  (erée  (serrurier).  E  suivi  de  deux  con- 
sonnes se  prononce,  en  générai  (ainsi  qu'en  italien),  très-ouvert:  semm, 
emm,  ves^  (être).  L'è  est  beaucoup  plus  ouvert  qu'en  italien  :  vedè  (voir;, 
marciapè  (trottoir),  gh'è  (il  y  a).  Lo  mol  fer  (fer)  se  prononce  comme  en 
français  :  c'est  une  exception . 

Les  doubles  voyelles  à  la  fin  des  mots  se  prononcent  en  traînant  un 
peu  la  voix.  C'est  la  terminaison  ordinaire  des  participes  passés  (  exem. 
pies:  andaa  (allé),  perduu,  visaa.  rivaa,  straa,  finii  (fini),  et  de  la  seconde 
personne  du  pluriel  des  verbes  (p.ir  exemple  :  andée  (allez),  vegnii  (  ve- 
nez), parlée  (parlez),  disii  ou  disij  (dites).) 

J  a  le  son  italien  d'un  i  :  jer,  legrij . 

En  a  un  son  approchant  de  la  même  syllabe  dans  les  mots  français 
bien,  tien,  sien  (  mais  avec  l'e  moins  ouvert  ):  ben  (bien),  fen  (foin),  sen 
(sein). 

Un  n'est  pas  aussi  nasal  qu'en  français  ;  le  son  du  u  y  est  conservé  : 
nun  (nous),  vun  (un). 

On  est  nasal,  mais  la  voyelle  y  conserve  le  son  du  u  italien  (ou),  comme 
dans  les  mots  suivants  :  ona,  bon  ;  boccon,  Tobia,  hoo  (j'ai),  coo,  stagion, 
diroo.  Le  premier  o  du  mot  boccon  se  prononce  ou  par  exception  ;  car,  en 
général,  l'o  suivi  de  deux  consonnes,  s'approche  plus  du  o  ouvert  italien: 
mort,  tocch,  vost,  rost  (rôti),  olter. 

Scia,  sce,  sci,  scia  (  u  italien),  sciu  (  u  français  ),  comme  en  italien 
(  français:  cha,  ché,  chi,  cho,  chu  ):  scior,  sciora,  etc. 

Le  V  final  se  confond  souvent  avec  l'f.  comme  dans  les  mots  œuv,  ciav 
(clef). 


<-^^:^'G\J»<2((î'^S<^  o 


UN  ALLELUIA  PASCAL  EN  VELAY 


Ce  chant  m'a  été  communiqué  par  so^ur  Hippolyte  Chauchat,  institu- 
trice à  Ghamalières  (Haute-Loire).  Sœur  Ghaucliat  l'a  appris,  il  y  a 
une  trentaine  d'années,  à  Saint-Jeau-la-Clialm,  canton  de  Gayres,  même 
département  Elle  m'en  envoya  deux  copies,  qui  ne  sont  pas  d'une  en- 
tière similitude 

V.  8mith 


Las  très  Marias,  de  i,^ron  maqui, 
Partoun  pré  vire  Jésus-Christ  ; 
Crégien  troubâinseveili. 
Alléluia  !  alléluia  !  alléluia  ! 

Chi  nin  prenoun  gronda  quanquità 
D'aroumatas,  pré  imbouma, 
Pre  imbouma  son  coir  sacra. 
Alléluia  !  {ter) 

Chi  nin  guigien,  de  tins  in  tins  : 
«[  — De  que  farin  quon  y  sarin, 
Lou  toumbeau  poudrin  pas  bada.  » 
Alléluia  !  (  ter) 

Toutas  très  soun  bien  estounadas 
Troubâ  la  peira  renversada, 

UN  ALLELUIA    PASCAL  EN  VKLAY 


Les  trois  Maries,  de  grand  matin,  —  [iart,oiil  pour  voir  Jnsus- 
Christ  ;  —  elles  croyaient  [le]  trouver  enseveli.-  Aliehiia  !  alloluia  ! 
alléluia  ! 

Elles  prennent  grande  quantité —  d'aromates,  pour  embaumer, 
—  pour  embaumer  son  corps  sacré.  —  Alléluia! 

Elles  disent,  de  temps  en  temjis  : — «  Que  ferons-nous  quand  nous 
y  serons?  —  Le  tombeau  ne  pourrons  pas  ouvrir.»  —  Alléluia' 

Toutes  trois  sont  bien  étonnées  —  [de]  trouver  la  pierre  renver- 
sée, —  un  ange  de  chaque  côté.  —  Alléluia! 


218  DIALECTES    MODERNES 

En  anzié  de  caque  coustâ. 
Alléluia  !  (  ter  ) 

((  — De  que  venez  faiere  iqui  ! 
Aquin  que  tserquâ  z-ès  parqui  : 
Lou  Sauveur  es  réchuchétâ.» 
Alléluia  !  {te?') 

Magdaleina,  touta  troublada, 
Couri,  touta  esçavalada, 
Lou  zarguignié  s'in  vaye  troubà. 
Alléluia  !  {ter) 

«  — Ch  'acos  es  vous  que  l'avez  près, 
Guisèz-me  d'oun  Tavèz  bouta, 
Que  iéun  lou  voile  impourtâ.  » 
Alléluia  !  {ter) 

Magdaleina  n'aziama  pas  ', 
Chi  z-ès  prou  foirta  pré  l'impourtà, 
L'amour  i  faje  tout  sourmountâ. 
Alléluia!  (M 

«  —Maria,  me  counniunsez-vous  pas  ? 
Sèje  vouste  mestre  réchuchétâ; 
De  la  moir  aje  triumplu'i .  » 
Alléluia  !  {ter) 

Magdaleina  lou  von  imbrassâ, 
Maisoun  boun  mestre  vou  von  pas. 

((  —  Que  venez-vous  faire  ici? — Celui  que  vous  cherchez  est  parti  : 
—  le  Sauveur  est  ressuscité  !  »  —  Alléluia  ! 

Magdeleine,  toute  troublée,  —  courait,  tout  échevelée  ;  —  le 
jardinier  elle  s'en  va  trouver.  —  Alléluia  ! 

« — Si  c'est  vous  qui  l'avez  pris, —  dites-moi  où  vous  l'avez  mis, — 
car  je  le  veux  emporter.  »  —  Alléluia! 

Magdeleine  n'examine  pas  —  si  elle  est  assez  forte  jiour  l'empor- 
ter; —  l'amour  lui  fait  touc  surmonter.  —  Alléluia  ! 

<< — Marie,  ne  me  coniiaissez-vous  pas? — Je  suis  votre  maître  res- 
suscité ;  —  de  la  mort  j'ai  triomphé.  »  —  Alléluia  ! 

Magdeleine  le  veut  embrasser, —  mais  son  bon  maître  ne  le  veut 
pas ,  —  «  Dans  ma  gloire  je  ne  suis  pas  monté.  »  —  Alléluia. 

1  Dans  la  seconde  copie,  sœur  Chauchat  écrit  n'azeima  pas 


UN    AT.I.ELUIA   PASCAL    EN  VELAY  219 

«  — Q-uin  ma  gloira  sèye  pas  mountâ. 
Alléluia  !  {ter) 

«  —  Magdaleina,  ana  anounça 
Mous  apôtres  sèye  réchuchétâ, 
Et  lous  anaraye  végitâ  !  » 
Alléluia  !  {tet^) 

Lou  Seigneur  part  pré  Emmaiis; 
Ciuin  souri  tsami  u'o  rincouiitrâ 
Dous  dischipies  bien  tracassa. 
Alléluia  !  {(er) 

a  —  De  qu'es  aco  que  [vos]  parU'i. 
Que  paraichez  ton  afflizâ  ? 
Quauque  malheur  es  arribâ  ?  » 
Alléluia  !  (tet') 

«  —  Chau  sag'uacbà^bien  inlougnâ 
Pré  pas  soupre  que  s'ès  passé 
Cointra  Jésus  Nazarethâ, 
Alléluia  !  (ter) 

î  Noustous  prestres  l'on  arrestâ, 
Et  méchamin  l'on  flagella, 
Et  en  lin  l'on  crucifia. 
Alléluia  !  (ter) 

»  Lou  Seigneur  gui  'von  de  mouri  : 
«  Guin  très  zours  réchuchétari.  » 

«  Magdeleine,  allez  annoncer — [à]  mes  apôtres  [que]  je  suis  res- 
suscité, —  et  [que]  je  les  irai  visiter.  »  —  Alléluia  ! 

Le  Seigneur  part  pour  Emmaùs; — dans  son  chemin  il  a  ren- 
contré —  deux  disciples  bien  tracassés.  —  Alléluia  ! 

«  De  quoi  parlez-vous,  —  que  vous  paraissez  tant  affligés  ?  — 
Quelque  malheur  est-il  arrivé?  »  —  Alléluia  i 

11  faut  [que]  vous  soyez  de  bien  loin,  —  pour  pas  savoir  [ce]  qui 
s'est  passé  — contre  Jésus  de  Nazareth.  —  Alléluia! 

«Nos  prêtres  l'ont  arrêté,  —  et  méchamment  l'ont  flagellé,  —  et 
enfin  l'ont  crucifié!  —  Alléluia! 

«  Le  Seigneur  dit,  avant  de  mourir  :  — «  Dans  trois  jours  ressusci- 
terai. »  —  Cependant  ce  temps  a  passé.  »  —  Alléluia  ! 


?20  DIALECTES    MODERNES 

Cepindin  quin  tins  o  passa.  » 
Alléluia!  (ter) 

«  —  Ome^.  que  z'avèz  puan  de  foi. 
Pré  pas  crire  la  véritâ, 
Lous  prouphètas  ount  announçà.  » 
Alléluia!  {te)') 

Quon  saguèi'oun  à  Emmaiis, 
Lous  dischiples  prieroun  .Jésus. 
De  vegni  se  repounsa. 
Alléluia  !  {ter) 

Quon  Jésus  saguèt  àsoupà, 
Prenguet  de  po,  lou  counsacrà, 
Et  lous  faguet  tous  communia. 
Alléluia  !  {ter) 

Quon  lou  soupa  saguèt  'çabâ, 
Lou  Sauveure  se  sépara, 
Lous  dischiples  bien  estounà. 
Alléluia!  [ter] 

—  M  Ne  sinquièns  pas  toun  coeur  imbrasà 
Din  tins  que  .Jésus  o  parla? 

Que  sin  esta  muan  avisa  !  » 
Alléluia!  alléluia  !  alléluia *! 

((.  Hommes,  que  vous  avez  pou  de  foi, — pour  ne  pas  croire  la  vé- 
rité,— [que]  les  prophètes  ont  annoncée,  w  —  Aileluia: 

Quand  ils  furent  à  Emmaiis, —  les  disciples  prièrent  Jésus —  do 
venir  se  reposer.  —  Alléluia  ! 

Quand  Jésus  fut  à  souper,—  il  prit  du  pain,  le  consacra, —  et  les 
fit  tous  communier.  —  Alléluia  ! 

Quand  le  souper  fut  achevé,  —  le  Sauveur  se  sépara  [d'eux]  ;  — 
les  disciples  bien  étonnés  :  —  Alléluia  ! 

«  Ne  sentais-[tu)  pas  ton  cœur  embrasé,  —  du  temps  que  Jésus 
a  parlé? —  Que  nous  avons  été  peu  clairvoyants  !  » —  AUeiuia  1  allé- 
luia! alléluia  ! 

1  Dans  sa  seconde  copie,  sœur  Chauchal  écrit: 

—  «  Yeun  sinqui  mouu  cœur  întlammâ 
Din  tin  lou  Sauveur  o  parla; 
Quesins  intâ  muan  avisai  » 

'yj\jyj\n-  • 


POUEISIAS  DIOIAS  DE  GUSTE  BOUEISSIEK 


11  y  a  quelques  années,  s'éteignait  à  Die  un  modeste  poète  (jui 
n'a  juis  fait  grand  bruit  dans  le  monde,  mais  qui  cependant  ne  mé- 
ritait pas  qu'une  profonde  obscurité  enveloppât  son  nom. 

Ce  poëte  se  nommait  Auguste  Boissier.  A  part  ses  amis  et  deiix 
ou  trois  bibliophiles  dauphinois,  personne,  nous  en  sommes  sûr, 
n'a  jamais  lu  un  seul  de  ses  vers  ;  ses  œuvres,  d'une  rareté  ex- 
trême, ne  sont  pas  même  certaines  de  vivre  de  longues  années  sur 
les  rayons  de  quelques  bibliothèques  poudreuses.  — Le  lecteur  nous 
comprendra  tout  à  l'heure. 

Un  des  compatriotes  de  Boissier,  M.  Adolphe  Rochas,  le  savant 
auteur  de  la  Bloijraphie  du  Dauphiné,  estle  seul  écrivain  qui  se.soit 
occupé  de  lui*.  Dans  une  c'narmante  petite  brochure,  introuvable 
aujourd'hui,  car  elle  ne  fut  tirée  qu'à  Vô  exemplaires,  il  nous  ra- 
conte la  vie  intime  du  poëte,  d'abord  simple  ouvrier  tanneur  à  Die, 
sa  ville  natale;  son  tour  de  France,  et  eulin  son  arrivée  à  Paris 
et  sa  visite  à  un  de  ses  oncles.  M.  Payan,  grand  négociant  en  lin- 
gerie. —  Sur  l'offre  que  lui  fit  son  oncle  de  le  garder  avec  lui, 
Boissier  renonça  sans  regret  à  son  métier,  qu'il  aimait  peu,  et  de- 
vint dessinateur  en  broderies.  —  Dans  cette  nouvelle  position,  il 
eut  des  loisirs  qui  lui  permirent  de  se  livrer  à  son  goût  pour  la 
poésie;  et  de  cette  époque  datent  ses  premières  productions.  Boissier 
avait  le  désir  naturel  qu'éprouvent  tous  'es  jeunes  auteurs,  celui 
de  livrer  ses  poésies  à  l'impression.  Mais  ses  appointements  étaient 
modestes,  et,  à  Paris  comme  en  province,  les  imprimeurs  ne  font 
pas  crédit.  La  difficulté  était  grande  ;  mais,  animé  du  feu  sacré,  il 
ne  devait  pas  se  laisser  abattre  par  ce  premier  obstacle  ;  il  se  sou- 
vint de  la  chanson  qui  dit: 

Lorsqu'on  n'a  pas  de  quoi  payer  sou  terme, 
il  faut  avoir  une  maisou  à  soi  ; 

et.  trop  pauvre  pour  faire  imprimer  ses  vers,  il   résolut  de  les  im- 
primer lui-même. 


'  On  trouve  cependant  des  comptes  rendus  de  divers  fascicules  de 
Boissier  dans  1h  Courrier  de  la  Drùme  années  1843  et  1853).  Ces  articles, 
signés  A.  M . ,  sont  de  M  .  Alexis  Mustou . 


222  DIALECTES    MODERNES 

Voici  comiueiii  il  s'y  prit  :  je  cude  la  parole  à  M .  Hochas. 

a  II  avait  la  patience  d'écrire  lui-même  la  pièce  qu'il  voulait  re- 
»  produire,  sur  <lu  papier  fort  mince,  en  caractères  imitant  ceux  de 
»  r impression.  11  disposait  les  pages  comme  elles  sont  sur  une 
"/brme  d'imprimerie.  Cette  première  opération  terminée,  il  avait 
•>  la  patience  non  moins  grande  de  piquer  les  contours  de  chaque 
•)  lettre  avec  cet  instrument  particulier  dont  t'ont  u.-agc  les  de.ssina- 
»  leurs  en  broderie.  Il  obtenait  ainsi  des  pages  (soit  8  pour  rin-8°) 
>)  dont  tous  les  caractères  étaient  percés  à  jour  par  de  petits  trous 
»  très-rapprochés.  C'était  là  sa /orme,  à  lui.  Jl  en  faisait  une  sem- 
»  blable  pour  l'antre  côté  de  la  feuille.  Chacune  de  ces  deux  formes 
»  était  placée  l'une  près  de  l'autre  sur  une  feuille  de  papier  blanc, 
»  et  il  promenait  sur  les  pages  ainsi  préparéos  un  tampon  forte- 
»  ment  imprégné  d'une  poussière  impalpable,  composée  de  résine 
»  et  d'un  matière  colorante  (noire  ou  bleue).  Cette  poussière,  pas- 
«  sant  au  travers  des  petits  trous,  venait  former  sur  le  papier  blanc 
rt  les  caractères  de  la  forme.  Il  exposait  ensuite  la  feuille  à  un  feu 
»  ardent  :  la  chaleur  faisait  adhérer  la  jjoussière  résineuse  au 
^)  jiapier,  et  les  caractères  étaient  fixés.  Il  recommençait  la  même 
"  opération  pour  le  verso  de  la  feuille,  et  ainsi  de  suite  pour  toutes 
>>  les  autres. 

«  Cette  manière  d'imprimer  était  de  l'invention  de  Boissier;  il  en 
»  tirait  vanité  et  en  faisait  un  gros  mystère  pour  les  profanes.  Mal- 
)>  heureusement,  on  le  comprend,  la  résine  qui  fait  adhérer  la  ma- 
»  tière  coloi'ante  au  papier  ne  saurait  être  d'une  bien  longue  durée, 
»  et  les  caractères  ainsi  tracés  doivent  tinir  par  disparaître.  Cepen- 
»  dant,  je  conserve  depuis  vingt-six  ans  un  exemplaire  do  ses  œu- 
»  vres  et  je  n'y  remarque  pas  d'altération  sensible.  » 

Cette  impression,  qui  coûtait  tant  de  travail  et  tant  de  soins,  ex- 
plique l'extième  rareté  des  recueils  poétiques  de  Boissier.  Le  plus 
souvent,  il  réunissait  quelques  poésies,  en  formait  un  fascicule,  qu'il 
lirait  à  quelques  exemplaires,  et  les  adressait  à  ses  meilleurs  amis, 
l'ersonne  n'a  jamais  su  combien  d'exemplaires  ont  été  ainsi  épar- 
pillés. 

«  Combien  a-t-il  imprimé  de  fascicules,  dit  encore  M.  Rochas,  et 
v  que  sont-ils  devenus?  Je  ne  saurais  le  dire;  mais,  sur  mes  vives 
»  instances,  il  se  décida  un  jour  à  faire  tout  exprès  pour  moi  un 
»  recueil  à  peu  près  complot  de  ses  ouvrages  poétiques.  C'est  un 
1)  volume  que  je  conserve  précieusement,  comme  une  vraie  curio- 
K  site,  car  il  n'a  été  tiré  qu'à  deux  exemplaires,  un  pour  moi,  l'autre 
»  pour  l'auteur.  En  voici  le  titre  et  la  description  : 


POUEISIAS    DIOISAS  223 

POUEISIAS   DIOISAS 

DE 

GUSTE    BOUEISSIER. 


PORIS    

Eimpiima  per  elou  d'uno  nouvMlo  moiiirro 

)'  1  vol.  in-8»,  (le  5  feuillets  préliminaires,  non  chifîrés,  pour  les 
titres  et  l'approbation  facétieuse  du  curé;  336  pages  chiffrées  et 
•28  feuillets  non  chiffrés,  pour  le  glossaire  et  la  table.  » 

Grâce  à  la  générosité  de  M.  Boissier,  greffier  de  la  justice  de 
paix  à  Die,  un  des  neveux  et  des  héritiers  du  poëtc,  nous  possédons 
le  recueil  même  d'Auguste  Boissier.  considérablement  augmenté, 
puisqu'il  a  480,  pages,  au  lieu  des  336  de  l'exemplaire  de  M.  Rochas. 
C'est  donc  an  volume  unique  que  nous  possédons  et  que  nous 
sommes  fier  de  montrer  aux  bibliophiles. 

Les  Poueisias  dioisas  se  composent  d'un  grand  nombre  de  fables 
et  d'épigrammes,  d'une  comédie:  lou  Retour  dins  lou  Diois,  et  de 
trois  poèmes,  dont  l'un,  lou  Siège  de  Solliens,  est  un  petit  chef- 
d'œuvre,  imité  du  Siège  de  Cadei-ousse,  de  l'abbé  Favre. 

A  part  quelques  fables  insérées  dans  le  Journal  de  Die,  les 
œuvres  de  Boissier  sont  complètement  inédites.  Depuis  longtemps, 
nous  pensions  qu'il  serait  égoïste  de  garder  pour  nous  seul  tant 
de  charmantes  poésies,  et  nous  avions  l'intention  de  les  publier,  en 
laissant  de  côté  les  moins  bonnes.  Un  bibliophile  de  Provence, 
M .  Léon  de  Berluc-Perussis,  a  bien  voulu  nous  faire  ouvrir  les 
colonnes  de  la  Revue  den  langues  romanes  ;  qu'il  reçoive  ici  nos  sin- 
cères remerciements. 

Outre  les  Poueisias  dioisas,  Boissier  a  encore  publié  quelques  ro- 
mances en  français  et  en  patois,  d'après  le  procédé  expliqué  plus 
haut.  Je  n'ai  jamais  pu  en  savoir  le  nombre  exact;  mais,  après  de 
nombreuses  recherches,  je  suis  parveim  à  en  trouver  trois.  M.Ro- 
chas ne  les  mentionne  pas  dans  sa  notice. 
En  voici  la  note  bibliographique  : 

\o  L' Orphelin.  —  Paroles  d'Auguste  Boissier,  musique  de 
M,  Panseron. (Paris,  in-4°.  sans  date.) 

^°  Retour  au  pays  natal.  —  Romance.  —  Paroles  d'Auguste  Bois- 
sier, musique  de  M.  Duprez.  (Paris,  in-4o,  sans  date.) 


224  DIALECTES    MODERNES 

3»  Lou  Bergitr  omuueiruux . —  Houmonro.  —  Poraoulas  dé  Guste 
HouEissiKR.  musiqiio  dé  M.  Kinilé  Raoux.  (Poris,  in-4",  sans  date.) 

Plus  tard,  sur  la  lin  do  sa  carrière.  l'aïUeur  avait  abandonné  la 
poésie  pour  se  livrer  à  des  études  historiques  et  ])liilologiques.  Il 
a  laissé  en  manuscrit  des  notes  sur  l'histoire  du  Diois;  une  Vie  de 
Franhlin,  que  nous  publierons  probablement  un  jour,  et  son  ou- 
vraiîe  le  plus  important  :  Glossaire  du  patois  de  Die  (Drame).  — Cet 
ouvrage  est  divisé  en  trois  parties  :  1°  Glossaire  géographique;  2» 
Essai  d'une  grammaire  ;  3°  Notices  biographiques,  formant  2  vol.  petit 
in-8".  Le  tom.  P' a  191  pag.;  le  tom.  II*,  198  pag.—  Année  1863. 

Les  Notices  hiographiques  ne  contiennent  que  quelques  noms; 
mais  V Essai  d'une  grammaire  pourra  être  d'un  grand  secours  à  ceux 
qui  veulent  lire  ou  écrire  le  sous-ilialecte  de  Die.  Le  Glossaire  est 
une  œuvre  considérable,  quia  dû  coûter  d'immenses  recherches  à 
l'auteur. 

Sur  notre  pro])Ositioii.  la  Société  d'archéologie  de  la  Drame  a  bien 
voulu  en  publier  un  abrégé. 

Auguste  Boissier  était  né  à  Die,  le  15  août  18(J2.  Quand  vinrent 
les  dernières  années  de  sa  vie,  il  se  retira  dans  sa  ville  natale,  qu'il 
aimait  beaucoup;  il  s'y  est  éteint  au  milieu  de  ses  parents  et  de 
ses  amis,  le  1  janvier  1867. 

A  la  longue,  le  temps  effacera  rim[)ression  du  volume  des  Poué^*- 
siasdioisas.  Kn  les  rééditant  aujourd'liui,  la  Société  pour  V étude  des 
langues  romanes  les  sauve  d'une  mort  inévitable.  C'est  un  véritable 
service  qu'elle  rend  à  la  littérature  de  la  langue  d'oc  et  de  ses 
nombreux  sous-dialectes . 

.Iules  Saint-Hémv. 


LOU 

SIHGÉ    DE   SOLLIENS 
Pouémé  en  4  chonts 


Oquoou  pouémé  n'eï  pas  de  mi  tout  soulé,  l'aï  tira  d'un  ouvragé 
de  moussus  lou  cura  Fabré.  Si  quaouon  trouvoqne  lous  persouna- 
geis  ([ue  liai  bouta  soun  pas  bien  poueti(jueis,  coumo  etont  d'uno 
counditiau  que  passo  per  être  coumuno.  reipoundrei  qu'un  fessouei- 
lier,  0(1  tout  aoulré  poysont  que  vai  trovoyas  tout  lou  jous  O'jurabi- 
soulé  per  uouris  sous  sorablableis,  voou  ooutont  (jue  lou  prumier 
veint-'u. 


POUEISIAS   DIOISAS  225 


CHONT 


Yoou  quai  dejo  sus  moun  poys 
-     ■       Fa  quaouqueis  vers  bouos  ou  moris, 
Ou  bien  mountra  que  soun  liistoiro 
Ogu  perfeis  sous  jous  de  gloiro; 
Einquei,  si  Clio  m'aido  un  paou, 
Lo  besougno  n'irec  pas  maou, 
Car  devou  eiiontas  las  olarmas, 
Lo  coulero,  lou  bru,  las  armas, 
Et  lo  famino  que  dins  Dio*; 
Reindet  tout  sec  coumo  de  tio. 
Onein,  vieillo  nymplio,  courage  ! 
S'ogis,  eissi.  de  fas  topage  ; 
Quentei  lo  fenno  qu'amo  pas 
Un  paou  de  trin,  un  paou  borjas  ? 
Nei  pas  tout,  per  être  tronquille, 
Invouqueins  eincas  moun  Virgile. 
Poulitou  i  !  ti  que  lou  prumier 
As  si  bien  chonta  lou  bergier, 
Sorias  moun  dioou,  sorias  mo  rito, 
Si  m'inspiravei  de  TEigypto; 
Noourioou  pasbesoun  coumo  oco 
D'invouqua  lo  muso  Clio, 
Ni  d'onas  mountas  embe  peno 
0  lo  sourco  de  l'Hypoucreno. 
Oquello  aïgo  qu'ei  tont  vonta, 
Sioou  sur  que  n'ei  pas  lo  meita 
Si  bouono,  si  freicho  et  si  neto, 
Qu'oquello  de  lo  Chonoleto  ■'. 
Oh!  paouroyoou  !  si  souloment 
Pouvioou  m'obuoouras  un  moument 

'  Die,  sous-préfeciure  du  déparlement  de  la  Drùme. 
■^Hip'poMe  Arnoux.'de  Die),  ancien  médecin  du  vice-roi  d'Egypte,^  a 
traduit  en"vers  patois  très-remarquables  la  première  églogiie  do  Virgile. 
3  Ghenelette,  nom  d'une  fontaine  de  Die. 

8 


220  DIALECTulS     MODERNES 

0  souu  bournec,  queintou   courage 
Poueirio  dounas  un  taou  breuvage  ! 
Si  nein  bevioou,  veiriec  de  vers 
Que  sorion  pas  piqua  doous  vers; 
Mais,  hélas  !  dins  lo  eopitalo, 
L'aïgo  que  lou  Diois  ovalo 
N'ei  pas  trop  bien  counditioouna; 
Ooussi  soré  pas  eitouna 
Si  dins  tout  ce  que  voou  vous  dire 
On  pouo  li  trouvas  o  redire  : 
Quoique  nein  sied,  foou  coumeinças 
Ce  qu'aï  proumei  de  retroças. 

Lio  soixante  ons  qu'uno  fonino 
Pourtec  ves  Dio  lo  fonconino, 
Si  bien  que  dins  oquoou  pays, 
On  Tei  vejo  que  d'eicrussis. 
Las  fennas,  que  soun  pas  bien  fouortas, 
Eroun  pâlas  coumo  de  mouortas; 
Lour  couorps,  de  F  un  o  l'autre  bout, 
Semblavo  un  monche  d'eicoussout. 
Lous  hommeis,  plus  maïgreis  eincaro. 
Ovion  l'air  doou  paoure  Lazaro,. 
Et  lou  meindre  veint  que  fosio 
Lous  poussavo  vounté  voujo, 
Coume  la  neou  dessus  Glondaço  ', 
Que  Taouro  faï  chongeas  de  plaço 
Ein  Teilevont  d'eici,  d'eilaï, 
Et  que  bientoou  Ton  vé  que  chaï 
Dins  las  runas,  dins  las  béleiras, 
Per  fourmas  oquelas  counieras 
Que  deissinoun  L  et  lou  T, 
Qu'on  vé  dins  lou  mei  de  juillet. 

On  veyo  plus,  dins  oquoou  caïre, 
Ni  cueisiner,  ni  jis  de  criaïre 
Veindre  de  pourchet,  de  chobris, 
D'eipourchalias,  de  répoursis. 
Oou  morcUa,  peindont  lo  semanu, 

'  Glandasse,  monlagne  du  Diois. 


POUEISIAS   DIOISaS  227 

N'orrivovo  pas  une  grano 
De  Pouvoûu,  d'Oourcl,  d'Oucellou, 
De  Lus,  de  Nounlaou.  de  Meinglou': 
Car  dins  tous  oqueloux  villageis, 
Lous  poysons,  per  lous  meinageis, 
Gordavoun  lours  geiças,  lours  sens, 
Lour  blat  et  lours  moris  ogneux. 

Lous  chonoineis,  que  d'ordinaire 
Soun  plus  gras  que  lou  nécessaire, 
Chaque  jous,  faouto  de  fricot, 
Veyon  deicoutlas  lour  jobot  ; 
Au  meintou  lo  peou  peindoulavo. 
Ce  que,  mofé,  lous  ofligeavo 
De  veire  lours  jallias  portis 
Sein  poueire  las  fas  revenis. 
Cependent  oquello  fomino 
Lous  dounavo  si  triste  mino, 
Que  nein  sorions  tous  orleinqui, 
Sein  l'ovonturo  que  voqui  : 

Un  moine,  ein  venont  de  lo  queto, 
Opreinguec,  dins  uno  guingueto, 
Que  venio  d'orrivas  de  greins 
Dedins  lo  villo  de  Solliens. 
Oou  couveint  pourtec  lo  nouvello  ; 
Mais  lous  frereis,  coumo  lo  grèlo, 
Cheigueroun  dessus  lou  poquet 

Que  pourtavo  Tabbé  Rousset  : 

Tellement  que  lou  chef  de  Tordre 

N'oguet  casi  plus  ren  per  mouordre  . 

Qu'on  vouogueroun  tout  ochoba, 

Sein  coui*oun  tous  o  Telveicha  - 

Direo  Teiveque,  oou  grond  vicaire. 

Ce  qn'ovio  rocounta  lou  frère. 

0  lo  pouorto,  oqueloux  toundus 

Picheroun  coumo  de  perdus; 

Tout  qu'olofin  uno  chombreiro 


Villages  du  Diois. 

Avant  la  Révolution,  Die  était  le  siège  d'un  évèché. 


2?S  DIALECTES    MODERNES 

a  Criée:  Qui  picho  de  lo  choreiro?  » 
Lous  aoutreis  reipouondoun  :  «  Dubrec. 

—  Mais  disec-me  ce  que  voulec  ? 

—  0  votre  meitre  venein  dire 
Quaoucoré  que  lou  forec  rire. 
Voqui  :  veneiu  per  l'overtis 
Que  n'oourein  pas  plus  o  potis. 

—  Tenec,  Teintondou  (jue  devalo  : 
Li  poueiré  porlas  dinslo  sallo.  » 
On  eiffet,  Desaupiers-Desplon  i 
Lo  .seg'uio  de  près  ein  disoni  : 

M  Queisoquo?  Yenec  veire  ein  foulo 
Si  per  eissi  sourtein  de  roulo 
Uno  cacha  de  chaoux,  de  peis. 
De  tortifleis  et  de  noveis  ? 

—  N'oourion  pas  oquello  insoulonço  : 
Venein  dire  o  votre  excellenro 
Qu'o  Solliens  l'ai  veint  d'arrivas 

De  blat  o  nein  sovès  que  fas. 
--Dupei  quond.  dins  oquellu  villu 
Font  plus  coreimo  ni  vigilo  ?  » 
Répliquée  Teiveque  surprei. 
((  Dupei  lou  vue  d'oquestou  mei. 

—  Ocosufit,  reverond  père, 
Vous  souhaitou  lous  nécessaire.  » 
Oqui  dessus  lous  eimondec, 
Priée  lou  Segneur,  et  deijeinec. 
Dioou  sa  si  pichec  fouort  et  ierme  : 
Crejout  pas  que  Fioguesse  un  ternie. 
Las  brisas,  o  chaque  mourcec, 
Sooutavoun  dessus  soun  chopec. 
Opres  deijeinas,  mondée  caire 
Mounard,  Rousset  de  ves  lou  Serre, 
Sara  Micou,  Conel,  A'oulé, 
Nevers,  Roussignol,  Jon  Livé, 
Rocho.  Ooudifret,  Bounard,  Micalo, 


*  Désaugier-Déplan.  évêque  de  Oie. 


POUEISIAS    DIOISIAS  -^29 

Fringado,  Potocou,  Dessalo, 
Et  quaouqueis  aoutreis  poroissiens, 
Per  onas  tout  dret  ves  Sollicns. 
N'oyont  ni  tombour  ni  troumpeto, 
Porteroun  un  fifre  o  lo  têto, 
(^hacu  soun  fusi  sus  lou  couol, 
Et  Mounard  boutée  soun  oscuol. 
Per  goûtas,  oou  plus  près  village 
Trouveroun  qu'un  paou  de  froumage  ; 
Mais  rioguec  quaoucoré  de  mai 
0  soupas,  lou  vepre,  o  Pountaï  ^ 

Lou  lendemon,  o  peno  Taoubo 
Oguec  bouta  so  bello  raoubo 
Per  soluas  lou  dioou  doou  jour. 
Tout  preste  o  fas  soun  pecho  tour, 
Que  toute  notro  corovano 
Doous  Solliensoux  -  veguec  lo  piano. 
Pejtoout  Germillio,  en  juont  un  air, 
Boutée  toute  lo  villo  en  l'air. 
Un  homme,  olors,  de  lo  murayo, 
Criée  :  ^  Paouro  yoou,  queinto  cliorpajo 
Compo  dovont  notre  pourtaou  ! 
Si  siens  pas  mouorts,  de  rein  sein  taou  : 
Veiren  plus  uno  aoutro  semano. 
Si  secouyens  pas  lo  campano. 
Tout  lou  mounde  tont  s'eifroyec 
Que  lou  togoci  se  sounec  ; 
Et,  sein  soungeas  o  se  défeindre, 
Porlavoun  dejo  de  se  reindre. 

«  Onein,  siec  de  fiers  eiporbaoux  ! 
Foouti  que  quaouqueis  peleraoux 
Devein  fas  reindre  notro  villo  ?  » 
Dissecl'un  d'eloux,  plé  de  bilo. 
a  Ovont,  infourmec-vous,  ooumeins, 
Ce  que  voloun  oquelas  gens. 
Venoun  de  siblas.  . .  Mais  Ton  sible, 

*  Pontaix,  village  situé  eûtrj  !>aillans  et  Die. 
2  Habitants  de  Saillans. 


2'0  DIALECTES     MODERNES 

Faï  pas  que  Ton  sié  bien  terrible  ! 
Si  voulec,  yoou  voou  tout  doré 
Eilaï,  veiré  oqueloux  pas  ré.  » 
Tous  li  reipouondoun  :  a  Lofeuillailo. 
Chorgec-vous  d'oquello  embossado  ; 
Vous  qu'ovec  pas  l'esprit  troubla, 
Onec  veire  per  qu'on  sibla. 
Bien  sur,  siens  des  geins  d'uno  mino 
Que  vous  virorein  pas  l'eichino; 
Car  olo  moueindre  poou  qu'oouré, 
Oou  mouiendré  signe  que  foré. 
Tout  dret,  sein  d'ovontage  otteindre, 
Onorein  eilaï  vous  défeindre.  » 

Lou  vieux moneichaou,  einchonta 
D'être  choousi  per  deiputa, 
Embrasso  so  fenno  Louise, 
Chongec  de  vesto  et  de  chomiso, 
Bouoto  soun  bounet  coumo  faou 
Et  pei  souort  per  lou  grond  pourtaoïi. 

«  Messieus,  dissec  o  lo  brigado. 
Siens  surprei  d'oquello  olgorado 
Que  venec  nous  beilas  eici; 
Si  votre  chef  se  trouovo  oqui, 
Ei  nous  aoutreis  qu'oco  regarde.» 
Mounard,  que  tenio  Fhollebardo, 
Per  ovez  lou  dimeincho  oou  chœur 
Chonta  vépras  de  bien  boun  cœur, 
Reipound  :  a  Ei  mi,  Dioou  vous  bénisse  I 
—  Et  dinstout  per  vous  sié  proupice  ». 
Li  répliquée  Fambossadeur. 
«  Touchée  me  lo  mon,  mounseigneur, 
Rédé. . .  Bouon.  . .  Aoa,  venou  veyre 
Ce  que  nostro  villo  duoou  creire 
Sus  lo  visito  que  veici. 
Porlec  me  coumo  un  bouon  omi, 
En  disent  ce  que  vous  opello. 
Venec  per  nous  cherchas  querelle, 
Poueiriec  vous  einonas  comus, 
Si  per  occ  que  siec  veingus.  » 


POUEISÎAS    DIOISAS  231 

Lou  prouprietaire  de  Pluyanas' 
Li  dit  :  «  Moun  cher,  pas  de  chicana*. 
Mounsegneur  Desplons-Desaugiers 
Nous  mondo  dins  voirais  quartiers, 
Et  vous  prio  per  une  ourdounanco 
Que,  coumo  siec  dins  l'aboundonço, 
Foguessec  fas  dins  oquoou  cas 
0  notro  villo  un  boun  repas. 
Hélas  !  tallo  ei  notro  disetto. 
Que  tous,  tont  que  siens,  fosein  diéto. 
Voqui  perqué  nous  o  monda, 
Ofîn  de  poueire  oves  de  bla. 
Cregnou  pas  omein  que  m'obusé, 
Qu'un  Solliensou  nous  lou  refusé; 
Sein  oco,  s'ein  repeintirec. 
Veici  lo  lettre,  légissee.  » 

Lou  moneichaou  preind  sas  lunettas, 
Que  n'eroun,  mofé,  pas  trop  nettas, 
Per  légis  l'eicrit  tout  oou  long; 
Mais  lou  grivois  foguec  seimblont. 
Opres  oquoou  trait  d'impourtonco, 
Deingu  veyont  soun  ignoouronço, 
Lous  dissec  :  «  Très-bien,  mous  omis, 
Oteindec-mein,  voou   revenis.» 

0  soun  retour  dedins  lo  villo, 
Tout  lou  mounde  veint  o  lo  filo, 
Ofin  d'einteindre  soun  récit  : 
«  Ah  !  Messieus,  dissec,  Dioou  merci, 
Venou  de  tas  uno  embossado, 
Eilaï  ves  oquello  brigade, 
Que  voou  bien  un  pechot  eicu  ; 
Nein  suoou,  veyec,  coumo  un  perdu. 
Erou  dins  un  pas  eifrouyable. 
Mais  mein  sioou  tira  coumo  un  diable. 
Tout  bestio  qu'on  ei,  mous  omis, 
Un  popier  m'o  fougu  legis, 
Que  mo  bien  plus  donna  de  peno 

Quartier  de  la  banlieue  de  Die. 


:3-2  DIALECTES    MODERNES 

Que  naï  de  fas  quesas  mo  fenno. 
Cepeindont  sus  ce  que  m'ont  dit 
Ai  pougu  devinas  Teicrit. 
Veici  queintei  so  countenenço  : 
Omoun  vas  Dio  font  obstinenço, 
Et  moussus  Desplons-Desaugiés, 
Que,  per  moleur,  sa  dupei  hiés 
Qu'eici  vivein  dins  l'oboundonço. 
Seins  se  geinas,  per  ourdounonco. 
Vous  demondo  doou  blat  qu'ovec 
Lou  meyous,  surtout  lou  plus  sec. 

—  Oco  nei  pas  de  bouon  oouguro  », 
Répouond  lou  brave  Loverduro; 

{(  Voou  donne,  per  li  fournis  de  pon, 
Qu'eici  chacu  crébe  de  fon?... 
Qu'on  nein  douono  lou  comorado?,.. 

—  Mofé,  repliquo  Lofeuillado, 
Per  l'aoufro,  u'aï  pas  bien  légis  ; 
Mais  onporla  d'un  gramocis 

—  Un  gramocis!  !  Oh  !  queinto  graço 
Gueuleo  touto  io  pooupulaço. 

«  Et  n'eicrioou  pas  qu'ei  trop  poya, 
Qu'ollieurs  l'oourio  mejous  morchal 

—  Otteinsioou,  dit  l'un  de  lo  troupo 
Que  venio  de  mingeas  lou  soupo; 

«  Douçoment,  joou  sorioou  d'ovis 
De  lous  preindre  lour  gramocis. 
De  Dio  lo  villo  ei  per  trop  grondo  ; 
Si  venoun  eici  tous  en  bondo, 
Ce  que  poueirio,  beleou,  se  fas, 
Siec  sur  que  nous  vont  tout  bâfras, 
Qu'empourtorein  blat  et  forino 
Et  nous  coousorein  lo  fomino. 
Mi  sioou  preste  o  beilas  lou  mioou. 
Seulement  per  lou  prix  que  voou.» 
Un  aoutre,  qu'ero  un  pinçomaillio, 
Un  rein  du  tout,  uno  gueusaillio, 
Ojouto  :  «  Aï  dejo  trop  perdu: 
Oqueloux  que  me  l'on  veindu 


POUEISIAS    DIOISAS  2^S 

Me  nont  fa  sogas  sus  lo  plaço 

Noou  froncs  doou  seitier,  cl  per  graço  ; 

Quond  duoourion  m'eicourchas  tout  vioou. 

Nein  volon  quotorze  doou  mioou. 

Si  Dio  potis,  bah  !  que  potisse 

Ou  que  l'eiveque  lou  nourisse. 

L'oourein  pas  un  pota  de  mein  : 

Tout  homme  ci  meitre  de  soun  bien, 

Surtout  quand  on  o  de  Ibmillio. 

—  Ei  bien  sur,  reipoundec  Jovillio  ; 
Pei  que  ves  Dio  toutas  las  geins 
N'ont  rein  o  boutas  sous  las  deints, 
Sorio  juste  que  ronçounesseins, 

Et  qu'o  vingt  froncs  nous  lou  poyesseins. 

—  Et  perque  pas  o  vingto-doux  ?» 
Dissec  lou  morchond  Goouteiroux. 
«N'ei  pas  que  Ton  doive  être  chiche, 
Pei  que  lou  Diois  n'ei  pas  riche  ; 
Mais  creyou  que  dins  oquoou  cas, 
Foou  pas  per  rein  li  lou  beilas. 

— Per  yoou,  nein  volou  vingto-(juatre; 
Et  si  mein  veyec  rein  robattre  >■ , 
Répliquée  Nicoula  Ponchaou, 
((  Tretec-me  de  vieux  péléraou. 
Oquest'on  cregnou  plus  lo  grelo  : 
Moun  archo  ei  pleno  de  toueisello. 
Et  creyou,  mordioou,  qu'un  taon  bla 
0  trente  sorio  pas  poya.  » 

Chacu  d'eloux  tont  ojoutavo 
Que  toujous  lou  prix  oougmeintavo  ; 
Mais,  per  bien  lous  touchas  oou  vioou, 
Lofeuillado  criée  :  «  Ottenssioou  ! 
Ce  que  voou  dire  ei  d'impourtonço  : 
Aï  dins  mo  pocho  uno  ourdounonço 
Que  m'o  beila,  gno  qu'un  instont, 
Un  moussus  que  parle  ein  chontont. 
L'aï  pas  bien  legio,  mais  n  impouorto, 
Lo  susdite  ourdounonço  pouorto 
Que  tout  desueito  sogoré 


234  DIALECTES    MODERNES 

Lou  meindre  refus  que  foré  ; 
Ainsi,  prenec  votras  mesuras....  » 

Oquellas  paouras  creaturas, 
Des  que  lou  vieux  oguec  porla, 
Se  creisseroun  einsourcela  ; 
Oouriec  dit,  ein  veyon  lour  mino, 
Que  lous  eitrilliavoun  Feichino. 

Lou  moneichaou,  de  veire  oco. 
Lous  dissec  :  a  Mais  quei  tout  eisso  ? 
El  que  per  uno  bogotello, 
Un  Solliensou  perd  lo  cervelio  ? 
Et  que  foriec  dounc,  s'il  vous  plait. 
Si  vous  dounavoun  lou  sujet  ? 
Eicoutec,  mein  voou  vous  fas  rire 
Per  ce  que  me  resto  o  vous  dire  : 
Me  veyec  dejo  bien  cossa  ; 
Pourtont,  tout  soulé  dins  un  sac, 
Voudrioou  pesas  touto  l'escouorlo 
Qu'ovein  eilai  dovont  io  pouorto  , 
Et  pariou  que  tous  tont  que  soun 
Font  pas  remountas  lou  billoun. 
L'oou  goyet  d'oquellas  mozétas 
Sounorio  coumo  de  triquetas. 
Et  lou  peloueiro  o  tont  poti 
Que  dirion  qu'ei  de  porjemi. 
Nont  plus  ni  courage,  ni  fouorço  ; 
Lous  fusis  n'ont  pas  uno  omouorco  : 
Et  poueirion  pas  gnoou  lous  bougeas, 
Quond  lous  oourion  sooupu  chorgeas. 
D'opres  oco,  lous  paoureis  diableis, 
Devoun  pas  estre  redoutableis; 
Soun  pourtont,  ou  me  trompou  fouoit, 
Ce  que  ves  Dio  lio  de  plus  fouort  : 
Car,  per  onas  livras  botayo, 
L'on  se  sert  pas  de  lo  foutrayo. 
Aça,  per  sourtis  d'oquoou  pas, 
Vetoqui  ce  que  devein  fas  : 
Foou  que  chacu  préne  uno  triquo 
Ppr  cichinas  oquello  cliquo. 


POUEISIAS    DIOISÂS  235 

Oraoun  ves  Dio  sein  fachorein, 
Soit.  Eh  bé  !  qu'ei  que  nous  forain  ? 
Lo  guerro  ?  Lo  creignein  pas  gaire  : 
Per  lo  t'as,  foou  souflas,  pechaïre  ; 
Et  jurorioou  bien  que  l'ei  gno 
Que  poueirion  pas  soufla  lou  fuo. 
Onein,  efons,  vivo  la  gloiro  ; 
Foou  rompourtas  uno  victoiro.  » 

Chacu  maroho  uno  triquo  ein  mon. 
Lou  moneichaou,  qu'ero  dovon, 
Opercevec  lou  gombi  Rocho, 
Et  li  foutec  dessus  Tondocho; 
Lous  aoutreis,de  lous  veire  oou  soou, 
Chaigairoun  casi  tous  de  poou. 
Jon  Livé  pissec  dins  sas  brayas, 
Pei  ressooupec  quaouquas  cintajas 
Dins  un  eindret  que  dirai  pas, 
Ce  que  lou  foguec  gomougnas, 
Et  d'un  cop  beila  sus  so  nuquo 
Foguec  voultigeas  so  perruquo. 

Un  certain  Toine  Guiyetou 
Souffletée  lou  vieux  Potocou, 
Que  vite,  sein  sooupre  yount  coure, 
Virée,  pei  cheiguec  sus  lou  moure 
Dins  un  foussa.  Charle  Rousset 
Ressooupec  un  aoutre  souflet, 
Oppliqua  per  loumême  Toine. 
Tout  d'un  cop  l'on  vé  Moncilane 
S'opprouclias  coumo  quond  lou  chat 
Eipincho  quaouque  mori  rat  ; 
Mais  lou  dit  Gujetou  l'eipeillio 
D'uno  empoouma  dessus  l'ooureillio. 
Oquel  Ontoine  ero  pertout  : 
On  lou  vej'o  tontoou  d'un  bout, 
Tontoou  de   l'aoutre,  et  devolavo 
Oquoou  que  souloment  touchavo. 

Sus  oco,  Nicoula  Ponchaou 
De  Sarra  preind  lo  grosso  claoou  : 
Quond  un  efont  o  lo  golocho 


236  DIALECTES    MODERNES 

Faï  pillio  et  bouoto  dins  so  pocho 

Las  cipioounas  qu'o  pas  gagna, 

Siec  sur  de  veire  l'aoutro  gna 

Pourtas  sas  ounglas  o  sofaço, 

Ou  l'ottropas  per  lo  tignaço. 

De  même,  lou  gombi  Sarra, 

De  veire  qu'on  Fiovio  gora 

So  daou  que  rai'oment  quitavo. 

Et  que  per  se  battre  pourtavo, 

Cheiguee  sus  lou  vieux  Nicoula. 

Mais,  heiias  !  fuguec  degoula 

Per  lou  terrible  Lofeuillado. 

N'ei  pas  tout  :  Ton  veguec  Fringado 

Ressooupre  uno  tallo  eimborgea, 

Que  lous  dissec  :  «  Bien  obligea  ! 

M'ovec   pas  maou  rengea  lo  jaouto. 

M'ein  plaignou  pas,  ei  de  mo  faouto  : 

Quelque  me  poussavo  o  venis 

Dins  oquoou  diable  de  povs. 

Si  mo  fenno  ovioou  vougu  creire, 

N'oourioou  pas  quitta  mon  Sont-Peire  ' 

Ello  que  me  disio  toujous  : 

Per  que  tein  onas,  moluroux.  » 

Mounard  embe  soun  hollebardo, 

Vouguec  bien  se  boutas  ein  gardo  ; 

Mais  lou  moneichaou,  coumo  un  fouol, 

Ein  l'ogroffont  per  soun  oscouol. 

Lou  poussée  couontrolo  murajo. 

Ce  que  finissec  lo  botajo, 

Onlin  notreis  paoureis  Diois, 
Fosont  lou  signe  de  lo  croix, 
Se  bouteroun  tous  ein  deirouto; 
Et  pei,  tout  lou  long  de  lorouto. 
Prounounceroun  chaque  pater 
Ein  relèvent  lou  nas  ein  Tair. 

(fin  DOOU    CHONT    l«^) 
•  Saint- Pierre,  nom  <V-m  quartier  de  la  ville  de  Die. 


LETTRES  A  GRÉGOIRE 
SUR   LES  PATOIS    DE   FRANCE 

iSuile] 


SVK    i..\    MOHl' 

Texte  Traduit.  Tracl.fronç. 

Eme  soun  day  cruel,  la  Avec  sa  faux  cruelle,  la  La  moit  i'rappe  indis- 
-Moiierl  paupo  per-  Mort  n'épargne  per-  laiclemeiil  les  rois  ol 
sûurio;  sonne;  leurs    sujets  ;   prolitons 

Segiio  leis  roys  tout  Elle  fauche  les  rois  tout  des  courts  instants  de 
coumo  leis  su"]els.  comme  les  sujets.  notre  vie. et  ne  perdons 

Proufiten  deis  mou-  Profitons  des  moments  pas  notre  temps  ù  former 
mens  que  lou  destin  que  le  destin  nous  de  grands  et  vains  pro- 
nous  douno;  donne;  jets. 

Soun  troou  courts    per  Ils  sont  top  courts  pour 
de  grands  proujets.  de  grands  projets. 


ExïKMT  Dou  NODVEOU  LUTRIN,  poi.'kmo.  pkr  M.  d'Arvieux^ 

Texte  Trad.lUt  Trad.  franc. 

De  tout  home  que  pourto  De  tout  homme  qui  porte      Tout  homme  a  sa  fo- 

bano,  cornes,  lie;    eeux    qui    ont    eu 

Pretro.  doutour,  vo  ba-  Prêtre,  coeteur  ou    !)a-  main  l'autorité  sont  sou- 

chelié.  chelier,  vent  au  cas    d'en  abu- 

Ges  que  noun  ague  sa  11  n'en  est    aucun    qui  ser;  mais    ils  sont  plus 

foulié.  n'est  sa  folie.  d'une  fois  obligés   d'en 

Durant    la  vido  d'estou  Durant     la  v;e    de    ce  rabattre.    11    n'y  a  rien 

mound»',  monde,  de  si  dillicilo  que  de  te- 


1  Ce  quat'ain  est  de  Toussaint  Gros.  Il  ouvre  a  série  des  Pensado.s 
deslacados,  dans  son  Recueil  de  pouesiés  prû»iypnfa/o.$  \ Marseille,  Sibié, 
1763  ),  p.  158.  L'orthographe  de  Gros,  sans  être  irréprochable,  est  moins 
mauvaise  que  colle  de  son  copiste,  (ij.  de  Hekluc-Pekussis.) 

-  Laurent  Arviou  ou  d'Arvieux,  né  eu  163.J,  au  Canet-lez-Marseille,  où 
il  mourut  en  1702,  est  plus  connu  par  la  Relation  de  son  voyage  vers  le 
grand  émir,  publiée  par  La  Hoque  en  1717,  et  par  ses  Mémoires  édités 
en  1735  par  le  P.  Labat,  que  par  ses  rimes  provençale.*,  qui  sont  de- 
meuré's  médites.  Son  poëme  du  Nouveau  Lutrin,  qui  lui  fut  inspiré 
par  une  d.spute  dont  la  maison  du  Hefugc  de  Marso  lie  fut  le  théâtre,  se 
trouvait  en  1786  entre  les  mains  du  docteur  G  -F.  Achard,  qui  en  repro- 
duisit seulement  quelques  vers  dans  son  Dictionnaire  iiiografihique  ou 
Histoire  des  hommes  illustres  de  la  Provence,  t.  l,  \'  .Vrvieox.  Ces  vers 
.et  ceux  qu'on  va  lire  sont  l'unique  spécimen  de  la  iioésie  de  d'Arvieux  qui 
ait  jamais  été  livré  au  public.  La  biographie  de  cet  écrivain,  au  t.  I"  du 
Plntarrjue  provençal  (Marseille,  Gueidan,  \8->8),  ne  fait  aucune  mention 
de  ses  œuvres  poétiques.  (I..  de  Berldc-Pehussis.j 


ojv;  DIALECTES    MODEREES 

L'un  «i  raso   l'autre  si  L'un  se  rase,  l'autre  se  nir  les  femmes   renfer- 
toundc       '  tond,  mées;  elles  sont  à  cet 

Caduii  surtout  es  entesta  Chacun  surtoutestentèlé  é^jard  comme  les  chats. 
Doou  tic  de  souD  aulou-  Du  tic  de  sou  autorité. 

rita  ;  ,.     u  ^ 

Mai  souven  n'en  coueslo  Mais   souvent  1  aubaoe 

l'aubado,  coûte; 

Car  voudrié  mai   rauba  II  vaudrait  mieux  voler 

bugado  une  lessive 

Et   faire  d'aulrei    plus  El  faire  d'autres    plus 

grand  mau,  grands  maux. 

Dins    aques    pays     de  Dans  ce   pays    de   ba- 

gournau,  *  dauds, 

Que  de  toumba  iin  Tes-  Que  de  tomber  dans  la 

caufeslre  faute 

De    mettre    fremos    en  De  mettre  des  femmes 

séquestre;  en  réclusion  ; 

Eleis  esten  coumo  lei  ga  Elles  étant  comme   les 

chats 
Qu'eniabien  quand  soun  Qui     s'enragent    d'être 

ensara .  renfermés . 

Gresié     d'empourta    la  Le    prêtre  si  renommé      Un     prêtre     (1  abbé 

victori,  croyait    emporter    la  Bougerel,  directeur   de 

Lou  tan'renouma  cape-     victoire,  la  maison    de  force  de 

lan,  Marseille)  en  (il  la  triste 

Et  pènset  aver  lou  mal  Et  il  manqua  avoir   du  expérience.  C'est  un  bel 

an.  malhour.  homme,  de  belle  appa- 

Es  béou,  ben    fach,  de  II  est  beau,  bien  fait,  de  rence,  à  jambes  minces, 

boueno  mino  ;  bonne  mine  :  à  larges  ùpaiilps,  bouil- 

Prin    de    boutéou.  fort  II  a  les  mollets  maigres  lant,     spirituel,     grand 

long  d'csquino,  et  le  dos  fort  allongé,  mangeur,      propre      et 

Plen   de    fuech    autant  Plein  de  feu  autant  que  courtois,  vertueux  et  in- 

que  d'esprit,  d'esprit,  capable  de  se  laisser  sé- 

Dalicat,  de  bouon  appe-  Délicat,    ayant     bonne  duire  par  les   appas  de 

tit,  appétit,  celles  qu'il  dirige.  II  sait 

Propre,  mignoun,  cour-  Propre  et  galant  envers  les  tenir   contenues  en 

tois  ei  damo,  !es  pieuses  dames,       ne  les  accablant  pas  de 

Que  soun  coumo  eou  de  prières  et  de  pénitences; 

santeis  amo,  aussi      est-il     regardé 

Ennemi      jurât      doou  Ennemi  .'.é:laré  du  vice,  comme  un  oracle,  cl  ses 

pecca  ;  sermons    sont    courus. 

Incapable    d'estre    en-  Incapable     d'être    pris  Mais    il  est  facile  à  se 

visca  aux  lacs  mettre  en  colère,  et  alors 

D'aucuno  de  sei   peni-  D'aucune  de  ses  péni- il  semble  furieux;  il  est 

tento;  tentes;  vrai  que  le  feu  s'éteint 

Lei    sau     tenir    toutei  11  les  contente  toutes,      aussi  vite  qu'il  avait  été 

countento.  allumé.  11  n'a  pas  le  dé- 

Soulo    d'un     directour  Sous  uu  directeur  aussi  faut  de  trop  boire,  mais 

tant  doux,  doux,  il  mauge  comme  quatre. 

Si    maquoun  gaire    lei  Elles    ne     se    blessent  II  a  l'air  toujours  pressé, 

ginoux.  guère  les  genoux.         ot  cependant  il  n'a  rien 

Hou   parlo  clar   coumo  II  leur  parle  comme  un  à  faire.    11    ne  voit  du 

un  ouracle;  oracle;  latin  que  dans  son  bré- 

Quand  precho,  cridoun  Quand    il   prêche,  elles  viaire.     Qui      pourrait 

au  miracle,  crient  au  miracle,        croire  qu'un  si  bon  di- 

Et  cadun  s'espanto  en  Chacun      se    pâme    en  recteur  eût  été  exposé  à 

l'auven.  l'écoutant.  la  méchanceté  des  fem- 

Es  caOi  de  devoutien;       Il  est  rempli  de  dévotion;  mes    de   mauvaise    vie 


LETTRES    A    GREGOIRE  239 

Mai,  perpauquelifas  la  Mais,  pour  peu  qu'on  le  qu'il  dirigeait  /    Quelle 

niquo,  tourmente,  récompense  pour  le  zèle 

Tout  d'abord  la  mousco  D'abord    la    mouche  le  d'un  homme  ù  qui  rien 

lou  piquo,  pi(jue,  no  route   lorsqu'il  s'agit 

Que   lou  fa  courre,  re  -  Le  fait  courir,  ruer,  de   faire    le    bien,    qui 

guigna,  brûle  d'un  feu  toujours 

Crida,querela,grafigna  Crier,  quereller,  égrati-  ardent  pour  arracher  à 

gner.  Satan    les    âmes    fémi- 

Es  verai  quesareniflado  II  est  vrai  que  sa  colère  nines  que  cet  esprit  ma- 

Noun    duro     pas     uno  Ne  dure  pas  une  jour-  Un  veut  porter   au  mal; 

joumado  :  née.  chose  qui    lui  est  très- 

S'allumo  et  s'amouesso  Elle  s'allume  et  s'éteint  ordinaire,     comme     le 

à  la  fés.  à.  la  fois.  prouve    ce    qui    arriva 

Beou  pas,  mai  mange o  II  ne  boit  pas,  mais  il  aux  repenties   de  Mar- 

coumo  1res.  mange  comme  trois,    seilie?  Ces  tilles  n'ayant 

Es    moussu    Féou,  tout  C'est    monsieur     Féou,  ni  pain,  ni  vin,  ni  bois 

plen  d'alTaire  :  toujours  affairé  :  pour  se  chauffer 

Si boulegosensoren faire  II  remue  et  ne  finit  rien,  etc..  .... .  > 

S'enchautogairedelatin,  Il  ne  se  soucie  guère  du 

latin. 
Passa  aqueou  que  dien  Si  ce  n'est  de  celui  qu'on 

au  lutrin.  chante  au  lutrin. 

Qu  creirié  que  l'ingra-  Qui  croirait  que  l'ingra- 

titudo  tilude 

Deis  pécheresses  d'habi-  Des  pécheresses  d'habi- 

tudo  tude 

Aguesso  juga  marri  tour  Ait  joué  un  mauvais  tour 
An'  un   tant  bénin  di-  A  un    directeur  si    dé- 

rectour,  bonnaire , 

Per    lou     recoumpensa  Pour  récompenser    s:n 

daou  zelo  zèle 

Que   mette  tout  per  es-  Qui      met      tout      par 

cudèlo'?  écuelle  ? 

Quand    s'agisse      doou  Lorsqu'il  s'agit  du  bien 

ben  public,  public, 

Heias  !  ven  maigre  cou-  Alors  il  devient  maigre 

mo  un  pic,  comme  un  hareng  saur 

El  sou  vent  la  teste  lifumo  Sa  tète  fume  souvent 
D'aqueou  zelo    que  lou  Du  feu  qui  le  consume, 

counsumo 
Coumo  lou  sin  à  la  sar-  Gomme      le      saindoux 

tan,  dans  la  poêle, 

Quand  voou  deslourna  Quand  il  veut  empêcher 

que  Satan  que  Satan 

Noun  tournouire  quau-  Ne    fatigue  quelque  bi- 

quo  bigolto  gote 

En  li  tirant  troou  la  ga-  En    lui   tirant     troj)   la 

rotto,  tête  de  côté, 

Gavo   qu'arribo    fouart  Chose  qui   arrive   très- 
souvent,  souvent, 
Ansin     qu'arribet     au  Gomme  cela  arriva   au 

au  couvent  couvent 

De  la  famille  repentido.  De  la  famille  repentie. 
Mourien   touteis    de  la  Là  on  mourait  de  la  pé- 

pepido,  pie. 

Doou  fam  doou  se,  doou  De    faim,  de     soif,   de 

maus  encoues,  toutes  sortes  de  maux, 

Doou    tremoulun,  faute  De  frisson,  faute  de  bois. 

de  boues  '. 


*  L'extrait  du  citoyen  Achard  s'arrête  là;  je  ne  crois  pas  qu'il  y   ait 
sujet  de  regretter  vivement  le  reste. 


S4U 


DIALKCTES    MODEF-INES 


A    UNK    AMIE    yur    DFMEURE    A    LA    CAMPAGNE 


en  lui  dem 

Aurez-,  bessai,  la  coumplesenço, 
Se  vous  n'on  progan  •'  pouliraent, 
De  nous  rogalar  bouenament 
D'un  pau  de  burri  de  Prouvenço? 
Burri  ben  plus  delicious, 
Perceque^  jamay  ren  li  manque, 
Qu'houro    es      fach     per    vostreis 
imans  blanquo  •. 
Qu'aqnelo  bourrido  deis  dieous, 
Dins  nuuestro  terradou''  dounado, 
Et  qu'un  poueto  prouvençau, 
De  Gros  successoiir  et  rivau, 
Germain,  nous  a  tant  beu'^  pintade. 
Sarié'*  pas  per  naulroi  tant  mau 
Qu'attroubessian  au  remiilagi 
Un  boiien  téchou  de  bacayau. 
Restarioou  pas  coumo  un  eiraagi  : 
Emo  pebro,  holi,  anchayo,  ailhet, 
Va  vous  dieou  senso  gascounado, 
Vous  farieou  léou  talc  brandade'' 
Que  ve  n'en  licanas  lin  d^t. 


andant  à  dîner* 

[sanco, 
Vous    aurez,  peut-être,  la  compbi- 
Si  nous  vous  en  prions  poliment, 
De  nous  régaler  tout  bonnement 
Avec  un  peu  de  beurre  de  Provence'? 
Beurre  raille  fois  plus  délicieux 
(Surtout    quand    vos     belles    mainï- 

blanches  l'ont  fait,  car  alors  il  n'y 

manque  rien) 
Que  cette  bourride  des  Dieux 
Donnée  dans  notre  territoire, 
Et  qu'un  poète  provençal. 
De  Gro-  successour  et  rivai, 
(i'Tmain,  nous  a  si  bien  dépeintes. 
Ce  ne  serait  pas  mal  pour  nous 
De  trouver  dans  un  baquet  d'eau 
Un  bon  morceau  da  merluche. 
J''  ne  resterai  pas  comme  une  image: 
Avec  poivre,  huile,  anchois  et  ails. 
Je  vous  le  dis  sans  gasconnade. 
Je  vous  fierai  bientôt  une  brandade 
Dont  vous  vous  lécher  ez  les  doigts  '". 


Cantique  ancien,  avec  la  version  provençale  moderne 
et  la  version  française  *' 

Texte  Version  proi-.  Version  franc. 

REFRAIN 

Allegron  sis  los  pecca-  Que  leis  peccadous  sie-  Que      les      pécheurs 

dors                                goun  soient  joyeux  en  louant 

Lauzant  sancta  Maria      Allègres  en  lauzansanto  sainte  Ma"rie-Magdeleine 

.Maria  dévotement. 
Magdalena  devolament.  Madaleno  devoutarr.ent. 


<  Ces  vers  sont  lires  d  une  Kpilro  ii  uno  Daino  qu'ero  anado  d  la  bas- 
tido  senso  dire  adiou  en  dequn.  la  veillo  dimo  plaegpo  que  duret  plusiers 
jours,  par  Claude  Dageville,  d(^  Marseille,  architecte  et  peintre  de  mérite, 
poêle  à  ses  heures,  guillotiné  en  1791.  11  était  de  l'Académ.ie  royale  d'ar- 
chitecture de  Paris  et  de  celle  des  Arcades  de  Home.  Ses  œuvres  proven- 
çales ont  été  recueillies,  en  1823,  dans  le  Bouquet  prouvcnçaon.  vo  Jeis 
Troubadours  revioudas  (Marseille,  chez  Achard),  pages  87-106.  Voir  ci- 
après  les  variantes  (L   de  Berluc-Pekdssis). 

-  Aurias.  -  '  Se  ven  pregavian.  —  ''  Parce  que.  —  •  Vouestro  man 
blanquo.  —  '•  Tarraire.  •  Germain  enfin  nous  a.  —  •*  Sérié.  —  ■'  Uno. 
f  L.  de  B.-P  ) 

'"  Non  content  de  celte  traduction,  l'auteur  en  a  donné  uno  autre  qu'il 
trouvait  plus  français';,  mai?  qui  n'a  aucun  iulérol;  elle  ne  fait  qu'affaiblir 
le  sens. 

"  Ces  fragments  appartiennent  à  la  Cantinella  prorençah'  en  l'honneu-- 


LETTRES    A    GRF:G0IR,E  ;41 

l'^''"    COUPLET 

Ella  conec  la  siou    or-  Counouisse    soun     er-  Elle  reconnaît  son  er- 

ror.          .                         lour,  reur,    io     mal     qu'elle 

Lo  mal  que  fach  avia,      Lou  uiau  quo  avie  fach.  avait  fait,  ot  elle  a  peur 

E  ac  del    fuec   d'enfer  Et    a  poou    don   fuech  du  feu  de  l'enfer,  et  elle 

paor                                   d'enfer,  se  mol  dans  la  voie  qui 

Et  mes  si  en  la  via         Et  si  mette  din  lou  ca-  pont  la  conduire  au  sa- 

Perque  venguct  a  sal  -      min  lui. 
vament.                        Per  venir  à  sauvamenl. 

■2«    COUPLET 

Quand  la  grand   mort  Quand      leis    Judieous        Lorsque  les  Juifs  lui 

Josious  treidor  l'agueroun  dounat  la  eurent    donné    la  mort 

grand  mouert,  par  leur  grande  félonie, 

Per  lur  grand  fellonia    Per  sa  grande  couqui-  et  Joseph,  celui  d'Ari- 

narié,  mathie.   par   sa  grande 

Et  Joseph  par  sa  grand  Et  Joousé,  per  sa  grand  douceur,  1(>  mit  dans  son 

doussor,  douçour,  tombeau. 

Gel  de  Baramathia  Aqueou  d'Arimatio, 

Lo  met  en  lo  siou  mou-  Lou      mettet     en  soun 
riment  niounument. 

O"    COUPLET 

Or    preguen    tous     lo  Or   preguen   touleis  lou  Or    prions     tous     le 

Salvador,                         Sauveur,  Sauveur,  fils  de  Mnrie, 

Fils  de sanla  Maria,        Fieou  de  santo  Mario,  qu'il  nous    préserve  de 

Que  nos  garde    tos   de  Que  nous  gardo  de  dou-  (louleur,    et    le    peuple 

dolor,                               lour,  quel   qu'il  soit,  et  qu'il 

Et  poblum  cum  que  sia  Et  lou  pople   quauque  nous      gouverne     avec 

siegue.  amour. 

En  ça  verge  tos  aman-  Et  nous  riege  touleis  per 
teînent.  soun  amour. 

J'ai  choisi  ces  trois  couplets  pour  montrer  la  différence  de 
la  langue  du  XIIP  siècle  à  la  nôtre.  J'ai  choisi  de  préférence 
une  pièce   qui   est  très- connue,  puisqu'il  n'y  a  pas  cinquante 

(le  la  yîagdplelne,  qui  fut  chantée  annuellement  à  Marseille,  le    jour   de 

Pâques,  jusqu'en  ITlî.  M.  Bory  Ta  rééditée  dans  coite  ville  en  1861  (V. 

Boy,  in-8"j,  et  il  l'a  accompagnée  d'une   introduction,  de  commentaires 

et  de  recherches  historiques,  ainsi  que  d'une  traduction. 

Achard  a  reproduit  le  texte  donné  par  Grosson ,  dans  VAlmanach  de 

Marseille  de  1773.  Au  premier  vers  du  2«  couplet,  il  faut  corriger,  avec 

M    Bory: 

(juaiid  l'wjroii  mort  Jusieu  traidor. 

Pour  le  dernier  vers  du  2"  couplet,  que  Bory  a  changé  en  : 
Toc'  en  sa  vcij'  amantement, 
on  pourrait  indiquer  la  correction  suivante  : 

Enfant,  verge,  to=,  luantencnt. 

Enfant,  écrit  enfti  dans  un  ms.,  a  pu,  par  suite  d'une  faute  de  lecture, 
être  transcrit  enaa,  d'où  \  mra  de  Grosson  et  d'Achard.—  Tos  Signifie, 
comme  ou  sait,  j'ewne  garçon  (G.  Ghabaneau). 

19 


242  DIALECTES   MODERNES 

ans  qu'on  chantait  encore  ce  cantique  à  Marseille,  dans  la 
chapelle  du  carrefour  des  13  Cantons.  Je  ne  finirais  pas  si  je 
cherchais  d'autres  exemples  dans  nos  poésies  provençales, 
mais  je  les  conserve  pour  en  donner  une  édition  complète,  si 
leur  publicité  peut  être  utile  et  agréable  à  mes  concitoyens. 

ACHARD, 

bibliothécaire  national  de  Marseille. 
Du  l"  floréal  l'an  II  de  la  République 


DIALECTES    DU    NORD 


Il  nous  faut  maintenant  quitter,  non  sans  regret,  le  midi  de 
la  France,  et  passer  rapidement  en  revue,  avec  les  corres- 
pondants de  Grégoire,  les  différents  idiomes  du  Nordj;  ils  se- 
ront moins  riches,  sans  doute,  et  moins  harmonieux,  mais  ils 
ne  manqueront  pas  d'intérêt  pour  le  véritable  philologue.  La 
langue  d'oil  va  nous  apparaître  telle  qu'elle  était  en  1790,  dans 
les  provinces  les  plus  éloignées  de  Paris.  Nous  j  surprendrons 
à  tout  moment  l'influence  de  la  grande  ville;  cependant  on 
trouvera  encore  chez  les  Francs-Comtois,  chez  les  Bourgui- 
gnons, chez  les  peuples  de  l'Artois  et  de  la  Flandre,  surtout 
chez  les  Bretons,  une  sève  toute  particulière  et  une  surpre- 
nante originalité.  On  verra  en  même  temps  ce  que  la  France 
d'alors  avait  encore  à  faire  pour  conquérir  cette  unité  qu'elle 
recherchait  avec  tant  d'ardeur  :  tous  les  cœurs  étaient  fran- 
çais ;  mais  quelle  dififérence  de  langage  '"t  de  moeurs  !  quel 
amour  du  clocher  et  des  coutumes  locales,  derniers  vestiges 
de  l'ancienne  autonomie  ! 

L'ordre  que  nous  suivrons  dans  cette  étude  est  indiqué 
par  la  nature  elle-même  :  nous  commencerons  par  les  pro- 
vinces de  l'Est  et  du  Nord,  pour  arriver,  en  traversant  la  ré- 
gion centrale,  jusqu'au  fond  de  cette  Bretagne  où  s'étaient 
réfugiés  les  Celtes,  nos  aïeux. On  verra  ainsi,  les  uns  après  les 
autres,  les  dialectes  et  sous-dialectes  qui  ont,  pendant  plu- 
sieurs siècles,  lutté  contre  le  sous-dialecte  de  l'Ile-de-France, 
et  l'on  pourra  se  rendre  compte  des  emprunts  que  ce  dernier 
leur  a  faits. 


LETTRES    A    GREGOIRE  243 

I 

Dialectes  bourguignons  (sous-dialectes  de  la  Franche-Comté) 

Je  n'ai  pu  découvrir  quel  était  le  Lorain  fils  qui  a  signé  la 
lettre  suivante;  il  n'a  fait  partie  ni  de  la  Législative,  ni  de  la 
Convention.  Il  avoue  lui-même  qu'il  connaissait  peu  l'idiome 
particulier  de  son  district;  mais  sa  lettre  n'en  est  pas  moins 
une  des  plus  charmantes  et  une  des  plus  instructives  que 
nous  ayons  encore  rencontrées. 

DÉPARTEMENT    DU    JURA 

Dislrict  de  Saint-Claude.  —  14  s^pterabn?  1790,i'an  2»  d.-  l'ère  de  !a 
Liberté  française 

J'avais  lu  dans  le  n"  370  du  Palriote  français  une  lettre 
de  M.  G-régoire,  digne  de  siéger  parmi  les  législateurs  do  la 
France  et  d'éclairer  les  hommes  dans  les  Académies.  Comme 
elle  était  adressée  à  tous  les  patriotes,  je  crus  que  j'y  devais 
un  mot  de  réponse.  Malheureusement,  je  suis  peu  instruit  de 
la  langue  grossière  de  nos  pères.  Je  m'adressai  à  un  honnête 
juge  retiré,  qui  passe  pour  la  bien  savoir,  afin  qu'il  me  com- 
muniquât un  peu  de  sa  science  :  il  me  promit,  et  j'attendais 
avec  impatience  :  mais,  plusieurs  jours  après,  il  me  répondit 
qu'il  lui  avait  adressé  directement  les  éclaircissements  que  je 
lui  avais  demandés,  parce  qu'il  y  disait  du  bien  de  la  muni- 
cipalité, et  qu'il  n'aurait  pas  été  honnête  qu'il  me  le  commu- 
niquât '.  Les  devoirs  de  ma  place  m'ont  pris  ensuite  tous  mes 
moments;  mais  l'occasion  d'entrer  en  correspondance  avec 
M.  Grégoire  est  trop  précieuse  pour  que  je  ne  me  hâte  pas 
d'employer  le  premier  dont  je  puis  disposer  à  répondre  deux 
mots  sur  chacune  de  ses  questions. 

1.  —  L'usage  de  la  langue  française  est  universel  dans  ce 
'  district;  cependant  on  y  parle  presque  autant  de  patois  diffé- 
rents qu'il  y  a  de  villages. 

2.  —  Le  patois  est  si  ancien,  que  son  origine  est  inconnue. 
On  dit  que  celui  d'un  village  voisin,  nommé  Septmoncel,  tire 
son  origine  de  la   langue   parlée   dans  la  Suisse  allemande. 

'  Voyez  la  lettre  suivante;  ce  juge  se  nommait  Joly 


244  DIALECTES  MODERNES 

Peut-être,  comme  les  Septmoncelans  sont  grands  voyageurs, 
en  ont-ils  tiré  plusieurs  expressions  ;  peut-être  les  Septmon- 
celans sont  une  colonie  suisse. 

3,  4.  —  Plusieurs  mots  sont  évidemment  dérivés  du  latin. 
Exemples:  l'ieure,  lèvent,  d'eurus;  —  i  soliva,  il  avait  cou- 
tume, de  solere;  —  un'iégua,  une  jument,  d'equa;  —  de  l'égua, 
de  leau,  d'aqua;  — ja,  om?,  d'ita;  —  coincha,  bassin,  de  concha; 
-     la  vi,  chemin,  de  via,  etc. 

Quelques-uns  sont  dérivés  de  l'espagnol.  La  province  de 
Franche-Comté,  ou  soi-disant  [telle],  a  été  autrefois  soumise 
à  ce  pays,  si  digne  d'être  libre  quand  il  aura  brûlé  le  tribunal 
du  Grand  Inquisiteur,  purifié  la  place  où  se  faisaient  ses  auto- 
da-fé  et  balayé  ses  moines. 

Il  y  en  a  aussi  de  dérivés  du  celtique.  Saint-Claude  s'ap- 
pelait autrefois  Condal,  qui  signifie  confluent  en  celtique,  et 
cette  petite  ville  est  située  au  confinent  de  deux  rivières.  Un 
lieu  voisin  se  nomme  Condamine  et  est  aussi  situé  au  confluent 
de  deux  rivières.  Je  crois  que  baume,  en  celtique,  signifie 
caveiiie,  et  une  charmante  promenade  se  nomme  Baumerives, 
les  rives  de  la  caverne  ;  c'est  ordinairement  le  local  qui  a 
baptisé  le  pays. 

5.  —  La  plupart  des  mots  ont  une  affinité  marquée  avec  le 
français,  et  la  terminaison  seule  est  changée;  ex.  :  la  téta,  pour 
dire  la  tête.  Ils  substituent  volontiers  l'a  à  \'e  muet  pour  les 
finales. L'e  muet  serait-il  un  raffinement  des  peuples  amollis? 
Les  Romains  ne  le  connaissaient  pas,  et  nos  paysans  ont  cela 
de  commun  avec  les  Romains.  Vous  les  avez  rendus  leurs 
semblables  en  choses  plus  essentielles.  Quelquefois  les  mots 
qu'ils  emploient  sont  des  diminutifs.  Ex.  :  lo  charel,  le  petit 
char,  le  chariot;  —  lo  violel,  le  sentier,  de  via,  chemin.  D'autres 
mots  ne  paraissent  avoir  aucune  analogie  :  une  miche  de  pain, 
una  droublira; —  commodité,  bantsi; —  gilet,  brustio,  etc.  J'a^ 
déjà  parlé  de  l'affinité  du  patois  d'un  village  avec  celui  des 
cantons  suisses. 

G. —  Les  noms  des  plantes  et  ceux  des  astres  sont  efi'ective- 
ment  ceux  où  ils  s'éloignent  le  plus  du  français. Les  paysans 
liaraissent  des  hommes  à  part  pour  ces  objets,  et  ne  rien  de- 
voir qu'à  leurs  observations.  Il  est   à  présumer  que  [leur  lan- 


LETTRRS    A    GREGOIRE  2^'^ 

gag'e  a  été  ']  celui  de  tous  les  houiruos,  mais  spccialemoni  des 
hommes  adonnés  à  ragriculturo,  (^ui,  soit  en  conduisant  leurs 
troupeaux,  soit  en  voyageant  avec  leur  voiture,  étudîaicnî 
les  astres,  et  qui  ont  eu  aussi  de  fréquentes  occasions  de  cher- 
cher dans  les  plantes  des  remèdes  pour  leurs  blessures  et 
leurs  troupeaux,  qu'ils  soignent  ordinairement  un  peu  plus 
qu'eux-mêmes. 

7,  8,  9.  —  Nouso,  aben,  signifient  également  oui  dans  cer- 
tains villages,  et  le  mot  ia  j  est  inconnu,  tandis  que  c'est  le 
seul  employé  en  d'autres.  Una  caffa,  una  coincha,  signifient 
également  un  bassin;  mais  il  est  des  villages  où  le  second  seul 
est  connu.  En  général,  je  soupçonne  leur  langage  borné 
comme  leurs  besoins  et  leurs  idées,  et  je  n'y  crois  pas  à  la 
variété  des  expressions  pour  signifier  le  même  objet.  J'y  ai 
cependant  quelquefois  remarqué  des  nuances  qui  manquent 
au  français. 

10,  11,  12. —  Les  jurements  varient  suivant  les  villages. 
Lo  chancro  to  rongieo  est  aussi  familier  aux  habitants  de  Sept- 
moncel,  dont  j'ai  déjà  parlé,  que  S.. .  nom  deD...  aux  soldats. 
L'un  d'eux,  fâché  de  voir  neiger,  disait  :  Plût  à  Di  que  ne  nei 
jusqu'à  tant  que  les  gerines  (les  poules,  gallincTB)  ne  becassan  les 
éteiles.  Une  femme,  fâchée  de  s'entendre  appeler  b. .  . ,  répon- 
dit :  L'a  osto  d'abord  fa  una  bogressa,  tandis  que  ta  mare  restn 
9  nieis  à  fare  un  Jan-fotre.  Dans  d'autres  villages,  on  dit  mala 
via  te  pregna;  cette  imprécation  paraît  plus  religieuse,  si  ces 
deux  mots  peuvent  se  trouver  ensemble. 

13.  —  Les  finales  sont  plus  communément  voyelles  :  una 
culotta^  une  culotte;  —  no,  non;  —  una  chapella,  une  chapelle; 
— un  barutio,  un  gilet'; —  l-outo,  la  maison,  la  cuisine; — couatu 
la  porta,  ferme  la  porte;  —  un  casso,  une  noix,  etc. 

14.  —  La  prononciation  me  paraît  plus  rude  que  celle  du 
français;  l'accent  du  pays  est  traînant  :  ce  ne  sont  pas  des  Pro- 
vençaux, des  Languedociens. 

15.  —   On  n'a  pas  d'exemple  d'écrit  en  patois. 

16.  —  Il  varie  de  village  en  village:  deux  villages  de   la 

'  Le  ms.  donm;  qn'i'Ks  ont  été  celui  d'' qui  c^t  inintelligible 

^  L'auteur  a  écrit  quelques  lignes  plu'^  haut  hruslio,  mais  on  a  vu  qu'il 
ne  se  piquait  pas  de  bien  savoir  le  patois. 


246  DIALECTES    MODERNRS 

même  paroisse,  à  demi-heure  l'un  de  Tautre,  parlent  deux  pa- 
tois différents,  et  des  granges  éparses,  dépendantes  de  la  même 
paroisse,  ont  encore  un  idiome  un  peu  différent.  Ce  sont  sur- 
tout les  terminaisons  qui  varient.  Par  exemple,  ici,  Ton  ter- 
minera tout  en  a,  et  dans  le  village  voisin  tout  en  o.  On  en 
peut  conclure,  ce  me  semble,  qu'autrefois  il  y  avait  fort  peu 
de  correspondance  entre  les  hommes.  Plusieurs  testaments 
portent  qu'ils  ont  été  faits  attendu  qu'on  se  disposait  à  un 
grand  voyage,  celui  de  Besançon,  capitale  de  la  province. 

17.  —  Il  y  a  cinquante  ans  que  tout  le  monde  le  parlait 
dans  cette  ville,  et  les  ^ros  l'employaient  comme  un  moyen  de 
se  familiariser  avec  les  petits  ;  aujourd'hui  on  le  parle  peu,  et 
la  plupart  des  fils  de  bourgeois  n'en  savent  pas  un  mot, 

18,  19.  —  Tous  les  montagnards  entendent  le  'français,  et 
la  plus  grande  partie  sait  s'énoncer  en  cette  langue.  Ils  s'en- 
tendent entre  eux,  preuve  de  l'analogie  des  patois  ou  de  la 
communication  des  habitants.  La  plupart  ont  beaucoup  à  faire 
dans  les  villes  (  ils  sont  voituriers  )  ;  plusieurs  ont  été  choisis 
pour  le  département  et  le  district. 

20.  —  Je  n'ai  connu  qu'un  curé  qui  ait  prêché  patois;  il 
est  mort.  Je  croirais  cet  usage  dangereux  ;  il  éloignerait  de 
s'instruire  dans  la  langue  nationale.  J'ai  ouï  dire  qu'en  quelques 
maisons  de  village  on  priait  Dieu  en  patois,  ou  du  moins  on 
faisait  en  patois  certaines  prières  ;  cet  usage  est  beaucoup 
plus  raisonnable  que  celui  de  lui  parler  latin  quand  on  ne  le 
sait  pas. 

21.  —  Non.  [On  n'a  pas  de  grammaire  ni  de  dictionnaire 
de  ce  patois.  ] 

22.  —  [Les  inscriptions]  sont  en  français  ou  en  latin. 

23.  24.  — 7  On  a  fait  quelques  noëls  en  patois,  pleins  de  sel 
et  de  malice,  mais  ils  ont  été  faits  à  la  ville.  A  la  campagne, 
on  trouverait  tout  au  plus  quelques  chansons  ;  et,  si  dans  ces 
chansons  on  trouvait  quelques  nuances  de  naïveté,  on  y  trou- 
verait infiniment  plus  de  simplicité  et  de  non-sens. 

25,  26,  27.  —  La  simplicité,  l'ignorance  et  la  grossièreté 
ont  jusqu'ici  escorté  le  patois.  Il  est  à  espérer  qu'il  dispa- 
raîtra avec  elles,  et  qu'il  disparaîtra  sans  que  les  vices  des 
villes  s'y  joignent.  Je  dois  dire  cependant  que  les  paysans  ont 


LETTRES     A     GREGOIRE  247 

été  scandalisés,  et  à  juste  titre,  de  la  manière  dont,  nous 
avons  sollicite,  extorqué  leurs  suffrages  dans  les  assemblées 
primaires.  Homme  de  génie,  faites  donc  d'excellentes  lois 
capables  de  prévenir  les  cabales  ;  autrement  vous  nous  avez 
livrés  en  proie  aune  foule  de  vices  nouveaux. Quel  est  le  meil- 
leur moyen  de  prévenir  les  cabales  ?  —  Problème  très-impor- 
tant à  résoudre  et  digne  d'occuper  les  meilleures  têtes  de 
l'Assemblée.  Un  des  meilleurs  moyens  de  déjouer  les  cabales, 
et  en  général  toutes  les  manœuvres  des  méchants,  c'est  l'im- 
primerie ;  ne  pourriez-vous  faire  en  sorte  q.u'il  y  en  eût  dans 
toutes  les  villes,  comme  les  collèges?  L'imprimerie  est,  sans 
contredit,  le  plus  grand  bienfait  de  l'industrie  moderne,  et  sans 
elle  la  Révolution  n'existerait  pas.  Nous  n'avons  pas  ici  d'im- 
primerie, et  grande  est  la  différence  d'avoir  les  choses  sous 
sa  main  ou  d'aller  les  chercher  au  loin. 

28,  29.  —  Je  crois  qu'on  se  rapproche  du  français  ;  cepen- 
dant le  patois  se  perpétuera,  si  vous  n'y  mettez  ordre,  et  j'ap- 
prouve infiniment  votre  idée  de  vouloir  que  la  Révolution  se 
fasse  sur  cet  objet  comme  sur  les  autres.  L'instruction  en  se- 
rait plus  facile,  et  nos  sociétés  ont  besoin  d'instruction. 

A  propos  d'instruction,  je  me  rappelle,  respectable  curé, 
que  vous  avez  fait  la  motion  de  supprimer  les  confréries  ;  ce- 
pendant elles  subsistent  encore,  à  la  honte  de  la  raison  hu- 
maine. Nous  avons  parmi  nous  des  pénitents;  nous  avons 
essayé  de  rendre  utile  le  lieu  de  leur  assemblée,  en  y  lisant 
des  nouvelles  de  la  vôtre.  L'aumônier  s'y  est  opposé  avec  les 
bonnes  têtes  de  la  confrérie  ;  je  lui  ai  répondu  que,  puisqu'on 
lisait  les  décrets  à  la  paroisse,  on  pouvait  bien  lire  le  Point  du 
jour*  aux  pénitents,  et  je  l'ai  emporté. 

J'ai  trouvé  le  moyen  de  rendre  ainsi  fort  fréquentée  cette 
église  des  pénitents,  où  il  ne  venait  que  quelques  confrères. 
Nous  y  lisons  les  prônes  de  M.  le  curé  d'Emberménil  -  aux 
bons  citoyens  de  la  Meurthe,  ses  sermons  sur  le  duel  et  même 
ses  dissertations  sur  les  salines.  Ily  a  longtemps  que  nous 
sommes  accoutumés  à  bénir  son  nom  dans  nos  contrées;  nous 


•  Journal  du  temps,  nui  donnait  de  grand  matin  les  nouvelles  de  l'As- 
semblée; il  (^tait  rédigé  par  Barrère. 
2  Grégoire  lui-même. 


248  niALlCCTES    M0DRRN1£S 

savons  combien  il  a  été  utile  au  commencement  de  la  Révo- 
lution et  combien  il  est  respectable  dans  tous  les  temps. 

30  — Si  les  maîtres  d'école  distribuaient  des  prix  sur  des 
exercices  en  français  ])ur,  [on  détruirait  les  patois].  La  nou- 
velle constitution  ne  doit-elle  pas  amener  l'anéantissement  du 
patois,  puisqu'ils  auront  part  au  gouvernement? 

31.  —  [L'enseignement  se  fait]  en  français.  Plusieurs  maî- 
tres d'école  sont  pris  à  la  ville. 

32.  —  Il  y  en  a  dans  tous  les  chefs-lieux  de  paroisse;  mais 
ceux  qui  ne  le  sont  pas  n'en  ont  qu'en  hiver.  Dans  les  chefs- 
lieux,  c'est  ordinairement  le  chantre  qui  est  maître  d'école. 
Quelques-uns  de  ces  maîtres  d'école  passent  pour  habiles,  et 
celui  d'un  village  appelé  Chour  a  été  élu  membre  du  départe- 
ment. Sans  doute  on  se  souvenait  de  ces  vers  : 

Peut-être  qu'un  Lyciirgue,  un  Gicéron  sauvage, 
Est  chantre  de  paroisse  ou  juge  de  village. 

33.  —  Beaucoup  [de  maîtres]  n'apprennent  pas  à  chiffrer. 
Un  très-petit  nombre  donnent  les  principes  de  la  langue  la- 
tine, si  utile  aux  villageois.  Mais  beaucoup  enseignent  le  plain- 
chant,  et  c'est  tout, 

34.  —  Non  [les  écoles  ne  sont  pas  surveillées  par  les  cu- 
rés] ;  et,  comme  il  j  a  peu  d'abbés  Grégoire  parmi  eux;  comme 
plusieurs  sont  despotiques,  tracassiers,  peut-être  n'est-c»pas 
un  grand  mal.  Le  latin  des  classes  et  la  théologie  du  séminaire 
sont  les  deux  pôles  de  leur  science.  Ah  !  faites  donc  un  bon 
plan  d'éducation  nationale,  si  vous  voulez  affermir  les  lois  par 
les  mœurs,  si  vous  voulez  que  vos  descendants  aient  des  mœurs 
dignes  des  lois  que  vous  leur  donnez,  si  vous  voulez  que  la 
Constitution  subsiste  et  soit  utile.  Nous  ne  pouvons  que  lever 
les  mains  sur  la  montagne,  pendant  que  vous  combattez  dans 
la  plaine  ;  mais  c'est  sans  doute  aux  officiers  de  morale  à  tra- 
vailler au  plan  d'une  éducation  physique,  morale  et  intellec- 
tuelle. 

35.  —  Les  curés  ont  leur  bréviaire  et  quelques  volumes 
de  mauvais  fermons.  Sans  doute  il  est  des  exceptions,  puis- 
qu'il   s'est  trouvé    parmi   eux  des  Royer  '   et  des  Clerget  ^, 

'  Evéque  constiluliounel  de  l'Ain,  puis   in(^'troi)Olita!n  de  Paris,  mom 
bre  de  la  Constituante  cl  de  la  Convention. 
2  Curé  d'Oruans.  député  du  clergé  à  l'Assemblée  nationale. 


LETTRCS     A     GHEGOIRE  243 

mais  je  parle  en  général.  J'ai  proposé  le  nouvel  ouvrage  de 
Berquin  {Bibliothèque  des  villages)  à  quelques  maires  de  cam- 
pagne, qui  ne  s'en  sont  pas  souciés.  L'instruction  est  néces- 
saire pour  avoir  soif  de  rinstruction. 

36.  —  Le  plus  petit  nombre  [des  gens  de  la  campagne]  lit 
dans  ses  Heures,  et  c'est  tout.  Les  exceptions  sont  infiniment 
clairsemées. 

37.  —  [On  trouve  surtout,  chez  eux,  les  livres]  qui  peuvent 
les  hébéter. 

38.  —  [Ils  ont  les  préjugés]  de  l'ignorance  et  de  la  super- 
stition; ils  croient  aux  devins,  aux  sortilèges,  aux  revenants. 

39.  —  Oui  [ils  sont  peu  éclairés  ],  oui  [leurs  mœurs  sont 
plus  dépravées],  oui  [leurs  principes  religieux  sont  affaiblis]. 

40.  —  [Le  remède  à  ces  maux  serait]  une  éducation  natio- 
nale. 

4L  —  [Depuis  la  Révolution]  ils  sont  moins  humiliés,  ils 
sentent  un  peu  mieux  qu'ils  sont  hommes. 

42.  —  [Trouve-t-on  chez  eux  du  patriotisme,  etc.?].  Hélas  ! 
les  Grégoire,  les  Péthion  sont-ils  les  plusnombreux  à  l'Assem- 
blée nationale  ? 

43.  —  Les  abus  ont  été  peu  nombreux.  Ils  se  sont  enrégi- 
mentés, et  le  goût  des  armes  paraît  vif  en  eux.  Combien  il  est 
important  d'organiser  les  gardes  nationales!  Quel  terrible  le- 
vier aux  mains  d'un  charlatan  immoral  qu'une  multitude  en 
armes  !  .Je  n'ai  encore  rien  vu  sur  ce  nouvel  ordre  de  choses, 
qui  a  sauvé  la  France  en  gros  et  peut  la  perdre  en  détail. 

LoRAiN  fils,  maire  de  St-Claude. 


La  lettre  qu'on  va  lire  est  annoncée  dans  la  précédente  ; 
mais  il  est  heureux  que  le  maire  de  Saint-Claude  ait  pris  la 
peine  de  répondre  lui-même  à  Grégoire;  car,  si  M.  Joly,  avo- 
cat et  juge  dans  'cette  ville,  savait  bien  le  franc-comtois,  en 
revanche  il  ne  savait  guère  le  français,  et  il  était  loin  d'avoir 
Tesprit  de  Lorainfils.  On  trouvera  pourtant  dans  cette  lourde 
réponse  quelques  détails  intéressants  et,  ce  qui  est  toujours 
précieux  à  recueillir,  quelques  lignes  de  patois. 


250  DUrECTES    MODERNES 

Monsieur', 

Je  prends  la  liberté  de  vous  adresser  des  réponses  aux  ques- 
tions de  M.  Grégoire  sur  le  langage  et  les  mœurs  des  habi- 
tants de  notre  bailliage,  que  j'ai  faites  à  l'invitation  de  MM.  de 
la  municipalité.  J'ai  saisi  avec  empressement  cette  occasion 
de  me    rendre    utile    et  de  vous  assurer   que  j'ai  l'honneur 

d'être,  etc. 

JoLY,  avocat. 

A  St-Glaude,  en  Franche-Comté,  7  sept.  1790. 

1.  —  La  langue  française  est  en  usage  dans  tout  le  bailliage 
de  Saint-Claude  ;  l'usage  du  patois  n'est  que  pour  la  conver- 
sation. Il  a  le  même  fond  par  tout  ce  pays  ;  mais  il  varie  sur 
quelques  termes,  les  expressions  et  la  prononciation,  dans  les 
cantons  différents. 

2.  —  Il  dérive  du  celtique,  comme  tous  les  autres  patois 
de  Franche-Comté.  On  en  trouve  la  preuve  dans  un  Diction- 
naire celtique  de  M.  Bullet,  ancien  professeur  de  l'Université 
de  Besançon.  11  a  aussi  quelques  termes  qui  ont  du  rapport  au 
latin,  comme  coincha,  qui  signifie  un  bassin  à  puiser  teau, 
qui  vient  de  coucha.  Cela  n'est  pas  surprenant,  car  la  langue 
latine  s'est  conservée  par  les  actes,  qui  étaient  en  latin  ancien- 
nement. 

3.  4,  5.  —  Le  patois  a  très-peu  de  termes  composés.  Le 
celtique,dont  il  dérive,  lui  a  donné  un  fond  d'affinité  avec  les 
autres  ;  mais  les  variations  locales  y  ont  apporté  bien  des 
différences,  en  sorte  que  souvent  ils  s'entendent  peu.  Les  émi- 
grants  sont  toujours  obligés  de  prendre  les  jargons  des  lieux 
de  leurs  domiciles  ;  car  ils  y  sont  autant  attachés  qu'à  leurs 
usages,  et  ils  ont  peine  à  l'adopter. 

6.  —  L'ancien  idiome  provençal  doit  avoir  beaucoup  plus 
d'affinité  au  patois  que  le  nouveau  ;  mais  il  s'est  rapproché 
du  français  sur  tous  les  objets  qui  exigent  la  communication, 
comme  ceux  de  la  médecine,  des  arts,  du  commerce. 

7.  —  Le?  différents  cantons  du  bailliage  ont  quelques  ter- 
mes différents  pour  signifier  la  même  chose,  mais  on  en  voit 

'  Cette  lettre  est  adressée  au  Président  de  l'Assemblée  nationale. 


LETTRES     A     GREGOIRE  ?51 

peu   dans  un  canton;  ils  ont  ajouté  des  termes  allég:orii|ues, 
pour  donner  plus  d'énergie. 

8.  —  Le  patois  en  lui-même  n'a  pas  plus  d'abondance  en 
termes  sur  les  sujets  différents  ;  mais  les  allusions  sont  d'une 
abondance  singulière  dans  la  colère,  la  satire  et  la  gaieté.  Les 
exemples  sont  très-propres  à  faire  connaître  le  langage  et  le 
génie  des  habitants  ;  on  en  rapportera  quelques-uns.  Un  par- 
ticulier, voyant  écrire  un  homme  de  loi,  dit  :  Voutra  pluinma 
veule  bin  ;  Votre  plume  vole  bien.  Il  disait  vrai  dans  son  sens.  Un 
autre,  parlant  d'un  particulier  qui  avait  un  soin  excessif  de  sa 
personne,  dit  :  Y  fara  triais  la  terra  po  Cantarai  ;  Il  fera  trier 
la  terre  pour  l'enterrer.  Un  autre  disait  d'un  homme  qui  était 
mort  la  veille  de  Noël  :  Lo  diable  es  bin  fin,  il  a  prai...  la  veille 
de  Noyé  por  en  faille  sa  tronche  ;  Le  diable  est  bien  fin,  il  a  pris. . . 
la  veille  de  Noël  pour  en  faire  sa  tronche.  L'usage  est  de  conser- 
ver la  plus  grosse  bûche  pour  la  veille  de  Noël;  ils  l'appellent 
tronche.  Un  autre,  parlant  d'un  absent  qui  devait  être  bientôt 
de  retour,  dit:  Qu  il  s'en  vigne  comme  la  bina,  en  quatro  quarti; 
Qu'il  s^ en  vienne  comme  la  lune,  en  quatre  quartiers.  Un  autre, 
enfin,  dit  en  colère  :  Quatant  de  cinq  cens  millions  de  diaiblos  te 
trainnent  en  enfer  qui  faudret  de  friimis  por  trainnoit  Lyon  à 
Paris  ;  Qu'autant  de  cinq  cents  millions  de  diables  te  traînent  en 
enfer  quil  faudrait  de  fourmis  pour  traîner  Lyon  à  Paris,  etc . 

9.  —  On  a  toujours  cru  que  le  patois  était  borné  aux  objets 
propres  aux  gens  de  la  campagne,  mais  un  exemple  nous  a  con- 
vaincu qu'il  pouvait  être  propre  aux  sciences.  Un  ecclésiastique 
de  cette  ville,  que  je  fréquentais  beaucoup,  inventa,  par  la 
seule  force  de  son  génie,  un  nouveau  système  astronomique.  Il 
était  né  mécanicien  et  fit  une  sphère  pour  la  démonstration  de 
son  système.  La  langue  française  lui  parut  d'une  marche  trop 
lente  pour  l'expliquer  ;  il  donna  la  préférence  au  patois,  qui 
lui  était  famillier,  à  la  réserve  des  termes  astronomiques  qu'il 
ne  trouvait  pas  dans  le  patois.  Il  acquit  cependant  une  répu- 
tation qui  lui  procura  des  visites  de  savants  qui  ne  l'auraient 
pas  entendu  sans  le  secours  de  la  sphère.  Il  fut  mandé  à  Pa- 
ris ;  mais  son  langage,  ses  réformes  des  idées  des  autres,  lui 
firent  manquer  le  succès. 

10.  —  La  faiblesse  humaine  est  de  tous  les  pajs.  Le  patois 


25?  DIALECTES    MODERNES 

a  des  termes  [  obscènes]  qui  lui  sont  propres;  mais  les  expres- 
sions sont  si  incrénieiises,  que  les  personnes  les  plus  rigriries  ne 
peuvent  se  défendre  d'en  rire. 

11.  —  Le  patois  n'a  que  les  jurements  du  français,  mais 
les  imprécations  j  sont  singulières  ;  voyez  la  réponse  sur  l'ar- 
ticle 8. 

12.  — Le  patois  est  laconique  et  capable  de  réduire  à  très- 
peu  de  chose  le  sens  des  brochures  du  jour. 

13.  —  Les  finales  du  patois  sont  le  plus  souvent  consonnes. 

14.  —  La  prononciation  n'est  ni  gutturale,  ni  sifflante,  mais 
traînante  :  mais  il  en  est  qui  le  parlent  vite  et  avec  grâce. 

15.  —  On  ne  met  pas  le  patois  en  écrit  ;  ceux  qui,  dans  un 
badinage,  l'ont  entrepris,  l'ont  fait  d'après  la  prononciation, 
car  il  n'y  a  jamais  eu  de  grammaire  ni  de  dictionnaire  sur  ce 
jargon. 

16.  —  V.  la  réponse  sur  l'article.  1. 

17.  —  L'énergie  et  la  naïveté  du  patois  en  avaient  con- 
servé l'usage  dans  cette  ville  en  conversation;  mais  le  torrent 
de  la  mode  et  du  bon  ton  l'a  rélégué  au  menu  peuple,  qui  com- 
mence à  le  dédaigner. 

18.  —  Le  patois  est  dominant  dans  les  conversations  des 
gens  de  la  campagne  du  bailliage,  qui  a  environ  trente-trois 
mille  toises  du  midi  au  septentrion  ,  et  vingt-trois  mille  du 
levant  au  couchant. 

19.  —  Les  campagnards  permanents  parlent  peu  français 
et  très-mal  ;  ceux  qui  voyagent  le  parlent  moins  mal  ;  ceux 
qui  se  sont  absentés  plusieurs  années  le  parlent  assez  bien. 

20, 21, 22.  —  On  n'a  jamais  ouï  dire  qu'on  ait  prêché  en  pa- 
tois; les  inscriptions  du  pays  sont  toutes  en  latin  ou  en  fran- 
çais. V.  réponse  sur  l'art.  15. 

23,  24,  25.  —  On  n'a  connu  en  patois  que  des  chansons  faites 
pour  les  danses  des  gens  de  la  campagne,  dont  les  rimes  sont 
très-inexactes;  le  patois  n'en  est  pas  susceptible. 

26.  —  On  ne  connaît  pas  de  proverbes  propres  au  patois. 
On  y  a  reçu  ceux  du  français,  lesquels,  habillés  en  patois,  ne 
perdent  rien  de  leur  mérite. 

27.  —  Le  patois  du  pays  a  moins  d'influence  sur  les  mœurs 
que  les  mœurs  sur  le  langage.  Sa  simplicité,  sa  naïveté  prou- 


LETTRES     A     GREGOIRE  ?53 

vent  les  mœurs.  La  parure  de  la  langue  française  est  bien  ])lus 
dangereuse. 

28,  —  V.  la  réponse  sur  Fart.  6. 

29,  30.  —  On  ne  voit  d'importance  que  dans  la  conserva- 
tion du  patois.  11  est  le  langage  du  bon  sens  et  de  la  belle  sim- 
plicité, double  mérite  augmente  par  conséquent  tous  les  jours. 
On  a  remarqué  que  le  dédain  du  patois  n'a  pris  que  dans  ceux 
de  la  campagne  qui  n'ont  ni  bon  sens  ni  mœurs  ;  ils  sont  en 
petit  nombre.  La  plupart  sait  l'apprécier  et  ne  se  résoudra  ja- 
mais à  le  quitter. 

31.  —  Dans  les  campagnes,  l'enseignement  a  toujours  été 
fait  en  français,  sur  des  livres  ascétiques,  et  l'instruction  sur  le 
catéchisme  du  diocèse. 

32.  —  Chaque  paroisse  a  son  maiirs  d'école,  qui  habite  ati 
chef-lieu.  Quelques  cantons  qui  en  sont  éloignés  s'en  donnent 
avec  l'approbation  de  l'ordinaire.  Ils  enseignent  garçons  et 
filles,  parce  qu'il  n'y  a  pas  de  personnes  assez  instruites  pour 
faire  les  fonctions  de  maîtresse  d'école. 

33.  —  On  n'enseigne,  dans  ces  écoles,  qu'à  lire,  écrire  et 
chifl'rer. 

34.  35  .  —  Elles  sont  bien  surveillées,  et  l'on  n'en  a  pas  en- 
core eu  de  sujet  de  plainte.  M.  l'évêque  défunt  a  fait  distri- 
buer dans  les  paroisses  beaucoup  de  livres  ;  il  en  a  laissé  beau- 
coup qui  ont  été  à  leur  destination. 

35.  —  Les  gens  de  la  campagne  ne  manquent  [pas]  de  goût 
pour  la  lecture,  mais  ils  donnent  une  juste  préférence  aux  ou- 
vrages de  leur  état.  En  hiver  principalement,  ils  lisent  ou  font 
lire  par  leurs  enfants,  en  famille,  des  livres  ascétiques. 

37.  —  L'office  de  juge,  que  j'ai  exercé  pendant  longtemps, 
m'a  occasionné  des  séjours  à  la  campagne.  Je  voyais  leurs 
livres  dans  les  temps  qui  interrompaient  mes  occupations;  j'y 
ai  souvent  vu  des  ouvrages  de  piété.  Le  voisinage  de  certains 
auteurs  célèbres*,  qui  ont  souillé  et  avili  leur  plume  sur  la  tin 
de  leur  carrière,  y  avait  répandu  des  brochures  dangereuses 
pour  les  mœurs  et  la  religion,  qui  ont  introduit  et  nourri  le 
trouble  et  l'anarchie  à  Genève.  Je  trouvais  de  ces  ouvrages 

I  E?t-il  besoin  de  dire  que  c'est  du  ciloi/en  de  Genève  et  du  patriarche 
de  Ferney  qu'il  est  ici  question? 


254  DIALECTES    MODERNES 

chez  un  commerçant  qui  était  séduit;  mais,  à  l'aide  de  son  bon 
sens,  je  lui  lis  apercevoir  le  faible  de  ces  écrits,  leurs  absurdi- 
tés, leurs  inconséquences  et  leurs  contradictions.  Il  en  revint, 
et  a  fini  sa  vie  avec  édification.  Un  petit  nombre  d'autres  ont 
été  désabusés. 

38.  —  Il  n'est  pas  de  peuple  sans  préjugé;  mais  je  n'en  ia 
pas  connu  de  dangereux  dans  la  campagne.  Il  y  a  eu  plus  de 
superstitions,   dont  on  les  a  désabusés. 

39,  40.  —  Les  gens  de  la  campagne  ont  trop  d'occupation 
d'état  pour  s'attacher  à  s'instruire  sur  tout  ce  qui  n'y  a  pas 
du  rapport.  Ceux  qui  ont  poussé  leur  curiosité  au  delà  se 
sont  donnés  aux  écrits  de  mode,  qui  se  répandent  avec  trop 
de  liberté,  et,  n'y  trouvant  que  des  mots,  ou  des  doutes  et 
des  incertitudes,  la  plupart  ont  fini  par  les  mépriser  II  est 
dangereux  *  que  la  jeunesse  ne  soit  séduite,  ce  qui  serait  un 
grand  mal  parmi  des  ignorants  sans  éducation,  qui  ne  con- 
naissent ni  bienséance  ni  modération,  et  qui  donheraient  dans 
le  fanatisme.  Il  n'a  que  trop  été  funeste  pour  la  religion,  dans  le 
temps  que  le  torrent  qui  entraîne  les  esprits  faibles  était  pour 
elle,  quoiqu'elle  le  désavouât.  Par  la  même  raison,  il  a  pris  un 
cours  opposé,  où  il  serait  bien  plus  dangereux,  parce  qu'il  n'y 
aurait  aucun  frein.  Le  remède  au  mal  serait  d'arrêter  tous  les 
ouvrages  contraires  aux  mœurs,  à  la  religion  et  au  gouverne- 
ment, directement  ou  indirectement,  qui  sont  des  boîtes  de 
Pandore  propres  à  répandre  la  dépravation,  le  trouble  et 
l'anarchie  ^. 

41. — La  Révolution  n'a  été  suivie  d'aucun  mauvais  effet 
dans  notre  bailliage.  Nous  n'avons  éprou""é  ni  insurrection,  ni 
trouble  ;  l'ordre  et  la  tranquillité  ont  toujours  régné  ici.  L'at- 
tachement pour  les  ministres  de  ia  religion  a  occasionné  quel- 
ques plaintes  sur  la  pression  de  la  dîme  ;  mais  on  les  a  con- 
solés en  leur  disant  qu'elle  serait  remplacée  par  un  impôt  avec 
plus  d'étendue  et  de  justice. 

42.  —  Le  patriotisme  règne,  dans  ce  pays,  tout  au  moins 
autant  que  nulle  part.  L'intérêt  particulier  cependant,  dans 


*  C'est-à-dire  U  est  à  craindre;  latinisme. 

-  Ce  raisonnement  ressemble  un  peu  à   celui  de  Sganarelle  :   nous 
n'avons  pas  cru  devoir  changer  un  seul  mot. 


LETTRES     A    GREGOIRE  255 

des  familles  qui  n'ont  pour  la  plupart  que  leur  subsistance, 
conserve  ses  droits.  Mais  on  leur  tait  apercevoir  que  la  reli- 
gion a  mis  le  patriotisme  au  rang  de  leurs  devoirs,  que  le  bien 
général  refluait  sur  le  particulier,  et  que  du  bon  ordre  dépen- 
daient leurs  fortunes  et  leur  tranquillité. 

43.  —  On  a  toujours  conservé  les  mêmes  égards  pour 
M.  l'Evêque,  les  chanoines,  ci-devant  gentilshommes,  et  autres 
prêtres  séculiers  et  réguliers.  Pour  preuve,  on  rapportera  des 
faits.  M.  FEvêque  est  au  rang  des  notables  de  la  municipalité  ; 
les  municipaux  et  les  notables  se  sont  régalés  réciproquement, 
et  M.  FEvêque.  Sur  un  bruit  d'insurrection  de  la  part  des  an- 
ciens vassaux  du  chapitre  pour  leur  enlever  leurs  titres,  la 
municipalité  leur  assura  qu'ils  seraient  défendus  par  notre 
milice  nationale.  Deux  officiers  de  cette  milice  allèrent  dans 
ces  terres,  pour  les  exhorter  à  rester  tranquilles  et  les  assurer 
qu'ils  trouveraient  toute  la  milice  pour  les  arrêter.  Ils  se  con- 
vainquirent de  la  fausseté  de  ce  bruit.  Un  chanoine  est  aumô- 
nier de  notre  milice  et  a  été  invité  à  toutes  nos  fêtes  patrioti- 
ques. MM.  du  District  ont  mis  le  procédé  le  plus  honnête  dans 
les  inventaires  qu'ils  ont  faits.  C'est  ainsi  que  nos  habitants 
prouvent  ia  noblesse  [sic]. 


Il  n'est  pas  question  du  seul  département  du  Jura  dans  le 
document  qu'on  va  lire  ;  mais  l'auteur  de  cette  lettre,  qui  fut 
dans  la  suite  vicaire  épiscopal  de  Blois,  et  que  Grégoire,  dans 
ses  Mémoires,  ne  craint  pas  d'appeler  un  hypocrite  abominable, 
avait  séjourné,  probablement  comme  aumônier  ou  comme 
précepteur,  à  Salins,  àTournon,  aux  Chapelles-Bourbon,  dans 
le  département  de  Seine-et-Marne,  et  finalement  au  château 
de  Sullj,  dans  le  Loiret.  Les  indications  qu'il  donne  sur  ces 
différents  pays  sont  bonnes  à  recueillir,  malgré  son  verbiage 
et  ses  prétentions  de  réformateur  religieux. 

Monsieur  l'Evèque, 

Je  vais  essayer  de  concourir  à  vos  vues  morales  et  patrio- 
tiques, en  répondant  à  vos  questions  sur  le  patois.  Je  vous 
soumets  entièrement  mes  idées  ;  puissent-elles  entrer  dans  la 


256  DIALECTES    MODERNES 

composition  de  votre  ouvrage,  lorsque  vous  les  aurez  embel- 
lies de  votre  style  !  Je  répondrai  à  vos  questions  par  ordre, 
relativement  à  Salins,  à  Tournon,  à  Beaumarchais  et  à  Sully. 

M.-J.-P.  ROCHEJEAN 

1,  —  La  ville  de  Salins,  la  plus  considérable  du  départe- 
ment du  Jura,  fait  partie  de  la  France  depuis  la  dernière  con- 
quête de  la  Franclie-Comté,  qui  eut  lieu,  je  crois,  en  1688  •. 
Avant  la  conquête,  la  Franche-Comté  n'avait  d'espagnol  que 
son  gouverneur  et  quelques  tyrans  subalternes.  Quant  à  ses 
moeurs  et  à  son  langage,  elle  n'était  pas  plus  espagnole  que  le 
Comtat  d'Avignon  n'est  italien ,  que  le  duché  de  Savoie  n'est 
piémontais.  Seulement  on  rencontre  dans  le  patois  et  le  mau- 
vais français  du  peuple  de  Salins  et  de  la  ci-devant  province 
quelques  tournures  et  quelques  expressions  espagnoles,  ou  qui 
tiennent  de  l'espagnol.  Il  est  moins  rare  d'y  trouver  des  tra- 
ces de  la  langue  allemande,  par  la  raison  de  son  voisinage  avec 
la  Suisse.  Le  patois  de  Salins,  de  la  ci-devant  Franche-Comté 
et  de  la  ci-devant  Bourgogne,  est  un  vieur  français  corrompu  '. 
Chacun  des  villages  où  j'ai  été  et  dont  j'ai  entendu  parler  mo- 
difie tellement  cette  source  commune  de  son  langage,  qu'il 
diffère  au  point  d'être  presque  méconnaissable.  Une  chose 
plus  singulière  :  la  ville  de  Salins,  qui  est  longue  presque  d'une 
demi-lieue,  est  divisée,  de  langage  et  même  de  mœurs,  en 
deux  parties  très-distinctes.  Le  patois  et  le  français,  dans  la 
partie  nord,  sont  beaucoup  plus  grossiers  et  moins  français, 
et  les  mœurs  beaucoup  moins  polies  que  dans  la  partie  sud.  La 
langue  nationale  fait  tous  les  jours  des  progrès  sensibles  dans 
toute  la  ville  ;  les  vieillards  de  la  bourgeoisie  ne  parlent  plus  pa- 
tois ;  les  jeunes  gens  de  la  dernière  classe  savent  assez  bien  le 
français.  Tout  le  monde  connaît  la  lâcheté  niaise  et  fastidieuse 
de  l'accent  des  Francs-Comtois,  dont  ils  se  corrigent  très-diffi- 
cilement, même  en  se  dépaysant.  Un  défaut  de  langage  aussi  en- 
raciné chez  eux  et  plus  important  est  l'inexactitude  et  le  louche 
•  le  leurs  constructions. 


'  C'est  1668  qu'il  taul  lire. 

-  Cette  erreur  est  trop  manifeste  pour  qu'il  soit  besoin  Je  la  reciifier 
longuement. 


LETTRES    A    GREGOIRE  257 

2.  —  La  réponse  à  la  seconde  qutîstion  est  fondue  dans  celle 
à  la  première. 

3.  —  Les  termes  radicaux  du  patois  de  P^ranche-Comté  sont 
les  mêmes  que  ceux  du  français.  Il  n'est  point  riche  comme  le 
languedocien  et  le  provençal  ;  il  a  peu  do  mots  composés,  mais 
il  renferme  quelques  mots  d'une  énergie  très-pittoresque. 

4.  —  Ce  que  j'ai  dit  jusqu'à  présent  nie  paraît  suffisamment 
répondre  à  la  quatrième  question. 

5  à  12.  —  Je  ne  suis  jjoint  assez  habile  pour  répondre  aux 
huit  suivantes.  Seulement  je  répondrai  en  deux  mots  à  la  neu- 
vième, que  le  patois  de  Franche-Comté  manque  d'ex[)ressions 
pour  les  nuances  des  idées  et  les  objets  intellectuels,  parce  que 
les  paysans  francs-comtois  ont  des  idées  très-peu  nombreuses 
et  fort  peu  nuancées,  et  parce  qu'ils  cultivent  beaui-oup  plus 
leurs  champs  que  leurs  intelligences. 

13.  —  J'observe  que,  si  peu  de  mots  français  rinissent  par 
i\e^  voyelles,  il  en  est  peut-être  moins  encore  qui  soient  ter- 
minés par  des  voyelles  prononcées.  Or,  dans  le  patois  de 
Franche-Comté,  on  ne  trouve  des  consonnes  prononcées  qu'à 
la  iin  d'un  très-petit  nombre  de  mots,  presque  entièrement 
français.  Je  placerai  ici  une  autre  observation.  On  dit  que 
les  langues  septentrionales  sont  surchargées  de  consonnes, 
et  les  langues  méridionales  abondantes  en  voyelles;  cela  n'est 
pas  généralement  vrai,  car  j'ai  vu  dans  les  poésies  écossaises 
d'Ossian,fils  de  Fingal,  presque  tous  les  mots  terminés  par  des 
voyelles,  et  la  langue  écossaise  est  à  très-peu  de  chose  près 
celle  de  l'Irlande,  de  la  principauté  de  Galles  et  de  notre  ci- 
devant  basse  Bretagne. 

14.  —  Je  passe  sur  cette  question,  pour  la  môme  raison  que 
j'ai  passé  sur  [dusieurs  des  précédeiites  et  que  je  passerai  sur 
plusieurs  des  suivantes. 

15.  —  Le  patois  de  Franche-Comté  ue  s'écrit  qu'avec  les  ca- 
ractères français,  et  je  ne  sache  pas  (luMl  y  ait  d'autres  ouvra- 
ges que  des  cantiques  et  des  noëls. 

19.  —  Dans  les  villages  les  plus  éloignés  des  villes,  le  peuple 
entend  un  peu  le  français,  mais  ne  sait  pas  le  parler. 

20  à  20.  —  Je  n'ai  jamais  entendu  dire  qu'on  prêchât  ni 
qu'on  ait  prêché  en  patois  dans  le  pays  dont  je  parle.  Même 
réponse  jusqu'à  la  vingt-septième  (question. 

20 


258  DIALECTES   MODERNES 

27.  —  L'influence  du  patois  sur  les  mœurs  me  semble  devoir 
être  d'abaisser  les  paysans  à  leurs  yeux,  en  leur  faisant  penser 
qu'ils  ont  un  langage  grossier,  dédaigné  et  ignoré  des  premiè- 
res classes  de  la  société.  Les  mœurs  rustiques,  naturellement 
immuables,  imprimeraient  leur  immutabilité  au  langage  de 
tous  les  campagnards,  si  ceux-ci  ne  fréquentaient  les  villes. 

29.  —  L'effet  de  la  destruction  du  patois  serait  d'élever 
l'âme,  de  réunir  les  cœurs,  d'éclairer  les  esprits;  comme  l'effet 
du  patois  est  de  dégrader  l'âme  par  une  des  distinctions  qui 
placent  le  pauvre  au-dessous  du  riche,  de  conserver  dans  les 
campagnes  une  ignorance  qui  met  sans  cesse  les  hommes  aux 
prises  avec  l'erreur  et  la  fourberie  ,  d'empêcher  entre  les 
hommes  la  communication  des  sentiments  et  des  pensées,  de 
traiter  facilement  de  leurs  intérêts,  de  diviser  les  départe- 
ments, les  districts  et  les  communes  en  autant  de  peuples  diffé- 
rents. Le  détruire  serait  travailler  pour  l'établissement  de 
l'égalité,  donner  de  grandes  facilités  à  l'instructon  publique, 
unir  en  un  seul  cœur  comme  en  un  seul  peuple  tous  les  Fran- 
çais. L'avantage  religieux  de  la  destruction  du  patois  ne  serait 
moins  grand  que  son  avantage  politique.  Il  importe  à  une 
grande  partie  de  la  nation  de  savoir  la  langue  dans  laquelle 
on  l'instruit  de  la  religion,  et  qui  bientôt  sera  celle  de  la  litur- 
gie .  L'ignorance  de  cette  langue  nécessiterait  un  grand  nom- 
bre de  traductions  des  nouveaux  livres  de  liturgie,  qu'il  est  à 
désirer  de  ne  pas  multiplier,  et  remettrait  le  voyageur  le  plus 
instruit  dans  le  cas  de  ne  rien  comprendre  à  l'office  de  beau- 
coup de  départements  et  d'y  assister  comme  le  peuple  dans 
nos  églises.  Tous  les  Français  doivent  savoir  lire  les  bons  ou- 
vrages que  nous  avons  sur  la  religion,  dans  la  langue  de  cen 
ouvrages,  et  non  dans  des  traductions  qu'on  ne  fera  pas  pour 
eux.  Enfin,  s'il  est  de  l'intérêt  public  qu'il  n'y  ait  qu'un  poids 
et  une  mesure  en  France,  il  l'est  bien  plus  encore  qu'il  n'y  ait 
qu'un  même  idiome. 

30.  -—  Les  moyens  de  détruire  le  patois  sont  :  U  de  n'ad- 
mettre désormais  pour  maîtres  d'école  dans  les  villages  que 
des  hommes  qui  n'en  sachent  pas  le  patois;  2°  de  fournir 
chaque  année  aux  administrateurs  de  district  une  somme  à 
distribuer,  en  forme  de  prix  d'encouragement,  aux  trois  maî- 


LETTRES    A     GREGOIRE  259 

très  d'école  qui  auront  le  plus  contribué  à  détruire  le  patois 
de  leur  paroisse  ;  3°  de  distribuer  dans  les  campagnes  beau- 
coup d'instructions  simples  en  français,  sur  la  religion,  la 
Constitution,  l'agriculture  et  le  commerce;  4°  de  cesser,  dès 
que  l'intérêt  de  la  religion  et  des  fortunes  pai-ticulières  le 
permettront,  de  prêcher  et  de  faire  les  actes  civils  autrement 
qu'en  français  ;  5°  de  hâter  le  moment  où  le  service  divin  se 
fera  on  langue  nationale. 

31.  —  Dans  la  ci-devant  Franche-Comté,  l'enseignement  se 
fait  en  français;  mais,  partout,  les  catéchismes,  qui  sont  les 
premiers  livres  que  lisent  les  enfants,  sont  peu  exacts  sur  la 
doctrine  de  la  foi  et  sur  la  décence  des  mœurs.  Rien  n'est  plus 
nécessaire  qu'un  catéchisme  unique,  adopté  par  un  concile 
national. 

32.  —  Je  suis  porté  à  croire  qu'il  v  a  un  maître  ou  une 
maîtresse  d'école  dans  chaque  paroisse  de  la  ci-devant  Franche- 
Comté,  et  que  le  plus  grand  nombre  des  villageois  y  sait  lire. 

35. —  Un  assortiment  de  livres,  que  devraient  avoir  MM.  les 
Curés  pour  prêter  à  leui^s  paroissiens,  est  une  idée  digne 
d'avoir  été  conçue  et  exécutée  par  l'auteur  de  ces  questions. 
Il  a  toujours  eu  en  cela,  comme  dans  beaucoup  d'autres  ex- 
pressions de  son  zèle,  très-peu  de  rivaux,  et  je  crains  que, 
malgré  le  renouvellement  du  clergé,  il  n'ait  toujours  que  très- 
peu  d'imitateurs.  Mais  il  vaut  mieux  qu'un  peu  de  bien  se  fasse 
que  pas  du  tout. 

36.  _  Si  les  gens  de  la  campagne  n'ont  pas  le  goût  de  la 
lecture,  il  n'est  pas  douteux  que  les  curés  et  les  maires  ne 
puissent  le  leur  imposer.  Partout  le  peuple  commence  à  lire  ; 
il  s'agit  d'entretenir  l'impulsion  donnée.  Dans  les  classes  les 
plus  ignorantes  de  la  société,  il  se  trouve  des  hommes  dignes 
d'instruction,  qui  ne  demandent  qu'à  s'instruire.  Je  sais  que 
le  peuple  est  très-apathique  ;  mais  je  sais  qu'il  l'est  moins  de 
jour  en  jour,  et  qu'il  renferme  assez  d'hommes  avides  d'in- 
struction pour  en  rendre  plus  ou  moins  lentement  le  goût  uni- 
versel. 

37.  —  Les  paysans  de  la  ci-devant  Franche-Comté  sont, 
comme,  je  le  crois,  dans  tous  les  départements,  à  une  certaine 
distance  des  grandes  villes,  routiniers,  très-opiniâtres  dans 


260  DIALECTES   MODERNES 

K;ur  manière  de  cultiver  la  terre,  beaucoup  plus  dévots  envers 
une  statue  de  la  Vierge  ou  d'un  saint  en  réputation  qu'en- 
vers J.-C,  et  persuadés  de  l'existence  des  revenants. 

42.  —  La  hauteur  des  sentiments  patriotiques  me  paraît 
devoir  être  au-dessus  des  lumières  et  des  vieilles  affections 
des  habitants  de  la  campagne  ;  mais  j'ai  trop  bonne  idée  de  la 
nature  humaine  pour  ne  pas  croire  que,  s'ils  avaient  de  justes 
idées  de  l'intérêt  public,  ils  ne  devinssent  d'excellents  pa- 
triotes. 

43.  —  Dans  la  ville  de  Salins,  tous  les  fonctionnaires  ecclé- 
siastiques ont  prêté  le  serment;  les  chanoines  j  seront  peu 
regrettés,  quoiqu'ils  n'j  donnassent  aucun  mauvais  exemple 
et  que  quelques-uns  y  exerçassent  le  ministère  avec  beaucoup 
de  fruit.  On  y  est,  comme  presque  partout,  très-patriote.  La 
faute  qu'un  ci-devant  noble  a  faite  fie  garder  longtemps  de 
grandes  provisions  de  blé,  pendant  la  dernière  famine  et  la 
précédente,  n'a  pas  peu  servi  à  décréditer  la  noblesse.  Le  jour 
de  la  Fédération,  on  a  obligé  les  nobles  de  la  ville  à  aller  au 
lieu  de  la  cérémonie  prêter  le  serment  civique.  Je  ne  pense 
pas  que,  depuis  cette  époque,  la  haine  et  la  déiiance  de  la  no- 
blesse soient  diminuées;  chaque  jour,  la  résurrection  des  or- 
dres devient  [)lus  impossible.  Cette  observation  est  surtout 
vraie  pour  les  départements  qui  ont  remplacé  les  ci-devant 
comté  et  duché  de  Bougogne,  où  le  ])atriotisme  s'est  monrré, 
dès  le  commencemeut,  avec  plus  de  constance  et  de  vigueur. 


Tournon,  chef-lieu  de  district  dans  le  département  de  l'Ar- 
dèche,  située  au  ])ied  d'un  coteau  qui  fait  face  à  celui  qui 
produit  le  fameux  vin  de  l'Hermitage,  est  peuplée  de  près  de 
4,000  personnes,  qui  toutes  entendent  le  français,  et  dont 
les  plus  pauvres  ne  le  savent  guère  parler.  Les  habitants  des 
villages  et  hameaux  qui  sont  à  moins  d'une  lipue  de  la  ville 
n'entendent  pas  mot  de  la  langue  nationale.  La  leur,  qui  est 
aussi  celle  du  peuple  de  Tournon,  tient  plus  du  languedocien 
que  de  toute  autre;  son  caractère  général  est  celui  des  idiomes 
méridionaux.  Il  change  de  distance  en  distance,  tellement  qu'à 
Satillieu,  éloigné  seulement  de  cinq  lieues  de  Tournon,  il  est 


LETTRES    A     GREGOIRE  261 

rres-différent  ;  il  devient  moins  Irançais  et  plus  grossier  à  me- 
sure qui;  Ton  s'éloigne  des  villes. 

On  trouve  dans  les  environs  de  Tournon,  et  surtout  en 
suivant  la  plaine  du  Rhône,  beaucoup  d'inscriptions,  de  mo- 
saïques, de  taui'oboles,  d'urnes,  d'idoles  et  de  monnaies  ro- 
maines. A  Tain,  situé  au  delà  du  Rhône,  vis-à-vis  Tournon, 
un  taurobole  sert  de  piédestal  à  la  croix  qui  est  sur  la  place 
du  port.  Aune  demi-lieue  de  Tournon,  une  pierre  portant  une 
inscription  très-bien  conservée,  en  l'honneur  de  Trajan,  est  la 
pierre  angulaire  d'une  église  de  paroisse.  . 

Je  n'ai  point  assez  vu  le  peuple  de  Tournon  pour  vous  don- 
ner de  plus  grands  détails  sur  son  langage  et  sur  ses  mœurs, 
sans  m'exposer  à  faire  fléchir  la  vérité.  Pour  les  observations 
générales,  je  vous  prie  de  vous  référer  à  ce  que  j'ai  dit  sur  la 
ci-devant  Franche-C.'omté. 


A  suivre.  ) 


-.t>~&,^rSO-Ji-'^ — 


Concours  du  Chant  du  Latin 

PIÈCE  COURONNÉE 


CANTUL   GINTEI    LATINE 

Latina  gintâ  e  reginâ 
Intre  aile  lumii  ginte  mari. 
Ea  pôrtâ'n  frunte  o  stea  divinâ 
Luciud  prin  timpii  seculari. 
Menirea  ei  tôt  înainte 
Mâret  îndréptâ  pasii  sei. 
Ea  merge'n  capul  altor  ginte 
Versând  lumina'n  urma  ei . 

Latina  gintâ'i  o  verginà 
Cu  farmec  dulce,  râpitor. 
Strâinu'n  façiâ'i  se  închinâ 
Si  pe  genuchi  cade  cu  dor, 


LE  CHANT  DE  LA  RACE  LATINE 

La  race  latine  est  reine  —  parmi  les  grandes  races  du  monde.  — 
Elle  porte  sur  le  front  une  étoile  divine,  —  qui  luit  à  travers  les 
temps  séculaires.  —  Le  destin,  —  toujours  en  avant.  —  dirige  ses 
pas  d'une  manière  grandiose.  —  Elle  marciie  à  la  tète  des  autres 
races,  —  versant  la  lumière  derrière  elle. 

Ija  race  latine  est  une  vierge  —  au  charme  doux  et  ravissant.  — 
L'étranijer  en  face  d'elle  s'incline  :  —  il  tombe  à  ses  genoux  avec  un 


'  La  Société  publiera  bientôt,  eu  un  volume  distinct  de  la  Revue,  la  re- 
lation du  concours  du  Chant  du  Latin  et  des  réunions  scientifiques  ou 
littéraires  qui  Tout  précédé  et  suivi,  dans  la  deuxième  quinzaine  du  mois 
de  mai.  En  attendant  l'apparition  de  ce  volume,  elle  croit  devoir  insérer 
dans  le  présent  fascicule  les  principales  pièces  de  poésie  de  la  s'!-ance 
tenus  au  Peyroa  1^  25  mai.  c'est-à-dire  le  Chant  de  la  Race  latine  de 
B.  Alecsandi'i.  h  poésie  fie  Matheu  y  Fornells  et  l'appel  à  la  Raço  Intino 
de  F.  Mistral. 


CANTUL  GINTEI  LATINE  2^^ 

Frumôsâ,  vie,  zîmbitôre, 
Sub  cer  senin,  în  aer  cald, 
Ea  se  mirézâ'n  splendid  sôre, 
Se  scaldâ  'n  mare  de  smarald. 

Latiua  gintâ  are  parte 
De  aile  pâmêntului  comori, 
Si  mult  voios  ea  le  imparte 
Cu  celle-1-alte  a  ei  surori. 
Dar  e  terribilô'n  manie 
Când  braçiul  ei  liberator 
Lovesce  'n  cruda  tirante, 
Se  luptâ  pentru  al  seu  onor . 

La  dina  cea  de  iudecatâ 

Când,  façiâ'n  cer  cu  Domnul  sânt, 

Latina  gintà  a  fi  'ntrebatâ  : 

«  Ce  a  fâcut  pe  acest  pâment?  » 

Ea  va  respunde  sus  si  tare  : 

«  0  !  Dômne,  'n  lume  cât  am  stat, 

»  In  ocliii  sei  plini  de  admirare, 

»  Pe  tine  te  am  represintat  !  » 

B.  Alecsandri 
Mircesti  (Roumanie). 


désir  mêlé  de  regret.  —  Belle,  vive,  souriante,  —  sous  le  ciel  se- 
rein, dans  l'air  chaud, —  elle  se  mire  au  soleil  splendide, —  elle  se 
baigne  dans  une  mer  d'émeraude. 

La  race  latine  a  sa  part  —  des  trésors  de  la  terre,  —  et  bien  vo- 
lontiers elle  les  partage  —  avec  les  autres  de  ses  sœurs.  —  Mais 
elle  est  terrible  en  [sa]  colère  —  quand  son  bras  libérateur — frappe 
la  cruelle  tyrannie,  —  [ou]  lutte  pour  son  honneur. 

Au  jour  de  ce  jugement,  —  quand  au  Ciel,  en  face  du  Seigneur 
saint,  —  la  race  latine  sera  interrogée  : —  «  Qu'a-t-elle  fait  sur  cette 
terre  ?»  —  Elle  répondra  haut  et  ferme  :  —  «  Oh  !  Seigneur,  au 
»  monde  tant  que  je  suis  restée  —  à  ses  yeux  pleins  d'admiration. 

»  c'est  toi  que  j'ai  représenté!  » 

B.  Aleisandri 
Mircesti    (Roumanie). 


LO  GANT  DEL  LLATl 

Mentres  nos  quede  dins  la  memorin 
L'imatge  viva  del  temps  passât  ; 
Menti'es  nos  lligue  la  nostra  historia 
Ab  lias  fortissim  de  germa iidat, 

Serèm  Llajins  : 
Llaiius  11  fora,  LIatins  ;i  dins, 

Sempre  LIatins  ! 

Menrres  ressone  pei-  nostres  platjf^=; 
Del  mar  de  Roma  Cetern  udol, 
Y'I  mestral  infle  ses  amples  rat]  es 
Y'ns  petoneje  la  Hum  del  sol, 

Serèm  LIatins; 
LIatins  à  fora,  LIatins  a  dins, 

Sempre  LIatins  ! 

Mentres  les  segues    ora])len  les  ères, 
Y'is  ceps  engrexen  nostres  cellers. 

Y  cad'  any  Ueven  les  oliveres, 

Y  reverdescan  nostres  llorers, 

Serèm  LIatins; 
LIatins  à  fora,  LIatins  a  dins, 
Sempre  LIatins  ! 

LE    CHANT  DU   LATIN      - 

Tant  quB  restera  dans  notre  mémoire  —  l'image  vive  du  temps 
passé;  —  tant  quo  notre  histoire  nous  liera—-  par  le  lien  très-fort 
de  la  fraternité,  —  nous  serons  Latins;  —  Lutins  an  dehors,  Lntins 
au  dedans,  —  toujours  Latins! 

Tant  que  retentira  sur  nos  plages  —  delà  merde  Home  la  plainte 
éternelle; — tant  (|ue  le  mistral  souillera  sur  nous  ses  grandes 
tempêtes  —  et  que  nous  brunira  de  son  baiser  la  lumière  du 
soleil, — nous  serons  Latins  ;—  Latins  au  dehors.  Latins  au  dedans. 
—  toujours  Latins  ! 

Tant  (]ue  les  moissons  rempliront  les  aires,  —  qu(,'  les  ceps  des 
vignes  engraisseront  nos  celliers,— que  chaque  année  fructifieront 
les  oliviers  —  et  reverdiront  nos  lauriers,  —  nous  scions  Latins  ; — 
Latins  au  dehors.  Latins  au  dedans,  —  toujours  Latins  ! 


LO  CANT  DEL    LLATI  26r) 

Mentres  nosquede  la  Uar  dels  avis. 

Y  aprop  Tesglesia  d'estil  antich, 
^"  la  Uatina  parla  en  los  llabis. 

Y  a  fora  casa  ni  un  enemich, 

Serèm  Llatins; 
Ijlatins  à  fora,  Llalins  â  diii<. 
Sempre  Llatins  ! 

Mentres  perillen  d'una  destrossn 
Les  nostres  dones  en  desconsol. 
Los  nostres  pares  dintre  lafossa, 
Los  fiUets  nostres  dintre  '1  bressol. 

Serèm  Llatins; 
Llatins  â  fora,  Llatins  â  dins, 

Sempre  Llatins! 

Mentres  nos  queden  sis  pams  de  terra. 

Y  un'  arma  vella  per    guerrejar, 

Y  un  pit  contrari  pel  nostre  ferre, 

Y  un  fil  de  vida  per  respirar, 

Serèm  Llatins; 
Llatins  â  fora,  Llatins  à  dins 
Sempre  Llatins  ! 

F.    MaTHKC    r    FoRNELLS 

((Catalan) 

Tant  que  nous  restera  le  foyer  des  aïeux,  —  et  près  de  lui  l'église 
de  style  antique, — et  la  langue  latine  sur  nos  lèvres, — et  au  dehors 
(le  la  maison  un  ennemi, —  nous  serons  I.atins: — Latins  au  dehors 
Latins  au  dedans.  —  toujours  Latins  ! 

Tant  qu'il  y  aura  crainte  de  défaite  .  —  pour  nos  dames 
en  deuil,  —  et  pour  nos  pères  dans  la  fosse.  —  et  pour  nos  petits 
enfants  dans  le  berceau,  —  nous  serons  Latins  ;—  Latins  au  <lehors, 
Latins  au  dedans, —  toujours  Latins. 

Tant  que  si.x:  pans  de  terre  nous  resteront  — rt  une  arme  anti(pie 
pour  guerroyer,  —  et  une  poitrine  ennemie  pour  notre  glaive,  —  et 
un  reste  de  souffle  pour  respirer.  —  nous  seron.-  L.itms  :  —  Latins 
au  dehors, Latins  au  dedans,  —  toujours  Latins! 

Fr.   Matîiku  V  KouNiiLi,s. 


A  LA  RAÇO  LATINO 


Aubouro-te,  raço  latino, 
Souto  la  capo  dôu  soulèu  ! 
Lou  rasin  brun  boui  dins  la  tinn, 
Lou  vin  de  Dieu  gisclara  lèu. 

Emé  toun  peu  que  se  desnouso 
A  Tauro  santo  dôu  Tabor, 
Tu  sies  la  raço  lumenouso 
Que  viéu  de  joio  e  d'  estrambord; 
Tu  sies  la  raço  apoustoulico 
Que  sono  li  campano  à  brand; 
Tu  sies  la  troumpo  que  publico, 
E  sies  la  man  que  trais  lou  gran. 

Aubouro-te,  raço  latino, 
Souto  la  capo  dôu  soulèu  ! 
Lou  rasin  brun  boui  dins  la  tino, 
Lou  vin  de  Dieu  gisclara  lèu. 

Ta  lengo  maire,  aquéu  grand  flume 
Que  pèr  sèt  branco  s'espandis, 


A  LA  RACE  LATINE 


Releve-toi.  race  latine.  —  sous  h^  manteau  île  ton  soleil!  —  I-e 
raisin  brun  bout  dans  la  cuve  —  et  le  vin  de  Dieu  va  jaillir. 

Avec  tes  cheveux  dénoués  —  au  souffle  sacré  du  Tliabor,  —  tu 
es  la  race  lumineuse  —  qui  vit  de  joie  et  d'enthousiasme  ;  —  tu  es 
la  race  apostolique  —  qui  sonne  les  volées  des  cloches;  — tu  es  la 
trompe  qui  publie  —  et  la  main  qui  jette  le  grain. 

Relève-toi,  race  latine,  —  sous  le  manteau  de  ton  soleil!  —  Le 
raibin  brun  bout  dans  la  cuve  —  et  le  vin  de  Dieu  va  jaillir. 

Ta  langue  mère,  ce  grand  fleuve  —  qui    par  sept  branches  se 


A   LA  RAÇO  LATINO  267 

Largant  l'amour,  largant  lou  lume. 
Coume  un  resson  de  paradis; 
Talengo  d'or,  fihoroumaao 
Dôu  pople-rèi,  eslacansoun 
Que  rediran  li  bouco  umano. 
Tant  que  lou  Verbe  auraresoun. 

Aubouro-te,  raço  latino, 
Souto  la  capo  dôu  soulèu  ! 
Lou  rasin  brun  boui  dins  la  tino, 
Lou  vin  de  Dieu  gisclara  lèu. 

Toun  sang  ilustre,  de  tout  caire, 
Pèr  la  justice  a  fa  rajôu; 
Au  mounde  vici  ti  navegaire 
Soun  ana  querre  un  mounde  nèu  ; 
I  batedis  de  ta  pensado 
As  esclapa  cent  cop  ti  rèi  : 
Ah  !  se  noun  ères  divisado, 
Vuei,  quau  poudrié  te  faire  lèi  ? 

Aubouro-te,  raço  latino, 
Souto  la  capo  dôu  soulèu  ! 
Lou  rasin  brun  boui  dins  la  tino, 
Lou  vin  de  Dieu  gisclara  lèu. 


répand,  —  versant  l'amour  el  la  lumière  —  comme  un  écho  de 
paradis,  —  ta  lanççue  d'or,  fille  romane  —  du  pouple-roi,  est  la 
chanson  —  que  redira  la  bouche  humaine.  —  tant  que  le  Verbe 
aura  raison. 

Relève-toi,  race  latine,  —  sous  le  manteau  de  ton  soleil  !  —  Le 
raisin  brun  bout  dans- la  cuve  —  et  le  vin  de  Dieu  va  jaillir. 

De  toutes  parts,  ton  sang  illustre  —  pour  la  justice  a  ruisselé;  — 
tes  navigateurs  au  vieux  monde  —  ont  conquis  un  monde  nou- 
veau;—  aux  battements  de  ta  pensée,  — tu  as  brisé  cent  fois  tes 
rois. . .  —  x\h!  si  tu  n'étais  divisée,  —  qui  pourrait  aujourd'hui  te 
vaincre? 

Relève-toi,  race  latine,  —  sous  le  manteau  de  ton  soleil!  —  \>p 
raisin  brun  bout  dans  la  cuve  — et  le  vin  de  Dieu  va  jaillir. 


2e,fi  nrvi.RrTi'is  modkknrs 

A  la  belugo  dis  estello 
Abrant  lou  mou  de  tounflambèu, 
Dintre  lou   mabre  e  sus  la  telo 
As  encarnalou  subre-bèu. 
De  l'art  divin  sies  la  patrio, 
E  touio  grkci  vèn  de  tu  ! 
Sies  lou  sourgènt  de  Talegi'io 
E  sies  Teterno  jouventu  ! 

Aubouro-te,  raço  latino, 
Souto  la  capo  dôu  soulèu  ! 
Lou  rasin  brun  boui  dins  la  rino. 
Lou  vin  de  Dieu  gisclara  lèu. 

Di  formo  puro  de  ti  femo 
Li  panteon  se  soun  poupla; 
A  ti  triounfle,  à  ti  lagremo. 
Tôuti  li  cor  an  barbela. 
Flouris  la  terro,  quand  fas  flôri: 
De  ti  foulié  cadun  vèn  fôu  . 
E  dins  l'esclùssi  de  ta  glôri 
Sèmpre  lou  mounde  a  pourta  dou. 

Aubouro-fe,  raço  latino, 
Souto  la  capo  dôu  soulèu  ! 
Lou  rasin  brun  boui  dins  la  tino, 
Lou  vin  de  Dieu  gisclara  lèu. 


A  l'étincelle  des  étoiles  —  allumant  là-haut  ton  flambeau,  — 
tu  a.>,  dans  le  marbre  et  la  toile.  —  incarné  la  beauté  suprême.  — 
De  l'art  divin  tu  es  la  patrie,  — et  toute  grâce  vient  de  toi!  —  (^l'est, 
toi  la  source  d'allégresse:  — c'est  toi  la  jeunesse  éternelle! 

Relève-toi,  race  latine,  —  sous  le  manteau  de  ton  soleil!  —  Le 
raisin  brun  bout  dans  la  cuve  —  et  le  vin  de  Dieu  va  jaillir. 

Des  formes  pures  de  tes  femmes  —  les  panthéons  se  sont  peu- 
plés ;  —  à  tes  triomphes,  à  tes  larmes,  —  tous  les  cœurs  ont  battu 
d'émoi. —  Quand  tu  fleuris,  fleurit  la  terre;  — de  tes  folies  chacun 
s'affole,  —  et  dans  l'éclipsé  de  ta  gloire  —  toujours  le  monde  porta 
deuil. 

Relève-toi.  race  latine,  —  sous  le  manteau  de  ton  .soleil  1  —  Le 
raisin  brun  bout  dans  la  cuve  —  elle  vin  de  Dieu  va  jaillir. 


A  LA   KaÇO  latin O  289 

Ta  lindo  luar,  la  mai'  seieiio 
Ounte  blanquejon  li  veissèu, 
Friso  à  ti  pèd  sa  molo  areno 
En  miraiant  l'azur  dou  cèu  : 
Aquelo  mar  toujour  risèiito, 
Dieu  Tescampè  de  soun  clarun 
Courue  la  cencho  treiusènto 
Que  dèu  liga  ti  pople  brun. 

Aubouro-te,  raço  latino, 
Souto  la  capo  dôu  soulèu  ! 
Lou  rasin  brun  boui  dins  la  tino, 
Lou  vin  de  Dieu  gisclara  lèu. 

Sus  ti  coustiero  souleiouso 
Crèis  rôulivié,  Faubre  de  pas  ; 
Ë  de  la  viguo  vertuiouso 
S'enourgulisson  ti  campas. 
Raço  latino  !  en  remembranço 
De  toun  destin  sèmpre  courons, 
Aubouro-te  vers  l'esperanço, 
Afrairo-te  souto  la  Crous. 

Aubouro-te,  raco  latino, 
Souto  la  capo  dôu  soulèu  ! 
Lou  rasin  brun  boui  dins  la  lino. 
Lou  vin  de  Dieu  gisclara  lèu. 

!''.  Mistral. 

(Provençal,  sous- dialecte  d'Avignon  et  des  bords  .!u  Rhône.) 

Ta  mer,  si  limpide  et  sereine, — où  blanchissent  au  loin  les  voiles, 
—  frise  à  tes  pieds  sa  molle  arène  —  en  reflétant  l'azur  du  ciel  :  — 
cette  mer  toujours  souriante,  —  Dieu  l'rjiancha  de  sa  clarté, — 
comme  la  ceinture  splendide  —  qui  doit  lier  tes  peuples  brnns. 

Relève-toi,  race  latine,  —  sous  le  manteau  de  ton  soleil  !  —  Le 
raisin  brun  bout  dans  la  cuve  —  et  le  vin  de  Dieu  va  jaillir. 

Sur  tes  rivages  radieux  —  croît  l'olivier,  l'arbre  de  paix:  —  et  de 
la  vigne  plantureuse  —  s'enorgueillissent  tes  campagnes.  —  Race 
latine!  en  souvenir  —  de  ton  destin  toujours  brillant,  —  relève-toi 
vers  l'espérance  —  et  fédère  -toi  sous  la  Croix  ! 

Uelève-toi,  race  latine,  —  sous  le  manteau  de  lou  soleil  !  —  Le 
raisin  brun  boutdans  la  cuve  —  et  le  vin  de  Dieu  va  jaillir. 

F.  Mistral. 


CALABRUN 


A    M.    G.    LISBONNE,    D  ALES 


Lou  calabnin  toumbavo 

Quauqui  nivo  estiifaroiigissien  l'ourizouii. 
(Chauvet.) 


Dins  soun  mantéu  d'or, 
Coume  un  rèi  de  glôri 
Qu'  ufanous  e  flôri 
De  soun  palais  sort, 

Lou  grand  sonlèu  rouge 
S'esvalis  ferouge. 

Bressa  dins  l'azur 
D'un  cèu  clar  d'autouno, 
Qu'esblèugis,  qu'estouno. 
Danson  dins  Ter  pur 

Mile  niéu  que  pousso 
L'auro  siavo  e  douco. 


CREPUSCULE 


A    M.    G.    LISBONNE,     L>  ALAIS 


Le  crépuscule  tombait. 

Quelques  nuages  déchirés  rougissaioiit  riiorizoïi . 
(Chauvet.  ; 

Dans  son  manteau  d'or,  —  lel  qu'un  roi  glorieux—  qui,  allier 
et  florissant, — sort  de  son  palais, 

Le  grand  soleil  rouge  —  disparaît  farouche. 

Bercés  dans  l'azur  —  d'un  ciel  clair  d'automne  —  qui  éblouit, 
qui  étonne,  —  dansent  dans  l'air  pur 

Mille  nuages  que  chasse  —  la  brise  calme  et  douce. 


CAL\BRUN  27  f 

Si  vivo  coulour 
Moureto,  pourpalo, 
Verdo,  roso  e  palo 
Brilion  dins  Tahour. 
La  naturo  endiho 
De  tant  d'escandiho. 

Niéu  pichot  o  grand, 
Que  luse,  que  lande, 
'     Coumo  dins  un  hrande, 
Se  (l(Mi()n  la  man  ; 

Au  dieu  que  trocoulo 
Fan  la  farandoulo. 

Aquoste,  dirias 
Uno  fiour  giganto; 
L'autre  que  Taganto, 
Un  moustre  marrias; 
Aquel  autre,  uno  iscio 
Que  de  la  mar  gisclo. 

Fantasti  troupèu, 
Barrulant  lis  astre 
Senso  cliin  ni  pastre, 
T'arrestaras  lèu  ? 

Mounte  vas  encaro 
E  niount'  ei  ta  raro?. . 

Leurs  vives  couleurs, —  hrunes.  i.ourpres.  —  vortes,  roses  el 
pâles^ — brillent  dans  l'horizon  embrasé. 

La  nature  frémit — de  tant  de  lueurs  ardentes. 

Nuage  petit  ou  grand. —  que  l'un  lirille,  que  l'autre  llamboie  — 
comme  dans  une  ronde, —  se  donnent,  la  main  : 

Au  Dieu  qui  se  couche,  —  ils  dansent  la  farandole. 

Celui-ci,  vous  diriez —  une  fleur  géante  ;  —  l'autre  qui  le  saisit, 
—  un  monstre  méchant  : 

Cet  autre,  une  ile  —  qui  de  la  mer  jaillit. 

Troupeau  fantastique,  —  parcourant  l'espace  —  sans  chien  ni 
berger, —  t'arrèteras-tu  bientôt? 

Où  vas -tu  encore?  — et  quelle  est  la  limite? 


272  blALECTKb    MODERNKS 

Mai,  plan-plan,  li  nièu 
Dins  Taire  oiinte  glisson 
Sourne  s'esvalisson . . . 
Calabrun,  adieu  ! 
La  niue  t'enmantello. 
Vaqui  lis  estello  !..  . 

Looiinrino  Ttoikand 
(Provençal,  sous-dialiicte  d'Avignon  et  di^t:   bords  du  Rhône  ; 


Mais  peu  à  peu  les  luiafj'es, —  dans  l'espace   où  ils   glissent, 
-  sombres,  s'évanouissent. —  Crépuscule,  adieu! 
La  nuit  te  cou  vie  de  son  manteau,  —  voilà  les  étoiles. 

Léontine  Goirand 


LUNO    PLENO 


Dins  lou  cèu  blanc  coume  de  la, 

Sus  li  champ  blanc  coume  quand  nèvo, 

La  blanco  iuno  apereila, 

Espandis  sa  clarta  de  trèvo. 

Lis  estello  d'or  à  milioun, 
Davans  lou  dardai  de  la  Iuno, 
Pèr  faire  plaço  à  si  raioun, 
S'esvalisson  uno  pèr  uno. 


PLEINE  LUNE      , 

Dans  le  ciel  blanc  comme  du  lait,  —  sur  les  champs  blancs 
comme  quand  il  neiiie,  —  la  blanche  lune,  dans  le  loin, — t'panouit 
sa  clart';  de  fantôme. 

Les  étoiles  d'or  à  millions,  —  devant  le  scintillement  de  la  lune, 
—  pour  faire  place  à  ses  rayons,  —  s'évanouissent  une  à  une. 


LUKO    PLENO  273 

Tout  es  mut,  désert  :  de  la  soni 
E  dôu  silènci  veici  Touro. 
S'entend  que  lou  murmur  di  font 
Coume  uno  voues  que  canto  e  ploiiro. 

Fai  clar  autant  qu  en  plen  miejour  ; 
Dins  li  founsour,  Toumbro  es  plus  negro  ; 
Sias  esmougu  mai  que  de  jour, 
E  la  bello  niue  vous  alegro. 

Coume  un  velet  de  nùvio  es  blanc, 
Lou  castèu,  blanc  coume  un  susàri  : 
Quau  cerco  sa  jouvo  ane  plan, 
D'èstre  pas  lou  jouguct  d'un  glàri. 

Franc  d()u  ferun  paurous  que  sort, 
Sus  li  camin  i'a  res  en  aio  ; 
Belèu  mai  que  Tome  que  dor, 
L'ome  que  viho  aro  pantaio  : 

Poulit  pantai  !  souuge  risènt 
De  Famourous  pèr  sa  Mirèio  ; 
Souveni  dis  oureto  ensèn 
Passado  au  fres  souto  li  lèio  ; 


Tout  est  muet,  désert  :  du  sommeil  —  et  du  silence  voici  l'heure. 

—  On  nentend  que  le  murmure  des  fontaines  —  comme  une  voix 
qui  chante  et  pleure. 

Il  fait  clair  autant  qu'eu  plein  midi;  —  dans  les  profondeurs 
l'ombre  est  plus  noire;-  vous  êtes  ému  plus  que  iieiidant  le  jour, 

—  et  la  belle  nuit  vous  relève. 

Gomme  un  voile  de  mariée,  le  château  est  blanc,  —  ii  est  blanc 
comme  un  suaire  :  -  qui  cherche  son  amie  aille  doucement,  -  pour 
n'être  pas  le  jouet  d'un  lutin. 

Excepté  les  fauves  qui  sortent  peureu.v,  —  nul  ne  se  hâte  sur  les 
chemins;  —  peut-être  plus  que  l'homme  qui  dort,  —  l'homme  qui 
veille  rêve  maintenant  : 

Joli  rêve,  songe  riant  de  l'amoureux  pour  sa  Mireille,  —  souvenir 
des  heures  charmantes  ensemble —  passées  sous  la  fraîcheur  des 
allées; 

21 


27 ^  DIALECTES  MODBKNES 

Paillai  de  l'amo  que  languis 
Eu  terro  estranjo,  ai-las  !  souleto, 
Vers  lûu  fougau,  vers  lou  pais, 
Voulaut  coume  uno  dindouleto  ; 

Pèr  sa  maire,  pantai  d'enfant; 
Gai  o  doulènt,  toujour  amaire: 
Pantai  que  vous  dis:  a  De-que  fan  ?  » 
Long  e  divin  pantai  de  maire! 

Pèr  aquéli  que  van  sus  mar 
Tendre  e  segrenous  pantaiage  ; 
Marrit  pantai,  pantai  amar, 
Pèr  li  qu'an  fa  lou  sourne  viage. 

Parpaioun  blu,  négri  tavan 
Que  bâton  lou  front  de  sis  alo  ; 
Revarié  suavo,  espravant, 
Pantai  que  vous  brulo  o  vous  j alo. 

Li  nivo  eourron. . .  Lou  mistrau, 
Enca  mai,  fai  briha  ta  fàci. 
0  luno  !  s'ères  un  rairau, 
Amount  pendoula  dins  l'espàci  ! 

Vers  tu,  triste,  aubourant  lis  iue. 
Quête  cliale  sarié  de  vèire, 
Misterious  mirau,  la  niue. 
Sis  amour,  sis  ami,  si  rèire  ! 


Hève  de  l'àme  qui  languit  —  en    lerre  étrangère,    hélas!  seule, 

—  vers  le  foyer,  vers  le  pays,  — volant  comme  une  hirondelle; 
Rèved'enfant  pour  sa  mère; — joyeux  ou  dolent,  toujours  aimant; 

—  rêve  qui  vous  dit:  <«  Que  font-ils?  » —  long  et  divin  rêve  de  mère  ; 
F^our  ceux  qui  vont  sur  mer,  —  rêve  tendre  et  soucieux;  —  mau- 
vais rêve,  rêve  amer  —  pour  ceux  qui  ont  Jait  le  sombre  voyage. 

