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REVUE
HISTORIQUE
Paraissant tous les deux mois.
Ne quid faUi audeatt ne quid veri non audeal historia.
CicfeoR, de Orat.t II, 15.
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ANNÉE.
TOMB SOIXANTB-SIXIÉMB
Janvier-Avril 1898.
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ANCIENNE LIBRAIRIE GERMER BAILLIÈRE bt C
FÉLIX ALGAN, Éditeur
108, BOULEVARD SAINT-aBRU AIN
AU COIN DB LA RUE HADTBVBOILLB
1898
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LES AVENTURES
DU
MARQUIS DE LANGALERIE
(1661-1717).
« Sangsues, espions, suborneurs et corrupteurs, pestes et gan-
grènes mortifères, qui, à force de factions, de révoltes, de guerres
civiles, d'intelligence avec les ennemis de FÉtat, et depuis à la tête
des armées du roi, ont vécu de toute sorte de félonie et d'abolition,
ravissant les plus grands établissements en alliances, en charges,
en gouvernements, tirant des ignominies des honneurs et des
distinctions, » tels Saint-Simon dépeint ces princes étrangers
issus de maisons souveraines. Lorraine, Savoie, Bouillon, « dont
les trahisons et rébellions particulières rempliroient de nom-
breuses bibliothèques. » Jeune encore, en 1710, il avait dénoncé
leurs « brigandages » dans un virulent Êictum sur la « retraite »
du cardinal de Bouillon, en suivant pas à pas d'Ossat, Davila,
Sully, Fontenay-Mareuil, Péréfixe ; trente ans plus tard, d'un
bout à l'autre des Mémoires, il ne s'est jamais lassé de renou-
veler son implacable réquisitoire*. L'histoire ne peut que s'y
associer quand elle compte, dans le seul règne de Louis XIV ,
combien de transfuges ces mêmes trois maisons, comblées par lui
de grâces et de bienfaits, fournirent à ses ennemis héréditaires.
De tous le plus illustre, et le plus redoutable pour la France
parce que ni le temps, ni les victoires, ni les défaites non plus, ne
purent éteindre sa rancune contre le royaume où il avait pris
naissance, ou du moins contre le maître qui avait méconnu ou
1. teriU inédits, poblîés par Pr. Faagère, t. III, p. 255-309; Projets de gcu»
vemement du dw de Bourgogne, publiés par M. Paul Mesaard, p. 100-102;
Mémoires, éd. nouv., t. V, p. 288, VI, p. 71-90, IX, p. 256-257, X, p. 252, etc.
EIbv. Histor. LXVI. !•' fasg. 1
2 A. DB BOISLISLE.
dédaigné sa vocation militaire, ce fut Eugène-François de Savoie-
Soissons, le prince Eugène de la première et de la seconde coali-
tion, à la gloire duquel il ne manque que < d'avoir servi son roi
et sauvé sa patrie ^ » Dans le triumvirat formé avec Heinsius et
Marlborough, Eugène, fils d'une nièce de Mazarin, pupille et
presque enfant de la maison royale de France, se montra tou-
jours impitoyable, acharné contre ses anciens compatriotes,
contre les compagnons de ses premiers débuts. Au bout d'une
lutte de vingt-cinq ans, il disait encore à un prisonnier d'Oude-
narde : « Je suis un homme que le roi a méprisé. Il ne crut ni
mon frère ni moi dignes de recueillir la charge de colonel gén^
rai laissée par notre père ; il m'est doux de lui faire sentir que je
méritais un autre traitement. » Il eût voulu rejeter Louis XIV
au delà de la Loire et lui enlever une moitié de la monarchie.
Cest en pleine paix que le « petit abbé » était allé prendre du
service dans l'armée impériale, sous les auspices de Charles
de Lorraine, et Caire, comme volontaire, cette brillante cam-
pagne de Hongrie qui lui valut son premier régiment. Le
même prince Charles attira alors à lui un Lorraine -Elbeuf,
Charles-François de Lillebonne-Commercy, dont toute la Camille
vivait dans la plus étroite familiarité avec l'héritier de Louis XIV,
et qui, lui aussi, avait été destiné à l'Église par la cour de Ver-
sailles. Très valeureux, très agissant, désireux de s'instruire et
d'avancer, le prince de Commercy fit une rapide carrière inamé-
diatement derrière Eugène, commanda comme lui les armées de
la coalition, et nous ne pouvons douter qu'il n'eût fait autant
de mal à la France, si le cours de ses exploits n'avait été
prématurément arrêté au début de la guerre de la Succession
d'Espagne 2.
Dans le cours de la précédente guerre, la double désertion d'Eu-
gène et du prince de Commercy avait provoqué des imitateurs. Ce
fut d'abord, en 1694, le propre firère d'Eugène, ce piteux et misé-
rable comte de Soissons, déjà maréchal de camp, mais marié
malgré presque toute la cour à la belle Uranie, et qui se mit à
« rôder toute l'Europe » sans que personne lui offrît ni pain ni
service, jusqu'au jour où, par pitié, Eugène le fit nommer génè-
1. Villars d'aprèt sa correspondance, par le marquis de Vogué, t. II, p. 179.
2. ÉcrUs inédiU de Sain^SifOon, t. m, p. 302, 303, et t. VIII, p. 3^ 51-52;
Mémoires, éd. nouT., U IV, p. 337, IX, p. 328, et X, p. 226-227.
\
LES ITgnrïïBES DIT «IIQUIS I)B LlNfilLEBIE. 3
ral d'artillerie'. Un autre Lorrain, celui-là Ëls unique du prince
de Vaudémont que la France et l'Espagne maintinrent dans le
gDuvememeutdu Milanais à partir de 1701, le prince Charles-
Thomas, servait également sous les drapeaux ennemis', si bien
que l'on eut alors le singulier spectacle de trois sujets français
commandant l'armée de lempereur eo Italie : le prince Eugène
en chef, et Commercy et Vaudémont « les deus premiers gèné-
raui après lui, par leur rang de guerre^, » Eugène les perdit
l'un et l'autre avant qu'ib eussent eu le temps de donner toute la
mesure de leur valeur militaire'; mais la maison de Bouillon
et les Lorraine-Harcourt fournirent de nouvelles recrues à
la seconde coalition : en 1702, le prince d'Auvergne, neveu du
duc etdu cardinal de Bouillon, qui, pour « porter aux Hoilandois
répée de Turenne, déserta de garde en garde comme ceux qui
tout pendus lorsqu'ils sont trouvés sur le fiait''; > en novembre
i704, le prince de Montlaur, propre fils de cette princesse d'Har-
ccnirt la très originale familière de M"* de Maintenon et des prin-
Montlaur s'échappa de la maison paternelle pour aller
fsceroir le commandement d'un régiment impérial, sans que sa
mère en fût moins considérée et choyée à Versailles ou à Marly*.
EnfiD, au début de l'année 1700, ce fut encore un Lorrain.
Emmanuel, prince d'Elbeuf et frère cadet du duc de ce nom,
n'appartenait pas à l'armée, quoi que le roi eût pu faire pour lui
Irouver un emploi. C'était « une manière de brigand, mais à
bbgue dorée, avec beaucoup d'esprit', » qui, après avoir tiré de
I. I) inoarut presque aussilùt, devant Landau, Voy. l'appendira consacré A sa
feBma bI i loi dans l'édition nouTellc des Mémoires, t. X, p. â39-&72. La des-
Ceodanu de ce conile de Soissons se lit loale allemaDde.
1. Au moins il n'avait jamais servi la France, ma pËre rayant combattue
1.
•4 de Sainl-Stmoa, éd. nouv., I. IX, p. 49.
4. Ooumercj périt à Luzzara, et la jeune Vandémanl, blessé dans le mém?
, ne survécut que deui aas. Ou remarqua l'empressement do Grand
jiûn à canwler la famille de li, de Commercy, qui cepeadanl ne se faisait
KlMenii scrupule » de le Toir bientôt à la l€le des armées de l'empereur et
* « le* premiers postes du miaislèrc à Vienne > {Écritt inédits, I. VIII, p. 52).
5, ÉtriU inrdiU de Saint-Simon, t. III, p. 272-373; Mémoires, éd. nouv.,
L IV, p. 17<t9, el X, p. 2i7-251. Uu frère alué avait é(« obligé de se retirer à
■*" ■ « t la suite d'un duel trts suspect.
K. ÈeriU ine'diU, t. III, p. 303 1 MénuHret, éd. nouv,, t. XIII, p. 1. Cdoi-
là maorul en chemin avant d'arriver à Vienne.
7. SaifU-Sinton, éd. 1873, l. XVI, p. 346, el éd, nouv., t. Xlll, p. 333; ÉcrUs
^IWJtt», t. m, p. 303, et Mn, p. 27-28.
â
4 A. DE BOISLISLE.
Louis XIV, en argent, en indulgence et en protection, bien plus
que ne méritait aucun de ces princes étrangers, alla prendre du
service chez l'empereur sans qu'on sût pourquoi, ni que lui-
même peut-être se rendît compte de ce que c'était qu'une défec-
tion en face de l'ennemi. Sa sœur la princesse de Yaudémont
et son beau-frère avaient vainement essayé d'empêcher qu'on
lui permît de les venir voir à Milan; pendant le carnaval, il
gagna Venise et de là l'armée impériale, où il eut un régiment
de cuirassiers, mais d'ailleurs, croyons-nous, ne combattit point
contre les Français. Louis XIV se consola facilement de cette
perte*.
Deux autres désertions consommées dans le même temps purent
l'affecter bien autrement, et par les conditions où elles se pro-
duisirent, et par la qualité des ofSciers de l'armée d'Italie qui
allèrent, en compagnie du prince d'EIlbeuf, ofirir leurs épées au
nouvel empereur.
Ils n'appartenaient plus aux maisons de princes cosmopolites,
mais à la noblesse française, jusque-là pure de pareilles trahi-
sons ^. Sans doute, au cours de la guerre civile, on avait vu les
noms les plus illustres passer dans les rangs de l'armée espa-
gnole plutôt que de subir la dictature de Mazarin^, et la Révoca-
tion de 1685 avait également réduit une élite d'officiers et de gen-
tilshommes, les Schonberg, les Ruvigny, les Miremont, les
Belcastel, les Rochegude et tant d'autres, à prendre service dans
les rangs de nos ennemis protestants. Mais, qu'en dehors de toute
passion politique ou religieuse un officier général aussi renommé
pour sa vaillance que le marquis de Langalerie, un colonel de
nom aussi illustre que le chevalier de Bonneval désertassent
l'armée du duc de Vendôme pour aller prendre de l'avancement
dans celle que le prince Eugène commandait de l'autre côté du
Pô ou de l'Adige, c'était là un symptôme inquiétant, ces défec-
i. Oa avait cependaDt pris des mesures pour le faire arrêter entre Bologne
et Ferrare; il en eut yent et passa par Ravenne. Voir les lettres de Saint-Fré-
mond et du prince de Vaudémont au Dépôt de la guerre, vol. 196 1, n" 58 et
79. Le diplomate anglais Richard Hill l'amena à Venise, où il retrouva Lan-
galerie et les autres mécontents de môme espèce (voyez sa Correspondance,
publiée en 1845, t. 11, p. 691, 12 mars 1706); mais le prince ne fit que passer,
et partit pour Vienne après une visite à l'ambassadeur Ercolani.
2. Addition de Saint-Simon au Journal de Dangeau, dans le t. Xlll des
Mémoires, éd. nouv., p. 506.
3. Voir des exemples dans la Rébellion d'Hesdin, Fargues et le premier pré-
Ment Lamoignon (1897).
LES ITEimiBES DU lUBQÏÏIB DE LINGILEBIE.
lions ii'aj'ant été provoquées que par des mobiles mallieureuse-
lueut commuDs à toutes nos armées.
Tous les historiens de ce temps-là, tous les documents révèlent
k quels excès de luie, de faste et de folle dépense s'abandonuaieul
\e6 officiers en campagne. Vainement Louis XIV avait essayé de
réagir' : ou bien les généraux ne veillaient pas à ce que, loiu de
la cour, ses ordonnaoces, ses règlements fussent observés, ou ils
se déclaraient impuissants contre « les gens sans ordre qui
veulent se ruiner, et se ruineot partout aussi bien dans la paix
que dans la gueiTe-, » Quarante ans plus tard, carie mal se per-
pétua et empira toujours sous Louis XV, Saint-Simon pouvait
encore s'écrier' : « Le luxe de la cour et de la ville est passé
avec tant d'excès dans les armées..., que la dépense ruine les
officiers, qui, les uns pour les autres, s'efforcent à l'envi de
paraître roagniSques... Il y a longtemps qu'on s'en plaint, ceux
mêmes qui font ces dépenses qui les minent, sans qu'aucun ose
les diminuer... On ne tient la main à aucun règlement, et il
arrive que, souvent même dès la première année, tout est enfreint,
et qu'on n'y pense plus dès la seconde. »
Luxe du train, luxe des équipages, luxe de la table et de la
chèi-e*, autant de causes de perditioni Et lejeut Voyez ce qu'en
disent les Mémoires d'un brave officier de l'armée dans laquelle
Bonneval et Langalerie commandaient en 1706", ou ce cas de
frénésie rappelé plus tard par le duc de Luynes, de trois colonels
de l'armée du maréchal d'Harcourt s'engageant à jouer entre
1 i. JTiAnoè-ei de Saial-Simon, éd. doqt., I. Xm, p. 343, note 9.
t. Leitre do M juillel 1705 donnée par M. le marquis de Vogiié dan« l'Appen-
dice du t. Il de son édition des Mémolru du maréchal de VUlart, p. Shl.
3. MémoiTU, éd. IS73, L V, p. 189.
4. 1 Bagouts, liqueur», entrées, entremets..., comment ces mots peurenl-ils
(Xk «nlendus ilani le temps de la guerre et d'une misère publiijue, à la vue de
l'unwiai, à li veille d'un combat, pendant un siégeT • {Caraetèret dt J. de la
Bnfirt. éd. Servoig, t. Il, p. 195-ige et tOS-409.}
5. Mémoire! du ntarqaii de Franelleu, publiés i Auch, en 1696, par H. L. de
Germon, p. 39 : < Je gagnai tin jour onze cents pisloles d'or (It, 000 Ut.) a une
léance... De retour cbei moi, Delisle, capitaine dans le mtme régiment que
RMï, m'aida a compter cet argent. Tout mon lit étoit couvert d'or; tout i coup
U M jeta dessus, rao disant : a Je reui pouvoir dire que je me suis roulé snr
< t'orl u Cette Tartane dora peu; toiUs'en relouruaau jeu. H. de Saînt-Frèmond
Icnnit la banque cl rninoît tous le» olDciers. Il avuii un bel équipage sans faire
de dêpeusc, ce qui faisoit dire au comte de Hursa; ; u Salot-Prémond n autant
■ de mulets d'équipage que moi ; mois la moitié porte de l'avoine, et l'antre des
■ cartes. ■
à
6 A. DB BOISUSLB.
eux tous leurs biensjusqu'à ce qu'un seul eût gagné les trois lots^
D'autre part, le duc de Vendôme n'était que trop connu pour
tolérer ouvertement, publiquement, la licence et l'exaction à
tous les degrés. Louis XIV, cependant, avait toujours condamné
un si détestable abus. « Tout prince, disait-il^, qui chérira sa
réputation avec un peu de délicatesse ne doutera pas qu'elle ne
soit aussi bien engagée à défendre le bien de ses sujets du pillage
de ses propres troupes que de celles de ses ennemis. » Mais la
guerre a ses compromissions, et Vendôme, avant tout, tenait à
s'attacher soldats et officiers. Presque tous ses familiers étaient
gens de sac et de corde^ aussi pillards que débauchés, habitués
à se donner libre carrière, et peu lui importait même que ce fût à
ses propres dépens. Un de ses « domestiques » voulant le quitter
plutôt que de le voir effrontément grugé par ses camarades :
€ N'est-ce que cela? lui dit-il ; eh bien ! pille toi-même. » L'ar-
mée, officiers généraux, officiers inférieurs ou soldats, se réglait
sur cet exemple pernicieux, sans souci ni de la morale, ni des lois
militaires, ni de la discipline, de la subordination, du droit des
gens 3. Si, dans les derniers jours de 1705, le châtiment suprême
fut tiré d'un auxiliaire, le comte Galéas Boselli, colonel d'un
régiment de dragons au service de ia France, c'est que le prince
de Vaudémont intervint en personne pour faire tomber la tête de
ce condottiere redouté dans toute l'Italie du Nord, à laquelle
cependant le rattachait son origine première, et que non seule-
ment ses exactions réitérées, mais aussi ses cruautés et ses
crimes, relevant du droit commun, ne permettaient pas une plus
longue indulgence^.
Tel n'était pas, je me hâte de le dire, le cas de Langalerie et de
Bonneval ; mais leurs pilleries avérées et leur indiscipline notoire
méritaient un châtiment dont la désertion seule put les sauver le
jour où l'honnête Chamillart, poussé à bout, voulut y mettre
ordre ; ce jour-là, le patriotisme fut impuissant à les retenir.
Les aventures de Bonneval, qui ne mourut qu'en 1747, pacha
à trois queues et topigi-bachi du sultan Mahmoud V, sont bien
connues aujourd'hui par des publications modernes, notamment
par l'étude du comte Albert Vandal. Quoique l'existence de
1. Mémoires du duc de Luynes, t. XIH, p. 150-151.
2. Mémoires de Louis XIV, éd. Dreyss, t. ï, p. 248-250.
3. Mémoires de Saint-Simon, éd. nouT., t. XIII, p. 286 et 492-493.
4. Ibid., p. 226-228.
série
I
LES ATENTUBES DU HiRODtS DE UtfGlLBME. T
Langalerie ait abouti ii des aveDtures non moins extraordinaires,
le souvenir D'en subsiste plus guère que cliez quelques curieux,
et mêlé à tant de fables ou de légendes, que nos biographes, si
sérieux que fussent leurs efforts, ne sauraient y déoièler la réa-
lité bi&torique. La raison en est que tout ce qui a été écrit sur lui
M IrouTe vicié en principe par le contact de romans et de
loires apocryphes.
On sait qu'en ces temps de guerres européennes, nombre de
romanciers de bas étage, ou plutôt d'industriels littéraires,
gîtes au fond de la Hollande, inondaient tous pays de leurs
petits volumes à tendances antifrançaises, mais d'une lecture
Ëtcile et parfois amusante. L'un d'eux, dont on ne connaît
pas au juste la personnalité', avait publié en 1702 la Guerre
iltalie, ou Mémoires du comte D'", et un continuateur,
également anonyme et tout aussi médiocre, en avait donné
une nouvelle édition en 1706'. Dana cette même année 1706,
le même auteur, ou un concurrent, avait fait imprimer à Cologne
(lisez : Rouen) l'équivalent de celte compilation insipide sous
un titre analogue : la Guerre d'Espagne, de Bavière et de
Flandre, ou Mémoires du marquis D'", contenant ce qui
t'est passé de plus secret et de plus particulier depuis le
commencement de cette guerre jusqu'à la campagne de
i706^. Des bibliographes attribuent ce second roman à Catien
des Courtilz de Sandras, ou à un certain marquis de Souffenage,
comme le premier à Grandchamp* ; mais il ne faut pas connaître
les œuvres innombrables de Sandras pour mettre à son compte
des volumes qui ne rappellent en rien ni son faire, ni sa connais-
sance surprenante des ^its et des gens du temps.
C'est ce que l'on peut dire également des deux petits v
1. Selao Des Uaiseaui, ce sérail an de aes amis, Dotnmé Grandchïmp, capi-
taloe aa régimeal da colonel émigré Lille-Harais, dont nous aurona à parler
plu lard, Grandcbamp périt en 1702 i l'allaque de la citadelle de Liège.
3. Une trolBième édillon parut encore en 1707, ■ conteuant qaanlité de rhoses
puttculjèr«8 et secrètes qui se sont passées dans les tours d'Alleuiagae, de
Pnnoe, d'Espagne, Je SaToie et d'Italie, aognieatée des derniers éTéoemenls de
celle ({lierre, u avec un portrait du prince Eugène et des plans de Manloae, du
combat de Loziara et de la bataille d'BochsIedt. Une quatrième est datée
ite 1710 ou de 1713. Chaque éditiun nouvelle continuait le récit jusqu'à la date
où eUe était mise sous presse, et reproduisait les lettres qui venaient de paraître
dut les gasettes.
3. M T ent d'autres éditions en 1707 et 1712.
4. Lelong, SibUoihequt hulorigue, a" 2441S et 24137.
fpie i'Irr.'pritMnr jnzTZAlr^ Piarre ^iaLrr^An i: :ara:tre à Cologne
qri^(Tî^ noTiL^ apr»fl la 'itdecûijti ie L^i^zalt^je. accâ ce titre :
la Otufrre d' Italt^, ou J/e>/V>t>ef «wjr'>/n</»i*?^. pjiitiqiLes et
galante du rruirquvt 4e LanQoll^rxe. « C'-ist ^i. rocnaL 'ians
k g<rnr«i dfî oiiix ie Oatiet ie G^urilz ir: Saii-iraî. > dit la
hMUAhèrpju> kUtorypâe^ . «>. Sandnu, qui avait sucoessÎTe-
icïfitit pm pour hftTos «l'Artagnaû. «^iavag^ac, J.-B. ie la Foq-
taine, k vicomte: de Tarenûi*, le comte «ie Rochefort. put être
certainemerit tenté d'ajouter à cette série on personnage tel
qae [^n;?alehe, lieutenant gênerai tranifiige des armées du roi
très chrétien. Quoirpie renfermé d'une façijn presque constante
à la Bastille pendant les dix premières années du nouveau siècle,
grâce à ses correspon'lances avec les nouvellistes de Paris et les
gazetiers étrangers» grâce aussi à certaines complicités de la
police, qui ne laissait pas d'apprécier l'exactitude de ses infor-
mations *, Sandras n'eût pas été embarrassé de fournir un volume
de plus à ses éiliteurs ; mais, en tant que compositeur de mémoires
apocryphes, il se respectait lui-même et n'aurait pas eu Timpu-
dence d'offrir à ses lecteurs une production où le héros ne figurait
que sur le titre, et où l'histoire réelle ne tenait absolument aucune
place. Tel est le cas des deux volumes mis en vente au commen-
cement de 1707% qui furent traduits en anglais l'année suivante
1. N» 24419.
2. En 1701, on coirespondaat de M. d'Argeason, chargé d'eximiaer les
Annales de la cour et de PariSy y recoaoat sans peine la plame de l'autear
des Mémoires du comte de Roche fort et de ceux de M. d'Artagnan, qui araient
en tant de sucrés. « Même genre, disait-il, même style et même hardiesse de
médire de tout le monde et de s'y débiter pour un personnage qni a eu part
aux intrigues et qui sait quUl rex reginae dixertt et quid Juno fabulata est
cum Jove. Cependant c'est un petit particulier sans bien, sans fortune, et qui
apparemment n'écrit tout cela que pour le Tendre aux libraires de Hollande. Il
faut pourtant qu'il ait quelque habitude aTec les fainéants de Paris, qui lui
apprennent tout ce qui s'y conte de Trai ou de faux entre les nouyellistes. On
souhaitcroit que, dans quelque journal, on décréditAt les ouTrages de cet
homme-là... Il faut couTenir qu'il débite des faits fort curieux et fort singuliers;
mais quelle impudence de donner pour des mémoires de M. d'Artagnan trois
Tolumes dont il n'y a pas une ligne faite par M. d'Artagnan! i (Rayaisson,
Archives de la BastilUf t. X, p. 8-9.) Un écrivain dont la police parlait si favo-
rablement, — et elle avait raison, — mériterait mieux que l'article tout super-
ficiel qui lui a été consacré dans la Revue des Deux Mondes du 15 février der-
nier et, moyennant quelques précautions, l'historien a le droit de se servir de
ses publications, si apocryphes qu'elles soient. Le jeune Brienne a bien cm
devoir discuter sérieusement dans ses Mémoires, t. H, p. 264, 274 et soiv.,
plusieurs passages du Testament politique de J.-B. Colbert (1694).
3. L« préfiee de P. Marteau est datée de Cologne, 26 novembre 1706.
lions
I proie
ï
LES AVENTIIKES DD 11110018 DB URGUEUE. 9
qui eurent une nouvelle édition française en 1709. J'ai tout
u d'ailleurs de cralre que nos bibliographes n'ont pas connu
de visu ces deux éditions. Elles sont aussi restées introuvables
pour moi, quoiqu'un récentcataloguede librairie en ait annoncé
uu exemplaire; mais j'ai sur les bibliographes, si j'ose te dire,
cet avantage d'avoir Jait examiner à Londres la traduction
anglaise', et, des renseignements qui m'ont été obligeamment
envoyés, il me semble résulter, comme d'ailleurs le titre peimettait
de le prévoir, que, k part l'addition du nom de Langalerie sur le
titre, ce n'est autre chose que la Guerre d'Italie qui avait com-
mencé à paraître en 1702 -, Reraa niée et continuée jusqu'en 1707,
nous n'y trouvons qu'un tableau imaginaire d'opérations deguerre
et de négociations diplomatiques tendant à cette seule fiu de faire
ressortir la fourberie et l'ambition de Louis XIV. C'est, par
exemple, Langalerie qui aurait été chargé en Italie d'organiser
une ligue contre Innocent XI, puis, à Bruxelles, en 1693, de
détacher Guillaume III delà coalition par l'entremise de l'élec-
teur de Bavière. Récits et documents sont, les uns et les autres,
de pure invention; on verra toutàl'heure que Langalerie ne prit
aucune part à des événements de ce genre. L'tiistoire n'a donc
rien à faire ici.
Trente-cinq ans plus tard, un autre faiseur d'apocryphes,
Gautier de Faget, qui devait être un réfugié français établi en
Hollande, reprit le sujet sans tenir aucun compte des publica-
tions de 1707^, et, cette fois, eut la prétention de reconstituer
l'existence entière de Langalerie, ses origines, sa jeunesse, sa
'ière militaire, sa vie errante et aventureuse en Allemagne,
conversion au protestantisme, son traité avec la Turquie, ses
projets de croisade et de colonisation, sa fin dramatique. Le
1. UDsée britannique, tl9â d 11 : Tht Memoirs of tht marques! de Langat-
lirit, eoAlaintnii an accovnt of the moil secret intrigues of Ihe frenck, »pa-
ni*h and bacariaa rourli, ami the moit remarkable baltlet, sièges and encam-
pnmft In Cermani/, Spain and Flandert, iagelher ii-Hh the moU consideral/le
trtatia and allîancet maiIe wlth France from the year 1687 to the year 1707,
M«miU^ Kitk lèverai original privale Uilers {never before mode public)
VrtUmt hg the trench king, cardinal Parlocarrero. duke of Anjou, elecfor of
Bararia, Chartes in of Spain, iake of Marlboroagh, duke of Ormond, if Ak-
Wtr^nerque, M' Fogti, etc.; Iranslaled from llie french; Londcjn, 17U8. En lètc
Ht une Induction de \a iiréfact: frani^jge de P. Harleaii.
2. Ci-dessus, p. T.
3. Dans son épitre dèdicatoira au député bollandais Vau Uaaren, il ne fail
■lluslou i ces publications.
40 A. DE I0I8LI8LB.
volume qu'il fit paraître à la Haye, en 1748, chez Daniel Âil-
laud, a pour titre : Mémoires du marquis de Langallery (sic),
lieutenant général des armées de France, général-fèldn
m^réchal^lieutenant au service de V empereur Charles VI;
histoire intéressante où se trouvent un grand nombre
d^ anecdotes qui concernent ilf"** de Maint enon, MM. de
Catinat, de Vendâm^, le duc de Savoie, le prince Eugène j
etc., écrite par lui-^même dans sa prison à Vienne en
Autriche.
Ce petit livre est aussi commun que celui de 1707 paraît introu-
vable, et nombre d'historiens, de biographes, de critiques, à
commencer par Fontenelle, ont cru ou croient encore à son
authenticité. Comme la Guerre d'Italie^ il eut les honneurs
d'une traduction, non plus en anglais, mais en allemande Ce
n'est cependant qu'un tissu d'inventions futiles, d'événements
imaginaires et d'épisodes de pur roman, où toutefois quelques
détails prouvent que Gautier de Faget avait entendu vaguement
parler de la première partie de l'existence de Langalerie, qu'il
avait tout au moins suivi dans les gazettes le reste de sa vie
d'aventures, mais qu'il ne connaissait bien exactement que les
circonstances de sa mort, par le récit d'un serviteur qui remplit
les trois dernières pages du livre.
Les descendants laissés par Langalerie se devaient de protester
contre un abus aussi flagrant des droits de l'écrivain sur les per-
sonnages marquants; c'est seulement en 1759 que l'un d'eux, ou
quelque ami de la famille, sous la qualification d' « une personne
très instruite, » fit insérer dans la dernière édition du Diction--
naire de Moréri* une notice où du moins la biographie est à
peu près établie, quoique avec des erreurs de dates. « Il a paru
en 1753 {sic), y lisons-nous, des « Mémoires du marquis de
« Langalerie, histoire écrite par lui-même dans sa prison à
« Vienne en Autriche ; à la Haye, chez D. Aillaud. » C'est un
roman qu'on a voulu débiter à la faveur d'un nom connu; les
noms, les faits, les dates^ tout y est confondu, et presque toute
l'histoire est composée à plaisir. »
1. Musée britanniqae, 10658 aa 27 : Lebens-Beschreibung det Markis von
Langallerie,., woHnnen sehr viel geheime Naekrtchten enÛialten.,. wn ihm
selbst,.. aufgezeUhnety nun aber,,. ins Teuische Ubersettt von C. E, S,; Gotha,
1747.
2. T. VI, 2* partie, p. 543-S44, addlUoo à la p. 131.
LES ITBflTDSKB DO lUlQDtB DE UNGILEUE. ^^
Tels sont donc les éléments sur lesquels, jusqu'en notre temps.
les biographes français ont pu travailler, et il Haut avouer que
loua à peu près préférèrent les romans et lea faux mémoires h
l'article beaucoup plus authentique relégué dans les dernières
^_ pages <l'uu volume du Moréri. Quant aux documents, personne
^H D'y avait encore songé, lorsqu'un historien allemand, le doc-
^H tetip Charles de Weber', utilisa dans ses Souvenirs de quatn>
^^L siècles (1861) la correspondance d'un diplomate saxon qui jetait
^^H un jour tout nouveau sur les projets chimériques conçus en 1715
^^||t 1716 par Langalerie, et sur la catastrophe finale". Quatre
^^ftunnèes plus tard, un énidit de notre province d'Angoumols,
^^VM. Henry ti. de Montégut, composa une notice biographique sur
^^B-BOD compatriote Langalerie pour le Bulletin de la Société
^^ archéologique et historique de la Charente, et, ayant eu
l'heureuse fortune de connaître à temps l'article du docteur de
Weber, en put joindre la traduction à son étude^.
La notice aUeraande avait attiré l'attention des érudits d'outre-
Rhin ; l'uQ de ceux qui s'occupent avec le plus de succès de l'his-
II toire de l'Europe au temps de Louis XIV, M. le docteur Marcus
j^H Landau, de Vienne, consacra successivement à notre héros deux
^^Karticles de revue^, pleins de révélations que lui avaient fournies
^^Fles archives d'Autriche et les papiers saisis sur Langalerie lui-
1^^ même en 1716.
ËQÛn, tout récemment, les descendants allemands et suisses
r de la dernière Langalerie ont fait paraître, mais pour la famille
1^^^ Beolement, une notice que feu le colonel Hermann de Rotenhan,
^^Barrière-petit-fils du lieutenant général, avait préparée sous ce
^^Hfitre : Philippe de Gentils, marquis de Langalerie, franzô-
^^^m I. Fils Au groDil compositeur.
^^^F î. Le lilra est : Dfr Marquis von Langallerie unil der KUnig von ilada-
f^^ fcucar (1716), datia Avs tter Ja/irhunderlen, neue Folge, t. U, p. 163-16*.
3. Tirage t (jarl, en 186S ; Philippe île Gentils de LajanekapI, marquis de
langalltTie, premier baron de Saintange, Ueutenaid général des armées du
Toi, feld-maréeliat au lertiiee d'AiUriche, eU. (1661-1717), avec un portrait
|raTè d'iprèï la toile originale.
\. Dans le Saripléraent de VAllgemeiiu Zeitvng <les 13 el 24 mai 188S :
Dtr GeneralUsmut der TheoKratie ; dans le t'rankfurler Zeilung Jcs H et
13 mai 1893 : Ein franîdsIsch-Oiilerreichischer General ait Induslrleritler unil
SAtMrmer. M. Landau lui-infme a bien foulu me Mmmuniquer ses derniers
■rtiele« de 1393. — Avant le docteur. lllltisCrlric Zeilung de New-York, du
13 juin 1883, «Tait [lublié un article signé : Oscar Schwebel, el intitulé : Ein
Kaiitr von Madagaskar In der Mark.
^^_ auHBT vun
42 A. DE B0I8LI8LB.
sischer Generallieutenant, ôsterreischer General der Cava-
lerie, angehlich Kaiser von Madagaskar, polnischer Gène-
rai der Cavalerie, etc. (1661-1717)^ und Geschichte der
Familie Gentils de Langalerie^. Malheureusement, Tauteur
de cette étude n'avait pu la terminer, et ses héritiers ont eu le
tort de la livrer telle quelle à l'impression *. Les fables de 1743
s'y trouvent si étroitement mélangées avec les données authen-
tiques des récents travaux, que le lecteur, déjà gêné par les fautes
de l'imprimeur, ne peut faire le départ qu'à grand'peine^. C'est la
meilleure preuve qu'un historien ne devrait tenir aucun compte de
l'œuvre apocryphe de Gautier de Faget, ni comme chronologie,
ni comme détails se rattachant à l'histoire générale ou à la bio-
graphie de Langalerie^.
Si à cette énumération bibliographique j'ajoute un article
publié chez nous, en 1894, dans la Revv£ des Etudes juives '^^
par M. David Kaufmann, d'après les papiers de Thèbraisant
Alexandre Sûsskind, qui fut une des dupes de Langalerie et le
suivit dans ses dernières aventures, et d'après les Mémoires
apocryphes de 1743; si enfin je mentionne quelques articles des
biographies françaises*, j'aurai, je crois, établi l'état actuel du
sujet. On peut dire qu'il n'a jamais été traité dans son ensemble,
que surtout nos documents français n'ont point été mis jusqu'ici
à contribution ; nous connaissons même un peu mieux la partie
de l'existence de Langalerie qui s'écoula en pays étranger et
ennemi, que ses services sous son roi légitime et les circonstances
où il se fit transfuge et déserteur. Un passage des Mémoires de
Saint-Simon'* m'ayant donné l'occasion de constater ou des
lacunes ou des erreurs capitales dans tout ce qui a été écrit, j'ai
cru qu'il ne serait pas sans intérêt d'étudier un si extraordinaire
personnage de plus près. Je ne dis pas : complètement et défini-
1. Imprimée à Munich en 1895.
'2. La brtidiure n'a pas été mise dans le commerce. J'en ai connu l'existence
par M. le vicomte de Grouchy, qui a bien voulu s'entremettre pour moi auprès
de la famille de Saugy, descendue d'une sonir de l'auteur.
3. A la fin, on trouTe une bibliographie assez complète; mais l'auteur ne
s'était certainement i^as serri de tout ce qu'il y indique.
4. Des études faites sur Langalerie, il n'en est aucune absolument, je le
répète, qui n'ait, sur quelque point, souffert du contact de l'apocryphe.
5. T, XXVlll, p. 193-211.
6. Biographies Michaud et Didot; Encyclopédies diverses; la France proies-
tante, etc.
7. Éd. nouT., t. XIII, p. 334-336.
^
LB3 «TENTUBES DC IHIBQOIS DE LtKGALBBIE. 13
tivement. En effet, le brillant lieutenant général de notre armée
d'Italie, une fois sorti du bon chemin et devenu chevalier errant
et chevalier d'industrie, a traversé pendant dix ans tous les Etats
de l'Europe centrale, côtoyé tous les plus hauts personnages,
frappé aux portes les plus diverses, demandé asile à toutes les
religions, cherché des ressources dans toutes les spéculations,
dans les entreprises les plus chimériques, avant d'aboutir h une an
misérable; et partout il a laissé des traces qu'il y aurait profit
à relever, comme celles d'un type, dirai-je un précurseur? qui
allait laisser son empreinte sur le xvui" siècle naissant. Ces
traces, de même que M. de Weber les a recueillies dans les
archives diplomatiques de la Saxe, le docteur Marcus Laodau
dans celles de l'Autriche, ou d'autres écrivains modernes dans
les annales des communautés protestantes et des communautés
juives, il faudrait les suivre plus profondément dans le dépùt de
Vienne où les papiers de Langalerie sont allés échouer, dans
ceux de la Prusse, à laquelle il s'adressa comme à la Suède, au
rk, à la Hesse, à la Russie, à la Turquie, dans le-s
archives du Saint-Siège, que menacèrent un moment ses folles
Tiaées, jusque dans les souvenirs de notre nouvelle colonie de
Madagascar, enfin dans les gazettes de tous pays, dont je n'ai pu
consulter qu'une partie. Kt, lorsque l'historien aura épuisé ces
filons épars, il restera encore, pour le psychologue, à analyser
r « état d'âme » d'un si étrange « dévoyé, » et, pour un nouveau
Lesage, — ou un Casanova de Seingalt, — à tirer un roman
« réellement vécu » des déchéances successives qui, de chute en
chuld, amenèrent fatalement le drame final '.
I.
ORIGDfB ET DÉBOTS DE LaNOALERIE.
Philippe de Gentils, marquis de Langalerie, appartenait à une
lamille de Saint-Yrieix, en Limousin, anoblie par la régente de
France au mois de décembre 1515, dans la personne d'Hélie
Gentil, sieur du Mas et de la Jonchapt, qui avait fidèlement servi
cette princesse'^. Le âls d'Hélie épousa en 1543 une Salaiguac,
l. L.'«bbé de Wallevillc, autre Iranstuge et re
prii pour bèros d'un roraaii bislorique.
• le plas «impie gentilhomme,
légal célèbre, Tient d'être ainsi
» ou * tout au plus un gealil-
4â a. db boislislb.
de la Camille d*où devait sortir, au siècle suivant, Tarchevêque
de Cambray. L'aîné des petits-fils forma la branche des sei-
gneurs de la Jonchapt, qui firent leurs preuves de noblesse pour
Malte et pour Saint-Gyr ; le cadet, Yrieix Gentil ou de Oentils,
gouverneur de Cognac en Tabsence de M. d*Ambleville, épousa
en 1598, à Angoulème, la fille d*un certain Thomas Géraud,
ardent calviniste qui avait été exécuté en 1586 pour avoir
essayé de livrer cette ville au Béarnais. Henri lY , devenu roi,
s*était empressé de réhabiliter la mémoire de Thomas Géraud et
de restituer à sa fille les biens confisqués lors de la tentative
de 1586. Ces biens, dit-on, étaient considérables à Ângoulême
même, et ils comprenaient en outre la seigneurie de la Motte-
Charente, dans la paroisse de Nersac, avec un péage très pro-
ductif*. C'est alors, aux environs de 1600, que le même Yrieix
commença à se qualifier sieur de Lagalerie, et ce surnom ne
homme, i a dit Saint-Simon (éd. 1873, t. XIII, p. 67). — C'est par lettres doDBées
à Lyon que la duchesse d'Angouléme, régente de France, anoblit Hélie Gentil,
seigneur du Mas, demeurant à Saint-Yrieix, c tant en considération de ses
Tertus et de l'honnête Tie qu'il sToit toujours menée, qu'il étoit issu de notable
lignée, et qu'il aToit des parents, des biens et de la chevance pour entretenir
honorablement l'état de noblesse, qu*ea considération de plusieurs bons et
grands services qu'aucuns des parents et alliés dudit seigneur du Mas, qui pour
lui afoient supplié et requis cette grâce, avoient faits par ci-devant aux rois
Charles et Louis derniers décédés, i De plus, le dernier fils d'Uélie, Poucet
Gentil, sieur de Panthenie, figuier de Saint- Yrieix, fut également anobli en
juillet 1528 {Ordonnances du roi François /«', t. I, p. 586, et VI, p. 136), pour
sa bonne extraction, ses services et ceux de son beau-frère, le président de
Calvymont, ancien ambassadeur de France auprès de Charles-Quint. Hélie
lui-même eut soin de faire confirmer son anoblissement par le roi François I**,
étant à Couches le 4 avril 1544. Si M. de Montégut et le colonel de Rotenhan
n'ont pas fait mention de ces anoblissements dans la généalogie dressée par
eux, c'est qu'ils ignoraient Texistence de certains dossiers du Cabinet des
titres, parmi lesquels il faut signaler le volume 159 du Cabinet d'Hozibr, les
copies d'actes conservées dans le volume 291 des Carrés d^Hozibr et le vol. 310
des Dossiers bleus (doss. 7887 et 7892), ces derniers présentant des variantes
suspectes empruntées aux Mémoires apocryphes de 1743. Il n'y a pas non plus
trace de l'anoblissement dans les trois dossiers de titres de famille que la sœur
de notre Langalerie déposa en 1753 chez le notaire Vanin, pour assurer la con-
servation de ces souvenirs « d'illustration et de noblesse, » et que M* Nottin,
successeur actuel de Vanin, a bien voulu me communiquer. — Les armoiries,
compliquées comme l'étaient généralement celles des anoblis, se composaient
de trois roues de Sainte-Catherine, encadrant un chevron, et une épée brochant
sur le tout.
1. Les titres de cette seigneurie sont actuellement déposés aux archives du
département de la Charente, série E, liasses 27-35, p. 10-15 de VInventaire
sommaire.
LES AVENTURES DC HIRQCIS DE UIGILBRIB. 15
paraît être devenu Langalerie que trente ans plus tard'. Était-il
aapnintê à quelque arrière-fief situé, comme la Motte-Charente,
sur le territoire de Nersac, ou bien dans la ville môme de Saint-
I Yrieisî Et n'est-ce pas une coïncidence singulière qu'une femille
^ Gérault (sic), non pas d'Angoulème, mais de l'Agenais, pos-
s^àt depuis 14ï)6 une autre terre de Langalerie', dont elle porte
encore honorablement le nom dans le clergé et dans l'armée^ï
Autant de petits problèmes que nos généalogistes n'ont pas
résolus*. Je ne parle pas de la question secondaire d'orthographe :
les Gâutils écrivaient Langalerie, les Gérault Langallerie.
Quoi qu'il en soit, les premiers, séparés désormais de leurs aînés
les seigneurs de la Jonchapt, s'établirent déâDÎtivement dans
l'Angoumois et firent leur résidence à la Motte-Chareute,
Le fils d'Vrieix Gentils et d'Anne Géraud épousa, eu 1635,
Judith de la Motte-Fouqué, d'une tamille de Saintonge qui a
marqué particulièrement dans l'tiistoire de l'émigration protes-
tante, et celte alliance donne, des relations qui s'établirent entre
M"* de Maioteuou et nos Langalerie, une explication bien plus
satisfaisante que la fable ridicule des Mémoires apocryphes
de 1743\ Non seulement, en effet, les La Motte-Fouqué appar-
I tenaient presque à la même province que Françoise d'Aubigné,
I nuds aussi une sœur de Judith, ayant épousé Gédéon de Martel,
' eut pour petite-fille la belle Uranie de la Gropte-Beauvais, com-
tesse de Soissons^ : par cette tante, surtout par les Martel et par la
maréchale d'Albret, notre Langalerie se trouva tout naturelle-
ment recommandé à leur grande amie M°'° de Maintenoo'.
I. Actes de 1601, 1610, IÛ23, 1632, dans les dossiers déposés chez Vacia ea 1TS3,
7. ignoble rËnoumé, sur la commune de Saiat-QueDtiD-de-Capiang, à onze
Ulomèlres sod-ouest de Sainle-Fo y-la- Grande (Gironde).
3. U y CD s une généalogiit moderne dans le rcgUtre VU (^lupplémentaire] de
\:Armorial général des d'Ûozler.
i. Le rédaclear de la geniulogie qui vient d'dlre indiquée croit, mais sans
pvu>oir le prouver, que les Gérauld d'Agenais el les Géraud d'Aoganlénio éUient
il'nne seule et même souche; quant au âef de Langalerie, il dit que celui des
Gentils n'était pas le même que la terre des Gérauld, et il le place dans la
livoÎMe de Nersac, par conséquent A câté de ta Uotte- Charente. D'autre part,
un document de 178!), publié daos les Archives Kisloriqva de la Gironde,
L IVIt, p. 195, mentionne deux Oefs de Langalerie, l'un sur la paroisse de
Siiiil^uenlin (c'est celai qae Jeanne Béraud apporta aux Géranld en 1i9G], et
l'autre sur la paraisse d'Eynesse, Toislae de Saint-Quentin.
5. P. îô, 41, 54-92 et suiv.
6. Ci-après, p. 18.
^. To). l'appendice consacré A Uranie dans le I. X dea Mémoires de Saint-
à
46 A. Dl BOISLtSLE.
Le mari de Judith de la Motte-Fouqué est peu^-etre le Langa-
lerie, maréchal de bataille dans les troapes de Coudé rebelle, qui
fut tué le 6 mars 1653 à la défaite du marquis d*Aubeterre^
Leur fils, Hemri-François de Gentils, marquis de Langalerie*,
père de notre héros, fit une très brillante carrière militaire, dont
la Chronologie militaire de Pinard donne le tableau 3. Quoique
Boileau ait oublié son nom dans le Passage du Rhin^ c'est lui
qui, commandant comme major quarante maîtres du régiment
des Cuirassiers, décida par sa hardiesse le succès de cette journée
du 12 juin 1672, ainsi que l'atteste QuincyS et il y gagna le
régiment du jeune duc de Longueville, tué en prenant terre
immédiatement derrière lui. Il parvint au grade de lieutenant
général en mars 1690, fit les campagnes suivantes en Catalogne
sous Noailles, puis en Piémont sous Catinat, mais dut se faire
donner comme retraite le commandement des troupes de la Pro-
vence et du comté de Nice, et mourut à peine arrivé à Riez, le
24 octobre 1693. Fort vif et orgueilleux, se croyant oublié et
lésé, il donna parfois à son fils l'exemple de l'indiscipline et de la
rébellion contre les chefs ^. Au dire des Mémoires apocryphes
de 1743, ce Langalerie aurait épousé une fort belle demoiselle,
Charlotte-Henriette de Nesmond, nièce de l'évêque de Montauban,
qui serait la Damestriane dont Somaize raconte une histoire
galante^, bien autrement dramatique dans ces mêmes Mémoires.
Charlotte-Henriette n'existe pas dans les généalogies authen-
Simon, éd. nouT., p. 541-542. Madame, qui parle de cette parenté dans plusieurs
de ses lettres à la raugraTe Louise, connut de très près notre Langalerie comme
mari de la gouvernante de ses filles d'honneur. On la Toît, en 1712, assister,
ainsi que M"* de Maintenon et que la sœur de Langalerie, au mariage du comte
de Butant avec une Gentils de la Jonchapt que la toute-puissante marquise
avait fait entrer à Saint-Cyr en 1696 (brochure Montégut, p. 17-18).
1. Gazette, p. 289.
2. On ne trouve pas trace d^érection de ce marquisat. En 1696, le personnage
même qui nous occupe, faisant eoregislrer ses armes à TArmorial général, ne se
qualifia que de seigneur de la Moite-Charente, Tonnay-Boutonne , Biron et
autres lieux.
3. T. IV, p. 346-348.
4. Histoire militaire du règne de Louis le Grand, t. I, p. 321. Par une sin-
gulière erreur, la Biographie générale attribue le rôle glorieux du père au fils,
qui n'ayait pas douze ans alors.
5. C'est lui, en effet, et non son fils, comme on l'a écrit, qui eut arec le
maréchal de Noailles un différend fort vif en 1690 et s'attira une disgrâce tem-
poraire {Mémoires de Noailles, p. 35-37).
6. Dictionnaire des Précieuses, t I, p. 263-265, et t. II, p. 264-265. La clef
dit que Dambstrianb est la comtesse d'Angalbrib.
LiB ivznruREa nu habquis de L1ITG1I.KBIE.
47
tiques de la maison de Nesmond', et il n'y eut, de ce nom,
uu évoque de Montauban que de 1687 k 1703. Le vrai est que
Henri-François de Laugalerie se maria deux fois : 1' en 1650,
avec une Lubersac de la Brosse, de bonne famille du Pèrigord;
2" le 28 septembre 1660, avec Anne-Marie Decouleura de Rou-
velliè, fille d'un président-trésorier de France au bureau des
Snances de Lyon"-. C'est de ce second mariage que vinrent
d'abord notre marquis, puis, sept ans plus tard, une fille nommée
Suzan ne- V ictoi re .
Le fils, Philippe, naquit et fut baptisé à Lyon le 24 septembre
1661 '. A quinze ans il débuta (1676), comme cornette, dans le
régiment de son père*. A partir de là, Pinard nous fait suivre
très exactement les étapes de sa carrière militaire''. 11 combattit
à l'armée du Rhin, sous Luxembourg en 1676, sous Créquy
l en 1677, devint capitaine en 1678, et fit encore cette campagne
I sur le Rhin. Sa compagnie fut réformée à la paix, puis rétablie
' le 7 mai 1682, et, quand son père monta au grade de maréchal
de camp, il passa, comme mestre de camp de Langalerie, dans
l'année qui couvrait le siège de Luxembourg ; mais la trêve de
Batisbonne fit encore licencier le régiment, et, simple officier
réformé à la suite de Locmaria pendant les quatre années sui-
vantes, sa situation devint fort précaire. C'est ainsi qu'en 1685
Dous le voyons forcé de prendre une surséance de deux ans contre
ses créanciers* ; la passion du jeu' et les exigence.s du luxe des
camps épuisaient ses ressources, comme celles de tant d'autres
. Dans une généalt^e (Oossiers bleus, vol. 85, dossier 12740, fol. 2 v
f tl 3), oo n'a ajoute qu'nprâs coup Cbarlotte-Henrietle, comme fille de U"'de
I Hinunion née en 1640, et par coaséqoeat comme sieur da présideat et du marin.
I Cf. le» Uémoires de 1743, p. 34, 13 et B8.
2. Philippe Decouleurs do Koavelllé, Ticomte d'Aruas, seigneur de la Bour-
I loDnière el de la Dousonnïére. cberaller de l'ordre da roi (Saint -Michel], tré-
!r de France arec breTet de conseiller aui conseils d'Ëlat et privé. Sa femme
I t'appelait Suzanne Vidaud.
3. Et non I65tj, comme le dlseot nombre de biographies.
4. È[uA fils uDÏqne et dÉbutanl si jeune dans la carrière militaire, il est
iBMjmUsible qu'on l'eùl destiné d'abord à l'Église, comme le disent les
Mfmoirei de 1743. sous préleite que son père s'élait dégoûté du service mili*
liift ta boni de dii ans.
i. Chronologie mtlitaire, I. IV, p. 518-520. Les Hémoiru de 1743 le font
débuter dans le rcgimenl d'infanterie da Boi en 1674.
5. Arr«t do Conseil du 7 février 1686 [Arcb. nat., E 1833).
T. Le laoce-canet (sic) figure constamment dans le récit de ses années de
Hrriees militaires fabriqué par les Mimotre* apocryphes.
Bbv. HiaToa. LXVI. 1" fabc. 2
4 s A. DR BOISLISLE.
officiers. La Révocation put relever un moment le niveau de ses
finances, car, son grand-oncle Charles de la Motte-Fouqué, pos-
sesseur de Tonnay-Boutonne, la première baronnie de Saintonge,
ayant émigré en Hollande plutôt que d'abjurer le protestantisme,
Langalerie et sa cousine Uranie^ obtinrent le don des biens con-
fisqués sur le fugitif, ou tout au moins de sa baronnie, qui pas-
sait pour rapporter quelque vingt mille livres par an*. On en
peut donc conclure que Langalerie était bien en cour ; mais ce
qui trahit encore les embarras financiers du jeune colonel sans
régiment, c*est que, dans le courant du mois de juin 1687, âgé
alors de vingt-six ans, beau, grand, fait à peindre^, et assuré d'un
bel avenir, il se maria avec une femme de quarante-six ans,
Marie- Anne de Pourroy de Voissan, veuve du président de
Simiane de la Goste, qui venait de perdre une fille âgée de vingt
et un ans, et à laquelle il restait un fils de dix-sept ou dix-huit
ans, un autre fils destiné aux ordres, un troisième destiné aux
armes, et une dernière fille qui fut placée, elle aussi, dans la mai-
son de Madame, comme les fils dans le service du duc d*Orléans
plus tard régent^. La disproportion d'âge ne laissa pas de faire
scandale''. Autrement la présidente était d'une assez bonne
noblesse de Dauphiné, bien alliée, et qui touchait d'ailleurs à la
famille maternelle de Langalerie. Sa mère, Catherine d'Orgeoise
de la Tivolière, s'étant remariée en 1651 au comte de Viriville,
en avait eu la femme du futur maréchal deTallard®, de qui Lan-
1. La belle comtesse était aussi uoe besogneuse réduite à tous les expédients.
2. Bulletin de la Société de l'histoire du protestantisme français, années
1887, p. 132-133, et 181K), p. 135-137 et 331-332. Étaient héritiers : Emmanuel,
comte de Soissons, et sa sœur Anne- Victoire, comme enfants dX-ranie, Gédéon
de Martel, François de la Cropte-BeauTais, Langalerie et sa sœur.
3. D*fIozier le dépeignait ainsi vingt ans plus tard (dossier 4112, foL 11).
M. de Montégut a placé en tête de sa brochure la reproduction d'un portrait de
la même époque.
4. Le père avait été président à mortier en la cour de parlement, aides et
finances de Dauphiné. Le premier fils devint successivement écuyer et che-
valier d'honneur de Madame; le second, abbé de Marcillac, fut maître de Tora-
toire du Régent. La fille aînée, horriblement laide, morte en mai 1687, avait
remplacé M"* de Loubes dans la chambre des filles de Madame, et la fille sur-
vivante y entra Aussi plus tard. Le troisième fils fut page du duc d*Oriéans,
devint mostre de camp, et continua la descendance masculine, l'atné n'ayant
eu qu'une fille, mariée au président Durey de Noinville. — Les Mémoires de 1743
ne parlent que d*un fils de quinze ans.
5. Mémoires de Sourthes^ t. Il, p. 61 : c M** la présidente de la Goste, mère
de défunte M*** de Simiane, épousa le jeane Langalerie, mestre de camp de
cavalerie, dont l'Age étoit assez peu proporUonné an sien. >
t>. En 1687, il n'est encore que brigadier, mais s'eat déjà distiagoé.
LES 1T8NTDRES l>D HABQDIS DE L4ItGtLERIB. {9
galerie se troava être ainsi demi-bean-frère par alliance. Que
M"° de MaintenoQ, comme le racontent les Mémoires apo-
crrpbes, ait négocié cette belle union', ou qu'elle n'y ait été
pour rien, il paraît du moins \raiseniblable qu'elle aida l'ex-prè-
stdente à obtenir pour quelque milliers de livres un emploi d'ordre
secondaire qui toutefois dounait rang à la cour, la charge de
gouvernante des filles de Madame, devenue vacante sur la fin
de 1696*; mais un contemporain nous raconte, à ce propos, que
les deux époux étaient déjà « fort brouillés^, » et d'ailleurs la
guerre les avait séparés de fait depuis 1688, Le régiment de Lan-
galeriâ ayant été rétabli dans la réorganisation des armées, le
tneslre de camp le mena d'abord à l'armée du maréchal de Duras
sur le Rhin, puisa celle du maréchal de Luxembourg en Flandre,
et prit part au combat de Fleurus, où il contribua fort à la victoire,
i ceux de Leuze et de Steinkerque.et au siège do Namur'. Pen-
dant ce temps, sa femme s'occupait des Intérêts du ménage.
Quand on créa des lieutenances de roi dans les provinces, elle
acheta pour Langalerie, au prix de quarante-cinq mille livres,
la lieutenance de son pays d'Angoumois et de Saintonge, et l'en
fit pourvoir le 16 mai 1692 ; mais, soit pour faire pièce à cette
dévouée épouse, soit parce que son service le retenait k l'armée,
il ne vint prêter serment entre les mains du roi que le 27 février
1703. De ce fait, il n'avait pas droit aux gages de la charge pour
les années comprises entre la date des provisions et celle du ser-
raent. D'ordinaire, ies gens bien en cour obtenaient aisément le
I. Bien enteniln. ce insriage annule celui <]iic, bcIuii tes Mémoirts, Langalerie
•nndl coDlraclé dËs 1675, c'eBl-à-dire A moinn de quluze ans, dans le» conditions
tu plus romanesques, aveu une demaisette de Fay d'AthIs, parenle de U. de SU-
lerï ou de Silly. Eli» ne aoraîl raorlu que TÎngl ans plus lard, ayant perdu deui
Bis. et les Mémoires placent on 1G% ou t6% le second mariage avec U" de
SiDilDt, dont its font une Castellaoe, jeune veuve charinanle, mais pauTie,
ttcHBte par 11" de Uaialcnun pour faire passer au Qls de sou premier mari te
H^iMat de Langalerie. De plus, ils raeoDient graTemenl commenl les deux
ludraa fiancé* reçurent la bénSdjclion du roi dans l 'an licb ambre de H" de
binlenoB. et ils font mourir H*" de Langalerie en 1703.
1. Journal de Dangeait, t. VI, p. 48, l'è décembre 1G9G. La marquise de la
R*cbe-dM-Aubiers Tendait ponr six ou sept mille livres.
3. Mémoires de Sourchei. t. V, p. 323. En note ; ( La marquise de Langalerie
(TOU iponsê en premières noces le président de Simiane, préùdenl au mortier
ia parlement de Grenoble, et ensuite, eu secondes noces, le jeune Langalerie,
fnÛle «Toi( ^ris par amour ; mais celle inclination n'avoit pas duré longtemps,
il Ut ttoienl alors fort brouitléa. i
t. C'est i ce ftitige que les l^étnoire* placent une scène grolesqne entre U" de
HainLeaon et le Jeune me>lre de caup.
i
20 A. DE BOISLISLE.
don de ces gages intermédiaires, qui ne représentaient qu'un
faible intérêt de la finance déboursée par eux ; mais M"^ de Lan-
galerie le réclama en vain, et, malgré Tappui du duc de la Feuil-
lade^ le contrôleur général Chamillart et le roi lui-même ne
répondirent que par des refusa II est vrai que les temps étaient
durs, et le Trésor royal fort embarrassé pour rien payer. Ainsi,
lorsque le père de Langalerie vint à mourir en 1693'^, on con-
sentit bien à reporter deux tiers de sa pension de quatre mille
cinq cents livres sur le fils et la fille ; mais ni Tarriéré ni les
arrérages courants n'en furent régulièrement payés, puisque, au
commencement de 1695, nous voyons Langalerie réclamer treize
mille cinq cents livres pour le temps passé^, et voici en quels
termes, deux ans plus tard, il sollicitait la pitié du contrôleur
général Pontchartrain ^ :
De Verssalle, se 26 feuvrié 4 697.
Monseigneur
Quoy que ie soy an lieu de vou faire ma cour et de vou parler, îe
ne laisse pas que de prandre la liberté de vous escrire pour pouvoir
mieu vou marquer le besoin que iay destre mis sur létat de distri-
bution pour les cinq cents escud de ma pantion qui me sont du par
une ordonance signée du six septembre mile six cent quatre vingt
seize. le vou proteste Monseigneur que ie suis sans un soi, et dans
un état de convaléssance qui peut me faire retombé si iépargne se
quil faut pour me réparer de la foyblesse ou mat mis la grande mala-
die que ie vien dessuyé an Piedmon. le vous suplie très bumble-
ment pour que ie soy an état daié iusqua la campagne prochaine de
macorder se secour sette protection et surtout la grâce de me croyre
aveque un très profond respect Monseigneur vostre très humble et
très hobeissant serviteur. Langalerie.
Pontchartrain voulut bien porter le nom du suppliant sur une
des feuilles de distribution ; mais ces habitudes du Trésor royal
n'expliquent que trop quelle nécessité il y avait, surtout pour les
ofSciers employés au loin dans les armées ou pour les person-
nages suivant la cour, de prendre des lettres d*état, des arrêts de
1. Arch. nat., Papiers da Contrôle général. G' 1004, 5 octobre 1705, et 1007,
9 août 1706.
2. Langalerie vint en Aogoamois pendant le quartier d'hiver, en février 1694,
et fit faire l'inventaire de la Motte-Charente.
3. Papiers du Contrôle général, G^ 994, feuille de distribution du 29 avril 1695.
4. ibid,, G' 997, feuille du 5 mars 1697. Je conserve l'orthographe barbare,
qui ne se retrouve pas dans les lettres postérieures conservées au Dépôt de
la guerre.
LIS ITEHTHKES DV lUBQDlS DE LtNGlI.EKtB. 2|
ipttou de surséance contre les importunités, tracasseries, saisies
«tprocÀlures iadiscrètes. Langalerîe avait toute sorte de niutifs
d'en user chaque année, et il y manqua d'autant moins que son
père laissait une succession embarrassée'.
Pendant que ses créanciers étaient ainsi tenus en respect, il
lisait bravement son métier de brigadier de cavalerie à l'armée
la Moselle, à la bataille de Nerwinde et au siège de Charleroy
(1693), j) l'amiée des maréchaux de Lorge et de Joyeuse en
Allemagne, où Saint-Simon put le connaître, k celle de Catinat,
qui finit les opérations de Piémont en 1696, et à celle du maré-
chal de Cboiseul sur le Rhin, en 1697-.
Cette dernière campagne lui valut la croix de Saint-Louis ;
mais la paix survenue sur ces entrefaites et le licenciement des
années rouvrirent pour lui l'ère des préoccupations. Il s'ingénia
pour faire face aux créanciers. Nous le vo.yons, en février 1699,
stflUâter, à l'instar des concessions accordées depuis longtemps
aux demoiselles de Sautour, au baron de Beauvais, à M*"" du
Fresnoy et au major Brissac, un privilège pour établir des voi-
tures et charrettes destinées à faire le service des ports de Paris
an tarif de quinze sols par heure pour deux chevaux, et de
trente pour quatre chevaux. Le mois suivant, il offre d'assurer
aux pauvres de Paris un profit de cinquante mille livres par an, si
on lui accorde k vie le droit de lever pour lui-même la botte de foin
ou de paille que les marchands donnaient en sus de chaque quar-
teron. Enfin, il demande à vendre son régiment, comptant qu'eu
cas de nouvelle guerre il retrouverait quand même un emploi de
brigadier. Cela était contraire à l'usage : le roi se refusa donc à
donner son agrément; le ministre fit également repousser les deux
propositions de finance', et il fallut, en juillet 1700, reprendre
un nouvel arrêt de surséance^. Heureusement, la guerre recom-
meoce, le régiment est désigné pour servir h l'armée de Catinat
60 Piémont, et la première campagne de 1701 se termine par
l'élévation du brigadier au grade de maréchal de camp.
' I. Arcb. nat., G 1886, nnft du 17 mai imi, et E 1894. arrêt du 24 décembre
1 Î-Les Mémoires de 1743 le font serrir, an wnlrsire, en Catalogne, où il se
~ïaï( brouillé arec H. do NuaJIIes, inai« aurait ensuite couquis les bonues
a da duc de Vendôme el prie lui-même Ilostalrich, comme il aaralt (ait
tr à Catinat la Tictolre de la Harsaille eu Piémont.
S. D*p*t de* affaires étrangères, vol, Fiukcb 1069; Bitloire journalière ou
Coufle de la naye. 1690, n- li.
i. Arch. nat-, E 1914. n- 38, 18 joillel 1700.
i
22 1. DE B0IBLI8LE.
Dans le recaeil des Lettres de M"^^ de Maintenons publié
— et fabriqué en grande partie — par La Beaumelle, on trouve
cette épître annonçant à Langalerie la bonne nouvelle * :
Le roi vous a mis sur la liste des maréchaux de ses camps et
armées. Vous en recevrez le brevet par M. de Gatinat, qui doit par-
tir incessamment d'ici pour aller prendre le commandement des
armées en Piémont. Vous n*avez plus besoin de ce que vous appelez
ma protection ; le roi se chargera de votre fortune. Renvoyez à Dieu
tous les remerciements, et songez que vous n'étiez, il y a quatre ans,
que capitaine sans espérance. Je suis bien aise que vous soyez con-
tent de M. d'Aubigné; je compte qu'il ne sera pas mécontent du tour
que prennent votre fortune et la sienne. Signalez-vous; vos services
ne seront pas perdus, ils seront remarqués, et vous ne manquerez
pas de gens qui les feront valoir. Quelque répugnance que j'aie à
me mêler des places, j'accepte vos offres au sujet de votre régiment,
et je les accepte avec d^autant plus de plaisir que j'espère que vous
ne vous opposerez pas au dessein que j'ai de vous marier, supposé
que la femme que vous regrettez ne vous ait pas dégoûté de toutes
les autres. Le petit Simiane aura votre régiment, et vous aurez
Madame sa mère. Vous trouverez en elle naissance, jeunesse, beauté
et assez de bien. Ce dernier article est celui qui doit le moins vous
embarrasser. Voyez, et mandez-moi vos sentiments sans complai-
sance et sans détours.
Le style familier de cette lettre impliquerait une véritable inti-
mité entre la signataire et le destinataire; mais elle a tout sim-
plement été empruntée par La Beaumelle aux Mémoires de 1743,
où les éléments en figurent (p. 139-140 et 144-147) sous la date
de 1695 et d avril 1696. Sa fausseté* ressort de l'examen le plus
superficiel, soit qu'on la place en avril 1696, comme Tavait fait
l'auteur des Méynoires, soit qu'on la reporte à janvier 1702,
date véritable de la promotion de Langalerie 3.
En 1696, il n'y eut de promotion que le 3 janvier, et Langa-
lerie n'y fut point compris par la raison que son grade de briga-
dier ne datait que du 30 mars 1693. — En 1702, la promotion
eut lieu également dans le cours de janvier.
1. Lettres de M'* de Maintenon, éd. 1756, t. II» p. 218-220, et 1789, t. II,
p. 196-197.
2. Il peut être nécessaire de la démontrer, puisque le texte en a été repro-
duit par de tout récents biographes de Langalerie, et que ni Lavallée, ni Gef-
froy n'en ont fait la critique, faute sans doute d'avoir connu ce texte.
3. Journal de Dangeau, t. VlU, p. 304; Mémoires de Sowches^ t. VU, p. 191.
LES ATERTUaKa DC liBQUIS Bt UNaiLERIB. K9
1 Voua n'étiez, il y a qualre ans, que capitaine sans espé-
p.niuce, > (lit M"* de Maintenon. — On a vu qu'il avait été fait
mestre de camp du régiment de son père en 16S3 (4 novembre),
à vingt-deux ans, et qu'il le commandait encore comme bri-
gadier.
En i696, Catinat alla bien commander, pour la troisième fois,
l'armée de Piémont; mais il avait quitté la cour dès les pre-
, miers jours de janvier : ainsi donc M'"" de Maintenon ne pouvait
[enuoDcer en avrd son départ imminent. — En 1702, il com-
landa l'armée du Rhin, où Langalerie ne fut pas employé.
Le d'Aubigné dont M"'^ de Maintenon compare la fortune à
B de Langaleriene peut être le comte son frère, qui, depuis
niiigt ans passés, n'avait plus que des pensions et des gouver-
leDts; pas davantage ce prétendu cousin Louis- François
i'AabigBy de Tigny que les Mémoires de 1743 font nommer
r M"* de Maintenon, en 1694, lieutenant-colonel du régiment
Is Laogalerie : ué vers 1685, celui-lk n'entra aux mousquetaires
n'en 1700, n'eut un petit régiment d'infanterie que le 3 sep-
3 1702, et, en réalité, ne servit jamais avec Langalerie.
Quant-à la proposition matrimoniale, ou a vu plus haut que
le prétendu premier mariage de Langalerie doit être considéré
cumme une pure fable; que, depuis le mois de juin 1687, il avait
pris pour femme la veuve du président de Simiane, laquelle ne
lui avait apporté ni jeunesse {en 1696, elle comptait cinquante-
ciaq printemps!) ni grande naissance (fille d'un maître des
comptes de Grenoble) ', mais du bien au contraire ; et c'est ce qui
n'avait dû guère embarrasser le jeune mari.
Le « petit * Simiane, son beau-fils, hérita eneffetdu régiment
ds Laogalerie, mais en 1703; né vers 1669, capitaine sous les
ordres de son beau-père depuis i6S9, sa jeunesse, à lui aussi,
n'était que relative.
II n'est pas besoin d'insister davantage sur ce document.
D'ailleurs, nous avons d'autres preuves que La Ueaumelle, qui
Ini a donné sa forme définitive, a fait encore d'autres emprunts
aux Mémoires de 1743 : il en cite textuellement trois pages sur
l'origine des relations de Langalerie avec M"" de Maintenon. et
iwume d'après eux la fin de son existence^.
1, Il Ml vrai (fat! 1m Mt'moiria iIp IT43 ^n raiisient ane CaRldlans.
1. mmiOm mr H" lie Mninttnm. éd. 1756, t. 111, p. Î91-294.
24 A. DK BOISUSLB.
IL
Lanoalerie a l'armée d'Italie.
Quelques semaines à peine s'étaient écoulées depuis la promo-
tion au grade de maréchal de camp, lorsque, le 11 février 1702,
Madame licencia ses filles d'honneur ^ Ce fut un grave événe-
ment pour M'"*' de Langalerie, quoique indemnisée en partie de
sa gouvernance par une pension de cinq mille livres pour elle et
sa fille Simiane, et par un logement au Palais-Royal. Quant au
mari, vivant toujours à l'armée et séparé de biens, il se ressentait
peu des embarras du ménage et s'en souciait encore moins. Des
lettres de service du 21 février l'avaient attaché à l'armée du duc
de Vendôme, et il avait passé son régiment à son beau- fils'. C'est
seulement par aventure qu'il prit part au brillant combat de
Luzzara' : venu en curieux à l'aile gauche et prié par M. de
Tessé de rester là avec Albergotti, ce fut lui qui soutint, à la
tête de la brigade de Piémont, les derniers efibrts de l'ennemi,
de neuf heures du soir à une heure de la nuit; mais, en fin de
compte, il fut obligé de faire une retraite de flanc « un peu
hardie. > Selon son habitude, il ne manqua pas de réclamer
pour lui-même tout l'honneur de l'afiaire, et adressa directement
cette lettre au roi* :
Je prends la liberté de rendre compte à Votre Majesté qu'ayant eu
le bonheur de la servir utilement au combat de Luzzara, m'y étant
trouvé commandant six bataillons et un régiment de cavalerie qui
ont combattu avec toute la valeur et Tintrépidité du monde, je me
donne Thonneur d*en rendre compte à Votre Majesté, parce que Fac-
tion a roulé sur moi, qui me suis trouvé hors de communication
avec l'armée de Votre Majesté, et que les ennemis étoient entre elle
1. Mémoires de Saint-Simont éd. dout., t. X, p. 99-tOO.
2. Dangeau, t. VIII, p. 307 et 347.
3. Quincy, Histoire militaire du règne de Louis le Grand, t. III, p. 677-678.
Cf. les Mémoires de 1743, p. 324. Ces Mémoires le font assister en spectateur,
pris de vin et iTre-mort, à la journée de Crémone (1*^ février 1702) ; mais son
nom ne figure dans aucune des relations.
4. Lettre du 18 août, reproduite dans les Pièces du t. II des Mémoires mili^
iaires pour servir à l'histoire de la guerre de la Succession d'Espagne^
p. 737-738.
us IVEITCREB DD HIBQI^
l el les troupes que j'avois l'honneur de commander*... Heureux,
Sire, de m'élre trouvé dans cette occasion pour marquer à Votre
AUjestê moD zèle à son service, pour lequel je m'estimerai toujours
trop heureuï de pouvoir sacrifier ma vie en l'assurant du très pro-
fond respect, etc.
I En 1703, après une courte apparition à Versailles ", il fil encore
I Campagne sous M. de Vendôme. Celui-ci, sans l'aimer, semblait
ipprécier sa vigueur et son activité ; il lui confia le commandement
de Mantoue et le chargea, à la fin de l'année, de couper les deux
mille Impériaux du corps du général Viaconti'. Chamillart l'en
lèlicita très chaudement : < Si vous continuez de servir S. M.
comme vous avez fait jusqu'à présent, vous vous rendrez de plus
plus digne de ses grâces royales, et j'y contribuerai volon-
tiers en tout ce qui pourra dépendre de moi^. » Mais M. de Ven-
dôme changea subitement, se plaignit que, faute de vigilance,
Visconti eiit pu se retirer en Piémont^ et tint Langalerie, pour
quelque temps, en disgrâce. On verra plus loin que la conduite
du maréchal de camp, soit à l'égard des pays occupés et mis k
contribution par l'année française, soit vis-à-vis de certains
généraux ennemis, tels que le comte de Linange, qu'il avait pu
connaître jadis à la cour de Versailles*, ne prêtait que trop aux
soupçons. Avant que ceux-ci eussent pris corps, une promotion
de onze lieutenants généraux fut fciite le 10 février 1704', et
Langalerie y fut compris. De son commandement de Mantoue, il
se bâta de remercier très chaudement le ministre, tout en protes-
tant contre la nouvelle attitude de M. de Vendôme'.
I
I
I
^Ê traire toutes |i
t. La lettre de Tessé i U duchesse de Bourgogne reproduite dans l'Appendice
du 1. VII de Soureli^i, p. 481-4S2, reconnart que la résislance fuL admirable de
M cAtè-lt. Le lendemaio, Langalerie prit le cbAtcao de Lntura; quelque temps
plus tard, il força la ville de Borgofarle. Vùj. la publication olHcielle des Feld-
iUft dta Pfinzen fufren von Savayen. t. IV, p. 301, 30G el 38G.
!. En févrlEr, il vint prêter sertncut pour sa charge de lieutenant de roi.
î. PMiUge dei Prinsen Eugen. t. V, p. 223 el 233-334.
4. Lellre dn 2S novembre citée par Laogalerie lui-méine dans md manifeste
dalTOe, «â-après, p. 29.
5, Dangean, I. IX, p. 365; Mémoira militaires, t. [11, p. 315-316,
G. Uénioirtt de Saint-Simon, éd. nouv., t. XTI, p. 386.
T. Cette promotion ne fui connue que peu A peu et lardiTemenl, rers le
milieu dn mois (Sourches, t. VIII, p, 286).
S. Lettre du 30 mars 1704, au Dèpût de la guerre, roi. 1782, n* 100. Le jour
tnlTuil, i Paria, un a;r"it-droit de son maître d'iiùtel obtenait du Conseil la
U surséance que tes lettres d'Etal lui assuraient, comme i l'ordinaire,
poursuites de créanciers (Arch. ual., E 1930, n' 311). En rcmer-
26 A. DB BOISLISLE.
La campagne de 1705 s'engagea dans ces conditions. Langa-
lerie n'y eut qu'un rôle effacé. L'orage grondait sur sa tête; on
en suit la marche dans les correspondances du Dépôt de la guerre^.
Le 11 février, il se plaint à Chamillart que ce ministre ait en
r < injustice » de le forcer de remettre au trésorier de Milan cin-
quante mille livres en billets du duc de Massa et de lui retenir la
moitié de ses appointements et de ses fourrages ; il le prie d'ap-
puyer auprès du roi sa réclamation contre lui-même, ministre. Cha-
millart répond que l'on a su par une plainte du nonce qu'il avait
dissimulé ce versement de M. de Massa, et que le roi s'est décidé
à lui retirer son emploi ; pour éviter cette disgrâce, il serait plus
prudent de se faire oublier que de réclamer. La réponse était
méritée; ne fallait-il pas que Chamillart réagit contre des ten-
dances que Vendôme lui-même ne favorisait que trop publique-
ment^? Le 16 mars suivant, il adressa à Langalerie une lettre
singulièrement équivoque sur ses < étranges » rapportsavec l'Alle-
mand Linange. Langalerie avait alors un commandement dans
le Bressan et la Lunégiane, en face de ce général^. Selon lui-
même, il y rendit les plus grands services en rétablissant la cava-
lerie du grand prieur, frère cadet du généralissime, en harcelant
celle de Linange, etc. ; au contraire, toute l'armée l'accusait de lever
à son propre profit des contributions énormes, peut-être même de
méditer quelque coup de tête, une trahison. A cela, peu après le
combat de Cassano, auquel il ne prit point part^ il ajouta l'im-
ciant le ministre, Langalerie lui dit qu'il n'avait plus besoin de demander de
l'argent, mais ambitionnait d'obtenir un jour la lieatenance générale d*Angou-
mois et le gouTernement de Cognac, et souhaitait que le roi lui envoyât son
portrait, comme au prince de Vandémont, pour le porter au bras.
1. Vol. 1863 A 1867.
2. C'est ce que ne semble pas bien comprendre Saint-Simon, qui dit (nouT.
éd., t. XII], p. 334-335 et 505) : « Langalerie étoit brave et réglé, appliqué et
bon officier ; il étoit parvenu assez vite à être lieutenant général. Il avoit toujours
paru sage et modeste... Je ne sais ce qui lui tourna la tète. L'ambition le saisit;
il se piqua de quelque pillage qui lui fut reproché de la cour, tandis qu'il en
voyoit ^ire sans cesse de bien plus considérables à d'antres à qui on ne disoit
mot parce qu'ils étoient plus appuyés... • Il est vrai que, plus loin (p. 336), il
le qualifie de t court d'esprit i et que, plus tard (éd. 1873, t. Xin, p. 67), il
parlera des t horribles concussions de ce gueux, pillard et fort borné, ambitieux
et plein de son mérite, i Évidemment il n'a eu qu'une Tagne idée du person-
nage et de ses méfaits.
3. Gazette, p. 200, 248, 268. Le corps d'armée était celui du grand prieur.
4. Il était encore du corps d'armée que le grand prieur, avec qui il se trou-
vait en meilleurs termes qu'avec son aîné, emmena à Rivolta et tint toute la
journée dans la plus incroyable inaction.
U8 ITEimiIlES un KiBQDIS DE U.'^GlLBRn.
27
prudence d'envoyer h l'adresse du roi lui-même tin « faclum »
contre son général, et cette pièce, tombant entre les mains du
ministre par l'infidélité du porteur, acheva de le compromettre.
Aussi, lorsque M, de Vendôme exprima ses inquiétudes person-
nelles sur le tieiiteniint général, ChamiUart répondit qu'il ne suf-
fisait pas de le mettre en observation, que mieux valait le ren-
voyer en France'. La lettre du ministre parvint à l'armée lorsque
las troupes allaient prendre leurs quartiers d'hiver ; Vendôme, tou-
jours indulgent, n'en tint compte-, et déclara même publique-
ment qu'ayant un homme tel que Langalerie pour défendre l'Oglio
contre toute tentative des Impé^iaux^ U n'aurait plus scrupule
de se rendre à Paris. De nouvelles injonctions étant arrivées
en décembre, il voulut bien les communiquer, * les larmes aux
j«ux, > h notre lieutenant général, l'engagea à partir pour la
cour, où il l'aiderait à se justifier pleinement, et même à indemni-
ser l'intendance*, et, croyant l'avoir décidé, lui remit sous cachet
volant une lettre destinée au ministre, où U plaidait en ces termes
les circonstances atténuantes^ : ■ M. de Langalerie est un homme
qui pense quelquefois un peu exlraordlnairement; mais cela
n'empêche pas que ce ne soit un homme plein de courage et de
bonne volonté, et de qui on peut très bien se servir. Sur bien
des choses, sa conduite n'est pas excusable; mais il est à l'au-
mône et dans un état digne de pitié... >
Au moment de prendre la poste, Langalerie ressentit, ou du
moins affeola de ressentir une profonde terreur d'aller se jeter à
Paris aux mains de ses créanciers, qui seraient capables de l'em-
prisonner pour le reste de sa vie, puisqu'il n'avait plus un sou.
I* 3U; Bibl. aal., ma. fr, 14178. Toi. 311,
1. Dipbl de la guerre, toL I
leilre ia 6 octobre.
2. Chsmiliart le Iroofa Tnrt tnaoTais [Gaerre, vol. 196D, n- 73).
3> Pour le quartier d'iiiier, Lanealerie Tut cantonné â Ticeago, en Crimoiiaig.
i. langalerie a raconté ainsi les faits dans le manifeste dont il sera parlé
^nt hrin, et les correspondances confinnenl celte trersion. On trouve même ces
diUilt rampl^iiDentaireg dans un article rétrospectif du Journal de Verdun
(nclobre 1716, p. 7\1) que l'aurai souvent occasion de citer : ■ Le duc de Ven-
, qui le cansidÉrait et l'almoit , lui offrit sa protection , l'invita de le
■e* Paris, et Ini promit d'obtenir sa grftce du roi, même de prendre sur ion
I couple les sommes qu'il ne seroit pas eu étal de rendre, et qu'en attendant
t !• décision de cette affaire, il ponrrolt être en refuge as«Dré dans eon ciiâteau
d'Anet, pris de Paris. >
Sl Lettres do dnc de Vendûme au rni et i Ctuuiitlart, IS décembre (Guerre,
t 130).
28 ▲. DE BOISLISLB.
Au liea de se diriger vers la France, il partit à petites journées
pour les terres pontificales. Quant à la lettre de Vendôme, il
chargea son secrétaire, dépêché comme courrier du généralis-
sime, de la porter en cour et de la faire présenter au roi par le
P. de la Chaise, qui s'était déjà entremis en sa faveur^
Avant de faire un pas de plus, Langalerie s'arrêta quelque temps
sur le territoire de l'Eglise, dans un couvent de Bologne ; il y reçut
même la visite de son ami Saint-Frémond', et promit que, si,
avant la an d'avril, le ministre lui pardonnait le « manifeste publié
mal à propos, > il reviendrait à son poste, sinon il s'attache-
rait à une puissance neutre, le pape par exemple, préférant tout,
même la mort, plutôt que de servir contre son roi l^itime^. Mais
le bruit s'était répandu à la cour que le ministre avait décidé de
le rappeler^, c'est-à-dire de lui retirer son emploi à l'armée, et
les nouvelles de plus en plus inquiétantes le firent partir pour
Venise. Il n'y avait pas encore désertion, puisque cette ville de
plaisir était un rendez-vous neutre pendant l'inaction de l'hiver,
surtout durant les mois de carnaval, pour les officiers de toute
nationalité ; beaucoup des nôtres y allaient aussi avec l'intention
ou sous le prétexte de prendre du service dans l'armée des Mécon-
tents hongrois. Mursay, qui s'y trouvait en permission régulière,
et qui rencontra Langalerie dans les premiers jours, attesta,
comme Saint-Frémond, qu'on pouvait espérer qu'il vînt à rési-
piscence''. En effet, notre lieutenant général avait commencé,
très correctement et sous mine de se justifier, par rendre visite à
l'ambassadeur de France, abbé de Pomponne*; mais celui-ci,
1. Guerre, vol. 1960, n*' 37 et 44, 9 et 11 janvier.
2. Aussi son compagnon de jeu.
3. Guerre, toI. i960, n* 133, lettre de Saint-Frémond datée du 25 janvier.
4. DangeaUf t. XI, p. 15; Sourcha, t. X, p. 18.
5. Guerre, vol. 1960, n* 182, 2 février. En même temps (n* 201), le duc de
Mantoue écrivait en sa faveur à Chamiilart. — Il est superflu de démontrer
que cette correspondance détruit toute la légende des Mémoires de 1743 qui le
représente se rendant directement auprès du prince Eugène, sous Pizzighi-
tone. D'ailleurs, à cette époque de l'année, les opérations étant suspendues,
le prince demeurait A Vienne.
6. L'abbé écrivait de Venise, le 13 février, an ministère (Affaires étran-
gères, vol. Vbnisb 146, fol. 126 v*), que Langalerie, arrivé le 10, avait protesté
pour qu'on intercédât en sa faveur A Versailles, mais qu'il avait auparavant
réclamé la protection de la république, et que l'ambassadeur impérial lui avait
fait faire des propositions à Bologne. Les inquisiteurs d'État répondirent à
Langalerie que ce n'était pas leur affaire de protéger un sujet intidèle à son
souverain.
LES ATEKTOHES 00 HIKQDIB DE LlHBUmB.
I mis au courant de la situatîou, le reçut très froidement, comme
r bien on pense, et interdit aux officiers français qui se trouvaient
alors à Venise de fi'équenter un camarade si suspect. Laoga-
lerie s'imagina même, et non peut-être sans \Taiserablance,
qu'il y avait un projet de l'arrêter à la première uccasion et de
l'expédier sur la 13astitle. 11 demanda donc au gouvernement
réuitien de le mettre sous la protection de quelques gardes, et,
malgré les nouvelles objurgations de ses compatriotes, prêta
l'oreiUe aux avances qui lui avaient été faites dès l'abord par le
prince Ercolani', ambassadeur de l'empereur Joseph. Co des
Français qui avaient essayé de l'en détourner écrivait alors à
Ghamillart : « Si nos ennemis l'attirent à leur service, ils auront
certainement un officier de courage, mais dont les continuelles
Tisious et disparates leur feront peut-être plus de mal que de
bien', » Enfin, le 17 février, il adressa au prince une lettre dans
laquelle il se disait prêt à aller prendra du service à Vienne, si
l'empereur voulait bien lui assurer un grade de capitaine géné-
ral, intermédiaire entre celui de lieutenant général qu'il avait
en France et les feld -maréchaux autrichiens^. Il envoya à
son beau-fils Simîaoe, qui était dans Mantoue, l'ordre de vendre
l'équipage qu'il avait laissé h Bologtie', et se mit, du 20 février
au 10 mars, à rédiger contre le ministre Chamillart un mani-
feste oô nous relevons sans peine les premiers symptômes du
délire des grandeurs et de la manie de la persécution qui rem-
plirent son existence. Quant à ses griefs, voici très sommaire-
ment^ quels Us étaient; d'ailleurs on les devine par avance.
Comme tant d'autres officiers généraux poussés par le ministre
au désespoir, aux dernières extrémités", il a été la victime de
Chamillart, qui n'est pas homme h tenir compte ni des soixante-
dix années passées par son père et par sou aïeul dans les armées
1. Philippe Ercolftoi, prince da Sainl-Empire et coaseiller d'ËUt impérial,
latMk Venise de 1705 à 1714.
i. Guerre, vol. 1060, n- ?G4, lettre de La Perrière, Venise, 13 Tévrier.
3. Lettre reproduite dans le manifeale dont II va filre parlé,
t. Guerre, *ol. 1060, n- 323, lettre de Simiaae, 24 février. Le miiilBlre
5. D'après l'exemplaire conservé à la Bibliothèque nationale dans le recueil
Ctnge, Réeerva F 167, pièce 34.
6, Outre ses campagnon» ile désertion le prince Emmanuel et le chevalier
it BouoeTal (ci-aprèa, p. 34-3G), il citait le marquis d'EaclaioTilUers et le
n Quiuson, Câlinât, le prince d'Auvergne, Surville, etc.
k
â
30 ▲. D8 B0I8L18IJS.
de Louis XIII et de Louis XIY , ni des services que lui-même a
rendus pendant trente-deux ans, et notamment en Italie, dans
ces dernières campagnes. Un premier ordre de proscription n*a été
arrêté que par la bienveillance et la gratitude du grand prieur»
frère de M. de Vendôme, un second l'a privé de la moitié de ses
appointements pendant quinze mois ; on lui a fait un « mécompte »
de quarante-deux mille livres; on voudrait l'enlever pour faire
tomber sa tête ou pour le plonger à jamais dans un cachot; on
défend aux officiers ses amis de le voir, et même de le recon-
naître; on empêche que ses lettres n'arrivent jusqu'à M. de Ven-
dôme, son général ; on rejette sans examen les protestations faites
en sa faveur par des collègues tels que Médavy, Saint-Fré-
mond et Montgon ; on persuade même au roi qu'il a traité avec
l'empereur.
Conclusion : il ne lui reste qu'à quitter son pays, son comman-
dement, quatre cent mille livres de bien, pour échapper à la haine
envenimée et aux persécutions du ministre ^
Ce manifeste ne resta pas, comme le factum de l'année précé-
dente, entre celui qui l'avait rédigé, le roi et le ministre. Langa-
lerie eut soin de lui donner une grande publicité' ; selon l'expres-
sion de Madame, c'était se « casser le cou^, » renoncer à toute
possibilité de réhabilitation. « Ce que le roi peut le moins souffrir,
disait cette princesse^, c'est qu'on attaque ses ministres. Il punit
cela aussi sévèrement que si on l'avait attaqué lui-même. C'est
1. On remarquera qa*il n'y a pas d'allusion aux persécutions de M"* de Main-
tenon dont parlent toutes les biographies.
2. Cette pièce fut publiée dès l'automne suivant dans les journaux ennemis
d'après l'imprimé de Venise (Gazette d' Afnsierdam, n* xci, de Vienne, 30 octobre
1706), et elle parut en feuille volante A Cologne en 1707, à la Haye en 1714, etc.
Titre : t Manifeste de Philippe de Gentils, marquis de Langalerie, ci-devant lieute-
nant général des armées de S. M. très chrétienne et son pensionnaire, seigneur
des terres de la Motte^harente, Tonnay-Boutonne et Biron, lieutenant de roi et
premier baron de la province de Saintonge, et chevalier de l'ordre militaire de
Saint-Louis. • Lamberty en a donné le texte dans son recueil, t. IV, p. 127-143.
Le Musée britannique en possède (702 f 25) une réimpression de 1712, avec
addition des pièces relatives à son abjuration, dont il sera parlé ci-après.
3. Lettre de 1711, dans la traduction Jaeglé, t. 11, p. 159 : t J'ai bien pensé
que Langalerie n'avait pas fait son livre lui-même; il n'est pas savant du tout,
mais fort entendu à la guerre. Il aurait mieux fait de ne pas publier de Uvre,
car celui qu*il fit composer et imprimer contre M. de Chamillart lui a cassé le
cou. Aussi était-ce une grande folie de dire la vérité. »
4. Lettre antérieure : ibidem, p. 130.
fliTW
LES AVB11TCUS DD HtBQCIS DE UKGILBBIE. H
poorqooi Laogalerie et La Hoatan' oe pourront rentrer eu
Ûirear. •
n Eant le dire, le ministre ne fut pas soutenu par l'opinion
lique. On n'était plus accoutumé à la sévérité de Louvois;
iciers ou courlisaus eussent considéré comme plus généreux, et
anssi comme plus prudent en temps de guerre, de ue pns pousser k
bout nu lieutenant général de valeur bien établie. Mais Chamil-
lart tint bon. A la lettre de Mursay citée plus haut', il répondit,
le 22 février* : « H seroît à désirer que Laugalerie eut autant de
règle dans l'esprit qu'il a de courage. Il s'est attiré la disgrâce
du roi par tous le^ mauvais propos et les lettres les plus imperti-
nentes qu'un homme puisse jamais écrire, et il n'est pas possible
de prendre jamais aucune confiance en lui après s'être oublié
comme il a fait. >
Un correspondant qu'il avait dans Mantoue, le sieur de la Fer-
rière, chevalier de Vîncelles, lui écrivait, le 23 février* :
M. de Langalerie est un bomme d'un sens si extraordinaire qu'on
ne peut rien s'en promellre de fixe et d'assuré. U recommence ses
protestations el envoie même son équipage a ManLoue, comme une
e»pu<:e de gage de sa lldélilè. Il est à souhaiter que cette aiïaire se
termine sans augmenter le dérangement audacieux et mutin qui
semble régner dans Tesprit des troupes du roi, el qu'on croit avoir
phis besoin d'exemple de sèTérllê que de clémence. Je me crois
même obligé d'ajouter ici que M. l'abbé de Pomponne m'a dit conru-
Staient, à Venise, qu'il avoit des soupçons que ledit sieur de Langa-
lerie avoit eu des commerces avec les ennemis dans le temps qu'il
commandoiL, il y a trots ans, à Mantoue : sur quoi néanmoins il ne
1. Les éilllenre oal lu La Hautan. Il l'agîl du baron gasuiii, un clés eiplora-
leurt (lu Canada, ifai, éUat lieutenant de roi à Terre-Neuve et ajïnl él* accusé
ils MDcus»luafl, se uura en IG94. de peut d*élre nritxé, et se iita i Amsterdam,
puit t Hanovre, Leibniz, qni |ml>liB de lui un iiainplilel i |iropus du manifeste
il» l'Angtelcrre contre U Suède, s'exprime en ces lermes dans nne tellre du
3G juin ITIQ i U prinwNic de Galles : n Le pauTre La llontan avoil meilleur
Traloir que dm TorcBi pour servir le roi ; m qu'il dil n'e«t pas IrèB bien rai-
sonné, elc. » Il avait compoié une «mère critique de l'église romaine et de la
civlliulion iiuro)iéenue, que l'apcislal GueudevillH publia en 1704 «ans le lilre
lie : Diatogue de .V. le baron de la Hontan et d'un sauvage. O'esl pour tout
crli qun Madame rapprochail «on cas de celui de Langalerie.
î. Ci'deMus, p. 28.
l. Guerre, vol. 19G0, n* 305.
(. Ibidem, a' 3\0. En lâte de la leltre, le ministre a fait écrire celte apostille :
< A H. Pinsonneau (premier commiB) ; A garder. *
32 A. DR BOISLISLB.
m'a rien dil de fort positif, et peut-être même qu'on a pris mal à
propos ces sentiments sur l'afRnité qu'il a avec M^^ la comtesse de
Soissons, qui est sa proche parente.
Je vois, Monseigneur, des gens qui se réjouissent de cette affaire
de M. de Langalerie dans Tidée qu'il pourra vous en revenir du
blâme et de Tinquiétude, comme s'il n'étoit pas constant que cet
homme a voulu manifestement voler quarante mille francs au roi et
qu'à la valeur près c'est un des sujets le plus mince qu'il soit pos-
sible de trouver, et même reconnu pour une cervelle entièrement
démontée. Mais les élévations comme la vôtre ne sont jamais sans
envieux.
Je crois que c'est de là que naît la principale source des tournures
impertinentes et criminelles qu'on continue de donner au peu de
succès de la dernière campagne de Piémont, et des paris que quelques
gens font insolemment et ouvertement que M. le duc de la Feuillade*
(poussé par des sentiments d'un extraordinaire qu'on n'oseroit vous
exprimer) fera trouver, cette campagne, des obstacles à l'entreprise
ou au succès du siège de Turin. J'ai confondu deux ou trois des dis*
coureurs...
A toutes les lettres de La Perrière, Chamillart ne répondit que
par cette profession de foi, bien honorable pour lui' :
J'ai su, avant que je fusse ministre, un discours qui étoit familier
à M. le cardinal de Mazarin, et que j'ai bien retenu. On parloit, de
son temps, du moins avec autant de liberté que Ton fait présente-
ment contre ceux qui étoient dans les premières places, et particuliè-
rement contre lui. Il n'avoit à opposer à ces discours que d'aller tou-
jours son chemin en disant qu'il falloit les laisser dire pourvu qu'ils
le laissassent faire. S'il y a des gens qui aiment assez M. de Langale-
rie pour croire que j'ai fait tort au service du roi de l'en éloigner, ils
ont des sentiments qui ne les doivent pas beaucoup faire estimer. Le
plus brave homme du monde, sans vertu, sans probité et sans mérite,
ne me paroit bon à rien, quand il n'a pas assez d'arrangement dans
la tête pour faire usage de cette bonne qualité. J'ai vu dans d'autres
temps que Ton auroit mis un ofQcier comme M. de Langalerie à la
Bastille pour un long temps, sans l'avoir aussi bien mérité.
Pour ce qui est de M. de Bonneval, c'est une tête démontée, qui se
fera aisément connoitre pour ce qu'il est, et dont on ne doit pas foire
assez de cas pour se mettre en peine de ce qu'il est devenu.
1. Gendre du ministre.
2. Guerre, vol. 1961, n* 74, minute da 12 mars.
LIS iTE^mrilBS no MiHQPIS DE UNGILEBIE. 33
A un officier qui, le 20 mars, crut également devoir le
prévenir de tous les mauvais discours répandus contre lui, il
répliqua encore' ;
Je crois que j'ai beaucoup contribué au parti que M. de Laogale-
rie a pris; mais Je n'aurai jamais de regret à la perle d'un oftlcier
qui, pour tout mérite, n'aqiio la bravoure d'un soldat, et qui compte
pour rien de voler son maître, .le me tiendrois bien plus coupable,
si je ne l'avois pas fait connoilre à S. M. Tel qu'il est, si les enae-
niis n'ont de béros parmi eux que ceux que nous perdrons à ces
conditions-là, jl faut s'en consoler...
Vous me mandez que l'on me reproche de promettre aisément et
d'oublier. Il est vrai que je réponds, ou verbalement ou par écrit,
trop bonnètement, et que les ofliciers qui étoienl accoutumés à être
refusés durement prennent ces lionnétetés pour des promesses. Ce
qui est de certain, c'est que les grâces se sont répandues si abondam-
znent depuis que je suis dans la place de secrétaire d'Ëlat, que j'ai
doQpé la hardiesse à ceux qui n'auroient osé en demander sous un
autre ministère, de les solliciter avec la même hardiesse que si elles
leur étoient dues. Il y a quelques oillciers raisonnables; mais il y en
a encore davantage qui ne le sont p^s.
Chamillart jugea même nécessaire, quelques mois plus tard, de
Caire réfuter par le Mercure les termes du manifeste"^, comme on
«ût fait pour l'œuvre d'une puissance étrangère, de la Hollande,
de l'Angleterre ou de l'Autriche. M. de Langalerie ne parle
Jtoitit de son affaire, dit le rédacteur officieux ; il ne donne aucune
explication des faits qui lui sont imputés, et remplace cela par des
Jjortraits satiriques, par des appels venimeux à l'iadiscipline.
Que n'est-U donc venu se justifier? Tout le monde sait qu'il s'est
approprié une somme de soixante mille livres versée au compte du
roi par la principauté de Masaa et la Garfagnane^ Pouvait-on
faire autrement que de lui réclamer cette contribution? Ses pré-
tendus persécuteurs, dont la douceur et les manières obligeantes
aoDt généralement connues, auraient su passer sur bien des griefs
I es considération de sa valeur passée et de ses services.
1. VoJ. 1961, a' 125, rëpoQM margiaale sur une lettre d« CimI, W man.
î. Vol. de février 1707, p. Î30-Î41,
3. Petit paya des Apennins partagé ealre le duc de Uodéne et la répablique
de Lucqnes, sur le SercMo.
Rbv. HisTOB. LXVI. 1« FABC. 3
h
34 ▲. DE BOISLISLE.
m.
Langalerie au service des Allemands.
Le manifeste nous a entraînés un peu loin ; il faut reprendre les
faits au moment où la réponse de Vienne était attendue. L*am-
bassadeur Ercolani avait promis d'obtenir un grade de général
de la cavalerie, un régiment et une sonmie sufi^nte pour payer
dettes et équipage ; l'empereur Joseph n'accorda que le grade de
generalwachtmeister (général-vaguemestre ou major), cinq
mille florins de pension et autant de frais d'équipage^ Langalerie
accepta quand même et partit pour Vienne, mais non pas seul,
car il avait été rejoint par cet autre déserteur, le chevalier de
Bonneval, qui venait de rompre avec leur patrie conmiune dans
des conditions identiquement pareilles, et ils retrouvèrent en
Autriche le troisième transfuge dont j'ai dit un mot au début*, le
prince d'Elbeuf. Il faut bien faire connaître aussi qui était Bon-
neval et quelles analogies ou quelles différences il y avait entre
son cas et celui de Langalerie.
Cadet d'une très ancienne maison de chevalerie limousine et
proche allié de Fénelon, Claude-Alexandre, chevalier puis comte
de Bonneval (1675-1747), avait débuté sur mer à l'âge de onze
ans', sous son parent Tourville, puis avait quitté ce service en
1697, à la suite d'un duel, pour prendre une sous-lieutenance aux
gardes et enfin le commandement du petit régiment d'infanterie
de Labour. Tandis que Langalerie passait pour « court d'esprit
et ignorants » Bonneval, < bien-disant, éloquent avec du tour
et de la grâce, avec beaucoup d'esprit, fort orné de lecture, et
beaucoup de talents pour la guerre, » mais, conmie le lieutenant
1. C'est du moins ce que Conche, aide de camp de M. le duc de Vendôme,
déposa pins tard, au cours du procès, avoir entendu dire A l'abbé de Pom-
ponne en passant A Venise. Le Journal de Verdun (juin 1706, p. 420-421) ne
parle que de six mille florins, équivalant A douze mille livres de France. On
indique le 5 avril comme date du brevet impérial. Dangean sut les promesses
de rambassadeur le 25 mars : Journal, t. XI, p. 62.
2. Ci-dessus, p. 4.
3. Garde-marine en 1687, enseigne en 1691.
4. C'est Madame qui dit qu'il n'était a pas savant do tout, i et son ortho-
graphe, an moins celle de 1697, ne donne qu'une très médiocre idée de l'ins-
truction quMl avait pu recevoir.
t:
LBS ATSNTiniBS M MlftQÏÏIfl DE LiHnâtBRIE.
géoèrat, < fort gueux, fort dépensier, extrêmement débauché',
grand escroc, et qui se peut dire sans honneur ni conscieace, fort
pillard, avoit rudement vexé ces petits princes d'Italie que nous
ménagions assez mai à propos; il avoit pris aussi assez d'argent
des contributions'. » M. de Vendôme l'avait habitué k abuser de
son indulgence, lui avait permis des trafics peu convenables pour
un colonel'; mais, au lieu de s'enrichir, il laissait des dettes par-
tout, d'autant que, posté suria route des officiers allant k l'armée
ou en revenant, il ne manquait pas à les traiter très luxueuse-
ment et à tenir table ouverte'. Aussi, Vendôme et le lieutenant
général d'Arenoes l'ayant chargé de venir a bout des habitants
du Biellois, vallée située entre le Cervo et la Sesia, dont l'hosti-
lité pouvait couper les communications avec Ivrèe, et, ae trou-
vant abandonné dans ce canton pendant le long siège de Verne,
il lui imposa de sa propre autorité une contribution de près de
cinq cent mille livres, pareille à l'imposition que le duc de Savoie
y levait en temps ordinaire. Il prétendait avoir l'autorisation de
M. de Vendôme; mais l'intendant d'Egrigny n'avait pas même
été consulté. Loi-squ'un commissaire des guerres apprît et l'énorme
contribution dont le colonel s'était approprié une bonne part, et
les Irais de table ouverte pendant sept mois, et les traités passés
avec des entrepreneurs pour rétablissement d'un hôpital, pour
une fourniture de chaussures, etc., le commissaire, l'intendant,
le ministre ûnalemeut refusèrent de ratifier les comptes et préten-
dirent se rembourser sur les appointements et les fourrages du
looel : procédure identique à celle qu'ils suivirent, et à peu près
t. Selon le marquis de Francliea {MéniÀret, p. 17), Bonneral était comme
Vn enragé dans le» parties de débucha et j laocail des ciianionR qui eassenl
noériU l« BuUlle.
2. Ménoira de Saint-Simon, éd. nouv., t. XIII, p. 33G-337 et 505-5OG.
3. Son ami et camarade le marquis de Franclieu racoole [Mémoiret, p. 38)
«jue, a'ayaDl point d'équipage, il se Qt attribuer par le général tons les che-
'^ani des déserteurs qui arriTaient de l'année împâriaie et que l'on ne Isiait
^u'à quatre pîsloles par t£tc : i II se mil i revendre ces cbeTiux en y gagnant
«Miuidérableincnt; il en garda vingt-quatre pour lui, et en vendit assez pour les
SHjer et pour &e mettre en argent. On en avertit H. de VendOme, qui relira
sa grtce, pour l'accorder ft d'antres qui en avoienl besoin ; sans quoi Booneval
se «croit mis IrËa à son ai&e. Je cite cette particularité parce qne c'est utte
kjidustiie isieî honaélc et qui peut servir dans l'occasion, s
\. I Courageui, dianil VendAme, mais point boa pour la police; revient plus
^leiu qu'il n'ëloil poTlJ. Son tort est d'avoir tenu grande table i tous les
36 A. DB BOISLISLB.
pour les mêmes motifs, contre Langalerie^ De là une correspon-
dance qui se prolongea pendant deux mois et plus entre M. Cha-
millart et Bonneval. Celui-ci, soutenu par Vendôme selon toute
apparence^ et plein d'une morgue aristocratique, se permit des
réponses insultantes pour le ministre et pour les « gens de
plume, » mais cependant finit par comprendre ses torts, tout
au moins son imprudence, sollicita la permission de s'engager au
service de quelque prince étranger, en Hongrie ou en Espagne,
obtint en attendant un congé pour aller passer le carnaval de 1706
à Venise, et enfin, ne recevant aucune réponse de la cour, n'ayant
plus de ressources, et cédant aux instances de Langalerie plu-
tôt qu'aux remontrances amicales de l'abbé de Pomponne^, il
s'adressa aux agents impériaux. Sa belle conduite à Luzzara
avait été remarquée par Eugène, et le duc Victor- Amédée s'em-
pressa aussi de le recommander à Vienne; il trouva donc, en
arrivant dans cette capitale, un brevet de colonel de cuirassiers,
de même que Langalerie eut son brevet de général-major.
A la rigueur, prendre du service chez l'ennemi héréditaire en
pleines hostilités eût pu s'excuser dans ces temps où le condot-
tiérisme n'était pas encore oublié, mais à la condition de ne point
combattre contre son propre souverain, contre ses compagnons de
la veille, et Chamillart persista jusqu'au dernier moment à espé-
rer que Langalerie et Bonneval ne franchiraient pas cette su-
prême étape de la dégradation^. Mais de pareils scrupules ne
1. Ci-dessas, p. 26 et sai?.
2. Il prétendit même qae «a réponse la pins mordante Ini arait été dictée par
Vendôme, et qae celui-ci faillit rompre avec la coar de dépit ponr son jeune
colonel.
3. L'abbé accusa formellement Langalerie d'avoir entraîné Bonneval alors que
celui-ci ne demandait qu'à rester fidèle, et de Tavoir décidé à porter sa démis-
sion à l'ambassade et à prendre le chemin de Vienne (AfT. étr., vol. Venise 146,
fol. 177 et 258).
4. Apprenant que, sous main, on essayait de faire déserter les officiers ou
les soldats de l'ancien régiment cédé par Langalerie à son beau-fils en 1702 et
cantonné alors à Mantoue, le ministre écrivait à M. de Vendôme, le 2 avril
(Bibl. nat., ms. fr. 14178, fol. 55 V et 320 v*) : c II me revient de plusieurs
endroits, Monseigneur, que l'intention de M. de Langalerie est de débaucher
autant qu'il pourra les cavaliers du régiment de Simiane, qui a été le sien,
et les Irlandois qui ont servi avec lui. Il seroit facile de prévenir l'inconvé-
nient de perdre une partie du régiment de Simiane en le faisant passer à Tar-
mée de Piémont et le changeant contre un autre. Pour ce qui est des Irlan-
dois, vous les aimez trop, et ils vous ont assez d'obligations pour croire qu'ils
vous donneront la préférence sur M. de Langalerie, puisqu'ils ont éprouvé en
LRS ATenrURES do IliRQniS DE LinGALBBTB. 37
comptaient point pour le prince Eugène, et, de plus, il se trou-
vait presque parent de Langalerie par sa belle-sœur la comtesse
Uraoîe; aussi, dans sa toute- puissance de généralissime des
armées d'Italie et de président du conseil aulique de guerre, il se
hâta d'emmener à sa suite le lieutenant général et le colonel, de
leor donner des commandements en Lombardie, en face même
de leurs anciens camarades de l'armée française, et de faire valoir
ï la Haye comme à Londres l'importance de ces recrues de
disti action*.
Sur cette nouvelle, Louis XIV donna ordre au parlement de
Paris de procéder conjointement, par contumace, contre les deux
déserteurs et contre le prince Emmanuel'. De même, quand le
prince d'Auvergne, en 1702, avait franchi la frontière « comme
un cavalier*, » on avait tout d'abord étouffé l'affaire par com-
passion et dans la croyance qu'il resterait en pays ami, chez sa
lante de Bavière ; c'est seulement à la nouvelle qu'il avait mis
< Vépée de Turenne * au service des Hollandais, et même donné
l'exemple de la cruauté lors du sac de Venloo, que Louis XIV
l'avait fait pendre en effigie, tout comme son frère aîné l'avait
^té en 1697 pour affaire de duel*. Seulement, cette fois-ci, en
^■706, on eut soin de prendre toutes mesures pour que l'instruc-
^Unt d'occasioas que vous leor arez tenn lieu de père à la cour st i l'armée.
Il me paroU bien nËcesuIra que tous tous expliquiez aiec eux, el que voas
leur titfjct enlendre que ces (aux bruits ae vans atil danui aucune inquiétude.
Ce disconrs, ar.mmpagné d'hannélelés, écartera jusqu'au muipilre nuage. Je ne
Murois croire que U. de Langalerie, quelque mauvaise opinion que j'aie de sa
l^te, soit assez malheureux pour servir l'empereur contre le roi. a Voici com-
ment la c^onduile des deux Innsfuges fut jugée par an de leurs camarades
(.VÂnolru du marquU de Franclieu, p. 39) : « Vojaiit leur perle assurée, ces
deux messieurs traitèrent avec l'empereur et enlrèreut à son service, extrémité
tlcbeuse pour deux personnes de marque et de distinction. On iloit y blAmer
un esprit de vengeance toujours bien condamnable lorsqu'il porte un sujet i
quitter le service de son maître pour passer tout d'un coup dans celui de son
moani. Ce qu'ils ont fait depuis ne peut, en aucune façon, les jnslilier. Bou-
■enl, eomiue ayant été rooo ami, lorsqu'il sut que j'allois sertir en Espagne
ItUait par nictsiiU el avec l'agrément du roi), Bt ce qu'il put pour m'enga-
|et à passer chex l'empereur; mais j'ai toujours cru que, si des raisons obli-
gHienl un galant homme A quitter sa patrie, ïl devoit du moins s'employer de
(i^ i De rien faire contre elle ni contre le roi son maître, d
\. ioumal de Verdun, mai 1706, p. 3S6.
' 1. Dangeaii, t. XI, p. 96.
). Ci-dessus, p. 3,
[ 4. Mémoires de Saint-Simon, éd. nouT., t. IV, p. 17-19, X, p. 347-154, et XIII,
38 1. DE BOISLISLE.
iion ne fût pas entravée par les démarches intéressées de MM. de
Lorraine, et le roi manifesta son désir que tout marchât vite^
Sous ce rapport, il fut impossible de lui donner satisfaction.
L'information commença le 8 mai, et les témoins entendus sur
Langalerie et Bonneval furent d'anciens camarades de l'armée
d'Italie qui se trouvaient être venus en mission à Paris : Conche,
aide de camp du duc de Vendôme, le jeune colonel Cotron, fils de
son capitaine des gardes, et le chevalier de Maulévrier. Le 12,
après récolement des dépositions, les accusés furent décrétés de
prise de corps « pour être ouïs et interrogés sur les faits résultant
de l'information par-devant le conseiller rapporteur, si pris et
appréhendés pouvoient être ; sinon, assignés, et leurs biens saisis
et annotés suivant l'ordonnance. » Quant au prince Enmianuel,
l'accusation ne reposait que sur une lettre arrogante qu'il avait
adressée à l'un des ministres en franchissant la frontière. Deux
experts furent désignés pour vérifier l'authenticité de cette pièce ;
ce fut un long travail, de même qu'il fallut épuiser les délais pres-
crits par la procédure criminelle en cas de contumace, car on
pense bien que ni assignations ni perquisitions n'avaient abouti.
Enfin il y eut lieu d'entendre et de récoler de nouveaux témoins :
si bien que la sentence ne fut rendue que le 20 janvier 1707*. Elle
déclarait la contumace bien instruite et les trois accusés dûment
convaincus de lèse-majesté et félonie, les privait de tous états,
honneurs, ofSces et dignités, les condamnait à « avoir la tête
tranchée sur un échafaud par effigie en un tableau attaché à une
potence qui, pour cet efiet, seroit plantée en la place de Grève,
leurs biens féodaux tenus et mouvant médiatement ou inunédia-
tement du roi retournés audit seigneur et réunis au domaine de
sa couronne, et leurs autres biens, meubles et immeubles, acquis
et confisqués au profit dudit seigneur roi, en quelques lieux qu'ils
fussent situés, sur iceux préalablement pris la somme de soixante
mille livres d'amende, payable par tiers pour chacun, et sans
solidité, vers ledit seigneur roi. »
L'exécution par effigie eut lieu ; mais il était rare que la rigueur
de la confiscation s'étendit jusqu'aux familles des coupables :
1. Registres da secrétaire d'État de la Maison do roi : Arch. nat., O^ 367,
fol. 121 ▼% 130, 131 T-, 141, 152, 230, 254, etc.; Depping, Correspmdanee
administrative du règne de Louis XIV, t. II, p. 271-272.
2. L'original du jugement est dans le registre dn Parlement X^ 540, et les
pièces du procès dans le carton X2b 1284.
I
LES ifE^ITClBES DD XlRQDtS DE L1NC1LER1E. 31)
Suzanne de Langalerie obtint-elle', par brevet lic 31 jaii-
\ la jouissance des biens patrîmoDiaux qui étaient restés iodi-
entre son frère et elle depuis la mort de leur père, et cela tant
que durerait le délai quinquennal de la coatuinace*. Par la suite,
elle vendit les terres à viager, et vécut ainsi dans TopuleDce jus-
iju'h sa mort'. Quant h la lieutenance de roi que possédait tou-
jours Langalerie, elle fut supprimée par un édit consécutif à la
condamnation', mais revint plus tard aux mains du dernier de
ses beaux-fils Simiane et des descendants de celui-ci.
Tandis que durait la procédure, Langalerie et Bonneval se dis-
tinguaient au combat de Calcinât», h la tête de ces mêmes troupes
que, pendant les précédentes campagnes, ils avaient glorieuse-
ment combattues, et, quelques mois plus tard, ils prirent une part
active, devant Turin, à l'écrasement de l'armée commandée par
le propre neveu du roi de France^. Mais Langalerie s'accom-
moda encore plus mal de ses nouveaux cunapagnons d'armes, et,
disoDS-le à sa décharge, il ne tarda pas à marquer que, quoique
déserteur et transfuge, il entendait toujours soutenir l'bonneur
de 33 patrie et de son souverain légitime. Le bruit même courut,
à l'entrée du printemps de 1707, qu'il venait de tuer en duel le
prince d'.^VnhaU, commandant des troupes brandebourgeoises dans
le Mantouau, et, suivant un contemporain", voici comment se
passa la scène :
S'étant trouvé à un dîner où le prince d'Anbalt preaoit la liberlé
de dire beaucoup de choses outrageuses contre le roi, Langalerie lui
I. Sflcin le dosKier du Cïbinel d'HoziPr [loi. 159, dussier Gsntil4112, fol, 1(1),
H j avaii ea une brouille aasaz longue eulre 1« ttÈte et la sœur.
S. Arcb. anl.. 0' 51, fnl. 22. C'est alosl que les dames de Lillebonae araienl
obteon ta conflsMtion de lenr ttiae Commerce (Dangeav, l, I, p. 409, III,
|>.98et Itl, «t IV, p. 366).
3. Dietioniiaire de Moréri, I. VI, p. 543.
4. DtpAt des affaires ctrangâres, loi. Fbancb 1145, fol. 409.
5. A lire les Mémoires apocryphes de 1743 (p. 350-362. etc.). c'est Langalerie
qui aorait tout fait dans cplte joarnée néfaste de Turin et décidé la Ticloirc eu
pénétrant le premier dans les lignes inachevéen de l'armée franchise; son rûle
etl rUiiil A de plus jnstes proportions dans le recueil ofllciel des Fddiitge du
Print^Eugen, t. VIII, p. 22G,2&3.'n\ et 277, et même la quatrième édilion de
l'apocrjphe Guerre iltalie oh Mimoiru du marquit D"" (1710) ne parle que
de la part prise par lui i la défaite d'un convoi français la veille de la bataille
(I. II. p. 327). Toutefois, un passage du Journal du contmusatre iVarbonne
(p. HO) proute que. sous Louis XV, on croyail encore que le succès de la bataille
d« Turin avait été asinré par Langalerie et Bonnevai.
6. Hénmrti dt Smtrelut, t. X, p. 3TT-27S.
40 k. DE BOISLISLG.
avoit dit qu'encore qu'il fût alors au service de l'empereur, le pol étoit
toujours son maître, el qu'il ne lui éloit pas permis de soufTrir qu'on
eu parlai outrageusement, et que le prince d'Anhalt lui feroîl plaisir
de ne pas tenir do semblables discours ; que cela ne l'avoit pas empêcbé
d'en tenir encore d'autres plus forts, el que, Langalerle a^ant insisté
pour l'obliger à se taire, il l'avoit insulté personnellement; qu'au
sortir de là, ils s'éLoient rencontrés; que Langalerie lui avoit fait
mettre l'épée à la main, l'avoit tué et s'étoit rérugié à Gènes.
La nouvelle n'était qu'à demi vraie, et le prince d'Anhalt n'avait
pas succombé' ; maison aime à relever cette attestation de patrio-
tisme à l'actif de Langalerie, comme à lire dans Guillot de Mar-
cilly, qui le pratiqua huit ans plus tard', que, malgré une « inca-
pacité de solide et mûre réflexion, » il conser\'a toujours < des
sentiments très respectueux et très soumis aux ordres de son
roi, joints à un amour et une tendresse filiale pour sa patrie*. ■
Bonneval, lui aussi, six mois après être arrivé en Allemagne,
asséna un coup de poing formidable sur la large face de certain
général prussien qui se permettait de traiter devant lui le roi
Louis XIV d' « indigne j... f...; » il se battit deux fois, pour la
même cause, pendant les conférences d'Utrecht, puis, plus tard,
rompit une intimité de dix-huit ans avec le pinnce Eugène, le
provoqua même en duel, parce qu'il avait attaqué la réputation
de la seconde femme de Philippe V, et enfin, à Bruxelles, pour
quelque pareil motif, fit un esclandre non moins retentissant.
Mais Bonneval, pendant la fin de la guerre, demeura en Italie ou
en Flandre avec Eugène, tandis qu'un reste inefi'açable de loya-
lisme poussa Langalerie à fuir si loin qu'une rencontre fût désor-
mais impossible entre les Français et tui. Il rompit à l'occasion
d'une nouvelle querelle. Le 20 juillet 1707, le correspondant de
la Gazette d' Amsterdam annonçait de Vienne : « On dit que le
marquis de Langalerie demande son congé à cause qu'il n'est pas
content du jugement qui a été rendu au sujet du démêlé qu'il a eu
avec le chevalier de Montigny^. » Et. le 1" novembre suivant,
l'abbé Dubois écrivait au duc d'Orléans" : « On dit que M. de
I. Journal de Dangeau, I. \1, p. 338; Journal dt Verdun, mai 1707. |i. 378.
î. Voir la chapitre V,
3. Belttlion historique d'\in voyage en Hollande, p, i46-448.
4. 11 est Trai que Bonneval se coaaidérail comuie allié à la maison Je France
par les Puii et les Albrcl.
5. Gaietle d' AmUerdam, Eilr, lxi.
6. Vabbé Dtiboit, par le caraU de Seilliac (1862), t. I, p. 350.
LBB «TRUTDBES ira KiBQOIB DE LlNGiLEBIB.
H
L«ingalerie a quitté le service de l'empereur et s'est offert au
roi de Suède ; mais le comte P[iper] lui a répondu que le roi son
tnaître avoit peu de goût pour les incoastants. Oa croit qu'il va
prendre de l'emploi dans les troupes du czar'. »
Il était donc en quête lorsque put lui parvenir la nouvelle que
sa fenune était morte le 12 janvier 1708, dans l'appartement
qu'elle occupait au Palais Royal, au-dessus de la chapelle du Com-
mun'. On se doute que cette épouse surannée était le moindre de
ses soucis, d'autant qu'il y avait déjà séparation de biens entre
eux; cependant il regagnait sa liberté, et ne tarda pas à en user.
Au mois de juillet de la même année, le bruit courut — sans
doute à son instigation — qu'il allait commander en Pologne la
cavalerie moscovite contre le roi de Suède^; mais il n'en fut
rien. Au début de l'année 1709, nous le trouvons à Berlin, tout
désemparé^ : < Le général de Langalerie est ici depuis quelque
temps. Son état est assez triste, car il se voit sans bien et sans
espérance de secours. Un inconnu, touché de son sort, lui a
envoyé une somme de deux mille florins, et lui a écrit une lettre
fort honnête et pleine d'estime, à laquelle cet illustre malheu-
reux a fait réponse en des termes qui marquent également sa
douleur et sa juste reconnaissance. *
En ce temps-là, Auguste de Saxe méditait de reprendre la
lutte contre l'usurpateur Stanislas et reformait son armée, Lan-
galerie, s' étant transporté à Leipzig au début d'avril, le rencon-
tra au milieu de nombre de grands personnages qui y avaient
pris rendez-vous, et nous pouvons croire que le prince était son
bienfaiteur anonyme, puisque, trois mois plus tard, la même
gazette — prabablement encore renseignée par lui-même —
annonça qu'il venait de recevoir d'Auguste un présent de mille
1. Cf. Ir Journal de Verdun, oclobre I7IG, p. 2i2. On voit (|ue LaDgalerie
ne put prendre pari à l'iavusion <le la Provence ea loût 1707, ni au iiège de
Toulon, comme le racanlent les Mémoires de 1743, p. 367-377.
i. Mereare de «trier, p. 18G-Î87; Journal de Verdvn, mars, p. 229. Roche-
blliâre nous a conwrvé le leile de l'acte d'iabumalioa A Saint- A adré-den- Arcs
<Bil>l. nat., ma. doqt. acq. fr. 3619, a' 1902). Nons avons aux Archives nationales,
T 1 1537. le procès-verbal d'appositiao des scellés d la requête de l'abbé de Har-
dllac (les deui antres Slmlane étant i l'armée d'Elspagne) et des créanciers au
Ibartiîsseurs. — Le Mercure, mal renseigné, crut et dil que u'élail une Grolee
«le Viriiille. Us Mémoires de 1743 la font mourir en 1703.
3. Casrile d' Amtlerilam, n' \.\iv, de Vienne. Le U octobre suivant, Pierre
le Grand iulligea aux Suédois une sanglante défaite.
4. Gssette d'Anutfrdam,, 16 mars, n* xKv.
42 ▲. DE B0ISLI8LK. — LES ITBIlTUaBS DU MARQUIS DB URGALERIB.
ducats et l'offre d'un emploi analogue à celui qu'il avait eu dans
l'armée impériale*, c'est-à-dire le grade de général de la cava-
lerie étrangère entretenue dans le grand-duché de Lithuanie,
auquel furent joints deux régiments et le titre d'administrateur
de la terre de Eazogne.
Auguste était en relations étroites avec les Juifis, qui l'aidèrent
à rentrer en campagne'; c'est ainsi que Langalerie fut amené à
se lier avec certains personnages de cette religion, et notamment
avec le financier Berend Lehmann d'HalI)erstadt^. Celui-ci,
dit-on, lui donna l'hospitalité, et le fit rencontrer avec une jeune
protestante d'origine languedocienne, qui s'appelait Marguerite
de Frère, fille du baron de Gratens et de Marguerite de Bar^.
Quoiqu'elle n'eût pas vingt-cinq ans^, et que Langalerie en
comptât presque le double, ils s'épousèrent le 24 août 1709®. Un
premier fils, nommé Philippe-François-Frédéric, leur naquit le
6 août suivant, et M"*^ de Langalerie en mit au jour un second,
douze mois plus tard, à Francfort-sur-l'Oder. A cette époque,
son mari venait, tout à la fois, d'abjurer la religion catholique
et de quitter le service du roi de Pologne, comme nous le verrons
dans le chapitre suivant.
A. DE BOISUSLE.
{A stUvre.)
1. Gazette d'Amsterdam, Eztr. xxix, n» xxxvi, correspondance de Dresde,
0' Lxi, correspondance de Berlin, 20 juillet 1709, et Extr. lxiii. C'est le 28 juil-
let que Langalerie quitta Berlin pour aller prendre possession de son serrice à
Dresde. Le roi de Prusse Tenait tout récemment, par un édit du 13 mai {ibid.,
n' Lxxxv), d'accorder la naturalisation aux réfugiés protestants Tenus de France.
2. Ibid,, 1708, Extr. xil
3. 11 représentait la Pologne à Dresde et était le financier attitré d'Augaste.
On pense que c'est le personnage dcTenu Lezana ou Lenzana dans les Mémoires
de 1743, p. 381.
4. On croit qu'ils étaient apparentés aux Rapin-Thoiras ; mais je n'ai pu trou-
Ter aucune généalogie. La France protestante ne parle pas d'eux, que je sache.
5. Elle était née en 1686. Je ne pense pas qu'elle fût tcutc d'un émigré
comme l'a dit M. Landau. Le Journal de Verdun a cm, à tort aussi, qu'elle
appartenait à la maison de la Force.
6. Des auteurs disent : 1710; mais le colonel de Rotenhan aTait en main
(p. 93) l'acte de mariage, du 24 août 1709, passé devant le Ticaire général de
Pologne. La notice du Morëri dit seulement ceci : a Voyant qu'il ne ponrrolt
pas tenir longtemps à la cour de Vienne, il prêta d'abord l'oreille aux proposi-
tions que le roi Auguste de Pologne lui fit faire, et les accepta peu après... Pas-
sant par Berlin, en 1709, pour aller en Pologne, il vit à la cour une jeune Fran-
çoise, un peu de ses parentes,... fille de Charles, baron de Frère... 11 l'éponsa
en secondes noces et l'emmena en Pologne. »
LES DEBUTS
DE
« L'AFFAIRE DE BRETAGNE
(1763-1764).
I
La fin de la guerre de Sept ans, loin de procurer au gouver-
nement de Louis XV un peu de tranquillité, le laissait aux prises
aTec les plus terribles embarras, Toujours à court d'argent, aussi
inea pendant la paix que pendant la guerre, il voyait avec épou-
Tante venir le moment où fa suppression du second et du troisième
vingtième et des suppléments à la capitation, formellement pro-
mise pour le moment de la publication de la paix, allait le priver
d'une ressource très nécessaire, quoique d'ailleurs fort insuffisante
pour subvenir à des charges énormes et à un formidable arriéré.
Force fut au contrôleur général Berlin de proroger et même d'ag-
graver les mesures ânanciéres prises pendantla guerre. Des édits
d'avril 1763, tout eu supprimant le troisième vingtième et les
doublement et triplement de capitation, prorogèrent pour six ans
le second vingtième, pour six ans aussi les dons gratuits des
Tilles, qui devaient unir en 1764, créèrent un sixième sol pour
livre des droits des fermes, donnèrent h l'impôt du centième
donier une extension considérable et menaçante pour les intérêts
des parlementaires, et surtout, en ordonnant un dénombrement
exact de tous les biens-fonds du royaume, sans exception,
annoncèrent l'intention de faire rendre à l'impôt des vingtièmes
tout ce qu'il devait rendre régulièrement : ce qui porta au plus
haut point l'irritation des privilégiés en général et des Parie-
meuts en particulier. Appliqués par un gouvernemect sage et par
e administration vigoureuse, ces édits auraient pu être le salut
du royaume; appliqués par un pouvoir Eaible et discrédité, ils
J
44 M. Miaioif.
ne servirent qu'à augmenter la confusion générale et valurent à
l'autorité royale les plus dures humiliations qu'elle ait subies sous
ce règne de Louis XY , où elle en subit de si nombreuses.
Entre autres conséquences fâcheuses que devait amener cette
tentative inopportune d'une réforme fiscale alors impossible, les
troubles de la Bretagne, dont les édits de 1763 ont été sinon la
cause, du moins l'occasion déterminante, furent certainement la
plus grave. Cette province ne fut pas, d'ailleurs, atteinte une des
premières : elle ne devait même entrer en combustion qu'assez
tardivement; mais l'incendie y prit des proportions plus vastes
qu'ailleurs, et il ne devait plus pouvoir y être éteint qu'après
avoir embrasé tout le royaume.
Au début, en effet, le ministère fort embarrassé, comme tou-
jours, lorsqu'il s'agissait de passer de la parole à l'exécution, aux
prises d'ailleurs avec un soulèvement général des cours souve-
raines du royaume, le plus formidable qu'on ait vu depuis la
Fronde, n'osa pas essayer d'introduire en Bretagne les nouveaux
impôts; il borna son ambition à assurer la continuation du second
vingtième après le terme fatidique du 21 septembres et cette
prétention même, si modeste qu'elle fût, n'allait pas sans de
graves difScultés. Sans doute, l'abonnement des vingtièmes avait
été voté dans les derniers états pour deux ans, 1763 et 1764 ;
mais la clause de l'arrêt d'enregistrement du Parlement de Rennes
du 29 mars 1757, qui stipulait cessation du second vingtième (et
même aussi du premier) trois mois après la publication de la paix,
n'en subsistait pas moins, et, dans ce conflit entre les deux auto-
rités provinciales, il ne fallait guère espérer que la conmiission
intermédiaire, quoique émanée des Etats, osât prendre sur elle
d'adopter le parti le moins favorable aux intérêts de ses adminis-
trés. C'est ce que d'Aiguillon, à la veille de son retour en Bre-
tagne, cherchait dans une lettre du 19 juillet à faire entendre à
l'incorrigible optimisme du contrôleur général : il lui représen-
tait que le seul moyen régulier d'obtenir le second vingtième pour
le dernier trimestre de l'année était, à défaut d'une session d'Etats
extraordinaires dont personne ne se souciait, de promettre k la
commission qu'il en serait tenu compte sur le premier vingtième
de 1764, quitte à trouver d'ici là quelque procédé pour assurer
1. Le second yingUème derait disparaître trois mois après la pabUcation de
la paix, qui arait en Uea le 21 jaio 1763.
p
LB9 D^BDTS DE ■ l'iFTIIJIB DE BKETIGNE. * 45
en 1764 la levée de tous les deux ; et il réussit enfin k obteuir la
permission de faire k la commissioa des déclarations conformes k
ce programme.
Dans cette même lettre, averti que Berlin songeait k faire
enregistrer ses édits au Parlement de Rennes et à lever les impôts
en conséquence, d'Aiguillon s'élevait avec torce contre ce plan,
qu'il jugeait illégal et désastreux ; d'abord, parce que l'autorité
royale était tombée dans un tel discrédit et la hardiesse des Par-
lements portée à un si haut point qu'on se heurterait certaine-
ment à une opposition irréductible ; le refus obstiné qu'avait fait
ce Parlement d'enregistrer les édits d'avril 1758 et de février
1760 ne laissait aucun doute à cet égard; ensuite, parce qu'en
supposant même le succès, l'enregistrement ainsi obtenu resterait
inutile jusqu'à ce que les Etats, seuls en droit de consentir des
levées d'argi^nt dans la province, eussent à leur tour donné leur
adhésion. Cette théorie si avantageuse aux Etats, dont d'Aiguil-
lon a en réalité toujours vivement défendu les droits, bien que par
ime des bizarreries si multipliées dans cette histoire l'artiâce de
ses ennemis soit parvenu à lui créer une réputation toute difTé-
rente, était celle qu'il s'était formée et qu'il s'efforçait d'appliquer
depuis plusieurs années déjà ; aux États le droit imprescriptible
de consentir l'impôt, leur fidélité leur faisant d'ailleurs toujours
un devoir de se conformer aux volontés du roi et de subvenir
pour leur part aux nécessités du royaume ; au Parlement le rôle
plus modeste de promulguer la loi émanée de l'autorité royale et
acceptée par l'assemblée représentative de la province. < Si on
commence par ce dernier, disait-il, le coup est porté aux privi-
lèges des Etats, et ils n'ont plus de ménagements à garder; si, au
contraire, on se borne k leur faire entendre qu'en cas de refus de
leur consentement ou aura recours à l'euregistrement, ils acquies-
ceront vraisemblablement à la an à ce qu'on exigera d'eux, dans
la crainte de laisser entamer leurs privilèges... Si on n'envoie les
édita au Parlement qu'après un refus des États, en le supposant,
ce que j'ai peine à imaginer, on lui dira que le roi, mécontent
avec raison de ses sujets de Bretagne, qui lui ont refusé les
secours dont il a besoin... est dans la volonté de se les procurer
par la voie de l'iutendaDt et que c'est pour faire connaître ses
intentions dans la forme prescrite par les règles législatives qu'il
loi ordonne d'enregistrer les édits dont les États ont refusé l'exé-
culioa... Le roi peut justement punir des sujets rebelles et se ser-
1
K cuUûn.-.L
46 M. MABION.
yir de toute son autorité à oe sujet, mais il ne doit pas enfreindre
les privilèges de ceux auxquels il en a accordé ni lee en priver sans
raison ^ . . Nos parlementaires qui diront et feront toutes les extra-
vagances imaginables, si on veut qu'ils enregistrent les nouveaux
édits avant que les États en aient eu connaissance, demandttt>nt
avec instance qu'on les leur envoie à enregistrer brsque les États
les auront abonnés. . . Les États sont certainement très déraison-
nables et fort difficiles à mener, mais cependant on peut en venir
à bout avec de la patience et de l'adresse ; je ne connais point de
moyen pour persuader ou dompter le Parlement de Bretagne,
quoique j'y aie plus d'amis et de gens affidés que dans l'assemblée
des Etats, mais ils ont des préjugés qu'il faudrait détruire pour
les persuader, au lieu que je persuade les États avec le secours
de leurs préjugés^. » Le contrôleur général se rendit à ces repré-
sentations et se décida à ne pas soumettre ses édits au Parlement
avant l'acceptation des États, ou plutôt à distinguer dans les
édits deux sortes de dispositions, celles qui intéressaient les États,
et celles dont cette assemblée n'avait point, du moins à ses yeux,
à s'occuper, comme le don gratuit des villes, les sols pour livre des
droits des fermes et des octrois municipaux, droits dont le prin-
cipal n'était pas soumis au consentement des États et dont la sur-
taxe additionnelle devait, à plus forte raison, nepas Têtre davan-
tage, et enfin la réfection du cadastre 3. Il ne serait pas question
des premières avant une réunion d'États extraordinaires ou avant
la session régulière, qui devait se tenir à la fin de l'année 1764 ;
quant aux autres, elles feraient l'objet d'un édit particulier, que
Bertin se flatta d'abord d'envoyer au Parlement de Rennes avant
vacations (il était particulièrement pressé de faire travailler au
cadastre en Bretagne, où il le jugeait encore plus nécessaire que
nulle part ailleurs), mais que les graves complications de la lutte
1. Addition à la lettre de d'Aigaillon du 19 jaillet 1763 (Arch. nat., H. 636).
2. Lettre de d'AiguiUoo à Mesnard, 9 oct. 1763 (H. 534).
3. Sur ce dernier point, d'Aiguillon et le contrôleur général étaient fort loin
de s'entendre. Le premier pensait que le cadastre ne regardait en aucune façoa
le Parlement : on jugeait au contraire au contrôle général (lettre de Mesnard à
d'Aiguillon, 25 oct., H. 534)quMl serait dangereux c de soumettre aux États one
opération qui y trouTerait beaucoup de contradiction par rapport aux intérêts
particuliers et à l'arbitraire dont elle doit détruire les abus énormes, sortoat
de la part de la noblesse, i A Trai dire, le cadastre, lésant les intérêts et du
Parlement et de la noblesse des États, n'arait chance d'être accepté de bon
gré par aucun de ees deux corps.
LES DiBPTS HE « t'iFPilEE DE BKETÀ0!1E. • 17
avecles Parlements de Rouen, de Toulouse, de Grenoble et autres,
ne lui penDireot pas de Caire k temps. Ce retard fut des plus
Ckcbeux, car il fit perdre le seul moment peut-être où l'enregis-
tremeot eût encore été possible. La crise parlementaire prit pen-
dant les vacances un lel caractère d'acuité, elle excita si gra-
'vement les passions, inconsciemment révolutioanaires, qui
fermentaient plus ou moins dans toutes les cours souveraines du
rojaume, que le succès, bien difficile déjh avant les scènes inouïes
<|Qi signalèrent la mission de Fitz Jaroes à Toulouse ou celle de
Damesnil à Grenoble, était certainement impossible à la rentrée.
Bertin n'eut pas d'ailleurs à tenter cette nouvelle épreuve. Il ne
pouvait tenir tcte bien longtemps au déchaînement des fureurs
parlementaires. Une véritable révolution ministérielle ne tarda
pas à se produire à Versailles : le chancelier Lamoignon fut
exilé, Bertin perdit le contrôle général des finances ; deux parle-
mentaires prirent leur place : l'un, Maupeou, eut les sceaux,
avec le titre de vic&chancelier ; l'autre, Laverdy, eut les Bnances';
DÏ plus ni moins qu'un monarque constitutionnel, Louis XY sacri-
âait ceux de ses ministres dont ses Parlements ne voulaient plus
8t allait chercher leurs successeurs sur les bancs de l'opposition.
Bd oiême temps le gouvernement n'hésitait pas à s'infliger à
lat-mêrae le plus pénible démenti en retirant les édits d'avril
1763, dont il avait proclamé si haut la nécessité, et alors que la
France entière retentissait encore des éclats de la lutte entreprise
pour en imposer l'enregistrement aux cours souveraines. Il y
stibstituait la déclaration du 21 novembre 1763, où l'on faisait
dire au roi qu'il voulait régner, non par l'impression seule de son
autorité, mais par l'amour de la justice et l'observation des règles
dâs formes sagement établies dans son royaume : le centième
ier était retiré, les règlements pour le cadastre devaient être
"'acceptation des cours, celles-ci étaient invitées
présenter des mémoires et avis sur les moyens d'améliorer l'état
des finances el de perfectionner la répartition et le recouvrement
des impositions. Il fut entendu que les vingtièmes ne pouiTaient
Être perçus que sur le pied des rôles actuels, sans augmentation,
8008 peine, pour les préposés, d'être poursuivis extraordinaire-
méat. La victoire de la magistrature était complète.
auwnie, ma
^Hat dâs forme:
^^Banier était :
^^nsbordoimés
^^^ présenter à
I. L'oi
elle orthographe, Le r
48 M. MARION.
Le Parlement de Rennes, qui n*ayait pas été à la peine, puisque
la bataille avait été donnée et gagnée sur d'autres points, n'en
fut pas moins à l'honneur, du moins dans la personne de son pro-
cureur général. M. de la Chalotais, qui, lui aussi, marchait de
triomphe en triomphe, qui venait d'ajouter, à ceux de ses compter-
rendus, les lauriers plus glorieux peu^-etre et en tout cas moins
fanés aujourd'hui de son Essai d'éducation nationale —
ouvrage excellent et qui n'a pas perdu toute actualité, encore
que dans un passage célèbre il heurte violemment une des idées
les plus en faveur de nos jours — menait depuis quelque temps
une négociation au succès de laquelle il attachait un prix consi-
dérable. Il s'agissait de faire passer à son fils, M. de Caradeuc,
alors conseiller au Parlement après avoir rempli pendant quelque
temps les fonctions de substitut de son père, sa charge de procu-
reur général, tout en conservant pour lui-même le droit de con-
currence et celui de survivance, en cas de prédécès de M. de
Caradeuc. Cette combinaison, que M. de la Chalotais a eue extrê-
mement à cœur, avait vraisemblablement pour motifs — nous
sommes sur ce point réduit aux conjectures — le désir d'être plus
libre de son temps et de ses actions, sans rien perdre d'ailleurs de
son empire sur le Parlement de Rennes et en conservant toujours
le moyen de faire mouvoir cette compagnie à son gré, d'avoir
plus de facilité pour venir à Paris jouir de sa gloire, se mêler aux
groupes influents de la société d'alors, fréquenter les chefs du
parti philosophique, qui le tenaient en haute estime, et s'appro-
cher du ministère, pour lequel il a pu se croire désigné le jour où
l'influence des Parlements triompherait décidément dans l'État.
Une autre considération, semble-t-il, a dû aussi inspirer sa con-
duite : en faisant passer sa charge à son fils, M. de la Chalotais
donnait une preuve nouvelle de sa puissance, démontrait le dan-
ger qu'il y avait à ne pas s'attacher à sa fortune et mettait la
rage dans le cœur à Tun de ses principaux adversaires dans le
Parlement, l'avocat général Le Prestre de Chàteaugiron, qui
depuis tantôt dix ans attendait que la retraite du procureur géné-
ral laissât vacante cette charge plus brillante et regardée géné-
ralement comme la récompense réservée aux avocats généraux ^
Bien qu'il ne fut que le second des avocats généraux par ordre
1. Lettres de l'aTOcat général Le Prestre de Chàteaugiron à Laverdy, 13 jao«
vksr 1765 (H. 358) et f mai 1765 (H. 436).
ï
LB9 D^KDTS DE « L'AFFilKE DE BBETICNB. " 49
d'aztcieDDeté (son collègue Duparc Porée le primait), il comptait
positivement sur cet avancement, encouragé par diverses circons-
taQCsesetentreautres.peut-être, par un proposqui serait, paraît-il,
éctiappè à M. de la Chalotais lui-même'. Dès qu'il fut bruit de
la «l^iaission prochaioe du procureur généra], les Le Prestre de
CbâteaugiroD, soutenus par le duc d'Aiguillon, firent d'activés
démsrcbes en cour pour ne pas laisser échapper cette succession,
qu'ils croyaient déjà tenir; mais celles de M. de la Chalotais en
bv^nr de son fils furent non moins vives et se trouvèrent plus
puissantes. Il mit en campagne ses parents, amis et protecteurs,
les Coetraen, les Goyoïi, les Matignon, les Duras, les Maupeou,
le duc de Choiseul, M"" de Pompadour, et jusqu'à Saint-Floren-
tin lui-même, qu'il devait plus tard flétrir comme l'âme damnée
du duc d'Aiguillon et qui n'en paraît pas moins avoir eu dans
cette affaire une attitude fort différente de celle que La Chalotais
lui a prêtée dans ses Mémoires, fort différente aussi de celle que
(i'A.iguillon eût désirée". Les députés des Etats de Bretagne en
coat- furent chargés défaire des démarches dans le même sens;
!- M. de la Chalotais aurait autrefois représenté au chancelinr V. Le Prestre
de CSblteaugiroD comme le sent tiomme capable de lui succéder. — Ce détail
cnri^aii, nais doDl l'eiacUlude aurait d'aJUeurs besoin d'élre démontrée, est
nlaS^ diDS une lettre que M. de Robien, procureur général syndic des ËtaU de
BnL^Lgne, gendre du président de Chiteau giron, adressait à «on frère H. de
Cmî^c, sénéchal de Rennes, le 28 juillet I76S. — La correspondance de M. de
Bobi^n avec H. de Cooiac, source de renseignements souvent précieux, nous a
*t* cscuomuniquée avec la plus grande complaisance par M. Pelage de Coniac,
4eIl^Bnea, grâce A l'enlremise de M. Saulnier, conseiller i la cour de Rennes,
tia connu par de nombreux et importants travaux généalogiques et bisto-
■^a^s sur la Bretagne; nous sommes heureux d'adresser ici i tous deux nos
f\n -vih remerciemenls.
^ ^ Vous ne devez pas douter, écriiait Saint-Florentin à La Cbalotaia le
10 ackfii 1763 (O. 459;, que je ne snidisse avec empressement les o
't vcMis obliger. Je parlerai avec plaisir & M. le chancelier su
1** ^'«Hs désirez obtenir de Totre charge puur Monsieur votre fils, et je serai
"*'^«»*«i je peux contribuer à vous procurer cette récompense de vos services. >
" ^â aoùi, tiaini-Flofentin adressait, sur le même sujet, une lettre fort encou-
"Ee^Cite à M. de Caradeuc: et, quand la chose fut faite, il l'en félicita chau-
"•O^aal dans une autre lettre du 30 décembre. — Quelque opinion que l'on
*nii 1 1^ ,^^j^ jg 1^ sincérité du ministre, toujours est-il que ces lettres per-
"f'-^ient k M. de la Chalotais de dire el, au besoin, de prouver que M. de
^'^^— Flarentin lui était favorable, et elles devaient singulièrement géuer l'op-
V^'^-^on que ce ministre aurait pu être tenté de faire aux projets du procureur
«M«»-s»i.
Rev. HisTOB. LXVI. 1" FA8C. 4
50 M. MiaioN.
M. de Choiseal les mit lui-même en ayant et les pria de recom-
mander au chancelier, comme de leur propre mouvement, la can-
didature de M. de Caradeuc. Parfaitement au courant de toutes
ces intrigues et fort au fait des dispositions dominant dans le sein
du ministère, d* Aiguillon prévit de bonne heure et même prédit
ironiquement au premier commis des finances, Mesnard, que
M. de la Chalotais finirait par en arriver à ses fins. Il avait vu
juste. Bertin et le chancelier étaient seuls à tenir bon encore^;
leur chute presque simultanée débarrassa le procureur général
des derniers obstacles qu'il rencontrait ; lui-même vint le 2 no-
vembre à Paris*, où il sentait que le vent lui devenait décidément
favorable, pour aplanir toutes difScultés; et un des premiers
actes de la nouvelle administration fut de lui accorder la faveur
sollicitée avec tant d'insistance; le 20 décembre, M. de Caradeuc
reçut la charge de procureur général au Parlement de Bennes,
avec concurrence et survivance au profit de M. de la CSialotais'.
Dans ses Mémoires, M. de la Chalotais a présenté cet événe-
ment comme une nouvelle victoire remportée sur la cabale jésui-
tique et qui plongea dans la consternation les amis de la société
proscrite, surtout l'archevêque de Paris ; il est en efiet possible, et
même probable, que les partisans des Jésuites aient déploré cette
faveur éclatante accordée au principal auteur de leur destruc-
tion. Mais M. de la Chalotais a négligé d'ajouter qu'il n'était pas
nécessaire d'être un ami du premier degré des Jésuites pour voir
avec étonnement et avec regret un choix aussi singulier que celui
de M. de Caradeuc. Ce magistrat était alors universellement con-
sidéré comme une intelligence des plus médiocres. D'un caractère
violent et emporté, comme ne l'ont que trop prouvé, lors de son
procès, les dépositions du notaire Berthelot et du frère Silvestre,
ainsi que sa conduite, dans sa prison de Saint-Malo, envers tous
ceux qui avaient la redoutable mission de rapprocher^, il repro-
duisait, peut-être en les exagérant, les défauts paternels, sans
avoir l'esprit mordant et la véhémence dans l'invective que
possédait à un si haut degré M. de la Chalotais. D subit tou-
1. Berlin à (TAiguilloD, 20 août 1763 (H. 355).
2. 11 deTait y séjourner (oa à Versailles) de novembre 1763 à mai 1764.
3. Arcb. nat., 0. 459.
4. Gf. Carré, La Chalotais et le duc d'Aiguillon, p. 155, 156, 158, 167,
etc., etc.
^
LES néenrS de « L'âFFtIKE ns BHETiGUB. n 51
jours docilemeot l'impulsion de son père, et fit bien, car il ne
paraît guère qu'il eût été autrement capable de se conduire, et
Ini-même semble en avoir été convaincu. Il avoua dans ses
interrogatoires qu'il ne taisait rien sans le consulter et reconnut
sans ambages qu'il n'avait pas « les connaissances supérieures
que demandait la place qu'il exerçait concurremment avec son
père'. > M. de la Chalolais lui écrivait les brouillons de ses
lettres de bonne année^ : et un tremblait, à l'hôtel de Cara~
deuc, quand on le supposait, dans les circonstances délicates,
livré aux seules ressources de son inspiration individuelle^
C'était, dans toute la force du terme, « un bien mince sujet, »
comme le disait M. de Robien^, d'autant plus digue de foi
en cela qu'exempt de tout fanatisme, ses sympathies pour d'Ai-
guillon ne l'empèchaieût pas de voir avec commisération les
iofortunes des procureurs généraux et qu'il ne manquait jamais
l'occasion de faire leur apologie et même l'éloge de leurs qualités
morales. M. Le Pelletier de Beaupré, membre de la commission
de Saint-Malo. le jugeait < le plus ingénu des cinq magistrats
prisonniers » et plus bête que méchante Telle était bien aussi
i'impressioa qu'il produisait parla suite, lorsque le calme était
depuis longtemps rétabli en Bretagne, sur ceux que la curiosité
atUntit auprès de lui. « Je n'ai pas manqué d'aller rendre mes
devoirs aux procureurs généraux de Bretagne, > lit-on dans
l'Espion anglais, t. VIII, cti. ii; « mais vous l'avouerai-je?
Major e longinquo reverentia. .. Le premier (M. de la Chalo-
tais), affaissé sous le poids de l'âge et du malheur, m'a semblé
n'être plus que l'ombre de lui-même et ne répondre que faible-
ment à la haute opinion que j'en avais conçue; le second ne
répoudre que trop par&itement, au contraire, à celle qu'en don-
nèrent ses ennemis dans leurs pamphlets, qui le peignent comme
un homme ignorant et borné. » L'auteur de ces lignes n'était pas
I. Batiporl de Le Huit ai
t. Lettre de L» Ctialotais i son (ils, décembre I7ti4, (iroduile an Procès,
1,231.
3. « TSchex de savoir ce que répondra votre papa. ■ La recomioandatioa
IreTieat à plasieur» reprises dans les lettres que M*> de Caradeuc lit passer i
•00 mari en décembre 1765 [Procèi, 11, 275 et Buiv.).
4. Lettre de H. de Holiiun ^ H. de CoDÎac, 21 oct. 1765.
%. Le Pelletier de Beaupré k Urerdy, 1-2 févr. 1766 (H. 139}.
â
52 M. MAftlOX.
un ennemi systématique, puisqu'il ajoute que M. de Caradeuc a
eu d'ailleurs le bon esprit de suivre Timpulsion de son père, de
ne jamais se détacher de ses intérêts, et que cette conduite le ren-
dra toujours « fort intéressant, p
Ce n'était donc pas sans de sérieux motifs que d'Aiguillon
s'était prononcé assez haut contre l'acte inique de népotisme que
M. de la Chalotais s'était juré d'obtenir ; et il fut d'autant plus
fondé à déplorer la complaisance extrême dont on avait usé
envers le procureur général qu'il ne pouvait pas se Caire la
moindre illusion sur les conséquences regrettables qu'une telle
politique ou, pour mieux dire, qu'une telle absence de politique
devait nécessairement produire. Cette prime accordée à l'homme
qui était le véritable chef d'un Parlement frondeur et toujours
prêt à repousser les édits bursaux, cette grâce accordée en récom-
pense d'une opposition sourde que l'on ne cessait, depuis quelques
années, de trouver sur sa route, devaient singulièrement ajouter
aux difficultés déjà si grandes qu'allait rencontrer en Bretagne
l'exécution des dernières volontés du roi. Infliger un échec per-
sonnel au commandant, au moment où il allait s'agir pour lui
d'entreprendre les négociations les plus pénibles et les plus déli-
cates et où il imjportait le plus que parlementaires et membres
des États eussent une haute idée de son crédit, était une singu-
lière inconséquence. « Ce ne sera pas avec de belles phrases,
disait très justement d'Aiguillon ^ que je persuaderai les Etats
de payer les deux vingtièmes, les sols pour livre, etc.; il en faut
quelques-unes dans certaines occasions, mais elles ne suffisent
pas, et si ma position vis-à-vis de la cour n'est pas telle qu'on
puisse croire que ceux qui me serviront bien seront récompensés
dans leur personne ou dans celle de leurs proches, et que ceux
qui ne se prêteront pas à mes insinuations seront privés de grâces
ainsi que tout ce qui leur appartient, je ne réussirai certainement
point. » Et ce n'était pas seulement le service du roi qui allait lui
être rendu plus difficile : sa situation personnelle elle-même, son
honorabilité, sa bonne conduite dans son gouvernement de Bre-
tagne allaient être mises en question, et ce danger, qu'il ne paraît
pas avoir aperçu tout d'abord, ne tarda pas à lui être révélé.
La victoire de M. de la Chalotais, en efiet, n'était pas complète
1. Leitre da 18 août 1764 à La?erdy (bibl. de Nantes, ms. 672, pièce 3).
us DEBUTS DE ■ L'irriUB DE BBBTAGH8. «
58
tant qu'il n'avait pas abattu l'homme coupable d'avoir dît tout
haut, sur le compte de son fils, ce que tantdegeDS pensaient tout
bas. Partout alors les Parlements triomphaient des commandants
de provinces ; le nouveau ministère sacrifiait Dumesuil à Gre-
noble, d'Harcourt à Rouen, Fitz James à Toulouse; la magistra-
ture, comme l'écrivait M. de la Chalotaisà M.deCaradeuc, avait
partout le haut du pavé'; était-il possible que cet abaissement
universel des représentants de l'autorité royale ne s'étendît pas à
la province turbulente entre toutes, à celle qui avait les Etats les
plus tumultueux et le Parlement le plus agité, à celle où les habi-
tudes de résistance étaient les plus invétérées? Etait-il possible
surtout qu'un commandant aussi énergique que d'Aiguillon, aussi
connu pour son zèle à maintenir intacte l'autorité royale,
survécût presque seul îi cette espèce de mortalité politique qui
&-appa tant de représentants moins éminents du pouvoir central
pendant celte année 1703? M. de la Chalotais avait trop de ran-
cunes contre d'Aiguillon et trop de raisons de souhaiter sa dis-
parition pour l'entendre ainsi : et le Parlement de Rennes conte-
nait un certain nombre de tètes ardentes qu'indignait profondément
la lenteur des magistrats bretons à suivre les traces glorieuses de
ceui de Toulouse, Rouen et Grenoble, et qui étaient pour les vues
de La Chalotais de précieux auxiliaires tout trouvés. « Je vous
plains, > disait un de ces boute-feu, M. de la Gascherie, à un
autre, M, de Montreuil, dans une lettre du 10 décembre 1763,
dont on essayera vainement, lors du procès, de donner des expli-
cations satisfaisantes-, « je vous plains d'être spectateur d'une si
étonnante léthargie. » Aussi bien cette léthargie allait-elle bien-
tôt faire place h. une agitation fébrile. Lorsque M. de la Chalotais
eut acquis la certitude de l'excessive faiblesse du gouvernement
envers les cours souveraines, lorsqu'il vit que les influences hos-
tiles à d'Aiguillon prédominaient à Versailles^, la campagne
s'engagea immédiatement.
1. LeUre du M letrier 1764, Procès. I, 225. GeUe lettre serait i citer tout
entière-, elle fournit les preuves tes plui décisives du peu de crédit qu'avait
d'Aiguillon i Versailles, (|noi que La Chalotais ail plus tard prétendu, et de
l'extrirne timidité du gouvernement enfers la magisiralnre.
î. Procts, 1, 358. — H. de la Gascherie était l'ennemi mortel du duc d'Ai-
gnillun depuis son arrestation, en t?57.
3. Soulavie. dans ses Mémoires da minutire du dite d'Aiguillon, parle de
canfèrences tenues en JaUTier 1764 entre Cbuiseut, U" de fumpadour et La
M H. MAUOll.
Tout prétexte, il est vrai, faisait défaut : les nouveaux impôts
n'ayant pas encore été proposés au Parlement de Rennes,
cette cour n*avait pas eu Toccasion d'imiter les emportements
des autres cours de province; quand même ils l'eussent été,
cette occasion ne lui eût pas sans doute été fournie, car d'Aiguil-
lon désapprouvait les violences dont on avait usé envers plusieurs
Parlements, et il ne se serait probablement pas prêté à introduire
en Bretagne la pitoyable comédie des enregistrements militaires ^
Mais le désir de perdre d'Aiguillon et le plaisir de Caire du bruit
firent passer par-dessus cette difficulté. On profita de la situation
générale du royaume pour lancer contre le duc des accusations
que le Parlement était coupable de hasarder si elles étaient fausses,
et coupable aussi de n'avoir pas formulées plus tôt si elles étaient
vraies, car elles se référaient pour la plupart à des pratiques déjà
fort anciennes. L'affaire des Parlements de Toulouse, Rouen et
Grenoble servit de prétexte pour engager les hostilités; ce fut en
exhalant son indignation contre Dumesnil, d'Harcourt et Fitz
James qu'il trouva le moyen de mettre d'Aiguillon lui-même sur
la sellette.
Le 30 décembre 1763, alors que le Parlement de Toulouse était
déjà rétabli et qu'une intervention en sa faveur avait cessé par
conséquent d'être utile, le Parlement de Rennes, ou plutôt un
quart à peine des membres qui composaient cette compagnie^,
Chalotais poar perdre d*AigailIoD. Ce sont des faits quil est impossible de
proQTer, mais qui restent fort Traisemblables.
1. Il n'était nullement partisan c de ces coups d'autorité qui ne font qu'ai-
grir les esprits et qu'on se repent toujours d'afoir frappés. » c Voos saTez,
écrirait-il à Larerdy le 18 aoàt 1764, combien j'ai bUmé la dureté aYeclaqaelle
on agissait Tannée dernière. »
2. 11 y arait ce jour-là (Reg. secrets du Parlement de Rennes) cinq présidents
et Tingt conseillers; or le Parlement comptait de cent à cent Tingt oflBciers. Les
remontrances ne passèrent qu'à deux Toix de majorité, et encore parce qae
parmi les opposants il s'en trouva plusieurs qui étaient parents et dont les
Toix, selon la coutume, furent réduites, c'est-à-dire comptées pour une. —
Nulle part peut-être le scandaleux mépris que la magistrature parlementaire
dn XVIII* siècle faisait de ses obligations professionnelles n'était poussé an
même degré que dans le Parlement de Bretagne. Chaque année, pendant les
mois de noTembre et de décembre, le palais était presque désert ; et, dès les
premiers beaux joors, on arait peine, en réunissant toutes les chambres, à en
composer une entière. Les charges n'étaient achetées le plus souvent qu'à
causa des privilèges qu'elles conféraient et de l'importance qu'elles donnaient
à leurs titulaires, vénérés et craints, chacun dans son petit territoire, à Tégal
IlE DB BRBUGin. i
résolut d'adresser au roi des remontrances sur les violences exer-
cées par le doc de Fitz James. Bientôt après, le 12 jauvier 1764,
il fut décidé d'en ajouter d'autres relatives aux événements de
Oreuoble et de Rouen. Ce fut dans ces dernières, arrêtées le
1" révrier par une faible minorité de ses membres', que le Par-
lement lança sa déclaration de guerre : « Les peuples, dlsait-il,
«spèraient enfin jouir des fruits de la paix, lorsqu'un nouvel
ennemi a paru dans le sein delà monarchie pour la déchirer; plus
•cruel mille fois que la guerre, le despotisme personnel du com-
mandant dans les provinces de votre royaume ose enfin se mon-
trer à découvert : 11 porte une main hardie sur le dépût sacré des
lois, il avilit, il opprime les magistrats, il abuse de l'autorité
royale pour les mettre dans les liens. * La Normandie, le Dau-
pÛné et le Languedoc n'étaient pas seuls à souSrlr de ces excès
de pouvoir; la Bretagne ne les connaissait aussi que trop : « Le
propriétaire n'est pas siîr s'il jouira le lendemain de sa maison,
de son champ ; votre province de Bretagne ne voit plus rien de
sacré dans ses privilèges ; on attaque la loi fondamentale de ses
Etats; jusqu'ici, les trois ordres se réunissaient pour multiplier
leurs dons toujours au-dessus de leurs forces; à présent, on veut
que deux ordres donnent des biens qui ne leur appartiennent pas,
et on enlève à l'autre ordre jusqu'à la consolation de vous ofîrir
ce qui lui appartient. Les communautés qui composent votre pro-
vince de Bretagne ne sont plus maîtresses de leurs choix ; il faut
que leurs députés soient pour ainsi dire du choix de vos commis-
saires ; elles ne les voient plus partir comme de zélés défenseurs
de leurs intérêts, inséparables de ceux de V. M., mais comme de
d^iR BODcerain, Seules les affaires qui inl^reBBaieDt les passiona de la magU-
IratnK, comme des arrêts A rendre contre le» Jésuites ou contre le comman-
dul de Is proriace, attiraient aa palais une aSluence un pej plus nombreuse.
Lore de» contocations générales qui précédèrent les démissions de (765, on vil
aiTJ*er aa ParJement quelques Qgures i peu près iRconaues, qu'on ne se sou-
Tenait pat d'y UToir «ues depuis le juur de la réception. Il y eut des contelUers
qui ne roagirent pas île se faire indiquer, dans les mes de Rennes, le chemin
du palais. (Mémoire de M. de Sérant, conseiller au Parlement de fleanes, sur
l'administration de la justice en Bretagne, 1767, U. 138. U. de Séranl était
un chaud parlementaire, admirateur de Laverdy.)
1. Il n'y araii aussi ce jnur-là que quatre présidents et vingt et un conseil-
lerv C'était ainsi qne quelques mauvaises têtes, quelques jeunes gens lurbu-
lenls. engageuienl des démarches auxquelles riuimcnsc tna}urité de la compagnie
était totalement étrangère, mais qu'elle se croyait ensuite, tant était puissant
l'emplie de l'esprit de corps, obligée de soutenir k tout prix.
li^Mh
56 M. maiON.
vils esclaves qui ne mériteront jamais leur coniBaDce. Si oepen*
dant quelques-uns restent attachés à leur devoir et défendent avec
zèle les intérêts qui leur sont confiés, bientôt on les menace, et,
s'ils ne cèdent pas, on les fait succomber sous les coups d'auto-
rité. » Des expropriations violentes, l'ordre du 12 octobre 1762
et un arrêt du conseil du 11 juin 1763 relatif aux mairies S tels
étaient donc les griefs que le Parlement trouvait alors à allégua:
contre le duc d'Aiguillon, dans ces remontrances auxquelles
M. de la Chalotaisa afSrmé avoir été absolument étranger, chose
peu croyable, car elles le comblèrent de satisfaction, et il ne leur
reprocha que d'être trop douces*. On devait allonger cette liste,
quelques mois plus tard, en trouvant de nouveaux chefs d'accu-
sation, corvées, dépenses exagérées des villes, etc., etc. Il sera
temps alors de les examiner.
Rien n'avait permis de prévoir cette attaque. En partant pour
faire sur les côtes de Bretagne sa tournée annuelle, d'Aiguillon
1. L'arrêt da 11 juin 1763, particulier à la Bretagne, astreignait les maires,
soit élus, soit en titre d'office, à obtenir Tagrément du gouTemeur ou du com-
mandant et confirmait le droit des maires d'être les députés-nés de leurs Tilles
aux États de la province. En cas d'absence de leur part, les députés nommés
par les communautés de?aient faire approuver leur nomination par les commis-
saires du roi. Cette dernière disposition seule constituait à vrai dire une nou-
veauté. Il est évident que cet arrêt choque entièrement nos idées modernes de
liberté électorale. Mais c'est Tancien régime tout entier qui est ici en cause, et
non pas personnellement le duc d'Aiguillon. Nulle part on n'entendait concéder
plus de liberté pour les élections à ce qui subsistait encore d'assemblées d'États.
L'arrêt du 11 juin 1763 est d'ailleurs resté en vigueur après le départ du duc
d'Aiguillon, et il subsistait encore à la veille de la Révolution. Trois fois de
suite, à Dinan, de 1772 à 1778, la ville s'étant obstinée à ne présenter pour U
mairie que des personnes dont le gouverneur ne voulait pas, on tourna la dif-
ficulté en prolongeant d'autorité les fonctions du maire qui devait sortir de
charge. L'Mit de mai 1765, qui stipulait la nomination des maires par le secré-
taire d'État de chaque province sur une liste de trois noms élus dans chaque
ville, allait aussi loin, comme Linguet l'a fait remarquer, que l'arrêt du 11 juin
1763. — Quant aux prétendus coups d'autorité frappés sur des députés du tiers
trop indépendants, le récit des précédentes sessions d'États fournit des
exemples de membres de cet ordre pouvant faire de l'opposition impunément.
Dans une note relative aux remontrances du Parlement (H. 625), d'Aiguillon
affirme n'avoir jamais eu recours qu*à des avertissements et avoir toujours
évité « ces actes de violence que ses prédécesseurs avaient été quelquefois
obligés de mettre en usage. »
2. LeUre du 11 février, ProcèSy 1, 224 : « Votre petit despote est donc bien
fâché des remontrances de votre Parlement ? Tant mieux, tout le monde en est
bien aise ici... Vos remontrances sont au miel et au sucre contre lui auprès
de celles des autres Parlements, n
t
LES DEBUTS DB <• I.'4FPilBR DK BBETtONR. > S7
I
.^rait, quelques semaines auparavanl, quitté le Parlement en fort
Itoas termes. Aussi sa stupéfaction fut-elle extrême lorsqu'il
■apprit à Saint-Brieuc les actes de despotisme qu'on lui imputait.
31 s'empressa de revenir à Rennes (6 février) et témoigna le len-
'^emain au Parlement, venu chez lui selon la coutume, combien
â! était affecté de cette violente sortie. Il se montra ému et vive-
inent peiné, mais ne fut d'ailleurs ni amer ni offensant'. On se
sépara de part et d'autre sans éclat ni vivacité, ce qui n'empêcha
JWs le Parlement, délibérant le 8 sur ce qui s'était passé la veille
«bez le duc, de voter que l'on serait mécontent et de charger son
jppfânier président de faire des observations sur l'accueil qu'il
avait reçu, D'Aiguillon répondit que sa sensibilité avait été trop
grande pour pouvoir la cacher et qu'il faisait trop de cas de l'es-
time du Parlement pour ne pas voir avec une douleur extrême
qu'il l'avait perdue; il insista en même temps pour que le Parle-
xnent donnât des preuves de ses allégations. D'Amilly s'entremit,
ca.liiia les dissentiments, promit que les remontrances ne seraient
pas imprimées et ménagea une réconciliation apparente. Bien prit
a.u duc de se montrer accommodant. S'il avait persisté à vouloir
eatjger des preuves et à écrire au roi, comme il en avait d'abord
formé le projet, il aurait été plus que médiocrement soutenu.
M. de Laverdj, eu effet, auquel un des choix les plus fàdieux
«jMe Louis XV ait jamais faits venait de dnnner le contrôle géné-
ï"^!, était l'homme le moins capable de maintenir les Parlements
«lans le devoir. Fils d'un avocat au Parlement de Paris, ardent
Janséniste, conseiller lui-même k la première chambre des enquêtes
*ie cette compagnie*, ayant grandi et vécu exclusivement dans
I. Lettre» de d'Aiguillon A Saint-Florentin, 7 février, et à Laverdy, 9 février
C^. 630). D'Amilly écrit do aon c<Vlé le 10 Kvrier : » Il ne lui échappa pas uD
*>»ot qui put oQ'enser ea rien la Cotnpiignie. et la vivacité arec laquelle il par-
^^î( èiAÎt plulâl une marque de m MDsibilité que de calËre un de mécoolenle-
*kKeat. » C'est ce que la Réponae de» ÊLals an Mémoire de Lingoet appelle
* avoir mallrailé la Compagnie publiquement avec beaucoup de vivacité. •
2- II venait de conquérir une certaine illusIraUon par la part qu'il avait prise
4«i procis des Jësuilcs. Son rapport du 12 novembre 17B3 sur les collèges de
f^atifl, rapfiorl qui inspira les leUres patentes du 31 novembre pour le transfert
^M collège Louis- te- Grand du collège deLisîeui et dei boursiers des petits col-
l^iges de la capitale, parntt avoir été l'occasioa déterminante de sa nomination.
Il avait une bonne réputation et passait pour un magistrat honnête, ïtlé et
tiutnill. On ue pouvait pas encore connaître son inauDisance, qui n'avait pas
CD l'occailon de se manifester.
]
58
cette société parlementaire dont il avait entièremeot adopté les
doctrines et les préjugés, il ne pouvait être au pouvoir que le
protecteur des hotaiaes auxquels l'unissaient et la comimioautÂ
des idées et des relations de longue date ; et les Parlementa pou-
vaient être dix fois coupables sans paraître tels à ses yeux, n
n'osait user envers eux que d'objurgations timides et de suppli-
cations éplorées, dont le danger des manœuvres jésuitiques faisait
généralement le thème ; et, si loin qu'ils allassent, ils étaient sûrs
de ne jamais épuiser sa patience. C'était chez lui un système
de tout leur pardonner et de n'attendre le rétablissement de
l'autorité que des excès du désordre et de l'anarchie. La pensée
de Louis XV, quand il alla chercher un contrôleur général
dans le sein de la magistrature, avait été certainement que cette
preuve de déférence la flatterait et que le monde parlementaire,
devenu si redoutable, en serait plus facile h conduire ; jamais cal-
cul ne fitt aussi complètement déjoué par l'événement. M. de
Laverdy était intègre, zélé, rempli de bonnes intentions, sincère-
ment désireux de tirer la France de cette espèce de décomposition
dans laquelle elle tombait visiblement; c'était uu travailleur
infatigable'. Malheureusement, il joignait à ces heureuses qua-
lités les plus graves défauts; la feiblessede son caractère était
extrême; très peu au fait des matières administratives, il était
incapable de mener de front les affaires multiples et pressantes
qui surgissaient h chaque instant, et ne tarda pas à se troaver
entièrement débordé ; il était dépourvu, non seulement d'habileté,
mais même de cette sagacité élémentaire, et pour ainsi dire de cette
sorte d'instinct de gouvernement, qui constitue la première et la
plus essentielle qualité d'an homme d'État. Incapable de la plus
vulgaire discrétion, il livrait sans cesse les plus intimes pensées
du gouvernement à des confidents plus que suspects qui se fai-
saient un jeu de le trahir. Par sa simplicité excessive, par le trop
de facilité de son abord comme par la familiarité incorrecte et
triviale de son style, il déconsidérait l'autorité dont il était revêtu
et prêtait à rire à ses dépens. Des aveux d'ignorance d'une humi-
lité touchante, mais singulièrement maladroite, revenaient à
chaque instant sous sa plume. Sa crainte excessive de nouveaux
1. f Je travaille 12 i 13 heures par Jour, éeriTait-il 4 d'Aiguillon le 27 dé-
cembre 1763 (H. 630), je raaaemble aatoDl que je puis des coanaissancet de
LES DÉBOTS DE <! l'iFFAIU DE IKETifiHE. I
cooflits avec les cours excitait tout natureUeinenl k lui résister
el semait partout des germes d'insubordination. Soucieux d'ail-
Imrs de dissimuler sous des apparences d'énergie son Inépuisable
feiblesse, il flottait sans cesse entre la politique de rigueur et celle
des concessions k outrance, prenait des attitudes impérieuses iné-
TJtablenient suivies de quelque piteuse reculade, conseillait au
besoin des procédés k la Terray, engageait des démarches qu'il
n'était point capable de soutenir et multipliait dans ses actes
cotame dans ses paroles les plus grossières coutradictions. 11 put,
grâce aux amitiés qu'il y comptait et à force de concessions,
pacifier pour quelque temps le Parlement de Paris ; mais, après
une courte accalmie, son élévation même ne pouvait guère qu'ag-
graver les querelles. Les ambitions parleraeutaires étaient stimu-
lées par son exemple et encouragées par son incapacité. 11 n'y
eul pins de jeune conseiller aux enquêtes qui ne se crût capable
(le gouverner l'Etat, et les Parlements de province, notamment,
qui avaient alors contre celui de Paris plus d'un grief', devaient
nécessairement être tentés d'avoir leur tour. M. de la Chalotais,
^ qui les chaudes félicitations de Voltaire, de d'Alembert et des
pliiloBophes avaient inculqué une haute idée de sa valeur et de
*8 supériorité, d'ailleurs réelle, sur les hommes les plus en vue
ào Parlement de la capitale-, trouva certainement que le choix
'■ Le Parlement de Paris avait contre lui sa théorie qu'il Élail seul et eiclu-
UTOnenl la cour des pairs, sa compoeiUon sociale pluLAt inférieure A celle de
'*Pla|)arL de» cours proTinciales, son Taiialisiae JHnséniste el l'esprit gouver-
■■"iieaui (du moins relatiremeni; qui l'aaima dans les premiers temps du
iniiJstïre de Laverdy. Nul doute que M. de ta Chalotais n'eilL été bien aise
d'tiu tyiillff celle cour, qui devait plus lard épouser sa cause avec tanl d'éner-
C" : n 11 a'esl que Irop TÎsible, u lui a écrit sou correspondant de Reynes dans
"" lettre qui métlle allenlion [15 mai 1765. Procès, I, Î82), » que le Parle-
■°«>t <|e Paris »eot loot subjuguer,,., bien des bons eiloyens trouvent étrange
1"* Vos douze eonrrëres (les douze Parlements) ne se soient pas éleïès contre
lenir^priiedu nôtre, qui semble ne respirer et ne cbercber que tous les moyens
de ront meltre sous son joug. >
'- Orlmm dit en juin 1T63, à propos de VEiiai d'éducation nationale : i La
I'"''^*' ili, qui placera lU. de la ChalotaÏB an premier rang de la magislraluro de
'^'*c«, renurqnera avec élonnemenl qu'il est le seul magistrat qui ait su Ira-
"r Uq |,|aQ d'éducation, tandis que te premier Parlement du royaume s'est
ure&^ am pédants de l'Université pour avoir un plan d'études... > — < Vous
^"uei de beaui exemples en pins d'un genre au Parlement de Paris, > lui
«uivail VolUire â son tour (22 juin 1763}; a on préteud que maître Orner Joly
^ ^«ury ne les a pas suivis en faisant son réquiaitoire contre l'inoculation...
"ioaa, ne paraissez le procurear général de la France entière ■ (2S sept. 1764],
60 M. MARIOX.
du roi aurait pu être plus éclairé et comprit qu'il lui serait facile,
eu suscitant des troubles, de se frayer la voie vers cette place
enviée, quoique peu eoviable, que l'infortuné ministre occupait
sans motif explicable, « par accident à son être S » et qu'il était
si peu apte à remplir.
Tel était Thomme que, pour son plus grand malheur, pour le
malheur du royaume, pour le malheur surtout de la Bretagne,
dans les troubles de laquelle il a eu, par son insufSsance, une
lourde part de responsabilité, on était veou prendre pour le
mettre à la tête du département le plus difficile, au moment de la
crise la plus violente que le royaume eût depuis longtemps tra-
versée. Il a toujours affirmé n'avoir pas désiré cette distinction
dangereuse et avoir été surpris tout le premier qu'on soit venu
le chercher « dans son coin^; » et sa sincérité en cela ne parait
pas douteuse, carie pouvoir, auquel il finit plus tard par prendre
goût, auquel même il se raccrocha désespérément, ne fut pour
lui au début qu'une source de tribulations de toute sorte, et il
semble bien, par sa correspondance en 1764 et 1765, qu'il ait été
alors l'homme le plus malheureux de tout le royaume. Assiégé
d'embarras incessants, qui certes étaient grands, mais que son
caractère pessimiste le portait à s'exagérer encore, succombant
sous le poids d'une besogne trop lourde pour sa pauvre tête, U
aurait peut-être quitté la place, s'il n'avait été retenu par l'idée
singulière (M. de Laverdy appartenait à la fraction dévote du
parti janséniste) que Dieu avait eu ses desseins en l'élevant si
haut et qu'il n'avait plus le droit d'éloigner de lui ce calice. Ce
pouvait être un moyen, certes douloureux et pénible, mais d'au-
tant plus méritoire, de faire son salut éternel, que de travailler au
salut temporel de sa patrie. « Je périrai peut-être victime de mon
zèle et de mon assiduité, écrivait-il à d'Aiguillon le 27 décembre
1763, mais j'ose espérer qu'il peut être dans le ciel des récom-
penses pour ceux qui ne désespèrent pas tout à fait du salut de
leur patrie et qui lui consacrent leurs travaux. » Soutenu par
cette perspective, il tint bon et jura qu'il mourrait à la peine ou
qu'il sauverait ses concitoyens malgré eux : « Je vois les suites
afireuses de tout ceci comme une punition de la Providence et,
1. L'expression est de M. de L&ferdy lai-méme (lettre du 2 mai 1765, Pro'
ces, I, 271).
2. Lettre du 4 mare 1764 à d*Aigalllon (H. 630).
Pqpo
fin
LES DéeOTS DB ■ L'tFFitBK DE RKETIGNE.
mallieureuse victime de sa rigueur pour moi , je me dispose k
avaler le calice de l'amertume qu'elle me propose jusqu'à ce que
ina santé, anéantie par de si grands malheurs, ait fait cesser mon
existence physique ou qu'une heureuse révolution m'ait conduit
k un état plus tranquille et plus fait pour le ccBur d'un véritable
citoyen, que les infortunes de son maître et de sa patrie pénètrent
de la plus vive douleur '. »
Ses premiers actes donnèrent sa mesure. Lorsqu'il devint con-
trôleur général, il y avait à Versailles des députés du Parlement
de Grenoble mandés en cour pour rendre compte de la conduite
de leur compagnie envers le malheureux Dumesnil. Laverdy ne
trouTa rieu de mieux à faire que de les renvoyer avec de bonnes
paroles et en leur payant leurs frais de voyage et de séjour " ; et
cet acte de faiblesse inouïe avait lieu dans un temps où, selon le
mot du premier commis du contrôle général, le gouvernement en
«tait réduit k compter pour un écu''. Il était tout occupé de réta-
**lir ïa paix à Toulouse et à Rouen, à force de concessions, lorsque
^*"^it la malencontreuse affaire de Rennes. Il fallait à tout prix
^^ pas aigrir ce Parlement pour ne pas faire éclater là aussi de
Qou-veaux orages. Aussi ses recommandations à d'Aiguillon
"iï*ect-eiles dans le sens de la conciliation quand même, et il
'e supplia de ne pas porter plainte au roi des remontrances du
rafleraent : < llue situation si critique, écrivait-il le 12 février^,
®^ge plus de modération que jamais... Ne vaudrait-il pas
*°l^Ux que le roi répondît à ces remontrances en annonçant son
****our pour la tranquillité, le rétablissement du Parlement de
'"^Tioble, qui sera consommé demain lundi, et des espérances
^*»f Rouen, auxquelles on va s'attacher après que Toulouse sera
^f*i. et que de lui-même il rendît justice à votre administration!
/ 1« Parlement enregistre la réponse, tout est dit. S'il la rejette,
^st lui qui devient accusateur en forme et vous n'êtes que défen-
r^**»",., > En tout cas, on gagnait ainsi du temps : et il importait
P^t peu à cet étrange ministre de laisser sous le coup d'inculpa-
^**ïis graves les plus fidèles serviteurs du roi, pourvu qu'il eût la
*^** avec les cours et qu'il pût obtenir de leur complaisance les
'^^'^istremeuts dont il avait besoin.
*- Utlredu 3 féTriet t76S{U. G3I).
^- LtTCrdyd d'AiguillOQ, 4 mars (H.630J.
^- Uctnard à d'Aiguillon, 7 Beplembre 1762 (H. 3dI).
*- H.e30,
L^
62 W. WARlOlf.
Ce qui disposait , en effet, le nouveau contrôleur général S* ^
toutes les faiblesses, ce n'était pas seulement la timidité natoreU^K^Je
de son caractère et la difficulté de rompre en visière avec
alliés de la veille, c'était plus encore peut>-etre l'affreuse pénurie Jè*i(
d'argent qu'il avait trouvée en arrivant au ministère^ etla n
site impérieuse de se procurer des fonds, donc de se procurer d
enregistrements, coûte que coûte et sans délai. La déclaration d
21 novembre 1763, qui avait retranché des édits d'avril ce
blessait le plus les intérêts de la magistrature, à savoir le cen-
tième denier et les dispositions primitives prises pour le cadastre
mais qui maintenait le second vingtième et le sixième sol pours
livre des droits des fermes, pouvait fournir quelque argent ; c'était',
une dernière planche de salut dont il importait d'user i
ment. « Ce moment, » écrivait Laverdy à d'Aiguillon dans ao!
style plat et trivial', « ce moment est celui de la crise; il faut^-^^
que tout pète ou que la déclaration ait lieu partout, afin d'avoir'K^
le temps de prendre les arrangements convenables. » Aussi,
les premiers jours de son ministère, contrairement aux intentions ^3 iS
dernières de son prédécesseur, qui étaient de réunir en Bretagne
une assemblée d'Etats extraordinaires, parut-il disposé & e
la déclaration au Parlement de Rennes, sans plus attendre, en
même temps que l'édit d'avril 1758 et que la déclaration de
février 1760, toujours non enregistrés. Les objections de d'Aiguil-
lon sur la nécessité du consentement préalable des Etats, et la
nouvelle que le Parlement persistait à cet égard dans le système
adopté par lui en 1760 le firent changer d'avis ; dans une lettre
du 15 février 1764, il sembla résigné à attendre la session des
Etats ordinaires. Mais il ne se prêtait qu'avec beaucoup de regret
à cette combinaison, qui retardait singulièrement la perception
des nouveaux impôts en Bretagne et qui avait de plus l'inconvé-
nient d'y laisser en souffrance, non seulement le second, mais
même le premier vingtième; et, pour répondre aux désirs non
dissimulés du ministre, d'Aiguillon venait précisément, lorsqu'il
1. c L'état des finances est dans un délabrement qui ne peut s'imaginer...
