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Full text of "Répertoire historique et archéologique de l'Anjou"

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RÉPERTOIRE  ARCHtOLOGIOlJË 


DE  L'ANJOU 


ANGERS,   IMPRIIIKIUB  OE  COSNIBR  ET  LACHÈSE 


soaÈn  tHPiiuALB  d'agmcultorb,  sciences  et  arts 
ANCIENNE  ACADÉMIE  D'ANeERS. 


COIIISSIOI  ÂRCIÉOLOGIQUE 


DU  DEPARTENBMT 


DE  MAINE  ET  LOIRE 


RÉPERTOIRE  ARGHÊOLOGIQIie 


DE    Ï/ANJOU 


Année  i86S. 


ANGERS 

IMPRIMERIE    DE    COSNIER    ET    LACHÉSE 
ChauMéc  Saint-Pierre,  13 

1863 


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IMPÉRIALE    d'agriculture,  8CIENCB8  ET  ARTS 

ANCIENNE  ACADÉHIE  D'ANSEBS. 


,  rc  3.       COniSSIOI  iRGHÊOLOGIQUE 


f^ 


DU  DEPARTEMENT 


DE  MAINE  ET  LOIRE 


RÉPËRTOIEi  ARGHÊOLOGm 


DE    I/ANJOU 


I 


Année  i86S.  —  Janvier. 


ANGERS 

j^pKlMERIE    DE    COSNIER    ET    LÂGHÈ8E 

Chanmée  Saint-Pierre,  13 

1863 


OQ 


JVJO-I 


(suite). 

i^  Les  masques. 

Au  catalogue  des  objets  du  cabinet  de  M.  T.  Grille, 
dressé  par  M.  Carrand,  ^n  1851,  on  lit  :  «  N<^  561, 
masque  de  femme  en  feuille  d'argent  battu  ^  de  graU'- 
deur  au-dessus  de  nature,  ayant  les  yeùi  évidés;  des 
espèces  de  cbatons  concaves  ornent  le  bord  du  vête- 
ment au  bas  du  cou ,  un  pareil  chaton  est  placé  d^ns 
la  chevelure  au-dessus  du  front.  On  sait  que  chez  les 
Romains,  ce  genre  d'ornement  appelé  par  eux  clavus^ 
.  d'où  laticlave,  était  exclusivement  réservé  aux  personnes 
du  plus  haut  rang.  Quelques  trous  rfui  existent  sur  le» 
bord  extérieur  du  masque  semblent  avoir  été  destinés 
à  le  fixer  à  une  statue^  probablement  celle  de  la  déesse 
adorée  en  ce  lieu.        ^ 

»  N<>  562,  autre  masque,  les  yeux  y  sont  également 
repercés,  seulement  à  l'endroit  des  prunelles.  Les  cavités 
des  yeux  ont  dû  être  remplies  par  de  l'émail  ou  de  l'or.» 
L'emploi  de  l'émail  était  surtout  en  usage  à  cet  effet 
chez  les  anciens,  ainsi  que  nous  avons  pu  le  constater 
en  visitant  le  musée  de  Naples.  Le  moyen  âge  lui- 
même  s'en  est  servi  /voir  la  statuette  en  bronze  de 
N.-D.  du  Ronceray,  à  la  Trinité  d'Angers)., 

Un  troisième  masque,  mais  celui-ci  en  fer  battu, 
trouvé  au  même  lieu  que  les  précédents,  en  Anjou, 
appartient  au  Musée  des  antiquités  d'Angers;  les  deux 
autres  sont  au  Louvre. 

2©  Figurines  votives. 
Elles  sont  classées  dans  le  catalogue  Grille  sous  le 

REP.   ARC.  1 


—  6  — 

no  587.  En  1854,  M.  Macé^  curé  de  N.-b».  d'Allençon 
(le  même  qui  était  pasteur  de  celle  paroisse  en  1836, 
lors  de  la  découverte  des  objets  dont  il  s'agit),  m'assura 
que  des  trois  figurines  votives,  une  seule  était  authen- 
tique*; \èk  deux  autres  auraient  été  faites  après  coup, 
récemment  ad  omamentiim;  avis  à  MM.  les  conserva- 
teurs du  Louvre. 

3^  Les  deux  canihares  avec,  inscription. 

Ils  sont  classée  dans  le  catalogue  Grille  sous  le 
no  573.  Ces  inscriptions ,  en  capitales  nommées  rusti- 
ques^ par  M.  Carrand,  ont  cela  de  particulier  qu'elles 
^oXiX  poiritilléês  ^  c'êst-à-dire  que  leurs  lettres  ont  été 
formées  à  l'aide  d'un  poinçon.  Cet  usage  de  pointiller 
était  connu  dès  Grecs  ;  nous  aVons  pris  note  au  mu- 
sée dû  Capîtôle,  à  Rome,  d'un  vase  de  brohzé  trouvé 
près  d'Âlbano,  et  sur  lequel  on^rema^iViB  une  légèUde 
en  lettres  grtecques  pointillées. 

Nos  deux  inscriptions  du  Sacellurh  ont  été  déchif- 
frées par  M.  Carrand  (catalogue  Grille  page  4-1).  «  Ces 
inscriptions,  dit-il,  sont  à  peu  près  les  mêmes  dans  les 
deux  vases,  et  se  rapportent  à  un  seul  et  même  fait; 
elles  présentent  tant  d'irrégularité  et  d'incorrection, 
qu'elles  ont  jusqu'à  présent  défié  la  perspicacité  de 
tous  les  lecteurs Aussi  sommes-nous  loin  de  consi- 
dérer notre  explication  comme  parfaitement  satisfai- 
sante; nous -la  livrons  sous  toute  réserve.  » 

EX  AYCT.  D.  MINER.  DON.  C  AVDIL  ET  PR.  CRIMIL. 

L.  X.  EMER. 

C'est-à-dire  :  Ex  auctorammto  Deœ  Minervœ  donum  : 


—  7  — 

Caia  Audilia  et  Proba  CrimiUa  quinquaginta  denariis 
emerunt. 

Traduction  :  Don  par  suite  d'un  vœu  à  la  déesse  Mi- 
nerve; Caia  Audilia  et  Proba  CrimiUa  y  l'ont  acheté 
)inquante  deniers. 

L'autre  inscription  ne  diflfère  de  celle-ci  que  par  le 
second  prénom  dans  lequel  on  lit  :  la  (Labiena),  au 
lieu  de  pr  (Proba). 

a  Ce  précieux  ensemble,  composant  le  trésor  d'un 
temple,  a  été  trouvé,  continue  M.  Garrand,  peu  d'an- 
nées après  la  célèbre  découverte  du  même  genre,  faite 
à  Berthouville,  que  l'on  admire  aujourd'hui  au  musée 
de  la  Bibliothèque  nationale.  Sans  analogues  dans  les 
autres  collections  de  l'Europe,  ces  deux  trésors,  à  part 
la  supériorité  artistique  de  celui  de  Berthouville,  of- 
frent entre  eux  de  nombreux  points  de  ressemblance. 
Tous  lieux,  en  -effet,  contiennent  l'idole  ou  l'image  de 
la  divinité  à  laquelle  ils  étaient  consaci^és;...  tous  deux 
effrent  cette  particularité  remarquable  que  la  plupart 
des  ustensiles  y  sont  doubles,  c'est-à-dire  par  paire.  » 

Cependant  je  ferai  remarquer  qu'il  y  a  une  telle  dif- 
féreDce  dans  le  style  des  deux  masques,  que  je  ne  les 
crois  pas  de  la  même  époque,  ou  du  moins  du  même 
artiste. 

4°  Le  disque  représentant  Apollon. 

Voici  ce  qu'en  a  écril  M.  L^jard,  membre  de  l'Insti- 
lut  de  France ,  au  tome  XX ,  2®  partie ,  page  260,  des 
Mémoires  de  l'Académie  des  inscriptions  et  belles- 
letures. 

€  L'imitation  d'un  type  grec,  imité  lui-même  ou  plu- 


—  8  - 

tôt  transformé  d'après  un  type  asiatique,  ne  se  décèle 
pas  moins  dans  un  disque  d'argent,  de  travail  romain, 

représentant  Apollon  avec  l'attribut  du  cyprès Ce 

disque  provient  du  trésor  d'Allençon,  près  de  Brissac, 
en  Anjou.  Ce  trésor  se  composait  de  trente-quatre  ob- 
jets, donl  le  plus  précieux,  sous  le  rapport  de  la  oiy- 
thologie,  du  syinbolisnie  et  de  l'art,  est  sans  contredit 
notre  disque  d'argent.  Ces  trente-quatre  objets  ont  été 

acquis  par  le  musée  du  Louvre Le  disque  présente 

en  relief  et  vu  de  face,  Apollon  debout  presque  nu,  le 
bras  gaucho  appuyé  sur  un  trépied  à  griffes  de  lion; 
dans  sa  main  droite,  le  dieu  solaire  tient  une  branche 
de  laurier.  Une  légère  draperie,  qui  part  de  l'épaule 
gauche,  couvre  une  portion  des  cuisses  et  toute  la 
jambe  gauche  jusqu'au  cou -de-pied;  les   deux  pieds 
sont  nus.  A  droite  et  à  gauche  d'Apollon  s'élèvent  des 
rochers,  dont  la  disposition,  pour  le  dire  en  passant, 
rappelle  les  rochers  qui,  sur  un  grand  nombre  de  mo- 
numents romains,  forment  la  grotte  au  milieu  de  la- 
quelle est  placé  Mithra,  le  dieu  solaire  des  Perses. 
Pour  compléter  l'analogie,  un  corbeau,  fidèle  compa- 
gnon d'Apollou  comme  de  Mithra,  est.posé  sur  les  ro- 
chers placés  à  la  droite  du  dieu.  De  là  l'exemple  du 
corbeau  des  bas-reliefs  mithriaques.  Il  semble  contem- 
pler attentivement  le  sacrifice  auquel  il  assiste,  mais 
ses  regards  s'arrêtent  sur  une  grande  roue  qui  forme 
une  saillie  très-prononcée.  Cette  roue  ne  se  rencontre 
sur  aucun  des  monuments  mithriaques  que  nous  ont 
légués  l'antiquité  persique  et  l'antiquité  romaine.  Je 
ne  sais  jusqu'à  quel  point  il  est  permis  de  croire  que 
sur  ces  derniers,  elle  est  en  quelque  sorte  remplacée 


-  9- 

par  les  roues  d'un  cbar  qui  porte  tantôt  le  soleil,  tan- 
tôt Mithra  lui-même.  Symbole  connu  d'Apollon  et  de 
Némèsis,  et  fréquemment  placée  sous  la  patte  d'un  grif- 
fon, animal  solaire ,  la  roue  rappelle  tont  â  la  fois  le 
mouvement  rapide  du  soleil  et  les  arrêts  du  sort  ou  du 
destin.  C'est  à  ce  double  titre  qu'on  la  voit  ici  auprès 
d'Apollon,  dieu  solaire  et  créateur  qui  préside  à  la  vîe 
et  à  la  reproduction.  Un  grand  cyprès  pyramidal  planté 
entre  le  trépied  et  les  rochers,  achève  de  caractériser, 
comme  symbole  de  vie,  les  foncjlions  dévolues  à  ce 
dieu  ;  et  cet  arbre,  nous  le  retrouvons  sur  des  monu- 
ments romains  consacrés  à  Mithra.      .     .     .  •  .     .     . 

»  Enfin  le  style  du  disque  d'argent  permet  de  faire 
remonter  ce  monument  au  i^r  ou  au  ii«  siècle  de  l'ère 
chrélienne,  c'est-à-dire  à  une  époque  peu  éloignée  du 
temps  où  Auguste  avait  établi  une  colonie  romaine 
dans  la  ville  d'Alexandria-Troas.  > 

M.  Lajard  parle  ici  d'Alexandria-Troas y  parce  qu'il 
trouve  au  revers  des  médailles  autonomes  coloniales 
de  cette  ville  d'Asie,  un  type  analogue  à  celui  de  noire 
disque  angevin.  11  en  conclut  que  ce  type  asiatique  fut 
importé  dans  les  Gaules  (voir  page  107  du  tome  XX 
précité). 

t  L'attribution  du  cyprès  à  Apollon,  continue  M.  La- 
jard, sur  un  disque  romain  trouvé  dans  les  Gaules, 
nous  autorise  sans  doute  à  présumer  que  ce  symbole 
appartenait  aussi  à  la  Diane  romaine,  de  même  que 
nous  l'avons  reconnu  parmi  les  attributs  de  l'ArtémiB 
grecque...  On  attribue  aussi  à  Silvain  le  symbole  du 
cyprès.  » 

On  a  découvert  également,  non  loin  de  N.-D.  d'Al- 


—  40  ~ 

lençon,  une  pièce  d'argent  consulaire  crénelée,  de  la 
classe  de  celles  nommées  numismata  serrata;  elle  est 
de  la  famille  Fufia.  Un  Fufius  avait  été  tribun  du  peu- 
ple l'an  de  Rome  691.  Ces  médailles,  à  bords  dente* 
lés,  sont  communes,  parmi  les  consulaires,  jusqu'au 
temps  d'Auguste.  La  malice  des  faux  monnayeurs  avait 
obligé  de  prendre  ces  précautions  dès  le  temps  de  la 
république.  Cette  mesure  eut  pour  but  de  rendre  ira- 
possible  l'usage  des  pièces  fausses  dites  fourrées,  c'est- 
à-dire  recouvertes  d'une  simple  feuille  d'argent. 

On  a  encore  trouvé,  près  d'Allençon,  des  pièces  à 
l'effigie  ^e  Commode,  de  Domitien,  des  Faustines,  de 
Gordien  III,  et  une  intaille  de  verre  antique  représen- 
tant, d'après  une  pierre  grecque ,  Prométhée,  attaché 
à  un  rocher  par  Vulcain,  la  Force  et  Mercure. 

14o  COMMUNES   DE   CHARGÉ   ET   SAINT-ELLIER. 

Il  résulte  d'une  enquête  administrative  faite  en  1856, 
par  les  soins  de  la  Commission  archéologique,  qu'il 
existe  dans  cette  commune,  sur  le  bord  d'un  étang,  un 
retranchement  romain  que  nous  signalons  pour  mé« 
moire,  ne  l'ayant  pas  encore  vérifié.  Ce  camp  ne  serait- 
il  point  celui  dans  lequel  Fabius  se  retira  lors  de  la 
poursuite  qu'il  fit  de  l'armée  des  Andes,  commandée 
par  Dumnacus,  au  temps  de  J.  César?  <  Gonsequun- 
tur  équités  nostri...  invaduntque  Dumnaci  agmen... 
ita  re  bene  gesta  se  recipiunt  in  castra.  »  Alinéa  27, 
lib.  VIII  de  BeUo  Gallico. 

15o  COMMUNE   DE   SAINT-JEAN-DE-LINIÈRES. 

On  découvrit  en  1762,  une  buire  haute  de  onze 


—  H  — 

ponces  sur  sept  de  diamètre,  de  l'époque  romaine. 
Cette  buire  avait  un  couvercle;  c'était  un  de  ces  vases 
qui  servaient  à  faire  rafraîchir  F  eau  (Voir  Bodin,  t.  I«', 
Bas  AtyoUy  page  53, 1*^  édition). 

16»  COMMUNE  DE  BOyCHEMAINË. 

Au  rapport  de  M.  Béraud,  tome  V,  page- 372  des 
Mémoires  de  la  Société  d'agriculture,  sciences  et  arls 
d'Angers,  il  existe  sur  cette  commune  une  voie  nom- 
mée Chemin  romain^  se  dirigeant  vers  le  nord -ouest. 
Dans  un  champ  voisin,  on  a  découvert  des  fragments 
de  tuiles  à  talon,  du  ciment,  des  pierres  oolithiques 
et  des  cercueils  en  pierre  de  Doué. 

t7o  COMMUNE  d'INGRANOES. 

Vers  1813,  on  a  trouvé  à  Ingrand.es  quatre  cents 
monnaies  romaines  d'Auguste,  en  argent. 

Ce  nom  d'Ingrandes  et  d'Ingrande  se  rencontre  en 
sa  endroits.  Savoir  :  1°  notre  Jngrandes-sur-Loire  (1); 
2«  le  fief  d'Ingrandes  sur  le  territoire  de  la  Chapelle- 
HoUin,  près  de  Pouancé  (2)  (Maine-et-Loire);  3°  In- 
grandes près  de  Châteaugontier  (Mayenne);  4^  Ingran- 
des près  de  SaintrPatrice,  non  loin  de  Langeais  (Indre- 
et-Loire);  5®  Ingrande  près  de  Ghâtellerault  (Vienne); 
6®  Ingraqde  près  (je  Le  Blanc  (Indre). 

Les  quatre  premiers  lieux  sont  situés  aux  limites  de 

(i)  Il  y  a,  écrit  Ménage  dans  son  Sablé,  page  136,  une  grosse 
pierre  dans  le  bourg  d'Ingrandes-sur-Loire ,  qui  fait  la  séparation  des 
âeui  provinces  de  TAnjou  et  de  la  Bretagne. 

(S)  Voir  la  page  90  d'un  recueil  d^aveux,  titre  de  Champîré, 
B.  piété  par  M.  Alfred  de  Falloux. 


—  12  — 

l'Anjou,  d'avant  1789,  savoir  :  deux  vers  l'ouest,  do 
côté  de  la  Bretagne,  un  vers  nord,  du  côté  du  Maine 
el  un  autre  vers  l'est,  du  côté  de  la  Touraine. 

Quant  aux  deux  derniers  lieux  portant  le  nom  d'In* 
grande,  le  n^  5  est  situé  sur  la  limite  du  Poitou  et  de 
la  Touraine,  et  le  n^  6  sur  la  frontière  du  Poitou  et 
du  Berry. 

Ce  nom  d'Ingrandes  ne  parait  donc  pas  absolument 
spécial  à  l'Anjou,  et  ceci  compromet  quelque  peu  Té- 
tymologie  de  ingressm  Andiuniy  entrée  des  Andes,  que 
nous  donne  Pierre  Eveillard  en  son  livre  manuscrit  de 
la  juridiction  du  Présidial  d'Angers ,  où  il  assure  que 
«  la  ville  d'Ingrandes-sur-Loire  est  appelée  ingressus 
»  Andium  dans  le  cartulaire  de  St-Aubin  d'Angers.  » 

D'autres  titres  la  nomment  Ingranda  et  Hingranda^ 
Ménage  admet  Igorandis  et  rejette  ingressus  Andium 
(Sablé,  page  136). 

Quoi  qu'il  en  soit,  il  paraît  que  ce  nom  d'Ingrandes 
emporte  l'idée  de  limites,  du  moins,  si  l'on  doit  en 
croire  ce  passage  des  Bulletins  de  la  Société  des  anti- 
quaires de  l'ouest,  1«r  trimestre  1858  :  «  Sur  la  reraar- 
»  que  faite,  dit  M.  Ménard,  par  M.  l'abbé  Toury,  que 
»  huit  localités  nommées  Ingrandes,  Eygurande,  Igue- 
»  rande,  Ingranne  sont  toutes  situées  sur  des  confins 
»  de  provinces  ou  de  diocèses ,  notre  confrère  M.  Gar- 
0  din,  si  versé  dans  la  connaissance  des  idiomes  celti- 
»  ques,  a  reconnu  que  d'après  ses  racines,  le  mot 
»  IngrandeSy  sous  les  différentes  formes  précitées,  em- 
»  porte  l'idée  de  limite.  Ainsi  le  mot  gaulois  Ingrandes 
»  a  été  traduit  par  le  mot  latin  fineSy  comme  le  mot 
î>  syrien  Baalbeck^  ville  du  soleil,  a  été  traduit  par  le 


—  48  — 

>  mot  grec  Héliopolis,  qui  a  le  même  sens,  et  la  phi- 
»  lologie  confirme  ainsi  la  géographie.  »  (Voir  encore 
mêmes  Bulletins,  1853,  page  100.) 

Rapprochement  curieax,  un  auteur  angevin,  Pas- 
chal  Robin  du  Fauz,  s'exprime  ainsi  :  c  Je  trouve  que 
le  mot  d'Anjou  s'écrivait  diversement  ango,  andgev^ 
ANDGVN  et...  AKJOU,  dout  nous  pouvons  conjecturer  que 
les  termes  de  GO,  on  gav,  ou  gev,  ou  gvn  signifient 
extrémité^  fin  et  limite.  » 

Paschal  ne  nous  dit  pas  en  quelle  langue  tous  ces 
monosyllabes  peuvent  signifier  limite  (voir  Rép,  arch.^ 
ann.  1861,  pag.  19). 

D'un  autre  côté,  François  Desrues,  dans  sa  descrip- 
tion de  la  France,  page  225,  écrit  :  «  Le  pays  d'Anjou 
est  de  petite  étendue,  servant  de  bornes  et  finages  à  la 
Gaule  celtique.  » 

Un  jeton  en  cuivre  du  xvi*  siècle  nous  donne  aussi 
cette  légende  : 

CLEMENT.  ALEXANDRE. 

GARDE.  DE.  LA.  MON. 

^   DE.    ANGIERS.    ANTIQUE. 

CLEF.    DE.    FRANCE. 

Cette  dénomination  de  clef  de  France  implique  égale- 
ment l'idée  de  limite.  Le  nom  de  notre  province  où 
finissait  ce  qu'on  appelait  . encore  ^  au  ix^  siècle  la 
France,  vers  sud,  aurait  donc  été  synonyme  de  fron- 
tière. 

Mais  revenons  à  l'examen  du  mot  Ingrandes.  D'après 
les  uns,  nous  venons  de  voir  qu'il  signifie  limites  en 
général ,  et  suivant  les  autres ,  limites  spéciales  à  l'An- 


--14  — 

jou,  ingressus  Andium.  Bodin,  dans  l'édition  Montalant, 
Angers  1847,  à  la  page  4,  admet  avec  Pierre  Eveillard 
ce  sens  spécial,  et  il  en  conclut  qu'à  l'époque  romaine, 
d  Ingrandes,  sur  la  rive  droite  de  la  Loire,  séparait 
les  Angevins  d'avec  les  Armoricains;  Ingrandes,  prés 
Châleaugontier,  d'avec  les  Aulerces  -  Cénomans  ;  In- 
grandes, près  Saint-Patriee,  d'avec  les  Turones,  et  In- 
grandes-sur-Vienne, d'avec  les  Pictones.  > 

Il  suit  de  là  que  l'Anjou,  sous  les  Romains,  aurait 
occupé  le  nord  de  l'Aquitaine  depuis  Cbalonnes  jus- 
que vers  Mirebeau.  Or,  ceci  est  démenti  par  l'énumé- 
ration  que  fait  Pline  {Hisi.  nat.,  lib.  IV,  cap.  xxxiii) 
des  divers  peuples  de  l'Aquitaine,  parmi  lesquels  les 
Angevins  ne  se  rencontrent  pas  (1);  d'où  résulte  qu'au 
temps  de  Pline,  l'Anjou  avait  pour  limite  la  Loire, 
vers  sud. 

Si  d'un  autre  côté,  il  parait  certain  que  le  pays  des 
Mauges  n'a  été  annexé  définitivement  à  l'Anjou  que 
par  suite  de  la  bataille  de  Saint-Jouin  en  1083,  et  du 
traité  de  1037,  en  vertu  duquel  Guillaume  le  Gros, 
comte  du  Poitou,  fut  rendu  à  la  liberté  par  le  comte 
d'Anjou  (2),  on  doit  en  conclure  que  c'est  seule- 
ment au  XI©  siècle  que  les  limites  de  l'Anjou,  au-delà 
du  Layon ,  s'étendirent  jusqu'à  Ingrande  du  déparle- 
ment  de  la  Vienne. 

Cependant  Thibaudeau,  tome  I«r,  page  422,  reculé 
d'un  siècle  environ  cette  annexion.  «  Il  paraît,  dit^-il, 

(1)  Voir  Bulletins  de  la  Société  des  antiquaires  de  l'ouest,  1«  tri- 
mestre de  1858,  page  284. 

(2)  Mémoires  de  la  même  Société,  tome  V,  année  1838,  pages  440 
et  441. 


—  15  — 

qae  les  Mauges  n'ont  été  réunies  à  TAnjou  qu'en  même 
temps  que  le  Loudurwis  et  le  Mirebelais  ont  passé  aux 
comtes  d'Anjou,  c'est-à-dire  vers  958.  »   . 

Roger,  pages  1.S7-138,  d'après  Jean  de  Besly,  admet 
aussi  cette  époque  du  x^  siècle,  t  Jean  de  Besly,  écrit- 
il,  rapporte  au  commencement  du  règne  de  Robert, 
une  guerre  qu'il  dit  qu'eut  notre  Geoffroy  Grisegonelle 
contre  Guillaume  III,  comte  de  Poitou  et  duc  d'Aqui- 
taine, laquelle  dura  un  an.  Il  ajoute  que  l'Angevin  fut 
contraint  de  se  soumettre  à  Guillaume,  qui  donna  à 
Grisegonelle  Mirebeau  et  Loudun  pour  les  tenir  à  foi 
et  hommage  des  comtes  de  Poitou,  et  encore  quelques 
autres  terres  que  les  comtes  d'Anjou  ont  toujours  der 
pais  ce  temps-là  repris  et  relevé  des  comtes  de  Poi- 
tou. > 

Le  PepliAs,  page  133,  tome  I^,  et  mon  manuscrit 
des  sétiéchaux  d'Anjou,  ouvrage  du  dernier  siècle,  con-» 
firment  rue  Mirebeau  était  autrefois  du  comté  d'An-r 
jeu  (1). 

Dans  un  manuscrit  que  je  possède,  intitulé  Tablettes 
angevines^  année  1761,  pages  461-162,  on  voit  que  la 
terre  de  Montcontour  relevait  du  château  d'Angers. 
BoulainviUiers^  tome  I^^^  page  9ây  dit  aussi  que  les 
appellations  de  la  justice  du  duché  de  Richelieu  allaient 
au  Présidial  d'Angers,  et  il  ajoute: Que  parmi  les  villes 
murées  de  l'Anjou,  l'on  compte  Montcontour  et  Riche- 
lieu (page  72,  tome  VI). 

(1)  Mirebeau  avait  été  bâti  par  Foulques  Nerra,  comte  d'Anjou, 
en  1020.  Voir  Tablettes  angevines  ^  page  161.  Le  même  comte  avait 
aussi  fait  construire  en  Poitou  Faye ,  Montreuil ,  Passavant  et  Maulé- 
vrier.  Hiret,  page  188. 


-  16  — 

Enfin,  si  l'on  jette  les  yeux  sur  la  carte  de  Cassînî, 
no  66,  on  verra  qu'au  sud-ouest  de  Loudun  et  non 
loin  d'Oiron,  est  un  petit  territoire  exprimé  par  un 
cercle  de  points,  qui  a  pour  centre  Saint-Généroux, 
et  qui  porte  le  nom  très-significatif  d'ANJOU. 

En  résumé,  ce  n'est  que  depuis  le  xi^  siècle,  suivant 
les  uns,  et  le  x«  selon  d'autres,  que  Loudun,  Riche- 
lieu ,  Montcontour  et  Mirebeau  furent  annexés  civile- 
ment à  l'Anjou  par  suite  des  conquêtes  de  nos  remuants 
comtes  d'Anjou  de  la  race  ing^lgérienne.  Ces  annexions^ 
chose  curieuse,  ont,  comme  nous  venons  de  le  voir 
notamment  sur  la  carte  de  Cassini,  n*  66,  laissé  quel- 
ques traces  jusqu'au  xviiio  siècle. 

Si  maintenant  vous  prenez  garde  aux  situations  de 
Loudun,  Montcontour,  Richelieu  et  Mirebeau  entr'elles, 
vous  verrez  que  nos  comtes  d'Anjou  ,  en  faisant  leur 
pointe  dans  cette  partie  du  Poitou,  touchèrent  naturel- 
lement Ingrande-sur-Vienne,  près  de  Châtellerault,  et 
s'il  est  vrai  que  le  nom  d'Ingrandes  ait  pour  étymologie 
ingressîis  Andium^  tout  porte  à  croire  que  ce  lieu  d'in- 
grandes-sur-Vienne  aura  limité  leur  conquête,  et  qu'ils 
lui  auront  donné  cette  dénomination. 

J'irai  plus  loin,  il  ne  me  paraît  pas  improbable  que 
ces  mêmes  comtes  d'Anjou  poussèrent  leur  pointe  en- 
core plus  au  sud  et  jusque  vers  l'Ingrande  du  Berry, 
près  Le  Blanc  (Indre);  en  effet,  la  distance  d'Ingrandes- 
sur-Vienne  à  Ingrande  près  Le  Blanc,  a'est  que  de 
quinze  lieues  et  dans  la  même  direction  ;  mais  c'est  là 
une'  conjecture  qui  ne  pourra  se  vérifier  qu'autant 
que  Ton  trouverait  un  jour,  un  document  constatant 
que  nos  comtes  d'Anjou  auraient  guerroyé  dans  le 
Berry. 


—  47  — 

Quoi  qu'il  en  soit,  on  voit  en  quoi  nous  différons 
d'avec  Bodin.  Cet  auteur,  d'une  façoik  toute  conjectu- 
rale, fait  d' Ingrandes-sur-Vienne  au  temps  des  Romains ^ 
la  limite  sudest  de  l'Anjou,;  ce  qui  ne  peut  être  d'a- 
près Pline.  Nous,  au  contraire,,  nous  n'adoptons  celte 
limite,  pièces  en  mains,  qu'après  le  x®  siècle.    . 

Revenant  à  Ingrandes-suc-Loite,  jnousdirons  que  le 
prieuré  qui  lui  a. donné  naissance  ou  plutôt  qui  a  fa** 
vorisé  son  développement,  fut  fondé  en  4095  par  Hor^ 
rie  ou  Orry,  du  Louroux-Boltereau.  {Morice ,  preuves , 
tome  1er,  page  486).  Cette  ville  obtint^  dans  la  suite, 
le  titre  de  baronnie  avec  le  droit  de  députation  aux 
Etats.  Elle  a  soutenu  plusieurs  sièges,  et  sa  verrerie 
a  été  très-longtemps  renommée  par  4a  beauté  ide, ses 
bouteilles  (voir  .Manet,  Histoire  de  la  petite  Bretagne^, 
tome  1er,  page  19).        i 

18o  COMMUNE  DU   LOUROUX-BÉCONNAIS. 

On  voit^  dans  cette-  commune,  une  enceinte  à  peu 
près  carrée,  pouvant  contenir  t  hectare  i-j^i  en  éten- 
'lue,  elle  se  nomme  les  Châte&ux,  Un  fossé  et  une  le* 
vée  l'environnent,  lé  tout  formant  une  défense  de  3 
mètres  en  moyenne  de  hauteur,  sur  5  mètres  de  lar- 
geur. Point  de  briques  à  rebord,  ni  de  médailles  ro- 
maines, aucune  trace  même  de  construction,  ni  sou- 
venir qu*il  y  en  ait  eu.  Le  nom  seul  de  les  Châteaux^ 
analogue  à  celui  de  les  Hauts  Châteaux  que  porte  une 
pièce  de  terre  de  la  commune  de  Chan^bellay  où  se 
trouvent  des  débris  romains,  et  l'enceinte  précitée 
nous  autorisent  à  croire  qu'il  y  avait  là, -peut-être  bien, 
un  subitum  castrum.  C'est  aussi  Fopinion  dq  M;  Eusébe 


—  Î8  — 

Bore,  maire  du  Louroux-Béconnais^  qui  nous  conduisit 
sur  les  lieux  en  1858. 

,  Une  voie  romaine,  du  reste,  ne  passait  pas  très-loin 
de  cette  enceinte  fortifiée;  voici  ce  que  nous  en  écri- 
vait,  en  1850,  M.  Briau,  docteur  médecin,  à  Paris. 

€  La  commune  du  Louroux-Béconnais  est  séparée  de 
celles  d'Angrie  et  de  Vem,  par  la  rivière  de  TErdre, 
qui  prend  sa  source  dans  ce  pays.  Le  point  où  ces 
trrois  communes  se  touchent  se  nomnne  le  6W,  et  le 
long  de  ce  petit  village,  piasse  un  vieux  chemin  qui 
conduisait  du  bourg  d'Angrie  à  celui  de  la  Pouèie,  On 
allait  autrefois  par  là  d'Angers  à  Rennes.  Des  deux 
côtés  de  Tarche  dite  du  Guéy  existe  une  chaussée  pa- 
vée, longue  de  145  mètres;  une  moitié  à  l'est  du  pont 
se  trouve  sur  la  commune  du  Louroux,  l'autre  à  l'ouest 
est  sur  le  territoire  d'Angrie.  Les  bordures  (margines) 
sont  à  vives  arrêtes;  sa  largeur  est  de  5  mètres.  Des 
fouilles  me  firent  découvrir  une  couche  supérieure  for- 
mée de  grandes  pierres  de  quartz  non  taillées,  mais 
placées  en  ordre  les  unes  auprès  des  autres.  Les  in- 
terstices formés  par  l'inégalité  des  surfaces,  étaient 
remplis  par  des  pierres  plus  petites;  toutes  ces  pierres 
étaient  placées  debout.  Cette  partie  supérieure  repo- 
sait sur  un  lit  de  sable  blanc,  qui  lui-même  recouvrait 
une  couche  de  cailloutis  formée  de  petites  pierres. 

»  L'épaisseur  totale  de  la  chaussée  était  de  0^66^^  dé- 
composée ainsi  :  couche  de  cailloutis  ^Q^y  lit  de  sable 
15^^  pavé  supérieur  20^.   » 

Quelques  mots  maintejiant  sur  Tétymologie  du  nom 
de  Lor<mx  ou  LQurouXy  car  les  deux  s'écrivent.  La  carte 
de  Gassini  porte  LoroUos. 


Un  tiers  de  sou  d'or  que  possède  M.  le  docteur  Briau^ 
présentement  bibliothécaire  de  l'Académie  impériale 
de  médecine,  porte  au  revers  lorovio  vico,  on  Tattri- 
bne  au  Loroux^Béconnais.  M.  Briau  prétend  ^e  loro- 
vio vient  du  celtique  lour  ior,  signifiant  lépreux,  et 
de  hws  (haus),  signifiant  habitation ,  inomme  on  le  voit 
en  allemand  haus,  en  anglais  home;  on  a  donc  Lorhv^s 
qui  veut  dire  habitation  de  lépreux.  Cette  explication  se 
trouve  en  quelque  sorte  confirmée  par  ce  qui  suit  : 

Un  gros  bourg ,  nommé  le  Louroux ,  existe  près  de 
Mantelau  en  Touraine.  Don  Gervaise  pense  que  ce  nom 
provient  de  libroso^  lebrosoy  librosso  isignifiant  léprose-^ 
rie,  (Voir  Vi&  de  saint  Martin^  par  Sulpicse  Sévère, 
page  340,  édît.  Panckoucke,  184f8,  et  Revue  deVAnjou^ 
page  240,  juillet  1857.) 

C'est  aussi  l'opinion  de  M.  Valois.  (Voir  Vie^  de  saint 
Martin  9  par  Paalin  de  Périgueus,  page  216,  édition 
Panckoucke,  .1850.)    -^  , 

D'autres  croient  qi;ie  le  nom  de  Louroux  ou  Loropx» 
qui  s'écrivait  aux  xui«  et  xiye  siècles  LORAfORio,  dérive 
de  Oratorium.  M.  l'abbé  Brouillet,  curé  du  Lorou*, 
nous  naarquait  en  1851  qu'il  avait  trouvé  «n  titre  fort 
ancien,  portant  Parochia  ab  Oratorio  bisconn^nsi. 

Il  existe  un  autre  endroit  du  même  nom  en  Anjofi  : 
le  Leroux  en  Monnaye,  près  de  Verqantes.  Voici  ce 

■ 

qu'en  dit  Hiret  (Antiquités  d'Anjou,  page  249)  : 
f  Foulques  V  fist  bastir  l'abbaye  de  l'Oratoire  ou  d'Ou- 
lerous,  et  y  mit  des  moines  Bernardins.  *, 

Ce  passage  va  bien  pour  ceux  qui  admettent  l'étymo- 
logie  Oratorium.  Us  peuvent  encore  s'appuyer  de  ce 
fait  que  ce  furent  des  moines  Bernardins  du  Loroux  en 


—  ao  — 

Monnaye  c  qui  s'en  allèrent  bâtir,  en  1134,  l'abbaye 
de  Pontron,  située  près  du  Loroux-Béconnais.  >  (Hiret, 
page  251 .) 

Cela  étant,  il  leur  semble  probable  que  le  nom  de 
Loroux,  arrondissement  d'Angers,  est  venu  de  celui  du 
Loroux,  arrondissement  de  Baugé^  et  comme  d'après 
Hiret,  le  nom  de  Ouleroas,  de  Loroux,  car  il  l'écrit 
des  deux  manières,  est  synonyme  de  l'Oratoire,  il 
s'ensuit  à  leur  sens  que  le  nom  de  Louroux-^Bécon- 
nais  dérive  certainement  de  Oratorium  ;  en  consé- 
quence, il  faudrait  écrire  le  Loroux  et  non  pas  le  Loti- 
roux,  la  double  consonne  L  n'étant  là  que  par  euphonie. 

Quoi  qu'il  en  soit,  le  Loroux  fut  un  viens  qui'  porta 
successivement  ces  noms  :  Lorovio^  Oratorio,  Loratorio, 
le  Loroux,  et  seulement  à  la  fin  du  xviije  siècle  le 
Louroux.  V   . 

19^  GOMMUKB  DE   DENiE. 

Dans  cette  partie  de  l'île  de  Saint-Jean-de-la-Croix; 
qui  dépend  de  la  commune  de  Denée,  au  village  des 
Jubeaux  bu  Jobeaux,  sur  un  sol  élevé  et  qui  n'est  bai- 
gné que  pendant  les  plus  grandes  eaux,  l'on  a  décou- 
vert, vers  1859,  en  tirant  de  la  pierre  pour  là  cons- 
truction de  la  nouvelle  église  de  Sain l-Jean-de-la-Croix, 
à  1"^  50c  (jje  profondeur,  un  amas  assez  considérable 
de  briques  à  rebords  et  une  lame  de  hache  en  fer, 
fornie  de  coin  tronqué -vers  la  pointe.  Le  champ 
où  cette  découverte  s'est  effectuée  se  nommé  le  champ 
de  la  Cave,  il  appartient  à  uii  sieur  Pinard. 

V.  Godard-Faultrier. 


(l,a.mit^  t^u  prochain  numéro). 


I,  « 


1 


ANTIQUITES  iMEROYIIVGIElVNES. 

JVttrrusTnatîouje.    Antfeinne . 

Planche  .    3  * 


Pièces  portant  le  nom  d'Angers 


en  Atottoaramnie. 


N. 


TRIENS  D'OR 


a^jHirtvnant  nu,  Atuiée   d 'Angers. 


1. 


<^} 


2. 


^\>^ 

s 


i 


) 


Cotfi^riMise. 
Pt-fT 


I 


£rJ)auiviVe. 


jÀt  CMiiierâlachè.^Auaert. 


ANTIQUITES  MEROVINGIEMES. 

Nu  mis  m  atiaue  .'Innei'ùu . 

Planche   2' 


B 


'^S4 


Coifiùrouse^ 


> 


Comhrouse, 
PL4f 


JSr  DainvtJle.. 


Lilh.  Cosmer  â  Liuhfse^  /inytrj 


ANTIOUITÉS  MÉROVINGIENNES. 

■  Planche  1'!' 


TRANSITION 

du  Monna^a^e  ROMAIN  au  Monnayatft 
MEROYING-IEN 
EN  ANJOU. 


OR 


Triens    de  l'Empereur 

ANASTASE, 
D'ANGERS . 


l'jrtrait  des  Annales  déDidron,  tome  Vll^pa^es  fOetîI,  (h'twuve  jV.!'fâ. 


IrOaùiaiUe. 


£Uk  Côstùer  S  laJiM;  Âiwerf. 


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iiriQDITËS  l£R0Vn6IÉIIES 


'î-    : 


..I 


NUMISMATIQUE   ANGEVINE 


«7 


Dans  le  tome  4^,  t^  cahier,  année  4869  des  Mé->> 
moires  de  la  Société  impériale  d'agrictiltiiFQ,  sciences 
et  arts  d'Angers^  et  i dans  le  Répertoire  Archéologit[ue 
de  l'Anjou,  n^  d'août^  même  année,  nous  avons  moptr^ 
que  PAnjou  avait  sa  monnaie  propre;  à  l'époque  cel-^ 
tique;  que  cette  tncmnaâe  coinplè  trois  périodes  :' là 
\^y  àiie  Auto^ama^  allant  de  Tannée  800  avant  J^^C^ 
jusqtrJen  278;  la  2«,  'dite  ^ai/!fo-y?fe<?9i^,  commençant 
▼ers  rangée  278  avaiit.  J!.><^C..<et  finissant  à;  T^fl  100; 
la  â^,  dite  ^^2o'ji*i)miâ2W9  qai;^part  deil'^i^tlOQ  avant 
J.-G.  et  qui  va  jusqu'à  l'an  21  de  l'ère  chrétienne. 

Nous avonsmontré qiae dans  ia pifemière  et  la  seconde 
période,  nos  pièces  étaient  muéltes,  mâife  que  dans  la 
troisième,  elles  avaient  dés  légendes ,' îégëàdés  pré- 
cieuses  pour  notre  histoire,  puisqu'elles  nous  révèlent 
les  premiers  noms  de  notre  peupl^fjlei  s^ngeyiue,;,  aiflsi, 

EEP.    ARC.  2 


—  22  ~ 
lisons-nous  :  amdeg  —  andego  —  anbegom  —  ande- 

GOMBO. 

M.  Lenormant  croit  que  ces  monnaies  portant  lé- 
gendes, sont  contemporaines  de  la  conquête  de  César. 

Nous  avons  également  montré  que  dans  les  deux  pre- 
mières périodes,  les  figures  sont  emblématiques^  et 
plus  réalistes  dans  la  troisième,  où  elles  représentent 
en  effet  quelquefois  Pallas  et  Diane.  Dans  cette  der- 
nière période,  la  division  monétaire  des  Romains  par 
deniers,  demi  deniers  ou  quinaires,  est  admise  comine 
aussi  le  type  artistique. 

Nous  avons  dit  qu'Auguste  s'efforça  le  premier  de 
faire  cesser  l'usage  des' mionnaîes  provinciales,  et  que 
Mécène  chercha  les  moyens  d'établir  l'uniformité  des 
poids  et  des  mesures,  qui  paraît  n'avoir  été  constituée 
que  sûitis  Vibère.  ,  «  • 

De>puis  lors  rAfi}ou,  comme  les  autres  peu{>lades  d6 
la  Gaule^  icee^a  idiovoir  bëi  monnaie  propre»,  et  ce  fut 
jmqueiversyla'fiiiidiiv^  siècle.  À  cietle'époque^  gufi  cldt; 
yëre  Tqmaiiiiey  noii$  commençons  à  ieirouivér Je  now 
d!Angers,  inmis  en  abrégé,  sur  un  triens  {\)  ée^  X em*. 
pôreur  Anaslàâô.  €e  itriens  a  été 'publié,  par  M.  E.Carf 
tier^'dans:  les, Annales  de  Didron,  ^ages:70Let  71  du 
télttie  VII,  g^âvuTe  aP  15.  On«  voit  /sur  cette  pièce,  der 
tant  mnvônge,  leimonograpame  N»  R  entre  les  lettres 

'.t(i)  )Tiêrs((leJ3ou?dM.>«toiaoiiBaies  m^ontifieoiiist  étaient  le^ou 
»  t(i>f;i(|p/tdtf#),  c(m, pesait,  8^  grains. et  valait .40  deui^  d*iœgept; 
»  le  demi  sou  isemU);  le  tiers  de.  sou  (triens),  et  le  denier  d'ar- 
»  gent,  ou  saïga,  pesant  21  'crains.  *  Voir  manuel  de  Numismatique 
(iii  moyen  âge  '  et  moderne,  pa&r  J.'B.  A  .'À.  BâcUléléiùy,' pâge'lr«, 
aadrÉnWèïoiïédieRôret.  ^=     '-' ''    "    "       • 


V        ! 