Bleus  papillons,  taons  noirs  —  qui  battent  ie  front  de  leurs  ailes  ; 

—  rêverie  suave,  épouvante;  —  rêve  qui  vous  brûle  ou  vous  glace. 
Les  nuages  courent....  Le  mistral, — encore  plus, fait  brillertaface. 

—  0  lune!  si  tu  étais  un  miroir,  —  là-haut  suspendu  dans  l'espace  ! 
Vers  toi,  tristes,  lev;nit  les  yeux,  —  qu'il  serait  délicieux  de  voir. 

—  mystérieux  miroir,  la  nuit,  —  ses  amours,  ses  amis,  ses  aïeux! 


LA    BOUMIANO  g"! 5 

Dins  lou  cèu  blanc  coume  de  la, 
Sus  li  champ  blanc  coume  quand  nèvo, 
La  luno  masco  apereil^ 
Escampo  sa  clarta  de  trèvo. 

Teodor  Aubanel. 
(Provençal.  Avignon  et  les  bord?  du  RhAiie.) 


Dans  le  ciel  blanc  comme  du  lait,  —  sur  les  cliainps  l)lancs 
comme  quand  il  neige,  —  la  lune,  sorcière  dans  le  loin,  ('pand  sa 
clartù  de  fantôme. 

Théodore  AuFiANioi.. 


LA  BOUMIANO 


A  M'°    A.   B.,   A    ROUIAN 

—  Veni,  veni,  ma  tilheto, 
Daisso  a([ui  la  faucilheto; 
Balho-me  ta  ma  blanqueto. 
Saurei  lèu  se  toun  destin 
Sara  bounur  ou  chagrin 
E  se  toun  cor  ta  tin-tin. 


LA  BOHEMIENNE 


A     MADEMOISELLE     A.  B.,  A  ROYAN 

Viens,  viens,  ma  lillette,  —  laisse  là  la  faucille  ;  —  donne-moi 
ta  petite  main  blanche.  — Je  saurai  bientôt  si  ton  destin —  sera 
chagrin  ou  bonheur  =  et  si  ton  cœur  pense  à  quelqu'un  '. 

'  Littéralement:  qui  fait  tin-tin. 


?76  DIALECTES  MODhRNES 

—  U  boumiano  1  ma  boumiano, 
G-ai'  aissi  ma  ma  rouiano  ; 
Grucito-ne  pla  lous  countours. 
Digo-me  se  dins  Tabsenso 
Moun  calignaire  à  iéu  penso  ; 
Digo  sem'aimo  toujours. 

—  Toun  estelo,  gento  filho, 
Dins  un  hourizoun  d'or  briiho; 

Ooumo  uno  perlo  sintilho. 
Un  jour,  crei-zou,  tous  penous 
Trepejaran  lou  velous 
Dins  un  saloun  pie  de  flous. 

—  0  boumiano!  ma  boumiano. 
Se  tu  SOS  tant  soubeirano, 
Daisso  moun  hourizoun  d'or. 
Digo-me  se  dins  Tabsenso 
Moun  calignaire  à  iéu  penso; 
Digo  se  m'aimo  de  cor. 

—  Jouino  fillio,  aquelo  veno, 
De  sang  escarlato  pleno. 

Es  un  signe  de  grandous. 
Saras  un  jour  hounourado, 
Coumo  uno  reino  entourado 
De  vailets  e  de  tlatous. 


0  bohémienne  !  m;i  bohémienne,  voici  ma  main  de  jeune  filie 
de  Royan  ;  —  re^ardes-en  bien  les  contours. —  Dis-moi  si  dans 
l'absence  —  mon  amoureux  pense  à  moi,  —  dis  s'il  m'aime  tou- 
jours . 

Ton  étoile,  gentille  fillette,  —  brille  dans  un  horizon  d'or  ;  — 
comme  une  perle  elle  scintille.  —  Un  jour,  crois-le,  tes  petits 
liieds  — fouleront  le  velours  —  dans  un  salon  plein  de  fleurs. 

O  bohémienne!  ma  bohémienne,  —  si  tu  es  si  souveraine, — 
laisse  mon  horizon  d'or.  — Dis-moi  si  dans  l'absence  mon  amou- 
reux pense  à  moi,  —  dis  s'il  m'aime  [du  fond]  du  cœur. 

Jeune  tille,  cette  veine.  —  gonflée  de  sang  écarlate,  —  est  un 
signe  de  grandeurs.  —  Tu  seras  un  jour  honorée  — et  entourée, 
comme  une  reine,  — de  valets  et  de  flatteurs. 


LA  BOUMlAîsO  27- 


—  0  boumiano,  ma  boumiano, 
Se  tu  SOS  tant  soubeirano. 

Me  parles  pas  de  grandous. 
Digo-me   se  dins  l'absenso 
Moun  calignaire  à  iéu  penso; 
Digo  se  m'aimo  toujours. 

—  Jouino  filho.  aquelo  ligno, 
Tantblanco  que  flou  d'espigno, 
Médis  qu'auras  de  loungs  jours. 
Ta  vielhesso  sara  belo, 

0  ma  dousso  jouvenselo  ! 
Coumo  roso  sens  pounchous. 

—  0  boumiano  !  ma  boumiano, 

Se  tu  SOS  tant  soubeirano, 
Me  parles  pas  de  loungs  jours. 
Digo-me  se  dins  l'absenso 
Moun  calignaire  à  iéu  penso  ; 
Digo  se  m'aimo  toujours. 

—  Pauro  filho,  ma  scienso 
Es  al  bout  de  sa  puissenso. 
De  toun  cor  que  trefoulis, 
De  toun  amo  malcourado, 
Podi  pas,  o  desoulado, 
Foro  bandi  lous  soucis. 


0  bohémienne  !  ma  bohémienne,  —  ï^i  tu  es  si  souveraine,  ne  me 
parle  pas  de  grandeurs.  —  Dis-moi  si  dans  l'absence  mon  amou- 
reux pense  à  moi.  —  dis  s'il  m'aime  toujours. 

Jeune  fille,  cette  ligne,  — aussi  blanche  que  fleur  d'épino,  —  me 
dit  que  tu  auras  de  longs  jours.  —  Ta  vieillesse  sera  belle.  —  ôma 
douce  jouvencelle  !  —  comme  une  rose  sans  piquants. 

O  bohémienne  !  ma  bohémienne.  —  si  tu  es  si  souveraine,  —  ne 
me  parle  pas  de  longs  jours.  —  Dis-moi  si  dans  l'absence  —  mon 
amoureux  pense  à  moi,  —  dis  s'il  m'aime  toujours. 

Pauvre  hile,  ma  science  —  est  au  bout  de  sa  puissance. — ^De 
ton  cœur  qui  tremble.  —  de  ton  âme  affligée*, — je  ne  puis,  6 
désolée,  —  chasser  les  soucis. 

'  Littéralemeut  :  qui  a  mai  au  cœur. 


278  DIALECTES  MODERNES 

—  O  houmiaiio  !  ma  boumiano, 
S  os  dounc  pas   tant  soubeirano. 
De  que  me  fan  tas  grandous 
E  toun  hourizoun  de  flous. 
S'a  moun  amo  endoulourido 
Podes  pas  rendre  la  vido? 

GUILHEM   RONAPARTE-WYSE 

A  VOUS,  Milord,  aquestes  vers, 

Que  vous  mandi  sens  ges  de  crento  ; 

CarH  a  digus  dins  l'univers 

Qu'aje  l'amo  pus  indulgento. 
Tout  en  vous  trefoulis,  l'esprit  amai  lou  cor, 
Quand  de  nostrepaïs  entendez  lou  lengage. 
L'escrivez  en  pouëto,  à  l'aie  fier  e  d'or. 

Vouiajaz  en  sabent,  en  sage, 
E  daissaz  apertout  treu  de  vostre  passage . 
Pensaz  qu'à  fa  valé  cadun,  quand  ven  soun  tour, 
Acô  d'aqui  nous  met  en  de  vivos  alarmos 
E  nous  forso  tant  lèu  à  vous  rendre  las  armos, 
Sens  poudre  en  res  de  res  vous  paga  de  retour. 

C.  Laforgue. 
(Languedocien,  Quarante  et  ses  environs. } 


0  bohémienne!  ma  bohém  enne, —  tu  n'es  donc  pas  si  souveraine 
— Que  me  font  tes  grandeur?  —  et  ton  horizon  de  fleurs. —  si  à  mon 
Hine  attristée  —  tu  ne  peux  rendre  ]a  vie  ? 

A  Guillaume-G.  Bonaparte-Wyse 

A  vous,  -Mylord,  ces  vers  —  que  je  vous  envoie  .sans  crainte.  — 
car  il  n'est  personne  dans  l'univers  —  qui  ait  l'âme  plus  indul- 
gente [que  vous].  —  Tout  en  vous  tressaille,  l'esprit  et  le  cœur,  — 
quand  vous  entendez  le  langage  de  notre  pays.  — Vous  l'écrivez  en 
poëte,  au  souffle  fier  et  d'or. —  Vous  voyagez  en  savant,  en  sage,— 
et  laissez  partout  trace  de  votre  passage.  —  Vous  ne  pensez  qu'à 
faire  valoir  chacun,  lorsque  son  tour  vient.  — Tout  cela  nous  met 
en  de  vives  alarmes  —  et  nous  force  aussitôt  à  vous  rendre  les 
nrmos, —  sans  pouvoir  en  rien  vous  payer  de  retour. 

C.  Laforgue. 


A  LA  MAR  LATINA 

0  bressaira  de  lum  amai  d'allegretat  ! 
Tas  crsas,  couma  d'iols  linsas  e  souiijarola.-^ 
Qu'enfloura,  toun  pantai,  d'illas  lugrejarelas, 
Autant  qu'un  cel  preclar  alargoun  la  clartat. 

Tanda  clartat,  que  fai  de  cada  ime  atindat 
Un  clar  meravilhous,  miralhaire  d'estelas, 
E  regat  per  vesiouns,  emb  de  magicas  vêlas 
Que  van  questant  pertout  e  Sapiençia  e  Bèutat; 

Car,  s'emerga  de  tus  TAfroudita-daurada, 

A  Minerva-Athenè  toun  siau  blous  tant  agrada, 

Qu'en  subre-amor  de  tus  lou  garda  en  soun  esgard. 

Antau,  couma  de  dieus  roudant  una  urna  nntica. 
Veiràs  tous  fils  latins,  coupa  serena,  ô  Mar  ! 
T'abrassà  d'una  volta  estrecha  e  pacefica. 

Lidia  de  Ricard. 
(Languedocien,  environs  de  Montpellier.) 


A  LA  MER    LATINE 


0  berceuse  de  lumière  et  d'allégresse,  —  tes  vagues,  profondes 
et  songeuses  comme  des  yeux  — que  ion  rêve  fleurit  d'îles  étin- 
celantes,  — autant  que  le  ciel  splendide  épandent  la  clarté. 

Candide  clarté,  qui  fait  de  chaque  esprit  [rendu]  translucide  —  un 
lac  merveilleux  où  se  mirent  les  étoiles, —  un  lac  sillonné  de  visions 
aux  voiles  magiques,  —  qui  vont  cherchant  partout  et  Sagesse  et 
Beauté  ; 

Car,  si  elle  émerge  de  toi,  l'Aphrodite  dorée, —  ton  calme  limpide 
plait  tant  à  Minerve-Athénè,  —  que,  par  suprême  amour  de  toi, 
elle  le  garde  dans  son  regard. 

.  Aussi,  comme  «les  dieux  qui  entourent  une  urne  antique. — 
verras-tu  tes  fils  latins,  coupe  sereine,  ô  Mer!  —  t'embrasser 
d'une  ronde  étroite  et  pacifique  ! 

Lydie  de  Ricard. 


A  MOUNT-PELIE 

Vendue  lou  mes  de  mai,  ô  reina  miejournala  ! 
Veiràs  courre  ver  tus  per  caire  e  per  camin  ; 
Seras,  en  même  tems  que  vila  majourala, 
Seti  das  Jocs  flouraus  dau  viel  pople  latin. 

De  la  granda  cansoun,  de  la  cansoun  troumfala  ', 
La  premieira  ausiràs  lou  sublime  refrin; 
L'ausiràs  brounzinà  dins  la  leni?a  inmourtala, 
Que  voulen  releva  coume  un  parla  divin. 

Felibres,  gardaren  longa-mai  souvenença  ; 
E,  lou  jour  benesit  de  nosta  renaissença, 
Vendren  toutes  à  tus  en  nous  sarrant  la  man. 

Sagatuns  verturious  d'una  raça  aublidada, 
Mema  fe  dinslou  cor,  dessus  toun  Esplanada, 
Faren  trementl  Taire  au  nouvel  cant  ronman  ! 

A.  Roux. 
(Languedocien.  Lunel-Viel  et  ses  environs  ) 


A  MONTPELLIER 

Yienne  le  mois  de  mai,  ô  reine  du  Midi  !  —  tu  verras  courir  vers 
toi  par  coins  et  par  chemins  ;—  tu  seras,  en  même  temps  que  ville 
majorale,  —  siège  des  Jeux  floraux  du  vieux  peuple  latin. 

De  la  grande  chanson,  de  la  chanson  triomphale,  —  tu  enten- 
dras, la  première,  I^  sublime  refrain;  —  tu  l'entendras  bruire  dans 
la  lani^ue  immortelle  —  que  nous  voulons  relever  comme  un  par- 
ler des  dieux. 

Félihres.  nous  garderons  sans  cesse  souvenance  ; —  et,  le  jour 
béni  (le  notre  renaissance, —  nous  viendrons  tous  à  toi  en  nous 
serrant  la  main. 

Rejetons  vigoureux  d'une  race  oubliée,  —  la  même  foi  dans  le 
cieur  sur  ton  Es[ilanade,  —  nous  ferons  retentir  l'air  du  nouveau 
chant  roman  ! 

A.  Roux. 
'  La  Chanson  du  Latin. 


LOU     BRANLE 

DE   LAS  TEELHAS 


Eh  !    atanlà  ! 
Passa,  se  vos  passa, 
Passa  jouta  las  trelhas. 

Eh  !  atanlà  ! 
Passa,  se  vos  passa. 
Très  cops  sens  t'arrestà   . 

—  Cap  de  jouvent. 
Que  vas  coume  lou  vent. 
Espéra  ta  poulida: 

Cap  de  jouvent. 
Que  vas  coume  lou  vent, 
Espera-la  que  ven. 

—  Lou  mes  de  mai 
S'espandis  fres  e  gai, 
La  rosa  es  espelida  ; 

Lou  mes  de  mai 


LA  RONDE  DES  TREILLES 


Eh  !  atanlà  !  —  passe,  si  tu  veux  passer,  —  passe  sotis  le? 
treilles.  —  Eh!  atanlà  !  —  passe,  si  tu  veux  passer,  —  trois  fois 
sans  t'arrèter. 

(jhef  des  jouvenceaux.  —  qui  vas  comme  le  vent,  —  attends  ta 
belle  ; — chef  des  jouvenceaux. —  qui  vas  comme  le  vent, — attends- 
la  qui  vient. 
•    Le  mois  de  mai — s'épanouit  frais  et  joyeux, —  la  rose  est  éclose: 

'  C'est  le  refram  traditionael  de  la  danse  des  Treilles  aux  environs 
de  Montpellier.  Les  couplets  ont  été  composés  par  l'a'iteur  à  l'occasion 
des  Fêtes  latines.  Ils  sont  alternativement  chantés  par  les  filles  et  les 
garçons. 


2^2  niALKCTES    MOBKRNBS 

S'espandis  fres  o  jrai. 
Tout  canta  mai  que  mai 

—  Lous  aucelous,  . 
Sus  lous  aubres  en  flous, 
Disoun  sas  cansounetas  ; 

Lou  aucelous, 
Sus  lous  aubres  en  flous, 
Rendoun  moun  cor  jalous. 

—  Coume  eles,  ieu, 
Angeta  dau  bon  Dieu, 
Se  vos  de  poutounetas  ; 

Coume  eles,  ieu, 
Angeta  dau  bon  Dieu, 
Que  n'en  fariei,  boudieu  ! , 

—  Brave  galant, 
Sen  pas  au  jour  de  Tan, 
Gardas  vostas  brassadas  ; 

Brave  galant, 
Sen  pas  au  jour  de  l'an, 
Fourviàs-vous  de  davans. 

—  Au  mes  d'amour, 


7 

Poutounejoun  toujour 
Dos  amas  embrasadas  ; 


—  le  mois  do  mai  —  s'épanouit  frais  etjoyeux.  —  tout  clianto  plus 
que  jamais. 

Les  petits  oiseaux  —  sur  les  arbres  en  fleurs  —  disent  leurs 
chansonnettes;  —  les  petits  oiseaux  —  sur  les  arbres  en  fleurs  — 
rendent  mon  cœur  jaloux. 

Comme  eux,  moi,  —  angelei  du  bon  Dieu,  —  si  tu  veux  des 
baisers;  — comme  eux,  moi,  —  angelet  du  bon  Dieu, —  j'en  ferais, 
ob  !  oui! 

Brave  amoureux,  —  nous  ne  sommes  pas  au  (  premier)  jour  de 
l'an,  — gardez  vos  embrassades;  —  brave  amoureux,  —  nous  ne 
sommes  pas  au  jour  de  l'an,  —  levez-vous  de  devant  moi. 

Au  mois  (les  amours,  — s'embrassent  toujours  —  deux  âmes  en- 


LOU  BRANLE  DE  LAS  TRELHAS  ?8  ! 

Au  mes  d'amour, 
Poutounejoun  toujour 
La  nioch  coume  lou  jour. 

—  S'acô's  antau, 
Vendrés  à  moun  oustau, 
Vous  ie  serai  proumessa  ; 

S'acô  's  antau, 
Vendrés  à  moun  oustau  ; 
Moun  paire  es  pas  hrut^n  ! 

—  Ma  bêla  enfant, 
Per  ameisà  ma  fam. 
Aici  la  taula  es  messa  : 

Ma  bêla  enfant, 
Per  amaisà  ma  fam, 
De  qu'esperà  deman  ? 

—  Ses  pas  countent? 
Adessiàs,  bèu  jouvènt, 
Passas  bona  la  festa  ! 

Se?  pas  countent  ? 
Adessiàs,  bèujouvent: 
M'en  vau,  qu'ai  pas  lou  tems. 

—  Oh  !  jour  charmant! 
Mignota,  prend  ma  man. 
Pus  tard  veiren  lou  resta; 


flammées;  —  au  mois  des  amours,  —  elles  s'embrassent,  toujours. 

—  la  nuit  comme  le  jour. 

S'il  en  est  ainsi, —  vous  viendrez  à  ma  maison, —  je  vous  y  serai 
promise;  —  s'il  en  est  ainsi.  — vous  viendrez  à  ma  maison:  — 
mon  père  n'est  point  brutal. 

Ma  belle  enfant,  —  pour  apaiser  ma  faim,  —la  table  est  mise 
ici  :  —  ma  belle  enfant.  —  podr  apaiser  ma  faim, —  pourquoi  atten- 
dre demain  ? 

Vous  n'êtes  pas  content.^—  Bien  le  bonjour,  beau  jeune  homme; 

—  passez  bonne  la  fête!  —  Vous  n'êtes  pas  content?  —  Adieu 
beau  jeune  homme  ;  — je  m'en  vais,  car  je  n'ai  pas  le  temps. 

O  jour  charmant  1  —  Mignonne,    prends  ma  main  ,  —  plus  tard 


884  DIALECTES  MODERNEF 

Oh  !  jour  charmant! 
Mignota,  prend  ma  mau 
Embé  moun  cor  aimant  ! . . . 

Eh  !  atanlà  ! 
Passa,  se  vos  passa. 
Passa  jouta  las  trelhas. 

Eh  !  atanlà  ! 
Passa,  se  vos  passa, 
Très  cops  sens  t'arrestà  ! .  .  . 

Louis    ROUMIEUX. 

'Languedocien,  sous-dialecle  de  Montpellier.) 

nous  verrons  le  reste;  — 6  jour  charmant  !  —mignonne,  prends 

ma  main  —  avec  mon  cœur  aimant  1. . . . 

Eh  !  atanlà! — passe,  si  tu  veux  passer, —  passe  sous  les  treilles. 

Eh!  atanlà!  —  passe,  si   tu  veux  passer,  — trois   fois   sans   t'ar- 

rêter. 

Louis  RouMiEUx. 


L'AUTOUNA 

PANTAIAGK 


Dins  la  vida,  souvent  nosta  ama  es  atendria 

E  pensa  à  Dieu. 
Eren  à  la  sasou  de  la  malancounia, 

Après  l'estieu  ; 
Lous  aubres,  despolhats  de  sa  verda  parura. 

Eroun  mouquets; 

L'AUTOMNE 
RÊVERIE 

Dans  la  vie,  souvent  notre  âme  est  attendrie  —  et  pense  à 
Dieu.  —  Nous  étions  à  la  saison  de  la  mélancolie,  —  après  l'été;  — 
les  arbres,  dépouillés  de  leur  verte  parure.  — étaient  tristes;  — 


L  ATITOmsA  285 

Lous  raisses  dau  sourel,  esclairant  sa  ramura. 
Venien  fresquets. 

Las  fiolhas  sus  lou  sôu,  toumbadas  per  rantouna. 

S'acoutissien  ; 
Roussegadas  dau  vent,  dansant  la  farandouna, 

S'enfugissien . 
Lou  pin  armounious  disiè  sa  cansounota 

De  long  dau  rieu, 
E  lous  passerounets,  en  bâtent  de  Taleta, 

Fasien  pieu-pieu. 

Déjà  la  trista  nèu  davalava  à  grands  flecas, 

E  soun  lençèu 
S'espandissiè  plan-plan  dessus  las  tiolhas  secas  : 

Tout  era  dôu  ! 
Eu  vegent  aquel  glas  de  Tannada  mourenta, 

Tremoulissiei  ; 
Moun  cor  era  mens  caud,  moun  ama  mai  doulenta  : 

leu  vielhissiei  ! 

C.  Gros. 

(  Languedocien,  Montpellier  et  ses  environs.  ; 


les  rayons  du  soleil,  éclairant  leur  feuillage.  —  tombaient  presque 
refroidis. 

Les  feuilles  sur  le  sol,  couchées  par  l'automne,  —  se  poursui- 
vaieni;  —  roulées  par  le  vent,  dansant  la  farandole,  —  elles  s'en- 
fuyaient. —  Le  pin  harmonieux  disait  sa  chan»on  —  le  long  du 
ruisseau.  —  et  les  petits  oiseaux,  en  battant  de  l'aile,  —  piaulaient. 

Déjà  la  triste  neige  descendait  à  larges  flocons,  —  et,  son  lin- 
ceul —  s'étendait  doucement  sur  les  feuilles  sèches:  —  tout  était 
deuil.  —  En  voyant  ce  glas  del'année  mourante.  — je  tressaillais; 
—  mon  cœur  était  moins  chaud.  —  mon  âme  plus  dolente  :  —  je 
vieillissais  ! 

Ch.  Gros. 


BIBLIOGRAPHIE 


La  Prise  de  Damiette  en  1219.  —  Relation  inédite  en  provençal,  publiée 
et  commeiiti^o  par  Paul  Mryer.  (extrait  de  la  Ribliothèque  deV Ecole  des 
chartes).  In-8%  1877. 

Cette  relation,  (jui  malheureusement,  —  car  elle  a  pour  l'histoire 
de  l'expédition  (ju'elle  raconte  une  importance  considérable  et  que 
le  savant  éditeur  fait  parfaitement  ressortir,  —  ne  nous  est  parvenue 
qu'incomplète,  nous  était  déjà  connue  par  l'extrait  qu'en  donna,  il 
V  a  trois  ans,  M.  Meyer  lui-même  dans  son  Recueil  d'anciens  tex- 
tes (p.  138).  Mais,  contrairement  à  son  habitude,  il  n'en  indiqua  pas 
alors  la  provenance.  Aujourd'hui  il  nous  apprend  que  le  ms.  qui 
nous  a  conservé  ce  précieux  fragment  appartient  à  la  Bililiothèque 
de  l'Arsenal,  où  il  porte  depuis  peu  le  n"  5,991 . 

Après  la  description  du  ms.,  lequel  consiste  en  un  cahier  in-fol. 
de  quatre  feuillets  doubles  et  renferme,  outre  notre  fragment,  la 
fin  d'une  version  provençale,  différente  de  celle  que  Raynouard* 
et  Bartsch  =^  ont  mentionnée,  de  la.  Lettre  du  prêtre  Jean;  la.  falde  de 
Peire  Cardinal,  Una  ciutatz  fo,  et  enfin  une  lisle  en  latin,  dont  il 
existe  ailleurs  de  nombreux  exemplaires,  des  évê.chés  du  monde 
chrétien,  M.  Paul  Meyer  donne  un  aperçu  des  sources  historiques 
de  l'expédition  de  Damiette.  Viont  ensuite  la  relation  provençale, 
précédée  il'un  sommaire  des  événements  antérieurs  et  de  ceux 
qu'elle  raconte,  et  suivie  d'un  précieux  commentaire  historique, 
dans  lequel  sont  utilisées  les  sources  précédemment  indiquées,  et 
particulièrement  la  relation  latine  d'un  témoin  oculaire,  le  prêtre 
«  Johaniips  de  Tulbia»,  qui,  à  ce  qu'il  parait,  n'avait  pas  encore 
été  signalée.  Un  g'Zossa^■re-^?iffec,  comprenant  les  noms  propres  et 
(Quelques  autres  mots,  termine  le  volume. 

M.  Meyer  suppose,  avec  toute  vraisemblance,  que  la  partie  de 
la  relation  provençale  qui  fait  défaut  au  commencement  formait 
bien  prés  de  la  moitié  de  l'ouvrage.  On  en  doit  d'autant  plus  re- 
gretter la  perte  qu'avec  elle  a  dû  disparaître  le  nom  de  l'auteur. 
L'ingénieuse  sagacité  de  l'éditeur  a  réparé  un  autre  dommage  moins 
grave,  en  restituant  au  texte,  avec  un  haut  degré  de  probabilité  (on 

'  Lex.  roman,  V.  606  a. 

■■'  Grundriss  zur  Geschichlo.  der  prov.Lit,,  p.  92. 


ÔIHLIOGRAI'HIE  287 

pourrait  dire  neuf  t'ois  sur  dix,  avec  certitude),  un  grand  nombre  de 
mots  ou  de  lettres  qu'une  souris  indiscrète  avait  fait  disparaître  en 
rongeant  le  parchemin  du  ms.  A  peine  si,  sur  près  de  cent  cin- 
quante lacunes,  il  en  a  laissé  sept  ou  huit  sans  les  remplir. 

Je  ne  sais  si  d'autres  réussiront  à  combler  ces  vides.  Je  l'ai,  pour 
mon  compte,  essayé  sans  succès  à  plusieurs  reprises.  Mais,  en  étu- 
dianl:  avec  le  soin  qu'elle  réclame  la  nouvelle  publication  de  M .  Paul 
Mever.j'ai  trouvé  matière  à  quelques  remarques  qui  ont  trait,  pour 
la  plupart,  soit  à  la  constitution,  soit  à  l'interprétation  du  texte,  et 
je  les  soumets  ici  à  son  jugement. 

L.  28.  Peut-être  vaudrait-il  mieux  suppléer  que  devant  si  que  de 
remplacer  de  par  don. 

30.  Lors,  sujet  singulier.  M.  Meyer  rejette  Vs,  ([ue  j'aurais  gar- 
dée. Voy.  les  Leys  d'amors,  t.  II,  p.  216.  Notre  texte  est  probable- 
ment toulousain  ;  ainsi  l'article  masc.  suj.  sing.  y  est /e.  Cf.  dans 
l'inlroil..  p.  498,  la  remarque  de  M.  M.  sur  l'écriture  du  ms. 

49.  Redargar.  Je  considère  ce  mot  comme  une  autre  forme  du 
regardât.  Cf.  adujar  (à  Toulouse  et  ailleurs)  =  ajtidar,  deneiar  = 
nedeiar  (netejar),  etc. 

103.  Doa  milia.  Cette  forme  neutre  de  duo  est  inconnue  de  Diez 
^qui  mentionne  [lourtant  tria),  comme  de  Raynouard  et  île  Hoche- 
gude.  M.  Meyer  aurait  bien  fait  de  la  relever  dans  son  glossaire. 

149.  Istaton.  Ne  vaudrait-il  pas  mieux  écrire  i  'sfavon? 

151 .  11  paraît  douteux  que  manesc  soit  ici  le  même  mot  que  le  manecs 
de  Raynouard,  IV,  lôU,  Vs  de  ce  dernier  étant  probablement  la 
flexion  du  nominatif  et  ne  pouvant,  dès  lors,  se  prêter  à  la  méta- 
thèse.  J'assimilerais  plutôt  notre  mcme.9c  k  mânes.  (Cf.  sirventesc  et 
drventes,  parentesc  Qi  parentes,  etc.,  etc.).  A  manesc  serait  ainsi  la 
même  locution  que  a  mânes,  qui  existe  encore,  dans  le  rôle  d'ad- 
verbe et  (suivi  de  que)  dans  celui  de  conjonction,  et  qui  a  le  même 
sens,  ou  à  peu  près,  que  de  mânes,  à  savoir  soudainement,  sur-le- 
champ  . 

156.  Si  l'on  supprimait  le  premier  çwe  de  cette  ligne  et  que  l'on  mît 
un  point  après  Sanhs  (Viix,.  158).  la  difficulté  signalée  dans  la  note 
sur  ce  passage  disparaîtrait. 

172  Teula  cucha.  Corr.  cuecJia.  Peut-être  est-ce  une  faute  d'im- 
pression 

281.  Lo  comolumps  de  .j.  ou.  M.  M.  propose  do  corriger  la 
rnojols  ou  .j.  ou  de  colump.  Mais  aucune  correction,  à  mon  avis, 
n'est  nécessaire.  Comolumps  peut  très-bien  s'entendre  comme  sub- 
stantif formé  du  verbe  comolar:  «  Le  comble  d'un  œuf»  c'est-à-dire 
«  autant  de  sucre  qu'un  œuf  en  contiendrait.  »  On  sait  combien, 
en  provonçal.   a  été   productif  le  suffixe  un.  Quant  au  ^,  il  est  ici 


2«i8  BIBLIOGRAPHIE 

parasite,  comme  si  souvent  ailleurs,  entre  les  raèaies  lettres  m  et  s. 
Ainsi,  femps  ^  firnus,  comps  =  cornes,  etc. 

309.  Que  lorfalhiron.  Avec  la  correct,  salhiron,  le  sens  devien- 
drait, ce  me  semble,  satisfaisant:  «  qui  volaient  vers  eux.  » 

315.  Dieus  no[l\  vole.  Ce  texte  n'offrant  aucun  exemple  de  lo,  pro- 
nom neutre,  il  aurait  mieux  valu,  je  crois,  sans  rien  suppléer, 
écrire  no. 

336.  11  suffirait,  pour  faire  disparaître  la  difficulté  signalée  dans 
le  commentaire,  de  mettre  un  point  après  a  pe,  surtout  si  l'on 
commençait  ensuite  un  autre  alinéa. 

366.  Aheure.  Je  vois  là  deux  mots,  et  non  pas  un  seul  qui  serait 
synonyme  de  abeurar,  comme  M.  Meyer  para,ît  l'avoir  cru.  Per 
sif^nifie  peut-être  ici  par,  à  travers,  plutôt  que  j^oiir.  Ainsi  s'expli- 
querait l'a  (préposition),  que  M.  M.  propose  de  corriger  e. 

375.  Le  patriarcha.  L'article,  comme  les  quatre  premières  lettres 
du  substantif,  a  été  restitué  par  l'éditeur.  Mais  je  crois  qu'il  eût 
mieux  valu  lui  donner  la  forme  féminine  et  écrire  la  patriarcha. 
Un  autre  substantif  masculin  de  la  première  déclinaison,  Califa, 
qui  paraît  plusieurs  fois  dans  notre  texte,  y  est  toujours  accom- 
pagné de  l'article  féminin. 

388.  Motzs'enfugiron.  Corr.  totz? 

404.  Etiïh  que  aman  gran  ren  perdut.  C'est,  je  pense,  un  tort  de 
considérer  cette  phrase  comme  incomplète  ou  corrompue.  Elle  nous 
offre  seulement  un  exemple,  bon  à  noter,  d'un  tour  que  le  langage 
populaire  affectionne  pour  sa  vivacité.  Yoy.  Mussafia,  die  Catala- 
nische  Version  der  sieben  ireisen  Meister,  p.  96,  note  sur  le  v.  1267, 
et  Cf.  Revue,  X,  315, 1.  1-6*. 

415.  A[r]sas.  L'insertion  de  l'r  me  paraît  inutile,  osas  pouvant  très- 
bien  être  le  féminin  de  as  ou  asse  i=assus),  qui  existe  encore. 
Notre  texte  offre  d'autres  exemples  de  s  simple  pour  ss;  ainsi,  1.  473. 
corrosatz . 

430.  De  que  non  soi  lors  noms.  Ve  de  que,  comme  le  non  qui  suit, 
a  été  restitué.  J'aurais  préféré  de  qui,  comme  plus  correct,  que 
n'étant  régime  indirect  qu'au  neutre. 

507.  Enfrendatz.  Ce  mot,  qui  n'est  ni  dans  Haynouard  ni  dans 
Kochegude,  manque  aussi  au  glossaire-index  de  M.  Meyer.  Comme 


*  Un  exemple  pareil,  corrigé  à  tort  par  M.  Bartsch,  peut  se  voir 
dans  sa  Chrestomathie  provençale  (2«  édit.  337,10).  Cf.  encore  ce  passage 
de  Deiclot  .•  «  Car  be  sapiats  que,  si  dos  dits  fos  venguda  pus  alta  la 
esquona,  e  lo  rey  que  no  era  ben  yuarnil.  de  part  a  part  lo  baguera 
passât  sens  toi  si.  » 


BIBLIOGRAPHIE  289 

on  ne  saurait  guère  le  traduire  ici  par  «  garnis  de  feuillages  >»,  ce 
doit  être  une  autre  forme,  obtenue  par  la  miHathèsede  IV,  de  enfon- 
(Iratz,  synonyme  ou  à  peu  près  de  esfondratz.  Cf.  1.  180,  trez=^  terz 
(tertius),  I.  426,  cannelencs  =■  camerlencs . 

515.  Attenhatz.  M.  Meyer  propose  la  corr.  atakinatz.  Atteunatz 
{exténués)  conviendrait  mieux  au  sens  et  serait  bien  plus  près  du 
ms,  Raynouard  n'a  que  la  forme  savante,  atenuar  ;  mais  afeunar  sub- 
siste, avec  son  synonyme  ateunir,  dans  les  dialectes  modernes. 

56&.  Noc  y  ac.  Faute  d'impression  pour  hom  ?  Un  c  euphonique 
serait  ici  peu  vraisemblable. 

589.  Lors.  Mot  suppléé,  sauf  l's  qui  le  termine;  mais  c'est  une 
forme  assez  peu  admissible  dans  un  texte  provençal  correct.  Fors, 
même  pour  le  sens,  eût,  je  crois,  mieux  valu. 

691.  Auzlron.  Mot  restitué.  Il  faudrait  auziran.  C'est  sans  doute 
une  faute  d'impression. 

li^ .  Semanara  la  sens pecatz.  Aucune  correction  n'est  proposée 
pour  ce  semanara,  qui  n'est  pas  pourtant  expliiiué  dans  le  glossaire. 
Semenara  ne  conviendrait  guère  ;  mais  on  pourrait  penser  à  s'en 
anara.  La,  qui  suit,  serait  l'adverbe  de  lieu. 

726.  E 'penra  .j.  tarent  que  sera  destruiz  a  quarrataz.  Je  crois  que 
ce  passage  corrompu  peut  se  corriger,  au  commencement:  «  e  penra 
i  lo  renh.  »  Quant  à  «  a  quarrataz  »,  je  ne  sais  s'il  faut  maintenir 
ces  deux  mots,  en  les  prenant  pour  une  locution  adverbiale  signi- 
liant  quelque  chose  comme  complètement^  ou  les  changer  en  e  hara- 
tatz. 

745.  Malagutz.  J'aurais  divisé  malagutz.  Exemple  à  joindre  à  ce- 
lui de  la  1.  453,  qui  a  été  relevé  au  glossaire,  de  agutz  pour  estatz. 

788.  Lengostatz.  A  l'agoU,  correction  proposée  par  M.  Meyer,  je 
préférerais  Z'estote.Le  copiste,  qui  était  en  train  de  répéter  lengostas, 
s'aperçut  de  son  erreur,  comme  le  prouve  la  substitution  de  tz  à  s, 
mais  il  oublia  de  pointer  les  trois  lettres  intérieures  qui  sont  de  trop. 

P.  543,  note  3.   Gfrnnz  oh.  Faute  d'impression  pour  otz  {=osts). 

Camille  Chabaneau. 

Die  Provenzalische  Blumenlese  àer  Chigiaoa.—Erster  und  getreuer  Ab- 

druck  nach  dem  gegenvaertiyen  verstummelten  Original  und  der  rolls- 
lœndigen  Copie  der  liiccardiana,  bi?sorgt  von  Edmund  Stengel.  Vlar- 
burg,in-4°,  1878. 

Lems.  2348  (;;iujourd'hui  L.  IV.  1U6)  de  la  liibliothèque  Chigi, 
désigné  par  F  dans  la  table  de  M.  Bartsch  [Grundriss,  p.  28)  et 
par  O  dans  celle  de  M.  Paul  Meyer  (Derniers  Troubadours,  p.  llj, 
renferme,  outre  un  choix  copieux  des  poésies  de  Bertran  de  Born 

22 


•290  BIBLIOGRAPHIE 

et  la  biographie  développée  de  ce  grand  poëte,  uneanthologie  com- 
posée d'extraits  de  pièces  d'autres  troubadours,  avec  un  petit  nom- 
bre de  pièces  entières.  C'est  cette  anthologie  que  M.  Stengel  vient 
de  publier.  Le  ms.,  quiestdu  XIV<^  s.  et  qui  peut  compter  parmi 
les  bons  qui  nous  restent,  est  actuellement  incomplet  de  dix  feuil- 
lets. Mais  on  en  possède  heureusement  une  copie  exécutée  avant 
la  perte  de  ces  feuillets  et  à  l'aide  de  laquelle  M.  Stengel  a  pu  en 
combler  toutes  les  lacunes.  Cette  copie,  datée  de  1594,  appartient 
à  la  bibl.  Riccardi,  où  elle  porte  le  no  2981.  Il  en  existe  à  Milan  une 
autre,  mais  seulement  partielle  et  qui  ne  suit  pas  Tordre  de  l'ori- 
ginal. 

L'anthologie  chigienne  nous  a  conservé  un  assez  grand  nombre 
de  pièces  ou  de  fragments  de  pièces  qui  ne  se  trouvent  point  ail- 
leurs, de  trente  à  quarante  environ,  et  plusieurs,  soit  de  celles-ci, 
soit  des  autres,  n'avaient  pas  encore  été  publiées.  Cette  circon- 
stance ajoute  un  prix  particulier  à  la  publication  de  M.  Stengel. 

Le  texte  du  ms.,  ou  celui  de  sa  copie,  là  oià  le  premier  manque,  a 
été  reproduit  tel  quel.  Quelques  corrections  sont  proposées  dans 
les  notes,  où  l'éditeur  a  mentionné  aussi  les  principales  variantes 
qu'il  a  pu  connaître. 

Trois  tables,  dont  l'utilité  sera  appréciée,  complètent  la  publica- 
tion de  M.  Stengel.  La  première  indique,  selon  l'ordre  du  Grundriss 
de  M.  Bartsch  (pp.  09-203),  le  contenu  du  ms.  Chigi  (anthologie  seu- 
lement) et  du  ms.  15211  de  notre  Bibliothèque  nationale*  ;  les  deux 
autres  présentent  distinctement  ce  même  contenu,  selon  l'ordre  des 
matières,  avec  la  concordance,  pour  le  ms.  Chigi,  de  tous  les  chan- 
sonniers ou  recueils  analogues. 

C.  G. 

Société  des  anciens  textes.  —  Aiol,  chanson  de  geste  publiée  d'après  le 
ms.  unique  de  Paris,  par  Jacques  Normand  et  Gaston  Ra-ynaud.  — 
Paris,  Didol,  1877,  in- 18. 

IjAîoI,  curieux  poëme  de  onze  mille  vers,  a  été  déjà  publié  par 
M.  W.  Foerster ( voy.  Rev.  desl.  rom.,  15  octobre  1876,  p.  216). 
Cette  édition  diffère  de  la  précédente  en  ce  qu'elle  se  présente  comme 
complète  et  définitive,  avec  Litroduction  et  Glossaire,  tandis  que 
celle  de  M.  Foerster  ne  donne  que  le  texte,  en  attendant  le  travail 

'  Ou  n'avait  pas  encore  de  table  de  ce  ms.  M.  Suchier  en  promet  une, 
qui  sera  sans  doute  complète  en  soi.  En  attendant,  celle  de  M.  St.,  bien 
qu'on  ne  puisse  l'utiliser  sans  le  secours  de  Bartsch,  rendra  service  aux 
travailleurs. 


BIBLIOGRAPHIE  291 

d'exégèse  annoncé  par  l'éditeur.  Dans  leur  Introduction (i.xii  p.). 
MM.  J.  Normand  et  G.  lîaynaud  font  la  description  du  ms.  (le 
II" '25516,  Bibl.  nat.,  f.  français)  quileur  a  servi,  etanalysent  très- 
sommairement  le  poème,  dont  ils  étudient  ensuite  la  langue  et 
la  versification.  Ils  en  rapprochent  les  imitations  étrangères  (Pays- 
Bas,  Italie,  Espagne  )  et  terminent  par  une  courte  appréciation 
littéraire.  D'après  eux,  le  texte  aurait  été  refondu  par  un  remanieur 
auquel  on  serait  redevable  de  la  transformation  du  vers  hiendéca- 
syliabique,  à  peu  près  seul  usité  dans  la  première  partie,  en  vers 
dodécasyllabique  ou  alexandrin,  le  seul  employé  dans  la  seconde. 
J'avoue  que  les  raisons  présentées  à  l'appui  de  cette  conjecture  ne 
m'ont  pas  convaincu.  La  versification  de  ce  poème  est  intéres- 
sante. On  y  remarque  l'emploi,  de  tout  temps  assez  rare  dans  la 
poésie  française,  du  vers  dècasyllabique  à  premier  hémistiche  de 
six  syllabes.  A  cette  particularité  vient  s'en  ajouter  une  seconde 
déjà  signalée:  je  veux  parler  de  l'alternance  de  ce  même  vers  et 
du  vers  dodécasyllabique  ou  alexandrin.  Les  éditeurs  ont  cru  en 
découvrir  une  autre.  Frappés  de  ce  que  bon  nombre  de  ces  vers 
décasyllabiques,  qui  ont  une  atone  à  la  septième  syllabe,  sont  faux, 
si  l'on  ne  fait  pas  compter  cette  môme  atone  de  la  césure  parmi  les 
quatre  syllabes  du  second  hémistiche,  ils  n'ont  pas  hésité  à  ad- 
mettre cet  enjambement  plutôt  que  de  corriger  leur  texte.  D'a])rès 
eux,  ces  vers,  dont  ils  ont  dressé  une  liste  qu'ils  présententcomme 
complète,  mais  oii  manquent  les  v.  831  et  1 191,  devraient  se  scan- 
der comme  les  suivants  : 

Si  n'ai  apris  mes  ar  —  mes  à  porter  (v.  282). 
Ja  ne  venra  en  te  —  re  n'entre  gent  (v.  355). 
Armes  as  tu  mok  boi  —  nés,  molt  m'agrée  (v.  524). 
Car  moltavoil  grant  pie  —  che,  nés  senti  (v.  627). 
Ensamble  avoec  ces  moi  —  nés  demorés  (v.  830) . 

Cette  coupe,  il  est  vrai,  a  cours  chez  les  Italiens,  mais  jamais  la 
versification  française,  pas  plus  au  Midi  qu'au  Nord,  ne  l'a  connue 
ni  pratiquée.  Il  serait  bien  extraordinaire  que  l'auteur  d'Aiol  eût 
imaginé  de  ne  l'employer  que  dans  une  quarantaine  de  vers,  sur  les 
onze  mille  environ  dont  se  compose  l'ouvrage  entier.  Ce  sont  pro- 
bablement de  simples  distractions  de  copiste.  Le  nôtre  était  cou- 
tumier  du  fait,  et  ce  ne  sont  pas  quarante  corrections  de  plus  qui 
doivent  faire  reculer  l'éditeur  d'un  poème  où  l'on  compte  par  cen- 
taines celles  qui  sont  évidentes  et  nécessaires.  Aussi,  chacun  de 
ces  vers  se  laisse  rétablir  au  moyen  de  corrections  faciles  ou  as- 
surées : 

Si  n'ai  apris  mes  armes  [bienj  a  porter  (cf.  v.  1097). 
Ga  ne  venra  en  tare  n'en  [au]tre  gent,  etc. 


292  BIBLIOGRAPHIE 

Observons  encore  qu'à  respecter  trop  scrupuleusement  le  texte 
du  manuscrit,  on  se  verrait  forcé  d'admettre  pour  certains  vers  la 
césure  dite  lyrique,  où  l'atone  avait  la  valeur  d'une  syllabe  accen- 
tuée; par  exemple  : 

Teus  m'escarnits  ore  —  dontme  vengrai  (v.  3085)  ; 

supposition  qui  serait  aussi  admissible  que  l'autre,  puisque  cette 
coupe  singulière  n'était  pas  étrangère  à  notre  ancienne  versifica- 
tion. Mais,  en  réalité,  elles  doivent  être  également  rejetées  toutes 
les  deux,  surtout  parce  que,  employées  concurremment  avec  la 
coupe  contraire,  celle  qui  ne  compte  pas  l'atone  de  la  césure  même 
quand  le  mot  suivant  commence  par  une  consonne,  elles  auraient 
mis  le  lecteur  dans  le  plus  grand  embarras.  Aussi  ces  différentes 
coupes  sont-elles  ou  étaient-elles  exclusives  les  unes  des  autres 
car  jamais  on  ne  les  rencontre  réunies  dans  les  mêmes  pièces. 
D'un  autre  côté,  les  éditeurs  sont  tellement  pleins  de  leur  idée, 
qu'ils  vont  jusqu'à  prétendre  «  que  le  copiste  n'a  jamais  commis 
d'erreurs  que  dans  les  vers  où  le  second  hémistiche  peut  com- 
mencer par  la  dernière  syllabe  muette  du  mot  terminant  le  pre- 
mier >>;  affirmation  erronée,  comme  le  prouvent  ces  quelques  vers, 
choisis  exclusivement  parmi  ceux  qui  ont  une  atone  au  sixième 
pied  : 

Ja  ne  me  tieng  mie  —  a  guinlechier  (v.  977). 

Mais  il  est  si  \)Qvres  —  et  desnués  (v.  1207).   . 

Onques  ne  vi  home  —  de  vostre  aé  (2205). 

Mais  che  me  va  auques  —  reconfortant  (v.2706;.- 

Car  il  n'estoit  \vres  —  ne  estordis  (v.  2781). 

Lors  a  pris  le  ma/vC  —  li  glous  qu'il  tint  (v.  4001). 

On  s'étonne  un  peu  de  voir  des  formes  très-connues  grossir  inu- 
tilement le  Glossaire,  qui  devrait  être  principalement  réservé  à 
celles  que  recommandent  leur  rareté  ou  certaines  difficultés  d'in- 
terprétation. Pourquoi,  par  exemple,  y  ciiQV  undetis,amor{iéxmnm), 
a?ieZ=  anneau,  a«;!e=  tante,  o/igîfes  =  jamais, etc.;  tandis  qu'on  n'y 
voit  figurer  ni  desrée,  v.  765;  ni  our,  v.  7098;  ni  oc=liabui,  v.  74245 
ni  la  locution  a  tel  mois,  v.  7517;  ni  dispers,  v.  8179;  ni  liège,  v.  10208; 
ni  subicion,  v.  10677?  V.  1095,  qu'home;  M.  Foersler,  qu  orne.  Si  réel- 
lement le  ms.  donne  qu'home,  il  fallait  l'indiquer  en  note,  mais  cor- 
riger ç«  orne.  L'A  tombait  en  cas  d'élision.  Les  exceptions  à  cette 
règle,  qui  n'est  pas  contestée,  sont  très-rares.  V.  2613.  ««  Por  voir 
les  entorchierent  gent  sarrasine  :  —  Qui  navrés  en  seroit  ne  poroit 
vivre.»  Entorchier  est  traduit  au  Glossaire  par  fourbir.  La  bonne 
leçon,  garantie  par  le  vers  suivant,  est  celle   du  ms.  et  de  M.  F.: 


BIBLIOGRAPHIE  293 

rntoschierent  =  intoxicaveriint.  L's  devant  le  groupe  ch  aura  pu  se 
confondre  avec  \'r  ici,  comme  dans  marchecliere  p.  maschecliere, 
\ .  2700.  V.  6'282  de  mal  enartnus.iQ  ne  cliangerais  rien  à  la  leçon  du 
ms.rfe  mal  enarcon,  que  je  lirais  arçon  =  arsio,  onis,  litt.  «en  ardeur 
de  mal.  »  Glossaire  :  Coraus,  estre  (v.  7166,  7171)  n'est  pas  exacte- 
ment traduit  par  se  montrer,  laisser  voir  sa  pensée.  Le  sens  est  in  in- 
tlmo  corde.  Encoistre  du  v.  6436  est  traduit  par  grossier.  Je  ne  sais 
d'après  quelles  données  étymologiques  les  éditeurs  ont  adopté  ce 
sens.  Dans  tous  les  cas,  l'expression  «  tètes  grossières  »  laisse  à 
désirer.  Kernus,  du  v.8349,  est  mal  à  propos  traduit  par  charnus. 
Kernus  =  crenus  =  crinitos.  Revisder  (i^'iO)  signifie  «ranimer,  récon- 
forter», et  non  «  visiter  de  nouveau.  »  Fossier  ne  veut  pas  dire 
hahitant  d'une  caverne,  mais  simplement  fossoyeur;  v.  Recueil  général 
et  complet  des  fabliaux  des  XIII'^  et  XIV°  siècles,  par  MM.  Anatole 
de  Montaiglon  et  Gaston  Raynaud,  t.  II,  p. 175,  v.l43  et  147. 

A.  B. 

Sprachliches     aus  romaenischen  Volksmaerchen  von  D'  Johann  Urban 
Jarnik.  Wien,  1877,31  pag.,  in-8° 

Après  des  considérations  générales  sur  les  rapports  de  la  langue 
littéraire  avec  celle  du  peuple  en  Roumanie,  l'auteur  donne  une 
longue  liste  de  locutions  populaires,  méthodiquement  classées  et 
tirées  des  contes  qui  ont  servi  de  base  à  son  essai.  C'est  un  tra- 
vail fait  avec  soin  et  que  nous  avons  lu  avec  intérêt  et  profit. 

C.  G. 

Un  document  inédit  sur  Laure  de  Sade,  par  M  de  Berluc-Perussis. 
Aix-en-Provenee,  Marias  lUy,  187(i;  in-S",  16  pages  (Extrait  des  Mé- 
moires de  l'Académie  d'Aix.  ) 

«  La  Laure  aimée  de  l'immortel  rêveur  de  Vaucluse  était-elle  la 
sœur  ou  la  femme  d'Hugues  de  Sade?  Pétrarque  s'éprit-ii  d'une 
idéale  jeune  fille  ou  d'une  prosaïque  matrone?  En  d'autres  termes, 
et  pour  placer  la  question  sur  le  terrain  élevé  qui  lui  convient, 
l'amour  du  poëte  fut-il  pur  ou  adultère?  »  Tel  est  le  problème  (|ue 
M.  deBerluc-Perussis  a  résolu  en  faveur  delà  première  alternative. 

L'abbé  de  Sade,  qui,  au  siècle  dernier,  accrédita  la  seconde,  et  à 
qui  il  ne  déplaisait  pas  qu'on  le  supposât  descendant  de  Pétrarque, 
ne  recula  pas  devant  la  falsification  des  pièces  du  procès  et  la  sup- 
pression du  nom  de  Laure  dans  le  testament  de  son  père. 

Le  témoignage  des  premiers  biographes  du  poëte  italien  fortifiait 
déjà  beaucoup  la  thèse  de  M,  de  B,-P.  Une  découverte  faite  par 
lui  dans  les  ms.  775-778  du  Cabinet  des  titres  de  la  Bibliothèque 


294  BIBLIOGRAPHIE 

nationale  est  venue  lui  donner  une  sanction  de  certitude.  Ces  ms. 
forment  un  nobiliaire  de  Provence,  dressi-  par  l'abbé  Dominique 
Robert  de  Briancon,  élève  el  auxiliaire  de  d'Hozier.  sur  la  commu- 
nication des  titres  des  familles  intéressées.  Déjà,  dans  l'Etat  de  la 
Provence  (1693),  tome  III,  p.  21,  Robert  avait  indiqué  la  généalo- 
gie des  Sade  ;  dans  les  manuscrits  il  y  revient  de  nouveau,  et  il  éta- 
blit par  le  dépouillement  des  titres,  aussi  bien  que  par  un  tableau 
généalogique,  que  la  Laure  du  poëte  était  la  sœur  et  non  la  femme 
d'Hugues  de  Sade. 

Ce  n'est  pas  le  seul  point  que  mette  en  définitive  lumière  l'inté- 
ressante et  substantielle  brochure  de  M.  de  B.-P.  Il  en  est  deux 
autres  qu'elle  a,  sinon  dévoilés,  au  moins  fait  connaître  en  France. 
Des  biographes  du  poëte,  Squercialico  notamment,  rapportent  que 
le  Pape  Jean  XXII  aurait  voulu  marier  Laure  et  Pétrarque,  et 
que  celui-ci  aurait  refusé,  disant  qu'il  ne  voulait  pas  devenir  époux 
pour  ne  pas  laisser  d'être  amant.  M.  de  B.  P,  incline  à  croire  que 
les  empêchements  qui  traversèrent  cette  union  étaient  autres  qu'on 
ne  le  suppose.  Il  ressort,  en  effet,  d'une  Vie*  jusqu'ici  inédite, 
car  elle  a  été  imprimée  en  1874  seulement  par  M.  Carbone,  que 
le  poëte  mourut  d'un  accident  épileptique,  «  ce  qui  donne  médica- 
lement le  droit  de  supposer  que  cette  maladie  était  invétérée  chez 
lui.  »  D'autre  part,  l'examen  de  ses  restes,  fait  la  même  année,  a 
démontré  qu'il  fut  atteint  d'une  claudication,  non  pas  accidentelle, 
mais  de  naissance  2. 

C'est  pro])ablement  dans  ces  deux  faits,  conclut  M. de  B.-P . ,  qu'il 
faut  chercher  l'explication  d'un  célibat  moins  volontaire  peut-être 
qu'il  n'a  plu  aux  chroniqueurs  de  le  supposer. 

Alph.  Roque-Ferrier. 

Almanach  niçois  pour  1876,  par  Jules  Bessi.  Nice.u-iletta;  in-l2,vm-b8  p 

A  eu  mi  crompera  li  desiri  de  couor: 
Prosperità,  bouonour,  richessa  e  longa  vida. 
De  n'en  vendre  touplen  gardi  lou  ferme  espouor; 
A  ou  refusera  farai  courre  bourrida  !  ! 

Malgré   le   titre  français  adopté    par  M.  Bessi,  le  quatrain    de 


1  Vita  di  F.  Petrarca,  pubblicata  per  la  prima  volta.  Bœuf,  à  Turin, 

1874. 

-  Le  Ossa  di  F.  Petrarca,  studio  anlropologico.  Pro?i)':'rini,  â  Padoue, 
1874.  Cette  description  anatomique  est  due  à  M.  le  professeur  Canestrini, 
de  l'Université  de  Padoue. 


PERIOniQlTBS  295 

souhaits  et  de   menace   que   l'on  vient  de  lire  indique  que  VAl- 
manach  niçois  est  à  demi  français,  à  demi  niçard  de  composition. 

Les  pièces  écrites  dans  ce  dernier  idiome  sont:  lo  une  Epitafa 
de  Guisol,  par  J.  Ammirati  ;  2°  une  Cansoun  emhriagouna  :  3°  lu 
Calomniotour  (f)  don  casino  rfe  Monte-Carlo,  saiira;  4*  l'Abat  amou- 
rous,  comedia;  5»  Garibaldi;  6°  H  Doui  Mestressa,  comedia;lo  Gatrin, 
non  signés,  mais  certainement  de  M.  Bossi*. 

L'orthographe  de  ces  pièces  est  à  demi  itaUenne,  bien  que  le 
niçard  appartienne  à  la  langue  d'oc . 

A.  R.-F. 


PERIODIQUES 


Zeitschrift  fur  romanische  Philologie.  1.  Band.  1877. —  Ce 
premier  volume  de  la  revue  qui  a  pris  la  place  du  Jahrbuch  filr 
romwiische  Hprache  und  Liferatur  renferme  des  travaux  d'un  haut 
intérêt,  dont  nous  regrettons  de  ne  pouvoir ,  faute  de  loisir  autant 
que  de  place,  rendre  à  nos  lecteurs  un  compte  détaillé.  Nous  nous 
bornerons,  pour  cette  fois,  à  la  reproduction  pure  et  simple  de  la 
table  des  matières,  sauf  à  mettre  en  note  deux  ou  trois  remarques 
sur  quelques  articles: 

A .  Tobler .  Vermischte  Beitriige  zur  Grammatik  des  Franz'ôsischen^ . 
P .  1 .  —  F .  SchoUe,  Die  Baligantepisode,  ein  Einschuh  in  dus  oxfor- 
der  Rolanslied.  26. —  T.  Braga,  0  (Jancioneiro  jmrtugicez  da  Vaticana 
e  suas  relaçûes  com  outros  cancioneiros  dos  secidos  XIII  e  XIV.  41. 
179.  — W.  Victor,  Der  Ursprung  der  Virgilsage,  165, —  A  Stim- 
ming,  Die  Syntax  des  Commines.  191,  489.  — U.-A.  Ganello,  il 
Vocalismo  tonico  italiano.  510. 


*  Les  Notices  historiques  sur  le  comté  de  Nice,  qui  constituent  les  deux 
tiers  de  la  partie  française  de  l'Almanach  de  M.Bessi,  ont  été  empruntées 
par  lui  à  son  Nouveau  Guide  des  étrangers  à  Nice.  Nice,  Giletta,  1873, 
in-8'.  Le  lecteur  n'a  pas  élé  averti  de  ces  emprunts. 

2  Le  septième  des  points  traités  (participes  présents  à  signification 
passive,  comme  couleur  voyante)  dans  cette  savante  étude  a  été  déjà 
élucidé,  in  même  (IX,  215),  par  M.  Boucherie,  dans  un  article  dont  M.  To- 
bler paraît  n'avoir  pas  eu  connaissance. 


296  PERIODIQUES 

Texte.  —  K.  Rarlsch,  Zv}eA  prnvenzalîsche  Lais.  58.  —  W. 
Foerster,  CatoJanischeaStrpitgedicIit  zwisnJwn  EnBur  ami  Keinem  Pferd  '. 
79.  —  A.  Paz  y  Melia,  Libro  de  Cetreira  y  una  Prof  pria  de  Evan- 
gelîsta.  222.  —  A.  Scheler,  li  Prière  TheopUlus.  VCl .  — Th.  Aiira- 
cher,  Der  Sof/ennanfe  poitevinische  Pseudoturpin^ .  25'J.  —  A.  Weber, 
Zivei  ungedruckte  Versionen  der  Theophilussage .  523 . 

MisGiîLLEN.  — 1.  Zur  CultuTf/eschichte .  — F.  Liebrecht,  Portu- 
giesischer  Aherglauhe.  Mucharinga .  89. 

2.  Zur  Literaturgeschichte.  —  F.  Liebrecht,  Zit  Marie  de  France . 
90. — H.  Suchier,  Die  Quelle  des  Sermo  de  Sapientia.  91  — "W.  Foers- 
ter. Zu  Chevalier  as  dens  espées.  91.  Zu  Richart  le  liai.  92.  — 
E.  Mail,  Noch  einmal  Marie  de  Compiègne,  etc.  337.  —  A.  Weber, 
Zuden  Legenden  der  a  Vie  des  pères.  »  357.  —  R.  Kœhler.  Ueher  die 
Dodici  Conti  morali  d'Anonimo  senese.  365. 

3.  Zur  Handscriften  und  Bilcherlcunde .  — E.  Stengel,  Cod.  Vati- 
can, n°  32U7.  93.  —  K.  VoUmœller,  Laherintn  amoroso.  94.  —  E. 
Monaci,  il  Lihroreale.  375. — II.  Varnhaiïen,  Die  Handschr.  Erwer- 
hungen  des  Brit.  Mus.  bil.Zu  Deux  Rédactions  du  rom.  des  Sept  Sages 
éd.  G.  Parts.  555. 

4.  Handscriftliches.  —  W.  Foerster.  Altfranzôsische  GesundheitS' 
regeln.  97.  Alf/ranzusisches  Lieheslied.  98.  —  P.  Rajna,  Intorno  a 
due  canzoni gemelle.  381 . — E.  Stengel,  Studien  iiher  die  provenz  .  Lie- 
derhdscfui.l.  Kojyenhagner  Hand.^chrift.  3S1 . 

5.  Texthritisches.  —  A.  Mussaiia.  Zu  Brun  de  la  Montagne.  98. 

"W.  Foerster,  Z'»  Quatre  Livres  des  Rois,l,  xxx.  106.  Zu  altfr. 

Uehersetzung  der  Isidorschen  Synonyma^ .  397.  — A.  Mussafia,  Zmtw 
altfr.  Gottfried  von  Monmouth.  402.  —  H.  Sachier,  Zuni  Dialogus 
anime  eonquerentis  et  rationis  consolantis.  556. — A.  Tobler^  Zum  Dia- 
logus anime  et  rationis .   558. 

6.  Grammatisches. —  E.  Stengel.  Schiound  von  e,  i,  ira  Nordw. —  Ro 
Romanischen .\^'6 . —  G.  Grœber,  Z-o,  li,  il,  i  im  Altitalienischen.  108. 

'  L'habile  éditeur  de  ce  curieux  texte  n'a  pas  reconnu  au  v.  22  l'ad- 
verbe ich  (on  trouve  aussi  hic),  si  usité  dans  l'ancien  catalan.  V.  5f, 
j'écrirais  abdos  en  un  seul  mot.  151,  venar  =  vanar  (non  vantar).  Voy. 
Raynouard.  171.  paliter  =  [v.  pelletier.  2\l,tal   corr.  cal. 

"^  C'est  le  texte  dont  M.  Boucherie  a  publié  deux  fragments  au  t.  II, 
p.  126-132  de  la  Revue,  et  dont  il  a  promis  une  édition  que  colle  de 
M.  Auracher,  reproduction  diplomatique  des  mss.,  ne  le  dispense  nulle- 
ment de  nous  donner. 

^  Ue  la  forme  nasalisée  du  pronom  neutre  cen,  que  M.  Foerster  signale 
dans  le  texte  lorrain  auquel  cet  article  est  consacré,  on  peut  rapprocher 
le  moderne  çan  (  -  ça),  usité  en  Saintonge  (  écoutez  çan  que  je  vous  dis) 
et  aussi,  à  ce  qu'il  paraît,  dans  la  Suisse  romande. 


PERIODIQUES  297 

7.  Etymologisches . —  H.  Ro^nsch,  Romanische  Etymologien .  414. 
— N.  Caix,  Vocinate  dalla  fusione  di  due  terni.  4'.M. —  H.  Suchier, 
Franz'ôs.  Etymologien.  4'28. — W.  Fœrster,  Spanisch  Enclenque.  559. 
AUfr.réu  Scheiterhaufen.  »  561.  Ueber  vaincre  und  niaiigier.  562. 
Franz'ôs .  Selon .  56i.  Franz'ôs.  beau  ans  hélium.  564.  —  U.-A.  Ga- 
iiello,  Perder  Verre.  567. 

Regensionen  und  Anzeigkn.  —  H.  Schuchardt,  Stilnkel,  Le.c  ro- 
mana  Ultinensis.  111.— U.-A.  Ganello,  Eajna,  le  Fonti  delV  Or- 
lando  furioso.  125.  —  L.  Lemcke,  Braunfeh^  KritiscJier  Versuch 
iiher  den  Roman  Amadis.  131.  —  L.  Lemko,  Société  des  anciens 
textes,  135.  —  E.  Stengel,  Andresen,  Maistre  Wace's  Roman  de  Rou. 
144.  —  F.  SchoUe,  Laurentiux,  zur  Kritih  der  Chanson  de  Roland. 
—  159.  F,  Liebrecht,  Guastella,  Canti  iwpolari.  434. —  K.  Voll- 
moUer,  Michaelis,  Studien  zur  roman.  Wortschopfung .  442.  — H. 
Bucholtz,  Deniattio,  Morfologia  italiana.  446.  —  A.  Morel-Fatio. 
Sbarhi,  el  Refranero  gênerai  espafiol.  447. —  W.  Storck,  Braga,  An 
tologia  ijortugueza.  453. —  H.  Sucliicr.  la  Chanson  de  Roland,  he- 
rausg.  von  E.  Kolbing.  461.  —  0.  Ulbrich,  Recueil  de  poésies  franc . 
des  XV^  et  XVPs.  462.  — 0.  Behaghel,  Neumann,  die  Germa- 
nische  Elemente  in  der  prov .  undfranz.  Sprache.  iQQ. — 0.  Knauer, 
Scheler,  Exposé  des  lois  qui  régissent  la  transformation  française  des 
mots  latins.  469.  —  K.  Sachs,  Beaujean,  Dictiojnudre  de  la  langue 
française.  474.  — E.  Stengel,  L.  Lemcke,  R.  Kohler,  H.  Suchier, 
A.  Tobler,  Romania.  476.  — H.  Schuchardt,  Columna  lui  Traian, 
Anul  VII.  481  —  E.  Stengel,  Englische  Studien.  1877.  1.  Heft. 
484.  — H.  Qachier, Michel,  Livre  des  Psaumes,  anc.  trad.  française. 
568.  —0.  Ulbrich,  Longnon,  Étude  sur  Fr.  Villon.  572.  —  0. 
Behaghel,  Wulf,  de  l'Emploi  de  l'infinitif.  575.  —A.  Stimming  : 
Kri'tger,  Wortslellung  in  der  franz.  Prosalitteratur.  577.  0.  Ul- 
brich, Benoist,  de  la  Syntaxe  franc,  entre  Palsg  rave  et  Vaugelas. 

G.  G. 

Archiv  fur  das  Studium  der  neueren  Sprachen  und  Lite- 

raturen.  L\I1.  Band.  1877.  —  P.  1.  Ueher  den  cpiachen  Chnrartcr 
der  Sprache  Ville- Hardouins,  von  Adolf  Kressner.  — Article  in- 
téressant, où  l'on  montre  que  la  prose  de  Villehardouin  olTro  en 
abondance  les  tours,  expressions  Qt  formules  habituels  aux  auteurs 
des  chansons  de  geste.  —  383.  Goethe  als  Uebersetzer  Voltaire' scher 
Trag'ndien,  von  D"^^  W.  Mûnch.  Gomj>araison  des  traductions  de 
Mahomet  et  de  Tancrède  avec  les  originaux.  —  Los  autres  travaux 
compris  dans  ce  volume  concernent  exclusivement  les  langues 
germaniques.  Mais  nous  avons  à  signaler,  parmi  les  annonces  et 


29S  PÉRIODIQUES 

comptes  rendus,  un  article  justement  élogieux  sur  les  Morceaux 
choisis  den  écrivains  français  du  XVI"  s.,  de  MM.  A.  Darmesteter  et 
A.  Hatzfeld  (p.  99),  et,  dans  les  Mélanges,  une  notice  sur  George 
Sand,  signée  Hans  IJerrig.  où  le  grand  écrivain  est  dignement  ap- 
précié (p.  119).  Notons  encore,  dans  le  compte  rendu  des  séances 
de  la  Société  de  Berlin  pour  l'étude  des  langues  modernes,  quelques 
observations  de  M.  Wiillenweber  sur  Vaugelas  (p.  88). 

G.  G. 


Archiv  fur  das  Studium  der  neueren  Sprachen  und  Lite- 

raturen.  LVill.  Band.  1877.  —  P.  193.  Fr.  Brinkmann.  Etudes 
métajjhoriques  (suite).  Le  Coq  et  la  Poule. — 267.  R.  Mahrenholz.  Le 
Misanthrope  de  Molière  et  les  jugements  de  la  critique.— 2,17.  K,  Foth. 
Du  Sentiment  de  Corneille  sur  F  essence  de  la  tragédie.  —  291.  Adolf. 
Kressner,  le  Poëme  provençal  de  l'Enfance  de  Jésus.  Examen  des 
sources  et  étude  de  la  langue  et  de  la  versification  de  ce  poëme.  Il 
s'agit  du  texte  que  M.  Bartsch  a  publié  dans  ces  Denkmaeler. 
M.  Kressner  ne  paraît  pas  avoir  eu  connaissance  d'une  autre 
composition  sur  le  même  sujet,  dont  il  reste  un  fragment  d'en- 
viron 600  vers  et  dont  M.  Paul  Meyer  a  donné  un  extrait  dans  le 
2™e  fascicule  du  Bulletin  de  la  Société  des  anciens  textes  français. — 
447.  Séances  de  la  Société  berlinoise  pour  V étude  des  langues  modernes. 
On  y  remarque  plusieurs  communications  concernant  noire  his- 
toire littéraire  (sur  Molière,  T Académie).  — 457. Compte  rendu  de 
l'ouvrage  de  M.  Hermann  Buchholtz.  intitulé:  Priscœ  Latinitatis 
originum  libritres. 

G.  G. 

Il  Propugnatore.  Anno  X.  Dispense  4a,  5a  e  6».  —  P.  3. 
Francesco  Labruzzi.  Quando  nacque  Dante  Alighieri?  L'auteur  ex- 
pose les  raisons  qu'on  a  de  douter  que  ce  puisse  être,  selon  l'opi- 
nion admise,  en  mai  1265  ;  mais  il  ne  conclut  pas  en  faveur  d'une 
autre  date.  —  17.  Licurgo  Gapelletti.  La  Novella  di  Guido  Caval- 
canti.  Etude  sur  ce  poète,  à  propos  de  la  nouvelle  IX  de  la  6*  jour- 
née du Décaméron,  qui,  d'après  M .  G. ,  raconterait  un  fait  réellement 
arrivé.  — 39.  Salvatore  Salomone-Marino,  Storie  popolari  in poesia 
siciliana  (fin).  Notes  bibliographiques  sur  plusieurs  histoires  non 
reproduites.  Un  court  glossaire  (pp.  49-53)  termine  la  très-inté- 
ressante publication  de  M.  Salomone-Marino.  —  54  et  281.  Carlo 
Vassalo.  TnterpretarÀone  filologica  di  molti  passi  oscuri  e  controversi 
delln,  Divina  Commedia.  Saggio  di  L.  G.  Blanc,  tradotto  cou  aggiunta  di 
alcune  osservcmoni.  Suite  et  fin.  —  90  et  228.   Giovanni   Ricagni. 


PERIODIQUES  299 

La  Fioritura  epica  francese  nel  medio  evo,  e  la  Chanson  de  Roland 
comparata  coipoemi  italiani  che  traltano  la  rotta  di  Roncisvalle. — 
133.  Vincenzo  Pagano.  Sal  Volgare  Eloquio  e  mlla  Lingua  italiann. 
—  169.  Luigi  Rob&rto.  Sordello.  Commentaire  lu.storùiuc,  liltrrairc 
et  philosophique,  du  passage  célèbre  du  Purgatoire  où  Dante  in- 
troduit Sordel.  —  193.  Gherardo  Ghirardini.  Délia  Visione  di 
Dante  nel  Paradiso  terrestre.  —  334.  Ernesto  Monaci. /Z  Canzoniere 
ChigianoL.  VIII.  305.  Suite.  —  4i4.  Luigi  Gaiter .  H  Dialelto 
veneto  nel  secolo  di  Dante.  Examen  philologique  d'un  texte  vénitien 
du  XI Ve  s.  récemment  publié  {la  Cronaca  di  Raffaino  Caresini, 
tradotta  in  volgare  vencziano  nel  secolo  XIV .  ) 

G.   G. 

Rivista  di  letteratura  popolare.  Vol.  I.  fasc.  II.  • — P.  81. 
A.  de  Gubernatis,  Novelllne  di  santu  Stefano  di  Salcinaia. —  P.  87. 
F.  Sabatini,  Saggio  di  canti  popolari  romani  (suite).  Je  renouvelle- 
rai les  observations  que  j'ai  déjà  eu  occasion  de  faire  dans  mon 
compte  rendu  du  premier  fascicule  :  pourquoi  ne  pas  indiquer  les 
élisions  que  nécessite  la  mesure  du  vers  (p.  89,  chanson  26,  v.  2; 
ch.  30,  V.  3;  ch.  31,  v.  2;  ch.  35,  v.  1.,  etc...)??-  90,  ch.  33,  le 
vers  2  est  faux.  Gomment  le  rétablir?  Gomment  scander  le  vers  6  de 
la  ch.  37?  —  P.  97,  G.  Vavè,Antichi  Usi  per  la /esta  di  mezz'Agosto, 
in  Palermo  e  in  altri  luoghi  di  Sicilia.  —  P.  108.  C.  de  Puymaigre, 
Chansons  populaires  du  pays  messin.  P.  108  et  109,  les  deux  premiers 
vers  de  chaque  couplet  ne  doivent-ils  pas  se  chanter  deux  fois  ?  Ce 
qui  me  le  fait  supposer,  c'est  que  le  2«  vers  ne  rime  pas  toujours  avec 
le  4"=  et  avec  le  G«,  qui,  au  contraire,  se  correspondent  toujours  pour 
la  rime.  En  pareil  cas,  les  chanteurs  ont  généralement  pour  habi- 
tude de  faire  rimer  avec  lui-même  le  vers  sans  rime  en  le  répétant. 
P.  108,  les  deux  vers  qui  terminent  le  2«  couplet  ne  doivent-ils 
pas  le  commencer?  G'est  du  moins  la  place  que  leur  assignent  la 
suite  du  sens  et  la  nécessité  de  faire  rimer  entre  eux  les  vers  4  et  6. 
Pourquoi  ne  pas  indiquer  toujours  les  syllabes  qu'il  faut  élider  pour 
rétablir  la  mesure  (c.  1,  v.  5;  c.  2,  v.  6;  c.  3,  v,  1,  6;  c.  4,  v.  6, 
etc.),  et  les  cas  de  non-éUsion  (c.  4,  v.  1;  c.  7.  v.  4),  les  cas  où  la 
diérèse  est  pratiquée  (c.  4,  v.  4;  c  9.  v.  6),  et  ceux  oii  elle  ne  l'est 
pas  (c.  3,  V.  4)?  Un  Français  peut  n'avoir  pas  besoin  de  ces  indi- 
cations de  détail;  mais  comment  veut-on  qu'un  étranger  s'en  tire? 
P.  110,  c.  2,  il  fallait  noter  par  une  hgne  de  points  la  lacune  du 
3*' vers  à  terminaison  féminine.  P.  111,  on  voit  des  couplets  qui  ont 
tantôt  5  vers,  tantôt  6,  tantôt  7,  tantôt  8,  et  cela  sans  aucune  obser- 
vation de  l'éditeur.  P.  117.  Th.  Braga,  Litteratura  dos  conios  popu- 


300  PERIODIQUES 

lares  pnrhigueses.  —  P.  137.  A.  GiainaLudreu,  Safjgio  di giuochi  e  canti 
popolari  funciulleachi  (lelle  Marche.  —  P.  145.  Varietà.  —  P.  152, 
Bibliografia.  —  P.  157.  Periodici. 

A.   B. 


Giornale  di  filologia  romanza,  n"  1.  La  Rivista  di  filologia 
romanza  ay?ix\\.  cessé  de  iiaraître  en  octobre  1876,  l'un  de  ses  di- 
recteurs, M.Ernest  Monaci,a,  sur  les  instances  de  ses  amis,  repris 
à  son  compte  une  publication  du  même  genre,  intitulée:  Giornale  di 
filologia  romanza  (à  Rome,  chez  Heermann  Lœscher  ;  à  Paris,  chez 
Vieweg).  ha,  Revue  des  langues  romanes  est  heureuse  de  pouvoir 
souhaiter  la  bienvenue  au  nouveau  recueil,  qui  se  présente  d'ail- 
leurs sous  les  meilleurs  auspices,  assuré  qu'il  est  dès  à  présent 
de  la  collaboration  de  savants  tels  que  MM,  Ganello,  P.  Rajna, 
M.  Gaix  et  A.  d'Ancona.  Voici  le  sommaire  de  ce  premier  numéro. 
—  E.  Monaci,  Awertenza.  —  U.-A.  Canello,  Lingua  e  dialelto.  — 
P.  Rajna,  Estratli  d'una  raccolta  di  favole.  —  N.  Caix,  sul  Pro- 
nome. —  Varietà:  N.  Caix,  Etimologie  romanze;  E.  Molteni,  sul 
Libro  Reale  ;  A.  d'Ancona,  Fra  Guittone  e  il  sig.  Perrens. —  Ras- 
segna  bibliografica.  —  Bolletino  bibliograiico.  —  Periodici.  —  No- 
tizie . 

A.  B. 

Revistas  catalanas. —  Lo  Gay  Saber.  N.  III  (1  de  febrer). — 
P.  33.  F.  Maspons  y  Labrôs  :  la  Tonada  maravellosa {  Qùenlo  po- 
pular  irlandés).  Ab  lo  prétest  de  donar  à  coneixer  una  mostra  del 
llibre  de  legendas  y  tradicions  irlandesas  que  han  coleccionat  los 
escriptors  M.  Groker  y  M.  Keightley,  fâ  l'ilustrat  Sr.  Maspons  un 
estudi  comparatiu  que  res  deixa  pera  desitjar  al  mes  inteligent  en 
la  materia.  —  P.  37.  Damas  Galvet:  Marta.  Poesia.  — P.  37, 
A.  Garetâ  y  Vidal:  los  Carboners.  Poema  provensal  en  XII  cants, 
per  Félix  Gras.  Gontinûa  la  traducciô:  cant  segon.  —  P.  40.  Tomâs 
Forteza,  mestre  en  gay  saber  :  lo  Claveller.  Imitaciô  de  les  cansons 
popularsmallorquines.  Poesia, —  P.  40.  Maria  de  Bell-lloch  :  Viga- 
tansy  hotiflers.  Prossegueix  estanovela. — P.  43.  Agnade  Valldaura 
(pseudonim  de  la  Senyoreta  Na  .Toaquima  Santamaria):  lo  Fruyt 
de  Montcada.  Poesia.  —  P.  43.  Enrich  Franco  :  Edipo  Rey,  Tra- 
ducciô de  Sôfocles.  Gontinuaciô,  — P.  14,  F.  Pelay  Briz  :  la  Pinya 
d'or.  Gomedia,  etc.  Seguiment. — P.  47  :  Novas.  Entre  ellas  son  di- 
gnes d'especial  menciu  :  la  que  conté  lo  text  y  la  traducciô  catalana 
delà  bella  salutaciûdc  bon  any  qu'end rcssâ en  vers  alsseusamichs,. 
lo  distingit  poeta  dr  i'rovensa  Francesch  Vidal,  autor  del  Tamhou- 


PERIODIQUES  301 

rinaire  ;  y  la  que  parla  de  l'obertura  de  la  via  férrea  qu'iinoix  Es- 
panyaab  Fransa. 

N.  IV  (là  de  febrer).  —  P.  4y.  Manuel  MiUi  y  Fonlanals  : 
Notas  sobre  la  influencia  de  la  literatura  italiana  en  la  catalana.  Con- 
sisteix  en  la  versiô  catalana  fêta  per  la  redacciô  del  Gay  Saler,  del 
precios  treball  que  (  segons  en  altra  ocasiô  digu^rem  )  tant  rich  de 
datos  commodesten  son  titol,  e.>criguénostre  estimât  y  savi  mestre 
pera  festejar,  al  estil  d'italia,  las  bodas  del  literat  siciliâ  D^'D.  Jo- 
seph Pitre  ab  DaFrancîsca  Pilrano  (de  Palerrao). — P.  52.  Geroni 
Rossellô,  mestre  en  gay  saber:  h  Cantihl  segador.  Poesia. — P.  52. 
A.Careta:  los  Carhoners ,  etc.,  de  Gras.  Gant  ters. — P.  5i.  Frederich 
Soler,  meslre  en  gay  saber  :  l'Anell.  Poesia. — P. 55.  Maria  de  Bell- 
lloch:  Vigntatis  y  hotijiers.  Gontinuaciô. — P.  58.  Jascinto  Labaila:  Els 
Poetos.  Sonet.  — P.  58.  E.  Franco:  EdipoRey.  Trad.  de  Sofocles . 
Seguiraent. —  P.  60.  Gonrat  Roure:  Revista  dramâtica.  La  Contra- 
mestre,  drama  en  très  actes  de  D.  Frederich  Saler.  —  P.  62.  F.-P. 
Briz  :  la  Pinya  d'or,  etc.  Gontinuaciô.  —  P.  (34.  Novas:  Intéressant 
es  la  llista  de  las  20  obras  catalanas  qu'ofereix  le  Gay  Saber  à  ses 
suscriptors. 

N.  V  (  1  de  mars).  —  P.  62.  F.  Maspons  y  Labrôs  :  Quentos  i)o- 
pulars  viennesos.  S'ocupa  ab  fruyt,  com  sempre,  pera  la  lileratura 
popular,  del  opùscul  que  ha  escrit  lo  D''  Anton  Ive  ab  moLiu  del 
casament  de.Toan  Ive  y  la  senyoreta  Lorenzetto. — P.  68.Francosch 
Ubach  y  Vinyeta,  mestre  en  gay  saber:  Suspirs.  Poesia.  —  P.  69. 
A.  Careta  :  los  Carhoners,  etc.,  de  Gras.  Gomonsa  lo  cant  quart. — 
P.  70.  Margarida  Gaymaride  Baulô  :  Veu  de  Mare.  Poesia.  — 71. 
Maria  de  Bell-lloch  :  Vigatans  y  botifler s.  (loniinuaciù. —  P.  72. 
Gonstanti  Llonibart  :  Amor  ah  amor  se  paga.  Dolora  (Valencia).  — 
P  73.  Joseph  Fiter  è  Inglés,  etc.,  segueix  la  traducciù  del  Estudi 
histôrich-critich  sobre'ls  poefas  valencians  dels  segles  XIII.,  XIV y  XV, 
per  En  Rafel  Ferrer  y  Bigné,  tractant  de  Mossen  Jaume  Febrer,  En 
Dionis  Guiot  o  Guinot,  y  Mattfres  de  Bezeys.  —  P.  75.  Agnès  Ar- 
mengol  de  Badia  :  Intima.  Poesia  dedicada  à  N'Agna  de  Vall- 
daura. — P.  75.  E.Vidal  Valenciano  :  Bibliografia  :  Dos  Llibres  nous 
[Quadro  en  prosa  d'en  Joan  Pons  y  Massaveu,  y  Perlas  catalanas 
d'en  Artur  Masrieray  Golomer).  P.  76.  F.-P.  Briz  :  laPinya  d'or. 
Comedia,  etc.  Gontinuaciô. —  P.  78.  Curiositats.  Fundaciô  del  Cou- 
vent de  JesÛH.  (Barcelona,  1427).  Nota  antigua  que'n  fa  referencia. 
—  P.  79.  Novas. 

N.  VI  (15  de  mars). — P.  81 .  F.  Maspons  y  Labrôs:  Endevinallas 
pbpulars  francesas.  Notable  article  que'l  llibre  Devinnettes  ou  énig- 
mes populaires  de  la  France,  par  M.  Eugène  Rolland,  ha  proporcio- 
uat  à  dit  Sr.  Maspons  l'ocasio   de  demostrar  quan  intéressant  es 


802  PERIODIQUES 

l'estuili  que  ha  fet  no  sols  de  la  literatura  popular  catalana,  si  que 
també  de  las  d'altres  payssos  d'Europa.  —  P.  86.  Victor  Bala- 
iîuer,  mestre  en  gay  saber  :  Amorosa.  Poesia. —  P.  86.  A.  Garetâ  : 
los  Carboners,  etc.,  de  Gias.  Fi  del  cant  quart.  —  P.  87.  Damas 
Galvet  :  l'Anadaà  Recasens.  Poesia.  —  P.  88.  Maria  de  Dell-lloch  : 
Vigatans  y  botijlers.' ^es,mmeni.  — P.  91.  E.  Franco.  Edipo  Rey. 
Trad.  de  Sôfodes.  Continuaciô.  —  P.  92.  Francisco  Sabatini  :  Bi- 
hliografia  forana .  En  ella  l'inteligent  escriptor  italiâ  Sr.  Sabatini, 
director  de  la  Revista  di  letteratura  popolare  de  Roma,  dona  à  co- 
neixer  per  diversas  mostras  las  inspiradas  poesias  de  son  compa- 
trici  lo  difunt  artista  Praga,  que  conté  un  voium  titolat  «  Traspa- 
rensCj  Fantasma.  Versi  di  Emilio  Praga  [Torino,  1878).  »  —  P.  93. 
F.-P.  Briz:  la  Pinya  d'or.  Comedia,  etc.  Acaba  l'acte  pf". —  P.  95. 
Akiba  (Qûento  hébreu) .  —  P.  95.  Novas. 

La  Renaixensa.  N.  3  (15  de  febrer).  —  P.  97.  Quatre  Paraulasal 
Sr.  A.  E.,  periodista  de  Madrid.  Replica  à  algunas  apreciacions  con- 
trarias à  Gatalunya,  emitidas  en  lo  diari  laEpoca  del  14  de  janer.  — 

—  P.  102.  Guillem  M.  de  Brocâ:  dels  Bens  de  la  dona  en  lo  matri- 
tnoni  à  Catalunya,  y  en particular  en  la  comarca  de  Tarragona.  Estudi 
juridich  molt  intéressant,  redactat  ab  certa  precisiô  de  Uenguatge, 
([ue  demostran  en  son  autor  una  exactaconeixensa  de  la  llegislaciô 
catalana  y  de  sos  origens.  —  P.  111.  Emili  Vilanova  :  A  mon  amich 
R.  Falco.  Bestias  embalsamadas  (  Diàlechs).  Quadro  de  costums 
d'atractivola  lectura,  per  la  sua  animacio  y  per  la  veritat  dels  ca- 
racters  que  tant  be  dibuixa. — P.  119.  Francesch  Matheu  :  les  Pestes 
llatines  à  Montpeller.  Est  article  descriu  los  preparatius  pera  lo  gran 
concurs  y  festa  de  las  literaturas  llatmas  qu'ensemps  tindrânlloch 
proximament  en  dita  ciutat.  A  ellas,  essenthi  galanament  invitats 
los  cscriptors  catalans  per  nostres  germans  de  Provensa,  creyem 
no  deixarân  mos   compatricis  de  correspondt-erhi  com  se  mercix. 

—  P.  122.  F.  T.  A.  Associaeiô  catalanista  d'excursions  cientificas.  Es- 
posiciû  dirigida  per  aquesta  societat  al  Excm.  Sr.  Ministre  de  Fo- 
ment,  pera  que  l'Estat  subvencionés,  com  ho  ha  fet,  ab  8,000  pes- 
setas,  la  reparaciô  del  cclebre  monastir  de  Santa-Maria  de  Uipoll. 

—  P.  125.  Manuel  Milâ  y  Fontanals  :  Esperansa.  Reproduciô  do  la 
bermosa  poesia  qu'ab  aquest  titol,  lo  primer  dels  escriptors  cata- 
lans havia  ja  publicat  en  esta  Revue.— V.  126.  Jascinto  Verdaguer: 
A  mon  Deu.  Inspirats  versos  del  autor  del  poema  l'Atlàntida.  — 
P.  128.  Joaquin  M.  Bartrina  :  Poweto.'  Altrc  poesia.  —  P.  130. 
Bibliografia.  J.  Ixart  :  Quadros  en  prosa  per  Joan  Pons  Massaveu  ; 
(p.  132)  A.  Balaguer  y  Merino:  «  Petit  Romancero.  Choix  de  vieux 


PERIODIQUES  303 

chants  espagnols  traduits  et  annotés  par  le  Comte  de  Puymaigre,  mem 
bre  correspondant  de  l'Académie  royale  d'histoire  de  Madrid  et  de 
l'Académie  royale  des  belles-lettres  de  Barcelone  »  (p.  133);  A.  A.  P.  : 
Usi  popolari  per  lafestadi  Natale  in  Sicilia,  descrittida  Giuseptpe  Pitre. 
Criticas  favorables.  —  P.  134  Novas.  —  A  aquest  numéro  l'accom- 
panyan  ;  una  copia  del  quadro  al  oli  del  distingii  artista  I).  Joaquim 
Vayreda  las  Primeras  Calsas,  premial  ab  una  medalla  en  l'expo- 
siciô  de  Paris  de  1871  ;  y  la  continuacio  del  Llibre  de  coses  assenya- 
lades  per  foUeti. 

N.  4.  (28  de  febrer).  —  P.  137.  J.  Riera  y  Bertran  :  Motius  d'una 
tendencia.  Ço  es  la  de  la  renaixensa  del  art  à  Catalunya  à  la  vegada 
que  la  de  sa  literatura. —  P.  141.  J.  Narcis  Roca  :  los  Pahers  y  'Is 
primitius  Concellers  de  Barcelona.  Encara  qu'est  autor  no  ha  afegit 
nous  datos  als  ja  coneguts,  ha  sabut  condensar  la  materia  en  pro- 
porcions  mes  llegibles  qu'altres  traballs  seus  de  la  mateixa  natura- 
lesa. — P.  149.  Lluis  Domenech  y  Montaner  :  En  buscade  una  argui- 
tectura  nacional. 'Sota.hledisqiùsïciû,  perl'estudi  que  presuposaeu  son 
autor.  —  P.  161.  Autoni  Yilanova  :  Exposiciô  de  pinturas  à  Madrid. 

I.  Critica  de  las  obras  artisticas  alli  exposadas,  comensant  per  las 
d'assurapto  religiôs. — P.  165.  Thomas  Forteza,  mestre  en  gay  saber: 
Plor  d'esperansa.  Poesia.  —  P.  169.  Angel  Guimerâ,  mestre  en  gay 
saber  :  Joël.  Poesia.  ■ —  P.  171.  Pau  Bertran  y  Bros  ;  A  la  verge  de 
Montserrat.  —  P.  172.  Novas.  —  Va  adjunt  à  est  numéro  ademés 
del  foUeti  una  lamina  heliogrâfica,  copia  de  l'estàtua  en  bronzo  que 
représenta  à  Dante,  fêta  per  D.  Geroni  Sunyoi,  y  que  posscheix  la 
Exma.  Diputaciô  provincial  de  Barcelona. 

N.  5(15  de  mars).  —  P.  177.  J.  Pella  y  Forgas  :  Grans  exemples  : 

II.  La  Renaixensa  de  Hungria. —  Article  expositiu  del  renaixament 
politich-literari  de  dit  pays,  corapendiat  en  los  seguents  capitols  : 
Decadencia  y  centralisaciô .  Maria  Teresa.  Joseph  II.  De  1460  à 
1790.—  La  Jlenaixensa  literaria  politica.  La  revoluciù  francesa.  De 
1790  à  1815.  —  La  segona  renaixensa  literaria.  Kisfaludy.  Sandor 
Petoefi.  —  Segona  j-enaixensa  politica.  Kossuth  y  Deak.  1848  y  1867. 
—  La  Actual  Constituciô  de  Austria  y  Hungria.—  P.  199.  Francisco 
Manel  Pau.  Impressions  de  pare.  Quadro  intim.  qu'es  distingeix  per 
sa  naturalitat,  y  si  be  en  algun  lloch  es  un  poch  difus,  lo  final  es 
verdaderament  sentit.  —  P.  209.  Antoni  Vilanova  :  Exposiciô  de 
pinturas  à  Madrid,  II.  Continua,  ocupantse  dels  quadros  d'assumptos 
histôrichs.  —  P.  214.  Damas  Galvet.  Mallorca  cristiana.  CantXIV. 
Fragments.  Ho  son  del  poema  inédit  qu'esta  ultimant  est  di-;tingit 
poeta.  —  P.  223.  Jascinto  Torres  y  Reyatô  :  lo  Plany  del  rossinyol. 
Poesia. — P.  226  Joseph  Serra  y  Campdelacreu  :  l'Anell de prometatge. 


304  PERIODIQUES 

Pocsia.  —  P.  2»".  Consistori  del  Jochs  jlorals  de  Bareelona.  Compo- 
sicions  rebudas  en  secretaria  fins  al  13  de  mars.  —  P.  '228.  Novas. 
Cal  esmentar  la  que  dona  coneixensa,  de  la  copa  quels  Provensals 
pensan  regalar  als  Catalans.  —  Se  ha  repartit  ab  est  numéro,  un 
dibuix  à  la  ploma  del  artista  D.  Antoni  Fabrés,  pensionat  à  Roma 
per  la  Exma.  Diputaciô  provincial,  y  un  plech  del  folleti. 

N.  6  (31  do  mars).  —  P.  233.  Antoni  de  Bofarull:  la  Vnitat  de 
la  llengua  calalana  en  Catalunya,  Mallorca  y  Valencia.  Varias  son 
las  observacions  que  fa  l'autor,  ajudat  de  sa  reconeguda  compe- 
tencia,  pera  probar  son  tema  ;  empero  nos  sembla  qu'à  las  dife- 
rencias  que  s'observan  en  lo  catalâ  vulgar.  segons  las  encontradas 
en  que  's  parla,  podria  justament  calificarlas  de  dialectes.  De  tots 
modos,  voldriam  véurersovint  articles  tan  intéressants  com  aquest, 
en  las  planas  de  las  revistas  catalanas;  voldriam  poder  aplaudir  un 
despertament  de  l'aficiô  per  los  estudis  fiiolôgichs,  quai  ausencia 
nos  esplica  clarament  lo  perqué  qualsevol  catalanista  compétent 
se  veu  exposât  à  quedar  poch  menys  que  sens  lectors,  si  publica 
aqui  SOS  treballs  lingiiîstischs,  —  P.  241.  Johan  Montserrat  y 
Archs  :  la  Vinya  y  sos  inimichs.  I.  Los  sûlits  coneixements  que'l 
Sr.  Montserrat  posseheix  en  las  ciencias  naturals,  especialment  en 
la  botûnica,  recomanan  vivament  l'atenciô  dels  Catalans  y  Pro- 
vensals envers  aquest  estudi,  quels  sera  de  gran  profit,  ame- 
nassats  com  se  troban  à  la  vegada,  de  la  destrucciô  de  la  vinya  per 
lo  devastador  philoxera.  —  P.  246.  Antoni  Vilanova:  Exposiciô  de 
pinturas  à  Bladrid.  III.  Tracta  de  la  pintura  de  género.  — P.  250. 
Joseph  Rodoreda  :  Una  opiniô  sobre  l'estat  de  la  Tnûsica  à  Bareelona. 
Utils  observacions  pera  lo  progrés  del  art  musical  en  la  capital  de 
Catalunya.  —  P.  255.  Tomàs  Aguilo:  Sa  Pohila  del  Veguer. 
Poesia. —  P.  259.  Joseph  de  Letamendi  :  Ciencia  y  art.  Poesia  que 
satisfâ  nostre  desitj  d'anar  coneixent  las  ignoradas  composi- 
cions  en  vers  catalâ  del  D""  Letamendi.  —  P.  260.  J.SardûiJ. 
Tyndaris  (traducciô  de  l'oda  XVII  del  Uibre  I  d'Horaci).  — 
P.  261.  Artur  Gallard:  Plany.  Poesia.  — P.  263.  R.:  Teatre  catalâ. 
Critica  de  l'obra  dramâtica  d'en  Francesch  Ubach  y  Vinyeta,  la 
Ma  freda,  ultimament  estrenada.  —  P.  267.  Consistori  dels  Jochs 
Jlorals  de  Bareelona.  Composicions  rebudas  en  secretaria  fins  lo 
30  de  mars. — P.  269.  iVo «as.  Los  suscriptors  han  rei)Ut  ab  est 
numéro  una  copia  del  inspirât  quadro  de  D°  Francisco  Masriera 
la  Esclava,  premiat  en  l'ùltima  exposiciô  de  Madrid. 

Bareelona.  31  de  mars  de  1878. 

A.   B.\lagler  y  Merino, 


CHRONIQUE  305 

Société  d'Alliance  latine.  —  Le  Banquet  de  l'Alouette 
Montpellier,  Boalim,  1878;  in-8°,  32  p. 

liecueil  des  discours  et  des  toasts  prononcés  au  l)an(juet  de 
V Alouette,  le  26  mai  1878,  à  Montpellier.  Comme  textes  intéres- 
sants, nous  signalerons  les  toasts  de  MM.  Croisier  et  Duleix-An- 
sermez,  écrits,  l'un  en  patois  de  Saint-Triphon  (Vaud,  en  Suisse), 
l'autre  en  patois  d'Aigle  (même  canton).  ISous  signalerons  aussi, 
mais  non  pas  comme  un  modèle  de  courtoisie,  le  début  du  dis- 
cours de  M.  Mary-Lafon  :  «  Messieurs;  j'ai  reçu  deux  invitations 
pour  assister  aux  Fêtes  latines  :  l'une  de  la  Société  qui  a  t'ait 
beaucoup  de  bruit  dans  les  rues  {sic),  l'autre  venant  de  V Alouette. 
L'alouette  étant  la  première  qui  chante  en  monuut  vers  le  ciel 
et  qui  annonce  la  lumière,  j'ai  préféré  son  invitation,  et  me  voici  » 
Nous  devons  faire  observer  à  M.  Mary-Lafon  que  les  deux  invi- 
tations n'étaient  pas  exclusives  l'une  de  l'autre,  puistju'elles  éma- 
naient de  deux  sociétés,  non  pas  rivales  et  encore  moins  hostiles, 
mais  simplement  distincte^.  L'une  arbore  franchement  sa  cou- 
leur politique,  l'autre  n'en  veut  pas  avoir;  ce  qui  explique  qu'elles 
aient  agi  en  pleine  indépendance  l'une  de  l'autre,  comme  l'a  très- 
justement,  «et  sans  récrimination  »,  constaté  M.  Xav.  de  Ricard. 
M.  Mary-Lafon  aurait  dû  prendre  exemple  sur  lui  et  ne  pas  répon- 
dre à  une  politesse  par  une  épigrammc  d'ailleurs  assez  faible,  et  que 
rien  ne  moiive. 

A.    BOUCHEUIIÎ. 


CHRONIQUE 


L'impossibilité  où  nous  serions  de  condenser  dans  les  quelques 
pages  ordinairement  réservées  à  la  Chronique  le  Compte  rendu  du 
Concours  du  Chant  du  Latin  et  des  diverses  séancesou  réunions  qui 
l'ont  précédé  et  suivi,  nous  oblige  à  renvoyer  le  lecteur  à  la  relation 
spéciale  que  la  Société  fera  paraître,  avant  la  fin  de  l'année,  en  un 
volume  distinct  de  la  ^ev«e^Cette  relation  contiendra  les  discours 
et  les  rapports  de  MM.de  Quiutana,  Mistral,  Paul  Glaize,  de  Tour- 
toulon,  de  Lestaubière,  Laissac,  Léon  .Mares,  Roque-Ferrier,  Uon- 

1  Un  prospectus  fera  prouliuiiiein.j  nt  coiinailre  les  condiiions  de  sous- 
cription. 

23 


306  CHRONIQUE 

nadieu,  Antonin  Glaize.  liieutaud;  lesljrindes  elles  pièces  de  poésie 
de  MM.  Ai^uilù,  LIorente,  Matheu  y  I-ornells,  Ppdrell,de  Bornier. 
Aubanel,de  Berluc-Perussis.  Lanj^îade,  de  Toulouse-Lautrec, Ctia- 
baneau,  Azaïs,  Boacherie.  Roumieux.  Lafor;,'ue,  Tavan.etc;  le 
Chant  de  la  race  latine  An  M.  Alecsandri,  et  de  nouiljreux  extraits 
des  œuvres  couronnées,  dues,  comme  on  le  sait,  à  MM.  Balaguer  y 
Merino,  Bonaparie-Wyse,  Constans,  l'abbé  Paul  Guillaume,  Marti 
y  Folguera,  Achille  Mir,  etc. ,  etc. 

La  Société  se  propose  de  joindre  à  ces  divers  documents  les  let- 
tres d'adhésion  qui  lui  ont  été  adressées  à  l'occasion  du  concours-du 
Chant  du  Latin,  par  les  principaux  philol02;uos  ou  romanisants  de 
l'Espaççucdu  Portugal,  de  l'Ilaiie  et  de  la  Roumanie,  et  notamment 
par  MM.  Milà  y  Fontanals,  Pelay  Briz.  Victor  Balaguer. Nuiiez  de 
Arce,  Castelar,  E.  Monaci.  Ascoli,  le  prince  Ruspoli.le  séna- 
teur Sabarrini,  l'ablié  Spéra,  le  marquis  de  Mendez  Léal,  ambassa- 
deur de  Portugal:  Urechia,  Hasdeu.  Obédénare,  Bratiano,  Emile 
Costine>cu,  Michel  Biéal,  Gaidoz,  Picot,  etc. 

Par  exception,  nous  donnerons  seu  ement  dans  \îi  Revue  \à  liste 
des  prix  et  des  mentions  du  Chant  du  Latin: 

Une  cocpe  artistiqoh  et  symbolique 
donnée  par  don  albert  de  quintana  y  combis, 

A  M.  Alecsandri,  à  Mircesti  (Roumanie),  pour  le  Cantul  gintei 
latine  (le  Chant  de  la  race  latine),  (langue  roumaine). 

Un   rameau  DE  LAURIER   EN  VERMEIL 
DONNÉ  PAR   LE  PaRAGE 

A  Don  Franc.  Math^-u  vFornells,  à  Barcelone  (Espagne),  pour 
une  pièce  de  poésie  catalane  :  lo  Cant  del  Llati. 

Mentions 

I.  A  un  anonyme  de  Tergu-Muresinlui  (Transylvanie),  jiour 
une  pièce  de  poésie  roumaiT.e  :  Cantul  Lutimdui  (signé  0  Montana 
din  Transilvani a); 

II.  A  un  anonyme,  à  Paris,  pour  une  ])ièce  française  :  Chant  du 
Latin  (épigraphe  :  Sursùm!)\ 

m.  A  M.  Albert  Arnavielle,  secrétaire  de  la  maintenance  de 
Languedoc,  à  Alais  (Gard),  pour  une  pièce  en  dialecte  cévenol  : 
Tahb,  cant  de  raço; 

IV.  A  don  Miguel-Antonio  Caro,  correspondant  des  Académies 
royales  de  langue  et  d'histoire  de  Madrid,  membre  honoraire  de 
rAcadéinio  des  belles-lettres  de  Santiago  (Chili),  à  Santa-Fe-de- 
Bogota  (Nouvelle-Greiuide, — Amérique  méridionale),  pour  une 
pièce  de  poésie  espagnole:  el  Himno  del  Latino; 

V.  A  M.  Auguste  Chastanet,  à  la  Bachellerie  (Dordogne).  pour 
une  pièce  de  poésie  en  dialecte  périgourdin:  lou  Chant  dau  Latin; 

Vi.  A  M.  Girolamo  Donatl.  à  Pérouse  (Italie),  pour  une  pièce  de 
po  sie  italienne  :  il  Canto  del  Latino; 

VII.  A  M.Félicien  de  Prades.  pour  une  pièce  de  poésie  en 
langue  romane  du  Xll*-'  siècle  :  lo  Cant  del  Latin; 

VIII.  A  M.  Auguste  Fourès,  à  Castelnaudary  (Aude),  pour  une 
pièce  de  poésie  en  dialecte  du  Lauraguais  :  le  Cant  delLatî; 

IX.  A  M.  Aimé  Giron,  au  Puy-en-Velay.  pour  une  pièce  de 
poésie  française  :  le  Cliant  des  Latins; 


CHRONIQUE  307 

X.  A  M.  Alexandre  Langlade,  à  Lansarpçuos  (Ilérauli),  pour  une 
pièce  de  poésie  lanmiodoclenno  ^sous-dialccte  de  Montpellier  et  de 
ses  environs):  lou  Gant  daio  Latin; 

XI.  A  M.  Giovaniies  Matliis,  à  Gènes  (Italie),  pour  une  pièce  de 
poésie  rumonsclie  (diulectn  de  la  Haute  Ensçadinc,  canton  des  Gri- 
sons, —  Suisse)  :  VOvel  clella  Bernina  et  il  cuors  délia  vita  umauna ; 

XII.  A  .M.  Cesare  Paîadini.  à  Milan  (Italie),  pour  un  pièce  de 
poésie  gallo-italienne  (dialecte  milanais)  ;  la  Leggenda  di  popol 
latin  ; 

XIII.  A  M.  Ubacli  y  Vinyeta,  à  Barcelone  (Espagne),  pour  une 
pièce  de  poésie  catalane  :  lo  Cant  del  Lati. 

Mentions  particulières 

I.  A  M.  le  baron  de  Meyronnet  de  St-Marc,  à  Aix-en-Provence, 
pour  :  la  Race  latine,  oratorio,  suivi  du  Chant  des  Latins.  Les  vers 
latins  sont  dus  à  M.  A.-B.  Crousillat  (de  Salon);  les  vers  italiens, 
à  M.  R.-P.  Tasso;  les  vers  espagnols  et  catalans,  à  des  anonymes; 
les  vers  provençaux,  à  M.  J.  Gaut,  d'Aix-en-Provence;  les  vers 
roumains,  à  M.  Georges  Sion,  secrétaire  général  île  la  Société  acadé- 
mique roumaine,  à  Bucarest  (Roumanie); 

II.  A  MM.  Aimé  Giron  et  Gyrille  Fiston,  pour  les  Petits-Fils  des 
douze  Césars,  satires  françaises-latines  (Imprimé)  ; 

III.  A  MM.  Charles  Gros  et  Laborde,  à  Montpellier,  pour  les  pa- 
roles et  la  musique  d'une  Cansou  latina  exécutée  pendant  les  Fêtes 
latines. 

Mentions  pour  la  musique 

I.  A  M.  Borel,  à  Aix-en-Provence,  pour  la  musique  de  la  Race 
latine,  oratorio  de  M.  le  baron  de  Meyronnet  de  Saint-Marc  ; 

II.  A  M.  Marc  Burty,  à  fjyon,  pour  la  musique  de  la  pièce  le 
Chant  des  Latins,  par  M.  Aimé  Giron  (no  IX  du  Concours  de 
poésie); 

III.  A  Don  José  Rodoreda,  à  Barcelone  (Espagne),  pour  la 
musique  d'un  poésie  catalane  intitulée  lo  Cant  del  Llati. 

MM.  André,  archiviste  du  département  de  la  Lozère,  et  Maurice 
Faure,  tous  les  deux  membres  de  la  Société,  ont  été  récemment 
nommés  officiers  d'académie,  par  M.  le  Ministre  de  l'instruction 
publique. 

*  * 

Travaux  sur  la  langue  d'oc  ancienne  et  modekne.  Publications 
CATALANES,  PROVENÇALES  ET  LANGUEDOCIENNES.  —  Œuvres  de  Mar- 
guerite d  Oijngt .  xyrieare  de  Poleteins ,  publiées  d'après  le  manuscrit 
unique  de  la  bibliothèque  de  Grenoble,  par  E.  Philipon,  avec  une  in- 
troduction de  M,  C.  Guigue.  Lyon,  Scheuring;  in-S",  xxxix-93  pag. 

La  Vida  de  S.  Amador,  texte  provençal  inédit  du  XIV^  siècle,  p)u- 
blié  diaprés  le  manuscrit  de  la  Bibliothèque  de  Marseille,  par  V.  Lieu- 
taud,  bibliothécaire  de  la  ville  de  Marseille.  Marseille,  Lebon,  1878; 
in-S",  23  pages,  avec  un  fac-similé. 

Le  Fieus  de  Mons.  leoesque  et  conte  al  Chastel  de  Orest.  Document 
du  XIIP  Siècle,  commenté,  annoté  et  publié  fSLV  J.  Brun-Durand.  Va- 
lence, 1878; in-8". 


•?0S  CHROMQT'i: 

Keaiircflon  (^l'abbé).  Études  landaises.  Essai  de  philologie  lan- 
daise. Déconrrrte  archéologique  à  Pis.'^Ofi.  Études  archéologiques  de 
.1/.   le  docteur  Léon  Sorbets.    Pau.  Menetière;  in-H",  79  pages. 

Alpli.  Ho(|UP-Ferrier.  Z'iî  des  infinitifs  en  langue  d'oc.  Paris. 
Maisonneiivo;  in -S",  Ul  pai^os.  (  flxtrail  de  la  Revue  des  langues  ro- 
manes. ) 

Michel.  Le  Z euphonique  et  son  équiralcnt,  l S  douce  en  2^rovençal  et 
en  français.  Toulon.  Ij;iLM-('nl,;  in-8',  50  pnues. 

Gombette-LaltoureliG  (de).  Roman  et  Patois.  Gaillac,  Du2:ourc  ; 
in -8",  xYn-152  pages. 

Un  pom  de  flors.  A  /as  iVo/ya.s- c«/afa?2a.s.Barcelona,  Volliada  ùel  dia 
6  de  niaig  de  1878.  Imprenla  d,'  la  Reiiaixensa  ;  in-i2,  r34])age.':. 

Charmant  recueil  de  poésies  catalanes,  dues  à  M. M.  Basscgoda, 
Bertran  y  Bros,  B.  Ferrer.  Franquesa  y  Gomis,  Arthur  Gallard. 
Genis  y  Aguilar,  Ange!  Giiimprà,  Marti  Folmiera,  Masriera  y  Go- 
lonier,  Francescli  Mathèu,  Monlserrat  y  Arclis,  Manel  I^au,  F-'icû  y 
Campamar,  Pons  y  Massaven,  Rahola.  Reventos,  Roca  y  Roca. 
Riera  y  Bertran,  Sardâ,  Torres  y  Reyato  et  Ubach  y  Vinyeia. 

V.  Balaguer.  Trajedias.  Su  autor  en  ver.'io  catalan.  Victor  Bala- 
guer.  Sus  traductores  en  verso  castellano,  Ruiz  Aguilera,  Nunez  de 
Arce,  Rétes,  Ferez  Echerarria.  Barrera,  Llorente.  Rossellô.  Biedma, 
Sierra  1/  C'/zave-?.  Segunda  edicion.  Madrid,  Fortanet;  in-12,484  pag. 

Francesch  Matheu.  La  Orns'-'i  de  l'espiga .  Barcelona.  A.  Verda- 
guer;  in -12,  6  pages 

Fr.  Ubacli  y  Vinyeta.  La  Ma  frrda,  comedla  tragica  en  très  actes  ?/ 
en  vers.  Barcelona.  Rafel  Ribas;  in-S»,  80  pages. 

Masriera  y  Colomer.  Poeslas premiadas  en  lo  cerfamen  literari  del 
centre  cutalanesch-recreatiu  de  1S78.  Barcelona,  Imprenta  de  la  Re- 
nuixensa;  in- 12.  1G  pages. 

Gayeta  Vidal  y  Valenciaiio.  lo  Mon  invisible  en  la  literatura  ca- 
talana  y  lo  Viatjefet  al  in  fer  n  per  Père  Porter.  Barcelona^  Estampa 
delà  Renaixcnsa:  in-S",  78  jinges. 

Homenage  al  beato  Raimundo  Lulleu  el  sexto  centenario  de  lafunda- 
cion  del  colegio  de  Miramar.  Pal  ma.  Gelabert;  gr.  in-8°,  172  patzes. 
Contient  de  nombreuses  poésies  en  catalan,  sur  ou  en  l'honneur 
de  Raymond  Lull 

J.  Maluquer  "Viladot,  Teatre  eatalà,  estudi  histôrich-cntich, premiai 
ab  menciô  honorifica  en  los  Jochs  florals  de  1876."  Barcelona,  Estampa 
de  la  Rcnaixensa;  in-12,  62  pages. 

Joseph  Maria  Valls  y  Vicens.  Diseurs  llegit  en  la  f esta  de  repar- 
ticiô  de  premis  del  centro  catalanesch.  Barcelona,  Imprenta  de  la  Re- 
naixensa;  in-12,  16  pages. 

Œuvres  complètes,  languedociennes  et  françaises,  de  l'abbé  Facre,  jm- 
hliées  sous  les  auspices  de  la  Société  pour  l'étude  des  langues  romanes. 
Montpellier  G.  Goulet  (  tom.  I''"  );  in -So^  233  pages. 

Éflition  préparée  pai-  MM.  Léon  Gandin  et  Alph.  Roque-Fenùer; 
l'étude  sur  Favre.  sa  vie.  sa  langue  et  ses  poésies  (1r'  partie  du 
tome  Jei),  sera  distribuée  avec  le  dernier  volume  des  Œuvres  com- 
plètes. 

Melchior  Biilhé>.  Prumiè  Bouquet  (1838-1842),  Flouretas  demoun- 
tagno,  poésies  languedociennes,  avec  un  Avant- Propos  àe  .Mariu';  Bour- 
relly,  et  des  Notes  sur  l'orthographe  et  la proiiotniation  languedociennes 
(  traduction  française  en  regard)  ;  ourrage  couronné  aux  Jeux  fiovaux  des 


CHIIONÎQUE  309 

Fète.-^  latines  de  Montpellier.  INInn' ,ifllier.   Imprimerie  centrale  du 
Miili:  in-1'2,  455  pa^os 

P  Gaii?«en,  la  Fieiro  de  Chnmboiirigaxd,  pouèmo  coumique  en  cinq 
cants,  emb'nn  afo;(.<-j«-e/)a!/.s  d'Albert  Ariiavielo.  Alais,  brugiieirolle: 
in-l"2,  iv-55  pages. 

Marins  Bourreily,  Poesiaprorenxal  dedicada  à  la  Asociacion  literaria 
de  Gerona.  con  motii-o  del  certt'unen  de  1877.  Gérons  ;  in-4'',  4  paiîe.< 
(texte  provençal  '^  traduction  cî^paunole  ). 

Bonaparte-AVysp.  Très  Ramhiai prourencau  (la  Vilo  d'Aiyo-Morto, 
la  Soiditudo,  Un  Deo  gratias )  Monnt-peiiè,  Einpremariè  centralô 
d('iLi  Miejour;  in-8",  25  pages  (  Extrait  de  la  Renie  des  langues  ro- 
manes. ) 

I3onapaite-"\Vyse,  <S'e/>)/e«^noî<rt.  .Vnfibo  Marchand:  in- ■",  12  p. 
Voir  le  compte  rendu  de  M.  Espagne.  Revue.  15  avril  1878.  ])   197. 

Bonaparte-Wyse.  Magalouno.  odoleto  dedicado  à  Mounsegne  de 
Cabrièro,  eresque  de  Mount-peliè .  Isclo  de  la  Magalouno,  in-4",  avec 
la  musique,  du»-  .à  M.  Louis  Laml  ert:  12  pages.  (Montpellier,  Im- 
primerie centrale  du  Midi.) 

Camille  Laforgue,  .4  milord  Guilhèm-C.  Bonaj^arte-Wf/se  :  la  Bou- 
miano.  Mount-peliè,  Empremariè  centralô  dau  Miejour  (  Hamelin 
fraires);  10-4".  14  pages:  avec  la  musique,  due  à  M.  Loins  Lambert. 
Extrait  du  présent  numéro  de  la  Revue  des  langues  romanes. 

\J Angles  à  l'Oiipera,  ouhreto  per  S . ■  . .  illuslrado  per  Falip.  Carcas- 
souno,  Pouecli;  in-8o,  16  pages,  figures 

A  de  Gagnaud,  Pèr  lou  hateja  dùu  felihrihoun  de  Saut- Clament. 
Ais,  Remondet-Aubin;  in -8°.  1  feuille. 

A.  Fourès,  le  Vincedou  à  la  hatesto  de  pouls.  Montpellier.  Impri- 
merie cent^'ale  du  Midi;  in-8'*.  3  patres. 

Cette  pièce  de  poésie  a  paru  l'abord  dans  le  no  de  février  de  la 
Revue  des  langues  romanes. 

A.  Fourès,  le  Cap  de  Voultari  à  Toidousn.  sonnet.  Castél-nou- 
d'Arri.  Chavard:  in-4°.  4  pages. 

Louis  i^esjardins,  le  Chant  du  Gaulois,  aux  Damex  félihresses,  sonnet. 
S.  L.  N.  D.  (.Montpellier,  mai  1878);  in-S".  4  jjages. 

La  quatrième  page  contient  une  traduction  en  langage  de  Tou- 
louse, par  M.  Germain  Fournier,  secrétaire  de  la  maintenance 
d'Aquitaine,  du  sonnet  aux  dames  félihresses. 

C.  Gros,  3Iagaloiina.  jxiroidas  de  C.  (iros.  félibre  dau  Clapas; 
musica  deBéren-d.  Montpellier,  Boehm;  in-4o,  4  pages. 

Pièce  de  poésie  lue  par  l'auteur  à  Ma^uelone,  lors  de  la  première 
réunion  du  Forage,  le  18  novembre  1877. 

Jules  Bessi,  Notices  sur  Segurana.  héroïne  niçoise.  Nice,  Gilletta: 
in-8o,  30  pages. 

Contient,  p.  29,  une  pièce  de  1G  vers,  en  langage  de  Nice;  elle 
est  suivie  d'une  ode  en  français.  Le  tout  signé:  Jules  Bessi,  et 
daté  du  15  août  18132, 

Babret.  Cansou  de  la  haquo  de  Capestang.  Rigaoudoun,  paraulos  e 
musiquo  de  Babret  (Auguste).  Béziers,  Perdraut,  S.  D,  Une  feuille 
in-4''  à  2  colonnes. 

La  vache  est  l'animal  symbolique  de  Capeslana.  Voici  le  refrain 
de  la  chanson  : 

Garas  1  Garas  ! 
Mouud''.  la  baquo  pa>so. 


310  CHRONIQUE 

Badas  !  Badas ! 
Mrs  aonmens  fazes  plasso. 
Donnas  I  donnas!  donnas! 
Qiiaouqiie  biel  liard  onfouasso  ; 
Balhas  !    balhas  !  balhas  ! 
Quant  saio  de  binasso  !  !  ! 

Les  douze  couplets  qui  accompagnent  ce  refrain  sont  parfois 
assez  risqués  En  revanche,  on  ne  saurait  leur  contester  une  cer- 
taine verve  rustique.  L'auteur  peut  faire  mieux. 

B.  Artou,  Ouhretto  proureiKialo .  Leis  Embarras  de  Marsiho  (Imita- 
tien  de  Boileau).  Marsilio,  Bernascon;  in-8o,  xiv  pages. 

Imitation  en  provençal-marseillais,  de  la  sixième  satire  de  Boi- 
leau. L'auteur  met  en  souscription  une  traduction  en  vers  de  la 
Jnconde  de  Lafontaine. 

Alexandre  PlazoUes,  VOuherturo  d'uno  mission  à  Moularés.  Cas- 
tres, Abeilhou:  in-12,  13  pages  (au  bénéfice  des  pauvres,  50  cen- 
times). 

Société  d'' alliance  latine .  Le  Banquet  de  l'Alouette.  Discours  et  toasts 
de  MM.  V.  Hugo,  E.  ('astelar,  etc.  Paris:  Sandoz  et  Fischbacher; 
in-S",  82  pages. 

La  part  de  la  langue  d'oc,  dans  ce  recueil,  consiste  :  1°  en  un 
toast  en  prosede  M.  Croisier  (St-Tréphon,  canton  de  Vaud,  Suisse); 
2»  un  toast  en  prosede  M.  Dulex-Ansermez  (Aigle,  canton  de  Vaud. 
Suisse);  3°  un  l»ria.le  en  prose  provençale  de  M.  Félix  Gras  ;  4"  un 
brinde  en  vers  provençaux  {la  Patrio),  de  M.  Piemy  Marcelin: 
5o  une  poésie  languedocienne  (  la  Lauseta),  due  à  M.  A.  Langlade: 
'3°  une  poésie  languedocienne  (  la  Mariano  latino),  par  lA.  Auguste 
Fourès. 

A.  de  Lamothe,  le  Proscrit  de  la  Camargue,  Paris.  Blériot:  in-12, 
303  pages. 

Contient  divers  cbants  et  fragments  de  chants  populaires  ou  re- 
ligieux en  provençal. 

Troubat.  Plume  et  Pinceau,  études  de  littérature  et  d'art.  Paris, 
Liseux;  in-l(j. 

Quelque.<-unes  des  études  de  ce  volume  concernent  des  auteurs 
et  des  sujets  appartenant  au  midi  de  la  France. 

A.  R.-F. 


Le  gérant  responsable  :  Ernest  HAMELIN, 


TABLE  DES  MATIÈRES 

DU    CINQHIÈMK    \(U,rME    DE    LA    DEUXIÈME    SÉRIE 


DIALECTES  AisClEISS 

Poëtes  lyriques  catalans  (MiLA  v  Font^vnals) ôH 

L"Evang-ile    selon    saint  Jean,    en  provençal    du   Xlll"    siècle. 

(W.  FoERSTER. ) ...' 105-167 

Extrait   d'une    traduction    catalane    de  la  Légende  dorée  (Cha- 

BANEAU    ) •_>U9 

DIALECTES    MODERNES 

Etudes  sur  l'histoire  de   quelques  mots  romans.    (Al.\rt.)..  .  .  5 
Lettres  à  Grégoire  sur  les  patois  de  France  (suite) .   (Gazikk).  .  .    9-237 

Euignies  populaires  siciliennes.    (Di  Martino.) 12G 

UR  des  intinitifs  eu  langue  d'oc    (Alph.  Eoque-Fkrrier.).  .  .  180 

Trois  Poésies  milanaises  de  Carlo  Porta.  (PlEïRo  Preda.) 213 

Un  Alléluia  pascal  en  Velay,  (V.  Smith.) 217 

Poueisias  dioisas  de  Guste  Boueissier.  (Jules  Saixt-Rémy.).  .  .  .  2'21 

Lou  Pech  Trinal.  (Clair  Gleizks. ) 27 

Béumouno.  (Théodore  Aubanel.) 28 

Lou  Garda-Mas  (lin) .  (A.  Langlade  .  ) 29 

Lous  Bords  dau  Lez.  (Lydie  ue  Ricard .  ) 84 

Le  Vincedoi'    (A.  Fourès  .  ) 85 

A  Trench  dauba.  (Ubach  y  Vinyeta.) 87 

Lous  Pouleits.  (A.  Chastanet.  )    91 

A  Jidi  Gaussinel,  après  la  legido de  soun  Ahdona.  (A.  Espagne.).  133 

Donec  grains  eram,  etc.,  traduction  provençale.  (V.  Liedtaud.)  134 

—          —         traduction  languedocienne.  (A.  Espagne.).  135 
A-n-Anfos  Tavan,  après  uno  legido  à' Amour  e  Ploiir{A.  Arna- 

vielle) 158 

Lous  Dans  Canards  sauvages.  (Gabriel  Aza'is.) 191 

/  Latin  cl  America.  (A.  de  Gagnaud.) •  .  190 

Cantul  gintei  latine.  (Alecsandri.) 202 

La  Cant  del  Llatl.  (Fr.  Matiietj  y  Forneels.) 2(î4 

A  la  ratjo  latino.  (  F.  Mistral.)   2i5(; 

Galahrun  (  Léontine  GoiRAND.  j 270 

Luno  pleno.  ;  Théodore  Aubanel.) • 272 

La  Boumiano.  (Camille  Laforgue.) . .  275 

A  la  Mar  latina.  (  Lydie  DE  Ricard.) 279 

A  Mount-peliè.  (  A  Roux.) 280 

Lou  Branle  de  las  Trelhas.  (  Louis  Iîoumieux.) 281 

L'Autouna.  ( Charles  Gros.) 285 

BIBLlGCiRAPHlE 

Le  Brédaire  d'amour,  de  Matft-e  Ermengaud,  pulilié  par  la  Société 

archéologique  de  Béziers.  (C.  Ciiabaneau.  ) .  .  . 38 

De  la  Poesia  provenzal  en  Castilla  y  en  Léon,  par  V.  Balaguer  . 

(C.-J.  T.) 44 


31?  TABT.R    DKS    .MATIERES 

Recueil  de  rerxio))s  prorençales  puur  l'enseigne  nient  dit  français  en 

Provence,  .>'  partit.-,  par  un  professeur.  (A.  Espagne.) 40 

Counteis  e  Viorlas,  per  Au.i^.  Cliastanet.  (  C.  Tiiabaneau.  ) 48 

Corrertions  du  textt-  d'E.'^tienne  de  Fougères,  addenda  à  l'article 

dé  M.  Boutlu-rie.  { W.  FoERSTER.^^ 92 

Lo  Dona1~ pr)ensuU  und  laa  R'izox  de  Indiar,  ])ul)lit'spar  M.  Sten- 

gel.  { C.  Cii.vii.wi'UiT.) ] :î8 

Sèptentrioun,  pèr  W.-C.  Bonaparte- Wysr.  (A.  Espagne.) \'M 

Cataloifue  de  la  bibliothèque  de  Marxeille,  ourrayes   relatif!^  à  la 

Prorence,  par  M.  V.  Lieutaud.  (A.  Espagne.^ l'.tK 

Congrès  urchéoloiiiqtn'  dp  France.  XL!!!*-'  session.  (Alpli.  Iîdque- 

Ferrier.) •  .    .    .    -lu-i 

Le  Seizième  Siècle  eu  France,  par  ^l?d.  I  )arni:  sti-ter  et  liatzfeld. 

;  A.  Boucherik.  ' 2(12 

La  Prise  de  Damiette  en  1219,  publiée  par  M.  Paul   Mivor.   (C. 

Chahan'eau.' ....    2H7 

Die  Prorenzalische  Blumenlese  der  (.'higiana,  ^nhW^.  i)ar  M.  Edm. 

Stengcl .  (C .  Chabaneai;  .  ) 289 

Société  des  Anciens  Textes. —  Aiol,  dianson  de  geste-,  publiée 

par  MM.  J.  Normand  et  G.  Rayaaud.  ;A.  Boucherie.) 290 

Sprachliches  ans  romœnischen  Volksnuerchen,  par  J.-U.  Jarnik..  . 

(C.  Chauaneac.) ■ • 29;} 

Un  document  inédit  sur  Laurc  de  Sade,  par  do   P>erliu-rérus'^:s. 

(A  .  RotîUE-FERRIER) 29.-} 

Almanach  niçois  y^out  1X76.  par  .T.  Bessi.  (A.  Hoque-Fkrkikr.      29,j 

PÉRjODiQUEs.  —  Romunia.  (A.  Boucherie.  ). ...    , 4'.l-99-203 

Archivio  glottolofjico  italiano .  (A.   Boucherie.   . -t'I 

La  Rcnaixensa.   (Balaguer  y  Merixo) .    14!!-;-J02 

Lo  Gai)  Saber.  (Id. ) .  ■ ••......    148-300 

Romanische  Studien.  (C.  Chabaneau. ) lôO 

Zeit.-ichriftfiir  romanische  Philologie.  (CoNSXANs,  Chabaneau  i  150-295 
Journal  officiel  de  lo.  République  française.  (A  Espagne  ).  .  .  ■  .  1")1 
Mémoires  de  la  Société  des  lettres,  sciences  et  arts  de  VAveipon. 

(A.  Ruque-Ferrier.) ' 2(t4 

Archio  filr  dus  Studium  der  neueren  Sprachm  and  Literaturen. 

(C.  Chabaneau.).  297-2iw 

Il  Propugtiato'-e.  (C.  Chabaneau.) 298 

Rivista  di  letteratura  popolare.  (A.  Boui  herie.) 2'.t9 

Giornale  difilologia  romanza.  (A.  Boucherie.) -înO 

Société  d'Alliance  latine. —  Le  Banquet  de  VAlouette.  (A.  BtH'- 

CHERl  k) •    .        305 

Chronique in  1-153- .00-305 

Table  des  niatici(,-s 311 


REVUE 


DBS 


LANGUES  ROMANES 


DIALECTES   ANCIENS 


CANTIQUE  PROVENÇAL  SUR  LA  RÉSURRECTION 


Ce  cantique,  dont  je  dois  la  copie  à  l'obligeance  de  M.  Bou- 
cherie, est  tiré  du  ms.  fr.  1058  (anc.  7310)  de  la  Bibliotliôque 
nationale,  où  il  suit  immédiatement  (folio  176,  vo)  une  ver- 
sion du  chant  bien  connu  sur  sainte  Marie  Madeleine,  sen- 
siblement plus  rajeunie  que  celles  qui  ont  servi  de  base  à 
l'édition  donnée  de  ce  chant  par  M.  Bory  en  1861  '.  A  la  un, 
on  lit:  «  Le  tout-  couppié  à  l'original  de  messire  Anthoyne 
Longi  de  Roquevayre,  prieur  de  Guiller  au  dioseze  d'Aix  et 
prédicateur  au  lieu  de  Mallemort  en  l'année  mil  six  cens 
et  seze,  et  selom  som  dire,  a  douse  cens  ans  que  le  tout  fut 
composé  en  se  [sic)  mesme  langage  et  rime  provensale.  Fait 
par  moi  Pelluret,  vicaire  de  Mallemort.  » 

M.  Damase  Arbaud  a  publié  {Chants  populaires  de  la,  Pro- 
vence, 1,  49)  une  pièce  qui  ressemble  beaucoup  à  la  nôtre  ;  non- 
seulement  le  sujet,  mais  encore  la  mesure  du  vers,  la  compo- 
sition de  la  strophe,  le  refrain,  sont  les  mêmes.  Seulement, 
tandis  qu'ici  les  trois  vers  de  chaque  strophe  riment  en- 
semble, il  n'y  a  chez  M.  Damase  Arbaud  que  les  deux  pre- 
miers. Le  troisième  y  est  toujours  en  a,   pour  rimer  avec   le 

'  J'en  donnera»   moi-même  prochainement   une  nouvelle  édition,  pour 
laquelle  j'utiliserai  la  copie  du  ms.  1058. 
2  G'est-â-dire  le  chant  sur  sainte  Madeleine  et  notre  cantique. 


6  DIALECTES   ANCIENS 

refrain.  Des  deux  côtés  d'ailleurs,  la  rime,  toujours  mascu- 
line, se  réduit  souvent  à  Tassonance. 

Tout  porte  à  croire  que  notre  cantique,  sans  avoir  l'anti- 
quité que  lui  prêtait  messire  Anthoyne  Longi  en  1616,  datait 
déjà,  alors,  de  plusieurs  siècles.  On  peut,  sans  témérité,  en  faire 
remonter  la  composition,  comme  celle  de  la  cantilène  sur 
sainte  Madeleine,  jusqu'aux  environs  de  l'an  1300. 

Je  n'essayerai  point  d'en  rétablir  la  forme  primitive,  dont 
la  copie  du  vicaire  Pelluret  s'écarte  sans  doute  assez  souvent. 
Je  me  liornerai  à  quelques  corrections,  surtout  orthographi- 
ques, régularisant  l'emploi  de  Vm  et  de  l'n,  substituant  l'an- 
cien 0  au  moderne  ou^,  etc.  Les  leçons  du  ms.  seront  tou- 
jours, du  reste,  indiquées  en  note. 

On  remarquera,  st.  4,  la  prosthèse  du  v  dans  oogner;  st.  10, 
la  forme  va  pour  o  (vo);  st.  4,  son  pour  lor;  st.  2,  9,  10,  17,  H 
pour  lor  [illis);  st.  16,  siu  [sien]  pour  soi;  st.  19,  sias  pour  etz. 
Ces  provençalismes  ont  pu  être  introduits  par  les  derniers  co- 
pistes; mais  il  n'y  aurait  non  plus  rien  d'impossible  à  ce  qu'ils 
remontassent  à  l'original  même.  —  Je  n'ai  pas  corrigé  ceau 
{=eel),  stance  16,  parce  qu'on  a  des  exemples  anciens  le  cette 
insertion  de  l'a  entre  e  et  l.  Tel  est  peal  =  pel  dans  la  nou- 
velle de  PeireG-uillem  (Bartsch,  Crtres?./)roy.,  261,  6).  P<iur  dau 
(st.  11),  aujourd'hui  c?dM  =  fl?et(,  génitif  de  l'article,  cf.  Diau, 
iau,  miau  [meum),  etc.,  dans  S  te  Agnès  et  ailleurs.  Les  formes 
aqueUos,ellos  (st. 21), sont  déjà  dans  Blandin  de  Cornouailles  et 
d'autres  textes  du  même  temps.  C.  C. 

SABBATO  SANCTO  PASCH. 

Quando  cantatur  Regina  cœli  letare,  ail. 

Alleluya,  alleluya,  alleluya, 
Alleluya-  ! 

I,  Quand  Jésus  Christ  fon  tormentat 
Et  de  la  crous  desclavellat, 

*  .Te  laisse  crous  (si.  1.2)  parce  que  celle  forme  (et  de  même  fOus  := 
votz,  etc.)  be  trouve  déjà  dans  !a  Vie  de  saint  Honorât  et  uvAres  toxtf's  de 
Provence  de  la  même  époque.  Il  est  probable  que  l'ou  y  est  diphlhongne. 
Cf..  en  provençal  moderne,  pôu  =  pot,  tôuti  =tot,  etc.  —  2  En  toutes  let- 
tres; partout  ailleurs,  en  abrégé. 


CANTIQUE   PROVENÇAL  7 

En  lo  *   sépulcre  fon  pausat. 
Alleluya  ! 

II.  [Mas]  Pons  Pilats  et  Caiphas 
Ben  fort  fasion  garda[r]  lo^  vas, 
Que  non  li  fossa  '  deraubat. 
Alleluja  ! 

III.  Quand  Jésus  ton  ressuscitât, 
Las  gardas  foron  fort  troblas; 
Dison  *  qu'en  •'  dorment  fon  raubat. 

Alleluya  ! 

IV.  Las  Marias  '^  en  grand  tremor 
Au  sépulcre  venon  en  cors  ^ 

Fer  vogne[r]  Christ  son  *  sauvador. 
Alleluya  ! 

V.  Auses,  Segnors  ^,  miracle  gran  : 
-De  Jésus  Christ  sias  certans 
Lo  jor  *"  de  Pascas  sens  engan  — 
Alleluya  !  — 

VI.  Ressuscitât  es  verament, 

Car  rangi[l]  tôt  certanament  <^ 
A  las  Marias  i*  clarament  — 
Alleluya  !  — 

VIL  Lur  a  dich  et  manifestât  : 
«  Jésus  Christ  es  ressuscitât  ; 
En  Galilea  *^  es  annat.  » 
Alleluya  ! 

VIII.  Las  très  Marias**  clarament 
An  caminat  certanament, 
Sonvengudas  ''  tôt*®  prestament. 
Alleluya  ! 
IX.  En  Jérusalem  an  trobat  '" 

1  lou.—  -  lou.—  '^  fousse.—  ''  disom.—  ^  em.—  «  Marias.—  '  cours. 
-«  som.  —  ■'  segnours.—  '"  lou  jour  —  "  tout  certenament  —  i-  marios 
-  ^^galilee.  -  '-  marios.  —  *■  vengudos.  —  "'  tout.  —  ^Hroubnt. 


8  DIALECTES    ANCIENS 

Los  apostols  tos  '  estonnas  ; 
Aqui  li  an  annonciat  — 
AUeluya  l  — 

X.  De  Christ  lo-  ressuscitament. 
Manifestât  II  an  doussament 
Que  rangi[l]  li  a  dich  certament  '  — 
Alleluja  !  — 

XI.  Que  Jésus  es  ressuscitât, 
Dau  sépulcre  s'es  ennanat, 
Tôt*  aisso  dis  en  veritat. 
Alleluja  ! 

XII.  Los  apostols  ''  gauch  an  agut  ; 
Ambe  "  Sant  Peire  sont  vengus, 
Tos  ensems  '  parlant  de  Jésus. 
Alleluya  ! 

Xni.  E  Sant  Peire  si  lur  a  dich  : 

«  Anem  '^  veire  tost  Jésus  Christ, 
Seguem  lo  prest,  aisso  es  pron  dich.  » 
Alleluya  ! 

XIV.  Magdalena^  s'en  vent  tot^"  prest 
Dins  lo  "  jardin  per  lo  *-  vezer; 
Tocar  lo  ^^  vou  a  som  plaser  '*. 
Alleluya  ! 

XV.  Jésus  [Christ]  prest  se  reviret  ; 
Ella'°  ben  fort  lo  "^  regardet. 
Si  li  dis  et  li  commandet  :  — 
AUeluj^a  !  — 

XVI.  «  Maria '^,  non  mi  toques  pas 

Ni  pau[c]  ni  pron  '**,  ben  va  saclias, 
Car  au  ceau  non  siu  *^  pas  monta[t|.  « 
Alleluya  ! 

Hous  aposloustous.  -Hou.—  -^ certanament.—  >tout.—  ''lousaposlous. 
—  >>  enbe.  -  '-tous  ensens  —  «  anen.—  '•  Magdaleno.—  '"  tout.  —  '*  lou. 
_*2  lou.  —*■■■'  lou.  —  'i  pleser.  -  i-'  ello.—  "'  lou.  —  ^'  Mario  —  '«  pruun  — 
19  siou. 


CANTIQUE   PROVENÇAL  9 

XVII.  As  Apostols*  el  a  parlât, 

Et  Sanct  Thomas  1»  es  arribat 
Et  li  a  donat  -  a  tos  ■'  la  pas. 
Alleluya  ! 

XVIII.  «  Vejas,  Thomas  \  lo  mieu  costat  % 
Veyas  mos  pes,  mas  ^  mans  veyas; 
Mescresent  estre  non  vulhas  '.  )> 

Allelnya  ! 

XIX.  Tliomas  **  respond  a  son  ^  segnor  '": 

«  Mon   Dieu'-,  vos  '-  sias  mon  Sauvador, 
Ressuscitât  en  grand  honor'^.  » 
Alleluya  ! 

XX.  «  — |Apr]es,  Thomas'*,  que  m'as  tocat'" 
Et  mas  plagas  ^^  as  maneiat, 

Tu  m' as  cregut  en  veritat.  » 
Alleluja  ! 

XXI.   a  Aquellos  que  non  mi  vejran 
Et  fermament  en  mi  crejran 
Benauroses  "  elles  seran  ***.  » 
Alleluya  ! 

XXII.  Preguem  '^  lo  -"  paire  et  lo  ^'  fils 
Que  mande  son--  sant  Esperit 
Et  nos-^  meta-^  en  Paradis. 
Alleluj-a  ! 

'  apostous.  —  2  dounat.  —  '  tous.—  ''  thoumas.—  ■>  lou  miou  constat.  — 
'^mes.—  ''voulhas.—  >^Thoumas.—  ^som—  ^"segnoiir.—  '*  diou.—  ^'vous 
—  ' I /lonour. —  '*  Thoumas.  —  '-  toucat.  —  •'■  plagnes.  —  ''  bensey- 
roiises.  —  '8  serarn.  —  ^'' preguen.  —  -"lou.  —  ^i  iou.  —  -^ som.  — 
^'  nous.  -  -''  mette. 


DIALECTES  MODERNES 


NOËL  LANGUEDOCIEN  INÉDIT  (?) 


Je  dois  la  copie  de  ce  noël  à  l'obligeance  de  M.  Boucherie,  quiu 
bien  voulu  le  transcrire  pour  moi  du  ms.  fr.  13173,  P  205,  de  la 
Bibliothèque  nationale. 

G.  Ghabaneau. 


I.  Une  joine  fillette, 
Pregant  Dius  un  mati 
Auprès  de  sa  couchette, 
Cujet  s'esturmenti*, 
Quan[t]  un  juine  moussur 
Intret  dins  sa  crambette 
•  Per  li  fa  serbiteur^. 

II.  N'agés  pou*,  11  dis,  belle, 
Cresés  me  souloment  ; 
Bous  resterés  pieucelle 
Après  Tenfantomen. 

lou  soui  Tembassadour  * 
Per  bous  pourta  noubelle 
Que  Diou  bous  fay  l'amour. 

III.  Bous  ses  del  pal  la  fille 
Et  la  reine  del  cel, 
Despei  que  Diou  s'abille 
De  car  dins  bostre  pel  ; 

•  Le  même  qaeslrementi.Vof.  Rayuouardot  Sauvages. —  -Prononcez 
serbitur.  —  ^  Ou,  ici,  est  diphthongue.  C'est  un  affaiblissement  de  ou=s 
ao  (paor,  paur,  pou).—  ''  Ms.  embassadeur. 


LANGAGE    DE    ST-MAURTCE-DE-L  EXIL  H 

Et  bous  e[s]poutissés  ' 
Lou  dragon  qu'entourtille  ^ 
Lous  homes  ^  sous  lous  pés. 

IV.  Tout  lou  monde}s'affanne 
A  bous  dressa  d'autas  ; 
Lou  sant  et  lou  proufane 
Couront  tous  à  grand  pas, 
Per  bous  ouffrir  d'encens, 
Corne  a  la  bien  aimade 
De  Dious  et  de  lais  *  gens  *. 


NOTES 

SUR  LE  LANGAGE  DE  SAINT-MAURICE-DE  l'BXIL 

(Isère) 


Ce  dialecte  n'a  jamais  été  écrit,  et  il  est  difficile  d'en  dé- 
terminer l'orthographe.  Afin  de  faciliter  Fintelligence  de  la 
pièce  qui  précède,  je  vais  tâcher  d'en  donner  une  idée;  aupa- 
ravant, il  est  peut-être  nécessaire  de  dire  quelques  mots  du 
pays: 

Saint-Maurice-de-l'Exil,  canton  de  Roussillon  (Isère),  est  un 
petit  village  (fomposé  de  trois  ou  quatre  hameaux,  formant  en- 
semble une  commune  de  mille  habitants  environ.  Le  village 
est  à  1,200  mètres  du  Rhône,  entre  les  stations  des  Roches  et 
du  Péage  (  chemin  de  fer  Paris-Lyon-Méditerranée). 


*  Eapoutir  =  écraser,  proprement  mettre  en  bouillie  (puis,  pultis). 
—  2  Ms.  entoustille.  —  ^  Ms.  houmés.  —  ■^  Pour  las.  Prononciation  du 
Quercy,  du  Rouergue,  d'une  partie  de  la  Provence,  etc  ,  etc.  Voy.  Ro- 
que-Ferrier,  des  Formes  de  l'article  '-n  langue  d'oc  (Revue,  X,  254).  — 
^.Gette  piècii  est  suivie  dans  le  ms.,  qui  est  du  XVI IP  siècle,  du  fa- 
meux noël  des  Bohémiens  {Nautres  siam  très  hooumians,  etc.),  qui  a  été 
souvent  réimprimé,  par  exemple  dans  les  Variétés  religieuses  (1860), 
p.  114. 


12  DIALECTES    MODERNES 

Les  vingt-deux  communes  du  canton,  sauf  quelques  va- 
riantes, ont  à  peu  près  le  même  langage.  Cependant  il  j  a  des 
expressions  singulières  dans  quelques  villages  ;  ainsi  on  dit  : 
(Tancoui,  pour  aujourd'hui;  vorendré,  pour  maintenant. 

Dans  l'arrondissement  de  Vienne  et  dans  presque  tout  le 
département,  on  se  comprend  réciproquement,  malgré  la  diffé- 
rence de  l'accent  et  de  quelques  expressions. 

A  Moidieu,  canton  sud  de  Vienne,  les  habitants  disent,  en 
l)arlant  de  leur  village  : 

A  Moidi,  iqui  van  i  mîzon  de  trou  de  cièr  cueme  de  soulouc 
(  à  Moidieu,  là  où  l'on  mange  des  morceaux  de  viande  gros 
comme  des  lampes,  calèu). 

A  Saint-Maurice,  on  dirait  :  A  Mrndsé,  iquiet  van  i  mîjon  de 
trou  de  char  cueme  de  choulâ,  mais  avec  un  accent  très-diflfé- 
rent. 

Aux  Roches-de-Condrieu,  l'idiome  est  très-harmonieux;  il 
se  prête  admirablement  à  la  versification,  et  les  expressions 
sont  douces  et  agréables  ;  on  dit: 

Onte  vaïtse  ?  (  Où  vas-tu  ?  ) 

Vetse,  fé  esquiglié !  (Vois,  j'ai  glissé!) 

A  Saint  Maurice  : 

—  Van  vétse  ? 

—  Vatse,f  écoula  f 

Prononciation.  —  Toutes  les  lettres  se  prononcent  avec 
l'accent  français,  sauf  dans  les  cas  suivants  : 
L'o  a  deux  sons  différents  : 

Le  premier  est  bref  dans  les  verl)es  do  la  première  conju- 
gaison à  l'infinitif: 

Omo,     chanta,    allô,    plourù,     trouva,    etc. 
Aimer,  chanter,  aller,  pleurer,  trouver,  etc. 

Il  indique  aussi  le  participe  : 

.ré  chanto,  fé  omô,  j'é  plourù,  etc. 
La  prononciation  est  longue  dans  : 

Apôtrou,  Cotrou,    incore,    consona,    quoque,    etc. 
Apôtre,  l'autre,  encore,  consonne,  quelque,  etc. 
L'e  sans  accent  est  toujours  muet ,  sauf  lorsqu'il  est  pré- 
cédé d'un  M.  Ainsi  on  dit:  persévérance,  au  lieu  de  persévé- 


LANGAGE    DE    ST-MAURlCE-l)E    L  EXIL  13 

rance;  vierge,  verge,  per,  au  lieu  de  vierge,  verge,  pèr  ;  d'ail- 
leurs, l'accent  indique  si  Ve  est  forme  ou  ouvert. 

OU  a  deux  prononciations  :  la  française  d'abord  ;  l'autre,  qu'il 
faudrait  entendre  pour  la  saisir,  indique  le  pluriel  dans  l'ar- 
ticle làu  (les).  C'est  encore  l'accent  qui  le  détermine. 

Il  se  prononce  également  dans  quelques  substantifs: 

LoU  roussignôu,  lok  roussignôu. 
Le  rossignol,    les  rossignols . 

Il  remplace  1'^  muet  dans  l'indicatif  des  verbes  :  Je  chàntou, 
fomou,  je  hogliou,  je  travagliou,  etc. 

6'^^' joue  un  grand  rôle.  Il  est  presque  impossible  d'en  saisir 
le  son,  même  en  l'entendant:  à  peine  Vu  se  fait  sentir,  à  peine 
Ve  se  prononce,  ce  qui  donne  un  son  intermédiaire  difficile  à 
expliquer.  Cette  diphthongue  se  rencontre  fréquemment;  elle 
remplace  ot  le  plus  souvent.  Uiglie  se  prononce  comme  feuille, 
fille,  etc. 

Le  nom  de  Mireille  (  Muereglie  ]  offre,  comme  prononcia- 
tion, les  trois  cas  principaux  de  ce  que  j'ai  dit  ci-dessus  :  Mue, 
re,  glie;  les  deux  derniers  é  sont  muets. 

Les  anciens,  pour  les  pronoms,  disaient:  lou  man,  lou  tan, 
lou  san,  lou  noùtrou,  lou  voutrou,  lou  gliour. 

Ma  mère  disait  :  loîi  miénou,  loù  tsénou,  lou  siénou,  lou  noù- 
trou, loùvoùtrou,  loù  gliour;  ce  qui  se  dit  encore.  Mais,  au  fé- 
minin, elle  disait  :  la  mià,  la  tsa,  la  sia,  etc.,  et  on  dit  généra- 
lement: la  miéna,  la  tséna,  la  siéna,  etc. 

Toutes  les  consonnes  se  prononcent  comme  en  italien,  mais 
les  diphthongues  n'ont  qu'un  son. 

Dans  certains  de  nos  verbes,  Var  de  l'infinitif  se  change 
en  0,  lequel  est  prononcé,  à  peu  de  chose  près,  comme  Vo  du 
mot  so?"^."  omô,  aimer;  chanta,  chanter;  allô,  aller;  trouva, 
trouver;  devuenô,  deviner;  ruémo,  ruminer. 

Dans  d'autres  il  est  remplacé  tantôt  par  yé  et  tantôt  par  é  : 
baglié,  donner;  dansié,  danser  ;  chassie,  chasser  ;  lessié,  laisser; 
beneyé,  bénir  ;  netteyé,  nettojer  ;  seyé,  faucher  ;  mouché,  mou- 
cher. 

Dans  les  verbes  en  i,  Vr  se  supprime  également:  on  dit 
figni,  finir;  vegni,  venir;  retegni,  retenir,  etc. 


T4  DIALECTES   MODERNES 

Les  conjugaisons  en  oir  donnent:  oare ,  voir;  apercevrc, 
apercevoir;  pouére,  pouvoir,  etc.,  etc. 

Un  mot  de  prosodie  :  You  et  l'a  s'élident  ;  ils  remplacent  W 
muet  du  français.  La  prononciation  exige  que  l'on  appuie  sur 
la  syllabe  pénultième  : 

Ex.:    Lou  Ronou  etsin  rueban  que  bian  long  se  dépleyé. 

On  considère  comme  muette  la  dernière  syllabe  de  la  pre- 
mière personne  du  pluriel  du  présent  de  rindicatif  : 

Ex.:  Pendant  qui  se  proumenon 

Ne  venon. 

11  en  est  de  même  à  la  troisième  personne  du  pluriel  de  l'im- 
parfait de  l'indicatif  : 

Ex.:  Moù  magnon  groùsseyiovaw 

Brififova». . . 

Et  dans  les  cas  suivant  : 

Ma  mère,  sinta  fena 
Etplena... 
Je  vou  lou  boglion  en  cent  où  muela 

Ailleurs  on  suit  les  règles  ordinaires  du  français. 

Maurice  Rivière. 


MOU  DERA  COUCON 

IDIGLIE 

A    MA   FIGLIE 

Madàma  M.  F.  M 

I  per  tsuet  que  se  dévertoglie 
Quella  flotta  de  soie  joglia. 
Si  moù  magnon  an  z'â  la  tbuoglie, 
Per  tsuet  aran  bian  travaglia. 

Mon  père  m'ayié  dsuet  : 

—  Puetsuet  ! 
Je  se  content  de  tsuet, 
Car  t'ésse  éto  bian  sajou  : 
Te  faré  de  magnon, 

Mignon  ! 
Per  tsuet  et  sans  partajou. 

T'éré  vélaCaro, 

Aro 
Doù  viérou  de  Bero, 

MES  DERNIERS  COCONS 

IDYLLE 
A    MA    FILLK 

Madame  M.  F.  M. 

C'est  pour  toi  que  se  dévide —  cette  jolie  flotte  de  soie.  —  Si  mes 
vers  ont  eu  la  feuille,  —  pour  toi  ils  auront  bien  travaillé! 
,  Mon  père  m'avait  dit  :  —  Petit,   —  je  suis  content  de  toi,  — 
car  tu  as  été  bien  sai^e  :  —  tu  feras  des  vers  à  soie,  —  mii^non!  — 
pour  toi  et  sans  partage. 

Tu  iras  vers  la  Carré,  —  à   coté  —  des  friches  de  Béraud,  — 


16  DIALECTES  MODERNES 

Per  amasso  ta  fouoglie  : 
Ampouogne  ton  grand  sa. 

Ah  !  ra, 
Tant  pis  si  te  te  mouoglie. 

Ma  mère,  sinta  fena 

Et  plena 
De  bonto  :  por  ma  pena 
Ina  once  aile  bettuet 
Pâ  couvo,  dsan  la  pàta, 

Adràta, 
In  ma  dsan  soù  tetuet 

Per  loù  fére  épegli. . , 

—  Jogli, 
Cueme  de  fleur  de  gli  ! 
Eran  alla  proumâre, 
Si  lou  papié  greglia, 

Baglia 
Per  la  mère  Revâre. 

Vé  netra  pipignére 
Mouriére, 

A  toute  le  pragniére 

Je  coulôvou  loù  juet  ; 

Charja  de  ma  farjuena 
Mià  pluena, 

J'adsuesien  derejuet. 


pour  cueillir  ta  feuille  :  —  prends  ton  grand  sac. —  Ah  !  ça,  —  tant 
pis  si  tu  te  mouilles  '. 

Ma  mère,  sainte  femme,  —  et  pleine  —  de  bonté  :  pour  ma  peine, 
—  une  once  (de  vers  à  soie)  elle  mit  —  dans  le  chiffon,  —  adroite- 
ment, —  couver  un  mois  dans  son  sein  - 

Pour  les  faire  éclore. . . —  Jolis,  —  comme  des  fleurs  de  lys,  — 
ils  étaient  à  la  première  [mue]  —  sur  le  papier  découpé,  —  donné 
'-  par  ma  mère  ^. 

Vers  notre  pépinière  —  [de]  mûriers,  — après  toutes  les  siestes, 

*  Voir  les  notes  à  la  p.  23. 


MOU    DERA    COUCON  17 

Qu'éran  couvar  de  roùse 

Moussoùse  : 
Per  z'èllou  i  boune  choùse. 
En  arruevan,  d'abor, 
Plan  plan,  je  gliôu  mécliôvou, 

Bagliôvou 
Fouoglie  où  miâ,  rôuse  ou  bor. 

Vé  Glioùre,  pueruelo, 

Doù  lo 
Qu'habuete  Gnuiecoulo, 
J'amassovou  de  grome  ; 
I  n'en  mancove  po  : 

Te  po 
Que  lou  magnon  groù  Tome 

Per  fére  sa  méson  ? . . . 

— Veson  ! 
Que  se  bette  eu  préson  ! . . . 
Apre,  vé  la  Couiratta 
Je  courrien  araché, 

Charché 
La  rustsica  mourjatta  ; 

Et  pessan  vé  le  Froclie, 

Po  loche 
Je  me  bettove  en  morche, 
Per  allô  dérouclié 


—  je  dépouillais  les  brindilles  ;  chargé  de  mon  petit  sac  — rai- plein, 

—  j'apportais  [encore]  des  rejets 

Qui  étaient  couverts  de  roses  —  mousseuses;  —  pour  eux,  c'est 
une  bonue  chose.  — En  arrivant  d'abord,  —  doucement  je  mé- 
langeais, —  [et]  donnais  —  teuilic  au  milieu,  roses  au  bord  '•. 

Là-bas,  vers  le  mas  de  Lioure.  —  du  côté  —  qu'habite  Nicolas, 

—  je  ramassais  du  chiendent: — il  n'en  manquait  pas  !  —  N'est- 
ce  pas  —  que  le  ver  à  soie  l'aime  beaucoup 

Pour  faire  s:-,  maison  ?  —  [Joli]  ver  —  qui  se  met  en  prison  ! . . . 

—  Après,  vers  la  (louiratte,  —  je   courais  arracher,  —  chercher 

—  la  mourjatte  rustique  =. 

Et  puis  vers  les  Fràches,  —  alerte,  — je  me  méfiais  en  marche 


18  DIALECTES  MODERNES 

In  grand  fé  de  briyiére, 

Van  yiére 
Où  mià  delloù  rouché. 

Loù  z'angardon  bian  druet, 

Adruet 
J'allovou  où  boun  andruet 
Illo  vé  Ro  loù  quorre  ; 
Car  per  ancabano, 

Mono, 
1  n'en  fa  de  z'amborre. 

Moù  magnon  groùsseyiôvan, 

BriflEbvan, 
Gliôu  mouron  s'allonjôvan, 
Cueme  igniayé,  mou  Dsé  ! 
Dessi  le  z'étagére 

Légère, 
De  pertout  s'apondsè  ! 

Alor,  i  n'en  faglié 

Baglié 
(Per  iquian  éfouglié 
Loû  mourié  délia  plagne): 
Doù  grand  plan  sa  per  jour, 

Toujour 
Prâsa  aile  z'ébaragne. 

Si  loù  rouché,  le  grise 
Larmise, 

—  pour  aller  extraire  —  une  charge  de  bruyère  —  poussée  —  au 
milieu  des  rochers^. 

Les  petits  échalas  alignés,  —  prestement  —  j'allais  au  bon  en- 
droit —  les  chercher  là-bas  vers  le  Rhône  ;  —  car  ,  pour  encaba- 
ner,  — mes  amis,  — cela  donne  de  l'embarras  '^. 

Mes  vers  à  soie  grossissaient,  —  briffaient,  —  et  leurs  nez  s'al- 
longeaient. —  Comme  il  y  en  avait,  mon  Dieu  !  —  Sur  les  étagères 

—  légères,  — de  partout  il  en  sortait: 

Alors,  il  en  fallait  —  donner  —  [  de  la  feuille  ]  —  (  et  pour  cela 
effeuiller  —  les  mûriers  de  la  plaine  )  :  —  deux  grands  pleins  sacs 
par  jour,  —  toujours —  prise  aux  branches  basses. 

Sur  les  rochers,  les  lézards  —  gris,  —  à  l'abri  de  la  bise, —  font 


MOr   DERA    COUCON  19 

Airôuri  délia  bise, 

Fan  bian  moins  de  trafuet 

Que  loù  magnon  que  briffon, 

Et  rifflon 
La  fouoglie  à  grand  gourjuet. 

—  Bertoula,  de  Condrié, 

Courié 
Acheto  de  mourié 
Per  n'amasso  la  fouoglie  : 
Où  me  fcsié  dono 

Tourne 
Lou  migé  dsan  le  bouoglie. 