C'est un miracle, au pied de la lettre, que nous ayons été cette année Jogei
de la position du pauvre diable qui conduit une administration oà il dépend
également, par la pénurie extrême où elle est réduite, des financière et des
magistrats qui se détestent également » (l^ettres de La?erdy, 27 décembre 1763,
29 octobre 1764 ; H. 630 et 631).
2. Uttre du 12 février (H. 630).
_ n
^ lES DEBUTS DE « t AFF
reçut cette dernière lettre, de faire dans le Parlement une certaine
propagande et de sonder le terrain en vue d'un enregistrement
yar celle compagnie antérieurement à l'acceplatioL des États.
Pareil procédé, on le sait, était absolument contraire à son opi-
nion personnelle, mainte fois répétée et toujours invariable; mais
il lai parut impossible de refuser à Laverdy ce service, alors que
3e gouvernement venait, dans une déclaration solennelle, d'an-
noncer son intention d'avoir recours, dans une large mesure, aux
conseils et aux lumières de la magistrature ; en agissant autre-
ment, il eût craint d'être accusé de trahir les intentions ministé-
rielies, de s'obstiner par parti pris à reléguer les Parlements au
second plan, peut-être de conserver un ressentiment trop vif des
mauvais procédés que les magistrats rennais venaient d'avoir
envers lui. 11 avait donc entretenu quelques-uns des membres les
jlus influents, leur avait Êiit entendre que les Parlements, appe-
lée désormais à prendre tant d'influence dans le i-oyaume, ne
jouvaient guère se contenter de se traîner à la remorque des
États, et avait fait quelque impression. « Je crus m'apercevoir
il y a deux jours, écrit-il le 22 février, qu'on désirait recevoir
au plus tôt la déclaration pour l'enregistrer avant la tenue des
États... Je crois que vous ne devez pas balancer à l'envoyer,
parce que, si elle est enregistrée, comme je l'espère, sans autres
modiScatioDS que celles du Parlement de Paris, nous aurons
beaucoup plus de facilité k taire consentir par les États les impo-
sitions qui y sont contenues, et la tranquillité sera plus aflermie
que jamais dans cette province. » D'Aiguillon a été accusé d'à voir
voulu par là brouiller les deux corps' ; il l'eût été, s'il eût agi
autrement, d'avoir voulu l'abaissement de la magistrature et de
l'avoir calomniée auprès du trône. Son véritable tort, en celte
■circonstance comme en plusieurs autres, fut d'avoir trop facile-
ment ajouté foi aux assurances des parlementaires. Sincères peut-
être, les promesses qui lui furent faites n'allaient pas moins per-
mettre aux (auteurs de troubles de tendre au contrôleur général
lia piège dans lequel celui-ci alla donner avec une naïveté qui
étonne.
Dès qu'il eut reçu la lettre de d'Aiguillon, il s'empressa de
i^prendre un plan qu'il n'avait jamais abandonné que mal-
1. Réponse des ÉUls au Uémoire de Liuguel.
^B-l. RépanM des
64 W. WABION.
gré lui et De songea plus qu'à adapter la déclaration du
21 novembre aux conditions particulières dans lesquelles se
trouvait la Bretagne. Au lieu d'établir un sixième sol pour
livre des droits des fermes, comme le cinquième n'avait jamais
été enregistré au Parlement, la déclaration destinée à cette pro-
vince créa deux sols pour livre de tous les droits perçus au profit
du roi, des Etats, ou des villes, corps et communautés, du 1®'' juil-
let 1764 au 31 décembre 1772*. On renonça à parler du don
gratuit des villes, les rapports de d'Aiguillon ayant affirmé que
la province n'en voulait à aucun prix. Quant au reste de la déda-
ration, il continuait à avoir bonne opinion de l'accueil que le
Parlement lui ferait, et ses lettres étaient fort optimistes.
Le projet de déclaration fut donc envoyé, non pas encore pour
que le Parlement l'enregistrât, mais pour en négocier avec lui
l'enregistrement et lui permettre de présenter ses observations, s'il
avait à en faire, car on redoutait par-dessus tout un enregistre-
ment avec modifications et restrictions, qui compromettrait sin-
gulièrement le succès auprès des États au lieu de le faciliter.
 peine eut-il été connu du Parlement et des commissaires nom-
més pour l'examiner, qu'un certain courant d'opposition com-
mença à se manifester. Sur la motion de M. de Montreuil, on
donna lecture à l'assemblée des commissaires du mémoire rédigé
en 1762 par les États contre l'imposition du sol pour livre, et les
raisons en furent trouvées convaincantes. On ne voulait pas
davantage du second vingtième, qui d'ailleurs n'était plus perçu
en Bretagne depuis le commencement de l'année 1764*. Très ras-
surantes jusque-là, les lettres de d'Aiguillon deviennent, à partir
du 18 mars, presque alarmantes : « Je prévois avec douleur,
écrit-il à cette date, que l'avis des commissaires passera de
trois ou quatre voix, quoique le nombre des gens décidés pour
l'enregistrement de la déclaration soit plus considérable que celui
de ceux qui s'y opposent ; mais il s'en trouve plusieurs des pre-
miers qui ne font qu'une voix entre deux ou trois, tels que
MM. les présidents de Châteaugiron et de Cucé^; d'ailleurs, les
1. Au 31 décembre 1771, pour les droits perçus au profit des États, afin de
tenir compte à ceux-ci des deux années 1762-1764 pendant lesquelles ils aTaient
abonné un sol pour livre.
2. C'est à grand'peine que d'Aiguillon a?ait décidé la commission à imposer
encore le premier.
3. Le président de Cncé était gendre dn président de Châteaugiron.
jeunes conseillera des enquêtes, qui sont fort ignorants, croient
iâir-« merveille de demander des soulagements fort étendus et sont
persuadés qu'on ne les leur refusera pas, s'ils y insistent forte-
ment; c'est réjiidêmie du temps, beaucoup plus générale et plus
TÎolente dans cette province que dans le reste du royaume, attendu
la forme de son administration. »
Ij« 21 mars, en effet, il fut convenu dans une assemblée des
chambres que la commission rédigerait un mémoire concluant à
diverses modifications dans le texte de la déclaration. Ce mémoire
insista sur l'accablement de la province et représenta que les ving-
bàiues et sols pour livre constitueraient un fardeau intolérable
sous lequel elle succomberait inévitablement. Le cadastre surtout
serait inutile, impraticable, contraire aux constitutions de la
pfO"vince. • Le plan de régie établi en Bretagne, affirmait la
commission, est bien plus simple pour connaître la vraie valeur
lies kieus et pour exclure l'arbitraire... Chaque propriétaire a
foni-ni une déclaration de ses biens, il a communiqué au soutien
ses fermes authentiques, ses partages ou autres pièces semblables,
les déclarations ont été vérifiées par l'inspection des lieux et sur
la vve des titres, elles le sont encore, pour ainsi dire, tous les
J<*nrB par les soins du grand nombre de patriotes qui. chargés
de Cette partie d'administration, travaillent pour en exclure l'ar-
"it'*aire ; en introduisant le cadastre, le travail de trente années
''fist^rait sans effet et les dépenses des déclarations et vérifications
s^naieni perdues pour le propriétaire ; il serait inquiété de nouveau
daas ses possessions et se détacherait de plus en plus de la culture
et 3^ l'amélioration d'un bien qui lui deviendrait à charge. «Cette
™'"r*ur pour la réfection du cadastre se comprend aisément :
P8''l^mentaires et privilégiés avaient tout à y perdre, et en Bre-
*8&*»« plus que partout ailleurs. Là était la véritable raison pour
laquelle le cadastre était contraire aux institutions de la pro-
î^eu importait d'ailleurs au succès de la négociation, puisque
1* K<iaTernement avait renoncé à exécuter sérieusement ce
cadastre, qui aurait révélé de si étranges anomalies dans la
répartition des vingtièmes, et se déclarait prêt k soumettre h
l'approbation des cours les règlements qui seraient faits pour y
fri'Vailler, même à différer de rien ordonner sur cet article jus-
Httà la réunion des Etats. C'est sur quoi Laverdy insistait dans
Hev- HrsTOB. LXVI. 1" fasc. 5
66 M. MABIOlf.
sa réponse au Parlements où il réfutait également dans le plus
grand détail toutes les autres objections qui lui avaient été Eatites;
la Bretagne avait moins payé que nulle autre province; on
emploierait pour l'acquittement du second vingtième des moyens
qui rempliraient les vues et les désirs du Parlement pour le sou-
lagement des contribuables ; Sa Majesté était dans les dispositions
les plus favorables pour concéder à ses fidèles sujets de Bretagne
le traitement le plus avantageux quant à la levée des sols pour
livre; ce n'était pas encore le moment de traiter ce qui regardait
les corvées, mais on aurait grand égard en temps et lieu aux
observations du Parlement ; qu'il prit seulement une décision à
bref délai, sans quoi on serait obligé de réunir, sans plus attendre,
des États extraordinaires pour traiter avec eux de la levée des
vingtièmes et des autres impositions.
A cette mise en demeure, le Parlement ne fit qu'une réponse
vague et équivoque. < Le Parlement, y était-il dit'^, paraît
disposé à enregistrer la déclaration telle que l'annonce M. le con-
trôleur général, parce qu'il ne sera fait aucun changement dans
la forme de la perception, sous quelque prétexte ou dénomination
que ce puisse être, même de cadastre ou autrement, réservant
de mettre les modifications convenables sur les articles de
la déclaration, » On ne pouvait se moquer plus complètement
du ministère, qui ne s'était prêté à toute cette négociation que
pour éviter des modifications et avoir la certitude d'un enr^is-
trement intégral. Laverdy commençait à le comprendre, mais il
comprenait aussi qu'il s'était désormais trop avancé pour recu-
ler. Se sentant obligé de continuer malgré tout cette négociation
dangereuse, il écrivit, le 24 avril, au premier président, La Brifie
d'Amilly, deux lettres. L'une, ostensible, se plaignait que Tarrêt
du Parlement ne fut pas plus décisif, protestait contre la pensée
d'insérer aucune réserve sur le cadastre^ puisque la déclaration
n'en parlerait point, et réclamait l'assurance positive qu'U ne
serait mis dans l'arrêt d'enregistrement aucune modification de
nature à déplaire à Sa Majesté. L'autre, particulière, annonçait au
premier président l'envoi du texte définitif de la déclaration, qui
lui parviendrait secrètement par l'intermédiaire de Le Bret,
1. Lettre du 14 avril (H. 630).
2. Arrêté du 17 ayril.
if Wt *'t^ifP»niB DB BEETiGNE. B "W
et qu'il aurait à présenter aux chambres lorsqu'il jugerait le
moment favorable. Ainsi, le même jour, le ministre exigeait un
eugageinent et avouait cependant qu'il se résignerait à s'en pas-
ser; et il prenait pour couBdentde cette faiblesse un homme dont
k d'Aiguillon lui-même, qui le défeodail en général et qui croyait
4 ses bonnes intentions, avait cependant mainte fois reconnu le
1 caractère timide et faux et la parole indiscrète. Très vraisembla-
lllementileParlement, à supposer même qu'ilTaitignorèJusque-là,
fut dès lors fort instruit qu'Û pouvait sans rien risquer tenir ferme.
Anssi, à l'assemblée des chambres du 2 mai, le parti de l'obèis-
saDce eut-il, comme toujours, le dessous : douze voix seulement
s'y prononcèrent pour envojer au contrôleur général un précis
fies modifications jugées convenables; seize, dont trois, selon une
lettre non signée qui fut écrite deux jours après à d'Aiguilloo',
ne se décidèrent que sous la pression de la menace et par l'effet
<i« la peur, s'y refusèrent, par la raison que ces modifications,
devant être libres, ne pouvaient être déterminées à l'avance et
que le contrôleur général devait d'ailleurs être content de savoir
qu'elles ne porteraient atteinte ni k la prorogation des deux ving-
t-ièmes ni à l'établissement des sols pour livre. Le Parlement ajou-
t-ait que, si la déclaration faisait mentiou du cadastre, il mettrait
dans son enregistrement une modification analogue à celle du
I^arlemeut de Rouen, à savoir que le cadastre ne pourrait avoir
lieu qu'autant qu'on aurait reconnu qu'il était possible, néces-
saire, et ne dérogeait pas aux droits particuliers et privilèges de
la province; que, si cet article, au contraire, était rayé de la
déclaration, il mettrait une réserve conçue dans les mêmes termes
que son arrêté du 17 avril; enfin, que, si la déclaration n'était
Ï.s envoyée à bref délai, il serait dans la nécessité d'interdire la
rée du premier vingtième, conformément à son enregistrement
i 29 mars 1757 -. Et, comme îa réponse du contrôleur général
cette sommation impérieuse et grosse de menaces se fit quelque
I. Rapport du 4 mai [U. 4:13).
^ 3. H- de Is Gascherle, tiaus son Mémoire JustiGcalif, p. 32, a aOeclè de ne
ftarler que du second vingtième, il uublle ou veut oublier que le secoad viag-
Uteie a'ét«it plus perçu depuis le 1" janrier t7tl4. C'est bien du premier qu'il
Vi'agil, et la menace d'en défendre la levée devait tire, le Parlement ue l'igno-
tttît pu, d'nn elTet infaillible sur le roalheureui niinislre, qni sentait confusé-
ta«nt qu'on l'entraînait dans un piège, mais qui était déjà trop compromis pour
poUTOir l'éviter.
68 M. MABIOlf.
temps attendre, le premier président eut grand*peine à empêcher
cette interdiction d'être prononcée dès rassemblée des chambres
du 12 mai.
Le 14, la réponse du ministre arriva. Laverdy s'y plaignait
des dispositions du Parlement, disait avoir évité d'en rendre
compte au roi, pour lui laisser le temps de revenir à d'autres
déterminations, et laissait entrevoir qu'à défaut de solution plus
satisfaisante on pourrait bien avoir recours à une réunion d'Etats
extraordinaires. La menace était d'autant moins redoutable que
Laverdy, avec son imprudence ordinaire, ne se faisait pas faute
de dire très haut dans Paris qu'il n'y aurait pas d'États extraor-
dinaires, et il ne manquait pas de gens dans la capitale pour
transmettre ces propos à leurs amis et parents de Bretagne. Aussi
ses observations furent-elles fort mal reçues ; l'assemblée, « avec
un esprit d'aigreur étonnant, > chargea le premier président
d'exprimer au contrôleur général combien elle était affectée de
sa méfiance; qu'elle n'avait pas de raison d'être, puisque les
modifications projetées ne porteraient aucune atteinte aux ving-
tièmes et aux sols pour livre , et seraient conformes à celles de Rouen
pour le cadastre ; que les délibérations devaient être libres et volon-
taires, que rien ne devait les gêner et que des magistrats ne pou-
vaient se décorer de ce titre si leur consentement à la loi proposée
n'était que précaire et dépendant de la volonté d'autrui'. Le pré-
sident de Montbourcher représenta en vain que ce principe pou-
vait être juste en lui-même, mais qu'il ne pouvait avoir son
application dans le cas présent, puisque la négociation avait été
entamée précisément pour qu'on put s'entendre préalablement sur
la teneur de l'arrêt d'enregistrement; il parlait à des gens déter-
minés d'avance à ne pas entendre ou trop timides pour élever la
voix'-', et entièrement asservis à quelques meneurs dont le plan
était tout formé pour insérer dans l'enregistrement certains
articles tendant à inculper le commandant, à gêner le ministre,
à entraver le succès de la future assemblée des Etats, et particu-
lièrement une protestation vigoureuse contre l'ordre du 12 oc-
tobre 17623.
1. Lettre de La Briffe d'Amiliy à d'Aiguillon, 16 mai (H. 630).
2. c Personne n'osa répliquer, i mande dans cette lettre le premier prtei^*
dent, c excepté trois ou quatre, encore fort doucement, on se serait fait dire
des injures personnelles. •
3. c L'arrangement a été fait avec les gens d'ici et ceux de Paris : je me
I
LES D^BUTH nB ■ L'iFFATBE DE BaETiCNE. ■> fit)
U était le point le plus délicat. On sait combien cet ordre avait
eiaspèrè la noblesse, privée par lui de son procédé ordinaire
d'obslrnctioD. On redoutait de sa part quelque éclat particulière-
nenl grave lorsqu'il s'agirait aux prochains États de faire voter
par l'assemblée, en pleine paix, des impôts déjà si difficilement
accordés en temps de guerre. On s'était persuadé qu'une politique
de concessions offrirait moins de dangers que le maintien de ce
i%leiDent détesté. D'Aiguillon lui-même, qui eut parfois, lui
sissi, le tort d'incliner vers des partis de faiblesse, avait conseillé
àLaverdy, lorsqu'il vint à Paris en avril 1764, de faire retirer
l'ordre du 12 octobre dès l'ouverture même des prochains États.
Le ministre n'était que trop disposé à écouter ce langage, con-
forme à son caractère, conforme aussi aux objurgations que
M. de la Chalotais, qui le fréquentait alors, ne lui ménageait
certainement pas'. Le retrait de cet ordre nécessaire, mais diffi-
cileà feire respecter vu le discrédit profond dans lequelétait tombée
l'autorilé royale, fut donc décidé en principe dès le printemps
del764; mais il importait que cette concession parût spontanée
de la part du gouvernement, et tout l'effet qu'on en attendait
nrait perdu, la situation serait même singuhèrement empirée, si
le Parlement prenait les devants et si on paraissait n'agir qu'à
is requête et sous l'impression de la crainte qu'il Inspirait. La
bclique était puérile et n'avait pu être imaginée, comme l'écri-
vit M, de Eersalaijn à M. de la Chalotais, que par des hommes
croyant le public aussi sot qu'ils l'étaient eux-mêmes'. Malheu-
Basemeot tel était peut-être le cas pour M. de Laverdy, qui
ittachait un prix énorme à ce que le Parlement gardât là-dessus
le silence, et qui attendait de cette rétractation de Tordre de 1702,
ifclennelleraent annoncée aux États le premier jour de leur tenue,
1*8 plus surprenants et les plus merveilleux effets^ Et comme la
lis longlemps que lelle élail l'intention : mercredi (î mai), il j en
ex indiBcret pour le dire t (Rapport àa i mai à d'Atguillan). —
ITittlt prèciaâmenl 1 ce inonieDl que M. de la Cbalolais revenait à Reiinea,
*lp*4>énieiit cliar^é par UH. Je L.averdy et de Ctioisoul d'empecber l'ardre
*■ lî octobre ITUl d'être visé dans l'iirrél d'enregislreroeol. Un des deni
Bl>Ulm, u] moïDs, cbolsiïMit bien mat son confident.
'■ Cr. le Mémoire justiQcalir de U. de la Cbalotais.
!■ fTMh, I, 281 CJO septembre 17G4).
3- H wmblerait m#me que le reirait de l'ordre du 13 octobre 176! ail été
■ OQM de ta part de H. de Larerdj' de quelque promesse faile i des tiers et
70 M. MAJUON.
dernière lettre du premier président n'était évidemment rien
moins que satisfaisante à cet^ard, le contrôleur général, sérieu-
sement inquiet, hésita ou du moins voulut paraître hésiter plus
que jamais à envoyer la déclaration et laissa percer dans une
lettre du 23 mai au premier président son intention de n'en
rien faire.
Cette détermination n'était pas ce que voulait la cabale ; aussi
n'épai^na-t-elle rien pour l'y faire renoncer. Bientôt affluèrent
à Paris des lettres de divers magistrats de Rennes^ assez influents
pour que leur opinion pût être regardée à bon droit comme celle
du corps tout entier, qui toutes affirmaient qu'il ne serait ques-
tion dans l'enregistrement ni de l'arrêt du 12 octobre ni de rien
de ce qui concernait les États. M. de la Gascherie l'écrivit à
Lambert S conseiller au Parlement de Paris, et intime ami du
contrôleur général, tout en faisant ses réserves sur le parti que
le Parlement pourrait prendre ultérieurement à l'égard de l'ordre
du 12 octobre. La Chalotais l'assura à l'abbé Chauvelin^. M. de
qo*ii ait dû payer de ce prix certaines concessions accordées sar d'antres points
à sa politique. Les documents que nous ayons pu consulter ne nous per-
mettent pas malheureusement de préciser davantage, mais le fait loi-méme
paraît être bien établi par certaines lettres du contrôleur général : c On a été
forcé de l'abandonner (l'ordre du 12 octobre) par des raisons bien plus impor-
tantes encore que la tranquillité de la seule province de Bretagne, qu'on avait
espéré en même temps assurer par là... Tout se tient et se touche aujoardlioi,
le choc aux uns produit le contre-choc des autres, et il a fallu considérer l'en-
semble pour éviter, s'il se peut, un incendie général qui dévorerait la finance
et la France... i (Lettres des 28 oct et 11 nov. 1764; H. 625 et 631.) Le
premier commis, Mesnard, s'exprimait dans les mêmes termes (lettre da
28 oct.).
1. H. 433. c Cet ordre, quelque destructif qu'il soit de la liberté des États»
n'a jamais pu faire l'objet de modifications à la déclaration dont il s'agit... Par
la suite, il n'échappera pas à la vigilance du Parlement, dépositaire et gardien
des lois, de réclamer contre une interversion aussi marquée de l'ordre public.
C'est un moyen auquel il ne renoncera pas en gardant le silence sur cet objet
dans le moment présent. »
2. c Je crois pouvoir assurer à M. le contrôleur général, disait M. de la
Chalotais dans cette lettre (25 mai, H. 433), que Ton ne songe pas à mettre la
modification qu'il craint : je vous dirai que la seule modification, avec celle
de Rouen sur le cadastre, serait de mettre, sans préjudice des droits^ fran'
chises et immunités de la province.,. M. Lambert pourra lui dire à peu près
la même chose. Il a reçu une réponse à peu près pareille à laquelle je me
réfère, i La promesse était formelle. M. de la Chalotais sera réduit après coup,
pour se disculper, à chercher une pitoyable défaite : il prétendra que le Par-
lement avait promis qu'il n'y aurait pas de modification, mais non point qu'il
LES nÉBCTS D£ « L «FFilBE Dt BBETAU^E. » 71
Montbourcher écrivit au duc d'Aiguillon des lettres fort rassu-
raotes' ; le premier président donna de son côté toutes les assu-
rances possibles au contrôleur général'. Laverdy se laissa cod-
vaincre. Au fond, d'ailleurs, il avait toujours été persuadé de la
nécessité de l'envoi de la déclaration, et dans ses lettres particu-
lières U n'avait cessé d'avoir ou tout au moins d'affecter d'avoir
confiance dans la pureté des vues du Parlement^. Il se décida
donc à hasarder le tout pour le tout, non pas d'ailleurs sans
prendre quelques précautions suprêmes. Il adressa au premier
président force recommandations ; il lui écrivit deux lettres pour
lui ordonner d'arrêter la délibération, dans le cas où le Parle-
ETtent se hasarderait sur le terrain défendu ; il chargea Choiseul
ti'ÎDsister lui-même auprès de M. de la Chalolais pour que l'en-
«'^gistrement ne contînt rien de relatif à l'ordre du 12 octobre* ;
iX alla jusqu'à adresser de véritables prières à ses correspondants
dans le Parlement de Rennes, notamment à M. de la Gascherîe^,
Kk'j aurait pu de représeKlaliotu comprises dans l'arrêt lui-même, n aarait,
s-^DS nal daule, viTement relevé cette disliaction ptus que subtile si c'était un
^^soite qni se l'était permise.
I. 24 et 30 mai (H. 630).
'L 25 mii (U. 630]. « Autant i(u'oa peut compter sur les avis d'une compa-
lïe, autant je crois que ce qui aura été mandé est Térilablc... Ceux qui u'ont
voulu, par amour-propre, vous faire écrire par moi tout uoimenl ce qu'on
'«alait mettre dans les modifications vous auront Tait instruire par ailleurs de
v::^ qu'elles contiendraient. >
3. Letlro du 6 mai  d'Aiguillon (H. 630), etc.
\. 0 Je ne peui ïous cactier, » écriïil Cliolfleul i La Chalotais le 29 mai
Cfti. 433), < que toul serait perdu si le Parlement, soit dans la modification,
■^«if «I tupplication ou aufre voie quelconque, allait limiter ce qui r^rde
ordre do 1! octobre 1762 i nous serions alors dans la nécessité de proposer an
elle vient de l'être, comme tous le savez sans
contre la prétention de l'un des ordres. Votre
;st assez connu pour qne je puisse compter que
or empêcher un pareil événement, i On remer-
iangage, duquel il résultait qne le roi aurait été
nom le \1 octobre.
5. Cette lettre (ïd mai, H. 433) était d'une singulière naïveté. Le minislre y
.^TODait son ignorance de la constitution bretoune et annonçait qn'il recevrait
^*ee pUiiir les renseignements qu'on voudrait bien Ini donner : a J'ignore
^xacore à fond les usages et les droits de la Bretagne, je ne proposerai pas de
k«s décider sans les avoir étudiés, si malheureusement il est nécessaire d'en
"««air là, et je mus serai fort aise de recevoir personnellement de votre part
«3ea instmclioos à ce sujet, i Puis il prenait U. de la Gascherie pour confident
43e la peur extrême qu'il éprouvait de voir aborder dans l'enregistrement l'ar-
■M do 13 octobre et de la confiance qa'il voulait avoir, malgré toul, dans la
i de décider la question, e
«loDie, pour les États d'Arloi
^èle pour le service du Roi n:
'^'ous ferez tout au monde p
«guera ta perfide habileté de ci
^btranger à l'ordre donné ei
72 M. MABIO!!.
et insinua même qu*il était disposé à entamer avec les principaux
membres de la compagnie une correspondance sur les droits et
privilèges de la province qui le mit en état de décider en toute
connaissance de cause avant les prochains Etats sur la question
de Tunanimité des ordres, dans Tespérance sans doute que la
perspective d*avoir gain de cause dans cette discussion pourrait
détourner le Parlement de mettre dans son arrêt la modification
si redoutée. Était-il possible qu'une administration coupable d'une
si inqualifiable faiblesse ne se vît pas bientôt aux prises avec les
plus cruels embarras?
Le Parlement était donc pourvu des armes nécessaires iK)ur
frapper un double coup sur le ministre et le commandant de la
province, et dûment averti du point où ce coup serait le plus sen-
sible. Il n'eut garde de laisser échapper cette magnifique occa-
sion de satisfaire ses rancunes, et cet amour du désordre pour
lui-même qui depuis quelques années s'était tant développé dans
les cours souveraines; et il oublia entièrement pour la circons-
tance l'anathème qu'il avait fulminé lui-même quatre ans plus
tôt contre les cours qui enregistraient avant l'acceptation des
États*. Le 5 juin, dix-neuf voix contre quatorze- votèrent l'en-
droiturc des Tues do Parlement : c ... Si le Parlement aTait pris sur loi de
mettre des modifications sur cet objet, il en serait résulté une querelle inter-
minable entre le Roi et le Parlement d'une part, entre le Roi et les États àt
l'autre, peut-être entre le Parlement et les États. Or, le Roi déteste les que-
relles, son cœur est porté naturellement à la paix et à la tranquillité, ne soyez
donc pas surpris qu'il en ait conclu quMl ne devait pas envoyer la déclaration
dans de pareilles circonstances. Votre lettre m'a mis à |K)rtée de le rassurer...,
mais tout serait perdu si contre mon attente ce malheureux objet était abordé
par le Parlement soit dans l'enregistrement, soit avant les premiers États, et
le Roi serait convaincu que le Parlement n'a désiré la déclaration que pour
faire naître un nouvel obstacle aux vues de pacification. •
t. Il n'est pas sans intérêt de rappeler ici le passage des remontrances du
18 juillet 1760 relatif à cette question : a Enregistrer votre édit et votre décla-
ration du mois de février 1760 concernant les nouveaux impôts sans l'accep-
tation préalable de la nation serait prononcer l'abolition et l'anéantissement de
ses Constitutions primitives, de ces lois sacrées dont nous sommes les déposi-
taires, les conservateurs et les juges ; le cri de la nation et plus encore le cri
de la justice et des lois expirantes s'élèverait contre nous pour nous reprocher
notre infidélité. » On a quelque peine à garder son sérieux en lisant ces décla-
mations boursouflées et puériles, quand un sait quel compte en tenaient leurs
auteurs eux-mêmes, dès qu'elles allaient à rencontre de leurs i^etites combi-
naisons.
2. Il y avait à cette séance quatre présidents et trente-sept conseillers. Mais
t-BS O^BDIS DE 1 L'il
! DE BBBTA6IR. 1
f istmnent fnmeux qui devait être le point de départ de cinq
dées de troubles. Après les modifications ordinaires et con-
mes sur les deux vingtièmes et le cadasire', après la
rve habituelle des droits, franchises et libertés de la pro-
Tii».«e, après avoir demandé qu'un traitement avantageux lui
fut accordé pour les cinquième et sixième sols pour livre
dts^ droits des fermes, et que la perception n'en fût pas con-
tia«_aée eo Bretagne au delà du terrai fixé pour les autres
pr«z> "winces ', le Parlement décrivait sous les couleurs les plus
sor-»ibres la triste situation de la Bretagne sous le despotisme du
(ltt<:s d'Aiguillon : « Les corvées ruinent et écrasent les labou-
ret».«?s; ce genre de travail, toujours onéreux, est devenu insuppor-
tât* le en Bretagne par la multitude de routes ouvertes en même
I8c*a.p8, par la précipitation avec laquelle on veut les perfection-
n6»~^ [ar les ordres violents qui arrachent le laboureur à la cul-
tur^^ et à la récolte... la levée pour les milices garde-côtes se
Ûit sans le consentement des États et sans enregistrement au
Pa-i~leinent; les dépenses dans lesquelles on constitue les villes,
SOVS.S prétexte de travailler à leur embellissement, ruinent sans
"'s^oiirces les communautés, sans sufBsamment dédommager le
P»«-|icuiier d'un bien dont il se voit dépouillé presque toujours
"l'&lgré lui. » Pois l'ordre du IS octobre avait son tour : « Les
assurances que le seigneur roi veut bien donner de régner par
lannonr, par la justice, par l'observation des règlesetdes formes
^'K^ment établies dans son royaume pénètrent son Parlement de
^ ^'ViUme d«s rédactions de voix entraînai! souvent celte conséquence qae le
°!***fcrDdes saffnges fût inférieur â celui des présenta. — Tout éUil combiné
'^'^M, et il paraît (lettre ilu premier président à Laverdy, G juin, H. 630) que
'"~*^iiis magistrala, que la cabale s'était réserTé de faire venir, rei
'"''^Vibordre an dernier mûmeni, par la rdion que l'on arail ïaCBsamtnenI
''* *-«ii,
' - On s'était décidé délinîtivemeal i lalïBer dans le texte l'article relatif
"*^^lre.
^ - Il e&l t remarqner, à cause de l'importance que In queglion prendra p
. ^Oite, que le Parlement ne demandait aucun chaugemeol quant an moine
°^'*» perception des iwU pour livre devait commencer; or l'article Vll de la
~*^arïtion indiquait rormellement le I" juilleL Le Parlement soutiendra plus
j '"'^ qu'en acc«rdanl. il avait entendu n'nccurder qu'4 dater du moment où les
,^^« auraient accordé enx-mémes. Si telle avait été son intention, con
"^pliquer le silence gardé sut celle date du 1" juillet? N'eel-il pas évident
"t"^ Ib Parlement, ici encore, n'nvalt d'autre intention que de se méoaefr un
l"^t«iie ponr faire «urgir plus tard de nouvelles diMcultés?
74 M. MARION.
la plus vive reconnaissance; elles lui garantissent que tout va
rentrer dans l'ordre, que les coups d'autorité sont à jamais ban-
nis, que les actes de despotisme, dont ledit seigneur roi se déclare
l'ennemi, seront réprimés en tout lieu par le Parlement armé du
glaive de la justice pour en frapper le coupable tel qu'il soit ; la
Bretagne va recouvrer ses droits et ses privilèges... S. M.
n'attend que l'assemblée des trois Etats pour révoquer l'ordre du
12 octobre 1762, surpris à sa religion et inscrit sans aucuc
motif sur les registres de la province assemblée. Ledit seigneui
roi sera très humblement supplié de considérer que cet ordre
détruit l'essence primitive des États, que tant qu'il subsistera
aucun octroi ne sera légitime, parce qu'il n'y a que la nation
composée des trois ordres qui puisse octroyer; qu'il est des pre-
miers devoirs de son Parlement de réclamer avec les instances
les plus vives et les plus respectueuses des privilèges dont il esl
le gardien, et à la conservation desquels il ne cessera jamais de
veiller*. »
Il faudrait, pour discuter la vérité des accusations portées
contre le duc d'Aiguillon, refaire ici toute l'histoire de son admi-
nistration, et c'est chose évidemment impossible. Rappelons seu-
lement que la corvée, loin d'avoir été rendue plus lourde, avait
au contraire été allégée par les ordonnances de 1754 et de 1757,
et qu'en admettant même une certaine précipitation dans l'ou-
verture des routes, peu importait à chaque paroisse qui n'avait
jamais qu'une tâche strictement limitée à accomplir, et qui après
s'en être acquittée était à l'abri de toute nouvelle exigence ; un
grand bénéfice en résultait au contraire pour les populations, qui
jusque-là avaient été astreintes à des fatigues au moins égales,
mais sans résultat, et qui commençaient maintenant (quoique
encore incomplètement) à être pourvues des moyens de conunu-
nication indispensables. On a allégué, il est vrai, qu'il avait été
commis des infiractions aux ordonnances de 1754 et de 1757,
mais on n'a pu en fournir aucune preuve bien établie, et l'enquête
faite par les États de 1764 a démontré le contraire. En réalité,
1. La forme affirmative était ici employée pour éluder les promesses faitei
par certains correspondants da contrôleur général, quMl n'y aurait pas de récla-
mation à ce sujet. On ne demandait rien, on prévoyait seulement que le roi
rétracterait Tordre du 12 octobre... C'est ce misérable prétexte que le premlei
président ne craignit pas d'alléguer poor se jusUfier de n'avoir pas fait usage
des ordres du contrôleur général.
LES D^RIJTS DE « l'iFFIISB DE BRETlGHe. »
aoEis le duc d'Aiguillon, la corTée avait été exigée à la fois avec
plus de régularité et avec moins de rigueur que dans la période
précédente; d'où quelques plaintes ; maïs les populations rurales
û'avaienl pas tanié à comprendre le bien qui résulterait pour
files de rétablissemeDt d'uu réseau étendu de routes, et elles le
déclarèrent très haut. Il y aurait eu d'ailleurs, pour le Parle-
ment et la noblesse des Étals, un moyen très simple de soula-
ger les corvéables, dont ils faisaient profession de tant déplorer
les souffrances; c'était d'améliorer la répartition delà capitation,
excessive dans les paroisses rurales, très faible pour la noblesse,
el pour les cours souveraines', et qui servait aussi de règle
pour la répartition de la corvée, en sorte que tout le far-
imu en retombait sur les plus misérables; mais de ce moyen
noblesse et Parlement ne voulaient pas entendre parler, et pour
cause, et l'intendant ou le ministre qui l'eût proposé n'aurait
pas manqué d'attirer sur sa tête la plus formidable tempête.
Le fonds pour les milices garde-côtes avait été régulièrement
accordé par les États depuis 1758; l'ordre du 12 octobre 1762
n'était pas une innovation, et n'avait été sollicité par d'Aiguillon
qo'à contre-cœur et en désespoir de cause, pour les plus sérieux
rtles plus pressants motifs. Quant aux prétendues dépenses exa-
gérées pour les travaux publics des villes, le crime, si c'en était
tu, n'était pas plus celui de d'Aiguillon que celui des Etats, qui à
chaque session votaient des fonds pour constructions de quais, répa-
rationsde ports, etc. (fondsmoins élevés précisément sous d'Aiguil-
loa que sous le duc de Cbaulnes'), et qui en avaient voté en 1760
de fort importants pour l'embellisseraeiit de Nantes : ou que celui
Qo F*arlement, qui homologuait sans difficulté les emprunts muni-
opaui, et qui — circonstance remarquable — n'avait jamais
'. Sur f,SO0,OOOIiv.auiquelles se montait d'ordinaire la capitation, la noblesse
°"' iMjiitqae 100,000,
^ *- 1 1 est assez carieui, à cet égard, de comparer le« si
***'* dans ce bat, STant el pendant l'adininisl ration d
idniinigtration de la prov. de Bretagne).
Dicii^;
s volées par les
i d'AlguilloD (U.639 :
Etats de 1752.
**»»-ai. lî.OOOI.
*-** Cruisic. 30,0iW
8»i«ii.Brieuc. 25,000
"•iw-liii.
30.000
!n,ooo
1756.
4,0001.
10.000
10,000
15,000
10,000
1760.
6,0001.
1.000
1762.
2,0001.
76 M. MABIO!!.
songé, depuis dix ans, même dans ses plaintes les plus vives sur
la misère et Tépuisement de la province, à dénoncer les travaux
d'amélioration des villes comme une cause de ruine pour elles ^
Certes les finances municipales avaient été plus d'une fois malme-
nées dans la province; elles l'étaient encore, elles continuèrent à
l'être après le départ du duc d'Aiguillon; mais le Parlement
aurait eu fort à faire s'il avait voulu en rechercher toutes les
causes, et il aurait été amené plus d'une fois à incriminer des
pratiques dont d'Aiguillon n'était certes pas responsable*, et cer-
tains personnages qui tinrent précisément une place notable
dans le parti chalotiste. C'est ainsi que l'épuisement des deniers
d'octroi, tant reproché au commandant dans la Réponse des
États au Mé)noire de Linguet, était beaucoup moins impu-
table à celui-ci qu'au camp adverse, comme le prouve par
exemple la fâcheuse histoire du bail des octrois de Rennes. Cette
ville avait affermé ses droits d'entrée, en 1758, à un sieur Adde-
nin pour le prix de H 4, 500 livres par an, plus l'obligation pour
le fermier de tenir en bon état les écluses de la Vilaine. A peine
entré en jouissance, celui-ci mit tout en œuvre pour se soustraire
1. Les remontrances du t8 juillet 1760 sont particalièrement instroctiTes à
œt égard, f>ar ce qu'elles disent et surtout par ce qu'elles ne disent pas. Le
Parlement y fait une description lugubre de l'épuisement des ailles bretonnes;
il attribue tout le mal à la cessation du commerce, à la capture des bâtiments
par les Anglais, au discrédit public et particulier. Il ne pense pas à allégaer les
dépenses exagérées d'embellissement. De même, parlant de la misère des cnl-
tirateurs, il déplore a leur capitation eYcessive, les fouages, le taiUon, U gen-
darmerie, les garnisons, la solde des milices, les ▼ingtièmes, les sols poor livre,
les droits sur les cuirs, droits de contrôle, de franc-fief, de centième denier,
etc., etc.; » mais il ne parle pas des conrées. Pourquoi ce silence T C'est peut-
être dans les premières années de Tadministration de d'Aiguillon que les In-
▼aux furent le plus considérables et que la construcUon des grands diemins
eut le plus d'aclirité. Mais le Parlement ne pouvait éyidemment pas prévoir
que, quatre ans plus tard, le mot d'ordre serait de crier sas aux oorrées et
aux dépenses d'embellissements des villes.
?. Ainsi les dépenses qu'elles avaient toutes la manie de faire lors du pas-
sage de personnages de disUnction. D'Aiguillon, auquel elles offrirent mainte
fois des fêles trop splendides et des festins trop coûteux, cherchait platAt à
leur inspirer des vues d'économie. Duportal, maire de Trégnier, nn des pins
chauds partisans de d'Aiguillon, le priant, en janvier 1766, d'accepter an iMn-
quet que la ville comptait lai offrir à son prochain passage, s'efilnrce de préve-
nir un refus qull craint, parce qull sait que le duc n'aime point à acoorder
ces grâces aux villes, « par rapport à la dépense que cela leur oecasioiiDe. »
(U. 624.}
LRB O^BCTTS DE « L'APFJmB DE BRKTiSXE, « 77
aux conditioDS de son bail, et, grâce à une maladie de Le Bret,
toujours très hostUe aux concessions de celte sorte, il obtint par
surprise, le 18 août 1761 , ud arrêt du Conseil réduisant sou bail
h 90,000 livres pour toutes charges, avec effet rétroactif, ce qui
mit la comnmnauté de Reunes dans le plus cruel embarras ' . Elle
se pourvut contre cet arrêt et chargea du soin de poursuivre l'af-
faire son maire, le fameux Hévin, dont une publication récente
a essayé inutilement de réhabiliter la triste mémoire*. Hévin
apporta dans cette mission une négligence poussée k un tel point
que le mot de complicité serait infiniment plus exact. Tout en
ayant l'air de poursuivre Le Boucher, négociant de Rennes, le
principal membre delà société Addenin, avec la dernière rigueur,
il laissa rendre par l'influence d'un sieur Héron, premier commis
deM. de Courteille, homme d'une probité douteuse, un jugement en
Terta duquel le bail d'Addeuin fut définitivement fixé, le 13 juillet
1762, à 92,500 livres''; or, en ce moment même, il y avait des
compagnies qui offraient de le prendre pour 105,000 s'il était
résilié*. Ces pratiques frauduleuses eurent bientôt mené la ville de
Rennes à la ruine et les fermiers de ses octrois, notamment
Le Boucher, à la richesse^. Toutes les villes de Bretagne avaient
I. Lellre de Vedier, sabdél^é gèoéral de l'inlendaDt Le Bret, 1 sept. t7til
(B. 633).
% Loui» de Viller», Jacques Bévin et le due d'AigMtlloa (Revue de Bretagne,
de Vmdée et d'Anjou, mai el join 1896). L'auleur reproduit un mémoire
jmUlicalit du sieur Hévin, sans apporter à l'appui de ce donuineiit si suspect
par lui-même la tuoindre preuie.
3. Ilévia avait annoucé en parlaet que. si sa mission n'avait pas le suci^ès
qu'il wubailajl, ii refuserait le remboursement de ses Trais de Tuyage [lettre
i il'Aieuillon, 27 ocl. 1761, H. ùti). Or, en 176!, Uérin présenta une note de
1.573 lie. h s. pour une partie de ces dépenses et se Gt allouer eu outre une
iadcmnitê de 6,0U0 liv. [H. G23). Les 2,50Û livres de supplément autquelles
Addenin consentit ne figuri^rent sans doute dans l'arrél que pour fournir k
llè«iu nu prételle honnête de puiser une fois de plus dans la caisse muni-
4. LetUe de Le Bret, 21 oclobre 1763 (Arch. d'ilIc-et-Vilaine, 0.263). —
Par ■irr^t du ÏS novembre 1766, toutes ces circonstauces a^anl été dévoilées,
lea parties lurent reiuiiies dans le même élut qu'avant les arreis de ITGi el 1762
et Addenin condamné à satisfaire A toutes les conditions de Bon bail. Ce fol
alors i son lonr de faire opposition à cet arrêt, d'où un procès inlertninable
encore pendant en 1770.
5. On ne peut pas ne pas remarquer que plosicurs des hommes avec lesqueU
H. de la Chalotais était le plus lié se sont trouvés compromis, t des degrés
divers, dans cette vilaine affaire. Abeille était ua des intéressés dans le hait
L^B
J
78 M. MARIOIV.
plus OU moins de semblables difficultés pour se faire payer de
leurs fermiers S grâce aux complaisances exagérées que les inté-
ressés savaient se procurer dans le Conseil d'Etat, et malgré les
vigoureuses protestations de l'intendant et du commandant^, qui
ne cessaient de montrer les conséquences néfastes d'un pareil
système. Le Parlement ne pouvait ignorer ces détails quand il
rédigeait ces remontrances, où il rendait d'Aiguillon respon-
sable de la déroute des budgets municipaux. Mais on n'en
voulait qu*à lui, et voilà pourquoi l'on faisait le silence sur des
manœuvres bien autrement condamnables et bien autrement
ruineuses.
M. de la Gascherie, dans son Mémoire justificatif, accuse le duc
d'Aiguillon d'avoir couru, sitôt qu'il eut connaissance de Tarrêt
du 5 juin, de Véretz à Compiègne pour inspirer aux ministres la
Addenin (lettre de Duclos au contrôleur général, 30 juin 1770, H. 611) : Hévin
était un parent de M. de la Chalotais; et Le Boucher, dont le Me fut aussi
plus que suspect, était un des agents et un des protégés du procureur géné-
ral. 11 était un des intermédiaires de ta correspondance active qui s'échangeut
entre les meneurs du Parlement de Rennes et les autres Parlements du royaume
(billet de M. de la Gascherie à M. de Montreuil, Procès, l, 258 : interrogatoire
de M. de Montreuil, ibid., Il, 432). D'Aiguillon l'appelle c un homme taré sor
tous les points • (lettre à Larerdy, 16 juillet 1764, H. 636). Ce jugement sévère
paraît bien ne pas l'aroir été trop, car il est entièrement corroboré par le témoi-
gnage si grave en pareille matière de M. de Robien, homme essentieUement
impartial et modéré dans ses appréciations comme dans ses expressions, qui
représente constamment dans sa correspondance le sieur Lie Boucher comme
un fripon : c Je tranche le mot hardiment, » écrit-il le 6 janvier 1766, « car
J'ai à peu près toute certitude de ce qui s*est passé entre lui et le maire, lorsqae
celui-ci fut député pour s'opposer à la demande de réduction de prix do baiL«. >
M. de Robien tenait ces détails de M* Roux, son avocat au conseil, qui TaTait
été aussi de Le Boucher, lors de sa contestation avec la ville de Rennes.
t. Des faits du même genre s'étaient passés à Nantes; à Brest, on autre favori
du bastion, Gratien, pour qui le duc de Duras et la noblesse montrèrent une
partialité si exclusive aux Etats de 1769, alors fermier des octrois de celte
Tille, était aussi en instance pour compter de clerc à maître, an lien de rem-
plir les conditions de son bail, et sur le point de Tobtenir.
2. Le 15 septembre 176t, Le Bret écrivait à Courteille une lettre remplie
des protestations les plus vives contre le trop de facilité du conseil à délier les
adjudicataires de leurs engagements, et d'Aiguillon Tannotait de la façon sui-
vante : <K Cette lettre est très bien et devrait faire ouvrir les yeux à M. de Gooi^
teille sur les injustices que ses bureaux lui font commettre tous les jours...,
mais je ne serais pas étonné que les fermiers des octrois de Brest ne fussent
aussi bien traités que ceux de Rennes et de Nantes l'ont été. Il est certain
qu'il est impossible de soutenir l'administration si on admet de pareilles
demandes. Je n'ai cessé de le dire et je le répète à chaque instant. » (H. 623.)
L*S DËBITTS DB I
fureur dont il tut rempli en se voyant démasqué. Il y a ];
ine'Xactitude et une calomoie : d'ÂiguilIoD ne vint k Compiègne
qu'en juillet, sur l'invitation de Choiseul lui-même; et quelle
qu'ait pu être son indignation légitime contre ta conduite du
parlement, elle était moins grande probablement que l'irritation
et la déception du contrôleur général, dont l'arrêt du 5 juin con-
trecarrait tous les plans. Sans oser toutefois faire casser cet
arrêt, M. de Laverdy adressa de vife reproches au premier prési-
dent, à MM. de la Chalotais et de la Gascherie, à tous ceux qui
lui avaient donné des assurances si complètement démenties par
l'événement, et il prit, avec autant d'énergie qu'il était capable
de le faire, la défense du duc d'Aiguillon : « L'administra-
lion des grands chemins, écrivait-il au premier président',
est aussi douce que bien entendue, et il serait peut-être
heureux de pouvoir l'établir dans les autres provinces du
royaume : administration qui a pour base des règlements faits
et concertés avec les États, et sur laquelle j'ai des preuves non
équivoques de la satisfaction des différents onires de la province. ..
La ville de Nantes est peut-être la seule où il ait été fait des tra-
vaux uo peu considérables, au fur et à mesure des fonds qu'elle
a pu y employer, sur u n plan arrêté par le conseil depuis nombre
d'années, et dont il me paraît devoir résulter une véritable utilité
pour cette ville commerçante, qui en désire l'exécution... J'ai
bit rechercher s'il y avait des plaintes de la part des proprié-
taires de cette ville ou de quelque autre de la province, et il ne
l'enest trouvé aucune... C'est avoir voulu prévenir S. M. bien
psn favorablement sur ce qu'elle doit attendre des mémoires qui
loi seraient envoyés que d'avoir parlé de plusieurs de ces objets
M la manière que le Parlement l'a fait... » D'autres ministres ne
fwtil pas moins amers dans les reproches qu'ils adressèrent au
Pariement, et entre autres Choiseul, soit qu'il voulût avoir l'air
<!< blâmer toute cette intrigue, soit qu'il regrettât réellement que
l'on fût allé aussi loin : « S. M-, écrivit-Il à M. de la Chalotais*,
**t mécontente, nommément de vous et de M, de la Gascherie.
^ a cru que son contrôleur général l'avait engagée mal à pro-
pos à envoyer son édi tau Parlement de Bretagne. M. de Laverdy,
1. H. 630 : celU! lettre a été citée par Lingoet.
J ^ 11 InU 1764 (ibiO.). Elle a été cilée au Frocis, I, 290, sous la date du
fl^ltia.
80 M. MARIOIf.
pour son excuse, a montré au roi les lettres que vous lui av
écrites, et l'on ne comprend pas, après ces lettres, comment vo
pouvez soutenir Tarrêt de modification. Vous êtes accusé ici h
fortement d'avoir voulu exciter du trouble ; je ne le croyais pa
mais je ne puis me refuser aux preuves que Ton me donne,
n'ai qu'à me reprocher d'avoir été dans Terreur. » Pour toi
justification, M. de la Chalotais renvoya l'accusation cent
d'Aiguillon, et afiecta d'attribuer tout l'esclandre aux manœuvi
perfides du commandant pour le perdre et pour discréditer
Parlement auprès du roi. Â l'exemple de son procureur génén
la compagnie aussi ne songeait à rien moins qu'à des excuse
fort au contraire, la commission qu'elle avait nommée, en enr
gistrant la déclaration, pour rédiger les mémoires et avis prév
par l'article premier, parlait très haut, émettait les prétentio
les plus exagérées, affichait Tintention de prendre counaissan
des registres des communautés, de ceux de la commission inte
médiaire et de la commission des contrôles, de toutes les somm
levées par les Etats et de l'emploi qu'ils en faisaient S et,
19 juin, la grand'chambre osa refuser d'écouter la lecture d'ui
lettre du contrôleur général contenant diverses observations à •
sujet, ainsi qu'au sujet de l'arrêt d'enregistrement '.
Le parti était décidément bien pris à Rennes de se moquer c
gouvernement, et Laverdy lui-même ne pouvait se le dissimul*
plus longtemps. Le 22 juin, ordre fut adressé au Parlement d'ei
voyer à Compiègne une députation composée d'un président, <
trois conseillers et du procureur général. Le Parlement désigi
à cet eflet le président de Robien et ilM, de la Gascherie, (
Montreuil et de Kersalaiin, alloua à chacun des députés 30 livr
par jour pendant la durée de leur voyage, contracta à cet eff
un emprunt de 0,000 livres, fixa au 2 juillet la date de lei
départ, et les chargea jusque-là de se procurer < toutes instnic
tions et mémoires dont ils auraient besoin pour répondre au
objections qui pourraient leur être faites au sujet de l'enregistre
ment de la déclaration du 21 novembre"^, » et pour faire valo
les motifs des représentations qui avaient été faites. Admirons
en passant, la logique et la bonne foi du Parlement, qui ava
1. L^ttK de d'Amilly ta contrMear général, 6 jaio {fl. 630).
2. Ibid.. ^ juin (h/433).
3. AivHés des 25 et % juin.
Ln D^BOTS DE > l'aPFAIRB PB BMTIGITB. > fil
coxvitnencé par lancer ses inculpatious, quitte à réunir plus tard
le» jreuves à l'appui. Ou pouvait d'ailleurs compter sur le zèle
lie la plnpart d'entre eux à cet égard', notammeut de M. de la
Ca. ^icherie, qui mettait alors uti homme à lui en campagne pour
ae jarocurer, coule que coûte, des plaintes contre l'admimstrattoQ
de^ grands chemins*.
^Rd, de la Chalotais, affectant une grande joie d'avoir ainsi
l'otKasion de réfuter les calomnies de d'Aiguillon, partit eu
S.V ^ nce, dès le 29 juin ; mais il trouva une lettre de Saint-Flo-
rentin, lui défendant de paraître à Corapiègne avant le reste de
la <3«putation. Tousarrivèrentdoncensemblele 8 juilletet eurent
an-dleoce du roi le surlendemain. Les documents dont ils s'étaient
mtiBisleur furent inutiles, car ils ne furent pas appelés à discu-
ter- : «r Je n'ai pu voir sans peine, leur dit le roi, que dans une
ocoasion où j'ai donné à mon Parlement les plus grandes marques
•le confiance et où je ne devais attendre que des témoignages de
9on zèle et de sa reconnaissance, il ait ajouté par un arrêté com-
P^a, contre la règle ordinaire, dans son arrêt d'enregistrement
''» ma déclaration du 21 novembre dernier, des objets qui y
^laiçui totalement étrangers et qui ne tendent qu'à jeter des
"liages sur une administration dont je suis aussi content que la
pi'o-vince, ou même à élever des difficultés qui pourraient exciter
' - De la plupart, mais non de tous. 11 semblerait, d'après divers rapports
inonjniM, et DoUmineut d'après celui du 25 juin (H. 433), que M. de Kersa-
'"**! «tslt loin de penser du mal de l'adoiiaiatratioD des grands cbemins et ne
* It^iuil pas pour proclamer IrÈa haut qu'elle était ud grand bien pour la
i'"*-*-i»«,.
*- Il vagit de noltaod, grefller d'une des terres de M. de la Gascberic, dont
"'■«Inire trouvera place plus loiu. Quaot à M. de la Chalotais, il a nié Tigon-
'"*^*tiimt «voit fait faire des recherches et suscité des plaintes. L'ingénieur
''"■■ollc, dans une lettre à d'Aiguillon, qui est citée dan» le JoumcU du coJB-
°"^*t<l<j7ieni (III, 264], douae i celle assertion un démeoti catégorique, montra
''" *>n ae chercbait qu'A échauffer les esprits et se plaiol des tracasseries qui
'"' ^Uienl suscitées partout : i Je tous supplie, ècril-it, de me continuer Totra
l'^^1<3cliun et de me soutenir contre toutes les clabauderies excitées seulemeat
'"*' cinq ou six particuliers qui ne respirent que l'humeur et qui ont été les
'''^•*»lers aotrefois à demander des routes, u — Est-ce à M. de la Chalotais que
"'t« phrase fait aUusioaî Toujours est-il qu'il avait multiplié les démarches
V°^w obtenir le pavage du faubourg Saint -Hélier, i Rennes, qui menait i la
''^(^ de Vem (H. 623). — D'Amiily cuaslate aussi (lettre au contrôleur général,
j*>îllet, H. 630) que € des plaintes étaient quémandées cheE les curés et syn-
'''^^ des paroisses, qui ne sougeaienl nullement à en faire, mais qui n'osaient
1^^ en refuser i ceux qui les provoquaient. •
Rbv. HiBTOK. LXVI. I" FAsa. 6
A
82 M. MARION.
des divisions entre mes sujets s'ils m'étaient moins attachés.
Retournez sans délai dire à mon Parlement que je yeux que cetto
affaire n'ait aucune suite. » Puis, la députation sortie, le roi
rappela La Chalotais et lui dit en particulier de prendre garde à
la conduite qu'il tiendrait personnellement dans cette aflEadre.
« Conduisez-vous avec plus de modération, c'est moi qui vous le
dis. » Mais ils trouvèrent moins de fermeté auprès de M. de
Laverdy, avec qui ils avaient conféré avant l'audience rojale;
du moins ils se vantèrent de l'avoir fait convenir qu'ils avaient
eu raison, quant à l'arrêt du 12 octobre, et ils assurèrent
qu'en général M. de Laverdy leur avait parlé si faiblement qu'on
voyait bien qu'il agissait à contre-cœur ^ M. de la Chalotais a
dit dans son Mémoiy^e justificatifs et peut-être avec vérité, avoir
amené M. de Laverdy à convenir que, n'ayant été chargé qae
d'empêcher des modifications et l'arrêt ne contenant que des
représentations, sa conduite était à l'abri de tout reproche.
Aussi revinrent-ils à Rennes (13 juillet) irrités, mais non
intimidés, et ils eurent vite fait de communiquer leur colère au
Parlement, qui décida, le 16 juillet, à défaut d'une cessation de
service que quelques-uns de ses membres eussent vivement dési-
rée, de nouvelles remontrances au roi, et prit par vingt et une
voix contre dix-huit' un arrêté de scission contre le comman-
dant : « La cour, toutes chambres assemblées, a arrêté, pour
bonnes et justes causes à elles connues, que le sieur duc d'Ai-
guillon ne sera visité par aucun des membres de la cour, à l'ex-
ception de ceux qui pourraient être obligés de se trouver chez lui
pour les affaires de S. M. ou pour leurs affaires particulières,
auquel dernier cas ils en informeront la cour, chambres assem-
blées. » M. de Laverdy fut indigné de cette déraison; mais telle
était sa faiblesse qu'au lieu d'agir il s'enquit dans le plus grand
secret, auprès du premier président, des moyens de rétablir
l'ordre sans frapper de coup d'autorité : « Je n'aurais jamais ima-
giné, disait-il naïvement^, que le Parlement fut assez mené pour
se porter à des arrêtés de cette nature ; au surplus, je crois que
1. Rapport anonyme du 15 juillet (H. 434).
2. Ce résultat fut obtenu, d'une part, par une réduction de toIx, d'autre part,
en prenant les voix de quatre conseillers au-dessous de vingt-cinq ans, qui, réga-
lièrement, n'auraient pas dû l'être (rapport du 17 juillet, H. 630).
3. Lettre du 21 juillet (H. 630).
LES vitVTS DB " t'AFFilHB BE HRETlr,?(E. « 83
plus il mettra de chaleur dans ses démarches, plus on mettra ici
de flegme et de fermeté; je voudrais bien en même temps trouver
le moyen de ramener l'ordre sans qu'on en vînt, de la part du
gouvernement, à des mesures effectives qui pourraient ranimer
les troubles qui viennent de s'éteindre. > Et il engagea, selon son
habitude incorrigible, avec les principaux meneurs du Parle-
ment, d'inutiles négociations qui ne servirent qu'à accroître leur
audace et à leur ménager le temps de vaquer paisiblement à la
rédaction de leurs nouvelles remontrances.
Celles-ci, lues le 11 août à l'assemblée des chambres, étaient
nne répétition et un développement de ce que les remontrances
du 1" février et l'arrêt du 5 juin avaient déjà allégué : les cor-
vées arbitraires et écrasantes, la ruine des villes par des emprunts
multipliés, la destruction des franchises de la province par l'ar-
rêl du 12 octobre et par celui du 1 1 juin 1763, étaient les points
successivement aboi"dés; puis le Parlement s'élevaîtavec énergie
contre la mauvaise réception faite à ses députés et en accusait
ces hommes qui, perfides ennemis de la magistrature, l'étaient
doDc aussi de leur roi : ■ Votre Parlement, en enregistrant,
avait jugé que nul moment n'était plus favorable pour supplier
V. M. de jeter un regard paternel sur les corvées excessives, sur
les dépenses extraordinaires et superflues des villes, sur les impots
non enregistrés ni compris aux contrats des États... Voilà ces
représentations que l'un a taxées de criminelles... Loin de nous
les hommes qui intriguent pour vous inspirer de la méfiance
contre le zèle le plus pur, contre la fidélité la plus inaltérable...
A eux le reproche de faire naître des difficultés qui tendent à
intercepter cette communication si naturelle du souverain avec
les ministres essentiels des lois du royaume, qui veulent vous
EEÙre envisager la liberté légitime de vos sujets comme incompa-
tible à votre puissance souveraine,. , A eux le reproche de faire
naître des difficultés qui pourraient exciter des divisions entre
vos sujets, s'ils vous étaient moins attachés. Punissez votre Par-
letneat, s'il est coupable, mais si on t'a calomnié, les lois vous
demandent vengeance. » Le 17 août, à la suite d'une délibéra-
tion tronquée, à laquelle avaient été conviés pour la forme tous
les membres absents', les remontrances furent définitivement
1. Il ; eut ce joor-lt »ix prégidenta et solianto-dii-sepl coDseillers. On
impow bmiammeot ûlence i toaa ceux qui, cODune MU. de Langle el de U
84 M. MARI05.
arrêtées, cachetées et scellées. Le roi, toujours débonnaire, avait
consenti qu'elles lui fussent apportées par une grande députation
de huit membres du Parlement, et non par un président et deux
conseillers, comme il Tavait d*abord demandé. On nomma pour
cette grande députation MM. de Robien, du Pont, de Boux de
Saint-Mars, de Gouvello, de Grimaudet, de Montreuil, de Ker-
salaiin et de Guiray, avec défense expresse d'engager aucune
négociation avec aucun des ministres, et d'écouter aucune pro-
position sans en donner avis à la cour et avoir reçu ses ordres.
La députation se mit en route et présenta ses remontrances le
26 août. Le 31, elle eut audience pour recevoir la réponse de Sa
Majesté. Le ton en était sensiblement moins énergique que celui de
la réponse précédente, et les ennemis de d'Aiguillon purent remar-
quer avec plaisir que pas un mot n'y était dit pour défendre l'ad-
ministration du duc contre les attaques du Parlement. Evi-
demment le gouvernement, irrésolu, divisé, subissant tour à tour
toutes les influences, ne savait pas à quel parti s'arrêter pour
prévenir les troubles graves qu'il prévoyait et qu'il redoutait à
l'excès. 4c J'ai désapprouvé, disait le roi, que mon Parlement de
Bretagne ait fait entrer dans son arrêt d'enregistrement de ma
déclaration du 21 novembre des objets étrangers à cette loi, et
j'ai voulu lui en faire sentir les conséquences, mais mon Parle-
ment n'a pas dû penser que j'aie douté de sa fidélité et de son
zèle, sur lesquels je lui ai toujours rendu assez de justice pour
qu'il n'ait pas besoin de se justifier auprès de moi ; ainsi je vous
répète que mon intention est que cette afiaire n'ait aucune suite.
Je serai toujours attentif à maintenir les privilèges légitimes des
Etats et à pourvoir dans le temps et de la manière que je le juge-
rai convenable aux objets qui intéressent le véritable bien d'une
province qui, à son ancienne et première dépendance de ma cou-
ronne, que mon Parlement ne doit jamais lui laisser oublier,
joint les avantages qui lui ont été assurés lors de sa réunion et
qui ne me sont pas moins chers qu'à elle-même ^ Je connais
Biochaye, voulurent protester contre la teneur des remontrances et défendre
l'administration des grands chemins. Toute objection fut étouffée avec scandale,
i. M. de Laverdy méditait dès lors l'ouvrage historique qu'il devait faire
paraître Tannée suivante pour démontrer que Tunion de la Bretagne à la France
n'avait pas été l'associaUon de deux États souverains et indépendants, mais
la réunion d'un fief compris de temps immémorial dans la mouvance de la
couronne.
LB3 D^BCTS I
! DE BRETlGm. >
l'utilité des usages qui y ont lisu par rapport aux corvées, et si,
(fans la suite, il s'y glissait quelques abus, j'emploierai mon «uto-
rité pour y remédier. Mon Parlement ne doit pas perdre de vue
qne le bien de mon service exige la plus parfaite ÎDtelligence entre
tous ceux qui exercent mon autorité dans la proTÎnce, et que ce
qiii y serait contraire ne pourrait que me déplaire. » M. de
Laverdy avait précédemment dit et répété à ses correspondants
lie Rennes que, si l'enregistrement contenait des articles de
nature à déplaire au roi, rien ne pourrait lui ôter de l'esprit la
conviction que son Parlement n'avait demandé la déclaration que
liour exciter des troubles et des querelles, ni l'empêcher de faire
usage de son autorité pour réprimer cette audace. L'attentat
avait été commis, et le roi déclarait maintenant, en termes soi-
gneusement calculés pour ne pas irriter la susceptibilité de sa
coor, n'avoir jamais douté de sa fidélité et de son zèle ! Dans une
lettre du même jour à son neveu, Saint-Florentin déplorait le
lieu Je fermeté de cette réponse et aflîrmait que, si on l'eût cru,
elle eût été d'un autre style. Ce fut sans doute pour suppléer k ce
qu'elle ne disait pas ou ne disait pas assez que Maupeou et lui
prirent k part MM. de Montreuîl et de Kersalaiin, et leur décla-
rèrent que le roi était très mécontent d'eux per-sonnelleraent,
qu'ils s'étaient faits les instruments de la haine de M. de la Gas-
cherie contre le duc d'Aiguillon, que le roi leur défendait très
■■'ïpressément de faire imprimer leurs dernières remontrances,
lue c€ qui y était avancé sur les grands chemins était faux et
qu'on avait bien voulu leur épargner l'humiliation de le leur dire
*û fece; mais cette démarche nouvelle, venant après une décla-
'"8 tion royale d'un ton extrêmement différent, était, elle aussi, une
"OOTelle maladresse, qui montrait au grand jour à quel point le
1*iMistérc était divisé et qui ne pouvait qu'encourager les sédi-
"^Hx à aller de l'avant.
ïln effet, dès leur retour à Rennes, les deux conseillers ainsi
^ *»cés n'eurent rien de plus pressé que de laisser transpirer les
P^^ipos que les ministres leur avaient tenus, encore qu'ils eussent
^*^u de ceux-ci défense expresse de les faire connaître; le Parle-
"^^at s'empressa de son côté de leur enjoindre par arrêt du
■^, ^«pterabre de répéter tous les détails de cette conversation par-
, '^'SMlière, ce qu'ils firent immédiatement sans plus de résistance.
T^^^llTrer à Um nombre de conseillers copie des remontrances du
F * * août, afin que le gouvernement ne sût sur qui feire retomber
86 M. MARIOlf.
la responsabilité de Timpression qu*0Q était fermemeDt résolu à
faire : en décider de nouvelles : charger de leur rédaction MM. de
Robien, de la Gascherie, de Mon treuil etdeKersalaûn, qui peut-
être se seraient bien passés de cet honneur, et qui commençaient
à ne pas être sans quelque inquiétude sur les suites de leur déso-
béissance, fiit Taffaire de peu de temps (4 septembre). Mais ils
étaient désormais trop avancés pour pouvoir reculer, et le Parle-
ment lui-même, où beaucoup aussi regrettaient de s*être engagés
sans preuves dans cette affaire, ne pouvait plus battre en retraite
sans se couvrir de ridicule. Cet argument était décisif pour impo-
ser silence aux modérés, qui n'eussent pas été éloignés de souhai-
ter une conciliation. Aussi, lorsque les quatre messieurs propo-
sèrent, d'un ton assez mal assuré et d'une mine assez piteuse^
le canevas des nouvelles remontrances, il fut accepté tout d*une
voix ; on remit la lecture du texte définitif à la rentrée, au 3 dé-
cembre, puis on se sépara après avoir confirmé par trente et une
voix contre vingt-huit l'arrêté de scission pris contre le duc
d'Aiguillon (7 septembre).
Les héros de cette aventure n'avaient pas tort de trembler. Il
ne parut pas possible de laisser impunie leur flagrante désobéis-
sance, et MM. de Montreuil et de KersaLoûn, auxquels on adjoi-
gnit M. de la Gascherie, regardé à Versailles comme le principal
meneur de toute l'intrigue, à cause de son inimitié personnelle
contre d'Aiguillon, reçurent le 12 septembre l'ordre de se rendre
à Versailles, où ils trouvèrent des lettres de cachet leur enjoi-
gnant de partir pour Sens et d'y rester jusqu'à nouvel ordre.
Mais il était visible que le ministère n'avait recours à ces rigueurs
qu'en tremblant. Le plus vif désir de M. de Laverdy était de
trouver quelque prétexte pour mettre un terme à leur punition,
dans la crainte qu'elle ne mît en combustion, à la rentrée, tous
les Parlements du royaume, et il insinua à d'Aiguillon de deman-
der lui-même leur rappel 2. Comme le bruit public les accusait
de n'avoir agi que par inimitié contre le commandant, ce serait
un procédé noble et généreux qui éteindrait tous les ressenti-
ments et réconcilierait tous les cœurs; d'ailleurs, ajoutait le
ministre, qui était pour la magistrature le plus compromettant
des amis, et sous la plume duquel reviennent à chaque instant
1. Rapports da 3 septembre et jours suivants (H. 630).
2. Lettre du 10 septembre (ibid.)-
des aveux dépouillés d'artifice sur les molifs peu élevés qui la
faisaient agir, on serait toujours forcé de les rendre a la rentrée,
par<» que le Parlement de Rennes finirait par se porter à des
folies pour les ravoir, et que M. Lambert, accusé par M. de la
Gascherie de mauvaise foi, mettrait celui de Paris en feu pour se
disculper...
Cette nouvelle preuve de faiblesse o'apprit certainement rien
à d'Aiguillon, qui en avait déjà fait l'expérience, mais elle lui
donna singulièrement à réfléchir à la veille d'une session d'États
que les fautes déjà commises, celles qu'il était facile de prévoir
encore, et les exigences fiscales du gouvernement devaient certai-
nement rendre particulièrement redoutable. Forcé, par les vives
instances qui lui étaient sans cesse renouvelées, de conserver ces
fonctions périlleuses dont il eût souhaité être débarrassé, il crut
nécessaire de s'adresser au roi lui-même et de lui demander une
enquête solennelle sur son administration en Bretagne, et il écri-
vit à Louis XV la lettre suivante (15 septembre)' :
« Sire, votre Parlement de liretagne, excité et animé par les
ennemis de votre autorité, qu'on attaque partout aujourd'hui, et
que je défendrai jusqu'à mon dernier soupir, vient de publier les
Causses accusations qu'il a osé porter contre moi à V. M. et de
les renouveler avec plus de violence que jamais dans des objets
de nouvelles remontrances qu'il a arrêté de lui présenter, malgré
les défenses expresses et réitérées qu'Elle lui a faites de parler
d'une aSaire qui ne la regarde point. Si les plaintes qu'il fait de
mon administration étaient vraies, je devrais payer de ma tête
l'alms que j'aurais fait de l'autorité qu'Elle a daigné me confier,
mais si je n'ai employé cette autorité que pour le bien de son ser-
vice et l'avantage des peuples de cette province, comme je l'ai
prouvé d'avance à V. M. et à son conseil, et comme je puis
encore le démontrer plus positivement aujourd'hui, je suis fondé
h me plaindre des imputations calomnieuses de votre Parlement
et à supplier V. M. d'en faire une justice éclatante. Si... Elle
avait quelque doute sur la sagesse et l'exactitude de ma conduite,
j'ose lui demander avec les plus vives et les plus respectueuses
instances d'envoyer en Bretagne un membre de son conseil pour
l'examiner dans le plus grand détail, sur tous les points, et lui
en rendre compte. Quelque humiliant que puisse être un pareil
88 M. MilION.
examen..., je m'y soumettrai avec joie, bien conyainca qu<
résultat lui fera connaître que je ne suis point indigne de la [
tection qu*Elle a daigné me promettre lorsqu*Elle m'a ordoj
de me rendre en Bretagne, et que ma fermeté inébranlable po«^^
le maintien de son autorité est le seul motif des indécents proo^
dés du Parlement à mon égard... » Et il écrivit le même jour ^
son protecteur attitré le dauphin une lettre conçue presque dan^
les mêmes termes.
La réponse du roi fut bienveillante, mais quelque peu évasive :
« Mon cousin, lui disait le monarque, je ne suis pas surpris que
vous ayez eu toutes les plus jolies femmes à la vivacité et à la
ténacité que vous apportez à tout ce que vous désirez. Oh ! que
n'ai-je été comme c^a toujours ! Je suis content de vous, je vous
l'ai dit et vous le répète; mais votre style ampoulé et plein de...^
ne me fera pas changer : servez-moi avec probité, vigilance,
exactitude, zèle, et comptez avec cela sûrement sur mon appui.
Le membre de mon conseil que je pourrais vous envoyer en serait
le chef. S'il était plus jeune et moins timide, il irait, mais dans
tout autre vue que les vôtres. » Celle du dauphin, conçue en
termes plus satisfaisants, n'était pas beaucoup plus rassurante :
« ... Je ne vois encore rien de bien disposé à vous répondre sur
ce ton, et tout ce que je puis vous dire, c'est que les accusations
énoncées dans les remontrances dans des termes obscurs sont si
atroces, si éloignées de la vérité que, quelque désir que la faction
parlementaire ait de vous attaquer, je ne puis croire qu'ils osent
en venir jusque-là. Pour ce moment-ci, permettez-moi de me
réjouir de voir encore, pendant cette tenue, les affaires du roi
entre vos mains. J'espère qu'enfin vous surmonterez tout ce que le
malheureux esprit qui règne vous suscite de difficultés; nos inté-
rêts sont si unis que vous souhaiter du succès c'est nous en
souhaiter h nous-mêmes; mais ce motif n'est pas le seul : vous
savez combien je m*intéresse personnellement à ce qui vous
reganlo, et je vous prie d*en être aussi convaincu que de ma par^
faite estime. »
Ainsi, de la part du dauphin, un bon vouloir absolu, mais
impuissant ; de celle du roi, de banales protestations de satisfac-
tion qu il ne fallait pas s'attendre à voir suivies d'effet; un minis-
tère divisé et irrésolu, dupe ou complice des parlementaires,
1. Ici eftt un mot ettacé.
«TetB
LES DEBUTS DE '
ETemblant sans cesse devant eux; la calomnie sûre de l'impunité
^t bénèSciaot déjà de la laveur de l'opinion publique, séduite ou
subjuguée; voilà daus quelles conditions se trouvait d'Aiguillon,
»la veille d'une session d'États qu'on avait tout fait pour rendre
Ltrêmeroent difficile, et où l'intrigue nouée pour le perdre allait
Ejuver de puissants moyens d'action.
Tels furent les évéDements qui, au ^témoignage de M. de la
Chalotais lui-même, furent le principe de tous les troubles de la
province, de la mauvaise querelle que le Parlement allait susci-
ter en défendant la perception des sols pour livre après l'avoir
permise, de la démission du Parlement qui en fut la conséquence,
du procès de M. de la Chalotais, de celui du duc d'Aiguillon et
de la longue agitation que « l'affaire de lîretagne » entraîna. Le
duc d'Aiguillon a passé, sur la foi des Mémoires de M . de la Cha-
lotais, pour avoir été, par dépit, par vengeance, et par servilité
envers les Jésuites, le moteur de toute l'intrigue. Le récit qu'on
vient de lire laissera, croyons-nous, dans tout esprit impartial,
une impression différente. Ce fut au moment du triomphe du parti
parlementaire à Versailles (donc lorsqu'une campagne contre la
magistrature et ses chefs ne présentait aucune chance de succès)
que l'aSaire s'engagea : ce fut alors que le Parlement de Rennes,
subissant l'influence de quelques meneurs qui haïssaient le com-
mandant, lui lança sa déclaration de guerre, qui tout d'abord
ne fut pas relevée; ce fut ce même Parlement qui revint avec
persistance à la charge et mit tout en œuvre pour iaire naître
une de ces querelles qui fatiguaient le roi et dont il ne se
débarrassait généralement qu'en sacrifiant les représentants de
soc autorité; et ce fut le gouvernement qui, par sa pusillanimité
et son irrésolution, laissa grandir des germes de troubles dont la
avitè devait surpasser toutes ses craintes.
M. Marion.
MÉLANGES ET DOCUMENTS
LE LIEU
DE LA RENCONTRE DES FRANCS ET DES WISIGOTH
SUR LES BORDS DU CLAIN
EN 507.
C'est en Poitou que les Francs, par leur victoire surles Wisigoths
donnèrent, en 507, le dernier coup à la civilisation antique. Vivani
depuis deux ou trois générations au milieu de la Gaule romanisée^
les Goths de l'ouest avaient en effet hérité de tout ce qu'ils n'avaien!
pas détruit, et maintenant, à demi dégrossis, ils se trouvaient éti
chez nous les gardiens et les défenseurs de ce qui restait de TandeiB.
monde.
On n'est pas d'accord sur l'endroit qui fut le théâtre de oeUi^
mémorable rencontre, à la suite de laquelle la Gaule devint la France^
On a successivement placé le champ de bataille à Givaux, à Nouaillé^.
à Ghauvigny, à Youlon, à Gbampagné-Saint-Hilaire, à Mougon, à_
Youillé, etc., à Test, au sud et à Pouest de Poitiers, de tous les c&té^
en un mot, excepté au nord, où il aurait été pourlant naturel de le^
chercher, puisque c'est la direction dans laquelle arrivait devis,
marchant sur Poitiers, occupé par son adversaire.
Nous allons commencer par donner tous les textes anciens qui sem-
rapportent à notre sujet. Gela fait, nous demanderons au lecteur de^
les avoir toujours présents à l'esprit et de vouloir bien de temps à^
autre porter les yeux sur une carte, soit pendant que nous discute-
rons l'opinion la plus généralement admise, soit quand nous expo-
serons notre propre manière de voir.
VUa Maxentii, dans Acta Sanctorum^ die 26 junii, p. 472 :
Eo tempore contigit ut Franci cum Gothis confllcto bellico adveoi-
rent, praecedente eos Ghlodoveo rege. Gum autem monasterio propin-
quassent in quo 8. Maxentius pastor habebatar egregius, et venissent
in villam vocabulo Vocladom, instinctu diaboii cogitare coopérant nt
idem monasterium debellare deberent...
RBnCDNTKB DES FR1NC3 ET DEH WISIGOTHS EN 507. 91
Gregorii Turonensis Hist. Francorum, II, ïxitii, éd. Arndl el
K-i-uscli, dans ScripCares rerum Merovingicarum, I, 101. — Gré-
goire de Tours, Hist. des Francs, publ, par Oraont, II, hyii :
CblodovechuB..., commolo esercitu, Peclavus diregît. Ibi tune Ala-
ricus commorabatur. Sed quoniam pars hoslium per territurium Toro-
nicunQ Iransiebat, pro reverenlia boaii Mariini dédit edictum, ut nullus
de rc-gtane illa aliud quam herbarum alimenta aquamque praeEumeret,
QuicJajn autem de exercitu, invento cajusdam pauperis fenum, ait ;
• N'ourle rex herba taittum praesiimi mandavtt, nihil aliud? Et hoc,
in<iviit, lierba est. Non ecim primus transgressores praecepti ejus si
^am praesumimus. u Cumque vim faciens pauperi faenum virtute
tutissct, factura pervenit ad regera. Quem dicto citius gludio peremp-
'um, oit : « Et ubi erit epes vicluriae, si beaio Martino offendimus? ■
Satis^^uo fuit eieroîlu nihil ulterius ab hac regione praesumere. Ipse
ïero roi direxit nuntios ad beati basilecam. {Suit le récit du présage de
'* •^•«^ttirc.) Porro ille, cum ad flitvium Vincennam ciim exercitu adve-
'**^®*3t, in qno loco eam iranRÏre deberet, paenitiis ignorabat. lutumue-
^^ ^nim ab iaundatione pluviarum. Cumque illa nocte Dotninum
°'P*'^a.eoatus fuisset, nt eî vadum quo transjre posait digoaretur osten-
®''^-, mane facto cerva miras magnitudinis ante eos nutu Dei Dumine
8*"^ditur, iliaque vadanie, populos quo transire posait agnovit.Veniente
****^ni régi apud Pectavus, dum In tonturiis coiamoraret, pharus ignea,
^ ^^*Q.aileca sancti Hilarii egresaa, visa est ei tamquam aaper ae advenire.
'**•"< le récit du miracle lie saint Uaixent.)
^^*-Qlerea Ghlodovechua rex cum Alarico régi Gothorum in campo
^Blsdenaï (allait Vocladensi, Vocladense) decimo ab urbe Fectava
T**Wrio convenii Migravit autem poat Vogladensem {alias Voola-
^^Oftem) belium an no qninto (ïsin).
Predegarii Chronica, II, lviii, III, iiir, hyiii, éd. Knisch, dans
Wpf. rerum Merov., II :
1^
ChlodoveuB adversua Alaricum arma commovit, quem in campania
.^^ogtadeDSPm decimo ab urbe Pectaïa miliario interfecit. — Obiit poat
Voglensim beltum anno 5.
Getta regum Franeorum, x?ii, éd. Rntscb, dans Seript. rerum
-^erov., II :
Commovit Rex (Cblodoveos) cunctum exercltnm snum, populo {alias
^opnium, populuaque, populnmque) Francorum Pectavia dirigit; ibi
^DÎm tune Alaricus, rex Gothorum, commorabatur. Muita para hostium
tter terreturium Toronicum transiebat. Precepit autem rex pro reve-
Yealia sancti Martini nihil aliud nisi herbam preaumerent ad eorum
«quoe Gustenlandum. Dtreiit iiaque nuncios rex ad beati Martini basi-
Ucam cum maneribus et equo guo velocisaimo... Cum veaisaet autem
TDX ad fluvium Vincenna cum exercitu suo, in quo loco eum vadare
92 MiLANGBS ET DOCUMENTS.
deberet, non inveniebat; inundayerat enim a multitudine pluviamm.
Deprecatasque Dominum, ut ei vadum ostenderet, nocte illa fuit.
Mane autem facto, cervia... vadum ostendit, illaque vadante, populus-
que sequens vadavit... Ghiodoveus autem rex cum Alarico rege Gotho-
rum in campo Yogiadinse {alias Vogiatlinse, Vocladinense, Voclan-
dinse, Vocladiense) 8uper fluvium Glinno miliario decimo ab nrbe
Pectava convenit; iilisque inter compugnantibus Gothi cum rege suo
nimis conloesi terga verterunt.
Vita Remigii, auclore Hincmaro, dans Duchesne, Hisioriae Fran-
corum ScriptoreSy I, 529; — Acta Sanctorum, die prima odobris;
— Script, rerum Merov.^ III :
Gum Alarico... in campo Mogotense (alias Moglotinse), super fluviam
Glinno, miliario decimo ab urbe Pictavis bellum conseruit.
Dans cette reproduction des sources, nous n'avons pas compris
rbistorien byzantin Procope. Il s'est particulièrement occupé des
Goths et a vécu au temps même des événements ^ mais il a composé
son livre loin du tbéâtre de la guerre et, dans son ignorance de la
géographie de l'Occident, il va jusqu'à confondre Poitiers avec Gar-
cassonne.
Les chroniques veisigothiques fournissent des renseignements sur
l'ensemble des fails qui ont précédé ou suivi la guerre, mais n'en
donnent aucun sur la marche des armées. Une seule mentionne l'en-
droit où se produisit le choc et l'appelle Boglodoreta*, nom de lieu
qui reste à idenlifier, à moins, ce qui parait probable, qu^il ne soit
une altération de Vocladum,
La Vie de saint Maixent, écrite au temps de Childebert, c'est-à-dire
par quelqu'un que Ton pourrait presque considérer comme contem-
porain, nous fait connaître le nom de l'endroit où s'est livrée la
bataille, mais rien de plus.
Grégoire de Tours, qui appartient déjà à une autre génération,
a emprunté diverses parties de son récit à des sources antérieures^,
et il nous offre de plus une garantie particulière : il a vécu dans le
voisinage des lieux où l'événement s'est passé; il les connaît. Ses
renseignements sont précis ; le seul embarras qu'ils causent aujour-
d'hui et dont on ne saurait se prendre à lui, c'est que le nom qu'il
donne au champ de bataille ne se retrouve plus. Telles quelles cepen-
dant ses indications sufDsent pour nous conduire à rendrait où Ala-
ric perdit la moitié de son royaume et la vie.
1. Hist. des règnes de Childerich et de Chlodovech, par W. Janghans, trad.
par Gabriel Monod, p. 91 et 150.
2. Jaoghans, BUt, de Chlodaoechj trad. par Monod, p. 154.
roEBwraraoTHS
1 507.
Le récit de Grégoire est la source où ont puisé les chroniqueurs
des siècles suivants. Ils le reproduisnnl avec de simples variantes de
forme. L'un d'eus cependant, l'auteur des fieWa ou Liber hisloriae,
y ijjoutc un détail géographique très précis, qui nous interdit de
chercher le lieu de la reuconlre ailleurs que là où Grégoire l'avait
déjà placé et |qui prouve que lut-méme connaissait les lieux dont il
parle ou avait à sa disposition un document que nous n'avons plus.
Ilincniar, qui, longtemps après, a emprunté en gros son récit aui
Gesta, donne cependant un nom difTérenl au champ de bataille, tout
en lui assignant exactement la même situation. Malheureusement, ce
nom lui-même varie sensiblement suivant les copies : dans l'une
c'est campus Mogolemis, dans l'autre c'est campus Moglotensis.
Cette dernière forme, si elle était seule et en y metlant do la bonne
volonté, pourrait être prise pour une mauvaise lecture de Vogladefi~
ns; mais ce serait, a notre avis, aller un peu loin que de voir dana
Mogotemit une simple variante de Vogladensis. Et si c'est réelle-
ment là le vocable qu'a employé Hincmar, il y aurait lieu de recher-
cher à côlé de Vocladum un autre endroit susceptible d'être identiflé
avec le campus Mogoteiuis. Nous avons indiqué ailleurs un nom
ayant quelque rapport avec celui-là : Moussais-la-Balaiile. Nous n'y
reviendrons pas ici, n'ayant aucun moyen de fïiire préalablement un
choix entre les deux versions des copies d'Hincmar et n'ayant pas
non plus besoin du témoignage de cet auteur pour fixer le lieu de la
rencontre.
Complétons celle bibliographie des sources parcelle des monogra-
L phies qui, depuis un siècle et demi, ont été consacrées à l'événement
1 et par l'indicalion de quelques ouvrages plus généraux dont
i ont émis sur la question une opinion plus ou moins
^_ tin de ^
IjS p. Routh, Oburvattom sur le Campus Vociadensû, à. la suite de
Rtcherehes sur Ja manièrB d'inkumer des anciens. Poitiers, 1736. —
Lebeaf, Diisertation toucliant la situation du Campus Vocladtnsis, dans
Diutrtations sur fhist. de Paris. Paris, 1739, 1, 304. — Affiches du Poitou,
OCU 1774. — Dufour, De l'ancien Poitou. Poitiere, 1826. — Mesoard,
d'après de Beauregard, Dissertation sur te Campus Vocladensis, dans
Mim. dt la Soc. des Antiquaires de l'Ouest, année 1836. — Saint-Hypo-
lïte. Notice sur la bataille dr. Vouion, dans Mim. des Antiquaires de
l'Ouest, 1S44, exCraîLe du Spectateur militaire. — La Fontenelle de
"Vaadorê, Notice sur le monastère de Sainl-ifaixtnt, à la suile de jour-
nal de Lericlie. Poitiers, 1846. — L'abbé Pourtault, le Cliamp de
batatU» de Ciwis contre àlaric est-il à Vouillé? Est-il à Vouhm Poi-
tiâfs, 1873. — &..-P. Lièvre, Du lieu o
tin de la Soc. aead. de Poitiers, 1S73
t Clovis défit Àlaric, dans BulU-
— Longaon, Géographie de la
94 irfUlfGBS BT DOGUnilTS.
Gaule au VI* siècle. Paris, 1878. — Lévesque, le c Campus Vocladeruis^ b
dissertation sur le champ de bataille de 507, Niort, 1880. — Rédet, Die-
tionnaire topographique de la Vienne. Paris, 1881. — D. Ghamard, la
Victoire de Clovis en Poitou, dans Revue des Questions historiques,
t. XXXIII. Paris, 1883, p. 5 et 624. — A. Richard, les Légendes de saint
Maixent et la victoire de Clovis en Poitou, dans Revue des Questions his-
toHques, t. XXXIU, p. 609. — k. Richard, la BatailU de VouilU, dans
Bulletin de la Faculté des lettres de Poitiers, 1888, p. 62. — Kurth, CUnris.
Tours, 1896.
Des textes que nous avons mis sous les yeux du lecteur il résulte :
V Que Clovis, ayant résolu de faire la guerre aux Wisigolhs, se
dirige sur Poitiers, où se trouve Alaric, traverse une partie de la
Touraine, sans passer par Tours, et franchit la Vienne à gué;
2® Qu'à son approche Alaric sort de Poitiers et se porte à la ren-
contre des Francs ;
3*" Que les deux armées s'abordent à dix milles de Poitiers, près
du Clain, dans un endroit appelé Vocladum par la Vie de saint
Maixent, campus Vocladensis par Grégoire et les autres chroniqueurs.
Tout ce qu'on ajoutera à ces conditions ne sera qu'hypothèse, et
hypothèse pour le moins inutile s'il se trouve que les données four-
nies par les textes sont suffisantes pour résoudre le problème proposé.
Lorsque, au xn* siècle, on se mit à écrire notre histoire en fran-
çais, on ne chercha pas tout d'abord ou on ne trouva plus la localité
désignée en latin par le nom de Vocladum, et dès lors commença la
série des suppositions arbitraires, dans lesquelles tantôt l'un, tantôt
Taulre des éléments de la question était négligé, quand ils n'étaient
pas tous faussés. Jean Boucbet, par exemple, songea à Givaux,
parce qu'il y a là beaucoup de sarcophages. Presque tous les auteurs
locaux demandèrent à la tradition le souvenir du gué où la biche
merveilleuse avait montré un passage à Glovis; on en trouva un,
puis deux, puis trois. Nicole Gilles, qui le premier risqua une iden-
tification philologique du campus Vocladensis^ imagina le substantif
€ Nagladiense ou Vocladence » et affirma que c'était c Nouailles, »
apparemment Nouaillé, qu'il place près du Glain. Personne avant le
xvii^ siècle ne pensa à Youillé ; mais depuis que ce nom a été mis en
avant, il a fait fortune; grâce à l'importance de l'événement qu'il
rappelle, il est maintenant du nombre de ceux qu'il fout savoir pour
obtenir dans nos écoles le plus élémentaire de tous les brevets. Voici,
d'après l'opinion la plus communément reçue, comment il se ratta«
cherait au vocable latin : Vocladum serait devenu Vodade ou Voglade,
puis Voglai, Vouglé et enfin Vouillé.
Nous pourrions accorder cette dérivation sans que pour œla le
BBIfCOIlTRE DES FHiNCS ET l>ES WISIGOTBS E^ 507.
95
I
problème fût résolu; car la question n'est pas là toutentière. Bemsr-
quoos cependant que celte idenlirication de Vouillé et do Vocladum
se faeurle à deux dimcullés. La première c'est que toulea les rormes
intermédiaires sont supposées; ce sont des resUlulions théoriques.
La seconde c'est que cette Filiation de noms, dont aucun ne saurait
justiHer par litres qu'il a réellement existé à un moment donné, laisse
de côté un certain VoUiacas ou Volliacum, qui, lui, est bien Vouillé
el possède des chartes pour le prouver. Dès le siècle dernier, le
P. Routb avait fait observer que dans les documents anciens cette
localité est appelée Votliacum et, par suite, il doutait qu'elle eût
jamais élé Vocladum. Ces pièces, il ne les citait ni ne les discutait, et
peu de ^ns alors ou depuis avaient t^it attention à sa remarque. Un
savant de nos jours, M. Longnon, a compris qu'il y avait là un dan-
ger latent pour Vouillé et, avant même que ces documents aient été
publiés, il a essayé de le conjurer en les discutant. D'après lui,
« ces chartes ne sont certainement pas antérieures au xii" siècle, data
à laquelle les scribes Torgeaient des noms par analogie. A notre avis,
dit-il, il n'y a pas lieu de tenir compte ici des formes postérieures à
l'an 1100, el l'on doil seulement examiner si Voctadis' a pu donner
en français Youillé; > or, ajoute-l-il, « cette question ne semble pou-
voir être résolue que par raffirmalive, puisque Va long accentué de
Voctadis, placé devant une consonne simple, a nécessairement pro-
duit i français, tandis que le groupe cl-gl donnait une mouillure
représentée dans la notation de la langue vulgaire par le groupe Ul;
de là Voillé, ancienne forme du nom de Vouillé. i
Nous ne contesterons pas à un des maîtres de la science la valeur
théorique de ces considérations; mais nous estimons qu'on n'en
saurait accepter la conclusion que dans deux cas : celui oii Vouillé
satisferait aux autres conditions du problème el celui où il n'existe-
rail pas une explication plus simple du nom même de cette localité.
Rédel, dans son Dictionnaire topographique de la Vienne, cite
une dizaine de textes du mojen âge oii Vouillé est nommé ; Volhé,
"Voilhé, 1383; Vouilhé, <375; Voulbé, 1370; Voillé, 4298; Votia-
eum, \îm\ VoilUacus, 1252; Voyilé, 1250; Vollec, 1231 ; VoUiacus
ou Volliacum |tn Volliaco), vers 1095. Aucune de ces formes ne
nous rapprocbe de Vocladum, et les latines nous en éloignent même
tout à fait, en faisant apparaître, au lieu de la désinence, cladum,
1. a MoDS écriTOOS Voeladit, dit H. Longnon, p. 577, parce que la termi-
e aoia est iodiquée par un coaUmporain, l'auleur de la Vie de sainl
MAisenL • C'est U une erreur^ la Vie de saiot MaJxeot porte Vocladum el non
Vocladem, el la Vie du saint qui seule conltenl ce renseignemeut prÉdeux n'est
pas celle à laquelle renvoie la GëograpMe de la Gaule, p, 582, mais celle qui
ne Inate dam les Ac(a Sanetorum.
96 MELANGES ET DOCIWEIfTS.
un des suffixes gallo-romains œus ou acum. Prétendre que des
clercs du moyen âge, ayant à mettre en latin le nom de Vouillé, ont
forgé cette forme Volliacus, ce serait admettre quMls étaient aussi
dépourvus que nous de chartes antérieures pouvant les renseigner.
Or, les documents qui nous restent, à l'exception de celui de 4252,
proviennent du trésor du chapitre de Sainte-Radegonde de Poitiers;
est-il supposable que cette importante communauté, qui, soit dit en
passant, prétendait tenir de la libéralité des Mérovingiens sa terre de
Vouillé, n'ait jamais eu dans ses archives de chartes relatives à ce
domaine avant celle de 4 095 ou environ, la plus ancienne que nous
ayons aujourd'hui? Ce qui est probable, au contraire, c'est que œ
vocable Volliacus s'était transmis traditionnellement et de charte
en charte.
Volliacus n'a pas été imaginé par un clerc qui aurait ignoré Vockh
dum, il est lui-même le nom primitif. Du sufllxe aciu est venue natu-
rellement et directement la finale é : de Volliacus on a fait Vouillé,
comme de Roliacus, mentionné en 889, on a, non loin de là, bit
Rouillé. Nos voisins de la Charente ont mieux que nous gardé le sou-
venir de cette ancienne terminaison : de Roliacus, Floriacus, Vol*
liacus^ ils ont fait Rouiliac, Fleurac, Vouillac, tandis que chez nous
ces mêmes formes primitives ont produit Rouillé, Fleuré, Vouillé.
Vouillé, qui ne parait point avoir été Vocladum, ne répond pas
non plus à une autre exigence du problème. Vocladum était sur le
Glain; Vouillé est sur l'Auzance, à une quinzaine de kilomètres du
Glain. On a longuement disserté sur cette condition topographique
sans réussir à faire que cela ne soit ainsi. L'auteur de la Géographie
de la Gaule au Vl^ siècle reconnaît qu'il y a là une difficulté et il
est porté à l'expliquer par une erreur. Vouillé, dit-il, est sur les
bords de l'Auzance, qui verse ses eaux dans le Clain et c qu'un
étranger voyageant en, Poitou pourrait prendre de la sorte pour la
partie supérieure du flurius Clinnus. » A ce compte-là, et pour ce
voyageur, Poitiers lui-même ne serait plus sur le Ulain.
C'est surtout cette situation de Vouillé qui, dès le siècle dernier,
fit douter de ses titres. On se mit alors à chercher sur les bords du
Clain un endroit dont le nom eût, lui aussi, quelque ressemblance
avec Vocladum, et on découvrit Voulon, à cinq ou six lieues au sud
de Poitiers, dans l'entonnoir où la Dive et la Bouleur confondent
leurs eaux avec celles du Clain. Aujourd'hui, bien que Henri Martin
(autorité bien faible, surtout en pareille matière; s y soit rallié, la
cause de Voulon parait perdue sans appel, et nous ne voyons aucune
utilité à revenir sur la discussion à laquelle nous l'avons soumise
au temps où elle était en faveur, il y a un quart de siècle.
■BHGOimiE DES FRAnCS RT DBB TVtSIGOTHS EU 507.
97
Veuille, qui n'est pas sur le Clain, et qui ne saurait justifier cpi'il
œ «»î t jamais appelé Vorladum, peut du moins soutenir qu'il se
Itwve, par rapport à Poitiers, à la distance exigée par les textes.
Miiï cet argumeut ne saurait être isolé des autres conditions à rera-
l^it, el îi perd sa valeur s'il est en opposition avec elles. On nous
[lermcllra d'ajouter qu'en s'en servant maladroitement on a infirmé
eucore le peu de force qu'il pouvait avoir en lui-même. Grégoire dit :
dmmo ab urbe milliario. MilUarium signifie borne milliaire, mais
par eitension il a aussi parfois le sens de mille romain, et c'est dans
ce sens dérivé qu'il faut l'entendre pour que Vouillé se trouve décima
mitiario. Or, deux des tenants de Vouillé l'ont compris autrement.
L'un d'eux, M. Pourlault, bien convaincu que ce mot ne peut signi-
fier que milliaire, n'a pas hésité à y ajouter celui de lapide et nous
a de cette façon interdit de prendre milliarium dans le sens favo-
lable à sa thèse, celui de mille romain; il a altéré un texte sans
autre résultat que de gâter un argument. Les bornes, en effet, étaient,
cbez ODIJS, placées de lieue en lieue, et non de mille en mille; or, la
lieue gauloise ayant 955 mètres de plus que le mille romain, on
sniTe à celte conséquence que le dixième milliaire ne pouvait se
trouTer qu'à plus de six railles, ou environ neuf kilomètres et demi,
au delà de Vouillé.
Un autre défenseur de Vouillé, M. Richard, aggravant cette méprise,
a prétendu nous indiquer la place précise que ce milliaire aurait
occupée. A lui aussi nous répéterons que nos bornes indiquent des
lieues, que la lieue gauloise et le mille romain ne sont pas des équî-
valenls el que, à supposer qu'il y eût à Vouillé un milliaire, ce ne
pouvait être que le sixième, el non le dixième, à partir de Poitiers.
Nous verrons tout à l'heure ce qu'il faut penser, non plus de celle
boroe et de sa position, mais de la chaussée même sur laquelle elle
aurait existé.
Vouillé est à dix milles romains de Poitiers, voilà ce qu'il fallait
dire, lien de plus-, et nous nous serions contenté de donner acte de
Mlle coïncidence. Mais puisque l'occasion nous en est offerte, nous
ferons remarquer qu'en le prenant à la lettre sur ce point, nous
'ttordons peul-étre à Grégoire plus de rigoureuse précision que lui-
"■ê'uen'a prétendu en mettre dans son récit. L'évoque de Tours, qui
wnaissait assurément bien les environs de sa ville épiscopale, nous
■"l quelque part, en parlant de Monllouis, que celte localité est sexio
ai «rôe milliario. Or, la distance de Tours à Montlouis est de onze
•"'"mètres, qui, divisés par six, donnent ^.833 mètres, c'est-à-dire
3âO mètres de plus que le mille romain et 600 mètres de moins
..S"* ^ lieue gauloise. L'Auvergne, son pays d'origine, était avec la
Rev liisTOB. LXVI. 1" p*«c. 7
98 MéLlTCGBS ET DOCUMEIfTS.
Touraine celui que Grégoire connaissait le mieux. H évalue de même
à six milles la distance de Clermont au monasterium Chrononense^
où son oncle saint Gall embrassa Tétat ecclésiastique, et que M. Lon-
gnon a identifié avec Gournon, situé à dix ou douze kilomètres du
chef-lieu, ce qui nous donne encore des unités supérieures au mille
et inférieures à la lieue. Conclusion : Grégoire n'a pas chaîné les
routes dont il parle, et la précision pour nous doit consister à n'en
mettre que dans ce qui en comporte.
Tout ce qu*il importe de retenir de cette discussion concernant le
prétendu milLiaire de Vouillé, c'est qu'en la soulevant on a implici-
tement admis que la rencontre a eu lieu sur une des grandes chaus-
sées dont les Romains avaient doté la Gaule. Mais Vouillé n'est pas
sur une de ces voies, et celle qui en passe le plus près, — à environ
huit iLiiomètres, — vient de Nantes et d'Angers.
Or, Glovis est parti du nord-est-, comment se fait-il qu^au lieu de
le voir arriver par la voie de Paris nous le rencontrions ainsi au
nord-ouest de Poitiers, comme s'il venait de Nantes ou d^Âogers?
Presque tous les partisans de Vouillé gardent à ce sujet le silence;
quatre seulement ont entrepris de nous l'expliquer, et à eux quatre ils
nous donnent à choisir entre cinq explications absolument diôérentes :
Le premier, M. Pourtault^ inspecteur primaire, veut que les Francs
aient passé la Vienne vers Ghinon, après quoi on les trouve au lieu
convenu : Vouillé.
Le second, M. Richard, archiviste de la Vienne, a émis sur la
marche de Glovis deux opinions. Eu 4883, il le fait arriver de l'est,
vraisemblablement, dit-il, par la voie romaine d'Argenton-, son
armée campe d'abord à l'orient de Poitiers, vers le Breuil-l'Abbesse;
puis, à un signal parti de la ville, elle va traverser le Giain à l'en-
droit où depuis fut bâti Saint-Benoit; de là elle continue à contour-
ner la cité, dans un faubourg de laquelle, entre-temps, Glovis va
faire ses dévotions à Saint- Elilaire; elle remonte ensuite la Boivre,
s'allonge un peu pour éviter une forêt impénétrable, passe TAuzanoe
à Vouillé et revient enfin par la chaussée de Nantes vers Géneret, où
l'on suppose que se trouvait le roi des Wisigoths. En 4888, M. Ri-
chard, contrairement à cette première thèse, dont il ne dit plus mot,
soutient que les Francs ont longé la Loire jusqu'à cinquante kilo-
mètres en aval de Tours pour la franchir à Gandes, au point même
où elle reçoit la Vienne, et de là les ramène vers Vouillé par une
voie secondaire qui vient se souder à celle de Nantes à Poitiers.
Le troisième opinant, D. Ghamard, admet que Glovis passa la
Vienne au nord de Poitiers et considère comme certain qu'il occupa
la ville avant la bataille, mais n^est pas bien convaincu que le com-
bat principal ait eu lieu à Vouillé.
KnCOITKE DBS ritlHCS ET DES WISIOOTOS Bit 507. 99
Le qualrième et dernier qui ait essayé de nous expliquer la marche
l fle Clovis est M. Kurth, professeur à rUoiversité (te Liège. D'après
^*", lea francs traversèrenl la Loire à Amboise, d'où ils gagnèrent
^^^ bords de la Vienne; ensuite, « quittant, dit-il, la railée do la
k^itnnu a partir du confluant du Glain, en amont de Cliâtelleraull,
On remonta allègrement celle dernière rivière, au bout de laquelle on
*^v&il rencontrer Poitiers. > Admettons sur parole Tallégresse des
ïterbares; mais par respect pour Ja géographie, généralement moios
^dtommodaule que rhJaloire, ne parlons pas ici du •> bout ■ de la
rivière : ce serait rogner le Glaiu de cent kilomètres ou transporter
'c chel-lieu du département de la Vienne à la Chapelle- Beauclai a,
<^!> celui de la Charente. A part cette légère incorrection, la marche
de l'envahisseur est logique et ne heurte en rien les textes. Mais si
'es Francs arrivent de ce côté, c'est-à-dire par la chaussée romaine
*}ui, vuiiant du nord, longe la rive droite du l^laia, on s'explique
d'autant moins que l'auteur place la rencontre à VouiUé. M. Kurth
o»us décontenance même tout à fait lorsque, appelant eu témoignage
^urce point notre plus ancien chroniqueur, il ajoute: < Le lieu précis
'^^ l'engagement doit être cherché, selon Grégoire de Tours, à quinze
Itiloinetres de Poitiers, des deui côtés de la chaussée romaine qui de
*e*le ville allait à Nantes et à rOccan. » On reste enlin tout à fait
•"«sanné devant cette autre aflirmation que le camp gaulois de Céne-
*^^> SUT l'Auzance, occupé, d'après lui, par Alarîc, « commandait le
chemin par lequel devait arriver Clovis. n Après tout, nous n'avons
(^"l-èlre pas le droit de nous étonner; M. K-urth nous avait averti :
"■''ai essayé plus d'une fois, dit-il dans sa préface, de suppléer a
• 'iSurOsance de mes documents par l'elïort intense de l'esprit pour
*'^'Ter à l'inluilion du passé. » Celte méthode, si c'en est une, l'a
"**' servi dans son récit de la campagne de 507; mais comaie les
produits de l'intuition ne sonl point des documents que l'on puisse
''■^ter à l'égal des textes, nous ne nous attarderons pas a relever les
'^ où, eu eiret, l'imagination, guidant sa plume, a suppléé aux
E"nioi^nages écrits.
On voudra bien aussi nous excuser, n'étant pas militaire, de ne
* Uous engager dans la discussion des questions de pure stratégie
■ -* Soulèvent les divers plans de campagne altribués aux deux chefs
^^ particulièrement a Clovis, plans qui uon seulement dilTèreut tous
BQtre eux, mais dont quatre sur cinq n'ont rien de commua non
P'Us avec l'itinéraire que suivrait un voyageur ordinaire allant de
Pari
3 à Poitiers. Nous nous contenterons de faire remarquer que
'^^ ce qu'oD nous dit a ce sujet, parlois d'une façon bien confuse,
^^'^où au contraire avec les délailâ les plus circonstanciés, n'est
^ b^poibése, ne repose sur aucun texte el découle aeulemenl de
I:
400
M^LANGBS ET BOCUHENTS.
cette opinion préconçue que Vouîllé est Vocladum. Voeladum^ c'est
Vouillé, voilà tout ce qu'ont de commun entre elles ces thèses
variées et opposées. Il fallait dès lors, n'importe par où et commeat,
amener à Vouillé les deux armées. Or, nous savons maintenant ce
que vaut cette identification du Vouillé moderne avec le Voelad^nt
mérovingien, et dussions-nous ne pas retrouver Vocladumy Veuille
nous paraît d'ores et déjà hors de cause.
Reprenons maintenant la question avec les textes et une carte soiifl
les yeux.
Le roi des Francs a annoncé son intention de faire la guerre à
celui des Wisigoths, dont le royaume s'étend jusqu'à la Loire et qui
se trouve maintenant à Poitiers ^ Glovis, de son côté, a depuis peu
1. Citons ici un exemple des singalières déviations qu'a produites l'hypo-
thèse de Vouillé sur l'esprit de ceux qui, après l'avoir trop facilement acceptée,
n'ont plus eu d'autre souci que de la démontrer. Grégoire dit : CModoveehus
Peciavus diregit; ibi lune Alaricus commorabatur. Un des tenants de VoeUh
dum = Vouillé, et non le moindre, traduit : Alaric f posté auprès de Poitiers... i
{Revue des Questions historiques, t. XXXIII, p. 615). Auprès de Poitiers, cela
▼eut dire à Céneret, proche de Vouillé. Non moins étrange est l'idée d'invoquer
à l'appui de cette thèse le témoignage de Procope {BuU, de la FùeuUé des
lettres de Poitiers, année 1888, p. 65).
r
1
BEDCONTaE DES FB1NC5 ET DES WIS1G0TBS BV 507. 101
transporté sa résidence de Soissons à Paris'. La guerre déclarée, il
a intérêt à aller vite et rien dans Ibs textes, ahsolumeDt rien, n'auto-
' rîse.i supposer qu'il n'a pas pris le chemin le plus court. Or, le che-
I m'iD qui reliait la nouvelle capitale de (ilovis à la capitale momen-
laoée d'Alaric, c'était la grande chaussée romaine dont le tracé s'est
imposé depuis, sans grands écarta, à la route royale du xnii" siècle
et même à la voie ferrée du xii*. Les contrées peu accidentées qu'elle
iraverse sont lea plus fertiles de la France : la Beauce, la vallée de
la Loire el les plaines du Poitou, au delà desquelles le roi franc a
déjà porté sea regards sur l'Aquitaine. A raison de ses avantages, ot
pour ie malheur des provinces qu'elle parcourt, celte route a été de
tout temps la grande artère des invasions.
Que Clovis l'ait suivie jusqu'à Blois, ce n'est pas douteux. Hais,
arrivé dans cette ville, il pouvait, soit continuer par Tours, soit
prendre une voie secondaire plus courte, qui, par Loches, l'amenait
dîreclemenl dans la vallée de la Vienne, où il retrouvait la chaussée
principale. A passer par Loches, il gagnait près d'une journée do
marche, raison suffîsarrte, à supposer qu'il n'en eût pas d'autre, pour
éviter Tours. Il est certain en tout cas qu'il ne traversa pas celte
ville, puisqu'il y envoya des messagers avec des présents pour la
basilique du bienheureux Martin. Mais si l'armée laissa Tours à
l'écart, une parlie n'en foula pas moins le territoire de la cité, pars
hostium per territorium Turonicum transiebat, et )a suite du récit
de Grégoire montre que le roi en personne était à la tète de celte
division. Les Gesta prétendent que c'était là le gros de l'armée,
nvlta pars, et cela paraîtrait vraisemblable alors même que nous
n'aurions pas ce témoignage. En suivant la chaussée de Loches, l]lo-
Tii coupait tout le sud-est du diocèse de Tours, ce qui explique qu'il
ïil tenu à se rendre saint Martin favorable.
A. franchir la Loire à Blois. il y avait sans doute un autre avan-
^Se , celui d'opérer le passage loin de l'ennemi et dans un pays peut-
^^ soumis déjà sur les deux rives".
A quatre cents mètres avant d'arriver à la Vienne, la voie de
lâches rejoint celle qui vient de Tours, à laquelle elle imprime, pour
''^verserla vallée, sa propre direction, el les deux chaussées con-
'oodues abordent la rivière en face de Cenon, un peu en amont du
^fifïuent du Clain. Clovis n'a pas eu h langer la Vienne; il a suivi
'* ctiemin ordinaire, el il la rencontre au point même où il avait
'^^^lu de la passer, cum ad fluvtum Vincennata advenissel ; mais il
sut, ia ChUderieh tt de Cklodmxck, par JaDgbans. trad. par G. Uoiiod,
M, Loognon, ÂUm hiil. de la France, pi. Itl (Gaole en âOG], étnnd, en
« oAti Im possesdans des Francs jusqu'au Cher.
402 ]fâ.A?(G£S ET DOGUMEirrS.
la trouve grossie par les pluies et ne sait où la franchir. Dans la nuit
il prie et au matin, mane^ une biche, en passant l'eau sans avoir à
nager, lui fait connaître un gué.
La Vienne à Genon, où Glovis se trouve ainsi arrêté, parait
aujourd'hui, même en temps ordinaire, une assez grosse rivière.
Gela tient au barrage établi à Ghâtellerault pour la manufocture
d^armes et qui fait remonter le niveau de Teau jusqu'au-dessus de
Genon. Mais avant cet obstacle à son écoulement naturel la Vienne
était guéable à peu près partout au-dessus du confluent du Glain, et
presque en toute saison. Les vieux chasseurs du pays se rappellent
le temps où, en général, la rivière ne les gênait guère pour suivre
une compagnie de perdreaux d'une rive sur Tautre. Si Glovis n*a pas
pu la firanchir à Genon, c^est-à-dire à Taboutlssement même de la
chaussée, ou à un gué voisin, il n'a pas eu à la remonter plus de
quatre kilomètres et a pu la passer à Ghitré. C'est la seule fois que
nous le voyons quitter l'ancienne voie et cette insigniflante déviation,
dont Grégoire nous a fait connaître le motif, s'explique tout naturel-
lement.
La Vienne franchie, les Francs, en une demi-heure de marche,
ont pu rejoindre la chaussée romaine, qui maintenant longe la vallée
du Glain en se tenant toujours sur le plateau. Nous allons pour le
moment les laisser sur ces hauteurs, d^où ils peuvent déjà aperce-
voir Poitiers.
Pendant ce temps, que faisaient les Wisigoths?
Un officier supérieur, M. Saint-Hypolite, qui a écrit une notice
sur la bataille de 507 et qui estime comme nous que Glovis, venant
de Paris, a dû arriver à Genon, fait cette observation : « Alaric aurait
dû couvrir Poitiers en défendant le passage de la Greuse ou au moins
celui de la Vienne; il devait se porter à Genon. » Nous allons voir
que c'est bien, en effet, ce qu'il fit, et que le reproche porte absolu-
ment à faux. Mais, manifestement étranger à la critique des textes,
autant qu'il est compétent en matière de stratégie, M. Saint-Hypolite
a admis de confiance l'opinion, alors en faveur, que Vocladutn était
Voulon; il n'a su se défendre ni contre les prétendues traditions, ni
contre les étymologies imaginaires et il a fait comme il a pu pour
amener les deux adversaires, sinon à Voulon, du moins dans les
environs, au sud de Poitiers. Il est piquant et d'autant plus remar-
quable de voir qu'en envisageant la situation théoriquement^ il va
droit à la solution et que c^est après avoir touché cette solution qu'il
s'égare à la suite d'érudits du cru, qui faisaient de Voulon non seu-
lement Vocladum, mais par surcroit Vallis Cladis, » la vallée de
la défaite, » et de Champagne « le champ de bataille, » Campus
pugnae.
lËB FUncS ET DES WISIGOTBS Eli 307. 4D3
Alaric s'est bien porlé à la rencontre des Francs, comme il le
devait, et naturellement il a marché dans la direction de Cenon par
où il les attendait; mais il les a rencontrés avant d'arriver a la
Vienne. Ciovis l'avait passée le matin el c'est entre Poitiers et Cenon
que le choc eut lieu. Il nous reste à préciser,
Les deux armées se sont rencontrées à dix milles de Poitiers, ou
au dixième milliatre, decimo tnilUario. S'il s'agit de milles romains,
les dix nous portent au delà de Dissais, mais pas tout à f^it jusqu'à
Saint^Cyr; si, par decimo milliario, on veut, au contraire, entendre
U dixième borne, c'est-à-dire dix lieues gauloises, comptées à
a,436 mètres, nous sommes conduits jusque près du Vieux-Poitiers,
el comme nous sommes ici sur une chaussée bien authentique et
bornée, nous ferons remarquer en passant que ce dixième milliaire,
si c'est lui que Grégoire a eu en vue, exisie encore tout près de là,
dans le parc du château du Fou, où il a été transporté. C'est entre
eus limites extrêmes, le Vieux-Poitiers et Dissais, que l'action s'est
passée. Si entre la lieue et le mille on préfère accepter une éva-
luation intermédiaire, nécessairement arbitraire, mais probable,
comme celle dont nous avons parlé ci-dessus à propos de la distance
de Montlouis à Tours et de celle de Clermont à Cournon, nous arri-
verons à circonscrire le théâtre de la lutte entre Sainl-Gyr cl Mous-
sais. Cette difTérence d'évaluation a, au surplus, fort peu d'impor-
tance: l'écart est minime, et comme il ne s'agit pas de déterminer
on point mathématique, nous accepterons l'interprétation que l'on
voudra.
La voie romaine dans œtte partie de son parcours ne s'écarte nulle
part de plus d'un kilomètre et demi de la rivière et n'en est souvent
n'a sept à huit cents mètres. C'est donc bien sur les bords du Clain,
r ftwium Clinno, que la bataille s'est livrée, et sur ce point,
î plus que sur les autres, nous n'avons aucune complaisance à
demander aux textes, aucune torture â leur infliger.
Le théâtre de l'action est appelé Vocladum, campus Vocladenm.
Aucun nom dans le pays ne se rapproche de celui-là ni n'en dérive.
Esl-ce une localité détruite? Nous ne le pensons pas; dans les
limites indiquées on n'en a pas signalé et nous n'y avons pas reconnu
le moindre vestige d'habitations antiques disparues. Le Vieux-Poi-
tiers, qui d'ailleurs est en dehors de ces limites, ne saurait être la
viiia voeabuio Vocladum; son ancien nom est aujourd'hui connu :
c'itAil BrivQ.
Vocladum est un lieu qui a changé de nom. C'est le cas de presque
toutes les anciennes paroisses qui sont aujourd'hui sous le vocable
d'un saint. Lorsque, dans ces endroils-là, on a bâti une église, il y
avait déjà apparemment un centre do population, sans quoi elle
404 MELANGES ET DOCUMENTS.
n*aurait pas eu de raison d'être. Le nom du patron de la nouvelle
paroisse Ait d*abord ajouté à celui de la localité; on a dit, par
exemple, Saint-Jouin d'Ansion, Saint-Clémentin de Segora, puis
ensuite tout simplement Saint-Jouin, Saint-Glémentin. Vacladum
doit de même porter aujourd'hui le nom d'un saint. Quel est-il?
A onze milles de Poitiers^ c'est-à-dire à la distance indiquée par
les chroniqueurs, se trouve, entre la chaussée romaine et le Glain,
un petit bourg où, en agrandissant l'église, il y a une trentaine d'an-
nées, on reconnut un cimetière mérovingien et où antérieurement
on avait déjà découvert des monnaies gauloises; c'est Sadnt-Gyr.
Saint-Gyr est donc incontestablement plus ancien que son nom
actuel. Quel est celui qu'il portait primitivement? Pour nous, étant
donnés la situation de cette bourgade et le foit qu'elle a changé de
nom, le doute ne nous parait guère possible : Saint-Gjrr, c^est
Vocladum.
Les témoignages que nous venons d'interpréter proviennent de
deux sources différentes, Grégoire et les Gesta; loin de se contredire
en quoi que ce soit, ils se complètent, et, parfaitement concordants
entre eux, ils deviennent au contraire, chacun en particulier et tous
deux ensemble, inexplicables dès qu'on attribue aux belligérants une
autre stratégie que celle qui a consisté pour Glovis à marcher tout
droit sur Poitiers, pour Alaric à aller tout droit à la rencontre de
Glovis.
Nous concluons :
La bataille de 507 ne s'est pas livrée à Vouillé, VoUiaeus^ près de
l'Auzanoe et sur la chaussée de Nantes; mais près du Glain, à dix ou
onze milles de Poitiers, sur la route de Paris, dans un endroit appelé
alors Vocladum^ qui pour nous est Sainl-Gyr.
Et maintenant, qu'on appelle du nom que l'on voudra la bataille
de 507; nous n'espérons pas avoir raison auprès de tous d'une
erreur enseignée dans toutes nos écoles et que, depuis cent ans et
plus, chaque génération répète à celle qui la suit. Nous nous tien-
drons pour satisfait si les philologues, sur le domaine desquels
nous avons dû fkire une incursion, reconnaissent que nous ne nous
y sommes pas égaré; si les militaires conviennent que nous n'avons
attribué ni aux Francs ni aux Wisigolhs une stratégie de âtnlaîsie;
si eutln ceux qui ont étudié les textes nous accordent que nos con-
clusions remplissent et ne dépassent pas les conditions du problème
posé au commencement de cette étude.
A.-F. LrivEB.
BULLETIN HISTORIQUE
FRANCE.
I
u
PdBLiCÂTioira oe textes. — M. l'abbé V. Gubtiueb vient de Taire
paraître la Qn de soq Itepertorium liymnologicum [Louvain, Polen-
nis, IS97, iii-8°), auquel le recueil des Analecla BoUandiana avait
duimê asile. Ce travail, aride et simple dictionnaire, rendra de très
grands services à l'histoire du moyen âge; beaucoup de ces poésies
liturgiques sont fort anciennes, et dans bien des cas, quand il s'agit
d'un saint, elles reorerment tout ce que nous savons de certain sur
lui. De plus, certains de ces morceaux sont loin d'éLre sans valeur,
el les allributjoos Tantaisisles données par les anciens scribes indiquent
sufnsamment en quelle estime on les tenait jadis. Il ^ a là toute une
mine à exploiter.
L'auteur de cet utile répertoire a en même temps entrepris la
publication d'une Bibliothèque liturgique; en quoi il a fkit preuve de
courage; ces études spéciales sont aujourd'hui trop négligées des
laïques qui s'occupent de l'histoire du moyen âge, et, depuis l'adop-
tion iinivorsello en Franco du rite romain, elles paraissent sans inté-
rêt au clergé. Et pourtant de quel secours peuvent être ces vieux
textes pour tout médiéviste? On ne saurait parler des religions
uitiques sans entrer dans des dâlails analogues; de même, pour
connaitre le moyen âge, il est bon d'avoir une connaissance sum*
saole des anciens cérémontaux des églises de Francp. Le tome VI de
la nouvelle Bibliothèque liturgique (Paris, Picard, in-S") est occupé
par deut ordinaires de l'église de Laon. On appelait de ce nom dans
l'ancienne Ëglîse des recueils indiquant pour chaque jour de l'année
les offices et parties d'office à réciter, les cérémonies à faire; le nom
vient de ordo, ordo officii. Les deux textes imprimés par les soins
de l'abbé Chevalier datent, le premier du in* siècle, — il parait
avoir été rédigé par les soins de Lisiard, doyen de la cathédrale de
LaOQ de 4)55 à H68, — le second du un', et ce dernier a été com-
posé par ordre du doyen .\dam de Courlandon (1196-1223], tbéolo-
giea eélèbreen son temps et dont on a quelques ouvrages importants.
Le premier recueil contient l'ordinaire du temps, le second l'ordi-
naire des saints. Le volume se termine par le texte de deux mystères
'lOô BULLETIN HISTORIQUE.
lilurgiques, empruntés aux manuscrits de T>aon, les Prophètes du
Christ et TAdoration des mages, Tun et l'autre fort curieux. Espé-
rons que ni le courage ni les collaborateurs ne manqueront à M. Tabbé
Chevalier pour la suite de cette très intéressante collection.
On connaissait depuis le xytp siècle le recueil des miracles de
sainte Foy de Conques; les ossements de cette jeune vierge, marty-
risée à Agen au début du iv^ siècle, et longtemps conservés à Agen
même, furent volés par un moine de Conques au cours du ix*
et transportés par lui dans l'abbaye rouergate; la translation était
un fait accompli dès Tan 883. Sainte Foy ne parait pas avoir gardé
rancune du procédé quelque peu cavalier des moines de Conques,
et dans sa nouvelle demeure, comme auparavant à Agen, elle
signale sa présence par une foule de miracles plus surprenants les
uns que les autres. Bientôt Conques devient un lieu de pèlerinage
célèbre dans la France méridionale et dans les pays voisins; les
malades viennent en foule demander à la nouvelle patronne la gué-
rison de leurs maux; on Fimplore pour tous les fléaux, pour toutes
les misères, et ce concours de dévots est loin de déplaire aux habi-
tants de Tabbaye que leurs offrandes enrichissent. Au x* siècle,
pour honorer la sainte, on fabrique une statue en orfèvrerie encore
aujourd'hui existante et qui est un des monuments les plus curieux
de la ciselure au moyen âge. Cette statue, d'aspect hiératique et
assez effrayant, ne fait que redoubler la dévotion et aussi la terreur
des fidèles, qui la respectent un peu à la foçon d'une déesse antique,
capricieuse comme une femme, exauçant volontiers les requêtes de
ses dévots, mais plus souvent encore obligeant les visiteurs à satis-
faire ses fantaisies et punissant sévèrement la moindre des irrévé-
rences ou les attentats commis contre les personnes ou les biens des
moines de Conques. De là le caractère tout spécial de ce recueil de
miracles. Dans les deux premiers livres surtout, dus à la plume d'un
élève de Fulbert de Chartres, Bernard TÉcolâtre, on trouve peu de
ces miracles courants qui encombrent les productions hagiogra-
phiques du moyen âge, sortes de thèmes reproduits à satiété par les
écrivains. La plupart de ces récits, caractère miraculeux à part, rap-
portent des faits réels, et dans plus d^n cas, ce que Fauteur du
XI'' siècle appelle miracle peut s'expliquer tout naturellement. Le
tout constitue un recueil de premier ordre pour l'histoire politique
et sociale du midi de la France au xi* siècle, pour un pays qui ne
nous a laissé que des chartes, fort utiles sans doute, mais ne don-
nant que des dates et des noms sans plus. Dès le xvn'' siècle, Labbe
avait publié des fragments des miracles, d^autres avaient été donnés
par les BoUandistes au tome III d'octobre ; ils n'avaient point encore
puinci;, 40T
élé l'objet d'une édition intégrale. M. l'abbé Bodillët vient de coœ-
iler cette lacune' ; il a pris pour base un précieux recueil de Scblo-
studt, datant du début du iri' siècle, qui provient du prieuré de Sainte-
Foy, fondé par des moines de Conques dans cette ville en 1094, et
représente probablement le recueil officiel des nairacles, loi qu'il
existait à la maison mèro. Ce recueil est divisé en quatre livres; les
deux premiers, dus à Bernard riîcolâlre et dédiés par lui à Fulbert,
sont donc antérieurs à ^027, les deux autres, un peu plus récenlâ,
ont été rédigés à Conques même par un anonyme, moine de cette
maison. En appendice, l'éditeur donne quelques autres miracles
empruntés à divers manuscrits de Conques, de Rome, de Chartres
et de Londres. Un tableau d'ensemble, qui termine l'introduction,
indique l'ordre des chapitres de chaque livre dans les difTérenles
copies manuscrites, le codex de Schlestadt étant pris comme terme
(le comparaison. Ce dernier, en général excellent, a servi de base
pour l'établissement du texte. Bernard l'ÉcoIâtro élait un écrivain
soigneiu, amateur du mot rare et de Texpression recherchée; de la
une certaine obscurité et des passages dirOciles à comprendre. La
suite est moins travaillée, mais encore déparée par de fausses élé-
gances, et souvent on a peine à trouver un sens saliafaisant aux
balbutiements du malheureux auteur. C'est du resl« le défaut ordi-
naire du latin du moyen âge. Ces taches n'enlèvent rien à l'intérêt
du recueil; tous ceux qui veulent connaître l'état inteUcctuel de nos
ancélres auront à recourir a ce volume dont l'intérêt est de tout
premier ordre.
Le P. Henri Denffle, en dépom'llant les registres du Vatican du
XV siècle pour la préparation du Charlularium univeTsitatU Pari-
*<«i*m', avait remarqué quantité de documents curieux sur l'état
des églises françaises vers la lin de la guerre de Cent ans. La pensée
ïtii est venue de réunir les plus importantes de ces Imlles et de ces
suppliques. Le premier volume du recueil vient d'être distribué par
l'auteur à ses amis, mais l'ouvrage ne sera mis en vente qu'après
l'ochèvemenl du tome H. Le P. Deuiflc lui a donné le litre suivant,
«lue lui fournissaient les auciens auteurs du xv" siècle: la Désolation
<S«3 églises, monastères, hôpitaux en Fratice vers le milieu du
-\*r" $ièele. On aurait peine a exagérer la valeur historique de cette
l>ublicâtion. Tout le monde sait en général que la guerre de Cent ans,
les luttes civiles et le brigandage avaient ruiné lu pays de France au
1. Paris, Picard. IS97, in-S- (ColleclioD de textes pour serfir & l'ensetgne-
VciEnl de l'hisloire).
2. Le tome IV de eu Carluloire paraisMit au niomeDt même oii dous faUioas
iUprlmBr ces lignes.
BULLETIN fitSTOaiUDE.
temps de Charles VII. On a cilé bien des fois quelques lignes dol
Journal d'un bourgeois de Paris, les doléances de rUoiversilâ ou]
certaines lettres royales, mais on n'avait pas un recueil un peu rictM'l
de textes sur le sujet. Le P. Ilenille nous le donne et puisé aux meit- 1
leures sources; propriétaires d'une bonne partie du sol. les établis:
ments religieux étaient les premiers à soufTrir des ravages de la
guerre et de la ruine des paysans. Souvent isolés en pleine cam-
pagne, les monastères servaient de refuge aux haliilanlsdu plat [lays
menacés par les brigands ou par les hommes d'armes; leur réputa-
tion de richesse, la renommée jde leurs trésors les exposêùent aux É
attaques des pillards. De là des sièges à main armée, des coups de 1
maiu, des incendies, dont les moines et les chanoines avaient grand'- 1
peine à réparer les suites désastreuses. Mais l'Ëglise ne soufTnûtl
pas seulement dans ses intérêts matériels; la vie spirituelle étiûtj^
aussi profondémenl atteinte. Toujours en alarmes, les religieux et les J
prêtres en arrivaient à négliger leurs devoirs; certaines paroisses]
étaient, durant de longues années, dépourvues de pasteurs, nul d
se souciant, dans la tiédeur universelle, d'accepUr des fonctions ^
périlleuses et mal rétribuées. Dans les cloîtres, aucune régularité ; des
abbés souvent peu dignes, égoïstes et ne songeant i|u'à leurs intérêts
personnels et des moines soucieux avant tout de vivre tant bien que
mal, C'est donc pour l'Église une ruine presque universelle, un
relâchement extraordinaire, que Charles VU, une fois l'ennemi héré-
ditaire expulsé, pourra dimcilement guérir. Il s'y emploie pourtant
avec ardeur, et, tandis que le conseil du roi Henri VI n'avait rien fait
pour adoucir les maux infligés par la guerre aux nouveaux sujets de
la couronne d'Angleterre, le prince français s'entremet volontiers
auprès du pape pour remédier dans la mesure du possible à toutes
ces misères. 11 semble bien, en un mot, que, campés sur le soi fran-
i;ais, les Anglais n'ont jamais cherché à s'attacher les populations
conquises, et de là sans doute leur insuccès déHnilif; un coup du
sort, la sottise de leurs adversaires avaient fait pour un instant
de Henri V et de Uedford les maîtres d'un pays plus grand que
l'Angleterre; pour conserver cette conquête, il leur aurait fkllu
se montrer meilleurs administrateurs que leurs devanciers; ils
paraissent au contraire n'avoir songé qu'a pressurer leurs nouveaux
sujets. Ces quelques réflexions donneront au lecteur un aperçu de
l'intérêt du nouveau recueil du P. DcniQe; on peut aflirmer que
depuis la publication des œuvres do Thomas Itasin, par Jules Qui-
ctieral, il n'avait paru sur le it" siècle aucune collection aussi impor-
tante de documents.
Le deuxième volume du Carlulaire et histoire diplomatique de
saint Dominique', par le P. Bilhe, de l'ordre des Prêcheurs, ren-
^Jerme l'hisloiro du fondateur, de 12(6 à 1220; l'auteur s'est fait
ider pour celte partie par un de ses confrères, le P. Leiaîdier. Gomme
le premier volume, il donne le texte intégral de chaque
tce et le fait suivre d'un copieux commentaire expliquant dans
jtielles circonstances l'acte a été écrit et donnant la biographie som-
aire de tous les personnages cités. Certaines de ces petites disserta-
Ûons sont â noter; par exemple, à propos de la première confirma-
tion de la règle du nouvel ordre par Honorius III, le P. Balme explique
avec beaucoup de netteté comment saint Dominique fut amené à
emprunter à l'ordre des Prémontrés ses premières constitutions et
compare longuement les deux règles. Ailleurs ce sont d'abondants
«lét^s sur la fondation des premiers couvents dominicains : Prouille,
Toulouse, Paris. En un mot, ce nouveau tome sera comme le précé-
«Jent indispensable à quiconque s'intéresse a l'histoire du iiii' siècle;
pour la croisade des .\lbigeois notamment, si souvent étudiée de nos
jours, on y trouvera quautilé de renseignements, des pièces inédites
ou perdues dans d'anciens ouvrages peu consultés et que le savant
auteur a mis de nouveau pour ainsi dire en circulation. Le dernier
"volume renfermera l'bisloii-e de saint Dominique durant sa dernière
année et celle de la canonisation du saint.
M. l'abbé Fbbet vient de faire paraître le quatrième et dernier
"volume de son ouvrage ; la Faculté de théologie de Paris'; il y
traite du iv" siècle, époque extrêmement importante pour la corpo-
ration, laquelle prend une part active à toutes les discussions qui
troublent l'Ëgliso et l'État. L'autorité doctrinale des théologiens de
Paris est universellement reconnue, et, bien que les études y soient
plutôt en décadence, la Faculté a pour représentants quelques-uns
des docteurs les plus émiiienls du temps. Elle s'oppose éner^que-
ment par la voix de ses docteurs à toutes les nouveautés qui se font
Jour, combat énergiquement les abominables paradoxes du misérable
Jean Petit louchant le tyrannicide et s'efforce, au milieu de la déca-
dence navrante et universelle de l'Église, de maintenir les anciennes
croyances dans U)ute leur pureté. Elle est bien dès lors, toute galli-
cane qu'elle paraisse, le corps entêté et profondément réactionnaire
qui prendra une large part à la lutte contre la reforme du xvi» siècle.
Me est du reste ici dans son rôle et un ne saurait l'en blâmer, non
plus que de son aversion pour les doctrines ultramontaines. En une
■-oocasion toutefois elle dépasse certainement la mesure, et la part
I 1. Puis, bureaux de ■ l'Année daminicïiae, i
l. [>iri«, Picard, 1897, in-S-.
440 BULLETIN HISTORIQUE.
qu'elle prend au procès de Jeanne d*Arc reste une tache ineffaçable
pour la mémoire de tous ces docteurs^ chez lesquels le caractère ne
valait pas le savoir. La Sorbonne, qui condamna Jeanne d^Arc, était,
il est vrai, une Sorbonne expurgée, et ceux-là seuls étaient restés,
qu'une aberration singulière, partagée par toute la bourgeoisie
parisienne, avait rendus partisans de la domination anglaise. La
seconde partie du volume est, comme dans les tomes précédents,
occupée par la biographie des principaux sorbonnistes du temps,
classés d'après leur origine. En général, ces biographies sont fort
intéressantes, et Fauteur parle de tous ces théologiens en homme du
métier, connaissant à fond les questions souvent difficiles agitées
par eux. On a pu reprocher à M. l'abbé Féret de renvoyer surtout à
des ouvrages anciens, de ne point citer, par exemple, aussi souvent
quUl l'aurait pu, l'admirable cartulaire du P. Denille et de M. Châte-
lain ; à ce reproche, qui ne s'applique pas en tout cas et pour cause
au présent volume, l'auteur répond dans un avertissement; il foit
remarquer que ses notes étaient réunies avant la publication du
recueil cité; cette excuse paraîtra peut-être insuffisante à quelques-
uns; il y a lieu toutefois d'en tenir compte dans une certaine mesure.
En somme et pour conclure. Fauteur aura honorablement accompli
la tâche qu'il s'était imposée ; il a mis à la portée du public une
quantité énorme de renseignements épars un peu partout, et il donne,
sous une forme un peu décousue peut-être (le reproche lui a été fait
ailleurs), beaucoup de remarques personnelles dont on devra désor-
mais tenir grand compte à l'avenir.
Les études sur Thistoire de l'ancien droit se multiplient depuis
quelques années, et cette multiplicité prouve sans doute une renais-
sance des études juridiques. Ces études, en effet, quand elles ne
sont point vivifiées par Thistoire ou par la philosophie, risquent
fort, soit d'aboutir à une sorte de scolastique d'un nouveau genre,
plus dangereuse encore que l'ancienne, soit de se réduire à la
simple pratique, terre à terre, des règles de la chicane procédu-
rière. On sait que ces recherches sont fort goûtées en Allemagne
depuis longtemps; il est heureux que les juristes français suivent
cet excellent exemple; ce sera revenir à une vieille tradition un
peu oubliée dans le présent siècle. De ces ouvrages historico-juri-
diques, nous citerons d'abord un très intéressant : Essai histo-
rique sur le droit des marchés et foires^ de M. Huvelin*; l'auteur
a donné à son étude les plus grandes proportions et tracé rapi-
dement une histoire de ces institutions commerciales depuis les ori-
1. Paris, Arthur Roasseaa, 1897, in-S*.
FtuncE. m
I gines de la civilbalion jusqu'à nos jours. Il avoue avec bonne
gr&ce, dans la prérace, qu'embrassant un sujel aussi élendu, il a dû,
dans plus d'un cas, s'en rapporter aux ouvrages de seconde main,
sans recourir aux leiles aussi souvent qu'il l'aurait voulu, mais, par
contre, il connaît fort bien la littérature du sujet, el cite, à côté desprin-
cipales publications françaises sur le sujet, un foule de livres étran-
gers dont il a su s'assimiler la substance. Le cadre du travail est
fort étendu : après une étude générale sur l'origine des marchés et
des foires chez les peuples primitifs, il parle successivement des
foires chez les peuples de l'Orient et de l'Kxtrème-Orient, grec el
romain, en Occident, au moyen âge el dans les lemps modernes;
c'oal l'bisloire externe du droit. Puis un second livre embrasse
l'histoire interne, les mesures prises à chaque époque chez les
dilTépenls peuples pour assurer la prospérité des marchés el des
foires el la sécurité des marchands el des acheteurs; il expose ensuite
le droit particulier des foires : franchises et privilèges, usages com-
oaerciaui. Le cadre, on le voit, est immense; l'auteur nous parait
l'avoir bien rempli, el les conclusions générales sont fort sages.
M. Huvelin y montre quel a été le rôle de ces vieilles institutions au
point de vue économique et social, comment elles ont vu naître la
loi de la concurrence et ont permis au capital, argent ou marchan-
dise, (Ib se créer a côté du capital terre ; ii monlre encore l'inlluence
du droit des foires sur le droit moderne, les notions ajoutées par lui
* l'ancien Jus romanum, enfin comment le développement de ces
*®ntrcs commerciaux a contribué à celui des centres urbains. Au
commerce périodique, en Europe tout au moins el en Amérique,
5 est substitué le commerce permanent, nouvelle étape de la civi-
"sation, destinée sans doute à se modifier prochainement dans un
sens que le plus clairvoyant des prophètes ne pourrait prédire à
*=oup sur.
A. côté de l'ouvrage de M. Huvelin, nous citerons l'étude de
*■- François Mobel »ur Im Juridictioiis commerciales aa moyendge*;
*Q lôte, l'auteur a placé une courte introduction sur ces institutions
'^Qs l'antiquité ; elle n'est pas sans intérêt, mais le moyen âge ayant
"***'. innové sur ce point, elle aurait pu facilement être supprimée. Vient
*Qsmie une étude sur les juridictions italiennes, les premières éla-
^*'Ob et qui ont servi de modèle pour les tribunaux similaires hors
7*^ Ut Péninsule. Elles naissent en même lemps que les communes
''tiennes el sont une conséquence du développement extraordinaire
°^ l'organisation corporative; dès le milieu du xit* siècle, il existe
l- P»ri», Routseau, 1897, in-fl-.
à
442 BULLBTIll HISTOKIQUV.
dans les grandes villes des eonsules mercaiorum, dont la compétence,
d'abord très étendue, se restreindra peu à peu aux affaires oommer-
ciaies. Enfln le tribunal spécial de commerce, la mercansia^ apparaît
au début du iiv* siècle, et bientôt il a une procédure, une compé-
tence réglées avec une entente particulière des besoins du négoce.
Ces tribunaux exercent leur action en Italie même et hors de l'Italie;
ils ont pour justiciables les innombrables marchands génois, vénn
tiens, pisans, florentins ou lombards, spéculant dans TEorope
entière ; en un mot, Torganisation est à peu près parfoile et fonc-
tionne avec une aisance étonnante. En Allemagne, les premiers tri-
bunaux temporaires ou à compétence restreinte paraissent être d'ins-
titution impériale et sont des tribunaux de marché, qui^ le jour où
le marché devient une ville, se transforment en tribunaux urbains.
Peu à peu les assesseurs supplantent le représentant de Fautorité
supérieure, le Schultheiss; la plupart sont des marchands, et trans-
forment le tribunal échevinal en tribunal de commerce; la révolu-
tion est achevée au milieu du xiv* siècle. A côté des tribunaux locaux
fonctionnent ceux delà Hanse, devenue puissance politique; ils sont
répandus non seulement en Allemagne, mais encore en dehors,
dans tous les comptoirs de la puissante association. En France, le
développement de la juridiction commerciale est tout différent et
parait avoir des causes diverses suivant les temps et les provinces.
Dans le sud-est, il est au xii® s. une suite de Textension du commerce,
et on y imite visiblement les institutions similaires de Tltalie; i
Paris, le Parloir aux bourgeois, association des marchands de la capi-
tale, est la seule représentation municipale de la ville. Puis on trouve
la juridiction spéciale des gardes des foires de Champagne et de Brie
et certaines cours particulières, celle des conventions royales de
Nîmes, par exemple, création de Tautorité royale; ailleurs la eon-
servation de Lyon. Enfîn, vers le milieu du xvi* siècle, paraissent les
juges consulaires, établis par édit royal, et qui bientôt fonctionnent
dans toutes les villes un peu importantes. En un mot, dans notre
pays, dans les provinces non soumises à l'autorité centrale, la juri-
diction commerciale est, comme en Italie, une création des marchands
réunis en corporation ; partout ailleurs, dans les provinces dépen-
dantes de la couronne, elle est un octroi de la royauté, un organe
administratif; c'est ainsi que, dans cette matière spéciale comme ail-
leurs, les lois fondamentales, qui ont régi notre histoire, trouvent
leur application.
Nous avons reçu, en même temps que les deux volumes précédem-
ment annoncés, la traduction par M. J. Yil^rt d*un mémoire d'un
jurisconsulte italien bien connu, M. Bs^rsi, sur VHittaire du contrai
^^xttHrattce au moyen âge'. L'ouvrage esl composé en grande partie
d'a.prè8 les archives génoises, et l'auleur y parle presque unique-
menlde l'assurance contre les risques de moi'; au foud, c'est une
histoire abrégée d'uue des Forines de l'association pour le commerce
maritime. Dans le dernier chapitre, H, Bensa parle d'une espèce par-
ticulière d'assurance sur la vie, qui parait dans des contrats du
\v" siècle, et qui jette un singulier jour sur les mœura de l'époque.
Le travail, fort intéressant, est précédé d'une préface de M. J. Leforl.
HisTOiBE LOCALE. — Lc Gonseil géoéral de la Seine a décidé de
publier sous le titre suivant : Étai des communes à la fin du
.ï/,1'" siècle (in-8°), une description des soixante-seize municipa-
lités du département. Quatre ont déjà paru : Épinaj, Pîerrefitle,
Stains et Villetaneuse. Chaque fascicule comprend les parties sui-
vantes : une notice historique sur la commune due à M. F. BocBso.f,
puis une description minutieuse de la commune actuelle: population,
instruction, viabilité, imposition, agriculture et Industrie, etc. A la
suite, des tableaux indi()uent le mouvement de la population et la
marche ascensionnelle des impôts-, ils marquent également la place
occupée à ce double égard par la commune en question dans la liste
des communes du département; viennent enQn deux cartes, une de
la commune actuelle, l'autre empruntée à la fameuse carte des
"^basses ((773) ; sur cette dernière on a reporté les limites commu-
nales actuelles. Chacune de ces différentes parties a un intérêt
'P^ial; la notice historique est abondante et précise, telle qu'on
devait l'attendre de M. Bournon, du nouvel éditeur de l'abbé Lebeuf;
" suite, sous le titre de Renseignements adminislratifs, est une des-
tripUon complète de la commune moderne et aura un intérêt tout
Particulier dans l'avenir. La collection des soixante-seize monogra-
phies sera, dit-on, complète en l'an 1900 et figurera à l'Exposition
"^'verselle; espérons que M. Bournon aura les loisirs et le courage
••^cessaires pour terminer cette lourde lâche, dont seuls les gens du
"•^Uer connaissent les difficultés multiples.
Oo conserve aux Archives nationales la collection complète des
•^K'slres de délibérations du chapitre Notre-Dame de Paria, de
*32b à i7'J0; celte série imposante de volumes, si utiles pour l'bia-
f^MTC de l'aris et pour l'histoire générale du moyen âge, n'a encore été
<li*e p^u utilisée, sans doute a cause des difficultés de lecture que
présentent les registres du iv* s. Fort heureusement, il en existe un
répertoire, admirablement dressé, œuvre du chanoine Claude Sarra-
K *Q, znort vers nse, et ce répertoire, classé par matières, permetde
L
- ï*«rU, FonUmoing, 1837, io-S-.
Rbv, Uistob. LXVI. \" PASO.
141
nrtr.En!i butouditi.
retrouver à peu près Inus les renseignemenU épars dans (ea cent
doquante volumes orJginaut. M. labbé CHtSTiEs vient d'en tirer les
élâiDeals d'un intêreaeaut volume iolilulê : PAneien thapUre d»
/fotn-Dame de Paru el ta mailrise\ La maîtrise cathédrale était
digne de la vieille réputation do l'église de Paris, el le chapitre
n'épargnait rien pour avoir une école de chant do premier ordre. Uû
grand nombre denfaoLs de chœur, choisis parmi les pluà belles voii
de la capitale, y apprenaient les premiers cléments de l'arl; à leur
ttle, on mettait des organistes de talent, des maîtres éprouvés; enfla
pour stimuler le zèle de tout ce personnel, on avait établi des con-
cours de chant, concours publics, avec pris et récompense et à Vo&-
ca^on desquels on donnait aux membres de la maîtrise un festin
extraordinaire. La discipline était assez difficile â maintenir dans
tout ce petit monde ; si le maître était séfère, les verges jouaient leur
r61e, mais les enfants de cbœur se vengeaient du châtiment en chan-
tant Taux; que le maître Tùt trop doux, l'indiscipline, la paresse
régnaient dans l'école; de la mille conflits, vraies tempêtes dans ua
verre d'eau, que le chapitre avait à apaiser et sur lesquels le livre de
M, l'abbé Cbartier renferme plus d'un détail piquant. Ajoutons-; une
monographie du cloilre Notre-Dame, enceinte fermée, soumise à uns
police particulière; elle englobait rcxlrémité orientale de l'Ile de la
Cité et formait une sorte de ville à part. L'attribution des maisons
canouiales, la location des appartements vacants donnaient lieu â
maintes discussions, que l'auteur expose en délail. Enfin en appen-
dice, les amateurs de musique sacrée trouveront quelques morceaux
des meilleurs compositeurs religieux des irn* el xfiii" siècles : Abra-
ham Blondel, Jean Mignon, Henri Frémart, et un Sanclw de Louis
Vanpulaer, musicien flamand du xti° siècle, qui Hit maître de chœur
à Notre-Uame de Paris de 1 307 à 1 327.
Sous le titre de Inscriptions de l'ancien diocèse de Sens, MM. Paul
Qdesvess et Henri Srei» viennent de terminer le premier volume d'un
ouvrage très important pour l'histoire d'une vaste région de l'an-
cienne France, lin léle, on trouve un pouillé du diocèse, déjà annoncé
par la Hevue historique'; puis le texte, avec copieux commentaires,
de toutes les inscriptions existant aujourd'hui aoit en originaux, soit
en copies. Ce tome 1" renferme les litres de Sons même, au nombre
de près de deux cents; les auteurs estiment qu'il leur faudra encore
quatre volumes pour remplir le cadre tracé. Il existe encore aujour-
d'hui pas mal de monuments funéraires anciens à Sens, maîa Uj
p^«n bien plus encore. Au xTin* siècle, quand on voulut réparer
révise cathédrale de Saint-Étienne, on relounia cl ou dclailla en
cai-reaui toutes les pierres anciennes qui pavaient la nef et le sanc-
lLi.;9Jre, détruisant ainsi sottement une foule de monuments respec-
laJ>les; on voit que le vandalisme, à Sens comme ailleurs, ne date
pa^ de la Révolution. Un peu plus lard, on éprouva pourtanl
quelques scrupules, et, pour conserver le souvenir des dignitaires
et des bienfaiteurs de l'église sénonaise, on grava sur le nouveau
pavage, un peu au hasard et avec raille fautes d'orlhographo el de
nombreuses erreurs de date, les noms des pauvres chrétiens dont on
avait ainsi troublé le repos el violé la sépulture. Tous ces monu-
ments el beaucoup d'autres avaient été copiés et estampés par feu
ICdmoad Michel, président de la Société du Gâtinais ; c'est à l'aide de
ces estampages et grâce à des subsides d« la famille du savant défunt,
que les éditeurs ont pu entreprendre celle œuvre de longue baleine.
En cfTet, ils onl tenu à joindre aux moiiuaienls tous les éclaircisse-
ments désirables, el chaque inscription est accompagnée d'un com-
mentaire souvent fort étendu, donnant sur le défunt et sa famille tous
les renseignemenls désirables; ils y ont joint le texte des épitaphes
P^ues et relevées jadis par Gaigniéres et autres collectionneurs ;
plus, la liste des personnes enterrées à Sens el dont les monuments
funéraires, disparus aujourd'hui, sont signalés par d'anciens auteurs.
El un mot, tout en suivant en général le plan de Guilhermy, éditeur
^ ioscriplions du diocèse de Paris, ils ont modifié ce même plan
sur plusieurs points essentiels, et leur recueil sera un véritable épi-
tspMer de l'ancien diocèse de Sens. Faire ressortir Tutillté de pareils
recueils serait inutile; seuls, ils donnent pour la mort de person-
nages plus ou moins illustres des dates précises, et les éclaircisse-
toeaUa de MM. Quesvers el Stein ne peuvent que rendre le recueil
Mcore plus précieux. Espérons que nous pourrons bientôt en annon-
***■ la suite, 011 l'on trouvera les monuments funéraires de villes telles
lue fVovins, Monlereau, Melun et Ëlampes, pour ne citer que les
principales.
Jacqueline de Rueil, comtesse de Moret, fut une des nombreuses
iBilresses de Henri IV el non la moins connue. M. G. Liobet' a
'WUi tout ce qu'ont raconté les chroniqueurs et littérateurs du temps
*^ celle liaison du grand roi, dont les mœurs, on le sait depuis
''Mgteinps, ne valaient pas l'intelligence politique; rivale de la Ver-
"suil el de bien d'autres, Jacqueline, mariée par le roi à M. de Chan •
!■ Étude kùtortquê nir Jatqvetine de Btteil, eomieue de Moret. Horet,
S«»i, iB-8'.
44f> BULLETIN HISTOKIQCB,
vallon, qui ne fut jamais qu'un époux honoraire, eut de Henri un
fils, Anloine, comte de Moret et légitimé de France, qui disparaîtra
mystérieusement au combat de Castelnaudary en 4632. Remariée
plus tard à Vardes, mêlée à toutes les intrigues de la cour, chas-
sée de France avec la reine mère, Marie de Médicis, elle finit par mou*
rir tragiquement en 4 664 , empoisonnée par son mari, disent quelques-
uns, victime d^un accident, suivant les autres. M. Lioret, dans œ
mémoire fort agréablement écrit, nous fait l'histoire des royales
amours de Jac([ucline, et nous donne de nombreux détails sur l'ad-
ministration du comté de Moret, d'après les pièces trouvées dans les
archives-, le tout est de lecture fort intéressante, et cette figure
curieuse et, en somme^ moins antipathique que celles de beaucoup
d'autres grandes dames du temps, y est fort bien présentée.
L'ouvrage de M. A. Lacroix, archiviste de la Drôme, Rotnans H U
Dourç'dU'Péage^ est le résumé de tout ce que l'auteur a rencontré
dans les archives du pays sur ces deux petites villes. Pour Romans,
il n'a pu ajouter grand'chose aux recherches de M. Giraud sur Tab-
baye de Saint-Barnard et aux Annales du docteur Chevalier, annon-
cées ici même tout récemment. Pour le Bourg-du-Péage, au contraire,
il avait à traiter un sujet moins rebattu et cette partie de Pouvrage
est peut-être la plus intéressante. Cette petite ville fut d'abord une
simple agglomération de maisons sur la rive gauche de Plsère, au
débouché du pont jeté sur le fleuve; le lieu s'appelait déjà Bourg-du-
Péago en 4 231 -, le principal commerce y était celui du sel. Longtemps
uni à Romans, il finit par on être détaché au xvii* siècle, et, en dépit
des eflbrts de cette dernière communauté, la séparation devint bien-
tôt définitive. Naturellement l'histoire de ces deux petites villes se
confond durant tout le moyen âge, chaque chapitre du travail inté-
ressant autant Bourg-du-Pcage que ilomans. M. Lacroix parle suc-
cessivement des églises, de la commune, des écoles, des hôpitaux,
des épidémies et des fléaux, des charges et revenus, de l'industrie, etc.
C^est de rhisLoire locale très menue. Ou pourra toutefois y glaner
quelques renseignements utiles pour Phistoire générale. Les annales
mêmes du xvP siècle nous ont paru moins fournies et moins détail-
lées que la partie correspondante de l'ouvrage du docteur Chevalier.
M. l'abbé Sabartuès, ayant retrouvé un manuscrit intéressant pour
Thistoire de la petite ville de Montréal dans l'Aude, vient d^en publier
le texte intégral ^. Ce volume, qui d'après les fac-similé donnés par Pédi-
1. Valence, Céas et Uls, 1897, gr. in-8*.
2. Les Coutumes, libertés et franchises de Montréal (Aude). Carcissoiuiey
G. Servières, 1897, in-S-,
Sur paraît dalerde la fin du xiy's., reiiTerme, non point, comme le
il M. i'abbé S, , les rranchises et couLumes de Montréal, mais les tari ïs
de la leude et autres droits levés pour le compte de la communauté.
Ces lariTs, nolammenl celui de la leude et de rincan/oïor, ou vendeur
Juré de la ville, sont d'autant plus intéressants que Montréal était au
KIT" siècle une place de commerce fort importante et un centre Jndus-
■iel de premier ordre, principalement pour la draperie. Plus tard, à
■lie copie on joignit un calendrier et divers passages des évangiles
et du Te tgitur ou Credo de la messe. lia copie du leudaire fut ainsi
t ransformée en livre de serment, et c'est vraisemblablement celui qui
figura dans la cérémonie d'inslallalion des nouveaux consuls; on lui
ajouta une courte chronique consulaire, énumérant de 1374 h nJ22
les magistrats municipaux de chaque année et indiquant la date de
leur élection. C'est eu un mot un de ces recueils comme il s'en ren-
contre tant dans les archives communales du midi de la France: il
n'en est pas moins fort curieux, et méritait d'être publié, L'éditeur
a. donné le manuscrit aux archives départementales de l'Aude, le
niettanL ainsi à l'abri de toute nouvelle chance de perte.
M. l'abbé Torhbilles, dont la Reuite historique a déjà signalé plu-
sieurs travaux intéressants, vient de faire paraître sous ce titre :
^^erpiçnan sotti fa ftéi'olulion' , ane élude fort complète sur l'histoire
<3e cette ville do 1780 à 1800. L'ouvrage, qui forme trois volumes
oompacts, ne renferme à peu près que des faits précis puisés aux
rneîlleures sources : archives publiques, correspondances particu-
1 ières, journaux manuscrits d'émigrés; voici, brièvement expliquée,
l'économie de l'ouvrage, qui mérite d'être lu. Le tome I va de 1789
à la déclaration de guerre de l'Espagne (1793); il s'ouvre par un
Lableau de Perpignan au début de la Révolution : topographie, orga-
ciisation, classes, état des esprits; l'auteur insiste sur le caraclcrn
particulier que le Roussillon a gardé en dépit de la conquête fran-
çaise; le pays est encore à demi catalan, la religion très forte, en
dépit d'une certaine tiédeur. Les idées un peu vagues de réforme qui
É vaillent la France entière ont pénétré ici comme ailleurs; de là
e inquiétude singulière, une sorte d'anxiété et des troubles violents
e fois l'ancien régime tombé. A Perpignan comme dans toute la
nnce, les événements de Paris amènent de terribles émeutes ; aigri
■par de longues soulTrances, manquant de pain, le peuple profite du
i-elâchement de l'autorité; de là des pillages, puis une anarchie com-
plète. Les anciennes autorités n'agissent plus, lo nouvel organisme
s'existe pas encore ; les clubs commencent à s'agiter, et, à Perpignan
1. Perpiftnan, Lairulie, ISQ6-1897, 3 lol. petit in-Sv
comme ailleurs, ils joueront un rôle néfaste. F-n un mol, jusqu'eï^
4Ti3, c'esl une lente désorgaaisaliou, un ùmietLemunt de l'autorité^
qu'accompagnent un arTolemenl grandissant de la masse populaire^-
un désarroi général. Luttes entre les clubs modéré et révolutionn^pe»-
émeutes continuelles, troubles dans la rue, querelles religieuses, toa C^
se réunit pour préparer les malbeurs de n93-(794. A Perpignan»
on peut noter quelques traits spéciaux ; la haine des douaniers, paa~
exemple; on a cliangé leur nom, on a pris toutes les précautions pos —
sibles; le peuple, qui a longtemps vécu de contrebande, les attaque.*,
en massacre plusieurs, en dépit de toutes les mesures; évidem —
ment, il est rebelle à toutes les taxes indirectes, et il tiiudra ui»-~
régime de Ter pour lui fkire respecter ta loi. Bientôt les événement^^
se précipitent; l'émigration commence avec toutes les misères —
qu'elle entraîne; l'armée prend part à la lutte civile; la aitualioo-^
politique et économique devientchaque jour plus critique. Les Giron-
dins triomphent après le iO août, et avec eux la République; mais, _
à Perpignan comme dans toute la France, ils vont avoir à luttei
contre les partis extrêmes cl à soutenir en même temps la guei
avec l'Espagne, que le supplice de Louis \V[ a décidée à entrer dans
la coalition.
Le Roussillon et- Perpignan étaient en grand danger, et l'invasion
ennemie trouvait le pays en désarroi complet, une armée désorganisée,
des pouvoirs toujours en lutte, uue population alTolée et divisée. Des
généraux qui se succèdent, les uns sont incapables, les autres para-
lysés par les intrigues des meneurs jacobins, qui suspectent toutes
les démarches et qui jugent toutes les opérations. Au milieu de ce
désordre général, quelques esprits plus froids et moins exaltés tra-
vaillent à sauver le pays; enlln, le misérable Barl>cntane quitte le
commandement. Dagoberl, qui le remplace, a fort heureusement la
faveur des clubistes, et, le 17 octobre 1793, la victoire de Peyres-
tortes arrêtn un instant les envahisseurs. Ce premier succès est, U
est vrai, suivi de revers, mais le parti terroriste établit cependant
sa domination dans le département, et, devenus gouvernants â iear
tour, les anciens anarchistes des clubs savent se faire ul)éir; les nou-
veaux commissaires de la Convention, Milhaud et Soubrany, fVappeat
sans pitié tout ce qui leur résiste, changent les étals-majors, réorga-
nisent l'armée; Uugommier les rejoint en janvier 1794 et bîent&l
l'armée ennemie est rejetée en Espagne, où les Français la suivent
et imposent la paix h l'Espagne, A Perpignan, cependant, c'esl d'abord
la Terreur, avec toutes ses abominations, puis la réaction thermido-
rienne, le maximum, la disette, la dépréciation des assignats, enfin
tous les maux qui marquent presque partout en b^rance cette ter-
e époque. Dans le Iroisième volume, l'auLeur nous montro l'anar-
he directoriale, jouant à la bascule avec les parLis et laissant la
noce aller à vau-l'eau; cfaa<)ue coup d'élat de Paris a son coutre-
Up en prorince; de toutes ces agitations naît cette lassitude qui
ivail cire le meilleur auxiliaire de Bonaparte et de sa bande au
?8 Brumaire. M. Torreilles ne couclut pas, malgré l'engagement pris
par lui-même dans la préfacei pout-êiro a-t-il mieux fait en elfel de
s'alistoitir; les faits qu'U nous rapporte porlent leur enseignement
avec eux, et il est peut-être plus simple de laisser au lecteur le soin de
conclure. L'histoire de la Révolution, ainsi étudiée dans le détail et
AUT un terrain étroit, perd un peu, avouons-lo, de sa grandeur épique,
0 réduit le plus souvent soit à l'action aveugle de la masse popu-
hire eo mouvement, soit à de misérables haines personnelles. Mnjor
m tonginquo reverenCia.
A. MOLnlLS.
HISTOIRE MODERNE,
Uarie-Thérèse Rodet, née en 4699 d'un ancien valet de la garde-
de la dauphine, devenu « commissaire-contrûleur-juré-mouleur
bois de la ville de Paris, » ne semblait assurément promise à
!une royauté ni à l'honneur de frayer un jour avec les RomanolT
et les Habsbourg. Orpheline do bonne heure, elle fut élevée par sa
grand'mère Ghemineau, type accompli de la bourgeoise parisienne,
intelligente, économe et légèrement dévote. Un matin qu'à Saint-
Rocb, ■ en cornetle très plate, en minée et légère siamoise, jolie
comme un ange, » la petite Rodel, pour lors âjjée de quatorze ans,
■ joignait au pied des autels les plus belles menottes du monde, d
— c'est Uiderot qui parle, — un bourgeois de quarante-huit ans,
veuf, grisonnant et ridé, mais enrichi par ses « parts » dans la
manufacture de glaces de Sainl-Gobain, la vit, la désira, la demanda
en mariage, Tobtint sans difficulté et l'épousa le 15 juillet 1713.
A seize ans, la jeune femme donnait le jour à une lllle, la future
marquise de la Ferté-Imbault; un au plus lard naquit un fils qui ne
Ici se termine sa vie de famille; grâce à la dévotion
ieuse de son épouse et à son tempérament placide, M. Geolfrin'
Il la bonne fortune d'échapper auï accidents qu'eût pu faire craindre
un mariage aussi disproportionné que le sien; il ne se < tira pas
plus mal que bien d'autres de remploi toujours difficile de mari
d'une femme célèbre. » Après avoir essajé d'abord de regimber
coDlre le gouvernement absolu de sa moitié, il poussa jusqu'à quatre-
marq
Ëuil
■iei
lia
II* 1. £ff lloV<""'te lie la rue Sainf-Bonarë. Madame Geoffrin
j^^Ham de Ségur. ParU, Calmunn Livy, IS^IT, VI, 503 p. m-S°,
10 fille. p.-ir
c portrait.
420 BULLETI?! HISTORIQUE.
vingt-trois ans, intendant résigné, puis zélé de la partie matérielle
de ses dîners célèbres, peu remarqué d^ailleurs par les convives de
son hôtel. Plusieurs mois après son décès, un des habitués de
H""* Geoffrin lui demandait par hasard : « Qu*est donc devenu ce
vieux monsieur, qui était toujours au bout de la table et qui ne
disait jamais rien? » — « fi'était mon mari, répondit^lle sèche-
ment; il est mort. »
L^oralson funèbre était quelque peu froide pour un homme qui
lui laissait tant de milliers de livres à distribuer à ses chers hommes
de lettres. Gomment d'ailleurs la petite bourgeoise était-elle devenue
la « reine ou l'une des reines au moins de la société littéraire pari-
sienne? » Ce fut une voisine, M""* de Tencin, cette dévergondée
sans cœur et de beaucoup d'esprit, qui forma la jeune dévote aux
façons du grand monde et lui fît entrevoir les premiers philosophes.
Elle Tadmil ensuite dans son propre salon, et, quand elle mourut, ce
fut M""® Geoffrin qui recueillit sa succession littéraire et régna sur
un peuple soumis pendant près de trente ans. La « nouvelle reine
de Saba, » comme l'appelait Voltaire, a-t-elle réellement exercé sur
son entourage une influence aussi profonde que Taffirment certains
de ses admirateurs* ? On jugera sans doute un peu différemment de
cette activité mondaine et littéraire de M"** Geoffrin, selon qu'on se
range parmi les hommes du monde, amateurs de l'esprit qui brille
aux mille facettes des causeries de salon^ ou parmi ceux, moins bien
doués ou plus austères, qui croient le silence du cabinet de travail
plus propice au développement de la science et de la philosophie.
De nos jours, en tout cas^ la presse remplace avantageusement, et à
moins de frais, les salons littéraires du xviir siècle, pour la mise en
circulation des idées nouvelles, en leur donnant, il est vrai, une
enveloppe plus vulgaire, mais en les répandant avec une rapidité et
une puissance autrement redoutables. En défînitive, tous les philo-
sophes et les révolutionnaires en chambre qui tiraient leurs brillants
feux d'artiflce devant les comtes et les barons polonais, anglais,
russes et allemands, tout en dégustant les crus choisis du vieux
Geoffrin, ne sont pas bien dangereux pour le pouvoir absolu^.
Mais, quoi qu'on pense de leur rôle et de celui de leur « reine, »
il est impossible de ne pas prendre un plaisir extrême à la façon dont
on vient de nous raconter son histoire intime et leur ménage com-
mun. Le livre de M. de Ségur, riche en détails nouveaux, empruntés
1. Ce qui est certain, c'est qu'elle ne lisait pas les auteurs, pas même les
siens. Le catalogue de sa bibliothèque contient quelques grammaires, quelques
recueils d'Ana, le Sopha de Crébillon, mais pas un philosophe.
2. Disons d'ailleurs que M"' Geoffrin ne voulut jamais permettre qu'on ftt
de la politique chez elle; cela l'eanuyalt.
I FUNCE. i 2l
aux papiers de la marquiae ilo la Ferlé-Imbaull, eal écrit d'une
^Dlume alerte et spiriluelle, avec une compétence indiscutable, et pré-
^^taote c« cbarme particulier aux biographies qui font valoir l'impor-
^^■Doe de leur héros sans jamais l'exagérer, et dont l'auteur s'est
^BiSservé le droit d'en sourire parfois discrètement lui-même. C'est
moins peut-être dans les chapitres consacrés plus particulièrement à
M*' Geoffrin que cet art du narrateur se feil sentir. La reine de la
rue Saint-Honoré reste, en définitive, toujours un peu trop bour-
geoise (comme elle mendie la visite de Joseph II I), un peu trop com-
passée, un peu solennelle; ainsi, dans son voyage de Pologne, auprès
de son ■ fils adoptif, " le roi Stanislas-Auguste. Sa philosophie n'est
pas bon teint, et sur la fin de ses jours elle revient, presque aveugle,
aux pratiques dévoles de son enftince, proférant, à la grande colère
(le tl'Alemberl, la lecture de V Imitation à celle de Y Encyclopédie. Ce
n'est pas pour cette raison, bien entendu, mais il est certain que
c'est moins Marie-Thérèse I", qui est l'héroïne du livre de M. de
Ségur, que Marie-Thérèse II, et que la bonne BeUe-Minelte est
Rlrônée par le capricieux Beau-Matou; assurément, les chapitres
nsacrés à la fille de M'°" Geoffrin sont les plus curieux de l'ou-
^. Une vérilalile toquée, d'ailleurs, que cette marquise de la
rté-Imbault, la fondatrice de l'ordre dos Lantureîus, auquel ont
appartenu Tempereur Paul 1"' de Russie et le prince Henri de Prusse,
N'" de Staël et le conventionnel Le Pelletier-Sainl-Kargeau. KHe était
l'amie du vieux roi Stanislas Lecrinski, qui lui avouait candidement
que sa femme et sa (llle étaient i les deux reines les plus ennuyeuses
qu'il eût jamais rencontrées; n elle était aussi Tamie du cardinal de
Bemis, qui l'appelait Rimilièrement Toinette. Mais, bien qu'elle sou-
pàt sans scrupule avec M"" de Pompadour, c'était une fort honnête
femme, qui mordit jusqu'au sang lo prince de Conli, un jour que
cette altesse lui réclamait un baiser. Seulement, malgré tout son
esprit, la pauvre marquise ne savait que faire pour mettre en fuite
l'ennui, ce mal inexorable qui ronge toute la haute société d'alors.
Toujours effarée dans son oisiveté, toujours surexcitée, M°" de la
t'crté-lrabault s'effondre et reste anéantie quand éclate la Révolu-
lion, > quand Paris n'est plus Paris et la cour n'est plus la cour. ■>
Adieu les folies gaknles du temps passé, alors qu'elle faisait danser
le cardinal de la Rochefoucauld ou l'archevêque de Narbonne dans
les salons de l'hôtel de Luynes, et que, pour l'égayer, l'aimable car-
dinal de Tavannes déguisait ses valets en 'prêtres et les lui présen-
tait comme ses grands vicaires! La llllc s'éteint dans la peur et la
mélancolie, en mai I79t, comme la mère, treize ans auparavant,
s'était éteinte dans la dévotion, rapidement oubliée par les plus assi-
L. vives. Ces deux Uns de vie jettent une ombre un peu
422 BULLBTm HISTOfilQUE.
lugubre sur le tableau si spirituel et si vivant de M. de Ségur; elles
nous donnent la note élégiaque flnale sur un ordre de choses qui
s'en va, sur cette société élégante et frivole qui creusa si gaiement la
fosse où elle allait s'ensevelir, entraînant dans sa chute la reine des
Tuileries, comme celles des boudoirs et des salons.
C'est dans la sphère d'activité d'un autre monarque, un peu plus
autoritaire que la bonne M""* GeofTrin, que nous introduit le volume
de M. Tabbé Le Sueur ^ sur Maupertuis. C'est essentiellement un fxi
recueil de pièces inédites, tirées des archives du château d'Estouilly, ^^
dans le département de la Somme, et mises à la disposition de Tédi- — â\
teur par leur propriétaire actuel, M. le comte de Vaudrimey-d'Es- <e3
touilly, qui les tient en héritage des La Gondaminc. Elles avaient été »-St
parcourues déjà par La Bcaumelle pour sa vie de Maupertuis, msûs ^ Si
il n'en avait fait copier que la correspondance du président de l'Aca-
démie de Berlin avec Frédéric II, correspondance mise au jour par
son arrière-neveu, M. Maurice Angliviel de la Beaumelle, en 4854. - ^
Le recueil s'ouvre par une introduction de quatre-vingt-trois pages, « -€:£
où Maupertuis est impartialement apprécié, sans qu'on y dissimule ^M \
le moins du monde son despotisme scientiflque, sa vanité, sa crainte ^J I
du ridicule et sa misanthropie; on y trouve aussi le croquis réussi i^«:
de ses principaux correspondants : La Beaumelle, Tressan, etc., , - *
et Ton peut croire, en général, que les victimes des sarcasmes et des
vengeances souvent mesquines de Voltaire ont dû, à ces persécu-
tions mémos, les jugements très équitables de M. l'abbé Le Sueur. ."Xi
Quant aux documents réunis ici, ils sont de valeur fort inégale. On mtm Ci
n'y trouve guère du roi de Prusse que quelques apostilles à des ^^^c
rapports et à des placets de Maupertuis-, on reconnaîtra çà et là le^-E '
coup de griffe du moqueur couronné. Nous apprenons par contre à
connaître Kœnig, le modeste savant, qui refuse de sacriOer les
droits de la science et ses convictions personnelles, et préfère le res* *
pect pour Leibnitz mort à l'appui de Maupertuis vivant; des lettres^
d'Ëuler, de Hallcr, du président Hénault, il n'y a pas grand'chose ài& ^
dire. En revanche on parcourra, non sans plaisir, les lettres amu — MiM u
santés et dévotieuses écrites par La Beaumelle de Paris, du Vigan. .ctm^ Jin,
de Nîmes et de Montpellier-, il y entretient son patron de ses tra-
vaux littéraires, de ses projets de mariage, voire même de
amours ancillaires, et lui dépeint la vie de province sur un ton
fois assez cynique. On trouvera là quelques tableautins de la v ^^^r/e
languedocienne d'alors assez réussis. Les lettres du comte de Tj
1. Maupertuis et ses correspondants. Lettres inédites du grand Frédéric, da
prince Henri de Prusse, de la Beaumelle, du président Hénault, etc., pir
M. l'abbé A. Le Sueur. Paris, Picard, 1897, 1 vol. In-S*.
m
nient un intérêt analogue; la silhouelLe de ce lieulenanl géné-
;prit, quémandeur infatigable de dignités académiques et
autres, aniidéricnl prononcé, comme on dirait aujourd'hui, se retrace,
pour ainâi dire, d'elle-même dans ces effusions, presque naïves, d'un
fbrveat philosophe, au(|uel aa chienne Flora tient plus à cœur que
terlains prochains qui me paraissent bien plus hétérogènes à mon
ice que cette jolie petite créature. > Malheureusement l'éditeur
commis bien des erreurs dans la lecture de ses documents, pour
ce qui regarde les noms propres, et n'a pas toujours compris ce qu'il
copiait' . t'.erlaines données dans les notes soûl erronées ou témoignent
d'une inattention singulière de l'annotateur, trop pressé de terminer
jjÉtÂcbe'.
■Xies Mémoires du général marquis de Maleyssie, mis au jour par
K. RosESTi^, tiennent une place à part parmi les souvenirs person-
nels relatifs à la Bévolulion et à l'Empire, qui surgissent chaque
jour plus nombreux. Ce n'est ni un homme d^Ëlat ni un chef mili-
taire que ce jeune sous-lieutenant dont on vient de déterrer les
â la Bibliothèque royale de Turin ; ou ne trouvera dans ses
loirei ni révélations inattendues ni vues profondes, et moins
ire une appréciation impartiale des événements dont il fut le
imoin. M. de Maleyssie n'était ni en position de les voir de bien
haut ni de les juger avec calme; mais les récits de ce jeune émigré,
imbu de tous les préjugés de sa caste, de toutes les illusions de son
i|e, se lisent néanmoins avec plaisir et présentent un véritable intc-
1. C'est «intî, — pour ne citer que (luelqnes exemples, — que le nom de
" de rAtrfm«j«r est écrit successive m en l Fuimayrtn, Fulmater et ToiUmar.
I trouve Horbadi au lieu de ttonbach, Chol:.emiUa ponr Ckotuiils, Zornor-
ff juniT ZondorlJ; Fermée pour Fermor, Koenilgrats pour Koenigxgraiitt,
fn/du |>our Kanluiu, clc. — A la pwe 250, il Tanl lire " 6lé son honneur a
peur • été ton, tionneur; ■ p. 350, le prétendant Jacques
pr/iUent; p. 319, le céKbre physicit
QQe contractloo hardie, Hoane,
!. M. Le Sueur sait a«surément que c'est Soobise et non le maréchal de
Richelieu {p. 337) qui Tut baltu à llDSiiliacb. Il aurait pu s'épargner aussi d'écrire
que I l'eat boudas me dea pralestanli de Nîmes pour le roi proteslaat Frédéric
donne la triste roeaure. de leur patriotisme, i car il ne saurait ignorer que la
_toot et la lille cbansonnèrenl Soubise après sa défaite el qu'on raffolait, à
t à Versailles (où il n'y avait guère d'hérétiques], du philoiophe
^roBDé. Il édite lui-même des lettres de Tressan (p. 3!0) et de l'abbé de
iiiUtc (p. 386), pleines du même enlbousiaame. — Il sait sans doute aussi
» et n'est pas i la guerre de Trente aja qui Cl Taloir le génie vaste de Fré-
■ - • [p. ISG).
I. Oénérat marqua de Haleysiie. Mêmoiret d'un officier aux gardes fran-
B (1789-1793), publiés par U. G. Roberti, professeur A l'Académie militaire
fc Tarin. Pari», Pion, Nourrit el C-, 1807, 1 vol. in-8-, porirnil.
424 BULLETI?r HISTORIQUE.
rêt à Thistoire. Leur accent de grande franchise, la vivacité des
impressions du moment, fldèlemenl rendue, maint petit détail qui
trahit Tobservateur attentif des hommes et des choses inspirent
confiance. On se sent en présence d^un narrateur qui ne raconte que
ce qu'il a vu, qui n'af^rme que ce qu'il sait, sans broder et sans
farder sciemment la vérité. Les violences de langage et de pensée
elles-mêmes contribuent à nous mieux faire sentir la flèvre de ces
temps révolutionnaires, et Ton peut glaner dans ces pages d^un
auteur obscur plus d^un trait nouveau pour Thistoîre du grand
drame militaire de 4792 à 4793 et pour celle des intrigues de Témi-
gralion de Coblence. Antoine-Charles-Marie-Anne de Tardîeu, comte,
puis marquis de Maleyssie, né en 4764, n*avait que vingt-cinq ans
au moment où commence la lutte entre la royauté et la nation.
Sous-lieutenant aux gardes françaises, il avait aidé, dès Tannée pré-
cédente, à l'arrestation d'Espréménil et de Montsabert; il n'aurait
pas mieux demandé que d'étouffer aussi le soulèvement du 44 juillet;
il croit même assez naïvement qu'il eût réussi si ses chefs avaient
eu quelque courage et si ses soldats étaient restés fidèles^; mais,
abandonné par eux^ il fut arrêté et presque écharpé dans les couloirs
de rhôtel de ville. Réfugié en province, il reprend du service sous
Bouille, assiste à la répression des troubles de Nancy, en août 4790,
et flnit par émigrer en juin 4794. Nous le rencontrons d'abord à
Luxembourg comme aide de camp do Klinglin, puis il est envoyé
avec deux collègues dans le midi de la France pour examiner les
chances d'une insurrection royaliste dans ces parages^; il part sous
le déguisement d'un garçon chirurgien et revient à travers mille
dangers à Coblence, où il reprend son service d'informations sur la
frontière au profit de l'armée des princes et de celle des alliés. Son
récit s^arrête après Valmy; c^est probablement quelques mois plus
tard, durant l'hiver de 4792-93, qu'il fut écrit. S'il a continué de
servir en Allemagne, puis en Angleterre, aux Pays-Bas, à Saint-
Domingue et au Portugal jusqu'en 4804, M. de Maleyssie n*a plus
rien noté de ses aventures subséquentes. Revenu en France en 4802,
il refusa de servir Tempercur et ne rentra dans l'armée qu'à la
seconde restauration; mais, frappé de paralysie, il est retraité comme
maréchal de camp dès 4820 et meurt, trente ans plus tard, le
44 novembre 4854.
1. ( Aujourd'hui même, je sais convainca que, si le dimanche on m*eût fiut
marcher avec mon artillerie, j'aurais pu tirer sur le peuple, le dissiper et san-
yer la monarchie. »
2. 11 signale avec colère l'enthousiasme général des protestants de ces régions
pour le mouvement révolutionnaire (p. 261).
I3S
bn peut négliger ses colères aveugles contre Lafayetlo, « manne-
1 révolutionnaire qu'on ne remuait qu'à force de ressorts étran-
fiere, » ou contre Necker, ce s ministre hypocrite et perfide, » qui
avait Tait à Montmartre n un assemblage immense de bandits de
toutes les provinces. » Mais ou croira sur parole le fervent royaliste
quand il nous dépeint l'incurable incapacité, l'aveuglement inouï de
ce monde des émigrés massés sur les frontières de leur patrie, leurs
fanfaronnades et leur indiscipline, s Le luxe, le jeu, la débauche,
]câ intrigues, les sottises, t'égoisme, la mauvaise foi y (à Coblence)
régnaient avec autant d'empire que dans n'importe quelle cour d'Eu-
rope. Les femmes conduisaient tout, et ceUes qui conduisaient, éloi-
gnées elles-mêmes du chemin de la vertu, ne pouvaient qu'égarer. =
Il s'arrête pourtant dans ses descriptions : « Le tableau serait trop
noir, il faudrait dévoiler trop d'horreurs, o Sur difTérents autres
pointa (les journées d'Octobre, le procès de Favras, l'alTaire de
Nancy, etc.) l'on trouvera dans les Mémoires de Maleyssie des indi-
cations utiles; par contre, son récit de la fuite de Varennes (à laquelle
il n'assista pas) n'apporte aucun détail nouveau.
C'est par un tout autre côté que nous abordons le drame révolu-
tionnaire dans le substantiel volume de M. Georges Mocssom, con-
sacré au conventionnel Hyacinthe Richand'. C'est presque un écrit
de circonstance; mais on n'a pas besoin d'être natif de Versaillea
pour s'intéresser am destinées de ce parfait honnête homme, auquel
on va dresser un monument dans sa ville adoptive, et qui eut dans
sa modeste existence un jour d'honneur, un bel élan de courage
civique, et, grâce à lui, ses entrées dans i'histoire. Né en 1757, dans
nu village du Dauphiné, Hyacinthe Richaud, après avoir été clerc de
notaire à Chalon-sur-Saône, était employé dans le commerce de draps
(te son oncle, à Versailles, au moment où s'ouvre l'époque révolu-
tionnaire. Il entre dans la vie publique, en juin (790, comme con-
seiller du district, et, en novembre 1791, il est élu maire de la ville.
Il rélait encore an moment où Claude Fournier, l'Américain, avec
dos volontaires parisiens et marseillais, entraînait vers l'ancienne
résidence royale et vers la mort les accusés de la haute cour d'Or-
léans, le duc de Brissac, le ministre de Lessart et tant d'autres mal-
heureux. Au milieu du désordre matériel et moral qui paralysait
toutes les énergies, Richaud fut a peu près le seul a faire son devoir,
01 lutta. Jusqu'à l'entier épuisement de ses forces, contre les assas-
sins de la rue de l'Orangerie et de la maison d'arrêt. S'il ne peut
1. Georgei UoUMoir, la CoiWtlUionnel H^aeinlhe Richaad. Paris, Plan,
Noorril «I C". 1897, l vol. in-lS, porirait.
426 BULLSTIN HISTOEIQUE.
empêcher le hideux massacre du 9 septembre, sll tombe évanoui,
couvert du sang des victimes quil couvre de son corps, du moins il
a prolesté jusqu'au boul au nom de Phumanîté et au nom de la loi.