^88  — 

S.  Gm  qui  pemient,  dit  M.  Cartier ,  rappeler  le  nom 
à'^Agers,  Andegavis.  (Voir  notre  planche  1^.) 

Ce  Iriens  établit  en  quelque  sorte  la  transition  du 
monnayage  angeVin  sous  les  derniers  lenuper^aur^,  qui 
avaient  encore  quelque  apparence  ide  pourvoir  >^n  «Ooci* 
dent;  établit,  dis^je^  la  transition  a«  irjègiie  des. rois 
mérovingiens  dans  notre  contrée. 

On  sait,  en  effet,  que  Clovis  I^r  n'envahit  [rArmorique 
qu'en  497,  et  qu'Anastase ,:  qui  fut  fait  .  emperciiibr 
en  491,  lui  conféra,  «vers  507,  les  honneurs  du.  con^ 
sulat.  C'est  entre  ces  deux  dernières  dates  que  notre 
iriens  angevin  fut  sans  doute  frappé;  c'est  égalemei^t 
«ntre  ces  deux  idates  que  doit  être  plaoéie  cencueil  m 
plomb  d'un  monétaire  y  trouvé  à:  la  ;gadre  .  d'An^l!S 
«n  1853,  et  «classé  sous  le  np  VU  siu  Musée  d'Angers, 
parmi  des  cercueils  seÉnblables. 

Ce  qui  donne  à  celui  du  <no  VII  un  intérêt  spécial, 
ce  sont  les  reliefs  de  cinq  pièces  romaines  :  ;  trois  .de 
grand  et.  deux  de  petit  olodule..  Ces  eoi [freintes  de 
{liéces  «e  voient  {l*è&-bîei|..à<riMénieur  idudit. cercueil» 
dn  )oAté  de  la  tête., Les  troôs  grandes temprcÂntes  datent 
du  faant  empire;  quant'  aux  deux  petites ,  elles  . ne 
peuvrat  êltre  d'une  époque  plus,  ancienne  qu^.ie  règne 
des  Posthume  et  des  Tetricus  (lUP  siècle)... 

Il  ne  fettt  pas  s'étonner  de.  voir  ides  empreintes*  |de 
médailles  romaines  d'nn  type: de  beaucoup: antérieur  à 
l^lge  do  cercueil' i^  question  >€ar  c'est  une  .vâtité 
acquise  que  lés  types  nomains^  dansS^s  monnaies^  pe:r-^ 
sistèrent  jusque  sous  les  Mérovingiens,  ce  qui  a  même 
fait  dire  à  M.  Leblanc,  .page  2  dé  son  Traité  des  Mon- 
naies de  France  :  a  Que  la  con^orjfnité  (i^  poids  j(entre 


—  m  — 

»  la  monnaie  romaine  et  celle  des  Francs)  le  persua- 
»  dait  gué  les  Fronçai»  imitèrent  .les  Romains  dans  la 
»  fabrication  de  leurs  mopnaies.  » 

Personne  n'ignore,  en  outre,  que  le  tombeau  de 
GhiMétïc  renfermait  des  monnaies  romaines. 

Mais  pourquoi  ces  empreintes?  On  s'explique  bien 
comment  des  pièces  de  diverses  époques •  se  trouvent 
dans  les  tombéauK;  mats  des  empreintes,  c'est  atttre 
chose.  A  celte  question,  nous  croyons  pouvoir  répondre 
que  nos  empreintes  de  pièces  sont  là  pour  indiquer  la 
qualité  du  défunt  :  or,  cette  qualité  ne  pouvait  être 
que  celle  A^  monétajire  ou  Ae  monnûyeur^  noms  divers 
que  l'on  donnait  aux-  garaéts  et  aux  fabricateurs  ides 
anciennes  monnaies;.  .  > 

Le  cercueil  en  question,  rapproché  de  la  pièce  ismge- 
vine  frappée  sous  l'empereur  Anastase^  prouve  donc 
que  nous  avions- un  atelier  de  monnaie,  en  nos  murs, 
vers  la  fin  de  l'ère  galio-roipaine,  c'estrà-dire  entre  les 
années  491  et  507j  Les >  ateliers  monétaires,  à  la  fin>d.e 
l'Empire,  s'étaient  très-muttipliés.  D'après  M.  Cartier^ 
ils  suivaient  même  les  armées  (1),  et  dès  le  temps 
d'Aurélien  (dernier  tiers  du  III«  siècle),  «.  les  ouvrieifs 
»  monétaires  se  trouvaient  si  nombreux  .qu'ils  /for^ 
!>  mèrent  un^corps  dîarmée  capable  de  résister  :  à  oe 
»  prince  et  de  lui  faire  éporouver  une  .perta  de  Eippt 
i>  mille  hompies'  de  troupes  régiées  (2)..  » 
^' iMâis  laissons' encore  parler*  M.  iCartier,  si  ^odoipé^at 
en  oes^  matières  (â)  ::  c  La  multiplicité  d^teliers  mor. 

(1)  P.  75,  t'.  7,  Annales  de  Didron. 
"(2)Ibid.  '  ' 

f3)  Meniez  Àniiàles,  t.  8,  p.  â.      '         '       :       •     «  • 


— '  ro  — 

>  nétaires  nous  étonne,  ajoute-t-il  ;  l'ouvrier  ne  Ira- 
»  vaillait  pas  seulement  dans  les  villes  importantes;  il 
1  transportait   ses   outils  et  son  talent  dans  les  plus 

>  petites  localités.  » 

Notre  pièce  angevine  d'Anastàse  nous  prouve  que^ 
même  avant  l'établissement  définitif  de  la  puissance  de 
Qovis  en  nos  contrées,  les  Romains  laissèrent  l'Anjou 
reprendre  son  ancien  privilège  de  battre  monnaie, 
dont  il  avait  été  privé,  durant,  les  quatre  premiers 
siècles  de  l'ère  chrétienne. 

On  a  découvert  à  Angers,  rue  Daupbine,  aujourd'hui 
des  Lices,  en  mars  1830,  parmi  des  objets  gallo* 
romains  tels  que  poteries  rouges,  statuette  de  Vénus, 
froment  brûlé,  trois  creusets  et  le  ffagment  d'un  qua- 
trième que  plusieurs  antiquaires  croient  amiv  servis 
à  fondre  le  métal  de  monnaies  de  cuivre.  Ces  creusets, 
en  terre  cuite ,  présentement  déposés  au  Musée  des 
Antiquités,  renferment  encore  des  bavures  de  ce  métah 
Us  sont  hauts  d'environ  M  centimètres  sur  10  centi- 
mètres d'ouverture  et  ronds  à  leur  extrémité  infé- 
rieure. 

Mais  il  est  temps  d'aborder  la  numismatique  ange- 
vine sous  nos  rois  mérovingiens. 

De  même  que  dans  la  troisième  période  des  médailles 
celtiques,  l'on  avait  imité  les  monnaies  romaines  (1)> 
dites  consulaires j  de  même,  sous  nos  Mérovingiens, 
Ton  imita  les  monnaies  romaines,  élites  du  bas  empire. 

De  ménie  aussi  que  sous  la  république  romaine  les 
monétaires  ou   officiers  de  la   monnaie  l'avaient  fait 

M 

(1)  Répertoire  Archéologique  de  .1861,  mois  d*âoût,  |>age  237.  ' 


—  2»  — 

manquer  die;  leurs  noms  et  de  leurs  qualités  (i),*  de 
même  é|falenient  les  monétaires  mérovingiens  la  si- 
gnèrent de  leurs  noms. 

«  On  peut  observer,  dit  Leblane  (page  10  de  son 
»  Traité  historique  déb  nionnaies  de  France),  que 
»  presque»  sur  toutes  les  espèces  d'or  de  la  V^  race  de 
»  nos  roiS)  il  y  a  d'un  costé  la  teste  du  roy  (2)  ceinte 

>  d'wn  diadème,  et  pour  légende  le  nom  du  roy;  de 
»  l'autre  costé  il  y  a  ordinairement  une  croix  et  lé 
»  nom  du  lieu  où  la  pièce  a  été  mbnnayée.  Il  s^en 
»  trouve  aussi  quantité  sur  lesquelles  au  lieu  du  nom 

>  du  roy  on  a  mis  celui  dw  monétaire.  » 

Et  M.  Cartier  nous  apprend  (3)  «  que  les  tois  de  lar 
]»  1^®  race  s'affranchissaient  par  là  des  prétetitions  de 

>  Temperéur;  ils  remplaçaient  insensiblement  son  nom 
^  par  celui  du  monétaire. 

-»  Les  monétaires,  continue-t-'il,  étaient  des  fonc- 
»  tionnaires  publics  entre  le  souverain  ou  ses  délégués 
»  et  les  ouvriers  qui  frappaient  la  m>onnaie  ;  les  moné- 

>  taires  mérovingiens  étaient  tes  descendants  des  mané^ 
»  taires  romains C'étaient  ordinairement  des  or- 

>  fèvres  d^ûne  probité  reconnue  dont  lès  fonctions 
^^•étaient  héréditaires  à  cause  de  leur  spécialité;  lis 
t  fabriquaietit  eux-^mémes  quelquefois  les  monnaies^  et 

(1)  Nos  NouVelies  Archéologiques,  n^  S5. 

{%  Toutefois,  il  est  bon  de  faire  observer  «  qu'avant  TaiméQ  544, 
»  les  rois  barbares  frappaient  momnaie  aux  typcfs  et  avec  Teffigie  àes 
■  empereurs»  tandis  qu'après  cette  date  ils  commencèrent  à  graver 
«  leurs  propres  effigies  et  leurs  noms.  »  (Page  7,  Barthélémy  dans 
Roret). 

(3)  Annales  de  Didron,  t.  Vil,  page  75. 


-  27  — 

»  ils  enseignaient  à  des  apprentis  leur  industrie  qui 
»  était  Irès-cousidériée.  > 

Nos  monnaies  wgevines  ipérovingiemieç  noue  font 
connaitre  plusieurs  n^ms  de  ces:  monétaires,  que  nous 
allons  classer  par  ordre  alphabétique  : 

Alligisels^  sur  unepièee  éfliiée  j^ar  l'Église  d'Angers; 
la  légende  porte  d'un  côté  Eclesie  Amkoaviy  et  de 
l'autre  AUigi$ei$^  Monel\2ir\m\  {knti,  de  Didrèn,  t.  VIII, 
page  494).. 
Alliffesilvsy  mètae  qu'Alligisfiis(Roret.  Encycl.,  p.  12). 
Allom^  Sur  un  trieris  ange^vlin  publié  par  M:  Boileau, 
de  Tours. 

Allo^  même  qu'Alloni  (Roret,  E«€ycl.,  p.  42). 
Dans  Coœbrouse,  pi.  4j  no4,  trienë^n  ooty  Andicav^ 
tête  à  droite  perlée;  fif  Alloni.  mo.   earoix.  piam.   42 
millim.  (Voir  notre  planche  2^  B.  n»  4.) 
Aimardvs  (Roret,  p.  42). 
Bûtiriadv&  (ftoret,  p.  12). 
Gando  (Nouv.  arcb.,  ^  42,  p.  7). . 
Dans  Combrousey  pL  ji^  nP  6,  fMièce  en  m.  Andega-^ 
vis  C  {ivitas)y  tète  à  droite;  jR|  G^ndo.  Mooa.,  croix  an- 
crée, au«dessoiii5  :uri  point  et  un. trait  hoârizontal.  Diam. 
13  millim.  (Voir  notre  planche. â®*  B.  ji^  6.) 
Gvndbaldns  (Roret,  p.  42). 

Jdone  (Rorét,  p.  i2).  Dans  le  Catalogue  des  monnaies 
de  France  de  Gontbrouse  et  les  Monétaires  des  rois  mé* 
rovingiensj  pi.  Ir®,  ji*»  6,  on  trouve  un  triens  portant 
d'an  côté  :  Andeeavis^.^ie  à  droite;  ati  revers  Idone 
mom  (loràtô),  croix  au  centre;  diaiJQèlre,  12  malUmèr 
tfes.  (Voir  notre  plancbé'2«  A,:  np  6.)  » 


—  28  — 

Levnardbs  (Roret,  p.  12;  Annales  deDidron,  t.  VIÎI,  1 
p.  194,  no  5  de  la  planche).  On  y  lit  :  Andeeams,  Dans 
Combrouse,  pi.  4,  n»  1«^,  or,  triens,  Andeeams^  lête  à 
droite;  Levnardvs^  personnage  assis  dans  un  fauteuil, 
présentant  d'une  main  tin  anneau.  Diam.  12  miUim. 
(Voir  notre  planche  2^  B,  n^  l«r.) 

Levdenvs  (Roret,  p.  12). 

Lavnardo.  Dans  Combrouse,  pi.  4,  n»  12.  Triens  en 
or.  Andecavis^  tête  à  droite,  un  point  sur  la  septième 
lettre.  ,fi|  Lamardo^  personnage  debout,  tenant  une 
croix  de  la  main  droite.  Diam.  13  millim.  C'est  peut- 
être  la  même  pièce  que  celle  de  Leunardus?  Le  Musée 
des  antiquités  possède  un  beau  triens  en  or  de  .ce  ino- 
nétaire,  acheté  26  fr.  à  la  vente  Grille.  (Calai.  Grille, 
no  694.)  (Voir  notre  planche  2©  B,  n*  12,  et  planche 
3®,  no  1.) 

Levnvlfvs  (Roret,  p.  12).  Dans  Combrouse,  pi.  4, 
no  7.  Triens  en  or.  Andecnis  civ  {itas)^  tête  à  droite 
perlée;  ^  Levnvlf,  zone,  croix  ancrée.  Diam.  là  mil- 
lim. (Voir  notre  planché  2®  B,  n»  7.) 

Lahdoaldvs  (Roret,  p.  1^). 

Lairardvs  (Roret,  p.  12).  On  y  lit  :  And.,.veoas. 

Levpeno  (Nouv.  airch.,  no  42,  p.  7).  Dans  Combrouse, 
pi.  4,  no  10,  triens  en  or  :  And^cavis . . . ,  Tête  à  droite; 
^  Levpeno.  mone.  Monogramme  And,  Diam;  12  àiii- 
lim.  Cette  pièce  ne  serait-elle  point  la  même  que  celle 
de  Leudenus?  (Voir  notre  planche 2çB,  no  10.) 

Martinus.  Triens  appartenant  à  la  collection  F.  P., 
pièce  inédite  et  dont  nous  trouvons  la  mention  à  la 
page  470  du  Bulletin  de  la  Société  archéologique  de 


Nantes,  t,  I«r,  1^^  et  2«  livraisodiSy  triiiiestrè  de  4861. 
Nantes,  A.  Guéràud;  i86SL 
Nvnnvs  (Roret,  p.  12;  NouV.  arch.;  n»  42,  p.  7). 
DaBs  ComtNTOitôe,  pi.  I''^  n^  7,  triens  portant  d'un 
côté  Andegams^  tête  à  droite  ;  ^  Nvnnvs  mOy  croiat  la- 
tine cantonnée  de  deux  points.  Diam.  12  millim.  (Voir 
notre  planche  2®  A,  n^  7.) 

iSwôer^ws  (Roret,  p.  12),  même  que  Sisberim  (Nouv. 
arch.,  n»  42,  p.  7).  Dans  Coinbrouse,  pV4)  n»  5,  pièce 
en  or  :  Andecavis  civ  (itas\  tête  à  droite;  ^  Sisbertvs 
mon,  croix  latine  stkrn^ontée  de  deux  ancres,  canton- 
née de  deux  pOintsv  trait  horizontal  au-dessous.  Diam. 
14  millim.  (Voii*  notre  planche  2®  B,  n»  5.) 

Sevdvlfvs  (Rorèt,  p.  12).  Dans'  Gombrouse,  pi.  4, 
no  3,  triens  en  or.  Sevdvlfvs  mo,  tète  à  droite,  diadème 
perlé.  ^  Andegaoiéi  croii  grecque  entourée  d'un  cercle 
perlé.  Diam.  12  millirti.  (Voir  notre  planche  2®  B, 
vfi  3).  Dains  le  même  ouvrage  de  Combrouse,  pi.  49, 
une  pièce  portant  Andecavis ^  tête  à^  droite;  ^  Sev- 
dv  \  \  \  5,  croix  antrée.  Diamètre  12.  millim.  (Voir 
notre  planche  2®,  n^  11).  Le  Musée  des  antiquités  d'An- 
gers possède  un  triens  en  or  du  monétaire  Seudulfus  : 
Andecavis  y  personnage  assis  à  terre.  ^  Sevdvlfvs  ^  croix 
ancrée.  (Voir  notre  planche  3®,  n©  2.) 

Theodegistlvs  (Roret,  p.  12).  On  y  lit  Andecavis 
(Nouv.  arch.,  n<>  42,  p.  7).  Dans  Le  Blanc,  page  58, 
planche  58  A,  n»  4,  on  trouve. le  nom  de  Theodpgisilus 
sur  un  tiers  de  sol  d'Or  attribué  ps^r  Bouteroue  à  Chil- 
déric  !««•  ou  Clovis  I^r.  On  y  voit  d'un  côté,  tête  & 
gauche,  ornée  d'un  cercle  perlé  et  comme  une  sorte 
de  bouclier  protégeant,  l'iépau^e   gauche;  Isi  légende 


pointe  Andecam;  au  revers,  un  nœuid  surmonté  de 
quatre  globules  avec  cette  légsende  :  Theodegùilvs. 

Daiis  CdTfibtrouse,  pi.  4,  i{^%  tnen3'>en  or.  Andeca- 
vi$^  tâte  &  gauche;  b)  TheodegisUvs^  un  noeud  caaitdnné 
d'une  étoile.  Diam.  12  fibillim.  (Voir  noitre  planche'  2^  B, 
nPÎ.)  .      '•        ■ 

Toutes  ces  monnaies  ne  portent  /iqule  dés  noms  de 
idonétaires,  ce  qui  nous  prouve  qu'elles  sont  antérieu- 
res à  Fan  544,  époque  où  nos  rois  commencèrent  à 
placer  leu^rs  ny)ffls. 

La  momiaie  angevine  mérovingienne  présente  aMissi 
d<es  triens  sans  noms  de  monétaires.  De  ce  nombre 
sont  deux  pièces  muettes  dessinées  dans  Gombrouae> 
pi.  4o,  sous  les  no»  8- et  ©.  La  première  est  un  denier 
d'argenit,  ou  saïga,  portant  d'un  côté  un  monogramme 
ob  Ton  distingué  un  g^rand  A^  et>  de  l'autre  une  croix 
grecque  entourée  de  diverses  branches;  au  ba'S  est  en* 
cbre  i*n  grand  Â.  (Toir  notre  planche  3®,  n^  8.)  La  se- 
conde pièce  est  un  triens  d'or,  tête  ornée  4'nn  dia- 
dème perte;  ^  monognam^me  où  Ton  remarque :un  A, 
u^n^N  dont  Ja  branche  Bst  coupée  par  un  Si  (Voir  notre 
planche  3«,  n«  9.)  Ce  n'est  pas  seulement  à  Angers  ijue 
l'on  a  frappé  monnaie  sous  les  Mérovingiens;  de  pe- 
tites villes  beaucoup  moins  importantes  de>  notre  pro- 
vince ont  eu  cet  honnecfir. 

Lelewel  ^  découvert  que  l'on  battait  de  la  monnaie 
d'or  à  Chemillé,  et  il  donne  dans  sa  Numismatique  du 
mo'gen  âge,  titre  l^r,  pages  69  et  70,  le  dessin  d'un  tiers 
de  sou  ayant  d'un  côté  le  mot  Cathiliaco,  piïis  au  i^ 
une  croii  ancrée  avec  ce  nom  d'un  monétaire  :  Hûde^ 
m%  M.  V.  (monetarius).  On  peut  consulter  sur  cette 


pièce  Thibêaudeéti^  noiefs,  1^39,  titré  K  p^  Jm.  Le 
nom  de  Camiliaôo  se  rapporte  incontestablement  à 
Chemillé  ;  eii  effet  ll3  prieuré  de  Saint-Pierre  de  Chemillô 
est  dit  en  latin >:  S\anoius  Petrus  de  teteri  GamUliaco 
(Voir  Archivée â Anj^u^  t.  2^,  pi  16). 

M.  le  docteur  René  Briau,  bibliothécaire  de  TAcadé- 
mie  impériale  de  médeeme,  dans  la  Rex^ut  de  tAnj^ 
et  du  Maine,  p.  240,  t.  1®*",  4®  livraison^  juilleft  et  août 
1857,  fafît  connaître  uni  tiers*  de  sou  d'or  frappé  au 
Lourouï-Béconoais,  On  y  voit  d'un  côté  une  tête  in- 
forme à  droite,  avec  ce  nom  de  monétaire  :  Metallobci^ 
dus  M  {anetarm$),i  et  au  j§|  Lorovio  vicoy  croix  ancrée^ 
caUtontaée  de  dc«n  globules  (1). 

Le  Louroiix-Béconnais^  en  latin  Lorovio^  Oratorio^ 
Loratorio  ^  Lormœ ,  Lmrovx ,  est  une  petite  ville  en 
eifet  très-ancienfita ,  autrefois  située  dans  le  voisinage 
d'une  voie  i^omaine  allant  d'Angers  à  Rennes. 

M.  Ducbalais  )r^slitue  à  Baugé  une  pièce  méroviur 
gienne  attribuée'  à  Beaugency,  (Voir  s^  brochure  in-8<> 
avec  planches.)  » 

Nous  craigQons  sur  ce  •  point  que  M.  Duchalais  ne 
fasse  erreur,  car  l'originie  mSme  de  Baugé  ne  paraît 
pas  devoir  remonter  plus  haut  que  le  commencement 
du  XI®  siècle.  En  effet,  dans  le  Spicilége  de  d'Achéry, 
t.  X,  p.  392,  on  trouve  un  passage  de  Foulques-Ré- 
chin,  qui  nous  apprend  que  FoulquesrNerra  fit  cons- 


(i)  Le  catalogue  de  M.  Serrure,  recteur  de  rUniversité,  à  Gand, 
imprimé  avant  le  mois  d*ayril  1857,  porte  no  12,  ce  qui  suit  :<  Lou- 
»  roux,  en  Anjou.  —  Mettavbodvs  M, y  tête  informe.  Êi  Lorovio  vico, 
»  eroix  cantonnée  de  didux  globules;  belle  et  inédite;  or.  » 


—  9Sl  *- 

truiréBaugé  :  Mdificavit  Baugiacum.  Cependant  comme 
il  nous  semble  que  l'on  doit  entendre  par  ce  riom  de 
Bàugiàcum  plutôt  une  forteresse  qu'une  ville,  il  ne  se- 
rait pas  impossible  que  le  grand  bâtisseur  eût  choisi 
pour  sa  construction  un  lieu  couvert  déjà  de  quelques 
habitations.  En  tout  cas,  s'il  y  eut  lin  bourg  nommé 
Baugé  à  l'époque  mérovingienne,  ce  né  peut  être  que 
le  vieux  Baugé.  Enfin,  le  muséede  Saximur  possède  un 
triens  en  or  que  Ton  croit  avoir  été  frappé  à  Allonnes. 

Quoi  qif  il  en  soit,  il  èfet  teimps  de  passer  à  diverses 
observations  que  noué  suggère  la  monnaie  mérovin- 
gienne, et  que  nous  allons  résumer  brièvement. 

Les  monnaies  d'or  soiit  ceHes  que  l'on  trouve  le  jî^lus 
ordinairement;  viennent  ensuite  les  deniers  ou  sdus 
d'argent,  nommés  saigas^  beaucoup  plus  rares.  Quant 
à  la  monnaie  de  cuivré,  autant  vaut  n'en  pas  parler,  be 
qui  prouve  que  les  petits  bronzes  romains  fabriqués  en 
si  grand  nombre  depuis  le  règile  de  Gallien,  continuè- 
rent à  être  reçues  dans  le  commerce  bien  longtemps 
après  la  chute  de  l'Empire  en  Occident. 

«  Les  sous  d'or  et  les  quinaires  des  Anaslase  et  des 
»  Justinien  servirent  de  modèles  à  des  types  monétai- 

>  res  grossiers  qui  avaient  la  prétention  de  représenter 

>  les  éhmelles  figures  des  Césars  entourées  d'un  nom 
»  plus  ou  moins  tudesque;  Le  maire  du  palais  rem - 
»  plaça  le  comte  des  sacrées  largesses)  les  raoïinayerk 
»  plus  indépendants,  ou  revêtus  d'un  caractère  d'officiers 
»  publics...  inscrivirent  leurs  noms  plus  souvent  que 
»  celui  du  roi.  »  (Barthélémy,  dans  Roret,  pages  1  et 2.) 

On  croit  généralement  qu'il  y  avait  des  n^onnayers 
sédentaires  dans  les  grandes  villes,  et  d'autres  ambu- 


—  33  — 

lants  qui  frappaient  des  tiers  de  sou  cTor  dans  les  pe- 
tites localités  auxquelles  un  tribut  était  imposé,  et  c'est 
ce  qui  explique  le  grand  nombre  de  noms  de  villes  et 
de  bourgs  que  Ton  rencontre  sur  la  monnaie  mérovin- 
gienne. 

Nous  devons  faire  remarquer  ^q^ue  sur  .nos  monnaies 
angevines  gallo-romaines,  les  noms  Andec.  AndecOj 
AndecoTHj  Andecôrnbô  s'écriveiït  constamment  par  un 
c,  tandis  que,  cinq  siècles  après,  sur  nos  pièces  méro- 
vingiennes, remploi' du  c  et  du  g  eât  alternatif  ,  =  éxem-* 

'M 

pies  :  AndêcoVy  Andécài)ii  Ahdècàtis,  ^Andegavù:  G  est 
c(»e  le  c  fait  plàdë  au  g  (1)  dans  le  'norii  de' nôtre  'peti^ 
pladé  angevine*  Vers!  la'fin  du  y«  siècle.         •  ' 

Terminons  en  disant  que  le  sol^  le  demi-sof  el  i^ 
tiers  de  sol  d'or  ùvi  iHéris\  en  Usage  cJhèz  lès  Romains 
depuis  Constantin  lé  Gi^ànd  et  adoptée  par  nos' tbife'  de 
la  première  rade,  vgrtaient'  environ  de  notre  monnaie, 
savoir:'-    ''•'•''••  i     .     ;  ••=  -     -i 

Le  demi-sol  d'or  .     .•  J    i  ^   &    ^  ^' 

•'    ''■  '  -^  -Le  tiers  de  éô\.  ^^x  ^^'''  .  ^':*'-^' 41  "  -  '  - 

Quant  aux  types  artistiques  dé  nos  triens  angevins, 
les  planche?  ci-contre,'  clessinées  par  notre  cbilèguèj 
M.  Ernest  flainville,  les  feront  mieux  connaître  qu'au- 
cune descriptioo.'M:,   .*. .    ..:.<*|.-  i  *  in  .<  i,(  i 

A  bientôt  la  numismatique  angevine  sous  les  Carlo- 

^iiigiens;     '  '.  '"'•    '' y\  -^'^'     ;•      ■'•  "    ^-    ''   ^"-^ 

'  '         •»  ,     •       '     ''"'■     '  ■   :  •'       '    *  •    •:•-.'       ■'  ,  :-•'': 

■i.  !        si       ;  :,,  y.  G0P^Iin7FAVLTRIER.  .   ,. 

(1)  Voir  Mém,  de  la  commission  historique  dû  Chler^  \^^{\  p.  ^3.  .^ 


:« 


CHRONIQUE. 


nomunenta'  gaulois  de  l*iln]oii. 

Noi\is  apprenqii$  que  l'ouvrage  jnli^Qlé  Monuments 
gaulois  du  département  de  Maine  eijjoirfi^  par  M.  Qodard- 
Faultrier,  obtient  un  légitime  sucera. 

D'après  l'avis  du  co^seil  spécial  do  rinstructjlpn  pu* 
blique^  M,  le  ministre  d'Etal^  y^ent  4^  sqfi^crjii^ô  à  inogt- 
cinq  exemplaires  ^pQ^r  l^s  prittQipfile^.)>ibi,^t)ièque9  ,de 
France;  , 

jD'un  -autre  ç&té,  qAie  broqhure,  présentée  à  r£mpe* 
reur  par  M.  le  Ministre  de  rin^t,rvict;iqp  publique^  en  a 
été  trèsTf^voraUement  aivcueiUie.  Sa  Maj^té  ^q^i,  on  1q 
sait,  s'occupe  beaucoup  d'études  relatives  à  notri;  .^ir- 
chéologie  nationale  y  a  fait  adressfirtfi  jl'^utqur  de  par- 
ticulières félicitations.  , 

Nous  apprenons  aussi  que  l'Académie  des  Inscriptions 
et  belles-lettres  sur  la  présentation  de  M.  Villem^^n, 
vient  d'admettre  le  travail  de  M.  Godard  au  concours  de 

4863.  L.  G. 

«  ,         •'        ■  ?^ 

Croi:^  du  chapitre  d'AngeMi. 

C'est  le  21  novembre  1862,  que  pour  la  premi^çç 
fois ,  les  chanoines  de  l'église  d'Angers  ont  paru  dans 
la  catWédrf<lè  âhrec  4a  nJëcoration  de  chœur  accordée  par 
Sa.  Sainteté  Pie  IX,  sur  la  demande  de  M»''  Angebault. 
Gette  croix  se  porte  suspendue  à^  un  large  ruban  rouge 


-85- 

bordé   de  deux  liserets  jaunes.  Elle  a  été  faite  dans 

l'atelier  de  Poussielgue  de  Paris. 
Elle  e&l  à  bra&ches  êgàet^  tefrmmé^  par  un  iréfle; 

quatre*  l'ayons  sont  aux  angles  ;  l'émail  en  est  brun  >èt 

86  trotive^n<ïa^é  dans  le  métal  doré.      .    «> 

D'un  cdté,  au  centre  et  en  médaillon ,  siaint  llaufiod 

përaît  debout;  de  l'autre  on  voitj  Pie  IX  en  buste^    ' 
Les  légendes  portent  :  :  ;  ,  :  .    i    :..  i 

s.  MAVRrCiïvs.  hruLmA.nni  {pow  ebristi)/'BGRi}G  {iu^y 
AND  (egavensis).  teCdL  ('eaiae).  <3AP  <itelunl)-  î 

PIVS.  p.  IX.  MDtCClLXH.  -  ^        -  • 

Caves  des  Sarandière*»  aa  Pay-Notrc-Dame.  ,.  .>  ,     , 

M.  Garin  nous  conTBrtmRjoe»*te  note  suivante  qu'il 
tient  de  M^  Michçlet,  ijQspecteiur,de;s  époiiles  ^priqoiairep  à 
Saumur.  .    ,  ;  - 

Près  du  Puy-NptrerD»mç,  dans  une  vig^f^ej  appa|;te- 
nant  à  M™*  v®  Dubois,  se  trpwvç^pnp^cayjB.^s^pz  pp 
ruines,  qui  croit-on,  doit  avoir  servi  au  culte  à  l'époque 
des  guerres  de  religion  ou  dans  des  temps  plus  re- 

lËlIe  se  composa  d'une  lespèce^de  rotodde  ^JaniueUe 
deux  avenues  donnent  isùseèsv  uBé  sauU  est; (praticable; 
la  seconde  conduit,  dans  des  geilerie$/ soAit^T^iii^vau 
nombmidle  i]iuali*e>  qui  'Cônsenviâtit  .de^  Irâices^'b^bita- 
tion.  .  .  •  .■:    .;  .  "u   I   .if- 

La  rotonde  est  éclairée  .pai:.uni.ilirgit^  .a^uj^if^ail  et 
du  côté  de.l'fiij/vici|iq  prtt<esig^l«ri«g  \Qgiivales -oaiv^té 
taillées  dans  le  rocher  .'dû i.tttlfeaiVi.elJ/es^p^raiiç'dïPnt 
avoir  servi  à  la  célébration  des  saints  mystères,  plus 
particulièrement  que  les  autres  parties  des  caves. 


-86- 

Décès  de  H.  l'Mibé  Benotot.     , 

1     • 

Encone,  uq.e  perle,  cruelle  faite  pajr  la  Commission  ar- 
chéologique en  la  pt^rsonpe  de  M.  Tabbé  Charles  Bemoist^ 
chanoine  honoraire»  aumônier  da  Son  Pasteur,  décédé 
leii3  décembre  1862,  à  l'âge  de  53  ans.       . 

Ce  digne  ecclésiastique^  pour  no^$  servir  d'un  ternie 
familier  au  .style  légendaire,  embaumait  de  la  bonne 
qdeur  de  ses  vertus  tous  peux  qui  l'approchaient.  . 

Il  aimait  les  ;art$  H  les  appréciait  .^y^c  goût. 

La  Commission  perd  en  lui  un  membre  .,doi^.  les 
conseils  sages  et  prudents  ont  été  souvent  d'un  grand 
poids. 

•  •  •  » 

Le  48  décembre  dernier,'  a  été  faite  la  bénédiction 
de  l'église  de  Murs,  par  M?r  Angebault. 

M',  dé  CoTitailloux  est  Tarchilecle  de  ce  nouvel  édiéce 
bâtr  dans  le  style  du  iiiie  siècle. 


'  I 


Dans  sa  dernière  séance,  la  Commission  Archéologique 
dè^  M^ine  et  boire  a' coiïstitué  :5oii  bureau  de  la' ma- 
nière suivante  pour  Fannée  1863  :    I  :     ' 

■  'PrMfen/,'M.  V.  Godard-Fàultrier.  >  - 
"iVîôe^^prédderiu^^M.'  FabbéiLeges^rd  dis  1^  Bîryais  'et 

M.  Albert  Lemarchand. 

■  S^cràRctïré,  M.  îPaul  Lachèse.  '  .! 
^Secrétam-ùTchivisiéiU:  Ëhi^st  Dainvillë.  > 

■'  rr^oner ,  M.  Roftdeau  aîné.  ^ 


JJi  *     ,      I  m:    . 


>  1 


•     I 


'  I 


MONSIEUR  GRÉGOIRE  BORDILX-ON 


> 


f  ' 


•4—^ 


'  / 


)  I 


f  J 


Angers»  le  16^ décf«ibre,lS62. 


Hoo  cher  cousin  et  ami. 

Tu  viens  d'engager  contre  M.  l'abbé  Pletteau  un(^  polé^ 
miqne  à  laquelle  je  n'ai  pas  l'intention  de  pt'endre  part. 

Non  nostram  iriter  vos  tantas  oomponere  lites*  ' 

La  seule  chose  que  je  ferais,'  is'^il  m'était  permis  de 
donner  un  conseil  aux  deux  honorables  adversaires, 
ce  seréiît  de  leur  dire  avec  le' paêle  Uiin  :  ' Claudite 
jam  rivos;  et  même  je  rie  me  bornerais  pas  k  ajouter 
comme  lui  :  Soi  prafa  biberunty  je  dirais  :  Satque  su- 
perque. 

Toutefois,  les  reproches  que  tu  adresses  à  l'auteur 
àxi  Jansénisme  dans  TUniveréité  (PAngerè^  tu  les  fais 
incidemment  rejaillir  sur  une  Société  dont  je  m'honore 
fêlre  un  des  membres,  les  moins  dignes,  maiales  plus 
dévoués.  Par  ce  motif,  veux-tu  bien  que  je  t'adresse  à 

5 

nion  tour  quelques  observations  tout  amicales ,  comme 
celles  que  nous  avons  coutume  d'échanger  dans  nos 
entretiens,  parfois  un  peu  animés,  mais  toujours  affec- 

REP.   ARC.  3 


—  38  — 

tueux?La  responsabilité  que  tu  semblés  vouloir  imposer 
à  la  Société  Impériale  d'Agriculture,  Sciences  et  Arts 
d'Angers,  ayant  reçu  de  ta  brochure  une  grande  pu- 
blicité, tu  ne  trouveras  pas 'mauvais  que  ce  soit  aussi 
devant  le  public  que  je  te  réponde.  Si  je  le  fais,  ce  n'est 
Qa^^que  notre  Société   ne  compte  bon  nombre   de 
membres  qui  en  seraient  plus  capables;  mais  j'ai  cru 
que  cette  tâche  m'incombait,  comme  subissant  l'avan- 
tage peu  -envié  d'être  4 -pe«-j3rès  son  doyen  d'âge , 
comme  étant  d'ailleurs  un  de  ceux  qui  prennent  le 
plus  de  part  à  ses  travaux  et  en  ont  eu  pendant  plu- 
sieurs années  la  direction;  *En  outre,  les  lecteurs  s'ex- 
pliqueront encore  mieux  le  fond  et  la  forme  de  cette 
lettre,  quand  ils  sauront  que  là'  jouissance  de  mon 
iranç-parler  atedUoi^ifémmteiaux  aflp4^s>(si>alo^Ëes 
ni^qtenànt!i)|  dé>  ton  enfance  le^  de  laj  fiûienpe ,  .^épogiie 
où,  parce  que  j'^vaip  assisté  k.  h  \Ç»vèf»f>»K  A^  ton 
bapt0lTjç,,no^.  nqus  jfiguriQç^.l'yp  et  l'aj^tjrp  jjue  j'étai^ 
ton.parraifl.  .  .    j  ...  ..'.; 

jpanstabrpçhur^^  QÙ.J|U.,9j^^f,^tr,çp,  ep  lep,y  apiç^T 
qanf  (jl.e  près  jCt  j^e  f^yi^it^pt  ^e  W^ffff^^?  Pf  ^^  choses^ 

« 

..  :..i./M.    -^'On  ne  8*à\tendail  ^uère  •  '  '" 

De  voir />aral^re  en  cette  affaire, 

1   -  '      '.:       :  •'   .    '  ;,■■    !•■   i    ■      .  •    ■  i;  .  ■! 
Qn  trouve  jpoçr  qp.  qjii  aç'us  coijciernç..  : 

..«  C',fst  c|anf  ^9  app,^es  d'.vme ,fi^  pos ,§,oci^^és  ^r 

«  vantes,,J(^§pq4|^,^;A§;^|çultuj:e  d'ÀffgerÇp  qjjfiMr.r^jj^, 

»  Pletltepu  yienjt  ,^6  ppl?,liejr  son  .  tr^^  -  blâ^^ble  hçf\\, 

î  (devoir  d'élgj^fr,(i],evpnt  JU  §ppiét,é  ,d'^gj-//îjijjlvir|^  d'^*^- 
î«^s  les  (jéf^fll^Rfies,  )^  jfiav^fjs  ,^t  /^ef.jvj^es./ifle,^. 