«  Dsi  !  pitsité  chânîglié, 

Guenîglié, 
Que  resseimble  inâ  fîglié, 
Quein  tou  màgnon  ein  sa, 
Onte  té  qui  vein  béré  ? 

Révéré, 
Itô  dsin  quô  grein  sa  ?  » 

Mai  non,  mon  bio  savan  ! 

I  van, 
Meno  per  loù  davan, 
En  poucission  ohé  Feja  : 
Se  dessio  vé  la  Fon, 

Où  fon 
Délia  derâre  leya. 


bien  moins  de  bruit  —  que  les  vers  à  soie,  à  la  quatrième  mue, — 
mangeant  —  la  feuille  avec  voracité'. 

—  Bertholat,  de  Gondrieu,  —  courait —  acheter  des  mûriers  — 
pour  en  ramasser  la  feuille  :  —  il  me  faisait  damner, —  retourner 
les  aliments  dans  les  entrailles  : 

('  Dis  !  petite  chenille,  —  guenille,  —  qui  ressembles  à  une  fille. 

—  quand  tes  vers  à  soie  ont  soif,  —  où  vont-ils  boire?  —  Rivière, 

—  est-ce  dans  ce  grand  seau  *  ? 

Mais  non,  mon  beau  savant  !  —  ils  vont, —  conduits  par  les  pre- 
miers, —  en  procession  chez  Feyat,  —  étancher  leur  soif  vers  la 
fontaine,  —  au  bout  de  la  dernière  allée  '•*. 


80  DIALECTES    MODERNES 

Pendant  qui  se  proumenon, 

Ne  venon 
Loù  déjassié.  Ne  prenon 
In  poù  de  sarpouluet  : 
Ne  n'en  frotton  le  planche 

Suet  blanche 
Que  la  char  de  pouluet. 

Point  deflàpou,  ampeja. 

Louja 
Ere  groù  bian  mija  ; 
(Imuet  drajeye,  gniuet  vache, 
Grniuemé  point  de  trouvo 

Crevo 
Que  pouyian  fére  tache. 

Pà,  ne  plasson  aile  douce 
Le  trousse, 

Si  loù  bord  le  pli  groùsse  ; 

Ne  betton  per  calo 

In  bouquiet  de  briyiére 
Per  pouere 

Tegni  dsuessuet  dsuelo. 

Si  le  trousse  i  gropîglion, 

S'arpîglion. 
Dsé  !  cueme  i  s'éjarmîglion 


Pendant  qu'ils  se  promènent,  —  nous  ùtons — leurs  détritus.  — 
Nous  prenons  —  un  peu  de  serpolet,  —  nous  en  frottons  les  plan- 
ches, —  aussi  blanches  —  que  la  chair  de  poulet. 

Point  de  |  vers  à  soie  j  flétris,  collés.  —  La  litière  —  était  bien 
dévorée; — ni  muscardines, —  ni  lèpres,  —  non  plus  pointde  trou- 
vés —  crevés,  —  qui  pouvaient  faire  tache'". 

Puis  nous   plaçons  avec  précaution  — les  trousses,  —  les  plus 
grosses  sur  les  bords;  —  nous  mettons  pour  les  caler —  un  bouquet 
de  bruyère,  —  afin  de  —  les  tenir  deçà,  delà. 
Sur  les  trousses,  ils  grimpent,  —  s'attachent.  —  Dieu  !  comme 


MOU    DBRA    COUCON  21 

En  charchan  se  placié  ; 
Pessan  chocun  se  range, 

S'arango 
Per  vitou  coumaucié . 

I  poson  glioù  z'attache  : 

Per  tache 
Dsin  jour,  gliou  cor  se  cache 
Où  zié  doù  kirioù. 
La  soie  se  devertoglie, 

Vucroglic 
Dsan  gliou  paluct  souyioù. 


INVOUCACION 

Dsuevuena  Mère,  ô  Sinta  Vierge, 
Vous  m'  éde  toujour  beneyia  : 
Paro  moù  magnon  délie  merje 
Doù  ra  tsèulà  dell'  oùteyia. 

Etandâ  voutra  man  puessànta 
Si  la  méson,  dsan  mon  granâ; 
Qu'a  choque  troussa  joùgnuessanta 
De  coucon,  n'aje  in  plan  pana. 


ils  se  trémoussent  — en  cherchant  ii  se  placer;  —  puis  chacun  se 
range,  —  s'arrani^e,  —  pour  commencer  bien  vite  . 

Ils  posent  leurs  attaches.  —  Pour  tâche  —  d'un  jour,  leur  corps 
se  cache  —  à  l'œil  du  curieux.  —  Leur  soie  se  dévide,  —  tout  au- 
tour [se  place  j  —  dans  leur  palais  soyeux  ", 

INVOCATION 

Divine  Mère,  ô  Sainte  Vierge!   —   vous    m'avez  toujours  béni: 

—  Préservez  mes  vers  à  soie  des  souris,  —  des  rats  de  tuile  et  des 
coups  de  chaleur*-. 

Étendez  votre  main  puissante — sur  la  maison,  ilansraon  grenier  ; 

—  qu'à  cha([ue  trousse  jaunissaaLt  de  cocons  —  il  y  en  ait  à  pleins 
panier?  *3. 

2 


22  DIALECTES    MODERNES 

OFFRANDA 

Enûn,  dedsan  voutra  chapella 
Imblaman  j'cra  vous  pourto 
La  troussa  chousia  la  pli  bella, 
Où  pié  de  voutroù  sint  z'ôuto. 

—  Chanto,  découcounoùse 

Joujoûse ! 
Chanto,  débouretoùse  : 
Le  grome  sont  gargniuet, 
Le  mourjatte  sont  plene, 

Me  fene, 
De  coucon  à  pignuiet. 

N'ampliron  lou  lancié. 

Où  sié 
Guéman  n'éron  dansié. 
Chanto,  découcounoùse ! 
AUon,  déboureto  ! 

Chanto  ! 
Chanto,  débouretoùse  !... 

Mourice  Revare 
Dsuejon,  15  jugliot  1877. 


OFFRANDE 

Enfin,  dans  votre  chapelle,  —  humblement  j'irai  vous  porter—' 
la  trousse  choisie  la  ])lus  belle,  —  au  pied  de  vos  saints  autels. 

Chantez,  décoconneuses  —  joyeuses  !  —  Chantez,  débour- 
reuses:  —  le  chiendent  est  garni;  —  les  mourjattes  sont  pleines, 
—  1  Mesdames],  de  cocon  à  poignées. 

Nous  en  remplirons  un  drap  ;  —  dans  l'aire,  —  gaîment,  nous 
irons  danser. — Chantez,  décoconneuses  ! — Allons,  ôtez  la  première 

bourre  [  des  cocons].  —  Chantez, —  chantez ,  débourreuses  ! 

Maurice  Rivière. 

Dijon,  le  15  juillet  1877. 


MOU    DERA    COUCON  23 


NOTES 


^  Lisez:  mas  de.  Tous  les  noms  de  lieu  se  disent  ainsi:  mas  de  la 
Carré,  mas  de  Lioure,  etc. 

2  Au  mois  de  mai,  lorsque  les  feuilles  de  mûrier  commencent  à  pousser, 
les  femmes  mettent  généralement  dans  leur  sein  le  drap  qui  contient  les 
œufs  de  vers  à  soie,  afin  de  les  faire  éclore.  Beaucoup  vont  en  pèlerinage 
à  Saint-Savin,  chapelle  située  sur  une  crête  au  midi  du  mont  Pila. 
Cette  chapelle,  que  l'on  aperçoit  de  Saint-Maurice,  scintille  comme  un 
diamant  aux  premiers  rayons  du  soleil  lovant. 

■'  Lorsque  les  vers  commencent  d'éclore,  on  les  met  dans  une  petite 
boite  oblongue.  On  étend  sur  eux  un  papier  découpé;  avec  quelques  rejets 
de  feuille  posés  sur  ce  papier,  on  recueille  facilement  les  vers,  qui 
viennent  manger  cette  feuille. 

^  On  prétend  que  les  vers  aiment  l'odeur  de  la  rose  et  du  serpolet. 

^  Plantago  cynops. 

''  Erica  vulgaris . 

'i  Les  vers  à  la  quatrième  mue  (briife)  font,  en  mangeant,  un  bruit  qui 
ressemble  à  la  pluie  tombant  sur  des  feuilles  sèches,  ou  à  des  lézards  qui 
frôlent  les  plantes  desséchées. 

*  Idiome  de  Condrieu  (Rhône). 

*  Plaisanterie  que  j'ai  entendu  faire  par  mon  père  à  des  gens  de  la 
montagne  (Khône,  Loire). 

1"  Maladies  qui  atteignent  les  vers  à  soie. 

1*  Le  ver  réunissant  les  meilleures  conditions  de  santé  fait  pon  cocon 
en  trois  jours  {Dsan  trâ  jour  in  bon  maynon  fa  son  coucon),  prov.  local  ; 
mais  un  jour  suffit  pour  se  cacher. 

^-  Il  est  d'usage  de  mettre  les  vers  sous  la  protection  de  la  Sainte 
Vierge  et  de  lui  offrir  une  trousse  garnie  de  cocons. 

'3  Pour  encabaner  les  vers  à  soie,  lorsqu'ils  sont  mûrs,  on  confec- 
tionne de  petits  fagots  (  trousses),  allongés  et  plats,  avec  de  la  bruyère, 
du  chiendent,  de  la  paille  de  colza,  de  la  mourjalte  (  plantago  cynops); 
on  se  sert  de  petits  éclialas  pour  soutenir  les  trousses. 


UN  FRAGMENT  DE  POÈME 

EN    LANGAGE    DE    BESSAK 
(Hérault) 


L'idiome  de  Bessan  (Hérault)  '  appartient  à  cette  catégorie 
de  dialectes  de  la  langue  d'oc  que  l'on  pourrait  peut-être  appe- 
ler illogiques  ou  irréguliers,  parce  qu'ils  admettent  à  la  fois 
Va  etl'a  comme  voyelles  finales  du  féminin  -.  Le  périgourdin  •'. 
le  limousin'*  et  le  dauphinois  ',  en  représentent  la  moyenne  la 
plus  ordinaire, c'est-à-dire  celle  où  la  première  de  ces  voyelles 
termine  le  singulier;  la  seconde,  le  pluriel. 

En  opposition  au  dauphinois,  au  périgourdin  et  au  limousin, 
le  langage  de  Bessan  réserve  l'a  aux  finales  féminines  du  sin- 
gulier :  irounda,  laugeira,  poulida,  et  l'o  à  celles  du  \A\xv\e\:  fa- 
dos, causas,  fetnnos.  Cette  particularité  dialectale,  non  encore 
signalée  jusqu'ici,  constitue  le  principal  intérêt  philologique 
des  fi-agments  du  poëme  la  Granja  de  las  Fados,  dû  à  M.  H. 
Bousquet,  garde  d'artillerie  en  retraite,  à  Bessan. 

Ces  fragments  en  possèdent  un  autre,  (ju'il  n  est  pas  inutile 
de  relever.  On  sait  que  le  moyen  âge  avait  un  mode  de  vers 
très-répandu,  celui  de  douze  pieds  avec  une  syllabe  supplé- 


'  Petite  ville  d'environ  deux  mille  cinq  cents  âmes, située  sur  les  bords 
(Je  l'Hérault,  canton  d'Agde,  arrondissement  de  Béziers. 

-  Divers  poètes,  n'admettant  pas  celle  dualité,  sont  revenus  à  l'unité  do 
finale,  tantôt  par  l'o  et  tantôt  par  l'a.  J'aurai  l'occasion  de  parler  plus  lon- 
guement de  ce  détail  dans  un  prochain  mémoire. 

'  Voyez  les  Counteis  e  l'ior/a5,par  M.  Chastanet;  Robeirac,  1877  in-8°. 

*■  Voyez  la  Grammaire  limousine  dr  M .  Ghabaneau. 

••  Voyez  ios  Noças  de  Jauselou  Roubi:  envnàdio  dauphinoise,  publiée  par 
M.  Revillout  'Revue,  octobre  1875).  On  pourrait  encore  citer  certaines  por- 
tions de  l'auvergnat.  Voyez,  comme  exemple,  les  fragments  de  Faucon, 
rapportés  par  M.  Henry  Doniol  dans  ses  Patuis  delà  basse  Auvergne,  leur 
grammaire  et  leur  liltéralure;  Montpellier,  1877.  in-H"  (Série  des  F'ubli- 
cations  spéciales  do  la  Société  des  langues  romanes),  p.  88  à  93. 


POEME    EN    LANGA(rE    DE    liESSAN  25 

mentaire  et  inaccentuée  à  la  césure,  souvent  employé  dans  les 
laisses  de  la  Cansos  de  la  Crozada  contr  eh  ereges  d'Albegés  : 
Lo  filhs  del  rei  de  Fransa  fo  mot  be  acuUiitz 
Per  son  paire  e  pels  autres  e  volgutz  e  grazitz, 
Ez  es  vengutz  en  Fransa  de  sobre  '1  arabitz 
E  comta  al  rei  son  pairr^  cum  s'es  ben  enantitz 
En  Simos  de  Montfort  ni  cum  s'es  enrlquitz. 
E'I  reis  no  respon  mot  ni  nulha  re  no  dltz*. 

«  Le  fils  du  roi  do  France  fut  à  merveille  accueilli,  —  et  agréé  par 
son  père  et  par  les  autres.  —  Et  il  est  venu  en  France  sur  son  cheval 
d'Arabie,  —  et  il  conte  au  roi  son  pi-re  combien  s'est  mis  en  pouvoir  — 
Simon  de  Montfort  et  combien  il  s'est  enrichi.  — Et  le  roi  ne  lui  répond 
nul]  motet  ne  lui  dit  nulle  chose.  » 

Notre  oreille  a  peine  à  s'accoutumer  aujourd'hui  à  ce  vers. 
Aussi  le  rencontre-t-on  très-rarement  dans  les  œuvres  écri- 
tes du  XVr'  au  XIX''  siècle.  Le  seul  exemple  que  nous  en 
olfre  la  littérature   savante  ^  de   la  lanj^ue  d'oc  moderne  est 


'  Histoire  de  la  croisade,  contre  Im  hérétiques  albig^'ois,  écrite  en  vers 
provençaux  [jar  un  poêle  contemporain,  traduite  et  publiée  par  M.  Fau- 
riel;  Paris.  Imurimerie  royale,  1837,  in-4",  p.  224,  laisse  GXLII.  Je  me 
suis  servi  de  cette  édition,  n'ayant  pas  sous  la  main  celle,  bien  meilleure, 
de  M.  Paul  Meyer. 

-  C'est  à  dessein  qne  je  parle  de  littérature  savante,  car  les  œuvres  po- 
pulaires, celles  où  le  chant  fait  encore  sentir  son  influence,  ne  sont  pas 
totalement  dépourvues  de  vers  semblables. 

J'en  donnerai  pour  preuve  les  extraits  suivants  de  deux  pièces  qui 
paraissaient  quelques  mois  après  la  communication  à  la  Sociét'i  des  lan- 
gues romanes  des  poèmes  de  MM.  Roux  et  Bousquet  ; 

Que  nosto   religiou 
Siegue  pa  plus  la  caouso  de  noste  {sic)  divisiou  ; 
Servèn  lou  mémo  Dieu,  dounc  devèn  estre  frèro. 
Lous  que  nous  desunissor<  volou  Dosto  misèro.... 

As  Eler.furs  d'Alex  et  de  la  cnmpagno.  Alais,  Martin  [1877], 
pièce  anonyme,  1  feuillet  in-40  à  2  col. 

Faulié  veire  la  peno  que  prenien  li  marin  : 
Abéura  li  malau  coucha  sus  de  coussin: 
Alesti  soun  bèu  cocho,  sis  armuro,  si  main, 
Fair  ;  son  cargamen  pèr  touca  Trinquataio, 
S'estaca  sus  la  gravo  pèr  reçaupre  li  doun 
De  fhasque  citouien  pourtau  sa  prouvisioun  : 
Lou  boulangié  de  pan,  lou  mounié  sa  mouture... 

La  Pesto  d'Arle  en  1720,  pm-  Ilouiiaral  Triuquié(de  Boucaire). 
Alais,  Trintignau,  1877,  iu-80,  14  p. 


86  DIALECTES    MODERNES 

tout  à  fait  récent.  Il  appartient  à  un  petit  poème  limousin  de 
M.  l'abbé  Joseph  Roux,  communiqué  à  la  Société  des  langues 
romanes  le  6  décembre  1876,  et  qui  a  pour  sujet  la  mort  de 
Gondovald,  bâtard  de  Clotaire ,  proclamé  roi  par  les  grands 
de  l'Aquitaine  en  584,  mais  qui  ne  tarda  pas  à  périr  à  Lug- 
dunum  Convenarum  (Saint-Bertrand-de-Comminges)  assassiné, 
disent  les  uns,  lapidé,  disent  les  autres,  peut-être  victime  de 
deux  supplices  à  la  fois  ' . 

Mais,  tandis  que  M.  Roux  poussait  ses  innovations,  ou  plu- 
tôt ses  archaïsmes,  jusqu'à  remettre  en  honneur  les  laisses 
monorimes  des  vieilles  épopées  de  l'ancienne  langue,  M.Bous- 
quet bornait  les  siences  à  l'emploi  du  vers  de  douze  syllabes, 
inaccentué  à  la  césure,  et  à  celui  de  quelques  rimes  assonan- 
cées.  Nous  avons  scrupuleusement  respecté  ces  licences,  que 
l'éclipsé  de  la  poésie  méridionale,  pendant  les  trois  derniers 
siècles,  nous  a  temporairement  enlevées  -. 

Alph.  Roque-Ferrier. 


1  Voici  quelques  vers  de  la  poésie  de  M.  l'abbé  Joseph  Roux: 

Al  mitan  d'un  fournel  lou  temple  disparais  : 
Lou  fuec  a  tout  cremat,  lou  reire  emais  lou  creis; 
Adi,  tourabel  de  marbre  atrevadour  de  reis, 
Estatuas,  autars  flouritz  couma  un  cireis 
Quand  la  prima  nouvela  nous  ramena  sas  geis. 
DeJ  bel  aubrc  res  pus  ne  sobra,  rams  ni  reis, 
Miscan  En  Libéral,  miscan  mais  cinq  ou  sicis 

Tout  escana,  tout  crolla. 
Et  se  beu  et  seminja...  Ai  !  aco  fai  escor!... 
Et  lou  duc,  pie  del  vi  que  li  nejalou  cor, 
Coumanda  que  b  arrason   lou  Sent  Gral,  iianap  d'or. 
Que  José  d'Arimat  te  prestet  per  l'amor, 
Christ  !  de  lei  oelebrar  ta  darrieira  Pascor. .  .. 

2  L'emploi  de  l'assonnance  n'est  pas  sans  exemples  pendant  les  troii> 
derniers  siècles.  On  trouve  un  noël  de  Saboly  dont  tous  les  quatrains, 
sauf  le  premier,  renferment  deux  vers  assonnants,  et  souvent  mémo  non 
rimes.  C'est  celui  qui  commence  par  les  vers  :  Auprès  d'aquel  eslable.  11 
porte  le  n"  48  dans  la  grande  édition  de  de  Séguin  :  Recueil  de  noël  com- 
posés en  lanijue  prorenrale,  par  Nicolas  Saboly,  etc.  Avignon,  Séguin, 
1856,  in-4». 


LA  GRANJA  DE  LAS  FADOS  (*) 


Dins  la  piano,  i'  o(-)'n  mountfach  do  la  raan  de  l'orne 
Que  eounten  dins  sous  flancs  un  quicon  de  renoum  ('). 
A  sas  quatre  muralhos  espessos  dedins  obra. 
Toutos  soun  encadrados  per  un  gros  quart  de  round*  .... 

Ras  d'aquel  endrechou  que  Marta  ie  fialava, 
Las  Fados  delà  granja  espandissiôu  souvent 
Soun  linge  bel  e  fi,  e  tant  blanc  qu'esclatava 
D'una  blancou  de  nèu  e  linde  couma  argent. 
Lou  vent  e  lou  sourel  dessu  '1  cop  l'assecavou; 
La  flou  des  coudouniès  ie  dounava  un  perfum  (^). 
Elos,  tout  en  riguent,  countentos  l'estremavou 
En  dedins  la  founsou  de  sa  granja,  sans  lum(^). 

La  bugada  finida,  anavou  dins  la  prada 

En  dansant,  en  cantant  (^),  jouiousos  de  plasé  (^). 

Culissiôutant  de  flous  que  sa  granja  embaumava 

E  respendiô  'n  audou  que  levava  lou  se. 

Las  vielhos  dau  vilage,  un  pauquet  curiousos, 

Espinchavou  souvent  per  saupre  que  fasiôu, 

Mais  {^)  las  finos  fadetos  s'escoundiôu,  trop  urousos, 

Detras  un  gros  nuage,  escut  à  faire  pôu. 

Quand  un  orne,  su '1  tard,  en  courriguent  passava, 
Davans  de  la  grangeta,  el  era  espaurugat, 
E  las  fuelhos  des  aur^s,  que  lou  vent  boulegava, 
Siblavou  mai  que  mai  la  pôu  à  soun  constat. 
Avansava  lou  pas  en  alenant  à  pena, 
Recoumandant  à  Dieus  soun  ama,  sa  fiertat  ; 

'  Les  chiflres  entre  parenthèses  renvoient  aux  observations  des  p.  30 
et  31. 

*  Il  s'agit  d'une  construction  d'origine  romaine,  à  laquelle  attache  la 
dénomination  de  Granja  de  las  Fados.  Ce  titre  et  quelques  détails  sur  le 
linge  blanc  que  les  fées  étendaient  autour  de  leur  grange  constituent  tout 
ce  que  l'œuvre  de  M.  Bousquet  doit  à  la  tradition  populaire. 


88  DIALECTES   MODERNES 

E  las  finos  fadetos  risiôu  de  sa  dcvena*: 

Kauriôu  (")  vourgut  emb  o\os  per  dansa  dins  lou  prat. 

Erou  de  bounos  Fados,  e  tant  pla  las  iîlhetos 
Venièu  per  ie  countà  sas  penos,  sous  amours  ; 
E  toutos  aladounc  ie  disiôu  de  sournetos 
Que  las  fasiôu  revà  las  niochs  amai  lous  jours. 
Mais,  des  qu'un  pretendut  un  pauquet  trop  parlaire, 
Veniô  dire  à  soun  tour  qu'era  pla  malurous, 
Elos,  douçamenet,  ie  fasiôu  :  «  Calignaire, 
Vous  planés  un  pau  trop  e  serés  pas  urous. .  .» 

Predisiôu  l'aveni  ;  sabiôu  tene  TaguUia 

Per  broudà  (*)   un  traval  de  gaubi,  de  sabé 


Tout  ço  qu'elos  fasiôu  era  pas  imitable, 

E  las  jouinos  filhetos  aviôu  bel  s'aplicà  : 

Auriôu  (')  dounat  soun  ama  à  Dieus,  e  saique  al  diable, 

Que  sousdechs  (^)  mal  aisich  (")  deviôu  (*")  ie  renouncà. 

Quaucos  fes,  una  flou  dins  lous  ers  las  pourtava, 
Per  anà  {^)  al  counsel,  joust(")  la  mar,  al  sabat  ! 
Se  troubavou  per  tout!  Quand  un  soureiè  parlava, 
Vite  s'avalissiôu  de  tant  qu'era  escoutat. 
Demouravou  sus  i-ochs  ("),  dins  lou  bose,  sus  una  illa, 
Lous  chaînes  e  las  landos  erou  soun  bel  saloun. 
Quand  caliô  ('^)  proutejà,  enfadià(^)  una  vila, 
Erou  toujour  aqui  per  coucha  lou  demoun 

Un  vespre,  de  su'l  tard,  que  l'aurage  mountava, 
Passava  un  cavaliè  dins  soun  màntou  plcgat; 
Soun  chaval,  alassat,  dejoust  el  tresanava; 
Aloungava  lou  pas  de  tant  qu'era  pressât. 
Un  iglaus  l'emblausis  e  la  ploja  toumbava; 
Lou  tron  ven  s'espetà  sus  Taure  qu'es  davans. 
Su'l  cop  lou  fioc  s'en  prend  e  vite  que  cremava, 
Lou  rude  cavaliè  met  l'espasa  à  la  man  : 

Malechance.  Ce  mot  manque  à  Honnorat. 


POEME    EN    LANCtAGE    DE    RESSAN  29 

Menacava  lou  tron.Es  vous  dire  quai  era: 
Era  barde  gales ('^),  sans  crento  amai  sans  pou. 
La  rota  que  pourtava,  la  tenio  'n  bandoulieîra, 
E  sa  forta  paraula  bruhissiô  coume  un  biôu .... 

Lou  cami  era  ruda  e  michant;  s'enfangava. 

Lou  pavât  era  rare,  o  lous  traucs  erou  grands; 

Lous  rechs  {*)  erou  roumplich('),  e  l'Arau*  desbourdava  ; 

L'aiga  que  courrissiô  anava  à  sous  davans. 

Mais  C')  Fardit  cavaliè  (*-]  toujour  esperounava 

En  siblejant  un  er  ou  de  cassa  ou  guerric. 

Quand  la  paura  bestiola  cargada  s'escrancava, 

Sas  cambos  i'amainavoM**,  pla  lion  (*-j  dcl  rasteliè. 

Dins  toutes  lous  tautasses,  lou  chaval  cbauciiiava, 
E  lou  barde  risiù  de  lou  veire  soufri. 
Crac  !  un  cop  d'esperou  vite  recoumpensava 
La  pena  que  preniè  de  lou  faire  courrî .... 

Aviô  talent,  pas  mens  ;  mais  Taurage  durava, 
La  ploja  destrempava  lous  rochs  C)  e  lou  tarren; 
Tout  era  à  l'amagat,  e,  sans  el  que  siblava, 
S'entendiô  pas  res  pus  que  Taiga  aml)é  lou  vent. 
A  travès  la  chaineda  ***,  vei  un  lum  (•')  que  cremava; 
le  vo  drech,  e  las  fado.s  se  pressou  de  dourbi. 
La  porta  s'avalis;  vei  lou  tioc  que  flambava: 
Es  sec  de  su'lmoument  ;  o  [-)  taula,  pan  e  vi. 

L'auba  d'un  bel  mati  dins  lou  cel  espetava, 

E  lou  sourel  levât  aviô  fach  de  cami. 

D'aurage  n'i  'aviô  pus;  déjà  lion,  (^-)  s'enanava. 

Lou  cavaliè  dourmiè  su'l  liech  de  jaussemi, 

Quand  una  jouina  fada,  al  pel  d'or,  agachava 

Lou  gales  ('■')  (ju'era  aquis  davans  ela  endourmit; 

Poutouna  de  sa  bouco  soun  front  que  blanquejava, 

•  L'Hérault. 

**  Amainà.  Honnorat  donne  seulement  à  ce  verbe  la  signification  de 
orienter,  mettre  en  assiette,  se  diriger,  baisser  les  voiles. 
***  Honnorat  n'enregistre  pas  ce  mot. 


30  D1ALKCTE8    MODERNES 

E  courris  s'amagà.  Avi6  perdut  T esprit  ! 

Lou  chaval  arnescat  era  davans  la  porta, 
Que  lou  bel  cavaliè  ('^)  revava  sus  soun  liech. 
Soun  cors  era  adalit  ;  sa  figura  tant  forta 
Era  d'una  pallou  que  fasiô  grand  despiech. 
Aviô  lou  fioc  al  cap  ,  quand  sa  man  se  jalava: 
Quicon  lou  reteniô  couma  s'era  estacat. 
Voulio  (*-)  be  se  leva;  soun  devé  lou  sounava, 
Mais  (^)  soun  ama  cremava  del  désir  esprimat. 

Fo  'n  esfor  e  se  leva,  encantat  de  las  Fados; 
Partis  coume  Tiglaus. . . .  Despei  l'ôu  pas  pus  vist. 
Mais  {^)  se  dis  que,  lou  vespre,  un  fieu  d'or,  dins  las  prados, 
Lou  fo  veni  près  d'elos  per  saupre  s'o  (-)  pla  rist  ; 
Car  lou  mati  l'erbeta  es  toujour  pla  perlada 
A  Tendrech  qu'aviôu  mes  lou  liech  de  jaussemi. 
E  la  belaFadeta,  toujour  enamourada, 
Espéra  soun  retour  dins  lou  pus  grand  plesi. 

H.    BOUSQUET. 


OBSERVATIONS 


1 .  (Observation  générale).  —  Le  languedocien  de  Bessan 
ignore  complètement  le  v.  Il  faut  donc  prononcer  bent,  hie- 
Ihos,  bilage,  soubent,  fialaba,  assecabou.  leu  se  pronence  toujoui  s 
iou,  d'une  seule  émission  de  voix.  Exceptez  cf^pendant  le  pronom 
personnel  ieu,  où  Ve  reste  e. 

2. —  L'a  latin  du  verbe  habere  devient  o,  comme  dans  le 
Lodévois. 

3.  —  On  prononce:  renoun,  perfun,  lun. 

4.  —  La  distinction  des  participes  en  ant  et  en  ent  s'est 
conservée  à  Bessan,  bien  mieux  qu'à  Montpellier  et  àBéziers. 

5.  —  Plasé ;  le  dernier  vers  du  poëme  donne  plesi,  qui  est 
la  forme  gallicisée. 

C. —  Prononcez  mes. 

7.  —  L'r  ne  se  fait  pas  sentir.  Prononcez  au-iou. 

8.  —  L'r  de   l'infinitif  existe  encore  à  l'état  latent.  On  ne 


POEME    EN    LANGAGE    DE    BESSAN  31 

trouve  pas  un  seul  exemple  d'élision  dans  le  poëme  de 
M,  Bousquet. 

9.  —  A  Bessan  comme  à  Lodève,  à  Agde  et  à  Béziers,  cer- 
tains pluriels  se  forment  au  mojen  de  l'adjonction  d'un  ch . 
Dans  les  Berses  patoueses  de  J.  Azaïs  (Béziers,  1867,  2  vol. 
in-12),  c'est  par  un  x  qu'ils  ont  été  figurés.  Exemples  :  rabex, 
brasselex,  amix,  etc. 

Pareil  mode  de  lîguration  orthographique  est  encore  en 
usage  dans  l'Albigeois.  Il  j  remplace  même  le  ;  initial  : 

Un  xoun,  lounglemps  après,  que  se  trouben  à  taoulo 
Amé  soun  courounel  debengut  xénéral, 
El  même  à  soun  coustat  am'un  coustume  égal. 
Fabricat  Iros  à  tros  sus  bint  cans  de  bataillo 

D'aylhurs  l'ibrougnarié,  bous  rand  coumo  de  brutes, 
Amay  presque  touxoun  enxendro  de  disputos; 
Dins  las  calos  souben,  d'atnix  al  caliaret 
Bous  xetas  la  bouteillo  amay  lou  i^oubeiet, 
Tout  ço  qu'es  xoust  la  ma,  xuscos  à  la  cadièyro. 
Et  pey,  per  l'oste  enquiet,  licax  à  la  carrieyro, 
Lous  èls  plenes  de  sang,  manubras  de  pu  bel, 
Lous  unes  dal  bastou,  lous  aoutres  dal  coutel. 

lit-on  dans  une  pièce  de  poésie  :  rOuberturo  d'uno  mission  à 
Moularés,  par  Alexandre  Plazolles  (Castres,  Abeilhou,  1877; 
in-12,  13  pages),  qui,  malgré  de  trop  fréquents  gallicismes,  ne 
manque  ni  de  facilité,  ni  de  bons  vers. 

10. —  L'e  se  change  très-fréquemment  en  i. 

11.  —  Et  aussi  yYoMs^  Dans  le  langage  de  Bessan,  le  7  affecte 
le  son  du  ch.  Il  faut  donc  prononcer  :  chou(,  chioust,  touchour, 
grancha,  etc. 

12.  Prononcez  ca-io,  cava-iè,  ion  et  vou-iô. 

13.  —  Faut-il  dire  Gales  ou  Galoi?  Ce  dernier  terme  a  com- 
munément le  sens  de  joyeux,  éveillé,  réjoui;  mais  on  l'emploie 
quelquefois  avec  la  signification  de  Gaulois,  qui  lui  est,  du 
reste,  reconnu  par  Honnorat  dans  son  Dictionnaire  provençal. 


POUEISIAS  DIOISAS  DE  GUSTÉ  BOUEISSIER 


LOU 

SIÈGK     DE     SOLLIENS 
Pouémé  en  4  chonts 

(  Suite) 


CHONT  II 


Lo  fotiguo,  lo  fon  conino, 

Vingt  cops  de  hatous  sus  reichino 

E  lou  doublé  sus  lous  gigots, 

Soun  bien  pesont  par  de  bigots. 

Ovein  dit  que  lous  notreis  prieroun  ; 

Disein  ooussi  que  gomougneroun. 

Jusqu'o  lo  cour  de  Tciveicha. 

L'eiveque,  ein  lous  vejont,  criée  la  Ha! 

Vous  vetoqui  !  Quinto  nouvello  ? 

Oourein  toou  de  bouono  toueisello? 

— Oh  !  mounseigneur,  creyou  que  non  i> , 

Reipounderoun  ein  se  signont  ; 

«  Malgré  votro  bello  ourdounnonço, 

Nous  on  opprei  certaine  donso 

Ein  nous  oppliquont,  lous  pas  reins, 

Vingt  cops  de  triquas  sus  lous  reins, 

Et  vous,  otteindu  votre  titré, 

Vous  mondoun  souloment  fas. ..  fitré. 

— Qui,  mi?  «l'eiveque  répliquée, 

«  Lou  SoUiensou  moou  sogorec. 

Coumprenou  per  que  lou  viodasé 

Bouoto  oquoou  mont  dins  sous  longagé  : 

Voudrio  de  soun  l)la  mai  que  vnou  ; 

Mais,  moju,  n'ourec  pas  un  soou  : 


POTJRISTAS    DIOISAS  33 

Foou  pas  li  laissas  uno  grano, 

Dovont  que  passe  lo  semano. . . 
Onec  me  dire  ooux  jocoubins, 
Courdeliers  et.  bénédictins, 
Jesueiteis,  en  un  moût  lo  raço 
De  bénéfice  et  de  lo  biaço. 
Que  venein  eici  proumptoment 
Que  lous  otteindou  pocioment. 
Volou  sooupi'é,  sein  tordas  gaïré, 
Ce  que  pensoun  d'oquello  ofïaïré.  » 
Moussus  Aniés  se  deitochec, 
Et  vite  lous  overtissec. 
De  moineis  oyont  de  sondalas 
Sourteroun  bientou  de  leurs  sailas, 
Per  onas,  d'un  air  pastoural, 
Ves  lou  polais  épiscoupal. 
Esperavoun  bé  de  nouvellas, 
Mais  las  creyons  un  paou  plus  bellas, 
Car  on  lous  veyo,  nies  et  bloncs, 
S'ottroupas  coumo  de  cuooubloncs. 
Quond  fugueroun  dovont  lo  pouorto, 
L'eivequé  horonguec  de  lo  sorto  : 
«  Bouon  oppetit,  mous  chers  omis. 
Si  Fovec  grond,  mofé,  tonpis  : 
Tonpis  ei  lou  moût  que  foou  dire  ; 
Car,  einquei,  Ton  pouo  vous  prédire 
Que  preireis,  nobleis  et  bourgeois 
Vont  tous  jeûnas  dins  lou  Diois. 
N'ovein  rein  couontro  lo  tbmino, 
Ni  viondo,  ni  bla,  ni  forino, 
0  ce  que  rocouonto  Mounard  ', 
Que  de  Solliens  vent  de  mo  part. 
Vous  direi,  per  toute  nouvelle, 
Qu'oquello  villo  tont  cruelle 
Veint  de  nous  refusas  de  pon 
Per  nous  laissas  creban  de  fon, 

*  Mounard,  personnage  influent  du  pays,  elmarguillier  do  la  paroisse 


34  DIALECTES   MODERNES 

Et  d'eitrillas  notro  miliço. 
Mais,  lou  coumblé  de  lo  moliço, 
Las  grossas  geins  d'oquel  eindret, 
Me  mondoun  fas  foutre  tout  dret, 
Tallo  insoulenço  vous  eitouno  : 
Oï,  mi-même,  ein  propre  persouno, 
Me  mondoun,  oqueloux  gouja, 
Oqui  vount  tout  lou  mounde  sa. 
Ovont  de  nein  tiras  veingenço, 
Fosec  me  sooupré  ce  que  so  peinso. 
Si  pouo,  chaque  coumuuoouta, 
Sus  oquoou  trait  d  iniquita; 
Mais  ooumein  que  chacu  s'explique. 
Sus  un  toun  que  sié  pothotique  : 
Père  Cournu,  vrai  courdelier, 
Onein,  veyein,  porlec  prumier 
Sus  lou  moût  qu'uno  tallo  ongeonço 
Veint  de  dire  o  moun  excellenço . 

—  Yoou  disou,  li  reipouond  Cournu, 
Qu'oquoou  moût  vein  d'un  pas  deingu  ; 

Et  pei  qu'eici  foou  qu'on  s'explique, 
Un  taou  peuple  ei  trop  heirétique 
Per  pas  tout  de  sueito  einvouyas 
L'ordre  de  l'excoumunias. 

—  Très-bien. . .  o  vous,  père  Dechasso, 
Fosec  nous,  s'il  vous  plaît,  lo  graço, 
Coumo  siec  frère  doou  doyen, 

De  nous  dire  ce  que  forein. 

—  Oh  !  n'ein  forei  pas  un  mystère  », 
Repliquo  lou  rêveront  père, 

«  Car  siens  de  técous  si  souffreins 

L'ooudaço  d'oqueloux  pas  reins. 

Per  punis  oquello  brovado, 

Foou  fas  uno  sainto  croisade  : 

Ormas  oou  plus  toou  lou  Diois, 

Per  lou  onas  boutas  ein  croix. 

Un  homme  qu'on  monde  fas  foutre. 

Si  dit  rein,  n'ci  qu'un  grond  jonfoutré  ; 

Yoou  n'ofirmou  pas  que  l'eu  siec, 


POUEISIAS    mOISAS  35 

Mais  ovont  paou  Fou  deveindriec.  » 

Oprès  oco  se  deilibero, 
Et  chacu  voutec  per  lo  guerro. 
L'eivéqué,  olors  tout  rejouit 
Qu'o  soun  goût  l'oguessoun  servit, 
Dissec  d'osseimblas  lo  brigado 
Et  de  prêchas  uno  croisade . 

Lou  jous  sueivont,  de  grond  moti, 
Ooux  hobitons  qu'ovions  poti, 
Lou  bouon  et  Teilouquont  Dechasso  ' 
Peroourec  eimbe  tout  de  graço 
Sus  Teificocita  doou  pon 
Couontro  lo  rageo  de  lo  fon, 
Dins  uno  pinturo  si  vivo, 
Que  foguec  venis  lo  solivo 
0  lo  boucho  doou  père  Ornoux  ^, 
Qu'o  so  jaouto  oguec  de  coulous  ; 
Dessorto  que  lou  vieux  goléro, 
Qu'omavo  tont  lo  bouono  chéro, 

Creyo  de  mingeas  un  mourcec 

D'un  groou  gigot  lo  peço  oou  pec. 
L'oouroteur  criavo  o  roouditoiré  : 

((  Souvenec-vous  doou  réfectoire, 

Dins  un  teimps  vounté,  chaque  jour, 

Lou  pon  que  revenio  doou  four 

Per  soun  ooudous  vous  chotoujavo  : 

Et  de  lo  brocho  que  viravo 

Lou  fumet  vous  fosio  venis 

D'un  quart  de  lego  de  poys. 

0  !  temps  huroux  !  jis  de  fominas  ; 

Las  bogas  semblavoun  de  tinas, 

Etions  moureis  eroun  si  viooux 

Qu'oviont  lo  coulou  doou  grofiooux. 

Notre  soi  de  leins  brilliavo, 

Embe  oppetit  l'on  deijeinavo; 

Si  perfeis  ero  deireingea, 

Ei  que  l'on  ovio  trop  mingea. 

1  Avocat  de  village,  célèbre  par  sa  hâblerie . 
'  Gastronome  renominé. 


36  DIALECTES     MODERNES 

Ves  Dio  lou  moundé  ero  odourablé, 
Mais  euqiiei  rf  ei  plus  couneissablé  : 
Siens  si  maigreis,  si  deilohras 
Que  Sigolou  '  pouo  pas  toutfas. 
Oou  cemeintieri  lo  jueinesso 
Pars  per  einteras  lo  vieillesso. 
Lou  Dios  ci  tont  ohuri 
Qu'ei  sec  coumo  de  popori, 
Et  lo  fenno  lo  plus  golliardo 
N'o  pas  mai  de  chair  qu'une  sardo. 
Per  sourtis  d'oquel  embora, 
Foou  de  pon  rousse  d'ossura. 
Courage  !  indulgeinço  pleniero 
O  qui  portirec  per  lo  guerro. 
Vès  Solliens  Tio  beoucop  de  bla  ; 
0  mounseigneur  qu'ovio  monda 
Quaouqueis  penitonts  per  n'  oduré, 
Lou  Solliensou,  que  Dioou  louscuré, 
Ont  lâcha  certaine  raison 
Qu'ei  trop  sàlo  per  un  sermon 
Et  qu'eici  Ton  pouo  pas  redire, 
De  quintou  biaï  qu'on  vous  lo  viré;  ' 
Mais  eissoyec  d'imoginas 
Un  moût  bouon  o  vous  fas  domnas  ; 
Sovec. . . .  frereis,  oquel  outragé 
Duoou  se  lovas  dins  lou  pilliagé. 
L'hounous  voou  que  portée  démon 
Per  lei  tuas  tout  o  votre  fon  ; 
Nous  aoutreis  oourein  l'ovontagé 
De  sonctifias  lou  cornagé.  » 

Tous  tont  que  soun  disoun  Amen  ; 
Pei  criont  :  a  Mais  qu'ai  que  sei  Ibsen, 
Fosen  eici  tristo  figuro  ; 
Per  que  pas  portis  tout  ovuro  ?  » 
Sus  oco  vont  se  counfessas, 
Mingeas  l'oustio  et  se  coueijas. 

Lou  Icndemon,  dès  que  Touroro 

'  Fossoyeur  de  Die. 


POEISTAS   DTOISAS  37 

Ogiiec  bouta  soun  lias  defouoro, 
Qu'ero  Teitiqueto  doou  jour, 
Pecholoup  botec  doou  tombour. 
Coumo  quond  veirçin  dins  lo  piano 
De  Josaphat  lo  sourapetano 
De  Tongé,  fosont  reveillias 
Lous  mouorts  que  soun  o  sumillas, 
Ainsi  tous  lous  Diois  se  levoun 
Onoquoou  ropel,  et  s'oppelloun 
Pei  se  reindoun  ves  mounsegneur, 
Ein  chontont  einsein  de  bouon  cœur  : 

((  Onein,  éfons  de  las  mountagnas, 

Lous  jous  d'eicoueire  soun  veingus  ; 

Portein,  quitein  notras  coumpagnas, 

Per  pichas  sus  de  pasdeingus  {bis). 

Solliens,  dus  ooutont  que  lou  ferre, 

Ofin  que  crebessein  de  fon, 

N'o  pas  vougu  beilas  de  pon 

Ooux  Diois  qu'on  ista  nein  caire. 
Courage,  fessoueiriers,  preneins  notreis  fessoux, 
Morchein  Uns],  qu'un  song  coya  romplisse   d'eigairoux 

))  Tromblo,  Solliens,  car  dins  to  villo 
Introrein  dins  doux  ou  treis  jous  ; 
Et,  si  gno  pas  assez  d'un  millo. 
Siens  presteis  o  l'ai  coure  tous  [bis). 
Rein  nous  reteindrec  per  t'obattré  ; 
Si  chayoun  notreis  vieux  Diois, 
Lous  jueineis  sorein  de  grivois 
Que  portireins  per  te  coumbattré. 

Courage,  fessoueiriers,  etc. 

»  Cornus  couontro  oquello  gueusajo, 
Douono  de  fouorço  o  notreis  puns, 
Si  nous  ojuas  dins  lo  botayo. 
Siens  surs  de  nein  brias  quaouqueis  uns. 
Vès  nous  aoutreis  que  lo  victoiro 
QÔÔuré  0  noous  maleis  ocçonts  ; 

3 


Z^  DIALECTES    MODERNES 

Dins  tous  lous  SoUiensoux  jeunonts 

Ye  toun  trioumphé  et  notro  gloiro, 

C(^urage,  fessoueiriers,  etc.  » 

Lous  moris  que  venion  dories 
.  Eintounavoun  o  plein  goousies  : 
«  Nous  entrerons  dans  la  carrière  »  , 
Et  las  morias  :  «  Il  pleut,  bergère.  « 
On  veyo  ooussi  de  villogeois 
Chontont  :  «   Rossignolet  du  bois  »; 
Et  maï  fuguessein  o  lo  diéto, 
Gueulavoun  o  roumpré  lo  tête. 
Ainsi,  bras  dessus  bras  dessous, 
Vés  Feiveque  arriveroun  tous. 
Elou,  que  dejo  s'onuvavo, 
Ein  lous  otteindont  deiieinavo  ; 
Ce  que  fuguec  un  chordoueinec 
Que  tous  lous  goousiers  picoutec. 
Oquoou  moumeint  lo  pooupulaço 
Oourio  vougu  tenis  so  plaço, 
Et  Lonfré  *,  tout  ein  regoi-dont, 
Disio  :    «  Quond  nein  forein  ooutont? 
Pariou  que  voueido  so  dimeyo  2 
Ein  oehobont  so  fricossevo 
De  boudins  d'un  mori  coyou, 
Qu'o  tua  Faoutre  jous  lou  picou.  » 

Mounsegneur  veinguec  sus  sopouorto 
Et  trouvée  Tormeyo  prou  fouorto  : 
lovio  bien  dous  ceints  fontossins, 
Pas  si  voulec  doous  plus  mutins 
Ni  mai  d'un  air  très-redoutablé, 
Mais  oyont  ropjtotit  dou  diable. 
Ein  teto  beoucop  d'oouficiers, 
0  lo  quio  lous  courdeliers. 
Las  coumpognas  et  las  brigadas 
Eroun  divisas  per  escouadas. 

*  Homme  d'un  gros  appétit. 

2  Dimeyo,  demif^  (pour  demi-bouteille). 


POUEISIAS   DTOTSAS  39 

Mais  pereici  crejou  que  foou, 
Ovont  tout  uno  invoucocioou 
On  oquello  que  clins  lo  Greço 
Lo  memoiro  ovio  per  déesso  : 
Ti  que  roprouochei  lou  possa 
Ein  lou  boutent  dins  lo  peinsa, 
Mnémousyno,  ah  !  si  vouyas  dire 
Denoums  que  poueichein  nous  fas  rire, 
Un  bien  grond  plaisis  me  forias. 
Dejo  n'o  pas  fougu  te  prias 
Quond  ai  vougu,  dins  quaouquas  fabhit;, 
Porlas  de  cliaousas  véritablas 
Que  s'eroun  possa  dins  un  teimps 
Bien  ogréable,  mais  bien  leins. 
Ovuro,  coumo  sus  lo  rocho, 
Gravo  lous  noums  dins  mo  cobocho 
De  tous  lous  Diois  que  sein  poou, 
Porterount  per  l'expeditioou. 

Lous  hommeis  fourmont  l'ovont-gardo 
Choousisseroun  lou  brave  Sardo^, 
Ofin  de  coundueire  lours  pas 
Dins  lous  coumbats  que  vont  livras . 
Oqui  ce  vejo  Buei-mochino  ^ 
Que  mountravo  so  bello  mino; 
Orchillet,  pourtont  soun  boraou; 
Pojau,  Tulaura,  Barjomau, 
Chioou  reiuébla,  Julion-counasso, 
Quejuravode  pas  fa  graço 
Ooux  Solliensoux  qu  ottroporio. 
Oprès  oquoou  grivois  venio  : 
Merle,  Boujé,  Liaoudou-d'eilèno  ; 
Jasque  Grenier,  Picard-sirèno; 
Boouria,  Gingorec,  Blonc-d'ooussou; 
Bosset,  Landros  etBogossou. 

Quaouqueis  siareis  embe  lours  dajas, 

*  Boiteux. 

2  Tous  ces  noms  propres  sont  ceux  des  personnages  les  plus  grotesques 

de  Die . 


40  ni.VLblCTP^.S    MODERNES 

Devion  coupas  coumo  de  payas 
Lous  agocis  doous  Solliensoux  ; 
Près  d'eloux  de  jueineis  gorçous, 
Que  Ton  veyo  pourtont  de  frondas, 
Noun  pas  eisein,  mais  ein  douas  bondas  ; 
Sont-Peireis,  embe  Sont-Morceoux', 
Que  devion  lanças  do  collieoux. 
Piare  Ormond,  tenont  so  ferulo^, 
Per  lous  reunis  gesticulo 
Ooutont  que  pouo;  mais  lous  moris 
Saoutoun  coumo  de  prevezis  : 
L'un  voou,  per  livras  lo  botayo, 
Que  l'aoutré  li  garé  lo  payo 
Dessus  Teipoulo.  Lous  tollieurs 
Ovions  leurs  gronds  ciseoux  vouleurs. 
Et  Rula'',  que  Lous  coumoudavo, 
Sus  so  jombo  se  redressavo. 

Lous  gnafreis,  que  venion  oprès, 
Volou  dire  lous  courdouniers, 
Que  pourtavoun  dins  uno  gaino, 
Bien  eifila,  lour  grosso  oleino, 
Ovion  eincaro  o  lour  cousta 
Un  tronchet  bravement  bouta, 
Et,  d'une  moniero  guerrière, 
Lour  tiro-pied  ein  bondoulliero; 
Choousisserouu  lou  vieux  Louœbard, 
Ofin  de  pourtas  Teitondard. 

Boueissilliou,  lou  vétérinaire. 
Et  Tolioto,  Fopouticaire, 
Dins  lo  villo  onavoun  jitas 
De  droguas  o  lous  eimpestas. 
Lou  prumier  ovio  so  seringue 
Que  li  sert  ([uond  Tio  quaouquo  bringo 


*  Sainl-Pierre  et  Saint-Marcel,  deux  quartiers  de  Die  qui  étaient  tou- 
jours en  querelle,  et  dont  les  enfants  se  battaient  souvent  entre  eux  à 
coups  de  fronde. 

2  Pierre  Armand,  raaîlri;'  dV'ciii;. 

•'  Tailleur  principal  du  pays,  qui  avait  uin'  )ambc'de  bois. 


POITEISIAS    DIOISAS  41 

De  molato.  Lous  moneichaoux, 
Tous  mountas  sus  de  vieux  chovaoux 
Embe  treis  ou  quatre  chatraïreis. 
Fiers  ibrouguas,  rudeis  mingeaireis, 
Devious  lous  ojuas,  ein  omis, 
0  seringuas  lous  ennemis. 
Lour  boniero  représeintavo 
Un  ane  qu'un  d'éloux  feravo. 

Lous  plâtriers  embe  lous  moçous, 
Meitreis,  monobros,  coumpognous, 
Tenont  leurs  morteoux  et  lours  tibias, 
Ovion  de  minas  tres-risiblas . 
Sus  lour  eitondard  gris  et  vert, 
On  veyo  chaire  d'un  cubert 
Un  homme  que  se  deipochavo 
Coumo  si  lo  chaouso  pressavo; 
Ein  bas  l'iovio  per  eicritoou  : 
Longuissec  pas,  sei  sorei  toou. 

Lous  fourniers,  plus  nies  que  de  dialtlois, 
Pourtavoun  lours  pelas,  lours  riableis, 
Lours  gouyards  embe  lous  oehoux, 
Per  pichas  sus  lous  SoUiensoux. 
Coumo  se  cubreroun  de  gloiro, 
Foou  boutas  lours  noums  dins  l'histoiro  : 
L'iovio  dounc  Chovolou,  Goma, 
Culés,  tieni  Brelliou,  Poula. 
On  veyo  ooussi  lous  vieux  Poleto, 
Que  biscavo  d'être  o  lo  dieto; 
Ribaou,  Cossia,  Ponké,  Coucici 
Et  lou  grand  père  Bolodi. 
Dessus  lours  maooux  fouyo  lous  veire, 
Morounas  de  pouvcr  plus  coueire 
Ni  fouyaoas,  ni  brocedeoux. 
Ni  ponettas,  ni  revordeoux. 
Mais  lo  chaouso  la  plus  coumiquo 
Ero  de  veire  lo  musiquo  : 
L'iovio  soumpetanas  de  bois, 
Fifre,  couornas  embe  un  ooubois, 
O  quoou  qu'einteindio  l'hormounio 
D'oquello  bello  symphounio 


42  DIALECTES   MODERNES 

Disio  :  Bien  ei  que  per  eici 

L'on  vai  sounas  lou  togoci. 

On  veguec  mai  que  d'un  village 

Fournis  d'hommeis  d'un  grond  courage; 

Boutoundort  de  vès  Roumeyer  ', 

0  l'civeicha  fuguec  prumier. 

Venio  de  quittas,  noun  sein  peno, 

Sous  bois,  sous  efons  et  so  fenno, 

Per  portis  embe  lousDiois. 

Oh  !  paouro  joou,  quintou  grivois  ! 

Jomai  jusqu'eici  lo  noturo 

N'ovio  fa  si   fouorto  coruro  : 

Imaginec-vous  un  solau 

Bien  plus  large  qu'un  eissogau. 

Ooussi,  quond  soun  muoou  s'obouîiavo, 

Molgré  so  chargeo  lou  levavo. 

Et,  si  lou  gardo  fourestier 

Ovio  fa  soun  ooubereitier, 

Un  bouon  jous  sur  uno  sopino 

Oouriec  vegu  so  tristo  mino  ; 

Et  pourtont,  o  dire  entre  nous, 

Vn  ognec  n'ero  pas  plus  doux . 

Ein  filont  lou  long  de  Meirosso  -, 

Mounta  dessus  so  viello  rosso, 

Preinguec  :  Lorouchetto,  Sodou, 

Embe  Tronleret  Cournillou. 

Quaouqueis  houmeis  de  ves  Mouleiras% 

De  Chatilliou,  de  las  Nouneiras, 

De  Reqoubec,  d'Aï,  de  Mountmoou, 

DeChomoloc  et  deVossioou, 

Veingueroun  oussi,  fifre  ein  teto, 

Per  être  d'oquello  counqueto, 

Que  proumetio  de  lous  donnas 

De  lo  gloiro  et  de  que  dinas. 


1  Romeyer,  \illage  ù  trois  kilomètres  de  Die. 

2  Mérosse,  petite  rivière  du  Diois. 

^  Molière,  Châtillon,  les  Nounières,  Rocoubeau,    Aix,  Montmort,  Gha- 
maloc,  Vassieux,  petits  villages  des  environs  de  Die. 


POUEISIAS    DIOISAS  43 

Pleno  de  joie  et  d'esperonço 
Millo  fcis  mai  que  de  pitonço, 
L'orraevo  otteindio  soiin  deipai-t 
F]t  disio  que  se  fosio  tard. 
Voulont  ainsi  lo  satisfaire. 
L'eivequé  lo  teinguec  pas  gaïre, 
Car  oou  plutoou  lo  benissec, 
Li  dounec  Tordre  et  pei  portée. 
Des  que  las  troumpétas  souneroun, 
Aneis  et  saoumas  reguinerouu.  ; 
Dius  lou  noumbré  gnoguec  beoucop 
Que  fogueroun  pas  rein  qu'oco  : 
L'on  einteindio  quàouquo  bouri(iun 
Segoundas  si  bien  lo  musique, 
Que  Plossou  S  si  fouort  musicien, 
îN'oourio,  mofé,  pas  fa  si  bien. 
Ein  soupiront,  touto  Tormeyo 
Obondounavo  uno  couutrejo 
Si  richo  quond,  o  mei  juillet, 
Chacu  meissouno  o  plein  puguet; 
Mais  olors,  mai  fugues  superbo; 
Lo  recolto  n'ero  qu'ein  herbo; 
Lo  frucho  ooussi,  de  soun  cousta, 

N'éro  pas  moyuro  o  meita. 

On  trouvavo  bien  dins  las  runas 

De  bouchossoux  et  quaouquas  pi'unas, 

Perdigounas  et  groou  domas, 

Très  bouonas  o  lous  otfomas 

Ou  per  lous  eimpourtas  las  barjas. 

Mai  d'un  regrètavo  Chomarjas  -, 

Oquel  aoutre  o  l'Ormelorio 

0  fa  sous  odiooux  per  lo  vio; 

Grnoguec  plusieurs  que  ves  Pissignas 

N'eibroutouneroun  pas  leurs  vignas; 

Oquoou  d'aqui  ves  Chomqueira 

Laissée  soun  triooulé  soun  goru. 

i  Musicien  de  bastringue. 

2  Ghamarge,  Armélerie,  Pissigne,  Clianquei.a,  Flo.eaux,  Comanes,  Saint- 
Pierre,  le  Périer,  quartiers  de  Die  et  de  la  banlieue. 


, 


44  DIALECTES    MODERNES 

Onfin  de  Floureoux  o  Coumano, 
On  veyo  casi  plus  uno  amo. 
Sont-Peire,  ainsi  que  lou  Perrier, 
Fugueroun  toou  laissa  dorier  ; 
Et  Zelo,  que  soun  père  exhorte, 
Molgré  lou  terrible  Lomouorto, 
Oousec,  oou  pouont  de  Chondilliou, 
Preindre  maï  d'un  eicoutilliou. 

Quaoucu,  beleou,  veindrec  me  dire  : 
Moun  comorade,  volei  rire, 
Dins  lou  nombre  n'ei  pas  coumprei 
Ce  que  Mounard  ovio  counduei; 
Foou  donne  qu'oquello  bello  troupe 
Volé  plus  jis  mingeas  de  soupo  ? 
Si,  mais  creins  lous  cops  de  bâtoux, 
Et  meipriso  lous  Solliensoux  : 
Restée  per  prudonco  o  lo  villo, 
Vounté  fuguec  pas  inutilo. 
Car  priée  lou  bouon  Dioou  tout  lou  jour 
Per  Formeyo  et  per  soun  retour. 
Mais  peytout  o  Thumous  guerriero 
Vouguec  pas  restas  ein  priero, 
Embe  soun  siblet  lous  seguec, 
Et,  mofé  se  lei  distinguée. 
Ein  otteindont  fosio  soun  crané, 
Mounta  dessus  lou  bât  d'un  ané, 
Ocota  sous  soun  bounet  rouei, 
Courdiont  lo  pouncho  de  soun  fcuei  ; 
Quond  Toguec  finie  s'eissojavo 
0  fas  flic,  flac,  flac,  pei  chontavo. 

Tout  d'un  cop  soun  ané  s'eimpouorto 
Et  reguino  de  tallo  sorte 
Que  moun  Peytout  vein  coumo  un  fouel 
Cheire  o  croumpoloux  sus  lou  couoi, 
N'ei  pas  tout  :  rélévont  lo  têto, 
L'onimal  oousitoou  lou  jieto 
Sus  lo  croupo,  vounté  restée 
Tont  quo  lo  fooucaïro  teinguec  ; 


POUEISIAS    DIOISAS  *^ 

Mais  lo  bestio,  qu'oco  geinavo, 
De  las  douas  jombas  reguinavo, 
Si  bien  que, sein  lâchas  TesthoQU, 
Lou  cavalier  virée  per  soou. 

Mais  reveueins  o  notro  troupo. 
Que  sus  ello  ovio  paou  de  poupo. 
Lous  aneis  morchavoun  prumiers; 
Eroun  bien  cinquante  o  paouprès, 
Coumptont  oqueloux  que  mountavoun. 
Tout  coumo  oqueloux  que  pourtavoun. 
Perque  dires?. . .  et  perquepas: 

Quand  eroun  ein  bas, 
L'on  veyo  jis  de  differeinço, 
D'oluro  ni  de  counteneinço; 
Sus  lo  routo  brouncheroun  fouort 

Et  teingueroun  toujous  lou  bouort, 
Ein  morchontla  tête  ossez  basse, 

Coumo  faï  touto  oquello  raço; 

Ou  bien  lo  levavoun  ein  naou, 

Per  veire  si  seintio  très-maou 

Lou  pissa  qu  ein  chomin  trouvavoun, 

Et  qu  embe  un  grand  plaisis  niflavoun. 

Oprès  venio  lous  fessoueiriers 

Vount  on  veyo  Gustou  Boueissier*. 

L'eigaïre  eimpourtec  son  eissado 

Dins  oquello  grondo  croisade; 

D'autreis  pourteroun  lour  fessou, 

Leur  eiterpo  et  lour  eicoussou, 

Per  eicoueire  uno  tallo  raço. 

Sus  l'eiponlo  ovion  bien  lour  biaço, 

Mais  souloment  per  li  boutas 

Ce  que  poueirion  escomoutas. 
Ofin  de  lei  preindre  uno  bosse, 
Dedins  l'iovion  bouta  lo  cesse 
Vount  se  trouvavo  eincas  oeu  bouort 
Las  traças  deeu  froumagé  fouort. 
Polbés  tenio  toujous  le  têto, 


*  Auteur  dp  re  poème 


46  DIALECTES    MODERNES 

Tout  lier  de  fas  timblas  lo  guêto, 
Segu  de  Goougné,  de  Toueira, 
De  cri-cri  Mourliet,  de  Coura  ; 
L'iovio  bien  eincas  Toine  Pleno, 
Lonfré,  Truchou,  Vollonoir,  Ooubeno. 
Donsolounbro,  Poivre,  Goougnou, 
Boyard,  Jon  Coucourdo,  Bonou, 
Touzé,  Pota,  Colliet,  Juncheiras, 
Jus,  Pontreimpo,  lous  doux  Boueideiras, 
Bouligou,  Foraou,  Bajoré, 
Embe  Chonas  et  G-oudouré. 

Molgré  lou  trin  et  las  olarmas, 
Chonas  respeindio  quaouquas  larmas, 
Ooussi  grossas  que  de  fojoou  ; 
N'éro  pas  per  ré,  soun  coueiroou, 
Que  proumetio  tout  per  soun  âge, 
Venio  de  fas  lou  grond  vouyage  ; 
Cepeindont  ero  bien  bâtit 
Et  doou  père  ovio  Foppetit. 
Quond  elou  sooupec  lo  nouvello 
Et  si  peniblo  et  si  cruello 
0  soun  cœur,  ero  oou  Mortouret  * , 
0  foueire  per  moussus  Rousset. 
Soun  aine,  que  venio  lou  quaire, 
Ein  Topercevont  li  criée:  «  Père, 
Ei  mouort!!! — Mouort  !  »  répliquée  Chonas; 
Et  l'eicho  répétée  tout  bas  : 
Mouort!!  Opres,  dubront  plus  lo  boucho, 
Restée  plonta  coumo  uno  soucho, 
Sein  poueire  levas  soun  fessou 
Oppuya  sus  un  polissou. 
0  lo  fin,relevont  lo  faço, 
Poussent  un  soupir  dins  l'espaço, 
Se  dissec  :  «  0  bien  paou  laissa 
Notre  mori  qu'ei  trepossa  ; 
Si  dins  lou  paou  de  bien  que  laisse 
Gno  pas  de  que  fas  uno  caisse  »  ; 

*  Martouret,  quartier  d'i  la  banlieue  de  Die. 


POUETSIAS    DTOISAS 

Et,  porlont  o  moussus  Rousset  : 

«  Preitec-me  vingt  soous,  si  vou  plaît.  » 

Si  lou  grond  Chonas  rounguignavo. 
Lou  bouon  Mourliei  raccoumpagnavo, 
Fosio  chorus,  car  o  cri-cri 
Venion  de  preindre  soun  chobri. 
Lo  maire  ooussi  n'oguec  pas  graço, 
On  vous  lo  sonec  dessus  plaço, 
Seins  remissioou.  L'on  duoou  peinsas 
Tout  ce  que  duooupec  se  possas 
Dins  lou  cœur  d'oquoou  paouré  diable  : 
Lou  dire,  n'ein  sioou  pas  copablé. 
Et  que  dirioou?  Qu'opres  lou  vouol, 
Cri-cri  Mourliet  deveinguec  fouol  ; 
Pei  que  de  teimps  ein  teimps  gueulavo, 
Ollont  de  lo  grongeo  o  lo  cavo  : 
((  0  !  mo  chabro,  qu  omavou  tout  ! 
ïi  qu  ai  pas  quitta  d'un  instont, 
Que  sias  dounc  deveinguo,  pechaïre! 
Te  veyou  plus  dedin  toun  caïre . . . 
Oh  î  non,  te  sias  pas  eiloigna 
De  mi  que  t'ai  toujous'.sougna... 
0  qu  ei  fini,  poueirei  plus  vioouré, 
Voou  devenis  sec  coumo  un  lioouré 
Ein  buvont  plus  jis  de  toun  la; 
Pourtont,^'uno  bouono  eicuela 
Forio  de  bien,  et  lou  courage 
Poueirio  venis  per  lou  vouyage; 
Mais  mous  regrets  soun  superflus, 
0  !  ma  chabro,  te  veirei  plus  !  » 

Dorier,  coumo  oco  se  protiquo, 
Tout  lou  bogage  de  lo  clique 
Ero  escourta  de  fouteirooux 
Qu  eincholavoun  dessus  lous  muoous. 
L'iovio  douze  ou  trezé  choretas 
Vount  avion  bouta  de  fourchettas, 
D'houlas,  de  peirooux  et  de  plats, 
Lou  tout  preste  per  fricoutas 
Etions  rouliersque  las  menavoun 


48  DIALECTES    MODERNES 

Eroun  de  grivois  que  pichavoun 
Sus  Piaré  ooussi  bien  que  sus  Jon, 
Quond  ovion  lour  tovelo  ein  mon; 
Surtout  Jon-de-Bri,  de  Sont-Peiré. 
Ero  olors  que  foujo  lou  veire 
Se  bolonças  d'eici,  d'eilaï, 
Coumo  tout  bouon  choretier  faï. 
Mais  lou  plus  fouort,  lou  plus  terrible, 
Et  cepeindont  assez  paisible 
Quond  lou  poussavoun  pas  o  bout, 
Ero  moun  cousi  Poyonout. 

Tout  ein  bobilliont,  tont  morcheroun 
Que  dins  douas  houras  arriveroun, 
Las  deints  longeas  coumo  un  fessou, 
Dovont  lou  pouont  de  Sonto-Croux  •. 
Quaouqueis  goulavis  de  l'ormeyo 
Tocheroun  de  gagnas  Fintreyo 
Doou  couveint,  per  se  fas  dounas 
De  que  poueire  un  paou  deijeinas. 
Un  moine,  ein  veyont  uno  escouado, 
Se  deitochas  de  lo  croisado, 
Fuguec  tout  dret  dire  oou  prieur  : 
«  Péré,  tretec-me  de  monteur 
Si  ce  qu'aï  vegu  de  la  pouorto 
N'ei  pas  uno  bello  cohorto  : 
Tromblec,  car  s'ei  venoun  d'un  trin 
0  rein  laissas  eici  dedin.  » 
Lou  bouon  prieur,  qu'oco  reveillo, 
Li  dit,  ein  se  grottont  l'oonreillo  : 
«  Vaï  dire  o  notre  cueisinier 
D'eicoundre  tout  dins  lou  cellier  ; 
Oprès  irez  caire  mon  fouorto. 
Surtout  sororez  bien  lo  pouorto; 
Mais,  si  roncouontrec  l'ennemi, 
Disei  pas  que  sioou  per  eici .» 

Opendant  lo  chorpajo  orrivo  : 
Tout  dessueito  on  li  crio  :  «  Qui  vivo  ?  <» 

♦  Sainte-Croix,  village  des  environs  de  Die,  où  se  trouve  un  pont  sur  la 
Dr6me . 


POUEISIAS  DIOISAS  49 

Siens,  dit  l'un,  quaouqueis  moluroux 
Que  vous  demondein  o  genoux 
Lo  cliorita  que  Dioou  coumondo, 
Souloment  de  pon  et  de  viondo . 
Pourtont,  coumo  ovein  bien  pati, 
Buoourion  un  pechot  cop  de  vi; 
Vetoqui  ce  que  nous  omeno. 
—  Quond  siée  veingus?  —  Uno  vingtaino. 
Vingt  sorio  rein;  mais,  per  donnas. 
Nous  faudrio  diobloment  zeunar  ; 
Ainsi,  frèreis,  Dioou  vous  ossisté», 
Dit  lou  moine  d'un  air  bien  triste. 
S'ein  oneroun,  oqui  dessus. 
Très  fotigas,  surtout  dejus. 

Dins  lou  couveint  se  rossureroun, 
Dès  que  l'eichino  lous  vegueroun, 
Et  dision  :  u  Oqueloux  gueusards 
On,  mofé,  l'air  de  gronds  ponsards. 

Dioou  gardé  qu'une  tallo  troupo 

Chaye  dessus  un  plat  de  soupo  ; 

L'ovolorion  sur,  quond  lou  plat 

Sorio  de  lo  grondous  d'un  prat.  » 

Mais  o  Pountaï*,  queintobounbonço, 

Quond  las  deints  intreroun  cin  donso  ! 

Dins  un  moumeint  tout  fugue c  net, 

Sus  lo  taoulo  et  sus  lou  bufet  ; 

Pei  cheigueroun  sus  lo  voulayo 

Ofin  de  tas  grondo  ripayo; 

Oprès,  de  lo  cavo  oou  plonchout, 

Fourfouyeroun  casi  pertout. 

Lou  fuo,  lou  choléra,  lo  pesto, 

Laïssoun  be  quaoucorein  de  resto; 

Mais  eloux,  dins  oquel  eindret, 

Fogueroun  raflo  de  bidet  : 

Tout  fuguec,  dins  oquello  lutto, 
Mingea  dins  meiu  d'uno  minute. 

Village  qui  se  trouve  entre  Die  et  Sailians. 


60  DIAXECTES    MODERNES 

Et  lour  oppetit,  o  lofin, 

Venio  de  se  boutas  ein  trin. 

Oprès  de  tallas  beatillias, 

Prenoun  tous  lours  sacs  et  leurs  quillias. 

Disoun  gramocis  et  s'en  vont 

Offomas  coumo  oouporovont. 

Pei  chonteroun  per  las  compagnas  : 

((  Onein,  efons  de  las  mountagnas  », 

Et  SoUiens  pouvion  remorquas, 

Que  tous  lo  chontavoun  eincas. 


(fin  DOOl"  CHANT  II 


SUR    l<KS  PATOIS    \)K    b'KANCM 

{Suilr) 


InMiini.ircliais,  iloiuiiiih"  et  li:iiiii\iii  siliK'  sur  In  |);ii'()iss(>  des 
Cluipi-Uos-Hourhoii,  diins  lu.  ci-dovaiil  \W\o  IVaiicaiso,  inaintcî- 
iiaiit.  (iisirici  do  l\(i/(\v  oi  dc'pai'hMiKMil  de  St>iii(>-(>l-Marti(\ 
rtMil't-rmr.  ainsi  i\no  ht  paroissi»  doiH  il  dcpciid,  un  |n'lil,  ii(»iiilirc 
dMiabitants,  d'iiii  cai'aoltM'o  iiaciliinu^  do  iiKciirs  (U)iu',iis  (>l,  pu- 
i\'s,  pauvres  païu'.o  iprils  s(»iit  l'iiviroiiiit'S  de  loiilcs  |)arls  d'un 
des  |)liis  i^rauds  propricta.ii'(>s  de  l''i'aiu'(>,  M.  de  l'eut liièvro, 
l'iie  siiii;ularil-('  lVa.|ipaiit.e  est  ([iraulaiit  les  lialiil.aiits  de  hi 
pai'oisse  (lt>s  CliafielU^s  sont  lraii(|uilles  et.  d(>  lion  aee.ord,  au- 
(aiil  les  liahilaiils  d(>  Marlt>,  (|iii  iTesl  (\ni\  nue  diMui-limie, 
sont  tui'bideiits  (M  pi'oeessil's.  \ic  laiif^aii'e  eoinnie  les  iu(0urs 
de  ee  eaiilDii  si>  rt'sstMit.  de  la.  proxiuiit.é  de  lu  ea])it.al(!  ;  s'il 
iiian(|Ue  il'iirliaiiitt>,  il  (^st  exempt.  dt>  i;i'ossièi'(dé,  ("est  un 
vieux  iVaueais,  tel  (pi'on  le  trouve  dans  la  Ixuiclie  du  peuple 
de  Paris,   et   (|ue   l.out.   hduinu»    sachant  le    français    |»(>u(.    en- 

ItMldl'i>. 

11  rèj;ne  dans  le  canton  un  j;ra.nd  amour  pour  la  K,(''vo- 
luiioii.  Co  (|ui  pa.rt.ouf  me  parait  le  i)his  ^v  attacher  le  iuhi[)1() 
est  l\'tal)lissement  de  Tt'iralitt'  ;  il  s\mi  l'oruie  uno  iddc  plus 
juste  et  plus  chère  (|ue  de  la  liberté  :  la  première  suffit  au 
Huiintiou  do  la  seconde.  L'épUité  est  Pidolo  des  ignorants, 
la  lilierté  est  celle  des  philoso[)lies.  La  Révolution  fait  chaque 
Jour  des  proj^^rès  rapides  dans  les  esprits  et  dans  les  choses;  la 
Constitution  pourra  et  doit  être  amendée,  mais  ses  bases  sont 
immoi'telles.  u  8anabilesfecit  (Deus)  nationes  orbis  tcrrarum.» 
Cette  prière  est  exaucée  :  a  Constitue,  Domine,  legislatorem 
super  eos,  ut  sciant  gentes  ([uoniam  hominos  sunt.  » 


52  DIALECTES    MODERInES 

Sullj,  dans  le  département  du  Loiret,  district  de  Gien, 
chef-lieu  de  canton,  est  peuplé  de  2,400  habitants,  d'un  ca- 
ractère paisible  et  sage  et  très-patriotes.  L'éloge  que  je  viens 
de  faire  d'un  village  du  département  de  Seine-et-Marne  est 
aussi  celui  de  la  ville  de  Sullj.  Les  vertus  pacifiques  et  bien- 
faisantes de  son  ci-devant  seigneur  lui  ont  conservé  les  sen- 
timents d'amour  et  de  respect  dont  il  a  toujours  joui.  Le  curé 
y  est  aussi  très-aimé  ettrès-respecté.  Cependant  hier,  13  mars, 
ce  bon  pasteur  étant  allé  prendre  possession  de  sa  nouvelle 
succursale,  une  vingtaine  d'habitants,  presque  tous  mariniers, 
gens  féroces,  allèrent  lui  témoigner  leur  mécontentement  de 
ne  l'avoir  point  vu  à  la  grand'messe  de  l'église  paroissiale, 
et  lui  dirent  qu'il  n'avait  qu'à  voir,  qu'ils  en  prendraient  un 
autre.  Le  curé  leur  répondit  qu'il  se  partagerait  alternati- 
vement chaque  dimanche,  avec  son  vicaire,  entre  la  paroisse 
et  la  succursale  ;  il  remarque  qu'ils  n'ont  laissé  échapper  au- 
cune mauvaise   parole,  et  il  a  ri  de  leur  boutade. 

J'entends  beaucoup  les  riches  parler,  dans  ce  pays-ci,  de  la 
misère  du  peuple,  et  le  maire,  qui  est  aussi  sage  que  patriote, 
n'en  remarque  pas  moins  que  ce  peuple  est  mieux  habillé  et 
plus  gai  qu'avant  la  Révolution,  J'ai  vu,  de  l'autre  côté  de  la 
Loire,  les  dommages  qu'elle  a  causés  en  charriant  des  quantités 
énormes  de  sable  dans  la  crue  de  novembre  1790,  mais  je  n'ai 
rien  vu  qui  me  portât  à  croire  que  ce  malheur  mît  personne 
dans  la  souffrance. 

Quoique  Sully  soit  éloigné  de  quarante  lieues  de  Paris,  on  y 
parle  le  même  français  qu'aux  Chapelles-Bourbon,  qui  n'en 
sont  éloignées  que  de  dix  lieues. 

Je  finirai  par  une  observation  que  je  voudrais  voir  impri- 
mée et  réimprimée  dans  les  livres  que  tout  le  monde  lit.  Lorsque 
je  suis  venu  à  Paris,  je  m'attendais  à  ne  trouver,  parmi  les 
personnes  qui  ont  la  réputation  de  bien  parler,  aucun  accent 
marqué,  et  j'y  ai  reconnu  les  accents  de  toutes  les  provinces. 
On  semble  ignorer  qu'une  prononciation  vicieuse  défigure  le 
français  et  lui  ôte  ses  grâces  propres.  L'accent  gascon,  que 
beaucoup  de  personnes  sont  convenues  de  trouver  joli,  ne  sied 
pas  mieux  à  la  langue  française  que  l'accent  de  la  capitale  au 
jargon  bayonnais.  J'ai  remarqué  aver-  poim^  la  grande  influence 


LETTRES    A    GREGOIRE  53 

des  prononciations  des  différents  départements  sur  la  vraie  pro- 
nonciation de  la  lanj^ue  française.  On  est  maintenant  souvent 
dans  le  doute  si  Ton  prononcera  un  e  ouvert,  un  e  fermé  ou  un 
e  muet,  dans  beaucoup  de  mots.  J'ai  recommandé  aux  gens  de 
lettres  la  cause  de  la  langue  qui  fait  leur  gloire.  Des  altéra- 
tions dans  sa  nature  pourraient  lui  ôter  de  son  unité  et  de  son 
élégance.  C'est  en  s'élevant  contre  les  abus  d'un  pareil  genre 
et  en  citant  les  délits  au  tribunal  du  goût  que  l'on  parvient  à 
les  corriger. 

Au  château  de  Sully,  le  15  mars  1791. 

•) 

Note  de  Grégoire:  Patois  des  ctj-devant  Maçonnais,  Uombes,  Bresse) 

RÉPONSES  AUX  DIFFÉRENTES  QUESTIONS  PROPOSÉES  DANS  LA  LETTRE 
CIRCULAIRE  DE  M.  l'aBBÉ  GRÉGOIRE,  EN  DATE  DU    13  AOÛT 

1.  —  La  langue  française  n'est  principalement  en  usage  que 
dans  nos  villes  et  entre  les  personnes  aisées.  Les  gens  de  la 
campagne  l'entendent,  mais  ne  s'en  servent  point  entre  eux. 
Ils  parlent  une  espèce  de  patois,  qui  est  unique  dans  chaque  pa- 
roisse. 

2.  —  Il  est  possible  de  déterminer  l'origine  de  ce  patois. 
Selon  toute  conjecture,  c'est  un  composé  des  différentes  lan- 
gues des  peuples  qui  ont  successivement  asservi  ces  contrées. 
Le  fond  de  ce  jargon  est  un  mauvais  français,  dénaturé  dans 
son  essence  et  sa  prononciation,  dans  lequel  on  reconnaît  une 
multitude  de  mots  latins,  ce  qui  nous  rappelle  la  conquête  des 
Gaules  parles  Romains  et  les  temps  antérieurs  et  postérieurs. 

3.  —  Comme  ce  patois  ne  jjaraît  dériver  d'aucune  mère  lan- 
gue, on  n'y  voit  point  non  plus  de  termes  radicaux,  ou,  s'il  en 
existait,  ainsi  que  des  termes  composés,  ils  appartiendraient  à 
la  langue  latine  ou  française. 

4.  —  On  y  trouve  beaucoup  de  mots  latins,  comme  il  a  été 
dit  plus  haut. 

5.  —  Il  y  a  affinité,  pour  ne  pas  dire  identité,  avec  le  fran- 
çais ;  la  différence  consiste  principalement  dans  la  transposi- 
sition  des  lettres  qui  composent  le  mot,  dans  la  substitution 
d'une  voyelle  à  une  autre,  comme  dans  les  mots  suivants  : 
Mocan,  au  lieu  àeMâcon;  tarife,  au  lieu  de  terre;  à^ns  le  retran- 

4 


51  DIALECTES    MODERNES 

chement  ou  adilitioii  d'une  voyelle,  comme  il  suit  :  le  foua,  au 
lieu  de  feu;  le  pan,  au  lieu  de  pain;  le  cheneve,  au  lieu  de  chan- 
vre, etc. 

6.  —  D'après  ce  qui  vient  d'être  expliqué,  les  noms  employés 
à  désigner  les  plantes,  arts,  métiers,  etc.,  ne  peuvent  avoir 
que  beaucoup  de  ressemblance  avec  ceux  de  notre  langue. 

7.  —  Au  moyen  de  ce  que  [  le  patois  ]  participe  de  deux  lan- 
gues, il  n'est  point  rare  de  trouver  plusieurs  mots  pour  expri- 
mer la  même  chose. 

8.  —  Il  est,  à  la  campagne,  d'un  usage  général. 

9.  —  Le  nombre  des  mots  propres  à  exprimer  les  idées  et 
les  objets  intellectuels  est  très-resserré,  par  la  raison  que,  la 
vie  des  gens  de  la  canipagne  étant  purement  physique,  le 
monde  idéal  ne  peut  que  leur  être  étranger. 

10.  —  Les  termes  contraires  à  la  pudeur  ne  sont  pas  en 
grand  nombre,  mais  ils  sont  de  la  dernière  crudité.  Comme  ils 
sont  de  leur  nature  très-significatifs,  il  semble  qu'ils  devraient 
ouvrir  l'esprit  au  libertinage  ;  cependant  les  mœurs  ne  sont 
pas  plus  dépravées  qu'ailleurs. 

11.  — Les  jurements  les  plus  usités  se  bornent  à  une  demi- 
douzaine,  et  sont  à  peu  près  les  mêmes  que  dans  l'idiome  na- 
tional. 

12.  —  On  trouve  quelques  locutions  assez  énergiques,  ou 
plutôt  originales;  mais  elles  paraissent  tenir  plutôt  de  la 
tournure  des  esprits  que  de  la  richesse  de  la  langue. 

13. — Les  finales  sont  beaucoup  plus  communément  voyelles 
que  consonnes. 

14.  —  La  prononciation  n'est  ni  gutturale,  ni  douce,  ni  sif- 
flante ;  elle  se  fait  à  pleine  bouche;  elle  est  plate  et  fortement 
accentuée. 

15.  —  L'écriture  du  patois  est  parfaitement  la  même  que 
pour  le  français. 

16.  —  Ce  patois  varie  de  village  à  village  quant  à  l'accent, 
la  prononciation  et  aux  finales. 

17.  —  On  ne  le  parle  point  dans  les  villes. 

18.  —  Il  embrasse  toute  la  partie  de  la  France  connue  sous 
le  nom  de  Maçonnais,  Dombes,  Bresse,  etc. 

19.  —  [Les  campagnards]  s'énoncent  plus  volontiers  en 
français  que  les  gens  de  ville  ne  parlent  patois. 


I-ETTRES    A    GREGOIRE  55 

20.  —  Les  instructions  se  sont  toujours  faites  et  se  font  en- 
core en  français  ;  mais  il  n'y  a  pas  de  doute  qu'elles  fussent, 
sinon  plus  fructueuses,  du  moins  plus  à  leur  portée,  si  elles  se 
faisaient  en  patois. 

21.  —  Il  n'existe  ni  grammaires  ni  dictionnaires  de  ce  dia- 
lecte. 

22,  —  Les  églises  n'offrent  nulle  part  aucune  inscription 
en  cet  idiome. 

23,  24,  25.  —  [Néant.] 

26.  —  Les  proverbes  sont  assez  communs,  mais  ils  ne  sont 
point  particuliers  à  ce  dialecte. 

27.  —  Le  patois  influe  sur  les  mœurs,  en  ce  qu'il  fait  des 
gens  de  campagne  une  caste  isolée  et  séparée,  qui  ne  commu- 
nique point  avec  la  ville.  De  là  les  mœurs  sont,  à  la  vérité, 
plus  austères;  mais,  d'un  autre  côté,  leur  caractère  est  plus 
rude,  plus  sauvage,  et  réciproquement  cette  teinte  réfléchit 
sur  la  langue. 

28.  —  Leur  idiome  est  toujours  à  peu  près  le  môme;  mais 
la  fréquentation  des  villes  leur  donne  plus  de  facilité  pour 
entendre  et  parler  le  français. 

29.  —  L'importance  religieuse  de  changer  ce  patois  con- 
sisterait en  ce  que  les  instructions  parochiales  [sic]  devien  - 
draient  plus  faciles  et  plus  intelligibles  ;  l'importance  politi- 
tique  consisterait  en  ce  que  les  campagnes  s'identifieraient 
avec  les  villes. 

30.  —  Les  moyens  seraient:  1°  la  composition  d'un  caté- 
chisme national,  dans  lequel  la  partie  du  dogme  et  de  la  mo- 
rale serait  énoncée  en  termes  les  plus  clairs  et  les  plus  sim- 
ples. Dans  cet  ouvrage,  qui  serait  encore  un  compendium  des 
bases  politiques  de  notre  constitution,  seraient  détaillées 
toutes  les  qualités  qui  doivent  détei-miner  les  suifrages  des 
citoyens  dans  le  choix  des  aspirants  aux  places  et  aux  di- 
gnités; —  2°  L'établissement  de  quelque  école  gratuite  propre 
à  remplir  le  but  de  cet  ouvrage,  ouverte  tous  les  jours  en  fa- 
veur de  la  jeunesse,  et  les  dimanches  et  fêtes,  dans  l'inter- 
valle des  offices,  spécialement  pour  les  grandes  personnes;  — 
3°  L'institution  de  quelque  prime  pour  exciter  l'émulation. 

31.  —  Dans  toutes  les  écoles  de  campagne,  l'enseignement 


5:  DIALECTES    MODERNES 

se  fait  en  français,  et  presque  partout  de  la  même  manière. 

32.  —  Très  peu  de  villages  sont  fournis  de  maître  d'école  ; 
on  n'en  trouve  que  dans  les  paroisses  considérables  ou  dans 
lesquelles  il  existe  des  fondations  à  cet  effet. 

33.  —  L'enseignement  dans  ces  écoles  se  borne  à  lire,  écrire, 
chiffrer. 

34.  —  Dans  les  paroisses  où  les  maîtres  d'école  sont,  par  le 
titre  de  la  fondation,  à  la  nomination  du  curé,  les  écoles  sont 
surveillées  par  lui  ou  par  son  vicaire  ;  mais  hors  ce  cas,  ce  qui 
est  très-rare,  ces  places  sont  indépendantes. 

35.  —  Les  curés  et  vicaires  n'ont  guère  de  livres  qui  puis- 
sent convenir  à  leurs  paroissiens. 

36. — Les  gens  de  campagne  n'ont  point  le  goût  de  la  lecture, 
parce  qu'à  peine  savent-ils  lire. 

37.  —  Le  catéchisme  et  quelques  livres  d'église,  voilà  les 
livres  que  l'on  trouve  chez  ceux  qui  peuvent  en  faire  usage. 

38.  —  Leurs  préjugés  sont  nombreux  ;  ils  tiennent  extra- 
ordinairement  à  leurs  habitudes,  leurs  coutumes.  Ce  qu'ils  ont 
vu  faire  à  leurs  auteurs  est  la  règle  invariable  de  leur  conduite. 
Minutieux,  petits,  superstitieux  dans  leur  religion;  la  terreur, 
la  crainte,  font  la  base  de  leur  dévotion . 

39.  —  Depuis  une  vingtaine  d'années,  s'ils  ne  sont  pas  plus 
éclairés,  ils  sont  au  moins  plus  éveillés.  Les  mœurs  sont  plus 
dépravées  et  les  principes  religieux  plus  affaiblis. 

40.  —  Les  principales  causes  sont  :  1°  le  vide  des  jour- 
nées de  dimanche  et  des  fêtes,  les  loiigues  veillées  d'hiver  ; 
2»  la  fréquentation  des  villes,  leur  exemple  contagieux  ;  3°  le 
retour,  le  passage  des  jeunes  gens  qui  sont  sortis  du  sein  des 
campagnes  pour  rouler  le  monde  ;  4°  la  multiplication  des  ca- 
barets. 

41.  —  Les  remèdes,  toujours  plus  aisés  à  indiquer  qu'à 
effectuer,  seraient  :  1°  de  diminuer,  sinon  de  détruire,  les  ca- 
barets ;  2°  de  remplir  les  intervalles  des  offices  par  quelque 
exercice  intéressant  et  instructif;  3°  de  fixer  les  jeunes  gens 
dans  le  lieu  de  leur  naissance,  etc. 

42.  —  Les  effets  moraux  sont  une  grande  satisfaction  :  1°  de 
voir  toutes  les  classes  réduites  à  leur  niveau  ;  2°  de  participer 
à  l'administration,  soit  directement,   soit  indirectement,  par 


LETTRES     A     GREGOIRE  57 

leurs  suffrages.  De  là  un  certain  ton  d'importance,  un  certain 
sentiment  d'orgueil  et  d'amour-propre  qui  les  rend  plus  exi- 
geants, plus  spéculatifs,  sur  la  conduite  que  l'on  tient  à  leur 
égard . 

[Le  reste  mam^ue.] 

5 
[Cy-devanl  Bourguignon.  —  Note  de  Grégoire 

RÉPONSE    AUX    QUESTIONS     DE     M.     GREGOIRE 

Il  est  impossible  de  répondre  à  toutes  les  questions  propo- 
sées par  M.  Grégoire  ;  on  ne  peut  répondre  qu'à  quelques- 
unes. 

1 .  —  On  parle  français,  et  bon  français,  dans  toutes  les 
villes.  On  y  est  plus  puriste  qu'à  Paris,  où  l'on  dit  :  Je  vou- 
drais bien  que  vous  aillez  [sic]  à  ...;  au  lieu  qu'en  Bourgogne  on 
dit  :  Je  voudrais  bien  que  vous  allassiez.  Mais,  dans  les  campa- 
gnes, le  paysan  parle  un  patois  particulier,  qui  varie  d'un  lieu 
à  l'autre,  quand  il  v  a  quelque  distance.  On  citera  que  le  patois 
de  Dijon  diffère  de  celui  de  Beaune,  qui  à  son  tour  diffère  de 
celui  de  Chalon,  de  la  Bresse  et  du  Morvan.  Mais  c'est  tou- 
jours le  même  patois,  et  l'on  peut  dire  qu'il  n'y  a  radicalement 
qu'un  seul  patois. 

2.  —  L'on  ignore  pleinement  l'origine  de  ce  patois. 

3.  —  Il  est  impossible  de  dire  s'il  a  beaucoup  de  termes  ra- 
dicaux et  beaucoup  de  termes  composés. 

4.  —  On  ne  connaît  pas  assez  le  celtique  pour  savoir  si  ce 
patois  contient  des  termes  dérivés  du  celte,  mais  il  contient 
des  termes  dérivés  du  latin  et  du  grec. 

5.  —  Il  y  a  une  affinité  marquée  avec  le  français,  et  il  est 
un  français  corrompu,  mal  décliné  et  plus  mal  conjugué,  et 
avec  des  tours  de  phrase  qui  sont  grecs  ou  latins.  Par  exemple, 
on  dit  :  Dimoinche  je  fions  lai  polée;  c'est-à-dire.  Dimanche  nous 
ferons  la  polée.  [Polée  est  une  réjouissance  de  table,  un  ban- 
quet proprement  dit,  qui  se  fait  quand  on  a  terminé  quelque 
travail  important,  tel  que  la  fin  de  battre  le  grain  dans  la 
grange,  et  que  tout  est  vanné.)  Ce  terme  polée  vit-nt  du  latin 
polenta,  employé  par  Columelle  pour  signifier  un  gâteau  de 
farine  d'orge  ;  et  le  terme  polenta  peut  venir  du  grec  7ro/-£v, 


58  LETTRES     A     GREGOIRE 

vertere,  versare,  volvere,  qui  exprime  Taction  de  pétrir  ou  le 
terme  du  battement  des  grains.)  On  dit  encore,  pour  le  dessein 
qu'on  a  de  faire  quelque  chose  :  A  m'ot  aivis  que  j  feras  bein  de 
dire,  etc.,  ce  qui  signifie  mot  à  mot  :  //  m  est  avis  que  je  ferais 
bien  de  dire,  etc.;  ce  qui  se  réduit  à  dire  en  français:  J'ai  envie 
de  dire,  ce  qui  s'exprimerait  en  latin  par  Est  mihi  animus  dicere. 
Les  contrées  voisines  ont  leurs  dialectes  particuliers;  et  le 
patois  bourguignon  paraît  avoir  été  propre  à  la  peuplade  qui, 
de  la  forêt  Hercynienne,  est  venue  occuper  la  Iranche-Comté 
et  la  Bourgogne.  Mais  dans  la  lisière  de  la  Champagne  le  pa- 
tois bourguignon  est  commun,  ainsi  que  dans  la  lisière  des 
autres  provinces,  et  cela  a  même  pénétré  plus  loin  que  la  li- 
sière. Feu  M.  Groslej  a  recueilli,  dans  une  des  éphémérides 
troyennes,  un  certain  nombre  de  mots  employés  populaire- 
ment à  Troyes,  et  il  y  en  a  beaucoup  qui  sont  du  patois  bour- 
guignon; mais  la  prononciation  champenoise  est  douce  et 
traînante,  celle  du  bourguignon  est  serrée  et  vive. 

6.  —  Ce  patois  a  ses  termes  propres  pour  certaines  plantes, 
certains  bois,  certaines  maladies,  et  pour  les  instruments  qui 
sont  propres  à  la  culture  qui  lui  est  particulière.  Mais,  pour 
les  arts,  les  métiers,  le  commerce,  ses  termes  sont  presque  les 
mêmes  que  ceux  de  l'idiome  national.  Dans  le  droit  coutumier, 
il  y  a  aussi  des  termes  propres;  il  est  impossible  de  donner 
la  nomenclature  propre  et  exclusive  de  ce  patois. 

7.  —  Un  mot  ne  signifie  en  général  qu'une  chose;  cela  rend 
le  patois  fort  riche. 

8.  —  Ce  patois  abonde  partout. 

9.  —  Il  ne  manque  d'aucun  terme  pour  exprimer  ce  que  l'on 
veut,  ce  que  l'on  sait,  ce  que  l'on  pense,  etc. 

10.  —  Il  est  impossible  de  répondre  à  cette  question. 

11.  —  Il  n'a  de  jurements  que  ceux  du  français. 

12.  —  Il  a  des  termes  propres  à  lui  seul;  par  exemple,  un 
guerault,  ou  guarau,  ou  garau,  c'est-à-dire  une  pluie  à  verse 
de  courte  durée. 

13.  —  Les  finales  sont  plus  voyelles  que  consonnes,  et  elles 
se  terminent  presque  toujours  en  a,  quelquefois  en  o. 

14.  —  La  prononciation  est  vive  et  finit  en  élevant  la  voix; 
elle  est  un  peu  rude,  sans  être  gutturale  ni  sifflante,  mais  bien 
prononcée. 


DIAI.ECTFS   MODERNES  59 

15.  —  Non  [l'écriture  n'est  pas  autre  que  celle  du  français]. 

16  à  19.  —  Ce  qui  précède  répond  aux  questions  16,  17 
et  18,  et  il  faut  ajouter  que  tout  campagnard  entend  très-bien 
le  français  et  qu'il  y  en  a  beaucoup  qui  le  parlent.  Ceci  est  la 
réponse  à  l'article  19. 

20.  —  On  n'a  jamais  prêché  en  patois,  au  moins  on  ne  le 
croit  pas. 

21.  —  On  no  connaît  ni  grammaire  ni  dictionnaire,  si  ce 
n'est  l'espèce  de  dictionnaire,  fort  bien  fait,  de  M.  de  la  Mon- 
noye,  qui  se  trouve  à  la  suite  de  ses  Noëls. 

22.  —  Non.  [On  ne  trouve  pas  d'inscriptions  en  patois.] 

23.  —  Il  y  a  peu  d'ouvrages  en  patois.  On  vient  de  citer  les 
Aoèîs  de  la  Monnoye;  il  y  a  aussi  quelque  chose  en  dialogue 
dans  le  livre  in-4°  de  la  Fête  des  fous  de  Dijon,  ou  la  Mère  follv. 
Ainsi  ce  n'est  qu'en  poésie  et  en  style  léger  qu'on  a  écrit,  et 
point  du  tout  autrement. 

24.  25.  —  On  peut  aisément  avoir  à  Dijon  les  Noëls  de  la 
Monnoye.  Pour  la  Mère  folle,  on  ne  la  trouve  que  de  rencontre  ; 
cet  ouvrage  n'est  pas  rare. 

26.  —  Ily  a  quelques  proverbes  particuliers;  ils  sont  plus 
locaux  que  tenant  à  l'idiome. 

27.  —  On  ne  peut  répondre  à  cette  question  et  })resque  point 
à  la  suivante,  moins  encore  à  la  29*  et  à  la  30^ 

31.  —  L'enseignement  se  fait  en  français,  et  le  langage  or- 
dinaire en  patois. 

32.  —  Il  y  a  bien  des  endroits  qui  manquent  d'écoles. 

33.  —  Le  plain-chant,  et  rien  de  plus. 

34.  —  Oui  [les  écoles  sont  surveillées]  quand  les  ecclésias- 
tiques remplissent  leur  devoir. 

35.  —  Non  [ils  n'ont  pas  de  livres  à  prêter]. 

36.  —  Ils  aiment  beaucoup  les  histoires  des  Vies  des  saints 
et  de  la  Bible;  lorsqu'ils  ont  des  livres,  ce  sont  de  ceux-là  et 
rarement  des  autres. 

38.  —  Ils  sont  superstitieux  et  croient  aux  sorciers. 

39.  —  Depuis  plus  de  vingt  ans,  le  luxe  et  le  libertinage 
ayant  pénétré  partout,  les  mœurs  sont  devenues  plus  dé- 
pravées, sans  que  cependant  les  principes  religieux  soient 
affaiblis  dans  la  plus  grande  partie. 

40.  '  On  vient  d'exposer  la  cause;  le  remède  serait  une  in- 


60  DIALECTES    MODERNES 

struction  de  religion  solide,  pour  les  corriger  et  les  guérir  de  la 
superstition. 

41,  42.  —  On  trouve  des  affections  produites  par  l'intérêt 
plutôt  que  d'autres  sentiments.  Il  ne  faut  pas  s'égarer  sur  le 
patriotisme;  il  est  encore  loin.  On  est  tellement  habitué  à  Té- 
goïsme  et  à  l'intérêt  personnel,  qu'il  est  bien  diflScile  que  d'au- 
tres sentiments  succèdent  promptement.  Si  les  campagnards 
étaient  menacés  de  payer  plus  qu'ils  ne  payaient,  ils  réclame- 
raient bien  vite  l'ancien  régime. 

43.  —  Oui  [les  ecclésiastiques  et  les  nobles  ont  été  insultés] 
pour  certains  endroits,  et  non  pour  d'autres;  cela  dépend  de 
la  conduite  des  ecclésiastiques  et  des  ci-devant  nobles,  etc., 
etc. 

Note  de  Grégoire  :  Donné  par  M.  If  curé  d'Arnay-le-Duc  ;  patois 
de   Bourgogne. 


MAZILLE,  DIOCÈSE  DE  MAÇON,  PRÈS  CLUNY 

•28  décembre  1790. 
Monsieur, 

J'ai  l'honneur  de  répondre  à  la  vôtre,  que  j'ai  reçue  depuis 
huit  jours,  relativement  aune  série  de  questions  ;  je  ne  ré- 
ponds, Monsieur,  qu'à  celles  qui  regardent  ma  paroisse,  et  je 
marque  seulement  les  articles  qui  nous  concernent. 

1.  —  L'usage  de  la  langue  française  est  général  dans  notre 
pays  ;  ils  entendent  tous  le  français,  et  disent,  au  lieu  de  Nous 
voulons,  Je  voulons,  etc. 

2.  —  De  tout  temps  ils  ont  parlé  de  même. 

11.  —  Dans  la  colère,  il  y  a  beaucoup  de  jurements. 

14.  —  La  prononciation  est  douce. 

32.  —  Il  n'y  a  point  de  maîtres  d'école  dans  nos  villages. 

36.  —  Les  gens  de  la  campagne  aiment  beaucoup  la  lec- 
ture, et,  s'ils  ne  font  pas  instruire  leurs  enfants,  c'est  qu'ils 
n'ont  point  de  maîtres  d'école.  Ceux  qui  peuvent  le  faire  les 
mettent  pendant  l'hiver  dans  les  villes  voisines,  mais  le  nombre 
en  est  petit. 

39.  —  Ils  sont  plus  éclairés  depuis  vingt  ans  ;  les  mœurs 
un  peu  plus  dépravées  :  il  faut  l'attribuer   aux  petits  cabarets 


LETTRES     A     GREGOIRE  61 

de  village  où  l'on  donne  du  vin  à  toute  [heure]  de  la  nuit,  et  aux 
fêtes  baladoires  '. 

42.  —  LMntérêt  personnel  les  fait  plutôt  mouvoir  que  le  pa- 
triotisme. 

43,  —  Entre  eux,  lorsqu'ils  voient  passer  un  ecclésiastique, 
ils  disent  :  «Voyez  ce  calotin.  »  Plusieurs  disent  qu'il  n'en  fau- 
drait laisser  aucun,  surtout  des  chanoines  et  des  moines. 

C'est  tout  ce  que  je  puis  répondre  à  vos  demandes. 

Bernardet,  curé  de  Mazille. 

II 
Dialecte  de  l'Alsace 

On  ne  doit  pas  s'attendre  à  trouver  ici  de  longs  détails  sur 
le  dialecte  alsacien;  leur  place  ne  serait  pas  dans  une  Revue 
des  langues  romanes .  Ce  qui  nous  décide  à  publier  ces  quelques 
fragments,  c'est  leur  extrême  brièveté  d'une  part,  et,  de  l'au- 
tre, le  nom  d'Oberlin  ^  qui  ne  peut  manquer  de  leur  donner  de 
l'intérêt.  On  verra,  en  outre,  qu'il  y  est  fait  mention  d'un  opus- 
cule imprimé  relatif  aux  dialectes  de  la  Lorraine,  dialectes 
qui  n'ont  presque  rien  emprunté  aux  idiomes  germaniques. 


Strasbourg,  28  août  1790. 
Monsieur, 

Sensible  à  l'honneur  que  vous  me  faites  de  m' adresser  vos 
questions  nombreuses  sur  les  patois,  je  me  hâte  de  vous  en- 
voyer pour  première  réponse  l'essai  que  j'ai  fait  imprimer  au- 
trefois sur  ce  langage.  Vous  y  trouverez  peut-être  d'avance 
la  solution  de  quelques-uns  de  vos  problèmes.  Pour  les  autres, 
nous  tâcherons  de  vous  satisfaire  autant  que  nous  pourrons, 
M .  Stouber,  qui  me  charge  de  vous  présenter  ses  hommages; 
mon   frère,  auquel  je  vais  envoyer  votre  feuille  et  qui  sera 


'  Fêtes  de  village  avec  des  bals  champêtres. 

*  Il  y  a  deux  frères  de  ce  nom;  Jérémie- Jacques,  l'auteur  de  ces  lettres 
'1735-1806),  et  Jean-Frédéric,  celui  que  Grégoire  était  allé  voir  au  Ban- 
de-la-Roche  (1740-1826. 


62  DUT-ECTES    MODERNES 

sensible  à  l'honneur  de  votre  souvenir,  et  mon  chétif  individu. 
Vous  devez  vous  souvenir  de  ce  que  vous  avez  vu  au  Ban-de-la- 
Roche;  Tapplication  de  mon  frère  et  de  M.  son  devancier  pour- 
ront peut  être  servir  d'exemple  à  d'autres. 

Les  deux  communions  des  confessions  d'Augsbourg  et  Hel- 
vétique, en  Alsace,  doivent  des  remerciements  sincères  à  l'au- 
guste Assemblée  nationale  de  ce  qu'elle  a  pourvu  à  leur  sûreté 
en  fixant  leur  sort.  Vous  pouvez  compter,  M.,  sur  la  recon- 
naissance de  l'Université  de  Strasbourg,  qui  se  fera  un  devoir 
de  soutenir  les  décrets  de  la  nation.  Elle  doit  lui  servir  de  bou- 
levard contre  les  principes  ultramontains.  Pour  nos  ministres, 
il  faut  voir  comment  faire.  La  plus  grande  partie  est  bien  mal 
à  son  aise,  jouissant  des  pensions  qui  leur  ont  été  fixées  il  y  a 
plus  de  deux  siècles,  [à  une  époque]  où  les  denrées  étaient  à 
un  sixième  et  même  quelques-unes  à  un  dixième  de  ce  qu'elles 
coûtent  à  présent.  Ajoutez  qu'il  y  en  a  qui,  en  perdant  les 
dîmes  ou  n'étant  plus  payés  parceux  qui  les  perdent,  seraient 
réduits  à  mendier  leur  pain,  à  moins  qu'il  ne  soit  enjoint  aux 
districts  et  départements  de  leur  pouvoir  d'un  équivalent.  Ce 
besoin  est  urgent,  et  je  crois  que  nos  ministres  vont  faire 
leurs  représentations  à  l'Assemblée  là-dessus. 

M.  Rabaut  de  Saint-Etienne,  votre  confrère,  a  bien  voulu 
se  souvenir  de  moi;  je  vous  prie.  M.,  de  l'assurer  de  mes  hom- 
mages, de  même  que  M.  Gossin. 

Je  vous  embrasse  de  tout  mon  cœur, 

Oberlin,  Prof. 

Je  recevrai  avec  reconnaissance  les  ouvrages  précieux  que 
vous  me  promettez. 

2 

Strasbourg,  ce  13  novembre  1790. 
Monsieur, 

Il  est  temps  que  j'aie  l'honneur  de  faire  réponse  aux  ques- 
tions que  vous  avez  proposées  touchant  le  patois.  Je  l'aurais 
fait  plutôt  si  ce  n'était  pas  une  affaire  de  longue  haleine  et  quia 
bien  des  difficultés,  à  cause  de  la  manière  d'écrire  ou  d'expri- 
mer par  l'écriture  les  différentes  nuances  de  la  prononcia- 
tion. Vous  aurez  reçu,  il  y  a  quelque   temps,  V Essai  sur  le 


LETTRES    A    GREGOIRE  63 

patois  lorrain  que  j'ai  puliliô  en  1775',  et  que  j'ai  mis  à  la  poste 
à  l'adresse  de  M.  le  Président  de  l'Assemblée  nationale  ,  le 
30  août.  Vous  V  aurez  vu  que  j'ai  adopté  une  façon  d'écrire 
que  j'ai  crue  convenable.  J'en  ai  rendu  raison  à  la  page  85  et 
suivantes. 

J'ai  ramassé,  pour  satisfaire  à  vos  demandes,  des  renseigne- 
ments fournis  par  mon  frère,  qui  vous  prie  d'agréer  ses  hom- 
mages, et  par  les  régents  des  écoles  de  sa  paroisse.  J'ai  ré- 
fléchi moi-même  sur  quelques  articles,  de  façon  que  je  crois 
pouvoir  donner  d'assez  bonnes  réponses  à  la  plupart  de  vos 
questions  par  rapport  au  patois  du  Ban -de-la-Roche.  Mais,  au 
moment  que  je  vais  rédiger  ces  réponses,  je  m'avise  d'une 
chose  :  il  me  semble  que  le  meilleur  parti  à  prendre  est  de 
leur  donner  la  forme  d'un  petit  mémoire  qu'on  fasse  imprimer. 
Si  l'on  met  cette  méthode  partout,  on  profitera  dans  toute  la 
France  des  renseignements  donnés  dans  chaque  province,  et 
cela  mènera  à  des  recherches  ultérieures.  Les  noms  du  patois 
des  différents  départements,  étant  inconnus  hors  les  endroits 
ou  ils  sont  en  usage,  seraient  sujets  à  être  corrompus  et  alté- 
rés à  l'infini.  Étant  imprimés  sous  les  yeux  de  chaque  rédac- 
teur, on  sera  sûr  de  leur  correction.  Enfin,  Monsieur,  je  vais 
exécuter  mon  idée;  si  je  suis  le  premier  à  le  faire,  j'aurai 
donné  bon  exemple  à  suivre. 

Au  reste,  il  me  manque  encore  quelques  nomenclaturespour 
lesquelles  je  vais  presser  mon  frère  et  ses  coopérateurs.  Si- 
tôt que  je  les  aurai  reçues,  mon  petit  mémoire  sera  mis  sous 
presse  et  ne  tardera  pas  à  paraître  '-. 

Si  vous  approuvez  mon  idée,  vous  pourriez  inviter  les  per- 
sonnes qui  s'occuperont  de  cet  objet  dans  d'autres  départe- 
ments à  en  faire  autant.  Vous  pourrez  ensuite  travailler  avec 
plus  de  siireté  et  de  précision  sur  tous  ces  mémoires. 

Vous  savez,  Monsieur,  que  j'ai  ete  le  rédacteur  de  Y Almn- 
nach  d'Alsace,  auquel  je  crois  avoir  donné  une  forme  utile  et 
instructive.  Ce  serait  le  moment  de  faire  l'almanach  des  deux 
départements  du  Rhin.  Je  suppose  que  quelqu'un  de   Colmar 

*  Strasbourg,  in -8°. 

2  11  parut  a  Strasbourg  en  1791,  sous  le  titre  :ï  Observations  contenant 
le  patots  et  les  mœurs  des  gens  de  la  campagne. 


64  DIALECTES    MODERNES 

serait  tenté  de  faire  celui  du  Haut-Rhin;  mais,  au  moins,  je 
serais  charmé  de  ne  pas  voir  m'enlever  celui  de  notre  départe- 
ment du  Bas-Rhin.  Or,  étant  membre  du  district  de  Strasbourg, 
qui  est  en  contestation  avec  MM.  du  directoire  du  départe- 
ment du  Bas-Rhin,  j'ai  à  craindre  qu'on  ne  mette  des  empê- 
chements à  cette  entreprise,  comme  ces  Messieurs  en  mettent 
à  tout  ce  qui  tient  au  nouveau  mode  de  choses.  Je  pense  donc, 
Monsieur,  que  le  meilleur  moyen  serait  d'obtenir,  ou  plutôt 
d'être  chargé  par  l'Assemblée  nationale  de  la  rédaction  de  cet 
almanach.  Ne  croyez  pas  que  ce  soit  une  chose  peu  digne  de 
nos  législateurs;  de  tel  almanachs,  faits  dans  tous  les  départe- 
ments, répandraient  la  lumière  par  toute  la  France  et  servi- 
raient à  affermir  la  Constitution.  Je  vous  abandonne  mon  idée, 
Monsieur;  mais,  si  elle  obtient  votre  suffrage,  il  faudrait  vous 
occuper  sans  délai  de  cet  objet,  pour  que  cet  almanach  puisse 
paraître  au  commencement  de  l'année.  Pour  que  vous  puissiez 
en  parler  pertinemment,  je  vous  offre  ci-joint  l'almanach  de 
1789  et  le  supplément  pour  1790. 

—  Le  reste  de  cette  lettre,  qui  d'ailleurs  est  tronquée,  a  trait 
à  une  affaire  particulière  de  nul  intérêt. 

111 
Dialecte  wallon 

Observations  sur  le  patois  du  duché  de  Bouillon,  par  Aubry,  curé  de 
Bellevaux  et  président  de  l'Assemblée  générale  du  duché  souverain 
de  Bouillon  i. 

L'idiome  du  duché  de  Bouillon  est  commun  à  tous  les  habi- 
tants des  Ardennes  et  des  Pays-Bas,  connus  sous  le  nom  de 
Wallons,  parce  que  leur  langage  naturel  est  le  wallon  ou  l'an- 
cien français,  tel  à  peu  près  qu'on  le  parlait  lorsque  les  Francs 
et  autres  peuples  du  Nord  se  sont  confondus  avec  les  Gaulois, 
dont  le  langage  était,  à  cette  époque,  un  composé  de  celte  et  de 
latin.  C'est  pourquoi  le  patois  wallon,  en  usage  dans  le  duché 
de  Bouillon  et  dans  les  Ardennes,  est  un  assemblage  de  mots 
pour  la  plupart  dérivés   du  latin,  du  celte,  du  tudesque,  et 

'  Celte  pièce  est  une  des  plus  importantes  du  recueil  de  Grégoire  ;  il 
suffira  d"y  jeter  les  yeux  pour  s  en  convaincre. 


LETTRES     A     GREGOIRE  85 

quelquefois  du  grec.  Il  a  aussi  beaucoup  emprunté  des  lan- 
gues vivantes  que  parlent  les  peuples  dont  les  armées  ont 
fait  quelque  séjour  dans  les  Ardennes,  ou  avec  lesquels  les 
habitants  du  pays  ont  des  relations  à  raison  du  commerce  ou 
de  la  proximité,  tels  que  les  Français,  les  Flamands,  les  Alle- 
mands, les  Hollandais,  les  Italiens,  les  Espagnols  et  les  An- 
glais. 

Le  patois  du  duché  de  Bouillon  a  beaucoup  dégénéré  de 
l'ancien  wallon.  Depuis  une  centaine  d'années,  il  a  adopté  un 
grand  nombre  de  mots  et  d'expressions  françaises,  principa- 
lement dans  les  conjugaisons  des  verbes  :  cela  vient  de  ce  que 
cette  souveraineté,  étant  limitrophe  du  royaume  de  France  et 
sons  sa  protection  spéciale,  y  a  des  relations  continuelles. 

Le  wallon,  dans  le  pays  de  Liège  et  dans  les  provinces  bel- 
giques,  conserve  des  traces  plus  marquées  de  son  origine  : 
on  y  reconnaît  aisément  les  radicaux  des  langues  mères  ;  le 
flamand  et  l'allemand  fournissent  beaucoup  de  mots,  d'expres- 
sions et  de  termes  inconnus  dans  le  duché  de  Bouillon. 

Eu  général,  ce  patois  est  doux,  agréable,  sonore,  expressif, 
abondant,  grave  et  propre  à  exprimer  les  grands  mouvements 
de  l'àme,  les  actions  pathétiques  et  les  scènes  tragiques.  Il  est 
riche  en  noms  qui  expriment  les  vertus  ou  les  vices,  et  en  ver- 
bes qui  expriment  jusqu'aux  dernières  nuances  du  mouve- 
ment et  des  actions  corporelles  ;  mais  il  a  peu  de  termes  pour 
exprimer  les  idées  et  les  objets  intellectuels. 

11  n'y  a  point  dans  le  duché  de  Bouillon  de  termes  contrai- 
res à  la  pudeur  ;  ceux  qu'il  a  empruntés  de  l'italien  et  de  l'es- 
pagnol ne  sont  employés  que  pour  exprimer  des  idées  hon- 
nêtes. Dans  le  pays  de  Liège,  il  y  a  beaucoup  d'expressions 
basses,  viles,  bouffonnes  et  indécentes  ;  d'où  il  résulte  que  le 
langage  de  cette  contrée  est  singulièrement  propre  au  comi- 
([ue.  Il  y  a  aussi  beaucoup  de  jurements  orduriers  et  de  ter- 
mes pour  exprimer  les  mouvements  de  colère,  tandis  que  dans 
le  duché  de  Bouillon  il  n'y  en  a  aucun.  Cela  vient  probable- 
ment de  la  différence  du  caractère,  des  mœurs  et  de  l'instruc- 
tion nationale. 

On  trouve  dans  le  patois  wallon  une  grande  partie  des  ra- 
dicaux français,  outre  un  grand  nombre  de  termes  et  de  lo- 


«6  DIALECTES    MODERNES 

cutions   très-énergiques   qui   manquent  à  ce  dernier  idiome. 

Il  j  a  dans  le  corps  des  mots  beaucoup  de  diphthongues  et 
de  voyelles  réunies  ;  les  finales  sont  aux  trois  quarts  voyelles, 
ce  qui  rend  la  prononciation  de  ce  patois  facile.  Dans  le  duché 
(le  Bouillon,  elle  est  labiale,  sans  accent,  et  souvent  harmo- 
nieuse ;  dans  la  Belgique  et  le  pays  de  Liège,  elle  est  un  peu 
sifflante,  gutturale,  moins  facile  et  moins  agréable;  ce  qui  vient 
sans  doute  du  voisinage  des  Flamands  et  des  Allemands,  ou 
peut  être  de  la  prononciation  primitive  que  ces  peuples  ont 
retenue,  laquelle  est  très-dure,  si  Ton  en  croit  Thistoire,  Les 
musiciens  que  Charlemagne  amena  de  Rome  dans  les  Gaules, 
pour  y  enseigner  léchant  roumain,  }' trouvèrent  les  voix  si 
âpres  et  si  discordes,  qu'ils  ne  purent  adoucir  la  dureté  de  leurs 
accents. 

La  beauté  du  patois  wallon  dépend  de  la  prononciation  de 
certaines  lettres  et  syllabes,  L'm  se  prononce  à  la  française, 
mais  plus  communément  comme  Ye  muet  d'un  monosyllabe . 
Le/  consonne  se  prononce  à  peu  près  comme  les  Italiens  et  les 
Anglais  le  prononcent.  Le  ^  a  la  même  prononciation  devant 
Va,  Yi  et  Ye.  Les  lettres  ch  se  prononcent  comme  les  Allemands 
prononcent  ces  lettres,  sch,  ou  comme  les  Italiens  prononcent 
ce,  ci,  de  ce  mot  cecita.Le  w  se  prononce  comme  les  Anglais  ou 
comme  la  diphthongue  ou  suivie  d'une  voyelle,  et  ne  faisant 
qu'une  syllabe,  comme  oua;  wallon,  oué,  wé,  oui,  Willieme.  La 
diphthongue  02  et/ mouillée  se  prononcent  comme  le  peuple 
de  Paris  les  prononce.  La  dipthongue  au  se  prononce  encore, 
dans  les  Pays-Bas,  à  l'allemande  ;  ce  son  peut  se  rendre  par 
ces  lettres  avve.  On  prononçait  autrefois  toutes  les  lettres 
finales  ;  mais  la  prononciation  française  a  été  adoptée,  à  cet 
égard,  depuis  environ  cinquante  ans. 

On  écrit  ce  patois,  depuis  plus  de  cent  cinquante  ans,  avec 
les  traits  et  les  caractères  français.  Dans  son  origine,  on  se 
servait  de  caractères  runiques,  ainsi  qu'il  paraît  par  les  in- 
scriptions des  anciennes  tombes  écrites  en  wallon,  qui  sont 
assez  communes  dans  les  provinces  belgiques. 

Ce  patois  varie  peu  de  village  à  village,  mais  il  varie  beau- 
coup de  ce  duché  aux  Pays-Bas,  où  l'idiom  français  a  moins 
gagné  et  les  langues  du  Nord  beaucoup.  L  s  campagnards 


LETTRES     A     GREGOIRE  67 

s'énoncent  également  en  patois  et  en  mauvais  français,  mais 
c'est  en  cette  dernière  langue  que  se  prononcent  les  discours 
publics  et  que  s'écrivent  les  actes  obligatoires  et  judiciaires  ; 
cet  usage  est  très-ancien. 

Il  n'existe  point,  que  je  sache,  de  grammaire  de  cet  idiome; 
un  bénédictin  de  Metz  a  donné  depuis  peu  un  dictionnaire  ro- 
man, wallon,  celtique  et  tudesque',  qui  se  trouve  chez  M.  Tré- 
court,  imprimeur  du  département  des  Ardennes,  à  Maizières 
(«c  ).  Ce  dictionnaire  contient  une  infinité  de  mots  très-ex- 
pressifs qui  ne  sont  plus  en  usage,  et  qui  ne  sont  point  rem- 
placés dans  l'idiome  wallon  ni  dans  l'idiome  français;  d'oîi  il 
résulte  que  le  patois  des  Ardennes,  en  se  rapprochant  de  la 
langue  française,  s'appauvrit  visiblement,  en  rejetant  une 
quantité  de  mots  et  d'expressions  très-énergiques,  qui  ne  sont 
qu'imparfaitement  remplacés  par  les  mots  et  les  termes  tirés 
du  français. 

On  trouve  à  Liège  quelques  opéras,  des  chansons,  des  pas- 
quinades  et  autres  pièces  de  poésie  écrites  en  wallon  liégeois, 
et  qui  ne  manquentpoint  de  sel;  mais  l'ouvrage  le  plus  estimé, 
écrit  dans  ce  patois,  c'est  ï Histoire  héraldique  de  la  noblesse 
des  Pays-Bas,  par  Hemricourt;  la  version  française  est  im- 
primée à  côté  du  texte  et  se  vend  à  Liège.  On  trouve  encore 
dans  les  anciennes  abbayes  des  Pays-Bas  quelques  manuscrits 
wallons. 

Il  n'est  guère  probable  que  le  langage  des  Ardennes  puisse 
jamais  se  détruire  entièrement,  malgré  sa  grande  affinité  avec 
l'idiome  national  :  il  n'y  a  point  dans  ce  pays  de  cour,  de  grands 
princes,  ni  de  sociétés  littéraires;  les  habitants  ne  s'occupent 
que  des  travaux  de  la  campagne,  des  arts  utiles  et  du  com- 
merce ;  d'ailleurs,  la  langue  française  est  trop  surchargée  de 
règles  pour  que  le  peuple  puisse  les  observer,  quoique  l'en- 
seignement se  fasse  dans  les  écoles  en  cet  idiome,  mais  sans 
uniformité  de  livres.  Ce  qui  empêchera  encore  que  le  wallon 
ne  périsse  entièrement,  c'est  qu'il  a  des  termes  et  des  expres- 

I  Dictionnaire  roman,  ivallon.  celtique  et  tudesque,  pour  servir  à  l'in- 
telligence des  anciennes  loix  et  cuntracts,  etc.,  par  un  religieux  bénédictin 
de  la  congrégation  de  St-Vaunes.  Bouillon,  de  limprimerie  de  la  Société 
typographique;  1777,  in  4»,  XII-364  pages.  (A.  R.-F.) 


88  DIALECTES    MODERNES 

sions  qui  plairont  toujours  par  leur  énergie  et  leur  brièveté. 

Les  écoles  sont  trop  négligées  dans  les  Ardennes  ;  on  n'y 
apprend  guère  qu'à  lire,  écrire  et  le  catéchisme.  Les  curés  et 
les  vicaires  ne  les  surveillent  point  et  ne  prêtent  aucun  livre 
à  leurs  paroissiens,  à  qui  il  est  défendu  de  lire  l'Kcriture 
sainte.  Aussi  y  a  t-il  peu  de  campagnards  qui  ont  le  goût  de 
la  lecture.  Les  livres  qu'on  trouve  communément  chez  eux 
sont  des  Vies  des  saints,  de  prières  et  les  Bibliothèques  bleues. 

Les  Ardennais  n'ont  point  de  talent  pour  la  poésie  ni  pour 
l'éloquence  ;  ils  ne  sont  point  assez  vifs  ;  leur  imagination  est 
trop  froide,  quoique  d'un  caractère  très-sensible  et  porté  aux 
actions  vertueuses.  Les  Liégeois,  néanmoins,  ont  des  disposi- 
tions à  la  poésie  badine  et  erotique  . 

Les  habitants  du  duché  de  Bouillon  et  des  environs  ont  peu 
de  préjugés.  Depuis  environ  vingt  ans,  ils  ne  croient  plus  aux 
revenants,  ni  aux  sorciers,  ni  aux  enchantements  ni  posses- 
sions. Leur  croyance  sur  les  miracles  et  autres  histoires  mer- 
veilleuses se  réduit  à  peu  de  chose.  En  général,  leurs  opinions 
religieuses  sont  assez  pures;  ce  qui  vient,  je  crois,  de  ce  que 
les  curés  et  les  vicaires,  au  lieu  de  leur  faire  des  sermons  re- 
levés, se  contentent  de  leur  expliquer  dans  leurs  prônes  le 
catéchisme  d'une  manière  simple  et  proportionnée  à  leur  ca- 
pacité et  à  leur  état  ;  peut-être  aussi  que  les  connaissances 
gagnent  un  peu  depuis  l'établissement  des  journaux  à  Bouillon. 
Au  reste,  les  mœurs  sont  encore  pures  dans  les  campagnes, 
et  il  n'y  a  pas  de  grands  vices  dans  les  Ardennes  ;  mais  il  y  a 
peu  de  patriotisme,  et  l'intérêt  personnel  y  joue  un  grand  rôle. 

La  Révolution  française  a  gagné  le  duch-^  de  Bouillon.  Les 
habitants  ont  voulu  avoir  une  Assemblée  générale,  qui  s'est 
constituée  en  Corps  législatif,  du  consentement  du  prince  sou- 
verain, qui  fait  sa  résidence  à  Navare,  près  d'Evreux,  en  Nor- 
mandie. 

Cette  Assemblée  a  adopté  les  principes  de  la  Constitution 
française  ;  elle  en  a  extrait  les  décrets  qui  pouvaient  être  ap- 
pliqués aux  convenances  du  pays.  Le  régime  féodal  a  été  aboli 
et  les  dîmes  rendues  aux  paroisses;  les  curés  et  vicaires  n'ont 
point  été  traités  généreusement,  et  les  seigneurs  ont  été  dé- 
pouillés plus  impitoyablement  qu'en  France  :  les  ferrages  leur 
ont  été  enlevés  sans  indemnité,  et  la  plupart  des  maires  et 


LETTRES    A   OREGOIRK  69 

des  municipalités  ont  encore  à  leur  égard  de  mauvaises  fa- 
çons, en  leur  refusant  des  droits  conservés.  —  Depuis  la  Ré- 
volution, les  habitants  de  ce  duché,  qui,  par  caractère,  sont 
doux  et  dociles,  sont  devenus  mutins  et  récalcitrants  ;  les  lois 
sont  sans  vigueur;  les  muuici[)alités  s'attribuent  toute  espèce 
de  pouvoir,  et  l'anarchie  croît  de  jour  en  jour.  Il  n'y  avait 
dans  cette  souveraineté  qu'une  force  d'opinion,  elle  est  ôtée  ; 
comment  réprimer  les  abus?  Le  peuple  a  besoin  d'être  contenu 
par  une  autorité  qu'il  craint,  et  lui  donner  trop  de  pouvoir, 
c'est  lui  ouvrir  la  porte  des  désordres.  On  ne  peut  dissimuler 
({ue  l'Assemblée  de  Bouillon  n'ait  été  beaucoup  trop  loin,  et 
que,  en  voulant  rendre  les  hommes  trop  libres,  elle  n'ait  brisé 
les  liens  de  l'association,  dont  la  sûreté  et  la  tranquillité  sont 
depuis  sans  cesse  exposées  aux  attentats  des  méchants  et  des 
ignorants,  qu'il  sera  bien  difficile  de  ramener  à  l'ordre  — 
Mais  revenons  au  patois  des  Ardennes- 

Ur  des  infinitifs  est  retranché  dans  cet  idiome,  excepté  des 
verbes  en  oir,  qui  s'écrivent  et  se  prononcent  ive?\  Par  exem- 
ple, devoir  se  prononce  dewer  ;  avoir,  awer,  et  ces  infinitifs  sont 
peu  en  usage.  Les  mots  de  ce  patois  sont  souvent  raccourcis 
par  la  contraction  des  syllabes  et  des  lettres;  d'autres  fois,  ils 
conservent  les  lettres  que  la  langue  française  a  retranchées, 
comme  esté  pour  été,  estourdi  pour  étourdi,  et  ces  lettres  con- 
servées se  prononcent. 

On  joint  ci-après  un  dictionnaire  des  mots  qui  s'éloignent 
le  plus  des  radicaux  français  ;  ils  sont  ortographiés  {sic)  comme 
ils  se  prononcent  ;  leur  signification  en  français  est  jointe  à 
chaque  mot.  On  trouve  ensuite  les  conjugaisons  des  verbes 
être,  avoir  et  aimer,  qui  suffisent  pour  donner  une  idée  des  ter- 
minaisons wallonnes. 

Les  verbes  de  ce  patois  ont  moins  de  temps  que  ceux  de  la 
langue  française  et  s'emploient  souvent  l'un  pour  l'autre . 

Il  y  a  des  proverbes  en  patois  sur  les  ouvrages  ruraux  et 
les  pronostics  des  temps  ;  en  voici  quelques-uns  : 

—  Jamoiiai  bounn"  houme  ne  revenni  de  Roume.  —  Jamais  bon 
-homme  ne  revint  de  Rome. 

—  Air  saint  Gervai,  samme  tes  navets. —  Sème  tes  navets  à  la 
Saint-Gervais. 

5 


70  DIALECTES    MODERNES 

—  On'  saut'ot  mie  spaniles  pouchelets  que  d" tué  la  (rouie. —  On 
ne  peut  mieux  sevrer  les  cochons  que  de  tuer  la  truie. 

—  Vinde  se  pourcai  et  warde  Claur.  —  Vendre  son  cochon  et 
retenir  le  lard  ;  c'est-à-dire  vouloir  tirer  le  prix  et  garder  la 
chose. 

—  Quand  on  n'est  qu'in  chevet,  il  est  aizi  dull  duscrami.  — 
Quand  on  n'a  qu'un  cheveu,  a  facile  {sic)  à  le  démêler. 

—  Ess  vayant  quant  i  ny  est  vin  à  fouaire. —  Etre  laborieux 
quand  il  n'y  a  rien  à  faire. 

—  Les  ei  qui  n'ont  pon  d'argent  nont  ni  peure  des  larons.  — 
Qui  n'a  pas  d'argent  ne  craint  pas  les  voleurs 

—  /  fouai  bon  samer  tovone  quand  la  cône  dou  bu  goutte.  — 
C'est  le  temps  de  semer  les  avoines  quand  il  pleut. 

—  .Sans  ponne  ne  vin  avone.  —  Sans  peine  ne  vient  avoine. 

—  i  faut  samé  l soie  din  la  poussire  et  T avone  din  layoutire.  — 
Il  faut  semer  le  seigle  par  le  beau  temps  et  l'avoine  quand  il 
pleut. 

—  Quand  toutes  les  pauques  sont  d'avri,  datent  la  mouche  et  la 
burbi. —  Quand  les  pâques  sont  en  avril,  malheur  aux  abeilles 
et  aux  brebis. 

—  Datent  V avone  que  la  Saint- Bar tolomie  pourmene.  —  Mal- 
heur à  l'avoine  que  la  Saint-Barthélémy  promène  (parce  que 
le  vent  peut  la  secouer). 

—  Quand  la  lune  est  blemive  ou  que  les  cornaïes  criant,  marque 
de  pluve.  —  Quand  la  lune  est  pâle  et  que  les  corneilles  croas- 
sent, signe  de  pluie. 

—  Quand  les  tahans  piquant  et  que  les  baisses  bisnnt,  c'est 
marque  de  pluve.  —  Quand  les  taons  piquant  et  font  fuir  les 
bestiaux,  signe  de  pluie. 

—  Vent  de  Loimine  amone  la  pluve  din  les  smonaine.  —  Vent 
de  Lorraine  amène  la  pluie  dans  la  semaine. 

—  Fraîches  avins,  scehe  estée;  scehes  avins,  fraiches  estée.  — 
Lorsque  les  avents  '  sont  humides,  l'été  sera  sec  ;  mais  si  les 
aventssont  secs,  l'été  sera  humide. 

—  Jamonai  sécheresse  n' amone  chiresse.  —  Jamais  sécheresse 
ne  cause  de  cherté. 


*  Les  avenls.  parce  que  l'Aveiitest  toujours  en  fiécembre. 


LETTRES    A     GREGOIRE  71 

—  Bonne  poulie  qui  fouait  tous  les  jours  un  u.  —  Bonne  poule 
qui  pond  tous  les  jours  un  œuf. 

—  Quand  il  plue  le  jour  saint  Medaure,  on  n"  rehrule  ni  les 
saures.  —  Quand  il  pleut  lo  jour  de  saint  Médard,  on  ne  brûle 
pas  les  terres  essartées. 

—  C'est  in  bon  vaurlet  qui  le  bai  tim.  —  Le  beau  temps  est 
un  bon  serviteur. 

—  Lslo  fouai  pu  de  besouen  que  cent  fneusses.  —  Le  soleil 
fait  plus  d'ouvrage  que  cent  faneuses. 

—  Qui  s'  luve  matin  ne  manque  jamonai  de  poin.  —  Qui  se 
lèvematin  ne  manquera  jamais  de  pain. 

—  La  fouin  est  in  bon  reveïe-matin.  —  La  faim  réveille  de 
grand  matin. 

—  Ess  hardi  quand  on  ri  risque  rin,  —  Faire  le  brave  quand 
il  ny  a  point  de  danger. 

—  Allé  a  eu  de  pouïoïc  ;  tourné  à  brule-navet.  —  Déchoire 
{sic),  rendre  à  rien. 

—  Laurgesse  ne  fouai  ni  uni  t  bure  al  'boisse.  —  On  ne  de- 
vient point  riche  à  force  de  donner. 

—  Pechi  dri  la  trulle.  —  Pêcher  derrière  le  filet,  vouloir 
revenir  sur  une  affaire  finie. 

—  Le  bourgeois  va  devant  riiakiu.  —  L'homme  en  place  doit 
passer  devant  l'homme  de  rien. 

—  I  vau  mi  laie ki  sa  famé  moucheuse  que  d'ii  arachi  /'  né.  — 
Il  faut  [sic]  mieux  laisser  sa  femme  morveuse  que  de  lui  arra- 
cher le  nez. 

—  Laichi  couri  la  striche  su  l'  bichet.  —  Laisser  aller  les  af- 
faires comme  elles  vont. 

—  In  vau  ni  la  haure  poul  stranné.  —  Il  ne  vaut  pas  la  hart 
pour  le  pendre. 

—  Invauniplins''en  d'avve. —  Il  ne  vaut  pas  une  jatte  d'eau. 

—  Aussi  aivare  que  l"  bouc  Colan  Jancq,  qui  sotot  deux  chives 
din  cô.  —  Aussi  étourdi  que  le  bouc  de  Nicolas  Jacques,  qui 
saillait  deux  chèvres  à  la  fois. 

—  Chèque  pais,  chèque  mode.  —  Chaque  pays  a  ses  usages. 

,  —  Chaure  fouai  chaure.  —  Qui  mange   de  la  viande  mange 
de  l'embonpoint. 

—  Clore  la  staule  quand  le  chevau  est  hors.  —  Fermer 
l'écurie  quand  le  cheval  est  dehors. 


72  DIALECTES    MODERNES 

—  Les  vauriens  se  trouvant  tondi.  —  Les  [vauriens]  se  ren- 
contrent toujours. 

—  Vherbe  qu  C  counnoua,   mette  la  siit'  doua.  —  Mets  sur 
ton  doigt  l'herbe  que  tu  connais. 

—  Les  joncs  famés  ont  toudi  bosse  on  /josse.  —  Les  jeunes 
mariées  passent  d'une  plainte  à  l'autre. 

—  Méchante  poire  quin  meuri  ni.  —  Mauvais  fruit    qui  ne 
mûrit  pas. 

—  In  fau  quune  hurhi  rouyneuse  pou  ablavé  ton  le  tropui .  — 
Une  brebis  galeuse  gâte  tout  le  troupeau. 

—  Jone  c/iesseu,  joue  monsieu;  vi  chesseu,  vi  hribeû.  —  Jeune 
chasseur,  jeune  seigneur;  vieux  chasseur,  vieux  bribeur. 

—  Dire  à  ruchai.  —  Parler  sans  fin. 

—  On  n'scawot  fouaire  dou  leu  une  bonne  baisse.  —  On  ne 
saurait  faire  du  loup  une  bonne  bête. 

(A   suivre.) 


CHANTS  POPULAIRES  DU  LANGUEDOC 

CHANTS  DU   PREMIER  AGE 

V«  Série 
LES    PETITES    RONDES- 


I.  — Les  Rondes  du  premier  âge  prennent  place,  par  suite 
de  leur  caractère  tout  particulier,  à  la  suite  des  petits  chants, 
dont  nous  avons  fait  la  publication. 

Elles  ne  sont,  en  effet,  à  exactement  parler,  ni  un  chant,  ni 
un  jeu.  C'est  intemnédiaire  ;  quelque  chose  d'une  gymnasti- 
que de  l'esprit  et  du  corps  appropriée  à  l'âge  et  aux  forces 
des  petits  bambins  qu'il  s'agit  d'amuser,  et  qui  ne  savent 
guère  encoi'e  ni  parler,  ni  se  mouvoir. 

Du  chant,  du  mouvement,  du  bruit,  c'est  i)lus  qu'il  n'en 
faut  pour  cette  période  du  développement  physique,  qui  ne 
demande  qu'à  intéresser  quelque  peu  l'intelligence  sans  exiger 
d'efforts,  et  à  exercer  des  membi^es  encore  faibles  et  tendres, 
sans  qu'il  y  ait  de  risques  à  courir. 

II.  —  Elles  exigent  naturellement  peu  de  place  et  font  peu 
de  bruit;  elles  ressemblent  de  très-près  à  ces.  premiers  pas 
essayés  sur  les  genoux  de  la  mère,  dont  nous  avons  parlé  ; 
elles  peuvent  être  faites  dans  une  chambre,  sur  un  coin  de 
tapis,  sur  le  rebord  du  lit,  etc.  '. 

Elles  ne  conviennent  donc  qu'à  de  tout  petits  enfants. 

Elles  forment  une  transition,  parfaitement  sensible,  entre 
la  série  des  chants  pour  apprendre  à  agir,  premiers  exercices 
des  mouvements  du  corps,  et  les  danses  et  rondes  des  filles  et 
/garçons,  où  le  corps  et  l'esprit  s'en  donnent  à  cœur  de  joie. 

*  Le  ch.  IV  dit  l'aireto,  i'airela,  le  palier,  le  seuil  de  la  porte,  limite 
que  ne  dépassent  guère,  en  efTel.  les  petit?  enfants. 


74  DIALECTES   MODERNES 

m.  — Leurs  airs,  lents  et  mollement  cadencés,  se  composent 
presque  tous  des  deux  notes  qui  caractérisent  le  chant  des 
berceuses  ;  le  rhythme  seul  en  fait  le  fond,  différant  en  cela 
des  grandes  rondes^  dont  les  airs  sont  vifs,  animés,  et  qui  ont 
de  plus  une  intention  scénique. 

Ce  sont  les  mêmes  mélodies  somnolentes,  traînantes,  mais 
avec  une  accélération  plus  marquée  du  mouvement^. 

L'inspiration  n'étant  ni  trop  joyeuse,  ni  trop  tfiste,  le 
rhjthme,  par  effet  tout  de  moyen  terme,  de  milieu,  si  l'on  peut 
parler  ainsi,  s'y  conforme.  Il  se  tient  entre  la  vivacité  des 
chants  de  jeu  ou  de  danse  et  la  paresse  des  berceuses  ^. 

IV.  —  Comme  pour  les  chants  destinés  à  apprendre,  à 
agir  (IIP  série),  la  cadence  finale  est  généralement  plus  forte 
et  marquée  par  un  cri. 

C'est  une  exclamation:  hou!  (ch.  XIV),  pi!  (VI),  cra! 
(III),  cri!   (XIII);  ou  un  mot  quelconque,  qui  n'a  aucun  rap- 


'  V.  Nen-nèn,  1'"  série,  ch.  VI U. 

-  En  écoutant  les  coups  réguliers  frappés  sur  une  enclume,  le  bruit  des 
fléaux  retombant  tour  h  tour  sur  le  blé,  les  diverses  batteries  de  tambour, 
et  même,  sans  cet  auxiliaire,  les  pas  caiiencés  d'une  troupe  bien  disci- 
plinée, l'on  éprouve  ce  sentiment  que  produisent  l'ordre  et  la  régularité, 
et  qui  remue,  agite,  entraîne.  Les  efTets  du  rhythme  dans  ie  mouvement 
sont  tellement  incontestables,  qu'ils  n'ont  pas  nécessairement  besoin  du 
secours  de  la  mélodie,  comme  on  le  voit  par  les  exemples  que  nous  ve- 
nons de  donner.  Quelques  sons  disposés  sans  art  sous  le  rapport  mélo- 
dique, un  seul  même,  un  simple  bruit  inharmonique,  tel  que  celui  pro- 
duit par  la  plupart  des  instruments  de  percussion,  répété  plusieurs  fois, 
suivant  certaines  formes  rhythmiques,  peuvent  produire  la  plus  forte  im- 
pression. (D.  Beaulieu,  du  Rhythme;  Paris,  Dentu,  s    d.,  in-S",  p.  44.) 

•1  L'homme,  dans  toutes  ses  actions,  et  principalement  dans  celles  qui- 
sont  longtemps  répétées,  épreuve,  pour  faciliter  ses  mouvements,  et  sou- 
vent à  son  insu,  le  besoin  de  les  mesurer.  Est-il  triste,  abattu,  ils  sont 
lents;  est-il  gai,  dispos,  ils  sont  vifs  et  précipités.  Sous  l'influence  des 
mêmes  dispositions,  ses  paroles  ou  les  sons  inarUculés  de  sa  voix  sui- 
vent une  mesure  analogue,  et  deviennent  ainsi  plus  ou  moins  imhatifs 
de  ses  actions  ou  de  ses  sentiments.  Dans  ce  langage,  dans  cette  suite 
de  mouvements  mesuré.-^,  le  ttmps  que  l'homme  met  à  exécuter  chacun 
de  ces  mouvements,  à  prononcer  chaque  syllabe  ou  à  proférer  cliaque  son 
inarticulé,  est  un  temps  rhythmiqu»',  e  le  rhythme  n'est  que  le  rapport 
qui  existe  entre  plusieurs  de  ces  temps   (D.  Beaulieu,  du  Rhythme,  p.  11.) 


CITANTS   POPULAIRES    DU    LANGUEDOC  75 

port  avec  le  chant  :  favarou  i  haricot  (ch.  I)  ;  coucou  !  œuf  (ch. 
II  et  XXIII),  concourelet !  petit  œuf  (ch.  XII);  civadof  avoine 
(X),  etc. 

Ce  dernier  est  le  plus  ordinaire.  C'est  celui  que  l'on  ajoute, 
presque  toujours,  quoiqu'il  ne  soit  pas  indiqué  dans  toutes  nos 
versions,  à  la  fin  des  petits  branles  de  Lileto  (ch.  I-IVj. 

C'est  un  cri  que  nous  avons  noté,  quand  nous  l'avons 
pu  '. 

V.  —  Leur  composition  est  habile.  Tout  en  ne  faisant  cou- 
rir aucun  danger  à  l'enfant,  puisqu'il  est  soutenu  par  des 
personnes  âgées  qui  l'entraînent,  le  portent  presque,  elles 
demandent  de  lui,  toutefois,  un  ensemble  de  mouvements 
assez  compliqués  pour  son  âge. 

Indépendamment  du  mouvement  giratoire,  tournoyant,  qui 
est  le  principal ,  et  pour  lequel  il  n'a  qu'à  suivre ,  il  faut 
encore  que,  dans  certains  cas,  passes  ou  évolutions,  il  sache 
croiser  les  bras,  élever  les  mains,  ployer  les  genoux,  se  bais- 
sant et  se  relevant  avec  rapidité  ^. 

Elles  ont  surtout  lieu  à  la  fin  de  ces  petites  danses  '. 

Comme  les  grandes  rondes,  elles  se  répètent  et  se  repro- 
duisent indéfiniment,  jusqu'à  épuisement  des  forces  ''. 

VI.  —  Ces  passes  ou  évolutions  s'augmentent  et  deviennent 
plus  nombreuses  au  fur  et  à  mesure  que  l'enfant  grandit. 

1°  Tout  d'abord,  il  est  soutenu,  porté,  par  des  personnes 
âgées,  la  mère,  la  nourrice,  la  servante,  ou  bien  par  des  en- 
fants plus  forts,  ses  frères  et  ses  sœurs  ordinairement  '■'. 


'  Voir  les  observations  de  Kastner,  auxquelles  nous  nous  sommes  con- 
formés  Les  Voix  de  Paris.  Paris,  1857,  in-4",  p  3-4. 

-  Ces  mouvements  de  repos  sont  marqués:  d'abord  un  pied,  puis  tout 
le  corps  (v  ch.  I);  ou  encore  un  pied,  l'autre  pied,  tout  le  corps  (ch    IV). 

Dans  chaque  mouvement,  on  distingue  aussi  quand  l'enfant  se  baiss-; 
(ch.  II,  XIX,  XXV)  et  quand  il  se  lève  (ch.  XV  et  XVI),  et  parfois 
l'un  et  l'autre  (V  et  X) . 

3  Voir  ci-dessus,  observation  IV,  les  finales,  qui  marquent  fin  de 
moude. 

*  Pour  la  répétition,  v.  c!i.  XX. 

-  Ch.  [-V. 


76  DIALECTRS    MODERNES 

2"  Dans  une  seconde  série,  le  tournoiement  imite  certaines 
actions  :  la  boulangère  qui  fait  son  pain,  la  cuisinière  qui  re- 
tourne sa  poêle,  le  charcutier  qui  retourne  le  boudin,  etc.  *. 

3°  Les  suivantes  se  proposent  de  reproduire  en  petit  le-^ 
danses  des  grandes  personnes  qu'elles  mettent  en  scène,  ron- 
des, farondoles,  etc.  ^ 

4"  Les  mouvements  ne  tardent  pas  alors  à  devenir  plus  ra- 
pides, plus  accentués  :  ce  sont  des  fruits  qu'on  ramasse,  le 
pied  auquel  on  s'est  fait  mal  en  tombant,  le  chat  qui  guette  ^ 

Dans  cette  dernière,  l'intention  est  scénique  et  fort  mouve  - 
mentée.  Toutefois,  le  petit  enfant  n'y  prend  qu'une  part  res- 
treinte: placé  tout  au  milieu  du  cercle,  il  voit  la  petite  ronde 
tourner  autour  de  lui,  comme  autour  d'un  pivot,  s'agiter,  sans 
qu'il  ait  même  à  se  lever. 

5°  Les  deux  dernières  sont  ce  qu'on  nomme  des  branles  de 
sourtida  \ 

Ces  petits  branles  sont  ceux  que  font  les  enfants  à  la  sortie 
de  l'école,  alors  que,  se  tenant  par  la  main  et  se  sentant  le 
besoin  de  donner  un  libre  cours  à  leur  joie,  ils  remplissent  la 
rue  de  cris  et  d'éclats  de  rire.  C'est  ce  qu'on  nomme  en  lan- 
gage vulgaire  lou  branle  de  sourtida,  branle  de  sortie.  La 
gaieté,  si  naturelle  à  cet  âge,  ne  trouve  pas  de  meilleur  moyen 
de  se  satisfaire,  de  se  manifester,  que  par  cette  joie  à  la  fois 
bruyante  et  folle . 

Un  vieil  auteur,  aujourd'hui  fort  oublié,  en  fait  une  des- 
cription charmante,  prise  sur  le  vif,  description  qui  doit  faire 
partie  tout  naturellement  de  nos  observations: 

Abets-mejamai  bisl  un  nizal  d'apparats 
Sourti  bistft  d'un  trauc  ount  eron  embarrats? 
Quin  sisclet,  quino  joyo.  en  bezon  la  campagnol 
Diriots  que  soud  labelz  en  pais  de  Coucaigno. 
Per  acassa  la  fara,  manjon  tout  lour  sadoul, 
Etbolonlibromen  de  rastoul  en  rastoul. 

Atal  mous  escouilhés,  quand  l'escolo  es  finido, 
Sounjon  à  dansa  Icu  le  branle  de  sourlido, 


»  Ch.  VI- X. 

2  Gh.  XI-XVIIl. 

3  Ch.  XIX-XXI. 

*  Gh.  XXII-XXIII. 


CHANTS    POPULAIRES    DT'    LANGUEDOC  " 

Se  buton  l'iiii  sus  l'autre,  et,  toiilis  airafats, 
Fan  à  qui  les  prumiés  seslran  espoiiffats; 
L'un  es  gilat  jiel  sol  d  l'autn'  se  relebo. 
Tantos  dessus,  dejouls,  coiimo  fa  la  callobo  ; 
Et  toutis.  per  sourti,  soun  autant  diligens 
Que  s'eron,  per  dinlra,  moustradils  négligens  '. 

Avez-vous  jamais  vu  une  nichée  de  passereaux  —  sortir  vite  du 
trou  ou  ils  étaient  enfermés  ?  —  Quels  cris  aigus,  quelle  joie,  en  voyant  la 
campagne  !  —  Vous  diriez  qu'ils  sont  alors  en  pays  de  Cocagne.  —  Pour 
faire  cesser  la  faim  ils  mangent  tout  leur  saoul.  —  et  volent  librement  de 
chaume  en  chaume. 

Ainsi  mes  écoliers,  quand  l'école  est  Gnie, —  songent  à  danser  le  iranle 
de  la  sortie  —  Ils  se  poussent  l'un  l'autre,  et,  se  saisissant, —  font  à  qui  les 
premier^  se  seront  échappés  ;  —  l'un  tombe,  l'autre  se  relève,  —  tantôt 
dessus,  tantôt  dessous,  comme  quand  on  roule,  et  tous,  pour  sortir,  sont 
aussi  diligents  —  qu'ils  s'étaient,  pour  entrer,  montrés  négligents. 

VIL —  Ces  rondes  des  tout  petits  enfants,  tout  comme  celles 
des  personnes  plus  âgées,  sont  dites  simplement  rodas,  rodos^, 
rondes.  Exemples  :  la  rodo  dau  Coubent,  la  ronde  du  Cou- 
vent ;  la  rodo  del  Calel,  la  ronde  de  la  Lampe.  On  dit  aussi 
roundo  :  la  roundo  de  Catarino,  la  ronde  de  Catherine. 

Elles  prennent  quelquefois  le  nom  des  grandes  danses  :  la 
farandoulo  de  Trinquatailho,  Va  farandole  de  Trinquetaille  ; 
loti  branle  de  Lileto,  le  branle  de  Lili  ;  lou  branle  de  CEireto, 
le  branle  de  la  Petite  Aire;  lou  branle  de  ma  Tanto,  le  branle 
de  ma  Tante  ;  lou  brande  dau  Cacaraca,  le  branle  du  Coq. 

Au  diminutif,  brandet,  le  petit  branle  :  lou  brandet  de  Roso, 
le  petit  branle  de  Rose  ;  lou  brandet  de  Paladan,  le  petit 
branle  de  Paladan,  etc. 

Chauri,  chœur,  lat.  cliorea,  ne  se  dit  guère  que  de  la  ronde 
que  font  les  fées  sur  l'herbe  fleurie,  au  clair  de  lune  '\ 

VIII.  —  Il  va  sans  dire  que  ces  petites  rondes,  premiers 
essais  chorégraphiques  de  Tenfance,  se  perpétuent  dans  Fàge 
de  l'adolescence. 


*  Le  Mirai  moundi,  ctc  ,  1700,  p.  36. 

-  De  roda.  rodo.  roue.  Faire  la  roda,  faire  la  ronde-  Jout  la  roda  dau 
sourel.  sous  le   cercle  tracé  par  le  soleil,  la  ronde  solaire. 

Audim.,  fa  lou  roudet,  faire  le  cercle  autour  d'un  enfant,  d'un  conteur. 
3  D'où  chauriha.  tournoyer,  faire  la  ronde. 


•î  DIALECTES    MODERNES 

Celles  de  la  première  catégorie  (ch.  I-V)  sont  assez  vite 
abandonnées,  parce  que  l'impatience  et  la  turbulence  des 
enfants,  devenus  forts,  s'accommodent  mal  de  leur  lenteur, 
de  leur  air  monotone,  de  leur  peu  de  mise  en  scène. 

Les  rondes  qui  suivent  (ch.  VI-XVIII)  sont  plus  longtemps 
conservées. 

Mais  ce  sont  surtout  les  dernières  (ch.  XIX-XXIII)  qui 
persistent.  La  raison,  c'est  que  ce  sont  des  jeux,  de  vrais 
jeux, — le  Coq,  le  Chat,  le  Pied  rompu, —  qui  sont  de  tous  les 
âges,  ou  des  exclamations  de  joie,  à  la  sortie  de  l'école, 
communs  à  tous  les  enfants. 

IX. — C'est  une  remarque  à  faire,  cependant,  que  les  rondes 
languedociennes  sont  peu  à  peu  délaissées,  et  qu'elles  font 
place  aux  rondes  en  langue  du  nord. 

Cette  substitution  est  due  surtout  àFinfluence  des  écoles  pri- 
maires, principalement  celle  des  jeunes  filles.  Les  maîtresses 
ne  permettant  plus,  pendant  les  heures  de  récréation,  que  des 
rondes  françaises,  l'habitude  a  été  prise  peu  à  peu  et  fait 
sentir  aujourd'hui  ses  résultats. 

Les  rondes  de  cette  sorte  que  l'on  répète  le  plus  souvent 
sont  :  le  Petit  Moulin,  les  Petits  Cousins,  etc.,  et  les  petites 
scènes  chantées  :  le  Joli  Tamboio'  qui  aime  la  fille  du  roi;  les 
Compagnons  de  la  Marjolaine,  la  Tour,  prends  garde;  Savez-oous 
planter  les  choux  ?  etc . 

X.  —  Il  est  résulté  de  cette  habitude  deux  faits  importants , 
dont  nous  avons  à  tenir  compte  pour  l'histoire  de  la  langue. 

Il  y  a  des  tentatives  de  traduction,  tant  en  languedocien 
qu'en  français,  mais  principalement  dans  ce  dernier  idiome'. 

Il  j  aussi  corruption  de  la  langue  employée,  qu'on  tâche 
d'accommoder  à  des  formes  mixtes  ou  communes  à  toutes 
deux-. 

Et,  enfin,  des  chants  où  les  deux  langues  vont  de  pair  ^ 


*  V.  ch.  IX,  note  l  :   la   traduction  des  Petits  Cousins. 
3  V.  Chants  VI  et  XXIII. 


nHANTS   POPULAIRES    DU    LANdUKDlIC 


I. —  I.OIJ  RHAM.K  DK   I.ÎI-ftTA 


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Lou    bran  -  io     de      l.i  -      le  -  ta,  Ma     lan-la      la     sau- 


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me    -    ta,       Lou    pè,        lou 


cuou,      Au         sôu. 


Lou  branle  de  Lileta, 
Ma  tan  ta  la  saumeta: 
Lou  pè,  lou  cùou. 
Au  sôu  ! 

Le  branle  de  la  petite  Lili. —  Le  branle  de  Lili,  —  ma  tante  l'â- 
nesse: —  le  pied,  le  derrière,  — à  terre  ! 

Ne  se  dit  guère  qu'à  Montpellier  et  ses  environs,  quoiqu'il  soit  plus 
connu  que  les  petites  chansons  suivantes,  usitées  ailleurs. 

I.  —  Elles  se  chantent  dès  que  l'enfant  peut  plus  facilement  plier  les 
genoux.  On  lui  fait  faire  la  ronde  -^n  le  tenant  par  les  deux  mains.  Au 
mot  :  au.  sou!  tous  ceux  qui  y  prennent  part  s'accroupissent,  pour  l'en- 
gager à  en  faire  autant. 

II,  —  On  ajoute  quelquefois,  en  termina;)!  :  favarnu:  mais  ce  mot  n'est 
'à  que  pour  la  rime. 

Dans  d'au'res  endroits  :  civado! 


II. 


BRANLE  DE  LILLETO 


1)      Al  branle  de  Lilleto, 
Ma  tanto  Guilhaumeto 
S'asséto  per  lou  sôu  : 
Coucou  ! 

.AuTUF—  1).  Au  branle  de  Lilleto,—  ma  tante  ^ullhaumette 
s'assied  parterre:  —  coucou! 

Version  de  Golognac  (Gard),  citée  par  M.  le  pasteur  Fesquot.  {lievue 
des  laTi'jues  romanes,  t.  VI,  p   104.) 


80 


DIALECTES  MOPERNES 


1.  —  Il  serait  tenté  de  comparer,  observe-t-il,  ce  nom  de  Lilteto  »  avec 
la  Lilik  qui,  selon  le  Talmu'l,  fut  la  première  femme  d'Adam  et  l'une 
des  quatre  mères  des  démons  (en  hébreu.  Lilik,  spectre  nocturne  qui 
fait  du  mal  aux  enfants).  »  Nous  pensons  qu'il  n'est  pas  nécessaire 
d'aller  chercher  son  origine  si  loin  que  cela  ;  comme  nous  l'avons  dit, 
Liileto  n'est  que  le  diminutif  Lelleto,  de  Leilo,  Adèle. 

2.  —  Cette  version  est  plus  jolie  que  la  précédente.  La  saumelo  y  de- 
vient Gtiilhaumeto, a\n'i\  q\iQ  dnnsles  suivantes,  Jacouneto  et  Guilhaumelo. 
La  qualilication  ma  tanto  autorise  à  ne  voir  dans  la  version  de  Mont- 
pellier qu'une  ironie. 

Cette  opinion  est  autorisée  par  les  chants  XII  et  XIII. 


m.  —  AUTHE 

Lou  branle  de  Lileto, 
Ma  tanto  Jacouneto 
Se  vouliô  maridà: 
Cra  ! . . .  dins  lou  sa. 

Autre, —  Le  branle  de  Lili, —  ma  tante   Jacqueline  —  voulait 
se  marier  :  —  crac  ! . . .  dans  le  sac. 

V.  recueillie  par  M.  H.  Ghaussinand,  de  Coux  (Ardèche). 
l.  —  Au  mot  cra  ! . .   ...  on  fait  sauter  l'enfant  dans  le  tablier  et  on  l'y 
tient  caché. 


IV.    —  I.UU    BKAME      Dt     i/eIKETO 


? 


^^^P^P^^^ 


IjOu  bran-le     de     l'ei  -  ret   -   to.    Ma    tan  -  to  (iuil-hau- 


^^^^^^g^^^lplzi^ 


me  -  to  ;      Un   pè,  l'au-tre    pè 


îou  cùou.  Au         sôu. 