Ses concitoyens^ qui n'avaient osé le seconder ^ le récompensèrent
de son courage en l'élisant, quinze jours plus tard, comme suppléant
à la Convention nationale, et, par une coïncidence curieuse, il y entra
comme titulaire, quand le courageux Kersaint eut donné sa démis-
sion, le 20 janvier 4793, « pour défendre sa mémoire contre le
reproche d^avoir été le complice et le panégyriste des assassinats du
2 septembre. » 11 y siégea « sans laisser aucune trace d'une inter-
vention quelconque dans les affaires publiques, » et, quand la Ter-
reur s'accentue, il cherche à s'éloigner du champ de bataille des par-
tis, sans cependant déserter le service de son pays. Le décret du
49 juillet 4793 l'envoie en mission à Tarmée de la Moselle. Nous le
trouvons dans les rangs des soldats à Ritche, à Sarrebruck, dans le
Palatinat, et, le 44 septembre, il couvrait bravement la retraite de
l'armée à la défaite de Pirmasens. Mais bientôt on le juge trop modéré
dans ses allures, et lui et son collègue Soubrany sont remplacés en
novembre par Lacoste et Baudot. De retour à Paris, quand vint le
9 thermidof, Richaud n'avait rien à se faire pardonner et put agir,
avec d'autant plus de succès, dans le sens de la modération, durant
une mission passablement difficile auprès des Lyonnais affamés.
Reconnaissants, ils le nommèrent député de leur ville au conseil des
Cinq-Cents, où d'ailleurs il ne tint qu^un rôle assez effacé. Commis-
saire du Directoire executif auprès de l'administration de Seine-et-
Oise, en 4798, il se rallia, comme tant d'autres^ au 48 brumaire, et
le premier consul le nomma conseiller de préfecture à Versailles.
Depuis longtemps il avait liquidé sa maison de commerce; il resta
vingt-sept ans dans cette situation relativement modeste, n^ayant
jamais rien demandé, soit par candeur, soit par fierté. Député durant
les Cent Jours, décoré malgré lui par Louis XVIII en 4821 pour
l'acte de courage du 9 septembre 4792, il s'est éteint doucement dans
son domicile de Tavenue de Saint-Cloud, en 4827, entouré du res-
pect et de Testime de tous. Richaud ne fut pas un homme de capa-
cités supérieures, mais un citoyen probe et dévoué, aux mains pures
d'or et de sang, en ces temps de sang et de pillage ; il montra aux
armées son courage militaire, comme beaucoup d'autres, et, dans
l'exercice de sa magistrature, un courage civique qui, trop souvent,
flt défaut aux hommes publics de son temps. M. Moussoir a composé
1. c La population se plaisait à constater qu'elle était restée étrangàre à cet
scènes de carnage, • dit l'auteur. C'était se satisfaire à bon compte.
volume avec beaucoup de soin; il a tiré des archives de Ver-
tes beaucoup de prece.s inédites et réuni tous les renseignements
irabics sur la vie privée de son héros, sur sa carrière adminis-
trative, sur les services rendus par lui duraul l'époque révolution-
naire. Il a raconté la vie de Rîchaud comme il convenait de le faire,
simplement et sans phrases; cela lui a porté bonheur; son livre est
■in bon livre, racontant l'existence d'un homme de bien.
Cent ans avant la Révolution Trançaise, une autre révolution s'opc-
Tait à rextrémité orientale de notre continent, sanglante comme elle,
mais imposée de haut par une volonté souveraine, La Russie du
svm' siècle, le siècle où elle naquit à l'Europe, compte deux puis-
santes Ggures : Pierre I" à son début, Catherine II à son déclin.
Quel que soil d'ailleurs le jugement que l'on porte sur l'homme et
sur la femme, ils ont été les deux facteurs principaux du développe-
meiil de la Russie moderne, les deux créateurs de l'Empire des tsars,
tel qu'il se présente aujourd'hui. Que leur inlluence ait été bienfai-
sante ou nél^le, elle est un fait acquis à l'histoire et qui n'en sau-
rait plus être elTacê. On comprend que les historiens et les romanciers
reviennent toujours à de pareils personnages, auxquels leurs bizar-
reries sauvages et leurs vices privés ont fait une réputation plus
universelle encore que leurs vertus politiques. Après avoir eu un
très grand succès avec ses ouvrages sur (Catherine 11, le Roman d'une
impératrice et Autour d'un trône, M. K. WiUszEwsKi a dû tout
nalurellementétre entraîné à remonter à Pierre le Grand pour peindre
à sou tour ce barbare de génie, initiateur de son peuple à ta civih-
salion européenne, cet « homme unique peut-éire dans l'humanité. »
Il a » voulu faire palpiter dans ces pages l'àme d'un grand homme
et d'un grand peuple, > et, se servant do la littérature la plus récente,
étrangère et nationale, — aussi bien les archives n'ont plus guère de
secrets à nous révéler sur son compte, — il a retracé de Pierre un por-
trait vivant, d'une psycholi^ie très fouillée, dans un langage nerveux
et poétique qui lui vaudra certainement de nouveaux succès auprès
du grand public, el qui est sufQsammenl documenté pour ne pas
déplaire même aux plus savants ' .
L'ouvrage de M. Walisïewski n'est point, à vrai dire, une Histoire
de Pierre le Grand, dans le sens ordinaire de ce mot. Divisé un trois
livres, l'Sducation, r Homme oi l'OEuore, il étudie successivement,
dans une longue série de chapitres, les origines de Pierre, son édu-
t. K. Wallszewski, Pierre le Grand. L'Éducation, l'Homme, l'Œuvre, d'après
des docuDDents noareaai. Paris, Pion, Noarrit el G'*, 1897, 1 vol. gr. in-3',
k
428 BULLBTIlf HISTORIQUV.
cation à Técole du monde civilisé^ sa personnalité physique et morale^- ^
son entourage officiel et intime, ses collaborateurs, ses amis,
favoris et ses favorites. Puis il passe à Tétude de son oeuvre poli-
tique et sociale : la lutte au dehors, contre la Suède et la Turquie,
la lutte au dedans, contre les strélitz, les boyars et le clergé. Il exa-
mine le nouveau régime violemment installé parle tsar sur les débris
des traditions presque orientales du vieil empire, en dépit des pré-
jugés des siens et de l'antipathie de la nation presque tout entière.
Choisis avec discernement, avec un très vif sentiment de Tart dra-
matique, les menus détails groupés par lauteur dans son récit cons-
tituent un tableau des plus pittoresques et des mieux Ikits pour
frapper l'imagination du lecteur; peut-être trouvera-t-on les conclu-
sions du livre un peu flottantes, un peu troubles, j'allais dire un peu
contradictoires. Est-ce, comme on Ta dit déjà, le Polonais vaincu qui
se révolte parfois contre le Russe victorieux, ou cette hésitation, très
légitime à mon avis, ne proviendrait-elle pas plutôt du conflit perpé-
tuel entre l'admiration pour le génie et l'horreur pour la brute,
réunis dans le même homme, entre Tadmiration pour TefTort prodi-
gieux du despote Imposant à tout un peuple une civilisation nou-
velle et la réaction de l'idéalisme occidental, constatant qu'après tout
Pierre n'a pris et compris dans cette civilisation que le côté pure-
ment matériel ?
Peut-ôtrc, pour faire marcher un peuple encore barbare, Ikllait-il
être un barbare soi-même; car il est indéniable qu'il a marché à
pas de géant et (lue, bon gré mal gré, à travers des torrents de sang,
la Russie a dii marcher avec lui. Mais ce mélange de cruauté et de
corruption, ces relents d'alcôve mêlés à ces émanations de boucherie,
qui ont conslituo l'histoire intime de la Russie jusqu^'au début de ce
siècle, c'est à lui aussi, c'est à son exemple qu*il faut les faire remon-
ter, et l'histoire a le droit et le devoir de s'en souvenir. A-t-il vrai-
ment violenté le génie de sa race par sa révolution politique et sociale,
ou n'a-t-ii fait, en déflnitive, que hâter une métamorphose, qui se
serait accomplie, moins brutalement, quelques siècles plus tard?
Qui pourrait résoudre ce problème qui divise encore aujourd'hui les
historiens et les publicistes de son vaste empire ? Ce qui seul parait
certain, c'est qu'il a agi contrairement aux aspirations nationales de
son temps, et que c'est aussi parfois en réformateur inconscient qu'il
a jeté dans le sol natal, d'une main capricieuse, les semences qui
ont germé et fructiflé plus tard. Ce cynique agité, toujours en mou-
vement, s'occupant des moindres détails comme des plus grandes
choses, est une incarnation prodigieuse de l'action du pouvoir absolu
dans le monde; on l'admire, malgré soi, comme une force naturelle
w
«Jécbamce par le sort, mais il n'impose pas le respecl. Il manque â
ce bourreau de sa famille, qui se complail dans la crapule, au milieu
de ses compagnons de débauche, et qui ne craint pas d'asseoir sur
son trône une mie à soldais, il lui manque tout ce qui constitue la
{grandeur morale; je ne saurais découvrir pn lui, pour ma part, ce
■ grand idéaliste i qui rêve d'une Russie, « non seulement capable
de défendre el d'agrandir son patrimoine matériel, mais susceptible
de revendiquer un jour l'héritage spirituel de la Grèce et de l'Italie. >
La liberté de penser et le culte des arls étaient absolument indiffé-
rents à ce recruteur de sous-officiers, do marchands, de matelots et
d'iogénieurs. On ne saurait lui en faire un reproche; il avait une
besogne plus pressée k accomplir. Il l'accomplit, et c'est son excuse
el sou titre de gloire. Mais quand on examine d'un peu près à quel
prix il atteignit le but, pour peu qu'on ait l'àme un peu haute, on
restera toujours en suspens entre l'horreur, l'admiralion et le dégoût.
L'ouvrage de M. André Lbcuï sur les Origines historiques de
l'alliance franco-msse* , évidemment inspiré par les événements
récents de notre histoire contemporaine, n'est pas précisément un
travail d'érudition el n'élève aucune prétention à l'être. Il y aurait
donc quelque Injustice à juger à ce point de vue ces aimables cause-
ries, entrecoupées de digressions nombreuses*, et dont les éléments
sont empruntés à des sources d'importance fort diverse, enumérées
à la (lu du volume, depuis Voltaire jusqu'aux articles des revues
parisiennes de l'année dernière; on y signalerait sans peine des
lacunes fort nombreuses, puisqu'aucun historien de langue étran-
gère n'est admis à y figurer. L'idée du livre elle-même était intéres-
sante : retracer les origines des courants sympathiques actuels qui
portent les Russes et les Français de la fin du xti' siècle les uns vers
les autres et permettent aux politiciens hardis de conjecturer des
modifications plus ou moins profondes sur l'échiquier des États euro-
péens au siècle prochain. Mais il peut sembler bien inutile de remon-
ter pour cela au xr siècle ; le mariage de Henri I" et d'Anne de
Russie, uniquement provoqué par la crainte des censures de l'Ëglise
contre toute alliance matrimoniale à un degré prohibé par elle, est
un fait sans conséquences politiques aucunes. Encore que cette
■ descendante de la vigoureuse lignée des Rurik » ail fait « reverdir
la race des Capétiens, > le tableau presque lyrique de ses amours
1. André Leglaj, lei Originu hisloriquet de l'atUanee franea-rtuse. Pre-
ni^Tt) térie. Paris. CLiim|>i<>D, 1897, ! rnl. in-lS.
'î. Par exemple sur Aago, l'armaUur die|)poi«, sur Boi».Robert, sur lu» ori-
giiiM d« |J presse frannaUe, cic.
Bbv. Hihtob. LXVL 1" F*ac. 9
430 BULLETIII HISTOEIQUB.
avec Raoul de Créquy forme un épilogue assez inattendu à œti
existence de reine « se confinant dans ses devoirs d'épouse et
mère. » II faut descendre ensuite jusqu^à la fin du m* siècle poi
retrouver, non pas des relations politiques entre les deux natiou
mais un simple négociant français vendant ses marchandises au po:
d'Archangel. L'arrangement commercial de 4 587 n'eut aucune poi
politique et ne pouvait en avoir, et, cent ans plus tard, la Ru
restait pour nous une contrée barbare. Les quelques relations qcz
en parlent se lisaient comme nous lisons aujourd'hui les descripUo;
de la cour du sultan du Maroc ou du roi de Népaul, et quels qi
soient les éloges donnés par l'auteur au tsar Alexis le Paisible, qi
< aux qualités de cœur joignait celles de Tesprit, » je pense
Louis XIV aurait été vivement choqué d*un parallèle tracé entre l
et le grand-duc de Moscovie, coiffé de sa tiare mongole, bordée
zibeline. Aussi bien toutes les ambassades de boyars et de diaks
vinrent alors à Saint-Germain ou à Versailles, — les plus coom
sont celles de 4668 et de 4684, — n'aboutireut-elles pas à des
tats pratiques. Si Potemkine eut Thonneur de voir Molière lui offri
des confitures et de passer en revue le régiment de Monsieur à Mi
treuil, il ne rapportait à son maitre que < les formules babltuell
de politesse, » ainsi que Fauteur le reconnaît lui-même; et eneoi
en 4684, le roi refusait catégoriquement toute alliance avec le tsar
M. Leglay s'est arrêté naturellement, avec de longs détails, sur
séjour de Pierre le Grand à Paris en 4746, et c'est là surtout que
disposition des esprits à Theure présente a le plus singulière!
influé sur l'optique de notre historien^. Il trouverait sans peine
les mémoires contemporains les correctifs nécessaires à son engoui
ment pour le terrible visiteur du petit Louis XV, qu'il dépeint avi
des nuances inûnlmeut trop modernes^. Le présent volume s'
1. A |»ropo9 des négociations de 1687, M. L. a confonda Jean-Baptiste
berty mort depuis longtemps, avec son frère Charles Golbert de CroUsy.
"î. Ce tsar, qui éprouve la plus vive satisfaction t à vivre de la vie ioteUi
tuelle et artistique • de la capitale, ne ressemble guère ao bérot des
plus que bizarres dont le souverain et sa suite donnèrent le spectacle à Pi
et à Versailles, et qui montrèrent leur barbarie naUve de la façon la plus
cutable.
3. Quand Pierre exprime par exemple à la eonr de Frédérie-GoUUome
Prusse le désir d'avoir des enfants comme celui-ci, M. L. s'apitoie : c Que
mélancolie dans cette i^irople pbrase du souverain qui n*avait pas été heurea
dans ses enfants ! • Ce lyrisme parait hors de saison quand on songe que l'ai
née suivante il lit |»érir sous le knoal le lils qu'il avait. — M. L. sait anad qu
Catherine l'* t avait un culte pour tout ce qui loaehalt à soa épom diéri
Téaérê. » 11 fera bien de lire dans le volume de M. WalisMwtki par
orgies elle prouvait sa c vénération > pour son défont cpoox.
&t] traité d'Amsterdam, signé le 4 5 août -1717, qui ne contient guère,
'1 est vrai, que des généralités, mais n'en est pas moins un acte
'diplomatique sérieux, — le premier, — entre les deux couronnes.
M. Leglaj est également l'auteur d'une plaquette inspirée sans
Iiloule par l'insurrection crétoise actuelle et parl'interïenlion plus ou
Wrins efficace des grandes puissances dans cette ile'. 11 nous y
Ktrïce le tableau des dernières luttes que les Vénitiens aux abois
soutinrent contre les soldats de Mohammed IV, derrière les murs
délabrés de Candie, de (668 à 1669, et celui du secours, malheu-
reusement inutile, que vint leur porter le marquis de Ville avec un
Irillanl cortège de volontaires français, les ducs de Beaufort, de la
f'euillade, de Navailles et bien d'autres. C'est d'après la correspon-
ffanoe diplomatique de l'ambassadeur de France à Venise, Pierre de
Honsy, évèque de Béziers, que M. Leglay raconte cet épisode de la
dernière croisade chrétienne, qui fit alors grand bruit en Europe,
comme le siège d'Ostende au début du siècle, ou comme celui de
Brisach trente ans auparavant. L'auteur ne s'est guère occupé que
du rôle joué par les Français dans la défense de la place, jusqu'au
moment où leurs querelles incessantes avec le général Morosini les
engagèrent à quitter la partie, départ qui amena bien vile la reddi-
tion de la ville aux troupes du sultan, et leur vnlut de violents
reprocbea, assez peu mérités d'ailleurs, de la part de leurs alliés
d'un jour. II aurait fallu peut-être, pour se montrer absolument
impartial, tenir un peu plus compte de la littérature italienne et
^Irangère du temps, très abondante sur ces faits de guerre un peu
oubliés de nos jours, mais illustrés par les beaux coups d'épée de la
jeune noblesse française, et au milieu desquels disparut, après une
™ t>ien inutile, le petit-fils de Henri IV et de la belle Gabrielle.
La. correspondance du roi Stanislas-Auguste avec son conseiller et
McréLaire intime Maurice Glayre, tirée par M. Eugène Motriz des
areiiî-ves de la famille de Lerber â Romainmôtier, nous fait assister
^ '^ i^nle agonie de la république de Pologne pendant les vingt der-
Dierei;^ aiioées, si troublées, de sa lamentable existence*. Klle ne
•^•"tirend pas seulement les lettres du monarque et celles du jeune
<an4i^J3t en théologie vaudois, qui se voit soudain promu apprenti
dtplcfc»^ate par un caprice du sort et ministre plénipotentiaire de son
™'*-»~« a Saint- Pèle rsbourg, dans sa vingt-quatrième année. On y
'• -^«idré Urinj, Une iniervealion en CrèU (1668-1669). Paris, Champion,
'3^. brochure in-IS. (Exlrdt de la Reeue d'htiloire diplomatique.)
^ ^«ig«ne HoIUje, StanisUa Poniùlowikl tt Maurice Glayre, c4)iTeBpondance
"^*v«aui partages de la Pologne. Paris, Calmann Uvy, 1897, 1 toI. iu-lS,
4S2
BIILLITIII HiaTDKtQm.
trouve encore une partie de la correspondaDcc de Stanislas avec les
successeurs de Glabre, ses agents ofîlcieux auprès du cabinet de Ver-
sailles, le général de Monel el le comLe Branicki, correspoadance
éijalement déchilTrée par le Jeuuo professeur d'hisloiro au coll^
d'Yverdon. On pourrait désirer que l'éditeur eût été un peu moins
BObre de renaeiguemeuls biographiques sur son héros. Son introduc-
tion ne nous apprend pas même rannée de la naissance de Glajrre
ni la date exacte de son entrée au service de Sa Majesté polonaise.
Elle nous oriente suffisamment sur le r&le joué par le jeune conseiller
intime à Varsovie elsur ses missions diplomatiques en France (1771-
17S8), mais on ne serait pas Htché iVy trouver quelques renseigne-
ments supplémentaires sur la seconde partie, fort dissemblable, de
sa carrière politique. En elTel , Glayre, après dii ans d'une vie calme
au pays natal. Tut saisi par la tourmente révolutionnaire qui boule-
versa la vieille organisation des Treize Cantons; il s'associa au sou-
lèvement de ses compatriotes vaudois contre le gouvernement de
Berne, ûgura parmi les membres du Directoire belvélique el repré-
senta plus tard la Suisse au congrès du Lunéville. Puis il rentra daus
sa retraite et mourut à Lausanne en 1X19,
Sa correspondance nouâ le Tait connaître sous un jour très fhvo-
rable, comme un conseiller intelligent et bonnêle de son malheureux
et débonnaire souverain. Ce n'était d'ailleurs pas l'intelligence qui
manquaità Stanislas-Auguste', mais plutôt Ténergie du caractère;
mais quelle forcené se serait changée en faiblesse devant trois adver-
saires solidement liés par une même convoitise, comme l'étaieot
Catherine, Marie- Thérèse et Frédéric II, alors qu'il ne trouvait contre
eux aucun appui ? La politique française restait profondément indif-
férente et le duc d'Aiguillon disait, dès 1772, à Branicki ; « Que
voulez-vous qu'on fasse pour vous autres? Vous ne pouvez rien par
vous-mêmes, le roi de France est fort éloigné. Il faut détacher la
Russie, et c'est ce que le roi de Polognedoil faire par ses inHuences. ■
Stanislas était bien du même avis. Il disait à Monet, en 1778 : a Us
vœux ardents de tous les bons Polonais sont de voir agir de concert
la Russie el la France... Au reste, mon système ne change point;
je me tiens à la Russie et je désire beaucoup qu'elle se réunisse à la
France. » Mais il n'avait, hélas ! plus aucune iniluence a la cour de
Catherine, qui n'était pas femme à rêver longtemps à ses amours
d'anlan. Encore en nsT, Glayre proposait au roi de demander à
t, Pour t'en uonfainere, on n'a qu'A lire le tableau remarquable de la sitat-
tion inlérieure et etUrieure de la Pologne qu'il relrace i la veille da premier
partage, dans m lellre i Hoaet du 7 octobre I77'2.
<S3
rir
h
><np«raLrice un de ses pcLiLs-fiIs comme successeur, en garantissant
^iresleà ia Pologne une aulonomie complète. C'est un long mémoire,
'^ont il Taut lire les déductions très curieuses et dont les indications,
'Balisées à temps, et sans arrière-pensée des deui parts, eussent con-
juré peut-être la crise fetale et douloureuse prévue partout le monde.
^ le 26 mai 1788, Glayre écrivait de Paris à son souverain : « U
"e Taut point se faire illusion; telle est la position de la Pologne que
sa restauration ne peut être l'ouvrago do ia prudence humaine. Elle
appartient à ce genre d'événements où la Providence aime à interve-
nir avec ce de;;rè d'évidence qui ne permet pas de la méconnaître*, n
ifais la Providence, on le sait, ne jugea point à propos d'intervenir
W la république succomba. Le volume se termine sur cette lettre
Pressée à Glajre par la princesse Lubomirska : « Oui, la voilà
''énouée celte malheureuse tragédie polonaise, mais par quelle
affreuse catastrophe! Le roi est parti, sans espérance de retour...
^fîn tout est fini, il n'y a plus de Pologne. Il ne nous reste que des
'*K«*et8 inutiles, des souvenirs déchirants et le désespoir ! »
Rod. Rëoss.
'*.-5. — Un mot de notre dernier Bulletin a pu laisser à nos lec-
*^Vip-s une impre&sfon erronée. Noua avons parlé du manuscrit de
Poésies inédites de Marguerite de Navarre que M. A. Lefranc a publié
• er» majeure partie; » nous aurions dû dire « presque intégrale-
"*eia i, B car les quelques pièces qu'il a laissées de coté comptent peu
^ côté des 12,000 vers inédits dont il a enrichi l'héritage littéraire de
1^ r-eine de Navarre. Aucun de nos lecteurs d'ailleurs, après avoir lu
•^^ «rue j'ai écrit (LXI, 92) sur la publication de M. Lefranc, n'a pu
penser que je n'en appréciais pas le juste prix, ni que je jugeais ses
Quelques omissions aussi graves que l'oubli total, commis par les
P>'é<ï«dents éditeurs des Poésies de Marguerite, du manuscrit publié
f**^ lui- G. M.
1 - Iliïloriqiiiïment p«rlanl, la piËce la plus inléreseanle du Tolume est peul-
^*'*'^ ia loDgne lettre dii roJ i Glayre [21 juin 1791), dans laquelle il lui expose
"^nt^ïslea inlrÎRues de la Diète, sa position douloureuse entre les partis; ou y
f**^*>d tnr le TÎf sa faiblesse, &es incertitudes perpétuelles, son optimisme naïf,
lut luj f^t croire qu'il pourra toujours réclamer contre Catherine i le casus
. /*«<*«rij auprès de notre allié le roi de Prusse, t
434 BOLLSTlff HISTOUQUB.
BELGIQUE.
4886-4895.
(Suite et /in*,)
NAifua. — Nous devons mettre hors de pair Touvrage de M. Ro-
LA3(D, Orchimont et ses fiefs^. C'est un modèle à suivre pour ceux
qui s'occupent d^hisloire locale. EnQn, nous citerons aussi le volu-
mineux travail de M. G. Lamotte sur le Comté de Rochefort ^.
Histoire u.^iterselle. — Nous n'avons à citer sous cette rubrique
qu'un seul ouvrage; empressons-nous de dire qu'il est excellenL
M. L Leclère a voulu, dans son Histoire générale ^^ mettre en relief
les faits capitaux de l'histoire, en montrer sous une forme concise
les causes, les conséquences, la Ûiiation, esquisser à larges trails le
tableau des formes successives de la civilisation, dégager des fkits
que fournit Thistoire le sens de sa marche et les résultats obtenus à
la fin de chaque grande période. Il a mené à bonne fln ce délicat tra-
vail de synthèse.
HisToiEE DE L'OaiEifT. — L'Unlvcrsité de Louvain est depuis de
longues années un centre important d'études orientales. Nous rele-
vons dans la longue liste de ses récentes publications d'abord une
série de travaux dus à un savant aussi renommé comme sinologue
que comme indianiste, M. Ch. de Harlez : Nuc-Tchiset Mandchoux^;
la Religion nationale des Tartares orientaux mandchoux comparée à
la religion des anciens Chinois^; l'Histoire de l'empire de Kin au
Empire d'or''^ traduit du mandchoux; Le plus ancien rituel de la
Chine ^; puis surtout deux ouvrages où les critiques les plus compé-
tents se plaisent à reconnaître une érudition immense : les Religions
1. Voir Revue Mstoriqve, LXV, p. 135.
1. Annales de l Académie d^archéoloçie de Belgique, XLVn-XLVIlI.
3. Namar, Delraux, 1893, 600 p.
4. Bruxelles, Rosez, 1894, 259 p.
5. Paris, Leroux, 1888, 32 p.
6. Bruxelles, Ilayez, 1888, 216 p.
7. Louvain, Peelers, 1889, 288 p.
8. Paris, Leroux, 1889, 44 p.
d« la CAine, aperçu historique et critique ' , et le Liire des esprits
«des immortels, essai de mythologie chinoise'. M. J.-B. Abbeloos,
recleur de l'Université de Louvaio, a publié les actes de Mar Karda-
ghi ', gouverneur de province sous Sapor H. Son livre est une con-
tribution imporUinle à l'histoire de l'Église d'Orient sous les Sassa-
nidcs. \u iiii* siècle, un prêtre neslorien d'origine chinoise, qui
devint archevêque de Pékio et patriarche de Bagdad, provoqua une
véritAble renaissance du Christianisme dans la Haute-Asie, il rentra
dans la communion romaine et prépara une espèce de croisade contre
l'Islam. M. T. Ltsr a publié la biographie de ce personnage, qui est
une véritable révélation'. M. k. Viit KoomcKeB, dans son étude sur
SVéhémie et Esdras, avait proposé pour les événements rapportés
dans le livre de Néhèmie et dans les chapitres vu à i d'Esdras un
systèmechronologiquequi ruine toutes les hjpothèaes tma;;inées jus-
qu'ici pour justi lier la chronologie traditionnelle. M. KDE.'(E?i''a com-
battu en Taveur de celle dernière. M. Van lloonacker lui a répondu
par une nouvelle dissertation : Né/iémie en l'an 30 d'Artaxenès l";
Esdras en l'a» 7 d'Arlaxersès //*. 11 s'est également livré à des
reeberches chronologiques sur les événements révélés par les six pre-
miers chapitres du livre d'Esdras,el il dérend la valeur historique de
ce livre avec beaucoup d'érudition'. t^nRn, poursuivant ses éludes
critiques sur la Bible, M. Van Hoonacker discute la question des
sacriUces humains dans l'Ancien Testament ". Le P. Delattre a exposé
les progrès réalisés dans le domaine de l'assyriologie depuis 1878
Jusqu'à 1889, en ce qui concerne la découverte et la publication des
textes ainsi que les travaux de philologie". Nous lui devons aussi un
Braïf
1. LeipriR, Gerhard, I89Î, 270 p.
?. Uémourei île l'Académie royale de Belgique, coll. in-t', LI, tiré k part.
Bral<>llM, Ua^ez, 192 p. — Voy. aussi \' Infanticiiie en Chint d'après tesdocu-
elUnoU. LuQTain, Peelers, IS93, 46 p.
Ada Mar Kardaghi. mazbani, sab Sapore II martgrtt, Syriace nunc pri-
juxta codicem ecelesUe S. Pethionta in Diarbettr, et latina édita.
[elles, Schepens, 1890, S25 p.
4. Job-AlaKa ou une page de l'histoire du. Pleslonanism*, au XllJ' siècle,
IMU les Mongolt. Bruiellei, Schepens, 1889, 24 p.
5. Chronologie tan lut persische tydvak derjoodsche geschiedenis [Mémoires
de VAcadémie des Pays-Bas, 1890).
e. Gand. Engelcke, ISUt, 01 p.
7. Chronologie des six premiers chapitres du livre d'Etdras. Gand, Eo^telclie,
I. 118 p.
le Vœu de Jephlé. Étade sur le chapllre xr du livre des luges, euivie
notiu sur Ézéchiei, X\, 25-26. Louvain, Istas, 1892, 173 p.
L'ÀStyriologie depuis onte ans. Paris, Leroux, 1891, 122 p.
■DU
mémoire inléreasant sur les Travaux hydrauliques en Babylonie*.
M. L. DELiHTSBEtiKE 3 anal^sé et discuté louLes les inrormaLions que
fouraissenl sur les Hittites' la Bible, lus documents égypUens, asg-
riens et les monumeuls hittites eux-mêmes. Sous le pseudonyme de
L. DB LA GjLnnE de Died, uo écrivain doué d'un véritable talent litté-
raire, m<iisquj suit en histoire une méthode quelque peu TanUiisisIe,
a présenté une synthèse de X'Uisloire de l'hlamisme et de l'empire
ottoman '. 11 insiste sur les événements des quarante dernières années
et prophétise la solution de la question d'Orient par le démembre-
ment définitif de la Turquie à la suite d'une guerre générale où la
ï^rance et la Russie défendront la Porte contre l'assaut de la triple-
alliance. M. Victor Ghacth a Tait œuvre à la fois d'historien, de phi-
lologue et de juriste dans une dissertation sur le crime, analogue au
/Sauvai» gré, propre aux peuplades arabes, qu'on appelle le scopé-
lisme*.
Histoire dd hote^ ige. — H. G. Kchtd est l'auteur d'une puia-
sante synthèse sur les Origines de la cioilimfion moderne". Après
avoir déterminé les caractères des trois facteurs qui vunl former le
monde nouveau, c'est-à-dire l'empire romain, le monde germanique
et l'Église, il montre leur action réciproque, leurs vicissitudes et les
transformations sociales qui se succèdeul jusqu'à ravènemoDt de
Charlemagne. Se plaçant à un point de vue très élevé, il aborde les
plus diritciles problèmes de la vie sociale, reli^jieuse et politique de
l'humanité. On lui a reproché d'avoir produit surtout une œuvre apo-
logétique, de méconnaître le caraclèrc complexe de la civilisation, de
ne pas tenir compte de l'influence exercée par l'hellénisme, de juger
Byzance avec trop de sévérité, de négliger les antécédents juifs du
christianisme, enQn d'exagérer la grandeur du rôle de Charlemagne,
dont l'œuvre fut si éphémère. Ces critiques sont fondées dans une
certaine mesure, mais on ne pourrait sans injustice nier la haute
valeur de l'ouvrage considéré dans son ensemble. C'est en même
temps, chose assez rare en Belgique, un livre d'un réel mérite litté-
raire. Il y a tels chapitres, par exemple celui que M. Kurth consacre
à l'élude du monde germanique, qui charmeront les lettrés autant
qu'ils satisferont les érudils.
1. Beeutila Queitioni tcien.ti/i'iua, XXIII, I8S3.
2. De la race el du la langue de» HttUles. Mémoire prÉscnlé an second con-
grès scienlinque intemalional Jes catimliques, tenu i Paria au mois d'avril 18tH> |
Bruxelles, GoAinaere, 132 p.
3. Bruxelles, Schepens, 1893, 278 p.
4. Bulletin de l Académie royale de Balgiqwe, 3' série, XXUI, 1S99J
5. LooTiin, Peetere, ISB6, 2 tqI., 387, 37S p.; 2' édil., I8SS, 380, i '
Dom Be&liIbe a fait paraître une étude sur les Origines du mona-
fhisme et la critique moderne^. M. L. Vi^ dke KnDEiiE a étudié la
* miatuTa » dans les textes francs^ ; il discute [es hypothèses émisea
par Pltbou, Waitz, Tbonissen, elc.,el conclul que la • dilatura »
TeprésGQle le >i lucrum cessaus. <> Le travail de M. Sehesia sur l'époque
frajique' est un bon livre de vulgarisation ; il n'apporte aucun Tait ni
3ucun point de vue nouveau. M. G. Kdbth a démontré que la plupart
des historiens exagèrent l'importance du rôle joué par Pierre l'Ermite
à la. première croisade. Le véritable et unique inspirateur de la guerre
Sainte fut le pape Urbain 11, et Pierre ne fut que son actif collabora-
teur'. Nous devons à M. L. Leclère deux excellentes dissertations
qui témoignent d'un esprit hautement scientilique et d'une parfàile
cou naissance des méthodes de recherche et de critique. La première
tot. consacrée à l'Élection du pape Clément V^; l'autre, plus impor-
'aiiti;, traite des Rapports de la papauté et de la France sous Phi-
''>>^3B /// (1270-1 285|, d'après un grand nombre de documents ori-
gi«^Eiui, dont plusieurs inédits*. Même après le livre de M. Langlois
si"-»~ Philippe m, le travail de M. Leclère conserve toute sa valeur.
ITemps hooerkes. — L'ouvrage le plus étendu que nous ajons à
'■i^ «itionner est rflisïoire mo(/erne du baron de BLiliGKiBr-SuBLKT'.
■'*"S*-Kheureusemenl, il n'a aucune valeur; c'est une compilation faite
®^k:*s méthode, sans ordre, encombrée de digressions fatigantes et
^^^«~lte de la manière la plus incorrecte. La notice de M. V. Bhahts sur
-^^^^■an Bichardot^, rédigée d'après des documents Inédits, nous fait
*^o *~» naître des particularités curieuses au sujet de la création des rap-
ï*** *~ls diplomatiques entre le Saint-Siège et les Pays-Bas au xvi" siècle.
^'■^^«js nous bornerons à rappeler les deux grands ouvrages consacrés
^- -^(ïarie Stuart par MM. Kervïi de Lettenqoïe* et M. Philipfson '",
^^ -^ttime historique en ayant rendu compte d'une manière détaillée.
"■- - Htwe bénédictine, XI, 1894.
^S — Mémoirtj dt l'Académie roi/ale ils Belgique. colL ia-S', X.LI, tiré è pari.
^■"^^Jxelles, Hayei, 188«, 56 p.
■^^ - Ltglise et l'État sous Its rois francs au Vf Oèete. Gand, Vuristeke,
*^-S, 153 p. \KtTk en staai onder de frankixhe Koniagen der Vf eeuv.]
**- - fierre fEnnile. Liège, Demarleiiu. 1892, \1i p.
_ ^* — Annaletittia Faculté de philosophie el Mires de t' Oniveriité de Bruxellet,
■ ^*rniellei, Weissembruch, 1889.
^ _ Bruxelles, Umertin, 1891, 140 p.
"^ - Liège, Demarteau, 1880-1892, 5 vol., 315, 381, 352, 264, 315 p.
^- LouToia, Istan, 1891, 25 p,
^^ - Marie Sluarl; l'amere purilaiiw: le procès; le supptice, 1585-1587.
^**~"i, Perrin, 188U, i ïoI., 460, jJ6 p. — Voj, flevue hlitorique, XLll, îlOj
*■— • 11, 103.
"^ C aui. du rigtu de Marie Stuarl. Paris, BouiUon, 1891, 3 t., 344, 408, 530 p.
4BS BULLETIN HISTOEIQUV.
M. DE ViLLERMONT a accumulé une grande abondance de documral
pour réhabiliter les acteurs catholiques de la guerre de Trente ans^
Il accepte sans discussion tous les témoignages qui servent sa
et dans le nombre il en est de passablement suspects. Son œuvre
peu sérieuse. H. de Bdeexstam a rédigé une espèce de journal di
séjour que la reine Christine de Suède fit dans les Pays-Bas ' ; il a
recours aux archives suédoises, hollandaises, espagnoles, italieniiec::sss=
et belges. Nous y trouvons des renseignements très neufs sur les rela -
Uons de la reine avec Pimentel, sur sa conversion par les Jésuites, er^
sur rintérèt qu'elle portait à la guerre franco-espagnole. M. de Vil^
LERMO!<rr a condensé en deux volumes les faits les plus importants Au
règne de Marie-Thérèse^ d'après le grand ouvrage du chevalier
A. d'Arneth. Il expose d'une manière assez piquante les contradic-
tions du caractère de l'impératrice et explique clairement les compli*
cations de la politique extérieure. Les réformes introduites en matière
religieuse font l'objet de vives critiques et Fauteur ne dissimule pas
ses préférences pour l'ancien régime. L'abbé Jehin, le fameux cory-
phée du mouvement révolutionnaire au pays de Franchimont, séjourna
à Paris pendant les années 4793-4794. Il notait chaque jour les évé-
nements dont il était le spectateur. M. Bodt a publié cet intéressant
journal de voyage*. Le P. Vax Duerm* a tâché d'éclaircir l'histoire
assez obscure des débuts du pontiûcat de Pie VII.
Histoire coxiemporâine. — Le général Viif dee Smissex *, qui fut
le chef vaillant et distingué du corps belge au Mexique, a retracé avec
beaucoup de clarté et de précision non seulement ses souvenirs de
campagne, mais aussi les tristes péripéties du court et malheureux
règne de l'empereur Maximilien. Il complète les ouvrages du colonel
Loizillon et de M. Gaulot, il pourra servir à les rectifler, notamment
en ce qui concerne la conduite de Bazaine. Le grand mérite de M. Van
der Smissen consiste en ce qu'il n'avance rien sans fournir immédia-
tement les preuves péremptoires de son dire. Le colonel de Schetn-
mâëkers^ a traité le même sujet avec plus de détails.
1. TUly ou la guerre de Trente ans. Bruges, Desclée, 1887, 437 p.
2. La reine Christine de Suède à Anvers et à Bruxelles en 1654-1655.
Bruxelles, Vromant, 168 p.
3. Bruges, Desclée, 1895, 432, 436 p.
4. Le Carnet de Cabbë Jehin à Paris (Bulletin de Vlnstitut arehéoiogiçue
liégeois, XXU, 1894).
5. Un peu plus de lumière sur le conclave de Venise et sur le commence-
ment du pontificat de Pie VIL Louvain, Peeters, 1895, 700 p.
6. Souvenirs du Mexique, 1864-1867. Bruxelles, Lebègue, 1892, 232 p.
7. Le Mexique. Histoire de l'établissement et de la chute de l'empire de
MaximUien. Bruxelles, Gastaigne, 1890, 358 p.
BELAian-
Woici trois ouvrages écrrls de manière à se Faire lire sans TaLigue,
. la défense de convicLioiis , d'ailleurs respeclahles, y tieut
beaucoup plus de place que le souci de l'biskiire. Nous voulons parler
d'abord de la Lulti^ de l'Irlande', de M. Kebtin ok Voluersoeee,
oii des antipathies politiques el religieuses se maaifeslenl souvent
hors de propos. Le P. V*n Ddehm espose en un gros volume, avec
UDQ précision et une clarté louables, les VicmitutUn du pouvoir
temporel des papes depuis uh siècle^. Il cite beaucoup de pièces im-
portantes, mais il a une tendance fâcheuse à passer sous silence les
faits qui ne concordent pas avec sa thèse. A le lire, on pourrait croire
que l'adminislration pontificale a toujours été impeccable, et <|ue ses
adversaires ont toujours fait preuve du la plus noire duplicité, Le
P. Van Uuerm n'a pas pu faire usage des documenta publiés récem-
ment par k baron Rlanc sur les événements de septembre 1870^;
s'il les avait connus, peut-être aurait-il retouché Ie3 derniers chapitres
de son livre et modiDé certaines de ses conclusions. UUistoire du
Calturkampf en Suisse*, de M. Ch. Woeste, présente un puissant
ialérél; le récit est vivant, il y a beaucoup de recherches et de ren-
seignements dont l'historien fera son profit, mais il ne perdra pas de
vue qu'il se trouve devant une apologie el une œuvre de propagande.
Les obàcrvalions pénélranles faites par E. de LiVELEvs au cours de
ses voyages en Croatie, eu Bosniu, en Serbie, en Bulgarie, etc., et
qu'il avait condensées dans la Péniimule des Balkans'^, présentent
autant d'intérêt pour l'historien que pour l'économisle ou pour
l'homme politique.
Histoire LiTTÊaiiUE. — L'Histoire poétique des Slérovingistu^, de
M. (j- KuBTfl, a fait l'objet d'un compte-rendu détaillé qui a paru id
même'. Nous nous bornerons donc à citer pour mémoire ce beau
livre < plein d'idées, plein do choses, très intéressant, très instructif, *
qui a obtenu récemment le grand prix quinquennal du gouvernement
belge. D'autres ouvrages d'bistoire littéraire mérilenl des éloges : les
Études morales el lilléraires de feu L. de MoMce" ; les traités d'His-
kBrugM, Deaclée, IS9I, 384 p.
Ibid., 180U, 156 p.
Taj. F. Carry, le Vatican et le Quirinat daoa U Correspondant àa
tO dtcembre 1895.
4. BniielleB, V»n den Broeck, 1887, Î80 p.
5. Broielles, Fnik, 1SS8, 2 vol., 300, 435 )i.
6. Paris, Picard, IB'.JS, 552 p.
1. Afime hitijirique, LU, 32â-323.
fi. Louvain, Peeters. IS87, 430 p.
440 BOLLBTIIf HISTOaiQUB.
toire de la littérature française de MM. GoFFlRT^ Pergame^' c
Stibr^^et^; le Wallon, histoire et littérature des origines à 4789*
par M. M. Wilmotte; enfin le travail magistral de feu Félix NivESui
V Arménie chrétienne et sa littérature^.
Biographies. — Le baron P. de ïIaulleyille a réuni en dei
volumes* une série de portraits de contemporains célèbres,
d'un crayon alerte et délicat, qui ont paru, les uns dans le Corres
pondant j d'autres dans la Revue générale. Tour à tour, Napoléon III
Pie IX, Thicrs, le roi Guillaume III des Pays-Bas, Lacordaire, Mon—
talembert, des écrivains, des artistes, des hommes d'État défilen
devant nous, et sont l'objet d'ingénieuses observations et d'une ana —
lyse psychologique souvent pénétrante. Les appréciations de récri—
vain sont parfois inQuencées plus que de raison par les principes di»
l'homme politique, mais il est en général soucieux de l'équité, et Toi
doit rendre hommage à l'élévation de ses vues.
Histoire religieuse. — M. E. Goblet d'Alvielu a bit paraître un^
remarquable Introduction à l'histoire des religions''^ résumé d'à
cours ^it à l'Université de Bruxelles. C'est également le précis d
ses leçons que M. le chanoine Liagrb, professeur au grand séminal
de Tournai, nous a donné dans son Essai sur la philosophie de Phis^
toire au point de vue catholique^. M. J. Fredeeichs a présenté
cours pratique de M. P. Fredericq, à Gand, une dissertation excel«-
lente sur Robert le Bougre, premier inquisiteur général en France^
La critique des sources est particulièrement bien soignée-, Tauteus
discute les travaux de Holder Egger, de Waitz, de Lea, et termine par
les utiles Regestes de l'Inquisiteur. Dom G. Vax Galoeh a
l'intéressante carrière de Dom Maur Wolter et les origines de la eon
grégation l)énédictine de l'abbaye de Beuron^^j si intimement liée ^
l'histoire religieuse et littéraire de la France. M. H. ScHUBuiAifs, pi
mier président de la cour d'appel de Liège, a rompu une lance ei
faveur des légistes contre les canonistes, et déployé beaucoup d'éru
1. Histoire de la littérature française depuis ses origines Jusqu'à nosf
Namur, Wesmael, 1889, 547 p.
2. Bruxelles, Mayolez, 1889, 669 p.
3. La Littérature française au XVII* siècle. Braxelles, Schepens, 18S7, 357
4. BruxclleB, Rosez, 1893, 160 p.
5. Louvain, Peeters, 1886, 403 p.
6. Portraits et silhouettes. Bruxelles, Lacomblez, 1892-1893, 2 vol., 327, 359
7. Bruxelles, Muquardt, 1886, 176 p.
8. Tournai, Decalonne, 1892, 157 p.
9. Recueil de travaux publiés par la Faculté de philosophie et lettres
V Université de Gand, VI. Gand, Engelcke, 1892.
10. Bruges, Desclée, 1891, 132 p.
I
BBLGigilB. m
ditîon pour établir l'authenlîcilé dd h Pragmatique nanction de sainl
Louis '. Il a égalenietiL étudié le rùle d'Amijol au cnncilf de Trente.*.
M. Vkhki^debën a abordé uo sujet peu explore, les relations deClirîs-
lopbe Colomb avec les Franciscains^, M. Edmond Picahd * est à la fois
tin brillant littérateur et un des maîtres du barre^iu belge; il s'est
avenLuré sar le terrain de l'hisloire religieuse, et a Irailé diverses
questions qui se ratlaclient à l'antisémitisme. L'éminent adversaire
des Jtiirs sait donner un puissant intérêt à tous les sujets qu'il traite;
mais il alTectionne le paradoxe, et soutient, nolammunt en matière
d'etli nographie et d'histoire biblique, des tlièses plus que contes-
tables ; son argumentation révèle trop souvent le défeul de prépara-
tion spéciale, et il a ainsi donné beau jeu aux critiques'. Auxatlaques
conLre les JuiTs, M. L. EsKEBia répondu par la poignante description
de Pétat misérable de ses coreligionnaires cruellement persécutés en
Russie", La colonisation du Congo par les Belges a été l'occasion pour
le P. EccHEH de faire paraître un curieux Essai sur l'histoire reli-
gie^tae du Congo depuis sa découverte, en USi, jusqu'à nos jours''.
Nous pouvons aussi raltacber â rfaisloire religieuse l'imporlanle
pa±>Ii«alion liturgique de Dom G. Moaix, Anecdota Maredsolana, /,
Litter comieus sii'e Lectionarius mïssx quo Tolelana Ecclesia ante
t^nnoi mille et ducenlos utebalur*.
HisToiiE ér,o\on[QCE, — L'étude précise et délaillée qu'E. de Lite-
••KïB a consacrée aux Formes primitives de la propriété' esl une
(Buvre d'bistorien autant que d'économiste. L'éminenl écrivain nous
"aonLre la propriété d'abord confuse entre les groupes et ne devenant
indi -V iduiMle et héréditaire que plus tard, dans la mesure où la cul-
ture devient plus intensive. M, V. Bbants nous présente une analyse
t'es "théories économiques au XIII" et au XI V' siècle '*. Nous j Irou-
'■ -e«/jiçue ;titfjc(0tre, 1890.
^- -Mitvne de Belgique. 1831.
.^- ^2hnitùff^ Colomb ; syn; betrekkingen met de Franeiseanen. Gand, Sifler,
* - ■'SgiUltèse de fanlisëmitiime. Bniielles, Larcier, 1893, 3Î3 p. — Voj. ausii
.^^•*~<6u/(mi ù la recUion des origines du chriitiatUsme. BruiellM, Honnom,
5.
55 p.
^oy. A. Delalire, le Cerveau picaresque. Bruxelles, Schepens, 1897, Î76 p.
^ **^ une attaque savante et apirituelle, mais qui dégénère soureol en tioleoce»
**»aoïals goûl.
^- Uf Juifs russes. Bruxelles, Huquardt, 1893, 184 p.
' - Baj, CbarpenUer, 1895, 264 p.
*- Bruges, Desclée, 1893, gr. iD-4-, 463 p.
^. Paris, Alcao, 1894. 4- édil.. 562 p.
^0. LouTaia, Peelers, 1895, 279 p.
I4Ï BïïtLKTTB KISTORIQDR.
vooB beaucoup de détails inédils sur la propriété, la Ihéorie de la
valeur et des échanges, le travail el l'organisation industrielle, les
échanges et la circulation des biens, la population, elr. Le beau livre
d« M. R. Ni9, professeur à l'Université de Bruxelles, sur les Ort£rin«
du droit international* semble, à première vue, destiné aux seuls
juristes. Les historiens en rolireront cependant le plus grand rniit.
Nous signalerons, entre autres, les suggestifs chapitres sur la
papauté et l'empire, la guerre et la diplomatid,
RiSToiBE HiLiTiiRE. — Un anonyme a résumé avec une préd^on
et une clarté irréprochables les Campagnes de t7'J6 el I7'J7 en Italie
et en Allemagne^, d'après les travaux de Jomini, en profitant de tous
les ouvrages qui ont paru depuis. C'est une œuvre de très haute
valeur. Les expéditions du duc de Mariborough en Belgique exer-
cèrent une inHuence considérable sur la politi()ue générale de l'Eu-
rope; il suflit de rappeler Ramillii.<s, Audenarde el Malplaquet. Do
nouvel exposé do ces campagnes a été Tait d'une manière très vivante
parH°"E. LAGaincE^; il est malheureusement déparé par des erreurs
graves, notamment en ce qui concerne la constitution des Pays-Baa.
ËTHiOGBiFHiE. — M. J. Sodpfret' a voulu démoDtrcr qu'il Rmt
chercher le principe Tondamental de la diversité des civiUsations dans
la disparité originelle et indélébile des caractères dislinctifs des races.
Ses arguments sont souvent ingénieux, mais la partie historique de
son livre est empruntée avec trop de conlïance à des travaux surao-
nés. MM. J. FsAipn^ et M. Lboest ont publié le résultat de leurs
recherches sur la Bace humaine de Neanderthal ou de Camtadt m
Belgique *.
AttcHiSotoGiB. — MM. Henri et Louis SrasT, à la suite de fouilles
faites par eux de 1881 àl8S7,ont fait paraître sur les Premier» (Ij«
du métal dans le sud-est de l'Espagne^ un important ouvrage qui a
obtenu en I^spagne un prix de 20,000 francs. Feu H. le professeur
P. J. Van Beneden en a écrit la prefttce, et M. le D' Jacques j a joint
une élude ethnologique. M. le comte E. Goslet d'Alvielu^ a réuni
el refondu les essais qu'il a publiés dans le Bulletin de l'Académie
royale de Belgique et dans la Bévue des Deux-Mondes. Il recherche
1. Pari», Thorin, 1894, 414 p.
1. BrDielles, Uoqnardt, 1889, 447 p.
3. I.e Duc de Marlborough en Belgique. BruiclleB, Hayei, 1893, .180 p.
4. De la disparue phi/tique et mentale des race* humaines et de ses f
eipet. Uatines, Godenne, 1891. 322 p.
5. Oand, Van der Poorlen, 1888, I&5 p.
6. LoDTiiin, Peelers, 1S8S, 433 p. în-fol,
7. La Migration des symbolei. Parii, Leroox, 1891, 3f3 p.
comment certains symboles religieux se sonl transmis de peuple a
peuple cl dans quelle me>siire leur signification et leur forme ont pu
se modifier au cours de leur migration. Au commcnr^ment de notre
ère, la religion de Mithra, originaire de Perse, envahit l'Europe et
parut une rivale redoutable du Christianisme. Reprenant les travaux
de L^jard sur ce curieux phénomène religieux, et les complétant par
dos recherches persfmuelles poursuivies dans toute l'étendue euro-
péenne de l'empire romain, M. Cifhokt a commencé la publication
d'un ouvrage considérable sur les Textes et inonumenls /igurés rela-
tifs aux mystères de Milltra'. Ea 1891 a paru la cinquième édition
(le l'ouvrage de feu le chanoine de Bleser sur Rome et ses monu-
ments *.
ÉpicHiPHtE. — La science épigraphique s'est enrichie de plusieurs
prodoclions importantes dues à M. J.-P. W^i.tzi»g, professeur à
rUoiversîlé de Lii^e : le Recueil général des iiucripUons latines et
f^pigrapkie latine depuis cinquante ans^; rÉpiçraphiect leneorpo-
rations professionnelles de l'empire romain \ et surtout YÊiude his-
torique sur les corporations professionnelles chez les Itoinains depuis
'*» origines jusqu'à la chute de l'empire d'Occident", couronnée par
''Académie.
GéoGKAFBiE. — Parmi les nombreux ouvrages qu'a fait naître la
***loiiisation du Congo par le roi Lcopold H, nous signalerons comme
parlicuJièremenl importants la Vie en Afrique^, de M. J. Becker;
■>«r ic Haut-Congo'', par M. J. Goqviibat, al \ea lettres sur le Congo",
P*^ M. Ed. DcpOfïT. Le livre de M. Max Rooses, Op reis naor heinde
^^ t>er', contient d'intéressantes notices sur les monuments et les
5^**T«s d'art de l'Espagne, de l'Angleterre, de l'Allemagne, de la
****Uande, des pajs Scandinaves et de la Russie. Nous devons men-
^•*t»er aussi plusieurs livres de voyages oii l'histoire tient quelque
"**<»: ceux de M. J. ht.cLt&cti, Du Caucase aux monts Ala'i*"; Voyage
tnont Ararat** ■,ùe}A.^.Viùi^b, El Maghreb al Ahsa, Une mis-
«i«
^- Brniellea, Uroertin, 1394-1395, in-l*, 3 fuBcicules paras, Mb p.
^. Re»ufl par Uarucctii et Roger. LouTain, Poalejn, 2 vol,, 540, 161
^. LonTain, Peeters, 1892, 156 p.
'^. Gand, Sifler, 1892, 133 p.
^. Untaiii, Peelers, 1895, 2 vol., 5Î8, 553 p.
^ Bruielle». Lebigue, 1887, 2 Tot., 5DU, 528 p.
*>. Paris, Ubèguc, 1838, 535 p.
%. Paris, ReiDWuld^ 1889, 724 p.
Qtai, Qosle, tS8!), 2M p.
I. Paris, Pion, |g9U, 270 p.
. fliid.. 1892, 319 p,
444 BULLBTIFf HISTORIQUE.
sion belge au Maroc * ; de M. E. db Gbootb, Islande^; du P. G. G&ocri^
NB11BBRGHS, le Mexique^ ^ où l'on trouvera un important chapitre su ^
l'empire de Maximilien. Le même voyageur nous a décrit les Étais- "^
Unis*. Le Bulletin consulaire^ contient de nombreuses monogra — -
phles, œuvres de nos diplomates et de nos consuls, qui envisagent,
surtout les questions économiques.
Il nous reste à signaler dans ce domaine une étude de géographie
militaire, à laquelle les spécialistes ont fiait un accueil très favorable»
la France par rapport à l'Allemagne^, par le colonel d'état-major
Pent, commandant TÉcole de guerre de Bruxelles.
Bibliographie. — M. E. Bâcha a essayé de fkciliter les recherches
des travailleurs par une énumération rationnelle des Bibliographies
méthodiques"^. Les BoUandistes ont dressé le catalogue des manus-
crits hagiographiques de la bibliothèque royale de Bruxelles". M. Y.
CHADViPr a commencé la publication d'une Bibliographie des ouvrages
arabes ou relatifs aux Arabes publiés dans l'Europe chrétienne de
i8i0ài885\
Chbonologie. — M. Cb. LAGRiNGEest l'auteur d'un mémoire Sur la
concordance qui existe entre la loi historique de Brikk, la chrono^
logie de la Bible j et celle de la grande pyramide de CheopSj avec une
interprétation nouvelle du plan prophétique de la RévélatUm^^. Ge
travail a été très vivement attaqué dans le tome XIII des Analeeta
bollandiana,
Eug. Hubert.
1. firaxelles, Lacomblez, 1893, 430 p.
2. Paris, 1889, 327 p.
3. Ibid., Delhomme et Brigaet, 1893, 420 p.
4. Ibid., 2 vol., 392, 372 p.
5. Bruxelles, Weissembruch.
6. Paris, Alcan, 1887, 375 p.
7. Bruxelles, 1892, 83 p.
8. Catalogus codicum hagiographicorum BibUothecx regUe BruxêUensit.
Bruxelles, Polleunis, 1890, 2 vol., 600, 650 p.
9. Liège, Vaillant, 1892, 72 p.
10. Bruxelles, Hayez, 1893, 228 p.
ALLEMAGNE.
l'OQUË MODERNE,
L'historiographie allemande n'a produit, dans le cours de 1896,
ri^n de bien saisissant ni de magistral pour l'époque moderne, mais
un grand nombre de bons et ulileâ ouvrages dont je voudrais carac-
téi-5ser ici les plus importants. Il est vrai que le fait le plus intéres-
s^Ei t de l'année passée, la lutte entre les Kullurhistoriker, repré-
s^ïr^tcs surtout par M. Lahf&ecdt, de Leipzig, et les faistoriens
f>o£- iliques, a été si bien exposé par M. Pirensb dans cette Revue
(msii-juin 1897) que je n'ai pas à y revenir.
Il..es causes du déclin économique tle l'Ës|)agne pendant le ivi* siècle
orst Été étudiées de nouveau parM. Maurice-Jules Boxn'. Son ouvrage,
qu î est en grande partie destiné à combattre les travaux antérieurs
d^ 2il. HiEULEB, prouve que t'énorine hausse des prix en Espagne,
jxyEsilanl les règnes de Charles-Quiut et de Philippe II, n'a pas été
a-cnenée par l'afllux des métaux précieux d'Amérique, mais par le peu
d^ jiroduction industrielle dans le pajs même; et que les causes de
ce déclin du travail national étaient la paresse du peuple, la sévère
■"é^lementation par la bureaucratie et la pression énorme exercée par
l'itrapol. Quoique l'étude de M, Bonn ne soit pas tout à fait com-
ï»l«ï tj;, elle est fondée sur des bases raisonnables et sérieuses et marque
ui:i "véritable progrés dans la question dont elle traite.
ÎVI. KtEDLEK lui-même a dirigé ses recherches vers les relations
économiques de l'Allemagne avec la péninsule ibérique; il nous
«ti feii connaître maintenant une partie : l'Histoire des affaires de
*■»■ naisoD allemande des Fugger en Espagne', Ge travail, bien
I*'**3 mûri que les publications antérieures du même auteur, est
principalement puisé aux riches archives de la famille princiére
«es Pugger. D'une manière aussi authentique qu'intéressante, il
•***us montre le développement surprenant de celle grande maison
^c commerce qui, d'une médiocrité de petits bourgeois, s'est élevée
^ Une imporUince européenne, jusqu'au moment où les terribles
L
i. JahrkmutertM.
'- 0(e Gachichie lier Fuggerschen /landlung (SocialgeichiehtUche For-
"^^^^Hçen. herauag. »on Baner cl Hartmann, ?(.l, I). Weimnr, Feller, 1897.
Kbv. II18TOB. LXVI. 1"
iU BCLLETin BISTOUIQIIB.
désordres de la guerre de Trente ans anoanlirenl, sinon ses ricbesses,
au moins son aclivilé commerciale. Nous voyons les Fugger, pen-
dant le xTi* siècle, être les banquiers principaux du roi catholique el
des premiers personnages de l'F.spagne, ainsi que les Termiers des
grandes mines de raercuii! d'Almaden. Ce n'est qu'en (640 que la
mauvaise Toi du gouvernemeul espagnol, la débâcle de son immense
empire et les malheurs de la grande guerre forcèrent les Fugger a
liquider leurs affaires en Espagne.
M. Richard lÎDBE^iBERr., bien connu par ses recherches sur les reia>
lions économiques de l'Allemagne avec l'Angleterre pendant le
ivi' siècle, traite d'une manière plus vaste que M. Haebler de
l'époque des Fugger'. Sous ce titre, il nous donne une histoire du
capital mobilier et des formes du crédit public et privé pendant le
ïïi' et la première moitié du nvii" siècle. Cet ouvrage, en deux
volumes, est écrit d'après des recherches à la fois très étendues et
fort minutieuses dans les archives les plus diverses de l'Europe, a
l'exception de celles de rFspagne. 11 est vrai que le séjour de Siman-
cas est fait pour décourager le chercheur le plus intrépide. La lillê-
ralure imprimée est également mise à profit avec une très vaste éru-
dition, quant aux livres spéciaux; la littérature historique générale,
au contraire, est un peu négligée. C'est une des causes qui ont amené
M. Ehrenberg â exagérer l'influence des motifs matériels, aux
dépens des motifs politiques, rehgieux et sociaux, selon la mode de
l'école historique la plus récente. Mais cette tendance, d'ailleurs
facile à reconnaître el partant à rectifier, n'empêche pas le travail
de M. Rhrenherg d'être d'une utilité très grande et d'une impor-
tance capitale pour l'histoire économique de l'époque de la Réforme.
Le développement merveilleux de la puissance Hnancière des grandes
maisons do commerce de l'Allemagne méridionale aussi bien que des
Géoois nous est exposé sur la foi des documents authentiques, aJoat
que leur déclin dA à l'injustice et à la rapacité brutale des rois qui
les avaient fait servir aux liesoins de leur politique. Nous assistons
au fonctionnement surprenant des grandes bouries de Lyon et d'An-
vers, et nous les voyons disparaître au profit de celles d'Amsterdam
et de Francfort. Les terribles crises pécuniaires de celle époque ont
exercé des ravages bien plus durables cl plus pernicieux que les faits
semblables de la période actuelle. Quelque soucieux qu'il soit du
détail, M. l'^hrenberg n'y reste jamais attaché et nous élève toujours
aux hauteurs des grandes considérations politiques et économiqi
Bref, c'est un travail très considérable.
1. Doi ZeUaitar ifcr Fusger, 2 vol. Jtna, Fischer.
iuraieiTE. 447
De l'histoire économique du iTt* siècle, nous arrivons à son mou-
'ement religieux. Le père jésuite OtLo BRiuKSBBAGEit nous montre un
'les héros de la conlre-Réforme, te jésuite Pierre Canisius, par la
Collection de ses lettres et actes'. Canisius fut le premier Germain
<]uî devint membre de la jeune Compagnie, en 1543. Ce fut surtout
hi qui organisa les provinces allemandes de l'ordre, qui encouragea
/e roi Ferdinand et les princes calholiques à la lutl« contre l'hérésie,
qui écrivit des livres, — particulièrement son fameux Catéchisme, —
Aussi importants pour l'Église que ceux de Luther pour les protes-
tants. En outre, il entretenait une immense correspondance que
M. Braunshcrger publie pour la première fois en entier, autant qu'il
fa reste. L'éditeur a mis en réquisition plus de 260 archives et
bibliothèques ave« une ardeur et une patience réellement admi-
'a.bles, et il publie ses trouvailles nombreuses avec une science qu'il
feiit hautement reconnaître. Sa connaissance de la littérature rela-
tive à son sujet est très vaste, et il la met à profil avec la plus
gra.Mde impartialité. La correspondance de Canisius est en effet fort
u*ï Fkorlanle, non seulement pour sa propre biographie et pour l'his-
**>«n« de l'ordre des jésuites, mais encore pour l'histoire de l'Église,
*te l'Université de Cologne et de l'Allomagne occidentale et méridio-
nale. En dehors des lettres de iM\ à 1556, ce premier volume con-
*-*en t encore une édition de l'autobiographie de Canisius, — incom-
plète, d'ailleurs, — et ses JUonumenCa, c'est-à-dire les passages des
s<3iarces contemporaines, oii Canisius est mentionné. Ainsi, le père
BrîM-unsberger coalribue d'une manière eicellente a la vaste œuvre
tïîslorique que son ordre vient d'entreprendre dans différents pays.
E^ts face de l'hoslihté que la Compagnie rencontre de tant de côtés,
"rten ne saurait lui être plus utile que de dévoiler au public les
Sources mêmes de son histoire, pour le mettre à même de juger en
parfaite connaissance de cause.
O'est un liislorien laïque, M. Jos. Hlisen, archiviste de la ville de
Cologne, bien connu comme éditeur de documents, qui nous donne
les Actes des jésuites de Cologne, de Mayence et de "Trêves, jusqu'à
Is constitution définitive de ces trois collèges de la Compagnie^.
^ actes sont très importants pour l'histoire, soit de la Compa-
iS"*^ elle-même, soit, dans un sens plus large, des affaires
'^fiïeuses de l'Allemagne. Il est regrettable que cette publica*
'• Astttri Pétri Canitii, Soeietatis Jesu. Epùtuiae et acttt. Prlbaui^-eD-
Brisgau. Mohr,
^ ftA«JrtticJie Akun sur GetckkkU dei JesvOenorieiu, 1S41-15S2. Bonn,
148 BULLrriIf HISTOEIQUE.
tion ait coïncidé avec celle de M. Braunsberger; ainsi beaucoup
lettres de Ganisius se trouvent imprimées inutilement dans I
deux ouvrages. De nombreuses autres lettres, publiées déjà
leurs, auraient pu être données par M. Hansen en extraits, et m
pas en entier, comme il le fait; de cette sorte, il aurait diminué
beaucoup l'étendue de son livre. Mais tel qu'il est, il est encore
intéressant. Nous y voyons que, partout où les princes ne favorisai!
pas la Compagnie, elle rencontrait la plus grande méflance : à Gologi=3r^
notamment, elle dut mettre quarante ans à vaincre la résistance » ^
Conseil de la cité, du clergé et de TUniversité, avant d'arriver^^
pouvoir ériger un collège. Mais nous admirons aussi l'énergie
jésuites qui, malgré leur position précaire dans la Rome allemaf
fondent de là des colonies à Trêves, à Mayence, dans d'autres vill ^kJi
forcent TUniversité à leur céder des chaires, combattent le prot ^*^
tantisme et toute tendance vers la tolérance religieuse, organisi^^ESa/
partout la contre-Réforme, soumettent à leurs idées même les nou— ^
apostoliques. Nous assistons à l'éclosion de la branche allemande ^
Tordre et au développement de son activité fiévreuse et pourtant si
considérable en faveur de l'Église, menacée dans son existence mèoie
dans tout l'empire germanique. Pour arriver à leurs fins, les jésuites
devaient faire preuve d'une abnégation personnelle et d^une énergie
de tous les instants qui étaient au-dessus des forces d'individus
médiocrement doués en intelligence ou en caractère; de là de nom-
breux cas de démence, dont l'un amena même, en 4574, l'assassi-
nat des trois membres les plus iniluents parmi les jésuites de Cologne
par un de leurs frères. Saint Ignace désirait éviter, du moins, toute
possibilité d'insubordination et de relâchement des mœurs dans la
Compagnie; c'est pourquoi il défendit, en 4548, comme principe,
d'admettre les femmes a l'obédicnco de Tordre et de les laisser
prononcer les vœux (p. 425). Dans une lettre, écrite sur le comman-
dement du général par son secrétaire Polanco aux frères de Lou-
vain, en 4549, les institutions de la Compagnie sont déjà brièvement
indiquées (p. 458 et suiv.), preuve nouvelle que Loyola lui-même, et
nullement son successeur Lainez, a été le véritable législateur des
jésuites. Très intéressantes, aussi, les lettres des jésuites qui
avaient assisté à la Saint-Barthélémy, à Paris (p. 627 et suiv.). Elles
répètent les calomnies que les assassins ont répandues alors sur leurs
victimes; les huguenots auraient été tués au moment où ils atta-
quaient le roi et sa famille; ces hérétiques auraient déjà détruit deux
corps de garde du monarque et auraient été vaincus et anéantis, seu-
lement lorsqu'ils attaquèrent la troisième et dernière garde du sou-
verain. Ces mensonges conscients sont caractéristiques.
Knstilut prussien d'histoire dn Rome et la catholique Société de
î se sont partagé la tâche da publier les dépêches et relations
des nonces apostoliques en Allemagne, de sorte que la Société se
contente de s'occuper des nonces de 1SS5 à 1605, depuis SixLe-Qutnl
jusqu'à Clément VIII, L'Institut prussien édite maintenant le pre-
mier volume de la troisième partie (nonciature du comte Barlholomé
de Porta dans l'Allemagne du sud) de sa troisième série (4572 ix
(S85)'. Ce volume, rédigé par M. Karl Schellbiss, embrasse les
années 1573 et 4574. Nous y assistons aux premières tentatives faites
pour réformer le clergé allemand par la discipline et par l'instruction,
tentatives qui ont rendu des services immenses à la cause catholique.
On commença par s'adresser dans cette intention, non pas à l'empe-
reur Maximiiien 11, dont le zèle pour l'Église était fort suspect, mais
aux petits princes de l'Allemagne méridionale, plus dignes de la con-
fiance de la cour de Rome. M. Schellhass expose très bien ces f^ils
dans l'introduction, dont il fait précéder l'impression des docu-
ments mêmes. Ceux-ci prouvent de nouveau la grande amitié que le
pape Grégoire XllI portait aux jésuites et l'assistance qu'il leur prê-
tait partout. Le nonce est obligé de reconnaître l'indignité absolue
d'un grand nombre de prélats de l'Allemagne du sud (p. 19S) et la
pénurie de sujets vertueux , capables d'être promus à l'épiscopat.
Les faits que cite le comte de Porta sont de la plus haute gravité.
La Société de Goerres nous donne, par les soins de MM. Stephan
Enses el Al. Meisteb, le premier volume de sa première série : la
Nonciature de Cologne^ Il contient d'ailleurs, à côté de la noncia-
ture de Bouomi à Cologne (1584-1587), celle de Santonio en Suisse,
autant qu'elle se rapporte aux affaires d'Allemagne et de France.
Quant a ces dernières, nous y trouvons surtout des faits concernant
les mercenaires suisses du roi très chrétien. Les documents relatifs
à la nonciature de Bonomi sont plus intéressants pour l'histoire de
la réforme catholique que pour l'histoire politique de l'Allemagne.
L'immixtion de la cour de Rome dans la lutte pour l'évèché de
Strasbourg et l'intercession des princes protestants en faveur des
chanoines évangèliques de cette ville y jouent également un rùle con-
sidérable. MM. Ehses et Moister ont enrichi leur pubUcation d'une
1. Nanliaturbericlile aiu Deutichland, heraatg. ton dem Kûn. Preuu. Int-
l.tiil in Rom und der Klin. Preva. ÀTehiv-Yern-allang ; série tll : 1572-1585;
ptirlie III ; Die Silddmliche yuntiatar du Grafen Bartkol. von Porta; toI, I :
1573-1574. Berlin. RalL.
2. Qvellett tiitiJ Fonchangen auf item Geblete der Geachiclite, herausg. von
r GOTTtf-GeietlKkafl; roi. IV ; yanlîatarberielite oui DeutsclUand, I ; Die
r jVfindafur. Paderborti. Scbitningh.
L
\
450 BULLKTIFI HISTORIQUE.
introduction fort étendue et de notes explicatives très mMioir^^&.
L'administration des archives de Prusse a continué d'une mani^^sci
très louable ses publications de documents ^ Le 64* volume ooi^km
tient : la Politique de la Poméranie pendant la guerre de Trei^E-x
ans, par M. M. Bjer. Nous y trouvons surtout les documents relal:^ J
à la succession de la Poméranie, avant et après que la couronne duc
de ce pays Ait devenue vacante par la mort de son dernier duc ini
pendant, Bogislav XIV, en 4637. L*introduction historique
M. Bœr, assez développée, se basant particulièrement sur les d<
ments publiés pour la première fois dans son volume même, proi^^iui
à l'évidence que Gustave-Adolphe de Suède était d^accord avec-' Je
gouvernement poméranien lors de son arrivée devant Stettin, em
4630, et que la défense de la religion protestante n'était pas le motff
principal qui amenait alors ce monarque en Allemagne. C'était, eo
premier lieu, le projet de dominer la Baltique; en second, le désir
de se venger de Tasslstance prêtée à ses ennemis, les Polonais, par
l'empereur Ferdinand II et par son général Wallenstein. Sans se sou-
cier des droits incontestables que son beau-frère, l'électeur de Bran-
debourg, avait à la succession de la Poméranie, Gustave-Adolphe en
prépara l'annexion à la Suède, contre le gré des Poméraniens eux-
mêmes. Il est vrai que la conduite maladroite et indécise de l'électeur
George-Guillaume aida merveilleusement les Suédois dans leurs pro-
jets de conquête.
Le 66* volume nous donne le tome IV des Procès-verbaux et
relations du conseil secret du grand électeur Frédéric-Guillaume, par
M. Othon Mbinardcts. Le conseil secret du grand électeur jouait un
rôle très important pendant les premières années de son règne, à une
époque où ce prince, jeune homme d'une vingtaine d'années, était
encore trop incertain dans ses propres idées pour rien décider sans
l'avis de tous ses conseillers. Mais à l'époque dont traite ce volume,
Frédéric-Guillaume avait déjà reconnu le peu de valeur des anciens
ministres de son père et prenait ses résolutions sans eux, avec un
nombre très restreint de confidents. Par conséquent, ce volume est
beaucoup moins important que les précédents. Les documents quMl
publie roulent, à quelques exceptions près, sur des aflfkires d'admi-
nistration, d'un ordre inférieur, et même la plupart des avis vrai-
ment politiques formulés par le conseil secret ont peu influé sur la
1. Publikathnen au$ den Kôn. Preuss. Staatsarehiven, Veraniaut und
herausg. vonderKôn. Archiv-Verwallung ; vol. LXIV : DiePolUik Pommenu
itnhrend des dreissigjflhrigen Krieges; vol. LXVI : ProtokoUe und RetaHo-
nen des Brandenburg. Geheimen Rathes aus der Zeit dm KurfUnien Frie-
drich WUMm ; vol, IV : 1647-16S4. Leipzig, Hirxel.
ILLEKAGNB.
Kfeci
marche dos événemenls. La partie de beaucoup la plus imporLanle du
.Tolume est l'introducLion où M. Meinardus, avec la précision, avec la
lence cl la largeur de vues qu'on lui connaît, eipose l'btsloirc
luttes lanlot diplomatiques tantôt militaires entre le jeune
;teup et le duc de Neubourg pour les provinces formant la succes-
sion de Julîers-Glèves, de 1047 à 1651. En outre, le volume coutient
quelf^ues documents intéressants relatifs à la chute du ministre de
Burgedorf et à l'avènement au pouvoir de son successeur, M. de
Slumenthal.
Jo ne fais que citer le premier volume d'une biographie du grand
électeur, que j'ai fait paraître*. Mon but était surtout de réunir, dans
un tableau aussi vivant que possible, les résultat» des innombrables
publications de sources et monographies qui ont paru sur ce sujet,
et qui, naturellement, restent inconnus du public.
Ed profitant des éludes préparatoires faites par feu le professeur
Ernest Fiscber, en vue d'une biographie de Derfllinger, le l'amcui
maréchal du grand électeur, M. Wilhelm vo^t Uiïgkh les a complétées
par des recherches personnelles*. 11 nous a fourni ainsi, pour la pre-
mière fois, une histoire vcridique et assez complète du vieux troupier
qui, d'ailleurs, était un excellent organisateur militaire. Le fait que
M. de Unger est lui-même ancien soldat rend sa biographie de Derf-
ninger doublement précieuse pour nous. Par ce travail ainsi que par
les biographies, antérieurement publiées, d'un certain nombre des
liommes d'État du grand électeur, celui-ci est descendu de la liauleur
isolée sur laquelle Droysen et Ranke l'avaient placé, au-dessus de
l'humanité ordinaire; nous comprenons de plus en plus l'origine de
s«3 décisions en matières politiques et militaires et l'inlluence exercée
sur lui par son entourage.
Le successeur de Frédéric-Guillaume, Frédéric, le dernier électeur
de Brandebourg et premier roi de Prusse, ne lui ressemblait que par
l'ambition. Au fond, c'était un homme faible, parfois colérique et
passionné, mats incapable de résolutions fermes et constantes, dirigé
par les influences du moment, cédant â des considérations mesquines.
Tel il nous parait de nouveau dans l'excellent travail, peut-être trop
miQuIieux pour les détails infimes, de M. P. H*iee, sur la politique et
les actions militaires du Brandebourg en U\88 et 1689^.
1. Der Groue Kwfîlrsl Friedrich WUkelm «on Brandatburg; vol. 1 : 1640-
1660. Beriin, Crotibach, I3a7.
3. PeldmarJchall Berf/linger {Beihefl lum MUiWrwochenblatl, 18%, o- 7
et S).
3. Brand^burgisclie PolUik und KrieçfiUtruiig 1G88 uad 1689. KaMol,
vBruiin(!aiii.iii
^w Bruiin(!aiii.iiiu
4 sa
DDLUETIIf HiSTOKlgOB.
La vie d'un archevêque de Maj'ence du xth" siècle est raconlée dans
deux ouvrages, dus à rinfluenco de M. E&Dm^^fsiKsaKFiiK : le premier,
par l'inlermédiaire de son excellente Bistoire d'Allemagne drpuit la
paix de Wnlp/ialie ; le second, directement. Le fait i]ue deux auteurs
s'occupent en même temps de Jean-Philippe de Schonboni s'explique
par le râle relativomeot important joué par ce prince dans la plus
triste période de l'histoire d'Allemagne, et par la faveurqu'il a mon-
trée aux hommes de science, surtout au i^rand Leibniz. M. George
Mentï, privât docent k Jéna*, a un but plus vaste que son rival :
il désire présenter la biographie entière du prince ecclésiastique,
dont le premier volume raconte la politique extérieure, tandis qu'un
second volume exposera son administralionelsavie intime. M. MenU
a fait des études sérieuses aux archives de Rome, de Vienne el de
Wiirzbourg; malheureusement, il a négligé celles de Paris, pourt^il
si importantes, et les archives de la [kmille de SchOnboro, à Wie-
sentheid. .\usâi ne saurail-on prétendre, malgré beaucoup de détails
nouveaux, qu'il ait réellement enrichi nos connaissances sur l'homme
et sur l'époque, sauf peut-être pour les négociations relatives à la
conservation de la Lorraine, en ^670 et 1671. M. Charles WiLD*a
limité sou travail plus élroilement : il ne va que jusqu'à la conclu-
siou de la paix de Westphalie. En tirant prolît des papiers de
ramilles conservés à Wiesentbeid, il consacre son livre surtout à
l'action de Sclionborn dana les longues négociations de Munster et
d'Osnabruck. Son héros y contribua avec succès en se liguant
autant avec les princes protestants qu'avec la Bavière et avec
la France, et aida beaucoup à forcer l'empereur à se séparer de
l'Espagne et à accepter une paix peu profitable à la maison de Habs*
bourg. Mais faut-il écrire tout un volume pour constater ces fUts
relativement peu intéressants d'un point de vue général? Le talent et
la puissance de Schonborn, ainsi que l'inlluence qu'il a pu exercer,
étaient, ce me semble, trop faibles pour justifier tant de peine, et de
la part du lecteur et de celle de l'auteur.
M.Albert vo.t K'ofiu.iL, privât docent a Halle, raconte l'Histoire de
la diète de l'empire, tenue à Ratishonne pendant les années 1653 et
1654^. Destinée a réaliser des réformes importantes dans La législa-
tion et dans radministration de l'empire, celte dicte échoua complè-
1. Johann- PhUipp von Schontiorn, Kurplrsl von Mainz, Bitckof ton Wilrsr-
burg und Wonni; toI. I : 1605-1673. Jéna. Fischer.
2. Joliann-PhUipp von Schonborn, eJn FriedemfUrsl sur Zeit des dreittlg-
Jahrigen Krieges. Heidelberit. Winter.
3. Die Kaiierliehe PotiM auf devt Begensbtirger Reiekttag», l^:i-l6U.
Berlin, Gutlenti^.
» areuug- i
165:^-16». Jj
VL^
PP
P
ILLBIfâSHB. 48S
tocncnt et se sépara saiis aucun résullat considérable. S'appu^ranl sur
les matériaux des riches archives de Vienne, l'auLeur cherche à jus-
t.iHfST l'empereur el la majorité de la diète. Cepcodaut il ne conTain-
ci"«a. que peu de personnes; il n'aura réussi qu'à détruire plusieurs
eï-K-e!iirs de détail et à rendre un peu plus cléments les jugemenla à
j>or-teraur les pouvoirs cenlraux de l'ancien empire germanique.
£>ans notre revue précédente, nouâ avons parlé de l'Hisloire de la
{^is^rre de la succession d'Autriche, publiée par les archives de la
^u^ rre autrichiennes. Le premier volume contenait l'introduction ; le
cl<3a.a:iieme, rédigé par le colonel Karl ton Ucivcger, traite de la pre-
ETxi ère année de la première guerre de Silésie (décembre 1740-auLomne
■■ "ST-* l)'. Il faut encore louer la parraiLe impartialité de cet ouvrage.
Af^isen revanche, quel fatras de détails inutiles, quel manque ahsolu
d^ talent d'historien I II vaudrait vraiment mieux que l'auteur se
rm tentât d'exposer les faits militaires, sans s'aventurer dans des
ck-sidéraUons politiques et psychologiques.
2M- 0. Webeh décrit uo épisode de la guerre de la succession d'Au-
*■■•» c=.he, l'occupation de Prague par les Frannais et les Bavarois eu 174 1
*it- -i7*3*. Il y emploie surtout des journaux tenus à cette époque
«^n.ë me par des habitants de Prague, et en second lieu des matériaux
Ifo wïês aux archives de Prague et de Vienne ; et tout cela est jugé et
m i s a proOt avec beaucoup de sagesse el de saine critique. La lilté-
""a-l-ure imprimée, cependant, n'est pas sufûsamnient connue à M. We-
Ij^r- . Nous voyons que les Français, martres de Prague, s'y montrèrent
bk^weillants et doux envers les habitants, mais négligents et im-
prévoyants pour leurs propres intérêts. L'incapacité du maréchal de
Broglie est mise hors do doute, quoi qu'en ait dit son illustre des-
cendant actuel.
Ou sait que M. Albert Njiddé a été enlevé par une mort prématurée
à l'enseignement et à la science historiques peu de mois après avoir
piitilié la seconde partie de ses Études sur l'origine de la guerre de
^Ptans*. Comme la première partie traitait des intentions politiques
'^^ fies préparatifs militaires de l'.Yutriche, le second fascicule s'oc-
^Pe des projets et des armements du roi de Prusse. Ce travail, basé
^KcJitgiveiaeDt sur des recherches infetigables aux archives de la
guerre de Berlin, néglige de parti pris les paroles et les écrits de Fré-
"ûï^c B, qu'on a taxés d'hypocrites, et ne cite que des faits incontcs-
. K. Kriegsarnhiv, Der Œsttmicliische Erbfolgtkrteg : vol. Il :
l'46. t 718. Vienne, Scidsl.
'" ■*>*« Okkupation Prags dureh Pramoien vnd Baiern. Pr3|;ue, Cnivc.
,' -^mlra-ge sur SnUtehUTigigeKhiehte des Subeajxhrigen Krieget, fut. 11.
'*'i»».ig, Ouoclser el Humblol,
J
454
BULLETIN HISTORIQUE.
que
ar-
bilh
te,
ci»
tables el inattaquables. Sur la foi des documents militaires, H. Naadé
prouve que les prétendus préparatifs militaires du roi mentioDiiii&
par M. Lehmann n^existaient point dans la première partie de T^
4756, que les forteresses de Silésie étaient inachevées, que leurs
nisons, leur artillerie étaient peu nombreuses, que l'armée de
pagne n^était point augmentée, que le trésor était loin de possédeKr*^fi&
sommes que Frédéric II avait toujours estimées nécessaires m
pour une guerre défensive, que grand nombre d'ofnders avaient
des congés, en partie justement pour les villes d^eau de Bohême,
la plupart des régiments avaient renvoyé leurs réservistes, que
mée manquait d'armes, d*uniformes et de munitions pour la mOi
sation. Les premières mesures de mobilisation se firent depui Ss le
47 juin 4756, mais exclusivement pour le corps dVmée de la
orientale, contre L'attaque dont la Russie menaçait alors cette
vince; et elles furent contremandées dès le 29 juin, lorsque la
priée par TAutriche d'ajourner la guerre jusqu'à Tannée suiv
arrêta ses colonnes de marche. Ce n'est qu'après avoir reçu
communications sûres dévoilant les grands préparatifs de l'Auti
et la formation d'une terrible confédération dirigée contre l'exister ^^
même de son État, c'est-à-dire depuis le 45 juillet 4756, que Frfe'^®"
rie se décide à plutôt praevenire quant praeveniri et qu'il comma^^^f
la mobilisation de son armée. En réalité, la situation politique é
de nature à décourager le joueur le plus intrépide d'une guerre oRî
sive et de conquêtes. Aucune des conditions que Frédéric, dans
rêveries de Tan 4752, avait posées comme indispensables pour n.
telle guerre, n'était accomplie-, au contraire, la Prusse était
ment isolée en face d'innombrables adversaires.
On le voit, les faits sont d'accord avec les paroles du roi, je ne
pasavec celles qui étaient destinées à la publicité et qui, naturellemi
ne contiennent ()as la vérité toute pure, mais avec ses explicatl
envers ses frères, ainsi qu'envers ses principaux ministres et générau::^
Il va sans dire que M. LBHMi^in, dans les Goiiinger Geteh
Anseigen de 4896, p. 814 et suiv., s'est efforcé d'aOkiblir Tarj
mentation de M. Naudé. L'unique allié important du fougu
professeur de Gœttingue, M. Delbruck (Preussische JahrhUeh
t. LXXXVI, p. 446 et suiv.), avoue que Naudé l'a réfuté en pluslei
endroits, ainsi que Lehmann, et il confesse que l'Autriche était
moins autant l'agresseur que Frédéric II (voir p. 425). Cependant,
cherche à démontrer que les résultats établis par Naudé et Koser soi
peu considérables et que tout ce qui reste encore debout de sa prop
thèse et do celle de Lehmann est très important. Malheureusemen
il emploie, pour prouver ces faits, des artifices peu dignes d'un bi
3.-
e
ILLBHAOlte. 455
torien sérieux ; par exemple, il cite les paroles d'une lettre de Fré-
déric lï du A juillet 1 756 : « Si les Autrichiens ont la guerre dans le
Wnlre. on les fera accoucher; s mais il omet ce qui suit immédiale-
ttenl : < S'ils se sont précipités avec leurs démonstrations, ils ren-
gaineront bien vile, >■ ainsi que le commencement de la même lettre,
fjpique pour toute ta correspondance du roi pendant ces semaines :
« Je vois par tout ceci, — les nouvelles d'armements autrichiens, —
beaucoup de mauvaise volonté, mais point de projet solide. « il répote
constamment, dans ses lettres les plus confidentielles, qu'il fera
dépendre ses propres résolutions sur la paix et la guerre des projeta
de l'Autriche et de la Russie (Politische Correspondem, t. XIII, p. 33,
39, 42). Le 10 et le 13 juillet, il dit expressément qu'il ne croit pas
il La guerre pour la même année {fbid., p. 53, 59). Ce n'est qu'après
avoir reçu la nouvelle de son ministre à la Haye du ^ 3 juillet que
l'A^nlricbe, avec 80,000 hommes, et la Russie, avec 420,000, allaient
r<]Lttaquer au printemps suivant, qu'il se décide à la lutte.
fHistoire de l'Angleterre pendant le iviii" siècle est traitée par
M. Wolfgang Michibl, professeur â Fribourg'. Son ouvrage est
conçu d'après un vaste plan : le premier volume, déjà gros de plus
de 850 pages, ne contient que l'histoire de quatre années, de 4714
à 4 74S. Si l'auteur continue sur ce même pied, il lui Faudra vingt
volumes du même calibre pour arriver à la (in de sa tâche. Il serait
▼raiinenl à désirer, dans rintérét des auteurs, des lecteurs et de ta
propagation des connaissances historiques, que les historiens se sou-
vinssent du mot de Gœtbe : que le maître se montre dans la restric-
"oo et dans la limitation. On souhaitera, d'ailleurs, que M. Michael
^'gne davantage son style, fatigant parfois et rebutant par la trop
«"é<|uenie répétition des mêmes mots et des mêmes phrases. Cepen-
''^■■it, si on a le cou rage de se hasarder dans la lecture de son ouvrage,
'"' en est récompensé par la quantité de détails historiques présentés
"^*" la base solide d'études approfondies et consciencieuses. Jamais,
P*^ur cette partie de l'histoire, ils n'ont été exposés avec celte ampleur
^'- Cette précision, progrès évident sur le livre bien connu de lord
«ation. Tandis que Leckï nous donne pluttît Ihistorique du mouve-
■^^ïit de la civilisation et de la culture matérielle et inlellectuelle de
. ^ ^lelerre pendant le xviii' siècle, M. Michael décrit les faits poli-
"lUea d'une manière définitive.
En arrivant à l'époque de la Révolution, noua pouvons noua
■^*3lenter de citer seulement la correspondance de l'archiduchesse
_ ^- BngliKhe Gtfchichte iM adUieknten JaliThu»d«rt, l. 1. Uamboarg et
156 BULLETni HISTORIQUE.
Marîe-Christînc avec l'empereur Léopold IIS ouvrage dont il a
été parlé dans cette Revue, numéro de mai-juin 1897.
M. HannsGuGio inaugure la série des Études historiques put
par M. E. Eberhcg, par une étude sur l'Assemblée législative et
gine des guerres de la Révolution'. Re travail, sorti du sémii
historique de Fexcellent professeur Max Lenz, traite surtout de
fluence du comte de Narbonne sur le ministère des Feuillants e
l'origine de la guerre de i 792. Il montre que la fuite de Yareni
déchaîné la méflance générale, en France, contre Marie-Antoinei
contre ses négociations secrètes avec la cour de Vienne. Tandis
le ministère des Feuillants cherchait à apaiser Tindignation c
craintes populaires, Narbonne désirait la guerre, et sa chute se
à augmenter l'antipathie de la nation contre ses collègues feuil
et contre la cour des Tuileries, et à grandir ainsi les chance
guerre. M. Glagau nous donne de nombreux détails et docun
nouveaux d'un haut intérêt, sans contribuer beaucoup à la soli
définitive de la question de savoir à qui revient la faute d^i
déchaîné les immenses luttes de la Révolution et de l'Empire.
Nous avons déjà parlé des publications que les archiducs Alb<
Guillaume ont fait paraître sur la vie de leur célèbre père. Tard
Charles. Les deux princes ont malheureusement disparu après ;
jeté les premières bases du monument qu'ils ont voulu élev<
rhonneur du grand général. Ce sont ses petits-fils, les archiducs
déric et Eugène, qui continuent actuellement cette œuvre import
Six volumes de ses (Huvres choisies ont paru ; de même deux vol
de sa biographie par M. de Zeissberg. Maintenant le colonel Ma
D'AifGELi vient de publier les trois premiers volumes d'une his
militaire de Tarchiduc Charles'. L'importance de ce dernier ou'
pour rhistoire générale consiste surtout dans l'emploi que Faut
pu faire de la correspondance tant officielle qu'intime de son fa
Celui-ci y parait plein de la plus grande modestie, diminuant <
tamment ses propres mérites en faveur de ses subordonnés,
désormais on ne pourra plus juger les actions militaires de Gï
sans tenir compte de la jalousie haineuse que son frère, l'erope
a toujours montrée envers sa supériorité de talent et de cara<
1. Hanns Schlitter, Briefe der Erzhenogin Marie Christine, Statihc
der Niederlande, an Leopold II. Vienne, Gerold.
2. JHe franzôsitche Législative und der Ursprung der Révolutions- /
1791-1792 {llistorische Studien, verôffentlichl von D' E. Ebering, t. I)
lin, Ebering.
3. Erzherzog Karl von Otsterreich als Feldherr und Heeresorgam
vol. I, II, III. Vienne et Leipzig, 1896.
ALLSHIGRE. i 57
el des empéchemenls de lout genre, par lesquels, même aux ilépena
de l'Élal, François !" a essayé de détruire les résulLala oblenus par
les victoires de l'archiduc. De même, la condamnation de la poli-
tique do Tliugut ressort aussi bien des lettres de l'archiduc et des
pa^s de son biographe militaire que des écrits des historiens prus-
siens, que Ton a voulu taxer de partiahtê sur ce point. Jugeant le
prioce d'après leur propre petitesse, l'emirereur et son ministre
étaient pleins de méGance pour lui et le soumettaient continuelle-
rnenL a des humiliations et des dégoûts sans nombre, a une dcpen-
'hnce ridicule pour la moindre décision, à des reproches Iracassiera,
à des actions contraires à sa conviction. Ces faits expliquent en
graode partie ses hésitations et son irrésolution apparentes. 11 est
vrai que, même après tout cela, l'archiduc Charles restera un géné-
ral plutôt, prudent et méthodique que hardi, et que son énergie était
étroilemenl limitée par une certaine lenteur dans ses décisions. — Il
esL re^retlahle que M. d'Angeli, toujours équitable envers les armées
et les généraux Trançais, se montre très partial pour ses compatriotes,
<^ont il cache soigneusement les fautes et les faiblesses, et fort injuste
pour les Busses et leur général Souvoroff. La biographie de celui-ci
^L d'ailleurs enrichie de détails aussi authentiques que piquants :
daos son ambition démesurée, Souvorotf trouvait tout naturel qu'il
Commandai même à l'illustre archiduc. De son côté, le Isar Paul ne
™vail rien de moins que de mettre le comte de Provence sur le trône
de France par ses troupes seules et par le génie de SouvorofT (voy.
'- II, p. 436], Malgré quelques restrictions que nous avons dû faire,
lous n'héaitons pas â dire que les volumes de M. d'Angeli sont
pleins de renseignements importants et uUles pour l'époque des
guerres de la Révolution et du Consulat.
Un des épisodes les plus curieux de ces grandes luttes, la guerre
"^ montagnes en Suisse, en 1791), est exposé dans deux ouvrages
"^''itaires. Le premier, écrit par M. Heinh. GDntueb, traite de la
*^'**pagne de la division Lecourhe dans les hautes montagnes'. Ce
' ^fe, qui a été couronnépar la Société des oHiciera suisses, est hase sur
^s recherches minutieuses faites aux archives de la guerre, à Paris,
'-le la famille de Lecourbe elle-même; très consciencieux et bien
**^*"*t, il est pourtant plus important encore pour le militaire que
Pour l'historien. M. Giinther justifie pleinement le général Lecourbe
" »"eproche de rapacité qu'on lui a fait et prouve, au contraire,
"** *J maintenait une stricte discipline et l'équité envers les popu-
ItZ **"" ^'^^"9 '^ Uioaion, Lecourbe iin ScUa>ei:.erisclien. llocligebirge.
.J— É
158 BULLSTIlf HISTOtlQUB.
lations paisibles. Ce n^étaienl que les fonctionnaires civils de Vi
française qui exaspéraient les habitants par leurs exactions
nelles et amenaient ainsi des émeutes dangereuses et sanglante
L'auteur juge très sévèrement, avec raison, Farmée autrichienne t
Tyrol, dont la conduite misérable et le mauvais esprit contrasta
étrangement avec le courage et le patriotisme des paysans tyroli^i
et avec la fermeté, souvent vraiment héroïque, des troupes CraL
çaises. — Le lieutenant-colonel suisse Rod. von RedilTg-Bibieis
s^occupe de la campagne de Souvoroff dans les Alpes ^ Égalerai
rédigé sur les matériaux que les archives de Paris ont fournis, <
ouvrage est de beaucoup inférieur à celui de M. Gûnther coolk
clarté et comme valeur historique. D^ailleurs, les résultats des d^
livres sont presque identiques. M. de Reding a cependant étudia
topographie militaire de la Suisse d'il y a un siède plus profoii.c
ment que son rival, dont quelques erreurs, à ce point de vue,
corrigées par les déductions du colonel.
Nous rentrons sur le terrain politique avec le quatrième volu
publié par M. Charles Obser, de la correspondance politique du
grave Charles-Frédéric de Bade, de i7SS ki 806 ^. L'éditeur a pis.î
surtout aux archives de Karlsruhe, en second lieu à celles de
lin, de Vienne, de Paris, de Copenhague et de plusieurs
nobles. Le volume comprend les années de 4804 à 1804. Par stm
de la faiblesse de la Prusse et de Thostilité manifeste de TAutriel^
le margrave, après la paix de Lunéville, s'attacha au premier con»*
qui résolut de se servir de son petit pays comme d'une avant-gac*^
contre l'Autriche. 11 l'agrandit par des concessions territoriales et ^
procura la dignité électorale. Remarquons que c'est justement le jei»
Éméric-Joseph de Daiberg, — le futur grand-duc de Francfort p
la grâce de Napoléon, — alors ministre du nouvel électeur à Paris, c^
chercha, mais en vain, à l'enlrainer dans une politique anti-françal ^
11 y a, dans ce volume, encore d'autres détails historiques très intér^
sants dus aux relations des diplomates badois. Je n'en mentionner
ici que les récits authentiques sur l'assassinat du tsar Paul, ^
modiflenl, en plusieurs endroits, la tradition historique actu^
(p. 440 et suiv.).
L'an 4 806 amena la guerre entre Napoléon I" et la Prusse, lu
magistralement racontée par le colonel Oscar de Lettow-Vobbe^
dont le livre classique est terminé maintenant par son quatriètf
1. Der Zug Suworoffs durch die Schweit. Zarich, Schulthess.
2. Politische Correspondenz Karl Friedrichs von Baden, 1783-1806, vol.
Heidelberg, Winter.
volame, auasi plein de résultats nouveaux et sûrs que les parties
précédentes'. Nous y voyons, par exemple, que le rôle joué par
Schariihorsl en 1 807 fut beaucoup plus effacé que le récent bio-
graphe du général, M. Max Lebman:!, ne l'avait fait croire. Le
ministre de Hardenberg, au contraire, parait dans les publications
modernes sous un jour plus favorable qu'autrefois. M. de Leltow
expose avec franchise les intrigues qui rendaient stériles les conseils
courageux et patriotiques de Hardenberg. Il montre également le
manque de décision de la part du général en chef russe Bennigsen,
ainsi que l'immixtion pernicieuse de l'empereur Alexandre I" et du
roi Frédéric-Guillaume III dans les opérations militaires. L'auteur
rend pleine justice au génie militaire de Napoléon, presque infail-
lible BOUS ce rapport. S'il semble parfois plus hésitant que la situa-
Lion militaire ne l'exige, c'est que des nécessités politiques Vy
ïorcMnt absolument. Comme diplomale, il est également d'une habi-
leté consommée, dépourvue, il est vrai, de toule considération
«noraie. Mais comme homme d'État, il commet la faute énorme de ne
Jamais songer à l'avenir et de méconnailro l'impossibilité d'une
"Xïonarchie universelle durable, telle qu'il cherchait à la réaliser.
ï-*iœparlialité absolue de M, de Lellow, égale seulement au zèle avec
I^kquel il s'efforce de fonder partout les faits sur des documents
^mîèrement dignes de confiance, ne se change jamais en froideur;
t^& caractères des protagonistes ressortent vivement du tableau
^•*>ouvanl qu'il réussit à nous tracer des grands événements de
^^tte époque mémorable,
X..* major général Albert Pfister expose le sort des contingents
^''"** rlembergeois pondant les campagnes de 1812 et de 1«I3, en
■*^lant des lumières parfois très vives sur les rapports pohtiques du
'^•^u-veau royaume de Wurtemberg avec les puissances voisines et
*-***tflul avec Napoléon I"'. La matière du volume est fournie sur-
~*^**t par les archives de Stuttgart et de Berlin. Nous vojons la sourde
^'^stiiilé des Ëtats de la confédération du Rhin contre le joug que les
■^■"^a-inçais leur imposaient et qui était d'autant plus lourd à porter
"ï^e les maîtres ne cichaient guère leur mépris pour leurs infé-
■^d»rs. De là des conlhts cruels qui finissaient toujours par de nou-
^^Uea humiliations pour les Allemands. Le roi Frédéric de Wurlem-
"^r-g disail lui-même qu'il se soumettait à Napoléon seulement d'après
'<» if»i de la nécessité. En elfel, la gratitude était inconnue à ce petit
I
1 - J>er Kritg von I80G witd ISO?, t. IV, Berlin, Mittler.
î- Jfudem Lagerdes Pheinb^miU, 1812-1SI3, Stuttgart elLdplig, DeuUchfl
\trt«(Sanslilt, 1897.
160 BULLETIff HISTORIQUE.
despole sans cœur, qui oubliait volonliers combien renapereur avait
agrandi sa position. D'ailleurs, Touvrage du général Pflster montre
de nouveau que la défaite de la grande armée de 4842 était déddée
dès son arrivée à Moscou par les pertes énormes que la inarcbe pré-
cipitée à travers un immense pays désert et dévasté lui avait ioffi-
gées. Les chiffres que Tauteur donne sur les pertes des contingente
wurtembergeois et bavarois parlent un langage terrible. — Dès le mw^
d'avril 4843, le roi Frédéric prépara sa séparation d^avec la Frane^^
Néanmoins, ses troupes prirent une part brillante à la bataille (%.«
Baulzen et furent complètement anéanties dans les batailles de Des:^-
newitz et de Wartenburg. Le petit reste de ce nouveau continge«:i.t,
500 hommes de cavalerie, passa aux alliés dans la bataille de Leip-
zig, livrée par Napoléon contre le conseil de tous ses généraux., l^
livre de M. PHsler est riche de faits authentiques qui intéresseront
au plus haut degré les lecteurs français.
Le contingent saxon fut moins maltraité pendant la campagae de
4842, parce qu'il était attaché au corps autrichien commando p^
Schwarzenberg, sauf la brigade de cavalerie sous les ordres de T*i^'
mann, dont seuls vingt officiers et sept cavaliers rentrèrent c1ai>s
leur patrie. L'histoire de ce contingent est décrite par H. Maurî^
ExNER^, d'après des sources officielles et d'une manière très coïïm^
ciencieuse. Il ne réussit pas, cependant, à expliquer pourquoi ^
maréchal autrichien n'obtempéra pas aux ordres de Napoléon ^^
protéger sa retraite et ainsi ne le sauva pas des désastres de l^
Bérézina. Nous pensons que cette question ne saurait être txsxM
chée par des raisons militaires, mais seulement par des raison,
politiques.
I^a campagne de 4843 fut Tépoque d'une activité particulière des
partisans, et ceci pour deux raisons : la grande supériorité des alliés
sur las Français en cavalerie légère, et les sympathies que les popu-
lations du théâtre de la guerre nourrissaient naturellement pour la
cause des alliés. Le lieutenant-colonel E. Sghxackexburg raconte les
actes d'un des plus hardis partisans prussiens, Frédéric de Helwlg*.
La seconde partie du travail est une histoire complète de la lutte que
le général Maison a glorieusement soutenue en Belgique contre des
troupes alliées beaucoup plus nombreuses. Ce volume est rédigé avec
beaucoup de soins, d'après tout ce que la littérature historique offrait
en matériaux et d'après un grand nombre de documents inédits.
1. Der Anthril der KônigL sxchsischen Armée am Feldsuge gegen Ihustoiul,
1812. Leipzig, Duncker et Humblot.
2. Der Parteigxnger Friedrich von Hdwig. BerUn, Bath.
\a part importante que le général Charles de Grolman a prise
siii guerres de délivrance a été exposée dans le second volume
de l'eicellenl ouvrage de M. le général E. m Go?(badt, dont nous
amns p.irlé dans notre précédent comple-rendu. Le troisième el der-
nier volume traite de la vie de Grolman en temps de paix jusqu'à sa
Uforl, en 1M43'. Si pendant ces vingt-liuit années le général n'eut plus
l'ot^asion de raonlrer ses qualités de stralégîsle, il exerça une grande
in n uence sur le développement des institutions militaires de sa patrie,
1(11* il aimait passionnément, et sur le sort de la province de Posen,
i|L&'il cherchait à priver de son caractère polonais el à rattacher élroi-
li^rnenl â la Prusse allemande. Chef de Pétat-major après la guerre,
il devint, avec Guillaume de Humboldl el le minisire de la guerre
iioyen, le représenlantdes idées libérales modérées et de l'inslilution
populaire dv. la landwehr, battue en brèche par les éléments réac-
lionnaires qui entouraient Frédéric-Guillaume III. Tout en rendant
justice à la landwehr, M. de Conrady essaie vainement de concilier ses
propres convictions réactionnaires avec le libéralisme et l'unitarisme
^1 en ami de son héros. Il condamne sévèrement les tendances cons-
titutionnelles de la jeune Allemagne d'alors, el pourtant il ne peut
pas cacher que Grolman les approuvait en principe, sans être d'ac-
•^rd avec, tous les écarts d'une fervente jeunesse universitaire. Pour
le pas montrer Grolman comme coreligionnaire politique du libéral
'luoilioldt, l'auteur fait déjà quitter à celui-ci le ministère en 1.S17,
'^ndi;^ qu'en réalité Humboldl tomba en même temps que Boyen el
''■^Iman, en décembre 18(9; et il dépeint l'ennemi de Grolman,
l'u-l Ira-reaclionnaire ministre de la police Wiltgenstein, comme ami
''•^"Voué du demi-libéral Hardenberg (p. 60), lorsque, en vérité, il en
«•^il ilevenu depuis longtemps l'adversaire victorieuï. Quelles conlre-
l'^riies historiques! Grolman prit sa démission parce que le » roi
avait peur du peuple » (p. 76)-, dans sa demande au roi, il parle
0 ^Câ triâtes années qu'il avait passées depuis 1813, ■> el, quoique
Pauvre, il renonça à toute pension pour montrer d'autanl plus clai-
rement son opposition contre le triomphe de la réaction politique et
miliUiire. La position précaire de sa Fortune le fonja à rentrer dans
le service en 4823, et, après quelques années, il devint général com-
mandant le 3' corps d'armée â Posen, oii le roi lui confia également
k baute main sur l'administration civile. Grolman fut partisan du
service mililaire de deux ans pour l'infanterie; il croyait même un
service plus long nuisible à la discipline (p. 209). 11 est donc d'accord
afBC les idées défendues par l'opposition parlementaire de 1860 à
I. £«6m Viut Wirken des GeneraU Cari von Grolman, l. ni. Berlin. Uittler.
Rbv. Hibtor. LXVL 1" p*8c. Il
162 BULLETIPf HISTOEIQUE.
i 866 et avec la législation allemande actuelle contre le principe 1
service de trois ans, maintenu par le roi et empereur Guillaume 1'
M. de Gonrady communique des faits très intéressants au point de vn-^^^
politique sur les préparatifs de guerre de TAUemagne et de l'Autridies^
dans Tautomne de 4840, contre Tattaque dont M. Thiers menapi.^^^
les provinces rhénanes. Bref, malgré quelques dé&uts que
avons dû signaler, Touvrage du général de Gonrady, basé partOQ
sur des documents authentiques et en grande partie încoonus, eer
un beau monument élevé à la mémoire de Grolman qui, avec Schirn-.
hurst, Blucher, Gneisenau, Boyen, rendit les plus grands
pour la délivrance de TAllemagne du joug de Napoléon I*' et pour^ -^
l'organisation de Tarmée prussienne moderne.
Guillaume de Humboldt, comme homme d*État, a trouvé un bic
graphe dans M. Bruno Gebhardt^ Le premier volume de cet excel-
lent ouvrage va jusqu'au congrès de Prague, en août i 8<3. Philosopher^*
esthétique, poète, linguiste émincnt et homme d'État, Guillaium
de Humboidt nous est pour la première fois dépeint dans cette de^ ^
nlère qualité par M. Gcbhardt, d'après des matériaux, en majeure
partie inexplorés, des archives prussiennes. L'immense mérite
de Humboidt est de s^être toujours inspiré de grandes idées générales
et de les avoir appliquées aux affaires, sans pourtant se perdre
dans la théorie, parce qu'il étudiait à fond les détails et possédait un
sens historique très fin. Avec Stein et Hardenberg, mais d*une
manière plus ferme et décidée que ce dernier, il représente le libé-
ralisme parmi les hommes d'État prussiens, après les terribles catas-
trophes de 4806 et de 4807. A trente-cinq ans, il commença sa car-
rière politique par le poste d'envoyé de la Prusse à Rome, où il
défendit le point de vue séculier et protestant contre les prétentions
de la cour pontificale. Mais l'activité la plus féconde fut exercée par
lui comme chef de Tinstruction publique en 4809 et 4840. Quoiqu^il
ne pût se maintenir longtemps contre les intrigues des hauts fonc-
tionnaires qui le haïssaient à cause de sa supériorité intellectuelle, et
contre Taversion du roi pour ses idées réformatrices et pour son libé-
ralisme religieux, il réussit à marquer sa présence au département
de l'instruction par des créations importantes et durables, dont la
plus considérable fut la fondation de l'Université de Berlin, non
seulement le plus grand centre de la science en Allemagne, mais
encore un foyer ardent du patriotisme prussien et allemand. Pen-
dant les premiers huit mois de l'année 4 84 3, il fut, comme minisire de
Prusse à Vienne, l'allié diplomatique des Scharnhorst, des Blucher,
1. Wilhdin von Hunboldt aU SUuUsmann^ L I. Stuttgart, CotU.
<les Gneisenau, et il contribua, plus que Hardenlierg, à reLenir le roi
f rêderic-Guillaume, toujours méfiant el crainlif, dans la voie de la
liilte libératrice. M. Gebhardt, il est vrai, commet la faute de ne voir
<(ue les beaux côtés de son héros; mais il s'est servi d'excellents
malériam el il fait parler autant que possible Humboldt lui-même,
de naanîere que nous obtenons de celui-ci un portrait très vivant,
quoique un peu flatté.
Un autre libéral parmi les hauts fonctionnaires prussiens de cette
époque, Théodore von Scbœï, président supérieur de la province de
Prusse et plus lard ministre, a toujours beaucoup occupé la curiosité
de s«s contemporains et de la poslériLé. La marche de son dévelop-
pement intellectuel est expliquée par les papiers reslant de son
enfance et do sa jeunesse et que son fils vient de publier '. Bien plus
ioiporlanlj est la correspondance de Schœn avec les historiens Pertz
et Droysen, éditée par M. Franz Rùhl'. Elle jette une vive lumière
sur l'éminent homme d'Étal ijui nous parait un peu vaniteui, pré-
Icodantavoirtoujoursraison, dur envers les faiblesses d'autrui, iras-
cible, mais plein de l'amour de l'idéal, porté vers les belles et grandes
choses, prompt à l'enthousiasme, profondément vrai et sincère, ce
iKëme homme que Treitschke, dans sa haine aveugle contre tout ce
<pà est libéral, a osé accuser de mensonge! Malgré toutes ses décep-
[iODs politiques et personnelles, au milieu de la plus triste réaction,
SchoBD, à l'âge de quatre-vingts ans, crojait encore à ravènemenl du
règne de la raison. Quoique manquant d'impartialité, ses jugements
91»* Sleiû et sur Hardenberg, qu'il a si bien connus, sont fort dignes
de considération, ainsi que beaucoup d'indications contenues dans ses
lellrea a Schwinck, à Bunsen et à Friccius, que l'éditeur a ajoutées,
D**i8 les lettres émanant de J.-G. Droysen, ce célèbre historien se
montre sous un jour des plus sympathiques dans toute sa manière
de sentir et de penser. Bref, cette correspondance est fort inté-
rt<Mat)le, et nous sommes reconnaissants de sa publication à
M- Rûfal qui, du reste, l'a accompagnée d'un avant-propos et de
flûles très utiles.
La femme d'un homme d'Ëtat prussien, le comte de Bemslorff,
oiifiistre des AfTaires étrangères sous Frédéric-Guillaume III, a laissé
dss mémoireâ qui ont déjà paru eu seconde édition'. Ëlise de Beb^s-
*;Ziir Kititben- vnd JUnijUngizeU Thaod. von Schôna, naeh dtisen Papie-
muammeageilelU von leinem Sohne. Berliu, SituiOD.
Briefweelael des Ministeri und BurggTafen Theod. von Schen mU
G.-B. Perti und J.-G. Droijsen. Leipzig, Dunclier et Iluinblol.
3. firx^n fliMteUi von Bernslorff. Ein BUd aus der Zeit iwn 1789-1835.
j»« Utren Aufiekhnnnuen. 2> AnUiige, 2 vol. Berllo, Hiltlei.
i(U
BDLLBTtN BISTOBIQDE.
lUBFF, née comlesse Dernatli, de naissance danoise comme soo mari,
est une Ccmme vraiment aimable et gracieuse, dont les souveain
nous Tont connaître la hauLe société européenne, surtout allemande,
dans ses dehors, dans ses lignes extérieures. L'histoire propremeul
dite y a peu à gagner, sauf le sentiment de Tair ambiant de ce monde
étranger à tout progrès littéraire, social ou politique.
M. Horst K.OHL s'est fait une spécialité du grand chancelier de fer,^
dont, enelTet, ilTaitmieui connaître la biographie par des document^
fortcurieuxËttrosauthenliquea. Le troisième volume de son Annuair -^
de Bismarck < nous donne de nouveau des choses très intéressaol
dans sa première partie, intitulée Documents et Uttres. Quatre lettre^^s,
écrites en 1846 par M. de Bismarck à Louis de Gerlach, moolre^cuf
encore le futur ministre comme fanatique de réaction féodale, adver-
saire du prince de Prusse, son Tulur maître, et surtout de la pric»-
eesse Augusta, suspecte de libéralisme. Très importantes aussi les
lellrea du président du conseil Othon de Manteuffel à Bismarck, «^
1835 à 1838. Elles contiennent des données nouvelles sur la condu-*^
de la Prusse pendant la guerre de Crimée, ainsi nue sur les inlrig»»^
qui se croisaient constamment autour du faible roi Prédéric-Oui^'
laume IV, enfin sur la lutte du parti féodal contre la régence ^^^
prince de Prusse, après que son frère fut tombé en démence. ^Ji
mémoire très curieux de Bismarck , de l'année 1 8ei , prouve que, ****
cette époque, il était rempli de méfiance envers les gouverneme**:
allemands et demandait une représentation popuLiire à côlé d^
diète princière, comme signe et comme base de l'unité allemaa^''
Quels changements dans ses idées, depuis .-;on ancienne hostilité coi» *-*
tout élément populaire, et ensuite jusqu'au moment où, plus (arcf -*
déclarait en pleine séance du Reickslag que l'unité allemande résicï-^
beaucoup plus dans les princes que dans le parlement! Le fame^^
projet de Tannexion de la Belgique à la France est traité dans u^ - ^
dépêche du comte de Goltz, ministre de Prusse â Paris, du \2 seP^^
lembre 1866. Comme Goltz répète l'assertion de Rouher que ce pr""^
jet était l'œuvre commune de Benedelti et de Bismarck, celui '
écrit à la marge : « Benedelti le tira tout fait de sa poche > (p. 2^^
et suiv.) ; annotation qui, faite pour le chancelier lui-même.
parait pas manquer de sincérité. Une correspondance entre Bismarc^^
et Koon prouve de nouveau combien il fut difQcile à ces deu
ministres d'amener le roi Guillaume à se déclarer contre le prini
d'Augustenbury et à rompre avec l'Autriche et que leur propre chul»-^
sembla parfois très prochaine. Leur hostilité contre le prince impé-
t. Bimarek-Jaitrbvek, t. III. B«rlin, HKHag.
nal cl surloul contre sa femme se montre ardente (cf. p. 2ii]. Les
^euï autres parties du volume, — discours, conférences, essais et
chronique, — ne contiennent guère rien do nouveau ni d'inLéressanl.
r.'eât une tendance très louable de la part d'un Itls que de servir
la mémoire d'un père célèbre. Le lieutenant-général Waldemar de
Roon, membre conservateur du Reicbslag, avait déjà publié les
mémoires et lettres de l'ancien ministre de la guerre, (jui avait réa-
lisé la réorganisation de l'armée prussienne avec beaucoup d'énergie
el détalent. 11 en publie également les discours*. M. Albrechl de
Roon pcre avait été un des adversaires les plus décidés du parlemen-
tarisme pendant Vépoque du confiit, de '1862 à 1866. Orateur adroit,
couple, toujours prêt à l'attaque et à la défense, généralement poli
dfins la forme, il soutenait pour le principe que la constituUon et
l«s lois doivent être observées, sauf quand elles gênent le gouverne-
ment dans ce qu'il croit bon et utile. Il avait élé prêt à accorder le
«nrice militaire de deux ans et n'avait relire sa promesse de s'y sou-
niettre que devant le veto du roi; mais c«la ne l'empêcha pas de
défendre cette décision du monarque avec une ardeur due à l'obéis-
since du soldat envers les ordres du supérieur. M. Waldemar de
Roon Dis a caché autant que possible celle palinodie de son père. Il
Kl encore aujourd'hui champion du service de Irois ans, abandonné,
pniA à rinfïinterie, par l'empereur actuel, qui a approuvé ainsi les
^dances de la majorité parlementaire de 4 862. Le général actuel de
itoon ne s'en console pas; il n'y a pas d'adjectif méprisant dont il
>'tise enrers le parlement et le parlementarisme. 11 est facile a la
"fcc de se moquer du droit quand elle a les canons pour elle; si la
t^4xnbre des députés de 1862 à 1866 avait en les épées de son côlé
»xinie le parlement anglais en 1643 et en 1688, la verve de M. de
■t^Ofl n'aurait aucune raison de se donner libre carrière. Quand on
''iUi les discours d'un personnage politique en ue donnant des
*-roIes de ses adversaires que quelques maigres résumés, le jour
^ le vent sont déjà fort inégalement partagés; mais le général de
l^oon aggrave celte inégalité en travestissant d'une manière inad-
foissible et eu injuriant les paroles des adversaires de son père. Son
injustice est surtout criante envers le célèbre député Lasker, devant
\>»]uel son père avait pourtant reconnu pleinement ses torts lors de
In fameuse affaire de concussion des chemins de for nouvellement
concédés en 1873. Il est vrai que les coupables étaient surtout des
ibres de la haute aristocratie prussienne; de là les colores du
WKriigtmiKliler von Roon aU Rtdner. PolUitài und mMUtrUch erlûidert,
Kn el III. Breslaa, Treneadt.
166 BULLETIlf HISTORIQUK.
comte Albert de Roon contre le juif libéral qui les avait aœusés
convaincus.
L'importante publicaUon de ia correspondance militaire du maW
chai DB MoLTKB est arrivée à ses U* et III* volumes * . Elle a un intéri
non seulement militaire, mais encore vraiment historique. Goil
laume I*' et M. de Bismarck ne prenaient de résolutions importante
que d'après la constatation des forces militaires relatives des diffi
rentes puissances fournie par Moltlie. Celui-ci, d'ailleurs, était hia
loin d'être exclusivement soldat. Les nombreux mémoires imprima
dans ces deux volumes démontrent en lui un profond politique, unia
sant les réflexions générales aux déductions purement militaires
Dès Tannée 4 860, il prépara les guerres contre P Autriche et la Franc
par ses écrits d'une argumentation serrée, d'une logique claire ■
mathématique, fondés sur des connaissances aussi multiples ■
variées que précises. Le II* volume comprend la correspondance se ni
portant à la guerre allemande de 4866. Convaincu, comme Bismardi
de la nécessité d'une lutte décisive avec la rivale allemande de 3
Prusse, Moltke désirait pousser en avant le roi Guillaume pour atte
quer TAutriche avant que celle^i eût terminé ses armements. Ce fL
en vain ; le roi craignait la responsabilité du premier coup de cano-
et était effrayé de rhostilité que lui montrait l'Allemagne du Sud. L
conséquence de ces hésitations fût que les armées prussiennes, di£
persées sur une ligne de plus de 450 kilomètres pour défendre un:
frontière très étendue, se trouvaient au début de la campagne dan
une position détestable. Les butes et les lenteurs des Autrichien
sauvèrent la Prusse de cette situation dangereuse et lui permirent d
prendre l'ofTensive. Ces faits sont pleinement mis en lumière par c
volume, ainsi que les excellents conseils donnés par M. de Moltk
au roi Victor-Emmanuel sur la guerre de Vénétie.
Le III< volume, qui se rattache à la guerre de 1870-71, seraeneoi
plus intéressant pour le lecteur français. La première partie, seo!
publiée en 4896, va jusqu'à la capitulation de Sedan. Les mémoin
militaires de M. de Moltke nous font comprendre pour la premièi
fois la politique de la Prusse pendant la guerre d'Italie en 4 859. 1
prince régent ne s'était décidé à assister TAutriche contre la Frani
que parce que les hommes d'État et de guerre prussiens étaient pe
suadés que, TAutriche mise hors de combat, la France se jetten
immédiatement sur les provinces rhénanes. Avec un intérêt puissa
nous voyons, dans les différents mémoires relatifs à la future guer
1. MoUkes miUiArische Werke: 1'* térie : MilUOrische Corresponde!
Tol. II et III, f partie. Berlin, MitUer.
ILLENiGNE. 167
tranco-prussienne, se développer^ sous la plume du grand slraté-
fiste, les idées qui l'ont mené pendant l'immeose luLle de 1870.
Iléjàenaoûl 4866, Mollke démontra que l'armée prussienne, alliée
aai troupes de rMlemagoo du Sud, était a même de braver à la fois
l'Autriche, affaiblie par Sadowa et allaquée par l'Italie, et la France,
doDl l'armée était épuisée en hommes et en matériel par l'expédition
dn Mexique. Se tenant sur la défensive envers l'Autriche, les Prus-
siens auraient à prendre hardiment l'ofTensive contre la France. C'est
l'idée qui prévaulégalemeotpendaiit les années suivantes quand une
sUlance austro-française était vraisemblable. Le plan de campagne
ttfltre la France, rédigé par Mollke en mai 4870, est admirable de
clarté, de précision et de brièveté. Quel contraste avec les plans
inlerminables el artittciels des stralégistes de l'ancien régime I Même
quand l'invasion française semblait imminente, en juillet J870,
Moltke était résolu à prendre l'offensive dès que les forces aile-
mindcs seraient complètement réunies. Très intéressants aussi les
(télails concernant la résistance opposée aux ordres de Mollke par le
général de Sleinmelz, qui, comme on le sait, en fui puni par la perle
de aon commandement. On attendra avec impatience la publication
des documents relatifs à la seconde période de la guerre franco-
lUemande.
Ia guerre de 1S66 a été surtout décrite par des historiens et des
mititaires prussiens. Il est d'autant plus précieux d'entendre une
fài autrichienne raconter les faits politiques et militaires de la lutte
pmr la domination en Allemagne. M. Henri Fkiedjung base son Ira-
rail» très important', sur les archives de la guerre de Vienne et sur
les lérnoignages de nombreux hommes d'Étal et de guerre autrichiens ;
" peut nous donner ainsi une idée juste de la manière dont les évé-
uBinenls se sont développés du côté de l'empire austro- hongrois depuis
l'an 1 859. Le livre, du reste très impartial, caractérise avec bonheur
"^ personnages marquants de Vienne; il prouve que l'empereur
François-Joseph a toujours influencé le sort de sa monarchie avec
'*aucoup plus d'énergie el de constance qu'on ne le pense ordinaire-
'"'Ot. Les généraux envisageaient avec beaucoup de craintes une
S^erre avec la Prusse, et ce sont l'empereur lui-même et son funeste
"'oseiller personnel, le comte Esterhazy, qui ont bâté la catastrophe
P*'' des mesures politiques el militaires. Des faits analogues s'étaient
f^^sês en 1 859, lorsque le général Giulay avait déconseillé d^atlaquer
P'^maturémenl le Piémont, mais où François-Joseph s'était laissé
^ - Xur Kampf um die Vorhemchaft hi Deutsthland, 1859- 1S
*n, CMU, 1897.
468 BULLSTIlf HISTORIQUE.
entraîner par son entourage à une offensive que Tétat imparftdl des
préparatifs militaires ne justiflait nullement. La véritable respoDsa-
bilité des fautes commises pendant la campagne de 1866 incombe aa
général Krismanic, chef de la chancellerie cPopéralions du maréchal
Benedek, et non pas, comme on Ta cru jusqu'ici, au général de
Henikstein, qui n'a joué qu'un rôle effacé.
Très animée el toujours intéressante, la narration de M. Friedjang
est moins originale quant aux faits relatifs à la Prusse. Quoique grani
admirateur de M. de Bismarck, Fauteur justifie les bommes d^ÈUd
italiens de s'être méfiés du chancelier, leur allié, qui, en effet, av3i^
toujours été prêt à les sacrifier à TAutriche, à laquelle, encore p^*^
de semaines avant la guerre, il offrait le partage de TAllemagne elL la>
garantie de la Vénétie. L'ouvrage do M. Friedjung est une des publ^'
cations les plus importantes de Tannée 4896.
Après avoir terminé son livre capital sur la guerre de 4806-4 SOTT^
le colonel de Lettow-Vorbeck entreprend de raconter celle de 4860 * -
Le premier volume comprend les préparatifs politiques et militai*"^®
et les faits qui ont amené l'occupation de la Hcsse et du Hanovre p^'^
la Prusse. Avec son impartialité bien connue, M. de Lettow a le co^^"
rage de dire hautement (p. 44) que c'est, non la diplomatie de Bismarc^^ »
mais seulement les victoires rapides et écrasantes de l'armée, — €[
personne n'avait pu prévoir, — qui ont décidé la lutte avec F-
triche en faveur de la Prusse et que, par conséquent, les bésîtatî^^*^^
antérieures du roi Guillaume el de ses proches, responsables de Y*
nir du pays et de la famille des IlohenzoUern, étaient entièrement j U
tifiées. Nous apprenons des détails fort intéressants sur les négociatic^
entre la Prusse et le Hanovre. Le jugement militaire du colonel ^®
Lettow n'est pas moins clair et juste. Les causes de la catastrophe
Hanovriens à I^angensalza sont exposées pour la première fois d*"'
manière authentique et impartiale. Nous voyons que les généra
prussiens ont commis à cette occasion de lourdes fautes et que
succès final n'est dû qu'à l'aveuglement physique et intellectuel ^^*?
roi George V, à la faiblesse de son général en chef Arentschildt e^
la chance, alors si favorable aux Prussiens. Les volumes ultéri»^^^
de M. de Lettow-Vorbeck auront à exposer des faits plus glori^
pour les chefs de l'armée prussienne.
La même impartialité domine le livre par lequel M. GAEinBB déc^
les premières batailles livrées par les armées allemandes sur le
français, en 4870^. Dans sa narration très vivante, l'auteur recc^
1. Geschichte des Krieges von t86G, t. 1. Berlin, Mittler.
2. Die Einmarschkxmpfe der de^itschen Armée imAugust 1870. Berlin,
ALLKHAGNE. ' '16$
naît pleinement la tenue admirable des soldats de Mac-Mahon contre
le nombre très supérieur des troupes allemainies; il célèbre surtout
les zouaves et les lurcos comme modèles des vertus guerrières.
M. Garnier constate que seuls les corps d'armée de la vieille Prusse,
mais point ceux des provinces annexées en 4866 ni les Allemands
du Sud, étaient égaux en valeur militaire aux régiments du 4" corps
fraudais.
Deux ouvrages traitent du siège de Metz dans un sens plul&t de
critique que d'histoire militaire. Le major Kdstz', auteur que nous
avons déjà mentionné dans nos comptes-rendus précédents, se dis-
tingue par la nouveauté de ses recherches; le général Guillaume de
ScHERFF^ qui s'appuie presque eielusivemenl sur l'ouvrage de l'état-
major prussien, surpasse son rival par la sûreté du jugement poli-
tique et militaire. Tandis que M. Kuntz voit dans Bazaine un trailre
ayant sacrifié ses devoirs militaires à ses projets d'ambition person-
nelle, M, de Scherff, — avec raison, ce me semble, — explique les
fautes commises par le maréchal surtout par son incapacité et par
son manque de résolution. Bien loin, d'ailleurs, d'attribuer la catas-
trophe de l'armée du Rhin au seul Bazaine, il trouve des défauts
semblables dans ses subordonnés, qui, autant que lui, ont manqué
l'occasion de battre le i" corps d'armée prussien, presque trois fois
plus ^ible que refTeclir Français, dans la bataille de Noissevtlle. Le
général de ScherfF n'a pas non plus une opinion très favorable des
talents du prince Frédéric-Charles comme général en chef. Ici, il est
<ïu cnénie avis que M. Fritz Hce^ig.
C'est avec plaisir que je rends compte do l'éminent livre de ce
''ernier auteur sur la Campagne de la Loire en automne 1870'.
^^ grand mérite de M. Hœnig est d'introduire dans l'histoire mili-
•^re les éléments ethnographiques et psychologiques. Pour lui, il
^'y a pas que des chiffres et que des unités tactiques; sous tout cela,
'1 sent les hommes, les nations dans leur vie individuelle. Les por-
^•ts des chefs, tant allemands que français, sont tracés de main de
"Maître, avec une impartiahlé et une bonne foi parfaites, et à l'aide
0 etutJeg fort étendues et contrôlées par une critique sérieuse et
"•^thodique. L'aul«ur n'expose pas moins bien l'état physique et
■Qoraj des troupes, leur organisation et leur armement. A côté de
t der Loire Un Berbst 1870, val. 111 et rv. Berlin,
470 BULLBTIff HISTOEIQUB.
rimmense littérature déjà imprimée, ainsi que des archives de la
guerre, M. Hœnig s'est servi de nombreuses informations particu-
lières, écrites ou orales. De cette sorte, son récit gagne énormémait
en animation et en largeur. Cependant, nous trouvons dans ces
espèces de sources les mêmes inconvénients que Ton a souvent obser-
vés dans les mémoires historiques : l'auteur, volontairement ou par
instinct, cherche à se faire valoir, à cacher les fautes qu'il aura com-
mises et à agrandir son rôle dans des événements déjà fort lointains.
M. Hœnig n'a pu éviter entièrement les pièges que ce genre d'infor-
mations lui tendait inévitablement. Cependant, la grande quantité et
diversité de ses matériaux et la critique qu'il cherche à exercer par-
tout lui ont permis de redresser de nombreuses erreurs, et notam-
ment les batailles de Villepiou et de Loigny-Poupry (4 '^ et 2 dé-
cembre 4870) ont pris sous sa plume une figure toute nouvelle.
— Les deux premiers volumes, parus en 4894, avaient mené
le récit jusqu'à la bataille de Beaune-la-Rolande; les deux volumes
nouvellement publiés traitent des événements décisifs du 4*' et du
2 décembre, où TofTensive française et l'offensive allemande se heur-
tèrent pour finir par la défaite de Tarmée française. L'auteur, qui
reconnaît firanchement les fautes commises par plusieurs généraux
allemands et même par leur grand état-major, rend hommage à l'hé-
roïsme inattendu de Paris, au talent et à la force de caractère de
Chanzy, au mérite de plusieurs autres chefs français et au courage
malheureux de leurs soldats improvisés, ainsi qu'au patriotisme
ardent de la nation française. Depuis le général von der Goltz, aucun
écrivain militaire allemand n^a apprécié aussi justement le génie
politique et organisateur de Gambetta; M. Hœnig est d'autant plus
sévère pour M. de Freycinet, dans la présomption et l'insufOsanœ
militaire duquel il voit une des causes principales des malheurs qui
ont fait échouer les efforts surhumains du dictateur et du peuple
firançais. L'ouvrage de M. Hœnig sera, non seulement pour les mili-
taires, mais encore pour les historiens, une des sources de connais-
sances les plus complètes pour cette époque do la grande lutte de
4870 à 4874.
Nous avons à rendre compte d'un certain nombre d'ouvrages con-
cernant l'histoire entière d'un pays. L'Histoire du Wurtemberg, par
M. Eugène Schneider ^ comble une véritable lacune en nous donnant
un ouvrage basé sur des études scientifiques et accessible au grand
public. Si la majeure partie du volume est rédigée d'après les travaux
antérieurs sur le même sujet, les xviii" et xix" siècles sont racontés
1. WUrttembergische Getehichie. Stuttgart, Metzler.
' la foi de recherches nouvelles et même d'après des sources
naiiuserites. Le livre est intéressant el bien écril et jette des lumières
très caracLérisliques sur l'histoire de l'Allemagne du Sud peudaut les
int* et iTiii' siècles. Les études de l'auteur sur les évéuements con-
ceraaDl le Wurtemberg pendant le xiï* siècle, faites sur les doeu-
menls mêmes, montrent de nouveau la manière partiale et injuste
dont M. de Treilscbke a traité tout ce qui n'était pas prussien ni
absolutiste, et combien peu de foi on peut prêter aux opinions et aux
tai\s contenus dans son Histoire d'Allemagne. Les parties du livre
de M. Schneider qui se rapportent au règne du premier roi de Wur-
temberg sont importantes pour l'époque de Napoléon I" et coïncident,
dans leurs conclusions, avec l'ouvrage du général Pflster. Peut^lre
le roi Frédéric est-il jugé trop favorablement par M. Schneider. De
mémo, le récit des luttes coListilutioiinelles sous le roi suivant,
Ouillaume 1", est très intéressant. Ce souverain parait réellement
favorable aux idées constitutionnelles et libérales et pour cette raison
même en butte aux hoslililés de l'Aulriche et de la Prusse. Mais,
depuisles événements de 1848, la question principale pour les princes
allemands devint celle de l'hégémonie toiyours menaçante do la
Prusse. Guillaume de Wurtemberg s'écria : • Je veux bien me sou-
mettre à un Habsbourg; à un Hohenzollern, jamais 1 » Et une autre
fois : < Plutôt l'allié de la France que le vassal de la Prusse I >
Cependant, tout comme pour d'autres pays allemands, la révolution,
tant de fois blâmée et injuriée, de iSiS eut pour le Wurtemberg des
ccHiséquences heureuses et durables : beaucoup de libertés proclamées
par le parlement de Francfort s'introduisirent dans la constitution
vurtembergeoise. — M. Schneider aurait pu accorder une place plus
lat^ à l'histoire du développement intellectuel et matériel du peuple
mirtembergeois.
M. Alphonse Hobkb continue son excellente Histoire d'Autriche,
qui vient d'arriver a son cinquième volume, comprenant l'époque de
4609 à 1648'. Écrit sur les meilleurs matériaux déjà connus, sans
la recherche de Tinédit, cet ouvrage est ftiit de manière à donner au
public lettré une histoire digne de toute conllance, impartiale et bien
rédigée. Il ne veut rien offrir de nouveau à Thistorien de métier.
H. Huber édite également l'Histoire de l'administration publique
en Autriche de (710 à 1848, laissée par feu le conseiller de cour
d'appel Ignaz Beidtel'. Le premier volume en a paru. Le conseiller
1. Geiehlchte Œsterreleh», t. V. Gotha, Pertbes,
. î. Gachichle der œslarekhiiehen Staatnerwaltung, 1740-1:
L
Bcidlcl, qu'une biographie rédigée par M. Kuhcrnous fait inllmemet^''
connaître, était un clérical vraiment fanaticpie, letlemenl homme d**
mo^eu âge qu'il condamna même rô),'alité de tous devant les Irit»*^
naui cl dans la pépression des cricnes. Par consé<iuenl, il est adve*"
saire décidé de l'empereur Joseph II el de son œuvre, ainsi que ^
toute sorte de liberté. Cependant, malgrù sa criante partiallli, 1 '*>**'
vrage de M. Beidtel mérite d'être consulté sur nombre de détails ***j
réformes administratives réalisées sous Marie-Thérèse, Joseph t*- j.
Léopold II. M. Huber, qui a publié ce livre selon les vœux du 111^
l'auteur, ajoute des notes contenant des citations d'ouvrages moder-^'^
el réfutant parfois les indications erronées de feu M. Beidtel.
La vieille et vénérable collection de l'Histoire des ÉtaUs d'Euro^t^
commencée il y a soiiante-huit ans par Hebbeii et Ukebt, est repr.
maintenant parCtiarksLtHPBËcaT, le professeur bien connu deLei
£ig. Le premier volume qu'il y fait publier est le tome 1 d'une Hf
toire de la Russie jusqu'à h fin du \nu' siècle, par A. BauECKNEa
L'éditeur expose, dans un avant-propos, le plan d'après lequel il
continuer la grande entreprise. Comme autrefois, de nombre
maîtres y contribueront, selon leur individualité; mais on appuiei
désormais beaucoup plus sur la KuUurgeschickte qu'auparavant,
tendance qui, comme tout le monde le sait, a toujours été celle d^^
M. Lamprecht.
L'ouvrage de Briickner est fort original. Il ne donne pas une his— ^
toire de Russie, comme ses prédécesseurs, mais il «pose les progrès^
du procès à'etiropéisation de ce pays. Au lieu d'unp narration chro- "
nologiquB, nous y trouvons des coupes transversales de la société
russe d'après des époques un peu arbitraires. Le livre est très spirï*
tuel, cependant plutôt une collectiOD d'anecdotes qui, inévilablemeut,
sont plus ou moins choisies au hasard des études de l'auteur. Il fait
mieux comprendre l'histoire de l'ancienne Russie, maïs il ne l'en-
seigne pas. 11 est bon à lire à côté des histoires proprement dites,
mais il ne les rend nullement superflues. C'est un ouvrage fait plutôt
pour le curieui et peut-être pour l'ethnographe que pour celui qui
voudrait étudier, sous tous les rapports, le passé d'une grande nation.
Malheureusement, M. Briickner, cet excellent connaisseur de l'histoire
russe, est mort dans cette même année de ^896; qui continuera son
œuvre dans son esprit el avec ses qualités? — Fait importaol : après
des recherches approfondies, Briickner arriva à nier complètemenL
l'inDuence que les Scandinaves auraient exercée sur l'origine de l'État
I , Gtich. Buutands bii zum Ende de* IK. JahrhuaderU, (. I. Gotha, Pertltet. J
AiXEUGrre,'
EUd aulre ouvrage de la même coDecLîon est la Iraduclion, assez
ibre, de la Finlands Bistoria, de M. M, -G. Scaïbeagsos, par M. Yritz
AuiEEiH*. L'auleurarevu lui-mêitie son texte original et l'a continué
jusqu'à la mort du Isar Alexandre III. Le traducteur l'a abrégé, sur-
tout dans les parties relatives à Tliistoire générale de la Suède. C'est
mil excellent livre, qui contient l'hisloire du développement intérieur
fuissi bien que celle des événomeols politiques.
La politique coloniale de la France, depuis l'an J6Gf jusqu'à
l'époque actuelle, est exposée par M. A. vos BaAaDT^. Il y a surtout
«leiu époques qui rintéressent : celle de Colliert, qu'il cherche à jus-
llfter contre les reproches des physiocrates et des historiens qui les
M«nt suivis, et celle des traités de commerce visant au libre-écbange
^Btiaugurêe par Napoléon III. Basé sur des recherches sérieuses et sur
^Hfes résultats de la statistique, el pourvu d'un riche matériel de faits
suUientiques, ce livre est également utile à l'économisle el à rhis-
lorien.
Colbert est dérendu aussi dans un volume de M. Guillaume Navùé
«lédié à la politique frumentaire des États européens depuis le ini'
jusqu'au iviii" siècle. C'est une partie de la grande collection des
^ctes de l'administration intérieure de la Prusse, publiée par l'Aca-
«Jémie de Berlin sous la direction spéciale de M. Schmollee^. Ce pre-
.mier volume forme l'introduction à l'histoire de la politique fru-
^■□cntaire de la Prusse pendant le ivii[° siècle. On pourrait se
«leniander si, pour une publication destinée à donner les résultats
«les documents prussiens, il est vraiment indiqué d'exposer la
|)oUtique du commerce des céréales dans tous les États européens
«Icpuis le iiii" siècle. De celte manière, les Acta Borussica soiil
xoeitacés du sort de tant d'autres collections semblables, de ne
Jamais être terminées. Abstraction faite de celte considération, le
Vravail de M. Guill. Naudé monlre une connaissance très étendue de
-Ka liltérature spéciale. .Mais ce qui fait défaut à cet auteur, c'est à la
•bis l'approfondissement Intellectuel de la matière, la largeur des
foinls de vue et le soin des détails. Le livre fourmille d'erreurs.
Comment peut-on dire, par exemple, sur la foi de quelques plaintes
accidentelles, que l'agriculture française était entièrement ruinée vers
_ I. GetchkshU f^imlaitiU. Deulscbe Bearbeitung. Gatba, Perlh«s.
1 2. Beitriege sur GeuMchle dtr fraaXœsiKhen HaruleUpoUiik ivn Colbert
PMi t»r Gegeiticart. Leipzig, Dnncker el Humblot.
3. Âeta Boruuica. Dentm-rter der PreuuUchea Slautiverivallung iwi
18. Jahrhundtrl. Herauâgegeben Ton der Akudeinie der Wissenschallen.
Ctir^dêhaitdeUpalUik, 1. Band : Die GelreidthandeUpoliUk der europxlic/ien
SUaten vom 13. bii iS. Jahrhunderl. Berlin, Parey.
474 BULLETIIff HT8T0EIQUB.
le milieu du zyii« siècle (p. 34), que, même au iyiii* siècle, rAngleterre
était beaucoup inférieure à la France et à la Hollande dans son déve-
loppement industriel (p. 403), que la grandeur de la marine anglaise,
pendant ce même siècle, dépendait surtout de l'exportation des
céréales, qui était, en moyenne, de 700,000 quarters par an (p. 424)?
M. Naudé a prouvé, comme M. de Brandt, que Colbert n*a pas été
aussi nuisible à Fagriculture qu'on a voulu le prétendre. Mais il est
feux de dire, comme Fauteur le fait (p. 56), que le grand ministre a
voulu faire de toute la France une unité douanière. En vérité, les
douanes provinciales sont restées sous son administration eequ'elles
avaient été auparavant. La meilleure partie du livre est encore l'ex-
posé de la politique du commerce des céréales de la Hanse et du Nord
Scandinave.
Il faut, au contraire, approuver sans restriction l'Histoire des pro*
ces contre les sorcières en Bavière, par M. Sigismond RiEZLEa *. Elle
est fondée sur des études approfondies et rédigée avec une complète
imparlialité. L^auteur montre que le terrible fléau des procès contre
les prétendues sorcières date de l'antiquité germanique païenne, que
rÉglise ancienne ne l'adoptait qu'à moitié, mais que, depuis le
XIII* siècle et surtout depuis saint Thomas d'Aquin, elle ftdsait de la
superstition magique un dogme et de la persécution des magiciens
et des sorcières une de ses préoccupations principales. L'humanisme
avait refoulé ces horreurs, qui furent malheureusement ressuscitées
par la bulle Summis desideratUes affectibus d'Linocent YIII, du 5 dé-
cembre 4484. C'est depuis cette bulle néfaste que la persécution corn*
mença, plus terrible que jamais. Après la réforme religieuse, les trois
confessions chrétiennes rivalisèrent de rigueur contre sorciers et sor-
cières dans le pays où elles se trouvaient réunies toutes les trois^
c'est-à-dire en Allemagne. En Bavière, les Jésuites se font, depuis
4590, les propagateurs principaux de la persécution. La dernière
sorcière y a été brûlée en 1756, mais des prescriptions détaillées
pour de tels procès se trouvent encore en 4769 dans les livres de
procédure criminelle en Bavière. Et on s'étonne que l'affreuse supmi^
tition n'a pas encore disparu aujourd'hui de ce pays !
L'habitude se répand chez nous de plus en plus pour les auteurs
de faire réimprimer et réunir en volume les moindres bribes de
littérature qu'ils ont jadis publiées dans un journal ou dans une
revue. C'est à cette catégorie d'écrits qu'appartiennent les essais de
M. Hermann Grihm, qui portent le titre passablement prétentieux
1. Getehichte der Hexenproiesse in Bayem. Stattgart, GoUia.
ALLEHAGNE. 175
de CoatribuUons à l'histoire de la cullurB allemande'. En réalité, ils
ne traitent que de quelques sujets de littérature et d'art assemblés
au hasard, La partie la plus intéressante de ce volume sont les notes
coaoernant les célèbres père ei oncle de l'auteur et Torigine des
eootea populaires qu'ils ont réunis el narrés d'une manière si heu-
reuse (p. 2-14-247]. M. Herm. Grimm (ils est un auteur plein d'es-
prit, mais sans suite ni clarté dans le développement de ses idées, et
(fun sljle tout individuel qui n'est pas l'afTaire de tout le monde,
MoD moins originales sont ses opinions personnelles; il trouvera peu
de partisans, par exemple lorsqu'il prétend (p. ii9] que i Millet est
le seul véritable peintre que la France ait jamais produit. >
La collection d'essais que M. Ottokar Lobenz a Tait paraître sous
le Ulre d'fiommes d'Ëlats et bistoriens du m' siècle ° contient pour
la plupart des articles donnanldes critiques ou des extraits de livres
publiés depuis vingt ans et peu intéressants aujourd'hui. 11 n'y a
rjeu d'original dans ces Irailés, sauf quelques jugements qui tendent
généralement à être le contraire des convictions du monde entier,
comme c'est, depuis quelque temps, l'habitude constante de M. Lo-
renz. Partisan enthousiaste du passé, ennemi du consUtutionalisme
et de toute liberté populaire, croyant, avec feu Léopold de Gerlach,
((ue le bon Dieu punit comme de méchants enfants les États qui com-
mettent des erreurs, il combat le développement moderne avec un
^cbttrnement peu digne d'un historien qui devrait comprendre el non
P^s condamner en bloc. Le Verre d'eau de Scribe est encore pour lui
le Qn fonds de l'histoire : les plus grands événements sont dus à de
petites intrigues de comparses cachés. Je ne saurais admettre qu'un
'^^'l des principes énoncés par M. Lorenz : « J'espère que le ton
•iêclaraaloire que les historiens ont inautiure dernièrement sera Iran-
^•loire. iVest une méthode peu recommandable de traiter Thistoire
*^»*ïttie le marquis Posa (dans le Don Carlos do Schiller) joue au
'*'éâlre, et je me trouve du côté de ceux qui croient les déclamations
***«* içg personnages morts alTaire du curé el point de l'historien, i
L'essayiste bien connu Charles -Théod. Keigel publie, dans ses
Iniages et esquisses d'histoire^ le cinquième volume de ses petits
**^*ts historiques. Comme toujours, ils sont bien rédigés, agréables
* *îre, sans grandes prétentions littéraires. A.u point de vue histo-
*■ SffHrarjeu
**rtii». Hertz.
^- GtÊChielUlicke BUder und Skizien. Uunicli, Lebmi
476 BULLBTIlf H18T0EIQUE.
rique, ils sont d^une valeur bien inégale. Quelques-uns, tels que 1
essais sur Taine et sur le divorce de Napoléon P', ne contienne
rien de nouveau et parfois des erreurs manifestes. Les articles oo
sacrés à l'empereur Léopold P' et à la politique prussienne penda
la guerre de Grimée donnent des extraits intéressants de correspo
dances inédites, mais sont trop exclusivement basés sur ces matéria
insuffisants, en négligeant toute autre source de connaissances, po
ne pas arriver à des résultats foncièrement inexacts. D'autres essa
au contraire, sont fort instructifs. M. Heigel démontre déflnitivemc
la fausseté du prétendu envoi d'une épée et d'un chapeau consaci
par le pape Clément XII au maréchal autrichien Daun après
bataille de Hochkirch. Il donne pour la première fois une bistoi
documentée du pacte de famille conclu, en 4724, par tous les princ
de la maison de Wittelsbach et placé sous la protection de la Fran(
point de départ de l'élection impériale de Charles-Albert de Baviè
en 4744. Un autre essai prouve que la lâche reddition de Hannhei
aux faibles troupes républicaines, en 4 795, doit être imputée, non p
à une trahison des ministres, mais à la pusillanimité de l'électeur pal
tin lui-même. D'autres articles traitent des questions d'art et de dn
public. Tout le monde trouvera à glaner dans les pages de M. Heig(
Le quatrième congrès d'historiens allemands s'est réuni à Innsbra
du 44 au 44 septembre 4896^ Le nombre des participants ne fut p
grand, à peu près 420, presque tous Allemands du Sud ou Âutr
chiens. On discuta l'édition d'un atlas historique des pays alpin
puis l'origine des élats des pay;3 du moyen âge. On formula une séi
de questions à résoudre par les académies allemandes. On ne p
s'entendre sur la manière dont les archives devraient être ouvert
aux recherches historiques, et on finit par se contenter de demand
au comité du congrès d'énoncer des vœux en faveur d'une liberté pi
grande dans l'accès des archives pour les historiens. La lutte enl
l'histoire politique et la Kulturgeschichte était un des points prop
SOS aux discussions du congrès. Au lieu de cette question, on dispt
sur l'objectivisme et le subjectivismo dans l'historiographie. GN
une question de tempérament et de sentiment. Il va sans dire qi
la fin tout le monde garda son opinion première.
M. Philippso3I.
1. Voir l'article de H. Blondel dans la RevtLt historique, LXV, 323.
W. le chevalier d'Arneth est mort à Vienne le 30 juillet 1897.
Comme il arrive aux esprits vraimeul supérieurs, son nom élait
connu bien au delà des frontières de son pajs. Grand officier de la
Lê^an d'honneur, Il est connu en France par ses nombreuses publi-
cations concernant l'histoire de la Franco aussi bien que celle de
l'Aulricbe; il est juste que la Bévue historique lui consacre autre
ctiose qu'une simple notice nécrologique.
Dans un ouvrage en deux volumes, paru en 1891 et intitulé :
AusMctnei/i Leben, Arneth a raconté lui-même comment il s'était
formé. Il est né à Vienne le )0 jullletlSlO, de parents remarquables
pat- kor culture intellectuelle. Son père élait un savant dislingué;
sa mère, — plus connue sous son nom de jeune fille, Antoinette
A- clam berger, — était aussi célèbre par sa beauté que par son latent;
^ife était actrice au Burgthealer de Vienne. En 1 809, elle avait joué
*'*"«î«; toute la troupe devant Napoléon I" à Schœnbrunn; elle racon-
*^it de lui que, le libretto français à la main, il avait suivi la repré-
^^'i talion allemande avec la plus grande attention.
ï*our perfectionner son éducation, Arneth fui envojé avec son
'•"fet-e aîné à Krerasmiinster, oii il reçut une instrucliou solide. A dix-
®^C>(ans, il suit les cours de droit à l'Université de Vienne. Là, dans
*^ Vile natale, il s'adonne avec zèle à Tétude des plus importantes
■t*^t*ioi les langues modernes; ses connaissances en celte matière lui
*^^*"cnt, pour sa carrière future, de la plus grande utilité. Son amour
^*>tir M'" de Schœffer, qui devint plus tard sa femme, faillit le
**^tourner de la carrière scientifique. .\fin de pouvoir demander en
f**a.riage sans relard la charmante jeune fille, il étail prél à accepter
^ la. campagne un modeste emploi dans l'admiiiislralion des domaines
* ■*> F>ériaux. Si son père ne s'élail énergiquement opposé à ces projets,
:^^**rjetb, au lieu de devenir le biographe de la grande impératrice
**a.fie- Thérèse, aurait achevé sa carrière dans un poste d'intendant.
V^^ ''ut donc une résolution décisive pour lui qu'il prit en cédant aux
***st.anccs de son père; au lieu de partir [tour la campagne, il entra
^*^x Archives de l'État de Vienne, dont les trésors eurent vile fait
'^^ l'eiilbousiasmer pour l'élude de l'histoire. Ce qui fascinait surtout
^**<i esprit, ce n'était pas tant les documents concernant le moyen
^S^ que ceux des temps modernes. Aussi le xviii" siècle a-t-il trouvé
^*^ Arneth un de ses plus zélés et plus heureux hialoriens. Avec l'ins-
tiBï, iliaioR. LXVl. 1" fASC. 15
478 BULLETIN HISTOltQUI.
tinct de rhomme d'État qui s'efforce de saisir le lien entre le préseik.
et le passé, il cherche à pénétrer dans Tesprit de Tépoque d'où pi
cède le siècle où il vit. Il s'était proposé de raconter Thistoire
temps modernes, mais sans se laisser entraîner par les passions
partis. Il est le premier qui, en Autriche, ait étudié aux sources 1
plus directes et dépeint avec une grande largeur d'esprit ce passé
nous touche de si près. U avait un penchant tout particulier
les études biographiques; raconter la vie de personnages é
est un goût auquel il est toujours resté fidèle. Après avoir publi
en 4853, la biographie du maréchal Starhemberg et, en 4858,
un ouvrage en trois volumes, celle du prince Eugène de Savoie, il
paraître, en 4 863, le premier volume de son histoire de Tim
Marie-Thérèse. Il était orgueilleux de puiser dans des documen
jusqu'alors complètement inédits pour présenter à ses contemporair — ms^
l'image de cette princesse, qui peut être considérée comme aja^Kitt
réellement créé la vie politique moderne en Autriche. Son ou^
en dix volumes sur Marie-Thérèse est vraiment un monument
de l'activité féconde et bénie de la noble princesse. Ceux même q
ne seront pas toujours d'accord avec l'auteur devront reconnalt^g'c
qu'il a fait là une œuvre belle et méritoire, qui est un honneur m
seulement pour lui, mais pour le pays dont il est le fils.
de ceux qui voudraient se faire une juste idée de raetivité cM^
cette grande souveraine ne devra négliger de consulter ce livre. XI
pourra être complété, amélioré dans certains détails, — c'est
sort commun à tout ouvrage scientifique, — mais son im]
n'en sera pas diminuée. Dans l'intérêt de l'œuvre, il eût
lement été désirable qu'Arneth eût mieux dominé ses matériau^^-
Quoique son récit soit plein de vie et qu'il écrive d'un bon style, ^^
ne possède cependant pas la puissance d'évocation d'un Macaula^^*
Outre ses ouvrages biographiques, Arneth attira encore Tattentii^''^
générale par la publication d'un grand nombre de sources impor^*^
tantes pour l'histoire du xviii"^ siècle. En première Ugne, il flu^^
mentionner la correspondance de Marie-Thérèse avec Joseph Vf-^
celle de Joseph II avec son frère Léopold et avec Catherine II d^
Russie. Mais ce qui excita au plus haut point l'attention, ce fut sa
publication de la correspondance de Mario- Antoinette. Tous ceux qui
se sont occupés de l'histoire de la malheureuse reine savent de qudle
importance sont ces lettres, filles ont modifié de fond en comble le
jugement porté sur elle par le monde savant. Des satires^ des écrits
haineux et des lettres falsifiées présentaient à la postérité l'image de
la reine sous le jour le plus défiâivorable ; sa correspondance authen-
tique, — eUe est maintenant dans toutes les mains, — l'édaire d^une
J
^m
tUTBICBR. 479
lumière difTérente et la rend plus sympathique. Il est intéressant de
roirdaus les mémoires d'Arueth les raisons qui l'ont délermiué à
[>LB.])lier cette correspondance. Dans les dix dernières années du
s,^^3nid Empire, l'impératrice Eugénie avait mis à la mode à Paris le
i^&xlte de l'infortunée souveraine. Arnetti avait entendu raconter par
le général bavarois von der Tann qu'il s'était trouvé présenta plu-
sieurs reprises quand on faisait circuler dans les salons de l'impé-
raLrice des lettres de Marie-Antoinette, lettres qui y excitaient autant
d'admiration que de pitié pour le sort de la malheureuse princesse.
Les tirades emphatiques, ,dont étaient remplie3 ces [lettres lues avec
l£Lnt d'enthousiasme dans le boudoir de l'impératrice, donnèrent à
^.i-ueth, dès qu'il put en prendre connaissance, l'impression d'une
Ca.isiflcalion. A ce moment, il était peut-être le seul à avoir vu des
leLtrijs authentiques de Marie-Antoinette. 11 n'hésita pas un instant
a les publier et il obtint un succès complet. Il fallut avouer, quoique
a regret, que presque toutes les lettres de Marie-Antoinette, publiées
auparavant, étaient falsiliées. Seul le comte P. d'Hunolstein, un des
édiUurs trompés, ne voulut pas se laisser convaincre ; il ne put jamais
I IB résoudre à comparer les lettres apocryphes qui étaient en sa posses-
I tioD avec les lettres authentiques conservées aux Archives de l'Ëtat
<le \iHDne, bien qu'il y eût été souvent invité par Arneth. Un peut
direavec certitude que celte correspondance, de même que les recueils
publiés par lui en collaboration avec les savants français Geffroy
{VaTie-Anloinel{e, correspondance teeréte entre Marie-Thérèse et le
'^fnlfde Hercy-Argenteau. Paris, 187'!) et Flammermonl [Corres-
pondance secrète du comte de Mercif-Argenteau. Paris, 1889),
'"^^iudls qui contiennent les matériaux essentiels pour une biogra-
phie ilèllnilive de Marie- Antoinette, ont acquis au nom d'Amelh une
•^'ébrité européenne. Son volume sur ■ Beaumarchais et Sonnenfels ■
t Vieillie, 1868) a de plus une importance toute particulière pour la
*^ra.nce. Il y décrit avec verve, et en s'appuyaut sur des documents
^*étlii3, un des plus gais épisodes de la vie du grand écrivain et le
Pt'ésenle comme un des plus impudents aventuriers qui aient été.
La valeur d'Arnelh ne réside cependant pas exclusivemeut dans
*^n activité littéraire. 11 a de plus ce grand mérite d'avoir le premier
r^'ormé le service des Archives. Les pénibles difficultés auxquelles
^ s'était heurte lui-même, (|uand il avait voulu y travailler au début
*** sa carrière littéraire, lîreut de bonne heure naître en lui l'idée de
■^■^■voquer des réformes dans cette administration. Rappelons a ce
t*«'opoB l'amusante historiette qu'Arneth a contée lui-même dans ses
^^^^■noires. Vers i 850, époque où il taisait déjà partie du miulslère des
4S0 BULLETIN HISTORIQUE.
affaires étrangères, il publia dans les comples-rendus de rAcadéimede&
sciences à Vienne la correspondance du roi Charles III d^Espagne, —
plus lard Tempereur Charles VI, — avec le comte Jean Wenceshs
Wratislaw. Dans l'espoir de recueillir les éloges qu'il croyait méri-
ter, il apporta ce travail à son chef, le baron Werner, de qui dépen-
daient également les Archives de l'État. Quelle ne fût pas sa décep-
tion lorsqu'il n'obtint du baron, au lieu des louanges qu'il attendait,
que le blâme le plus amer : « Malheureux, » s'écria celui-d, c qu*a-
vez-vou5 fait? Comment avez-yous pu avoir l'idée de faire imprima*
la correspondance d'un membre de la maison impériale? Qui vous
en a donné Tautorisation? Je vous préviens que, si quelque vieille
dame de la cour trouve un cheveu dans votre publicalion et vous
dénonce en haut lieu, je m'en lave les mains; je ne m'occuperai pas
de vous un seul instant, je vous abandonne complètement. » —
A peine, en 4868, Arneth fut-il nommé directeur des « archives
secrètes de la cour et de TÉtat » qu'il établit en principe qu'on
pourrait librement en utiliser les trésors. Il ne fit à cet égard
aucune différence entre amis et ennemis de l'État dont il étùt
citoyen. U est bien permis de dire qu'Arneth créa ainsi un précédent
qui fit époque dans la direction des archives européennes.
Arneth n'était pas seulement un érudit. Historien de valeur, Q
entra aussi dans la politique militante. La Révolution de 4848 lui
offrit une première occasion d^y jouer un rôle; il fut à cette époque
délégué au parlement de Francfort. U y déploya une éloquence qui
commanda instantanément l'attention. Nous devons résister à la
tentation de donner ici un portrait détaillé d'Arneth comme hooune
politique. Nous nous bornerons donc à dire qu'il fit constamment
preuve d*un esprit indépendant et libéral. A aucun moment il n^a
hésité à se poser en champion d'une monarchie constitutionnelle.
Dans la chambre des seigneurs autrichienne, dont il faisait partie, il
s'éleva toujours, avec de chaleureuses et éloquentes paroles, contre
l'absolutisme et le « zélotisme » de tout genre. U avait le courage de
dire en haut lieu la vérité ouvertement et sans fard.
Le portrait d'Arneth serait incomplet si nous ne disions un mot
de l'homme même. 11 faut avoir été mis en contact avec lui pour se
faire une idée juste de l'extraordinaire bienveillance de cet homme
qui ne dédaignait pas cependant une fine satire. Il n'avait rien des
duretés et des aspérités si fréquentes chez les hommes qui passent
leur vie au milieu de parchemins jaunis. Ses manières accomplies
étaient celles du grand seigneur élevé dans le monde aristocratique;
elles n'avaient rien de pédantesque. Malgré l'énergie qu'il lui fellut
iUTBICHE. iS4
déployer pour atteiDdre au but qu'il s'était proposé, son caractère
était d'une douceur qui ennoblissait et embellissait tout son être.
Cette impression était fortiQée encore par un organe bien timbré,
harmonieux et sympathique, un héritage de sa mère. C'est de cette
noble femme aussi qu'Arnelh semble tenir le sens du beau, et à son
influence que nous devons sûrement attribuer beaucoup des qualités
qui le faisaient tant aimer ; mais à lui seul revient le mérite de n'avoir
jamais démenti ces qualités si profondément humaines. Les sen-
timents d'envie, si fréquents parmi les savants, lui étaient aussi
étrangers que la tendance au dénigrement. Il n'était pas de ceux
qui n'ont d'yeux que pour les « arrivés ; » il soutenait et excitait au
contraire de préférence ceux qui voulaient faire quelque chose.
Arneth acheva au milieu des honneurs, — il était aussi président
de l'Académie des sciences de Vienne, — cette vie si utile et si méri-
tante. Il put terminer encore avant sa mort la biographie de l'homme
d'État autrichien Wessenberg. Cette œuvre, qui vient d'être publiée,
est une preuve de l'infatigable activité et de la vigueur persistante
avec lesquelles Arneth s^est occupé jusqu'à un âge avancé des
sciences historiques. Elles perdent en lui un de leurs plus nobles et
plus fldèles représentants.
Edouard Werthbimer.
482 COMPTBS-aENDUS CRITIQUES.
COMPTES-RENDUS CRITIQUES.
Histoire de Bretagne, par Arthur Le Motne de la Bordeue, U
Paris, Picard ; Rennes, Plihon. In-4'', iy-592 pages.
Dans rhistoire ancienne de Bretagne, le fait le plus import
aussi le plus obscur, c'est la fondation et Taménageinent des co
bretonnes. Que ces colonies soient venues de la grande île, q
soient postérieures au iv« siècle, c'est ce que personne ne conteste
Grégoire de Tours {Hist, Pr,, IV, 4) nous les montre, au mili
Yi* siècle, dirigées par trois chefs qui paraissent bien correspond
trois principautés traditionnelles de Broerech, Gornouaille et
nonée. Nous savons aussi par lui que ces principautés, qu'il a
encore des royaumes (régna) ^ avaient eu d'abord à leur tète des p
nages qualifiés de rois, mais que, depuis la mort de Glovis, on t
reconnaissait plus que le titre de comtes. Antérieurement à Gri
une lettre écrite vers 515 par trois évèques francs nous permet de
tater la présence d'émigrés bretons établis probablement sur le
toire de la cité de Rennes et desservis par un clergé indigène. E
un évêque Drittannorum figure dans une assemblée épiscopale à '.
quelques années plus tard, un corps de Bretons, commandé par
Riothime, est posté en Berry, sur la frontière entre les Romains
Wisigoths. Sans pouvoir l'afBrmer avec une pleine certitude,
porté à croire que les Bretons de l'évéque Mansuetus et ceux
Riothime avaient leurs établissements dans l'ouest ou dans le n
la péninsule armoricaine.
A s'en tenir aux textes bien autorisés, on ne saurait guère c
plus long. Mais il y a les vies de saints. Les saints bretons
presque tous venus d'outre-mer, presque tous aussi à la tète de g
d'émigrants, leurs biographes ont dû conserver plus d'une tn
intéressante sur les circonstances de l'émigration. D'autre pa;
saints, ou du moins ceux qui ont fait sur le sol armoricain des
tions importantes, ont dû se trouver en rapport avec les chefs ci
militaires du pays. On peut donc s'attendre à ce que ces chefs
mentionnés dans les légendes et aussi les principales divisioni
tiques.
G'est en effet ce qui arrive. Mais comme ces légendes sont toi
presque toutes d'une date notablement postérieure aux fonc
qu'elles racontent, la tradition qu'elles nous présentent est une
tion peu précise ou peu sûre. On en déduit aisément que tel sa
le fondateur de tel établissement monastique, qu'il a laissé on
^ L£ MOINE DE L* BOSDERIB : BISTOIBR DB BBETiGHt.
renom de vertu et de miracteg, que telle uu telle localité a coaeervé de
lai un Eouveoir particulier, que telle autre a rentré d'aboid, ou du
mninfi reotTail au temps dn biographe, daus la mouvance du monas-
tfere principal. Eu égard aux habitudes des écriTains ccltiqucii, on peut
stissi considérer comme digaee d'attention les généalogies des saints et
le« traditions sur la patrie de leur famille. Au delà, on n'est plus en
sûreté. Les anecdotes, miraculeuses ou autres, opl trop longtemps llotté
dans lamémoirepopulaire, et dans une mémoire particulièrement fertile,
pour <{ne l'on puisse faire fond sur elles, surtout dans le détail. Le»
données chronologiques, les synchronismes avec les princes francs ou
mém^ avec les chefs hretoos, sont encore moins propres à iuspirer con-
fiance. Il est trop clair qu'ici nous sommes exposés à rencontrer des
arrangements artiliciels, plus ou moins ingénieusement combiaês par
1^8 biographes eui-mémee, eu dehors de toute tradition. Sans doute,
il faut considérer conntne possible que, dans certains cas, les noms de
princes aient été relevés sur des chartes. Enajre faudrait-il ^tre en
niAsurede savoir si le biographe ea a fait un usage prudent et légitime.
C'est pourtant sur ces légendes et sur leurs données les plus cootes-
Ubleeque se fonde tout l'édifice historique de M. de la Borderie, notam-
ment son ossature chronologique. La vie de saint Tudual, particulière-
iQ^ni ancienne et sobre, contient un passage d'uoe importance capitale
•Qr l'origine de l'émigration. Il y est dit que le saint fut en rapport
&VOC Deroch, fils de Riwal, et que ce Riwal est le premier des Bretons
*loi soit venu d'outre-mer ; qui primus venit de Briltonibvs extra mare.
l'C souvenir n'a rien de légendaire. Bien que je n'attribue pas à la vie
d^ eaint Tudual une si baute antiquité que M. de la B., je serais porté
^ la croire en ceci, à voir dans ce qu'elle dit de Riwal l'expression d'une
'''•«ïition ancienne ei respectable. H. de la B.,qui rapporte au vi« siècle
'* vie de gaînt Tudual et saint Tudual lui-même, ne devrait avoir ici
*acun doute. Pour être conséquent, il devrait commencer avec Riwal
' histoire de l'émigration bretonne, au moins en ce qui regarde la
^^Oinonée.
ï^oin de là, négligeant la vie de saint Tudual qui devrait être pour
'ai Un tejcte sacré, il se Se à celle de saint Guénolé. laquelle est d'au-
^'^r <x)nnu et de date bien assurée, mais de la fin du ix» siècle. Sur un
''^**il de ce texte, d'ailleurs faussement interprété, il fonde toute une
^ai-onolc^ie de l'émigration dans la baie de Baint-Brieuc et dans la
'^•Tiouailie. Voici le cas ;
^4int Guénolé, fondateur du monastère de Landevenec, mourut, dit
7^^ biographe, le 3 mars, mercredi de la première semaine de Carême.
^^ acceptant ceci comme une tradition conservée dans le monastère,
** en conclut que, l'année de la mort de saint Guénolé, Pâques tomba
^ I I avril. C'est le cas en ^99. 510, .521, 532, 583, 594, 605. M. de la B.
'■^rte les trois dernières dates comme trop tardives, les trois pre-
^'^ree comme trop précoces. Le saint, en effet, mourut pienas die-
**"(, et M. de la B. a ses raisons de le faire naitre peu apréï 460.
18J
COMrTES-UEKDDS CRITIQUES.
Noua allons bientôt voir ce que valent ces r&iaoQS. Il choisit donc l'a
nce 532.
Malheureusement c«s calculs Bout faits sur les tables pascales a
lemeat en usage, non sur celles dont m servaient les Bretons*.
celles-ci, fondées sur un cycle de quatre-vingt-(|uatre ant, la piijue <l.^Er:3
Il avril ne ae préseuie qu'aux années 34 et 45 du cycle, c'est-à-dirr^ — ,
pour la périwlc qui nous occupe, en 426, 499. 510, 5S3, 594 et 667. L«^_^
première et la dernière a'écartc^nt toutes seules. Des quatre anlre^k^
aucune ne convient à M. de la B. Celle de 53^ est impossible. Avec elLV
disparait le fondement du système.
Mais venons à la naissance de Guénolé. Son biographe, Wrdisten a^t^_-—
Gurdestin, dit en son prologue que l'émigration des Bretons iasulair^^^^_
eut lieu tentpore quo gens Saxonum maternuin po.iiedit eeuptletn. • c'ec^ -^
■ à-dire, d'apr^s M. de la B., que l'émigration bretonne cammrnça ^^^^ .
< moment où commença aussi la prise de possession île la Graude-Br- ^^^
< tagne par l'invasion saxonne, après les premières victoires des Saiot^^^^ ^
« sur les Bretons, de 455 à iCO. Donc, d'après Wrdisten, les d^tmtt ^^e
■ l'étaigratiou bretonne se placent vers 460. i Un de ces premiers itxr^ m-
grants s'appelait Fracau*; c'est le père de Guénolé, qui naquit no ^».xi
après le dèbarquemeut, soit en 461.
A cela je répondrai ; i» que le biographe se borne à dire que l'éc*» *"
gratitm des Bretons eut lieu lors de l'invasion saionoe, sans parler «**
commetieement. L'invasion saxonne est un fait de quelque durée, ell»
répartit sur plusieurs siècles. Bleu n'indique que le narrateur ait ex* '
vue un stade de la conquête plutôt qu'un autre; 2" que le biogra f>**^'
loin de dire que Fracan ail émigré des premiers, le range eipressétX* ^^
parmi ceuï qui restèrent et qui furent chassés de leur pays, non p^ *" ,
guerre, mais par la peste. Il semble bien avoir ici en I&te la gr3- ~*^*'
peste du vC siècle, que tes Annales do Carobrie mentionnent à ft '^^
née 547. S'il en est ainsi, on voit ce que devient la chronologie <^^^
posée; s'il s'agit d'une épidémie sans date, nous retombons dans %- *
certain. _^^^
Ainsi on n'a pas le droit de déterminer, comme le fait M. de la '
la date de l'émigration de Fracan et de la naissance de saint Guén^^^^
ni surtout do faire intervenir cette date dans le choix entre les diveir^^*"
années auxquelles le calcul de Piques permettrait de rattacher la ra^^*
du saint. L'époque de celui-ci demeure indéterminée. Indétermitï^^
aussi l'époque du roi Grallon, car la chronologie ne l'atteint que par ^^ '
rapports avec Guénolé.
A Vannes aussi, M. de la B. découvre une colonie bretonne ^^
y siècle. Cela parait d'abord impossible, car la ville de Vannes n'^^*
devenue bretoime que très tard, si môme elle l'est devenue ava::- ^
1, Voy. ces tables daas le Ifeaei Arehie, l. IX, p. 167.
2. Son nom se conserve dans celai de Ploufragan, localilË située â une liei^^'
au sud de Sainl-Brieuc.
LE XOT!<E DE Le BORDEBIE : BISTOIRE DE DRETlG^fE.
iS$
fons les canons d'un concile qup le
! 4C1 et 4'JO, avec ses suffraganCs, à
e Paterne. Ces canons ne trahissent
I le voisinage des Bretons, Mais ce
I saiiit gallu!
ptominoé', et, d'autre part, nous a
métropolilain de Tours y tint, entt
l'occasion de l'ordination de l'évêqi
p3.r aucun détail la présence o
ï*aterne, confondu plus lard ave
l'objet d'une légende des plus fabuleuses, et, dans celte légende, on
racontait qu'nn roi breton, Garadauc, qui résidait à VanneG, lui donna
BOO palais pour bâtir une cathédrale. M. de la B. ne fait pas grand cas
de la légende, mais il retient le détail du roi Garadauc et de son palais
transformé eu église. Ce détail, en effet, a passé de la légende dans nu
■«rroon prêché à Vannes vers l'an lîOO, ce qui, suivant M. de la B.,
lai donne une valeur traditionnelle très considérable. Je n'insiste pas.
De tels procédés critiques sont aisés à apprécier.
Re-renoos à Riwal. Aucune légende ne dément expressément la
priorité qui lui est attribuée par la vie de saint Tudual. Beaucoup
mentionnent son règne ou sa généalogie; mais il est difficile de savoir
en c] Del temps au juste il a vécu. Selon Gurdestin, c'est un contempo-
•"airi de Fracan. D'autres récits le mettent au temps des fils de CIotîb.
I*onr accorder ces données divergentes, M. de !a B. a imagine de
dédoubler le personnage, de distinguer entre le Riwal contemporain et
****rne voisin de Fracan et le Riwal des autres légendes, connu aussi
P^T" les généalogies et les chroniques. Le premier serait du v" siècle,
^ avatre du vi". Pour mieux inculquer ce dédoublement, il altère t'ortho-
8'^.phe. Les textes, qui ne parlent jamais que d'un seul et même Riwal,
Varient quelquefois sur la façon d'écrire son nom : on trouve les formes
At'truottM, Bigualis, Biwalus. Suivant M. de la B., celui de Gurdestin
• appelait Rliigall. On intercale une h, on supprime l'u {gii=:uu:=.w],
^n^Gjd au redouble VI finale et l'on obtient un personnage différent de
**i^w^al.
Ci'est beaucoup d'ingéniosité et peat-ôtre d'audace, le tout inutile-
^*^^rxi. Puisque l'on a besoin de deus Riwal, pourquoi ne distingue-l-on
**^^ entre Riwal !"■ et Riwal II, comme on distingue entre Weroc I"
' AWeroc II? Le premier Riwal et le premier Weroc seraient aussi
'^'^itaDériqueB l'un que l'autre, mais on respecterait au moins la tradition
ï^* '^«graphique,
tin réalité, la tradition légendaire ne connaît qu'un seul Riwal; Gur-
^**t-in lui-même, dont on s'autorise pour le dédoublement, le qualifie,
'^^-■t. comme les autres biographes, de dux Domnonieae partis. Quant
a Age, il semble que les légendes l'aient plutôt abaissé que recalé.
^Somar, moine de Saint-Mêen, qui écrivit au ii' siècle une vie du saint
^
tôt;
^^^i»s de ce prince et sur les origines de son royaume. En ce tomps-lâ,
**Ï8loiro de l'émigration bretonni
Judicael, se trouva conduit par soasujet à disserter sur les prédéces-
les de son royaume. En c
'émigration bretonne avait pris la forme que v
^ - Le Icile alléeué. p. 505, pour prouver ([ne Ptpin le Bref reconquit Vannes
** 753, est tiré des Annata de Metz, document bien peu anlorisé.
fCUTlQDBS.
i crmoricaiDe (Léuvie) fat cCO-
• habitants et s'iDsUllèreul à lent
Fët sa feinine Aletba. Celle-ci ayAnt
■ .ut «un chef friaon, Goraold se mit aux troasses <li>
kdt4 j^tma COarchioD, avec tout son monde, de sorte qn'il ne
M 1)* l^Mwie. Les FrisODs ne revinrent pas ; l'émigration
nù ta place libre. Elle se prodaiïiit au temps de Clo-
i. Hoa chef fut RiwaI, Bis de Deroch, fils de Wilbol,
, U» <im Cath«T, 61s de Gerenton. Il posséda toute la B>-e-
I la -«jri* ti* ses successeurs ; Deroch, fils de RiwaI, cnge»>"
. imUU loua, lona Judwal, Judwot Juthael, Juthael Jadi"
itt^iotwa dn roi Dagoben.
t-imf» t«Ot parle de la Dornoonée comme si c'était toute Ls
iak La l«9»od« de Corsold et d'Aletha s'est évidemment fonn^^
mil n lift Ûlw symbolise les dernières destinées des établissement^
»4» Uo««il et d'Alet, Quant au synchronisme de RiwaI a-vC^
«, tMi I» ivirouve dans nne ■ géné-alogie princière, rédigée *'*'
ii^\ > il dans certaines chroniques d'assez basse époque*- ^
[ |HM»ibh' de l'accepter. Clolaire, en effet, n'a régné sur
I sur ses confins qu'après la mort de Chitdebert, en &5®-
n avec Childebert que les saints bretons ont atTatre. Si 1'*^"
I ^laai du temps de Clotalre les légendaires, généalogis^
I, aionl désigné d'une façon générale le temps de-s fil»
\,<yitk iM1-56ll. leur synchronisme, qui devient alors fort vogue^ *"
«3e
l'émigration bretonne aV*
ftv« «vulivilit par tout ce qu'on sait si
tt ftiwal n'a pas d'attaches chronologiques h la Tois soli ■
IMI M qu'il y a de sérieux dans les vies de saints sur
k W psnonnage, c'est le gui primus venil de Brilonibus ei
1 ce que M. de la B. néglige. Ce çui prïmus nt?
I ponse. au déclin du V siècle. Il faudrait le concilier a
k du roi Riothime, inconnu aux légendaires. Mais (
tiUX panonnes pour qui la vie de saint Tudual est une piè*
ntaDOnde ftiwal et son râle aux premiers temps de l'émigratio^
^ MM^^ noua font connaître les divisions politiques du pays. Ma. -^
^Ibtiw WM> renseignent pas sur leurs origines. Quant au pays de Vanner
ym'v % ^ do difficulté. I..e terme Broerec on Browaroch
\ VvrtM> l> '211- Li'lEB de cette gânéalogie n'est pas établi par M, de la B^
IN» math provenir d'uoe «ie de saint Wiaaoc, plus andenne que celle d^
iMiM V« """■1' 1"' "' ''" *'" *'**='*■
t WwtK«. I. 3 Cette chronliiue, illéguËe par U. de la B. (p. 350], se ter — '
MM* a t Mu*>« 'ï''*>' !'■"> autre chronique, du MnDt-Sainl-Michel, A laquelle il^
l«M<vt* <))*'*'''*'*'■ "" '"*i'>">" P*^ Clolaire. Elle provient d'un tnannscrit du
> ktMW kUtUala, Chnniqat ola ilMert de TAor^y, i. U, p. 208.)
ï
'. LA BOBDERtR : DtSTOISB DE BRËTIGME.
de AAfaroch et dârlve du nom du célèbre comle qui lient tant de place
d(i.Exs les récite de Grégoire de Tours comme ennemi de Cbilpéric, de
CÎ-OÏ3. Iran et de Childebert II. Restent la Domnonée ot la Gornouaille,
Oitrri^iionia et Cornubia. Cee termes, inconoug des historienG Trancs,
«■^viennent à chaque instant dans les légendes bretûnneii. Gelles-ei ne
ae «3 onuent jamai): la peine de les expliquer; ils sont chose courante et
d*ï»saage immémorial. Il est clairqu'ils remontent auï origines. L'expli-
ca.t.i<3n naturelle serait que l'émigration s'est aménagée autour de deux
B*'o«-«pes principanx. ïeous l'un de cheî les Dumnonii, l'autre de chez
l98 dfmvbii ou Cornovii de la grande ile. Cbose singulière, les Ômigra-
t'ioKS s dont il est question dans les vies de saints ne viennent jamais de
ch^sc les Cornovii; en des cas très rares, elles ont quelque lien avec le
P«-y^ des Dumnonii; presque toutes viennent de la Cambrie, rarement
de i» Bretagne du Nord (Stratclyde) ou de l'Irlande.
*îi n ce qui regarde la Cornubia, M. de la B. reproduit une eiplicalioa
•1"«^ j'ai eu déjà occasion de repousser'. La Ifolitia Dignilalum nous
*I>F»«-eod que la cohorte casernée à Pons .€lii (Newcastle) s'appelait
eo/c«>r] /» Cornoviorum, ce qui suppose qu'à l'origine elle avait été
•"««^•■«itie chez les Cornovii. Mais qu'en était-il au v* siècle? Jusqu'à
l*-»**!. point cet élément ethnique y était-il représenté? Nul ne peut le
^^"^ c»ir. C'est k cette petite troupe, A cette compagnie de soldats, que
»**^«^»- Bllribup la Tondationde la Cornubia bretonne, au lieu de s'adresser
* '^ nation ou cité des Cornouiï elle-même. Pourquoi? Parce que la gai^
'^•^<»ii de Newcastle offre plus de commodité pour expliquer l'origine de
^•-■ÎBiiper. Cette localité s'appelait en latin Corisopilum; ses évéques,
**^ï*«ais le «• siècle, se qualî6ent d'epùcopi CorifopiUnscs. Le nom de
"**'»» ji«r (en breton, coDOiient)' semble bien avoir été Introduit par les
^'■^lons de l'émigration, tandis que celui de Corisopilum doit provenir
"«^ temps romains. Cette explication s'accorde avec la mention d'une
^*^<'Cai Corisopitum dans ta Notice des Gaules. M. de la B. préfère la
«ystiine suivant.
-A. «ix lieues et demie de Newcastle et do sa compagnie de Comoviens
*^ trouvait une « ville importante s appelée Corisopitum. On conjec-
^^*"^ que les habitants de cette ville céiièrenl, en même temps que la
*^*lorte des Cornubii, aux attaques des Pietés et des Saxons et qu'ils se
'^^'-«giêrenl avec eux, vers 475, aux bords armoricains do l'Odet. Là,
J^**" un amical partage, les Corisopitains de la grande ile donnèrent
^»*r- nom à ta ville fondée en commun, et les Gornubiens de la cohorte
•***Bèrent le leur à la province qui lui fut assijjnée comme ressort.
^^ '-^^ serait beaucoup de changement pour peu de monde, car la pré-
^j **«ioe 1 ville importante > de Corisopitum n'était qu'une simple sta-
"' postale sur une voie romaine et les Cornubii de Newcastle qu'une
ttOT
* - Bulltliti crUique, I. V, p. Îi4.