—  w .«- 

»  yaux  égarés  prét^ndmeni  iapaïK^evoir  leii'  lapenâonoe 
4  de  s(m  éyâqpei(p).  34)*....^  Au  lim  à%n  âoficbir  sus 
«aimaleB  (p..  5),  câtle  raime  sooiatéi  que  M.  YAhhé 
^Pletteau  yient  de  piPeudre  piour  oonfidente  d^  ses 

>  eolôrevs  rétrQgf)eotiv,e6  contre  He»ii  AriauU  i(p.  6)^ 

>  ieuait  paut-iê^e  aus^i.bieii  d'y  .insérer  wAe  -élude  sur 

>  les  semaîties  â!atttaau|ie  lou  3ur^'empl<QÎ)d6  la  canoAte 
»  blanobe  à  .coUet  v»rt  {(p.  5);  > 

En  lisant  o6s  (|uelques  «lignes, ,  il  of  esli  mm  >ûber  aou, 
persmae^qui  n'^nvoiesofr^,  aiuis^itôt,  non  pas  dnq, 
iiitai$,itsois;prDp0Biti<(ns>  BayDlr;  .        ; 

4^  Wanrafitide'ipuibUer  sont  ibémoire,  U.Vààié  Ptei- 
teau  l'a  confié  à  la  Sœiéié  (TA^/mcuiture.; 

2o;Q^e  la  Soeîété  a  favcprableipelLt  aûoueiUi  ce  nié- 
iftoire,  au  moins  comme  iitine  cudevise  étude  historique  ; 
.  .3o.  Qii'elte  a  mnipài  $es  annaie^ale  jcolères  iréttospec^ 
<it)€«,  étalée^ ^depmt  ,elf0, .     , 

Âucuiie  de  oe^>  trois  pro^psitions^  n'estt  béràiiique,  il 
est  yrai^  .aomme  le  sont  les.oinq^ui  constituent  la  doo 
trine  jan^éii^st^  ;:  inais  >toules  trois,  sont;  d'une  icpoipléte 
wewctUude.Tu  ysis.  l^ivoiridâirement.     . 

tia  SQ(tô»é  impériale  d' A  gricultui^e,  Sciétices*  et  Artis 
d'Angers  a,  depuis  longtemps,  eu  le  ibojahejiju:  de  voir  se 
ïmBidr  dans.sQn  sein  e^  se:  dé^^elqpper  auprès  d'elle 
deux  ei^cellisntes.  créaliox^^  Ja  fiommissjoa  arcbà^o- 
gique  du .  dép^rtemeiiit,  .de  Munehôt-Loire .  et  le  Qomice 
horticole  4a  Maine-et-Loiiie..;  iGe  n'^esit  pas  à  toi»  mon 
cher  aiBÎ  »  si  plein  de  sympathie  |K)ur  .tout  ce  qiui  iaàt 
hoimear  auii  Angeyins ,  qu'il  |S6rait  nécessairie .  d'ap- 
prendre la  valeur  de  ces  deux  institutions;  mais  tu  pa- 
rais ignocer  {et  4;eirte8  ice.  n'^st  pas  un  eriipQe)  que  la 


—  *0  — 

Société  (l'AgricuhQPe  a  seulement  sur  ses  annexes  ce  que 
j'appellerais  Tolontîers,  si  le  mot  «n'était  pas  trop  ambi* 
tieux,  une  suzeraineté  nominale.  La  Commission  et  le 
Comice  ont  la  courtoisie  de  la  nommer  toujours  la  So- 
ciété mère.  Celle-ci,  à  son  tour,  accepte  ce  titre  avec 
reconnaissance  et  le  conserve  avec  orgueil.  Comment  en 
serait-il  autrement?  Ne  doit-il  pas  lui  être  doux  d'avoir 
deux  enfants  dont  elle  serait  d^à  fiére  de  n'étré  que  la 
sœur  aînée?' Elle  jouit  de  laurs  mctfiB  dont  Téclat  se 
reflète  sur  elle.  Gesi  succès,  je  le  répète,  ne  te  sont  pas 
inconnus.  Tu  sais  que  le  Comice  horticole  a  rendu  et 
rend  tou«  les  jours  de  signalés  services  à  l'une  des  plus 
importantes  industries  de  notre  pays.  Tu  n'ignores  pas 
quelle  v^oureuse  impulsion  ses  travaux  reçoivent  du 
zèle  éclairé  de  son  président ,  ^  ton  ami  et  le  mien , 
M.  André  Leroy.  Quant  à  la  Commission  arché6logi()ue, 
si  les  services  qu'on  lui  doit  sont,  de  leur  nature,  moins 
généralement  appréciables,  ils  ni' en  sont  que  plus  goûtés 
des  esprits  d'élite;  ai)63i  ont-ils  toute  ton  estime./  Ta 
connais,  entre  autres,  les  travaux  du<  président  de  cette 
Commission,  le* digne,  l'excellent  créateur  et  directeur 
du  Musée  d'afntiquités  d'Angers,  M.  Godard-Paultrier. 
Tu  as  partagé  la  satisfaction  de  tous  ceux  de  nos  oén^ 
citoyens  qui;  rendeint  justice  au  savoir  modeste,  accom- 
pagné de  toutes  les  qualités  qui  ((mi  l'homme  éminem- 
ment honorable^  quand  tu  as  lu,  il  y  a  peu  de  jours, 
dans  les  deux  fouillés  publiques  de  notre  ville  ,<  que  le 
livre  de  M.  Godard  sur  les  JUanuments- gaulois  de  PAn-- 
jou  vient  d'obtenir  l'approbation  de  deux  ministres, 
celle  même  de  l'Empereur,  et  d'être  désigné  comme 
digne  d'aspirer  à  un  des  prix  que  l'Académie  des  In- 


-Ai  -^ 

scriptions  et  Belles-Lettres  décernera  en  1868.  Encore 
une  fois,  notre  société  e$t  heureuse  et  flère  de  voir 
prospérer  ainsi  les  deux  institutions  .auxquelles  elle  a 
donné  naissance;  mais  tout  eQ  s'intére^ant  plus  que 
personne  à  leurs  travaux,  en  partageant  vivement  leurs 
joies,  elle  n'est  pas  solidaire  de  leurs  actes.  S'il  était 
permis  d'assimilé;»  les  très-petites  ctôses  aux  choses  les 
plus  émiuentes,  je  dirais  que  la  Société  d'Agriculture, 
la  Commission  archéologique  et  le  Comice  horticole  sont 
trois  fractions,  d'un  mèïùe  tout,  indépendantes  quoique 
alliées,  à  peu  près  comme  le^  cinq  académies  dont  la 
réunion  forme  le  grand  corps  appelé  rinstîtut.  Chacune 
d'elles  a  sa  vitalité  propre ,  sigit  dans  la  sphère  de  sa 
spécialité,  sans  interventiOin .,  concours  ni  contrôle  des 
deux  autres;  chacune,  sans  prendre  leur  avi$,  compose 
conime  il  lui  pla^ît  ses  publkations:  IL  résulte  de  cette 
organisation  trois  collections  de  volumes,  aussi  .dis-* 
tinctes  les  unes  des  autres  .qijp  si  elles  émanaient  de 
soçiétést établies  dans  trois, ciliés  différentesi  Ainsi,  la 
Commission  archéologique,  dont  la  spécialité  embrasse 
tout  ee  qui  se  rattache  à»  l'histoire  de  l'Anjou ,  a  dû 
examiner  si,  à  ce  titre,  il  lui  Qpnvenait  de  laisser,  pa- 
raître dans  son  Répertoire  le  mémoir.e  de  M.  l'abbé 
PIetieau.,Elle  y  a  consenti;  je. n'ai  pas  à  la  défendre  de 
cet  acte  de, condescendance.  S'il  plaisait  à  la  Commis- 
sion qu'il,  fut  expliqué,  elle  =  n'aurait  bes(^in  pour  cela 
du  secours  depersonne,  elle  est  parfaitement  de  force 
à  faire  elle-o^éme  ses  affaires»  Quant  à  la  Société  d'Agri- 
culture, elle  n'a  eu>  commieitoi^  mon  aini,  comme  toute 
la  ville,  connaissance  du  ménfpire  qu'au  inament  où  il 
3; paru  an  gr^nd  jpur  de^  la  publicité;  :» 


-  n  — 

Ges  explîbatioïis  suffiraient  p6Ur  cpie^  dans  ta  loyâiité 
m  jtistëmettt  estimée  de  tout  le  monde;  tu  fusses'  prêt  à 
recékmaltre' cpie  notre  paisible  ^ciété  doit  être  laissée 
en  dehoi^s  du  débat  engs^é'  entre  M'.  Tabbé  Ptetteau'  et 
toi»,  lutte  fâiùheuse  à  plus  d'un  poitit  de  vue,  et  de  la- 
quelle, pour  revenir  toujours  à  mes  vieilles  citations  de' 
collège,  fan  peut'  biétt  dire  avec  chagriïi  : 

■  • 

Iliacos  intra  muros  peccatur  et  extra. 

Héritière  de^  l'ancienne  Académie  (f  Angers,  et  accëj)»- 
ftatat  gaiement  pour  ce  qu'elle  vaut  la  pïàisante  boutaiib 
d^' Voltaire  sur  la  brave  fille  qui  ne  faisait  point  par/èr 
(telle  y  la' Société  d'Agriculture  n'aspire  pas  non  pïAs, 
dans  àes  modestes  travaux,  à  faire  beaucoup  de  bruifl 
Il  lui'  serait  mirtout  pénible  d'en  faii*e  en  se  trouvatat* 
mêlée  malgré  elle»  à  des  discussions  iri^itattteë,  parfbiS> 
imprufd^mment  pT^ovoquéeô»,  acceptées'  avec  vitilettbé  ét^ 
soutenues  atec  emportertient. 

Je»  pourrais  m'arrêter  ici ,  mon  Cher  amî  ;  maïs  j'a  •' 
jouter&i  quélqiifes:  mots'  encore-  parce  qUe  de'  l'extrait^ 
que  j'ai  donilé  ci»  dessus  dte'  ta  bt^ochui^e  on'  poiiïtàit, 
contré»  ton' intention;  tirer  des  inductions  q\ie  jë^  cii^ôfe 
devbii*  repousser*. 

Il»  ildu^  eôt»i^eVeîitt  (j[tié'  des  lievgôtttt'es,  Hiert'  ihal'  iHW- 
m^es,  (il  holils  rëptignerailld'adhïfettré  qU'it  y  en  eût  de  mfei! 
intentîoimées),  ihsiA^aîeht'de 'temps  ett  tfempfe  quèf  tiôtre- 
société  d'ét\]desv  tioute^  scientificfties  et  littéraii^eS*,  au-î- 
râî»t-  tendà:nce  â  se  transformer  en  je  ne  sais^  trop  qdfel^ 
petit  foyer  dfe  passions-  jiolitiques  oii'  autfes.  Riôn  au 
motide  n'est  pluâ  faux  ;  puisque  Tôccasibn  s'en  préséÈte; 
il  est  bon  de  protester  éilergiquemeût ,  une  fois*  poUr 


-40-- 

toiites,  cUnlf^'d^lW'impmÂtoliVlcIéHttéë'  dU^  plas  lé^ei^ 
fandensiète.  Nbiily  fa^^Sbcièté  Ifûpériâlë  d^A^icMtdré/ 
Sdenœs»  et*  ATtftîdtAjdgeiis  iné  èêgé^idj^t;  notf,  é\l€ 
n*a  pas  cd$Bé«  dîêtreî  ee  ^tf*^l*  Wt  '  à*  sôù  origltte',  ôè 
qufeUei  entend  bien  rèâteir  tot!i|fatil^ès  ùïile' a^dciàtiôà' 
étrangèreià  toiit  ëspi4('dei  )^ti  trÀei  réIknSôir  d^boMtiieâ' 
stodiei»x,<  'qui  ibettënt  en  efoiinanin  léul^s'éfMrts>  pôtif' 
s'instruire  m^otUdUëttiMt  el|^Ùtér>èAâeiAtfolè  léb  pllàisîi'é' 
de  VinJfeUigettee^;  non^tttitiii^iftiis  bbâyèllé  de"  âé  fô^^^ 
«i  cltAytnif'concilJabute,  tii^éùïétië;  elVé^  n'oublia' i4eh< 
deoe  q«i^elièidèlit  êti^ir  iittiei^ô^ôieïi  qu'elle  a  l'hôiinèuV 
de  porter^  et  à/la  «ôasidéi*a!tjcm  peVs^ûnelle  de  sèi^ 
membresi'  '•"  '<'  -•  ■  '•.     •     ^ 

S'ensaitHl  que' 8ur  tdute'  nidiiëfé  ils  aiefift  toùis'  la 
même*  mandàreid6iW)ii'?  noii>Àâ#i!i>réttiéilt;  mSs  qù'im^ 
pdrle'?  Iifesxoiit  tin^liiefn tbitfttimf,'  l^aïAdtir dubeatt ':  cela 
suffit  pouK  f«a«fltMii<  éârè»  èf^  dïié  par&itë  baâ^iiibnié' 
et'  p'<rar  écatlef  def  Fëndeinfié*  de'  leùt^é  '  l'ëuiiioiië  fout 'ië' 
qtttpoti^rait  enàlfafelït'lk  paî«/  '  ' 

Ed  pvevi^M  ffiSm^àÊôïk' y  kVkkS^ïe  ft^^i^é,  du' 
feuteuil  dc^eflti  vae^t  pat*  la^  lÂiort  d^  M.  Tissôt;l 
M«»  DùpftMott{^'diiàkit>à  sé&^nôùvëauil^ëcillêgùëâ^  :  iÈéX-^' 
>*e:rè'  denégréttabléd  diver^dces  d'opinions,  si^j'aivais^ 
>  eu  l'avantagé  de  coiinafirè  Aicfn  préd^ces^étor;  iWtis' 
)^  ttOuS^ifi^Hoiisi  eâlëildn^;  9^i>^tVè  » miééÈ^autèdt  f^émùT.  » 
G^nicrti^hamiialti^ûi  M  si'  vivethent  appIaucH  dû  pa-; 
lais'  Mazariiii  deVraitétirë  laJdeviâe  db  lotîtes  les  gfsindéë' 
eti  petites  ddadébié^/ Alitisi  lia' cottlprénfilènt^totiteëil^^' 
sociétét^  EfâHràht<^  /  tin*  peu  tlûttifkôuses,  qu^Âikg:ei'È>  vdit' 
phte  on  ibiiinâ 'fleûtiM  daUld^  sé6  mnv^S/PôUr  «i^^èA^  citbr 
qu'une*  ^en<««v  la  S^^té  A^dàdémiqt^,  ilidil' <!Aer  ami; . 


-44- 

a  récemipent  i^sprit  .p.4rf{ii  86Si  membres  M.  l'abbé 
PlettQaju^  à  }'ipstai9f;  ^ê^e  où  ilvenaiti  de  poèUer  smi: 
m^mpii^a  et  Çiù^  toi^isrjeâ  .échos  de  la  ville,  répétaient) qi>e 
tu,  ea  pfépi^raiis  la.' r^talÂoiij  II  est  pourtant  hors  de 
dQïf^qne  la.))rochure  ^  M.  leviaaiireide  Saint-rMaurioe 
aurait  ^s  Jla  Société  ^cadéniiqtie  plus  d'Un  cootra- 
4^teur.|  |jLiQ'eQ{,ai  p4&.P!<>ipsiitrQuvé*  chez  nielle  un  bon: 
acç^eîL  La  .q)ép^(ÇtiQaç;aur^  lieju  obesnouâ  ;  car  non^ 
soyons  qn'à,p^trgrprQ$bMn^  l^uniQnji^nsiielle  M.  Plet^ 
tjeapi  dqit  âtre  pir^enté  comiQe  cotididiat,  conjointiai&enl 
avec;  M.  Mouria;  ^qui  a  laissé. de  si  brillants. souvenirs 
ici,  dans  ks.chajiras  d'bistoine^  an  Lyeée'  et  à  l'Ecole 
d'enseignement  supérieur.  Ils  seront  les  bienvenus  l'Iin  el 
rautr,^;  i^ç^,,3ocp(été:  d'étude^rnc  peut  jamais  "Cooipter 
trçp  de  i9(^inbr)Qs  inte^ents»  linMfuîts  et  laborieui» 

Et  toi,  fpon  fib^r  apni,  quienaeiisais^tu  l'eiettiple  de 
cçsdieujx ,bqq9r^le£i,çandidat3?' Quçi ^e vieas-tUi  comme 
epX;,.;Boijg,i3ppQr^qf  etiïioufli  demïm^eri  un.  fraterneir 
échange  de  studieux  travap^^  d'agcé^blesetinsliructives 
(M;>f:pmUJi^c^ians,^(|ÇleKrte9î'jc«  ç^ait  pour  nous  un  beau 
jqvii:  gpe  peluji  ou^  danp!une<de.nas:  réuuioas,  nousite 
vef^iîons  serrer  d'une  main c^  de. l'auteur  ànJansé*- 
nisnfi^\dfins  fM^iper^ité  4'An^er$>  et  de  l'autre  «aelle: de 
r/lpteuFî  de  la  déforme  ^f  la  Jttffi^e  en  Anjou. .,  .7 
.  Si  celte  idéei  pouvait  te  sourireraussjvjei.réalamerais 
p9^r.moâ!,.le  plaisii*  de  poser  ta  candidature^! i bien .^ûi^ 
d'ayapçe  da  suocéç  qu'elljt^  obtiendrait  »  J^  sei^ais  Abaroié^ 
d'^|tre.,ftUi;M'ès.4e.  notre  société  plus  réellement  4oo:parh 
r^in  qijie  jo  ne  l'ai  été  dçva^t  jles  foii^ts  baptisipaux; 

Gpmfriep  ,la'.SçMîjié|.é  d'Agricultqre  me  deyrait-eU^.; 
p^fi  .ce,,  fôlioiter  dente  voir/  prendre  plaioe  danq.<6eâ 


—  45  — 

Rùifs!  Par  la  vanité  4^  <  te»)  cbntdftisëaâcés,  pdf  t  là 
persistante  fraîcheur  de  ton  îmagifiation ,  par  la  sëu^ 
ple^eide  langage  qui  te  tait,  iioùjoâfs  avec  line  verve 
édncelante  d'esprit,  ^  n'esamioe  pas  si  c'est  toujours 
avec  une  parfaite  mesure),      •      ^  c  •■ 

'il'  .       i       '•»">,        '11!-  i       •  '  • 

Passer  du  grave  aii  doux,  du  plai$ant  ^u  sévère, 

.  .1'.    !  !ii  )   I  r,    'i'ij.;iM.    .1»   <  •  .;•'»/    .  '-■ 

» 

tu  animerais  nos  séances  d'une  piquante  vivacité.  Peut- 
être  aussi  leur  calme  habituel  tempérerait-il  un  peu,  au 
besoin,  ce  que  tu  appelles  toi-même  tes  juvéniles  ar- 
deurs. 

Quoi  qu'il  en  soit,  nous  n'accepterions  probablement 
pas  toutes  tes  idées  ;  mais  nous  goûterions  vivement  la 
forme,  tour  à  tour  incisive  ou  émue,  toujours  saisissante, 
sous  laquelle  tu  les  produirais.  Si,  trop  sensibles  aux  char- 
mes de  la  littérature  et  des  arts,  nous  perdions  parfois  un 
peu  de  vue  que  l'agriculture  a  la  première  place  dans 
le  titre  de  notre  société,  tu  reporterais  de  ce  côté  notre 
attention.  Habitué  à  mener  de  front  avec  succès  les 
études  les  plus  diverses,  tu  nous  rappellerais  que,  si  le 
poète  favori  de  M.  Tissot  et  de  Mfifr  Tévêque  d'Orléans 
s'écriait  :  Dulces  ante  omnia  Musœ  !  il  enseignait  aussi 
Qutd  faciat  lœtas  segetes.  Toi  qui  invoques  si  facile- 
ment saint  Paul  et  les  Pères  de  l'Eglise  quand  tu  prêches 
les  théologiens,  tu  offrirais  avec  la  même  aisance  à  notre 
petite  assemblée  de  littérateurs,  plus  ou  moins  agro- 
nomes, les  leçons  de  Virgile  et  celles  de  Matthieu  de 
Dombasle.  Tu  nous  trouverais  toujours  prêts  à  les  écou- 
ter. Bien  certainement,  nous  partagerions  ta  très-légi- 
time sollicitude  pour  les  semailles  ^automne.  Et  qui 
sait?. . .  peut-être  arriverais-tu  même  à  nous  faire  mettre 


;  el  aussi      1 


Eji  uffilMf  b 

plus  d^me  matiéR,  Um  taosm  el  uni 

cher  BordiDoii,  de  f offrir  pobliqiienKBl  Feifiressîon  de 

mm  fiefl  et  inallénUe  attafhemcttL 


J.  SoBin, 


h  Siciélé  iiBv^fâle  ë'AcrîçillllMfe. 
cl  A#te  iTAiynB 


*    !  1  .  t^  -MJ       .1  ••-  -lir  ' 


I     '  •  '  '  I  . 


GO^Mi^$SfON  AACH^OLOiGtQUE. 


NOTE  DU  COMITÉ  DE  RÉDACTION. 


Une  polémique  s'étant  engagée  à  propos  d'une  bro- 
chure sur  Henri  Amauld,  imprimée  dans  le  Répertoire 
(novembre  4862),  le  devoir  du  comité  de  rédaction 
est  d'indiquer  quelle  part  il  a  pris  dans  cette  publica- 
tion. 

Le  comité  partant  de  ce  principe  que  la  liberté  de 
discussion  en  matière  historique  et  sous  la  responsabi- 
lité entière  de  chaque  auteur j  est  une  règle  constam- 
ment reçue  au  sein  de  la  Commission  archéologique,  a 
ouvert  ses  annales  au  travail  de  M.  Fabbé  Pletteau. 

Telle  est  la  position  libérale  que  le  comité  n'a  pas 
hésité  à  prendre  dans  cette  affaire. 

Il  ne  faut  point  oublier  que  la  Commission  avait 
publié,  en  1855,  une  biographie  d'Henri  Amauld,  bio- 
graphie dont  les  vues  sont  le  plus  souvent  en  désac- 
cord complet  avec  celles  de  M.  l'abbé  Pletteau. 

Ces  deux  travaux  rapprochés  l'un  de  l'autre  et  con- 
tenant des  jugements  si  différents,  prouvent,  par  leur 


—  48  — 

admission 9  la  haute  impartialité  de  la  Commission 
archéologique. 

Elle  n'y  fera  jamais  défaut  et  saura  se  mettre  au- 
dessus  de  certains  ^reproches  de  quelque  part  qu'ils 
viennent. 

Sa  devise  en  matière  historique  sera  toujours  :  Li- 
berté de  discussion. 


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CONDITIONS  DE  L'ABONNEMENT. 


Le  Répertoire  Archéologique  de  VAnjof^  paraît  le  i**'  de 
chaque  mois,  par  livraisons  chacune  de  deux  feuilles  d'im- 
pression. 

Le  prix  de  l'abonnement,  pour  les  personnes  ne  faisant  pas 
partie  de  la  Commission  Archéologique,  est  He  5  francs  par  an 
pour  Angers  et  de  6  francs  par  la  poste. 

Les  abonnements  sont  reçus  chez  tous  les  libraires  du 
département. 


co 


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SOCIETE    IMPBRlALiB    D'AGRICULTURE,  SCIENCES   ET   ARTS 

ANCIENNE  ACADÉMIE  D'ANGERS. 


^^  ^       COMMISSIOI  ARCIÉOLOGiaUE 


DU  DÉPARTEMENT 


DE  MAINE  ET  LOIRE 


RÉPERTOIRE  ifiCHiOLOGIQIlE 


DE    L'ANJOU 


Année   i86S Février. 


ANGERS 

iMPl^IMERIE    DE    COSNIER    ET    LACHÊSE 

Chaa&sëc  Saint-Pierre ,  13 


1863  S 


-CQ 


lOmNI^  MûlIES  Dl  l'AM. 

(suite). 

20o  COMMUNE  D'ÉCOUFLANT. 

Dans  un  endroit  nommé  le  champ  de  la  Rivière^  sur 
la  rive  gauche  de  la  Sarlhe,  en  regard  de  Tîle  des 
Amours,  on  voit  une  construction  romaine  dont  la  base 
est  baignée,  Thiver,  par  les  grandes  eaux.  On  y  dis- 
tingue, sur  une  longueur  d'environ  20«»,  des  murs 
emplecton,  des  restes  de  briques  à  rebords  et  du  ciment 
romain.  Il  est  impossible  de  se  bien  rendre  compte  de 
ce  que  pouvait  être  cette  construction;  les  paysans 
disent  qu'en  cet  endroit  il  y  avait  jadis  un  fort  ro- 
main. Quelques  ardoises  bleues  et  plates  sont  mêlées 
à  tous  ces  débris. 

24  0  COMMUNE  DE   FENEU. 

Nous  ignorons  s'il  a  jamais  été  trouvé  de  débris  ro- 
mains sur  cette  commune,  mais  nous  la  mentionnons 
ici  à  cause  de  son  nom  latin  Fanumy  temple  (Hirel, 
page  237.  —  Le  Montglonney  tome  I^r,  page  406,  C.  Ro- 
bin. —  Ménage,  Sablé,  page  156). 

22o  COMMUNE  DE  LÀ  BOHÀLLE. 

En  face  de  la  Boballe  existe,  sous  la  Loire,  un  radier 
ou  chaussée  maçonnée,  allant  du  nord  au  sud,  dans 
une  longueur  d'environ  250™  sur  ô""  de  large.  Ce  ra- 
dier paraît  devoir  correspondre  avec  une  chaussée  qui 
part  d'Andard,  et  dont  M.  de  Matty  a  constaté  l'exis- 
tence sur  une  longueur  d'environ  200>».  On  croit  que 
ces  deux  radiers  sont  d'origine  romaine,  et  qu'ils  réu- 

REP.  ARC.  4 


DO 
A4 


—  50  — 

nissaieni  les  deux  rives  de  la  Loire  pour  favoriser  le 
passage  de  la  Celtique  en  Aquitaine  (Mes  notes  sur 
l'ouvrage  de  M.  de  Matty,  page  13). 

23^  GOUMUNE  DE  JUIGNÉ-SUR-LOIRE. 

Vis-à-vis  de  Juigné ,  vers  l'ouest ,  durant  les  basses 
eauXy  on  aperçoit,  traversant  un  bras  de  la  Loire  et  le 
Louet,  une  sorte  de  barrage,  plus  une  levée  et  des  piles 
dites  du  Louet  (1),  qui  sont  les  restes  d'un  passage 
entre  ledit  Juigné  et  St-Maurille  des  Ponts-de-Cé  (culée 
du  pont  de  la  Rabonnière).  Bodin  a  marqué  ce  passage 
sur  sa  carte  antique.  La  construction  de  cette  levée 
n'a  rien  de  l'appareil  romain;  elle  aura  été  refaite  au 
moyen  âge,  car  il  n'est  pas  douteux  pour  nous  que  le 
principal  passage  aux  Ponts-de-Gé,  de  la  Celtique  en 
Aquitaine,  s'effectuait  sous  les  Romains,  par  ce  côté, 
avant  le  percement  assez  moderne  de  la  butte  d'Eri- 
gné.  C'est  donc  sur  les  hauteurs  de  Juigné,  et  non 
à  Erigné,  que  dut  avoir  lieu  la  défaite  de  Dumnacus. 

Antérieurement  à  la  reconstruction  de  l'église  de 
Juigné,  on  apercevait  sur  l'un  des  murs,  des  trace§  de 
petit  appareil,  sans  briques.  La  cure  de  Saint-Germain 
de  Juigné-sur-Loire  était  l'annexe  de  l'archiprêtré  de 
Saumur  dans  l'archidiaconé  d'outre -Loire.  Anciennes 
carrières  d'ardoises  à  Juigné. 

(1)  Ces  piles,  aujourd'hui  à  sec,  prouvent  qu'un  courant  d*eau  les 
avait  jadis  baignées  ;  ce  courant  devait  passer  au  pied  du  coteau  mé- 
ridional, entre  Juigné  et  la  butle  d'Erigné.  Des  anneaux  en  fer,  ayant 
senri  à  amarrer  les  bateaux,  se  voient  encore  incrustés  dans  les 
rochers. 


-  Si- 

V 

24o  COMMUNE  DE  BSÀULI£XJ« 

Des  traces  romaines  furent  découvertes  dès  avant 
1837,  dans  un  champ  nommé  Pief-Signoré.  (LAnjou 
et  ses  Monuments^  lome  I®"^,  page  85.) 

25<>  COMMUNE  DE  FAVERAVE. 

k  trois  kilomèlrcs  au  sud  du  bourg  et  à  un  kilomè- 
tre au  sud  de  Machelles,  entre  les  moulins  à  eau  du 
pont  Bourceau  et  la  ferme  de  Maizé  ^  dans  un  champ 
nommé  le  Coteau-Gaudy,  on  trouva  beaucoup  de  frag- 
ments de  tuiles  à  rebords,  et  vers  1780  on  y  a  décou- 
vert une  grande  quantité  de  pièces,  les  unes  en  argent, 
les  autres  en  alliage  ou  en  cuivre. 

26o  COMMUNE  DE  PAYE. 

A  800in  au  sud  de  l'église,  près  et  au  sud  de  la  mai- 
son de  la  Pinsonniére,  on  a  trouvé,  dans  les  vignes, 
de  vieilles  murailles  et  de  nombreux  fragments  de 
toiles  à  rebords,  beaucoup  plus  épaisses  que  d'ordi- 
naire. Ce  terrain,  aux  xvi"  et  xvue  siècles,  s'appelait 
les  Tuiles. 


—  52  — 

ARRONDISSEMENT  DE  BAUGÉ. 

Des  traces  gallo-romaines  ont  été  constatées  savoir  : 
1.  Sur  la  commune  de  Saint-Martin-d'Arcé;  2.  de 

Yaulandry;  3.  de  Beaufort;  A.  de  Corné;  5.  de  Mazé; 

6.  de  Saint-Georges-des-Bôis ;  7.  de  la  Lande-Chasie; 

8.  de  Seiches;  9.  de  Beauvau;  10.  de  la  Rairie;  11.  de 

Marcé;  12.  de  Suelte;  13  de  Cuon. 

1.   COMMUNE  DE  SAINT-MARTIN-D'ARCÉ. 

Un  grand  nombre  de  briques  à  rebords  et  une  clef 
en  bronze  de  forme  semblable  à  celle  de  plusieurs 
clefs  provenant  de  Pompéie,  ont  été  trouvées  sur  cette 
commune,  dont  le  nom  très-significatif  d'Arcé  pourrait 
bien  dériver  du  mot  arXy  arcis,  citadelle,  lieu  fortifié. 
On  cessera  de  s'en  étonner  si  l'on  vient  à  songar  que 
Saint-Martin-d'Arcé  n^est  pas  fort  éloigné  du  camp  de 
Gré  (département  de  la  Sarthe).  Ce  camp,  dit  M.  l'abbé 
Voisin  dans  son  histoire  des  CenomanSy  1. 1^^,  page  37, 
c  était  sur  la  voie  d'Angers  au  Mans  et  marquait  les 
»  frontières  des  deux  cités  :  il  était  comme  un  poste 
)  avancé  du  camp  d'Angers.  > 

Dans  le  nom  de  gué  d'Arcis ,  lieu  situé  en  Anjou , 
près  de  Vivy,  arrondissement  de  Saumur,  nous  retrou- 
vons encore  la  même  étymologie  :  arx,  arcis,  citadelle, 
et  cet  endroit  est  assez  voisin  du  camp  de  Chenehutte. 

Ces  différents  lieux  fortifiés  étaient,  durant  l'ère 
gallo-romaine,  comme  autant  de  petits  postes  mili- 
taires qui  pouvaient  assurer  la  circulation  sur  les 
routes. 


2.    COMMUNE  DE  YAULÂNDRY. 

D'après  M.  Tabbé  Chevallier,  secrétaire  de  la  Com- 
mission archéologique  de  Maine-et-Loire,  l'origine 
gallo-romaine  de  cette  commune  est  incontestable.  A 
l'entrée  du  bourg,  dans  un  champ  dit  la  Roberdière, 
on  a  découvert  un  grand  nombre  de  briques  à  rebords, 
et  aussi  dans  deux  autres  champs  situés  à  des  distances 
assez  lointaines. 

A  500  mètres  vers  l'est  de  la  Roberdière,  existe  une 
motte  de  défense  d'environ  ^^  de  hauteur  et  20™  de 
diamètre  à  sa  base.  Son  plan  est  elliptique. 

Plusieurs  cercueils  en  pierre  coquillière  ont  été  dé- 
couverts au  même  lieu. 

Voir  page  78,  2®  série,  2*  vol.,  Mémoires  de  la  So- 
ciété d'agriculture  y  sciences  et  arts  d'Angers» 

S.   COMMUNE  DE  BËAUFORT. 

On  a  trouvé  des  antiquités  romaines  principalement 
dans  les  deux  endroits  de  cette  œmmune  nommés 
Saint-Pierre-du-Lac  et  le  Grand-Buzé. 

Le  Grand-Buzé  est  situé  dans  la  vallée  sur  une  lé- 
gère éminence  que  les  eaux  débordées  peuvent  diffici- 
lement atteindre.  La  découverte  de  ce  point  gallo-ro-* 
main  pourrait,  en  de  certaines  limites,  indiquer  le  ni- 
veau de  la  Loire  lorsque  ce  fleuve  coulait  autrefois  de 
ce  côté. 

Le  Grand-Buzé,  placé  rive  droite  de  TAutliion,  à  pe- 
tite distance  du  Pont-Rouge,  dépendait  de  Saint-Pierre- 
du^Lac.  Entre  ces  deux  endroits  la  vallée  se  creuse,  et 
il  est  fort  à  croire,  que  même  après  le  détournement 


—  54  — 

de  la  Loire,  des  eaux  seront  demeurées  stagnantes  et 
auront  formé  comme  un  lac  entre  le  Grand-Buzé  ^t 
Saint-Pierre ,  qui  en  aura  tiré  son  nom  de  Saint-Pierre 
du  Lac.  De  même  du  lieu  voisin,  Port-à-Fondu;  il  se 
sera  ainsi  nommé  quand  la  Loire  aura  eu  cessé  de 
baigner  le  coteau  septentrional. 

Dans  les  parties  basses  de  Beaufort,  vers  Test,  à 
travers  la  Grande^Boire^  la  métairie  de  la  Touche-Bru- 
neau  et  les  lieux  appelés  Pptits-Bois,  Bois-du-Longy 
Marais- de-Chape ,  la  Bulle  j  Fourcelle  et  la  Chenaye, 
jusqu'au  gué  d'Arcis,  près  de  Vivy,  existent  les  traces 
d'une  voie  romaine  qui  passe  sur  les  coins  des  deux 
arrondissements  de  Saumur  et  de  Baugé.  0  C'est,  je 

>  crois,  écrit  Bodin,  cette  partie  de  la  voie  romaine 

>  que  Ménage  nomme    une   ancienne  levée  {Sablé ^ 

>  page  234).  i» 

Le  nom  de  Touche-Bruneau  a  suggéré  l'idée  que 
cette  route  aurait  bien  pu  être  établie  par  les  soins  de 
Brunehaut.  Mais  il  n'y  a  pas  apparence  qu'il  en  ait 
été  ainsi,  cette  reine  n'ayant  gouverné  qu'en  Austrasie. 

4.  COMMUNE  DE  CORNÉ. 

C'est  dans  cette  commune  qu'en  janvier  4847,  au 
lieu  nommé  la  Gangneriede-Quiquère  et  à  la  profon- 
deur d'environ  28  centimètres  Ton  trouva  un  vase  en 
terre  rougeâtre  et  sans  ornements  ni  vernis^  ayant  une 
forme  ovoïde  et  un  col  étroit.  Ce  vase,  dont  les  frag- 
ments sont  au  musée  d^antiquités ,  ne  renfermait  pas 
moins  de  458  pièces  d'or  de  module  ordinaire,  pesant 
au  total  3  kilogrammes  250  grammes ,  et  représentant 
une  valeur  métallique  de  10,225  francs.  Elles  sont  à 


—  56  — 

l'effigie  de  treize  personnages  dont  ciiiq  femmes,  sa- 
voir : 

Nombre  des  médailles. 

Harciane,  sœur  de  Trajan i 

Sabine ,  épouse  d'Adrien .  3 

Fausline  première 59 

Faustine  deux    .     .    • 55 

Lucille  f,  de  Lucius  Verus 12 

Les  huit  autres  effigies  sont,  dans  Tordre  chro- 
nologique, celles  de  : 

Jules  César  restitué  par  Trajan i 

Trajan 9 

Adrien 16 

Lucius  Œlius 3 

Antonin  le  pieux    ...     « 137 

Marc-Aurèle 111 

Lucius  Yerus 4A 

Commode.     . 7 

Total 458 

Tous  ces  princes  et  princesses ,  à  partir  de  Favéne- 
ment  de  Trajan  jusqu'à  la  mort  de  Commode,  vont  de 
Fan  97  de  J.-C.  à  l'an  192.  Les  revers  en  sont  géné- 
ralement beaux  et  variés.  (Voir  Notice  de  M.  Marche- 
gay ,  Bulletin  de  la  Société  mivMrielle  d'Angers ,  n^  1 , 
18«  année.) 

En  1847  le  musée  des  antiquités  a  fait  l'acquisition 
de  huit  de  ces  médailles,  savoir  :  Adrien,  Antonin  le 
pieux,  Marc-Aurèle,  Faustine  mère,  Faustine  jeune, 
Lucille,  Trajan  et  Lucius  Yerus.  Ces  monnaies  sont  à 
fleur  de  coin. 

Le  nom  de  Quiquère  vient-il,  comme  on  l'a  prétendu, 


—  56  — 

de  qui  quœre  (cherche  id)?  Je  laisse  i  de  plus  doctes 
que  moi  le  soin  d'apprécier  la  valeur  de  cette  étjmo— 
logie. 

Quiquère  est  situé  sur  la  voie  romaine  d'Angers  à 
Tours  ;  on  y  trouve  aux  lieux  Qommés  Champs-de-la- 
Ville  et  les  Hauts-Champs  y  beaucoup  de  briques  ro-" 
maines,  et  des  sarcophages  composés  chacun  de  trois 
grandes  ardoises  brutes. 

5.  COMMUNE  DE  MAZÉ. 

On  a  découvert  aux  environs  de  Mazé  des  briques 
romaines  (1).  Ce  lieu  était  la  Condita  Madacmsis  du 
ix«  siècle.  (Voir  Archives  d'Anjou^  vol.  1©^,  pag.  378.) 

La  cité  qui  correspondait  à  l'étendue  d'un  diocèse 
dans  les  premiers  temps  de  l'Empire  romain,  était  di- 
visée en  14  régions  ou  condita^  chaque  condita  en  trois 
vici  ou  cantons,  chaque  viens  renfermait  un  certain 
nombre  de  villœ. 

Mazé  fut  donc  un  chef-lieu  de  condita  ou  d'arron- 
dissement, de  même  que  Ghalonne  fut  un  chef- lieu 
de  vîcus  ou  de  canton,  durant  l'ère  gallo-romaine. 
(Consulter  la  lettre  inédite  de  M.  l'abbé  Voisin  du 
Mans.) 

6.   COMMUNE  DE  SAINT -GEORGES-DU-BOIS. 

Au  rapport  de  M.  Cellier,  propriétaire  en  cette  com- 
mune, on  y  a  trouvé  récemment,  dans  un  lieu  désert, 
beaucoup  de  cercueils  en  pierre ,  autour  desquels  gi- 

(1)  M.  Mamert,  conseiller  de  préfecture,  vit,  en  1853,  démolir  des 
murailles  avec  appareil  de  briques  à  rebords,  non  loin  du  château  de 
Moniçeoffr&y. 


—  57  — 

saient  de  nombreux  fragments  de  briques  à  rebords 
(Voir  mes  notes  pour  plus  de  détails  à  ce  sujet.) 

7.  COMMUNE   DE  LA   LANDE-CHASLE. 

Dans  le  champ  de  la  Besnardière  on  a  découvert  de 
grandes  briques  romaines.  Leur  pâte  présente  à  la 
cassure  un  beau  rouge  vif  qui  les  dislingue  de  nos 
briques  modernes  beaucoup  plus  pâles.  On  nous  assura 
que  dans  l'étendue  de  plus  d'un  hectare,  le  soc  de  la 
charrue  heurtait  souvent  de  vieux  murs  d'une  extrême 
dureté.  Ces  murailles,  nous  dit  M.  de  Lestoile,  sont  for- 
mées de  petites  pierres  bloquées  dans  de  la  chaux. 
Elles  avaient  sans  doute  appartenu  à  quelque  villa. 

La  pièce  de  la  Besnardière  est  située  à  200  mètres 
d'une  ancienne  route  q.ui  d'Angers  se  rendait  en  Tou- 
raine,  par  Andard,  Mazé,  Gée,  Brion,  La  Lande-Chasle, 
Mouliheme,  Breil,  Rillé,  route  plus  directe  que  toute 
autre,  comme  on  peut  s'en  convaincre  en  jetant  les 
yeux  sur  une  carte.  (Voir  Revue  d'Anjou  et  du  Maine, 
page  124,  nov.  1857.) 

8.   COMMUNE  DE   SEICHES. 

Le  i5  janvier  1854,  au  lieu  nommé  Vetière^  (loca 
vetera,  lieux  anciens  (1)),  à  la  profondeur  de  65  centi- 
mètres on  découvrit  dans  un  vase  de  terre  noire,  plus 

({)  Il  paraît,  d'après  une  lettre  de  juin  1859  de  M.  de  Beauvoys^ 
qu'il  faudrait  écrire  Vecquières  au  lieu  de  Vetières,  Dans  ce  cas, 
notre  étymologie  tomberait  d'elle-même.  l\  résulte  d'une  seconde 
lettre  que  ce  mot  se  trouve  ainsi  écrit:  TEvêcquière,  TEvêquerie. 
«  Foulques  de  Matheflon,  évêque  d* Angers  en  1349,  lors  de  la  peste 
»  noire,  n'anrait-il  pas  construit  là  une  maison  de  plaisance  t  »  Ceci 
ne  détruit  point  la  certitude  d'une  villa  romaine  en  cet  endroit. 


—  58  — 

de  300  médailles  d'argent,  pesant  un  kilogramme  en- 
virQn.  Le  terrain,  en  cet  endroit,  est  parsemé  de  restes 
de  briques  à  rebords,  qui,  avec  les  débris  de  mu- 
railles emplecton  paraissant  à  fleur  de  sol,  prouvent 
que  dut  exister  ici,  une  villa  d'une  très-haute  anti- 
quité. 

La  moins  ancienne  des  médailles  datant  d'Auguste , 
établit  assez  que  leur  enfouissement  s'est  vraisembla- 
blement fait  sous  cet  empereur. 

La  plupart  de  ces  monnaies  sont  du  nombre  de 
celles  que  l'on  nomme  consulaires.  Elles  appartiennent 
aux  deux  siècles  et  demi  qui  précèdent  notre  ère.  Il  y 
en  a  plusieurs  de  dentelées  ou  crénelées  (numismata  ser- 
rata).  Une  seule  appartient  à  la  classe  de  celles  nom- 
mées incuseSy  c'est-à-dire  qu'elle  a  au  droit  une  tête 
en  relief  et  au  revers  la  même  effigie  en  creux. 

Les  pièces,  avec  ce  défaut  provenant  de  la  mala- 
dresse de  l'ouvrier,  n'en  sont  pas  moins  recherchées. 

Ces  monnaies  des  Vetières  appartiennent  aux  familles 
romaines  suivantes  :  Acilia,  Alia,  Œmilia,^  Antonia, 
Afrania,  Crepusia,  Gornelia,  Carisia,  Gordia,  Claudia, 
Coponia,  Cassia,  Cœcilia,  Furia,  Flaminia,  Fonteia, 
Junia,  Julia,  Lucretia,  Lucilia,  Livineia,  Marcia,  Mus- 
sidia,  Mamillia,  Octavia,  Plancia,  Porcia,  Poblicia, 
Plantia,  Posthumia,  Plettoria,  Petillia,  Pompeia,  Renia, 
Rutilia,  Rubria,  Scribonia,  Servilia,  Satrianâ,  Sicinia, 
Sulpicia,  Titia,  Torria,  Tituria,  Vibia  et  Volteia.  (Voir, 
pour  plus  de  développements,  nos  Nouvelles  archéolo- 
giques, no  25.) 

Seiches  sur  le  Loir  portait  encore  au  ix©  siècle 
le  nom    de   villa  :    Villam  nuncupante   cipiam  qui 


—  69  — 

(  sic)  est  sita  in  pago  Andecavo  y  suprà  Liddo  fiumine  • 
lisons-noQS  dans  une  charte  de  Charlemagne,  que 
possède  en  original  le  musée  d'antiquités  d'Angers. 
Le  latin  en  est  fort  défectueux ,  mais  ne  diminue 
pas  l'intérêt  de  ce  précieux  document,  daté  d'Aix- 
la-Chapelle.  Il  nous  fait  savoir  qu'en  Tannée  809 , 
Charlemagne  donna  Seiches,  son  église  et  ses  mou- 
lins aux  religieux  de  Saint-Aubin  d'Angers. 

Depuis  lors,  Foulques-Nerra,  au  rapport  de  Roger, 
page  419,  retira  Seiches  de  leurs  mains  pour  le  don- 
ner au  Ronceray.  (Voir  l'Anjou  et  ses  monuments  ^  1. 1^»*.) 

9.  COMMUNE   DE  BEAUVAU. 

D'après  une  notice  sur  Beauvav  par  M.  J.  P.  Ouvrard, 
page  71  des  Mémoires  de  la  Société  d'agriculture,  scien- 
ces  et  arts  d'Angers,  2®  série,  5«  volume,  existent  dans 
cette  commune  les  traces  d'une  voie  romaine  qui,  par- 
tant du  bourg  ^  se  rend  sur  les  bords  du  Loir^  au-des- 
sous de  DurtaL  en  traversant  la  forêt  de  Chambiers. 
«  L'exhaussement  de  la  chaussée  existe  encore  çà  et 
»  là  et  de  chaque  côté  on  voit,  alignées,  de  grosse^ 
»  pierres;  cette  chaussée  a  de  9  à  10  pieds  de  lar- 
ï  geur.  Son  centre  est  occupé  par  un  mélange  de  pe- 
»  tiles  pierres  que  les  Romains  nommaient  rvdus,  » 

M.  Ouvrard  signale  également  près  de  Beauvau,  sur 
le  coteau  de  Richebourg,  un  camp  qui  était  protégé 
au  nord  par  un  large  retranchement  et  au  sud  par  la 
rivière  du  Pouyat.  On  y  a  trouvé,  en  1807,  des  bri- 
ques à  rebords  et  des  pièces  de  Vespasien,  Posthume, 
Valentinien  et  Constantin* 


—  M  — 

10.  COimUlfE  DE  LA.  RIIRIE. 

La  Toie  du  Mans  à  Angers,  après  avoir  longé  le 
camp  romain  de  Cré^  traversant  le  Gué^-F Arche,  ve- 
nait aux  carrières  de  la  Raine,  au  château  de  Miré, 
dans  la  forêt  de  Chambiers. 

il.   COMMUNE  DE  MARCi. 

La  voie  romaine  du  Mans  à  Angers  passait  près  de 
Marcé  et  joignait  à  Suette  la  route  actuelle. 

12.   COMMUNE  DE  SUETTE. 

Suite  de  la  voie  romaine  du  Mans  à  Angers. 
Voir,  pour  cette  voie,  les  Cenomans,  t.  I®^,  page  50, 
de  M.  Tabbé  Voisin. 