Lou  branle  de  l'eireto, 
Ma  tanto  Gruilhaumeto: 
Un  pé, 


CHANTS   POPULAIRES    DU    LANGUEDOC  81 

L'autre  pô, 
Lou  cùou, 
Au  sou  ! 

Branle  de  l'Aire. —  Le  l)ranlp  de  la  petite  aire,  — ma  tante 
Guillaumotle  :  —  un  [lied, —  l'autre  pieil,  —  le  dernère. — à  terre. 

Version  iiimoise,  recueillie  et  notée  par  M.  Victor  de  Laruelle. 

1.  —  Eireto,  à  .Montpellier  aireta.  petite  aire,  est  absolument  le  palier 
de  la  porte,  le  repos  de  l'escalier . 

V   le  Dict.  languedocien  de  Sauvage,  v.  Aireto. 

C'est  lendroil  oii  s'amusent  es  toui  petits  enfants,  et  qu  ils  ne  dé- 
passent guère.  Ce  n'est  que  plus  tard  qu'on  les  laisse  aller  courir  dans  la 
rue. 

V.  —  LA    RODO    DAI    COUBENT 

Roda,  roda,  dai  coubent  : 
Se  toumbant,  nous  levaren. 
A  bùoure ! 

Ronde  du  Couvent. —  La  ronde,  ronde,  du  couvent  :  —  si  nou> 
tombons,  nous  nous  relèverons.  —  A  lioire! 

Version  de  Saint-André-de-Sangonis  (Hérault),  communiquée  par  le 
docteur  Ch.  C.ste. 

VI.    —    LA     MAHIANNE 

Rondin, 

Picotin, 
La  Marianne  a  fait  son  pain 
Pas  si  gros  que  son  levain. 
Pif 

Version  de  Goux.  recueillie  par  M.  H.  Chaussinand. 

1. Au  dernier  mot.  tous  les  enfants  doivent  s'accroupir  sans  tombfir 

parterre. 

Vil.  —  l'oumeleto 


^/V=  !32 


cher-cha  d'er  -  be  -  to,  P^r  fai  -  re    lou  -  me- 


82 


DIALECTES    MODERNES 


le-to.    Vi-ren   la,  Tour-non-ln,    L'ou-me-le-to  Dins  lou     pla. 

Anen  chercha  d'erbeto, 
Per  faire  l'oumeleto. 

Viren-la  , 

Tournen-la, 

L'oumeleto 

Dins  lou  pla. 

L'Omelette.  —  Allons  chercher  de  l'herbe  —  pour  faire  l'ome- 
lette. —  Virons-la,  —  tournons-la,  —  l'omelette  ~  dan«  le 
plat. 

De  Coiix  (Ardèche),  communiquée  ])ar  M.  Chaussinand. 


Yll  (his).    —    LAS  CRAMALHOS 


^ 


^ 


^ 


^ 


HUE 


Las    cru  -  ma-    Ihos  soun  su!       foc,    Re-bi  -  ro,    re- 


ltê=i 


'LAJ  i  /  !  ^^f^^fïTVp^^ 


bi  -  ro;    Las  cra  -  ma-lhos  soun  su!    foc;    Re-bi -ro  .Mar-got. 
Las  cramallios  soun  sul  foc, 

Rebiro,  rebiro; 
Las  cramalhos  soun  sul  foc, 


Rebiro  Margot. 


La  Crémaillère.  —  La  crémaillère  est  sur  le  fou,  —  retourne 
retourne  ;  —  la  crémaillère  est  sur  le  feu, —  retourne  Martrot  (dim  . 
de  Marguerite). 

■Version  du  D'  Guibaud.  rec.  à  Narbonni'. 


VIII. 


LA  PAUKNO 


Las  cerbèlos  soun  sul  foc, 
Rebiro,  Madamo; 


CHANTS   POPULAIRES    DU    f.ANOlIEDOC 


83 


Las  cerbèlos  soun  snl  foc, 
Rebira-me-los. 

La  Poêle.—  Les  cervelles  sont  sur  le  feu,  —  retourne-les,  Ma- 
dame; —  les  cervelles  sont  sur  le  feu,  —  retourne-les-moi. 

Recueillie  à  Garcassonne,  par  M.  Achille  Mir. 


IX 


LOU    COUSI 


Ma  cousino, 

Moun  cousi, 

Vire  lou  boudi. 

Lk  Cousin.  — Ma  cousine,  — mon  cousin, —  tourne  le  houdiu. 

Version  de  Coux  (Ardèche),  communiquée  par  M.  H    Ch^iussinaiid . 
1.  —  On  chante,  à  Montpellier,  la  ronde  française  : 


A 


<Xrù>  1'  0=  GZ'' 


t˱T 


ÎE2 


Mon        grand    -       pè      -      re.         Ma         grand' 


— ù. 


--^ 


S 


V w ■ r l^-i^ 

mè  -  re,     Mcn      cou    -  sin,        Et        vi   -  re      le      mou -lin. 


LES    PETITS    COUSIKS 

Mon  grand-père, 
Ma  grand'mère, 

Mon  cousin. 
Et  vire  le  moulin. 
On  en  a  fait  une  traduction  à  peu  près  languedocienne,  qu'on  chante 
ainsi  : 

LOUS    CODSIS 

Moun  gran-pèra, 
Ma  gran'mcra. 
Moun  cousi, 
E  vira  lou  mouli. 


84  DIALKCTES    MOKERNES 


X.  — LA     HODO    DEL   CALEL 

Roilo,  rodo,  lou  calel  ; 
Se  tomhan,  nous  lebaren. 
Cibado  !  cibado  ! 

Ronde  de  lx  Lampe. — Tourne,  tourne,  la  lampe  ; — si  nous  tom- 
bons, nous  nous  relèverons.  —  Avoine!  avoine  ! 

Version  due  à  M""  Mir  (de  Garcassonne). 
1.  —  Lo  dernier  mot:  eivndo!  est  le  cri. 

XI.  —  LOU  COUCOURDIÉ 

Branle,  branle  coucourdiè, 
La  bichieiro,  lou  bichiè  ; 
Tan  de  rosoi  coumo  de  flous; 
Madumisèlo,  reviras-vous'. 

Branle  de  la  Gourde.  —  Branle  de  la  gourde,  — la  bouteille,  le 
flacon; —  autant  de  roses  que  de  fleurs: — Mesdemoiselles,  re- 
tournez-vous . 

Version  de  .\I.  Ghaussiuand,  de  Ceux. 

1.  — On  commence  le  branle  autant  de  fois  qu'il  y  a  de  petites  filles. 
A  la  tin  du  couplet,  l'une  d'elles  se  retourne  en  sens  inverse  des  autres; 
quand  elles  se  sont  toutes  tournées,  elles  se  rangent  sur  deux  lignes, 
dos  à  dos.  et  l'on  nhante  : 

—  Quant  ei  d'ourol,  Jacou;iar? 
(Din-don-dan,  din-don-dan) 

—  Ei   si  eis  ouroi,  manquo  en  quart. 

—  Ei  l'ouro  de  dejunùJ 
-■  Non. 

—  Ei  l'ouro  de  dinà? 

—  Nou. 

—  Ei  l'ouro  de  goiisfà? 

—  Nou. 

—  Ei  l'ouro  de  soupà  ? 

*  Var.:    Vtro  toun  quiou.  maire  Câlin. 


CHANTS   POPUIAIRES    DU   LANGUEDOC 


65 


•  Nou. 
Ei  Touro  de  se  coueijù  ? 
Nou . 

Ei  l'ouro  de  fravnlhàf 
Voué.  voué. 
E  zou!  fraralhen.  traruihen. 


Pin,  pan,  pin.  pan,  etc. 


Quelle  heure  est-il,  Jacquemart?—  (On  imite  le  son  des  cloches  :  dxn- 
don-dan,  dindon-dan.)  —  C'est  six  heures  moins  un  quart.  —  Est-ce 
l'heure  de  déjeuner'?  —  Non.  —  Est-ce  l'heure  de  dîner?  —  Non.  —  Est- 
ce  l'heure  de  goûter  ?  —Non.  —  Est-ce  l'heure  de  souper?  —Non.— Est-ce 
1  heure  de  se  coucher? — Non. —  Est-ce  l'heure  de  travailler  ?— Oui, 
oui.  —  Et,  allons!  travaillons,  travaillons  . .    Pin',  pan!  pin!  pan  ! 

Et  en  même  temps  elles  se  donnent  mutuellement  de  grands  coups 
de  derrière  jusqu'à  ce   qu'elles  en  aient  assez,  et  le  jeu    recommence. 


XII. 


LOU  BRANLE  DE  MA  TANTO 


Lou  bran-le    de     ma     tan  -  to,      Lou   rous-si-gnôu 


^^^ 


-K     N?- 


J\  é    » 


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can  -  to.       Li  gou  -  be  -  lel  Soiiu  pan  -  ca  -  ro  net.  Coucourelet  ! 

1)  Lou  branle  de  ma  tanto, 
Lou  roussignôu  canto . 

Li  goubelet 
Soun  pu  'ncaro  net. 
Coucourelet' 

Le  Br.\nledem.\  Tante.— 1)  Lebranlo  de  ma  tante,— le  rossignol 
chante.  —  l^es  gobelets  —  ne  sont  pas  encore  nets.  —  Cou- 
courelet ! 

Écrit  et  noté  d'apr.'S  M"°  Marthe  Reboul,  d'Arles  (Bouches-du-Rhône) 


XIII. 


AUTRE. 


Au  jardi  de  ma  tanto 
Lou  roussignôu  li  chanto, 


86  DIALECTES    MODERNES 

Fai  toutounet  (bis). 
Fai  :  cri  ! .  . . 

Autre.  —  Au  jardin  de  ma  tante,  —  le  rossignol  y  chante.—  Il 
fait:  t (bis);  —  il  fait  :  cri  ! 

Recueillie  par  M,  Ghaussinand,  à  Goux  (Ardèche). 


XIV.    —  LA  ROUNDO  DE  CATARINO 

Roundo,  roundo,  Catarino, 
Que  mamà  es  à  la  vigne  ; 

Pourtarà  un  auzel 
Sur  la  punto  del  coutèl. 
Hou  !  hou  ! 

Ronde  de  Catherine.  —  Fais  la  ronde,  Catherine,  —  car  ta  mère 
est  à  la  vigne;  —  elle  t'apportera  un  oiseau  —  sur  la  pointe  d'un 
couteau.  —  Hou  !  hou  ! 

Nous  devons  cette  version  à  Mlle  Marie  Lambert,  de  Belcstà  (Ariége). 
1 .  —  Hou  I  est  le  cri  final. 


XV.  —  LOU  BRANDET  DE  ROSO 


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r  K  T'i  r  r  ^irr  r  ç  i 


Lou  bran-det    de        Ro  -  so,  Tant    de    ro  -  sos 


)g^  k  K  p     »  k   k^  k^  p  1/  ■  k  T 


cou-mo   de  flous 


De    tou-tome-no        do    cou  -  lous. 


1* 1* ^ 


pâ 


c  f  r 


y    1?    \.  j/    y  \    y    s>  \^    y    ^ 


Ca  -  gas  -  sou  -  net, 


Le         vo  -  te      dre  ! 


Lou  brandet  de  Rose  : 
Tant  de  rosos  coumo  de  tious 


CHANTS   POPULAIRES    DU    LANGUEDOC 


R7 


De  touto  meno  de  coulous. 
Cagassounet, 
Levo-te  dre  ! 

Le  Petit  Branle  de  Rose.  —  Le  petit  branle  de  Rose  :  —il  y  a 
autant  de  roses  que  de  Heurs  —  de  toutes  sortes  de  couleurs.  — 
Baisse-toi,  —  lève-toi  droit. 

Version  qui  nous  a  été  adressée  par  M.  Albert  Arnavielle,  d'Alais 
(Gard).  Se  dit  dans  tout  le  pays  des  basses  Cévennes. 

1.  —  Le  deuxième  vers, 

Tant  de  rosos  coumo  de  flous, 

rappelle  le  troisième  du  ch.  XI. 

Tant  de  losoi  coumo  de  flous . 

Il  S(^    présente  très-souvent  dans   nos  chants  populaires.   C'est  un  lieu 
c  mn\un. 

2.  —  Cagassounei.  petit  enfant  qui  se  baisse,  de  cagà,  de  faire  ses  be- 
soins, se  baisser. 


XVI.  --    LOU  BHANDKT  DE  PALADAN 


±^ 


trrryfrrf  "t  r  r  r 


Lou  bran-det    de       Pa-la-dan,        Lou  pus  nesci   es 


feniy— y 


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-Ç^-^ 


3^ 


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p=^^=p^ 


^-K 


■y- 


lou   pus  graad  .La       fi  -  go    ra    -  ta  -  do,        Lou  cat    l'a  man- 


—7 — fer— fe — \/      /        \.'     t, — 1S—7- 


^ 


■± 


k   !^  k'-  V 


ja  -  do. 


Ca-gas-sou-net, 


Le  -  vo  -  te    dre! 


l)Lou  brandet  de  Paladan, 
Lou  pus  nesci  es  lou  pus  grand. 
La  figo  ratado, 
Lou  cat  Ta  manjado. 
Cagassounet, 
Levo-te  dre. 


Le  Petit  Branle  de  Paladan. —  1)  Dans  le  petit  branle  de  Pa- 


88  DIALECTES   MODERNES 

ladan,  — celui-là  est  le  plus  niais  —  qui  est  le  plus  grand.  —  La 
figue  mordue  par  le  rat,  —  c'est  le  chat  qui  l'a  mangée.  —  Baisse- 
toi.  —  lève-toi  droit. 

Ronde  cévtmole,  recueillie  par  M.  Albert  Arnavielle,  d'Alais  (Gard). 


XVII.         LA  FARANDOULO  DE  TRINQUATALHO 


kr-l^-^ 


iv-t^ 


3 


~w~ir 


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5E*S53 


1/   V- 


La      fa  -  ran  -  dou     lo     de     Trin  -  qua  -  ta!  -  ho,  Tou-li  li 


%=^ 


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W — 0- 


gen    90un  de      ca     -  nal  -  ho  ;    La    fa  -  ran  -  dou-lo  de  Sant-Rou- 


T=^ 


¥=F 


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JZ 


miè,       Tou   -   ti        li         gen         pis  -  son         au       lié. 

1)    La  farandoulo  de  Trinquatalho, 
Touti  li  gen  soun  de  canalho  ; 
La  farandoulo  de  San-Roumiè, 
Touti  li  gen  pisson  au  lié. 

La  Farandole  de  Trinquetaille. —  1)  A  la  farandole  de  Trin- 
quetailie,  —  tous  ceux  qui  s'y  trouvent  sont  de  la  canaille  ;  —  à  la 
farandole  de  Saint-Remy,  —  tous  les  danseurs  pissent  au  lit. 

De  M""  Marthe  Reboul,  d'Arles-sur  Rhône. 

L  —  Moquerie  à  l'adresse  des  gens  de  Trinquetaille  et  de  8ainl-Rémy; 
se  rattache  ainsi  à  la  curieuse  série  de  nos  chants  satiriques. 

Nous  avons  vu  un  exemple  de  ces  satires  de  lieu  à  lieu  jusque  dans 
notre  deuxième  série,  \ous  Enfants  de  Mounlpeliè  (chants  pour  réveiller.) 


CHANTS    POPULAIRES    DU    LANGUEDOC 


89 


XVIIl.   —  LA    MARIDADOUNO 

Marida  me  vole  aquest'  an, 
Vole  pas  'spera  un  autre  an. 

L'annado  n'es  bouno, 
La  vole  pas  'spera  milhouno, 

La  FiLLK  A  MARIER.  —  Je  veux  me  marier  cette  année,  — je  ne 
veux  pas  attendre  un  autre  an — L'année  est  bonne, —  je  ne  veux 
pas  l'attendre  meilleure. 

Version  de  Golognac  (Gard),  d'après  M.  le  pasteur  Fesquel. 
1.  —  Parodie,    pour   toutes   petites   filles,    des  chants   énumératifs, 
IV»  série . 

XiX.  —  LOU    BHANLE    UAU    CACARACA 


J=, 


2o 


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A  -  co's  lou        bran  -  de 


Dau      ca  -  ca  -  ra- 


^ 


Y- 


— = ^^ 

cà  !      Las  sor  -  bas       tom  -  bou,       Las    eau     ra  -  mas  -  sa. 

Aco  's  lou  brande 
Dau  Cacaracà  ! 

Las  sorbas  tombou, 
Las  eau  ramassa 
A  pougnas,  pougnas ! 
—  Cau  que  las  sorhas  tombou! 

Le  Branle  du  Goquerico.  — C'est  le  branle  du  Coqiierico;  — les 
cormes  tombent, —  il  faut  les  ramasser,  —  à  poignées,  à  poignées! 
—  Il  faut  fjue  les  cormes  tombent  ! 

'    Version  communiquée  par  M.  Henri  Bouquet  (de  Montpellier,. 

1.  —  C'est  aussi  une  ronde.  Aux  mots  :  à  pougnas!  on  s'arrête  — pour 
faire  semblant  de  ramasser  les  cormes;  —  puis  l'on  reprend  encore  la 
ronde,  et  l'on  termine  comme  dans  le' branle  de  Lileta. 


90 


DIALECTES   MODERKES 


XIX  [bis).   — LOU  PED,  LA  MA 


is 


S 


k: 


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5 


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__| ■-..y  »!  »^ 1^ 1       W       ' #- 


-' — #- 


Lou     ped,  lou  ped,  lou    ped;     La     ma,    la     ma,      la 


fflj.-'lc-"f,:li:-''^^ 


ma;      E       vi  -  ro  -  le     de      ça.    Que    ti      vo  -   li    bai  -  sa. 

Lou  ped,  lou  ped,  lou  ped; 
La  ma,  la  ma,  la  ma: 
E  viro-te  de  ça 
Que  ti  voli  baisà. 

Le  Pied,  la  Main. —  Le  pied  (ter),  — la  main  (ter):  —  et  tourne-toi 
de  ce  côté,  — que  je  veux  l'embrasser. 


XX.   LOU  PED  BOU.MPUT 


m 


ojee^J.r^-^os 


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F   h  j  }\ 


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:^ 


Sau  -    tè,      Se  roum  -  pe  -  guè     — 


W 9r- 

la     cham  -  bo  ;    Sau 


ii^J\{]  j'iir^v^^ 


tè,      Se  roum-pe  -  gi-.è    —    Lou       ped.     Sau  -  tè  Dins  lou  bour-bour- 


^ 


^=ih^r-^ 


-4- 


£=£ 


:2=2: 


bour,      Sau  -  tè       Dins  lou  bour 


di      -    Ihè. 


Sauté, 
Se  roumpeguè 


CHANTS    POPULAIRES    DU    LANGUEDOC  91 

La  chambo  ; 

Sauté, 
Se  roumpeguè 
Lou  ped. 
Sauté 
Dins  lou  bour-bour-bour, 

Sauté 
Dins  lou  hourdilhc  ! 

Le  Pied  rompu.— Il  sauta,— il  se  rompit —la  jambe;— il  sauta, 
—  il  se  rompit  le  pied.—  Il  sauta  dans  le  bour  {ter),  —  il  sauta 
dans  le  bourbier. 

Version  de  M.  H.  Chaussinaud,  de  Coux  (Ardèche). 

1)  Exercice  de  saut,  à  la  sortie  de  l'école. Sorte  de  cloche-pied  qui  se 
fait  en  se  tenant  par  la  main,  en  formant  une  bande. 


XXI.   —  LOD   CAT 


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Lou  cat  es  au    sùu,  Se  sou  -  rel-ha,  se    sou  -  rel  -  ha 


,M'j';;iJ.  ^^.\^a44\^^ 


Lou    cat    es       au       sôu,     Se    sou  -  rel  -  ha,  dis   que  plôu. 


Lou  cat  es  au  sôu, 

Se  sourelha  {bis)  ; 
Lou  cat  es  au  sôu, 
Se  sourelha,  dis  que  plôu. 

Le  Chat.  —  Le  chat  esta  terre,—  il  se  soleille  fois);- le  chat  est 
à  terre,  —  il  se  soleille  et  dit  qu'il  pleut. 

Version  de  Montpellier. 

I.  —On  place  un  tout  petit  enfant,  lou  cat,  le  chat,  au  milieu  d'un  cercle, 
et  l'on  fait  la  ronde  autour  de  lui.  Il  prend  part  au  jeu,  quoiqu'il  ne  lui 
soit  pas  possible  de  sauter  comme  les  autres. 

II.— Lorsque  la  ronde  est  faite  par  de  plus  âgés,  le  chat  se  lève,  le  chant 
fini;  et  tâche  d'attraper  l'un  de  ses  petits  camarades,  qui  prend  sa  place. 


92 


DIALECTES    MODERNES 


XXII.  —  LA     PEKDIGOLO 

Rodo,  rodo, 

Perdigolo. 
Se  ma  maire  es  à  Tescolo, 
N'ai  moun  paire  à  Paris  * 
Que  mi  pourtaro  de  ris. 

La  Coccinelle.  —  Tourne,  tourne,  —  coccinelle.  —  Si  ma  mère 
esta  l'école,  —  mon  père  esta  Paris,  —  qui  m'apportera  du  riz. 

Se  dit  à  Colognac  (Gard),  d'après  M.  le  pasteur  Fesquet. 

I.  —  La  rime  semble  exiger  rollo,  roule.  Cf.  perdigolo  ei  escolo. 


XXIII 


LA    RONDE  PAPILLONNE 


La  ronde  papillonne. 
Mon  père  est  à  l'école. 
Ma  mère  est  en  prison! 

Coucou  ! 
Saucisso  !  missou  ! 

Version  de  M.  Fesquet,  pasteur,  à  Gologaac.  près  Lasalle  (Gard). 

l .  —  Les  derniers  mots  seuls  sont  en  languedocien. 

Il  y  a  trois  cris,  au  lieu  d'un  seul:  coucou!  sauasso!  missou!  œufi 
saucisse  1  saucisson  !  —  mots  incohérents,  qui  n'ont  aucun  rapport  avec 
le  chant,  et  ne  sont  là  que   comme  exclamations  et  pour  la  rime. 


*  "Var.  de  Saint-Martin-de- Londres  (Hérault). 

Toun  paire  es  en  paradis 

Que  manja  un  platat  de  ris. 
Trad.  —  Ton  père  est  on  paradis,  —  qui  mange  un  gros  plaide  riz. 

A.  M.  et  L.  L. 


MAUCOR' 


PlAT. 


Aviei  una  maire  carida  ; 
Aviei  de  fraires,  una  sor  : 
Touteis  an  atroubat  la  mort 
Dins  Torra  e  guerrieira  partida  ! 

Encara  aviei  per  passa  vida 
De  riquessias,  d'argent  e  d'or  ; 
Mais  tala  es  la  lei  dau  pus  fort, 
Que  Foustalada  es  avalida. 

Mouis  amies  an  pensât  mai  bel, 
E  segu  de  me  daissà  'n  pena 
(Dau  ben  fach  memoria  s'avena). 

Ma  miga,  de  tant  bona  mena, 
Me  Fan  raubada  en  plen  sourel. 
Veses  acôs  e  cales,  Cel! 

(Languedocien,  environs  de  Montpellier,  i 


DECOURAGEMENT 


J'avais  une  mère  chérie;  —  j'avais  des  frères,  une  sœur  :  —  tous 
ont  trouvé   la  mort  —  dans  la  joute  horrible  de  la  guerre  ! 

J'avais  encore,  pour  passer  ma  vie,  —  des  richesses,  de  l'argent 
et  de  l'or  ;  —  mais  telle  est  la  loi  du  plus  fort,  —  que  la  maison 
tout  entière  s'est  évanouie. 

Mes  amis  ont  cru  bien  plus  beau —  et  plus  sûr  de  me  laisser  à  la 
peine —  (du  bienfait  se  perd  la  mémoire). 

Mon  amie,  de  si  bonne  race, —  on  me  l'a  ravie  en  plein  soleil... 
Tu  vois  cela  et  tu  te  tais,  ô  Ciel  ! 

PlAT. 

'  Extrait  de  Garbeto,  recueil  de  poésies  couronnées  le  23  mai  1878. 


LOU  DIEU  VIVENT  ! 

léu,  paure  orne  dôu  Nord,  aujourd'uei  que  vous  parle, 
Que  vous  plagne  toujour,  pàuris  orne  dôu  Nord, 
De  Berlin,  de  Paris,  d'Avignoun  même,  e  d'Arle, 
Agouloupa  de  gèu  e  malaut  de  maucor  ! 

Entanterin  que  vautre,  à  la  visto  negrasso 
De  la  plueio  e  di  niéu,  trouvas  triste  lou  cor, 
E  sentes  dôu  mistrau  l'esperoun  e  la  chasso. 
Me  souleie  à  la  flamo,  e  trêve  li  rai  d'or  ! 

A  geinoun  me  veici,  plen  de  gau  inefable 

(Coume  un  «  hadji  »  fervent  sus  soun  tros  de  tapis 

Se  clinant  à  Mecca  que  de  liuen  ie  sourris), 

Au  soumet  trelusènt  dôu  Cap  Incoumparable, 
Sus  un  ro  perfuma,  unverdous  prego-diéu, 
T'adourant,  pèr  ma  fe.  blound  Febus,  grand  Soulèu  ! 

Guihèn-C.  Bonaparte-Wyse 
Au  Gap  d'Antibo,  feb.  19,  —  1878. 

(Provençal,  Avignon  et  les  bords  du  Rhône.) 
LE  DIEU  VIVANT 

Moi,  pauvre  homme  du  Nord  ,  qui  vous  parle  aujourd'hui ,  — 
que  je  vous  plains  en  tout  temps,  pauvres  hommes  du  Nord,  —  de 
Berlin,  de  Paris  ,  d'Avignon  même  et  d'Arles,  —  enveloppés 
de  gelées  et  malades  de  mélancolie  ! 

Pendant  que  vous,  à  la  vue  noircie  —  de  la  pluie  et  des  nuages, 
trouvez  le  cœur  triste,  —  et  sentez  du  mistral  l'éperon  et  le  fouet 
[de  chasse],  —  je  m'ensoleille  à  la  flamme  et  je  hante  les  rayons 
d'or. 

A  genoux  me  voici,  plein  de  joie  ineffable  —  (comme  un  hadji^ 
fervent  sur  son  fragment  de  tapis  —  se  clinant  à  Mecca  qui  lui 
sourit  de  loin), 

Au  sommet  éblouissant  du  Gap  Incomparable-,—  sur  un  rocher 
parfumé,  sur  un  prie-Dieu  vert,  —  t'adorant,  par  ma  foi,  blond 
Phébus,  grand  Soleil! 

Guillaume-C.  Bonaparte-Wyse. 

'  Pèlerin  muisuman, —' Le  Gap  d'Amibes,  que  j'ai  nommé,  que  je 
nomme,  et  que  je  nommerai  toujours  ainsi. 


NIÇO 

A  DoNo  Fabre-Sallières. 

Grando,  douço,  graciouso  e  bello  entre  li  bello, 
Dins  l'aire  embauseraa  coungreies  de  poutoun  ; 
Fiero  coume  la  mar  que  frusto  ti  petoun, 
Espandisses  toun  sen  au  soulèu,  que  simbello. 

Amairis  dôu  plesi,  toun  amo  lou  barbèlo  ; 
Mai,  s'a  la  danso,  au  jo,  vas  coume  un  fouletoun, 
Au  fougau  dôu  malur  te  veson  d'assetoun, 
Degaiant  ti  trésor  au  pauro  que  li  bèlo. 

Lou  Printèms,  toun  esclau  eterne,  de  rai  d'or, 
De  flour  e  de  perfum,  te  treno  uno  courouno 
Que  lèu  ta  man  de  rèino  en  cadun  abandouno. 

0  Niço,  tèsto  ardènto  !  0  Niço,  noble  cor  ! 
Dôu  Paradis  sus  tu  lou  chale  escrèt  davalo  : 
Sèmpre  auras  de  jalouso  e  jamai  de  rivale. 

L.    ROUMIEUX. 

Niço,  23  de  Febrié  de  1878. 

(Provençal,  sous-dialecte  d'Avignon  et  des  bords  du  Rhône  ) 

NICE 

A  Madame  Fabre-Sallières. 

Grande,  douce,  gracieuse  et  belle  entre  les  belles,  —  dans  l'air 
embaumé  tu  engendres  des  baisers;  —  fière  comme  la  mer  qui 
frôle  tes  pieds  mignons,  —  tu  éi/anouis  au  soleil  ton  sein  qui  l'in- 
vite [à  venir]. 

Amante  du  plaisir,  ton  âme  le  convoite;  —  mais  si,  à  la  danse, 
au  jeu,  tu  vas  comme  un  lutin,  —  au  foyer  du  malheur  on  te  voit 
t'asseoir,  —  prodiguant  tes  trésors  au  pauvre  qui  les  désire. 

Le  Printemps,  ton  éternel  esclave,  de  rayons  d'or,  —  de  fleurs 
et  de  parfums,  te  tresse  une  couronne,  —  que  promptement  ta  main 
de  reine  abandonne  à  chacun . 

0  Nice,  tête  ardente!  0  Nice,  noble  cœur!  —  le  charme  le  plus 
pur  du  Paradis  descend  sur  toi;  —  tu  auras  toujours  des  jalouses 
et  jamais  de  rivales.  L.  Roumieox. 

Nice,  23  février  1878. 


LA  SEMENAIRO  DE  MILH 


«  En  abrilh 
Fai  toun  milh.  » 
(Reprouvprbi  laaragues  ) 

Le  gaueh  de  la  mannado  i)rimo, 
Clar-tindent,  se  ven  d'asalbrà, 
E  del  cloutas  cap  à  la  cimo, 
Lest,  on  le  vei  s'escalabrà. 

Las  cardinos  s'esperdigalhoun 
Subre  Tcapelh  des  çupressiès, 
Pes  rais  celestials  que  davalhoun 
Junquos  sus  eules  bartassiès. 

0  glorio  !  Tout  s'escarrabilho 
Dins  l'aire  fresc  e  sanetous  ; 
Demest  la  cansou  que  bresilho 
L'aucelet,  i  a  'n  brucli  de  poutous. 

O  naturo  !  L'armo  s' allegro 
A  mira  le  regrilhoment 
Belestant  la  Mountagno  Negro 
Del  vert  clar  de  soun  vestiment. 

LA  SEMEUSE  DE  MAIS 

«  En  avril,— fais  ton  mais,  » 
{Proverbe  lauraguais.) 

La  joie  de  la  charmante  prime-saison, — avec  ses  clairs  tintements, 
vient  de  se  répandre  dans  les  arbres,  —  et  du  grand  trou  jusqu'à 
la  cime,  —  leste,  on  la  voit  monter  à  re?calade 

Les  chardonnerets  se  réjouissent  en  brandissant  les  ailes  —  sur 
le  faîte  des  cyprès.  —  par  les  rayons  célestes  qui  descendent  — 
jusque  sur  les  hièbles  des  buissons  épais. 

0  gloire!  tout  s'évertue  —  dans  l'air  frais  et  sain;  —  au  milieu 
de  la  chanson  que  gazouille  —  l'oiselet,  il  y  a  un  bruit  de  baisers. 

0  nature!  l'âme  se  réjouit  — à  admirer  le  renouveau  — embel- 
lissant la  Montaigne  Noire —  du  vert  clair  de  son  vêtement. 


T.A    SEMENA1R0    DE    MILH  97 

Quand  touruo  la  sasou  nouvelo, 
Qu'acouro  tant:  Tabrilh,  rabrilh, 
Poulit  coiinao  uno  jouvenelo, 
Le  gazalhà  penso  à  fa  Tmilh. 

Te,  per  la  piano  lauragueso, 
Ount  lusis  un  breselh  daurat, 
Uno  grando  e  liero  pageso 
Cour  à  travès  un  camp  laurat. 

Es  bruuo,  es  de  la  caudo  raço  ■ 
Des  belis  Morouls  cordouans 
Qu'apr'aici  daisseroun  Ihour  traço. 
Terribles  coumo  d'ouracans. 

Sa  cambo  n'es  pas  brico  torto, 
Un  gard  negret  i  oumbrejo  Y  pot  ; 
Soun  se  vertelho,  mais  es  forto 
E,  se  se  vol  marida,  pot. 

Sara  lèu  à  'no  countournieiro  ; 
Va,  resoulgudo,  le  ped  franc  : 
Semeno,  —  porto  en  bandoulieiro 
Un  sac  emplenat  de  milh  blanc  ; 


Quand  revient  la  saison  nouvelle,  —  qui  donne  tant  de  cœur: 
l'avril,  l'avril,  joli  comme  une  jouvencelle, —  le  laboureur  pense 
à  faire  le  mais . 

Tiens,  par  la  plaine  lauraguaise,  —  où  luit  un  réseau  doré,  — 
une  grande  et  ûère  paysanne  —  marche  à  travers  un  champ  la- 
bouré. 

Elle  est  brune;  elle  est  de  la  chaude  race  —  des  beaux  Maures 
cordouans  —  qui  par  ici  laisseront  leur  trace ,  —  terribles  comme 
des  ouragans 

Sa  jambe  n'est  pas  du  tout  tortue,  —  un  duvet  un  peu  noir  lui 
estompe  la  lèvre  ;  —  son  sein  naît,  mais  elle  est  forte,  —  et,  si 
elle  veut  se  marier,  elle  le  peut. 

'  Elle  atteindra  bientôt  à  une  conlournière  (une  des  extrémités  du 
champ);  —  elle  va,  résolue,  le  pied  franc:  —  elle  sème,  elle  porte 
en  bandoulière  —  un  sac  rempli  de  maïs  blanc  ; 


98  DIALECTES    MODERNES 

I  pouso,  margo  reissugado, 
1  pouso  junquos  à  miej  bras, 
E,  de  la  sieu  ma  bristoulado, 
Semble  fa  rajà  d'ambre  en  gras. 

Tout  en  sourrisent,  elo  sousco 

Ah  vielh  reprouverbi  que  dits  : 

«  Blat  dins  Faigo  e  milh  dins  la  pousco  »  ; 

E,  brassejant,  durbis  les  dits. 

Ves  le  Fresquelh,  dins  la  boulbeno, 
Sens  bissautà  cap  de  selhou, 
Dempuei  boun  maiti  ja  semeno  ! 
Aco's  un  valent  merilhou. 

I  atrio  de  vese,  espandidos. 
Las  fuelhos  d'un  vert  metallic, 
Larjos  lances  souvent  brandidos 
Per  Fautà  que  se  levé,  afric. 

Dins  las  milheros  pla  ramados , 
Quouro  se  farà  mai  d'un  fais 
De  crestos  tendres  e  sucrados 
Que  les  biôus  chapoun  à  bel  cais  ? 


Elle  y  puise,  manche  retroussée;  —  elle  y  puise  jusqu'à  moitié 
bras,  —  et,  de  sa  main  hàlée,  —  elle  semble  faire  couler^de  l'ambre 
en  grains. 

Tout  en  souriant,  elle  songe  —  au  vieux  pi"Overbe  qui  dit:  — 
«  Blé  dans  l'eau  et  maïs  dans  la  poussière»;  —  et,  faisant  mouvoir 
son  bras,  elle  ouvre  les  doigts. 

Vers  le  Fresquel,  dans  la  terre  argilo-sablonneuse  (bolaire),  — 
sans  omettre  aucun  sillon, —  depuis  le  grand  matin,  elle  sèmel  — 
C'est  une  vaillante  petite  merveille. 

Il  lui  tarde  de  voir,  étendues,  —  les  feuilles  d'un  vert  métalli- 
que, —  larges  lances  souvent  brandies  —  par  l'autan  qui  se  lève, 
ardent. 

Dans  les  maïsières  bien  ramées,  —  quand  fora-t-on  de  nombreux 
faix  —  de  crêtes  (panicules)  tendres  et  sucrées,  —  que  les  bœufs 
bâfrent  à  belle  dent  ? 


LA    SEMENAIRO    DE    MILH  99 

Sens  borgnos,  les  peds  verturouses, 
Nouseluts,  de  sabo  couflats, 
Pes  païsans  que  n'soun  gelouses 
Saran  sarclats  e  causselats. 

Voulam  al  punh,  cremant  las  bossos, 
Que  tourne  veni  Messidor, 
E  se  granaran  las  cabossos 
En  metent  barbos  de  pel  d'or. 

Qu'ai  mens,  quand  la  luno  treluco 
Le  tais  nou  las  vengue  péri  ! 
Esperen  qu'auranpas  la  cuco, 
Que  res  nou  las  farà  pouirri  ; 

PerVendemiari  'mbriaigaire, 
Pla  maduros  s'amassaran 
E,  sens  que  se  demore  gaire. 
Apuei  se  despeloufaran. 

Las  palhassieiros  emplenados 
De  lliour  estroup  rous  e  triât, 
Selho  de  part,  soun  desgranados, 
E  l'milli  es  lèu  escampilhat. 


Sans  excroissances,  les  pieds  vigoureux,  —  noueux,  de  sève 
gonflés,  —  par  les  paysans  qui  en  sont  jaloux  —  ils  seront  sar- 
clés et  chaussés. 

Faucille  au  poing,  brûlant  les  monticules,  —  que  revienne  Messi- 
dor, —  et  ils  se  couvriront  de  grains  ,  les  épis,  — ■  en  poussant 
des  barbes  aux  poils  d'or. 

Qu'au  moins,  quand  la  lune  est  dans  son  plein,  —  le  blaireau 
ne  vienne  pas  les  abîmer  !  —  Espérons  qu'ils  n'auront  point  la  che- 
nille, —  que  rien  ne  les  fera  pourrir. 

En  Vendémiaire  enivreur,  —  bien  mûrs  on  les  cueillera  —  et, 
sans  que  l'on  attende  longtemps,  —  ensuite  on  les  débarrassera 
de  leur  spathe. 

Les  paillasses  remplies  —  de  leur  enveloppe  jaune  et  triée,  — 
les  épis  gâtés  mis  de  côté,  ils  sont  égrainés,  — et  le  maïs  bientôt 
éparpillé. 


100  DIALECTES    MODERNES 

Dins  l'iver,  se  fa  d'engranieiros 
De  la  milhorco  qu'a  levât 
Sous  penaches  sus  las  aurieiros  ; 
E's  mainages,  tre  qu'a  nevat 

E  que  coummenço  la  velhado, 
Fan  de  muscardins  de  gras  viels 
Davant  uno  bravo  flambado 
De  trouisses  e  mai  de  tutels. 

Cal  que  la  molo  de  Sidobre, 
Tros  de  qualque  roc  tremoulant, 
Sul  milh  de  Fan,  sens  relais,  obre. 
—  Que  vire,  vire,  le  voulant  ! 

Passade  al  sedas,  la  farino 
Se  vudo  al  pairol  escurat  : 
Aquelo  semblo  de  nèu  iino, 
Aiceste  un  brasiè'mpourpourat; 

Penjo  al  cremalh  :  ou'  cousinieiro, 
Sarro  as  genouls  le  teule  fort  ! 


Durant  l'hiver,  on  fait  des  balais  —  avec  [les  panicules]  —  du 
sorgho  qui  se  sont  dressées  — en  panaches  au-dessus  des  orées,— 
et  les  enfants,  dès  qu'il  a  neigé 

Et  que  commence  la  veillée,  —  font  des  muscardins  '  de  grains 
vieux,  —  devant  une  bonne  flambée  — de  tiges  sèches  de  maïs  et 
de  chardons  blancs  (tout-yeux.) 

Il  faut  que  la  meule  fen  granit]  de  Sidobre.  —  morceau  de  quel- 
que roc  tremblant,  —  sur  le  maïs  de  l'année  sans  relAcbe  travaille.— 
Qu'il  vire,  vire,  le  volant  (raeule/supérieure)  ! 

Passée  au  sas,  la  farine  —  se  vide  au  chaudron  récuré: —  colle-ci 
semble  de  la  neige  fine,  — celui-là  un  brasier  empourpré  ; 

Le  chaudron  pend  à  la  crémaillère  :  holà!  cuisinière. —  serre  aux 
genoux  la  tuile  *  forte  !  —  Le  milhas  ^  bout;  que  ta  cuiller  —  le  re- 
mue,/ic-/oc.  à  tout  rompre  ! 

'  Grains  de  maïs  qui  ont  éclaté  devant  la  braise  et  se  sont  couverts 
de  fécule.  Us  sont  pareils  à  des  fleurettes  aux  pétales  gras;  ils  éblouis- 
sent de  blancheur. 

*  Qui  se  place  contre  le  chaudron  pour  garantir  du  feu. 

^  Bouillie  de  maïs. 


LA   SEMENATHO    DE    MILH  101 

—  Le  rnilhas  bulh;  que  ta  culieiro 
Le  reineae,  tlic-lloc,  à  mort  ! 

Vudat  sus  la  toualho  neto, 
Sens  couquels,  fumant,  s'espandis  : 
A  taulo!  e  de  peço  en  peceto, 
Dins  un  soûl  repais  sVngoulis. 

E  la  semenairo  maurelo 
Pel  cap  se  va  repasso  atal, 
Uelh  vieu  counio  uno  carbounelo, 
Plantado,  mas  suT  davantal. 

0  la  pageso  pensasivu. 
Al  colh  pouderous,  as  peds  nuds  ! 
La  belo  drouUasso  qu'es  divo 
Autant  que  Cibelo  ou  Venus, 

Ag'USt   FOURÈS. 

Abrilh  1877. 
{Languedocien,  ("lasi^lnaïuiary  et  ses  environs). 


"Vidé  sur  la  nappe  nette,—  sans  ixrianeaux,  fumant,  il  s'étend  :  — 
A  table!  et  de  pièce  en  piécette,  —  dans  un  seul  repas  il  est  en- 
glouti. 

Et  la  semeuse  brune  —  par  la  tète  se  repasse  tout  cela  ainsi.  — 
œil  vif  comme  une  escariioucle,  —  plantée,  les  mains  sur  son  ta- 
blier. 

O  la  paysanne  pensive,  —  au  cou  puissant,  aux  pied?,  nus!  —  la 
belle  fille  qui  est  déesse  —  autant  que  Cybèle  ou  Vénus! 

Aug.  FouRÈs. 
Avril  1877. 


-CNj»OTC«'>^  ^ 


VËSPRE  D'ESTIEU 

AU     FRLIKRE      TKODOR     ATHANEL 

Palo  coiime  un  maubre, 
La  luno  plan-plan 
Davalo  dis  aubre 
Sus  lou  camin  blanc  ; 
Vers  l'Alzoun  s'adraio 
V]  dins  li  sourgènt. 
En  passant,  miraio 
Si  bano  d'argent. 

Au  founs  de  la  lèio 
L'anen  vèire  ensèn, 
E,  coume  Mirèio, 
Belaren  Vincent: 
Es  l'ouro  que  Tamo 
Se  perd  dins  li  niéu, 
L'ouro  ounte  l'on  amo, 
L'ouro  ounte  l'on  viéu . 

Tout  dor,  tout  soumiho  ; 
Mai,  dins  l'aire  escur, 
Dirias  l'armounio 


'SOIR   D'ÉTÉ 


AU    FKLIBRE    THEOnOUE    AUBANKL 

Pâle  comme  un  marbre,  —  la  lune  doucettement  —  descend 
des  arbres  —  sur  le  chemin  blanc;  —  elle  se  dirige  vers  l'Alzon, 
—  et,  dans  les  iilets  d'eau,  — en  passant,  —  elle  mire —  ses  cornes 
d'argent. 

Au  fond  do  l'allée  —  allons  la  voir  ensemble,  —  e',  comme 
Mireille,  —  nous  penserons  à  Vincent .  —  c'est  l'heure  —  où  l'âme 
se  perd  dans  les  nuées,  —  l'heure  où  l'on  aime,  —  l'heure  où 
l'on  vit. 

Tout  dort,  tout  sommeille;  —  mais,  dans  l'air  obscurci,  —  Ton 


VESPRE    D  ESTIEU  103 

D'estràngi  murniur  : 
Mistei'iôusi   gamo 
Tant  douço  d'ausi, 
Voues  lie  la  calamo, 
Quau  vous  fai  brusi  ? 

Milo  farfantello, 
Alilo  sounge  d'or, 
Gisclant  dis  estello, 
Penetron  li  cor. 
Au  fres  de  Teigagno. 
Au  mié  di  perfum, 
Segren  e  magagno 
Fuson  coume  un  fum. 

Mai  Fur  do  la  terre 
Glisse  dins  la  man  : 
Daman  nous  espère. 
Esperen  deman; 
E  tourna  sus  Fèrbo, 
Amigo,  vendren 
De  la  niue  supèrbo 
Béure  lou  seren. 

Leountino  Goirand. 

(Provençal,  Avignon  et  les  bords  du  Rhône.) 


(lirait  (ouïr)  l'harmonie  —  de  murmures  étranges  :  —  mysté- 
rieuses gammes.  —  si  douces  à  entendre  ;  —  voix  du  silence,  — 
qui  vous  fait  bruire? 

Mille  scintillements,  —  mille  rêves  d'or,  — jaillissant  des  étoiles, 

—  ]iénètrent  les  C(jeurs.  — A  la  fraîcheur  de  la  rosée,  —au  milieu 
des  parfums,  —  chagrins  et  tristesses  —  disparaissent  comme 
une  fumée. 

Mais  le  bonheur  de  la  terre  —  glisse  dans  la  main  :  —  demain 
nous  attend;  —  attendons  demain,  —  et,  de  nouveau  sur  l'herbe, 

—  amies,  nous  viendrons  —  de  la  nuit  splendide  —  boire  le  se- 
rein. 

Léontine  Gouiand. 


MARIUS^ 


De-vers  li  bèlli  terro  —  dou  Miejour  espanta, 

Lou  Nord,  a  cha  cent  milo, —  Ijandis,  femo,  oiue,  oiifant. 

Estrasson,  pihon,  brulon,  —  volon  tout,  sai^atfi  : 

An  fam  d'or  e  de  terro.  —  de  souleiado  an  fam  : 

Es  la  Barba,i'ifi  que  passe  —  davans  lou  mounde  roiimau. 

De  peu  (le  bèsti  fèro  —  envevtouion  si  las: 
Sa  como  es  i-oiiginasso,  —  soini  pitre  es  tout  badant. 
Soun  bèure  es  lou  sang  tèbi  —  e  souu  virure  es  la  car  ; 
Parlon  pas  :  onrlon,  bramon  ;  —  soun  oumbro  porto  esfrai 
Es  la  Barbarie  que  passe  —  davans  lou  mounde  rouman. 

Lou  resson  de  sa  marcho  —  retrais  à  l'ouragan. 
Li  Latin  mort  d'estrànsi  —  n'auson  pas  regarda; 


MARIUS 


"Vers  les  belles  plaines  du  Midi  lerrifié, —  le  Nord,  par  cent 
mille,  lance  femmes,  hommes,  enfants.  —  Ils  déchirent,  ils  pil- 
lent, ils  brillent,  ils  veulent  tout  éstorger:  — ils  ont  faim  d'oret  de 
terre,   ils  ont  faim  de  rayons  de  soleil  : 

(l'est  la  Barbarie  qui  passe  devant  le  monde  romain. 

De  peaux  de  bètes  sauvages  ils  enveloppent  leurs  flancs  ;  — 
leur  chevelure  est,  rousse,  leur  poitrine  toute  nuo.  —  Leur  bois- 
son est  le  sang  tiède,  et  leur  nourriture  la  chair.  —  Ils  ne  parlent 
pas,  ils  rugissent;  —  leur  ombre  jiortc  clTioi  : 

C'est  la  Barbarie  qui  passe  devant  le  monde  lomain  . 

L'écho  de  leur  marche  ressemble  à  lonragan.  —  Les  Latins, 
morts  d'effroi,  n'osent  pas  les  regarder;--  la  vallée  est  épouvantée 


*  Marius  a  obtenu  la  Cigale  d'or  olferle  par  M.  de  Qiiinlana  y  Combis, 
au  meilleur  poëme  sur  un  sujet  tiré  d'î  l'histoire  des  peuples  de  race  latine. 


MARITTS  )05 

La  coumho  es  espantado  —  de  lis  entendre  ourla. 

Desempièi  vue  jour,  passon,  —  passon  en  desfisant  : 

Es  la  Barbarie  que  passo  —  davans  lou  mounde  ronman. 

Lou  proumié  jour  que  passon,  —  Roumo  n'a  ressauta  : 
Lou  segound  jour  que  passon,  —  fernisson  li  roucas: 
Lou  tresen  jour  que  passon,  —  la  terro  a  tremoula  ; 
Lou  quatren  jour  que  passon,  —  lou  soulèu  s'es  tapa  : 
Es  la  Barbarie  ([ue  passo  —  davans  lou  mounde  rouman. 

Lou  cinqucn  jour  que  passon,  —  Marto  a  proufeiisa; 
Lou  sieisen  jour  que  passon,  —  s'anbouron  li  sourdat; 
Lou  seten  jour  ([ue  passon,  —  demandon  lou  courabat  ; 
Lou  vuechen  jour  que  passon,  —  quau  lis  arrestara? 
Es  la  Barliarié  que  passo —  davans  lou  raounde  rouraan. 

('ourt  Tarmado  latino —  à  travès  mount  e  vau  ; 
Toumlio  sus  Tost  destrùssi,  —  rapido  coume  un  lamp. 
Alin,  de- vers  Pourrièro,  —  li  Teutoun  soun  tança  ; 
Ourlo  lou  camp  barbare  :  —  quute  terrible  ourla  ! 
Es  la  Barbarie  que  passo  —  davans  lou  mounde  rouman. 


(le  les  entendre  hurler.  —  Depuis  huit  jours  ils  passent,  ils 
passent,  jetant  des  défis: 

C'est  la  Barbarie  qui  passe  devant  le  monde  romain. 

Le  premier  jour  qu'ils  passent,  Rome  en  a  tressailli  ;  —  le 
deuxième  jour  qu'ils  passent,  les  rochers  en  ont  frémi;  —  le  troi- 
sième jour  qu'ils  passent,  la  terre  en  a  tremblé  ;  —  le  quatrième 
jour  qu'ils  passent,  le  soleil  s'est  couché  : 

C'est  la   Barbarie  qui  passe  devant  le  monde  romain. 

Le  cinquième  jour  qu'ils  passent,  Marthe  la  prophéiesse  a 
parlé  :  —  le  sixième  jour  qu'ils  i)assent,  les  soldats  se  lèvent  :  — 
le  septième  jour  qu'ils  passent,  ils  demandent  le  combat: — U* 
huitième  jour  qu'ils  passent,  qui  pourra  les  retenir? 

C'est  la  Barbarie  qui  pa^se  devant  le  monde  romnin. 

L'armée  latine  conrt  à  travers  monts  et  vaux  ;  —  elle  tombe  sur 
l'armée  barbare,  rapide  comme  l'éclair.  —  En  bas.  vers  four- 
rières, les  Teutons  sont  acculés:  —  le  camp  barbaïc  hurle  :  quel 
terrible  hurlement!.. . 

C'est  la  Barbarie  qui  pa^se  ^lovant  le  monde  romain. 


106  DIALECTES   MODERNES 

Sus  Pourrièro  s'aubouro  —  lou  soulèu  fousc,  pourpau. 
Restountis  la  troumpeto,  —  s'abrivon  li  Rouman. 
Très  joui'  e  très  niue  duro  —  la  bataio  de  Lar. .  . 
Lou  sabre  latin  chaplo,  —  chaplo  que  chaplaras! 
Es  la  Barbarie  que  passo  —  davans  lou  mounde  rouman. 

Marins,  sus  li  roco,  —  lis  a  'scrapouchina 

Coume  un  rasin  bèn  gounfle  —  souto  un  destret  sarra. 

Que  moulounado  afrouso —  de  mort  dins  lou  campas  ! 

La  terro  assadoulado  —  vùu  plus  bèure  de  sang  : 

Es  la  Barbarie  que  passo  —  davans  lou  mounde  rouman. 

Sourtès  de  vôsti  cauno,  —  feruno  o  croupatas  : 
N'avès  pèr  vosto  vido,  —  de  cadabre  a  rouiga. 
0  terro  de  Prouvènço,   —  long  tèms  t'en  souvendras  : 
Aclapères  un  mounde  —  qu'aurié  tout  aclapa. 

Es  la  Barbai^é  que  passo  —  davans  lou  mounde  rouman. 

V.   LiEUTAUD. 

(  Provençal,  sous-dialecle  d'Avignon  et  des  bords  iJu  Rhône.  ) 


Sur  Pourrières  se  levé  le  soleil  ubscurci  et  pourpre;  —  la  trom- 
pette résonne,  les  Romains  s'élnncent.  —  La  bataille  de  Lar  dure 
trois  jours  et  trois   nuits  ;  —  le  sabre  latin  immole,  immole  tout  : 

C'est  la  Barbarie  qui  passe  devant  le  monde  romain. 

Marius.  sur  les  roches,  les  a  broyés  effroyablement, —  comme  un 
pressoir  serré  broie  un  raisin  bien  gonflé  de  suc  —  Quels  af- 
freux monceaux  de  morts  sur  le  champ  de  bataille  !  —  La  terre 
rassassiée  ne  veut  plus  boire  de  sang. 

C'est  la  Barbarie  qui  passe  devant  le  monde  romain. 

Sortez  de  vos  cavernes ,  bêtes  fauves  et  corbeaux  :  —  vous 
avez  des  cadavres  à  ronger  pour  toute  votre  vie.  —  0  terre  de 
Provence!  longtemps  tu  t'en  souviendras  ;  —  tu  dévoras  un  monde 
qui  eût  tout  dévoré  : 

C'est  la  Barbarie  qui  passe  devant  le  monde  romain. 

V.     LiEUTAUD. 


POULIMNIO  ♦ 

A  LA  FELIBRESSO    d'aRKNO 
gagnarello  de  la  joio  «  la  Poulimnîo  »,  i  Fèsto  latino  de  Mount-pelié 

Emé  lou  mes  de  jun  lou  printèms  s'enanavo, 
Laissant  coume  adessias  si  perfum  li  mai  pur  ; 
GardoLin,  cascarelet,  te  trasié  si  murmur; 
Touto  la  Pradarié,  bello,  te  courounavo  ; 

L'eissame  dis  aucèu,  que  ta  voues  gacinavo, 
Fasiè  subre  toun  front  Taleto  dins  l'azur  ; 
L'aureto  plan-planet,  dôu  mié  dis  aubre  escur, 
Pèr  noun  te  treboula,  tout-bèu-just  alenavo  ; 

E  nautre,  pivela  dôu  chale  de  ti  vers, 
Emé  tu  marchavian  sout  li  castanié  verd, 
Quand  un  d'éli  subran  pren  vido,  e  Poulimnîo 

Espelis  d'un  vièi  trounc.  Divo  de  l'armounio, 

Candido  elo  peréu  de  t'ausi,  Beatris, 

Se  clinavo  umblamen  davans  sa  vinceiris. 

L.  ROUMIEUX. 

(Provençal,  Avignon  et  les  bords  du  Rhône.) 
POLYMNIE 

A    LA    FKLIURKSSI-:    d'arKNK 
qui  a  gagne  la  joie  de  >  la  Polymnie  »,  aux   Fêtes  latines  de  Montpellier 

Avec  le  mois  de  juin  le  printemps  disparal^^sait,  —  laissant 
pour  adieu  ses  parfums  les  plus  purs;  —  le  Gardon  te  jetait  ses 
joyeux  murmures;  —  toute  la  Prairie,  belle,  te  couronnait. 

L'essaim  des  oiseaux,  que  ta  voix  enchantait,  —  au-dessus  de 
ton  front  déployait  ses  ailes  dans  l'azur;  —  le  doux  zéphir,  du  milieu 
des  arbres  obscurs, — pour  ne  point  te  troubler,  retenait  son  haleine: 

Et  nous,  fascinés  par  le  charme  de  tes  vers,  —  nous  marchions 
avec  toi  sous  les  verts  châtaigniers,  —  lorsque  l'un  d'eux  s'anime 
soudain,  et  Polymnie 

Jaillit  d'un  vieux  tronc.  La  déesse  de  l'harmonie,  —  charmée, 
elle  aussi,  de  t' entendre,  —  Béatrix,  s'inclinait  humblement  de- 
vant celle  qui  avait  triomphé  d'elle.  L.  RouMn-:ux. 

1  Le  17  juin  1878,  dans  une  promenade  à  la  Prairie  d'Alais,  où  se  trou- 
vaient quelques  félibres,  ce  sonnet  fut  composé  à  propos  d'un  châtaignier 
foudroyé,  doijt  le  tronc  affectait  la  forme  de  la  Polymnie. 


BIBI.IOGRAPHIE 


Prumié  Bouquet  (1838-1842).  Flonretos  de  moutagno.  poésies  langue- 
dociennes, par  Melchior  Bartiiiîs.  avec  un  avant-propos  de  Marins 
Bourrelly,  et  des  notes  sur  l'orthographe  et  la  prononciation  langue- 
dociennes, traduction  française  en  regard.  Tome  premier.  Montpellier. 
Imprimerie  centrale  du  Midi  (Hamelin  frères),  1878;  ia-l2,  i7.5  pag. 

Le  tome  premier  des  Flonretos  de  monnfagno  a  obtenu  une  mé- 
daille d'argent  dans  la  section  poétique  du  deuxième  Concours 
triennal  de  la  Société  des  langues  romanes,  et  ce  prix  était  justement 
mérité  par  son  auteur,  M .  Melchior  Barthès,  qui  est,  en  même  temps 
qu'un  savant  et  zélé  botaniste,  un  des  plus  anciens  et  des  plus 
fidèles   disciples  de   la  langue  d'oc  ^ 

Ainsi  qu'il  l'annonce  dans  sa  Préface,  oii  les  mots  sont  ingénieuse- 
ment appelés  «  les  fleurs  d'une  langue  »,  l'auteur  eut,  en  1838,  le 
projet  de  réunir  dans  un  dictionnaire  particulier  les  expressions 
les  plus  caractéristiques  du  dialecte  de  Saint-Pons*  :  il  y  renonça 
ensuite,  car  il  lui  sembla  préférabl?  dedisséminer  dans  ses  vers  les 
matériaux  linguistiques  qu'il  avait  pris  la  peine  de  recueillir.  G'e.st 
dire  par  là  l'intérêt  que  les  Fhuretos  présentent  pour  la  philologie 
et  le  grand  nombre  d'expressions  locales,  de  formes  véritablement 
languedociennes,  qu'on  y  rencontrera. 

L'aisanee  et  la  facilité  du  vers,  la  constante  honnêteté  de  l'in- 
spiration, et,  dans  le  poëme  de  Louiset,  par  exemple,  des  traits  et  des 
descriptions  qui  rappellent  parfois  la  manière  de  Jasmin,  de  Ves- 
trepain  et  des  poètes  de  la  Gascogne,  ne  seront  pas  moins  goûtés  par 
les  simples  curieux  de  poésie. 

Tous  les  genres,  la  chanson,  l'épigramme,  la  fable,  l'ode,  l'épitre, 
le  poëme  et  le  sonnet,  sont,  du  reste,  mêlés  dans  les  Flonretos  de 
mountagno.  On  y  rencontre  même  une  amusante  comédie  en  cinq 
3iCtes,  lou  Plaidejciire,   où   M.B.   a  d'excellents  traits  de  caractère 


1  On  trouve  deux  pièces  de  lui,  remontant  à  l'année  1841  et  adressées  à 
M.  Jacques  Azaïs,  dans  le  recueil  «les  Uersps  de  ce  dernier. 

-  La  littérature  du  langage  de  Saint-Pons  est  représentée,  à  l'heiue 
qu'il  est,  par  his  Floweto^  de  mountagno,  le  Glossaire  botanique  langue- 
docien de  l'arrondissement  de  Saint-Pons,  Montpellier,  1873,  in-8'  (dû  à 
M.  Barthi'S,  comme  les  Flourelos),  et  par  deux  fragment?  d'un  poëme  Je 
Guiraut  Saquet  (XVHi"  siècle)  sur  la  famine  de  1709,  publiés  p.  45 
et  93  du  Glossaire  botanique  , 


BIHI.TOGRAPHIK  10? 

et  un  dialogue  d'un  tour  naturel  et  coulant.  Ainsi.  lorsque  Guîrguil, 
le  plaideur,  est  contraint  d'avouer  à  sou  ami  Nadal  qu'il  vient  de 
perdre  un  nouveau  procès: 

Nadal:  Adiu.  Guirguil  ;  ch  be  1  l'as  t>>ajoiw  la  pebrino  I 

GoiRGOiL  (à  part)  :  Al  diables  l'impourtu  ! 

Nadal:  As  pla  missarito  mine. 

De  qu'as  '?  semblos  maiaut. 
Goirguil:  Merci  dai  coumpliment  ! 

M'atendiô  pas  a  tu  dins  aqucGte  moiiincnt. 
Nadal:  Sios  tout  cambo-virat. . . 
GmRGUiL  :  0  vai!  soui  pas  sans  ciiro, 

E  n'èi  pas  brico  tort  ■!>•  fa  tristn  liguro 
Naoal  (il  part):  A  pcrdut  soun  proucès. 
GuiHGDiL  :  Me  vesos  mnlcourat, 

Soui  las  d'estre  pel  sort  loujour  endalraairat: 

A  tout  cal  uno  fi,  mêmes  à  la  pacieeço . . . 
Nahxl:  Couci  tout  s'es  passai  an-aqueio  audienço? 
GiiiRGDiL  :   Parlen  de  quiconmai...   Plo;;  loujour  sus  baguais   .. 

El  perdut  moun  proucès. . . 
Nadal  :  N'as-tijamai  gagnais? 

Je  signalerai  ici  quelques  formes  françaises  ou  simplement  dou- 
teuses, relevées  au  courant  de  ia  plume,  dans  l'ouvrage  de  M.  B  : 

P.  32,  l.  6.  et  p.  154,  1.  1.  msi,  forme  française.  Il  vaudrait  mieux 
dire  aital,  que  l'on  trouve  p.  86,  102  et  356. 

H.  32,  1.  10.  brandiguen,  participe  sans  i  final,  ce  qui  peut  donner 
matière  à  confusion  avec  l'impératif  et  la  première  personne 
plurielle  du  présent  de  l'indicatif  dans  certains  verbes:  diren,fa- 
ren  ;  l'ancienne  langue  avait  résolu  la  difticulté  en  écrivant  di- 
rem,  farem.  etc.,  méthode  suivie  par  M.  Cliabaneau  dans  sa 
Grammaire  limousine. 

P.  60.1.  11  .douhlen.triplen:  VïnWnW.'xî  ^\('  ces  vrrbes  appartenant  à 
la  classe  des  infinitifs  en  a,  il  faudrait  r?o?f6/an,  triplan.  (>ette  faute 
se  reproduit  assez  souvent,  bien  que  M.  B.  écrive  pu  d'autres 
endroits  toumhan  (76)  dounan  (84)  etc. 

P.  60. 1.  31 ,  gutn.  forme  française  ;  il  faudrait  guuu  ou  gazan. 

P.  94,  1.  18,  anpletos.  forme  française. 

P.  100,  1.  5.  cracur,  forme  française,  surtout  par  le  sufli.ve  ur.  M.  B. 
la  traduit  par  weniewr:  il  faudrait  donc  messourguiè,  que  I  on  trouve 
p.  194,  1.  21. 

P.  102.  1.  9.  sauturs,  forme  française  ;  il  faudrait  sautaires,  ou  [du- 
tôt  dansaires,  car  l'auteur  traduit  par  danseurs  de  corde. 

P.  112,  1.  26,  assigurenço ;  il  faudrait  nsaignrnnrn.  puisque   l'infinitif 


ÎIO  BrBLIOGRAIHIE 

est  en  a.  ot  mieux  assigurando .  Je  lis,  p.  144.  oubeïssencio  et  reve- 

rencio.  Cf.  p.  \\%, prounoiinciat^renounciat. 
P.  116. 1.  1,  trnhels.  Fourf|uoi  l'introduction  de  ce  k?  Truquels  serait 

fort  légitime. 
P.   1 18,  1.  14,  disparegut.  Le  verbe  avait  eût  été  préférable. 
P.  120,1.  15.  anfin.  Enfin,  ou  encore,  finalomen,  serait  mieux. 
P.  134,  1.  27,  vouiage,  forme  française  pour  viage. 
P.  138,  1.  12,  tout  a  f et     —  —        pour  d'afouns 

P.  140,  1.  \3,  goutos  —  —       (du  moins  à  Montpellier) 

pour  dégoûts. 
P.  140, 1.  17,  crusen,  forme  française;  il  faudrait  crosan,  puisque  le 

substantif  normal  et  courant  est  cros. 
P.  142,  1.  3,  separado,  form^^  française;  desseparado,  separtido  ou  par- 

tido  vaudrait  mieux. 
P.  146,  l.  31,  ^ownero, forme  française;  la  forme  languedocienne  tron 
■    se  lit  trois  vers  plus  haut 

P.  148, 1.  22,  VMS,  forme  française  ;  lisez  :  votSj  ou  peut-être  vouts? 
P.   150,  1.  31,  counfienço;  fisancio  vaudrait  mieux. 
P.  152,  1,  17,  ^ramSZo^  forme  française.  Je  trouve  le  verbe  tremoulà. 

p.  150. 
P.  160,  1.  20,  Vatend;  V espéra  vaudrait  mieux.  On  le  trouve  du  reste 

ailleurs,  p.  198, 1.  13,  par  exemple. 

L'orthographe  de  M.  B,  atteste  un  effort  sérieux  pour  revenir  aux 
habitudes  de  l'ancienne  langue  :  ainsi,  l'emploi  du  v  pour  le  &,  là 
où  l'étymologie  latine  l'exige,  le  z  à  la  deuxième  personne  plurielle 
(lu  présent  de  Vxxxàxç.^Xxi,  oouldrez,  pescarez ;  l'emploi  de  la  forme  iu 
dans  Dius,arpiu,fiulado.  etc..  L'accentuation  est  souvent  trop  com- 
pliquée, mais  ce  n'est  pas  la  faute  de  MB.  :  il  n'a  fait  que  céder  à 
une  habitude  trop  générale  dans  tous  les  dialectes  méridionaux. 

Le  plaisir  que  l'on  éprouve  à  lire  ce  volume  nous  fait  espérer  que 
le  Segmmd  Bouquet  ne  se  fera  pas  attendre  longtemps. 

Alph.  RoQUE-FERniiiR. 

Poésies   patoises,  par  Vkrnhet  père,  d'Agen  (Aveyron).  Rodez,  irap. 
H.  de  Broca,  1877;  petit  in-8°,  62  pag. 

«  A  l'àire  de  soixante-dix  ans,  M.  Vernhet  s'e?t  amusé  à  versifier 
»  en  pur  patois  de  Rodez  et  de  ses  environs.  »  Son  petit  volume 
comprend  : 

P.  5-23,  des  Géorgiques,  380  vers.  Le  Rouergue  semble  affec- 
tionner les  géorgiques;  Peyrot,  prieur  de  Pradinas.  en  avait  com- 


RlBTJOr.RAPHlR  111 

posé,  et  l'abbé  Mélac  (1841),  ancien  professeur  de  seconde  au 
coliéi^e  de  Rodez,  avait  laissé  en  manusciit  une  Traduction  en 
vers  patois  des  Géorgiques  de  Virgile^.  —  P.  25-33,  las  Vicissitudos 
dé  lo  hido  htimèno,  2i8  vers.  —  P.  35,  Un  soubénir  dé  l'ouraché  del 
8  décembre  1876,  6  vers.  —  P.  37-8.  lou  Brocouniè  prés  en  fio- 
grant délit  en  temps  prohibât,  44  vers.  —  P.  39-43,  Sourdes,  trèbos 
et  rébénens,  112  vers.  —  P.  45-55,  un  Récuil  dé  prouverbès,  meximos 
et  aphorismés ,  210  vers.  —  Le  tout  suivi,  p.  57-9,  d'un  Petit  Vocabu- 
laire de  quelques  mots  les  plus  éloignés  du  français,  contenus  dans  ce  vo- 
lume. 

Ces  poésies  ne  sont  pas  sans  défaut,  sans  qualité  non  plus. 
Venant  de  Marseille  ou  d'Avignon,  elles  ne  seraient  sans  doute 
pas  remarquées;  mais  elles  nous  arrivent  d'un  pays  bien  lent  à 
prendre  part  au  mouvement  littéraire  des  autres  provinces  de 
langue  d'oc:  à  ce  titre  surtout,  elles  méritent  d'être  signalées.  Le 
Rouergue  tout  entier  ne  sufGrail  pas  à  fonder  une  Escola;  du 
moins  nous  ne  connaissons  que  les  noms  de  MM.  Brouillet. 
Villié  et  d'Armagnac,  àjoindre  à  celui  de  M.  Vernbet".  Espérons 
que  le  Rouergue  tiendra,  enfin,  à  honneur  de  sortir  de  son  trop 
long   mutisme. 

L'Aveyron  produisant  peu,  sa  langue  est  naturellement  peu  con- 
nue; les  traits  marquants  qui  la  distinguent,  au  moins  dans  le 
volume  de  M.  Vernhet,  sont  :  lo  le  remplacement  des  a  protoniques 
par  des  o  :  osilo  :  corèmé,  okel,  Morgorido,  orrenten-nous,  popiè,  etc.  ; 
—  2°  des  0  toniques  par  ovo:  tricouot.esclouoj),  bouosc,  trouop,  okouo, 
houome.  linouot,  etc.  ;  -  3"  ('e  an  tonique  par  on  :  cfont;  —  4»  des  bl 
par^jZ;  encuraplé,  'Diiseraplé,  etc.:  —  5°  des  v  par  b:  bido,  dibendres, 
etc  :  —  6°  des  gl  par  cl  :  réclat;  —  7°  des  j  par  ch:  cuuraché,  sache, 
racho;  —  8°  la  suppression  de  la  nasale  dans  les  linales  in,  an,oun  : 
bi,  moti,  pa,  poulou,  nenou; — 9°  la  chute  de  g  entre  deux  voyelles  : 
fouo'irou  20.  pléat  25,  diet  41  ^foet  28,  osséiiro  50.  aio  19,  53,  i)oat  28, 
préario  9,  ol  séur  16,  qui  seraient  en  languedocien /oMgrairoMw,  ple- 
gat,  diguet,  faguet.  nsseguro.  aigo,  pagat,  pregario  ^.  al  segur. 


1  Voir  Mém.  de  la  Soc.  des  lettres  de  l'Aveijron,  III,  337. 

-  Un  poëtc  anonyme,  qui,  d'après  M.  Alph.Roque-Ferrier  Ri  vue  des 
langues  romanes.  1878,  p.  205;,.  est  M.  Vesy.  bibliothécaire  de  la  ville  de 
Rodez,  a  publié  deux  Sounets  dans  les  Mém.  de  la  Société  rie  rAvpymn, 
X,  1868-1873,  Rodez,  1874.  On  a  aussi  de  lui  un  sonnet,--  signé  cette  fois. 
—  dans  Un  bouquet  de  campaneto,  recueil  de  sonnets,  publié  par  M.  de 
Berluc-Perussis  en  1876  (Aix,  Remondet- Aubin,  in-8o;. 

3  On  trouve  préario,  p.  9,  et  prèo  =  prsgn  20,  mais  pregat,  p    40. 


112  PUniOGPAPHlE 

L'article  est  également  à  observer.  Voici  le  tal^iloau  des  forme» 
employée.»»  par  M.  V.  : 

SrNG.    lou.  r  lo,  r 

fiel,  de  r  de  lo,  de  1' 

ol.  ôl'  ô  lo,  ôl' 

Plcii.    ious  et   loui,  les e/ loi 

dois,  dese/dei  do  lo? 
os 

L'article,  soit  masc.  soit  fém .,  possède  au  pluriel  une  double 
forme;  mais  nous  soupçonnons  M.  Vernhct  d'avoir  noté  ce  phéno- 
mène d'une  manière  très-inconséquente;  il  se  pourrait  aussi  que  le 
sentiment  de  ces  variations  phonétiques  fût  en  train  de  disparaître. 
Nous  trouvons  l'article  pur  devant  les  lettres  e,  o,  u,  k,  j.  t,  d.  ç 
(s\  p,  n,  F,  v,  h,  R,  m:  mais  en  uiéine  temps  devant  certaines  de  ces 
lettres  se  rencontre  l'article  mouillé  :  1°  e.  lou?,  entendre  27,  iows 
^on.<î'27,  30,  31;  Zos  égos  40,  et  trois  autres  exemples  (2  pour  lou?,, 
1  pour  Zos),  à  côté  de  d'éis  (lisez  dei?)  éfons  32;  —  2°  d.  ^s  dens  26, 
des  défaous  45,  Zos  derrengio  31,  et  trois  autres  exemples  de  lo?,  à 
côté  de  loi  démouorou  40:  — 3"  ç  (s),  lou?- cédas  29,  tout  seul  on  re- 
gard de  loui  secours  12,  loi  surs  t~,de\sious  29,  loiii  soucis  29;  —  4"  b. 
lou?,  bers  26,  lou?  brabés  gens  26,  et  12  autres  exemples  (6  pour  lous 
et  6  pour  los,  en  face  de  pey  biels  32  ;  —  .")"  r  .  lo?  rabos  .1 6, 1 9,  lou^  rond 
12,  à  côté  du  louï  rosins  15,  pe\  rens  12;  —  devant  x,  je  n'ai  trouvé 
qu'uH  seul  exemple,  lou\  nous  roln'o  10:  devant  a,  i,  g.  ch,  z,  je  n'en 
ai  rencontré  aucun. 

M.  Vernhet  s'adressant  particulièrement  ù  ses  compatriotes  de  la 
campagne,  nous  lui  reprocherons  de  parler  du  Pornasso,  de  la  Muso 
et  de  P/i?7ome?o:  les  gens  instruits  n'ont  que  l'aire  de  cette  mytholo- 
2ie,  et  les  paysans  n'y  comprennent  rien.  Déplus,  quand,  au  lieu 
d'écrire  en  français,  un  Méridional  use  de  la  langue  d'oc,  c'est  sans 
doute  qu'il  l'aime,  qu'il  la  préfère  au  français,  au  moins  comme  in- 
strument poétique:  son  plus  grand  souci  doit  donc  être  de  bannir  les 
mois  français,  intrus  qui,  malgré  leur  désinence  méridionale,"  puent 
étrangement"  leur  oiigino.  Parmi  ces  fâcheux, que  M.  Vernhet  au- 
rait sagement  fait  de  mettre  à  la  porte,  citons  :  entréprénur  8,  hu- 
méno  25.  clirisolido  25,  mèro  25,  26,  pèro  26  (on  trouve  paire  et  maire, 
p.  29),  histouèretto  27,  frèro  27.  sur  Tl  (sœur),  junés  gens  28  (tandis 
i[uejoubé  se  rencontre  p.  26).  Estieynés  28,  rouèlà  38  (voilà),  quouè- 
què  47  (quoique),  sent  48  (saint),  ogricoltur  50,  cultibotur  ûO  (à  côte 
de  cultibairé). 

Les  fautes  d'impression  sont  tres-uomhrcusos,  et  quelques-unes 


BlBLlOciKAPUIE  113 

rendent  difticile  l'intelligonce  du  texte;  par  exemple:  t'oïonon  oper- 
tieyro,  13,  lisez  lot  onon  o  pertieyro ;  il  faut  de  même  corriger  l'oï  ho 
30,  el  l'oionon  28:  —  respecta  ton  bé  "26  lisez  tombé; — ooubé21.  lisez 
oou  bé,'  — lou  set  1(3.  lisez  lo  set;  etc. 

Le  dictionnaire  paraîtra  cerlainement  trop  court  à  beaucoup  de 
lecteurs.  Nous  y  relèverons  une  erreur.  »  Okouos,  c'est,  cela.  » 
Okouo  =  cela,  mais  okouos  =  okouo  es  =  ce  est,  c'est.  M .  VernheL 
n'a  pas  reconnu  le  verbe  qui  se  trouve  dans  okouo  's,  et  il  imprime 
toujours  okouos,  quoique  partout,  dans  ses  poésies,  okouo  veuille 
dire  cela  (p.  10,  12,  etc. .),  et  okouos  c'est  (  p.  7,  12,  26,  etc.'  )  Lo 
mol  rogas,  qui  est  traduit  par  enfant  pour  aider  le  berger,  est  à  rap- 
|)rocher  de  l'italien  ra<7a;i^o;  onthouro,  qui  est  traduit  par  sows  délai-, 
se  décompose  étymologifjuoment  en  onthnuro,  ante  Jioram{  ci'r.  an- 
tan,  ante  annum  ) . 

Si  le  dernier  paraiiia]ihe  de  V Avertissement  n'est  pas  une  banale 
politesse,  M.  Vernhet  ne  nous  .saura  pas  mauvais  gré  d'avoir 
ainsi  descouti  se<  poi'sit's  ])atoises. 

•T.  Baijquiek. 

Una  voués  dai  vilage,  pouesias  lengadoacianas,  per  Ch.  Coste;  Mounl- 
pelié,  Mortel  l'ainal,  1877;  in-S",  viii-52  pages. 

bans  une  préface  languedocienne  placée  en  tète  de  son  volume, 
M.  Coste  nous  apprend  l'origine  des  pièces  qu'il  y  a  réunies  : 

«  Dins  Testât  de  medeci,  en  trepant  de  vilage  en  vilage,  lou  cami  quau- 
ques  cops  es  long,  e  l'ospril,  que  d'ourdinari  es  toujour  en  souciença  . . 
se  met  à  panlaià;  lou  craioun  sourtis  de  la  pocha,  e  sui  papiè  que  me- 
triàs  una  ourdounança,  escrivés  quauques  verses,  sans  avudre  trop  lou 
tems  de  Ions  alisà. 

»  Lous  amagàs  couma  un  pecat;  mes,  un  jour  ou  l'autre,  l'onveja  vous 

*  Le  vers  suivant  (  p .  20  )  : 

En  fosqueu  cminio  okoi/ns  ](mn\i  n'ouii  Icnro  giiïré, 

semble  nous  donner  tort;  mais  il  vaut  beaucoup  mieux  lire  el  écrire  okuiw. 
Oerlainemenl,  dans  quelques  patois,  l'incessante  répétition  de  acu  s  [  aco 
es  j  a  Uni  par  souder  Vs  du  verbe  au  pronom  ;  mais  puisque  o1<ouo  existe 
encore  dans  l'Aveyron ,  ce  n'est  pus  à  un  écrivain  à  se  laire  le  protec- 
teur d'un  barbarisme.  —  Dans  ie  vers  cité,  7i'oun  est  à  corriger  on  noiin. 
^  Dans  Cl.  Brueys  {Jardin  de  .v  musos  provençaloi,  éd.  Morlreuil,  II, 
p.  75),  on  trouve  ragusscl: 

Lous  Ualinn.-^  amon  la  cioupo, 

-Subre  que  tout  d"vo  Ragassel. 

Partissen  en  miUiuuro 
per  olcouop  orriba.  p.  8. 


114  HIBL'.OGRAPHIE 

pren  de  lous  fa  voire  an  un  amie  que  vous  proumet,  en  riguent,  d'estre 
mut.  Loii  traite  o  pas  pus  léa  virât  lous  talons  que  vous  dessala,  e  voslre 
sicret  es  «  lou  sicret  de  la  sauvia.  » 

"  Moussu  l'abat  Vinas,  curât  de  Jounquieiras,  regretable  per  soun 
bouii  cor  e  soun  saupre,  aget  connouissença  de  mous  pichots  verses,  e  me 
butet  jusqu'à  tant  que  naguère  mandual  quauques  us  ai  Councours  de 
Mountpelié  :  rccassere  una  mentiéu;  pus  tard,  la  Soucietat  de  Beziès 
macourdet  una  medalha  per  ma  peça  luu  Counsel  de  moun  paire.  » 

Una  voués  dai  vilage  se  compose  donc  dos  deux  poésies  cou- 
ronnées à  Monlpellier  et  à  Béziers  — cette  dernière  est  surtout  re- 
quable  — ,  de  quelques  autres  lues  à  V Association  des  médecins  de 
l'Hérault  et  d'un  certain  nombre  de  pièces  de  circonstance  et  de 
couplets  satiriques.  li  est  écrit  en  entier  dans  le  Sous-dialecte 
lodévois,  un  des  plus  originaux,  sans  contredit,  de  la  iangued'oc  *. 

On  lit,  à  la  fin  d' Una  voués  dai  vilage,  une  poésie  composée  en  lan  - 
gage  de  Montpellier,  par  M.  Louis  Lambert,  l'éditeur,  avec  ISI.  Mon- 
tel,  de  la  collection  des  Chants  populaires  du  Languedoc  que  publie  la 
Revue  des  langues  romanes.  Nous  avons  pensé  que  l'auteur  de  ces 
vers  charmants  nous  pardonnerait  de  dévoiler  le  demi-pseudonyme 
sous  lequel  il  les  adressa  à  M.  G.,  afin  de  le  remercier  de  son  hos- 
pitalité dans  le  petit  village  de  Beaulieu  : 

Au  bord  de  l'Erau,  dins  aquela  plana 

Que  mirgalha  tant, 
Beulioc  lou  poulit,  couma  una  raieugrana, 

Lusis  au  mit  an. 

Dins  un  recantou  de  la  granda  plaça 

r  a  'noustau  bénit 
Aqui  lou  bonur,  lou  sabé,  la  graça, 

Tout  es  réunit. 

Dins  aquel  oustau  très  jours  demourère 

Ai  !  couma  aven  ris  ; 
De  tant  d'amistat  qu'aqui  reçagurre 

Per  moun  gramecis, 
Cada  ser  dirai  :  —Lou  bon  Diéus  proutège 

I/ouslau  benurat 

1  C'est  ce  dialccle  auquel  Peyrottes  donna,  il  y  a  trente  ans,  quelques 
instants  do  célébrité.  Il  n'a  guère  d'autre  poêle  aujourd'hui  que  M.  H. 
Brun,  auteur  do  diverses  pièces  imprimées  à   Lodève  de   1875  à  1877. 

Qu'il  nous  soit  permis  d'émettre  un  vœu  en  faveur  de  la  prochaine 
publication  des  poésies  inédiles  de  Peyrottes,  pieusement  conservées  dans 
sa  famille  jusqu'à  aujourd'hui.  Au  jugement  de  ceux  qui  ont  pu  les 
examiner,  elles  sont  bien  supérieures  à  celles  qui  ont  été  mises  à  jour 
en  1840. 


BIBLIOGRAPHIE  l.ô 

Qu'abrigue  long  temps  la  maire,  lou  mège 
E  r  enfant  besiat  !  » 

Une  édition  de  luxe  des  Œuvres  choisies  du  docteur  Goste  est  en 
souscription  et  paraîtra  bientôt,  sous  les  auspices  de  VAssociation 
des  médecins  de  l'Hérault. 

Alph.  Roque-Ferrier. 

La  Fièiro  de  Ghambourigaud,  pouemo  coumique  en  cinq  cants,  per 
Pau  Gaussen,  emb'  un  avans-prepaiis  d'Albert  Arnaviele.  Alais, 
Brugueirolle  et  Compagnie,  1878;  in-l2,  iv-56  pag. 

On  ne  connaît  généralement  de  M.  Gaussen  que  des  œuvres 
provençales,  où  il  a  su  exprimer  avec  beaucoup  d'éclat  et  de 
coloris  les  sujets,  presque  toujours  lyriques,  de  ses  inspirations. 
Voici  qu'à  la  sollicitation  de  M .  Albert  Arnavielle,  il  vient  de 
publier  un  petit  poëme  comique  en  cinq  chants,  la  Fièiro  de 
Chdinliourigaud,  qu'il  composa  en  1869  dans  son  dialecte  naturel, 
le  raiol.  Cette  œuvre  n'atteste  pas  un  développement  poétique 
aussi  complet  que  les  sonnets  imprimés  par  VArmana  prou- 
rençau  et  la  Cigalo  d'or;  elle  se  fait  cependant  lire  avec  plaisir  du 
commencement  à  la  fin. 

Nous  en  détacherons  le  Iragmeut  suivant,  où  l'auteur  parle  des 
Cévennes  en  véritable  poëte  et,  il  faut  le  dire  aussi,  en  véritable 
enfant  du  pays  : 

Ob  !  salut  1  terro  sans  egalo, 

Ount  la  cansou  de  la  cigalo 

Se  mèsclo  au  crid  de  l'aigle  fer  1 

O  mounts,  que  d'un  trapou  d'infèr, 

Boumissès  l'or  à  plenos  seios, 

D'aquel  or  rous  coumo  las  seios 

Rabinados  dau  reganèl 

Qu'Avoust  raando  de  soun  fournèl  ; 

Gevenos,  quanle  es  lou  terraire 

Que  mai  que  lou  tiéu  saupriè  plaire  '? 

Nou,  toun  pané  's  pas  counegu  ! 

E  vales  mai,  n'en  sièi  segu. 

Que  la  grand  terro  de  Prouveijço. 

Mai  que  l'uigo  de  la  Durenço, 

Tous  rajôus  soun  lindes  e  fres; 

E  de  tous  auts  creslels  de  grès 

Bouto  loujour  uno  douço  auro, 

Quand,  aval,  lou  païs  de  Lauro 

Es  esloufa  dau  caiimas. 

Alph    HoQUK-Ft:i!Riiiu. 


PERIODIQUES 


Revue  des  Sociétés  savantes,  Vl*^  s'^rie,  toni.  111,  p.  \'id.  — 
Paul  M eyer.  Rapport  sur  des  coinimtnicafions  de  MM.  Blanc,  Charvet, 
Eyijlier,  de  Fleuri/,  Oomart.  Luzel,  Mireur  et  Tartière.  — Plusieurs 
de  ces  communications,  surtout  la  première  et  l'avant-dernière.  sont 
intéressantes  pour  la  langue  et  la  littérature  provençales.  M.  Meyor 
les  a  accompagnées  de  savantes  ohservations  et  y  a  l'ait  d'impor- 
tantes additions.  Le  premier  document  est  un  ordre  pour  la  garde 
du  château  de  Vence,  daté  de  1378,  et  qui  porte  naturellement  tous 
les  caractères  du  dialecte  provençal.  Au  paragr.  3  (p.  421)  sietA.o\i 
probablement  être  lu  siei,  qui  est  pour  si  l.  Le  dialecte  provençal  et 
aussi  quelques  variétés  de  celui  du  Languedoc  insèrent  volontiers 
un  e  entre  deux  /  consécutifs,  (jue  la  prononciation  doit  réunir  en 
une  seule  syllabe,  non-seulement  quand  ces  deux  i  sont  dans  le 
même  mot,  mais  encore  quelquefois,  comme  ici,  quand  le  second 
forme  un  mot  à  lui  seul.  Ainsi  on  trouve  fréquemment  dieis,  dieire, 
etc.  pour  les  formes  plus  anciennes  dus,  diire  (où  le  second  i  pro- 
vient du  c  de  dixit,  dic{e)re),  dans  la  Vie  de  saint  Honorât,  dans  le  Bre- 
viari  d'amor  et  dans  d'autres  textes  qui  paraissent  provenir  de  la 
même  région  V  Les  exemples  du  second  cas  sont  plus  rareis.  Il  y 
en  a  deux  dans  le  roman  de  Flamenca 'i  (siei  =^  si  i  au  v.  4299  et 
niei==  ni  i  au  v.  5103),  et  le  Breviari  d'amor,  si  l'on  y  regardait  de 
près,  en  offrirait  peut-être  plusieurs.  J'en  puis  du  moins  citer  un  : 
qxnei=^qui  i  {Gedichte  I,  p.  188.  1.  3, où  M.  Mahn  a  eu  le  tort  de  lire 
et  d'imprimer  quici).  L'«°,  dans  ces  exemples,  a  dû  être  introduit 


*  Dieifi  e>l  fréquent  dans  las Rasos  de  trobar.  Ni.  GuessarJ  a  lu  par- 
tout die  s,  M.St\'>gel  y  a  sui)slilué  ditz  ou  dis.  I/éciitour  do  V Évangile  de 
b-ainl  Jean  en  vieux  provençal  (Berlin.  1868)  a  commis  la  même  faute  que 
M,  Guessord,  on  imp.-imant  18,7)  diciseron  au  lieu  do  dieiseron. —  Exem- 
ples analogues:  'ieyre{^=riire.  rigre.  rid[e)re)  dans  le  lirevinri  et  lo  Livre 
de  Seneca.  assie.iire,  frieyre  [friire,  frig{ejre},  dans  le  Fireviari  également. 
C'est  probablemeDl  de  la  môme  manié:  e  qu'il  faut  expliquer  les  formes  en 
/et*  qu'offrenl  en  grand  nombre,  dans  ce  dernier  ouvrage,  les  verbes  en  \r 
de  1:1  conjugaison  inchoative,  complieis,  partieis,  etc.,  le  second  i  s'étanl 
développé  devant  s  final,  comme  il  arrive  après  a,  e,  o,  ou  résultant  peut- 
être  de  la  vocalisation  du  c  transposé  de  iscit  {icsit  —  iis). 

*  Le  ms.  de  cet  ouvragOj  au  v  1121.  a  diere,  qu'on  pourrait,  sans  témé- 
rité, Corriger  diare  j'iutôl  que  dire. 


PERIODIQUES  TI7 

pour  rendre  plus  facile  la  synérèse  des  deux  i,  qui,  du  reste,  a  eu 
lieu  aussi  quelquefois  sans  ce  secours.  Ainsi,  ni  y  garava  ricors 
{Troubadours  de  Béziers,Tp.  72),  si  i  agues  poder  {Gedichte,  1243,3),  où 
niy,  siine  font  respectivement  qu'une  syllabe. 

La  finale  iar  (=  lat.  arium  ou  erium  )  n'est  pas,  comme  M.  Moyer 
parait  le  croire,  propre  au  sud  de  la  Provence.  On  en  remarque  de 
nombreux  exemples  dans  des  textes  languedociens,  et  elle  persiste 
aujourd'hui,  affaiblie  en  io,  dans  le  Rouergue  et  le  Gévaudan.  C'est  un 
fait  que  j'ai  déjà  eu  l'occasion  de  constater.  Voy.  Revue,  VII,  439. 

C'est  sans  nécessité  que  M.  Meyor  a  corrigé  deux  fois,  p.  432, 
caseun[a]  sera.  Sero,  en  provençal  moderne,  et  aussi  dans  d'autres 
dialectes,  est  masculin  :  un  sero  [Mireio,  458  );  lou  sero  (  Damase 
/Arbaud,  II,  198);  aquel  sero  (3 a.smin)\  lou  sero  (Quercy),  etc.  Un 
autre  exemple  bien  plus  ancien  que  celui  du  texte  de  Vence  est  le 
suivant,  de  Flamenca  [y.  3240)  :  Las  maias  quel  seras  {=  sera  se)  son 
fâchas. 

.Aux  formes  estague,  estegon,  du  subjoncLif  présent  de  estar,  que 
M.  Meyer  relève  avec  raison,  on  peut  comparer  les  formes  moder- 
nes gue fugue  {qu'il soit),  que  fague  {qu'il  fasse).  Elles  proviennoai. 
toutes  d'une  propagation  abusive  de  la  gutturale  du  prétérit  {estec, 
estegron,  etc.)  au  subjonctif  présent. 

Les  dix  commandements  de  Dieu  mis  en  quatrains  provençaux  en  1522 
viennent  après  V Ordre  pour  la  garde  du  château  de  Vence.  C'est  une 
pièce  sans  mérite  et  où  il  n'y  a  guère  à  signaler,  au  point  de  vue 
de  la  langue,  que  les  formes /re?rto  (femina,  fennia,  fenna,  frema) 
et  duves{dehes),  aujourd'hui  l'une  et  l'autre  fort  usuelles*.  A  côté 
de  dure,  le  provençal  etla  partie  voisine  du  I^anguedoc  (Nimes,  etc.), 
nous  offrent  encore  huveijbiho),  oendumiat,  mumo  {même),  duja.plugue 
(àe plegar),  etc.  Je  trouve  aussi  duve  dans  le  Rouergue  et  le  Veiay 
(dubou.  duvien).  Cette  dernière  forme  est  dans  les  Noëis  de  Cordai 
(  vers  1630  ).  Cf.  enubriar  dans  des  textes  purement  provençaux  du 
XIV'  siècle  {Év.  de  saint  Jean,  Berlin.  1868,  II,  10,  etc.  ),  et  pru- 
mier  -ponr premier,  forme  qui  paraît  commune  à  tous  les  dialectes. 
Dans  la  plupart  de  ces  exemples,  Vu  est  né  de  l'e  sous  l'influence 
d'une  labiale  suivante,  phénomène  que  l'on  constate  souvent  aussi 
en  français. 

J'arrive  à  la  communication  de  beaucoup  la  plus  intéressante 
de  celles  qui  font  l'objet  du  rapport  do  M.  Meyer.  Elle  est  de 
M.  Mirdur,  archiviste  du  Var,  et  consiste  en  «documents  extraits 

'  Fremo  est  déjà  dans  le  Ludus  sancti  Jacobi,  texte  antérieur  d'environ 
vingt  ans. 

8 


118  PERIODIQUES 

des  archives  communales  Je  Draf,'uignan,  qui  attestent,  du  XV* 
au  XVI*  siècle,  une  série  non  interrompue  de  représentations  de 
mystères.  Le  plus  ancien  de  ces  témoignages  est  de  14:^3,  le  plus 
récent  de  167U.  »  C'est,  ajoute  M.  Meyer,  l'une  dos  plus  impor- 
tantes contributions  qui  aient  été  apportées  depuis  longtemps  a 
l'histoire  du  drame  religieux  dans  le  midi  de  la  France.  Le  nombre 
des  pièces  nouvelles,  dont  la  représentation  en  Provence  nous  est 
ainsi  révélés,  s'élève  à  dix-sept;  mais  plusieurs  sont  probablement 
des  pièces  françaises  et  qui  furent  jouées  en  français. 

A  l'occasion  de  cette  communication,  M.  Meyer  a  dressé  unr 
double  liste  oiî  sont  énumérés  :  1°  les  mystères  dont  il  nous  reste 
tout  ou  partie;  2°  ceux  dont  les  titres  seuls  nous  sont  connus. 
Les  premiers  sont  au  nombre  de  six.  J'en  ai  déjà  moi-même  men- 
tionné ici  quatre  {Revue,  X,  158).  Les  deux  autres  .•^ont  le  mystère 
de  saint  Poiis  et  le  mystère  des  saints  Pierre  et  Paul,  tous  les  deux 
de  la  fin  du  XVe  siècle.  Ils  sont  conservés  dans  les  archives  d'une 
commune  de  l'ari'ondissement  de  Briançon,  et  M.  Meyer  an- 
nonce   qu'ils  seront  prochainement  pubUés  *.  Quant  aux  mystères 

*  Un  fragment  du  Mystère  de  saint  Pons  a  paru  depuis  dans  l'ou- 
vrage intitulé  ;  Patois  des  Alpes  cottiennes,  par  MM.  Chabrand  et  de  Ro- 
chas d'Aiglun.  —  M.  Meyer  mentionne  encore  pour  mémoire  deux  frag- 
ments d'un  ancien  mystère  catalan  ou  mayorquin  qui  paraît  avoir  eu 
pour  sujet  la  conversion  de  sainte  Marie-Magdeleine.  Ils  ont  été  trouvés 
à  Palma,  et  contiennent  environ  150  vers,  qu'a  publiés  D.  José-Maria 
Quadrado,  dans  la  Unidad  catolica  du  5  février  1871.  I/écriture  de  ces 
fragments  est  du  XIV*  siècle.  —  Ajoutons  nous-même  deux  autres  mys- 
tères, composés  en  partie  seulement  en  langue  d'oc:  l'un  représenté  à 
Giermont.  (?)  en  1477  (1),  et  dont  M.  Doniol,  qui  nous  le  fait  connaître 
(  les  Patois  de  la  basse  Auvergne,  p.  73-80),  n'indique  pas  le  titre  *,  l'autre 
au  Puy  en  1518.  Voy.,  sur  ce  dernier,  la  préface  des  Noëls  vellaves  de 
Cordât,  p.  xxi,  où.  il  est  question  du  «célèbre  mystère  de  Claude  Dolesonet 
des  tirades  naïves  qu'y  débite  le  paysan  dans  l'idiome  local.»  Ce  mystère 
est  sans  doute  le  même  que  celui  qu'on  voit  mentionné  dans  le  Diction- 
naire des  mystères  du  comte  de  Douhet  (  col.  544),  sous  le  titre  suivant  : 
«  Le  Mystère  de  l'édilicalion  et  dédicaça  de  l'église  de  Notre-Dame-du- 
Puy,  et  translation  de  l'image  qui  y  est  à  XXXV  personnages,  par  Claude 
d'Oléson.  »  Je  ne  sais  si  cet  ouvrage  a  été  imprimé  ou  s'il  existe  seu- 


*  liciyole,  dans  Ip  fraîi:ineiit  cité  (p.  77),  paraît  ne  pouvoir  signifier  que 
caye  [yabiola,  yayola  et,  par  raétathèse,  galoya).  —  P.  78,  hrasmas  est, 
au  propre,  le  fr.  brèmes,  espèce  de  poisson.  C'est,  d'ailleurs,  ici  un  jeu  de 
mots,  comme  carpus  qui  suit,  o'  dernier  étant  rapporté  plaisamment  à  cur- 
pere. 


PERIODIQTTES  119 

et  autres  compositions  dramatiques  que  nous  ne  connaissons  plus 
que  par  les  mentions  qui  en  ont  été  faites  en  divers  temps,  la  liste 
de  M.  Meyer  en  contient  dix-luiil.  Mais  cette  liste  est  incomplète, 
car  tous  les  témoiiinages  n'y  ont  pas  été  utilisés*.  Tels  sont  ceux 
qu'a  réunis  M.  G.  Arnaud  dans  la  préface  du  Ludiis  sancti  Jacohi. 
Tels  sont  encore  ceux  qui  concernent  le  mystère  des  Trois 
Doms  (Romans,  Pentecôte  de  1509)-,  et  celui  des  miracles  de  saint 
Martial,  qui,  d'après  l'abbé  Legros,  cité  par  Allou  {Monuments  Je 
la  Haute-Vienne,  p.  20).  aurait  été  représenté  à  Limoges  en  1290  et 
130-2    . 

G.  G. 


lement  en  manuscrit.  Dans  tous  les  cas,  M.  l'abbé  Payrard,  le  soigneux 
éditeur  des  Noëls  de  Cordai,  s'acquerrait  un  nouveau  titre  à  notre  re- 
connaissance en  publiant  tout  au  moins  le  rôle  du  paysan.  —  Un  autre 
mystère  français,  un  peu  plus  récent  que  celui  de  Doléson,  est  signalé 
aussi  comme  ayant  un  rùle  en  langue  d'oc:  c'est  le  «joyeux  mystère  des 
Trois-Uois  »  (vers  1540),  par  Jean  d'Abuudance,  notaire  royal  du  Pont- 
Saint-Esprit,  sur  lequel  ou  peut  voir  la  notice  des  frères  Parfait  (III,  47j, 
reproduite  intégralement  dans  le  Dictionnaire  des  Mystères,  col.  978. 

*  Une  des  pièces  qui  figurent  dans  les  communications  de  M.  Mireur  y 
a  même  été  omise  :  c'est  le  Ver  du  péché,  moralité,  par  Arlus  Gautier  (?); 
Draguignaii,  1613. 

2  Le  ms.  de  ce  mystère  existait  encore  en  1787,  mais  la  trace  en  pa- 
raît aujourd'hui  perdue  Voy.  Composition,  mise  en  scène  et  représenta- 
lion  du  mystère  des  Trois  Doms;  Lyon,  Perrin,  184S.  —Une  notice  qui 
a  paru,  depuis  le  rapport  de  M.  Meyer,  dans  le  Bulletin  de  la  Société 
d'archéologie  de  la  Brome,  nous  révèle  encore  les  représentations  sui- 
vantes, qui  eurent  lieu  à  Die  : 

1»  La  Passion.  Jour  des  Rameaux  et  Vendredi  Saint  de  1484; 

2°  Le  Poble  coinun,  moralité.  1493  ; 

3°  Une  histoire  ou  moralité  dont  le  titre  n'est  pas  indiqué.  1496,  à  l'.ir- 
rivée  de  l'évêque  ; 

4o  Mystère  du  chevalier  qui  aoel  doné  sa  famé  au  diable.  1541  ; 

5»  Comédie  «  faicte  par  M.  Escoffier  »,  dont  le  titre  est  inconnu.  1625: 

6"  Pastourelle,  jouée  à  l'arrivée  de  l'évêque.  1634. 

Il  est  probable  que  ces  trois  dernières  pièces,  et  peut-être  aussi  la  pré- 
cédente, étaient  en  français  ;  le  mystère  du  Chevalier  existe  dans  celte 
langue.  —  La  même  notice  mentionne  encore,  avec  le  mystère  des 
Trois  Doms,  cité  plus  haut,  celui  des  saints  Félix.  Fortunat  et  Achillée, 
joué  à  Valence  en  1524,  et  qui  l'était  déjà  de  temps  immémorial,  dans 
la  même  ville,  tous  les  vingt-cinq  ans  ou  à  peu  près.  Voy.  Jules  OUivier, 
Essais  historiques  sur  la  ville  de  Valence,  cité  par  le  comte  de  Douhot, 
Dictionnaire  des  mystères,  col.  1361. 

•*  Le  comte  de  Douhet   mentionne  aussi,  d'après    la  même  autorité   et 


120  PERIODIQUES 

Bulletin  de  la  Société  des  sciences,  lettres  et  arts  de  Pau, 

1874-1875, 2« série,  tome  IV.— P.  8-17.  le  docteur  de  Rochas,  iNToie 
sur  les  Colliherts.  A  propos  des  ceux  de  l'île  de  Maillezais  et  con- 
trairement à  l'opinion  de  M.  Francisque  Michel,  M.  de  R.  démon- 
tre que  des  colliberts  sont  signalés  sur  des  points  très-nombreux  et 
très-divers  de  la  France  du  moyen  âge.  C'est  une  erreur  de  les" 
considérer  comme  un  groupe  intermédiaire  entre  les  cagots  du  Midi 
et  les  cacous  de  la  Bretagne.  Les  colliberts  étaient,  dit  M.  de  R., 
une  classe  de  serfs  ayant,  moyennant  certaines  redevances,  un  peu 
plus  de  liberté  que  ceux-ci. —  18-27,  Luchairo,  du  Mot  banque  iri  et 
de  son  emploi  dans  la  comijosition  des  noms  de  lieu  de  V Espagne  et  de 
l'AquitaiJie  antique.  —  28-86,  Lespy,  les  Sorcières  dans  le  Béarn,  curieux 
et  intéressant  travail;  il  contient,  en  appendice,  divers  textes  béar- 
nais des  XlVe,  X"Ve,  XVP  et  XYH^^  siècles,  tirés  des  archives  des 
Basses-Pyrénées;  et  p.  35,  un  extrait  assez  considérable  des  Coun- 
tes  biarnés.  publiés  par  M.  Alexis  Peyret,  près  dos  rives  de  l'Uru- 
guay (Conception-de -l'Uruguay,  1870). —  87-114,Soulice,Z)ocwmente 
2Mur  l'histoire  du  protestantisme  en  Béarn.  Bernard,  baron  d'Arros,  et  le 
comte  de  Gramont,  1573.  Les  pièces  justilicatives  n"s  VIK,  X  et  XL 
sont  en  béarnais.  M.  S.  les  a  publiées  d'après  «un  manuscrit  de  la 
lin  du  XV!!»--  siècle,  traitant  de  l'histoire  du  calvinisme  en  Béarn, 
et  dont  il  ne  nous  est  malheureusement  parvenu  qu'une  partie.» — 
132-134,  Piche,  Question  sur  la  couvade.  «  Quand  une  Basque  ac- 
couche, dit  Spencer,  le  mari  se  met  au  lit  et  reçoit  les  félicitations 
des  amis,  tandis  que  sa  femme  vaque  aux  soins  du  ménage  »  :  telle 
est  la  couvade.  M.  P.  demande  si  cette  coutume,  à  laquelle  on  a 
trouvé  des  équivalents  en  Asie  et  parmi  les  Indiens  de  l'Amérique, 
a  existé,  comme  ou  Ta  dit,  dans  le  Béarn  ou  dans  le  pays  basque. 
—  17  1-175,  V.  Lespy,  sur  le  Nom  des  habitants  de  Pau.  M.  L.  exclut 
les  formes  palésiensel  pauniens,  tour  à  tour  jiroposées  par  le  Courrier 
de  Vaugelas.  et  il  conseille  d'adopter  la  forme  palois,  justifiée  par 
celles  de  daquois,  ossalois,  nimois,  usitées  à  l'égard  des  habitants  de 

sous  les  mêmes  dates,  un  Miracle  du  bienheureux  saint  Martial  :  mais 
ici,  c'est  "  par  les  bourgeois  de  Cahors,  dans  le  cimetière  et  près  de  la 
croix  de  pierre  consacrés  audit  saint  »,  que  ce  mystère  aurait  été  repré- 
senté. -  S  il  fallait  s'en  rapporter  à  M.  Aubertin  {Histoire  de  la  langue 
et  de  la  littérature  françaises  au  moyen  âge,  p.  434),  nous  aurions  encore 
à  signaler  à  Tulle,  dans  le  courant  du  XV"  siècle,  des  représentations 
de  moralités,  de  mystères,  et  même  de  farces.  Mais  M.  Aubertin  s'est 
mépris  sur  l'origine  du  lexle  (pi'il  cite:  c'est  un  extrait  des  statuts  de 
l'église  do  Toul,  ut  non  de-  celle  de  Tulle. 


PERIODIQUES  1?I 

Dax,  (l'Ossau  et  de  Nimes.  —  '200-^26,  Dubouo,  Fragments  incdiia 
d'un  manuscrit  de  Bordeu,  intitulé  :  Observations  sur  les  eaux  minérales 
de  la  généralité  d'Auch.  Ainsi  que  le  remarque  M.  D.,  ces  observa- 
tions ont  été  en  partie  fondues  par  l'auteur  dans  ses  Recherches  sur 
les  maladies  chrojiiques.  C'est  à  Bordeii  qiio  l'on  attribue  la  l)elle  et, 
pourrait-on  dire,  mystérieuse  chanson  insérée  par  M.  le  docteur  JS'ou- 
let,  Histoire  des  patois  du  7nidi,  Revue,  [""e  série,  t.  VJl,  p.  190  :  Pay, 
may.  rays  et  sourines,  etc.  —  227-232.  V.  Lespy,  les  Marionnettes  à 
Pau  {XVIII' siècle). —  223-289,  Cerquand,  Z-eV/enr/es  et  récits poimlaires 
du  pays  basque.  Lhi  compte  rendu  spécial  sera  procliainoment  con- 
sacré à  cette  publication.  —  3:20-339,  V.  hes\t\ ,  Remarques  sur  lu 
toponymie  du  Béarn.  M.  Lespy  pense  que  les  suffixes  en  os,  alos, 
arros,  Bardos,  Bidos,  etc.,  d'un  grand  nombre  de  villes  et  villages, 
non-seulement  des  Basses-Pyrénées,  mais  encore  de  plusieurs  dé- 
partements méridionaux,  appartiennent  à  l'euscare. —  351-404.  544- 
580,  le  docteur  de  Rochas,  les  Parias  de  France  et  d'Espagne,  chres- 
tianSj  cagots,  gahets  et  cacous,  avec  un  appendice  sur  les  bohémiens  du 
pays  basque.  Travail  important  et  qui  mérite  pleinement  les  éloges 
qui  lui  ont  été  adressés.  Textes  divers  en  béarnais,  pag.  37^,  375, 
376,  378,  etc.  Fragments  de  cbansons  populaires  pour  ou  contre  les 
cagots,  388-389,  400,  extraites  de  F.  Michel,  Histoire  des  races  mau- 
dites de  France  et  d'Espagne.  —  405-529,  Rivarés,  Pau  et  les  Basses- 
Pyrénées  pendant  la  Révolution. 

^  A.  R.-F. 

Bulletin  de  la  Société  des  sciences,  lettres  et  arts  de 
Pau,  1S75-187C,  2e  série,  t.  V. —  47-81,  1-2-2-157.— 29I-3C3,  lo  doc- 
teur de  Rochas,  les  Parias  de  France  et  d'Espagne  (suite).  M.  de  R. 
rectifie  une  erreur  du  Dictionnaire  de  Littré,  qui  définit  à  tort  les  ca- 
gots :  «  peuplade  des  Pyrénées  affectée  d'une  sorte  de  crétinisme  »; 
textes  divers  en  langue  d'oc;  p.  49,  68,  69,  71.  72,  77,  quelques-uns 
d'après  M.  Francisque  Michel;  p.  137,  138,  139,  d'après  M.  Paul 
Raymond.  M.  de  R.  conclut,  p.  80,  que  les  cagots  n'ont  jamais 
formé  une  race,  mais  une  caste,  et  qu'en  quelque  province  de 
France  et  d'Espagne  qu'ils  habitent,  ils  n'ont  aucun  idiome  qui 
leur  soit  particulier.  —  183-260,  Or(iuand,  Légendes  et  récits  popu- 
laires du  pays  basque  {smia) . —  367-384.  Rivarès,  Pau  et  les  Basses- 
Pyrénées  pendant    la  Révohition  {smlQ) . 

A.   R.-F. 

Bulletin  de  la  Société  des  sciences,  lettres  et  arts  de 
Pau,  1876-1877,  2-  série,  t.  VI.— 4-116.  Rivarès,  Pauetles  Basses- 


I?2  PERIODIQUES 

Pyrénées  penfJnnf  la  Rèvoltdion  (fin).  —  149-221 .  l'abhé  Marseillon. 
Histoire  du  Montanérez.  —  293-308,  Paul  Raymond,  Notice  sur  la 
famille  de  Jean- Paul  deLescun.  Pièces  justificatives  en  béarnais  : 
(■lies  sont  d'autant  plus  précieuses  qu'elles  appartiennent  au 
XVIle  siècle  (années  1601,  1607,  1612,  1619,  1623).  —  349-423, 
Liichaire.  les  Origines  linguistiques  de  V Aquitaine .  Un  compte  rendu 
de  cet  intéressant  travail  paraîtra  bientôt  dans  la  partie  bibliogra- 
phique de  la  Revue.  —  424-429,  Documents  divers  communiqués  par 
M.  Raymond.  Tous  sont  en  français,  sauf  un  qui  ne  manque  pas 
d'intérêt  et  qui  a  trait  à  un  procès  que  Corisande  d'Andoins,  com- 
tesse de  Gramont,  soutenait  contre  la  commune  d'Arthez,  dont  elle 
était  dame.  «  Les  bourgeois  avaient  nommé  un  syndic  :  c'était  \^ 
sieur  de  Merican,  le  trésorier  communal.  Mal  lui  en  prit,  car  il  reçut 
la  visite  du  chargé  d'affaires  de  la  belle  comtesse,  M.  de  Poyanne, 
ijuivint  lui  dire  que,  s'il  se  mêlait  du  procès,  il  recevrait  tant  de 
coups  de  bâton  qu'il  faudrait  l'emporter  dans  sa  maison.  Merican 
se  le  tint  pour  dit  et  s'empressa  d'écrire  sur  les  registres  de  la 
commune  qu'il  n'osait  se  mêler  de  rien  et  qu'on  voulût  bien  lui 
donner  un  remplaçant.  —  450-531.  Cerquand.  L^grenrfes  et  récits 
populaires  du  pays  basque  (suite). 

A.  R.-F. 

Mémoires  de  T Académie  des  sciences,  agriculture,  arts 
et  belles-lettres  d'Aix,  Lonie  XI.  —  1-9.  Rupporlde  M.  Achintre 
sur  l'ouvrage  de  M.  Réguis,  lu  à  l'Académie  le  30  janvier  1877.  Ce 
rapport  est  une  introduction  à  une  nomenclature  franco-provençale 
des  plantes  qui  croissent  dans  notre  région.,  par  M.Marius  Réguis,  de 
Meyrargues,  qui,  avec  divers  préambules,  occupe  les  pages  1 1  à 
186  du  présent  volume.  M.  Réguis  a  entre  les  mains  les  maté- 
riaux très-considérables  d'un  Dictionnaire  franco-provençal  d'histoire 
naturelle.  A  la  veille  de  l'imprimer,  il  a  pensé  qu'il  le  rendrait  plus 
complet  en  en  publiant  l'abrégé,  le  squelette,  selon  son  expression, 
dans  le  tome  XI  des  Mémoires  de  l'Académie,  et  en  sollicitant  la 
collaboration  des  personnes  qui  s'intéressent  au  vocabulaire  des 
végétaux  de  la  Provence.  M.  R,  a  sagement  agi.  et  tout  fait  es- 
pérer que  son  appel  sera  entendu.  D'ores  et  déjà,  sa  Nomenclature 
franc9-provençale  a  notablement  accru  les  listes  de  noms  dressées 
par  Garidel,  (terard,  Laugier  de  Chartrouse,  etc.ain.si  quecelles  que 
l'on  trouve  dans  le  Calendrier  de  Faune  et  de  Flore  pour  les  environs 
d'Aic,  de  M.  de  Fonl-Golombe,  et  le  Catalogue  des  plantes  vascu- 
laires.de  MM.de  Fonvert  et  Achintre,  publiés,  le  premier,  dans  le 
tome  cinquième,  et  le  deuxième,  dans  le  tome  dixième,  des  Mé- 
moires de  l'Académie.  Dans  son  rapport,  M.  Achintre  fait  quelques 


PERIODIQUES  1?3 

réserves  touchant  certaines  dénominations  acceptées  par  M .  H .  *. — 
22[-2tl .  Poésie  française  et  provençale,  par  M.J.-B.  Gaut.  Cette  der- 
nière, en  dialecte  d'Aix,  a  pour  litre  :  Aro  lei  plumon  lei  lapin;  inven- 
ciennouvello.  C'est  un  conte  humourisUque,  écrit,  comme  tout  ce  qui 
sort  de  la  plume  de  M.  G.,  avec  aisance  et  facilité.  —  229-240. 
Un  épisode  du  séjour  d^ Horace  Vernet  à  Rome,  par  M.  A.  de  Fonvert  ; 
anecdote  qui  fait  honneur  à  l'esprit  et  au  cœur  d'Horace  Vernet. 
M.  de  F.  la  tenait  du  peintre  lui-même,  dont  la  famille  était  d'ori- 
gine provençale.  —  451-464.  Un  document  inédit  sur  Lattre  de  Sade, 
par  M.  de  Berluc-Perussis.  Voyez  la.  Revue  de  mai-juin  1878.  — 
ièb-iSO,  Un Nostradamus  du  XIII°  siècle,  par  M.  Gh.de  Ribbe.  Cu- 
rieux et  intéressant  mémoire,  dans  lequel  M.  de  R.  donne  le  texte 
d'une  prophétie  latine  qu'il  a  trouvée  sur  la  couverture  d'un  cartu- 
laire  du  XIV''  siècle,  «  portant  la  date  de  1353  et  contenant  un  certain 
nombre  d'actes  passés  à  Aix-en-Provence,  par  un  tabellion  del'é- 
poque  nommé  Pascalis  (ou  Pascal)  de  Bucot.»  Cette  prophétie  a  est 
relative  aux  luttes  du  Sacerdoce  contre  l'Empire,  et  vise  directement 
le  rôle  et  la  destinée  des  descendants  de  Charles  d'Anjou,  comme 

instruments  delà  politique  française  en  Italie. 

A.  R.-F. 


Bulletin  de  la  Société  archéologique  de  Tarn-et-Garonne, 
t.  III,  p.  49-74;  t.  IV,  p.  72-88,  137-146.  L.  Buscon,  Recueil  des 
Proverbes  patois  usités  dans  le  département  de  Tarn-et- Garonne .  Collec- 
tion intéressante,  accompagnée  d'observations  judicieuses  et  qui 
annoncent  un  homme  d'esprit  et  de  goût.  La  plupart  de  ces  pro- 
verbes, comme  on  doit  s'y  attendre,  se  retrouvent  ailleurs  et  sou- 
vent sous  la  même  forme.  Le  mot  rampan  n'est  pas,  comme  le  croit 
M.  B.  (III,  67),  un  composé  de  ram  et  de  pan  ;  la  forme  ancienne 
et  complète  de  ce  substantif  est  rampalm,  où  l'on  voit  clairement 
l'origine  de  son  second  élément.  Delà,  dans  la  langue  moderne, 
selon  que  l'une  ou  l'autre  des  deux  consonnes  finales  est  tombée. 
Ici  rampau  et  \k  rampan,  C'e^t  de  la  même  manière  que  l'ancien 
jorn  s'est  réduit  en  tel  lieu  à  jour,  en  tel  autre  (  par  exemple,  à 
Montauban  même)  kjoun.  Plus  loin  (IV,  74)  l'adjectif  ort^  (Us. 
ori-e),  orro,  est  rattaché  à  sordidus.  C'est  de  horridus  qu'il  provient. 
—  A  la  page  183  de  ce  même  tome  IV,  je  rencontre  une  étymologie 
singulière  et  tout  à  fait  inattendue.  Selon  ÎM.  le  docteur  Rattier, 

'  Nous  ne  signalons  que  les  travaux  qui  relèvent  de  la  compétence 
de  la  Revue.  Mentionnons  cependant,  à  titre  d'exception,  p.  187-205,  une 
Causerie  de  voyage,  par  M.  Gaston  de  Saporta.  d'un  style  excellent. 


124  PERIODIQUES 

«  on  a  souvent  tourné  autour  du  véritable  sens  des  mots  langue 
d'oc  et  d'oil.  Pour  lui,  l'explication  la  plus  plausible  lui  a  été  four- 
nie par  un  savant  russe  qui  traduisait  ainsi  :  langue  d'oc  ou  d'oc- 
cident, langue  d'oil  ou  d'orient.  »  Et  pourquoi  non,  puisque,  comme 
chacun  sait,  cadaver  ^  caro  ^«ta  wrmibus,  et  que,  comme  l'ensei- 
gnent les  Lei/sd'amors,  Romaetfemna  ne  sont  respectivement  autre 
chose  que  rotz  ma  (rodit  manum,  parce  qu'on  y  laisse  tout  son  ar- 
gent), et/enestra  «nveriiiada  raortz  nostra  oparelhada? 

C,  G. 

Bulletin  de  la  Société  des  Études  littéraires,  scientifi- 
ques et  artistiques  du  Lot,  tom.  111,  1876-1877*.  — P.  57  et 
134.  L'abbé  Hérétié,  Fables patoises . —  p.  65,  95,  241.  P.  Lacombe 
et  L.  Gombarieu.  Documents  contenus  dans  le  TE-IGITUR.  On  ap- 
pelle ainsi,  nos  lecteurs  le  savent  déjà  -,  un  registre  des  archives 
municipales  de  Gahors  dans  lequel  sont  conservés  de  nombreux 
documents  en  langue  vulgaire ,  et  entre  autres  les  Coutumes  de  Cahors. 
La  publication  de  ces  coutumes  commence  à  la  page  241  du  vo- 
lume dont  nous  rendons  compte.  J'y  remarque,  tout  au  commen" 
cément,  1.  21  de  la  page  précitée,  un  exemple  bon  à  noter,  en 
raison  delà  rareté  du  phénomène,  de  conditionnel  décomposé: 
«  E  si  adresar  non  o  volio,  tornar  s'en  io  [11]  home  de  Gaortz. . .  » 
P.  106.  Gastela,  lou  Parpaillot  fahlo.  —  P.  109.  V.  Lieutaud.  la 
Vida  de  sanl  Amador,  texte  catalan  du  XlVe  siècle,  publié  d'après 
un  ms.  de  la  bibliothèque  de  Marseille  et  accompagnée  d'une  tra- 
duction ^.  G'est  une  légende  grossière,  moins  édifiante  assurément 
que  ridicule  et  repoussante,  et  qui  a  dû  être  traduite  du  latin,  car  il  en 
existe  ou  en  a  existé  une  version  languedocienne,  imprimée  à  Tou- 
louse vers  1520,  comme  nouslefait  connaître  le  savant  éditeur '\  Le 
ms.  d'où  ce  texte  est  tiré  renferme  en  outre  de  nombreuses  pièces 
provençales  dont  M.  Lieutaud  nous  promet  une  notice  détaillée. 
P.  16,1.  7,  suppl.  [eran]  entre  qui  etsis.  P.  124,  1.  9  du  bas.  Exem- 
ple remarquable  de    conditionnel  décomposé,  avec  l'auxiliaire  de- 

*  Nous  no  mentionnons,  comme  d'habitude,  que  les  articles  intéressant 
la  langue  d'oc  et  sa  littérature. 

2  Voy.  Revue,  XH,  153. 

^  Il  en  a  été  fait  un  tirage  à  part:  Marseille,  Lebon.et  Paris.  Delaille. 
In-80  de  24  p,  et  fac-similé. 

'•  Plusieurs  traits  de  cette  légende  sont  rapportés  piU'  M.  A.  Merny 
{Ips  Libres  prêcheurs,  p.  101),  d'après  Jean  Herolt,  Sermones  discipuli . . 
cum  casibus  papalibus  et  episcopalibus;  mais  je  ne  sais  si  c'est  d'Ama- 
dor  et  de  sa  mère  qu'il  s'y  agit. 


PERIODIQUES  1?5 

vant  le  verbe:  per  que  ella  nol  havia perdre,  ce  qu'il  faut,  traduire  : 
émotif]  pour  lequel  elle  ne  le  perdrait  pas,  et  non,  comme  l'a  fait  M.  L.: 
l't  elle  de  son  côté  n'avait  pas  permis  qu'il  fût  perdu.  Même  page,  1.  4 
lu  T)âs,  M.  L.  s'est  également  mépris  sur  le  vrai  sens  du  texte. 
Ce  n'est  pas  «  quels  que  fussent  ses  torts  et  sa  méchanceté  ii 
mon  égard»,  mais  «  si  vile  et  si  mauvaise  que  je  fusse.»  —  P.  180, 
-1.  Gary,  lou  Mounumen  deis  souldats  del  Lot.  -■  P.  ISi^.  A.  Hérétié. 
Election  d'un  mounumen  oy  mouhiles  del  Lot  morts penden  la  guerre  de 
1870.  Poésies  qui  ont  obtenu,  la  première,  une  médaille  de  ver- 
meil ;  la  seconde,  une  médaille  d'argent,  au  concours  ouvert  en 
1877  par  la  Société  des  Études  du  Lot.  Dans  ce  même  concours, 
un  prix  a  été  décerné  à  M.  Daymard  pour  un  recueil  de  chants  po- 
[)ulaires.  C.C. 

Mémoires  de  TAcadémie  des  sciences,  belles-lettres  et 
arts  de  Clermont-Ferrand,  tome  XVll.  —  17-30.  Rapport  sur 
les  fouilles  archéologiques  exécutées  au  sommet  du  Puy-de-Dôme,  avec 
un  plan. —  41-54.  Bouillet,  Nouvelles  Observations  sur  la  montagne 
de  Gergovia.  On  y  relève  la  mention  d'un  nom  de  lieu  appelé  dans 
les  vieux  titres  Tiche  ou  Quiche.  La  mutation  de  ^  en  t  est,  comme 
on  le  sait,  fréquente  dans  les  dialectes  de  la  langue  d'oc.  —  65-116. 
621-681,  l'abbé  A.  Chaix,  Bullaire  de  l'Auvergne,  depuis  les  origi- 
nes de  la  diplomatique  pontificale  dans  cette  province  jusqu'à  la  fin  du 
XVIII^  siècle.—  11 7-226,  287,  344-441 ,  620,  Lamotte,  Prodrome  de  la 
Flore  du  plateau  central  de  la  France.  Il  est  regrettable  que  l'auteur 
n'ait  pas  cru  devoir  nous  donner,  au  moins  partiellement,  les 
noms  locaux  des  plantes  qu'il  décrit.  —227-284,345-440,  Mathieu. 
le  Puy-de-Dôme,  ses  ruines.  Mercure  et  les  matrones,  contient  des  dé- 
tails intéressants  sur  les  traditions  qui  ont  rapport  aux  fées.  — 
682-692,  Francisque  Renaud,  les  Formules  arvemiennes,  préambule 

du  travail  de  l'auteur. 

A.  R.-F. 

Revue  de  linguistique  et  de  philologie  comparée,  tomeX. 
— 3-33,  Charles  Schœbel,  la  Légende  du  Juif  errant.  — 169-170,  Ho- 
velacque.  Étude  sur  la  limite  géograj)hique  de  la  langue  d'oc  et  de  la 
langue d'oiljY'a.r  MM.  deTourtoulonet  Bringuier. — 175-185.  Edouard 
Le  Héricher,  Philologie  topographique.  Légende  territoriale  de  la 
France,  pour  servir  à  l'étude  des  cartes  tojMgraphiques.  par  M.  Peitfer. 
—  271-287.  Alexandre  Maurer,  de  l'Origine  du  son  articulé. 


126  RULLETHS    BIBLIOGRAPHIQUE 


BULLETIX  BIBLIOGRAPHIQUE  DE  LA  LANGUE  D'OC 

(dialectes  modernes) 

Année    1875 

Almanagh  (!')  dous  paysans,  1875.  Mont-de-Marsan,  Chaussade. 
ln-16,  64  p.  35  c. 

Almanach  historique  de  Provence;  Revue  annuelle,  par  Alexan- 
dre Gueidon,  1875,  2Û«  année.  Paris,  Pion,  in-8,  48  p.  1  fr. 

Anciens  Proverbes  basques  et  gascons,  recueillis  par  Voltoire  et 
remis  au  jour  par  M  .  Gustave  Brunet.  Nouv.  édit.,  rev..  augmentée 
pt  suivie  de  notes  et  renseignements  inédits.  Bayonne,  C'azals. 
In-8,  31  p.  Tiré  à  134  exempl. 

A  Petrarco.  Quauquei  rimo  inedicho  mandado  au  Centenàri 
cinquen...  Publié  par  M.  L.  de  Berluc-Perussis.  Aix,  Remondet- 
Auhin.  In-8,  14  p. 

Armagna  Cevenôu  per  lou  bel  an  de  Dieu  1875.  Segoundo  an- 
nado.  Alais,   Brugueirolle.  In-12,  80  p.  50  c. 

Ar.mana  prouvençau  pèr  lou  bel  an  de  Dieu  1875,  adouba  e  pu- 
hlica  de  la  uian  di  Felibre.  An  vint-e-unen  dôu  felibrige.  Avignoun, 
Roumanille.  ln-18,  112  p.  50  c. 

Arnavielle  (A).  A  Nosto-Damo  de  la  Gardo,  pèlerinage  cevenôu 
dau  8  de  setembre  1875.  Alais,  Trintignan.  In-8,  1  p. 

Arnavielle  (A.).  Per  Toulouso,  au  noum  de  Dieu,  poésie  lan- 
guedocienne (traduction  française  en  regard).  Alais,  Martin,  ln-8, 
16  p. 

AssABÉ  dei  joio  baiado  ei  Vinceire  dei  Jué-Fiourau  de  N.-D.  de 
Prouvènço  de  Four-Cauquié,  lou  13  de  setembre  18T1.  Fourcau- 
quié,  Massoun.  In-8,  8  p. 

AsTRiÈ  (Théophile).  Les  Drames  de  l'inondation  à  Toulouse.  Pa- 
ris, Arnaud  et  Lahat.  In-16,  456  p. 

Contient,  p.  391  à  399,  des  extraits  de  diverses  pièces  en  langue  d'Oc 
sur  les  inondations. 

Atger.  Poésies  populaires  en  langue  d'Oc,  recueillies  par  Aimé 
Atger.  Montpellier,  Ricateau,  Hamelin  et  C^ .  ln-8°,  68  p. 

Extr.  delà  Revue  des  langues  romanes,  t.  VI,  liv.  de  juillet  1874. 

AuBANEL  (Teodor).  Discours  di  Jo  Flourau  tengu  dins  la  vilo  coum- 
talo  de  Fourcauquié,  pèr  li  fèsto  de  Nosto-Damo  de  Prouvènço 


RUTXETIN    BIBLIOGRAPmQTTR  127 

(11-12-13-14  (le  setèmbre  1875),  avec  traduction  française  en  re- 
gard. Avignon,  Aîibanel .  In-8'',31  p. 

Baldffe  (Aui^uste).  Bihliojïraphie.  Las  Vesprados  de  Clairac. 
pèr  Gabriel  Azaïs.  Béziers,  Malinas.  ïn-8^,  32  p. 

Barbe  (Paul).  Picambril.  poëme  toulousain  en  quatre  chants. 
Précédé  d'une  lettre  provençale  de  Louis  Roumieux.  Traduction 
française  en  regard.   Toulouse,  Bompard.  In-8'\  154  p.  3  fr. 

Bessi  (J  ules),  poeta  nassional  nissart.  La  Partensa  per  San-Giouan , 
Canson  messa  en  musico  da  D.  G.  (Orfeon  Pépin  ).  Nice,  Gilletta. 
ln-4'*,  1  p. 

Bessi  (Jules),  ^joeta  nassional  nissart.  Nissa,  canson  per  lou  mes 
de  mai.  Nice,  Gilletta.  In-4°  a  2  col.,  1  p. 

BiDAL,  le  Musicien  d'Issel.  Las  Farços.  dediados  à  la  populaco. 
Se  bendoun  chez  el  à  Castannaoudarry ,  cariéro  de  Countrosty.  In-12, 
24  p.  Prex  net  de!  cahié,  oO  cent. 

Ce  cahier,  le  8'  des  Farces  de  Vidal,  est  paginé  169  à  I9î.  Il  contient  ; 
le  Capela  imprudent,  l'Ambitiou  perd  les  homes,  le  Playrejur.  Anecdo- 
tos  comiques  (  en  vers  ;. 

Bigot  (A.).  Li  Boiirgadieiro  (dialecte  de  Nimes),  6«  édit.  Nimes, 
Chautard.  In-12,  300  p.  3  fr.  50. 

Blancard  (Jules).  A.  Petrarca!. ..  per  soun  Gentenaira  célébra 
à  la  fou.^n  de  Vouclusa,  lou  18  tgheuyô  1874.  Montélimar,  Cheynet, 
in-8.  10  p. 

Blancard  (Julesl.  Le  Rêve  d'une  nuit  d'hiver,  poème.  Flommage 
à  l'Helvétie  pour  son  hospitalité  envers  l'armée  française  (1870- 
1871).  Montêlimar ,  Cheynet,  in-8,  32  p. 

Contient  une  lettre  de  Roumanilie  en  provençal . 

Blanchoun,  à' Aies.  Lou  Carnaval  et  leis  Amourous.  Alais,  Bru- 
(jueirolle,  10-4",  1  p. 

Bonaparte-Wyse  (William).  I  Felibre  d'Avignoun  (chanson). 
Avignon,    Gros.  In-8,  3p. 

Bouan  (lou)  Prouvençaou.  Armana  doou  Var,  1875.  Toulon,  Cos- 
tel,  in-16.  16  p. 

Boucoiran  (L).  Dictionnaire  analogique  et  étymologique  des 
idiomes  méridionaux  qui  sont  parlés  depuis  Nice  jusqu'à  Bayonne 
et  depuis  les  Pyrénées  jusqu'au  centre  de  la  France,  comprenant 
tous  les  termes  vulgaires  de  la  flore  et  de  la  faune  méridionales,  un 
grand  nombre  de  citations  prises  dans  les  meilleurs  auteurs,  ainsi 
qu'une  collection  de  proverbes  locaux  tirés  de  nos  moralistes  po- 
pulaires, l'-^  livraison,  Nimes,  Baldy-Riffard.  Gr.  in-8  à  2eolonnes, 
40  p.  Chaque  fascicule  1  fr. 


128  BULLETIN    BIBLIOGRAPHIQUE 

BouDON  {W.).  Lou  voulen  et  l'ouren,  chanson.  Avignon,  Seguin. 
In-8,  2  p. 

BouENO-VoYO.    Déclamatien  (vers).  Marseille.  Cayev.  ln-8.  4  p. 

BouRRELLY  (Marius).  Poesia  provenzal  dedicada  à  la  Asociacion 
literaria  de  Gerona,  con  motivo  del  certamen  de  1875  (avec  la  tra- 
duction espagnole).  V.  Dorca,   s.  1.  n.  d.  Gr.  in-8,  4  p. 

Calamitat  (la)  de  Garono  méso  en  bersés  patouèses  pel  faouré 
dé  la  magistèro.  Toulouse.  Delhoy.  In-8°,  8  p.  15c. 

Castela  (J.).  Caoussado  (vers).  Montauban,   Forestié.  In-16,  3  p. 

Chants  populaires  recueillis  dans  la  vallée  d'Ossau,  par  le  comte 
de  Puymaigre.  Nogent-le-Rotrou.  Gouverneur .  ln-8°,  16  p. 

Extraits  de  la  Romania. 

Chastanet  (Auguste).  Lous  Bouqueis  de  la  Jano.  Pouème  peri- 
gourdi,  couronnât  pellaSocietat  de  laslengas  roumanas,de  Moun- 
pelher,  lou  31  mars  1875  (avec  la  traduction  française).  Périgueux, 
Dupont.  In-S",  30  p. 

Chevret  (Ed.).  La  Lazaréïde,  ou  le  Jeu  de  bataillon.  Poëme  épi- 
que, local,  enfantin,  satirique  et  tragi-comique,  mêlé  de  mots  pa- 
tois, avec  prologue  et  épilogue.  Marseille.  Doucet.  In-8°,  16  p. 
25  c. 

Cinquième  Centenaire  de  la  mort  de  Pétrarque,  célébré  à  Vau- 
cluse  et  à  Avignon  les  18.  19  et  20  juillet  1874.  Fêtes  littéraires  et 
internationales  (avec  les  discours,  rapports  et  poésies  des  concours 
français  et  provençaux).  Avignon,  Roumanille.  ln-8o,  294  p.  4  fr. 

Concours  philologique  et  littéraire  de  la  Société  pour  l'étude  des 
langues  romanes.  Année  1875.  Séance  solennelle  du  31  mars. 
Montpellier,  Imprimerie  centrale  du  Midi.    In -8°,  8  p. 

.CouRTATS  (S),  membre  fundadôi'  de  la  Societatper  las  llengas  romanas 
de  Montpeller,  premi  dels  Jochs  forais  de  Beziers.  Dolsuras.  La  Pe- 
dregada  y  la  dotzena  d'en  Pau  XIII,  poemas  ccmics.  Banyuls-dc- 
Mer,  l'auteur.  In-8o,  16  p.  60  c. 

Deuxième  Centenaire  de  Saboly,  célébré  à  Monteux  (Vaucluse) 
le  31  août  1875.  Avignon,  Seguin.  In-8o,  69  p.  et  portrait.  1  fr.  50. 

Récit  de  la  fête,  discours,  brindes,  liste  des  lauréats  du  Concours  lit- 
téraire, liste  des  souscripteurs,  etc.  Buste  de  Saboly. 

Durbec  (  F. -H.).  La  Tourré  de  Babéou.  ou  la  Franco  en  révo- 
lutien,  suivido  dé  la  Guerro  émé  la  Prusso.  Dialoguo  en  très  par- 
tidos,  entré  Blai  d'Allaouch,  Tounin  d'Aoubagno  et  François  dé 
Marseilho.  Marseille,  les  principaux  libraires.  In-18,  35  p. 

FuizET  (M.).  Li  Fueio  nouvello,  poésie.  Montpellier.,  Imprimerie 
centrale  du  Midi.  In -8°. 

Extrait  de  la  Revue  des  langues  romanes. 


BULLETIN    BIBLIOGRAPHIQUE  129 

Gagnaud  (A.  de), pseudonyme  de  M.  L.  de  Berlue- Perussis.  Dous 
Nouvè  latin  inedi,  de  Fourtunat  Pin,  courouna  en  At  e  Moiintèu 
i  .lo  flourau  de  la  fésio  de  Saboly.  Montpellier,  Ricateau,  Hamelin 
et  O.  In-8o,  15  p. 

Garnier  (dom  J.-B.)-  M.-B,  Santo  Escoulastico;  Avignon,  Rou- 
manille.  In-8o,  12  p. 

EsïAMAÏRE  (1'),  ou  li  Régré  dou  mariage  (vers),  par  J  .  L.,  suivi 
de:  le  Chèvrefeuille  (vers),  par  Alphonse  Achardy.  Nimes,  Chau- 
tard,  Catelan,  Chambourdon  et  Ollé.  In-S»,  4  p. 

FABRE(Binjaminj.  La  Partido  de  casso  à  la  mar,  pouëme  qu'a  ga- 
gnât la  prumieiro  medalho  d'argent  al  councours  de  uoslre  Soucie- 
tat  arqueouiougico,  scienlifico  e  litterario.  Béziers,  Malinas.  In-8o, 
31  p.  1  fr. 

Fabue  (Ferdinand).  Barnabe.  Paris,  Dentu.  ln-12,  482p.  3  fr.  50. 

Ce  roman  contient  une  chanson  en  languedocien. 

Fabre  (Hyacinthe).  Paoura  França.  Discourt  sur  traitât  de  paix 
infâme  que  la  Prussa  oh  exigeât  en  nou.s  salcheu  trayts.  Lodève, 
Corbière.  In-8o,  4  p. 

Fabre  (Hyacinthe).  Mémoire  de  la  campagne  àe.s  mobilisés 
de  la  première  légion  de  l'Hérault.  Souvenir  à  me.s  frères  d'armes 
(vers  patois).  Lodève,  Corbière.  In-8",  24  p. 

Fabré  (Hyacintha).  Désespouer  d'un  cultibatou  attaquât  day 
philocxera  (vers).  Lodève,  Tiffy-Jullian.  In-8",  7  p. 

FouRÈs  (Auguste),  fja  Grouès  de  l'inoundaciu.  CastannaucCarri., 
Chavard.  In-8o,24  p.  Prêts:  dèts  sous. 

Franc  (lou)  Prouvençau,  almanach  de  la  Provence  pour  187G. 
!■■«  année    Draguignan,  Laugier.  In-16,  144  p.  50  c. 

Frayces  (Ferdinand),  de  Nimes.  Lou  Baptèmod'un  rayoou.  Lou 
Mestre  d'cscoulo  ous  a  dit.  Baptistou  lou  Counscrit;  scènes  comiques. 
Nimes,   Vauteur,  musicien.  In-8o,  12  p. 

Gaut(J.-B.).  Sounet,  Souneto  e  Sounaio.  em'uno  Sounadisso 
de  Frederi  Mistral.  A-z-Ais,  Remandet- Aubin .  ln-12,  128  p. 

Gaut  (J.-B.).  Lei  Mouro,  dramo  en  très  ate  e  en  vers,  mescla 
de  cantadisso.  Aix,  V' Remondet- Aubin,  ln-18,  99  p. 

Giron  (Amat).  L'Ami  dei  buon  Dieu,  premiè  près  au  Centenari 
de  Saboly,  en  Ate(  Vau-cluso).  Alais,  Brugueirolle.  Li-8°. 

Extr.  de  VArmana  de  Lengadà. 

Gras  (Félix).  Raport  sus  li  Jo  flourau  d'At  (25  juliet  1875), 
avec  la  traduction  française.  Avignoun,  Maillet.  In-8",  IG  p. 

Grimoèro.  La  Scienci  du  paisan  douphinois  (vers  en  patois), 
par***.  Grenoble,  Baratier  frères  et  Dardelet.  In-8o,  v-159  p. 


130  BULLETIN    BIBLIOGRAPHIQUE 

Gros  (Charles).  Aou  grand  poë ta  Mistral  (simple  hommage  de 
l'auteur);  Per  dé  que  parlant  pas  pus  patouès  (vers).  Montpellier^ 
Pujolas.  ^1-4°  à2  col.,  1  p. 

Gros  (Gh.).  Ma  Grand!  !  !  Gansounétapatouèsa,  air  :  Grand'mère 
qui  connaît  la  chose;  chantée  par  M.  G.  Hippolyte.  Montpellier, 
chez  l'auteur,  cours  des  Casernes,  28.  In-4o  à  2  col.,  1  p. 

Gros  (Charles).  Per  lous  inoundas  ;  hymna  cantada  à  la  caval- 
cada  de  Mounpéié.  Montpellier,  Firmin  et  Cahirou.  In-4*,  1  p. 

Gros  (Charles).  Una  nioch  à  Palavas,  barcarola  cantada  aoù  fes- 
lival  d'aoù  Peyrou.  Montpellier,  Firmin  et  Cabirou.  In  4°,  1  p. 

Gros  (Charles).  L'Inoundatioun  de  Toulouza  en  1875.  Au  proutit 
das  inoundas  daou  Miejour.  Montpellier,  Firmin  et  Cabirou.  In-S». 
8  p.   25  c. 

Cette  pièce  de  poésie  a  eu  un  grand  nombre  d'éditions. 

Gros  (Charles).  L'Inoundatioun  de  l'Héraou  en  1875  (vers).  Au 
proulit  das  inoundas  daou  départamen.  il/o?i//:»eZZ4er,  Firmin  et  Cabi- 
rou. In-8o,  8  p.  25  c. 

La  troisième  édition  de  ce  poëme  a  été  revue  et  corrigée. 

GuisoL  (J.).  Poesia  nissardi  ollerti  ai  niieu  souscritour.  Nice, 
Gilletta.  ln-8o,  8  p. 

GuisoL  (F).  Épitre  supliant  au  gran  sitoyen  Thiers.  Nice,  Verani. 
ln-4o,  t  p. 

Guisol(F.).  Poesia  nouvcli.  Avis  impourtant  au  pople  moun 
fraire.  Una  comision  per  rire.  Épigrama.  Nice,  Gilletta.  in-fà  3  col., 
Ip. 

HouNOU  à  l'agricultuda.  Cansou  patouéza.  Loc^ève,  Corbière.  In-4'' 
à  2  col.,  1  p. 

Itinéraire  et  ordre  des  cérémonies  pour  le  Pèlerinage  diocésain 
de  Nimes  à  N.-D.-de-Fourvières  et  à  Paray-le-Monial,  27.  28,  29 
et  30  juillet  1875.  Nimes,  La/are.  In-8»,  16  p. 

Contient  à  la  page  8  un  cantique  provençal  par  M.  Bard  :  Cor  sacra, 
perdouno-nous. 

Jaudry  (A.),  maître  de  pension  à  Rochechouart.  Pus  d'einueï. 
Poésies  patoises,  comprenant  les  principaux  traits  de  la  vie  de 
Champalimau,  Bounéfan,  Burgou,  Mouret,  etc.  Limoges,  veuve 
Ducourtieux.  Iu-12,  10 i  p. 

Lavergne  (Bernard),  ancien  représentant  dupeuple.  As  paysans. 
Lou  Récensomen  dés  tsabals.  Lous  Homes  dé  la  réserbo.  Cal  un 
goubernomen.  Albi,  Nouguières.  In-12,  34  p. 

Léotard  (S.).    Bulletin   bibliographique  de  la  langue  d'oc  (dia- 


BULLETIN    BIBLIOGRAPHIQUE  131 

lectes  modernes),  pendant  les  années  1872,  1873  et  1874.  Montpel- 
ler,  Imprimerie  centrale  du  Midi.  In-8,  16  p.  1  fr.  50. 

Lespy  (V.).  secrétaire  général  de  la  préfecture  des  Basses- Pyrénées 
en  retraite.  Dictons  du  pays  de  Béarn.  Pau,  Rihaut.  ln-8,  xii-297  p. 

Tiré  à  102  exemplaires. 

Libre  (lou)  de  la  Crous  de  Prouvènco.  En  Avignoun,  Eoumanille. 
In-16,  160  p.,  2fr. 

LiEUTAUD  (V.),  hiblioutecàri  de  la  ciéuta  de  Marsiho.  Brinde  pourta 
dins  lou  banquet  oufert  i  felibre  pèr  la  vilo  de  Mount-pelié,  lou 
31  de  mars  1875.  Mount-pelié,  Ricateau,  Hamelin  e  Ce.  In-8,  8  p. 

Maurel  (Ant.).  Le  Mystère  de  la  naissance  de  N.-3.  Jésus- 
Christ,  pastorale  en  cinq  actes,  en  vers  provençaux,  contenant  : 
Hérode  et  les  Mages,  poëme  dramatique,  par  M.  le  baron  G,  de 
Flotte.  3«  édit.,  rev.  et  corr.  Marseille,  l'auteur,  rue  du  Refuge,  25. 
ln-16,  152  p. 

Mengaud  (L.).  Pastorale  languedocienne;  traduction  d'A.  Lo- 
mon,  musique  de  G.  Rupès.  Paris,  A.  Leduc,  avec  accompagne- 
ment de  piano,  5  fr.  — Sans  accomp.,  1  fr. 

Musique  vocale. 

Mes  (lo)  de  Maria,  ossia  lo  Mes  de  mai  consacrât  à  Maria  Santis- 
sima.  Gonsiderassion  de  G. -P.,  sac.  obi.  de  M.  Y.  Nice.  Caisson  et 
Mignon.  In-i6,  192  p- 

MiR  (Achilo).  L'Inoundaciu!  cant  de  dol.  Se  bend  al  prouflt  das 
inoundats.  Carcassonne^  Polère.  ln-4o  à  2  col.,  1  p. 

Mistral  (Frédéric).  Mireille,  poème  provençal,  avec  la  traduction 
littéraire  en  regard;  6*  édit  ,  rev.,  corr.  et  accomp.  de  notes  et  ar- 
guments.  Paris,  Charpentier.  In-12,  vni-511  p.  3  fr.  50. 

MiTROUN  (lou)  amourous.  Grando  lamentatioun  per  estré  débi- 
tado  din  li  mazet,  per  J.  L.  Nimts,  Bal.ly-Riffard.  In-8'',  1  p. 
10  c. 

Molinari  (Pierre),  ex-chef  d'orchestre  de  la  salle  Valentino.  Lou 
Massacré  de  la  mar  fa  per  leis  homes  de  l'art,  ou  la  Destruction  des 
peis.  Marseille,  Samat.  In-S",  8  p.  25  c. 

MoNTRAND  (Maxime  de).  Jasmin,  poète d'Agen.  Étude  biographi- 
que et  littéraire,  2'  édit.  Paris,  Lefort.  In-12,  142  p.  et  grav. 

NoELs  béarnais  et  français  jtopulaires  dans  les  Pyrénées,  avec 
accompagnement  de  piano,  par  MM.  R.  Baillot,  P.  GasimirJana, 
P.  Chabeaux,  A.  Dariès,  E.  Durand,  J.  Durantoy,  etc.,  etc.,  re- 
cueillis ei  publiés  par  P.  Darricades,  directeur  de  l'École  primaire 


13?  BULLETIN    BIBLIOGRAPHIQUE 

de  Pau.  Texte  et  musiiiue.  Pau,  les  lib.  et  marchands  de  musique. 
2  V.  in-S». 
NosTRO-D.\MO-DE-LuMiEno.  Cantique.   Avignon,  Auhanel.   In-8o, 

2  p. 

NouuRY(Paul).  Li  Niéros.  Cançouneto  patoiso.  Carpentras,  Prière. 
ln-4o,  2  col.,  1  p. 

Pèlerinage  à  Nostro-Damo-do-Luiniero.  Avignon,  Séguin.  ln-8° 
à  2  col . ,  'i  p . 

Petrarco.  L'Aura  gentil.  Sounet  CXLII.  Traducioun  prouven- 
çalo  de  Madamo  Roso-Aiiaïs  Roumanille  (Je  tlourau  d'Avignoun, 
juliet  18.  4  ).  Avignoun,  Seguin.  In-8.  4  \k 

Papier  vergé. 

PrGHO  (li)  Gréba,  saliro,  par  l'auteur  du  Manovro  amourous;  2'^  éd. 
Roger  et  Laporte.  In-8",  i  p. 

PoNCY(Gh  )Soavé,ni  delà  Gardo  naiiounalo.  L'Enchouyailo  (vers;. 
Toulouse,  Mihière.  ln-32,  vui  p. 

Premier  Recueil  des  chants  favoris  exécutés  par  les  Chanteurs 
montagnards  béarnais.  Rennes,  Obcrthur.  In-S"  à  2  col.  8  p. 

Recueil  de  Chansons  patoises.  (Lous  Tirairés. —  Lis  Aoureillas 
dé  Mario.  —  La  Fille  de  l'escoubillé).  Marseille,  Cainoin.  In-S°,  4  p. 

RicH.\RD.  Las  Noças  de  Jauselou  Roubi,  Comédie  dauphinoise 
(sous-'lialecte  de  Triéves,  1815  à  1820),  publié  par  M.Ch.  Revil- 
lout.  Montpellier,  Imp.  centrale  du  Midi.  Li-8°,  31  p.- 

Extrait  de  la  Revue  des  langues  romanes. 

RouMtEUX  (Louis),  président  de  la  Soucietci  de  Sant-Jan-de-la-Crous. 
La  Gansoun  de  Sant  Jan-de-la-Crous.  Brinde  à  Sant  Jan-de-la- 
Grous.  Nîmes,  Baldy-Riffard.  In-8",  4  p. 

RouMiEux  (L).  A  Sant  Jan-de-la-Grous,  chanson,  Nîmes,  Rou- 
mieux.  In-5°,  2  p. 

RouMiRux  (Louis).  Belli  Santo  (vers).  Avignon,  Auhanel.  Lî-8", 
4  pages. 

RouMiEux  (L).  Cansoun  nouvlalo.  Nîmes.  Baldy-Riffard.  In-8'', 
4  pages. 

Roux  (Joseph),  di  Tullo.  Pey  cinquième  Centinare  di  Petrarco 
0  Petrarco. Sounet  in  lingaje  neu-rouman  liuiousi,  counio  se  parlo 
0  Tullo.  Tulle,  Bossoutrot.  In-4°,  3  p. 

Sans  {i\i\\\ov),  felihre  delà  Naoeto.  Beit  telados.  Paris,  Ubr .  des 
Bibliophiles.  Li-12,  50  p.,  2  fr. 

Seh.mon  (lou)  deu  curé  de  Bideren  (X"VIII«  ségle),  publicat  per  la 
prumére  betz.  Pau,  Ribaut.  In-S",  16  p. 
Tiré  à  104  exompl. 


KT'LLETIN    lîIIÏÏJOi  iRA PIITQUE  133 

SoiRÈKs  du  Midi.  Douze  morceaux  de  chant;  paroles  languedo- 
ciennes de  L.  Mengaud,  ])aroles  françaises  de  M**',  avec  accom- 
pagnement de  piano,  par  E.  Rey.  Paris,  L.  Escudier.  (Musique  vo- 
cale.) 10  francs. 

TniQUETr  (Henry  de),  président  du  Comité  de  patronage,  etc.,  de 
l'Église  réformée  de  Paris. —  Les  Ouvriers  selon  Dieu  et  leurs  œu- 
vres, suite  de  discours  adressés  aux  jeunes  apprentis  (17*  série  : 
Jasmin.  Les  Œuvres  de  la  force.  Correspondance.  Frédéric-Au- 
guste (de  Metz).  Paris,  l'auteur,  rue  Pigalle,  15.  In-18,  141  p. 

Une    journée    du   mois    de  mai  à  la  campagne.  Les  insectes. 

Espoir  et  Souvenir.  Mouu  idéal.  Mon  idéal.  Poésies,  par  X 

Rodez,  Ratery.  ln-8^  16  p. 

Extrait  des  Mémoires  do  la  Société  des  lettres,  sciences  et  arts  de 
l'Aveyron,  t.  X. 

Yasch.vlde.  Dictons  et  SobriijLiets  populaires  dn  Vivarais.  Mar- 
seille. In-8°. 

Vasch.\lde.  Anthologie  patoise  du  Vivarais  (documents  i:iédi(s). 
Montpellier,   Coulet.  ln-8°,  48  p. 

Tiré  ù  200  exemplaires. 

Vaschalde.  Nos  pères.  Proverbes  et  maximes  populaires  du  Vi- 
varai.  Privas.  In-8". 

Verdie  (M  pste),  ^joé7e  «/a-scort.  CËavres  complètes.  10^  édit.  Bor- 
deaux, Goudin.  ln-12,  219  p.  et  vign.  3  fr. 

IdexM,  11«  édil.  Bordeaux,  Lacoste.  In-12,  219  p.  et  vign.  3  fr. 

ViLo-Novo  d'Esglapoun  (lou  comte  Crestian  de),  dôu  felibrige . 
Lei  Jue  tlourau  de  Fourcauquié,  13  de  setèmbre  1875.  Kaport  .sus 
lou  Councours.  Montpellier,  Ricateau.,  HamelinetC^.  ln-8".  14  p. 


LE  PARAGE  A  MAGUELONE 


Le  Statut  félibrin*  de  Forcalquier-,  rédigé  au  commencement  de 
l'année  1877  par  M.  de  Berluc-Pérussis,  disposait  que  les  séances 
des  membres  de  l'Ecole  des  Alpes  se  tiendraient  tous  les  trois 
mois  dans  un  lieu  poétique,  ou  qui  rappellerait  quelque  souvenir 
provençal.  Tel  fut  le  motif  qui  détermina  les  sept  fondateurs  du 
Parage  à  choisir  pour  leurs  lieux  de  réunion  un  même  nombre  de 
points  contenus  dans  le  rayon  du  langaiz:e  de  Montpellier,  c'est-à- 
dire  l'ancienne  île  de  Maguelone.  le  pic  Saint-Loup,  les  bois  de  pins 
qui  s'étendent  en  avant  de  Montferrier,  non  loin  d'une  partie  de 
l'aqueduc  de  Saint-Clément:  la  montagne  de  Saint-Clair,  à  Cette; 
la  grotte  des  Fées  3,  près  de  Ganges:  le  bois  de  Puéchabon  et  la 
baronnie  de  Lunel. 

Le  clioix  de  ces  sept  lieux,  de  réunion,  le  rappel  dans  un  sens 
plus  large,  et  plus  décidément  latin  surtout,  des  paroles  inscrites 
en  tête  du  statut  de  1862;  l'obligation  d'écrire  et  de  remettre  en 
honneur  le  dialecte  propre  de  chaque  ville  du  Midi,  constituent  les 
caractères  de  ce  qu'il  est  permis  d'appeler  le  féli.brigc  languedo- 
cien ;  car,  il  importe  de  ne  pas  l'oublier,  la  transformation  (ju'a 
subie  la  grande  association   méridionale,  le  21  mai  1876,  eut  son 


1  On  dit  ordinairement  félihresque  :  me  serait- il  permis  de  motiver 
une  préférence  à  l'égard  de  la  terminaison  normale  et  courante  en  in 
{(élibrin).  par  ce  fait  que  celle  en  e^que  est  une  sorte  d'exception  dans  le 
français  et  qu'elle  est  presque  toujours  prise  on  raillerie  ou  à  mauvaise 
intention  [grotesque,  pittoresque,  burlesque,  picaresque)"! 

On  ri  il  aussi  au  féminin  félibrenque,  que  rien  ne  justifie,  attendu  que  co 
terme  est  le  gascouisme  ou,  plus  exactement,  le  provençalisme  de  feli- 
brenco. 

Félibrée,  substitué  pour  la  première  fois  (1877),  dans  le  Journal  de  For- 
calquier et  la  Revue  des  langues  romanes,  à  la  forme  presque  barbare 
de  félibrejade,  a  engendré  à  Aix-en-Provence  l'adjectif  félibréen,  enne, 
dont  il  serait  difficile  de  prévoir,  à  l'heure  qu'il  est,  la  fortune  linguisti- 
que. 

-  Voyez  Revue,  janvier  1877.  p.  55. 

3  La  bauma  de  lai  Dunmniselas,  que  l'on  traduit  assez  improprement 
par  grotte  des  Demoiselles.  Doumaisela  est  synonyme  de  fée,  en  beaucoup 
d'eadroits. 


LE    PARAGE    A    MACiUELONE  ISS 

point  de  départ  dans  la  réunion  que  les  félibres  du  Languedoc  tin- 
rent à  Montpellier  le  4  novembre  1875,  le  jour  même  où  l'école 
de  cette  ville  était  fondée  sous  la  présidence  de  M.  Charles  Cava- 
llier.  Le  statut  de  l'École  ne  devait  être  rédigé  que  plus  tard,  le 
23  mars  1877;  mais  l'Ecole  elle-même,  désignée  depuis  sous  le  nom 
de  Parage^ ,  est  la  plus  ancienne  du  midi  de  la  France. 

Les  souvenirs  liistoriques  et  légendaires  qui  «  auréolent  »  si  bien 
le  sol  de  l'ancienne  métropole  religieuse  de  Montpellier,  l'admirable 
situation  de  son  église,  placée  sur  une  légère  éminence,  au  centre 
d'un  paysage  à  demi  montueux,  à  demi  maritime,  dont  la  ville  de 
Montpellier,  la  chaîne  de  la  Gardiole,  \"illeneuve-lez-Maguelone, 
les  étangs,  les  premières  croupes  des  Côvennes  et  le  pic  Saint- 
Loup,  Aigues-Mortes  et  le  phare  de  l'Espiguette,  constituent  les 
horizons  divers,  la  saison  déjà  très-avancée,  et,  pour  ne  pas  omet- 
tre un  des  [irincipaux  attraits  du  lieu,  la  gracieuse  hospitalité  de 
M.  Fabrége,  décidèrent  M .  Cavallier  à  tenir  la  séance  d'inaugu- 
ration dans  la  presqu'île  magalonaise,  le  dimanche  \'è  novembre 
1877,  à  neuf  heures  du  matin. 