^ - Qnimper, en effet, se Irouve au «latlueat de deux petites riviËres, l'Odet
^ >^«ïSler.
k
488 COMPTES-REÏIDUS CRinQUBS.
bien faible troupe. Encore devait-elle être fort réduite après la défc
énergique qu'elle opposa, dit M. de la B. (qui n*en sait rien du tootf.^M),
aux attaques des Saxons et des Pietés. Mais il n*y a pas lieu d'û
là- dessus, car la Corisopitum insulaire n'a jamais existé que
quelques imaginations armoricaines et modernes. Le seul texte qui l.V la
mentionne, Titinéraire d'Antonin, appelle cette station Gorstopitum c^^ et
non Corisopitum. M. de la B. a tort de s'en rapporter pour ceci à TédÎK Ci-
tion Wesseling. Celle de Parthey et Pinder, postérieure et bien mieor ^cjai
documentée, nous apprend que, sur douze manuscrits, six porteici^snt
Corstopitum; que les variantes des six autres, Corstopilum (3 fois), (7oK..'^z3f-
topitum, Constopitum, Corstopitu, se ramènent aisément à la premièHr^^re
leçon; enfin qu'aucun exemplaire ne porte Corisopitum.
Il y a donc lieu de laisser en paix )a garnison de Newcastle et T la
station de Corstopitum. Ce n'est pas là qu'il faut aller chercher les fos- fon-
dateurs de notre Cornouaille. Jusqu'à ce qu'on ait trouvé mieux, . il
faudra se contenter de la rattacher à la Comubia de la grande île, sac^ .-ins
prétendre tirer au clair le lien qui les unit.
L'origine de la Dumnonia n'est pas plus facile à expliquer. Je
bien que M. de la B. nous offre une solution. Riwal étant par lui coh
sidéré comme contemporain de Clotaire, il remarque que c'est précis»
ment au temps de ce roi, à partir de 515, que la Dumnonia insulai
fut atteinte par l'invasion saxonne. Riwal sera venu de cette régies -ion
de l'île et en aura transporté le nom sur la côte nord de rArmoriqi]^^-'*^^'
Ce système, hélas! se fonde sur un synchronisme des moins admi^Sr .is-
sibles, en même temps que sur une hypothèse tout à fait gratuite^^^ •
Riwal ne peut être considéré comme contemporain de Clotaire et n .^a^inl
ne sait s'il est venu de chez les Dumnonii ou d'une autre partie de ^^
Grande-Bretagne.
Ainsi, ni pour la date des premières émigrations, ni pour l'origi^ ^^nne
des dénominations géographiques, rien à tirer des légendes. L'histoi M- ^^^^
suivie, enchaînée, datée à une année près, quelquefois à une heu. .^l^^^
près, que nous présente M. do la B., n'est, d'un bout à l'autre, qu*iE-^ -^^
tissu d'hypothèses et de combinaisons. Car les légendes elles-mèm» ^^^^
sont souvent en désaccord. Pour les concilier, soit entre elles, soita?^"^^ *^
les véritables documents historiques, il ne faut pas être avare de oouK^ ^^ '^^
de pouce.
J'ai déjà signalé, en ce genre, l'évanouissement du texte qui primf^ -^ "^ ^"^^
de Britonihus et la création du personnage de RhigalH. Voici celle £> ^ .*
Waroch !«»•. Le vrai et unique Waroch, bien connu par Grégoire 4^ ^ .
Tours, succéda en 576 à son père Macliav comme chef des Bretons dC> ^
Vannetais. Depuis lors, on le voit souvent en guerre avec les Francr^> -•^-'"^
Presque toujours victorieux, il laissa parmi les siens un souvenir -»-«3S8<
imposant pour que son nom ait servi à désigner le pays qu'ils
1 . Notez aussi la suppression de Riatha, dans la généalogie tradilioniMUe tw
saint Judicasi (p. 351, 400), sons prétexte qu'elle est trop longna.
'WQ^I
LE VOTKE DE U BOBDËRIE : HISTOIRE DE BRETiGXE. 489
paient, flro Waroch, Broérec. Ud Warocli, ou Weroc, prince du Van-
oeiais, est menlionné dans pliiBieure légendes, noiarament celles de
saint Gunhiern de Quimperlê, de saint Gildas de Rhuys et de saint
Mêen de Gael; il y a peut-être quelque cbose de vrai dans lee rapports
qu'elles établissent entre ces saints et lui. Mal hou reu sèment, non pour
cette tradition, maïs ^lour le système chronologique de M. de la B., ces
rapports abaisseraient us peu la date des saints en question. Saint
Gunhiern est l'ami de Waroch et du roi Grallon. Or, celui-ci vivait
au temps de saint Guénolé, lequel, d'après le système, mourut en 532.
Saint Méen fit un voyage à Vannes, oii il se rencontra avec Waroch,
en 554, d'après le sijstéme. Longtemps avant ce voyage, loujours d'aprèt
U sytltme, saint Giidas fut eo rapports fréquenta avec le même prince.
Comment accorder tout cela avec la date de 576, bien connue comme
celle de l'avènement de Waroch? Par un procédé très simple ; on
dédouble ce personnage. Il y a un Waroch I" et un Waroch II, le
premier dont parlent les légendes, le second dont parle l'histoire. Il
^aoie pourtant aux yeux que les légendes et l'histoire ont en vue le
tnéme Waroch. Si quelques détails secondaires, dans les vies de saints,
s'accordent mal avec la chronologie réelle du célèbre chef breton, cela
ne prouve qu'une chose, c'est qu'elles méritent correction sur ces
points. H. de la B., qui rectifie si volontiers les légendes quand elles
iQi paraissent exorbitantes ou fautives, ne doit pas refuser aux autres
te droit d'y faire aussi leur triage.
Je dis qu'il les rectifie. Dans la vie de saint Gildas, il est question
'''dd« résurrection. TriBne, la personne ressuscitée, ayant eu la télé
Uaachée, M. de la B. a jugé le miracle trop fort et retouché le récit.
^ légendaire dit expressément que le méchant Gonomor avait coupé
*^ tête Je sa lemme : exempta mueront amputavit caput tiai. D'après
^' de la B.<, il dirait que Couomor o lui abattit son glaive sur la télé
^^ Ift laissa pour morte. ■ Un temps notable s'écoule, plusieurs jours
**iis doute. Gildas arrive, trouve le cadavre de la pauvre femme, tra-
'*''*»« cadaver mulierii inUrlectae, se met en prières, rapproche la léte
*•_« tronc et dit : « Au nom de Jésus-Christ, TriBne, lève-toi. » Elle se
^Ve auBsitdt. Voilà ce que dît le légendaire. Voici la traduction de
^> de la B. : I Sur la bruyère tachée de sang gisait le corps de la
' princesse, à la tête une plaie horrible, au front et aux joues le marbre de
' 'a mort. Malgré cette plaie effroyable, avec l'aide de Dieu et le secours
* "ios antiques secrets de la médecine druidique, qu'il tenait de son
* **ïaitre saint lltud, Gildas ne désespéra point de ramener la princesse
* i la vie. Combien dura cette cure merveilleuse, désespérée? On ne
^^^■Ut. Hais un jour vint où la moine dit : Au nom de N.-S. J.-C.,
^HDtrifine, je te l'ordonne, lève-toi et marcfae. Et TriGne se leva, i
. 1- P. 412. Notez bien que M. de la D. entend comniuniquer au lecteur non
^ t«^4>o dont il interprète le récit, mais le récit lui-mftne : ■ Voici, dit-il ea
* Commençant, conime la légende de Gildas racoale celte tragédie. >
490 coiipn8-EB!n)US CEinQinn.
Gomme escamotage de miracle % c'est bien réussi. Je compreods qpm^
M. de la B. n'accepte pas le témoignage du légendaire, mais il n'a
le droit de le falsifier. Le biographe dit que saint Giidas opéra, par
prières, la résurrection subite d'une personne qni avait eu la tète
chée; M. de la B. lui fait guérir, par des remèdes savants et un traite
ment prolongé, une simple plaie à la tête. S'il s'est permis une
liberté avec son document, et cela dans le principal épisode du récit.
pourquoi attache-t-ii tant d'importance aux ointer dicta dans lesquels
rencontrent les indications chronologiques?
Gonomor, le mari assassin de Trifine, joue un grand rôle dans
légendes bretonnes. C'est un personnage réel. Grégoire de Tours (FV, 4
le mentionne à propos d'événements qui se passèrent dans le pays
Vannes vers 550. Un « comte des Bretons » appelé Ckanao fait mouri:
trois de ses frères ; il se disposait à se débarrasser aussi du quatrièmi
Macliav, mais l'évéque de Nantes Félix parvint à le sauver. Peu
Macliav, de nouveau poursuivi par son frère, fut obligé de s'enfuir; i
trouva refuge auprès d'un autre comte, Ghonomor, qui le tira d'
une seconde fois. Macliav, évincé de sa part d'héritage, se réfugia
Vannes, où il parvint à se faire installer évoque. Enfin, Ghanao é
mort, il abandonna la carrière ecclésiastique, reprit sa femme et La pi
de son frère à la tête du royaume. Les conditions chronologiques d
récit paraissent bien impliquer que toute cette série de faits tient en
549 et 552.
On identiâe généralement le Cfionomor nommé ici avec le Cho:
dont il est question dans un autre récit de Grégoire (IV, 20); c'est
Chonoober qui soutint Ghramne dans sa révolte contre Glotaire et pôrir
en 560, victime de cette alliance. La différence entre les formes Choi
mor et Chonoober n'est pas une objection contre l'identification^ com
le savent les gens experts en philologie celtique^. Gependant, M.
la B. tient pour la distinction des deux personnages. Libre à lui,
où il me semble avoir tout à fait tort, c'est quand il prétend que Chih'
noober et Chanao ne font qu'un. Pour en arriver là, il se fonde sur des
variantes paléographiques. Dans le manuscrit de Gorbie, sur trou fois
que se rencontre le nom de Ghanao, il est écrit une fois Cfumoone (à
l'ablatif) ; le même manuscrit, sur deux fois qu*il donne le nom de ChO'
noober, l'écrit deux fois Chonoo, indéclinable'. Or, le ms. de Gorbie est
i. Il y eo a bien d'autres; une apparition de saint Tudoal mort transformée
en une apparition de saint Tudual malade; les cerfs de saint Lunaire changés
en bœufs (p. 369): la levée de terre dressée par les disciples de saint Iltot
pour arrêter la mer (p. 276); le texte de la vie de saint Pol parle sealement
d'une ligne tracée sur le sable par saint Iltut, avec son bâton, et pas dm tout
d'une levée de terre.
2. Sur ceci, voy. Zimmer, dans les Jlfon. Germ. Scrtpt. aniiq., t. Xin, p. 5.
3. M. de la B. dit (p. 568) que cette dernière variante se rencontre deux fois
dans le ms. de Beau vais, une fois dans le ms. de Cambrai. J'ai vérifié. L'asser-
* le plu
LE KOIHB DE Ll BORDEKIE : BISTOIBE IIE BBBTlCnE. <491
le plus aocien des exemplaires de Grégoire de Tours. C'est possible,
mAii il est loin d'être le plus autorisé : son copiste se permet très sou-
vent des changements de mots ol de Torme. Il n'a donc pas d'autorité
dans ia question, contredit qu'il est par tous les autres mactuscrits,
ftnxqaele se joÎQt, en ce qui regarde Chonoober, l'autorité de Frédé-
gaîre et da Liber historiae Francorum, deux ouvrages qui représentent
des manascrits du tu* siècle. Comment d'ailleurs Chanao, qui mourut
vers 5ô2, pourrait-il être identique à Chonoober, tué en 560?
a. de la D. se félicite beaucoup de sa mètbode qui, dit-il, est la
vraie critique, également éloignée de rbypercritique et de l'hypocri-
lique- On voit, hélas I — et les preuves s'en multiplieraient aisément,
— que cette vraie critique ressemble souvent à ses voisines.
C'est que le savant historien y met de la passion, de la passion
pUriotique, bien entendu. César a vaincu les Vénètes, ces oncles éloi-
gnés des Bretons du vi* siècle. M. de la B. l'accorde; mais si César
«vaiLété un vrai chevalier, s'il se fût refusé l'usage de stratagèmes sub-
lita, si seulemeat le vent n'eût pas molli pendant la bataille, les < lâches, ■
les € dégoûtants > Homains eussent été mis en déroute. Cela se voit
P*r Dioa Gassius, un auteur qui écrivait trois siècles après l'evéne-
meat et dont le témoignage doit prévaloir contre celui de César, qui
était li.
Grégoire de Tours décrit en termes compromettants les iocursions
■W Bretons sur le territoire franc; il parle de leur perpétuel manque
■JB Toi à l'égard de leurs voisins. M. de la B. ne l'en croit qu'à moitié.
£st-c« qu'un écrivain franc est recevable quand il dit du mal des Ere-
loQs? Il parvient, du reste, par une exégèse des plus ingénieuses, à
nioinrer que, même d'après Grégoire, ces invasions bretonnes étaient
*^fX anodines. Quelques fermes brûlées, quelques vendanges sur les
^if^a d'autrui, voilà tout. Les Bretons na tuaieut jamais personne.
Alais leurs légendes elles-mêmes sont remplies d'histoires peu édi-
~*Ote3 : pupilles frustrés, moines persécutés, monastères livrés au pil-
^■go, ôgorgemonls de femmes et d'enfants. Conomor, en particulier,
J*^tie les rôles les moins recommandables. Eh bieni même pour Coqo-
''***^>", M. do la B. trouve moyen de plaider les circonstances atténuantes.
^^ Qe fut pas un saint, non; mais on a beaucoup exagère.
^Uant aux auteurs contemporains qui ont eu le malbeur de n'être
***« de l'avis de M. de la B,, je laisse à penser quels égards il a pour
***- Ah I pauvres Twut/
L. Ddghebne.
^**<> de U. de la R. est fausse eu c« ((ui regarde te ms. de Beauvais (Parii,
>^â4), fausse également eu ce qui regarde le ms. de Cambrai.
492 COMPTES-EB.fDUS GBniQUBS.
I. Francesco Catazzi. Le scuole dell' antico Stndlo Bol<
Bologne, U. Hœpli, 4896. In-8^ 344-Lxyiii pages.
II. Mauri Siari et Mauri Fattorim. De clarla archlgymnasU Bmn
niensis professoribus a saeculo XI usqae ad saeciiliim XF
iterumedidenintCaesar Albicixius et Garolus Hiligola. Bom
niae, ex officina regia frairum Merlani, 4888-4896. 2 vol. in-fol
27-xxiyi-675 et 386 pages.
I. Étude d'histoire locale, plutôt archéologique qu'historique, do:^
Tauteur, qui n'est pas un historien de profession, se proposait d'abo:^
de faire simplement une lecture à la Deputazione di storia patria
Romagne. L'ouvrage a pris des proportions considérables et for
maintenant un volume, illustre avec somptuosité et avec goût. On
trouvera des documents, et des renseignements qu'il y a tout lieu
croire exacts, sur les bâtiments où furent logées les écoles univers
taires do Ik>logno depuis les origines jusqu'à nos jours. — L'aut^s=
aurait peut-être pu se dispenser de rapprochements entre l'histoire
l'Université de Bologne et celle de l'Université de Paris. Ce qu'il
de Paris (p. 15 et suiv., ci passim) est superficiel et emprunté à
livres sans autorité.
II. L'histoire littéraire de l'Université de Bologne au moyen
commencée par Mauro Sarti sous les auspices de Benoit XIV (le Bol
nais Lambertini), est célèbre : c'est un des principaux monuments
l'érudition italienne au xvui« siècle. Savigny, Tiraboschi l'ont, à b
droit, vantée, et le plus grand éloge que l'on en puisse faire, c'est q^
Ton s'en sert encore.
Le comte Cosare Albicini eut l'idée, à l'époque de ces fêtes du
tenaire de TUnivorsité de Bologne dont le souvenir est encore
à tous les historiens, de rééditer le De claris archigymnasii Bonanien — -^''*
pro/essoribus, L'ouvrajie de Sarti, mort en 1766, avait été continué ^'
publié par le P. [«'attorini. Le P. Fattorini était un homme négligera' ^'
qui imprima sans soin les pièces justiticatives; et ce n'était pas m^^
homme très actif puisque, en vingt-deux ans, il n'avait pas trouvé ^^
temps de poursuivre les recherches de son prédécesseur au delà de /^
première moitié du xiv« siècle; par sa faute, le De claris archigymnasii
Bononiensis i-rofcssoribus, dont l'érudition et la critique de Mauro Sartf
font le prix, est un livn^ inachevé et insutlisamment correct. — C â1-
bioiui ue se proposa pas de le terminer : c'eût été une entreprise trop
vaste; mais de le réimprimer purement et simplement en effaçant les
uéglik^enoos du P. Fattorini et en ajoutant, rà et là, en note, quelques
n»ferences à des travaux modernes. Il mourut en 1891, après avoir sur*
veille le tome l*»" de la présente reimpression.
C. Malacola a dirigé la reimpression du tome II, qui contient les
pitVes justiticatives et qui forme, dit-il \U p. 16». un véritable Codes
diplomatkus de l'ancienne Université de Bologne. Tons les textes publiés
1
KDENTZEL : HtSS-ITnD r.EWICDTSWESGIf l"C DetlTSnHLAIfD. i93
rlaos h prpmiêrp édilion ont élé cocsciencieuspmenl collaiionDés sur
Ips originaux. De pius, M. Malagola a recherché les papiers inédits de
Sarti et de faltorini (notes, épreuves, etc.) et publié ceux qiii en
valaient la peine. Enfin, il est l'auteur d'une excellente préface où se
trouve racontée en détail l'hislflire du Dt clarù..., les elTorts M les
déboires de ses auteurs.
Ch.-V, Lakolois,
tieber die Vernialtung des Mass-und Gewichts'wesena in Dent-
sdUand wœhreDd des Uittelaltera, piir le !)' Guorg KÎîntzel.
Leipzig, DuiickiT el Humlilol.. 1894. Iti-8°, viii-J02 pages.
Die Qrdentllchen direkten Staatsstenern des Mlttelalters Im
FarstblBtbnm MOnster, par Joseph iUktzën. Miinsler, Regens-
berg, 1895. Ia-8°, 95 pages.
I>1« Osnabrticker LalBchaften, par le {)' F. Philippi, archiviste
d'Osnabriick [mfkinl«i]aiUiJeMilnijler).Osnabriick,Itackhorst, I8<J6.
ln-8", 35 pageâ.
'Weicbblld, par le D' Philippi. (ExLrail des llansische Geschichts-
blSUer, l. XXIII.) In-H% 55 pages.
Ces quatre opuscules méritent d'être signalés à ceux qui s'occupent
••e la formation el de l'histoire des villes allemandes au moyen âge.
Ia dissertation de M. K. n'est pas seulement, comme le titre pour-
•^'l le faire croire, une sèche étude sur l'administration des poids et
ŒMaros; OQ y trouve dps ^■ues Tort judicieuses sur cette question tou-
iourg discutée de l'origine des villes, les uns persislaat à les rattacher
b" *°^ Gildes, les autres cherchant la cause de leur développement dans
Hp^ développement des relations commerciales et du MarUrecht, d'autres
^HPtofin croyant que les villes n'unt été au tond que des communes rurales
' *'«»8ies. C'est là, on le sait, la théorie de M. G. de Below, contre
'"quelle s'était déjà élevé le professeur Schmoiler (voy. Jahràuch far
"c^elsjfiuny..., 1893, p. 289 et suivi en attirant, avec raison, l'intérêt
^ur l'utilité d'une élude minutieuse de l'organisation des poids et
*^6s mesures.
*ï. K., dont le travail a provoqué naturellement une réplique de
^- de Below \Zeitschrifl fur Social- «nd WirtkscluiftsgocliwlUe, 1894,
^- ^Sl|, s'est livré, à cet égard, à des recherches trÈs pénétrantes, con-
Ouil^^s avec beaucoup de méthode et présentées, eu dehors de toute
^"^'^mique personnelle, dans ce ton digne qui seul convient à la science,
* •dissertation éclaire par un côté intéressant les rapports qui existent
'^l^e la vie économique et la vie juridique des sociétés; elle montre
*^*Qnienl le droit public du moyen âge dépendait de celte organisation
~*inun)ique naturelle {Haturalwirtschafti que, dans noire vie écoao-
nev. HtsTOB. I.XVI. 1" CASc 13
494 COMPTES-RBNDCS CRITIQUES.
mique modornc où l'argent joue un si grand rôle (Getdwirthsehaj
nous comprenons mal ; elle prouve aussi que la marche vers une ci
nisation plus moderne a dépendu surtout du développement des
tiens commerciales et do conceptions économiques nouvelles, l»-
emprunts faits aux institutions romaines n'ont pas changé le fond d. ^ss
choses. L'organisation financière des Romains n'a guère modifié A. ^3s
procédés usités par les villes ou par les seigneurs de toute catégorie ^slvj
moyen âge pour rémunérer leurs employés. Remontant jusqu'à répo<|^^«^c
carolingienne, M. K. étudie avec soin les droits respectifs du roi et
seigneurs (p. il). Il cherche à dégager des capitulaires et des docnme:
relatifs aux droits régaliens les points intéressants pour son snjet.
Miroir de Saxe est en tout cas le premier document où l'on voit la
réglementation des poids et mesures confiée expressément aux bon r^-
mestres. ÏA encore est-il bien douteux (p. 18) que ce soit là un prîKX-
cipo. Pout-on croire en définitive avec M. K. que les droits et préro-
gatives des conseils de ville et spécialement la compétence de €^^s
conseils en matière de poids et mesures aient été un legs des commui
rurales (ce que Schmoller ne paraît point admettre)? Après avoir
au début et dès l'époque de Cbarlemagne un droit régalien, le droit
réglementation des poids et mesures passa par suite de l'impuissaD-^^*
des souverains à un grand nombre de seigneurs laïques ou ecclésii
tiques, et enfin aux communes rurales elles-mêmes, mais sans cj
théoriquement le pouvoir royal y renonçât, ce qui explique l'influezi'
qu'il conserva sur les marchés publics. Gela étant, est-il certain qu© 1*
compétence du conseil de ville en matière de poids et mesures soi^
empruntée à l'organisation ancienne des communes rurales? N'est— ^^c
pas plutôt, comme tout ce qui concerne le droit de marché, une p^^*"
celle de la puissance publi(}ue passée aux mains des pouvoirs miiO'-'
cipaux? Les recherches de M. K., c'est la principale conclusion que no^^
dégageons de sa judicieuse étude, prouvent une fois de plus à qO^'
point la diversité a été la loi du moyen âge allemand et combien ox^^
agi différemment sur les constitutions urbaines les divers facteurs Q^^
ont concouru à leur formation.
Sur un terrain plus spécial, M. Metzen nous donne une excellente ant*
lyse des diverses sources des revenus des princes-évéques de Munster et
distingue avec soin ceux que ce personnage percevait comme grand pro*
priétaire et seigneur foncier (Grundherr) de ceux qull percevait comme
souverain (Landeslierr). A leur tour les premiers se décomposèrent ea
prestations fixes et redevances irrégulières. Les seconds, sur lesquels il
insiste longuement, comprennent les péages, le trésor, les impôts. On
trouve dans cette brochure d'intéressants détails sur le trésor, rectifiant
diverses assertions de Lamprecht et montrant surtout comment il se
forma. On doit distinguer la redevance appelée pemio (Pacht) qui rentre
dans la catégorie des droits seigneuriaux d'ordre privé, de Vexactio, qui
a été précisément constitutive par excellence du trésor (Schais) et où le
caractère do droit public apparaît déjà très accentué et qui ne se rat-
PBILIPPI : niB 09»BBDRCR8R LilSCHAFTEN. 493
laclie nullemenl aux droits appartenanl à l'évoque en lanl que proprié-
taire funciFr. Le trésor a son origiao premiëre dans \es proGts découlant
de l'eieruice de la paissance judiciaire; el on peut dire qu'il devint un
des éléments conEtitutil'a de la souveraiaeti territoriale [Landeshohfit).
M. M. lait ressortir, par une étude minutieuse des documents, le carac-
téra d'impôt des petitioms, precariae, Eeden, examine avec soin les Ion-
demenis juridiques sur lesquels s'appuyaient les droits et met en relief
les exceptions dont jouissait le clergé. Cette dissertation, bien docu-
mentée, mais un peu touQue et à laquelle manque une table des
matières, sera utile à consulter par ceux qui cherchent à voir clair dans
cetie organisation financière si compliquée du moyen âge allemand.
M, Pbilippi, le savant éditeur de V Urkundenbuch d'Osnabriick, vient
de faire de curieuses recherches sur les Laischaflen de celte régiou.
Laùchafl, Letscap a le sens de collegium; il s'agit ici des associations
fiirméee pour l'exploitation et l'utilisation des pâturages des environs
d'Oinabruck {Weidegenossensehaften). Appuyée sur des documents iné-
dits dont quelques-uns ont été reproduits en appendice, cette disserla-
tioE sura un grand intérêt pour tous ceux qui étudient l'histoire du
régime de la propriété foncière et de ces Peldmarken, dont quelques-
unet fd sont maintenues jusqu'à nos jours dans la région westpha-
lienae, qu'on s'occupe de partager aujourd'hui (j'ai vu procéder à ces
partages dans la vallée de l'Ems et la région du Hiimmling') et qui ont
eu une inQueace considérable sur l'organisation sociale et la vie écoDO<
inique de toute cette partie de l'AUeaiagno. Nous sommes ea présence
d'ane très vieille iostilulion germanique, et M. P. nous montre que la
poseessioQ ou la jouissance de ces pâturages était une question vitale
pour les bourgeois d'Osnabrùck; il ne peut malheureusement noua
dire, Taute de documents, quel était exactement le régime de ces pâtu-
'^B«s et des associations ou Laùchaflen avant le xv* siècle. C'est dans la
'econde moitié du xvi' siècle que leur situation se précise, et ces asso-
ciatioas s'arrogent ou oblienuent le droit de régler les choses à peu
près à leur gré. On verra quels furent leurs divers modes d'activité en
inaiLére de défrichements [Rodungen), soit de routes et chemins, et ce
qu'il faai entendre par l'expression Wegeherren, seigneurs des chemins.
*^ travail sera très instructif pour ceux qui recherchent dans ia persis-
■^DCB de certaines communautés agraires partielles les vestiges (?j d'une
*^n»aunautê agraire primitive; pour ceux aussi qui, au point de vue
^ciai, se demandent quelles furent les transformations heureuses et les
^nsformaUous funestes des classes rurales au moyen âge, quels furent
^* divers procédés qai permirent aux tenanciers de conquérir peu à
P®*J «ne plus grande liberté.
^o a longtemps discuté sur le sens exact du mol V/eiclibUd. A la
'^'ïWirquable dissertation de Richard Bchrceder, M. Philîppi vient
'- Cr. mes ^Judet sur lei populatioiu rurale» de l'AOemagne, 1807, p. S3,
'"''■ I, 88, 04, 437-440.
495 COMPTES-RENDUS CRITIQUES.
d'ajouter, en serrant de très près les textes de ces dépôts d'archives
TÂIlemagne du Nord qu*il connaît si bien, d'intéressants complémem.
Le sens du mot Weichbild s'est étendu par la suite. Mais il est certain <2
le mot Wic avait primitivement le sens de ville ou localité. BU, comm^
savant archiviste d*01denburg, le D'' Sello, Ta établi, c'est la racine qn "*
retrouve encore dans le mot actuel billig (convenable, raisonnable, s'^
pliquant à...). Et la désinence ilhi est un vieux mot saxon indiqua
ridée de pluralité. Wicbîlithi, Weichbild, peut être traduit en allem
moderne par Stadtgerechtsame, ce qui concorde avec des chartes
xii« siècle où on lit Jus civile quod wicbilethe dicitur. L'expresam
Weichbild qui se retrouve d'ailleurs dans des documents thuringien^
hessois est d'origine saxonne. C'est peu à peu, par l'intermédiaire
colons saxons, qu'elle se répandit dans toute la Basse- Allemagne.
Munster clic rayonna dans la direction de Paderbom, d'Osnabrûck,
Minden, plus tard de Halle et de Magdebourg. Le plus ancien doov3'
ment qui en parle est une charte de 1178 relative au couvent d'Uet>^r-
wasser à Munster, et pendant un siècle au moins le sens qui pa.r^/t
s'attacher à ce mot est celui de collation de tenuro bourgeoise hérédi-
taire (Erbzinsleifierecht), Mais le terme Weichbild ne pouvait s'appli-
quer à toute teuure héréditaire. Celles auxquelles il convenait se €Ïis-
tinguaient surtout en ce que les différends qui pouvaient surgir a ieuf
propos no pouvaient être tranchés que par le tribunal territorial {Larui'
gerichi). M. P. étudie avec soin quelques statuts anciens, notamment
ceux de Soest (où )o mot Weichbild n'apparaît d'ailleurs qu'au xiu" siècle^,
et divers documents westphaliens d'où ressort la liberté présomptî^^
des tenanciers (Erbzinsleute) soumis au Weichbildrecht, Ce droit péné^
tra dans les colonies fondées par les Saxons grâce à l'intermédiaire do>
droit de Magdebourg et du droit jusqu'ici peu connu de Schartau (qu^
n'est plus aujourd'hui qu'un simple village entre Jerichovir et Bnrg9
dans le Brandebourg). La théorie du Weichbildrecht est particuHèremen^
intéressante à étudier dans cette région parce qu'on voit comment il
permit de créer, à côté des anciens bourgeois complets (Fo//66r^er),des
bourgeois d'un type nouveau (Neubùrger) qui, bien qu'investis de piéro-
galives moins étendues, purent facilement acquérir au point de vue de
la propriété foncière les mêmes avantages que les autres^.
Georges Blondbl.
Les grandes époques de rhistoire économiqae Jnsqa^à la fin du
xv« siècle, par Claudio Ji.vxet. Paris et Lyon, Delhomine et Bri-
guet. In-12, vi-410 pages.
M. Pierre-Claudio Jannet a réuni et publié avec soin les derniers
1. M. Philippi vient de publier sons ce titre : Zwr OsnabrUcker Verfoêt^mg^
geschichte, Osnabriick, 1897, un petit volome que nous signalona à ceax qn'ia-
: LES GRANDES ^rOQDUS DE L'bISTQIBE ËCONOMIQOE. 407
travaux <lo son père. Toub les amis, les élèves et les admirateurs du
maître lui en exprimeront leur gratitude. M. Claudio Janaet est de ceux
i|ui ont souvent attiré notro étude sur les questions sooialei! dans le
l'imaine historique, nous avons été souvent sous l'empire de sa parole,
irailuisant avec taat d'éclat et de précision sa pensée vive et pénétrante.
M. Claudio Jannel est un des économistes de ce temps qui ont le plus
[ravaillé, qui ont éteadu leurs investigations infatigables auï champs
\ff plus vastes et les plus variés, et qui ont mis en œuvre l'abondante
récolte de recherches incessantes avec le plus de personnalité. Ce der-
nier livre, comme ses aines, est imprégné de la conviction profonde de
l'écrivain, — parmi les économistes M. Claudio Jannel n'a jamais été
un d i tcllanie, comme beaucoup d'autres, — il se distingue par des con-
ciuBioDs personnelles exposées avec Torce et netteté.
Pourquoiavoirinlitulé ce livre tes Grandes époques de Vkistoire feono
miquef Ou peut dire que l'histoire militaire a eu de grandes époques
1"^ premier Empire par exemple, par opposition à d'autres époques.
comme aotre lin de siècle, où il n'y a que des guerres sans importance
mais l'histoire économique? En tous temps, les hommes ont eu besoin
de \■i^■^e et d'élever leurs familles, et ils ne l'ont pas fait plus grandi
ment à une époque qu'à une autre. Peut-être certaines époqui
para lEseot-el les plus claires que d'autres, par la lumière qu'y jetteni
W documents conservés et le travail des historiens; mais il suffirait de
déplacer cette lumière pour que l'éclat se déplaçât également. Nous
'-royoQs hicn que ce que M. Claudio Jannet appelle les grandes époques
^^iBt les époques de transformation; mais, ici encore, il faut ee défier de
'u pression : les dilfèrentes époques de l'histoire paraissent plus ou
i^iiiits des époques de transformation selon qu'on les envisage sous tel
"" tel aspect.
I' 'introduction est une large esquisse : ■ La société moderne et son
unité historique. » Cette unité historique est, dans la pensée de l'au-
[rar, l'iEuvre de l'Eglise. M. Claudio Jannet a commis la même erreur
r)aô Fastel de Coulanges avait commise en écrivant la Cité antique.
Diios l'ensemble d'une civilisation, la religion n'est jamais une cause
elfici«Dte, elle est toujours un eifet; ce n'est pas la religion qui fait
l'eiat Rocial, c'est l'état social qui fait la religion ; le monde moderne a
eu de l'unité au xiii° siècle, non parce que la religion était commune,
0iaU la religion a été commune parce que, sur les diflérents points de
t'iSnrope occidentale, l'état social était identique,
s chapitres traitant
La all^me observation s'adresse a
de I& Rfforme iimale par le chrUtianisme aui
(option de l'auteur est poussée si loin que
fclêye à peine do la critique historique.
Le chapitre m, bien que très court, est d
liiiK. U. Jaunet y t
premiers siècles, où la ci
cette partie de
I beaucoup le meilleur du
•.c des idées parfois nouvelles et qui frappent
l'blstoira des villm allemudos an moyen ftge et f
par louf justesse, do la formation de la société
IX* siècles.
Itelevons les cinq pointa suivants qui dominent la conceplion
l'aulpur et qui, à notre avis, dominent réellement celte question
controversée de la formation de l'ancienne France :
1° t Le caractère essentiel de la société féodale, c'est que chaip
localité doit pourvoir à 6a dèfenae contre l'ennemi extérieur, satislââ
elle-même à tona ses besoins économiques, et que tous les membres ■
même groupe sont unis entre eux par nn lien social, celai de la féavlm
{p. 151-52).
2° ■ La prédominance de la vie rurale. C'eEit un changement con
plet avec le monde ancien » (p. 157).
Dans cet ordre d'idées, M. Claudio Jannet va plus loin que ses prâil
cessetirs par cette observation très intéressante el très importante
■ Lo ctmus, prix du loyer de la terre, est toujours payé en nature, e
bœufs, quelquefois en brebis, le plus fréquemment en porcs. Cela indiqa
que ces redevances ont été établies à une époque où l'élevage du béui
l'emportait aor la culture des céréales • (p. 168|.
3" La coutume locale qui régit la terre a son origine dans la juridt
tion domestique (p. 171}.
40 C'est la coutume qui fait loi et non l'arbitraire individuel |p. (T—
b' On peut définir d'un mot cet état social : c'est le patronage obi
gatoire ip. 173). Le mot " obligatoire • nous parait inutile. Cet et
social était l'organisation patronale*.
Tels sont, tracés à grands traits, les éléments fondamentaux
l'État social où s'est formée la France du vii° au ix* siècle. Il est
table qa'ayantvu si juste et ayant dit si bien dans l'ensemble M. Claa^
dio Jannet se soit embarrassé, dans le détail, au milieu d'expressicrs
fieillies sur les Homains et les Germains et dans des considérali^=
théolûgiquesqne l'on doitBB garder d'introduire dans un livre d'iiistot —
Four en donner une idée, prenons ce paragraphe dans le cliapitre
Une municipalité du midi de la France de l'époque romaim à 1789, 5«— *
ron. M. Claudio Jannet estime que les éléments qui ont concouru ^*
formation des municipalités du moyen âge sont au nombre de troi^
1° • L'élément germanique qui représente la sauvage liberté ''
« forêts. «
î' ' Les traditions romaines qui, grâce à leur passé glorieux ^
B leurs formes savantes, subjuguent l'imagination souple des e?*-
3' « L'Église enfin qui, animée d'une vie indéfectible, lutte »*
( reUche contre la barbarie des peuples du nord et le sensuall^
1 païen, toujours vivace cbez ceux du midi. ■
t. Celle idée a été dëvelopp^e avec beaacuup de talent el de forre pur U.
Punck-Brentano ilana riatroductiori Je sa réimpression du Traité d'écono*^
pnlitiqtie de Honcbrétion. M. Jannet aurait certainement cité ce travail
nvail pu mettre ta dernière main h son tenvrc. (Nolo de la Direclion.)
^
niKnro^ : u aércBUCte hks MtOTiNCES-irinES. 49'J
Or, Qua srnlement ces trois éléments n'ont pas été les élêineQlR
essentiels de la furmation des villes à l'origine du moyen âge, mais ils
n'v oat eiercé aucune action. Les villes «a sont formées tout natu-
rellement au milieu des conditions économiques et sociales que
M. Claudio Jannpt a si bien dëGaies précédemment.
IL.« chapitre vi, le plus important du livre comme dimensions, traito
de La criae économique du xvi' siècle. Il n'a pas êlé écrit par M. Jan-
Det lui-même; c'est le résumé, par un élève, M. Victor Taiiuay, de
leçckcs faites à l'Université catholique. Le livre se termine par une
étnc3« sur le a crédit populaire et les banques en Italie du xv» au
xviiT" siècle. »
KA^algré les réserves que nous avons cm devoir faire, nous avons
peia K.-étre montré l'importance et l'intérêt de cet ouvrage. Notre dernière
parole sera un hommage respectueux à la mémoire du maître que la
niOT-« a enlevé duue manière prématurée aux éludes où il se distin-
Bi^tii si noblement.
FVaciK Fubck-Bbentano.
A. ^flfiDDiSGTON. La rëpnbllqae des Provinces- Unies, la France
^t. les Pays-Bas espagnols de 1630 â 1650. T. 1. Paris, Mas-
SOD. 1895. I vol. in-8°, iii-44fi pages.
Xja critique procède parfois si lentemenl et elle a quelquefois affaire
à des auteurs si diligents qu'au moment où elle se met en mesure d'ap-
précier la première partie d'un ouvrage, la seconde vient déjà s'offrir
à ses arrêts*. CVsi ce qui est arrive pour M. W. et pour le signataire
du présent article. Heureusement, le livre de M. W. n'est pas de ceux
(lai perdent à attendre la publicité; s'adressant àuu public aussi éclairé
<\Vi restreint, il peut se passer, pour obtenir son suffrage, de l'a.^sis-
t*acr de la critique et, si celle-ci no vient que tardivemeul lui assi-
gner an rang que tous los lecteurs compéteots lui ont déjà donné,
c'est tant pis pour elle et non pas pour lui.
Il est peu de sujets aussi attrayants, et d'un attrait plus varié, que
c^lui que M. W. a choisi. La lutte héroïque des coufédérés d'Ulrocht,
'^ complexité et l'originalité de leurs institutions, l'inllueiice que les
Provinces-Unies ont exercée sur la politique européenne et qui fut si
•Opérieure à leurs moyens matériels, leur génie industrieux, l'éclat
*lQ'elleE ont jeté dans les arts, que de litres â l'intérêt et à la sympa-
^*e ! Les dix provinces restées fidèles à l'Espagne offrent moins d'ori-
ginaliié et exercent moins de séduction, et pourtant, par leur loya-
lisme, leur ardeur laborieuse, leur fidélité i leur religion et à leurs
"iimirji^ la gloire qu'elles ont acquise aupsi dans les arls, elles ne sont
Etuêre moins attachantes. Si on envisage l'histoire des uuw et des
'• Voir Mevue hUlotiqW, 1. LXV, p. 454.
200 COMFTES-ftB^IDUS CRITIQUES.
autres dans sos rapports avec la nôtre, si uu étudie la place qu'elles
tenue dans la politique française, l'intérêt s'accroît et il est d'aul
plus vif que les questions qui se sont autrefois agitées à leur sujet
occupé aussi notre siècle, que leur union ou leur séparation, 1
annexion ou leur indépendance ont été, aujourd'hui comme autrefc
des solutions projetées ou réalisées.
Richelieu avait compris, dès son avènement définitif au pouvc:::=^^'>
rimportanco de la diversion que les Provinces-Unies, par leur lu —^^e
contre l'Espagne, opéraient au profit de la France, mais ce ne fut gutH^'"'®
avant la fin de 1629 qu'il put se livrer avec liberté d'esprit et avec suil. -*ite
à l'organisation de la lutte européenne contre la maison d'Autricl:=^^*
Aussi est-ce l'époque à laquelle s'ouvre l'exposé suivi que M. W. — *
tracé des relations do la France avec les Provinces-Unies et les Pay ^^8-
Bas. La soumission et le désarmement du parti protestant avaient é -s-^^té
accomplis en 1G29. La diète de Ratisbonne, en faisant éclater. Tanner -ée
suivante, rimpuissance de l'empereur en face des collèges de l'Empire — ïc»
allait fortifier indirectement l'autorité de notre pays. Le 13 juin 163^ ^0,
un traité de subsides était conclu avec les Provinces-Unies. Richelie^^^en
se refusa longtemps à aller plus loin, à passer de l'assistance pécL-v ^u*
niaire, inscrite déjà dans le traité du 10 juin 1624, à l'alliance défeiczar d-
sive et oifensive. Sa circonspection, ou ne le redira jamais assez, ne K le
cédait pas à la généreuse hardiesse qui, toutes les précautions une foc ^ois
prises, lui faisait affronter l'inconnu inséparable des entreprises 1^ ^es
mieux conçues et les mieux préparées. On est frappé une fois de pla- ^^qs,
en lisant le livre de M. W., de l'impuissance à laquelle se trouva si sor <^u.
vent réduit par les complots et les tentatives de^soulèvement, par Ti^ n-
certitudo du ministre au sujet de l'appui du roi, aussi persévéra ^.^nt
pourtant en réalité que précaire en apparence, un gouvernement
finit maljijrê tout par faire de si grandes choses. A défaut d'une par
cipation militaire aux hostilités contre l'Espagne, Richelieu et le
Joseph, qui, dans cette circonstance moins que dans toute autre,
doit pas être séparé de lui, se prêtèrent avec empressement aux off'
et aux sollicitations des mécontents qui se flattaient de fomenter d*
les Pays-Bas une insurrection générale. M. W. adonné sur ces med^*
des détails plus complets que ne l'avaient fait ses prédécesseurs. Il
parait pas pourtant avoir connu les marchés offerts ou conclus par
agents secrets du Père Joseph pour faire entrer les Français à Lanci
cies, à Bapaume, à Namur et à Béthune^ Il ne parle que du projet ^
Arras et nous révèle le nom du traître, Pierre François, qui avait voi
livrer celte ville à la France.
Il arriva un moment pourtant où le concours pécuniaire de la Fran^
ne parut plus suffisant pour faire pencher du côté de la guerre la balaie
où pesaient en faveur de la paix de grands intérêts et de vivaces p^- *"
sions. Ce fut après la mort de Gustave-Adolphe. Pour entraîner ve^
1. Le Père Joseph et Richelieu, 11, 209-211.
c
m
TlkhBtKaiOH : U HRrDBLIQDE DG» rKOTI<fCB»-tI.1IR9. 201
guerre les ProvioceE-Unies hésitantes, pour combattre le projet de
We entre elles et l'Espasaa, Gharnaci- fut envoyé auprps des lïtala
généraux et de FrédËric-Ueari. Bien qu'il ail élA écrit à un (joint de
vue particulier et avec la pensée con^tanle d'y distinguer et d'y mettre
en relief le rûle du Père Joseph, l'ejspoaé de la nénociotiun de Char-
nacé, lel que nous l'avons présenté*, aurait pu être coneulté utilement
par M. W. Il y aurait vu que nous avons expliqué autrement que lui
les ateriDoieaieni!^ de Charuacé. Là où M. W. voit uoiquemont l'habile
mèDagcment des concessions que la France était résignée à faire, nous
avons cru dii^tinguer l'embarras où le mettaient le défaut de pouvoirs,
l'inllueuce perfide de Servien*. Nous avons interprété aussi l'avis de
Riclielieu au roi du commencement de juin i&H dans un sens opposé
à celui que lui donne M. W, ^. Ces divergences méritaient d'être discu-
ttVee. L'auteur aurait dû signaler le manifesle écrit par le Père Joseph
à l'adresse des provinces des Pays-Bas dont le soulèvement était espéré'.
Le lecteur devra rapprocher ce que M. W. a écrit do la retraite et de la
BÎlualion de l'armée française après la bataille d'Âvcia^ el ce que nous
en avons dit nous-méme*. M. W. a négligé de mentionner le passage
de La Gardie à la Haye en 1637', Cette omission a d'ailleurs bien peu
d'importance, et les observations qui précèdent n'en ont pas beaucoup
plus. Klles n'ùtent rien au mérite du livre de M. W. envisagé dans son
ensemble. Le sujet en est nouveau pour le lecteur Crançaip, et l'auteur,
pour le traiter, ne parait avoir laissé de cùlé aucune source d'informa-
tions. L'intérêt en est heureusement ménagé par !a variété qui résulte
du jeu discordant des institutions néerlandaises où le stathoudérat prend
une place de plus en plus importante, du régime mixte el original aussi
des dix provinces, des relations avec la France qui sont, au contraire,
en elles-mêmes empreintes d'une certaine monotonie, mais qui s'élèvent
et s'agrandissent par instants grâce aux échappées qu'elles ouvrent sur la
politique générale de Richelieu. C'est il peine si nous oserons regretter
que la composition de l'ouvrage soit un peu lâche et que le style ne soit
pas plus soutenu': les lecteurs auxquels s'adresse M. W. lui sauront
plus de gré de leur donner un ouvrage de plus, aussi solide et aossi
instructif, qu'ils ne lui en auraient su d'avoir serré davantage la trame
et plus rigoureusement châtié la forme de celui>là,
G. P.
t. U Pire Joseph et Rie^etieu, 11, 127-129, WMU.
3. Ibid., II, Î0Î-Î04.
3. Ibui., II, -JOS. WaddingloD, I, 2«.
4- Ibld., Il, 2G7.
â. WariJingIfln, 1. 271, 271-279.
6. U Pire Joiepit et Hithelieu. II. 288-296, 29g-302.
7. Ibid-, tl. 393.
8. A«(iaseinFnlg (paulm). Se Ht tniil voir (p. ISfi). Allactier le grelot (p. 166].
Se mettre i dos [p. 113). Potins (p. 352).
202 COMPTBS-RBIIDOS CEITIQUBS.
Der Grosse Knrfllrst Friedrioh-'WlUielm Ton Braiid6iibi]A>rg,
von Martin Philippsox. ErsterTheil : 4640 bis 4660. Berlin, G vr-on-
bach, 4897. In-S*», vn-452 pages.
La publication des documents d'archives relatifs au grand élec^-^enr
est loin d'être terminée. Il manque plusieurs volumes à la grande col-
lection des Urkunden und Actenstûcke sur Geschichte des Kurfïtm^^sten
Friedrich' Wilhelm, Dans la collection des documents sur l'hls'iK^^jj^
intérieure du règne, il n'a paru que le premier tome de VHisUnr^ des
finances brandebourgeoises, par M. Breysig. La publication des Pw^oto^
coles du conseil secret, par M. Meinardus, n'embrasse encore que les
premières années du règne. Mais le nombre des monographies coDfia-
crées à l'histoire de l'électeur est infini, et sa personne, sa politique,
son administration sont en grande partie étudiées. M. Pbilippson a
pensé qu'il était dès maintenant possible et utile de rassembler les
résultats acquis et de les présenter dans leur ensemble en les groupant
autour de la personne môme du grand électeur. Il ne prétend pas fûre
œuvre définitive, et bien qu'il n'ait point négligé de recourir am
manuscrits de la bibliothèque royale de Berlin, aux archives d*État et
à celles de la Guerre, chaque fois qu'il l'a jugé nécessaire, il n'a point
voulu apporter à l'histoire une contribution nouvelle, mais seulement,
comme il le dit lui-même, tirer des publications déjà faites et des
innombrables monographies un tableau d'ensemble, aussi clair que
possible, de ce qu'a voulu et accompli l'électeur Frédéric-Guillaume.
L'histoire du grand électeur comprendra deux volumes, dont le pre-
mier seul a paru. Celui-ci nous conduit jusqu'en 1660. La jeunesse de
Frédéric-Guillaume, son avènement, son mariage; les dernières années
de la guerre de Trente ans et les avantages assurés au Brandebonrg par
la paix de Westphalie; les complications de la guerre du Nord et l'ac-
quisition de la souveraineté en Prusse, consacrée par la paix d'Oliva;
les premières luttes entre l'électeur et les états provinciaux : telle en
est à peu près la matière. Mais l'intérêt en est surtout de voir se for-
mer le caractère, les idées, la politique de Frédéric-Guillaume. Jus-
qu'en 1660, on peut douter s'il gouverne vraiment par lui-ménie, tant
semble grand le rôle personnel de certains ministres, comme Bargsdorf
ou surtout Waldeck; en tous cas, il a tant de résistances à vaincre,
tant de difficultés à résoudre, tant de périls à éviter, qu'il lui faut lou-
voyer sans cesse et qu'une politique à longues vues lui est interdite.
Après la paix d'Oliva, l'État brandebourgeois-prussien devra bien sou-
vent encore vivre au jour le jour, et la souplesse, l'esprit pratique qui se
contente de résultats modestes, mais immédiats et réels, resteront les
caractères essentiels de sa politique. Pourtant, certains résultats sont
acquis déjà : avec les premiers éléments d'une armée, l'électeur Fré-
déric-Guillaume, duc souverain en Prusse, n'est plus pour l'Europe une
quantité négligeable; à condition d'être prudent et hardi à la fois, il
H. DE SilNT-LËOIf
"ïfe conpouTions de vinsw.
poorn vouloir et agir. Les vingt années de luttes el de périls qui
s'élcndani de 1640 à IfiCO ont été ses années d'apprentissage.
Peut-être la personne de Frédcric-Guillaiime n'a-t-elle pas, dans
l'ouvrage de M. Philippson, toute la vie et tout le rplief qu'elle pour-
rait avoir; mais je crois qu'il serait injuste de lui en faire une critique.
Pendant cette première partie du r&gne, les événements sont trop mul-
tiples, trop dispersé», et surtout l'action personnelle de l'élecieur, si
réelle qu'elle puisse être, n'est point assez prépondêraole encore pour
que rtiisloire politique de l'Ëtat brandebout^eois-prussicn se confonde
avec ses pensées et ses actes. Or, M. Philippson n'a pas voulu nous
donner seulement une biographie du prince, mais une histoire de
l'Étal. Du moins a-t-il bien analysé, sinon rendu très vivant, le c
tére de Frédéric-Guilloume ; nous ne retrouvons plus ici le portrait
légeodaire auquel Droysen lui-même s'est encore trop souvent complu:
et Frédéric-Guillaume n'y perd rien.
Il est inutile de dire que rien d'intéressant, dans la littérature du
enjet, D'à échappé à l'auteur et que l'on peut toujours se fiera ses réfé-
rences; le nom de M. Philippson en est une garantie suffisanic.
G. Pages.
klstolre des corporations de métiers depuis leurs origines jus-
qu'à letir suppression en 1791, suivie d'une étude sur l'évolution
de l'idée corporative au in° siècle et sur les syndicats profession-
nels, par Etienne Màbtlv-Saimt-Léom. Paris, libr. Guillaumin,
1897. Iii-8°, 1-671 pages.
On ne pouvait choisir un plus beau sujet que celui qui fait l'objet de
œ livre ni un sujet qu'il fùl plus opportun de traiter. L'organisalioQ du
travail est le fondement même de la vie d'un peuple, la source de sa
civilisation. Écrire l'histoire des corporations ouvrières en France
depuis leurs origines jusqu'à nos jours, c'est traiter L'histoire de notre
pays dans ses parties les plus importantes; quand on y aura joint i'his-
loire de<j classes agricoles, on aura écrit l'histoire de France tout
entière II est vrai que l'histoire des classes agricoles, malgré quelques
monographie-î admirables, est encore très loin do ponvoir être écrite
dans son ensemble II n'en est pas de même de l'histoire des corpora-
tions ouvrières
M Martin-Saint- Léon sera peut-être étonné de s'entendre repro-
cbpr par un aucien élève de l'École des chartes de s'être livré à des
recherches parmi les manuscrits de la Bibliothèque nationale et les
liasses des Archives. Du moment où M. Martin- Saint -Léon s'enga-
geait dans des recherches de documents inédits, étant donnée l'éti^ndue
du sujet qu'il avait choisi, il y devait consacrer sa vie entière ; encore
■a vie n'aurait-elle pas sufG. Il aurait dû se résoudre franchement à
204 coiiptes-rb:hdus critiques.
n'utiliser que les textes imprimés et les ouvrages des historiens
prédécesseurs, s'efforcer sur ce point d'être complet et résumer ces "Ck^^-
vaux, déjà si nombreux et si considérables, en un ouvrage d'enscn^lz» le
au cadre large et précis. La magnifique bibliographie des corporatio^ns
publiée par M. Blanc en 1885 lui devait être d'un grand secours; il la
cite d'ailleurs dans son introduction. Ce que M. Martin-Saint-Léais. a
tiré des documents inédits est insignifiant, une goutte d'eau en prof>«=> r-
tion de ce qu'il avait à on tirer, et combien d'ouvrages imprimés q^ui
lui eussent apporté des indications importantes a-t-il négligés! Gitosns
au hasard la précieuse monographie des métiers de Blois, par M. ÂlTrc^^
Bourgeois, les ghildes marchandes de M. Vander-Landen, l'origine cl.^s
constitutions urbaines de M. Pirenne, et, oubli incroyable, les livi
de M. Flach.
Du moment où M. Martin-Saint-I^on avait pris pour objet de s
livre l'histoire des corporations en France, il eût dû laisser de côté
étude des corporations dans la Rome antique, absolument étrangères ^
son sujet, et que nous ne lui reprocherions d'ailleurs pas si cette par*^ ^®
n'était de beaucoup la plus faible de son ouvrage. Nous ne nous arrô '•-^
rons pas à analyser ces trente premières pages, où chacune prête r*^»*^
matière à critique. Nous ne leur adresserons que deux reproches, <3. ^^
portent sur l'ensemble. Le premier est de ne pas indiquer le moia '^^ *'
mont de transformation des collèges d'artisans depuis l'époque où l*^^'*
ganisation en paraît avoir été codifiée sous Numa ou Servius Tulli^-^-f'
jusqu'au premier siècle avant notre ère où fut promulguée la loi Ji-» ^ ^
qui abolit les collèges et les sodalitia. Ce qui eût été intéressant et» ^
qui eût justifié cette sorte d'introduction étrangère au sujet, c'eût ^^
de montrer, — comme M. Flach l'a si bien fait en étudiant l'organi -s^ ^^
tion de la famille romaine dans ses Origines de l'ancienne Prar^^^^*
— de montrer comment dans la Rome antique des conditions Bocis- ^^
semblables à celles qu'a traversées notre pays produisirent une orga.^^^*"
sation semblable du travail, et que le travail subit, en France, les mênr"^'
crises et les mômes révolutions. La seconde critique n'e^it pas mo
grave. M. Martin-Saint-Léon a ignoré les travaux les plus importaï^^^^^^;;^
faits avant lui : W. Liebenam, Zur Geschichte und Organisation
Bœmischen Vereinwesens (Leipzig, 1890); Waltzing, Étude historique s
les corporations professionnelles chez les Romains (Louvain, 1895).
Arrivant à l'étude des collèges d'artisans dans la Gaule romaine
aux ghildes germaniques, l'auteur aborde son sujet — en supposant q
les corporations de métiers telles que nous les trouvons en France ^
XI" siècle fussent sorties des collèges gallo-romains et que les ghild^^
germaniques eussent eu sur elles la moindre action. Or, ceci n'est ri^
moins que prouvé. Pour notre part, nous nions complètement ViO
fluence des ghildes germaniques sur la formation de^; corporations
la France, sur les corporations m4>me de la Flandre; et quant à l'ori
gine gallo-romaine, ce n'est pas encore M. Martin-Saint-Léon qui l'aura
démontrée. O'ailleurs, cette partie du livre souffre encore de la manière
s
is
es
if
t
e
u
foSS BES fiORPORITIO-ra HB lltTtBRg.
ftcheusf! de l'ignorance des travaux récents, siirloiil de ceox do
h et de M. Plrenne, dont nouE parlions plus baut. M. Martin-
éon 00 est encore k Raynouard, à ['Histoire du droit municipal
ce, publiée en 1829.
les XI" et xu' siècles, M. Marlin-Sainl-Loon entre dans son
nais oombiea nous regrettons ici le temps perdu à des prê-
tes inutiles, à l'exameti de problèmes historiques que l'auteur
ipuissaDt i résoudre I Le sn' siècle a été la grande époque de
[tation corporative, époque puissante et prodigieuse; seul le
ipement de quelques cités modernes, grùce anx progrès vertigi-
B l'inilustrie et de la science et à la multiplication vraiment
) des moyens de transport, peut nous donner une idée du déve-
enl des villes au xn* siècle sur quelques points de la France,
pcment produit par les seules vertus morales et l'orgaaisation
I des corps de métiers. C'était la partie de l'œuvre la plus intë-
) à traiter. D'un pied léger l'auteur passe en courant.
< arrivons au xui' siècle. Ici nous avons une élude coDSciencieuse,
doanée, précise et exacte des corporations parisiennes d'après
ible livre d'Etienne Boileau.
artin- Saint- Léon commet cependant une erreur quand il écrit :
rporaiion est née. La codiScation d'Etienne Boileau lui a donné
inisation délinitive. i L'auteur ne parait pas comprendre quel a
Lractére de l'œuvre du célèbre prévût. Boileau n'a rien organisé
U II s'est contenté de mettre par écrit les dis'erses coutumes
corps de métiers parisiens s'étaient données eux-mâmes, cou*
(ni allëreut se modifiant dans la suite peu à peu comme elles
t mudiBées précâdemment. Si, au lieu de séparer l'étude de
•atiOQ corporative dans les autres provinces de l'élude des
parisiens, l'auteur les avait groupés, il aurait vu qu'Etienne
; avait fait si peu, que partout la constitution des métiers était
<B : preneï Metz, ou Gand, ou aaiol-Omer, ou Paris, ou Orléans,
II, ou Lyon, "ou Bordeaux, ou Florence, ou Home. Partout où
tdal était le tnême, l'organisation du travail était la même et
Ballon corporative identique.
rre m, les Corporations de 13-28 à îkGl, nous introduit dans la
I partie de l'ouvrage. Hàlons-ûous d'ajouter que nous la pré-
Ae beaucoup à la première; le premier chapitre du livre lU
ne très remarquable. Le sin* siècle a marqué l'apogée de l'or'
ion corporative; le xiv* siècle est rempli par l'histoire de con-
■ intestines, puis, après l'éclat de la Renaissance, commencera
idiable décadence. M. Martin- Saint- Léon caractérise bien le
sent dirigé par Et. Marcel. • Il ne faut pas s'y tromper, ce n'est
euple, c'est la haute bourgeoisie de la hartse et des métiers qui
la întte avec la monarchie; c'est elle qui donne au soulèvement
iciioa, un mot d'ordre et des chefs. » Les émeutes de.» Maillo-
206 GOMPTBS-RBIIDUS CRITIQUES.
tins et des Gabochiens furent, au contraire, des mouvements essent-di^ ^].
lement populaires.
Arrivant à la Renaissance, on voit bien que M. Martin-Saint-La^^^kOii
comprend l'importance du rôle que les métiers y ont joué| qu'ils. en
furent les facteurs principaux, mais, — est-ce timidité? — il se rcm^^bat
sur des lieux communs, qui sont des explications superficielles et m^^r — ti-
ficielles : c La grande idée païenne, le culte de la nature et de la bea.^c^ -té,
abandonné pendant tout le moyen âge pour le cuite de l'idée pare, ^ast
restauré, etc. »
La décadence des corporations de métiers commence an zvu* si&<^Ie;
décadence lente, fatale. On a bien tort d'en rendre responsable le pc=>ii-
voir royal. Gomme tous les organismes vitaux, les métiers ava.i«^iit
des germes féconds et des germes de mort ; lorsque les premiers eu iCBrjt
épuisé leurs forces vives, les seconds commencèrent leur œuvre destrmsc*
trice. M. Martin-Saint- Léon montre très bien comment, après a'voir
favorisé les progrès de l'industrie, les métiers étaient devenus on oft>»-
tacle à tout progrès. Nous avons toujours été frappé de ce fait <|[iae
c'étaient les mômes historiens qui reprochaient le plus vivemeat ^Q
pouvoir royal d'avoir combattu les métiers aux derniers temps de It
monarchie et félicitaient le plus cordialement les hommes de la Ré^vo-
lution de les avoir supprimés.
La dernière partie du livre de M. Martin-Saint-Léon, l'étude de I'on
ganisation ouvrière dans notre siècle, de la loi du 21 mars 1884 sux* ^^
syndicats professionnels en particulier, sort du cadre des travaux a.i3.a-
lysés dans la Revue historique. Elle est d'ailleurs faite avec une grsxs^^^
compétence et, avec la partie où il est question des métiers à l'épcxx;^^
de la guerre de Gent ans, la meilleure du livre.
Nous avons fait beaucoup de critiques qui doivent se résumer fiix^^^
ment en beaucoup d'éloges. Le travail de M. Martin-Saint-Léoa ^^^
considérable et lui fait grand honneur. Quand on veut exposer toi^ ^ ^
qu'un auteur n'a pas fait et les erreurs que l'on croit qu'il acommi^*^'
on doit parler longuement, et il est si facile de dire ce qu'il aurait ^
faire. Gelui qui signe ces critiques eût-il fait mieux?
Frantz Fungk-Brentano.
UCBItLa F^IDniQVES.
HECUEILS PÉRIODIQUES ET SOCIETES SAVANTES.
X.. — La Correspondance historique et archéologique. ]!497,
n.** 45. — Fr. Punck-Brentano. La deuïième conférence bibliographique
in t^rnationale de Druxelle? (expose les améliorations apporléeB par l'Uf-
tice Internalioual au classement méthodique des livres d'après le sye-
tfemc décimai). — Cominission nommée par le Directoire pour rapporter
des monuments d'art et de science de l'abbaye de Saint-Denis, l" oct.
179i. ^ N° i6. P. Meïeb. Les arcbivcs communales d'une ville du
Midi (décrit l'élat lamentable où se trouvent les archives d'une ville
■ ancienae cité, colonie romaine, déjà mentionnée dans Pline, et qui
est maintenant le siège d'une ^ous-préfecture, > et demande qu'on
applifjue le récent décret sur les bibliothèques communales autorisant
le transport aux archives du département d'archives ainsi laissées à
l*al>a.Qdoo|. ^ N" 47. F. Boohnon. La création du département de Paris
et soo étendue, ITSfl-llM. — F. Chaubon, Documents révolutionnaires
(deux lettres de 1794 sur les affaires militaires en avant du Quesnoy).
-Alph. RosKBOT. Contribution au glossaire de la basse latinité (publie
"i mandement du pape Léon X ordonnant à l'official du diocèse de
"^«"Oyes de procéder à une information tendant à faire restituer à l'ab-
**^ye de la Chapelle-aux- Planches les biens meubles et immeubles qui
'**» avaient été enlevés, 1519). — Relation » do ce que causa l'hyver
^^''^lier de la présente année 1709 dans la ville de Toulouse. •
*- — La Révolution française. (897, 14 octobre. — A, Mostieb.
Robert Lindet avant et depuis le 18 Brumaire Idepuis l'acquittement de
ancien ministre des Finances du Directoire par la haute cour de Ven-
*****^ne. 25 mai 1797, jusqu'aux derniers jours de 1799, où il refusa de se
*'**-"i*ir au coup d'Étal). — Ch. Picqdbsahd. La Société du Panthéon et
® Parti patriote de Paris, de brumaire h ventôse an IV (d'après les rap-
^^''t-s de police et les journaux du parti). — Henri C*hhé. Un précur-
«ta r- inconscient de la Révolution, le conseiller Du Val d'Épremesnil,
'"''^^~— 1788; suite et fin le 14 novembre. — Fr. Galabeby. La fuite du
^* » lettre d'un patriote montalbanaia. ^ 14 novembre. J. CLAHETtE,
*'"<"^d'ÉglantiDoà la Comédie-Prançaise(fournitquelques détails nou-
^^"^^^ sur la vie privée du conventionnel et sur ses héritiers). —
" -SuETTS. Une rectification à la France tittéraire de Quérard,à propos
^, ^r, -Xavier Pages (montre que l'rançois-Xavier Pages et Pages de
*^*Ou7.c sont un seul et raéme perflonnage. Il joua pendant la Révolu-
^•^ un certain r6le en Auvergne en publiant le Cantalisle). — A. Cobhe.
^^ *'***Oiir du 10 août et des journèee de ^ptembre 1792 (publie quelques
208 RECUBILS P^RIOniQUES.
Icltres de fédérés da Finistère ; lettres écrites de Paris à la municipalité ^
de Brest).
3. — Revue des Questions historiques. 1897, l*'' cet. — Paulf
Allard. I^a jeunesse de IVmpereur Julien. — A. de Boislisle. LArébeU^
lion d'IIesdin. Fargues et le premier président de Lamoignon, 1658^ ^
1668 ; fin (convaincu des crimes de péculat, larcins, faussetés, abas e^^
malversations commis au fait du pain de munition qui avait été founc:^
pendant plusieurs années à la garnison d'Hesdin, Fargues fut penda
27 mars 1665 à Abbeville. Montre comment Saint-Simon a dénaturé li
suites de ce jugement). — Geoffroy de Grandmaison. Un envoyé c^e
Napoléon en Espagne en 1810, Carrion Nisas (analyse un rapport «=le
Garrion Nisas que Napoléon avait envoyé auprès de Macdonald c po^uir
se procurer des renseignements sur Tétat passé et présent de la Cat*a*
logne. » Biographie de Carrion jusqu'à sa mort, en 1842). — Conate
L. RiouLT de Neits'ille. Le duc de Richelieu et les premières années de
la Restauration (d'après les mémoires du temps). — Abbé Vagandabd.
Encore un mot sur la scola du palais mérovingien (cette scola avait pour
chef le major domus ; elle désignait primitivement un corps spécial de
comités, de gardes du roi, que le biographe de sainte A Idegonde désigne
sous le nom de hellaiores, sans doute les autrustions; plus tard, le mot
parait avoir désigné l'ensemble de tous les palatins. M. Yacandard ne
paraît pas avoir connu l'opinion exprimée par la Rev, hist., LXV,4iO|.
— J. ViARD. I^s origines de la guerre de Cent ans. Philippe le Bel en
Flandre (à propos de l'ouvrage de Funck-Rrentano). — Tamizey de Lai-
uoQUK. Une nouvelle biographie du poète breton Jean Meschinot (par
M. de la Borderie). — Jean d'Estienne. Le congrès scientifique de Fri-.
bourg. — M.Sepbt. Léon Gautier. = Bulletin bibliographique: Raukhoi.
Jahrbûcher der christlichen Kirche, 378-395 (beaucoup de faits et de
résultats nouveaux). — Mémoires du comte Ferrand, ministre d'État
sous Louis XVIII (agréables et utiles). — I^s hussards de Chamborant^
2^' hussards, 1735-1897 (curieux). — Abbé Grente. Une paroisse de Paris
sous lancien régime, Saint-Jacques-du-lIaut-Pas, 1566-1793 (curieux).
4. — Revue d*histoire et de littérature religiense. Année I,
1896. — Gette revue a pour collaborateurs les hommes les plus distin-
gués parmi les savants catholitiues contemporains et elle mérite la plus
sérieuse attention des érudits. La chronique bibli({ue y est faite par
M. Jacques Simon et la chronique de littérature chrétienne par M. Paul
Lejay. M. Ilommer y fait une chronique d'histoire de TËglise gallicane.
M. F. Thureau-Dangin y traite des questions d'archéologie orientale.
Parmi les principaux travaux parus en 189G, nous citerons une série
irarticlos de l'abbe Duohesne sur les premiers temps de l'État pontitical
de Ziicharie à Léon VIII, continués eu 1897 jusqu'à Nicolas II, où nous
retrouvons la netteté dldees et de vues et la sûreté d'érudition de Fédi-
teur du Liber pontificalis : une étude impartiale sur Richard Simon de
11. Maruival, continuée dans les n^* 1 et 3 du l. II; un article de
"abbé PisABi Bur les chrétiens Jis rite orientiil à Venise et dans les
gationa véDitleanes de 1439 à 1791 ; une dissertation excellenle de
■ K^'iBBE sur les colons dans l'Église romaine au vi" s., d'après une
',^*-*~« de saint Grégoire le Grand ; un article de M. Cumont sur l'éler-
'"^^ des empereurs romains. Citons encore ; Bburlier. Saint Paul et
■^^■^^opage. — Dei-abochblle. L'idée do l'Église dans saint Cyprien. —
^■*»aii. Les monuments de la prédication de saint Jérôme. ^ Année U,
^ - Bbitrubr. Les Juifs et l'Église da Jérusalem. — Hekmeb. Manning
^^*-Hl sa conversion; fin dans le a' !.=; N= i. Cduoht. La propagation
^?* mystères de Milhra dans l'empire romain; suite dans le n" h. —
rr^VniHHON. Sur l'histoire de la pénitence (critique modérée et impar-
tie de l'ouvrage de Lea. Expose comment la conTession auriculaire
«SI introduite comme adoucissement à l'ancienne péuitence publique).
'^'^ IIemueb. Manning et New man et laquestioD de l'éducation des cathO'
' >ques & Oxford. -~ Joly. Le schisme de l'Église de France pendant la
ttévolutioo. — On trouvera aussi dans celts revue des articles impor-
tants d'exégèse biblique par l'abbé Loisy.
B. — Revue d'histoire diplomatique. !!• année, 1897, n" 4. —
Frédéric Masson. Les secondes noces de Paulelte (histoire du mariage
de Pauline Bonaparte avec le prince Borghôse. Le mariage religieux fui
célébré à Mortefontaine parCaprara deux mois avant le mariage civil ;
la chose se lit k l'iusu de Donaparte, qui ne laissa pas d'en témoigner
son mécontentement, sans oser faire un éclat]. — Victor Du Bled. Une
femme premier ministre : Madame des Ursina (publie quelques lignes
tirées du chartrier du duc de la Trémoîlle). — A. Le Glaï. Une mis-
sîoo délicate. Le cas d'un ambassadeur génois à Florence, 1743 (le baron
de NeuliofT, qui, en 1738, s'était fait proclamer roi par les Corses, était
venu en 1743 se cacber à Florence, oi!i il eut des conférences secrètes
avec Mann, le résideul anglais, ami et correspondant de Walpole.
A GAnes, on le soupçonnait de vouloir soulever l'île avec laconniveuce
des Anglais; aussi la République cbargea-t-elle son ambassadeur à Flo<
rence de rechercher l'ai-roi et de le faire tuer. Neuhoff réussit cepen-
dant à s'échapper et alla mourir tranquillement t Londres eti 17û6). —
G. Salles. L'institution des consulats; son origine, son développement
au moyen &ge che» les dilTérents peuples; fin <le consul n'a pas à l'ori-
gine le caractère d'un agent commercial; il est nommé par le gouver-
nement de sa patrie pour gouverner et juger ses compatriotes dans
l'étendue de son ressort. En fait, il joua souvent aussi un rôle poli-
tique, sans avoir jamais eu le rang ol'Bciel de diplomate. Ses attribu-
tions judiciaires étaient très étendues ; c'est devant lui qu'étaient por-
tées toutes les causes civiles et la plupart des causes criminelles, dans
lesquelles te défendeur était un de ses compatriotes).
6. — Bulletin critique. 18'J7, n" 29. — Castonmt dus Fosies. LAbys-
sinie et les Italiens (bon résumé de l'histoire de l'Ethiopie ; un seul cha-
pitre, ajouté après coup, se rapporte aux rapports des Italiens avec Méné-
Hkv. iliBTos. LXVL l" fASa. M
240 RECUEILS PERIODIQUES.
lik). — Chronique d'Italie (par Albert Dufourcq). = N* 30. Furtumngler.
Intormezzi (recueil d'importants mémoires sur l'histoire de l'art antique;
beaucoup de science et quelques témérités). ^ N« 31. Pfeilschifter. Der
Ostgothenkœnig Theodorich der Grosse und die katholische Kirche
(excellent). = N*" 32. H. Ehrensberger. Libri liturgici bibliothecae apot-
tolicae Vaticanae manuscripti (très bonne description de 554 msi., avec
de bonnes tables). = N* 33. Comte Benedetti. Essais diplomatiques ; noo-
velle séné (détails fort piquants en particulier sur Méhémet ÂJi). — U
R, P. Constant. Les Juifs devant l'Église et l'histoire (l'auteur s'est pro*
posé de faire connaître la législation de l'Église touchant les Juifs et il
a pubhé seize constitutions pontificales, plus quelques autres doeuments
choisis un peu au hasard et non d'après un plan rigoureusement sden-
tifique. Le commentaire est remarquable). ^ N» 34. Allard. Le chris-
tianisme et l'empire romain de Néron à Théodose (excellente mise an
point des travaux antérieurs). — Abbé Le Bourgeois, Les martyrs de
Rome, d'après l'histoire et l'archéologie chrétiennes ; 1. 1 : les martyrs
des voies Nomentane et Tiburtine (bon résumé de tout ce qui a été écrit
sur le sujet). — Ch. Michel, Recueil d'inscriptions grecques, fasc. 1
(excellent recueil). — G. Bonnefoy, Histoire de l'administration civile
dans la province d'Auvergne et le département du Puy-de-Dôme, depuis
les temps les plus reculés jusqu'à nos jours; 1. 1 et IV (recueil assez
indigeste de documents, de listes et de notices qui, d'ailleurs, ne
remonte pas plus haut que 1635). — R, de Vissae, Chronique vivaroise.
Anthoine du Roure et la révolte de 1670 (récit bien documenté, mais
d'une forme très déclamatoire).
7. — Journal des Savants. 1897, octobre. — L. Delislb. Catalogue
général des incunables des bibliothèques publiques de France (à propos
du t. I, publié par M^* Pellechet; très important pour l'histoire des
origines de l'imprimerie). — Berthelot. Quelques renseignements sur
l'alchimie persane et indienne. = Novembre. Albert Sorbl. Les origines
do la guerre de Cent ans (à propos de l'ouvrage de Funck-Brentano sur
Philippe le Bel et la Flandre ; fait ressortir les grands mérites du livre
et reproche à l'auteur quelques exagérations). — G. Paris. Histoire de
la langue française, 3<> et dernier article (intéressant résumé et substan-
tielle critique du livre de M. Brunot. Le livre et ces articles seront i
méditer par tous ceux qui étudient l'histoire de la civilisation).
8. — PolyblbUon. 1897, octobre. — H. Glagau, Die franzôsische
Législative und der Ursprung der Révolu tionskriege, 1791-92 (publie
quelques documents utiles sur l'histoire des sept premiers mois de l'an*
née 1792). — Duchemin des Cépeaux. Lettres sur l'origine de la chouan-
nerie et sur les chouans du Bas-Maine (très intéressant). — Angot.
Mémoires épistolaires sur la Révolution à Laval, avec une notice sur
Duchemin de Villiers (utile). — BrUckner, Geschichte Russlands bis
zum Endo des xviii Jahrh. (très important). — A. d'Avril. La Serbie
chrétienne (bonne élude sur l'église serbe). — Lippi, L'archivio comunale
di Gagliari (bon). = Novembre. Rouard de Gard. Les traités de protec-
«vcnns rfaroDtQvis. 211
torat conclus par la France en Afrique, IST0-lâ95. — Y. Guyot. Quea-
nay et U Physiocratie (intéressaot). — Chailley Bsrt. Léon Say. — G. F.
mu. Sources for greek history beiween the Persian and PeloponoeBian
wars (recueil indispensable, bien que mal distribué). — Scli^/cr. Luther
als Kirehhistoriker (beaucoup d'érudition; mais l'auteur se placp à un
point do vue trop luthérien. En fait, Luther ne voyait dans l'histoire
qn'uQ arsenal d'arguments contre la papauté). — imbert de Saint-Âmand.
Louis Napoléon et M"° de Montijo (piquant par endroits, souvent mono-
tone, rauwur voulant ne déplaire à personne). — V. Fiorini. Gii attl
det coDgreeso cîspadano nella città di Reggio, 27 dicembre 1796-9 gen-
uaio 1797 (excellent). — A. Roussel. Lamennais intime (d'après sa cor-
reepondance inédite avec Eugène Bore, qui mourut en 1877 supérieur
des Laiaristea. Les documents publiés ici se rapportent aux années 1B29-
IB36t.
9. — Revne critliiae d'histoire et de littérature. 1897, n° 41. —
Gretnidge. A baadbook of greek constiiulîonal hislory (bibliographie
incomplète; dea considérations générales intéressantes). — Heiienberg.
Nicepliuri Uleramydae currlculum vitae et carmina (autobiographie inté-
ressante, à la fois pour l'histoiro littéraire byzantine et pour celle des
querelles religieuses du xiii" «.). — ilarnûck. Die Chronologie der Lit-
teratur bis Irenaeus (ce second volume de la chronologie de la littérature
chrétienne jusqu'à Eusèbe abonde eu résultats nouveaux). — Br. Violet.
Die palais linischen Mœrtyrer des Eusebius von Gssarea (publie une tra-
duction allemande du texte syriaque de cet ouvrage et, en regard, en
autant de colonnes parallèles, les sources de cette rédaction. Cette rédac-
tion est un remaniement fait par Eusèbe lui-même d'un premier récit
plus court qu'il avait inséré dans son Histoire ecclésiastique). — Glagau.
Die rraniusische Législative und der Ursprung der Itevolulionskriege
(jette quelques lumières nouvelles sur le rôle joué par Narbonne en
1793).=: N" 42. B. Zelter. U minorité de Louis XUI, Marie de Médicls
et Villeroy (utilise beaucoup de documents nouveaux, mais exagère
l'importance du rôle joué par Villeroy). ^ N" i3. J. Mly. Recht und
Bitte (admirable résume sur le droit et la coutume de l'Inde antique).
— S. Reinaeh. Répertoire de la statuaire grecque et romaine, l. I Iréé-
dilion du recueil de Clarac, avec une excellente biographie de cet anti-
quaire. 6)7 planches contenant plus de 4,000 reproductions. Le tout
pour b francs). — G. Gilbert, fieitrœge zur Entwickelutigsgescbichte des
griecbischen Gerichtsverfahrens und Rechtes (de l'originalité, beaucoup
de précision et de clarté). — Franchina. Le condizioni economiche
délia Bicilia ai tempi di Verre, I* parte (sons valeur). — D' K. Jacob.
Die Erwerbung des Ëlsass durch Frankreich im westf<elischen Krlege
(ouvrage très consciencieux et en partie nouveau; mais l'auteur, en pré-
lut qu'il ne s'est agi il Munster que de la cesaiou de l'Alsace aulri-
a ruridu inintelligible l'histoire des événements postérieurs,
a loui« l'Alsace que les Impériaux cédèrent à Louis XIV). —
242 RECDEILS PERIODIQUES.
Eug. Hubert, La torture aux Pays-Bas autrichiens pendant le zvm* s.
(très intéressant). — G. de MortilUi. Formation de la nation française
(S. Reioach relève dans cet ouvrage un nombre incroyable de bévues et
une déplorable facilité à prendre des hypothèses pour des vérités sdeo-
tifiquement démontrées). z= N<* 44. E, Mûhlbacher. Deutsche Geschicbte
unter den Karolingern (travail très consciencieux et qui serait un exœl*
lent manuel s'il y avait les renvois aux sources et une table). — P. /^
dericq. Oe Secten der Geeselars en der Dansers in de Nederlaaden
(excellente étude sur les Flagellants, 1349-1400). -~ Mahrenholtx. Féo»'
Ion, Ërzbischof von Cambrai (excellent). — Pfriffèr, Der Feldxag Luck-
ners in Belgien, 1792 (récit déânitif). — Knod. Die aiten Matrikeln
der Univerâitœt Strassburg, 1621-1793 (bon). = N» 45. Beauchet. His-
toire du droit privé de la république athénienne (ouvrage considérable;
bibliographie très bien renseignée et des idées personnelles). — E, d^Bo»-
terive. Un soldat de la Révolution, le général Alexandre Dumas, 176^
1806 (récit très agréable d'une vie qui a été un vrai roman). — ?. Boppe,
La légion portugaise, 1807-1813 (très long, mais nouveau). =: N<* 46.
Laizarini. Marino Faliero, la congiura (détruit la légende et rétablit
l'histoire en ce qui concerne cette célèbre conspiration). = N*' 47.
H. Peter. Die geschichtliche Litteratur ûber die rômische Kaiseneit bis
Theodosius 1 und ihre Quellen (le pian de Touvrage est un peu l&che,
mais le fond est excellent). — Chantepie de la Saussaye. Lehrbnch der
Religionsgeschichte, 2« édit. (très remarquable).
10. — Revue de Tliistoire des reli|^ona. Tome XKXVI, n* 1.
Juillet-août 1897. — G. Maspero. La table d'offrandes des tombeaux
égyptiens ; fin (description minutieuse de scènes dont l'ordonnance a été
fixée depuis les plus anciens temps et qui sont un des éléments essen-
tiels de la vie que, selon les idées égyptiennes, les morts vivaient dans
le tombeau). — E. Aymonier. Le Cambodge et ses monuments (l*Koh«
Ker, où Ton a relevé plus de 40 inscriptions comprenant environ
1,500 lignes et plus de 4,000 noms de serfs ou d^esclaves sacrés;
2* Phoom-Sandak, où l'on a relevé aussi des inscriptions. Ces monu-
ments épigraphiques remontent au x« et au xi« siècle de notre ère). —
L. Knappert. La religion germanique (d'après le dernier ouvrage de
M. Golther : Handbucli der germanischen Mythologie, 1895. L'auteur fait
un très grand éloge de ce livre). := Comptes-rendus : PameU. The cuits
of the greek states (important traité de théologie grecque, où la liturgie
et la ritologie sont étudiées avec un soin particulier). — Â, de Bidder.
De ridée de la mort en Grèce à Tépoque classique (l'auteur s'efforce de
montrer que, vers le v« s., une transformation commença à s'opérer
dans i'àme hellénique, où s'introduisit un souci mélancolique de ce qui
attend l'homme après cette vie). — Fr. Spitta. Zur Geschicbte und Lit-
teratur des Urchristenlums (important et original). — 1)*^ Boàinet, Le
mouvement religieux à Paris pendant la Révolution, t. 1 (l'auteur ne
devait que réunir et publier les documents relatifs à ce mouyement reli*
^^^^^^^ RECOEILS rfmOOIQDES.
gxeni : il a fait mallieureusement beaucoup plus en s'occupant de cbosGK
étrangères à son sujet ot en jugeant un peu trop les évéoements et les
KiinineE d« la ftévolution d'après les théorieB d'Ang. Comte).
11. — Le Correspondant. 10 octobre 1897.— Un ancien diplomate :
Uiance franco-ruBse ; fin le 25 oct. — E. Daodbt. Le duc d'Aumale :
Dne jouroèe historique. M. Thiers et les priDces. Au seuil de l'Assem-
blée nationale (récit détaillé et impartial de la part prises à la guerre par
les princes d'Orléans et des démarches faites par eux pour pouvoir sië-
^r à l'Aesemblée; suite le 35 oct. et le iO nov. M. D. y raconte le pro-
cès Bazaine et le rôle ei patriotique et ai brillant joué par le dnc comme
commandant du !• corps, puis les douloureux évânements qui devaient
le rejeter en exil. Tout ce récit, très vivant et très documenté, est puisé
au3 meilleures sources orales et écrites). — Lanzac db Labomb. Le
maréchal Buchet (d'après le livre do M. F. Rousseau), == 25 octobre.
Lafenestiig. Jean de la Foniaine et les artistes de son temps (jolie
addition au joli livre de M. L. sur La Fontaine). — Dbuon. L'édoca-
tioD des Bourbons (Fragments de l'ouvrage ingéaicux de M. Druon sur
un sujet qui éclaire assez vivement l'histoire de nos derniers rois]. ^
10 novembre. Tninios. La France et l'Angleterre en Afrique. La boucle
du Niger (excellent exposé de la question). — Lanzac de Laborib. La
France en 1814, d'après Ipb rapports inédits du comte Angles (ces pré-
cieux ijocumenis d'un des chefs de la police générale vont être publiés
par M. C. Finnin-Didot).
12. — Étades pnbUées par d«8 Pères de la Compagnie de
JAans. 1897, '20 oct. — M. L.-J. Le centenaire de saint Augustin de
Cantorbéry. — L. Mëcuiheau. La bjble d'Ethiopie; second article : ses
origines; troisième article (5 nov.) : sa valeur littéraire, dogmatique et
critique. — Doizë. Léon Gautier (article nécrologique à signaler; l'au-
teur Élit les réserves nécessaireg sur l'œuvre de L. Gautier au point de
vue de la sévère érudition, mais fait ressortir avec autant de mesure
que d'équité la valeur pédagogique de son enseignement. De lui aussi
on peut dire : son meilleur livre, ce sont ses élèves]. — A. Houard. La
vérité sur Carrier (combat le Carrier de M. Ghassin par le Carrier de
M. le comte Fleury). ^ 5 nov. V, B. (Jn Russe calomnié (l'empereur
Paul, qui voulut être l'aillé de la France, qui a protège le conclave de
1800, qui fut le sauveur et le grand maitro d'un ordre militaire catho-
lique et qui procura la résurrection de la Compagnie de Jésus, Il fat
honnête et généreux ; il mérile d'être placé en un bon rang parmi les
souverains). — S. Harent. La part de l'Ëglise dans la détermination du
rite sacramentel (elle est probablement nulle, dit le P. Sasse dans ses /ni-
tittitioïKi theologîcae; c'est le contraire qui est plus probable). = 20 nov.
i. Satirin. Note sur le culte perdu des saints Dizole et Recesse (ces
saints ont été honorés à Saint-Omor à partir de 1618, année où le P. Van
Crombeck, recteur du collège wallon de cette ville, fit la reconnaissance
canonique de leurs reliques, jusqu'à la Révolution, oii elles ont disparu.
Ces saints Bont d'aillours par rai te m (?Dt iucoimus; peut-être doivent^ib
l'existence à une erreur de lecture dans les Catacombes, au iftmps
l'eiplo ration qu'y Gt Bosio).
la. — La Revue de Parla. 1897. 15 octobre. — Lahenhaib. 1
h MoDtalemberl ; suite le 1°'' nov, (correspondance fort importante pcvo'
l'histoire du roouTement intellectuel dans le monde catholique frani^^s-^
après la chute do la Restauration). — Duc de Richelibii. Ma retraite
pouvoir; suite et Qn le !"■ novembre (ce récit, très remarquable, a •
publié pour la première fois par la Revue hislorigue en 1890. M. *^
Cisteroes, qui le publie aujourd'hui dans tin volume sur Ricbelieu. 1
croyait inédit). ^ 15 novembre. E, Lavisbs. Bur les galères du ::^'~*
(tableau très coloré des misères auxquelles étaient condamnés ^V-*
forçats sous le grand règne, et l'un sait qu'aprè.s la Révocation b ^'"^
nombre de protestants furent soumis à ce régime). ^ 1" décemb^r"'
E. Renan, H. RBi(AK,M.BERrBEi.OT. Correspondance, 1847-1892; 2" sér^S-
1" art. {la plupart de cps lettres appartiennent au temps de la missi^C^
archéologique que Ronan dirigea en Palestine. Elles témoignent, enti^ -'
autres choses, de l'extrême ardeur que Renan apportait à son travai - ^
14. — Revne dea Deux-Hondea, 1897, 1" juillet. — Com
E. Lefbdtbb db Bèhainb, Léon XIIl et le prince de Bismarck. 3* art, —
l'arbilragi' des Caroline»; la fin du Culturkampr. — Paul Girash. L^^*
orateurs et l'opinion publique chez les Athéniens. — Valbe^t. Pier^^M
le Grand et son dernier biographe (à propos du livre récent de M. Walis^
Kevski). ^ ib juillet, Albert Souel. L'Europe et le Directoire, l^^art. ——
le congrès de Bastadt et la cession de la rive gauche du Rhin ; !■ arir '
{15 août) : les républiques tributaires ; la mission de Bieyès & Berlin ^*
3* art. (15 sept.) ; la seconde coalition; la république napolitaine (eipos^^
brillant et lumineux de la politique téméraire du Directoire ; beau por^
trait de Cbampionnet|. — Ch. Denoist. La révolte des Philippines e^£
les mœurs politiques de l'Espagne. — Eug. Guillauhe. Les ruines d» J
Palmyre et leur récent explorateur (raconte la chute de l'Étal de Pal— ^'
myre en 213 ; décrit les monmnonta de Palmyre d'après les travaux d^ ^^
M. Bertone, qui a reconstitué cette ville, construite selon les principes ^^
de l'art grec : comparaison Instructive avec Balheck où t'arl, également' -^^
gréco-syrien de caractère, a subi l'influence romaine). =: {" août. V, DcJ"
Bled. Berryer, d'après ses deraiers historiens. — G. Valsbbt. Les année^s^
de retraite du prince de Bismarck. ^ 15 août. Etienne Laxï. Les lutter*-*
entre l'Eglise et l'Étal au su" s. 1" art. : les causes ; 2* art. |15 nov.) : —
les phases; la Révolution française et le Premier Empire (étude très ^*^
documeatée et fortement pensée). =: l*' sept. G. Goyau. L'Allemagne ^^
religieuse. La vie protestante : les églises officielles et les eecles. — Rrt- — ^
TES. Les nouvelles recherches sur J.-J. Rousseau. 3' art. : la seconde ^
partie des Con/«jjionj|beaucoup de faits très précis; curieux portrait de ^
Ml'' Lo Vasseur ; influence morale exercée sur les âmes par Rousseau. —
Voltaire jeta le trouble dans bien des consciences qui voyaient uu ap6m '
dsiM 4«*n-Juqaes, quand il s'avisa de iui demander ce qu'étaient dere-
DttstneDbntei. — Cb.BEKoisT. Don Â. Canovas del Castillo.^ 15 sepL
Êmil» Uictm. Les missions diplomatiques de P.-P. Rabens, 16^7-1630
{d'après VBùioirt dîpUmiatique de Hubtm parGschardl.^ I« ocl. Mar-
quis deGâbuic. Chiieaubriand et la guerre d'Espagne, d'après des docu-
meau inédits. 1" art. .- les conférences de Vienne ei le coogrès de
Vérone 4 ces documents inédits sont des noies prises au jour le jour,
pendant le coi^rès, par M. de Gabriac, père de l'auteur, et par M. de
Boi«-le-Gomte) ; 3* art. |I« oov.j : Cbàteaubriand ministre des aSàires
éU-sAgèrw (montre que la guerre d'Espagne, qui était une partie du
* snnd detsein • imaginé par Chateaubriand, a été bien accueillie par
les cdiiaets eoropéecu, sauf l'Angleterre, et le profit moral qu'en relira
le ^memement). — Pierre M iixe. En Tbessalie. Journal de campagne;
fin le 1& oct. ^ 15 ocl. Cb. Bekoist. La monarchie ans tro- hongroise et
I*éqiiilî]ire ennipéen. 1" art. : les nationalités et l'empereur.
as. — Bania des UniTerslUs dn Midi. 1897, oct.-déc. — M. Hol-
' **n. L'expédition d'Altale I" en liS Ireprend la question déjà étu-
*lié«i par M. Radet dans le même recueil et présente des conclusions
^^at à fait différentes. Altale ■ se s'est pas montré en 318 le tacticien
**»daciieui et le manœuvrier de grande allure qu'a cru voir M. Radet ;
**<**]( le reirooTon», cette année-là comme toujours, circonspect, limi-
**»« »e» eotreprises à ses moyens d'action et se hftlant d'accomplir,
*it4t qne s'en offre l'occasion, des besognes immédiatement miles. >
^* - Radei a reconnu qu'il s'est trompé). — H. Babckhausen. Montesquieu
^^ ta tbéorie des gouvemetnents |que la distinction établie par Montes-
*ï^%ieo entre l'Ëtat républicain, monarchique et despotique est fondée
^^T ane idée philosophique très juste et non sur les aspects fournis par
^Observation de quelques États civilisés). ^ Bulletin historique rëgio-
***J : A. DscesT. Landes (bibliographie très minutieusei.
18. — SociéU de l*hlstoir« dn Protestantisme b^nçais. Bul-
*&tin historique et littéraire, 1897, 15 oct. ~ D. Benoit. Les prédicants
tnartyrE de la Révocation; les frères Plan, 1686-169". — A. Bebsus.
l>e tecUment autobiographique d'un des premiers pasteurs do France,
K^iem Pomelet, 1593. — A.-L. Hermimu(d. Une plaquette ioèdite
4* Agrippa d'Aubigné, 16ÎI-1630 (les éditeurs de IST3 avaient découvert
^t publié la minute manuscrite de cette lettre; on en donne aujourd'hui
Uq teste dèveloppeetretouchéqui avait été réimprimé sous Louis Xm,
tuais dont on ne soupçonnait même plus l'existence). — N. Weiss. La
liberté religieuse; ses ennemis et ses défenseurs en 1765 et 1789, d'après
trois leiUes inédites de Rabaut de Saint-tïtienne. — G. Pascal. La
l^uiiie d'Anlun et Jean Goujon (attribue à Jean Goujon une fontaine
datée de )543; c'est doni^ peu après V ' expiation ■ qu'il avait dû subir
fc Paris en 1543. et juste à un moment ou jusqu'ici l'on perdait sa trace,
qoe l'oD retrouve le célèbre sculpteur à .\uiun; et c'était peut-être sa
«lia aaUle). =: 15 mare. J. Viéhot. La régime de la séparation de
216 RECUEILS ptfRIODIQDBS.
l'Église et de rËtat dans Taucienne principauté de Montbéliard de 1793
à 1804. — F. Tbissier. La date précise de l'abjuration des réformés
d'Anduze (en oct. 1685). — N. Weiss. Le médecin Daniel Pajon après
la Révocation à Sainte-Menehould, 1701 (il était en prison pour avoir
tenu des assemblées prohibées).
17. — Académie des Inscriptions et belles-lettres. Comptes-
rendus des séances de Tannée 1897, 4« série, t. XXV, 1897, juilI.-aoùL
— DiEULAFOY. Simon de Montfort et la bataille de Muret. — Glermort-
G ANNEAU. Les tombeaux de David et des rois de Juda et le tunnel-
aqueduc de ii^iloé (ces tombeaux n'ont pas encore été retrouvés; l'auteur
indique dans quelle direction il faudrait chercher. Expose les fouilles
exécutées dans le tunnel de Siloé). — Emile Berteadx. Gastel del Monte
et les architectes français de l'empereur Frédéric II (ce château a été
construit dans le plus pur style français par Philippe Chinard en 1340;
c'était un seigneur français que Frédéric II ramena de Chypre. Signale
d'autres monuments apuliens élevés aussi par des architectes français).
— Ph. Rerger. L'église du Saint-Sépulcre sur la mosaïque géographique
de Mâdaba. i= Sept. -oct. J. Oppert. Un dieu commerçant |c nous pou-
vons suivre les opérations commerciales du Dieu-Soleil jusqu'au xxTi«i.
avant l'ère chrétienne: mais certes la fondation de cette maison remon-
tait plus haut : on peut dire que la maison de haute banque sous h
raison sociale « Dieu-Soleil i est le plus antique établissement finan-
cier dont l'histoire nous ait laissé le souvenir; aucun autre ne peut se
prévaloir d'une existence aussi longue, car il a subsisté pendant trois
ou quatre mille ans. i Le siècre de cette c maison du trésor i était à
Sippara-EIèliopoUs). — Id. Une d^'nastie d'usurpateurs (Bel-Sum-isknm
régna pendant quelques mois de l'année 561 ; il fut tué par Evil Méro«
dach, fils de Nabuchodonosor, et vengé par son fils NérigUssor, qui
assassina Evil Mérodach, son l>eau-frère). — Gagnât. Note sur un non*
veau diplôme militaire de Bulgarie, avec une photographie (transcrip-
tion et traduction; le diplôme est daté du 16 sept. 93. Il mentionne
pour la première fois le nom complet de la cohorte des Cisipaderuei ;
mais on ne sait identifier ce dernier nom). — Vidal de la Blaghb. Note
sur l'origine du commerce de la soie par voie de mer. — Hêboh db Yilp
LETOssB. Fragment d'un diplôme militaire, de Tannée 99, relatif & la
flotte de Misène.
18. — Bulletin de la Société des sciences historiques et natv-
relles de l'Yonne. Année 1896, vol. L« 1897. — Ch. Moisbt. Les t Idées
sinlnlli^^es • de Rétif de la Bretonne (analyse les idées contenues dans
les ouvrages où Rétif se proposait de réformer la société et les mœurs;
la forme en est licencieuse et le fond chimérique). — Abbé Jobir. Le
prieuré de Franchevaux idepiiis sa fondation eu 1159 jusqu'à sa des-
truction totale à la tin du siècle dernier ; liste des religieux et des
prieurs de Franchevaux ; en appendice, 24 chartes des xii* et xni« s.),
'■' Gaston Gauthier. Rogny et Saint-Eusoge, Yonne, depuis les cri-
UCDEILS friRlOOIQDM.
217
■r'
jusqu'à GOS jours (monographie de 14-^ p., avec dix documeats
lit», DUO carte et plusieurs croquis|. — Fr. Molabd. Le iivre de
on des familles Bnrbanceys et Gbadenier. — E. Pbtit. Quatre lettres
l'abbé LebeuF {à Martène et à Monlfauconj. — Abbé Blondel, Esa-
nien crillque du système de l'abbè LebeuT sur la chronologie des pre-
liera évéques d'Auierre (Peregrinua, premier évêque d'Auserre, fut
■tyrÏBé en 287 et non eo 303, comme le veut Lebeuf. Celui-ci a eu
lorl également de prétondre que Valôre et Valérien, le Kccuud el le
lisiëme successeur de salut Pèlerio, étaient une seule et m<>me per-
sonne :îajnt Valérien; enGn, il a sans raison placé saint Praleme avant
saint Alode|, — Loiseau. Un syndicat agricole à Chitry en 1163. —
Fr. MoLARD. Études hagiographiques : la passion de saint PêleHo; la
cbronologie des premieri évéques d'Auxerre [longue discussion qui
aboutit aux conclusions suivanteu ; 1° saint Pèlerin a été martyrisé le
16 mai 259, sous le principat de Yalérien et de Gallien et sous le con-
sulat d'Ëmilianus et de Bassus. 1° Cette date laisse dans la suite des
évéque« d'Auierre une lacune de Tingt-neuf ans; on peul la combler
d'abord en donnant saint Marcdlîen pour successeur presque immédiat
saint Pèlerin, puis eu admettant de 286 ou ?a9 à 313 une longue
:e du siège épiscopal. 3° La passion de saint Pèlerin telle que
'avons a été rédigée vers la fin du vi* s. d'après un récit beaucoup
ncien, et son auteur probable est Etienne l'Africain ou quelqu'un
disciples immédiats).
-— Bulletin Ustorlqae et aolentlflque de l'Anvergne. 1S07,
— J. Delmas. Les loges maçonniques de Saint-Flour au xvm" s.
ibé Mioche. Rectification à l'hagiographie d'Auvergne (les martyrs
" ■ n et Agape n'appartiennent pas au diocèse de Clermont;
ilroduits dans le Propre de Clermont au xvn» s. par suite
I de BarouiuB mal traduit). =: N" 6. Abbé Attaix. Les
.nton d'Ennezat,
égnm
k HeTu« archéologique, historique et
- F, SteuNÉE, Notes sur l'histo
tee deux chartes do 1376 et de M^ij. = Mi
|de N,-D. de Loretle en Berry. ^ J
aclentlSqae dn
re de Saiul-Char-
i. Abbé DuBOiBKL,
Id. Le temporel de
fAe la VernuBse |d'aprés un terrier dressé de 1700 à 1727). -
Iabou. Le tombeau d'Aldeberl, archevêque de Bourges, 109?-
!t abbé de Déols, 1087-1007.
— Revue bourgnlguonne de l'Enseignement Bnpértear
rsité de Dijon). Tome VII, cl. — Gaffahel. Baylen et Vimeiro.
S N" 2. Kl^nclausz. Leçon d'ouverture du cours d'histoire de la Bour*
-, faite à l'Université de Dijon, le 9 fôvr. 1897.
S2. — Revue de Champagne et de Brie. 1896, nov.-déc. —
J.-A. Blancrbt. Bellement des potiers d'étain à Troyes an I57G. —
l*. GuAUA'ET. Extraits des anciens registres paroissiaux du Potit-Mesnil.
— Abbè MiLLASD. Histoire de Gigny-aux-Boie; suite. — Jad«bt et Lb
248 IBCUBILS FifilODIQUIS.
Grand. L'ancienne baronnie du Thour en Champagne, d'après unairea
de 1390 comparé au cadastre; appendice; suite en janv.-févr. 1897. ^
1897, janv. Â. Pétel. Les seigneurs de Ville-sur-Ârce ; saite en man
et avril. — Abbé Millard. Histoire de Bussy-au-Bois; suite ea man
et juin. — Abel Rioault. Documents sur Bouillon conservés aux
archives du ministère des Affaires étrangères (bref inventaire). =: Févr.
P. Ghauvbt. Actes religieux du Petit-Mesnil ; suite en mars-juin. =
Mai-juin. Gaston Paris. Le poète Guillaume Goquillart, chanoine et
ofGcial de Reims. — L. Mongb-W. La mission de Reims en 1821. —
RosEROT. Répertoire historique de la Haute-Marne contenant la nomen-
clature des ouvrages, articles, dissertations et documents imprimés
concernant l'histoire de ce département; 2* part. : Catalogue des actes.
23. — Revue de Oascogne. 1897, 9« et 10« livr., sept.-oct. —
Ph. Lauzun. Châteaux gascons de la fin du xin* siècle. Valence-sur-
Baîse; l*** partie (son histoire jusqu'au xvm« s.). — Cypr. La Plagme-
Barris. Seigneuries du pays d'Angles. 1*^ partie : Pouylebon; 1*' art
(son histoire du xrv« au xyu« siècle) ; suite en novembre : Pouylebon
jusqu'à la fin de la Révolution. — T. de L. Une lettre et une note de
1619 sur les antiquités de la ville d'Auch (lettre adressée à Peyresc). —
Carsalade du Pont. La noblesse du diocèse d'Auch au siège de Salces
en 1639. = Bibliographie : Abbé Dubarat Bétharram et le Mont-Valé-
rien (documents inédits relatifs surtout à l'histoire du xvii* s.). — J,de
Jaurgain. Châteaux basques. Urtubie (intéressant). — LabaU Le châ-
teau de Marrac (construit, à une demi-lieue de Bayonne, par Marie-
Anne de Neubourg; c'est là que fut consommée en 1808 la déchéance
des Bourbons d'Espagne; intéressant pour l'histoire de cet épisode
tragi-comique de l'affaire d'Espagne). — Breuils et Gardère, Ck)mptes
des consuls de Montréal-du-Gers, 1411-1450. — Lauxun, Le château de
Cauzac; le château de Nérac (bonnes monographies). =: Novembre.
L. Couture. La reine Marguerite, d'après quelques publications méri-
dionales (il s'agit de la première femme de Henri IV; utilise les publi-
cations récentes de MM. l'abbé Douais, Pb. Lauzun et Tamizey de
Larroque).
24. — La Province du Maine. 1897, n9 8. — L. DeiTis. La maison
Bérengère au Mans. — Ë.-L. Dubois. Le prieuré de Baint-Juiien-la-
Tourette au diocèse du Puy-en-Velay. — L. Frooer. De la significa-
tion du mot saint au xv* siècle {saint = cloche, ce qu'on savait depuis
longtemps). — Lettres royales ; suite au n^ 2 (deux lettres de Henri FV
à Charles de Ghambes, 13 juin 1590 et 15 mai 1597). =r N<» 9. Lbdru.
Les pèlerinages â la sainte Vierge dans le diocèse du Mans.
26. — Revue historique et archéologique du Maine. T. XLII,
1" livr. 1897, second semestre. — Dieudonné. Hildebert de Lavardin,
évoque du Mans, archevêque de Tours ; suite (examen méthodique des
lettres). — M. Robert. L'instruction primaire au xviii* s. dans le can-
ton de Fresnay. — L. Briére. Bibliographie du Maine pour Tan-
UCUULS PBBtOftKtlln.
= 3° livr. Baron S. de la Bouilleoib. Une émeute au Mans
D Ift75, & propos de droits il'ociroi {la victime de cette éateute fiit un
avocat, Claude Blondrau, dont la maison fui mise au pillage après
SToir été assiégée par la pupulace). — D^ Candë Ud livre de gages des
chitelains du Lude au coinmpncementdu xvii* s.; contribution à l'élude
de la vie privée des anciens seigneurs en province. — Dieudonnë. Hil-
debert de Lavardin,cvéque du Mans; suite (chronologie de ses leltres|.
28. — Revae de Salntonge et d'Annls. 1897, )" sept. — E. G.
Los Fleuriau de la Rochelle. — Le culte de sainte Radegonde en Sain-
tonge. — L* MoBiNERiE. Le marquis de Montalembert et son second
mariage (le général de Montalemliert épousa en premières noces M"' de
Commarieu; ce mariage étant resté stérile, il divorça en 1794, à l'âge
de qnatre-vingls ans, pour épouser Rosalie Cadet, divorcée également,
et dont il eut une fille). — J, Pemssow. Notes sur les enseignes, le
commerce et l'industrie en Saiotonge et en Aunis ; fin. = 1" novembre.
LËTELtË. Un cnré constitutionnel : Léonard, curé de Marennes. —
J. PEL1.1B90N. Balzac, Thiers et Alfred de Vigny devant les électeurs
chareutais. — E.-G, La Famille Oiialle, de la Rochelle (gi''néalogie de
celle aacience famille protestante). — L. Am>uT. Une baronnie en
Angoumois |baronoie de Marthon, au diocèse d'Angoulôme, d'après
une monographie récente par l'abbé A. Mondon). — Th. Phelippot.
Étude historique sur la baronnie de l'ile de Ré: réponse aux obser^'a-
tioos du D' Kemmerer et du D' .\tgicr (cette baronnie n'a pas été créée
par Louis XIV; ajoute quelques noms aux neuf possessears de cette
baronnie signalés par le D' Kemmerer).
fi7. — Travaux de l'Académie nationale de Reims. Vol. XCFX,
année 1895-96, t. I (Reims, Mlchaud. 1897). — M. Fboussabd, Jeanne
d'Arc champenoise; rapport sur la brochure de M. Mi.iset en réponse à
celle de M. Poinsignon (tient pour l'origine champenoise de la Pncelle).
— Abbé Chaules. Une contrefaçon de Jeanne d'Arc (quelques pages
sar Claude des Armoises). — Ch. Coyon. DécouvertPs et fouilles dans
un cimetière gaulois, lieu dit le Monlèqueux, territoire de Beine,
Marae. — Atph. Gobset. Monographie de la basilique de Saint-Rcmi
de Reima. — Jadaiit, Vieilles rues et vleilIeH enseignes de Reims. —
A-bbé MissET. Proses en l'honneur de saint Rémi.
28. — Beitreege znr Bayerlschen KlrcbeogeBChlchte. Bd. m,
H^ft 1, 1896. — 0. EsHAEn. J. Schwanhausen, le réformateur de Bam-
Bn dans Heft 2. — Mmei. Letlres d'Adolf de Harless à Hod.
'agner (I8&3-&S ; important pour l'histoire des luttes politiques et reli-
luses à cette époque). — Th. Koldb. Un évêque élu de 'Wiirzboarg
î passe au luthéranisme (J. Pettendorfer, 1524). = Heft 2. In. Trois
tetlres du temps do la Réforme (de Gbr. Scheurl, Th. Billican et
A. Dœber, 1521, 1524, 1546). — Ehoebs. La correspondance de Caspar
LcBner; suite; fin dans Heft 3 (1545-1555). — 0. Rieder. L'histoire
220 lECUEILS FiaiODIQUES.
religieuse dans les revues des sociétés historiques de Bavière; suite
dans Heft 5-6. = Heft 3. Ney. Le prétendu soulèvement du pasteur
réformé Georg Infantius à Spire en 1577 (montre, d'après des documents
inédits, qu*il n'y a rien de fondé dans le récit qui montre ce pasteur et
les membres de TÉglise réformée formant un complot contre les luthé-
riens). — Th. Ladter. L'oppression de TËglise évangélique dans le
duché de Sulzhach, 1627-1649 (d'après les registres ecclésiastiques). —
Braun. Hans Ehinger de Memmingen (publie une apologie écrite par
Ehinger en 1539 où il montre les services qu'il a rendus à la réforme
luthérienne). ^ Heft 4. Jordan. Les registres ecclésiastiques de Nurem-
berg au xvi« s. (article très soigné sur ces registres paroissiaux, leur
contenu, leur importance pour l'histoire ecclésiastique et morale). —
KoLDE. La réforme luthérienne à Rothenburg-sur-Ia-Tauber (publie
13 lettres de 1544-1546, avec un abondant commentaire). — Id. Le ser-
vice divin à Nuremberg, d'après les notes d*un contemporain, 1783-
1784. := Heft 5. H. de Schubert. Le conflit relatif aux cérémonies du
culte luthérien à Nuremberg en 1750. — Fr. Braun. Le monastère
augustin de Memmingen (1<> extraits des statuts de 1453; 2<> acte de
1516 relatif à la situation des monastères de femmes dans l'ordre de
saint Augustin). = Heft 6. Kawerau. Johannes Draconitès de Gari-
stadt, 1494-1566 (théologien luthérien distingué. Publie des lettres iné-
dites et une oraison funèbre de Draconitès sur Luther le 11 mars 1546).
— G. Brunner. Les mss. allemands relatifs à l'histoire religieuse de la
Bavière qui se trouvent à la Bibliothèque nationale de Paris (d'après le
Catalogue des mss. allemands de Huet).
29. — Dentsch-evangelisclie BlssUer. Jahrg. XXU, 1897, Heft 1.
— Th. ScHOTT. Renée de France, duchesse de Ferrare (esquisse biogra-
phique d'après le récent ouvrage de Rodocanachi ; sa situation à l'égard
du protestantisme). — Brausewbtter. J.-J. Rousseau moraliste et
pédagogue; suite dans Heft 2. — L'évêque Ross (biographie de cet
évéque titulaire évangélique qui joua un rôle important dans l'Église
évangélique des pays rhénans et de la Westphalie, 1772-1854). = Heft 3.
Nasemann. La Palatine, duchesse d'Orléans (brève esquisse historique).
= Heft 4. Reinthalbr. Ernest-Maurice Amdt (sa biographie; tableau
de sa vie politique). — Billes. Les tablettes d'argile de Tell-el-Âmama
et les livres de Josué et des Juges (à la fin du règne d'Aménophis HI,
roi d'Egypte, toute la Palestine était occupée par les Hébreux. Ces
tablettes fournissent d'importants renseignements sur la situation du
culte que professait à cette époque le peuple juif). ^ Heft 5. Sodeur.
L'amiral Goligny (surtout d'après la biographie publiée parE. Marcks).
— Naseicann. Le prince Eugène de Savoie (rien de nouveau). := Heft 6.
Andlbr. La vie du réformateur John Knox comparée avec celle de
Luther. — Nasemann. Marie-Thérèse d'Autriche. — Charles Walker.
Montesquieu, champion du protestantisme en France.
30. — Neue kirclUiche Zeitsdirilt. Jahrg. Vm, 1887, Heft f.
■BCOErLS F^ftlODIQUES. 221
— lfu>ETEuiiflN. Gotnmcat s'est lormd le Pentateuque ; suite (étude
criliqae sur tes récits du Pentateuque relatifs au sauciuaire mudaique
du Tabernacle et à la disposUiun du camp iaraèlitc. Attaque vivement
la luelLoiIe suivie par Wellbau^en dans la critique du PeniateuqueJ;
suite daus Heit 3 et 4 ; lin dans lleft 5 (ces récits sont du temps de
David ou de Salomon). ;= Hcft S. Lehius. La aitualion religieuse de
Hèlaacbton. — Seebero. La situaiion de Mélanchtou dans l'bistoire du
dggme et de la dogmatique. — Blasb. Hélanchlon considéré comme
humaniste et pédagogue. = Heft 4. Sellui. Auguste Kohier, tbéolosien
et historieui article nécrologique. — WoRLENBBtio. Jésus Sirach et la
question sociale (il est complètement faux qu'il y ait dans les ideer^ de
Jésus Sîracli des idées semblables à celles du socialisme moderne). —
UoMMSL, Arpaksliad (dans VAcademy du 17 octobre 1896, l'auteur avait
donné uue explication de ce nom qui se trouve dans la Genèse, 10, 22
et 24, et dans 11,1'^; il l'avait identilié avec UrKasdim, patrie d'Abra-
ham. Ctaeyne avait, dans VE^posîtor, soulevé des objections que réfute
l'auteur dans le présent article). ^ Ueft 5, Z&ubpfvsd. La situation de
l'apOire saint Paul au regard de la loi mosaïque. — Wieoànd. Les
mosaïques du ba|>tistère de Kaveune (elles représentent la liturgie du
baptême dam l'Eglise primitive; très importantes à cet égard).
3t. — Studien uod Mlttheilungen ans dem Benedictlner-and
CUterci«nser-Orden. Jabrg. XVll, IHSb, Ueft 3. — Vbith. Les mar-
tyrologes des Grecs (explique minutieusement la situation présente de
la science sur ce domaine, d'après l'étude de nombreux martyrologes
inédiuji suite dans lleft 4 et dans Bd. XVUl, Ueft i. — Leistlb. Les
Eciedces et les arts au monastère bénédictin de Saim-MagnusàFOssen;
euiU) irelaUve au xvu" s.) ; suiie dans Heft 4 et dans Bd. KVIU, Befl 2.
— QjtjiHiBB. Sctiolae Benediciinae (des progrès que les Bénédictins
firent accomplir à la science) ; suite dans Heft 4 et dans Bd. XVIII,
Ueft 2. — Renz. Contributions à l'histoire de l'abbaye bénédictine de
âainl-^acques et du prieuré ■ Weicb - Saint- Peter • à liattsbonne;
suite : 1384-U22; lin dans He^ 4 et dans Bd. XVlll, Ueft 2 (l'auteur
s'arrête en (499). — ScnNsmER. Jobaiin Bertels, abbé de Munster et
d'Ëctaternach 1 Un : 1594- 1Ë07. — GBiLLËMBEflaga. Documents et
recherclies sur l'bistoire de l'ordre cistercien', suite dans Ueft 4 et dans
Bd. XVIU, Ueft 2. = Ueft 4. W'^oneb. Gillon li Muisi, abbé de Saint-
Martin de Tournai (biographie détaillée, d'après des documents inédita,
1272-1353). — P. WirriTANN. Jean Nibling, prieur de l'abbaye cister-
cienne d'Ëbrach, et ses œuvres, 1500-1526 (extraits de ses chroniques) ;
suite dans Bd. XVIII, Ueft 2, — Kukcla. Lettres écrites de Rome par
des religieux de Cjaiut-Maur en 1699 (douze pièces de dom Guillaume
Laparre, Mabillon, MonLfaucon et autres; importantes en ce qu'elles
montrent la situatiuu de la congrégation de Saiut-Maur à l'égard de la
cour de Home, ses rapports avec les Jésuites et tes luttes qu'elle eut à
aui>ir k propos de la publication des œuvres de saint Augustin). ^
^d. XVIll, 1S97, Ueil 2. Ponsgbàb. Le ■ Liber pontificalis • de l'évéque
222 UCOBILS PlffilODIQUES.
d'Ëicbstsett, Gundekar II, et le bienheureux Utto de Metten; suite
(détails sur les débuts de Torganisation ecclésiastique dans l'évéché
d*£ichstœtt au viii« s. et sur les premiers monastères qui y furent éta-
blis). — Plena. Histoire du culte de la Vierge; suite : ix^xii* s.
32. — Zeitochrift fOr deutsche PhUologie. Bd. XKX, Heft 1,
1397. — H.-G. BoBR. Sur la Gretissaga (l'auteur prépare une édition de
cette saga ; le présent mémoire lui sert d'introduction, i® Les divers
remaniements de la saga; l'authenticité de chaque strophe et les inter-
polations. 2<» Rapports de la saga avec d'autres récits de l'ancienne
Scandinavie, en particulier avec la Fostbroedra et la légende de fieo-
wulf. 3» Luttes des Grettir avec des spectres et des esprits méchants;
origine mythologique de ces récits). — Fr. Eauffiunn. L'arianisme
d'LJlIilas (Jostes a récemment exprimé l'opinion qu'Ulfilas, l'évoque des
Gotbs, le traducteur bien connu de la Bible, a d'abord appartenu à
l'Eglise orthodoxe ; c'est seulement en 383, Tannée même de sa mort,
qu'il se fit arien et qu'il amena do cette façon tout son peuple à passer
à l'arianisme. L auteur réfute cette opinion ; il étudie la situation reli-
gieuse des Goths au iv« s.). = Gomptes-rendus : Loewt, Die Reste der
Germanen am Schwarzen Meere (peu de valeur). — W. Hœhler, Luther's
Scbrift an dcn christlichen Adcl im Spiegcl der Kultur-und Zeitge-
schichtc (remarquable, malgré beaucoup d'erreurs de détail).
d3. — Nene Mitiheilungen ans dem Gebiet hlatorlscli-aiitl-
qaartscher Forsolinngen. Bd. XIX, Heft 2, 1896. — Firrnio. Pour
servir à l'histoire des Universités de Halle et de Wittemberg (histoire
d'une bourse fondée à l'Université de Wittemberg au xvm* s. pour les
étudiants hongrois). — Jul. Meyer. Rapports de l'Université de Halle
avec la Franconie (signale un certain nombre d'hommes remarquables
provenant de Franconie, qui demeurèrent à Halle, soit comme profes-
seurs, soit comme étudiants). — Rambeau. Une image de pierre érigée
à Gûmmritz, non loin do Wettin (une pierre de ces environs montre
le profil d'un homme plus grand que nature; l'auteur croit qu'elle est
de l'époque préhistorique). — Kohlmann. Pour servir à l'histoire de la
réforme luthérienne à Halle (traite de l'ordonnance ecclésiastique pro-
mulguée en iô43j. — R. Sghmidt. Gontributions à l'histoire de la ville
de Zôrbig et de ses environs (préhistoire, trouvailles de monnaies; his-
toire du moyen âge et moderne). — Hub. ërmisgu. Les tablettes de cire
du curé Hermann Westfal dans les archives municipales de Delitssch
(contiennent des notes historiques de 1409-1435 qui apportent des résul-
tats en partie nouveaux. Texte et commentaire). — R. Sghmidt. Une
plainte du conseil municipal de Zôrbig, 1636 (adressée à l'éleclenr de
Saxe au sujet du pillage de la ville par les Suédois). — J. FcBasTSMAKK.
Fragments d'un livre de dépenses du comte Guuther de Beichlingen
en 1448. — Fabarius. La bataille de Riade, 15 mars 933 (recherche les
péripéties de la bataille et le lieu où elle fut livrée. Ge lieu doit être
cherché à l'est de Halle et au nord de Mersebourg).
84. — Scban ins Land. Jahrg. XXUI, 1896. — Hermann Mayeb.
Le prédicateur Jean Geiler de Kaysersberg, 1445-1510 {ses rajiporls
avec Fribonrg en Bade). — P. Albert. Le corps des soldaW-ciluyena
de Fribourg; de lu part qu'il prit aux mmbata de Wagenstadt, 7 et
14 août 17116, d'après des documents iaédits et avec des illuntrations.
— U, Langer. La prise de Brisacb par les troupes Trançaises eu 1103.
— Obser. La maiBOQ où mourut Mirai)eau-Tonneau, chef des émigrés
ffaaçais.
35. — Jabrbnch ftlr Oesetzgebang, Terwaltung and Volks-
wfrtluchaft Im dentBclien Relcb. Jabrg. XXI, 1897, HeFt 1. —
fiBEVBTo. Le développement social des principaux peuples de l'Europe
à l'cpoque moderne et contemporaine; ï° art. (compare le groupement
économique et social des différentes classes dans les divers États de
l'Europe au commencement de l'époque moderae, groupement dans
lequel se reilète l'inQuence politique des classes. Important article de
99 p-]. — SiEvEKiNo. L'industrie de la soie à Gènes au xv el au ivr' s.
(débuts de celte iaduslrie en Italie et à Gènes; fondation de la corpo-
ralion de la soie en 1432; orpnisaiion de cette corporation : de l'obli-
galion imposée aux marchands d'y entrer. Happorl des gros fabricants,
des seaterii, avec les ouvriers el le travail à la maison ; importaoce des
déboDcbés, concnrience avec Lyon et avec l'organisation des métiers
libres dans cette ville; Lyon a complètement dépassé, dans le cours du
XVI* S-, rindostrie génoise ; la peste de Id79 lui donna le coup de mort.
Comparaison avec ce qui se passait à Florence, à Venise et à Lncques
an XV* et au xvi* s. Utilise un grand Bombre de pièces d'arcbivesj. —
CarlGfiiJEKBBBa. Étude sur l'histoire et la politique agraires en Autriche;
3* art. (expose les conditions auxquelles était attachée l'acquisition de
la propriété foncière seigneuriale dans les pays bohèmes avant 1848, ce
qti'oD appelait ia ■ Gruodeigeathumsriehigkeit. ■ Avant 1848, les noD-
Dobles en étaient exclus. Expose le droit et la pratique en usage à cel
égard depuis le xvni' s. Ges mesures restrictives avaient puur but de
maintenir la noblesse dans son ancienne autorité poliCique. Depuis 1848,
ta noblesse boliéme n'a vu, pour ainsi dire, porter aucune atteinte à son
énorme prépondérance politique). ^= Comptes -rend us ; Aviirlis, Moderne
Volkerkunde (erreurs nombreuses). — Cunningham et Arlhur. Grund-
Unien der englischen Industrie-Gescbichte (excellent). — Ehrenberg.
DuA Zeitaller der Fugger (boa). — Benger. Rumienien (superficiel). —
Baieoianu. Geacbichte der rumsnischen Zollpolitik vom xiv Jahrb. bis
1874 Ibon). — Mûniterberg. Der auswœrtige Handel Japans, 1542-1854
(•ans grande valeur). = Heft 2. Strcell. Le développement économique
el politique de la Bulgarie depuis 1878. — Ziuhebmanh. De l'iollucnco
dfls milieux sur la formation de la population dans lo doclie de Bruns-
wick (exposé très approfondi ; tableaux établissant les influences exer-
cées par la condition géologique du sol, les hauteurs, la qualité du sol,
les champs et les bois, les cours d'eau, le commerce, les chemins de
fer, l'industrie, les villes, sur la densité et l'accroissement de la popn-
224 aiGUEILS PjffilODIQUBS.
iation peadaat an siècle). = CSomptes-rendus : Gumplowics. Sociologie
und Politik (manqué). — Bematzik. Republik und Monarchie (excel-
lent). — Siegel. Deutsche Rechtsgeschichte ; 3« édit. (bon). — Keuigen.
Untersuchungen ûber den Ursprung der deutschen Stadt-Verfassong
(bon ; objections présentées par Liesegang). — Spahn. VerfiBissungs-and
Wirthschaftsgeschichte des Herzogthums Pommern, 1468-1625 (excel-
lent). — Blumenstock. Ëntstehung des deutschen Immobiliar^Êigen-
thums ; Bd. I (important). — Ludwig, Der Badische Baner im xvm Jahrfa.
(bon). := Heft 3. 0. Hintze. W. Hoscher et sa théorie de révolution
politique (analyse approfondie et appréciation de la Politik de Roscher,
dont la 2« édit. parut en 1893). — ëberstadt. Les c maîtres par don de
Roy 1 ou « maîtres par lettres de Roy ; » histoire de cette charge ; sa
place dans ^organisation corporative de la France depuis le moyen âge
jusqu'au xviii" s. (on désignait par ce nom les ouvriers qui étaient reçus
par décision royale dans une corporation tout en étant dispensés des
obligations relatives à Tapprentissage, au compagnonnage et au chef-
d'œuvre. On a prétendu jusqu'ici que la création des c maîtres par don
de Roy i était un acte de l'absolutisme royal sous Louis XI et qu'elle
datait de 1461 ; un acte inédit permet à Fauteur d'en constater l'exis-
tence déjà en 1388. Au moyen âge, cette ingérence royale dans le droit
des corporations a été bienfaisante ; plus tard, la nomination de ces
f maîtres » donna aussi lieu à des abus. Somme toute, l'institation des
t maîtres par don de Roy i a été très utile pour le développement de
la classe ouvrière en France et pour les corporations elles-mêmes). —
LouTSGHiTSKY. Los formcs de la propriété foncière dans la Petite-Rus-
sie; 2« art. (à l'aide de documents inédits tirés des archives de Kiev,
Tauteur décrit certaines formes de la propriété agraire qui se sont main-
tenues jusqu'au xviii" s., en opposition avec le droit écrit dans l'Ukraine,
surtout sur la rive gauche du Dnieper). — £. von Halle. Revue des
publications récentes sur l'histoire du commerce et de la situation éco-
nomique à Hambourg. = Comptes-rendus : Bûcher. Arbeit und Rhyth-
mus (excellent). — Luschin von Ebengreuth. CËsterreichische Rechts-
geschichte (très bon). — Breysig, Geschichte der Brandenborgischen
Finances, 1640-97 (excellent).
36. — Jahrbflcher flir Nationalœkonomie und Statiatik.
3« Folge, Bd. XIII, Heft 1, 1897. — Steinuausen. Lettres de commerce
de la Hanse écrites au xv« s. (publie huit lettres de marchands de Riga
adressées à des marchands de Lubeck et de Bruges, 1458 ; elles sont
intéressantes pour l'histoire du commerce à cette époque). =: Heft 2.
0. Seeck. De l'emploi de la méthode statistique dans l'histoire ancienne
(prévient contre l'abus de cette méthode ; combat les ouvrages de Beloch
et d'£d. Meyer). = Compte- rendu : JelUnek. Die Ërklœrung der
Menschen- und Bûrgerrechte (remarquable). ^Heft 3. J. Beloch. His-
toire de la population dans l'antiquité (réplique au mémoire de Seeck
dans le précédent fascicule). =: Comptes-rendus : Von Brdberg^Krezen"
ciewski. Johann-Joachim Bêcher (bon). — Ehrenherg. Hamburg und
BECCTBItS P^HIODIftireS.
225
I
EogUnil im Zeitalter der Kônigin ElisabeLh (excellent). = Heft i. Eu-
UCNBURQ. Du Dombre des éludiants qui onl TréqueDlé les univerBÎtés
allemandes du itv au xvti° b. (étude de statistique très détaillée). ^
Heft 5. RACUFtHL. Sur une théorie d'une science a collectiviEle > de
l'histoire (critique la théorie soutenue par Lamprechl et qu'il tient pour
Gomplèiemeut fausse. On ne saurait bannir l'individualité de l'hia-
loirej. = Compte-rendu : Wiebe. Zur Geschichte der Preis-Revolulioa
des XVI u. x™ Jahrh. (excelleot). = Heft 6. K. Laupabcht. L'individna-
lUme et la force du socialisme psychique en histoire (réplique à
Bachfahl).
- Staata- nnd Social wis se nscbafUiche Forscbungen.
Bd. XV, Heft ?. -~ H. Eberstaut. Magisterium et fraterniUs (âtude
approfondie, et qui conduit à des résultats nouveaux, sur l'origine des
corporations; l'auteur y a été amené par des travaux sur l'bisloire du
droit industriel et sur les origines des corps de métier en France, pour
lesquels il a utilisé un grand nombre de documents. Mém. de 241 p.). ^
Hofl 3. A. DosEN. Développement et organisation de^ corps de métier
à Florence au xni' et au siv» s. (d'après des documents inédits dont
plusieurs sont publiés en appendice. 'Travail de 114 pages).
38. — Zeltschrlft f&r die geaammte Stants^vissenschaft.
Jahrg. UU, 1897, Heft I. — MiraABus. Appréciation critique des
prix marqués dans l'Ëdit de Dioclélien, au point de vue de l'économie
politique (étude approfondie sur la manière de vivre, la nourriture, le
vêtement, l'habitation dans le monde antique, sur le système monétaire
des Romains à l'époque impériale, sur les salaires à cette époque et
leur rapport avec ce qui était strictement indispensable au.ï ouvriers
pour vivre, La condition de ces derniers n'était pas trop dcfavorable).
39. — Zeitschplft fOr (lie geaammte Strafpechtswlsaenschaft.
Bd. XVU, Heft 4-5. (897. — P. Fbaubnstj;!.!. Mendicité et vagabon-
dage en Silèsie du xvi' au zvhp s., d'après des documents inédits
(article très détaillé). ^ Heft 6. Id. Le droit de gr&co an moyen âge
(blsloire de ce droit; détails sur la pratique du droit de grâce et sur les
personnes qui en bénèGciaient ; de l'efficacité de la « Fiirbilte. » L'idée
que la grâce appartenait uniquement aux chefs d'État ne s'est formée
qu'à l'époque moderne).
40. — K. Sachalsche GeselUchaft der vriBsenBChaften.
Atihandlungen der philoiogisch-historischen Classe, Bd. XVII, n° 5,
1896. — C. BuECHEB. Travail et rythme (mémoire de 130 pages sur
Torigine et le développement du travail et les procédés de travail des
peuples primitifs, sur la forme rythmique du travail, l'importance
Eociaie et morale du rythme du travail, tes chanta populaires appliqués
à certains travaux, tels que filer, tisser, ramer, battre le blé, sur l'ori-
gine de la poésie et de la musique, sur l'importance du rythme comme
principe dn développement économique). ^ Bd. XVUI, a" 1, 1897.
^^.C Wachsuuth. Nouvelles contribuLioQS à la topographie d'Athènes
^^ Hbv. UisTOB. LXVI. i« FAsc. 15
J
226 RECUEILS PriRÎODIQlTBB.
(explique l'importance des fouilles dirigées par Dœrpfeld sur le Tersant
occidental de l'Acropole, pour Tintelligence de la plus ancienne topo-
graphie d'Athènes. Réfute l'opinion de Dœrpfeld sur la situation de la
« Krene Ënneakrunos i et du « Lenaion. » Les fêtes athéniennes des
Lenaia et des Anthestéries ne sont pas identiques).
41. — Schriften des Vereins fOr Geschichte nnd Natarge-
schichte der Baar nnd der angrenzenden Theile in Donan-
eschingen. Heft 9, 1896. — G. Tumbuelt. Le comté de Furstemberg
et l'accroissement de son territoire, par le comte Frédéric, 1510-59. —
Id. Journal de l'archiviste J.-B. Mûller sur les événements militaires
et les marches des troupes à Donaueschingen, de 1799 à 1814 (notes
très détaillées). — Roder. Un procès de sorcellerie à Villingen en 1641
(ce procès a obtenu une certaine célébrité dans l'histoire de la sorcel-
lerie. Publie des documents nouveaux). — E.-G. Kuerz. Le traité de
Georges Pictorius de Villingen sur l'élevage des abeilles en 1563 (tra-
duction et commentaire). — Tuiibuelt. Monnaies trouvées à Stetten et
près de Hubertshofen (1<» 700 bractéates du xm« siècle; 2<> 22 monnaies
d'argent, de 1592-1674).
42. — Zeitschrift des Aachener Geschichtsvereins. Bd. XVII,
1895. — A. Pauls. L'anneau de Fastrade (ce mémoire a provoqué
l'étude publiée par G. Paris dans le Journal des Savants), — A. Car-
TELLiERi. Henri de Klingenberg, prévôt d'Aix-la-Chapelle, 1291-1293
(il fut plus tard évéque de Constance et s'est fait connaître comme
homme politique, historien et poète. Détails sur ses rapports avec Aix-
la-Chapelle). — BucHKREMER. Les architectes Jean-Joseph Gouven et
Jacques Couven, 1701-1780 (important pour l'histoire de l'art dans les
pays rhénans). — E. Fromm. L'entrée et le couronnement de l'empe-
reur Charles-Quint à Aix-la-Chapelle en oct. 1520; récits contempo-
rains (étude bibliographique très détaillée; texte des récits principaux,
avec commentaire). — Bellesheim. Étudiants d'Aix-la-Chapelle on
i CoUcgium germanicum » de Rome, 1583-1789. — Keussbn. Docu-
ments relatifs aux villes impériales données en gage au daché de
Juliers (deux pièces de 1472). ^Kelleter. Gens d'Aix-la-Chapelle pri-
sonniers à Alger, 1591. — Wissowa. Bibliographie des articles relatifs
à l'histoire locale qui ont paru dans les journaux d'Aix-la-Chapelle,
de 1815 à 1890.
43. — Archiv fur œsterreichische Oeschichte. Bd. LXXXUI,
Heft 2, 1897. — Kaindl. Origine et développement des colonies de
Lippovanes en Bukovine (les Lippovanes étaient une secte religieuse
qui, au xvii» s., se sépara de l'église gréco-russe et dont les partisans
s'enfuirent en grand nombre de Ilussie dans les pays voisins ; ils sont
aujourd'hui dissémines en Russie, en Prusse, en Autriche, en Rou-
manie et en Bulgarie. Détails sur leur émigration en Bukovine depuis
1770, sur le développement des colonies qu'ils y fondèrent et snr les
RECUEILS FliKIODIQrBS. 227
panlcularilés de leucs croyances religiGusee jusqu'au lempe présent.
Publie en appendice 109 documents, de 1783 à 1865). — Eqoeii. La
tainille des Aribones (rocliercbes généalogiques fort intéresRanles sur
l'histoire primitive de cette famille et sur les rameaux qui ea sortirent
plue tard. L'aneflre le plus anciennement connu est Aribo, marquis de
U Marche orientale, qui vivait ver» l'an 'JOO; la demeure primitive da
L la famille n'était pas placée dans le disiricl bavarois de Chiem, mais
I plue au nord, dans celui d'Iseu. La maison a poussé beaucoup plus
de rameaux qu'on ne le croyait jusqu'ici; s'y rattachent en eiTet non
Beulement la famille des anciens comtes palatins de Ijavière, mais encore
les familles des palatins Chuno et Rapoto, les comtes de Lurngau et
ceux de Gcarz , sans doute aussi les comtes de Tirol. Les comtes
d'Ortenburg ont socceilé aux .^ribones dans la possession du comté de
la vallée inférieure de t'Inol.
44. — Zeitschrlft des Verelns fflr die Oeschlchte Bïœhrens
n&d Scbleaiena. Jahrg. I, Ilefi 3. — Janetschek. Le monastère augus-
tin de Saini-Tlitimas 4 Brûnn pendant la guerre de Trente ans (détails
sur le» maux qu'il souffrit alors], — Bkehak. Poteries anciennes trou-
vées en grand nombre & Brùnn (elles sont du moyen âge). — Rolle-
DBa. Pour servir à l'bistoire de la ville d'Odrau (l'emplacement qu'oc-
cupe aujourd'hui cette villes'appelaitaulrefois Winanowet appartenait
aux margraves de Moravie, qui en firent don au monastère de Tisch-
nowitiE; plus tard il passa aux seigneurs de Siernberg. Ces derniers
èUblireut des coious allemands sur lo lieu qu'avaient saccagé lesTartares,
et c'«st d'eux qu'il reçut le nom nouveau d'Oder ou Odrau). — Simbicck.
Tombes et inscriptions à iglau, xv°'XV]u' s. — Pour servir à l'bistoire
de U ville de Znaïm pendant la Contre- Réforme; d'après des documents
inédits. — ScHHAM. Documents nouveaux sur t'bisU)ire de Brùnn
(extraits des comptes municipaux, de lEi&O à 1700). = Comptes-rendus :
FrUdrieh. Ueber Kanzler und Urkunden der Markgrafen Vladislav und
Premyslav von Miebren (excellent). — ParUck. Bclilesiou, 1" partie
fiemarquable).
46. ^ The Athennnm. 1897, 25 sept. — l. Sergeant. Groece in the
xixtli ceutury |livrc. vieux de près de vingt ans, qui n'a pas été remis
au point; intéressant néanmoins). — Bridges. Tbe o Opus majus t of
Boger Bacon (mauvaise édition; le texte fourmille de fautes; la préface
ne traite presque aucune des questions que soulève cet ouvrage; est-il
m^tae bien sûr que cet Opus mnjus soit l'œuvre qu'avait rêvée Bacou?).
= 2 ocl. Bume. Sir Wulter Raleigh ; tUe britisli duminion of the West
(bon résumé biographique; l'auteur a ramené son héros à des propor-
doo s .vraiment historiques; cependant il lui attribue encore des projets
et des entreprises qu'il serait bien en peine de justifier par des textes).
— Ilatéls. Letters and documents of the dutch church of London,
1463-1874, vol. III (publication très copieusel. ^ 9 oct. A. ff. Johnson.
Europe in the xvith ceutury (beaucoup de faits présentés en bon ordre
228 RgCDBILS P^&IOOIQUBS.
et avec iateiligeace, mais de trop nombreuses erreurs de détail). ^
23 oct. Bedford, The blazon of episcopacy (nouvelle édition très rema-
niée d'un ouvrage très utile pour les généalogistes). := 30 oct. S. R. Gar-
diner, llisiory of the Gommonwealth and Protectorate; vol. II, 1651-1654
(excellente méthode, qui consiste à suivre toujours d'aussi près que
possible Tordre chronologique; intéressant exposé de la guerre anglo-
hollandaise. Blake n'y montra pas les qualités d'un grand amiral. Il
était certainement inférieur à Tromp). ^ 6 nov. Ch. S. RyanetJ. Sandyi,
Adventures of an english surgeon with the Turkish army at PlevDi
and Ërzeroum (fort attachants récits; Tauteur rend un éclatant hom-
mage aux vertus guerrières des soldats turcs). := 13 nov. M^^ J, Dar^
mesteter. The life of Ernest Renan (livre charmant dont on ne sait
qu^il faut le plus louer, du fond ou de la forme). — Le c Cahier d'
roi • (l'historien de Henri IV, M. Wylie, examinant un point A. «
l'étude récemment publiée ici môme par M. Jusserand, établit que S^e
roi d'l!]cosso Jacques I*"* a éié l'ait prisonnier en 1406 et non en 1405; SI
relève aussi plusieurs erreurs manifestes de M. Brown). ^ 20 no^^^.
Ross-of'Bladensburg. Â historyof the Goldstream guards, 1815-1825 (troj)
long; seule la part que prit ce régiment à la guerre de Grimée ^
quelque importance). — Hay Fleming. Mary, queen of Scots, from hcr
birth to her ûight into England (très consciencieux, mais ennuyeux ;
1 auteur en outre no dissipe aucune des obscurités qui enveloppent
encore l'histoire de Marie Stuart).
46. ^ The Gontemporary Revieixr. 1897, juillet. — Gomtesse
Martinengu-Gesaresco. L'économie domestique dans les drames grecs.
^ Sept. Germanigus. La révolte de TAllemagne du Sud (de l'inimitié
que professent les Allemands du Sud pour les Prussiens en général et
en particulier pour le hobereau prussien, qui parait aujourd'hui mener
la politique impériale). — R. G. NiQHTrNOALE. Les saints et les martyrs
méthodistes. — Sir Gharles G. Duffy. La Ghambre des Gommunes il
y a cinquante ans ; fragment d'autobiographie. 2« partie, 1852-1855. ^
Décembre. Gomtesse Martinenqo-Gesaresgo. Le paysan de la Grèce
antique (d'après Homère et Hésiode). — E. H. Parker. La Ghine et les
Pamirs, avec une carte (surtout au xvm« et au xix« s. Des voies de
pénétration de la Ghine vers la région des Pamirs).
47. — Tiie Nineteenth Gentary. 1897, août. — Vincent Hev^tabd.
Réjouissances au temps d'Elisabeth (fôtes du couronnement de la reine;
fêtes que Leicester donna à la reine dans son château de Kenilworth,
etc.). =: Sept. L. Gourtney. Ganning et la question d'Orient (il voulait
le maintien de l'empire ottoman et n'avait qu'une foi médiocre dans la
volonté des Grecs d'être libres). — Marquis de Ruviqnv et Granstoun
Metcalfe. Le parti légitimiste en Angleterre (origines de ce parti;
ses tendances actuelles). — Major M. Hume. Gomment le sceptre de la
mer a passé à l'Angleterre (raconte comment fut détruite l'Invincible
Armada). — Gomte A. de Galonné. L'aristocratie française (histoire
HKCCBILS PJKIOBIQIFBa. £M
des titres de noblesse et de Ih particule nobiliaire depuis la Révolution).
:= Novembre. Cmspc. La double iilliaoce et la triple alliance. — I.ainI
Glowes. La généalogie de Nelson (le premier de ses ascendants que
Von connaisse était un manufacturier de Norwich au xvn" siècle). —
J. MoBLE¥. Guichardin. ^ Décembre. Fr. de Pressenbé. La double
alliance et la triple alliance, et l'Angleterre. — Jcerqensen. La question
du âlesvÎR-HoUteîn envisagée an point de vue danois (réplique à l'ar-
ticle de Max Millier sur le sujet. Cette ri^ptique est insérée à la prière
^^£aa t haut personnage qui est intéressé au c^lé danois do la question; •
^^■r contre-coup, elle répond au livre de Jensen et Samwer, auquel Max
^^BUer avait emprunté les faits et ses priocipaux arguments).
4B. — Johrbnch ffir achwelzerlsche Geschichte. T. XXII, 1897.
— Rodolphe LcotsDUEHL. Les réquisitions do Masséna à Zurich, k
Saint-Gall et à Bâie, I7D9-1800. — Karl Getser. La Suisse pendant la
guerre de SmalkaUlen, — Placido Buetleh. Ulrich d'Eppensteiu, abbé
de Saiot-Gall et patriarche d'AquIléo, — Robert Hoppei.eh. L'alliance
de Berne avec l'évéque de Sioo, 17 juillet 1252.
49. — Quellen znr SchwoiMr Geschichte. T. XVU, iSUT. —
0. Hdnziker. Récits contemporains des troubles dans le canton de
Zunch. 1794 à 1798,
50. — Bulletin de l'Institut national genevois. T. XXIV, 1897.
— Eng. RiiTEB. DiFcours (le procès de Jacques Gruet). — Cb. nu Bois
Mellv. Le déclin de la chevalerie et gendarmerie, du règne de Jean
le Bon à celui de Louis XI (1350 à 1483). — Fontaire-Bobqbl. A la
mémoire de Nicolas Lemaitre, citoyen de Genève, ami de Pierre Fatio,
exécuté à Plainpalais le 23 août 1707. — Eog. Ritteb. La république
de Genève, d'après Pierre Davity. — Ch. on Bois-Melly. Uq chapitre
Kl livre de messire de la Tour Landry, 1372.
fil. — Archlvlo délia SooLetà romana di storla patria.
ol- XIX, fasc. i-2. 189ti. — 8*vignoni. Les archives historiques de
la commune de Viterbe; suite (n" 139-2200, 1286-1300; important);
Eoite au vol. XX [iv< s.|. — D. Orano. Le journal de Marcello Albe-
rini, 1fi21-153S^ appendice (fragment de son - Libni dellî rîcordi e
tpese, t 1536; mémoire concernant les événements de l'année 1548:
armes et tableaux Rénéalogiques, avec des noies). — V, Capùhlanohi.
Notes concernant les monnaies Frappées par le sénat romain de MBi à
1439; suite Igrosse monnaie d'argent), — G. Tomabsetti. De la cara-
pace romaine; suite au vol. XX (monuments et fouilles d'Ostie). —
B. FoNTANA. Sommaire du procès d'Aonio Paleario pour cause d'héré-
Me, 15G9-1370 (public le texte de ce procès, avec des notes). — Zakelli,
noberio Sansoverino et les tentatives de paix entre Innocent VTII et
le roi de Naples (publie deux documenis de l'année 1585). = Biblio-
ibie : C.-P. Burger. Neue Forschungen zur aeltern Geschichte Roms
230 RECUEILS PERIODIQUES.
(rauteur étudie les relations de Rome avec les États étrangers, le
développement de l'État romain-latin et les origines de la guerre latine.
Les conclusions en paraissent très vraisemblables). — Schipa. StorÎA
del ducato napoletano (tire un bon parti des sources et sait se faire
lire). — Capasso, Topogratia délia città di Napoii neir xi secolo (beau-
coup de faits étudiés avec soin; résultats importants). — Krah, Der
Reformversuch des Tiberius Gracchus im Licbte alter nnd neuer Ge-
schichtsschreibung (analyse de cette dissertation, ainsi que de celles
de E. Meyer et de E. Gallegari). — Lud.-M, Hartmann, Ecclesiae S.
Mariae in Via lata tabularium ; pars vetustior, quae complectitor char-
tas 921-1045 conscriptas (très belle publication, accompagnée d'un
album de 21 planches en phototypie). := Vol. XX, 1897; fasc. 1-2.
G. Glaretta. La princesse Marie Golonna-Mancini; ses relations parti-
culières avec le duc de Savoie Gharles-Ëmmanuel n (ajoute des ren-
seignements et documents intéressants à ceux que l'on connaissait
déjà). — M. Antonelli. Une révolte contre le vicaire du Patrimoine,
Bernard de Goucy, 1313-1317 (Bernard de Goucy était le lieutenant du
gouverneur, Gagliardo; sa tyrannie et sa rapacité soulevèrent les gibe-
lins d'Orvieto, qui faillirent s'emparer de Montefiascone, mais furent
repoussés par les guelfes de Viterbe).
62. — Archivio storico italiano. 1897, disp. 2. — F. Tocco. Les
Apostoliques et fra Dolcino (histoire de la secte ; procès et mort de fra
Dolcino; analyse critique du traité composé sur son hérésie par Ber-
nard Gui ou quelqu'un de ses amis). — P. Santini. Documents nou-
veaux sur l'ancienne constitution de la commune de Florence (texte
et commentaire de treize chartes de 1192 à 1230). — L. Zdekaoeb.
Archives communales de Macerata, dans les Marches; notes prélimi-
naires (publie cinq chartes des xni« et xn'« s.). = Correspondances :
France. Publications relatives à Thistoire d'Italie, 1894-1896, par L.-G.
Pélissier; fin. — Hongrie. Les principales publications historiques de
l'année 1896, par A. Aldasy. = Bibliographie : D. Comparetti, Virgi-
lio nel medio evo; 2« édition (excellent). — Ad, Ehner, Quellen und
Forschungen zur Geschichte und Kunstgeschichte des Missale Roma-
num im Mittelaltor. Iter italicum (travail considérable). — G. Papa^
leoni. Gli statuti del comune di Darzo. Comuni e feudatorî nelTrentino.
Privilegî veneziani alla Valle Trentina del Chiese (important pour
l'histoire des communes rurales du Trentin). — S. Mitis, Storia d'Ezze-
lino IV da Romano, con spéciale riguardo ad Aquileia e Trente
(ouvrage de pure compilation ; c'est un simple remaniement da livre
de Gitterman, avec cette différence que Gitterman, comme tous les
autres historiens, désigne Ëzzelino comme le troisième des Da Romano,
tandis que Mitis, sans aucune raison d'ailleurs, l'appelle le quatrième).
— /. Del Lungo, Florentia. Uomini e cose del Quattrocento (réédite,
avec des corrections et des additions, ses études sur A. Politien). —
L, Beltrami, Storia documentata délia Gertosa di Pavia (très intéres-
sant). — G, Maizatinti, La biblioteca dei re d'Aragona di Napoii (ins-
raiLS rtfnioDiQUis.
troctif). — //. Varnhagen. Lautrecho; eine italieniBchs Dichlung des
FnnceBCO MauLovano aua deu Jaliren 1521-1523; nebsl einer Ge-
«chichle des fraDEôeiechen FeldzugGs gegea Mailand i. J. 15S2 (bonne
iotroduction historique, avec l'indication très miauLieuBe des Bourcps).
— P. Vayra. La le^enda di una corona; Carlo Allierto e le porlidie
au^triache (prouve éloijuemment la Tausseté de cea prétendues perfidies
eu 18211. = Nécrologie : Gabrîele Reisa. Federico Stefani.
53. — Apchlvio «topico lombarde. Anno XXIV, 1897, 30 juin.
— Stefano Davasi. Notes hist'jriquea sur la topographie de Mantoue
au xni> et au xiv* s.; suite et lia. — G.-B. Intra. Le monastère de
8. Denedetto Potirone (hlBtoire de ce monastère). — E. Galu. Facino
Cane et les guerres des Gueires et des Gibelios dans l'Italie sepien-
trionale, 1360-1400; recherches et documents; 1" article. — D. Sant'
Ambrooio. Deui monuments bmharda pour la délivrance de Favîe
as)>iêfzée par les Français en 1655. — In. Le tombeau de l'archevêque
de Milan, Bartolomeo Capra, dans la cathédrale de Dâle (cet archevêque
mourut à Bàle en 1133). — G. Gahotti, Rapport sur les objets antiques
qui sont entrés au Musée archéologique de Milan en 1896. = Bulletin
bibliographique de Tbistaire lombarde.
64. — Archivio storico per le provincle napotetane, Anno XXII,
fasc. '2. — Gebasoli. Innocent VI et Jeanne I de Naples. Uociiments
laéditK des archives du Vatican ; suite. — E. Nunziahte, Les premières
années de Ferdinand d'Aragon et l'invasion de Jean d'Anjou; suite. —
Fahaolm. I^e receniiement de la population Tait à Naples eo 1591,
1593, 1595 (publie le teile du dénombrement par feux et par per-
sonnes). — Geci. I.s jeu à Naples sous les vice-rois. — R. Bevbbe.
Vêtements et joyaux en usage dans les provinces napoUtaines du ïh»
au ivi° s. — G. OE Petra. Liste des monnaies acquises par le Musée
jiational de Naples à la vente de la collection Sambon.
^■^ 66. — Archivio atorlco siclllano. Anno XXI, 1897. Fasc. 3-4. —
^HQ.'A. Gabufi. Recherches sur les usages nuptiaux observés en Sicile
Bipenilant le moyen âge (mémoire copieusement annoté et suivi de docu-
menls inédite}. — 8. Rohano. La construction de la tour do Ligne et
les soulèvements populaires du Trapani en 1673 (cette tour a été élevée
en 1671 par le vice-roi, prince de Ligne, pour défendre le littoral contre
l'ennemi extérieur, en particulier contre les Turcs, et non pour tenir
en bride les habitants de Trapani). — V. m Giovanni. La copie des
diplAmea du monastère du ■ Presbitero Scbolaro • de Messine (publie
le texte de cette transcription). — Salomonb-Marino. Notes sur l'his-
toire de la Sicile du xiv« s. au xix*. Seconde série (1" une victoire et
nne défaite de l'armée ottomane décrites dans deux estampes sici-
liennes du XVI* s.; 2" inventaire des biens de don Berlinghieri Reque-
sensl. = Bibliographie : Al. d'Ancona. Cariepgio di Michèle Amari,
coir elogio di lui. — C. Manfroni. La marina mdilare del Granducalo
xnediceo (bon). — R. Accademia Peloritana. Gommemorusione del
232 E£G0£ILS P<aiODIQ0ES.
IV centeaario di Praacesco Maurolico, 1894 (volume important consa-
cré à la mémoire d'ua mathématicien célèbre du xvi* s., né à Messine
en 1494 et mort en 1575). — Magani. Degli scritti di Mgr Isidoro
Garini.
56. — Naovo Archivio Teneto. Anno Vil, n* 26. Tome XHI,
2« partie, 1897. — G. Berghet. L'adresse des Véronais à 8. M. Victor^
Emmanuel (adresse envoyée au roi de Sardaigne après que la paix de
Villafranca eut rétabli le joug autrichien à Vérone; cette adresse, rédi-
gée par Pietro (Portes, fut copiée en cinq exemplaires pour chaque
membre du (Comité secret de Vérone, et les signatures recueillies secrè-
tement par chacun d'eux. Donne le texte de cette adresse et les noms
des signataires, qui risquèrent leur vie pour afGrmer leur attache-
ment à la patrie). — Ant. Medim. La chronique de Bartolomeo Gatari,
d'après le ms. 262 de la Bibliothèque nationale à Paris (Bartolomeo a
écrit cette chronique pour faire suite à celle de son père Galeazzo ; son
œuvre commence en 1358 et continue jusqu'en 1407. Rapports entre la
chronique de Bartolomeo et celle d'Andréa, son frère. Variantes four-
nies par le ms. de Paris aux parties du texte déjà publiées par Mura-
tori). — V. Lazzarini. Marine Faliero. La conjuration; suite et fin (en
appendice des tables généalogiques et quelques documents). — Ant.
Spaonolo. Histoire littéraire de la bibliothèque capitulaire de Vérone;
1896. — G. GiPOLLA. Publications relatives à l'histoire de l'Italie au
moyen âge ; 1895. = Comptes-rendus : Cola. G\ï studenti bormiesi ail'
università di Padova (bon). — ManfYoni. Storia délia marina italiana
dalla caduta di Gonstantinopoli alla battaglia di Lepanto, t. I (très
utile).
57. — Rivista storica italiana. Vol. II, fasc. 3, 1897, mai-juin.
— Pollini, Notizie storiche, statuti antichi, documenti e anticbità
romane di Malesco, comune délia valle Vigezzo neir Ossola (excellent;
mais consacrer 700 pages à une commune qui ne compte pas aujour-
d'hui 800 âmes, c'est beaucoup !). — Sorricchio, Sulle probabili origini
Abruzzesi (la population des Âbbruzzes est d'origine pélasgique ; or, le
mot de Pélasges veut dire : étrangers, Hétéens, donc cette population
est d'origine asiatique et hétéenne!). — Allcroft et Mason, The tuto-
rial history of Rome to 14 A. D. (simple manuel pour l'étude de l'his-
toire romaine dans les classes, mais mis au courant des plus récents
travaux). — L, Borsari, Topografia di Roma antica (excellent). — Testa.
Pandolfo Gapodiferro fra gli eventi del suo tempo 961-981 (bon). —
Schipa, Pei nomi Calabria, Sicilia e Italia nel medio evo (réponse aux
critiques de Grivellucci; ces critiques sont sans force). — P. Valente.
Il commune astigiano e la lotta contre Federico I (travail soigné;
Gabotto présente d assez graves objections). — Gabotto. Accenni inediti
di storia politica subalpina, 1292-1410, dai conti e dai registri délia
curia del comune di Pinerolo. — Ftlippi. Dell' arte délia lana in
Savona nei sec. xiv e xv (publie quelques documents intéressants). — <•
^
KECDBILS FéHIODIQDES. 233
7. Joppi. Lettere storiche dall' anna 1508 al 1528 di Girolamo 6avor-
gnano, colla vita e documeoti cootemporanei. — Pralo. Il Parco vec-
chîo e il campo dplla baita^lia di Pavia (excellent). — Bosi. Documenti
genovosi sqU' assedio di Sieoa (utile). — fl. de IJinojosa. Los despachos
de la dîplomacia pontiGcia en Espaiîa, t. I (important pour l'œuvre de
la diptumatie poniiGcale en Espagne de 1450 à 1605). — Fiarini et
BtiUurini. Chî inventô la baodiera tricolore? (les trois oouleurg ita-
liennes apparaissent pour la première fois dans le plan d'organisa-
tion do la lépon lombarde en octobre 1796; l'année suivanle, elles
furent adoptée? par la république cisalpine). ^ Fascicule 4, juil-
lei-aoUt, Ed. Durando. Il tabeltionato o notariato (beau travail, qni
embrasse toute rbî?loire du notariat depuis l'époque romaine; pourles
temps modernes, l'auteur étudie surtout la législation sarde, qui est
devenue celle de l'Italie en ce qui concerne le notariat). — Maddio.
Notifie sloricbe del comune di Gassino. — Pannelta. Cenni biograiici
di alcuni uomini illuslri délia provincia; t. II (il s'agit de la province
de Teramo). — Fr. Savini. Délia famiglia Teramana di Valle, domina-
trice dp|)« palria nel sec, irv (fait d'après les riches archives de Teramo).
— Annuarto délia nobilità iUliana, aono XIX. — L. Schiaparelli.
Origitii del comune di Biella (bon). — G. Maiialinti. La bihiioteca
deî r6 d'Aragona in Napuli (excellent). — Mastrojanni. Sommario degU
atti délia cancelleria di Carlo VIII a Napoli (très intéressant). — Cam-
pagne del principe Eugénie di Savoîa, vol. V-IX. — Il Monténégro, da
relazioni dei provveditori Teneli, 1687-1735 (texte important, tiré k
petit nombre). — Schipa. Un ministro napoletano del sec. ïviii : D. Ca-
racciolo (très intéressant). — Ouvrages relatifs à la période de la Révo-
lution française, 1798-IS15, et i celle da » Hisorgimento, > 1815-1896.
68. ^Hiatorlsk Tidsskrlft. 6* série, vol. VI. — Matzbn. Leges
"Waldemari Hegis (ce sont des lois du temps de Valdemar II ; l'ordon-
nance dite d'Abel-Chri.'îlophe date du règne d'Abel, et non de 1241,
comme le prétend M. Holberg. Polémique à ce sujet enlre les deux
auteurs dans les numéros suivants). — Ladridsen. Usages suivis dans
la construction des maisons de paysans en SIesvic (polémique avec
H. Mejborg. qui se continue dans les numéros suivants). — Job. Steens-
Taup. A quelle époque remonte l'origine des Danois en Danemark?
(études sur la force démonstrative des matériaux archéologiques. La
nationalité n'a jamais pu être prouvée par des objets trouvés ni à
l'étranger ni en Danemark. On ne peut faire remonter les Danois
qu'aux premiers siècles après J.-C.), — Mackepbano. Les fiefs princiers
eu Danemarfa (ils datent des fonctions comme Jarle dans les provinces
froDliires et semblent avoir été héréditaires. Les droits et devoirs des
fendataires). — Kr. Ehslev. Constitutio Valdemariana (prouve l'au-
thenticité de ce célèbre article de 13?6). — Steenstritp. Les noms des
dieoz dans les noms de lieu [règles générales sur la formation de ces noms
234
UCCBILS riEBIODIQUBB.
de lieu; ils ne sont composée qu'avec des Dome pris de la oatara^
comme ruiESeau, culline, etc., ou avec les dénomiDationa de templ»^
jamais avec les mois villes, hameaux, elc), — Erslbv. Recherches sot:
l'époque (le la domiaaiion des Holsleinuis, 1325-40 |de l'eadroil où /qk- ^
livrée la bataille de 1325; l'échange des provioces en 1340. Le comt^
Gerhard ne St pas une coQceasîon en cédaut la Jutland au duc Valde — _
mar. Polcmique sur cette assertion entre l'auteur el Jœrgensen dan^
les numéros suivants). — Jon Jonsson. Le gouvernement danois el 1^^ i
commerce monopolisé en Islande (les plaintes au sujet de l'abus dt^- ~
monopole par le gouvernement au détriment des Islandais sont iain^^
aocun Fondement. Les Islandais- eux-mêmes craignaient l'affranchieec
ment du commerce). — Hans Olrik. Recherches concernant répoqu^L__j|
des tils de Valdemar U. — Matzen. L'ordonnance de 1276 et le jnc^^^
Worihffid. =: Comptes- rend us : Sckàfer. Geschiciite vou Oienemark, I^^^;
(excellent). — Bochtruh. Un corps danois en Italie et en Hoiigr^S..p,
nOI-9 (bon). — A.-D. Jœrgetam. Christian VIII et la question ^e
Slesvic (original), — Jvl. Clausen. Frédéric Christian, duc d'Auge» »-
tenburg |ban). — Holberg. Roi et assemblée des Danois au xiii* siëi=.k-
— Schuxilm. Hermann Korner. — Schwerin. Helgoland (ces livre» b«3»iW
excellent6|. — Bussche-Kesid. La coralesse Élise de BenstorlT (intér^**"
sanl). — J.~0. Andersen. Holger Rosenkrantz (excellent). — Ma^^'*'
prang. Bibliographie historique, 1894-95. ^ 7° série, vol. I, cab. 1- -«
Jul. Clausen. Hommes de lettres français à Copenhague sous le të^^
de Frédéric V (La Beaumelle, Mallet, Hoger, des Roches de ParteC*^''^
Reverdil), — 9. Nïoaaru. Noms do lieux et de personnes en Danena ^"^
(les noms avec tes terminaisonit en Uf 6l sied sont composés avec?
plus anciens noms de personnes, les noms en tnrp. balle daienC ^
l'époque chrélifnne). — Zahbtmaks. Les Suédois de l'île de Bornhc^^
en 1658 (le gouverneur suédois Printzeoslcœld n'était pas cruel).
E. Madseb. L'infanterie des armées danoises au XVI' siècle. ^= Compt.-^^^
rendus : G. Bang. La déchéance de l'ancienne noblesse danoise (étuC^
intéressantes et originales, mais résultats erronés). — Nouvelles de
science historique en Danemark et A l'étranger.
69. — Danske Magasin. 5" série, vol, III, cah. 4. — O. NtEUS'^'
Documents relatifs à l'histoire de Copenhagae au milieu du xvii* siècle
— BoBÈ. Rapports adressés par le résident H.-C. MeiniR au gouverna— ""
raent des villes Hanséaiiques en 1770-72. — E. Hoi.«. Exposé de la ^
grande guerre du Nord par le ministre Dillev Wibe. — W, CbristeH-
BBH. Documenta relatifs à l'histoire de l'cvéché de Roeskîlde sous
Niela Bkave.
60. — Aarbœger for nordisk Oldkyndlghed. 1896. — Bunkbr-
BEso. Antiquités prémycéniques. — Kaaluno. VHiitoria de profeetiom
Danortirti in terram tanclam appartient-elle à la littérature danuisel^
(non, l'auteur est norvégien el sans doute identique avec l'auteur de
Theodoriei monachi hûtorta). — Lauridsen, La formation des a
RECUEILS PÉRIODIQUES. 235
villages danois (études intéressantes sur d'anciennes cartes; l'auteur
prétend que la répartition des terres d'un village, connue des lois du
moyen âge, ne date pas du temps de l'immigration ni de la coloni-
sation, elle est due à une régularisation qui eut lieu au moyen âge). —
L. Daae. Études sur t le miroir des rois » (date d'environ 1250 et
semble écrit par le maître Guillaume). — Uldall. Églises du Jutland
en granit (la plupart sont du xiip s.). = 1897. Fabrigius. Expéditions
des Normands en Espagne.
61. — Oversie^ over Videnskabernes Selskabs Forhandlin-
ger. 1896. — Hoeffding. L'influence de Rousseau sur la forme défini-
tive de l'éthique de Kant (elle a été considérable). — Œstrup. La des-
cription de l'Egypte par Omar ibn Muhammed-al-Kindi. — Fridericia.
Remarques sur l'économie politique de Christian IV et sur ses relations
avec la bourgeoisie jusqu'en 1625. — Joh. Steenstrup. Recherches sur
les anciennes divisions du Danemark. ^ 1897, cah. 1-3. Jap. Steens-
trup. Contributions à l'étude des bractéates trouvés dans les pays
Scandinaves (ils sont d'origine orientale, un exemplaire porte une
inscription en lettres hindoues). — J.-L. Ussing. Sconica, à propos de
l'ouvrage de MM. Dœrpfeld et Reisch sur le théâtre grec.
62. — Videnskabernes Selskabs Skrifter. 6« série, section des
lettres, vol. IV, n® 3. — J.-L. Ussing. Observations sur Vitruve et sur
le temps où peut avoir été écrit l'ouvrage qui porte son nom (Vitruve
n'était pas un architecte, mais un lettré; il ne vivait pas à Rome du
temps d'Auguste, mais sans doute à Ravenne, au ni« s. ou plus tard).
236 CHRONIQUE ET BIBUOGKiPHIB.
CHRONIQUE ET BIBLIOGRAPHIE.
France. — M. A. Bardoux est mort le 23 novembre, à Page de
soixante-sept ans. Nous lai consacrerons dans le prochain naméro
une notice détaillée.
— MM. Dbveria et Babelon ont été élus membres de l'Académie
inscriptions et belles-lettres.
— Dans le rapport du secrétaire perpétuel de TAcadémie des inscrip-
tions et belles-lettres (l^' semestre de 1897), nous voyons que le t. X
et dernier des Œuvres de Borghesi vient de paraître ; il complète le t. IX.
Ces deux volumes contiennent deux mémoires inédits sur les préfets
de Rome et les préfets du prétoire que Borghesi avait laissés inachevés
et qui ont été menés à bonne fin par MM. de Villefosse et Guq. — Sur
les fonds de la donation Plot, l'Académie a fait publier le t. IV, 3« fasc.,
des Monuments et Mémoires, le Catalogue des v<ises antiques du Louvre,
publié par M. Pottibr, et le Catalogue des camées de la Bibliothèque
nationale, publié par M. Babelon. — Le t. XXIV des Historiens des
Gaules et de la France verra sans doute bientôt le jour, car le texte est
imprimé en entier, on achève la revision des tables et on prépare l'in-
troduction. — Enfin l'impression des Rouilles et des Obituaires est pous-
sée avec une grande activité sous la direction de M. Longnon.
— Le tome II des Études d'archéologie orientale, par M. Glermont-
Ganneau, vient de se terminer avec les livraisons 24-29 (Bibliothèque
des hautes études. Bouillon, fasc. il3, in-4<>); elles contiennent la fin
du mémoire sur les stèles araméennes de Neîrab, que l'auteur est dis-
posé à attribuer au règne de Nabonide.
— Le 24« fascicule du Dictionnaire des antiquités grecques et romaines
(Hachette) contient entre autres mémoires les suivants : Horae, par J.*A.
Hild; Horologium, par Ë. Ardaillon; Horreum (avec le plan du port de
Trajan), par H. Thédenat; Hortus, par 6. Lafaye; Hospitium, par Gh.
LÉGRiVAni; Hydraulus (orgues hydrauliques), parG.-E. Ruelle; Hygieia,
par H. Lechat; Hymnodus et Hymnus, par Th. Reinach; Hypotheca, par
Éd. Guq; lliacae tabulae, par Et. Mighon; Illustres, vir illustris, par
G. Jullian; Imago, par Gourbaud.
— Ghargé de publier pour la Société des Anciens textes français la
Prise de Cordres et de Sebille, chanson de geste du xn« siècle (F. Didot),
M. Ovide Densusianu a dû rechercher quels pouvaient être les éléments
historiques de ce poème. Il a conclu que c'est une pure fiction, sans
aucune base réelle. Mais, en même temps, il a été amené à étudier les
CHlOIflUOB ET BtBLlMlAFHII.
237
lattes des Français contre les Sarrasins en Espagae ei il a préE^nté
diverses ubaervaiions, dont les historieas devroat tenir compte, sur la
prise de Barcelone par Cbarlemagae el la façon dont cet événement est
raconté dans les Carmina in honorem Iliudowiei d'Ernioldus Nigellus,
sur la conquête de Tortose on 811 et de Barbaste en lO&t ou 1065, sur
la défaite que les BarrasiuB Brent éprouver aux troupes chrétiennes
sous les murs de Fraga en 1134 et sur le témoignage qu'en a conservé
Orderic Vital. Ces faits liislorlques ont donné naissance à autant de
poèmes qui sont venu» se foodre dans le cycle de Guillaume d'Orange.
Quant au personnage d'Aimeri, qui joue un si grand rôle dans l'épopée,
M. Densusiaou incline à penser qu'il n'est autre que le comte Aimeri II
de Narbonne, tué à la bataille de Fraga.
— Les Rtgistres d'Innocent IV, publiés par M. Ëlie Behoeb, viennent
d'être terminés avec le II* fascicule (Fontemoing). Le chiffre total des
actes analysés ou publiés in extenso est de 3,352. Celte importante réu-
nion de documents n'attend plus pour pouvoir être consultée avec fruit
qu'une bonne table. — La table et l'introduction des RegUlrn il'Hono-
rtiw IV, après avoir très longtemps, trop longtemps attendu, sont enfin
MUS presse; elles paraîtront prochainement.
— Vient enfin de paraître, dans la CoHecliun des documents inédits,
le poème français d'Ambroise sur la troisième croisade. Le texte de cette
longue chronique riœée est précédé d'une importante préface par
M. Gaston Paris. Noue y reviendrcms. — Dans la même collection a
paru aussi le l. VI de la Correspondance de Catherine de Médicis, publié
par M. Baoubnaui.t db Puchbsse, qui a pris la suite du gros travail
commencé par le comte H. de la Ferriére.
— M. limile Cukvi.uu, qui avait publié l'an dernier un volume sur
les Anciennes corporations des médecins, chirurgiens et apothicaires de
Mural [1680-1776). vient d'en consacrer un nouveau aux pharmaciens
de Bordeaux : Histoire de la corporation des apothicaires de Bordtaux, de
l'enseignement et de l'exercice de la pharmacie dans celte ville {1355-1802)
(Bordeaux, A. MoUai; Paris, A. Picard. 138 p. in-S". Prix : 7 fr. 50).
11 y expose, en s'appuyant sur des documenta inédits, t' organisation
lie la confrérie, sa police intérieure lluttes contre les chirurgiens, les
moioes, les jurais), son régime financier, ses dernières années et sa
euppresEÎon; un cbapitre (le 9*) est consacré à t une boutique d'apo-
Lbicaire au xvi' siècle i et de jolies planches nous donnent le dessin de
faïences et de mortiers du xvi» au iviii° siècle.
— M. Dast le Vacher de BoisvaLE a publié dans le Bulletin du
eamilt des travaux historiques (Itidti) et à part plusieurs documents iné-
dite relatifs à Simon Millanges, imprimeur à Bordeaux de 1572 à 1623.
— La librairie Pion a publié récemment un ouvrage de M. Oscar-
Gusiave de Bbidenbtau sur Une smur du grand Frédéric, Louise- l'irigue,
reine de- Suéde. M. Fritz Arnbeih se plaint dans la IHslorisclit Zeitschri/t
. LXSX^ Ueft 1, déc. 1897) d'avoir été impudemment pillé par
388
CBRO:iIQUE ET BIBLIOr.BiPRIB.
l'anlaur. Il lui avait gracieusement communique, non wulemeDV divef^
mémoireB inBérés dans les Forsehungm tar llrandenb. u. Prtust. Gr
ichiehte, mais lea copies de pièces numlireuses copiées par lui au^=
archives de Berlia, de Btockbolm et d'Upsal et doat il s'était formelle ^
meut réservé la publication; or, M. de Beidenstam a publié ces piêce^c:
comme s'il les avait trouvées lui-même, et nulle part il n'a même cil
lenomde M. Arnheim. M. ArnlieimprèvientenBn le public savant qut
les documenta pablié!- par M, do HeidcQSlatn méritent peu de conliance,
parce qu'ils ont été maintes fois tronqués, interpolés ou adultérés avea
ia plus arbitraire fantaisie.
— M. Lucien Marcheix a publié dans l'Arliitt « à part (Leroni,;
181 p. in-4'') un très piquant el intéressant récit du voj-age A'Un Par^
lien |J.-J. Bouchard) à Rome et à Kapics en 1632, avec de nombreus^^^
citations eucadrées dans un excellent texte explicatif.
— M. Eugène Duval, avocat général k la Cour de cassation, a cho^^g,'
■ pour sujet du discours qu'il a ^té charge de proDoncer il l'audience «de
rentrée du 16 octobre tH97 la Préparation des Ordonnances dt i661 et
de ÎG70 et Guiltaume d» Lamoignon (Paris, Marchai et Billard, Ul8 p-
in-S"). Sans insister, plus que la circonstance ne l'exigeait, sur la p^tr-
tie parement juridique, il u tenu à montrer avec quelle passion de c^n-
traUsation monarchique, dans quel esprit d'hostilité pour le Parletxx^"^
de Paris, Colbert et Pussort dirigèrent les premiers travaux et *^
discussions préliminaires, puis avec quel art Lamoignon, premier p*^'
sident du Parlement, réussit k impuser à ces fougueux serviteur^ ^
la royauté sa collaboration et jusqu'à un certain point son conlf"^^
aes luttes, pour adoucir la rigueur d'une procédure qui livrait le f^
venu sans défense aux mains de juges sou veut impitoyables, lanobl^
d(t son caractère et de sa conduite. Plusieurs documents nouveaux
permis à M. Ûuval, toujours égal à lui-même dans toutes tes élix-
qu'il aborde, de préciser certains traits de cette belle Ggure.
— Les plus récentes livraisons de VAilai universel de géogrt
publié par MM. Vivien de SAiBT-MAnim ot ScHaAOBB (Hachelle|
tiennent la fin de la carte de Franco |6° feuille, région du suil-oni
et la carie do l'Afrique politique, oii sont marquées les limites Bx<
par les nations européennes jusqu'au 30 sept. 1897.
— A la même librairie est paru le t. XUI des Mémoires de Sait
Simon, publiés par M. A. de Roislisi.e; il contient les années 1705
1706. En appendice, outre les Additions de Sainl-Himon, le savant
leur a publié une lettre de Ninon de Lenclos à la marquise de VilleL.'
el une donation d'elle à son fils, plusieurs documents relatifs aux Ve*
dôme el au maréchal de Tessé, des Mémoires d'économie politique ^
de philosophie de M. de Bélébat, divers arrêts et pièces concernai
Sainl-Simon.
- La librairie A. Colin a mis en vente le t, IV de VHiiloirt de
«^-
CHKOHIQDB ET BtBlIOGUPBrE.
239
iançtte et de la lUléralure fYançaùe. qui se rapporte au xvn' siècle (pre-
mière partie, )60i-l660), et le t. VI des Discours el Opinioiu de Julei
Ferry. 1880-1885.
— M. le D' A. CoBRE, ancien arcbivigle de la ville de Brest, vice"
prÉ-sideni de la Société d'archéologie du Finistère, vient de publier, k
50 exemplaires, pour la Société de l'Histoire de la Révolution, un choix
lies Papiers du générai A .-JV. de ta Salle, relatife à Saint-Domingue (f 792-
(793) (Quinipor, Cotonnec, 18'J7, in-8», 251 p.j. Ces papiers, qui appar-
tiennent aux archives municipales de Drest, Torment a deux registres
et plus de t,500 pièces, mémoires, rapports, élAts militaires, lettres
originfties d'hommes célèbres (Rocliambeau, Laveaux, Polverel, San-
thonaii. I Ils furent évidemment saisis à l'arrivée du général à Brest,
sur l'ordre des représentants du peuple en mission. La Salle avait pré-
cédé La Fayette dans le commandement de la garde nationale en 1789.
U représente assez bien le type des aristocrates ralliés aux idées nou-
velles; mais il ne perd jamais l'occasion de soutenir ses intérêts.
— La librairie A. Ourlacher vient de publier le cinquième et dernier
volume du l'Htstoire îles Juifs, de Graetz, traduit par M. Moïse Bloch.
Ce volume, qui va de l'époque de la Réforme (15001 jusqu'à 1880, est
précédé d'une Préface par M. Zadoc Kash, grand rabbin de France, et
se termine par un Index alphabétique des cinq volumes.
— On trouvera des détails inléressanls sur l'histoire, l'éliulogie el la
propagation de la peste dans l'ouvrage du D' Pboust sur ta Offense de
^Europe contre la Peste et ta Conférence de Venise en 1397 (Masson).
— Presque au moment même uù paraissait la belle édition du manus-
crit original des Pensées de Pascal, par M. Michaut, un autre norma-
lien, M, tintiMscHviQc, donnait une éditiun classique des Optiseutes et
Pensées (Hachette) excellente de tous points, comme texte, introduc-
tion et notes.
— M. J. Laude vient de donner une excellente traduction revue par
l'anteur et considérablement augmentée de l'excellent Manuel de biblio-
Ihteonomie {Welter), de A. GmeseL. C'est le traité le plus complet et
to plus compétent sur la matière.
— A Moutreuil-sur-Mer, subsistait, au ivm* siècle encore, une
société de marchands privilégiés, qu'on nommait ta gliilde. L'ensemble
de ses prérogatives constituait une sorte de fief, pour lequel la corpora-
tion rendait hommage au roi de France et lui offrait divers objets,
quand le souverain passait dans la ville. Montreuil faisait partie, au
xiv* siècle, de la grande hanse du nord de la France, qui comptait dix-
sept villes marchandes. A quelle époque fut fondée la ghilde, on l'ignore
et on a peu de documents relatifs à cette association. M. A. OHABreN-
TfiR vient d'en publier quelques-uns des xvii°~xvij[' siècles qui font
connaitre ce qu'était alors devenue cette corporation autrefois puis-
. {La Ghilde de Montreuil- sur- Mer, documents inédits. Abbeville,
lurdrinjer, 1897, in-8*.)
^lurdr
240 CHRONIQUE BT BIBLIOGliPHfB.
— Sous ce titre : la Franche-ComU et la^ Gazette de France, » de 1633
à iSkk (BesançoQ, Paul Jacquiu, 1897, in-8o), M. £. Lonoin examine les
nouvelles sur les opérations françaises dans cette province, insérées par
Rcnaudot dans son célèbre journal. Ces relations, souvent fort curieuses,
sont de provenance très variée, et les épreuves de la Gazette étant revues
avec grand soin par le cardinal, elles avaient un caractère officiel tout
particulier. On sait, du reste, que Renaudot compta parfois Louis lîlU
lui-même au nombre de ses collaborateurs.
— M. l'abbé Torbbilles vient de publier sous le titre : le RoussUUm, ât
1789 à 1830, des extraits des Mémoires de Jaubert de Passa (38* Bul-
letin de la Société agricole des Pyrénées-Orientales). Ces fragments
sont du plus grand intérêt; l'auteur, sous-préfet, puis conseiller de
préfecture sous plusieurs régimes, avait vu beaucoup de choses, connu
beaucoup de grands personnages, et il a écrit, on peut le dire, sine ira.
On signalera aux curieux les pages où il peint la fatigue de toutes
les classes sociales à la fin de l'Empire, la retraite de l'armée de Cata-
logne en 1814 ; citons encore le passage sur la stupeur qui accueillit
l'annonce de la criminelle équipée de Napoléon en 1815, bien éloignée
de l'enthousiasme que peignent la plupart des historiens encore aujour-
d'hui; enfin de curieux détails sur l'étrange invasion du Roussillonen
1815, après la paix signée, par les troupes du méprisable Ferdinand VII
et sur la très honorable conduite du duc d'Angoulême en cette cir-
constance.
— M. Picard, dans une intéressante brochure, intitulée : le Corn-
merce du bois de chauffage et du charbon de bois à Dijon au XVIU* siècle
(Dijon, Darantière, 1896, in-8<>), donne de nombreux détails sur la
matière, sur les droits perçus par la ville, sur le roi et les officiers spé-
ciaux créés par Louis KIV, en un mot, sur toutes les entraves appor-
tées à la liberté du commerce par une réglementation compliquée
et une administration passablement tracassière.
— M. Henri Omont a publié pour la Société nationale des Antiquaires
de France, et à part, le Catalogue des collections manuscrites et impri'
mées relatives à Vhistoire de Metz et de la Lorraine, liguées par M. Au»
guste Prost (114 p. in-8<»). Ce Catalogue énumère 145 volumes manus-
crits, plus un certain nombre de livres imprimés et quelques dessins
relatifs à l'histoire de Metz et, accessoirement, de la Lorraine.
— M. Emile Amé vient de publier, sous les auspices du ministère de
Tinstruction publique, le Dictionnaire topographique du département du
Cantal (E. Leroux, un vol. in-4o. Prix : 10 fr.).
Livres nouveaux. — Lnventaires et Documents. — G, Amiot. Inventaire
analytique des archives de la ville de Cherbourg. Cherbourg, impr. LhAtelier,
327 p. — Arbois de Jubainville et André. Inventaire sommaire des archives
départementales. Aube. Archives ecclésiastiques, série G (clergé séculier}, t. II.
A. Picard, xxvni-481 p. — E. Desplanque. Département des Pyrénées-Orien*
taies. Ville de Thuir. Inventaire sommaire des archives communales. Perpi-
gnan, impr. de l'Indépendant, xxxu-148 p. in-fol. ^ Abbé EsnauU. Inventaire
^nSLIOGSlFBIK.
■ks mimites «ncieniiGS des Doliùrea du Uans, xvu-xviir s- l, V, Le Uidb,
Lcgaicheui, 328 ]>. — J. Finot. DéparUnncnl du Nord. Ville de Morlagne-du-
Nord. iDientitire «oinmiiire dcsarchiTetcniiiraunales, Li[le, impr. Daiiel, ïixvii-
V> p. io-4'- — P. de Pleitry. Invealaire sommaire de« arcliive» départemen-
Ules. Charente. ArcbîTes civiles, série E. Angoulfime, impr. CbuHseïgnac,
409 p. ~- Gavpel, Dacler et BertliÊlé. Départemeal des Deai-SèvreR. Inven-
Uira somniaire. Archives civiles et ecclésiastiques, série G. à H. Helle,
Lacave. — A. BrettiU. Comptes des consuls de Uontréal-du-Gera, 1435-39.
BordeBDi, impr. GouDOuilbou, S4 p. in-4'. — Grosie-Dupéron et Couvrion.
Cartalaire de Tabbaje cistercienae de Fontaine- Daniel. Mnjeime, impr. Poi*
rier-Béaln, 437 p. — L. Uerlet et t. Jairi/. Carlulaire de l'abbaye de la Made-
leine de Chlteandun. — Séjalon. Nomasticon Cislerciense, seu anUquiores
urdinïs Cisterciensts cous ti lut iones. Edit. nova. Solesmea, impr. de Saiat-
Pierre, XLvn-821 p. — Detackenat. Gartulaire du Temple de Vaux, 119U-I2Ï3.