13.   COMMUNE  DE  GUON. 

Sur  la  pièce  de  la  Gerveselière,  dépendant  d'une  mé- 
tairie appartenant  à  M.  J.  de  Lestoile,  on  trouve  des 
briques  à  crosseltes;  d'un  autre  côté  la  charrue  ren- 
contre de  vieux  murs  sur  une  étendue  de  plus  d'un 
hectare;  il  y  avait  là,  sûrement,  quelque  villa  ro- 
maine fort  bien  située  d'ailleurs,  près  d'une  source 
dite  de  Brené,  dont  l'eau  fait  tourner  un  moulin. 


-  61  — 

ARRONDISSEMENT  DE  CHOLET, 

Auparavant  de  Beaupreau. 

Des  traces  gallo-romaines  ont  été  constatées,  savoir  : 
1.  Sur  Saint'Martin  do  Beaupreau;  2.  Sur  la  com- 
mune d'Andrezé;  3.  de  la  Chapelle -du-Genet;  4.  de 
Geste;  5.  de  Jallais;  6.  du  May;  7.  de  la  Blouère; 
8.  de  Champtoceaux  ;  9.  de  la  Ghapelle-Rousselin  ; 
10.  de  Sainte-Christine;  41.  de  Neuvy;  12.  de  la  Tour-  * 
Landry;  13.  de  Chanteloup;  14.  de  Nuaillé;  15.  de 
Toul-le-Monde ;  16.  de  Trementines ;  17.  de  Vezins; 
18.  d'Yzemay;  19.  de  Saint-Laurent -de -la -Plaine; 
20.  de  Saint-Crespin ;  21.  du  Longeron;  22.  de  la  Re- 
naudière;  23.  de  Roussay;  24.  de  Tilliers;  25.  de  Tor- 
fou;  26.  de  Chaudron;  27.  de  la  Chaussaire;  28.  du 
Fief-Sauvin;  29.  de  Saint- Remy- en -Mauges;  30.  de 
Saint-Florent-le-Vieil  ;  31,  la  Romagne;  32.  Cholet; 
33.  Bouzillé. 

1.  SAINT-MARTIN   DE  BEAUPREAU. 

En  1826  et  1851  plusieurs  centaines  de  pièces  ro- 
maines aux  effigies  de  Constance  Chlore,  de  Conslan- 
tin,  de  Maxence,  de  Maximien,  de  Licinius  et  de  Dio- 
clétien  furent  trouvées  au  lieu  dit  la  métairie  des 
Pierres-Blanches,  La  découverte  de  1826  a  été  faite 
dans  une  urne  antique.  (Nouv.  arch.,  n»  25,  et  lettre 
de  M.  Tristan-Martin  du  28  août  1851.) 

2.  COMMUNE   d'aNDREZÉ. 

Au  rapport  de  M.  Tristan-Martin  on  y  a  trouvé,  il  y 
a  trente  ans,  un  trésor  composé  de  plus  de  600  pièces 


-  62- 

romaines  d'époque  précédant  celle  du  Bas -Empire. 
(Voir  Notice  de  M.  Léon  Faye,  page  320,  3^  vol.,  2«  sé- 
rie, 1 852,  Mémoires  de  la  Société  (T agriculture,  sciences 
et  arts  d'Angers,) 

3.   COMMUNE  DE  LA  CHÀPELLE-DXJ^GENET. 

Trace  de  la  voie  romaine  allant  du  nord-ouest  au 
sud-est  j  de  Nantes  à  Poitiers.  (Voir  Notice  sur  la  sta- 
tion Segora  par  M.  Tristan-Martin,  Beaupreau^  Grange^ 
1854,  page  4.) 

4.  COMMUNE  DE  GESTE. 

Trace  de  voie  romaine  auprès  du  château  de  la  fo- 
rêt sur  Geste,  allant  de  Test  à  l'ouest,  vers  Nantes. 
Plus  au  sud  de  la  même  commune,  vestiges  d'une 
autre  voie  allant  du  nord-ouest  au  sud-ouest  vers  le  dé- 
partement de  la  Vendée. 

5.  COMMUNE  DE  JALLAIS. 

Deux  traces  de  voie  romaine  allant  l'une  du  nord- 
est  au  sud-ouest  vers  Belle-Fontaine;  Tautre  du  nordr- 
ouest  au  sud-est ^  vers  Trémentines. 

6.   COMMUNE  DU  MAY. 

Trace  de  voie  romaine  allant  du  nord-ou£st  au  sud- 
est  vers  Nuaillé. 

7.   COMMUNES  DE  LA  BLOUÈRE  ET  DE  VILLEDIEU. 

Traces  de  voies  romaines  allant  du  nord  au  sud  vers 
la  Renaudière.  m^ 


—  63  — 

8.   COMMUNE  DE  GHAMPTOGEAUX. 

D'après  M.  Tristan-Martin,  quelques  murs  imbriqués 
se  voient  en  cette  commune;  Champtoceaux  même 
au  moyen-âge  passait  pour  être  un  point  gallo-romain. 
Voici  ce  qu'en  a  écrit  Bourdigné  :  «  Aussi  dit-on  que 
»  l'un  des  questeurs  romains  nommé  Celsus  pour  les 

>  tributs  que  Ton  leur  devait  mettre  en  seureté,  feist 
1  es  fins  d'Anjou  et  Bretaigne-Armorique ,  bastir  un 
^  puissant  chasteau  que  il  nomma  de  son  nom  Chas- 

>  teauceaulx,  lequel  Ton  appelle  maintenant,  en  lan- 

>  gaige  corrompu,  Chanloceaulx.  i>  (Feuillet  XV  recto.) 
Le  Celsus  dont  il  s'agit  ici  pourrait  bien  être  sim- 
plement l'adjectif  latin  celsixs^  signifiant  lieu  élevé; 
Champtoceaux  est  en  effet  placé  sur  l'un  des  points 
les  plus  culminants  de  l'Anjou.  Mais  la  tradition  ro- 
maine n'en  persiste  pas  moins. 

Dans  Notitia  dignitaUim  per  Gallias  (page  427,  Bou- 
quet, t.  I«r),  il  est  question  de  deux  endroits  portant 
le  nom  de  Grannona  et  Gramiono,  dont  l'un  est  situé 
en  Ârmorique  (tractus  Armoricanus).  Plusieurs  placent 
Grannona  à  Guérande,  d'autres  à  Granville  et  sans 
bonnes  raisons.  Dans  cette  incertitude  il  nous  sera  bien 
permis  de  risquer  une  conjecture.  Pour  nous,  Gran- 
nona n'est  point  synonyme  de  Grandis  viUuy  Granville^ 
mais  bien  de  Grani  annona,  annuités  du  grain ,  meta* 
phoriquement  tributs  en  nature.  Or,  comme  suivant  la 
tradition  Champtoceaux  fut  un  lieu  considérable  affecté 
à  la  sûreté  du  dépôt  des  tributs ,  et  comme  il  était  en 
outre  situé  dans  le  tractus  Armoricanus  ^  on  voit  de 
suite  que  Grannona  pourrait  bien  y  avoir  été  placé« 

Il  est  vrai  que  la  Notice  des  dignités  porte  Gran-^ 
nona  in  littore  Saxonico;  mais  on  sait  que  par  littus  et 


-  64  — 

littora^  on  ne  doit  pas  entendre  seulement  parler  des 
bords  de  la  mer,  mais  encore  des  contrées  qui  Tavoi- 
sinent,  bien  qu'à  plusieurs  lieues  Je  distance.  Nous  en 
trouvons  un  exemple  frappant  dans  ce  texte  de  César, 
lib.  III,  alin.  vu  de  ses  Commentaires  :  <  P.  Crassus 
»  adolescens  cum  legione  VU  proximus  mare  Oceanum 
)  Andibus  hiemabat.  » 

Si  notre  conjecture  est  fondée,  Champtoceaux  aurait 
donc  été  le  lieu  où  se  tenait  le  tribun  de  la  cohorte 
de  la  première  nouvelle  Armorique  :  tribunus  cohortis 
primœ  novœ  Armoricœ. 

Le  curé  Robin  avait  (dans  son  Camp  de  César^ 
page  xiv)  fort  bien  entrevu  que  les  troupes  granno- 
niennes  résidaient  en  Anjou,  lorsqu'il  dit  :  «  L'an- 
»  cienne  description  ou  notice  de  l'empire  d'Occident 
ï  appelle  Grannoviences^  les  troupes  qui  étaient  en  An- 
]»  jou,  sous  les  préfets,  comtes  ou  marquis  de  la  fron- 

>  tière  Britannique  ou  Armorique,  tractus  armoricani.,. 
ï  Cette  marche  ou  frontière  fut  encore  appelée  Saxo- 

>  niqtie  à  cause  des  Anglais-Saxons  qui  la  dévastèrent, 
2>  comme  dit  Ammien,  lib.  XXVI.  Les  officiers  établis  à 
:»  Grannon  étaient  chargés  de  la  défendre.  Le  comte 
jo  Paul  qui  fut  tué  à  Angers  par  notre  roi  Ghildéric, 
j>  après  la  déroute  d'Odoacre,  selon  Aimoin,  y  était 
»  élabU  par  les  Romains,  gouverneur  de  cette  frontière 

>  Saxonique- Britannique,  Limitis  Britannici.  Sa  de- 
9  meure  était  à  Angers  :  Statio  Comitialis.  Encore  en 
»  861 ,  sous  Charles  le  Chauve,  Robert  le  Fort  est  pré- 

>  posé  sur  toute  la  côte  britannique,  Littori  Britannico, 
»  pour  la  défendre  des  courses  des  Normands.  > 

V.  Godaro-Faultrier. 

(La  suite  au  prochain  numéro). 


NOTICE  HISTORIQUE 


SUR 


LE  CHATEAU  ET  LA  COMIHUi^E  M  MUÎ 


La  commune  de  Brezé,  canton  Ae  Wontreuil-Bellay, 
a  été  habitée  dès  le  temps  des  Romains,  ainsi  que  le 
prouvent  lés  tuiles  à  rebord,  les  poteries  antiques  et 
les  médailles  qu'on  a  découvertes  surle  bord  de  la  Divei 
au  lieu  dit  la  Rivière-Marteau.  Des  traces  de  construc- 
tions romaines  se  voient  également  non  loin  du  châ- 
teau. 

Nous  admettons  volontiers,  d'après  Bourdigné  (1),  que 
du  temps  de  Clovis  (fin  du  v®  et  commencement  du  vi*^ 
sfècle),  Thibault  de  Brezay  ^e  rendit,  avec  plusieurs  An- 
gevins, au  secours  de  Ponthus,  roi  de  Gallice,  et  qu'il 
fut  tué  dans  là'  bataille^ 

D'après  une  charte  de  l'abbaye  de  Saint-Florent  près 

(1)  Chroniques  d'Anjou  et  du-Haiiie,  lumveile  édition,  tome  i**'^ 
page82. 

REP.  ARC.  5 


-66- 

Saumur,  il  y  avait  à  Brezé  un  château  dès  Tan  1063  (1). 

Dans  les  titres  latins  ce  lieu  est  appelé  Breze,  Bre- 
zay,  Brescum,  Breseyum,  Breiseium,  Breseium,  Brais- 
cium,  Brayscium. 

On  prononce  actuellement  Brêzé. 

Un  Geoffroy  de  Brezé,  Goffredus  de  Bresay,  figure 
comme  témoin  dans  une  donation  faite  vers  l'an  1110, 
à  Robert  d'Ârbrissel,  par  Leegat  et  sa  femme  Erem- 
burge,  de  la  pierre  nécessaire  pour  construire  Téglise 
de  Fonte vrault  (2). 

Vers  Tan  1125,  Renaud  de  Brezé,  sa  femme  Mil- 
sende,  leurs  fils  Foulques,  Raoul,  Guérin,  et  leurs 
filles  Hameline  et  Guinne  donnèrent  à  Tabbaye  de 
Fontevrault,  trois  setrées  de  terre  situées  à  Asnière 
sur  Dive  (3),  et  une  setrée  dans  un  autre  endroit.  Ce 
don  fut  confirmé  par  Assalit,  gendre  dudit  Renaud  et 
par  son  épouse  Hadieme  (4). 

Barthélémy  de  Brezé  restitua  vers  l'anllôGàZacha- 
rie,  abbé  du  Lproux,  les  dixmes  que  les  moines  de 
cette  abbaye  avaient  à  leur  maison  de  Lançon  et  qu'il 
leur  avait  enlevées  par  force.  Cette  restitution  fut  faite 
du  consentement  de  son  épouse  Handinie,  de  Barthé- 
lémy son  fils  aine,  de  Pierre  et  Richer  ses  frères,  en 
présence  de  Rainaud  de  Brezé  (5), 

Milon  de  Brezé,  chevalier^  eidstait  en  1224-1230,  #t 

(i)  Recherches  historiques  par  Bodin,  édition  publiée  par  M.  Go* 
det  en  1845-1846^  tome  l«r,  page  241. 

(2)  Clypeus  tiascentit  FonUbraldensis  ordinis,  tome  2,  page  Î4i. 

(3)  Commune  d'Epieds. 

(4)  Clypeus,  tome  2,  page  300^1 . 

(5)  Pièces  justificatives  no  I. 


—  eî  — 

i]   confirma  diverses  donations  faites  à  l'abbaye  du 
LoroBx  (1). 

JfiAif  BE  Brezé,  chevalier,  approuva  Tan  1333  le  don 
de  certaines  dixmes  fait  à  Tabbaye  du  Loroux  par 
Philippe  de  Dampierre.  Son  sceau  porte  une  bande 
accompagnée  de  six  molettes,  et  la  légende  s.  johan 
DB  BR£SEv  ifiLiTis  (2).  Ce  Philippe  de  Dampierre  avait 
épousé  la  sœur  de  Jean  de  Brezé^ 

Geoffroy  de  Brezé,  chevalier,  céda  en  1249  aux  re- 
ligieux de  l'abbaye  du  Loroux  un  ûef  qu'il  avait  à 
Saumar,  et  il  prit  à  rente,  en  1263,  de  Simon  Cha-* 
maîHart,  divers  héritages  à  Grandfond  et  dans  les  pa- 
roisses de  Chétigné  et  du  Coudray. 
C'est  probablement  ce  même  Geoffroy  de  Brezé  qui 

èVait  bailli  d'Anjou  pour  le  roi  de  Jérusalem  et  de  S- 

cile,  comte  d'Anjou,  vers  Tan  1279  (3). 
11  fit  son  testament  en  1300,  et  l'an  1302  il  partagea 

ses  biens  entre  ses  enfants  (4).  Dans  cet  acte  il  donne 

à  Catherine  de  Brezé,  sa  petite-fille,  épouse  de  Macé 

de  l'Etang,  la  terre  de  Brezé  et  celle  de  Grandfond. 

n  donné  à  Jean,  son  fils  puisné,  la  terre  de  la  Varenne, 

celle  de  Longueville  (5),  etc. 
En  1318,  la  terre  de  Brezé  passe  dans  l'illustre  fa* 

mille  de  U aillé  par  le  mariage  de  Péan  de  Maillé  I 

avec  Jeanne  de  l'Etang  qu'il  avait  enlevée  avant  de 

l'épouser. 

(1)  Ghartrier  du  château  de  Brezé.  Titres  de  Lançon. 

(2)  Ghartrier  du  château  de  Brezé.  Titres  de  Lançon. 

(3)  Recherches  historiques  par  Bodin,  tome  i*'^,  page  192. 

(4)  Pièces  justificatives  h9  III. 

(5)  Communes  de  Gharcé  et  $«iôt»EUier^  caHUw  de  Thouarcé. 


—  68  — 

Ce  chevalier  étant  sénéchal  et  capitaine  de  Périgord 
et  Âuvray,  et  ayant  avancé  des  fonds  à  plusieurs  offi-* 
ciers  de  sa  compagnie  lesquels  se  révoltèrent  et  prireat 
parti  contre  TEtat,  le  roi  Philippe  VI,  par  lettres  datées 
du  3  mai  1342,  ordonna  au  trésorier  des  guerres  de 
rembourser  les  avances  faites  par  Péan  de  Maillé. 

11  était  mort  l'an  1347  et  eut  pour  enfants  Péan  II, 
Eléonore,  mariée  à  Guy  de  Chasseraye  et  Isabeau,  dame 
de  Saumoussay  (1). 

PÉA.N  DE  Maillé  II,  seigneur  de  Brezé  et  SMieorge&- 
du-Bois,  servit  le  roi  dans  ses  guerres  en  plusieurs 
occasions  depuis  1352  jusqu'en  1381.  Il  épousa  en 
premières  noces  Marie  de  la  Jaille  qui  le  rendit  père 
d'Eléonore.  S'étant  remarié  le  21  octobre  1367  avec 
Jeanne  Bouchard ,  il  en  eut  Péan  III,  Catherine  et 
Jacques,  et  mourut  avant  1390.  Sa  femme  lui  survécut 
et  vivait  encore  en  1418.  Comme  elle  avait  la  jouis- 
sance de  leurs  biens,  elle  donna  le  château  de  Brezé  à 
Péan  son  fils,  par  acte  du  29  juin  14-00. 

Péan  de  Maillé  III  était  seigneur  de  Brezé  en  1400; 
il  fit  son  testament  le  10  décembre  1427  et  vivait  en- 
core en  1430.  Il  avait  épousé  Marie  de  Maillé,  fille 
d^Hardouin  VII,  qui  était  veuve  en  1433,  dame  de 
Milly-le-Meugon  et  Brezé,  en  1440,  dont  il  eut  :  Har- 
douin,  Gilles  et  sept  filles. 

Gilles  de  Maillé  fut  seigneur  de  Brezé  et  de  Mille 
ou  Milly-le-Meugon  en  1437-1477.  Conseiller,  chambel- 
lan et  grand  maître  de  la  vénerie  de  René,  roi  de 
Sicile,  duc  d'Anjou,  qui  le  fit  chevalier  de  son  ordre 

(1)  Cotomane  do  Samt-'Cyr-en-Souf^. 


^  69  -- 

du  Croissant  le  27  juillet  1449,  il  suivit  ce  prince  en 
son  voyage  d'Italie  pour  le  recouvrement  de  ses  états 
où  il  lui  rendit  de  grands  services.  Aussi  en  obtint-il 
des  lettres  patentes  qui  lui  permettaient  de  fortifier 
son  château  de  Brezé  et  d'y  établir  une  garnison. 

Le  29  juin  4440,  il  avait  épousé  Jeanne  Amenard 
morte  avant  1459,  et  en  secondes  noces,  Marguerite 
Levesque  qui  ne  vivait  plus  en  1470. 

Gilles  de  Maillé  fit  son  testament  le  22  janvier  1477, 
et  fut  père  d'Hardouin,  René,  Jean  et  Catherine. 

Hardouin  de  Maillé  épousa  par  contrat  du  25  jan- 
vier 1480,  Ambroise  de  Melun,  fille  de  Charles  de  Melun 
grand  maître  de  France.  11  assista,  le  11  juillet  1496, 
au  contrat  de  mariage  de  René  du  Bellay  et  de  Mar- 
guerite de  Laval,  au  château  du  Plessis-Macé  (1).  Har- 
douin fut  seigneur  de  Brezé  et  de  Milly  ;  il  mourut  en 
1508  et  sa  femme  vers  1524,  laissant  1^  Guy,  2^  Am- 
broise qui  épousa  Jacques  de  Perrière. 

GuT  DE  Maillé  prit  alliance  le  3  mars  1510  avec 
Anne  de  Louan,  et  en  eut  onze  enfants  parmi  lesquels 
nous  citerons  :  1»  Arthur;  2°  Simon,  archevêque  de 
Tours,  mort  en  odeur  de  sainteté  le  11  janvier  1597; 
So  Philippe;  iP  Jacques;  5^  Jeanne,  abbesse  du  Ron- 
ceray,  morte  le  6  décembre  1571  ;  6°  Yvonne,  abbesse 
du  Ronceray  après  sa  sœur,  morte  Tan  1589. 

Le  27  janvier  1 51 7,  il  se  rendit  auprès  de  René  de  Cessé, 
gouverneur  d'Anjou  pour  la  reine  mère  du  roi  duchesse 
d'Anjou,  et  déclara  :  <  tenir  en  franc  alleu  son  chastel  de 
>  Brezé  avec  ses  douves,  clos  de  vignes ,  frous,  jar- 

(1)  L* Anjou  el  ses  monuments,  tome  2,  page  128. 


—  70  — 

»  dins,  préSy  closteaux  et  appartenances  joignant  son 

>  dit  chdstel  et  aussi  sa  haulte  justice,  moyenne  et 

>  basse  et  tout  ce  qui  en  despend...  » 

Une  senlence  rendue  à  Saumur  le  3  novembre  1520, 
confirme  au  seigneur  de  Brezé  c  le  droit  qu'il  a  de 

>  faire  frapper  et  courir  la  quintaine  par  ses  hommes 
»  et  sujets  estant  nouveaux  mariés,  quand  le  cas  ad- 

>  vient  et  que  pour  ycelle  cource  lui  est  deub  (du), 

>  par  chacune  personne  subjecle  à  courir,  le  nombre 
»  de  huit  boisseaux  d'avoine  quand  il  casse  sa  lance 
»  contre  l'écusson,  et  si  elle  n'est  cassée,  luy  en  est 
»  deub  le  nombre  de  seize  boisseaux,  et  ceux  qui 
»  font  deffault  de  courir  lui  doibvent  pareil  nombre 

>  de  seize  boisseaux.  » 

Guy  de  Maillé  fut  aussi  gouverneur  d'Anjou  ;  il  ha- 
bitait ordinairement  le  château  de  Milly  (1),  et  par  son 
testament  passé  le  22  janvier  1545,  il  fonda  plusieurs 
chapelles  en  l'église  dudit  lieu. 

ÂRTHUS  DE  Maillé  épousa  le  2  juin  1547  demoiselle 
Claude  de  Gravy,  fille  d'Ambroise  de  Gravy,  seigneur 
des  Costeaux,  et  de  Renée  du  Bellay.  En  1548,  il  eut  le 
commandement  de  l'armée  envoyée  en  Guyenne  contre 
les  rebelles,  et  passa  la  même  année  en  Ecosse  pour  y 
recevoir  Marie  Stuart  qu'il  conduisît  en  France.  En 
1554,  il  était  gentilhomme  de  la  chambre  du  roi,  lieu- 
tenant de  cent  hommes  d'armes  de  la  compagnie  de 
Claude  de  Lorraine,  duc  d'Âumale,  qu'il  accompagna 
en  Italie  en  1557,  et  devint  capitaine  des  gardes  du 
corps  du  roi  en  1558.  C'est  lui  qui  fit  reconstruire  le 

(1)  Commune  de  Gennes. 


—  71  — 

château  de  Brezé  qu'il  habitait  ordinairement  et  où  il 
eut  l'honneur  de  recevoir,  le  2  octobre  1565,  le  roi 
Charles  IX  et  Catherine  de  Médicis,  sa  mère,  qui  ve- 
naient de  Fontevrault,  couchèrent  à  Brezé  et  se  rendi- 
rent le  lendemain  à  Doué.  Le  seigneur  de  Brezé  fut  chargé 
par  la  reine  Catherine  de  Médicis  de  la  conduite  dé 
Henri  III,  roi  de  Pologne,  lors  de  son  retour  en  France 
en  1 574'.  Il  accompagna  aussi  en  1 582  François ,  duc 
d'Alençon,  lorsqu'il  fut  couronné  duc  de  Brabant  (1). 

Arthus  de  Maillé  ayant  fait  reconstruire  également 
la  chapelle  de  Sainte-Catherine,  placée  dans  l'enceinte 
de  son  château,  la  fit  ériger  en  cure  et  par  acte  du  10 
septembre  1585,  il  dota  convenablement  les  prêtres 
chargés  d'y  célébrer  le  service  divin. 

Le  24  mai  1585  il  fit  son  testament  et  mourut  en 
1592. 

Claude  de  Maillé,  fils  d'Arthus,  avait  épousé  le  15 
septembre  1567,  demoiselle  Robinette  Hérisson,  fille  de 
Jacques  Hérisson,  seigneur  de  Saint-Martin-du-Latr  ou 
du  Lac.  Dans  les  actes  qui  le  concernent,  on  lui  donne 
les  titres  de  chevalier  de  l'ordre  du  roi,  seigneur  de 
Brezé,  Milly  et  Saumoussay,  etc.  Cependant  il  mourut 
avant  son  père,  car  il  fut  tué,  avec  beaucoup  d'Ange- 
vins, le  20  octobre  1587,  à  la  bataille  de  Coutras  où  il 
portait  la  cornette  blanche  de  l'armée  ,(2).  Son  épouse 
qui  lui  survécut,  fit  le  9  novembre  1611,  le  partage  de 
ses  biens  à  ses  enfants,  Charles,  Jacques,  Eléonore  et 
Jeanne. 

(1)  L'Anjou  et  ses  monuments,  tome  2,  page  lil. 

(2)  Histoire  de  France,  par  le  père  Daniel,  et  Recherches  par  6o- 
din,  tome  l'r,  page  316. 


-  72  - 

Charles  de  Maillé  prenait  les  titres  de  chevalier,  sei* 
gaeur  de  Brezé,  Lançon,  Meigné,  la  Rivière-Marteau  (4), 
le  Bois  de  Saumoussay  (2),  Milly  et  TArabroise  (3).  Il 
mourut  en  1613,  ayant  épousé,  le  24  novembre  1597, 
Jacqueline  de  Thévalle,  qui  vivait  encore  en  1643  et 
fut  tutrice  d'Urbain  leur  fils. 

Urbain  de  Maillé  naquit  à  Brezé  et  y  fut  baptisé 
le  30  mars  1598,  ayant  pour  parrain  et  marraine  les 
plus  pauvres  de  la  paroisse. 

Dés  le  mois  de  février  1615,  la  terre  de  Brezé  fut  érigée 
en  marquisat  en  sa  faveur  par  Louis  XIII.  Il  épousa,  le 
25  novembre  1617,  NicoUe  duPlessis,  sœur  du  cardinal 
de  Richelieu.  Le  16  octobre  1619,  il  accompagnait  à 
Angers  la  reine  Marie  de  Médicis,  et  le  25  septembre 
1620,  il  reçut  le  brevet  de  capitaine  de  ses  gardes  du 
corps.  Le  27  avril  1623,  il  devint  conseiller  du  roi  en 
son  conseil  d'état  et  privé,  fut  fait  chevalier  des  Ordres 
le  14  novembre  1625;  capitaine  des  gardes  du  corps  du 
roi  le  20  septembre  1627;  maréchal  de  camp  le  11 
septembre  1630;  ambassadeur  extraordinaire  en  Alle- 
magne le  5  janvier  1632;  maréchal  de  France  le  29 
octobre  suivant  et  gouverneur  de  Calais  le  lendemain. 
En  1635,  Urbain  de  Maillé  perdit  son  épouse,  qui 
mourut  au  château  de  Saumur  le  30  août,  et  fut  in- 
humée dans  réghse  de  Notre-Dame-des-Ardillers.  Dès 
1626,  il  était  gouverneur  de  Saumur  et  du  Saumurois, 
et  fut  nommé  gouverneur  d'Anjou,  le  19  septembre 

(1)  Ces  trois  localités  sont  dans  la  commune  de  Brezé. 

(2)  Commune  de  Chacé,  près  Saumur. 

(3)  L'Ambroise  est  dans  la  commune  de  Saint-Sulpice,  canton  des 
Ponls-de-  Ce 


—  78-^ 

1036,  et  vice -roi  de  Gatalpgne  le  17  octobre  1641. 

Outre  le  marquisat  de  Brezé,  Urbain  de. Maillé  pos- 
sédait encore  les  terres  de  la  Bouchardière  (1)  ;  Milly 
et  Trêves;  Saugré,  Villeneuve-Maillard  et  Virollais  (2) ; 
la  MineroUe  (3),  Marson,  etc.  Il  habitait  ordinairement 
le  château  de  Milly,  où  il  mourut  le  13  février  1650. 

Armand  ou  selon  quelques-uns  Jean-Armand  de  Maillé  , 
fils  d'Urbain,  prenait  les  titres  de  duc  de  Fronsac  et  de 
Caumont,  marquis  de  Brezé  et  de  Graville,  comte  de 
Beaufort  en  vallée.  Nommé,  le  5  décembre  1642, 
grand  maître,  chef  et  surintendant  de  la  navigation  et 
commerce  de  France  (grand  amiral),  il  fut  tué  d'un 
coup  de  canon  au  siège  d'Orbitello  en  Toscane,  le  14 
juin  1646,  à  l'âge  de  27  ans  et  sans  avoir  été  marié, 

Louis  DE  Bourbon  ayant  épousé,  le  7  février  1641. 
Claire-Clémence  de  Maillé,  fille  d'Urbain ,  devint  sei- 
gneur de  Brezé  après  la  mort  de  ce  dernier.  Il  possé- 
dait également  Marson,  Milly,  Pocé,  Trêves,  Beaufort, 
Candé,  Champtoceaux,  etc. 

Ce  prince,  connu  dans  l'histoire  sous  le  nom  de  grand 
Condé,  n'eut  guère  de  relations  avec  notre  pays,  et  il 
avait  un  intendant  pour  gérer  ses  nombreuses  pro- 
priétés en  Anjou  et  en  Bretagne. 

En  1653  et  1654,  le  château  de  Brezé  fut  occupé  au 
nom  du  roi  par  une  garnison,  ainsi  que  beaucoup 
d'autres  châteaux  dans  les  campagnes,  afin  de  résister 
aux  influences  de  la  Fronde. 

(i)  Commune  de  Saint-Cyr-en-Bourg. 

(2)  Ces  trois  localités  sont  dans  la  commune  de  Deuezé,  canton 
de  Doué. 

(3)  Commune  de  Chenehutte-les-Tuffeaux. 


-.•  74  — 

Le  31  juillet  4682,  le  prince  de  Coudé  et  Henri-Jules 
de  Bourbon,  duc  d'Enghien,  son  fils,  cédèrent  à  roes- 
sire  Thomas  de  Dreux,  chevalier,  seigneur  de  la  Galis- 
sonnière  et  autres  lieux,  conseiller  au  parlement  de 
Paris,  le  château  et  la  terre  de  Brezé  et  ses  dépen* 
dances,  en  échange  pour  celle  de  la  Galissonnière. 

Thomas  de  Dreux,  fils  aîné  de  Pierre  de  Dreux  et  de 
Marie  Saguié,  descendait  de  Robert  de  Dreux,  fils  du 
roi  Louis  le  Gros  (1),  et  il  avait  épousé  par  contrat  du 
6  août  1670,  demoiselle  Marie-Marguerite  Bodinet. 

Le  roi  Louis  XIV  érigea  la  terre  de  Brezé  en  mar- 
quisat en  sa  faveur,  et  pour  sa  postérité  née  et  à  naître 
en  légitime  mariage,  par  lettres  patentes  du  raoi;^ 
d'août  1685,  registrées  en  la  chambre  des  comptes  le 
22  juillet  1686,  et  au  parlement  de  Paris  le  5  août  de 
la  même  année. 

Il  acheta,  le  16  novembre  1695,  la  terre  de  Berrie  (2) 
dont  la  féodalité  s'étendait  jusque  dans  la  commune 
de  Brezé,  et  prenait  en  1702  les  titres  de  marquis  de 
Brezé,  baron  de  Berrie,  seigneur  de  Saint-Just,  Saint- 
Hippolyte,  Saumoussay  et  Somloire,  etc. 

Thomas  de  Dreux  mourut  le  27  octobre  1731,  à 
l'âge  de  91  ans,  ayant  eu  pour  enfant  Thomas  et 
Joachim,  qui  avaient  partagé  noblement  la  succession 
de  leur  mère,  le  12  novembre  1717. 

Thomas  de  Dreux  II,  entré  en  1695  dans  le  première 
compagnie  des  mousquetaires,  passa  ensuite  dans  les 
régiments  des  gardes  françaises,  fut  nommé  en  1698, 

(1)  Dictionnaire  historique,  biographique  et  généalogique  des  fa- 
milles de  l'ancien  Poitou,  par  Henri  Filleau. 

(2)  Commune  de  Nueil  sur  Dive,  près  Loudun. 


~  75  — 

colonel  du  régiment  de  Bourgogne,' brigadier  des  arr 
mées  du  roi  en  1703,  niarécbid-de&-bgis  en  17049 
liealenssct-générai  en  1710,  gouverneur  de  k  ville  de 
Loudun  et  pays  Loudunais  en  1720,  et  des  îles  Sainte* 
Marguerite  et  Saint-*Honorat  de  Lerins  en  1727.  Dès 
le  mois  de  mars  1710,  sur  la  résignation  de  Jules-Ar- 
mand Colbert,  marquis  de  Blainville,  il  avait  été  nommé 
grand  maître  des  cérémonies  de  France ,  charge , 
depuis  cette  époque,  héréditaire  dans  sa  famille,  et 
dont  il  se  démit  en  faveur  de  son  fils  atné. 

Dès  1700  il  prenait  le  titre  de  marquis  de  Brezé,  et  le 
16  janvier  1755,  il  rendit  au  roi  Louis  XIV  son  aveu 
pour  raison  de  ladite  terre  de  Brezé  (1). 

Thomas  de  Dreux  mourut  le  26  mars  1749,  laissant  de 
demoiseJe  Catherine-Angélique  Ghamaillart,  JSUe  de 
messire  Michel,  chevalier,  seigneur  de  Montfermeil, 
conseiller  d'Etat  ordinaire  et  intendant  des  finances  de 

* 

France,  et  de  dame  Elisabeth-Thérèse  le  Rebours,  qu'il 
avait  épousée,  par  contrat  du  13  mai  1698,  1^  Michel; 
2**  Joachim;  3»  Elisabeth-Angélique  qui  épousa,  le  6 
octobre  1723,  Bertrand-César  du  Guesclin,  seigneur 
de  la  Roberie,  etc.  dernier  représentant  mâle  de  la 
famille  du  coûnétable;  ifi  Catherine-Françoise,  mariée 
le  4  août  1734  à  Jean-Baptiste  Poussart. 

Michel  de  Dreux,  né  le  15  juin  1700,  fut  nommé 
colonel  du  régiment  de  Guyenne  le  15  mars  171B,  puis 
appelé  en  1720  à  la  charge  de  grand  maître  des  céré- 
monies de  France,  sur  la  résignation  de  son  père  en  sa 
faveur;  brigadier  des  armées  du  roi  le  20  mars  1734. 

(1)  Pièces  jastificatives  no  3« 


-  76  - 

Le  roi,  pour  le  récompenser  de  sa  belle  condaite  au 
siège,  de  Douai,  par  les  alliés,  où  il  Tut  blessé,  le  nomma 
lieutenant  général  le  2  mai  1741,  puis  inspecteur  géné- 
ral dé  rinfanlerie,  commandant  de  Tournay  en  1745, 
gouverneur  de  Loudun  et  des  îles  de  Sainte-Marguerite 
et  Saint-Honorat  de  Lerins  en  mars  1749.  En  mémoire 
du  talent  que  le  marquis  de  Brezé  déploya  à  la  bataille 
de  Fontenoy  et  des  services  qu'il  avait  rendus  précé- 
demment, le  roi  lui  fit  don  de  six  pièces  de  canon  que 
la  révolution  de  1793  enleva  du  château  de  Brezé,  où 
elles  avaient  été  placées. 

Michel  mourut  le  17  février  1754,  ayant  épousé  en 
premières  noces,  par  contrat  du  l^r  juin  1720,  demoi- 
selle Isabelle-Glaire -Eugénie  de  Dreux-Nancré  ,  fille 
aînée  de  Claude-Aimé,  chevalier,  comte  de  Nâncré,  et 
de  Marie-Thérèse  de  Montmorency,  son  épouse.  11  n*eut 
point  d'enfants  de  ce  mariage,  non  plus  que  de  celui 
qu'il  contracta  le  15  novembre  1749,  avec  demoiselle 
Louise-Charlolte  de  la  Châtre,  fille  de  Louis-Charles, 
marquis  de  la  Châtre,  et  de  dame  Marie-Elisabeth  de 
Nicolaï,  son  épouse. 

JoACHiM  DE  Dreux,  fils  puisné  de  Thomas  et  de  Ca- 
therine-Angélique Chamaillarlfut  successivement  mous- 
quetaire du  roi  dans  la  première  compagnie  en  1728, 
capitaine  au  régiment  de  Turenne,  cavalerie,  en  1730, 
colonel  au  régiment  de  Guyenne  le  24  février  1738, 
brigadier  des  armées  du  roi  et  colonel  lieutenant  général 
du  régiment  de  Royale-Marine,  en  1745,  maréchal  des 
camps  et  armées  du  roi  le  10  mai  4748,  chevalier  non 
profès  de  Tordre  de  Malte  en  1754,  lieutenant  général  le 
17  décembre  1759.  En  1754,  il  avait  succédé  à  son  frère 


—  n  — 

dans  les  chaînes  de  grand  ms^ftre  des  cérémomes  de 
France,  de  gouverneur  de  Loudun  et  du  pays  Londu- 
nais,  et  des  Iles  de  Sainte-Marguerite  et  Saint-Honorat 
de  Lerins;  et  le  16  mai  1755,  il  avait  quitté  la  croix 
de  Malte  et  avait  été  reçu  chevalier  de  Saint-Louis.. 

Par  acte  passé  les  24  et  27  mai  1745,  Joachim  épousa 
demoiselle  Louise-Jeanne-Marie  de  Coutarvel  de  Pe^é^ 
fille  ainée  et  principale  héritière  de  Louis-René,  mar«* 
quis  de  Coutarvel  de  Pezé^  et  de  Louise-Charlotte  Thi- 
bault de  la  Rpcbe-TuUon.  U  eut  de  ce  mariage  :  1® 
Henri-Evrard;  2o  Louise-Elisabeth,  mariée  en  1788  à 
François- Charles  comte  de  Coucy;  3^  Catherine-Hen- 
riette qui,  en  1783,  se  maria  avec  le  marquis  de  Ra- 
diais; 4o  Charlotte-Marie  qui  épousa  le  comte  de  la 
Roche- Lambert;  5®  Marie-Marguerite,  qui  en  1790, 
épousa  M.  de  Saint-Martial,  baron  d'Aurillac;  6°  Anne- 
Jacqueline,  mariée  en  1789  au  comte  Léon  d'Ourches; 
plus  un  fils  et  deux  filles  morts  en  bas  âge. 

Henri-Evrard  de  Dreux,  né  en  1766,  fut  revêtu  à 
l'âge  de  seize  ans  de  la  charge  de  grand  maître  des  cé- 
rémonies par  le  décès  de  son  père.  11  eut  le  courage  de 
s'éloigner  de  la  cour  pour  se  préparer  au  métier  des 
armes  par  des  études  spéciales,  et  aux  affaires  publi- 
ques en  suivant  les  cours  renommés  alors  de  TuDiiver- 
site  de  Strasbourg. 

En  1789,  Louis  XVI  le  chargea  des  dispositions  à 
prendre  pour  la  convocation  des  Etats  généraux.  Sorti 
de  France,  et  rentré  plusieurs  fois  aux  plus  affreux 
jours  de  la  terreur,  il  rejoignit  encore  à  Vérone  le  roi 
Louis  XVUI,  et  reçut  ce  prince  sur  le  rivage  de  Calais 
lors  de  son  retour  en  France.  Créé  pair  de  France. le 


—  7«- 

il  août  181 Ô,  il  présida  comme  maître  de  cérémonies 
au  sacre  de  Charles  X,  et  mourut  en  1829. 

De  son  mariage  avec  Adélaïde-Anne-Philippine  de 
Custîne,  fille  du  célèbre  et  infortuné  général  de  ce  nom, 
morte  le  20  juin  1861,  âgée  de  94  ans,  sont  issus  : 
4«  Clémentine-Henrielte-Pbilippine,  mariée  en  1810 
à  Hector,  marquis  de  Monteynard  et  de  Montfrin  ; 
2o  Scipion;  S®  Emmanuel-Joachim-Marie  ;  4»  Pierre- 
Simon-Louis-Marie,  aujourd'hui  évêque  de  Moulins. 

SciPiON  DE  Dreux-Brezé  Baquit  aux  Andelys  (Eure), 
le  43  décembre  4793.  Destiné  à  la  carrière  des  armes, 
il  entra  fort  jeune  au  collège  de  la  Flèche,  d'où  il  sortit 
à  dix-huit  ans  comme  officier  de  cavalerie.  Ce  fut  en 
cette  qualité  qu'il  prit  part  aux  dernières  campagnes 
de  l'Empire.  Après  l'abdication  de  Napoléon,  il  prit  dir 
service  dans  l'armée  royale,  et  devint  aide  de  camp  du 
maréchal  Soult.  Pendant  les  cent-jours,  M.  de  Dreux- 
Brezé  rejoignit  Louis  XVIII  à  Gand  en  qualité  de  vo- 
lontaire. Après  la  restauration,  il  servit  dans  le  pre- 
mier régiment  de  cuirassiers  de  la  garde  royale,  devint 
lieutenant  colonel  et  se  retira  avec  ce  grade  en  4827, 
à  cause  de  l'état  délabré  de  sa  santé.  Deux  ans  après, 
la  mort  de  son  père  lui  transmit  tout  à  la  fois  la  pairie 
et  la  charge  de  grand  maitre  de  cérémonies  de  France. 
Après  la  révolution  de  4830,  M.  de  Brezé  n'hésita  point 
à  prêter  le  serment  exigé,  et  resta  à  la  chambre  des 
pairs,  où  il  se  fit  remarquer  par  son  éloquence  et  sa 
loyauté  en  défendant  les  principes  monarchiques.  Enfin 
il  mourut  en  son  château  de  Brezé  le  24  novembre 
4845. 

Pe  son  mariage  avec  demoiselle  Aglaé-Henriette  de 


-  79  — 

Moûtault,  fille  d'Armand-Gharles^tienri ,  marquis  de 
Moniault,  baron  de  Castelnau,  et  d'Agio é*Marie-Made- 
leine  Dubosc  de  Radepont,  Scipion  de  Dreax-Brezé  n'eut 
qu'une  fille,  Bertbe-Alix,  morte  jeune. 

EiiMAKUEL  -  JoAGHiM  -  Marie  de  Dreux -Brezé,   frère 
du  précédent,  né  le  S5  décembre  1797  aux  Andeiys 
(Eure),  entra  dans  les  pages  de  l'Empereur  le  3  janvier 
1812,  fut  admis  dans  les  chevau-légers  de  la  garde  de 
Louis  XVIII,  avec  le  gracie  de  lieutenant  de  cavalerie 
(l^T  juillet  1814),  accompagna  le  roi  jusqu'à  la  frontière 
aux  eent-jours,  et  demeura  pendant  cette  époque  dans 
rinaclivité.  Lieutenant  au  8^  chasseurs  à  cheval  (7  fé- 
vrier 4816),  il  fut  nommé  capitaine  d'état-major,  aide 
de  camp  du  maréchal  Mo'ncey,  commandant  le  4^  corps 
de  Tarmée  de  Catalogne  (1823).  Il  fut  fait  chevalier 
de  la  Légion  d'honneur  et  des  ordres  de  Saint-Ferdi- 
nand d'Espagne  de  première  classe  et  de  Charles  III. 
En  4824,  il  fut  nommé  aide  de  camp  du  maréchal  Su-> 
chet,  et  le  11  avril  1828,  gentilhomme  honoraire  de 
la  chambre.  Après  l'élection  du  roi  Louis-Philippe,  il 
adressa  sa  démission  au  ministère  de  la  guerre,  rentra 
dans  la  vie  privée,  et  mourut  le  19  mai  1848. 