La  réunion  devait  être  favorisée  par  une  de  ces  merveilleuses 
journées  que  l'été  de  la  Saint -Martin  réserve  souvent  à  notre  ré- 
gion. Elle  comptait  parmi  ses  membres  :  Mgr  Roverié  de  Gabriè- 
res,  l'éloqnent  évêque  de  Montpellier,  qui  avait  bien  voulu  ac- 
cepter récemment  le  titre  de  mainteneur  du  Félihrige;  MM.  W.- 
C.  Bonaparte-W'yse,  arrivé  depuis  quelques  jours  de  ses  terres  de 
Waterford,  en  Irlande,  pour  s'asseoir,  selon  ses  poétiques  expres- 
sions, «  à  l'ombre  des  caryas  -  visionnaires  de  Maguelone  »  ;  Rou- 
manUle,  qu'il  suffit  de  nommer  et  que  l'on  voyait  pour  la  première 
fois  à  Montpellier  depuis  que  les  études  romanes  y  avaient  repris 
Javeur  ;  Louis  Roumieux,  l'auteur  de  la  Rampelado  et  de  la  comé- 
die des  DosLehre,  le  plus  vif  et  le  plus  prime-sautier  peut-être  des 
félibres  de  la  Provence  ;  l'aimable  et  érudit  président  de  l'Athénée 
de  Forcalquier,  Léon  de  Berluc-Perussis,  poète,  écrivain  et  orateur 
également  autorisé  en  français  comme  en  provençal  ;  Auguste 
Verdot,    l'auteur  des  vers    si   connus  ef  si  touchants:  A  Eiguiero; 


i  C'est  à  M.  Charles  Revillout.  professeur  à  la  Faculté  des  lettres  et 
président  de  la  Société  des  langues  romanes,  lors  de  son  premier  con- 
cours triennal  de  1875  que  l'on  doit  le  choix  de  cette  appellation. 

*  Allusion  à  l'agréable  supercherie  littéraire  de  Moquin-Tandon:  le 
Cariia  Manalonensis,  ou  le  Noyer  de  Manuelone,  avec  la  traduction  fran- 
çaise en  regard,  ï"  édition;  Montpellier,  Boehm.  1844;  in-12. 


136  I.K    PARAGE    A    MAGIKI.ONE 

Christian  de  Vilieneuve-Esclapon,  d'Aix-en-[*rovence,  el  Albert 
Arnavielle,  d'Alais.  La  Société  archéologique  de  Béziers  y  était  re- 
présentée par  un  de^es  correspondants,  M.  Camille  Laforgue,  de 
Quarante,  que  le  soin  d'un  des  j)Ius  riches  vignobles  de  l'Hérault 
n'a  jamais  distrait  des  recherches  historiques  et  de  la  poésie. 

MM.  les  abbés  Gervais  et  Rédier,  secrétaires  de  M^r  de  Gabrières: 
Sarran,  Mie  Keittinger,  le  président  Maxime  de  la  Baume,  Henri 
Delpech,  qui  venait  de  terminer  dans  les  archives  de  Rome  et  de 
Barcelone  les  recherches  nécessaires  à  la  publication  de  sa  belle 
et  savante  monographie  de  la  bataille  de  Muret;  le  docteur  Espn- 
gne,  Antonin  Glaize  et  Boucherie,  trois  noms  qu'il  est  inutile  de 
recommander  auprès  des  lecteurs  de  la  Revue;  Cantagrel,  prési- 
dent, et  Alphonse  Roque- Ferrier,  secrétaire  de  la  Société  pour 
Vétude  des  langues  romanes;  Jules  Gaussinel,  l'auteur  du  poëme  d'^i- 
dona*,  sorte  de  synthèse  épique  de  l'humanité,  dans  laquelle  tous 
ceux  qui  ont  ennobli  la  condition  de  l'homme  ou  en  ont  charmé  les 
tristesses,  sainte  Agnès,  sainte  Cécile,  le  Dante,  saint  François 
d'Assise,  Raphaël,  Milton.  les  saints  aussi  bien  que  les  poètes, 
sont  considérés  comme  les  descendants  d'un  ange  que  Dieu  in- 
carna ici-bas  pour  y  remplir  une  mission  de  relèvement  et  de  lu- 
mière: Charles  Gros,  le  poète  populaire  de  Montpellier;  l'abbé 
Douais,  l'annaliste  du  conciliabule  arien  ^  tenu  à  Béziers  en  356. 
—  sous  la  présidence  de  Saturnin,  d'Arles,  Libère  étant  pape;  Con- 
stance, empereur,  Julien,  César ,  et  Numérus,  gouverneur  de  la 
Gaule  narbonnaise;  —  l'abbé  A.  Rouet,  à  qui  la  Société  archéologique 
de  Béziers  avait,  quelques  mois  auparavant,  décerné  la  plus  impor- 
tante de  ses  récompenses  historiques  pour  un  travail  sur  l'Ecole 
juive  de  Lunel.  dans  lequel  il  avait  réuni  une  foule  de  détails  cri- 
tiques et  bibliographiques  sur  les  médecins  et  les  interprètes  de  la 
Bible  et  du  Talmud,  que  cette  ville  possédait  aux  XIP  et  XIll*'  siè- 
cles 3;  le  peintre  Edouard  Marsal,  dont  le  crayon  fécond  et  spiri- 
tuel a  si  bien  rendu  les  burlesques  ou  comiques  inventions  de  l'abbé 
Favre  dans  le  Siège  de  Cadaroussa  et  ïlstouera  de  Jan-l'an-pres''  : 

'  Abdona,  poëme  en  trenle-deux  chants.  Montpellier,  Seguin,  1877;  m- 
12,  ix-472  pages.  Ce  poëme  est  le  développement  d'^i^dono,  histoire  d'un 
ange,  que  l'auteur  fit  paraître  en  1873.  Montpellier,  GroUier,  in-S"; 
•")3  pages. 

-  h' Enlise  des  Gaules  et  le  Conciliabule  de  Béziers,  tenu,  en  l'année 
356.  etc.  Paris,  Oudin.  1875,  iu-8o,  viu-107 pages. 

'  Etude  sur  l'Ecole  juive  de  Lunel  au  moyen  âge,  par  l'abbé  A.  Roiiet. 
Paris,  Vioweg,  1878,  in-8«,  vn-65  paget-,  avec  un  plan. 

'  Obras  lengadoucianas  de  J.-B.  Favre,  nonvela  edicioun  illustrada, 
pèr  Ed.  Marsal  (lom.  1).  Mounlpeliè,  Marsal,  1877;  in-8°,  lig.  et  l'an-simile. 


lh;  taraok  a   magt'ki.onI':  13 j 

telles  étaient  les  personnes  que  la  ville  de  Montpellier  comptait  à  la 
première  assemblée  du  Parage. 

Les  lettres  d'adhésion  adressées  par  les  membres  que  l'éloigne- 
ment,  les  occupations  ou  la  maladie  avaient  retenus  loin  de  Maguo- 
lone,  étaient  fort  nombreuses.  MM.  Gabriel  Azaïs,  Junior  Sans 
et  Bonnet,  de  Béziers  ;  Astruc,  Bistagne,  Lieutaud  et  Tavan,  do 
Marseille:  Mir,  de  Garca'îsonne;  Descosse  et  l'abbé  Emile  Savy, 
de  Forcalquier;  Gleizes,  d'Arles;  Guillibertet  Frizet,  d'Aix-en-Pro- 
vence;  Aubanel,  d'Avignon;  le  docteur  A.  Roux,  de  Lunel-Viel; 
Légier  de  Mesteyme.d'Apt;  Deloncle,  de  Toulouse;  Barbe,  de  Bu- 
zet  ;  Albert  de  Quintana,  de  Tourtoulon  ot  de  Ricard,  étaient  de 
ceux-là.  Presque  tous  cependant  avaient  envoyé  des  vers  dont  la 
lecture  ne  fut  pas  un  des  moindres  succès  de  la  journée. 

En  arrivant  devant  l'église  de  Maguelone.le  Gapiscol*  du  Parage 
adressa  à  Mgr.  de  Cabrières  quelques  mots  en  languedocien,  où  il  le 
remerciait  d'avoir  consenti  à  rehausser  de  sa  présence  la  première 
réunion  de  l'École  de  Montpellier: 

u  En  memoria  de  nostes  reires,  aven  vougut,  dit  M.  Gavallier,  planta 
lou  jardinet  dau  Parage.  dins  l'illa  de  Magalouna,  sus  lou  ribairésdola 
mar  linda  ounte  se  miralha  tant  ben  lou  ciel  mount-pelieirenc;  l'aven 
vougut  planta  à  l'assousta  de  la  tremountana,  ras  d'aquela  gleisa  roumana 
ounte  cha^^a  peira  retrais  un  precious  souvenir.  » 

L'évêque  de  Montpellier  répondit  à  ce  compliment  par  les  plus 
aimables  paroles.  Peu  d'instants  après,  la  messe  était  dite  par  lui 
dans  l'église  de  Maguelone  -.  Sous  l'éclat  de  la  lumière  à  demi  voilée 
({ueleur  envoie  les  fenêtres  étroites  de  la  nef,  les  murs  de  celle-ci 
présentaient  tout  d'abord  à  l'œil,  avec  l'austère  et  religieuse  nudité 
qu'on  leur  a  justement  conservée,  leurs  colonnes  à  chapiteaux  dé- 
rivés du  corinthien,  leurs  tombes  épiscopales  et,  au  fond  du  chœur, 


'  Cabiscàu,  en  languedocien  et  en  provençal,  littéralement  chef  de  l'école. 
Le  Capiscol  était  le  doyen  d'un  chapitre  dans  quelques  provinces  {Diction- 
naire de  l'Académie  franraise,  Lyon,  Joseph  Duplairi,  1777).  Il  en  était  à 
peu  près  de  même  en  Espagne.  Le  Libre  dels  [eijts  d'armes  de  Calalunha 
(ch.  xxiu,  p.  :5"20-327,  cité  par  Henri  Delpech  (la  Bataille  de  Muret;  Paris, 
Picard,  1878;  in-8°,xvi-154  pages),  mentionne  au  nombre  de  ceux  qui.  par 
leurs  contingents,  contribuèrent  militairement  à  l'expédition  de  Mnjorque 
en  1229,  «  l'abat  de  Sanct  Feliu  de  Gerona  e  l'abat  de  Ripoll,  el  cabisco  'le 
Barcelona. . .  e  moites  altres  ecclésiastiques  persones. ...» 

2  Voyez,  sur  l'intériour  de  l'église  de  Maguelone,  Renouvier.  Monuments 
de  quelques  diocèses  du  bas  Languedoc;  Adolphe  Ricard,  la  Réconciliation 
de  Maguelone  {M  in'mlSlb'i.  ptc. 


138  LE    PARAGE    A    MAGUELONE 

les  magnifiques  tentures  rouges  données  par  M"»»  Fabrége  lors 
de  la  réconciliation  du  t  i  juin  1875.  (^e  fut  l'impression  première 
qu'en  reçurent  toutes,  les  personnes  présentes.  Selon  l'usage  des 
basiliques  romaines,  remis  en  pratique  à  Maguelone,  parce  que  son 
église  releva  directement  du  Saint-Siège  au  moyen  âge,  l'évèque 
officia  le  visage  tourné  du  côté  de  l'assistance,  composée  cette  fois 
des  félibres,  de  quelques  fidèles  venus  de  Villeneuve  «  et  d'une 
»  petite  escouade  de  douaniers  gardes-côtes,  image  bien  modeste  de 
»  l'appareil  militaire  dont  ces  mêmes  lieux  avaient  été  témoins  dans 
»  les  siècles  passés'.  »  Le  silence  de  la  vieille  basilique  n'était  in- 
terrompu que  par  les  mélodies  éloignées  d'un  orgue-harmonium 
place  dans  l'ancienne  tribune  des  chanoines,  et  tenu  avec  une  dis- 
tinction très-remarquée  par  M™* veuve  Martin, de  Montpellier'-. 

A  dix  heures  et  un  quart,  à  l'issue  de  la  messe,  des  sièges  furent 
apportés  près  du  mur  sud  de  l'église,  en  face  du  soleil  levant  et 
de  la  mer,  et  occupés  par  l'Evêque  de  Montpellier,  MM. Cavallior, 
Bonaparte-Wyse,  Roumanille  et  les  autres  membres  de  la  réu- 
nion. La  séance  littéraire  se  tint  donc,  non  pas  à  table,  comme  on 
l'avait  fait  jusqu'ici  dans  les  autres  félibrées,  mais  en  plein  air,  au 
bord  d'une  allée  de  pins  maritimes,  aux  émanations  aromatiques 
et  salubres.  M.  C-avallier  lut  tout  d'abord  le  statut  du  Parage.  Les 
formules  poétiques,  presque  ternaires,  de  cette  pièce,  entièrement 
rédigée  en  languedocien,  rappellent,  dès  le  début,  l'ancien  statut 
du  Félibrige,  tel  qu'il  fut  arrêté  en  1862,  à  la  suite  des  fêtes  pro- 
vençales d'Apt  : 

L  Lou  Félibrige  es  establit  peramor  de  garda  lou  parla  rouman,  sa  li- 
bertat  e  sa  voia  naturala;  lou  Félibrige  es  gai,  amisladous  e  frairenau, 
pie  de  simplessia  e  de  franquessla. 

Ten  en  ferme  perpaus  lou  chale  de  soun  bres  nadalenc,  de  la  França 
e  de  la  terra  lalina. 

Soun    vi    es   la    bèutat,  soun    pan   es   la   bountat,  e  soun    cami   la 
veritat. 

A  lou  sourel  per  regalida,  tira  sa  sciençia  de  l'amour  e  fisa  en  Dieu  sa 
prima  espéra. 


'  Nous  empruntons  les  lignes  guillemetées  à  une  relation  de  la  (ète 
destinée  à  un  journal  de  Monlpeilier,  et  non  imprimée. 

2  M.  Louis  Lambert,  si  connu  par  ses  recherches  sur  la  musique  popu- 
laire du  Midi,  avait  ou  la  j.ensée  fort  heureuse  de  jouer,  pendant  la  célé- 
bration de  cet  office,  quelques-unb  des  anciens  airs  historiques  du  Lan- 
guedoc ;  une  indisposition  le  retint  malheureusement  à  Montpellier 
le  18  novembre. 


LE    PARAGF,  A    MAGUELONE  139 

Serva  soun  odi  per  ça  qu'es  odi,  aima  r  recampa  ra  qu'es  amour  '. 

II.  En  causa  daquel  prefache  per  fin  qu'es  pas  soulamentfclibre  aqui  1 
que  se  capita  troubaire  eque  canta,  mais  tantben  lou  que  sap  lou  noum 
das  sants,  das  princes  e  das  omes  de  Prouvença, -louque  se  sentis  grandi 
davans  l'obra  dau  Pugot  ou  que  tresana  au  raconte  de  las  balalhas  de 
Mountcalm,  de  las  vitorias  de  Sufren  e  de  la  mort  d'Assàs,  aquel  que 
sus  la  peira,  per  lou  cant  e  la  parladura,  cnaura  mai  que  mai  lou  chale 
de  soun  bres  nadaleiic,  de  la  França  e  delà  terra  latina^; 

Lous  set  Mount-pelieirencs  que  se  rencountreroun  de  cor  lou  quatre  de 
nouvembre  mila  ioch  cent  setanla-cinq.  es  à  dire  Anatoli  de  Boucherie, 
Beneset  de  Gantagiel,  Adèufe  d'Espagne,  Antouni  de  Glaize,  Louvis  de 
Lambert,  Caries,  baroun  de  Tourtouloun  e  Anfos  de  la  Rocca,  s'acor- 
doun  per  estituir,  embé  Caries  de  Cavallier  3,  una  escola  felibrenca  que 
sera  dicha  lou  Parage. 

En  memoria  das  set  troubaires  de  Toulousa  e  de  Barcelouna,  on  nic- 
moria  tant  ben  das  set  felibres  de  Font-Segugna  *,  lou  gouver  d'aquela 
escola  es  tengut  per  un  cabiscôu  e  set  magislres  que  se  renouvelissoun 
eleigiblamenl  de  très  en  très  ans. 

Loii  Parage  causis,  dins  Mount-peliè  soulet,  quaranta-nàu  socls,  e  lou 
même  noumbre  encara  dins  las  parladuras  que  retrasoun  lou  milhou  sa 
lenga  naturala.  Lous  magistres  qu'an  lou  gouver  tersenau  soun  toujour 
de  Mount-pelieirencs. 

'  Le  premier  statut  du  Félibrige  s'exprimait  ainsi  : 

Art.  l .  Liou  Kelibrige  es  establi  pèr  garda  longo-mai  à  la  Pronvènço  sa 
lengo,  sa  couleur,  sa  libertade  gàubi,  soun  oiinour  naciounau  e  soun  bèu 
rèng  d'intelligènci  ;  car,  laio  qu'e?,  la  Prouvènço  nous  agrado.  Entenden 
pèr  Prouvènço  lou  miejour  de  la  Franco  tout  en  entiè. 

Art.  ï.  Lou  Félibrige  es  gai,  amistadous,  frairenau,  plen  de  simolesso  e 
de  franquesso. 

Soun  vin  es  la  bèuta,  soun  pan  es  la  bounta,  e  soun  camin  la  verita . 

A  lou  soulèu  pèr  regalido,  tiro  sa  sciènci  de  l'amour,  e  bouto  en  Dieu 
soun  espérance  (Armana  prouvençau,  de  1863,  p.  108). 

2  Presque  entièrement  pris  du  discours  d'Aubanel  à  Forcalquier  (1875). 

3  Dans  l'onomastique  du  dialecte  de  Montpellier  et  dans  celle  du  proven- 
çal, la  préposition  de  n'a  pas  de  valeur  nobiliaire;  elle  exprime  un  rapport 
de  filiation  ou  d'habitation.  Ainsi,  par  e.Kemple:  Jan  de  Gnunfaroun  (Mis- 
tral,/5do  d'or.  l8),Ja7i  de  la  Valado  (titre  des  poésies  de  Victor  Bourrolly, 
Jan  de  Fourcada,  dans  les  Amours  de  Mountpeié ,  de  Rigaud  (  Obras, 
cQumple(ns  d'Aug.  et  de  C.  Rigaud  (Montpellier;  Virenque,  1845,  in-lî, 
p.  73),  Louinset  de  Rouinion,  dans  les  Bourgadieiro,  de  Bigot,  etc.  On  pour- 
rait citer,  à  Montpellier  même,  les  noms  courants  et  tout  à  fait  réels  de 
Louis  de  Seba,  Jan  de  Housset.  Jan  de  Magot,  etc. 

♦  Ancien  château  de  jilaisance  des  ducs  deCadagne;  lu  se  réunirent  les 
sept  premiers  felibres  :  MM,  RoumaniUe.  Mistral,  Aubanel.  Glaup  (dont 
les  poésies  ont  été  publiées  dans  le  recueil  Un  liame  de  rasin,  Avignon, 
RoumaniUe,  1865;  in-12),  Cpousillat,  Mathieu  et  Tavan. 


140  LE    PARAGE    A    MAGUBLONE 

Lons  socis  dau  Parage  s  atroboun  set  cops  l'an  dins  l'un  ou  l'autre  de 
sous  sel  rodou?  d'unimont,  qu(i  soun,  en  desjiarl  de  Moiint-peliè,  l'illa  de 
Magalouna,  lou  pioch  do  Sant-Loup,  la  Bauma  de  las  Doumaiselas,  lou 
pioch  de  Sanl-Clar,  à  Seta  ;  la  pineda  de  Mount-ferriè.  lou  bos  de  Pecha- 
bonn  e  la  barouniè  de  Lunel.  Bevoun  lou  vi  d'un  même  gol  <à  l'acoumen- 
çament  ou  à  la  fenicioiin  de  toutas  sas  sesiihas 

En  mai  de  sous  asempres  ourdinaris  e  cada  annada  que  ie  plai,  lous 
socis  qu'an  lou  gouver  tersenau  podoun  donna  de  joias.  Lou  gagnaire 
dau  pres-mage  causis  la  reina  de  la  Court  e  ten  de  sa  man  la  Qou  de  per- 
venca,  que  sera  dins  tout  tems  la  permieira  joia  dau  Parage  de  Mount- 
peliè  ! 

III.  Estent  que  la  parladura  mount-pelieirenca  es  clara,  franca  e 
naturala,  e  que  lavoulen  mantene  à  toujour  clara,  franca  e  naturala.clogus 
pot  se  seire  dins  lou  Parage,  se  noun  a  lou  ferme  perpaus  d'oscrieure 
mai  que  mai  la  parladura  de  Mount-peliè  e  de  n'acreisse  l'espandiraent  e 
la  fourtuna.  Parieirament  degus  se  pot  seire  dins  la  tioira  das  qua- 
ranta-nôu  socis  causits  en  fora  de  Mount-peliè,  se  noua  oscrieu  una  par- 
ladura que  retrague,  couma  una  sorre  reirais  sa  sorre,  la  parladura  dau 
Parage  de  .Mount-peliè. 

Dieu  mantengue  longa-mai  lou  Parage  de  Mount-peliè! 

On  voit,  par  le  préambule  de  ce  .^^tatut,  que  la  France,  et  natu- 
rellement la  langue  fi'ançaise,  gardent  dans  le  Parage  un  rôle  plus 
grand  quedans  les  autres  écoles  du  Félibrige.  La  raison  en  est,  à  la 
fois,  et  dans  ce  fait  que  le  Languedoc  fut,  de  toutes  les  provinces 
du  Midi,  celle  où  les  tiaditions  d'unité  linguistique  eurent  le  moins 
de  force,  et  surtout  dans  la  remarque,  déjà  faite  ailleurs  *,  que  la 
culture  parallèle  et  réfléchie  de  deux  langues  n'était  pas,  comme 
on  l'a  presque  toujours  cru,  une  source  de  corruption  pour  l'une 
et  pour  l'autre.  Celte  double  particularité  explique  qu'un  membre 
de  la  maintenance  d'Aquitaine,  M.  ie  docteur  Louis  Folie-Des- 
jardins,  ait  fait  agréer  les  poétiques  excuses  de  son  absence  par  des 
stances  françaises,  qu'une  regrettable  omis.'^ion  empêcha  seule  de 
lire  après  le  statut. 

En  voici  le  passage  principal: 

Seul,  le  temple  est  debout;  Dieu  seul  habite  ici; 

8eule,  l'ombre  de  Madeleine, 
Au  souvenir  des  pleurs  versés,  anime  ainsi 

Cette  solitude  lointaine. 

Vous  ne  pourrez   donc  pas,  Pontifes  d'autrefois. 
Sur  le  smiii  de  ce  temple  auguste, 

•  Ch.  de  Tourloulon  et  Octavien  Bringuier,  Ètade  sur  la  limite  géo- 
graphique de  la  langue  d'oc  et  de  Ui  langue  d'oil,  in  Archives  des  mission'i 
scietUifuiues,  iom.  III  do  hi  iroir^icme  série,  p.  586, 


LE    PARAGE    A    MVCtUELONE  III 

Mitres,  la  crosse  on  main,  précédés  de  la  croix. 
Teinte  à  jamais  du  sang  du  juste, 

Recevoir  votre  saint  et  zélé  successeur 

Et  lui  dire  la  bienvenue, 
Et  bénir  de  vos  mains  le  vénéré  pasteur 

Et  l'élite  avec  lui  venue. 

Pour  consacrer  au  pied  do  cet  antiqiio  autel 

La  poétique  renaissance 
De  notre  vieux  parler,  désormais  immortel 

En  Languedoc  comme  en  Provence  ! 

Poêles,  mes  amis,  sur  vos  fronts  inspirés, 

Quand  le  noble  évèque-félibre 
Aura  fait  de  sa  ipjain  les  signes  consacrés, 

Votre  génie,  en  son  vol  libre. 

Montera  vers  les  cior.x,  planera   sur  la  mer. 

Cherchant  la  belle  pécheresse 
Qui,  par  ses  pleurs  sans  fin,  son  repentir  amer 

Et  par  sa  pieuse  tendresse, 

Mérita  de  Jésus  le  pardon  généreux: 

Alors  sachez  que  ma  pensée 
Se  sera  vers  la  mer,  se  sera  vers  les  cieux. 

Avec  les  vôtres  élancée. 

La  parole  fut  alors  donnée  i)ar  leCapi.^colà  M.William-C.  Bona- 
parte-Wyse,  ou  piutôtà  M.  de  Villeiieuve-Esclapon.  car  le  petit-fils 
de  Lucien  Bonaparte,  atteint  depuis  dixaiis  d'une  aphonie  presque 
complète,  ne  pouvait  lire  lui-même  la  jiièce  qu'il  avait  composée  et 
qui  était  spécialement  réservée  à  la  séance  que  le  Parage  tenait  en 
son  honneur.  Cette  atîention  de  l'École  de  Montpellier  n'était  pas 
imméritée,  tant  s'en  faut:  nul  n'en  était  plus  digne  que  celui  à  qui 
l'on  doit  les  Parpaioun  hlu,  la  Cuheladm-o  d'or,  lou  Dimenche  dôu  mes 
de  mai  et  tant  d'autres  œuvres  marquées  d'un  caractère  si  varié,  si 
profondément  original  et  vivant.  On  a  dit  que  la  fécondité  était  in- 
séparaLile  du  véritable  génie.  M.  Bonaparte- Wysc  a  justiiié  cet 
axiome  par  la  publication,  à  partir  de  l'année  lSb8,  d'une  sérienon 
interrompue  de  pièces  écrites,  le  plus  souvent  en  ]iroveneal*et  en 

'  Li  Parpaioun  blu,  pouësio  prouvençalo,  em'  nn  Avans-Prepaus  de 
F.  Mistral.  Avignoun,  Oros,  1868;  in- 12. 

Chincho  Merlincho,  poërae  provençal  inédit,  de  Royer,  d'Avignon 
(XVllI'  siècle).  En  Balh  (.Vnglo-terro),  encô  de  G.  Lewis,  libraire-edi- 
tour.  carrière  dicho  «  Norlhgate  street  ♦,  12,  1871  (tiré  à  27  exemplaires). 

Galei ado  prouvenralo-ingleso  [tour  de  força  pantaiiruelistOi,  dedicado 
à  Jôusê  Boumaiiiho,  etc.  Londres,  Alfred  Robins,  1873;  in-8°. 


142  LE    PARAGE    A    MAGTJELONE 

anglais,  parfois  en  catalan,  en  français  et  en  langue  romane.  A  l'ex- 
ception de  Mistral,  la  très-grande  majorité  des  félibres  d'Aix,  d'Avi- 
gnon et  do  -Marseille,  s'est  attachée  à  suivre  les  précédents  autorisés 
par  la  poétique  française;  elle  n'a  pas  même  essayé  de  remettre  en 

Lou  Vin  di  felibre.  musico  deDau.  Avignoun.Roumanillp,  S.  D.,  in-4' 
(pièce  extraite  des  Parpaioun  hlu). 

1  félibre  d'Avignoun.  Avignon,  Gros,  1875;  ir:-h« 

L'Arc  de  sedo  doit,  chaîne  verd.  Tetligopolis,  à  l'Ensigno  di  Mirau,  1876; 
in-4''. 

A  MounsegneDubreil.  archcvesque  d' Avu/noun,  en  souveni  dôu  bautisme 
benaslra  de  moun  enfantoun.  Plytnoulh.  Keys  and  Son,  1876;  iu-4\ 

Lou  Cantico  de  santo  Estello,  dedica  au  felibrige,  musico  de  Dau.  Avi~ 
gnonn.  1876:  in-4'. 

La  Cabeladuro  d'or,  pouès'io  pronvençalo.  Mount-pelié.  Emprimarié  cen- 
tralo  dôu  Vliejour,  1876;  m  8°. 

Li  Vièi.  Montpellier,  imprimerie  centrale  du  Midi.  1876;  in-4''. 

La  Cansoun  capouliero  dnu  Felibrige,  si'guido  d'un  Brinde  pourta  lou 
jour  de  santo  Estello.  a-n-Avignoun.  Piymouth,  Keys,  1877;  in-8''. 

Sound  à  Teodor  Aubanel.  Piymouth,  Keys,  1877;  in-8o. 

Un  ditnenche  dnu  mes  de  mai.  Mount-pelié,  Empremarié  centralo  dnu 
Miejour,  1877;  in-8". 

Lou  Viage  di  très  rri,  musico  de  Dumount.  Avignoun,  Prévôt,  1878; 
in-40. 

Très  Rambiai  pruuvençau.  Mount-peliè.Empremarié  centralo  dou  Mie- 
jour, 1878;  in-8", 

Septentrioun.  .'.ntibo,  Marchand,  1878;  in-8  ,  etc. 

La  Familio  delà  Coumtesso.  Antibo,  Marchand,  1878,  in-8". 

Nombre  de  pièces  di'lachées  ont  été  données  par  M.  Bonaparte- Wyse, 
à  VArmana  prouvençau,  à  VArmana  de  Lengadô,  à  VAlmanach  du  Son- 
net, au  Prouvençau ^  à  la  Revue  des  langues  romanes,  etc.  Ses  œuvres 
anglaises,  dont  voici  la  liste,  se  rattachent,  par  plus  d'un  côté,  à  la  Pro- 
vence et  au  midi  de  la  bVance: 

Quatrains  of  Holy  Love.  Bath,  1864,  in-8o  (sans  nom  d'imprimeur). 

Scattered  Leaves.  Piymouth,  Keys,  1866;  in-8o,  310  pag. 

Traduccio  inglesa  de  la  «  Bala.d.\  de  (îataldn.v  »  de  V .  Ruiz  Aguilera. 
Bath,  Chas.  Clarke,  1868;  in-8o. 

The  Hoe,  an  ode.   Piymoulh,  Keys;  in-8o,  16  pag. 

Moans  of  a  nioribund,  or  Sick-bed  sonnets.  Bath.  Clark,  1869;  in-8o 
(trente-six  sonnets). 

The  Old  Fisherman  uf  Long-Rea.  Gahvay,  Daly,  1871. 

Limcrick  old   Toum.  Limerick,  1871;  in-4o. 

Translation  of  the  Triomphe  de  Pétrarque,  de  T.  Gauthier.  Piymouth. 
Keys,  1874;  in-4o. 

Epi.<ttle  to  Mistral.  Piymouth.  Keys,  in-4o. 

Tran.'ilatinn  of  the  Pan  dôu  peoat  of  Aubanel.  Piymouth,  Keys,  1860: 
in-8o  (les  trois  premiers  actes  seulement). 


LE   PARAGE    A    MAOTTELONr:  1^3 

honneur  les  formes  que  l'ancieiwie  langue  avait  le  plus  complètement 
légitimées,  le  monorimo  par  exemple;  M.  W.  Bonaparte-Wyse,  au 
contraire,  a  recherché  constamment  celles  qui  n'avaient  pas  été 
introduites  dans  le  courant  littéraire  du  Félibrige.  De  là  une  sorte 
de  saveur  particulière,  que  les  œuvres  de  bien  peu  de  poètes  pro- 
vençaux pourraient  présenter.  La  pensée,  toujours  vive,  abon- 
dante et  franche,  est  enfin,  dans  l'auteur  des  Parpaioun  Mu,  aussi 
originale  que  les  combinaisons  du  rhythme  et  de  la  versification. 
Mais  l'action  de  M.  Bonaparte-Wyse  ne  s'est  pas  exercée  seulement 
dans  le  domaine  de  la  poésie;  elle  a  aussi  influé  très-souvent  et 
très-fortement  sur  l'organisation  du  Félibrige,  sur  ses  manifestations 
extérieures,  sa  propagande  littéraire,  s'il  est  permis  d'ainsi  parler. 
Cette  habitude  de  boire  à  la  même  coupe  et  de  prononcer,  avant 
d'y  porter  ses  lèvres,  des  vers  à  la  louange  d'un  homme,  d'un  fait 
ou  d'un  sentiment  particulier,  par  laquelle  ont  été  si  poétique- 
ment transformés  les  banquets  méridionaux  ;  cette  habitude,  dis- 
je,  qui,  à  Avignon,  à  l'abri  des  voûtes  gothiques  de  la  chapelle  des 
Templiers  ,  après  la  Cansoun  de  la  Coupo  de  Mistral  ,  et  les  espé- 
rances mêlées  de  craintes  qui  s'agitent  sous  ses  strophes,  donne 
à  l'institution  provençale  quelque  chose  de  mystique  et  de  reli- 
gieux, c'est  à  M.  Bonaparte-Wyse  surtout  que  l'on  doit  de  l'avoir 
vue  se  répandre  et  se  généraliser.  Chose  presque  complètement 
ignorée  sur  le  continent,  la  coupe  d'Avignon,  celle  que  la  Société, 
archéologique  de  Béziers  doit  à  M.  Bistagne  (de  Marseille),  celle 
dont  parle  le  statut  tiu  Parage,o\M  leur  équivalent  en  Angleterre  *  : 

•  M.  Maurice  Rivière  me  fait  conriailre  un  usage  dauphinois  qui,  s'il 
n'a  pa-  quelque  analogie  lointaine  avec  celui  qui  nous  occupe,  atteste 
au  moins  les  mœurs  patriarcales  et  les  habitudes  de  confraternité  des 
paysans  de  Saint-Maurice-de-l'Exil  (Isère)  en  1837: 

«  C'était  le  jour  où  l'on  pressait;  huit  à  dix  personnes  rangées  en  demi- 
cercle  devant  le  pressoir  attendaient  avec  impatience  que  le  vin  coulât 
clair. 

»  Tout  à  coup,  un  vieillard,  gai  et  joyeux,  prend  le  goubio  [verre  on 
gobelet)  en  fer-blanc,  remplit  de  vin  et,  avant  de  boire,  entonne  ce 
chant  : 

Je  se  in  gni  de  chardounetta  Je  sais  un  nid  de  chardonneret  — 

Que  tout  rempli  de  viùulelta,  qui  est  tout  rempli  de  violettes,—  de 

De  roumanuot  toutàrentour:  romarin  tout   à   l'entour  :  —    cama- 

Mou  camaradou,  i-f-a  tou  tour.      rade,  c'est  à  ton  tour. 

»  Le  vieillard  vide  le  verre,  le  remplit  de  nouveau,  le  vide  encore,  et 
reprend,  en  le  passant  à  son  voisin  .• 

N'é-je  po  fa  in  tré  d'ounétou,  N'ai-je  pas  fait  un  trait  d'hon- 

N'é-je  po  bian  vouidomou  vérou?  nète     homme],    —n'ai-je    pas 


IW  LE    PAR\CtE    a    MAGTTELOKK 

Dans  les  festins  d'apparat  de  la  municipalité  de  Londres,  celle-ci 
aune  coupe  qu'on  appelle  «  the  Loving  Cup  ».  c'est-à-dire  la  Coupe 
d'amour,  et  à  laquelle  les  convives  boivent  tour  à  tour  en  grande 
cérémonie.  Les  plus  importantes  municipalités  d'Angleterre  ont 
imité  celle  de  Londres.  Y  a-t-il  dans  cette  coutume, à  la  fois  bri- 
tannique et  provençale,  un  souvenir  confus  des  traditions  bardi- 
ques,  de  ce  Saint-Graal,àla  recherche  duquel  les  chevaliers  bretons 
el  français  consacrent  leur  existence  dans  les  gestes  du  moyen  âge  V' 

Lou  viqiiia  sans  dessi  desso  :  bien  vidé  mon  verre  ?  —  Le  voi'à 

Camaradou.  prend  lo  i  goubio.  sans    dessus  dessous: —  cama- 

rade, prends  le  verre. 

B  Et  chacun  de  chanter,  de  boire  et  de  passer  le  verre  à  son  camarade 
de  droite.  J'avais  huit  ans;  je  bus  et  je  chantai  comme  les  autres.  » 

'  Les  récits  populaires  sur  Arthur  et  les  traditions  légendaires  qui  ont 
servi  de  base  aux  romans  de  la  Table-Ronde  et  même  du  Saiut-Graal 
ne  sont  pas,  comme  on  le  croit  communément,  le  patrimoine  exclu  si! 
du  pays  de  Galles,  de  la  Bretagne  et  de  la  France  de  langue  d'oil  au 
moyen  âge;  ils  ont  certains  équivalents  en  Béarn,  en  Limousin,  en  Langue- 
doc et  en  Provence. Dans  ces  deux  dernières  provinces,  c'est  par  l'histoire 
miraculeuse  des  Saintes-Maries-de-la-Mer  que  !a  légende  du  Saint-Graal 
revêt  un  côté  provençal.  Selon  la  tradition  arlésienne,  les  premiers  apôtres 
de  la  Gaule  suivirent  le  Rhône  jusqu'à  Arles,  el  Joseph  d'Arimathie  pro- 
longea son  voyage  jusqu'en  Angleterre.  L'empereur  Valentinien  III,  re- 
connaissant de  trois  grandes  victoires  remportées  sur  les  barbares  par  l'ia- 
tercession  de  St  Martin,  envoya  à  l'église  de  Brives  de  riches  présents. 
Parmi  ceux-ci,  dit  une  vieUle  tradition  limousine  qui  m'est  signalée  par 
par  mon  confrère  et  ami  M.  l'abbé  J.  Roux,  était  le  vase  d'or,  orné  de 
pierreries,  que  Joseph  d'Arimathie  avait  prêté  â  Jésus-Christ,  le  soir  de  la 
cène,  et  qui  servit  à  l'institution  de  l'Eucharistie.  Le  roi  Arthur  est  connu 
dans  presque  toutes  les  parties  du  Midi;  mais  son  importance  mythologi- 
que est  bien  déchue.  Un  savant,  aujourd'hui  trop  décrié,  M.  A.  du  Mége,  si- 
gnala le  premier,  je  crois,  à  la  page  383  de  ses  Monuments  religieux  des 
Volces  Tectosages,  et  plus  tard  dans  le  tome  II  f  p.  354)  de  sa  Slalistique 
des  départements  pi/r^n*^en.s' (Toulouse,  1829),  la  tradition  landaise  qui  Ir 
concerne:  Un  joiu'  de  fête  solennelle,  au  iinlieu  de  la  messe,  Artus  fut 
averti  qu'un  sanglier  était  proche  de  l'église  Uien  ne  put  retenir  le  mo- 
narque, trop  amoureux  de  la  chasse;  il  saisit  un  épieu,  sortit,  et  depuis 
le  Ciel  l'a  condamné  à  chasser  éternellement  et  en  vain  dans  les  hautes 
régions  de  l'air. 

Un  récit  des  Contes  et  Proverbes  populaires  recueillis  en  Armagnac, 
p^r  .M.  Bladé  (Paris,  Franck.  1867):  lou  Rey  Artus.  a  confirmé  les  in- 
dications de  Du  Mége,  en  les  dégageant  de  quelques  embellissements 
imaginés  par  celui-ci.  Les  prises  de  chasse  d'Artus  ne  vont  pas  à  grand 
profit:  (iaho  pas,  dit  M.  Bladé,  qu'un  moasco  cado  sept  ans.  Encore 
arrive-t-il  souvent  que  ses  chiens  l'ont  mangée  avant  qu'il  aii  pu  la  saisir. 


LE    PARAGE    A    MAGUELONE  145 

C'est  ce  qu'il  sérail  difficile  de  déterminer;  quoi  qu'il  en  soit, 
c'est  à  la  félibrée  de  Cliàieauneiif-du-Pape,  qui  eut  lieu  en  1859, 
la  première  année  de  l'arrivée  de  M.  Bonaparte-Wyse  en  Pro- 
vence; c'est,  enGn,  à  la  fête  de  trois  jours  de  Font-Ségugne,  que 
Mistral  a  poétiquement  appelé  «  un  charme,  un  paradis  sur  terre*». 
et  qui  fut  donnée  le  30  mai  1867,  par  l'autour  des  Parpaioun  blu,  à 
trente  poëtes  provençaux  ou  catalans,  parmi  lesquels  se  trouvaientD. 
Victor  Balaguer,  D.  Louis  C  itchet,  D,  Ascensiô  de  Aicantara,  que 
s'accomplit  la  transformation  si  heureuse  de  nos  anciens  toasts  '. 
Le  petit  château  de  Font-Segugne  vit  ainsi,  sous  l'inspiration 
directe  du  petit-fils  du  prince  Lucien-Bonaparte,  le  commencement 
des  félibrées  internationales-'.  Là.  pour  la  première  fois,  les  mets  et 
les  vins  furent,  exclusivement  de  Provence;  là,  celui  de  Chàteau- 
neuf-du-Pape  reçut  de  l'auteur  des  Parpaioun  blu  le  titre  de  vin  des 
félibres,de  vin  imperiau.  reiau  e  pounteficau,  comme  a  dit  jMistral,  et 
il  fut  décidé  qu'il  serait  réservé  aux  réunions  annuelles  de  la  nou- 
velle association.  Là  encore  et  pour  la  première  fois,  les  murs  de 
la  salle  furent  ornés  d'inscriptions  prises  dans  les  vers  des  trou- 
badours et  des  félibres;  à  l'occasion  de  cette   fête,  M.  Bonaparte- 

Antérieurement  à  M.  Bladé,  un  poète  béarnais,  M.  Alexis  Peyret,  avait 
composé  la  Casse  deu  rey  Arthus  (  Bayonne,  veuve  Lamaignère,  1851  i. 
récit  de  torme  littéraire,  qu'il  a  réimprimé  eu  1870,  à  C!onception-de- 
rUruguay  (  Amérique  méridionale),  dans  son  recueil  de  Counles  biarnén. 

Les  allusions  des  troubadours  à  des  poèmes  en  ancien  provençal  sur 
Arthur,  Erec  et  Enide,  Dovon,  Merlin,  Tristan  et  Yseult,  etc.,  sont  très- 
uombreuses,  comme  l'on  peut  s'en  assurer  en  lisant  l'essai  de  catalogue 
qu'en  a  fait  Fauriel,  au  tome  III,  page  472,  de  son  Histoire  de  la  poésie 
provençale.  De  nos  romans  de  la  Tablo-Ronde,  il  n.'ste  aujourd'hui  seu- 
lement celui  de  Jaufre,  dans  le  préambule  duquel  il  est  question  de 
Pierre  II  d'Aragon,  ie  même  qui  fut  tué  à  Muret  en  lîl;j. 

Selon  l'abbé  Béionie  Dictionnaire  du  patois  du  bas  Limousin),  grial  et 
yrialo  désignent  encore,  en  Limousin,  un  vase,  un  vaisseau  de  terre  de 
ûgure  ronde,  qui  va  toujours  s'élargissant  par  en  haut.  Cf.  grasal. 
grazal  et  grazas,  dans  la  langue  des  troubadours,  et  gresau,  dans  ie  pro- 
vençal moderne. 

1  Dans  la  préface  des  Parpaioun  blu,  pag.  xxvm. 

*  Au  mois  d'août  suivant,  au  banquet  où  parut  pour  la  première  fois 
la  coupe  que  les  poëtes  catalans  avaient  donnée  aux  félibres  provençaux, 
en  souvenir  de  leur  hospitalité  envers  M.  Balaguer  exilé,  fiU  introduite, 
probablement  à  linstigation  de  M.  Bonaparte-Wyse,  l'habitude  de  boire 
à  la  «  coupe  d'amnur.  » 

■'  Avec  Mistral,  Roumioux  et  le  savant  philologue  tt  romaniste  Paul 
Meyer,  il  avait  été,  en  1865,  le  premier  a  renouer,  en  Catalogne  même, 
le  lieu  de  l'ancienne  fraternité  catalane  et  provençale. 


146  I.K    PARAGE    A    MAGUELOME 

Wyse  avait  fait  broder  sur  une  bannière  de  soie  la  grande  devise 
adoptée  depuis  par  l'école  des  félibres  nimois.  ce  vers  de  la  Venus 
d^Arle,  d'Aubanel  : 

Luse  tout  ço  qu'es  bèu  tout  co  qu'es  laid  s'escounde  ! 

Bien  avant  que  [' Aube provetiçale  l'adoptât  «  sans  reconnaissance 
de  cause  »,  comme  on  l'a  dit  un  peu  méchamment,  mais  fort  spiri- 
tuellement, il  avait  noté  la  coïncidence  du  nom  de  la  pervenche 
{prouvenca,  pervenca,  prouvençala),  cet  emblème  de  la  persévérance  et 
des  amours  chastes,  avec  celle  de  la  Provence,  et  il  avait  donné  cette 
plante  comme  symbole  au  félihrige.  C'est  M ,  Bonaparte- Wyse 
qui  voyait  dans  sainte  Estelle  ',  vierge  et  martyre,  vers  l'an  98  de 
l'ère  chrétienne  et  patronne  de  l'association  avignonaise  depuis  son 
institution,  l'étoile  de  bon  augure  des  Mages,  celle  des  princes  des 
Baux,  l'étoile  félibrique  par  excellence^.  C'est  lui  qui,  acceptant  et  dé- 
veloppant cette  théorie  de  VErapèri  dôusoulèu^  qui,  aujourd'hui,  tend 
à  se  confondre  avec  les  idées  de  confédération  latine,  suggérait  à 
Mistral  sa  devise  :  Lou  soulèu  me/ai  canta.  C'est  encore  lui  qui,  lors- 
que les  fameux  vers  do  la  CounUesso  devenaient,  non  en  Provence, 
mais  dans  le  nord  delà  France,  et  surtoutà  Paris,  où  l'ignorance  des 
choses  méridionales  est.  dans  le  plus  grand  nombre,  doublée  par  l'é- 
loignement  et  l'absence  de  tout  contact  avec  les  félibres,  le  prétexte 
de  chimériques  craintes  de  séparatisme,  répondait  à  celles-ci  dans 
la  pièce:  Coume  la  lisco  armaduro  lampejo  au  soulèu  de  Dieu,  et  expli- 
quait par  la  haine  de  la  centralisation  l'appel  ardent  du  poète  de 
Maillane. 

Cette  action  si  vive,  si  continue,  n'est  pas  entretenue  seulement 
par  de  fréquentes  publications  :  presque  tous  les  ans,  l'auteur  des 
Parpaioun  hlu  quitte  ses  domaines  de  Waterford  ou  sa  maison  de 
Plymouth,  et  vient  passer  quelques  mois  sur  le  continent,  afin  d'en 
connaître  les  hommes,  afin  d'étudier  directemenL  et  par  lui-même 
la  poésie  qui  se  dégage  des  ruines,  des  accidents  du  sol.  des  eaux  et 
des  montagnes.  C'est  ainsi  (ju'il  a  visité  une  parliede  la  France,  de 
l'Espagne  et.  en  1868,  les  bords  du  Rhin,  la  Suisse  et  l'Italie  du  Nord, 
depuis  Cologne  jusqu'à  Venise.  Cette  fois,  il  avait  magnifiquement 
personnifié,  dans  le  i?ow?w>!w  de  sa  poésie,  les  inclinations  quil'ame- 

»  Voyez  l'histoire  de  sainte  Eutrope  de  Saintes,  à  laquelle  la  sienne  se 
relie.  C'est  à  tort  que  l'existence  de  sainte  Estelle  a  été  mise  en  doute. 

2  Quoique  ce  détail  ait  peu  d'importance,  il  faut  remarquer  que  la  per- 
sonnification ailée  de  la  Sainte  Estelle  dans  les  premiers  numéros  du 
Dominique,  ionvnn\  provençal  de  Nîmes,  est  imitée  de  la  lithographie  qui 
est  en  lète  du  Cantico  de  Sanlu  Estello  de  M.  Bonaparte- Wyse. 


LE    PARACiE    A    MAGUELONE  147 

naient  en  Provence;  car  c'était  «n  efTet  pour  elle,  c'était  pour  la  fête 
du  Parage  et  pour  celle  à  laquelle  la  Chanson  du  Latin  donnera  lieu, 
au  mois  de  mai  1878  *,  qu'il  avait  quitté  cette  terre  d'Angleterre  où, 
comme  il  le  disait  si  bien,  «  l'ordre  suprême,  la  haute  liberté,  avec 
la  saj^e  paix  et  le  droit,  portent  toujours  la  couronne.  » 

UN  OMB  :     Batènt  la  lerro  emé  toiiii  fort  bourdoun. 
M  courrènt  léu,  pèr  vilo,  pèr  campngno. 
Bon  pel'^rin  !  ouute  vas*?...  Ti  visioun 
Soun  plen  do  voie  o  franc  de  tnalamagno: 
Digo,  ourite  vas? 
Lou  jcur  t'ai  vist  amount,  i  galis  di  mountagno, 
O  segui??ènt  de  flnme,  o  frustant  de  baragno  ; 
T'ai  rescounlra  la  niue  au  mitan  di  eamui  ; 
Ounte  vas  7  digo  donne:  ountevas,o  blouudm, 
O  brave  barrulaire? 

Lou  RoDMiÉci:  Te  lou  dirai,  moun  ome,  francamen  : 
Voie,  ra'abrive,  à  travès  oundo  e  colo. 
Goume  un  veissèu  esperouna  dou  vent, 
Goutne  l'aucèu  que  s'abrivo  e  que  volo 
Au  souleias  : 
Sens  lassige,  m'en  vau  à  la  lerro  adourado. 
Que  tendramen  me  clialo,  e  me  plais  e  m'agrado  ; 
Au  paradis  plasènt  de  mountagno  e  de  mar. 
Qu'eila  se  pavounejo  entre  Durènço  c  Var, 
E  qu'âme  en  calignaire. 

L'oME  :    O  que  sies  tu  bèn  avisa,  Roumiéu  ! 

Mai  conto  donne,  que  flamejanto  estello. 
Que  ventoulet  perfuma  dôu  Bon  Dieu, 
T'a  fach  ama  tant  la  terro  tant  bcllo 
De  noste  amour? 
Que,  pèr  la  vèire,  ansindo  as  de-snbran  Jeissado 
Ta  calanco  verdalo  is  «  Tsclo  Fourtunado  », 
Ounte  l'Ordre  suprême,  ount  l'auto  Libéria, 
Emé  la  siavo  Pas  e  lou  Dre  bèn-astra, 

Porton  sèmpre  la  courouno  ? 

Qu'es  donne  l'amorço  '  iéu  lou  sabe,  bessai!  ) 

Que  le  pivello  e  te  fai  tant  linguelo; 

Que  risonlel  nous  ccrques  mai-que-mai. 

Quand  venon  Pasco,  emé  ti  dindouleto  , 
Emai  li  flour'.' 
De  segur,  quauco  vierge  o  dono  subre-bello, 
De  soun  nis  escoundu  le  counvido  e  t'apello 

'  Sauf  quelques  notes,  celle  relation  a  été  rédigée  avant  la  célébration 
des  Fêtes  latines. 


143  LE    PARAGB    A    MAGUELONE 

A  si  bras  blanc  dubert,  que  voles,  abrama, 
Goume  lou  pariiaioun  à  l'ile  jirefuma, 
Pèr  béure  si  poutouno. 

Lof  RoiiMiKtj  :  O,  parles  bèn,  courapaireamisladous  ! 
Te  parlarai  perèu  sônso  inchaiènço  ; 
S'ansin  m'en  vau  à  toun  païs  lanl  dous, 
S'ansia  m'envole  à  ma  Dono,  Prouvènço. 
Cencho  de  rai, 
Es  que  vese  lou  lum  d'uno  grando  Idealo, 
Esbarluganlo,  ardènto,  ùudourouso,  inmourtalo. 
Que  se  pauso  e  s'enauro  à  l'aubo.  aperalin, 
Subre  si  piano  roso  e  si  roucas  aurin, 

Counie  uno  esteilo  di  Mage  '.. . . 

Et  l'auteur  des  Paiyaioun  hlu  terminait  en  dédiant  son  poëme  au 
Parage,  à  qui  il  voulait  bien^promettre,  dans  les  vers  d'un  mandadis 
trop  flatteur,  un  delubre  de  glbri  (un  déluge  de  gloire  ). 

L'originalité  de  cette  poésie  n'aida  que  mieux  à  saisir  la  discrète 
et  spirituelle  émotion  des  vers  suivants,  où  M.  Antonin  Glaize,  jus- 
que-là plus  familier  du  provençal  que  du  languedocien,  fît  l'éloge 
et  en  même  temps  la  satire  du  Lez,  petite  rivière  qui  coule  aux 
environs  de  Montpellier: 

Paure  Lez!  sies  pas  fier,  nimai  grand,  nimal  long  : 
Valal  per  la  milat  e  canau  perd  lou  resta. 
Tant  ben,  quand  lou  gusàs  bèu  trop, perd  lèu  la  testa, 
Secoulla  en  un  cop  d'iol  e  creva  coume  un  tron. 
D'aquel  Hume  estequit  e  michant.  n'i'a  per  rire, 
Pecairo  !  Mais  pamens,  canau  couma  valat, 
Embé  tout  soun  bauchun  l'aime  qu'es  pas  de  dire: 
Sufis  que  sus  sous  bords,  que  se  vire  ou  revire, 
Dau  grau  ounte  se  perd  au  cros  ounte  a  gisclat, 
S'entend  que  lou  parla  que  mous  viels  an  parlai  -. 

M.  de  Berluc-Perussis  se  leva  alors  et  lut  un  sonnet  provençal 
qui  est  un  des  plus  parfaits  qu'il  ait'composés^  .  Il  avait  pour  titre 
/  Latin  d'Avieriœ  et  était  dédié  à  un  député  au  Parlement  canadien, 
M.  Louis-H.  Fréchette,  de  Lévis,  que  l'on  a  surnommé  le  poëte 
français;  quelques-uns  ont  même  été  jusqu'à  dire,  et  non  sans  une 

'  Le  Roumieu  dou  Souléuâ  été  reproduit  en  entie:  dans  le  Prouvençau, 
n"  du  2ô  novembre  1877. 

■^  Nous  avons  retrouvé  les  vers  do  M.  Glaize  dans,  le  premier  numéro 
de  l'Alliance  latine.  Montpellier,  Boehm,  1878,  p.  54. 

^  Ce  sonnet  a  été  publié  dans  la  Revue  des  langues  romanes,  n*  du 
15  avril  1878,  p.  196. 


LE    PARAGE    A    MAGUELONE  U'J 

sorte  de  raison,  le  grand  poëte  français  de  l'Amérique  du  Nord  *. 
Après  les  paroles  du  statut,  l'accueil  fait  au  sonnet  do  M.  de 
Berlue,  la  faveur  que  rencontra  l'hommage  qu'il  y  rendait  au  Ca- 
nada, «ce  rameau  fier  et  fécond  du  vieil  arbre  de  France»,  ne  con- 
tri])ua  pas  peu  à  affirmer  les  sentiments  du  Tarage  à  l'égard  de 
l'idée  latine  et  de  l'avenir  qui  lui  est  réservé.  La  réunion  en  vit 
comme  un  présage  anticipé  dans  les  magnifiques  tercets  qui  termi- 
nent le  sonnet  de  M.  de  Berlue  : 

*  M.  Louis-H.  Fréchette  est  l'auteur  du  recueil  Pi^le-Méle,  fantaisie  et 
souvenirs  poétiques.  Montréal,  Compagnie  d'impression  et  de  publicatioa , 
Lovell,  1877;  in-12,  274  pages. 

Des  vers  comme  ceux  que  nous  allons  transcrire  ne  sont  pas  faits 
pour  démentir  les  appréciations  de  la  critique.  Ils  sont  consacrés  à  honorer 
la  mémoire  de  Papineau.  qui,  l'espace  de  quarante  années,  se  constitua 
le  défenseur  des  droits  du  Canada  : 

Seul  de  ces  temps  féconds  en  dévoiiment  épique  ; 
Seul  de  tous  ces  grands  cœurs  à  la  trempe  olympique, 
Qui  défendaient  jadis  notre  droit  menacé, 
Sur  notre  âge  imprimant  sa  gigantesque  empreinte, 
Il  restait  là,  debout,  dans  sa  majesté  sainte. 
Comme  un  monument  du  passé  ! 

Le;  ans  n'avaient  pas  pu  courber  son  front  superbe  ; 
Et,  comme  un  moissonneur  appuyé  sur  sa  gerbe 
Regarde,  fatigué,  l'ombre  du  soir  venir, 
Calme,  il  .se  reposait,  laissant,  vaincu  stoïque, 
Son  œil,  encor  baigné  de  lueur  héroïque, 
Plonger  serein  dans  l'avenir. 

Aux  bruits  de  notre  époque  il  fecmait  sa  grande  âme  ; 
Et,  sourd  aux  vains  projets  dont  notre  orgueil  s'enflamme,. 
Avec  ses  souvenirs  de  gloire  et  de  douleurs. 
Il  vivait  seul,  laissant  ses  mains  octogénaires, 
Qui  des  forums  jadis  remuaient  les  tonnerres, 
Vieillir  en  cultivant  des  fleurs! 

Sa  voix,  sa  grande  voix,  aux  sublimes  colères; 
Sa  voix  qui  déchaînait  sur  les  flots  populaires 
Tant  de  sarcasme  amer  et  d'éclats  triomphants; 
Sa  voix  qui,  des  tyrans  déconcertant  l'audace, 
Quarante  ans  proclama  les  droits  de  notre  race. 
Enseignait  les  petits  enfants. 
Nous  n'aurions  pas  dérogé  aux  habitudes  de  la  Revue,  si  la  littérature 
du  Canada  n'était  malheureusement  très-peu  connue  en  France,  à  l'heure 
qu'il  est.  Nous  ne  sommes,  du  reste,  que   trop  coutumiers  de   pareilles 
ignorances. 

lu 


150  LE    PARAOfcl    A    MAGUELONfci 

Que  fan,  de  milo  lego,  e  la  mar  e  li  tlame, 
S'ess  lou  même  soulèu  que  uous  largo  souu  lume, 
Se  dius  la  mémo  fe  li  pies  balon  d'acord  ? 

D'enterin  que  iou  sang  au  viei  mounde  se  verso  ', 
Rejougnen  nôsli  man  per  dessubre  lis  erso  : 
La  soulo  vesinanço  es  aquelo  di  cor. 

Après  M.  de  Berluc-Perussis,  M.  Camille  Laforgue  fit  entendre 
sa  Magalouno,  pièce  écrite  dans  le  languedocien  en  usage  aux  en- 
virons de  Quarante,  petite  ville  située  au-dessus  de  Béziers,  non 
loin  de  l'ancien  étang  de  Capestang.  On  applaudit  surtout,  dans 
cette  ode,  la  strophe  où  l'auteur  dépeint  le  bouvier  qui,  insoucieux 
des  souvenirs  iiistoriques  et  des  vicissitudes  du  passé,  enfonce  hardi- 
ment le  couteau  de  sa  charrue  dans  le  sol  oii  repose  depuis  long- 
temps «  un  peuple  de  vaillants  et  de  race  choisie  »  : 

Sus  un  sol  dezoulat,  batul  per  la  tempesto, 
Ount  lou  flot  de  la  mar  s'espandls  sens  counlesto, 
Ount  l'ange  de  malur  passeget  soun  Uambèu, 
Un  temple  es  drech  encaro,  e  joust  la  terro  humido 
Un  pople  de  vaients  e  de  rasso  cauzido 
Dourmis  dins  soun  toumbèu . 

Lou  baral  a  fait  plassoà  Terbo  verdejanto; 
Lou  bouier,  jusqu'as  peds  de  la  demoro  santo, 
Ignourant  dal  passât  de  souvenls  claufit, 
Enfounso  dins  lou  sol  lou  coutel  de  l'araire. 
E,  davant  un  débris  que  rend  lier  l'antiquaire, 
Susprés,  s'arresto  estabouzit. 

Res  noun  remembre,  vei,  la  renouniado  anliquo 
Dal  grand  port  sarrazin;  la  vielho  bazeliquo 
Nous  dis  soulo  so  qu'ero  aquel  Hoc  agradiéu, 
Car  tout  es  arrazal  :  pas  un  pan  de  muralho  ! 
Tout  es  passât  arrèu.  joust  la  dent  de  'a  daiho, 
A  part  lou  bel  houstal  de  Dieu. 

Mais,  tandis  que  \dL  Magalouno  de  M.  Laforgue  s'inspirait  presque 
exclusivement  de  la  ville  détruite,  celle  de  M.  Charles  Gros  tem- 
pérait la  tristesse  de  ce  souvenir,  en  le  mêlant  à  la  joie  des  félibres 
réunis  pour  la  première  fois  sous  l'abri  des  murailles  garnies  de 
lierre  de  la  vieille  basilique  romane  : 

Et  lou  sourelhet,  de  lous  veire,  ris  : 

1  On  était  alors  au  plus  fort  de  la  guerre  entre  les  Turcs  et  les 
Russes,  qu'un  peuple  de  langue  latine,  la  Houmanie,  venait  de  sauver 
de  très-grands  désastres  devaul  Plewna. 


LE    PARAGE    A    MAGUELONE  151 

disait-il  d'eux  dans  un  vers  digne  d'avoir  été  écrit  par  un  de  ces 
troubadours  qui,  en  opposition  à  la  mélancolie  des  temps  de  dé- 
cadence et  de  scepticisme,  cette  impuissance  dévie  et  d'amour, 
cette  solitude  égoïste  de  l'âme  s'agitant  sur  elle-même  dans  le 
vide',  firent  de  la  joie  l'état  naturel  de  l'homme,  et  surtout  de 
celui  qui  devait  trouver  : 

Dedins  tas  parets,  quel'èure  envirouna, 
Lous  troubaires  gais  se  soun  reûnits, 

Bella  Magalouna! 
Soun  cor  prouvençau  de  joia  frissouna 
Et  iou  sourelhet,  de  lous  veire.  ris. 
Dedinstas  parets.  que  l'èure  envirouna, 
Lous  troubaires  gais  venoun  fa  soun  nis. 

Lous  roussinholets  d'aquella  nisada. 
Tant  lèu  espelis,  pieutaran  vers  Dieu; 

Pioi,  bella  raainada. 
Prendran  soun  voular  de  long  de  la  prada, 
Tout  en  brezilhant  un  dous  rieu-chieu-chieu  î 
l,ous  roussinholets  d'aquella  nizada, 
Tant  lèu  espelis.  pieutaran  vers  Dieu. 

Ben  lion  auziran  sa  douça  harmounia 
Coumoula  d'unioun,  coumoula  d'amour. 

Fer  nosta  patrîa. 
Ravits  de  soun  cant,  la  nobla  familha 
S'agrandira  plan-plari  do  jour  en  jour. 
Ben  lion  auziran  sa  linda  harmounia. 
Coumoula  d'unioun,  coumoula  d'amour. 

Revendran  encar  mètre  una  couronna 
Dessus  toun  clapàs  toumbat  per  Iou  tems, 

Paura  Magalouna  ! 
Jouta  Iou  voulam  qu'à-de-re  maissouna, 
Nautres  coiima  tus  tant  ben  fenirem; 
Revendrera  avans  mètre  una  courouna 
Dessus  toun  clapàs  toumbat  per  iou  tems  '  '. 

M.  Cavallier  donna  ensuite  la  parole  à  M.  A.  Roque-Ferrier, 
pour  la  lecture  de  diverses  scènes  extraites  d'une  œuvre  dramati- 
que en  languedocien  :  l'Auhrede  la  fristessia  galoisa.  Versentmiric. 

De   toutes  les  figures  historiques  de  l'époque    gauloise,  Vercin- 

*  Je  n'emprunte  ces  paroles  à  M.  Henri  Martin,  Hisloirp  de  France, 
t.  LU,  p.  379,  4'  édition,  1855,  que  par  l'espèce  d'â-propos  que  leur  donne 
le  statut  du  Par  âge. 

2  Cette  pièce,  reproduite  en  partie  dans  le  Messager  du  Midi  (no  du 
24  novembre  1877),  en  totalité  dans  le  Petit  Midi  (no  du  25  novembre)  de 


15?  LE   PARAGE   A    MAGUELONE 

^étorix  a  été  la  plus  maltraitée  par  les  poètes  des  trois  derniers  siè- 
cles. Presque  tous  ceux  qui  se  sont  emparés  d'elle,  et  le  nombre  en 
est  grand,  l'ont  mêlée  à  des  intrigues  amoureuses  aussi  déplacées 
que  celles  qui  s'agitent  autour  des  héros  de  l'ancienne  Grèce 
ou  de  Rome,  dans  les  tragédies  des  contemporains  de  Racine  et  de 
Voltaire  ^  U Arbre  de  la  tristesse  gauloise  est  connu  d'après  un  ordre 
d'idées  contraire.  Combinantles  récits  des  histoiiens  grecs  et  latins, 
les  coutumes,  les  superstitions  et  les  formules  populaires,  plus  an- 
ciennes qu'on  ne  croit,  de  notre  pays;  mettant  enûn  à  profit,  dans 
ce  qu'elles  n'ont  pas  d'inconciliable  avec  les  témoignages  de  l'anti- 
quité, les  traditions  et  les  chants  de  la  Bretagne,  M.  Roque-Ferrier 
a  essayé  de  reconstituer  dans  un  ensemble  dramatique  les  traits 
principaux  de  la  grande  lutte  qui,  un  siècle  avant  l'ère  chrétieime, 
s'engagea  entre  les  Gaulois  (Galois)  et  \es  Roma.ins  (Eoumieus)  ^ . 
Son  drame  commence  avec  la  révolte  de  Gergovie  et  se  termine  à 
la  mort  du  fils  de  Geltil,  dans  le  cachot  de  la  prison  Mamertine  à 
Rome.  Il  comporte  des  développements  de  dialogue  hors  de  pro- 
portion avec  les  habitudes  trop  écourtées  du  théâtre  actuel  et  compte 
environ  cinquante  branches  ou  scènes,  dont  quelques-unes  :  lou 
Message  de  César,  Versentauric  e  César,  lou  Counsel  de  l'uniment,  la 
Mort,  ne  sont  pas  loin  d'être  de  véritables  actes. 

Montpellier,  a  été  imprimée  à  pan  par  M.  Gros;  Montpellier.,  Boehm,  in-4o, 
4  pages,  fig.  de  Marsal.  La  notation  musicale  en  est  due  à  M  Ed.  Bè- 
rard  ;   elle  est  d'un  caractère  très-remarquable. 

'  Henri  Martin  lui-même  n'y  a  pas  manqué  dans  son  drame  de  Ver- 
cingétorix;  Paris,  Furne.  1865,  in-8.  C'est,  du  reste,  une  œuvre  estima- 
ble à  d'autres  égards. 

2  Le  mol  vulgaire  et  gallicisé  de  Roumen  {Es  un  traval  de  Roumen, 
dit  la  comparaison  populaire),  sa  forme  plus  pure  et  plus  littéraire  de 
Rouman,  ne  semblent  pas  exclure  celle  de  fioumjeu,  roumiva,  qui,  indé- 
pendamment de  son  accoption  courante  de  pèlerin  ou  pèlerine  allant  à 
Rome,  est  la  qualification  que  l'on  donne  à  presque  toutes  les  voies  ro- 
maines du  Languedoc  cl  de  la  Provence:  entre  Arboras  et  Monlpeyroux, 
le  chemin  qui  conduisait  autrefois  vers  le  pays  des  Ruthènes  est  dé- 
nommé Costa  roumiva  par  les  gens  du  pays.  La  ville  d'Apt  a  son  camin 
roumieu  (  luu  Prouvençau,  n"  du  16  septembre  1877:  rapport  de  M.  Frizet 
aux  Jeux  floraux  aplésions):  «  La  grande  voie  romaine  de  communica- 
tion entre  l'Aquitaine  et  la  Tarraconaise  est  devenue  plus  tard  le  cami 
roumm  (  chemin  romain)  des  pèlerins  de  Saint-Jacq::es-(1e-Compostelle, 
dit  M.  de  Rochas,  les  Parias  de  France  et  d'Espagne  {Bulletin  de  la 
Société  de  Pau,  ï'  série,  t.  V,  p.  71  ).  Au  delà  de  Lavérune,  près  Montpel- 
lier, selon  Renaud  de  Wilback  (  Voyages  dans  les  départ,  formés  de 
l'ancienne  prov.  de  Languedoc  ;  Paris,  1825,  in-S»,  p   365),  «  on  trouve  la 


LE    PARA(iE    A    MAfiUKLONH  153 

Lou  Devoument  *,  la  première  des  deux  branches  lues  par  M.  Ho- 
que-Ferrier,  montrait  le  héros  gaulois  rentrant  vaincu  dans  les 
murs  d'Alesia,  le  soir  de  la  dernière  bataille,  et  s'offrant  aux  ar- 
mées arvernes  pour  apaiser,  morl  ou  vivant,  la  colère  de  César. 
Dans /a  Despartida,  Vercingétorix,  prêt  à  partir  ])Our  le  camp  ro- 
main, écoute  les  paroles  d'adieu  de  ses  compagnons  d'armes,  qui 
désespèrent  déjà  de  la  liberté  et  des  franchises  gauloises  ;  il  refuse 
le  sacriûce  de  ses  dévoués,  venus  en  troupes  au-devant  de  lui,  alin 
de  partager  sa  captivité  et  sa  mort  ;  celui  de  son  barde,  à  qui  les 
désastres  de  la  Gaule  ont  enlevé  la  raison,  et  jiart  seul  pour  se 
livrer  à  César  -. 

Quelques  citations  de  cette  u-uvre  ne  seront  peut-être  pas  inutiles. 
Dans  la  première,  les  Gaulois  oxiirimentle  regret  de  n'avoir  i)as 
plus  complètement  suivi  les  conseils  de  leur  jeune  chef: 

Loui  Galoises  :  Ome  fort,  discoureire  sage,  ô  barri  de  l'est  auvernenc,  per 
courri  dinslou  coumbat,  toun  arma  aviè  couma  de  vêlas:  esperava  pas 
jamai  la  clamada  de  Bel  ;  ieu,  la  mieuna  es  flaca,  flaca  coume  l'ajounc 
que  lou  dalhaire  a  segal. 

Versentauric  :  Ere  pas  fort,  ère  pas  drue,  pioi  que  lou  César  l*a  tourn- 


trace  de  deux  voies  romaines  presque  parallèles  :  l'une  vulgairement 
appelée  chemin  de  la  reine  Juliette  . . .  Celte  voie  est  appelée,  dans  le 
vieux  compois,  le  clieml)i  romieux vieux;  l'aulte,  jikis  nouvelle,  s'appelle 
encore  lou  cami  roumiou  »  On  ht  dans  un  oj)U3culo  fort  intéressant  : 
Études  historiques  sur  la  ville  de  Florensac,  par  M.  Donnadieu  (Paris, 
Jouaust,  1877,  p.  3!):  «  Le  compois  de  Florensac  de  1G56  et  ceux  de  plu- 
sieurs communes  du  canton,  qui  ne  doivent  être  que  la  copie  do  compois 
plus  anciens,  constatent  l'exisience  de  deux  chemins  paralli'Ies  de  con- 
struction romaine.  L'un  y  est  désigné  sous  le  nom  de  chemin  romain  nou- 
veau, vulgairement  appelé  ca7ni  roumieu,  et  l'autre  sous  celui  de  chemin 
romain  vieux,  ou  chemin  de  la  reine  Juliette. 

»  La  tradition  est  maette  ;ï  l'égard  de  l'origine  de  chemin  de  la  reine 
Jul  iette .  » 

Voyez  également  une  note  de  M.  Véran,  dans  une  Etude  sur  les  voies 
rom.  de  l'arrondis  d  Arles  {Congrès  archéol.  de  France,  XLIII'  session. 
Séances  tenues  à  Arles  en  18J'6,  p.  i95).  M.  de  V.  n'admet  qu'avec  une 
grande  timidité  la  signiiicalion  de  romain  attribuée  au  mol  roumieu. 

*  M.  RoumaniUe  publia  celle  scène,  Armana pr juvi'n{au âe  1870,  p.  99. 

2  Ces  lieux  branches  ont  été  imprimées  dans  le  Prouvençau  d'A.ix-en- 
Provence,  n°  du  23  décembre  1877,  ainsi  que  lou  Trebuna'  de  César,  qui 
les  suit.  Elles  sont  signées  du  pseudonyme  de  Clarens. 

10* 


154  LE    l'ARACiE    A    MAGUE1.0^E 

bat.  S'ai  pasfauial  dins  aquesle  mouncie,  ai  faulat  clins  un  autre,  e  ma 
michanta  piaaeta  t'a  malaslrat. 
Loui  Galoises  :  Si  qu'ères  fort  e  valent,  si  qu'ères  sage  e  drue,  si  qu'ères 
moun  barri  e  ma  j:ardia  bêla,  moun  sauver,  inoun  esper  e  moun  gou- 
ver  !  Se  sies  loutnbat  en  Alesi,  es  que  t'ai  mancat,  es  que  l'ai  pas  se- 
guit.  es  qu'ai  mespresat  tai  paraulas;  mais  aquelei  que  m'an  butai  ou 
pourlanui  pas  davans  Dis. 

Ici  ce  sonlses  dévoués  et  iinsuile  son  barde.  Véroduu,  qui  !e  veu- 
lent suivre  au  camp  romain  : 

VBRbENTAUu.u  :  De  qu'es  que  vos,  lus,  per  veire  ? 

Loin  DEvouATs:  Aicisoui,  fin  que  d'un,  per  te  seguir  en  quanle  rôdou  qiie 
te  menoun. 

Vbrsentadric  :  Ni  lus,  ni  degus  autre  me  seguirà. 

l.ODi  DEVOUATS:  Ah  be  ara  !  moun  paire  se  traguet  dins  lou  floc  que  cre- 
met  lou  lieu,  lou  jour  que  louis  enfants  de  Gergauvia  l'agaireroun  tant 
malameiil,  e  tus  vos  pas  que  te  rende  ioi  lou  même  servici?  Me  reman- 
des pasantau,  me  fagues  pas  aquel  afrount  davans  louis  osts  de  nosla 
terra  mairala.  Es  lou  coumandament  d'Euse  que  ieu,  loun  fraire,  par- 
tage ta  mort. 

Versentauric  :  Mait'ou  dise,  n'ou  vole  pas.  Se  jamai  i'aviè  un  Galois  que 
s'en  souvenguesse,  mourigue  davans  que  l'ou  reprouchà;  se  jamai  ne 
parlava  dins  un  milan,  vege  soun  ped  s'assecà  sus  lais  estradas  dau 
mounde  1  Tenes  lou  seramenl  que  fau  davans  louis  omes  qu'ausissoun 
ioi  moun  paraulis  gallic  ! 

Loui  DEVOUATS  :  Lou  maudigues  pas  ;  recorda-te  pus  lèu  ça  que  m'or- 
denoun  lai  drechuras  auvernas.  aqueiai  leis  sanlas  qu'as  praticai  tant 
ben  couma  ieu.  Soui  tieune  per  la  vida  amai  per  la  mort,  e  m'es  dever 
de  te  coumpanejar  en  tout,  doun  te  daissar  en  quanta  desfourtuna  que 
siegue.  Per  que  passariès  l'aiga  de  la  mort  sens  m'avedre  à  loun  cous- 
lat  dedins  aquel  viage?  De  ma  vida  vidanla,  revendriei  pas  d'un  cop 
coume  aquel  ! 

Versentauric.  Toun  devé  série  de  me  seguir,  e  lou  mieu  es  de  le  daissà. 
A-n-aqueste  moument,  Veraudun  sourtis  de  la  cola  dai  dévouais  : 

Veraijdun,  à.  Versentauric  :  ho\i  leioun  es  dins  la  doulou:  noun  i'eir- 
jarai,  mais,  me  sarrant  d'el,  canlarai  per  l'allegrir,  amai  siegue  triste  e 
mai  que  mai  triste.  Anarai  pas  en  ges  de  courts,  me  farai  pas  de  ges  de 
reis,  per  tant  d'ounou  que  ne  liresse,  alara  qu'ai  moun  soulàs  dins  moun 
prince,  moun  lum  première  majoia.  Davans  ieu  caminaran  loui  1res 
dôus  lou  jour  de  ta  mort;  quand  la  descarrada  le  vendra  prene,  me 
pendra,  ieu  atabé.  Las  1  Las  !  rei  venturious  e  manefique,  auriei  jamai 
pensai  aimar  un  orne  mai  que   tus   lou  tems  que  t'ai  servit'. 

*  Imité  de  Taliésin,  Dédommagement  à  Urien,  in  Bardes  bretons,  poèmes 
du  Vl"  siècle;  trad.  par  M.  de  lu  Villemarqué,  p.  433.  Ce  n'est  pas  la  seule 
imitation  que  nous  pourrions  signaler. 


LE    PARAGE    A    MAGUBLONE  155 

VBRSENTAimic:  Amai  tus,  encara  ! 

Veraudun:  Hobula  louis  Auvenu's,  loun  pople,  loui  fraires,  louis  amies; 
mais  mo  rebutes  pas  ieu,  lou  canlaire  de  tas  diadas  Irehoumfalas,  lou 
barde  de  tai  balalhas  roumivas;  as  chaplat  la  cadena  dai  pesés  que 
me  portoun;  as  benaslral  ma  vida  de  soun  coumençamcnt  à  sa  foni- 
cioun.  E  tant  beii  [a  dicli  Veraudun  que  la  mort  mema  dessapartiriè 
pas  Veraudun  de  VersentauricI 

VERSENTA0RIC  :  No,  HO,  to  vols  pas,  ni  eau  que  siegue  de  Galiia.  En- 
torna-te  dms  Gergauvia;  ma  maire,  que  lai  es  encara,  te  gardarà  tant 
que  vieurà  ! 

Veraudun  :  0]magistre  !  magistrc!'plourariè  trop,  ta  maire,  la  rcina  blanca 
couma   l'eli,  s'un  cop  me  ie  caliè  countà   tout  ça  que  l'es  avengut! 

Et  celte  réflexion  douloureuse  arrête  un  moment  le  roi  arverne. 
Quelques  instants  après  cependant,  il  l'envoie  àLuctèrele  (^adur- 
que  ;  et,  si  celui-ci  est  vainqueur,  il  charge  le  barde  de  venir  le  lui 
chanter  au-devant  de  la  porte  de  sa  prison  de  Rome. 

La  dernière  communication  devait  être  une  traduction  proven- 
çale du  Donecgratus  eram.  Ce  petit  clief-d'œuvre  de  la  poésie  anti- 
que, prol;ablement  enlevé  par  Horace  à  (juelqu'ua  des  lyriques  de 
la  Grèce,  avait  été  l'objet  d'une  sorte  de  tournoi  littéraire  entre 
M.  Lieutaud  et  M.  le  docteur  Adelphe  Espai^ne.  Le  savant  biblio- 
thécaire de  la  ville  de  Marseille  avait  imité  le  Donec  gratus  eram  en 
se  servant  du  dialecte  d'Avignon  et  des  bords  du  Rhône.  M.  Es- 
pagne, au  contraire,  s'était  astreint  à  !e  traduire  exactement  dans 
le  languedocien  des  environs  de  Montpellier.  Enfin,  tandis  quels 
premier  ne  s'écartait  pas  des  règles  de  la  poétique  courante,  le 
second  avait  introduit  dans  quelques-unes  de  ses  strophes  des  as- 
sonnances  semblables  à  celles  (l'uemploicnt  les  poëtes  catalans  : 

Quand  ère  de  tus  agradat. 
Que  ges  de  jouvent  préférât 
Toun  col  lis  o  blanc  abrassava, 
Mai  qu'un  rei  de  Persia  troumflave. 

La  pièce  de  M.  Lieutaud  fut  seule  communiquée.  E.i  l'absence 
de  l'auteur,  retenu  à  Marseille  par  ses  obligations  de  bibliothécaire, 
M.  le  comte  de  Ville neuve-Esclapon  voulut  bien  en  donner  lecture 
aux  membres  du  Parage  '. 
{A  suivre.) 

*  Les  deux  pièces  de  MM.  Espagne  et  Lieutaud  ont  paru  ensemble, 
Revue  des  langues  romanes,  n"  du  15  mars  1878,  p.  134. 


DISCOURS 

I'KON()N('K     PAR    M.     DE    gllNTANA  \   Cd.MBIS 
le  ^"i  mai  1H7S 

à  la  séance  solennelle  du  Concours  du   Chant  du  Latin 


Mesdames   et  Messieurs, 

En  un  jour  de  bonheur  pour  moi,  une  idée  grande  et  géné- 
reuse a  jailli  du  fond  de  mon  âme. 

L'étincelle  électrique  la  transmit  à  la  ville  de  Montpellier, 
l'Athènesdu  Midi,  la  terre  dusoleil,  lefojerde  l'enthousiasme, 
et  l'idée  a  grandi,  a  parcouru  le  monde  et  elle  est  allée  réveil- 
ler des  échos  sympathiques,  endormis  malheureusementdepuis 
de  longues  années. 

Tout  ce  qui  respire  autour  du  lac  latin,  berceau  de  la  patrie; 
sur  les  rives  de  l'Orient,  horizon  de  nos  rêves;  tout  ce  o^ui  vit 
au  delà  des  mers  profondes,  aurore  d'une  civilisation  nou- 
velle qui  nous  sourit  avec  espoir  ;  tous  les  pavs  qui  s'inspirent 
à  la  suave  mélodie  des  langues  romanes,  — langues  d'amour 
qui  font  battre  les  cœurs,  car  elles  redisent  la  gloire  du  passé 
et  seront  les  liens  de  l'avenir;  — tout  ce  qui  est  latin,  enfin,  a 
répondu  à  l'appel  de  la  noble  et  généreuse  ville. 

Salut,  peuples  du  midi  de  l'Europe,  si  longtemps  éprouvés 
parle  malheur!  Salut,  peuples  de  l'Orient,  d'où  nous  vien- 
nent chaque  matin  la  lumière  qui  nous  éclaire  et  la  chaleur 
qui  féconde  noire  sol,  mêlées  à  vos  regrets  et  à  vos  craintes  ! 
Salut,  peuples  de  l'Occident,  qui  nous  tend'^z  vos  bras  et  vos 
espérances  comme  l'enfant  éloigné  de  son  berceau  !  Salut,  ô 
vous  tous  qui  avez  répondu  à  l'appel  et  qui  venez  aujourd'hui 
resserrer  les  liens  de  la  famille  romane! 

Voyez  en  moi,  le  plus  humble  des  poètes,  choisi  peut-être 
par  la  Providence,  à  cause  de  sa  petitesse  même, pour  exalter 
la  grandeur  de  l'idée:  voyez  en  moi  l'organe  du  sentiment 
qui  vous  inspire.  Le  rossignol  des  bois,  malgré  sa  modestie, 
chante  les  harmonies  de  la  nature  et  la   grandeur  de  Dieu. 

Peuples  de  langue  romane  !  nous  avons  quitté,  il  y  a  bien 
des  siècles,  le  foyer  paternel  comme  des  enfants  prodigues  ; 
le  malheur  s'est  abattu  sur  nous,  au  milieu  des  éclairs  d'une 
gloire  qui  éblouissait  le  monde. 

Nous  nous  sommes  acharnés  les  uns  contre  les  autres, 
sans  reconnaître  le  signe  de  famille. 


*i 


DISCOURS    DE    M.  DE  QUINTANA    Y    COMRIS  157 

Nous  sommes  tombés  les  uns  après  les  autres  sous  le  glaive 
cruel  du  barbare. 

Le  char  de  la  civilisation  nous  a  broyés  toutes  les  fois  que 
nous  avons  faibli  sous  le  poids  de  nos  longues  ivresses. 

Peuples  de  langue  romane,  souvenez-vous  !  ! 

Quand  la  France,  la  sœur  aînée  do  la  race  latine,  le  foyer 
lumineux  qui  a  projeté  la  civilisation  moderne  sur  Thumanité 
entière,  s'affaissait,  les  entrailles  labourées  par  la  griffe  san- 
glante de  la  guerre,  nos  cœurs  se  gonflaient  do  larmes,  nos 
bras  se  levaient  vers  le  ciel,  la  douleur  des  regrets  assombris- 
sait nos  âmes. 

Peuples  de  langue  romane,  retournons  au  foyer  paternel  ! 
Frères,  resserrons  nos  liens  ! 

Les  peuples  se  rallient  par  le  mélange  de  leurs  intérêts, 
par  la  communauté  de  leurs  sentiments,  par  la  fusion  de  leurs 
idées. 

Peuples  de  langue  romane  ,  peuples  qui  avons  la  foi,  rele- 
vons-nous par  le  travail,  par  la  science,  par  la  liberté  !  . .  . 

La  tempête  lève,  comme  autrefois,  à  l'Orient,  ses  tourbil- 
lons de  flamme  au  milieu  des  nuages  sombres,  gros  de  mena- 
ces pour  l'avenir  ;  les  vents  froids  et  glacés  nous  envoient  tou- 
jours leur  haleine  mortelle. 

Race  latine,  range-toi  au  seuil  de  ta  demeure,  l'olivier  de  la 
paix  sur  ton  front,  les  armes  du  travail  à  la  main,  la  liberté 
planant daus  ton  ciel  d'azur! 

Et,  tant  que  tu  auras  ton  soleil  brûlant  qui  féconde  nos 
germes,  et  ton  vin  généreux  qui  réchauftè  nos  cœurs,  et  l'a- 
mour de  tes  femmes  qui  inspire  tes  créations  sublimes,  et  la 
foi  qui  les  pousse  et  qui  te  donne  la  résignation  et  la  force, 
tu  seras  immortelle,  vieille  race  latine,  comme  le  souffle  divin 
qui  t'a  créée  pour  être  le  cœur  et  l'âme  du  monde  ! 

Et  toi,  ville  de  Montpellier;  toi  qui  gardes  la  semence  de 
cette  idée  de  paix  et  d'avenir,  toi  qui  la  couves  avec  amour, 
sois  immortelle  aussi  ! 

Tu  la  verras  éclore,  et  de  ses  branches  robustes  ombrager 
le  seuil  du  grand  foyer  latin. 

Et  maintemant,  Mesdames  et  Messieurs,  couronnez  avec 
moi  les  poètes  vainqueurs. 

Honneur  et  gloire  aux  vaincus,  qui  se  sont  inspirés  du  saint 
amour  de  la  famille!  Et  tous  ensemble,  avec  la  foi  des  croyants, 
répétons  en  chœur  le  chant  qui  deviendra  pour  nous  tous 
l'hymne  sacré  de  la  patrie. 


CHRONIQUE 


Un  membrp  du  Conseil  de  la  Société  pour  l'étude  des  langues  ro- 
manes, M.  Henri  Delpech,  vient  de  publier  un  travail  sur  la  bataille 
de  Muret,  dont  l'importance  a  été,  comme  on  le  sait,  décisive  dans 
l'histoire  du  Languedoc.  T^e  travail  de  M.  Delpech  a  pour  titre  : 
la  Bataille  de  Muret  et  la  tactique  de  la  cavalerie  au  XIII^  siècle 
{avec  deux  plans  topographiques.  Montpellier,  bureau  de  la  Société 
pour  l'étude  des  langues  romanes,  1878;  in-8o,  xvi-155  pages),  et 
peut,  à  tous  les  points  de  vue,  être  considéré  comme  une  des 
monographies  les  mieux  étudiées  et  les  plus  complètes  que  pos- 
sède le  midi  delà  France. 

Il  en  sera  rendu  compte  dans  un  des  prochains  fascicules  de 
la  Revue. 

* 

Publications     catalanes  ,     provençales     et     languedociennes, 

TRAVAUX  SUR  LA   LITTÉRATURE  DU  MIDI    DE    LA     FlîANCE,    etc.—   Hueffer. 

The  Troubadours,  a  history  of  provençal  life  and  literature  in  the 
middle  âges.  London,  Chatto  and  AVindus;  in-8''.  378  pag. 

Birsch-Hirschfpld.  Ueber  die  den  prorenzalischen  Troubadours  des 
XII  u  XIII.  Jahrh .  bekoMiiten  epische  Stoffe.  Ein  Beitrag  zur  Lite- 
raturgeschichte  des  mittelalters .  Halle.  Xiemeyer;  in-4o,  92  pag. 

Jochs  jlorals  de  Barcelona,  any  xxde  llur  restauraciô ,  M  DCCCLXXVIU. 
Barcelona,  estampa  de  la  Renaixensa;  in-S»,  236  pag. 

Contenant  les  discoirs.  rapports  et  pièces  couronnées  le  5  mai 
dernier. 

Llibre  d'or  de  la  modema  poesia  catulana.  [Barcelona],  la  Re- 
naixensa; in-12.  308  pag. 

Lo  Camestolies  à  Barcelona  en  la  segle  xvii.  Romansos  populars 
catalans,  rep roduhits  d  impresos  contemporàneos  é  ilusfrais  ab  notas  y 
documents  inédits,  per  A.  Balaguer  y  Merino  Barcelona.  estampa 
de  la  Renaixensa;  in-8o,  27  pag.  (Extrait  de  la  Renaixensa,  de  Bar- 
celone.) 

Riera  y  Bertran.  Escenas  de  la  vida  pag esa.  Noveletas  y  narracions 
varias  de  costums  catalans.  Barcelona,  impreiUa  de  la  Renaixensa; 
in-12,  207  pag. 

Marius  Girard.  Lis  Aupiho,  poésies  et  légendes  provençales^  tra- 
duction française  en  regard  du  texte.  Avignon,  RoumaniJle  ;  Paris, 
Maisonneuve.  1878,  în-12,  511  pag. 

Recueil  de  poésies  couronnées  au  Concours  de  la  Société  des 
langues  romanes,  le  23  mai  1878. 

L  auteur  prépare  en  ce  inoincnt  la  Crau,  volume  en  deux  parties  : 
A  l'oumbrineUo,  poésies,  et  Au  souleias,  légendes  et  ballades. 

Lou  Rire  de  laPrincesso,  pbr  lou  felibre  d'Enlre-mount,  conte  qu'a 
gagna  uno  mencien  d'ounour  au  Concours  dei  Fèsto  latino  de  Mount-pelié 
(mai  1878).  Ais,  Remondet-Aubin.  i878;  in-8",  16  pages. 

L'auteur  met  en  souscription  :  lou  Reinard  prouven^au.roumanen 
douge  cant,  tira  deis  escritde  l'agi  mejan  e  de  la  traditien,em'unoletro 
de  Frederi  Mistral. 

Celle  œuvre,  qui  n  été  couronnée  au  Concours  de  la  Société  des 
langues  romanes,  sera  accompagnée  d'une  traduction  française. 


CHRONIQUE  1» 

Société  archéologique  de  Béziers.  Compte  rendu  de  la  séance  tenue  le 
60  mai  1878.  Bézier?,  Granié  et  Malinas;  in-S",  55  paires. 

Conlienl,  p.  42-52,  la  Velhado,  poésie  laniiuedocienno  (Quarante 
et  ses  environs),  par  M.  Prosper  Vidal,  qui  a  obtenu,  cette  année, 
le  rameau  d'olivier  en  argent. 

De  Berlue- Perussis.  le  Centenaire  de  Pétrarque  au  point  de  vuehi- 
bliographique.  Apt,  J.-S.  Jean;  in  8°,  i5  pages. 

Cil.  de  Villcneuve-E.'ïcl  ipon,Za  Première  Représentation  du  Vwti  nv 
PÉCHÉ  {lou  Pan  dôu  pecat) ,  drame  i^rovenc^al  en  cinq  actes  et  en  vers  de 
Théodore  Auhnnel.  Aix,  Romondet-Aubin,  1878:  in-S",  22  paires. 

Reproduction  d'un  article  imprimé  dans  le  Messager  du  Midi  de 
Montpellier  (n°*  des  8  et  9  juin  1878). 

Bonaparte-Wvse.  La  Famiho  de  la  Coumtesso.  Antibo.  Marchand; 
in-8°. 

L.  Roumieux.ia  CiVjrafo^  catisoun,  musico  cleBorel,  d'après  un  èrdôu 
rèi  Reinié.    Avignon,  Lagier-Fornery:  in-4",  4  patres. 

Laurans  (Aug.).  Récits  bibliques  en  vers  patois.  Ancien  et  Nouveau 
Testament.  Agen  et  tous   les  libraires  de  la  région;  irr-8°,  vi-221  pag. 

Guiraud  (A.)  La  Font-Putanelle,  ou  Jacques  Cceur  à  Montpellier, 
pièce  en  vers  français,  provençaux  et  languedociens,  représentée  à  Mont- 
pellier le  il  novembre  1808.  Que  i'a  de  mm,  dialogue  en  vers  langue- 
dociens; précédés  d'une  notice,  par  Antonio  Glaize.  .Montpellier,  Ha- 
melin  frères;  in-S",  88  pages. 

Remy  (Marcplin)ZoM  Bon  Tèms,  sirvente provençal,  suivi  de  Ço  que 
voidèn,  chant  patriotique  {traduction  française  en  regard)  .Carpentras, 
Pinet,  1878;   in-S",  64  ]>ages. 

Louis  Astruc.  La  Leiouno,  à  moun  ami  Louis  Roumiéux.  A-z-Ais, 
Remondc  t-Aubin,  1878;  in-S",  4 pages. 

Gesiain.  Lu  Littérature  contemporaine  en  province.  Portraits  bio- 
graphiques et  littéraires,  troisième  édition.  Paris,  Rouveyre;  in-8*, 
\'n-346  pages. 

Cartailhac,  L'Age  de  pierre  dans  les  souvenirs  et  superstitions  popu- 
laires. Paris,  Reinwald;  in-4°,  'i02  pages,  lig. 

Sous  le  titre  Ung  bouquetot  coelhut  hens  los  Psalmes  de  David,metutz 
en  rima  hemesa.  per  Arnaud  de  Salette  en  l'aneia  MDLXXXlii,  un 
bibliophile  vient  de  ])ublier  (librairie  Ribaut,  à  Pau)  les  cinquante 
premiers  psaumes  de  David,  traduits  en  béarnais,  en  1583,  par 
Arnaud  de  Salette,  lils  de  Johan  de  'èa.XeX.io ,  président  de  la  Crampa 
de  Contes  et  Conselh  ordenarg  en  lo  pays  et  sobiranitat  de  Bcarn. 

Cet  ouvrage,  qui  fut  imprimé  à  Orthez  par  Louis  Rabier,  n'existe 
plus  aujourd  hui  que  dans  doux  ou  trois  grandes  bibliothèques  ; 
c'est  sur  l'exemplaire  de  la  Bibliothèque  nationale  (]u'a  été  laite  la 
copie  des  ciniiuanle  premiers  psaumes  formant  le  bouquet  que 
vient  de  publier  la  librairie  Ribaut.  Apres  les  Récits  d'histoiie  sainte 
en  béarnais  et  los  Psalmes  complets,  ce  volume  constitue  le  plus 
long  texte  littéraire  qui  ait  été  donné  en  béarnais. 

Inutile  d'observer  qu'à  l'époque  où  Arnaud  de  Salette  traduisait 
les  psaumes  (1583),  le  béarnais  était  encore  universellement  parlé 
en  Béarn  ;  c'est  donc  presque  toujours  en  vrai  et  pur  béarnais  que 
s'exprime  l'auteur 

Ung  Bouquetot,  tiré  à  102  exemplaires,  a  le  même  format,  le 
même  papier  et  les  mêmes  caractères  que  les  belles  publications 
delà  Société  des  Bibliophiles  du  Béarn.  Son  prix  est  de  10  trancs. 


160  ERRATA 


L'abondance  des  matières  qui  constituent  le  présent  numéro  ne 
nous  permet  pas  de  publier,  ce  mois-ci,  la  chronique  du  Félibrige 
et  des  associations  qui  relèvent  de  lui,- la  liste  des  publications 
concernant  le  midi  de  la  Francvj  et  celle  des  articles  en  langue  d'oc 
imprimés  dans  les  journaux,  depuis  le  mois  de  mars  dernier. 

Le  prochain  fascicule  de  la  Revue  réparera  ces  omissions. 


Errata  des  numéros  de  février  à  juin  1878 

Poètes  lyriques  catalans.  —  P.  56,  ligne  1.  jjus,  lisez  car.  —  62,  4^ 
A.  Chartres,  I.  A.  Chartier.  — 63,  19,  e«»/,  I.  en.  — 
67,  21,  Don.  1.  Dona.  —  73,  34,  prenga,  1.  pendra.  — 
77,  16.  quel,  mon,  1.  qu'el  mon.  —  83,  1.  6  de  la  noie, 
ne,  1.  no. 

Donec  gratus  eram. —  P.  135,  1.  17,  ul  sieu.  1.  au  sieu.  —  137.  8, 
am  tus,  1.  emb  tus 

Chronique. —  P.  156,  1.  10  (trois  lettres  sont  tombées  à  quelques 
exemplaires),  lisez:  un  recueil  de  poésies  françaises, 
dont  il. . . 

Périodiques. —  P.  2U6,  1.  3-4,  pounche  d'agach  {déuomina.t\OTi  locale), 
sommet  d'où  l'on  découvre  au  loin.  Pointe  du  guet 
serait  une  traduction  plus  exacte. 

Poueisias  dioisas.  —  P.  221,  1.  1,  dioias,  1.  dioisas.  —  226,  \3,fonino, 
\.  fomino.  —  227,  3,  Nounlaou,  1  Mounlaou. —  228.  ly, 
arrivas,  1.  arrivas.  —  230,  8,  des.  1.  de.  —  230,  30,  am- 
bossadeur,  1.  ombossodeur.  —  23u,  33,  nostro,  1.  notro.— 
231,  ii.,oteindec-mein^voou  revenis,  l.oteindec.  m'ein  coou 
revenis.  —  232,  25,  lou  soupo,  1.  lo  soupo.  —  235, 13. 
lous,  1.  lou. 

Lettres  à  Grégoire. —  P.  236, 1.  2,  en  commençant  par  le  bas  :  Gueidan, 
1.  Gueidon 

Cantul  gintei  latine.   —   P.  263,  1.    21.   B.  Alecsandri,  !.  V.  Alec- 

SANDRl. 

Lou  Branle  de  las  trelkas.  —  P.  281,  1.  9,  t'arresta,  1.  t'arresta  •. 
La    Prise  de  Damiette.   —  287,  1.  40  :   «  Comolumps   peut  très-bien 

s'entendre  comme  substantif  formé  du  verbe  comolar. 

lisez  :.....  de  l'adjectif  comol.  » 
Chronique   —  P.  306.  1.  29,  à  un  anonyme  de  Tergu-Muresinlui.  I.  à 

une   anonyme..  .  .    —   307,  32,   d'un  poésie,   1.    d'une 

iwésie. 
Ta  bit  des  matières .  ' —  P.   312,    23,    par    de  Bcrluc-Péi  assis,  1.  par 

M.  de  Berlue- Perussis. 


Supplément  aux  errata  antérieurs  :  octobre  1877 

Un  document  inédit  relatif  à  la  Chronique  catalane  du  roi  Jacmes  Z'^'".  — 
P.  161.  1.  10,  Manuel,  1.  Mariano. 


Le  ycrant  responsable  :  Ernes'i  Hamelin 


DIALECTES   ANCIENS 


INSCRIPTION  PROVENÇALE  EN  VERS  DU  XVI'  SIECLE 

CONSERVÉE 

dans  l'église  paroissiale  du  Bar  (Alpes-Maritimes  ) 


Cette  inscription  a  été  publiée,  avec  un  dessin  d'un  tableau 
très-curieux  qu'elle  accompagne,  dans  le  n°  de  février  1851 
du  Bulletin  des  Comités  historiques.  Comme  ce  recueil  est  peu 
répandu,  nos  lecteurs  nous  sauront  gré  de  la  reproduire  ici. 
Nous  la  ferons  précéder  d'un  extrait  de  la  notice  de  M.  Henry, 
correspondant  du  ministère  à  Toulon,  à  qui  la  première  pu- 
blication en  est  due. 

((  J'ai  l'honneur  d'adresser  au  Comité  des  arts  le  dessin  au 
trait,  fort  exact,  d'un  tableau  curieux,  peint  sur  bois,  existant 
dans  l'église  paroissiale  du  Bar,  commune  de  l'arrondisse- 
ment de  Grrasse,  département  du  Var  (aujourd'hui  Alpes-Ma- 
ritimes). L'ais  sur  lequel  se  trouve  cette  peinture  a  1  mètre 
75  centimètres  de  hauteur,  sur  une  largeur  de  85  centi- 
mètres. Le  dessin  ne  prend  qu'un  peu  moins  du  tiers  de  cette 
hauteur;  le  reste  est  occupé  par  une  inscription  en  trente- 
trois  vers  monorimes,  tracée  en  beaux  caractères  gothiques, 
en  deux  colonnes.  Le  stjle  de  cette  inscription  et  les  mots 
qui  la  composent  attestent  la  dégénération  la  plus  complète 
de  la  langue  romane  en  Provence,  à  l'époque  où  elle  a  été 
écrite,  et  ne  permettent  pas  de  la  faire  remonter  plus  haut 
que  la  première  moitié    du  XVP  siècle  .... 

»  Le  sujet  du  tableau  est  une  danse  exécutée  au  son  du 
galoubet  et  du  tambourin,  par  des  hommes  et  des  femmes.  Un 
petit  diable  peint  en  noir  gambade  au-dessus  de  la  tête  de 
tous  ceux  qui  prennent  part  à  cet  amusement.  La  Mort,  armée 
d'un  arc,  décoche  .-^es  flèches  sur  les  danseurs.  Ceux  qu'elle 

11 


162  DIALECTES  ANCIENS 

atteint  tombent  à  la  renverse,  et  les  diables  qui  les  possè- 
dent, figurés  par  ceux  qui  gambadent  sur  leur  tète,  accourent 
aussitôt  à  leur  bouche  pour  saisir  au  passage  l'àme  dont  ils 
se  sont  rendus  maîtres.  Chacun  d'eux  place  Tâme  devenue  sa 
proie  dans  l'un  des  bassins  de  la  balance  que  tient  Tarchange 
saint  Michel,  laquelle  a  pour  contre-poids,  dans  l'autre  bassin, 
le  Livre  de  vie. 

De  peur  que  l'acte  de  la  danse  ne  soit  pas  assez  fort  pour 
amener  la  condamnation,  un  autre  démon  s'allonge  pour  pe- 
ser sur  le  bassin  où  est  l'àme,  avec  une  baguette  qu'il  tient 
à  la  main.  Un  autre  esprit  malin  s'empare  de  l'àme  reconnue 
coupable  et  la  précipite  dans  la  géhenne,  figurée  par  une 
gueule  de  Léviathan,  d'où  s'élèvent  des  llammes.  » 

L'inscription,  publiée  dans  le  Bulletin  des  Comités  histoi^i- 
ques,  avec  les  abréviations  de  l'original,  v  est  accompagnée 
d'une  traduction,  en  général  assez  exacte,  et  due,  comme  la 
copie  du  texte  lui-même,  à  M.  Senequier  (de  Grasse).  La  re- 
production de  cette  traduction  serait  ici  sans  utilité;  nous 
nous  bornerons,  en  conséquence,  à  transcrire  le  texte,  sauf 
à  remplacer  partout,  pour  la  commodité  de  la  lecture,  les 
signes  abréviatifs  de  l'original  par  les  lettres  qu'ils  repré- 
sentent, à  introduire  quelques  apostrophes,  à  modifier  par 
places  la  ponctuation  du  premier  éditeur  et  à  faire  deux  ou 

trois  corrections  indispensables. 

C.  C. 


0  paures  pecadours,  haias  grant  recordansa 
Que  vous  mourres  tantost,  non  hi  fassas  douransa. 
E  vous  ballas  souvent  e  menas  folla  dansa, 
E  fases  autres  mais  ambe  grant  seguransa, 
5  En  vous  cargant  forment  de  mortala  grevansa, 
E  non  doutas  en  ren  de  far  grant  rebellansa 
Al  grant  rej  Jésus  Crist  que  sousten  vostra  'stansa  ! 
Longament  a  'sperat  la  vostra  melhuransa. 
Si  vous  mourias  ensin  sens  haver  reparansa, 
10  Sensa  doute  alcun  haurias  malahuransa. 

Pensas  hi  ben  souvent,  non  fassas  demouransa 


INSCRlPTIOlSi  PRUVKN(J.\LE  EN   VERS  163 

De  VOUS  levar  ben  prest  de  tant  granda  pesansa; 
Quarsi  vous  entendias  la  terribla  venjansa 
Que  tara  Dieu  après  la  dura  separansa 

15  De  vostra  ama*  doulent,  quant  sera  en  balansa, 
Meravillia  séria  si  non  sontias  tremblansa 
l!]n  vostre  paure  cor  (?  mais  eu  vostra  pansa. 
Haias  granda  paour,  quar  cascun  jour  s'avaiisa 
La  tin  e  vostra  mort  de  mala  sabouransa. 

20  Si  ella  vous  feria  -  en  souta  deyssoutansa  ^, 
Vous  tombarias  de  tout  eu  grant  desésperansa, 
E  pueis  vous  ballarias  en  la  terribla  dansa 
Laquai  s'apella  ben  perpétuai  cremansa, 
En  fasent  plours  e  crits  e  granda  blastemansa 

25  De  Dieu  e  mai  de  vous,  sens  mais  haver  cessa[n]sa. 
Aras  tant  (|ue  vives  e  hâves  la  poyssansa, 
Fuges  tant  grant  perilh  e  tant  grant  trabucansa; 
Quar  si  vous  intrares  una  t'es  en  tal  dansa, 
Vous  en  repentires,  mas  tart  sens  proufictansa. 

30  Pregui  Nostre  Senhour  vous  donne  tal  poyssansa 
Que  aquistes  lo  ben  que  dura  sens  mancansa, 
Qu'en  ''  tout  temps  lauses  Dieu  ambe  grant  alegransa, 
Dont  lo  prince  d'enfern  haia  grant  douleansa. 
Amen! 


*  Gorr.  armât—  *  Ms.  ferias.—  ^  «  Par  surprise  soudaine  »,  du  verbe 
deyssoptar  -  assaillir,  surprendre  (Raynouard,  Lex.  rom.,  V,  240),  el 
non  «  par  une  soudaine  cessation  des  sauts  »,  comme  on  a  traduit  dans 
le  Bulletin.  —  '  Ms   ques'. 


■j»iXQèjr:t 


DIALECTES  MODERNES 


NOËL  PERIGOURDIN 


Ce  joli  noël,  publié  ici  d'après  une  copie  que  je  dois  à  l'obli- 
geance de  M.  Ribaut  de  Laugardière,  président  du  Conseil 
d'arrondissement  de  Nontron  et  auteur  de  consciencieuses 
Recherches  historiques  sur  cet  arrondissement,  en  rappelle  deux 
du  recueil  de  M.  Damase  Arbaud  :  le  Premier  Miracle,  I,  23, 
et  la  Fuite  en  Egypte,  ibid.,  33.  Mais  la  ressemblance  ne  va 
pas  plus  loin  que  les  premiers  vers.  Le  noël  périgourdin  a,  de 
plus,  une  pointe  de  malioe  qui  manque  aux  deux  cantiques 
provençaux  : 


C.  C. 


L    José,  la  Sento  Vierjo, 
Helas  !  moun  Dî  ! 
José,  la  Sento  Vierjo, 

Lôuva  sio  Dî  ! 
S'en  va  se  permenâ   /      .  . 
Jésus  !  ave   Maria  î    ( 

IL     Din  lur  cliami  reneountren, 

Helas  !  moun  Dî  ! 
Din  lur   chami  reneountren, 

Lôuva  sio  Dî  ! 
Un  poumier  plé  de  poumâ. 
Jésus  !  ave  Maria  ! 

III.     — «  José,  ayâ  m'en  uno  ! 
Helas!  moun  Dî  ! 
José,  ajâ  m'en  uno  ! 
Lôuva  sio  Dî  ! 


NOËL   PÉRIGOURDIN  165 

Ayâ  m'en  uno,  siôu  plâ  '.  » 
Jésus  !  ave  Maria  ! 

IV.      —  «  Que  lou  que  v'o  graciado, 

Helas  !   moun  Dî  ! 
Que  lou  que  v'o  graciado, 

Lôuva  sio  Dî  ! 
Vous  la  venhe  ajà  !  » 
Jésus  !  ave  Maria! 

V.     La  Vierjo  se  janolho, 

Helas  !  moun  Dî  ! 
La  Vierjo  se  janolho, 

Lôuva  sio  Dî  ! 
Lou  poumier  s'ei  beissa. 
Jésus  !  ave  Maria  ! 

VI.     La  Vierjo  pren  'no  poumo, 

Helas  !  moun  Dî  ! 
La  Vierjo  pren  'no  poumo, 

Lôuva  sio  Dî  ! 
Nen  pren  uno,  mai  doua. 
Jésus  !  ave  Maria  ! 

VII.     José  vôu  fà  coum  'elo  ; 

Helas  !  moun  Dî  ! 
José  vôu  fà  coum  'elo  ; 

Lôuva  sio  Dî  ! 
Lou  poumier  s'ei  leva. 
Jésus  1  ave  Maria  ! 

VIII.     Din  lur  chami  rencountren, 
Helas  !  moun  Dî  ! 
Din  lur  chami  rencountren, 
Lôuva  sio  Dî! 


1  Ce  vert  serait  irop  long,  et  pareillement  Je  cinquième  du  neuvième 
couplet,  si  l'on  conservait  l'accentualion  normale.  Mais  il  faut  pro- 
noncer sioupla.  comme  un  seul  mot,  en  faisant  atone  l'o  Qnal.  tout  en 
'lui  conservant  sa  quantité.  On  a  ainsi  un  vers  féminin,  comme  l'est  le 
vers  corresi^ondant  du  couplet  précédent  (....  pouma),  et  dont  la  syl- 
labe surnuméraire,  comme  dans  ce  dernier,  rime  seule,  ou  est  censée 
rimer.  —  SiVif*  (alias  siau)  est  d'ailleurs  l'ancien  sius  =  si  vos. 


166  DIALECTES    MODERNE^ 

Un  riusseii  a  passa. 
Jésus  !  ave  Maria  ! 

IX.     —  «  José,  passa  me  Taigo  ! 

Helas  !  moun  Di  ! 
José,  passa  me  Taigo, 

Lôuva  sic  Dî  ! 
Passa  me  l'aigo,  siôu  plâ!  » 

Jésus  !  ave  Maria  ! 

X.     —  «  Que  lou  que  v'o  graciado, 

Hélas  !  moun  Dî  ! 
Que  lou  que  v'o  graciado, 

Lôuva  sio  Dî! 
Vous  la  venhe  passa  !  » 

Jésus  !  ave  Maria  ! 

XI.     La  Vierjo  se  janolho, 

Helas  !  moun  Dî  ! 
La  Vierjo  se  janolho, 

Lôuva  sio  Dî  ! 
Lou  riu  s'ei  partaja. 

Jésus!  ave  Maria! 

Xn.     La  Sento  Vierjo  passo, 
°  Helas!  moun  Dî! 
La  Sento  Vierjo  passo, 
Lôuva  sio  Dî  ! 

La  passo  sei  boula'. 
Jésus  !  ave  Maria  ! 

XHL     José  vôu  fâ  coum'  elo  ; 

Helas!  moun  Dî  ! 
José  vôu  fâ  coum'  elo  ; 

Lôuva  sio  Dî  ! 
Ou  ^  s'ei  pensa  nejâ. 
Jésus  !  ave  Maria! 

'  Boula  [bouler,  an  Saintonge),  c'est  mettre  les  pieds  dans  une  ornière 
ou  une  flaque  d'eau. 
2  Prononcez   oou.  C'est  le  pronom  el  (eu,  puis  ow,  ailleurs  au). 


UN  SONNET  DE  RANCIIIN 

TRADUIT  EN  PROVENÇAL  ET  EN    LANGUEDOCIEN 


Les  extraits  ([ui  suivent  sont  tirés  du  Mercure  tjabmt  de 
l'année  1682,  mois  de  juin. 

Le  texte  français,  fort  mauvais  du  reste,  appartient  à  Ran- 
chiu;  la  traduction  provençale  est  de  Tabbé  de  Carj;  l'auteur 
de  la  traduction  languedocienne  n'est  pas  indiqué. 

Martin. 

Page  18. —  «On  peut  voir  par  là  que  le  Roy  n"a  point  de  plus  forte 
<;  passion  que  devoir  la  vérité  réunir  tous  ceux  que  les  erreurs  de 
->  Calvin  ont  séparés  de  l'É.irlise.  Leur  party  s'affaiblit  fort,  et  c'est 
»  là-dessus  que  M.  Ranchin,  tle  Montpellier,  a  remiily  les  bouts- 
"  rimez  de  M. Mignon.  Je  vous  envoyé  son  sonnet. 

sur  le  soin  que  prend  le  roy  de  bannir  i/hkiu':sik 

DE  SON  royaume 

L'hérésie,  autrefois  plus  superbe  qu'un  pan, 
Est  enfin  à  la  chaîne  ainsi  qu'une  guenuche; 
Le  Grand  Loujs,  malgré  les  ruses  de  Satan, 
La  rend,  par  ses  édits,  plus  douce  que  la  pluche. 

La  biche  a  moins  d'ardeur  à  retrouver  son  fan 
Qu'il  n'en  a  de  nous  voir  ensemble  en  mesrae  ruche  ; 
Quittant,  pour  le  projet  qui  l'occupe  tout  l'an, 
Celuv  d'aller  porter  ses  lois  où  naît  l'autruche. 

Revenez,  dévoyez,  et  le  Ciel  vous  est  hoc. 
Vous  aurez  l'amitié  de  Louis  sur  le  troc  ; 
Voyez  que  du  party  toujours  quoiqu'un  déniche. 

L'Église  vous  appelle,  et  vous  conjure  par 

Ce  champ  mal  cultivé  que  vous  laissez  en  friche, 

De  rentrer  dans  son  sein  sans  si,  sans  mais,  sans  car. 

•'  \\  n'y  a  rien  de  plus  agréable  que  le  provençal,  surtout  quand 
»  c'est  une  femme  qui  le  parle.  Voyez,  Madame,  si  vous  l'aimerez 
>'  dans  ce  sonnet;  il  est  de  M.  l'abbé  de  Gary. 

sonnet  provençal  sur  les  bouts-rimez  de  pan 

Faire  entendre  per  tout  lou  parapatapan, 
Si  juga  d'au  lion  coumo  d'uno  guenuilio, 


16S  DIALKCTES   MODBUNPIS 

Estre  amat  como  un  Diou  et  crench  como  Satan, 
Jusquos  eis  bords  glassars,  donte  ven  la  pelucho  ; 

Rire  de  Tenemy,  quand  seis  explois  lou  fan 
Fondre  como  un  eissame  quand  soiierte  de  la  ruche  ; 
Combatré  hyver,  estiou  et  trionfa  tout  l'an, 
Tenir  Taiglo  plus  bas  que  noun  voelo  l'autruche  ; 

En  tout  temps,  en  tout  luec,  s'y  faire  dire  d'hoc; 
Aver  ço  qu'es  de  drech,  senso  perto  ny  troc, 
Et  ço  que  moun  rey  fa,  lorsque  la  pas  dénicho. 

Din  lou  mounde,  atamben  eou  noun  a  pa  soun  par; 
Eou  pou  mettre  quand  vou  cent  provinces  en  fricho, 
Parço  que  sa  valeur  es  l'appuy  de  son  car. 

Page  86. —  «On  ne  s'est  pas  seulement  scrvy  du  provençal  pour 
»  publier  les  grandeurs  du  Roy:  on  a  fait  aussi  un  sonnet  gascon 
»  sur  cette  mesme  matière.  Je  vous  l'envoyé.  Les  rimes  de  par  et 
»  de  car  y  sont  employées  d'autant  plus  heureusement  que  ces 
»  deux  mots  signihent^jmV  et  cher  en  cette  langue.   » 

SOUNET    BOUT-KIMAT    EN    LINGL'O    .MOUNDINO 
A    LA    GLORIO    DEL    REY 

Lou  rey,  que  ran  la  pas  as  troupelets  de  Pan, 
■     Fa  bouqua  l'enemic  millou  qu'uno  guenucho. 
El  fa  luzi  la  croux  oun  regnabo  Satan 
Et  s'abillo  de  fermay  souben  que  de  plucho. 

El  n'a  qu'eis  ennemis  que  sas  bertuts  l'y  fan. 
Coum'  uno  saio  abeille  el  sap  rampli  sa  rucho  ; 
El  fa  may  dins  un  jour  qu'eis  autres  dins  tout  l'an, 
Et  coubo  touts  dois  els  pla  millou  qu'un  autruche, 

El  pot  tout  ço  qu'es  bel,  tout  ço  qu'el  dis  es  hoc; 
Pren  tout  de  bouno  guerre,  e  jaraai  re  per  troc; 
La  bertut  dins  soun  cor  es  coumo  dins  sa  nicho. 

Cap  d'autre  rey  dambel  nou  pot  ana  del  par, 
Lou  royaume  sens  el  serio  toumbat  en  fricho, 
E  Louis  es  del  Ciel  lou  présen  lou  plus  car. 


LETTRES  A  GREGOIRE 
SUR   LES  PATOIS    DE   FRANCE 

[Suite) 


DICTIONNAIRE 

DU    PATOIS    DU    DUCHK    DE    HOUILLON 


Ahachi  (verbe)  —  tirer  en  bas. 

Abané  (v.) — mettre  des  terres  en  ré- 
serve ;  faire  des  publications  de 
mariage. 

Abaouï  (v.)  — japper. 

Abasourdi  (v.)  —  étourdir. 

Abaufumé  (v.)  —  enflammer,  mettre 
en  train. 

Abôrr  (v.) —  faire  entrer  dans  un 
trou. 

Abiichi  (.s') —  heurter  du  pied  contre 
(pielque  chose. 

A  bloqué  (v.)  —  mettre  sur  ou  contre 
des  blocs. 

Aburni  (v.) — se  dit  d'une  truie  prête 
à  donner  les  petits. 

Acanoaé  (v.)  —  s'encanailler. 

Accipr  (v.)  —  prendre,  escamoter. 

Achauré  —  étourdi,  éventé,  léger. 

Adostai  —  petit  enclos  pour  loger 
des  agneaux. 

Acostauie  —  qui  accueille  gracieuse- 
ment. 

Acosté  (v.)  —  accueillir. 

Acrami  (v.)  —  mélanger,  confondre. 

Acrachi  (v.)  —  engraisser. 

Acri'pé  (v.) —  s'arranger  autour  d'une 
table  pour  manger. 

Adoltiiiné  (v.)  —  flatter,  caresser, 
adoucir. 

Advinourde  —  énigme. 

Advenant,  à  Vadvenant —  à  propor- 
tion. 

Adayni  —  très-occupé,  attaché  à 
quelque  chose. 

Adaumé  —  entamer. 


Affiagr\  affianée —  confianco. 

Affié  —  donner  parole. 

Af'fistoli-  —  paré,  bien  arrange. 

Aff'i-icot'é  —  éveillé,  gai,  leste. 

Affolté  —  faire  du  mal,  blesser. 

Aff'ondr:'  (v.)  —  enfoncer  dans  quel- 
que chose. 

.I//We(v.)  — coitT.'r. 

Aff'iitou  —  coiffure  de  femme. 

Affûté  —  arrangé,  mis  en  ordre. 

Aginci  (v.) —  s'habiller,  se  bien  ai- 
rauger. 

Afjasse  —  cors  aux  pieds  ;  babillard, 
imprudent. 

Afjrinci  (.s')  —  s'ennuyer, 

Agnlin  —  toison  d'agneau. 

Ai/oustante  —  appétissant. 

Af/ruhi  {s') — Kc  tenir  près  du  l'eu, 
se  chauffer  de  près. 

Aguë —  aiguille,  du  mot  a^o  italien. 

Anale  (v.) —  embarrasser. 

Ahalemin  —  embarras. 

Alianer  (v.)  —  herser. 

AJiéré  —  étourdi,  qui  agit  précipi- 
tamment. 

Aliofé  (v.)  —  arrêter,  mettre  obs- 
tacle. 

A/ioté  —  embourbé,  chariot  qui  no 
peut  avancer. 

Ahùllé  (v.)  —  assommer  avec  une 
massue. 

Alievdé  (v.)  —  attafiuer,  battre,  com- 
mencer. 

A  boulé  (v.)  —  hurler. 

Ahinchi  (s')  —  s'habiller. 

Ahachire — estropié,  infirme,  malade. 


'  On  a  publié,  de  1787  à  1857,  plusieurs  dictionnaires  français-wallons  et 
wallons-français;  mais  ou  pmit  être  assure  que  celui-ci  ne  manquera  pas  d'in- 
térêt, malgré  les  fautes  nombreuses  que  présente  ce  lexique  et  que  nous  n'avons 
garde  de  corriger. 


1-n 


DIALECTES    MODERNES 


Ahonrhi{\.)  —  saisir,  tenir,  bultre, 
commpiicer. 

Ahuré  (v.)  —  sahurer,  s'entêter,  s'ob- 
stiner. 

M —  aiiïe  —  oui.  certainement,  .je  le 
veux  bien. 

Aïoui'se  —  moisson. 

Airie  —  carreau  de  jardin,  certaine 
quantité  de  gerbes  apprêtées  pour 
être  battues  de  suite. 

Airin,  courtiaux  airiîis  ou  airi.es  — 
jardin  potager,  du  mot  ararc. 

Aitrie  —  cimetière,  du  mot  atrium., 
parvis. 

Aiwe  —  eau. 

Aiwées — eau  de  relavure,  eau  puante 
et  sale. 

Aiunassfi  —  qui  a  un  goût  d'eau. 

Akanlé  [s)  —  s'encanailler. 

Aeuré,  akuré  —  soigné. 

Alachi  (v.)  —  mettre  à  la  laisse. 

Alaidir  (v.)  —  délaisser,  abandonner. 

Alévré  —  étourdi,  éventé. 

Alihoinum  —  raisons  captieuses,  pré- 
texte. 

Aluké  (v.) —  regarder  quelque  chose 
avec  attention. 

Alosé  —  pré  ou  viande  qui  se  couvre 
d'une  peau  de  mousse  ou  de  moisis- 
sure. 

Amadé  (v.)  —  châtrer. 

Amadeu  —  chàtreur. 

Ambedeux  —  tous  les  deux. 

Amaï  -   embarrassé,  en  peine. 

Amedé  (v.)  —  s'engraisser,  profiter, 
s'enrichir. 

Amanri  (v.)  —  devenir  maigre. 

Amiaide  —  aimable. 

Amiaulté  —  amabilité. 

Amignoté  (v.)  —  caresser,  flatter. 

Ami  la  mouaigon  —  au  milieu  de  la 
maison. 

Am.on —  chez. 

Anchoures —  coins,  aisances,  déchar- 
ges d'une  maison. 

Aneine  —  fumier. 

Aneini — tas,  amas  de  fumier. 

Anechi  (s')  —  .s'étouffer  en  mangeant. 

AnicJu  (v.)  —  salir. 

Anichilé — biffé,  effacé,  réduit  à  rien. 


Aiiolié  —  donner  les  saintes  huiles. 

Angouchi  —  pressé,    impatient,    é- 
tourdi. 

Angloit  — coin  de  bâtiment. 

A7)ei/,  anuit,  anute  —  aujourd'hui. 

Ani/strni    ou    awistrui   —  petit   du 
mois  d'août. 

Apacfii  —  mettre  la  mangeaille  dans 
la  bouche  à  quelqu'un. 

Appiffo  (v.)  — faire  manger  avec  ex- 
cès. 

Arninp{\.)  —  interroger,  parlera  quel- 
qu'un. 

Aringi  —  rouillé. 

Arochi  {être)  —  être  arrêté  par  des 
obstacles. 

Aroi —  tapage,  bruit. 

A)'Oïé  —  mettre  la  charrue  dans  une 
terre. 

Arouté  (.s')  — se  mettre  en  chemin. 

Assanne  —  ensemble. 

Asmette  (v.)  —  se  dit  d'une   femelli- 
prête  à  donner  les  petits. 

Astoqier  (v.)  —   contenir   avec    des 
blocs. 

Astniqué  {s)  —  s'étrangler  en  man- 
geant. 

Attrimielé  (s)  —  s'associer. 

Askaharé  —  étourdi,  éventé,  volage. 

Assotti  {faire) —  faire  des  niches,  tour- 
menter. 

Asgmedp  —  mener  les  bestiaux  au 
pâturage 

Asquouette —  abri  contre  la  pluie. 

Attache  —  épingle. 

Atousé  —  pré  où  l'herbe  est  drue. 

Atoiirné  —  déjà  tout  formé. 

Attoligi  —  bien  traité,  caressé,  flatté. 

Aiirdre  (v.)  —  brûler,  s'enflammer. 

Auque  —  quelque  chose,  aliquid. 

Avan  la  vie  —  dans   la  ville  ou  le 
village,  en  visite. 

Aurmougni  (s')  —  se  tourmenter,  se 
dépiter. 

Auquette  ou  jaquette   —   jupe   de 
femme. 

Avinde  (v.)    —    atteindre,    prendre, 
toucher  en  haut. 

Avvaré  —  étourdi,  imprudent. 

Avvigi  —  éveillé,  hùrdi,  alerte. 


B 


Bachole   —   panier  dont   se  servent 

les  pêcheurs. 
Racelie  ou  houairhelle  —  fille. 
Bacelette  ou   houaictielettc  —  [)elite 

fille. 
Buffre  —  soufflet,  coups  de  poing. 
Rassa  ou  bassette  —  espèce  de  selle 


qu'on  met  sur  les  chevaux  pour 
porter  les  sacs. 

Rauctd  —  cloison  en  planches. 

Banne  —  tombereau  en  claie  ou  pa- 
nier à  mener  des  charbons. 

Barijaugex  —  saleté,  bûches,  raies  de 
pain 


I.I'.TTRES    A     GREGOIRE 


171 


Baufjîié  (v.)   —    regarder   à    travers 

quelque  chose. 
Banquette  —  petite  vitre. 
Hafi^e  —  luit  dn  beurre. 
Bouaidc  —  ouverture  de  la  ruge  {sic) 

pour  sortir  les  abeilles. 
Beraiidé  (v.)  —  grimper,  monter. 
BeraiaU  —  qui  aime  à  grimper. 
Beriii  —  bélipr. 
Bevtaudé  (v.)  —  châtrer,  couper  mal 

les  cheveux. 
Bertaudi  —  qui  coupe  mal  les  cheveux. 
Belhiné  (v.)  —  se  plaindre,  deman- 
der en  gémissant. 
Belhineu  —  qui  se  plaint  en  laissant 

voir  ses  besoins. 
Béhelle — grosse  tête,  homme  grossier. 
Biloqué  (v.)  —  se   partager  en  plu- 
sieurs bandes   pour  mieux  trouver 

à  vivre. 
Blastagi  {v.)  insulter,    maltraiter  de 

paroles. 
Blason  —  mauvais  ouvrier. 
Blasonné  —  faire  mal  l'ouvrage. 
Biau  —    bâton  jeté   aux    poires    ou 

pommes. 
Baïourdai  —  idem. 
Biauce  —  verrat,  châtré. 
Binnée  —  mangeoire  des   bœufs  ou 

vaches 
Biser  (v.)  —  courir  par  bonds  et  par 

sauts. 
Bique  et  bouc  —  hermaphrodite. 
Bique  ou  biquette  —  chèvre, . 
Bolhée  —  multitude,  quantité,  grand 

nombre 
Boquioii  —  bûcheron,  du  mot  bois. 
Bôsi  —  buisson  ou  fort  d'épines  et  de 

ronces. 
Boussai  —  bouteille  à  l'huile  ou  de 

pierre. 
Boufnbal  —  un  gourmand,    un   mal 

tappé  (v/r). 
Bouté  (v.)   —    mettre,   plasser  (s^V,-), 

agir,  faire. 
Basée  —  paravent  de  genêts  ou  de 

paille. 
Bore  —  creux,  enfoncement,  trou. 
Boru —  creusé. 
Boure  —  cruche,  pot,  pinte. 
Boudrule  —  nombril . 
Boutique,  balistique  —  agir,  remuer, 

travailler. 


Boutou  —  étui  à  épingle. 

Bouquet  —  morceau. 

Bâtard  ou  botellet  —  jeunes  bœufs 

non  riiàtrés. 
Bousti  (v.)  —  boiter. 
Bnustuiu  —  boiteux. 
Bovirea  —  terres  en  réserve   pour  y 

faire  jjùturer  les  bêtes  de  trait. 
Bavé  —   garder  les    hèles    dans  les 

abanis  pendant  la  nuit,  veiller. 
Brai  —  grain   germé  pour  faire    la 

bière. 
Brigosxé  (v.)  —  demander  des  restes 

de  table. 
Brigasscs  —  restes  de  table,  peu  de 

cliose. 
Bribé  (v.)  —  mendier. 
Bribeu  —  mendiant. 
Brigné  —  s'élever,  paraître  sortir  en 

haut, 
Bricallé  (v.)  — aller  et  venir  de  droite 

à  gauvlie. 
Bricolli  —  courailleur,  désœuvré. 
Bringue  —  femme  sans  honneur. 
Brandi  (v.)  —  faire  retentir  sa  voix. 
Braiiqué  (v.)  —  se  tenir  droit  comme 

un  pi{|uet. 
Bronqueu  —  qui  se  tient  droit. 
Bronzé  (v.)  —  enivrer. 
Brouchire  —  qui  mange  de  tout. 
Brisar  —  homme   mal    mis,    dégue- 
nillé. 
Boîirbian    —    Iroumillant     (sic)    en 

grande  quantité. 
Brouet  —  confitures  de  poires. 
Bruë  —  bouillon,  potage  sans  pain. 
Buée  —  lessive. 
Bué  (v.)  —  faire  la  lessive. 
Buha  —  vase  oblong  dans   lequel  les 

faucheurs    mettent    leur    pierre    à 

aiguis(;r. 
Burdanefii  (v.)  —  faire  du  bruit. 
Burgaigi  —  remuer  les  meubles. 
Butai  —  baratte  à  battre  le  beurre. 
Buti  —  gardien  de  bœufs. 
Bulsonné  (v.)  manger   des  morceaux 

de  pain. 
Burtonné  (v.) —  gronder,  lapager. 
Burton  —  grondeur. 
Bursi  (v.)  —  faire  peu  de  chose. 
Burhon  —  vieil  arbre  creux. 
Burheu  —  sombre,  temps  couvert. 


Cabriollé  (v.)  —  bariolé. 

Ca/jauré   —   bigarré  de    différentes 

couleurs. 
Caire  —  visage,  teint. 
Calhostai  —  petite  armoire  ou  caisse. 
Caboré  —  noircir. 


CaltouchI  (v.)  —  i.iin-  011  ijruit. 

Ca/joté  —  tache  de  différentes  cou- 
leurs. 

Cafougni  (v.) —  chiffonner,  ramas.er 
en  tas. 

Caïaux  —  joujoux. 


172 


DIALECTES    MODERNES 


Carouftr  (v.)  —  aller  el  venir. 

Carre  —  chemin  creux. 

Chaboré —  noircir. 

Cahoiilée —  potage  pour  les  bestiaux. 

Cahwté  (v.)— dechicté  (.s-zc),  brillé. 

Chuhollp.  —  chasser    les    poules    et 

autres  volailles. 
Chante  —  banc,  escabelle  à  traire  les 

vaches. 
Chamoix  —  petit  banc. 
Chanrè  (v.)  —  chasser  les  poules. 
Chamlé  (v.)  —  éparpiller. 
Chardé  —  édenté. 
Chanex  —  petites  planches  dont    on 

couvre  les  toits. 
Chaf'tire  —  partie    supérieurf    d'un 

champ    dépouillé    de  terre  par    la 

charrue. 
Chaxpout,   chauspouï  (v.)  —   battre 

avec  les  mains. 
Chévée  —  ravin. 
Chévé  (v.)  —  creuser,  déchirer. 
Cherpê  —  arracher,  tirer. 
Chelme  —  turbulent,  méchant. 
Cheaeau  —  vieille  masure. 
Chippotê  (v.)  —  éclabousser. 
Chouvé  (v.)  —  balaver. 
Chôpé  (v.)  -  gratter. 
Chalé  —  mal  mis  sur  ses  jambes. 
Champi  (v.) — aller  ou  travailler  vite. 
Chauhouïe  —  querelle,  batiture  (.«V/i. 
Chandie  —  chaude. 
Chetowde  —  ruge  {sic,  ruche). 
Chh'ou  — maigre. 
Chippée   ou    cMpette  —  équipée    de 

jeunes  gens. 
Chipé  (v.)  —  darder   de   l'eau   avec 

une  seringue. 
Choqué  (v.)  —  presser,    saillir;  il   se 

dit  de  l'accouplement  des  volailles. 
Cliourhé  —  essuyer. 
Chouté  (v.)  —  écouter,  prêter  atten- 
tion. 
Chouvé  (v.)  —  balayer,  nettoyer. 
Chodé  (v.)  —  brûler,  du  moi  chaud. 
Chou  —  pille,    mange    (en  parlant  à 

un  chien). 
Chure  —  suivre. 
Chute  —  suite. 

Clamé  —  crier,  du  mot  clamare. 
Clicoté  —  faire  sonner. 
Clicotai  —  petite  sonnette. 


Cliaie  —  femme  sans  \'igueiir,  non- 
chalante. 

Clabot  —  clochette  pendue  au  cou  du 
bétail. 

Chume  —  écume. 

Cn  —  encore. 

Cohdi  —  personne  maigre. 

Coche  —  truie  châtrée  ;  item  bran- 
chages. 

Co)npuyso7inier.'i  —  cohéritiers. 

Conquête  —  biens  acquis  pendant  le 
mariage. 

Cordelle  (il  est  n  xa)  —  à  sa  disposi- 
tion. 

Côpon  —  tison. 

Coiipion  —  petit  vase  de  terre. 

Cotirxelle  —  petite  cour. 

Conhandiné  —  balancer  ensemble. 

Conpichi  (v.) —  dépisser. 

Contappé  (v.). —  se  déjeter,  jeter 
par-ci  par-là. 

Conpité  (v.)  —  donner  des  coups  de 
pied. 

Contrainé  (v.)  —  traîner  dans  les 
ordures. 

Contrachi  (v.)  —  tirer  par  les  che- 
veux ou  par  les  habits. 

Conflachi  (v.)  —  coucher,  abattre, 
renverser  par  terre. 

Conchiné  (v.  )  —  parler  durement, 
insulter. 

Crache  —  graisse. 

Crachon  —  bête  grasse  ou  qu'on  en- 
graisse. 

Cramiette  —  main  de  fer. 

Cran  —  gras.  dodu. 

Crahai — mâche-fer,  crasse  de  fer. 

Crameu  —  gamelle  à  mettre  du  lait. 

Culot  —  coin  du  feu,  dernier  enfant 
ou  petit. 

Culotfi  —  qui  a  des  culottes. 

Cure  —  soin,  paroisse. 

Custode  —  étui,  bourse. 

Cossette  —  iHui  à  mettre  des 
épingles. 

Crawi  (\.)  —  aller  de  travers. 

Ci^awiieiix  —  tortu,  qui  a  les  jambes 
torses. 

Crauwe  —  crosse. 

Cvvi  (v.)  —  faire  peu  de  chose. 

Cuvieu  —  qui  s'amuse  à  faire  des 
bagatelles. 


D 


Dadai,  dadau  —  nigaud,  nonclia- 
lant. 

Déhalé  (v.)  —  battre,  estropier. 

Déhnlé  (v  )  —  débari  ,i  ,ei-,  ôter  l'em- 
barras. 

Duji.k  — j;rand  iiieici. 


Dauface  —  enfantin,  qui  a  des  ma- 
nières puériles. 

Délougi  fx.)  —  désoler,  rebuter,  dé- 
goûter. 

Dalousé  (v.)  —  plaindre,  avoir  com- 
passion. 


LETTRES    A    <iKEGOIRE 


17:^ 


Datnùse  —  qui  veut  goûter  de  tout, 
gourmand. 

Ditsganrochi  —  malade  pour  avoir 
fait  la  débauciic 

DK^hvinqni'  (v.)  —  délasser,  des- 
serrer. 

DifsgcDilr  —  être  déboutouoé,  avoir 
l'estomac  découvert. 

Duswaimé  (v.)  —  perdre  ses  plumes. 

Dusfriclé  (v.)  —  séparer,  démêler. 

Dauré  (v.)  —  s'élancer,  agir  avec 
vivacité. 

Dawme  —  attaqué  de  vertiges. 

Daurnai  —  vertiges. 

Dfvant  erso  —  devant  hier. 

Deulé,  adlé  —  auprès. 

Devantrin  —  tablier. 

Devousé  (v.)  —  tutoyer. 

Dia,à  dia  — tirer  à  gauche- 


liniiiiifi'    OU     tortiller   —    caresser. 

(lutter,  ciioyer. 
IHc/iippe  —  qui    use    beaucoup   ses 

habits. 
Dorre  —  taile . 
Doiifance  —  incertitude 
Doïr  — doigt  de  pied 
Drnne  (v.)  —  briser  les  reins. 
Drnnp  —  qui  va  de  travers,  qui  a  hs 

reins  brisés. 
Dresde  —  armoire  de  cuisine. 
Dugeaule  —  facile  à  conduire. 
Duxdu  —  tapage,  meubles  brisés. 
Drhurni'  (v.)  —  charger   de  saletés, 

d'immondices. 
Demoné  (v.)  —  gronder,  tapager. 
Diiagramné  (v.) —  arracher  avec  les 

ongles. 


Echelée   —    poignée,    brassée,  petite 

quantité. 
Emburlicoqiœ  —  déranger  les  idées. 

tromper. 
Engin  (sans  mal  engin) — sans  fraude 

ni  tromperie. 
Ensiwie  —  fumier. 


FariboUe  —  fable. 
Fêle  —  violent,  dur,  colère. 
Fauqiiet  —  manche  de  faux. 
Fauquette  —  fente    aux   jupes    des 

femmes  (mot  italien  fifhetti). 
Feases  — tringues  {sic)  de  plafond  ou 

de  parois. 
Fine  (v.)  —  trouver,  se  procurer. 
Fiquette  [pai)  —  terme  qui  vient  de 

l'italien  et  qui  se  prononce  sans  en 

connaître  la  signification  obscène. 
Fe)'i  (v.)  frapper. 
Flahau  —  flatteur,  amas  ou  quantité 

de  neige, 
Flabaudi  (v.)—  dire  des  mensonges 

ou  des  flatteries. 
Flabaudé  (v.)  —  touché  à  droite  et  à 

gauche. 
FZa«ie(v.)— battre  sansménagement. 
Flaubée  —  rossée,  correction. 
Flanche —  femme  qui  dit  des  riens. 
Flauclip  (v.)  —  dire  des  riens,  des  fa- 
bles. 
Flnnchcu  —  qui  dit  des   fables 

mensonges. 
Flachi{\.)  —  renverser  l'un  sur  l'an 

tre. 
Flahutte  —  femme  flatteuse  ou  qu 

conte  des  riens. 


Enainné —  fumer,  graisser  les  terres. 
Enginni  —  tas  de  fumier. 
Estelles  —  copeaux  de  bois. 
Ersot  —  hier. 

Enhairgne  —  maussade,  entêté,  dur. 
Œnron-cou  —  œuf  cuit  à  la  coque. 
Einnté  (v.)  —  casser  les  reins. 


F 


Flauwe  —  fable,  conte:  fade,  pares- 
seux, 

Foi'funé  (v.)  —  périr. 

Frairie  —  tour  joué  à  quelqu'un. 

Frint/nette,  frignette — fille  élégante, 
alerte. 

Friolc  l\.)  —  être  alerte,  joyeux,  tres- 
saillir. 

Friolv,  afliiolé  —  être  alerte,  gai, 
leste. 

Froiimigive  —  jatte  de  lait  avec  du 
fromage  blanc  et  du  pain. 

Friski/i  {s(ii7it)—  tout  ce  que  (|uel- 
tju'un  possède. 

Fnmelc  (v.)  —  choisir  ce  qu'il  y  a  de 
mieux. 

Furdaucld  (v)  —  battre  à  coups  de 
gaules. 

Furdaui'hfiin''  —  batterie  ou  évérie- 
nement  fâcheux. 

//  n'est  ni  in  fi  de  c/aiei/re  —  il  est 
entièrement  mouillé. 


Fouqni  {\.)  — fouiller, 
déplacer. 


des       Furniqiiii 


remuer,  déranger. 


Fraie  \y.)  —  craindre,  être  sensible. 
Flihou  —  chose  très-légère. 


\-,i 


1  )I  A  LEC  TES    MOI)  H  UNES 


G 


Gade  —  clièvre;  croix  à  souli-iiii-  Ir 
bois  pour  scier. 

(iaivé  (v.)  —  lirer  en  bourse 

Gaioiue —  cage,  prison. 

Galouff'é  (v.)  —  manger  indécemment. 

Gamhlon  —  bois  courbu  (.s'/c)  pour 
écarter  les  jambes  de  derrière  à  une 
bête  qu'on  a  tuée . 

Gambi  (v.)  —  écarter  les  jambes,  les 
remuer. 

Galfadre  —  vaurien,  grand  mangeur 

Galle  (v.)  —  gratter,  brouter  l'herbe. 

Gertcu  —  qui  a  les  genoux  de  lia- 
vers  . 

Germe  —  brebis  de  deux  dents. 

Giboulée —  nuée  de  grêle  ou  de  neige. 

Givée  —  flotte  de  bois, 

Glayn  [à)  —  à  foule,  en  quantité 

Glaitié  (v.)  —  répandre  par-ci  par-là. 

Glawerai  —  nappe  d'eau,  eaux  sta- 
gnantes . 

Glo  —  friand,  gourmand. 

Golippe  —  femme  malpropre  et  de 
réputation  équivoque . 

Gode  —  femme  sale  et  vilaine 

Godin  —  jeune  bœuf,  aumaille. 


Gommée  —enflure  sous  la  gorge;  vase 
d'écorce  d'arbre. 

Graboiii  (v.)  —  clialouilier,  gêner, 
faire  mal. 

Grauiré  (v.)  —  puiser  dans  quelque 
chose  en  pâte. 

Grawe  —  boue  gelée  et  fort  rabo- 
teuse. 

Graie  —  mince,  effilé,  élancé. 

Grandiveu  —  orgueilleux,  vain,  am- 
bitieux. 

Grevissi  (v.)  — talonner  à  la  manière 
des  écrevisses. 

Grivo  ou  çjrivolé  —  tacheté,  mar- 
queté. 

Grivou  —  ravin  par  lequel  on  entraîne 
le  bois  dans  les  montagnes. 

Grifjneu  —  qui  est  de  mauvaise  hu- 
meur. 

Grumer  —  gruger,  broyer  avec  les 
dents . 

Guigné  (,s-') —  rechiner,  faire  la  moue. 

Gmpié  — toucher,  heurter,  coudoyer. 

Guinyuin  —  grande  parure. 

Guaulnes  —  propos  désagréables. 


H 


Hahni  —  bruit,  criailleries.  querelles. 

Haclii  (v.)  — tirer  à  soi. 

Hagaron,  ha  guette  —  mauvais  cheval. 

Haingance  —  haine,  animosité. 

Httiti  —  bien  portant;  sain. 

Hailige — semblant,  feinte,  apparence. 

Hana  — vase  à  boire. 

Haleoti  —  mauvais  conducteur,  qui 
fait  de  mauvaises  affaires. 

Haleoté  (v.)  —  conduire  mal  ses  affai- 
res. 

Haleotée  —  petite  charée  [sic). 

Hareiigé  (v.)  —  quereller. 

Harengire  —  méchante  femme . 

Hakin  —  serf,  vassal,  homme  obscur. 

Marotte  —  mauvais  cheval. 

Haeait  —  mâle  qui  n'a  qu'un  testi- 
cule. 

Harnouder  (v.)  —  remuer,  déranger 
les  meubles. 

Har)/ir/ii  (v.)  —  agir,  ranger  k-s 
meubles. 

Haraudé  [v.)  —  crier,  faire  du  bruit. 

Haulaque  —  brigand,  vaurien. 

Halon  —  vieux  tronc  d'arbre  laissé 
dans  un  bois. 

Haniaule —  qui  rôde  autour  des  vil- 
lages pour  volei'. 


Handelé    (v.)  —    monder,     balayer. 

porter  le  fumier. 
IJamai  —  vieux  meuble. 
Halbutte  —   espèce    de    fusil  à  veut 

que  les  enfants  font  avec  du  sureau 

percé. 
Hairde  —  troupeau  de  vaches. 
Haïné  (v.)  —  répandre,  éparpiller. 
Haloppai —  guenille. 
Haloppe  —  femme  mal  mise. 
Halofjué,  haruoqué  —  remuer,  faire 

du  bruit. 
Haulou  —  serviette  dont  les  femmes 

se    coiffent    pour    se   garantir   du 

hàle. 
Hahnandé  (v.)  —  parler  d'une  façon 

inintelligible. 
Haloche  —  femme  qui  se  tient  mal. 
Holoté  —  ne  pas  être  ferme. 
Hanicrodie —  qui  s'arrête  partout. 
Handiné,  dandiné  (v.)  — balancer. 
Halarme( faire)  —  faire  haro,  tomber 

dessus. 
Herdal  —  chemin  par  où  lesbestiau.\ 

passent. 
Haroches  —  grosses  étoupes. 
Haskadar  —  vaurien. 
Hatrni  —  le  cou. 


LETTRES     A     GREGOIRK 


175 


tlazée  —  pas.  enjambée. 

Haijous  —  paravent  dont  sp  servent 
les  cliarbnnniers. 

Hausse  —  vente,  écriée  (sic). 

Hausse  (avoir)  —  être  pressé. 

llelpai  —  habillement  déchiré,  per- 
sonne mal  mise. 

Hautnelle  —  torche  faite  de  paille. 

Hast  —  desséché. 

Haimé  (v.)  —  frapper  à  la  tète. 

Hait/té —  marqué  au  front. 

tliTiii  —  gardien  des  vaches. 

H(')'é  (v.)  —  agacer,  exciter. 

Hrré  (se)  —  se  fourrer  partout. 

H'-rijai  —  guenille. 

Ili'vpc  —  amadou. 

Hesié  (v.)  — exciter  un  chien. 

Hcté  (v.) —  désirer  ardemment. 

llurdulé  (v.)  —  faire  du  bruit  avec 
des  meubles. 

Hurduli  —  qui  dérange  tout,  qui  fait 
du  bruit. 

Himine  —  fluet,  maigre. 

Hiolé  —  manger  après  la  veille. 

Herchi  (v.)  —  traîner. 

Iliti  —  que  dites-vous  ? 

Hisse  —  habit  de  toile  ou  de  Lirtniiie. 

Ilodé  (v.)  triciiei'  au  jeu. 

Hocleu  —  tricheur,  fraudeur. 

Hndaule — importun,  fâcheux. 

Hodé  (v.) —  fatiguer. 

Hoki  (v.)  —  béguer  {sic). 

Hokieu  —  bègue. 


Ho//é  (v.)  —  aller  et  venir. 

tlolli — àqui  tous  marchés  sont  bons. 

Hin'hée —  certain  espace  de  temps. 

Hoches,  hocliettes  —  tas  dt;  gazon 
mis  l'un  sur  l'autre  pour  sécliei'. 

Hourhallc  (v.)  —  traiter  durement. 

Houdrç  —  malpropre,  couvert  doi- 
dures. 

Houre  —  femme  de  mauvaise  vie. 

Houhi  —  gronder. 

Houijeux  —  couvert  de  poils. 

Houijous  —  crillards  {sic?)  qui  dan- 
sent en  criant  heu-hou. 

Foliaire  le  hou-hou  —  avoir  froid, 
être  malade. 

Houchi  —  appelei'. 

Houlfc  (v.)  —  parler  durement. 

Horlai  —  butte,  petite  éminence. 

Hureu  —  morfondu  de  froid,  de  ma- 
ladie ou  de  misère. 

Hufjné  (v.  )  —  ramasser  du  foin  en 
larges  tas. 

Ilngne  —  foin  ramassé  en  tas  plus 
larges  que  hauts. 

Huiné  —  un  bouillon  de  malade 

Hcurée  —  loufl'e  de  broussailles. 

Huii  (v.)  —  avoir  des  horreurs. 

Uosettes  —  quelles  faites  en  façon  du 
sas 

Hoseli  —  mal  chaussé. 

Huvé  —  qui  a  une  marque  à  la  tête, 
bigarré . 


1  -  J 


Incomparaule  —  incomparaJjle. 
Inçjenii   (v.)  —   chercher  dans  sou 

esprit. 
lolé  (v.)  — manger  après  la  veille. 


Jus  —  bas  (mettre  jus,  mettre  bas). 
Jouquettc,  jaquette—  cotte  ou  jupe. 
■loque  —  juchoir. 


K 


Kahow'de  —  bouteille  de  pierre; 
veille  de  fille  ou  de  femme,  bal  noc- 
turne. 

Kahu  —  têtu,  obstiné. 

Kuïaux  —  joujoux  d'enfants. 

Kalenijurdaines  —  balivernes. 

Kalenhwdiné — dire  des  balivernes 

Karouté  (v.)  —  aller  et  venir. 

Kermesse  —  fête  de  village. 

Kaure  —  liard. 

Kawet  —  petit  pot  de  terre  avec  un 
manche. 

Kerre  —  chercher,  prendre,  em- 
porter . 

Klabau —  criailleur. 

Klabot  —  sonnette  de  bœuf. 


Kranti{\.) —   vaincre,   épuiser   les 

forces  de  quelqu'un. 
Kranti  —  rendu,  épuisé. 
Kanles  —  gens  méprisables . 
Kahi  —  le  crâne,  la  tête, 
Kai  —  desséché,  dur. 
Kaire  —  couleur  du  visage. 
Ka/joré  (v.)  —  noircir. 
Kahauré  —  bigarré. 
Kaijurté —  brûler  les  jambes  près  du 

feu. 
Kourie  —  charogne. 
Kouaté  (v.)  —  désirer  ardemment. 
Kouateux  —  qui  désire  tout  ce  qu'il 

voit. 


176 


blALECTES   MODERNES 


Lniyne  —  bois  à  brûler,  copeaux. 

Laisse  —  une  volée  de  cloclies. 

Laitrie  —  cimetièr(\ 

Landstmaiie  —  compatriote. 

Lani  —  tas  de  bois  à  brûler. 

Laurme  —  miel. 

Launnian  —  pleureur. 

Lasse  —  foyer. 

Lauvau  —  la-bas  (26/). 

Louppe —  lèvre  d'en  bas;  [fouairi- 

la  louppe,  —  faire  la  moue.) 
Liquéfie  —  languette. 
Lechette  —  petit  morceau  à  manger. 
Liguette  —  petit  morceau  en  long. 
Lobhé  (v.)  —  caresser,  flatter. 
Lobben  —  flatteur,  patelin. 
Lauchené  (v.)  —  battre,  maltraiter  à 

coups  de  bâton . 
Laupigne  —  oiseau  de  proie. 
Loquette  —  bâton  avec  une  houle  en 

bas. 


La f 0)1  —  du  son. 
Loripi  —  vaurien,  traînard. 
Limé  (v.)  —  demander  sans  cesse. 
Lohai  —  gros  morceau 
Loiettes  —  jarretières. 
Loigne  —  niais,  diseur  de  balivernes. 
Loigneries  —  sottises,  foiies. 
Lopjiin  —  gros  morceau  de  viande. 
Losse  —  fainéant,  débauché. 
Losfries  —  discours  trop  libres. 
Louqué  (v.)  —  regarder. 
Lotisse  —  cuiller  à  pot. 
Lonzin  —  lent,  paresseu.x . 
Lonziné  (v.)  —  agir  lentement. 
Lumé  —  éclairer. 

Lumette  —  petits  copeaux  pour  éclai- 
rer 
Lukette  —  créneau  ou  petite  vitre. 
Luské  (v.)  —  loucher. 
Luskette  —  femme  qui  louche. 
Luskanl  —  louche. 


M 


Mal  apris  —  vaurien,  sans  éduca- 
tion 

Margoui  (v.)  —  mener  mal,  mal- 
traiter 

Mesbrigi  —  estropié. 

Mii'e  (  mettre  à  )  —  mettre  à  cheptel . 

Mesplege  —  qui  a  des  plaies. 

Migneron  —  ferblantier  qui  roule  les 
villages. 

Mitan  —  milieu . 

Mou/lasse  —  molasse,  tendre,  spon- 
gieux. 

Mougené  —  (v.)  travailler  mal.  sans 
propreté. 

MachurO  (v.) —  noircir,  sahr. 

Mâcherai  —  rhume. 

Mallette  —  panetière  de  berger. 

Mangon  —  cruel;  autrefois  boucher, 
bourreau. 

Mangonné  (v.)  —  faire  soufîrir. 

Maradr  (v.)  —  goûter,  manger  après 
midi. 

Malignan  —  méchant,  pervers. 

Malon  —  bourdon,  grosse  mouche, 
bourbillon. 

Margoui  (v.) — maltraiter  quelqu'un, 
houspiller. 

Mariaule  —  propre  à  être  marié. 

Ma7'é  (v.  )  —  donner  le  cauchemar. 

Méhin,  tnéha —  maladie  courante. 

Meing,  pourpjris  —  euclos  ou  jardin 
potager . 

Mello  —  nèfle. 

Mellier  —  uéflier. 


Mesquine  —  fille  de  cuisine. 

Merelle  —  cailloutage,  pierrette. 

Merlin  —  massue  en  forme  de  hache. 

Messie  (v  )  —  ne  pas  convenir. 

Mestumé  (v.) —  tomber  en  faute 

Messe — quartz  cristallisé;  h\i\.{meta) 

Messi  —  ban,  garde. 

Misée,  daniisce  —  qui  veut  goûter  d(^ 
tout. 

Mice  —  la  rate. 

Micé  (v.)  —  donner  un  coup  au  creux 
(le  Testomac,  qui  fait  tomber  sans 
respiration. 

Mi  —  hydromel. 

Miée — jatte  de  lait  avec  du  pain  brisé. 

Miraine  —  aigreur  dans  le  gosier. 

Misfanflute  —  homme  sans  consis- 
tance, vaurien. 

Mitte  —  chatte . 

Moliné  (v.)  — manger  à  toute  heure. 

MoVmée  —  taupinière. 

Mouui  —  méchant,  colère. 

Mouchon  —  lait  que  donne  une  vache 
chaque  fois  qu'on    lu  trait. 

Mougiii  —  manger. 

Mou  —  (niultum) . 

Motlée  —  pommes  cuites. 

Musai  —  friand. 

Musse  [y.)  —  faire  entrer  dans  un 
trou,  cacher. 

Mussot  —  trou,  cachette. 

Mourhii  (v.) —  chasser  les  mouches, 

Mulai  —  tas  de  foin. 


LFÏTRES     A     liRKGOlRE 


177 


N 


Nareu  —  qui  se  dégoûte  facilempnt. 
Je  n'ai  cure — je  ne  m'en  embarriis< 

pas. 
Naiveu  —  batelier,  iionime  d"eau. 
Tout  à  nawefte  —  tout  à  coup. 
Nésa  —  venez. 
Nés  in  que  — nul. 
Niau  —  uicliel. 
NirliP  —  sale,  dp'^oùlanl 


Nichefre  —  saleté. 

Sicli"rri(  —  sale,  vilain,  avare. 

Somme?  —  n'est-ce  pas? 

Noncffes  —  épingles. 

Sou  nier  —  étui  à  mettre  des  épin- 
gles. 

Soureli  —  terre  chargée  de  genêts, 
ou  bois  de  genêts. 

Signée —  nichée,  bande,  troupe. 


Oyeai  —  oiseau . 

Orson  —  morceau  de  pain. 

U>i7'e  —  lisière  de  bois. 

Orre  —  fleur  de  farine. 

Oucfté,  onrhafe  —  que  j':ii  fro 

Ourdon  —  partie  d'un  terrain. 

Ostnnf  —  autant. 

Osté  ou  arnon  —  clie/. 

O'é  dn  —  mais  oui. 

Orri  <\.)  —  trav;iiller. 


Ostel/erie  —  auberge. 
Ouvietti'  —  agneau  femelle. 
(h/f/f'itse  —  vieille  brebis  qui  n'a  point 

fait  d'agneau. 
O/iri/i/ii'.  —  dans   i  ■    iihhiii'uI    seule- 

<l/ti'  —  oui. 

Ole,    nia     —   aïe  1    vous    me     faites 
miil. 


Pachi  —  enclos 

Pnchon.  poisson   ~  glandée  où  il  y  ii 

des  porcs. 
Paltée — charge  une  pelle  (.s/''). 
Pallon  —  bètiie, 
Papiii  — bouillie  d'enfant. 
Parsouniers  —  cohéritiei's. 
Parcours,  entrecours  —  droit  dr  pâ- 
turage. 
Pnrdienne  —  per  Deum. 
Parmi  —  à  condition. 
Panni/ijr   —    ce    qui    se    payt?   pour 

mettre  un  cochon  à  la  glandée. 
I>iif/u/s   ou     /lufis   —  pâturage    com- 

iiuin. 
l'afar  —  sol;  une  rouelli'  de  punune. 
l'iirn/t/r  (\.) —  |)ass('r  la  nui!  s:in-  se 

eonchei-. 
Pazdi  —  Sfiiti.'r. 
Parti  (v.')   —  |)artager. 
Pastai  —  liourbier,  mortier 
Pasturai  —  pâtre 
Passée  —  pas. 
l'aurge  —  amas  de  fumier. 
Pargire  — enfoncement  cnï  un  met  le 

fumier. 
Paume  —  épis. 
Paumé  (v.)  —  venir  en  épis. 
Parpnunot  —  le  di-rnirr  des  petits. 
'  PecJieri — malheureux, qui  ni-  n'usit 

en  l'ien. 
Pénau,  péneu  —  triste,  honteux. 
Pequet  —  genévrier. 


Pefe/h's  —  hente  de  brebis,  et.... 

l'i'frai  —  jH'tites  poires   sauvages. 

Pestulé    -   fouler  au.x  pieds. 

Pirrée  —  amas  de  pieij'es. 

Pipé  (v.)  —  fumer  avec  une  pipe. 

Pipcu  —  fumeur. 

Pité  (v.)  donner  des  coups  de  pied. 

Pité  (v.)  —  piéter. 

Pl(i<cl,i)  —  llatteui',  hypocrite. 