A. Picard.
HiaroiHB LOCALS. — F. Aulorde. Les charités de la ville de Felletia,
CreuM, an iv* siècle. Guéret, Amlaud, 111 p. — BeawItet-FUieaK et Ck. de
Chergë. Oictkinaaire historique et généalogique des familles du Poitou; 2' édit.,
t. m, fasc 1. Poitiers, impr. Oudln, 160 p. — J. Bordai. La commune de
Ctiiteauneuf de Galaure et son chAleau. Valence, impr. Valentinoise, 24 p. —
Esquisse tiistorique sur Moatluel. Bourij, impr. Dureuil, 112 p. in-lè. —
fitude historique sorTilly-aur-Seutea, Caen, impr. Valio, 29 p. — Abbé E. Per-
ret. Histoire de Marcbeseuil, Cùte-dOr. Cbâtillon-sur-Seine, impr. Pictiat,
vi-204 p. — L. Lebœu{. Histoire de la Cbarilé. La Charité, impr. Taureau,
3^2 p. — J. Maticome. Documents et courte notice sur l'abbaye de Blvat, du
m- s. jusqu'en 1799. Rouen, impr. G;, 99 p. — Abbé Kicolcu. Histoire de
G«nolhac. Klmes, impr. Chastanier, iïi p. — L. Niepee. Ljoa militaire. Notes
et docamenls pour servir à l'histoire de cette ville depuis son origine. Lyou,
BeraouK et CnniiD, vi-624 p. — Fouaereau. Uisloire des comtes et des ducs
de Nevers. Nevers, impr. Valliere, tïl p. in-16. — Àl. Rivière. Les commu-
nautés religîeaKes de l'ancieD Cbilans. Gbllons, Martin, is-70 p. — Toumieux.
U« quelques seigneuries de la Marche, du Limousin et des enclaves poile-
vines : la vicomte de Monteil et ses arriére-llers, Guérel, impr. Amianlt,
20U p. — P, de Vérax. Histoire d'Atnplepuis. L]od, impr. Mougin-Husand,
394 p. — Mtmrel. Histoire de la commune de Puimoisson et de la commande-
ri« des chevaliers de Malle, langue de Provence, 1120-1792. A. Picard. —
Devans. Origines gAIinaises. Ibid.
Alsace-Lorraine. — La maison La mu Ile cl Poisson (Paris) va faire
pamilreprochaiaemeat par souscription UQ volume sur Mils; DocumenU
giiUalogiquu, d'après les regislret des paroisses 11561-1792), par l'abbé
F.-J. PumiEH. On y trouvera les actes (baptêmes, mariages, décès,
abjurations) concernant les familles indigènes, que l'auteur a relevés
de 1561 è. 1792 dans les registres des paroisses, et aussi les pièces
fort nombreuses intéressant une population étrangère que les circoDs-
taucee ont amenée daos les Troia-Évôebés et qui a rempli l'armée, la
noblesse, la magistrature et la baule bourgeoisie de la proviace.
Belgiqne. — Sous le titre modeste de Essai d'une notice bibliogra-
phique sur la question d'Orient', M. Georges Benqesco, ministre pléni-
Bnixelles, Liicomblez; Paris, Le Soudier, in-â'
Kbv. Hibtob. LX.VI. l" PABc.
^K Hbv. B
329 p.
pownliaire de Roumanie « Bruxelles, a rpuni, eo suivant l'ordre chro—
noiogiijue, les titres de plusieurs milliers d'ouvrages ee rapportant »u^
complication); diplomatiques et militaires fameuses dont la piétiiasul^M
dee Balkans et les répons voiainei; ont été le théâtre depuis 1821.
C'est, en effet, l'Orient européen seul qui a fait l'objet des rechercher
mcnëes à bonne Go par l'érudit bibliographe, t^oo livre est une mine^
de renseignements précieux sur l'affranchisBcment de la Grèce, ta ques— -
tion des priacipaulés danubiennes, la guerre de Crimée, le traité de *
Paris, etc., jusqu'à la guerre torco-grecque de 1896-1897. Il a laissé de s
côté les parties africaine et asiatique de la question d'Orient, c'est-4- -
dire l'Egypte et le Soudan égyptien, d'une pan; et, d'autre pari, la
Syrie, l'Afghanistan, l'Inde et T Extrême-Orient. Nous ne pouvons que
le regretter, tout en admettant que ce complément aurait grossi le tra-
vail k l'extrême, et nous devons constater d'ailleurs qu'une double
exception a été faite pour la rivalité de Mahmoud et de Mebemel-AU m I -
et pour la question arraéoienae. Nous signalerons aussi des relevés ^^
bibliographiques très soignés concernant les révolutions hongroise et
polonaise, le panslavisme et même la récente alliance franco-russe.
D'excelknteE tables rendent le maniement de ce volume très facile et
permettent de trouver rapidement les indications voulues.
Ce nouvel ouvrage est digne de Vnutear de ]a. Bibliographie des auvru
de Voltaire: il rendra de réels services aux travailleurs en les guidant
à travers le dédaia des innombrables imprimés consacrés à la question
brûlante ouverte depuis plus d'un siècle et malheureusement non
encore close.
Allemagne. — Le 16 octobre est mort le D' François- Xavier de
Weqele, professeur d'histoire à l'Université de Wurïbourg, à l'âge de
soixante-quatome ans. Ëiève de Gervinus et de Schlosser, il fut, de 1851
à 1857, professeur à r Université d'Iéna; il appartenait à celle de Warx*
bourg depuis 1857. L'année suivante, il devint membre de la Commis-
sion d'histoire instituée .près de l'Académie des sciences de Munich, et
c'est sous ses auspices qu'il entreprit la publication de la Deutsche Bio-
graphie et des Forschungen lur deuUclien Getchichte. Parmi ses travaux
historiques, nous signaleroos : Carl-Auguil oon Weimar (1850); Dante
Atighieri's Uben und Werke (3'ôdit., 1879); ThûringiscKt Gfsehiehlsqwl-
Un (3 vol. 1854-55); Priedriche der Freidige, Markgrafvon lleissen\\%'<i)\
Gathe ab Uisloriker (1875); Gesckiehte der deutschen Hisloriographie
(1884); Gesckiehte der Cniversitxt Wvribourg[^ vol. 1882). — Le 16 no-
vembre également est mort le D' W.-H. de Riebl, professeur d'histoire
à l'Université de Munich ; il était né le 6 mai 1823, à Biberich, et, après
avoir étudié la théologie, la philosophie et l'histoire, il se voua aux
études d'histoire de l'art et de la civilisation. Après avoir, pendant
longtemp.'!, écrit dans les journaux, il fui, en 1853, nommé professeur
à l'Université de Munich; depuis 1862, il était membre de l'Académie.
La noblesse personnelle lui fut conférée en 1880. En 1885, tout en con-
servant sa chaire, il devint directeur du Musée national de Bavière et
CBBO-dQCE er UBLIOOUPHIE.
248
[«ervateur général des monumeute ai anllquités du paye. A c6Lé de
inibreux romans historiques, de composiiions musicales et des Slusika-
Utcha CharakterkSpft, il a publié plusieurs ouvrages d'érudition, dont
nous mentionnerons deux seulement : Die Pfxlter et EuUttrsl^niien atu
drei Jahrhundfrten. Il a aussi dirigé la Bavaria et le UiHorischts Tas-
chenhuch. — Le 14 octobre est mort à Blaiikenburg l'économisle Kuno
Fbakkehbtbib, de Berlin ; i! avait fondé la Zeitschrift fur Literatur unrf
Geschithte der Slaatswissenschafï et dirigé le Hand-und Lehrbuch dtr
Staaliwissenscha(ten. — Le 25 novembre est mort le professeur Alfred
BE Sallet, directeur du Cabinet des médaillea des musées royaui de
Berlin. FiU du poète Frédéric de Sallet, il était né à Breslau en 1842.
Il déploya dans ses études une remuante tectivitë et composa un grand
nombre de travaux. En 1874, il foniuli Zeitschrift filr Ifumiimalik, qui
a rendu de signalés services. Sans doute, il ne se renferma pas dans
ces études spéciales, puisqu'il s'occupa aussi de l'histoire de l'art en
général, mais c'est à la numismatique et à l'antiquité que se rapportent
ses principales publications. Il a décrit les monnaies antiques des
musées de Berlin ; Beschreibttng der anliken lHànzen der k. Museen in
Berlin (1888); et on lui doit en outre : Btitrxge sur Geschichle und
Nvmiimatik der Kônigê des Cimmerischen Boiporxis utid Pontus (1866|;
Di» FUrsUrt von PalmyraunterGallitnui, Ciaudius und Aurelian |1866);
Dit Ktinitter-Inschri/Xen der griecMschtn Mùnzen (1871); Die Daten der
Àlesandrînischen Kaisarmùmen (1870); Die Nackfolger Atexandera Gr. in
Baktrien und Indien (1879) ; AlexandriniscKe Kaisermùnten (1893).
— Le 30 novembre dernier, l'illustre professeur Théodore Momusen
a fêté le 80° anniversaire de sa naissance. On sait qu'il a encore deux
frères, l'un Tycho, né en 1819, connu par ses études sur Pindare et
Bbakespeare, l'autre Auguste, né en 1821, auteur de travaux sur la
chronologie dans l'antiquité.
— Le D' B. Saueb a été nommé professeur extraordinaire pour
l'archéologie et l'histoire à l'Université de Giessen; le D' Stieda
professeur d'économie politique à celle de Greifswald ; le D' Heitnëb
professeur ordinaire de géographie à celle de Tubiogue; le D' Cari
Bbakdi professeur pour les sciences auxiliaires de l'histoire à celle de
Harbourg; le D' L. Pastor professeur d'histoire à celle de Fribourg
Bade.
Le D' KoHLMANN a été nommé archiviste aux archives secrètes de
'lin; il a été remplacé à la tête des archives d'État à Munster par
1e D' pHn.EPP], et ce dernier remplacé à. Osnahruck par le D'' Max B^n.
— L'Académie des sciences de Prusse a nommé le roi de Suède,
Oscar IL, membre honoraire, et le D' E.-J . Bekkbh, professeur de droit
à rUniversilé do Heidelberg, membre correspoudant. — L'Académie a
Tolé 3,000 m. au professeur HAanACK pour pousser les travaux préli-
minaires d'une Histoire de l'Académie, qui a été entreprise pour le
itlé de cette célèbre société; 900 m. pour l'édition du tableau des
Hari
Herl
244 CHEOIVIQUE BT BIBLIOGKlPHtB.
éclipses dans l'antiquité, dressé par M. Gihzel; 400 m. poor TéditioD
des lettres privées, écrites en allemand au xiv« et au zv* s., entreprise
par M. Steinhausen. — Sous les auspices de TAcadémie, une missioOf
dirigée par Torientaliste Saghau et Tarchitecte Koldewby, est partie
pour la Mésopotamie, où elle devra explorer les ruines de Kalaat-Sche^
gat, emplacement de l'ancienne ville d'Assur.
— L'Académie des sciences de Munich a nommé membre extraordi-
naire pour la classe de philosophie et de philologie le I> Hirth, direc-
teur des douanes en Chine; membres correspondants pour la mètx^^
classe, le D' Hugo Schuchardt, professeur de philologie romane ^
l'Université de Graz, et le Di* Erwin Rohdb, professeur de philolos^^
classique à celle de Heidelberg; membres correspondants de la cla.^Kse
d'histoire, MM. Erdmannsdcerffer et Adolf Harnagk.
— La Commission pour Thistoire de Saxe a décidé de ^publier les
biographies et correspondances du duc Georges le Barbu, de Félect^^ur
Maurice ot de i'électrice Marie-Antoinette (morte en 1780), un aK^las
agricole de la Saxe; les procès-verbaux des diètes saxonnes, une b^is-
toire de l'administration centrale de la Saxe an xvi« s., on tableau^ de
la peinture saxonne au xv«.
— La Commission d'histoire badoise a nommé membre ordinaires» le
D' A. DovE, professeur d'histoire à l'Université do Fribourg; M. de
Weech a été renommé président pour cinq années.
— La Faculté de philosophie dléna a conféré le titre de docteur ho Mào-
raire au P. Leontius Alishan, des Méchitaristes de Venise, le sav^uit
arménien bien connu.
— On a découvert récemment au château de Heidelberg des re^^
d'architecture qui font remonter plus haut qu'on ne l'avait admis j i-s^'
qu'alors la fondation de ce château, sans doute aux premières ana^^
du xiii"^ s.
— La Société pour l'histoire et les antiquités de la Lorraine à }£^^
a décidé de publier un dictionnaire des dialectes allemands employ^^
dans cette province. Une commission composée de MM. Wolfrah ^^
Grimme a été nommée.
— M. 0. Redlich vient de mettre au jour, dans les Beitrxge xur O^^
schischte des Nicderrheins (t. XI, Dusseldorf, Lintz, 1897), un mémo*^^
détaillé sur l'intervention amicale du roi Louis XH dans les querella ^
entre le duc Guillaume IV de Juliers et Charles d'Ëgmont, duc ***
Gueldre (FranzcBsisctie Vermittlungspolitik am Niederrhein im Anfang
XVI Jahrhunderts), Il avait obtenu la renonciation de ce dernier au ti^
ducal de Juliers par le traité d'Orléans (29 décembre 1499), et le A^^^
Jean II de Clèves, quoique absent, ayant été inclus dans cette paix ^ *"*
politique française avait enlevé de la sorte, semblait-il, à Maximilien
ses principaux alliés sur le Rhin inférieur. L'auteur suit, dans tous
détails, les efforts contradictoires de la diplomatie impériale et de c^^ ^^
I
I
iriQDE ET BIECIOGBAPHtI,
.^e Loais XII et de Français 1°', soit pour affcrinîr, soit pour renverser
cet état de choses, peu agréable aux Habsbourg; il nous les raconta
d'après les oombreux documente conservés aux archives de DusseldorF,
et soo récit s'étend jusqu'au moment où la France est mise en échec
par l'élection du 28 juin 1519. L'avènetnent de Charles-Quict amène
l'alliance de Cléves et de Juliers avec la maison de Habsbourg contre
l'iinirpateur gueldrois et le retour, au moins momentané, de la supré-
matie impériale dans ces parages rhénans. L'historien de la politique
étrangère de la France au ïvi» siècle trouvera dans le travail conscien-
cieux de M. Rediich une série d'indications nouvelles. R.
— M. W. At.TM4NW vient de rénnir, dans un volume qui sera très
ntile aux séminaires historiques et juridiques, tous les principaux
textes relatirs à l'histoire des constitutions non allemandes depuis I7T6 :
AwgewahUe Drkundêti sur ausserdeatscken Verfassungsgfschichte seit 1796
(Berlin, Gtertner). Le recueil fait suite à un autre du même genre sur
l'histoire constitutionnelle et administrative du Brandebourg et de la
Prusse.
— La librairie Hertz de Berlin a mie en vente le t. II de la belle
Histoire de l'Europe depuis 1815, par M. Alfred Stbbn [Gtsckiclite Euro-
pas sait dcn Verlragen von 1815]. Il comprend les années de 1850 à 1826,
c'est-à-dire qu'il se rapporte à la guerre d'Espagne et à la guerre de
''indépendance hellénique.
- I^a librairie Velbagen et Klasiitg, de Leipzig, a entrepris une col-
ion destinée à raconter l'histoire universelle sous forme de biogra-
ihiee. Elle aura pour directeur M. Ed. Hëyck et pour titre : Monogra-
phien sur WeUgesehichte. Chaque volume sera illustré. Le premier
volume est consacré aux Médicis {die Medketr}, par M. Hevck lui-
même. Le second, intitulé ; Kônigin Etisabelh von England und ihre
Zeit, a pour auteur M. Ericb Mabgks, professeur à Leipzig, l'auteur
connu et apprécié en France d'une excellente biographie de l'amiral
ODiïguy. Ces volumes, dénués de tout appareil bibliographique et cri-
tique, s'adressent plutôt au grand public; mais les noms d'auteurs que
^ous venons de donner attireront aussi l'attention des gens du métier.
— Dans les importantes Études sur les populations ruraUs de l'AlU-
et la cnse agraire (Larose), publiées par M. Georges Blohdbl,
avec la collaboration de MM. Brouilhet^ Julhiet, de Bainte-Croix et
Quesnel, ou trouvera une foule de précieux renseignements historiques
l'évolution de l'agriculture en Allemagne, sur les coutumes qui
règlent la vie agricole, sur les associations de paysans, sur l'émancipa-
paysans au xvni" a.
— A la suite des vives attaques dont il a été l'objet depuis quelque
'temps, et auxquelles nous avons fait plusieurs fois allusion (voy. notre
micle sur le congrès d'Iimsbriick, nov.-dec. 1807), M. Lampbecht vient
de faire paraître, sous ce titre : Zwei Streittchriflen, un remarquable
opuocnle que nous tenons à signaler à tons ceux qu'intéressent ces
^ftnag'
ave"
Qu
lufoj
Vtea
k.
246 CHROHIQITE BT BIBLIOGRAPHIB.
délicates questions. Nous avons dit quelles réserves il convient de foire
en appréciant Tœuvre du trop fécond écrivain. Quelles que soient sa
puissance d'assimilation et la finesse de son esprit, il travaille trop
vite, et Ton a pu relever dans son livre quantité de petites erreurs.
Mais nous ne pouvons nous empêcher de trouver, d'antre part, qu'on
s'est attaqué à lui avec une passion et une àpreté qui dissimulent mal
un sentiment de jalousie peu honorable pour ces critiques. Dans la
brochure que nous signalons ici, Lamprecht, sans se départir d'une
courtoisie qui lui fait honneur, ramène à leurs véritables proportions
les critiques de détail que Lenz, Deibrûck, Oncken surtout ont dirigées
contre lui. Quand on connaît son écriture, on n'éprouve aucune diffi-
culté à admettre que beaucoup de fautes relevées par ce dernier sont
de simples fautes d'imprimeur, qu'il a eu le tort d^ailleurs de ne pas cor-
riger. Nous signalerons aussi, dans le chapitre de polémique avec Lenz,
intitulé : c Halbwahrheiten, • les idées complémentaires qu'il émet
sur le développement de la puissance territoriale et la situation de la
noblesse allemande à la fin du moyen âge. M. Lamprecht s'est senti blessé
par quelques-unes des appréciations émises par moi dans l'article rap-
pelé plus haut (note 1 de la page 326). Après avoir lu son nouveau
travail, et les explications qu'il m'a données, je retire volontiers les
expressions dont je m'étais servi en disant qu'il avait pillé ses devan-
ciers. Les deux articles de Hermann Oncken, qui doivent être lus en
même temps que le sien {Preussische Jahrbûcher, t. LXXXIX (1897),
p. 83 et 353), permettront de se rendre un compte exact de la façon dont
il a souvent procédé. G. B.
— Signalons un nouveau recueil de Lectures historigties allemandes,
publié par M. Paul Durandin (Paris, Masson, in-8<>). L'auteur a classé
les fragments par périodes historiques, et, rompant avec les anciennes
traditions, il donne des fragments des grands historiens allemands
modernes, comme des écrivains de l'époque classique. En quoi il a grand
raison, la langue allemande ayant bien changé depuis Gœthe et les
écrivains modernes ayant un vocabulaire, une syntaxe parfois assez
différents de celle du début du siècle.
Ajigleterre. — M. George Clément Boasb, l'auteur de la Bibliotheea
Comubiensis (3 vol., en collaboration avec M. P. Gourtney), est mort à
l'âge de soixante-huit ans, le i*' octobre dernier. Il a donné en outre
un grand nombre d'articles au DicHonary of national biography.
— On annonce également la mort, le 5 octobre, à l'âge de quatre-
vingt-huit ans, de don Pascual Gayawqos y Arce. Né à Séville, le
21 juin 1809, il fit son éducation en France, où il compta parmi les
élèves de Sylvestre de Sacy; une traduction de l'Histoire des dynasties
mahométanes en Espagne d'Almakkari le désigna pour la chaire d'arabe
à l'Université do Madrid. Fort curieux pour lui-même de mss. orien-
taux et de livres rares de l'ancienne littérature espagnole, il fut un des
fondateurs de la Société des bibliophiles espagnols. Vers la fin de sa
CHKOHIQ» ST BIBLtOGUFHtS. SiT
vie il s'éiablil en Angleterre, où il s'éiail marié, et fut chargé de conlî-
nuer, dans la série des Cakndars. l'œuvre de Bergearoth; il y publia
quatre volumes ea huit tomes qui coDlJeaneat l'invenlaire des lettres,
dépAcbes et papiers d'Ëiat relatifs aux néj^ociatioas outre l'Auglolerre
et l'Espagne, qui sont conservés aux archives de Simaocas et ailleurs
(I5Î5-I542|. On lai doit aussi le GaUlogue des mss. grecs au Britisb
Muséum.
— Nous ne pouvons qu'annoncer aujourd'hui le premier faBoiculodu
grand travail que M. le professeur F. Liboermann prépare depuis long-
temps et dont nous avoos od plusieurs fois l'occasion de parler : Die
Gitetu der Angelsacksen (Halle, Niemeyer, p. 1-191, in-4*). Cette livrai-
EOn contient lee lois des rois du Kent, celles d'Alfred et d'ine, le texte
des deux traités conclus avec les Danois dans l'Est-Anglie, les lois des
rois Edouard I", Athelstan et Edmond I". L'auteur publie en colonnes
parallèles les rédactions différentes de ces luis, avec les traductions
latiDes empruntées au Quadripartilus et aux Instituta Cnuti, eniin une
traduction littérale en allemand. Les variantes sont notées au t>as des
pages; les notes explicatives sont renvoyées au tome II. Nous avons &
peine besoin d'ajouter que celte nouvelle édition des lois anglo-saxonnes
est établie avec le soin le plus méritoire et qu'elle fera époque dans
l'érudition.
— La volume des Pipe rolls pour 1897 contient le texte du grand rôle
de l'échiquier pour la vingt-unième année de Henri II (1174-1175);
comme le précédent, il renferme encore des traces nombreuses du
bouleversement causé en Angleterre par le soulèvement féodal de H73.
— La Revue historique il signalé en son temps (LIV, 138) la publica-
tion des Statuts de la cathédrale de Lincoln, préparés par feu llenry
Bbadshaw, et en fait ressortir l'importance. H. Chr, Wobdswortk nous
apporte aujourd'hui le complément de l'ouvrage dans un volume en
deux tomes où il a réuni , à càié des textes relatifs à l'élection de l'èvéque
de Uncoln, à ses fonctions spirituelles, à ses rapports avec le chapitre,
& l'organisation du service divin de la cathédrale, un grand nombre
d'autres documents analogue.^ empruntés aux usages de Salisbury, de
LicbGeld, de Hereford et d'York, églises dont les chapitres étaient,
comme on sait, composés de chanoines séculiers. L'intérêt que pré-
sente cette collection de textes est très vif; l'éditeur, M. Wordsworth,
s'est acquitte avec le zélé le plus louable de sa t&che souvent difficile,
et il fkut remercier les syndics de l'Imprimerie universitaire de Cam-
bridge d'avoir fait les frais de cette coûteuse publication \Slatutts of
lineoln çathrdrat, wilh iUuslraliw docurnenU, edited hy Chr. Words-
wonb, 2* partie. Cambridge, at the University press, 1897, ccxc-xxvi
et 957 p. in-8°).
— Le t. III el dernier des MemoHah of Saint Edmund's abbey, publiés
par M. Thomas Arnolo (Rolls séries, 1896), est fait de pièces et de
morceaux : 1° une chronique (Chronica Burieiuis, 1020-1446), composée
À
248 CDRoinQUE et bibliographib.
par un moine de Saint- Benet-Hulme ; 2« documents divers emprunta
à une collection que forma, en 1426, un des moines de rabl>aye, Andrew
Aston; le plus important concerne le différend relatif à l'élection de
John Tymworth en 1379; 3o extraits d'un ms. de Cambridge, parmi
lesquels nous citerons nn récit des violences exercées contre l'abbaye
par les travailleurs soulevés en 1381 ; c'est une traduction française
d'un document plus long en latin qui Ggure déjà dans la collection
Aston; ajouter le récit d'une visite faite à l'abbaye par l'arcbevôque de
Gantorbéry en 1401 ; 4o chartes anciennes de l'abbaye traduites en vers
anglais au xv* siècle, sans doute par John Lydgate ; b^ diverses lettres
tirées du registre de l'abbé Curtys, et dont plusieurs concernent la
guerre avec la France sous Henri VI ; 6® deux pièces sur rincendie de
l'église de Saint-Edmond en 1465; 7o une très brève chronique, rédigée
à Bury, et allant de 1263 à 1469. Le volume, accompagné d'un plan de
l'abbaye ot de ses dépendances, se termine par un glossaire et un
copieux index.
— Nous devons remercier le Rév. F. C. Hinoeston-Rahdolph de nous
avoir fait envoyer la seconde partie du Registre de l'évêque d'Exeter,
John de Grandisson (cf. Rev. hist,, LVIT, 144). Ce volume se rapporte
aux années 1331-1360 et est remph de documents intéressants. Une
courte introduction nous apprend comment ont été formés les trois
volumes contenant le registre de l'évêque (un quatrième a péri depuis
longtemps) et quelles en sont les divisions. Nous reviendrons plus en
détail sur cette belle publication quand elle sera terminée, ce qui ne
tanleni guèn^ \The register ofJohn de Grandisson, bishopof ExeUr, Î327'
Î369, part. Il, 1331-I3G0. Londres, Bell; Exeter, Eland, p. 605-1212,
in-8»).
— La nouvelle édition de ÏOpus mqjus du moine franciscain Roger
Bacon, que vient de donner M. John Henry Bwdoes (The « Opus
Majus » of Rouer Bacon. Oxford, at the Clarendon press, 1897, 2 vol.
clxxxvij-404 et 566 p.; prix : 32 sh.), diffère de celle de Jebb (1733) en
plusieurs points : \^ elle est plus complète, Jebb ayant omis de donner
ce qui nous a été conservé de la 7« partie, consacrée à la philosophie
morale» conclusion nécessaire de tout l'ouvrage; 2» elle supprime an
traité de Baam, c De multiplicacione specierum, i que Jebb avait
intercalé entre la 5* et la 6* partie et qui ne fait pas partie de VOptu
nu^us: il a été retniité en appt^udice. Le texte, qui nous est donc pré-
sente jKïur la premièr^^ fois dans son inti^riié, a été revu avec un soin
minutieux sur les manuscrits et la lecture en a été facilitée par un
ivpieux sommaire, des titres courants et de nombreuses m&nchettes.
L^iutrvxiuction traite de la vie de Bacon, de la place qu'il occupa dans
les ci^ntn^verses métaphysique> du xiir« siècle, de son t Scriptnm prin-
cii^Ue, » de sou système philoloiîique, de ses connaissances sur les
mathomatiqucs, Tastn^Ioisie , la propaiMtion de la force, réplique,
r«lohiroio« U science oxpénmemale et sur sa philosophie morale.
CBUNHIDB ET BIBLIMnAPHII. 249
— Dans le l. II des SeUci pUas in Ihe court of Admiralty (Selden
Sodety,
. XI. Quanlch, 18971, M. Mae
< a continué de publie
Bon choix de procédures devant la cour de ramirauté jusqu'à !a fin du
r^tie d'Elisabeth. Jusqu'à cette époque, les actes sont pour la plupart
rédigée en latin. Us sont accompagnés d'une traduction anglaise en
K^rd,
— La 3» fascicule des Facsimiles of royal, hUlorical, UUerary and
ùther aulograph), publiés par ordre des administrateurs du Driilsli
Huseam, contient un choix fort intéressant de documents répartis sur
quatre siècles, de 1171 à 1839. Deux autres volumes compléteront la
collection.
— L'Angleterre n'a pas d'épopée nationale, mais quelques-uns de
ses écrivains, et di;s plue grands, se sont complu à raconter, à drama-
tiser les épisodes les plus populaires de son histoire. Elle possède ainsi
toute UDe littérature de romans historiques dont certains sont devenus
classiques. La librairie A. Constable iWestminster) s'est proposé de
le« rééditer, règne par règne, avec nn commentaire et une illustration
vraiment scientifiques, et il a chargé de cette entreprise M. G. Lau-
rence GoHUK. Le t. I est l'histoire de Harold, que lord Litton a publiée
en 18*8 {Harold, ihe ttul of Vie Saxons. Pris : 3 sh. 6 d.|; le t. U sera
consacré à Guillaume le Conquérant (Cam^ of refUge, par Macfarlanej
et le t. m à Guillaume II le Roulx (Rufus, or Ihe red king). Dans le
vol. sur Harold, où nous retrouvons certains dessins empruntés à la
Tapisserie de Bayeux, M. Gomme a montré qu'il est ait courant des tra-
Taax tes plus récents et, entre antres, des controverses sur la bataille
de Uastings.
SdIsbs. — M. le pasteur François Naef est mort à Genève le
4 novembre dernier; on lui doit plusieurs travaux historiques, entre
autres : une Hisloir» de la Héformalion (l-^ édit., 1856, 2" édil., 1867);
On unitaire au XVI' tiènle [Gribaldi\ {Étrennes ehriliennei, 1874);
Ztmngli réformateur et patriote {ibidem. 1876); (m Premiers jours du
ehriiUanisme en Suisse; Trois grandes individualités du IV* siècle [ibidem,
18791; Anna Rheinhard, femme d'Ulrich Zivingli [ibidem, 18801; avec
Théod, Clapâhède, Histoire des Églises réformées du pays de Gex, 1891 ;
eiiQn, en 1892, il publia le plus important de ses ouvrages, une Histoire
de t'Uglise chrétienne. Paris, Pischbacher, in-8° de 440 p.
— MM. W. Oechbu, professeur d'histoire à Zurich, et A. Baloauus,
ft Leiping, viennent de publier une Carte murale historique de la Suisse
(édit. G. Lang à Leipzig) qui rendra de grands services.
— M. Ernest Mchet, professeur à l'Université de Genève, vient de
faire paraître, dans tes Archives suisses des traditions populaires {ï" &naÉe,
i897, p. 284-3171, une curieuse étude sur la Légende de la reine Bertht.
Tout un cycle de traditions s'est groupé, dans la Suisse romande,
autour de la femme de Rodolphe II, roi de la Bourgogne transjurane,
fondatrice de l'abbaye de Payerne. Les contemporains ont à peine parte
250 CH10?(IQUB ET BIBUOGBIPHU.
de « la bonne reine Berthe, de la royale filandière ; » après le mémoire
de M. Maret et jusqu'à faits nouveaux, les historiens feront sagement
d'imiter cette réserve dont ils ne se sont, jusqu'à ce jour, que trop
départis.
— Dans son intéressant travail sur la Théocratie à Genève au temps
de Calvin (Genève, Ëggimann, in-8« de 288 p.) M. Eugène Ghoist a
montré < en quoi Genève a été soumise dans sa vie politique comme
dans sa vie ecclésiastique, dans la vie publique de ses cit03^ns comme
dans leur vie privée, à un principe théocratique. »
— M. Alfred Boissier a réuni en une élégante brochure, intitulée :
En Cappadoce (Genève, 1897, in-8o de 51 p., ornée de nombreuses repro-
ductions de photographies), des notes prises par lui au cours du voyage
qu'il a fait en Âsie-Mineure, durant l'été 1894, avec M. et M»* Chantre.
— M. le chanoine Pierre IBourban vient d'écrire, sous le titre de :
V Enseignement à Saint-Maurice du F* au III* siècle (Fribourg, 18%,
in-8o de 129 p.), un chapitre de l'histoire de cette abbaye. Rappelons à
ce propos que M. le chanoine Bourban a fait entreprendre dans l'ab-
baye même des fouilles qui ont donné des résultats très curieux.
— Du 16 au 20 août dernier s'est tenu à l'Université de Fribourg le
quatrième congrès scientifique international des catholiques. Le précé-
dent congrès, dont il a été parlé ici même, s'était tenu à Bruxelles en
1894. Le congrès de Fribourg a réuni environ sept cents personnes, ce
qui serait beaucoup pour un congrès scientifique, si parmi ces sept cents
personnes il n'y avait un énorme contingent de c démocrates chré-
tiens • venus pour faire figure de « sociologues, » et de là, à la sec-
tion de sociologie, de bruyantes séances, que la présidence de
M. Decurtins n'était pas de nature à rendre plus scientifiques.
Quelques sections ont fourni de sérieuses discussions. — En tête la sec-
tion des « sciences exégétiques, » présidée avec infiniment de tact et
d'autorité par le R. P. Lagrangb, a entendu de solides mémoires pré-
sentés par MM. Bardenhewer (de Munich), von Hoeobl (de Londres),
P. ScHBiL (de Paris), Mjnocghi (de Florence), Labourt (de Paris), Rose
(de Fribourg), Séjourné (de Jérusalem), témoignant des progrès accom-
plis depuis quelques années par l'exégèse catholique, particulièrement
en France. — La section de philologie mérite une mention honorable pour
quelques travaux, comme celui de M. Weimann (de Munich) sur les
poètes chrétiens et celui de M. Audollent (de Glermont) sur l'ortho-
graphe des lapicides carthaginois. — A la section d'histoire, où, par
une exception qui a été très commentée, le bureau ne comptait pas un
Français, les travaux français ont été les plus nombreux. Citons : M. l'abbé
DuGHESNE, sur la Vie des Pères du Jura; M. l'abbé Batiffol, sur Ôabi-
nos, source de Sozomène; M. Guiraud, sur le pèlerinage de Rome au
V* siècle; M. Allard, sur la jeunesse de l'empereur Julien; M. Paul
Fournies, sur l'œuvre canonique d'Yves de Chartres et son influence ;
M. Edouard Jordan, sur les relations des papes avec les banquiers
^ 4
CBHOIIIQCIE RT BIBLIOGUPflIB. 251
^Delfes^ H. Douais, sur la formule Communieato bonorum virorum
eontilio des senteaces inquifitoriale!: ; du P. Mandohnet, Gur l'ordre de
la pénitence et les origines des liers-ordres franciscain et domiaicaiD;
de M. Constantin, sur l'ordre tetitonique h Arles. Quelques l'rudits
suiraee avaient apporté des recherches d'histoire iodigène : le capucin
MùLLBR, sur l'iQtroductioQ des Capucine en Suisse; le carë Ddpraz,
sur l'tuitioa religieuse et sociale des papes dans le canton de Vaud ]ub-
qu*Bn XTi» siècle; le curé Tdemp, sur l'évêque Greith et le myslicisme.
M. Graubht (de Municb) était seul à représenter l'Allemagne par un
travail : « Ueber Jordanus von Osnabriick. > M. Gauchie (de LouTaia)
reprêsenldt la Belgique par un travail sur * La paix de Clément IX. n
Lee Bollaadistee s'étaient abstenus. Quant à l'Angleterre, au lieu d'en-
voyer là des hommes de la solidité de M. Bishop ou de Dom Gasquel,
elle n'avait pour la faire valoir qu'un caméripr de cape et d'épép, avec un
petit devoir sur < Les épées d'honneur envoyées par les pape» aus rois
de Portugal au svi' siècle. • — 11 y avait aussi une section dite des
« sciences religieuses, t On se perd en conjectures sur le programme
de cette section, à moins qu'elle n'ait eu d'autre raison d'être que d'ac-
cueillir les travaux repousses par les autres sections et de servir de
■ salon des refusés. ■ La valeur de la plupart des travaux qui y furent
lue confirmerait cette conjecture. Et pourtant on avait mis à la prési-
dence un bomme de la valeur du prof. Fdnk (de Tubingue) I — En
résumé, avec d'excellents éléments, lo congrès de Fribourg a été inté-
rieur à ceux qui l'avaient précédé. La commission organisatrice ne
e'est pas salBsarament préoccupée de déterminer à chaque section un
programme net, de choisir longtemps i l'avance le bureau propre à
chaque section, d'investir chacun de ces bureaux de pouvoirs sévères
d'élimination. Le prochain congrès scientiQquo international des catho-
liques se tiendra à Munich en 1900.
— Sous le titre Die schweiîerùchm BUdtrchroniken und ihre Arclii-
tektur-Darstellungen (Zurich, Schulless, in-8°, vm-368 p., avec gravures
Bl TÎgnetiesl, M. Joseph Zeup a publié un beau volume sur les chro-
niques k images de la Suisse; il montre combien celte étude est utile
à quiconque veut connaître les mœurs, les idées, l'histoire même de
certaines époques.
— Nous avons déjà annoncé {Revue, t. LX, p. 239-340) la publica-
tiOD de l'Histoire de Genève des origines à l'année 169Î par Jean- Antoine
Gautibb. Le tome H a paru l'an dernier, le tome I" vient de paraître
par les soins de MM. Victor van Bergheh et Edouard Favbe (Genève,
gr. in-S°, avec portrait) et comprend la période des origines à la fin du
XV» siècle. Quoique le moyen ^e ne soit pas la meilleure partie du
travail de Gautier, cependant ce volume, grâce aux notes des éditeurs,
peut être très utile. Ne pas le publier, c'eût été détruire la belle ordon-
nance de cette œuvre, si remarquable pour le temps où elle aété écrite
(1708-17291. Les deux éditeurs de ce volume l'ont fait précéder d'une
étode sur les circonstances dans lesquelles Gautier a composé son HtS'
H^ étode sur les
252 CHRO?ÏIQUB BT BIBLIOGRAPHIE.
toire. L'impression du tome III, qui comprendra les années 4538-1555,
est déjà très avancée.
— La Revue a mentionné (t. LXIII, p. 238) le jubilé de M. A.-L
Hbrminjabd. Les organisateurs de cette belle manifestation ont tenu à
ce qu'il en restât un souvenir tangible et ils ont réuni en une char-
mante plaquette (Lausanne, impr. G. Bridel, in-4o, 119 p.) le portrait
du jubilaire, les soixante-six adresses qui lui ont été envoyées et deux
articles de la Gazette de Lausanne. — M. Hbrminjabd vient de donner
une nouvelle preuve de cette « énergie trempée à la vraie source etqni
défie les vulgaires lassitudes • en publiant le tome IX de la Correspon-
dance des réformateurs dans les pays de langue française. Ce volume ne
comprend qu'un peu plus d'une année, du 18 août 1543 au 3 oc-
tobre 1544.
— M. Arthur Piaqet a fait paraître dans le Musé^ neuchâtelois puis
en tirage à part (Neuchâtel, 1897, in-8o, 56 p., avec fac-similé) une
série intéressante de Documents inédits sur Guillaume Farel et sur la
réformation dans le comté de Neuchâtel tirés des registres du notaire
Bretel, secrétaire du conseil et des archives de l'État de Neuchâtel.
— La Société d'histoire du canton de Fribourg avait décidé d'offrir à
l'abbé Jean Gremaud, en 1897, à l'occasion du 50« anniversaire de sa
première messe, un volume contenant quelques travaux d'histoire fri-
bourgeoise. Malheureusement, l'abbé Gremaud étant mort pendant
l'impression {Revue, t. LXV, p. 236), le volume a été dédié à sa mémoire.
On trouve dans les Pages d histoire dédiée par la Société d'histoire au
canton de Fribourg à la mémoire de son président M, le professeur Jtei^
Gremaud (Fri bourg-en-Suisse, 1897, in-S®, xxui-199 p.) une excellente
biographie et une liste des ouvrages de Gremaud, par M. Max de Dibs*
BACH, une étude sur les Professions de foi à Fribourg au IVI^ siècle, pat
M. Gh. HoLDER, enfin les Comptes-rendus des séances de la Société d^his^
toire du canton de Fribourg de 1886 à 1896, par M. Max de Diesbagh.
États-Unis d^Amériqae. — Le 22 octobre dernier est mort L^
bibliographe et historien bien connu, Justin Windsor, à l'âge d^
soixante-six ans. Il avait été administrateur en chef de la bibliothèque
publique de Boston avant d'être mis à la tête de celle de Harvard Gol"^
lege, et s'était fait un nom dans les deux hémisphères par ses publica-^
tions spéciales : Bibliography of the original quartos and folios of Sha^
kespeare (1876), Reader' s handbook of the american Révolution (1879)^
Bibliography of Ptolemy*s geography ; mais il était encore plus connu,^
en France du moins, par ses deux volumes sur le comté de Frontenac^
et le Bassin du Mississipi, où il raconta la chute de la domination^
française au Canada. On a parlé longuement ici même de la grande^
entreprise qu'il dirigea de faire écrire par des spécialistes une histoire
critique et narrative de l'Amérique. Il s'y réserva la partie géographique
et cartographique et la traita avec une érudition consommée.
— Le tome V des « Harvard historical studios • est une vaste Biblio^
CBKONIQUE 8T BIBLlOGHtPHrE.
ffaphy of municipal histary. iiiclttdini/ Gilds and parliamtnlary reprt-
I untation, par M. Ch. Gross (New- York, i^agmaas, xi:tiv-461 p. iii-6*).
- Le P. Lujgi Tdsti, abbé dti Monl-Cassin, est mort en
B dernier, & l'âge de quatre- viogt-aept ans. Nous lai cooMcreroDs
l'te prochaÎD numéro une notice détaillée.
- Charlee Castellani, bibliographe et helieDiste très connu, préfet
àt Is bibliothèque de Saint-Marc, est mort à Venise au mois d'octobre,
âgé de BoixaDte-quiaze ans. Travailleur infatigable, il avait publié
' Wucoup, particulièrement des catalogues de manuscrits; de ees
ouvrages nous rappellerons ; le Oibliotecke dai tempi piû remoli alla fine
'W/' impero romano; la Stampa in Vent:ia dalla ma origine alla morte
di Aldo Manu:io.
— On annonce également la mort de Thomas Valudrt, latiniste très
éoiineiit, professeur à l'Université de Tarin, sénateur, membre de
l'Académie des Kciences, etc.; il était né en 1805, Dans le grand nombre
•le s«8 publications nous rappellerons seulement : Sioria délia potsia
"I Piemonle, Sioria deW Univeriilà in Piemonte, Vila di Tommoio Val-
tau»-! scritta da esso.
— L'illustre historien de l'art, Jean-Baptiste Cavalcasbli-b, mort
* Rotne au mois de novembre 1897, était u
S'ait pris une part très active au mouvement de 1848, et, après les
■lé8a.streE de 1849, il s'était réfugié en Angleterre, où il publia, en cot-
'l'^oration de M. Ghowe, la Sioria delta pittura in llalia dal secolo II al
""Oto svi. Revenu en Italie, il fut inspecteur des musées de Florence
y plus lard appelé à Rome à la direction des beaux-arts au ministère
l'iQslmcliun publique. H pubha encore : llaff'aello. la sua vila e le lUe
'f^*~*i i Us Anciens peintres flamands, leurvie et leurs œuvres, et plusieurs
'ûtr-es ouvrages sur l'histoire de l'art, qui ont été très remarqués.
~ — te gouvernement vient de nommer une commission chargée de
"""lier les documents financiers de la république de Venise. Ce sera
^^î*-inement une publication très intéressante,
A Barl- des- Fouilles s'est (ondée, il y a quelques années, une
r'^*^** mission provinciale d'archéologie et d'histoire. Elle a fait paraître
* ,*■- t du Cadiee diplomatico Barese, où sont publiés les actes sur parcbe-
'"'■'^ de la cathédrale de Bari, de 952 à 1261; en tout 107 documents,
^^*ï. 17 seulement avaient été déjà publiés. Cette publication, qui com-
V^^'Od des bulles de pajtes, deâ diplôraes de rois et de ducs, des chartes
°^Vscopales, ecclésiastiques et privées, est une bonne contribution, non
''^U\ement à l'histoire de l'évèche de Bari, maïs encore aux études
*^Vlomaliques, juridiques et linguistiques. Une préface de M. G.-B.
^iTro r>E Rossi, qui a la prétention de montrer l'importance des docu-
UeDlB publiés, aurait pu être plus concise et moins saperficielle ; les
actes ont été publiés par M. Prancesco Nim m Vite, ancien élève de
l'école de paléographie de Florence, avec beaucoup de soin et de cri-
liipie, et, grâce à lui, le volume a été enrichi d'excellentes tables.
254 CHlONiQUfi BT BIBLIOGUPHIE.
— M. Girolamo Mancini a publié an gros volume sur CarUma ntl
medio evo (Florence, Garnesecchi). L'ouvrage se divise en trois parties:
la première traite de la commune libre jusqu'à 1325, la seconde de la
domination des Gasali jusqu^à 1409, la troisième de l'époque de sou-
mission à la république florentine, de 1411 à 1529. C'est un tranil
d'une érudition très grande, parfois trop minutieuse; ajoutons qae,
suivant la nouvelle manière d'écrire l'histoire, à côté de l'histoire poli-
tique, l'auteur a donné une grande place à celle des institutions, des
usages, de la situation économique et de la civilisation.
— On a publié (Sienne, Lazzeri) le t. V de l'important ouvrage de
Narciso Mbnoozzi, Il monte de' Paschi di Siena, Ce célèbre établisse-
ment de crédit, qui remonte aux temps les plus florissants de la répu-
blique et qui a une existence tout à fait autonome, méritait qu'on en
étudiât de près Torganisation et l'histoire. M. Mengozzi Ta fait avec
soin et avec une science parfois surabondante : sous le nom de MtmU
de' Paschi passe toute l'histoire civile et économique de Sienne et en
partie même celle du reste de la Toscane. Mais, si cela nuit à l'écono-
mie de l'ouvrage, cela donne aussi à l'érudit de riches matériaux puisés
à des sources originales et en partie inconnues. L'ouvrage embrasse
toute l'histoire du Mont et des agences qui lui ont été jointes, des ori-
gines au XV* siècle (sans compter ce que dit l'auteur du prêt à nsnre
exercé par les Juifs avant l'institution des monts-de-piété), jnsqn'à la
fin du règne du premier grand-duc lorrain de Toscane.
— Le baron Domenico Garutti a donné la 3* édition de son Histoire
de Victor-Âmédée III (Turin, Glausen), qui fut publiée pour la pre-
mière fois en 1856; il y a mis d'importantes additions et lui a donné
un nouveau titre : Il primo re di casa Savoia.
— En 1097, le comte Roger de Sicile tint à Mezzara une assemblée
des barons et des évêques de Sicile pour régler un conflit qui avait
éclaté entre les uns et les autres au sujet des dîmes. L'accord qui ea
résulta est connu. Gependant, pour solenniser le haitième centenaire
de cette assemblée, qu'ils considèrent comme le premier parlement
sicilien, MM. Paterne Gastbllo et Gaoliani en donnent une nouveli^
édition critique \ avec le fac-similé de la copie que possèdent les archiv^^
capitulaires de Girgenti. Les auteurs se sont beaucoup plus mis en frai-^
pour l'édition, qui est riche, que pour le commentaire historique doiP- ^
la pauvreté touche à la misère.
— G'est une série d'études sur les anciennes annales de EHse qu ^
M. Otto Langer a publiée sous le titre général de Die Annales Pisao^-
und Bernardo Maragone (Zwickau, Zuckler, 1897, in-A®, p. 39). Il ^
examine tour à tour si, comme on le croit depuis longtemps, Bemar"^
Maragone est Tauteur de ces annales du xn« siècle, comment se présenta
1. SM* oitavo crnienario del primo Parlammiio Sidliano, Gatane, Gia^3
noU, 1897, ia-8% 46 p.
mSînflCB ET BlBtlOGBlPBIB.
dans cette compilalion historique la série des conBula plsans, enfin il
montre l'importance qu'a le manuscrit parisien de ces Annales.
— Après avoir étudié, dans une brochure précédente, dont la Revue
hiitorique a rendu compte (t. LXIV, p, 448), les tentatives de réforme du
calendrier faites au concile du Lalran, sous Léon X, M. Marzi aborde
la queelion de la réforme grégorienne et, dans un article de peu d'éten-
due*, il étudie les projets présentés par Giglio et par le coadjuleur de
Sienne, Piccolomini, lous deux e'inspiranl des recherches antérieures
de ToloBaoi.
— 8ouB le titre général de Carattcre giuriàico del governo costilusio-
natf^, M. MicELi, professeur à l'Universilé de Pérouse, a publié deux
fascicules de droit constitutionnel ; dans le premier, il étudie les fonc-
tiouE de la Couronne ou de la Présidence; dans le second, celui da
Cabinet. Comme il le déclare lui-même dans sa préface, il n'a pas voulu
taire une théorie pure; il a tenu compte le ptus possible de l'expérience
et de la marche des faits. Quoique s'intéressant plus spécialement à
l'Italie, il n'a pas laissé de prendre des points de comparaison dans
tous les autres pays placés sous un régime analogue. Frappé du discré-
dit où le parlementarisme lui semble tombé, il cherche à montrer les
troubles qui se sont produits dans le fonclionnement régulier du régime
constitutionnel et à en indiquer le remède. Œuvres d'un esprit à la
fois logique el pratique, doué d'une grande pénétration ei dépourvu
autant que possible de parti-pris, ces études sont remarquables, et tout
homme préoccupé de ces graves problèmes politiques les lira avec profit.
— M. CoHAzïCNi* étudie les paroisses gentiltces qui esisteol encore
en Italie ; après les avoir définies d'après les canonistes, il cherche à en
déterminer l'origine et il la fait remonter aux paroisses des fundi et
des massae de l'époque mérovingienne. Malheureusement, cet article
de huit pages est un sommaire plutôt qu'un traité de la question.
— Dans un autre article plus étudié', le môme auteur cherche &
déterminer ia condition juridique des presbytères dans les diverses
régions de l'Italie et en France, où il cherche des points de comparai-
son. Quels en sont les propriétaires, sont-ce les communes, les fabriques
ou les curés? Si ces derniers n'en sont que les usufruitiers, quelle est
la limite de leurs droits? A qui incombent les frais d'entretien? Telles
sont les principales queslions que M. Corazzini se pose et qu'il cherche
à résoudre non seulement d'après les textes de loin, mais encore d'après
la jurisprudence des Conseils d'^.tat, des Cours de cassation, les com-
mentaires des jurisconsultes et des canonistes.
1. Giov. Maria Toloiani, Àlesiandro Piccolomini e Luigi Giglio. CaslelQo-
reolina, 1897, in-8-, p. lî.
2. Péroune, lip. Umbra, 1894, ! fasc. in-8-, p. 1-136, 1-îïO.
3. Parrochie genlilisie. Etirait de la Riviala dl dtrltto ecclesiasiico, \&%,
io-8-, p. 8.
i, PrabUerli o eau canonicAe (extrait de la même revue), 1S96, p. 52l-57a,
256
CfllOIVIQUB BT BIBLIOGBIPHIB.
— M. G.-B. S1RAGU8A a publié, pour Vlstituto starico italiano, nne
nouvelle édition de l'Histoire do la Sicile de Hugo Falcandus (la Hih
toria 0 liber de regno Sicilie e la epislola ad Petrum, Panormitane eeeUnt
iiiesaurarium, di lîgo Falcando, Rome, Forzani, 1897, xlv-197 p. in-8«.
Prix : 10 lire).
Danemark. — La science danoise a fait une grande perte par la mort
du directeur général des archives de i'Ëtat, le D' A.-D. JGEEOEMSEXfdéoédë
le 5 octobre. Il tenait en Danemark une place importante par ses travaux,
écrits d'un style facile et élégant ; il s'était fait aimer comme historieo
populaire; son grand patriotisme et la lutte infatigable qu'il avait entre'
priso en faveur des Danois annexés du Slesvig lui avaient valu TestimecL^
tous; rexcellentc direction qu'il avait imprimée aux archives a mont^T"^
à quel point il fut un administrateur éminent. Né à Graasten en SletyS- l
en 1840, il vint à Gopenliai^uc, lors de la guerre de 1861; il y obtint, ^p^'^
1869, un emploi aux archives du ministère et fut mis, en 1883, à la té
de ce dépôt. Il le réorganisa et Gt publier d'importants catalogaei
tableaux do l'administration générale pour faciliter les recherches hisi
riques. C'est à son initiative que l'on doit l'établissement des trois
provinciales en 1881K Connaissant à fond le contenu de ses archives, il
en tirer des documents d'un trè^ grand intérêt, concernant, par exem
la Réforme, la captivité de Christian II, les atTaires politiques du zix*
Ses premiers ouvrages se rapportent à l'histoire du moyen âge;
Études sur l'histoire du Nord au moyen âge et sa grande Histoire de
fondation de l'Église chrétienne dans les pays Scandinaves témoi
de Toriginalité de se.^ études, faites directement sur les sources, d
la pénétration avec laquelle il comprenait les caractères humains
l'esprit particulier de chaque époque. Ce sont les mêmes qualités
se font jour dans ses Quarante récits de l'histoire nationale, ouvrage
répandu, où il a présenté des points de vue tout nouveaux, sartout ai^
sujet de l'histoire du Slesvig. •Tturgensen a aussi publié toute une séri^
d'importantes recherches sur l'histoire de cette province. La biographie
l'intéressait beaucoup, et il a tracé d'excellents portraits de rarchéo-^
loguc Zoêga, de l'anatomiste et géologue Sténo, du psalmiste Bro
du poète EvaUl, entin, dernièrement, dans un ouvrage en deux volnmi
de l'homme d'État GrifTcufeid. Dans la Danmarks Riges Historié, J^
gensen a décrit répo<iue de 1814 à 1838; la suite, jusqu'en 1852,
entièrement terminée.
— Le D' C.-F. nuiCKA, connu surtout par son grand dictionnaii '^^
Dansk Biografisk Lcxikon, a été nommé directeur général des aitbives ^— -
L'un des propriétaires'^érants, G. Monod.
Nogent-le-Rotrou, imprimerie Daupblbt-Gouvbbxcbur.
LES AVENTURES
DU
MARQUIS DE LANGALEME
(1661-1717).
(Suite et fin*.)
IV.
Langaler[b protestant.
€IZeile même année 1711 vit se produire une nouvelle incar-
AtL'îcû de Langalerie.
^^^aturellement porté vers les spéculations religieuses, si nous
en rapportons à ses propres déclarations, il avait cru rame-
sa nouvelle épouse dans le giron de l'église catholique ; au
on traire, ce fut elle qui, protestante ardente et versée dans les
'-^^laties de la controverse, le décida à embrasser le calvinisme,
^^y le dimanche 19 juillet 1711, en grande cérémonie, devant
^ne nombreuse assistance que la foire de Francfort-sur-l'Oder
^vaît encore grossie, il fit son abjuration dans le temple français
^ yeux de certains contemporains, les mobiles religieux ne
ïw^n t pas seuls à faire du transfuge de 1706 un renégat ; il y en eut
f^^^î de politiques. Sa situation auprès du roi Auguste était devenue
Jûsoutcnable. Non seulement les Lithuaniens protestaient contre
^ lourde surcharge que leur imposaient douze régiments de cava-
ievx^ étrangère cantonnés par le prince saxon dans leur pays,
malg^^ eux, et contre les exactions écrasantes de ces mercenaires,
^ • Voir Revue historique^ LXVI, p. 1.
Rbv. Histor. LXVI. 2« pasc. 17
258 1. OB BOrSLISLS.
encore plus que contre les dépenses d'entretien d*un pareil arme-
ment* ; mais grands et petits généraux n'entendaient pas qu'un
étranger, un Français, empiétât sur leurs emplois. Il Mut
chercher fortune ailleurs^. L'Autriche étant désormais fermée
au générais il ne restait de ressource que du côté des Etats
protesta nts^'. Quittant donc le commandement qui lui avait été
confié sur les frontières de Pologne et de Hongrie, Langalerie
se transporte d'abord à Hambourg, et, là, remontre à la com-
munauté protestante qu'au milieu des ravages effrayants de la ^
peste il a vu comment sa « chère épouse » avait « mené battant » —
les prêtres catholiques chargés de la ramener à la religion romaine; ^
que lui-même, < catholique à brûler et jusqu'à vouloir faire d(
prosélytes, » il s'est mis à étudier Y Abrégé des controverses Ai
brelincourt^ le Bouclier de foi de Dumoulin*, YAccomplissi
7iient des prophéties de Jurieu"', surtout la Bible de Louvain
que ces lectures l'ont décidé à s'instruire plus complètement dan^.^
la religion protestante, qu'elle soit luthérienne ou calviniste.
l^es Hambourgeois Taccueillent pendant six mois, font une collecte
h son profit, et, le 1*"" mai 1711, lui délivrent une chaleureuse
recommandation pour leurs coreligionnaires de Brème, où il
1. Gazette d'Amsterdam, 1710, Extr. xx, xxii, xlvii, et n* xcin, et 1714,
n* i:iv; Gazette de Leyde^ année 1713» n* 16.
2. Journal de Verdun^ octobre 1710, p. 243.
3. Les Mémoires de 1743, p. 387-391, racontent qaMl alla à Vienne, du»
rété de 1711, pour réclamer du nouvel empereur an arriéré de plu d* u
demi-million de florins, mais que le prince Eugène fit échouer tontes ses
démarches, et qu'il revint dans le Nord en jurant de se Tenger. Tout cela ne
paraît pas Traisemblable.
4. Auguste de Pologne aTait abjuré le luthéranisme pour le catholicisme Ion>
qu'il s'était fait élire en 1GU7; mais son fils, le prince électoral de Saxe, passa
au luthéranisme en 1710.
5. Une vingtième édition avait paru à Charenton eo 1674.
6. Bouclier de la foi. ou Défense de la confession de foi des égUse$ réfor-
mées du royaume, publié à Charenton, en 1618, par Pierre da Moalin.
7. l^ titre do cet ouvrage, publié en 168(3 et 1687, et inspiré da chapitre xi
de V Apocalypse, explique quelle influence il put avoir sor l'esprit do néophyte:
r Accomplissement des prophéties, ou la Délivrance prochaine de rÉgÙte;
ouvrage dans lequel il est prouvé que le papisme est V empire antichréden;
que cet empire n'est pas éloigné de sa ruine; que cette ruine doit commMoer
dans peu de temps; que la persécution présente peut finir dans trois ans et
demi, apri's quoi commencera la destmction de l Antéchrist j laquelle se con-
tinuera dans le reste de ce siècle et s'achèvera dans le commencement A»
siîxle prochain: et en/in le règne de Jésus-Christ tiendra sur la terre, Poor
ré|H>ndre aux railleries de ses adversaires, Jurien publia deux on trois laites
ou a|H)logies.
LES AVBNTORBS DD VÀIQUIS DE UIIOilElI£.
i aller fixer sa résidence. Fut-il mal accueilli dans cette
le? C'est ce que nous ne savons pas; toujours est-il que les
••randebourgeois de Francfort-sur-l'Oder eurent la préférence,
eï qu'il se mit entre les mains de deux pasteurs renommés de
celte ville, le luthérien allemand Strimesius' et le calviniste fran-
sa/s Causse*. Après six ou huit semaines de conférences et decon-
tyvenes, ce dernier l'emporta et eut l'honneur insigne de pré-
d^tr à la cérémonie du 19 juillets
I^e la part d'un visionnaire à tendances mystiques, tel que
'vxs connaissons Langalerie, on peut admettre que l'abjuration
k ï t sincère; il voulut immédiatement la justifier aux yeux des
EXEA patriotes et des amis qui l'apprendraient par les gazettes
r";^ ngères*. Celle qui se publiait à Leyde '", sous la direction du
E°Ugié français Antoine Detafont, fut choisie spécialement par
-*- » et, à suivre les diverses insertions qu'il y obtint, on ne peut
•^'admirer son instinct de l'action que, dès ces temps primi-
^Ï'S, le journalisme pouvait exercer sur l'opinion publique, et son
Caresse à manier cet instrument*. En premier heu', un compte
^ndu, qui commençait par l'énumération de tous les titres du
èophyte*, annonça les splendeurs émouvantes de l'abjuration
dique. Onze numéros plus loin', nouvel article ;
tauit jours après que M. le marquis de Langalerie '" eut fait
I abjuration publique des erreurs de la religion romaine dans
bise des réformés de cette ville, S. Eic. y fut admise à la sainte
E Samuel Strimesins, mort en 1730.
[ Jean Csusse, ordonné à Berlin en I6â8, mgUllè A Prancforl en l&S<l.
C Les lUànoira de 1713, p. 402, iilacenl celle abjuration en 1711 et en attri-
•Benl l'honneur au fameat llMusobrB: mais ceiui-ci èUil éubli â Berlin, el le
Icile mttae de l'ubjuration. publié en dernier lieu dans le Bullelin de la Société
de Chttloira du prolestantUme (Tançais, année IS90. p. 4%-40S, ne parle que
de Strimesius et Cnusae. C'est cette conversion qui, dè« ISS6, n râla it Langa-
lerie un article des auteurs de la France proleslunie (I. VI, p. 515-517); « U
Mcande édition de ce grand recueil continue, il est i Mubniter que l'on expurge
l'arLicle des fautselés empruntées par les frères Haag aux Mémoiret apocryphes.
4, Gaittte liAmslerdam, 171], Eitr. lxii; Journal de Verdun, août t7lt,
m et 299.
I Sou» le titre de youveltn extrat/rdinairei de diaeri endroUi.
a déji usé en 17U».
tiBttielte de Leyde. 1711, n* 61, correspond a née de Francrorl.
f Depuis son arrivée en Allemagne, Langalerie arborait ta i|ualiricBlian double
i marquis, ce qni ne ae fniMlt pu en France.
E N* 7t. Il y a deux numéros par semaine.
I, Celle ortbograplie sulGrait pour révéler l'origine de l'article.
260 1. DE BOISLISLS.
communion avec M*"^ la marquise sa 1res digne et vertueuse épouse,
cl cela après une mûre délibération du consistoire de la même église.
Toute rassemblée fût extrêmement édifiée de la piété et du zèle que
ces deux illustres personnes firent paroitre à cette occasion. Depuis
ce temps-là, M°"'' la marquise est heureusement accouchée d'un
second fils dans le château du général de Micrander, qui est aux
portes de cette ville, ce généreux seigneur ayant bien voulu y loger
M. et >!"»• de Langalerie : de sorte que cette illustre marquise a en
presque en même temps une double joie, celle de voir M. son époux
embrasser la religion réformée, et celle d'avoir mis au monde un
jeune marquis, qu*on va baptiser au premier jour dans le sein delà
même église. M. le marquis son époux mettra bientôt au jour un
écrit en forme de lettre, contenant quatorze motifs également forts
et solides qui ont obligé S. Exe. à faire abjuration des erreurs de
réglise romaine pour professer les vérités de la religion réformée.
De la Gazette de Leyde, ces importantes nouvelles passèrent
dans le Journal de Verdun^; mais la première feuille inaéra
encore une relation du baptême du nouveau-né, qui se fit dans
l'église française, par la main du ministre français Cabrit, rem-
plaçant M. Causse, et où les parrain et marraine furent le roi
Frédéric et la reine Sophie-Louise de Prusse, représentés par le
gouverneur de la ville et sa femme'. A la suite venait cette der-
nière annonce, qu'il faut reproduire intégralement^ :
Le grand et bel exemple que M. le marquis de Langalerie a donné
en embrassant dernièrement la religion réformée a fait tant d'im-
pression sur l'esprit d*un gentilhomme irlandoisnomméM. O'Bryen,
homme de réputation qui a été ci-devant major dans les troupes du roi
de Suède et, en dernier lieu, commandant des grenadiers à cheval du
prince Kagotski, qu'après avoir été instruit pendant cinq semaines
par M. Gausse, l'un de nos pasteurs, et convaincu des erreurs du
papisme par la lecture de \ Abrégé des controverses de M. Drelin-
court, lequel le général de Langalerie lui a fourni, [il] fit hier abjura-
tion publique... Ce qu'il y a de plus admirable dans cette conversion
1. Octobre 1711, p. 209 : c La marquise de Langalerie ayant été joindre son
époux en Saxe, où elle a, comme lai, abjuré la religion catholique pour embras-
ser la proleslanle suivant la réforme de Calvin, accoucha d'oa fils, à Franc-
fort-sur-i'Oder, au mois d'août. Ce marquis travaille à doooer au pubUc les
motifs qui l'ont engagé à changer de religion. •
2. Gazette de Leyde, n* 87. Ce fils reçut eo conséquence les noms de Frédè-
ric-UIric-Charles-Philippe.
Z, Ibidem.
us ITEffrCSES DD KiRQITlS DR Ll^IGlLERIB. 26\
est qu'elle s'e^t Taile avec une pleine connoissancc de cause; car
M. le major O'Brycn diâputoit Lous les jours avec M. Gausse, ayant
on main son Etichiridion Echij contre Luther', d'où il liroit ses
arguments pour appuyer les erreurs de l'église romaine; mais,
comme ce nouveau prosélyte est mathématicien, qu'il a l'esprit
juste, et qu'il parle bien françois et latin, il a facilement compris les
erreurs de la religion où il étoit né et les vérités de la m'ilre. Au
reste, celte conversion s'est faite sans aucune vue d'intérêt mondain,
puisque M, O'Bryen, avant que d'embrasser la religion réformée,
étoit déjà pourvu d'un emploi également honorable et lucratif. M. le
marquis de Langalerie a fait, depuis trois semaines, divers vojages
à Berlin, et de celle capitale à Landsherg, où la cour est â présent.
On dit que c'est pour proposer au roi de Prusse un projet de guerre
très important que ce général a formé, et pour l'exécution duquel il
offre ses services à S. M. Prussienne et à ses hauts alliés; et l'on
ajoute qu'il a été goûté par S. M. Pr. et par M. le Prince rojat son
» unique et hérédilaire'.
I^à uae correspondance envoyée de Berlin le 13 octobre, et
lue dans le n" 85 de la même Gazelle de Leyde, avait
répandu la aouvelle par toute l'Europe :
Le marquis de Langalerie, qui a ci-devant servi le roi de France
avec beaucoup de distinction en qualité de lieutenant, cl qui a été
depuis titré général de la cavalerie de l'empereur, etc., a eu audience
à Landsberg de S. M. Prussienne, qui lui a fait un accueil très f^vo-
Kl, et l'on dit qu'il lèvera un régîmenl de cavalerie pour le sér-
ie la reine de la Grande-Bretagne.
i Anne, ni Frédéric-Guillaume n'avaient probablement rien
connu de ces relations que la gazette leur prêtait avec le transfuge
français^. Du moins, celui-ci tint sa promesse de justifier son évolu-
tion religieuse. Le manifeste annoncé parut en Saxe, puis en Hol-
lande, au mois de septembre 1711 '■. Sous forme de réponse à un
ami^, il y racontait les circonstances qui l'avaient décidé à se
*Kne)\tndion eontroversiarum, eomraentariat In Aristoietis libros PhijU-
p «t lit Meteora, par l'Allemand Jeoa Eck, mort ea 1543.
Fridirlc-Guillauma, qui monta »ur le irûne en 1713.
3. Lh ilêmolret lie 174î parlent (p. 404) ilcs offres du général an roi da
Prusse. maU ilisenl qn'il fut caitrUiisemenl icnnduil,
i. Journal de Verdun, même mois. p. t9!-l94,
^TiUv : Ltltre dv giji^ral nariiuù de langalerie eontenattl en abrégé
262 i. OB B0I8LI8LE.
mettre entre les mains des ministres de Francfort, et, à rioTene
du duc Antoine-Ulrich de Brunswick- Wolfenbîittel, qui avait
publié, deux ans auparavant, les cinquante motifs de son abju-
ration du protestantisme, il énumérait ses quatorze motife, à lui,
pour renier le catholicisme, sans compter deux cent quarante-
cinq versets de la Bible relevés à l'appui; motifis bien coddos
d'ailleurs : Tantichristianisme des papes, leur vie impure etleor
simonie, le culte des images, la croyance aux miracles et aux
légendes, la persécution des hérétiques, etc.
Annoncé d'avance par les gazettes, comme on l'a vu, ce mani-
feste passa jusqu'en Angleterre grâce à une traduction de l'année
suivante, mais sans produire l'effet espéré; et cependant les
circonstances étaient favorables pour que le condottiere trouvât
emploi dans l'une des coalitions qui partageaient alors l'Europe
centrale : d'un côté, la Suède, le roi Stanislas et la Turquie; de
l'autre, le Danemark, la Russie et le roi Auguste. Le roi de
Prusse ayant éconduit Langalerie *, une tentative auprès du czar
Pierre le Grand ne réussit pas mieux*. Pendant dix-huit mois,
l'histoire et les motifs de sa conversion^ avec un discours, etc. — Noos avons
un exemplaire de l'édition de 1711 dans le dossier Gentil du Cabinet db d'Ho-
ziHit, vol. 150, dossier 4112, fol. 11-22, et une traduction anglaise publiée on
an et demi plus tard (Musée britannique, 700 r25}. 11 paraît même que cette plt*
quette a eu les honneurs de la réimpression en 1852. Voir le BuUeUn de lA
Société de l'histoire du protestantisme français, années 1862, p. 315, et 1890,
p. 490.
1. Ci-dessus, p. 261. Le roi Frédéric mourut le 25 février 1713. On sait combien
de sacrifices la Prusse fit alors pour s'assurer Tincorporation des réfugiés fnQ'
(^ais; Frédéric-Guillaume, à peine monté sur le trône, leur offrit quinze années
de franchise {Gazette d'Amsterdam, avril 1714, Extr. lvui).
2. M. de Weber dit (brochure Montégut, p. 24) : « Nous trouvons de loi bb
mémoire adressé au czar Pierre le Grand durant la guerre des Russes contre
les Turcs. Langalerie conclut en proposant d'envoyer une personne de confiance
pour faire continuer la révolte des Monténégrins et leur promettre de la pirt
de S. M. czarienne une forte assistance. On devait aussi se mettre en nls-
tions avec les chefs d'autres tribus qui entretenaient depuis quelque temps ane
correspondance avec lui, Langalerie. Il s'offrit même à désigner uo port de
Grèce qui fût propre à recevoir une flotte et facile à fortifier; il se déclara
ensuite prêt à enrôler un corps de six mille hommes et à l'embarquer dans on
port de l'État pontifical, dans l'espérance que le pape favoriserait une entf^
prise dirigée contre l'ennemi du nom chrétien et autoriserait ses sujets à louer
leurs vaisseaux pour cela. Langalerie avait donc alors en vue une guerre contre
les Turcs en faveur du czar et avec l'aide du pape. Mais ce plan est resté une
simple feuille de papier. • Langalerie, dit-on, fil une démarche pareille
auprès de Rakoczy, le chef de l'insurrection hongroise, qui tendait à sa in.
i iVIHTirKES DC HIRQUIS DE Ll>1CALEItIC.
le général chercha vainement un placement de ses projets chimé-
riques, de ses visées ambitieuses. A la fin d'août 1712, il fit faire
ane nouvelle édition de son manifeste comme appel à la sympa-
thie des protestants, en y joignant non seulement le certificat de
la commuDauté de Hambourg', mais aussi une prière aux com-
munautés de réfugiés français de faire parvenir en franchise aux
pasteurs de Brème les subventions qu'il sollicitait d'elles-. C'est
seulement au printemps de 1713 que le prince héréditaire de
Hesse-Cassel \ auquel il avait jadis rendu quelque service dans
la campagne de 1705 en Italie, vint à son aide.
Ce prince, l'un des plus brillants généraux delà coalition contre
Louis XIV '', obtint du landgrave son père^, pour Langalerie et
pour sa famille, une pension considérable, une terre et un titre de
général-lieu tenant dans cette petite armée de mercenaires qu'il met-
tait à la solde des puissances étrangères et qui jouissait d'un très
bon renom. L'installation de ses protégés à la cour de Cassel dut
avoir lieu vers le l" avril 1713", Les charmes de M™" de Lan-
galerie opérèrent bientôt : quoique peu jolie, et affligée en outre
d'une humeur diflScile, quinteuse, elle devint la maîtresse en titre
Quant BU Monléoègro, il y eul effectiTement, dans \'élé de ITIS, on loulèvement
considérable et une lutte acEiarnée {Gatelle rT Anulerdam, q" lxsi et Lxxni).
t. Ci-detsue, p. Z58.
2. Aéiinpre8«ion datée du !5 août 1712 (Musée brilannique). A la deroiËre
page : a Vous êtes très bnmbleineat suppliés d'avoir ta boolé d'aUraDchir lei
paquet} que vous leur adresserez pour cet efTet. ■ -- C'est précisémenl à cette
époque rie l'anoèe 1712 qu'eut liea le siégé de Stade, dans le ducbé de Brétue,
où les Ménolrn de 1743, p. 393-394. prétendant que Langalerie eul un com-
mandement dans l'armée du roi Auguste de Pologne anie  celle du Danemarb.
C'est le général Hohendorp qui commandait les troupes assiégeantes au oom de
Frédéric IV de Danemark; le siège dura d'août k septembre et finit par un
bombardement terrible. Même dans les articles très circonstanciés de la Gasette
lU Leyde (n" 63 A 76), je n'ai pu trouver uealion de Langalerie.
3. Frédéric de Hesse {1676-1751), celui qui épousa en 1715 Ulrique de SuËde,
soeur de Charles XII, et monta avec elle sur le IrÛne après la mort de ce
4. Après avoir servi en Italie sous tes ordres d'Eugène, ce prince avait pris
une pari active et glorieuse aux campagnes de Flandre et d'Allemagne, comme
général de la cavalerie bollandaise, et avait même commandé en chef l'armée
alliée pendant l'absence du prince Eugène et de Tilty.
5. Charles de Hesse (1G51-I730).
G. Cette dale e<t donnée par le propre journal de Langalerie conservé &
%'icnDe. — Les Mèmeirex de 1743 prétendent, p. 405-406, que Langalerie fut
lèduil à recevoir quelque vingt mille nurins pour fournir aux frais de l'instal-
tj^i *e nipper, etc.
264 i. OB B0I8USLB.
du très mûr landgraveS et, avant qu*un mois se fût écoulé, h
général ne put plus douter de rien^.
Quoique restant fort épris de l'épouse infidèle, il essaya de
chercher une consolation dans les spéculations théologiques et
mystiques ; le plus clair résultat des lectures auxquelles il s'était
adonné depuis 1710 fut de le pousser de la « mégalomanie » à
la < théomanie. > Le Journal de Verdun raconta cela un peu
plus tard^ :
Il s^appliqua à Tétude de la Bible, faisant des remarques sur
divers textes, principalement sur les prophéties et sur le livre de
V Apocalypse, quoiquMl ignorât les langues savantes, mèmelelallD^
Cette élude el diverses chimères qu'il rouloit dans sa tète cootn-
huèrent beaucoup à lui brouiller la cervelle. La preuve que son bon
sens l'abandonna dans ce temps-là se tire de la lecture de ses propres
écrits, car il fit imprimer quelques brochures dans lesquelles il
avançoil « que Dieu Tavoit destiné à abattre et anéantir toutes le»
religions opposées à celle qu'il venoil d^cmbrasser. i II se fortiDa
dans cette pensée, lorsqu'il reçut la lettre d'un fanatique d^ Allemagne
dans laquelle il le qualifloit de mon ange de Langalerie. Ce fana-
tique, nommé Joseph de Latre, se disoit être prophète ', et, en cette
qualité, il tira deux lettres de change sur la nation juive de la ville
d'Amsterdam, Tune de douze cents florins, l'autre de huit cents
1. Agé de ciaquanle-sept ans, il Tenait de perdre sa femme, uoe Courlande
qui lui ayait donné au moios quinze enfants. Voir les notes de Chr. Ton Rom-
mel sur la colonie de prolestants français établie en He^se, dans Zeitsehrifl det
Vereins ftir Hessische GeschicMe und Landeskunde^ t. VII (1858), p. 125. —
La Beaumelle s'est demandé s'il s'agissait du père ou du fils.
2. Mémoires de 1743, p. 406 : a Je Toulois solliciter un noureau titre d'hon-
oenr pour joindre à ceux que j'aTois déjà dans les plus puissantes cours de
TEurope ; mais que j'y aurois peu pensé, si j'avois préru l'insigne affront que
j'y ai reçu et les chagrins cuisants qu'il m'a causés! Le cœur d'un scaro^n,
quelque vieux et usé qu'il soit, a toujours des attraits séduisants pour la plut
sage des femmes. Si son penchant amoureux n'en est point flatté, sa ranité y
trouTe son compte. La mienne est jolie, aimable, bien faite; elle a beaucoup
d'esprit, et elle joint à toutes ces belles qualités une âme noble, un cœor tendre
et généreux, t
3. Dans une très intéressante relation datée de Hambourg, le 17 août 1716,
que ce journal publia en octobre, p. 242-249.
4. Le livre de Jurieu dont il s'était servi pour préparer son abjuration, ci-des-
sus, p. 260, facilita l'interprétation du texte apocalyptique.
5. Selon les Mémoires de 1743, p. 410, ce juif reconnaissait aux prénoms de
Langalerie, Philip|)e-i4nytf, que c'était l'ange annoncé par Baruch comme devant
rétablir l'empire juif. Le second prénom n'avait jamais existé.
us ITBNTIIBIS DD lURQDlB Dl LlItULUII. 26i
(lorias, leur ordonnant de la part de Dieu d'en faire le paiement à
Yanyff de Laiigaterie ' .
Cet Ange de nouvelle création fil assembler les principaux de la
syQagoj^ue pour leur nolifler l'ordre qu'il avoit de la part de Dieu et
de soa nouveau prophète eu les Hattant d'un prompt changement de
leur misérable condition, puisque toutes les nations alloient, par son
uinistère, être réunies en une seule communion. A la vue des lettres
le change, on pria M. de Langaierie de se retirer, pour leur laisser
a liberté de délibérer. Un moment après, on le rappela, et on lui dit
|ue, n'ayant pas encore reçu la lettre d'avis de la part de Dieu, ils
'allendroient et ferotenl le payement dès qu'ils l'auroient reçue;
|ue cette règle étoil universellement reconnue de tous ceux qui iiégo-
:ient eu lettres de change.
L'Ange et le Prophète attribuèrent ce refus à l'aveuglement de la
lalion juive, et convinrent de cherclier d'autres eipédienta pour
rouver de l'argent. Ces circonstances m'ont été certifiées vériUbles
»ar deux riches juifs d'Amsterdam, qui ont fait ici quelque séjour,
evenant de la dernière foire de Leipzig'.
M. de Langaierie fil imprimer,quelque temps après, une brochure,
idressée à trente-neuf des principaux marchands d'Amsterdam, qui
itoit un espèce de rôle de l'argent que chacun d'eux devoit fournir
lour l'accomplissemenl des prophéties qui erabrouilloienl son esprit;
nais cette aouvelle tentative fut aussi sans effet. Gomme il ne se
■ebutoit point, il présenta requête au consistoire wallon d'Amster-
lam pour emprunter treize mille florins de l'argent des pauvres, sous
sromesse qu'il faisoit d'en rendre vingt-six mille dans unan. 11 n'en
!ut pas une réponse plus favorable que celle que lui flrent les juifs.
En effet, M. le docteur Landau a retrouvé un manifeste que
Langalme adressa alors {19 juin 1713) à ses compatriotes les
réfugiés protestants. Il leur annonçait son projet de « contraindre
.e pape, aotechrist d'Ocoident, à ne plus prendre d'autre grade
{ue celui d'évèque de Rome, et à ne plus faire d'autres fonctions. >
La seconde décadence du Souverain Pontife devait commencer
l'année suivante et finir eu 1750, < comme c'est un fait connu
par tous ceux qui ont des oreilles pour entendre et qui com-
clque loul n'Éclatât. ■
1. Sous menace que " Ira grandes roue
Voir l'article du doclenr Landau.
2. Tous ces délails sont uiniiriiiés par l'article de la Ketme d«s r.tudet juitti,
ïù l'on ¥0(1 qoe le |irincipal inlennédiaire élail l'hébraïsanl Aleiandre Sosskind,
l'origine messine, mai» habitant à Aiusierdain, qui conserva l>eaucou[i de noies
ifl.doeaineDt» sur Lugalerie (ci-après, p. 284).
266 A. Dl B0ISLI8LB.
prennent les divines prophéties de Daniel et de saint Jean. >
Lui, Langalerie, se chargerait de diriger sur les États de TÉglùe
ou sur la France une bande de missionnaires évangéliques sou-
tenus par une armée de dix mille hommes. On le voit, tout œ
fatras était inspiré de V Accomplissement des prophéties de
Jurieu.
Les réfugiés se récusèrent, sauf un seul, ancien camisard, qui,
encore, était empêché d*agir par son grand âge ; les autres déda-
rèrent que la propagande évangélique ne pouvait ni ne devait se
faire par les armes.
Quelque dix mois plus tard, une rupture se produisit, qui
empira la situation de Langalerie et aggrava son état mental.
Vers le milieu d'août 1714, il quitta sa femme, ses enfants et
la cour de Cassel. Pour quels motifs? cela parait difficile à déter-
miner. On ne croira guère que ce fût par honte de la puUiciti
donnée aux amours de la marquise avec le landgrave leur hôte,
puisque le docteur Landau a vu dans son journal et dans sa cor-
respondance qu*il conserva toujours, et quand même, un fonds de
tendresse imperturbable pour M™' de Langalerie, qu'il lui écrivait
fréquemment, et qu'il recevait en retour des lettres et des envois
d'argent qui toujours arrivaient à point nommé dans les moments
d'extrême indigence ^ La brouille vint-elle, comme on le lit dans
une note du vieux d'Hozier ', de ce que Langalerie avait eu la pré-
tention de marier sa propre sœur èr son beau-flls Simiane? Ou, tout
simplement, l'incompatibilité d'humeur ne s'était-elle pas décla-
rée entre une femme à l'esprit acariâtre, brouillon et indépendant,
fière déjouer le rôle de favorite, et l'étrange personnage à qui
elle se trouvait associée depuis cinq ans par le lien conjugal? Ou
bien, enfin, Langalerie ne fut-il pas, de son côté, entraîné parle
besoin d'aventures et la manie de visions qui le menèrent rapi-
dement à une dernière déchéance^?
1. M. LaQdau cite plusieurs phrases comme celle-ci : f Je riens de rece?oir
de ma chère femme un petit secours que Dieu m'a gratuitement envoyé, et
qui est Tenu fort à propos, car je n'arois pas de quoi payer le port de cette
lettre, i
2. Cabinet des titres, dossier Gentil (n* 4112) du yoI. 159 dn CAsnnn: de
d'Hozier, fol. 10.
3. Oserai-je faire un rapprochement avec le fondateur dn saint-simonisme,
lui aussi noble ruiné et mendiant, aventurier et agioteur, ponssé par cette opi-
niâtreté de l'inventeur qui ramène tout, et à tout prix, à son rére, utopiste et
positif, un pied dans la réalité et l'antre dans la cliimère ?
LIS tTERTUESB BD UIQIFIS DE UUGALBBIB.
Langalerie et le faox Linanoe en Hollande.
De Cassel, LaDgalerie était venu en Hollande' pour provoquer
élan des communautés protestantes et des coroniunautés juives,
[otéresfler les unes à ses projets d'expédition contre la France et
contre Rome, les autres à ses visions de rétablissement du
royaume de Jérusalem*, et enfin fondre christianisme et judaïsme
une seule et même religion dont le Tout-Puissant lui avait
élé les principes. Son ardeur et celle de quelques adhérents de
première heure, tous juifs semble-l-îl, n'avaient guère eu de
i, lorsque le hasard amena sur le même théâtre, à Amster-
'.m, certain aventurier qui, depuis quelques années, se faisait
ippeler le comte ou le landgrave de Uoange, tout comme le
loéral impérial avec qtd nous avons vu que Langalerie avait
des relations suspectes en Italie.
Cet étrange personnage, d'origine française, venu des mêmes
riions du sud-ouest que Langalerie, et issu d'une familJe qui
avait des points de contact avec les Gentils, arborait un titre
bien connu de notre marquis. Voici, au juste, d'après les meil-
leures sources^, ce qu'il était et quelles aventures l'avaient
amené, lui aussi, en Hollaude; des marchands à qui il proposa
alors la constitution d'une compagnie de commerce demandèrent
les références d'usage à leurs correspondants de Genève, où il
disait avoir séjourné, et au lieutenant général de police de Paris,
M. d'Argenson, puisqu'il était Français de naissance : les
rponses ne tardèrent point à arriver. Le prétendu landgrave de
[. Le« Mémoires de 1743 lai foDl dire alore (p. 411-413) : « Le fameux con-
grès d'Ulrechl alloil finir, lorsque J'y passai. Je m'y arrêtai qDelqaes jours pour
solliciter les plénipotentiaires de l'empereur 1 me faire touclier quelque acompte
(les sommes que me devoit ce monarque; mais ce furent dee rocbers auiquels
j'adressai mes plaintes. J'y vis le marécbal d'Huxelles. qui me proposa de faire
ma paii avec la cour de Frani^e; mais je ne m'y âais pas : on n'auroil pas si
rsr.ilement oublié mon eipéditioo devant Turin. >
'2. Ce rélnbiissemenl aTait été annoncé d'après les prophétiss, en (TOT, dans
la Ditsertalion thtologiqte du professeur J. Meyer [iovrnul des Savanli,
aaai* 1708. p. i9î.l93],
3. Ravaisson.jtrcAtuM de lit DattilU. t. XI, p. 4(11-467; Lamberty, Mémoirei
pour ternir à VIMotre du XVIIl' siiele, t. IX (1735), p. 566 et suir.; Bibl. de
ITArMiial, dossiers Bistilm 1U58(i, IU6I6 et 10621 ; Journal de Verdun, novembre
ai6, p. 303-305.
268 i. OB BOI8L18LE.
Linange, priDce de l'Empire et de Cbabanais, etc., s'appelait de
ses vrais noms René-Godefroy-Louis-ErnestrJoseph Joumard,
mais d'ailleurs appartenait à une bonne famille qui, substitaée
depuis quelque cent ans aux anciens Tizon d'Ârgence, et plus
anciennement aux Achard ou Hachard^ prétendait, de ce dief,
se rattacher aux princes de Montpellier, aux comtes de Poitou et
à un Achard < très considéré dans Poitiers sous le règne de
ClotairelII, en l'an 680 de l'ère chrétienne, de même race que
saint Roch et saint Achard*. > De plus, René-Godefiroy, etc.,
se vantait de posséder des droits au duché d* Angoulême ^ paroe
que sa mère était une Taillefer de Barrière et qu'il y avait eu
des Taillefer comtes d'Angoulême depuis le milieu du ix* siècle
jusqu'à la fin du xm*.
Né vers 1677, destiné dans le principe à l'Église conmie cadet,
et admis au Noviciat de Saint-Sulpice, René-Godefroy avait
volé, dans ce séminaire, les papiers d'un missionnaire destiné à
révêché de Macao, et, sous les noms et titres de celui-ci, s'était
retiré à Genève pour y embrasser la religion calviniste, ou plu-
tôt pour tirer des subsides du consistoire de cette ville et de la
chambre des prosélytes, alors présidée par le marquis du Quesne.
Son esprit, sa politesse, sa mémoire imperturbable l'aidèrent à se
soutenir, jusqu'au jour où, mieux édifiés. Messieurs du consistoire,
sans autre éclat, mais en lui donnant quelque argent, le prièrent
d'aller chercher fortune ailleurs. On était alors aux environs
de 1706, en pleine guerre. Trop prudent pour rentrer en France,
le renégat se dirigea vers la Hollande, terre de prédilection des
aventuriers. Il y fit le métier d'agent secret et s'afifubla de toutes
1. La Mothe-Achard, citée plus loin, p. 273, est aujourd'hui un chef-liea de
canton du département de la Vendée, au nord-eftt des Sables.
2. Les Tizon ayant fini au commencement du xvu* siècle, le fils issa du
mariage (15 juillet 1608) de la dernière du nom avec Gaspard Joumard de la
Brangelie, gentilhomme de la chambre du roi Henri IV, releva le nom et les
prétentions de sa famille maternelle. Il laissa lui-même quatre fils : François,
qui épousa en 1683 Marguerite de Forges de la Rocheandry, d'où an fils qui se
maria avec une parente de M. d'Argenson ; Gabriel, qui se qualifiait chevalier
Joumard on Jaumard Tizon d'Argence, et fut tué sur le Fier le 24 août 1704
étant garde-marine depuis dix mois ; et un troisième enfin, Pierre. Voir, tu
Cabinet des titres, le vol. 605 des Carrés db d'Hozier et le dossier bien 9781
du Toi. 370. Notre faux Linange ne figure dans le dossier 7892 du vol. 310 des
Dossiers dleus, fol. 3, que parce que Bertin du Rocheret y a consigné ce que
disent de lui les Mémoires de 1743, p. 414; mais son état-civil est suffisam-
ment établi par les pièces du temps émanées de lui-même ou venues de la Bastille.
3. Voir, dans le dossier du vol. 370 des Dossiers bleus, fol. 14, un projet
de lettres patentes préparé sons le règne de Louis XV.
ISS IVENTDHBS DU MIBQDIS DE LINGILERIK. 20!)
9 de titres et de noms, prétendant être baron, comte, land-
fcve ou prince de Lînange (Leiningen) -Westerlwurg parce
qu'une fille de sa famille avait pris alliance dans cette bonne
maison rUénane'. Allant et venant sous ces faux noms de Hol-
lande en France, mais dénoncé pour quelque projet de descente
en Saintonge qu'il avait présenté aux États-Généraux et aux
réfugiés protestants, il fut arrêté par la police française en
décembre 1709', mis à la Dastille, facilement démasqué par
d'Argenson, et donna pour toute excuse qu'étant né sans bien,
puisque sou aîné même n'en possédait que fort peu, il avait pria
de grands titres pour s'attirer de la considération dans les paya
étrangers oii le libertinage le conduisait et pour y faire croire
que la situation qu'il avait en France le rendait propre à exécu-
ter les plus grandes entreprises, que ses compatriotes les gen-
tilshommes de Marennes l'attendaient avec impatience pour
secouer le joug, qu'il devait épouser l'héritière de Linange en
Lorraine, qu'il avait eu des entretiens secrets avec Marlborough,
avec le prince Eugène, etc. D'Argenson le considéra comme
dangereux quoique ses projets politiques ne présentassent aucune
valeur, et le retint cinq ans pleins à la Bastille, jusqu'au moment
où la paix eut été conclue. Dans cette prison, il avait fini par
renier le protestantisme, et même avait rédigé une démonstration
m mystère de la Transsubstantiation opérée dans le sacrement de
tticharistie et une interprétation en vers des Psaumes de David^
û sortit que le 16 novembre 1714. Son premier soin fut
i s'associer avec quatre ou cinq fripons pour proposer à de cré-
dules bourgeois, éblouis par les somptuosités de son installation
dans l'hôtel de Soissons*, la recherche de trésors qu'il prêten-
tt avoir été cachés dans telle ou telle maison. Ordre fut lancé
conséquence de le ramener à sa chambre de la Bastille ; mais
I
md de c<
n {/oarnal de fordun,
D'autres l« disaieal bAUrd d'ui
ire 1718, p. 349; cf. d-a|.rè3, p- 232).
OoieUe d' Anulerdarii, n' civ, correspondance de la Haye, 25 dpcemlre
Quelques ans de TourDa; disent que lea Francis oal trouvé le mojeo
A'y inleTer te corato de Linange et qu'il» l'onl conduit à la cour de France. 11
est, dit-on, toupçonnÈ d'avoir voulu favoriser l'invasion do comte de Merc;r
en Bourgogne, ■ M^me mpolion, venant de Bruxelles, dans la Gaiette de
ID5. Voir dans Dangeau el dans Saial-Siiaon le rédl de U lentaliTe
Ces jdices août dans un des dossiers de la Bastille.
Àtlle privilégié el respecté des aventuriers ou fripoDS de toulc prove-
270 A. DE BOI8LI8LI.
il se hâta de reprendre le chemin des pays protestants, et, dans
Tété de 1715, revenant de Hambourg, il parut de nouveau sur
la place d'Amsterdam ^ .
Langalerie s'j trouvait alors en position très critique.
D*une part, ses appels n'avaient pas eu plus de succès chez les
anglicans ou les presbytériens que parmi les calvinistes^ :
Le marquis de Langalerie écrivit une lettre circulaire aux églises
d'Angleterre, datée d'Amsterdam du 30 mars 4745, pour leur fisdre
part de ses prétendus projets, les invitant de les approuver par sous-
cription au bas de sa lettre, sous peine de c l'ire de TÉtemel; >
que, pour marque de leur union, il demande que les ministres et
prédicateurs d'Angleterre fassent mention de lui (marquis de Langa-
lerie) dans les prières publiques, de même que pour « D. Hierôme
Ximenez de Gisneros y Mendoza, » qu^il envoya dans la Grande-
Bretagne pour communiquer de bouche à « ses frères d'Angleterre >
les c mystiques > desseins qu'il devoit exécuter, lesquels, disoit-ii,
ne pouvoient pas manquer de réussir, puisque les « fondements » en
étoient « solides et inébranlables. » On voit, dans cette lettre impri-
mée en six pages, un langage tout à fait fanatique, puisque l'auteur
se met en parallèle avec Abel, Enoch, Abraham, Josué, Jaoob,
Joseph, Moïse, Gédéon, Samson, David, Samuel, etc.
De même que les juifs, sauf quelques exceptions, ne furent pas
assez simples pour livrer leur argent sur le seul espoir de ren-
trer dans Jérusalem, les protestants restèrent insensibles à la
promesse d'une prochaine « délivrance de l'Eglise militante'. »
D'autre part, M"'** de Langalerie, venue inopinément pour
rejoindre son mari en avril 1715, l'avait abandonné de nouveau,
après un séjour de quatre semaines dont on verra tout à l'heure
le motif probable ^ Puis, un Français, étudiant en théologie, qui
voyageait alors en Hollande et était possédé de la passion du
prosélytisme, entreprit de le ramener au catholicisme, et il s'en-
suivit, entre Langalerie et ce Guillot de Marcilly , toute une série
de conférences, par lettres ou par entretiens, qui ne firent que
surexciter la manie religieuse du général. D'ailleurs, il Caut
reconnaître autant de bonne foi et de naïveté chez l'un que chez
1. Journal de Verdun, septembre 1716, p. 245; Revue des éhules juivtt,
t XXVIII, p. 198. — A en croire les Mémoires de 1743, c'est alors que Linange
aurait pris du service eo MoscoTie sous le nom de Molac.
2. Journal de Verdun, article cité d'octobre 1716, p. 248«249.
3. Article du docteur Laodau.
4. Ci-après, p. 281.
r
LES AVENTURES DC HiBQria HE Li)TGALËBie. 271
l'autre. L'attention de Guillot de Marcilly avait été attirée sans
doute par uoe nouvelle plaquette surtîe de la plume de Laagale-
rie et par l'annonce d'un Journal chrétien qui devait achever
la justification de celui-ci' ; Langalerie accepta de grand cœur
la provocation de son ardent compatriote, se fil seconder de deux
pasteurs d'origine française, MM. Clairmoiit et d'Arbussy-, et
s'engagea à faire retour au catholicisme pour peu que son erreur
lui fût prouvée avec évidence; mais, au bout de deux mois,
la joute cessa, Guillot de Marcilly craignant de se faire une mau-
vaise affaire avec les protestants, et Langalerie déclarant que
ses engagements politiques avec une pulssauce étrangère ne lui
permettraient de redevenir catholique qu'en secret^.
Tel était l'état des choses, lorsque le hasard des aventures
amena le prétendu Linange en face de Langalerie'. Ils étaient
presque compatriotes; tout fier de pouvoir s'appuyer sur un per-
sonnage qui avait jadis rempli l'Europe de son nom, Linange
établit, par une « illustre généalogie^, » qu'il y avait parenté
entre eux, que même Us étaient oncle et neveu à la mode de Bre-
tagne", et, se trouvant tous deux bons protestants antipapistes,
1. Journal de Verdun, avril IT15, p. Mb. — 1^ plaquelle sTsit pour tilre :
Lettre de M— la tomlesie If. jV. ëerUe de Paris à son Excellence le général
marjuiê de Lanjalerie, le l'îjanvier 1715, lur ion changement de religion
el SUT quelguei points de controverses, avec la réponse de Sadite excellence
à ladite dame, en date du H Janvier I71â; Amsterdain, chez Olnude Jorilin;
annoacée dans la Gaiette d'Amsterdam, d* xvi. C'eal du pur radotage. Celle
fois, il dil avoir en quinze natifs pour abjurer le cathulicUme et cite à tort et
i travers les textes sacrts oii, dil-il, ■ ses jeui se sont usés. » — Le Journal
chrétien est dans les papiers de Langalerie actuellemenl conserrës i Vienne.
2. Le pasteur Antoine d'Arbussjr, issu d'une bonne famille de Kouergue, téfu'
g\t d'abord en Pri.te el i Utrecbt, arriva & Amsterdam en 1713, et j parvint à
lemériUil en 1735.
3. Gnillot de Uarcilly publia, quatre ans plus lard, avec dédicace au jeune
r(H Louis XV, une Relation hittoriqae el tliéologiqae d'un voyagé en Eollande
el autres provinces des Pays-Bas, dans laquelle on verra le détail des conver-
sations de l'aalear avtc M. le tnarquis de Langalerie sur les principaux points
de la religion. Les anecdoUs et descriptions de pays s'y trouvent ealremelées
avec la correspondance écbaugËe enUe l'auleur et le renégat à convertir. L'au-
teur des Mémoires de 1713 s'est servi de cette relation, et d'Arligny en a donné
de« «itraits dans les youveaai mémoires de critique el de Uttéralure (1749),
1. 1, p. Ï41-ÎM.
4. Journal de Verdun, octobre 1716, p. 245.
5. Soixante an» plus lard, La Cheniye des Bois disait, dans son DictUmnaire
d« la Noblesse, t. XII, col, 169 : t Nous avons no Taui mémoire de lui sur la
flutton de Linange. >
6. De plus, on a TU (ci-dessas, p. ^5] que Langalerie avait eu, en 1703-1705,
272 A. DE B0I8LI8LE.
ils s*associèrent, par un traité passé double le 8 octobre 1715,
pour entreprendre le renversement de « Tabominable, infâme et
déloyal monstre, Texécrable et infernal anthropophage nommé
le pape de Rome, et du barbare tribunal de l'Inquisition par lequel
il fait gémir, dans ses diaboliques fers, une grande partie do
genre humain. > Ils s'engageaient sur leur honneur, pour tonte
leur vie, à employer à cette tâche sacrée € les talents militaires
qu'ils avaient reçus de l'Éternel leur Dieu tout-puissant, » à
gagner à cette cause les puissances ennemies du monstre san-
guinaire, et à délivrer les peuples < si cruellement tourmentés en
leurs corps et si effroyablement tyrannisés en leurs consciences. >
Si les actes officiels de la constitution de cette croisade, sous le
titre de Théocratie du Verbe incarne S n'étaient parvenus
jusqu'à nous dans leur forme authentique, tels que les deux aven-
turiers les livrèrent alors à la publicité, l'esprit se refuserait à
admettre de pareilles divagations. Cependant avons-nous le
droit de tant nous étonner? Un éminent aliéniste ne renoon-
trait-il pas tout dernièrement certain prêtre < halluciné unilaté-
ralement > qui, sous l'inspiration de * voix divines, » proposait
à nos pouvoirs politiques et religieux de fonder une Théog&atis
universelle, où Dieu seul remplacerait tous les souverains?
€ Pour atteindre ce but, le gouvernement français devait créer
une chancellerie divine, et, naturellement, c'est le malade lui-
même qui occuperait le poste de chancelier divin. Il lui serait
alloué vingt mille francs d'appointements, etc.*. > Telle était
précisément la Théocratie de 1715, programme d'un État qui ne
devait reposer que sur la parole de Dieu, la Révélation*. Nul
des relations suspectes arec le vrai comte de Linange, qui commandiit lue
(Nirtie de Tannée da prince Eugène en Italie.
1. Il est étonnant que Voltaire, qui résida en Hollande peo après et y fréqneoti
le même monde que Langalerie, par exemple Limiers et M"* du Noyer, ii*ait |ms
parlé de cette manifestation de 1715 dans l'article Théocratie du DkiUmnain
philosophique. Les Mémoires de 1743 prétendent (p. 413} que Langalerie aTiit
préalablement soumis son système à Limiers. Voir ci-après, p. 2S4.
2. Bail, Leçons iur les maladies mentales, éd. 1890, p. 584.
3. L'auteur des Mémoires de 1743, assez bien informé en ce qui est de la
Théocratie, fait dire à son héros (p. 410-411) : « Je prétendois qu'il n'y eût
dans ma nouvelle république d'autre règle et d'autre loi que la seule parole de
Dieu prise à la lettre ; de sorte que je proscrirois prêtres, juges, aTOcals, gouh
mentaires, gloses, interprétations, et toutes les lois des hommes. Je nommoii
ce système : THéocRATiB ou Vehbb divix, prenant ces deux demie» tenues
pour des synonymes de Parole de Dieu, i
LBS IVRNTUKBS DIT
doute (jue le pauvre Langalerie ne fût de bonne foi;
Liaaoge ne saurait béuéficier de la u
Les deux fondateurs de la Théocratie se partagèreut les r
k l'uD les armées de terre de la Divine Providence, à l'autre les
armées navales; mais combien les titres de Langalerie, authen-
tiques ou à peu près, se trouvent éclipsés par ceux <
associé' 1
Nous, Philippe le Gentil, marquis de Langalerie, seigneur de la
HoUe-Cbarenle, de Biron' et de la ville, lerre et barounie de Ton-
na;-Boulonne, premier baron et lieutenant de roi de la province de
Saiotonge, ci-devant lieutenant général des armées de France et
chevalier de l'ordre rojal et militaire de Saint-Louis, ensuite général
de la cavalerie de l'empire d'Allemagne, puis Teld-maréchal de Saxe,
admiuislrateur de Kazogne, colonel de deux régimenls et général de
la cavalerie des troupes du grand-duché de Lithuanie, et présente-
ment, pr la Divine Providence, grand maréchal généralissime des
armées sur terre de la Théocratie du Verbe incarné, faisons aujour-
d'hui un vœu irrévocable el jurons devant l'Éternel notre Dieu que, le
plus promptement qu'il nous sera possible, nousprendrons les armes
et ferons continuellement la guerre contre rinTernal monstre nommé
le Pape de Rome, jusques à ce que le diabolique tribunal qui s'ap-
pelle l'Inquisition soit entièrement aboli dans tout l'univers.
Pareillement, nous, llené - Godefroy - Louis - Ernest > Joseph Le
Hachard, par la grâce de Dieu landgrave de Linango, prince de
l'Empire romain et de Ghabanois, duc d'Angelponl, de .Madagascar,
d'Ophtr el de l-'oros*, marquis de Lusignan, d'Oleron, de Balanzac,
de Pisani el de Rugé*. comte de la Mothe- Hachard, de Saujon, de
Hichecourt, d'Ansel cl d'Aspremonl, vicomte de Vaxin, de Morial et
d'Aubetcrre, premier baron de Guyenne et d'Angoumois, ci-devaut
chef d'escadre des armées navales de France'', puis capitaine général
1. Je lionne le* leiles d'aprâs la reprodaclion du recueil de Lambert;, t. IX,
p. 5TU-5TI, <|ui les a empruiilès aai imprimés du lemps dont parle le Journal
(i« Vfriiun. CouipareE l'article de Cli. du Welier, dan^ la brochure de U, de
Mont^ut, p. 19. — Je corrige quelques noina mal lus.
2. Uiron, en Siinlonge, commune de la Uollu^barente, tcdsK des La Uolt»-
Fonquè.
3. Voir ci-aprÈs, pi«7D-281.
f. Ces nami'ci uinl ceux de Icrrei cl fiers située dans les dèparlemenls
acUiels de la Cbarente el de la Veudée.
â. Je ne trouve dans les répertoires de notre marine d'autres Joamard el
Tizoo d'Argeuce que celui qui lut tué eu 1701 (ci-dessus, p, 268, note i) et nn
gard^marine qui serrit de 1Q93 à lti95.
Rbv. Histob. LXVI. 2- fasc. 18
274 i. DE BOISLISLE.
des mers et commandant suprême des armateurs indépendamment
établis dans les fies et ports de l'Amérique, de FAsie, de l'Afrique
et de TEurope, et présentement, aussi par la grâce de Dieu, grand
amiral généralissime des armées navales de ladite Théocratie; étant
embrasé du même zèle qui enflamme Son Excellence le susdit maré-
chal général noire cher oncle, voulant concourir de notre part en
tout ce qui nous est et sera possible à Texécution du pieux et chari-
table dessein ci-dessus expliqué, nous faisons aussi vœu irrévocable
et jurons devant TËternel notre Dieu que, le plus promptement que
nous le pourrons, nous prendrons les armes et ferons continuelle-
ment la guerre contre Tinfernal monstre nommé le Pape de Rome,
el que, tant que nous aurons un instant de vie, nous ne cesserons
de faire tous nos eiTorts pour que le diabolique tribunal qu'on appelle
Inquisition soit aboli dans tout Tunivers.
De plus, nous, grand maréchal général, et nous, grand amind
généralissime, reconnoissons devant TÉternel notre Dieu que Son
adorable Majesté veut que nous soyons dès à présent entre nous, et
toujours sans cesse à Tavenir, étroitement unis ensemble par une
amitié à jamais inviolable et par une concorde que rien ne soit
capable d'altérer...
U y eut plus encore.
Pour sa part, S. A. S. le prétendu landgrave de Linange
annonça par une déclaration publique^ que « les peuples des
îles de TAngelpont, Madagascar et Ophir, et un grand nombre
d'armateurs européens établis depuis longtemps dans ces îles et
dans plusieurs autres de TAmérique, de TAsie et de l'Âfirique >
s*étaient mis sous son obéissance et lui avaient conféré le titre de
roi avec la suprême autorité ; que, seul, il aurait le droit et le poor
voir de faire transporter où bon lui semblerait la prodigieuse
quantité de richesses dont ces peuples et armateurs étaient en
possession, et que, par amitié pour les Hollandais, il était dis-
posé à céder ce monopole merveilleux à telle compagnie qu'ils
voudraient former, ne faisant de réserve que pour le cas où la
guerre éclaterait entre lui et une puissance non protestante, et où
ses propres vaisseaux feraient des captures.
Ledit prince s'engagera de protéger ladite compagnie et de Tassis-
1. Recueil Lainberty, t. IX, p. 566-568, manifeste intitulé : Réponse à ta pn-
position qu'on a faite àS.A.S, Mgr le landgrave de Linange, prince de f J?«-
pire et de Chabanois, etc, pour l'éiablissemeni d'une compagnie de Tin-
gelpont.
LES ITBTmBBS DIT MIBQÏÏIR Di; UlfGâLERIE. 375
ter avec toute la puissance nécessaire, aliD d'empêcher qu'il ne soit
en n'en contrevenu au conlraL que ledit prince fera avec ladil« com-
pagnie, qui conviendra dès à présent avec ledit prince d'un tarif de
ce qu'elle devra pajer des effets, fruits et denrées et aulres choses
qu'elle prendra en échange de chaque chose qu'elle portera d'Europe
dans lesdites iles; et le prince promettra de ne faire aucun change-
ment dans ledit tarif pendant trcole années.
Ledit prince, étant le fondateur, protecteur et chef de ladite com-
pagnie, se réserve, un tiers de plus de la partie de la répartition qui
se fera tous les ans, que n'eu avoit dans la compagnie des Indes,
comme membre d'icelle, le feu roi de la Grande-Bretagne Guillaume
de Nassau, de très glorieuse mémoire.
De plus, ledit prince se réserve aussi de faire venir pour son
compte toutes sortes de munlUons de guerre, avec des conditions
expresses que tous les vaisseaux qu'il envolera pour cela ne seront
chargés d'aucune autre marchandise...
SI ladite compagnie l^it des avances audit prince, il s'engagera de
payer six pour cent d'intérêt jusqu'à l'entier payement des sommes
il lui avancées.
Et quand le prince donnera en payement à ladite compagnie des
efl'els, fruits ou denrées provenant des domaines à lui appartenant,
elle ne recevra qu'à cent pour cent de profil pour elle.
Il est prêt à contracter sur ce pied-là avec ladite compagnie dès
que LL. HH. PP. les Étals-Uénéraux des sept provinces y auront
donné leur consentement.
Ceci était l'apport particulier de Linange; mais, pour com-
mencer l'exécution du grand dessein de la 'l'iiéocratie, nos deux i
aventuriers eurent la bonne fortune de rencontrer un représen-
tant de la puissance la mieux qualifiée qu'ils pussent souhaiter '
en cette circonstance.
Certain Turc, du nom d'Osman-aga', venait d'arriver à la
Haye' avec une créance du sultan Ahmed III et une mission du
tapitan-pacha ou grand amiral de la flotte ottomane pour obte-
nir quelque dédommagement d'une prise faite par la marine hol-
I. E«t-ce I ' Osman -dgn, premier écujer >lu suItaD et kiaya du panA-i'air
UebciDRl-Pacha, qui, h ta auile de la disgrdce de ce minlatre (''0 norembre
\7M), a*ait 6lé enfermé aux gc|>l-Tours et condamné à pajer une très %io*se
(oramc d'argent, «insi que son rrureAli-a(!a, tténéral dea «pahia (Gasetle d'Àjru-
(trdam, l7t2,D* vu)'' Dan» l« Iritité avec les deux aveoluriers, Osman se qtia-
lîfie pacha des spahis et de lu mer ; ci-après, p. 277.
S. Ibid., 1715, n* xcvni. Cf. le récit dea Htinotra de 1743, p. 415-418.
i
276 1. DB B01SLI8LB.
landaise sur les Arabes ^ Or, à cette époque, la Turquie était en
guerre avec les puissances catholiques, ou du moins la déclara-
tion de guerre lancée le 8 septembre 1714 contre Venise, puis
les hostilités ouvertes en Morée contre les troupes alliées de cette
république, de Tordre de Malte et du pape Clément XI, rendaient
imminente une rupture de la paix de Carlowitz entre Vienne et
Constantinople. De part et d'autre on se préparait à une lutte
nouvelle : les Turcs, outre leur puissante flotte, comptaient diri-
ger trois armées sur la Dalmatie, la Hongi*ieetla Pologne; l'em-
pereur allait bientôt être en mesure de leur opposer cent soixante-
douze mille hommes sous la bannière victorieuse du prince
Eugène. On a vu plus haut que, en 1712 ou 1713, Langalerie
avait proposé au czar Pierre le Grand de fomenter ou de soutenir
une diversion des Monténégrins contre la Turquie; il ne lui en
coûta pas plus, changeant du tout au tout son orientation, d'of-
frir ses services à la Turquie contre le catholicisme représenté
par l'empereur Joseph et le pape Clément XL Conunententra-t-il
en relation avec l'agent Osman ; comment celui-ci se crut-il en
droit de traiter, sincèrement ou non, au nom de son maître,
avec deux aventuriers, l'un homme à chimères, l'autre repris de
justice, et à conclure avec eux un pacte diplomatique tout aussi
solennel de formes et gros de conséquences que s'ils eussent été,
lui un plénipotentiaire dûment accrédité, eux des puissances
régulières et de premier rang? De quel côté fut-on dupé? Ce
sont là des dessous que les biographes allemands eux-mêmes ne
sont pas parvenus à pénétrer*. Toujours est-il que l'acte diplo-
matique existe, qu'il fut divulgué sur le moment même, sans
qu'on parût, il est vrai, en faire trop de cas, mais aussi sans que
personne en contestât l'authenticité, et nous en trouvons le texte
à peu près partout ^ : si bien même qu'ici il suflira d'en faire un
résumé.
1. Mémoires de Lamberty, t. IX, p. 565-566.
2. fin tout cas, Boaneval n'était pour rieo dans Taffaire, paisqall ne se fil
musulman que quinze ans plus tard.
3. Il ne resta pas inconnu dans le temps, comme l'ont cm la plupart des bio-
graphes modernes de Langalerie, ou du moins il fut divulgué dès qoe les deux
aTenturiers, avec leurs papiers, tombèrent au pouvoir de la police impériale :
Journal de Dangeau, t. XVl, p., 404; Journal de Jean Buvat, t. I, p. 16S-170.
Notre Mercure galant le publia dès août 1716, p. 231-238, et le Journal de
Verdun trois mois après (novembre 1716, p. 305-311); c'est là que poreot
le prendre plus tard Lamberty (Mémoêres, t. IX, p. 575-578} et Fauteor des
1 DU HillQUIS DE Ll^GlLBBIE.
Osmao-bacba, aga des spahis et de la mer, se disant aiiil>as-
sadeur extraordinaire du sultan, acceptait les offres du gèaèra-
lissime et du grand amiral de la Théocratie de faire que l'Otto-
mau devînt maître de Rome par uu niojeD infaillible : moyeDDant
quoi il leur promettait la réception dans CoDstautioople et une
installation « la plus noble et la plus digne de leur rang et
leur mérite; > eux et leur suite ne seraient pas seulement assurés
de toute « liberté de conscience, » mais aussi défrayés de tout
entretien pendant six années consécutives, et ils auraient le pou-
Toirde lever et préparer un corps do dii mille hommes de cavale-
rie avec une flotte de cinquante vaisseaux «capitaux* de guerre,
d'enrôler à leur service même les esclaves chrétiens, et de prendre
sous leur juridicUon tous les chrétiens ou juifs qui voudraient
venir s'établiren Turquie, avec la pleine liberté et l'exercice public
de leur religion, sans payeraucun tribut. « Aussitôt queleGrand
Seigneur sera maître de Rome, il jure et promet, par Mahomet
notre saint prophète, de donner et céder auxdits seigneurs, sans
division, certaines îles de la mer Méditerranée et les provinces
stipulées dans leur convention particulière, et de les leur céder
en toute souveraineté, et même de les en reconnoitre rois en
sorte que leurs descendants et héritiers en jouiront à perpétuité
pour y régner indépendamment de toute puissance. »
D'ailleurs, le sultan prendra Langalerie et Linange sous sa
irotection, les fera rentrer dans leurs biens de France ou d'Eu-
n ipe, et les protégera, ainsi que leur expédition, contre toute entre-
prise des < empereurs, rois, princes et républiques de ses amis. *
Cet acte diplomatique, que nous donnons pour ce qu'il vaut,
ayant été signé et scellé à la Haye « le iô du mois de zilhezzi
l'annéâ 1128 de l'hégire', » puis translaté en arabe par un
•Ires spocryphes de 1743 [p. 424-430). De noire temps, HM. de Weber,
Kaufman, àr. Rolcnhan l'ont de nouveau publié-
1 . Le mais de UllieL:J ou »ilhidjé, plus correctement iovt-ki4ièh, est le der-
nier du l'auDée musulmane el (correspond pour nous, en année ordinaire, à
novembre-décembre. D'autre pari, l'année 1I2S de l'hégire nous placerait en
décembre 1716, ce qui eatau^sl inadmissible que les mlttésinies 1 108, 1123, 1I7S,
qu'on trouve daes certaines Iranslalions du Iraîlë, puisque nous Terrons toal i
l'heure que ao« aventurier», i la date de décembre 1716, éUieat au fond des
prisons autricblennes. Il faut dono supposer que le traité original portait la date
de 1 137, mal lue par les copistes ; et ainsi, puisque nons trouvons dans Ham-
mer (llUtoire de l'empire ottoman, 1. XIII, p. !77) que t G silhidjé = 3 dé-
eoiubre 1715, • le Ib nous mellrsit au 12, el dod pas au 18, comme l'ont dit
qDAlqDes auteurs, encore moins lu ib févrtei ou an 15 mars suivant (et. Wils-
278 1. DB BOISLISLE.
orientaliste de LeydeS Osman-aga l'emporta trois mois plos
tard, en reprenant le chemin de Constantinople*. Le soumit-il
réellement à son maître ? Je ne saurais le dire ; mais les événe-
ments furent immédiatement décisifs, soit pour nos deux aventu-
riers, soit pour la Turquie elle-même, comme on le verra tout k
rheure, et le sultan ne manqua pas, l'année suivante, de désa-
vouer son plénipotentiaire^.
Au milieu d'articles incohérents, on se rend assez dair^nent
compte des visées des contractants français. Ils n'entraient pas
au service du sultan, ce qui eût comporté une apostasie : c'était
plutôt une alliance offensive en vue de diversions analogues à
celles des Rakoczy et des Tœkoely ; mais sur quoi l'appuyaient-ils?
Ici, je me risquerai, par exception, à reproduire une ou deax
pages des Méywires de 1743^ où se marque nettement la cod-
nexité du traité turc avec les projets chimériques de Linange
sur Madagascar et sur les pirates de la mer des Indes :
Le traité ne faisoit aucune mention d'un autre projet que nous
avions, qui nous auroit efncacement servi à réussir dans oeloî
qui y est exprimé. Nous nous proposions de faire sentir au Grand
Seigneur la nécessité de nous donner d'abord une des îles do TAr-
chipel où il y eût un bon port, afln d'y recevoir les flibustiers et les
corsaires dont fourmilloit alors Tile de Madagascar. Nous avions
parole de ces gens-là qu'aussitôt qu'ils auroient reçu leur passeport
do la Porte, ils s'y rendroient en toute diligence avec une flotte de
soixante vaisseaux armés en guerre et chargés do la meilleure partie
de leurs immenses trésors. Us en dévoient laisser le reste dans cette
île et une partie de leurs camarades^ afin d'établir et de soutenir le
commerce entre ce pays et notre nouvel État. Cet expédient levoit
leofeld, VergleichungS'Tabellen). — On pourrait se demander si cette erreor
de datation de milléâime ne ferait pas douter que l'acte ait été réellement dressé
par Osman-aga ; mais elle peut aussi venir soit du traducteur de la minote ori-
ginale, soit des copistes venus après lui.
1. Lamberty, t. LX, p. 575. Les Mémoires de 1743 disent (p. 430) que l'ori-
ginal avait été dressé en langue italienne, et que la traduction donnée dans les
journaux fut fort inexacte, par ignorance ou par malice.
2. Après avoir eu plusieurs conférences avec les régents et avoir rendu visite
au résident impérial, il partit vers le 25 mars {Gazette d'Anuterdam, I7t6,
n** XIX et xxvi). Le mois précédent, on avait ordonné un jour de jeune et
des prières solennelles à Constantinople pour obtenir l'appui de Mahomet
contre la Chrétienté {ibid., Extr. xviii).
3. Lamberty, t. X, année 1717, p. 258-260.
4. P. 431-433.
î iTEUTCSES DD MIBQDIS Di! UNGILEBIE. 279
loutes les difflcullés qu'auroit pu former le Grand Seigneur sur les
grandes avances qu'il auroil dû faire pour Iravailler à l'heureuse
issue de notre dessein, et, par là, nous nous serions trouvés en état
d'y suppléer. Nous comptions sur plus de vingt mille braves gens
que ces corsaires de loutes nations dévoient nous amener. Cétoîent
là les fruits des négociations que le comte de Linange avoit heureu-
sement terminées avec eux pendant son séjour à Pétershourg et
à Arckangel, Geuit qui savent combien sont riches et nombreux ces
corsaires comprennent aisément que leur union nous auroit rendus
formidables. Osman-bassa n^étoil point initié dans ce mystère; nous
nous réservions de le développer à Sa Hautesse, qui n'auroil pas
manqué d'en saisir tous \ea avantages.
Nous avions encore un dessein qui nous auroit procuré des
richesses immenses : c'étoit de nous emparer du trésor de l'église de
LorelUi, et, de la f^çon dont il étoil concerté, nous y aurions inikil-
liblenient réussi...
Les écrivains étrangers ont insisté particulièrement sur le
projet d'établissemeut à Madagascar : l'un d'eux a même raconté
très sérieusement qu'il fut mis à exécution avec succès, que le
général français trôna comme empereur dans la grande île, qu'il
ne fut forcé d'en revenir qu'au bout d'un assez long temps, etc.';
un autre l'a comparé au Messin Théodore de Neuhof qui, vingt
ans plus tard, se fit roi de Corse, et l'on a estimé que Langalerie,
n'eût été sa folie des grandeurs, aurait pu réussir tout aussi bien...
C'est absolument méconnaître et le caractère cbimèrique de toutes
ses hallucinations, et même l'état des choses à cette époque. Sans
doute un vent de colonisatiou soufflait, non seulement sur la
France, qui allait bientôt mettre le Mississipi en actions, mais
aussi sur l'Angleterre, d'où partirent en 1716 les premiers occu-
pants de l'Acadie*, sur la Prusse, où le chevalier Fraser' avait
apporté des projets qui paraissent avoir intéresséle roi Frédéric',
sur la Suède enfin, où l'on croit que, précisément, le barou de
GœrXz. appelé par Charles XII à la restauration de ses finances,
t. Arilele de ['lUuitrirte-Zellunç de New-Tork, reproduit el analjKè dans la
brocbure Holenhan. p. 39-40. Vojm ci-dessus, p. 11.
2. Gatette iFÀmtterdam, 1T1G, Bilr. liimii.
3. Fils du médecin de Charles II d'Anglel^rre et beau-frère de lord Peler-
borough.
4. En IT'B, on pcrWail de Berlin à la Catulle d'Amsterdam {Eilr. kxuilI qat
le roi avait résolu de rétablir des relations commerciales arec l'Aïîe et mfime
l'Afrique, et que, pour cet effet, il enverrait uae ambasaade en Perte.
280 1. DE BOISUSLB.
eut quelque idée de reprendre pour son propre compte le projet
de nos deux aventuriers et qu*il fit étudier la question parlkni.de
Cronstrom et de Mendal ^ ; mais Frédéric était mort, et Charles Xn
ne se trouvait guère en mesure de porter ses visées vers des aven-
tures lointaines, alors surtout que Madagascar appartenait ii>
tuellement à la France.
En fait, nous avions renoncé à l'exploitation des côtes depuis
les désastres subis par nos colons en 1671 et 1672, et Louis XIV
n*avait maintenu qu'une souveraineté nominale par sa dédara-
tion de 1686^. A la place des postes français, quelques centaines
d'écumeurs cosmopolites étaient venus faire de Madagascar
comme leur port d'attache, d'où ils s'élançaient tantôt dans la
mer Rouge ou dans la mer des Indes, tantôt vers les étabUss^
ments espagnols de la mer du Sud, et ils y venaient rapporter
leur immense butin : tel le fameux Avery, dont les forces et Tao-
dace avaient fini par en imposer même à la compagnie anglaise
des Indes-Orientales 3.
Au cours de ses pérégrinations aventureuses, Linange avait
pu entendre parler des hardies prouesses de ces flibustiers, fo^
bans et pirates; il ne lui en coûta pas plus de grossir jusqu'à on
chiffre fabuleux leur très petit nombre, que de persuader à Lan-
galerie et d'annoncer à toute l'Europe que € cent mille flibus-
tiers > leur offraient à tous deux de venir s'installer sous leurs
ordres dans Tîle de l'Archipel que donnerait le Grand Seigneur,
et d'établir ainsi, entre la Méditerranée et la mer des Indes, ou
même la mer Blanche*, le va-et-vient d'une puissance € formi-
dable » par ses innombrables vaisseaux et par ses énormes
réserves de butin. L'Angelpont et Ophir, de légendaire mémoire,
1. Je dois cette indication à l'obligeance de mon confrère M. Grandidier,
l'explorateur et l'historien de Madagascar.
2. Lors<]ue, en 1776, Taventurier hongrois Beniowski se fit proclamer roi des
SakalaTOà dans le kabar du 17 septembre, ce ne fnt qa'après s'être régulière*
ment démis des fonctions que le roi de France lai a?ait conférées trois ans
auparavant.
3. Voir Ch. Johnson, Histoire des pirates anglais depuis leur éiablissemeiit
dans rHe de ta Providence^ trad. 17Î6, p. 1-32, etc. Cf., en 1709, la dodU
d'Amsterdam, Exir. xlvii et xcvii, et la Gazette de Le^dCy n* 97; en 1711, I>
Gazette de Leyde. n* 54 et n* 90; en 1712, iWd.. n» 14: en 1713, la Gûsette
dÀmsterdam, n* i.xvi.
4. Par un décret de Pierre le i^rand, en 1713, Arckangel avait été dépossédé
du ct^mmerro de rei|H>rlation russe au profit de Pétersbourg. Les Hoilandiiset
les Anglais y envoyaient de nombreux vaisseaux.
LES ITEIITCHES DU HIHQUIS DE LtRGllEKrS.
compIétaîeDt la prestigieux programme, auquel, comme le dit un
gazetier du temps, il ue manquait qu'une carte géographique
indiquant la situation de ces fabuleuses contrées'.
Mais, allant au plus pressé, c'est-à-dire à la croisade contre le
papisme concertée avec Osman-aga, et surtout au pillage des tré-
sors accumulés par la piété des catholiques à Lorette ou dans les
autres sanctuaires italiens, Langalerie chercha sur le littoral de la
mer du Nord un paya où il pût former le corps de dix ou vingt
mille hommes qui était nécessaire pour entrer en campagne
et pour seconder par les armes l'actio!) émancipatrice des
ministres de rEvangile-. H jeta son dévolu sur le plat pays situé
entre Gliicksladt et Altona, et, k la fin du printemps de 1716, il
proposa au roi Frédéric IV de lui permettre d'y établir un camp
et de coopérer ainsi à la grande œuvre de « l'avancement du règne
de Jésus-Christ'. » On se doute de l'accueil que le résident danois
et son maître, au plus fort de la lutte suprême où ils étaient enga-
gés, ainsi que la Prusse, contre Charles XII, purent faire à ces
propositions chimériques; mais les détails nous manquent.
Cependant Langalerie songeait toujours à sa femme : quoiqu'il
sût qu'elle était enceinte, et sans tenir compte de ce détail *, il lui
attribuait un rôle dans ses grands projets. Au commencement
de 1716. elle venait de quitter Cassel pour Paris, et le marquis
avait quelque raison de craindre que ses propres visions et sa
folie ne fussent dévoilées à Madame et au Régent son fils. A
Madame, il adressa un exemplaire de son « catéchisme, > et l'on
Kl. Oi
1. On peol voir dans \ea Disserlatlofu d'Adrien Rdand (1707} et dans le
dietionnoire géographique de Bruxen do la Uartinîire. I. VI (1736),
6^2, qnelJcs étaient lej opinions diverses sur Ophir; mais J'y ai raine-
menl cbercbé l'Angelpont. E«l-ce unn Torme francisée du nom grec d'Arckan-
i;el, ArchangelùpoUif Baudrand érriTsit : l'Archangel. Quant k Feras, qni
bguro ci-dea«us, p. 273, dane les litres de Linange, ne serail-ee pas l'arcbipel
>is des PèrDë?
signalé duns les papiers d'Antoine Court un eiemplaire Imprimé d'un
ijel dn général marquis de t^nKalerie, prosélyte, de leTer dix mille hnmaies
CKorter Tingl on trente ministres dans les États papistes pour y faire
iher l'ËTatigile et être en étal de «e défendre, etc. > {BitlUim de la SoeUlè
\ThitMre du protestantisme français, t. XI, ISG2, p. 92).
T.etire du l'A mai HIG au roi, et négociation avec son résident de la Haye,
par Cb. de Weber. Dans la IcUre, Langalerie annonçait qu'il propase-
mx puissance» maritimes nne i élrolle amilié, alliance et confédération
contribuer ensemble à l'aTénement du régne de Jésus^^hrisl. i
I. Dans son journal cité par le docteur Landau, il écrivait, A la dalf des
M 27 novembre 1715 : i Voilà douze jours que ma femme me bt pari de ton
Le public savait à quoi s'en Icnir.
282 A. DE BOI8LI8LE.
peut penser comment cet envoi fut reçu^ Au Régent, il écrivit,
en son nom et au nom de Linange, comme le faisaient alors cer-
tains souverains protestants, que la France, maintenant assurée
de la paix, eût à relâcher leurs frères les religionnaires détenus
sur les galères^. A M°*" de Langalerie, le 19 mars 1716, il
adressa un double du traité Osman, en la sommant de venir le
rejoindre lorsque la flotte de la Théocratie longerait les côtes du
Languedoc ou de la Provence, afin qu'il pût la remettre, avec
ses enfants, aux mains du sultan, « pour gage des paroles don-
nées par lui, > et qu'il reprit possession des effets et < machines de
guerre » laissés sous sa garde à Cassel, notamment d*un modèle
d'artillerie de son invention^. Sinon, disait-il, € je suis contraint
de vous répudier et de me remarier à la première venue. J'ai déjà
pris une concubine, et, marque que je ne mens pas, voici ci-jointe
la convention que j'ai faite avec elle il y a trois jours. Le marché
se fit à l'instant que j'eus appris, par la troisième lettre de mon
adjudant, que vous ne vouliez pas absolument me venir joindre. »
Le fait était vrai : pour se mieux donner des allures de vrais
souverains, souverains peu fortunés, il est vrai, et dotés d'une
médiocre liste civile, Langalerie et Linange venaient de s'atta-
cher par un contrat authentique, et moyennant la promesse d'une
pension annuelle de quatre cents florins chacune, deux péron-
nelles hollandaises qui, à défaut de la marquise et de sa nièce
(celle-ci refusait de venir épouser Linange), les serviraient « en
tout ce qu'il leur plairait dans leurs besoins tant nocturnes que
1. Madame écrit à la raugrave Louifte, le 29 octobre 1715 : c Dieo seal sait
qui m'a envoyé ce catéchisme; car la lettre n'est pas signée. Je mlmagiiie
qa'll Tient de Langalerie ; mais il me semble qa'il n'est pas bien réfléchi. Qae
peut-on a^oir de meilleur que le catéchisme d'HeideU>erg? » (Éd. Stuttgart,
t. CVII, p. 662; trad. Jaeglé, t. II, p. 241.)
2. Lettre de la (in de février t716 mentionnée dans l'autre épttre dont il va
être parlé. En 1715 et 1716, précisément, le marquis de Rochegnde, agent
général des protestants français à l'étranger, alla, au nom de la Suisse, du
landgrave de Hesse-Cassel et de la reine de Prusse, solliciter le roi Georges
d'Angleterre pour qu'il intervint auprès du régent de France et agit par une
énergique pression en ce sens.
3. Cette lettre, datée d'Amsterdam, fut communiquée par M"* de Langalerie
aux gazettes, et Lamberty l'a reproduite in extenso dans son tome IX, p. 579-
582. Les Mémoires apocryphes racontent (p. 422) quMl lui avait écrit, an
moment de la signature du traité Osman, de venir partager sa félicité, ou an
moins de lui envoyer ses deux fils, mais qu'elle ne répondit point, c Qu'est-ce
qu'une femme, lorsque, conduite par une passion effrénée, elle donne dans des
travers si aff'reux 1 »
journaliers, » Tout était prévu, jusqu'aux enfants qui pourraient
naître du concubinage, et que les deux aventuriers se réservaient
d'élever eux-mêmes. L'engagement devait entrer en exécution
1" mai suivant, si M™" de Langalerie n'était alors « revenue
de son égarement > pour ■ partager avec son mari et son neveu
la sainte, brillante et glorieuse fortune que Dieu venait de leur
accorder par sa grâce*. *
tCe c'était qu'un prélude à l'organisation du grand état-major
et de la maison des princes de la Tliéocratie. Tout d'abord
JB*éU)it-U pas essentiel que les deux cbefs, a&n de mieux repré-
senter la sainte Trinité, s'adjoignissent en tiers un ■ grand séné-
chal chargé du commandement tant militaire que politique? » Ils
trouvèrent pour jouer ce rôle, que dis-jeî pour en payer Thon-
neur au prix de douze mille florins, un émigré français de bonne
fetnille^, Henri Roisbelland ou Boisbellaud de Montassier, sei-
gneur de Lille-Marais, qui possédait un régiment d'infeuterie
au service des Etats-Généraui% avait fait les campagnes d'Es-
pagne comme major général, et avait été revêtu, en 1710, du
grade de général-major*. Et les tmis cbefe suprêmes, ■ se regar-
dant dès k présent, et pour toute leur vie, quoique foibles instru-
ments, comme des vases d'élection chargés en unité du gou-
vernement de la Théocratie du Verbe incarné, en sorte qu'ils
représentent tous trois la sainte Trinité^, • s'engagent par un
pacte solennel à < agir tous les trois ensemble de concert dans un
même cœur et dans un même esprit, en répondant le plus sainte-
ment qu'il leur sera possible, et d'une manière la plus convenable,
& leur commune et divine TOcalion^ »
Leur suite devait être, non seulement respectable, mais pom-
peuse, au moins sur le papier^ : un adjudant général et douze
I. Le texte dii cnnlrut [lariit, sept moi» plus tard, dans le Journal de
rertlvn, novembre ITIG, p. 311-313. il est ausai dans le recueil Laraberly.
p. 578.579.
3. Enwre an SnlntangeolH.
3. Le régimenl dans lequel le romancier Grandcbanip était en 1703 (ei-dea-
»as, p. 7. noie I).
L Ce personnage manque dans la seconde édilioo de ta France proleslante.
i. Itemedes t^linies juteei, t, XXVIII, p. 209.
G. Traite du !li avril 1716, reproduit dans le recueil Lamberly, I. IX,
p. ^7î-575.
7. I Elut de la maison de la Tlitocralie t dressa i Amalerdani le 9 mai 1716,
relTOUvé plus Urd dans les itapiers de Sâsskind, et publié en 1391 dans la
Mme dei étudeê juivei, p. 209-210.
284 1. DR BOI8LI8LE.
adjudants, un chancelier et six secrétaires» six pages, dix-
huit valets de pied à la livrée de la Théocratie, six cochers, six
postillons et six palefreniers, une compagnie de cent gardes, un
suprême maître d'hôtel et six maîtres d'hôtel ordinaires, autaot
de cuisiniers, vingt-quatre marmitons, etc., etc.
Quelques charges même eurent des titulaires : un Suisse du
nom de Meyer, comme secrétaire; un juif portugais, Manassè
Mendez ou Da Costa, comme consul, et, comme résident de la
Théocratie à la Haye, Thistorien français Limiers', qui achevait
alors la France sous le règne de Louis XIV. Les relations
avec la presse furent même confiées à une Française, M**' Do-
noyer, qui rédigeait depuis deux ans, à Amsterdam, la Quintes^
sence des nouvelles historiques, critiques et politiques'^.
Enfin il y avait un ordre de chevalerie, avec la devise : Sic ione
SUPERBI PBRiBUNT, et dont les insignes, dit-on, se voient encore
à Vienne, dans les archives de la Théocratie.
Il semblerait que tant d'extravagances n'eussent dû exciter que
de l'indifiérence ou de la pitié parmi les Hollandais à l'esprit
positif; cependant les croyants, les dupes furent relativement
nombreux, généreux même. A l'exemple du général Lille-Marais
payant douze mille fiorins son titre de grand sénéchal, le juif mes-
sin Sùsskind, qui était, paraît-il, un érudit hébraïsant et que Laoga-
lerie avait trouvé secrétaire dans la maison de Berend Lehman',
céda une créance de vingt-cinq mille fiorins sur son ancien patronS
1. c Uo certain Ltnier, » daos le texte de Ch. de Weber. Les Mémoires apo-
cryphes disent (p. 413-414) : c Ayant mis au net et perfectionné le système de
mon mieux, je le proposai à un homme de lettres qui méritoit plus de la fo^
tune qu'elle ne lui accordoit. Il a?oit beaucoup de génie et un esprit coltivé
par les belles sciences : il le trouva de son goût et y applaudit. Il ne me fat
pas si aisé de le faire approuver de la nation juive. »
2. Gazette en français qui avait eu pour premier directeur an disciple de
Spinosa, et que M"* Dunoyer, bien connue pour ses Lettres galantes et pour
l'hospitalité qu'elle donna à Voltaire, continua jusqu'en 1730.
3. Ci-dessus, p. 42. Deux frères du nom de Behrens, banquiers juifs à Hanom,
firent banqueroute quelques années plus tard {Mercure d'avril 1721, p. 183].^
M. Kaufmau, qui a trouvé les éléments de son article de la Rewte des éttàis
juives dans les papiers saisis sur Siisskind et transportés à Vienne (Bibliothèque
impériale et royale, ms. 11263), comme on le verra tout à l'heure, s'est fait iUQ-
sion sur la valeur de son personnage. Peut-être était-ce réellement un émdil en
fait de livres saints; mais son rôle dans l'entreprise de la Théocratie fut celai
d'un niais, sinon d'un fripon. M. Kaufman ne veut pas croire non plus qne ses
coreligionnaires aient contribué à l'entreprise et fourni des fonds.
4. Revue des études juives, p. 210, transport du 6 mai 1716.
tBS 1TE!(TÏÏBE3 DD MiagCtS DE URGILRRIË. 285
et. soit fanatisme religieux, soit simple spéculation, un certain
nombre d'adhérents se présentèrent aux guichets de la Théocratie,
sans avoir une idée bien nette, cela est évident, ni du but visé,
DÎ des ressources et des moyens dont on faisait état, ou croyant
|>eut-^tre que, réellement, le roi de Prussa et le Grand Seigneur
avaient donné leur appui au projet. Aucun ne se demandait si les
îles promises étaient « moins fabuleuses que celle que Ptolémée
donoe comme inaccessible et qui se dérobe toujours à la rue des
pilotes qui la cherchent'. »
Malheureusement, les gazettes ne dévoilèrent que trop tard le
fond des choses, alors que le mal était fait et la confusion des
aventuriers consommée.
Ceux-ci menaient déjà grand train aux dépens de leurs com-
Ïanditaires et commençaient à préparer l'expédition ' :
Ou fut fort surpris, au mois d'arril tUfî, de voir le marquis et
D prétendu neveu en magnifiques équipages. On savoil qu'aupa-
ravant ils ne subsisloient que de charités : Linage [sic] n'étoil arrivé
qa'avec un bonnet a la polouoise et un méchant habit de friperie;
OD le vil enâuile suivi do laquais proprement velus, un plumet jaune
sur le chapeau. Les maîtres firent faire plusieurs tiabils galonnés,
du linge et des dentelles à proportion ; M, de Langalerie se donna
UQ carrosse fort propre. On porta chez lui des sommes considérables.
Gomme l'on ne vojioit pas par où ces richesses pouvoient être venues
si subitement, on jugea que l'aga les avoiL procurées'.
M. de Langalerie acheta quantités de marchandises propres pour
le Levant', il engagea plusieurs pauvres familles, lant hommes,
femmes qu'enfants, auxquels il fournil quelque argent, leur disant
qu'il alloil leur procurer une haule fortune en les menant dans une
nouvelle colonie qu'il alloit établir. Lorsque quelqu'un lui deman-
doit le lieu où il voulait mener tout ce monde, il répondoit : « Bien
des princes et des souverains voudroienl savoir ce que vous me
1. Journal de Verdun, jaillet 1716, p. 8.
3. Journal de Verditn, octobre 1716, p. 34&-247. Comparez tes corrcspun-
■JkQCes de l'eoTojrË 6»ion ciWes par Ch. de Weber. Les Mémoires <le 1743,
p. 4tS-tl9. proleilenl contre les euppusitioas malveillaales ilea gazelles.
3. L'anleur des Uimoirtt de 1743 a cannu ces arlîclei du Journal.
< L'équïpHge, dil-il (p. 414]. dans lequel Linange arriva rèpondoil IrËa mal &
sa coaditiiiD, Il aroil loul l'air d'uo Moscovite du lulgaire, et, n'élanl pas en
■rgenl, il ne m'étoit pas possible de le mettre dans une situation plus décente. •
FJus loin (ti. 41&-ilS], il assure que ce Tut ea effet le < cbiaoutb-aga » qui
leur donna deut mille ducats pour se nipper.
286 A. DE B0ISL18LE.
demandez ; mais ni vous ni eux ne le saurez que lorsque mon projet
sera entièrement accompli. »
Cependant les Hollandais en général, et particulièrement Mes-
sieurs des États-Généraux, se tenaient sur la réserve. En gens
pratiques ils comprenaient que tout établissement nouveau dans
Tocéan Indien serait une concurrence pour leur conunerce colonial.
Vainement, à l'instigation de Linange, Langalerie leur révéla que
Tantechrist Clément XI, le roi de France et le Prétendant (Jacques
Stuart) avaient conçu et préparé un infernal projet pour la des-
truction de la Hollande entière par Teau et par le feu^ : les États
firent la sourde oreille; mais un moment vint où il leur fallut bien
intervenir, soit pour éclairer leurs concitoyens sur Tinanité des
projets que les deux aventuriers faisaient colporter de caie en
café, soit pour éviter des complications internationales'.
VI.
La fin de Langalerie.
Un traître, le secrétaire même de la Théocratie, soi-disant pour
soulager sa conscience, mais en réalité contre une somme d'ar-
gent comptant et de bonnes promesses d'emploi, s'était empressé
de communiquer la copie du traité turc aux représentants du
t. Le projet est dans Lamberty, p. 582-584. Voici comment tout cela a été
paraphrasé dans les Mémoires de 1743 (p. 418-419) : c Ce brillant, dont on
ignoroit la source, fournit d'abord matière à raisonner, et à raisonner faux, an
grand nombre de curieux que renferme la Haye. Chacun mit son grain de sel
à la capilotade où l'on nous mit. Les uns publièrent qu'un colonel au serrice
des Provinces-Unies, nommé M. de Lille-Marais, nous a?oit prêté uoe somme
considérable conséquemment à l'adoption qu'il avoit faite de notre système
théocratique. D'autres assurèrent que les plus riches juifs de la Haye nous
avoient mis dans l'état dont on étoil ébloui. Ceux qui passoient pour aroir le
nez le plus fin pensèrent que, Linange et moi ayant découvert à l'Étal le des-
sein qu'on disoit avoir été formé de percer les digues pour inonder la proTÎnoe
de Hollande, les Etats-Généraux nous avoicnt donné une récompense propor-
tionnée au service que nous avions rendu à la république. Personne, comme
l'on voit, ne devina : quand on n'est point libéral, on pense qu'il est rare de
trouver des gens qui pratiquent celte vertu héroïque, et l'on pensoit eocore
moins qu'un Turc en fût capable. »
2. Par un placard du 21 octobre 1715, tous les réfugiés doroiciliés en Hol-
lande avaient reçu la naturalité et les droits civiques, sauf celui de parrenir à
certains emplois {Gazette d'Amsterdam, n* lxxxvii).
LES ATK:VTCRES du MlBQinS DE LimiAtEBtE.
287
I
I
î h Bruxelles et de l'empereur à la Haye. Ce deroier, le
m de Heems, en fit part à la cour de Vieoue, et put annoncer
que les préparatifs militaires avançaient grâce aux fonds fournis
par un banquier d'Amsterdam ou venus de « haute main; » une
frégate avait été payée entièrement au comptant et une autre à
moitié, des matelots enrôlés à n'importe quel prix, un agent otS-
ciel de la Théocratie envoyé au ministre danois pour qu'il obtînt
l'autorisation de faire camper des troupes sur les terres de sou
maître. L'empereur Charles s'émut et ordonna de présenter des
objurgations motivées aux Ktats-Généraux sur ce qu'ils laissaient
préparer chez eux des complots abomiuables contre le repos de la
Chrétienté. Les États répondirent qu'il n'y avait là rien de
sérieux ; que les aventuriers n'avaient organisé ni flotte, ni armée ;
qu'ils n'avaient rien reçu des Turcs, ni d'aucune autre puissance;
que, seul, LUle-Marais avait sottement versé douze mille florins
qui avaient servi à remonter la garde-robe et le train des chefs,
et que ceux-ci n'avaient guère enrôlé que quelques pauvres diables
pour aller coloniser Madagascar.
Craignant néanmoins une algarade de la police hollan-
daise, les généralissimes se décidèrent à s'embarquer sur leurs
frégates avant la date de juin primitivement fixée. Langalerie
partit le premier, dans la direction des villes hansèatiques,
&isant escale à Emden, à Brème, à Hambourg, pour solliciter
l'adhésion des riches communautés juives'. La police impériale
ne lui permit pas de pousser plus loin.
Depuis longtemps des ordres étaient donnés partout pour que
Messieurs de la Théocratie fussent arrêtés le jour où ils tnet-
traieot le pied en terre allemande; des avis en ce sens avaient été
«dressés aux princes et aux villes libres'^, des troupes disposées
1. Les Mémoires rie 1743 disenl (p. 434-43S) qu'ils s'einbarqiièreii
pottr BrAme, Lioange deraat aller de li â Francfort, et Laiiguler:
bourg et DanUick.
ï. L'agent Pusiar écriïail de Vienne, le 21) juin, ou président du conaeil des
Affaires âtrangîtres de France {vol. Viknnb 115, fol. 49 t") ; • L'empereur a fiit
puier t l'enTOfé d'ilollanile contre ce pntjel du gênerai Langalerie, et il ■ écrit
■u> directeurs de tous les cercles d'Allemagne et aux principales cilles libres
de CarrAler, si il passe par ces cercles ou ces villes. Votre Excellence n
«ana doute connoisannce dudil projet. Ou l'avoil regardé comme cLImérique;
mais J'apprends (|ue le nonce A celte cour, sur des aris refus du nunee i
Cologne, l'a repréuolâ A l'empereur comme pouvant produire quelque clmao
de réel. ,
288 1. DE BOISLISLB.
pour aider à Tarrestation, des étapes même et des relais préparés
pour transporter les prisonniers à Vienne.
Dociles à l'invitation de Tempereur, les Hambourgeois expé-
dièrent Langalerie et son secrétaire à Stade, dans le duché de
Brèmes tandis que le navire de la Théocratie, son équipage et
ses autres passagers restaient consignés dans le port. Langalerie
arriva à Stade dans la seconde semaine de juin'. H crut tout
d*abord pouvoir demander un emplacement pour le^ adhérents qui
l'avaient suivi, ou qu'il pourrait enrégimenter, jusqu'à ce que l'ex-
pédition poussât plus loin ; mais, au contraire, les autorités de la
ville le firent plus étroitement garder, s'emparèrent de ses papiers
et les firent expédier à Vienne par courrier exprès'. On y trouva
le texte du traité turc, qui fit surtout l'efiet d'une machine de
guerre dirigée contre le commerce de la France et de la Hol-
lande^ et l'ordre fut donné de faire conduire les deux pri-
sonniers, sous bonne escorte, par Erfurt, Gœttingue, Eger et
Prague, jusqu'à Vienne, où les attendait la juridiction militaire.
Lies agents de l'électeur de Hanovre et roi d'Angleterre, quoique
protestants, se prêtèrent à cette extradition de leur coreUgion-
1. C'étail précisément la yille forte que les Mémoires de 1743 représentent
oomnae ayant été assiégée et conquise par Langalerie pour le compte d'Auguste
de Saxe : ci-dessus, p. 263, note 2. Les Uanovriens occupaient Stade et le duché
de Brème depuis le 15 octobre 1715.
2. Son journal, saisi sur lui et aujourd'hui conser?é, avec le reste de ses
papiers, à la Hofbibliolhek de Vienne, s'arrête sur la date du 13 juin, À Stade.
3. Voir les Tabulae codicum mss, in bibliotheca Vindobonensi, etc., t. V,
p. 82-83, mss. 6966-6976. Les mss. 6969, 6970, 6973, 6975 et 6976 sont le Jour-
nal chrétien dont il a été parlé ci-dessus, p. 271. Le n* 6974 est an recueil
d'extraits d'histoire et de théologie protestante. Le journal commencé à Cassel
le 1*' avril 1713 porte les n»* 6966, 6968, 6971 et 6972. Le n* 6967, commencé
à Amsterdam le 1*' octobre 1715, est intitulé : « Minute des occupations jour-
nalières qui se mettent par écrit par Son Excellence ou de sa part. » Le
n* 107'77 est un livre de comptes de l'année 1713. Le docteur Marcus Landan
est peut-être le seul des biographes de Langalerie qui se soit aventuré dans ce
fatras; M. Kaufman parait n'avoir connu que les papiers de Siisskind (ms. 11263)
et les Mémoires apocryphes de 1743.
4. Voir la Gazette de Cologne (en latin), n** lui, lvi, lviii et lxii, ou les
douze articles du traité du 15 zoul-hidjèh 1127 furent immédiatement et très exac-
tement analysés. Cf. la Gazette de Bruxelles, qui donnait les mêmes noayelles,
mais en français, p. 414, 415, 423 et 439. fin ce dernier endroit, elle ajoute :
« On a aussi trouvé un projet agréé par le sultan pour l'établissement dans le
royaume de Morée des manufactures que les négociants françois, anglois et hol-
landois font passer en Turquie afin de ruiner par ce moyen le commerce de
ces nations. »
Ji
LES ÀysHTcaes dc hasqu» de li.igilb&ib.
2S»
I
laîre, en stipulant toutefois qu'il ne serait ui coDdaïuné à mort,
ni soumis k la question : moyennant quoi ils remirent Langalerie
et son secrétaire à une escorte autrichienne, qui continua le tra-
jet à petites journées, pour n'entrer dans Vienne que le 14 août,
au milieu de la foule accourue pour contempler le « général
lurc'. » Par égard pour celui-ci, on l'installa assez convenable-
ment dans la prison Pallen-Thor, et on lui donna un serviteur,
taudis que son secrétaire était beaucoup moins bien traité dans
une prison vulgaire'.
Linange les rejoignit bientôt dans la capitale impériale. Avec
ses deux compagnons les riches juifs Siissktnd et Da Costa âls, il
s'était prudemment débarrassé de la partie de l'expédition confiée
à ses soins et avait cru trouver un asile chez le prince d'Ost-
Frise, à Auricli ; mais celui-ci les fit arrêter le 22 juillet, et, par
les mêmes étapes que Langalerie, les trois prisonniers arrivèrent
à Vienne le .31 août'. On trouva entre leurs mains beaucoup
d'argent comptant, tandis que Langalerie n'avait emporté que
des lettres de change, et celles-ci étaient fausses,
Aononcées tout de suite par le Wienerisches DiaHuni, puis
par les autres gazettes, ces arrestations firent grand bruit jus-
qu'en France^, jusqu'en Angleterre, jusqu'à Rome, et jusque chez
I
1. Dépôt des Affaires élrangère», vol. Viennb 115, fol. 89 v el 115,
2. Goielte de Colayne, n- lxu, lxii el lix; Gatette de Bruxelles, p. 492,
5)9 el bii. On a uu Musée britannique (II52I a i) une chanson nHemsnde sur
l'urestiklioD lie Langalerie el son arrivée i Vienne.
3. Gawtle dx Coloijne, a" ls, lxviii, lsx el Lxxiv: Gazelle de Bnixetlet,
|i. 581 el 5%, Le vorres[>ondanl d'Erfurt écrirait à la première de cea gazelles,
le 17 août : ■ Vir nobilis et conOilenlo alloquio dlcll comills doUtII acre
Utlm discretumque jadicluin, unimumque falia aaimosum, proprii quldein
•rmti contcmiitorem; alque, ul ait, unice appreliendil ac dolet Tices alioram
■wUe polioris bouiuam qui hoc ipso grande damnuni palieiilur. Vemni de
caaue meritis Vienna judicabil. >
4. GaseKe, corresp.de Rome, p. 415 ;Joiu-nafd«/]an?niu,l. XVI, p. 404; Jour-
Moi de Jean Bavai, 1. 1, p. I6S-ITO1 Journal lU Verdun, octobre, p- 24t. Noire
ambuudeur en Autriche, le comte du Luc, écrivait le ■■'juillet (vol. Vignnb 115,
fïil. 79) : < Le marquis de Langalerie, soi-disant généralissime de la Théocra-
Ue, et dont la manœuvre faisoil grand' peur i la cour de Rome, a eu l'impru-
dance de venir en Allemagne. Les ordres étoiejit donnés partoul de l'arréler,
el cela s'est eiéculé dans le pajs de Brème. Je ne sais point si les protestants
voudront ie remettre i l'empereur; mais, s'ils prenoient ce parti, ce général de
Boavelle édilioa auroil de mauvais quarts d'heure i essuyer. ■ On s'étonna, en
effet, qae le roi Georges eill consenti à livrer son prisonnier (Journal de Yer-
^ Rxv.
janvier 1717, p. 38).
Rey. Histob. LXVI. 2-
290 i. DE BOrSLTSLE.
les Turcs, qui, selon une gazette, menacèrent d*us6r de reprè-
sailles^ Généralement on s*apitoya sur ce « pauvre fou » de Las-
galerie ^ et il y eut des amis pour regretter qu'il eût échoué dans
une tentative d'évasion quelques jours avant de comparaître
devant ses juges ^. Les Mémoires de 1743 racontent que cette
évasion avait été préparée par l'ancien camarade de Laogalerie,
Bonneval, qui, devenu général-major et grâce k son crédit auprès
de l'empereur, pouvait faire de fréquentes visites dans la prison
de Pallen-Thor. Mais Bonneval, deux fois blesse k la bataille de
Salankemen ou Peterwaradin, le 5 août, n'était pas encore ren-
tré à Vienne, ou tout au moins n'était point remis de ses bles-
sures ; il partit le 3 décembre pour la France, où l'attendait une
amnistie bien méritée par sa brillante conduite dans la campagne
contre les Turcs ^.
Nous manquons de renseignements authentiques sur le procès^.
Il fut renvoyé devant des commissaires militaires nommés par
l'empereur, et porta, dit-on, sur ces trois griefs : alliance avec
les Infidèles, désertion du service de l'empereur, préparation
d'hostilités contre le pape et les princes italiens. Ce qui est cer-
tain, c'est que, contrairement à l'assertion des Mémoires apo-
cryphes^, le prince Eugène ne jugea pas lui-même, conoune pré-
sident du conseil de guerre, son ancien lieutenant : parti pour
l'armée de Hongrie le 1^ juillet, il n'en revint, triomphant, que
1. C'est la Galette de Bruxelles qui innonçâ, le 9 septembre (p. 614-615),
que la Porte avait menacé de faire subir au résident impérial Fleischmami,
alors détenu à Gonstantinople, le même traitement que Langalerie eMoierall à
Vienne, mais qu'on ne laissa pas de donner la question au secrétaire arrêté
avec celui-ci. Fleischroann fut rendu au bout de quelque tempe et reparut à
Vienne le 4 décembre.
2. L'expression est répétée plusieurs fois par Madame, dans ses lettres à la
raugrave Louise, qui la tenait au courant de tous les inddents. La princesse ile
Galles aussi répondait, le 26 septembre, à la lettre ci-coatre de Leibniz (recneil
O. Klopp, t. XI, p. 197) : c Je ne puis m'cmpécber d'avoir pitié du paarre Lan-
galerie. Je crois qu'une tête plus forte que la sienne auroit eu de la peine à
résister aux impertinences de Madame sa femme. Je sonbaiterolt le pauvre
homme dans les Petites- Maisons. »
3. On écrivit de Vienne, le 5 septembre, À la Guuette de Coloffie, ■* lxxv,
qu'il avait enivré ses gardiens et était prêt à sortir de la prison, lorsqn'u
soldat le reconnut au passage.
4. Ci-après, p. 294.
5. M. Landau lui-même n'a pu découvrir les pièces, et les giiiettet sont à
peu près muettes.
6. P. 436 et 440-441.
I
I
us iTGIfTVRES AU MiROD'S DE LAItClLEBIE. 291
e 9 DOTembre. La correspoodancâ diplomalique de Vienne con-
tient UDe seule feuille de nouvelles du 22 août et quelques lignes
de l'ambassadeur comte du Luc'. La feuille, que je traduis de
l'italien, dit :
L'interrogaloire et le procès du général seront TalLs par le conseil
aulique, ayant été arrèlé sur le Lerritoire de l'Empire. Le roi d'An-
gleterre, eu le remettant, a stipulé qu'il lui seroit fait grâce de la
Tïe, et qu'on ne lui ferait pas subir de tourments pour avoir des
«Teui, supposant que, dans ses projets, il y avoit plus de fantaisie
et d'idée de fonder une religion comme celle de Malte contre la
eour de Rome, que d'intelligences avec les Turcs. Il se peut pour-
tant qu'on l'enferme pour le reste de ses jours dans quelque châ-
teau, sans autres recherches. En venant ici, il se plaignoitque le roi
d'Angleterre l'eût fait arrêter après avoir promis de le protéger et
de ne point s'opposer à son idealo disegno per la dilalazione délia
religione ri formata.
Le comte du Luc écrivait, le 2 septembre :
Notre brave Langaierie est aux fers depuis deux jours. Je ne sais
pas encore d'où vient cette rigueur. Se pourroil-il qu'un fou de cette
espèce ait eu le secret de faire donner les Turcs dans ses chimériques
projets? Il est certain qu'il a pâli lorsqu'il a appris que tous les
papiers du grand vizir éloient pris *,
Seule, une lettre de Leibniz à la princesse de Galles' noua donne
quelques autres détails :
V. A. R. aura sans doute été informée des étranges déportements
du marquis de Langalerie, que j'ai connu à Berlin, où il me parut
assez raisonnable; mais les malhuurs lui ont tourné la tête. On
m'écrit de Vienne qu'ayant été interrogé devant les commissaires de
rEmpereur, il a avoué d'abord son traité avec le Turc; mais il a
i^outé qu'il n'y avoit point eu de guerre alors entre l'Empereur et
les Ottomans, et qu'il avoit eu sujet de croire qu'il n'y en auroit
point; que, depuis qu'il éloit sorti du service de France, il n'avoil
jamais eu engagement avec des ennemis de S. Ai. Impériale; que son
dessein avoit élé de faire la guerre au pape comme h un ennemi de
Jésus-Christ, de livrer le pape aux Turcs et la ville de Borne à l'em-
1. Affaires étrangères, toI. Vibkhe 119, fol. ISO et 189.
î. Le griod «izir élail tombé dans la journée du 5 août; i \» suite de rette
dâ(ut«, le» Turcs avaionl perdu Temesnar e[ leré le ïîËge de CorFou.
3. LeUre écrile de Uuiorre, le 11 icplembre, daas le reoueil d«s Œuvra
pnblii par O Klopp, t. XI, p. 1S3,
k^
292 ▲. DB B0ISLI8LK.
pereur; que les Turcs lui avoieni promis en échange un royaume
dans quelque île de la Méditerranée, et que l'échange d*un prêtre
contre un royaume n'auroit point été mauvais. Les comoiissaîres
ont eu de la peine à s'empêcher de rire. Quelques-uns disent que le
prétendu prince de Linange^ qui est aussi arrivé à Vienne, est on
flis naturel d'un comte de Linange; d'autres prétendent quil est
gentilhomme du Poitou et qu'après avoir ftiit mille fourberies en
France, il est venu en Hollande se disant premièrement prince député
des pirates à Madagascar qui tranchent de souverain dans cette
grande ile, et puis il a voulu (klre le Messie, ou du moins le précur-
seur du Messie des Juifs, et a trouvé des fous qui lui ont donné de
l'argent. On croit donc qu'il y a de la malice dans son bit, mais de
la folie dans celui du marquis.
En effet, considéré comme fou plutôt que comme ennemi de la
paix européenne, Langalerie fut condamné à une détention per-
pétuelle et envoyé dans la forteresse de Raab (Javarin), sur le
Danube ^ Les renseignements que donnent les Mémoires ieilH
sur son séjour dans cette prison ne méritent aucune confiance.
Au contraire, les circonstances dramatiques de sa mort sont par-
faitement établies. Ce n'est pas, comme l'ont dit nombre d'auteurs,
le 20 juin ou le 7 septembre 1717 que ses aventures et ses mal-
heurs finirent, mais dans la nuit du 18 septembre ^^. A cette époque,
il avait été ramené de Raab à Vienne ; une lettre datée de cette
dernière ville, le jour même 3, porte ceci :
Ce matin, Langalerie est mort après avoir refusé de prendre
aucune nourriture depuis déjà plusieurs jours et n'avoir bu rien que
de Teau. Depuis le temps où est arrivée ici la première nouvelle de
la victoire remportée sur les Turcs^ il s'est considéré comme tout à
fait désespéré et a continué à vouloir manger peu ou point du tout,
si ce n'est quelquefois un peu de raisin sec ou d'eau, et cela jusqu'à
sa fîn, quoiqu'on lui fit prendre quelquefois par force, mais inuti-
lement.
Madame, qui n'avait jamais cessé de s*apitoyer sur le mal-
1. Journal de Verdun, noTembre 1716, p. 313.
2. Voir les gazettes de Cologne, de Leyde, de BruxeUes, de Vienne, etc., et
le Journal de Verdun, noTembre 1717, p. 390.
3. Donnée dans l'article de Ch. de Weber, traduite dans la brochure de M. de
Montégut, p. 32, et confirmée par deaz autres lettres de Vienne (Affaires étrai-
gères, Tol. Vibnnb 122, fol. 155, et toI. 126, fol. 85).
4. Prise de Belgrade, 18 août.
V 1 t.^
iTBirruBBB DU Hingcis de ungjlbrte.
loreux prisonnier', reçut ce conaplèmeot de détails touchants* :
' La duchesse de Hanovre ra'écril que Laugalerio est bien mort de
(^ra il y a vingt et un Jours ', ne voulant ni manger ni boire. A son
liBuro dernière, il c'a pas recommandé aouâmeàN. S. Uieu*; mais,
comme il sentait qu'il allait mourir, il prit le portrait de sa femme
et se mit à lui parler comme si elle était la. Cet entretien était plein
de tant de tendresse, que tous les assistants Tondirent en larmes.
C'est une mort bien triste, et l'objet d'une telle passion en était bien
peu digne, car son inlldélilé était notoire et des plus scandaleuse".
Selon la même princesse, le prisonnier avait été plus étroite-
ment resserré depuis certain jour oii, l'empereur passant devant
la fenêtre de sa chambre, il avait versé un pot de chambre sur le
carrosse; cependant il fut conté que ses geôliers le traitaient
bien, et qu'il leur voulut laisser dix mille florins à valoir sur
l'arriéré qu'il réclamait depuis 1709 au gouvernement impérial*.
Par ordre, son corps reçut les honneurs funèbres dus au grade
qu'il avait occupé dans l'armée autrichienne, et fut porté dans le
cimetière protestant que protégeaient les ambassades de Dane-
mark et de Hollande'.
^LOq dit que diverses puissances avaient fait des instances pour
^■rl. Lettre du 11 aofll 1717, dans le recaeil de Staltgart, t. CXXD, p. 79:
« LïDgaterie me fait pilié. C'esl un malbeureui homme que je connais beau-
coup. II aTttil une cousine qui Tul de mes filles d'honocar. cbez laquelle il
éUil toujours, et, comme elle-même me suiïail très assidûment, il élall sans
^^gase chn moi. Je n'avais jamais pensé que c«t homme dût devenir Ton. >
^^B. Lettre da 10 octobre, ibid., p. 107; cf. Ja Iradnclion Brunet, l. I, p. 337.
^^H^ Sans doute A compter jusqu'au jour où la lettre Tut écrite de Hanovre.
^^H. Un brait courut qu'il avait dËclaré mourir dans la religion mahométane
^^ttaîres élrangères. vol. V[ekt(e n6, fol. 85).
5. Madame, peu de jonri après, apprit la mort <le la comtesse de Soiason»,
etUe cousine deLangalerie (ci-dessus, p. 15 el 18) dont parle sa leltre-
6. Quatre cent mille florins, selon les Mémoires apocniphes. Voir ci-dessua,
p. 3&8, note 3.
7. Cr. l'épilogue des Mémoires de 1743, attribué par Gautier de Fagel bu
valet de chambre de Langalerle, et qui est peut-être la seule portion «utlien-
tiqne de ce livre. La nouvelle de la mort était arrivée IrËs rapidement en
Fmnce ; Dangeau la counul dès le 23 septembre {Journal, L .WII, p. 16^ ; cf. te
Mercure du mois, p. 175). — Madame écrit, te 11 novembre (t. CXXII, p. 121-
123) : a Je pensais que l'abbé Buuquois (Bucquojr) aurait composé l'épilaphe de
Lingalerio d'après M. de Honseau {'!); mais l'abbé n'a pas, suivant la coutume
lies cstiioliqnes, recommandé son âme aui priËres des Gdéles, et a slmple-
meot mis : i Priez Dieu pour mou âmel i L'abbé dont parle Madame est ce
fameux comte du Bucquoj, ancien prisonnier de la Bastille, dont M" Dunoyer,
^^onift Fransois Ravaisson, ont raconté les aventures el les moltiples avatars.
294 i. DE B0I8LI8LB.
que la cour de France accordât k Langalerie des lettres d'aboli-
tion ou Tadmît à bénéficier de Tamnistie qui était la conséquence
des traités de 1714 ^ Bonneval avait ainsi obtenu sa grâce du
Régent en septembre 1716*, et le prince Emmanuel d*Elbeuf,
« ne sachant plus que devenir ni de quoi subsister, » revint de
Naples à la fin de 1719 pour se faire pareillement réhabiliter'.
Encore que fou, l'ancien lieutenant général du duc de Yendftme
eût tout aussi bien mérité que ses complices de désertion d'éprou-
ver les efiets de la clémence du Régent.
Linange, semble-t-il, ne fut jugé qu'après Langalerie, et sépa-
rément^. Celui-là était bien un fripon, un escroc, un chevalier
d'industrie. On avait découvert en sa possession une liste de
joyaux achetés ou soutirés à un bijoutier d'Amsterdam, et deux
lettres de change tirées par des négociants chrétiens de la même
place pour la somme d'un million et demi de florins d'or. C'étaient
des faux de sa fabrication^. Sur le fond de l'affaire, pendant l'in-
terrogatoire et le procès comme lors de son arrestation*, il s'em-
brouilla de mensonge en mensonge, tantôt sur sa propre identité,
tantôt sur l'authenticité et la portée du traité turc, dont on tenait
1. Le mémoire donné an Moréri dit : c II moarut de chagrin le 20 juin (tàe)
1717, malgré les espérances que dévoient lui donner les moQTemenU que le
roi d'Angleterre, de Suède, et même le Tare, dit-on, se donnoienl pour le
remettre en liberté. >
2. Il la sollicitait depuis le congrès de Bade.
3. Marié à Naples avec une Stramboni et derenu propriétaire de Portid,
c*e8t lui, dit-on, qui eut la bonne fortune d'y découvrir en 1719 THerciilanoBi
enseveli sous la lave. Neuf ans auparavant, il avait déjà mis an jour, soit au
même endroit, soit dans son c bôtel de Naples, v comme le raconta «lors la
Gaielte de Leyde (1711, n* 1), une c grotte » ornée de statues de marbre blanc.
4. Voir le second article du docteur Landau. Un rapport détaillé que le baron
de Hecms envoya de la Haye le 16 octobre 1716 dut servir au procès.
5. Selon les pièces utilisées par Ch. de Weber, c'est sur Langalerie lui-même
qu'on découvrit (ci-dessus, p. 289) ces lettres de change do banquier Gliffort
qu'une bande de fripon» lui avait passées pour bonnes.
6. Affaires étrangères, vol. Vibnne 119, fol. 51, nouTelles da 25 Juillet 1716:
c Depuis l'arrestation du fanatique général Langalerie, son amiral général le
comte de Linange a été mis aussi en prison. Le premier sera, sous peu, conduit
à Rastadl (iic)^ où il finira ses jours. Il persiste à nier sa prétendue conTention
avec les Turcs et à soutenir que son unique projet étoit d'aller aux Indes pour
propager sa religion, particulièrement dans la NouTelle- France et les Iles voi-
sines. On n'a saisi ni lettres ni écrits d'importance, i Le correspondant italien
ajoutait que les bruits répandus par Vanghel dans sa fameuse gazette étaient
faux; qu'on avait arrêté, avec Linange, un jeune Juif, fils de gros banquier
hollandais, qui avait cru aller dans la Terre-Promise, et qne beancoop de juifs
et de marchands crédules s'étaient laissé duper.
L£S ATENTCKES DD HiBQDIS DE LlXCALEStG. 39S
l'original entièrement écrit de sa main; prétendant alternative-
ment que ce traité était une feinte ponr donner le change aux
Anglais et aux Hollandais qui refusaient leur coopération contre
Rome, et que le véritable projet — qu'il avait voulu faire pré-
senter h l'empereur par le prince d'Ost-Frise — était de tomber
à l'improviste sur les Dardanelles et Constantinople, de mettre le
feu à la flotte turque, et de détruire ou piller la Mecque avec l'aide
d'Abyssins commandés par des officiers catholiques.
Reconnu coupable de fourberie, de faux, de blasphème et de
lèse-majesté, condamné en conséquence à la prison perpétuelle,
Linange fut conduit à Spielberg' ; il j finit ses jours-, mais sans
avoir jamais renoncé à l'entreprise de Madagascar^.
Siisskind, les deux jui& portugais arrêtés avec Linaage, et
même le secrétaire de Langalerie, ayant persisté les uns et les
autres à soutenir qu'il n'avait jamais été question que de coloni-
sation pour eux, qu'ils n'étaient en rien instruits des projets de
croisade, que même leurs coreligionnaires n'avaient point ali-
inté les caisses de la Théocratie, ils finirent par se trouver quittes
après une détention un peu longue.
VU.
La descendance de Langalerib.
M"" de Langalerie survécut une viugtaine d'années au mari
qu'elle avait refusé de suivre dans ses dernières aventures. Hono-
rée de toute sorte de distinctions parle sexagénaire landgrave, ce
devait être cependant une piètre Maintenon au dire de Madame.
Celle-ci eut à la recevoir à plusieurs reprises comme favorite de
son parent, et l'on a vu qu'elle vint une première fois à Paris peu
de temps avant l'arrestation de Stade.
Lorsqu'elle était ici, raconte quelque part la mordante Bavaroise ',
t. La fameuse prison d'État, proche de BrQna, en Horafie.
7. Les iUmoirei de 1743 prétenJenl à lorl qu'il fut relaie.
3. Les biographes signalent ea dlteraes archives la trace d'une conlinualioo
des projets de Linange purdet sTenluriers d'ef^penii aaalngue; te docteur Landau
j ratUche la tentiIlTe faite par le niaréclial de Saxe pour se faire céder I'IIh
par LonU XV et y établir une colonie allemiDde,
i. Lettre da 13 août 1717, dans le recueil Bjninet, L 1, p. 310.
296 ▲. DB B0I8LI8LB.
on disait que l'enfant dont elle était enceinte appartenait au land-
grave. Elle n'est pas belle et a des manières très affectées, comme
celles des coquettes de province... On ne peut pas la voir sans rire,
tant elle est ridicule. Langalerie me fait vraiment de la peine; il est
fort malheureux. Je n'ai pas entendu dire que mon cousin le land-
grave ait eu d'autre galanterie que celle-ci...
Toute la correspondance de Madame est sur ce ton, ou pis
encore. La marquise ayant reparu devant elle en 1721 , voici ce
qu'elle écrit de cette pécore* :
Il convient bien à la Langalerie de parler contre les bâtards, alors
qu'elle-même en a fait un qui devrait être placé en tête dans son
registre, et à la première place, comme (Ils de landgrave'. Cette imper-
tinente m'aurait fait perdre patience. Elle me parla avec tant d'arro-
gance, que mes dames en étaient outrées ; mais, à force de rire, ma
colère tomba. Je crois qu'elle s'est aperçue que nous nous moquions
d'elle ».
Vingt jours après, elle donne plus de détails :
M°*® de Langalerie m'a dit mille sottises. Elle demandait que je lui
fasse restituer les biens de son mari confisqués lors de la fuite de œ
dernier et donnés par le roi à sa sœur... Je lui dis que cela ne se
pouvait faire, vu que Langalerie avait pris du service contre le roi.
Là-dessus, elle s'écria que je ne savais pas faire mon métier, que
j'ignorais ce que c'était que d'être généreuse, et mille impertinences
du même genre, assez, en un mot, pour me décider à la faire pousser
par mes laquais hors de chez moi par les épaules. Mais, par consi-
dération pour mon cousin le landgrave, qui a un fils de cette femme,
je me contentai de dire à M. de Martine : « Vous entendez comme
elle parle ! Je n^en ferai que rire, à cause de mon cousin le land-
grave; sans cela, je saurais bien comment la traiter. Voilà assez
d^extravagance; emmenez-la. »
Et encore, le 8 mai^ :
Il est impossible d'avoir plus d'impertinence que M"« de Langale-
rie. Je ne puis la souffrir, et je regarderais mon cousin le landgrave
comme fort heureux s'il pouvait se débarrasser de cette folle. Ce
1. Lettre du 22 mars 1721, t. CLVII du recueil de Stuttgart, p. 55-56.
2. Le petit bâtard était heureusement mort, dit Madame.
3. Traduction Jaeglé, t. III, p. 96, lettre du 11 avril.
4. Recueil Brunet, t. II, p. 324-325.
LES 1TE5TUHES D0 ffilÔme DE UnCiLBU
n'est au feît qu'une campagnarde imbécile, qui ne sait nullement
/rre, mais qui se met à rire sans savoir ce qu'elle dit, et, lors-
l'elïe a dit cenl sottises, elle esl tout étonnée de ce qu'on ne
dfoire pas. Elle ne doit m'avoir aucune obligation de ne l'avoir
3 cbassée de ma chambre; mais je n'ai pas voulu tracasser mon
xsi n te landgrave au sujet de son cher objet, car, lorsqu'on a été
sicbé à quelqu'un comme il Ta été à cette folle, on éprouve une
rie violente en le voyant maltrailer,
One dernière lettre' nous apprend que, pour la plus grande
^IsCaction de Madame, il y eut brouille entre le landgrave et sa
kirquise vers les derniers mois de cette même année 1721;
pextdant l'article du Moréri affirme qu'elle ne quitta Cassel
'hu la mort du prince régnant (1730). On voit, d'autre part,
l'elle était restée en rapport avec Auguste de Saxe, lui rendant
is services de toute nature, même de police, jouissant de toute
i confiance et bénéficiant de sa générosité-. En même temps,
lose assez singulière, elle se voua à la cause de l'ancien com-
Ètiteur d'Auguste, Stanislas Leszczynski^ et la fille de ce prince,
yant épousé Louis SV, fit rendre aux fils de Langalerie le droit
* servir en France et d'y recueillir des successions, comme si
**"" père n'eût quitté la France que contraint et forcé par les
^'^^cutions de Chamillart. L'acte en fut expédié le 30 juillet
^S * ; le 26 décembre suivant. M"* de Langalerie et ses trois
"•^ts prenaient la naturalisation suisse. C'est sur le territoire
'■«tique qu'ils se retirèrent après la mort du landgrave, et la
"^ y finit ses jours en 1736, dans son cbâteau d'AUaman, au
^ ci« Lausanne. Le fils aîné, François-Philippe, héritier du
"■ <ie marquis, né en 1710 et élevé à l'Université de Ham-
^•«««eil de Slutlgflrt, t. CLVI!, p. 582, 27 noTetnbre 1721.
r***t.« de Ch. de Weber, dias U brochure Montégut, p. 29.
^*^ «olonel do RoleDhan prétend menie qne Langalerie aurait leconin 8U-
"*^rs de son relour de Bender el de «an ioslallalion t Deux-Ponls [juin
■ ^t que nos deux èpom n'allèreol prendre asile A la conr de Cassel qne
***■ pouvnir suivre leur t prolégÉ • anr le territoire français. On a tu plu»
^*»^ lea Langalerie prirent asile A Caaael dès 1713, el Stanislas ae s'ias-
^K^iaBenitiaurg qu'en 1720. D'aulre part, en 1714, le marqnU n'était guère
^^ «le prêter aide A personne. Tant cela a'éelaircirait A l'aide de la cor-
^l^nee des Lesznijnskt qui etisie encore entre les mains des descen-
LJ**s [jiogalerie.
"-aUoii dans les pièces L»NQi^sB^a conservées aui Archi»es administra-
* ^^« la Oaene, dossier 389.
298 i. DB BOISLISLB.
bourg S fut appelé par le roi Auguste, en 1728, à oommaDder
une compagnie de ses gardes. Après la mort d* Auguste, Stani»-
las, ayant été rappelé au trône de Pologne, prit en estime le jeune
capitaine. Celui-ci quitta tout pour suivre son nouveau maître à
Kœnigsberg, puis le ramena en France, et, là, chercha un
emploi avec Tappui de Stanislas, de la reine sa fille, et de Tam-
bassadeur Monti ; mais, par horreur du nom de Langalerie, k
cardinal Fleury fit échouer toutes les démarches, et il fallut ren-
trer en Suisse. Dans la suite, Stanislas obtint pour son fidèle
serviteur l'autorisation de lever un régiment au service de Fem-
pereur Charles VU, et lui fit même donner un brevet d*aide de
camp : ce fut pour peu de temps, car, à la mort de Charles, k
Bavière ayant rompu ses attaches avec la France, il Mat se
retirer de nouveau en Suisse. Fleury disparu, le marquis ne
cessa pas de solliciter un emploi dans le pays d'origine de son
père. Il ne voulait pas moins que le brevet de brigadier au titre
étranger, soit suisse, soit allemand, avec une pension propo^
tionnée à ses services militaires. Ces prétentions étaient-elles
justifiables?
La sœur de son père, celle qui avait bénéficié de la confisca-
tion de 1707^, étant morte au mois de mai 1754, la famille Tint
à Paris en juin 1755, pour recueillir la succession et solliciter
le rétablissement de la pension qui remontait jusqu'au temps du
grand-père, mort en 1693, mais qui avait été réduite à deux
mille deux cent cinquante livres en 1726. Il fut répondu que
chacun des deux frères pourrait avoir une pension de cinq cents
livres, mais seulement s'ils entraient au service de la France et
tant qu'ils y resteraient^.
Cette démarche fut renouvelée quelques années plus tard dans
de curieuses conditions.
1. Le réfugié Jean des Champs, qui vécut à Berlin et à Cassel, rap(»rie,
dans ses mémoires inédits, qu'il arait tu les (ils à EIamlK>urg en 1727, tlon
que leur mère était notoirement la fayorite du landgrave.
2. Ci-dessus, p. 39 et 266. Suzanne de Langalerie avait vendu d'une part la
Motte-Charente pour soixante-cinq mille livres (Archives de la Charente, B 33]
et, d'autre part, avait cédé sa moitié de Tonnay-Boutonne aux La Trémoîlle-Tal<
mond contre une rente viagère (1719). C'est six mois avant sa mort qu'elle déposa,
le 22 novembre 1753, chez le notaire Vanin, les titres de famille dont il a été
parlé ci-dessus, p. 14. Une copie de son acte d'inhumation est dans la collec-
tion formée par Rochebilière : Bibl. nat., ms. nouv. acq. fr. 3619, n* 4903.
3. Ministère de la Guerre, Archives administratives.
BC KiaVCnS DB UTCGILEIIE.
3»
B marquis avait vendu Ailaman en 1756 et était allé s'èla-
r dans le iaubourg de Lausanne où Voltaire acquit aossi use
maison en 1757. Des relations d'intimité s'établirent d'une rési-
dence à l'autre; M. de Langalerie ayant monté un théâtre àe
société. Voltaire en devint tout k la fois le directeur, le principal
acteur et le fournisseur attitré. Pour témoigner sa gratitude k
son hôte, il essaya de nouveau de lui rouvrir les portes du pays
^ l'on refusait de le recevoir dans des conditions honorables. Le
janvier 1760, il écrivit cette lettre au vieux Pâria-Duvemey,
[rand arbitre des choses de la guerre :
Vous avez peut-èlro connu autrefois le marquis de Langalerie,
ntenanl général des armées que son humeur trop vire et l'ineptie
11. de Chamillart' obligèrent d'aller servir l'empereur. J'ai engagé
son (ils, qui est un bomme de probité et de mérite, à retourner en
France. La religion prolealante, qu'il professe en Suisse, où il a
t|uelques possessions encore, ne mettra aucun obstacle à son relour.
Votre École mililairc est la vraie place do ses enlknts '. Une pension
pour eux sur les économats paraîtra très bien appliquée, un grade
de maréchal de camp pour le père n'est qu'un parchemin. D'ailleurs,
M. le marquis de Gentil-Langalerie, âgé de quarante-huit ans, peut
rendre service, parlant l'allemand comme le français et connaissant
tous les buissons des paya où l'on fait la guerre. J'ose confier celte
négociation à votre générosité et à votre discrétion. Si vous entre-
prenez l'atraire, elle réussira. Voulez-vous en parler à M"° de Pom-
padour? Je crois servir TÉtat en servant M. le marquis de Gentil,
quoique le roi ne manque pas de braves orticiers. J'ai cru, dans cette
affaire, ne devoir ra'ouvrir qu'à vous, le marquis de Gentil ayant de
grands méaigements a garder en Suisse, où il a encore une partie
gea fortune...
'à insinuante et habile que fut cette épître, il est à croire que
Itaire no s'était point abusé sur son effet. Le marquis de Lan-
galerie ne fut pas appelé en France ; il continua à habiter Mont-
Repos, Voltaire y donna en 1766 la première représentation de
Scythes, et c'est là que le marquis finit ses jours le 37 oc-
1773. Toutefois, les deux fils qu'il avait eus de son mariage
une Constant de Rebecque, d'origine française et âUe d'une
r de tout ce qni avait pu Ctre dil eo 1706 coalre le
Et-deisus, p. :;9-33.
L nrït-DDieniei' était le fondateur et t'iDiendaat de cette école (1751).
300 ▲. DK B0I8LISLE. — LES AVeNTITEES DU MABQUIS DB LANGALBEfE.
Saussure, entrèrent au service de Louis XY, Tun comme capi-
taine d'infanterie, l'autre comme capitaine dans un régiment
suisse. L'héritière unique du premier se maria d'abord avec un
commissaire des guerres français, puis avec le baron Pelletier, du
corps de l'artillerie, qui devint lieutenant général sous le r^ne
de Louis-Philippe, en 1836. Le second Langalerie eut un fils, qui
servit également dans la garde suisse jusqu'à la révolution de
1830, puisse fit rendre la naturalité française comme descendant
d'émigrés protestants, entra dans la légion étrangère d'Afrique,
et mourut en 1873, dernier des nom et titre. La descendance
n'est plus représentée que par les petits-enfonts de ses deux
sœurs, mariées en Allemagne ^ , et par ceux de sa tante, la baronne
Pelletier.