M.  de  Brezé  avait  épousé,  au  mois  de  juin  1824, 
demoiselle  Marie-Charlotte  de  Boisgelin,  fille  du  mar- 
quis de  Boisgelin^  pair  de  France  et  de  demoiselle 
d'Harcourt,  dont  il  a  eu  : 
lo  Henri-Simon-Charles,  né  le  22  mars  1826; 
2o  Eugène-Philippe--Joseph,  né  le  10  août  1827  ; 
So  Georges-Robert,  né  le  24  mai  1829,  mort  le  13 
juillet  1830; 
4fi  Edouard-Ëmmanuel-Marie,  né  le  5  octobre  1841. 


-  80  - 

M .  HbmrI'Simom^Ghârlbs  beDrëuxtEhezé^  propriétaire 
actuel  du  château  de  Br^ezé,  a  été  institué  légati^ire 
universel  de  Scipioa  de  Dreux-Brezé,  son  onde,  par 
son  testament  olographe  en  date  du  8  avril  1842. 

Il  a  épousé,  le  30  septembre  1850,  M^^  Marie-Made- 
leine des  Bravards  d'Eyssart  du  Prat,  dont  : 

Pierre-Marie-Joseph,  né  le  31  octobre  1853. 

Louis  Raimbault. 

(La  suite  au  prochain  numéro). 


Les  lecteurs  n'ont  point  oublié  le  concours  ouvert 
par  la  Société  Impériale  d'agriculture,  sciences  et  arts 
d'Angers,  sur  cette  question  :  Etude  de  la  législation 
en  Anjou  pendant  le  moyen  âge.  Le  prix  en  était  une 
médaille  de  500  francs,  votée  par  le  Conseil  général  de 
Maine  et  Loire,  sur  la  proposition  de  M.  le  Préfet. 

Le  lundi  29  décembre,  une  séance  pleine  d^intérêl  a 
eu  lieu  à  la  Société  d'agriculture;  il  s  agissait  de  la  I^e7 
mise  de  cette  médaille  à  M.  d'Espinay,  juge  au  Tribunal 
civil  de  Saumur,  qui  l'avait  ootenue  pour  son  beau 
travail  intitulé  :  Les  Cartulaires  Angevins^  Etude  his" 
torique  sur  la  législation  féodale  en  Anjou. 

M.  le  Préfet  avait  bien  voulu  venir  présider  cette 
séance. 

Nous  regrettons  que  le  défaut  d'espace  nous  empêche 
de  reproduire  ici  le  discours  par  lequel  M.  Ad.  Lachèse 
a  ouvert  la  séance,  l'improvisation,  nleine  de  bienveil- 
lance et  de  goût,  par  laquelle  M.  le  Préfet  a  répondu  à 
cette  allocution,  heureuse  expression  des  sentiments  de 
gralitude  de  la  Société  d'agriculture,  et  enfin  le  rapport 
de  M.  Faire,  sur  le  travail  de  M.  d'Espinay. 

Après  la  lecture  de  ce  rapport,  qui  a  excité  le  plus 
vif  intérêt  dans  l'auditoire,  M.  le  Préfet  a  rerais  la  mé- 
daille à  M.  d'Espinay,  en  lui  adressant  des  félicitations 
aussi  flatteuses  que  méritées. 


CONDITIONS  DE  L'ABONNEMENT, 


Le  Répertoire  Archéologique  de  l'Anjou  paraît  le  i^'  de 
chaque  mois,  par  livmidaiis*  cliaeune  de  deux  feuilles  dlttb^ 
pression. 

Le  prix  de  l'abonnement,  pouï'vK^p  .tonnes  ne  faisant  pas 
partie  de  la  Commission  Ârchéologiqut,  est  de  5  francs  par  an 
pour  Angers  et  de  6  francs  par  la  poste. 

Les  abonnements  sont  reçus  chez  tous  les  libraires  du 
département. 


SOGIKTB    IMPÉRIALE    D'AGRICULTURE,  8CIBNCB8   ET   ART8 

ilNCIENNE  ACAOÉni  D'ANGERS. 


COMMISSIOI  IRCIÉOLOGIQUE 


DO  DEPARTEMENT 


DE  MAINE  ET  LOIRE 


RÉPERTOIRE  ARCfllOLOGIODE 


DE    I/ANJOU 


Année    të6S.    —  Mars. 


ANGERS 

IMPRIMERIE    DE    COSNIER    ET    LACHÉSE 
ChansAéc  Saint-Pierre ,  13 

4863 


"•CQ 


SUR  LA  POLÉMIQUE 


QUI  8*EST  ÉLEVÉE  A  L'OCCASION  DE 


HENRI   ARNAULD 


CVCQUE  D'MGEM,  au  XVIh  SIÈCLE  (1). 


A4, 


Messieurs , 

Uoe  polémique  ardente  et  passionnée  s'est  élevée  en 
présence  de  quelques  considérations  rétrospectives  où  il  a 
semblg  à  plusieurs  que  Tévèque  d'Angers,  Henri  Arnauld, 
dont  la  mémoire  fut  si  longtemps  populaire  et  vénérée 
en  Anjou  »  avait  été  jugé  cette  fois  avec  plus  de  rigueur 
que  de  justice.  L'opinion  publique  s'est  vivement  émue 
et  malgré  tout  le  désir  que  j^éprouvais,  je  l'avoue,  d'in- 
tervenir dans  ce  débat ,  j'hésitais  fort  à  le  raviver  en 
livrant  à  la  presse  les  raisons  de  mon  profonil  dissenti- 
ment avec  l'un  et  l'autre  des  écrivains  qui  se  sont  signalés 

{{)  Ce  discours  n'était  nullement  destiné  à  la  publicité,  et  Fauteur 
ne  Va  livré  â  Timpression  que  d'après  une  délibération  formelle  et  très- 
èzpresse  de  la  Société. 

REP.   ÀRC.  6 


--  82  — 

dans  cette  arène  brûlante,  dans  cette  lutte  bien  inoppor- 
tune assurément  et  dangereuse  même  à  tant  de  titres 
divers.  Mais  ce  que  la  prudence  ne  me  permettait  pas  de 
tenter  au  grand  jour  de  la  publicité,  je  puis  le  faire  sans 
inconvénient  et  sans  péril  au  sein  d'une  réunion  litté- 
raire et  privée  qui  a  bien  le  droit,  il  me  semble,  de  traiter 
dans  rintimité  de  ses  séances  toutes  les  questions  qui 
peuvent,  dans  quelque  mesure  que  ce  soit,  se  rattacher 
aux  grandes  ,et  hautes  appréciations  de  notre  histoire  lo- 
cal^. 

S'il  en  était  autrement.  Messieurs,  je  ne  comprendrais 
plus  la  mission  ni  même  la  raison  d'être  de  notre  Société 
des  sciences  et  arts.  Je  vous  le  disais  la  première  fois  que 
j'ai  eu  l'honneur  de  vous  adresser  la  parole  et  je  vous 
demande  la  permission  de  le  répéter  aujourd'hui  :  dans 
une  réunion  intime  on  peut  se  permettre  des  libertés  que 
l'on  n'oserait  prendre  partout  ailleurs.  Une  causerie 
académique  ne  ressemble  en  quo^ue  ce  soit  à  un  pam- 
phlet, car  c'est  pour  nous  entretenir  en  toute  franchise 
et  pour  parler  entre  nous  à  cœur  ouvert  qu'ont  été  éta- 
blies ces  assemblées  littéraires  où  vous  m'avez  fait  J'hon- 
neur  de  m'admettre.  J'ai  senti  surtout,  Messieurs,  le  prix 
de  votre  gracieux  accueil ,  parce  qu'il  me  semblait  que 
l'on  pouvait  toujours  appliquer  à  notre  Société  desscien^ 
ces  et  arts  ce  que  Pélisson,  l'ingénieux  historien  de  TA- 
cadémie  française,  disait  de  cette  illustre  compagnie  où 
<i  sans  bruit  et  sans  pompe  et  sans  autres  lois  que  belles 
»  de  l^amitié ,  ses  membres  goûtaient  ensemble  tout  ce 
»  que  la  société  des  esprits  et  la  vie  raisonnable  ont  de 
))  plus  doux  çt  de  plus  charmant.  » 

Certes ,  je  ne  me  dissimule  pas  que  j'ai,  i  ps^^CQurix  an- 


—  8â  — 

jourd'hui  un  terrain  glissant  et  ardu  tout  à  la  fois  ,  mais 
j^espère  cependant  parvenir  à  surmonter  tous  les  obstacles 
en  me  Maintenant  toujours  dans  le'^  bornes  d'une  niodê- 
ration  qui  n'exclura  lii  là  netteté  ni  la  franchise.  Je 
compte  dbnc,  Messieurs,  sur  votre  bienveillance  et  aussi 
sur  votre  attention ,  caf  il  en  faut  beaucoup  pour  saisir 
à  la  simple  léfetnre  le  gravé  et  important  sujiét  que  je  me 
propose  de  traiter. 

Dans  la  seconde  moitié  du  xvii«  sièkie  le  diôéèse  d'An- 
gers fut  gouverné  par  un  pontife  qui  pendant  longtemps 
avait  été  cité  comme  le  modèle  et  l'honneur  de  l'épisco- 
pat.  snAviTÈR  et  fortiteè,  ces  deux  mdts  empruntés  aux 
saintes  Écritures  résument  admirablement  la  ligne  de 
conduite  et  la  double  règle  de  gouvernement  qu'il  s'était 
tracée  et  dont  il  avait  surtout  puisé  l'inspiration  dans  un 
esprit  ferme  et  élevé ,  daiïs  un  cœur  débordant  de  man- 
suétude et  de  bonté.  Il  eut  pour  ses  diocésaine  plus  que 
l'affection  d'un  père,  il  se  sentait  pour  chacun  d'eux,  les 
plus  petits  comme  les  plus  grands,  ces  Sollicitudes  et  cet 
amour  (Ttme  tendre  mère  qu'exprimait  si  bien  Fénelon 
dans*les  toîiicftanfes  expansions  de  son  âme.  Port  seule- 
ment dé  l'ascendatit  de  ses  vertus,  guidé  par  le  généreux 
élan  de  son  grand  cœur  et  armé ,  pour  ainsi  dire ,  du 
Christ,  il  ne  balâiiçai  point  à  venir  dans  le  palais  des  i^ois, 
crier  grâce  et  merci  pour  ses  enfants  bien-aiimés,  en  même 
temps  qu'il  se  mettait  humblement  aux  pieds  dès  plus 
pauvres  d'entre  son  ^eupïe  pour  obtenir  d'eux  le  renon- 
cement aux  haines,  le  gardon  des  injures  et  Tamour  des 
ennemis.  J^  fais  ici,  Messieurs,  une  doublé  allusion  et  à 
ses  admirables  paroles  à  la  reine  Anne  d'Autriche,  pro- 
fbikdlithèht  iMtéë'  contré  la  ville  d* Angers  dont  elle  se 


—  84  — 

dispensait  à  faire  le  siège  ^  et  à  sa  démarche  touchante 
auprès  d'une  malheureuse  et  pauvre  femme  de  la  paroisse 
de  la  Trinité  qui  s'obstinait  dans  un  ressentiment  odieux 
et  cruel.  Je  n'ai  point  la  prétention  de  donner  ici  une 
notice  biographique  sur  Henri  Arnauld  ;  ce  serait  sans 
doute  un  intéressant  et  magnifique  sujet ,  mais  je  n'ai  ni 
la  volonté  ni  le  loisir  de  l'entreprendre.  Je  ne  puis  ce- 
pendant traiter  complètement  la  question  historique  qui 
fait  l'objet  de  ce  discours,  sans  vous  faire  connaître,  au 
moins  très  sommairement^  l'admirable  vie  de  l'illustre  et 
saint  prélat  dont  je  voudrais  défendre  et  venger  la  mé- 
moire. Permettez-moi  donc ,  Messieurs ,  de  revenir  en 
quelques  mots  sur  ces  deux  traits  qui  montrent  sous  un  si 
doux  et  si  grand  aspect  le  chrétien ,  le  pontife  et  l'apô- 
tre. 

*  Sans  doute  le  fait  relatif  à  Anne  d'Autriche  est  connu 
de  tout  le  monde,  et  partout  on  a  pu  lire  le  récit  de  la 
pieuse  et  touchante  insistance  du  prélat  qui ,  après  avoir 
échoué  dans  toutes  ses  tentatives  et  dans  ses  supplica- 
tions les  plus  pressantes ,  s'approcha  de  la  reine  à  l'ins- 
tant où  elle  se  présentait  à  la  communion.  Ce  fut  alors , 
on  le  sait,  que  le  vénérable  pasteur  tenant  la  sainte  hostie 
dans  ses  mains ,  adressa  à  la  régente  irritée  et  jusqu'à 
ce  moment  implacable,  des  paroles  auxquelles  il  n'y  avait 
plus  moyen  de  résister.  Dans  tous  les  recueils  mo- 
dernes ces  paroles  ont  été  rapportées  d'une  manière 
qui  ne  nous  paraît  point  exacte.  On  a  cru  les  embellir 
sans  doute  en  leur  donnant  la  forme  d'une  ingénieuse 
et  brillante  antithèse  (1),  mais  je  me  défie  toujours  des 

(1)  On  fait  dire  à  Tévêque,  dans  les  relations  imprimées  :  «  Recevez , 


-  8S  - 

relations  faites  après  coup  et  je  leur  préfère  de  tout 
point  les  documents  contemporains.  Or,  je  trouve  dans 
un  manuscrit  sans  nom  d'auteur,  mais  tracé  très  «évi- 
demment peu  d'années  après  la  mort  de  Henri  Arnauld, 
le  texte  exact  et  fidèle  de  la  courte  et  pathétique  allocution 
que  le  saint  évêque  adressa  à  la  reine  dans  cette  circons- 
tance solennelle  :  «  Madame ,  lui  dit-il  d'une  voix  émue, 
ï)  je  vous  conjure  par  les  entrailles  de  la  miséricorde  du 
»  Dieu  que  je  vousprésente,  de  pardonner  à  mon  peuple  !» 
Ce  cri  de  tendresse  et  d'amour  partait  du  plus  intime  de 
l'âme,  et  à  coup  sûr  i)  n'avait  rien  de  la  froideur  et  de 
l'austérité  jansénistes.  Quoi  qu'il  en  soit,  le  manuscrit  que 
je  continue  à  citer  textuellement  ajoute  que  «  la  reine, 
»  émue  et  touchée  jusqu'au  fond  du  cœur,  répondit  à  l'é- 
»  vêque  qu'au  nom  du  Maître  qu'elle  allait  recevoir,  elle 
»  ne  pouvait  rien  refuser  et  qu'elle  pardonnait  volontiers, 
»  ce  qui  fut  suivi  d'une  amnistie  générale.  » 

Le  généreux  pontife  qui,  à  l'exemple  des  plus  saints 
évêques  dont  les  traditions  de  nos  églises  de  France  aient 
gardé  la  mémoire,  s'interposait  ainsi  entre  les  périls  de 
son  peuple  et  la  vengeance  des  rois,  savait  unir  à  tant  de 
courage  la  piété  la  plus  affectueuse  et  la  plus  tendre.  Il 
ne  croyait  pas  déroger  aux  exigences  et  à  la  dignité  de 
son  rang,  en  descendant  aux  plus  humbles  pratiques  de 
la  vie  chrétienne,  aux  plus  admirables  manifestations 
d'une  charité  sans  bornes  et  d'une  humilité  que  le  relâ- 
chement et  la  mollesse  de  nos  mœurs  aura  peut-être 
quelque  peine  à  concevoir.  Henri  Arnauld  aimait  d'une 

Madame,  votre  Dieu  qui  en  mourant  sur  la  croix  a  pardonné  à  ses 
ennemis.  > 


—  86  — 

affection  toutç  particulière  les  pauvre3  ajlors  déjà  si  nom* 
breuz  de  la  paix)isfe  de  la  Trinité.  II  les  visitait  souvent, 
il  versait  dans  leur  sein  d'aboçdantes  aumônes,  il  les 
exboirtait^  les  consolait  dans  leurs  tribulations  diverses. 
Il  les  connaissait  presque  tous,  car  il  les  avait  soulagés, 
il  les  avait  nourris,  il  avait  été  pour  eux  commç  une  se- 
cond^ providence  pendant  les  vingt-six  années  qu'il  ava,it 
étfê  préposé  au  gouvernement  de  l'opulen^  abbaye  de 
S^int-Nicola^.  Or,  quelques  années  s^rès  sa  promotion  à 
l'épiscopat,B|Çnri  Arnauld  fut  informé  que  des  dissensions 
violentes  tétaient  manifestées  au  sein  de  cette  population 
m^lbeureusede  la  Doutre,  dans  les  rangs  mêmes  de  cette 
gr^a^e  fan^iille  des  infortunés  que  Le.  pfélat  avait  toujpurs, 
rega];d^e  comme  sa  famille  de  prédilection.  On  lai  apprit 
notamment  qu'une  femme  doQ}  on  lui  dit  le  nom  s'était 
slgaa^ée  dans  cette  lutte  intestine ,  qu'elle  avait  proféré 
d'borribles  menaces  contre  une  autxe  femme  de  son  voi- 
si^iage,  et  s'était  montrée  rebelle  à  toutes  le& exhortations 
et  si  obstinée  dans  sa  colère  qu'elle  avait  dit  hautement 
qu'elle  ne  pardonnerait  jamais.  A  ce  récit  l'évoque  pro- 
fondément affligé,  se  recueille  quelques  instants,  puis 
seul,  à  pied,  sans  appareil  et  sans  bruit,  il  se  transporte 
sur-le-champ  cbeas  cette  femme  doi^tla  demeure  lui  était 
bi|3n  connue.  Il  e^ntre  inopinément,  et  aussitôt  celle  que 
vepait  ainsi  surprendre  une  visite  de  cette  importance  se 
prosterna  humblement  aux  pieds,  du  prélat  en  lui  de*- 
mandant  ce  qui  lui  v^ait  l'honneur  qu'elle  recevait  en 
ce,  moment.  —  Levess-vous,  lui  dit  l'éyêque,  et  écoutqz- 
moi.  Je  sais  que  vous  avez  contre  votre  voisine  une  haine 
violente  et  que  vous  avez  juré  avec  l'accent  de  la  fureur 
et  de  la  rage  qu'il  ne  vous  arriverait  jamais  de  lui,pi|4*^ 


donner.  G&aerâienl  est  sacrilège  et  impie.  Il  tûfasH  pro«^ 
fondéinent  contristé  que  je  me  suis  déoiâé  à  véÉiir  vous 
deoiander  au  nom  de  vos  iaCérôts^  les  plus  sacrés  et  les 
pks  chers,  au  nom  de  la  religiouf^aa  nom  di»  Dieu  doat 
je  suis  le  mihiâtre  ot  qui  vou&  parle  par  ma  boucfae^d'oiK 
blier  le  passé,  de  <roua  réconcilier  avec  votre' voirine-  et 
de  lui  donner  en  présence  de  Volre^  évèc^ue  le  baiser  de 
paix  et  de  fraternité  ehrétienne.  — ^  Monseigneur .  lui 
fai-il  répondu  d'une  voisL  brève  et  ^tremblante,  ce  que 
vous  ote  demiuftdea  est  impossible,  non*}ama»^  jamais.  ..v 
— '  Je  vous  le  demandierai  fà  genoux.,  saille  fautyiéit  alors 
H^inAmauldenise' jetant  à  l'instant  même  sl\M  pieds 
de  eette  malheureuse.  -*-  Monseigàenr,  répliqua«t-e]le , 
je  suis  confuse  de  vous  voir  ainsi  à  mes  gedoux,  et  ce^ 
pendant  mai  résolution  est  inéibranlalbie ,  niais  de  grâce , 
levez- vous  1  —-Eh  bien  !  puisqiue  rifen  ne  peutvous-faire  ' 
fléchir,  je  vous  déclare  quei  je  ne  me  lèverai  point  que 
vous  n'ajez  pardonné,  car  je  veux  espérer  encore  que  la^ 
gFàoesde  Dieu  et  les  supplications  de  votfere  premier  pas^ 
teur  et  votre  père» finiront  par  vous toïieher-et  par  obtenir 
raison  de  votre*  colère  et  de  votre  détestable  ressentiment. 
Kn  disant  cela  le  vénérable  prélat  demeurait  toujours 
prosterné  et  immobile.  Le  cceur  de  cette  feibme  impla- 
cable* ne  put  résister  plus  longtemps  à  une  si  vive  et  si 
saisissante  prière;. ses  yeux  se  remplirent  de  larmes  ;  elle 
tombai  eUe-^même^à genoux  devant  Févéque  en  s'écriant  : 
Abi  de  grâce,  lèvez^voss^i Monseigneur,  levez^-veus,  je 
païKionnel  et  enr  même  iffmps  die  appela  son  ennemie 
qu'elle  serra  dans  ses  bvas:  ^ 

Peopmettez-moiide vous^tedire'jMessieurs^  c'eet  avec 
nne  profonde  satisfaction  ^  c'est  avec  un  indicible  bonheur 


—  88  — 

que  j*ai  vu  cette  touchante  histoire  mentionnée  dans  le 
manuscrit  que  je  vous  citais  tout  à  Theure.  Elle  m'avait 
été  racontée  souvent  dans  les  jours  de  ma  première  jeu- 
nesse par  un  saint  et  vénérable  pasteur  chargé  d'années, 
de  travaux  apostoliques  et  de  vertus,  qui  avait  vécu  dans 
un  temps  où  les  traditions  de  Henri  Arnauld  n'étaient 
pas  encore  complètement  effacées  dans  la  Doutre. 

Cette  piété  si  humble^  si  fervente  et  si  douce  n'affai- 
blissait poiat  dans  les  mains  de  l'évêqne  d'Angers  les 
ressorts  du  gouvernement  et  ne  lui  fit  jamais  négliger  les 
devoirs  toujours  austères  et  souvent  pénibles  de  l'épls- 
copat.  De  la  même  main  qui  s'étendait  sur  l'indigent 
et  qui  distribuait. partout  d'immenses  largesses,  l'ad*- 
mirable  pontife  obligeait  les  statuts  de  ses  prédéces- 
seurs, en  promulguait  de  nouveaux  et  rédigeait  un  code 
complet  pour  assurer  la  bonne  tenue  de  la  discipline 
ecclésiastique  et  pour  réglementer  l'administration  des 
sacrements  conformément  aux  traditions  primitives  de 
l'Eglise.  Il  faisait  une  guerre  incessante  aux  abus,  rap- 
pelait son  clergé  aux  saintes  lois  de  la  résidence,  déncm- 
çait  les  faux  miracles,  proscrivait  les  pratiques  supersti- 
tieuses, enfin  mettait  en  œuvre  tout  ce  qu'il  avait  de  zèle, 
d'influence  et  d'autorité  pour  ramener  l'observance  de 
la  religion  à  l'auguste  caractère  de  dignité  et  de  gravité 
qu'elle  comporte.  Il  défendit  énergiquement  les  droits 
de  sa  juridiction  épiscopale  contre  les  prétendues  immu- 
nités d'une  grande  et  puissante  abbaye  et  plus  tard  sut 
restreindre  dans  de  justes  bornes  les  exigences  et  les 
envahissements  de  divers  ordres  mendiants  établis  dans 
son  diocèse ,  notamment  des  Dominicains,,  des  Carmes 
et  des  Récollets.  Cette  dernière  lutte  tint  une  place  im- 


—  89  — 

portante  dans  la  vie  de  Henri  Arnauld  et  mit  sa  patience 
à  de  craelles  épreuves,  en  même  temps  qu'elle  fit  mieux 
voir  encore  la  bonté  de  son  cœur  et  l'inaltérable  fermeté 
de  son  caractère.  Des  moines  turbulents  s'étaient  ré- 
voltés contre  les  sages  ordonnances  de  l'évèque  d'An- 
gers et  lancèrent  œutre  lui  d'indignes  pamphlets  qui  fu- 
rent dénoncés  à  l'assemblée  générale  du  clergé  alors  te- 
nante. Elle  informa  contre  les  auteurs  de  ces  libelles 
scandaleux  qui  déversaient  à  profusion  l'invective  et  l'ou- 
trage contre  un  prélat  dont  toute  la  France ,  écrivaient 
les  évèques  assemblés,  dont  toute  la  France  connaît  la 
modération  et  la  sagesse.  Henri  Amanld  se  montra  pro- 
fondément sensible  à  ces  attaques  passionnées  et  il  confia 
ses  amertumes  à  son  synode  diocésain  dans  des  termes 
qui  révélaient  à  la  fois  une  profonde  douleur  et  une  ré- 
signation sans  bornes.  «  Méprisez ,  disait-il  en  termi- 
^  nant  son  allocution ,  méprisez ,  mes  frères ,  par  une 
»  générosité  vraiment  chrétienne ,  toutes  les  vaines  at- 
»  taques  de  nos  adversaires,  puisque  selon  l'Apôtre  ils 
»  ne  remporteront  de  tous  leurs  efiPorts  que  la  honte  et  la 
»  confusion.  N'imitez  pas  les  emportements  de  ces  en- 
»  nemis  de  la  hiérarchie,  animés  de  superbe  contre  les 
»  évèques  et  d'une  passion  particulière  contre  nous.  Té- 
»  moignez-leur  plutôt  que  vous  savez  que  comme  l'Église 
»  prit  naissance  sur  le  Calvaire  parmi  les  affronts  et  les 
I  outrages  d'un  Dieu  mourant^  elle  ne  peut  se  conserver 
»  et  se  maintenir  qae  par  les  prières  et  par  les  souf- 
»  frances,  et  que  ceux  qui  sont  véritablement  à  elle  sa- 
»  vent  supporter  les  injures  avec  douceur  et  faire  du  bien 
»  à  leurs  ennemis  avec  charité.  C'est  pourquoi  qu'ils 
»  nous  déchirent  tant  qu'ils  voudront  et  qu'ils  s'effor- 


—  9» — 

»'€ieBt  eoDune  ils  font  de  lioos  rendre  odieux  à  notre 
»  peuple;  nous  noue  justifierons  toiqours  par  notre con— 
»  diiite  et  continuerons  de  leur  témoi^er  que  notre  hoti«* 
»  neur  et  notire  appui  consistent  à  être  uni  avec  Dieu  , 
»  ét^t  très  persuadé  que  la  véritable  gloire  d'un  évèqiie 
»  est,  à  l'exemple  de  l'Apôtre ,  d'être  attaché  à  la  croix 
»  de  Jésus^-Cbrist  par  lequel  le*  monde  nous  doit  êtiie 
»  crucifié  et  nous  devons  être  crudfié  au  monde,  i» 

Ces  plaintes  si  résignées,  ce  cm  de  douleur  exprimé 
en  termies  si  déchirants,  n'inspira,  parak-il^ nulremord» 
aux  insuiteursy  ils  redoublèrent  bien  plutôt  leurs  invec- 
tiver et  laneèrent  de  nouveaux  pamphlets  plus  violents^ 
encore  que  les  premiers.  Ils  traitèrent  cette  t fois  Févêque 
d^ hérétique  et  d'excommunié,  imputation  qui  aiu'ait  été 
odieuse  si  elle  n'avait  été  ridicule  et  insensée,  puisqu'à 
cette  époque  Tévêque  d'Angers  ne  s'était  mêlé  em  quoi 
que  ce  fût  aux  querellesdu  jansénisme,  mais  dans  tous 
leSè temps  les  hommes. de  part^ n'ont  pas  eubesoiu de 
l'ombre  même  d'un  prétexte  pour  se  créer  un  vocabulaire 
au  service  de  leufs  haines  et  de  leurs  passions!  L'évêque 
d'Angers  aurait  méprisé  sans*  douta  ces  e&travagaaces 
furieuse&,  s'il  n'avait  pas  cru  de  son  devoir  de  veager 
l'outrs^a  fait  à  sa  dignité  épiscopale.  Il  condamna  for- 
mellejnentiles  publiciBitions  nouvelles:  en  disant  :.  a  Pui^ 
»  qu'au  préjudice  de  la  paix  de  l'Eglise,  et  du  salut  des 
»  âmes,  ils  continuent  d'exciter  desi  troubles  et  qu'ils  ont 
»  eocore  depuis  quelques  jours  distribué  un  nouveau 
»  libelle  plein  de  faussetés  et  de  suppositions,  où  ils  trai- 
»  tent  d'hérétiques  et  d'excommuniés  ceux  qui,, par  une 
»  doctrine  sincère  et  catholique,  s'opposent  à  leurs  er- 
»  reurs,  nous  avons  cru  (de  voir....  » 


—  9*  — 

Après  cette  seatence,  le  prélat  avait  encore  la  bonté 
d'expliquer  ses  ordonnances,  on  dirait  presque  de  sejus-- 
tijBer  auprès  de*  ceux  qui  Tavaient  si  indignement  ou- 
tragé. «  Nous  n'avons  point  eu ,  disait4l ,  la  moindre 
D  pensée  d'eoKpécher  les  religieux  mendiants  de  mendier 
suivant  leur  institution  et  les  saints  canons,  mais  seu- 
lement d'empêcheF  fes  exactions  qui  se  font  sous  pré- 
texte d'indulgenoe  et  de  confession,  et  notre  intention 
n'a  jamais  été  de  les  troubler  dans  leurs  privilèges 
dont  le  saint-siége  apostolique  les  laisse  encore  en 
possession,  mais  seufi^ment  de  nous  opposer  aux  abus 
qu'ils  commettent  en  s'attribaant  des  pouvoirs  ou  qui 
ne  leur  ont  jamais  été  accordés  ou  qui  ont  été  révoqués 
par  les  décrets  des  Papes  et  des  conciles  auxquels  nous 
protestoQi)  vouloir  êtiie  toute  notre  vie  inviolablement 
»  attaché.  y> 

La  sentence  portée  par  le  pvélat  non  plus  que  la  con- 
damnation prononcée  le  1®^  avril  1656  par  l'assemUée 
dn  clergé,  ne  trouvèr<$nt  que  des  cœurs  endurcis  et  re- 
belles. Poun  éludée  Kautorité  desi  évoques,  on  fit  ce  que 
dans  tous  les  temps  n'ont  jamais  manqué  de  faire  ceux 
qui  ne  payent  se  irésignen  à  l'obéissance.  Les  moines 
prétendirent  que>  le  Pape  seul  avait  le  droit  de  statuer  en 
pareille  matière,  mais  la.  cour  de  Rome  n'a  guère  pour 
tradition  d'accueillir  les  recours  de  ce  genre  et  de  livrer 
premier  réclamant  la  cause  et.les  droits  de  l'épiscopat. 
pape  Alexandre  YII,  qui  occupait  alors  la  chaire  de 
saint  Pierre,  chargea  le  nonce  d'arranger  cette  affaire  à 
la  complète  satisfaistion  de  l'évêque  d'Angers,  dont  la 
haute  sagesse  et  l'éminente  piété  lui  étaient  connues. 
Après  neuf  années  d'un  épiscopat  que  Ton  voudrait  nous 


—  99  — 

re{)réséiiter  aujourd'hui  comme  une  réalisation  de  la  pen- 
sée longuement  préméditée,  de  livrer  le  diocèse  d'Angers  à 
Fespril  de  secte  et  de  rébellion  contre  l'Eglise,  le  souve- 
rain pontife  rendait  à  Henri  Arnauld  un  magnifique  té- 
moignage en  lui  écrivant  le  26  février  1659  :  aZelum 
et  vir tûtes  tuas  magnifacimus  et  prœcipuo  paternœ  vo- 
luntatis  affectu  complectimur.  »  A  cette  voix  imposante 
du  chef  auguste  de  l'Eglise  tout  rentra  bientôt  dans 
l'ordre  accoutumé,  et  ce  qui  resta  seulement  de  ce  triste 
incident  ce  furent  l'indulgence  et  les  bontés  plus  grandes 
que  jamais  de  Tévêque  d'Angers  envers  ceux  qui  l'avaient 
combattu  à  outrance,  ce  II  avait,  dit  le  manuscrit  que 
»  nous  avons  déjà  plusieurs  fois  cité,  il  avait  une  dou- 
»  ceur  et  une  affabilité  sans  pareilles,  et  s'il  avait  quel- 
ï)  ques  défauts,  c'était  d'être  trop  bon....  Mais  ce  qui 
»  marque  qu'il  avait  une  vertu  consommée,  c'est  le  bien 
»  qu'il  prenait  plaisir  à  faire  à  ses  ennemis  et  à  ceux  qui 
»  s'étaient  fait  un  divertissement  de  déchirer  sa  réputa- 
.»  tion  par  des  libelles  diffamatoires.  r> 

La  main  qui  rendait  ce  témoignage  à  la  mémoire  vé- 
nérée du  saint  évêque  d'Angers,  était  une  main  amie 
sans  doute,  mais  on  ne  saurait  dire  qu'elle  n'ait  pas  fidè- 
lement reproduit  le  sentiment  public,  car  tout  le  monde 
alors  s'accordait  à  payer  à  tant  de  vertus  un  tribut 
d'hommages  qui  ne  fut  pas  même  contesté  une  seule  fois 
avant  le  jour  où  Henri  Arnauld  parut  s'être  engagé  dans 
les  premières  querelles  du  jansénisme.  C'est  la  triste  et 
fatale  époque  de  l'invasion,  dans  notre  Anjou,  de  cette 
doctrine  désastreu&e  et  erronée  que  M.  l'abbé  Pletteau  a 
voulu  taire  connaître  dans  une  brochure  dont  le  long  et 
fâcheux  retentissement  n'a  pu  le  surprendre  que  parce 


—  98  — 

qu'il,  ne  s'est  pas  suffisamment  rendu  compte  des  diffi- 
coltés  auxquelles  il  allait  se  heurter,  et  des  contradictions 
qu'il  s'exposait  à  soulever.  Nous  n'aurons  que  trop  tôt  à 
les  indiquer,  mais  nous  devons  constater  avant  tout^  que 
le  sujet  n'était  pas  heureusement  choisi,  et  ne  pouvait 
d'ailleurs  être  convenablement  traité  dans  une  brochure. 
Puis,  dans  un  siècle  où  l'indifférence  et  le  rationalisme 
se  disputent  Tempire,  quelle  nécessité,  quel  motif,  quel 
prétexte  même  pour  venir  évoquer  ce  vieux  fantôme  du 
jansénisme?  Il  n'a  point  taissé  de  traces  dans  le.  dio- 
cèse d*Ângers;  nous  n'en  voyons  plus  s'agiter  auprès  de 
nous  le  moindre  débris.  Notre  clergé,  admirablement  or- 
thodoxe et  pur,  ^st  soumis  sans  restriction  aux  enseigne- 
ments de  l'Eglise  en  toutes  choses.  Pourquoi  donc  revenir 
sur  un  passé,  déjà  si  loin  de  nous?  Youdrait-on  prétendre 
que  de  pareilles  questions  sont  toujours  bonnes  à  traiter, 
au  moins  sous  le  rapport  historique  ?  Si  l'objection  m'était 
faite,  je  répondrais  sans  hésiter  que  bien.peu  de  lecteurs 
pouvaient  se  complaire  à  faire  retour  sur  des  souvenirs 
que  je  crois  beaucoup  moins  historiques  que  théologi- 
ques et  scholastiques,  et  sqr  ce  terrain  l'attention  devait 
infailliblement  faire  défaut.  Trop  de  gens  sont  étrangers 
à  ces  sortes  de  questions  et  ne  veulent  ni  les  étudier,  ni 
même  les  aborder,  de  peur  d'assumer  une  trop  rude  tâche^ 
de  s'égarer  dans  un  dédale  inextricable,  et  de  s'exposqr 
peut-être  k  prendre  le  Pirée  pour  un  homme  y  comme  le 
disait  spirituellement  M.  de  Chateaubriand.  Que  si  nonob- 
stant toutes  ces  considérations,  M.  l'abbé  Pletteau  voulait 
élever  un  pareil  sujet  à  la  graudeur  de  l'histoire,  au  moins 
lui  fallait-il  prendre  la  peine  de  renionter  aux  véritables 
sources.  Il  fallait  étudier  avec  soin  les  documents  con- 


tetnporainS)  les  peser^  les  comparer,  tout  vérifier  avec 
une  extrême  et  scrupuleuse  exactitude,  et  au  lieu  d'ac- 
cepter toutes  faites  les  opiiiions  d'une  école  historique 
quelconque,  il  fallait  savoir  dominer  les  faitd  d^  toute  la 
hauteur  d'une  critique  intelligente  et  impartiale.  Ce  n'est 
qu'à  ces  conditions  que  la  mission  de  Tbistorien  devient 
sérieuse  et  digne  ;  autrement  il  ne  peut  que  se  traîner 
sur  des  routes  battues^  s'agiter  dans  le  vide,  semer  du 
vent  et  quelquefois  moissonner  des  tempêtes. 

M.  l'abbé  Pletteau  n'aurait  couru  nul  risque  de  soule- 
ver de  semblables  orages  s*il  se  fût  borné  à  nous  relater  les 
faits  et  gestes  de  notre  vieille  Université  d'Angers.  Pour 
moi,  qui  rends  toute  justice  à  cette  savante  compagnie  et 
qui  honore  comme  je  le  dois  le  zèle  Qu'elle  apporta  à 
maintenir  la  pureté  dé  la  foi,  je  le  décldi^  en  toute  sitl- 
cérité,  si  je  me  suis  surpris  à  sourire  en  lisant  dans  la  bro- 
chure sm  Le  Jansénùme  le  récit  qui  nous  montre  le  dod- 
teur  cartésien  Audouin  se  prenant  à  la  gorge  avec  \e  pé- 
ripatéticien  Babin,  son  collègue  Je  préfère  mille  fois  ce 
pendant  ces  luttes  excessives  et  désordonnées,  à  l'ignoble 
et  odieux  pugilat  de  nos  clubs  révolutionnaires.  Je  ne  me 
sens  pas  non  plus  tenté  le  moins  du  monde  de  reprocher 
à  M.  l'abbé  Pletteau  d'avoir  mal  parlé  de  l'orthodoxie 
de  Henri  Arnauld,  parce  que  je  reconnais  très  volontiers 
qu'il  ne  devait  à  ses  lecteurs  que  la  vérité  ou  en  tout  cas 
ce  qu'il  prenait  pour  elie.  Mais  ce  que^  fai  peine  à  con- 
cevoir, c*est  qu'un  éerivaiil  qui  ne  voulait  pas  sans 
doute  sortir  dés  Kbf  nés  de  la  justice  et  de  la  modération, 
se  soit  montré  si  froidement  positif  dans  ses  termes  et  si 
rigoureusement  iosifassible  dans  ses  appréciatioils.  Ce 
n'est  pas  moi  qui  voudrais  pactiiser  jamais  avec  Perreur, 


—  95  — 

je  89is  k  merveille  que  teut  cathoiiqne  doit  aux  décisions 
de  I*Eglise  une  soumission  sans  réserve,  et  que  les  œu^ 
vres  les  plus  saintes  ne  sooit  plus  que  des  œuvres  stériles 
et  vaines  aux  yeux  de  Dieu^  quand  elles  s'allient  aux 
entratnements  de  Forgueil  et  à  ses  opiniâtretés  détes- 
tables. La  charité  est  la  plus  grande  des  trois  vertus  théo- 
logales,  mais  la  foi  est  celle  que  TApôtce  a  nommée  la 
première,  est  M.  l'abbé  Pletteau  ne  pouvait  Toublier. 
J'aurais  voulu  cependant  qu'à  la  vue  d'une  si  éminente 
sainteté  qui  lui  semblait  déplorablement  évanouie,  et  au 
moment  même  où  il  croy^t  nous  montrer  cet  or  autre- 
fois si  pur,  transformé  désormais  en  un  vil  métal;  j'au- 
rais voulU)  dis-je,  que  du  fond  de  son  âme  se  fût  échappé 
un  sourd  gémissement  en  présence  d'une  si  lamentable 
chute  ;  l'aurais  voulu  que  même  en  détestant  de  toutç 
l'ardeur  de  «a  foi  ce  qu'il  appelle  Ykérésiede  Henri  Ar-r- 
nauld,  il  se  fût  exprimé  avec  les  égards  dus  à  la  mémoire 
d'un  évêque  si  longtemps  en  possession  de  la  vénération 
publique  ;  j'aurais  voulu,  enfin^  qu'à  l'exemple  de  cas 
âiUQs  pieuses  qui,  dans  une  cité  voisine  (1),  ne  pouvaient 
s'empêcher  d'admirer  l'édifiante  régularité  d'un  autre 
évêque  d'Angers  que  nous  a,y<ms  tous  connu,  tous 
aimé ,  et  qui  avait  le  malheur  d'appartenir  alors  à  un 
épiscopat  séparé  de  la:  communion  de  l'Ëglise^  il  se  fût 
écrié  aussi  :  «  Jamais  nous  n^/zviotis  vu  un  si  saint  héré^ 
tique!...  »  Mais  ce  mot  cruel  d! hérétique  est  prononcé  à 
plusieurs  reprisas  par  M.  l'abbé  Pletteau  sans  le  moindre 
correctif.  Il  fait  même  de  Henri  Arnauld  un  relaps  et  un 

(1)  y.  la    Vie  de  Mt^  MontauU,  évêque  d'Angers,  par  M.  l'abbë 
Maupokit,  p.  4a.et255. 