Phiis  —  audiences  où  les  amendes  se 

.jugent. 
Plunrhi  —  gi'enier. 
Pailire   —  carrière. 
Parfis  —  panaris 
Pranglé  (v.)  —  se  dit    des    bestiaux 

(pii   se  reposent  à  midi. 
P/u/ige/ou  —  lieu  oii  les  bestiaux  se 

lassendjlent  poui'  se  reposer. 
l'ragnire  —  temps  (pu-    les   bestiaux 

se  reposent 
Ponre  —  pondre 
Poclii  —  tacher,  barlicjuiller. 
Porr/ii  —  gardien  des  porcs. 
Potef  —  petit  creux. 
Pofelle   -    petite    armoire    au-dessus 

de  la  cheminée. 
Piolé  (v.) —  se  plaindre,  se  lamenter. 
Pidlru  —  ijui  se  plaint. 
Pnsson  —  \  ase  à  boire  de  la  bière. 
Pouclielet  —  petit  cochon. 
Poutre,  pouliche  —  jeune  jument. 
Pouyon  — jeune  poussin. 
Proime  —  proche  parent. 

1^ 


I7j< 


DIALECTES    MODERNES 


Pouyi  (v.)  —  puiser. 
l'oiigiti  (v.)  —  pûif^ner. 
Prête  (v.)  —  se  faire  prêtre. 
l'ute  —  colère,  méchant,  revêche. 


l'fifuéf'  —  niellée  . 
l'iuH-Jiflé    (v.)  —  truie  qi 
petits. 


fait  des 


Q 


Qi/aire    —  ciiercher,     amener,     ap- 
porter. 
Quouniue  —  semblant,  mine 
Quant    ft    (jiKint   —  tout     à     cette 
heure. 


Rahcirhi  (v.)  —  abaisser. 

Racalagi  (v.)  —  accoster,  accueillir. 

Radressé  (v.)  —  mettre  les  grains  en 
javelles  sans  râteau. 

Rafferé    (v.)  —  enfoncer  la    charrue 
dans  un  champ. 

Rafiitté  (v.)  —  battre,  rosser. 

Ragaidi  (v.)  —  ragaillardir. 

Ragoicsté  (v.)  —  remettre  en  goût. 

Ragoi/té{\.)  — recueillir  des  gouttes. 

Rngroiilp  (v.)  —  gronder 

Rageiilé  (x.)  —  retirer  dans  un  coin. 

Raguinchi  (v.)  —  raccommoder. 

Rahmip  (v.)  —  herser  de  nouveau. 

Raheurée  —  vache  qui  a  fait  le  veau. 

Raine  —  grenouille. 

Rins   —  rameaux  pour  faire  des  ba- 
lais. 

Raiidé  —  grasseyer. 

Rallr  (v  )  —  retourner. 

Reclie  —  dur,  âpre,  grondeur. 

Rag limette  —  restant,  reliquat. 

Ras  m  —  gratin . 

Rakolagi — retirer,  recevoir  quelqu'un 
chez  soi,  dans  sa  maison. 

Ha/juiié  (v.)  —  répliquer  durement, 
résister  en  face. 

Ragiiette  —    femme    hardie,  querel- 
leuse. 

Rechi  (v.)  —  sortir. 

Remembfene  —  ressemblance. 

Ramirhe  —  qui  dérange  tout. 

Ramiini   (v.)  —  déranger,  déplacei', 
remuer. 

Rumo7i  —  balai. 

Ramoimé  (v.)  —  balaver. 

Rigollé  (v  )  —  glissé .' 

Rapniiaigi  (v.)  —  apaiser. 

Rec/tire  —   sortie  des  bestiaux  après 

midi . 
Rechiré  (v.)  —  mener   les   bestiaux 

aux  pâturages  après  midi. 
Rnpongni  (v  )  —  rattaqu(;r.  haltri-  de 

nouveau. 
Ranoiré  (v .)  — rendre  du  nerf. 
Ro/ii  (v.)  —  tousser  en  crachant. 


Qiiedre  (v .  )  —  cueillir. 
Qi/erri  (v.)  —  chercher. 
Qitoïe  (eatt)  —  eau  dormante. 
(Jneqiie   eô;   pas  des  cri  —  quelque- 
fois. 


R 


Rassajtiné  (v.)  —   lécher  ses  lèvres, 

les  sucer. 
Rassonré  (v.)  —  se  réunir  en  bande. 
Ratinde  (v.)  —  attendre. 
Ratoiiriti-  (v.)  —  battre,  arrêter,  faire 

retourner. 
Ratoiisd  —   recouvert  d'herbes   qui 

commencent  à  croître. 
Raille  —   instrument  pour  tirer  les 

liraises 
Riini'r  (v.)  —  ravoir,  n'prendre. 
Rane  —  créneau. 
Roui  (v.)  —  airacher,  déplanter. 
Rebiffé,  raljeijuc  (v.)  —  imposer  si- 
lence, répondre  durement. 
Rehoidé  (v  )  —  remettre. 
Reciné  (v.)  —  manger  après  la  veille. 
Reehandi  (v.)   -    réchauffer. 
Rucondoure  (v  ) . —  reconduire. 
Rede/il"  (v.  )  —  hérisser. 
RejoiK-klé  (v.)  —    remonter  vers   sa 

source 
Huskeure  (v.)  —  garantir,  sauver,  re- 
prendre. 
Reganlure  —  regard. 
Relaitchi  (v.)  —  relâcher. 
HekeiloK  —  tinette. 
Religiic  (v.)  —  dégeler. 
Relain  —  dégel. 
Remontrance —  soleil  qui  contient  la 

sainte  hostie. 
Reriiiis.sé  (v.)  —    se  cacher  dans  un 

trou . 
Rena/iciti  (v.)  —   remuer,   dérangei- 

les  meubles. 
Renaudé  (v.)  —  vomir. 
Reupé  (v.)  —  roter. 
Routi  —  chemin  par  uù  les  bestiaux 

passent. 
Ri'tiske/ire  (v.)  —  réchapper. 
Roniruiti  [\  )  —  regarder. 
Ragosse  (v.)  —  tige  de  chou. 
Ri f fier  (v.)  —  dépenser  vite. 
Rihotte,  rihotage  —  ripaille,  grandi- 
chère. 
Rihotté  (v.;  —  tain-  ripaille. 


LETTRKS    A    GREGOIRE 


179 


Hirlé  {\.)  —  ôlcr  le  comljlc. 

liiné  (v.)  —  détacher  les  feuilles  en 
glissant  la  main  le  lonj;  des  bran- 
ches. 

Romiim'  (v.)  —  ruminer. 

liusfai  —  râteau. 

Hustfllé  (v.)  —  râteler. 


liuittjt'fti  —  racloire. 

RotH/elv  (v.)  —  passer  la  racloire  sui- 

la  mesure. 
liiiin-i/sn'  —  qui  oublie  facilemeut. 
Ruiue  (v.)  —  ronger  avec  les  dents. 
Ruspaumë  (v.)  —  rincer. 


Snrmitex — beaucoup,  plusieurs,  mul- 
titude. 

Saif/ni  (v.)  —  l'aire  le  signe  de  lu 
croix. 

Saijuhi  ou  Sahaie  —  je  serais  bien 
étonné  si. . 

Saije  ou  Sëai  —  seau,  vase. 

Sui  (v.)  —  goûter,  essayer. 

Samhridiet — juron  sans  signification 
connue. 

Santicaide —  sain,  propre  à  entretenir 
la  santé. 

Saqué  —  chose  de  rien.  Saque  çjens 
—  gens  de  rien,  méprisables. 

Satires  —  terres  incultes  qu'on  essarte 
pour  les  brûler;  du  verbe  sauve)', 
dessécher. 

Sawira  —  os  plein  de  moelle. 

Sfjaré  (v.)  —  l'aire  peur. 

S/juré  —  se  dit  d'un  chariot  dont  les 
essieux  sont  usés  et  ne  remplissent 
plus  les  moyeux. 

Sfjlai-é  —  éploré,  triste,  décoloré. 

Scra/joui  (v.)  —  racler  un  tison  en- 
flammé, exciter  le  feu. 

Sareinouchi  —  moucher,  cracher, 
tousser  à  la  fois. 

Srhehiii;  —  Irattre,  scélérat  (mot  alle- 
mand ) 

Sculot  —  aide,  valet  du  pâtre . 

Sralofé  (v.)  —  gar'der  le  bétail  sous 
l'inspection  du  pâtre. 

Srafic  (v.)  —  tirer  les  fruits  de  leur 
coque,  faire  prestement  une  chose. 

Scaf'ai  —  coque  dure  comme  de  noix. 

Scaflotte  — coque  mollasse  ou  gousse. 

Scraifi — écaille  d'œnf. 

Scraifi  —  déjà  grandelet. 

Scornai  —  éclat,  écornure. 

Scorné  {\ .]  —  écorner,  casser,  nui- 
tiler. 

Sérain  —  écrin,  armoire  à  mettre  le 
pain . 

Sefai  —  seau,  vase. 

Shuré  ^v.)  —  épouvanter. 

Sbavat  —  épouvantai! . 

Sbrougiù  —  éraousser  la  pointe. 

Seeheron  —  tarte  sèche  ou  mau- 
vais pré. 

Scoté  (V.)  — couper  les  branches. 

Selle  —  chaise. 


S(mt)io>i7-e  (v.)  —  annoncer,  ave  rtir, 

Spani  (v.)   -  serrer. 

.s"/e,s7  —  oui,  la  chose  est  ainsi. 

Slo-i/i/i:'  —  crinière. 

Soque,  soquette  —  tronc  ou  souche. 

S'nasé  —  camus. 

Sto  —  souche. 

Soron  —  associé,  compagnon . 

Sn/ire  —  troupeau  de  cochons. 

Siturjne  —  soin. 

Souaii  ou  suile  —  seigle. 

SelaDtùofjne  —  qui  est  de  travers, 
plus  haut  d'un  côté  que  de  l'autre. 

Slambranl  —  soleil  couchant. 

Snmieu.r  —  triste,  de  mauvaise  hu- 
meur. 

Spalanti  (v .)  —  tenir  debout  comme 
un  piquet. 

Stempi  —  idem . 

Spande  (v.)  —  répandre. 

Spa7ii  (v.)  —  sevrer. 

Spirai  —  armoire  à  serrer  le  pain. 

Siiaté  (v.)  —  écraser. 

Spi)igi  (v.)  —  écouanger  le  chanvre, 
battre . 

Spité  (v.)  —  trépigner,  s'impatienter, 
dépiter. 

S/)ifa>it  —  qui  se  fâche  facilement. 

Spinceron  —  étincelle  de  feu,  pico- 
tement. 

Stinrhe  —  digue  d'étang. 

Stinehi  (v.)  —  étancher. 

Stolon  ou  Roiicin  —  cheval  entier. 

Sf elles  —  copeaux  de  bois. 

SfeuUes  —  chaumes 

Stiqué  —  coudoyer,  pousser. 

Sfitjiu'rminile  —  mande  dont  se  ser- 
vent les  brasseurs. 

Stiprc  —  petit  espace  de  temps. 

St<i<-h<i  —  l'Iiiiusson  de  laine. 

Sfitf/'rf  —  fromage  mou. 

Stoupé  (v) —  boucher. 

Sfrafjne,  stra;/nire — étranger  qui  lait 
des  façons. 

Staicrc  (v.)  —  répandre. 

Sfrain  —  paille. 

StatJieau —  bouc  châtré. 

Sfrau/e  ou  sfri/'é  —  battre,  maltrai- 
ter. 

Strie  —  étrille. 

Sfrii  (v.)  —  étriller. 


180 


11IA.LECTES  MODERNHS 


Strichi  (v.)  —  se    redresser,  s;^  tenir 

droit. 
Strime  — étrenne. 
Strimi'  (v.)  — étreuner. 
Stritlp  (v.) —  frotter  fort,  battre. 
Stni/liii  — piHite  écurie. 
Sfo/i'ii  —  Iriiciiée. 
Su/j/iasti'   (v  )    —   vendre  des  iiéri- 

tages  au  cri  pul)lic. 
Saurmougni  (v.)  —  s'impatienter,  se 

dépiter. 


Sizettu^  —  des  ciseaux. 
Susoti  ou  Su<inon  —  sureau. 
Sconrire  —  arnas  de  neige. 
Scornifleu  —  piqueur  d'assiettes. 
Sniiie  —  reste  du   fourrage  que    le 

bi'tail  ne  mange  pas. 
Sauj/e  (v.)  —  ne  pas  manger  tout  ce 

qui  est  offert. 
Sgrimii  (v.)  •  -  se   gratter  avec    ses 

liabits. 


Tachette  —  petit  morceau    qui    reste 

après  que  le  terrain  est  partagé. 
Taichi  (v.)  —  tacher. 
Tahuré  (v.)  —  dire  sans  fin. 
Tabure  —  femme  qui  dit  sans  fin. 
Taroi/ge,  taroKiji  —  idem. 
Taquin  —  prompt,  colère. 
Tartelle  —  crécelle. 
Tartullé  (v.)  —  faire  crier  la  crécelle. 
Tassai  —  tas  de  gerbes. 
Tasticoté  (v.)  —  criailler,  tapager. 
Taulle  —    table.    S'attaulé    (v.)  — 

s'attabler. 
TauUé  —  petite  nappe   dont   se  ser- 
vent les  paysans. 
Taupin     —    homme     lent»     massif, 

lâclie. 
Tanfirt-ux    —   qui    désire    tout    ce 

qu'il  voit. 
Terrninaire  —    religieux  qui  prêche 

dans  un  arrondissement. 
Teriniiie  —  terme  de  payement. 
Tachon  —  blaireau. 
Tronce — corps  d'un  gros  arbre. 
Tinau  —  bâton    à  porter  un   cuvier; 

homme  pesant,  mal  dégourdi. 
Tille  ou  aupi  —  rugir. 
Ti/fr;  afliffé  (v.)  —  coiffer. 
Tiquette  ou  tidette  —  toile  d'oieil- 

ler. 
Tutaine  —  sorte  de  droguel. 
Taquet  —  homme  court  et  gros. 
Tûlli  (v.)  — ôter,  détruire. 
Tostiné  (v.) —  réchauffer,  caresser. 
Tomioure  —  tonnerre,  la  foudre. 
To<iui'  (v.) —  hurler,  frapper. d:iiii)pr. 
Taudis  — toujours. 
Toute  {y. j —  mettre  sens  dessus  di's- 

sous. 
Taui/aii  —  lorciiou  (au  figuré). 
Taurtai  —  petit   gâteau,  petit    pain, 

michot. 
Taie  —  toile  de  paillasse. 
Tout  à  pont  — au  point  préci>. 
Tout  à  nawette  —  tout  à  coup. 
Tùuzp  —  tonde. 


Taxon  —  mauvais  sujet. 

Traque  —  enceinte    d'hommes   pour 

chasser  le  gibier. 
Troqué  (v.)  —  poursuivre  le  gibier. 
Traij'cu     —  pelle     à     feu     {trahrru 

i<inem,. 
Trappp  —  épais,  large,  dodu. 
Travure  —  grenier  à  foin,  gerbier. 
Trikouage  —  tenaille  pour  arracher 

les  clous. 
Treimpence  —  patience,  modération. 
Trpuiiip  (v.)  —  trémousser. 
Tourfau  {onines). 

Tursai  —  tas  de  gerbes  aux  champs. 
Trihoulé  —  troubler,  remuer,  agiter. 
TrUtoli'tte —  petit  vase  à  boire  de  la 

bière. 
Trihollé  (v.)  —  sonner   les   cloches, 

carillonner. 
Trifjaudé   (v.) —  mêler  les  boissons. 
Triqaudeu  —  qui  mêle  les  boissons. 
Triqauderie —  mélange  de  boissons. 
Triuuir  —  bruit,  fracas 
Trimé  (v.)  —  marcher  vite. 
Triu  —  bruit,  fracas. 
Tri7}trin  —  chignon,  mauvais  joueui' 

de  violon. 
Trinlé  (v.)  —  aller  el  venir  dans  les 

champs. 
Triât  —  chi'Mip  (indn    ensemence  en 

menus    grains    pour    la    troisième 

fois. 
Tripotfé  (v.)  —  faire  le  ménage. 
Trajiai  —  troupeau. 
Trumnlé  (v.)  —   passer  les  nuits  au 

yy\. 
Truijties,    (•(inaduK.r  —  jKunines    de 

li-rre. 
Tujiiu  ou  ta]iiu  —  vase  quelconque. 
Tusr  (v.)  —  pensé,  être  distrait. 
Ti')iflé[\.) —  respirer  avec  ditticiillè. 
Idi/e    ou    Tauj/pffc   —   gamelle    de 

terre. 
Tout  à  hanti'té  —  tout  arrangé,  tout 

entier. 
Taloche  —  gros  morceau  de  pain. 


LKITRES    A    GREGOIRE 


isl 


r  -\ 


Uche  —  porte . 

i'citi  (v.J  —  ouvrir    souvtuU  la  [lorte, 

sortir  et  rentrer. 
Ih'aii  —  homme  farouche. 
ViirJiai  —  iramelle   di-  bois,  cercueil. 
Viu/ant  —  laborieux,  aimable. 
\'iii>-/es  —  vitre.<. 
Vt/lrt  —  ji'une  garçou,  uoq  marié. 
Viiiirh't  —  domestique. 
Vaulvi  —  être  en  visite. 
Vegin  —  voisin. 
Vpginr   —  voisiner. 
Vi-ntion  —  volet  de  fenêtre. 
Verd.in  —  canne    avec   un  poit;nard 

caché 


\'('s/)rre  —  l'après-midi. 

\'i;/u!i  —  bourreau,  homme  dur.  qui 
i'ait  souffrir. 

Vii/outir  (v.)  —  faire  souffrir. 

Vii/iid  (v.)  —  vivre. 

\'if/>iairiex  —  victuailles. 

Vidase  —  vaurien. 

]'i)ia;/e  —  assemblée  des  habilauLs 
d'un  village. 

Viréex  —  terres  sortables  qui  se  par- 
tagent entre  les  habitants  d'uue 
commune  chaque  fois  qu'on  les  cul- 
tive. 

lV(.s-.s-  —  votre. 

Void-ci  —  le  voici. 


w 


Warbe  —  haie  morte,    faite    de   bois 

coupé. 
Wnien —  regain,  labour  d'automne. 
Wnvokai  —    bois   rond   qu'on    jette 

iqjrès  lies  arbres  pour  abattre  des 

fruits. 
Wnrandi —  cacher,  garder,  défendre. 
WarcolU  —  bourrelier,  sellier. 
Wargai  —  amas  d'eaux  stagnantes. 

bourbier. 
W'art  —  verre,  gobelet. 
Waurde  —  garde. 
Waio'dp  (v.)  —  garder. 


Wriifi  (v.)  —  regarder. 

W'arhe  —  ban,  fi  nage,  triage. 

]\  /i/ri'  —  pluie  d'orage. 

\\'i/s/ii^  —  giièpe. 

Wdndc —  femme  paresseuse,  sale. 

Wandri  —  traîner  dans  la  boue,  en- 
foncer dans  l'eau  par  différents 
mouvements. 

\\  cz  —  gué,  passage  d'une  rivière. 

\\  inngc  —  droit  de  bourgeoisie. 

W(i! — cri  d'étonnement. 

WaluiH  —  n"est-il  pas  ainsi  ? 


Yauqiie—  quelque  chose. 


Conjugaison  des  verbes  -wallons 

en  usage  dans  le  duché  de  Bouillon. 


VERBES    AUXIU.VIRES 


Être  Avoir 

Infin.  présent 
Ess.  Awere. 

Parfait. 
Awere  esté.  Awere  oyeu. 

Futur 
Dewerees-.  Dewere  awere. 

Partie,  présent 
Estant.  » 


Être  Avoir 

Partie,  parfait 


Esté , 

<Jyeu . 

Indii: 

P 

'ésejit 

,1e  su 

.l'ai 

T'est 

T'est 

Il  est 

Il  est 

•l'estan 

•l'en 

Veste 

V'so 

1  son. 

il  ont. 

182 


DTALECTl'îS    MOOERKES 


Être 


Avoir 


Imporf'ait 

J'esto 

Javo 

T'esto . 

T'avo 

Il  esto 

Il  avo 

J'estin  ou  j'erin. 

J'avin 

V'esti 

V'savi 

Il  estin  ou  il  erin.Il  avin. 

Par- fait  défini 

.|p.  furi  J'ori 

Te  furi  T'ori 

I  furi  II  ori 

Je  furin  .roiia 

Vou  furi  V'sorin 

I  furin.  11  crin. 


Parfait  indéfini 


J'ai 
T'est 
Il  est 
J'en 
V  savez 
Il  ont 


sté 


J'avo 
T'avo 
Il  avo 
J'avin 
V  savi 
II  avin 


Je  serai 
Te  serott 
11  seret 
Je  seran 
V  zseré 
Il  seront 


Pus-que-Parfait 


Futur 


J'aurai 
T'auret 
II  auret 
J'auran 
V  zauré 
11  auran 


Futur  passé 


J'aurai 
T 
11 

J'auran  i 
V  zauré  ) 
Il  auran 


'aurai      ] 
',  ^"'■^^   >  sté 


Conditionnel  présent 


Je  seros 
Te  sero 
1  sero 
Je  serin 
Vous  seri 
I  serin 


J'auros 
T'auro 
Il  au  m 
J'aurin 
V  zauri 
Il  riiirin 


Être  Avoir 

Second  Conditionnel 

J'auro  — 

T'auro     i  — 


11  auro 
J'aurin 
Vousauri 
Il  auri 


lunl 
n     I 


sté 


oyu 


Impératif 


So 

Qui  so 
Soyenge 
Soyenge 
Qui  suringe 


Uge 

QuMl  uge 

Uchant 

Uchi 

Qu'il  uchenche 


Subjonctif  présent 

Que  j'  soie  Que  j'uche 

Que  t'  soie  Que  t'uche 

Qu'il  soie  Qu'il  uche 

Que  j'  soyenge  Que  j'usinge 

Que  v'  zsoige  Que  v'  zuchi 

Qui  soyenge  Qu'il  uchinge 


Imparfait 


Que  j'  furiche 
Que  t'furiche 
Qu'il  furiche 
Que  j'  furinge 
Que  v'furige 
Qui  furinge 


Que  j'uriche 
Que  furiche 
Qu'il  uriche 
Que  j'uringe 
Que  v'urige 
Qu'il  uringe, 


sté 


Parfait 

Que  j'uche        I 
Que  t'uche        f 
Qu'il  uche 
Que  j" uchinge 
Que  v'uché 
Qu'il    uchinge 

Plus-que-Parfait 

Que  j'uriche 
Que  furiche 
Qu'il  uriche  v  . . 
Que  j'uringe 
Que  v'urirhe 
Qu'il  uringe 


—         \ 


_     i  oy" 


Que  v'urigeX 
Qu'ils  urinchenl' 


Verbe  Aimer 


Indicatif  présent 

J'aime 

T'aime 

Il  aime 

J'aiman 

V  saimé 

Il  aimant 


Imparfait 

J"aimo 
Taimo 
Il  aimo 
J'ai  min 
V  saimi 
Il  aimin 


LETTRES    A    GREGOIRE 


l«i3 


Parfait  défiiri 

J'airaa 
T'aima 
11  aima 
J"aiinin 
V  aimi 
11  aimin 


Futur 

J'aimerai 
T'aimeret 
Il  airaeret 
J'aimerao 
V  s'aimeré 
n  aimerau 


Parfait 

J'ai 
T'est 
il  est 
Javans 
V  savez 
11  ont 


indéfini       Futur  pasxc, 

'  J'aurai      i 

(  T'aiii-et    / 

Il  auret 
J'aiiraii    l 
V  sauré  ^ 
11  aurant 


aimé 


aimé 


Plus-cfue-Parfait  Condit.  premier 


J'avo 
T'avo 
Il  avo 
J'avin 
V  s'avi 
Il  avin 


J'aimeros 
T'aimero 
Il  aimerd 
J'aimerin 
V'zaimi 
Ils  aimerin. 


Condit.  second 

J'auros 
T'auro 
Il  auro 
J'aurin 
V'sauri  V 
Il  auriii  ' 

Impératif 

Aime 
(^u'il  aime 
Aimant 
Qu'il  aiminge 

Suljjnnct.  présent 
et  imparfait 

Que  j'aime 
Que  t'aime 
Qu'il  aime 
Que  j'airainche 
Que  v'zaimiche 
Qu'il  aiminche 


Parfait 
Que  j'euciie 
(iu(t  f  uche 
Qu'il  uche 
Que  J'uchiiigc 
Que  v'zuchif;e 
Qu'il  uchiuge 


Plus-que-Parfait 

I 


Que  j  uriclie 
Que  t'uriche 
Qu'il  uriclie 
Que  j'urin{<e 
Que  v'zuriclie 
Qu'il  urinche 


Infinitif  préxent 
Aimé 

Parfait 
Awere  aimé 

Participe  présent 
Aimant 


Les   autres    temps  manquent.  Les   verbes   en  were,  re,  ir,  sont  presiiur 
tous  irré^uliers. 


Observation.  —  Les  lettres  u,  g,  i  et  ch,  se  prononcent  à 
l'anglaise  ;  c'est  de  leur  viaic  prononciation  que  dépend  la 
beauté  de  l'idiome 

Cet  ouvrage  ne  doit  être  regardé  que  comme  un  aperçu 
très-imparfait  du  vocabulaire  wallon.  Les  mots  ne  se  trouvent 
même  pas  à  leur  place,  et  il  en  manque  une  grande  quantité. 
Si  j'ai  un  jour  le  temps,  je  perfectionnerai  ce  petit  ouvrage. 


A  Beiievaux,  26  février  1792. 


UN  CONTE  DAUPHINOIS 
SUR  LE  LOUP  ET  LE  RENARD 


Une  version  de  ce  conte,  notée  à  Belesta  (Ariége),  a  été 
publiée,  dans  le  numéro  d'avril  1873  de  \a  Eevue  des  langues  ro- 
manes, par  MM.  Montel  et  Lambert,  et  reiiroduite  par  eux  dans 
le  premier  fascicule  de  leur  ouvrage;  Littérature  populaire  du 
Languedoc   Petites  Compositions  populaires  ;  Montpellier,  1873,  in-8°. 

Notre  version,  recueillie  à  Saint-Maurice-de-l'Exil  (Isère),  en 
diffère  seulement  par  sa  conclusion,  où  le  loup  e-t  une  seconde 
fois  victime  de  la  ruse  du  renard, 

Maurice  Rivière. 

LOU  LOUP  ET  LOU  RÉNOR 

Où  tems  van  le  bétse  parlovan,  lou  Loup  et  lou  Rénor 
ayant  prâ  per  ansan,  lou  pruet  fa  à  besso  ina  târra,  per  se- 
mé no  de  trueffe. 

Lou  Rénor  ayié,  per  mijaglie,  la  méto  dsin  vie  pouluet 
roubo  à  in  poulaglié  vésin ,  et  lou  Loup  in  pouot  de  miei- 
arpiglia  dsan  la  cuesuena  dsin  vie  chotso. 

Présso  de  vîtou  figni  gliou  oùra,mé  que  mié  de  glioù  bésse, 
i  soulevovan  le  carriche.  Gliou  boura  fumove  ;  glioù  mourrou 
suovan.  et  éran  rintri  per  glioù  travâ  acliueno. 

Cependant,  en  bessan,  lou  Rénor  pensove  (in  Rénor  pense 

LE    LOUP  ET   LE   RENARD 

Au  temps  où  les  IxHes  parlaient,  le  Loup  et  le  Renard  avaient 
ensemble  pris  à  tâche  un  cham[)  à  bêcher,  pour  planter  des  pommes 
de  terre. 

Le  Renard  avait  pour  pitance  la  moitié  d'un  vieux  coq  dérobéà  un 
poulailler  voisin,  et  le  Loup  un  pot  de  miel  sournoisement  soustrait 
dans  la  cuisine  d'un  vieux  manoir. 

Désireux  d'achever  au  plus  tôt,  leur  besogne,  à  qui  mieux  mieux 
lie  leurs  hèches,  ils  soulevaient  les  mottes  de  tf  rre.  Leur  poil  fu- 
mait; la  sueur  goutte  à  goutte  descendait  sur  leurs  museaux  rac- 
courcis par  l'ardeur  du  travail. 

Cependant,  en  bêchant,  le  Uoiianl  pensait  , un  renard  pense  tou- 


TN    CONTE     DAUPHINOIS  185 

loujour  à  ruso)  où  mouyan  do  plico  loù  coutso  de  mier  apet- 
suessan  qu'amplissovan  lou  tsepin  adsi  per  lou  Loup.  La  cha- 
ripa  ne  charchuet  po  longtems:  où  se  rapeluet  dsuena  viéglie 
pérola  dépouso,  per  asor,  dsan  ina  clierson  pré  de  glioù 
prouvision.  Où  se  couluet  en  cachetta  vé  la  pérola,  et  avé  ina 
piéra  où  se  bettuei  à  boudeyié. 

Lou  Loup,  tro  annourcha,  dsuessuet  où  Rénor,  quand  où 
revenue!:  «  Que  zia-t-é  donc,  compère?  —  Mai,  repondsuet 
quéquet,  j'ayin  oùbliya  de  te  dsuere  qu'itsin  batéraou  qui 
sonon,  van  je  se  invueto  per  être  lou  paran,  et  j'y  courou!  )> 

Lou  drôlou  reprend  lou  chamin  délia  clierson,  et  boufe 
lou  tser  doù  pouot  de  mier. 

A  son  retour,  lou  Loup  gli  demanduet  lou  nom  dôu  motri  : 
Jesquacoiiâ!  repondsuet  lou  Rénor;  et,  arapan  vsa  béssa,  où 
contsuenuyuet  son  travâ. 

In'ura  apré,  la  clioche  d'sin  vuellajou  vésin  sounuet,  et  lou 
Renor,  reglico  per  la  douceur  doù  mier,  dsi  où  Loup  :  «  Tsan  ! 
itsincore  in  batémou  van  je  se  invueto.  J'é  bian  de  paran;  la 
séson  dsan  ma  famiglie  a  éto  bian  dria  !  Lou  tems  d'allo  et  de 
revegni.  Contsuenuye  souluet  lou  travâ;  je  tocherâ  mouyan  de 
t'adsîre  quoque  z'où  à  roùgé.   o 

jours  à  ruser)  au  moyen  de  s'approprier  les  rayons  do  miel  appé- 
tissants qui  remplissaient  le  pot  apporté  par  le  Loup.  Le  madré  ne 
chercha  pas  longtemps  :  il  se  souvint  d'un  vioux  chaudron  déposé, 
par  hasard,  dans  une  haie  auprès  de  leurs  provisions.  11  se  dirigea 
en  tapinois  près  du  chaudron.,  et.  avec  un  caillou,  il  imita  lo  son 
d'une  cloche  que  l'on  carillonne. 

Le  Loup,  très-occupé  à  sa  besogne,  dil  au  Renard,  quand  il  revint: 
«  Qu'y  a-t-il  donc,  compère?  — Tiens!  lui  réiiondit  celui-ci,  j'avais 
oublié  de  te  dire  que  c'est  un  baptême  (|ue  l'on  sonne,  où  je  suis 
invité  d'être  parrain,  et  j'y  cours  !  » 

Le  drôle  prend  le  chemin  de  la  haie  et  happe  le  tiers  du  pot  de 
miel.  A  son  retour,  le  Loup  lui  demanda  le  nom  de  l'onfant  :  Jus- 
qu'au cou!  répondit  lo  renard;  et,  reprenant  sa  bêche,  il  continua 
son  travail. 

Une  heure  après,  la  cloche  d'un  village  voisin  sonna  et  1"  Renard, 
alléché  par  la  douceur  du  miel,  dit  au  Lou|i  :  «  Mais  c'est  encore  un 
baptême  où  je  suis  invité;  j'ai  beaucoup  do  parents,  oi  l'année  dans 
ma  famille  a  été  très-fertile  !  Le  temps  d'iller  et  de  revenir.  Con- 
tinue lo  travail,  je  tâcherai  do  te  raiiportor  quelques  os  à  ronger.  » 


18(3  DIALECTRS    MODERNES 

Mons  Renor  retorne  ou  tsepin  per  lou  regrabouto.  Apre 
s'être  bian  benésia,oà  revian  oùpré  doù  Loup,  que  gli  demande 
lou  nom  deir  efan  :  Jesquamiâ!  où  repondsuet,  en  gli  dsuesan 
que  la  char  san  z'où  ne  pouyé  po  s'adsîre  façuelam'an  dsin 
guleton  ! 

Lou  poùrou  Loup  dégoutove  et  barbelove  apré  lou  goùto. 

Son  compagnon  ne  poujan  resuesto  à  sa  groumandsise,  re- 
torne alla  ciierson  per  nesenéque,  pique  incore  si  la  pérola, 
et  revian  en  couran  annoncié  où  Loup  in  trâsiémou  batémou; 
tout  en  fassan  la  catamouoche,  où  gli  dsuessuet  de  z'iallo  et 
se  rebette  alFoùra. 

Lou  grouman,  en  quoque  tour  de  linga,  fignià  lou  pouot  de 
mier,  et  revian  en  se  glichan  le  babuene,  et  en  dsuesan  que 
lou  motri  s'apelove  :  Jesquaki! 

Lou  Loup,  délavouro  per  la  sa  et  meran  de  fam,  prépose  où 
ruso  d'allo  goùto. 

Quéquiet,  qu'ayié  guiegnia  ail'  avance  iua  caborna  dsan  ina 
téta  de  revou,  pré  délia  târra  qui  bessovan,  suivie  lou  Loup, 
Toùreglie  où  guet  et  lacoua  bossa. 

Mons  Renard  retourne  au  pot  de  miel,  qu'il  attaqua  de  nouveau. 
Sa  gourmandise  satisfaite,  il  revint  auprès  du  Loup,  qui  lui  de- 
manda le  nom  du  nouveau-né:  Jusqu'au  milieu!  répondit-il,  en 
lui  disant  que  la  viande  désossée  ne  lui  avait  pas  permis  de  lui 
rapporter  le  moindre  relief  du  festin  ! 

Le  pauvre  Loup  suait  et  attendait  avec  impatience  le  moment 
du  goûter. 

Cependant  son  compagnon,  ne  pouvant  résister  à  sa  gourman- 
dise, retourne  à  la  haie  sous  un  prétexte  quelconque,  frappe  de 
nouveau  sur  le  chaudron  et  revient  en  courant  annoncer  au  Loup 
un  troisième  baptême.  Celui-ci,  mécontent,  accède  néanmoins  à  la 
demande  du  Renard  pour  y  assister  et  continue  sa  besogne. 

Le  gourmand,  en  quelques  tours  de  langue,  acheva  le  pot  de 
miel  et  revint  en  se  léchant  les  babines,  disant  que  le  petit  s'ap- 
pelait :  Jusqu'au  fond  ! 

Le  Loup,  dévoré  par  la  soif  et  mourant  de  faim,  proposa  au  rusé 
d'aller  manger. 

Celui-ci,  qui  avait  visé  à  l'avance  un  trou  dans  une  cépée  de 
chêne,  près  de  la  terre  qu'ils  bêchaient,  suivait  le  Loup,  l'oreille 
au  guet  et  la  queue  basse. 


UN    CONTE    DAUPHINOIS  187 

Quand  lou  sire  Roùgefejas'apercevuet  délia  força  de  son 
compère,  où  gli  couruet  dessi  per  Testourbo;  mai  lou  Rénor 
subtsuelaman  s'ansoùvuet,  doù  lo  doù  pertsi  dalla  téta  de  re- 
vou. 

Courajà  de  pré  per  lou  Loup,  mogré  qu'oùU'ére  lâstou,où  se 
jetuet  dsan  lou  pertsi,  mai  po  suetvîtou  que  lou  Loup  courajé- 
rou  [)oussuet  gli  arrapo  ina  piotta  de  derrâ. 

1  façuelou  de  juger  dell'  embarras  de  Crocapoula,  que,  per 
touta  consoulacion,  ayié  ina  courla  d'cga  vuenégro  dsan  se 
griffe,  et  qu'où  pourtove  à  sa  gorge,  à  choque  breyuet  délia 
dent  dôu  loup,  menaçan  degli  coupo  lapatta. 

Mon  ruso  couquin,  que  sajié  suet  bian  broujé  toù  loù  tour 
poussueblou  en  plagne,  se  trouvove  prâ  délia  bouna  ma- 
nière. 

Enfin,  foù  de  douleur,  i  gli  vian  in'  idé...  Se  redressan  avé 
éfor  et  montran  sa  courla  où  Loup,  gli  dsi  : 

«  Avisa,  pendant  que  je  bevou, 
Te  tsuere  la  raje  doù  revnù!  » 

Lou  Loup  vouçuet  proutesto  et....  on    devuene  lou  ràstou  î 
V adresse  a  toujours  pi^uemo  la  force,  et  lah^ûsa  la  houna  fâ... 

Quand  messire  Maniïe-Brebis  s'aperçut  de  la  supercherie  de 
son  compère,  il  courut  sur  lui  pour  se  venger  ;  mais  le  Renard 
subitement  prit  la  fuite   et  se  dirigea  vers  le   trou  de  la  cépée. 

Serré  de  près  parle  Loup,  malgré  son  agilité,  il  se  jeta  dans  le 
trou, mais  pas  si  prestement  ([ue  le  Loup  ne  lui  attrapât  une  patte 
de  derrière. 

Il  est  facile  de  juger  de  l'embarras  de  Croque-Poule,  qui,  pour 
toute  consolation,  avait  une  gourde  d'eau  vinaigrée  dans  ses  griffes 
et  qu'il  portait  à  sa  bouche  à  chaque  contraction  de  la  dent  du 
Loup,  menaçant  de  lui  couper  la  patte. 

Mon  rusé  cocjuin,  qui  savait  très-bien  imaginer  tous  les  tours 
possibles  en  rase  campagne,  se  trouvait  pris  de  la  bonne  manière. 

Enfin,  fou  de  douleur,  il  lui  vint  une  idée;  se  redressant  avec 
effort  et  montrant  sa  gourde  au  Loup,  il  lui  dit  : 

«  Regarde!  pendant  que  je  bois, —  tu  serres  la  racine  du  chêne!  » 

Le  Loup  voulut  protester,  et. . . .  on  devine  le  reste. 

L  adresse  a  toujours  primé  la  force,  et  la  rvxe  la  hanne  foi. 


UROUS    NAUFRAGE 

AV      PRESIDENT     MAX      DE     LA     BAUMO 

Èro  un  bèu  jour  d'autouno,  e  soun  alen  tebés 
Butavo  sus  lou  clar    -  pèr  la  preniiero  fes  — 
La  nau  qu'anavo  au  fiéu  de  l'aigo  lindo  e  puro. 
Asseta  tôuti  dous,  siau  coume  la  naturo, 

ChaiTavon,  Elo  em  'Eu,  urous  coume  n'i'a  ges. 
De-que  disien?  Noun  sai  ;  belèu  rèn  !  Es  permés 
Au  bonur  de  teni  mudo  sa  parladuro  : 
Chale  paradisen  sens  mistèri  noun  duro.  .  . 

Rintrèron  au  castèu  que  toum})avo  la  niue. 
La  barco  flame-novo,  alor,  passé  pèr  lue  : 
le  sufisiè  d'avé  pourta  la  fado  bloundo  ! 

Tôuti  n'an  pas  tant  fier  destin,  que  van  sus  l'oundo. .  .  . 
E  la  /Jaumo,  de  l'ange  esvali  coume  un  fum, 
Dintre  si  teso  en  flour  a  garda  lou  perfum  I 

Louis  RouMiKUX. 
^'Provençal,  Avignon  ot  les  bords  du  Rhône.) 

HEUREUX  NAUFRAGE 

AL   i>iu:.sii)i;nt  max  ok  i,a  baume 

C'était  un  beau  jour  d'automne,  et  sa  liède  haleine  —  poussait 
sur  le  lac,  pour  la  première  fois,  —  la  nacelle  qui  allait  au  courant 
de  l'eau  pure  et  limpide.  —  .\ssis  tous  les  deux,  calmes  comme  la 
nature, 

Ils  devisaient,  Elle  et  Lui,  heureux  comme  personne.  . .  —  Que 
disaient-ils  ?  Je  ne  sais  ;  peut-être  rien  !  Il  est  permis  ^au  bonheur 
de  tenir  un  langage  muet:  — nul  charme  de  Paradis  ne  dure 
sans  mystère  ! 

Ils  rentrèrent  au  château  à  la  nuit  tombante.  —  La  barque  llam- 
bante  neuve,  alors,  s'engloutit  :  —  il  lui  suffisait  d'avoir  porté  la 
blonde  fée  ! 

Toutes  n'ont  pas  si  fière  destinée,  qui  vont  sur  l'onde. , .  —  Et 
la  Baume*,  de  l'ange  évanoui  comme  une  fumée,  —  a  gardé  le  par- 
mm  dans  ses  allées  fleuries! 

Louis   RoDMlEtTX. 

'  Le  château  de  la  Haum>',  prés  Uzè.s. 


L'IVER 

A     UN     A  M  I  C 

L'iver  es  revengut  tout  erissat  de  glasso  ; 
Lou  soulel  e  la  luno  an  lous  pelses  jalats, 
Saturno  e  Jupiter  se  soun  enraantelats, 
E  Mars,  tant  frejoulet,  tremblo  jout  sa  couirasso. 

La  terro,  de  coutou  se  vei  tapa  la  fasso  ; 
Lous  aubres  an  sous  peds  per  la  frejou  pelats. 
Dins  soun  leil  hivernenc,  lous  flunies  acalats 
An  perdut  lou  poudé  de  se  clianja  de  plasso. 

Que  poudriô  te  manda  dins  a(iuelo  sazou, 
Amie,  per  n'adoussi  la  tant  grando  rigou  ? 
Moun  cor,  qu'a  sonl  de  fioc  dins  touto  la  naturo. 

Pendent  las  loungos  neits,  plegat  sus  toun  burèu, 
Dins  toun  traval  ardent,  el  sera  toun  flambèu, 
Sera  toun  refaudis  al  temps  de  la  frescuro. 

C.  Laforgue. 

(Languedocien,  Quarante  et  ses  environs.) 
L'HIVER 

a  un  ami 

L'hiver  est  revenu  tout  hérissé  de  glace:  —  le  soleil  et  la  lune 
ont  leurs  cheveux  geiés,  —  Saturne  et  Jupiter  se  sont  couverts  de 
leurs  manteaux,  —  et  Mars,  si  frileux,  tremble  sous  sa  cuirasse. 

La  terre,  de  coton  se  voit  couvrir  la  face  ; — les  arbres  ont  leurs 
pieds  maltraités  par  la  froidure.— Dans  leur  lit  hivernal,  les  lleuves 
apaisés  —  ont  perdu  le  pouvoir  de  se  changer  de  place. 

Que  pourrais-je  l'envoyer  dans  cette  saison,  —  ami,  pour  en 
adoucir  la  grande  rigueur?  —  Mon  cœur,  qui,  seul,  est  de  feu  dans 
toute  la  nature. 

Pendant  les  longues  nuits,  ployé  sur  ton  bureau,  — dans  ton 
ardent  travail  il  sera  ton  flambeau,  —  il  sera  ton  refuge  au  temps 
de  la  f-aîcheur.  G.  LAFonouE. 


A  CLEMENT  FANOT 


(Anacrkoun) 


D'Avignoun  grand  trignoulejaire! 
Que  m'enchau  ço  que  dislou  catau,  Tufanous, 

L'arlèri  vueje,  loutrufaire? 
léu,  iéu,  te  nome  urous,  êtres  fes  plus  urous 

Que  bèn  de  segnour  dôu  terraire, 
Que  sebagnon  dins  V  or  e  que  volon  courous, . . 

Capoulié  di  trignoulejaire  ! 

Lou  languimen  nous  enmantello  ! 
Tenes,  tu,  dins  la  man  la  poumo  de  bonur, 

Car  brûles  d'uno  passioun  bello 
Que  sèmpre  te  sourris  d'eilamount,  de  FAzur, 

Coume  uno  trelusento  estello  ; 
Mai  nàutri,  tron  de  goi  !  sian  priva  de  toun  ur  ! 

Car  la  ca<?no  nous  enmantello  ! 


A  CLEMENT  FANOT 


Nous  t'estimons  heureuse, 
ô  cigale  ! 

AXACUÉON.) 


0  grand  carillonneur  avignonnais  !  —  que  m'importe  ce  que  dit 
le  richard,  l'orgueilleux,  —  le  fat,  le  moqueur  au  cœur  vide?  —  Moi, 
moi,  je  te  nomme  heureux,  et  trois  fois  plus  heureux —  que  bien  des 
seigneurs  du  territoire  —  qui  se  baignent  dans  l'or  et  qui  volent 
brillants —  ô  maître  des  carillonneurs  ! 

L'ennui  nous  enveloppe  !  — Tu  liens,  toi,  dans  la  main  la  pomme 
de  bonheur,  —  car  tu  brûles  d'une  belle  passion  —  qui  te  sourit 
toujours  d'en- haut,  de  l'Azur,  —  comme  une  étoile  étincelante;  — 
mais  nous,  parbleu  !  nous  sommes  privés  de  ta  chance,  —  caries 
soucis  nous  enveloppent. 

'  Grâce  au  poëme héroï-comique  de  Roumanille,  la  Campano  mountado, 
imprimé  il  y  quelques  aniii';es,  tous  ceux  qui  s'intéressent  à  la  poésie  pro- 
vençale moderne  connaissent  Clément  Fanot. 


A    CLEMBM'    FANOT  lyl 

Semblés,  Fanot,  uno  cigalo  ! 
Quilia  déclins  ta  tourre,  entre  terru  e  soulèu 

(Un  rèi  sus  soun  autour  reialo)  ; 
Fasènt  dindatoujour  ti  trignoun  cantarèu, 

Escampes  un  son  que  regalo 
De  ti  mirau  brounzin.  noun  creba,  clarinéu. 

0  !  semblés  un  vôu  de  cigalo  ! 

Tu,  la  pas  di  sàntis  andano  ! . . . 
La  cigalo  escampiho,  eila,  de  soun  oustau, 

Sus  la  branco  d'uno  platano, 
De  calour  dins  lou  cor,  de  trelus,  de  grand  gau  : 

Tu,  fas  toumbade  ti  campano 
Uno  eigagno  de  Dieu,  un  vounvoun  celestiau, 

Un  perfum  di  sàntis  andano  ! 

GuiHEN-C.  Bonaparte-Wyse. 
Avignoun,  febrié  1868. 

(Provenral,  Avignon  et  les  bords  du  Rhône.» 


Tu  semblés,  Fanot,  une  cigale  !..  —  Dans  ta  tour,  perché  en- 
tre terre  et  soleil  — (un  roi  sur  une  élévation  royale); — faisant  ré- 
sonner joyeusement  tes  battants  harmonieux,  — tu  éparpilles  un 
bruit  qui  réjouit, —  de  tes  miroirs  de  bronze,  entiers,  d'un  timbre 
clair.  —  Oui,  tu  semblés  une  volée  de  cigales  ! 

Toi,  la  paix  des  allées  saintes  ! . . .  —  La  cigale  répand,  au  loin 
de  son  gîte,  sur  la  branche  d'un  platane,  —  de  la  chaleur  dans  le 
cœur,  de  la  lumière,  de  la  grande  joie  ; — toi.  tu  laisses  tomber  de  tes 
cloches  — une  rosée  divine,  un  bourdonnement  céleste,  —  un  par- 
fum des  allées  saintes! 

GuiLL.\UME-C.  Bonapaute-Wyse. 
Avignon,  février  1868. 


MOUSSU  CHASAUD  ' 

Aves  be  counei2:iit  Moussu  Chasaud? 
Aurô  n'i'a  pus  de  gent  couma-t-eu  era. 
Quand  auvio,  loumati,  chanta  soun  jau, 
Tant  lèu  aguessas  vist  notre  orne  à  terra, 
E  tant  lèu  que  lou  jour  era  falit. 
Tant  lèu  aguessas  vist  notre  orne  au  nid. 

Au  meis  d'abrieu,  quand  venta  e  jala  enquera, 
Taurias  dit  qu'avias  vist  lou  roussignôu, 
Notre  orne  se  vitissio  à  la  lèugiera; 
E,  si  li'aguessas  dit,  vers  la  fi  d'ôut, 
Qu'avias  vist  la  rousseta  ou  la  bechada, 
Se  bilhava  d'iver  dins  la  journada. 

Quand  venio  de  sa  vigna  emd  un  paniè, 

La  marmalha  autour  d'eu  s'atroupelava; 

E  quand  quis  poulissouns  de  soun  quartiè 

Cherchaven  à  sabei  ça  que  pourtava  : 

((  Devinas  !  disiô-t-eu,  ça  qu'ei  dedins, 

N'aures  'na  grapa.  —  Eh  be!  qu'ei  dans  rasins,  » 

MONSIEUR   CHAZAUD 

Vous  avez  bien  connu  Monsieur  Chazaud"? —  Aujoud'hui,  il  n'y  a 
plus  de  gens  comme  lui.  —  Quand  il  entendait,  le  matin,  chanter 
son  coq, —  aussitôt  vous  eussiez  vu  notre  homme  à  terre. —  Et  aus- 
sitôt que  le  jour  avait  décliné.  —  aussitôt  vous  eussiez  vu  notre 
homme  au  nid. 

Au  mois  d'avril,  quand  il  vente  et  gèle  encore,  —  vous  lui  au- 
riez dit  que  vous  aviez  vu  le  rossignol,  —  notre  homme  se  vètis- 
sait  à  la  légère;  —  et  si  vous  lui  aviez  dit,  vers  la  fin  d'aoûl, —  que 
vous  aviez  vu  le  rouge-gorge  ou  la  bécasse,  —  il  s'habillait  d'hiver 
dans  la  journée. 

Quand  il  revenait  de  sa  vigne  avec  un  panier,  —  la  marmaille 
autour  de  lui  s'attroupait:  —  et  quand  ces  polissons  de  son  quar- 
tier—  cherchaient  à  savoir  ce  qu'il  portait  :  —  «  Devinez  !  disait-il, 
ce  qui  est  dedans,  —  vous  en  aurez  une  grappe.  —  Eh  bien!  ce 
sont  des  raisins  », 

I  Dans  hi  périgourdin.  la  finale  féminine  du  sinjîfiilier  prend,  sauf  quel- 
ques cas,  le  son  d(3  l'o;  bechada,  journada  ~  hcchado,  ]otir7,ado.U  en  est 
de  même  pour  certains  temps  de  v^rbe:  bilhava.  désira  =  bilhavo.  desiro. 


Monssr  ciiASAUi»  193 

Disian-t-is  tous  au  cop.  «  Ah  !  «[uis  meinageis, 
Disio  Moussu  Chasaud,  jous  lur  bounet. 
N'en  sabeii  mai  que  nous,  e  lous  vilageis 
N'en  motren  à  la  vila,  au  jour  cl'anet.  » 
E  lou  boun  viei  leidounc  rieicapelava 
Souu  paniè  de  rasins  e  lou  boueidava. 

Aimava  à  trabalhàsoun  pitit  be. 

Sans  se  preissà  jamai,  jamai  chauraava. 

Soun  boursic  n'era  pas  tous  lous  jours    [)le, 

Ni  soun  granic  ;  pertant  jamai  junava, 

E  culio  dins  soun  be,  tranquilament, 

Sous  mounjous,  soun  bles[)a2:na  esounfrotiment. 

Prenio,  tous  lous  dimcns,  l'abit  de  lana, 
Una  chamisa  blancha  e  soun  cliapèu  ; 
E,  couma  sa  barba  avio  'na  semana, 
Se  nava  fa  rasa  per  se  fa  bèu. 
E,  quand  lous  de  lesei  lou  rancouutraven, 
En  se  donnant  lou  mont,  lou  saludaven  , 

E  li  disian:  «  Boun  jour,  Moussu  Chasaud, 
Couma  00  vai  anet  ?  —  Merci,  co  vira, 
Disio-t-eu;  brave  tems,  ni  fret,  ni  chaud, 
E  bien  de  la  santat  qu'un  vous  désira. 

disaient-ils  tous  à  la  fois.  «  Ah!  ces  enfants,  —  disait  Monsieur 
Chazaud,  sous  leur  bonnet,  —  ils  en  savent  plus  que  nous,  et  le? 
villages  —  en  remontrent  à  ia  ville,  présentement.  »  — Et  le  bon 
vieillard  alors  découvrait  —  son  panier  de  raisins  et  le  vidait. 

Il  aimait  ;i  travailler  son  petit  bien.  —  Sans  se  presser  jamais, 
jamais  il  n'était  oisif.  —  Sa  petite  bourse  n'était  pas  tous  les  jour.« 
pleine, —  ni  son  grenier;  pourtant  il  ne  jeûnait  jamais,  —  et,  dans 
son  bien,  tranquillement,  il  récollait  —  ses  haricots,  son  mais  oi 
son  froment. 

Il  prenait,  chaque  dimanche,  l'habit  de  laine,  —  une  chemise 
blanche  et  son  chapeau;  —  el,  comme  sa  barbe  avait  une  senvMiir, 
—  il  allait  se  faire  raser  pour  se  faire  beau.  —  Et,  quaml  les  gens 
de  loisir  le  rencontraient,  —  ils  le  saluaient  en  se  donnant  le  moi. 

El  lui  disaient:  «  Bonjour.  Monsieur  Chazaud  !— Comment  niiez 
vous  aujourd'hui?  —  Merci,  ça  boulotte,  —  disait-il  ;  [  il  fait]  beau 
temps,  ni  froid,  ni  chaud,  —  et  beaucoup   de   santé  que  je    vous 


194  DIALECTES    MODl-^RNES 

—  Eli  !  mas;  eh  !  mas,  dijas,  Moussu  Chasaud; 
Dijas-me,  qu'aves-vous?  Ses  pla  malaut  : 

»  Aves  lous  eis  batuts,  la  jauta  pala; 

N'aves  pas  Ter  dau  tout  d'un  (.me  fier. 

Fases-me  veire  un  pau  la  lenga  ?  Ei  sala. 

Aures-vous  bien  trapat  quauque  cop  d'er? 

Surti  dins  quel  eitat  !  quala  imprudonca  ! 

Un  cop  d'er ,  qu'ei  meichant,  quand  un  gui  pensa  !  » 

E  Moussu  Chasaud,  blanc  couma  leri, 

Disio  aleidounc  :  «  Qu'ei  pas  Fimbarras,  sente 

Quaucaré.  — Dévias  pas  quête  mati 

Vous  leva.  —  Qu'ei  be  vrai  que  m'en  repente. 

—  Couma  aves-vous  pougut  quità  lou  liet  ? 

—  Gui  torne,  disio-t-eu,  mai  tout-à-dret.    » 

E  lou  paubre  moussur,  que  fasio  pena 
A  veire,  talament  era  chanjat, 
S'entournava,  las  mas  sus  sa  peitrena. 
Mens  de  mejoura  après,  era  coueijat. 
K  Fa  loung  tems,  disio-t-eu,  que  iou  zou  couava.  » 
Se  plagno,  se  purjava,  e  bevio  e  suava. 


désire.  —  Eh  !  mais  ;  eh!  mais,  dites,  iMonsieur  Gha/aud,  —  dites- 
moi,  qu'avez-vous  ?  "Vous  devez  être  malade  : 

Vous  avez  les  yeux  battus, la  joue  pâle; —  vous  n'avez  pas  du  tout 
l'air  d'un  homme  bien  portant.  —  Faites-moi  voir  un  peu  la  lan- 
gue ?  Elle  est  sale .  —  Vous  .aurez  certainemenf  pris  quelque  coup 
d'air.  — Sortir  dans  cet  état!  Quelle  imprudence  ! —  Un  coup  d'air, 
c'est  mauvais,  quand  on  y  pense  !. . .  » 

Et  Monsieur  Chazaud,  blanc  comme  lis, — disait  alors  :  «Ce  n'est 
pas  l'embarras,  je  sens  —  quelque  chose.  —  Vous  ne  deviez  pas  de 
ce  matin  —  vous  lever.  —  Je  m'en  repens,  cela  est  bien  vrai.  — 
Comment  avez-vous  pu  quitter  le  lit?  —  J'y  retourne,  disait-il,  et 
tout  droit  de  ce  pas.  » 

Et  le  pauvre  monsieur,  qui  faisait  peine  —  à  voir,  tant  il  était 
changé, —  s'en  retournait,  les  mains  sur  sa  poitrine.  —  Moins  d'une 
demi-heure  après,  il  était  couché.  —  «  11  y  a  longtemps,  disait-il, 
que  je  couvais  cette  maladie.  »  —  11  se  plaignait,  il  se  purgeait;  il 
buvait  et  suait. 


MOUSSU    CHASAUn  IPS 

Quand  avio  'u  liet  goumat  clous  jours  ou  treis, 
Trop  de  tems  ({u'aurio  eitat  deirasounable, 
Notreis  bous  paroufiens,  jôuneis  mai  vieis, 
Naven  per  s'eimajà  dau  paubre  diable. 
Entraven  en  prenent  tout  lur  seriou 
E  lou  vesian  au  liet  pus  mort  que  viou. 

((  Eh  be!  Moussu  Chasaud,  couma  co  vira? 

Eh  !  mas,  aves  tournât  prene  coulour. 

La  lenga  n'a  pus  re  ;  Fei,  un  s'i  mira  ; 

La  peitrena  truudis  couma  un  tambour. 

Ses  garit.  »  E  lou  viei  lur  disio  :   «  Trobe, 

Dempeis  quauqueis  mouments,  que  iou  me  dobe.   » 

Un  jour,  queTavian  fai  entau  coueijà, 
Un  de  quis  de  lesei  que  lou  velhaven, 
En  l'empeichant  de  beure  e  de  minjà, 
Vesent  sous  paubreis  eis  que  se  barraven. 
Disset  à  sous  amis,  tant  si  pau  fort  : 
Aurù  qu'ei  be  finit;  notre  ome  ei  mort,  n 

Paubre  Moussu  Chasaud  I  qu  avio  la  teta 
Pausada  de  coûtât  sur  lou  chabei, 


(^)uan(l  il  avait  croupi  au  lit  tleux  ou  trois  jours,  —  trop  de  temps 
c'eût  été  déraisonnable,  —  nos  bons  paroissiens,  jeunes  et  vieux, 
—  allaient  s'informer  du  pauvre  diable.  —  Ils  entraient  en  pre- 
nant tout  leur  sérieux,  —  et  ils  le  voyaient  au  lit  plus  mort 
que  vif. 

«  Eh  bien!  Monsieur  Chazaud,  commentcela  va-t-il?  —  Eh!  mais, 
vous  avez  repris  couleur;  —  la  langue  n'a  plus  rien  ;  vos  yeux,  on 
s'y  mire:  ait.  —  La  poitrine  résonne  comme  un  tambour:  —  vous 
êtes  guéri.  »  Et  le  vieillard  leur  disait  :  ■•  Je  trouve,  —  depuis  quel- 
ques moments,  que  je  me  rétablis.   » 

Un  jour,  qu'on  l'avait  fait  coucher  ainsi,  —  un  de  ces  oisifs  qui 
le  veillaient,  —  en  l'empêchant  de  boire  et  de  manger,  —  voyant 
ses  pauvres  yeux  qui  se  fermaient,  —  dit  à  ses  amis,  en  haussant 
tant  soit  peu  la  voix:  —  »  A  présent,  c'est  bien  Uni:  notre  homme 
est  mort.  » 

Pauvre  Monsieur  Chazaud  !  qui  avait  la  tète  —  posée  de  côté  sur 


196  DT.VLKCTK.S    .\Url)l<:KNK!5 

(juela  j)ai'aula  fola  e  malouneta 
Lou  tuet:  Moussu  (Miasaud  drubit  pus  l'ei. 
Fuguet  lou  lendouiua  pourtat  en  terra. 
Aurô,  n'i  'a  pus  de  gcnts  couma-t-eu  era. 

A.  Chastanet. 

(Périgourdin,  Mussidan  et  ses  environs.) 

le  chevet,  —  cette  parole  inconsidérée  ni  inconvenante  —  le  tua: 
Monsieur  Chazaud  ne  rouvrit  plus  les  yeux.  —  Il  fut  le  lendemain 
porté  en  terre. —  Aujourd'hui,  il  n'y  a  plus  de  gens  comme  lui. 

A.  Chastanet. 


LE  PINTAIRE 


Urous  qui  pot  passa  sa  vido  ame's  pintaires  ! 
Milo  douces  plasés  fan  à  barres  dins  el; 
Dins  el  tout  viro  Hous,  dins  el  tout  jogo  d'aires: 
Ten  toutos  sas  ergnos  pel  pel. 

I  venguets  pas  dounc  dire  :  «  Uno  vaco  t'es  morto, 
Janet;  un  rousal  blanc  t'a  rumat  le  vigne.  » 
Ni  mai  :  «  L'oustal  te  toumbo  e  l'aigat  se  l'emporto, 
—  Saras  dema  sens  un  diniè.  » 

El  s'en  rits.  Enroudat  d'un  eissam  de  bebeiros, 
L'elh  vieu,  le  pot  lusent  e  le  nas  cramuesi, 

LE  BUVEUR 


Heureux  celui  qui  peut  passer  sa  vie  avec  les  buveurs!  —  Mille 
doux  plaisirs  jouent  aux  barres  en  lui;  —  en  lui  tout  tourne^ear^- 
(trèlles),  lir-  lui  tout  joue  des  airs:  —  il  tient  ses  ennuis  par  les 
cheveux. 

Ne  venez  pas  lui  dire  :  «  Une  de  tes  vaches  est  morte,  —  Janot; 
uno  gelée  blanche  a  roussi  ton  vignoble.» —  Non  plus:  «  Ta  maison 
lombnot  l'inondation  l'emporte, —  tu  seras  demain  sans  un  denier.» 

Lui,  s'en  rit.  Entouré  d'un  essaim  ilo  huviMirs. —  Td'il  vif,  la  lèvre 


LOU    PIN  Ta  IRE  197 

El  canto  à  plen  puetralh,  en  t'arrasanl  les  veires. 
Le  boun  soûlas  e  le  bounvi. 

«  E  per  (1110,  s'a-dits  el,  se  donna  tant  de  peno? 
Sapien-va  passa  dons,  montre  que  Ttems  va  dits; 
Car,  se  la  mort  nous  douno  un  tabut  per  cousseno, 
Per  mile  ans  saren  endourraits, 

»  Anen,  bounis  efants,  que  Tbarrilh   se  desl)Oundo  ! 
Daissen  pasesfreja  las  ansos  del  plounclioun; 
Que  passe  !  E,  quand  saurion  d'esse  à  la  fi  de!  niouude, 
Sens  ped  branla,  bep-uen  toutjoun. 

))  Eh  be  !  qu'un  lac  de  vi  nous  courgue  sus  la  lengo  ! 
El  soûl,  del  cor  de  l'orne  es  l'arremountacieu. 
Car  veirets  pas  en  loc  de  niedeci  que  tengo 
De  pus  sanitouso  poucieu. 

»  Donne,  Bourtoumieu,  al  chai!  Del  vielh  !  e  que  tout  sonne  ! 
Mai  on  beu  entre  amies,  mais  las  ergnos  s'en  van. 
Anen,  te!  vudo   ras,  e  qu'aiceste  me  doune 
Bouno  santat  per  tout  oungan.  » 

Ag.    Ctaltier. 

(Languedocien,  Casteinaudnry  et  ses  enviions.) 

luisante  ot  le  nez  cramoisi. —  lui,  chante  à  pleine  poitrine,  en  rem- 
plissant ras  les  verres. —  la  joie  ot  le  bon  vin. 

«  Et  pourquoi,  se  dit-il,  se  donner  lant  de  peine?—  Sachons  la  iia.s- 
ser  douce  pondant  que  le  temps  le  dit; — car,  si  la  mort  nous  doiiiio 
un  cercueil  pour  coussin,  —  pour  mille  ans  nous  serons  endormis  . 

»  Allons,  bons  enfants,  que  le  haril  se  débonde!  —  Ne  laissons 
pas  refroidir  les  anses  du  pirhet. —  quil  passe  !  Et,  quand  nous 
saurions  être  à  la  lin  du  monde.  —  sans  pied  branler.  I)uvons 
toujours. 

»  Eh  bien  !  qu'un  lac  de  vin  nous  coure  sur  la  langue!  —  Lui 
seul,  du  cœur  de  l'homme  est  la  restauration, —  car  vous  ne 
verrez  nullj  part  de  médecin  qui  ait  — de  plus  salutaire  potion. 

»  Donc,  Barthélémy,  au  chai!  Du  vieux!  et  que  tout  sonne  !  — 
Plus  on  boit  entre  amis,  plus  [vite]  les  ennuis  s'en  vont. —  Allons» 
tiens!  vide  à  pleins  bords,  ot,  que  celui-ci  me  donne  —  bonne  santé 
pour  toute  l'année.    »  Aug.   G.\i.tiei!. 


LESNOUIES 


Al  luscre,  les  nouiès  qu'an  mai  de  cent  ans  d'âge 
Sembloun  plenis  de  raive,  en  tenent  desplegat, 
Sus  le  rose  e  l'or  clar  del  soulelh  amagat, 
Le  nègre  ventallias  à  joun  de  Ihour  brancage. 

Lhour  trounc  dreit,  que  le  tems  souvent  a  moussegat, 
D'uno  peiro  ficado  a  l'mage  aspet  salvage. 
Que  soun  belis  e  forts!  Servissoun  de  bournage 
A-n-un  grait  espacious  e  bêlement  regat. 

Dambe  un  brave  ramat  de  fuelhos  roubilhados, 
I  aura  proche  d'un  mes,  quand  tourne  Sant-Marti. 
Que  las  nouses,  pel  sol,  se  soun  escampilhados. 

Las  doublidi,  —    e  pr'aco  m'an  sapiut  agati  :  — 
Vesi  demest  les  brancs  tant  d'estelos  poulidos 
Brembant  les  fruts  de  Fort  de  las  dos  Esperidos  ! 

Ag.  Fourés. 
Caudoroco,  le  28  d'outobre  1877. 

(Languedocien,  Casteinaudary  et  ses  environs). 

LES  NOYERS 

Au  crépuscule,  les  noyers  qui  ont  plus  de  cent  ans  d'âge  — 
semblent  pleins  de  rêve,  en  tenant  déployé,  —  sur  le  rose  et  l'or 
clair  du  soleil  caché,  —  le  noir  et  grand  éventail  à  jour  de  leur 
branchage. 

Leur  tronc  droit,  que  le  temps  a  souvent  mordu,  —  d'un  pelvan 
a  le  grand  aspect  sauvage.  —  Qu'ils  sont  beaux  et  forts!  Ils  ser- 
vent de  bornage  —  à  un  guéret  spacieux  et  largement  rayé. 

Avec  une  nombreuse  quantité  de  feuilles  rouillées,  —  il  y  aura 
près  d'un  mois,  revienne  la  Saint-Martin,  —  que  les  noix  sur  le 
sol  ont  été  éparpillées. 

Je  les  oublie,  et  pourtant  elles  ont  su  m'allécher.  —  Je  vois  au 
milieu  des  branches  tant  d'étoiles  jolies  —  rappelant  les  fruits  du 
jardin  des  deux  Hespérides  !  Aug.  Foubès. 

Cauderoque,  28  octobre  1877. 


BIBLIOGRAPHIE 


La  Bataille  de  Muret  et  la  Tactique  de  la  cavalerie  au  XW  si^kle  (avec 
deux  pliins  topographiques),  par  Henri  Diîlpech.  membre  résidant  de 
la  Société  des  langues  romanes.— Montpellier,  bureau  de  la  Société  des 
langues  romanes;  1878,  in  8°,  XVl-156  pages. 

Ce  travail,  avant  d'être  livré  à  l'impression,  était  à  demi  connu 
des  lecteurs  montpelliérains.  Dans  une  série  de  conférences  très- 
bien  accueillies  du  public,  M.  iJelpecli  en  avait  esquissé  les  prin- 
cipaux traits  et  résumé  les  conclusions.  Dès  son  apparition,  la  Ba- 
taille de  Muret  se  trouve  donc  devant  des  lecteur.s  qui  sont  en  état 
de  l'apprécier  immédiatement,  H  n'ont  pas  besoin  qu'on  leur  expose 
longuement  le  plan  de  l'auteur  et  les  résultats  de  ses  recherches. 

Disons  tout  de  suite  que  M.  Delpech  s'est  attaché  à  remplir  tout 
son  cadre,  mais  qu'il  s'est  bien  gardé  d'en  sortir  pour  engager,  à 
propos  du  grand  événement  qui  est  l'objectif  de  son  travail,  une 
polémique  rétrospective  pour  ou  contre  l'un  des  deux  partis  en 
lutte.  Il  a  voulu  faire  une  œuvre  en  quelque  sorte  technique  et  ré- 
soudre un  important  problème  d'histoire  et  d'art  militaire. 

Dans  une  rapide  Introduction,  il  nous  place  au  cœur  des  événe- 
ments, au  milieu  des  deux  armées  prêtes  à  en  venir  aux  mains.  11 
nous  fait  connaître  en  détail  les  emplacements  qu'elles  occupent, 
la  composition  de  chacune  d'elles,  les  dispositions  morales  et  les 
intentions  stratégiques  des  chefs.  C'est  le  sujet  des  trois  premiers 
chapitres . 

Le  récit  de  la  bataille  remplit  le  chapitre  IV,  le  plus  important 
et  le  plus  étendu.  On  y  remarque  l'attaque  des  Vasco-Aragonais  et 
leur  déroute  à  la  suite  du  brusque  retour  offensif  des  Croisés,  la 
mort  de  Pierre  II,  roi  d'Aragon;  la  résistance  désespérée  de  sa 
maynade,  l'immense  et  hardi  mouvement  tournant  par  lequel 
Montfort  en  personne  amène  son  troisième  corps  sur  le  flanc  droit 
de  ce  corps  d'élite,  dont  il  achève  ainsi  la  destruction;  l'à-propos 
de  la  manœuvre  par  laquelle  il  tient  en  respect  les  réserves  du 
comte  de  Toulouse  et  les  empêche  de  venir  au  secours  des  cheva- 
liers de  Pierre  II;  le  massacre  des  milices  toulousaines,  étonrdi- 
ment  revenues  à  l'attaque  sur  les  derrières  des  Croisés  victorieux. 
Les  trois  derniers  chapitres  sont  consacrés  à  une  étude  détaillée 
de  la  Version  de  Ut  Canso,  des  Causes  d£  la  victoire  de  Muret  ol  de  la 
Tactique  'le  la  cavalerie  au  XIIP  siècle. 


200  BrBLIOCiRAPHIE 

Des  Pièces  justificatives,  com|josées  en  grande  partie  de  textes 
transcrits  par  l'auteur  dans  les  archives  de  la  couronne  d'Aragon, 
et  deux  caries,  complètent  cette  publication  '. 

M.  Delpech  ne  s'en  est  pas  tenu  à  la  partie  purement  techni- 
que de  son  sujet.  Il  a  bien  vu  et  il  fait  bien  voir  qu'à  côté  des 
causes  exclusivement  militaires  qui  ont  décidé  le  succès  en  faveur 
des  Croisés,  il  y  en  a  d'autres,  les  unes  relifzieuses.  les  autres 
politiques,  qui  ont  eu  une  influence  presque  égale  sur  la  marche 
des  événements.  Ainsi  on  s'étonne  moins  de  l'audace,  en  appa- 
rence insensée,  de  neuf  cents  chevaliers  français  qui  vont  s'atta- 
quer à  une  armée  de  quarante-trois  mille  hommes,  quand  on  voit 
leurs  escadrons  ne  s'acheminer  vers  le  champ  de  bataille  qu'après 
que  l'évèque  de  Comminges  a  répété  devant  chacun  d'eux  sa 
promesse  formelle  «  qu'en  cas  de  mort,  il  leur  servirait  de  cau- 
tion devant  Dieu  pour  les  délivrer,  non-seulement  de  l'enfer,  mais 
du  purgatoire.  «  De  toute  façon,  et  qu'elle  qu'en  fût  l'issue,  la  ba- 
taille qui  s'engageait  était  donc  une  bonne  affaire  pour  ces  cheva- 
liers avides  et  croyants,  calculateurs  jusque  dans  leur  foi. 

Montfort,  qui  savait  si  bien  tirer  parti  des  dispositions  morales 
de  ses  soldats,  se  tenait  prêt  à  en  faire  autant  de  celles  qu'il  sup- 
posait chez  ses  adversaires.  Il  n'ignorait  pas,  en  effet,  que  les 
Toulousains  et  les  Gascons  soutenaient  mal  le  roi  d'Aragon,  parce 
qu'ils  voyaient  en  lui  un  étranger,  presque  aussi  dangereux  pour 
eux  que  les  Français  du  Nord.  De  leur  côté,  les  Catalans  inar- 
chaient  à  contre-cœur  contre  ces  mêmes  Français,  desquels  les 
rapprochaient  leur  foi  religieuse  et  le  souvenir  tout  récent  de  la 
gloi'ieuse  victoire  de  las  Navas,  remportée  en  commun  sur  les 
Maures  d' Espagne,  un  an  auparavant.  En  cherchant,  comme  il  le 
fit,  à  supprimer  dès  le  début  de  la  bataille  le  chef  de  l'armée  en- 
nemie, il  était  assuré  de  détruire  du  même  couple  seul  lien  qui 
pût  retenir  encore  en  un  faisceau  mal  joint  ces  volontés  diver- 
gentes et  ces  intérêts  contraires. 

Jusqu'à  quel  point  ces  sourds  dissentiments  ont-ils  influé  sur  la 
catastrophe  qui  aboutit  à  la  mort  du  roi  Pierre  II  et  à  la  défaite  de 
ses  troupes?  On  ne  le  sait  ni  ne  le  saura  probablement  jamais.  Mais 
cequi  paraît  certain,  c'est  que  Montfort,  parfaitement  renseigné  pour 
tout  le  reste  par  ses  espions,  en  fut  prévenu  ou  les  devina.  Tout, 
d'ailleurs,  de  la  manière  dont  il  conduisit  les  opérations,  prouve 
qu'il  raisonna  d'après  l'hypothèse  d'un  manque  d'accord  entre  les 
coalisés.  M.  Delpech,  sans  sortir,  comme  il  le  déclare  expressément, 
du  domaine  de  la  simple  conjecture,  a  raison  de  rapprocher  toutes 
ces  coïncidences,  laissant  à  de  nouvelles, et  non  jiius  sagaces  re- 
cherches l'heureuse,  mais  peu  ]ir(»balilo  chance,  de  trouver  des  docu- 


BIBLIOGR.VPHIK  301 

monts  qui  complètent  et  conliruieai  cet  ensemble  de  prohabiliiés. 

En  résumé,  Montfort  a  dû  sa  victoire,  non  à  la  supériorité  d'arme- 
ment ou  d'équipement  de  ses  chevaliers,  nia  une  prétendue  supé- 
riorité physique  de  la  race  du  Nord  sur  celle  du  Sud,  mais  à  leur 
rapidité  d'évolutions,  à  leur  habitude  de  cliari^er  en  masse  sans  cé- 
der r>.n  vain  plaisir  de  quitter  le  ran?  pour  montrer  leur  hravour- 
individuelle,  enfin  et  surtout  à  rinfaillibilité  de  son  coup  d'oeil,  qui 
lui  faisait  voir  à  l'avance  les  fautes  de  ses  adversaires  et  les  moyens 
de  les  retourner  contre  eux  aussitôt  qu'elles  avaient  été  commises. 
C'est  ce  qu'a  démontré  M.  Deljiecb,  avec  une  précision  qui  ne  laisse 
rien  à  désirer.  Il  a  été  ainsi  amené  à  s'occuper  de  !a  tactique  de  la 
cavalerie  au  XIIP  siècle,  étude  des  plus  instructives,  qui  se  résume 
fort  hpureusement  dans  la  comparaison  qu'il  fait  de  la  bataille  de 
Cocherei.  gai^née  par  du  Guesclin  sur  les  Anglais,  et  de  celle  de 
Muret. 

Cet  ouvrage,  fait  avec  beaucoup  de  soin  et  d'intelligence,  consti- 
tue une  monographie  des  plus  utiles,  en  ce  qu'elle  apporte,  non  des 
faits  nouveaux,  dont  la  découverte  dépend  souvent  plus  du  hasard 
que  de  l'inLelligence  des  chercheurs,  mais  des  explications  réelle- 
ment neuves.  Et  dans  la  circonstance  ce  n'est  pas  un  mince  mérite, 
si  l'on  songe  qu'elles  rectifient  sur  un  événement  aussi  important 
les  opinions  jusqu'ici  dominantes  d'hommes  tels  que  Sismondi. 
Micheletet  H.  Martin 

En  finissant,  nous  devons  présenter  à  l'auteur  une  observation 
dont  il  sera  le  meilleur  juge.  Page  78.  il  dit  que  la  nouvelle  de  la 
mort  de  Pierre  II  «  arracha  des  larmrs  à  Monifor;.  »  Le  fait  est-il 
bien  certain,  et  M.  D^lpech  n'a-t-il  pas  à  son  insu  forcé  la  signifi- 
cation des  témoignages  contemporains?  En  effet,  tous  ceux  qu'il  a 
reproduits  en  note,  avec  son  soin  habituel,  nous  montrent  Montfort 
plaignant,  mais  non  pas  pleurant,  celui  qui  avait  été  son  suzerain: 
ce. .  .  planctum  fecit  »,  Pierre  des  Vau.x  de  Cernay;  «  Quant  il  le  visy 
le  plaint  y>,  Baudouin  d'Avesnes:  «  non  modicum  lamentabatur  » . 
Chanoine  de  Laon.  Ce  détail  a  sa  valeur,  car  les  larmes  ne  dépen- 
dent guère' de  notre  volonté,  tandis  qu'il  n'en  est  pas  de  même  de 
no?  paroles  et  de  nos  g.-'stes.  Non  pas  qu'on  ne  puisse  croire  à  la 
sincérité  de  Montfort.  à  laquelle,  pour  ma  ]iart,  je  ne  crois  pas,  car  cet 
homme,  dur  et  retors,  savait  au  besoin  parfaitement  jouer  la  comé- 
die; mais,  s'il  avait  réellement  versé  des  larmes,  ses  hi«:toriens,et 
principalement  ses  panégyristes,  tous  si  déférents  à  l'égard  de  l'or- 
thodoxe Pierre  II,  n'auraient  pas  manqué  d'en  faire  honneur  à  l'un 
et  à  l'autre. 

Dois-je  signaler  encore,  pour  être  complet,  quelques  menues  fau- 


?02  BIBLIOGRAPHIE 

tes  d'impression?  P.  53,  1.  9,  il  faut  lire  aciei:  ihid.,  1.  2î,  ne  faut-il 
pas  gilUj  a  ruse,  tromperie  »,  et  non  Gille,  nom  propre  ? 

A.  B. 

Recueil  de  morceaux  choisis  envieux  français, parEugène  RirrER.pro- 
fess'^-ui' à  l'Université  de  Genève.— Genève,  Bâle,  Lyon,  H.  Georg,  li- 
braire-éditeur, 1878:  in-8°,  viii-li6  p. 

Opuscule  purement  scolaire.  Il  se  divise  en  trois  parties  d'iné- 
gale étendue.  La  première  comprend  les  plus  anciens  textes  de  la 
langue  française  ;  la  seconde,  sous  la  rubrique  Prose,  des  extraits 
du  Livre  des  Rois,  de  Villehardouin,  etc.;  la  troisième  est  consa- 
crée à  la  poésie.  Tous  ces  textes  ne  sont  pas  également  propres 
à  passer  sous  les  yeux  des  commençants:  quelques-uns  appar- 
tiennent à  des  dialectes  encore  peu  connus  et  mal  déterminés 
(Serments,  Saint  Léger);  d'autres,  comme  le  Livre  des  Rois,  ne  sont 
pas  écrits  avec  la  correction  uniforme  qu'exige  l'inexpérience  des 
premières  études.  Cependant,  ces  réserves  faites,  on  doit  reconnaître 
que  le  recueil  de  M.  R  été  composé  avec  soin  et  avec  i:oùt.Le  prix 
n'en  est  pas  indiqué,  mais  il  est  à  supposer  qu'il  est  à  la  portée  do 
toutes  les  bourses.  A.   B. 

L'Abbaye  de  Montmajour,  Étude  historique  d'après  les  manuscrits  de 
D.  Chanlelon  et  autres  documents  inédits,  pa.r  F.  de  Marin  de  Gar- 
RANRAis,  archiviste  auxiliaire  des  Bouches-du-Rhône.  Marseille,  1877: 
1  vol.gr.  in-8o,  162  pages. 

Au  milieu  de  cet  admirable  pays  d'Arles,  Eden  de  l'archéologue 
et  de  l'artiste,  se  dressent,  sur  la  colline  de  Montmajour,  des  ruines 
importantes,  dont  l'histoire  complète  et  authentique  restait  enfouie 
dans  la  poussière  des  archives.  Il  existe  de  nombreuses  notices 
sur  Montmajour  ;  un  travail  d'ensemble  était  encore  à  faire.  L'ou- 
vrage que  nous  annonçons  vient  de  combler  cette  lacune.  M.  de 
Marin  de  Garranrais  a  condensé  en  un  travail  substantiel  tous  les 
faits  importants  relatifs  à  l'antique  abbaye.  Notre  cadre  ne  nous 
permet  que  de  signaler  cette  œuvre  pleine  d'intérêt,  et  de  sou- 
haiter que  le  jeune  éruilit  à  qui  elle  est  due  continue  à  mettre  en 
lumière,  en  une  série  de  monographies  analogues,  les  nombreux 
points  encore  obscurs  de  notre  histoire  méridionale. 

C.  J.  T. 


PERIODIQUES 


Romania,  26.  —  P.  161.  La  Léfjendc  de  Girart  de  Roussillon. 
P.  Meyer.  Cette  notice  comprend  une  étude  bibliographique  et  his- 
torique sur  Girard  de  Roussillon;  la  vie  latine  du  célèbre  comte, 
accompagnée  de  la  traduction  en  français,  ou  plutôt  en  bourguignon , 
de  la  fin  du  XII le  siècle:  un  glossaire  qui  fait  suite  au  texte  bour- 
guignon, un  commentaire  et  un  appendice  intitulé  la  Translation 
du  corps  de  sainte  Marie-Madeleine  à  Vézelay .  P.  179.  1.  37,  refaiz 
manque  au  glossaire.  Litti'é  ne  donne  pas  d'exemple  ancien  de  ce 
mot  ainsi  employé.  P.  183,  1,  10,  Perfection,  que  M.  P.  M.  corrige 
en  persécution,  doit  probablement  se  \\ve  persection,  qui  donnerait  le 
même  sens.  P.  185,1.  22,  envie  envenimé .,  faute  d'impression  pour 
envenimée.  P.  195,1.  34.  s'escepa,  signalé  avec  raison  au  glossaire, 
est  un  doublet  dialectal  de  s'achopa.  P.  222,  1.  iO, poserai,  faute  d'im- 
pression pour  poterat.  Ibid.,  1.  23,  pro  divo.  faute  de  lecture  pour  pro- 
clivo.  P.  223, 1.  9,  s'en  lisostenant  de  .u.  basions,  lisez,  comme  plus 
bas,  1.  34,  sens  le  sostenement.  Ibid.,  1.  17  et  20,  voillast  =  voluisset 
paraît  étrange,  il  faut  san,s  doute  lire  voillust.  Ibid.  i.  19,  une  vir- 
gule serait  nécessaire  après  est.  P.  227,  1.  13,  il  est  probable  que  le 
traducteur  aura  lu  raptando,  qui  a  le  même  sens  que  rapiendo,  mais 
se  rapprocl:e  plus  de  l'original  reptando.  —  P.  236.  La  Sottie  en 
France,  E.  Picot.  Travail  très-soigné  et  ([ui  paraît  complet.  Faiisfc. 
auteur  defabrasies  ,  n'est  pas  au  glossaire.  P.  247  «  Les  fous  n'ob- 
tinrent pas  la  même  faveur  dans  l'Kurope  méridionale.  Les  mys- 
tères provençaux  que  nous  possédons  n'en  offrent  pas  de  traces.  » 
M.  Chabaneau  me  fait  observer  que  M.  P.  est  dans  l'erreur.  Des 
deux  seuls  mystères  provençaux  (sur  cinq)  qui  ont  été  publiés,  il 
n'y  en  a  qu'un  (  Sainte  Agnes)  où  l'on  ne  trouve  pas  trace  du  fou; 
dans  le  second  {Ludus  sancti  Jacobi),  ce  personnage,  la  fol,  suit  an 
contraire  l'action  d'un  bout  à  l'autre.  Peut-être,  ajoute  M.  Chaba- 
neau, M.  P.  considère-t  il  ce  dernier  mystère  comme  traduit  ou 
imité  d'un  original  français  et  comme  étranger,  par  suite,  à  la  dra- 
maturgie provençale.  —  P.  327.  Mélanges:  t°  Un  nouveau  texte  dea 
Novas  del  Papagay  (A.  Wesselofsky).  2"  Sur  Lo  pronom  neutre  en  pro- 
vençal (C.  Chabaneau).  —P.  332.  Comptes  rendus  :  !•  A.  Graf- 
/  Complementi  délia  chanson  dHuon  de  Bordeaux,  testi  francesi  iné- 
dite, tratti  da  un  codice  délia  Biblioteca  nazionale  di  Torino  (G  .  P.  ) 
2"  .\u.""uste  Scheler.  Deux  Rédactions  diverses  de  la  légende  de  Sainte 
Marguerite  envers  français,  publiées  avec  variantes  d'après  des  ms. 
du  Xlli»  et  du  XIV»  siècles  (P.  M.)  —P.  342.  Pcriodique-s.  — 
P.  349.  C'n-oniquc.  A  .    B, 


204  PERlOniQHES 

Bulletin  de  la  Société  des  anciens  textes  français.  1878, 

11°  1. —  P.  30  l'ai)!  Meypr,  Notice  dums.  V'  149  de  la  Bibliothèque  na- 
tionale de  Madrid.  Cems..  que  M.  P  Meyer  est  le  premier  à  étu- 
dier, date  ilti  XllI*  siècle  et  contient  au  moins  se^it  poèmes,  tous 
inédits.  L'éditeur  en  donne  l'analyse  et  des  extraits.  C'est  une  in- 
téressante étude  et  une  heureuse  trouvaille.  P.  43.  v.  8,  asses  pour 
à  ses.  et  p  48,  V.  32  osses  pour  o  .se.s,  sont  des  épaves  de  l'ortho- 
graphe archaïque,  qui  doublait  Vs  initiale  quand  les  deux  mots  for- 
aiaieut  corps  dans  la  prononciation  et  dans  l'écriture,  sans  doute 
afin  de  prévenir  le  lecteur  que  cet  s.  même  après  l'adjonction  du 
mot  antécédent,  s'articulait  comme  c;  et  non  comme  le  z  actuel. 
C'est  ainsi  que  nous  écrivons  ressentir  ot  que  nous  prononçons 
recentir.^'i  l'on  iiQ,viv?dt  resentir  par  s  simple,  on  serait  tenté  de  pro- 
noncer rezentir. —  P.  60.  Paul  Meyer,  Notesur  le  ms.  de  la  Biblio 
thèque  nationale  de  Paris,  Fr.  20'i9.  Cette  note  complète  la  précédonic, 
en  même  temps  que  l'artitde  du  Catalogue  (T.  I.)  des  manuscrits 
français.  A  .  B. 

L'Alliance  laitine .  Revue  internationale  de  littérature,  histoire,  phi- 
losophie, sciences  et  arts,  rédigée  par  les  membres  de  Z'.\louette,  société 
d'auteurs  français,  espagnols,  italiens,  portugais,  roumains,  suisses 
romands  et  Américains  du.  Sud.  (Prix  de  l'abonnement  :  14  fr.)  — 
Cette  revue  nouvelle,  fondée  à  Montpellier  par  M.  Xavier  de  Ri- 
card, est  à  la  fois  politique,  littérah-e  et  historique.  Elle  ne  rentre 
donc  pas  dans  le  cadre,  beaucoup  plus  restreint,  de  la  Revue  des  langues 
romawes,  laquelle  est  presque  exclusivement  philologique. 

Mais,  comme  la  publication  de  textes  en  langue  méridionale  cr.'e 
entre  elle  et  nous  plus  d'un  point  de  contact,  et  aussi  pour  lui  sou- 
haiter la  bienvenue  et  la  remercier  d'avoir  reproduit  le  sommaire  de 
notre  propre  Revue  (mars-avril  1878),  nous  donnons  la  table  des 
matières  du  premier  numéro  paru.  Dans  ceux  qui  suivront,  nous 
choisirons  plus  particulièrement  les  parties  qui  intéressent  la  philo- 
logie et  nous  en  ferons  le  compte  rendu,  réservant  ainsi  notre  pu- 
blicité toute  spéciale  pour  ce  qui  est  plus  particulièrement  de  notre 
compétence. 

P.  3.  .Mauro  Macchi,  l'Alliance  latine.  Progamme  républicain, 
fédéraliste  et  confédéraliste  de  la  nouvelle  revue.  —  P.  5.  Victor 
Bal.igu?r,  Juan  de  Aubusson.  Texte  et  traduction.  —  P.  8.  Xavier 
de  lUcard,  l'Idée  latine.  —  P.  17.  Anfos  Tavan,  Bresihage  d'alau- 
veto  Prose  provençale  (texte  et  traduction).  —  P  19.  Pompeyo 
Crcner,  Don   Quijote  >/  don  Juan.  Texte   espagnol  et  traduction.  — 


CHRONIQUE  L'or. 

P. '26.  Léon  ("llailel.  Un  marquia  rèjmblicain.  —  P.  3U.  Ed.Thiaii- 
dière,  la  Pratique  dr  la  morale.  —  P.  .'8  Rohert  Hall,  la  Main  et 
le  Doigt.  —  P.  Vl.  Iv  l'ouvilloii.  le  Nuage.  —  P.  40.  Olivier  le  Pata- 
rin,  le  Serment  de  Bernard  Alton.  —  P.  53.  Jousé  Mayor.  A  Vohro. 
prose  provençale.  —  P.  56.  Gellion  Daniilar,  Rienzi  —  l*.  68. 
Auguste  Fourès.  le  Martyre  de  l'oie.  —  P.  l'I.  Éinilo  Maison.  His- 
toire sentimentale  du  temps  des  Maures .  —  P.  76.  Les  Cenci  (, traduit 
de  l'anglais). —  P.  84.  Gerônimo  Forteza,  Zos  Cas<is  de  huéspedes 
(te.xte  et  traduction).  —  P.  102.  Pi  y  Margall,  Observaciones  sobre 
el  caracter  de  D.  Juan  Tenorio  (texte  et  traduction).  — P.  t  Pl.  Jules 
Laurens.  Notes  provençales. — P.  125.  (t.-L.  Patuzzi.  Gronica  italiana 
(texte  et  traduction).  —  P.  129.  Juan-ii.  Ensenat,  Cronica  espa- 
nola  (texte  et  traduction  .  —  P.  150.  Bibliographie.  —  P.  160.  An- 
thologie poétique.  Pièces  et  extraits  en  français,  en  italien,  en  cas- 
tillan, on  catalan,  en  roman  de  Lausanne,  en  provençal,  en  haut 
et  bas  languedocien.  A.  B. 

CHRONIQUE 


La  Revue  des  langues  romanes  publiera  dans  ses  prochains  fasci- 
ci des  Zas  Ordinacions  y  Bojis  del  comtat  d'Emjmrias.  par  M.  Bala- 
guer  y  Merino  (XIV^'  siècle);  des  Documents  sur  le  langage  de 
Rodez  et  le  langage  de  Milhau  (  du  XII^  au  XVI*^  siècles),  réunis  par 
M  Affre,  archiviste  du  département  de  l'Aveyron  :  une  étude 
de  M.  J.  Baucjuier  sur  Quelques  Pronoms  provençaux;  nn  recueil 
à'énigmes  et  un  autre  de  doublets  languedociens,  par  M.  le  pasleni- 
Fesquet.  et  en  même  temps  que  diverses  poésies  en  langue  d'oc  et 
en  catalan,  dues  ù  M^L  Aubanel,  Gabriel  Azaïs,  Bonaparte-Wyse, 
Garetâ  y  \idai.  Fourès,  Laforgue,  l'abbé  J,  Roux,  etc.;  le  poème 
languedocien  des  Lacs  d'amour,  par  .M.  Alexandre  T^anglade 

Publications  coucernaut  l'hii-toire.  la  littérature  et  l'archéologie  des 
provinces  du  midi  de  la  France 

Alhanès  (l'abbé).  Pierre  d'Aigrcfeuille,  évéque  d'Arignon,  de  Va- 
bres.  de  Ckrmont.  d'Uzès  et  de  Mende.  Preuves  de  son  épiscopat.  Eli- 
mination de  trois  faux  éréques  d'Avignon.  Marseille,  Lebon;  in-4". 
•ôG  pages. 

Allmeret  de  Terrebasse.  Inscriptions  antiques  et  du  moyen  âge  de 
Vienne  en  Dauphiné,. —  V'  partie.  Jnscriptions  autiipies  antérieures  au 
Ville  siècle,  t.  IV.  Vienne,  Girard;  in-8\    r,.:,2  pages 

Arnaud.  Histoire  des  protestants  du  Daunhir.é  aux  XVI^,  XVII"" 
et   XVIïP  siècles.  "Valence,  Gbenevier:  in-8".  île  446  u  532  pages. 

BilulVe.  Dix  Ans  de  consulat  à  Béziers.  de  1381  à  1394.  Etude 
d'histoire  locale.   Béziers,  Riviire;  in-8",  72  pages. 


20«  CHRONIQUE 

Barbier  île  Montaiilt  l'Mgr.).  La  Visite  (h  la  cathédrale  Saint-Ber- 
trand de  Commimj  es  en  10"27.  Montpellier.  Bureau  des  Chroniques 
(lu  ivangueiloc;  in-4",  '18  pages. 

Barges  (i'abl)o\  Recherches  archéologiques  sur  les  colonies  phéni- 
ciennes établies  sur  le  littoral  de  la  Cello-Ligurie .  Paris,  Leroux;  in-8", 
168  pag.,  planches. 

Barthélémy  (clej.  Les  Temps  antiques  de  la  Gaule.  Paris.  Palmé; 
in-B",  43  pages. 

Bastié.  Le  Languedoc. —  [''^  partie.  Description  complète  du  départe- 
ment du  Tarn,  tom.  II,  séries  16  à  22.  Aibi, Nouguiès;  ;n-4''à2  col., 
iv-290  pages. 

Bémont  Simon  de  Montfort,  comte  de  Leicester.  Son  gouvernement  en 
(rasco^ne  (I ■248-1  iôS).  Nouent-le-Rotrou,  Daupeloy;  in-8°,  37  pages. 

Borluc-Perussis  (de).  Forcalquier  et  ses  souvenirs  littéraires  Forcal- 
quier,  Masson;  in-S",  18  pa.ies. 

Berluc-Peru'^sis  (de)  Un  document  inédit  sur  Laure  de  Sade.  Aix, 
Marius  Illy;  in-8°,  16  pages. 

Bernard  Jabbè).  L'Église  de  Lyon  et  l'Immaculée  Conception.  Essai 
théologico-dogmatique .  Ly^  n,  Pitrat;  in-8°.  134  pages. 

^essi.  Notices  sur  Seguvana,  héroïne  niçoise.  Nice,  (^illetta;  in-8°, 
30  pages. 

Bladé.  Géographie  juive,  albigeoise  et  calviniste  de  la  Gascogne. 
Bordeaux,  in-8". 

Blouyn  (Mathieu).  Mémoires  sur  les  troubles  de  Gaillac  au  XVI^  siè- 
cle, publiés  pour  la  première  fois  et  annotés  par  M.  le  baron  de  Ri- 
vières. Montpellier.   Ricard;  in-4'',  36  pages. 

Firinin  Boissin.  Le  Vivarais  et  le  Dauphiné  aux  Jeux  floraux  de 
Toulouse.  "Vienne.  Savigné;  in-8",;11 1  pages. 

Bonnefoi  (l'abbé).  La  Noble  Eglise  collégiale  de- Saint- Julien  de 
Brioude.  Le  Puy,  Freydier;  in-B»,  51  pages. 

Bonnelye.  Saint  Antoine  de  Padoue  et  son  pèlerinage  aux  grottes  de 
Brives  (diocèse  de  Tidle).  Brives,  Verlhac:  in -8°,  "244  pages 

Bosc héron  des  Vorle--.  Histoire  du  Parlement  de  Bordeaux,  depuis 
sa  création  jusqu'à  sa  suppression  (1451-1790).  Bordeaux,  Lefevre: 
2  vol.  in-80,  x.\v-lOiO  pages. 

Bosr(!ilon  (de).  Nomenclature  des  monuments  et  gisements  de  l'épo- 
que anté-historic/ue  dans  le  département  de  la  Dordogne  (tiges  de  la 
pierre  taillée  et  de  la  pierre  polie).  Périgueux,  Dupont;  in-8". 
46  pages. 

Bourbon.  Notice  historique  sur  le  collège  de  Alontauban,  depuis  sa 
fondation  jusqu'en  1792.  Montauban    Forestié;  in-80.  30  pages. 

Bussière.  Etudes  historiques  sur  la Récolutlon  en Périgord . — •  [''"par- 
tie.  La  Bourgeoisie  péngourdine  au  XVIIP  siècle.  Agriculteurs,  écono- 
mistes et  paysans  pérlgourdlns  en  1789.  Bordeaux,  Lefebvre;  in-80, 
208  pages. 

Bresc  (Louis  de).  Noie  sur  les  armoiries  municipales  de  Forcal- 
quier. Forcalquier,  Masson;  in-B",  9  pages. 

Bresc  (Louis  de).  Episode  des  guerres  de  religion  en  Provence. 
Massacre  d' Aups  {octobre  1574).   Di'aguignan,  Latil,  in-80,  21  pages. 

Bruguier-Bourc.  La  Chartreuse  de  Valbonne  (Gard).  Tours,  Bou- 
serez;  in-80.  102  pages. 

Bruguier-Roure.  Chronique  et  cartulalre  de  la  vlguerie  royale  du 
Pont- Saint- Esprit. Tours,  Bouserez;  in-80,  103  pages. 


CHRONIQUE  ^O: 

Bi'iin-Durantl.  PonîlU  du  lUochr  de  Die.  Grenoble,  Maisonville: 
in-8o.  48  piiiios. 

Hriind-Durand.  La  Ville  de  Crest  {Drame),  sa  tour  et  ses  ilhts- 
trations;  résu lut  historique.  Vienne,  Savigné;  in-8o,  r2  pages. 

C'diWemev  .L' Établissement  des  Burgondes  davs  le  Lyonnais  au  lui- 
lieudu  V'  siècle. \Aon.  Riotor;  in-1",  23  pages. 

Castagne.  Notice  sur  les  voies  romaines  du  département  du  Lot.  Ca- 
hort;,  Plantadp;  in-S».  49  pages  et  carte. 

Chabalier.  Vais  et  ses  eiivirons.  Le  Bas  Vivarais  et  les  Cévennes. 
Paris,  Hachette;  in-32,  iv-313  pages. 

Charvct.  Un  épisode  d'histoire  locale  sous  le  règne  de  Charles  VI. 
Nimes,  in-8°,  54  pages, 

(vhamard  (doai).  Les  Églises  du  monde  romain,  notamment  celles  des 
Gaules,  pendant  les  trois  premiers  siècles.  Paris,  Palmé;  in-8»,  iv-443 
pages. 

Chantre.  Etudes  paléo- ethnologiques  dans  le  bassin  du  Rhône.  Age  du 
bronze.  Recherches  sur  l'origine  de  la  métallurgie  en  France  :  {'"'  partie, 
Industrie  de  rage  du  bronze.  ?>^ partie.  Statistique.  Paris,  Baudry;  2  v. 
in-4",  XXI-6Q5  pages  (avec  un  album  in-folio). 

Chauliac.  Un  martyr  bordelais  sotis  la  Terreur.  Vie  et  mort  du  R. 
P.  Pannetier,  grand-carme  du  coureidde  Bordeaux.  Bordeaux,  Feret; 
in-8o,  vui-334  pages. 

Chavernac.  Testament  de  Jacques  de  la  Roque,  fondateur  de  l'hôpital 
Saint-Jacques  d'Aix.  Aix,  Iipmondet-Aubin;  in-12,  64  pages. 

Chevalier  (Ulysse).  Annales  de  la  v'dle  de  Romans  pendant  les  guer- 
res de  religion,  de  1549  à  1599.  Valence,  Chenevier;  10-8",  111  pages. 

('hevulier  {\}\\'i?,e) .  Petit  Armoriai  romanais .  Vienne,  Savigné.  iii-4". 

Combet.  Histoire  de  la  ville  d'Uzerche,  suivie  de  documents  en  partie 
inédits  touchant  le  département  de  la  Corrèze.  — ï"  partie  :  Topographie 
du  canton.  Recherches  et  notes  pour  la  rédaction  d'un  dictionnaire 
géographique  et  d'un  répertoire  archéologique  du  département  de  la 
Corrèze.  Tulle,  V"  Bouillaguet;  in-8o,  361-376  pages. 

Goulondres.  La  Chartreuse  de  Villeneuve-lez- Avignon .  Dessèchement 
des  étangs  de  Rochefort  et  Pujaut.  Notices  historiques  et  documents. 
Aiais,  in-4o,  106  pages. 

Coulondres,  Lovis  VIII  à  Saint- André  (Villeneuve-lez- Avignon) 
et  Bermond  de  Clausonne,  treizième  abbé  du  monastère  de  Saint-André 
d'Avignon  (1226);  Nimes,  Clavel-Hallivet;  in-8o,  40  j)ages. 

Corbière.  La  Famille  de  Bourbon- Malauze  et  le  Château  de  Lacaze. 
Étude  historique.  Montpellier,  Firmin  etCaltirou,  in-4o,  117  pages. 

Couget.  Chartes  inédites  des  XIII",  XJV"^,  A'V'/e  et  XV II"  siècles. 
Saint-Martory  et  Lestelle  en  Comminges.  Saint-Gaudens,  Abadie; 
in-8'',  25  pages. 

Danzas,  Etudes  sur  les  temps  primitifs  de  l'ordre  de  Saint-Domi- 
nique, [.  IV.  Paris,  Ûudiii;  in-8o,  580  pages. 

Dassy  (  l'abbé  ).  L'Académie  de  Marseille,  ses  origines,  ses  publi- 
cations, ses  arcldves,  ses  membres,  etc.  iMarseille,  Barlatier-Feyssat; 
in-8°,  646  pages. 

Daux  (l'abbé).  La  Flore  monumentale  du  cloître  de  Moissac;  des- 
cription et  symbolisme.  Arras,  bureaux  de  la  Revue  de  l'art  chrétien; 
in-8°,  56  pages. 

Delpech  (H.)  La  Bataille  de  Muret  et  la  Tactique  de  la  cavalerie  au 
XIII*^  siècle  (avec  deuœ  plans  topographiques) .   Montpellier,  au  bu- 


20«  CHRONIQUE 

reau  des  publications  de  la  Société  des  languen  rnnutnes;  in  8",  xyi-lôâ 
paRcs. 

Deni.--\ .  Nvlirc  toiioçirapluique  et  historique  .sur  le  lunton  de  Marvèjoh. 
Ville  de  Marrtyoly.  i.  1.  Issoire.  Callhr.l;  in-8".  :i4T  paiîfs 

Desliarreaux-liiMnard.  Le  Portefeuille  de  M.L.-D.  F***,  utlribué 
à  Germain  de  la  Faille,  nuleur  des  Annales  de  Toulouse.  Toulouse, 
Privât;  in-4",  49  pages. 

Dosbarreaiix-Bernari! .  Etude  critique  de  Guillaume  Colletet  sur 
les  œuvres  de  Claude  de  Trellon,  poëte  toulousain  Toulouse,  Montau- 
hin;  in- 12.  19  ])ages. 

De  vie  et  VaisseU'.Zfistoire  g'éwéraZe  du  Languedoc,  édition  accom- 
pagnée  de  dissertations  et  de  notes  nouvelles,  etc.,  publiée  sou.s  la  di- 
rection de  M.  Dulauricr.  Totilouso,  Privât,  tomes  XIIl  et  XIV, 
in-4f,  XLVii-3214  paiirs. 

Drapeyroi) .  Essai  sur  le  caractère  de  la  lutte  de  l'Aquitaine  et  de 
lAustrasie  sous  les  Mérovingiens  et  les  Carolingiens.  Paris,  Thorin; 
in-8o,  109  pages. 

Dubuissou.  Historiœ  monasterii  S.  Severi.  in  Vasconia,  libri  X. 
Villeneuve-Marsan,  2  vol.  in-S»,  830  pages. 

Fayard.  Etude  historique  sur  l'ancienne  organisation  judiciaire  de 
la  ville  de  Valence.  Valence,  Chenevier;  in-8o,  90  page.s. 

Faydil  (l'abbé).  Vie  de  saint  Amahle.  prêtre  et  curé  de  Riom, 
réimprimer  sur  l'exemplaire  unique  de  la  Bibliothèque  nationale.  Riom, 
Nicolo:  in-12,  :i80  pages. 

Foncin.  De  Veteri  Carcassonis  Civitate,  de  Pago  carcassonnensi  et  de 
Romanis  quibus  ille  peragrahatur .  Paris.  Gormer-Baillière;  in-8'', 
35  pages'. 

Fontaine.  Mémoires  d'une  famille  huguenote, victime  de  la  révocation 
de  l'édit  de  Nantes,  arec  une  introduction  et  des  notes,  par  E.  (^lasLel, 
pisteur   Toulouse.  Lagarde;  in-80,  vfu-349  pages.    ■ 

Fouchier  (dej.  Un  Poitevin  en  Roussillon  au  XF"  siècle.  Notice  sur 
Charles  de  Saint- Gelais,  évèque  d'Elne  (14TU-147f)).  Poitiers  et  Pa- 
ris. Oudin;  in-8o.  37  images 

(laliiei'  (de).  La  Vie  de  province  au  dix-huitième  siècle,  d'après  les 
impiersde  Franquicres et  d'autres  documents  inédits.  Paris,  liouq nette; 
in-4o,  128  pages. 
Garnier.  Vie  deCrillon.  Tours,  Marne;  in-8",  235  pages. 
Gay  (l'abbé).  Petite  Histoire  populaire  de  Sainte- Anne  d'Apt.  For- 
calquier,  Masson,  in-8o,  16  pages. 

Gebhart.  Rabelais,  la  Renaissance  et  la  Réforme.  Paris,  Hachette; 
in-12,  300  pages. 

Germain.  Étude  historique  .sur  l'Ecole  de  droit  de  Montpellier  {1160- 
1 793),  fZ'«yj?'è.s  les  documents  originaux,  avec  j)ièces  justificatives  Mont- 
pellier, boehm;  in-4o,  124  pages. 

Germain.  Lettre  de  Manuel  de  Fiesque  concernant  les  dernières  an- 
nées du  roi  d'' Angleterre  Edouard  II.  Monti»ellier,  Martel;  in-4°,  23  pa- 
ges. 

Germain.  Statut  déterminant,  pour  les  princijjales  localités  du  diocèse 
de  Magiielone,  le  tour  de  représentation  aux  Etats  de  Languedoc  (1458- 
1459),  publié  avec  une  notice  explicative,   Montpellier,  iii-4". 

Genner-Dutand.  Déyourertes  archéologiques  faites  à  Nimes  et  dans 
le  Gard pjendant  l'année  187b,  1«'"  et  2™«  semestres.  Nîmes,  Catelan; 
in-8*'.  144  i)agos. 

Gilles.  Marseille  depuis  trois  mille  ans,  celtique, grecque  et  chrétienne 
Draguignan,  Gimbert;  in-8°,  64  pages  et  planches. 


CHRONIQUE  209 

Gonnard.  Catalogue  des  collections  du  musée  de  Saint-Etienne,  {"'sec- 
tion :  peinture,  sculpture,  f/ravure,  rff.ss/rts  et  aquarelles.  Vienne,  Savi- 
^né  ;  in-8°,  xi-264  pages. 

Gouazé.  La  Chambre  de  l'Édit  de  Languedoc.  Nîmes,  Clavel-Balli- 
vet ;  in-S",  36  pages. 

Grenier- Fajol.  Biographie  de  Charles  de  Bourdin.  pasteur  du  Mas- 
d'Azil,  réfugié  en  Suisse  à  la  révocation  de  l'édit  de  Nantes.  Montauban  , 
Vidallet  ;"in-8°.  211  pages. 

Guinodie.  Histoire  de  Libourne  et  des  autres  villes  et  bourgs  de  son 
arrondissement.  Tome  III  et  dernier,  2e  édition.  Libourne,  Malleville; 
in-8",  028  pages. 

Hermitte  (l'abbé).  Vie  de  saint  Louis,  évêque  et  patron  de  la  ville  de 
Brignolles.  Brignolles,  Vian  ;  in-i2,  272  pages. 

Hozier  (d').  Armoriai  général  des  personnes,  domaines,  compagnies, 
corps  et  communautés  (circonscription  actuelle  de  l'Aude).  Carcassonne, 
Pomiès  ;  in-8",  iv-128  pages. 

tdeville  (d').  Les  Châteaux  de  mon  enfance.  Auvergne  et  Bourbonnais. 
Paris,  Palmé;  in-8°,  266  pages. 

Jalat  (l'abbé).  Monographie  de  l'église  paroissiale  de  l'Isle-sur- 
Sorgues.  Avignon,  Seguin  ;  xxx\a-256  pages. 

Lacombe  (Gh.  de)  Henri  IV.  Paris,  Douniol  ;    iii-8»,  39    pages. 
Lacroix.  L' Arrondissement  de  Montélimar  ;  géographie,  histoire,  sta- 
tistique. T.  IV.  JNIontélimar ,  Bounon  ;  in-8o,  374  pages. 

Laval.  Histoire  de  la  peste  d'Arles  en  Provence,  de  1 720-1721. 
Nimes.  Gatelan  ;  in-8°,  48  pages. 

Lefort.  La  Légende  de  saint  Bénézet,  constructeur  du  pont  dAvignon 
au  Xlle  siècle  j  examen  historienne  et  critique.  Le  Mans,  1878,  in-4®. 

he  Cœuv.  Le  Béarn.  Histoire  et  promenades  archéologiques.  Pan. 
Ribaut;  in-8°,  xi-352  pages. 

Leatheric.  La  Grèce  et  l'Orient  en  Provence.  Paris,  Pion  :  in-12, 
497  i>ages. 

Levosque  (l'abbé).  Notr6-Dame-de-Lorette,prèsde  Séoerac-le-Chû- 
teau.  Histoire  de  sa  fondation  et  de  sa  restauration.  Rodez,  venve  Gar- 
rére;  in-r2.  iv-7û  pages. 

Magne.  Etude  sur  Etienne  de  la  Boétie.  Périgueux,  in- 8°,  56  pages. 
Maignien.    Notes   historiques    sur  Vévêché    de    Grenoble,  de  1237  à 
1338.  Grenoble,  in-8o. 

Maïmonide.  Lettre  de  Mdimonide  au  collège  rabbinique  de  Mar- 
seille (Tl  septembre  1 194;,  traduite  pour  la  première  fois  enfran(;aiSy 
avec  avani-propos  historique,  \yàT  iona.^  Weyl.  Avignon,  Gros;  in-8°, 
23  pages. 

Manés.  Notice  historique  sur  les  moyens  anciens  et  nouveaux  de  pas- 
sage de  la  Garonne  devant  Bordeaux,  el  de  la  Dordogne  devant  Cub- 
zac.  Bordeaux,  Gounouiihoii  ;  in-8",  84  pages  et  plancbes. 

Marehegav.  La  Ran<pn  d'Olivier  de  Coëtivy,  seigneur  de  Taillebourg 
et  sénéchal  de  Gnyenne  (1451-1477).  Nogent-le-Hotrou,  Daupeley  ; 
in-8o,  48  pages. 

Marin  de  Garranrais   (de).  L'Abbaye  de  Mantmajour,  étude  histo- 
rique, d'après  les    manuscrits  de  dont,    Chantelou   et  autres  documents 
'  inédits.  Marseille,  Olive;  in-8°,  166  pages. 

Mège.  Le  Puy-de-Dôme  en  1793  et  le  proconsulat  de  Couthon.  Paris, 
Aubry;in-8°,  712  pages. 

Menjoulet  (l'abbé).  Histoire  de  saint  Léon,  apôtre  de  Bayonne  ;  sou 
époque,  sa  vie,  son  culte.  Bayonne,  Lassere;  in-12.  288  pages. 

14 


?10  CHRONIQl'K 

Michel  (Albin).  Nimes  et  ses  rues.  i.  !"•.  Nimes,  Clavel-Ballivet  ; 
iii-8".  324  jiaiies 

Michel.  Les  Roy  s  du  Papegay  à  Niynes,  ouïes  Tireurs  nimois  en  l'an 
1300.   Nimos.  Caloian  ;  in-S",  â6  pages,  pianche.-i. 

Michit'ls.  L' Art  flamand  dans  l'est  et  le  midi  le  la  France.  Rapport 
au  gouvernement  français.  Paris  l.ooncs  ;  in-8°.  vin  56û  pages,  gra- 
vure?. 

.Millet.  Notice  sur  les  imprimeurs  d'Orange  et  les  lirres  sortis  de  leurs 
jyresses.  Valence,  Cheiievier,    in-S". 

MoiiLTiiis  lie  Roquefort  et  Gazan,  Inscription  grecque  trouvée  à 
Antibes  en]8i6(}   Notice.  Toulon,  Laurent;  in-8".  33  paj^es 

Niepce  (lA'opolilj.  Cartulaire  municipal  de  la  ville  de  Lyon  dit 
d^ Etienne  de  Villeneuve,,  /niblié  par  M.  Guigue.  Compte  rendu  et  étude. 
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Noulens.  Le  Comté  d'Agenais  au  A'*  siècle .  Paris,  Dumoulin  ; 
in-4».  1 1 1  pages. 

Paul  Guillaume.  La  Station  préhistorique  de  Panacelle  et  les  peu- 
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Pauli.  Simon  de  Afonlfort,   earl  qf  Leicester,  the  creator  of  the  House 
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Payon.  Tablettes  des  bibliojjhiles  de  la  Guyenne  (t.  II).  Inventaire 
de  lu  collection  des  ouvrages  et  des  documents  sur  Michel  de  Montaigne, 
réunis  jjar  le  docteur  J  -F  Payen  et  conservés  à  lu  Bibliothèque  natio- 
nale. Bordeaux,  in-8o,  xvri-396  panes. 

Pegat.  La  Cour  du  Petil-Scel  royal  de  Montpellier .  .Montijellier^ 
Boehm  ;  in-4'>.  r»9  pages 

Peiloux.  Etude  sur  la  Durance.  Porcalqnier,  Masson  ;  in-S", 
13   pag(>s. 

['errin.  Pnlafi tes  ou  habitations  hicustresdu  bassin  du  Rliône,  âge  du 
bronze.  Lyon.  Pitrai;  in-l".  54  pages. 

Peyrat  (Napoléon).  Les  Pyrénées.  Paris,  Grossart;  in-12,  3  fr. 
Prothero.  The  Life  of  Simon  de  Montfort,  earl  of  Leicester .  with  spécial 
to  the  parliamentary  history  of  his  time.    London,  Longinans;  in-S", 
xu-4U"J  pages. 

Quiriello  (de).  Forez  et  Bourbonnais.  Piervede  la  Fin  à  Montaiget. 
Notice  historique  et  archéologique,  etc.  Vienne,  Savigné  ;  in-4°,  3'.) 
pages. 

if'isançon  [à^) .  Étude  sur  l'allodialitt  dans  la  Drùme,  de  1000  à  1400, 
i"  partie.  Valenc(%  Chêne viei-;  pa-re'^  20',)  a  308. 

Haverat.  Le  Dauphiné.  de  Lyon  à  Grenoble .  Guide  artistique  et  pit- 
toresque. Lyon.  Meia;  in-8",  213  pages. 

Hey.  Recherches  géographiques  et  historiques  sur  la  domination  des 
Latins  en  Orient,  accompagnées  de  te,ctes  inédits  ou  peu  connus  du  X  I  P 
au  XIV*^  siècle.  I*aris.  J^ahure  ;  in-8",  78  pages. 

Ricard  (A).  Réconciliation  de  l'église  de  Maguelone  (  I  'a  Juin  1875). 
Monlpellier,  Jean  Martel;  in-4".  21  [lages. 

Rivarés.  Pau  et  les  Basses-Pyrénées  pendant  la  Révolution.  Pau. 
Ribaut  ;  in-8°,  ix-332  i)ages. 

Rolle.  Inventaire  sommaire  des  archives  hospitalières  antérieures 
à  1790.  Ville  de  Lyon;  lu  charilé  ou  aumône  générale,  l  m.  IIP  Lyon, 
Brun;  in-4"àdeu\  col.,  443  pages. 

Roiiet  (  l'ahlié  A  .  ).  Etude  .sur  l'école  juive  de  Lunel  au  moyen  âge. 
Paris,  Vieweg;  in-8",  vii-65  pages  (avec  un  plan). 


CHRONIQUE  iU 

Honx  ,  Xavier  ).  Les  Alpes,  histoire  et  souvenirs.  Paris,  Balten- 
weck  ;  iii-li,  -271  paLcos. 

Ruble  ;de).  Le  Mariage  de  Jeanne  d'Albret.  Paris.  l.ahitLe  ;  iii-8», 
xiv-321  paiïes 

Saurel.  3Iaritima  Avaticorum,  nu  Recherches  sur  une  nille  morte 
située  dans  la  commune  de  Saint- Mitr c  Douches-du-Rhône).  Tours, 
Bougerez;  in-S»,  48  pai-es 

Saurel.  Raolin,  ou  Aperçu  historique  sur  la  république  de  Marseille 
au  XII I^  siècle.  MarMiilt',  Thomas;  in-r2. 

Schloesini?.  Les  Vnudois  de  Provence  au  XVfe  siècle.  Conférence. 
Marspille,  Barlatier-l'Vissal    in-Ki,  G8  iiaiies. 

Simon .  Inscription.'^  tnmulaires  héhraïques  du  moyen  àgr.  Notice  com- 
muniquée  à   r Académie  ilu  Gard.  Xiinc.-;    Catelan;  in-8  •,  19  pages. 

Tamizey  do  Larroqiio.  Documents  inédits  sur  Gas.^endi.  Paris, 
Palmé  ;  in-8°,  36  [)aiies. 

Tardieu.  Grand  Dictionnaire  hiogruiMque  du  Puy-de-Dôme,  avec 
une  galerie  de  \6{)  porlr-aits  Moulins.  Desrosiers  ;  u;r.  in-4'>,  li^r  ,  fac- 
similé,  etc. 

Tardieu.  Grand  Dictionnaire  historique  du  Puy-de-Dôtne.  donnant 
l'histoire  complète  des  villes,  bourgs,  hameaux,  paroisses,  etr...  situés 
sur  ce  territoire.   Motilins    I):'sroziers;  iirauil  in-4o,  ui-38i  paires. 

Teissier.  Biographie  de  L.  Ch.  Thiers .  avacat  au  parlement  de  Pro- 
vence, archiviste  d<'  la  ville  de  Marseille  Marseille.  Librairie  uiarseil- 
laise  :  in-i6.  xiii-9t^'  pages. 

Tholin.  Aperçus  généra u.r,  sur  le  régime  municipal  de  la  ville  d'Agen 
au  XVI''  siècle.  Agei).  in  8o,  37  pages. 

Tholin.  Notes  sur  les  stations,  les  oppidum,  les  camps  et  les  refuges 
du  déparlcnent  du  Lot-et-Gaionne.  .\'XQn.  in-S",  38  jia^es. 

Tholin.  Notes  sur  la  chasse  dans  VAgenais.  Agen,  in-i^,  36  pages. 

Turrel.  Etude  sur  C.  de  Tournemiae.  peintre  toulonnais.  'l'oiilon. 
Laurent;  in-8o,  85  pages 

Vallenûin.  Excursions  archéologiques  dans  les  Alpes  Dauphinoises 
Grenoiile.  Maison  vil  le  ;  in-8".  16  pages 

Vallentin.  £'ssai  sur  les  divinités  indigètes  dn  Vocontium,  dajirès  les 
monuments  épigraphiques .  Grenoble,  Prud'homme-Diiuphin  :  in-8°, 
76  pages. 

Vaschalde.  Étahlisiement  de  l  Imprimerie  tlans  le  Vivarais,  illustré 
de  marques  typographiques.  Vienne,  in  8"; 37  jiagps  er.  |)lancl)es. 

Vaschalde.  Histoire  des  poëtes  du  Vivarais,  d'après  des  documents 
inédits.  Paris,  Aubry:  in-8°.  fascicules  I  à  3.  ~78  pagrs. 

Vaschalde.  Le  Tombeau  du  maréchal d'Ornano à  Auhena8{Ardèche). 
{Documents  inédits).  Vienne,  in-8''. 

Vian.  Histoire  de  Montesquieu,  sa  rie  et  ses  œuvres,  d'après  des  docu- 
ments nouveaux  et  inédits.  P.cis.  DidJM-  ;  in-8°.   vn-xi.\-4ll  pages. 

Vincent  (l'abbé).  Notice  historique  .^ur  Montmeyran  {Drame).  Va- 
lence, (léas:  in-8°,  55  |ia'_'es. 

Vivie.  Histoire  de  la  Tei-reurù  Bordean.r.  Bordeaux,  F>ret  l  tu  1"^ 
et  IL  xxin-455-511  pages. 


^SJ--* 


Errata  et  rectifications  du  uuméro  de  juillet-septembre  1878 


Notes  sur  le  langage  de  Saint- Maurice-de- l'Exil.  -  P.  11,  ligne  16. 
qui  précède,  lisez  qici  suit.  —  13,7,  loù  roussignou,  1. 
lou  roussignou.  —  14,  6,  se  dépleyé,  1.  se  depleye.  — 
16,  19.  inpignére,  1.  pipigniere.  — '21,  \i,paluct,\. 
paluet 

Un  fragment  de  puëme  en  langage  de  Bessan.  —  P.  26.  i.  12.  siences 
1.  siennes.  —  27,  3.  j^lf^fio,  1.  plana.  —  27.  31-32,  à 
laquelle  attache  la  dénomination,  1 .  à  laquelle  s'attache 
la  dénomination.  —  28.  16,  renouncà,  I.  renounçà.  — 
29.  1.  menacava,  1.  menaçava. —  29,  2,  crento.  I.  crenta. 

—  30.  24,  pronence,  1.  prononce.  —  31.  34,  reconnu,  1. 
reconnue . 

Poueisias  dioisas.  —  P.  34   I.  10,   ceque  so  peinso,  1.  ce  que  peinso. 

—  42.    27,   houmeis,   1.    hommeis.    —  43,    35.    oquoou 
d'aqui  1.  oquoou  d'oqui. 

Lettres  à  Grégoire  sur  les  patois  de  France.  —  P.  70,  1.  30,  smonaine, 
l.  smouaines, —  70,  'i:>,  jamonai.  l.jamouai.  — 71,  10, 
môme  recLitication. —  71,  18,  uni  1.  vni. —  72.  l,qu'in, 
1 .  qui  n' . 

Bibliographie  et  périodiques.  —  P  110,  1.  15,  tron.  1.  trou.  —  120, 
3,  des  ceux,  1.  de  ceux. —  !2l,  12-13,  alos.  arros,  1.  Alos, 
Arros. 

Bulletin  bibliographique  de  la  langue  d'oc.  —  Ajoutez  le  nom  de 
l'auteur  :  S.  Léot.\rd,  au  ba.-^  de  la  dernière  ligne  de 
la  page  133. 

Le  Purage  à  Maguelone.  —  P.  135,  1.  28,  y  avaient,  1.  y  ont. —  142, 
27.  la  Famiho  de  la  coumtesso,  1.  Pèr  madamo  la 
cnumtesso  C.-D.  Coote.  —  143,  note  *,  I.  li,  mou  ca- 
maradou.  i-t'-a  tou  tour,  I.  mon  camaraxlou,  i-t-a  ton 
tour.  —  143,  18,  mou  verou,  \.  mon  verou.  —  146,  titre 
courant  :  le  Parage  à  3Iaguelome,  1.  le  Parage  à  Ma- 
guelone. —  148.  ti,  2)erd,  1.  per.  —  153,  34.  row  de 
l'arrondis.  d'Arles,  1.  rom.de  l'arrondis.  d'Arles. —  153, 
35,  M.  de  F.  1.  M.  V. —  154,  34-35,  l'eirjarai,  X.l'ire- 
jarai. —  155,  28.  q'uemploient,  I,  c/u' emploient. 

Chronujue .  —  P.  159,  13,  la  Famiho  de  la  coumtesso.  1.  Per  madamo 
la  coumtesso  C.  D.  Coote,  sus  soun  libret.  Histoire  de 
trois  chiens:  d'une  jument  ei  de  deux  oiseaux. 


Le  gérant  responsable  :  Erne.st  Hamelin 


.Montpellier,  impriraerie  ce-ntiule  du  Midi  ( H.\mei.i.h  Frkres) 


DIALECTES  MODERNES 


-tî^V  _ 


L   ENSEIGNEMENT 

DE    LA   PHILOLOGIE    ROMANE 

EN  FRANCE 


Leçon  d'ouvortiire  des  Conférences  de  philologie  romane 
faite  à  la  Faculté  des  lettres  de  Montpellier,  le  16  novembre  1878 


Messieurs, 

En  me  nommant  maître  de  conférences  de  philologie  romane 
auprès  de  la  Faculté  des  lettres  de  Montpellier,  M.  le  Ministre 
de  l'instruction  publique  a  moins  voulu  récompenser  mes  mo- 
destes travaux  que  fournir  aux  hommes  d'étude  de  notre  ville 
qui  ont  le  goût  des  recherches  philologiques  l'occasion  de  tra- 
vailler plus  utilement,  en  associant  leurs  efforts  à  ceux  d'un 
spécialiste  déjà  connu  de  quelques-uns  d'entre  eux.  Je  sais 
mieux  que  personne  ce  qui  me  manque  encore  et  me  manquera 
peut-être  toujours.  Outre  que  je  n'ai  pas,  comme  les  savants 
professeurs  de  cette  Faculté,  l'habitude  de  la  parole  publique, 
à  laquelle  mes  fonctions  antérieures  ne  m'ont  qu'imparfaite- 
ment préparé,  ii  me  reste  à  apprendre  beaucoup  dans  ma  pro- 
pre spécialité,  et,  ce  qui  est  plus  difficile,  à  apprendre  d'eux 
le  secret  d'instruire  en  intéressant.  J'aurai  donc  besoin  de  vo- 
tre sympathique  indulgence,  et  j'ose  y  compter,  comme  vous 
pouvez  compter  sur  mon  désir  de  bien  faire. 

I 

Il  n'est  pas  besoin  de  longs  développements  pour  justifier 
l'introduction  de  la, philologie  romane  dans  notre  haut  ensei- 
gnement. Il   suffit  de  citer  l'exemple   àc   TAllemagne,  et  de 


214  ENSEIGNEMENT    DE    LA    PHILOLOGIE    KOMANE 

rappeler  que,  si  la  France  a  pris  en  grande  partie  l'initiative 
de  ces  études  avec  Rajnouard  et  Faui;iel,  ce  sont  les  philo- 
logues allemands  qui,  sous  la  direction  de  Diez,  ont  maintenu 
et  développé  Ja  tradition  scientifique  née  chez  nous.  Ils  ont 
même  pris  une  telle  avance  et  acquis  une  telle  autorité,  que 
c'est  à  leur  école  que  se  sont  formés  nos  principaux  romani- 
sants. 

Cette  prééminence  philologique,  l'Allemagne  la  doit  à  ce 
qu'elle  a  depuis  longtemps  admis  d'une  manière  définitive,  et 
non  pas  seulement  toléré  comme  en  France,  l'enseignement 
de  la  philologie  romane.  Pour  arriver  à  ce  résultat,  ou  du  moins 
pourenapprocher,  nous  n'avons  donc  qu'à  employer  les  mêmes 
moyens,  et  à  les  perfectionner  si  nous  pouvons. 

Et,  d'abord,  que  faut-il  entendre  par  cette  expression  de 
«  philologie  romane  ?  » 

Je  n'ai  pas  besoin  de  vous  faire  observer  que  le  mot  «philo- 
logie »  n'a  rien  d'exclusif,  et  que,  s'il  rappelle  surtout  l'idée 
d'études  linguistiques,  il  ne  repousse  ni  l'esthétique  ni  l'histoire 
littéraires.  Ce  n'est  pas  sur  ce  point  qu'il  peut  y  avoir  de  doute, 
mais  sur  l'acception  précise  du  mot  «  romane.  » 

Au  commencement  de  ce  siècle,  il  n'y  avait  pas  seulement 
erreur  ou  doute  à  cet  égard,  mais  ignorance  à  peu  près  géné- 
rale du  mot  lui-même. 

On  n'a  pas  oublié  la  mésaventure  de  Roquefort,  qui,  sup- 
posant à  Napoléon  autant  d'aptitude  pour  la  philologie  que 
pour  le  métier  des  armes,  avait  sollicité  et  obtenu  la  permis- 
sion de  lui  offrir  un  exemplaire  de  son  Glossaire  de  la  langue 
romane.  «  La  langue  romane,  dit  l'Empereur,  après  avoir  lu 
le  titre,  a  qu'est-ce  que  c'est  que  ça  ?»  —  Sire,  répondit  Ro- 
quefort, c'est  la  langue  que  parlaient  nos  ancêtres.  »  Ce  ren- 
seignement resta  sans  effet  sur  la  curiosité  de  Napoléon,  qui, 
tout  à  ses  démêlés  avec  l'Autriche,  —  c'était  l'année  de  la 
bataille  de  Wagram,  —  avait  bien  autre  chose  à  faire  qu'à  se 
laisser  initier  aux  mérites  d'une  langue  connue  seulement  de 
quelques  rares  érudits.  Après  avoir  déconcerté  le  pauvre 
Roquefort  par  de  brusques  et  désobligeantes  observations,  il 
tourna  les  talons  sans  lui  en  demander  davantage.  Et  ce  fut 
peut-être  tant  pis  pour  la  philologie,  qui  nous  est  chère,  car 
les  encouragements  du  pouvoir,  sans  action  sur  les  progrès 


EN    FRANCE  210 

de  la  littérature,  qui  vit  surtout  do  liberté,   en  ont  au  con- 
traire une  très-efficace  sur  ceux  de  la  science. 

Aujourd'hui  nous   sommes  plus  familiarisés  avec  cette  ex- 
pression de  «  langues  romanes  »  qu'on  ne  l'était  au  temps  de 
Napoléon  et  que  ne  l'était  Napoléon  lui-même.  Cependant  bien 
des  personnes  en  France,  et  plus  particulièrement  dans  le  Midi, 
l'appliquent  à  faux  ou  lui  donnent  une  signilication  incomplète  ; 
car  elles  pensent  qu'on  désigne  exclusivement  par  là  la  langue 
ancienne  ou  moderne  de  nos  provinces  méridionales.  Et  ce  doit 
être  pour  elles  une  espèce  d'énigme  que  de  voir  créer  en  même 
temps  deux  chaires  différentes  pour  ce  qu'elles  croient  être  une 
même  langue  et  une  même  littérature.  Mais  leur  embarras  pro- 
vient d'une  erreur  qui,  d'ailleurs,  date  de  loin  et  s'est  propagée 
sous  le  nom  respecté  de  Raynouard.  Si  les  troubadours  don- 
naient à  leur  langue  le  nom  de  romane,  les  trouvères,  leurs 
contemporains,  en  faisaient  autant  pour  la  langue  du  Nord  ou 
langue  d'oïl. Avant  eux,  ceux  qui,  écrivant  enlatin,  avaient  oc- 
casion de  mentionner  la  langue  vulgaire,  tant  celle  du  Nord  que 
celle  du  Midi,  ne  la  désignaient  pas  autrement  que  par  l'épithète 
de  romana,  réservant  celle  de  /a/ma  pour  la  langue  de  Rome. 
Tout  au  plus  j  ajoutaient-ils  une   seconde  épithète,  celle  de 
rustica,  destinée  à  rendre  plus  saisissable  la  distinction  qu'ils 
faisaient  de  la  langue  romane  et  de  la  langue  latine.  Les  sa- 
vants ont  repris  l'ancienne  tradition,  et,  pour  eux,  philologie 
romane  et  philologie  néo-latine  sont  termes  synonymes.  On 
ne  vous  demande  donc.  Messieurs,  en  vous  engageant  à  vous 
conformer  à  ce  qui,  pour  plusieurs  d'entre  vous,  est  un  usage 
nouveau,  que  de  ne  pas  désavouer  nos  ancêtres  et  d'accepter, 
sans  restriction  de  sens,  le  nom  qu'ils  donnaient  à  leur  langue. 
Ce  mot  de  u  roman  »,  ainsi  entendu,  est  bien  plus  compré- 
hensif,  vous  le  voyez,  qu'on  ne  le  supposerait  d'abord.  Il  s'ap- 
plique à  toutes  les  langues  issues  du  latin,  et  embrasse,  pour 
ne  pas  sortir  de  l'Europe,  outre  la  France  et  une  grande  par- 
tie de  la  Belgique  et  de  la  Suisse,  l'Italie,  plus  le  littoral  dal- 
mate,  la  péninsule  hispanique  tout  entière,  et  enfin  la  Rou- 
manie, dont  le  nom  significatif  nous  rappelle   de  communes 
origines  linguistiques  et  qui  est  comme  l'avant-garde  orien- 
tale de  ce  puissant  groupe  néo-latin. 

En  donnant  à  la  signification  de  ce  mot  toute  l'étendue  qu'il 


1 


SIC         ENSEIGNEMENT    DE    LA    PHILOLOGIE    ROMANE 

comporte,  le  domaine  de  lu  philologie  romane  s'étendrait  sur 
les  langues  et  les  littératures  de  près  de  la  moitié  de  l'Europe. 
C'est  ainsi,  du  reste,  que  l'entendent  les  Allemands;  et,  si 
nous  nous  étions  bornés  à  les  copier,  il  n' v  aurait  eu  qu'à  créer 
dans  chaque  Faculté  importante  une  seule  chaire,  dite  de  phi- 
lologie romane,  laquelle  aurait  compris  tout  ce  qui  a  trait  aux 
deux  langues  d'oc  et  d'oïl  et  à  toutes  les  autres  langues 
néo-latines.  C'aurait  été  quelque  chose  d'analogue  à  ce  qui  a 
eu  lieu  chez  nous  pour  les  chaires  de  littérature  ancienne, 
qui,  au  début,  réunissaient  la  littérature  latine  et  la  littérature 
grecque,  mais  que  les  nécessités  de  l'enseignement  ont  fait 
bientôt  dédoubler.  On  a  dû  confier  chacune  des  deux  spéciali- 
tés qu'elles  représentaient  à  un  professeur  distinct,  et  fonder 
dans  nos  principales  villes  universitaires,  à  Nancy,  à  Lyon,  à 
Montpellier,  une  chaire  de  langue  et  de  littérature  grecques, 
à  côté  de  la  chaire  de  langue  et  de  littérature  latines.  lien  est 
de  même  pour  la  philologie  romane,  qui  offre  aux  savants,  à 
ne  la  considérer  pourtant  que  dans  ses  deux  grandes  manifes- 
tations françaises,  la  langue  d'oc  et  la  langue  d'oïl,  autant  et 
plus  de  textes  que  les  deux  langues  anciennes  réunies. 

La  langue  d'oïl  comprend  tout  ce  qui  a  été.  écrit  en  langue 
vulgaire  du  Nord,  depuis  les  origines  jusqu'au  XV""  siècle. 
Elle  n'a  pas  seulement  longtemps  vécu,  elle  a  aussi  beaucoup 
produit,  et  l'on  n'a  pas  encore  tout  publié.  Rien  qu'avec  ce 
qui  a  été  imprimé,  sans  compter  ce  que  recèlent  d'inédit  les 
parchemins  de  nos  archives  et  les  manuscrits  de  nos  biblio- 
thèques, il  y  a  de  quoi  lasser  le  chercheur  le  plus  persévérant 
et  le  plus  expéditif. 

Et  ce  n'est  pas  tout.  A  cette  même  langue  d'oïl  se  rattachent 
aussi  les  langues  populaires  actuelles  ou  patois  du  nord,  suc- 
cesseurs directs,  sinon  immédiats,  de  nos  anciens  dialectes  ; 
amples  matériaux  pour  une  nouvelle  et  indispensable  étude,  qui 
se  greffe  naturellement  sur  la  précédente.  Car  il  y  a  là,  dans 
ce  sous-sol  philologique,  outre  un3  langue  d'une  incompara- 
ble valeur  scientifique,  comme  toutes  les  langues  parlées  par 
les  seuls  illettrés,  comme  tous  les  faits  d'ordre  purement  natu- 
rel, une  littérature  encore  peu  étudiée,  littérature  vraiment 
populaire  (noëls,  contes,  chants,  proverbes,  énigmes,  super- 
stitions religieuses  et  médicales),  dont  l'histoire,  sauf  pour  celle 
du  Midi,  est  entièrement  à  faire. 


EK    KKA^CI<:  217 

En  rejoignant  ainsi  los  [latois  de  notre  teraps  aux  dialectes 
d'autrefois,  on  laisse  forcément  de  côté  le  français  proprement 
dit,  formé  à  des  degrés  divers  du  mélange  des  dialectes  septen- 
trionaux et  du  dialecte  central  et  dominant  de  rile-do-France. 
Or  c'est  précisément  cette  langue  unique  et  multiforme  do 
notre  pays,  devenue  plus  tard  la  langue  classique  avec  les 
grands  écrivains  du  siècle  de  Louis  XIV,  qui  constitue,  de  la 
Renaissance  à  la  génération  présente,  le  domaine  incontesté 
et  jusqu'à  ce  jour,  sauf  de  très-rares  exceptions,  le  seul  ex- 
ploité, de  nos  professeurs  de  littérature  française.  D'où  il  ré- 
sulte que  ceux-ci  n'auront  aucune  concurrence*  à  souffrir  de 
la  part  d'une  chaire  voisine  de  langue  d'oïl.  Sur  ce  point  donc, 
les  nécessités  scientifiques  s'accordent  pleinement  avec  les 
habitudes  de  notre  enseignement  supérieur  et  n'exigent  de 
lui  aucun  sacrifice. 

Ce  qui  est  vrai  de  la  langue  d'oïl  l'est  tout  autant  de  la 
langue  d'oc.  Son  ancienne  littérature  est  aussi  intéressante  que 
celle  de  la  langue  sœur,  quoique  représentée  par  des  docu- 
ments moins  nombreux.  Elle  a  de  plus  l'avantage  déposséder, 
depuis  la  renaissance  néo-provençale,  une  littérature  artifi- 
cielle par  certains  côtés,  mais  très-populaire  par  d'autres,  qui 
appelle  un  rapprochement  constant  avec  les  œuvres  des  trou- 
badours. 

Si  l'on  ajoute  à  cela  que  les  archives  méridionales  ont  été 
moins  fouillées  que  celles  du  Nord,  à  cause  de  leur  éloignement 
de  Paris  et  surtout  à  cause  de  la  différence  de  langue,  on  verra 
que,  tant  au  point  de  vue  scientifique  qu'au  point  de  vue  litté- 
raire, la  langue  d'oc  ancienne  et  moderne  présente  une  aussi 
vaste  surface  que  la  langue  d'oïl,  envisagée,  comme  elle  vient 
de  l'être,  dans  son  présent  et  dans  son  passé. 

On  comprend  qu'à  l'étranger  un  seul  professeur  puisse  être 
chargé  de  la  langue  d'oc  et  de  la  langue  d'oïl,  puisqu'il  s'en- 
ferme le  plus  souvent  dans  leur  passé  sans  avoir,  comme  un 
professeur  français,  à  les  étudier  sur  le  vif,  c'est-à-dire  dans 
leurs  patois.  En  France,  au  contraire,  on  ne  peut  dispenser  le 
professeur  de  philologie  romane  de  l'étude  des  idiomes  popu- 
laires actuels,  héritiers  déchus,  mais  bien  vivants,  de  nos  deux 
anciennes  langues. 

Ces  études  complémentaires  des  patois  ne  peuvent,  on  le 


5IS         EKSBIGNEML'NT    DE    LA    PHILOLOGIE   ROMAKE 

devine  aisément,  être  bien  faites  que  surplace,  enFrance  même, 
dans  certaines  parties  de  la  France,  et  par  des  professeurs 
ayant  la  pratique  de  ces  idiomes  ;  car  il  ne  faut  pas  perdre  de 
vue  que  ces  professeurs  auront  à  parler  devant  des  auditeurs 
que  leur  origine  rend,  pour  la  plupart,  presque  aussi  compétents 
qu'eux-mêmes  pour  la  partie  moderne  de  leur  enseignement. 
D'un  autre  côté,  à  érudition  et  à  intelligence  égales,  de  deux 
savants  étudiant  une  même  langue  ancienne,  celui  qui  parle 
d'enfance  la  langue  moderne  qui  en  est  issue  aura  de  ce  chef 
une  véritable  supériorité  sur  son  concurrent.  C'est  dire  assez 
que,  en  réorganisant  cet  enseignement  dans  le  sens  que  nous 
venons  d'indiquer,  on  a  voulu  rendre  à  la  France  tous  ses 
avantages  vis-à-vis  des  étrangers,  qui  en  sont  encore  à  l'unité 
de  chaire  en  fait  de  philologie  romane. 

Quant  à  la  ville  destinée  à  essayer  ce  nouveau  genre  d'en- 
seignement, aucune  ne  pouvait  'convenir  mieux  que  Montpel- 
lier. C'est  là  que  s'est  fondée,  il  y  a  bientôt  dix  ans,  la  Société 
des  langues  romanes,  association  aujourd'hui  nombreuse,  com- 
posée d'hommes  laborieux  et  d'amateurs  éclairés,  qui  a  pour 
elle  l'opinion  locale  et  a  su  la  gagner  aux  études  philologi- 
ques. Je  ne  crois  pas  trop  sortir  de  la  discrétion  que  m'impose 
ma  qualité  de  membre  de  cette  Société,  en  rappelant  que 
c'est  principalement  en  considération  des  services  rendus  par 
elle  que  le  Conseil  académique,  et  plus  récemment  le  Conseil 
général,  avaient  émis  le  vœu  que  l'enseignement  de  la  philo- 
logie romane  fût  organisé  dans  notre  ville.  En  admettant  dans 
le  cadre  de  ses  publications  spéciales  ou  périodiques  tout  ce 
qui  a  trait  à  la  langue  d'oc  et  à  la  langue  d'oïl,  étudiées  dans 
leurs  dialectes  anciens  et  dans  leurs  dialectes  modernes,  en 
attirant  à  elle  tous  les  travailleurs  isolés  qui,  soit  à  Paris, 
soit  sur  un  point  quelconque  de  la  province,  soit  à  l'étranger 
(Espagne,  Italie,  Allemagne,  Suède),  s'adonnent  aux  études 
qu'elle  représente,  elle  a  créé  en  faveur  de  Montpellier  un 
véritable  courant  d'opinion  publique,  qui  s'est  grossi  de  l'adhé- 
sion fréquemment  exprimée  des  romanisants  étrangers. 

En  un  mot,  elle  a  contribué,  autant  que  cela  a  dépendu 
d'elle,  à  en  faire  xxxv  grand  centre  philologique,  en  attendant  qu'on 
en  fasse  un  grand  centre  universitaire. 

De  son  côté,  par  l'intelligente  sympathie  qu'il  n'a  cessé  de 


EN    FRANCK  219 

témoigner  à  la  Société  dont  il  est  le  siège,  Montpellier  a  pris 
l'avance  sur  ses  compétiteurs  possibles  et  justifié,  vis-à-vis 
d'eux,  la  préférence  dont  il  est  aujourd'hui  l'objet. 

Excusez-moi,  Messieurs,  d'avoir  insisté  si  longuement  sur 
la  nécessité  qu'il  y  avait  de  créer  deux  chaires  de  philologie 
romane  et  sur  les  avantages  que  nous  pouvons  retirer,  au  point 
de  vue  de  la  concurrence  scientifique  internationale,  de  cet 
élargissement  des  cadres  de  notre  enseignement  supérieur. 
J'ai  pensé,  et  vous  penserez  avec  moi,  que  la  meilleure  ma- 
nière de  remercier  le  gouvernement  de  son  libéralisme  et  de 
ses  libéralités  était  de  faire  ressortir  l'importance  de  l'ensei- 
gnement qu'il  vient  de  créer  parmi  nous. 

Il  ne  nous  reste  plus  qu'à  aborder  directement  ces  études 
de  philologie  romane.  Mais  auparavant  je  dois  vous  faire, 
principalement  au  point  de  vue  français,  l'historique  de  ces 
mêmes  études,  et  rappeler  les  noms  et  les  services  de  quel- 
(|ues-uns  de  ceux  auxquels  elle  sont  redevables  de  leurs  plus 
rapides  progrès.  Après  quoi,  nous  esquisserons  à  grands  traits 
l'histoire  de  la  langue  d'oil,  depuis  les  origines  jusqu'à  la  Re- 
naissance, pour  terminer  par  quelques  considérations  pratiques 
sur  le  fonctionnement  des  conférences  de  philologie  romane. 

II 

A  l'époque  de  la  Renaissance,  l'antiquité  grecque,  subitement 
ressuseitée  et  devenue,  ainsi  que  la  littérature  latine,  plus 
accessible  aux  lecteurs,  grâce  à  l'imprimerie,  avait  comme 
iHoufi'é  notre  littérature  dialectale  et  achevé  sa  ruine,  déjà 
plus  qu'à  demi  consommée  par  l'unification  de  la  France  et  de 
sa  langue.  Nos  trouvères,  jadis  si  populaires  chez  eux  et  hors 
de  chez  eux,  et  qui  avaient  porté  l'influence  de  notre  langue 
jusqu'aux  extrémités  de  l'Europe,  tombèrent  rapidement  dans 
l'oubli.  Savants  et  simples  lettrés  n'eurent  plus  de  curiosité 
que  pour  les  ouvrages  contemporains,  pour  ceux  qui  s'inspi- 
raient de  l'antiquité  et  s'écrivaient  dans  la  langue  de  Paris. 
Cène  fut  qu'assez  longtemps  après,  vers  la  fin  du  XVP  siècle, 
lorsque  plusieurs  générations  de  savants  se  furent  abreu- 
vées jusqu'à  satiété  aux  sources  rejaillissantes  de  l'antiquité, 
qu'on  eut  comme  un  remords  d'érudition,  et  que  l'attention  — 


220  DIALECTES    MODERNES 

Cepindin  quin  tins  o  passa.  » 
Alléluia!   (ter) 

((  -  Omes.  (jue  //avez  puan  de  foi. 
Pré  pas  crire  la  vérità, 
Lous  prouphètas  ount  announça.  » 
Alléluia!  {ter) 

Quon  saguèroun  à  Emmaiis, 
Lous  dischipies  prieroun  .Jésus, 
De  vegni  se  repounsa. 
Alléluia  !  (ter) 

Quon  Jésus  saguèt  à  soupa, 
Prenguet  de  po,  lou  counsacrà, 
Et  lous  faguet  tous  communia. 
Alléluia  !  (ter) 

Quon  lou  soupa  saguèt  'çabà, 
Lou  Sauveure  se  sépara, 
Lous  discbiples  bien  estounâ. 
Alléluia!  [ter) 

—  «  Ne  sinquièus  pas  toun  cœur  imbrasi'i 
Din  tins  que  .Jésus  o  parla? 

Que  sin  esta  muan  avisa  !  » 
Alléluia!  alléluia  !  alléluia  *! 

<ï  Hommes,  que  vous  avez  peu  de  foi,  —  pour  ne  pas  croire  la  vé- 
rité,— [que]  les  prophètes  ont  annoncée.  «  —  Alléluia! 

Quand  ils  furent  à  Eminaiis, —  les  disciples  prièrent  Jésus —  do 
venir  se  reposer.  —  Alléluia  ! 

Quand  Jésus  fut  à  souper,—  il  prit  du  pain,  le  consacra, —  et  les 
fit  tous  communier.  —  Alléluia  ! 

Quand  le  souper  fut  achevé,  —  le  Sauveur  se  sépara  [d'eux]  ;  — 
les  disciples  bien  étonnés  :  —  Alléluia  ! 

«ï  Ne  sentais-[tuj  pas  ton  cœur  embrasé,  —  du  temps  que  Jésus 
a  parlé? —  Que  nous  avons  été  peu  clairvoyants  !  ù —  Alléluia!  allé- 
luia !  alléluia  ! 

*  Dans  sa  seconde  copie,  sœur  Chauchat  écrit: 

—  «  Yeun  sinqui  moun  cœur  intlammâ 
Din  tin  lou  Sauveur  o  parla; 
Quesins  intà  muan  avisa!  » 


POUEISIAS  DIOIAS  DE  GUSTE  BOUEISSIER 


11  y  a  (luolques  années,  s'éteignait  à  Die  un  modeste  poëte  qui 
n'a  pas  fait  grand  brait  dans  le  monde,  mais  qui  ce|iendant  ne  mé- 
ritait pas  qu'une  profonde  obscurité  enveloppât  son  nom. 

Ce  poëte  se  nommait  Auguste  Boissier.  A  part  ses  amis  et  de-ix 
ou  trois  bibliophiles  dauphinois,  personne,  nous  en  sommes  sûr, 
n'a  jamais  lu  uu  seul  de  ses  vers  ;  ses  œuvres,  d'une  rareté  ex- 
trême, ne  sont  pas  même  cei  laines  de  vivre  de  longues  années  sur 
les  rayons  de  quelques  bibliothèques  poudreuses.  — Le  lecteur  nous 
comprendra  tout  à  l'heure. 

Un  des  compatriotes  de  Boissier,  M.  Adolphe  Rochas,  le  savant 
auteur  de  la  Bio(jrajjhie  du  Dauphiné^  estle  seul  écrivain  qui  se. soit 
occupé  de  lui*.  Dans  une  charmante  petite  brochure,  introuvable 
aujourd'hui,  car  elle  ne  fut  tirée  qu'à  25  exemplaires,  il  nous  ra- 
conte la  vie  intime  du  poëte,  d'abord  simple  ouvrier  tanneur  à  Die, 
sa  ville  natale;  son  tour  de  France,  et  enfin  son  arrivée  à  Paris 
et  sa  visite  à  un  de  ses  oncles.  M.  Payan,  grand  négociant  en  lin- 
gerie. —  Sur  l'otfre  que  lui  ht  son  oncle  de  le  garder  avec  lui, 
Boissier  renonça  sans  regret  à  son  métier,  qu'il  aimait  peu,  et  de- 
vint dessinateur  en  broderies.  —  Dans  cette  nouvelle  position,  il 
eut  de.'--  loisirs  qui  lui  permirent  de  se  livrer  à  son  goût  pour  la 
poésie;  etde  cette  époque  datent  ses  premières  productions.  Boissier 
avait  le  désir  naturel  qu'éprouvent  tous  '^es  jeunes  auteurs,  celui 
de  livrer  ses  poésies  à  l'impression.  Mais  ses  appointements  étaient 
modestes,  et,  à  Paris  comme  en  province,  les  imprimeurs  ne  font 
pas  crédit.  La  difficulté  était  grande  ;  mais,  animé  du  feu  sacré,  il 
ne  devait  pas  se  laisser  abattre  par  ce  premier  obstacle  ;  il  se  sou- 
vint de  la  chanson  qui  dit: 

Lorsqu'on  n'a  pas  de  quoi  payer  son  terme, 
11  faut  avoir  une  maison  à  soi  ; 

et.  trop  pauvre  pour  faire  irayirimer  ses  vers,  il   résolut  de  les  im- 
primer lui-même. 


'  On  trouve  cej^endant  dos  comptes  rendus  de  divers  fascicules  de 
Boissier  dans  1h  Courrier  de  la  Drame  années  1843  et  1853).  Ces  articles, 
signés  A.  M.,  sont  de  M.  Alexis  Mustoii. 


22?         ENSKiaNEMENT    DE    LA    PHILOLOGIE    ROMANE 

tion  particulière  de  ses  universités,  plus  complètes  que  les 
nôtres,  elle  a  pu  conserver  longtemps  cette  avance.  Mais  la 
science  française  a  fait  des  efforts  sérieux,  des  efforts  couron- 
nés de  succès,  pour  reconquérir  le  terrain  perdu  et  pour  se 
tenir,  non  pas  encore  au  delà,  mais  à  côté  de  la  science  alle- 
mande. L'honneur  d'avoir  inauguré  ce  retour  de  l'érudition 
française  vers  les  saines  et  nouvelles  doctrines  revient  en 
gi'ande  partie  à  l'Ecole  des  chartes,  et  plus  particulièrement 
à  ceux  qui  lui  ont  donné  l'exemple  par  leurs  écrits  ou  parleur 
enseignement:  à  MM.  Francisque  Michel,  Paulin  Paris,  le 
rééditeur  et  l'un  des  principaux  continuateurs  de  V Histoire 
littéraire  ;  Natalis  de  Wailly,  le  définitif  éditeur  de  Joinville 
et  de  Villehardouin  ;  Guessard,  P.  Meyer,  l'actif  et  éruditpro- 
vençaliste  ;  A.  Brachet,  Bonnardot  et  G.  Paris,  l'un  des  maîtres 
de  la  philologie  romane.  Le  système  d'études  de  cette  Ecole, 
l'aptitude  professionnelle  de  ses  élèves  à  déchiffrer  nos  vieux 
parchemins,  lui  rendirent  plus  facile  cette  évolution  et  lui  firent 
comme  un  monopole  de  la  publication  de  nos  anciens  textes. 

L'École  des  hautes  études,  quoique  de  fondation  beaucoup 
plus  récente,  vint  à  son  tour  apporter  l'appoint  de  sa  solide 
organisation  scientifique.  Elle  créa,  par  l'utilisation  simultanée 
de  spécialités  diverses,  par  l'enseignement  oral  comme  par 
l'enseignement  du  livre,  une  sorte  de  concurrence  philologi- 
que dont  bénéficièrent  les  études  romanes,  en  même  temps  et 
au  même  degré  que  les  études  grecques, latines  et  orientales. 

La  Société  de  linguistique,  dirigée  dans  le  même  sens  et  par 
les  mêmes  savants,  l'avait  précédée  dans  cette  voie,  avec  une 
efficacité  moindre  cependant,  parce  qu'elle  disposait  de  res- 
sources plus  restreintes. 

Mais  un  homme  seul,  M.  Littré,  avec  son  Dictionnaire  de  la 
langue  française,  a  fait  plus  encore  que  ces  associations  ou  ces 
groupes  de  travailleurs  pour  répandre  en  France  le  goût  et  la 
connaissance  du  vieux  français.  Initié  à  la  philologie  romane 
par  Génin,  comme  il  l'avait  été  à  la  philosophie  positive  par 
Auguste  Comte,  et  dans  les  deux  cas  disciple  supérieur  à  ses 
maîtres,  il  a,  par  ses  publications,  par  l'impartialité  de  ses 
critiques  et  surtout  par  l'autorité  de  son  nom,  puissamment 
contribué  à  relever  chez  nous  le  crédit  de  la  philologie  ro- 
mane. 


EN    FRVNCE  2?3 

L'Université,  de  son  côté,  ne  se  désintéressait  pas  de  ces 
études,  qui  dépassaient  peut-être  le  cadre  forcément  restreint 
de  son  enseignement  secondaire,  mais  qui  rentraient  virtuel- 
lement dans  son  enseignement  supérieur,  auquel  rien  de  ce 
qui  touche  à  la  langue  nationale  ne  saurait  rester  étranger. 
Plus  d'un,  parmi  les  professeurs  de  nos  Facultés,  entretenait 
SOS  auditeurs,  ou  ses  lecteurs,  de  notre  littérature  française  du 
moyen  âge,  ou  môme  résolvait  certains  problèmes  de  philolo- 
de  romane.  C'est  ainsi  que  M.  Egger,  infidèle  pour  un  mo- 
ment à  sa  chère  littérature  grecque,  traitait  d'une  manière  dé- 
linitive  la  question  des  Substantifs  verbaux  dérivés  de  l'infinitif, 
et  que  le  continuateur  de  Bopp,  M.  Michel  Bréal,  descendant 
(ii'S  hauteurs  de  la  philologie  comparée  sur  notre  territoire  ro- 
man, j  glanait  quelques  curieuses  et  heureuses  étjmologies. 
A  leur  tête,  on  voyait  celui  qui  fut  si  longtemps  l'arbitre  incon- 
testé de  notre  enseignement  supérieur,  le  vénérable  M.  Victor 
Leclerc.  Il  ne  s'épargnait  pas,  et  l'on  sait  quelle  part  il  a 
prise  à  la  continuation  deV Histoire  littéraire.  Avant  lui,  un  au- 
tre universitaire,  Génin,  philologue  spirituel  mais  incomplet, 
s'était  engagé  dans  ces  mêmes  études  avec  un  entrain  qu'il  sa- 
vait faire  partager  à  ses  lecteurs.  On  lui  doit  aussi,  en  ce  qui 
concerne  la  prononciation  du  vieux  français,  de  véritables 
découvertes,  dont  il  faut  lui  savoir  gré,  quoiqu'il  les  ait  com- 
promises par  un  esprit  de  système  excessif  et  des  boutades 
non  justifiées  contre  la  science  allemande.  En  même  temps, 
à  l'École  normale  supérieure,  quelques  maîtres  de  conférences 
familiarisaient  leurs  élèves  avec  notre  ancienne  langue,  ou 
plutôt,  pour  être  plus  exact,  avec  notre  ancienne  littérature. 