A. DB BOISLISLB.
1. La filiation el Thistoire de ces derniers degrés ont été établies mTec soin
dans la brochure du colonel de Rotenhan, fils de la seconde sœar.
5" CORPS DE L'ARMEE D'ITALIE
EN 1859.
En 1859, le 5° corps de larmée d'Italie rendit de réels
services; ils n'ont jamais été mis en lumière; ils ont même été
plutôt méconnus par les contemporains. La véritable impopula-
rité dont était l'objet, à tort ou à raison, le commandant en chef
prince Napoléon ' fut sans doute pour beaucoup dans le déni de
justice de l'opinion publique.
Mon père ayant fait partie de ce corps d'armée, j'ai trouvé
dans ses papiers des notes et des renseignements susceptibles de
Caire connaître avec exactitude le rôle du 5' corps.
Par suite de cii-conslances toutes personnelles, mon père rejoi-
gnit assez tardivement l'armée expéditionnaire. Il avait pourtant
demandé un des premiers à faire la campagne, avant même la
déclaration de guerre. — Lorsqu'elle eut été déclarée, le général
comte de Tascher La Pagerie, grand maître de la maison de
l'impératrice, avec lequel mon père était en relations journalières
pour la rédaction des Mémoires du prince Eugène de Beauhar-
nais*, engagea mon père à se iaire attacher au grand état-major
général.
« Il faut qu'on vous place, lui dit-il, k la section historique et
politique ; vos aptitudes vous mettent à même d'y rendre de
grands services; du reste, il n'y a qu'à signaler la chose à l'em-
t . Aux griefs Dès de la cooduile prËLée an prince pendant ruipèdition de Cri-
mée a'^joulitil le reproche d'aroir poussé à la guerre ea 1858, pour amener
l'agraDdissement des EtaUdu roi, son beau-père, avec peut-fitre le secrel espoir
ds cueillir liii-raéine une couronne aou« le beau ciel d'Italie où afaient élé rois
ses oncles Mural el Joscpb.
2. Le général de Tascher la Pagerie était parent du prbce Eugène, fiU d'une
Tascher (l'impératrice JosËphiae).
302 BiBON BOBEBT DU CASSE.
pereur; il sait que vous êtes l'auteur du Mémoire sur les États
italiens qu'il m'avait demandé et que je lui ai remis récemment,
dont il a été fort satisfait. Sa Majesté sera trop heureuse de vous
avoir è son état-major général. Je vais lui écrire à ce sujet pour
fixer son attention. »
Séance tenante, le général Tascher écrivit à rempereur, puis,
la lettre expédiée, il se retourna vers mon père en lui disant :
« C'est demain dimanche ; allez à la chapelle du château et,
à l'issue de la messe, vous causerez de votre affaire avec TeiQ-
pereur. >
Sous le second empire, le chef de l'État recevait après la messe,
dans la grande galerie faisant suite à la chapelle des Tuileries,
tous les officiers généraux et supérieurs qui s'y présentaient.
Le jour suivant, mon père se rendit au château, s'attendant à
recevoir de la bouche du souverain la confirmation de sa nomi-
nation .
Précédé du maréchal Magnan, commandant de Tannée de
Paris, et du grand chambellan duc de Bassano, chargés de
nommer les officiers présents, Napoléon III arriva devant mon
père :
« Bonjour Du Casse ; j'ai reçu de Tascher une lettre qui vous
concerne. Ce serait avec plaisir, mais j'ai tellement de demandes
que cela me sera impossible. »
Mon père, qui venait pour remercier, surpris et froissé du
refus, pâlit et ne put s'empêcher de répondre à haute voix :
« Sire, je ne m'attendais pas à cette parole de V. M. Depuis
plusieurs années déjà Elle avait daigné promettre qu'un des pre-
miers officiers qu'Elle attacherait à sa personne serait le gendre
du général Girard, blessé mortellement à Ligny le 16 juin 1815,
en assurant la dernière victoire de l'Empire. V. M. l'a oublié. Je
le regrette. »
Voici à quoi mon père faisait allusion. Peu de temps après le
rétablissement de l'Empire s'était posée la question de la recon-
naissance en bloc des titres, dignités, pensions accordés pendant
les Cent jours. Le comte de Casabianca, ministre d'État, chargé
d'élucider la question, excellent homme de beaucoup de valeur et
de mérite, mais cachant sous des dehors afiables d'extrême amé-
nité, d'exquise courtoisie, un rigorisme d'une austérité sans
borne, faisant du népotisme à rebours, c'est-à-dire au détriment
des siens, avait conclu à la non-reconnaissance des âdts qui
U s* CORPS 08 l'iBlris n'iTlLUt EIT i
aurait entraîné le paiement des arrérages considérables de juil-
let 1815 h juillet 1830. L'adoption des conclusions du comte de
Casablanca avait comme résultat pour ma famille maternelle
qu'on n'avait pas reconnu la dignitèdeducde Liguj conférée au
général Girard le 21 juin 1815, et qu'elle avait perdu les arré-
rages de la pension à titre de récompense nationale votée par les
Chambres le 25 juin 1815 à la veuve du général, pension qui
n'avait jamais été payée.
Napoléon III, en se ran^jeant à l'avis du comte de Casablanca,
le chargea d'annoncer officiellement de sa part k la famille du
général Girard, duc de Ligny, que le premier otficier d'ordon-
nance qu'il prendrait serait le capitaine Du Casse, gendre du
Après s'être respectueusement incliné (tandis que l'empereur,
firisant sa moustache saus rien dire, passait k un autre officier),
mon père se retirait lorsqu'il fut rejoint par le maréchal Magnan :
« Abl çk, mon cher commandant, êtes-vous fou?
— Hé bien quoi, monsieur le maréchal, quand votre empe-
reur entendrait la vérité une fois par hasard, où serait le malî
Du reste, il ne s'agit pas de moi. Je ferai la campagne dans n'im-
porte quelle condition. »
Puis traversant la cour des Tuileries, mon père entra conter
sa mésaventure au comte Tascher, qui s'en montra fort surpris.
Resté quelques jours sans recevoir de destination, puis nommé
dief d'état-major de la division UhricL, mon père reçut l'ordre
de surseoir à son départ. Enfin, le 27 mai, il reçut une lettre de
service l'enlevantde la division Uhrich pour l'accréditer à l'état-
major général du 5' corps en remplacement du lieutenant-
colonel Faure,
Le 29 mai, mon père quitta l'hôtel des Invalides et son gou-
verneur le général (plus tard maréchal) d'Ornano, dont il était
l'aide de camp. Il fit route pour Marseille avec le lieutenant-
colonel Aymard, du 61' de ligne, qui allait rejoindre à la divi-
sion de Ladmirault, et voulut bien se charger de remettre au
général Cler les premiers exemplaires de l'ouvrage, fruit de la
fM>llaboration des deux camarades de Saint-Cyr, Cler et Du Casse :
Soucenirs d'un officier du 2" zouaves. Le général reçut ce
livre deux ou trois jours avant Magenta et n'eut pas le temps
d'en accuser réception à mon père.
Arrivé le 31 mai à Marseille, à quatre heures de l'après-midi,
304 BABOIf BOBtET D0 GÂSSB.
mon père reçut à six heures ses chevaux et son ordonnance, les
premiers affamés, le second tellement malade que mon père dot
le conduire à l'hôpital et mener lui*même en main ses trois che-
vaux à un quartier de cavalerie distant de la gare d'environ six
kilomètres.
Dès le lendemain l***" juin, à la première heure, mon père fut
trouver le général qui commandait la division territoriale d'Ao-
relles de Paladines pour obtenir l'autorisation de prendre dans
la garnison un remplaçant à son ordonnance malade. Bien ^e
fort raide dans le service, le futur vainqueur de Coulmiers apporta
une bonne grâce relative dans cette affaire, et mon père, le jour
suivant 2 juin, s'embarqua sur l'aviso le Vatican à destination
de Livourne.
Le corps d*armée (dont mon père allait rejoindre Tétat-major
général) était déjà presque en entier passé dans la péninsule.
L'armée d'Italie comprenait cinq corps d'armée :
Le premier corps commandé par le maréchal comte Baraguey-
d'Hilliers ;
Le second par le général comte de Mac-Mahon ;
Le troisième par le maréchal Canrobert;
Le quatrième par le maréchal comte'Niel ;
Le cinquième enfin sous les ordres du prince Napoléon (Jérôme).
La composition du 5® corps était la suivante :
Aides de camp du général en chef : le colonel d'état-major de
Franconnière, le commandant Ferri-Pisani, le commandant
Clère, le chef de bataillon du génie Ragon.
Officiers d'ordonnance : le capitaine de cavalerie Ravel, le
capitaine d'infanterie Blum, le capitaine de frégate Georgette
du Buisson, le lieutenant de dragons de Chérisey, le lieutenant
Villot, le sous-lieutenant de cavalerie de Teulières, faisant fonc-
tions d'écuyer.
Chef d'état-major général du corps d'armée : le général mar-
quis de Beaufort d'Hautpoul.
Sous-chef d'état-major : le lieutenant-colonel Henry.
Officiers d'état-major : le commandant Du Casse, les capi-
taines Hubert de Castex, de Chàtillon et Tiersonnier.
Officier étranger attaché à l'état-major général : le lieutenant
toscan de Corsi.
Artillerie : commandant, le général de brigade Fiereck; chef
d'état-major, le colonel de Vercly .
LB 5° COEPS DB L'iUtE D'iTlLtS BK I
SOS
Génie ; commandant, le général de brigade CoEBnières de
Nordedc.
• IntendaDce : l'intetidant militaire Moisey.
Geadarmerîe : prévôt, le commandant Maociai.
Service religieux : aumônier, l'abbé Doussot.
l"divisto[i d'iufaoterie : commandant la division, le général
d'Aatemarre d'Ervillé.
Aides de camp : les capitaines d'état-major Tissier, Lafouge;
ofBcîer d'ordonnance : le lieutenant Bocher, détaché du 3' de
zouaves.
Chefd'élat-major : le lieutenant-colonel de Sulseau-Malroy.
Officiers d'état-major : le commandant Wenger et le capitaine
de Divouiie.
Commandant l'artillerie : le chef d'escadron Collard.
Commandant le génie : le chef de bataillon Fervel,
Intendance : le sous-intendant Le Creurer, l'adjoint Audenard.
Prévôt : le capitaine Vesco.
1" brigade (général Nègre, aide de camp le capitaine Linet) :
3° de iiouaves, 25' et 89" de ligne, colonels de Gbabron, de Les-
tellet et Pelletier de Montmarie.
2" brigade {général Corrèard) : 93° et 99° de ligne, colonels de
BellefondsetL'Hèrillier.
2° division : général Uhrich ; aides de camp, les capitaines de
la Haye, Samuel et de Chabannes.
Chef d'état-raajor ; le colonel Regnard; attachés à l'état^
major, les capitaines Guillet et Renouard.
Commandant l'artillerie : le commandant d'Ubesi.
Commandant le génie : le commandant de Cuurville.
Prévôt : le capitaine de gendarmerie Shisne.
1" brigade (général Grandchamp ; aide de camp, le capitaine
de Bresson; officier d'ordonnance, le lieutenant Dariot) : 14' batail-
lon de chasseurs à pied, commandant Séverin; 18° et 26* de
ligne, colonels d'Auteroche et de Sorbiers,
2" brigade (général Cauvin du Bourguet ; aide de camp, le
capitaine Jeanjean) : 80° et 82" de ligne, colonels Chardon de
Chaumont et Becquet de Sonnay.
Artillerie divisionnaire : 13° batterie du 7' rég imenl, 13° du 8' ;
5' et 6° batteries du 9° régiment : quatre batteries de réserve.
Génie : une compagnie du 2" régiment, deux du 3°.
. LXVI. 2- PASO, 20
^L Rbv. 1
806 BABOX ROBERT DU CASSE.
Brigade de cavalerie, le général de Lapérouae : 6« et 8* hus-
sards.
Le chef d'état-major général du 5* corps, le marquis de Beaa-
fort d'Hautpoul, fort connu de l'armée d'Afrique où il avait servi
longtemps et brillamment sous le gouvernement de Juillet, appro-
chant de près les princes, devint par la suite divisionnaire et est
mort après avoir commandé en chef l'expédition de Syrie.
Le colonel Henry, devenu brigadier, est mort au cadre de
réserve.
Lo capitaine Hubert de Castex, de la même famille que le
célèbre général de ce nom, est devenu lui aussi officiar général.
Lors de la suppression du corps d'état-major, versé, par décision
du général Farre, dans l'arme de la cavalerie, aussi brillant
officier de cavalerie qu'il avait été brillant officier d*état-major,
intem{)estivement retraité comme général de brigade par M. de
Freycinet au moment où toute l'armée attendait sa promotion de
divisionnaire, le général de Castex est toujours plein de verdeur,
très apte à faire campagne de nouveau.
[jes commandants de l'artillerie et du génie, Fiereck et Gof-
finières de Nordeck, sont devenus tous deux divisionnaires;
le second a joué un rôle qui l'a mis en évidence à l'armée de
Metz.
Le général d' Autemarre d'Ervillé, devenu, croyons-nous, séna-
teur, est mort depuis longtemps déjà.
Son officier d*ordonnance, le lieutenant Bocher, de la célèbre
famille do ce nom, qui a marqué dans les £astes politiques et par-
lementaires contemi>orains après avoir fourni une belle et vigou-
reuse carrière, est mort général de division, laissant un flls, bril-
lant otHcier d'infanterie de marine, décoré l'un des plus jeunes de
rarméo fran<,\iise pour faits de guerre à la prise de Dréné pendant
la cam|>agne du Scmilan.
Ui plupart des chefs de corps de la division d'Autemarre sont
devenus officiers généraux : les colonels de Chabron, de Mont-
luarie. L'Uôrillier.
Lo cvMumandant de la 2* division, le général Llirich, était issa
d'une f;mùUo alsacienne essentielloment militaire, fils d'un offi-
cier suivriour du cônio de la fia du xvnr siècle, firère d'un inten-
dant militaire et d*uu colonel, aussi connu par ses beaux états de
service que jvar une singulière blessure. Le général Uhrich, dont
on |K^urr;iil re(vt4Nr avec justesse le mot de Napoléon I* sur
iB 5* coire Dt L'iuiu o'iTiLnnn
Girard, petit de corps mais grand de cœur, devait dix ans
plus tard jeter va lustre immortel sur son nom indissolublement
lié désormais à celui de Strasbourg et au souvenir de la glorieuse
défense de celte ville.
Le commandant de sa 1" brigade, le général Grandchamp,
dont la figure balafrée est un de mes plus vivaces souvenirs d'en-
fance, était un homme superbe, de taille élancée, d'aspect mar-
tial, aimable et bienveillant, adoré du soldat. Étant capitaine, il
avait été fait prisonnier en Afrique par un parti arabe avec sa
compagnie. Sa tète avait servi de billot aux Arabes pour couper
le cou de vingt-deuï de ses camarades. Lorsque vint son tour
d'être décapité, les Arabes, « dans ce mélange affreux d'os et de
chairs meurtries, * ne surent trouver oii faire la section du col,
opération en laquelle ils sont pourtant si experts, et laissèrent le
capitaine de Grandchamp pour mort, sur place. Trouvé quelques
heures plus tard par les troupes françaises, sur le point d'être
enterré, il reprit connaissance. Un chirurgien militaire lui
épingta la figure au moyen d'un nombre invraisemblable d'ai-
•guilles. Je connais ce nombre, je ne l'écrirai pas ici pour ne point
être traité de romancier. La figure de M. de Grandchamp, par
la dextérité du chirurgien, avait été reconstituée dans son entier.
Couturée en tous sens, elle présentait l'aspect le plus singulier
qui se puisse imaginer, étrange au point d'impressionner.
Je vis souvent le bon général au camp de Boulogne, quand il
était un des deux brigadiers et mon père le chef d'état-major de
la division Uhrich. J'étais bien enfant alors et néanmoins la phy-
sionomie de M. de Grandchamp ne s'effacera jamais de ma
mémoire.
Le colonel Becquet de Sonnay, solide et vigoureux soldat, est
devenu officier général comme les deux colouels du général de
Lapérouse, MM. de Valabrègne et de Foutenoy.
L'empereur et le prince Napoléon débarquèrent à Gênes le
12 mai. — Le lendemain 13, un télégramme leur annonçait la
présence sur la Trebbia, à Bobbio (trois étapes de Gènes), dans
les montagnes, à l'est, d'un corps de 1,500 Autrichiens. Ordre
fut aussitôt donné de former une colonne composée du 3° de
zouaves, d'une compagnie de sapeurs du génie, d'une section
d'artillerie de montagne sarde et de diriger cette colonne sur
Bobbio, sous le commandement du colonel de Chabron. Le 14, k
mt heures du matin, le prince Napoléon passa en revue ces
308 BARON ROBBRT OU GAS8B.
troupes S qui se mirent en marche à huit heures et demie. Elles
(levaient coucher le même jour à Torriglia, le 15 à Ottone et être
rendues le 16 à Bobbio. Cette colonne comptait dans ses raogs
le capitaine de Tétat-major général du 5^ corps Hubert de Castex,
un capitaine d*artillerie et le sous-intendant militaire Le Breton.
A trois heures de l'après-midi, un convoi de vivres et de muni-
tions, escorté par deux sections du 3* de zouaves, partit égale-
ment de Gênes, sous la direction du sous-intendant Le Craurer,
de la division d*Âutemarre. Le 16 également, l'empereur, accom-
pagné du grand état-major, se rendit à Alexandrie, où il établit
son quartier général impérial; il laissait à Gênes son cousin le
prince Napoléon, qui devait y rallier Tétat-major, les généraux,
les troupes de son corps d'armée.
La colonne de Chabron (du 5* corps) rencontrait de pénibles
difficultés à Taccomplissement de sa mission.
Des chemins détestables dans la montagne et un temps affineux
n'avaient pas permis au 3^ de zouaves de faire plus de douze
kilomètres le premier jour. Il avait dû bivouaquer à Prato.
Le 14 au soir, le colonel Chabron fit demander au commissaire*
royal sarde cent mulets de réquisition qui partirent pour Prato,
le 15 au matin, sous la direction d'un des officiers d'ordonnance
du prince, le lieutenant Villot.
Le même jour 15, le colonel de Chabron se remit en route d
fit demander quatre-vingts autres mulets, qui partirent le lende-
main 16, au point du jour.
L'empereur envoya à Bobbio un de ses aides de camp, le colo-
nel d'état-major Waubert de Genlis, avec ordre de l'informer
directement de la situation des choses.
L'armée alliée occupait alors les positions suivantes :
Les Sardes à Casale, Borgo-San-Martino et Ciarole, avec
avant-postes sur la rive gauche du Pô, en avant de Casale.
Quartier général à Occimiano.
Le l*''' corps français (Baraguey d'Hilliers) à Voghera, Casei,
Castelnuovo di Scrivia, les avant-postes au delà de Voghera et de
Casei, ainsi qu'une brigade de cavalerie sarde. Quartier général
à Pontecurone.
Le 2« corps (Mao-Mahon) entre Castelnuovo di Scrivia et Rive-
rone (où un pont devait être jeté sur le Tanaro), se reliant par
1. Ce fut la seule revue que le prince passa.
LE 9* COBPS DE t'iRHéG n'rTlLIE Elf 18S0.
309
sa droite au l" corps et par sa gauche aux Sardes, avec nue
brigade de cavalerie sarde sur son front. Quartier général à Sale.
Le 3' corps (Canrobert) une division entre Pontecurone et
Tortone, une autre entre Sale et Tortone (seconde ligne). Quar-
tier général à Tortone, avec ordre de construire un pont sur la
Scrivia pour pouvoir, au besoin, réunir les deux divisions occu-
pant les routes de Sale et de Pontecurone, sa cavalerie près de
Tortone pour assurer la communication avec le grand quartier
Le 4° corps (Niel) une division à Valenza, une à Pecetto, gar-
dant le pont de Riverone. Quartier général à San Salvatore. La
garde impériale à Alexandrie, avec une brigade à Castel-Ceriolo
et à Mareogo.
Le i6 avril, le général d'Autemarre, son chef d'état-major,
colonel de Su Iseau-Malroy, et le général Nègre, commandant la
1" brigade, débarquèrent à Gènes. Le général Corréard, com-
mandant la 2° brigade, arriva le lendemain.
Une dépèche du colonel de Chabron annonça que les Autri-
chiens avaient quitté Bobbio.
Le 17 mai, le prince Napoléon se disposait k partir pour se
rapprocher de l'armée avec sa première division, lorsqu'un offi-
cier d'ordonnance de l'empereur, le prince Mural, lui apporta
l'ordre de s'embarquer pour Livourne et de Ik gagner Florence
avec la division Uhrich, mise en route directement de France
vers cette destination. I^e commandant du 5' corps, dès le lende-
main matin 18, se rendit auprès de l'empereur à Alexandrie, afin
d'obtenir de Napoléon IH que le 5° corps ne ae séparât pas du
gros de l'armée et que l'opération sur Florence et les duchés fût
confiée à un autre ofBcier général. Les instances furent des plus
vives, mais vaines; l'empereur tint bon, déclarant ne pouvoir
remettre en d'autres mains qu'en celles de son cousin un mouve-
ment qui était au moins autant une mission politique et diplo-
matique de la plus haute importance qu'une opération militaire.
La diversion sur les duchés était habile. Le 5' corps comptait
seulement à son actif deux divisions d'infanterie et une brigade
de cavalerie légère, mais une artillerie formidable, neufbatteries
de campagne du nouveau modèle, artillerie hors de proportion
avec l'effectif des troupes. La première division allait être dis-
traite et se trouvait eu partie déjà engagée.
était de faire croire à l'ennemi qu'un corps
340 BIROX ROBERT DU CASSB.
ce matériel et ayant à sa tête un prince de la Camille impMak
était de force à tenir tête à toutes les forces autrichiennes ooco-
pant Florence, Parme, Plaisance et les duchés. Le corps du
prince Napoléon, qu'on allait augmenter des forces toscanes et
romagnoles, devait prendre aux yeux de Fennemi des propoN
tions considérables, retenir et annihiler une partie de l'armée
autrichienne et aider au soulèvement des duchés. Ces prévisions
se réalisèrent en effet. L'empereur avait bien calculé et jugé aTec
raison que la présence de son cousin dans les pays dspadans
produirait les meilleurs effets, sans distraire beaucoup de forces
de l'armée alliée. Napoléon III était-il bien aise aussi de tenir
éloigné son cousin? c'est possible. Quoi qu'il en soit, le prince
Napoléon revint à Gênes, très contrarié du rôle qui lui édiéait,
fort ennuyé de la mission qui lui était confiée. La division Uhrich
avait reçu l'ordre en France d'embarquer directement pour
Livourne, d'où elle devait se rendre à Florence avec la brigade
de cavalerie légère du général de Lapérouse.
La division d'Autemarre, mise à la disposition du maréchal
Baraguey-d'Hilliers, reçut l'ordre de gagner Voghera à l'ex-
trême droite de la ligne. Il ne resta plus au prince Napoléon cpe
les deux brigades d'infanterie du général Uhrich et la brigade
de cavalerie Lapérouse, mais il conservait tout son matérid
d'artillerie. Il devait, en plus, augmenter ses forces par l'ad-
jonction des corps italiens en voie de formation, sous les ordres
du général toscan Jean d'UUoa et du général napolitain Mez-
zacapo.
L'effectif de la division Ulloa était sur le papier de douze mille
fantassins et douze cents chevaux, Mezzacapo devait avoir six
mille combattants. En réalité, il n'y avait pas dans les deux divi-
sions trois mille hommes de troupe. Pas armés, pas habillés, à
peine chaussés, pas aguerris, peu disciplinés, ils n'étaient bons
à rien qu'à embarrasser la marche du 5* corps, véritables impe-
dimenta gênants et nuisibles.
A l'exception de trois à quatre escadrons de carabiniers (anciens
gendarmes toscans) assez bien montés, le reste n'était bon qu'à
entraver les opérations et à faire tomber aux mains de Tennemi
les armes qu'on était obligé de leur fournir.
Le prince, contraint de gagner Livourne et Florence, donna
l'ordre, le 18 mai, au général Cîoffinières de Nordeck de se
rendre le 19 à Livourne pour préparer la marche des troupes.
^P IR S* CORPS DE L'iimJE d'itaue E!f 4859. 344
BLe général était porteur d'une lettre adressée par le prince au
Tbmmissaire extraordinaire de Victor- Emmanuel à Florence,
dans laquelle il déclarait qu'il venait en Toscane, sans visées
politiques, pour la simple conduite d'opérations militaires.
Le ïï> mai, le général d'Autemarre fui prendre à Alexandrie
les ordres de l'empereur, et le 75* de ligne se rendit par les voies
ferrées k Voghera. Ce même jour, le général Coffinières, son
personnel, l'adjoint à l'intendance d'Audemard montèrent à bord
du Sakel. Le François I"' embarqua en même temps une
compagnie du génie, les deux bâtiments appareillant de conserve
pour Livourne.
L'ordre fut expédié au colonel de Chabron de renvoyer à
rêtat-major généi'al le capitaine de Castex et de correspondre
directement, à l'avenir, avec son général de division k Voghera.
Les mouvements de troupes du B" corps continuèrent les jours
suivants. Le 20, le transport l'AïW^n'fj'Me embarqua pour Livourne
divers détachements ; le même jour débarquait à Gènes le lieute-
nant-colonel Hue de Mathan avec plusieurs escadrons du 8' hus-
sards. Les généraux d'Autemarre et Nègre se rendirent à Voghera ,
ville en avant de laquelle avait eu lieu la veille la bataille de
Montebello, si glorieuse pour la division Forey. Pendant cette
belle journée du 19 mai, un bataillon du 93' de ligne de la divi-
sion d'Autemarre, de passage à Voghera, entendant le canon,
s'était porté spontanément sur le champ de bataille. Arrivé à
Fossagozza et dirigé sur la brigade Blanchard, il avait reçu la
garde d'un poste important et du chemin de fer.
Le lendemain 21 mai, à cinq heures du soir, le bâtiment le
Panama chauffa pour Livourne, ayant à son bord le colonel de
Mathan et ses hussards, les ambulances (matériel et personnel)
du quartier général du 5' corps et delà division Uhrîch.
Enân, le 22, le prince de sa personne embarqua avec son état-
major sur la Reine-Hortense ; les chevaux, ainsi que le per-
sonnel de l'intendance et de la gendarmerie, montèrent sur le
Tfiouars.
Le 23, à neuf heures du matin, les deux navires pénétrèrent
dans le port de Livourne. Les autorités se rendirent à bord du
yacht impérial et furent admises en présence du prince. Puis à
rnidi enli'ée triomphale dans la ville.
La veille et le matin étaient arrivés dans la ville : le colonel
jS&Franconnière, premier aide de camp, le colonel Henry, le
342 BARON aOBERT OU CÀSSB.
capitaine de ChâtilloD, de Tétat-major général, le 14* bataillon
de chasseurs à pied et un bataillon du 18" de ligne.
Le 24, le général de Grandchamp, commandant la 1*^ brigade,
débarqua avec le 26" de ligne et les deux derniers bataillons du
18" de ligne amenés par le Char les- Albert, le ChtHstophe-
Colomb, le Malfatano et le Mozembano.
Le 25 mai, le général Uhrich, son état-major et le 80* de ligne
débarquèrent, en sorte que la 2* division se trouva presque an
complet.
Le 27 mai, deux colonnes. Tune formée des services adminis-
tratifs, du Trésor, des gendarmes à pied, l'autre du 18* de ligne,
partirent : la première pour Florence, la seconde pour Pistoïa,
petite ville entre Florence et Lucques.
L'armée toscane fut réunie au 5* corps et prit ses positions au
nord-ouest de Florence, où elle établit son quartier général arec
le général Jean d'Ulloa et 550 chevaux (carabiniers toscans).
L'avant-garde occupa Prato, à seize kilomètres nord-ouest de
Florence, le centre à San-Piero et Secoli, tenant les roules de
Filigare et de Porretta. La division Mezzacapo, composée en
majeure partie déjeunes Romagnols, adolescents non équipés, à
demi vêtus, dépourvus de tout, eut son quartier général à Veo-
chia, occupant Borgo-San-Lorenzo, sur la route de Faenza ^
Dicomano, sur la route de Forli.
En fait, les deux divisions d*Ulloa et de Mezzacapo n'avaient
pu mettre en ligne trois mille combattants.
Le mouvement avait pour objet de s'opposera la marche du
général autrichien de Wimpfien, signalé comme descendant, avec
un corps d'armée, du Tyrol, pour envahir les duchés. Le prince
Napoléon, prévenu par le grand quartier général, envoya deux
officiers du génie à Florence et à Pistoïa reconnaître les routes
do Porretta et de Filigare.
Le 30, le général de Lapérouse arriva à Livourne et le géné-
ral Uhrich en partit avec son état-major et le 82« de ligne pour
se rendre à Florence.
Des dispositions furent prises pour faire occuper par les troupes
les trois défilés de Porretta (sur Bologne), de Filigare (sur Bologne
et Ferrare), de l'Abetone (sur Modène). Ce dernier défilé était
celui qui devait être le plus rigoureusement observé, car le grand-
duc se trouvait aux environs, ainsi que les troupes autrichiennes.
Le prince Napoléon fit en personne, le 29, avec les généraux
18 5' COKPB DE L'iBM^K d'iTALIE I
tus
Cauvio du Eourguet. Coffinières et de Beaufort d'Hautpoul, la
reconnaiisanee des défilés jusque sur le territoire de Modène, ea
avant du col de l'Abetooe, puis il revint à Livourne.
Le leudemain 30 mai, le général Cauvin du Bourguet, à la
tête du 80° de ligue, d'une compagnie du génie, d'une compagnie
du train, quitta Pistoïa et s'installa le soir h San-Marcello,
au-dessous de Porretta et du col de l'Abetooe, à cheval sur la
route de Florence h Modène el k Reggio. Dans la nuit, lesbatail-
loDS de chasseurs toscans, quittant San-Marcello, se dirigèrent
par la montagne sur Porretta, poste qu'ils occupèrent, taudis
qu'une compagnie de voltigeurs du 80^ bivouaquait au col même.
Pendant que le général Cauvin du Bourguet faisaitce mouve-
ment, la 1" brigade de la division Uhrich et le 82' (de la 2'' bri-
gade) se concentraient sous les ordres de leur général de division
à Florence, ainsi que la brigade de hussards Lapérouse.
Le 31 mai, le prince quitta Livourne et vint établir son quar-
tier général à Florence. Il descendit avec son état-major au
palais de la Santa-Croce, résidence d'été du grand-duc, et ren-
força le général du Bourguet d'un demi-bataillon du 14° de chas-
seurs à pied.
La position en Toscane du 5^ corps, le 1^'' juin 1859, était la
suivante :
1° Le général du Bourguet avec le 80' de ligna, occupant des
positions au nord-ouest de Florence sur l'Apennin, surveillant le
duché de Modène, sa droite appuyée aux volontaires de Mezza-
capo et auï Toscans d'UUoa. Ce dernier était au défilé de Filigare.
2° Le gros de la division Uhrich et la brigade de cavalerie
l^ère, concentrés à Florence, au bivouac, sur les Caséines.
L 3" Les magasins généraux et les petits dépôts à Livourne,
Bâtée la base d'opérations du 5' corps.
r Des reconnaissances furent poussées h l'ouest dans la direction
de Bagni et en avant de Fiumalbo; on apprit par elles que
quelques cavaliers autrichiens se retiraient en Élisant sauter les
^ODts que les habitants s'empressaient de réparer.
Ainsi, les Autrichiens paraissaient disposés h battre en retraite
st à abandonner les duchés plutôt qu'à les défendre. Le prince
Napoléon, sur cette assurance, s'installa de son mieux dans le
palais de la Santa-Croce.
Le 4 juin, mon père débarqua à Livourne, et arriva quelques
s plus tard à Florence. Il se rendit immédiatement auprès du
344 BARON ROBKRT DU CÂ8SB.
prince Napoléon ; ce dernier, fort brusque de son naturel, n'ayait
pas été avisé de la nomination de mon père. Il reçut assez mal le
nouvel arrivant et semblait refuser de l'admettre à l'état-major
général du corps d'armée.
Mon père , décidément , jouait de malheur dans ses relations
avec la famille impériale. Il se contenta de dire au prince :
« Monseigneur, j'ai demandé à faire la campagne et non à
venir me promener sur les bords de l'Arno. Je serai donc recon-
naissant à Votre Altesse de me remettre à la disposition du
ministre de la guerre et heureux d'obtenir un service dans un des
corps en contact avec l'ennemi. Toutefois, je ferai observera
Votre Altesse qu'envoyé à l'état-major du 5* corps j'y prendrai
et garderai mon service jusqu'au jour où j'en aurai été relevé par
une décision régulière. »
Le prince fit appeler le général de Beaufort :
Comment trouvez-vous Du Casse, qui vient ici sans que je l'aie
demandé et qui prétend rester avec nous malgré moi?
— Mon général, dit mon père portant sa lettre de service
sans répondre au prince, voici mon ordre.
— Monseigneur, le commandant est parfaitement en règle;
c'est d'ailleurs un fort bon officier que je serai heureux de comp-
ter à notre état-major.
— C'est bien, en ce cas.
Mon père sortit avec le général, qui le présenta à ses nouveaux
camarades, le colonel Henry, les capitaines Hubert de Castex d
de Châtillon. Sur ces entrefaites, un valet de pied apporta à mon
père une invitation du général en chef à dîner pour le soir même.
Encore sous l'impression de la réception du matin, mon père
dit au valet de pied :
Veuillez dire à Monseigneur que je le remercie, mais que
mon état de fatigue ne me permettra pas de me rendre à son invi-
tation.
— Oh ! Du Casse, ne faites pas cela, je vous en prie, dit M. de
Beaufort. Acceptez.
— Soit, mon général, puisque cela vous est agréable.
Le soir, la mauvaise humeur du prince était dissipée. H
accueillit mon père avec bienveillance. Ils étaient à table, sépa-
rés par le général Jean d'Ulloa. Vers le milieu du dîner, se pen-
chant, derrière le général toscan, vers mon père, le prince
lui dit :
1
ut 5* COIFS DK l'Atuis D'rTALIE t^ 4859.
313
Comment trouvez-vous ma popotte?
Détestable, Monseigneur,
— Dites-le donc ii Georgette du Buisson, qui en est chargé;
ms me ferez plaisir.
Après le dîner, mon père servit ce mauvais compliment au
ipîtaine lie frégate Georgette du Buisson.
Comment le prince veut-il que ce soit autrement? » riposta
icier de marine. < Il veut que j'utilise pour sa popotte les
trente-six rations de campagne qui lui sont allouées comme com-
mandant de corps d'armée. »
Le lendemain, mon père, installé au palais grand-ducal de la
nta-Croce, prit son service. Profitant de quelques heures de
lîsir, il fut voir la marquise Bartolini, qui, très heureuse de le
'oir, le retint à dîner et le pria de revenir le plus souvent pos-
ile.
La marquise Bartolini, charmante et vertueuse Florentine,
bonne, aimable et gracieuse, était la troisième femme du vieux
roi Jérôme, encore \'ivant à celte époque. Le dernier des frères
de Napoléon I" oS'rit cette curieuse particularité dans sa vie
vée d'avoir toujours deux femmes légitimes simultanément
:TaQtes. Aspirant de marine à l'âge de dix-neuf ans, il avait
lusè à Baltimore miss Palerson, mariage nul aux yeux de la
loi française et contracté en violation de la législation du code
cdvil. Après que Madame mère eut fait reconnaître par les tribu-
naux compétents l'illégalité de cette union, le plus jeune frère de
Napoléon épousa en 1807 la princesse Catherine de Wurtemberg,
Après la mori de cette princesse, longtemps après, il épousa la
marquise Bartolini.
Le dimanche 5 juin, au soir, parvint à Florence la nouvelle
de la victoire de Magenta. Aussitôt la ville s'illumina, les
musiques parcoururent les rues en jouant l'air national italien,
et une ovation spontanée fut faite au prince Napoléon sous les
fenêtres du palais ducal, vers minuit.
Le lendemain, lundi 6, mon père, dans une lettre à ma mère,
lui marquait k propos des événements de la veille :
Hier, 5 juin, à six heures, tandis que nnus dînions, est arrivée la
nouvelle de la gj-andc victoire de Magenta. C'est fort beau et cela fait
désirer ici que nous nous menions aussi en marche, mais nous
n'avons que neuf mille hommes; quant aux armées toscanes, ita<
Ueones, roraagnoles, quelle bonne farce !
nriv
^nivi
^iipoi
346 BARON ROBKIT OU CASSB.
Le soir, à la suite de cette nouvelle, la ville était comme folle. Les
musiques, le peuple, les drapeaux sout venus à minuit attendre te
retour du prince et lui ont fait une ovation à la lueur des torches.
C'était superbe.
On nous apporte une autre dépêche sur Plnsurrection de Milan et
sur la poursuite des Autrichiens. Si cela continue ainsi, ce ne sm
pas long; aurons-nous seulement le temps d^entrer en ligne?
Le 6 juin, le cousin de Napoléon in donna un diner de gala,
à la Santa-Croce, en l'honneur des victoires de Tannée française;
le repas fut fort gai. Le prince, homme d'un savoir incomparable,
causeur accompli, d'une intelligence très développée, d'un esprit
vif et délié, quand il voulait s'en donner la peine, tenait un audi-
toire sous le charme et exerçait une séduction fascinatrice.
Le chef d'état-major général, le marquis de Beaufort d'Haut-
poul, profita de cette longue soirée pour entretenir le commandant
en chef de la situation des troupes bivouaquées aux Cascines, Bois
de Boulogne de Florence, assez humide.
Depuis plusieurs jours, la pluie n'avait cessé de tomber; les
soldats, les pieds dans l'eau, étaient fort mal sous leurs petites
tentes-abris. Le général Beaufort d'Hautpoul obtint l'autorisa-
tion de les faire rentrer dès le lendemain à l'intérieur de la ville,
où ne manquait pas le logement, ne fût-ce que dans les vastes
monastères.
Le prince s'était composé une sorte de petite cour. Auprès de
lui vivaient plusieurs familiers venus de Paris, entre autres le
spirituel académicien Emile Augier, le richissime comte Branicki,
qui avait endossé pour la circonstance un uniforme passablement
hétéroclite de colonel de la garde nationale.
On menait joyeuse vie à la petite cour du prince, installée à la
Santa-Croce. Les amis venus de France n'engendraient pas la
mélancolie.
La politique et l'ambition ne laissaient pas non plus que d'avoir
leur place dans les préoccupations du général en chef. Il eût
volontiers relevé à son profit le royaume d'Étrurie en ce beau
pays de Toscane, où le cher cousin l'avait forcé de pénétrer en
triomphateur et le maintenait bien longtemps. Mais le rêve poli-
tique du prince n'était pas précisément celui de l'empereur. Le
ministre de France, marquis de Ferrières-Levayer, avait des
ordres fort différents.
"^COIPB DE L'iUBB D ITILEB tIM
A ce sujet, mon père écrivait à ma mère le 7 juin :
J^ai dîné ce soir chez Dolre ministre a Floreuce. Nous avons causé
du prince, qui no laisse pas que de l'embarrassep beaucoup en surei-
cîtanl les passions politiques. Toujours la même chanson. Le ministre
a demande son rappel, car il ne sait comment se tirer d'affaire. Il y
a ici un parti pour la réunion de la Toscane â la Sardaigiie, un autre
avec annexion des duchés pour former un royaume au bénétice du
prince Napoléon; il y a aussi un parli pour la république. Le clergé
séculier et régulier, Tort riche et influent dans ce pays, désire l'ancien
duc avec la protection de TAutriche.
Telle est la posilioa de la Toscane en ce moment. Nous chantons
le Te Deum pour nos victoires, les Autrichiens adressent au ciel des
prières pour le succès de leurs armes. Le prince Napoléon invoque
Satan pour qu'une couronne lui monte de l'enfer ou lui descende du
ciel. Comme disait plaisamment un ahhé quelque peu folâtre : « Que
Dieu et le diable se tirent d'afl'aire I o
Vous comprenez comme les arrangements seront faciles, la paix
Ulc.
f J'ai été chargé d'inspecter les fameuses divisions d'Ulloa et Mezza-
0,po. J'en ris encore, Au train dont vont les choses, la guerre sera
e avant que les Toscans d'Uiloa aient des vêlements et les Roma-
tols de Mezzacapo des chaussures. Et tout ce monde-là nous crie-
_ yt encore aujourd'hui tiien volontiers : Allez-vous en, nous n'avons
pas besoin de vous. Italia farà da se! Oh I si, à l'insLar des murs
de Jéricho, il sufïisait pour avoir raison des troupes autrichiennes
de chansons patriotiques, quelles belles victoires remporteraient les
belliqueux tmorini et soprani italiens !
Nous venons d'apprendre la mort de ce brave Cler, celle de mon
camarade Senneville. Le pauvre colonel de Senneville a été embroché
d'un coup de lance, par un cavalier autrichien, dans une imprudente
reconnaissance faite par le maréchal Canrobert, dont il était le chef
d'étal-major. Senneville était le beau-frère de Ferrières'. Vous com-
prenez si les pauvres gens sont tristes. Les Autrichiens avaient tendu
une embuscade à Cauroberl, qui, lui et ses ofQciers, uni dû mettre
répée à la main pour se tirer de leurs mains.
Les Aulricbiena ont quitté Bologne. Us sont bien ballus, Cela ne
peut durer longtemps. Cette guerre sera courte.
Le leademain du dîner de gala, conformément aux instructions
b'U avait obtenues du prince, le général Ueaufort donna à mou
. Le nuiqais de Fenières-Lev»yer, ninlslre de France i Florence.
348 BARON ROBBRT OU CASSB.
père Tordre de s'entendre avec le gonfalonier (maire) pour loger
les hommes et les chevaux du corps d'armée encore à Florence
et se rendre compte de la place disponible dans les couvents de
la ville.
Mon père se convainquit vite des immenses ressources que œs
nombreux établissements pouvaient fournir. Il y avait telle de
ces vastes maisons, admirablement aménagées, dont les cloîtres
pouvaient contenir un régiment tout entier et qui n'était occupée
que par une trentaine de religieux.
Néanmoins, l'installation des troupes n'alla pas sans certaines
difficultés. La municipalité de Florence était bien disposée à four-
nir des lits pour les hommes, de la paille pour les chevaux ; mais
les bons moines, fidèles sujets de Thonnête et pieux grand-duc,
no voyant dans les Français que les alliés du roi Victor-Emmanuel,
cherchaient de puérils prétextes pour éviter de loger nos troupes.
Au premier couvent où mon père se présenta, TAnnonciade,
impossible d'ouvrir aucune porte, les clefs étaient égarées. Mon
père offrit alors d'installer ses hommes dans les cloîtres. Autre
objection. Les cloîtres étaient indispensables aux religieux, ils
touchaient à la chapelle. L'écurie, très vaste, ne pouvait receToir
de chevaux; la mule du supérieur l'occupait. Impatienté de toutes
ces tergiversations, mon père se retourne vers les cavaliers d'es-
corte, entrés avec lui dans la cour intérieure du couvent :
« Six hussards pied à terre, commande-t-il. Prenez vos mous-
quetons et enfoncez-moi toutes les portes dont les clefs ne peuve&t
se trouver. »
Ce fut un véritable « Sésame, ouvre-toi. » Les clefis se retrou-
vèrent comme par enchantement. Mon père établit son caserne-
ment, et une heure plus tard les troupes s'installent.
Le 8 juin, un ordre du jour fit connaître la belle afiaire du
3" de zouaves, de la division d'Autemarre, à Palestro, sous les
yeux du roi Victor-Emmanuel*. Un Te Deum fut prescrit pour
le même jour à la cathédrale de Florence, en actions de grâces
pour les victoires remportées par nos troupes. Les bataillons et les
escadrons français et italiens prirent les armes et formèrent la
haie du palais de la Santa-Groce, quartier général, à l'église.
1. Ce fut à cette affaire qae les zoaayes français samommèrenl Vietor-EmiM-
nael U commandant Victor, comme jadis les grenadiers avaient surnommé
Bonaparte le petit caporal.
e commandant en chef, entouré de son état^major, à cheval,
i rendit à la pieuse cérémonie. A l'intérieur du d6me, les com-
pagnies d'élite formaient la haie.
A l'issue du Te Beum arriva à Florence la nouvelle de l'éva-
cuation de Pavie par les Autrichiens et de l'entrée du roi de Sar-
datgDe à Milan à la tête de son armée. Napoléon UI, dont l'armée
venait de battre l'ennemi à Magenta et de sauver le Piémont,
faisant preuve d'un tact exquis et d'une courtoisie toute française,
avait eu la délicate pensée, le bon goût de vouloir que le futur
roi de Lombardie entrât le premier dans sa nouvelle capitale et
seul au milieu de ses futurs sujets.
Les murs de Florence se couvrirent d'affiches invitant les Tos-
cans à demander leur aunesâon au Piémont.
Plusieurs partis politiques se dessinaient en Toscane. Le grand-
duc avaitlaissé des partisans dévoués et en grand nombre. C'était
la masse des habitants, et la chose s'explique d'elle-même. Ce
prince était excellent; son gouvernement bienveillant, doux,
facile, tolérant. Pas de conscription; peu de service militaire;
peu d'impôts; une somme de liberté très réelle. C'étaient là de
grands avantages, que la Toscane n'a jamais retrouvés depuis
cette époque. Il eu était de même, il faut bien le reconnaître, des
duchés de Parme et de Modène. Un autre parti poussait à l'an-
nexion piémontaise. Il était le moins nombreux et le plus bruyant,
et eu dessous main fortement appuyé par l'empereur Napoléon 111.
Déjà avait germé dans l'esprit de ce dernier l'idée de donner à
Victor-Emmanuel les trois duchés en compensation de Nice et
de la Savoie. Quelques isolés désiraient l'étaLlissement de la
république. Enfin, comme si ce n'était pas assez de trois partis
dans ce petit pays, le prince Napoléon poussait à la création d'un
quatrièjne, le sien. Ce quatrième, à la vérité, comptait peu
d'adhérents. Le pauvre prince Napoléon n'a jamais fait naître
chez personne le désir de devenir son sujet.
« Voyez-vous, > disait un officier du corps d'armée, * si l'on
réunissait dans les Caséines tous les partisans de notre général
en chef, ils pourraient y jouer à cache-cache plusieurs jours sans
se rencontrer, »
Parmi les officiers attachés à sa personne, pas davantage
d'entrain, de prosélytisme.
Le commandant du ô° corps se faisait des illusions sur
ses chances de succès. Il mettait daua un cruel embarras notre
.r-l^'
,uls de corp*
3{g RkBON BOBERT DU CISSE ..
père l'ordre de s'entendre avec le gootaloiiL «
163 hommes elles chevaux du corps J'aria
et ae rendre compte de la place dispouîblo
la ville.
Mon père se convainquit vite des ipur
nombreux établissements pouvaient f'
ces vastes maisons, admirablement ■
pouvaient contenir un régiment to-
que par une trentaine de religiei'
Néanmoins, l'iustallalion de-
diflficultés. La municipalité di
I nir des lits pour les homme
I les bons moines, fldèlaa r , -
f ne voyant dans les Frao "î"r' militaire instruit, offl^
l cherchaient de pu&rilf .[.agnie, en arrivant au grand qu»*;
Au premier oouv ■"^'■^ ''"P"'^^ "^^ '"^j«'" ^^"^^1 Vailla'"'-
f impossible d'ouvr" mauvais goût inhérent h sa nature grf"
père offrit alors "^ ^"^ "^«iP ^"^ P""** P^^" cett« plwased»"
1 objection. Lep ■'"''' ■ ■-
touchaient h -M^"^' ^'^ ^" ^^'^''P^ ®'' ^° ^'^ contiDuenl à ae cott^
\ de chevau'
|ces tergi- \i.,'("*' Monsieur le maréchal, lui repliqua son io^^vé
' ,,^ uQ spirituel sang-froid, le 5* corps et son <^
, .\ préparer la vôtre, car sans notre occupation \0 **
' tiius ne seriez pas aussi avancé aujourd'hui,
iTL'mieraidede<an'P'
.aveur de marchera' ^'''
r
n^''_^te était aussi bien trouvée que vraie et juste j le 5* co("f ^.!
^ \ièine roue, par sa présence dans les duchés, retec»'^*
' -i^nde partie des forces ennemies loin du théâtre des opé»^'
*^ jfl guerre. 11 rendait ainsi un service capital et, en eû*-^^
'?7utrement, rien n'était plus déplacé que de plaisanter et '
ijpjjher à tourner en ridicule la conduite d'un corps d'aror^^'
j_jt I» ^^ '^■'t' ^tait d'exécuter les ordres du commandem^^'
jppérieur.
\ji colonel vit ensuite l'empereur. Napoléon III, malgré
\ priôre de son cousin, persistait à vouloir que le 5' corps restât ^^
I ^cane. M, de Franconnîère avait des ordres formeb du prince^
comprenait d'ailleurs, aussi bien que son général, le ridicule, ai^^ -
yeux delà France et de l'armée, du rôle qu'où lui faisait jouer*—
Il osa insister; en parlant à S. M., il éleva la voir de SéJ-^
sorte que le maràchal Vaillant, inquiet, crut devoir entrer dux^
320 BARO!f ROBERT DU CASSB.
ministre plénipotentiaire, le marquis de Ferrières-Levayer. Les
inclinations personnelles xde ce dernier le portaient à désirer la
restauration du grand-duc ; les instructions secrètes du gouver-
nement impérial l'incitaient à pousser à Tannexion au Piémont.
Lassé des rôles qu*on voulait lui faire jouer, le marquis de ¥&-
rières finit par demander son rappel.
Malgré ses velléités royales, le prince Napoléon désirait quitter
la Toscane et rallier le gros de Tannée. Il sentait Tivement le
fâcheux de sa position, seul de tous les commandants de corps
éloigné de Tennemi.
Il envoya au grand quartier général son premier aide de camp,
le colonel de Franconnière, solliciter la faveur de marcher à Ten-
nemi.
Franconnière, homme de valeur, militaire instruit, ofiBder
calme, réservé, de bonne compagnie, en arrivant au grand quar-
tier impérial, se rendit d*abord auprès du major général Vaillant.
Le maréchal, avec le mauvais goût inhérent à sa nature gros-
sière, accueillit Taide de camp du prince par cette phrase d'an
tact tout particulier :
Eh bien, colonel, le 5*^ corps et son chef continuent à se couvrir
de gloire?
— Du moins. Monsieur le maréchal, lui répliqua son inter-
locuteur avec un spirituel sang-froid, le 5* corps et son chef
travaillent à préparer la vôtre, car sans notre occupation de la
Toscane vous ne seriez pas aussi avancé aujourd'hui.
La riposte était aussi bien trouvée que vraie et juste ; le 5' corps,
la cinquième roue, par sa présence dans les duchés, retenait
une grande partie des forces ennemies loin du théâtre des opéra-
tions de guerre. Il rendait ainsi un service capital et, en eût-il
été autrement, rien n'était plus déplacé que de plaisanter et de
chercher à tourner en ridicule la conduite d'un corps d'armée
dont le seul tort était d'exécuter les ordres du commandement
supérieur.
Le colonel vit ensuite l'empereur. Napoléon III, malgré la
prière de son cousin, persistait à vouloir que le 5* corps restât en
Toscane. M. de Franconnière avait des ordres formels du prince. 11
comprenait d'ailleurs, aussi bien que son général, le ridicule, aux
yeux de la France et de l'armée, du rôle qu'on lui faisait jouer.
Il osa insister; en parlant à S. M., il éleva la voix de telle
sorte que le maréchal Vaillant, inquiet, crut devoir entrer dans
..j
LE 5' CDKFS DE L'iKH^E D'iTitlE SK 48!
321
e l'empereur. Ce dernier termina l'audience en disant
tout haut au colonel : ■ Si Napoléon ne veut pas faire ce que je
veux, qu'il tasse donc ce qu'il voudra. » M. de Franconnière, en
rentrant à Florence le 14 au soir, rapporta ces paroles à son
général. Le prince décida de quitter immédiatement Florence
pour se porter sur Lucques et Massa, de façon à rallier l'armée
le plus rapidement possible.
La division Uhrich, la brigade La Pérouse et l'artillerie
reçurent l'ordre de gagner Parme par Lucques, Massa, Pontre-
moli, Casal-Maggiore ; les Toscans du général Ulloa par Pistoïa,
San-Marcello et Reggio.
Quant à la malheureuse division Mezzacapo, sans l'intelligence
politique et la prudence de son chef, elle changeait peut-être la
face des choses et, par la faute du prince Napoléon, mettait la
France dans une situation fausse, peut-être dangereuse et cri-
tique. Le prince, ayant appris par le colonel de Franconnière
la retraite des troupes autrichiennes qui occupaient la ville de
Bologne, envoya au général Mezzacapo l'ordre secret de partir
immédiatement avec ses volontaires, d'entrer sur le territoire des
Romagnes, d'aider au soulèvement du pays, alors en fermenta-
tion, et de se mettre aui trousses des Autrichiens. Or, une expé-
dition de ce genre était tout simplement la violation des Etats de
l'Église, dont la neutralité avait été hautement proclamée par la
France.
Cela donnait un excellent prétexte à la Prusse, qui en cher-
chait uu à peu près plausible pour se déclarer contre nous. Le
prince Napoléon ne l'ignorait pourtant pas, et il eut l'inconce-
vable distraction de perdre de vue cette redoutable éventualité ;
elle venait pourtant de lui être rappelée par le ministre de la
guerre dans une lettre toute récente (1 1 juin) que voici :
Monseigneur',
J'allends les ordres de l'empereur au sujet des officiers du grade
de colonel ou de lieulenanl-colonel que V. A. L mo fait l'honneur
1. Celle langae lettre, tout entière de la main du maréchal comte Rudon,
4Lait une réponM i une demande d'oOicicrs Taile par le prince, qui, ne Toyaot
dans les troupes auiiliairci peraonne en élat de commander des brigades, avait
écrit au nlnUtre de lui eavojer des cotooels [raoçaiB poar les inveslir du com-
mandemenl des brigades toscanes et romagnoles, sous ien ordres des (ténéraux
<i^Ulloa el Mezzacapo.
, Rbv. HisTOB. LXVI. 2' FABc. 21
322 BiBOn EOBIIT DU CiSSI.
de me demander pour exercer le commandement des brigades de
Tarmée toscane, car je ne pourrais pas me permettre, sans une auto-
risation formelle de S. M., de donner une pareille mission à des oiB-
ciers quelconques de Tarmée.
Je ferai toutefois remarquer à Y. A. 1. que je ne pourrais trouYer
que parmi les colonels d'état-major les ofQders de ce grade suscep-
tibles de vous être envoyés, puisque les autres colonels sont attachés
au commandement de leurs régiments, et que ce ne serait pas sans
les plus graves inconvénients que Ton pourrait les en distraire. Or,
je n'ai pas un seul colonel d'état-major qui ne soit employé très uti-
lement pour le service, déjà si réduit, de Tarmée de Tintérieur.
11 resterait donc à chercher dans les lieutenants-colonels d'iafan-
terie les chefs de brigade que V. A. I. voudrait donner à Parmée
toscane. Je me permettrai à cette occasion de lui faire observer
qu'elle aurait bien plus d'avantage, bien plus de facilités à reocoD-
trer les officiers de ce grade dans les régiments qui composent son
corps d'armée, que de recevoir de France des officiers supérieurs qui
auraient sans doute été choisis parmi ceux bien notés, mais qui
pourraient parfaitement ne pas réunir les conditions ou qualités spé-
ciales que V. A. I. est en droit de réclamer.
Ces observations étant faites, j'attends les ordres de Tempereur,
et m'acquitterai de mon mieux de ce qu'il aura décidé et de ce qui
fait le sujet de la demande de V. A. I.
Les congés renouvelables avaient en grande partie rejoint les ré^-
ments de la division Uhrich avant son départ de Paris; tous ceux qui
sont encore aux dépôts, aussi bien que les soldats dont rinstructiou
est terminée, sont incessamment dirigés sur les bataillons de guerre;
j'y tiens la main très sévèrement, parce que je comprends l'utilité
de renforcer les bataillons de guerre.
Les armes destinées aux troupes toscanes que Y. A. L avait
demandées sont en mer ou bien ne tarderont pas à être embarquées;
il a fallu les tirer d'autres arsenaux que ceux du littoral; c'est ce qui
a causé un peu de retard.
Les médecins et vétérinaires demandés par Y. A. I. doivent être
arrivés; ce n'est pas sans de grandes difllcultés que je puis fournir
et satisfaire aux exigences continuelles qui fondent sur le ministère
de la guerre. Si de grands intérêts^ si de grandes choses 5*arcom-
plissent en Italie, notts avons de grands devoirs à remplir en
France et de très sérieuses préoccupations à dominer du côté de
V Allemagne.
Il nous faut pour cela l'aide de Dieu et la patience des hommes.
J'ai demandé avec instance à Tétat-major général que Ton me fit
I
LE 5* GOBTS oi l'ikm^Er d'itilik bh 48S9.
lailre les besoins en approvisionnements de toute espèce des
tapes sous le commandcmenl de V. A. I., aussi bien que les dis-
positions à prendre pour y pourvoir. Jusqu'à ce jour, je n'ai rien
reçu ; cela pourra expliquer le retard que quelque partie du service
peut éprouver.
Je comprends que V. A. 1. est dans une position qui réclame une
vigilance toute particulière, cL il ue dépondra pas de moi que tout
marche réguliëremenl.
Je vous prie, Monseigneur, d'agréer, etc.
Maréchal Rindor.
On voit, par le paragraphe relatif à nos relations avec l'AlIe-
magneà cette époque, à quoi le coraraaiidautdu 5" corps exposait
la France, de gaieté de cœur, par son ordre intempestif.
Heureusement, le général Mezzacapo ne fut pas pris au
dépourvu. Son aide de camp, le baron Magliano, était fort lié
avec mon père et avec plusieurs autres officiers de l' état-major
général du 5° corps. Ceux-ci, aussitôt qu'ils connurent, par leur
camarade Franconnière, les intentions du prince, patriotiquement
effrayés des conséquences possibles, avisèrent le baron Magliano
afin qu'il avertit son général. — Mezzacapo (devenu depuis
ministre de la guerre du royaume d'Italie) était un homme de
sens et de valeur. — Ainsi prévenu d'avance, il put prendre le
temps de la réflexion et, d'accord avec son aide de camp (en qui
il avait avec raison grande confiance), arrêter la conduite qu'il
aurait à tenir. Aussi, lorsqu'il reçut l'ordre du prince de pénétrer
dans les Romagues et de violer la neutralité des Etats pontificaux,
il manifesta un empressement et un désir extrême d'exécuter
l'ordre, ajoutant toutefois que, lui et ses volontaires étant à la
dolde du roi de Sardaigne, il ne pouvait agir sans l'autorisation
dd ministre de Sardaigne en Toscane, M. Buoncompagni. Ce
dernier refusa l'autorisation et en référa à son souverain. Ainsi
furent évités les dangers d'une escapade politique qui avait pour
but de renverser le pouvoir temporel du pape et pouvait jeter la
France dans les embarras d'une guerre européenne contre la
lition de plusieurs puissances continentales.
Baron Robert Dd Casse.
{Seracontimié.)
MÉLANGES ET DOCUMENTS
M. THIERS ET LA SITUATION PARLEMENTAIRE
Eff 4839.
Le tome VI des Souvenirs du baron de Barante (G. Lévy) ou, pour
mieux dire, de la correspondance politique du baron de Barante, car
il se compose exclusivement des lettres échangées entre M. de Barante,
alors ambassadeur à Saint-Pétersbourg, avec lecomte Mole, M. Tbiers,
le maréchal Soult, M. et M™' Anisson Du Perron, M. de Sainl-Aulaire,
M. Mounier, la duchesse de Broglie, M™* de Talleyrand, etc., est un
des plus intéressants d'un recueil où rien n'est indifférent. II com-
prend la période qui s'étend d'avril -1837 à août 'I84'l , c'est-à-dire de
l'avènement du ministère Mole à la signature, par le ministère Soult-
Guizot, de la convention des Détroits. Le poste diplomatique occupé
par M. de Barante auprès de Tempereur Nicolas, à un moment où les
affaires d'Orient avaient, de la manière la plus anormale, uni la Rus-
sie et l'Angleterre contre la France, qui protégeait Mébémet-Ali, donne
à sa correspondance un intérêt vraiment dramatique, et cet intérêt
est doublé aujourd'hui par les liens nouveaux qui unissent la
France et la Kussie. On voit que déjà en ^1840 M. de Barante et même
M. Thiers se demandaient si la France et la Russie ne devraient pas
faire cause commune en Orient, et l'on entend Nicolas I*' dire à Tarn-
bassadeur de France : « L'Egypte ! les Anglais la veulent. Ils en ont
besoin pour la nouvelle communication qu'ils veulent ouvrir avec les
Indes. Ils s'établissent dans le golfe Persique et la mer Rouge. Vous
vous brouillerez avec eux pour l'Egypte. Votre prospérité intérieure
M. TIIIBS3 ET Ll SITDtTIOlf PABLEXENTÂIltS EN iSA9.
325
irrile les Anglais. Ils s'en irritent comme de celle de l'Allemagne. Ils
ont besoin de consommateurs au deliors. Ils ont besoin de débouchés.
C'est une loi de leur politique, d La répugnance invincible qui lenait
Nicolas I" éloigné du gouvernement de Juillet, né sur les barricades,
livra alors l'Europe à la politique insolemment égoïste de l'Angle-
terre, cette politique qui allait jusqu'à Taire main basse en pleine paix
sur des navires de commerce napolitains, pour interdire au roi des
Deux-Siciles de concéder à une compagnie française le monopole des
soufres. L'Angleterre, alors comme aujourd'hui, sacrifiait au souve-
nir d'un antagonisme héréditaire ses véritables intérêts qui devraient
la rapprocher de la France, sa naturelle associée commerciale, inca-
pable d'être sa rivale. Il est vrai que la France, de son côté, ci3de le
plus souvent au même préjuge et oublie que sa prospérité est indis-
solublement liée à celle de l'Angleterre.
Ce qui, dans ce volume, touche la politique intérieure n'est pas
moins important que ce qui concerne les alTaires européennes. On y
voitalors, comme aujourd'hui, les querelles parlementaires de partis
et de personnes s'agiter aux dépens des intérêts supérieurs du pays. On
mesure dans c£s lettres la mesquinerie de ces querelles qui se pro-
duisaient sur le terrain prodigieusement étroit du pays légal d'alors
et l'on voit avec peine des hommes de la valeur de M. Guizot et de
M. Thiers se compromellredansdes intrigues aussi pitoyables que la
coalition qui brisa le ministère Mole et qui engendra, au moment
même où la question d'Orient était le plus aiguë, l'anarchie rainiaté-
rielle qui dura pendant toute l'année 4839. On lira avec intérêt,
croyons-nous, comme complément aux nombreuses lettres des cor-
respondants de M. de Garante qui racontent et jugent la conduite et
les tergiversations de M. Thiers en 1839, ce qu'écrivait le J5 avril de
cette année, sur > la situation de Thiers, " M. d'Argoul, qui avait
été cboisi par M. Thiers comme ministre des finances dans le minis-
tère du 32 février 1 836. Nommé gouverneur de la Banque de France
après que Louis-Philippe, par une sorte de caprice royal, avait ren-
voyé le ministère Thiers pour former le ministère Mole (6-12 juillet
^836), d'Argout était resté, sinon attaché à la politique du centre
gaoclie, du moins sympathique à la personne de Thiers, tout en le
jugeant avec indépendance.
326 ■<LAN6BS BT DOCUMENTS.
DE LA SITUATION DE THIER8.
15 AVRIL 4839.
Plus la crise ministérielle se prolonges plus elle se complique; la
Chambre se morcelle en fractions, les hommes politiques se divisent.
Le centre gauche tend à se séparer en deux, la doctrine pareillement.
Thiers est mécontent de Sauzet, de Passy^, qui veulent entrer au minis-
tère sans lui. Il ne peut parvenir à s'entendre avec Guizot, qui refase
de porter Barrot à la présidence. Duchàtel, Duvergier et Hubert
échappent à Guizot, le maréchal Soult se livre à une haine aveugle
contre Thiers, Humann s'est laissé entraîner au centre droit, Dapin
déclame contre tout le monde, et le duc de Broglie, en cherchant à con-
cilier le centre gauche et la doctrine, pourrait bien hériter de Tnne et
de l'autre en acceptant un portefeuille avec les hommes de seconde
ligne do ces deux couleurs 3.
Le centre droit, c'est-à-dire les 224 réduits à 180^, sont lessealsqoi
demeurent unis. Ce parti, sans chef apparent, dépourvu de capacitée
parlementaires, se maintient cependant dans une parfaite cohésion; les
hommes sont inhabiles et le parti manœuvre avec constance et habi-
leté. Ce fait serait inexplicable si l'on ne savait que le roi en est Tàme
cachée et que l'adhésion' du centre droit est cimentée par la haine et
la peur.
Les divisions sont fomentées par les rivalités des chefs, par leurs pré-
tentions exorbitantes et surtout par les manœuvres du roi. Avoir le pins
petit ministère possible pour demeurer le maître, tel est son but. Exdare
Thiers, ou ne l'admettre que dans une position humiliée, ce serait un
grand triomphe pour son amour-propre, et il n'épargne rien pour y
parvenir.
1 . Elle durait depuis le 22 Janvier et ne devait prendre fin que le 12 mai.
2. Passy avait été élu le 6 avril président de la Chambre en opposition à
Odilon Barrot. Au moment où d'Argout écrivait ces lignes, il cherchait à fo^
mer un ministère centre gauche sans Thiers. Dupin fit échouer la combinaison
par son refus d'y entrer (30 avril).
3. D'Argout soupçonne ici le duc de Broglie de calculs tout à fait étrangen
à son caractère. 11 avait réussi à réunir dans le ministère dn il octobre 1835
M. Thiers et M. Guizot. Leur désaccord avait été la cause de sa chote. Au lien
de leur garder rancune, il travaillait à les réconcilier, convaincu qne leur boa
accord était nécessaire à la monarchie.
4. Le ministère MoIé avait eu, lors du vote de l'adresse, 221 voix en sa
faveur contre 208. Ne trouvant pas celle majorité suffisante, il avait dissous la
Chambre, et ses partisans n'étaient revenus qu'au nombre de 180, vaincus par
la coalition des légitimistes, des doctrinaires et de la gauche.
5. D'Argout veut dire « cohésion, i
. > .•
^^^^^it. THIEB8 ET U SlTOiTIOK PiRLEHENTilEE EH iS39,
Le calcul du roi manque de justesse et de loyaulé. Son obslioaiion à
maÎDieoîr l'incapable ministère du <5 avril* a déjà produit graad mal.
Le roi aggravera ce mal en chercbanl à afl'aiblir d'avance le minislèra
qn'il sera forcé de subir, c'est-à-dire les instruments futurs de la royauté.
Le roi, en maîtrisant le ministère Mole, croyait agrandir son inllHence
pergonnelle, tandis qu'il dirigeait contre lui-même les mécontentements
ffxciléa par une administration déplorable; dominateur de Luit per-
sonon, son induence ne s'étendait pas au delà des étroites limites de
la salle du conseil au palais Bourbon. Ses volontés, mal défendues par
des ministrcB complaisants, subissaient échec sur échec, et c'est ainsi
que l'autorité royale s'est momentanément perdue. L'autorilâ minislê'
rielleapéri du même coup, La Chambre des pairs, toujours aui ordres
du roi, est, par cela même, devenue sans crédit. A la Chambre des
députés seule demeure quelque autorité, c'est là l'unique pouvoir igui
demeure debout. Mais la Chambre esl partagée par moitié et le roi tra-
vaille méchamment à la diviser davantage; bientôt elle sera également
ruinée dans l'opinion. Alors l'anarchie morale deviendra complète, et en
France l'anarchie matérielle la suit toujours de près.
Celte situation étant donnée, quelle conduite Thiers doit-il suivre '{ Il
a déjà fait manquer une combinaison de centre gaucho en élevant une
controverse sur le sens du programme accepté par le roi. Thiers a été
sévèrement blâmé, à raison, selon mol, car s'il lui répugnait d'entrer
dans un cabinet qui ne lui offrait point de suffisantes garanties, mieux
valait le déclarer dès l'abord, plutôt que de rompre par le fâcheux expé-
dient d'une mauvaise querelle'.
De cette rupture est provenuo l'irritation du maréchal Soult et la
quasi défection de Passy, si funeste au centre gauche. La pofiilion de
'Thiers s'en est alTalbUe ', il n'en est pas moins demeuré intraitable sur
la Cfuestion de la présidence de Barrot. La condition une qua non de
toulss ses négociations avec las doctrinaires a Hé un engagemenl txigé
if«ujr de donner leurs votes à Odilon. Il a fait de ce vote une question
de cftbtaet. Les doctrinaires ont refusé, en alléguant que la nomination
de M. Barrot était plus qu'incertaine et qu'en votant pour ce candidat
iU s'aliéneraient i jamais le centre droit. < Après cet échec, disaient-ils,
la situation du centre gauche n'en sera pas moins puissante el honorée
dans le pays, mais, pour nous, quel sera notre sort ? A quel isolement
1. Le 15 avril 1S37, MM. Barthe, de Uonlallvel. Lacave-Laplagne et de Sal-
vandjr avaicDt remplacé dans le rainiïlère MdIë MU. Persil, de Gasparin,
DucbMel et Gnizot. Depuis lors le ininiatère ne Gt plus que végéter rualgré
la dissolution d'octobre 1837. Guizat se vengea en s'alJiant à Thiers puar rcn-
rerser Holé. Gelui-cl, dans une lettre à Baraate du 3 juin IS39, avoue que
c'est le roi qui l'a empêché de s'assurer l'appui de la gauche aprËe les nou-
velles élections de 1838.
2. Thiers lit échouer eu effet le SI mars 1839 une combinaison ceulre gauche
sous la présidence du marËchal Soult.
328 MELANGES ET DOCUMENTS.
ne serions-nous pas condamnés ? Quelle occasion trouYerions-nous de
nous relever ? i Ces considérations ne manquaient ni de justesse ni de
vérité.
Les motifs d'insistance allégués par Thiers n'étaient pas moins fon-
dés. « Si les doctrinaires refusent de se compromettre par un Yote,
disait-il à son tour, quelle foi puis-je faire sur la loyauté de leur con-
cours ? Une fois admis au pouvoir, il leur sera facile de s'entendre avec
le centre droit et de former une majorité qui m'expulserait bientôt. Qui
m'appuiera dans le nouveau cabinet? 8ur qui devrai-je compter? Sur
le maréchal ? Il se proclame mon ennemi. Un raccommodement ne sera
ni sincère ni durable. D'ailleurs, quoi de plus aisé que de changer ses
dispositions ? Passy, Dufaure et Sauzet devraient être nos alliés natu-
rels. Mais le seront-ils en effet? Sauzet est vaniteux et pusillanime \ il
tourne à tout vent, il a la monomanie du ministère, il le désire trop
pour ne pas le conserver à tout prix. Dufaure, homme loyal, est neuf
aux grandes affaires, il est plein de scrupules et d'hésitation. Passy,
pâle et prolixe discoureur, habile à discerner les difficultés^ impuissant
à les résoudre, est animé d'une jalousie furieuse contre moi, il me tra-
hira aussitôt qu'il pourra trahir avec sécurité. Je me trouverais donc à
la discréliou des doctrinaires, mes vieux ennemis, et je vivrais sous leur
protection, (^elte position serait intolérable. Mais si je les contraignais
à porter iiarrot, cette tentative, dût-elle échouer, m'assurerait la bien-
veillance de la gauche et l'appui de ses journaux. Entrant au ministère
avec cette formidable clientèle, alors je pourrais contrebalancer les doc-
trinaires, tenir en respect les ministres du centre gauche et lutter avec
chance île succès contre le roi lui-môme. Si je m'obstine à exiger la pré-
sidence de Barrot, ce n'est ni par caprice ni par entêtement, mais une
rigoureuse nécessité. »
Tel a dû être le langage de Thiers, ou du moins ses pensées. Son lan-
gage, je ne Tai point entendu, ses pensées, il ne me les a point com-
muniquées, mais jo le connais assez pour être certain qu'il a été dominé
par ces considérations. Toutefois, en y persévérant avec opiniâtreté, il
sert merveilleusement les projets de ceux qui veulent l'exclure du minis-
tère. Puisque la nomination de Barrot est impossible, même avec le
concours des doctrinaires, pourquoi ces exigences tyranniques ? Thiers
a donc dos engagements secrets avec la gauche? S'il en est ainsi, sa pré-
sence au conseil ne deviondra-t-elle pas dangereuse ? Il poussera le gou-
vernement de ce côté ; une fois lancé sur cette pente, qui pourra l'arrê-
ter? On marchera vers une révolution nouvelle*. Mieux vaut exclure
t. Sauzet justifia le 24 février 1848 le jugement de d'Argoat. On se rappelle
le vers des Châtiments :
Kt Dupin accusant Sauzet de lâcheté 1
2. i M. Thiers, écrivait Mole à M. de Barante le 25 avril 1840, in à gauche,
quoi qu'il veuille..., il a certainement beaucoup d'esprit, de dextérité, mais iJ
H. TBIBRB ET U BIIHilIOH PABLBHBireilU BIT i
Thiers <lu ministère. Le cabinet sera moins fort, mais ses tendaDCCS
seront moins périlleu^QB. Le cabinet aura une majorité, plus faible
il est vrai, mais qui ne vivra pas sous la dépendance da parti révolu-
tjoonaire.
La formation d'un parmi ministère n'a rien d'impossible, tout dppend
de la volonti^ du duc de Broglie. Le maréchal, le duc de Broglie, Dupin,
Humann, Dnchàlel, Duperré, Passy, Bauzet et Dufaure formeront un
cabinet suffisant pour la politique et pour les affaires ; ce caLieiet rassu-
rerait les esprits et obtiendrait la majorité, car bien des gens sont
inquiets ou fatigués et ne demandent qu'une occasion pour se rallier au
gouvernement.
Eu admettant qu'un ministère s'organise en dehors de Ouizot et de
Tbiere, que deviendrait ce dernier, sa position ne serait-elle pas plus
fausse et plus dangereuse que s'il entrait dans Se ministère sans exiger
la garantie d'un vote en faveur de Barrot?
Thiers, exclu du ministère, n'aurait que deux partis k prendre, celui
d'un silence qui l'annulerait, ou celui de l'opponition, ce qui le jellerut
À gauche. Son caractère moral recevrait la plus rude atteinte; d'odieuses
et df> lâcbes calomnies ont déjà ruiné sa réputation; des vivacités de
la Irilmoe peuvent donner prise contre lui ; bientôt il passerait pour un
ambitieux qui a déclaré une guerre personnelle au roi ou comme un
conspirateur qui veut le renverser. Peut-être, dominé par l'csaspéra-
tion, commettrait-il des fautes irrémédiables? Thiers se perdrait, mais
combien de mal no forait-il pasâ la monarchie ? Qui peut répondre des
chances de l'avenir? Une révolution est toujours possible dans un pays
oit elles ont été si fréquentes. Oi'i serait la certitude qu'un jour Tbiers
ne parviendrait pas à l'accomplir? Son immense talent, son audace, sa
dextérité le rendraient, du moins, un ennemi bien dangereux.
Thiers se trouve dans une triple alternative. Il peut entrer au minis-
tère, mais sans les ^rantics nécessaires pour y jouer un rôle important;
il peut se détruire par le silence ou se perdre en s'enrûlant sous le dra-
peau de la gauclie.
Le choix est hasardeux. Néanmoins, & sa place, je n'bésitQraiB pas,
le moindre danger est celui d'entrer au ministère. Thiers tient trop de
compte des obstacles prévus et de la disposition présente des esprits, et
pas assez des hasards de l'avenir et du parti que son talent pourrait
tirer du changement probable des dispositions des partis.
Thiers croit que la gauche l'abandonnera s'il se borne à porter Barrot
sans exiger le concours des votes des doctrinaires ; il se trompe, la
gauche aura de l'humeur, mais elle lui reviendra bientôt.
inan(|ne de jagemeat, de prévojiaace, do profondeur; il ne connaît ni les
honiLies ni la nature des partis et, on particulier, des opinions de gauche, dont
le propre est de ne pouvoir s'arrêter. Les partis n'ont pas de dernier mol,
voilA pourquoi il ne faut jamais leur céder. >
J
330 MELANGES ET D0GU1IK1IT8.
L'instinct des partis les porte à favoriser toujours celui des ministrei
qui se rapproche le plus de leur nuance.
Thiers se méûe de Passy et de Sauzet, et il n'a pas tort, mais, l'ae-
tion ministérielle une fois engagée dans les chambres, Passy et Sauzet,
tout aussi bien que Thiers, auront à défendre le pavillon du centre
gauche; le combat rétablirait la fraternité; la supériorité de Thien,
incontestable, forcerait des rivaux secrets à devenir de loyaux auxi-
liaires. Thiers redoute l'esprit d'envahissement et les vieilles hostilités
des doctrinaires, il apprécie justement les inconvénients de leor carac-
tère, mais il ne rend pas assez de justice à leur sagacité. Ils savent qae
l'avenir appartient aux opinions de la gauche, ils connaissent lenr impo-
pularité, ils n'ignorent pas que cette impopularité a été affaiblie parleur
coopération à la coalition, ils ne se presseront pas de reprendre une cou-
leur rétrograde. Peut-être deviendront -ils les plus fidèles alliés de
Thiers.
Enfin, Thiers croit à la persévérance de la haine du roi et il mécon-
naît son véritable caractère. Le roi n'a ni haine ni amour, les bons et
les mauvais services laissent peu de traces dans son souvenir. Le roi est
cssontiellcment mobile, il est tout au caprice, à la passion, à l'intérêt
du moment. Quels sont les sentiments qui exercent dans son cœur un
empire tenace? L'amour de la famille, une préoccupation presque
maniaque d'assurer l'avenir de ses enfants, la passion du pouvoir.
Aujourd'hui, le roi est violemment irrité contre Thiers, il ne peut en
être autrement, il y a lutte personnelle. Mais que Thiers rentre dans le
cabinet et le roi oubliera bientôt ses mécontentements, séduit par Thiers
dont l'esprit l'a toujours captivé. Il lui rendra sincèrement ses bonnes
grâces. Combien de déclarations le roi n'a-t-il pas faites contre Humann
et surtout contre Passy! Maintenant, il ne jure que par eux, tant ses
colères sont fragiles. A la vérité, la lutte recommencera aussitôt qu'il
s'élèvera dans le conseil une dissidence entre Thiers et le roi sur une
question étrangère, mais ce danger est inévitable. Quand bien môme
Thiers serait aujourd'hui l'objet de prédilection du roi, une lutte n'en
serait pas moins à redouter, à moins que Thiers ne se résigne à demeu-
rer en dehors du ministère pendant la vie du roi. Il faut bien qu'il
subisse un inconv('Qient irrémédiable. Le roi a une qualité précieuse,
il n'aime pas à changer de ministère, il ne recommencerait pas volon-
tiers le 6 Juillet^ et il gardera probablement pendant un certain temps
la mémoire des cruels embarras qu'il éprouve aujourd'hui.
Enfin, la prééminence des talents de Thiers et surtout la promptitude
et la sagacité de ses jugements lui donneront de grands avantages dans
le Conseil. Il y entre avec de mauvaises chances, le savoir-faire les ren-
dra favorables. Ajoutez-y l'immense chapitre de l'imprévu qui ruine la
1. Le 6 juillet 1836, quand Louis-Philippe renvoya le ministère Thiers pour
former le ministère Mole.
M. THIBBS ET LA SITUATION PARLBMENTAIBB EN ^1839. 33^1
ae politique des hommes médiocres et qui grandit celle des hommes
rieurs. Chose singulière et pourtant véritable, les chances calculées
celles qui se réalisent le moins fréquemment,
résultat, j'aime mieux Tbiers aux affaires, même dans une posi-
périlleuse, qu'au dehors. S'il tient les cartes en main, les as lui
Iront; s'il demeure en dehors, il se condamne à une inaction des-
ive ou à des hostilités qui le rendront odieux. Le mot d'ordre du
haut grade de la franc-maçonnerie, c'est : osez ; c'est une parole d'un
1 sens et qui explique presque tous les succès dans ce monde,
i carrière administrative et politique ne saurait être comparée à
de Tbiers, mais, je le déclare, je ne suis sorti do l'obscurité qu'en
iprenant des affaires désespérées et cola m'a toujours réussi.
D'Arqodt^
liers n'osa pas. Le 'l 2 mai fut constitué le ministère Soult, sans
ic de Broglie, resté fidèle à ses vues désintéressées^ mais avec
lâtel, Duperré, Passy, Dufaure, Villemain, Gunain-Gridaine^
leider. Sauzet fut président de la Chambre. Ce ne fut qu'en i 840,
' mars, que Thiers devint premier ministre, dans des conditions
moins favorables que celles d'avril 4839.
G. MoxoD.
Mous avons acquis de M. Et. Gharavay le texte autographe de ce docament.
BULLETIN HISTORIQUE
FRANCE.
NECROLOGIE. — Les études historiques ont éprouvé dans ces der-
niers mois des pertes sensibles. Le baron de Ruble était, avec M. Ludo-
vic Lalanne, M. de la Perrière, M. Baguenault de Puchesse, M. F. de
Grue et quelques autres, un des hommes qui ont le mieux connu notre
xvi' siècle et le plus contribué à en éclairer Thistoire. Il apportait à
cette étude la conscience d'un érudit scrupuleux et rimpartialité
d'une âme élevée et droite. Cette âme vraiment française savait
sentir la grandeur d'une Jeanne d'Albret aussi bien que celle d'un
François de Guise. Le pieux éditeur des Poésies et Mémoires de
Jeanne d'Alhret venait d imprimer, au moment où il est mort, une
étude sur Y Assassinat du duc de Guise par Poltrot de Méri^ où il
met en pleine lumière la figure d'un des plus grands hommes de
guerre du xti« siècle. 11 avait débuté dans la carrière de l'érudilion
comme éditeur des Commentaires et des Lettres d'un autre grand
capitaine. Biaise de Monluc, très inférieur moralement au duc de
Lorraine, mais à qui la postérité a presque pardonné son fanatisme
féroce et naïf, sa cynique mauvaise foi envers ses adversaires, en
faveur de sa verve gasconne et de son incomparable talent de narra*
teur. La publication des œuvres de Moniuc, qui fit le plus grand
honneur à la collection de la Société de l'histoire de France, av^t
préparé M. de Ruble à des travaux plus importants. Son grand
ouvrage sur Antoine de Bourbon et Jeanne éPAlbret (auquel vinrent
s ajouter des travaux de détail sur François de Montmorency, sur la
jeunesse de .Marie Stuart, sur le Colloque de Poissy, etc.), qui lui a
ouvert les portes de l'Académie des inscriptions et belles-lettres, est
une œuvre puisée tout entière aux sources originales el a beaucoup
ajouté à ce que Ton savait sur l'histoire des premières guerres de
religion. On peut regretter sans doute que M. de Ruble n'eût pas le
talent littéraire qui aurait donné la vie aux événements et aux per-
sonnages et ressuscité les passions d autrefois; mais on admire en
lui le chercheur infatigable* le critique scrupuleux, le narrateur
exact et im|>arUai. M. de Ruble inspirait à ceux qui le connaissaient
comme à ceux qui le lisaient le {dus haut d^ré de l'estime.
Si la carrière de M. Edouard Stvooa n'a pas tout à f^U répondu
aui brillantes espérances que ses débuts avaient fait concevoir, c'est,
en grande partie, parce qu'une crise morale du caractère te plus
élevé l'a arraché pendant quelques années à la vie de professeur et
d'historien pour faire de lui un prédicateur et un ministre de l' Enlise
réformée. Il faut [Murtant l'attribuer aussi à ce que, soit par suite
des circonslances, soit par une disposition naturelle, il a plusieurs
fois changé de direction dans ses études. Après avoir publié une
thèse de doctorat sur la France sous saint Louis, composée trop
hâtivement au sortir de l'École normale, il eut la très heureuse
pensée de se consacrer à l'étude du hongrois et de l'histoire de Hon-
grie. Il arriva vite à se rendre maître d'une langue dimcile, à être
au couranl des travaux allemands et hongrois sur la Hongrie, et il
publia en {87G une Histoire des Hongrois en deux volumes qui,
malgré des imperfections faciles à comprendre dans une œuvre
embrassant un aussi vaste sujet, mit cependant le jeune professeur
en évidence et fit croire qu'il allait poursuivre ses recherches dans
ce sens, être en France pour les études hongroises ce que L. Léger a
été pour les études slaves, un initiateur, un interprèle, un maître dans
tous les sens du mot. Malheureusement, en dehors d'un bon volume
sur la Hongrie contemporaine et de rares articles critiques, M. Sayous
ne continua pas à creuser le sillon qu'il avait ouvert, et quand il fut
nommé professeur à la Faculté des lettres de Toulouse, puis à celle
de Besançon, il s'occupa successivement de la reli^^ion romaine, de
la quatrième croisade, enfin de l'histoire d'Angleterre au wW et au
ivnr siècle. L'excellent volume qu'il publia sur l'Angleterre au
temps de Charles II dans la collection Quantin n'était que la pro-
messe d'études approfondies qu'il préparait sur l'bistoire des mœurs
et des idées un Angleterre. Ce sujet lui convenait admirablement; il
connaissait el comprenait bien l'Angleterre, il sentait vivement les
côtés pittoresques de la vie anglaise des derniers siècles; il retrou-
vait eu lui-même la passion pour les libertés politiques et les pro-
fondes préoccupations religieuses qui ont fait la grandeur de nos
voisins d'outre-Manche. On pouvait donc beaucoup attendre des tra-
vaux qu'il noua promettait, quand la destinée jalouse, qui l'avait
toujours poursuivi et entravé dans ses élans, a mis brusquement fm
à sa trop courte carrière de professeur et d'écrivain. Ses amis, qui
ont seuls connu tout ce qu'il valait, lui garderont uu lidèle souvenir
lie regrets et d'aft'ection.
M. Agénor BinooDi n'était pas un historien de profession, et le
l>arreau et la politique ont absorbé la plus grande partie de son acti-
vité, mais soo libéralisme politique même, qui faisait de lui uu deâ
334 BULLBTIlf HISTORIQUE.
représentants les plus convaincus et les plus aimables de la grande
tradition de i 789 et de cette bourgeoisie éclairée, désintéressée el
patriote qui a fondé en France le régime constitutionnel, Ta con-
duit à entreprendre une série d'études historiques et littéraires, qui
se rapportent toutes au même ordre d'idées et de préoccupations,
qui toutes éclairent Thistoire de la bourgeoisie française et des ori-
gines du gouvernement représentatif. De valeur inégale au point de
vue scientifique, mais d'une forme toujours animée, et puisés en
partie à des sources inédites, ces ouvrages constituent par har
ensemble une contribution importante à notre histoire contempo-
raine. M. Bardoux avait été d^abord attiré, alors quMl plaidait aa
barreau de Glermont-Forrand, par le rôle des légistes dans Tandeone
France, ces légistes qui ont été les plus efficaces fondateurs de l'ab-
solutisme monarchique, mais en qui cependant, comme adversaires
de la noblesse et du clergé, la bourgeoisie libérale a voulu voir des
ancêtres. Ses travaux sur les légistes du xvi« et du xviii* siècle (4856
et 4 859) et sur J. de Doyat (4863) sont venus se fondre dans un
livre sur les Légistes et leur influence sur la société françat$e
(487(;), livre intéressant et utile, tout incomplet quil est. Le
volume sur le Comte de Montlosier (4884) étudie un ty[)ecuri«ix
de grand seigneur devenu à la fois un serviteur de Bonaparte et un
théoricien de révolution démocratique et libérale de la France. Ge
conflil d'idôes et de tendances avait paru, avec raison, à H. Bardoux,
offrir rintérét le plus piquant. Ses deux volumes sur La Fayette
(4852-4853), composés malheureusement avec trop de précipitation,
nous présentent un portrait Adèle, quoique trop flatté, de celui qui
fut une incarnation d'autant plus exacte de la bourgeoisie libérale
moitié ré[)ublicaine, moitié monarchiste de la première moitié de ce
siècle, que « le libérateur des deux mondes » unissait au plus noble
caractère la vanité la plus naïve et une médiocrité intellectuelle que
sa popularité cacha à ses contemporains. — M. Bardoux montre
ensuite en M. Guizot (4895) le représentant et le théoricien le plus
émincnt du régime orléaniste, et s'il ne put rendre qu'un hommage
imparfait au grand historien, il sut peindre l'homme politique tel
qu'il fut, avec ses qualités supérieures et ses singulières étroitesses.
Avant d'écrire l'histoire de ces deux représentants éminents du libé-
ralisme constitutionnel, Bardoux avait, en 4887, tenté de donner
une histoire de la Bourgeoisie française de 4789 à 4848; mais il
n'avait ni la force d'esprit philosophique ni la largeur et la précision
de vues qui permettent les vastes généralisations et les fécondes syn-
thèses. L'analyse psychologique et sentimentale lui convenait mieux.
Il a consacré à Chateaubriand et à deux de ses amies les deux meil-
mp
RBors volumes qui soient sortis de sa plume ; Pauline de B^aumonl
188-1) el Madame de Custine (1888). Après Sainte-Beuve, il a su
ajouter des pages neuves eL pénétrantes à la biographie du grand
charmeur blasé et fhire revivre dans deux de ses types les plus déli-
cats la société féminine du commencement du siècle. M. Bardoux a
disparu avant d'avoir pu nous donner un livre qu'il eût été particu-
lièrement bien préparé à écrire, un livre sur Benjamin Constant. Il
était fait pour peindre au vrai ce perpétue! amoureux sans ten-
dresse, ce libéral qui a su si bien comprendre cl qui a si mal servi
la liberté, ce sceptique qui a si admirablement pénétré l'essence el
la nécessité de la religion. Ce livre manquera au couronnement de
l'œuvre de M. Bardoux. Telle qu'elle est, et bien qu'aucune de ses
parties ne paraisse en elle-même de tout à feit premier ordre, elle
oe manque, prise dans son ensemble, ni de portée ni d'originalité.
G. MoNOD.
I La science historique vient de faire une périodes plus regrettables
s la personne de M. Ernest Hiuei, sénateur radical de Seine-ct-
■, président honoraire de la Société des gens de lettres, qui est
brt à Paris le 6 Janvier iS9H. Rn laissant de côté une histoire de
I France depuis le Directoire qui eut plusieurs litres et plusieurs
mes et n'est guère qu'une tentative de vulgarisation, il est sur-
ht connu par son Histoire de Saint-Just (1859], donl il préparait
e troisième édition, el par sou Histoire de floôcï/iierrc (1865-1867,
1-8°). On sait que ces deux ouvrages sont avant tout des
>. Le premier, qui fut mis au pilon sous l'empire comme
(ditieux, est de beaucoup inférieur au deuxième. Ce dernier, malgré
jvisible parti pris de l'auteur, demeure des plus utiles â consulter;
I si l'on se reporte à l'époque à laquelle il fut écrit, on reconnaîtra
B M. Hamel, par le soin qu'il apporta à réunir tous les documents
^Ijcornant son héros el par la critique qu'il en lit, est un des pré-
curseurs de la reaaissauce des études historiques sur la France révo-
lutionnaire. Il y a peu d'ouvrages contemporains de l'iîijfoira de Itobes-
« dont la construction demeure aussi solide, qui inspirent autant
IlesUme et apportent autant de secours à celui qui les consulte.
A. L.
F H. Le Btiirr' n'a jamais écrit un livre d'bisloire; ses principaux
^ 1. Né le 12 aadt 1318, élu le 15 novembre 1S67 ù l'Acadéidie des iosc ri ]j lions,
"■Jlfeclenr de l'École de Rome du 1" juiTicr I8S3 au 1" jiinvier 1889, mort le
5jaillel 1897. — Les Uélanges de l'École de Home, l. Xlll, dooDeol la biblii»-
Kraphie de su wuTre^ jusqu'en 1892; le (iremler mémoire de H. Le Bliut mt
farcUtologie ebrètienae date de 1856.
k
336 BULLETIN HISTORIQUE.
ouvrages sont des recueils archéologiques^ ou épigraphiques*, et il
était rare que ses mémoires ne fussent pas inspirés par une vie de
saint^, une sculpture, une gemme ou une inscription *. Cependant, peu
d'archéologues français ont rendu plus de services immédiats à l'his-
toire, je parle de la véritable science historique^ qui s'intéresse à la vie
des religions et des âmes. — D'abord, H. Le Blant limita ses recherches
à une période assez courte et fort bien circonscrite, celle qu'inau-
gure Tarrivée en Gaule des premiers évangélistes et qui se ter-
mine par l'avènement des Carolingiens, la période qu^on pourrait
appeler du christianisme primitif et spontané; si de cette période
il exploitait plus volontiers les ressources lapidaires, il en avait
exploré avec soin tous les documents, ne négligeant aucun profit
scientifique : voyez ses études sur la prononciation du latin à l'époque
mérovingienne, et songez à tout le temps qu'il a consacré à de
pénibles investigations dans les manuscrits des bibliothèques provio*
ciales'. M. Le Blant pensait, comme tout vrai savant, qu^il n'y a
point de petits gains dans la science, et que les plus grands ont par-
fois besoin des moindres choses. — Puis, il avait précisément choisi
les siècles où notre histoire nationale est le moins connue, le plus
troublée et le plus troublante, où il suffit souvent d'une inscnplion
portant le nom d'un roi barbare pour jeter le doute et la discorde
dans le camp des historiens : le groupe épigraphique de la Gaule
chrétienne est, dans les pays classiques, un de ceux qui oQVentle
plus de surprises. — Enfin, M. Le Blant a toujours, dans ses études
d'archéologie, tiré des conclusions historiques. Il n'est jamais parti
de l'histoire, il y est toujours arrivé. Ce qui l'intéressait le plus dans
les sarcophages chrétiens, c'étaient les croyances religieuses que
révélaient les sculptures : à travers la scène figurée et au delà du
marbre taillé, il cherchait à deviner la pensée de l'artiste et le rêve
du fidèle. Croyant de la bonne race, il aimait à replacer ces tombes
•
1. Étude sur les sarcophages chrétiens antiqiies de la ville d Arles, 1878;
les Sarcophages chrétiens de la Gaule, 1886.
2. Inscriptions chrétiennes de la Gaule antérieures au VII* siècle, 2 toL,
1856-1865; Nouveau recueil des inscriptions, etc., 1892; Manuel dépi{fr(^hie
chrétienne, 1869 ; VÉpigraphie chrétienne en Gaule et dans V Afrique romaine,
1890.
3. Les Actes des martyrs, supplément aux Acta sincera de dom Ruinart,
1882.
4. Les principaux ont été réunis en 1893 sous le titre : les Persécuteurs el
les Martyrs aux premiers siècles de notre ère.
5. M. Le Blant a rendu le service de remettre en lumière les Ticilles collec-
tions archéologiques de Peircsc, Séguier, Calvet, Boahier, etc. Dans les iiu-
tructions du comité de 1890, il recommandait encore, avec raison, de tes con-
sulter sans cesse.
FtilIGE. 337
dans l'exubérance de la vie religieuse des premiers âges; dans une
page qui doit resler', Il a montré l'histoire ae faisant autour des
tombeaux, créateurs de miracles, inspirateurs de combats, fonda-
teurs de ba!)iliques et de pèlerinages. Ce qu'il recherchait le plus dans
les inscriptions, c'était à retrouver par elles les destinées du christia-
nisme gallo-romain, les premières traces de l'évangéUsation , les
secousses de la foi nouvelle pendant les invasions; c'était à rattacher
les épitaphos à quelque grand fait de l'histoire politique, religieuse et
littéraire. Son dernier manuel d'épigraphie chrétienne nous révèle,
plus que tout autre de ses ouvrages, celte curiosité très générale et
ces amhitions très scienlillques. — Tout ce que M. Le Blant écri-
vait, du reste, était fait avec une précision, une sûreté, une ueltelé
patiente et sobre qui le mettent, comme érudit, tout à fait à côté de
Léon Renier. Mais il a eu de plus tout ce qui a manqué à celui-ci,
la volonté de terminer ses œuvres, la joie de les savoir finies*, et,
GODUue couromiement à sa longue vie, la mort en plein IravaiP.
^^ C. JOLLUS.
^H TRAVAUX SOR l' ANTIQUITÉ BOMAINE.
^^fl. HlSTOiRB Lin^RUBE, POLiTiUDE KT iiHLmiEDSB. — L'Htstoire de la
littérature latine de M. Pichox' relève à peine de la Hevue histo-
rique. Un historien regrettera deux choses dans ce livre. — Il ren-
ferme trop peu d'allusions aux événements politiques contemporains
des œuvres littéraires, aux transformations sociales, religieuses ou
morales qui les ont précédées, accompagnées, déterminées. Le peuple
romain est peut-être celui dont la littérature a vécu le moins à part
de la vie publique; presque tous les écrits sont chez lui des actes
politiques ou des exercices sociaux autant que des produits litté-
raires. Or, M. P. se conforme encore trop aux vieilles traditions
de rhistoriographie littéraire, qui bâtit tout en l'air, en dehors
des circonstances sociales, sans contact avec le sol politique, la
critique des œuvres et l'évolution des genres. M. P., qui n'est
1. Sarcophaçet chrélieiu de la Gaule, p. vi.
1. Le Catalogue des monumenli chrétieru du mutée de Marseille, auquel il
lenail beaucoup, a paru en 1H94.
3. C'est quelques semaines aprei au inoK que la Revue archéologique a pubiiè
lit Pn de BUD mémoite sur la Paléographie des InteriptioTu ekrtlienneM dv
llf au VII' tiède (septembre 1897). — D'eicellenles noliccB sur M. Le Blant
oui été écrites par M. Héron <le Villeroise (discours prononcé aux funérailles,
ImlUul, 1897, 18), M. Péralé {Itevuc arcMologique, juillet 1897). M. StereD-
•011 (BulUtitno dl arckeologia crùtiana, IHtJS).
ÏBUUire de la littérature latine, pur René Pichon, professeur de rhélo-
an Ijcée Hocbe. Paris, Hacbelle, 1897, ia-12 de tvm-988 p.
ftEv. Hjstuh. LXVI. 2" FA8C, 22
388 bullbth hutouqui.
point ingrat envers ses maîtres, rappelle , dans sa préface, les
services rendus par M. Boissier à la scienee de la Uttératore
romaine : on regrette que M. P. ait assez peu suivi Texemple de
H. B., dont le très grand mérite est précisément de n*avoir jamais
séparé la société et les œuvres. La vie, les sujets d'étude, le style,
les préjugés et les Csiiblesses des écrivains du siècle d^ Auguste ne ee
comprendront jamais sans la connaissance approfondie des tendaœee
politiques du premier empereur : on est profondément surpris de
voir H. P. expédier en huit pages les caractères généraux du siècle
d'Auguste, et, dans ces huit pages, on cherche en vain un mot sur
la restauration religieuse qui a dicté la plupart des œuvres de ce
temps; en revanche, on y trouve des remarques sur la manière
dont une littérature arrive à Tétat « classique, » remarques qui
paraissent à la fois très brillantes et très contestables * . U y a,
entre les premières années du règne de Tibère et le gouverne-
ment de Claude, une des plus fortes dépressions littéraires de
l'histoire romaine, déclin qui a ses causes dans les conditiODS
nouvelles du régime impérial : elle ne se trouve pas indiquée
dans le livre de M. P., où les mômes chapitres sur la décadence
impériale vont do Phèdre à Pline TAncien, de Tibère à Nerva.
— Un second reproche qu'un historien peut faire à M* P., e'esi
d'avoir abusé des comparaisons et des parallèles entre Rome et le
présent. 11 faut être Renan pour s^en permettre un tel nombre, et
encore lui reproche-t-on parfois d'avoir songé à Troppmann à propos
de David. Pour être de nature moins criminelle, les allusions de
M. P. n'en sont pas moins de petits péchés historiques. On ne com-
prendra pas tout de suite ce que viennent faire Balzac et Voiture i
coté de Uuintilien, et les Trois Motuquetaires en (ace de Quinle-
Gurce. Il n'y a aucun rapport, pas Tombre d'une similitude, entre le
courtisan Dangeau et les écrivains de l'Ulstoire Auguste. De telles
comparaisons compliquent et n^expliquent pas; ce sont des rideaux
mis par devant la vérité. — Le livre de M. P. se lit, du reste, avec
plaisir; il est lestement écrit, il témoigne de beaucoup de lecture,
d^un effort de travail considérable, d'une facilité surprenante, et il
1. A quelle réalité historique peuvent correspondre des phrases
celles-ci : c Les écrivains du siècle d'Auguste sont classiques sans le Tooloiroi
le savoir... La période classique d'une littérature coïncide avec le momeDtoà
le sentiment national est le plus fort... Une littérature ne peut être cUssiqne
du premier coup • ? Tout cela est factice, et nous fondrions que i'Uoifersité
renonçât enfin à ces généralités TieiUes de cent ans et d'une moaolone abstnfr
Uon. Ce qu*il £aut montrer aux élôves des lycées, ce sont des Ufret, des
hommes, un pays, et non pes de ces chimères de métaphysique UUénire.
feul savoir gré à l'auteur d'avoir fort bien parlé de Lucain et d'Am-
micn Marœllin, et d'avoir consacré œnt bonnes pages à laULléra*
lure cbrétiennc. Somme toute, sauf son classicisme à outrance, cette
œuvre est une bonne recrue pour l'enseignement dans les lycées,
dans les facultés et partout où l'on veut s'instruire des lettres
latines'.
Malgré sou titre, le volume de M. Fontamb sur les Barbares'^ n'est
pas davantage une œuvre liistorique. C'est (avec inOniment moins
d'ordre, de soin, d'exactitude et do bon sens que chez M, Pichon)
une série de considérations littéraires, religieuses, morales et sur-
tout ethnographiques, sur les destinées du monde romain depuis
Hadrien jusqu'à Théodose. Au reste, la plupart de ces remarques
ont une grande saveur de nouveauté ; en voici (p. 14) sur ■ la Grèce
moderne, l'Hellénie, qui s'oppose par l'extravagance do sa courli-
sanerie à Rbodes, l'ancienne Grèce, intelligente, consciente de sa
valeur intellectuelle, et déplaisante; •> en voila sur Marc-Aurèle
(p. 73), a le plus navrant exemple de ce que la philosophie hellé-
nique, parvenue a ses fins, adaptée au gouvernement des hommes,
leur réservait. • Ce que M. F. semble approuver le plus chez Marc-
Aurèle, c'est d'avoir choisi Commode pour successeur ; a Ce fut
peut-être, quoique abominable, l'acte le plus courageux que Marc-
Aurèle accomplit (p. 76). » Le règne de Constantin a eu, suivant
M. F., des conséquences inattendues [p. 28H] -. a Le monde aryen,
prêt à recevoir l'Évangile, peuplait presque toute la largeur de l'Eu-
rope. La fondation de Constanlinoplc et le schisme d'Arius allaient
htentôt diviser les Hindous, les Perses, les Scythes et les Celtes, et
I. Sar les écriTains latins, Toy. de La Ville de Hirmoat, ta VU et Vœuvre
de Livtus Andronicui. II. L'Œuvre, dans la Revue de» Universitéi da Midi,
1897 (rearermc des parties [|ui «ont de» t modëJes de cansclence et de séTé-
filé, > dit M. aaveliaiisleiOonp(ei-rendiisderAead.des inscr., IS97, p. 5t3J;
Fabla, les TMA(rei de Borne au tempt de Plante etde Térence.àmi la Revue
de pMlologie de janvier 1897. Le livre de M. Bertrand, Cicéron au théâtre
(Àntxalet de la Faculté de Grenoble, 1897, et tiré à part], eal approfondi et
t plaira aux lettrés t (p. Tbomas, Jane la Reme critique, octobre 1897, p. 220);
LécrivaiD, Quelques points de droit grec dans les plaidoyers de CleéroK
(eicelleat de prècisian), dans lea Méinoires de t'Acadtmie des sciences, etc., de
routouw, t. VIII, 18%; Carlault, Étude sur tes Bucoliques de Virgile, Parla,
Oollii (cité d'aprËa le comple-reada de M. Boissier, Journal de* Havanti, août
1897); sur lea apparentés de la cens Virgtlta , une intéressante note de
H. Gagnai [Comptes-rendus de l'Acad. des i-nscr., IBQ7, p. 7).
3. Uarlus Pontano, Histoire universelle, I. IX, les Barbares (de 117 A 395 ap.
J.-C). Paris, Lemerre, 1897, in-S' de 518 p. et 5 cartes. Le l. VIII, le Chris-
tianitme, ne nous est point parvenu. Sar le t. Vil, Rome, vo;. Revue hUto-
rique de mars 1892, p. 317.
340 BULLmH HISTORIQUE.
retarder, pour des siècles et des siècles, Tanion de race, l'unioD
européenne. » De tous nos livres d'histoire, celai de H. Fontane
s'est le mieux inspiré de la Légende des Siècles.
Après ces deux gros livres d'histoire générale, on arrive avec plai*
sir aux monographies érudltes, dont Taspect est moins brillant,
mais où les profits sont plus solides.
Le Lulletin de correspondance hellénique nous apporte, comme
à l'ordinaire, un très précieux contingent de renseignements nou-
veaux sur les premiers temps de la Grèce romaine. M. Homolli* a
retrouvé, avec la sûreté de sa méthode habituelle, la vraie situation
de Nabis : « Descendant de la famille divine et royale des Uéradides,
il fut traité en roi et reconnu comme tel sous le patronage de Rome
elle-même^ ]> M. Perdrizet^, qui fait bien tout ce qu'il fait, a recons-
titué l'histoire de ces Scordistes qui pillèrent Delphes, que le pro-
consul M. Minucius Rufus combattit en 409, et qui furent les plus
terribles saccageurs des Balkans.
C'est un modèle du genre que Télude consacrée par M. Vidal de
LA Blicoe aux voies de commerce dans Tompire romain du n^siède'.
Par la richesse des informations, la précision des détails, la rigueur
des déductions, cette brochure est d'une excellente venue : pour la
première fois, nous voyons avec quel soin, par quelle méthode et
grâce à quels documents Ptolémée a dressé ses Tables et quelle
nature de renseignements on peut en tirer. — Le commentaire que
M. Tii. Reinach donne du décret de Mylasa^ (209 ou 240 ap. J.-G.)
abonde en remarques savantes et en vues ingénieuses sur la rédae-
1. iMcriptions de Délos : le roi NabiSy dans le Bulletin de eorrespondanct
helléniqt^y décembre 1896.
2. Ibidem, 1896, p. 481 et saiT.
3. Les Voies de commerce dans la Géographie de Piolémée, extrait dM
Comptes-rendus de V Académie des inscriptions et belles-lettres^ 6 nofembre
1896. Paris, in-8* de 32 p. et 2 cartes. — L'ooe de ces cartes n'est antre qoeU
reproduction de la carte, déjà célèbre, de l'Atlas Vidal- Lablache (p. ISàcJsor
V l'état économique du monde gréco-romain au II* t.; mais celte seconde édi-
tion renferme une addition qui est bien l'indice de la conscience tonjoon es
éveil de M. Y. Les récents travaux de MM. Ilourst et Bluzet (BuUeiin de la Soc.
de géogr.^ 1895) ont mis en évidence le caractère lacustre du moyen Nigpr;
M. Y. a tout de suite pensé aux lacs du Niger de Ptolémée (IV, 6} et an Nuckfd
de Mêla (111, 9) : il a pu ainsi étendre considérablement le domaine desconaais-
sances géographiques des Romains. — Dans sa Note sur Vorigine du commerce
de la soie par voie de mer, M. Y. de L. Bl. montre que le IliSpec de Pansi-
nias (YI, 20) désigne les habitants dn Tonkin {Comptes-rendus de VAcad. des
inscr., 1897, p. 520).
4. Une Crise monétaire de Mglasa {Bull, de corr. heU., 1896, p. 523).
FUXCE. 3H
Ion des décrels impériaux ' , sur l'or^'anisalion des banques municï'
pales et sur la crise monétaire que subit la ville de Mylasa par suite
(le l'accaparemeiit ou de la migration du numéraire ; c'est un des Ira-
vaux les plus garnis qu'ait livrés cet érudit.
M. Roger était un charmant élève de l'École normale supérieure,
que la maladie a enlevé, à l'âge de vingt-six ans, en juillet 4895.
Ses parents et ses amis ont eu la touchante pensée de réunir en un
volume ses principaux mémoires d'École"; l'un d'eux, sur l'empe-
reur Postume, composé sur l'inspiration de M. Bloch, intéresse les
études romaines : il est diligemment Tait et judicieusement pensé;
M. R. insiste avec raison sur te caractère latin, nullement gaulois,
du gouvernement de Postume. — M. Mow*t a apporté de fort utiles
contributions à la connaissance des monnaies de Probus^ et des empe-
reurs de la tétrarchie*. — Le travail de M. Alurd sur la Jeunesse
de Fempereur Julien'^ mérite des éloges pour la conscience avec
laquelle il est Tait et appelle quelques réserves sur les tendances de
l'auteur.
C'est avec un sentiment d'admiration que je ferme le premier
volume de M. André \.nymTVio:i sur la Chronique de Sulpice Sévère*.
L'exemple que nous oiTre l'auteur est d'une rare grandeur et presque
d'une haute vertu. M. L. est un vétéran de nos luttes politiques, uo
de ceux qui ont combattu pour la conquête de nos libertés avec le
plus d'bonnéte vaillance. Journaliste, diplomate, député, membre du
I. Je ne crois pas qiie H. R. ait raison de Totr un s paradoxe ■ [p. H^) duns
l'hjpothësc de M. HommseD, que les Tables de Claude renrerment de» Iraceg
d'acclamations ou plutôt d'interrap lions; le texte de Pline, qni porte sotebant,
n'esclnt pas toute eicepllon.
î. Maurice- Antoine Roger, FragmenU d'histoire. Paris, Roger et ChemoTb
[18961, lû-1* de xii-UO p.; p. 1-76 : FragmenU lur VkisMre de Postumui. —
Sur l'influence persistante des monnaies de TËtricus, Toy. une note intéresBanle
de H. ProQ dans te Bulletin des Antiqvaim de France, 18%, p. 339.
3. Bulletin des Antiquaires de Franc», I89ti, p. 352. — Dans les Mémoirn
de V Académie de Lyon, > s., t. IV, ISSB, p, 355: le Livre du préfet et ledit de
maxtatum, notes sur le protecUonnisnie dans l'empire romain, par M. Pariset,
t. Combinaisons lecrèles de lettrei dam les marques monétaires de t'empire
romain, dans la Reoae numismatique, tS9T, et tirage à part.
5. Dans la Jlevue des Questions historiques d'octohre IS97. — Le volume de
H. Allard sur le Chrisllanitme et l'empire romain de fféron à Théodoie
[itt-li de iic-307 p.j, annoncé dans la Becue historique de mars IS37, p. 310,
a paru : nous ne l'avona pas reçu.
6. La Chronique de Sulpice Sévère, lette crllicfue, traduction et commen-
lAire : lirre I, avec prolégomènes sur Sulplce, sur ses écrits et sur son mattra
Martin de Tout*. Paris, HacheUe, 13%, iD-4* de r.xxw314 p. — L'ouvrage,
turtî des presses Gounouilhou, est d'impressioa parfaite. — Ct. Revue histo-
rique, man 1S9^, p. 3!4.
842 BULLBTIlf HISTORIQUB.
gouvernement de la Défense nationale, sénateur enfin, il ne cessa un
instant, au milieu de i'âpreté des batailles parlementaires ou de b
banalité des conflits parisiens, de songer aux travaux de science pure.
Sulpice Sévère a été pour lui, autant que Tamour de la liberté, le
compagnon habituel de ses pensées. Il s*est souvent entretenu da
chroniqueur chrétien avec Jules Ferry; Renan lui a donné de pré-
cieux conseils; Gernuschi lui a fourni des éditions rares, et c*est Jules
Simon qui lui fit connaître Hauréau, et, par Hauréau, les bous
manuscrits des opuscules martiniens. Les braves gens et les grands
travailleurs 1 Dernier survivant de cette génération, H. L. a aban-
donné le Sénat et la vie publique et s'est retrouvé seul à seul avec
Sulpice Sévère. Voici le premier volume de son œuvre, qui en ren-
fermera cinq : il comprend des prolégomènes, le texte et la traduction
du livre P' de la Chronique, et un très long et très copieux commen-
taire de ce livre. Le texte parait établi avec scrupules et témoigne de
la connaissance de la critique de Halm et des travaux linguistiques de
MM. Gœlzer et Bonnet ^ Les prolégomènes sont fort attachants par
la franchise de leur allure. Les commentaires sont une vaste forêt
touffue et vigoureuse où il y a des souvenirs personnels, une lecture
très complète des documents du bas*empire romain, des études
bibliographiques, des aperçus sociologiques, et surtout des remarques
très originales et souvent très profondes sur les hommes et les idées
du iv^ siècle^. Ce siècle, si violent et si décadent, remueur d'idées et
forgeur de mots, pauvre d'inventions et grand d^aspirations', M. L.
le connaît comme pas un et en parle avec une passion qui, nulle part,
n'exclut la justesse du jugement et l'impartialité du sentiment. li
faut recommander à tout le monde ses pages sur saint Martin^ et
son livre tout entier à ceux qui veulent réfléchir sur les derniers
temps de la société romauie.
1. M. L. D'est jamais ingrat pour ses devanciers, même les plos lointains. Il
parle en termes enthousiastes et justes de Jacques Godefroy (p. lxxv), « le
grand bienfaiteur de l'histoire du iv* siècle, • de M. l'abbé Dnchesne, c mi suc-
cesseur des Bénédictins du bon temps » (p. xxi).
2. Tout ce que dit M. L. (p. 129 et suiT.) sur c la Bible incorporée à llii^
toire • par Sulpice Sévère m'a paru nouveau et vrai. — Il en est de même do
passage sur l'art militaire au iv* siècle (p. uu), et le rôle des Barbares et de
l'empereur Julien : cela est excellent.
3. M. L. (p. lxxv) dit du iv* siècle : « Celte période si sèche, si compliquée,
si bouillonnante, où plongent les racines de l'histoire occidentale, etc. »
4. P. 218, M. L. marque très bien que Martin c est le premier type complet
de la sainteté catholique : • a Je suis disposé à soutenir, quand on voudra,
que les opuscules martiniens ont été, après les Évangiles, le livre qui a le plus
influé sur la culture catholique. • C'est tout à fait vrai. — > P. gxvu : « L'a^
nuRCR. 348
Vu. l'isirrrrioNS, dhoit, ^tceioiocn. — L'Académie des iascrip-
ns vient de publier le tome X des Œuvres de Borgkest* ; il ren-
ferme la liste critique des préfets du prétoire, aussi bien ceux d'avant
Constantin [i" p.) que les préfets régionaux [i" et 2° p.|. A cette
tàcbe considérable ont collaboré trois savants de grand mérite et
également désignés par leur compétence pour annoter, compléter,
rectifier les nchede de Borghesi : WiDDisoTO», M. Héron ue Villb-
FOSSE et M. GuQ. M. de Villefosse annonce l'ouvrage au public en
proclamant la part prépondérante que ce dernier a eue dans la mise
au point du travail. — Ce qu'il y a eu à faire est énorme. Une grande
partie des notes de Borghesi datait de i&il : en ce demi-siècle, la
science de l'antiquité romaine a été remaniée de fond eo comble.
Il a Mu également bouleverser les papiers qui apparaissent seule-
inenl çâ et là, comme des jalons branlants. En somme, les édi-
teurs de ce volume ont dîi tout refaire, et, pour dire toute ma
pensée, ce n'est pas le travail de Borghesi, c'est surtout celui de
M. Cuq*, que nous avons sous les yeux : heureusement, du reste, car
n travail tout moderne, clair, complet, au courant^, et bien nôtre,
ïe volume des Œuvres de Borghesi sera le dernier. On renonce à
htinuer la publication des schede du vieux maître. Et on a raison,
mettre à jour, par exemple, les Fastes consulaires, eût été une
simple folie. Il sera plus commode de faire le travail à nouveau; les
Gcbes horghésiennes ne peuvent qu'encombrer et gêner. — Quand
fl'a^t d'cBQvres posthumes, qui n'ont qu'une valeur scientifique,
'tut se hâter: les découvertes vont parfoisaussi vile que la plume.
e^tlsme de Uarlio eet d'une antre nature que celai qui ïDspirait ta plaparl des
wlilaîrcs. II est tout ipaDtaoé. Le régime de sèTérilé et de priratiea qu'il
adopte lui esl nulurel et ne lui ceilte riea. Il ne semble pas qu'il ]r ail jamais
eo Inlle entre ses pencliaots et ses principes, etc. i Tuut cela est à lire.
Vl, Paris, Imprimerie nationale, 1837, ia-4- de 840 p.
^H. H. de Villefosse dit avec aa courtoisie habituelle : < M, Cuq a accepté de
^Klplèler et de remelire an point tes notes de Borghesi. Il l'a fait aiec an
Vvfionenient auquel aous sommes heoroui de rendre bommage. Tuntes les
additions placées entre crochets lai apparlienneoL a il faut ajouter qne
M- de V. a placé, outre un grand nombre de notes courantes, quelques notes
fort longues, qui sont de véritables dissertations origiaaies (cf. p. 797, 300}>
3. Il j a çà et lA, comme il va de sol dans un volume ou il ; a tant de textes
rionis, des réserves à faire, par exemple p. 687 ; je remanierais (ouïe la ques-
tion de PI. SbIIusUus; cf. De Sallustio praefeeto praetario GatUarum, par
H. G imazane, Toulouse. l889(liTTeqai n'est pas du reste convaincant |. — ['.741:
il Caul rappeler A ce propos p. 748. A celle p. 748 cl ï propos de Magnus Pelii,
tout est à retaire. On a les uoms complets et on possède l'épilaphe de ce pré-
fet, et il r a A ce snjet une dissertalioa 1res netle d'Albanès {voy. Corpus. XU,
SS [cf. VIU, 1356], et Alb«aËs, Dmx i^ten^imu vUtriqy^, Mtneille, 1886).
344 BULLETUf HI8T01IQ0E.
Cinq ans après la mort de Borghesi, son travail n'était plus au eon-
rant. Et il est mort en 4 860 ; et le premier volume d6 ses couvres a
paru en 4862^
Pourtant, c'est avec tristesse qu'on voit cette grande publication à
jamais incomplète. Que d'opéra inierrvpta la génération du second
empire nous a laissés : le Voyage cTAsie mineure et les Inserip^
tions (T Algérie, la Table de Peutinger et les Diplômes militaires^ le
Dictionnaire archéologique de la Gaule. Que de belles besognes
vaillamment commencées et brusquement arrêtées! Peut-être un jour
rechercherons-nous les causes de cet effondrement, dont la princi-
pale cause n'est point la mort.
Voici le dernier fascicule du Manuel élémentaire de droit romain
de M. P.-Fr. Girard^. A l'heure annoncée, l'ouvrage s*achève, et
sans que la fln ait démenti les promesses du début : beaucoup de
science, une grande clarté dans la disposition et dans Texposition,
une abondance de textes, et, ce qui ne gâte rien, une excellente cor-
rection typographique. Nous avons déjà formulé nos réserves : le
livre ne présente peut-être pas assez le développement historique du
droit romain, et, pour un manuel, est un peu trop savant. Il fiiut
déjà bien connaître le Droit pour l'étudier avec fruit; c^est surtout
un excellent point de départ pour des études de fond, par exemple,
pour des thèses de doctorat, j'entends pour des thèses que Ton veut
faire très sérieuses.
Il est peu de lois aussi importantes, dans l'histoire du droit
romain, que la lex Aebutia qui substitua définitivement la procédure
formulaire aux actions de la loi *, aussi est-il d^un très grand intérêt
d'en fixer la date. Seize solutions ou à peu près ont été proposées
pour cette question : dans un mémoire très net, très sobre, trèsappro*
fond!, M. P.-Fr. Girard indique comme date à peu près certaine
entre les années 605 et 629^. — Nous souhaitons la bienvenue i
1. T. I, 1862; t. VII et VIII, 1872; t. IX, 1879 et 1884.
2. Quatrième [et deroier] fascicule. Paris, Rousseau, 1897, in-8* de (657)-
1050 p. Cf. Revue historique, 1*' mars 1896, p. 346; l* mars 1897, p. 311. -
Nous rece?oos à rinstaat la deuxième édiUon du volume (1898, 1088 p.) : Tao-
leur a vérifié les citations de textes, mis la bibliographie au courant et joint an
travail une excellente table alphabétique.
3. La date de la loi Aebutia, extrait de la Nouvelle Revue historique de
droit, 1897 [déjà paru en 1893 dans la Zeitschrift Savigny, XIV, 1893, Ràm,
Abth., mais Tauteur a fait, dans cette réimpression, des additions nombreuses].
— M. Willcms place en 181 la loi Aquilienne (/a Date et la portée de la loi Aq.,
dans la Retrue générale de droit, mars 1897). — Thèses de droit : Maria, U
Vindex dans la legis actio per manu^ injectionem et dans Vin Jus voeatiOf
Paris, Rousseau, 1895 (précis et soigné) ; Olphe-Galiiard, De Vin/luenee de
M. Beskibb, il fait ses débuis dans la science des institutions
romaines par une élude épigraphiquo, précise et fouillée, sur l'épi-
taphe d'un lablifer des équités singulares '. — A propos des exagia
du bas-empire, M. Cuq cherche à prouver que le litre de ëuap/o;
*Pû|j.ii]i; a pu s'appliquer à Gonslantinople^.
L'archéologie nous vaut celte année de bons inventaires et d'utiles
mémoires. — ^'ts,\.\QCalalogue desCamées^ de la Bibliothèque nalio-
Mdfo, par M. Bibelot, le Catalogue sommaire des marbres antiques
<t Louvre, publié par les soins de M. Hiaoi de VrLLEFossE, avec le
rours de M. Micho:^', et cet admirable Glarac de poche do M. Salo-
IDn HEinACH *, qui rendra tant de services el ou il y a lant de science
b de dévouement.
ftNos sociétés locales et nos revues françaises apportent leur conlri-
ptiou à l'archéologie et à la religion romaiaes. Une urne sépulcrale
k musée de Laval^ suggère à M. Mowit une bonne notice sur les
résenlations de dauphins dans la sépulture funéraire; un dis-
irs prononcé à l'Académie de Lyon traite des Animaux domes-
I dans les cultes antiques'^ ; MM. Pabhentier et GmoMT nous
pnent de très curieux détails (presque des révélations) sur les
lamales romaines, à propos et à l'aide des Actes grecs do saint
" ; c'est enfin* une étude sur l'extirpation des varices'*.
tfduealion el de l'inilrucCion svr la législation romaine, Paria, Jonre, 1S96
(trop de généralités et de bors-d œuvre).
1 . !fole sur une inscription inédite trouvée à Borne, dans les Mélange* d'ar-
ehéùlogle et d'histoire, t. XVII.
ï- Revue orcWofojiîue, juillet-août 1897.
3- Antiguet et modernes. Paris, Lcroui, I33T(Ï), in-S- et 76 pi.; non vidi. —
l^mAme U. Babelaa, tel CoUectiom de monnaie antiennes, utUilé scienti-
t. Paris, Leroui, 1897, in-lS; non oidi.
L Piri», Maj el Motteroi, [1896 fj, iii-12 de 344 p. et 16 gr. Prii - I tr. 85.
i. Bépertoire de la ttaluaire grecque el romaine, 1. 1, Clarac de poche, con-
*int les baa-reliefs de l'ancien fonds du Louvre, el tes Statues antlquei du
k de sculpture de Clarac, avec aoe introducllon, des nolices et an indei.
il, Leroni, 1897, petit iii-4* de i,j[iv-66U p., doni 617 p. de planclies doubies.
I : 5 f r. Il faudrait que te Tulanie Fût entre les mains de quiconque en
s'intéresse aux beaui-arls et A l'anliquilé. — On a annoncé chez Leroux :
ont, Textes el monumeaU /igurés relatifs aux mystères de lUitkra, l. II,
6. Deux urnes funéraires, eitrail du Bulletin historique el archéologique
de ta Mayenne, 181)7.
7. Par M. Camevin, dans les Mémoires de l'Académie de Lyon, 3* «érie,
t, IV, 1896, p. 3U5 (tous les animaui ont été divinisés, sauf le mulet et le
lapin : H. C. est-il bien sQr de cet deux exceplionsî].
8. Le roi des Saturnales, dans la Revue de philologie de juillet 1897.
9. L'opération de Marias, par H. Delore, même recueil Ijonnais, p. 17.
l'IO. Sur la religion, voy. reicellent Bulletin archéologique de la religion
846 BULLETIN HISTORIQUE.
M. McNrTET* publie, pour la première fois et avee an tarée boneom-
mentaire, un eurieux formulaire sur les pnqportions des oolonnes :
il le rapproche, avec raison, des écrits des Arpenteurs romains et lui
assigne la même date', « la plône époque de l'Empire romain*, i
III. Gaule. — Décidément, le problème de nos origines nationales
a toujours ses idolâtres. Yoid, coup sur coup, deux livres sur la
Gaule primitive, celui de M. Laibih ^, que je ne connais pas, eelni
de M. DE Mortillbt', que les comptes-rendus ne me donnent pas
envie de connaître.
Les partisans de la domination ligure* en Gaule ont recruté on
nouvel adhérent en M. Dblochb : il a relevé tous les noms de locali-
tés qui évoquaient un souvenir ligure, il en a retrouvé dans les bas-
sins de la Loire et de la Garonne, jusque dans ceux de la Seine et de
la Meuse, et il en conclut que ce peuple a occupé toute la Gaule au
moins jusqu'au vu* siècle^. — Que les Celtes soient en Gaule des
tard-venus, et qu^ils s'y soient superposés* à une très nombreuse
population de race différente et depuis longtemps domiciliée sur le
romaine, de M. Aaâollent, dans la Revue de thlUMre de» reUgiom^ novemke
1S96. — Une deuxième édition dn lîTre célèbre de U. Dachesne rar lei Ort-
gines du culte chrétien rient de paraître. — Je ne connais l'ooTragie de M. Dei-
roches (le Labarum, étude critique et archéologique) que par la très Tolnmi-
neose analyse faite par M. Ganet (dans les Annales de V Académie de Mâam,
1895). — Notes d'archéologie figurée : sur Horus {Bull, des AnUq. de FnmeSj
1896, p. 356, par M. Blanchet); sur les lampes représentant des l>étes (aofes
dévorant des êtres humains (Id., 1897, p. 107; c(. 1892, Mémoires^ p. 99, et
Bulletin du Comité, 1896, p. 45, par le même) ; snr les angnipèdes {BuU. des
Antiq., p. 116, par M. Mowat); sur Bacchus enfant, par M. Héron de Yillefbsie
(fondation Piot, 1896), etc.
1. La Mesure des colonnes à la /in de l'époque romaine d'après un très
ancien formulaire (conservé surtout dans deux mss. de Unnich). Extrait de
U Bibliothèque de VÉcole des chartes, 1896, t. LVII.
2. Je préférerais ne pas placer la rédaction de ce formulaire avant le v* siède.
3. Nos lecteurs connaissent déjà V Astrologie romaine de M. Bouché-Leclercq
(Revu^ historique, nov.-déc. 1897).
4. Histoire de France, la Gaule primitive, Paris, 1897, in-8* de vui-79 p.
Cité d'après la Revue critique, 1897, 1, p. 357.
5. Formation de la nation française, Paris, Alcan, 1897, in-8* de 336 p.,
153 grav. Cité d'après la Revue critique, 1897, II, p. 263, et la Revue histth
riqtie, septembre 1897, p. 112.
6. Cf. Revue historique, mars 1892, p. 333; mars 1893, p. 320; mars 1894,
p. 332.
7. Des Indices de roecupaUon par les Ligures de la région qui fistphts tari
appelée la Gaule, extrait des Mémoires de l'Académie des inecr^pHons et
belles'lettres, t. XXXVI, 1'- p. (Paris, Klincksieck, 1897).
8. Un argument nouveau est fourni par M. Reinach, Revue celtique, 1897,
p. 146, à l'aide du vers de Lacain : Et, nunc tome, iAgur (I, v. 442). Mais
FuncE. ai7
sol, c'esl ce qui parait de plus en plus prouvé; que, dans cette popu-
lation, l'élément soi-disant ligure est le plus imporlanl., el qu'il faille
reléguer vers l'ouest los peuplades dites ibériques, c'est encore pro-
bable '. Mais il est cependant difticile de ne pas tenir compte de ces
dernières, et il est fort délicat de vouloir tirer des noms de lieux
modernes une conclusion détïniLive sur l'extension d'une race. Il fau-
drait pouvoir contrôler l'origine de chacun de ces noms, et la chose
est impossible. De ce qu'il y avait en Aunis, au x° siècle, une villa
Ligariacum, on ne peut supposer qu'une chose, c'esl qu'elle a ét«
habitée par un romain nommé ou surnommé Ligus ou Ligurius. Les
documents du iii" siècle citent en Périgord une foret de Ligurio; qui
,1 noui dire exactement par quelles vicissiludes ce nom a passé
luis les Ligures du tu* siècle jusqu'au temps de Louis VI 7 Quinze
vingt siècles changent terriblement la physionomie d'un mot.
Pauvre nation celtique I Tandis que quelques érudîts français
cberchenl à pénétrer l'âme du s génie africain^, > d'autres
dépouillent le « ^nie celtique i de tout ce qui faisait son patri-
line. Comptons les perles qu'il a subies cette année. — On a vu que
Deloche, après M. d'Arbois de Jubainville, a singulièrement res-
lint le domaine propre et l'erTectif historique des nations gauloises^.
lus avons des inscriptions dites celtiques : erreur, écrit M. Bréal,
texte de bon nombre d'entre elles semble indiquer un dialecte ila-
[ue^ et M. d'Arhois de Jubainville ne proleste pas'. On connaît
légende des vierges de l'île de Sena; c'est, dit M. Reinach*, une
ipte f^ble grecque que les navigateurs et les grammairiens, se
ivenant de Circé et de son Ile, ont transplantée sur les rivages
tains de la Gaule. L'autel (wrisien de Tarvos Trigaranus a fait
bonheur des ccllistes : M. Reinach indique^ toutes les hypothèses
li de« doutes : au lieu det Ligures, ou l'aUendrail chez Lncain i quelque
Blpl« germain ou betge.
I 1. nu. Hirachfeld et Sieglin (cf. Ravue épigrapkique, 1897, p. 473). On ne
t pas asêeï compte, duni lout cela, du telle de Scjlai,
I.S. CL Utoue kistorique, mars 1897, p. 321.
I 3, H. d'Arbois de JabïJnvillB rerieat sur celU question de l'arriTée tardive
« Ginloiï daoi le Midi, Beoue cdltque, juillet 1837, p. 319.
f 4. Société de linguistique, séance du 23 mai IS37; cf. Sur le mol gaulois
tou4e, dans la llevue arehéologique, n. s., XXXI, p. lOi.
i. D'Arbois de Jubainville, Sur quelques irueripHoni en caractères gréa ite
ia Gaule IVarlionnaiie, dans la Itevue celtique de juillet 1397.
6. Let Vierges de Sena, dans ta Revue celtique de Jaurier 1S97.
7. Tarvos Trigaranus. dans la Revue celtique de juillet 1837. M. R. a raison
de rappeler l'impurlaure de l'arbre ligure sur l'aulel. — Contre l'asBiinilaliou de
Dis Pater et du dieu au inaillul, cf. Morillol, Bulletin des Antiquaires, 1S!)7,
348 BULLETIN HI8T0&1QUB.
et toutes les comparaisons possibles à propos de œ monumenl, et,
par sa critique si fortement armée, détruit en nous toute certitude.
Il ne reste plus rien de la glorieuse triade celtique Esus, Taranis,
Teutatès, lorsque examine de sang-froid, avec le même H. Rei-
nach * , les textes à Taide desquels l'enthousiasme néo-druidique Ta
constituée : ce sont des dieux particuliers aux peuples d'entre Seine
et Loire, et s'ils sont trois, c^est uniquement parce que Lucain D*a
pas jugé à propos d'en énumérer un plus grand nombre.
Les coups de hache de M. Reinach abattent bien des vieux chênes
de la tradition celtique; Henri Martin et R. de Belloguet auraient
éprouvé, à lire ces articles, le même désespoir que les Gaulois en
voyant les cognées des légionnaires fendre les troncs séculaires des
divinités siivestres. Pour nous, qui n'avons la superstition d'aucune
légende et la peur d'aucun dieu, il nous plait inflniment de voir enfin
une habile libre-pensée mettre à leur vraie place les romantiques
produits d'un patriotisme gaulois. Nous souhaitons seulement qu'a-
près avoir trop cru, on ne s'avise pas de trop nier^. — Au surplus,
il est probable que les Celtes ne manqueront pas de défenseurs et
les Druides d'enthousiastes; nous n'avons pas encore lu le livre de
M. Alexandre BEATRifro sur les Druides et le druidisme*^ mais le
titre, des extraits^ et des indiscrétions permettent de croire que
notre cher maître est un fervent admirateur de l'enseignement droi*
dlque.
Nous attirons TattenUon des archéologues sur les plombs antiques
trouvés en Gaule', dont les légendes sont formées par les initiales
des noms de villes gallo-romaines: M. Maxb-Wbblt les étudie à nou-
1. Teutatès, Esus, TaraniSy dans la Revue eeUique d'aTiil 1897. Son com-
mentaire du Et quibus de Lucain (I, y. 444) est excellent. Tout ce qu'il dit pour
relever la valeur historique du poète est parfait.
2. Il serait bien possible qu'il y ait eu à Sena quelque mystère religieux qui
ait donné lieu à la transplantation, dans cette lie, de la légende de Gircé : les
Bretons avaient bien une manière d'Ile sainte, Mona, voisine du rivage. — H
est douteux que Esus soit simplement (comme le suppose M. Reinach) uae
divinité particulière à un peuple, par exemple celui des ParisH. La manière
même dont Lucain Tannonce {Et quibus, etc.), lui et les deux autres dieux,
semble indiquer qu'ils étaient généraux aux peuples de la Gaule centrale. —
Il n'est pas sûr qu'il n'y ait aucun lien entre le culte de ces trois dieux et les
Druides, et mal^ tout je ne puis m'empécher de rapprocher ces trois dienx
des grandes divinités adorées par les Gaulois, d'après César.
3. Nos origines. III : la Religion des Gaulois^ les Druides et le druidisme,
leçons professées A TÉcole du Louvre en 1896. Paris, Leroux, 1 vol. in-8*. Ct.
Revue historique, mars 1892, p. 333.
4. Dans la Revue archéologique, 1886. t. II, p. 112.
5. Dans les Mémoires de la Société des Antiquaires de France, 1894, p. 109.
nuRCB. 349
)aa. sans pouvoir former à leur sujel une conclusion définitive. On
tonne an peu de ce qu^il ne rappelle pas l'explication donnée à
propos des objets de la collection Récamier, qu'il s'agissait là de
plomlis de la douane*.
Nos provinces gallo-romaines produisent, comme toutes les terres
vigoureuses, leur moisson périodique de mémoires, ivraie et froment
mêlés. En Narbonnaise, nous avons un Iwn relevé de toutes les
fouilles faites à Martres-Tolosanes avant la dernière campagne, qui
parait avoir été très fructueuse: ce relevé, accompagné d'un cata-
logue, est dû à .M. jACLt?!*. L'excellent M. Bochetin' nous entretient
d'Uzès* et du Pont-du-Gard^. De l'autre côté du Rbône, M. Boubggs
étudie et restitue avec soin te Monument triomphal de CavaiUon^.
M. MokIjI nous apporte des « données nouvelles « sur saint I^zare
et saint Maximiu, les saints de Provence^, qui ne me paraissent pas
offrir toute l'importance annoncée par l'auteur. M. Siige nous rap-
pelle les débuts de Monaco*. M. Gillbs nous promène sur les terres
des Arlesiens, au gré de ses rêves archéologiques que doivent lui faire
Ïtrdonner sa verte vieillesse, sa belle vaillance et les services rendus '.
t. Cf. Gagnât, Impôts ii^irects, p. GS.
t. La FontiOet Ae Uartres-Tolosanei, IS16, 1S40, 1890, dgmg les Mëmoirei
it'Aeadimie dei (ct«ncsi, inicripUont et beUes-lettret île TotUoufe, l. Vlli.
L H. ttochelin est mort en août 1997; cf. le discojra de H. Ubsnde,
Mémoires de lAcadémie de Vauclute, I. XVI, p. 311.
i. Mémoires de lAcadémie de Vauctuui, t. XVI, p. 153 et tair. : Études
d'archéologie et d'histoire sur la ville d'Usés. Le costrum d'Utèi, du iV liâcle,
n'aurait laissé aucune trace. — Cazalis de FonUoucu, Une fonderie antiqae de
broiœ des eavlroivs de Montpellier (extrait des Mémoires de la Soc. arch. de
MotUpellier).
5. tl>id., t. XVI, p. 2t)â. Je ne suis pas encore conTaincu que le Poal-dn-
Gard soit contemporain d'AugusIe. Si l'inscription de Veranlus [Corpus, -Vil,
?980J eti antique (Cbarret l'affirrae. Soc. d'Alais, 1873, p. 152), rien ne prouve
qu'elle donne Je nom de l'architecte.
6. Ibid., t. XVI, p. 199 (il j a un tirage i part),
7. Mémoires des Antiquaires de France, 1835, p. 27-51 : Données nouvelles
sur plusieurs personnages de ta tradition de Provence (l'inicription de LaiM~
T\as\ p{a)p{a) était connue de M. AlbauM et de moi depuis 1IJH5, el déjà bien
des personnes ont aonge A y voir le texte autour duquel s'est cristallisée la
tradition de saint Lazare, mais il Tandrait d'uutres documents que la copie
manuscrite d'une épilapbe. L'orij^ne arvernique du culte de saint Maiimio
aurait tiesoia d'être prouvée autrement que par les textes donnés par H. U.).
S. Les Origines phéniciennes de Monaco et la voie Héracltenne, imprimerie
de Honaco, 1897, iQ-4° de 24 p. Gela est bien court. P. 23 : l'Itinéraire Anto-
sttn e«t antérieur i la On do m- siËcle.
9. Le Pays d'Arles et ses trois tribus saliennes, les Avattques, les Dt'euriates
t Im AnalOes, 1" partie, InlrodueUon (époque celttque, période romain*.
350 BULLITIH HIBrOEIQUI,
Il feut que tous les trois ans paraisse un nouveau travail sur le
passage des Alpes par Hannibal. A Télude de M. RomaD, publiée en
4894% répond aujourd'hui celle de M. GEirpuis, œuvre très eom-
pacle d'un homme qui était plein de ses textes et de son sujet ^ qui
connaissait fort bien le pays*, il fait passer les Gartba^nois par la
Drôme, le col de Cabre, la vallée de Buech, Gap, Ghorges, la Duranee
et la vallée de Barcelonnette '. DMci à trois ans, nous verrons indiquer
un autre tracé et nous savons qui le prépare.
En Lyonnaise, M. Bolliot', M. Aubertoc^, M. Afprb' continuent
à travailler chez les Éduens, M. Julliot chez les Senon^*^ M. Ha-
BBRT chez les Hèmes^; M. Ariiauldet achève son Corpus (bien som-
maire) des Inscriptions antiques de la IV^ Lyonnaise^. A Lyon, c'est
M. Lapon qui étudie l'amphithéâtre de Fourvière'. — On Mt de
belles découvertes en Armorique, et MM. Mowat et Loth les com-
mentent avec leur habileté ordinaire^®. — En Aquitaine, la question
époque chrétienne), Paris, Fontemoing, (s. d.,} iii-8* de 196 p. Je n'ai pas tu
la 2* partie : Fin de$ Déeuriates,
1. Revue historique, mars 1895, p. 337.
2. Annibal dans les Alpes, dans les Annales de FUniversiU ée GremUtU,
1897. K. Ch. aTait déjà esquissé sa théorie en 1862; ef. Desjardins, Gauk
romaine, I, p. 96.
3. Journal l'Autunois du 17 juin 1896, non vidi; cf. BuOeHn des Ântiquakts
de France, 1896, p. 289. Je n'ai pas encore reça la thèse latine de M. Gobin :
Viae apud Arvernos romanae, etc., 1897.
4. Recherches sur la fondation de la viUe de Beaune, dans les ITffrtMÉw
de la Société de Beaune, 1895 [1896J, p. 59.
5. Apollo Medicus, laraire de Santosse, Und., p. 149. Sor les dieux topiques
de cette région, cf. p. 115. On traTaille bien à Beaane.
6. Une façade des thermes romains élevés au commencement du It siède
dans la capitale des Senones, dans les Mémoires des Antiquaires de France,
1894, p. 123 et s. La restitution de cette façade m*a paru ingénieuse, mais pro-
blématique : quelques-uns des bas-reliefs nUlisés penvent convenir à des
monuments funéraires. — M. Le Clert a donné an catalogue très précis, très
minutieux des Monnaies gauloises du musée de Troyes (dans les Mémoires de
la Société académique de l'Aube, 1896).
7. Je regrette de n'aToir point parlé, en son temps, du liTre de K. Habert sur
la Poterie parlante (Pans, Reinwald, 1893, 2 toI. in-4*) qui est une très impor-
tante contribution à la connaissance des c sigles fignlins » dans la régk» des
Rèmes, des Tricasses, des Senones et des Lingons.
8. Mémoires delà Société des Antiquaires de Ftanee, 1894, p. 265 et s.
9. Amphithéâtre de FourvièreSy lu A l'Académie des sciences de Lyon, 3* tMt,
t IV, 1896, p. 397 et tirage à part.
10. Mowat, dans le Bulletin des Antiquaires de France, 1896, p. 297, et Loth,
dans les Annales de Bretagne, 1897, p. 266. J'ai peine A croire qoe le paçus
Camutenus (p. 300) ne soit pas un pagus des Bedones. — Une note plue que
sommaire sur les Antiquités de LiUebonne, dans VArchaeologia de Farts, 1897,
FKincE. 354
3 piles', les Touilles de Chagnoa-Villepouge ont agité les érudils
locaux', celles d'Yzeurea ont occupé MM. le P. ob u Gboix el Ha»^.
— Mais c'esl surtout en Gascogoe que les joutes archéologiques oui
été vives ^.
M. CiHOBKiT a droit à une sincère sympathie. Simple professeur
de dessin dans un collège sous-préfecloral, il travaille avec beaucoup
d'ardeur et inQniment peu de ressources livresques, mais il tire le
meilleur parti possible de ces ressources el de cette ardeur; c'est un
convaincu, un passionné, un désintéressé, et il tient avec une iné-
branlable ténacité à LecLoure son pays el aux idées qui lui sont
propres. Aussi convient-il de ne point répondre par d'autres colères
aux emportements que M. C. a laissés réguer dans sa Ville des
Sotiales^. — M. C. avait identlQé autrefois Voppidam célèbre des
Sotiales avec la ville de Lectoure'; l'abbé Breuils lui a répondu ea
défendant les droits du pays d'Eauze^; et M. Hirschfeld a supposé
ensuite que Lectoure avant le troisième siècle était, non pas cité
municipale, mais simple sanctuaire religieux^. De là l'irriLatiou crois-
sante de M. C, el le virulent pampUet par lequel il réplique à l'un
■•* 1-3 (cf. p. 60). — JVoa vidi: P. du Chalellier, la Poltrie aux épogwfpri-
hUtorique* el gauloites en Armoriqut. Paris, Lechevalter, IS37(7), ia^i'; Afe-
neau de la Orancière, tes Parures préhialorlques, eic, el le* colliers taliimans
eelloarmoriealns. Paris, Leroui, I897(?), ia-â*.
1. Voy. surtout le très îiaporiant traiail de U. Lièvre (toutes résenres faites
■ur la condusiOD, que ies piles sont des fatta ou temples) dans le Congrts
arekcoloffique ik- France, LXl* i^ssion [1834J, I8'Jlj; Pirelongut el la juulion
det piles; cf. Revue de Saialoage el d'Aunil, 1" mai 1S9&; ma couTiction
absolue est que les pilea sont d'origine funérure.
2. Voy. Revite de Sainloaçe el dàunis du 1" Juillet 1897, du l" septembre;
Bulltan de la Sùcûllé ilgt anliquaires de l'Ouest, avril 1397.
3. £iM MonanumU gallo-romain* dYteures, état le BuUeUn de ta Sociéli
des antigtuUrei de iOueU, I. Vlll, 2- série, 1S96. — Voj. une Excuraon à
Murtens, dans le B^tUetin de la Société des éludes du Lot, I. XXI, 1896. —
Le catalogue qu'a iaaaè M. Vialettcs des Sigles fig\Uiti* relevés s\tr Us pole-
ru$ trouvées dans l'Aveyron (surlont de la fabrique de la Graufeseoqae) et à
Sanesiac appelle tant de reclilicatioos qu'il est presque inutilisable {Mémoires
lie la société... de l'Axieyron, t. \V, 3' livr.).
4. L'AguUaine hislorique el monumenlale, de UM. Dufourcel et Camade (je
n'ai TU que le t. III, Dai, 1897, ia-S'), est un simple ré»unié des travaQi anlé-
rieurs. Elle parait à la suite des actes de la Société de Borda.
i, Étuties de géographie liistorigae ; la ville des Sollatei. Auch, Bousquet,
1867, iD-12 de I5U p., grav. et plans.
6. L'Emplacement de l'oppidum des Soliates. Paris, Champion, el Auch,
Folx, 1883.
7. l'Oppidum des SoUates, dans la Revae de Gascogne de 1895.
8. SUtuitgsberlchU de l'Académie de Berlin, t. XX, 1896; cf. AeoM épigra-
pHiqve, 1897, p. ihi.
M
352 BULLBTIII HI8T0UQUB.
et l'autre. ~ Il but avant tout déplorer et blâmer bautement le too
agressif, les allusions personnelles, les longues invectives que ren-
ferme le travail de M. C. On constate avec regret que de Êcheuses
habitudes, contraires à Tintérét de la science et à la dignité da
savant, se répandent de plus en plus dans le monde de TéruditioD^
gangrené à son tour par les maladies du journalisme politique et
des luttes parlementaires. Nos cbers amis de Gascogne et de Pro-
vence' en particulier ne peuvent écrire sans combattre, et ils vous
lancent une ligne ou une lettre dinscription comme une flèche
empoisonnée. C^est un peu Thabitude de M. Bladé', qui, en cela
comme en d'autres choses (celles-ci bien meilleures}, a été oo
maître de cbœur en Gascogne'. Si on n'y met bon ordre, le travail
scientiQque sera impossible avec ces d'Artagnan de la géographie
historique. Remarquez qu'ils gâtent leur cause et que M. C. en par-
ticulier en avait une excellente. — Il est probable en effet que, si
Lectoure n'est peut-être pas Toppidum des Sotiatesj la cité dont die
était la métropole n^est autre que Tancienne peuplade aquitanique:
le nom de Lectoure apparaît à la fln du premier siècle, au moment
où disparai t celui des Sotiates, et l'une et l'autre cité ont été parmi
les plus importantes, sinon les plus importantes, de TAquitaiDe
propre. D'autre part, on ne peut admettre que Lectoure ait été sim-
plement une bourgade sacrée, sans organisation municipale; on oe
comprendrait guère qu'à la fln du premier siècle un intendant impé-
rial ait été tour à tour procurateur en Lyonnaise et Aquitaine, puis
procurateur à Lectoure, si cette ville n'était pas une cité et le centre
d'une circonscription flscale.
Ce qui est l'origine de ces interminables discussions que suscitent
depuis trente ans le nom des Neuf Peuples et rinscripUon d^Has-
parren, c'est ceci et uniquement ceci : Ptolémée place dans l'Aqui-
taine propre cinq peuples seulement, Auch, les Tarbelles, les
Gonvènes, Bazas, et un cinquième, les Data, dont le nom est déna-
turé. Quel est ce cinquième peuple? Les uns, parmi lesquels M. Ga-
1. M. Gilles n'a-t-il pas écrit récemment (cf. p. 359, n. 3) qu*il était la victime
(l'un complot tramé contre lui par les Arcbives des Boaches-du-Rhône, et que
j'avais été Tagent principal de ce complot préfectoral ? cela parce qae je diffé-
rais d'avec lui sur la question du parcours des routes romaines en ProTcace.
2. Cf. Revue historique, mars 1893, p. 320.
3. Voy. avec quelle ardeur il combat ses adversaires A propos de l'antiqiiilê
du diocèse de Bayonne (Bladé, Mémoire sur Vévéehé de Bayonne^ Pan, 1897,
extrait des Éludes historiques et religieuses du diocèse de Bayonne). IL Blidé
est contre l'antiquité; M. Poydenot lui a répondu (cf. p. 362, d. 5), avec
beaucoup de calme et, bêlas 1 d'assez mauvais arguments.
niitcB. 3S3
loreyl*, disent Lecloure, les autres, et M. Hirschfbid* parmi eux,
"disent EauEe*. — Tous ces conflits disparaîtraient si l'on voulait une
bonne Tûis discuter ce LoUl des cinq peuples et douter un peu du
chiffre donné par Ptolémée*-, il ; a, certes, bien d'autres omissions
et d'autres erreurs chez le géographe grec, l^ meilleure solution est
de dire qu'il y a eu neuf peuples constitués en Aquitaine bien avant
Ptotêmée. et peut-Stre dès Auguste, et qu'il faut admettre de con-
serve parmi eus les Élusates, comme les Lectorates, sans parler des
Consérans, des Itoiens et d'Oloron.Lejouroùonse donnera la peine
de les chercher, on trouvera les.'preuves de l'eiistencc continue de
ces neuf cités sous l'empire, et l'on aura apaisé, au sud de la
Garonne, bien de vaines colères*.
IV. Afrtqdk. — Le seul gros ouvrage qu'on nous ait adressé sur
l'Afrique romaine est la suite des Fastes des Provinces africaines*
de M. PtLLo DE Lessebt : elle renferme une nouvelle édition, rema-
niée, des Fastes de la Numidie, parus en 1888. L'auteur n'a pas
épargné sa peine : l'utilité du hvi'c aurait éLé peut-être plus visible
s'il avait été moins étendu, plus condensé. Ce tome 1" renferme
570 pages grand in-4° et n'étudie que les gouverneurs d'Afrique
proconsulaire et de Numidieavant Dioclétien, L'auteur était d'autant
I. Bt U. Allmer, Bevve, 1895, p. 389.
S. Hirscbretd. op. Revut épigraphlqite, 1897, p. 4SI.
3. Duc des preuves serait, d'après l'abbé Breuils '.Revue épigraphîque, 1897,
p. 159), t|ue le« Data avatenl ponr capitale Tasta et qu'an liou dit d'Eauze
«'appellerai! la Tasle. M. C. râpond (p. III) qu'il y a un Tailo k Lecloure,
el (p, 114) il en conclol, lui aussi, que Lecloure s'appela d'abord TaUa. —
Hais il ï a une quantité cousidérable, en Gascotjne. de Toile, la Taile. Tasiet,
etc., il ; en a autant que de Lalande ou de Latttothe.
i. Celait la théorie de Sacaze {Inscriptions des Pyrénia, p. 545) : > L» l(st«
ploléméenae est sùremenl incomplète. » Voill, Je crois, la réritè.
5. Est-ce bien silr? Plus d'une question, qu'on croyait â jamais résolue, repa-
rall au jour après des siècles. On était bien persuadé, de notre temps, que U
cité des BoTeas correspondait au pays de Bucb. et il y a 1 cette persuasion au
moins quatre raisons, dont une seule eAt suffi. U. C, nous parle de celle ciié
connue • introuTable, n et M. Poydenot {<[e t'AntiquiU dt l'rvichè de Bayonne.
Bayonne. Lasserre, 1897, in-8' de 84 p.), renouTelaut la très vieille bypothèse
de Scaliger, identifie la cité de Bayonue 4 celle des Hoiens : mais au moins
11. Poydenot jiarle de toutes ces cboses sans colère et avec une loucbanle
Miortoisie. — Sur l'bistoire du sol en Gascogne, cf. Uurègne, Duna primUinet
et forits antiques de la c6te <lé Gaseogne (extrait du Bulletin de la Soeiiilé de
géographie commerciale de Bordeaux, 5 avril 1897) : une carte montre en
teinte plate les forêts d'origine ancieime.
6. Tome 1", 2* [et dernière] partie, p. 307-572. Paris, Leroux, 1897, in-*'.
Cr. Amue historique, mars 1893, p. 318; mars 1897, p. 319. Il y a beaucoup
K.iins^périeDC« dans la manière de préseoler les citations-
Rbv. Ujstob. LXVI. 2* fasg. 23
354 BULLETIN HIBIORIQirB.
plus tenu à la concision que ce genre de travail peut recevoir, à tout
moment, de nouvelles additions.
Le ministère de l'instruction publique, fort généreux pour les
choses de l'Afrique \ a pris sous sa protection une Bibliothèqm
d'archéologie africaine dont voici les deux premiers fascicules; ils
rappellent tous deux les noms de deux vaillants explorateurs égale-
ment disparus : le premier {Tombes en mosaïques de ThabroM;
douze stèles votives du musée de Bardo^) est Tœuvre de Du Gov-
DRAT La Blaivchère, l'autre [Études sur les ruines romaines de Ttg*
zirt^) est dû à Tarchitecte Gàvault; celui-là a été publié par les soins
de M. Cag^tat, celui-ci a été mis au point, complété et édité par
M. GsBLL. — Le même M. Gsell nous envoie une ample provisk»
(X* Inscriptions inédites de l'Algérie^; M. Gaucklee nous livre eatn
autres découvertes de nouvelles épitaphes provenant du cimetière
carthaginois des officiâtes^ ^ei les fort curieuses mosaïques deSousse*;
il y a entre autres une mosaïque, où sont Ûgurées des variétés nom-
breuses de poissons, qui ravira les historiens de la pisciculture et les
commentateurs d'Ausone.
C'est une fort belle inscription que celle d'Henchir-Mettich^ une
t. Le livre de M. Pillu de Lessert paraît également soas ses auspices.
'2. 10-8- de 56 p. et 7 pi. Paris, Leroux, 1897.
3. Iu-8* de 136 p., 2 pi. et 23 dess. Paris, Leroax, 1897.
4. Extrait du BulletiH arckéoiogique du Comité, 1896. N** 2 et 3, iiscrip-
tions intéressantes de soldats légionnaires origiftaires de Chartres et d'Antu.
— ïit^9> Marques céramiques grecques et romaines ont été publiées par M. Ds-
lattre dans la Hevue tunisienne de 1897.
5. Découvertes archéologiques en Tunisie, dans les Mémoires des Àjsih
quaires de France, 1895. — Voy. plus récemment fiesnier, Inscriptions et u»-
numents figures de Lamàèse et de Tëbessa, dans les Mélanges de Rome, déc
1897. — Je reçois à l'instant Ballu, Les ruines de Timgad. Paris, Lenrax, ia-^.
6. Les Mosaïques de Sousse, dans la Revue archéologique de jniltet-aodL
Sur les routes romaines de la Tunisie, cf. Winckler dans la Revue timlsémM
de 1897, et Granal dans le Congrès de Carthage, 1896. Sur {'Enceinte romaint
d'Uadruinète, cf. llannezo dans la Revue archéologique, janTier 1897, p. 22.
Vo>. encore Carton, In édi/ice de Dougga en forme de temple égyptieii
{Mémoires des Antiquaires de France, 1895, p. 52); les Sépultures à enceinttt
de Tunisie (extrait de l Anthropologie, 1897). ~ Les découTertes du P. Oe-
lattre (Compfe-rendu de l'Académie des inscriptions, 1897, p. 92) ont proTO-
qut\ rhoz M. liéron de Villefosse, de belles actions de grâces, auxquelles bous
nous assiKMons volontiers.
7. L'imcription d^ Henchir-Mettich [près du confluent de la Medjerdah et de
ro. Siliane], extrait des Mémoires présentés par divers savants à F Académie
des inscripUons et t^etles-lettres, 1** série, i. XI, f* partie, 1897, iA-4* de
56 p.. A pi. ~ On connaissait trois autres règlements sur l'exploitation rurale
de l'Afrique, mais il ne s'agissait que de domaines impériaoi; ici il s'agit à*u
faste territoire conbé à la colonisation privée.
des plus inléressantes découvertes que l'épigraphie ait fournies
depuis longtemps, et M. TooTiis a eu la bonne Tortune, dont il était
digiie, de s'en voir confler le commentaire par son maître, M. Gagnât.
C'est le règlement, très complet, très nainutieux, de l'exploitation
d'une grande ville africaine au temps de Tr^yan. Presque tout est
nouveau dans ce document, mais ce qui intéresse le plus et ce que
M. T. a fort bien mis en lumière, c'est la situation des colons, vrai-
semblablement des indigènes', sur un grand domaine de l'Afrique
latine*. Où il s'avanœ peut-être un peu trop, c'est quand il rattache
directement leur condition à la couquéLe de l'Afrique (p. 54)^ : qui
sait toutes les transformations que le sort des indigènes d'Henchir-
Metlich a pu subir entre les temps des Gracques et le règne de Tra-
jan 7 — M. Cartox vient de coordonner en un volume ses travaux de
dix années sur les installations hydrauliques romaines en Tunisie*, et
M. GiccELEK, sur le même sujet, conduit une vaste Ew/uète officielle'^,
dont les premiers résultats concernent surtout les régions d'Ël-Djem
et l'arrière-pays de Sfax. El M, Toulain conclut sa note très précise
sur l'Histoire des carrières de marbre Similku^ en donnant d'excel-
lents conseils sur la manière dont il faut procéder pour utiliser sage-
ment ces carrières. — Espérons qu'il en sera de ces travaux comme de
1. C'est 11 le point wwntict, selon moi, de ce méiDoire. Il a&t «wlement
flcbeai qu'il n'y ait pas une preuve formelle île l'iaillgÉaat de [ous ces colons.
2. Vo}., p. ïi, l'importante disaerUtiuo sur les deleniorei des groupemenU
iodigiaeE.
3. Je ne saie «i H. T. n'eiagËre pas en disani (p. %'i) que ces douaincs
fuient de petilea priacipautés ■ presque îadépenilanles, • Ils ont pa le deve-
nir, ils ae le sont pas, et il est IodI oaLurel que dans no rËglemeut de ce genre
il ne soit pas queslion île droits politiques. — Au deraler moment, nous rece-
vons une Ëtnde 1res profonde de M. Cuq sur le^^ problèmes juridiques que sou-
levé celte inscription, et en particulier sur celle du colonat partiaire des indi-
gènes, s qui n'a rien de commun, > dit-il, i arec le colonat du bas-empire s
\le Colonat partiaire dans l'Afrique romaine, extrait des Mimaires présen-
tét, etc., 1" sériE, t. XI, 1" partie, 1837, iu-f de 6fi p.). Voy. encore ScliulteD,
AbkandlMigen, etc., delà Société de Gœttingen,pft<I.-Aiif. Klasse, nouv. série,
1. II. (Of. un récent comple-rendu par H. Toutain, Rev. erit., 1896.)
4. Étude iUT les travaux hydrauiiqaet des Romains en Tunisie. Tunis, impr.
Rapide, 1897, un la-S- de 1.16 p. (extrait de la Reme tuTUsIenne).
j. Enquête sur les Intlallalions hydrauliques romaines en Tunisie. 1. La
BfsaçtM orientale. Tunis, Nicolas, 1897, in-8' de 62 p. Auteurs : MM. Maa-
inen#, Toussaint, Blauchel, Flick et Holios. Conclusion de H. Blancbet pour
le centre de la Tunisie ; < Il n'a jamais été couvert de cultures irrigables; les
seuls Iravani hydrauliques qu'où y relève sont destinta h l'utilisation alimen-
taire des eani de plnle. >
6. fatrait dn Cottgrit de Carthage, 1896.
356 BCLLITIN HISTOUQUB.
ceux qu'entreprit M. Bourde sur la culture de Tolivier; qulls aunmt
une conséquence pratique el profltable à notre belle ootonie.
Enfin rhistoire de TÉglise chrétienne d'Afrique doit on intéressant
erratum à M . Gsell. C'est à Lambèse qu'il faut placer, et non à Goos-
tantine, le lieu du martyre des saints Jacques, Marien et leurs com-
pagnons ^
y. Orieutt, Espàgub. — L^archéologie de TOrient' est toi^yours on
peu une chose française. — Nous nous affirmons en Syrie, et M. Dos-
SAUx nous en a rapporté des inscriptions intéressantes qu'il aurait
dû commenter un peu plus longuement'. — Le voyage de MM. Foos-
SBT et Pëedrizkt dans la même région a été fructueux et nous a fiût
connaître, entre autres nouveautés, l'origine et l'époque de la flotte
stationnée à Séleucie^. — Les RR. PP. copient avec soin les inscrip-
tions de Palesline, et ils ont souvent le coup d^œil heureux' et la
chance favorable*. — Un diplôme militaire fournit à M. Riioii de
ViLLEFossE^ l'occasion de nous donner la situation militaire et poU-
tique de la Palestine en 439. — il fout apporter une attention toute
particulière à la monographie faite par M. Hokolle du temple de
Delphes sous Tempire romain' ; elle renferme, sous une forme très
concise, trop concise, une quantité prodigieuse de renseignements,
1. ObêervaUons sur l'irucripiion des martyrs de CwistanUné [Vm, 7924].
Extrait des actes de la Société de ConstatUineCi),
2. Voy., de M. Dobrasky, la Description d^une copieuse trouvaille diMKrif-
tiens et d'ex-voto (ii* et m* siècles) dans un sanctoaire des Nymphes thneei
(Bulletin de correspondance hellénique, jaoTier 1897). — Sar la via Egnatk
et la Macédoine sous l'empire, cf. Perdrizet, iM., p. 161.
3. Voyage en Syrie^ dans la Revue archéologique, mai 1897 ; cf. BulMn é»
correspondatice hellénique, 1897, p. 165.
4. Bulletin de correspondance hellénique, janTier 1897.
5. Cf. Revue biblique, 1896, p. 603; Bulletin des Antiquaires, 1897, p. 111.
6. Par exemple, pour l'extraordinaire mosaïque de MadaK>a, figurant ui pUs
des contrées bibliques; cf. Compte-rendu de V Académie des inscriptions ie
1897, p. 140, 169, 189, 211, 284, 457; Revue biblique, 1*' atril 1897; Cosmos,
24 avril 1897.
7. Comptes-rendus de l'Académie des inscriptions de 1897. Je n*ai pas fu
Yalessie, la XII' légion bis de l'armée romaine en garnison à Jérusalem m
l'an 34 de J.-C, dans la Revue du clergé français d'avril 1897. Deux aoti«s
diplômes, de Bulgarie, dans les Comptes-rendus de V Académie des insaip'
lions, 1897, p. 498 (Gagnât) el p. 538 (Héron de Villefosse).
8. Bulletin de correspondance hellénique, 1896, p. 702-732. P. 715, rappro-
cher l'inscr. de Vespasien des autres règlements de territoire faits par cet empe
reur {Bulletin épigraphique, t IV, p. 136). P. 717, remarquer le rôle de Nénn
et de Domitien à Delphes. P. 729 : Gonstant est le dernier empereur qoi soit
mentionné. Tout cela a vraiment un grand intérêt historique.
ruRCB. 3S7
presque tous inédits ; lousceux qui s'occupent de l'histoire religieuse
de l'empire romain devront la consulter longuement.
Ue toutes parts, en revanche, nos archéologues français sont allés
à la conquête de l'Espagne. Aux Antiquaires de France arrivent des
inscriptions d'Andalousie, de Garthagène, de Tarragone ' , un utile
complément à l'étude des sources de l'êpigraphie hispanique*; de
Portugal même l'Académie des inscriptions reçoit un texte sur l'em-
pereur Domitien'; M. Enckl nous envoie de précieux renseignements
sur les musées publics et privés de la province de Barcelone*- On n'a
pas à parler ici des découvertes de M. PiRrs, si utiles à la connais-
sance de PEspagne anlé-romaine : mais c'est ce qui noua vient de
meilleur, cette année, d'au delà les Pyrénées*.
(Emilie Jdlluit.
HisTOïKE CONTE H FOR* IRE. — Le nouveau volume de M. Acubd* se
compose de huit études relatives à l'histoire de la Révolution fran-
ç<iis«, déjà parues dans diverses revues. Elles sont toutes de premier
intérêt et Taites de main de maître, et renouvellent en grande partie
les questions qu'elles traitent. La première {Auguste Comte et la
fiéitilufion française) nous rappelle de quelle singulière manière le
Tondateur du positivisme se permit de travestir l'histoire. Dans la
deuxième \Danfon et lesmassacres de Septembre), M. Aulard disculpe
Danton d'avoir eu une responsabilité dans les égorgemenls. 11 eâl
certain qu'il n'en fut pas l'auteur; sans parler de Murât, le rôle de
Roland fut peul-élre plus lamentable que le sien. Il n'empêche qu'on
ne peut l'innocenter complètemenl selon moi. Les deux articles sur
la séparation de TÉgliseet de l'État sont neufs et intéressants. J'aime
particulièrement l'étude sur les Causes du 18 Brumaire. Il ya Iéi des
pages Unes et profondes où M. Aulard montre à merveille comment
la disposition générale des esprits devait faire accueillir favorable-
ment le 1 8 Brumaire. L'étude suivante sur le lendemain du 18 Bru-
maire montre comment il le Ait en effet. Le volume se termine par
deux chapitres sur l'Établissement du Consulat à vie et sur l'Au-
Ihenticité des Mémoires de Talleyrand. On se souvient des polé-
I. Biaielln, 1896, p. 349 [de HH. de Bourgade cL H. de Villefosse), 1897,
p. t3l (de U. G. Vcrnet), etc.
i. Ibid.. 1S9T, p. 143 (de H. Hichon).
3. Complet-ren-ius, 1897, p. 172.
4. Dans la Betme internationale des archives, des biblialhèç^es i
musées. Welter, 1S96.
5. Je parle du busle déjà fameai d'Elche. Cf. Heaiey, Académie des ins-
criptions. 1S9T, p. 507. Sera publie par U. Paris, dans U Fondation Piot
6. F.-A. Aulard, Études et teçoTU sur ta Rivolution française, seconde série.
^wfa, AlciD, inl?, 307 p.
358 BULLBTIll HISTOEIQUB.
miques soulevées sur ce dernier sujet. U est certain que les mémoires
publiés ne sont pas tels quMls sont sortis de la plume de TaUeyrand;
il ne l'est pas moins qu'ils ont une réelle vaieur historique, à la
condition d*être employés avec critique. — M. Aulard a dirigé des
fouilles profondes dans les sources de l'histoire de la Révolution.
G*est lui qui a publié les Actes du Ctmité de salut publie et les Docih
ments relatifs à V histoire de la Société des Jacobins, U est de plus
l'auteur d'une multitude d'études sur les personnages et les événe-
ments les plus considérables de l'histoire intérieure de la RévolalioD.
Il est donc assurément, à tous les points de vue, le seul homme
capable de l'écrire actuellement. Or, il y a longtemps que noos
n'avons plus eu d'histoire de ce genre ; depuis la dernière, la science
des choses de l'époque s'est renouvelée. Il est nécessaire de temps
en temps d'écrire des ouvrages généraux qui durent et qui fixent
l'état de la science historique sur telle grande période. H. Aulard
ne nous donnera-t-il point cette œuvre dont il a déjà écrit tant de
fragments, qu'il a esquissée dans plusieurs chapitres de VBistm
générale et qu'on est en droit d'attendre de lui ?
M. BoppE étudie, dans un volume substantiel, Thistmre de la
légion portugaise, de 4807 à 4843, ou plutôt, comme il le dit lui-
même, ce n'est pas une véritable histoire qu'il nous donne, c'esl on
choix de documents officiels puisés en général aux archives de la
guerre et aux Archives nationales et destinés à servir de commen-
taire aux lettres de l'empereur concernant la légion portugaise. On
sait que la légion portugaise fut créée à la suite de l'occupation du
Portugal par Junot. Quoique primitivement ses officiers eussent dû
surtout servir d'otages auprès de Napoléon et l'aient suivi fort à
contre-cœur, elle se distingua à Wagram, à Smolensk et à la Mos-
kowa. Ses débris rentrèrent en France et, les régiments étrangers
ayant été licenciés par Louis XVIIl, les malheureux officiers portu-
gais se trouvèrent entraînés dans le désastre de celui qui les avait
arrachés à leur patrie. Ils écrivaient mélancoliquement, le 8 sep-
tembre I8H, au ministre de la guerre : t Nous sommes des mal-
heureux qui roulons depuis longtemps de malheur en malheur sans
en avoir été la cause, s II est difficile d'imaginer une odyssée plus
douloureuse que celle de ces infortunés qui, après avoir semé tous
les chemins d'Europe des cadavres de leurs compagnons, se trou-
vaient du jour au lendemain jetés sur le pavé. Il est fâcheux que,
par un excès de modestie, le commandant Boppe, au lieu de nous
1. Commandant P. Boppe, ia Légion portugaise, 1807-1813. Paris, Berger-
Levraolt, 1897, in-8% xii-519 p.
donner une histoire, n'ait Tait que publier des documents qui n'ont
guère d'uliliLé que pour l'hisloire militaire technique.
Ce sont au contraire tous les historiens qui sauront gré au com-
mandant MiRGD£ito<( de l'importante publication qu'il vient d'entre-
prendre' et dont le second volume paraîtra prochainement. Son
recueil a sans doute été i publié surtout en vue de riusiruclion
militaire, » mais co même temps il a groupé i les matériaux qui
forment ta substance essentielle de l'histoire de la campagne de 1812,
sans les modirer ni les tronquer, en laissant aux esprits éclairés le
soin d'apprécier tous les faits, ■ et par là se trouve avoir aecoiapli
une œuvre de toute première ulililé pour les historiens. Ils trouve-
ront dans le livre de M. Margueron un choix raisonné de documents
bien classés, précédés, réunis el complétés par des notices succinclos
et précises. Un grand nomtire de piècessont inédites; elles proviennent
principalement des archives du ministère de la guerre. Le volume
qui vient de paraître foit connaître avec détail les forces que réunit
l'empereur en vue de la campagne de Russie; il montre comment
peu à peu l'armée s'organisa et grossit de manière à être prête à
toute éventualité; quelques documents se rapportent aux projets que
l'empereur nourrissait contre l'.\ngleterre.
Ce ne sont pas les érudits seulement, mais même le grand public,
qui s'intéressera aux Souvenirs de Pons de l'Hérault, puhUés par
M. PÉLiBsiEB*. Je disais naguère que son introduction était ce qu'il
y avait de meilleur dans son récent volume des lettres de Napoléon
de l'ile d'Elbe. Ou n'en dira pas autant du présent. Non que l'intro-
duction qui est en tète soit insuffisante : elle est au contraire etcel-
lcnl£, sotire, nette et précise, et expliqua à merveille l'intérêt de la
publicalioD. Mais cette publication en elle-même est tout à fait impor-
tante. Je sais peu de volumes aussi intéressants en ce qui concerne
la personne de Napoléon vaincu. M. Pélissier a retrouvé à la biblio-
Ibëque de Carcassonne les manuscrits de Pons de l'Hérault, ancien
jacobin, qui fut nommé administrateur des mines de l'Ile d'Elbe,
quj, sans cesser d'être républicain, se dévoua à Napoléon détrôné,
rentra avec lui en France et vécut ensuite longtemps dans l'exd. U
avait de bonne heure entrepris la rédaction de ses souvenirs, qui
l. CatHpagne de Riiiaie. t" partie : Prétimiaairei île la campagne àe ffui-
tie, IH caïues, sa préparation. OrgatiUalion de t'arntfe du {"janvier tSIO
m 3[jaaaer mi. ParU, CbarlM-UTauzeltc, in-8', vn-333 ]>.
F^Z. Fons de l'IIcraull, Souvenirs et anecdolex de l'ile iTBlhe, |>aliliés d'après
't orïginul par Léon-G. PéliMier. Paris, Pion, IS9T, Id-8', xi.m-
360 BULLBTIIf HI8T0EIQUB.
devaient être publiés sous le titre d^Essai sur le règne de Napoléon
à nie d'Elbe, Mais le premier brouillon fut détruit, et ce n'est qa*à
la fin de sa vie que Pons a rédigé les notes publiées par M. Pélissia*.
Elles formaient trois grosses liasses de fiches incomplètes et décou-
sues. M. Pélissier les a fort bien classées et émondées. L'indéniable
sincérité du brave Pons, la précision de ses souvenirs, la lucidité de
son esprit, le soin qu'il eut de s'entourer de tous les témoignages
possibles, donnent à son récit une valeur véritable, malgré la date
reculée à laquelle il fut rédigé. Le récit est amusant par la persoD*
nalité de Fauteur, brave homme têtu, sensible et méridional. Le style
en est des plus pittoresque. Entremêlé de locutions méridionales
(a petitote, » a trop à bonne heure, » etc.), il est parfois incorrect
et souvent d'une enflure qui prête au sourire. Il fkut lire les amours
du brave général Drouot avec la charmante M"' Henriette (p. 472))
ou encore la description de l'arrivée de la garde à Tile d^Elbe : o&
voit « de vieux soldats qui, avec une flgure rébarbarative (ne), versent
de douces larmes comme la jeune fllle qui retrouve le père chéri
au-devant duquel elle courait » (p. 323). Mais c'est naturellement la
flgure de Tempereur qui tient le premier plan. Assurément, comme
le remarque fort bien M. Pélissier, Texcellent Pons est loin d'être
assez grand psychologue pour en démêler toute la complexité. Mais
il note un grand nombre de traits intéressants de sa vie et nous
donne l'impression exacte et sincère qu'il a produite sur un fort
honnête homme qui lui était hostile en principe et qui, tout en se
laissant séduire par lui, ne perdit pas entièrement la liberté de le
juger. Peut-être, comme le signale M. Pélissier, peut-on remarquer
dans les mémoires de Pons quelques signes d'afl*aissement intellec-
tuel chez Napoléon. Il est évident que le fait de remplir de petits
poissons la poche du général Bertrand, puis de lui demander son
mouchoir, n'est pas un acte de génie (p. 250-254). Plus signiflcatib,
de mauvais choix fréquents, des petites vanités, des jugements hâtifs,
des résolutions inconsidérées frappent le lecteur. Mais, en somme,
tout cela est peu de chose. Certains traits de caractère vraiment plus
importants s'accusent dans la publication de Pons. C'est par exemple
les merveilleux dons d'acteur qu'il y avait chez l'empereur, gardant
au milieu de ses plus grandes colères jouées ou réelles une posses-
sion entière de lui-même et le pouvoir de rendre pleine justice à ses
contradicteurs. Le brave Pons était tout bouleversé d'une scène vio-
lente qu'il venait de subir pour n'avoir pas voulu livrer à l'empereur
des sommes qu'il jugeait dues à la Légion d'honneur : il fut stupé-
fait de le voir quelques secondes après venir lui causer cordialement
UNCB. 364
comine si rien ne s'étaîl passé. « Il n'avait, dit-U, pas plus de flel
qu'un poulcl » (p. ^^51. « L'empereur n'élail pas haineux. Surtout
il n'était pas vindicatiT n (p. <<>(). « Il n'était pas télu et admettait
fort bien qu'on eût raison contre lui » [p, 2S0). Bien d'autres traits
seraient à rappeler. Le livre abonde en clioses nouvelles et mérite
un vrai succès'.
Il faut en souhaiter également à celui que M. Giffjirel vient de
consacrer à l'histoire de Dijon en 18)4 et en 1«15', pendant la pre-
mière occupation autrichienne, les Genl-Jours et la deuxième occu-
pation. L'auteur a trouvé un grand nombre de pièces d'archives, de
lettres et de mémoires locaux, pleins de détails curieux et importants.
Il nous a donné une bonne monographie de la vie d'une ville de pro-
vince pendant ces jours troublés. Entre autres questions générales,
il aide à élucider celle des sentiments de la France à la Un de l'em-
pire et au début de la Restauration. Ce volume n'apporte pas de faits
et d'idées nouveaux, mais il sert à vérifier abondamment les faits
historiques généralement admis : la lassitude du pajs à la cbute de
l'empire, la joie qui accueillit la première entrée des alliés, les désap-
pointements qui suivirent le retour des Bourbons, la surprise, la
crise d'espoir qui secoua le pays pendant les Cent-Jours. enfin,
après la chute déflnilive de l'empire, le malaise et la colère qui résul-
tèrent de la nouvelle occupation el des exactions des alliés obligés
de rentrer en France. La publication de M. GaCTarel n'a rien d'oiseux
comme trop souvent celles du même genre. Elle est utile et originale,
et, tout en intéressant par elle-même, elle donne à l'érudit qui le
désire le moyen de la vérifier et de la compléter. Regrettons un style
parfois un peu « bavard » dans son allure rapide et une incorrec-
tion trop fréquente des noms propres.
Le litre seul du volume de M. Philibert AonEBS^ND^ annonce qu'il
n'est pau un livre d'histoire. II consiste en une série de dialogues
précédés de deux courts morceaux sans importance. Des interlocu-
teurs aux noms fantaisistes y causent sur Napoléon sans que rien
indique le motif de leurs conversations et les sources de leurs affir-
mations. Bien qu'écrit dans une langue laborieuse et contournée qui
manque de précision et de finesse, le livre se lit facilement. L'auteur
1. Va indoi faciltle les recherches. Dans une procbaine éditioa, quelque*
recliSealionB de nams propres sont aécessaires. Le infime personnage est appelé
Ltmbers. p. 242 et 326, et Louberl, p. 330 el 352.
•L Paul Gaffatel. Dijon ttn 1814 et en 1815. Dijon, impr. Daranlître, 1897,
iD-8*, 3BÏ p.
3. Pbllitierl Audebrand, Kapoléon a-l-U tti un homint htwrvuxf Parle,
Ïalmann-Liv;, I
n-lS,
[I-30S p.
362 BULLETIN HISTORIQUB.
est au courant de tous les potins de Phistoire et y ajoute sa bonne
part. Étant donné qu'il semble viéer à l'exactitude, on peut lui
reprocher d'accepter sans contrôle certains dires par trop erronés
tels que l'imputation à T Autriche d'avoir volontairement détruit le
fils de Napoléon. L'ouvrage de M. Audebrand est un de ces livres
a à côté de l'histoire » comme il s'en écrit de bien pires. Il se par-
court sans désagrément et quelques pages sont amusantes et non
dénuées de vérité.
M""' Arvëde Barine a retracé dans son charmant volume, Bourgeois
et gens de peu^ la physionomie d'un brave grenadier anglais qui a
eu l'heureuse idée d'écrire, ou plutôt de dicter (car il ne savait pas
écrire) ses souvenirs de campagne. On s^étonne de ne pas voir men-
tionner cette élude dans l'introduction dont M. H. Gauthier- Villars a
fait précéder la traduction qu'il nous donne des Mémoires de William
Lawrence ^ Ils sont d^une lecture bien intéressante, moins d'ailleurs
au point de vue proprement historique qu^au point de vue psycholo-
gique. Ils n^apportent guère de détails nouveaux à l'histoire des
guerres d'Amérique, d'Espagne et de la campagne de Waterloo. En
revanche, ils nous fournissent une curieuse psychologie du soldat
anglo-saxon. M'"*' Arvëde Barine et M. Gauthier- Villars se sont plu
à rapprocher ces mémoires des souvenirs de Goignet et de Fricasse.
Malgré les différences de race, il demeure bien des traits communs,
et lo principal est qu'en temps de guerre la question du « ventre » est
celle qui concentre presque toute l'attention du soldat, quelle que soit
sa nationalité. La traduction de M. Gauthier- Villars est fort agréable,
d'une langue alerte et simple, très appropriée au style de l'auteur.
Le dernier volume des Mémoires des autres, de la comtesse DASH^
est peut-être le plus amusant. Il est moins « bâclé » que les autres,
si l'on peut dire, et il renferme une foule de détails sur Barbey d'Au-
revilly, Henri do Saint-Georges, Victor Hugo, Roger de Beauvoir,
Ida Ferrier, Gérard de Nerval, Dumas surtout, et bien d'autres.
J'imagine que l'aimable narratrice a dû plus d'une fois confondre et
enjoliver ses récits. Il faut signaler ses notes de voyage et particuliè-
rement l'amusante description qu'elle donne d'un séjour qu'elle fit
dans un harem de Gonstantinople, où elle vit des choses cachées au
commun des voyageurs. Malheureusement, ici encore Je me défie de
son imagination exubérante.
t. William Lawrence, Mémoires d'un grenadier anglais, 1791-1867, tradniti
par Henry Gauthier-Villars. Paris, Pion et Noorrit, in-18, xx-2% p.