-  96  — 

excommunié.  Nous  ne  voulons  point  incidenter  sur  les 
termes,  puisque  nous  allons  bientôt  examiner  le  fond  ;  mais 
au  préalable,  je  veux  le  demander  à  M.  l'abbé  Pietteau 
lui-même ,  à  quel  titre  a-t-il  donc  pu  lui  paraître  juste 
et  convenable  de  faire  peser  sur  Pévêque  d'Angers  cette 
terrible  qualification  d! hérétique,  quand  il  est  de  fait  que 
Bossuet,  que  je  citerai  tout  à  l'heure,  a  dit  textuellement 
.et  formellement  le  contraire,  quand  un  historien  qui 
appartient  à  cet  ordre  même  des  Jésuites  pour  lequel 
M.  l'abbé  Pietteau  professe  un  respect  si  profond,  a  dis- 
culpé positivement  la  mémoire  de  notre  ancien  évêque, 
quand  enfin,  les  docteurs  mêmes  de  l'Université  qui  lui 
avaient  si  énergiquement  résisté,  n'ont  parié  de  lui  qu'avec 
l'expression  du  respect  et  de  la  tendresse  ?  Est-ce  que  de 
pareilles  autorités  ne  méritaient  pas  que  l'on  daignât  au 
moins  en  faire  mention,  ne  fût-ce  que  pour  les  combat- 
tre? Est-ce  donc  garder  quelque  mesure  et  quelque  sem- 
blant d'impartialité  que  d'écarter  de  si  importants  té- 
moignages sans  prendre  la  peine  de  les  discuter,  ni 
même  de  les  indiquer  ?  Si  l'on  trouvait  cela  tout  simple, 
tout  naturel  et  du  meilleur  aloi,  je  ne  crains  pas  de  le 
dire^  il  faudrait  admettre  qu'une  puissance  occulte, 
qu'une  force  irrésistible  est  venue  changer  le  couiis  des 
idées  reçues  et^  suivant  la  sublime  expression  de  nos 
livres  saints,  diminuer  le  nombre  des  vérités  parmi  les 
hommes l...  Tâchons  donc,  cependant ^  si  la  chose  est 
possible,  de  voir  comment  M.  Pietteau  a  dû  se  trouver 
ainsi  jeté  dans  une  voie  inaccoutumée  et  que  n'avaient 
point  connue  jusqu'à  ce  jour  tous  les  historiens  vraiment 
dignes  de  ce  nom. 
L'Église  dans  le  concile  de  Trenta ,  sa  pins  haute  et 


—  97  — 

sa  pins  auguste  manifestation  des  temps  modernes,  avait 
rappelé  aux  fidèles  qu'il  était  inutile  et  téméraire  de 
prononcer  sur  les  questions  dont  Dieu  n'avait  pas  jugé 
la  connaissance  nécessaire  au  salut  des  hommes,  puisqu'il 
ne  les  avait  pas  révélées  d'une  manière  expresse  et 
formelle  ;  mais  des  théologiens,  pressés  sans  doute  par  le 
zèle  de  la  science  et  plus  encore  par  une  vaine  soif  de 
renommée,  ne  surent  pas  se  maintenir  dans  les  sages 
limites  qui  leur  étaient  tracées.  Vers  le  milieu  du  xvi* 
siècle,  Baîus,  professeur  à  l'Université  de  Louvain, 
hasarda  sur  les  matières  de  la  grâce  des  assertions  qui 
furent  chaleureusement  contredites  et  successivement 
'condamnées  par  le  Saint-Siège.  Le  jésuite  espagnol 
MoUna  exposa  un  système  intermédiaire  qui  fut  égale- 
ment dénoncé  à  Rome,  mais  à  l'égard  duquel  le  pape 
Paul  Y  ajourna  indéfiniment  toute  décision.  Toutefois 
cet  ajournement  avait  mis  les  théologiens  en  émoi^  tous 
voulaient  avoir  raison  des  questions  si  longuement  con* 
troversées,  et  c'est  ce  vif  désir  qui  insp'u'a  à  Jansénius, 
évèque  dTpres,  la  patience  d'employer  vingt -deux 
années  de  sa  vie  à  la  composition  d'un  énorme  livre  qu'il 
intitula  Augustinm^  parce  qu'il  avait  pour  but,  au  moins 
dans  la  pensée  de  son  auteur,  de  rétablir  la  pure  doctrine 
de  saint  Augustin  sur  la  grâce  et  sur  le  libre  arbitre.  Ce 
livre  fit  d'abord  peu  de  sensation  en  France ,  mais  il  fut 
^  bien  accueilli  dans  la  solitude  de  Port-Royal  qui  contri- 
bua beaucoup  à  le  répandre.  La  Faculté  de  théologie  de 
Paris  s'en  émut  et  procéda  à  l'examen  de  ce  formidable 
m-/(>/to ,  qu'elle  jugea  dangereux  et  qu'elle  frappa  d'une 
condamnation  expresse  ;  mais  des  dilficultés  de  forme  et 
des  exigences  parlementaires  l'empêchèrent  de  publier 

REP.  ARC.  7 


sa  seatence.  Ce  fut  alors  que  l'assemblée  du  clergé  crut 
devoir  réclamer  l'intervention  du  Souverain  Pontife.  Lie 
pape  Innooent  X  fit  examiner  le  livre  de  Jansénius  avec 
une  attention  nouvelle  et  plus  scrupuleuse  qu'on  ue 
l'avait  fait  encore,  et  après  une  étude  qui  dura  plus  de 
deux  années,  il  prononça  son  jugement  définitif  par  une 
bulle  datée  du  31  mai  1653,  qui  condamnait  cinq  propo^ 
sitions  extraites  du  livre  de  l'évêque  d'Ypres.  Cette 
sentence    ne  souleva  tout  d'abord  nulle  difficulté,  et 
l'évêque  d'Angers,  entre  autres,  déclara  accepter  pure- 
ment et  simplement  la  bulle ,  ce  qui  était  conforme  aux 
usages  du  temps ,  car  alors  on  ne  regardait  une  bulle 
pontificale  compoie  exécutoire,  qu'autant  qu'elle  avait  été 
publiée  par  l'autorité  civile  et  acceptée  par  l'évêque  et 
les  fidèles.  Le  livre  de  Jansénius  avait  fini  par  avoir  déjà 
bien  des  partisans  en  France,  et  cependant  aucune  récla- 
mation ne  se  fit  eatendre  à  cette  époque;  les  solitaires  de 
Port-Royal  eux-mêmes  furent  forcés  de  reconnaître  que 
les  cinq  propositions  frappées  de  censure  étaient  juste- 
ment condamnées.  Us  protestaient  donc  qu'ils  souscri- 
vaient aux  décisions  du  St-Siége  et  qu'ils  ne  voulaient 
pas  défendre  les  cinq  propositions  ;  seulement  ils  niaient 
que  ces  propositions,  qu'ils  tenaient  pour  hérétiques  et 
îinpies,  se  trouvassent  dans  le  livre  de  Jansénius  qui  n'a- 
vait fait  qu'exprimer  la  pure  doctrine  de  saint  Augustin. 
Cette  distinction  subtile  et  d'une  inexcusable  témérité 
en  présence  de  la  bulle  toute  récente  d'Innocent  X, 
n'allait  pas  toutefois  jusqu'à  la  scission  formelle,  tant  que 
l'Église  avait  paru  la  tolérer  ou  du  moins  ne  pas  s'en 
préoccuper  et  laisser  le  champ  libre  aux  disputes.  Mais 
le  16  octobre  1656,  Alexandre  YU^qui  avait  succédé  au 


—  «9  — 

pape  Innocent  X^  confirma  toutes  les  décisions  de  son 
pfédécessenr ,  ajoutant  que  les  cinq  propositions  étaient 
tirées  du  livre  de  Jansénius  et  avaient  été  condamnées 
dans  le  sens  auquel  cet  auteur  les  avait  expliquées.  Cette 
bulie  d'Alexandre  Yll  fut  acceptée  dans  tous  les  diocèses 
de  France,  et  nul  ne  l'accueillit  avec  une  plus  respec- 
taease  déférence  que  Févêque  d'Angers  ,  dont  nous 
avons  retrouvé  le  mandement  bien  peu  connu  et  qui, 
croyons-nous,  n'a  jamais  été  cité.  Il  y  disait  :  «  Nous 
)»  avons  reçu  la  bulle  de  notre  saint  père  le  pape  Alexan- 
»  dre  VII,  dont  la  teneur  est  ci-dessus,  avec  tout  le  respect 
y>  et  la  révérence  que  nous  devons  à  Sa  Sainteté  et  au 
»  Siège  apostolique,  et  pour  lui  rendre  témoignage  de 
»  notre  parfaite  obéissance,  nous  mandons  à  nos  archi- 
»  prêtres,  doyens  ruraux,  curés  et  vicaires  perpétuels,  de 
»  la  publier  à  leurs  prônes,  et  à  tous  chefs  et  supérieurs 
»  de  communautés  séculières  et  régulières,  en  leurs 
»  chapitres  et  assemblées,  de  tenir  la  main  à  son  exécu- 
»  tion ,  les  exhortant  et  leur  enjoignant  de  la  recevoir 
D  avec  toute  la  soumission  qui  est  due  au  vicaire  de 
»  Jésns-Christ,  de  l'observer  et  la  faire  observer  selon  sa 
y>  forme  et  teneur,  sous  tes  peines  qui  y  sont  portées,  et 
j>  de  conspirer  avec  nous,  autant  qu'il  leur  sera  possible^ 
»  pour  porter  ceux  qui  leur  sont  soumis  à  vivre  en  paix 
»  dans  l'unité  d'une  même  foi,  afin  deconseafver  entr'eux 
»  le  lien  de  charité  qui  doit  unir  tous  les  membres  de 
»  l'Église  dans  leur  chef  invisible,  qui  est  Jésus-Christ, 
»  et  dans  leur  chef  visible,  qui  est  le  Saint-Père.  » 

Malgré  des  acceptations  si  formelles  en  apparence,  la 
question  n'était  qu'assoupie,  et  l'école  de  Port-Royal 
avec  ses  adhérents  n'en  professait  pas  moins  ouvertement 


—  100  — 

la  doctrine  que  Fou  ne  devait  aux  décisions  récentes  de 
l'Église  qu'une  soumission  de  respect  et  de  silence ,  sans 
être  obligé  d'y  donner  aucune  croyance  intérieure.  En 
présence  de  ces  résistances  étranges  et  périlleuses,  l'as- 
semblée du  clergé,  pressée  surtout  par  l'autorité  royale 
qui  attachait  un  prix  extrême  à  maintenir  en  toutes 
choses  l'unité  religieuse,  sollicita  une  nouvelle  interven- 
tion du  souverain  pontife,  et  le  16  février  1665  le  pape 
Alexandre  VII  arrêta  la  rédaction  d'un  nouveau  formu- 
laire qui  devait  être  signé ,  sous  les  peines  canoniques , 
par  tous  les  archevêques ,  évêques,  ecclésiastiques  régu- 
liers et  séculiers,  et  même  par  les  religieux  et  les 
instituteurs  de  la  jeunesse*  Ce  formulaire  obligeait,  à 
condamner  de  cœur  et  de  bouche  les  cinq  propositions 
cojitenues  dans  le  livre  de  Jansénius.  Un  assez  grand 
nombre  de  prélats  virent  avec  peine  cette  exigence 
nouvelle,  qui  leur  paraissait  contenir  en  germe  un  long 
avenir  de  troubles  et  de  dissensions  et  que  la  cour  de 
Rome,  croyaient-ils^  n'aurait  point  imposée  si  elle  n'eût 
été  pressée  par  l'autorité  civile,  mais  quatre  évêques 
seulement  ne  voulurent  signer  ce  formulaire  que  sous  la 
distinction  du  fait  et  du  droit  :  ce  furent  les  évêques 
d'Aleth,  d'Angers,  de  Beauvais  et  de  Pamiers.  Tous  les 
historiens  reconnaissent  d'ailleurs  que  l'évêque  d'Aleth 
fut  le  véritable  chef  de  la  résistance,  et  que  les  autres  ne 
firent  que  le  suivre,  notamment  celui  d'Angers  qui 
s'était  toujours  occupé  beaucoup  plus  du  gouvernement 
de  son  diocèse  que  de  toutes  les  querelles  théologiques 
du  temps.  Quoi  qu'il  en  soit,  pour  justifier  leur  refus  de 
signature,  les  quatre  prélats  prétendirent  qu'il  était 
excessif  d'imposer  un  formulaire  absolu  à  des  hommes 


—  404  — 

qui  pouvaient  être  de  bonne  foi  sur  la  question  de  fait  ; 
ils  ajoutaient  qu'à  la  vérité  l'Église  est  infaillible  lors- 
qu'elle prononce  que  telle  ou  telle  proposition  est 
hérétique,  mais  qu'il  n'en  peut  être  de  même  quand  il 
s'agit  d'un  livre  qu'elle  ne  signale  point  textuellement , 
et  que  dans  ce  cas  il  n'est  dû  à  ses  jugements  qu'un 
sUence  respectueux  et  non  une  véritable  croyance.  Dès 
que  Louis  XIY  eut  connu  ce  refus  ainsi  motivé,  il  se 
montra  profondément  irrité,  et  il  demanda  au  Saint-Père 
de  nommer  douze  commissaires  qui  seraient  chargés  de 
faire  le  procès  des  quatre  évêques  réfractaires.  Le  Pape 
y  conset^tity  mais  je  ne  puis  me  dispenser  de  faire 
remarquer  en  passant  que  puisque  l'on  se  préparait  à 
procéder,  il  n'y  avait  évidemment  rien  de  décidé  encore 
contre  les  prélats  que  l'on  ne  songeait  nuUercient  à  juger 
sans  les  entendre. 

La  mort  d'Alexandre  VII  fit  traîner  en  longueur  cette 

procédure^  qui  d'ailleurs  avait  déjà  subi  de  nombreuses 

difficultés  de  forme,  et  vivement  excité  les  susceptibilités 

de  tout  l'épiscopat  français  ;  cependant  le  nouveau  Pape 

maintint  les  constitutions  de  son  prédécesseur ,  mais  le 

nonce  Bargellinl,  archevêque  de  Thèbes,  alors  accrédité 

près  la  cour  de  France ,  entreprit  de  traiter  lui-même 

cette  affaire,  et  de  réconcilier  avec  le  St-Siége  des  prélats 

qui  inspiraient  un  vif  intérêt  à  leurs  collègues  et  qui 

tous  étaient  renommés  pour  leur  piété  et  leurs  vertus. 

Le  nonce  se  fit  donc  autoriser  par  le  souverain  pontife  à 

dispenser  les  quatre  évêques  de  faire  la  rétractation 

formelle  de  leur  premier  refus,  et  Clément  IX  s'y  prêt 

avec  cette  indulgente  bonté  imitée  de  celle  du  divin 

Maître,  qui  recommandait  de  ne  point  rompre  le  roseau 


à  demi-^brisé  ni  éteindre  la  mèche  qui  fume  encore.  Une 
lettre  collective,  qui  prêtait  un  peu  à  l'équivoque  peut- 
être,  fut  seulement  souscrite  par  les  quatre  évêques  ;  on 
leur  fit  prendre  en  même  temps  des  engagements  qui, 
paràtt-il,  ne  furent  remplis  que  d'une  manière  irrégu— 
lière  ou  incomplète ,  puis  sur  ces  simples  promesses  on 
voulut  bien  oublier  le  passé  et  tout  parut  terminé.  Je 
ne  veux  point  certes  excuser  des  faux-fuyants  qui  auraient 
été  bien  malséants  en  matière  si  grave  et,  s'il  y  eut  des 
restrictions  mentales,  on  ne  saurait  trop  les  flétrir 
surtout  chez  les  partisans  d'une  école  qui  avait  si 
bruyamment  dénoncé  ce  qu'elle  appelait  Yescobarderie 
des  Jésuites;  mais  il  est  évident,  pour  qui  veut  examiner 
à  fond  cette  affaire ,  que  le  nonce  Bargellini ,  trop  em- 
pressé à  terminer  une  si  déplorable  controverse,  avait  pris 
avec  les  évêques  opposants  des  engagements  secrets  qui 
peut-être  outrepassaient  sa  mission  ostensible.  J'en 
aurais  bien  des  preuves  à  citer,  si  le  temps  me  permettait 
les  longs  développements,  mais  je  suis  forcé  de  me 
restreindre  sur  ce  point  aux  documents  qui  me  sont 
fournis  par  M.  Tabbé  Pletteau  lui-même.  Ainsi,  dans  ta 
malencontreuse  ordonnance  du  4  mai  1676  où  l'évêque 
d*Angers  revient  encore  sur  cette  éternelle  distinction 
du  droit  et  du  fait  que  l'on  croyait  abandonnée  à  tout 
jamais ,  il  est  dit  positivement  :  <i  Pour  le  fait  de  Jan- 
r>  sénius,  il  suffit  de  demeurer  en  un  silence  respectueux, 
i>  tel  que  les  autres  évêques,  nos  confrères  et  nous  avons 
Y>  fait  dans  nos  procès-verbaux  sur  lesquels  cette  paix 
»  (celle  de  Clément  IX)  a  été  faite  et  qui  ayant  été 
»  CONCERTÉS  AVEC  M.  LE  NoNCE  oe  Contiennent  autre 
D  chose  que  h  volonté  de  S.  8.  même.  »  Tout  cela,  il 


ioiporte  de  le  remarquer,  tout  cela  était  éerit  quelques 
années  seulement  après  c^te  paix  de  Clément  IX  ^  était 
rendu  public  par  la  voie  de  l'impressioa  et  affirmé  soius 
les  yeux  mêmes  du  Nonce ,  qui  remplissait  encore  ses 
fonctions  et  qui  n'élevait  ni  réclamation  ni  désaveu. 
Nous  voyons  encore  dans  l'arrêt  du  conseil  cité  au  n^  II 
des  pièces  justificatives  de  la  brochure  de  M.  Pletteau,. 
que  l'on  y  admet  la  possibilité  d'une  condescendance 
que  le  Str-Siége  aurait,  eue  en  admettant  avec  beaucoup 
de  prudence  a  quelques  signatures  du  formulaire  avec 
D  quelqu'explication  plus  étendue  «n  faveur  de  quelques 
B  particuliers  seulement^  et  pour  les  mettre  k  couvert  de 
»  leurs  scrupules  et  des  peines  portées  par  les  consti- 
»  tutions  apostoliques.  »  Il  est  évident  pour  nous  que 
cette  hypothèse  équivaut  '  à  peu  de  chose  près  à  l'aveu 
des  concessions  faites  dans  le  temps  par  le  représen- 
tant officiel  du  souverain  pontife.  Enfin  M.  l'abbé  Plet- 
teau  nous  apprend  encore  que  Henri  Amauld,  presque 
au  bord  de  la  tombe,  osa  écrire  au  pape  Innocent  Xi  que 
Qément  IX  lui  avait  permis  en  1668  la  signature  du 
formulaire  avec  la  distinction  du  fait  et  du  droit.  Il  est 
bien  difficile  de  croire  à  un  mensonge  qui  se  serait  pro- 
duit £Ûnsi  en  face  de  la  mort;  il  est  impossible  surtout 
d'admettre  que  le  chef  de  l'Eglise  ait  pu  jamais  accueillir 
les  confidences  d'un  hérétique  prétendu,  sans  lui  infliger 
un  démenti  formel  et  sans  lui  signifier  hautement  le 
vade  retrait..,  et  ce  dernier  renseignement  me  confirme 
plus  que  jamais  dans  Topinion  que  le  nonce  Bargellini 
avait  été  beaucoup  plus  loin  qu'il  ne  le  laissa  paraître 
dans  les  négociations  de  la  paix  de  1668,  mais  tout  cela 
aussi  ne  m'empêche  pas  de  ^blâmer  ce  qui  mérite  de 


-  104  — 

l'être,  ni  de  reconnaître  qu'au  milieu  de  ces  querelles  du 
jansénisme  Henri  Arnauld ,  entraîné  par  l'influence  et 
l'autorité  ide  sa  famille,  a  cédé  à  plus  d'une  défaillance  et 
nous  a  prouvé  une  fois  de  plus  qu'il  y  a  des  hésitations, 
des  faiblesses,  des  lacunes  dans  toutes  les  vertus.  Mais 
de  là  à  l'hérésie,  de  là  à  la  séparation  finale  de  l'Église, 
la  distance  est  immense.  L'évêque  d'Angers  qui  avait 
accepté  avec  une  si  pieuse  déférence  la  bulle  d'Alexan- 
dre yn,  était  bien  malheureusement  inspiré  en  se  refusant 
plus  tard  à  signer  purement  et  simplementle  formulaire, 
et  en  cherchant  à  couvrir  ses  refus  par  une  distinction 
subtile  et  téméraire  entre  le  droit  qu'il  tenait  pour 
incontestable,  et  le  fait  sur  lequel  il  se  réservait  toute 
liberté  de  croyance.  Il  y  avait  là ,  nous  ne  prétendons 
pas  le  nier,  une  désobéissance  flagrante  et  un  si  fâcheux 
exemple  qu'à  aucun  titre  le  souverain  pontife  ne  pouvait 
le  tolérer,  mais  il  faut  reconnsdtre  aussi  qu'il  n'y  avait 
point  d'affirmation  véritablement  périlleuse  pour  le  main- 
tien de  la  doctrine,  puisque  les  prélats  condamnaient  sans 
restriction  les  cinq  propositions  signalées,  et  que  sur  le 
fait  même  de  Janséniusils  s'obligeaient  àgarder  ce  qu'ils 
appelaient  un  silence  respectueux.  Ce  silence  prétendu  res- 
pectueux l'était  trop  peu  sans  doute,  et  l'Église  avait  bien 
droit  à  une  plus  complète  obéissance,  mais  enfin  elle  avait 
plus  d'une  fois  fermé  les  yeux  sur  des  réserves  de  ce  genre 
qui,  il  ne  faut  pas  l'oublier,  ne  furent  interdites  et  for- 
mellement condamnées  que  par  le  pape  Clément  XI  dans 
la  bulle  Vineam  domini  donné-e  le  15  juillet  1705,  plus 
de  13  ans  après  la  mort  de  Henri  Arnauld.  Il  serait  aussi 
par   trop   rigoureux  de  reprocher  à  ce  prélat  d'être 
contrevenu  à  une  sentence  qui  n'existait  pas  encore  1 


—  405  — 

J'ai  lu  dans  le  Dictionnaire  de  Trévoux  (on  voit  que 
îe  ne  cherche  pas  des  autorités  suspectes  (1),  que  Philas- 
tidns,  évêque  de  Brescia  en  Italie,  qui  vivait ,  je  crois , 
au  IV*  siècle  et  qui  siégea  avec  saint  Ambroise  au  concile 
d'Aquilée,  appelait  faiseurs  cf  hérétiques  ceux  qui  mul- 
tipliaient trop  le  nombre  des  hérésies.  Je  ne  sais  ce  que 
Philastrius  dirait  aujourd'hui ,  mais  il  m'avait  semblé 
que  déjà  depuis  quelques  années  les  faiseurs  se  remet- 
taient à  l'œuvre.  Toutefois,  avant  1858  je  ne  pense  pas 
qu'ils  aient  songé  jamais  à  choisir  le  nom  de  Henri 
Arnauld  pour  grossir  leur  liste.  On  avait  bien  pu 
jusque*là  accuser  Févêque  d'Angers  de  tergiversations 
et  de  faiblesse  ;  on  allait  même,  je  le  crois ,  jusqu'à  dire 
qu'mvolontairement  il  s'était  fait  fauteur  (Thérésiey  dans 
ce  sens  que  les  jansénistes  s'étaient  autorisés  de  sa 
résistance,  mais  on  n'avait  pas  osé  aller  plus  loin,  et  ce 
fut  un  écrivain  laïque  (2)  appartenant  à  l'Anjou,  qui  le 
premier  trancha  le  mot  et  nous  dit  sans  détour  qu'au 
xvu*  siècle  le  diocèse  d'Angers  avait  été  gouverné  par 
un  évêque  hérétique.  Le  mot  a  fait  une  si  prodigieuse 
fortune  depuis  1858,  qu'il  est  devenu  pour  certaines  gens 
une  véritable  règle  de  foi,  et  c'est  à  ce  point  qu'il  nous 
faut  peut-être  quelque  courage  pour  oser  aujourd'hui 
nous  soustraire  à  ce  courant  d'opinion  qui  domine  tout , 
qui  n'est  disposé  à  souffrir  aucune  espèce  de  résistance, 
et  qui  voudrait  tout  entraîner  dans  le  torrent  de  son 
aveugle  et  fougueuse  impétuosité. 

(i)  Tout  le  monde  sait  que  le  Dictionnaire  de  Trévoux  est  l'œuvre 
des  Jésuites. 

(±)  Notice  sur  M.  Tabbé  Joubert,  vicaire  général,  par  M.  Jourdain 
(Charles  Sainte-Foi),  1858. 


—  i«6  -^ 

Aiûn^  aviX  diseiples  de  cette  é<y)le,  il  n'y  aurait  pas 
sécurité  sans  doute  à  citer  lea  paroles  de  Bossnet,  qui^ 
selon  le  témoignage  de  l'abbé  Ledieu,  son  secrétaire  in- 
time, aurait  exprimé  l'opinion  ce  qu'on  ne  pouvait  pas 
y>  dire  que  ceux  que  de  son  temps  on  appelait  commu- 
y>  nément  jansénistes  fussent  des  hérétiques,  puisqu'ils 
»  condamnaient  les  cinq  propositions  condamnées  par 
»  l'Eglise.  x>  On  me  répondrait  très-probablement  que 
l'abbé  Ledieu  n'est  pas  une  autorité,  qu'il  y  a  dans  ses 
Mémoires  beaucoup  d'assertions  assez  mal  sonnantes,  et 
que  ce  n'est  pas  dans,  œ  livre  qu'il  est  convenable  d'ail- 
ler rechercher  les  textes  de  Bossuet.  Nous  n'avons  pas 
besoin  de  discuter  le  mérite  de  cette  critique,  car  les 
textes  authentiques  et  incontestables  du  grand  évèque 
de  Meaux  abondent  sur  le  sujet  qui  nous  occupe.  Ëi 
d'al>ord ,  comme  témoignage  de  sa  vénération  pour 
Henri  Arnauld,  il  nous  sufiQra  de  relater  un  passage  de 
son  admirable  lettre  aux  religieuses  de  Port*Royal,  où  il 
leur  cite  l'autorité  de  l'évéque  d'Angers^  dont  il  avait 
connu  le  mandement  si  humblement  soumis  du  14  mai 
1657.  a  II  faut,  disait  Bossuet,  il  faut  que  vous  vous  re- 
»  jetiez  dans  un  autre  abyme  en  croyant  que  les  décrets 
)»  de  deux  papes,  reçus,  approuvés,  publiés  uuanime- 
»  ment  par  tous  les  évêques,  lesquels  plusieurs  d'entre 
»  eux,  à  ce  que  j'ai  appris,  et  nommément  M.  d'An<* 
*  gers,  qice  je  nomme  par  hxmmur  H  avec  respect ,  ont 
»  souscrits  à  deux  genoux,  ne  peuvent  être  censés  cano-^ 
»  niques.  »  On  me  dira  peut  être  que  plus  tard  Bossuet 
ne  se  fût  pas  exprimé  ainsi,  et  cependant,  après  même 
la  procédure  dirigée  contre  les  évêques  qui  s'étaient  re- 
fusés à  signer  le  formulaire  sans  distinction,  il  écrivait 


—  t«7  — 

à  un  illustre  guerrier  qui  achevait  dans  les  œuvres  de  la 
plus  fervente  piété  une  vie  glorieusement  signalée  sur 
les  champs  de  bataille  de  la  Catalogne  et  de  la  Hollande: 
«  Dans  la  vérité^  je  ne  saurais  avoir  la  complaisance  de 
9  blâmer  beaucoup  de  gens  qui,  je  crois,  ne  le  méritent 
1  pas.  Cependant  je  ne  me  mâle  point  de  justifier  per- 
"»  sonne  sur  la  doctrine,  mais  Fati  fie  peut  soti/frir  que 
)»  je  témoigne  de  la  joie  que  les  quatre  évêques  soient 
1»  bien  avec  Sa  Sainteté,  et  que  des  hommes  qui  donnent 
»  de  si  grands  exemples  dans  la  morale  et  dans  la  dis- 
D  cipline ,  soient  purgés  de  soupçon  d'une  méchante 
»  doctrine.  »  On  voit  qu'il  y  avait  du  temps  de  Bossuet, 
comme  aujourd'hui,  des  hommes  ardents  et  exclusifs 
qui  auraient  voulu  que  le  saint-siége  eût  prodigué  les 
anathèmes^  et  qui  ne  pardonnaient  pas  à  Tillustre  évéque 
de  se  réjouir  de  la  tolérance  et  de  la  mansuétude  du 
souverain  pontife. 

Plus  tard  encore  Bossuet  écrivait  au  même  maréchal 
de  Bellefonds,  dont  le  religieux  qui  dirigeait  sa  cons- 
cience exigeait  qu'il  ne  parlât  jamais  de  jansénisme, 
sans  ajouter  aussitôt  qu'il  le  condamnait  en  droit  et  en 
fait,  Bossueiy  disons-nous,  répondait  :  «  Ojn  n'a  rien  k 
»  vous  demander  quand  vous  ne  direz  jamais  rien 
D  contre  le  jugement  qui  décide  la  question  de  fait,  et 
»  que,  da&s  l'occasion,  vous  direz  que  vous  vous  en 
»  rapportez  sur  tout  cela  à  ce  que  l'Eglise  ordonne  à 
»  ses  enfants.....  Du  reste,  vous  auriez  tort  de  blâmer 
»  des  évêques  QUI  SONT  DANS  LA  COMMUNION  DE 
»  L'EGLISE,  et  dont  la  vie  est  non-seulement  irrépro- 
»  chable,  mais  sainte...  Quand  on  a  dit,  ajoute  le  grand 
»  évfique  de  Meaux^  quand  on  a  dit  qu'on  ne  devait 


—  108  — 

»  ni  ne  pouvait  avoir  aux  jugements  de  l'Eglise,  sur 
»  les  points  de  fait^  une  croyance  pieuse,  on  a  avancé 
ïi  une  proposition  (Tune  dangereuse  conséquence  (1)  et 
»  contraire  à  la  tradition  et  à  la  pratique.  Comme  pour— 
»  tant  la  chose  était  à  un  point  qu'on  ne  pouvait  pas 
y>  pousser  à  toute  rigueur  la  signature  du  formulaire 
>  sans  causer  de  grands  désordres  et  sans  faire  un 
»  schisme,  l'Eglise  a  fait  selon  sa  prudence  d^accomfno^ 
»  der  celte  a/faire  et  de  supporter  par  charité  et  con- 
»  descendance  les  scrupules  que  de  saints  évêques  et 
»  des  prêtres,  d'ailleurs  attachés  à  FEglise,  ont  eus  sur 
»  le  fait  (2).  »  Yoilà  ce  me  semble,  en  termes  assez 
explicites,  l'opinion  de  Bossuet  sur  ces  prétendus  hé- 
rétiques dénoncés  à  si  grand  bruit,  et  il  en  résulte  clai- 
rement, je  le  crois,  non-seulement  que  les  quatre  évo- 
ques n'étaient  point  condamnés  par  l'Eglise,  mais  que, 
comme  je  l'ai  dit  plus  haut,  il  était  notoire  alors  que  le 
saint-siége  avait  fait  de  larges  concessions  sur  les  ter- 
mes de  la  signature  du  formulaire. 

Je  sais  parfaitement  d'ailleurs  que,  pour  une  certaine 
école,  le  grand  nom  de  Bossuet  est  loin  d'offrir  une 
autorité  imposante,  mais  je  ne  puis  croire  que  M.  l'abbé 
Pletteau  en  soit  encore  rendu  à  cette  extrémité.  En  tout 
cas,  j'ai  pris  l'engagement  de  lui  citer  l'opinion  d'un 
membre  très-dévoué  de  la  compagnie  de  Jésus,  qui  est 
bien  éloigné  de  faire  un  hérétique  de  l'évêque  Arnauld. 
«  Il  signa,  dit  Feller,  il  signa  le  formulaire   après 

(1)  On  ne  prétendra  pas»  je  l'espère,  qu'une  proposition  susceptible 
de  dangereuse  conséquence  constitue  nécessairement  une  hérésie 
formelle. 

(2)  Œuvres  de  Bossuet,  édition  de  Besançon,  t.  II,  p.  647  et  648. 


—  i09  — 

x>  l'avoir  refusé,  et  fit  sa  paix  non  sans  quelque  subter- 
j>  fuge  avec  Clément  IX.  Il  ne  faut  pas,  ajoute*t«il,  sur  la 
»  foi  d'un  théologien  qu'il  qualifie  lui-même  d'homme 
»  judicieux  et  modéré^  il  ne  faut  pas  juger  trop  sévère- 
»  ment  quelques  hommes  célèbres  qui«  dans  les  pre- 
»  miers  temps  du  jansénisme,  ont  témoigné  du  goût 
»  pour  cette  hérésie  naissante.  Elle  avait  alors  telle- 
>^  ment  réussi  à  prendre  les  dehors  de  la  piété,  de  l'aus- 
»  térité,  du  zèle  et  même  de  l'attachement  à  TEglise 
»  catholique,  que  bien  des  personnes  ont  pu  être  dupes 
»  de  l'hypocrisie.  Les  scènes  scandaleuses  de  Saint- 
»  Médard  ,  les ,  farces  sacrilèges  des  secouristes  ,  le 
»  schisme  formel  de  la  prétendue  Eglise  d'Utrechl  n'a- 
»  vaient  pas  encore  eu  lieu.  Le  jugement  de  l'Eglise 
»  s'est  manifesté  par  des  décisions  plus  formelles  et 
»  plus  soutenues,  par  des  décrets  principaux  solennel- 
»  lement  et  universellement  reçus,  par  la  conviction 
)>  complète  et  générale  de  tous  les  catholiques;  tous  les 
yy  subterfuges  du  parti,  toutes  les  subtilités  des  dogma- 
»  tismes  opiniâtres  dans  l'erreur  ont  été  confondus; 
»  les  apparences  de  la  piété  ont  fait  place  au  mensonge 
»  et  au  philpsophisme.  L'illusion  qui  a  pu  exister  d'a- 
»  bord  s'est  dissipée,  et  il  ne  faut  pas  douter  que  bien 
»  des  gens  qui  ont  paru  favorables  au  parti,  se  garde- 
»  raient  bien  de  l'être  aujourd'hui.  » 

On  voit  donc  que  Feller  est  bien  loin  de  vouloir  im- 
primer au  nom  de  Henri  Ârnauld  la  note  d'hérésie  dont 
on  se  montre  aujourd'hui  si  prodigue,  et  que  le  savant 
jésuite  reconnaît  en  faveur  de  l'évêque  d'Angers  de  véri- 
tables circonstances  atténuantes.  Le  docteur  Babin  iui- 
même,  tant  cité  par  M.  l'abbé  Pletteau,  et  qui  dans  ces 


—  -ilO  — 

[)remières  querelles  du  jansénisme  sut  montrer  en  effet 
tant  de  zèle  et  de  courage  pour  le  triomphe  de  l'ortho- 
doxie^  invoque  comme  titre  d'excu»;  pour  le  prélat, 
<c  la  modeste  déférence  qui  lui  fit. soumettre  ses  lumières 
»  à  quelques-uns  de  ses  confrères  et  de  ses  proches 
)»  qu'il  croyait  supérieures  aux  siennes,  et  il  recom* 
»  mande  le  respect  que  nous  devons  avoir,  dit-il,  pour 
»  la  mémoire  d'un  évêque  qui  le  mérite  d'ailleurs  par 
))  les  grandes  qualités  de  Tesprit  et  du  cœur.  » 

Cette  recommandation  du  docteur  Babin  n'a  pas 
réussi,  paraît-il,  auprès  de  l'auteur  de  la  brochure  que 
je  combats.  Loin  de  garder  quelque  respect  ou  même 
une  certaine  réserve  en  présence  d'une  mémoire  long- 
temps chère  et  vénérée,  son  rigorisme  inflexible  n*a 
laissé  échapper  nulle  occasion  de  s'exprimer  avec  amer- 
tume ou  dédain  sur  le  compte  d'un  prélat  auquel  son 
épigraphe  semblait  cependant  avoir  promis  Justice  en 
même  temps  que  liberté.  C'est  ainsi  qu'il  ne  voit  dans 
Henri  Ârnauld  avant  son  entrée  dans  les  ordres  sacrés, 
qu'un  ancien  avocat  retiré  prématurément  du  barreau 
où  i)  n'avait,  nous  dit-il,  montré  qu'un  talent  vulgaire. 
M.  l'abbé  Pletteau  oublie  apparemment  qu'à  l'âge  de 
vingt-deux  ans  le  jeune  Arnauld  fut  emmené  en  Italie 
par  le  cardinal  Bentivoglio,  qui  l'initia  dès  lors  aux 
affaires  diplomatiques.  Or,  je  le  demande,  un  procès 
tant  soit  peu  sérieux  fut-il  confié  jamais  à  un  jeune 
stagiaire  de  vingt-deux  ans?  Est-il  même  bien  avéré 
que  Henri  Arnauld  ait  jamais  plaidé,  et  en  tout  cas  la 
eause  put-elle  être  assez  importante  pour  faire  déses- 
pérer de  son  avenir? 

Cette  facilité  d'aflBrmation  sans  avoir  rien  vérifié,  rien 


—  411  — 

approfondi ,  entraîne  trop  souvent  M.  Fabbé  Pletteau, 
sinon  dans  une  voie  d'injustice  et  de  partialité^  au  moins 
dans  des  erreurs  matérielles  qui  n'ont  pas  une  impor- 
tance capitale  assurément,  mais  que  l'on  ne  devrait  pas 
trouver  dans  une  étude  véritablement  historique.  Où 
donc,  par  exemple,  M,  Tabbé  Plelteau  a-t-il  pu  voir  que 
le  titre  de  professeur  en  droit  civil  et  canonique  confé- 
rait la  noblesse  dans  notre  province  d'Anjou ,  et  que 
même  les  gentilshommes  de  haute  extraction  avaient  un 
dédain  superbe  pour  cette  aristocratie  factice  ?  H  est  bien 
vrai  que  dans  une  grande  et  auguste  solennité,  on  avait 
vu  l'empereur  Sigismond  faire  placer  un  simple  juris- 
consulte avant  les  hommes  portant  l'épée, .  parce  que, 
disait  ce  monarque,  en  un  jour  il  pouvait  faire  mille 
chevaliers  des  armes,  tandis  qu'en  mille  ans  il  ne  pour- 
rait faire  un  seul  chevalier  des  lois,  mais  cette  haute  dis- 
tinction n'avait  nullement  tiré  à  conséquence,  et  jamais, 
ni  dans  l'Anjou  ni  même  dans  toute  la  France,  on  n'a 
connu  la  noblesse  comitive  des  universités  d'Italie,  et  si 
le  doyen  de  notre  faculté  de  droit  prenait  dans  les  actes 
publics  le  titre  à*anttcessor  et  cornes,  ce  titre  ne  dépas- 
sait pas  l'eûceinte  de  l'école.  L'honorable  doyen  n'avait 
nulle  prétention  sérieuse  à  la  qualité  aristocratique  de 
comtey  personne  ne  lui  reconnaissait  le  moindre  droit  à 
la  porter,  et  à  aucune  époque  on  ne  vit  le  cornes  universi- 
taire inscrit  sur  le  ban  ou  l'arrière-ban  de  la  noblesse,  ni 
sur  les  listes  arrêtées  officiellement  pour  l'élection  des 
Etats  généraux;  le  titi^e  de. gentilhomme,  enfin,  ne  lui 
était  pas  même  acccordé  dans  les  vaines  et  frivc^  dis- 
tinctions du  monde.  Je  ne  relève  assurément  cette  erreur 
de  M.  l'abbé  Pletteau,  que  pour  ce  qu'elle  vaut  et  seule- 


—  110  — 

ment  parce  qu'il  me  semble  que  Ie$  inexactitudes  ne 
sont  jamais  bonnes  à  rien. 

J'en  aurais  beaucoup  d'autresà  signaler  (1),  mais  comme 
je  ne  puis  prolonger  indéfiniment  ce  travail ,  je  suis  forcé 
de  me  restreindre  à  ce  qui  concerne  personnellement 
Henri  Arnauld.  M.  Pletteau  prétend  que  sa  promotion  à 
l'évêché  d'Angers  mit  en  émoi  toutes  les  espérances  du 
jansénisme,  et  que  dès  lors  on  put  voir  en  lui  un  habile 
instrument  des  volontés  impérieuses  de  Port-Royal.  Je  ne 
veux  point  incidenter  ici  sur  une  erreur  de  date  évidente, 
ni  rappeler  que  Henri  Arnauld  fut  promu  en  1650  à 
l'évêché  d'Angers,  et  que  la  bulle  d'Innocent  X  contre 
le  livre  de  Jansénius  date  seulement  de  1653 ,  parce  que 
j'ai  quelque  chose  de  mieux  encore  à  répondre.  Je  veux 
demander  à  M.  l'abbé  Pletteau,  qui  croit  très  sincèrement, 
je  n'en  puis  douter,  que  l'évêque  Arnauld  ne  fut  qu'un 
instrument  docile  dans  les  mains  des  chefs  de  l'école  jansé- 
niste, je  veux  lui  demander,  dis-je,  comment  il  se  fait  que 
le  nouvel  évêqué,  avec  la  mission  qu'il  aurait  reçue,  n'ait 
pas  débuté  par  persécuter,  inquiéter  au  moins  la  compa- 
gnie de  Jésus  qui  avait  dans  le  diocèse  d'Angers  son  plus 
bel  établissement,  et  dont  l'immuable  dévouement  au 
saint-siége  était  si  fort  en  opposition  avec  cette  école  de 

(1)  M.  l'abbé  Pletteau,  je  regrette  de  le  dire,  a  procédé  avec  un 
tel  laisser-aller  à  la  composition  de  sa  brochure,  qu'il  tombe,  faute 
de  vérification  exacte,  dans  des  erreurs  même  préjudiciables  à  la 
thèse  qu'il  veut  soutenir.  En  parlant,  par  exemple,  des  luttes  de 
Henri  Arnauld  avec  l'Université  d'Angers,  il  lui  reproche  d'avoir 
provoqué  une  collision  malséante,  à  son  âge  de  près  de  16  ans.  Or, 
en  1676,  Henri  Arnauld,  né  en  i597,  avait  79  ans.  Dès  lors,  si  le 
reproche  de  M.  l'abbé  Pletteau  était  fondé,  il  l'aurait  atténué  par  sa 
propre  faute. 


—  ils  — 

Port-Royal,  appelée  justement  la  Genève  du  jansénisme  f 
L'évêque  d'Angers,  quoiqu'issu  d'une  famille  où  la  haine 
des  jésuites  était  héréditaire,  n'eut  jamais  pour  ceux  de 
La  Flèche  que  de  bons  procédés  et  une  bienveillance  dont 
on  ne  le  vit  point  se  départir.  Il  les  laissa  complètement 
libres  dans  leur  double  ministère,  «oit  de  la  prédication, 
soit  de  la  direction  des  consciences,  ce  qui  certes  saurait 
été  bien  imprudent  de  la  part  (Tun  docile  instrument  des 
volontés  impérieuses  de  Port-Royal.  Vainement  préten- 
drait-on que  le  grand  crédit  des  jésuites  à  la  cour  n'au- 
rait pas  permis  de  rien  oser  contre  eux.  Cette  école  de 
Port-Royal  ne  connaissait  guère  les  complaisances  de  la 
courtisanerie,  puis  on  sait  trop  à  quelles  extrémités  se 
portèrent  souvent,  sans  craindre  de  déplaire  à  la  cour, 
les  prélats  dominés  par  d'injustes  préventions  contre  les 
jésuites.  Le  cardinal  de  Noailles,  archevêque  de  Paris, 
en  vint  à  leur  interdire  si  rigoureusement  la  confession, 
par  exemple,  que  jamais  l'un  d'entr'eux  et  des  plus  hono- 
rables, n'en  put  obtenir  de  pouvoir  pour  confesser 
Louis  XV  encore  enfant,  et  que  pour  passer  outre,  il  fut 
nécessaire  d'emmener  le  jeune  roi  jusqu'à  la  mai;K)n 
royale  de  Saint-Cyr,  qui  se  trouvait  dans  le  diocèse  de 
Chartres,  et  ainsi  hors  la  juridiction  du  «'.ardinal  de 
Noailles. 

L'évêque  d'Angers  ne  poussa  jamais  à  ce  point  l'esprit 
de  parti ,  et  malgré  tontes  ses  luttes  avec  l'Université 
d'Angers,  A! .  l'abbé  Pletteau  est  forcé  de  convenir  que 
Henri  Arnauld  se  réconcilia  avec  elle  à  la  fin  de  sa  vie, 
et  qu'il  ne  l'inquiéta  plus  pendant  les  seize  années  qu'il 
vécut  encore.  Cette  réconcilialion  cependant  ne  peut 
inspirer   à  M.  l'abbé  Pletteau  le  moindre  retour  de 

REP.   ARC.  8 


—  M4  — 

bi(^i?XçjJl^x(^e.  n  4^mçiire  teU^^ant  sobre  d'éloges  pour 
l'évpime,  qu'obligé  de  faire  mention  de  ses  admirables 
statuts  diocésains,  il  se  borne  à  îles  résumer  en  quelques 
mot^  et  à  nous  dire  dédaigneusement  qu'il  ordonna  à  6on 
clergé  la  résidence  et  la  fuite  du  cabaret.  Cette  analyse 
dérisoire  de  tant  de  beaux  règlements  restaurateurs  de 
toutes  les  parties  de  la  discipline  ecclésiastique^  suffirait 
peut-être  à  donner  h  OXe^ure  de  l'impartialité  de  l'his- 
torien. 