Ce  n'étaient  là,  toutefois,  que  des  exceptions,  des  efibrts  in- 
dividuels, qui  attendaient,  qui  appelaient  une  participation  plus 
constante  et  collective  de  l'Université.  Enfin,  dans  ces  derniè- 
res années,  sur  l'initiative  de  MM.  Egger  et  Chassang,  prési- 
dents successifs  du  jury  d'agrégation  de  grammaire,  l'une  de 
nos  deux  anciennes  langues,  la  langue  d'oïl,  a  pris  officielle- 
ment place  sur  le  programme  universitaire.  Tous  nos  candi- 
dats à  cet  ordre  d'agrégation  sont  tenus  d'expliquer  Joinville 
à  livre  ouvert,  au  même  titre  et  dans  les  mêmes  conditions 
qu'un  passage  de  Thucydide  ou  de  Tite-Live.  Grand  honneur 
pour  notre  chroniqueur,  et  bien  inattendu  pour  sa  modestie, 


224  ENSEIGNEMENT    DE    LA    PHILOLOGIE    ROMANE 

mais  honneur  mérit('"  pour  lui  comme  pour  la  langue  qu'il  écri- 
vait. 

Vous  le  voyez,  Messieurs,  si  l'Université  est  venue  d'un  pas 
lent  aux  nouvelles  études,  elle  ne  les  a  pas  pour  cela  svstéma- 
liquement  négligées,  pas  plus  qu'elle  n'a  négligé  ceux  qui  ont 
pu  y  acquérir  quelque  notoriété.  Il  est  permis  d'espérer  (je 
dis  cela  sans  prétendre  engager  personne)  qu'on  ne  s'en  tien- 
dra pas  là.  L'Université  de  France,  toute  à  son  devoir  pro- 
fessionnel, a  bien  fait  de  ne  pas  sortir  tout  d'abord  de  ses 
programmes  consacrés  par  une  si  longue  expérience,  et  d'at- 
tendre, pour  les  modifier,  le  progrès  de  la  science  nouvelle  et 
la  démonstration  de  son  utilité  pédagogique,  car  elle  ne  doit 
rien  sacrifier  à  la  mode,  même  à  la  mode  scientifique.  Mais  le 
moment  paraît  venu  pour  elle  de  prendre  une  plus  large  part 
à  ce  mouvement  des  esprits.  Elle  voudra  encourager,  conso- 
lider et  diriger  l'enseignement  de  la  philologie  nationale,  non- 
seulement  par  la  fondation  de  chaires  nouvelles,  mais  aussi 
par  des  modifications  correspondantes  introduites  dans  le  pro- 
gramme des  examens  de  licence,  en  même  temps  que  dans 
celui  de  l'agrégation. 

Il  ne  faut  pas  qu'un  romanisant  français,  en  nous  comparant 
à  nos  voisins  d'outre-Rhin,  puisse  dire  de  cette  science  ce 
qu'Alfred  de  Musset  disait  de  la  valse  : 

Et  je  voudrais,  du  moins,  qu'une  duchesse,  en  France, 
Sût  valser  aussi  bien  qu'un  bouvier  allemand. 

Passe  encore  d'être  battus  sur  le  terrain  de  la  valse.  C'est 
affaire  aux  professeurs. ...  de  danse.  Mais  n'est-il  pas  fâcheux 
pour  notre  bonne  réputation  universitaire  que  nous  soyons 
obligés  de  reconnaître  que  la  philologie  romane  est  plus  fa- 
milière à  de  simples  étudiants  des  universités  de  Bonn  et  de 
Marbourg  qu'à  la  plupart  de  nos  licenciés  es  lettres?  Si  ce 
n'est  point  une  question  d'honneur,  c'est  au  moins  une  ques- 
tion d'amour-propre  national  que  les  Français  connaissent 
aussi  bien  que  les  étrangers  une  science  qui  a  pour  base 
principale  leurs  deux  anciennes  langues  et  les  patois  qui  en 
dérivent. 

Ceci,  Messieurs,  m'amène  à  parler  de  nos  langues  popu- 
laires ou  patois;  car  ici  encore  il  y  a  des  malentendus  à  pré- 
venir et  des  préjugés  à  dissiper. 


EN    KRANCK  225 

Si  nous  nous  occupons  des  patois,  ce  n'est  pas  pour  satis- 
faire une  vaine  curiosité,  et  encore  moins  pour  leur  rendre 
leur  antique  indépendance  et  leur  donner  la  force  de  sup- 
planter le  français,  ce  qui  serait  une  chimère  ou  un  danj^er  : 
mais  pour  nous  aider  à  mieux  comprendre  les  diverses  lan- 
gues provinciales  de  l'ancienne  France,  et  celle  qui  aujour- 
d'hui les  résume  toutes,  la  langue  française  proprement  dite, 
la  langue  unique  de  la  France  moderne.  Botanistes  de  la 
philologie,  nous  recueillons  soigneusement  ces  fleurs  hum- 
bles et  vivaces  pour  notre  grand  herbier  national,  avant 
qu'elles  ne  se  soient  tout  à  fait  flétries.  Nous  agissons  au  nom 
de  la  science,  et  uniquement  en  vue  de  la  science.  Mais  qui 
nous  reprochera  de  les  aimer  pour  elles-mêmes,  quand  un  peu 
de  culture  populaire  ou  mémo  artistique  leur  a  donné  une 
grâce  de  plus  et  un  renouveau  de  jeunesse?  Qui  se  plaindra 
de  ce  surcroît  de  production  littéraire  ?  Supposez  disparus 
de  notre  écrin  poétique  Mireille  et  l'aveugle  de  Castelcu- 
lié,  on  voit  bien  ce  qu'y  perdrait  notre  littérature,  on  se  de- 
mande ce  qu'y  gagnerait  la  langue  de  Lamartine  et  de  Victor 
Hugo. 

Ce  n'est  pas,  toutefois,  que  la  science  pure,  surveillante  un 
peu  quinteuse  des  poètes  et  des  littérateurs,  voie  d'un  œil 
bien  favorable  ces  tentatives  de  restauration  linguistique. 
Elles  ont  parfois, —  il  faut  bien  le  reconnaître,  —  le  tort  d'in- 
troduire dans  les  patois  écrits,  souvent  rebelles  à  l'expression 
de  certaines  idées,  des  formes  nouvelles  qui,  n'ayant  aucun 
caractère  d'authenticité,  sont  d'avance  exclues  de  tout  tra- 
vail vraiment  philologique.  Et  ce  n'est  pas  contre  le  néologisme 
seul  qu'il  faut  se  tenir  en  garde:  la  grammaire,  la  syntaxe  du 
patois  est  aussi  exposée  à  des  modifications  qui,  sous  prétexte 
de  correction,  font  disparaître  ce  qui  est  une  originalité  dia- 
lectale. Ainsi  ce  que  les  idiomes  populaires  gagnent  en  per- 
fection littéraire,  ils  peuvent  le  perdre  en  valeur  scientifique,  à 
moins  cependant  que  les  auteurs  ne  s'enferment  scrupuleuse- 
ment dans  la  pure  langue  populaire. 

L'étude  des  patois  néo-latins,  je  parle  de  l'étude  scienti- 
fique, a  grandi  en  même  temps  et  dans  la  même  proportion 
que  l'étude  de  nos  anciens  dialectes.  Outre  un  grand  nombre 
de  glossaires,  ouvrages  faciles  à  composer,  comme  tout  ce  qui 


•2m   ■      KNSKIGNEMKiST    DK    L.-V    PIFILOLOGIE    KOMaNE 

est  du  domaine  de  la  compilation,  mais  indispensables  pour  ce 
genre  de  recherches;  outre  quelques  grammaires  toujours 
utiles  à  consulter,  malgré  leurs  défectuosités,  nous  avons  vu 
publier,  dans  ces  dernières  années,  des  travaux  véritable- 
ment scientifiques  et  à  résultats  certains.  Ainsi,  pour  ne  citer 
que  les  plus  importants,  en  Italie,  M.  Ascoli  a  dressé  la  carte 
et  rédigé  l'inventaire  phonographique  des  patois  des  Alpes, 
avec  une  abondance  de  détails  et  une  exactitude  admira- 
bles. D'autres  ouvrages  d'une  moindre  étendue,  mais  d'une 
précision  égale,  et  relatifs  aux  patois  romans  de  la  Suisse, 
ont  paru  vers  le  même  temps,  dans  dQs  revues  allemandes, 
La  Romania  de  Paris,  savant  recueil  exclusivement  consacré, 
comme  son  titre  l'indique,  à  la  philologie  romane,  contient 
des  études  semblables  sur  nos  divers  patois,  et  notamment  sur 
ceux  de  la  Lorraine.  Le  Gouvernement  français  s'est  associé 
à  ces  investigations.  Deux  membres  de  la  Société  des  langues 
romanes,  MM.  0.  Bringuier  et  Charles  de  Tourtoulon,  ont 
été  chargés  par  lui  de  constater  de  visu  et  de  auditu  la  limite 
actuelle  des  patois  de  langue  d'oc  et  de  langue  d'oïl,  avant 
que  l'entame,  chaque  jour  plus  profonde,  du  français,  ne  leur 
ait  enlevé  leurs  caractères  distinctifs. 

Les  patois  n'ont  pas  été  étudiés  seulement  dans  leur  voca- 
bulaire; leur  littérature  a  été  et  est  encore  l'objet  de  mul- 
tiples et  persévérantes  recherches.  Les  artistes,  écrivains  et 
musiciens  ;  les  lettrés  simplement  curieux,  mais  de  curiosité 
intelligente,  se  sont  joints  aux  philologues,  et  les  recueils 
ont  succédé  aux  recueils.  En  Catalogne.  Milâ  y  Fontanals  et 
Pela  y  Briz;  en  Italie,  le  commandeur  Nigra;  en  France, 
MM.  Champfleury,  Rathery,  de  Puymaigre,  Jérôme  Bujeaud, 
celui-ci  pour  le  Poitou  et  la  Saintonge;  Damase  Arbaud,pour 
la  Provence  ;  M.  Smith,  pour  le  Forez  et  le  Velay,  et  chez 
nous,  à  Montpellier  même,  MM.  Achille  Montel  et  Louis  Lam- 
bert, et  bien  d'autres  qu'il  serait  trop  long  de  nommer,  ont 
publié  et  continuent  de  publier  ces  innombrables  productions 
de  l'imagination  populaire.  Heureuse  émulation  qui  profite  à 
la  science,  et,  chose  curieuse,  qui  profite  même  à  la  science 
ethnographique.  Ainsi,  pour  ne  citer  qu'un  fait,  qui  s'atten- 
drait à  voir  confirmée,  par  la  comparaison  de  leurs  chants 
populaires,  l'aflinité  de  race  que  l'histoire  nous  indique  entre 


EN    FRANCK  -22: 

les  populations  (roriginu  gauloise  ([ui  out  euvuhi,  il  y  a  de 
cela  je  ne  sais  combien  de  siècles,  Tltalie  du  nord  et  les  côtes 
orientales  et  occidentales  de  l'Espagne  ?  C'est  pourtant  ce  qui 
ressort  clairement  d'un  savant  travail  de  M.  Nigra  sur  ce 
sujet. 

A  cette  étude  se  rattache  de  très-près  celle  des  proverbes  et 
ces  contes.  Quant  aux  proverbes,  ces  fils  du  bon  sens  populaire, 
ce  n'est  pas  ici,  dans  une  province  voisine  du  pajs  qui  a  pro- 
duit le  proverbe  fait  homme,  le  Silène  de  Castille,  le  joyeux 
Sancho  Pança,  qu'on  a  pu  les  négliger.  Depuis  de  Sauvages, 
qui  en  a  inséré  un  si  grand  nombre  à  la  tin  de  son  Dictionnaire 
languedocien,  les  observateurs  n'ont  pas  manqué  qui  ont  tenu 
à  compléter  cette  moisson  déjà  riche,  et  Montpellier  y  a  porté 
sa  part  contributive  avec  MM.  Espagne  et  Roque-Ferrier.  Les 
contes  populaires,  menue  littérature  de  Fenfance,  qui  peut, 
sous  la  plume  d'un  Perrault,  faire  les  délices  de  l'âge  mûr, 
ont  été  recueillis  et  sont  commentés  avec  autant  de  soin  que 
les  chansons.  En  les  comparant  entre  eux,  on  s'est  aperçu  que 
ces  récits,  qui  semblent  l'œuvre  personnelle  et  spontanée  de 
chaque  jeune  mère  en  quête  de  distractions  pour  son  nour- 
risson, étaient  le  patrimoine  commun  de  plusieurs  généra- 
tions et  remontaient  parfois  à  la  plus  haute  antiquité.  Le  plus 
connu  de  tous,  le  conte  du  Petit  Poucet,  type  de  la  supério- 
rité intellectuelle  entée  sur  la  faiblesse  physique,  ne  nous  rap- 
pelle-t-il  pas  Ulysse  échappant  à  force  de  ruses  à  la  voracité 
du  cyclope  Polyphème,  l'ogre  de  Sicile?  Une  autre  version 
de  ce  même  conte  nous  ramène  plus  loin  encore,  à  la  suite  de 
M.  Gaston  Paris,  jusqu'à  la  constellation  du  Chariot,  jusqu'à 
l'Hermès  des  hymnes  homériques,  l'une  des  plus  anciennes 
conceptions  de  la  mythologie  sidérale  des  Grecs . 

En  nous  élevant  si  haut  dans  l'espace  et  dans  le  passé,  nous 
voilà  bien  loin  de  la  philologie  romane.  Mais  il  ne  dépend  que 
de  nous  d'y  revenir  à  l'instant,  sans  même  être  obligés  d'em- 
prunter au  héros  minuscule  des  contes  populaires  ses  gigan- 
tesques bottes  de  sept  lieues. 

III 

La  philologie  romane,  en  ce  qui  concerne  la  Planée,  a  pour 
base,  nous  l'avons  déjà  dit.  deux  langues  d'origine  commune 


22f!  ENSEIGNEMENT    DE    LA    PHÎI-OLOGIH    ROMANE 

et  de  physionomie  distincte,  lu  langue  d'oc  et  la  langue  d'oïl. 
C'est  cette  dernière  que  nous  allons  étudier  ensemble. 

La  langue  d'oïl,  ou  vieux  français,  remonte  plus  haut  dans 
le  passé,  au  moins  comme  langue  écrite,  qu'aucune  de  ses 
sœurs  néo-latines.  Le  hasard  peut  bien  y  être  pour  quelque 
chose,  car  c'est  le  hasard  seul  qui  nous  a  conservé  les  Glossai- 
res de  Cassel  et  de  lieichenau,  tous  deux  antérieurs  au  IX''  siè- 
cle; la  Cantilène  de  sainte  Eulalie  et  Y  Homélie  sur  Jonas,  l'une 
et  l'autre  du  IX^  ou  du  X«  siècle.  Mais  on  peut  dire,  avec  plus 
de  justesse  encore,  que  ce  droit  d'aînesse  était  d'avance  dévolu 
à  la  langue  du  nord  de  la  France,  par  cela  même  que,  diffé- 
rant plus  que  les  autres  langues  romanes  de  la  langue  mère, 
du  latin,  elle  a  dû  secouer  plus  tôt  qu'elles  le  joug  de  l'ortho- 
graphe latine.  C'est  eu  vertu  de  ce  principe  que  les  langues 
les  plus  barbares,  les  plus  éloignées  du  latin  (je  parle  de  l'Eu- 
rope occidentale),  se  sont  écrites  avant  les  autres,  et  que  les 
langues  germaniques  ont  précédé  les  langues  néo-latines  dans 
cette  voie.  Elles  ont  bien  pu  emprunter  à  la  langue  supérieure, 
à  la  langue  de  la  civilisation  et  de  la  religion,  au  latin,  tout  ou 
partie  de  son  appareil  scriptural,  mais  sans  pouvoir,  quelque 
superstitieuse  déférence  qu'elles  eussent  pour  elle,  s'accom- 
moder de  son  orthographe  ni  de  ses  flexions.  Dé  même,  parmi 
les  langues  néo-latines,  c'est  le  français,  et  précisément  le  fran- 
çais du  Nord,  qui  a  dû  avoir  et  a  eu  la  priorité  sur  les  autres, 
et  après  lui  le  français  du  Midi.  Réciproquement  on  conçoit 
tout  aussi  bien  que  les  idiomes  les  plus  rapprochés  de  la  langue 
mère,  comme  l'italien  et  l'espagnol,  s'en  soient  écartés  plus 
tard.  Le  costume  orthographique  qu'ils  tenf^ient  d'elle  allait  à 
leur  taille  et  ne  gênait  pas  trop  leurs  mouvements.  Ajoutons 
que,  si  la  France  dVil  doit  l'avance  qu'elle  a  prise  sur  les 
nations  soeurs  à  ce  que  ses  dialectes  différaient  davantage  du 
latin,  par  contre  elle  a  dû  sa  supériorité  littéraire  sur  l'Alle- 
magne, sa  voisine,  à  ce  qu'elle  était  fille  de  Rome,  sa  fille  parla 
langue  et  parla  culture  intellectuelle.  Singulière  et  heureuse 
destinée,  qui  a  tiré  de  deux  principes  contraires  le  plus  bel 
épanouissement  littéraire  que  l'on  connaisse,  de  la  chute  de 
l'Empire  romain  à  la  Renaissance. 

La  langue  d'oïl  existe  à  l'état  latent  jusqu'au  IX*^  siècle 
(Jn  la  sent,  plus  qu'on  no  la  voit  sous   la  surface  troublée  du 


EiN    PKANCK  2?i) 

bas-latin  de  l'époque  mérovingienne.  Elle  se  manifeste  à  demi, 
tantôt  par  des  mots  tout  nus,  si  je  puis  ainsi  parler,  c'est-à- 
dire  dépourvus  des  désinences  latines  dont  on  habillait  alors 
les  formes  empruntées  à  la  langue  vulgaire  ;  tantôt  par  les 
incorrections  sjntactiques,  flexionnelles  et  orthographiques, 
des  écrivains  incomplètement  lettrés,  fautes  involontaires  que 
confessait  ingénument  le  principal  historien  de  cette  époque, 
Grégoire  de  Tours,  et  que  nous  retrouvons  dans  les  plus  an- 
ciens manuscrits  de  ses  œuvres. 

Cette  période  de  barbarie,  la  plus  intéressante  au  point 
de  vue  des  origines,  mais  la  plus  difficile  à  étudier  à  cause  de 
la  diversité  des  phénomènes  et  de  la  diversité,  sinon  plus 
grande,  du  moins  plus  complexe,  des  influences  de  lieu,  de 
temps  et  de  personnes,  nécessiterait  à  elle  seule  des  recher- 
ches toutes  spéciales  et  de  longue  haleine.  C'est  vous  dire  que 
nous  réserverons  ces  études  pour  une  autre  partie  de  notre 
cours,  lorsque  nous  serons  suffisamment  familiarisés  avec  la 
langue  vulgaire  du  XIIP  siècle  et  que  nous  aurons  une  pleine 
connaissance  des  lois  phonétiques  qui  ont  présidé  à  sa  for- 
mation. 

Mais  la  moisissure  bas-latine  se  dessécha  rapidement  au 
souffle  de  la  bonne  latinité  rétablie  par  Charlemagne.  L'éner- 
gique volonté  de  ce  prince,  qui  pourtant  savait  tout  juste  lire 
et  ne  put  jamais  écrire,  arrêta  net  l'invasion    de  la  langue 
vulgaire,  mais   sans  diminuer  sa  vitalité,  en  l'augmentant  au 
contraire  ;  car  cette  langue,  qui  altérait  si  fortement  le  latin  en 
se  glissant  sous  la  plume  des  scribes  mérovingiens,  se  serait 
altérée  dans  une  égale  proportion  si  ce  compromis  eût  duré. 
Sans  doute  elle  serait  parvenue  un  peu  plus  tôt  aux   hon- 
neurs de  l'écriture,  mais  sous  un  déguisement  qui  l'aurait  cer- 
tainement déformée  ou  transformée;  tandis  que  redevenue, 
par  l'effet  même  de  la  proscription  indirecte  qui  la  frappait, 
l'instrument  et  la  propriété  exclusive  des  illettrés,  elle  n'eut 
plus  rien  à  craindre  des  dédaigneuses,  mais  dangereuses  fa- 
miliarités du   latin.   Elle   conserva    sa  physionomie  propre, 
ses  tendances  particulières,   sa  pureté  phonétique,  qu'aurait 
troublée   une    plus  longue    cohabitation    orthographique.  Et 
lorsque,  cent  ans  après,  nous  la  voyons  réapparaître  dans  le 
texte  des  fameux  Serments  de  Strasbourg,  transcrits  par  un 

16 


23u  ENtJBIGKEMEM    DE    LA    PHILOLOGIE    ROMANE 

copiste  du  X''  siècle,  nous  pouvons  mesurer,  malgré  les  lati- 
nismes sporadiques  dont  ils  sont  émaillés,  la  distance  qui  la 
sépare  du  bas-latin  le  plus  grossier  de  Tépoque  mérovin- 
gienne. 

N'allons  pas  croire  cependant  que  Charlemagne  se  préoc- 
cupât de  faire  la  guerre  aux  patois  de  son  temps.  Le  grand 
et  tout-puissant  centralisateur  ne  songeait  qu'à  rétablir  la 
bonne  langue  officielle  et  littéraire,  sans  renoncer  pour  son 
compte  à  la  pratique  de  sa  langue  maternelle,  l'allemand,  ni 
à  la  connaissance  de  son  autre  langue  quasi-maternelle,  le 
gallo-romain.  C'est  du  moins  ce  qu'on  peut  inférer  du  témoi- 
gnage d'un  auteur  presque  contemporain,  qui  nous  le  repré- 
sente entouré  de  ses  poètes  gaulois  et  teutoniques,  teutonicis 
gaUicisque  vatibus,  et  se  plaisant  à  écouter  leurs  chants. 

Ce  n'était  pas  par  la  poésie  seule  que  la  langue  vulgaire 
manifestait  son  existence  :  les  nécessités  de  l'enseignement 
religieux  lui  avaient  valu  une  reconnaissance  semi-officielle, 
de  même  qu'autrefois  les  nécessités  administratives  en  plein 
empire  romain.  Les  conciles  non-seulement  la  toléraient, mais 
en  recommandaient  l'emploi  aux  prêtres  qui  avaient  à  parler 
devant  le  commun  des  fidèles.  Cette  recommandation  ne  se 
bornait  pas  à  l'usage  purement  oral  de  la  langue  vulgaire; 
on  insistait  aussi  pour  que  les  textes  sacrés  fussent  traduits 
par  écrit  et  mis  ainsi,  d'une  manière  permanente,  à  la  portée 
des  personnes  médiocrement  instruites. 

Mais  cette  langue  n'en  restait  pas  moins  à  l'état  de  patois, 
et  ce  n'est  guère  qu'à  partir  du  XIP  siècle  qu'elle  est  accep- 
tée des  lettrés  comme  une  vraie  langue,  une  langue  à  ortho- 
graphe, à  règles  fixes  ou  qui  tendaient  à  devenir  telles. 

Comme  toutes  les  autres  langues,  elle  naquit  à  la  vie  litté- 
raire parla  poésie,  et  c'est  par  lapoésie  religieuse,  non  par  la 
poésie  populaire  ou  héroïque,  qu'elle  prit  place,  une  place  bien 
modeste  d'abord,  à  côté  du  latin.  La  poésie  populaire  était  cepen- 
dant de  beaucoup  la  plus  répandue  et  la  plus  ancienne;  mais 
on  la  confiait  à  la  mémoire  plutôt  qu'à  l'écriture,  dont  l'usage, 
monopolisé  par  le  latin,  était  peut-être  inconnu  des  auteurs, 
simples  laïques  plus  inspirés  que  lettrés.  Peut-être  aussi  les 
latiniers,  comme  on  appelait  au  moyen  âge  ceux  qui  possé- 
daient le  secret  de  l'écriture,  ne   voulaient-ils  pas  s'abaisser 


EN    FRANCE  231 

jusqu'à  accepter  le  dépôt  do  productions  littéraires  ([u'ils  de- 
vaient regarder  comme  inférieures  et  inutiles,  puisqu'elles 
n'avaient  pour  elles  ni  le  prestige  de  la  langue,  ni  l'excuse  et 
le  besoin  de  la  propagande  religieuse.  Cependant  cette  poésie, 
populaire  dans  les  deux  sens  du  mot,  avait  pénétré  dans  l'en- 
ceinte des  cloîtres  et  sous  la  voûte  des  cathédrales.  Sa  vogue 
en  faisait  un  instrument  tout  trouvé  pour  les  mains  pieuse- 
ment habiles  du  clergé.  Et,  bien  que  ne  lisant,  n'écrivant  que 
le  latin,  mais  poussé  par  l'intérêt  supérieur  de  la  religion,  il 
voulut,  malgré  l'énorme  distance  linguistique  qui  le  séparait 
du  peuple,  communiquer  de  plus  près  avec  lui  et  l'intéres- 
ser plus  directement  aux  choses  du  culte.  C'est  alors  que  les 
Vies  des  saints  furent  traduites  en  langue  vulgaire  et  mises 
en  vers.  On  les  chantait  dans  les  églises,  comme  en  fait  foi 
là  notation  musicale  qui  accompagne  bon  nombre  d'entre 
elles.  Sans  doute  quelques-uns  de  ces  dévots  traducteurs,  vrais 
poètes  du  terre-à-terre,  s'acquittaient  de  leur  tâche  en  sim- 
ples écoliers  ;  mais  d'autres  ont  trouvé  des  accents  d'une  vé- 
ritable éloquence  et  su  communiquer  même  au  lecteur  moderne 
l'émotion  qu'ils  avaient  ressentie  à  la  lecture  de  la  légende 
sacrée  dont  ils  se  faisaient  les  interprètes. 

Cette  contagion  poétique  se  répandit  rapidement.  Les  hé- 
ros de  la  foi,  saints  et  martyrs,  eurent  ainsi  leurs  chansons 
de  geste,  écrites  longtemps  avant,  quoique  composées  long- 
temps après  celles  de  Charlemagne  et  de  ses  douze  pairs. 
Alors  paraissent  la  Cantilène  de  sainte  Eulalie,  du  X»  siècle  ;  la 
Passion  du  Christ  et  celle  de  saint  Léger,  à  peu  près  de  la  même 
époque;  la  Chanson  de  saint  Alexis,  du  XP;  tandis  que  la  plus 
anciennement  écrite  de  nos  chansons  de  geste,  le  Roland,  ne 
l'a  été  qu'au  XIP.  Et  pourtant  elle  était  autrement  populaire 
qu'aucune  des  poésies  pieuses  que  nous  venons  de  citer,  cette 
Messénienne,  cette  Marseillaise  des  Normands,  qui  la  chantaient 
déjà  à  la  bataille  d'Hastings,  dès  le  milieu  du  XP  siècle. 

Du  jour  où  l'habitude  de  transcrire  les  chansons  de  geste 
devint  générale,  la  poésie  épique  changea  de  caractère.  On 
la  lut  davantage,  on  la  chanta  moins.  La  lecture  à  haute  voix 
remplaçante  chant,  les  épopées  devinrent  des  récits  et  s'al- 
longèrent indéfiniment.  Elles  étaient  d'abord  exclusivement, 
laïques,  c'est-à-dire  composées  par   et  pour  des  laïques,  et 


i32  ENSEIGNEMENT    DE    I.A    PllILOLciGIE    ROMANE 

s'adressaient  à  toutes  les  classes  de  la  société,  aux  chevaliers 
comme  aux  p-ens  du  jjeuple.  Peu  à  peu,  elles  furent  écrites  ou 
remaniées,  sur  la  demande  de  quelques  grands  seigneurs,  par 
des  clercs  que  leur  instruction   rendait  plus  aptes  à  ce  mé- 
tier de  compositeurs  à  gages,  et  souvent  pour  des  dames  d'es- 
prit curieux  et  cultivé.  On  voit  tout  de  suite  quelles  durent 
être  les  conséquences  de  ce  double  changement  d'auditeurs 
et  d'auteurs.  Les  lettrés  d'alors,  n'écrivant  pas  d'inspiration, 
comme  ceux  qui  avaient  produitles  premières,  les  vraies  chan- 
sons de  geste,  n'ayant  en  vue  qu'une  certaine  classe  de  la  so- 
ciété, celle  du  grand  monde  laïque,  où  les  dames  exerçaient 
une  prépondérante  influence,  modifièrent   profondément  les 
procédés  de  composition  transmis  par  leurs  devanciers.  On 
ne  vit  plus  de  ces  sobres  poèmes  qui,  comme  la  Chanson  de 
Roland,  ne  comptaient  guère  plus  de  quatre  mille  vers  ;  lés 
plus  courts  eurent  une  étendue  double.  Si  les  poèmes  s'al- 
longeaient, le  vers  se  raccourcissait,  l'octosyllabique  prenant 
la  place  du  décasyllabique  et  de  l'alexandrin.  La  rime  chas- 
sait l'assonance.   On  se  déshabituait  de  ces  tirades  uniasso- 
nancées  dont  le  martellement,  continu  et  vigoureux,  scan- 
dait nettement  le  rhythme,  en  marquait  le  pas,  pour  ainsi  dire, 
et  soutenait  à  la  fois  l'attention  de  l'auditeur   et  la  mémoire 
du  chanteur.  Devenus  purement  narratifs,  les  nouveaux  poè- 
mes ne  s'accommodèrent  plus  de  ces  groupes  de  vers  à  finale 
monorime  qui  faisaient  de  nos  anciennes  épopées   comme  de 
longs  poèmes  lyriques  aux  strophes  d'inégale  étendue.  Les 
vers  de  huit  syllabes  rimant  deux  à  deux,  moins  longs  et  plus 
souples  que  le  vers  épique,  sans  césure  intérieure  qui  ralen- 
tît leur  marche,  leur  convenaient  davantage  et  se  prêtaient 
mieux  aux  développements  du  récit  ou  aux  vives  allui-es  du 
dialogue.  C'était  comme  la  transition  de  la  poésie  à  la  prose. 
En  un  mot,  tout  fut  accommodé  pour  la  lecture,  et  plus  parti- 
culièrement pour  la  lecture  à  huis  clos,  devant  un  auditoire 
médiocrement  nombreux. 

Là  encore  on  retrouve  l'infiuence  monacale.  Dans  les  cloî- 
tres, en  effet,  au  moins  dans  la  plupart,  on  lisait  à  haute  voix, 
pendant  les  repas,  d'abord  des  passages  des  livres  sacrés, 
puis  des  Vies  de  saints  que  les  auteurs  ou  les  arrangeurs  agré- 
mentaient de  prose  rimée,  le  tout  en  latin  ;  puis  enfin  des  Vies 


EN    FRANCE  23^ 

(le  saints  ou  des  poésies  pieuses  en  langue  vulgaire.  Cette  lui- 
bitude  de  la  lecture  à  haute  voix  dut  pénétrer  en  même  temps 
dans  les  mille  petites  cours  féodales  de  l'époque,  et  surtout 
dans  ce  que  Joinville  appelle  «  la  chambre  des  dames  »,  équi- 
valent de  notre  salon  moderne,  où  elle  alternait  sans  doute 
avec  les  conversations  des  élégants  des  deux  sexes. 

La  poésie  se  féminisa  quelque  pou,  tout  en  continuant  d'exal- 
ter la  vaillance  guerrière.  Les  hommes  d'épée,  les  chevaliers, 
y  tenaient  toujours  le  premier  rang.  Braves  autant  que  leurs 
prédécesseurs  de  l'âge  héroïque,  mais  d'une  bravoure  souvent 
invraisemblable,  ils  nous  font  déjà  songer,  tantôt  aux  proues- 
ses imaginaires  du  survivant  attardé  de  la  chevalerie  errante 
qu'a  immortalisé  Cervantes,  tantôt  aux  désastreuses  et  trop 
réelles  témérités  de  Crécj  et  d'Azincourt.  Us  ne  se  préoccu- 
paient plus  seulement,  comme  les  paladins  des  chansons  de 
geste,  de  leur  honneur  de  soldat,  du  devoir  féodal,  de  la  foi 
chrétienne  :  à  côté,  au-dessus  même  de  cet  idéal  tout  militaire, 
ils  en  avaient  placé  un  autre,  l'amour.  C'était  un  vrai  culte  en 
l'honneur  de  la  femme,  ou  plutôt  de  la  dame,  de  la  maîtresse, 
domina;  culte  singulier,  mais  sérieux  dans  sa  singularité,  où  la 
fidélité  en  amour  était  la  grande  vertu,  qu'elle  coïncidât  ou  non 
avec  la  fidélité  conjugale. 

Cette  littérature  de  cabinet  et  de  salon  eut  une  vogue  im- 
mense. Elle  est  représentée  par  les  oeuvres  les  plus  correctes 
et  les  mieux  écrites  du  moyen  âge.  De  la  fin  du  XIP  à  la  fin  du 
XIII»  siècle,  elle  règne  sans  conteste.  Partout  on  lit,  et  on  ne 
lit  guère  que  les  récits  des  aventures  merveilleuses,  des  ex- 
ploits souvent  fabuleux,  des  amours  parfois  tragiques  des 
chevaliers  de  la  Table-Ronde.  Le  roi  Artus,  Gauvain,  Tristan, 
Lancelotdu  Lac,  enfants  de  l'imagination  bretonne  naturalisés 
Français,  ont  presque  pris  la  place  de  Charlemagne,  de  Roland 
et  d'Olivier.  A  la  belle  Aude,  qui  meurt  en  apprenant  la  glo- 
rieuse mais  triste  fin  de  son  fiancé  Roland,  à  ces  femmes  pres- 
que aussi  viriles  que  leurs  maris,  ont  succédé  Yseult  la  Blonde, 
épouse  infidèle  du  roi  Marc,  mais  fidèle  amante  du  beau  Tris- 
tan; la  reine  Genièvre,  qui  oublie  pour  Lancelot  du  Lac  le  roi 
Artus  lui-même,  le  type  accompli,  le  demi-dieu  de  la  cheva- 
lerie. 

C'est  l'âge   d'or,  l'époque   classique   de   notre    littérature 


231  ENSKIGNEMEiST    DE    LA    PHILOLOCxIE    ROIVIAME 

médiévale.  La  langue  atteint  alors  son  plus  haut  degré  de  per- 
l'ection.  Elle  est  fixée  quant  aux  règles  orthographiques,  et 
sous  ce  rapport  bien  supérieure  à  la  langue  actuelle.  L'accord 
est  presque  fait  entre  la  prononciation  et  les  signes  qui  la 
reproduisent.  Les  mots  nouveaux,  directement  empruntés  au 
latin  et  non  plus  seulement  façonnés  par  Forgane  et  l'analo- 
gie populaires,  sont  encore  conformes  aux  règles  de  l'accen- 
tuation, mais  déjà  moins  à  celles  de  la  dérivation. 

Les  exceptions  en  ce  sens  deviennent  alors  plus  nombreu- 
ses. Dès  l'origine,  sans  doute,  le  rigorisme  ecclésiastique,  pour 
qui  le  latin  était,  surtout  en  ce  qui  concernait  le  culte,  une 
sorte  de  langue  hiératique,  en  avait  imposé  plusieurs  que 
l'usage  avait  consacrées,  en  les  accompagnant  parfois  de  leurs 
doublets  ou  équivalents  populaires.  Mais,  à  mesure  que  la  cul- 
ture littéraire  se  développe,  les  bonnes  traditions  linguistiques 
se  perdent,  et  les  emprunts  trop  directs  au  latin  se  multiplient 
pour  aboutir,  dès  le  XI V""  siècle,  avec  la  langue  pédantesque  de 
Nicole  Oresme,  non  plus  seulement  à  la  déviation  des  lois 
de  dérivation,  mais  à  la  violation  de  la  loi  même  de  l'accent. 
Funestes  habitudes  dont  savaient  encore  se  défendre  les  au- 
teurs qui,  comme  l'historien  Froissard,  écrivaient  pour  le 
commun  des  lecteurs.  Heureusement  pour  nos  études,  cette 
réaction  des  ultra-latinistes  sur  notre  idiome  ne  s'exerça  avec 
toute  licence  qu'après  l'invention  de  l'imprimerie,  c'est-à-dire 
au  moment  où  finit  la  période  dialectale,  où  la  langue  d'oïl  de- 
vient la  langue  française. 

Mais,  du  XIP  au  XIV*  siècle,  la  langue  d'oïl  se  conserve  in- 
tacte, si  ce  n'est  que,  vers  la  fin,  elle  ne  pra+ique  plus  rigou- 
reusement son  ancienne  déclinaison  à  deux  cas.  Elle  subissait 
en  cela  l'influence  des  illettrés,  toujours  portés  à  la  simplifi- 
cation, influence  à  laquelle  elle  échappait  d'autre  part  dans  le 
développement  de  son  vocabulaire,  ainsi  que  nous  venons  de 
le  constater;  de  sorte  que, par  une  apparente  contradiction,  le 
vocabulaire  devenait  plus  savant  et  la  syntaxe  plus  populaire. 
Il  en  est  de  même  de  la  littérature,  qui  se  transforme,  devient 
plus  érudite  et  plus  complète;  plus  complète,  en  ce  qu'elle  fait 
une  plus  large  part  à  la  prose.  Cette  évolution,  d'ailleurs,  n'en- 
lève rien  aux  qualités  essentielles  de  la  langue  écrite,  qui,  ten- 
dant ainsi  à  se  rapprocher  davantage  du  langage  parlé,  n'en 


RN    FRANCE  335 

reste  que  plus  naturelle  dans  ses  tournures  et  dans  sa  syn- 
taxe .  De  même  que  le  vers  de  huit  syllabes,  sorte  d'intermé- 
diaire entre  le  vers  épique  et  la  prose,  avait  fait  à  celui-ci  une 
victorieuse  concurrence,  de  même  la  prose  tendait  à  revendi- 
quer sur  tous  les  deux  sa  part  du  domaine  commun. 

Les  œuvres  en  prose,  jusque-là  rares  et  peu  lues,  faisaient 
de  plus  fi'équentes  apparitions  à  mesure  que  les  laïques  sen- 
taient le  besoin  de  s'instruire  et  en  trouvaient  les  moyens. 
Bornée  d'abord  aux  besoins  de  la  prédication  et  à  la  rédaction 
en  langue  vulgaire  des  documents  officiels,  la  prose,  sœur  puî- 
née de  la  poésie,  en  passant  par  la  bouche  d'un  saint  Bernard 
et  par  la  plume  de  Villehardouin  et  de  Joinville,  reconquit 
bientôt  le  terrain  qui  lui  appartenait  en  propre.  Elle  dépos- 
séda son  aînée  des  droits  qu'elle  s'était  arroges  sur  l'his- 
toire, avec  Wace  et  Benoît  de  Saint-More,  historiens  versifi- 
cateurs de  l'Angleterre  bretonne  et  normande,  et  sur  la  science 
même,  avec  les  auteurs  des  fantastiques  Bestiaires.  A  côté  de 
ces  traités  pseudo-savants,  rédigés  en  vers  pour  la  plupart,  on 
vit  paraître,  ei^n,  des  œuvres  sérieuses  et  de  longue  haleine, 
telles  que  le  Livre  du  Trésor,  écrit  par  un  Italien  dans  cette 
prose  française  qu'il  préférait  à  sa  propre  langue  et  qu'il  pro- 
clamait «  la  parlure  la  plus  délitable  »  qu'il  y  eût  alors. 

La  poésie,  perdant  son  côté  utile,  tendait  à  devenir  ce 
qu'elle  est  de  nos  jours,  l'organe  de  l'imagination,  et  non  plus, 
comme  autrefois,  la  dépositaire  de  toutes  ou  presque  toutes  les 
connaissances  scientifiques,  morales  ou  historiques,  de  géné- 
rations qui  s'instruisaient  par  l'audition  bien  plus  que  par  la 
lecture  oculaire  ou  isolée. 

Telle  est,  vue  d'ensemble  et  dans  ses  évolutions  essentielles, 
l'ancienne  langue  du  nord  de  la  France,  ou  langue  d'oïl.  Mais 
il  ne  faudrait  pas  que,  en  voyant  ainsi  groupées  dans  l'appa- 
rente unité  d'un  cadre  commun  les  phases  principales  de  son 
existence  passée,  on  lui  attribuât  une  uniformité  qu'elle  n'a 
jamais  eue. 

La  France  n'avait  pas  alors  de  centre  linguistique  ;  elle  ne 
recevait  pas,  comme  aujourd'hui,  sa  nourriture  intellectuelle 
d'une  seule  ville,  en  qui  sont  concentrées  toutes  les  forces 
du  gouvernement,  y  compris  le  gouvernement  de  la  langue. 
Chaque  province,   chaque   localité,  avait  son  dialecte  ou  son 


236  MNSBIGNEMENT    DE    l.A    PHILOLOGIE   ROMANE 

sous-dialecte,  comme  aujourd'hui  son  patois,  idiomes  frères 
sans  doute  et  de  ressemblance  visible,  mais  ayant  aussi  leurs 
caractères  particuliers  et  leur  indépendance,  non-seulement 
philologique,  mais  littéraire. 

Ils  devaient  la  première  aux  diverses  chancelleries  seigneu- 
riales, communales,  ecclésiastiques,  qui,  à  partir  duXIIP  siè- 
cle, écrivaient  les  actes  privés  ou  publics  aussi  volontiers  en 
langue  vulgaire  qu'en  latin  ;  et  la  seconde  à  l'influence  de 
quelques  grandes  cours  féodales  qui  attiraient  à  elles  l'élite  des 
lettrés  et  des  poètes  de  chaque  province.  Tous  ces  grands  sei- 
gneurs, qui  ne  sortaient  guère  de  chez  eux,  avaient  plus  tôt 
fait  de  chercher  sur  place  des  clercs  et  des  trouvères  capa- 
bles de  les  Jouer  en  prose  et  en  vers,  fût-ce  aux  dépens  de 
l'histoire,  et  de  leur  procurer  par  leurs  écrits  d'agréables  et 
instructives  distractions.  Que  les  œuvres  ainsi  produites  fus- 
sent ou  non  originales,  peu  leur  importait,  pourvu  que,  compo- 
sées ou  transcrites  dans  leur  dialecte  maternel,  elles  fussent 
immédiatement  intelligibles  pour  eux. 

Ainsi  subsistèrent  un  nombre  infini  de  dialectes  et  de  sous- 
dialectes,  qui  tous  n'arrivèrent  pas  à  la  culture  littéraire.  La 
plupart  ont  péri  avec  les  témoins  les  plus  authentiques  de  leur 
existence  passée  :  ces  chartes  en  langue  vulgaire,  d'où  la  cri- 
tique moderne  sait  exhumer  en  toute  certitude  la  grammaire 
et  la  phonétique  de  nos  anciennes  langues  locales.  Il  en  reste 
assez  toutefois  pour  qu'on  ait  pu  procéder  à  une  classifica- 
tion et  les  diviser  en  quelques  groupes  principaux,  corres- 
pondant à  nos  principales  provinces,  tels  que  le  dialecte  nor- 
mand, celui  de  l'Ile-de-France,  le  picard,  le  bourguignon  et  le 
poitevin.  Cependant  il  ne  faut  pas  conclure  de  cette  classifi- 
cation nécessaire,  mais  arbitraire  et  sur  certains  points  provi- 
soire, que  chacun  de  ces  dialectes  pris  à  part  présente  la  môme 
homogénéité  que  les  anciens  dialectes  grecs.  Comme  aucun 
d'eux  n'a  été  l'objet  d'une  longue  culture  littéraire  ni  n'a  pro- 
duit de  ces  œuvres  capitales  dont  la  langue  fait  loi,  les  dissi- 
dences sous-dialectales  ont  persisté.  Les  auteurs  ont  écrit, 
les  copistes  ont  transcrit  au  gré  de  leurs  habitudes  d'orthogra- 
phe ou  de  prononciation,  et  il  en  est  résulté  une  variété  qui 
ne  se  plie  guère  aux  exigences  d'une  classification  rigoureuse. 
On    devine  tout  ce  que  prendrait  de  temps  et  entraînerait 


EN    FRANCE  237 

de  recherches  une  pareille  étude  poursuivie  dans  le  détail. 
Aussi  nous  contenterons-nous,  quand  nous  aurons,  dans  la 
suite  de  ce  cours,  à  parler  des  anciens  dialectes,  d'en  relever 
les  particularités  essentielles  ou  dilFércntielles.  Ces  esquisses 
de  monographies  dialectales  ne  seront  pas  simplement  théo- 
riques, mais  auront  toujours  pour  point  de  départ  les  textes 
étudiés.  Dans  l'exposition  des  lois  générales,  nous  nous  en 
tiendrons  au  dialecte  dit  de  l'Ile-de-France,  et  nous  ne  men- 
tionnerons les  autres  qu'autant  (ju'il  sera  nécessaire  pour 
rendre  chaque  explication  plus  claire  et  plus  complète. 

Puisque  j'arrive  à  la  partie  didactique  de  cet  enseignement 
nouveau,  permettez-moi  devons  donner  encore  quelques  ren- 
seignements sur  la  manière  dont  fonctionneront  à  Montpellier 
les  conférences  de  philologie  romane. 

Je  dois  vous  dire  d'abord  qu'elles  ne  seront  pas  publiques. 
Il  faudra  se  faire  inscrire  pour  y  être  admis.  Cette  formalité 
est  destinée  à  protéger  les  travailleurs  assidus  contre  le  dé- 
rangement qu'occasionneraient  les  entrées  et  les  sorties  des 
passants  amenés  par  le  hasard  d'une  promenade  ou  un  accès 
momentané  de  curiosité.  L'inscription  est  absolument  gratuite. 
De  plus,  elle  laisse  à  ceux  qui  l'auront  prise  toute  liberté  de  ne 
plus  suivre  les  cours,  soit  qu'après  un  certain  stage  ils  s'aper- 
çoivent que  leurs  aptitudes  les  portent  ailleurs,  soit  que  le 
temps  leur  manque,  soit  pour  tout  autre  motif.  Le  Ministre 
tient,  et  nous  tenons  autant  que  lui,  à  ce  que  ces  cours  soient 
pratiques,  techniques,  comme  sont,  par  exemple,  ceux  de  droit 
et  de  médecine .  Le  simple  curieux  ne  s'étonnera  donc  pas  trop 
si  la  porte  ne  s'ouvre  pas  devant  lui.  Quant  au  travailleur  qui 
tient  à  ne  perdre  ni  son  temps  ni  sapeine,  il  sera  assuré  de  trou- 
ver un  enseignement  fait  uniquement  pour  son  usage .  Plus  tard 
même,  quand  une  commune  assiduité  aura  créé  entre  lui  et 
les  autres  auditeurs  une  sorte  de  familiarité  scolaire,  il  pourra 
y  prendre  une  part  plus  active  en  acceptant  ou  en  provo- 
quant les  interrogations  du  professeur,  sans  avoir  à  craindre 
de  se  donner  en  spectacle  à  une  curiosité  indiscrète. 

L'exposition  théorique,  avec  démonstration  au  tableau,  al- 
ternera, soit  d'une  conférence  à  l'autre,  soit  dans  la  même 
conférence,  avec  les  explications  de  textes.  Les  appréciations 


?38  ENSEIGNEMENT    DE    LA    PHILOLOGIE    ROMANE 

littéraires  et  les  commentaires  historiques  formeront  le  com- 
plément, mais  non  la  base,  de  cet  enseignement,  qui,  au  moins 
pour  cette  année,  sera  purement  linguistique. 

Vous  m'excuserez,  Messieurs,  d'entrer  dans  ces  détails;  mais, 
sur  ce  point  pas  plus  que  sur  d'autres,  il  ne  doit  y  avoir  de 
malentendus  entre  vous  et  nous.  Je  dois  vous  avertir  aussi  que 
ces  études,  parfois  arides,  surtout  dans  les  commencements, 
avec  leurs  longues  nomenclatures  et  leurs  minutieux  procédés 
d'analyse  chimique  appliquée  au  langage,  ne  conviennent  peut- 
être  pas  à  tous  les  goûts.  Mais  ce  que  je  ne  crains  pas  d'affir- 
mer, c'est  que  tous  ceux  d'entre  vous  qui  ont  fait,  comme  on 
dit  vulgairement,  leurs  classes,  ceux-là  surtout  qui  ont  prati- 
qué jadis  le  vers  latin  (pardon  de  cette  justification  indirecte 
d'un  genre  d'exercice  qui  n'a  plus  la  faveur  du  public),  et  qui, 
en  le  pratiquant,  ont  appris  la  quantité  latine,  sont  aptes  dès 
aujourd'hui  à  s'approprier  les  découvertes  de  la  philologie 
romane. 

Ils  devront  à  ces  études,  outre  une  facilité  plus  grande  à 
lire  notre  ancienne  littérature,  outre  ce  que  M.  Littré  appelle 
si  justement  «  une  rénovation  partielle  de  l'esprit  »,  une  con- 
naissance approfondie  et  définitive  de  notre  idiome  actuel,  et 
les  moyens  de  connaître  presque  aussi  bien  l'oi'ganisme  des 
idiomes  géographiquement  et  philologiquement  voisins  de  l'Es- 
pagne et  de  l'Italie.  Ils  leur  devront  aussi  de  devenir  plus  in- 
dulgents pour  nos  inoffensifs  patois,  dont  ils  comprendront 
mieux  l'utilité  scientifique,  et  de  sentir  croître  ou  s'affermir 
leur  affection  pour  notre  chère  et  glorieuse  langue  nationale, 
à  mesure  qu'ils  pénétreront  plus  avant  dans  son  intimité,  pour 
la  langue  de  Chrestien  de  Troyes  et  de  Joinville,  de  Voltaire 
et  de  Bossuet,  la  seule  des  langues  modernes  qui  ait  eu  deux 
fois  l'honneur  —  au  XIIP  et  au  XVIIP  siècle  —  d'être  la  lan- 
gue littéraire  universelle  de  l'Europe. 

A.  Boucherie. 


DE  QUELQUES  PRONOMS  PROVENÇAUX 


I— FORMES    DIVERSES    DU    PRONOM    PERSONNEL    LA,    LAS 


En  provençal  comme  en  français,  Tarticle  défini  sert  de 
pronom  de  la  troisième  personne  au  complément  direct  et  se 
place  devant  le  verbe,  excepté  à  rimpératif  positif.  (Ex.  :  Je 
le  vois;  ne  /e  voyez  pas;  voyez-le).  Dans  divers  dialectes  de 
la  langue  d'oc,  le  pronom  féminin  de  la  troisième  personne 
change  de  forme,  suivant  la  place  par  lui  occupée  :  il  reste  la, 
las,  devant  le  verbe  ;  —  derrière  le  verbe,  il  devient  /o,  los,  ou 
le,  les-.  M.  C.  Chabaneau  a  traité,  dans  la  Romania,  de  plu- 
sieurs autres  pronoms  soumis  à  la  même  influence . 

Auvergnat.  —  Cantal.  «  Stindé  la  ilassade...  Sarra  fô,  111,  15; — 
Ma  parenta,  espouza  fô,  IV,  6.»  (Traduction  du  livre  de  Ruih  en 
patois  de  Ghalinargues,  canton  de  Murât,  par  l'abbé  J.  Laboude- 
rie,  Mém.  delà  Soc.  des  Ant.  de  Fr.,  VI,   1824,  p.  94-116.) 

Gascon  et  béarnais.  —  lo  Gers . 

I^a  medicho  'scuso  qu'alégui, 

Qu'aléguey  au  duc  d'Espernoun, 

Beséts-Zo,  JNloussur,  jou  bou  'n  prégui.         (P.  76.) 

Nou  poudéts  pas  paga  las  taillos  ? 
Pagats-Zos,  ses  mes  countesta.  (P.  211). 

D'Astros.  XVII«  s.,  dans  les  Poésies  gasconnes,  recueillies  et  pu- 
bliées par  F. -T.  Paris  (Tross,  1869,  t.  11)  : —  «  Ouerats  los  toutes 
duos  aqueros  bastiousos  que  salounquejon  à  la  hount.  y)  (Littérature 
populaire  delà  Gascogne,  par  Cénac-Moncaut.  Paris,  1868,  p.  228,) 

Cénac-Moncaut  ne  relève  le  fait  ni  dans  son  Dictionnaire 
ni  dans  sa  Grammaire. 

'  En  béarnais,  dans  le  département  de  Tarn-el-Garonne,  le  pronom 
suit  l'infinitif;  dans  l'Ariége,  il  suit  le  verbe  dans  une  phrase  interro- 
gative . 

*  Dans  une  variété  dialectale,  tout  au  moins,  le  pronom  masculin  de  la 
troisième  personne  change  de  forme  lorsqu'il  est  placé  a[)rès  le  verbe  : 
«  Emperaire,  vaqui  ti  servilour,  saludo-ièj.  • .  Ames  li  félibre,  amo-léi 
de  countunio  »  (Armana  prouvençau,  1861;  Mistral,  p  56;  —  Rouma- 
nille,  p.  75).  —  Devant  le  verbe,  on  dirait  li  et  non  léi. 


240  DIALIOCTES    MODERNES 

2°  Basses- Pyrénées.  Après  un  impératif  et  un  infinitif  paroxy- 
toniques,  le  pronom  se  maintient  :  ((  Apèro-/a,  apèro-/as,  que 
bouy  héàe-lai)  ;  mais  après  un  imp.  et  un  inf.  oxytoniques,  il 
devient /o,  /os,  à  Pau;  le,  /es,  àOrthcz  :«  Aperatz-fo,  aperatz-fo.s, 
etc.  »  M.  Lespy  {Grammaire  béarnaise.  Pau,  1858,  §§  355, 
357,  359)  signale  le  fait,  mais  il  a  tort  de  mettre  son  ortho- 
graphe en  contradiction  avec  la  prononciation  qu'il  signale. 

Languedocien.  —  1"  Ariége. 

As  pourtat  sens'  aunou  de  reliquos  sacrados  ? 
As  los  sensé  respeit,  neit  o  jour,  manejados  ? 

(Le  P.  Amilha,  Tableu  de  la  hido  del  parfet  crestia.  Toulouso, 
1673,  — cité  par  J.  Banquier.  Mélvsine,  1.  1877,  col.  525,  ii<=  str.)'- 
—  «Pourtax  bite  la  pu  bello  raoubo  é  cargax  Zo-i.»  (Parabole  de 
l'Enf.  prod.  en  patois  de  l'arr.  de  Pamiers,  Mém  Soc.  Antiq.  Fr., 
VI,  p.  503,^  22.) 

2o  Aude. — «  Anats  querré  dé  suite  sa  prumièro  raubo.  cargats-y 
lo.  ))(Parab.  de  l'Enf.  prod.  en  patois  de  Garcassonne,  M.  S,  A. 
Fr.,  VI,  p.  508,  g  22.) 

Sounos  la  marche  laurap;ueso. . ., 
Souno-/o  toutjoun  fort  e  mort  ! 
(A.  Fourès,  du  Lauraguais,  dans  la  Lauseta  de  1878,  p.  213.) 
Las  cerbélos  soun  sul  foc, 
Rebira-me-Zos. 
(Ronde  carcassonnaise,  R.des  L.  i2.,2«  S.,  VI,  1878,  p.  82.) 

Dans  la  Cansou  de  la  Lauseto  (Montpellier,  1870),  par  Mir, 
on  trouve  bien  des  exemples  du  pron.  pers.  fém.,  mais  tou- 
jours devant  le  verbe  (pp.  78,  158,  252,  174),  de  sorte  qu'on 
ne  sait  pas  si  le  narbonnais  se  comporte  comme  le  carcas- 
sonnais. 

3"  Haute- Garonne  : 

(Philomelo)  nou  canto  pus  aro, 
Tourno-Zo  mètre  en  joc  encaro. 

(Goudelin,  éd.  d'Amsterdam,  1700,  p.  7.) 

B'ets  pla  simples,  effans,  de  creiré  qu'es  cambiado, 
Et  que  se  sio  tabé  per  loung-tems  coumpouzado  : 
Seguissets-Zo  à  l'houstal. 
{Le  Mirai  moundi.  Toulouso,  1781,  p.  209);  —  Pourtats   proump- 

tomèn    sa  prumièro    raoubo   et    mettcts-/o   'y.  (Parab.  de  l'Enf. 

prod.,  Mém.  Soc.  Antiq.de  Fr.,  VI,  p.  502.  §22.) 


PKONOMS    PROVENÇAUX  241 

Uiio  iioumo  belt'^oii?...  Douno-/o-nie.  (P.  46.) 
O  lu  !  que  l'amhiciou  couiuo  un  pousou  deboro, 
Casso-Zo  (le  touu  cor,  bite  mel-lo  deforo.  (P.  61.) 

Las  cioulsesque  beséls M'abéts  dit  :  Plantats-Zos,  (P.  136.) 

(Mengaud,  Rosos  et  Pimpanél-os,  5*  éd.  Toulouse,  1877  .) 

4"  Hérault: 

Savé  qu'acos  moun  âma!  es  estada  rebella! 
Anfin  réçacha-Zo,  té  la  porté  en  oullVanda. 
(Peyiottes,  deClormonL-riIérault, Pouésiaspatouèzas. Montpellier, 
1840,  in-8°,  p.  102.) 

5°  Lot: 

jCoumo  un  pargan  rimât  la  mio  pèl  se  fronzis, 
Agacho-Zo  de  prèp. 
(Poésie  anonyme  du  XVII»  s.,  citée  par  le  docteur  Noulet,  His- 
toire des  patois  aux  XVI^  ei  XVII^  5s.,  p.  180.) 

6°  Lot-et-Garonne  : 

Tenèz-Zos  (vos  poules)  dins  l'ostal  ou  débat  un  crumèl. 
(Fr.  deCortète,  XVll'  s.,  cité  par  Xoulot,  Hist.  Hit.,  etc.,  p.  145.) 

Dans  lou  Ritckounè  de  Delbès  (2''éd.,  Agen,  1876),  on  trouve 
les  exemples  suivants  : 

Tè,  tè,  déjà  bezi  dios  tourterellos, 
Tè,  regardo-Zos  coumo  soun  bellos.  (P.  30.) 
Gardo  roso  d'amour, 
Gardo-Zo  pla,  maynado.  (P.  11.) 

7"  Tarn: 

Per  bous,  espousas-Zo  sans  que  digus  bous  bexo  ; 

La  bous  cedi  fort  pla,  car  n'ei  pas  pus  enbexo. 
(Daubian,  le  Minantrope  travesti.  Castres,  1797,  in-8°,  p.  81.) 

8°  Tarn-et-Garonne  : 

Per  tout  nostre  coudèrc  tout  es  aro  en  gran  treble, 

Et  tu  besez  qu'  yeu  mémo,  alangourit  è  feble. 

Ne  meni  (per  poude  salba-Zos  en  dacom) 

Mas  crabos  foro  tèrro. 
(Jean  de  Valès,  de  Montech,  XVIPs.,  cité  par  Noulet,  Hist.  litt., 
etc.,  p.  120.) 

Provençal.  —  Haute  s- Alpes:  «  Ana  querre  sa  pu  jorio  robo  et 
bita-Zo-ii.  »  (Parab.  de  l'Enf.  prod.  en  patois  du  Queyras,  p.  28  du 
Dictionnaire  de  MM.  Ghabrand  et  de  Rocbas  d'Aiglun,  Pa/ow  e?es 
Alpes  Cottiennes.  Grenoble,  1877.) 


2-12  DIALECTES    MODERNES 

li  paraît  que  le  pluriel  t'éminin  reste  las  devant  comme  der- 
rière le  verbe  :  «  Le  pronom  relatif  féminin  singulier  conserve 
la  forme  régulière  la,  quand  il  précède  le  verbe  ;  il  prend  la 
forme  la,  quand  il  le  suit.  Ainsi,  en  parlant  d'une  table,  par 
exemple,  on  dira  :  Fasé-/o,  faites-la,  et  La  faou,  je  la  fais.  » 
(Chabrand  et  de  Rochas,  p.  16). 

Aduzé'li  promptament  sa  premièro  sroueso,  è  bita  li  lo.  (Parab. 
de  l'Enf.  prod.  en  patois  du  Queyras,  dans  Ladoucelte,  Topog.  des 
Hautes-Alpes^  p.  618)  ;  —  Adusé  vite  sa  proumiero  rooubo  é  passa 
l'y  lo.  (Parab., etc.,  en  patois  de  Veynes,  dansLadoucette,  p.  616.) 

Remarque. — L'ancien  provençal  employait,  lui  aussi,  l'arti- 
cle défini  comme  pronom  de  la  troisième  personne*;  mais  on 
ne  voit  pas,  au  moins  dans  le  Recueil  d'anciens  textes  de  M.  P. 
Mej^er,  que  la  place  du  pronom  ait  influé  sur  sa  forme.  Devant 
comme  derrière  le  verbe,  on  trouve  toujours  la.  —  L'article 
servait  aussi  quelquefois  de  pronom  démonstratif  déterminatif 
(en  fr.,  celui,  celle,  ceux,  celles  )  : 

Dunt  estes  vos,  amis,  de  eau  reion? 
Sener,  ço  dist  Girarz,  de  la  Garlon*. 

L'ancien  français  disait  de  même  : 

Richart  en  son  escu  ataint, 
Si  que  la  lanche  en  pièces  noie. 
Mais  la  Richart  ne  fu  pas  molle  2. 

Le  français  actuel  serait  obligé  d'employer  ce/M«,  celle,  ceux, 
ce//es;  au  contraire,  la  langue  d"oc  moderne  peut  encore  se 
servir  de  l'article  : 

Lous  qui  nou  cantou  pas  anéyt  ^. 
Nous  a  taillât  prou  gran'  istorio 
Ses  counda  la  de  bous  medich  *. 

Dans  une  variété  dialectale,  etpeut-être  aussi  dans  plusieurs 
autres,  l'article,  ainsi  employé  comme  déterminatif,  subit  au 
féminin  un  changement,  et  de  la  devient  lo.  En  narbonnais, 
par  exemple,  on  dit  : 

'  Girard  de  Roussillon,  v.  314,  dans  le  Recueii  do  M.  P.  Vieyer. 
-  Richart  le  Bel,  éd.  W.  Fœrster,  v.  1586. 
■^  b'ezedé,  l.  Il,  p.  287  des  Poésies  gasconnes. 
*  D'Astros.  t.  II,  p.  35  des  Poésies  gasconnes. 


PRONOMïS    PROVENÇAUX  243 

Toiito  ttour  das  camps  es  passido,. . . 
Digo-me  dounc  ount  as  culliido 
Lo  qu'embauino  touii  NadaUU  '. 

En  pensado  rabit  al  séjour  abitat 

Per  lo  que  cèrqui  -. 

Amie,  saras  un  jour  amé  lo  que  t'espèro  ^. 

La  pus  justo  coumparasou 

Qu'on  posque  faire  d'un  ibrougno, 

Es  lo  d'un  porc  *. 

Au  pluriel,  on  trouve  las  ^  : 

Que  de  l)ostro  bouco  emporlado 
Toumbe  uno  graciouso  paraulo, 
Coumo  las  que  disiots  à  taulo  ^ 

ir.  —  DE  L'ADJECTIF  POSSESSIF  MA 

Le  Mirai  moundi  (Toulouso,  1781,  p.  92,  145)  nous  offre  deux 
exemples  de  ma  devenu  mo  dans  le  locution  «  Par  ma  foi  »  : 

Le  moundé,  per  mo  fés,  es  uno  drollo  cauzo. 
Nou  farei  per  mo  fés. 

Dans  Goudelin,  on  trouve  permofé^  mais  aussi  permafé  '' . 
Daubian  (le  Misanthrope  travesti.  Castres,  1797,  8",  p.  23, 
écrit  de  même  : 

Permafé  qui  bous  cren? 

m.- DU  PRONOM  DÉMONSTRATIF   NEUTRE  RÉGIME    DIRECT 
ÇO,  ÇOU,  ÇA,  CE 

En  français  ancien  et  moderne,  le  pronom  démonstratif 
neutre  ce  s'emploie  comme  sujet:  Ce  sera  beau,  etc.  En  pro- 

1  Ach.  Mir,  la  Cansou  de  la  Lausetu,  p.   14. 

2  Mir,  p.  78. 

^  Mir,  p.  78.  Voir  encore  p.  82. 

*  Mir,  p.  18.  Voir  encore  p.  240. 

■'  M.  Cantagrel  nous  fait  remarquer  que  c'est  par  suite  d'une  erreur 
typographique  qu'on  lui  a  fait  dire  le  contraire  dans  le  passage  suivant: 
«  Celui,  celle,  etc..  suivis  d'un  régime  indirect  ou  d'un  prouom  relatif, 
s'expriment  par  iou,  lo.  tous.  Los.  »  (P.  xxix  de  la  Lauselo  de  Mir.) 
L'article  féminin  est  toujours  las. 

6  Mir,  p.  80. 

7  Éditisn  d'Amsterdam,  1700..  pp.  !85,  173. 


244  DIALECTES    MODERNES 

vençal  ancien,  on  le  trouve  comme  sujet  sous  les  formes  ço, 
ça,  ce:  mais  les  dialectes  modernes  l'ont  généralement  aban- 
donné; ils  ont  recours  à  i'autres  pronoms,  ou  bien  ils  usent 
du  verbe  tout  seul. 

En  français,  depuis  les  temps  les  plus  reculés  jusqu'au 
XVIPs.,  cea  été  employé  comme  régime  direct  précédant 
le  verbe,  notamment  dans  les  «  propositions  incidentes  où  le 
sujet  est  représenté  comme  portant  la  parole*  : 

Ço  dist  Ghernubles,  ma  bone  espee  ai  teinte  -  ! 

Un  tiens  vaut,  ce  dit-on,  mieux  que  deux  tu  l'auras  '. 

L'emploi  de  ce  n'était  pas  forcé  en  pareil  cas  : 

Diex,  dist  Uichars,  mi  escuiier, 
Gon  furent  ore  paulonnier*. 

Le  démonstratif  ço  s'employait  comme  régime  direct,  no- 
tamment dans  le  même  cas,  en  ancien  provençal,  et  pouvait 
également  se  supprimer  : 

Per  Deu,  ço  dist  la  donne,  lai  vuel  eu  traire  ^. 

Adans,  dis  nostre  Senhor,  as  fach  mes  mandamens^. 

Plusieurs  dialectes  de  la  langue  moderne  emploient  encore 
ce  pronom  régime  sous  les  foi'mes  ço,  cou,  ça,  ce,  que  nous 
allons  passer  en  revue. 

Généralement,  le  démonstratif  neutre  régime  n'est  pas  suivi, 
dans  ses  modifications  phonétiques,  par  le  pronom  ço  que,  que 
nous  appellerons,  pour  abréger,  pronom  composé  ^. 

Ço.  —  Çoest  la  forme  habituellement  employée  par  les  écri- 
vains du  moyen  âge;  aujourd'hui,  au  contraire,  elle  se  rencon- 
tre rarement. 

1  Diee,  Gr.  des  L.  ft  ,  III,  «8. 

-  Chanson  de  Roland. 

'  Lafoutaine. 

*  Richart  le  Bel,  éd.  W.  Foerster,  v.  4347. 

Si  Girard  de  RoussiUon,  v.  296,  dans  le  Recueil  d'anciens  textes  de 
M.  P.Meyer. 

6  Pierre  de  Corbiac,  Trésor,  v.  141,  éd.  Sachs. 

■^  Ço  que  se  traduit  ea  français,  suivant  les  cas,  par  ce  qui  et  ce  que. 
Le  déraooslratif  neutre  ce  est  sujet  ou  régime  ;  le  relatif  neutre  qui  est 
toujours  sujet;  le  relatif  neutre  que  est  toujours  régime  direct  —  En 


PROIsOMS    PROVENÇAUX  24f. 

1"  Gard.  —  Nous  en  trouvons  un  exemple  aigné  du  nom  de 
L.  Roumieux  {.\rmana  prouvençau, .1859,  p.  101  )  : 

Es  un  Angles!  bono  praticd 
Ço  dis  lou  garde,  ai  cajiita. 

Cefélibre  a  plusieurs  autres  fois  employé  ço{Armana  /trou- 
vençau,  1860,  p.  101;  la  Rampelado,  Avignon,  1868,  in-8", 
p.  303)  ;  mais  cette  forme  n'est  employée  que  dans  un  rayon 
assez  restreint  du  provençal.  J'ignore  si  la  forme  cho,  que  je 
trouve  dans  une  rayolaûo  ou  prétendue  rayolado  de  M.  Méric 
{lou  Ma7X'han  d'nli;  ISlimes,  s.  d.,in-8o,  p.  2  ),  a  jamais  été 
employée  dans  le  pays  rayol  : 

Quan  tout  d'un  co,  cfi(y  fagué  Jan, 

Avès  vostoboutéyo  pléno. 

"2"  Hérault  : 

N'avèn,  ço  dis,  qu'à  l'envesti- 
(L'abbé  Favre,  lou  Siège  de  Cadaroussa,  éd.  nouv.  Avi^nolln,  .1 . 
Roumanille,  1868,  p.  63.) 

Cet  exemple,  ainsi  qu'on  me  le  fait  obligeamment  remarquer, 
n'est  pas  recevable  ;  si  je  le  maintiens,  c'est  pour  avertir  à  mon 
tour  le  lecteur  que  Roumanille  a  remanié  le  texte  du  Siège  de 
Cadej'oussè.  L'abbé  Favre  a  écrit  sou  dû  et  non  ço  dis. 

À"  Vaxicluse: 

Je  n'ai  trouvé  qu'un  seul  exemple  de  ço  employé  par  un 
Comtadin  : 

Que  siéu  bèfi,  ço  dis,  n'ai  pas  touca  la  fiolo  ! 

(T.  Glaup,  p.  "217,  Unliame  derasin.  Avignoun,  1865,  petit  in-8".) 

Çou.  —  1°  Aveyron: 

Oyci,  sou  se  dis  el,  entre  estré  fore  cledos, 
Bendrai  faire  corra  mous  bossious  é  mos  fédos. 
(Peyrot,  Poésies  diverses.  En  Rouergue,  1774,  in-8°,  p.  12). 

'Che^Peyrot,  le  pronom  composé  est  c"<yy^(passim)  et  ço  que 
(p.  V). 

niçard,  ce  que  s'est  nasalisé  en  çen  que.  comm»!  aquesto  en  anquesto 
«  Tout  senche  sabès.  «  (  Cram.  niss.  de  Miceu.  p.  80.)  Cfr.  pour  le  lorrain 
cen.  et  pour  1p  paintongeais  çan.  que:  W.  Foerster.  Zeitschrift  de  Gneber. 
1,  397.  et  C.  Chabaneau.  H.  des  t.  /?..  2'  S..  V.  1878,  p.  296,  n*  .3. 

17 


2-16  DIALECTES    MODERNES 

Séra.sjit  [j;ii-érf,  passablomen  prou  hoiio. 
{ Poésies paioises,  parVornhet-père,  d' Agen  (Aveyron)  ;  Rodez,  1877). 

D'après  l'auteur,  ces  poésies  sont  en  «  pur  patois  de  Rodez 
et  de  ses  environs.  » 

i"  Dordogne  : 

Sou  diiîuè  l'iroundèl. 
{Revue  des  langues  romaines,  2«  sér. .  IV,  1877,  p.  236.) 

Les  dix  couplets  de  la  ronde  d'où  est  tiré  cet  exemple  com- 
mencent, —  quatre  par  sou  digue  écrit  en  deux  mots,  —  six  par 
sotidis  écrit  en  un  seul  mot.  Une  semblable  inconséquence  se 
remarque  dans  la  traduction  :  sou  dis  est  traduit  six  fois  par 
ce  dit,  tandis  que  sou  digue  l'est  deux  fois  par  ceci  dit  et 
deux  fois  par  ce  dit;  —  ceci  dit-il  n'avait  sans  doute  jamais 
été  employé  en  français  :  c'est  un  solécisme . 

3"  Cantal:  "  Sou  faguét,  ill,  9;  sou  diguét,  IV,  5.»  (Parab.  de 
l'Enf.  prod.  en  patois  de  Chalinargues,  canton  de  Murât,  par 
l'abbé  J.  Labouderie,  Mém.  Soc.  An/iq.  Fr.,  VI,  1824,  p.  94-116.) 

Dans  ce  patois,  le  pron.  comp.  est  ço  //ue. 

\°  Gard.  —  Cévennes  : 

«  S'ou  fat;  s'ou  fazié;  dit-il,  disait-il.  »  {^anYAges.  Dictionnaire 
languedocien).  — «  Aquel  moussu  sow-disiè:  Tène  ma  fourtuno... 
L'autre  se  desarmo,  E  sou-ïa.i. . .  »  {Armagna  cevenùu.  1874,  p. 28-9, 
dans  une  poésie  datée  d'Anduze.) 

Sou  fas  :  oh  !  per  quanto  resoa 
Endure  talo  pougnesou  ? 
(Arnavielle,  d'Alais,  Re>:.  des  lang .  rom.,  2»  sér.,  V,  p.  186.) 

Dans  le  cévenol,  le  pron.  comp.  est  ço  que;  le  pronom  sujet 
est  çou  : 

"SoM-m'és-avis.  »  {Arm.  cev.,  1874,  p.  37.) 
Nimes  : 

Ha!  sou  dis  un,  lou  mau  est  double. 
(J.  Michel  de  Nismes,  Emharras  de  Beaucaire,  3e  éd. ,  p-^.) 

Que  siei  urous,  sowdis,  de  te  saouva  la  vido  ! 
{Um)  hourhouyado. . .  Premieiro  livrésoun.  Nime,  1856,  p.  9.  et  en- 
core pp.  18,20). 

Lipo  sa  raoustacho  et  sow-dis  :  Messieus. . .   (P.  25.) 
Oou  !  liravi  jèn, 


PRONOMS    PROVENÇAUX  217 

iSow-digué  Tome  charitable. 

Aqiii'  n  malaou.  (P.  37.) 
(A.  Bigot,  H  BourgarUeiro,  3' éd.  Nîmes,  1868,  12°.) 
5"  Hérault.  —  Montpellier  : 

Las  fennos  .soun  coumo  l'on  créy. 
Per  loup  hommes  so«dis  la  Léy.      (P.  \i.) 
Sou  li  dis  ello  bassomén.      (P.  51 .) 
Anen,  .sowdis,  la  mort.      (P.  164.) 
Sou  li  repliquo  l'autre.      (P.  202.) 
Sou  li  fau  ieii.    (P.  203) 
(  Les  Folies  de  Daniel  Sage,  de  Montpellier,  éditées  par  A.  des 
Mesnils.  Montpellier,  1874.  La  plus  ancienne  édition  connue  est 
de  1636.) 

Es  qu'  àysso  's  pas  lou  même  éndréch 
Per  ounte  (s'ow-dis)  soûy  véngûda? 
(Aug.  Tandon,  iï'a&^es,  etc.  2"  éd.  Montpellier.  1813.  iii-8".  p.  l't.) 
Aimas  las  rosas.  roussignôus. 
(S'oudison  las  gazels  persanas. 
(  'Na  Dulciorella,  dans  la  Lauseta  de  1878,  p.  81.  —  M'»'  de  Hi- 
card,  qui  signe  du  nom  de  Dulciorella,  est  d'origine  anglaise.  ) 

Béziers  : 

Poudriô  m'escapâ 

Coumo  el,  sou  dis. 
(  Gabriel  Azaïs,  Revue  des  langues  ronumes,  2«  série,  V.  p.  195). 

Saint- Pons  : 

L'home  a  fosso  estrumens,  outisses  e  machinos  : 
—  Es  iéu.  s'ou  dis,  es  ieu  que  lous  èi  enbentats. 

(Melchior  Barthés,  Glossaire  botanique  de  l'arrondissement  de  Saint- 
Pons.  Montpellier,  1873.  in  *8°,  p.  264.) 

Dans  Barthés,  le  pron.  comp.  est  ce  que  (  p.  256,  264);  — 
dans  Azaïs,  so  que.:  —  à  Montpellier,  ;i  Lunel-Viel  et  géné- 
ralement dans  l'arrondissement  de  Montpellier,  on  emploie  a- 
que  ;  mais  on  trouve  aussi  ça  que  dans  VEstatut  dnu  Paraije 
de  Mon1:pellier,  dans  des  poésies  de  Clarens  et  de  C.  Gros,  de 
Montpellier  [Lauseta,  1878,  pp.  109,  217,  248).  Enfin,  M.L.-X. 
de  Ricard,  qui  du  reste  traite  assez  librement  une  langue 
d'emprunt, emploie  indifféremment  coque,  ça  que,  ce  que  {Lau- 
seta, 1878,  de  la  p.  175  à  la  p.  184)  :  c'est  trop  d'nn,  ço  que 
étant  inconnu  à  Montpellier  :   on  s'y  sert  de  ce  que,  mais  les 


2i<  blAl.KCTES    MODERNES 

gens  illettrés  ont  paru  à  M.  Ai[)ii.  Ruque-'Ferrier  avoir  une 
préférence  à  Tégard  de  ça  que. 

6^  Landes  : 

S'ou  respounouc  quauqu'iin. 
(Aîmanach  (fous  Paysans,  1878,  p.  25.) 

Dans  ce  patois,  le  pron.  comp.  est  ço  qui.  (P.  25.) 

Ga.  —  On  en  trouve  quelques  exemples  dans  Taiicienut; 
langue  ;  ils  ont  été  relevés  par  M.  C.  Chabaneau  dans  la  I{o- 
maïu'a.  IV,  p.  339,  n.  4.  En  voici  dans  la  langue  modcîrne. 

1"  Aude  : 

Paure  Guillot,  .^iVtdilï;.  ahiôs  de  temsderesto.  (P.  114.) 

Un  grapaut,  l'èl  enberinat, 
Se  couQèt  c  d'un  couac  .s'  «faguèt  :  Aproubat  !  (P.   156). 
(A.  Mir,  la  Cansou  de  la  Lauseto.  Montpellier,  187G.) 

M.  Cantagrel,  dans  la  grammaire  du  dialecte  narbonnais- 
carcassonnais  qui  précède  la  Lauseto,  n'a  pas  noté  ce  pronom, 
d'un  emploi  cependant  très-fréquent  dans  les  poésies  de  Mir. 
Sous  le  nom  de  Felibre  escalin,  c'est-à-dire  d'Escales,  celui-ci 
l'a  orthographié  ou  laissé  orthographier  sa  au  lieu  de  s'a  : 
«  Adiu,  sa-dits.  »  {Armana  de  Lengadô,  1877,  p.  42).  Dans  le 
narbonnais  et  dans  le  carcassonnais,  le  pron.  comp.  est  ço  que 
(  Cantagrel,  p.  xxvin  de  la  Lauseto  de  Mir;  Fourès,  p.  195 de 
Y  Aîmanach  de  la  Lauseta,  187<S.) 

2°  Basses- Pyrénées  : 

Ghens  boste  ayde,  qu'èri  pergude, 
Ça  dis-ère,  Reyne  deij  Geù. 
(Vincent  de  Bataille,  dans   les  CansouR  héumahm  <Te  De^^pourrins 
étantes:  S^éd.  Pau,  1866,  p.  133.) 

M.  V.  Lespy  connaît  bien  cette  pièce,  puisqu'il  l'a  publiée 
dans  sa  Grammaire  béarnaise  (p.  94-7)  ;  néanmoins,  il  ne  signale 
pas  notre  pronom.  Aux  §§  373,  377,  il  note  seulement  le  pro- 
nom composé  so  qui  (ce  que). 

3"  Gers  : 

Carot,  ça  m'a  dit  caucoumet. 

James  Dominus  vobiscum. 

Ca  dils-on.  nou  luouric  de  liàmo. 


PRONOMS    rHOVKiNrAUX  210 

(D'Astros,  XVll'^  s.,  dans  les  Poésies  r/asconnes  recueiilifs  ei 
pul)liées  par  F. -T.;  Paris,  1869,  t.  II,  pp.  95,  98).  —  a  Moiin  hil 
•s'aou  digouc  lou  pay.  »  (Parab.  do  l'Enf.  prod.  Mnii.  Soc.  Anliq.  Fr.. 
VI.  p.  501,  §31.) 

Les  exemples  abondent  dans  la  Littérahire  /jopulcurc  de  la 
Gascogne  (Paris,  1868),  par  Cénac-Moncaut  :  «  (a  respounouc 
la  mayrastro,  p.  227: raou  *  respounouc,  p.  227;  ça  oudischouc, 
p.  230;  ça  diseouo,  p.  246;  ça  cridec,  p.  243;  ça  pensée,  p. 
243  ;  ç^  as  boutée  a  crida,  p.  234.  »  Dans  son  Dictionnaire  gas- 
con-français  (1863,  in-S"),  Conae-Moncaut  écrit  :  «  Sa,  pour 
cela;  Sa  dit,  dit-il,  locution  en  grand  usage.  »  Malgré  le  grand 
usage  de  cette  locution,  il  ne  la  signale  pas  dans  l'espèce  de 
grammaire  qui  suit  son  dictionnaire. 

Le  pronom  comp.  est  ço  que. 

4°  Gironde:  «  Ca  dissut.  »  {Œuvres  complètes  de  Meste  Verdie, 
12e  éd.;  Bordeaux,  187G,  in-16,  p.  2.) 

'  S'aou,  çaou  =  ça  ou.  c'est-à-dire  {•«  ton,  en  fr.  ce  lui  (<,au  dichouc. 
ce  lui  dit).  —  En  gascon  et  eu  béarnais,  l'article  appuyé  sur  a  et  rf«?  a 
de  benne  heure  vocalisé  son  l  {del,  deu;  ai,  au).  Appuyé  facultativemeni 
sur  d'autres  mots,  il  se  vocalise  de  même.  —  Le  pronom  de  la  3°  pers.. 
au  complément  direct,  n'a  pas  d'autre  forme  que  celle  de  l'article,  et 
comme  celui-ci,  au  lieu  de  s'appuyer  simplement,  il  se  diphthongue  avec 
l'impératif  singulier,  l'infinitif  et  des  mots  tels  que  me.  te.  se,  si,  nou. 
ande.  aco.  que.  etc.  Lespy  {Gram.  béarn..  %%  351-4)  a  tort  de  prendre  ce 
pronom  pour  «  l'article  (sic)  roman  el  employé  comme  pronom  »  ;  lou.  -on 
(article)  et  lou.  -ou  (pronom)  ne  doivent  pas  être  séparés  i'un  de  l'autre. 

—  En  gasc.  et  en  béarn.,  un  autre  pronom,  celui  de  la  3"  pers.  au  com- 
plément indir.  ,  a  la  même  forme  que  l'art,  et  le  pron.  de  la  3''  pers.  au 
complém.dir.  ;  il  subit  le  même  traitement  :  c'esllou  (lui),  lous  (leur).  On 
a  vu,  dans  les  ex.  plus  haut  cités,  ce  pronom  diphthongue  avec  ça  (çau). 
Lespy  (  Gram.  béarn.,  %%  360,  362)  confond  lou.  lous  lui,  leur)  ù  la  fois 
avee.  lou,  lous  (le,  les,  art.  et  pron.),  et  avec  un  prétendu  pronom  eu  qui 
voudrait  dire  le.  Lou  'lui)  n'est  autre  que  lour  (anc.  prov.  lor),  avec  chute 
de  r  final,  comme  dans  pastou,  mielhou.  cou,  etc.  :  /ous  (leur)  —  lour.<< 
(anc.  prov.  lor).  Deux  remarques  sont  à  faire  sur  lou,  lous  (  lui,  leur;  : 

—  1°  Dtins  certains  dialectes,  ainsi  que  l'a  déjà  remarqué  Ghabaueau 
{Romania.  IV,  346-7  ;  V,  372-3),  li  (lui)  a  supplanté  l'ancien  lor  et  signilio 
à  la  fois  lui  et  /eMr,parex.  dans  les  Basses-Alpes,  les  Bouches-du-Hhône, 
etc.  Inversemen' .  en  gasc.  et  en  béarn.,  ior  a  supplanté  it  et  signilie  à  la 
fois  leur  et  lui:  Gausauon  pas  lou  -parla;  Sensé  Lors  disf  adechals. 
Quev  poudcuoi-jou  respoune? Entavs  ftè dnn.sa  un  roundru  li  (lui)  survit 
encore  dans  d'Astros  concurremment  avec  lou.  (lui),  et  parfois  se  laisse 
remplacer  par  i  (ibi),  comme  cela  arrive  dans  Goudelin.  Mengaud,  Sage, 


■2b')  niALlCCTKS    MODEKNES 

f)"  Haute- (juroiinr  : 

5a  nous  comanda  la  Riqueta.  ("V.  501.'' 
Sa  dissec  dona  Sobiraiia.  (V,  517.; 
Car  6-a  ditz  la  Finoy  Daissus.  ("V.  786.) 

{Las  Ordenansas  del  libre  blanc.  Édit.  du  D''  Noulet;  Montpellier. 
1878,  in-8°.  —  L'éd.  originale  est  de  1555.) 

A  la  fi,  ça  me  di.ssec.  (P.  6.) 
Hélas!  oadizijou.  (P.  10.) 
(Xa«  0/>ros  de  Pierre  Goudelin;  Amsterdam,  17U0.) 

A  d'autres,  ça  li  bau  jou  dire. 
{Las  Obros  de  P.  Goudelin  ;  Toulouse.  1648,  in-4o,  p.  8,  cité  par 
Noulet, /oi-  Ordenansas  del  libre  blanc,  s.  v.  sa.) 

Ha  !  sa  dizio  le  misérable. 
Ha  !  sa  ditz  el . 
{La   Granoul-ratomachio ,  Toloso,  1664,  citée  par  G.  Brunet,  iVoL 
et  Extr.  de  quelques  ouvrages  en  patois  du  Midi;\%lkO,  in-8o,  p.  32,  35.) 

Ount  bas?  Arèsto-te.  Mouïso,  ca  ly  crido. 
La  bouts. 

Grand  Diu,  ^a  respoun  el. 
(Guitard,  XYII^  s.,  cité  par  Noulet,  Hist.  litt.  des  pat.  aux  XV I^ 
et  XVII*  ss.,  p.  94.) 

etc.  —  2*  Reste  à  expliquer  lous  (leur),  puisque  régulièrement  le  pronom 
ne  devrait  pas  avoir  la  marque  du  pluriel.  Le  gasc.  et  le  béarn.  se  sont  ici 
laissé  influencer  par  l'adj.  poss.  de  la  3<'  pers.  du  pluriel,  lour.  lours  { leur, 
leurs).  Cette  marque  analogique  du  pluriel  donnée  indûment  au  pronom, 
comme  elle  avait  déjà  été  donnée  à  l'adjectif,  a  eu  pour  but  de  donner  plus 
de  clarté  au  langage.  Ce  phénomène  est  peut-être  ancien  ;  si  la  charte  du 
pays  de  Soûle,  publiée  par  M.  P.  Meyer  {Romania,Y.  367-372),  ne  présen- 
tait quelques  fautes  évidentes,  on  pourrait  y  trouver  la  preuve  que  lor 
(pron.  )  était  déjà  devenu  lors,  los,  en  1254  (voir  la  note  de  M.  Meyer,  p.  372, 
n°  14).  En  français  trivial  on  dira  de  même  :  «  Je  leurs  ai  parlé  j»;  on  ren- 
forcera mémo  ce  leurs  du  pronom  j/  :  «  Je  leurs  y  ai  parlé.  «Dans  le  patois 
lu  Lot-et-Garonne  on  trouve  pareillement  :  Fazes  lous  y/"o  plaça  (Delbès, 
p.  112),  Loos  Y  parla  (Rigal,  p.  23). En  1677^  dans  les  poésies  de  la  Tour, 
de  Digne  (Basses-Alpes), on  trouve  lour,  lours  (leur),  employé  concurrem- 
ment avec  li  (lui,  leur).  En  alaisien,  lus  (adjectif  posses.j  veut  dire  aussi 
bien  leur  que  leurs . 

Quatre  garçounés  d'âou  mémo  âge 

Pourtavou  un  drôle  de  lus  tén. 

En  se  ségnan  de  lus  cinq  dés, 
(D'Hombres,  Bull,  de  la  Soc   .se.  et  litt  d'Alais.  t.  VIII,  pp.  79,  81  ) 


PRONOMS   PROVENÇAUX  251 

Cal,  ça  diguèt  Janeto. 
{Xoeh  nouveaux  ;  TovAdw^Q^  1707,  in-8°,  p.  10  ;  cités  par  Noulet, 
Ordenanta.'ifld  libre  blanc  y  p.  v.  sa). 

"  Chut,  ça  me  dizen,  chut,  qu'acos  pcr  maUlizenco.  (P.  48.) 
Anats  boun,  ça  lour  fa,  sourtissets-mo  daissiu.  (P  .68.) 
Coussi,  ça  me  ban  dire,  establi  sous  mainatgés?  (P.  78.) 
Eh!  per  que,  ça  bous  dits,  aquesté  aura  la  palmo?  (P.  80.) 
(Le  Mirai  moundi.  Toulouso,  1781 .) 

Dans  Mengaud  (Bosos  et  Pimpamlos,  5*  éd.;  Toulouse,  1877), 
parmi  plusieurs  autres  exemples  (p.  33,  46,  56,  135),  on  peut 
citer  le  suivant  (p.  52  )  :  «  (?a  cridec.  »  —  Dans  la  Haute- 
Garonne,  le  pron.  comp.  e?,i  coque. 

Dans  un  arrondissement  où  Ton  parle  gascon,  ça  est  égale- 
ment usité  :  «  5adichec  Bertrando;  sa  mous  dichecBessan.  » 
(V.  Cazos,  Massouquets  de  Sent-Biach  ;  Ssiïnt-Gandens,  1852, 
in-8o,  p.  10,  21).  A  ce  que  dit  l'éditeur,  les  poésies  de  V.  Gazes, 
«  peuvent  être  regardées  comme  un  spécimen  exact  de  l'idiome 
parlé  à  St-Béat,  à  St-Bertrand  et  dans  tout  le  Comminges  » , 
assertion  qu'on  fera  bien  de  n'admettre  qu'avec  méfiance. 

6°  Hérault: 

Cal  parti,  s«-dis  lou  Moussegne. 
(Estève  Glèizos,  d'Azilhanet,  Aj'inana  de  Lengadd,  1876,  p.  26.) 

7"  Limousin:  voir  Chabaneau,  Gram.  lim.,  1,  370. 

8"  Lot  : 

Sa  dison  lous  besis 

Ques  aquo  que  se  planch  e  tusto  cado  nèch? 
(Poésie  anonyme  du  XVII'  s.,  citée  par  Noulet,  Hist.  litf.  des  pa- 
tois aux  XVI^  et  XVI I^  .s.s. ,  p.  179.) 

9°  Lot-et-Garonne  : 

Oh!  quai  malhur  !  sa  dit  d'uno  bois  enrumado. 

(Jansemin,  lou  Chalihary,  1825,in-12,  p.  H.) 

Marcillo,  sa  disio  lou  jouyne  gouyatet, 

Lou  bonhur  nou  ben  pas  toutjour  de  la  fortune. 

(Rigal  iî/«mZfo;  Agen,  1870,  p.  15.) 

Sarro  fort,  ça  me  cridabo. 
(Lou Ritchounè,  par  Delbès.  2^  éd.;  Agen,  1876.  p.  234.) 

Le  pron.  comp.  est  ço  que. 


252  DIALtCTES  MODERNES 

10"   Tarn-t't-Garonne : 

Ça  respoundèt  Suzoun . 
(Castela,  Mous  Farinais.  Montauban,  fj.  22). 

5a-dis  à-n-el. 
{Arrn.  de  Lengadô,  1876,  p.  73,  dans  une  pièce  de  L.-J.-L.  Piat, 
datée  de  Montauban). 

Ce.  —  M.  Chabaneau  a  cité  un  ex.  du  Breviari  d'amor 
{Ilommiia,  V.  p.  234)  que  M.  P.  Meyer  trouve  fort  douteux, 
parce  que  l'un  des  mss.  de  Vienne  porte  so.  Se  a  été  employé 
en  catalan  : 

E  on  vas,  lop  Lobas  ? 
Se  dix  Nostre  Senyor. 
(Formule  de  conjuration.  1397,  publ.  par  Alart,  Revue  des  L.  R. , 
2"  s.,  m,  p.  11.) 

On  en  trouve  quelques  ex.  dans  la  langue  d'oc  moderne  : 

1°  Gironde: 

Bala,  se  dissut  het. 
Mais,  ce  dissury-jou. 
(  Œuvres  complètes  de  Meste  Yerdié.  12«  édit.;  Bordeaux,  1876, 
pp.  173,  179.) 

Comme  on  l'a  vu  plus  haut,  Verdie  emploie  aussi  le  pro- 
nom ça. 

2"  Hautes-Pyrénées: 

Se  dits  Mario  à  soun  Gouyat  ! 
Hé,  Diou!  moun  Hilh,  qu'as-tu  troubat? 
(Recueil  de  Noëls  choisis,  composés  autrefois  par  M.Henri  d'An- 
dichon  ;  Bagnères-de-Bigorre,  1876,  p.  17.) 

Le  nocl  Reheillats-bous,  meijnades,  dans  lequel  est  prise  cette 
citation,  est,  dans  l'édition  de  Bagnères,  attribué  à  d'Andi- 
chon  ;  mais  G.  Brunet  {Net.  et  Extr.  de  quelq.  ouvrages  en  patois 
du  Midi,  1840,in-8o,p.  177)lui  donne  pour  auteur  un  «  Gascon  », 
Gobain,  professeur  d'écriture  et  de  tenue  de  livres,  et  ne  sem- 
ble pas  avoir  connaissance  de  l'attribution  de  cette  pièce  à 
d'Andichon.  Dans  le  texte  cité  par  G.  Brunet,  et  qui  offre 
plusieurs  variantes,  on  lit  «  se  dit  »  (p.  180),  au  lieu  de  dits. 


PRONOMS   PROVENÇAUX  2m 

3°  Hérault: 

Un  anja  .sédiguet:  A'quel  éfan  sus  terra 
Séro  del  riche  haït. 
(Peyrottes,  de  Clermont-l'Hérault,  Poitésiaspatouèzas;  Montpel 
lier,  ISiO,  in-8°,  p.  4.) 

'("  Isère  : 

A  l'Evêchié  se  fit  pe  soixanla  personne. 
Un  dina  don  le  sauce  eyron  toulet  bien  bonne; 
Tout  eyre  fin,  ragoût,  ruty,  patissari; 
U  semblave,  se  dion,  ceu  de  Jean  de  Pari*. 
(  Épitre  en  langage  vulgaire  fie  Grenoble,   sur  les  réjouissances  pour 
la  naissance   du  Daupldn,  citée  par  GhampoUion-Figeac,  Nouvelles 
Recherches  sur  les i)atois  de  Vlsère;  Paris,  1809,  pag.  134  ) 

Le  pron.  comp.  est  ce  que. 


'  C'est  un  thnoignage  à  joindre  à  ceux  que  MM.  Mabille  (1855)  et 
Montaiglon  (  1867  )  ont  rapportés  de  la  popularité  du  Romant  de  Jehan 
lie  Paris,  témoignages  auxquels  on  peut  ajouter  les  suivants  :  —  Dans  la 
Relation  du  voiage  de  Brème  en  vers  burlesques  (  Leyde,  1677  ),  au 
chant  m»,  i;n  libraire  de  Brème  dénombre  les  livres  français  de  sa  bou- 
tique: 

Une  autre  Ji  èce  fort  jolie 
Qui  se  nomme  Jean  de  Paris. 

Dans  ses  Œuvres  galantes  (1665),  (Jotin  parle  des  livres  de  peu  de 
valeur  de  sa  bibliothèque: 

Primo,  Jean  de  J'drin,  Roger  et  Bradamantc. 

(Ces  citations  sont  extraites  du  Bulletin  du  Bibliophile.  1862,  pp.  920, 
973  )  :  —  Au  mois  de  décembre  1095,  M""  Guyon  fut  arrêtée  et  ses 
papiers  saisis  ;  «  elle  ne  voulut  pas  reconnoitre  des  opéras,  des  pièces  do 
Molière,  et  quelques  romans,  comme  .Jean  de  Paris.  Richard  Sans-Peur, 
etc.,  qu'elle  déclara  être  aux  laquais  de  son  fils,  lieutenant  aux  gardes  » 
{Relation...  du  quiétisme  [par  Phélipeaux,  docteur  de  SorbonneJ,  1732. 
p.  154  de  la  première  partie)  ;  —  Carvin  aine  a  fait  une  parodie  de  l'o- 
péra de  Boieldieu  (  Jea7i  de  Cassis  oou  Martegue.  imitation  burlesque  de 
Jean  de  Paris. ..  en  un  acte  et  en  vers  frovençoux ;  Marseille,  Masvert. 
1816,  in-8°)  ;  — '  Une  des  chansons  de  Béranger  porte  le  titre  de  .kan  de 
Paris.  Ce  Jean  de  Paris,  entiché  de  la  capitale,  batailleur,  blasé,  volup- 
tueux et  hâbleur,  quoique  le  chansonnier  fasse  allusion  à  je  ne  sais 
quelle  chronique  sur  laquelle  ne  nous  donnent  aucun  renseignement  ni 
les  notes  des  chansons,  ni  celles  do  Ma  Biographie i Pan?,.  Perrolin,  2*  éd.. 
1858,  in-8<^),  n'est  probablement  qu'un  souvenir  de  l'opéra  de  Boieldieu. 


254  DIALECTES   MODERNES 

5*  Landes: 

Lou  boun  Diu,  ses  pensée,  sur  sous  amies  que  beillo. 
[Alm<imrh  floua  Paysans,  1878,  p.  29).  Gfr.  cou,  G». 

(>  Limousin:  voir  Cliabaneau,  Gr.  Uni.,  i,  370. 

IV.-  D'UN  EMPLOI  PARTICULIER  DU  PRONOM 
DÉMONSTRATIF  NEUTRE  ÇO 

P  Ço  suivi  d'un  pronom  possessif,  d'un  adjectif  pris  sub- 
stantivement, ou  d'un  complément  prépositionnel,  se  traduit 
en  français  par  l'article  suivi  du  pronom  possessif  ou  d'un 
adjectif  pris  substantivement,  ou  bien  encore  on  est  obligé  de 
se  servir  de  l'article  et  dusubstantifquesous-entend  la  langue 
d'oc  ;  on  peut  parfois  aussi  avoir  recours  à  ce  qui  ou  ce  que  -f- 
un  verbe. 

Hérault  ;  «  Per  Sant-Michel  cepus  bel  »  =  pour  la  Saint-Michel 
(29  septembre,  on  marie)  le  plus  beau  (ce  qu'il  y  a  de  plus  beau)  ; — 
«  Ce  du  per  Moussu,  ce  mol  per  moun  col  »  ^  ce  qui  est  dur  pour 
Monsieur,  ce  qui  est  mou  pour  mon  gosier)';  —  «  Tout  ce  seou  »  = 
tout  le  sien  (tout  son  bien  -  ). 

Lio-t'y  dé  bounhur  dins  lou  moundé 
En  perd  en  ce  jms  jirécioiix? 
(Peyrottes,  Pouésias,  p.  78). 

Tarn  ;  «  So  seou  »  =  le  sien  (  son  bien)' . 

Cal  que  tu,  paouré  Bosc,  nous  lexiguos  ce  ieeu. 

Quant  aco  sera  fax,  bous  lexireei  ce  meeu. 

Aaissi  ce  teeu 

Aaissi  ce  bostré. 
(Daubian,  le  Misantrope  (raresti,  pp.  78,  79). 

Tarn-et-Gauonne  :  «  Tria  co  bel  d'ambe  la  peillo  »  =  trier  le 
haau  d'avec  le  chiffon,  le  rebut  ''. 

'  Adelphe. Espagne,  Proverbes  et  Dictons  populaires  recueillis  à  Aspi- 
m/i;  Montpellier.  1874,  in-S",  pp.  35,  44). 

*  Parab.  de  l'Enf.  prod.  en  patois  d'Agde,  Mém.  de  la  Soc.  des  Aniiq. 
de  France,  VI,  p.  510,  §  13.  Le  texte  de  la  parabole  est  généralement 
traduit  par  une  périphrase;  voici  les  seules  versions  où  il  n'en  soit  pas 
ainsi  :  "  Tout  lo  doisou  (roussillonnais,  p.  507);  tout  le  son  (Saintes,  p. 485); 
tout  aquo  siou  (Lozère,  p.  513).» 

'  Proverbe  albigeois.  Congrès  archéologique  de  France,  XLI"  ses- 
sion, 187.5,  p.  367. 

*  (  astela,  Mous  Farinais;  Montauban,  p.  38. 


PRONOMS    PROVENÇAUX  ?55 

2"  Plus  souvent,  ço  se  fait  accompagner  de  la  préposition  de. 

Haute-Garonne:  «  Garats  aci  code  niilhou;  amago  ço  de  pe- 
lassat  * . 

Sa  bertut,  sa  faissou  moudèsto, 
Soun  esprit  e  tout  .w  de  42i, 
M'an  boutât  un  martel  en  tésto. 
(  Gautier,  XYII»  s.,  cité  par  Noulet,  Hist.  litt.  des  patois  aux  XV  P' 
pf  XVII'  siècles,  p.  89.) 

Quand  sent  f]ue  per  sa  faute  a  pcrdut  ço  de  siu. 
{Le  Mirai  ?/iozmJi  ;  Toulouse,  1781,  p.  198..) 

Gers  : 

Que  eau  paga  dab  so  de  nosle.  (P.  214.) 

E  eau  qu'aquosto  capo  saute  ! 

Sauto,  capo  !  sauto  so  d'autel  (P.  240.) 

(D'Asiros,XVIIe  s.,  àSiTis  les  Poésies  gasconnes,  rec  par  F.-T..Ii  ; 
—  (.(.  Tout  ro-de-men  qu'ey  co-de-toun  »  (Parab.  de  l'Enf.  prod.,  Mém. 
Soc.  antiq.  Fr.,  "VI.  p.  50! ,  jl  31);  —  uÇo  de  boun  »  =  le  bon  (ce  qu'il 
y  a  de  bon)*. 

Basses- Pyrénées  :  «  Que  choisissen  so  de  mé  boun  »  =ils  choisis- 
sent le  meilleur  ;  —  «  Dap  so  dons  aoûts  »  =  avec  le  bien  des  autres 
d'autrui  3;  — «  Qu'ey  ço  de prumé gagnât;  code  mouillât,  (jue  potana 
à  l'aygue  *. 

Dans  Lespy  (§  384),  on  trouve  ço  uni  seulement  au  pos- 
sessif, so  de  me,  so  de  tau,  so  de  sou,  so  de  noustc,  so  de  boste 
(mon  bien,  ton  bien,  etc.;  ou  ce  qui  t'appartient,  ce  qui  est  à 
toi,  etc.). 

Catalogne.  —  Dans  le  Breviari  d'amor  catalan  (P.  Meyer, 
Rec.  d'anc.  textes),  on  trouve  :  «  Gusiwc  ço  del  vostî'e  »  (p.  125, 
1.  23),  «  ço  del  lur  »  (p.  125,  1.  2ij),  «  en  ço  del  lur  ve3'n  » 
(p.  126,  1.  49).  —  En  Catalogne,  du  moins  dans  le  Panades, 
le  peuple  de  la  campagne  dit,  en  certains  cas,  axô  ou  assù 
(peut-être  aussi  so  {del Ra fols  ou  del Miret)],  pour  désigner  le 


I  Goudelin,  éd.  d'Amsterdam,  1700,  pp.  147,259. 
■^  Chanson  gasconne  dans  Génac-Moncaut,  Litt.  pop.  de  la  Gasc,  p.  382. 
'  Un  anonyme,  dans  les  Poésies  gasconnes  de  J.  Larrobai;  Bayonne. 
1868,  p  85. 
■'  Cansous  béarnaises  de  Despourrins et  autes.  3*  éd.,  pp.  198,  201. 


256  1)1AI.1':CTKS   MODERNES 

domaine  de  ces  propriétaires.  D'ailleurs,  on  lit  dans  Bernât 
Metje:  «No  li  torna  so  delsieu*.  »  — Cf.  en  langue  d'oc: 
«  Per  ce  qu'es  de  mei  vers,  se  sount  de  boueno    raço,  vo  se 

sount  ô'aquo  fin- »;  «  Quant  sera  mort,  sera  aquo  scieu 

Plus  drcyt  bordo  qu'vng-  de  romieu*.  » 

J.  Bauquier. 


•  Milà  y  Fonlanals,  ftey^'C  des  L.  li  .  2'  s,  IV,  1877,  p.  207. 
-  Gros,  Recuil  de  poueniés  pronvençalos;  Marseille,  1763,  p.  9. 
•'  Las  Ordenansas  del  libre  blanc;  Tolosa,  1555,  éd.  Noulet,  v.  727 


LE  MOINE  ' 

CHANSON    DU    VELAY 


Une   série   de  chansons   populaires  est  consacrée  à  berner  les 

faux  galants  et  leurs  téméraires  entreprises.  Un  passager  courtise 

une  batelière  et,  à  ce  jeu,  perd  sa  bourse.  Un   seigneur  dessceml 

(le  cheval  pour  causer  à  l'aise  avec  une  bergère,  qui  lui  dérobe  sa 

monture.  A  ce  groupe  de  chansons  appartient,  par  le  sujet  et  par 

plusieurs  détails,  celle  du  Moine,  aujourd'hui  d'ailleurs  presque 

oubliée.  La  voici  telle  qu'elle  m'a  été  dite,  en   septembre  1868,  à 

Roche-cn-Régnier.  par  Marie  Matthieu.   Gomme  bon  nombre  de 

chansons  foréziennes,  elle  est  semée  de  gallicismes  et  même  de 

français.  Il  est  naturel  que  ce  dernier,  qui  pénètre  de  plus  on  plus 

dans  le  langage  de  la  vie  ordinaire,  prenne  dans  les  chansons  une 

iilace  plus  ou  moins  grande. 

V.  Smith  . 


{/iis.)    \ 


Soun  tré  zouena  fiUa, 
Touta  tré  d'un  temps. 

011  ola-! 
Touta  tré  d'un  temps. 

«  Una  de  vous  autra  —  ma  mia  chijeria.  » 
CM  na  gui  la  plus  grande  :  —  «  Eco  chera  pa  ieu.  u 
CM  n'a  gui  la  secounda  :  —  «  Encora  moins  ieu.  » 
CM  n'a  ffui  la  troisième  :  —  «  Eco  chera  bien  ieu.  » 


LE  MOINE 

Sont  trois  jeunes  hiles,  —  touLcs  trois  do  mémo  âge,  —  oli,  ola! 
—r  toutes  trois  de  même  âge. 

«  Une  de  vous  autres  —  ma  mie  sera.  » 

Si  n'a  dit  la  plus  grande  :  —  «  Celle-là  ne  sera  pas  moi ,  » 

Si  n'a  dit  la  seconde  :  —  «  Encore  moins  moi.  » 

Si  n'a  dit  la  troisième  :  —  «  Celle-là  sera  bien  moi .  » 

1  Nous  avons  reçu  de  M.  V.  S  la  chanson  ci-dessus,  qui  sort  assez  de 
notre  cadre  ]pour  que  nous  la  publiions  séparémi'nt. 

A.  M..L    L. 
•-'  La  chanteuse  dit  tantôt  OU  nia  !  tantôt  \'ull  via  ' 


258  DIALECTES    MODliKNES 

((  0  mouena,  faux  moueiia,  —  cncor  tiu  m'a  pa  : 

»  Tsau  que  tiu  me  douna  —  cent  étiu  que  n'a.  » 

Le  mouena  fut  chimpla,  —  lou  i  vai  coumpta. 

La  bella  fut  fina,  —  lou  vougué  coumpta. 

«  0  mouena,  faux  mouena,  —  aqui  manque  un  lia.  » 

Per  un  lia  que  manqua  —  i  lli  bote  unsâo. 

«  0  mouena,  faux  mouena,  —  encor  tiu  m'a  pa  : 

»  Tsau  que  tiu  me  douna  —  ton  tsava  baja.  » 

«  0  mouena,  faux  mouena,  —  encor  tiu  m'a  pa  : 

»  Tsau  que  tiu  me  douna  —  la  tsella  et  la  brida,  —  l'es- 

perou  dora. » 
Le  mouena  fut  chimpla,  —  lou  i  vai  baila. 
La  bella  fut  fina,  —  y  vougué  mounta. 
La  bella-z-à  courre,  —  le  mouena  à  trota. 
((  Arrêtez- vous,  belle,  —  je  suis  fatigué  !  » 
a  0  mouena,  faux  mouena,  —  oncor  lai  schia  pa  : 
»  La  côte  que  vedza,  —  la  te  tsau  mounta  ; 
»  Equela  que  vedza, — mai  que  vedza  pa, — la  tsau  dévala. 

«  0  moine,  faux  moine,  —  encore  tu  ne  m'as  pas. 

»  Faut  que  tu  me  donnes  —  cent  écus  que  n'as  '.  » 

Le  moine  fut  simple,  —  il  les  va  compter 

La  belle  futiine,  —  les  voulut  compter. 

«  0  moiae,  faux  moine,  —  ici  manque  un  liard.  » 

Pour  un  liard  qui  manque,  —  ii  lui  donne  un  sou. 

«  0  moine,  faux  moine, —  encore  tu  ne  m'as  pas  : 

<=  Faut  que  tu  me  donnes — ton  cheval  bayard  *.  » 

«  0  moine,  faux  moine,  —  encore  tu  m'as  pas. 

Faut  que  tu  me  donnes  —  la  selle  et   la   bride,  —   l'éperon 

doré.» 
Le  moine  fut  simple,  —  il  les  va  bailler,  , 

La  belle  fut  fine,  —  y  voulut  monter. 
La  belle-z-à  courir,  —  le  moine  à  trotter. 
Arrêtez-vous,  belle,  —  je  suis  fatigué  ! 
.    «  0  moine,  faux  moine,  -  encore  là  tu  n'es  pas. 
»  La  côte  que  tu  vois,  —  te  la  faut  monter  ; 
<>  Celle  que  tu  vois,  —  aussi  (celle)  que  tu  vois  pas,  —  la  faut 

descendre.  » 

*  Il  est  inutile  de  dire  que  Vn  n'a  pas  de  valeu''  négative. 
-'  De  couleur  variée,  pie. 


LE    MOINK  259 

Le  mouena  s'asseta,  —  Se  bote  à  ploura. 
\      «  Soun  tré  zouena  filla, 


{/iis 


)      \roun  bien  attrapa, 
Oli  ola  ! 
M'oun  bien  attrapa  ! 


Le  moine  s'assied,  —  se  mot,  à  pleurer. 

«  Sont  trois  jeunes  filles.  —  elles  m'ont  l>i(Mi   attrapé,    oli.  ola 
elles  m'ont  bien  attrapé. 


'■;=»»§JC»«!='-^- 


LA  NATURO 


Perque  te  doulentà,  matant  belo  aflijado  ? 
A  toutes  la  naturo  a  dounat  sous  soussis  : 
Lou  soulel  dins  lou  ciel  de  nibous  s'escursis, 
E  sus  terro  la  roso  es  d'espignos  cargado. 

La  peilo,  dins  la  mar,  pel  l'aiguo  es  acatado  ; 
L'argent,  blanc  coumo  non,  mai  d'un  cop  se  crassis: 
Lou  fioc,  nègre  de  fum,  emb  peno  s'enluzis, 
E  souvent  la  clartat  pel  l'oumbro  es  atapado. 

L'or  n'esclato  qu'autant  que  lou  fer  l'a  batut. 
Lou  pinsel  sus  la  tèlo  enauro  la  vertut; 
Lou  cizel  fa  l'image  en  travalhant  l'ivorio. 

Acô's  laie  coumuno  à  so  qu'a  de  valou, 
La  fourtuno  fantasco  escrazo  jou'  1  talou 
E  pei,  d'un  tour  de  rodo,  emporto  ves  la  glorio. 

C.   Laforgue. 

(Languedocien.  Quarante  et  ses  environs.) 

LA  NATURE 


Pourquoi  te  plainilre,  ma  belle  affligée  ?  — La  nature  a  donné  son 
souci  à  toutes  choses  :  — dans  le  ciel,  le  soleil  est  obscurci  par  les 
nuages,  —  et  sur  la  terre  la  rose  est  chargée  d'épines. 

La  perle,  dans  la  mer,  par  l'eau  est  cachée;  —  l'argent,  blanc 
comme  la  neige,  plus  d'une  fois  est  souillé;  —  le  feu,  de  la  noire 
fumée,  sort  brillant  avec  peine,  —  et  souvent  la  clarté  est  recouverte 
d'ombre. 

L'or  n'éclate  qu'autant  que  le  for  l'a  frappé;  —  \p  pinceau  sur  la 
toile  exalte  la  vertu;  —  le  ciseau  fait  l'image  en  travaillant  l'ivoire. 

C'est  là  la  loi  commune  à  tout  ce  qui  a  prix:  —  la  fortune  fantas- 
que [nous]  écrase  sous  le  talon. —  et  puis,  d'un  tour  dp  roue,  elle 
|nous|  emporte  vers  la  gloire. 

(].  Lai'Orguk. 


ATOS 

Le  jouve  gous  d'arrest,  la  perpelho  satado, 
Ajassat  coumo  un  sfinx,  s'arrajo  al  soulelh  rous, 
Qu'enlusis  francomeiit  la  bèutat  aplantado 
Joubs  le  relieu  ardit  de  soun  cos  verturous. 

Sa  raubo,  d'un  blound  caud,  n'a  pas  cap  de  pelado  ; 
A  de  pardos  ça'n  la  que,  subre  soun  velous, 
Paressoun,  à'ngana  l'oumbreto  festounado 
De  nibouls  qu'un  ventot  espaço  pel  cel  blous. 

Se  ten,  ves  auto,  al  miei  de  la  vielho  terrasso, 
E  se  pauso  aquital  de  set  meses  de  casso, 
Poulsant  douçomenet  ou  fresinant  d'amour. 

La  sieu  feraelo,  ountes?  —  Sul  cop  levât,  s'estiro, 
Badalho,  raugno  un  pauc,  ves  le  pourtalh  se  viro 
E  la  cerco  des  uels  en  se  lupant  le  mour. 

Ag.  FouRÈs. 

(Languedocien.  Oastelnaudary  et  ses  environs.) 

ATHOS 

Le  jeune  chien  d'arrêt,  la  paupière  mi-close,  —  couché  de  son 
long  comme  un  sphinx.  —  se  chauffe  aux  rayons  du  soleil  roux,  — 
qui  illumine  franchement  la  beauté  fixée  —  sons  le  relief  hardi  do 
son  corps  vigoureux. 

Sa  robe,  d'un  blond  chaud,  n'a  pos  une  cicatrice  ;  —  elle  a  des 
taches  çà  et  là  qui,  sur  son  velours,  —  paraissent,  à  vous  tromper, 
la  fine  ombre  festonnée  —  des  nues  ({u'un  zéphyr  disperse  par  le 
ciel  pur. 

Il  se  tient,  vers  autan,  au  milieu  de  la  vieille  terrasse,  —  et  se 
repose  là  de  sept  mois  de  chasse,  —  respirant  tout  doucement  ou 
frémissant  d'amour. 

Sa  femelle,  oîi  est-elle?  Sur-le-champ  levé,  il  s'étire, —  il  bùillo, 

grogne  un  peu,  vers  le  portail  se  tourne,  —  ox  la  cherche  des  yeux 

en  se  léchant  le  museau. 

Aug.  FouRÈs. 

18 


LOU  CALIGNAIRE 

A  VITOU    LIEUTAUD 

Biblicjuliîcàri  de  la  ciéula  de  Marsiliu 


Se  dreisson  au  soulèu  li  ciprès  de  la  piano, 
De  milo  flour  se  bordon  li  camin  ; 
Eilalin, 
Vese  la  serpentino  andano 
Di  ramudo  e  verdi  platano, 
Que  me  meno  lèu-lèu,  franc  de  marrit  pegin, 
A  Maiano. 

Beisarai  lou  front  blanc  e  lise,  dins  un  moumen, 
De  la  bèuta  que  ma  passioun  flourido 
A  chausido  !.. . 
Esoun  paire,  sènso  desden, 
Me  festara  graciousamen 
Emé  devin  famous,  emé  de  regalido, 
Certamen  ! 


L'AMOUREUX 


A    VICTOR    LIEUTAUD 
Bibliothécaire  de  la  ville  de  Marseille 

Au  soleil  se  di-essent  les  cyprès  de  la  plaine, —  les  chemins  sont 
bordés  de  mille  fleurs;  —  au  loin,  —  je  vois  l'allée  serpentine  — 
(les  platanes  ombreux  et  verts,  —  qui  me  mène  rapidement,  — 
délivré  de  toute  mélancolie  mauvaise,  —  à  Maillane. 

Je  baiserai  le  front  blanc  et  lisse,  dans  un  moment,  —  de  la 
beauté  que  ma  passion  fleurie  —  a  préférée  ! . . .  —  et  son  père,  sans 
dédain,  —  me  fêtera  gracieusement  —  avec  des  vins  excellents, 
avec  des  reifuUdes,  —  j'en  suiii  certain  ! 


LOU    CALIGNAIRR  263 

E  tout  soulet  em'  elo,  oh  !  sarai  uno  auretu 
Que  douçamen  l)oufo  sus  uno  flour  ; 
E  l'amour, 
De  soun  amo  de  fiheto 
(Coume  dôu  boutoun  la  roseto), 
S'escarrabihara,  sourrisènt  de  baudour, 
Boulegueto. 

Parlarai  de  Tamour,  tant  de  tèms  presounié, 
Sènso  paraulo,  au  bèu  mitan  di  /iamo 

De  moun  amo. . . 
Mai,  vuèi,  coume  uno  pradarié, 
Souto  li  raioun  pvintanié, 
Béurai  lou  grand  bonur,  bagna  dins  la  calamo 
Tout  entié  ! 

Guihèn-C.  Bonaparte- Wysk. 
(Provençal,  Avignon  et  les  bords  du  Rhône) 


Et  tout  seul  avec  elle,  oh  !  je  serai  une  petite  brise  —  qui  souffle 
doucement  sur  une  tleur;  —  et  l'Amour,  — de  son  âme  de  jeune 
fille  —  (comme  du  bouton  la  petite  rose).  —  s'éveillera,  souriant 
d'allégresse,  —  sémillante. 

Je  parlerai  de  l'amour,  si  longtemps  prisonnier,  —  san  ■  parole, 
au  beau  milieu  des  flammes  —  démon  âme. . .  —  Mais,  aujourd'hui, 
comme  une  prairie  —  sous  les  rayons  du  printemps,  —  je  boi- 
rai le  grand  bonheur,  baigné  dans  le  calme —  tout  entier! 

Guillaume-C.  Bonaparte -Wyse. 


SA  MAIRE  L'ES  VENGUT  CERCA 


Sans  parents  à  très  ans,  pecaire  ! 
Un  enfant  bèu  coume  un  amour, 
Tant  e  mai  sounava  sa  maire 
E  se  planissiè  nioch  e  jour. 

Jocs  de  touta  mena,  amusages, 
Souens,  caressas,  res  ie  fasiè  : 
Lou  paure  mesquin  sentissiè 
Qu'aeôs  era  de  souens  à  gages. 

Or  sa  maire,  un  souer  que  plourava, 
Dau  cementeri  Tausiguet 
Joutla  terra  que  l'atapava, 
E  tout  soun  cor  trefouliguet . 

Couma  una  tiecha,  sa  priera 
Monta  tout  drech  au  Paradis.  — 
Oh  !  la  fe  jamai  désespéra  !  — 
Prega  Nostre-Seerne  e  ie  dis: 


SA  MÈRE  EST  VENUE  LE  CHERCHER 


Sans  parents  à  trois  ans,  hélas!  —  un  enfant,  beau  comme 
un  amour,  —  tout  le  temps  appelait  sa  more—  et  se  plaignait  nuit 
et  jour. 

Jeux  de  toute  sorte,  amusements,  —  soins,  caresses,  rien  n'y 
faisait:  —  le  pauvre  petit  sentait  bien  — que  c'étaient  là  des  soins 
à  gages. 

Or  sa  mère,  un  soir  qu'il  pleurait,  —  du  cimetière  vint  à  l'en- 
tendre —  sous  la  terre  qui  la  recouvrait;  —  tout  son  cœur  en 
tressaillit. 

Comme  une  tlèche,  sa  prière  —  monte  tout  droit  au  Paradis.  — 
(Jh  !  la  foi  ne  désespère  jamais  !  —  Elle  prie  Notre-Seigneur  et  lui 

dil  : 


SA    MAIRE    L  ES    VENQUT   CKRCA  265 

«  Nostre-Segne,  laissas,  de  grara, 
Laissàs-me 'nmouraent  reveni 
Vers  moun  enfant,  carieu  soui  lassa 
De  l'ausi  toujour  se  plani.  » 

E  tant  ela  prega  e  tant  ploura, 
Que  lou  bon  Dieu  la  laissa  anà  : 
Aviè  l'ordre  de  s'entournà 
Quand  lou  gai  ie  cantariè  Toura. 

Se  levet  de  soun  jas  de  ploumb  ; 
Sous  pesés  un  pauie  pesavoun, 
Mais,  basta  !  seguet  lèu  amount. 
Lous  cliis  de  garda  ie  japavonn. 

Quand  arrivet  à  soun  oustau, 
—  Oh!  Ton  auriè  dicli  que  voulava !  — 
De  la  porta  a  pas  fach  qu'un  saut 
Au  brès  ounte  l'enfant  plourava. 

Sus  soun  se  tout  desalenat 
Vite  lou  prend,  Ion  poutouneja, 
E  pioi  douçament  lou  neteja 
E  penchina  soun  peu  bloucat. 


"  Notre  Seigneur,  ah!  laissez-moi,  de  grâce, —  laissez-moi  un 
moment  revenir —  vers  mon  enfant,  car  je  suis  lasse  —  de  l'ouïr 
toujours  se  plaindre.  » 

Et  tant  elle  prie  et  tant  elle  pleure,  —  que  le  bon  Dieu  la  laisse 
aller: — elle  avait  ordre  de  retourner —  quand  le  coq  lui  chante- 
rait l'heure. 

Elle  se  leva  de  sa  couche  de  plomb  ;  —  ses  pieds  lui  pesaient  un 
peu,  —  mais,  baste!  elle  fut  bientôt  là-haut,  —  Les  chiens  de  garde 
lui  aboyaient. 

Quand  elle  arriva  à  sa  maison,  — oh!  l'on  aurait  dit  qu'elle  vo- 
lait! —  De  la  porte  elle  n'a  fait  qu'un  saut  —  au  berceau  où  l'enfant 
pleurait. 

Sur  son  sein  qui  bat  à  peine  —  vite  elle  le  prend,  le  couvre  de 
baisers,  —  et  puis  doueement  le  nettoie  —  et  peigne  ses  cheveux 
bouclés. 


2rt6  I>IALECTES   MODERNES 

Lou  paui'c  manit  à  sa  maire 
Risiè,  pie  de  countentament, 
E  la  nioch  finiguet,  pecaire  ! 
Cresien  astre  au  coumençament. 

Quand  lou  gai  cantet  embé  Tauba, 
La  maire,  qu  ausis  lou  signau, 
Se  rapelant  Tordre  d'en  naut, 
Deven  touta  palla  e  se  sauba . 

Desempioi,  passât  miecha-nioch, 
L'enfant  se  fasiè  pus  entendre, 
E  degus  ie  pot  res  coumprendre  : 
La  morta  veniè  chaca  nioch. 

Un  mati,  lou  brès,  michant  signe  ! 
Seguet  siau.  —  Vite  i'  an  courrit. 
D'ounte  ven  que  chacun  se  signe  ? 

—  Per  lou  Ciel  l'ange  era  partit.  — 

L'ai  vist  :  dins  la  mort  embé  graça 
Risiè,  l'enfant,  tout  emblancat  ! 
E  disien  autour,  à  voués  bassa  : 

—  Sa  maire  l'es  vengut  cercà  ! 

J.  Gaussinel, 
(Languedocien,  Montpellier  et  ses  enviions.) 


Le  pauvre  petit  à  sa  mère — souriait  plein  de  contentement, — 
et  la  nuit  se  passa,  hélas  !  —  ils  croyaient  qu'elle  était  à  son  com- 
mencement. 

Quand  à  l'aube  le  coq  chanta,  —  la  mère,  qui  entend  le  signal, 
—  se  rappelant  l'ordre  d'en  haut, —  devient  toute  pâle  et  se  sauve. 
Depuis,  après  minuit, —  l'enfant  ne  se  faisait  plus  entendre. — 
Et  nul  n'y  pouvait  rien  comprendre:  —  la  morte  venait  chaque  nuit. 
Un  matin,  le  berceau,  mauvais  signe  !  —  fut  silencieux.  Vite 
on  y  a  couru.  —  D'où  vient  que  chacun  se  signe  (fait  le  signe  de  la 
croix)  ?  —  four  le  Ciel  l'ange  était  parti. 

Je  l'ai  vu  :  dans  la  mort  avec  grâce  —  il  souriait  l'enfant,  tout 
de  blanc  vêtu  :  —  et  l'on  disait  autour,  à  voix  basse  :  —  Sa  mère  est 
venue  le  chercher  !  J.  Gaussinel. 


A    PREPAUS 

DE  LA  MORT  DI  DOUS  CRI-CRI 

De  Madamisello  Ernestino  de  Bornier 


La  mort  avido,  que  desplego 

Si  brego 
Au  grand  cat-fèr,  au  leiounas 

Negras, 
E  que  fai  «  chut  d  is  alauveto 
Au  bèu  mitan  de  si  tiro-lireto. 

A  pica  de  soun  dardaioun 

Feroun 
Li  cri-cri  de  la  chatouneto 

Braveto; 
E  Tic-de-Mai  e  Brounzaflour 
Soun  toumba  'iia  d'ount  flouris  ges  de  flour  ! 


A   PROPOS 

DE  LA  MORT  DES  DEUX  GRILLONS 
de  Mademoiselle  Ernestine  de  Bornier 


La  mort  avide,  qui  étale  —  ses  mâchoires  —  au  grand  chat  sau- 
vage, au  lion  fort  —  [et]  noir,  —  et  qui  fait  taire  les  alouettes,— 
au  beau  milieu  de  leurs  claires  chansonnettes, 

A  piqué  de  son  dard  —  cruel  —  les  grillons  de  la  jeune  ûUe  — 
si  aimable;  —et  Tic-de-Mai  et  BronzaQor'  —  sont  tombés  là  où  ne 
fleurit  nulle  fleur  '• 

I  Noms  de  deux  grillons  qui  appartenaient  à  Mademoiselle  Ernosline 
de  Bornier. 


or,5  DIALKCTli^    MODERNES 

Mai.  icu,  s'ère  la  chatouneto 

Braveto 
Que  vèn  de  perdre  si  cri-cri 

Poulit, 
Mort,  mort,  ai  las!   de  ianguitôri, 
E  Mla  jasent,  descansouna,  desflôri, 

F'aricu  lèu-lèu,  lèu-lèu  fariéu, 

Boudiéu  ! 
(Pèr  coumplaire  à  ma  fantasio 

De  fiho), 
Un  fin  sépulcre  pèr  li  cors 
Aièr  vivent,  mai  mort,  encuei,  bènmort  ! . 

Te.  de  roso  dos  petalo 
Pourpalo  ! . .  . 
Agouloupen,  dins  si  mantèu 

Tant  bèu, 
Misto  taio  e  cuisse  grasseto 
Qu'alegramen  trepavo  sus  Terbeto. 

E  pèr  li  dous  eercuei,  veici 

Eici 
Dos  côuquiho  lisqueto  e  li'ndo 

Dis  Indo, 
Que  se  clauson,  i  goufoun  fin, 
Coume,  ma  fe!  de  pichounetescrin. 


Mais  moi,  si  j'étais  la  jeune  iille  —  si  aimable  —  qui  vient  de 
perdre  ses  grillons  — jolis,  —  morts^  morts,  hélas  !  de  nostalgie, — 
et  là  gisant,  sans  chansons,  sans  entrain, 

Je  ferais  vite,  vite  je  ferais,  —  certes  !  —  (pour  complaire  à  ma 
fantaisie  —  de  jeune  fille),  —  un  fin  sépulcre  pour  les  corps, —  hier 
vivants,  mais  aujourd'hui  morts,  bien  morts  !. . . 

Tiens,  [je  vois]  deux  pétales  de  roses  —  pourprées.  —  Envelop- 
pons dans  leur  manteau  —  si  beau  —  taille'mincc  et  cuisse  dodue 

—  qui  allègrement  sautillaient  sur  l'herbette. 

Et,  pour  cercueil,  voici,  —  ici,  — deux  coquilles  lisses  et  nettes 

—  des  Indes,  — qui  so  ferment,  aux  gonds  fins,  —  comme,  ma 
foi  !  de  tout  nolits  écrins. 


LA    MORT   DI    nous    CIU-ORI  26? 

Parai,  aquesto  raro  e  rioho 

Pouticho 
Fara,  pichoto,  un  toumbèu  cl  ai' 

E  car, 
Uno  chasseto  galantouno 
Pèr  recata  'quéli  biero  bessouno  ? 

E,  tu,  Taubouraras  après, 

Esprès, 
Sus  un  raioun  de  ta  chambrcto 

Proupeto, 
Coume  autri-fes  lou  grand  Trajan  ', 
Qu'an  enterra  sus  soun  pilié  d'arara? 

Ansindo,  rapelant  li  folo 

Bestiole 
Que  te  fasien,  la  niue,  lou  jour, 

Sa  cour, 
E  qu'ispiravon  dinstoun  amo 
Lou  fres  di  prado  e  la  douço  calamo, 

Ansindo,  dins  toun  cor  d'enfant, 

Gravant 
Que  ço  que  ris,  que  ço  qu'encanto 

E  canto, 
Dedins  la  vido  e  dins  la  mort 
A  dre  toujour  à  toui  lis  estrambord  ! 

N'est-ce  pas,  cette  rare  et  riche  —  potiche  —  fera,  jeune  fille, 
un  tombeau  clair  —  et  précieux,  —  une  petite  châsse  charmante  — 
pour  enfermer  ces  deux  bières  jumelles  ? 

Et  toi,  tu  rélèveras  après, —  exprès, —  sur  un  rayon  de  ta  cham- 
brette  —  proprette,  —  comme  jadis  le  grand  Trajan,  —  qu'on  en- 
terra sur  son  pilier  d'airain  ! 

Ainsi,  rappelant  les  folles  —  petites  bêtes  — qui  te  faisaient,  la 
nuit,  le  jour, —  leur  cour,  —  et  qui  inspiraient  dans  ton  âme  — 
la  fraîcheur  des  prairies  et  la  douce  tranquillité. 

Ainsi,  dans  ton  cœur  d'enfant  —  gravant  —  que  ce  qui  rit,  que 
ce  qui  enchante  —  et  chante,  —  dans  la  vie  et  dans  la  mort,  —  a 
toujours  droit  à  tous  les  enthousiasmes  ! 

'  L'empereur  Trajan,  iloiil  les  cendres  furent  déposées  dans  une  urne, 
au  sommet  de  sa  colonne,  à  Rome. 


270  I1IALECTES    MODERNES 

MANDADIS 

À    MADAMISELLO  ERNESTINO  DE    BORNIER 

Sourreto  de  Berto  *,  Ernestino  ! 

Ta  mino, 
Ta  voues,  toun  cor  (lauroun  cantant  !  ) 

Me  fan, 
Icu,  ^Tand  dévot  de  Santo-Estello, 
Piéuta  dedins  la  lengo  subre-bello. 

GuiHÉN-C.  Bonaparte- Wyse. 
(Provençal,  Avignon  et  les  bords  du  Rhône.) 


ENVOI 

A  MADEMOISELLE  ERNESTINE  DE  BORNIKR 

Sœur  de  Berthe,  Ernestine,  —  ta  mine  —  ta  voix,  ton  cœur 
(source  chantante  !),  —  me  font, —  moi,  grand  dévot  de  Sainte-Es- 
telle, —  chanter  dans  la  langue  belle  par-dessus  tout  ! 

GutLLAUME-C.  B0NAPARTE-"WySE  • 


I  L'héroïne  du  drame  célèbre  du  vicomte  Henri  de  Bornier,  la  Fille  de 
Roland,  représenté  à  Montpellier,  à  l'occasion  des  Fêtes  latines. 


GONDOVAL 

(4S4) 


Briva  adounch  couma  anueg  era  una  bouna  vila. 
Gondoval  n'a  mestier,  Gondoval  Tassetja. .  .  I!a, 
Barrada  entre  sous  murs,  fizansouza,  inmoubila 
(Tentar  Dieus  es  pechat),  s'en  fai  grana  de  bila  : 
«  Auria  be  tort»,  sou  dig,  «  de  noun  estar  tranquila, 
»  Quar  un  Patron  m'aponha,  e  soun  bratz  n'en  val  mila 
»  Sent  Marti  l'Espanhol  !  » 

Sent  Marti  l'Espanhol,  que,  d'en  premier  rebel, 
Lou  pople  escoupetet;  mas  pueis,  vengut  t'edel, 
Li  bastit  una  egleija,  am  dedins  soun  toumbel  ; 
Toumbel  de  marbre  e  d'or,  requist  e  subre-bel, 
Esclardat  nueg  e  journ  de  manh  e  manh  flambel, 


GONDOVAL 


Brive,  alors  comme  aujourd'hui,  était  une  ville  importante.  — 
Gondoval  en  ii  besoin,  Gondoval  l'assiège;  elle  —  enfermée  dans 
ses  murailles,  immobile  et  confiante  —  (tenter  Dieu,  c'est  péché), 
ne  s'en  fait  point  de  bile:  —  «  J'aurais  bien  tort,  dit-elle,  de  ne  pas 
me  tenir  en  paix,  —  car  un  Patron  me  veille,  et  son  bras  en  vaut 
mille  :  —  saint  Martin  l'Espagnol!  » 

Saint  Martin  l'Espagnol,  que,  d'abord  rebelle,  —  le  peuple  déca- 
pita; mais  ensuite,  devenu  croyant,—  il  lui  bâtit  une  église  dans  la- 
quelle était  son  tombeau;  ~  tombeau  de  marbre  et  d'or,  élégant 
et  magnifique,  —  nuit  et  jour  éclairé  par  maint  et  maint  cierge,  — 

'  «  Ce  Gondoval,  fils  naturel  de  Glotaire  1",  fut  renié  par  son  père,  se  re- 
tira en  Italie,  près  de  l'ennuque  Narsès,  et  le  suivit. à  Gonstaniinople.  Lf 
duc  Boson  lui  persuada  de  revenir  en  Gaule.  Il  débarqua  à  Marseille.  Sou- 
tenu par  Mummol,  patrice  de  Bourgogne,  et  par  Desiderius,  il  marcha 
vers  le  Limousin  et  s'arrêta  à  Brive,  oii  il  fut  élevé  sur  le  pavois;  mais 
bientôt  ses  partisans  le  trahirent.  Il  se  réfugia  dans  les  murs  de  St-Ber- 
trand-de-Gomminges,  fut  assiégé  par  Gontran  et  péril  assassiné.  »  (.Malte- 
Brun,  la  France  illustrée,  -dTi .  Corréze.  p.  11.) 


KIALECTES    MODERNKS 

()un,  souven,  Libéral,  pastour  d'aquest  troupel. 
Pretja  per  que  lou  Duc  porte  alhours  soun  drapel. 
Ou,  se  vol  s'atemar,  reste  sus  lou  carrel, 
El,  emais  soun  armada! 

El  emais  soun  armada  an  brandit  lour  ligoussa  : 
»  S'abuzon,  coumbatem  ! .    .  Ardit!  à  la  rescoussa  ! . . 
Lou  pus  char  que  la  vita,  e  la  vita  tan  doussa, 
Res  ne  pot  resistir  al  demoun  que  lous  poussa  ; 
E  lou  sang  de  pertout  fuma,  brumetja,  moussa  ; 
E  lou  fueg,  qu'an  boutât,  s'escampa  e  se  trémoussa  ; 
E  l'an  auve  la  charn  dins  la  flamada  roussa 
Brutgir  e  criquetar  couma  del  bois  de  broussa 
Al  mitan  d'un  fournel. 

Al  mitan  d'un  fournel  l'egleija  disparais  ; 
Lou  fueg  a  tout  cremat,  lou  reire  emais  lou  creis. 
Adi,  toumbel  de  marbre,  atrevadour  de  i*eis, 
Estatuas,  autars  flouritz  couma  un  cireis 
Quanla  prima  nouvela  nous  ramena  sas  geis  ! 
Del  bel  aubre  res  pus  ne  sobra,  rams  ni  reis.  .  . 
E  miscan  Libéral,  miscan  mais  cinq  ou  sieis, 
Tout  escana,  tout  crolla  ! 


où  souvent  Libéral,  pasteur  de  ce  troupeau,  —  prie  Dieu  pour  que 
le  duc  porte  ailleurs  son  étendard,  —  ou,  s'il  veut  s'obstiner,  reste 
sur  la  place,  —  lui  et  son  armée  ! 

Lui  et  son  armée  ont  brandi  leur  épée  :  «  —  Ils  s'amusent,  cou  - 
battons  !  Gouiage  ! ....  à  la  rescousse  !»  —  Ce  qui  est  plus  précieux 
que  la  vie,  et  la  vie  si  douce,  —  rien  ne  peut  résister  au  démon  qui 
les  emporte.  —  Et  le  sang  partout  fume,  mousse,  frémit;  —  et  le 
feu  qu'on  a  mis  s'étend  et  s'agite  ;  —  et  l'on  entend  la  chair,  dans 
la  flamme  rouge,  —  bruir  et  crier  comme  du  bois  de  bruyère  — 
au  milieu  d'un  brasier. 

Au  milieu  d'un  brasier,  l'égUse  disparaît;  —  le  feu  a  tout  con- 
sumé :  l'aïeul  et  l'enfant.  —  Adieu!  tombeau  de  marbre,  rendez- 
vous  des  rois,  —  statues,  autels  fleuris  comme  un  cerisier,  — 
lorsque  le  nouveau  printemps  nous  ramène  ses  joies!  —  Du  l)el 
arbre,  plus  rien  ne  reste,  ni  les  rameaux,  ni  les  racines;  — et,  sauf 
Libéral,  sauf  cinq  ou  six,  —  tout  périt,  tout  croule  ! 


CiOMJUVAL  273 

Tout  escana,  tout  croUa,  e  Briva  es  aiTouiuada! 
Oondoval  es  urous,  qu'a  fach  bouiia  journada  : 
«  Prou  !  n  dig,  «  se  chai  pausar.  La  lucha  es  termenada.  » 
E,  couma  la  nueg  cocha,  e  qu'es  bêla  lunada, 
Vol  que,  pertoutsoun  ost,  touta  laserenada, 
La  dinada  coumense,  una  tala  dinada 
Que  jamais  la  parieira  enlueg  se  sia  dounada, 
E  se  beu,  e  se  minja  ! 

E  se  beu,  e  se  minja î. . .  Al  mais  que  n'en  chab  !..  Or 
Gondoval,  pie  del  vi  que  li  neja  lou  cor, 
Coumanda  que  li  arrazon  lou  Sent-Grial,  hanap  d'or 
Que  Josep  d'Ariraat  te  prestet,  per  l'araor, 
Crist  !  de  lei  celebrar  ta  darrieira  «  Pascor  »  ; 
Apueis,  Valentiuian,  piousemperadoi-, 
Lou  mandet  a^  martire  per  guarnir  soun  trésor. 
Es  el  dins  lous  Roumans  que  lous  Douge  d'Armor 
Chercharan  per  tout  carre. 

Chercharan  per  tout  carre  ;  e  qu'anueg  serv  de  veire 
Al  bastard  Gondoval,  afourtuuat  venceire. 
Mas,  Libéral  se  leva  !  Auria  cbaugut  lou  veire  ! 
Devans  lou  rei  Herode  tal  se  quilhava  Peire  : 


Tout  périt,  tout  croule,  et  Brive  est  une  ruine!  —  Gondoval  est 
content;  il  a  fait  une  bonne  journée.  —  «  Assez!  dit-il;  il  faut  se 
reposer.  La  lutte  est  linie.  »  —  Et,  comme  la  nuit  vient  et  qu'il  fait 
belle  lune,  —  il  veut  que,  par  tout  le  camp,  toute  la  soirée,  —  la 
dînée  commence,  une  dînée  telle —  que  jamais  la  pareille  ne  se  soit 
vue  nulle  part.  —  Et  l'on  mant^^e  et  l'on  boit! 

Et  l'on  boit  et  l'on  mange. . .  .  c'est  à  qui  boira  davantage  !..  Or 
—  Gondoval,  gorgé  du  vin  qui  lui  noie  le  cœur,  —  commande  de 
lui  emplir  jusqu'au  bord  le  Saint-Graal,  hanap  d'or,  —  que  Joseph 
d'Arimathie  te  prêta,  afin,  —  ô  Christ!  d'y  célébrer  ta  dernière 
Pâque  ; —  puis  Valentinien,  pieux  empereur,  —  l'envoya  au 
martyre  pour  garnir  son  trésor.  —  C'est  ce  vase  que,  dan#  les 
Romans,  les  Douze  de  Bretagne  —  chercheront  par  tout  pays! 

Chercheront  par  tout  pays,  et  qui  sert  de  coupe  aujourd'hui  — 
au  bâtard  Gondoval,  fortuné  vainqueur.  —  Mais  Libéral  se  lève! 
I!  aurait  fallu  le   voir!  —  Devant   lo    roi  Hérode,  tel  se    dressait 


:>74  DIALECTES    MODERNES 

(i  Bourlaire  de  crestias!  Sacrelet^e  beveire! 
»  Gondoval!  Gondoval!  cre-me,  que  soui  de  creire  : 
»  N'estrenar.is  jamais  lou  trône  do  toun  reire: 
»  Toumbaras  avans  pauc  !  » 

—  (i  Toumbarai  avans  pauc  ?. . .  Repapias,  Libéral? 
»  Pas  pus  tard  que  demâ,  segoun  Tuz  patrial, 
»  Moun  armada  présenta,  a  la  facia  del  cial, 
»  Vole,  vole  recebre  lou  bateme  reial! . . . 
»  Bai'ous,  e  vous,  soudartz,  e  tu  pople  leial, 
»  Siajatz  prestes  trastoutz  à  moun  premier  senhal  ! 
»  E  tu,  Pestre  orirulhous,  que  me  parlas  aital, 
»  Mouriras  d'ira  e  d'ounta  !  » 

Mourira  d'ira  e  d'ounta,  el  puleu,  el  qu'espéra 
Una  renja  de  journs  de  mais  en  mais  prouspera; 
El  que  rêvera  pauc  so  que  tan  se  rêvera; 
El  que  s'auza  eniurar  a  l'anap  d'or  !..  La  terra, 
D'un  soulelh  darrieirol  s'oundrava  apena  enquera: 
Gondoval,  lou  frount  naut  e  la  teguda  fiera, 
Arriba  acoumpanhat  de  sous  homes  de  guerra, 
Per  esser  saludat,  noun  pus  duc  tal  couma  era. 
Mas  rei,  rei  del  Miejourn  ! 


Pierre:  «  Brûleur  de  chrétiens!  sacrilège  buveur!  —  Gondoval! 
»  Gondoval  !  crois-moi,  je  mérite  d'être  cru  ;  —  tu  ne  t'assiéras 
»  jamais  sur  le  trône  de  ton  ancêtre.  —  Tu  tomberas  avant  peu! 

—  «  Je  tomberai  avant  peu?. . . .  Tu  radotes,  Libéral  !  —  Pas  plus 
»  tard  que  demain,  suivant  Pus  de  nos  pères,  —  mon  armée  pré- 
>«  sente,  à  la  face  du  ciel, —  je  veux,  je  veux  recevoir  le  royal 
>•  baptême!  —  Barons,  et  vous,  soldats,  et  vous,  peuple  loyal,  — 
»  soyez  tous  prêts,  à  mon  premier  signal!  — Et  toi, prêtre  orgueil- 
>■  leux,  qui   me  parles  ainsi,  —  tu  mourras  de  dépit  et  de  hontel  » 

Il  mourra  de  honte  et  de  dépit,  lui  plutôt,  lui  qui  espère  —  une 
suite  (le  jours  de  plus  en  plus  prospère,  —  lui  qui  respecte  peu  ce 
([ui  ta«it  se  resjiecte,  — lui  qui  ose  s'enivrer  dans  le  hanap  d'or!.. . 
La  terre  —  d'un  soleil  d'automne  se  parait  encore  à  peine;  — 
Gondoval,  le  front  haut  et  la  démarche  flère,  — arrive  accompagné 
(le  sps  hommes  île  guerre,  —  pour  s'entendre  saluer,  non  plus  duc 
comme  il  l'était.  —  mais  roi,  roi  du  Midi  ! 


UONUOVAL  2Tf. 

Oc,   rei,  rei  del  Miejourn,  en  despieg  de  Gontran  ! 
E  Boson,  e  Deidier,  e  Mummol,  e  Bertram, 
Sus  ung  pabelhou  Tausson,  d'aprep  l'uzatge  franch, 
Pueis  fan  lou  tourn  dels  murs...L'ost  argiula,. .  Subran, 
Lou  triounfaire  brouncha  e  palis. .  :  «  Dieus  es  gran  !  » 
Boumbouina  Libéral,  que  seguia  "n  souspiran  : 
»  Dieus  es  gran  emais  juste  !  » 

Dieus  es  gran  emais  juste,  e  venja  Tinnoucensa  ; 
Dieus  trebla  qu  vol  perdre,  e  lou  bisest  coumensa... 
As  mancat,  Ballomer:  gara  la  penidensa!.. 
Gontran  (Toura,  qu  espiava,  es  a  sa  counvenensa) 
Redola  d'en-amount  ambe  una  armada  inmensa, 
Acota  Gondoval  e  devans  se  lou  gensa  ! 
Deimentre,  la  traizou  s'acoumplis  ou  se  pensa. . . 
Oh  !  Cumenge  !  Cumenge  !..  Aqui,  soûl,  sens  defensa. 
Liurat  per  sous  barons,  countr'el  d'entelegensa. 
Périt  de  mala  mort  ! 

Josep  Rots. 
XVI  iJe  Bélier  mdcgclxxvi. 

{Limousin .  ; 


Oui,  roi.  roi  du  Midi,  eu  dépit  de  Gontran!  —  Et  Boson,  et 
Didier,  et  Bertram,  et  Mummol,  —  le  haussent  sur  un  pavois, 

selon  la  coutume  franque,  —  puis  font  le  tour  des  remparts 

L'armée  hurle  de  joie.  Soudain  —  le    triomphateur  bronche  et 

pâlit. a  Dieu  est  grand  »,  —  murmure  Libéral,  qui  suivait  en 

soupirant,  —  «  Dieu  est  grand  et  juste  !  t 

Dieu  est  grand  et  juste,  et  il  venge  lïnnocence!  — Dieu  trouble 
qui  il  veut  perdre,  et  le  désastre  commence. . .  —  Tu  as  fait  le  mal, 
Ballomer.  gare  le  châtiment!  —  Gontran  (l'heure,  qu'il  épiait,  lui 
semblant  propice  ),  —  descend  de  par  là-haut  avec  une  nombreuse 
armée,  —  atteint  Gondoval  et  le  balaye  devant  lui  !  —  En  atten- 
dant, la  trahison  s'accomplit  ou  se  médite. . .  —  Oh!  Comminges! 
Comminges  !...  Là,  seul,  sans  défense,  —  livré  par  ses  barons,  qui 
.sont  d'inteUigence  contre  lui,  —  il  périt  de  maie  mort  ! 

Joseph  Rûcx. 


BIBLIOGRAPHIE 


Sorbonne  —Réunion  des  instituteurs.  — L'enseignement  du  fran- 
çais dans  les  Ecoles  primaires,  par  M.  Michel  Bréal  (de  rinsiilul). 
'  Revue  puliUque  et  liltéraire,  n"  du  5  octobre  1878.  ) 

M.  Michel  Bréal  a,  pendant  l'Exposition,  fait  aux  instituteurs 
réunis  à  Paris  une  conférence  sur  l'enseignement  du  français 
dans  les  écoles  primaires.  Ceux  qui  l'avaient  entendu,  en  1875,  à 
Montpellier,  savaient  bien  qu'il  était  tout  dévoué  aux  études  que 
représente  la  Bévue,  mais  ils  n'espéraient  pas  qu'il  leur  accorde- 
rait, trois  ans  après,  en  pleine  Sorbonne,  un  témoignage  aussi 
solennel  de  sa  haute  sympathie.  A  côté  d'une  autorité  de  cet  ordre, 
que  valent  les  railleries  à  répétition,  —  s'il  est  permis  de  parler 
ainsi,  —  dont  les  réunions  parisiennes  de  la  Cigale  ont  dernière- 
ment fourni  la  matière  à  quelques  écrivains  de  la  grande  ou  de  la 
petite  presse  *  ?  Heureusement,  à  Paris,  même  parmi  les  journa- 
listes, tout  le  monde  ne  juge  pas  comme  M.  Jules  Claretie. 

Si  l'espace  le  permettait,  il  y  aurait  lieu  de  reproduire  toute  la 
conférence.  M.  Bréal  a  été  clair,  précis,  intéressant^  plein  d'esprit 
même,  dans  une  leçon  d'une  heure  sur  la  grammaire,  en  touchant 
aux  points  les  plus  dogmatiques.  Il  veut  qu'on  associe  l'enfant  ù 
l'enseignement  du  maître;  qu'au  lieu  d'insister,  avec  une  logique 
aussi  savante  que  fastidieuse,  sur  la  définition  du  substantif,  on 
lui  en  demande  des  exemples  dès  qu'il  en  aura  une  brève  et  suf- 
fisante notion.  La  réponse  ne  se  fera  pas  attendre.  Bientôt  toute  la 
classe  s'y  mettra  ;  «  vous  aurez  de  la  peine  à  arrêter  le  torrent.  » 

La  libre  orthographe,  surtout  celle  des  mots  composés  et  des 
noms  de  nombre,  trouve  en  lui  un  apôtre  fervent  et  convaincu.  Déjà 
l'Académie,  dans  son  récent  dictionnaire,  est  entrée  dans  cette 
voie  ;  de  façon  qu'en  philologie  on  ne  pourra  bientôt  plus  distin- 
guer un  savant  de  celui  qui  ne  l'est  pas,  qu'au  mal  que  le  premier 
se  donne  pour  ne  pas  en  avoir  l'air.  On  a  dit  la  même  chose  des 
femmes  honnêtes  -. 


'  Voir  V Événement  du  13  octobre  1878. 

-' Sardou.  id  Famille  BenoUon .  act.  II.  se.   V. 


BIBLIOGRAPHIE  27  7 

En?eign(M'  aux  enfants  non  moins  les  choses  i[uo  les  mois  ;  choisir 
les  sujets  de  composition  parmi  les  objets  de  la  vie  réelle;  ne  pas 
abuser  de  l'analyse  loj^ique;  à  mesure  que  l'enlant  se  développe , 
lui  montrer  hi  dérivation  et  l'histoire  des  mots,  les  excoi)tionR, 
les  métamorphoses  :  considérer  avant  tout  le  français  comme  une 
langue  vivante,  non  comme  une  langue  morte;  apprendre  la  gram- 
maire par  la  langue  et  non  la  langue  par  la  grammaire  :  tels  sont 
la  plupart  des  points  développés  par  M.  Bréal. 

Il  tient  le  plus  grand  compte  des  proverbes  et  en  cite  ([uelques- 
uns,  extraits  du  véritable  Sancho  Pmuu,  livre  d'or,  dont  il  avoue  faire 
sa  lecture  fréquente  el  où  ces  sentences  sont  classées  en  séries 
méthodiques.  «  Un  des  avantages  de  ces  proverbes,  dit-il,  est  défaire 
»  passer  devant  les  écoliers  des  fragments  de  la  vieille  langue  et  de 
»  pouvoir  encore  servir  ainsi  de  leçon  au  français.  »  Du  vieux  fran- 
çais aux  patois,  dont  il  se  déclare  l'ami,  la  transition  est  si  natu- 
relle, qu'on  nous  pardonnera  de  ne  l'avoir  pas  négligée. 

Ici  il  faudrait  tout  citer.  «  A  l'aide  du  patois,  nos  habitants  du 
»  Béarn  communiquent  avec  l'Espagne  ;  ceux  de  Montpellier  s'en- 
»  tendent  avec  les  Catalans,  ceux  de  la  Provence  avec  les  Italiens. 
»  ...  Dans  nos  dialectes  méridionaux,  que  de  mots  intéressants! 
»  Le  8017',  en  provençal,  c'est  vespre,  la  vesprenada ;  du  mot  latin, 
n  vesjier.  Et  ces  suffixes,  que  nous  envions  quelquefois  à  l'italien, 
»  ils  existent  dans  le  Midi  :  une  petite  heure  se  dit  una  oureta; 
»  une  vie  de  malheur,  ima  vidassa  de  misèri.  Ce  sont  les  suflixes 
»  etto,  accio,  de  l'italien.  » 

Les  instituteurs  doivent  recueillir  les  airs  populaires  et  les  faire 
chanter  par  les  élèves,  en  y  adaptant,  quand  il  le  faut,  des  pa- 
roles nouvelles.  La  jolie  romance  de  Chateaubriand  : 

Combien  j'ai  douce  souvenance 

a  été  mise  en  musique  sur  un  air  languedocien. 

«C'est  toujours  une  chose  dangereuse  d'apprendre  à  l'enfant 
»  à  mépriser  ce  qu'il  doit  à  la  maison  paternelle.  (Applaudisse- 
»  ments.) 

»  C'est  une  chose  dangereuse  aussi,  dans  la  vie  intellectuelle  des 
>»  nations  comme  dans  celle  des  individus,  de  provoquer  des  solii- 
»  lions  de  continuité  ;  quand  elles  se  produi.'-ent,  c'est  toujours  un 
»  malheur.  Si  à  des  enfants  qui  ont  parlé  patois  juscju'à  l'âge  de 
»  douze  ans,  vous  défendez  subitement  ce  langage,  si  vous  traitez 
»  le  patois  comme  un  paria,  l'esprit  de  l'enfant  deviendra  incer- 
«  tain,  et  il  n'est  pas  sûr  qu'il  puisse  remplacer  ce  que  vous  l'obli- 

»  gez  à  abandonner » 

19 


278  BlULIOCiRAPHIE 

»  Je  ne  demamle  pas  que  vous  enseigniez  le  patois  à  l'école.  >- 
Pourquoi  pas,  comme  élude  de  grammaire  comparée  et  pour  ap- 
prendre à  mieux  écrire  même  en  français?  M.  Michel  Bréal  ne 
dit-il  pas  lui-même:  «  Ces  patois  sont  une  source  de  rénovation 
»  pour  la  langue  ;  beaucoup  des  écrivains  qui  ont  parlé  le  français 
»  avec  le  plus  de  saveur  avaient  parlé  patois  dans  leur  jeu- 
»  nesse  ;  pensez  aux  charmants  romans  berrichons  de  M™e  Sand  »? 
Les  dialectes  de  langue  d'oc,  qui  sont  de  véritables  langues  gram- 
maticales et  régulières,  peuvent  mieux  encore  que  les  dialectes 
d'oil  infuser  au  français  littéraire  cette  jeunesse  nouvelle.  «  Vous 
»  continuez  l'œuvre  de  nos  grands  monarques,  de  nos  grands  mi- 
»  nistres,  de  Richelieu;  vous  continuez  l'œuvre  de  la  Convention; 
»  vous  êtes  les  représentants  de  l'unité  française  en  ce  qu'elle  a 
»  de  meilleur  ;  mais  cette  œuvre  d'assimilation  est  aujourd'hui  as- 
»  sez  avancée  pour  qu'on  puisse  faire  grâce  à  ce  qui  reste  de  diver- 
»  sites  provinciales.  Laissez  donc  les  patois  vivre  à  côté  de  l'école, 
»  L'administration,  le  journalisme,  le  service  miUtaire,  les  feront 

»  assez  vite  disparaître Trop  de  variété  produit  la  di- 

»  vision   et  la  faiblesse,  mais  trop  d'unité  appauvrit  la  vie  et  em- 

»  pèche  le  renouvellement Là  où  la  chose  est 

»  possible,  je  voudrais  voir  l'école  s'appuyer  sur  les  originalités 

•>  natives Gela  introduirait  quelques  différences  entre 

»  les  écoles  des  diverses  régions  ;  mais  je  ne  crois  pas  que  nous 
»  devions  avoir  des  écoles  uniformes  comme  les  gajes  de  chemin 
»  de  fer,  qui,  tout  le  long  de  nos  voies  ferrées,  présentent  toujours 
»  le  même  aspect,  et  dont  le  modèle,  toujours  le  même,  a  été  ex- 
»  pédié  de  Paris  ».  (Applaudissements.) 
Et  ailleurs  ; 

«  —  Question  très- difficile,  parce  qu'on  y  a  mêlé  des  éléments 
»  étrangers  à  l'éducation.  L'esprit  de  parti  s'en  est  emparé  ;  la  po- 
»  litique,  la  mauvaise  politique,  peut  tout  gâter;  elle  peut  embrouil- 

»  1er  les  choses  les  plus  claires Quelques  personnes  parais- 

»  sent  craindre  que  l'existence  des  patois  ne  soit  un  péril  pour 
»  l'unité  française  ;  je  croirai  cela  quand  on  m'aura  fait  voir  que, 
»  dans  nos  récents  malheurs,  les  provinces  qui  ne  parlaient  pas 
»  français  se  sont  montrées  devant  l'ennemi  moins  françaises  que 
»  les  autres ....»(  Applaudissements  ) . 

Voilà  de  nobles  paroles,  que  les  romanisants  de  Montpellier  au- 
raient, eux  aussi,  applaudies,  et  jusqu'à  se  briser  les  mains.  Ne 
croirait-on   pas  entendre  Mistral,  disant  à  Montpellier  en  1875: 

" Li  meiour  soudard,  cresès-lou,  sounpas  aquéli  que  canton 

»  e  que  hramon  après  avé  begu  :  es  aquéli  que  plounm  en  quitant  sov/n 


BIHLIOURAPHIE  279 

»  outftau  *  »;— ou  Hoiimicux,  s';ulic^-sanl  à  la  (leniiùrc  ivunion  do  la 
Cigale  : 

Vivo,  vivo  la  Franco  !o  louslèras  fugue  flori! 
Cantan  en  prouvençau  :  mai,  lier  d'èsli-o  Francés. 
Sabèn  (le  la  patrio.  amado  coumo  res. 
Amira  11  gramlour  o  sahida  li  glôri  ! 