1. Mémoires des autres, par la comtesse Dash. Souvenirs aneâiotiques sur
mes contemporains, publiés par Clément Roche! . Paris, Librairie illastrée,
in-18, 262 p.
I IDC
FUIfCE. SAS
On consultera avec plus de conflance le dernier ouvrage de M. de
•(SLBEKCH dk LorEiTJouL, OÙ le savant érudit étudie avec son soin
accoutumé un cerlaiii nombre de particularités relatives à la vie et
aux ouvrages de Dalzac, dont il s'est Tait un domaine particulier'.
M. DE MeiDi a consacré à Montalemberl, qui fut son beau-pére et
ami, une élude biographique grave, pondérée, un peu solennelle,
ti en même temps qu'une œuvre d'bistoire est un hommage pieux '.
Me est écrite avec une simplicité austère et donne bien, je crois, le
portrait de l'homme honorable qu'elle décrit. Elle n'emprunte rien
au reportage ni aux préoccupations d'une amitié mesquine et fami-
lière. Elie montre â quelles grandes questions Montalemberl tlil
lëlé, comment il les comprit, de quelle manière il aida à les Iran-
lilier. Elle f^it ressortir les deux sentiments qui l'inspirèrent toute
vie : l'amour do la religion catholique et celui de la liberté, et
:poso de quelle manière Monlalemltert pensa les concilier. L^histo-
m est de la même race que son héros, et l'on croit lire par moment
biographie simple et austère de quelque grand parlementaire d'au-
Tois écrite par un fils respectueux qui, en retraçant la mémoire de
m père, pense honorer à la fois sa race, son Dieu et son pays.
Martial Delpit fut un des membres de la droite modérée dans l'As-
semblée nationale de tSlt. Son nom, à peu près ignoré de ceux qui
o'ont pas étudié spécialement notre histoire politique, peut l'être sans
înconrément. On ne lira pas néanmoins sans prollt l'étude que M. des
'audes vient de consacrer à ce très honnête homme'. Elle consiste
un choix de lettres et de manuscrits de Martial Delpit reliés par
tn commentaire très sobre. Nous avons des renseignements assez
abondants sur la jeunesse de Martial Delpit, ses relations avec Au^-'us-
tin Thierry, sa mission dans les archives anglaises, plus lard sur son
rôle dans l'Assemblée nationale. Par contre, il semble qu'il n'ait pas
vécu de 18J6 à 1871. Martial Delpit apparall comme un homme très
droit, d'un style et d'une pensée fermes. Ses lettres depuis i^lt sont
parfois intéressantes. Quelques-unes sont belles et méritaient d'être
ipubliées.
M. MékiIbes a groupé, sous le titre de Morts et vivants*, dix-buit
■Ucles consacrés à divers personnages littéraires et politiques des
1. vicomte de Sposlberch <te Lovenjaul, Jutour de Honoré de Balxae. Paris,
WmaDn-Léïï. 1897, in-18, itv-!91 p.
I 2. Vicomie de Meaui, Montalentberl. Pam, Ca1tniinii-L.évy, IK97. in-IS,
I 3. P.-B. des Vutacles, Martial Delpil, dépalê à l'AutmbUe italioaale. Jo'ir-
■al tt Cùrrespùndance. Puh, Didol, in-8'. vu- 363 p,
y 4. A. HétiËres, MorU et nininti. Paris, Hacbelle, tB97, iii-I6, 370 [i.
364 BULLETIN HI8T01UQUB.
deux derniers siècles. Ils ont généralement été écrits à propos de
volumes récents. Us n'ont donc point de prétention à l'érudition et se
contentent d'indiquer les traits caractéristiques et la véritable valeur
de leurs héros. Presque tous me semblent « justes, > c'est-à-dire que
M. Mézières a énoncé sur les livres qu'il étudie comme sur leurs
héros des jugements qui sont ceux de la critique impartiale. 11 est
excessivement facile d'utiliser les matériaux réunis par un érudit
pour démolir son œuvre; il ne l'est pas moins de lancer tel paradoxe
bruyant ou de caricaturer telle figure historique. Ces deux procédés
courants forcent l'attention du public et facilitent la vente d'un livre.
Ne les pratiquer à aucun degré est un mérite, négatif si l'on veut,
mais réel. M. Mézières choisit pour peindre ses personnages des traits
simples, souvent déjà connus, sur lesquels il ne craint pas de reve-
nir. Aussi les petits tableaux qu'il nous offre, pour n'être pas des
originaux, ont tous leur valeur, se lisent avec agrément et avec uti-
lité. J'aime tout particulièrement douze pages charmantes sur l'abbé
Prévost. Il faut aussi remercier M. Mézières d'avoir défendu Texquis
Fénelon contre les agressifs prôneurs de son rival. Je note encore un
intéressant croquis du feld-maréchal Paskevitch. Dans les dernières
études, consacrées à des personnages qu'il a connus, M. Mézières
ajoute le charme de ses souvenirs personnels. Il y a plaisir à suivre
ce cicérone aimable dans les chemins bien tracés où il nous promène.
L'Algérie de M. Maurice Wahl n'est pas non plus entièrement une
nouveauté <. C^est la troisième édition d'un ouvrage paru il y a déjà
plusieurs années. L'auteur en a rafraîchi les statistiques et complété
quelques détails. Il n'y a pas à revenir sur ce volume, dont le sérieux
mérite est déjà connu. Je rappelle qu'il se compose de six livres : il
y en a un consacré à la géographie physique, deux à l'histoire, un à
Tethnographie, un aux questions politiques, un à l'économie poli-
tique. U est regrettable que l'auteur n'ait pas complété son volume
par une bibliographie raisonnée et par un index. L'une et l'autre
auraient rendu de grands services. Espérons que nous les verrons
dans une prochaine édition.
L'étude que M. Lipib vient de consacrer à la société tunisienne, ou,
comme il le dit fort bien, « aux civilisations tunisiennes', > est tout
à fait agréable à lire. L'auteur a bien vu ce dont il parle et il a lu
tout ce qui s'est publié de considérable sur son siûet. Malheureuse-
ment, — nous en sommes très loyalement avertis, — il ne sait pas
1. Maurice Wabi, l'Algérie, Paris, Alcan, iii-8% 442 p.
2. Paal Lapie, les Civilisations tunisiennes. Musulmans, Israélites, Buropéens,
Étude de psychologie sociale. Paris, Alcan, 1898, in-12, 304 p.
paincB. 86S
l'arabe, ce qui doit inspirer quelques réserves sur bien des points,
&u moins jusqu'à ce que les arabisiints en aient conlr6lé l'eiacLitude.
Pour ceui qui savent encore beaucoup moins l'arabe que M. Lapie,
il est possible seulement de constater que son volume parait bien
informé et bien construit. Il distingue les trois éléments ethniques
principaux qui composent la population tunisienne, JuiTs, Arabes et
Européens, et étudie successivement les traits caractéristiques de la
langue, de l'économie, de la Taniille, de l'Élat, de la religion et de
l'art dans chaque langue, Tout ce que nous apprend M. Lapie est
intéressant et bien exposé. J'aurais préféré un autre ordre des
matières. Il est bien cerlain aussi qu'il y a quelque chose d'artificiel
dans les distinctions nu peu absolues et les généralisations parfois
hâtives de M. Lapie. Les portraits de l'âme arabe et de l'âme juive
soat joliment tracés, mais d'un dessin évidemment trop accusé. Ne
le lui reprochons pas trop. Comme il le dit lui-même, « isoler, c'est
exagérer, k II a voulu isoler les éléments ethniques très enchevêtrés
de la population tunisienne. Il en a sans doute exagéré les caractères
el rendu violenta les contours. Il n'empêche qu'il nous a bien intel-
ligemment expliqué l'étal psychologique et social des trois peuples,
leur action et leur réaction réciproque. Uans sa conclusion, M. Lapie
essaie d'indiquer comment ils peuvent se partager l'activité de la
nation, et l'on ne peut que s'associer, peut-être avec quelque scepti-
dsme, aux vceux qu'il forme pour que les progrès de l'inslruction
et de l'éducation facihtenl leur fusion, afin qu'il en résulte une nation
nouvelle où soient concentrées les qualités des trois races.
La question d'Orient apparaît comme un effroyable chaos à tous
ceux qui ne suivent pas avec quelque soin l'évolution politique de
l'Europe. Ils sauront gré à M. Cdoubliks du volume clair et substan-
tiel qu'il vient de lui consacrer ' . Une introduction expose l'hislorique
de la question avant le traité de Berlin. Itans la première partie de
l'ouvrage, l'auteur analyse le traité et montre les complications qui
viennent tant de la situation de la Turquie elle-même que du réveil
nationalités en Orient et des intérêts des puissances. Dans la
ixième partie, de beaucoup la plus considérable, il expose les dif-
tes étapes de la question d'Orient jusques et y compris les récentes
ires d'Arménie et de Crète. Ëufhi, une troisième partie, beaucoup
plus brève, examine l'état actuel de la question d'Orient. L'auteur est
au courant de la littérature de son sujet en anglais, eu français et en
allemand. 11 est exempt d'idées préconçues et de déclamation. Les
vienn
Hi|Duxii
^■renl
1. 1. Haï ChoubU«r, la Question d'Orient lUpuii le traité de Berlin, Élude
ItHitoite diplomatique. Paris, Roubuiu, 1897, io^S*, 53S p.
366 BULLETIN HISTORIQUE.
conclusions sonl justes et modérées. Il est certain qu'on ne peut
qu'approuver le rôle qu^l indique à la France dans ces laborieux
débats : favoriser avec modération le développement des nationalités
tout en tachant d^obtenir des réformes du gouvernement turc. Mal-
heureusement, ce rôle est terriblement difficile^ et à le jouer mal, oo
même bien, on risque fort de s'aliéner les deux parties ^
La biographie que publie le comte Geàbinski^ sur le comte Arese
intéresse presque autant Thistoire de France que celle d'Italie. C'est
la reproduction, avec quelques additions, de trois articles parus
naguère dans le Correspondant. Ces articles eux-mêmes avaient
pour but de faire connaître au public français des pièces inédites
publiées en italien, en 4894, par H. Bonfadini, dans sa Vita di
Francesco Arese^ et qui sont pour la plupart extraites de la corres-
pondance d'Arese. On sait qu'après avoir commencé par être un agi-
tateur et un carbonaro et avoir été Tami de jeunesse du futur empe-
reur des Français, Arese devint un des hommes politiques les {dus
considérables de la monarchie piémon taise puis italienne. Son amiUé
avec Napoléon III Taida en maintes reprises, comme agent de Gavour,
à obtenir des concessions favorables à Tltalie. La partie la plus
importante do la correspondance consiste dans les lettres qu'il échan-
gea avec Napoléon et avec le docteur Conneau. Les premières attestent
clairement la politique au jour le jour et décousue de l'empereur;
les deuxièmes démontrent l'influence considérable et souvent funeste
qu*eut sur cette politique le docteur Gonneau, qui déclarait lui-même :
« Je suis Français parce quo les circonstances m'ont fait tel, mais je
sens qu'au fond du cœur je suis, j'ai été et je serai toujours Italien»
(p. 440). Il faut savoir gré au comte Grabinski d'avoir mis ces pièces
curieuses à la portée du public français.
Sous le titre de l'Espagne^ Cuba et les États-Unis^, M. Gharles
Benoist a réuni un certain nombre d'articles de revue consacrés à la
question cubaine, au soulèvement des Philippines et au roie histo-
rique de M. Canovas dei Gastillo. Il a vu les hommes politiques prin-
cipaux d'Espagne et est bien au courant de ses sujets. Malgré une
1. Oq voudrait un peu plus de précision dans les référenees et de soin dans
les indications typographiques. M. Choublier cite à plusieurs reprises (p. 3Î2,
440, 4in)} le soi-disant testament de Fuad-Pacha daté de i8(>9 et publié dans U
Revue de Paris en novembre 1896. H e^t très vraisemblable que ce docament
est apocryphe.
l Comte Joseph Grabinski, Un ami de SapoUon III, U comte Arese et la
polUique italienne sous le second Empire. Paris, Bahl, 1897, in-l8, 259 p.
3. Charles Beuoist, l'Espagne, Cuàa et les États-Unis. Paris, Perrio. ia-lô,
xvii-*2G9 p. y » t
FBiflCE. 36T
prédiloction visible pour l'Espagne et pour Canovas, il j a un efTorL
d'imparLiaiilé, ut la valeur hi&torique de Touvra^ est réelle. Il a de
grandes «(ualités de netteté et de précision. Il faut y regretter un style
un peu sautillant et un procédé d'écriture qui rappelle souvent plutôt
l'interviewer que l'historien. La partie de beaucoup la meilleure du
volume eut celle qui traite de la question cubaine. Il expose à mer-
veille son origine et son évolution. La volonté séculaire cl inébran-
lable de l'Espagne de maintenir sa domination sur la colonie, quelque
socriDce qu'il puisse lui en coûter, est assurément uo bel exemple de
nerté nationale. M. BenoisI n'explique pas moins bien le désir d'indé-
pendance d'un peuple dont les chefs rêvent d'être des ■ Guacinton, »
des o LaiTayet, » des < Bolibar s (p. 43), et aussi l'attitude des lîtals-
Unis, qui depuis le commencement du siècle guettent l'île, laquelle,
selon eux, doit rorcémeul tomber dans leur domaine; leur politique
onicielle, correcte et diplomatique, ne cesse d'en négocier l'achat,
tandis que le sentiment populaire appuie l'idée d'une dépossession
brutale. Le conllît entre ces trois ambitions était inévitable. 11 semble
que l'aveuir ne pouvait que l'exaspérer; les trois adversaires se
réclameitt de principes irréconciliables : les Espagnols de leur tradi-
tion nationale et do leur propriété, les Cubains du droit du peuple à
disposer de lui-même, tes .'Vméricains de la géographie et de leur
intérêt. Celui de ces droits qui l'emportera est sans doute celui du
plus fort. L'avenir est gros d'orage.
M. Legee vient de publier une deuxième édition de son Monde
stavt*. Il y a ajouté une introduction où il raconte de quelle manière
il a été amené a s'occuper d'études slaves et un fragment imporlaoL
sur la langue russe et l'expansion des langues slaves. Le bvre est
assez connu pour qu'il soit inutile de le recommander. Quelque
anciens que soient quelques-uns des essaisqu'il comprend (plusieurs
datent d'avant la guerre de lëTO), ils n'out rien perdu de leur inté-
rêt ; ou pourrait même dire, hélas ! qu'ils sont presque aussi nouveaux
pour nous. En dehors de la littérature Journalistique, nous sommes
demeurés terriblement peu instruits de tout ce qui se passe dans le
monde slave. Chaque fois qu'on traduit un volume du russe, nous
nou« apercevons de notre prorunUo ignorance de l'àme et de la vie du
peuple allie. 11 faut bien avouer que les travaux de M. Léger et de
quelques autres sont trop peu connus, n'apprennent pas assez et ont
eu trop peu d'imitateurs. i'uJsse l'enseignement do M. Léger au Col-
e deFrance susciter des disciples qui aient la science, la prÉcisioa
h. Lonlt Leeer, le Mondt tlave. Étvdei politiquei et UtUrairu- 2' éd., revue
jiDHtie. Paris, Hachette, 1897, b-lfi, xxii-34t p.
d68 BULLBTIlf HISTOJUQUB.
et la clarté d'esprit du maître ! U est certes plus lieicile aetueUemeot
que jadis d'aborder ces études et les avantages qu^elles comportent
sont plus immédiats. Soyons toujours reconnaissants à M. Léger de
ce qu'il a fait et espérons encore davantage.
Le livre de M. Pob^donostzeff constitue un document très préciraz
pour la connaissance de cette âme slave^ H. Jules Lemattre Ta signalé
dans un intéressant article, qui, hélas, a eu moins de retentissement
que celui qu'il avait consacré à l'ouvrage de U. Demolins. Publié il
y a deux ans en Russie sous le titre de Recueil de Maseouj œ livre ;
a fait une très grande impression. G^est ce qu'on pourrait appeler le
catéchisme raisonné de Tàme russe conservatrice. Dans des chapitres
détachés, l'auteur^ qui occupe une très haute situation dans Téglise
orthodoxe, passe en revue un certain nombre des idées du jour en
matière philosophique, politique, religieuse, etc., et il les dissèque
avec une simplicité forte et rude qui n'est pas sans produire un grand
effet. En phrases nettes et sûres, il énonce les propositions les pbs
hostiles à toutes nos habitudes de juger modernes, et il &ut recon-
naître qu'il critique admirablement les institutions dont nous sommes
fiers ou vouions le paraître. La séparation de l'Église et de l'État est
absurde; « on ne peut séparer le corps de l'esprit. > Le sufiDrage uni-
versel est fondé sur une théorie absurde et engendre forcément la
corruption la plus effroyable. Absurde, le principe de la souverainelé
du peuple et le gouvernement parlementaire : « Le Parlement est une
institution qui sert à satisfaire l'ambition et la vanité et les intérêts
personnels des représentants. Cette institution est une des preuree
les plus éclatantes des illusions de l'esprit humain » (p. 40). Absurde,
le régime démocratique; absurde, l'organisation du journalisme
moderne : des aventuriers y exercent, grâce à la liberté de la presse,
la première magistrature de l'État sans donner aucune garantie, sans
avoir aucune responsabilité. Nous sommes hypnotisés dans l'idolâtrie
de mots abstraits mal compris. Le chapitre intitulé < Des maladies
de notre temps » est un des plus curieux. Celui qui traite de l'Église
est aussi très important. Mais tout le volume est à lire et à méditer.
C'est, à ma connaissance, le manifeste récent le plus remarquable de
l'esprit chrétien conservateur. Il est rédigé dans un ton très modéré
et fourmille d'observations profondes et délicates. Dans son genre,
c'est un chef-d'œuvre, et il est particulièrement intéressant comme
révélation de l'esprit russe traditionnel.
Certainement beaucoup moins curieux, le volume de M. Louis
1. G.-P. PobédoDosUeff, Questions religieuses, sociales et politiques. Puis,
iB-8*, II-2S3 p.
Leg&a:(d sur l'Hie de patrie* mérite d'élre lu avec esUme. C'est un
traité didactique à la manière des philosophes du zviu' aiède sur les
origines, l'historique et les conséquences de l'idée de pairie. Nous y
trouvons peu do choses nouveUes, mais des idées sages, justes et
salues, qu'il n'est pas oiseux de répéter en bons termes. Un livre
comme celui de M. Legraad n'est pas sans valeur à l'heure actuelle,
où l'idée de patrie subit des attaques ii^uslifiées et où il est de mode
de se singulariser par des paradoxes. Le livre de M. Legrand «bL
d'une sage doctrine et d'une grande probité littéraire. Je ne veux pas
examiner ici l'idée qu'il se fait de l'idée de patrie ni la manière dont
il conçoit son avenir. Ce ne sont pas la des matières historiques, à
proprement parler, et J'avoue m'éloigner de son sentiment sur ces
quesl'ons. Mais on peut louer son historique de l'idée de patrie, qui
est, en somme, exact. J'y voudrais plus de relier. L'idée de patrie a
traversé des phases plus diverses qu'il ne semble par le livre de
M. Legrand. La forme actuelle ne date certainement, en réalité, que
de la Révolution. Il est évident qu'un régime démocratique, où régne
le sulTrage universel el où chacun est partie agissante de la patrie,
doit en exalter l'idée jusqu'au moment où d'autres raisons viennent
modifier la forme de celte idée. L'idée actuelle de patrie est donc,
somme toute, comme celle que nous avons de la propriété, issue de
la Hévolulion française, ou du moins a été très profondément modi-
fiée par elle. C'est un fait que je constate sans prétendre d'ailleurs
en tirer ici aucune conclusion : l'abolition de l'esclavage est aussi une
création moderne et n'en est pas moins respectable. Faire de l'idée
que nous avons aciuellement de la patrie une ancienne tradition ou
le résultat d'une évolution plus récente n'est en soi ni en alTermlr ni
en ébranler la légitimité, on ne saurait trop le répéter.
André Lightenbekgbb.
Dn des derniers numéros de la Science sociale a résumé el discuté
assez longuement, quoiqu'on les « dissociant « d'une manière qui
pourrait induire en erreur, les lignes que j'ai consacrées ici au récent
volume de M. Demolins. Disposant de peu de place, je n'ai pu rele-
ver dans cette revue qu'un petit nombre des fantaisies hisloriques
de H. Demolins. La Science sociale a voulu en Justifier quelques-
unes. J'y renvoie sans commenUtire ceux que ce petit débat peut
, 1. Louis Legrund, t'ItUe dt patrie. Paris, Hacbelte,
Hbv. Histom. LXVI. ï' fasc.
870 BULLITU HlBTOJUQni.
ESPAGNE.
4895-4896.
La littérature historique est en Espagne plus abondante qu^on m
croit. Elle partage avec le roman presque toute Taetivité littéraire de
notre pays, et Ton peut afRrmer, sans chauvinisme, que dans m
deux genres les auteurs espagnols produisent des œuvres dignes
d*être connues partout.
Les deux années 4895-4896 ont été particulièrement fécondes en
livres de caractère historique. Notre bulletin sera donc un peu plu
long qu*à l'ordinaire. Nous tâcherons pourtant d^ètre bref, ne fai-
sant d'analyses détaillées que pour les ouvrages les plus importants.
DocDMBNTS. — Si l'on ne compte dans cette section que les publi-
cations exclusivement consacrées aux documents inédits, la liste ne
serait pas considérable à vrai dire; mais il ne faut pas oublier que,
comme nous le ferons remarquer à l'occasion, la plupart des travaux
historiques qu^on imprime maintenant sont accompagnés d*appeiH
dices où Ton insère les documents concernant le sujet étudié.
L'Académie de l'histoire, après les sept volumes de son Memorid
histârico publiés en 4894, semble avoir ajourné cette riche eoUee-
tion. Elle n'a fait paraître de nouveau que le volume XXXIV où
finit V Histoire de Charles /K, par Mitribl, et une riche édition delà
Lex romana Wisigothorum, d'après un palimpseste trouvé à Léon*,
et dont la nouveauté (vraiment très mince) est de renfermer une loi
inédite de Theudis concernant Tadministration de la justice. Ije texte
peu important do cette loi et l'existence d^une très belle édition anté-
rieure de la Lex romana rendaient superflue, à notre avis, la publi-
cation très coûteuse du palimpseste. Le commentaire historique et
critique qui précède le texte a été imprimé en latin, probablement i
Tcxemple des Monumenta Germaniae historica ou du Corpus tm-
criplionum de Berlin. Mais ce qui est très naturel pour les Alle-
mands, dont Tidrome est peu répandu dans le monde, ne semble pas
aussi nécessaire pour une langue latine^ qui, môme pour les étran-
gers cultivés, est très accessible au moyen du latin et de l'italieD.
Par contre, il n'est pas douteux qu'à cause de la décadence dee
études classiques en Espagne il y aura chez nous beaucoup de per-
1. Legis romanae Witigolhorum fragmenta ex codice palimpsetto sametai
Legionemis ecclesiae, Madrid, 1896.
usftùm. 371
sonnes pour qui la lecture du lalin académique sera une difficulté
assez embarrassante.
Les doux n collections de documenls inédita, > dues aux soins du
marquis de la Fuensanla et de MM. Zabalburu et Sancho Rayon,
n'ont pas trop prospéré depuis 1894. Dans la première ont paru
deux volumes (C)CI et CXIl) concernant, l'un la correspondance dea
princes d'Allemagna avec Philippe II et l'autre les documents de
la > Hermandad » de Cordoue, formée au temps de l'infant D. Sancho.
Dans la secnude on a. publié le tome VI, comprenant des documenls
relatifs au Pérou [1559-1570)'. — La mort du martiuis de la Fuen-
santa et de M. Zabalburu, survenue récemment, a rendu diftlcile la
continuation de ces deux séries.
En revanche, les érudits régionaux font des efforts très louables
pour publier les documents concernant leur province. En Catalogne,
la collection de Documents inédits del Arxtu municipal de Barce-
lona a donné de nouveaux volumes qui arrivent à la seconde moitié
du XVI* siècle, et lo direct«ur des archives communales de Manresa
a entrepris une Biblioleca hislorica Manrexana* dont le premier
volume comprend une œuvre inédite de Magi Cangellaa, auteur du
iTti* siècle; elle est intitulée : Descripciod« lagrandetay anttquilals
de la ciutal de Manresa. En même temps la Revista de Calalunya,
nouvellement parue, donne en feuilles séparées le célèbre Tractât
del régiment delà princeps e de comunilats de Fr. F. Eiimenis et
d'autres écrits inédits. Les érudils des lies Baléares font de même
avec les Informacioju judiciaU xobre'ls adictes a la Germania trou-
vées aux archives de Majorque par M. Quadrado, et le Diari de
Malte de Juan Roca.
De leur cùté, les Aragonais ont donné un nouveau volume de la
Biblioleca de escritores aragoneses, qui renferme l'ilinerario de
Araçiin de Labaûa^, et les Basques ont fondé une Biblioleca bascon-
gada qui publie des documents et des travaux historiques '. Une
attention particulière doit être donnée à \a.Colecciàn de Monumenlos
l. Nueea co/eceinn de documentoi inéditot para la liislorla de Bipana y
de tus ladlat. Tomo VI. Docuinentoi referentes al vireynalo del Peru, 1559-
1570. Mndrid, 18%. In-4*. ïeii-383 p.
3. BlblMeea hiator. Manraana. Tomo I. Descripciii de la grandeia y ttnU-
quUats de ta clutat de Manresa, abra mediia de Magi Cangellas ab la bio-
grafia del autor. Manresii, iSSti.
3. lltneraria del ittiaa de AragOn. Obra impresa y public, por la Excou,
DipuUciun pravinc. de Zaraguza. Zara^oza, lS'J5-96, la-rol., lxxi-213 p,
4. Uilbao, 1896. In-S'. Quatre Toliime» onl été publiés avec des Douvres de
Horua (dlanours politlqDe) el Camplou, et des Iraraux lur Ipirrigulrre et
pl'ftrbre de Guernica.
372 BULLETin HISTORIQUE.
hUtôricos de VaUnda y $u Reino due aux soins de M. Gbabas, el
dont les deux premiers volumes sont consacrés à Touvrage inédit da
P. Teixidor (xtiii* siècle) : Antigûedades de Valencia, très impor-
tant pour les rectiflcations qu'elle apporte aux histoires classiques de
Beuter, Ercolano, Ësclapés, etc. , et même aux écrivains modones,
tels que Llorente. M. Ghibis a publié avec un soin très méritoire le
manuscrit du P. Teixidor et Toffre aux lecteurs enrichi de notes,
d'appendices et de planches ^
D'un intérêt plus général est le Secundo proceso instruido for k
Inquisiciôn de Valladolid contra Fray Luis de Leôn, dont étaient
connus des fragments depuis 4882 (publiés par H. Alvarez Guijarro
dans la Revue Hispano- Américaine). Le*P. Blanco Garcu le publie
maintenant en entier avec des notes intéressantes.
Les Jésuites travaillent beaucoup à leurs Monumenta Histori»
Societatis Jesu (un fascicule par mois), qui sont à leur troisième
année et renferment, dans différentes séries, des documents coneer-
nant Thistoire de la Compagnie {Chronicon Soc. Jesu^ Lilterae qu(h
drimestres) en général, et en particulier saint Ignace de Loyola et
saint François de Borja.
Pour ce qui concerne les études arabes, il faut signaler un petit
volume de Escrituras mozarabes toledanas que se conservan en d
Archiva histôrico nacional^^ recueillies et annotées par M. Pois
BoiGUEs et intéressantes pour connaître la vie sociale et les mœurs
de Tolède pendant les zi^^ xu"* et xrii* siècles, et le tome X de la
Bibliotheca arabico-hispana^y qui continue V Index librorum de
diversis scieniiarum ordinibus quos a magisiris didicit Abu Beqwr
ben Khair, M. Riesai, de concert avec MM. Codera, Pons et autres
arabisants, commencera prochainement la publication d^une série
d'études hispano-arabes, où seront insérés plusieurs documents. Si
cette série réussit, elle prendra la place de la Bibliotheca^ meoaoée
de disparaître, malgré les efforts de ses éditeurs, TÉtat lui retirant
la subvention qu'elle a reçue jusqu'aujourd'hui. — Une des études
arabes annoncées sera consacrée aux bibliothèques et bibliophiles
arabes. M. Ribera a donné d^avance un spécimen de cette étude dans
une conférence lue à TUniversitéde Saragosse et qui est arrivée dqà
à sa seconde édition^.
1. Monumentos histôricos de Valencia y su reino, Tomos I y II. AnlifU-
dades de Valencia... Escribiolas en 17G7 f)r. Josef Teixidor... Valeoeia, ld9>
18U6. Ia-4% xxxix-467 el bOi p., a?ec planches.
2. Madrid, 1897. ia-8% 320 p. Texte arabe et tradacUoo pariieUe.
3. Tomus X. CaesaraugusUe, 1895. ln-4% xui-51 feuiUes.
4. BtiUiofUos y Biàliotecas de la Espana mtuulmana. Zaragou, 1897.
ESPIGHE. 373
M. UDiGon a publié dans la Mbiiolhèque des bibliophiles plusieurs
lielacionns hinlâricas de los siglosÀVlyXVlf, dont q indiques- unes
relalenl des voyages royaux, d'après des manuscrils de la Biblio-
thèque nationale, et, dans un fascicule à part, la curieuse Helacion
tle lot festinfii que se celebraron en el Valirano, con motivo de las
bodai de Lucrecia Borgia con Alotuo de Aragon.
iteveiianl à l'hislorrc locale, on trouve encore à signaler un volume
de Docutnentot hiitàricos det Archiva municipal de San SebaKlian,
qui comprend des documents depuis l'an 1200 jusqu'en l^tis'; les
trois lettres de Antonio Tallander' et surtout le Testamenlo de Rai-
mond Lulle', publications dues à M. Bofarull et dont la seconde a
été, à diverses reprises, analysée dans des revues périodiques de
France, à cause de son importance historique: la Nolida de las
fiettas en honor de la Marquesa de Denin, célébrées à Séville en 1 599,
imprimée, avec d'autres documents de l'époque, par M. TBfiORio*.
Au même genre appartiennent les relations des fêtes célébrées â
Madrid en honneur du prince de Guastalla, avec une pièce drama-
tique de Tirso de Molina, publiées à Séville*.
Parmi les œuvres des mémorialistes, ont paru le second et le Iroi-
sième volume des Memorias de la rida del Exc"" F.-D. José Garcia
de Leàn y Pisarro ^ la Refulacion de D. Jeràmmo Vnldés al Mani-
fiesio de D. Joaquin de la Pezuela, 1824 ", qui concerne l'histoire
de riniJépeiidaoce des colonies espagnoles de l'Amérique et les Memo-
rins del Marqués de Ayerbe relatifs au séjour de Ferdinand VI! à
Valençay et au commencement de la guerre de l'Indépendance (1N08)'.
Il suffira de citer deux anciens traités inédits : Compretitiàn de
la deslreza, par A. Ghebiu de la Vbgi, el Ejercicios de la brida,
par A. DE Ojeda, dont l'intérêt historique est assez mince, el qui ont
1. VoL XXXVII de la t Soclnlad de BibliofiloB espiiioles. i In-f, vii-lSl p.
Il compread trente et une retalions el de» noies.
%. 9an Seba»liiin, 189S. ln-4', 236 \>,
3. Trei cariât auMgrafwi t tncdilas de Antonio Tallander, Houtn Borra,
tHtieilro dt lo' atbanîana de D. Frrnando el de Aniequera, s algunoi docu-
tnenioi deseoimeidos relativoi al miimo personaje. Birceloni, 1895, 100 p.
\. El Itttameato de Ramtin LvU y la escuafa luliana en Baredona. Barce-
lona, 18%.
5. SevilU, 1S96. viii-U6 p.
6. Grandùuat fieilai qne en la Carte se hieieron à la enirada del seior
Principe de Guasiala... eon una Loa al naeimienlo del Principe de Espana,
compuetto par Gabriel Tdlen. Sevllla, 1896. 17 p.
7. Le |>rernier volnroe a été signalé dan« lo Bulletin précèdent (CotecciilH de
eicriiorei eatleltanot).
8. Madrid, I89S. 513 p. et nne carte.
9. Zango», 1893-95. Id-S>, 805 p. el m portrait.
k
874 BULLBTIlf HISTORIQUE.
été publiés par le marquis de Jerez de los Caballeros, avec des avertis-
semenls bibliographiques de M. Leguiua. Ces deux petites plaquettes
(39 et 23 pages) exciteront pourtant la curiosité des amateurs de
sport.
Nous parlerons ailleurs d'autres publications de documents relatif
à rhistoire littéraire et à celle de nos colonies d'oulre-mer.
RéiifPREssiO!fs. — L^amour de nos bibliophiles pour les réimpres-
sions de livres rares ou peu connus est toijgours aussi vif. Malhea-
reusement, dans la plupart des cas, la réimpression fkite à très petit
nombre d'exemplaires devient aussi rare que Tœuvre reproduite, au
grand regret des lecteurs ordinaires. Quelquefois, il s*agit d'ouvra^
considérables et vraiment importants, tels que les Flores depoeta
iluslres de Espaha^ dont nous nous occuperons dans un autre para-
graphe. Mais, en général, il s'agit de livres comme le LibroquetnUa
de los ini^enlores del arte de marear * et le Menosprecio de corte y ola-
banza de aldea^ écrits composés par Antonio de Gctbvabi, auteur da
xvi^ siècle, ou bien les Grandezas de Eeija^ de A. Flou^do, la
Caballeriza de Côrdoba, de A. Garbillo (imprimé pour la première
fois en 4625), Thistoire de Santa Isabel de Aragon^ reina de Portu-
gal^ écrite par Fr.-D. Gor5bjo et publiée de nouveau, avec des corre^
tions el additions, par le P. Coll^, etc. Parmi les plus importants,
il faut compter le dernier volume des Complementos à la obra de
Averiguaciones cantabricas é ignacianas, par le P. Hettao*^ et les
œuvres dramatiques do Lopb de Rueda * parues dans la Coleceiân de
Libros raros y curiososj et d'une valeur considérable pour notre his-
toire littéraire.
Bibliographie. — Les travaux de ce genre ne sont pas nombreux,
mais ils sont importants. Mettons en tête le catalogue des Manuscrits
catalans de la Bibliothèque nationale de Madrid', rédigé avec soin par
M. Mass6 Torrents, et Tindex des privilèges de Majorque*, dernier
ouvrage d'un archiviste fort zélé, M. Qcadrado. On trouvera beau-
coup do faits utiles à recueillir dans la Imprenta en Médina dd
Campo, de M. Pérez Pastor, et dans THistoiro et Bibliographie de la
1. Bilbao, 1895. glviii-84 p.
2. Ud Tol. de 304 p. Madrid, 1896. Avec des graTnres.
3. Vol. VII. Tolosa, 1895. In-4% 450 p.
4. Obras de Lope de Rueda, Tomo I. Madrid, 1895. In-S*, xii-331 p.TomoII.
Madrid, 1896. In-8% x-294 p.
5. Mantucrits catalans a la BibUoteca nadonal de Madrid, NoUeies per w
catalog raonat. Barcelona, 1896. In-S*, 216 p.
6. Indice de los PrivUegios y Franquezas de Mallorea, Deox fascicoles ont
été publiés à Majorque.
presse sévillane', de M. Manuel Hh^tes, Pour ce qui concerne ies
ilia Philippines, M. Retii^i a publié deux forts volumes de rensel-
^nemenLâ bibliographiques'. Moins importants sont les Apuntes
para eseribtr una bibliografia eucaristica valenciana, de M. CanaiT,
YEnsayo bibliografieo-histàrico de la provincia de Jaen, par le
P. Aconso, qui apporte des additions aux ouvrages antérieurs de
HuAoz Romero, Garnica y Lafliente' et les Apunles para una biblio-
leea eiparlola de politicos y tratadiiias de filosofia polUica, de
M. Bkcker*. m. Ferndndei! Dubo a augmenté ses publîcaliotia sur la
science cosmographiqne avec une curieuse monographie sur Alg-anas
obrat desconocidas de costHografia y navegaciàn^.
HtsToïKE DE l'aht. — La plupart des livres et brochures apparte-
nant a ce f^roupe sont relatiTs à l'histoire des arts plastiques; mais
il y a aussi pour la musique des publications dont l'importance com-
pense le petit nombre.
Les Catalans, qui ont toujours cultivé les études archéologiques,
continuent à apporter des documents nouveaux et des analyses : tels
sont ceux de M. Gispbbt sur les crucifix*, de M. Boikt sur les
sépultures romano-chrétiennes de la l^lalogne^, de M. Fîtes sur les
tlenlelles*, de M. Seseailacu sur l'église do San Pedro de lîampro-
don», de M. Rogbnt sur l'architecture moderne a Barcelone'", enfin
de M. iUssKGUDi sur la chapelle de Santa-Agueda".
Les monuments du nord-ouest de la péninsule ont été aussi étu-
t. BUtorla y bibliografia da la prnua seviUana. SctIIIs. 1836. ln-4',
XLn-37S p., i«ec des Krivurm.
Z Archiva del bthlia/ilo fillpiTiO. Madrid, 1895-36. !□.«■.
3. Un Tolumo de % p. Jnen, 18%.
4. La Iradieién polUiea apanola. ApuMa para una blbliotfca, etc., I tdI.
Hidrid, 1896.
5. Àlgunai abras dttconocidas de Cosmografia y Nafcgaciôn, y singular-
HMfrie delitqiie eicribUi Alfmto Chatei ù prineipio* del $igto XVI. Madrid,
1896. 46 p.
6. Vntt nofa dorqueologia cristiaria. La indvmentaria en lot Cntcifixi.
BwMtona, 1895. 89 p. el 8 phologravares.
T. Sarcàfagos romanoi crtstianos esculturadai que te eontervan en Cata-
luRd. Barceloaa, 1895. 9£i p.
8. Contideraeiones r«taUvat ri lot eneajet, tu earaeler arOaico r proeeta
hitlàrieo, etpeeialmmte en Espaàa. Barceloaa, 1896.
9. San Pedro de Camprodôn. Apuatet y planât relativot à tu rtilttura-
drfn. BarceloDB, 1896. 19 i>.
tO. Arquilectura mmlerna «n Barcelima. Primn caaderno. BitmIou, 1896.
32 p. «t la phololypieA.
11. La fteal CapiUa de Sonia Agueda dtl palacta dt lai seiorei re$et de
Arofihi en Bareeltma. Barcelooa, 1896.
I
376 BULLinif HISTOUQUI.
diés avec soin. D sufQt de citer les deux remarquables moDographies
de M. ViLLAiviL T Castro sur San Francisco de Lugo et Santa Mam
de Meira (église du même type que celle de Silvacane) et la luxoeott
publication de M. Rios t Serraho sur la Cathédrale de Léon*. Poor
la Castiile, nous avons une importante étude de M. Amador m lob
Rios sur le monastère de Saint-Pierre d'Arlanza' et le premier volame
de la Biblioieea artistiea entreprise par IfM. La Toreb et Azrai, et
où sont reproduits les détails d'ornementation de nos monuments
nationaux'. La sigillographie n'a reçu d'autre contribution qu'une
brëve étude, estimable d'ailleurs, de H. Sagarra sur les sceaux do
roi Pierre IV d'Aragon*.
En revanche, pour l'histoire de la peinture, il y a eu deux pul)!!-
cations d'un genre différent, mais d'une réelle Importance : une
étude sur Goya^^ de M. Araujo, remarquable par sa sincérilé, la
discrétion de ses jugements et la critique des légendes qui ont été
répandues sur la vie et les œuvres du grand maître des Caprim^
et VInventario de los cuadros sustraidos por el gobiemo ininuo (de
Joseph Bonaparte) en Sevilla el aào de 4840*; ce dernier inventaire
a été soigneusement reproduit par M. Gomez Imaz, d'après le doco-
ment original qui est conservé aux archives du Real patrimanio, ei
enrichi de notices historiques et de divers documents inédits.
Pour l'histoire de la musique, il faut mettre en tête la série considé-
rable de la Hispaniae Scholae Musica Sacra'' ^ publiée par M. Peouu,
et par laquelle, comme nous l'avons déjà fait remarquer, ont été
sauvées de l'oubli ou restaurées dans la faveur des artistes et da
public les importantes œuvres musicales de Victoria, Guerrero,
Morales, Cabezôn et autres. M. Pedrell, qui est en même temps que
1. La catedral de Le6n. Vol. II. Madrid, 1895. 244 p., arec des graTomet
5 phototypies hors texte.
2. Las ruinas del monasterio de San Pedro de Arlanta en la provineia ii
Burgos. Madrid, 1896. 25 p. et 2 photo.
3. Biblioieea ariistica. DeialUs de ornamentaciôn de los principales num^
mentos de Espana y con especialidad de los hispano-arabes. Tomo I. Madrid,
1896. ÀTec 24 planchea.
4. Apuntespara un estudio de sellos del rey D. Pedro IV de AragUn. Ba^
celona, 1895 (27 documents et 23 gravures). Du même auteur, Le SegréU de
S. Bernât Calvô, Bisbe de Vick (segle Xlll), Barcelona, 1895. 16 p.
5. Goya, por Z. Araujo. Madrid, 1895. 1 vol.
6. Sevilla, 1896. 103 p.
7. Ont été publiés jusqu'ici six volumes, comprenant les œuvres de Victoria,
Guerrero, Morales, Gabezon et Gincs Pérez. Chaque volume contient une préfaça
biographique et critique (en espagnol et français) et plusieurs pages de innsiqiie,
12 francs le volume.
E6P1GITB. 377
lUque el érudit un composiLeur remarquable (témoin son opéra
Eoi Pirineos, dont le prologue a été joué à Venise), donnera bienLùl
à SDR (Buvre monumcnlale un complémenl en publianl des œuvres
musicales antérieures au irx* siècle, dont beaucoup méritent d'élre
connues et chantées encore '.
L'impulsion donnée par M, Pedrell à ces études a produit les trois
monographies suivantes : celle de M. Loztxo sur la musique popu-
laire à Saragosse*, celle de M. Blisco sur la musique à Valence' et
celle de M. Vilub aurlesmusiciensd'Alicanle*. Le fascicule fxcur-
siôn d Elche'', écrit par M. Herseu, est curieux par le document
musical auquel il renvoie, mais la transcription en est très défec-
tueuse. La Biblioteca Sacro- Musical, publiée à Valence par MM. An-
TicB et Teri, donnera prochainement les œuvres inédites du maître
Pereï y Gasc6n dont Eslava avait fait connaître seulement deux
'sels.
iinscFiSTiccE. — 11 faut ici distinguer deux groupes de publica-
ms correspondant à deux courants traditionnels en Espagne ; l'un,
qui mène à l'étude des langues régionales, et l'autre, qui pousse à la
connaissance des langues indigènes de uoa colonies d'outre-mer.
Dans le premier groupe sont a signaler : la monographie du
P. Novell', Analisis fonolôgick-ortografich de la Uengua eatalana
antifja y moderna, complément de l'ouvrage publié précédemment
par Tauleur sous le litre : Aruilisix marfofogich de la Uengua cala-
laaa antiga eomparada ab la moderna; la conférence de M. Cisis t
C^BBti, Catatunya trilingiie, estitdi de biologia tlingiiiiliea'' ; le
Tratado etimolàgico de los apellidos eitskéricos^, par M. ABi.f*, en
cours de publication, et l'étude de M. Balibi, savant professeur de
rUniversilé de Barcelone, maître de la plupart de nos philologues,
sur les Inlensivos y superlativos de la lengua eatalana*. A noter
Père
1, Teairo lirieo eipaiiot antertor al stglo XIX Idceumenloi para la hisloria
> la mutica espanola, colecdonaibu, traTuaitot é ilialradoi). Publié par la
■iioD Gerea, à la Corogne.
^1. La muiica popular retigioia y dramiUiea en Zaragota , deide et aiglo XVI
a nueilroi diai. 1' édition. Zaragoza, 1895. Ia-8', viir-MS p.
PS. La mtuica en Calcncia.. A punies liiBlâricos. Alicinle, 1896. Ia-8-, 102 p.
4. Alitante arfUUco-inuiîeat. AUcante, 1894.
5. Escurtiân li Etcke. Aulo-tirico-retlgiosa, repretentado lodtii loi anos tn
la patroquia de Santa Maria lot diai H y \h dt Agosto. Iladrtd, 1896. ln-4*,
8 p. cl 20 de muniiine.
6. Barcelona, 1896.
7. Barcelona. 1896.
8. Bilbao, 1896.
9. BirMloni, 1895. Id-4', 92 p.
378 BULLBTIll HISTORIQUE.
aussi deux utiles dictionnaires de la langue catalane* et de cdlede
Valence*.
Le deuxième groupe est peu nombreux et tous les ouvrages quile
forment sont relatifs aux langues indigènes des Iles Philippines. Ce
sont VEstudio de los arUiguos alfabeios fUipinos^^ par le P. Hii-
GiLLA, livre utile, mais incomplet; le Diccionano Hispano^Bisayatj
Bisaya-Espanol*^ parle P. Sinchbz db la Rosa, œuvre considérable^
qui contient plusieurs vocabulaires spéciaux, et la Gramatiea ibh
eana du P. Lopbz, corrigée par le P. Gibbo'.
D'un caractère tout à fait différent est le livre de M. Salillas, El
delincuente espahol, El lenguaje^y où Fauteur étudie l'argot des cri-
minels espagnols^ — dont l'usage, dans nos romans « picarescos i
des XVI* et xvii* siècles, est si fréquent, — à un point de vue plutôt
sociologique, il est vrai, que proprement philologique. La nouveauté
de ses procédés et la richesse de son investigation sur la < jerga > et
le « calé jergal » font de ce livre une monographie remarquable,
dont les mérites ont été appréciés déjà à l'étranger par les spécia-
listes dans ce genre d'études. A la fin du volume sont imprimés deux
vocabulaires, celui de Juan Hidalgo et un autre inédit de « cal6. >
Histoire LirréRAiRB. — Après la mort du professeur M. Mili et de
ses collègues de l'ancienne génération, qui a donné un si grand essor
à l'étude de nos auteurs classiques, les historiens de la littérature
espagnole ont été pendant quelques années presque réduits à un
seul nom, celui de M. Mb^teudez t Pelato. C'est lui encore qui four-
nit la plus grande partie du travail. Pendant les deux années com-
prises dans ce bulletin, il a fkit paraître les volumes V et VI des
Œuvres de Lope de Yega ^, dont les préfaces historiques et critiques
constituent des monographies d'une grande valeur; le volume Vide
l'Anthologie des poètes castillans^, exclusivement consacré à l'étude
1. Diceionario de la lengua caUMina con la correêpondietUê eatalMO*
Barcelona, 1895 (tome 111).
2. DUxionario valencian(H:asiellano, 3* édit. augmentée. Valencia, 1887-96.
LXIV-1Î31 p.
3. Manila, 1895. 109 p.
4. Deux Tolumes. Manila, 1895. 480-332 p.
5. 3* édit Malabôn, 1895. In-4*, xiv-356 p.
6. Eitudio fUolôgicOy piicolagico y sockdôgieo, ean dos vocabularioi jer-
gales, Madrid, 1896. In-8*, vn-344 p.
7. Obras de Lope de Vega. Tomo V. Comedias de vidas de Sanios. Madrid,
1896. Tomo VI. Comedias mitolôgicas. Comedias historiau de asunio extran-
gero. Madrid, 1896.
8. Antologia de poeias liricos castellanos. Tomo VI. Madrid, 1896. In-8*,
401 p.
ESPAGNE. 879
de la poésie lyrique et du mouvement liUérairo el social (le Gastille
pendanl les règnes de Henri IV et des Rois catholiques, travail où
l'auleur a presque atteint la perfection du slyje historique; le
volume IV de l'AntboIoi^ie des poètes américains', rclalifà ceux du
Chili, de la République argentine et de l'Uruguay, et le tome II des
ÛEuvresdu P. Marchena', enrichi d'une élude biographique el cri-
tique (t59 pages in'4''), dans lequel M. Menéndcz y Pelayo, tout en
proRlanL des travaux antérieurs de Morel-Falio et de Castro, a
Tourni des renseignements nouveaux qui permettent de dessiner
pleinement la flgure historique et liltéraîre du célèbre révolution-
naire espagnol. Le volume contient en outre la traduction du poème
de Lucrèce et deux essais de critique de Marchena.
Un disciple de M. Henéndez y Pelayo, M. Memëndez Pidal (D. Ra-
miin), est venu tout récemment augmenter la liste, bien courte à
vrai dire, des œuvres vraiment remarquables, avec une monographie
sur la légende des iofanls de Lara dans la littérature espagnole^
L'auteur a étudié son sujet dans les anciens « canlares de gesia, ■
les chroniques et les histoires, les ■ romances, > le théâtre, les tra-
ditions populaires et la poésie narrative moderne. Il a travaillé sur
quarante manuscrits de chroniques et est arrivé à recomposer les
fragments de l'ancienne épopée, à distinguer les différents textes de
celle-ci, à trouver des <> romances > nouvelles (non connues do
Durân) et à établir certaines conséquences importantes concernant la
métrique des gestes et la première rédaction de VEsloria du roi
Alphonse X. Dans un appendice, l'auteur fait l'étude comparative
des divers textes des chroniques après avoir donné plusieurs de ces
textes dans la seconde partie de son ouvrage. Les éloges qui ont été
donnés au travail de M. Menéndez Pidal par d'aussi grandes autori-
tés que M. Gaston Paris el M. Morel-Falio me dispensent d'insister
sur les mérites de la Leyenda de Ioê siele Infantes de Lara.
M. Cotàselo, — dont nous avons déjà signalé aux lecteurs de la
Revue hisloTique l'étude sur Tirso de MoHna, — a donné successi-
vement trois ouvrages du même genre. Le plus considérable est une
monographie sur Don Bnrique de Villena',OLi l'auteur a réuni (sauf
de légères et peu importantes exceptions) tous les renseignements
H)Qnus sur la biographie, les œuvres et la légende du fameux noble
tl. Àntologia de poêlas hiipano-amerieanos. Tomo IV. Madrid, 1895. [n-*',
HTui-tao p.
t. Obrat tlUrarias àc D. José Marehetto (el abale Marckna) recogidat de
Miseritos y raroi impresot. ScrilU, lï<96. tn'4*, ::ljx-42I p.
V. La taijenda dt toi iiete Infantes de Lara. Madrid, 18%. In-t*, sn-448 p.
L Don Enrique de ViUena, nt vida f obrat. Utdrid, 1896. 178 p.
380 BULLBTIlf HISTOUQUS.
du xy« siècle. M. Gotarelo a essayé aussi de dresser le catalogue de la
bibliothèque de Don Enrique, et il Ta fait avec succès. Parmi les
documents inédits qu'il publie se trouve une lettre de Don Enrique
à Suero de Quiûones, trouvée dans un manuscrit du xy« siècle. Diri-
geant ses recherches vers des temps plus récents, H. Gotarelo a fait
paraître deux fascicules d'une série d^études sur Thistoire de l'art
théâtral, dont Tun est la biographie d'une actrice du xviii* siède,
Maria Lad venant ^ et Tautre celle de « la Tirana, b actrice contem-
poraine de celle-là. M. Gotarelo a fait des recherches, pour ces deux
études biographiques, dans les archives municipales de Madrid, où
il a trouvé des papiers fort intéressants et tout à (kit inédits sur
rhistoire de notre théâtre au siècle dernier.
Signalons dans ce même genre deux autres livres : celui de M. Diiz
DE EsGOBAR sur Ic théâtre à Malaga^ et le premier volume (à corriger
dans beaucoup d'endroits) de la Déclamation espagnole^, par M. Fuxbs.
Très brève, mais utile, est la monographie de M. SALriiAs sur Part
dramatique en Galice^.
Pour le théâtre ancien^ la publication la plus importante, après
les Œuvres de Lope de Vega, a été celle des deux volumes des
Œuvres de Lope de Rueda déjà signalée, et Télude de M. MirjAiii
sur Juan del Encina', qui renferme des renseignements tout à fait
inédits sur cet ancien auteur et musicien.
La poésie lyrique a été honorée de deux publications. Mettons
d'abord les deux volumes d^anciens poètes castillans (le second est
inédit, le premier, imprimé en <605, est très rare), formés par
Pedro de Espinosa et D. Juan Antonio Calderôn et publiés en
entier maintenant par les soins de MM. Quiaos db los Rios et Roou-
GUBz MARiif*. La collection d'Espinosa comprend des pièces de
soixante-trois auteurs, dont Gôngora, Argensola, Quevedo, Alcàzar,
Lope de Vega, etc., et celle de Calderôn de trente-cinq, dont vingt-un
ne figurent pas dans le volume d'Espinosa. Quelques-uns de ces
poètes étaient jusqu'ici inconnus dans notre histoire littéraire.
1 . Esiudios sobre la historia del arie eseénico en Eiptùia. /. Maria Ladw-
fiant y Quirante, primera dama de las teatros de la Carie, Madrid, 1896.
205 p. et un portrait.
2. El teatro en Mdlaga (siglos XVI, XVII y XVIII). Mdiaga, 1896.
3. La declamacidn etpahala, I. Borqu^a Mslônco, Sevilla, 1895. In-4',
608 p.
4. Memoria acerca de la dramdtiea gallega, La Corona, 1896. 867 p.
5. Jium dd Encina, musico y poeta. Mâlaga, 1896.
6. Primera y segunda parte de las fores de poeUu ilustres de Sspasa,
SeTilla, 1896. vii-459 et vin-427 p.
KSPicnE. 3Sf
H. Rodriguez Hariii 3C propose de Taire imprimer^ comme complé-
tneai a cet ouvrage, un volume de biographies déjà commencé par
M. Quiros de los Rios.
A Séville aussi a été publiée l'édilion complète des (ffiuvres du
grand PélrarquisLe espagnol, GuUerre de CeLina', avec une préface
et des Dotes par M. HiZAi^Aa i l* Roi, qui a soigné l'impression et a
doaaé des reoseignemeuls nouveaux sur la vie et les relatioas lillo-
raires de (îutierre avec les poètes de l'Itabe.
L'Université do Saragosae possède un manuscrit d'un chansonnier
catalan, jusqu'ici inédit. 11 vient d'être publié par M. Biselgi, mais
l'édition est al fautive qu'elle devient, à diverses reprises, prci>que
inutile'. Très curieuse est la brochure de M. Tbuioïebes sur la
poésie populaire valencienne dite « fallera', s parce qu'elle est com-
posée à l'occasion des ■ fallas > ou scènes plastiques improvisées
dans les rues, tous les ans, le jour de Saint-Joseph, et d'ordinaire
pour tourner en ridicule des individus el des faits de la vie politique
ou privée.
Au même genre de httérature populaire appartient le petit volume
de M. Diaz Cassod, la Literalura panacha* . On appelle ^/awocAos les
habitants de la campagne (Huerla) qui environne la ville de Mur-
cia. M. Cassou a réuni dans son livre quelques contes, légendes el
autres pièces de la littérature rurale, telles qu'elles sont sorties de la
bouche du peuple. La collection a un double intérêt philologique et
ii lierai re.
Le P. Blanco tiiBcii a llni son Histoire de la littérature espagnole
au xii° siècle avec le troisième volume, qui comprend les liltéra-
lures régionales el celles de l'Amérique espagnole^. L'auteur a été
encore moins heureux pour cette partie de son programme que pour
les précédentes. 11 ne connaît assez bien ni les langues ni les
^■UUératures de ces diverses régions. On voit souvent qu'il parle par
^^pu-dirc, et l'extrême concision qu'il s'est imposée pour mettre
^Beaucoup de choses eu un seul volume nuit à la clarté et à fexac-
^Khide de ses choix. Les lecteurs étrangers surtout risquent de s'éga-
^B)r fortement s'ils prennent pour guide, à travers la littérature
1. Obrat de Culierre i« Cetlna. 2 roi. SevilU, 1S95. ln-8-, iciu-312 et
Slip.
1. Caneionero eatalnn de la Untveraidad <U Zaragoia. ZcfagoM, 189G.
3. Lileralura • fallera. ■ Valenda, ISQS. la-i', 15 p.
4. Lileralura popalar marciana. La LUeralttra panodta. Uidrid, 1895.
In-S', III |). N'est pas <Jans le commerce.
5. La llUratara apaàola en «I sigla XIX. Parle lercera. loi literiUvrat
gttgioitala y la ttttpano-americana. Madrid, 1896. xvi-408 p.
382 BULLSTllf HISTOErQUS.
contemporaine, le livre du P. Blanco, dont les Jugements manquent
aussi de la sérénité nécessaire aux études historiques.
Les travaux de Woir sur les littératures castillane et portugaise
viennent d'être traduits et publiés en deux volumes avec des addi-
tions et des notes de M. MB?(B!fDBz t Pblato^ L'impression a mal-
heureusement beaucoup de Tantes, spécialement dans le tome I^.
Les Gervantistes ont apporté aussi leur contingent à l'histoire
littéraire, avec deux monographies de caractère local : Cervantes
vascùfilo^^ par M. Apeaiz, et Lo CervatUisme à Barcelona^, de
H. ClRREaAS T ClNDI.
Je regrette ne pouvoir parler dans ce bulletin du premier voIuqm
de la magniûque Bibliographie de Cervantes^, rédigée par Térudit
bibliophile catalan, M. Rins ; mais, bien que ce volume ait été imprimé
en 4895, Tauteur ne veut pas le donner à la publicité jusqu'à ce que
le second soit terminé, avec les appendices du premier. D'autre part,
obligé de nous borner aux livres parus en 4895-96, il nous est
impossible de faire l'analyse de l'importante collection de Docuwien-'
tos cervantinos hasta ahora méditos que vient de publier M. Pérez
Pastor, avec le millésime de 4897; mais nous la signalons aux lee-
teurs comme étant une des contributions des plus intéressantes et
plus neuves qui aient été apportées aux éludes cervantistes.
Pr^histoirb. — Histoire A!fciE:viiB. — Très maigre seetion. A signa-
1er seulement pour la préhistoire la monographie de M. Poig sur les
Cavemas y simas de Espana^, qui comprend la description de plus
de deux mille cavernes, avec leur répartition géographique, forma-
tion géologique, la bibliographie particulière à chacune, une biblio-
graphie générale et des index géographique et alphabétique, et les
nouvelles explorations des Yacimientos prehUtoricos en la provineia
de Sevilla^y par M. Canal, Tauleur bien connu de Sevillaprehisiérica.
Il n'y a pas lieu à parler d'autres descriptions de cavernes peu
importantes.
1. HiUoria de las lUeraturas castellana y poriuguesa, por Femando Wolt
Primera y segnnda parte. Madrid, g. d. (1895-96).
2. Cervantes vascôfilo, 6 *ea Cervantes vindicado de su supuesU) anUviieiU'
nismo. Nouvelle édition, très augmentée. Vitoria, 1895. 287 p.
3. Barcelona, 1895.
4. Bibliografia eritica de las obras de Miguel de Cervantes Saavedn.
Tomo I. Barcetona, 1895. In-4% viii-402 p., arec des graynres et planches.
5. Cavernos y simas de Espana y notas bibliogràfieas, Madrid, 1896. Iii-4',
xu-392-51 p. (Bolettn de la Comisiàn dd Mapa geolàgico de EspaMa, Temo I,
2* série.)
6. Nuevas exploraciones de yacimientos prehistôrieas en la pnmneia de
SeviUa. Madrid, 1896. 25 p. (Bztratt des Anaie» delaSoc.de JIM. noHÊrol^)
ESPIGNE. 3ft3
MoTBiT AfiB. — Ceux qui connaissaient les quelques chapitres de
VHitloire tle* Vingotkg^ do M. Pérez Pdjol, publiés à l'avance par
des revues allemandes et espaguoles, désiraient vivement la publica-
tion de l'œuvre entière. Le savant professeur de TUniversité de
Valence ne voulut pourtant la faire de 8on vivant. Ce sont ses héri-
tiers qui ont accompli cette tâche, et, malgré le soin apporté à l'im-
pression, on voit bien que la main de l'auteur a manqué pour la
dernière revision, dont tout travail d^udition a besoin, et que l'au-
teur seul peut faire comme il faut. Tout de même, la Uisioria de
ftuliluciones sociales de la Espana goda* reste une œuvre considé-
rable, la plus importante peut-être qui ait été publiée en Espagne
depuis bien des années. Elle est le fruit de toute une vie de travail
acharné sur les sources originales et sur les livres modernes concer-
nant son sujet; elle ofTre beaucoup de faits nouveaux et de rectiOca-
tions aux histoires déjà classiques de Dahn, Hoeffler et autres auteurs
étrangers.
Le premier volume est presque en entier consacré aux précédents
historiques de l'époque visigotbique (temps primitifs, colonisations
phénicienne et carthaginoise, domination romaine). L'auteur ne fait
que résumer et ordonner les recherches déjà connues des Ibérisles
et Romanistes espagnols et étrangers, mais il le fait très bien, avec
des aperçus critiques qui éclairent les questions principales. A la lin
du volume commence le travail propre de l'auteur, qui étudie l'ori-
gine cl les mœurs du peuple golh. Puis vient le tableau de son Inva*
sion en iîspagne, des changements produits par le contact de deux
peuples dans les classes sociales et l'organisation juridique, avec
rexamea des institutions économiques, delà vie scientifique et artis-
tique et de la constitution religieuse. La dernière partie de l'ouvrage,
— institutions du droit gothique en Espagne, — manque. M. Pérez
Pujol ne put parvenir à la rédiger complètement, bien qu'il eiït con-
sacré à ce sujet des études très approfondies ; il est dommage que
les résultats de ses recherches et de sa critique swent perdus, juste-
ment pour les points les plus douteux de l'histoire de l'E&pagne
wisigotbique. La mémo chose arrive pour les travaux de M. Hino-
losi {D.-E.}, qui, ni dans son Histoire du droit espagnol ni dans les
chapitres qu'ila écrits (avec M. Fernàndez Guerra) dans le tome l"dB
l'Histoire de l'époque wisigolhiqne *, n'a Tait t'êtude critique des
I. 4 volumes. Valericia. tS96. ta-4-.
!. Bisforla de Espana lUsde la invaMn de lospueblot germ4nieo$ haita la
ruina de la monarqaia vUigoda. Tomo I. Madrid, 1896. 483 p. [>e Iitts «»t
# par H. Rada y D^do.
384 BULLBTrif HISTOIUQUE.
sources et des institutions juridiques, sujet qu'il connaît cependant
mieux que personne. Quoi quMl en soit, ces deux ouvrages, — odoi
de M. Pérez Pujoi en première ligne et celui de MH. Hinojosa et
Fernândez Guerra, — sont des travaux qui honorent nos études his-
toriques et qui peuvent rivaliser avantageusement avec la plupart
des livres étrangers qui jusqu'ici étaient les seuls guides recomman-
dables pour cette sorte d'études.
Le reste des publications concernant le moyen âge est forcémoit
moins important. Notons d'abord les deux volumes de M. L6pb
Fbbrbiro sur les « Tueros » de Saint-Jacques-de-Clompostelle% qui
valent plutôt par les documents inédits qu'ils renferment que par les
observations de l'auteur, qui manquent souvent de critique. Le premier
volume est surtout une esquisse de Torganisation sociale de Léon et
de Castille pendant les premiers siècles de la Reconquête ; il apporte
des Taits considérables sur la condition des serfs, leur émancipation
au XII* siècle et les luttes pour la liberté communale dont furent le
théâtre spécialement les villes ecclésiastiques. Le second vq^ume
comprend la période du xiv« siècle jusqu'à nos jours; il contient
80 documents nouveaux et quelques fragments du Forum Judieum
avec une traduction castillane, que H. Lôpez Ferreiro croit feiteà
la fln du règne d'Alphonse IX (f 4230), et très différente de celle qui
est vulgairement connue.
Au même sujet appartient la monographie de M. YiixiiMa, El
senorio temporal de los obispos de Lugo^ qui contient seize docu-
ments inédits.
Pour l'histoire scientiflque, il y a l'Essai sur le philosophe Bai-
mond de Sebonde', par M. Rové; ce travail est très incomplet ^
superficiel ; l'auteur n'a fait que copier quelques travaux modernes,
sans même indiquer où il a pris ses renseignements et la substance
de ses paragraphes.
L'histoire politique est représentée par la monographie, très sm-
gnée, de M. Llabe^s, sur la conquête de Tile de Minorque ', et les
études numismatiques ont reçu une contribution assez considérable
avec la description faite par M. FEaiiAXDEz t Lopbz^ des nombreux
types monétaires trouvés il y a peu de temps dans la ferme nommée
1. Fueros munieipalei de Santiago y de su iierra. Santiago, 1895-96. xm-
397 et 321 p.
2. Assaig critich sobre 7 filosoph barceloni En Ramon Sibtude. Barcdotu,
1896. 213 p. L'autear a trooyé que le rrai nom de Sebonde était Sibiode.
3. La conquista de Menorca per Alfom JII, Publié dans le Tolume dei
Jochi HoraU de Barcelana. Any XXXVIIL 1896.
4. El ietoro visigôtieo de la CapiUa. Serilla, 1896. 166 p. et une planche.
ESPICHG. 385
la Capilla, près de Carmona, et doal quelques-uas soûl tout à bit
nouveaux et très importants.
Histoire HoDSKifË. — L'ouvrage le plus remarquable pour celle
période est celui de M. KiKOiosi (D. Ricardo) iulltulé Los depac/ioi
de la diplomacia pontificia en Espaha, et qui est, en quelque
sorte, une vaste collection de documents iuédits présentés méthodi-
quement et mis en valeur par la critique de l'auteur. M, Hinojosa
fut chargé en ^891 d'étudier dans les archives du Vatican les docu-
ments concernant notre histoire. Il travailla pendant plus de dix-huit
mois au dépouillement des fonds de ces dépôts (notamment des
archives secrètes, et plus spécialement des fonds di Segretaria d%
Stato et de la chambre apostolique), aussi bien que d'autres appar-
tenant à t'Ëlat et aux particuliers à Rome, Milan et Florence. 11 put
ainsi réunir une grande quantité de documents, dont il donne la
traduction, l'extrait ou l'indicalion précise, tout en les utilisant pour
raconter l'histoire de la diplomatie pontiOcale à la cour d'Espagne.
Ce premier volume comprend la description el l'histoire des archives
poDliltcales, une notice sur les collections les plus imporlantes rela-
tives aux nonciatures et une étude spéciale, en huit chapitres, des
papiers qui appartiennent à la période de 1^30 à 1603.
Le hvre de M. Lasili, duc de Mi»dâs, sur la paix de Bàle * a aussi
uae réelle valeur, noiammuni par les nombreux documents insérés
dans les appendices; celui de M. Babado sur le siège d'Anvers' est de
même à remarquer.
L'époque la plus en faveur auprès de nos historiens a été le
xviii" siècle; il ne faut pas regretter cette préférence, puisque, si
rapproché qu'il soit de nous, le iviir siècle est encore une des
périodes de notre histoire qui sont le plus ignorées, le plus obscur-
cies par la légende et les préjugés. Aussi convient-il de faire bon
accueil à deux livres qui se complètent mutuellement, et dont le
sujet est la ligure de dona Maria Manuela Pignatelli, duchesse de
Villahermosa : l'un de ceux-ci, Relratos de antano, a été écrit par le
fameux romancier P. Colosia^; l'autre, qui porte pour titre le nom
de la duchesse, par M, OaTi; tous deux ont été imprimes luxueu-
sement aux frais de la duchesse actuelle de Villahermosa.
Le premier est moins complet que le second. Il esquisse une
1. La leparadén de Guipyaeoa y la pat de Baillea. Madrid, 1893. loA',
vm-393 p.
2. El iUio de Amberes en \àU-\bib. Uadrid, 1S95.
3. Doâa Maria Maimtla PtgnaUlU de Aragon y de Gomaga, duqueia de
ruiahermoia. 2 Totume». 1Sô-i[ 1 p., avec plaache» et fac-almilis.
Rbv. Histor. LXVI. a» FASC, 25
386 BULLSTIir HmORIQUB.
partie de la biographie de dona Maria et de son mari le due, ambas*
sadeur d'Espagne à la cour de Louis XV, ainsi que des poriraili
d'autres individus de la femille el des personnages de la sociélé
française avec lesquels Villahermosa fut lié d'amitié, tels que d'Alem-
bert. La correspondance de celui-ci et de Galiani a?ec le duc, k
journal de Villahermosa et les lettres de la duchesse, qui renferment
de très curieux détails sur les événements et les mœurs de l'époque,
font l'attrait principal de ce volume, écrit avec un parti pris très
naturel, étant donné le caractère religieux de l'auteur.
Les deux volumes de M. Orti, plus dégagés de thèse morale et
philosophique, sont aussi plus exclusivement consacrés à la bio-
graphie. Le tome I comprend l'histoire du duc jusqu'à sa mort ee
septembre noo. En appendice on trouve des extraits du Journal de
voyage en Italie écrit par Vieyra et dont M. Morel-Fatio a donné un
paragraphe dans la deuxième série des Êtiuies sur l'Espagne (p. 380).
— Le second volume raconte le reste de la vie de la duchesse pen-
dant son veuvage, jusqu^en 4Siù. Il est particulièrement intéressant
en ce qui concerne les rapports de la duchesse, fervente catholique,
avec les Jésuites et les papes Pie VI et Pie VU, et son intervention
dans la guerre de notre indépendance. En appendice on trouve des
documents relatifs au P. Pignatelli. Des fac-similés de lettres écrites
par Villahermosa, Iriarte, le P. Nicolau, Pignatelli, Floridablanca, le
cardinal Gerdil, Palafox et autres personnages, sont nombreux et
rehaussent la valeur du livre, ainsi que les planches (portraits pour
la plupart), qui sont vraiment magniflques.
Très modeste, mais assez important, est le livre du P. Migvelbz
sur le Jansénisme et le Régalisme en Espagne au xyiii^ siècle ^ Il y
étudie les luttes poursuivies par la couronne et les tribunaux ecclé-
siastiques de Madrid contre ceux de Rome et les disputes et jalou-
sies entre les différents instituts religieux, qui aidèrent beaucoup
l'œuvre des ministres éclairés de Ferdinand VI et de Charles III.
Par les documents inédits qu'il contient et les responsabilités histo-
riques qu'il dévoile chez quelques personnages ecclésiastiques, au
sujet des victoires du régalisme, l'ouvrage. du P. Miguelez porte des
enseignements dont les historiens devront faire leur profit.
Aux relations entre l'iiistoire politique de TEspagne et de la
France pendant les premières années de ce siècle se rapportent les
Memorias (que nous avons déjà mentionnés) del marques de Ayerbe
sobre In estancia de Don Fernando Vil en Valençay y el prine^
de la guerra de la Independencia, et à la première de nos guerres
t. Jansenismo y Regalismo en Espana. ValladoUd, 1895. 486 p.
BSFiGHB. 387
viles, le tome 11 de l'ouvrage du marquis de Si» Rouan sur les
iTOpagnes du général Orùa*. Aux événements politiques de la
même époque, M. Vilulbi HEavAS, ancien député eL journaliste, a
eonaacré uu volume fort curieux intitulé Reeaerdoi de cineo lunlros
[tsi'd-liS)'; il a clé suivi, dans les premiers mois de 4897, d^un
autre, Una década iongrienla, qui retrace l'hisloire des années
4 >t33-40 *. Un épisode, assez obscur jusqu'ici, de la guerre avec les
républiques occidentales de l'Amérique du Sud, a été mis en lumière
par M. Co.icis, offlcier de marine el témoin pei-sonnel, dans son
petit livre inlilulê Bl combate naval drl Papudo el 26 de noviembre
dé is'j.')*.
CoLoifiEs ESPAGNOLES, iiiaEiTiES ET HODEanBS. — Avec le tome IV
M. JiMEHEz DE L* EspiDi a terminé la publication de l'important
ouvrage inédit du P. Cobo sur l'histoire de l'Amérique'; l'édileur
l'a enrichi de notes et de documents. De son côté, la Coleccion de
libroa rarus à earioios que tralan de Ataérica a fait réimprimer le
livre de RoHin t Ziiioa*, Repéblicas de Indîas^ et la Relaeiàn kis-
lorial de las misiones de Indio» Ckiquitos'' du P. FEnninoEï. Le
P. dm a fait paraître les volumes Xlll à XVIU de ses Études sur
ta domination espagnole en Amérique; ils concernent les beaux-arts.
Aux lies Philippines se rapportent plusieurs livres, dont quelques-
uns ont de la valeur. C'est d'abord l'Histoire générale de M. Montebo
r ViiuL *, excellent résumé des travaux imprimas, mais qui manque
(le renseignements nouveaux puisés aux sources manuscrites, assez
nombreuses pourtant. Le P. Octo a imprimé un Compeadio de la
ttesena biogrà/tca de los lieligiosos de la provincia del Santisimo
Hosario de Filipinas, de»de su fundaciàit hasta nuestros dias^,
abrégé du volumineux ouvi-age qui a commencé de paraître eu 1894.
1. Guerra eivU de 1833 à 1840 en Aragon ji Valenela; Campahai del gêne-
rai Orâa. Madrid, IS96. ua-lH p., on plan et on porlrait.
2. Madrid, 1896. Id-8*.
3. Madrid, 1897, In-SS 39S p.
4. Madrid, 18%. 11-103 p. et dem grararea.
5. Bistoria del Satvo .Vtmdir.,. puMicada par primera pes... Tomo [T.
Serilla, 1895. In-*', 347 p.
6. nepùfilieai de Indias, idatalrias g gobiernos en Mexico y Perù antes de
la eonquuta. Vol. XIV el XV de la Oolecclàn.
7. Helae. h<it. de las mis. de Indioi CAiquitos qae en el Paraguay tieneii
los Fadres de la Cmnpaiia de Je*ùf. La première édilion de cel ourrage esl
de 17:0.
8. inttoha gênerai de Filipinas. Vol. Il el 111. Madrid, I39â. Le premier
en de 1887.
9. HaaîU, ISSe.
1
388 BULLSTIlf HISTOUQUE.
A M. BÀLÀGUBa, ancien minisire des colonies, on doit un mémoire
très concis sur les Iles % et à M. Rbtàna, infatigable chercheur de h
bibliographie philippine, un curieux livre sur le journalisme ^, un
autre sur le gouvernement du maréchal Weyler ' et un petit tàsà-
cule sur les courses de taureaux *. Les études anthropologiques sont
représentées par une monographie du P. Guipa sur les mayàifooi*.
Parmi les ouvrages de caractère général il fout citer VHistaria de loi
dominios espanoles en Oceania^ de M. Alcazaa, livre assez minée
pour son sujet, et les Études sur les lies Carolines^ de M. Gabiza.
Les deux guerres actuellement soutenues aux Philippines et à
Cuba ont donné lieu à plusieurs publications de circonstance, la plu-
part sans valeur historique, bien que quelques-unes fossent con-
naître les courants de Topinion nationale et les conditions politiques
où ces luttes s'accomplissent. Citons pour mémoire : En la Mam-
guay par M. Rioja, récit de quelques foits d'armes de la guerre de
Cuba^; Filipinas y sus habitantes, par M. Gonzalez t Hartlt*^
Esiudios acerca del régimen y administraciàn de Espana en UUror
mar, par M. Casas ^^ ; Crônica de la guerra de Cuba, par M. Gou-
RERO ^ * ; Xa guerra de Cuba^ par M. Rbpaeaz^^, etc.
Pour les documents il faut tenir compte du tome IX de la CoteC"
ciôn de docutnentos inéditos relatives al descubrimientOf conquista
y organizaciôn de las antiguas posesiones espanolas de Ultramar*^;
pour rhisloire religieuse de l'Amérique, de la première partie du
livre du P. Péebz, La Compania de Jesûs en Colombia y centre
Atnérica *^ ; et pour les questions concernant la découverte et les pre-
1. Islas FUipinas. Madrid, 1895. 67 p.
2. El periodismo fUipino. Noticias para su historia (1811-1894). Madrid,
1895. G4G p.
3. Manda del gênerai Weyler en Filipinas, Madrid, 1896. 464 p.
4. Fiestas de toros en Filipinas, Madrid, 1895. 31 p.
5. Etnografia filipina. Los mayàyaosy la rara ifugao. Madrid, 1895. 165 p.
6. Manila, 1895. 207 p.
7. Esiudios sobre Carolinas, Un isla de Ponapé. Geografia. Etnografia. H»-
toria. Manila, 1895. xiii-241 p., arec des gravures.
8. Uabana, 1896. 32 p.
9. Bejar, 189G. 285 p.
10. Madrid, 1896. xviii-421 p.
11. D'après des reaseigaeraenU des journalistes de la Uarane et de New-Yoïi
et des documents. Ont paru les t. I et II. Barcelona, 1896. — M. Pirtla a
commencé aussi à publier par U?raisons une Historia de la guerra de Cuba.
12. Madrid, 1896. 216 p.
13. Madrid, 1895. lxxx-471 p.
14. VaUadolid, 1896.
raiera élablissements, le volume d'essais Bspana y America, de
M. SiKCOEZ MOGDEL,
Uoe crilîque soulevée par l'auteur péruvien M. PjLMi contre le
tome I des Documents publiés par le comte de Toeiti a donné lieu
à une réplique de celui-ci qui mérite d'être connue'.
BioGRiPHiRS. — Plus de dix-sept éludes biographiques ont été
publiées dans les années 1895 et f 896. La plupart sont sans impor-
tance. Parmi celles qui méritent d'être lues, mentionnons : flernàn
Tello PortocaTTfTO y Manuel de Veça Cabeza de Vaca, par M. Fer-
nàndoz Duro ' ; El doclor nararro D. Mnrtin de Asjnlcueta, y sut
ohrns, par M. Anir.iTi, livre très bien composé et de valeur'; Vida
del llt^" y Vénérable vizeaino D. Fr. Juan de Zutnarraga*, par
M. L*B*iii[i; Dif-go de Alava, par M. Oliver-Copoks"; (lôngora
racionero, recueil de notices concernant la vie ecclésiastique du
célèbre poète, extraites de livres et papiers authentiques, par M. Gon-
lALEï^; Nuevos datospara ilnufrar tas biografias del maestro Juan
de .Valara y de Mateo Aleman, par M. Gëstdso ', et la nécrologie de
Herculano, lue à l'Académie de l'histoire par M. Sabcdeib Mouoël *.
— Pour la biographie des contemporains, citons Set'illa intellectual,
tus eserilores y arlùtas conlempordneos, par M. CissiLES*, et Bio-
çra/las cordobesas eontemporineas, par M. Gokzilëz i Saenz'".
M. Feruândez Nivibrkte a rectifié quelt^ues points de la biographie
de l'historien D. Martin Feroandez de Navarrele, dans ses Brèves
recti/icaeiones d lu biografia, etc.".
D'une manière toute spéciale il faut attirer l'attention sur la
remarquable monographie de M. Rodbigcez Vill* sur U. Francisco
de Rojas ", qui a paru d'abord dans le Bolelin de la fl. Aeademia de
ta BUtoria. Elle renferme beaucoup de documents inédits trouvés par
M. R. Villa dans la collection de Salaxar et dans les archives de la
l. Cmttitaeiôn al artkiUo btbliogrâ^a ptibliçado por D. Pieardo Palma...
fobre el lamo I de Documenl^i para la historia de la giterra separaUiia det
Péril. Madrid. 1S»5, ln-4-, 34 p.
a. Madrid, 1895. In-*-, 70 p.
3. Punploaa, 1893. xxvii.6e7 p. (137 de docuiuents).
4. Bilbao, IS96. 3* éd., 336 p.
5. Hadrid, 1896.
e. Ofirdnba, 1896. 83 p.
T. Sevilla, 1896. n p.
8. Alejandro Hercalano de Carvalho. Madrid. tS86. 50 p.
9. SerilU, 1896. iv[-56! p.
10. (Uirdaba, I89&. xm-190 p.
ll.ZaraRoM, 189&. Iti-4*. 16 p.
\2. D. eraneUco de Bojai, embajador de lot Heyet eaUicoi. Madrid, 1896.
ln-4-, Î21 p.
J
SM BULLETIH HltTOUQUE.
comtesse de Teba. Ds ont été utilisés avec toute rhabiklé qa'oo
devait attendre de l'historien de Jeanne la Folle.
HtsToiRB LOCALE. ^ Les trayaux ooncernant Thistoire locale coatt-
nuent à être très abondants, mais par suite des conditions dans les-
quelles ils sont écrits pour la plupart, il j en a peu qui aient une
réelle valeur historique. L'Essai sur les provinces basques à la fin
du moyen âge S de M. Echegarat, est un des plus remarquables. Il
étudie les luttes des partis politiques (bandas) et la fondation des
villes; 11 renferme un certain nombre de documents; malheureuse-
ment Texposition est médiocre, et Tauteur tombe fréquemment dans
des analyses trop minutieuses de fiJts qui se répètent beauoonp.
Garthagène a trouvé deux historiens dans MM. Diaz Gassou et Mai-
TiiiEz Rizo. Le premier a publié d'abord un livre sur les évéques de
la ville', puis un supplément avec des additions et corrections^. Aa
second appartient le volume de Feehas y fechos de Cartagena*
imprimé en ^1874, mais paru réellement en 4895.
Pour l'histoire contemporaine de Gordoue, M. GrtL a écrit deux
volumes consacrés surtout aux événements littéraires'. Grenade a
eu dans le professeur M. SinoifBT un excellent chroniqueur ^, et Vigo,
dans M. Sattiago, un chercheur émérite de ses antiquités^.
Les Catalans n'ont pas négligé l'histoire de leurs villes, et il but
leur rendre la justice qu'ils accomplissent leur tâche avec amour et
sans épargner les recherches. C'est ainsi que M. Grahit a donné la
deuxième partie de sa copieuse Besena histôrica de las sitios de
Gerona en 4808 y 4809^; M. Montsalvatje le tome VI de ses
Notices historiques'; M. Alsius TEsquisse historique de Serinyi'*;
M. Grecs une Monographie sur les luttes féodales à Villanueva ei
Geltrû *', et M. Gonzalez la Chronique très curieuse de la République
1. lAU provincias bareongadas à fines de la Edad Media. Bnsayo kUt&rico,
Tomo I. San Sébastian, 1895. 496 p.
2. Série de lo$ obispos de Cartagena. Sus hechos y su tiempo, Madrid, 1895.
In-4% 304 p.
3. Série de les obispos de Cartagena. Addenda ei corrigenda» Madrid, 189&
40 p. N'est pas dans le commerce.
4. GarUgena, 1894. In-4% xxxiv-326 p.
5. Côrdoba contemporànea. 1891-96. iviii-293 et 222 p.
6. Cuadros histàricos y descriptives de Granada. Madrid^ 1896. xzi-388 p.
7. Historia de Vigo y su comarca. Madrid, 1896. 604 p.
8. Gerona, 1895. In-4*, 773 p.
9. Monasterios del antigiw eondado de Besalu. Obt, 1895.
10. Serinyd, Gerona, 1895.
11. Bosquejo histôrico de la parte que tomaron VUlanuêoa y GeUru en Is
lueha gênerai contra el feudalismo en los siglos XIII, XIV y XV, ViilaooeTi
y Geltrù, 1895.
li*e,
MU
à Barculoue *. De M. iiiuHi esl une Uislorin d« Ui lieal Acadttnia
de Cienelas y Artes de liarcelona (203 pages).
Les érudits des lies fialearca verseol la graode masse de leurs
lerches diins le Boletin de la Sociedad arqtteolâgica litlinna, une
revues les plus importantes de l'Ëspii^ne; c'est peut-être pour
oelte raison qu'ils impriment peu de livres. Nous ne pouvons donc
citer que la seconde édition du livre Forenses y eiudadanoi'*, de
M. Qdaohioo, une des études les plus remarquables parmi celles qui
icernenl l'histoire de nos luttes sociales. Le volume apparlicnt aux
vres complètes de M. Quadrado, en cours de publicatiou.
,1(. MiLuuEs a llni son Histoire des lies Canaries avec les tomes IX
X', et, pour les Asluries, MM. Bkllhd.tt et CiXELus ont entre-
une publication illustrée où seront étudiés l'Iiisloire, lus œonu-
Is, les mœurs, les traditions, le langage [bable] , tous les éléments
In de la vie passée et présente de la région*.
.ui Castilles appartient le livre superficiel, mais bien documealé,
H. Salti sur l'intervention de la ville de Burgos dans la guerre
Comunidades'^ ; l'Iiistoire du collège royal de Saint-Thomas
vila*, par le P. Cienfdecos ; les Excursions artistiques à la Tierra
Campoi'', par M. Sihon ï Nieto, et la petite monographie, assez
faite, de M. F.-B. NiviEBo, Fortalezas y casUltos en la edad
\ia, JUaqueàa y Escalona ^.
'our la région alicantine, il n'y a à signaler qu'une nouvelle His-
d'Elcbe", par M. Ibirba, et, pour l'Aragon, le Guide de Sara-
le et sa province ">, par M. Jotbh Giscon.
ie6 érudits andalous ont ajouté à l'histoire de leur pays deux
lOgraphJes relatives à Arcos de la Fronlera", par M. Mi.xche»o,
., La Repùbllca en Barcetoita. Apunles para uiia crônica. Barceloaa, iSdS.
IP-
\, Segnnda «dicioa aurafntada. Palma de Haltorca. 1895. In-4', 413 p.
B. Hiitoria gênerai de las Islas Canarias. Tonios VII y VIII. Laa Palma«,
>. Iii-4*.284et28! p.
L àtturia*. CijûD, \&%. In-fol., avec des phototypes. En cours de publi-
L Bvrgoi en lat comunidadei de CasHUa. BurgoB. 1895. 189 p.
t, Bme reseâa histàrica dM rtal eolesto de Santo Tovidi de ÀvUa. Madrid,
I,, avec graTures.
t. Excurtiones artUticai à la Tterra de Campos. Madrid, IS9â. 164 p., iTec
bchea et gruTures.
% lUdrid, 1895. In-l', à deai colonnes. 3% p., arec grsTnres.
f^. Btrtoria de Elehe. Alieante. In-S-, 329 p.
Il 6via de Zaragoza y *u provincia. Zarngoza, 1896. SOD p.
kl. Apunten para unahiitorta tleAreos de la Fronlera. \t(x», 181(3-96. 675 p.
wtùt tfleiiaJi parroqutales de Arcos de la Fronlera. Sito», 1896.
392 BULLBTIlf HI8T0BIQUI.
et un volume de notes sur Sanlucar de Barrameda, par M. EuGcs^
M. Almagro a fait paraître un supplément à son Museo granaâm
de antigHedades drabes^^ et M. Guichot a imprimé une histcnre
générale de la Montagne des Anges', très célèbre par son monastère
et par ses légendes, surtout celle de la femme pénitente, qui a été
mise à profit par le duc de Rivas dans son Don Alvaro. Le livre de
M. Guichot est travaillé avec amour et renferme de curieux rensei-
gnements.
M. LoPEz Fbrreiro, dont nous avons loué déjà Timportante mono-
graphie sur les Fueros de Saint-Jacques, a donné aussi la deuxième
édition de la Galicia en el ultimo tercio del siglo XV *^ écrite à Taide
de documents très nombreux, tirés des archives de la cathédrale.
M. LoPEz Peliez a publié de son côté une étude sur le P. Sarmieoto'
et une autre sur les bénédictins de Monforte*, qui n^ont pas le même
mérite que les livres de M. Ferreiro. Les archives cathédrales de
Saint-Jacques ont encore fourni à M. Olmeda les matériaux d'an
mémoire dont le sujet principal est le codex du pape Calixle 11^. Les
conclusions de M. Olmeda sont très discutables.
L'histoire juridique régionale est représentée par deux livres, qui
ajoutent peu de nouveau, mais qui remplissent bien leur rôle vul^-
risateur : les InstUuciones y reyes de Aragon^ par H. Balagubr^, el
les Instiiuclons de Catalunya^ par H. Bo?tf '.
Histoire G^:féRiLE. — VHistoria gênerai de Espana^ écrite par
des académiciens et dont nous avons parlé à plusieurs reprises dans
ces bulletins, avance très lentement dans sa publication. Elle conti-
nue d'ailleurs à être très inégale dans ses diverses parties, inconvé-
nient inévitable dans un ouvrage confié à diverses mains et dont le
directeur ne peut pas surveiller ni même corriger les travaux, comme
il serait bon de le faire. Laissant de côté les histoires de cette vaste
collection dont la publication est à peine commencée, nous citerons
seulement THistoire de Charles IV *^, par M. Govez Arteghb, impor-
tante au point de vue politique et militaire, et celle de Charles III,
1. Sanlucar de Barrameda. Apuntes de un vk^ero. Madrid, 1896. 142 p.
2. Album adicionaL Granada, 1896.
3. La Montana de los Angeles, Senlla, 1895. 250 p.
4. Tomo I. La Goruna, 1896 (toI. XLVI de la Bibl. Galleça).
5. La Coruna, 1895.
6. La Gorana, 1896.
7. Memoria de un viaje à Santiago de Galicia, 6 examen criticù-^uskal
del càdice del papa Calixto IL Burgos, 1895. 44 feailles, plus 85 p. et 3 pL
8. Madrid, 1896. 311 p.
9. Barcelona, 1896.
10. Reinado de Carlos IV. Tomo IL Madrid, 1896. 527 p. et 21 planches.
893
par M. Daxtiu, dont les tomes IV à VI ont paru aussi abondants en
documents, en général, que faibles au point de vue de la critique et
de la composition.
L'histoire des découvertes géographiques est représentée par une
série de petites études de M. ViDiHT sur Vasco de Gama et ses
voyages*; il y examine le point de vue, cerlainement trop étroit,
où se sont placés certains érudits portugais à l'occasion du cenleuairc
de la découverte de la route qui mène aux Indes.
Pour l'histoire économique et sociale, il faut signaler le remar-
quable programme d'un livre sur le collectivisme, le communisme
et le socialisme dans le droit positif espagnol', rédigé par M. J. Costa,
programme qui contient des renseignements historiques nombreux
et qui exprime des idées assez larges et neuves sur ce sujet. M. Costa
compte développer son plan dans un livre prochain. Sur l'état actuel
des études économiques en Espagne^, M. Ouscoici a imprimé une
étude en général bien renseignée, mais incomplète, où manquent
plusieurs chapitres sur certaines manifestations scientiUques et poli-
tiques importantes de nos jours.
L'histoire de la marine espagnole, commencée par M. Fermadez
DoBo avec son livre la Marina de Castilla, dont nous avons parlé
dans le bulletin précédent, a été continuée par le même auteur dans
uo ouvrage plus étendu, dont le premier et le second volume seuls
ont été publiés. Ils comprennent les règnes de Ferdinand et d'Isabelle,
de Charles V et de Philippe II jusqu'à 1S87, et passent en revue
tous les événements politiques, militaires et géographiques auxquels
prit part alors notre marine, tant en Europe que dans les deux Amé-
rtques. L'auteur a étudié minutieusement chacun de ces points et il
ne se contente pas de résumer les travaux des autres; tout au con-
traire, il apporte de nouveaux faits et de nouveaux documents (dont
quelques-uns sont reproduits en appendice) qui éclairent beaucoup
de questions concernant les gloires de nos marins et la politique
inlcrnalionale de nos rois. Les écrivains qui. â l'étranger, font de
celte sorte d'études une spécialité, ont accueilli très favorablement
l'œuvre de M. t'ernandez Duro\ qui est ornée de beaucoup de
gravures assez bien exécutées.
t. Vasea de Gama. Hadrid, 18%. 24 p. — El deseubrimienlo de la Indin
par Vaaco de Gama. Idem. 16 p. — La partida de Vasco de Gama. fdem.
16 p. — El dacubrimiento de Oeeania par lot Parlugaetei. Jdem. 64 p.
2. ColtetiKûmo, eomaniimoi toeialiimo en derecko positiva apaSol. Snsago
dé tin plan. Madrid, 1896. In-rot. 31 p. M'Mt pat dans 1« comment.
3. Ettado aetual de loi aludiot econotnieos «n Espaha. Madrid. 1B36. llii p.
4. Armaila espaàota deade la union de loi retnot de Cattilla y de Arat6n.
Tomo» 1 T U, Uadrld, 1895-96. Iii-4*, 346-131 el 532 p.
894 BULLSTIN H18T0UQUB.
OuyftAGBS oiTBis. — N0U8 réuniroQS sous cette déDominaUoa
d'abord les œuvres non historiques d'anciens auteurs que Ton vient
de publier et qu'il importe de signaler aux lecteurs. G^esl ainsi que
des œuvres inédites de Fr. Luis de Lbon * ont été imprimées à Sala-
manque et qu'une nouvelle édition de celles de Jean de Avila a paru
à Madrid'.
L'étude des proverbes a été cultivée par M. Rodriguez Hiiur,
auteur d'un discours sur les Proverbes en général et particulière-
ment sur les Proverbes espagnols^, et d'un livre sur les Proverbes
de l'almanach, relatifs aux mois de l'année et aux saisons^, et par
M. PoE!fTK, qui a fait paraître le tome I d'un recueil de proverbes
météorologiques'. Ces travaux, d'un caractère vraiment folklorique,
nous amènent à citer le Folk-lore caialâ^ de M. Mbstres, recueil très
curieux de traditions populaires. Un naturaliste, M. Gk)L]iBiao, est
revenu sur le compte de Don Quijote et a donné une notice des
animaux et plantes cités par Cervantes^, tandis qu'un médecin,
M. GoMENGB, a étudié les maladies de quelques personnages histo-
riques dans son volume Clinica egregia^.
Les voyages de Charles V ont été décrits par H. Foeonda dans ses
Estanciat y viajes de Carlos F^, et les édifices, musées et richesses
royales, aussi bien que la vie et en quelque sorte les mœurs de la
cour espagnole de nos jours, se trouvent exposés dans la GuiaPala-
ciana, qu'édite M. Jorreto et dont le quatrième fascicule, consacré
à ÏArmeria ReaV^^ est particulièrement à signaler; il a pour auteur
le comte de Valencia de Don Juan.
Dans le domaine des études géographiques qui intéressent l'his-
1. Mag, Luisii Legloneruis Augmtiniani Divinorum lihrorum primi apv4
SalmanUeemes intarpretis Opéra nunc primum ex ms$. ejutdem omidbfu
P. P, Agustiniensium studio édita. Torons VI. SalmanUcae, 1896. 457 p. Le
premier yolume a été publié en 1891.
2. Pfueva ediciôn de las obras del Beato Juan de AvUa, aposiol de Anda-
Ittcia, con prôlogos, notas, etc. Madrid, 1896. 4 toI.
3. Diseursos leklos ante la Real Academia Sevillana de Buenos Leiras..,
por D. Francisco Rodriguez Manu y d. Luis Montato... Sevilla, 1895. 99 p.
4. Los refranes del Almanaque, recogidos, explicados y coneordados coâ
los de varias paises românicos. Sevilla, 1896. viii-189 p.
5. Meteorologia popular é refranero meteorolégico de la PeninsiUa ib&ieaj
ordenadamente expuesto à tUulo de ensayo, I. Climatologia, Madrid, 1896.
In-8', 279 p., ayec gravures.
6. Barcelona, 1895. 304 p.
7. Madrid, 1895. 15 p.
8. Apuntes histôricos. Barcelona, 1895. xxi-603 p.
9. Madrid, 1895. ln-4-. 47 p.
10. Madrid, s. d. (1896). 40 p. avec des photogravures.
ESPIGNE. 395
toire, il ne faut pas oublier le volume d'études^ de M. D.-R. Torres
Gampos, qui contient des notices et jugements de valeur sur des
questions coloniales de l'Espagne et du Portugal, sur certains fleuves
de la péninsule et sur les conditions géographiques et historiques de
nos régions du Nord. Sur quelques-uns de ces points, on trouvera
de nouveaux renseignements dans le volume des Actes et rapports
du premier congrès africaniste-espagnol, qui vient d^être publié par
H. Almagro*.
En fleiit de recueils de travaux, il suffira de citer le tome IJ de
Cotas de EspaHa^y par M. le comte de las Nayas, bibliothécaire du
roi, qui comprend des notices historiques sur Ferdinand Colomb,
Juan de la Gosa, le Maestre Juan, le jeu de paume et autres sujets
divers, et les Études historiques de M. le comte de GASA-VALEnciA^
concernant l'ambassade de Jorje Juan au Maroc en 4767, la guerre
d'Espagne avec le Pérou en 4866 et un journal de Ferdinand VII
en 4823.
Finissons ce long bulletin avec la citation de l'utile Index des
vingt-cinq premiers volumes du Boletin de la Real Academia de la
Histaria^j rédigé par M. Rodriguez YaLA.
Rabel Altamira.
1. EUudios geogrâfieos. Madrid, 1895. Iii-4% 475 p.
2. Àetas y memorias del primer Congreso espanol de Afrieanistas,.. êefui-
dos de una resefia de la Expotiâén Morisea. Granada, 1896. 308 p.
3. Madrid, 1895. 151 p. N'est pas dans le commerce.
4. Estudios hisiôricos. Madrid, 1895. 249 p.
5. Madrid, 1895. Iii-4% 91 p.
396 BULLETIN HI8T0EIQUB.
ITALIE.
LE PÈRE LUIGI TOSTI. — MARCO TABARRINI.
En des temps où les moines ont semblé passés de mode, un béné-
dictin, le Père Luigi Tosti, sut, non seulement acquérir un raiom
toujours croissant, mais se faire aimer de tous, ce qui n'appartient
pas à une âme vulgaire. Il appartenait à cette génération qui, dans
rintime harmonie de i^esprit et du cœur, eut la force de rendre llta-
lie digne d'être une nation, et plus spécialement à cette génération
de 4848 chez qui s'unissaient la foi et la raison, la religion et b
patrie. Elle eut ce qu'un moine et philosophe éminent du moyen âge
appelait c fldes quaerens iutelleclum, » jointe à Tardeur du patrio-
tisme moderne. Chez le Père Tosti, le moine n'a pas tué Thomme,
le citoyen Tltalien ; il Fa élevé au contraire à une haute puissance
idéale. Là est le secret de la sympathie que tous eurent pour lui;
Renan, par exemple, qui Ta connu, a parlé de lui en termes qui font
honneur à son esprit large et compréhensif. Dans la phalange des
écrivains et des patriotes italiens, maintenant descendus presque
tous au tombeau, Tosti ne fut pas à vrai dire un des combattants; il
fut un des plus modérés, mais, tout en conservant le caractère paci-
flque du prêtre, il s'éleva à des audaces peu communes. Sans se
jeter dans la mêlée, il collabora au triomphe du droit italien, tout en
restant soumis à l'obéissance monastique. Il a conservé jusqu'à la 6n
la fraîcheur juvénile de l'âme, la foi intime à son idéal de religion et
de patrie. Après une longue et fructueuse vie, la mort le prit à
quatre-vingt-six ans, serein, souriant^ fidèle à la maxime bénédic-
tine : ora et labora,
II était né à Naples en 4804. Thiers a dit de lui-même : c Ha vie
a été une longue étude historique; » on pourrait en dire autant de
Tosti, dont la longue vie fut consacrée à étudier Thistoire de la
papauté, de l'Italie et de son abbaye du Mont-Cassin, illustre monu-
ment de l'histoire de la papauté et de la civilisation. L'âme de Tosti
est dans ses œuvres et dans ses recherches par lesquelles, soit dans
sa retraite du Mont-Cassin, soit à la bibliothèque du Vatican, il a
cherché à répandre la lumière sur les points les plus controversés et
les plus obscurs des événements du moyen âge. Sur la montagne où
s'élève Tabbaye, il était à son poste, accueillant les érudits ou les
aidant généreusement dans leurs recherches. Plus d'un, qui croyait
mtie. 397
rencontrer un moine austère, était agréablement surpris de se
trouver en face d'un gentilhomme gai, spirituel, d'une eiquise poli-
tesse : avant d'être moine, il était comte; mais, avant d'être comli',
il avait reçu de la nature une âme noble et généreuse. L'année 1880
fui mémorable |}our les Bénédictins du monde entier, quand ils
célébrèrent le i i' centenaire do la mort de saint Benoit. D'illustres
représentants du monde civilisé gravirent la montagne sainte et les
Bénédictins, familiers avec les grandes choses et les grands bommes,
surent se montrer a la hauteur de Tévénement. Parmi les dignitaires
brillait Tosli, humble dans tant de gloire; on le vojait se promener
seul dans les corridors, évoquaut peut-être ces visions du moyen
âge qui prennent tant do vie dans ses œuvres'. On peut mieux
mesurer i'afTection que nourrissaient pour lui ses frères par la fête
qu'ils donnèrent pour célébrer sa guérlson d'une très grave maladie;
mais toujours, en toute circonstance, Tosti était devenu comme le
génie lulélaire de l'illustre abbaye où fréquentèrent, à la recherche
de documents, de souvenirs et d'inspirations historiques et artis-
tiques, Bluhme, Pertz, Belhmann, Mommsen, Gregorovius, Renan
et cent autres.
Les œuvres de Tosti sont nombreuses. En 18H7, Loreto Pasqua-
lucci les a données presque toutes en une édition nouvelle, élégante,
corrigée et augmentée par l'auteur. Sans prétendre en fournir la
bibliographie détaillée, citons ; Storta délia lega tombarda (1 vol.);
Storia deW abbazia di Monle-Catsino (4 vol.j; Storta di fioni-
faiio VIII e rfe" moi tempi (2 vol.) ; Storia deW origine dello scisma
ffreco (2 vol.) ; / protegomeni delta storia delta ckiesa [i vol.) ; Sto-
ria di Abelardo e de' suoi tempi (1 vol.); Storia delta contesta
Matilde \\ vol.) ; Storia del concilia di Cosianza [2 vol.) -, Il votgari-
zamento di Salluslro [i vol.) ; Ricordi biblici [\ vol.) ; Scritii varî
\i vol.). Dans ce dernier recueil iigurenl les articles : Rome éter-
nelle; De la théologie dans l'art-, le Centenaire de saint Benoit, paroles
adressées aux Napolitains; la Bibliothèque des mss. du Mont-Cassin ;
les Ordres religieux dans la Divine Comédie ; l'Ëloge de saint Vincent
de Paul; le Christ et la Révolution; Le Tasse et les Bénédictins du
Mont-Cassin, et enfin b Prière du soldat et la t^ncilialion. La simple
énumération de ces écrits montre la variété du génie et l'étendue des
connaissances de Tosti. Çà et là il se répète, comme il arrive à qui
écrit beaucoup; il multiplie les préfaces, les dissertations, les digres-
I~'~us philosophiques, échos de certaines fanfares à la Gioberti ; mais,
. Voir la yoilone de» 16, V iepU et 2 ocl. 1897, U Trilmna du 27 sept, et
\auegna leUiina}iatt: Ju 3 octobre.
3fS BULLETIN KI8T0EIQ1TV.
quand il commenee ou qu*il reprend 1» fil du récit éUbli avec une
conscience admirable sur les sources qu'il croyait les plus pures, on
a plaisir et profit à le lire. Du reste, toutes les parties de son œuvre
n'ont pas la même valeur ni une égale importance. Certaines ont Dut
grand bruit à leur heure^ mais toutes peuvent être consultées avec
fruit, n choisissait heureusement ses sujets, prenant de frétmoxt
ceux qu*il appelait des « faits générateurs ; » ainsi la Ligue lom-
barde, le Schisme grec, Boniface VIII, Abélard. Dans tous ses livres
rayonne le même idéal, manifesté surtout dans la Ligue lombarde
(qui est un peu un livre de circonstance, mais qui a l'avantage d^avoir
été le premier) et dans la dédicace quMl fait de son Boniface VIII à la
mémoire de Dante. L^esprit de conciliation devait vraiment pénétrer
rame du bon Père, s'il croyait rapprocher Dante et le pape Bonifiice.
Il souhaite qu'on écrive ces mots sur le livre de la Divine Comédie :
« Que les dés reposent en paix en signe de cette union qui, seule,
peut féconder les espérances de la mère patrie ! » Ce sont les idées
mêmes de Gioberti, qui a loué la Storia délia lega lombarda^ née
dans le milieu même qui a produit II Primato.
Peut-être les œuvres les plus utiles, les meilleures au point de vue
scientiflque, de Tosti, ne sont-elles pas celles qui eurent le plus de
vogue. Ainsi, THistoire du Mont-Cassin, qui fut à vrai dire < son nid b
et qui fut réellement écrite avec toute la conscience et la sérénité de
rhistorien, avec Taffection d'un flis reconnaissant, diaprés de nom-
breux mémoires et documents publiés ou inédits, dont il donne la
substance avec une critique sagace. Le récit s'avance, solidemeal
documenté, vif et simple, parfois éloquent, sans l'emphase et les
digressions qu'offrent d'autres travaux. On l'a plus loué que lu, mais
il restera toujours digne de l'illustre monastère, titre durable à la
renommée du moine qui, en l'écrivant^ a fait une œuvre neuve et ori-
ginale. Malgré des fautes et des lacunes inévitables, cette œuvre est
un fondement et un guide sur pour tous ceux qui aborderont le même
sujet. On peut en dire presque autant de la Dissertation sur les mss.
du Mont-Cassin, qui n'est pas un simple catalogue, mais un tableau
de la civilisation dont l'abbaye a été le centre et la maltresse, ainsi
que de l'Histoire de Boniface VIII, qui n'est pas une réhabiiitatioo
systématique, mais une synthèse lumineuse et assez précise d'un des
fdus importants moments de Thistoiredu moyen âge. La défense que
Tosti eutrepritdece pape, que Benvenuto d'Imola appelait un « magna-
nime pécheur, » est plausible sur plusieurs points, et la discussion de
certains épisodes controversés de cette orageuse période, par exemple
le récit de la reddition de Paiestrina et de Gui de Montefeltro avec soq
c consiglio fraudulento » (cf. Dante, Div. Corn., Inferno, ch, xxvir),a
e valeur critique k laqudto l'histoire impartiale a autrefois reodij
pleine justice. Si, pour plusieurs de ses livres, tes recberches imL été
insunisaiiles (comparez, par exemple, sa Ligue lomlKirde aïec le tré-
sor de documents réunis par Vignali dans son Codice diphmalico
ilella lega lombarda), ce reproche ne saurait s'adresser à son Boni-
face Vin ni à son Histoire de l'abbaye. De môme encore, l'Histoire
des origiacs du schisme grec, la seule monographie que nous ayons
en Ilalie sur ce sujet, est fortement conçue et écrite d'un style
solide. Sans doule, le P. Tosti se place au point de vue d'un catho-
lique et, si l'on veut, d'un moine, mais le moine n'arrête pas la main
de l'historien, qui ne dissimule pas certains torls de ses héros. Comme
Mabillon, comme les Bénédictins de Sainl-Maur, comme Huralori, il
n'oublie pas que le rôle de l'hislorien est celui d'un juge impartial.
Il y eut un moment (en I8ST) où Tosti crut que son idéal devien-
drait une réalité, que le Quiriual et le Vatican allaient se rapprocher
et vivre en frères. .\Iors, dans la Prière du soldat, il avait écrit :
* 0 Dieu, par le souffle de la puissance, tu as fait QoUer la bannière
I ma patrie et l'as déployée, redoutable, à la face du monde...
^saiole liberté l Heureux ceux qui sont morts pour Dieu et pour la
Itrie. ■ Plein d'espoir, il écrivit la Co/tcitiozione. Dans cette bro-
fcure, avec un trop Juvénile enthousiasme, lui, un vieillard, applau-
t a la solution de la quesliou romaine. Le Vatican, qui avait d'abord
mbié l'encourager, lit entendre sa voix autorisée et Don Pacihco,
le protagoniste de la Conciliation (c'est-à-dire l'abbé Tosli), honora-
bitUer se subjecit . En mourant, illaisse, avec son souvenir, un ■ docu-
ment vivant ■ do la plus glorieuse période de l'histoire de rilalie
lerne, des éludes et des recherches utiles à qui voudra pénétrer
s les grands souvenirs du moyen âge.
Giuseppe RofDoi^i.
i Le sénateur Marco TiBiBsiflc, mort le 44 janvier à Rome, a été un
B hommes qui ont le plus contribué à la renaissance des études
bloriques ea Itahe, comme moyen d'éducation civile et de prépara-
renaissance politique de la nation. M. Tabarrioi naquit à
marance (Pise| le ii septembre 1818^ Qt ses cours de lettres â
■Volterra; fut reçu docteur eu droit à Piscen 1842, avocat à Florence
en 484ii, Employé au Conseil d'Ëlat sous le gouveruement grand-
ducal de Toscane, il rc^ut du gouvernement italien d'importantes
nkissious politiques et administratives. Dn 1871, il se transféra avec
le Conseil d'iDlat à Rome el fut nommé sénateur. Il a élfi quelque
temps vice^présideat du Sénat et il était actuellement présidenl du
wseil d'Ëtal du royaume. Il faut ajouter, à l'honneur de son patrio-
400 BULLirm HISTOUQUB.
tisme, quMl flt la campagne de 4848 pour Tindépendanee de Plialie
comme capitaine d'infonterie.
Nous le trouvons parmi les plus anciens rédacteurs de VArehivio
storico italiano (fondé en 4842 par J.-P. Yieusseux), où Gino Gap-
poni le fit admettre dès 4846. En 4853, il y fut inscrit parmi tes
rédacteurs ordinaires, et il en a été un des inspirateurs les plus
écoutés.
De la collaboration de Tabarrini à VArehivio du vivant de J.-P.
Yieusseux (Prima Série, Appendice, Nuova Série), il faut citer, avant
tout, deux Cronache Volterrane du xiv« au xn* siècle, avec une
introduction et des notes (4846), et un mémoire très intéressant sur
certaines tablettes de cire, découvertes à Florence en 4846^ qui con-
tiennent des notes d'un marchand de draps se rapportant à ses rela-
tions avec les foires et les marchés de la France et des Flandres
(4846) : le texte intégral de ces tablettes a été publié plus tard, en
4877, par les soins de TÉcole de paléographie de Florence. — En
4856, il y flt paraître un discours, Degli studi storici in Italia e dd
ptù fruttuoso loro indiriszo^ qui est le programme de l'école néo-
guelfe libérale. Nous ne dirons pas que ce discours soit rigou-
reusement scientifique : d^autres tendances aussi l'ont inspiré.
Il faut se rappeler que, pour Tabarrini, patriote fervent, esprit
modéré et chrétien, la préparation morale à l'indépendance poU-
tique prévalait alors sur toute autre considération ; c'est pourquoi,
dans son article, il insiste sur la conception d'une histoire italienne
du moyen âge à base nationale (même en prenant pour centre la
papauté) et qu'il proclame que Thistoire doit être une chaire de mora-
lité. — Admirable entre tous est Tarticle qu^il consacra en 4 862-4863
à la Cronaca di Fra Salimbene da Parma. Il faut reconnaître que
cette étude est, jusqu^à ce jour, la plus attrayante qui ait été jamais
faite sur la célèbre chronique ; d^autres travaux plus érudits ont
paru dans la suite, mais le mémoire de Tabarrini reste toujours,
au point de vue de la peinture morale de Tépoque décrite par le
brillant chroniqueur franciscain, le compte-rendu le plus vif et le
plus expressif. — Tabarrini publia, jusqu'à 4862, dans VArehivio,
d'autres études critiques qu'il serait trop long d'énumérer; elles
sont réunies pour la plupart dans le volume : M. TiBA&aiia, StuéU
di eritiea storiea (FirenzCi Sansoni, 4876), dont la Revue historique
s'est occupée en 4877.
En 4862, une commission royale d'histoire nationale [R. DqnUih
zione di storia patria] fut instituée à Florence. Tabarrini en fut un
des fondateurs avec le marquis Gapponi, le professeur Bonaini,
G. Guasti et d'autres; le bureau fut composé de Gapponi, président,
ITiUB. AM
etdeTabarrinî, secrétaire, el celui-ci fui élevé à la présidence après
la mort de Capponi, en 4876. Lorsque la D'rpulazione, en 4864,
acheta, des héritiers Vieusseux, l'Archioio (donl elle continue la
publication â ses frais el par ses soins), Tabarrini en fui nommé aus-
sitôt un des directeurs el s'en occupa avec zèle, quoique sa collabo-
ration personnelle fût 1res rare.
n faut mentionner parliculièremBiil les commémorations et les
nécrologies d'hommes illustres qu'il publia dans VArchivio sloricoel
ailleurs. Styliste élégant sans affectalion, écrivain plein de convic-
tion el de sentiment, mais sans ombre de rhétorique, on le lisait
avec le plus grand intérêt. Ses essais biographiques sont des portraits
vivants et suggestifs ; on peut leur reprocher d'être quelquefois un peu
inexacts dans les détails du dessin, mais les caractères y sont tracés
avec justesse el en ressortent avec relief; ce sont de petits chefs-
d'œuvre en leur genre. Nous rappellerons, entre autres, les commé-
morations de Repetti (1853), Troya (1837}, Rosmini (1864), Peyron
(1870), Cibrario(J871), d'Azeglio |I872), Lambruschini (4873), Man-
zoni (4873), Tommasei (3*)), RicasoH [360|, etc.", et le beau discours
en l'honneur d'Alfred de Reumont prononcé en 4 883 à la Socieià
Colombnria de Florence.
Quant aux autres publications dues à Tabarrini, il suffira de
citer, pour ce qui concerne les éludes historiques, le Sommario sto-
rieo délia r. Accademia dfi.i Oeorgofiti (Firenze, Cellini, 4856), le
Chronkon Tolosani canonici Faventini (Ibid., 4876, t. VI des publi-
cations de la Deputazione di sloria palria) , les Scrilli edili ed ine-
dm di Gino Capponi (Firenzo, Barbera, 4 877), en deux volumes,
précédés d'une introduction remarquable, son livre, non moins
remarquable, sur Gino Capponi, i suoi tempi, etc. (Ibid., 4879,
cf. Iteoue historique, i. XX], sa conférence sur les Consorterie nella
storia fiorenlina del medio evo (Milan, Trêves, 4892), etc. Ces publi-
cations et d'autres que nous omettons pour être bref ont apporté
une riche contribution à la culture littéraire el historique de l'Ilalie
contemporaine, à laquelle Taharrini prit aussi une large part comme
académicien de la Grusca el des Georgofili, président de Vhtitulo
storico italiano, président de la Consallà aratdica, président du
Conseil des archives, etc.
Tabarrini était une haute intelligence el un esprit modéré et par-
faitement équilibré ^ sous une apparente nonchalance, sous un aimable
scepticisme, qui est propre au caractère toscan, il avait un cœur
1. Voir le ïOlui
I. T;iD4RaiNi, Vite e rlcordi di uomini iUuilri (Fitenze,
Rev. lIisTOR. LXVL 2* i
402 BULLBTm HISTOUQUB»
excellent, un sentiment profond d'équité, un patriotisme éclairé; il
attirait facilement les sympathies de tous ceux qui rapprochaient. On
se souviendra de lui dans tous les cercles où le culte de la littérature
et de la science s'accorde avec le sentiment de la moralité et la poli-
tesse des mœurs.
Gesare Paou.
œRRESPONDANCE.
Paris, 28 janvier i898.
Mon cher directeur,
M. Martin-Saint-Léon me fait l'honneur de m'écrire pour formnier
des réserves au sujet de plusieurs des critiques que j'ai cru devoir ûdre
à son livre, l'Histoire des corporations de métiers (voir plus haut, p. 203).
Tout en croyant devoir maintenir mon opinion, je suis heureux de
rendre hommage, comme je l'ai déjà fait dans mon compte-reuda, i
son travail considérable et qui rendra de grands services.
Veuillez croire, mon cher directeur, à mon respectueux dévouement.
FrantZ FuNCK-fiRENTAKO.
W. M. COWBI :
I RI8TAKT OP ne ROD.
COMPTES-RENDUS CRITIQUES.
W. M. CoopEB. A history of the Rod. London, William Iteeves,
Un paBtaar anglais, le révéread W. M. Cooper, a eu l'idée BingulIËre
de nous conter l'histoire de la verge ■ dans tous les pays, depuis les
plus ancieos temps jusqu'à nos jours. > L'auteur nous prévient spiri-
tuellement qu'il n'a pas essayé de remonter au delà du déluge. Mais,
depuis Noé, il a constaté l'emploi de la verge chez tous les peuples.
Elle a eu presque toujours un douhle caraclèfe ; laotôt simple châti-
menl, tantôt pénitence anticipée, instrument de progrès moral. M. Coo-
per suit l'évolution et les transformations de cette coutume chez les
anciens Juifs et dans toute l'antiquité; puis, à partir du v* siècle de
notre 6re, dans les monastères chrétiens, dans les divers ordres reli-
gieux (chap. v-xi) ; au moyen âge, dans les sectes de pageltants jchap. xu-
xiu), plus tard, dans celle des quakers (cbap. xvn|, enfin, dans l'ancienne
médecine, dans l'armée et la marine, dans les écoles et les tribunaux
(chap. xvrii-xxii;x:iïi-xixvi). Il constate que la verge est encore fort
en honneur dans la Russie et la Chine de nos jours, dans tnute l'Arrique
et tout l'Orient (chap. xkiu-xxvui) ; môme en Angleterre, non seule-
ment dans les universités, — ce que nous savions tous, — mais jusque
dans les « houdoirs i et les pensionnats de demoiselles (chap. xiivm-
XLV). L'ouvrage se termine par une revue des poèmes qui ont trait au
sujet : une véritable Anthologie de la verge {chap. xlvu-xlviii).
Voilà, sans doute, un thème quelque peu monotone. M. Cooper l'a
relevé par d'innombrables anecdotes, agréablement contées d'un ton de
pince-aans-rire. A vrai dire, la valeur historique du livre est assez
mince. L'auteur nous prévient lui-même qu'il s'agit d'une * compila-
tion. • J'ajouterai : d'une compilation, sur plusieurs points, fort incom*
plète. Par exemple, les chapitres sur l'antiquité sont tout à fait insuf-
tisanls et trahissent un auteur mal renseigné; il y avait bien autre
chose à dire sur le rôle et le caractère de la llagellation n Sparte et
dans certains cultes d'Orient, sur les Litpercales de Rome, etc. Les cha-
pitres sur les couvents et les sectes de /lagellanU sont beaucoup plus
heureux. Malgré cela, ils seront une maigre conLributioa à l'histoire du
temps; car l'auteur n'apporte guère de nouveau, et il a supprimé, de
parti pris, toutes références. Ainsi compris, son livre ne saurait être
qu'un recueil de curiosités et d'aaecdotes humoristiques.
P. M.
404 COMPTBS-EBIfDUS G&ITIQUIS.
Arth. ScHRErDBH. Das Alte Rom, Ent'wickeliiiiif seines Gnud-
risses nnd (ïeschichte seiner Banten, in-folio renfermant
\ A planches (avec 287 gravures) et 4 2 caries, un plan de la Rome
actuelle et une introduction historique de 42 pages. Leipzig, Teub-
ner, 4896.
Le livre, ou platôt l'atlas de M. Schneider, est destiné à nous faire
connaître la topographie et les monuments de Tancienne Rome. Ge
n'est pas un travail d'érudition, mais de vulgarisation par le plan et
l'image. On ne saurait en donner une meilleore idée qu'en le comparant
à l'album de M. Fougères : encore ce dernier ouvrage nous paralt-il
plus scientifique, suppose chez le lecteur plus de connaissances histo-
riques et plus d'habitude de la réflexion. M. Schneider parait trop préoc-
cupé d'éviter tout effort à ceux qui le consultent. G*est ainsi que (pi. I|,
donnant le tracé du Palatin, il reproduit à côté le plan des quartiers
importants de Berlin, Vienne, Leipzig ou Munich qui occupent U
même superficie. Il reproduit parfois les dessins de monuments qui
n'ont qu'un rapport fort éloigné avec l'époque dont il est immédiate-
ment question; cest un procédé dont on a abusé dans l'illustration de
V Histoire des Romains de Duruy et auquel la librairie française i
aujourd'hui complètement renoncé : M. Schneider a tort de l'importer
dans la librairie allemande et de représenter un denier de P. Satrienust
propos de la Roma qucuiraia ou la piazza Navona à propos du stade de
Domition, dont elle n*a gardé que le contour. Une troisième critique
que l'on pourrait faire à M. Schneider est d'avoir multiplié les plans sup-
posés de Tancienne Rome; un plan de la Roma quadrata, un de la
Rome du SepUmontium, un troisième de la Rome des c quatre régions, t
un quatrième enfin de la Rome de Sen'ius Tullius : c'est beaucoup
pour 1 époque des rois, où il est plus facile de bâtir des hypothèses que
de restituer des édifices ^ — Ces reproches faits, reconnaissons que les
plans sont bien gravés, clairement dessinés, empruntés aux bons livres
sur la topographie romaine, que les reproductions de vues et de monu-
ments sont choisies avec habileté et admirablement venues, que les
restitutions de la vieille Rome sont vraisemblables et attachantes, et
qu'enfin l'ouvrage doit à Tordre historique qu'il a suivi une véritable
originalité. C'est uu excellent livre d'étrennes scientifiques et un fort
utile vadc^mecum pour les meilleurs des étudiants en philologie ou pour
les architectes qui ne dédaignent pas les secours de l'histoire.
Camille Jclliar.
1. J'ai bien des doutes au sujet de la resUtation du foroin d'Auguste (VII, H).
LCUS ; BTiDT TTSDS ZOR ZEIT DER KHErZZIfEGE.
405
iBt HiDViLLBR. Ulrich von Clnny, eln blographlacher Beltrag
■ur OescUchte der ClanlaceDBer Im 11 Jabrbnadert. Mun^
1er, H. Schëningh, 1896, In-S", 86 pages. (Dans les Kirchengc'
tekichtliche Siudien, de KnSpIler, Scbrdrs et Sdralek, Lomé III,
3' livraison.)
Ulrich de Cluny est le moine du xi* siècle qu'on appelle ordinaire-
ment en France Udalric, l'auteur des célèbres Gonslitutionti Ctunia-
censes. La bîograptiie de M. Hauviller, rédigée a^ec soin et méthode,
renferme d'aburd une étude sur les sources employées : deux vies
anciennes, en somme assez banales, du moine clunisien, et tes Consti-
tvtiones; puis vient un chapitre sur la jeunesse d'Ulrich. Né à Ratis-
bonne es t029, il fait son éducation à Saint-Emmeran ; il est appelé à
In cour d'Henri III vers ID44 et devient chapelaia de l'empereur. Puis,
son père et son oncle ayant trahi ce dernier, il doit quitter la cour et
se rend à Preisingen, où son oncle, l'évèque Nitker, lui confère les
ordres. On le trouve ensuite en Italie en 1046, puis en Palestine, puis
UD peu plus tard, quand la mort de l'êvéque Nitker lui a enlevé son
seul protecteur à Freisingen, il se décide à entrer dans un monastère
|106tl. Reçu il Clnny avec son compagnon Gérald par l'abbé S. Hugues,
il reçoit la prêtrise et devient d'abord chapelain et secrétaire de ce pré-
lat, puis prieur de Marcigny. EnDn, revenu dans son pays natal, il
construit le monastère de Zell en Brisgau, travaille à étendre la réforme
clunisienne dans l'Allemagne méridionale et meurt aveugle en 1091!.
L'opuscule se termine par une étude intéressante des écrits d'Ulrich et
du principal d'entre eui, les Co/tstitutiones, si utiles à qui veut con-
Tiailre l'état intérieur des abbayes cluoisiennea au si' siècle. Telle e-it
cette monographie, qui méritait d'être signalée aux historiens français
tqni complète sur plusieurs points le savant ouvrage de M. Sadtur.
A. L.
' Leopold Lccts. Gescblchte der Stadt Tyms sur Zelt der
KTBaBzflge. Berlin, Majer et Millier, 1896. In-K°, »2 pages.
La ville de Tyr ne fut enlevée aux Musulmans par les Lalins que le
7 juillet 1124, après plusieurs attaques infructueuses. Elle devint bien-
tôt, aux mains de ses nouveaux maitres, ui des ports les plus fré-
quentés et une des meilleures places de commerce de la c&te syrienne.
Assiégée inutilement par Baladin, elle est à la fin du siècle au pouvoir
de Conrad de Moatferrat, M. Lucas retrace d'abord l'bistoire politique
de la ville jusqu'au 19 mai 1291; à cette dernière date, la place, aban-
donnée des gens de guerre, est réoccupéc sans combat par le sultan
Malik-al-Aschraf. La seconde partie du mémoire est occupée par une
brève étude de l'organisation de la ville durant ce siècle et demi; l'au-
buir parle successivement des tribunanx, du commerce, des habitante,
406 COMPTES-RENDUS CaiTIQUBS.
des églises, dont plusieurs appartiennent aux Vénitiens, des colonies
pisane et génoise, des chapelles et des abbayes. En appendice, une
courte étude sur les différends entre les patriarches d'Antioche et de
Jérusalem, dont chacun revendiquait la suprématie snr la province de
Tyr, et une liste des dignitaires ecclésiastiques et sécnliers de la cité
au temps des croisades.
L^abbé Pisani. A travers rOrlent. Études d'histoire religieuse.
Paris, Bloud et Barrai (sans date). 4 vol. in-8«, xin-344 pages.
L'abbé Pisani est professeur à l'Institut catholique de Paris. On sait
quels efforts Léon XIII a faits depuis quelques années pour réunir i
rÉglise romaine ou tout au moins pour rapprocher d'elle les diverses
chrétientés orientales qui en sont séparées par des questions de dogmes
ou de rites. M. l*abbé Pisani a choisi l'histoire de ces églises pour sujet
d'un de ses cours et il publie le résultat de ses leçons. L'ouvrage est
clair, aussi agréable à lire que le permet Taustérité des matières traitées.
L'auteur part nécessairement du point de vue catholique, et l'on aurait
mauvaise grâce à s'en étonner. Il n'a pas prétendu épuiser la matière;
il ne fournit ni notes ni références. La bibliographie qu'il donne en
tète de son volume est un peu succincte. Nous regrettons particulière-
ment de ne pas y voir cité l'ouvrage de Pelesz, Geschichte der Union der
ruthenischen Kirche mit Rom (Vienne, 1878, 2 vol.) et l'excellent ouvrage
anonyme de M. E. Picot, Les Serbes de Hongrie (Prague, 1873). Du reste
M. l'abbé Pisani a passé assez légèrement sur l'histoire de l'église russe
unie ou ruthène. Il y a là une question particulièrement délicate, si
l'on considère d'une part les rapports actuels de la France avec la Rus-
sie, d'autre part l'extrême prudence de la cour de Rome, qui tient i
entretenir avec Pétersbourg les plus cordiales relations.
Je n'ai pas qualité pour apprécier dans toutes ses parties un ouvrage
dont certains chapitres échappent absolument à ma compétence. D sera
lu, il aura, je l'espère, une nouvelle édition, et c'est dans cette espé-
rance que je me permets de signaler à l'auteur quelques corrections oa
additions.
P. 9. Tous les Slaves étaient convertis au christianisme avant lexi^s.
Il faudrait dire tous les peuples slaves actuellement encore existants;
au xi« siècle, les Slaves baltiques ou de l'Elbe étaient encore païens. La
mission d'Otto, évoque de Bamberg, date de 1128; la destruction do
temple de Svantovit dans l'île de Rugen, par Valdemar de Danemark,
eut lieu en 1168. Il y avait encore des idoles et des Slaves païens dans
les régions de la Prusse actuelle au xiii* siècle.
P. 10. La puissance éphémère des Avares était tombée sous les oonps
des Croates. L'auteur oublie les expéditions de Gharlemagne (791) et de
son fils Pépin, qui détruisirent les Hrings et repoussèrent les Avares au
delà du Danube et de la Tisza.
Cubé pisini : i tuters L'oBiBitr.
407
f P. 17. Dn moment où l'auteur cite parmi les églises orientales les
"tnlgares unis, pourquoi oe pas citer aussi les Berbes unis et les
Russes unis ou Rulbènes, dont il sera d'ailleurs question plus loin
dans le volume?
P. 95. Nicolas, abbé de Stade. Est-ce bien ainsi qu'il convient de
désirer le monastère connu en grec sous le nom de "ù Erouîiou, tûv
SiauJi'iovT Stoudios était le nom dQ fondateur du monastère. P. 105. Je
suis un peu étonné de ne pas voir les Bulgares mentionnés parmi les
peuples slaves à c&té des Russes, des Polonais, des Tchèques et des
Serbes. C'est évidemment un oubli purement typographique, car ils
figurent dans le chapitre. C'est exagérer que de dire qu'ils ne sont
pas des Slaves, mais des Tatares (p. 107). Ces Tatares ont été absolu-
ment absorbés par les Slaves balkaniques ; les Bulgares sont pour Le
moins aussi slaves que les Russes, qui doivent leur nom à des Scandi-
naves H qui ont absorbé d'énormes éléments ficnoi».
P. 111. La Bulgarie était le seul pays où la langue liturgique fût le
slavon. Mais quelle était donc la langue liturgique des pays serbes et
russes? Celait aussi le slavon. P. 115. Les Russes envoyaient des
s au tombeau des apdtres. Quelles sont ces ambassades? Il
lAt été bon de préciser. P. 149. Il est question d'une lettre adressée
r Boris, roi des Bulgares, au pape Innocent III, Le souverain bul-
) ne s'appelait pas alors Boris, mais Kaloian (Jireczek, Histoire de>
fdgares]. La Bulgarie n'a eu que deux Boris. Le second vivait au
■ siècle. P. 151. Il aurait fallu donner la date de l'établissement à
sriovci du patriarche d'Ipek (1690). D'une façon générale, M. l'abbé
& négligé les dat^s.
P, 166. Les rapports des provinces russes de la Pologne, dites pro-
Inces rulbènes, avec l'église romaine sont indiqués d'une façon un
I sommaire. L'Union oftïcielle de Brest Litovsk n'est pas même
e' ; c'est une grave lacune. P. 166. Sur le nom que les Russes
tonent à Constant! no pie (Tsarigrad, la ville impériale], M. Pisaoi
mble répéter une erreur que j'ai relevée naguère à propos du livre
b M. C. Rousset sur la guerre de Crimée; ce nom de Tsarigrad a été
|r6é par les Slaves balkaniques, les Serbes et les Bulgares; c'est eux
hii l'ont importé en Russie.
|P. 174. L'origine du raskol parait rapportée à l'époque de Pierre
I Grand. Or ce raskol remonte au patriarcat de Nicon (1651-1658).
pt-il bien sur que les raskoloiks " aient fait la force des terribles
lepirations du nihilisme » (p. 175)? Cette assertion m'étonne nn peu
b j'aimerais à la voir prouvée par des faits précis. P. 560. Le prince
t Monténégro ne s'est jamais appelé, en dépit des journaux, Nikita
[ni représente le grec Nicetas), mais Nicolas. Je termine par nn ren-
t qui sera particulièrement agréable à notre savant collègue.
^ 1. Je me suis eOorcé d'eipliquer le caractère de cette Union dans VUUtoire
raie de UU. Lavlsse et Rambaud, (orne V, p. 129.
408 GOMPTBs-UNDUs caiTiQinis.
Mgr Hassonn n'est pas, comme il le croit^ le premier prélat orientai
nommé cardinal depuis Bessarion. Le 16 juin 1856, Mgr Lewicki,
métropolitain de Lemberg, a été préconisé par Pie IX (Pelesz, t. n,
p. 229). n est vrai, pourrait dire pour sa décharge M. Pisani, que le
cardinal Lewicki est mort sans avoir été à Rome recevoir le chapeau
et le titre cardinalice. Ces observations minutieuses attesteront avec
M. Pisani le soin avec lequel je Tai lu ; son livre est instructif et atta-
chant. Avec un peu plus de bibliographie, un peu plus de dates, un
peu plus de précision dans les détails, il pourra être excellent.
Louis Leoer.
R. FosTEa. Gommentaries on the Constitution of the United
States. (Uistorical andjuridical^ tvith observations upon the ordi'
nary provisions of State constitutions and a comparison with the
constitutions ofother countries,) T. L Boston et Londres..., 1896.
6r. in-8*^, yii-714 pages.
Il est difficile, d'après ce premier volume, d'apprécier exactement le
caractère de l'ouvrage, d'autant plus que l'auteur entre en matière
brusquement sans expliquer ni son but ni son plan^. D'après le sous-
titre on peut supposer qu'il a voulu faire une étude d'histoire comparée
des institutions ; il annonce des observations sur les constitutions des
États particuliers de l'Union et une comparaison avec les constitutions
des autres pays. Le tome I ne contient encore qu'un commentaire de la
constitution fédérale.
L'ouvrage est boaucoup plus juridique qu'historique. L'histoire s'y
réduit à une courte introduction historique sur les origines de la cons-
titution; c'est un chapitre de vulgarisation fait avec les histoires clas-
siques. Puis commence l'oxposition juridique qui est la véritable raison
d'être de ce travail. L'auteur, professeur de jurisprudence fédérale, est
ici sur son terrain ; il revient à la méthode d'exposition habituelle aux
juristes, le commentaire des textes officiels.
Après un exposé juridique des théories sur la souveraineté de l'Union
et des Etats et sur la nature du contrat fédéral, il commente phrase par
phrase lo préambule de la constitution et discute la question du droit de
sécession et de nuUification. Puis il analyse le gouvernement créé par
la constitution, examine la séparation des trois pouvoirs (ch. ni) et étu-
die chacun des organes, le Congrès (ch. iv), la Chambre des représen-
tants (ch. v-x), le Sénat (ch. xi-xii), le droit d'accusation (ch. xm); il
1. P. 283.
2. Le I 1, Paper Constitutions, où Ton trouve une liste des questions que
soulève la longue durée de la constitution fédérale des États-Unis, semble pro*
mettre une explication du but de l'auteur, mais s'arrête sur une longue période
oratoire où il est question de Tacite et de Simon de Montfort.
LOOTCDIBII : LA TEifTB DES BIEIfS RinoniUX. 409
itiint en appendice une histoire de Vimpeachment dans le» États. ÏA
trêie le lome I, au milieu de l'étude de la constitution fédérale. On
it que l'ouvrage sera volumineux s'il tient toutes les promesses de
|l eous-titre.
léthode d'exposition est une combinaifion judicieuse du procédé
Tistorique et du procédé juridique. Pour cliaque détail de la constitu-
tion l'auteur expose historiquement comment il a été établi en renvoyant
aux travaux historiques, — juridiquement comment le texte a été inter-
prété en citant les arrêts rendus sur des cas particuliers. L'ouvrage
forme ainsi un répertoire de tous les faits et do tous les textes relatifs
au développement de la constitution fédérale. On y trouve même repro-
duits in fxtenso certains documents qu'il n'est pas toujours facile de se
procurer {VAgreemtnt of Ihe people, de 1648, ou du moins ses parties
essentielles, les ordonnances de nulliUcation, l'opinion de JeCferson et
le rapport de Webster sur les bases de répartition des textes). C'est dire
que ce répertoire peut rendre de grands services à quiconque étudie
l'histoire des institutions dos ftlats-Unis. On y trouvera aussi (p. 347-
354) quelques pages remarquables de philosophie politique sur k rai-
son (l'être du suffrage uaiversel.
Ch. Seionobos.
J. LorTCQiSKi. La petite propriété en France avant la Révola-
tion et la vente des biens nationaux. Paris, Champion, 4 897.
Id-S", ((J4 pages.
Il n'est pas de question de notre histoire sociale plus débattue que
celle de la répartition de la propriété foncière avant et après la Révo-
lution. C'est ce problème que, après Tocqueville, Lavergne, Kareiev,
Gimel et Min;!és, M. Loulchisky a repris dans un article de la Heime fiis-
torique, septembre 1895, et dans l'opuscule précité. Il a compulsé dans
les archives de cinq départements : Pas-de-Calais, Aisne, Côte-d'Or,
Bouches-dn-Rhûne. Haute-Garonne , les r6lcs des vingtièmes et les
actes de vente des biens nationaux. M. L. a travaillé avec une patience
de bénédictin; mais il a vu tant de chiffres, tant de documents qu'il
n'expose pas toujours ses recheruhfls avec une clarté parfaite.
Il étudie d'abord la propriété en t789. Combien y avait-il de proprié-
lairea? Gimel, qui a travaillé sur les rôles des vingtièmes de vingt-sept
départements, donne le nombre de 4,600,000. M. L. critique Gimel, qui
compte deux fois des propriétaires déjà inscrits sur les rAles et qui
applique au iviit" siècle la proportion de 59,4 % entre le nombre des
cotes et celui des propriétaires, laquelle n'est vraie que pour l'année 1879.
M. L. dit que la proportion est de 65,2 "/o dans le Laounais (p. 77). —
Outre que ces deux proportions sont asse; voisines l'une de l'autre,
M. L. n'a pas du tout démontré, comme il le croit, que la proportion
de Gimel est trop faible. La proportion de M. L. est vraie du Laon-
440 GOMPTBS-KBIfDUS GUTIQUIS.
nais ; peut-on, en bonne méthode, l'appliquer à tonte la France? ~~
Quelle était la répartition de la propriété entre les di'v^ves classes?
Dans le lAonnais, les privilégiés avaient 50,5 <>/o du sol, les bourgeois
19,4 o/o et les paysans 30 <>/o. Dans tout village il y avait : 1* la pqm-
lation purement agricole (laboureurs, fermiers, manœuvriers et joumi-
liers); 2^ les marchands, artisans, qui, en dehors de leur industrie,
possédaient souvent quelques arpents de terre dont ils tiraient leur
principal revenu. C'est la vie agricole qui dominait dans le village. La
paysans avaient 30 <»/o du sol dans le Laonnais. Arthur Young dit que lei
petites propriétés occupaient un tiers du territoire français ; la statistique
confirme son opinion. M. L. aurait pu utiliser davantage Young etanss
les cahiers des états généraux de paroisses qui lui auraient fourni des
renseignements parfois statistiques et surtout très vivants. Le cahier
du tiers de Nemours, rédigé par Dupont, donne la répartition des terres
suivant leur nature économique : 5/6 des terres labourables et 1/5
environ des prés, bois, étangs appartiennent aux non privilégiés (Ârch.
pari., IV, iÎ4). M. L. omet cette question si intéressante. — Surtout
il néglige la question des charges qui grèvent le sol. Gomment étudier
la propriété foncière en 1789, sans parler des droits domaniaux? U dit
bien (p. 70) que dans le Laonnais on ne connaît guère le cens; que les
paysans possèdent leurs terres « à titre de propriété ; > mais ce terme
est vague. Les alleux ne sont qu'une exception au xvni* siècle; le paysan
propriétaire paie toujours un cens, un cbampart ou une rente foncière,
sans compter toute la série des droits seigneuriaux.
Quelle a été l'influence de la vente des biens nationaux sur la répar-
tition du sol? Contrairement à l'opinion émise sans preuves par Lavergne
et d'Avenel, les paysans ont acquis une grande partie des domaines
nationaux ; au début, l'aliénation s'est faite par petites parcelles. D'après
tous les exemples donnés par M. L., qui réserve ses conclusions pour
un ouvrage prochain, il semble que les paysans ont acquis à peu près
autant de terre que les bourgeois. Il faut distinguer deux catégories de
biens : les biens ecclésiastiques et les biens d'émigrés. Les premiers sont
allés très souvent aux bourgeois : il en a été ainsi dans la G6te-d'0r,
le Pas-de-Galais, la Haute-Garonne (Aev. hist,, sept. 1895, p. 83 et 107);
dans le Laonnais, au contraire, les paysans en ont acheté plus de la
moitié, de 1790 à 1792 (53,5 o/o). Les biens d'émigrés ont été acquis
surtout par les paysans dans les trois départements mentionnés, et à
peu près également par les paysans et les bourgeois dans le Laonnais.
— Les deux groupes rivaux ont obtenu à peu près autant l'un que
l'autre. Mais les bourgeois ont eu les terres situées près des villes.
Minzès avait déjà montré l'influence des grandes villes, Paris et Ver-
sailles, sur les achats. M. L. montre qu'il n'est pas de ville, môme très
petite, comme Tarascon, qui n'ait réussi à accaparer les domaines
nationaux des villages voisins (p. i25-i32). — De plus, les paysans
n'acquièrent en général que de petits lots; les bourgeois en acquièrent
de considérables. Dans le Laonnais, les paysans et les bourgeois achètent
.j
scBinuim : sEmBicH toit thbitschie.
Ht
respectivement 23 ,200 arpenta ot IS,800 arpents de biens ecclésiastiques,
de 1790 à 1793 ; les paysans sont 4,787 et les bourgeois seulemenl 171.
— La lutte entre la bourgeoisie et les classes rurales a été très vive;
pour obtenir les terres situées !<ur le territoire de leur vitlafte, les pay-
sans se sont associés. Ces coalitions se sont surtout développées dans
l'A-isne ; là, elles ont été beaucoup plus nocnbreuaea et plus consid^
râbles; elles se composaient, non plus de 5 à 10 membres, mais de 30,
parfois 100 et mémo 325 individus (p. 117); elles ont duré jusqu'au
décret du 24 avril 1793, qui les a supprimées. M. L. n'étudie pas révo-
lution de la législation relative aux biens nutionaui. Minzés avait en
partie toucbé le sujet; mais son travail, mal ordonne, contient des
erreurs graves d'interprétation de text«6. C'est un point très important
que M. L, eftleure seulement dans un appendice, qui n'est pas fondu
avec l'enfiemble. Le travail de M. L. est capital; nous enavons tiré un
grand pro6t pour un travail que nous donnerons cette année sur le droit
civil de la Révolution. Attendons l'ouvrage déSnitif de M. L. et souhai-
tons qu'il soit mieux ordonné, mieux fondu, plus complet sur certains
point* et plus vivant que l'opuscule que nous venons d'examiner. H. L.
a rendu an grand service à l'histoire sociale de la France.
Ph. Saqhag.
teodor ScHiEHt!<N. Helnrlch von Treitachbe'a Lehr-nnd Wan-
Iderjohre 1834-1866. {Historische iiibliolheh herausg. von der
BedaktioD der Ilistorischen Zeilschrift.) Mucnchea und Leipzig,
iB. Oldenhurg, 18«6, vir-270 pages.
rAujonrd'hni on s'occupe beaucoup de Treitschke en Allemagne.
1 mort, de nombreuses études ont été publiées par les hommes
les plus compétents, G. Schmoller, P. Bailleu, Eric Marx, Max Lpdk,
G. Kaufmann'. A en croire quelques-uns de ces critiques, l'historien
défunt éclipserait déjà toutes les gloires de son pays. On oublie que,
sans compter que dans le domaine scienlilique l'Allemagne a de plus
grands noms à opposer au sien, en hisuiire même elle compte des talents
pluâ considérables, pour ne citer que Lêopold de Ranke.
A la lin de 189li a paru la première partie d'une biographie de
M. Théodore Schiemann où Treitschke est étudié avec un soin et une
minutie qu'on n'a guère que pour les écrivains entrés dans l'immor-
i^
,. Gaslave Sclimolier, Ged'ichlnUirede avf H. von Sybel und H, von Treit-
Aus den Abbandlungea der Berl, Akademie, 18%, p. 31. — Paul BaJl-
'. von Treitschke, Deulsche Rundtchait, oct.-nov. 1S36. — Max Lenz,
Heinrieli uon Treitiehke. Anspraeke an dig Berl. SltuienlenKh. bei Ihrer
Trauerfeier am 17 mai ISM. Berlin, Waller, 1896. — G. KaufroanD, TreiUchtei
Deulielie Geiehiehie und der Vorv>urf der Tendeia. Vorirag geballea xu
der Schl. Cesellschafl Tùr vaterl. Kttllar, nov. I8!I6.
442 GOMPTKS-RBIfDDS CEITIQUU.
talité. Â en jager par quelques mots de la préface : t 8a TÎe fut si pure...
Cette lutte de héros... Cet ardent désir d'être utile... Ce cœur plein
d'amour... Ce courage moral qui ne connaissait aucune peur..., • on
pourrait même craindre de se trouver en face d'une de ces apolo-
gies dont Macaulay disait qu'elles semblent être composées en vertu
d'un contrat par lequel la famille s'engage à fournir les papiers et le
biographe les éloges. Mais il n'en est rien. L'auteur n'est h3^rboiiqQe
que dans les dernières lignes de sa préface. Dans le corps même de la
biographie, il s'efface très discrètement derrière les faits. H cite beau-
coup de lettres ou des fragments de lettres choisis judicieusement, et
il se contente de les relier par un sobre commentaire qui montre da
sens et du tact. Pour une biographie faite, semble-t-il, rapidement, peu
de mois après la mort de l'auteur, elle est excellente.
Ce que M. Sch. fait admirablement connaître, c*est la nature morale
de Treitschke. A en juger par ses écrits, la violence de ses attaques et
la grossièreté de sa polémique, celui-ci ne paraît point toujours fwt
sympathique. Dans ses lettres, au contraire, il se montre généreux et
affectueux. Le meilleur ami de ce fougueux antisémite est un juif,
Alphonse Oppenheim. Il y a dans sa vie des actions qui témoignent
d'une rare délicatesse de sentiment (voy. par exemple, p. 256, pourquoi,
en 4867, il refusa de succéder à Hœusser, à Heidelberg). D'un bouti
l'autre, sa correspondance le révèle rude, franc, ardent, droit, dévoué,
serviable, inébranlable dans ses principes, mais, en pratique, plein de con-
descendance pour les hommes. L'épisode de la rupture avec son père,
au sujet des événements de 1866, est tout simplement admirable. II y
a là trois ou quatre lettres qui font le plus grand honneur à celui qui
les a écrites (p. 255, 258).
A côté de cette nature généreuse, Treitschke montre un robuste opti-
misme, celui d'un homme de volonté et de réflexion qui « ne veut point
se laisser dominer par les choses. » Et cela devait lui être d'autant pins
difficile qu'à la suite d'une maladie d'enfant il était resté presque entière-
ment privé de l'ouïe. Treitschke trouve dans cette infirmité une occasion
de plus de s'élever. Constamment on le voit en travail sur lui-même,
c Être toujours probe, honnête, moral, devenir un homme, un brave
homme, utile à l'humanité > (p. 28), voilà l'idéal de vie qu'il se pro-
pose à quatorze ans, et à cet idéal il essaya toujours de rester fidèle. Ce
qui l'attache surtout à son premier maître, Dahlmann, c'est qu'il trouve
chez lui, comme chez le baron Stein, « un sentiment du devoir extra-
ordinaire, la simplicité, le dévouement absolu à la cause qu'il a em-
brassée » (p. 61).
Au point de vue intellectuel aussi, de bonne heure Treitschke lutte
contre certaines dispositions de sa nature. Imaginatif et poétique, ils
besoin d'efforts pour plier son esprit aux études arides • de l'économie
politique et dos systèmes sociaux. > Il se reproche à lui-même c de
manquer do concentration » et c de se laisser trop dominer par ses
impressions » (p. 52).
SCBIEHjINH : BEtNIICU ro^ TBEITSCHEE.
m
C'est que, forl jeune, il s conçu le plnn de eu vie. Ce plau eei de
travailler à créttr le véritable éut al!>-maiid. Ua grand sentiraeni l'em-
plit, l'amour de sa patrie, dont il incarne les destinées avec la politique
prussienne.
Treitschke fut en ce siècle un des plus ardents défenseurs de cette
politique. On est même étonné de voir là-dessus, dans sa correspondance,
la maturité de ses jugements. Né dans une famille entièrement dévouée
à la politique autricbienne, et qui prit ouvertement parti contre la
Prusse dans le couOil de 1866, dès quatorze ans, nonobstant une profes-
sion de foi républicaine, toute théorique du reste (p. 27), et une admi-
ration un peu juvénile pour le général Cavaignac, il est déjà Prussien
résolu. En Iâ49, il juge avec une précocité remarquable > les erreurs
et les fautes du Parlement de Francfort > et il exprime la conviction
que I la Prusse est l'instrument choisi qui fera l'unile allemande. *
Il parte déjà, eu termes identiques à ceui dont il se servira plus lard
dans sou histoire, de « ces Habsbourg qui veulent mêler leur sale mar-
melade slave aux pares eaui germaniques ■ (p. 50), et il s'élève avec non
moins de véhémence contre le radicalisme t antipatriotique de la jeune
Allemagne i (p. bù). Treitschke, entre quinze et vingt ans, était déjà le
politique intransigeant de son âge mùr.
Toute la partie de ta vie de Treitschke qui s'étend de ses années
d'études à ses débuts comme professeur oSre un intérêt général. On y
voit ce qu'était la vie politique des universités ou de certaines univer-
sités allemandes, entre ISbQ et 1860; ce que Dahlmann était alors pour
les étudiants; commentauasi se forma cette génération pratique et com-
bative après les dures expériences de IS48. Treitschke remarque, dans
une lettre à son père, que ce qui manque le plus aux professeurs qui
easeigaenl i'bistoire et la acieuce politique, c'est la pratique des affaires.
■ Aus»i, dit-il, après avoir passé mon examen, mon intention est de
voyager et de faire un séjour dans un institut agricole ou technique '
tp.71).
Les débuts do Treitschke comme professeur ne sont pas moins inté-
ressants. M. Scb. nous le montre inaugurant à Leipzig cet enseigne-
ment histurico-politique destiné à préparer le triomphe de la politique
prussienne (voy. p. 148) ', l'opposition que le jeune professeur rencontra
de la part de ses collègues qui réprouvaient cette transformation des
chaires universitaires en tribunes d'assemblées (Ranke fut du nombre)
et te mécontentement des gouvernements et des ministres saxons, Fat-
kenstein et Beust |p. 134); l'énergie avec laquelle, sans se laisser trou-
bler, il poursuit sa route ; le succès prodigieux qu'il obtient et l'estime
toute particulière que lui témoigne le prince de Bismarck, qui, voyant
en lui un précieux aide pour sa politique, lui lit des olfree fort curieuses
1. Sdunoller dit de la première partie ds l'activité de Treitschke comme
proCessear et pabliciste : « Ohne ilenn Hilfe wïro da* deulsclie Reicti akbt zu
^SUnde gckomoi
4U GOMPTBS-BBIfDUS CUTfQUn.
dans deux lettres publiées par M. Sch. (p. 240, 347). Tout cela apporte
une contribution importante à Thistoire de la politique pnusleime
durant ces années.
L'œuvre deTreitschke, malgré ses partis pris, ses défauts et ses Laconei,
n'en est pas moins une des œuvres littéraires les plus conridérabltt
du nouvel Empire allemand. Aussi tout ce qui contribue à la faire con-
naître a, dès aujourd'hui, son prix. L'auteur, qui arrête sa biographie
en 1866, ne nous dit par conséquent pas grand*cho8e de cette ceuvre,
mais on peut déjà voir dans le Treitschke de ces années se dessiner le
futur historien. A côté de l'homme de parti et du moraliste an peu âpre
qui exprime toujours sa pensée sans ménagements (p. 104), on aperçoit
aussi l'artiste et l'écrivain qui dans Macaulay admire c la conception
grandiose de son histoire » (p. 72), et qui trouve c que l'Histoire romaine
de Mommsen est la plus belle œuvre historique des Allemands » (p. 100);
le poète qui se révèle dans de charmantes lettres ( c tout fleurit ici, les
arbres sont blancs, > p. 60); le peintre des scènes populaires ou des des-
criptions de coins de terre allemande (l'émeute de Dresde en mai 1849
racontée d'une manière saisissante en trois lettres, p. 34-39) ; l'humo-
riste enfin qui s'essaye déjà à ces peintures de la vie germanique, si
caractéristiques dans son œuvre (le joueur d'accordéon, p. 77 ; le ridicnle
des petites cours gothiques, p. 96 ; la vie philistine des bourgeois de
Dresde, p. 98).
Toutes ces lettres, qui sont des lettres de grand écrivain, nous montrent
davantage encore que, la meilleure part de son succès, Treitschke la doit
à ses qualités littéraires.
Antoine Guillahd.
Eugène d'Eichthil. Alexis de TocqueviUe et la démocratie libé-
rale. Galmann-Lévy, 1897. lu-12, 354 pages.
Ge livre n'est pas un ouvrage d'histoire pure, mais ici comme dans une
étude antérieure dont j'ai déjà rendu compte S M. d'Eichthala reconnn
la nécessité de recourir à l'histoire pour éclairer la politique; son exa-
men critique des œuvres de TocqueviUe est encadré dans une biogra-
phie. Partisan déclaré du libéralisme, il veut remettre en lumière le
grand penseur qui eut le culte de la liberté; se préservant de cette
admiration à outrance qui est le travers habituel des biographes, il
recherche dans quelle mesure les prévisions et les jugements de 'Tocque-
ville ont été depuis cinquante ans confirmés ou démentis par les ùlt&.
Les réserves de M. d'Ëichthal sur la séparation de l'Église et de l'État,
surtout sur la décentralisation tant glorifiée par TocqueviUe, prouvent
1. Souveraéneté du peuple et gouvernement. Alcaa, 1895.
b'BICBTHU : i. I)B TOCaOBTILLB ET U OSMOCRITIE URtULB.
que les libéraux actuels (k part quelques économistes intraosi géante)
foot à l'État uae part bien plus grande que leurs devanciers et désirent
trouver en lui le défenseur dos droits individuels contre les tyrannies
locales. M. d'Eictittial a très bien montré le problème qui préoccupa
tODJours Tocqueville; la démocratie étant un Tait inévitable, la religion
et la liberté formant l'idéal qui lui était cher, U voulut concilier l'idéal
avec la réalité.
Je signalerai un seul point que l'auteur n'a pas suffisamment traité,
c'est l'étude des circonstances qui préparèrent le succès de la Déinocra-
lû en Àmériqite. Ce livre fait l'apologie de la liberté religieuse; or,
quelques aimées auparavant, la Société de la morale chrétienne avait
couroimé le remarquable mémoire de Vinet sur la liberté des cullOB.
Après l'auteur protestant, un grand écrivain catholique soutint la même
thèse; les articles de Lamennais dans l'Avenir gloriSaient â la fois la
liberté, la religion et la démocratie. Ce que Lamennais ei Vinet souhai-
taient de voir en Europe, Tocquevlile le montra eiistaol déjà on Amé-
rique. — Mèmeobservalionà propos du gouveroemeut. Les libéraux qui
luttaient sous Charles X n'auraient pas compris Tocqueville; tous.
Benjamin Cunsiant à leur tête, jugeaient les droits politiques insépa-
rables de la propriété. La révolution de Juillet changea ces idées; les
trois jours de combat où les prolétaires s'étaient montrés braves, humains
et désintéressé B, posèrent en France la question des droits du peuple;
et, pour le dire en passant, voilà qui prouve que l'histoire des théories
politiques ne saurait être séparée de celle des événemonts. AussitAt la
démocratie trouva des partisans : tandis que l'abbé de Geooude faisait
dans la GasHte dt france un amalgame bizarre de la légitimité avec
la souveraineté du peuple, les républicains se proclamèrent les défen-
seurs des classes exclues. Leur journal, la Tribune, à cAtè de polé-
miques violentes contre la monarchie, renfermait des articles remar-
quables sur ces questions*. A ta Chambre des députés, Garnier-P&gès
parlait « des hommes qui n'ont pas de droits, i et, se plaignant des
injustices de l'impùt, disait i ■ L'égalité des charges n'existera que
quand il y aura égalité de droits. ■ Enfin Armand Garrel, converti à
la République, prit dans le National la défense des ouvriers contre
ceux qui les traitaient de a barbares » et glorifia fréquemment le régime
des Ëlats-Unis; ses articles avaient de nombreux lecteurs, même parmi
les partisans de la dynastie. Voilà dans quel milieu parut l'ouvrage de
Tocqueville; ce livre sérieux, où rien n'était fait pour l'agrément du
lecteur, obtînt aussitôt un grand et légitime succès. — Ajoutons, sans y
insister, que les circonstances ne furent pas moins favorables eu 1856
pour l'Ancien régime et la lUvoludon. Les panégyriques enthousiastes
des Micbelet, des Lamartine et des Louis Blanc avaient représenté la
'. Voy., par exemple, les numéros des 23 juia, 13 jaillet, 27 aoat, 5 se
:, el le programme coateou daas le numéro du 3t jaDTieT IS33.
446 GOMPTBS-RBNDUS GRinQUEB.
Révolution comme un événement sans précédents, comme la naissance
miraculeuse d'un monde nouveau; après les déceptions causées par les
journées de Juin et le Deux-Décembre, le public français n*eat point
de peine à goûter l'étude précise et austère où Tocqueville rem^tait
les événements de 1789 à leur place dans la suite des fiaits bistoriques.
En résumé, le livre de M. d'Ë. est très intéressant, parce qu'il ert
très personnel; c'est Tocqueville jugé par un disciple respectueux et
indépendant. L'ouvrage contient en appendice la traduction des entre-
tiens de Tocqueville avec Senior, parus en anglais en 1872, et qui n'avaient
jamais été publiés en français. M. d'Eicbtbal donne également çà et
là quelques extraits de la correspondance inédite de Tocqueville avec
son ami Gorcelle, et à ce propos il exprime le vœu qu'on nous fasse
bientôt connaître les nombreuses lettres de lui qui n'ont pas encore été
mises au jour. Tous ceux qui ont lu les merveilleux Souvenirs publiés
en 1893 s'associeront à ce désir.
Georges Wbill.
James BarcE. The american common'wealth, t. Il, 3* édition.
Londres, MacmîUan, 4895. In-8<», 904 pages.
Après avoir expliqué le mécanisme des institutions politiques dans
le tome I*** (voir Rev. hist.» LVII, 189), l'auteur a, dans le tome II,
décrit la vie politique et sociale du peuple américain. Ce second volume
est donc la partie la plus importante de louvrage.
J'éprouve quelque confusion à constater que ce livre, répandu à des
centaines de milliers d'exemplaires dans le monde anglais, cinq ans
après son apparition n'est pas encore traduit en français, et n'est même
guère connu chez nous que par ouï-dire. Pourtant ce livre a été, je n'exa-
gère pas, un des événements intellectuels de notre siècle, puisqu'il adonné
à la plus grande des nations civilisées, la république des États-Unis, ane
notion précise et exacte de son caractère, de ses vertus, de ses défauts
et de sa destinée probable.
Le tome II se compose de 67 chapitres groupés en 4 « parties. ■ — Le
c Système des partis > (p. 1>246) est une description de l'organisation da
recrutement, du fonctionnement et des habitudes des partis où est
expliqué tout ce qui fait le caractère de la vie politique des Ëtats-Unis,
les conventions et les nominations, les politiciens, le c système des
dépouilles, » les rings, le boss, la corruption électorale et la vénalité.
— c L'opinion publique » (p. 247-376) est une analyse détaillée de la
formation de l'opinion, de ses organes, de ses caractères, de son action,
de ses conséquences. — Sous le titre « Illustrations et réflexions i
(p. 377-616) sont reunies une série d'études spéciales : trois exemples
de corruption ou de tyrannie politique (Tammany ring de New- York,
Giis ring de Philadelphie, Kameyanisme de Californie), deux tableaux
I. BUTCE : TBC IHBHtClN COHHOTWEiLTH. it7
dn Bod, la condition des Degrés', la politique étrangère, le sulTrage dea
remmes, los dèfatils et la force de la démocratie américaine. — La der-
nière partie « Infililulions sociales ■ (p. 611-871) décrit le barrean, les
tribunani, les cbemins de fer, le centre financier do Wall Slreet, lea
universités, les églises, la condition des femmes, l'ictluence de la démo-
cratie sor la pensée, les relations avec l'Europe, les résultats de l'absence
de capitale, l'éloquence, le charme et la monotonie de la vio américaine,
le tempérament de l'Ouest. — Les deux derniers chapitres sont consa-
crés à l'avenir politique et social des Ëtats-Unis.
Le plan n'est pas très méthodique ; on a l'impression d'un recueil
d'essais réunis par un lien très lâche, et il ne serait pas difficile de
montrer de nombreuses répétitions. Mais ce procédé d'eiposilioa peu
rigoureuï a peat-étre l'avantage, en laisKantàl'ameurles mouvements
plus libres, de donner à ses descriptions une allure plus naturelle et
plus vive. Chaque chapitre devient une étude indépendante dirigée
par la préoccupation unique d'analyser entièrement un des phénomènes
de la vio américaine et de le faire voir au lecteur sous tous ses aspects.
Le livre de M. Bryce est un de ces ouvrages si rares qu'on estime au
point d'être embarrassé pour en parler. On ne peut guère, tant il
contient de choses, le discuter, car il est toujours bien renseigne' et
bien pensé. Il ne reste qu'à recommander insiamment de le lire, C'est
une lecture indispensable pour quiconque veut connaître la vie politique
et sociale des Étals-Unis; or il n'est guère possible de comprendre la
moDde contemporain si l'on ne connaît la vie de la plus puissante et de
la plus civilisée des nations.
Dans un ouvrage qui louche k tant de questions il serait naturelle-
ment facile de retenir quelques jugements sujets à discussion. Mais des
polémiques de ce genre, où les sentiments subjectifs du critique ont
rorcémenl une grande part, seraient sans intérêt pour les lecteurs de la
Revue historique. En fait, par sa tournure d'esprit logique et rationaliste
et par ses habitudes politiques, libérales et démocratiques, M. Bryce
se nipprocbe tellement des façons de penser des libéraux français que
je suis, à peu près sur toutes les questions, ea communion non seule-
ment de pensée, mais de sentiment, avec lui. Je me borne donc à signaler
les traits par lesquels se marque le plus nettement la supériorité intel-
lectuelle de l'auteur. Tous les vices de méthode auxquels sont exposés
les historiens qui font le tableau d'une société, il a su tes éviter, et je
crois vraiment qu'il eei le seul qui les ait évités tous, — Chez lui pas de
t. Ces trois ctkapîtres oui été ajoulés daas cette derniëre èdilion.
Z. Sur quelques erreuri de ilèlail et quelques fausses interprétations, voir,
dans les PitblicalUmi de l'Académie des sciences polilijues de PkiladàpKie ,
D> 172. l'excelteute élude de M. E. 3. James, doul l'auleur rend d'ailleurs
pleine juslice à la valeur eicepliouDelle du livre de Brjce-, il l'appelle « un
ouvrage unique, • la meilleure dcscriplioa (aeeounf) des instilutions poliliquen
« ^ande nation,
Rbv. HisToa. LXVI. 2- fasc, 87
448 ftULLRTIX HISTORIQUI.
généralisation hâtive ; il a distingué nettement les difléranls groupes
réunis sous le nom commun d'Ëtats-Unis, il a partagé le tenitoire en
cinq régions et il a décrit Tétat social de chacune en prévenant ses \&>
teurs de ne pas étendre les caractères propres de chacune de ces sodéiâ
juxtaposées aux autres sociétés. — Il a résisté à la tentation si forte de
nos jours d'exprimer les phénomènes sociaux en termes biologiques;
il s'est abstenu rigoureusement de la terminologie pseudo-scientifiqiie
et des métaphores de la société-organisme ; et, quand il a traité U
question semi-biologique de Tinfluence du milieu, il Ta fait avec une
précision et une prudence do raisonnement qui l'a préservé de tous les
excès de Tanthropogéographie. — Il a évité aussi la terminologie abstndte
des juristes et a su décrire les faits sans le secours de ces substantifs
abstraits qui mènent si vite à personnifier les abstractions et à leur
attribuer une force propre, il n'emploie que des noms concrets ou col-
lectifs et toujours dans leur sens habituel, en sorte qu'il reste toujoun
intelligible et précis. On voit surtout dans la description des phénomènes
complexes et vivants, tels que la formation de Topinion publique, l'or-
ganisation des partis, le tempérament politique et social de la nation,
avec quelle sûreté et quelle précision il procède. C'est qu'il a Texpérienee
personnelle de la vie politique et sociale et qu'il possède cette puissance
d'analyse psychologique qui est la condition essentielle de toute étude
des sociétés. De là vient aussi qu'il a échappé à ce préjugé contre la
démocratie, presque universel chez les hommes de sa génération. Ne se
payant jamais de mots et ne formulant de jugement qu'après une ana-
lyse psychologique profonde et une synthèse méthodique des phénomènes
analysés, il a vu que la démocratie moderne a pour fondement la liberté
individuelle et la libre discussion et que la force de la majorité ne se
fait pas sentir sous forme de tyrannie. Aussi a-t-il pu exprimer une foi
sincère dans l'avenir de la démocratie américaine.
Gh. Seionobos.
G. DE Grbef. L'évolntion des croyances et des doctrines poli'
tiques. Bruxelles et Paris, Alcan, 4895. In-48, 334 pages.
M. de Grcef, le socialiste bien connu, professeur à l'Université non-
velle de Bruxelles, a réuni deux leçons doctrinales d'ouverture |1&
méthadologic des sciences sociales, les conditions de la démocratie) et
la série de ses articles sur l'Évolution des croyances politiques parus dans
la Revue socialiste.
Cet ouvrage n'a aucun intérêt historique. C'est une histoire de la
civilisation des empires despotiques du Pérou, du Mexique, de l'Egypte
et de l'Ethiopie antique faite au moyen de livres modernes de valeur
très différente, employés sans aucun discernement critique et indiqués
à la tin de chaque chapitre pôle-mêle et sans indication de dates.
U s'agit ici évidemment d'un essai de philosophie de l'histoire. M. de
C. DB GBBEF : l'JVOLDTIOa DES CHOTlnCES.
419
Oreef, une des âmes les plas géDéreuEes du Eociatisœe contemporain,
ne s'esl psa senti à l'atse dans l'inUriirétaiion exclusivement matéria-
liste de l'histoire par les phénomènes économiques. Il a tenu à mon-
trer l'action capitale des croyances et des doctrines politiques sur la
consUtolion des sociétés. Il a commencé son étude par les sociétés où
l'unité des croyances lui a paru élre la plus complète, celles où le sou-
verain est absolu et où la coutume n'est pas encore disculée.
Il est très difTictle de faire ici la critique d'une théorie qui repose
toul entiËre sur la métaphore de la société comparée à un organisme;
je connais des philosophes qui acceptent cette méthode de raisonne-
ment, je ne crois pas qu'elle soit intelligible pourunliistorieu; les faite
«H histoire ne se présentent jamais que sous la forme d'actes indivi-
duels, isolés ou collectifs. M. de Greef au contraire ne voit daos ies
actes humains que les manifestations d'un organisme social. Il déhnit
la politique ; i Le système de représentation et de délibération de la
société par lequel elle détermine sa volonté et transforme celte dernière
en acte > (p. 88) ; te progrès politique est t le perfectionnement des
organes de la triple fonction représentative, délibérante et executive. *
Il ne considère donc que les a phénomènes de représentation, de déli-
bération, de volition et d'exécution ■ des sociétés, non ceux des indi-
vidus, et il les cherche dans les institutions. Ce qui en forme le fon-
dement, ce sont les croyances politiques qui établissent l'unité de
conscience.
M. de Greef pousse sa métaphore au point de considérer les luttes
entre partis d'opinion différente comme des « dédoublements de la per-
sonnalité collective, • t phénomènes pathologiques d comparables à la
maladie individuelle connue sous ce nom. a Alors, dit-il, les partis
s'injurient et se brutalisent comme s'ils ne faisaient point partie de la
même collectivité. > Il serait inutile d'objecter que les nations ies plus
civilisées sont celles où les partis sont les plus nombreux et les plus
actifs et qu'elles se trouvent mieux de leur dédoublement pathologique
que les sociétés traditioaaUstes de leur unité de croyance. Car nous ne
sommes pas ici sur le terrain de l'histoire. Mais on ne voit pas ce que
ces métaphores ajoutent à notre connaissance de l'évolution humaine.
Ch. Sbconobus.
420 EBGDBILS PitlODIQUIS.
RECUEILS PÉRIODIQUES ET SOCIÉTÉS SAVANTES.
1. — Bibliothèque de l'École des chartes. 1897, juillet-août. —
L. Delisle. Notice sur un psautier duxin* siècle appartenant an comte
de Grawford (livre de grand luxe écrit et peint en France au temps de
saint Louis; il appartient à la reine Jeanne de Navarre, fille de Gharlei
le Mauvais et femme de Henri IV d'Angleterre). — Bourbl de la. Rok-
ciÈRE. Un inventaire de bord en 1294 et les origines de la navigation
hanturière (parle surtout des instruments de pilotage qui se trouvaient
à bord : la carte marine et la boussole. Montre que le prétendu Jean
Goya d'Amalû, à qui on attribuait l'invention de la bouasolevers 1300,
n'a jamais existé). — P. Fournier. Les collections canoniques attri-
buées à Yves de Chartres; suite (influence de ces collections). —
H. d'ârbois de JuBAiNviLLE. Notico sur un texte concernant Thistoire
de la Gaule au v* siècle de notre ère (sur une glose d'un vers de
Lucain, I, 435, où les Gévennes sont indiquées comme séparant les
Burgondes des « Galli; » elle a sans doute été écrite vers 473). =
Bibliographie : Sievers, Die politischen Beziehungen Kaiser Ludwigs
des Baiorn zu Frank reicb, 1314-1337 (consciencieux, mais fait sans
critique). — E. Mùller. Senlis et ses environs (intéressant pour les
archéologues). — Jadari, Vieilles rues et vieilles enseignes de Reims.
— y. IJalkin, Les prieurés belges de l'ordre de Gluny; 1" partie : les
prieurés clunisiens de l'ancien diocèse de Liège (bon). — U. Berlièn.
Monaslicon belge (excellent). == Chronique : Confirmation par saint
Louis d'un traité conclu entre le duc de Bretagne et André de Vitré,
juin 1237 (texte nouveau, d'après l'original de la confirmation). —
y. Viard, Une ordonnance de Philippe VI de Valois mal datée (une
lettre pour saint Gilles en Provence, publiée dans les Ordonnances,
t. III, p. 605, a été donnée, non à Pradèro en Armagnac, mais dans la
prairie de Saint- André près d'Aire en Artois).
2. — La Révolution française. 1897, 14 déc. — Aulard. L'his-
toire, d'après xMM. Langlois et Seignobos. — J. Flammermont. Une
nouvelle édition des lettres de Marie-Antoinette (explique pourquoi
M. d'Arneth refusa de communiquer à MM. de Beaucourt ei de la Roche-
teric certaines lettres de Marie- Antoinette, relève dans lenr publication
un certain nombre d'erreurs et montre comment ils auraient pu et dû
s'y prendre pour grossir notablement la correspondance de la reine).—
Debidour. L'expédition de Home et la loi Falloux. — J. Deuus.
Pages et le journal le Cantaliste (ajoute quelques documents nouveaux
à ce qu'avait déjà dit M. A. Brette), — A. Bretib. Journal de l'émo-
tion do Lyon, 29 juia-5 juillet 1769.
BBCOBItFI P^RIODIQneS.
421
S. ^ Rcme d'histoire diplomatique. 1898, n° 1. — Charles
Tbubte. Relations (te Gon^aguo, marquis de Maotoue, avec la conr de
Fran», H95-!526 (met en œuvre des documents copiég à Mantoue par
A. Baschet). — P. Matteb. Les misBione de M. de Persigny à Berlin,
1840-50 (l'ambassade de Persigny en Allemagne ne produisit aucun
rcBullat heureux pour la France ni pour le président, à cause de la
maladresse de l 'ambassadeur). — Dbdouvres. Le Père Joseph diplomate:
le Mercure d'Estat ou Hecueil de divers discours d'Estat, 168i |ces dis-
cours sont cerlainempnt du P. Joseph; ils sont fort importants pour
l'êludo des idées politiques de l'Éminence grise). — Louis Pasbv. Le
voyage de François Vettori, ambassadeur de la République llorentîne,
près de l'empereur Maximilien, 27 juio 1507-13 mars 150B ; liv. IV.
4. —Revue orltlqne d'histoire et de littérature. JS97, n" 49.—
Hamtj. Études historiques et géographiques {recueil fort intéressant où
sont représentés le Spilzberg, le Sénégal, les Moluques, les Carolines,
etc.). — Id. Galerie américaine du musée d'ethnographie au Tracadéro
(eoixaute plancbes renTermant cent soixante-quatorze figures concer-
nant les antiquités de l'Amériquel. — G. Bienaymé. Prii des princi-
paux objets de consommalioti à Paris depuis deux siècles. Le coût de
la vie à Parisà diversesépoques (travaux excellents, reposaaten grande
partie sur tes comptes de l'Hôlel-Dieu). = N" 50. E. Amélineau. Les
nouvelles fouilles d'Abydos, 1896-97 (découvertes i m po riantes ; des
réserves par G. Maspero). — W. Mœller. Lehrbucb der Kirchenge-
acbîclite; 2» édil, remaniée par H. de Schubert (édition aoigneueement
revue et complétée), — Harnack. Ijehrbucb der Dogmengeschichte ;
tome m, 3*édit. (cette édition contient un assez grand nombre d'addi-
tions nouvelles; le Toud n'a pas été modifié). — F. Slxhelin. Gescbichle
der Kleinasiatischen Galater bis sur Erricbtung der rOmîschen Provinz
Asia (excellente dissertation). — Eug. Miinli. La tiare pontificale du vm*
an ivi' siècle (excellent). — E. Lameere. Essai sur l'origine et les attri-
butions de t'audiencier dons les anciens Pays-Bas (utile dépouillement
de documents; la mise en œuvre laisse à désirer). — II. Witle. Zur
Geschichte des Deutschtums im Elsass und im Vogesengeblet (étude
bien dirigée sur l'bistoire de la germanisation de l'Alsace; des consi-
dérations politiques qui manquent d'objectivité et de justesse scienti-
fique). ^ N" 51. Podineiev. La Mandchourie (important). — P. Albert.
Geschichte der Stadt Radolfzell am flodensee (très bonne histoire
locale!, — P. Kalko/f. Die Depeschen desNuuliuB Aleandor von Worm-
ser Reicbslag, 1521 (traduction allemande accompagnée de notes nom-
breuses et substantielles). — A. Pieper. Die pœpstlichen Legaten und
Nuntien in Deutscbland, Frankreicb und Bpanieu seit der Mitte des
XVI Jahrh. (dépouillements considérables; biographie aussi précise
qti 'abondante). — t. Seller. Grundfragen der Reformatîonsgeschichte
(ouvrage de polémique personnelle). — Tliatloc:y et Barabàs. Codes
diplomaticuB comitum de Blagnay (265 documents allant de 1200 -
h 1578). — B. Toth. Les curiosités de l'histoire universelle (en bongivis;
422 EBCUBILS P<RI00IQUB8.
recueil fort intéressant). — Labriola. Essai snr la conception maté-
rialiste de l'histoire (long et important compte-rendn par A.-D. Xéoo-
pol). ^ N<» 52. Hunier, Life of Brian Houghton Hodgson, british rési-
dent at the court of Népal (importante biographie). — BuhU Géographie
der alten Palestina (consciencieux). — /. Jung, Grundrûs der Géogra-
phie Yon Italien und dem Orbis romanus (2* édition améliorée ; mais
la bibliographie est toujours fort incomplète). =: 1898, n» 1. SehœmMOL
Griechische Âlterthûmer, 4* édit. revue par Lipsius, 1. 1 (nouvelle édi-
tion tout à fait mise au courant de la science; elle permet de meiii-
rer les immenses progrès qui ont été accomplis depuis un quart de
siècle dans l'étude des antiquités grecques). — Kaufmann et Bewk,
Akten und Urkunden der Universitœt Frankfurt a. O. (texte du registre
du doyen, 1506-1597). = No 2. Ed. Hahn. Demeter und Baubo (excel-
lent essai d'une théorie sur Torigine de l'agriculture chez les peuples
civilisés). — E. Marcks, Kônigin Elisabeth von England und ihre Zeit
(excellent travail de vulgarisation). — Al, d*Ancana, Federico Gonfalo-
nieri su documenti inediti di archivi publici e privât! (excellent travail
sur un des martyrs du Risorgimento). =: N® 3. Àm. Hauvette. Extraits
de Thucydide (édition assez remarquable). — L, Marcheix, Un parisien
à Rome et à Naples en 1632 (curieux et publié avec science et goût).
= No 4. /. Tapffer, Beitrœge zur Griechischen Alterthumswissenschaft
(intéressant recueil de mémoires composés par un jenne savant mort
en 1895 à l'âge de trente-cinq ans). — Eug, Choisy, La théocratie i
Genève au temps de Galvin (bon). =: N» 5. il. von Hirsch-Gereuth. Sto-
dion zur Geschichte der Kreuzzugsidee nach den Kreuzzïîgen (expose
rhistoire de la politique pontiGcale en ce qui concerne la croisade pen-
dant les pOQtiticats de Grégoire X et de ses successeurs jusqu'à la fin
du xiuo siècle). — Labriola. Essai sur la conception matérialiste de
l'histoire (Seignobos : le matérialisme historique est trop superfîdel et
trop inexact pour fournir une méthode à la science naissante de l'his-
toire, mais il aura fait pour le progrès de l'histoire plus qu'aucun antre
système du xix* siècle).
6. — > Bulletin de Correspondance hellénique. 1896, décembre.
— Paul Tanner Y. Inscriptions de Delphes. Deux fragments concernant
des systèmes d'écriture abrégée. — E. Ardaillon. Rapport sur les fouilles
du port de Délos (ces fouilles ont permis de déterminer exactement la
ligne de l'ancien rivage, les dispositions du port, l'emplacement, la
forme et la construction des jetées, la distribution des magasins; avec
un plan détaillé). — P. JounuBT. Inscriptions métriques d'ApoUino-
polis Magna (gravées sur des stèles conservées au musée de Gixeh). —
Paul Perdrizet. Inscriptions de Delphes (1<» inscription concernant les
fils du roi Odryse Kersébleptès ; 2o décret de proxénie de Néarqne;
3» proxénie pour un Macédonien d'Europos sur l' Axios ; 4« relations de
Delphes avec un roi Odryse du ni« siècle; 5® le proconsul M. Minucius
Rufus, vaimiucur des Gaulois Scordistes et des Thraces en 109). —
G. Millet. Inscriptions byzantines de Trébixonde. — Th. floMOUS.
BBCCBIIS P^BIODIQQRS.
43»
e roi Nahis (rectifie, à l'aide d'un décret de Délos, certaines erreurs,
lias volontaires, des historiens anciecs sur ce tyran). — Tfa.
Reinach. Une crise monéUire au m* siècle de l'ère chrétienne:
inscripliou de Mylasa. — Paul Perdrizbt. Inscriptions de Delphes.
napii<rf]|iEi de villes sur des stèles de proxénie (ce sont des ioscrlptioDS
lOnoriSques décorées de l'emblème ardioairo de la ville à laquelle
Mrtieat le personnage honoré). — W. Dcerppeld. Le thê&tre de Deios
lia scène du théâtre grec (discute et réfute l'opinion exprimée eur ce
Rjet par M. Charoonardl. = Institut de Correspondance hellénique
I signaler dans les compte s- rend us des séances de cet Institut les con-
rences de M. Th. Homolle concernant Delphes : 1° sur le trésor de
(phnos qui, en réalité, est le trésor de Cnide; 'îf sur quelques ex-voto
mvés à Delphes, importants pour la topographie et l'histoire du
nctnaire; 3° sur l'histoire du temple de Delphes; 4° sur les sculptures
Il trésor de Sicyone et le décret des Thurieus; ce dernier est coutem-
1 de la construction du nouveau temple qui fut achevé dans le
r quart du iV siècle; lo temple le plus récent fut dédié eu 84
krès J.-C. Le christianisme s'installa dans le sanctuaire delphique au
P siècle et depuis lors sa destruction s'effectua rapidement). ^ 1897,
Divier-aoùt. A. db Ridoer. Inscriptions de Paros et de Naxos. —
ION- Trouvailles de monnaies du moyen âge à Delphes. — Ch. Fos-
, luBcriptions de Syrie. — Perdrizet et Possev. Voyage dans la
frie du Nord. — Ë. Leorand. Inscriptions de Paphlagonie. — Psa-
ST. Proxènes macédoniens à Delphes, — Dobbusky. Inscriptions et
înts figurés de la Thrace. — P. Jouoobt. Documents ptolé-
aïques (concernant Ptolémée H Soier et la révolte de la Thébaïde).
- Mélanges d*arohéologie et d'histoire. 1897, juill.-déc. —
k Madelin, Les premières applications du concordat dp 1516, d'après
• dossiers du cbdteau Saint-Auge (l'auteur a retrouvé vingt-sept dos-
ne relatifs aux aomiuations de prélats français, entre 1516 et 1521 :
i ces prélats, on trouve encore plus d'abbés que d'êvéques, et
i les abbés plusieurs avaient été d'abord élus, les élections abba-
a ayant été supprimées seulemeut en 1531. Publie le dossier de la
raination d'Eymar Gouffler, abbé de Saint-Denis, à l'abbaye de
jnny; GoufQer était frère de l'amiral de Bonivet}.—J, Gav. Le menas-
' e de Tremiti au xi' siècle, d'après un cartulairc inédit (ce monastère,
|cé dans une petite ile de l'Adriatique, au nord du Gargano, fut flo-
it jusqu'au xiii° siècle. Les chartes du carlulaire se rappoitent
XI" siècle ; elles donnent des détails nouveaux sur les râp-
ais de i'abbaye avec le Mont-Casain et sur l'état politique et social
' me partie de la Pouillc). — P. Lbcacuecx. La première Italien de
Dillaume Grimoard en Italie; juillet-novembre 1352 (publie et corn-
e plusieurs documents relatifs à celte légation, qui fut le début,
I les grandes aiïaires de la papauté, de l'abbé de 9ainl*Germaia-
j&uzerrois, plus lard pape sous le nom d'Urbain V|. — M. Besnier.