II  ajoute  que  Henri  Arnauld  n'allait  point  à  la  Cour 
qui  l'eût  m^l  accueilli ,  mais  visitait  quelquefois  Port- 
Royal  où  il  affermissait  dans  le  jansénisme  sa  conscience 
indécise.  M.  Tabbé  Pl^tteau,  nous  osons  l'affirmer,  n'a 
point  puisé  une  semblable  assertion  dans  les  documents 
contemporains;  tous  s'accordent  au  contraire  à  dire  qu'il 
ne  sortit  jamais  de  son  diocèse  que  pour  aller  à  Loches 
où  se  tenait  l'assemblée  électorale  de  la  province  ecclé- 
siastique de  Tours ,  et  que  bien  souvent  il  lui  fut  offert 
d'être  nommé  député  à  l'assemblée  génénile  du  clergé  , 
honneur  que  son  humilité  profonde  lui  fit  toujours  re- 
fuseï*,  mais  qu'un  phef  de  secte  aurait  sans  doute  avide- 
ment et  persévéramment  recherché.  Quant  à  la  disgrâce 
qui  lui  aurait  fermé  l'entrée  de  la^Gour,  M.  Pletteau  our 
blie  que  le  marquis  Arnauld  de  Pomponne  son. neveu, 
avajt  coDseryé ,  même  (|epuis  sa  retraite  des  affaires ,  les 
bonnes  grâces  et  l'amitié  (1)  de  Louis  XIV,  et  qu'ainsi  le 


(1)  A  sa  mort,  arrivée  en  1699,  Louis  XIV  dit  à  l'abbé  de  Pom- 
ponne, son  fils  :  Vous  pkuf-ez  un  père  que  vous  retrouverez  en  moi, 
et  moi  je  perds  un  ami  que  je  ne  retrouverai  plus  I  Voir  tous  les  Mé- 
moires du  temps. 


—  Ï15  — 

noitt  d' Arnauld  était  loiu  d'être  auprès  de  oe  xnonarque  mi 
titre  d'exclusôcsi.  II  aurait  suffi  d'ailleurs  de  consulter  le 
Journal  de  Dangeau  pour  avoir  le  véritablô  thermomàtre 
dos  imprepsions  d^  \^  €our  au  regard  de  l'évêque  d'An- 
gers. —  Le  journaliste  cour ti^n^  en  annonçant  la  mort 
de  Heqri  Arnciuld,  nous  dit  (1)  que,  «(  c'était  un  prélat 
»  d'une  grande  répul£^on,  qui  avait  mené  ane  vie  fort 
2>  exemplaire.  Il  avait  95  ans  et  il  y  en  avait  plus  àe  40 
D  qu'U  n'é4ii^t  sorti  de  son  évêehé.  »  On  peut  tenir,  pour 
cjiose  x;e rtaine  que  Dangeau  n'aurait  jamais  parlé  en  ter-^ 
mes  si  t>ien veillants  d'un  hoinmie  qui  aarait  encouru  la 
disgrâce  de  Louis  XIY^ 

OnéVeut  bien  «accorder  à  la.  mémoirede.  Henri  Arnauld 

t 

que  lesi  pauvres  d'Angers  ^  louaient  de  ses  aunnânes;  tnm 
de  bonne  foi^  e^tr-ce  dire  assez  pour  tant  d'immeofies  lap- 
gesisea,  pour  de  ai  nombreuses  infortunes  prévenues  ou 
soulagées?  Sa  table,  était  abondamment  servie^  nous 
dit-on  .encare,  mais  en.  vivait41  mo^s  avec  la  sobriétp 
d'un  aoachorèle?  Pouvait^il  d'ailleurs  se.  dispenser  .d'ac4» 
cueillir  les  .membres  de  son  clergé  dont  il  était  si  tendre--' 
ment  vénéréi?  Devait-il  oublier  enfin  le  précepte  d^l'A-^ 
pâtrewE|ui  recommande  aux  évèqiws  les  devoirs  de  l'hes-^ 
pitaUté:  OperM  episnopum  /^sse  Aospitaiem?  Mais  ce  qui 
est  le  plus  .(Qurieuj^  à  noter  et  œ  qui  dépassée  .vraime^ 
toutes  les  bornes ,  c'est  que  la  prévention  entraine 
M.  Pabbé  Pletteaii  jusqu'à  tin  retour  de  sëfisibilité  en  fa- 
veur du  docteur  Arnauld.  Je  cite  textuellement^  car  on 
aurait  peine  à  me  croire  :  «Son  créancier  et  propre  frère, 
Aîitoiae  Arnauld ,  pwvre  et  bami  de  France ,  m  plai- 

(i)  Jtfurmi  idé  Dun^eau,  t.  IV,  p.  408. 


_  H6  _ 

gnait  y  dans  son  triste  exil  de  Hollande ,  qu'il  ne  payait 
pas  ses  dettes  les  plus  sacrées.  Resté  indifiPérent  à  la  dé— 
tresse  du  chef  du  jansénisme,  il  ne  lui  fut  que  trop  fidèle 
dans  l'hérésie.  x>  Gomment ,  M.  Pletteau  aurait  voulu 
que  Févêque  d'Angers  payât  les  dettes  de  son  frère? 
Mais  qu'aurait-il  dit  alors  de  cette  prodigalité  au  profit 
d'un  chef  de  secte  qui  avait  dissipé  son  patrimoine  par 
des  publications  téméraires  et  une  propagande  hétéro- 
doxe? En  vérité^  Henri  Ârnauldjoue  de  malheur  ;  quand 
il  s'abstient  on  le  taxe  de  dureté  et  d'ingratitude;  s'il  eût 
payé  on  n'aurait  pas  manqué  de  le  signaler  comme  un 
complice  flagrant  et  un  abominable  sectaire. 

La  malveillance  est  si  persistante  à  l'égard  du  malheu- 
reux prél^,  qne  l'on  n'hésite  pas  à  le  poursuivre  jusqu'à 
ses  derniers  moments.  On  prétend  qu'il  manifesta  la 
crainte  des  jugements  de  Dieu.  M.  l'abbé  Pletteau  aurait- 
il  dû  s'en  étonner?  Ne  sait-il  pas  mieux  que  personne 
qu'il  est  terrible  toujours  de  paraître  devant  le  souverain 
Juge,  et  la  sainte  liturgie  ne  nous  apprend-elle  pas  qu'à 
ce  moment  suprême  le  juste  lui-même  tremble  d'effroi  : 
Vix  justus  sit  securus.  Cependant  on  assure  qu'il  fut 
tranquille  eu  face  même  de  la  mort  et  que ,  ses  terreurs 
refoulées  dam  sa  conscience ,  il  entra  d^un  coeur  assuré 
dafis  sa  mystérieuse  destinée  (1) ,  mais  on  ajoute  bientôt 

(1)  On  conserve  à  la  bibliothèque  de  révéché  un  manuscrit  en 
2  vol.  in-f«,  rédigé  par  Tabbé  Lehoreau,  Tun  des  chapelains  de  Téglise 
cathédrale.  Ce  manuscrit,  qui  a  pour  titre  :  Cérémonial  de  ^église 
d* Angers i  donne  sur  les  derniers  moments  de  Henri  Ârnauld  des 
détails  incontestablement  authentiques  et  qu*on  ne  lira  pas  sans  inté* 
rêt  : 

L'illustre  et  saint  prélat;  Henri  Arnauld,  ditLehoreau,  fut  sacré 


^  117  — 

que  l'Eglise  ne  le  mettra  point  au  nombre  des  saints.  Je 
le  crois  volontiers,  mais  alors  quelle  nécessité  à  Fauteur 
de  la  brochure  de  s'être  fait  ce  que  le  peuple  de  Rome 
dans  son  langage  burlesque  et  vulgaire  appelle  Vavocat 
du  diable  1  Pourquoi  avoir  insisté  sur  les  torts  plus  que 
sur  les  vertus,  pourquoi  avoir  si  amèrement  et  si  cruel- 
lement poursuivi  une  mémoire  vieillie  ou  à  peu  près 
oubliée?  Ici ,  il  faut  bien  le  dire  encore,  M.  l'abbé  Plet- 

à  Paris  le  29  juiu  1650  et  fit  ici  son  entrée  solennelle  le  16  novembre 
de  la  même  année;..  Le  26  janvier  1692,  on  fit  Texposition  du  saint 
Sacrement  pendant  quarante  heures.  Un  chanoine  dit  la  messe  basse 
parce  que  la  grande  messe  du  chœur  était  déjà  dite.  On  sonna  toutes 
les  cloches  de  cette  église  à  la  consécration  et  se  fit  un  grand  con- 
cours de  peuple  de  tous  états  grandement  afQigé  de  la  maladie  véhé^ 
mente  d'un  si  saint  pasteur.  Leurs  prières  ne  furent  pas  inutiles,  puis- 
quMl  se  trouva  un  peu  soulagé  ;  ce  qui  donnait  espérance  de  le  pos- 
séder plusieurs  années,  mais  Dieu  qui  se  plaît  à  récompenser  les 
siens,  après  l'avoir  laissé  combattre  dainseette>'vallée  ^e  misère  pen- 
dant 95  ans,  à  la  43®  de  son  pontificat,  le  tira  peu  après  de  ce  monde 
au  grand  regret  de  son  troupeau. 

ON  LE  COMMUNIE  EN  VIATIQUE. 

On  le  communia  en  viatique  le  samedi  7  juin  1692,  à  Tissue  des 
complies.  Ce  fut  M.  le  doyen  messire  Claude  Deniau  qui  fit  la  céré> 
monie.  Arrivé  qu'on  fut  au  palais  épiscopal  en  la  chambre  où  il  était, 
le  doyen  lui  fit  une  exhortation  en  français,  après  laquelle  sa  Gran- 
deur deipan^a  un  pardon  général  à  tout  son  clergé  et  à  tous  les 
ecclésiastiques  présents  qui  étaient  en  grand  nombre,  fondant  en 
larmes.  J^n  parle  par  expérience,  ayant  l'honneur  d'y  être  comme 
membre  de  la  cathédrale.  Le  doyen  le  communia,  puis  lui  demanda 
sa  bénédiction,  ce  qu'il  fit  et  à  tous  les  présents,  après  avoir  de- 
mandé s'ils  étaient  en  grand  nombre,  car  il  était  depuis  plusieurs 
années  aveugle,  et  lui  ayant  dit  que  oui,  il  remercia  Dieu  de  ses  mi- 
séricordes, puis  donna  sa  bénédiction.  On  s'eo  retourna  procession- 


—  118  — 

teau  n*a  été  que  l'organe  d'une  école  historique  qui  ne 
s'attaque  au  jansénisme^  fort  peu  taendçaQt  aujourd'hui, 
que  pour  mieux  atteindre  ce  qu'elle  appelle  le  gallica-- 
nisme  qui  lui  paraît  tout  autant  que  le  jansénisme  au 
moins  constituer  une  rébellion  permanente  et  organisée 
contre  l'autorité  du  Saint-Siège. 

nellement  comme  on  était  venu ,  parce  que  selon  la  coutume  on 
avait  porté  deux  hosties.  On  alla  et  revint  parla  chapelle  des  évêques. 

EXTRÊME  ONCTIOV. 

Le  même  jour,  sw  les  neuf!  i  dix  heure»  du  soir,  la  doye^^  ac- 
compagné de.  quelques  ecelésiastiquesi  qui.  se  trouvèrent  aku'S,  lui 
administra  L^ËxInêmQrODctioQ  avec. lae.oéréiiionies .ordinaires  d^  noka 
rituel. 

SON  AGONIE. 

On  fit  sonner  son  agonie  le  même  jour,  sur  les  huit  heures  du  ma^ 
tin,  dans  les  lieux  ordinaires^  et  pendant  Primes  et  Tierces,  MMi  du 
Chapitre  furent  dans  t:a  chambre  <  faire  les  prières  de  Ta^onisant,  à  (sa 
demande  et  réquisition,  étant  jusqu'à  la  fin  en  très*bon  JHgemenfj^ 
M»  Pierre  Syette,  chanoine  et  chantre  de  ladite  église^  aku».  préaii*« 
dant  la  cérémonie. 

so^p|;çàQ, 

Nemo  est  laudabilias 
Quam  qui  ab  omnibus 
Laudari  potest.    Ambem. 

Le  lendemain  dimanche,  l^juin  1602,  dans  Foetave  du  Saicre; 
entre- une  et  deux  heures  après  midi,  M^  Arnauld  décéda  en  son 
palais  épiscopal,  âgé  de  95  ans  et  la  43*  de  son  pontificat,  en  odeur 
de  sainteté. 

Cwrma  dignitatiê  stneetus  qui  in  viis  justitiœ  reperietur,  La  vieil- 
les^e  est  une  couronne  d^faonnenr  et*  de  gloire  quand  elle  se  trouve 
dans  les  votes  de  la  justice. 

PUnus  kmoribus  iUis  etiam  quM  recusavit, 

(Proverbes  de  Sahmon.) 

fJournal  de  Tabbé  Lehoreou,  t.  II,  p.  74  et  75.) 


—  119  — 

Je  n'ai  ni  le  temps  ni  la  volonté  de  traiter  aujourd'hui 
cette  vaste  question,  je  veux  dire  seulfemenl  que  le  gallica- 
nisme, même  parlementaire,  est  si-distinct  du  jansénisme 
que  cette  dernière  secte  n'a  jamais  été  plus  rudement  si- 
gnalée ni  plus  énergiquement  fléti*ie  qne  par  les  écrivains 
gallicans.  Voici  notamment  l'opinion  émise  stir  ce  sujet 
par  un  magistrat  français  de  l'antiquie  roche  cité  par 
l'abbé  Fleury  :  «  Le  jansénisme,  dit^-il,  est  l'Hérésie  la  plus 
»  subtile  que  le  diable  ait  tissue.  Ils  ont  vil  (les  jansé- 
»  nistes)  que  les  protestants ,  en  se  séparant  de  l'Eglise  , 
»  s'étaient  condamnés  eux-mêmes  et  qu'on  leiir  avait  re- 
»  proche  cette  séparation-  ita'ont  donc  pris  pour  maxime 
»  fondamentale  de  leur  conduite  de  nès'en  séparer  jamais 
»  extérieurement  et  de  protester  toujours  de  leur  sou- 
»  mission  aux  décisions^  de  l'Églisp,  à  la  charge  de  trou- 
))  ver  tons  les  jours  de  ribuvellès  subtilités  pour  les  ex- 
»  pliquer,  en  sorte  qu'ils  paraissent  soumis  sans  changer 
»  de  sentiments.  »  Je  pourrais  facilement  multiplier  les 
citations  de  ce  gpnre,  mais?  je- veux  me  borner  désormais 
à  une  seule  qui  ne  sera  pas  suspect'».  On  sait  que  personne 
ne  fut  plus  gallican  dam»  tont^  l'acception  et  la  portée  du 
mot  que  l'empereur  Napoléon  qui  ordonna  d'ens'^igner 
dans  tous  les  séminaires  de  son  vaste  empire  la  doctrine 
exprimée  par  le  clergé  de  France  en  1682  et  qui  ne  ces- 
sait, dans  ses  dissentiments  avec  le  souverain  pohtife,  de 
dire  :  Je  suis  à  cheval  sur  les  quatre  articles  !  Cependant 
un  prélat  qui  fut  longtemps  attaché  à  sa  personne  nous 
apprend  que  l'Empereur,  dans  ses  accès  d'impatience  , 
disait  souvent,  en  parlant  de  ceux  qui  avaient  lemalheur 
de  lui  déplaire:  C'est  un  idéologue,  un  constituant,  un 
janséniste,  a  Cette  dernière- épithètfe',  ajoute  M.  l'abbé  de 


—  440  — 

Pradt,  est  le  maximum  des  injures.  »  Il  est  donc  bien 
établi,  qu'en  s'acharnant  à  flétrir  la  mémoire  de  Tévècfue 
Arnauld  on  n'a  point  atteint  du  tout  le  gallicanisme  qui, 
comme  on  le  voit^  est  bien  loin  de  s'identifier  avec  le  jan- 
sénisme et  si  telle  avait  été  l'intention  de  M.  l'abbé  Plet— 
teau,  il  aurait  très  certainement  manqué  son  but. 

Quant  à  l'amertume  de  ses  dernières  paroles  jetées  sur 
la  tombe  de  Henri  Arnauld,  je  ne  veux  point  la  relever, 
puisque  l'auteur  en  a,  dit-on,  désavoué  tonte  interpréta- 
tion qui  tendrait  à  lui  prêter  une  arrière-pensée  sacrilège 
et  impie.  Je  regrette  seulement  qu'en  même  temps  qu'il 
rappelait  que  l'évêque  d'Angers  avait  été  inhumé  dans  sa 
cathédrale,  au  pied  de  l'escalier  de  l'évéché,  M.  l'abbé 
Pletteau  n'ait  pas  cru  convenable  de  rendre  un'juste  hom- 
mage à  la  profonde  humilité  du  prélat  qui  de  son  vivant 
avait  choisi  celieudesépultureafinque  sa  tombe  servît  de 
mart^hepied  à  ses  succef'seurs.  La  vérité  cependant  est 
toujours  bonne  à  dire  quand  même  il  s'agirait  d'ua 
homme  que  l'Eglise  aurait  frappé  A^ excommunication 
comme  hérétique  ... 

Ces  mots  terribles  d^hérétique  et  d^ excommunié  y 
M.  l'abbé  Pletteau  les  répète  encore  en  finissant  avec  une 
persistance  déplorable  et  une  candeur  vraiment  ef- 
frayante^ sans  nous  donner  bien  entendu  (et  pour  cause) 
la  teneur  ni  même  la  date  de  la  bulle  d'excommunication, 
et  sans  paraître  s'être  douté  le  moins  du  monde  qu'il  fai- 
sait ainsi  le  plus  sanglant  outrage  à  tous  les  évêques  qui, 
depuis  Henri  Arnauld ,  ont  occupé  successivement  le 
siège  d'Angers,  et  qui  auraient  maintenu  et  gardé  sous 
les  voûtes  de  leur  cathédrale,  des  cendres  impies' et 
notées  d'apathème.  On  n'a  pas  même  pris  la  peine  de 


—  421  — 

nous  dire  comment  les  obsèques  de  cet  hérétique  et  de 
cet  excommunié  avaient  pu  s'accomplir  avec  une  pompe 
toute  solennelle  à  laquelle  présidait  Fabbé  commenda- 
taire  de  St-Aubin ,  propre  frère  de  Pévêque  même  qui 
allait  succéder  à  Henri  Arnauld,  et  que  relevait  la  pré- 
sence de  tout  le  clergé  séculier  et  régulier  et  de  tous  les 
magistrats  de  l'ordre  administratif  et  judiciaire.  Bien 
des  gens  se  seront  demandé  sans  doute ,  si  tout  cela 
était  très-conciliable  avec  cette  odieuse  imputation 
d'hérésie,  mais  la  passion,  la  prévention  si  l'on  veut,  n'y 
regardent  pas  de  si  près  ;  il  faut  absolument  qu'elle  se 
donne  libre  cours,  sans  se  préoccuper  jamais  du  résultat, 
et  sans  prévoir  ni  les  démentis  possibles  ni  ces  expan- 
sions de  colère  qui  peuvent  surgir  et,  le  cas  échéant, 
contrister  si  profondément  tous  les  cœurs  honnêtes  et 
religieux. 

On  m'a  dit  que  M.  l'abbé  Pletteau ,  que  j'ai  à  peine 
l'honneur  de  connaître,  était,  malgré  les  torts  que  je  lui 
reproche,  un  homme  de  sagesse  et  de  modération,  et 
qu'il  n'avait  cédé  qu'à  un  entraînement  passager.  Je 
suis  tout  disposé  à  le  croire,  mais  en  dehors  de  M.  l'abbé 
Pletteau,  je  connais  un  certain  nombre  de  jeuneç  ecclé- 
siastiques dont  j'honore  plus  que  personne  le  mérite  et 
les  vertus,  et  qui,  de  la  meilleure  foi  du  monde,  sont 
persuadés  que  la  liberté  de  la  presse  est  une  chose  détes- 
table et  regardent  la  censure  comme  une  institution 
protectrice  et  salutaire.  S'il  en  est  ainsi,  ils  feront  bien 
alors  de  soumettre  toujours  leurs  écrits  à  la  censure  de  leur 
évêque,  dont  la  haute  sagesse  et  l'expérience  consommée 
les  guideraient  dans  des  voies  qui  leur  sont  mal  connues, 
et  leur  signaleraient  des  écueils  que,  livrés  à  eux-mêmes. 


—  122  — 

il  ne  poiii*rait  leur  être  donné  d'apercevoir.  Qui  d'entre 
eux,  en  effet,  s'attendait  à  la  réponse  que  s'éàt  attirée 
M.  l'abbé  Plelteau?  Quel  jeune  théologien,  s'il  a  prévu 
que  la  brochure  sur  le  jansénisme  ne  resterait  pas  sans 
réplique,  n'aurait  compté  du  moins  sur  une  série  plus 
ou  moins  redoutable  d'arguments  scholastiques,  dont 
l'habileté  de  l'auteur  pourrait  facilement  se  dégager*? 
On  ne  saurait  trop  le  redire,  ce  n'est  point  si  méthodi- 
quement que  procède  la  passion  ,  et  l'on  rie  se  souvenait 
plus,  paraît-il,  que  dans  le  camp  opposé  il  y  avait  des 
passions  terribles  eil  réserve.  Sans  le  vouloir,  je  le  crois, 
M.  Bfôrdillon  les  a  merveilleusement  servies  dans  une 
brcfchure,  qui  certes  n'a  que  l'apparence  d'une  répons»?  à 
M.  l'abbé  Pletteau,  et  qui  a  eu,  pour  réteultat  final,  non 
de  justifier  la  méîhoirè  de  Henri  Arnauld  dont  beaucoup 
de  ses  lecteurs  n'avaient  jamais  entendu  parler  et  n^  se 
préoccupaient  nullement ,  mais  de  faire  éclater  dan^  les 
bas  fonds  de  la  société  une  joie  hideuse,  et  d'y  faire  crier 
à  ba^  les  prêtres!  à  bas' les  jésuites!  à  bas  la  calotte! 

m 

aVec  une  ilecrudescence  qui  nous  ramenait  à  des  jours 
déjà  bieiï  éloignés  de  noua.  Cette  brochure,  d'un  effet  si 
retentissant  et  si  malencontreux,  n'a  pas  seulement 
traversé  ce  qiie  nous  poiivons  bien  à  notre  tour  appeler 
là  fnala'  aHa  des  clubs  et  des  tavernes,  en  plus  haut 
lieu  elle  a  eu  aussi  un  succès  qui  a  dépassé  [)eut-être  les 
espérances  de  son  auteur.  Elle  y  a  provoqué,  chez  quel- 
ques-utis  du  moins,  un  rire  amer  et  cynique,  triste 
épanchement  d'une  haine  contenue  un  instant,  mais  qui 
n'était  que  bien  passagèrement  assoupie.  Nous  ue. 
saurions  croire  qu  ce  soit  pour  donner  plus  ample  satis- 
factiotf  aux  déplorables  ressentiments  qui  se  sont"  ainsi 


—  ns  — 

manifestés,  que  M.  Bordillon  a  fait  tirer  et  distribuer  sa 
brochure  à  plusieurs  milliers  d'exemplaires  ;  et  cepen- 
dant, il  est  impossible  d'admetti-e  que  ce  soit  uniquement 
pour  réhabiliter  la   renommée  d'un   grand   et   saint 
évêque,  ni   même    pour   obtenir   un   témoignage   de 
reconnaissance  des  administrateurs  du  Mônt-dte-Piété  et 
de  leur  honorable  président,  M.  Mordret,  qu'il  a  entre- 
pris une  A  rudiB  tache  et  surtout  qu'il  ait  étendu  si 
prodigieusement  le  céi*cle  de  sa  publication.  Il  y  a  donc 
vraiment  dans  tout  cela  un  mystère  que  nous  ne  devons 
pas  chercher  à  pénétrer ,  parce  que  les  hommes  politiques 
ont  souvent  des  mobiles  qui  échappent  aux  inv(;$tigations 
du  vulgaire.  Le  temps  seul  peut  donner  le  dernier  mot 
de  leurs  actes,  et^  le  moment  venu,  ilfe  savent  toujours 
recueillir  à  point  le  fhtit  de  leurs  œuvres,  comme  nous 
le  dit  M..  Bordillon  lui-même,  dans  son  épigraphe  qu'il 
est  allé  chercher  jusque  dans  le  livre  de  l'Apocalypse  : 
Opéra  enim  illorum  sequuntur  illos. 

J'ai  si  longuement  répondu  à  M.  l'abbé  Pletteau ,  que 
l'on  ne  peut  attendre  de  moi  une  longue  réponse  à 
M.  Bordillon.  Elle  ne  seitait  pas  possible  d'ailleurs,  avec 
un  écrivain  dont  la  verve  sarcastique  ,  originale  et 
piquante,  ne  procède  que  par  épigrammes,  et  qui  a  l'art 
d^effleurer  tous  les  sujets  avec  une  si  effrayante  rapidité. 
Chacun  son*  caractère*;  il  est  dans  le  mien  de  traiter 
sérieusement  les  choses  sérieuses,  et  si  je  n'y  voyais  un 
motif  impérieux,  je  déclinerais  toute  espèce  de  lutte 
avec  un  si  rude  jouteur  qui  sait,  mieux  que  personne, 

Passer  du  ^ave  au  doux ,  du  plaisant  au  sévère, 

et  qui  ne  trouve  pas  la  moindre  difficulté  à  nous  faire 


—  iU  — 

un  amalgame  de  M.  Yeuillot  et  de  M.  de  Falloux  (qui, 
soit  dit  en  passant,  doivent  être  bien  étonnés  de  se  trouver 
sur  la  même  ligne),  de  M.  l'abbé  Morel  et  de  M.  Ville- 
main,  du  cardinal  Gaprara  et  du  saint  synode  de  Moscou,, 
du  catéchisme  de  l'Empire  et  de  la  chronique  plus  ou 
moins  fidèle  de  ce  qui  se  passait  naguère  au  château 
d'Eventard. 

Mes  dissidences  avec  M.  Bordillon  ne  peuvent  d'ailleurs 
porter  sur  le  fond ,  puisque  j'honore  comme  lui  cette 
grande  figure  de  l'évêque  Arnauld  auquel  il  a  rendu  un 
magnifique  témoignage  dont  il  a  puisé,  parait-il,  l'ins- 
piration dans  des  traditions  de  famille  qui  lui  sont  chères 
et  qui,  il  nous  le  dit  lui-même,  se  réfèrent  aux  plus 
doux,  aux  meilleurs  souvenirs  de  sa  vie.  Pour  qui  peut 
comme  moi  saisir  cette  pieuse  allusion ,  il  est  mille  fois 
regrettable  que  M.  Bordillon  n'en  ait  pas  toujours  eu 
l'objet  présent  à  la  pensée  en  écrivant  sa  brochure  ;  il 
aurait  pu  alors  réhabiliter  une  vénérable  mémoire 
sans  se  jeter  dans  des  excentricités  bien  mal  séantes  à 
côté  d'un  nom  qui  impose  à  tant  de  titres  la  réserve  et 
le  respect.  Mais  M.  Bordillon,  qui  trouve  très-mauvais 
que  des  hommes  religieux  se  permettent  de  mal  parler 
des  évêques,  a  cru  apparemment  que  son  titre  de  libre 
penseur  lui  donnait  toute  sorte  d'immunités  et  il  en 
profite  pour  jeter ,  à  propos  de  Henri  Arnauld,  les  pluà 
poignantes  invectives  et  les  plus  cruels  outrages  à  la 
face  des  successeurs  du  prélat  qu'il  voulait  glorifier. 

Il  a  eu  certainement  la  main  malheureuse  en  s'atta- 
quant  tout  d'abord  à  M.  Poucet  de  la  Rivière,  l'un  des 
plus  pieux,  des  plus  dignes  et  des  plus  éloquents  évêques 
qui  aient  occupé  le  siège  d'Angers. 


—  425  — 

Dès  sa  première  jeunesse,  étant  encore  grand  vicaire 
de  Pévêqne  d'Uzès,  son  oncle ,  il  avait  prêché  avec  une 
onction  touchante  et  une  immuable  douceur  les  protes- 
tante des  Cévennes.  Promu  à  l'évêché  d'Angers,  il  y 
continua  avec  un  grand  succès  son  ministère  de  prédi- 
eation,  et  s'y  livra  avec  un  zèle  incessant  à  toutes  les 
œuvres  pieuses  et  charitables.  Quoique  doux,  bienveillant 
et  modéré,  il  sut  lutter  énergiquement  contre  des  nou- 
veautés coupables,  et  se  montra  constamment  opposé 
aux  appelants  et  à  toutes  les  manœuvres  et  toutes  les 
démonstrations  qui  signalèrent  cette  seconde  phase  du 
jansénisme  bien  autrement  redoutable  que  les  dissidences 
sur  la  teneur  du  formulaire.  Avant  son  épiscopat  il 
avait  prononcé,  aux  grands  applaudissements  de  ses 
auditeurs,  l'oraison  funèbre  du  cardinal  de  Bonzi, 
archevêque  de  Narbonne  et  métropolitain  du  diocèse 
d'Uzès.  Le  souvenir  d'un  si  heureux  et  si  brillant  début 
le  fit  choisir  en  1711  pour  prononcer  dans  la  basilique 
de  St-Denis  le  discours  d'usage  aux  obsèques  du  grand 
Dauphin,  fils  unique  de  Louis  XIV.  Je  regrette  que 
M.  Bordillonji'ait  pas  pris  la  peine  de  lire  cet  admirable 

• 

discours.  Il  n'aurait  pu  s'empêcher  alors  de  rendre  hom- 
mage lui-même  à  l'énergie ,  au  courage,  au  talent  de 
l'orateur,  qui  du  haut  de  la  chaire  évangélique  avait 
dit  :  i<  Les  princes,  par  leur  naissance  ,  se  trouvent  au- 
»  dessus  des  peuples  ,  mais  à  tort  se  croiraient-ils 
»  au-dessus  de  leurs  devoirs.  Nés  pour  imposer  des 
»  lois,  ils  ne  sont  pas  dispensés  d'en  suivre;  comme 
^>  hommes,  ils  doivent  obéira  ce  que  la  nature  leur  ins- 
»  pire  de  sage  et  de  raisonnable;  comme  créatures,  il  faut 
»  qu'ils  se  soumettent  à  l'auteur  de  leur  être  et  de  leur 


—  126  — 

»  grandeur.  i>  Plus  loîii  l'orateur  ajoutait  :  «  N'attettdez 
»  pas  de  moi ,  Messieurs,  que  je  prenne  ici  le  vol  de  ces 
»  orateurs  téméraires  qui  portent  leur  curiosité  jusque 
0  dans  les  décrets  de  la  justice  de  Dieu,  qui  «canonisent , 
»  sans  autorité,  les  graiids  hommes  dont  ils  fout  l'éloge  j 
»  qui  s'imaginent  qu'au  bruit  de  leurs  paroles ,  les 
»  trésors  éternels  doivent  s'ouvrir,  et  qui  sembleoit 
»  vouloir  pénétrer  jusque  dans  le  eiel  pour  y  placer 
D  leur  héros  à  leur  gré.  i» 

Ces  nobles  et  courageuses  paroles  ne  plurent  que  très- 
médiocrement  à  l'auditoire,  mais  Louis  XIY  avait  le 
sens  trop  droit  et  l'esprit  trop  profondément  religieux 
pour  s'en  offenser.  Il  choisit  au  contraire  l'évêque 
d'Angers  pour  prêcher,  eu  1715,  la  station  de  carême 
dans  la  chapelle  de  Versailles.  Le  succès  de  l'orateur 
y  fut  tel  que,  plusieurs  de  ses  discours  ayant  été  re* 
cueillis,  un  journal  étranger  les  publia  comme  des 
sermons  inédits  de  MassiUon.  M.  Pôncet  de  la  Rivière 
réclama  dans  les  termes  les  plus  honorables  et  les  plus 
flatteurs  pour  son  iUu^re  collègue  l'évêque  deClermont, 
et  cette  modestie  touchante  lui  concilia  tous  les  suffrages. 
II  fut  encore  choisi  la  même  année  pour  prêcher  devant 
l'assemblée  du  clergé.  Sous  le  nouveau  règne,  il  pro- 
nonça dan^  la  cathédrale  de  Reims,  le  sermon  solennel 
pour  le  ^cre  de  Louis  XY,  puis  l'oraison  funèbre  de  la 
reine  d'Espagne,  Elisabeth  Farnèse,  où  l'on  remarque  un 
portrait  du  cardiqal  Aibéroni,  tracé  de  main  de  maître, 
et  vraiment  digne  de  l'histoire. 

Dès  qu'il  avait  accompli  la  tâche  honorable  qui  lui 
avait  été  confiée,  M.  Poncet  de  la  Rivière  se  hâtait  de 
revenir  dans  son  diocèse,  où  il  observait  exactement  les 


—  «27  — 

lois  jde  la  résidence,  et  donnai^  de  grands  et  édifi^nt^ 
exempjjes.  Il  vivait  dans  une  douce  familiarité  avec  ces 
chajDojines,  sojit  à  Angers,  soit  à  Eventard.  Un  jour  qu'il 
avait  réuni  quelques  convives  à  cette  charmante  maison 
de  campagqe  des  évêques  d'Angprs,  on  vint  lui  appor- 
ter ses  dépêches.!  J^e  paquet  contenait  une  lettre  qui  «jip- 
nonçait  au  prélat  la  mort  du  régepj;  Philippe  d'Opléans, 
aijieint  d^apoplexie  foudroyante  dan^  le  palais  même  de 
Versailles.  Cette  nouvelle  fut  donnée  par  Tévêque  à  se§ 
commensaux,  qui  tpi^  furent  frappés  comme  li^i  de 
cette  j^ort  imprévue  et  terpble.  «  Je  plains  bien,  dit 
alors  M.  Poucet  4f  la  PivièrCj  je  plains  bien  celui  qui 
fera  son  oraison  funèbre  1 1>  U  ajouta  ensuite  que  la  mé- 
moire dij  malheureux  princje  serait  suffisamment  sgiu- 
vegardée  dans  ri^jjStoire,  mais  qu^elle  était  redoutable, 
plus  qu^on  ne  pouvait  le  dire,  pour  l'oratqur  chrétien. 
Or,  quelqui^s  jour;^  après  çptte  conversation  fugitive, 
Févêque  d'Angers  reçut  une  lettre  offlcj^elle  du  duc  d^ 
Bpurbpq,  premiçF  ministre,  qui  Jui  faisait  savoir  (jue 
le  roi  l'avait  choisi  pour  prononcer  FélQge  funèbre  de 
feu  M,  le  duc  d'Oflé§ns.  J\J.  Poucet  de  1^  Jftivière  fut 
effrayé  comme  il  devait  l'être  de  l'énormilé  de  la  tâche, 
mais  il  p'y  avait  p^^s  moyeq  de  refuser.  Il  en  prit  (jonc 
bravement  sçn  parti  et  ne  chercl^^  plus  qu'à  concilier 
avec  les  difficultés  de  sa  mission  ses  devoirs  de  chrétien, 
<je  prédicateur  et  d'évêque.  II  parla  avec  son  talent  ac- 
coptumé  de  l'aptitudej  et  de  l'habileté  gouverpementalea 
du  régent,  puis  il  ajouta  :  «  Du  pied  du  plus  beau  trône 
»  du  mofide  il  tombe....  dans  l'éternité.  Mais  pourquoi, 
y>  mon  Çieu,  aprèp^  en  livpir  fai(  un  prp4ige  4^  talent, 
»  n'en  feriez-vou3  pasi  un  prodige  46  çpi^riporde?  Je 


—  428  — 

»  crains,  mais  j^espère.  »  Ces  paroles  éloquentes  irritè- 
rent à  l'excès  la  tourbe  inconsistante  et  légère  des  cour- 
tisans, et  le  duc  de  Bourbon  lui-même,  si  étroit,  si  mé- 
diocre et  en  même  temps  si  impérieux  et  si  absolu,  parut 
indigné.  De  ce  jour  l'éveque  d'Angers  encourut  une 
sorte  de  disgrâce  dont  il  fut  amplement- vengé  par  l'es- 
time publique  et  Tadmiration  de  tous  ses  contemporains. 
«  Quand  il  n'aurait  écrit  que  ce  peu  de  mots,  a  dit  d'A- 
»  lembert,  il  ne  devrait  pas  être  placé  dans  la  classe  des 
»  orateurs  ordinaires.  »  L'Académie  française  s'em- 
pressa bientôt  d'inscrire  M.  Poucet  de  la  Rivière  au 
nombre  de  ses  membres,  et  il  y  prononça  son  discours 
de  réception  le  10  janvier  1729. 

Sa  mort  suivit  de  bien  près  cette  réception  brillante, 
où  il  avait  recueilli  des  applaudissements  si  unanimes  et 
si  flatteurs.  Une  maladie  de  quelques  jours  l'enleva  aux 
respects  et  à  l'amour  de  ^s  diocésains  le  6  septembre 
1730,  à  peine  âgé  de  cinquante-huit  ans. 

Je  puis  bien  le  demander  maintenant  à  M.  Bordillon 
lui-même,  l'éveque  Poncet  de  la  Rivière  était-il  un  de 
ces  freluquets  aux  fringantes  allures  qui  nous  ont  été 
si  drôlatiquement  signalés,  et  s'il  fut  le  contemporain 
du  régent  et  du' cardinal  Dubois,  pourra-t-on  dire  qu'il 
ait  dissimulé  à  son  siècle  les  rudes  et  austères  vérités  de 
la  religion?  Il  est  viai  qu'il  avait  cultivé  la  poésie  dans 
sa  jeunesse,  et  l'on  a  recueilli  de  lui  des  vers  dont  on  est 
forcé  de  dire  que  le  cardinal  de  Bernis  lui-même  n'en 
eût  point  désavoué  la  grâce,  mais  que  cependant  la 
plume  trop  scrupuleuse  et  trop  pudique  de  M.  Bordillon 
n'a  osé  citer.  J'en  demande  bien  pardon  à  l'honorable 
écrivain,  mais  je  ne  puis  douter  qile  sa  fougue  première 


—  199  — 

uDe  fois  épanchée,  il  ne  4evienpe  toiit  à  fait  de  mon 
avis,  et  na  soit  disposé  à  reconnaître  volontiers  que.  sa 
réserve  prétendue  n'est  ni  sijicère  ni  bien  parfaitement 
loyale,  et  ressemble  même  quelque  peu  à  ces  escobarde- 
ries  qu'il  a  eçsi  grande  et  si  juste  horreur-,  Je  serai 
moins  scrupuleux  que  lui,  et  je  citei^ai  eu  entier  ces 
vers  qui  l'ont  si  fort  scandj^lisé. 

Bien  avant  l'qntrée  de  l'abbé  Poucet  de  la  Rivière 
dans  les  ordres  sacrés,  une  jeune  dame  de  ses  parentes 
ayant  entendu  xxn  pauvre  aveugle  lui  demander  l'au- 
mône au  nom  de  saint  Michel,  dont  l'Eglise  célébrait  la 
fête,  se  rappela  aussitôt  que  cette  fête  était  celle  de  son 
jeune  cousin^  et  ^jle  en  prit  occasion  pour  lui  envoyer 
un  bouquet  avec  unq  lettre  dans .  laquelle  elle  racontait 
de  quelle  u^nière  on  lui  avait  annoncé  la  fête  du  jour. 
Poucet  lui  réponi(]it  aussitôt  par  ce  cbaripant  sixain,  qui 
était  tout>à-fait  dans  les  usages  et  le  goût ^d'un  siècle  où 
les  poésies  galantes  étaient  devenues  ,une  mode  qqi  ne 
tirait  nuUeonent  h  conséquence  : 

Un  aveugle;  ed  passant,  vous  remet  en  mémoire 
Qu'aujourd'hui  de  mon  sain^  on  célèbre  la  gloire, 
Et  me  fait  recevoir  les  présents  les  plus  doux. 

Que  mon  bonheur  serait  extrême^ 

Si  cet  aveugle  était  le  même, 

Qui  me  fait  tant  penser  à  vous  ! 

Si  yraimept  le  rigorisme  puritain  de  M.  Bordillon 
s'est  alarmé  de  cçlte  pièce  de  vers,  y  avait-il  lieu  cepen- 
daot  dç  se  signer  d'effroi  et  de  n'oser  indiquer  qu'à 
l'aide  de  la  prétermissipn  ce  sixain,  qui  nous  parait  à 
uoufi  fort  iuinocçnt  et  fort  jçli?  N'aurait-il  pas  été  du 
moiQs  dç  la.  plus,  stricte  éqpité  d^  dire  qu'iine  fois  cou- 

BIP.  AUC.  9 


—  iSO  — 

sacré  au  sérvide  des  autels^  Tévèque  d'Angers  n'usa  plus 
de  soti  talent  poétique  que  pour  \u  composition  de  ces 
chants  Hsligieux  et  de  ces  hymnes  sacrées  que  l'on  trouve 
dans  àos  vieu^t  recueils  langevins,  qui  en  empruntent 
leur  charme  le  plus  puissant  et  leur  plus  vif  intérêt? 
Avouon^le  doné  en  toute  sincérité,  A  M.  Bordillon  a  cité 
un  pareil  évèque  comme  indigne  de  la  mttre  pastorale  et 
comme  profanateur  de  son  auguste  ministère,  il  est  évi- 
dent qu'il  n'a  pas  écilit  pour  les  hommes  sérieux,  que 
ses  insinuations  et  ses  réticences  Calculées  s'adressaient 
ailleurs,  et  étaient  destinées  à  une  classe  de  lecteurs 
auprès  desquels  il  espérait  trouver  plus  facilement  ce 
que  nous  avons  déjà  appelé  le  fruit  de  ses  œuvres. 