E,  quantli  'orre  fslrangit'  menaoo  lou  pais, 

Nôsti  tiéu  sabon  proun  la  lengo  naciounalo 

Pèr  dire:  «  Auvergne,  à  moi!  ce  sont  les  ennemis!  » 

E  touoiba  redn  mort,  estrifa  pèr  li  halo-. 

En  1873.  dans  une  brochure  intitulée:  Quelques  Moix  sur  l'in- 
i^truction  imhlique  en  France  -\  M.  Brédl  avait  déjà  dit  : 

«  Introduisez  le  irançais  tout  en  respectant  le  dialecte  natal.  Si 
»  l'Alsace  nous  est  et  reste  attachée  de  cœur,  c'est,  entre  autres 
»  causes,  parce  que  nous  n'avons  jamais  essayé' de  lui  enlever  son 
»  langage.. . .  On  a  remarqué  ([ue  les  seules  bonnes  poésies  que 
.  la  France  ait  produites  pendant  la  guerre  de  1870-1871  sont  en 
•>  provençal,  en  brelon  ou  en  allemand.  » 

A.  Espagne. 

Las  Baladas  fêtas  per  Francesch  Pelay  Briz.  —  Barcelona,  Joan 
Roc\  Y  Beo.s.    187^.  126  pag.  in-8'\ 

Gonegut  es  ja  en  la  literatura  catalana  lo  nom  de  U.  Francesch 
Pelay  Briz,  per  haver  figurât  en  toias  sas  mes  notables  nianifos- 
tacions,  d'uns  quants  anys  ençà,  y  per  havor  sigut  proclamât  en 
bon  nombre  decertâmens,  ahont  foren  premiadas  las  composicions 
de  tant  célébrât  y  popular  autor. 

Avuyaumenta,  ab  sa  incansablo  activitat.  lo  caudal  do  las  obras 
que  acreditan  la  vida  de  nostra  literatura  ab  lo  volum  de  Baladas 
dalt  indicat.  Vinty  una  ne  conté,  y  en  totas  es  de  notar  aquell  cert 
ayre  catalanesch  que  sap  imprimir  en  totas  sas  composicions  lo 
llorejat  autor,  tant  en  la  tria  del  llenguatje  de  bona  lley,  com  en  los 
giros  y  tirât  de  la  frase,  inspirats  generalment  en  la  literatura  po- 
pular de  que  ell  mateix  ha  sigut  lo  principal  propagador  ab  la  publi- 
caciô  de  sos  volums  de  Causons  do  la  ferra,  aplech  de  cants  ]»opu- 
lars  acompanyats  de  llurcorresponent  tonada. 

D'entre  las  baladas  de  que  'ns  ocupém,  n'  hi  ha  de  molt  diferent 
mérit,  tant  per  l'assumpto  com  per  la  manera  de  desenrotllarlo. 
Aixis  es  que  si  algunas  d'ellas  ofereixen  lo  repetit  qùadro  de  la 
nina  seduhida  y  la  venjansa  que  n  pren  l'enganyat  aymador,  allros 

»  Le  Concours  philologique  et  littéraire  de  l'année  1875. 
-  Paris,  Hachette.  ISTi. 


2S(i  PERIODIQUES     . 

soriireneii  jier  la  novetal  del  fons^  com  l'Eupasa  île  la  mort  (frag- 
uient  del  poema  que  ab  lo  lilol  de  Orientada  esta  escrivint  l'au- 
tor),  lo  quai  reuneix  també  una  cntonaciô  magniûca,  Mara  vella 
y  la  Mal  casacla,  hermos-as  alegorias;  la  Dampnada,  qùadro  de  fan- 
tasia dantosca  fet  ab  gran  art,  y  hn  Très  Nucols,  de  molt  sentiment. 

Allres  n'  hi  ha  de  assumpto  iradicional  com  A  las  portas  del 
cel  y  Lampeja,  que's  distingeixen  por  sa  pei'fecia  execuciô,  en 
especial  la  segona  que  i-espira  tendresa,  y  esta  perfectissimament 
versilicada.  També  es  notabla  la  titolado  Mala  Esphia,  per  son  ayre 
de  romans  po])ular  molt  ben  trobat. 

Si  à  aqueixas  qualitats  intrinsecas  s'  afegeix  que  l'obra  esta  pu- 
blicada  ab  véritable  luxo  y  que  va  acompanyada  d'un  retralo  del 
autor  en  fotografia,  quedara  justilicada  l'importancia  que  al  prin- 
cipi  li  hem  senyalat. 

A.    AULÉSTIA    Y'PiJOAN. 

Lo  Pia  Ermouèk  loûrain,  1879,  patoué  et  français,  pé  Chan  Hsurlin. 
Treûhieume  ènâye.  Strasbourg,  Fischbacli,  1879;  in-l"2,  96  pag. 

M  .  le  docteur  Frédéric  Estre  nous  envoie  VErmonch  loûrain, 
parvenu  aujourd'hui  à  sa  troisième  année,  et  qui  constitue  pour 
le?  dialectes  de  la  Lorraine  une  imitation  souvent  heureuse  de  VAr- 
mana  prouvencau.  Certaines  pièces,  notamment  la  première,  quelque 
intérêt  qu'elle  présente,  sont  peut-être  un  peu  trop  longues  pour 
un  almanach.  M.  Estre  aime  à  reproduire,  dans  ce  petit  livi-e,  les 
contes  et  les  superstitions  populaires  qu'il  recueille  autour  de  lui. 
C'est  là  une  excellente  entreprise,  qui  peut  fournir  d'utiles  rensei- 
gnements pour  une  étude  d'histoire,  de  philologie  et  même  d'eth- 
nographie comparées. 

A.  E. 


PÉRIODIQUES 


Bulletin  de  la  Société  des  anciens  textes,  1877,  n°  3.  — 
l\  85,  Notice  du  ms.  179  bis  de  la  Bibl.  ci/s  Genève.  Ce  ms.  est  du 
XVe  siècle.  M.  Ritter  a  enrichi  cette  notice  d'e.xtraits  nombreux  et 
étendus,  et  l'a  complétée  par  la  publication  intégrale  des  pièces  sui- 
vantes :  1"  Q/  s'ansuit  dou  meiiestrier  qui  acoit  nom  Orphe.us  qui  fut 
qtierre  s'amie  enanfert ;  2°  les  Dix  Souhaiz;  3°  les  Menuz  Souhaiz.  Une 
courte  chanson  tirée  d'un  chansonnier  du  XVI«  siècle,  de  la  bibl. 


l'KRIODIQUES  2-1 

d'Utrecht,  ot  transcrite  par  M. Gaston  Raynaud,  termine  re  numéro. 

A.  H. 

Archiv  fur  das    Studium  der    Neueren    Sprachen,  LIX. 

band.  —  P.  33.  Adolf  Kressner.  Salnf  Aicolas  in  der  tnulition  tmd 
in  der  ndttelalterlichen  Dichlung. —  P.  273.  Voelkel,  die  Kunst  dvtt 
Vortrags.  Analyse  de  l'ouvrage  de  M.  E.  Lesouvé,  V Art  de  la  lec- 
ture. —  P.  289.  Docteur  Scheffler.  Molière  -  Studien.  11  n'est  ques- 
tion dans  ce  premier  article  que  des  rapports  de  Molière  avec  sa  fa- 
mille. —  301.  Ad.  Kressner,  *M  iîaoMZ  de  Houdenc's  Meraugis  de 
Porflesguez .Ysirïa.ntes  tirées  d'un  ms.  de  Berlin  qui  contient  deux 
fragments  de  ce  poëme,  publié  en  1869  par  M.  Michelant.  —  377. 
Docteur  O.  Kares,  die  Unterweisung  inder  franziisischen  und  englix- 
chen  Atissin-ache .  —  403.  H.  Lvicking,  (7Je -Keiwere  Vocale  des  Fran- 
zôsischen  nach  Malvin-Cazal.  Travail  très-  soigné. 

G    G. 

Bulletin  de  la  Société  départementale  d'archéologie  et 
de  statistique  de  la  Drôme,  toia.  XII.  —  P.  62-72.  A.  Lacroix. 
Peintres  et  Poètes.  Ce  travail  j'enferme  une  notice  sur  le  félibre- 
peintrePierre-Antoine-BarthélemyGhalvet,  mort  à  Nyons  le23juin 
1877,  et  quelques' extraits  de  ses  poésies. — P.73-96.  Brun-Durand. 
Ayso so  es  lefieus  de  nions,  levesque  et  conte  al  chastel  de  Crest.  Docu~ 
ment  du  X TU»  siècle,  ij^ette  pièce,  en  langage  dauphinois,  est  une 
sorte  de  parcellaire  ou  d'état  dans  lequel  sont  indiqués  les  limites 
du  fief  d'un  évêque-comte  de  Valence  et  de  Die  dans  le  territoire 
de  Crest.  Elle  est  tirée  des  archives  de  la  Drôme  (fonds  de  l'évèché 
de  Die)  et  peut,  selon  M.  B.-D.,  être  placée  entre  les  années  1277- 
1281.  Publication  faite  avec  soin,  et  qui  atteste  une  grande  connais- 
sance de  la  topographie  locale. 

A.  R.-F. 

Le  Messager  agricole,  paraissant  à  Montpellier,  n°  du  10  sep- 
tembre 1877. —  P.  319-327.  Camille  Stiegler,  le  Juge  des  Vendanges, 
intéressante  étude  sur  une  des  anciennes  juridictions  populaires 
de  Montpellier.  M.  St.  cite,  p.  327,  quelques  vers  languedociens  de 
Sage,  où  se  trouve  une  allusion  aux  Juges  de  Vendémiaires. 

A.  R.-F. 

Lo  Gay  Saber,  N.  VII  (f  d'abril.) —  P.  97  Anénim  -.Es  horaja 
de  fer  una  Academia  catalana?  Expressiô  d'un  bon  desitj  que,  Dèu 
vulla,  sia  prompte  un  fet.  —  P.  99.  Frederich  Soler,  mestre  en  gay 
saber  :  Cansô  del  siti.  Poesia. —  P.  99.  Antoni  Gareta  y  Vidal  :  los 
C'arboners,  poema  provensal  en  XII  cants,  per  Félix  Gras.  Gant  cin- 
qué    —  P.  103.  P.-A.   Penya  :  Un  sermd  de  Cuaresma.  Poesia.  — 


2^2  TERIODIQUKS 

1*.  10 'i.  Maria  de  Bell-lloch  :  Vigatans  y  botiflers.  Continuaciô  d'esta 
novela.  —  V .  1U6.  B  :  Una  cansô  de  la  terra:  la  Pcrsegvida,  Test  y 
inusica  de  la  cansij  catalana,  quai  versiô  provensal,  lo  gcnide  Mis- 
tral sapii^ué  trast'ormar  en  la  preciosa  Magali.  P.  106.  B.:  Bihlio- 
<irafia  forana.  S'ocupa  de  las  segiients  obretas  :  Victor  Balaguer, 
«  de  la  Poesia  provenzal  en  Casfilla  y  en  Léon,  »  etc.;  Alphonse  Roque- 
Ferrier,  «  Un  recueil  de  poésies  rumonsches  »,etc.,  y  a  de  l'Idée  latine 
dans  quelques  poésies  en  langue  d'oc .  en  espagnol  et  en  catalan;  A. 
Larsen,  «  la  Vie  et  les  Œuvres  de  P.  CJir.  Ahsjernsen  »;  Giovanni  Sici- 
liano,  "  l'Jndovinello  (  el  Buscapié)  de  Michèle  Cervantes  »  —  P.  108. 
l'.-P.  Briz,  mestre  en  gay  saber:  la  Pinya  d'or,  comedia,  etc. 
Continuaciô.  —  P.  110  A.  de  \.:lo  Mal  donat  (Llegenda  Jiandesa 
'le  ff.  Bertouf.).  —  P.  111  :  Novas.  Consistori  dels  Jochsfiorcds  de  Bar- 
celona.  —  Centra  Gracieuse.  (Certamens  ) 

A.  Balaguer  y  Merino. 

La  Renaixeusa.  N.  7.  (15  abril).  —  P.  273.  Anonim  :  la  Aca  ■ 
dfinia  catalana.  intéressant  article  de  ben  tallada  ploma  que  respon 
à  altre  del  Gay  Saber  sobre  aquest  tema.  —  P.  277.  Isidro  Reven- 
tos  :  Catalanisme.  Valenta  defensa  de  nostre  justîssim  amor  à  la 
provincia  que'ns  ha  vist  naixer,  contra  las  afirmacions  dels  centra- 
lisadors.  —  P.  231.  J.  Marti  y  Folguera:  Notas  sobre  Vorïgeny  for- 
inaeio  de  las  muiiicipalitats.  Consideraclons  atinadas  sobre  sa  histo- 
ria.  —  P.  285.  Antoni  Vilanova  :  Exposiciô  de  pinturas  à  MaâHt. 
IV.  Parla  de  la  Secciô  de  retratos  y  paissatge.  —  P.  289.  Francesch 
Ricmar:  la  Norela  en  lo  renaio:ement.  Continuaciô  d'articles  anteriors 
sobre  lo  mateix  tema  de  historia  literaria. — P.  294.  Frederich  Solcr. 
nnestre  en  gay  soler:  la  Mnrt  dels  cristians. — P.  299.  J.  Franquesay 
Gomis  :  Caminada  — P.  301.  Joan  Pons  y  Massaveu  :  Misteri  dedolor 
(3  poesias).  —  P.  802.  Francisco  de  P.  Marferrer.  Bibliografia  :  Gri- 
tica  de  la  obra  Ricardo  Wagner,  cnsayo  biogrùjicn-crilico  p)or  D .  Joa- 
r/uin  Marsillachj  con  vn  prblogo  cpistolar  del  D"  D.  José  de  Leiamendi. 
— P.  304.  Certamens  literari  y  musical promog%its  'per  la  Socieiat  de  llen- 
guas  romànicas ;  adiciô  à  son  programa.  —  P.  306.  Consistori  dels 
Jochs  florals  de  Barcelona.  Llista  de  composicions.  iVoras.  Devem 
notar  la  que's  refereix  à  la  publicariô  en  esta  Revista  de  la  important 
monograGaPorCes  lyriques  catalans,  pcr  D.  Manuel  Milây  Fontanals. 
— •  Acompanya  à  aquest  mincro  una  copia  holiogràfica  de  la  Verge 
Mare,  escultura  de  J.  Sams*').  y  un  quadern  del  Libi-e  de  coses  asse- 
iii/alades . 

A.   Balaguer  v  Merino. 


LE  PARAGE  A  MAGUELONE 

(Suite) 


Telle  fut,  dans  ses  traits  essentiels,  la  séance  du  18  novembre 
à  Maguelone.  Le  charme  et  l'oriiïinalité   d'une  réunion  tenue  en 
plein  air  et  en  plein  soleil,  le  matin  d'une  sereine  journéed'automne, 
durent  être  bien  grands,  si  l'on  en  juge  par  les  relations  publiées 
dans  les  journaux  qui  entretiennent  leurs  lecteurs  du  Félibrige*. 
Et  la  raison  en  est  simple  :  la  poésie  contemporaine  ne  dédaigne 
pas,  comme  sa  devancière  des  XVII'  et  XV1I1<--  siècles,  le  soleil 
et  les  champs,  elle  s'en  inspire  volontiers  ;  mais   elle  est  restée 
pourtant  par  bien  des  côtés  une  œuvre  d'académie,  de  huis-clos 
et  de  salon.  Sa  sœur  de  Provence,  plus  jeune  et  plus  vivante,  pui- 
sant plus  largement  qu'elle  aux  sentiments  légitimes  et  natifs  de 
l'homme,  s'est  maintenue  plus  complètement  en  harmonie  avec 
le  monde  extérieur.  Nous  ignorons  comment  Mireille  a  été  com- 
posée; mais,  en  la  lisant,  on  ne  peut  s'empêcher  de  supposer  que 
ses  strophe^  furent  écrites  aux  abris  ensoleillés  des  rangées   de 
cyprès  qui  entourent  Maillane.  De  même  pourrait-on  dire  de  cer- 
•  taines  parties  de   Caleiidal,  malgré  la  différence  foncière  du  sujet  ; 
de  même   de  la  Farandoulo  de  Mathieu,  des  Sounjarello  de  Rou- 
manille.On  s'explique,  dès  lors,  lïmpression  que  la  félibrée  du 
18  novembre  a  exercée  sur  des  esprits  que  leurs  habitudes  poéti- 
ques prédisposaient  si  bien  à  l'éprouver.  La  poésie  de  la  lumière 
et  du  ciel,  des  ruines,  des  étangs  et  de  la  mer,  éclairait  et  com- 
plétait celle  de   la  pensée,  de  l'expression  et  du  rhythme.  L'une 
constituait  le  cadre  naturel  de  l'autre,  et  leur  accord  eut  ce  jour-là 
quelque  chose  de  si  spontané,  qu"il  parut  aux  yeux  des  plus  difficiles 
justifier  la  dénomination  dé  «  reine  et  de  première  des  félibrées  », 
donnée  depuis  à  la  séance  de  Maguelone. 

En  attendant  l'heure  du  repas,  on  se  dispersa  çà  et  là,  afin  d'exa- 
miner les  jardins  de  M.  Fabrége,  le  petit  oratoire  gothique,  situé  en 
avant  de  l'église;  la  porte  à  linteau  de  marbre,  où  se  lit  l'inscription 
latine  du  chanoine  Bernard  de  Tréviers,  et  enfin  l'extérieur  de 
l'église  elle-même.  Les  visiteurs  ne  furent  pas  sans  admirer  aussi 

'  Voyez  le  Journal  de  Forcalquier  du  25  novembre  1877,  lou  Prouven- 
çau  d'Aix  du  même  jour,  le  Messager  du  Midi  du  24,  etc. 


2?i  LE    i'ARAGE    A    MAGUELOKE 

des  plantations  t\o  viirnns  faites  au  milieu  des  sables  de  la  plage  et 
bravant  imi)unémenl.  du  moins  jusqu'ici,  les  ravages  du  tléau  qui 
anéantit  autour  de  nous  toute  production  viticole.  «  Heureux  pro- 
priétaire, qui  possède  Maguelone  et  triomphe  du  phylloxéra*!» 

Le  banquet  eut  lieu  dans  une  salle  ordinairement  destinée  aux 
vendangeurs  du  domaine,  et  décorée  avec  le  meilleur  goût  par  les 
soins  de  M.  Charles  Gros.  MM.  Bonaparte- Wyse  et  Houmanille 
avaient  été  placés,  le  premier  à  la  droite,  le  deuxième  à  la  gauche 
de  l'évêque  de  Montpellier  ;  M.  Fabrége  était  à  la  gauche  du  ca- 
piscol  du  Pavage.  M.  de  Berluc-Perussis  à  sa  droite.  On  s'entre- 
tint tour  à  tour  du  rôle  de  la  cité  magalonaise  au  moyen  âge,  de 
félibrige  et  de  poésie  provençale,  des  Gaulois  de  l'Asie  mineure 
et  de  la  persistance  de  leur  langue  après  l'époque  oij  écrivait  saint 
Jérôme  2,  de  la  publication  des  gloses  romanes  d'un  rituel  maga- 
lonais  ',  proposée  par  Mgr  de  Cabrières  à  quekiues  membres  de 
la  Société,  et,  entre  autres  particularités  philologiques,  des  formes 
mouillées  de  l'article  et  dos  pronoms  dans  l'idiome  de  Forcalquier. 
où  M.  de  Berluc-Perussis  avait,  de  concert  avec  M.  l'a!)bé  Emile 
Savy,  remarqué  que  la  mutation  de  \'s  en  i  ne  s'exerçait  pas  de- 
vant le  c,  le  p,  le  t  et  le  q,  constatation  presque  semblable  à  celle 
qui  est  due  à  M.  Canlagrel  à  propos  du  sous-dialecte  narbonnais  *. 

Au  dessert,  M.  Cavallier  prit  la  parole  et  s'exprima  dans  ces 
termes  : 

«  Mounsegne,  cars  e  'specials  amies,  quand,  de  la  cima  la  pus  nauta 
de  nostra  manefica  passejada  dau  Peirou,  jitan  un  cop  d'iol  dau  couslat 
dau  marin,  vesen  au  fin  fouus  de  l'ourizoun,  entre  la  mar  que  s'espandis 
coume  un  large  riban  d'azur,  una  granda  cpustrucioun  separada  de  la 
terra  ferma  por  un  autre  riban  argentat:  acn's  la  catedrala  de  Magalouna. 


'  Relation  destinée  à  un  journal  de  Montpellier,  et  non  imprimée. 

^  Cette  persistance  du  gaulois  de  l'Asie  mineure  a  été  contestée,  mais 
seulement  d'une  manière  spécieuse,  par  M  .  Perrot,  dans  un  travail  im- 
primé par  la  Revue  celtique  { I.  179):  de  la  Disparition  de  la  langue  gau- 
loise en  Galatie. 

'  Les  gloses  des  rituels  du  midi  de  la  France  furent  généralement  ré- 
digées en  roman  jusqu'à  la  fin  du  XVI^  siècle. 

'  Deux  sentiments  soni  en  présence  touchant  les  formes  mouillées  des 
dialectes  méridionaux,  celui  de  M.  A.  Roque-Ferrier  (fieuue  des  langues 
romanes,  11°  .série,  I.  125),  qui  croit  qu'elles  s'exercent  ou  plutôt  qu'elles 
se  sont  exercées  devant  toutes  les  consonnes  initiales,  ainsi  que  cela  a 
lieu  (lans  le  provençal  d'Avignon  et  dans  celai  de  Marseille,  et  cîlui 
de  MM.  Cantagrel  'Notes  sur  l'orthographe  et  la  prononciation  lan(juc- 
'lociennes  {dialecte  narbonnais-carcass(mnais),\n  la  Canson  de  lalauselo. 


tr.    PARAGE    A    MAGIKiONF,  2>^ô 

»  De  l'antica  cieutat  resta  pas  mai  quo  la  violha  gloisa:  lou  picou  abou- 
sounaire  a  escampilhat  deçai  délai  las  peinas  das  mounumenls  qu'espe- 
ligueroim  à  l'assousta  de  soiin  oumbra. 

»  Lou  tems.  aquei  grand  sagataire,  n'a  embrisal  toutes  lous  vestiges  c 
lous  a  connfounduts  emé  la  sabla  dan  rivair>'l.  que  lou  llus  c  lou  rellus 
de  la  mar  mescla  e  remescla  à  chaca  minuta. 

»  Trouvàs-ti  pas  aqui,  coume  ieu  .  un  ensegnament  .  que  nous  deu 
servi  de  liçou  ■? 

j>  Ça  que  vesen  à  Magalouna.  ou  vesen  pertoul,  e,  se  voulen  que  lou 
Parage  visque  e  se  mantengue,  fau  l'establi  sus  una  terra  esprouvada, 
ie  dounà  per  contre-fort  las  grandas  estiluciouns  dau  passât,  las  estitu  - 
ciouns  que  soûlas  an  surviscut  à  toutas  las  rouïnas- 

B  Oubliden  pas  que  noste  vi  es  la  bèutat.  noste  pan  là  bountat.  nosle 
»  camî  la  verilat  ;  qu'avi^n  lou  sourel  per  regalida,  que  liran  nosla  sciencia 
1)  de  l'amour,  e  que  Dieu  <^?  noslra  piima  espéra,  » 

Le  capiscol  du  Parage  donnait  ensuite,  comme  un  exemple  poé- 
tique de  cette  nécessité,  quatre  colonnes  qu'il  avait  remarquée.-^ 
dans  le  jardin  de  M.  de  Mesteyme,  et  que  le  temjis  était  parvenu  ;"i 
recouvrir  d'une  verdoyante  végétation  de  lierre.  Croyez- vous,  ajou- 
tait-il, que  si  l'on  voulait  abattre  ces  colonnes,  le  lierre  qui  s'y  at- 
tache pourrait  à  lui  seul  maintenir  ses  festons  et  les  dresser  vers  le 
soleil?  M.  Cavallier  eut  ensuite  un  mot  aimable  pour  chacun  des 
membre'  présents.  Évoquant  le  souvenir  de  la  Maguelone  suppliante 
de  Gariei,  cette  touchante  prière  qui  ne  put  émouvoir  l'inflexibi- 
lité de  Richelieu  et  de  Louis  XIII*,  il  loua  M.  Fabrége  d'avoir 


par  Achille  xMir  (Montpellier,  1876.  in-TÎ),  de.Herluc-Perussis  et  Savy.  qui 
exceptant,  au  contraire,  les  consonnes  fortes.  Celle  diversité  d'avis  sem- 
blera plus  apparente  que  réelle,  si  l'on  veut  bien  remarquer  que  l'usage 
des  formes  mouillées  est  général  ou  partiel  en  raison  directe  de  l'in- 
fluence plus  ou  moins  grande  du  français.  Le  fait  de  l'exception  du  c. 
du  p,  du  q  et  du  i,  classe  le  forcalquiérois  ot  le  naibuiniais  dans  la  caté- 
gorie des  dialectes  à  demi  contaminés.  Celui  de  Montpellier,  plus  alfecté. 
ne  change  guère  \'s  en  i  que  devant  Y  s  ou  le  f  :  loui  segnous.  laicendras, 
mai  sabatas,  et  encore  dans  une  partie  restreinte  de  la  population  de 
cette  ville.  L3  maintien  de  1'^  devant  les  consonnes  fortes  a  été,  du  reste, 
remarqué  de  bonne  heure  :  on  le  trouve  signalé  au  XVII«  siècle  dans  la 
Dovctritio  crestiano  meso  en  rimos,  per  poude  csire  cantado  sur  dibérses 
ayres,  etc.  Toulouse,  Couloumiés,  164t.  in-16 

'  Rééditée,  il  y  a  quelques  années,  avec  une  étude  préUminaire.  par 
M.  Louis  Lacour  de  la  Pijardière,  archiviste  de  l'Hérault,  sous  le  pseu- 
donyme de  A.  Devars  (^Collection  des  Cent  Quinze  de  la  Société  des  bi- 
bliophiles languedociens   Montpellier.  Coulet.  libraire-éditeur). 


îfif^  LE    PARA(tB    a    MAGUELONE 

<■  liépensiî  sans  compter  une  hémine  '  de  pièces  d'or  à  faire  revivre 
ia  sévère  beauté  de  la  vieille  basilique.»  Un  peu  plus  loin,  il  rappe- 
l.iit  avec  esprit  que  M.  l'abljé  Roiiet  avait  écrit  l'histoire  de  l'école 
rabbinique  de  Lunel -,  «  ça  qu'es  mai  que  poulit  per  un  capelan.  » 
Ti'Évêque  de  Montpellier,  MM.  Bonaparte,  de  Berluc-Perussis,  La- 
forgue, de  Villeneuve,  Roumanille,  ArnavieIle,Verdo*^et  Roumieux, 
ne  furent  pas  oubliés. 
M.  Cavailier  termina  son  brinde  de  la  manière  suivante  : 

«  Gouma  souvenoncia  de  nostra  premicira  sosiha,  m'auriè  fach  grand  gau 
d'oufrir  en  cadun  de  vautres  una  floureta  acampada  sus  lou  terradou  de 
Magalouna;  malurousament  la  sasou  's  trop  avansada  e  las  flous  dau  jar- 
dinet que  venen  de  plantar  an  pas  encara  espeiit. 

"  Aco  vendra,  se  Dieus  ou  vôu.  En  espérant,  vous  perpause  de  fourmar 
un  bouquet  de  tout  çaques'es  dich  d'aimabloe  de  poulit  dins  aquesta  jour- 
nada,  d'oufrl  lou  premier  eiseraplari  à  Mounscgne  de  Cabriciras,  per  lou 
gramassià  dau  trelus  qu'a  dounat  ioi  au  Parage  eu  venguent  lou  coun- 
firmar,  e  de  distribuï  lous  autres,  en  memoria  d'aquesta  festa  tant  siava 
aici,  qu'aurian  pas  doute  das  trebouleris  que  te  passoun  enquicon  mai. 

Après  avoir  prononcé  ces  paroles,  qui  furent  vivement  applau- 
dies, M.  Cavailier  lut  le  loast  que  Mistral  lui  avait  adressé  de  Mail- 

'  Ancienne  mesure  de  capacité  autrefois  usitée  dans  le  déparlement 
Les  Tables  de  comparaison  entre  les  anciens  poids  et  mesures  du  dépar- 
tement de  l'Hérault  et  les  nouveaux  poids  et  mesures,  de  Fort  aîné 
(Montpellier,  an  XIII,  in-S"),  donnent  à  l'hémine  de  Poussan  une  valeur 
de  20,44  litres. 

-  Un  an  aprrs  la  séance  de  Maguelone,  M,  l'abbé  Roiiet  a  complété 
son  premier  ouvrage  par  une  Étude  supplémentaire  sur  l'École  juive  de 
Lunel  au  moyen  âge  (Paris,  Vieweg,  1878;  in-8'>,  38  pages).  Il  y  a  utilisé 
les  renseignements  réunis  par  M.  le  D'  Lucien  Leclerc,  dans  son  Histoire 
de  la  médecine  arabe  (1876),  les  découvertes  de  M.  Neubauer  dans  les 
bibliothèques  de  France,  d'Italie  el  d'Espagne,  et  enfin  les  indications 
classées  par  M.  Renan  dans  un  mémoire  qui  fait  partie  du  tome  XXVII  de 
l'Histoire  littéraire  de  la  France,  p.  431-734.  .M.  l'abbé  Roiiet,  qui  pré- 
pare un  Irava  il  de  biographie  et  de  traduction  sur  le  troubadour  Folquet, 
de  Lunel,  a  naturellement  remarqué  la  curieuse  mention  qu'un  poète 
juif,  connu  sous  le  nom  d'Abraham,  fils  d'Isaac,  de  Béziers,  fait  de  son 
contemporain  dans  le  poëme  de  VÉpée  flamboyante  : 

«  Oii  sont  les  merveilles  de  la  science  el  de  la  poésie  juives  ?  (iier,  on 
les  trouvait  en  provençal  et  en  latin.  Dans  la  poésie  de  Folquet  et  de  ses 
collègues,  tu  recueilleras  la  manne  ;  de  la  bouche  de  Cardinal,  du  troène 
et  du  nard.» 

Mais  peut-être  M.  Renan,  quia  le  premier  cité  ce  passage,  a-t-il  iden- 
tifié trop  légi-remunl  le  Folquet  d'Abraham  avec  le  troubadour  de  Lunel. 
La  mention  de  la  manne  peut  faire  songera  la  douceur  des  poésies  de  Fol- 
quet de  Toulouse 


LE    PARAGE    A    MAGTTKLONK  287 

lane.  C'était  un  souvonir  à  la  mémoire  de  Moquin-Tandon.en  môme 
temps  qu'un  jUfîement  sohro  et  finement  exprimé  sur  le  Canja  ma- 
galonensis,  «  aquelo  galejado  esperitalo,  mountc  reviéu  tant  ben 
la  Magalouno  souloumbrouso  del'agc  mejan  '.  »  M.  Gantagrel,  par- 
lant au  nom  des  sept  maîtres  du  Pamge,  porta  ensuite  la  santé 
de  l'évêque  de  Montpellier.  Son  toast,  excellemment  pensé  et  rendu, 


'  Moquin-Tandon  faisait  partie  du  groupe  do  personnes  qui  renouèrent 
à  Montiiellier,  avant  la  fondation  de  ia  Société  des  langues  romanes,  la  tra- 
dition historiqui^  et  même  philologique  do  la  langue  natale.  En  oulic  du 
Carya  magalonensis,  qui  eut  deux  éditions  et  qui  trompa  la  sagacité  de 
Raynouard  lui-même,  Moquin-Tandon  composa,  tantôt  sous  son  propre 
nom,  tantôt  sous  le  pseudonyme  de  Fredol  de  Magalouna,  d^s  poésies  lan_ 
guedociennes  qu'il  serait  intéressant  de  recreillir  et  de  rééditer,  avec  le 
Carya-  On  les  trouverait  presque  toutes  à  la  suite  des  Proverbes  patois  de 
M.  Jules  Duval  (tome  V  des  Mém.  de  la  Soc.  des  let.  de  l'Avei/ron),  dans 
le  Gay  Saber  d'Aix  en-Provence,  le  recueil  li  Prourençalo,  publié  par  Rou- 
manilleen  1852;  la  collection  des  premiers  Armanaprouvençau  et  \esNouvé 
de  Saboly  e  dilroubairemouderne  ( Avignon,  Aubanel,  S.  n.),etc.  Plus  que 
Moquin-Tandon,  M.  Germain  a,  par  les  textes  qu  il  a  reproduits  ou  publiés 
dans  ce  vaste  ensemble  de  monographies  exactes,  patientes  et  sûres,  qui 
fait  de  lui  la  meilleure  autorité  en  histoire  méridionale,  le  droit  d'être  con- 
sidéré comme  le  pfincipal  initiateur  des  lettres  romanes  à  Montpellier. 

Près  de  lui  il  faut  placer  M.  Desmazes,  qui  fut  en  1840,  et  de  concert 
avec  MM.  Alicot,  Paulin  Blanc,  Grasset,  Pégat.  de  Saint-Pauf,  etc., 
l'éditeur  de  la  Chronique  latine,  romane  et  française,  que  l'on  dé- 
signe sous  le  nom  de  Peiit  Thalamus;  Massot-Reynier,  l'édiîeur  des 
Coutumes  (catalanes)  de  Perpignan -,  Eugène  Thomas,  à  qui  l'on  doit 
la  publication  d'un  Comput  ecclésiastique  en  vers  du  XIIl"-  siècle, 
un  Vocabulaire  des  mois  romans-  languedociens  dérivant  directement 
du  grec  (Montpellier,  1843)  et  une  Notice  sur  les  langues  qui  ont  été 
parlées  dans  la  province  du  Languedoc;  Renouvier  et  Adol{)he  Ricard, 
dont  ia  monographie  des  Maîtres  de  pierre  et  autres  artistes  gothi- 
ques de  Montpellier,  contient  des  textes  fort  intéressants  pour  l'histoire' 
de  la  langue  des  XIV  et  XV»  siècles,  et  un  Glossaire  des  termes  d'art 
romans  't  latins;  J.  Gastelnau,  qui  a  mis  à  jour,  dans  les  Mémoires  de  Ut 
Société  archéologique ,nne  Charte  de  l'an  1209.  en  roman,  contenant  aban- 
don par  un  seigneur  de  Panât  de  ses  prétentions  sur  le  prieurr  et  le.s 
terres  de  l'église  de  Marcillac.  etc.  A  ce  groupe  se  rattachèrent  quelquefois 
le  poète  F.-R.  Martin,  qui,  en  1827,  imprima,  en  tète  de  ses  Loisirs  d'un 
Languedocien,  un  Sssai  historique  sur  le  langage  vulgaire  des  habitants 
de  Montpellier,  suivi  d'extraits  d'anciens  troubadours  et  d'un  vocabu- 
laire ;  Charles  de  Belleval,  l'auteur  du  Nomenclateur  botanique  langue- 
docien (Montpellier,  1840),  et  même,  à  quelques  égards,  Pierquin,  dit  de 
de  Gembloux,  avec  son  Histoire  des  patois  {IS'iO)  et  divers  opuscules  d'un 
mérite  assez  contestable.  Martin  compléta  son  essai  philologique  de  1827, 


JS'^  LE    PARAGE    A    MAailELONE 

était  écrit  dans  lo  langaijjo  de  cette  ville.  Celui  de  M.  Bonaparte- 
Wyse  devait  être  et  fut  un  des  plus  remarqués  de  la  fête.  Le  sou- 
venir de  Pierre  de  Provence  et  de  ses  amours  avec  la  belle  Mague- 
lonc,  les  traverses  que  les  deux  amants  eurent  à  subir  avant  d'être 
réunis,  enfin  l'origine  magalonaise  de  cette  douce  et  ravissante  in- 
spiration, «s 'élevant  comme  une  Aphrodite,  plus  pure  que  celle  des 
Grecs,  de  la  mer  étinceianle  des  traditions  antiques  *  »,  furent  rap- 

en  donnant  pour  la  première  fois,  en  1839,  une  part  très-considérable  des 
pièces  inédites  'le  l'abbé  Favre.  La  partie  littéraire  et  poétique  a  été  re- 
présentée par  M.  Frédéric  Roqne-Ferrier,  dans  une  Lettre  sur  la  poésie 
provençale  (Revue  du  Midi,  année  1843  ).  et  tout  récemment  par  Très 
Cansos  en  plana  lengua  romana.  la  Fée  des  Pyrénées  et  los  Ages  de 
l'Umanitat.  La  transition  du  groupe  de  la  Société  archéologique  à  celui  de 
la  Société  des  langues  romanes  s'opéra  par  l'histoire  de  Jacme  le  Con- 
quérant (186.3-1867),  de  M.  Ch.  de  Tourtoulon  :  VEssai  sur  l'histoire  de  la 
littérature  catalane  et  les  Origines  élgmnlogiques  de  l'idiome  catalan,  que 
M.  Gambouliù  publia  tout  d'abord  dans  le  recueil  de  V Académie  de 
Montpellier;  divers  travaux  inédits  de  M.  l'abbé  Léon  Vinas,  tirés  des 
archives  de  Gignac  et  antérieurs  à  ceux  qui  figurent  dans  la  Revue  des 
langues  romanes,  et  entin  par  les  poésies  languedociennes  de  Guiraldenc 
(mort  If  23  octobre  1869),  qui  paraît  avoir  étudié  d'une  manière  toute  phi- 
lologique l'idiome  de  Montpellier. 

*  C'est  probablement  une  allusion  au  rôle  de  la  belle  Maguelono  dans 
l'astronomie  populaire  delà  Provence  et  du  Languedoc.  La  conjonction 
de  Vénus  avec  Saturne  représente,  selon  le  dire  des  pâtres  et  des  gens  de 
la  campagne,  la  belle  Maguelone  que  poursuit  Pierre  de  Provence.  Leur 
réunion  et  leur  mariage  ont  lieu  tous  les  sept  ans.  A  ces  noces  sont  con- 
viées les  autres  étoiles  :  Jan  de  Milan  (birius),  las  Ensignes  (  Orion  et 
la  ceinture  d'Orion  ;  ioui  Très  ffei5,  aux  environs  de  Montpellier)  et  la 
Poussinieira  [les  Pléiades).  La  Poussinieira,  plus  matinière  que  toutes 
les  autres,  partit  la  première  et  prit  le  chemin  haut;  les  Ensignes,  qui 
sont  trois  jeunes  filles  hardies,  passèrent  un  peu  plus  bas  et  ne  tardèrent 
pas  à  la  rejoindre.  Jan  de  Milan,  qui  était  endormi,  prit  un  chemin  de 
traverse  en  se  levant,  et  courut  après  les  jeunes  filles;  pour  les  arrêter,  il 
leur  lança  son  bâlon,  ce  qui  lait  que  le  faus  margue  est  appelé  aussi  lou 
hastou^de  Jan  de  Milan.  Lou  Panard,  une  autre  étoile,  était  aussi  convié; 
mais  comme  il  est  boiteux  il  reste  constamraoht  en  arrière.  M.  Mistral  a  dit  {Ar- 
mana  prouiençau,\81ï,  39),  quelques  mots  de  ces  légendes  astronomiques, 
qui  devraient  di'jà  posséder  leur  historien. [Aujourd'hui  encore,  nulle  histoire 
du  moyen  âge  n'a  conservé  plus  de  renom  et  de  lecteurs  que  le  roman  du 
chanoine  magalonais,  Bernard  de  Tréviers,  et  nulle  ne  le  mérite  mieux 
qu'elle,  par  «je  ne  sais  quelle  grâce  et  quelle  suavité  toute  particulière  de 
ton  et  de  manii''re»,adit  Fauriel.  A  ses  heures  de  récréation,  pendant  qu'il 
étudiait  le  droit  à  Montpellier,  Pétrarque  «polit  et  donna  des  grâces  nou- 
velles »,  selon  Gariel  (  Idée  de  la  ville  de  Montpellier,  p.  113,  2'  partie), 


LE    PARACiK    A    MAGL'El.ONE  2Sy 

pelés  par  .M.  15onaparto-\Vys(>,  aliii  di\  symboliser  l'union  future 
du  Pavage  de  Montpellier  et  du  Flun'ge^  d'Avignon  : 

Mounsegne,  Madamo,  Messies,  enlanleriii  que  vàulri  levas  lou  veire 
simpalique  e  brindas  atnisladousamoii  is  ami  qu'avès  councigu,  i  causo 
pratico  qu'avès  à  oor,  regarde,  iéu,  dins  lou  grand  passa  neblous,  qu'es 
pamens  clar  coume  l'azur  à  la  vislo  dùu  Iroubaire,  e  vole,  pér  ma  (isto, 
brinda  soulemnamen  à  la  farfantello  pouélico  que  vese  apeiralin,  s'aubou- 
rant  coume  une  Afroudito  pus  casto  que  la  di  Gré,  de  la  mar  belugue- 
janto  di  bélli  tradicioun  antico  De  peu  d'or  s'anclloD  autour  de  sis  es- 
palo  d'evôri,  rousènco  es  sa  caro,  e  veîaqui  que  vai  faire  arrarabage 
sus  l'isclo  soulilàri,  mounte  aqueste  moumon  même  cacalejan,  e  velaqui 
que  vai  founda  aquesto  vilo  Irelusènto  diiu  meja'n  ago  que,  maire  de  voste 
Mounl-pelié  bon  ama  {mater  pulchra,  filia  pulchrior),  os,  ai  las  !  franc  uno 
glciso  soulelo.  esvalido,  emé  si  niouiiumen,  coume  l'eigagno  au  grand 
soulèu. 

Briude  dounc,  Mounsegue,  Madamo  e  Messies,  à  la  memôri  douco 
d'aquelo  farfantello  legeudàri.  que,  morto,  es  pamens  sèmpre  vivonto 
dins  ii  souvenènci  de  vosti  popic  e  de  vost;  pouëlo,  —  à  la  memôri  de  la 
bello  foundadris  de  Magalouno,  à  l'amado  e  l'amourouso  de  Pèire  de 
Prouvènço.  Que  sa  vido  tendrinello,  après  tant  d'auvàri  pèr  la  lerro_ 
|iùr  la  mar,  pèr  l'aire,  e  finalamen  soun  unioun  emé  Peire  de  Prouvènço 
nous  siegue  loa  simbèu  de  ia  councôrdi  inlirao  que  déura  toujour  èstre 
entre  l'escolo  mount-pelierenco,  acampado  vuei,  pèr  la  proumiero  fes, 
souto  de  tant  urous  auspici,  lou  long  dùu  ribeirés  de  Magalouno,  e  lou 
l'elibrige  capoulié  d'Avignoun,  que  noun  cesso  de  galeja  e  de  canta,  à 
l'oumbrino  sacrado  de  Nosto-Damo  di  Dom,  de  Nosto-Damo  di  Dom  que 
se  dis  iieramen  de  Prouvènço  I 

Beve,  0  Parage,  à  la  memôri  de  la  bello  Magalouno! 

Parlant  au  nom  du  Parage  et  de  la  Société  2'our  î'étmle  des  lan- 
gues romanes,  M.  A.  Roque-Ferrier  porta  de  la  manière  suivante  la 
santé  du  poète  des  Parpaioun  hlu  et  de  la  CaheluJaru  iVor: 

Mounsegne,  Madamo  e  Messies,  emai  l'estatut  dou  Parage  fagiio  en 
touti  li  membre  de  nosto  escolo  un  devé  grand  de  pralica  la  parladuro 

à  cet  ouvrage,  que  la  littérature  populaire  de  plusieurs  nations  s'est  ap- 
propriée, lorsque  la  double  poésie  des  troubadours  et  des  trouvères  con- 
stituait le  pàtrimome  commun  o\x  venaient  s'enrichir  presque  toutes  les 
langues  européennes.  Ou  a  des  imitations  en  grec  moderne  de  Pierre  de 
Provence  dans  l'Histoire  almbi-rios  et  de  Marfjarona,  que  M.  Wagner  a 
publiée  en  1674,  d'après  le  manuscrit  de  la  Bibliothèque  impériale  de 
Vienne.  M.  G.  Meyera  encore  fait  paraître  à  Prague,  en  1876:  Imberios 
und  Margarona,  ein  mittelgriechisches  Gedicli  Gedicht.  etc. 

1  fii  tant  est  qu'il  ait  jamais  existé,  le  Florieje  était,  suivant  Nostra- 
damus,  une  académie  provençale  qui  florissait  à  l'époque  de  Pétrarque, 
près  de  l'abbaye  du  Thoronet. 


290  LK    l'AliAGE    A    MAGUELONE 

mounl  pelierenco  e  de  n'acreisse  l'espandimen  e  la  fourtuno,  brindarai 
aro  à  Guihèn  Bonaparte-Wyse  dins  aquelo  parladuro  d'Avignoun  que  sis 
obro  souloto  mantendrien  à  toujour,  se  pèr  quau(iue  raalastre  impous- 
sible,  s'airoubavo  plus  sus  li  terro  de  Franco  de  bouco  prouvençalo  à  ia 
saupre  parla. 

Longo-mai,  Mounsegne,  Madame  e  Messies,  au  Roumiéu  de  noste  sou- 
It'u,  à  la  raajouralo  cigalo  d'Irlande! 

A  ce  momenl-là,  les  membres  du  Parage  furent  agréablenionl 
surpris  par  la  visite  inattendue  de  MM.  Jules  Michel  et  V.  Smith, 
de  Saint-Étienne.  Celui-ci,  à  qui  l'on  doit  des  recherches  et  des 
recueils  de  poésie  populaire  française  et  forézienne  destinés  à 
devenir  classiques  par  la  riiïoureuse  exactitude  de  leurs  détail.'^, 
la  passion  mélhodique  et  savante  avec  laquelle  les  origines  et  les 
variantes  eu  ont  été  notées,  était  venu  depuis  un  mois  demander 
au  climat  de  Montpellier  le  rétablissement  de  sa  santé'.  M.  Michel 
y  était  amené  ]»ar  la  suite  des  recherches  qui  lui  ont  permis  de 
compléter  les  découvertes  de  M.  Aurês,  de  Niraes,  touchant  la 
valeur  des  pieds  grec  et  romain  et  l'idenlification  du  pied  de  Char- 
lemagne  avec  le  pied  gaulois 2.  Quelques  instants  après  leur  ar- 
rivée, l'évêque  de  Montpellier  prenait  la  parole  pour  répondre  au 
toast  de  M.  Cantagrel  et  aux  paroles  du  capiscol  du  Parage.  Dans 
une  improvisation  pleine  de  grâce  et  de  traits  émus  et  charmés, 
l'éloquent  prélat  s'excusa  de  ne  pas  savoir  encore  parler  assez- 
correctement  le  provençal  littéraire  et  d'être  ainsi  contraint  de  s'ex- 
primer en  français.  Il  dit  son  aflection  pour  le  langage  qu'il  avait 


^  Presque  tous  les  travaux  de  M  V.  Smiih  ont  paru  dans  la  liomania. 
C'est  pendant  son  séjour  à  Montpellier  qu'il  a  bien  voulu  préparer  et. don- 
ner il  la  lîevue  des  lannucs  romanes  un  Alléluia  paschai  du  V'elay  et  la 
chanson  populaire  du  Faux  Moine. 

-  «  Partant  de  ces  principes....  qu'il  fallait  tenir  grand  compte  d(!  l'es- 
prit de  superstition  qui,  durant  toute  l'antiquité,  a  présidé  à  l'emploi  des 
nombres.,..  M.  Aurès  s'est  avisé  li'interroger  les  monuments  eux-mêmes, 
et,  après  en  avoir  levé  les  mesures  principales  et  même  les  plus  minimes 
détails...  il  est  arrivé,  non-seulement  â  démontrer  que  les  dires  des  poè- 
tes, de  Végèce  et  de  Gensorin,  étaient  justifiés,  c'est-à-dire  que  les  nom- 
bres carrés  étaient  employés  avec  une  prédilection  marquée,  mais  qu'à 
défaut  de  nombres  carrés,  les  nombres  impairs,  appelés  nombres  mâles, 
étaient  autant  que  possible  préférés  aux  nombres  femelles,  c'est-à-dire 
pairs,  et  qu'enlin  il  était  toujours  facile,  à  l'aide  de  mesures  rigoureuse- 
ment prises,  sur  un  édifice  quelconque,  d'arriver  à  la  connaissance  de 
'unité  de  mesure  qui  y^avait  été  employée  et  de  ses  subdivisions. 

»  Le  Parthénon,  les  temples  de  la  Sicile  et  de  Picstura,  la  Maison 
Carrée  de  Ninieset  une  foule  d'autres,  ont  passé  sous  le   comjias  el  ont 


LE    PARAGb;    A    MAGUELONE  291 

appris  tout  enfant  ;iu  villaiio  de  Caliriùres,  pour  cet  iilionie  que 
les  ouvriers  de  la  llonaissanee  méridionale  pouvaient  voir  aujour- 
d'hui étudié  et  ensciijné  jusque  dans  les  Universités  de  Finlande, 
à  l'égal  du  français  et  de  l'italien  ;  avec  une  simplicité  et  un  esprit 
d'à-propos  bien  rares,  il  vanta  le  rajeunissement  de  sentiment  et 
d'inspiration  qu'il  valait  à  notre  Midi;  louant  ensuite  le  Félibrige 
de  chercher,  comme  l'avait  toujours  fait  le  maître  qui  était  assis  à 
ses  côtés,  comme  le  faisait  le  poëte  provençal  de  l'Irlande,  ses 
inspirations  dans  les  plus  hauts  sentiments  de  l'âme,  il  le  remercia 
d'avoir  pensé  que  la  poésie  devait  poursuivre,  elle  aussi,  une  re- 
cherche idéale,  et  de  s'être  constamment  «  souvenu  que  Jésus- 
Christ,  le  divin  Sauveur  des  hommes,  avait  été  en  même  temps  le 
premier  et  le  plus  divin  des  poêles  *.  » 

Lorsque  le  prélat  eut  cessé  de  parler,  M.  Cavallier  donna  la 
parole  à  M.  de  Berluc-Pérussis  : 

Si  le  rôle  de  M.  Bonaparte-Wyse  a  été,  pendant  deux  ou  trois 
ans,  capital  dans  le  Félibrjge,  celui  do  M.  Berluc-l-'erussis  ne  l'a 
pas  été  moins  en  1874.  Président  de  la  Société  littéraire  d'Apt  ou  de 
V Athénée  de  Forcalquier,  membre  de  V Académie  d'Aix  ou  l'un  des 
cinquante  du  Félibrige,  M .  de  Berlue  a  toujours  été  de  ceux  qui  on  t 

été  soumis  à  l'esprit  investigateur  de  M.  Aurès;  et,  dans  des  mémoires 

forcément  hérissés  de  chiffres il  a  démontré  la  valeur  des  pieds  grec 

et  romain  avec  une  sûreté  d'analyse  qui  peut  défier  les  plus  incrédules. 
à  la  condition  que  ces  incrédules  seront  en  état  de  comprendre  et  de 
suivre  cette  analyse  délicate . 

»  Un  des  résultats  les  plus  remarquables  et  les  plus  rigoureux  des  re- 
cherches de  M.  Aurès,  c'est  l'identiOoation  du  pied  de  Gharlemague,  dit 
pied  de  roi,  avec  le  pied  gaulois  primitif.  Ainsi  nous  savons  aujourd'hui, 
grâce  à  M.  Aurès,  que  (^harlemagne  n'a  fait  que  prescrire  l'emploi  du 
pied  usité  de  toute  autiquilô  sur  le  so!  gaulois,  en  écartant  de  l'usage  lo 
pied  romain,  que  la  conquête  avait  prétendu  imposer  aux  Gaulois  vain- 
cus.» (F.  de  Saulcy,  les  Travaux  jnétrologiques  de  M.  Aurès,  in  Polijbi- 
blion,  1'  série,  VI,  377,  octobre  1877.) 

1  «Me  siei  entancha,  disait  le  prélat  dans  une  lettre  provençale  écrite  à 
M.  Arnavielle,  de  signa  lou  papié  que  m'avès  manda,  dins  la  peu  qua- 
guessias  quauque  remord  e  que  moun  noum  manquesse  sus  la  listo  de 
vàstis  ami, 

»  Save  gaire  parla  la  lengo  franceso,  gaire  la  lalino,  que  pamens  es  la 
miéuno;  mai  me  souvene  emé  bonur  di  quàuqui  mot  prouvençau  qu'ai 
après  dins  moun  paure  vilage  de  Cabrièro,  quand  jougave  tout  pichot  pro- 
che de  moun  paire  e  de  ma  maire,  e  siei  arous  encaro  de  jioudé  eoum- 
prene  libéUi  cause  que  fasès,  tôuti  lis  an,  emprima  dins  vosle  Armana.» 
(Lettre  publiée  dans  les  Tablettes  d'Alais  et  reproduite  par  VUnion  na- 
tionale de  Montpellier,  n°  du  Î4  novembre  1877.  ) 


292  LE    PARAGE    A    MAUUEI.ONË 

le  patrioiisme  persévérant  du  sol  natal  et  qui  consacrent  à  l'étudier 
dans  son  histoire,  dans  sa  langue,  dans  son  passé  littéraire,  ar- 
chéologique et  scientifique,  tout  ce  qui  leur  a  été  départi  d'intel- 
ligence et  de  loisir.  Représentant  de  deux  vieilles  familles  dont  on 
retrouve  plus  d'une  fois  le  nom  dans  les  annales  de  la  Provence, 
il  la  connaît"  depuis  les  monuments  qui  ont  fait  son  orgueil  jus- 
qu'à la  culture  de  la  soie  qui  l'a  enrichie, jusqu'aux  origines  de  son 
idiome  '  contesté,  auquel  il  a  le  premier  donné  conscience  de  ce 
que  l'idée  latine  ou  romane  pouvait  rendre  en  action  et  en  vita- 
lité littéraire.  La  trente-troisième  session  du  Congrès  archéologi- 
que de  France,  tenue  à  Aix  en  1866,  dut  à  sa  fraternelle  collabora- 
tion avec  M.  Charles  de  Ribbe  la  majeure  partie  de  son  succès. 
Le  sixième  centenaire  de  Pétrarque  lui  donna,  en  1874,  un  moment 
d'existence  internationale,  qu'il  soutint  dignement.  L'initiative 
de  cette  solennité  lui  appartenait  ;  il  en  fut  à  la  fois  l'inspirateur, 
et,  de  concert  avec  M.  Hipp.  Guillibert,  le  principal  ouvrier:  pour 
la  première  fois,  depuis  que  des  Concours  littéraires  ont  lieu  dans 
le  Midi,  c'est-à-dire  depuis  la  période  médiévale,  Titalien,  le  ca- 
talan et  l'espagnol,  furent,  ainsi  que  le  provençal  et  le  français, 
mis  sur  le  pied  d'une  parfaite  égalité.  Le  Comité  aixois  compléta 
cette  grande  pensée  par  la  nomination  des  présidents  de  la  fête  : 
MM.  Conti,  de  l'Académie  de  la  Crusca,  pour  i'Jtalie;  Mézières, 
de  l'Académie  françaises,  pour  la  France,  et  de  Quintana,  prési- 
dent des  Jeux  floraux  de  Barcelone,  pour  l'Espagne.  Tous  les  trois 
assistèrent,  avec  M.  Nigra,  aux  assises  de  Pétrarque.  Le  Félihrifje, 
un  moment  hésitant,  fut  ramené  ou  conquis,  et  le  succès  de  la  so- 
lennité d'Avignon  la  fit  considérer  comme  la  première  fête  litté- 
raire oîi  les  peuples  néo-latins  se  soient  rencontrés  ensemble  et 
aient  repris  la  conscience  de  leur  fraternité  linguistique  2. 

Poëte,  on  lui  doit  la  reviviscence  du  sonnet  en  Provence  et  la 
faveur  qu'il  a  su  y  conquérir  parmi  les  féiibres  eux-mêmes.  Cette 
forme,  à  la  fois  si  délicate  et  si  difficile,  n'a  pas  d3  secret  pour  M.  de 
Berluc-Perussis;  il  sait  en  surmonter  les  écueils.  Ce  n'est  même  pas 
trop  exagérer  que  d'attribuer  à  quelques-uns  de  ses  essais  en  ce 

*  Nous  empruntons  quelques  détails  à  une  étude  biographique  et  litlé  ■ 
raire  sur  M.  de  Beriuc-Perussis  publiée  par  M.  Charles  Boy,  dans  la  Revue 
du  Lyonnais. 

Depuis  lors,  M.  de  Berluc-Pérussis  a  largemetil  contribué  au  succès 
des  Jeux  floraux  de  Notre-Darne  de  Provence  eu  1875  et  de  Sainle-Anne 
d'Apt  en  1877.  M.  Cavallier  a  écrit  la  relation  de  ceux-ci  dansson  opuscule  : 
les  F('tes  du  couronnement  de  .sainte  Anne,  des  9  et  10  septembre  1877, 
et  les  Jeux  floraux  aptesiens.  Montpellier,  Grollier,  1877,  in-S»,  48   pag. 


LE    PARAOP:    a     MAGt'ELONb:  293 

genre  la  valeur  un  peu  ironique  que  Despréaux  donnait  au  véri- 
table sonnet;  soit  que,  dans  celui  qu'il  a  emprunté  et  dédié  à 
M.  Jules  de  Gères,  il  renouvelle  la  doctrine  qu'enseignèrent  Pytha- 
goreet  les  druides  gaulois,  que  plus  tard  Origène  introduisit  dans  la 
philosophie  chrétienne,  mais  compliqua  en  même  temps  d'étranges 
erreurs;  soit  qu'il  exprime  en  vieux  français  des  regrets  de  sé- 
paration, il  est  toujours  égal  à  lui-même,  également  à  étudier  dans 
l'idée  et  dans  la  forme.  Et,  en  effet,  odyssée  des  âmes  dont  on 
trouvait  autrefois  la  figure  symbolique  dans  les  stations  du  livre 
des  Nombres,  joie?  littéraires  et  rustiiiues,  tristesses  du  temps  passé, 
langue  de  Ronsard,  langue  de  Musset  ou  de.  Mistral,  questions  de 
droit  naturel  ou  archéologie  provençale,  lui  sont  également  aisées, 
famihères  et  accessibles  *.  Orateur,  M.  de  Berlue  n'a  pas  de  moin- 
dres qualités  :  sa  langue,  souple,  fine  et  persuasive,  à  l'éloquence 
légèrement  italienne,  reste  partout  claire  et  élevée  ;  elle  est  comme 
le  vêtement  naturel  d'une  pensée  sûre  d'elle,  alors  même  qu'elle 
semble  réserver  une  meilleure  compétence  que  la  sienne-.  Faire  un 

'  On  nous  permettra  de  citer  le  Sonnet  treuvé  dans  ung  viel  livre  : 
Vous  parlez,  mie.  et  poinctn'i'iaez  pleuré  ! 
Ma  coulpe  feust  vous  trop  aymer  peust  astre. 
Femme  ne  veult  serviteur,  ains  ung  maistre  : 
Fol  et  meschant  m'eussiez,  crois-ie,  adouié. 

Ores,  allez,  chier  esprit  égaré  : 
Fouillez  la  ville  et  par  tout  le  champestre; 
A  Montfaulcon,  les  corbeaux  veulx  repaistre, 
Si  treuuez  cœur  oncque  au  mien  comparé. 

Quand  reviendrez,  portes,  las  !  seront  closes. 
Et  foulerez  la  maulve  au  lieu  de  roses  : 
Le  poure  amant  soubz  l'herbe  gésira. 

Lors,  pryez  Dieu,  l'âme  en  pleurs  espanchée. 

Et  tost,  cuidé-ie,  ez  cieulx  reuerdira 

La  fleur  qu'ici  vous  mesme  aurez  faulchée. 

-  Nous  avons  essayé  de  classer  ici  quflques-uns  des  opuscules  publiés 
par  M.  de  Berlue,  ou  contenant  des  pièces  de  hu;  mais  il  va  sans  dire 
Ljue  cette  liste  est  en  très-grande  partie  incomplète  ; 

Du  Mouvement  littéraire  en  Provence.  Forcalquier,  1855.  m-S". 

Bibliographie  provençale.  Les  Chansons  du  Carrateyron.  Aix,  1855, 
in-l2. 

L'Abâilho  prouvençalo  de  1858  par  uno  ribambello  derimaires,  eme  uno 
prefaço  de  J.-T.  P-ory.  Marsilho,  Feraoud,  1858,  in-lî. 

Éloge  de  Boniface,  avocat  au  Parlement  de  Provence.  Aix,  llly,  1860,  in-8  . 

20 


294  LE    PARAGB    A    MAGUELONE 

lui  portrait  de  l'hûle  du  Fara(je,  c'est  diro  d'avance  qu'en  expli- 
quant les  diverses  acceptions  de  ce  mot,  «  qui  contient  toute  la 
tlcurde  la  vieille  France  »,  le  président  de  V Athénée  de  Forcalquier 
maintint  la  félibrée  de  Maguelone  à  la  hauteur  où  l'avait  élevée  le 
langage  de  Mgr  de  Gabrières  : 

Mounsegne,  Madama,  cars  e  valants  Paraglés,  m'ausso,  par  beurre,  ou 
noum  dei  sèt  Priéus  des  Aupens,  ei  sèt  Magistres  dou  Paràgi.  L'Escou- 
reta  dei  voulountous  s'en  vèn  saiuda  TEscora  dei  saberus. 

Es  que,  ou  pouas  crèire,  eissublien  pas,  sus  nouostes  auturas,  aquéu 
camin  màgi  dôu  Narbounés  que,  dempièi  douei  raila  ans,  religa  les  Aups 
de  Prouvènça  amè  vouostes  plans.  Tambèn,  encuei,  l'ai  davala  à  la  lesta, 
par  vouei  veni  jougne  en  esta  grand  felibrèia  e  vous  arribo,  lou  couor  du- 
bert  e  lei  mans  tendues. 

Avès  bèn  e  patrialamen  fa,  messers  e  amis,  de  sourti  de  la  poussa  des 
tèms  meians  aquéu  mot  tant  significatiéu  de  Paràgi,  e  subre-tout  lei  no- 
bles cavas  qu'arrepresenla,  e  quejamai,  que  qu'avèngue,  saran  pardues 
dins  nouosta  bènama  e  doulèntapatrîa. 

Tout  l'ounour,  touta  la  flour  de  nouosta  vièia  França  ei  dins  aquéu 
mot,  dins  aqueles  cavas. 

E  couma  n'en  sarié  pa  'nsinta,  vous  ou  demande,  d'abord  que  lou  Pa- 
ràgi, valènt-à-dire  la  Parieta  es  la  frucha  prumièra  de  l'Evangèli  ?  Es-ti 
pas  lou  divin  presicaire  qu'aparieguè  les  omes  davans  soun  Dieu,  lei  fiéu 
davans  soun  paire,  les  chivaliés  davans  soun  rèi,  e  perèu  les  pouëtas  var- 
tadiés  davans  la  glôri?  E  de  bada  nous  agon  degaia  aquela  meravihousa 
parieta  crestiana,  en  en  fènt  l'Eqalita,  es  ela  qu'a  congreia  tout  ça  qu'es 
lier  e  bèu  dius  rouosta  islôri. 

Sabès-ti  rèn  de  mai  amirable..  dias,  qu'aquéu  Franc-Paràgi  de  nouostas 
coustumas,  quand  l'einat  de  l'oustau  garantissié  à  cadun  de  sei  fraires  sa 


Notice  sur  la  vie  et  les  œuvres  de  Gustave  Rambot.  Aix,  lUy,  1860,  in-8o. 

Rapport  au  Congrès  des  Académies  (Extrait  de  l'Annuaire  de  l'Institut 
des  provinces  ).  Forcalquier,  1862,  in-8". 

Discours  de  réception  à  l'Acadéinie  d'Aix.  Marseille,  1865,  in-8°. 

Recherches  biographiques  sur  Pierre  Aréod.  Aix,  Illy,  1866,  in-S". 

L  Enquête  et  la  Représentation  agricoles.  Aix,  1866,  in-8°. 

Le  Drainage  et  l'Irrigation.  Aix,  1866,  in-8°. 

La  Crise  agricole  en  Provence.  Aix,  1866,  in-8o. 

Discours  de  clôture  du  Congrès  scie7itifique  d'Aix.  Aix,  1867,  in-8''. 

La  Question  séricicole.  Aix,  1867,  in-8o. 

Rapport  sur  les  travaux  de  l'Académie  d'Aix.  Aix,  1867,  in-8°. 

François  I"  à  Avignon.  Apt,  1869,  in-8''. 

Biographie  de  Fortuné  Pin.  Nice,  Gauthier,  1870,  in-8''. 

A  la  mémoire  de  Fortuné  Pin,  poésies  par  MM.  de  Flotte,  A.  de  Gagnaud, 
J.-B.  Gaut,  Mistral,  A.  Real,  etc.  Nice,  Gauthier,  1870,  in-8». 

Du  Sonnet  et  des  Sonnettistes  aptésiens.  Apt,  1872,  id-8°. 


LE    PARAGE    A    MaGUELONE  2^)0 

part  sèrapre  franca  e  pariera,  e  qu'eles  prouraetien  en  retour  à  l'einat  de 
li  èsse  fidèus  e  de  l'ajua  dins  sei  maramagnas? 

Dins  la  valerousa  encountrada  de  Lourrenna,  que  plouren  couma  una 
sorre  raiiba,  aquela  usança  freirenala  èra  enca  mai  pretoucanta.  Aqui, 
leschivaliés  se  partissien  en  sièis  Paràgi  vou  parentèla,  que  s'arregar- 
davon  couma  sièis  famihas,  e  lou  qu'apartenié  à-n-una  liera  èra  censa  pa- 
rent, es  ueis  de  la  lèi  messina,  de  toutes  aquélei  de  la  liera. 

Mai  lou  triounfle  soubeiran  d'aquela  nauta  idèia  fougue  dins  l'establi- 
men  dôu  Paràgi  majour,  vouro.dire  dei  douge  Pars  de  tVançaque  favou 
lou  counsèu  de  fainiha  de  nouosta  nacien. 

E  tant  aquéu  mot  de  Paràgi  counvenié  en  tout  ça  qu'ei  grand  e  bèu, 
que  n'en  venguèron  lou  mounde  à  nouma  Paràgi,  couma  dirias  terraire 
commun,  touta  larga  encountrada,  e  que,  meme.sus  l'empèri  de  l'aiga,  lei 
mariniés  empachèron  dôu  même  noum  un  grand  vaste  de  mar. 

E  bèn,  messers  e  amis,  acô  bèu,  acô  tant  aut,  vaqui  que  lou  ressus- 
cites . 

Au  centre  de  la  terra  dO,  dins  la  cid'Uta  subre-sabènta,  anès  establi  un 
mevouioun  d'omes  requists,  nouostes  einats  dins  la  sciènci,  e  noui  van 
parmettre  de  pareja  am'eles,  e  couma  les  chivaliés  lourrens,  de  fa  ensèn 
qu'una  sourela  famiha 

E  couma  antan  les  pars  de  França  scmounilièn  au  parlamenl  de  Paris 
de  capeus  de  rosas  par  sa  benvenguda,  ansinta  nautres  esperen  peréu 
vouosla  Baillée  des  roses,  ça  es  lei  tlours  planas  d'agradança  de  vouosta 
pouësia. 

Les  Almanachs  littéraires.  Aix,  1874,  in-S". 

y'int  Sounet  prouvençau  tira  de  l'Almanach  du  Sonnet,  1874,  em'  uno 
letro-prefàci  (de  Vidal  ).  En  la  vièio  capitale  de  la  Prouvenço,  1874,  in-8". 

Dous  Nouvé  latin  inedi  de  Fourtuna  Pin,  couronna  en  At  e  Montèu. 
i  Jo  llourau  de  la  fèsto  de  Saboly,  e  revira  pèr  A .  de  Gagnaud .  Montpel- 
lier, Imprimerie  centrale  du  Midi,  1875,  in-8o. 

Un  bouquet  de  campanelo,  pèr  T.  Aubanel,  a.  Azais,  VV.  Bonaparte- 
IVyse.  Bonfiloti,  M.  e  V  Bourrelly,  P.  dis  Ebrido.  la  {elibres.so  duuCau- 
loun,A.  Fourès,  M.  Frizet,  A.  de  dagnaud.  Dom  Harnier.  J.-B.  Haut,  etc. 
Aix,  Remondet- Aubin,  1876.  in-80. 

Cant  di  Fourcauqueiren  à  NostoDarno  de  Prouvenço,  musico  de  Dési- 
rât (t....  Ais-de-ProuvênçOi  Remondet-Aubin,  1876,  in-4o. 

Forcalquier  et  ..es  souvenirs  littéraires.  Fovcalqmev,  Masson,  1876,  in-8o. 

Un  document  inédit  sur  Laure  de  Sade.  Aix,  Illy,  1876.  in-8o. 

Mgr  Terris,  évéque-nommé  de  Fréjuset  de  Toulon.  Aix,  Illy,  1876,  in-16. 

Académie  d'Aix.  Rapport  sur  les  prix  de  vertu,  lu  en  séance  publique  de 
l'Académie.  Aix,  Illy,  1876,  in-8('. 

L'Aubo.  sounet  tira  de  la  Revisto  di  lengo  roumano .  Mount-peliè,  Es- 
quicharié  centrale  dôu  Miejour,  1877,  in-8''. 

Le  Battage  à  vapeur.  Forcalquier,  Masson,  1877,  in-12. 

Le  Centenaire  de  Pétrarque  au  point  de  vue  bibliographique.  Apt.  J.-S. 
Jean,  1877, in-S". 


296  LE    PARAUE    A    MAUIJELONE 

D'enleiin,  lôu  mesquin,  dins  esta  journa  tant  couroua,  ilins  la  Maj^^a- 
rouna  que  canlè  lou  Petrarca,  vèno.  des  paragis  aupens,  tuerta  à  la 
bouona  salut  e  h  l'amigueta  des  Paragiés  lengadoucians,  à  soun  obra 
cavaleirousa,  e  à  soun  cap  tant  bèn  nouma,  lou  Caries  Cavallier  '. 

Plusieurs  toats  furent  prononcés  après  que  M.  de  Berluc-Pe- 
russis  eut  cessé  de  parler.  Celui  de  M.  Albert  Arnavielle,  écrit 
dans  le  langage  d'Alais,  la  ville  qui,  après  Avignon  et  Montpellier, 
entretient  le  foyer  littéraire  le  plus  actif,  était  adressé  à  Mgr  do 
Cabrièrcs,  auParage  et  à  ses  membres. M. Boucherie,  prenant  texte 
de  quelques  vers  empruntés  au  poëme  de  Galerend,  qu'il  venait 
de  découvrir  à  Paris,  et  dont  il  devait  entretenir  la  Société  des  lan- 
gues romanes  quelques  jours  après,  but  à  Mistral  et  à  Roumanille . 
M.  Henri  Delpech,  à  l'alliance  des  lettres  françaises  et  provençales; 
M.  Fabrége,  à  de  prochaines  réunions  sur  le  sol  où  il  avait  été 
heureux  de  prêter  territoire  à  la  félibrée  du  18  novembre.  Le  toasi 
de  M .  Louis  Roumieux  traduisit,  dans  un  langage  ému,  naturel  el 
facile,  les  sentiments  du  Parage  à  l'égard  de  son  président.  Con- 
fondant en  un  mélancolique  retour  sur  lui-même  et  sur  l'école  do 
Nimes,  presque  disparue  quelques  mois  après  sa  fondation,  If 
témoignage  de  la  reconnaissance  de  tous,  le  poète  de  la  Rampe - 
lado  et  des  Dos  Lebre  rappela,  sur  la  fin  de  son  toast,  et  l'un  des 
opuscules  les  plus  intéressants  qui  soient  sortis  de  la  plume  de 
M.  Cavallier^,  et  les  recherches  hagiographiques  qui,  de  bonne 
heure,  firent  de  ce  dernier  le  correspondant  et  l'ami  du  Père  La- 
cordaire  : 

Mounsegne,  Madamo  e  Messies,  cabiscôu  de  l'oscolo  de  Nimes,  que  — 
perqué  noun  lou  dire,  ai  !  las?  —  es  quasimen  esvalido  dins  11  nèblo  dùu 
matin,  m'es  un  plesi,  autant  coumeun  devé,  de  brinda  à  moun  counfraire 

Malherbe  à  Aix.  Aix,  1878,  )n-8'*. 

Rapport  sur  le  Concours  ouvert  par  l'Athénée  de  Forcalquier  en  l'hon- 
neur de  Gassendi.  Forcalquier,  1878,  in-8». 

M.  de  Berlue  a  publié,  en  collaboration  avec  M.  Gh.  de  Ribbe,  les  deux 
volumes  du  Congrès  scientifique  de  France,  Aix,  1867,  in-8';  avec 
MM.  Bonafous  el  Bory,  le  tome  premier  des  Mémoires  de  la  Société  histo- 
rique de  Provence,  Aix,  1867;  avec  M.  Guillibert,  la  Fête  séculaire  et  in- 
ternationale de  Pétrarque,  Aix.  1875.  11  a  fondé  \'Almanach  du  Sonnet 
(1874-1877)  et  y  a  collaboré  activement.  Nombre  de  ses  poésies  ont  paru 
dans  l'Armana  prouvençau  et  dans  la  Revue  des  langues  romanes. 

'  Ce  toast  est  écrit  en  langage  des  environs  de  Forcalquier;  il  a  été  pu- 
blié en  entiop  par  lo  i  Prouvençau  d'Aix,  no  du  25  novembre  tS77. 

^  Les  Plantes  carnivores  de  M.  Hooker.  Observations  présentées  à  la 
Société  d'horticulture  et  d  histoire  naturelle  de  l'Hérault  Montpellier. 
1 S75,  in-S». 


LE    PAKAGK    A    MAGUELONK  jo? 

(le  l'escolo  mount-pelierenco,  d'aquelo  escolo  que,  Ion  vesès,  lout-bèu-just 
à  sa  primoaubo,  Irelusis   déjà  d'iino  tant  vivo  esplendour  '......  Bevn  à 

l'ami  Carie  Cavallior,  au  valent  atroncalre  d'aqu^u  jardinet  caressa  dùu 
soiil^u,  benesi  de  l'eigagnau,  que  vous  a  piei  tant  finamen  retra  !...  A 
l'agiougrafe  distingui,  à  i  ami  di  jardin,  que  eouneis  tant  bon  la  vido  e  li 
vertu  di  sant,  aquéli  flour  celcstialo.  que  lou  noum  e  li  perfum  di  llou- 
reto  de  la  terro  ' . 

Couneissès  touti  ço  que  dis  Gavallier  d'aqurli  planto  carnivoro  que, 
fort  urousamen  pèr  nautre,  figuron  pas  au  mitan  de  la  taulo  ;  car  aurien 
vougu  seguramen  prene  sa  part  d'aqueste  superbe  festin. 

Beve  à  l'ami,  au  conrrespoundènt  dou  Paire  Lacourdari  l 

Au  noble  cor  que,  dins  si  paraulo  amistadouso,  a  saupu  entremescla 
un  mot  agradiéu  pèr  tùuti  li  cantaire  qu'an  iuei  lou  chale  de  bresiheja 
subre  lou  ribeirés  pouëli  de  Magalouno. 

a  Ghasque  aucèu  trovo  soun  nis  bèu  »,s'escridavo,  i'a  'n  moument,  en 
remembrant  ma  deviso  felibrenco. 

Urous,  milo  fes  urous,  lis  auceloun  que  l'auro  de  la  malamagno  foro- 
bandis  jamai  de  soun  nis  !  Longo-mai  dounc  li  piéutaire  dôu  Parage  fa- 
gon  ausi  si  gai  refrin  à  l'entour  d'aqueste  rode  tant  galantamen  pirapa, 
tant  richamen  reviscouia,  doumaci  soun  gênerons  prouprietàri  M.  Fa- 
brege,  en  quau,  tout  en  passante  pèr  acaba,  siéu  fier  de  rendre  tambèn  l'ou- 
màgi  que  s'amerito  ! 

M.  le  docteur  Espagne,  toastant  en  languedocien,  s'exprima  de  la 
manière  s  ai  van  te  ; 

Mounsegne,  Madama,  cars  e  specials  amies,  volepourtar  un  brinde  que 
l'assoustarés,  m'ou  assegure,  dau  turt  coural  de  vostes  goubelets. 

Beve  au  Felibrige,  que  nous  manda  ioi  lous  diamants  lous  pus  lindes  de 
sa  couronna. 

Estima,  lou  Felibrige,  que  dins  las  parladuras  d'Avignoun,  de  Tou- 
lousa  ou  de  Mount-peliè,  se  pot,  couma  dins  la  de  Paris,  proudure  de 
caps-d'obra  qu'ameritoun  de  vienre.  Antau  chaca  canlounei  espelis  una 
floura  e  una  frucha  que  vendrien  pas  tant  ben  dedins  un  autre  rôdou;  e 
se  vôu,  à  teras  passât  ou  à  tems  d'ara,  remembrar  ou  bouta  sus  lou  can- 
deliè  tout  ça  que  pot  alucà  l'amour  dau  son  pairoulau,  es  per  empusà  mai 
que  mai  l'amour  de  la  patrîa  granda. 

Adonne,  braves  amies,  brinden  ensemble,  au  Felibrige  que  reviscouia, 
esclaira  e  manten  tout  ça  qu'es  bon,  tout  ça  qu'es  bèu,  tout  ça  qu'a  drech 
de  lusir  e  de  trelusir  au  sonrel. 

Au  Felibrige  ionga-mai  !  ^ 

Les  brindes  se  multiplièrent  alors  à  l'envi  :  M.  Antonin  Glaize 
butàM.Fabrége,«<  ce  fidèle  de  l'archéologie  et  de  l'histoire  romane, 
quia  si  bien  su  retrouver  el  conserver  lespierres  de  Maguelone  »; 

*  M.  Gavallier  est  un  des  collaborateurs  autorisés  des  A7males  de  la 
Société  d'il  orticuiture  d  d  histoire  naturelle  de  l'Hérault. 


2î>>;  LE    TARAGE    A    MAGUELONE 

au  nom  Au  Félibngc  de  Provence,  M.  Roumanille  toasta  à  Mgr  de 
Cabricres,  -<  lou  dous  e  valent  successour  dis  evesque  de  Maga- 
louno,  que.  mestre,  vèn  à  l'escolo  dôu  Parage  ;  ounour  suprême 
pèr  lis  ami  de  la  lengo  di  reire  e  de  soun  renaisse  miraclous»: 
au  nom  de  M.  Hippolyte  Guillibert,  d'Aix,  M.  de  Villeneuve  lut 
les  vers  suivants,  où  l'auteur  a  su  s'approprier  aussi  naturelle- 
ment que  l'avait  déjà  fait  M.  Roumieux  la  forme  allègre  et  spiri- 
tuelle, mais  presque  inconnue  jusqu'à  eux,  dans  le  provençal  mo- 
derne, du  triolet  français  : 

I  sèt  magistre  dou  Parage 
Mande  mi  sentimen  courau  ; 
Tenon  sesiho  d'aut  Parage, 
Li  sèt  magistre  dou  Parage  ; 
Tambèn  m'agradario  lou  viage 
A  Magalouna  de  l'Erau  ! 
I  sèt  magistre  dôu  Parage 
Mande  mi  sentimen  courau . 

L'ama  cabiscôu  Cavalié, 
Agués  en  gau  ma  souvenenço  ! 
Se  lauso  en  Ais,  à  Mount-pelié, 
L'ama  cabiscôu  Gavalié  ; 
Es  ben  l'antico  chivalié 
Dôu  Lengado,  de  la  Prouvènço! 
L'ama  cabiscôu  Gavalié 
Agués  en  gau  ma  souvenenço  ! 

Les  envois  de  MM.  Achille  Mir,  de  Garcassonne  (un  Noël  lan- 
guedocien); Roux,  de  Lunel- Viel  (^s  set  magistres  dau  Parage);  Lau- 
rès.  de  Villeneuve-lez-Béziers  (  .4^  Parage),  Charles  Descosse,  de 
VorC(i\qu\er  [Brinde  i  trouhaire  acampa  au  Parage  de  3founf-pdir),  Ta- 
rent ensuite  communiqués  ou  mentionnés,  soit  par  le  Capiscol  du 
Parage,  soit  parle  Secrétaire  de  la  Société  des  langues  romanes.  Ce 
dernier  lut,  en  outre,  les  vers  suivants  de  M,  Louis  Astruc,  un 
des  plus  jeunes  et  des  plus  féconds  poètes  de  la  pléiade  qui  se 
grouoe  à  Marseille  sous  le  nom  de  Société  desfélibres  de  la  Mer: 

A  ço  qu'enauro  nôsti  creire, 

A  nosto  antico  liberta, 

A  nosto  naciounalita, 

Au  rèi  En  Jaume,  au  rei  En  Peire, 

Un  premié  veire 

Vole  turta  ! 

Is  ami  de  cor  dôu  Parage, 
T  majourau  de  Lengadô, 
A  touli  li  frairc  que  d'O 


LE    PARAGE    A    MAOUKl-OM':  209 

Sabon  atronca  soun  lengage. 
Un  segound  viage 
Vuego  moun  got*! 

Parmi  les  pièces  de  poésie  adressées  au  Parnge,  à  propos  de  sa 
séance  d'inauguration,  il  s'en  trouvait  une  qui  attestait  une  fois  de 
plus  l'attrait  qu'éprouvent  bien  des  poëtes  pour  la  régularité  et  la 
logique  des  formes  grammaticales  du  dialecte  de  Montpellier.  Déjà, 
au  milieu  du  XVIIe  siècle,  l'auteur  de  l'Embarras  de  lajieiro  de 
Beaucaire,  Michel  de  Nimes,  fait  parler  un  Montpelliérain  dans 
son  idiome  naturel.  Quatre-vingts  ans  plus  tard,  le  Père  Martin,  le 
poëte  le  moins  connu  du  Languedoc  auXVIII'^  siècle  et  le  plus  di- 
gne de  l'être  après  Favre,  adresse  de  Béziers  à  l'abbé  Plomet  une 
traduction  d'une  ode  d'Horace  en  montpelliérain.  Pierquin  de  Gem- 
bloux  l'adopte  aussi  pour  s^a  Louisa  et  ses -FZwretas,  œuvres  de  bi- 
zarre, mais  parfois  aussi  de  gracieuse  poésie;  Eusèbe  de  Salles  dé- 
laisse lelauraguais  dans  quelques  pages  de  ses  «  Rimes  patoises»; 
on  a  de  Balthazar  Floretjl'Agathois,  une  romance  montpelliéraine, 
imprimée  dans  sa  Bourrido  ;  enfin  on  ignore  généralement  que 
M.  Félix  Gras  eut,  en  1871,  l'idée  d'employer  dans  ses  Carhounic, 
au  détriment  du  provençal,  l'idiome  que  le  Parage  s'efforce  de  re- 
mettre en  honneur 2.  Le  sonnet  qui  suit,  de  M.  Charles  Deloncle,  le 

*  Voici  le  toast  à  la  mémoire  de  l'abbé  Favre,  qu'aurait  porté  le  véné- 
rable et  savant  M.  Gabriel  Azaïs,  si  une  indisposition  ne  l'avait  retenu 
à  Béziers  le  18  novembre: 

Porte  un  brinde  al  galoi  magistre 

Que  par,  aqueste  tems  d'auristre, 

Fariô  rire  même  un  ministre, 

Amb  soun  sermou  de  Moussu  Sistre  ! 
La  découverte  faite  quelques  mois  auparavant,  parle  Conservateur  de  la 
bibliothèque  de  Montpellier,  M.  Léon  Gaudin,  d'une  Pastorale  inédite  de 
Favre  sur  la  naissance  de  J.-C,  donnait  presque  à  ce  quatrain  un  intérêt 
d'actualité. 

2  II  va  sans  dire  que  tous  ces  textes  laissent  fréquemment  à  désirer. 
Celui  «^e  Michel  se  trouve  p.  16-17  de  l'édition  d'Amsterdam  (Daniel 
Pain,  1700,  in-12),  et  nul  ne  l'a  remarqué  jusqu'ici.  La  traduction  du  Père 
Martin  a  été  imprimée  à  Montpellier  en  1729,  par  Martel,  in-12,  i  pages. 
M.  A.  Roque-Ferrier  l'a  signalée  pour  la  première  fois  à  la  Société  des 
langues  ramenés  (séance du  14  mars  1877),  d'après  un  exemplaire  très- 
probablement  unique,  que  M.  Mir  avait  bien  voulu  lui  communiquijr. 
Pierquin  de  Gembloux  fit  paraître  en  1846  (Paris,  Barrois,  in-!2)  ses  Flu^ 
relas,  et  en  1850(  Montpellier)  Louisa.  Les  Poésies,  théàlre.  sonnets,  poésies 
diverses  et  rimes  paloises  d'Eusèbe  de  Salles,  appartiennent  à  l'année  1865 
(Paris,  Pagnerre,  in-12)    La  Bourrido  agatenco  est  do  1866. 


30<l  LI-^.    PAR\GE    A    MAGUELONP: 

pot'te  ilu  guercy,  est  un  nouvel  exemple  de  l'influence  que  le  lan- 
gai;e  de  Montpellier  exerce  en  dehors  de  ses  limites  naturelles  *  : 

Aiilaii,  en  lai,  ben  lion,  dîiu  tems  sourne  e  ferous 

Dai  Sarrasins  que  Carie,  emb  goun  bras  pouderous, 

Martelejava  à  mort,  Illa  de  Magalouna. 

Toula  espoutida  aviès  pamens  una  courouna. 

De  Rouma  ères  la  filha  e,  chacun  à  soun  tour, 
Loui  Papas,  dins  toun  grau,  trasien  sa  resplendour; 
Touis  evesques,  Mountlau,  Meza,  Fredol,  Verdala, 
Soustavoun  mai  que  mai  la  vielha  catedrala 

Toui  rais  soun  escantits,  toun  caire  esdesoundral; 
Soûl,  de  long  de  la  mar,  un  noum  es  demourat. 
Mais  angan,  m'es  avis,  ta  gloria  reviscola, 

?ioi  qu'un  evesque,  un  sant,  de  soun  traval  sacral 
S'es  despartil  e  ven,  eme  un  biais  dannstat. 
Dai  sabens  dau  Parage  adurre  aissi  l'escola  î 

Les  poètes  récitèrent  alors  quelques-unes  de  leurs  pièces.  Sur  la 
demande  de  l'évèque  de  Montpellier,  Roumanille  fit  entendre  deux 
de  ses  chefs-d'œuvre  :  la  Vaco  de  la  Véuso  et  la  CJiato  avuglo;  Rou- 
mieux  dit  hu  Maset,  que  toutes  les  féUbrées  de  Provence  et  de 
Languedoc  connaissent,  et  ensuite  des  stances  inédites  à  la  Ciyulo. 
M.  Charles  Gros  débita  Magalouna,  qu'il  avait  communiquée  à  la 
séance  littéraire  du  matin.  Mais,  selon  la  formule  populaire  langue- 
docienne, qui  veut  que  «les  longues  paroles  raccourcissent  le  jour*», 
les  moments  s'étaient  rapidement  écoulés  à  la  lecture  ou  à  l'audi- 
tion des  poésies  et  des  brindes  qui  viennent  d'être  rappelés.  Il  était 
bien  près  de  trois  heures  lorsque  le  banquet  se  termina.  Quelques 
pièces  restaient  à  lire  encore,  diverses  résolutions  devaient  être 
prises  touchant  le  Concours  du  Chant  du  Latin  et  la  part  que  l'école 
de  Montpellier  devait  y  avoir.  M.  de  Berlue  proposa  d'ajourner  le 
tout  à  une  deuxième  réunion, qui  serait  tenue  à  Montpellier  le  soir 
même  ;  il  proposa  ensuite  de  visiter  une  dernière  fois,  sous  la  di- 
rection de  M.  Fabrége,  l'éghse  de  Maguelone,  ce  qui  fut  accepté. 
M.  A.  Roque-Ferrier  prit  alors  la  parole  et  s'exprima  de  la  manière 
suivante,  «  afin  que  le  nom  des  absents  fût  rappelé  aux  fêtes  de  la 
famille,  comme  leur  place  y  avait  été  réservée ''>•: 

'  Ce  sonnet  a  été  publié  dans  le  Messager  du  Midi  de  Montpellier,  du 
24  novembre  1877,  et  ensuite  dans  le  Messager  de  Toulouse.  11  a  été,  de 
plus,  imprimé  par  M.  Charles  Deloncle  à  la  fin  de  son  opuscule  sur  la 
Ma'titanance  l'AqmLame  à  Toulouse;  Toulouse,  Douladoure,  1877,  in-12, 
42  pages. 

-'  Paraulas  lowjas  fan  loui  jours  courts. 

^  Relation  dostiuée  à  un  journal  do  Montpellier,  el  non  imprimée. 


LE    PARA.GE    A    M.VGIEI.ONE  m 

A  Mir  de  Garcassouna,  Aubanol  d'Avignoun, 
A  Lambert,  à  Pau  Glaize,  à  Vitor  Aragoun', 
A  Laurés,  esus  tout  Carlos  de  Tourloiiloun; 
A  Lieutaud  e  Tavan.  que  resloun  dins  Marsclha  ; 

k  Langlade,  la  meravelha 
De  noste  terradou  ;  à  Gabriel  Azaïs, 
Moun  mestree  moun  amie;  au  doutou  Cazalis; 
Au  coulounel  Fourcand,  l'arma  tant  valentousa  ; 

A  Delouncle,  que  dins  Toulousa 
Eaaurae^fai  flouri  la  lenga  quercinousa  ! 
Amai  que  siegoun  jjas  emé  nautrei  de  cors, 

Noste  souveni  vai  ver  eles 

E  se  i'agrada  à  sempre  fort  -  !" 

M .  Fabrége  dirigea  dans  tous  ses  détails  la  visite  de  l'imé- 
rieur  de  l'église.  Nul  n'avait  plus  de  droit  que  lui  à  faire  connaître 
au  Paraf/e  les  transformations  de  la  métropole  du  diocèse,  et  sur- 
tout l'état  déplorable  où  elle  se  trouvait  avant  qu'il  on  entreprît 
la  restauration.  Ainsi  que  l'a  dit  M.  Adolphe  Ricard,  p.our  rendre 
«  au  pays,  à  l'art,  à  l'histoire,  non  moins  qu'à  la  religion,  ce  mo- 
<•  nument  d'une  grâce  austère  et  d'une  largeur  de  lignes  saisissante, 
■'  il  a  fallu  que  le  nouveau  propriétaire  de  Maguolono  réunît  à 
»  une  rare  et  précieuse  générosité  une  persistance,  un  amour  de  la 
1)  science,  un  dévouement,  dont  on  ne  saurait  lui  être  trop  recon- 
»  naissant  Le  sanctuaire,  la  nef,  les  contre-forts,  le  monument  en 
»  entier,  ont  été  déblayés,  réparés  et  soutenus  avec  une  rare  in- 
«  telligence  et  au  prix  de  sacrifices  énormes  •'.  »  C'est  avec  le  savoir 
d'un  élève  de  l'École  des  chartes  et  la  plus  constante  affabilité  que 
M.  Frédéric  Fabrége  montra  aux  hôtes  du  Parage  l'église,  dont 
il  écrit  en  ce  moment  la  savante  monographie,  les  tom])os  d'évè- 
ques,  le  maître-autel  consacré  par  Alexandre  III,  et  actuellement 
orné,  pour  rester  en  conformité  archéologique  des  Statuts  de  1331, 
d'une  croix,  de  quatre  chandeliers  de  style  roman  et  de  deux  fia- 
belles  ou  éventails  de  paon  ;  les  limites  de  l'abside  primitive,  celle 
de  la  nef  mérovingienne,  celle  de  l'église  réparée  et  agrandie  par 

*  On  doit  à  M.  Aragon  une  étude  sur  les  poésies  languedociennes  de 
Cabanis  (  1785--1862) ,  insérée  dans  le  tome  "V  (p.  537-565J  du  recueil  de 
ï  Académie  des  aciences  et  lettres  de  Montpellier  :  Un  poêle  cévenol,  à  pro- 
pos de  l'idiome  languedocien.  Laurent  C ah anis. 

-  Ce  toast  a  été  inséré  daus  la  République  et  le  Messager  du  Midi,  de 
Montpellier  (n"  du  24  novembre  1S77).  lia  été,  quelque;  jours  après, 
reproduit  par  un  journal  de  Carcassonne  dont  le  titre  nous  échappe. 

'  La  Réconciliation  de  Maguelonc  (14  juin  1875),  par  Adolphe  Ricard 
-Montpellier,  Martel,  1876,  in-40,  p.  2. 


303  LE    TARAGE    A   MAGUELONE 

ri''V("'que  Arnaud,  au  miliou  du  XI*-  siècle;  la  vaste  tribune  des  cha- 
noines, où  sont  réunis  des  débris  de  sculpture  romaine  et  du 
moyen  âiie,le  beau  sarcophage  en  marbre  à  rinceaux,  les  diverses 
tombes  que  l'on  s'accorde  à  rapporter  à  l'époque  mérovingienne, 
enfln  ce'le  que  le  vulgaire  désigne  sous  le  nom  de  tombeau  de  la 
hrlle  Maijiielonr,  et  qui  renferme,  à  ce  que  l'on  croit,  les  restes  du 
cardinal  Raymond  de  Ganillac,  parent  de  Clément  VI,  ou  peut-être 
même  ceux  d'un  des  évoques  du  XVI"  siècle. 

Cette  seconde  visite  conduisit  une  partie  des  membres  du  Parage 
sur  le  toit  de  l'église,  sorte  de  terrasse  pavée  de  larges  dalles,  oij 
l'œil,  environné  de  tous  les  côtés  par  un  paysage  dont  il  est  dif- 
ficile d'oublier  la  sévère  et  particulière  grandeur,  plonge,  au  levant, 
dans  un  immense  horizon  de  mer,  pour  revenir  ensuite  vers  le^^or* 
sarrazin,  à  demi  comblé,  chercher  les  contours   supposés  de  l'an- 
cienne Maguelone,  à  l'époque  où,  suivant  le  poète,  «  les  papes  je- 
taient leur  splendeur  dans  ses  graus  »  remplis   de  barques  et  de 
navires  ;  où  Urbain  II,  de  retour  du  Concile  où  il  avait  fait  décider 
la  première  croisade,  bénissait,  sans  distinction  d'aucune  sorte, 
les  habitants  de  l'île,  donnant  l'absolution  plénièreaux  vivants,  aux 
trépassés  et  à  tous  ceux  qui  se  feraient  par  la  suite  ensevelir  à 
l'abri  de  ses  murs.  Mais  ces  souvenirs,  à  la  fois  si  multiples  et  si 
grands,  ne   firent   diversion  qu'un    moment  aux  préoccupations 
littéraires  et  philologiques.  A  propos  d'une  traduction  que  M.  Bo- 
naparte-Wyse  voulait  entreprendre  en  provençal  du  petit  roman 
retouché  par  Pétrarque  lors  de  son  séjour  à  Montpellier,  M.  de 
Berluc-Perussis  dit  comment  il  avait  été  conduit  à  retrouver  dans 
les  manuscrits  de  la  Bibliothèque  nationale  la  preuve  que  Laure 
n'avait  pas  été  la  femme  de  Hugues  de  Sade,  mais  sa  sœur,  décou- 
couverte  qui  relève  moralement  l'amour  du  poëte  italien.  M.  Bou- 
cherie cita  quelques  particularités  de  passion  vraie  et  délicate  qu'il 
avait  rencontrées  dans  le  poème  de  Galerend,  et  sos  citations  ame- 
nèrent M.  de  Berlue  à  expliquer  ce  qu'avaient  été  les  cours  d'amour 
et  combien  étaient  étranges  et  forcées  les  interprétations  qu'elles 
avaient  fait  naître  depuis  la  fin  de  la  période  médiévale.  Parmi 
ceux  que  le  félibrige  avait  seul  le  don  de  préoccuper,  tout  cela  cé- 
dait la  place  à  cette  sorte  de  symbolisme  qui,   aux  sept  trouba- 
dours de  Toulouse  et  de  Barcelone,  a  emprunté  les  sept  rayons 
de  l'étoile  du  Félibrige,  les  sept  lieux  félibrins  du  Parage,  ses  sept 
membres  fondateurs  et  le  nombre  exactement  semblable  de  leurs 
séances  annuelles.  De  là  à  penser  qu'en  souvenir  de  la  félibrée 
du  18  novembre  et  de  la   visite  de  Mgr  de  Gabrières,  une  messe 
devait  être  dite  tous  les  sept  ans  par  un  évèque  félibre,  dans  la 
vieille  église  de  Maguelone,  il  n'y  avait  pas  loin.  Au  milieu  de  ces 


CHRONIQUE  303 

entretiens,  des  explications  que  M.  Fabrége  multipliait  avec  sa 
bonne  grâce  et  sa  science  habituelles,  l'heure  ilu  départ  vint  à  son- 
ner. Ainsi  prit  fin  cette  journée,  que  M.  Cavallier  avait  eu  raison 
de  dire  «  talament  siava  que  degus  aguet  pas  doute  un  mounienet 
das  trebouleris  que  se  passavoun  en  quicon  mai.  »  N'était-ce  pas 
iieaucoup  d'avoir,  par  notre  temps  de  divisions  et  de  querelles  in- 
cessantes, vécu  quelques  heures  en  une  sorte  de  sphère  idéale  et 
de  n'y  avoir  point  séparé  du  présent,  quelque  contestable  qu'il  soit, 
l'avenir  qui  doit  le  suivre  et  le  passé  qui  l'a  préparé  ? 

{A  suivre.) 


CHRONIQUE 


Le  contraste  qui  existait  depuis  si  longtemps  entre  les  Universités 
d'outre-Rhin,  presque  toutes  pourvues  de  chaires  de  philologie  ro- 
mane, et  les  Facultés  des  lettres  françaises',  où  l'enseignement  de 
nos  idiomes  ne  brillait  guère  que  par  son  absence,  suggéra,  en  1875, 
à  la  suite  du  concours  de  la  Société,  la  première  demande  d'une 
création  de  chaires  de  langue  d'oc  et  de  langue  d'oil  dans  chaque 
Faculté  det  lettres,  et  plus  particulièrement  dans  celles  d'Aix,  de 
Montpellier  et  de  Toulouse,  trois  villes  que  leurs  traditions  littéraires 
et  scientifiques  désignaient  tout  d'abord.  La  Société  prit  l'initiative 
de  ces  demandes  et  les  adressa,  par  voie  de  pétition,  à  l'Assemblée 
nationale,oùellesfurentfavorablementaccueillies.Des  pétitions  iden- 
tiques avaient  été,  en  outre.  envoyéesd'Aix.  d'Avignon,  deToulouse, 
de  Béziers.de  Marseille  et  de  Perpignan.  La  cause  de  Montpellier 
était  plaidéeà  Paris  même  par  MM,  Egger,  Michel  Bréal  et  Gaston 
Paris.  Aussi,  lorsque  M.  "SVaddington,  alors  ministre  de  l'instruc- 
tion publique,  reçut,  lors  de  son  passage  à  Montpellier  en  1876,  le 
bureau  de  la  Société  des  langues  romanes,  lui  promit-il  de  demander 
à  la  Chambre  la  fondation  d'une  chaire  de  ce  genre  dans  l'un  des 
grands  centres  du  Midi.  Depuis  un  an  environ,  une  partie  des  la- 
cunes de  notre  enseignement  philologique  a  été  comblée  par  la 
nomination  de  MM.  Joret,  Clédat  etLuchaire,  à  Aix,  Lyon  et  Bor- 
deaux. Montpellier,  le  plus  tardivement  pourvu,  n'a  pas  été  le  moins 
favorisé.  Un  cours  de  langue  romane  vient  d'y  être  confié  à  M.  Ca- 
mille Ghabaneau,  et  des  conférences  de  philologie  romane  à  M.  Bou- 
cherie, vice-président  de  la  Société,  dont  la  leçon  d'ouverture  est 
pubUée  en  tète  de  ce  fascicule.  Presque  en  même  temps  qu'eux, 
M.  Marcel  Devic  était  nommé  maître  de  conférences  de  langue  et 
de  littérature  arabes.  On  doit  au  nouveau  titulaire  des  traductions 


'  Exceptons  toutefois  les  cours  de  MM.  Gaston  Paris,  Paul  Meyer  et 
A.  Darmesteter  au  Golloge  de  France,  à  l'Ecole  des  chartes,  â  celle  des 
Hautes  Etudes  et  à  la  Faculté  des  Lettres  de  Paris. 


304  CHRONIQUE 

(lu  roman  (TAnlar  et  du  Livre  des  merveilles,  ainsi  que  divers  tra- 
vaux se  rattachant  à  la  philologie  romane,  entre  antres  im  ijlossaire 
des  termes  français  empi-untés  aux  langues  orientales.  Ce  glos- 
saire forme  un  îles  compléments  du  Dictionnaire  de  M.  Littré. 

Un  quatrième  cours,  celui-ci  de  géographie,  a  été  enlin  créé  et 
conûé  à  M.  Cons. 

Dans  le  choix  que  vient  de  faire  M.  le  Ministre  de  l'instruction 
publique,  il  nous  sera  permis  de  voir  comme  une  promesse  en 
faveur  de  la  création  à  Montpellier  d'une  sorte  de  succursale  du 
Collège  de  France,  ou  tout  au  moins  de  chaires  de  sanscrit,  de 
])hilologie  germanique  et  de  roumain.  Si  le  souvenir  des  anciennes 
écoles  juives  du  Languedoc  et  le  rôle  de  plus  en  plus  considérable 
de  l'Algérie  justifient  de  toute  manière  un  cours  de  langue  et  de 
littérature  arabes,  l'étude  de  groupes  aussi  importants  que  le  sans- 
crit, les  langues  germaniques  et  le  roumain,  ne  saurait  être  mise  en 
doute  au  point  de  vue  de  l'établissement  d'un  centre  philologique  à 
Montpellier. 

Tous  ceux  qui  ont  suivi  dans  la  Revue  les  nombreux  et  compé- 
tents travaux  de  MM.  Chabaneau  et  Boucherie  s'associeront  à  la 
satisfaction  produite  par  une  nomination  si  égalemeni.  juslitiée  des 
deux  côtés,  et  aux  réflexions  qu'elle  inspire  à  la  Romania,  dans  sa 
livraison  d'octobre  1878  : 

<c  Nous  apprenons  avec  grand  plaisir  qu'on  vient  enfin  d'adjoin- 
dre à  la  Faculté  des  lettres  de  Montpellier  deux  conférences  de 
langue  et  de  littérature  du  moyen  âge,  consacrées,  l'une  au  midi, 
l'autre  au  nord  de  la  France.  Les  deux  maîtres  de  conférence 
étaient  naturellement  désignés  :  M.  Chabaneau  est  nommé  maître 
de  conférence  pour  la  langue  d'oc,  M .  Boucherie  pour  la  langue 
d'oil.  L'institution  nouvelle  des  maîtres  de  conférence  est  encore 
d'un  caraclère  mal  défini  et  d'une  utilité  scientifique,  sinon  pratique, 
du  moins  assez  vague.  Il  dépend  absolument  de  ceux  à  qui  sont 
dévolues  ces  fonctions  de  leur  donner  plus  ou  moins  de  sérieux  ou 
d'importance.  Si  elles  sont  remplies  avec  une  vraie  intelligence  des 
besoins  et  des  ressources  de  notre  enseignement  supérieur,  elles 
peuvent  certainement  contribuer  beaucoup  à  l'acheminer  vers  la 
réforme  dont  il  a  tant  besoin.  Nous  ne  pouvons  qu'applaudir  au 
choix  du  sujet  des  nouvelles  conférences,  au  choix  des  Facultés  et 
au  choix  des  titulaires.  Il  y  a  à  Montpellier,  plus  que  dans  aucune 
autre  ville  de  France,  un  terrain  préparé  pour  recevoir  la  bonne  se- 
mence. Nous  sommes  sûrs  que  MM.  Chabaneau  et  Boucherie  sau- 
ront la  répandre  avec  art  et  l'arroser  avec  persévérance.  D'ici  à  peu 
d'années,  on  commencera,  sans  aucun  doute,  à  recueillir  le  fruit 
de  leurs  peines.  Ce  n'est  qu'en  formant  aux  bonnes  méthodes  de 
jeunes  travailleurs,  en  leur  faisant  connaître  à  la  fois  toutes  les  dif- 
ficultés et  tous  les  auxiliaires  du  travail  scientifique,  en  leur  incul- 
quant l'horreur  des  banalités  superficielles,  le  mépris  du  dilettan- 
tisme et  l'amour  de  la  vérité,  autant  sous  son  nom  d'impartialité 
que  sous  son  nom  d'exactitude,  qu'on  préparera  en  France,  dans 
le  domaine  de  la  philologie  romane  comme  dans  tous  les  autres, 
l'avènement  d'une  renaissance  que  nous  ne  verrons  peut-être  pas, 
mais  que  nous  aurons  du  moins  appelée  de  tous  nos  vœux  et  aidée 
de  tous  nos  eftorts.  » 

» 

La  première  livraison  (in-8o,  256  pages)  du  tome  11  du  Diction- 
naire des  idiomes  romans  du  midi  de  la  FranCe,  par  M  .  Gabriel  Azaïs 


CHRONIQUE  305 

(  série  lies  publications  spéciales  de  la  Société),  a  paru  il  y  a  quel- 
ques mois;  le  complément  de  ce  volume  est  sous  presse  et  sera 
prochainement  distribué. 


Quelques  personnes  avaient  conservé  le  vague  souvenir  d'un 
jeune  homme  qui  fut  un  moment  le  secrétaire  du  regretté  Cam- 
bouliù.  et  qui,  par  une  triste  coïncidence;  s'éteignit  six  jours  avant 
lui,  le  23  octobre  1869.  Diogéne  Guiraldenc,  tel  était  son  nom,  s'était 
de  bonne  heure  essayé  à  la  poésie;  de  bonne  heure  aussi, il  avait 
^ongé  à  faire  imprimer  le  recueil  relativement  considérable  de  ses 
vers  français  et  languedociens.  Mais  ce  jirojet,  dont  il  avait  éiè 
le  seul  à  conserver  le  secret,  n'eut  aucune  suite.  Pauvre  et  isolé, 
Guiraldenc  ne  put  jamais  le  réaliser;  son  nom  serait  presque  abso- 
lument ignoré  aujourd'hui,  si  ses  manuscrits' n'étaient  tombés  en- 
tre les  mains  de  M.  Barthélémy  Martin,  de  Montpellier,  qui  a  bien 
voulu  en  faire  hommage  à  la  Société  des  langues  romanea  et  l'auto- 
riser à  en  publier  la  partie  languedocienne.  Quelques  pièces  de 
celles-ci:  la  Blanda,  la  Masca  et  la  Gloriousa.  ne  seraient  pas  dé- 
savouées parles  meilleurs  ouvriers  de  la  renaissance  actuelle.  En 
en  décidant  l'impression,  la  Société  a  demandé  à  M.Laissac,maire 
de  la  ville  de  Montpellier,  et  à  MM.  les  membres  du  Conseil  mu- 
nicipal, une  concession  au  cimetière  Saint-Lazare,  aiin  d'y  dé- 
poser les  restes  du  pauvre  poëte,  qu'allait  atteindre  bientôt  la  pres- 
cription décennale.  Cette  translation  a  eu  lieu  le  4  décembre,  à  la 
suite  du  vote  favorable  du  Conseil  municipal  et  d'une  souscription 
ouverte  chez  le  trésorier  de  la  Société,  par  les  amis  de  Guiraldenc. 

Ce  nous  est  un  devoir  de  remercier  ici  M.  Laissac  et  MM.  les 
membres  du  Conseil  municipal  de  leur  intelligente  et  sympathique 
adhésion. 

♦  » 

Lou  Pan  dôu  pecat,  représenté  à  Montpellier  le  soir  de  l'avant- 
dernière  journée  des  fêtes  latines,  a  été  le  point  de  départ  d'une 
nouvelle  reviviscence  du  théâtre  méridional.  Cette  œuvre  de  pro- 
fonde passion  et  de  splendide  poésie  a  obtenu  une  seconde  fois  à 
Alais  le  succès  qui  l'avait  accueillie  à  Montpellier.  Un  autre  drame, 
emprunté  au.\;  souvenirs  des  luttes  religieuses  entre  les  protestants 
et  les  catholiques  des  Gévennes,  a  été  joué  dans  la  même  ville  le 
29  septembre  dernier.  Il  a  pour  titre  la  Camisardo,  et  il  est  formé 
de  quatre  actes  écrits  en  vers  provençaux.  Nous  ne  le  connaissons 
encore  que  par  ce  que  l'auteur  en  a  publié  dans  le  Prouvençau  d' Ai.x 
et  par  les  analyses  des  journaux  de  la  région.  C'en  est  assez  cepen- 
dant pour  reconnaître  que  l'auteur,  M.  Paul  Gaussen,  a  su  éviter 
les  côtés  blessants  de  son  œuvre  et  qu'il  n'a  pas  évoqué,  pour  les 
envenimer,  comme  le  font  trop  souvent  les  poètes  ordinaires,  le 
souvenir  irritant  des  persécutions  rehgieuses.  L'éclat,  la  passion 
et  le  coloris  de  ses  premières  œuvres  se  retrouvent  fortiliées  et 
agrandies  dans  la  CamisGrdo.Toal  ce  qui  y  fournit  matière  à  déve- 
loppement lyrique  est  digne  de  grand  éloge.  11  y  a  surtoutdans  cer- 
tains détails  une  grâce  et  une  fleur  de  poésie  qui  montrent  que 
l'auteur  est  appelé  à  réussir  dans  le  drame  poétique  et  idéal  dont 
Shakespeare  a  donné  de  si  parfaits  modèles. 

D'un  autre  côté,  la  troupe  qui  avait  représenté  à  Montpellier, 


306  CHRONIQUE 

devant  les  hôtes  des  Fêtes  latines,  le  Trésor  de  Suhstuiicion,  y  jouait 
le  17  novembre  une  seconde  œuvre  dramatique  languedocienne  do 
l'altbé  Favro,  ÏOjicra  d'Aithais  '.Un  nouveau  s^uccts  a  été  la  récom- 
pense de  cette  initiative  excellente.  La  troupe  montpelliéraine  ap- 
prend en  ce  moment  un  vaudeville  en  prose  de  M.  Charles  Gros  : 
lou  Bal  dau  Parassol,  qui  parait  appelé  â  un  véritable  succès  de 
gaieté. 

Les  progrès  réalisés  ont  été,  comme  on  le  voit,  assez  rapides 
depuis  le  drame  des  Moxiro  de  M.  Gaut,  représenté  à  Forcalquier 
pendant  les  fêtes  de  Notre-Dame  de  Provence.  Il  est  à  souhaiter 
que  ces  commencements  s'alVermissent  et  se  continuent,  de  ma- 
nière à  doter  le  midi  de  la  France  d'un  théâtre  original,  sérieuse- 
ment étudié,  et  digne,  en  un  mot,  de  celui  que  la  Catalogne  a  su 
se  donner. 

Ce  ne  sont  pas  les  œuvres  qui  risquent  de  lui  faire  défaut. 
M.  Gaussen  doit  faire  jouer  bientôt  un  drame  de  Roulaml,  et 
M.  Roumieux  prépare  pour  le  théâtre  son  histoire  de  Jarjaille  en 
paradis  et  en  enfer.  C'est  la  verve  d'Aristophane  qui  nous  revient 
avec  son  inépuisable  invention,  sa  merveilleuse  gaieté  et  la  dé- 
cence que  le  comique  d'Athènes  connut  trop  rarement.  M.  Rou- 
mieux travaille  aussi  a-aJujamen  dôufilere,  dont  il  fut  un  moment 
question  pour  les  Fêtes  latines  de  Montpellier. 

* 
♦  » 

Notre  collaborateur,  M.  J.  Banquier,  prépare  uyïq  Bibliographie  de 
la  littérature  de  la  langue  d'oc  de  l'année  1847,  date  de  la  première 
publication  de  Roumanille,  à  l'année  1877,  et  il  serait  très-recon- 
naissant à  toutes  les  personnes  (  auteurs,  éditeurs  ou  simples 
curieux)  qui  voudraient  bien  lui  fournir  des  renseignements  bi- 
bliographiques sur  des  ouvrages  méridionaux,  et  surtout  sur  des 
productions  locales  ou  volantes.  Le  dépôt  légal  se  fait  avec  une 
irrégularité  telle,  que  l'on  ne  peut  espérer  être  complet  en  dépouil- 
lant le  seul  Journal  de  la  librairie.  C'est  cette  insuftisancequi  mo- 
tive etjustilie  l'appel  adressé  aujourd'hui  à  nos  lecteurs. 

Les  communications  doivent  être  transmises  à  M.  J.  Banquier, 
rue  des  Bernardins.  42,  à  Paris. 

* 
«  « 

On  n'ignore  pas  combien  sont  rares  les  localités  où  s'est  main- 
tenu l'usage  de  prêcher  dans  l'idiome  local.  A  ce  point  de  vue 
surtout,  il  nous  paraît  utile  de  mentionner  le  passage  suivant 
d'un  mandement  de  l'évêque  de  Fréjus  et  de  Toulon,  en  date  du 
24  juin  dernier  : 

«  11  est  un  point  cependant  auquel  tous  les  évoques  ne  sont 
pas  en  situation  de  toucher,  mais  que  ne  saurait  négliger  un  évè- 
que  provençal  :  l'emploi  de  la  langue  populaire  dans  l'enseigne- 
ment du  catéchisme.  Ce  serait  une  grande  erreur  de  croire  que 
dans  l'Église,  et  lorsqu'il  annonce  la  sainte  parole,  le  prêtre  doit  à 
sa  dignité  de  n'employer  que  la  langue  nationale.  Ainsi  ne  le 
pensait  pas  le  Concile  de  Trente,  qui  recommandait,  au  contraire, 

•  Nous  ne  devons  pas  oublier  une  comédie  provençale  :  Un  pin  fa'  n 
pin,  de  M.  P'-ise,  jouée  avec  succès,  au  mois  de  février  dernier,  sur  le 
tliéàtre  de  Toulon. 


CHROMQUE  307 

(le  rendre  lu  doctrine  sacrée  plus  accessible  en  la  présentant  dans 
le  dialecte  du  peuple  :  Prœcipit  sancta  synodus,  ut  si  opus  .svV  et  com- 
mode fieri  poterit,  sacra  eloquia  et  satutis  vionila  vcmacalâ  lingut't  e.c- 
planent.  Nous  avons,  dans  notre  pays  des  troubadours,  d'autant  plus 

de  raison  de  préférer  les  conseils  de  la  Sainte  Eglise 

que  notre  dialecte  n'est  pas  un  patois  méprisable,  mais  une  vraie 
langue,  riche,  souple,  expressive  autant  qu'une  autre,  plus  imagée 
peut-être  et  à  coup  sûr  plus  populaire;  le  jdus  grand  nombre  de 
nos  entants, quand  ils  sont  aiYranchis  des  exigences  réglementaires 
de  l'école,  n'en  parlent  point  d'autre,  et  presque  partout  c'est  elle 
encore  qui  transmet  et  qui  consacre  les  traditions  de  la  famille. 
Ne  craignez  donc  pas,  Messieurs,  dans  les  catéchismes  des  parois- 
ses, d'instruire  et  d'interroger  en  provençal;  vous  aurez, —  et  c'est 
une  expérience  que  votre  évéque  ne  rougit  pas,  tant  s'en  faut, 
d'invoquer,  —  vous  aurez  là  une  pierre  de  touche  infaillible,  ([ui 
vous  permettra  de  savoir  si  vous  avez  été  compris.  » 


Nous  sommes  en  retard  pour  annoncer  aux  lecteurs  de  la  Eevue 
que,  dans  sa  séance  du  27  juillet  1877,  l'Académie  des  inscriptions  et 
belles-lettres  a  entendu  la  lecture  d'un  rapport  de  M.  Longpérier 
sur  les  récompenses  décernées  par  la  Commission  des  antiquités 
de  France. Trois  médailles  ont  été  attribuées  à  MM.  Demay,  Bros- 
selard  et  Peigné-Delacourt.  Les  deux  premières  mentions  honora- 
bles ont  été  accordées  à  M.  Chabaneau,  pour  sa  Grammaire  limou- 
sine, et  à  M.  Bien  de  Maria vagne,  pour  son  Histoire  de  la  cathédrale 
de  Rodez. 

* 
*  * 

La  libiairie  Dorregaray,  à  Madrid,  met  en  souscription  VHistoriu 
politicay  liieraria  de  los  Trovadores,  par  M.  Victor  Balaguer.  L'œu- 
vre de  l'illustre  poëte  et  historien  catalan  ne  formera  pas  moins  do 
six  volumes  in-8o  et  sera  terminée  dans  un  court  délai.  Elle  se 
compose  d'environ  trois  cents  biographies,  où  le  troubadour  est  pré- 
senté sous  son  double  aspect  littéraire  et  politique  et  étudié  dans 
ses  diverses  œuvres.  Celles-ci,  ou  tout  au  moins  les  principales, 
viennent  ensuite,  accompagnées  d'une  traduction  littérale  en  es- 
pagnol. 

* 

Dans  sa  séance  du  28  juin,  M.  Gaston  Paris  a  fait  connaître  à 
V  Académie  des  inscriptions  et  belles -lettres  les  décisions  de  la  Com- 
mission des  antiquités  de  la  France  sur  le  Concours  de  l'année 
1878.  Quatre  médailles  et  six  mentions  honorables  ont  été  décer- 
nées. Une  de  ces  dernières  a  été  attribuée  à  M.  Luchaire,  pour 
ses  Origines  linguistiques  de  T Aquitaine. 


Au  commencement  de  cette  année,  le  roi  Humbert  a  fondé  deux 
prix  annuels  de  dix  mille  francs.  Le  premier  est  destiné  au  meil- 
leur travail  ou  à  la  plus  importante  découverte  scientiljquo;  l'autre, 
à  la  meilleure  œuvre  littéraire  ou  philologique,  h' Académie  desLyncées 
est  chargée  de  prononcer  sur  le  mérite  des  œuvres  envoyées.  Les 
seuls  Italiens  seront  admis  à  concourir. 


308  CHKONIQUE 


Fête  a  Quarante.  —  Quarante  a  eu,  le  12  mai  dernier,  sous 
l'inspiration  «le  M.  Caraille  Laforgue,  sa  petite  et  très-remarquable 
fèto  romane,  donnée  au  bénêtico  de  la  Société  philharmonique 
Saint-Jean,  alors  en  voie  de  reconstitution.  Deux  œuvres  d'une 
verve  et  d'un  caractère  tout  à  fait  populaire  :  lous  Set  Pecach  ca- 
pihils  de  las  fcnnos,  de  .T.  Laurès,  et  lou  Lufrî  de  Lader,  de  Mir,  en 
ont  formé  le  principal  attrait.  Cette  dernière  a  été  débitée  par 
M.  Prax,  d'AIzonne.  Diverses  pièces,  Vlhrougnariè.  Tems  passât 
aillé  tems  d'aro.  la  Fourmigo  e  lou  Gril,  de  Mir;  la  Malautiè  de  la 
bigno,  de  Laurès,  liguraient  sur  le  programme  languedocien  delà 
journée.  Trois  poésies  inédites,  Zom  Tracassai  dePolhos,  par  Laurès, 
la  Velhado  et  las  Oulivasoùs.  de  Prosper  Vidal,  ont  été  récitées  en- 
suite par  leurs  auteurs.  Le  premier  des  poèmes  de  M.  Vidal  de- 
vait, quelques  jours  après,  recevoir  le  rameau  d'olivier  de  la  Société 
archéologique  de  "Béziers.  Le  deuxième  faisait  partie  des  œuvres  que 
le  jury  de  la  Société  des  langues  romanes  a  récompensées  au  moyen 
d'une  médaille  d'argent,  lors  des  fêtes  latines  de  cette  année. 

* 

L'Aube  pbovengale  a  tenu,  le  23  juin,  à  Marseille,  sous  la  prési- 
dence de  M.  Lieutaud,  une  séance  littéraire  et  poétique. 

Elle  vient;de  prendre  l'initiative  d'un  Concours  provençal,  dont 
voici  les  sujets  et  les  prix  : 

Une  églantine  d'or  à  une  poésie  provençale  snr  un  sujet  tiré  de 
l'histoire  de  la  Provence  ou  de  l'une  de  ses  villes  ; 

Un  boulon  de  rose  en  argent  à  une  pièce  de  prose  sur  un  sujet 
historique,  littéraire  ou  scientifique; 

Une  médaille  en  argent  à  une  pièce  de  prose  provençale  sur 
un  sujet  satirique  emprunté  aux  mœurs  de  la  Provence. 

Les  manuscrits  doivent  être  adressés,  avant  le  l'^''  avril  1879,  à 
M.  J.  Monné,  secrétaire  de  Vxiuhe,  à  Marseille. 

FÉLiBRiGE.  La  réunion  générale  de  la  maintenance  de  Provence 
a  été  tenue  le  3  mars,  à  Marseille,  sous  la  présidence  de  M.  Au- 
banel.  Parmi  les  membres  nommés,  nous  remarquons  Mgr  Du 
breuil.  archevêque  d'Avignon;  M.  F.  Peise,  le  directeur  du  Franc 
Prouvencaou,  almanach  paraissant  à  Draguignan,  et  M.  Chailan, 
l'auteur  du  poème  des  Ermitan  de  Sant-Jan  henurous. 

L'.Assemblée  décida,  en  principe,  la  formation  des  trois  écoles 
de  Nice,  de  Toulon  et  d'Apt,  en  chargant  le  buieau  des  détails 
d'organisation. 

Le  secrétaire,  M.  de  Villeneuve,  lut  ensuite  un  rapport  qui  lui 
avait  été  adressé  par  M.  de  Berluc-Perussis  sur  le  Concours  d'Apt. 

Le  restant  de  la  journée  appartint  à  la  poésie. 

La  réunion  de  la  maintenance  de  Languedoc,  aussi  bien  que 
celle  de  la  maintenance  d'Aquitaine,  n'a  pas  eu  lieu.  Quant  à  l'As- 
semblée générale  de  la  Sainte-Estelle,  elle  a  été,  comme  on  sait, 
tenue  à  Montpellier  le  dimanche  26  mai.  On  en  trouvera  la  relation 
dans  le  Compte  rendu  des  Fêtes  latines. 

Le  Floréoe  d'Avignon.  Les  prix  du  Concours  de  1878  ont  été 
décernés  le  18  août  à  St-Rémy,  sous  la  présidence  de  M.  Marius 
Girard,  l'auteur  du  recueil  de  poésie  Us  Aupiho.  La  Société  des  lan- 
gues romanes  s'était  associée  à  ce  Concours  par  le  don  de  quatre 
médailles,  deux  d'argent  et  deux  de  bronze  ;  M.  Aubanel,  par  une 


CHRON IQUE  30« 

une  médaille  de  vermeil;  M.  C.  Laforgue,  par  une  médaille  d'ar- 
gent. Le  Félibrige  des  AJpes  avait  oHert  à  son  tour  une  seconde  mé- 
daille de  vermeil.  Les  pièces  provençales  à  traduire  en  français 
étaient  :  pour  la  prose,  un  fragment  du  discours  de  Roumanille  aux 
fêtes  de  Reboul.  en  1876;  pour  la  poésie,  loaViarje,  d'Aubanel. 

Les  jeunes  gens  de  moins  de  seize  ans  étaient  les  seuls  admis  à 
concourir.  Voici  les  noms  des  lauréats  de  1879  : 

Loi)  ViAGE  (traduction  en  prose)  :  m.  verm.,  Henri  Brun,  de  Vai- 
son;  m.d'arg.,  Louis  Bonnet,  de  Saint-Rémy;  m.  de  br.,  Paul  Brun, 
de  Frigolet;  ment.  ;  Lalil,  Pezière  ot  Waton. 

Lou  ViAGK  (trad.  en  vers)  :  m.  verm. .  Napoléon  François,  d'Avi- 
gnon ;  m.  d'arg.,  Albert  Daumet,  de  Toulouse;  m.  d'arg.,  Josepii 
Bouvet: d'Avignon  ;  m.  de  br..  Léonïalop, de  Privas;  ment.,  Fro- 
ment. 

Jan  Reboul:  m.  verm.,  Benoît  Mazeau,  d'Uzès;  m.d'arg.,  Louis 
Noyer, de  Sorgues  ;  méd.  d'arg.,  Alph.  Suc,  d'Avignon;  m.  de  br. , 
Justin  Julien,  de  l'isle;  ment.:  Abrial,  Véron  et  Reynier. 

Le  discours  d'ouverture  a  été  prononcé  par  M.  Marins  Girard, 
qui  aurait  dû  ne  pas  y  renouveler  le  système,  depuis  longtem])s 
abandonné,  de  Raynouard  :  une  langue  romane  succédant  au  latin, 
et  pendant  plusieurs  siècles  commune  à  tous  les  peuples  de  l'Oc- 
cident, avant  l'existence  de  l'italien,  du  provençal,  de  l'espagnol  et 
du  français.  Le  rapport  de  M.  Mouzin  n'est  pas  non  plus  sans  lais- 
ser quelque  prise  à  la  critique  linguistique.  Il  faut,  du  reste, féliciter 
M.  Girard  et  M.  Mouzin,  mais  surtout  ce  dernier,  d'une  idée  excel- 
lente et  qui  ne  peut  donner  que  de  bons  résultats  :  la  traduction 
en  provençal  moderne  d'une  pièce  en  vieux  provençal.  Cette  inno- 
vation sera  mise  en  pratique  l'an   prochain. 

M.  Marias  Girard  a  eu  raison  de  faire  remarquer,  à  la  lin  de  son 
discours,  que  la  pensée  première  des  Concours  du  Floréfje  était  due 
au  frère  Savinien  et  à  sa  remarquable  méthode  d'enseignement  du 
français  par  le  provençal. 

Société  des  Félibres  de  la  Mer.  a  Marseille. — Dans  les  premiers 
jours  d'avril,  elle  a  tenu  à  la  villa  Charmerette,  sous  la  présidence  de 
M.  Cbailan,  une  réunion  où  des  poésies  inédites  ont  été  communi- 
quées. On  a  remarqué  parmi  celles-ci  li  Reire  de  Tavan  et  Par- 
imiolo  de  Lieutaud.  M.  Chailan  a  ouvert  la  félibrée  par  d'heureuses 
paroles  de  bienvenue  et  de  r.?merciement.  Le  Prouvencau  d'Aixies 
a  publiées  dans  son  n"  du  14  avril. 

xAthenée  de  Forgalqoier  et  Félibrige  des  Alpes,  année  1877.  — 
La  deuxième  séance  semestrielle  tenue  en  1877.  par  les  deux  So- 
ciétés réunies, a  eu  lieu  le  4  novembre.  Nous  remarquons,  parmi  les 
communications  françaises,  quelques  chapitres  d'une  étude  ethno- 
graphique de  M.  Charles  Descosse  sur  les  Origines  de  la  race  pro- 
vençale, et  une  autre  étude  de  M.  Jules  Terris  sur  la  Vie  domes- 
liquiédans  lesBasses-Alpes.au  XVII*  siècle.  La  partie  provençale 
de  la  séance  consistait  en  un  rapport  en  prose  de  M-l'abbi-  Savy, 
président  duFélinrigc  des  Alpes;  Pantai,  par  M'»e  Lazarine  Daniel; 
un  petit  poème  sur  la  légende  bas-alpine  de  Saint-Eucher,  par  un 
anonyme,  et  deux  sonnets  dus  à  MM.  Gant  et  Vidal. 

Athénée  de  Forcalquier  et  Félibrige  des  Alpes,  année  1878. — 
Le  banquet  annuel  des  deux  Sociétés  réunissait,  le  10  mars,  de  nom- 
breux adhérents.  M.  de  Berlue -Perussis,  récemment,  placé  à  la  tète 
de  V Académie  d'Aix,  avait  prié  V Athénée  de  lui  donner  un  succes- 

21 


310  CHRONIQUE 

seur.  Le  nouvel  élu  est  M.  Eugène  Plaucliud,  qui  a  lu  pondant  le 
banquet  un  ronteen  dialecte  alpin.  D'autres  pièces  provençales  ont 
été  communiquées  ou  adressées  par  MM.  Milon,  Verdot,  Astruc, 
etc. 

Le  Concours  que  VAfhénée  avait  ouvertà  propos  de  la  restauration 
de  la  maison  natale  de  Gassendi,  par  les  soins  de  la  Société  fran- 
çaise d'archéologie,  a.  contluitàla  fin  du  mois  de  juin  dernier  M.  Léon 
Palustre^  directeur  de  cette  association^  et  un  assez  j^rand  nombre 
de  ses  membres,  dans  l'arrondissement  de  Forcalquier.  En  sa  qua- 
lité d'inspecteur  divisionnaire,  M.  de  Berluc-Perussis  les  a  reçus 
au  château  de  Porchères  et  leur  a  offert  une  disnée  archéologique, 
renouvelée  de  celle  que  les  consulsdeForcalquier  offrirent,  en  1533, 
au  grand  président  de  Provence.  Vaisselle  d'étain,  menu  et  toasts, 
tout  était  en  style  du  XVI»  siècle.  Voici  le  spirituel  début  du  brinde 
de  M.  de  Berlue  : 

«  Messires  et  chiers  confrères,  cependant  que  s'en  vienct  la  science 
peregrine  planter  le  coultre  es  terres  vierges  denos  Aulps,  poinct  ne 
faillirai  le  au  debvoir  qui  m'incombe  de  salluer  en  leur  advenue  ses 
desfricheurs  trez  vaillants. 

»  Cestuy  iour,  messires,  sera  escript  en  majeures  lettres  es  mé- 
moriaux de  nostre  comté  et  patrie  de  Fourcaulquerois,  et  n'oublie- 
rons mye  prendre,  pour  marquer  iceluy,  pierre  la  mieulx  blanche 
des  Graux  de  ce  présenct  Ueu.Feust  aultres  fois  moult  illustre  nostre 
souverain  Estât,  duquel  les  princes  le  doctèrent  de  raonumens  trez 
precieulx,  et  senblablement  de  non  moins  precieulses  chartes  et  li- 
bertez.  Mais,  du  depuis  s'estant  treuvée  la  dicte  contrée  abandon- 
née et  descheue  d'icelle  gloyre,  s'en  vinrent  frustes  et  branlants  les 
édifices  susditctz  comme  pareillement  nos  franchises.  Ung  homme 
etgenie  trez  excellent  [iVL.de  Gaumont]se  renconstra  en  nos  iours, 
lequel,  meu  d'affection  pour  les  reliefs  et  relicles  des  tems  escoulez, 
funda  ceste  moult  scavante  et  curieuse  Gompaignie,  laquelle  en 
chacune  province  de  ce  pais  de  France,  visite,  descript,  engarde  et 
par  mainctes  foys  repare  les  œvres  les  mieulx  plaisantes  de  nos 
prédécesseurs  et  devanciers.  » 

Les  fêtes  de  Gassendi,  comme  les  a  nommées  le  Journal  des 
Basses-Alpes,  ont  été  à  demi  archéologiques  et  à  demi  provençales, 
surtout  à  Forcalquier,  où  MM,  l'abbé  Savy,  Gaut,  Auguste  Verdot 
et  Ch.  Descosse,  ont  lu  diverses  poésies  publiées  dans  les  colonnes 
du  Journal  de  Forcalquier,  le  moniteur  exact  et  compétent  du  mou- 
vement littéraire  bas-alpin 

La  deuxième  séance  semestrielle  de  V Athénée  et  àuFélibrige  a  eu 
lieu  le  1'='"  novembre.  MM.  Verdot  et  l'abbé  Savy  ont  communiqué  des 
poésies  provençales  inédites;  MM.  Descosse,  Plauchud  et  Pelioux, 
des  mémoires  concernant  l'histoire,  l'archéologie  locale  etl'histoire 
naturelle.  M.  l'abbé  Savy  a  résumé  en  prose  provençale  les  tra- 
vaux du  i^e^j^n^/e  (Zes^Zpes  pendant  l'année  qui  vient  de  s'écouler. 
Line  poésie  inédite,  la  Chavano,  de  feu  Amédée  Martin,  a  été  lue 
par  M.  Descosse.  Il  aété  lu,  enfin,  un  travail  de  M.Georges  Gar- 
nier  sur  l'origine  du  sonnet;  ce  dernier  en  ferait  presque  honneur 
aux  troubadours,  contrairement  à  l'opinion  générale,  qui  y  voit  une 
forme  de  poésie  sicilienne  ou  toscane. 

Société  des  Félibres  du  Gardon,  a  Alais.  —  Cette  École  semble 
subir  une  sorte  de  temps  d'arrêt.  Elle  a  discontinué  ses  réunions 


CHRONIQUE  :^11 

depuis  quelques  mois,  et   sa  publication  ordinaire,  VAnnana  de 
Lengado,  ne  paraîtra  pas  cette  année. 

Elle  avait  pris  sous  son  patronage,  au  commencement  de  1878, 
une  quinzaine  de  jeunes  gens  choisis  dans  les  écoles  communa- 
les d'Alais.  et  elle  avait  chargé  un  de  ses  plus  jeunes  membres, 
M.Aristide  Brun,  de  les  diriger  dans  l'étude  de  la  langue  d'oc  et  de 
son  orthographe   Cet  essai,  fort  louable,  n'a  pas  eu  de  suite. 

L'activité  littéraire  dos  félibres  d'Alais  n'a  pas  été,  du  reste,  ra- 
lentie; Ml''  Goirand,  MM.  Gaussen,  Charvet.  Paul  Félix,  Bastidon, 
etc.,  continuent  à  représenter  dignement  les  deux  poésies  lan- 
guedocienne et  provençale  dans  cette  ville. 

Un  seul  nom  leur  manque,  celui  du  plus  ardent  et  du  plus  en- 
thousiaste, Albert  Arnavielle,  que  les  exigences  du  service  des  che- 
mins de  fer,  auquel  il  appartient,  ont  conduit  dans  le  Morvan,  à 
Cercy-la-Tour  (Nièvre).  La  ville  de  Nevers  a  eu  même,  au  mois 
d'août  dernier,  sa  petite  lélibrée  nivernaise,  organisée  par  le  poète 
des  Caiits  de  l'Auho,  de  concert  avec  quelques  Cévenols,  que  l'a- 
mour des  montagnes  natales  et  de  leur  langage  avait  réunis  autour 
de  lui. 

Société  archéologique  de  Béziers.  —  Le  Concours  de  187S  a 
donné  les  résultats  suivants  : 

Mémoires  historiques  et  monographies.  —  Couronne  de  laurier  en 
argent,  M.  l'abbé  Font,  pour  son  Histoire  de  l'abbaye  de  Saint- Mi- 
chel-de-Cuxa  ;  médaille  de  vermeil,  M.  Maurice  Fabre  père,  pour 
les  monographies  de  Gabrières.  Péret,  Adissan,  etc.;  médaille  d'ar- 
gent, M.  Alibert,  pour  ses  Recherches  historiques  sur  la  baronnie  de 
Roque-Courbe  ;  mentions  honorables:  MM.  Pommier  et  l'abbé  Mar- 
tin Seré. 

Poésie  néo-romane.  —  Rameau  d'olivier  en  argent,  M.  Prosper 
Vidal,  pour  la  Velhado;  médaille  d'argent,  M.  l'abbé  Joseph  Roux, 
pour  Christofle  Couloumb,  lou  Malurous,  Ad  una  margarita;  médaille 
d'argent,  M.  Ernest  Chalamel,  pour  En  quet  en  lou  bounur;  médaille 
de  bronze  :  le  frère  Théobald,  pour  la  Petouso  ;  mentions  honora- 
bles,  MM.  Louis  Gleize  et  Paul  Gourdon. 

La  Cigale.  —  Deux  de  ses  réunions  ont  présenté  un  grand  in- 
térêt :  la  première,  le  9  février;  la  deuxième,  le  3  avril  suivant. 
Dans  la  première,  qui  relève  plutôt  du  Compte  rendu  des  fêtes  la- 
tines que  de  cette  Chronique,  M.  de  Quintana  affirma  ses  vieilles 
sympathies  pour  la  France  et  les  espérances  que  lui  inspirait  la 
fête  du  Chant  du  Latin;  dans  la  seconde,  M.  de  Tourtoulon  lut  des 
fragments  du  Garda-Mas,  de  Langlade,  dont  la  Revue  des  langues 
romanes  venait  d'achever  la  publication. 

Le  peu  d'espace  dont  nous  disposons  aujourd'hui  ne  nous  per- 
met pas  de  parler  comme  nous  le  voudrions  de  la  fête  que  l'Asso- 
ciation méridionale  de  Paris  donna  à  MM.  Aubanel,  Roumieux, 
Arnavielle,  Gras,  Goirand,  Charles  Gros,  Marsal,etc..le  24  octobre, 
dans  les  salons  de  l'hôtel  Continental.  M.  Bardoux,  ministre  de 
l'instruction  publique,  en  avait  accepté  la  présidence. 

L'importance  de  cette  réunion  a  été  grande,  et  les  paroles  qui 
y  ont  été  prononcées  de  part  et  d'autre  ont  fait  l'objet  de  maints 
comptes  rendus.  M.  P.  Arène  a  porté  un  toast  à  Aubanel, qui  est, 
a-t-il  dit  avec  raison,  «  non-seulement  un  des  premiers  féhbres, 
mais  encore  un  des  plus  grands  poètes  de  la  France.  »  M.  Saint- 


.•^12  CMRONIQÎTF. 

Itoné  Taillandier  dévoloppa,  dans  une  longue  conférence,  ce 
iliémc  trop  exclusif  et  île  jilus  en  plus  condamné  par  les  dernières 
œuvres  du  Frlihrif/c,  que  la  poésie  provençale  doit  être  consncrée 
à  exprimer  les  sentiments  rustiques,  les  souvenirs  de  la  famille  et 
(lu  foyer.  M.  Anbanel  montra,  enfin,  que  le  Félihrige  n'est  que  la 
suite  de  trois  siècles  de  poésie  méridionale,  souvent  obscure  etcon- 
lesiée.  mais  non  sans  gloire,  lorsqu'elle  rencontrait  sur  son  chemin 
nelaiii!  de  la  Bélaudière  et  Saboly.  Le  FëUhrige,  en  tant  que  litté- 
rature, est  une  rénovation  et  non  une  création  • 

«  Nosto  escolo,  pèr  nous  ôucupa  de  ço  que  nous  es  vesin,  da- 
valo  en  drecho  rego  de  l'escolo  marsiheso  de  1840.  l'aviô  tambèn 
alor  uno  boulegadisso  literàri,  forço  vivènto  e  brusènto.  Lou  Bouia- 
baisso  de  Desanat.  li  cansoun  de  Gelu  e  li  conte  de  J3ellot,  èron 
lou  grand  regôli  e  lou  meiour  passo-tèms  de  tout  bon  Prouvençau. 
Roumaniho,  Crousihat  e  la  majo  part  dis  encian  felibre,  an  em- 
premi  si  premié  vers  dins  li  papié  d'aquéu  tèms  adeja  liuen,  c  iàéu 
segur  que  s'èron  eici,  renegarien  pas  aquelo  vièio  counlraltmita.» 

On  ne  peut  dire  mieux  ni  plus  juste,  et  il  est  sage  de  ne  pas  re 
nier  ses  origines,  quelque  grand  que  l'on  soit  devenu.  Il  faut  néan 
moins  reconnaître  que  le  Félihrige  doit  à  des  premiers  initiateurs- 
MM.  Aubanel,  Mistral  et  Roumanille,  un  esprit  nouveau,  à  demi 
mystique,  à  demi  poéti([ue,  une  sorte  de  souffle  très-divin,  pour  par- 
ler comrtie  Horace,  qui  a  toujours  manqué  à  la  pléiade  marseillaise 
et  qui,  parmi  les  littératures  que  le  XIX"  siècle  a  vues  éclore,  con- 
stitue la  forte  et  caractéristique  originalité  de  la  renaissance  pro- 
vençale. 

La  fin  du  discours  de  M.  Aubanel  renfermait  cette  protestation 
que,  dans  le  Félihrige,  «  c'était  1  ame  qu'il  fallait  voir,  etque  cette  âme 
était  à  la  France.  »  Tel  fut  le  thème  do  quelques  strophes  admira- 
bles lues  par  M.  de  Bornier  : 

Que  te  reste-l-il  donc,  à  toi  ?  Dans  notre  temps, 

A-t-on  déshérité  tes  fils,  <'>  Pof'sie? 

Et  ne  3onl-ils  donc  rien  que  des  roseaux  chantants  ? 

Non,  non!  ils  ont  leur  part  dans  la  grande  œuvre  à  faire. 
L'art  est  le  souffle  ardent  du  vaisseau  remorqueur; 
Chanter,  c'est  travailler,  quand  le  chant  est  sévère. 
Quand  il  sert  la  patrie  en  lui  haussant  le  cœur  ! 

Poètes,  en  ces  jours  pleins  de  mâle  espérance, 
Dieu  nous  réserve,  à  nous,  une  gloire  ici-bas  : 
C'est  d'aimer,  de  servir,  de  soutenir  la  France, 
Dans  ses  enfantements  comme  dans  ses  combats  ! 

Tout  ce  qui  n'est  pas  fait  pour  elle  est  éphémère; 
Ceux  qui  la  railleraient,  frivoles  ou  jaloux, 
Ressemblent  à  l'enfant  qui  rirait  de  sa  mère  : 
Le  rire  peut  tuer.  —  Parricide,  à  genoux  ! 

Au  cours  de  cette  fête,  M.  Bardoux  remit  à  MM.  Aubanel,  Gras 
et  l'aul  Arène,  les  palmes  d'officier  d'académie. 

Il  a  été  |)arlé  plus  haut  du  toast  de  M.  Roumieux.  Celui  de 
M.  Gras  introduisit  dans  la  fête  une  note  politique  qu'il  eût  été 
sage  d'en  écarter. 


CHRONIQUE  313 

Académie  dbs  .Ieux  floraux. — Toulouse  ouvre  ses  portes  au 
Félihrige.  Dans  sa  séance  du  14  juin,  l'Académie  toulousaine  a 
nommé  Mistral  maître  es  jeux  floraux. 

»    m 

Publications  catalanes,  languedociknnes  et  gasconnes^  travaux 
DE  philologie,  etc.  —  Achille  Luchaire  :  Etudes  sur  les  idiomes pyré- 
néeti^dela  région  française.  Paris,  Maisonneuvo,  in-8o,  xn-373  pages. 

Le  Breoiari  damorde  Matfre  Ermengaud,  suivi  de  sa  Lettre  à  sa 
sœur,  puhlié  par  la  Société  archéologique,  scientifique  et  littéraire  dr 
Béziers.  Introduction  et  Glossaire  par  tiahriol  Azaïs.  Paris,  Wioweg. 
tom.  11(3'^  livraison,  p.  381-572;. 

Recueil  de  versions  provençales  jiour  V enseignement  du  français  en 
Provence.  Deuxième  partie.  Avignon,  Aubanel .  in-12,  xii-lT2-lU0  p. 

Alart  ,  Privilèges  et  titres  relatifs  aux  franchises .  institutions  et  pro- 
priétés communales  de  Roussillon  et  de  Cerdagnr,  depuis  le  XP  siècle 
jusqu'à  l'an  1660,  recueillis  et  imhliés  par  B.  Alart,  I'^^  partie.  Perpi- 
gnan. Latrobe.  in-4°,  352  pages. 

Cardona  (  Enrieo  ),  deU  Antica  Letteratura  catalana:  Studi,  se- 
guiti  dal  Testa  e  délia  Vita  di  Giacomo  I,  tolta  délia  cronaca  catalana 
di  Ramon  Muntaner .  Napoii.  Furchheim,  in-12.  2^i0  pages. 

Lespy  et  Raymond  .  Un  baron  béarnais  au  A'F''  siècle,  textes  en  lan- 
gue vulgaire,  traduits  et  publiés  par  V.  Lespy  et  X.  Raymond.  Pau, 
Bibaut.  2  vol.  in-8%  xxvi-228  pages. 

Boucherie,  Faculté  des  lettres  de  Montpellier .  U Enseignement  de  la 
philologie  romane,  leçon  d'ouverture  prononcéepar  .A  .Bouclierie,  Mont- 
pellier, Imprimerie  centrale  du  Midi,  in-B".  30  i>ages.  (Extrait  de  la 
Revue  des  langues  romanes .) 

Verdaguer  .  la  Atlantida,  poema  que  obtingué  7  premi  de  la  ExC^" 
Diputaciu  provincial  de  Barcelona,  en  los  Jocs  Fierais  de  1877,  «6  la 
traducciô  castellana  per  Melcior  de  Palau.  Barcelona,  Jaume  Jepûs, 
in-8o.  348  p. 

Pelay  Briz,  tos  5aZa<fas  fêtas  per  Francesch  Pelay  Briz.  Barce- 
lona, Rocci  y  Bros,  in-8",  128  pages. 

Mistral,  lis  Isclo  d'or,  recuei  de  pouësio  diverso,  ein'uno  prefàci  biou- 
grafico  de  Vautour,  escricho  pèr  éu-mème  (3^  édition,  revue  et  corrigée). 
Avignon.  Roumanille,  1878,  in  12.  .530  pages. 

Louis  Roumieux.  laJarjaiado,  pouènio  erouï-coumique  de  Louis  Rou- 
mieux  {deNimes),  emé  traducioun  franceso.  Jarjaio  att  Paradis,  —  Jar- 
jaio  au  Purgatori,  —  Jarjaio  à  VInfèr, —  Jarjaio  sus  terro.  Ilustracioun 
d'Edouard  Marsal.  i  aris.  Maisonncuve  et  C«.  Motint-pelié,  Marsal. 
in-8°,  xii-185  pages  '. 

Garetà  y  Vidal.  Brosta,  aplech  de  quentosj  cscenas  de  costums,  tra- 
dicions,novelas  y  fantasias.  Barcelona.  Roca  y  Bros,  in-12, 244  pages. 

Francesch  Matheu  :  lo  Reliquiari.  Morta-Spleen-Primavera.  Bar- 
celona, Verdaguer,  in-12,  152  pages. 

No'éls  latins ,  français  et  provençaux ,  extraits  des  recueils  deSaboly. 

*  En  nttpndant  le  compte  rendu  qui  doit  être  consacré  à  Ja  Jarjaillade. 
nous  croyons  utile  dp.  prévenir  le  lecteur  que  la  qualrièmo partie  du 
poëmo  .  jarjaio  sus  terro,  a  été  rédigée  postérieurement  aux  Fêtes  la- 
tines. C'est  également  après  coup  que  le  manuscrit  primitif  a  été  modifié 
à  la  troisième  page  de  Jarjaio  à  l'infèr. 


814  CHRONIQUE 

Roche,  etc.,  «uec  Im  anciens  noëh  les  plus  populaires  en  Provence.  Mar- 
spille,  (ihaulTard.  in-8o  à  2  col.,  46  paaes. 

A.  Fourès  :  le  Cottmpousitou.  Mount-pelhc,  Estampario  centrale 
(loi  Miùchjoun.  in-S",  17  pages.  (Cette  brochure  n'est  pas  dans  le 
rommorco.)  .  ^ 

l'ïubiiisson  :  JJistoriœ  monasterii  S.  Severi,  in  Vasconia,  lihri  X. 
Villenouve-.Mar.san,  2  vol.  in-8»,  830  pages.  (Cet  ouvrage  contient 
à  la  fin  du  second  volume  un  glossaire  gascon.  ) 
t  Calenfldri  cafalâ  del  any  1 879,  escrit  per  los  mes  reputats  autors  ca- 
nlans.  mallorquins  y  vateneians,  y  coleccionat  per  F.-P,  Briz  y  F. 
Matheu.  Barcelona,  Roca  y  Bros,  in-12,  128  pages. 

Arniana  prnuvençau  jjèr  lou  bel  an  de  Dieu  1879.  adouba  e  publica 
de  la  mandifelibre.  Avignoun,  Roumanille.  in-12,  112  pages. 

Auhanel.  Luno pleno,  Montpellier.  Imprimerie  centrale  du  Midi, 
in-8",  4  pages.  (Extrait  de  la  Revue  des  langues  romanes,  no  de  juillet- 
septembre  1878.) 

Aubanel.  Brinde  de  Teodor  Aubanel,  sendi  de  Prouvènço,  à  la  tau- 
lepulo iiarisenco  de  la  Cigalo.  Avignoun,  Aubanel,  in-8",  17  pages. 

Aubanel.  Brinde  de  Théodore  Aubanel  au  banquet  2^^^^^^^^''^  fl^  la 
Cigale,  traduit  du  provençal.  Va^rï?.,  Arnous  de  Rivière,  in-4'',  4  pag. 

Louis  Roumieux.  Fèsto  de  la  Cigalo.  Brinde  de  Louis  Roumieux 
(  au  banquet  de  l'hôtel  Continental).  Paris.  Arnous  de  Rivière,  in^", 
4  pages. 

Bourrelly  (  Marins  ).  Poesia  provenzal  dedicada  à  la  asocia^ion  li- 
teraria  de  Gerona,  con  motivo  del  certdmen  de  1878.  Gerona,  in-4'', 
4  pages. 

Chronique  bordelaise  de  Gaufreteau  (publiée  parM.J.  Delpit,  pour 
la  Société  des  bibliophiles  de  Guyenne).  Bordeaux,  Gounouilhou,  187B- 
1878,  2  vol.  in-i",  xv-335-478  pages. 

Contient,  pages  253-284  du  tome  II,  des  vers  latins,  français  et 
gascons,  composés  ou  réunis  par  Jean  de  Gaufreteau. 

Bladé.  Trois  Contes  populaires  recueillis  à  Lectoure,  traduction  fran- 
çaise et  teccte  gascon .  Bordeaux,  Lefebvre,  in-S»,  76  pages. 

Rivière.  Mou  dera  coucon,  poésie  dauphhwise,  précédée  de  quelques 
notes  sur  le  langage  de  Saint- Maurice-de-l' Exil,  et  suivie  d'un  conte  po- 
pulaire sur  le  Renard.  Montpellier,  Imprimerie  centrale  du  Midi, 
in-8<*,  24  pages.  (  Extrait  de  la  Revue  des  langues  romanes.  1878.  ) 

Reboul.  Bibliographie  des  ouvrages  écrits  en  patois  du  midi  de  la 
France  et  des  travaux  de  la  langue  romano-provençale .  Paris,  in -8°. 

Ch.  Gros.  L'Aoutouna  de  la  vida,  VOumbra  de  Charles  Martel, 
lou  Cant  daou  Latin.   Montpellier,  Navas  et  Waré,  in-8°,  16  pag. 

Fiter  é  Inglés.  Invasiô  dels  Alarbs  en  la  Cerdanya  y  reconquisto 
d'aquesta  comarca  per  los  Cristians.  Barcelonâ,  estampa  de  la  Re- 
naixensa,  in-8o,  30  pag. 

Aulestia  y  P'i']OSin.  Barcelonâ,  ressewya  ^isiôrica.  Barcelonâ, Texidô 
y  Parera,  in-12,  84  pag. 

A.   R.-F. 

Le  Gérant  responsable  :  Ernest  Hamelin. 


TABLE  DES  MATIÈRES 

DU    SIXIÈMK    VOLUMK    DK    LA    DEUXIÈME    SlÏKlK 

DIALECTES    ANCIENS 

Cantique  provençal  sur  la  Résurrection  (Chabanead). 5 

Inscription  provençale  en  vers  du  XVP  siècle  (Chabaneau).  .  Kil 

DIALECTES   MODERNES 

Noël  languedocien  inédit  (Chabaneau) 10 

Notes   sur  le  langage  de  Saint-Maurice-de-l'Exil  (Isère)    Mou 

dera  Coucon.  Idiglie  (Kiviî:re) Il 

Un  fragment  de  poëme  eu  langage  de  Bessan  (Hérault)  (Alpli. 

Koque-Fkrriek)  .  . • 2 'i 

Poueisias   dioisas    de    Gusté    Boueissier  (suite)  (Jules  Saint- 

Rémy) ;32 

Lettres  à  Grégoire  sur  les  patois  de  France  (suite)  (Gazier).  .   5l-lt>9 

Chants  populaires  du  Languedoc  (suite)  (Montel  et  Lambert)  7;i 

No'd  pèrigourdiu  (Chabaneau) I (j4 

LTn  sonnet  de  Ranchin  traduit  en  provençal  et  en  languedocien 

(Martin) 1  iw 

Un   conte  dauphinois  sur  le  Loup  et  le  Renard  (Rivière)....  IH4 
L'Enseignement   de    la   philologie  romane   en    France  (Bou- 
cherie)    213 

De  Quekjues  Pronoms  provençaux  (J.  Bauquier) 2;{9 

Le  Moine,  chanson  du  Velay  (V.  Smith) 2D7 

Maucor  (Piat) .  93 

Lou  Dieu  vivent  (Boxaparte-Wyse) 94 

Niço  (L.  RouMiEux) 95 

La  Semenairo  de  milh  (A.  FouRÈs) ...  9(! 

Vèspre  d'estiéit  (Léontine  GoiRANDj lU2 

Marins  iX .  Lieutaud) 104 

Poulimmo  (L.  RouJUEUX) 1 07 

Urous  Naufrage  { L.  UoQMiEUx) 1 8S 

L'Imr  (C.  Laforgue) 1 89 

A  Clément  Fanot  (Bonaparte-Wyse). 1 90 

Moussu    Chasaud  (A.  (^hastanet) 1 92 

Le  Pintaire  (A.  Galtier) 1 96 

Les  Nouiès  (A.  FoURÈs) 1 98 

La  Naturo  (C.  L.vForgue; 2G0 

Atos  (A.  FouRÈs). .  '. 261 

Lou  Galignaire  (Bonaparte- Wyse) 202 

Sa  maire  l'es  vengut  cercà  (Gaussinel) 264 

A  prepaus  de  la  mort  di  do  us  cri-cri  de  Madamisello  de  Bornier 

(Bonaparte-Wyse) 267 

Gondoval  (l'abbé  Joseph  Roux) • 271 

BIBLIOGRAPHIE 

Prumié  Bouquet  (1838-1842).  i^Zowretos  de  mouniagno,  par  Mcl- 

chior  Barthès  (Alph .  Roque-Ferrier) 108 


110  l'ABLE    DBS   MATLbiRES 

Poésies  patoises,  par  Veruliet  père  (J.  Bauquier).  . 110 

IJna  roues  dai  vilagc,  per  Cli.  Coste  (Alph.  Iîoque-Ferrieb)..  .  113 
La  Fièiro  d';  Chaiiibonrigaud,  per  Pau  Gaussen  (Alph.RoQUE- 

Fkkuieh) •.. 115 

La  Bataille  de  Muret,  par  Henri  Delpecli  (Boucherie). 199 

Recueil  de  inorceau-c  choisis  en  vieux  français,  par  Eugène  Ritter 

(Boucui;kie) 202 

UAbbaiie  d*  Montmajour,    pai-    F.  de   Marin    de    Carranrais 

(C.  J'.-T.) 202 

L'Enseignement  du  français    dans    lefi   Ecoles  primaires,   par 

M.  Michel  Bréal  (A.  Espagne) 27i'> 

Las  Baladas  fêtas  pi-r  F.  Pelay  Briz  (Adles'HA  y  Pijoan) 279 

Lo  Pi'i  Ermontk  loàrain  (A.  Espagne) - 280 

PÉRIODIQUES.  — Revue  des  sociétés  savantes  (Chabaneau) 110 

Bulletin  de  la  Société  des  sciences,  lettres  et  arts  de  Pau  (Alph. 

Roque-Ferrier) 120 

Mémoires  de  V Académie  des  sciences,  agriculture,  arts  et  belles- 
lettres  d  Aix  (Alph .  Roque-Ferrier) 122 

Bulletin  de  la  Société  archéologique  de  Tarn- et- Garonne  (Chaba- 
neau)   •  . . .  123 

Bulletin  de  la  Société  des  études  littéraires,  scientifiques  et  artisti- 
ques du  Lot  (Chabaneau) 124 

Mémoires  de  l'Académie  des  sciences,  belles-lettres  et  arts  de  Cler- 

mont-Ferrand  (Alph.  Roque-Ferrier) 125 

Revue  de  linguistique  et  de  philologie  comparée 125 

Romania  (Boucherie) 203 

Bulletin  de  lu  Société  des  anciens  textes  français  (Boucherie),  204-280 

L'Alliance  latine  (Boucherie) 200 

ArcJiiv  fiir  das  studium,  etc.  (C.  Chabaneau) 281 

Bulletin  de  la  Société  départementale  d'archéologie  et  de  statistique 

de  la  Drame  (Alph.  Roque-Ferrier) -  28 1 

Lo  Gay  Saber  (BalagUER  y  Merino) 28 1 

La  Renaixensa  (Balagueu  y  Merino) 282 

Le  Messager  agricole  (Alph.  Roque-Ferrier) 281 

BulU'tiii  hibliographique  de  la  langue  d'oc  (dialectes  modernes) 

(S.  LÉOTARD) 1 2G 

Le  Parage  à  Maguelone • 134-283 

Discours  prononcé  par  M.  de  QuintanayCombis,  le  25 mai  1878, 

à  la  séance  solennelle  du  Concours  du  Chant  du  Latin loG 

Cluouique 158-205-303 

Errata lGO-212 


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Revue  des  langue»  rosianes 


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