■criplions et monuments figurés de Lambëse et d
424 lECUBILS P<EI0DIQUE8.
Mànteybr. Les légendes saintes de Provence et le martyrologe d'Arles*
Toulon, vers 1120 (da silence que garde ce martyrologe an sojet de
Maximin, de Lazare, de Madeleine, Marthe, Sidonie et des Marie, il
résulte que ces légendes n'étaient pas encore officiellement reconnues
en Provence vers 1120; Tunique tradition admise alors était que le pays
avait été évangélisé au i«' siècle par Trophime, disciple immédiat des
apôtres Pierre et Paul).
7. — Revue archéologique. Sept.-oct. — J. Stz. Un lécythe en
argent (trouvé dans la province néerlandaise de Drenthe). — Edm.
Le Blant. Paléographie des inscriptions latines du m* siècle à la fin
du vii«; &n. — L. Le Bas. Voyage archéologique de Ph. Le Bas en
Grèce et en Asie Mineure, du i*^ janvier 1843 au 1*' décembre 1844;
extraits do sa correspondance ; suite en nov.-déc. =: Novembre-décembre.
Gh. Jacquerel. Les ruines de Hatra (ville située au sud de Mossoal;
monuments à décoration imitée de Tart grec). — F. de Mélt. Le c de
monstris » chinois et les bestiaires occidentaux. — R. Gagnât. Revae
des publications épigraphiques relatives à l'antiquité romaine; juillet-
décembre.
8. — Nouvelle Revue historique de droit français et étran-
ger. 1897, sept.-oct. — Paul Gollinet. Deux papyrus gréco-égyptiens
d'Angleterre (traduit et commente : 1® un acte de divorce de l'an 305-
306 après J.-G.; 2® un fragment de jurisconsulte classique). — Edouard
Bbaudouin. Les grands domaines dans l'Empire romain ; suite en nov.-
déc. (importante étude de généralisation). — Prou. La charte de cou-
tumes de Saint-Julien-du-Sault, 1259 (cette charte a fait quelques
emprunts à celle de Lorris et en a subi l'influence. Texte et commen-
taire). = Gomptes-rcndus : Beauchet, Histoire du droit privé de la
République athénienne (ce n'est pas une histoire, mais seulement un
exposé du droit athénien; exposé d'ailleurs remarquable et qui résume
avec science et clarté les documents et les travaux si nombreux qui ont
été publiés sur le sujet. Discussion de plusieurs points particuliers par
R. Dareste). — M. Conrat. Die Ghristenverfolgungen im rômischen
Reiche (excellent; les conclusions ne sont pas neuves, mais le grand
mérite de l'auteur est d'avoir soigneusement distingué les époques). —
Seehokm, The tribal System in Wales (intéressant; mais l'auteur a le
tort de croire particuliers au pays de Galles des faits juridiques qui
sont le résultat des principes généraux admis dans les autres branches
de la famille indo-européenne). — H. Jireêek. Ginquante ans d'activité
littéraire publique (on donne ici la bibliographie complète des œuvres
du grand jurisconsulte tchèque). =: Nov.-déc. A. Lefas. L'adoption
testamentaire à Rome. — Ant. Bodcomont. L'ancienne coutume de
Nivernais (coutume rédigée en 1490; elle a déjà été imprimée trois fois
au xvi» siècle, mais ces éditions sont presque introuvables. Texte assez
différent de la rédaction de 1534). — P.-F. Girard. Los mss. de l'Epi-
tome exactis regibus (signale un nouveau ms. à la bibliothèque Sainte-
Geneviève, n» 2785).
HECDEILS P^BIODIQDES. 425
9. — Revue générale da droit. IS97, DOv.-dêc. — J. BaisBAUD.
De l'utilité de l'étude dp l'histoire du droit (introduction à au Manuel
d^hiatoire du droit français. L'auieur affirme que « l'histoire du droit a
encore besoin d'être défendue contre bien det< préjagés ■). ^= Biblio-
graphie : Besta. L'opéra d'Irnerio (escellente étude critique sur la vie
d'Irnérius et sur les œuvres qu'on peut lui attribuer). — Salvioli. Il
dirclto di guerra in Itatia ail' epoca dei Cooiuai (bon).
10. — Revne biblique Internationale. ISdS, 1" janvier. —
P. LiOBANOB. Les sources du troisième évangile. — P. Schbil, Psaume
de pénitence chaldéen inédit. — P. Batiffol. L'auteur véritable de
r < Epistula ad Zenam et Serenum > du faux saint Justin. — P. Sé-
journé. Fouilles des Anglais à Jérusalem. = 1" avril. M. na Hablek.
La Bible et l'Avesla (date probable de l'Avesta, rapporta probables
entre le zoroaslrisme et la Bible). — P. Baiiffol. Les prétendues
a Odae in scripturas ■ do saint Hippolyte (sont supposées d'après une
mauvaise transcription de l'inscription du Latran). ^^ Compte-rendu :
P. Sckeil. Du travail de de Moor sur la date de la chute de Ninive (tra-
vail d'uD homme incompétent), ^ \" juillet. P. GEHUER-DuRAin). La
basilique du Saint-Sépulcro au temps ilo Conslaniin et an temps des
Croisés. — M. de Voqub. Nouvelle inscription samaritaine d'Amwils.
— M. HrvERNAT. Étude sur les versions coptes de la Bible. — P. La-
enAitaB. Ain Kedeis (remet au point les descriptious fantaisistes de
Trnmbull). = Compte-rendu par le même du livre de Raabe sur Pierre
libère (excellent). = 1" octobre. P. Rose. L'épïtre de saint Jacqaes
est-elle un écrit chrétien ? (réfute le paradoie de Spillaj. — H. Mui-ler,
Discours de Malachie sur le rite des sacriBces. — M. Hyvbbnat. Élude
sur les versions coptes; suite. — P. Scheil. Kodorlabomor dans les
iuscriptiuns chaldéennes. — P. Gbhher-Durand. Ëpigraphie palesti-
nienne (une série de milliaires inédits et d'inscriptions byzantines). —
P. Lagbanoe. De Suez au Sinal (journal d'une exploration archéo-
logique) .
11. — Revue de l'histoire des rellgtons. 1S97, sept.-oct. —
A. Sabatleh. Une nouvelle vie do Jésus |le Jésus de Nazareth par
Alberd Réville; < c'est la première biograpbie scientiSque de Jésus
que la France aura lue >). — ScHBri.. Gboiide textes religieux assyriens.
— Li. Mabiluer. La place du totémisme dans l'évolution religieuse
(à propos du livre do M. Jevons); 1" article; suite en noï.-déc. —
A. RâviLLB. Gn essai de philosophie de l'histoire religieuse; étude sur
r < Introduction à la science de ta religion > par G. -P. Tiele. =^
Comptes-rendus : Gœtî. Geschicbte der Slavenapostel Constantinus und
Methodius (bon exposé des faits). — J.-H. Maronier. Histoire du pro-
testantisme, de la paix de Munster à la Révolution française, 164S-IT89
(bon manuel). — fi. Pariset. L'État et les églises ea Prusse sous Prô-
déric-Guitlaume I", IT13-t710 (important article do RuJ. Reuss, com-
Dlétant l'analyse donnée ici même, LXIV, 343).
426 UC0BII.8 PiUOOIQUBS.
12. -« Reme des Études Juives. T. XXXV, jiiiU.«sept. 4897. —
Th. REmAOH. Josèphe sur Jésus (le passage où Josôphe a parlé de Jésoi
est le seul témoignage non chrétien que l'antiquité nous ait laissé sur
le Christ, car Tacite a copié Joséphe; ce passage est authentique pour
le fond, mais il a été interpolé par un chrétien qui a voulu, à l'aide ds
quelques retouches, transformer le « testimonium de Ghristo • en un
f testimonium pro Ghristo. > Essaie de rétablir le texte original de
rhistorien juif). — L. Blau et J. Lévy. Quelques notes sur Jésus ben
Sirach et son ouvrage. — D. Kautmann. Menahem Azarya da Fano et
sa famille (notes pour la biographie de ce juif du xvi« s., auteur d'une
grande réputation littéraire auprès de ses coreligionnaires). — N. Roo-
BiN. La vie commerciale des Juifs comtadins en Languedoc au xvni* s.;
suite. — G. Bloch. L'opinion publique et les Juifs au xvin« s. en
France (publie un manifeste sur c la nécessité de rappeler les Juifs en
France pour augmenter la population i). = Â part : Jos. LEmuxx.
Assistance publique et privée d'après l'antique législation juive (confé-
rence faite à la Société des Études juives le 29 mai 1897).
13. — Revue de géoin!*aphie. 1897, oct. — F. Fwom. L'ingénieur
Lamblardie, successeur de Perronet à l'École des ponts et chaussées et
fondateur, avec Monge, de l'École des travaux publics ou École polytech-
nique, 1767-1797; fin. — J. Gobcbllb. Formation de la nation française
(analyse fort élogieuse de Touvrage de M. de Mortillet). = Nov. H. Haï*
RISSE. Sébastien Gabot, pilote-major d'Espagne, considéré comme navi-
gateur (établit, d'après des documents conservés aux archives des Lidesi
8ôvillo,quo l'incapacité de Gabot fut cause du désastre qui détruisit la flotte
espagnole envoyée en 1 526 dans les mers de l'Inde. Il faot ajouter que
la direction ordonnée par Gabot à ses navires était contraire aux ins-
tructions qu'il avait reçues). = Décembre. L. Drapbyron. J.-A. Rixxi
Zannoni, géographe italien, 1736-1814 ; son séjour en France (avec une
bibliographie de ses œuvres). — L. Dmisa. Entreprises coloniales de la
Prusse au xvn* s.; suite. = 1898, janv. E. Reglus. Attila de Grérando;
notice nécrologique. — Marcel. Mendafia et la découverte des Bi&r-
quiscs.
14. — Académie des soiences morales et politiqnes. Séances
et travaux. Gompte-rendu. 1897, décembre. — Bardoux. Un girondin :
le comte de Kersaint. — L»EFè\'RS-PoirrALis. Les élections en Hongrie.
— L. WiESENER. Lord Stair et John Law, à propos du Système (le gou-
vernement anglais surveilla de près l'évolution du Système, qui pouvait
lui créer des difficultés politiques et économiques ; à Paris, lord Stair
était résolument hostile à Law; mais à Londres on ne cessa d'agir
et d'écrire, au contraire, dans le sens d'une entente amiable avec l'heu-
reux aventurier). = 1898, janv. G. Picot. Notice historique sur la vie
et les travaux de M. le duc d'Aumale. — M. Blogk. Guillaume-Georges-
Frédéric Roscher; notice nécrologique.
15. -* Société de Tliietoire du protestantisme firançais. Bul-
KBCCBItS PtfBIODIQUiS.
427
I
hislorlque et lilléraire. 1897, 15 déc. — N. Wriss. Notes et docu-
ments eur la Rérorme en Brie, 1518-1516, — In. Documents (I" Une
requête de l'évêque Henri de Gondy réclamant l'exhumation de Barbe
Sanglé, 19 janv. 1606, et un arrêt du Parlement snr cette requête. Arrêt
du Parlement do Paris, du \ oct. 1546, contre les Luthériens de Meaux,
d'après le registre original. Une requête inédite de Bossuet à Louis XTV
contre le culte protestant de Bois-le-Vicomte, 1685. Procès-verbal de
la démolition du temple de NanteuiMès-Meaux. 20 oct. 1685), = 1898,
15 janvier. PorinRUNE-BËaBmAC. En Cévennes en 1690. — J. Gauphès.
L'esprit de réforme avant Lutlier (à propos du livre récent de M. Roc-
rjuain). — H.'V. Ausebt. Etablissement de l'église rërtirmëe de Mâcon
(quelques documents, 1561-1562). — H. Gelim. Lee tombes de Mursay,
sépultures de ta famille d'Aubigoé.
18. — Société des Antiquaires de rOuest. 1897, l« trimestre. —
Eii'D. L'inscription de Pcn-Berland (elle nous révèle un vocable nou-
veau d'Apollon, qui y parait identiSé avec un dieu celtique inconnu).
— Abbé CoLLON. Le trésor des raliqaes de la cathédrale de Poitiers ;
leliques do saint Irènée. — Alfred Babbier. Notes sur les gages et pen-
sions des ofGciers de la vicomte de Chàtellerault en 1429. — Alfrod
R]GR,iBD. Les armoiries de l'Université de Poitiers. ^2» trîm. Bois-
80NNADE. La police municipale à Poitiers au xvii' e. — A. -F. Lièvre.
Anstrapius elles Taifales du Poitou; examen de l'opinion de M, Richard
sur la Theiphalia et le Scllense caslrum Ile Sellense, ou mieux Cellenst
cattrum, est Celle-l'Evécault, qui n'a jamais formé le chef-lieu d'un
évêché occupé par Austrapius, nun plus d'ailleurs que Chaatoceaux.
Celte- l'Ëvécault était simplement le centre des possessions de cet évèquG
'dans une région voisine de Poitiers, au milieu de laquelle se trouve un
village appelé la Tiffaille. C'est sans doute un souvenir de la Tai-
[ïftlie mérovingienne).
Annales de Bretagne, 1897, n
SAKS. Quelques considérations sur Icf
pays guérandais (avec trois cartes). —
gje du cartulaire de Redon; suite au n
Nantes (corrige ce que la chronique de Nantes dit de ce personnage, qui
fat abbé de Redon avant d'être évêqnel. — Comptes-rendus : P. Atibry.
Journal d'un bourgeois de Dinan, 1637-1690. — Les publications his-
toriques de M. le D' Corre (elles se rapportent à l'histoire des corpora-
tions, à la marinfi et aux colonies, à la criminologie, etc.). ^ 1898,
janv., n* ?- M. Marion. Le second vingtième aux états de Bretagne,
rf756-1757 (épisode de la lutte entre l'autorité centrale et les parlements.
[Xie gouvernement d'Aiguillon en Bretagne fut habile et humain, mais
H s'attira de violentes inimitiés en luttant contre les cours souveraines
pour les contraindre d'accepter les impôts exigés par le roi). — J. Le-
uoiHE. La révolte dite du papier timbré ou des bonnets rouges en Bre-
tagne en 1675; ch. vi : la Répression, l'amnistie (politique ferme cl
T.Xm,n>'i. — H. QtiiL-
its mégalithiques du
BoRDEBtE. La chronolo-
F, Lot, Hervi, évéqoe de
428 UCUI1L8 pfelOMQUM.
prudente du duc de CShaulnes; la répression, quoique dnre, ne fut pu
excessive; mais, en évitant de donner aucune suite aux plaintes les
plus légitimes des paysans, le gouvernement eut le tort d'entretenir des
éléments de trouble dans la province. Nombreux documents inédits à
la suite). = Compte-rendu : Abbé Peyron, Documents ponr servir i
l'histoire du clergé et des communautés religieuses dans le Finistère
pendant la Révolution (beaucoup de faits précieux).
18. — Annales de l^st. 4897, octobre. — Duvbrnot. Longwy, de
Louis XIV à la Révolution. — Le peintre J.-J. Walter et sa « Chro-
nique strasbourgeoise, i traduit par Rod. Reuss; suite (bataille de
Turckheim et reprise do TAlsace par les Français, 4674-1675). = Biblio-
graphie : Bonvalot. Histoire du droit et des institutions de la Lorraine
et des Trois-Évéchés, 843-1789 (art. important de Chr. Pfister, qui note
d'assez nombreuses erreurs, un emploi téméraire de chroniques fausses,
mais un travail considérable, des idées personnelles, beaucoup de faits
nouveaux clairement présentés). — Lehr. Les monnaies des landgraves
autrichiens de la Haute- Alsace (bon). =: 1898, janvier. — A. Debidoub.
Le général Fabvier ; suite (Fabvier sur la Bidassoa, au début de la
guerre d'Espagne, en Angleterre et en Belgique ; son départ pour la
Grèce). — J. Kruq-Basse. Histoire du Parlement de Lorraine et de
Barrois; suite : ch. xrv et xv. — Le peintre J.-J. Walter et sa t Chro-
nique strasbourgeoise, i trad. par Rod. Reuss; suite (fin de Tannée
1675, depuis la mort de Turenne). = Bibliographie : Abbé Dacheui.
Fragments des anciennes chroniques d'Alsace; HI : les Chroniques
strasbourgeoises de Jacques Trausch et do Jean Wencker; les Annales
de Sébastien Brant. — Le vieux Mulhouse. Documents d'archives; t.I.
— A. Waltz. Chronik des Golmarer Kaufhauses (excellent). — Bod.
Reuss. Souvenirs alsatiques : Jean-Pierre Massenet, cultivateur à Hei-
ligenstein, député du Bas-Rhin, professeur à l'Académie de Strasbourg
(curieuse biographie d'un homme médiocre).
19. — Revue de FAgenals. 1897, n^ 5. — G. Tholin et Ph. Lauzck.
Le château de Perricard, commune de Montayral. — Abbé Durengues.
Vie de M. Hébert, évoque et comte d' Agen ; suite. — Baronne de Gervadt.
I/O baron Portai; suite. — T. de L. Note sur les Mémoires de Du Caaze
de Nazelles (ces Mémoires, retrouvés par M. Ernest Daudet, seront pro-
chainement publiés). =: N<> 6. G. Tholin et Ph. Ladzun. Le château
d'Estillac, xiii« et xvi« s. — J.-Fr. Bladé. L'évèché des Gascons (entre-
prend de réfuter tout ce qu'a dit Marca de cet évêché, et qui est com-
plètement faux. 1«>' art. oii il est question de deux des ciuq évéques que
l'on attribue à cet évéché : Gombaud et Hugues). — Abbé Dureicgues.
Vie de M. Hébert, évèque-comte d'Agen ; suite (M. Hébert et les affaires
de la constitution Unigenitus). — Nouvelles des affaires de France
(publie un nouveau frai^mont de correspondances adressées au jeune
Henri II, roi de Navarre, sopt.-oct. 1519. Il est de même nature et sans
BECDEIL8 FÉKIODIQCBS.
doute de mâme provenance qu'an aulre fragment publie dans la Biblio-
thique de l'ÊcoU des chartes. 4- série, t, V, p, 3C9|.
3H>. — Dentsche Zeltschrift fBr GeachlchtawiaMnsGhaXt. Neue
Folge, Jahrg. U, Verteljahrshofl 1, avnl-juin 1897. — W. Soboltze.
Le principal, le comilat, la noblesse, au cb. xiii de la Gcrmania de
Tacite (les s priacipeH i sont des cbefs et le droit d'avoir un < comita-
tos t était un privilège de ces chefs; la t aobilitas > désigne, noo une
Doblesse de naissance, mais une aristocFatie sociale dont U situation
était déterminée par la richesse}. — R. Uoltzmanh. Philippe le Bel, roi
de France, et la bulle a Âusculla fili • (la bulle « Deum Urne, • dalée
de Rome le 5 dec. 1301, est un faux labriquè par un homme qui con-
naissait la bulle ■ Ausculta Êli;» ce faussaire est Pierre Flotte, et c'est
la l'auBse bulle qui a été brûlée). — G. Wolf. L'intérim d'Augsbourg.
^ Vierieljabrshefl 2, juill.-sept. W. Soltau. Les « laudationes > chez
les Romains el leur iniluence sur l'an nalisti que. — U. Rresscad. Poar
servir à l'histoire des élections royales en Allemagne depuis le milieu
du 1111" s. jusqu'au milieu du xiv. — Otto Cleuen. Jean de Wesel ; sa
I ne et ses Oiuvres. — F. Kuhze. Uartwig, abbé de Hersfeld, considéré
I comme historien.^ MonalsblicUer, n» 1-2, avril -mai 1897. G. Ssbliqbr.
Aecberches sur l'origine du collège électoral. ^ Comptes-rendus :
W. Beyd. Dibliographie dor Wûrtlembergischen Geschicble. — P. Witt^
tnann. Kurzer Abriss der schwedischen Geschichte (résumé trop bref
pour être utile). — G. Pfeiiichijter. Der Oslgotenltijuig Theodoric der
Grosse und die kaibolische Kirche (travail soigne). = N"* 3-4, Juin-
juiliel. Ratzbl. L'ethnographie el la science hisloriquo en Amérique.
^ Comptes-rendus : 0. Zaekler. Askese und Mônchtum (nouvelle édi-
tion eutièremonl remaniée; important). — 0. Kjsmmtl. Der Werdegang
des deulscheo Volkes; I, daa Miitelalter (travail habile et solide, mais
qui donne un tableau trop raccourci de l'bistoire d'Allemagne). —
H. Sehoh. Beilrœge zur Geschictite der Hobeitsrecbie (1er deutscbea
Kôttigs zur Zeil der erslen Staufer, 1138-1197 (bon). ^ N" 5-(i, aoill-
eepl. H. Rdbffbr. Les Mémoires de Barras. ^Comptes-rendus: A. Jung.
Uas historiscbe Archiv der Stadt Frank/urt-a.-M. — A. Ilalban. Zur
Geschichte des deutscbea Reiches in Podolien, Wolbjnien und der
Ukraine (excellent). — Baumann et Tumbûtt. Quellen zur Geschichte
des Uauses Pitrstemberg, lâl0-l!)59. — A. Heinrich. Wallenstein als
Herzog von Sagan (excellent). — S. ilellmann. Die sogcnannten Memoi-
ren de Grandcbamps, und die sogenaunleu Memoiren des marquis de
Sassenage (montre que ces Mémoires, composés par des adversaires de
la France, tienneul au moins autant du roman que de rtaisloire).
21. — BUtoriache ZeltaobriR. Bd. LXXIX. , Eeft I, — Ben.
NiBSB. Jugement sur l'œuvre d'Alexandre le Grand (combat l'opinion
de Kœrst, reprenant celle de Grote, qu'après les batailles d'Issus el de
tangamela, Alexandre, abandonnant les projets do son père, rêva de
430 RECUEILS PERIODIQUES.
dominer le monde et de faire reconnaître partout sa dÎTinité. En réalité,
Alexandre n'eut qu'un but, de renverser Tempire de Oarins et d'orga-
niser Tempire perse conquis par ses armes). — W. WnncH. La condi-
tion économique des Germains au temps de César (discute la méthode
et certaines opinions de R. Hildebrand dans son livre : Recht und SitU
aufden verschiedenen wirthsckafllichen Kulturstufen). =z Comptes-ren-
dus : Àlf. Vierkundt, Naturvôlker und Kulturvôlker (ouvrage fortement
pensé). — 0. Meltzer. Geschichte der Karthager; t. U (allant de 306 i
218av. J.-C.; traite de Torganisation politique et administrative, expose
les résultats des plus récentes recherches sur le soi de Pantiqae Car-
thage). — A, Stauffer, Zwœlf Gestalten der Glœnzzeit Athens im Zosam-
menhange der Kulturentwickelung (remarquable). — Lœve, Die Reste
der Germanen am Schwarzen Meere (très hasardeux). — M, Spahn,
Yerfassungs-und Wirthschaftsgeschichte des Herzogthums Pommem,
1478-1625 (travail fort incomplet d'un débutant encore inexpérimenté).
— À. Overmann, Grsefiin Mathilde von Tuscien (bon). — Max. Claar.
Die Entwicklung der Venetianischen Verfassung, 1172-1297 (travail
très consciencieux où ne manquent pas cependant les hypothèses sans
fondement). = Heft 2. Jul. Belogh. L'histoire de la Grèce à Tépoque
primitive; l"** art. : ethnographie. — R. Sghroedbr. Les travaux récents
sur l'histoire du droit franc; 2« art. — M. Ritteb. La politique palatine
et l'élection au trône de Bohème en 1619 (résume et discute les rensei-
gnements fournis par les documents déjà publiés). — Karl von Heqsl.
Les coutumes municipales de Sienne au moyen âge (d'après les publi-
cations de Zdekauer). — Erhardt. Condition politique et économique
des Germains au temps de César (proteste contre la méthode de R. Hil-
debrand, qui prétend expliquer la condition économique des Germains
par la comparaison avec d'autres peuples pris au même degré de civi-
lisation. Il ne tient pas compte des sources qui nous montrent dans les
Germains des tribus guerrières et dans leurs princes des chefs guerrierB,
fait qui a exercé une influence capitale sur leur organisation politique).
= Comptes-rendus : B. Croce, Le teorie storiche del Prof. Loria (sans
valeur). — F, Tœnnies. Hobbes' Leben und Lehre (bon). — K. Kautsky.
Die Geschichte des Sozialismus in Ëinzeldarstellungen ; l^^ partie (de
Platon jusqu'aux anabaptistes. Prétentieux, insuffisant, souvent erroné).
— Greenidge. Infamia; its place in roman public and private law
(reprend, avec plus de détails, l'opinion de Savigny). — L. Kcmig, Die
pœpstliche Kammer unter Clemens V und Johann XXII (bon). —
0. Dobenecker. Regesta diplomatica necnon epistolaria historiae Thu-
ringiae, 1120-1152. —il. Sach. Das Herzogthum Schleswig in seincr
ethnographischen und nationalen Entwicklung (consciencieux). ==
Heft 3. R. PoEHLMANN. Los origines du socialisme en Europe; l'* part,
(considérations sur le socialisme dans l'antiquité grecqne). — 0. Hn-
SGHFELD. Decimus Clodius Albinus (biographie très documentée de ce
général romain, qui fut prétendant à l'empire en Gaule et que battit
Septime Sévère). = Comptes-rendus : H. v. Schwerin, Helgolaâd (excel-
lente esquisse historique et géographique). — P. Uehme. Das Lûbecker
Ober-Stadtbucb. — E. Hillîgms. Geschichte fier Lûbcckischen Kirche,
1530-1896 (ce n'est qu'une histoire de l'évéché catholique de Lubeck.
Insuffisant). — S. Wfitke. Studien ûher die Eatwicklung des Bergregals
in Scblesren (excellent). — if. Kiem. Geschichte der Beoediktiner-Abiei
Uuri-Gries. — Diercks. Geschichte Spanieus; Bd. II (très insuffisant).
— Undalrôm. Anteckninger om Gottands modellid (bon). ^ W. Chris-
ttmtn. Unîanskongeme og Hansesiaederue , 1439-1466 (imporUinl).
— Brandrud, Klosterlasselbon. Le nom des Klosteriasse • était le sobri-
quet populaire du jéHUÎte Lauritz Nilsson, qui dirigea une école à Stock-
holm de 1576 à 1580 et qui travailla très activement à ramener la Suède
au caiholicisme). — Y. Nielxen. Aktstykkor veâkommeude stormagternes
missioD UlKjubenhavnog Christiania 1814 (documents importants pour
l'histoire de l'union de la Norvège à la Suède). — Wauwerraans. His-
toira de l'école cartographique belge et anversoise du xvi* siècle (sans
valenrl; l'auteur est absolument incompétent), =:Jahrg. LXXX.Heft 1.
E. BHANDBNDtiEio. Le traité de Ratisboune entre les Habsbourg et Mau-
rice de Saxe en 1546 (publie le texte latin du traité). — C. Mibbt.
IjjnacB de Loyola (appréciatioo sur le caractère et l'œuvre de Loyola, à
propos de l'ouvrage de Goihein). — K. Zeumeh. Wilhelm Watteobach.
— R. Datidsohn. Les registres du trésor des papes au moyen Age out-
ils été conservés? (il y en a au moins des traces). ^ Comptes-rendus :
W. SitgUn. Spruner-Bieglin's Handallas; 1 : Atlas antiquus {cet atlas
a été mis au courant des plus récentes recherches archéologiques). —
Tiel». Geschichte der Religion im Altberthum bis auf Alexauder den
Oroesen; Bd. I (traduction allemande, par Gerich, d'un ouvrage excel-
lent). — B. Langwerlh von Simmem. Die KreisYcrfassung Maximilian'sl
und der Schwasbische Reichskreis in ihrer rechtsgeschicbt lichen Knt-
wicklung bis zum Jahre 1648 (bon). — Lùdemann. Reformation und
Tiuufertbum in ibrem Verhœltniss zum cbristlichen Princip (remar-
quable). — Rud. Schinidt. EinKalviuistals kaiserlicher Fetdmarscholl im
3U jsbr. Kriege (il s'agit de P. Melander, comte de Hoizapfel, sur lequel
l'auteur a réuni d'utiles documents; mais une biographie du général
reste à faire). — W. von Brtinneck. Zur Geschichte des Grundeigenlhums
ïa Ost-und Westpreussen (excellent).
2S. — Hermès. Bd. XXXIII, Heft 3, 1897. — B. Këil. Les comptes
de Delphes (commente le document publié par Bourguet dans le Bull.
de corresp. heltén., 1896, p. 198. Le passage U, 41, ■ Hapà Baisùiu<[i;
'AJ!e[ï]ivJfou *Ap)[iico)>iî, 'Athutoî, AWîopxOî, KsiUifEcvof, isiçot, > est tra-
duit : de la part du roi Alexandre, A, II, A, k, [tous quatre] Delphiens.
Suivent des additions et des corrections aux remarques de Bourguet sur
les délais dans lesquels les comptes devaient être rendus et sur l'organisa-
tion des agents chargés des constructions. La composition du conseil del-
pbique changea de 346 à 334 ; Alexandre se Ql attribuer quatre voix au
lieu des deux de son père, sans doute après la ruine de Thèbes. C'est
sans doute Alexandre qui introduisit dans la formule le BaoïXiOc dont
432 EEGUfiUS PiAlODIQUBS.
Philippe n'avait pas fait usage). — Tli. Mommsbv. Eugippiana. Saappe
contre Knœll (Saappe donne, contre KnœLl, la préférence à la classe des
mss. italiens de la Vita Severini; aussi Mommsen; Tétude des mss.
conservés en Allemagne ne change rien aux résultats acquis). —
F. MuBHZBB. Les fragments de Yalérius Ântias (les Annales d'Antiis
comprenaient 30 livres. Parle des fragments qui en ont été consenrés).
— K.-J. Neum ANN. f Lege pulsus » dans Tacite (Annal. , 3, 24 ; cette
expression se rapporte au bannissement par le jugement d'une « quaei-
tio »). — Ul. WiLGKEN. Tettalos (dans r'ASnv. noXir., 18, 2, les moU«a
Toùc irtp\ *Avaxpe6vta jusqu'à OérroXoc U vecircpoc noXû forment une paren-
thèse. Tettalos est encore trop jeune pour être dit 9iX6|iouooc). — P. Meyes.
Choses romaines en Egypte et en Arabie (!<» L. Mantennius Sabinus et
les autres t praefecti Aegypti i sous Sévère; 2<» les i focariae militum, i
expression technique, depuis la réforme militaire de Septime Sévère,
pour désigner les concubines des soldats; Z^ « praefecti montis Bereni-
cidis, » liste de cinq noms ; 4» le premier gouverneur de la province
d'Arabie, d'après la pierre milliaire publiée par Gagnât, Année épigr.,
1896, n. 135). = Heft 4. G.-G. Brandis. Une lettre du triumvir Marc-
Antoine aux États provinciaux d'Asie (publié par Kenyon, Ckusieal
Review, 1893, p. 476; elle est de l'an 33-32 av. J.-G. Uétablissement da
Koivôv ''Aotoïc est postérieur à la bataille de Philippe et est l'œuvre d'An-
toine; c'est Auguste qui a établi le lien entre le culte des empereurs et
le Kotv6v. De sa transformation sous Trajan). — A. Sghultbic. Les colo-
nies militaires dos Macédoniens (Tidée de ces colonies appartient i
Aloxandro et témoigne du prestige exercé par la Macédoine. Des colo-
nies militaires formées par les Séleucides ; leur organisation munid-
palo). — Th. MoMMSE!!. Consularia (remarques sur les désignations
consulaires do 307 après Jésus -Christ jusqu'au partage de Tempire :
Sévère et Maximin en 305; Dioclêtien, pour la dixième fois, et
Galère, pour la septième, en 308, d'après les listes publiées par
Groutoll et llunt; Acilius Sevorus et Vettius Rufinus en 323; JuÛiis
Amaniius et Hutius Albinus en 345, d'après les papyrus de Vienne,
n*» 247 et 269; Feslus, cousul pour TOccident, et Marcianus, pour
l'Orient, en 17C; Basilius, nommé par Odoacre et reconnu par l'Orient,
est anisul do rOccidonten iSO; Paulinus, dernier consul de l'Occident,
est inst^illé par le roi Athalaric. La repartition des consuls entre les
doux parties de l'empire a olo opérée d'une façon très inégale). —
Kii. ScHWARTZ. Les rràtj: relatifs à la conjuration de Gatilina (critique
los rvoiis do Sallusto, qui a consulté les mémoires de Gicéron; celai
do Tiio-Livo, qu'on poui reconstruire à l'aide de Dion Gassius; celai
do Phiuin]ue, Iviso sur un n^cit dallurc pedantesque fait par an
hommo qui oss^io do combiner Gicéron, Salluste, plusieurs pamphlets;
celui d'.Vppiou, qui est ua roman louddnc:eux|. — E. Zikbarth. Les
doUtours d'aj^n'^s lo droit grec .commente le passage de Platon, Rép-,
p. 745a.; art. trvs dôtaiilê . — L. Mitteis. Les papyrus de Berlin; suite
\pubho plusieurs textes fort importants i. — Th. MoxMsra. Epinikos
..]
RBCCEILS P^BIODIQURS.
433
mmente uno inscription bilingae trouvée par n&mta; en 1S34 ; elle
I de l'année 475-476. Indications biographiques sur EpinikoK, d'après
b auteurs byzantins). — A. Stein. Praefecti Aegypti (cutnplèle et cor-
mémoire de P. Meyer mentionné pluf> huut|, — Jul. Bbloch.
etolica (remarquer à propos des Ricerche itoriche intorno alla Uga eto-
Uca publiées dans la Rivista di storia antica, n, 95).
as. — Jahrbaoher fOp claasische PhUoloele. fid. CLIU, 1896,
Helï 12. — K, Khauth. Pays dOrient disparus; 6» ait. [les districte
financiers de la Perse orientale peuvent être dél«rminès d'après Uéro-
dole, in, S9, d'après la liste des guerriers, VU, 61, et d'après lea ins-
criptions de Darius ; on connaît la situation respective de certains
d'ealre eux. Le méridien de Demawaod, la ligne de faite qui longe
l'Araxe Terek marquent la froDtière uord-est du royaume. Hérodote
place an Dombre dee ilee de la mer Bouge des iles placées à l'emboa-
cbure de l'Araie. Hérodote tient l'Indos-Kura comme étant le cours
supérieur de l'Indos -Indus. L'Inde s'étend du Terek-Araïe jusqu'à
l'Indos-InduB; c'est dans l'intérieur d'une Inde ainsi circonscrite que
se trouvaient les provinces orientales du royaume persiquej.^Bd. CLV,
1B9T, Uelt 4-5. G. Piuëdrici]. Comment Thucydide a composé son His-
toire du PêlopoDÈse; suite (Thucydide a publié tout d'abord, vers 418,
la guerre d'Ârcbidamos, puis celle de Sicile, l'histoire des années 421-
\ib, eu&Q le S" livre. Alors il reprit l'ensemble de son travail pour
refondre dans une composition uoique les parties déjà traitées). —
0. Mëltzer. Topographie de la Carthage punique (analyse el discute
les travaux de Babeion, Gauckler, Vellard, Delattre el F. de Duhn ;
critique l'hypothèse de ce dernier d'après laquelle l'emplacement pri-
mitif de la ville était sur le plateau de la colline de saint Louis). —
W. Hehocus. Sur l'ëdît de Dioclètien (explique certains passages de ce
document à l'aide des ouvrages des glossateurs). ^ Hefl 6. W. Soltad.
Macer ei Tubëron (à côté de Pison el d'Aatias, Tîte-Live, dans la pre-
mière décade, a utilisé Gaius Licinius, Macer et LuciuB Aelius Tubè-
run. Macer a intlueucé Tiie-Live dans un sens hostile aux o Optimales t
et Tubérun en faveur de l'aristocralie modérée. Monlre comment Tite-
Live a combiné ses sources). — K. Lmcas. Socrate et Xénophon;
3» art. [analyse le 4° livre des Mémoires de Xénophon ; ce livre esl une
addition aux Mémoires. Le remaniement le plus récent 3 une tendance
hostile à l'Académie),
3Î4. — PhUologna. Bd. LVI, Heft 1, 1897. — Perd. DoEUMLBe.
Études sur l'histoire des mœurs (1° signification rituelle du uu^ cultes
et antiquités militaires des Doriens; '2<> do l'usage, fréquent chez les
peuples européens, de jeter dans ta mer un objet venant de la patrie
quand on débarquait snr un rivage étranger, etc.). — Itod. Hsrzoo.
'Traductions de noms propres (traductions de noms sémitiques en grec;
l'auteur n'a pas trouvé un seul exemple sûr d'une traduction de noms
égyptiens ca grec; 1° adaptation de noms persans en grec; 2" traduC'
Rkv. HisTOB. LXVI, -l' rASc. 28
434 EECUBILS PâllODlQUBS.
tion et adaptation de noms carthaginois en latin en Afrique ; 3* romi-
nisation de noms ibériques; 4» rapports des noms romains avec tel
noms grecs. Considérations générales sur l*onomatologie). — H. Lun.
Histoire de Corcyre (!• la colonie corinthienne de Gorcyre ftit fondée
trente ans environ après la fondation de Syracuse, 734. Prétend contre
G.-G.-A. Mùller, De republ. Corcyraeorum, 1835, p. 15, qu'en 625, à k
fondation d'Ëpidamne, Gorcyre appartenait déjà à l'empire colonial de
Corynthe. L'inscription 3189, publiée par Kollitz, Grieeh, Insehr., prouve
qu'au temps de Kypselos Gorcyre était déjà sous la dépendance de
Gorinthe. Hypothèses relatives à la chronologie des voyages accomplis
par Timothée et à sa déposition en 373 et 374). — W. Soltatj. L'anna-
liste Pison (Gicéron a suivi Pison dans son De Rep., II, 4-41 et 45-63.
Rapports de Pison avec Tite-Live dans la première décade). — E. Schwb-
OER. La carte du monde et la chorégraphie de l'empereur Auguste; suite
(les divergences qu'on observe entre Pline et Mêla n'empêchent pas
qu'ils aient puisé à une source commune. Il convient d'établir une
comparaison minutieuse de Pline et de Mêla avec ce qui reste de la carte
du monde. De la forme qu'avait probablement la chorographie d'Au-
guste). = Heft 2. P. Meybr. De la terminologie employée dans les
documents égyptiens (commente surtout le terme d'iicCxpuriç, en partico*
lier réicCxpteric xar otxfov àicerrpric). — Rud. Hblm. Fulgentins et le Dt
aetaiibus mundi (le mythographe Fulgentius et l'auteur du De aetatibus
mundi no font qu'un seul et même personnage). — W. Libbekam. I^
c Gurator rei publicae » (ce fonctionnaire apparaît au temps de Trajan;
il était nommé par le gouvernement pour surveiller l'administratioD
générale; en 331, il devint un fonctionnaire municipal. Son importance
fut amoindrie par celle que prit le « defensor > à partir de 364). —
J. Miller. Byzanco est-elle une colonie de Mégare? (c'est probable,
mais d'autres villes encore contribuèrent à la formation de Byzancej.
— II). La colonisation de l'Afrique septentrionale selon Salluste, Jug-,
18 (Hiempsal soutient la parenté des peuples asiatiques et africains à
cause de la ressemblance des Perorsi et des Persae ; Ëliempsal suit Sal-
luste). — J. KiERST. Ptolémée et les Ëphémérides d'Alexandre le Grand
(Arrien n'a pas, comme le prétend Wilcken, Philologus, LUI, 80,
emprunte sa citation des Éphémérides aux mémoires du roi Ptolémée I*'.
D'ailleurs, il est certain que des notes officielles ont été utilisées dans
le récit de la vie d'Alexandre). = Heft 3. E. Samter. Les rites expiatoires
chez les Romains (Th. Mommsen, R. Staatsrecht, 1, 414, dit que la tra-
bœa fut le premier costume militaire des Romains ; non : elle a une
origine sacrale; il faut la comparer à l'usage de la pourpre chez les sol-
dats Spartiates; celui qui endossait l'habit de pourpre se consacrait
symboliquement à TOrcus). — J. KiERST. La correspondance d'Alexandre
le Grand (marque les différences entre Arrien et la correspondance rap-
portée par Plutarque dans le récit de la bataille contre Porus. Arrien
reproduit le témoignage oculaire de Ptolémée. Néanmoins, on ne peat
se déclarer catégoriquement sur l'authenticité des lettres d'Alexandre). —
HECDStLS l'ËBIODtQITBS. 43S
r.SoLTAD. Claudius Quadrigarius (défend, contre Holzapfel et ZiBlinski,
fpinion qu'il avait déjà esprimèe dans eaa livre sur les sources de
!-Livc dans la 3° décade, 1S94; c'est bien la mdmc personne à
pieile se rapportent les citations de Claudius par Tite-Livo et Aulu-
Ûle. Uutre hce Annales, Ctaudlus Quadrigarius a composé un autre
e où il célébrait les Claudius et les Fulviue, ainsi que la Tamille
cipion l'Africain. Tite-Live les a utilisés l'un et l'autre, sans omettre
li Polybe). — J. Kbouaver. Uisloire de la flotte romaioe depuis la
e des Pirates jusqu'à la bataille d'Actium (discuta les chilTres don-
I pour déterminer le nombre des vaisseaux mis en ligne par les
;, chiiïres pour la plupart très exagérés. Discute aussi le chiffre
pages embarqués : il y avait 120 hommes sur une pentère et de
soldats sur une trière). = Heft 4. J. KiCnST. Recberches sur
biagène d'Alexandrie (dans Quinle-Curce, Justin et Pausanias, Tima-
K. de tendance hostile aux Romains, est peut-être l'unique source
J de Trogue-Pompéej .
— RheialBches Muséum tdr Philologie. Neue Folge, Bd. LU,
k i, 1897. — 0. RoBBACB. he ■ Prodigiorum liber » de Julius Obfic.
s (l'auteur n'est pas chrétien, c'est un paien très orthodoxe. Son
livre ne nous est point parvenu sous sa forme primitive ; il appartient
à l'époque d'Hadrien ou des premiers Antûnins. Des moyens dont
on dispose pour la critique du texte et premiers essais de correction).
— J, K^asT. La fondation du culte d'Alexandre et des Ptolémée
en Egypte (le culte de Ptolémée Soter et d'Alexandre le Grand n'a pas
été établi sous Ptolémée Philadelphe; il ne coïncide donc pas avec le
commencement de la prêtrise éponyme d'Alexandre et des 9cal ttiti^al;
c'est ce (jue l'auteur essaie d'établir contre Wilamowitz, Gœtl. gelehrle
Ameigtn, 1894, p. '28, n. I, en s'appuyant sur des documents et des
témoignages littéraires. Alexandre a été adoré à Alexandrie et Ptolé-
mée Soter à Ptolémais comme dieux municipaux. D'aprfes Diodore,
l. XVIII, p. 28, le corps d'Alexandre fut placé par Ptolémée dans on
temple en forme de tombeau à Alexandrie; avec cela concorde le
témoignage de Strabon, XVII, 794, qui ne manque pas de précision,
Au contraire, la tradition de Pausanias ne tient pas debout. M6me le
Paeudo-Callisthène ici n'est pas sans valeur : il dit qu'on avait l'babi-
ludede célébrer à Alexandrie le jour anniversaire de la mort d'Alexandre.
Plus tard, ce culte, sous les Ptolémée, devint de plus en plus égj'p-
lien). — H. Poutow. Contributions delphiques; suite : les Alcméo-
nides à Delphes (l'aide apportée par les Alcméonides à la conetniction
du temple de Delphes ne s'est pas produite aussitôt après la défaite de
Leipsydrion, comme on pourrait le conclure d'un passage d'Hérodote,
V, 62. Aristote, 'M. itoi.. 19, et Philochore, 70, ont suivi Hérodote. Il
est faux que les Alctnéonides aient détourné ou emprunté des sommes
d'argent au trésor du temple). — C. Wachsudth. L'héroon de Thémis-
tocle k Maf>nésie du Méandre (la monnaie publiée par Rboosopoulos
dans les MUih. d. Athen. Institutt, XXI, 21, représente Thémisiocle en
t
M
436 ABCUBILS PIÎ1I0D1QUI8.
héros. Le récit do son suicide est une fable). = Heft 2. L. Jeep. Les
sources de l'histoire d'Orient dans l'antiquité (parle de rËpilomé de
rhistoiro ecclésiastique de Philostorgios, III, 4-11. Les remarques sur
les Iloméritcs et les Axoumitcs en Arabie proviennent d'un manuel de
géographie. Parallélismes avec Agatharchidès et Artémidore dans la
description d'animaux prodigieux. L'identité de Moptoéte et de Sd^ w
tire de Philostorgios. L'indépendance politique des Homérites a per-
sisté jusqu'au début du v« s.; Tauteur a contre lui la lettre même de Tins*
cription axoumite dans Gosmas, Topogr. christ., p. 142, mais cette ins-
cription « prenait de simples désirs pour des réalités §). — Krombholl
Les Assyriaca de Gtêsias, V (compare Justin, I, 1-8, et Diodore, II. La
sourco de Justin donne, sous une forme remaniée, l'introduction des
Assyriaca. Do la division des livres de Gtésias. Il existe d'étroits rap-
ports entre KephuUon et Justin; l'un et l'autre utilisent un remanie-
meut des Assyriaca. La liste des rois d'Assyrie donnée par Gtésias oe
saurait être dressée à l'aide des données chronologiques de Kephalion;
elle n'a pas été faite sur des documents officiels et n'a aucune valeur. Rap-
ports de Gtésias avec Hérodote, Glitarque, Tzetzès, Diodore). — 0. Hn-
scHFELD. L'incendie de Lyon (il a eu lieu en 64 et non 58 ap. J.-G.). ^
A. KccRTE. Sur les fêtes de Dionysos à Athènes (Aïowaia xk hd Xnvaûf;
les I^uceuues sont distinctes ues Anthestéries. Les jeux donnés aux fétef
Lénéonnes ont été de bonne heure transportés au nouveau dcotpav qui,
au v« s. déjà, était installé au pied de l'Acropole). — U. de Prott. Boa-
phonies (la légende de Diomos marque la transformation des dipolies
non sanglantes on un saoritice sanglant. A Athènes, les Bovçdvia ne
sont qu'une partie des Ai;t6Xix. La légende de Sopatros marque l'ori-
giue dos Houphonies; elle n'est pas attique; elle a été portée à Athènes
par IV^rphyro. Les sacriticos de taureaux remplacèrent, à Athènes et eu
lonio, les sacriticos humains do Icpoquo primitive), zz Heft 3. Max
Ihm. Mars Mullo, Mars Vicinnus et les trois pagi des Redones (combat
l'opinion oxpriméo par R. Mowat, Revue celtique, t XVIII, p. 8". Le
« (kagus Garuutonus i ne peut être identifie avec le « pagus Gamote-
nus 0 mentiùuno par Grégoire de Tours, Glor. Conf., 97. Nous connais-
s<.ms maiutonant trois (tagi des Redones : Sextanmandui, Matantes,
Carnutouii. — P. Stunoel. Houphonies (combat l'opinion d'E. de
Prott I. = lloft t. «1. k.cRST. La ligue do Gorinthe (fondée en 337 sous
riiégomonio mact\ionieune ; le tribunal de la ligue n*était pas formé
(Kir lo consoil aniphictyoniquo, mais c*o«t à Gorinthe que le xotv^ t6v
'tlÀV^vw* <r-^£5piov oxoroaii son activité (H)litique et judiciaire. Le «vW-
^ft?> n'otait pas permanent; le nû de Macédoine commandait les forces
do la liguo tant ^K>ur les ontrvprisos oirangères que pour la défense da
pay^. Situaûon juridique des membnes do la ligue; contributions dont
ils son; lonus. Los KtaL< do la ligue n'avaient pas de politique indépen*
danto; loui ;iivord avec le roi do Perse était n^pnte trahison. Relations
dWloxandrx' avtv la liguo; les idée$ et les institutions panhelléniques
qu'oilo r\'pn's<'uuu: :urt'nt sacriôées à la politique de domination oui-
\or^llo of au caractôro divin do la monarchie d'Alexandre).
P^BIODIQCES. 49T
2e. — ZeiUchrin tar romanlsche PhUologl«. Bd. XXI, Heft 3,
1897. — Zenkeh. FolquBt de. Romaoa et Foiquel de Marseille (deux
poèmes récemment publiés par Thomas et atlrihuëe à uq Folquet, saoe
autre désignation, sont de Foiquel de Romaos, qui lêcat de 1170 à
15.13|. — H. Peters. La chronique de Floreffe; suite (publiée par Reif-
Teoberg dans les Mon. pour servir à Vhist. de la prov. de ffamur. 1848,
t. vni, p. 63, moins la premifre partie qui comprend le prologue, et
environ un tiers de l'ouvrage. Publie cette partie d'après le me. de
Bruxelles, B. R. 18064-69). — Todlbh. Bur la vie de saint Martin par
Pean Gatîneau (publii^e récemment par Sœderhjelm pour U biblio-
thèque de la Société lilléraire dp Stuttgart; oiontre que celle édition
fourmille d'erreurs). ^ Ueft 4. Biedbrhann. Additions a la bibliogra-
phie des manuels but la chasse en ancien français, composée par Werth.
27. — ArcUv nir kathoUsches Kirchenrecht. Bd. LXXVU,
Heft 3, 1897. — Stibqler, Les disppnses ecclésiastiques, du ix» siècle
jusqu'à Gratien; suite (étudie les théories présentées sur la dispense
ecclésiastique par Abbon de Fleury, Bonizo do Sutri, Geoffroi de Ven-
dôme, Yves de Chartres; suite dans HeFt4).i=Gomptes-reQdus :G. Pu-
riset. L'État et les Églises en Prusse, 1713-1740 (remarquable, mais
xussi des erreurs). — Pudolphi. Zur Kirchen-Politik Preussena (bon).
= Heft 4. Compte-rendu : Festscbrifl zum elfhundertjebrigeQ Jubi-
)xum des deutschen Campo santo in Rom (cxcel!ent|.
SB. — Studien nnd UinbeUanKen aua dem Benediotiner nnd
dem CUterclenBer-Orden. Jahrg. XVIII, Ilefl 3, 1897. — Veith.
Les martyrologes des Grecs; suite (comment ils nous sont parvenus et
de leur valeur historique). — Pb. Waqnbh. Giilon le Muisi, abbé de
Baiut-Martia de Tournai ; sa vie et ses œavres; suite (utilise les notes
inédites de cet abbé). — P. Lbistle. La science et les arts au monas-
tère bénédictin de Saint-Magnus à Fuessen; suite, 1763-1803. —
P. WrmiAHK. Jobannes Nibling, prieur à Ebrach, et ses cenvrea
(publie quelques notes historiques et des lettres de ce prieur, datées
du commencement du xvi' s.). — GwLi.NnËBoeii. Sources et études
pour servir à l'histoire do l'ordre de Cîteaux au xvt« et au ivli' s. —
Cabmines. Le monastère de Disentis dans les Grisons, depuis la fin du
moyen fl;je jusqu'en 1584.
S9. — Theologlsche Quartalfichrift. Jahrg. LXXIX, 1897,
Hofl 1. — Bludmi. L'Apocalypse et la traduction do livre de Daniel
par Theodotion (la traduclion du livre dé Daniel par les Septante était
déjà hors du commun usage au ii° siècle ; elle avait été remplacée par
une autre qu'utilisa Theodotion quand il revisa la traduction de ce
livre). — ScHAHz. L'absolution des péchés dans l'ancienne Église (dis-
cute les hypothèses récemment émises sur la question de savoir qui
avait le droit de remettre les péchés). — A. Koch. Le système moral
d'Alfonsc de Ltguori d'après ses lettres (il n'a pas été toute sa vie par-
tisan du probabilisme, qu'il a condamné à partir de 1763 jusqu'à sa
438 RBGUBILS P<A10DIQini8.
mort en 1787, il fat partisan de l'Aeqaiprobabilisme). = Compte»-
rendus : Realencyclopsedie fur protestantische Théologie; 3* édit
(important). — F.-J. Kraus. Geschichte der christlichen Kanst (excel-
lent). — HoUweck. Der apostolische Stuhl and Rom (bon). =: Heftl
EuRiNOER. L'état présent de la science dans les études bibliqnes en Ita-
lie. — GiQALSKi. Le pape Urbain n, les simoniaques, les schismatiques
et les hérétiques (combat l'opinion de Mirbt ; le pape n'a pa» considéré
comme dénuées de valeur les consécrations faites ni les sacremeato
administrés par les évéques et prêtres excommuniés). = Heft 3.
S. Wbbbr. La c Réfutation de Thérésie t par l'Arménien Eznik (Eznik
de Kolb , apologiste arménien , est le même qu'Ëznik , évéque de
Bagrewand, qui composa cette Réfutation vers 441-449). = Comptes-
rendus : Mirbt. Quellen zur Geschichte des Papstthums (bon). — Kunu,
Marcus Eremita (important). — Brûck. Geschichte der katholischen
Kirche im xix Jahrh. Bd. III (n'est pas impartial). — Kirsch. Die
Finanz-Yerwaltung des Gardinal-Gollegiums im xm u. xiv Jahrh.
(important). — Sellin. Beitrœge zur israelitischen und jûdlschen Reli-
gions-Geschichte. I (excellent). — Alker, Die segyptische Chronologie
im Einklang mit der biblischen (bon). — Schneider. Fontes juris eccle-
siastici novissimi (important). — Hommel. Die alt-israelitische Ueber-
lieferung in epigraphischer Beleuchtung (excellent).
80. — Theologische Studien nnd KriUken. Jabrg. 1897, Heft i.
— Drbscher. La deuxième épître de saint Paul aux Corinthiens et ce
qui s'était passé à Gorinthe depuis la première épitre (important). —
H. Becker. Les ordinations de prêtres évangéliques au c gymnasium
illustre » de Zerbst par le superintendant W. Amling, 1578-1606 (impor-
tant pour l'histoire des conflits religieux dans le sein de l'Église évan-
gélique de l'Allemagne). — Knaake. Remarques sur la correspondance
de Luther et de Mélanchthon. — Enoers. Luther était-il à Grimma
le 24 février 1539? (non). :=z Heft 2. Clemen. Gomment se suivent les
principales lettres de saint Paul? — G. Bossert. La c Wartburg-Po»-
tille » de Luther (étude sur ce recueil de sermons, importante pour
l'histoire de la vie et des idées de Luther en 1521). — J. Dr^sekb. La
question Dionysienne (en 1895, J. Btiglmayr avait émis l'opinion qne
les écrits du pseudo-Denys ne pouvaient avoir été composés avant bO0\
montre, au contraire, qu'ils remontent au rv« s.). =:Heft 3. Tschackbot.
Le récit de Justus Jonas sur l'entrée de Luther au couvent en 1505
(texte de ce récit inédit). — lo. Les sources pour Thistoire de la Réforme
luthérienne réunies par Johann Aurifaber (ce recueil doit être consulté
avec circonspection). — Haussleiter. Les thèses pour la dispute de
Mélanchthon le 16 nov. 1538. — Burkharot. Les persécutions des Juifs
dans la Saxe électorale depuis 1536. z= Heft 4. O. Albreght. De récrit
de Luther sur la nécessité d'établir des écoles savantes, 1524 (commen*
taire très détaillé; détails importants sur l'état de renseignement à
cotte époque). — Samuel Berger. Les leçons de Mélanchthon sur This-
toire universelle (détails intéressants sur un ms. jusqu'ici inconna de
BBCDEILS P^BlODlgiIBB.
^se
ces leçons). — Bbatke. < Evn, • poème de Mclanchthon. — Ci.guen.
Mélanges sur l'histoire de la ReforroB (documents gur l'histoire du col-
loque teaa à RatisboQQe, en 1541, entre les thèologieuB proiestauts et
catholiques; texte d'uoe ordonnance municipale de Willenherg en
1522, eLc.j. — KixsTtiN. Le tombeau de Lulher à Willenberg (il a été
ouvert en 1892 et l'on y a retrouvé les ossements de Lalher).
31. — Beitreege ssnr Geschlcbte dep dentschen Spracbe ond
Llteratur. Bd. XXH, Ueft 2, 1897. — H.-C. Boeb. La légende
héroïque du Danemark [l'Âsmandar Saga a. été interpolée et augmen-
tée. Montre comment ont été peu à peu constituées et transformées les
légendes de Halfdan, de Belgi et de Hagbadr). ^ Hell Z. SrttenuEna.
En quelle année est mort Ulfilas, l'evéque des Goths? {en 383; l'auteur
signale dans le code Théodosien 16, 5, Il et 12, deux diplômes impé-
riaux ijai se rapportent à l'histoire des conQits ecclésiastiques ea cette
annéel, — Jostes. L'erianisme d'Ultilas (défend, contre KautTmann,
l'hypothèse qu'il avait émise antérieurement sur !a situatiou d'L'lljlas
dans les partis ecclésiastiques de son temps).
32. — Jahrbnch des k. deutschen arcbreologischen Instituts,
Bd. XII, Heft 1, 1897. — Dbaqënoohff. Deux peintures sur marbrerie
l'ancienne Attique (1° d'un disque de marbre qui est conservé au musée
national d'Athènes. Il représente le médecin Aineios, qu'il ne faut pas
confondre avec l'Aineios nommé par Galien, Xn, 589. La peinture
date d'environ 525 ou 500. Aineios est de la famille des Âsclépiades de
CobI. — In. L'archéologie dans la Russie méridionale {parle des collec-
tions réunies s Odessa, Kichenef, Cherson, Bébastopol, Kertch|. —
H. Lebneb. Le») collections archéologiques de l' Allemagne occidentale.
— HiLLER DE G^BTRiNOEN. FouiUcs opérées à Théra. ^ Hefi 2.
G. Kieute. Une peinture murale de Vuici servant de document pour
l'histoire des rois de Rome (cette peinture est de la première moitié
du iv° siècle; le morceau principal représente une armée étrusque pre-
nant Rome dans une action où Tarquin l'Ancien trouve la mort. Le
fait qui amena cet heureux coup de main est la capture par les Romains
du chef étrusque Caele Vipinas. Le récit de Claude, sur les tables de
Lyon, est un compromis entre la légende romaine et la tradition
étrusque. La famille étrusque des Trachnas, qui fut ensevelie dans le
tombeau de Caere, n'a rien à voir avec les Tarquin. C'est à Rome
même que Maslarna, chef de mercenaires, commença de s'élever). —
Trouvailles archéologiques en 1896 (fouilles exécutées à Priène; à
Théra, en Locride, en Étolie et en Acarnanip, a Delphes).
33. — Ultthellnngen des b, dentacben archaBologlaoben Ids-
tttnts. Rœmiacha Abtheilung. Bd, XII, Heft 1, 1837. — M. Siebouho.
Fabriques italiennes de vases mégariens (marques des fabricants; vases
fabriqués sans marques. Origines de l'industrie d'Arezzo). — E. Lcbwt.
Scopas le Jeune et la statue d'Hercule (commente l'inscription expli-
par Petersen dans Ueft XI, p. 99. It ne faut pas confondre ce
440 EBCUBIL8 P<AI001QUB8.
Scopas avec celui des inscriptions détiennes; il a été mentionné par
Pline, N. H., 34, 86. Il ne vivait pas après le iii* siècle. L'Hercule ds
musée Ghiaramonti est sans doute l'œuvre de Scopas le Jeune). —
W. ÂMBLDNG. Statues transformées en figures de saints (parle du saiot
Sébastien qui est dans Téglise de Sainte- Agnès à Rome; le torse eit
celui d'un Jupiter ou d'un empereur assis. La tête de saint Joseph i
San-Giuseppe est un portrait d'Ântonin le Pieux). — M. Rostowzbw.
*Âiro<JT6Xiov (r ^Aicoox6Xtov (ncoictirrov t^ *Apa6apx^a n*est pas identique avec
le a Vectigal Alabarchiae > du Gode. La taxe était payée pour la pro-
tection que TArabarchie recevait du préfet des caravanes. Cf. Pliaden
Pétrie et Hogarth, Koptos, p. 27, pi. xxvu et xxvm).
34. — Untersachongen car deatschen Staats-and Rechtsge-
BOhichte. Heft 52, 1897. — Lieseqanq. Les villes du bas Rhin, surtout
au moyen âge (institutions municipales deGlèves).=:Heft&3. Doiceibb.
Les papes, juges des rois d'Allemagne, du milieu du xi* s. jusqu'à la
fin du XIII* (important pour l'histoire des institutions de TAllemagaeet
de l'influence pontificale en Allemagne à cette époque). = Heft 54.
M. HuBER. Les « Geraeinderschaften v de la Suisse (des formes de la
propriété commune; leur origine et leur développement depuis le moyen
âge, leur diffusion et leur état actuel).
35. — Zeitschrift fiir deuiBches Alterthnm and dentsche Lit-
teratur. Bd. XXI, Heft 3, 1897. — A. Schulte. Une nouvelle hypo-
thèse sur la patrie du poète Hartmann von Aue (Hartmann, mort
en 1220, vécut sans doute à Eglisau, au service des seigneurs de Ten-
gen. Recherches généalogiques sur les seigneurs d'Eglisau, de Wes-
pershûhl et de Tengon). — Rcethe. La famille noble d'Eschenbach en
Franconie au xiii* et au xn« s. (relativement au poète Wolfram d'Es-
chenbach). = Comptes-rendus : Heitner, Bericht liber die Erforschung
dos obergermanisch-n'etischen Limes (excellent; Kossinna explique
l'étymologie du mot c Pfahlgraben »). — Golther, Handbuch der germa-
nischen Mythologie (peu de nouveau). =: Heft 4. Nieoner. La mort do
dieu Baldr (recherches approfondies sur les différentes versions da
mythe Scandinave de la mort de Baldr et sur l'histoire de ce mythe an
X* et au xp s.). — Von Grienberoeh. Une prière à la nuit en ancien
allemand (commentaire important pour la mythologie germanique). =
Comptes-rendus : Thoroddseri'Gebhardt, Geschichte der islsendiscben
Géographie. Bd. I (important). — Deutsche Chroniken und andere
Gcschichtsbûcher des Mittelalters. Bd. VUI (important. Sources et
patrie du lied de Saint-Anno).
36. — Zeitschrift fiir die gesamte Staats^sirlsseiiscliaft.
Jahrg. LUI, Heft 4, 1897. — Grupp. I^es origines du capitalisme au
moyen âge. — Rodinson. Le fédéralisme.
37. — ZeitschHft fiir Kultargeschichte. Bd. IV, Heft i-5, 1897.
— G. Guupp. T/Cs orij^'ines de la monnaie (rien de nouveau). — C. vos
RozYCKi. L'humanisme on Pologne (article approfondi et important.
OECCEILS pJaioDidUBs. 4A4
I débuts de l'humanismo ea Pologne se ratlachent au concile de
lonetauce; il y a enfoncé de profondes taciDes au xv< el au xvi' s., et
conduit i. DDe importante floraison de la littérature nèo-latiae). —
Bdqkhahdt. Comment on 6t la conduite à l'arclievêque de Mayence,
Anselme- François, à partir de la frontière heaso-thuringienne, à tra-
vers le territoire de la Saxe électorale, eu 16S0 {publie une lettre de
1660 qui donne les détails les plus circonstanciés sur les formes et les
cérémonies de cette conduite). — C. Menke. La baloille du bouleau
(abondants détails sur l'idée, fort répandue encore aujourd'hui en
Westphalie, qu'une bataille décisive sera livrée prés d'un bouleau ; elle
se rattache k la légende de la résurrection de l'empereur Frédéric U ou
de Barberousse). — C. Auui. La campagne de presse en Allemagne
en 18*8-49; suite (extraits de journaux, pamphlets et autres produc-
tions littéraires, qui montrent les dilTéreate courants de l'opinion
publique). = Comptes-rendus : WiVJft. Geschichte des Geldes (bon). —
Boas. Gcschichte des cerzllichen Standes uod der medicinischen Wis-
senschaften (boni. — Osborn. Die Teufels-Litteratur des xvi Jahrh.
(intéressant). — Liehe. Das Kriegwesen der Stadt Erfurt (excellent). —
Weddigen. Westfalen (bon).— G.-A. von Maivenledl. Urkundenbuch
zar Gescbichte des Geschlechles von Oppen (important). — E. Wotff.
Die Stellung voa Gotb^ched im deutschen Ditdungsleben (boni. —
Koichwitt. Franzûsîsche Volks-Stimraungen wœhrend des Urieges
1870-71 (bou). — Bibliographie der Culturgeschichte fQr das erste
Halhjabr 1896 (art. très détaillé, qui comprend aussi les revues). =
Ei^.iïDzungsheft (Beitrsge zur Kulturgeschichte, Hefl 4). J. Meieb.
L'émeute des étudiants à Halle en 1733 (suscitée par des luttes avec la
garnison prussienne. Utilise le ms. d'un étudiant de Halle, qui est
conservé à la bibliothèque de Bamberg). — C. Sckodoeeupf. Ud poème
gatirique sur l'inauguration de l'Université de Halle en 1694. =:Bd, V,
^^^[t 1-3. — F. DE KnONRS. Les années de jeunesse du baron W. de
^^Pawata, 1573-1604 (ses études, ses voyages, sa conversion au catboli-
^Hnme). — Rîchard-M. Mbïeh. Histoire de la donation (l'époque primi-
^^ve ne connaissait pas la donation pure, irrévocable, mais seulement
trois sens très voisins, d'où est sortie en partie la signification de la
donation pure; ce sont ceux de prêter, d'acheter, de partager; autre-
pient dit, toute douaiion était alors révocable on, si elle était irrévo-
ible, fondée sur une obligation de l'une ou de l'autre partie. Même
gBiim6ne du moyen âge n'est pas une donation pure; c'est la mise en
ratique d'une obligation. Le roi, le seigneur, le père qui fait une dona-
i, partage en réalité ce qu'il est obligé de partager comme adminis-
Ikteur de la possession commune. Le sens moderne de donation repose
r l'idée qu'on peut disposer absolument de la propriété, idée inconnue
Kl'époque primitive). — A. Kcebealin. Comptes de voyage et relation
mbassude do !.. d'Eglolfslein, 1499 (il fut envoyé par l'évèque de
ur ie Fthin et aux Pays-Bas, à la cour du roi Maximilîeo 1"').
»KavLL. Description poétique de la saline d'Âuesee en Styrie, 1595
442 UCUSIL8 P<AIODIQUBS.
(avec d'utiles remarques sar le travail minier an moyen âge). —
F.-W.-E. RoTH. Histoire de la civilisation dans la vallée du Rhin;
{•' article (statistique de la population dans les localités aujonrd'hoi
prussiennes d*Eltville et de Rûdesheim ; impôts et dîmes^ revenus des
monastères et des paroisses^ etc.). = Comptes-rendus : Von WretaMo.
Das œsterreichische Marschall-Amt (excellent). — Eriehsan. Das theo-
logische Studien-Stift Ck)llegium Wilhelmitanum in Btrassborg, 1544-
1894 (bon).
38. — PreusBlBche JahrbAcher. Ed. LXXXIX, Heft 1, 1897.
— H. Oncken. De la plus récente manière d*écrire Thistoire (montre
comment a été fabriqué le t. Y de THistoire d'Allemagne de Lam«
precht). =: Heft 2. G. Adam. Situation des états et des professions en
Prusse à Fégard du mouvement national de 1848. — P. SmsoR. Le car-
dinal Stanislas Hosius, évèque d*£rmland, 1504-79 (sa biographie; son
activité religieuse et politique. Il a livré la Prusse évangélique à la
Pologne et à TÉglise catholique; c'était un personnage très influent
dont rhistoire ne pourra de longtemps encore s'empêcher de parler avec
passion). — LAMPascHT. Réplique à Tarticle d*Oncken. = Compte-
rendu : A us Polens und Kurlands letzten Tagen. Mémoires des Baron
Garl-Henri Heyking, 1752-1796 (important). = Heft 3, 1897. P. Frade»-
sTiEDT. Mendicité et vagabondage en Silésie, du xvi* jusqu'au xvui* s.
= Compte-rendu : 0. Lorenz, Die materialistische Gescbichts-Auffas-
sung (excellent). = Bd. XC, Heft 1. Eb. Gothein, H. Dblbbuegk. U Al-
lemagne et Tultramontanisme (analyse et critique de l'ouvrage de Tex-
jésuite comte Paul de Hœnsbrœch, Der Ultramontanismus). — Alf.
Heubaum. Sœren Kierkegaard (biographie de Kierkegaard; ses idées
sur la réforme religieuse, morale et sociale). — P. Rohrbach. Touran
et Arménie; 4« art. (topographie et ethnographie de TArménie; son
caractère national, son histoire); 5« art. dans Heft 2. — Pahohicus.
Politique d'administration nationale (expose la politique de l'État hon-
grois en ce qui concerne la compression des éléments ethniques alle-
mands, slaves et roumains en Hongrie, et indique comment s'y prendre
avec la population polonaise de la Prusse). := Heft 2. C. Buechbr. La
situation économique des civilisations primitives (chapitre, moins les
preuves et les notes, de la seconde édition, qui paraîtra bientôt, de Die
Entstehung der Volkswirthschaft; il est consacré à cette étape de la civi-
lisation que l'auteur appelle « la recherche individuelle des moyens de
subsistance v et qu'il retrouve chez tous les peuples). — Comte Paol
DE HocNSBRoccH. L'Allemagne et l'ultramontanisme (réponse à l'art, de
H. Delbrueck cité plus haut, et réplique de celui-ci).
39. — Bayerisohe Akademle der "Wlssenschaften. Sitzungs-
berichte der philosophisch-philologischen und historischen Classe.
1897, Heft 3. — Hefker-Altenegk. Les tablettes de cire au moyen âge
(résumé). — Heigbl. Les rapports de la France et de l'Autriche lors du
coup d'ÉUt en Pologne du 3 mai 1791. — W. Krumbagher. Kasii
BECVIItB riBfOffFQDRS. 44 S
me auteur célèbre du u° s.; ello composa des chanLs d'i'glise, des
K^tlgraoïineB et des Sûatencos. Sa biographie; publie quelques-uns do
ses poèmes. A noWr dans ses épigrammes la liaîne et le mépris qu'elle
proresse contre la nation arménienne). — In. Une nouvelle biograpliie
du chroaiiiueurTLéopbaaeCocressor (conservée dans le ms. Synod. 183
de la bibliothèque du synode de Moscou ; elle est anonyme. C'est un
remaniement abrégé de la biographie encore inédite de Tbéophune que
composa le patriarche Métbodius et a peu de valeur historique. Publie
le texte avec ua commentaire). — FuhtwjEnbler. Un bas-relief attique
représentant un festin funéraire |Zeus y est appelé IniT^ia; xa\ fiXiot;
sa mère : Pbilia; sa femme : Agathe Ty'^'iê. Culte et noms des divi-
nités cbtoniennes en Attique). — Sigm. Ribzler. Le carme P. Domi-
nicus a Jesn-Maria et le conseil de guerre impérial avant la bataille
lie la Montagne- Blanche en 16^0 (c'est lui qui, par ses paroles euQam-
mées, décida le général Bucquoy à attaquer l'armée bohémlenno:
celte attitude, qu'on avait révoquée en doute, est attesléo par des docu-
ments inéditsi.
40. — K. PreuBsiache Ahademle der vrisBenBChaften mn Ber-
Un. SilïuORsberichtc. 1897, Stùck 36-37. — Wattbnbagh. Les • Quiri-
nalia » de Mélellus de Tcgernsee (poème intéressant pour l'histoire du
monastère de Tegprnsee, composé au milieu du xn' s. tl avait déjà été
imprimé par Canisius; nouvelle édition d'après nu ms. d'Admont plus
correct et plus complet. Anecdotes curieuses < de intquitate juJicum
et advocatorum. i Le ms. d'Admont est sans doute l'autographe m6me
du leicte remanié des > Quirinalia •). ^ Stitck 38-39. Klobtëbuanh.
La liste des écrits d'Origène dans la lettre de saint Jérdme à Paula
(eonoue jusqu'ici par un ms. d'Arras; l'auteur en a retrouvé deux
antres, à Paris et k Bruxelles, et donné une édition critique du texte.
Le catalogue de saint Jérôme a sans doute pour base le Pampbilus-
BasËbe, mais saint Jérôme contient des additions et corrections nom-
breuses). ^ BtiJck 41. Bagbau. Une chronique arabe de Zanzibar |com>
poGée dans le second quart du xvni* s.; important pour l'histoire de
i'islamiame-lbadi tique et de sa propagation).
41. — JabPbQcher der k. Académie gemelanfitzlser Wla-
■enschaftea zn Erfort. Noue Folfue. Hefl 22, 1890. — ZscHiKseiie.
Sanctuaires païens en Thuringe. — Bbode. L'armée suédoise après la
paix de Prague et le supplice du colonel Joachim Friedricb de Secken-
dorff (montre la désorganisation de l'armée suédoise en Allemagne
après 1633; un trait caractéristique est la conduite de ce colonel qui,
en 1642, songea à passer du service dp la Suède à celui de l'empereur,
mais qui fut découvert et décapité). — A. HtaiiiANn. Hiab)ire du
Miroir de Saxe. — F. Scbbbibbr. Les recherches les plus récentes sur
le Limes romain entre le Mein et le Ncckar. ~ Loru. Bu|iervliUons an
xvi* et au Kvii* s.
- K. G«Mltocbaft der Wlsaonscluiftca m Oattlncsa.
444 EBCUBILS P|(aI001QUI8.
Philologisch-historische Classe. Abbandlangen. N. F. Bd. I> 1896, n* 1.
— P. Kehr. Un document romain sar papyras aux archives de Mar-
bourg (avec trois fac-similés et deux planches. Les archives de Biar-
bourg conservent quatre fragments de papyrus provenant de Tabbaye
de Hersfeld; ce sont des fragments d'une t carta emphyteusis •
romaine du x* s., d'un « libellas tertii generis, i ou contrat de fermage
héréditaire, par lequel un fonds de terre est donné au fermier pour trois
générations. On y voit que Tabbaye de Hersfeld avait à cette époque
des fonds de terre à Rome. Détails sur récriture des chartes privées à
Rome et des bulles pontificales; recherches sur Torganisation des
c tabelliones > romains). = N^ 2. W. Meybr. Les recueils de propos
de table de Luther formés par Lauterbach et Aurifaber (sources et
valeur de ces recueils ; on y constate de graves lacunes et Ton doit les
utiliser avec précaution). ^ N* 4. J. Wellhausen. Le Josippus arabe
(extrait d'une traduction en arabe du t Livre des Machabées de Josip-
pus ou Joseph ben Gorion ; recherches sur les sources et la valeur de
cet ouvrage). = N» 3, 1897. Â. Schulten. I^a c Ijex Manciana, > règle-
ment pour les domaines africains (nouvelle édition d'après un estam-
page et une photographie, avec un commentaire très détaillé qui traite
surtout l'histoire des dispositions législatives en vigueur sous Tempire
romain en ce qui concerne le fermage des domaines agricoles).
43. — Berichte des freien deutschen Hochstilts sa Frank-
ftot-am-Main. Neue Folge. Bd. XIII, Heft 1, 1897. — Ziehen. Le
musée de Gherchell (analyse élogieuse du t. V des Musées d'Afrique). =
Heft 2. Œlsnbr. Le nom de saint Boniface (le missionnaire Vynfreth
reçut le nom de Bonifatius en 719 pendant son séjour à Rome; en lui
donnant ce nom, Ton n'a pas songé à ce qu'il pouvait signifier, car
c'était un nom de saint souvent employé). =: Heft 3-4. Ltbrmann. La
Rcvellière-Lepeaux, membre du Directoire (d'après ses Mémoires et
ceux de Barras).
44. — DioBceBanarchlT von Schixraben. Jabrg. XV, n» 10, 1897.
— Stenqble. Le monastère de religieuses franciscaines de Mœggingen,
du XIII» au xviiio s. — Begk. Introduction de la Réforme luthérienne dans
le Vorariberg. — Brinzinger. Histoire du monastère augustin d'Obem-
dorf sur le Neckar, 1557-1806; suite au n® 11. — N. Paulus. Sermons
contre les sorcières au xvi« s. à Wittemberg. — Begk. Un témoignage
contemporain sur la Saint-Barthélémy (Albert de Baldinger, patricien
d'Uim, était alors à Paris et assista au massacre des Huguenots. Texte
de son récit). z= N^ 11. Memoriale San Ulricanum; sectio U (liste des
productions littéraires dues aux moines bénédictins de Saint-Ulrich, à
Augsbourg, au xvii« s., d'après des documents inédits) ; suite au n^lS.
— Th. ScHCEN. Les possessions des monastères de la ville libre de Reut-
lingen; suite au n» 12. =: N® 12. N. Paulus. J. Gaudentius Anhaiiser
(notable théologien catholique de Wurtemberg au xvi« s.).
45. — Forflohimgen sur Kultar-und Litteratnrgeschiohte
BBCUSILS pfRIODIQlIBS.
M»
Bayeras. Buch IV, 1696. — S. Gurnthe». Jacques Ziegler, géographe
ut matliémalicien bavarois, fW0-1&t<J (biographie; critlqui> de fcb
importants travaux sur la géographie de la Scandinavie et des régiouB
orientales de la Baltique). — P. -S. Rbauss. Mentions de la Bavière
duns les chanls populaires des Slaves du 8ud (l'un d'eux se rapporta
au siège de Vienne ea 1683). — Comte Du Mouun-Ëckhabt. Munich et
Vienne; étude sur l'histoire du mouvement philosophique en Bavière,
de IBOO à 1805 (élude approfuudie sur la politique religieuse de la
Bavière depuis ravèuement de Maximilien I", sous le ministère de
Montgelas, De l'oppoEition que fit l'Autriche aux sécularisai ion s exé'
culées en Bavière el des négociations qu'elle poursuivit à. ce sujet). ^
Budi V, 1897. L. Geioer. Lettres bavaroises inédites (écrites par divers
savants bavarois à la fin du ivni' s.; intéressant pour l'histoire de la
vie liiiéraire à celte époque), — Comte De MoDum-EcKHABr. Une apo-
logie (biographie de Jos. UUscbneider, homme d'État bavarois de la fin
du ivm' s.; ses rapports avec l'illuminisme et avec le parti jacobin en
Bavière vers l'an 180O. On a prétendu qu'Ulzschneider s'était mis à la
tôle de ces jacobins el qu'il avait aongé à se faire le présideni d'une
république bavaroise; c'est complèleraenl faux). — C. de Reinhabd-
Uqo esquisse de l'histoire de Bavière en 1627 (analyse et
iqne le traité de Nicolaus Bellus, intitulé : i Œslreicbiscber Lor-
■erkranz, ■ qui contient un récit détaillé de l'histoire bavaroise).
' 46. — Gesctiichtsblntter far Stadt aad Land Uagdeburg.
]abrg. XX.XII. llel't 1, 181:17. — NEuaAUER. Les registres des délibéra-
Ions du conseil municipal d'Âken; fia, I'ia7.15à5. — G, Stobdb. La
'justice à Magdebourg au ini' s. (les différents tribunaux qui rendaient
ta justice). — G. UsaTEL. Compte des dépenses faites pour le séjour de
l'archevêque Sigismond aux élats provinciaux de Galbe en 1564. —
G, WiTTicu. Extraits des papiers inédits de Cbrislian-GuillaDme de
Brandebourg, administrateur de l'archevêché de Magdebourg, 1635-
1629 (râle politique de cet administrateur; ses rapports avec le comte
de Manafeld, Wallenstein et Clirislian IV de Danemark; ses négocia-
Iins avec les cours de Paris el de Stockholm et avec les Pays-Bas a6n
âtre rétabli dans t'adminislralion de Magdebourg el de Halbersladt).
47. — Hanslsche Gesoblchtableatter. Jahrg. 1696. Leipzig, 1897.
■ W. DE Beppem. Comment a été construite la ville de Brème, du x"
1 iiï" a. — Reuteb. Quand a été construit Stralsund ? (en 1Î30 ; inlé-
ssaot pour l'histoire de Lubeck et des princes de Rugen). —
. Bbvhs. Les routes commerciales de Labeck à la fin du moyen âge
(arl. très intéressant, d'après de nombreux documents inédits). —
E. Mack. Etienne Paris (récit très détaillé d'un procès qui fut pour-
suivi de 1577 à 15S3 au sujet d'un navire hambourgeois enlevé par un
corsaire calviniste de la Rochelle: l'auteur du méfait était Etienne
Paris; les navires hanséates s'en vengèrent en transportant en Bruns-
^rick le fils de Paris; de là un nouveau procès dans lequel le roi de
446 RScnBiLs p^eiodiqubs.
France intervint en faveur de Paris. Ce dernier fat aussi prisonnier en
Brunswick, mais il parvint à s'échapper). — Fibnsdorf. Le c Ausheis-
chen > dans le droit de Lubeck (on a voulu voir l'origine du duel dans
Fusage de la c provocation. • Signale dans les sources des exemples de
cette coutume; le c Âusheischen > n*est pas une provocation au duel
comme on Tentend aujourd'hui ; dans le droit de Lubeck c'était consi-
déré comme une insulte faite à un adversaire, comme une injure punis-
sable). — Bruns. Hans Reckemanet Grerd Hoffioiaker, chroniqueurs de
Lubeck (publie douze documents, de 1523 à 1551). — Kunzb et Steut.
Rapport sur une mission ayant pour but de rechercher des pièces d'a^
chives relatives à Thistoire de la Hanse). = Comptes-rendus : Dàbner,
Urkundenbuch der Stadt Hildesheim; Bd. V-VI (excellent). — RmUr,
Lietz et Wehner. Das zweite Stadtbuch von Stralsund, 1310-1342
(important).
48. — Jahresbericht der SohlesUchen GtoselUchalt fOr vater-
lœndiflche Gultar. Bd. LXXIV, 1897. — Reimann. Les négociations
du président Washington avec l'Angleterre en 1790-1794 au sujet du
rétablissement de relations amicales. — A. Sghulte. La bataille de
Salankemen en 1691 et la bataille de Saint-Privat ; parallèle. —
6. Bauch. Le plus ancien registre du doyen de la Faculté de philoso-
phie à l'Université de Francfort-sur-l'Oder; l^* partie (liste des promo-
tions dans la Faculté des arts et de la philosophie en 1506-1540).
49. — Jahresbericht XI des hlstorischen Vereins POlt die
GrafiBChaft Ravensberg bu Bielefeld. 1897. ^ Th. Weddigek. Le
monastère franciscain de Bielefeld, 1518-1829, d'après des documents
inédits. — Id. La suppression de la collégiale « Ad Sanctam Mariam, »
de Bielefeld, en 1810. — Rebsb. Histoire de l'industrie linière à Biele-
feld. — WiLBRAND. Biographie de l'historien Gobelinus Persona
(quelques notes sur son séjour à Bielefeld). — W. Frickb. La guerre
dans le comté de Ravensberg, 1742-1814. — Tuempel. Le soulèvement
du major Schill à Ravensberg en 1809 (rien de nouveau).
50. — Mlttheilungen des historischen Vereines der Pfals.
Heft 21, 1897. — L. Eid. Le service de cour et le service d'État dans
l'ancien duché-palatinat de Deux-Ponts, 1444-1604 (art. de 325 pages.
Tableau très minutieux de la cour, de Tadministration financière et
militaire dans ce duché, d'après des documents inédits. Très important).
51. — Mlttheilungen aus dem Stadtarchiv von Kœln. Heft 26,
1897. — Inventaire des lettres adressées à la ville de Cologne au xiv*
et au xv« siècle ; 2* art. — G. Mollwo. Marchands de Cologne aux îles
Canaries (publie un document de 1530, d'où il résulte qu'une propriété
de la maison de commerce des Welser aux Canaries était, vers 1515,
passée aux mains de Jean Bies, marchand de Cologne. L'associé de
celui-ci, Jacques Gronenberg, s'établit aux Canaries comme adminis-
trateur de la propriété et, après une mauvaise gestion, dut soutenir an
I RBCDBItB PÉII0DIQITE3. J4T
procès contre les héritière de J. Bies). — Joa. Habsen. Arnold Merca-
tor et les plans récemment déconverts de la ville de Cologne, 1571
et 1642.
62. — N«nes LaualtKUches Magazin. Bd. LXXIII, He» 1, 1S97.
— KoHsceELT. Histoire des propriétaires nobles du village de Haine-
walde, siii*-iii° siècle. — H. Knothe. Les plus anciennes seigneuries
du village de Hirachfeide, iiv»-ivi' siècle. — Helbiq. Documents rela-
tifs à l'histoire des familles nobles qui ont possédé les seigneuries de
Friedlandet deSeidenberg(âlO numéros). — KuEiraEL. Les noms slaves
de plantes et de lieux en haute Lusace; fin.
63. — Quellea kup alten Oeschichte dea Ftlpstenthttma Bay-
renth. Bd. II, 1896. — Chronique do la ville de Hof, 1633-1643 (186 p.).
— Le 0 Livre des Befs t du burgrave de Nuremberg, Jean III; suite
(fin do XIV siècle et commencement du xv; pages 187-320).
64. — SchrUten des V«retns fCr Oeachlclite des Bodaneees.
Heft25, 18S6. — Martin. Fragments de l'histoire de Constance Itraile
surtout de l'histoire du concile). — G. Meveh de Knonau. Gebhard III,
^■Avôque de Constance (son rdle dans la querelle du sacerdoce et de l'em-
H^ sous Henri IV et Henri V).
^r 6S. — Westdeatsclie Zeitschrlft f^r Geaclilchte and Kanst.
Jahi?. XVI, Hefi I, 1897. — G, "Wolff. Voies romaines dans la Vet-
tèravie {art. approfondi do 46 pages sur les voies romaines dans lo pays
compris entre Francfort-sur- le- M eio et Giessen ; détails abondants sur
t construction technique, les ponts, etc. Un système compliqué de
itea eo cette région permettait aux Romains de concentrer et de con-
ire rapidement leurs troupes sur les points menacés). — W. Scgkel.
S seigneuries privées dans l'empire franc; suite (condition juridique
sociale des personnes subordonnées qui se trouvaient sur les grands
mainesdans l'empire franc; ce qu'elle est devenue jusqu'au ix° siècle).
Sauehland. Taxes payées par les archevêques de Trêves à la cour
pontificale vers la lin du moyen Age (d'après les archives du Vatican;
la levée de ces taxes a eu pour conséquence d'obérer l'archevêché d'une
façon croissante et d'exciier un vif mécontentement contre l'adminis-
tration ûnancière de la papauté). ^ Heft 2. Henkel. L'autel romain
des quatre dieux de Oarmstadt, — Général Popp. La ligne droite et la
construction des voies romaines en arrière du ' Limes Raeticus « (con-
corde dans les points principaux avec G. Wolff; mais pense que cer-
(Uoee votes se détachaient à certains points de la ligne principale).
tToMBUELT. Les institutions municipales des villes allemandes (ins-
Itntion de Brœunlingen ea Bade ; son origine n'a rien à voir avec la
bodation d'un marché). — V. Lcbwe. La France et l'Autriche; élec-
tion de l'archevêque de Mayence en 1647 (l'évoque de Wurzbourg,
Jean - Philippe de Schcenborn, qui fat candidat à l'archevêché de
'layence en 1&47, entretenait en mÔme temps des rapports avec I&
448 RECUEILS PiEIODtQUBS.
France et la cour de Vienne; il dut son élection surtout à l'habileté de
la diplomatie française. Devenu archevêque de Mayence, Jean- Philippe
fut donc la cheville ouvrière de la ligue du Rhin, qui fut fondée pour
affaiblir la maison d'Autriche). == Heft 3. Asbagh. La victoire de Géria-
lis, près de Trêves, en 70 ap. J.-G. (examen critique du récit de Tacite;
le camp romain se trouvait sur la rive droite de la Moselle). — E. Ahthbs.
Les monuments romains en pierre dans TOdenwald (travail d'ensemble :
55 monuments, avec planches. Remarques sur l'histoire du t Limes
imperii > dans cette région). — Hbidenheimeb. Petrus Ravennas et sa
lutte contre les hommes noirs à Cologne (analyse un pamphlet de
P. Ravennas publié à Mayence en 1508, mais resté jusqu'ici inconnu,
contre deux prêtres de Cologne, avec la réponse de Tun d'eux, Jacques
de Hochstraten). — S. Muller. Une cathédrale mérovingienne : l'église
Saint-Sauveur à Utrecht ; son histoire jusqu'au xvii* siècle.
56. — WflrttemberglBOhe Franken. Neue Folge, Bd. VI, 1897.
— Hâssleb. Histoire de la société historique de la Franconie wnrtem-
bergeoise, 1847-1897. — Kolb. Biographie du chroniqueur Geoiges
Widman de Schwsebisch-Hall, 1486-1560. Les mss. de sa chronique.
57. — Zeitschrift des historischen Vereins fUr den Re^ernngs-
besirk Marienixrerder. Heft 35, 1897. — R. von Flanss. L'ancienne
t Niederung > de Marienwerder (colonisation du pays; son histoire
politique, ecclésiastique et économique depuis le moyen âge ; d'après
des documents inédits). — Treighel. Le « Thiergarten • de Stuhm,
d'après le « Tresslerbuch » de l'ordre Teutonique (c'était un parc peuplé
d'animaux sauvages, réservés pour les classes du grand maître). — Id.
La charte de fondation de Berent en 1346.
58. — ZeitBchrlft des Aachener GeschlchtarereinB. Bd. XIX,
1897. — £m. Fromm. Histoire de la bibliothèque municipale d'Aix-la-
Chapelle, depuis le xvii* siècle. — L). Catalogue de la bibliothèque
dantesque formée par A. de Reumont, aujourd'hui à la bibliothèque
municipale d'Aix. — O.-R. Redligu. Documents relatifs à l'histoire
d'Aix au xv« siècle (venant de Dusseldorf, 1406-1500; ils concernent
surtout les rapports des ducs de Juliers avec Aix). — E. Pauls. Les
archives du département de la Roer, 1796-1816. — Th. Likdnbb. La
fable de l'ensevelissement de Charlemagne. Supplément (détails sur la
manière dont ont été ensevelis les prélats grecs, en particulier le
patriarche grec de Jérusalem, mort en 1896). — Bosbach. La fondation
et le fondateur de Tabbaye bénédictine de Burtscheid (sous l'empereur
Otton ni, fin du x" siècle ; l'abbaye fut fondée par l'abbé calabrais Gre-
gorovius, qui fut canonisé plus tard). — A. Belleshedc. Aix-la-Gha-
pelle au xvi* siècle (publie plusieurs documents d'origine romaine). —
W. Brubninq. Aix sous la domination française et pendant les guerres
de l'indépendance, d'après des documents inédits. — E. Pauls. Inven-
taire du château de Montjoie en 1436. — Bbllesheim. Simon Braun-
mann d'Aix, abbé du monastère prémontré d'Averbode, 1673-1747. —
B lEcnns putoDigcES. M»
^fa». GoiUchalk, prévôt d'Aix (aDalyse avec élugee la biographie de ce
Peligicni. mort en 1098. qu'a donnée Dreves au t. I de bbb HymnologUeke
Beitrxgt). = Compte- rendu : Liese<jaruj. Niederrheiaisches Slaedlewe-
sen, vornehinlich ici Mitlelaller (G. de Bclow : iuBufflBant).
59. — Zeitschrlft der GeseltBcIiaft ftlr Schleawig-Holatein-
Lanenburglache Geschichto. Bd. XSVI, (896. — Eckebhakh. His-
toire des digues de Bottschloot (au commencement du ivii' siècle, une
société bollandaise entreprit de protéger contre la mer, au moyen de
digues, de vastes espaces de terre entre Waygaard et Wiedingharde,
dans le duché de Slesvig. Histoire de cette entreprise d'après des docu-
ments inédits). — Id. Projet d'établissement d'un canal entre la mer
du Nord et la Baltique en 1629. — Poseelt. Le conseiller Christoph
"^ insch de Breileoau; sa vie et son action politique, 1638-1732 (impor-
it pour l'histoire des négociations qui amenèrent l'incorporatioc du
Itiché de Slosvig au royaume de Danemark. Publie l'opinion qu'ex-
prima cet itumme d'f)tat en 1721 sur l'incorporation du duché à l'État
danois). — R. Uanseh. Le.s cartes des pays marécageux situés entre
Husum et l'Eider, dressées par Iven Knulzen (vers 1560; texte et com-
menlairel. — R. Beck. Christian Daum ; ses rapports avec les érudits
du Slesvig-Rolstoin pendant la seconde moitié du xvii" siècle (profes-
seur, puis recteur de l'école latine de Zwickau, Daum entretint une
autre correspondance avec de nombreux érudils de ces provinces; ses
lettres se trouvent à la bibliothèque publique de Zwickau), — Ch. Voiot.
La colonisation des bruyères en Slesvig, 1760-65. — Bangebi. Le»
pierres avec inscriptions runiqaes dans le duché de Slesvig; leur
importance historique (importantes pour l'histoire du Danemark et de
Slesvig au x" s.). — Hille. Les archives des ducs de Holstein-Gotlorp
an château de Gotlorp (publie deux documents de l'année 1708 sur
jL'administratioQ de ces archives}. — A. de Bdob. Les archives ducales
|D Holstein, 1727-1773. — Dccauio. La corporation des bateliers à Son-
'burg BU xvu° et au xvni* s. (son organisation, ses statuts, etc.). —
La colonie des frères moraves, « Pilgerruh, • à Oldesloe,
'37-41. — Wktzei.. Analyse des publications récentes publiées sur
ituire du Blesvjg et du Holslein.
- Zeltscbrift des Hars-Vereina fOr Gescbicht« nnd AJter-
tbttmsktinde. Jahrg. XXX, 1897. — Reinsckb. Vie de sainte Liut-
bergii (publiée dans Pertï.Scnpi,, IV, 158. Cette biographie n'a pas été,
comme le croyait Pertz, composée vers 870 par un contemporain de la
sainte, mais dans la seconde moitié du xii* siècle; c'est un documeat
très suspect), — Meieh. L'artillerie de la ville de Brunswick, depuis le
moyen ilgo jusqu'en 1671, d'après des documents inédits. — Ed. Jacobb.
t rétablissement du protestantisme dans l'archevêché de Magdebourg
dans l'évèché de Kalberstadt par Gustave- Adolphe en 1632 (impor-
it mémoire de 186 p. Publie 22 documents inédits). — C. Heihe.
chftteau de Seeburg et ses habitants, depuis 1016 jusqu'à nOB jours.
Rbv. HisTOB. LXVI. 2« FAsc. 29
450 EBCUEILfl PfelODIQUËS.
— Reisghel. Ornements romains en or trouvés à Grottorf, près de Hil-
berstadt (chaîne de bronze, avec cinq monnaies en or de Tempereiir
Postumus, trouvés dans un tombeau. Détails sur d'autres monnaies
romaines trouvées dans la région du Harz). — 6. Poppb. Avilissement
de la frappe des monnaies divisionnaires dans le comté de Mansfeid,
en Saxe et dans les pays voisins, de 1618 à 1624. — In. La guerre da
landgrave de Thuringe Frédéric avec le comte d'Orlamûnde et d'autres
comtes thuringiens, vers 1350.
61. — Zeitsohrift des ixrestpr6iiBsiaolie& OeschichterereiBS.
Heft 36, 1897. — R. Fischer. Âchatius de Zehmen, voîvode de Marien-
burg, 1500-1564 (biographie très détaillée de 166 p.; d'après des docu-
ments inédits^ Achatius de Zehmen joua, dans la Prusse occidentale,
partie polonaise des États de l'ordre Teutonique, un rôle capital dans
toutes les questions relatives à la situation politique et nationale de la
Prusse occidentale, il eut d'étroites relations avec Albert, duc de Prusse,
et exerça une grande influence sur sa politique. Chef du parti évangé-
lique, il contribua à la propagation du luthéranisme dans la Prusse et
eut de violents démêlés avec l'épiscopat de la Pologne prussienne).
62. — Zeitschrift tfOup die Oeschichte des Oberrheins. Ed. XII,
Heft 3, 1897. — J.-A. Zbhnter. Les Juifs dans le margraviat de Bade-
Durlach de 1535 à 1771, d'après des documents inédits. — O. Guntz.
Les voies romaines des itinéraires romains en Alsace (fragment d'un
travail d'ensemble sur les itinéraires romains que l'auteur a entrepris
en collaboration avec Kubitschek. On a eu tort jusqu'ici d'établir un
étroit rapport de ces itinéraires avec le système militaire des Romains;
ils servaient bien plus encore au commerce. Marque l'emplacement
d'un certain nombre de villes romaines qui figurent sur ces itinéraires :
Salatio est identique à Mo thern, Goncordiaà Lauterbourg, Arialbinnum
était placé entre Saint-Louis et Bâle. Les erreurs des itinéraires qui
nous sont parvenus sont bien moins nombreuses qu'on ne le croit d'or-
dinaire et faciles à corriger). — H. Bloch. Les faux de Grandidier
(17 diplômes royaux et impériaux jusqu'à Henri V pour les monastères
de Schultern et d'Ëbersheim, ainsi que pour l'évèché de Strasbourg,
ne nous sont connus que par Grandidier; ce sont des faux imaginés
par Grandidier, désireux de l'emporter sur son prédécesseur Schœpflin).
— A. Klemm. La généalogie des seigneurs de Backnang. — PPAmoif-
scHMiD. Deux chartes du roi Frédéric II (corrige le texte de deux docu-
ments publiés par Winkelmann, Acta imperii, n»» 161 et 178). —
A. Wermjnghoff et A. Winkelmann. Ouvrages sur l'histoire badoise
parus en 1896. z= Heft 4. Kalkoff. Jacques Wimpfeling et le main-
tien de l'église catholique à Schiettstadt ; 1«' art. (d'après des docu-
ments inédits de cette ville ; le maintien de l'église catholique y fiit
favorisé par la répression de la guerre des Paysans et aussi par les
efforts persistants et méthodiques du parti catholique. Des réformes
que Wimpfeling et ses amis proposèrent pour régénérer le clergé et la
BBCtmLS PfniONQPES.
Ki
s prêtres même avant Luther). — Le P. Bruno Alubas. PUlorius
ï le margrave de Bade-Darlacli Erneat- Frédéric (d'après les archives
l Vatican, qui poesèdcat des lettres nomlireuseB de PisloriuB à la
|iur de Rome ea 1595-1601; ces lettres montrent le» vains efforts ten-
I par Piâtorius pour convertir le margrave au catholicisme après y
avoir amené déjà son frère, le margrave Jacques). — Zehktsr. Histoire
des Juifs dans le margraviat de Bade-Durlach ; suite : 1730-1738. —
F. Platz. Les troubles à Zeli en Bade, 11 décembre 1760 (ils éclatèrent
ir suite de conQils entre le conseil et les bourgeois; procëe devant le
Lbunal de la chambre impériale à ce sujet). — Inventaire des archives
s localités badoises de Bonndorf, Wolfach et Btaufen.
- E. Alcademie der vrisBQnscliaften. PhilosopbJscb-liisto-
whe ClasBe. SU:iungsberkkle. Bd. GSXXVI, 18U7. — J. Losebth.
' la politique ecclésiastique de l'Angleterre au xtv> siècle
(important pour l'histoire de Wycliffe jusqu'en 1378). — Wolf de
Glarvell. Le recueil de canons du Cod. Vatican., lat. 1348 (Corme
vers l'an 1100; analyse de ce recueil où sont fortement accentués les
privilèges de la papauté). — J. .Muellcb. Etudes critiques sur les lettres
de Sénèque. — âc&EitKi,. Ëiblîotheca patrum lalinorum britannica,
VIII (suite du catalogue des mss. de théologie catholique conservés à
Cambridge). — F. Mdbllbr. L'histoire légendaire, en laugue pebivie,
du fondateur de la dynastie des Sassanides (critique du texte et com-
mentaire). — Â.-E. ScHCENBACB. La légende de Biterolf et de Dietleip
(cette légende et la Thidrekssaga oui une commune origine). — F. Miïel-
LEH. 1.08 éléments Bémitiques du peliht (cette langue fut d'abord celle
de la cour et de l'administration; elle devint bientât aussi celle de la
littérature tbéologique, surtout en Perse. Après la chute de la monar-
chie nationale et la disparition de la religion d'Étal, le goût littéraire
changea ; les éléments araméens qui avaient pénétré dans la langue
persane restèrent inintelligibles au plus grand nombre). — C. JmcÎEK.
L'élément chrétien dans la nomenclature topographique de la région
des Balkans (art. très détaillé de 08 pages, Eo beaucoup d'endroits, les
anciens noms ont été remplacés par d'autres formés avec des noms de
saints; ces noms nouveaux sont plus fortement représentés dans les
pays où dominent depuis longtemps les éléments romains, grecs et
albanais que dans les pays slaves venus plus lard au christianisme. Ils
remontent pour la plupart aui iv"-vi"' siècles. Détails sur l'inOuence
exercée par la littérature hagiographique sur la toponymie). — L. de
tlocKiNQEB. Les mss. du Miroir de Souabe; 16* art. et fin (tableau des
500 mss. décrits par l'anteur, d'après leur origine, l'époque de leur
composition, leur langue, leur contenu et leur ornementation). —
F. MoBLLEB. La transcription d'alphabets étrangers. ^ Philoso-
phisch-historische Classe. Denksckriflen. Bd. XLV, 1897. Hbeebdet
l Kalinka. Relation sur deui voyages dans la sud-ouest de l'Asie
ineurc, entrepris sons les auspices de l'Académie des sciences de
^enae en 18^4 et en 1S9â (pour préparer un recueil des inscriptionB
452 EEG0BIL8 PiaiODIQUIS.
aatiqaes de l'Asie Mineure. Publient 80 inBcriptions dont plusiean
sont longues et importantes). — Ad. Bber. Kûbeck et Mettemich (le
baron Kûbeck, président de la cbambre aulique de 1840 à 1848, ministre
des finances en 1848, président du conseil impérial en 1850, mort en
1855, était un partisan déclaré de la politique de Metternich et resta
pendant de longues années en rapports intimes avec luL Publie de leur
correspondance 41 lettres très intéressantes pour l'histoire des années
1849-1854; les lettres de Metternich contiennent de longs exposés de
ses idées sur révolution politique de l'Autriche et de l'Allemagne, sar
les réformes qu'il conseillait et sur la direction qu'il voulait imprimer
à la politique autrichienne).
64. — Jahrbach des Bakoixdner Landes Maseonis. Jahrg. III,
1895. — Webenka. Le règlement des frontières de la Bukovine aa
temps de son annexion à l'Autriche, 1792. — Polek. Les voyages de
l'empereur Joseph IL en Galicie et en Bukovine; leur importance pour
cette dernière province, d'après des documents inédits (publie des lettres
de l'empereur). = Jahrg. IV, 1896. Kaindl. L'empereur Joseph II et
la Bukovine. — Fleisgheb. Pour servir à l'histoire de Sucxawa (siège
de cette forteresse par George Stephan en 1653. Atelier monétaire pour
la Moldavie à Suczawa). — Reinegkb. Antiquités scythiques en Buko-
vine. — Polek. Les Lippovanes en Bukovine (secte schismatique de
l'Église orthodoxe russe dont les partisans émigrèrent en grand nombre
en Bukovine à la fin du xvm« siècle. 97 documents de 1780-1839 en
appendice).
65. — Mittheilangen des Nordbœhmischen ExcnrBlons-Gliibs.
Jahrg. XX, Heft 2. Leipa, 1897. — R. de Wbinzierl. Une station
préhistorique à Gastorf (elle appartient à la période néolithique). —
E. Neder. Histoire du « Hals-Gericht > du Markersdorf (compétence
de ce tribunal; condamnations qu'il prononça de 1580-1747). — Hoo-
KAUF. Le partage de l'héritage de Henri de Schleinitz en 1566; fin. r:
Heft 3. Hantsgul. Antiquités préhistoriques trouvées dans la Bohème
septentrionale; suite (article très soigné, avec une carte). — Herglotz.
Statuts de la corporation des bouchers à Graber en 1657.
66. — Mittheilungen der prœhistorisohen GommiBsion der
k. Akademie der ^Wissenschaften sa ^Vien. Bd. I, n» 4, 1897. -^
M. HcEaNEs. La doctrine des formes préhistoriques; 4« art. (des figures
de bronze de l'Italie ancienne et leur importance au point de vue de
l'histoire de la civilisation. L'auteur estime que vers l'an 600 avant
notre ère il y eut en Italie une plastique primitive du bronze, qui pro-
duisit de petits objets portatifs, servant au culte, dans les tombeaux ou
comme talismans. Les formes de cette plastique sont empruntées i
l'Orient et montrent l'influence du commerce phénicien ; mais rien da
génie grec, rien de la main-d'œuvre grecque. Ces objets représentent
pour la plupart Astarté, Bès, les Gabires. Hs ont été imités au delà des
Alpes, loin dans la direction du Nord). — PALLuani. Les établissements
néolithiques à céramique colorée en Moravie et dans la basse Autriche.
EBcnBllS P^BIODigUES. 453
Zeitschrift des Vereins fllr die Geschlchte Mœhpena
id Schleolens. Jahrg. I, Heft 4, 1897. — Losehth. Les adversaires
Uttéraires de Jean Huss en Moravie; 1°' art. (Etienne, prieur de la
chartreuse de Dolein en Moravie; ses lettres et traités contre lowyclif-
fistne et le hussitisme; publie deux de ces lettres, importantes pour
l'histoire des troubles bussitiques en Bohême). — P. pe Kboneb. Ori-
gines du monastère cistercien de Saar en Moravie et wa chroniqueur,
Henri de Heimburg (Henri, chroniqueur de 8aar, né en 1242, est le
même que l'annalisle Henri de Heimburg, auteur des Annales qui ont
été imprimées dans Pertz, Script., t. XVII. Histoire des monastères
cisterciens ea Bohème et on Moravie jusqu'en 1250, et de la fondation
de celui de Saar en 1252. Détails sur la gânéalogie des seigneurs d'Ober-
sess ou Obran). — G. WnTttB. Les i Moralitates, » traité composé par
l'empereur Charles IV (texte et commentaire de ce tniité, qui fait bien
connaître le caractère et les idées directrices de l'omporeur; il a forte-
ment subi l'influence franraisel. — B. Brethou. Documents tirés des
archives municipales de Briion (sur l'histoire du sièpe de Briinn par
les Suédois en 1645). — C. Woynab. Histoire d'une ancienne famille
de paysans de Moravie |la famille Teltscbik, qui remonte au siv siècle).
66. — Bnlletla international de l'Académie des sciences de
Cracovle. 1897, octobre. — 0. Baiser. De la euccession au trône en
Polopoo. Étude juridico-historique; première partie : la succession à
ta mon de Casimir le Grand ol les lois d'hérédité des Piast (l'auteur
étudie sur quelles bases légales s'appuya Casimir le Grand pour appeler
la maison d'Anjou à la succession au trône de Pologne au détriment
de ses propres filles et même de ses parents en ligne masculine; ii
montre que la succession par les femmes avait pour but de hâter la
formation politique de la Pologne; elle conduisit d'abord â l'union
éphémère de la Pologne et de la Hongrie an proGt des princes angevins,
puis à celle de la Pologne et de la Litbuanîe, qui dura et qui eut une
grande importance historique |. =: Novembre. Ciermak. Scriplores
remm Poionicarum. Vol. XVI, Stanisiai Temberski Annales, 1647-
(curieui mémoires rédigés par un contemporain, historiographe
l'Université de Cracovie).
K,
Tbe engllsb historical Revlew. 1897, octobre. — Prof.
Maitland. La loi canonique en Angleterre; 3" article : Guillaume de
Drogbedaet l'Ordinairp universel (publie en appendice quelques extraits
de la Somme de Guillaume de Drogheda). — E. AaMSTHONO. L'Armada
et ses conséquences, d'après les dépêches vénitiennes (analyse les docu-
ments parue dans un récent volume: Calendar of State paptn, Venelian,
1581-91). — J.-R. Taîibbb. L'administration de la marine, de la Res-
tauration jusqu'à la Révolution; 2° article: 1673-79; suite en jan-
vier 1898, — H. RoBK. La presse non soumise au timbre, de 1815 à 1836
(parle des journaux qui réussirent à paraître en échappant, par tel ou
il artifice, à l'impôt du timbre; c'étaient pour la plupart des journaux
454 &BGUIIL8 ptfuOOlQUIS.
d'opinion très avancée, plus ou moins républicains et révolationnairM).
-— W. Heaolam. Henri de Treitschke. — Sir Edward Frt. Le champ
de bataille de Cannes (quelques remarques critiques sur les auteurs,
faites en présence des lieux mêmes). — Les monnaies frappées sons
les trois Edouard (d*après des renseignements fournis par les comptes
des gardes de la Monnaie). — W.-H. Stevenson. Une lettre de Des-
penser le Jeune, écrite le 21 mars 1321, à la veille du soulèvement des
barons (texte de cette lettre, écrite en firançais, avec un copieux ooni-
mentaire). — Arghbold. Lettre racontant la mort du général Wolfe. =
Cîomptes-rendus : Mtui Ktchnie, Tbe State andtbeindividual (bon résumé
des récentes discussions sur le sujet). — Koch. Beitrœge zur Geschichte
der politiscben Ideen und der Regierungspraxis ; 2« partie : Demokratie
und Konstitution, 1750-179! (expose les théories constitutionnelles qui
furent émises en France, en Angleterre et dans TAmérique du Nord
pendant la seconde moitié du xviii* siècle). — Â.J. Mason. The mission
of 8' Augustine to England according to the original documents (bon;
les textes ont été traduits, avec des notes, et suivis de quelques disser-
tations intéressantes). — Maitland. Domesday book and beyond (impor-
tant; compte-rendu par J. Tait à signaler). — M. Burrows, Goilectanea;
3« série (important pour l'histoire d'Oxford). — GasqueL The last abbot
of Glastonbury and his companions (excellent). — /. F. van Sommtn,
Archives ou correspondance inédite de la maison d'Orange-Nassaa.
Correspondance du prince Guillaume d'Orange avec Jacques de Wesen-
beke (important supplément au recueil de Groen van Prinsterer). —
Th. G. Law, The Archpriest controversy. Documents relatîng to the
dissensions of the roman catholic clergy, 1597-1602 (nouveaux docu-
ments tirés des rass. Petyt). — J. Gérard, What was the Gunpowder
plot? (la thèse du savant Père jésuite ne tient pas debout ; M. Gardiner
l'a ruinée). — A. Fea, The flight of the king (ouvrage très bien illustré
sur l'itinéraire suivi par Charles II après Worcester). — Mahan. The
life of Nelson (excellente biographie). — Schybergson. Geschichte Finn*
lands (bon). =: 1898, janvier. Sir Henry Howorth. Histoire primitive
de la Babylonie; 1«>^ article : les rois de Kengi et de Kish (résumé de
travaux antérieurs). — F. Baring. Les traces laissées par le Conqué-
rant dans le Domesday (suit pas à pas la marche de Guillaume le Bâtard,
de Hastings à Londres, et montre les ravages exercés par l'armée nor-
mande en comparant les chiffres de la valeur imposable des manoirs
avant la Conquête et au temps où fut rédigé le Domesday). — J. F.
Chance. John de Robetbon et les c Robethon papers i (biographie de
ce ministre de Georges I<"^, qui était un huguenot français, fils d'an
avocat au Parlement de Paris, et qui devint le ministre et le confident
du premier des rois hanovriens. Inventaire très sommaire de ses papiers,
composés en grande partie de documents originaux). — W. H. Ste-
venson. A quelle date mourut le roi Alfred ? (le 26 octobre 899, deux
ans plus tôt par conséquent qu'on ne l'admet d'ordinaire). — J. H. Rouho.
Les revenus de Henri III (propose une correction au chiffre du produit
sscniiLs FJiioDiQins.
«5
U 15* accordé à Henri m en 12^4, qui est Tourni parle Livre rouge de
■Ichi^ter. Celte correction rétablit une exacte proporiion avec les
autres chiffres semblables que l'on coonaitl. — Twehlow. Note sur un
mB. de Year book du temps d'Edouard II et III qui se trouve à la
Bibliothèque nationale de Paris (analyse du ms. fr. 5577). — J. Gaih-
DNEB. La leurs de l'évâque de Quadra et la mort d'Amy RoLsart (un
texte plus correct de la lettre de Quadra que celui Hur lequel s'appuyait
Froude fournit a l'auteur de nouveaux arguments pour soutenir qu'Ainy
Robsarl est morte de mort nalore!le|. — Miss E. H. LEONino. Le sou.
tagemeot des pauvres par une réglementation officielle des salaires
(signale plusieura tentatives faites par le Conseil privé de 1629 à 1640).
— Augusta S. BcRN. Correspondance do Richard Cromwell (publie
*0 lettres allant de (676 à 1708). = Comptes-rendus : G. Busolt. Hand-
buch der griechiacben Geachichte. Bd. III, Th. 1 : die Penlekontaûtie
(ouvrage très coDSciencieni) . — O'Connor Morris. Ilannlbal (inléres-
santa biographie, qui n'est pas toujours au courant des dernières
recherchesl. — W. Bund. The celtic church in Wales (ingénieux et
brillant, mais téméraire). — W. H. Hitlton. The church of tlie siith
century (six mémoires sur i'£)glise au temps de Justinien; agréable,
mais peu sûr). — Fr. Rûhl. Chronologie des Mittelalters und der Neu-
zeit (très utile traité, à la fois scientifique et pratique). — W. Reinecke.
Geschichte der Stadt Cambrai bis zur Ertheilung der Les GodeFridi,
1227 (c'est une suite de dissertations plutôt qu'un livre; l'auteur n'a
pas consulté les archives de la ville). — H. Hall. The Red book of the
Eichequer (édition somme toute remarquable). — J. H. Bridges. The
Optii Majus of Roger Bacon (édition très défeclueuse|. — Sir Herbert
Maxwell. Robert the Bruce (biographie bnllante, écrite avec un certain
esprit critique: l'auteur prend vivement In légende à partie, maie il
n'est pas assez précis dans le détail). — fiibliotbeca Erasmiaoa. I ; Ada-
gia. — H. Atlingham. Captain Cuellar's adveotures in Gonnacht and
Ulster, 1588 (bon). — Atf. Kingston. East Anglia and the civil war (très
intéressant). — 6. Jones. The diplomatie relations betweea Cromwell
and Charles X of Sweden (exce!lent|. — 0. Browning. Journal of sir
George Rooke (journal iotéressaut pour les événements sur mer au
début de la guerre de la succession d'Espagne, en particulier pour les
expéditions de Cadix et de Vigo en 1702; mais les textes pubhés lour-
mitlenl de fautes. C'est une édition à refaire). — Sir Augutttis Paget.
The Paget papers; diplomatie and other correspondence of the Hight
Hon. Sir Arthur Paget, 179*-1807 (très intéressant). — A. B. Hart.
American hîsiory told by contemporaries (bon). — Wittship. The
Coronda expédition, 15i0-1542. Cabot bibliograpby (bon). — G. Mac
CaU Theal. Uistory of South Africa, 1652-1795 (eicellent).
456 cmoinQOf n bibuogiafiui.
CHRONIQUE ET BIBUOGRAPHIE.
France. — Dom Th. Bârekoier, bénédictin à Sainte-Madeleine de
Marseille, est mort le 9 nov. dernier, âgé de soixante-dix ans. On lui
doit un certain nombre d'études sur des évoques provençaux au xvni«8. :
Belsunce, évoque de Marseille (1879), Gadenet-Gharleval, évèque
d'Agde (1884), J. de Foresta-CoUongne, évèque d'Apt (1885), Forbin-
Janson, archevêque d'Arles (1885), Lafiteau, évèque de Sisteron (1886),
Scipion de Ruffo-Bonneval, évèque de Senez (1886), J.-B. de Brancas,
archevêque d'Aix (1888), Malachie dlnguimbert, évèque de Garpen-
tras (1888), J. de Mesgrigny, évèque de Grasse (1889), J.-B. deSurian,
évèque de Vence (1895). On lui doit encore une Vie de saint Taribe,
archevêque de Lima et apôtre de Pérou (1872).
— M. Henri La voix, administrateur de la bibliothèque Sainte-Gene-
viève, est mort le 28 décembre dernier à Tâge de cinquante-deux ans.
On lui doit divers travaux sur l'histoire de la musique et de l'instru-
mentation.
— M. le comte Rosbllt de Lorgues, mort en janvier dernier, s'est
fait une place particulière dans l'histoire du xvi* siècle par les travaux
qu'il a publiés sur Christophe Golomb et l'apostolat qu'il s'est imposé
en vue d'obtenir en cour de Rome la canonisation de son héros. Cette
préoccupation extra-scientifique ne laisse pas d'amoindrir la valeur de
ses publications, qui, d'ailleurs, ont produit peu de faits nouveaux et
de découvertes originales. Rappelons seulement son Histoire posthume
de Christophe Colomb (1885).
— Le 9 janvier dernier est mort M. A. Gouverneub, ancien impri-
meur à Nogent-le-Rotrou. Il a dirigé avec un soin et une compétence
technique et scientifique remarquables quelques-uns des recueils qui,
depuis une trentaine d'années, ont imprimé une impulsion vigoureuse
aux études d'érudition; il a été, par exemple, l'imprimeur de la Revue
critique d'histoire et de littérature et de la Romania. Il était lui-même un
érudit : il a publié les œuvres complètes de Remy Belleau (Bibl.
elzévirienne , 3 vol.), Un coin du vieux Nogent, VHôtel'Dxeu (1868),
un bon volume à' Essais historiques sur le Perche (1882) et un grand
nombre d'articles sur l'histoire locale parus dans le Nogentais, La Revue
historique lui doit une reconnaissance particulière.
— La soutenance des thèses présentées pour obtenir le diplôme d'ar-
chiviste-paléographe de l'École des chartes a eu lieu les 24, 25 et 26 jan-
vier derniers. Voici, d'après le volume des Positions, le titre des thèses
qui intéressent l'histoire : Pierre Caron, Noël Béda, principal du œUège
caioKiQOB n BiBLioeiupats. 457
de Montaigu, syndic dt la FacuUt de Ihfoioçie {f 1537) ; — Emile Oacibr,
Ftorimond itofr^rici, tteritairt àv roi ci trésorier de France (f )527); —
Eug. Dbphe/,, la Prévôté dt. Paris sous Charles V : Hugues Àubriot; —
Paul Obslandbgs, l'Ordre des Trinitairts pour te rachat des captifs, il98-
159i: — G. Du\-AL, Anioine Vérard; — Roger Gband, Contributions à
l'histoire du r/gime des terres; It contrai de comptant; — Henri Lache-
KAUD, le Corps royal des galères sous Louis XIV, 166i-i715: — Léon
Levillain, Examen critique des chartes mérovingiennes et carolingiennes
de l'abbaye de Corbie, VW-X* siècle; — G. PénovBB, Étude sur les origines
de la gabelle et sur son organisation jusqu'en Î380; — Jos. Petit, Eisai
tur Charles de Valois, 1270-1325; — Jos. Podi, Essai sur le commun de
paix ou pesade dans le Rmergue et dans l'Albigeois; — Ed. Paitat,
Charles III le Noble, roi de Navarre, ses rapports avec la France; — Mario
BcRiFc, la Bibliothèque de don Inigo Lopes de Mendoza, marquis de San-
lillane: contribution à l'étude de l'érudition en Espagne; — Al. Vidieb,
^^'Historiographie à Saint- Benoit-sur- Loire ; les miracles de saint Senoil.
^H- — Le t. II de VUistoire des institutions politiques et administratives de
^Hb France, par Paul Violi^et, vient de paraître. Il est consacré au moyen
^^ftga proprement dit et contient les chapitres suivants : I, la Royauté
(avènement do Hugues Capet; succession au tr6ne, minorité et tutelle,
le palais et les grands officiers, le domaine et le royaume, le pouvoir
royal); H, le Clergé et l'Église (juridiction ecclésiastique, le clergé
séculier et régulier, les biens d'Église et l'impôt); lU, la Noblesse
(l'année et la marine, les droits seigneuriaux et la justice féodale).
Chaque chapitre est, comme on sait, suivi d'une aboudante bibliogra-
phie (Larose, 1898, 470 p. in-S». Prii, 8 fr.).
— La librairie Emile Bouillon a entrepris de publier une < Biblio-
thèque littéraire de la Renaissance, • sous la direction de MM, Pierre
DE Nqlhac et Léon Dorez, et qui sera composée d'ouvrages relatifs A
l'histoire de la Renaissance, où l'Italie et la France seront particuliè-
rement intéressées. A déjà paru : la Chronologie du « Can:onicre i de
Pétrarque, par M. Henry Cochin; parutra prochainemeut : Érasme et
le monastère de Steyn, par M. Léon Dorez. On annonce en outre : Jean
de Itavenne et son ■ Liber memorandarum rerum, > par Francesco
NovATi; Alciat en France, par Louis Delardelle ; Robert Gaguin et ses
amis, par Louis Thuas^e,
— Le i. XXVI des Archives historiques de la Saintonge et de l'Au-
nJB comient la deuxième partie des délibérations de l'échevinage de
inl-Jean-d'Angély, 1396-1411. Le volume se termine par la table
S matières des tomes XXI-XXVI.
- Le t. UI de la Correspondance générale de Carnot, publiée par
. Etienne Ch^bavay (P. Leroux), se rapporte k la correspondance
llitaire du Comité de salut public d'août à octobre 1793.
- H. Paul Ladraih a publié une brochure intitulée : De l'intervention
458 GHIOHIQUB IT BULIOGAAPHU.
des laïques, des diacres et des ahbesses dans Vadiministraiion de la Mtî-
tence, étude historique et théologique (Paria, Lethielleux, 4897). Ge
mémoire a serri à Tauteur de thèse de doctorat devant la Faculté
catholique de théologie de Paris, et c*est Tindice d'un progrès sensible
dans la méthode appliquée aux choses théologiques que l'admission de
la raison historique. On nous assure que la Faculté à laquelle M. Lan-
rain s'adressait a témoigné une médiocre intelligence de ce progrès,
ce qui n'est pas pour nous surprendre. M. Laurain n'en est pas moins
dans la bonne voie. Car il est bien temps que les théologiens catbo-
liques se mettent à étudier l'origine des formules consacrées par le
concile de Trente, s'ils ne veulent pas voir ces formules, mal com-
prises, devenir entre les mains de néo-scolastiques ignorants de toute
histoire les plus redoutables instruments d'oppression intellectuelle.
— MM. F. LoLiéE et Gh. GrosL ont publié dans la Bibliothèque de
dictionnaires'manuels illustrés de la librairie Armand CSolin un Diction'
naire des écrivains et des littératures. L'histoire et les historiens y
occupent une place importante. Ge dictionnaire, imprimé avec soin et
bien illustré, si l'on tient compte du prix modique, représente une
somme de travail considérable condensée avec beaucoup de goût et
beaucoup d'attention. La critique trouverait assurément à s'y exercer.
L'érudit sera surpris qu'à l'article Chronique, où M. Loliée cite les
grandes collections d'annales et de chroniques que se sont constituées
les nations modernes, la France ne figure que pour les Chroniques dt
Saint" Denis publiées par Paulin Paris, et pour les recueils de Guizot
et de Duchon, et la Belgique pour le Corpus de Swert et celui de Fop-
pons. IjO Recueil des historiens de la France (dom Bouquet), des his-
toriens des croisades, le monument élevé par la Société de l'histoire
do France, la vaste collection de chroniques belges publiée par la
Gommission royale d'histoire ne sont pas mentionnés. Une nouvelle
édition fera, nous l'espérons, disparaître ces inexcusables lacunes. Ge
qui distingue ce nouveau manuel est la forme vraiment littéraire don-
née aux notices. La collaboration de M. Gidel a porté plus spéciale-
ment sur les articles consacrés aux littératures grecque et latine.
— Deux grandes entreprises de bibliographie scientifique viennent
de commencer presque en même temps : !<> le Manuel de l'amateur de
livres au XI P siècle, 1801-1893, par M. G. Vicairb, dont huit fascicules
ont déjà paru (ils vont d^Abeille à Gyp. Rouquette, 1894-1897, in-8«);
2o le t. I du Catalogue général des livres imprimés de la Bibliothèque
nationale. La partie commencée est consacrée aux auteurs et contient,
des mots Aachs à Albyville, 11067 articles, soit environ le cinquième des
ouvrages dus aux auteurs dont le nom commence par la lettre  (Impr.
nationale, in-8^ à deux col.).
— La librairie Leroux a mis en vente le 1. 1 du Catalogue général des
Manuscrits français, ancien Saint-Germain français, par M. Auveay. On
y trouvera l'inventaire analytique des n»* 15370-170^8 (654 p. in-8<»).
cnomQOB n Biiuoeupni.
4S9
Mim
i-
B«lgl(pl0. — Feu le général Guillaume a publié jadis, dans les
Mtmairts de l'Àcadimie royale de Belgique, une euile de travaux histo-
les fort întéreBBaata iotilulé!^ : les Belges au servid de l'Espagne, de
[utriehe et de Naples. M. le général Bernaert vient de compléter la
irie de ces monographies, interrompue par la mort de l'auteur, par
livre important intitulé : Pastet mililaires des Belges au sei-vice de la
Fr&nea (BnixelleB, Lamertinj. Ou y trouve un grand nombre de notices
biographiques puisées aux meilleureB sources. C'est une eicellenio
contribution à l'histoire militaire de la Belgique.
— Notre collaboralfiur M. Paul Fredehicq, professeur à l'Université
de Gand, vient do faire paraître la seconde partie de son Histoire de
l'Inquisition aux Pays-Bas. Il y étudie successivement les troubles
religieux des Pays-Bas pendant le xiv* siècle: l'Inquisition et les pre-
mières poursuites exercées contre les Béguines et les Beggards; l'hé-
résie de Bloemardinnc et la secte des t Nouveaux; i l'apparition de
la secte des Flagellants en 1349 et sa résurrection en 1400; la secte
des danseurs en 1374; le procès des Templiers; la persécution des
Frères et des Sœurs de la vie commune; la prépondérance de l'Inqui-
sition épiscopale au xiv* siècle ; l'Inquisition et la puissance temporelle
à la même époque, et il termine par la rentrée en scène de l'Inquisi-
tion pontificale. Ce volume, aussi original et aussi plein d'intérêt que
le précédent, est rédigé en flamand (Gand, Vuylsteke).
Para-Bas. — Le rapport annuel de la Société d'histoire i Utrecht
{Bijdr. en Meded. van het hist. gen. te Ulreehl] contient un fragment d'une
ttutobiographie de Constantyn Huygens {"Wohp) ; les comptes du hailU
de Drenthe pour les années 13:16-1339 (S. Muller); une étude sur un
collège commercial ii Amsterdam, lequel, de 1663 jusqu'à 166ô, Ait
chargé de surveiller les intérêts du commerce iBruquans); le récit d'une
flDlrevue d'Arnold, duc de Gueldre, et d'Adolfe, son fils rebelle, en
1459 (van Vëen); un mémoire sur l'arrestation de quelques membres
des États de Hollande par le prince Guillaume II, de Nanning Keyser,
un des seigneurs arrêtes (Kehnkamp); une partie des notes de B. van
Leeuwea louchant l'inlluence du stadtiouder sur les élections des
magistrats municipaux (Fruin). — Dans les œuvres de la même Société
a paru le t. Il des papiers de Hans Bontemantel, régent d'Amsterdam,
ibtié par M. Keiinkami' avec le plus grand soin et enricbi de notices
appendices importants.
— Dans la i" livraison du tome] X des Bijdragen voor vadtrlandsche
ùescliiedenis, M. Bbom a publié une protestation, attribuée par lui à
Albert Pigge, contre la cession de l'autorité tetnporelle des évêques
d'Utrecht à Charles-Quint. Au même érudit nous devons la publica-
d'un a Discorso latino dell' Imperaiore Carlo V alla Santitft di
ilo III. » — M. Blok u étudie tes Mémoires Je llollando (Paris,
Ï1&); après en avoir discuLé la valeur historique, il demande à quel
460 GnONIQUB RT BlBUOGRAPHIl.
auteur il faut attribuer ce roman, et il répond qu'il est dû à la colla-
boration de M. Du Buisson et d'un second auteur, peut-être de
M. Huet. — On article sur les dettes des Stuarts à la maison d'Orange-
Nassau est de la main de M. Worp. — Une étude intéressante de
M. Fruin, sur la médiation de la République entre la France et l'Es-
pagne, rectifie quelques erreurs commises par M. A. Waddington
dans son livre sur Us Provinces-Unies, la France et les Pays-Bas espa-
gnolSf en louant d'ailleurs beaucoup les mérites de ce travail distingué
du professeur lyonnais.
— Les deux volumes consacrés par MM. Joostino et Ovbbvoordb
aux corps de métiers d'Utrecht sont d'un très grand intérêt {De gilden
van Utrecht, dans les œuvres de la Vereeniging toi uitgave van bronnen
van het oude vaderlandsche reeht). Dans une savante introduction, les
éditeurs, après avoir rendu compte de la manière dont ils ont mis à
profit les sources de leur publication, traitent les corps de métiers
d'Utrecbt, premièrement, en tant qu'associations professionnelles,
ensuite dans leurs relations avec TÉglise, enfin comme corps poli-
tiques, et ainsi ils ont donné un résumé de ce que contiennent les
nombreux documents qui suivent. — Dans les œuvres de la même
Société, M. Bezemer a publié des droits anciens de la ville de Steen-
bergen.
— Une édition très soignée des Stadboeken van Zufolle, par M. Tbl-
Tiifo, permet d'étudier le développement du droit de la ville de Zwolle.
(Dans les œuvres de la Vereeniging tôt beoefening van Overijsselsch regt en
geschiedenis,)
— M. DE HuLLu, le savant archiviste de la ville de Deventer, con-
tinue l'importante publication des comptes de cette ville; la livraison
dernièrement parue contient les comptes des années 1375-1376. En
même temps il a commencé de publier une collection de documents
relatifs à la Réformation dans là province d'Overyssel. (Dans les
œuvres de la même Société.)
— Quelques chartes, tirées des Archives nationales à Paris, et rela-
tives aux rapports de la Frise et de la France pendant les années 1337
et 1338, ont été publiées par M. Blok (Publications de Het Friesch
Genootschap),
— Dans le périodique intitulé Tijdschrift voor Geschiedenis, t. XIII,
je signale une étude de M. Feith sur les colonisations néerlandaises
dans le Brandebourg, et une autre, de M. de Boer, sur la trahison du
comte Henri van den Bergh et la campagne le long de la Meuse en 1632.
— M. Domela NiEuwENHms donne la suite des mémoires de son grand-
père sur les dernières années du xviii* siècle dans la revue de Tijà-
spiegel (juin et juillet).
— Une étude intéressante sur la condition du paysan frison, du
CB&OmQDB ET BIBLIOGHIPEII. Mt
moyen âge jusqu'à nos jours, est publiée par M. de Boer dans la Twee-
maaiuielijhsch TijdschHfï (sept. 1897-janv. 1898).
— Le tome U de l'iùstoire populaire des Pays-Bas au xtii* siècle,
publiée par M. P.-L. Mulleh, bou:) le titre : Onze gouden eeuui, expose
la condition sociale et politique des provioces et de plusieurs villes,
ensuite l'époque de Jean de Wltt ei l'année terrible de 1672; il se
recommande par les mêmes mérites que le premier volume.
— Dans les deux dernières livraisons du tome XLVU des Mémoires
de l'Institut royal de philologie, etc., des Indes-Orientales, M. van deh
Keup nous fait connaître l'upmion de Pendal et de HalQes sur le traité
de Londres du 13 août 1814. Un mémoire sur l'île d'Ambon en 161T,
du gouverneur G. Demmer, est publié par M. Ueehbs. Le tome XLVOl
cuniieai la première partie d'une grande collection de documents sur
les Uullaudais en Chine, dont nous sommes redevables à M. GaiE-
Alsace. — Noire collaborateur, M. Rud. REDss,'a conquis brillam-
ment le grade de docteur es lettres en Surbonne avec les deux ibèses
suivantes : Ùe Scriplorîbus rerum Âtsaticarutn historiâs inde a primor-
diis ad laeculi ÎViU eailum (Argenturati, apud Fred. Bull, xii-250 p.),
et l'Alsace au XVIh siide, au point de uue géographique, hiiloriqut,
adminitlralif, économique, social, intellectuel et religieux, 1. 1 (DuuilloD,
sixvi-735 p., D" 116 de la Bibliothèque des hautes études). Le tome 1"
contient les chapitres suivants : i. le Pays; ii. Histoire de l'Alsace au
xvu' siècle; m. Institutions générales du pays ; iv. les Territoires alsa-
(ûens; v. État économique de l'Alsace.
Allemagne. — Le 3(J nuv. 189T est mort le D^ H. de Marqu&rdsbn,
professeur de druit à l'Université d'Erlangen, âgé de soiianle et onze
ans. Oa lui doit do nombreux travaux sur le droit des gens et sur le
droit politique, ainsi qu'un Uandbuch des offenlUchen Heelites. — Le
19 déc. est mort le I>G. WBrim, professeur à l'Académie de Liegnitz,
en Silésie, auteur d'un ouvrage intitulé : Die Eroberung und Gtrmani-
tirung der Uender œstlicli der Elbe «1364-1889). — Le 5 janv. 18118 est
mort, à l'âge de cinquante-quatre ans, le professeur Mas Lossen, secré-
taire de l'Académie des sciences de Bavière à Munich, auteur d'excel-
lents travaux sur l'histoire de la Itéfûrme et de la Contre-Réforme;
son principal ouvrage est : Gesehichle des Kôlnischen Krieges î5d7-lS86
(2 vol. 1882-1897}. Citons aussi : Dojuiuwarth und Heriog Maximilian
(I8SS); tlriefe von À. Masius und seinen Freunden (ISSli); die Lehre von
Tyramunmord (189i). — Le II janv. est mort le D-- Erwin Rhooe, pro-
fesseur de philologie classique à l'Université de Heidelberg, âgé de
cinquante-trois ans. Après avoir enseigné successivement & Kiel, lêna,
Tubingue et Leipzig, il fut, en 1886, nommé à Heidelberg. Il était au
premier rang des philologues allemands. Ses principaux ouvrages sont :
itfr grieehische Boman und seine Vorlieufer (1878) et Psyché; Seelen Kult
462 CHIOHIQUI R BIBLIOMIPH».
und Unsterblichkeitsglaube d&r Grieehen (1890-1894) ; dont il entrepre-
nait une revision quand il est mort. — Le 18 janv. est mort le
D^ H. Webbr, professeur d'histoire au lycée de Bamberg, auteur de
travaux remarqués sur Thistoire de la Franconie, âgé de soixante-
trois ans.
— Le I> KosBB, directeur des archives de Prusse, a été nommé histo-
riographe de rÉtat prussien ; il a été élu dans le môme temps membre
étranger de TAcadémie des sciences de Stockholm, section d'histoire.
— Le D' DE HEnrBMANM a été nommé professeur d'histoire à l'Uni-
versité de Tubingue. — Le directeur de la bibUothèque de l'Universilé
de Halle, O. Hartwig, bien connu par ses travaux sur Thistoire d'Ita-
lie, a été mis à la retraite. — Le D'' Stibda a été nommé professeur de
sciences politiques à l'Université de Greifswald. — Le D' W. Sibouk,
auteur apprécié de travaux sur l'histoire et la cartographie de l'anti-
quité, a été nommé professeur de philologie classique à l'Université
d'Iéna.
— L'Académie des sciences de Bavière a, sur les revenus de la fon-
dation Savigny, accordé 1,500 m. au D' LnssBOAHO, privat-docent à
Berlin, pour contribuer aux frais d'impression du 1. 1 des Magdeburgtr
Schœffenspriiche^ et 2,500 m. au D' Knàppb, de Wurzbourg, pour lui
permettre de publier le Zentbueh des HochsiifUt Wiiriburg, dressé par
L. Fries au xvi« siècle.
— L'administration des musées de Berlin a reçu du D^ O.-H. Dei-
BEL, médecin, récemment décédé à Abbazia, un legs de 100,000 m., i
l'efTet d'acheter des sculptures d'origine égyptienne, assyrienne,
grecque, étrusque ou romaine.
— La c SaBchische Missions-Gonferenz » a mis au concours la ques-
tion suivante : Exposer les principales idées religieuses et philoso-
phiques des Hindous, d'après les Védas, les Oupanishads et la philoso-
phie brahmanique; apprécier ces idées au point de vue chrétien. Le
prix est de 1,000 m. Les mémoires, rédigés en allemand ou en anglais,
devront être remis avant le 30 juin.
— Dans la séance générale de la Commission d'histoire badoise, un
rapport sur les travaux qu'elle a entrepris fait connaître les points sui-
vants : en ce qui concerne les Regestes des évéques de Constance,
publiés par A. Cartellibri, la 4« livraison du t. U paraîtra en 1898; la
fin, en 1899; des recherches, aux archives du Vatican, par Cartellieri
et Kurt Schmidt ont fourni de riches matériaux. MM. Koppeler, de
Zurich, et Bbyerle, de Waldshut, préparent une édition des coutumes
municipales de Constance et d'Ueberlingen; M. Beyerle pubUera
ensuite la liste des conseillers municipaux de Constance au moyen
âge. Les matériaux du t. V et dernier de la Correspondance politique
du margrave de Bade, Charles-Frédéric, la plupart des matériaux sont
déii rénois; il mte eepaaiUiit à «UpooiUer tea uchim de Puw.
U. Ihiocb b commeiicê ton Tolnme aur te* ofigioea de I* gnem de la
nicees&ioo paUUoe li6ftâ-l6S8), d'eprèa tes nppùnx dea uoiiUMdeun
de Vienoe et de Pxiis. — UM. bb Wekb et Bwnxn préparent U
IHibbcatioa de la turreapuodaiice de Hanin Gertten, pnace-abbé de
Saim-BUiie, qui pareitn anmt uo an. Le dernier âûdcule du Dio
tioutiaire topograpbique du grand-ducbè de Bade, jiar le [>* Kbieoek,
est mu presse, amsi que le dernier Cucicuie de l'Ûàvrtiaditcfia Gttth'
UehUr-BiMh, pubLé par le lieuienant-colunel KuioLea ou Kbublucq. Les
weaux ei armea dee communes badoi&es seront publiés en trois iua-
cules. Chaque mmée, la Commiaaion publie ua ■ NeujaiirsbUit i * celui
pour l'annce 181J7, par Wiu^, est intitulé : Orvelual, Bitdar aw eiium
geMidun Staate da IVIIIJahrh.: celai pour |g!:»e, par le £)• de Weecs,
Sif r6nùchtr h-mUa am OOerrhein i76i-6i. Une suite des Boéitehe
BiografkittH parailn en 190U ou 1901.
— L'Âcadéatie des sciences de Berlin a nommé membres currupon-
danta, pour la classe de piiiloso{>liie et il'bistuire, les prufesMurs Corne-
ucs, de Municb, et EaonAKssDiEarvEii, de fleidelberg. — Elle a accordé
3,000 m. au professeur bcBWEixFuaTH pour la publication des cartee
qu'il a levées dans le désert arabique d'Egypte.
— Dos Ôoctâlé asiatique vient de se fonder en Allema^e sous la
présidence du prince Ueori de ScHieHAicti-CjiBDLAiH et la vice-prési-
Jence de l'amiral lIoLuunN. Celle société se propose d'exciter et de
propager l'inlérèt pour l'ancientie avilisaltoa orientale, surtout en
ÂEsyne et en Babylonie, de Mre exécuter des fouilles, etc. £lle a déjà
envoyt: une mission scientiâque en Mésopotamie.
— L'administration des archives militaires du royaume de Saxe a
récemment occupe le nouveau bltimeat construit aux frais de l'empire.
— Le musée germanique de Nuremberg va s'agrandir bieatùl par
l'acbat d'une grande cousiruelion voisine, avec cour et jardiu. On y
installera les gravures sur cuivre qui comprennent déjà plus de
-200,000 plancbes, la bibliothèque, qui contient plus de "200,000 volumes,
et les archives.
— Le professeur Rudolpb Vibchow a légué au musée romain et
germanique de Mayence une collection d'antiquités cypriotes, décou-
vertes, il y a de longues années, par le D' M. Ohnefaiscb-Richter
pour la I R. Vircbow btiflung ; > celte collection, qui comprend envi-
ron 150 numéros, se rapporte à l'époque du cuivre et du bronze dont
le début peut être placé entre 3 et 4,000 ans avant l'ère chrétienne.
— M. Cari Bleibtieu a publié dans le n<> 268-^9 dea Beiiage lur
—^Uffemeirun Zeilung un mémoire intéressant sur le droit de la guerre
Il temps du premier empire.
- Sur l'iDÎtialiTe de l'empereur Guillaume U, on a tracé le plan
464 OHEOinQUB n bibuogeaphii.
d'un grand dictionnaire égyptien, dont les académies allemandes se
partageront la publication.
— La librairie Hahn (Hanovre et Leipzig, 1898, 210 p. in-4») vient
de mettre en vente la deuxième partie du tome II de la Chronologie
de Grotefend : Zeitrechnung des deutscken MitteMters und der Neiueii;
elle contient les calendriers de certains ordres religieux, la liste des
saints avec la date de leurs fôtes et vingt pages d'additions an glos-
saire des dates qui figure dans le tome I.
— La librairie Hoffmann, à Berlin, avait commencé il y a peu de
temps un Annuaire de biographie sous la direction de M. Ant. Bn-
TELHEiM {Biographische BUstter, Jakrbuch fûr lebensgeschiehtlicke Kutut
und Forsehung). Deux volumes en ont paru. — Puis cette publication
8*e8t transformée, et, en passant à la librairie Reimer, mais en restant
sous la môme direction, elle est devenue un Annuaire biographique et
nécrologique de 1* Allemagne (Biographisck&s Jahrbuch und deutsches
Necrolog). Le t. I de cet Annuaire comprend : 1» des notes biogra-
phiques sur Lud. Richter, d'après les papiers d'Otto Jahn, par
Ad. MiGHABLis; des notices nécrologiques sur Clara Schumann, par
Bern. Sguolz; sur Michel Bernays, par H. Um)E; sur Hugo Bûrkner,
par le D^ K. Burkmer ; sur Franz- A. Buhl, par Marouaroseii ; des sou*
venirs sur Fr. Bodenstedt ; 2^ une bibliographie de la littérature bio-
graphique en 1896, par Joh. Luther; 3® une très longue nécrologie
(455 p.), où l'on donne la biographie de tons les personnages notables
morts en Allemagne dans le courant de Tannée 1896. On trouvera,
dans cette dernière partie, d'utiles indications bibliographiques. Le
présent volume est orné de deux portraits en héliogravure, de
Treitschke et de Du Bois Reymond (vii-77 et 463 p. in-8*. Prix : 12 m.).
Autriche-Hongrie. — Le D>^ David de Sghgenherr, directeur hono-
raire des archives autrichiennes, membre correspondant de l'Acadé-
mie de Vienne, est mort le 19 octobre à l'âge de soixante-quinze ans.
— Le 18 décembre 1897 est mort, à Salzbourg, âgé de quatre-vingt-
un ans, l'avocat A. de Rutuner, le Nestor des Alpinistes autrichiens.
Sous le titre : Dos Kaiserthum ŒsUrreich (2 vol., 1874-78), on a de lui
un grand ouvrage illustré sur l'histoire, la géographie et l'ethnographie
de l'Autriche. — Le 29 décembre est mort à Prague le professeur Gons*
tantin de Hoefler, à Tàge de quatre-vingt-six ans. B était né en 1811,
à Memmingcn eu Bavière. Il enseigna d'abord 'à Munich, puis fut
nommé archiviste de l'État à Bamberg, d'où il fut appelé à l'Université
de Prague. En 1872, il fut élu membre de la chambre des seigneurs
autrichiens et reçut la noblesse héréditaire. Il prit sa retraite en 1882.
Il a beaucoup écrit, et presque sur toutes les époques de l'his-
toire; il fut aussi un poète dramatique. Parmi ses ouvrages, publiés
en grande partie par la Société des sciences de Bohème et par
l'Académie de Vienne, nous citerons seulement les plus importants ;
CHBOilIQUE BT BIBLIOGRjtfmK.
465
Mleruananlung fur frjinkisclie Geschiclite (4 vol., 1849-1653), Bupreclit
I dtr Pfatz (1861), Condlia Prageiuia 11862), Magistcr Johannes Uns
und der Absug der deutielien Pro/nsaoren und Studenten aun Prag (1864) ;
Gtscliiehlsehreîber der kusitUeher Bewegung (3 parties, 1856-1S66),
Ahhandlungen aut dem Gehiete deralten Geschtchle (1870-18S0), DU roma-
nUcliA Welt und Mr VtrhrltnUs mu den Reformideen des Mitteiaiters (18781,
Papst Hadrian VlUmO), Monumenla Hùpanica {iS8i-ii»E], Don Rodrigo
de Borgia, Alexandtr 7/(18881. — Le 9 janvier 1898 est mon le D'J.-Ad.
ToiMAscHEK, proleseeur honoraire de droit allemand il l'Université de
Vienne, âgé de eoixanle-quaiorze a.nB. Il était membre de l'Académie
den sciences de Vienne et avait tait partie du parlement de Francfort.
It fut cbargô par la ville de Vienne de publier : RecMe und Privilegien
der Sladl Wten (2 vol., l8T7-)879), et a donné en outre de nombreux
mémoires sur l'histoire du droit autrichien.
— Les amis et anciens élèves de Max BDEDtHOEii, professeur à l'Uni-
versité de Vienne, se préparent à fêler le soixante-diiième anniver-
saire de sa naissance; un comité s'est formé pour composer un volume
de mémoires qui paraîtra chez Wagner, à. Innsbruck.
— Un article de F, de Kjiones intitulé : Herr Wilhelm von liosm-
berg «ind die seitgeschichttichen Berichte im Archive von Wittingau,
publié dans les Beilage der AUgemeinen Zeilung (1897, n<>?60), fait con-
naître de procieui documents sur l'bisloire du xvi' siècle, W. de Ho-
senberg (1535-1592) était un diplomate fréquemment employé par
l'empereur dans des missions à l'étranger et un homme d'État distin-
gué. On a trouvé dans ses papiers des instructions des empereurs et
rois Ferdinand I", MaiiraiUen II, Rodolphe II, des relations sur les
cours des Habsbourg, des lettres du roi d'Espagne PhiUppe 11, des
correspondances de princes allemands, des comptes-rendus des diètes
impériales et des états provinciaux de Bohème, des reuseignemeata
Rur la situation intérieure de la Bohème et de la Hongrie, des dépêches
envoyées de Paris, Venise, Rome, etc., des lettres de l'ambassadeur
espagnol San Ctemenle et du résident français à Vienne, L'Abbé.
M. de Krones, dans son article, doone une courte biographie de ce
dernier, avec des pièces justificatives empruntées à ce riche dépât.
Angleterre, — Sir Frederick Pollock est mort, en novembre der-
nier, à l'âge de cinquante-deux ans. 11 était professeur de droit à l'Uni-
versité d'Oxford et dirigeait le Law QiiarUrly Bmew. C'était un juris-
consulte éminçât qui a composé plusieurs chapitres de la belle Bisiory
afengliih law, qu'il signa en collaboration avec M. MArrLAND,
— 9ir Edward A. Bond, ancien administrateur général du British
Muséum 1I8T8-I88S), vient de mourir b. l'ige de quatre-vingt-deux ans.
On lui doit une édition des statuts de l'Université d'Oxford, des Diî^-
cours prononcés dans le procès de Warren Hastings, de la Chronique
de l'abbaye de Moaux (Mclsa) dans la colloclioa du Maitre des rôles.
Rbï. Histob. LXVI. 2" rASC. 30
466 CHIOHIQUE ST BIBLI06EAPHIE.
Mais il a beaucoup plus fait encore en fondant la c Palseographical
Society, i pour laquelle il prépara de beaux fac-similés photographiques
de textes grecs et latins, et surtout en poussant très activement le
Catalogue des mss. possédés par le British Muséum.
— La c Somerset Record Society, • depuis sa fondation en 1887,
a déjà fait paraître dix volumes : Bishop Drohensford's Regisier, analysé
par M. Hobuouse; Somerset chantries, publié par £. Grbbm; Kirby's
quest for Somerset, par feu Dickinsob ; Prs-Reformation Churchwardens'
aecounts in Somerset parishes, par Hobhouse ; Custumaria of the IllI*^
cent, abhots of Glastonbury, par G. J. ëlton; Pedes ftnium for Somerset^
par Ë. Green; Two chartularies of the priory of Bath, par le RéY.
W. Hunt; Bruton and Montacute eartularies, par Maxwell Lyte et
T. S. HoLsiEs; Hegistrum Radulphi de Salopia (2 vol.), par le Rév. T. 8.
Holmes. Le plus récent volume est un choix de Somersetshire pUas,
civil and criminal, extraits analysés et traduits des rôles des juges
itinérants pendant la première moitié du xm« siècle, par M. Charles
E. H. Chadwigk-Healey (1 vol. in-S®, lxxxiij-520 p.).
— Les quatre dernières livraisons de VHistorioal Atlas of moden
Europe (Oxford, at the Giarendon Press, livr. 12-15) contiennent les
cartes suivantes : l'Europe au temps d'Otton I"' le Grand, vers 962,
par M. R. L. Poole; l'Allemagne sous la maison de Hohenstaufeo,
1138-1254, par le môme; la maison de Savoie en Italie, par miss Doro-
thée Ewart; l'Allemagne religieuse, montrant les divisions ecclésias-
tiques de ce pays au moyen âge, par M. Poole ; la Pologne, depuis
Tunion de Lublin jusqu'au troisième partage, 1569-1795, par Nisbet
Bain ; l'Italie après la paix de Lodi (1454), par miss D. Ewart; la
France au xui" siècle, par M. W. E. Rhodes; l'empire romain d'Orient
au x« siècle, par le professeur Bury; l'Ecosse vers 1600, par M. Gre-
gory Smith; Torganisation ecclésiastique de la péninsule espagnole
(avec une liste dos diocèses espagnols et l'époque de leur fondation),
par M. Poole ; l'Asie occidentale sous les dynasties musulmanes (97(^
1070), par le même.
— Viennent de paraître dans la série des Calendars (Rolls séries) :
le t. III des Calendar of entries in the papal registers, 1342-1362, par
W. H. Bliss et G. Johnson, le t. I des Pétitions to the Pope, 1342-1419,
extraits des mômes registres pontificaux, par M. Buss, le 1. 1 du Calen'
dar ofthe patent rolls, Edward IV, IkeMkSl, et le t. XVI des ÂcUof
the Privy Council of England, par J. R. Basent.
— La librairie Simpkin a mis en vente un volume de Documents
relating to the history of the cathedral church of Winchester in the IVIP^
ccntury, publiés par MM. Stephens et Madqe, et The Registers of John
de Sandale and Rigaud de Asserio, bishops of Winchester, iSiô^iS^i,
publiés par M. Baigent.
Italie. — Nous ne croyons pas utile de donner des détails sur li
prétendue représentation de la crucifixion que M. Marugghi a cra
CaSONIQDE ET BtBLrOGlUPHie.
46T
' découvrir dans uQgrallilodu Palatin. Ce n'est qu'une scène d'acrobat«e
accumpuguéG it'ime iuBcriplion erotique. Un autre grafUta,oii M. Maruc-
cbi a cru auEsi trouver une rupoose d'Aleiamenos à la fameuBe uari-
culure qui te représeate ailorant sun Dieu cruciGi- cl à tèle d'ilne, parait
également avoir été interprété avec plus d'imagination que d'exactitude.
— En 1894 a été cuastituêe, au eein de l'Âcadi'inie royale des
Ruzzi à Sienne, une cooimissiou spéciale d'histoire, qui s'est appli-
quée tout de suite à ses travaux avec beaucoup d'ardeur. Dans la
ménie année, la comiuission a commencé la publication périodique
d'un ISulkilino Stnese di sloria patria, très bieu fait; ensuite elle a
inauguré dea conférences historiques, lioût deoi volumes ont déjà
paru (Sieoa, Laziari) en 1895 et 1896. Il est peut-être trop lard pour
résumer te contenu de ces volumes; il suflira que nous disions qu'ils
se rapportent exclusivement h. l'tiisloire de Sienne, â ses institu-
tions, à SOS traditions, à quelques-uns de ses personnages illustres.
— M. P. tlosEï, président de la commission, eu ouvrant la série des
conférences en 1895, avait lu un savant mémoire sur les Origines de
Sitniu avant l'époque romaine; en 1897, il s'est occupé de Sienne
colonie romaine. Il Exe rétablissement de la colonie à l'époque d'Au-
guste, décrit la topographie de Sienne romaine, traite de son organi-
sation administrative, de ses institutions religieuses, de sa conversion
au christianisme (rv siècle), etc.; tous ces sujets sont étudiés avec
beaucoup de soin. — M. L. Zdekaubb avait traité, dans une des cooCé-
rences de 1696, sur la Vie privte des Siennois au Illl' siècle, et donné
sur ce sujet, jusqu'ici peu étudié, des renseignements tout à fait iné-
dits et très instructifs; dans une seconde conférence, qui fait pendant
à la première, il s'est occupé de la Vio publique à la màme époque. La
source principale de ses recherchée a été le Statut de I26'2 (que
M. Zdekauer lui-même a édité en 1897 chez Lazzari| et d'autres docu-
ments contemporains. Il ne faut pas se méprendre sur le litre de cette
brochure. Ce n'est pas une narration de faits historiques, ni même une
histoire des institutions publiques (à ce point de vue on pourrait lui
reprocher d'être un peu superficiel), mais c'est uo portrait vif et
attrayant de la vie municipale en ce qui concerne la politique et
l 'administrât ion publique.
— Depuis que M. Felice Toceo, en 1884, a publié son livre remar-
quable sur VEresia nel medio ovo (cf. Revue historique, t. XXVIII), les
études italiennes sur les hérésies et les hérétiques du moyen âge uDt
repris avec plus d'activité et avec une méthode sans doute plue
sérieuse et plus scientifique qu'auparavant. Nous signalerons entre
autres quelques travaux de Dom G. Boffitu, barnabite piémontais. 11
s'occupe des hérétiques en Piémont et dans la Ligurie. En 1896 il a
publié dans le BuUettino storico subalpino, fasc. 6, des notices sur les
hérétiques li Cuneu; et dans le Giorn. stor. délie Utî. ital. (1897, p. 304
et suiv,), il a fiût connaître une déposition reçue par le tribunal iuqui'
eiiorial de Toulouse, où est mentionné un livre du Nouveau Testa-
meul écrit ïn ronumo si tn tatino mixtim, ce qui ajoute un nouveau
É
468 CHEO.NIQCE ET BIBUOGRAPHU.
fait à l'histoire de la Bible vaudoise. Deux documente qu'il a publiés
dans les Atti de TÂcadémie royale sont de nature, croit-il, à prou^rar
la propagation rapide de Thérésie des Albigeois à Gènes, ce qui ne
nous paraît pas bien établi, du moins par lesdits documents; mais ils
sont très intéressants. Ce sont : une sommation faite par un commis-
saire pontiûcal à la commune de Gènes d'insérer dans ses statuts les
constitutions impériales contre les hérétiques et d'en supprimer les
chapitres contraires à la liberté de l'Eglise; et une déclaration &ite
par Pierre Bouviile aux inquisiteurs de Toulouse, d'où il appert qu'en
1274 quelques Albigeois, et même leur évèque Bernard Olibe, demeu-
raient à Gènes et dans ses environs. Tout récemment a paru (Roma,
tip. Poliglotta) un opuscule de Dom Botlito sur les hérétiques en EHé-
mont, à l'époque du Grand Schisme (1378-1417); il comprend les cha-
pitres suivants : !<> uq fraticello en Piémont {Jacobtu Ristolaxius tU
Carmagnolia, 1395) ; 2<» une croisade contre les Vaudois en 1400; 3* li
tin du catholicisme en Piémont.
— On vient d'ériger à Grevalcuore (Romagne) un monument à Mar-
cello Malpighi, médecin et anatomiste célèbre du xvu« siècle; à cette
occasion, M. Garlo Frati, bibliothécaire à Bologne, a publié, sous le
titre de Bibliografia Malpighiana, un catalogue très soigné des œuvres
imprimées de M. Malpighi et des autres publications qui se rapportent
à lui. Dans Tintroductlun, M. Frati mentionne les manuscrits de Mal-
pighi qui se trouvent à Bologne et ailleurs; il rectiûe l'opinion com-
mune qu'une riche collection de ces manuscrits existe à la bibUothèque
de la ville de Bastia (Ombrie). M. le baron Cervoni, bibliothécaire de cette
ville, a récemment fait connaître (Bologne, Gamberini et Parmeggiani»
1897) que des six volumes conservés dans ladite bibliothèque sous le
titre : Malpichi. Consueii niedici, un seulement, le deuxième, contient
des écrits de Malpighi.
— M. Gaudenzio GLiiaETTA a pubUé dans VArchivio délia Società
Romana di Storia patria, XX, p. 95 et suiv., un mémoire sur la prin-
cesse Maria-Golonna Mancini, nièce de Mazarin, et sur ses relations
avec Charles-Emmanuel II, duc de Savoie. Ce qu'il raconte de ces
intimes relations est tout à fait inédit et très intéressant.
— Le second congrès d'archéologie chrétienne sera tenu à Ravenne
dans la semaine après Pàiiues. Pour une somme de 10 1., le secrétaire,
A. Bevignani (3, via Grociferi, Rome), délivrera un billet d'admission
à toute personne, de quelque nation que ce soit, qui désirerait suivre
les travaux de ce congrès.
Espagne. — M. A. Rodriquez WiLLk a réuni en un volume in-^
d environ 200 pages les articles qu'il a publiés dans le Boletin de U
Real Academia de la Hisloria sur Don Francisco de Rojas. Ce person-
nage, deux fois ambassadeur à Rome, ambassadeur en Angleterre,
chargé de négocier auprès de l'empereur Maximilien le mariage de
l'archiduc Philippe avec doâa Juana et de la princesse Marguerite
avec l'infant don Juan, fut mêlé à toutes les grandes affaires poUtiques
CHlOinUDB RT BIBLIOCUPHrB.
iS9
règne de Ferdinand et d'Isabelle. Les documenta réunis par M, Ro-
z Villa sont extraits de la coJleclioQ de don Liiiz de Sala^ar y
&stro, ainsi que des archives de la maison de Teba. Noua signalerons
particulièrement les pièces relatives à la seconde ambassade de Rojas
à Rome. L'érudil bibliothécaire et membre de l'Acadi'mic de l'histoire
a placé en tète de cet opuscule une notice biographique où il a indi-
qué briêvemeDt les principales négociations confiées par les rois catho-
liques à Rojas au cours de ses ^ingt années de carrière diplomatique.
— L'année 1897 a tu le BoUtin de Archivas, Biblioteeas y Mmcos se
transformer en Revista de Archivas, Bibliolteas y Museos. Ed appor-
tant au titre de leur périodique ce léger changement, ses directeurs
ont voulu attirer l'attention sur le développement nouveau qu'ils
tentent de donner à cette publication. Leur réussite serait un des
meilleurs pronostics de la renaissance des études historiques sérieuses
dans la Péninsule, renaissance à laquelle travaillent d'eicellents esprits.
Les bonnes volontés ne manquent pas en Espagne et le succès du livre
de M. Rafaël Altajiiba, notre collaborateur, sur l'enseignement de l'his-
toire', en est une preuve évidente. Espérons que la Revista de Archi-
aos trouvera la même faveur auprès du public. Nous lui souhaitons
bon succès el longue vie.
Brésil. — Sous le titre de Estudos de Hiatoria Paraena. M. J.-Lucio
d'Aïevëdo a réuni quelques articles relatifs à l'histoire de l'État du
ParÂ*. Les plus importantes de ces études ont trait, l'une à la compa-
gnie de commerce privilégiée que le marquis de Pombal institua pour
l'exploitation du Grand-ParÂ, l'autre à l'expulsion des Jésuites de cet
État. Aux historiens qui s'intéressent aux premières expéditions fran-
çaises en Amérique, signalons deux courtes notices, l'une sur le pilote
Jean Alfonse, Saintongeois, dont on a contesté la nationalité, la
seconde relative aux premières apparitions des Français aux bouches
de l'Amazone.
1. f)ari«l AllsmirB, In EnseSanta de la fii^oria. Ce lîTre, imprimé pour la
première fois i Madrid en IS9I, a ea une seconde édition sugmenlée en 1S95.
H. Altaroira ■ étudié de 1res près l'eDHignement supérieur de t'histolre en
France, en Belgique, en AllemiitQe et en An);leterTG, el le succès de son livre
llparfaileraeat justifié par sa compétence toute parlicutiËre en celle queslion,
I. Paré, Tavares Cardozo.
Erratum oo pbëcëdent hliiëho,
;e 147, noie 1. La Correspondance de saint Pierre Cantsias a p»ru cfaez
ir (et non cbei Mohr).
^e zyi. Nos lecteurs auront d'eui-mjmes corrigé le nom de l'érudit
iiolhècaire de Boston, J. Winsor (et non Wiudsor].
470
IlfDEX BIBLIOGRAPHIQUE.
INDEX BIBLIOGRAPHIQUE*
PRÊHI8T0IRB.
Fraipont et LhoesU La race hamaine
de Neanderthal ou de Ganstadt en
Belgique, 142.
Souffret, De la disparité physique et
mentale des races humaines, 142.
ANTIQUiré.
Affl'e. Apollo Medicns, laraire de San-
tosse, 350.
AUard. Le christianisme et l'empire
romain, de Néron à Théodose, 341.
Amauldel. Corpus des inscriptions
antiques de la IV* Lyonnaise, 350.
Aubertin, Recherches sur la fonda-
tion de la ville de Beaune. 350.
Bertrand [Alex,). Les druides et le
druidisme, 348.
Bleser (chanoine de). Rome et ses
monuments, 143.
Boissier [Alfred). En Capoadoce, 250.
Borghesi. (JEurres, t. X, 236, 343.
Bourges. Le monument triomphal de
Gavaillon, 349.
Camoreyt. La ville des Sotiates, 351.
Carton. Étude sur les travaux hy-
drauliques des Romains en Tunisie,
355.
Chappuis. Annibal dans len Alpes, 350.
Clermont-Ganneau. Études d'archéo-
logie orientale, t. II, 236.
Cumont. Textes et monuments figurés
relatifs aux mystères de Mithra, 143.
Cug. Le colonat partiaire dans l'Afrique
romaine, 355.
Delanisheere. De la race et de la
langue des Hittites, 136.
Delaitre. L'Assyriologie depuis onze
ans, 135.
— Les travaux hydrauliques en Ba-
bylonie, 136.
Deloche. Des indices de Toccupation
par les Ligures de la région qui fut
plus tard appelée la Gaule, 346.
Dictionnaire des antiquités grecques
et romaines, 236.
Dufourcet et Camade. L'Aquitaine
historique et monumentale, t. III,
351.
Gauckler. Les mosaïques de Sousse,
354.
GavauU. Étodes sur les raines n»-
roaines de Tigzirt, 354.
Gilles. Le pays d'Arles et ses trms tri-
bas saliennes, 349.
Girard. Manuel élémentaire de droit
romain, 344.
— La date de la tor Aelmtêa^ 344.
Gsell, Inscriptions inédites d'Algérie,
354.
— Observations sur rinscriptioo des
martyrs de Constantine, 356.
Homolle. Les inscriptions de Délos;
le roi Nabis, 340.
Jaulin. Les fouilles de Martres-Toio-
sanos, 349.
JullioU Une façade des thermes ro-
mains élevés dans la capitale des
iSeitones, 350.
La Blanchère. Tombes en mosaîqaes
de Thabraca, 354.
Lafon. L'amphithéâtre de Fourvièresy
350.
Lambin. La Gaule primitive, 346.
Lavertujon. Voy. Sulpice Sévère.
Lièvre. Pirelongue et la question des
piles, 351.
Mowat. Combinaisons secrètes de let-
très dans les marques monétaires
de l'empire romain, 341.
Pallu de Lessert. Les fastes des pro-
vinces africaines, 345.
Parmentier et Cumont. Le roi des
Saturnales, 345.
Pkhon. Histoire de la littérature
latine, 337.
Poydenoi. De Tantiquité de révéché
oe Rayonne, 353.
Reinaàh [Salomon). Les vierges de
Sena. Tarvos Trigaranus, 347.
Reinach [Th.). Une crise monétaire de
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d'histoire sur la ville d'Uzès, 349.
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Monaco et la voie Héracléenne, 349.
Schneider. Das allé Rom, 404.
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Lavertujon, 341.
Toutain. L'inscription d'Henchir-Met-
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1. Nous indiquons ici, outre les ouvrages qui ont été l'objet d'an compte-
rendu spécial, ceux qui sont appréciés dans les Bulletins et dans la Chronique.
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Fonlane (Uariiu]. Les Barbares. 339.
BauileviUe (P. de). PorlraiU et sil-
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moderne, I3G.
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Leclire. Histoire générale, 134.
— L'élecIJuo <lu pape Clément V, 137.
— Rapports de la papautË et de ta
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contre la peste et la conférence de
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Sehnaekenbwg. Dsr Parleignnger
Friedrir.h von Ueiwig. 160.
SehtiMer[B}igim«). WijrttembergiBcbe
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Sehœn. Znr KnabeU' und Jiingllngs-
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sifdo XIX. 377.
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luledanas que te cooserYao en cl
arcbiTo bUiitrico nacional, 372.
Puent*. Refranero meleorulogico de
la Peulnaula ibériei, 394.
Ptiig. Carernas j siroas de Espaôa,
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ciales de la Eapana |çoda. 383.
Qvadrado. Indice de los pririle^os jr
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jaï, embajador de los rcTes catolJ-
C09, 389, kf».
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Caloen (C. van]. Dom Maur Wolter
el les origines de la congrégation
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HauviUer. Ulrich von Cluny, 40â.
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Kuenen. Chronolitgic van bel perzis-
che lydvak der joodiche geschiede-
nis, 135.
Laurain. De l'intervention des laïques,
des diacres et des abbesses dans
l'administration de la Pénitence, 4^7.
Marin [Dom G.). Lectionarius missae
Îuo Toletana ecctesia snle annos
200 ulebatur, 141.
Picard {Edmond). Synthèse de l'an-
tisémitisme, 141.
Fwiiurfwtn.Chrislofiel Colomb; zyne
betreickingen met de Pranciscanen,
141.
Abbelooi, Acta Mar Kardagbi, sub Sa-
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DuponL Lettres sur le Congo, 143.
Eucher (le P.). Essai sur 1 histoire
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Lapie, Les cifilisalions tunisiennes,
36G.
Wahl. L'Algérie, 364.
AMÉRIQUE.
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tution of the United States, 408.
Pérez, La compaHia de Jesiis en Co-
lorabia, 388.
Sehrynmaekers (colonel deY Le Me-
xique. Histoire de rétablissement
et de la chute de l'empire de Maxi-
milien, 138.
Smissen (général van der). Souvenirs
du Mexique, 1804-67, 138.
EXTRÊME-ORIENT.
Bar lez [Ch. de), Nuc-Tchis et Mand-
choux, 134.
— L'histoire de l'empire de Kin on
Empire-d'Or, 134.
— Les religions de la Chine, 135.
CHRONOLOGIE ET PALÉOGRAPHIE.
Facsimiles of royal, historical, litte-
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Grotefend, Zeitrechnung des deut-
schen Mittelalters und der Neuzeit,
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Lagrange {Ch.). Sur la concordance
2ui existe entre la loi historique de
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celle de la grande pyramide de
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Chauvin ( Victor), Le scopélisme^ 136.
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Ekkthal {Bug. d*). Alexis de Tocoue-
ville et la démocratie libérale, 4l4.
Gablet d:AlvieUa. Inlrodactioo à
■ l'histoire des religions, 140.
— La migration des symboles, 142.
Greef (G. de). L'évolution des ero-
vances et des doctrines politiques,
4io.
Laveleye {E. de). Les formes primi-
tives de la propriété, 141.
Legrand {Louis). L'idée de patrie, 369.
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l'histoire au point de vue catholi-
que, 140.
Mange {L. de). Études morales et lit-
téraires, 139.
Nys. Les origines du droit interna-
tional, 142.
Pobédonastze/f. Questions religieuses,
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BIBLIOGRAPHIE,
CATALOGUES ET INVENTAIRES.
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rum de diversis scienciarum ordi-
nibus, 372.
Auvray, Catalogue général des ross.
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Babeton. Catalogue des camées de la
Bibliothèque nationale, 236, 345.
Bâcha {E.). Bibliographies métho-
diques, l44.
Bettelheim. Biographisches Jahrbucb,
404.
Bliss et Johnson. Calendar of entries
in the papal registers, t. III, 46G.
Calendar of the patent rolls. Ed-
ward IV, t. I, 466.
Catalogue général des livres imprimés
de la Bioliothèque nationale, t. I,
458.
Chauvin {Victor). Bibliographie des
ouvrages arabes ou relatifs aux
Arabes publiés de l'Europe chré-
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GrcBsel. Manuel de bibliothéconomie,
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Beron de Villefosse et Michon. Cata-
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LoUee et Gidel. Dictionnaire des écri-
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Omont. Catalogue des collections mss.
et imprimées relatives à l'histoire
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par A. Prost, 240.
INDEX BTBLIOGliPHIQUB.
479
Positions des thèses de l'École des
chartes, janvier 1898, 456.
PotUer, Catalogue des Tases antiques
du LouTre. ^136.
Beinach {Salomon). Répertoire de la
statuaire grecoue et romaine, Cla-
rac de poche, j45.
Torrents» Mss. catalans de la biblloteca
nacional de Madrid, 374.
Vicaire. Manuel de l'amateur de li-
Tres au xix* s., 458.
GÉOGRAPHIE.
HISTOIRE
COMMERCIALE ET ÉCONOMIQUE.
Amë. Dictionnaire topooranhique du
département du Caotal, 240.
Bensa, Histoire du contrat d'assu-
rance au moyen âge; trad. p. J, Fa-
iéry, 112.
BratuU {A. von), Beitnege zur Ge-
schlchte der franzôsischen Handels-
politik, 173.
Brandis (F.). Les théories économi-
ques au XIII* et au xiv* s., 141.
Ekrenberg, Das Zeitalter der Fugger,
146.
Bxbler. Die Geschichte der Fugger^
schen Handlung, 145.
Morel (Fr.). Les juridictions commer-
ciales au moyen Âge, 111.
Naudé iW.), Die Getreidehandelspo-
lilik der europœischen Staaten xiii-
xviii Jahrh., 173.
Valéry. Voy. Bensa,
Vivien de Saint-Martin et Schrader,
Atlas universel de géographie, 238.
480 TABLB DBS MlTlilBS.
TABLE DES MATIÈRES.
ARTICLES DE FOND.
A. DB B018LI8LE. Les aventures du marquis de Laugalerie
(1661-1717) 1,257
Baron du Casse. Le 5* corps de Tannée d'Italie en 1859 . . 301
P. Marion. Les débuU de « l'Affaire de Bretagne » (1763-1764). 43
MÉLANGES ET DOCUMENTS.
A. -F. Lièvre. Le lieu de la rencontre des Francs et des Wisi-
goths sur les bords du Clain, en 507 90
6. MoNOD. M. Thiers et la situation parlementaire en 1839 . 324
BULLETIN HISTORIQUE.
Allemagne. Époque moderne, par M. Phiuppson 145
Aatriohe. M. le chevalier d'Arnetb, par Ed. Wbbtheimbr. . 177
Belgique (1886-1896), par Eug. Hubert 134
Espagne, par R. Altamira 370
France. Travaux sur Tantiquilé romaine, par C. Jullian . . 335
— Moyen âge et temps modernes, par A. Lightenber-
oer, a. MoLUfiER, G. MoNOD et Rod. Reuss. . . . 105,332
Italie. Le Père Luigi Tosti, par G. Rondoni ; Marco Tabarrini,
par C. Paoli 396
COMPTES-RENDUS CRITIQUES.
Albigius et Malagola. Mauri Sarti et Mauri Fattorini De Cla-
ris archigymnasii Bononiensis professoribus. (Ch.-V.
I^anglois.) 192
J. Bryce. Tbe american Commonwealtb. (Gh. Seignobos.) . 416
Fr. Cavazza. Le scuole deir antico studio Bolognese. (Ch.-V.
Langlois.) 192
W. M. CooPER. A bistory of tbe rod. (P.-M.) 403
Eug. d'Eighthal. Alexis de Tocqueville et la démocratie lil)é-
rale. (G. TVeiU.) 414
R. FosTER. Commentaries on tbe constitution of tbe United
States. (Gh. Seignobos.) 408
G. DE Greef. L'évolution des croyances et des doctrines poli-
tiques. (Id.) 418
E. Hauviller. Ulricb von Cluny 405
TABLB DES MATliRBS. 481
Ptge»
Gl. Jannet. Les grandes époques de rhistoire économique.
(Fnnck-Brentano.) 196
G. KuENTZEL. Ueber die Verwaltung des Mass- und Gewichts-
wesens in Deutschland. (G. Blondel.) 193
A. Le Moyne de la Borderie. Histoire de Bretagne. (L. Dn-
chesne.) 482
J. LouTGHisKY. La petite propriété en France avant la Révolu-
tion. (Ph. Sagnac.) 409
L. Lucas. Geschichte der Stadt Tyrus zur Zeit der Kreuzzûge. 405
Ë. Martin- Saint-Léon. Histoire des corporations de métiers.
(Fnnck-Brentano.) 203
J. Mbtzbn. Die ordentlichen direkten Steuern des Mittelalters
im Fiirstbistbum Munster. (G. Blondel.) .... 193
F. Philippi. Die Osnabrûcker Laischaften. (Id.) 193
— Weichbild. (Id.) 193
M. Philippson. Der Grosse Kurfurst F.-W. von Brandenburg.
(G. Pages.) 202
P. PiSANi. A travers TOrient. (L. Léger.) 406
Tb. Schiemann. Heinricb von Treitscbke. (A. Gnilland.) . . 411
A. Schneider. Das alte Rome. (G. Jnllian.) 404
A. Waddinoton. La république des Provinces-Unies, 1630-1650.
(G. Fagnies.) 199
LISTE ALPHABÉTIQUE DES RECUEDLS PÉRIODIQUES
et des soGiéTÉs savantes.
FRANCE.
1 . Académie des inscriptions et belles-lettres 216
2. Académie des sciences morales et politiques .... 426
3. Annales de Bretagne 427
4. Annales de l'Est 428
5. Bibliothèque de l'École des chartes 420
6. Bulletin critique 209
7. Bulletin de correspondance hellénique 422
8. Bulletin historique et scientifique de l'Auvergne. . . 217
9. La Correspondance historique et archéologique . . . 207
10. Le Correspondant 213
11. Études publiées par les PP. de la Compagnie de Jésus. 213
12. Journal des Savants 210
13. Mélanges d'archéologie et d'histoire 423
14. Nouvelle Revue historique de droit 424
15. Polybiblion 210
16. La Province du Maine 218
17. La Révolution française 207,420
18. Revue archéologique 424
19. Revue archéologique du Berry 217
Rsv. HiSTOR. LXVI. 2* fasc. 31
482 TABLB DBS MlTliaSS.
20. Revue biblique internationale 425
21. Revue bourguignonne de renseignement supérieur. . 217
22. Revue critique d'histoire et de littérature 211,421
23. Revue de Champagne et de Brie 217
24. Revue de Gascogne 218
25. Revue de géographie 426
26. Revue de TAgenais 428
27. Revue de rUistoire des religions 212,425
28. Revue de Paris 214
29. Revue de Saintonge et d'Aunis 219
30. Revue des Deux-Mondes 214
31. Revue des Études juives 436
32. Revue des Questions historiques 208
33. Revue des Universités du Midi 215
34. Revue d'histoire et de littérature religieuse .... 208
35. Revue d'histoire diplomatique 209,420
36. Revue générale du droit 435
37. Revue historique du Maine 218
38. Sociélé de l'Histoire du protestantisme français . . . 215,426
39. Société des Antiquaires de l'Ouest 427
40. Société des sciences historiques et naturelles de l'Yonne. 216
41. Travaux de l'Académie nationale de Reims .... 219
ALLEMAGNE.
1. K. Akademie der Wissenschaften (Berlin) 443
2. K. Akademie der Wissenschaften (Munich) ...» 442
3. Arcbiv f. katbolisches Kirchenrecht 437
4. Beitrœge zur Bayeriscben Kirchengeschichte. . . . 219
5. BeitriBge zur Geschichte der deutschen Sprache. . . 439
6. Berichte d. freien Hochstifts zu Frankfurt-a.-M. . . 444
7. Deutsch-evangelische Blœtter 220
8. Deutsche Zeitschrift fur Geschichtswissenschaft . . . 429
9. Diœcesanarchiv von Schwaben 444
10. ForschuDgen zur Kulturgeschichte Bayerns .... 444
1 i . Gesellschaft der Wissenschaften zu Gœttingen . . . 443
12. Geschichtsblietter fur Magdeburg 445
13. ilansischc Geschichtsblaetter 445
14. Hermès 431
15. Uistorische Zeitschrift 429
16. Jahrbuch des k. d. archaelogischen Instituts .... 439
17. Jahrbuch fur Gesetzgebung 223
18. Jahrbûcber d. k. Akademie zu Ërfurt 443
19. Jahrbûcher fur classische Philologie 433
20. Jahrbûcher fur Nationalœkonomie 224
21. Jahresbericht d. histor. Vereins f. Ravensberg . . . 446
22. Jahresbericht d. Schlesischen Greselischaft 446
TABLE DBS MÂTliBES. 483
PagM
23. MittheiluDgen aus d. Stadtarchiv Kôln 446
24. Mittheilungen d. histor. Vereins der Pfalz 446
25. MittheiluDgen d. k. d. archœologischea Instituts . . 439
26. Neue kirchliche Zeitschrift 220
27. Neue Mittheilungen aus d. Gebiet historischer For-
schungen 222
28. Neues Lausitzisches Magazin 447
29. Philologus 433
30. Preussische Jahrbûcher 442
31. Quellen zur aiten (xeschichte Bayreuths 447
32. Rheinisches Muséum fur Philologie 435
33. Ssechsische Gesellschaft d. Wissenschaften .... 225
34. Schau ins Land 223
35. Schriften d. Vereins f. Geschichte d. Baar 226
36. Schriften d. Vereins f. d. Geschichte Bodensees. . . 447
37. Staats-und wissentchaftliche Forschungen 225
38. Studien u. Mittheilungen aus d. Benedictiner Orden . 221, 437
39. Theologische Quartalschrift 437
40. Theologische Studien und Kritiken 438
41. Untersuchungen zur d. Staatsgeschichte 440
42. Westdeutsche Zeitschrift fur Geschichte 447
43. Wûrttembergische Franken 448
44. Zeitschrift d. Aachener Geschichtsvereins 226,448
45. Zeitschrift d. Gesellschaft f. Schleswig-Holstein-Lauen-
burg. Geschichte 449
46. Zeitschrift d. histor. Vereins f. Marienwerder . . . 448
47. Zeitschrift d. Harz Vereins f. Geschichte 449
48. Zeitschrift d. Westpreussischen Geschichtsvereins . . 450
49. Zeitschrift fur deutsche Philologie 222
50. Zeitschrift fur deutsches Âiterthum 440
51. Zeitschrift fiir die gesamra te Staatswissenschaft. . . 225,440
52. Zeitschrift fur die gesammte Strafrechtswissenschaft . 225
53. Zeitschrift fiir die Geschichte des Oberrheins .... 450
54. Zeitschrift fiir Kulturgeschichte 440
55. Zeitschrift fur romanische Philologie 437
AUTRIGHE-HONQRIB.
1. K. Akademie der V^issenschaften 451
2. Archiv fur œsterreichische Greschichte 226
3. Bulletin de l'Académie des sciences de Cracovie. . . 453
4. Jahrbuch des Bukowiner Landes Muséums .... 452
5. Mittheilungen d. Nordbœhmischen Ëxcursionsclubs . 452
6. Mittheilungen d. prœhistorischen Commission d. k.
Akademie der Wissenschaften 452
7. Zeitschrift d. Vereins f. d. Greschichte Mshrens . . . 227, 453
«M
TiiLE DW nnftm.
1. Tbe Academy
2. Ths AtfaenaeuiD. ..... . ' 7
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(. Areblvid doUa Kocietà romana ili tlorla patiia . . . S39
2. ArcfaJvEo tUiticu itallono 230
3. Archivio Btiirico lombonlo 331
A. Archivio atorico pcr le pruvincie napOtflUDA .... 231
5. Archivio atdrici» siciliano MJ
6. Nnovo archivio vonoto Î3Î
7. rtiviRta Btorlca iullana ...
4. Bolletin (le llastîtot genavois . .
î. Jahrbuch Tiir Schweiseriwhe GASchichtP
3. Qnellsn zur Bcbw^ûer Ge»chicbi« . ,
1. AarbiEfer for nordiak Oldk]nii]i|tfaed
S. Danske MagKtin
3. Hifllorisk Tidsdkrïn
4. Ovemgt over Vidcrskabemas gelikoba forbandlioiyr .
5. Videos kabernes âelskabii Skriflar
Chronfr[nR et Bibliographie
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L'un dtx propriétairts-yérants, (1. Moroi
NaB<Dl-la-ttotniu. imprimerie OADPBLnmoinmKBaa.
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