De  l'épiscôpat  de  M.  Poucet  de  la  Rivière,  M.  Bordillon 
saute  à  pieds  joints  par-dessus  celui  de  M.  de  Yaugiraiild, 
qu'il  n'a  garde  même  d'indiquer,  sans  doute  parce  que, 
dans  un  lapb  de  près  de  trente  années,  il  n'a  pas  trouvé 
l'ombi^e  d'une  défaillance  à  signaler,  et  il  se  jette  tout 
d'un  coup  et  sans  transition  sur  l'évèque  Jacques  de 
Grasse,  contre  lequel  il  s'escrino^e  à  cœur  joie.  Tant  de 
rigueur  a  dû  nous  surpre^drey  et  iUaut  que  M»  Bordillon 
ait  oublié  qu'en  1763  ce  prélat  n'avait  pas  cru  devoir 
s'unir  à  ses  collègues  dans  l'affaire  deï  jésuites,  et  que 
seul,  de  tous  les  suffragants  de  la  province  ecclésiastique 
de  Tours,  il  avait  refusé  de  réclamer  en  leur  faveur.  Le 
mandemiênt  qu'il  publia  à  cette  occasion  fut  même  dé- 
féré â  rassemblée  du  clergé,  et  M.  de  Grasse  fut  obligé 
de  le  retirer  pour  év^er  qu'il  ne  fut  pris  des  mesures 
contre  lui.  Ce  souvenir 'historique  aurait  dû  recomman- 
der quelque  peu  be  prélat  auprès  de  M.  Bordillon^  mais 
il  a  sans  doute  trouvé  M*  de  Grasse  de  trop  bonne  prise 


*•• 


pour  ae  pas  lui  coasaorcr  quelcfues  pages  rétrospeo** 
tives* 

Je  ne  veux  point  lïier  que,  ddns  le$  anoée^  qui  précé*- 
dèrent  la  révolutioQ,  certains  de  nos  préfets  avai^:it  pria 
malheureusement  dans  les.  pratiques  d'une  vie  trop  mon- 
daine, l'allure  d'un  cbeyalier;  autant  peu^^étre  et  plus 
qu0  celle  d'u»  apôtre.  L'opinion  puUiqoey.deveBue,  on 
Ufe  :Saît  pourquoi^  phiii  «évère  cootre  les  prêtres^  dans  ub 
sièele  d'inerédujiit^  ou  d'indifférence,  ^ressait^notam^ 
meut  à,  M.  dcf  «Graise  dfçs  reproches  sans  doute  exagérés^ 
oiais.  auxquels,  U  faut  bien  l'avouer,  il  s'exposait  pai^ 
ses  habitudes  fastueuf^es  et  son  séjbur  prolongé  dans  la 
capita4ç.  Avatit.d'eutrer  dans  l'état  isoclésiastiqtte,  il 
avait  servi  en.qualité,âe  lieutenant  dans  un  régiment.da 
dragons,  .et  U<  en  avait  conservé  uneiliberté  de  formes  et 
une  assurance  de  langage  q^ione  prévenaient  pas  en  sa 
faveur,  et  dont  la  malveillance  n'avait  pas  manqué  de 
s'emparer  avec  empressement,  quoique  cette  dernière 
empreinte  de  la  vie  militaire  fûl  ^empéirée  chez  k  prélat 
par  une  haute  et  ria*e  distinction  de  manières.  De  tout 
cela  on  avait  psis  texte  pour  arrangeri  mille  et  mille 
anecdotes,  à  qui  les  |^lu$  ;3candaleuses^.sur  la  vie  intime 
de  M.  dé  Grasse,  qui  se  préoceupait. trop  peu  de  ces 
coiMaérages,  et  ^ui  sans  doute  était  bien  loin  de  penser 
que  cette  chrouiquie  misérable»  serait  jamais  recuaillie 
par  l'ilistoire»  et  viendi^ait,  un  /siiècle  après  lui^  salir  son 
nom  et  flétrir 'Sa  mémoirer  Cependant  sans  djscussion, 
sans  examen,  sans  le  moindre  contrôle  et  sans. autre  au*^ 
torité  que  celle  d'une  tradition  repoussée  par  toutes  les 
vtaîs^mhlances,  pour  qui  s'est  fait  une  idé^iî  ^exacte  de 
la  timidité  révérentielle  de»-siBl|^es  ecelésiastâqu^ai ^eu 


présence  des  évéques  du  xvrif  siècle,  M.  Bordillon  nous 
a  raconté  l'une  de  ces  historiettes,  qu'il  a  trouvée  pi- 
quante, et  qui,  il  faut  l'avouer,  n'a  pas  contribué  pour 
la  moindre  -part  au  succès  de  sa  brochure  auprès 
de  G€9:tains  de  ses  lee4}Qurs.  Je  suis  trës-persuadé  que^ 
dans  ce  monde  assez  peu  lettré,  tout  en  ne  comprenant 
guère  comment  M.  Bordillon  avait  cru  devoir  renvoyer 
à  un  texte  latin  pour  mieux  gazer  Pénormité  de  sa  pa- 
role, je  suis  très-persoadé,  ai*je  dit,  que  personne  n'atira 
manqué  de  se  faire  donner  la  tradacti<yn  du  vingt-hui- 
tième verset  du  premier  chapitre  de  saint  Luc,  et  je 
crois  entendre  d'ici  Ij^s  éclats  de  ce  rire  immonde  et 
bruyant  qui  a  dû  payer  la  complaisance  du  traducteur , 
mais  je  ne  veux  pas  m'arrèter  sur  cet  indigne  terrain, 
et  puisque  M.  Bo^rdillon  a  pris  tant  de  plaisir  à  raconter 
le  mal,  je  veux,  qu'on  me  permette  de  le  dire,  présenter 
un  tableau  plus  consolant  et  plus  vrai. 

Malgré  ses  brusqueries  de  caractère, 'M.  de  Grasse 
était  obligeant  et  bon  ;  son  cœur  était  noble  et  élevé.  Ce 
prélat  était  mente  assez  populaire  à  Angers ,  où  il  entre- 
tenait des  relations*  bienveillantes  et  polies,  non  seule- 
ment iavec  les'  maisons  nobles ,  mais  avec  toutes  les 
familles  d'honnête  bourgeoiBÎe,  ce  qui  ne  laissait  pas  que 
de  flatter  beaucoup  ces  dernières  auxquelles  les  mœurs 
du  temps  rendatient  cette  distinction  jextrémemelit  pré- 
cieuse. On  a  pu  voir  dans  la  -grande  salle  de  l'évèché  le 
portrait  de  M.  de  Grasse.  Sa  belle  et  noble  figure  ne 
respire  que  le  calmé,  la  décence  et  la  sérénité.  On  a  ins- 
crit sur  ce  tableau  ce^  paroles  de  l'Imitation  c  Venke  ad 
me  ûmnes  qui  laboràtis  ethneratiestis^ttegoreficiam 
vos,  U  répandait  en  effst  snr  tous. les  points  de  sa  ville 


—  188  — 

épiscopale  d'abondantes  aumônes,  et  malgré  ses  absences 
beaucoup  trop  prolongées,  il  ne  négligeait  point,  comme 
on  voudrait  le  4ire,  ses  devoirs  d'évê4jue.  Ilrevenaittou- 
jours  pour  ses  tournées  pastorales  ou  pour  la  collation  des 
ordres  sacrés,  et  d'ailleurs,  il  avait  su  se  donner  pour  le 
gouvernement  de  son  dioeèae,  des  coopérateurs  aussi 
rempli^  de  z^Ie  que  de  vraie  piété,, en  même  temps  qu'il 
avait  préposé  à  la  direction  de  son  séminaire,  ces  prêtres 
de  Saint-Sulpice,  dont  FénelQU  a  écrit  sur  son  lit  de 
mort  que  rien  n'était  plus  vénérable  et  plus  apostolique. 
L'illustre  et  savant  abbé  Emery,  notamment,  fut  long- 
temps directeur  du  séminaire  d'AïigerB,.  et  eut  une  très 
grande  part  à  la  confiance  de  M.  de  Grasse.  Tout  cela, 
sans  doute,  ne  suffirait  pas  à  couvrir  ce  que  la  vie  du 
prélat  eut  de  dissipé  et  de  trop  mondain  ;  mais  aux  jours 
de  bonbenr  et' de  friydes'  entraâjo^ments  y >  succédèrent 
bient(5t  des  jours  de  deuil  et  de  cruelles  épreuves. 

L'amiral' de  Grasse,  frère  du  prélat,  avait  été  appelé 
au  commandement  en  chef  de  l'escadre  française  qui, 
dans  la  guerre  d'Amérique,  lutta  sans  trop  de  désavan- 
tage contre  la  tdute  puissance  maritime  de  l'Angleterre  ; 
mais  après  plusieurs  succès  éclatants ,  la  fortune  cessa 
tout  à  coup  d'être  fidèle  au  comte  de  Grasse.  Une  bataille 
navale  longtemps  et  courageusement  disputée,  finit  par 
livrer  la  flotte  française  à  la  n^ereî  4^  ses  vennemis,  et 
l'amiral  fut  obligé  de.  se  rend;re  prisoniiier  des  Anglais, 
qui  l'emmenèrent  triomphalement  à  Londres  où  ils 
eurent  la  cruauté  de  le  coniibler  de  fêtes,  d'honneurs  et 
d'éloges  qu'on  ne. cessait  de  prodiguer  ^  sa  bravoure. 
En  France,  au  contraire ,  on  dévouait  son  nom  aux  ou- 
trages, et  des  couplets  d'une  odieuse  gaieté,  insultaient 


—  «184  — 

à  sa  défaite.  Notre  nation,  si  enthousiaste  de  la  gloire  mi- 
litaire ,  ne  sait  pas  toujours  honorer  le  courage  malheu- 
reux. Ces  clameurs  retentissantes  et  passionnées  .firent 
sur  révêque  d* Angers  une  impression  terrible;  il  se  ren- 
ferma dans  son  palais,  espérant  du  moins  trouver  quelque 
repos  dans  la  solitude  et  la  retraite,  mais  il  ne  lui  Ait 
pas  mime  donné  d^  goûter  un  seul  instant  de  répit.  A 
Angers  comme  partout  ailleurs,  on  chantonnait  aussi 
l'amiral^  et  dans  les  salons,  tout  aussi  bien  que  dans  les 
chaumières ,  son  nom  était  livré  aux  railleries  les  phis 
sanglantes,  et  les  quolibets  populaires  Ae  connaissaient 
plus  de  limites.  La  Fontaine  <a  dit  de  l'enfance  : 

Cet  âge  est  sans  pitié  î 

mais  c'est  chez  le  peuple  surtout,  que  l'enfance  se  pro- 
longe souvent  pendant  toute  la  durée  de  la  vie.  Les 
femmes  de  la  halle  et  ks  maraîchères  des  Ponts-de-Gé 
et  de  toute  la  banlieue,  portaient  alors  pour  ornement  de 
toilette  une  croix  d'or  surmontée  d'un  cœur  uni  et  ciselé 
et  on  appelait  cette  parure  une  croix  à  la  Jeannette.  Après 
la  disgrâce  du  malheureux  chef  d'escadre,  ces  femmes 
simplifièrent  leurs  croix  d'or  en  faisant  disparaître  le 
cœur  qui  les  surmontait,  et  elles  les  appelère/nt  dès  lors 
des  croix  à  ia  Grasse^  allusion  injuste  et  cruelle  plus 
qu'il  n'est  possible  de  l'exprimer.  L'évêque  en  éprouva 
un  tel  surcroit  de  honte  et  de  douleur,  qu'il  n'y  put  te- 
nir. Il  se  hâta  de  s'éloigner  de  ce  peuple  méchant  et 
frivole,  qui  prenait  ainsi  plaisir  à  flétrir  son  nom  et  à 
souiller  la  pureté  immaculée  de  son  blason.  Il  partit  pour 
la  capitale,  où  il  se  flattait  que  le  bruit  et  le  tourbillon  du 


monde  pourraient  peiiMtre  étourdir  un  feu  sop  pro- 
fond désespoir. 

Chemin  faisant ,  il  se  tenait  seul  et  silencieux  dan^  sa 
chaise  de  poste,  et  rameoé  à.  la  plénitude  4u  sentiment 
retigienx  par  l'excès  du  malheur^  il  rappelq^^t  tristement 
à  sa  mémoire  le  tableau  de  sa  vie  4éjà  longue  et  tant 
agitée.  Arrivé  bientôt  dans  une  lociB^Uté  voisino,  il  fit 
arrêter  sa  voiture,  et  exprima  le  désir  de  s'approcher  du 
tribunal  de  la  pénitence,  espérant  sans  doute  que  la 
sainte  intimité  de  la  confession  ramènerait  la  sérénité 
dans  son  âme,  et  répandrait  cfuelque  baume  sur  les 
cruelles  meurtriasures  de  son  cœur.  Il  réclama  le  minis- 
tère d'un  tout  jeune  vicaire,  qui  se  défendait  vivement 
d'accepter  un  pareil  honneur^  et  ne  se  résigna  que  par 
pure  obéissance  à  entendre  la  confee^ion  du  prélat« 
Sa  résistance  /ain&i  V£dncu6^  le  jeun?  prêtre  se  sentit 
transformé  en  un  homme  tout  nouveau  ;  mu  sans 
doute  par>  l'esprit  de  Dieu,  il  demanda  compte  à  M.  de 
Grasse,  JAUmblement  prosterné  k  se^  pieds,  de  toute  son 
administration. pastorale;  U  le  rapf^l^  aux  faipte^  lois  de 
la  résidence  qu'il  avait  tant  de  foia  oublié^  et  exigea, 
avant  de  l'absoudre,  qu'il  lui  promit  formellement  qu'il 
reviendrait  bientôt  au  mib^u  de  son.peuple^  dont  il  ne 
s'éloignerait  plus  à  moins  d'un  motif  impérieux.  Non 
seulement  ])f .  de  Grasse  le  promit^  mais  il  témoigna  hau- 
tefBent  sa  reeonnaissance  à  œ  jeune  et  .courageux  vi- 
caire, et'  fit  connaître  à.  tous  le  langage  digne  etft^rme 
qu'il  lui  avait  tenu  au  tribunal  sacné,  ajoutant  avec  une 
humilité  touchante  qu^  s'il  ne  profitait  pas  sur  l'heure 
de  ses  avis^  et  s'il  m  retournait  pas  immédiatement  à 
Angers,  c'était  uniquement  parce  que  sa  santé,  profon- 


-  486  — 

dément  altérée,  l'obligeait  d'aller  consulter  un  eîavant 
médecin  de  la  capitale,  où  il  lui  serait  plus  facile  aussi 
d'avoir  des  nouvelles  de  son  malheureux  frère,  dont  il 
n'entendait  plus  parler.  II  annonçait  d'ailleurs  son  très 
prochain  retour,  mais  Dieu  qui  l'avait  rappelé  si  tendre- 
ment à  lui,  He  permit  pas  ce  retour  tant  désiré.  Peu  de 
jours  après  son  arrivée  à  Paris,  une  attaque  foudroyante 
l'emporta  en  quelques  minutes,  sans  qu'il  fût  même  pos- 
sible de  lui  apporter  le  moindre  secours. 

La  nouvelle  de  cette  mort  imprévue  fut  promptement 
transmise  à  Angers  où  elle  produisit  une  douloureuse 
sensation  et  un  sentiment  général  de  regret.  Les  vicaires 
généraux  du  diocèse  publièrent  à  cette  occasion  un  man* 
dément  dans  lequel  ils  faisaient  un  touchant  éloge  du 
prélat,  a  Sa  main  libérale,  disaient-ils,  s'ouvrait  sans 
»  cesse  pour  secourir  les  malheureux.,..  Né  avec  les  dis- 
»  positions  les  plus  heureuses,  il  apportait  dans  !e  ma^ 
»  niement  des  affaires  ce  coup  d'oeil  juste,  qui  saisit  le 
»  vrai,  cette  impartialité  qui  gagne  la  confiance,  cet 
»  amour  de  la  paix  qui  fut  son  caractère.  Ami  tendre  et 
>>  compatissant;  protecteur  bienfaisant,  pasteur  officieux, 
»  il  vit  couler  des  larmes  et  il  l^s  essuya;  vous  implo- 
»  rates  son  assistance  et  il  fut  votre  bienfaiteur  et  vôtre 
»  appui....  C*est  dans  les  principes  divins  d'une  religion 
»  sainte,  qu'il  puisa  ces  vertus;  il  les  pratiqua  sans  os- 
w  tentation  et  opéra  les  œuvres  que  la  foi  nous  prescrit; 
»  il  fut  inaccessible  à  la  haine,  sourd  à  la  calomnie  ;  les 
»  entrailles  de  sa  charité  se  dilatèrent  pour  nourrir  les 
»  membres  soufrants  de  Notre  Seigneur  Jésus-(]hrist,  et 
»  ses  aumdnes  nous  font  espérer  que  si  sa  mort  a  été  im* 
»  prévue,  elle  n'en  est  pas  moins  précieuse  devant  Dieu.  » 


I 


—  137  — 

Tels  sont  les  dbèiiments  qiie  ii<m8  avoiis  pu  recueillir 
sur  un  évèqueque  l'on  peut  juger  sévèrement  sans  doute , 
mais  qu'il  serait  souverainement  injuste  de  condamner 
sor  la  foi  dé  misérables  commérages  qui  ne  furent  le  plus 
souvent  que  le  fruit  immonde  de  la  grosse  gaieté  d'un 
siècle  à  la  fois  sensualiste  et  sceptique.  Personne  ne  pré- 
tendra que  M.  de  Grasse  ait  été  irréprochable  de  tout 
point,  mais  quels  qu'aient  pu  être  ses  torts,  on  ne  saurait 
sans  injustice  dire  quHl  ait  été  tout  à  fait  indigne  de  for- 
mer un  anneau  dans  cette  longue  lignée  d'évèques  qui 
l'avaient  précédé  sur  le  siège  d'Angers.  Et  d'ailleurs , 
comment  M.  Bordillcm  qni  a  exprimé  en  termes  si  tou- 
chants, si  éloquents  même  quelquefois,  son  regret  de  ne 
pouvoir  présenter  à  Heuri  Arnauld  qu'un  hommage  que 
ses  dissidences  de  litn^epmseurn's.iûrsàetdi^xiieàTei' agréer 
par  son  vieil  évéque  auquelil  dit  huvnhlemenXqvL^il  ne  se 
sent  p€LS  digne  de  Im  ^offrir  son  ^patronage  pour  appui , 
comment  a-i-il  pu  croire  qu'il  lui  serait  donné  de  venger 
sa  mémoire  et  de  consoler  son  ombre  en  se  livrant  à 
d'odieuses  récriminations  contre qiittl<iue&-uns  dé  ses  suc- 
cesseurs? '     • 

Mais  ce  n'est  pas  même  dans^ces  récriminations  tantôt 
amères,  tantôt  plaisantes  ou  burlesques,  que  Henri  Ar- 
nauld eut  relevé  le  plus  cruel  outragée  Nous  ne  craignons 
pas  de  le  dire,  ce  qui  eût  le  plus  douloureusement  contristé 
le  pieux  prélat,  c'eût  été  bien  certainement  de  se  trouver 
confondu  dans  un  même  sentiment  de  vénération  avec 
un  évéque  séparé  ostensiblement  de  la  communion  de 
l'Église  romaine  et  dont  la  mission  ne  fut  jamais  avouée 
par  le  chef  suprême  de  l'épiscopat. 

Ici,  Messieurs,  j'éprouve  le  besoin  de  le  déclarer  haute- 


# 

~  188  — 

iMnt,  j«  ne  cède  à  auoune  hostilité  politique ,  à  nul  res- 
çentimeot  de  parti ,  j'honore  même  a  plusieurs  égards  la 
perpionne  de  M.  l'abbé  Grégoire.  Je  ne  sais  s'il  comprit  et 
aima  la  liberté ,  mais  il  aima  du  moins  la  république  de 
toute  l'ardeur  de  ^on  âme  et. il  faut  savoir  tenir  compte 
de  toutes  les  convictions  indépendantes  et  sincères.  Il  eut 
le  courage  de  rester  fidèle  à  sa  ireligion  dans  les  plus 
mauvais.jour^et  de  conff^aer  sa  foi'presque  sous  la  hache 
révolutionnaire.  Je  ne  veux  pas  même  lui  reprocher  un 
voie  contre  l-imputation  duquel  il  n-a  oesaé  de  protester, 
ni  me  faire  une  arme  contre  lui  de  quelques  paroles 
effroyables  qui  n'ont  été  que  trop  souvent  citées ,  j'aime 
mieu^  répéter  avec  une  auguste  et  sainte  victime  que 
souvent  daru  les  moments  de  trouble  et  d^e/J^^rvescence 
on  n'est  pas  maître  de  soi. 

Mais  ^  bonne  foi ,  qu'avait  de  comtoun  Tépiseopat 
de  Henri  Arnauld  avec  celui  de  Vévèque  constîtutioûnel 
de  Blois  et  qu'aurait  pensé  notre  vieux  et  vénéré  pontife 
qui  protesta  si  souvent  de  sa  fidélité  ot  de  son  dévoue-* 
me»t  à  l'ÉglisOy  si  jamais  il  avait  pu  prévoir  qu'une  voix 
amie  viendrait  un  jour  l'associer  à  un  prélat  notoirement 
séparé  de  Torthodoixte  romaine  et  qui  s'en  faisait  glaire. 
Assurément  M*  Bordillon  n'avait  pas  besoin  de  nous  rap- 
peler son  titre  de  libre  penseur  y  un  pareil  rapprochement 
eût  servi  aeul  à  l'établir.  Il  a  d'ailleurs  joué  ici  de  mal- 
heur et  s'est  heurté  à.  un  double  écueil.  Puisqu'il  nous 
fait  connaître  franchement  toutes  ses  sympathies  pour 
Pelage,  il  peut  tenir  pour  certain  que  l'évêque  de  Loir- 
et^^lher  eût  reipoussé  ses  hommages  avec  indignaticm.  Je 
soupçonne  fort  M.  BordiUon  d'avoir  lu  plus  souvent  les 
discours  de  M  Gr^oirea  la  Gonventiop  que  ses  ouvrages 


—  189  — 

de  controverse  théologique,  car  s'il  avait  seulement 
parcouru  son  Histoire  des  sectes  religieuses,  il  au* 
rait  vu  en  quelle  profonde  horreur  lé  prélat  républicain 
avait  ce  qu'il  appelait  la  secte  des  pélagiens  et  des  semi-- 
pélagiens  et  M.  Bordilïon  n'aurait  certes  jamais  osé  s%3X* 
poser  ainsi  h  encourir  au  premier  chef  l'excommuni** 
cation  constitutionnelle. 

n  n'a  pas  été  plus  heureux  en  citant  une  parole  pire* 
tendue  de  M.  le  duc  de  Broglie,  qu'il  reporte  à  un  temps 
qu'il  qualifie  des  plus  mauvais  fwre  de  la  Restautathn. 
Cette  année  1819  est  précisément  celle  où  nous  aurions 
cru  que  la  Restauration  aurait  dû  lui  paraître  le  mieux 
inspirée  et  où  il  avait  semblé  le  mieux  possible  d'opérer 
la  réconciliation  du  pouvoir  et  de  la  liberté.  U  est  vrai 
que  l'élection  de  AJ.  l'abbé  Grégoire  amena  dès  lors 
une  réaction  en  sens  contraire  et  que  son  nom  excita  de 
vives  rumeurs  au  seitt  du  parlement^  mais  ces  luttes  ar- 
dentes et  passionnées  ne  dépassèrent  pas  l'enceinte  de  la 
Chambre  des  députés  où  il  me  semble  encore  voir 
M.  Laine  ae  cr^aff^ppmmQt  k  la  tnbui|e,^&isanten  dépit 
des  clameurs  et  des  interruptions  bruyantes,  entendre  ces 
paroles  sévères,  impolitiques  peut^tre ,  mais  que  l'his- 
toire n'a  pas  démenties  :  <c  II  faut  que  cet  homme  se  retire 
devant  la  dynastie  régnante,  ou  que  la  race  de  nos  rois 
recule  devant  lui  !  n  Quant  à  la  Chambre  des  pairs  où 
siégeait  M.  le  duc  de  Broglie,  ni  à  cette  époque  ni  à  au- 
cune autre  il  n'y  fut  question  de  M.  Grégoire  et  par  con- 
séquent le  noble  duc  n'eut  point  à  intervenir  en  sa  faveur; 
le  député  de  l'Isère  n'y  fut  point  accablé  par  aindécen- 
tes  clameurs^  et  l'illustre  orateur  n'eut  pas  besoin  de 
venir  le  couvrir  de  sa  magnifique  éloquence.  Nous  avions 


—  140  — 

plusieurs  fois  reproché  à  M.  Pabbé  Pletteau  de  s*être  dis- 
pensé souvent Vje  vérifier  ses  assertions,  M.  Bordillon  ne 
l'a  que  trop  imité  (1)  en  venant  ainsi  sans  raison  mêler  à 
ce  débat,  et  associer  à  la  caisse  de  M.  l'abbé  Grégoire  le 
nom  d'un  homme  d'Etat  respecté  de  tous^  qui  achève 
dans  les  loisirs  d'une  noble  retraite  et  les  pratiques  de  la 
vie  chrétienne  une  carrière  toute,  consacrée  à  son  pays  et 
constamment  dévouée  à  la  grande  et  sainte  cause  de  l'or- 
dre et  de  la  liberté. 

.  ie  m'arrête  ici  y  quoique  je  sois  loin  d'avoir  épuisé  tous 
mes  griefs  coidre  la  brochure  de  M.  Bordillon,  mais  il  est 
temps  de  mettre  un  terme  à  une  double  critique  qui  ne 


(1)  J'aurais,  s*il  le  fallait,  bien  des  inexactitudes  à  reprocher  à 
M.  Bordillon,  mais  je  veux  me  borner  i  en  indiquer  une  seule  qui  me 
paraît  vraiment  excessive.  J'avais  été  très-^étonné  de  lire  à  h  page  ^ 
de  sa  brochure ,  que  pour  peu  qu'on  eût  voulu  faire  quelque  rechar- 
che^  on  aurait  trouvé  à  la  Bibliothèque  impériale^  dans  la  collection 
manuscrite  de  Dom  Rousseau,  vol.  JSvêques  d'Angers  y  un  bref  d'In- 
nocent XI,  de  4667.  des  plus  honorables  pour  le  vénérable  prélat  tant 
maltraité  par  M.  l'abbé  Pletteau.  Gomine  Innocent XI  ne  fut  promu  au 
pontificat  suprême  qu'en  1676,  j'étais  obligé  de  croire  à  une  faute  d'im- 
pression qui  seule  pouvait  m'expliquer  cette  date  évidemment  fausse 
de  1667.  J'ai  donc  prié  un  correspondant  aussi  intelligent  qu'habile 
de  vouloir  bien  faire  à  la  Bibliothèque  impériale  la  recherche  indiquée 
par  M.  Bordillon  lui-même,  et  voilà  qu'à  ma  très-grande  stupéfac- 
tion il  m'a  été  répondu  que  dans  le  volume  xïité  de  D.  Rousseau,  il 
ne  se  trouvait  ni  bref  d'Innocent  XI,  ni  même  absolumetit  rien,  si 
ce  n'est  le  mandement  des  vicaires  oapitulaires  d'Angers  annonçant  la 
mort  de  Rend  Amauld  et  faisant  l'éloge  de  ses  incomparables  vertus. 
Il  m'a  dès  lors  paru  très-évident  que  M.  Bordillon  ne  s'était  point  du 
tout  imposé  à  lui-même  ces  élucubratioris  et  recherchés  d'un  moderne 
dom  Calmet,  dont  il  se  montrait  d'ailleurs  si  plaisamment  disposée  à 
faire  grâce  à  M.  l'abbé  pietteau. 


—  Ui  — 

m'a  été  ÎDspirée^  j'ose  le  dire,  que  par  le  sentiment  du 
devoir  et  par  celui  d'une  conviction  profonde  et  sincère 
que  je  teiiaisy  Messieurs,  à  vous  e^iprimer,  parce  que  j'é^ 
tais  sûr  de  la  voir  accueilli»  sinon  avec  intérêt,  au  moins 
avec  cette  bienveillante  indulgence  à  laquelle  vous  m'avez 
déjà  plus  d'une  fois  accoutumé. 

BOUGLER. 


P.  S.  Apre»» la  lecture  de  ce  travail,  M.  l'abbé  Plet- 
teau,  dans  une  r^onse  présentée  avec  une  mesure  par- 
faite et  à  laquelle  je  me  plais  à  rendre  hommage,  m'a 
annoncé  une  réplique  qui  m'opposerait  des  documents 
particuliers  et  positifs,  pour  établir  que  Tévêque  Ar- 
nauld  fut  un  hérétique.  Quelle  que  soit  cette  réplique  de 
M.  Pletteauy  je  n'en  regarde  pas  moins  la  polémique 
comme  définitivement  close  pour  ce  qui  me  concerne.  Si 
l*on  me  produit  des  documents  jusqu'à  présent  inédits, 
j'aurai  toujours  eu  raison,  je  le  crois,  dans  ce  que  j'ai 
dit  d'après  les  documents  qui  m'étaient  connus  et  que 
j'avais  recueillis  dans  l'histoire  ecclésiastique  du  temps. 
Je  ne  sais,  d'ailleurs^  si  je  pourrais  m'accorder  avec 
M.  l'abbé  Pletteau,  sur  le  vrai  sens  du  mol  hérésie^  parce 
que  je  ne  crois  pas  du  tout  qu'une  distinction  subtile  et 
téméraire  sur  le  texte  du  formulaire,  ait  constitué  une 


—  4tt  — 

hiréneàAus  toute  Facoeption  du  mot;  mais  d'ailleurB 
bien  peu  importe  à  mon  av»^  puisque  dans  la  iséance  éa. 
28  janvier  V  M.  l'abbé  Pletteau  m'a  aecordé  qu'il  n'était 
pas  possible  de  contester  les  vertus  d'Amauld,  et  que  tout 
an  le  maintenant  pour  hérétiquCy  il  a  bien  voulu  recon* 
naître  qu'il  n'était  point  dénoncée  U  me  permettra  de  {ui 
dire  alors  que  ce  n'est  pas  à  un  simple  fidèle  à  suppléer 
la  dénonciation  de  l'Eglise,  ni  à  préjuger  la  question  de 
savoir  si  Henri  Arnauld  n'a  eu  en  effet  à  présenter  au 
tribunal  suprême  qvHune  Ame  janséniste.  Nous  croyons, 
nous,  qu'en  regard  de  quelques  hésitations  et  de  quelques 
faiblesses,  il  aura  eu  à  présenter  une  longue  série  de 
grandes  et  saintes  œuvres.  En  tout  cas,  s'il  a  eu  à  se  re- 
procher des  mauquements  à  la  foi,  il  me  semble  que, 
suivant  la  belle  expression  du  comte  de  Maistre,  il  n'ap- 
partenait qu'à  l'œil  po!ur  qui  tous  les  cœurs  saut  dia- 
phanes, de  reconnaitre  et  de  noter  la  fibre,  coupable. 


COMPTÈ-ftËNDU 


DES   SÉàNCËS   D£  LA  COMMISSION  ARCHÉOLOGIQUE. 


,  I 

Présidence   de  M.   Godard^  Faultrier. 

'      .  ». 

Le  procès-verbal  de  la  précédente  èëbneé  est  lu  et 
adopté. 

M.  Gaston,  de  Gholet,  édrit  pour  Mire  coraïaitffe  la 
découverte  de  durietfftisis  'peinture!^  dans  Téglise  Saint- 
Pierre  de  Gheftiillé  ;  mfeilheureusèiïient  îeur  état  de  dé'-» 
gradation  semble  rendre  tcmte  conservation  impossible: 
11.  Gaston  annonce  qu'il  enverra  un  rapport  détaillé 
sur  ces  peinttii^es. 

Après  une  courte  discusdon,  M.  DaiâvYlle,  qui  doit 
procbdinement  aller  à  Ghemilié;est  prié  de  tisiter  Té- 
gliise  Sdnt^Pierré  et  de  s'assurer  par  lui-même  bi  ie^ 
peintures  de  cette  église  doivent  nécessairement  dispa-J 
rajtre. 

H.  Godard  entretient  la  Comniission  des  réparïtiions 
qui  vieniièiit  d^tre  foites  à  la  chapelle  Saint-Mai^tin,  ft 
Saint-Maur-sur-Loire,cbapieHe  éi  intériessante,  qui  garde 
la  trace  vivante  encore  du  "passage  de  saint  Matr ,  TU- 
lustre  disciple  de  saint  Benoit  et  des  chefs  anglais  dont 
Duguesclin  devait  détruire  {Mfès  de  là  les  tnoupes,  Tef^ 
froi  du  pays.  M.  Godard  donne  lecture  'd'tin  rapport 
présenté  par  lui  au  Congrès  de  Saumur,  et  qui  a  dé- 
terminé le  vote  de  300  fr.  par  la  Société  française 


—  144  — 

d'archéologie,  pour  les  réparations  de  cette  chapelle. 
Il  lit  ensuite  une  intéressante  lettre  de  M.  l'abbé  Jou- 
bert  sur  ces  réparations;  la  somme  de  300  fr.  votée 
par  le  Congrès  d^  Saumpr  étant  trè^-insuffis^nte,  les 
habitants  du  pays  lui  sont  généreusement  venus  en 
aide  :  le  pauvre  comme  le  riche  a  voulu  contribuer  à 
cette  œuvre  à  -la  fois  pieuse  et  paifiotique  ;  cependant, 
tout  n'est  pas  encore  achevé  et  lès  fonds  manquent. 

M.  Godard  propose  de  voter  une  somme  de  25  fr. 
pour  une  inscription  qui  serait  placée  dans  la  chapelle 
et  rappellerait  la  part  prise  par  la  Commission  4ans 

■ 

cette  restauratioiji.  —  Adapté. 

Il  est.  domi)3  leetyre  de  la  prépaiera  pai^tie  d'un  long 
et  curieux  travail  de  M.  Raimbault^  de  Saumur,  sur  la 
fa^n^Ue  et  le  château  de  Brezé.  —  Renvoi  au  Comité  de 
rédaction. 

La  Commission  examine  avec  intérêt  différ^nts  objets 
déposas  sur..l$  bureau^  gi:avïiresic^u,rt^quivre,  sceaux^  çtc. 

§ur,.lA.prQpo$iljop  de  M,. Godard,  Je.titre.de,  membre 
hQP9raii;e..est  déqçrné.  ai.M..rabbé  Barbier  de  Montault 
el,,^  M., X^hhé,  Chçvallifir, , 

Il  est  ensuite  procédé  au  renouvellement  du  bui:ea,u. 
Cpnfprfîi^^ent  au  4*ègleiEnei;Lt,  cette,  opératioii  se  fait  au 
scrutin  .secret.  §oii;it  élps  pour  Tannée  1863  :  Présideat, 
M.  Godard-Faultrier ;  viçç-présidents,  M.  l'abbé  .l*e- 
geard  .de.  la.  Piryais  et  ]M.  A.  Lemarchaiid;  secrétaire, 
M.  I^aulLachèse;  secrétaire-archiviste,  M.  Ernest  0^- 
v^lle  ;^  trésorier,  M.  Rqn^e^u  aîné. 

Puji^  la  séance  est  levée..  .    . 

-  .  lie  Secrétaire  de  la  Commiiuçn , 


BÉNÉDICTION 


DE  L'ÉGLISE  DE  TIGNÉ 


Encore  une  ëglide  qui  doit  être  ajoutélB  6 
toutes  celles  bâties  sous  répiscopatdeMgr  An- 
gebault  et  qui  depuis  1842  sont  au  nombre  de 
plus  de  cent.  Jamais ,  en  eiï^i ,  k  partir  de 
Fouiques-Nerra,  surnommé  le  grand  bâtiseeur, 
c'est-à-dire  depuis  leXP  siècle,  ne  s'était  vu 
en  Anjou  un  pareil  élan  de  constructiens.  Si 
cet  élan  iémfrigne  du  zèle  de  notre  digB?e  évo- 
que il  prouve  aussi  combien  l'antique  foi  est 
vivace  au  cœur  des  populations.  L'afChéo- 
logie  a  bien  aussi  sa  part  dans  nos  éloges.  Les 
architectes  ne  dédaignent  plus  en  effet  ceiMé 
science  qui  leur  donne  des  modèles  ;  ils  Tétu^ 
dient  uvec  succès  ;  leurs  plans  d'ailleurs  sont 
revus  et  corrigés  par  deux  ^commissions  spé- 
ciailes ,  la  plus  ancienne  sous  k  direction  de 
l'évéque,  et 'la  seconde  depuis  18$â  sous  celle 
du  préfet.  €es  deu^t  commissions,  dont  la 
bonne  entente  ne  "S'est  pas  un  seul  instant  dé- 
mentie, fonotiotinent  avec  régularité  les  pre^ 
mier  et  troisième  mercredis  de  chaque  mois. 
Elles  dressent  des  procès-verbaux  dont  voici 

REP.   ARC.  10 


U6 

un  extrait  concernant  le  plan  de  Téglise  de  li- 
gné, en  date  du  4  mai  1859  : 

«  Ce  plan,  dressé  par  M,  l'architecte  Dain- 
»  ville ,  est  présenté  avec  tous  les  détails  qu'il 
u  est  permis  d'exiger  ;  il  est  étudié  avec  beau- 
»  coup  de  soin.  La  conmiission  s'empresse  de 
»  l'adopter.» 

Le  14  mai  1860 ,  Monseigneur  bénissait  so- 
lennellement la  première  pierre  de  cette 
église  (1). 

Moins  de  trois  années  après,  l'édifice  était 
entièrement  construit  ;  il  se  compose  de  trois 
nefs,  d'un  transsept  et  de  trois  absides.  Le 
plein-cintre  y  règne  dans  les  portes  et  les  fe- 
nêtres ;  les  voûtes  sont  en  coupoles  à  la  ma- 
nière byzantine.  C'est  la  première  églisQ  de  ce 
genre  bâtie  en  Maine-et-Loire.  Ce  style  roma- 
no-byzantin  est  préférable  à  tous  autres  dans 
nos  campagnes ,  à  cause  de  l'économie  qui  en 
résulte,  et  aussi  à  cause  de  l'effet  sévère  et 
vraiment  religieux  qu'il  produit.  Il  a,  en  outre, 
l'extrême  avantage  de  permettre  d'employer 
les  matériaux  de  la  localité.  A  Tigné,  le  calcaire 
coquillier  est  d'an  ton  jaune  qui  s'harmonise 
si  bien  avec  cette  architecture ,  que  l'on  dirait 
la  nouvelle  église  vieille  déjà  de  huit  siècles. 

M.  Daijdville  a  su  en  tirer  un  bon  parti. 
Nous  signalons  son  œuvre  comme  un  excel- 

(1)  Voir  le  Répertoire  archéologique ,  année  1860 ,  page 
226. 


147 

lent  point  de  départ  pour  nos  églises  futures. 
C^et  architecte  a  été  puissamment  aidé  dans 
l'exécution  de  son  travail  par  l'entrepreneur, 
M.  Bernier,  par  M.  Chapeau,  sculpteur,  et  par 
M.  Thierry,  peintre-verrier.  D'un  autre  côté, 
M.  le  curé  Vivion,  M.  Edouard  Poitou,  maire, 
MM.  Pierre  Peton  et  Maugin,  Tun  président 
de  la  fabrique  et  l'autre  trésorier,  ont  aplani, 
d'accord  avec  les  membres  des  deux  conseils, 
ces  mille  petites  difficultés  de  détails  inhé- 
rentes à  toute  entreprise  de  ce  genre,  car  c'est 
une  grosse  affaire  de  mener  à  bonne  fin  une 
semblable  construction. 

Yoilà  pour  le  matériel  des  choses ,  mais  la 
pierre  n'est  vivante  qu'à  la  condition  d'être 
spiritualisée,  c'est-à-dire  bénite*  Or,  ce  grand 
jour  de  la  bénédiction  avait  été  fixé  au  il  fé- 
vrier 1863. 

Tout  fut  prêt  à  point  :  temps  magnifique, 
guirlandes,  arbrisseaux,  arcs  de  triomphe,  de- 
vises, rues  sablées,  tambour  de  la  commune, 
maire  et  adjoint  en  ^charpe,  garde  champêtre 
à  son  poste,  hommes  en  tenue,  les  uns  avec 
des  fasils,  coupables  seulement  d'avoir  versé 
le  sang...  du  gibier;  les  autres  avec  des  armes 
plus  innocentes  encore,  car  elles  étaient  à 
pierre  et  merveilleusement  préparées  à  faire 
long  feu. 

Bref,  tout  cela,  fourbi  et  nettoyé,  donnait 
au  bourg  de  Tigné  un  air  joyeux  qui  rappe- 


J 


148 

lait  les  anciennes  fêtes  de  la  Vendée  d'autre- 
fois. • 

Dès  la  veille  an  soir,  Monseigneur  était  ar- 
rivé avec  soi^  grand-vicaire,  M.  Tabbé  Bompois, 
et  le  bruit  courait  que  Sa  Grandeur  ne  tarde- 
rait pas  à  être  rejointe  par  un  archevêque. 
Cette  erreur  provenait  d'un  malentendu  ;  en 
effet,  quelques  personnes  sachant  que,  dans 
l'ancienne  église,  reposait  le  cœur  de  Mgr 
Claude  Maur  d'Aubignë,  archevêque  de  Rouen, 
mort  en  ni9,  s'étaient  préoccupées  de  savoir 
oiji,  on  le  transporterait;  de  là  le  quiproquo  (i). 

(1)  Nous  devons  k  la  complaisaDce  de  M.  Baranger,  secré- 
taire de  la  mairie  de  Tigué,  la  note  suivante  concemaDt  cet 
archevêque  de  Rouen  : 

•  Pierre  sépulcrale  recouvrant  le  coeur  de  Monseigneur 
Claude  Maur  d'Âubigné,  déposé  dans  l'ancienne  église  de 
Tigné. 

>  Inscription  : 

t  6y-Gtt  le  cœur  d'illustrissime  et  révérendissime  père  en 
»  Dieu,  Monseigneur  Claude  Maur  d'Aubigné,  archevesque  de 

•  Rouen,  pair  de  France.  Mort  à  Rouen  ,  le  22  avril  1719. 
>  (  Priez  Dieu  poor  le  repos  de  son  ime.  )  • 

«  Acte  de  sépultuce  du  cœur  de  Monseigneur  Claude  Maur 
d'Àubigné.  Extrait  des  registres  de  Télat-civil  de  Tannée  1720. 
—  Suit  ia  teneur  : 

<  Le  vingt-troisième  jour  d'avril  mil  sept  cent  vingt  a  été.  à 
»  la  prière  de  nous,  curé  soussigné,  par  M^  François  le  Rayer, 
»  docteur  de  Paris,  curé  de  Saumur,  inhumé  dans  l'enclos  du 

•  grand  autel  de  ce  lieu  le  cœur  d'illustrissime  et  révérendis- 

•  si  me  père  en  Dieu,  Messire  Claude  Maur  d'Aubigné,  arche- 


«19 

Cependant,  dès  le  matin  du  il  février,  Mgr 
Angebault ,  descendu  à  la  cure ,  Ella  dire,  une 
basse  messe  dans  la  chapelle  du  vieux  château 
de  Tignd  ,  si  convenablement  restauré  par  les 
soins  de  son  propriétaire,  aous  la  direction  de 
M.  Dainville. 

Sur  ces  entrefaites ,  et  vers  neuf  heures  et 
demie ,  les  cloches  de  la  nouvelle  église  son-* 
nent  à  toute  volée.  Le  cortéige,  composé  no- 
tamment de  plii3  de  40  prêtres ,  bannière  et 
croix  en  tête,  se  rend  à  la  cure  et  ramène  Mgr 
révêque,  (jui  bénit  extérieurement  et  intérieu- 
rement réglise.  On  va  ensuite  à  Tancienne, 
d'où  l'on  apporte^  sous  le  dais,  le  Saint-Sacre- 
ment; la  messe  commence ,  elle  est  célébrée 
par  le  vénérable  abbé  Chalon,  enfant  de  la  pa- 
roisse et  aumônier  de  l'hôpital  de  Beaufort. 

Après  l'évangile,  M.  le  curé  Yivion  prononce 
un  discours,  où  nous  avons  remarqué  les  pas- 
sages suivants  :  «  Monseigneur  (a-t-ôl^  dit)  , 
»  Tautorité  nous  accordait  son  concours,  M.  le 
»  maire,  par  une  douce  et  intime  sympathie 
o  pour  nous ,  préparait  les  esprits  avec  modé- 
»  ration  et  délicatesse Le  conseil  de  fa- 

»  vesque  de  Rouen,  primat  de  Normandie,  pair  de  France,  dé- 
»  cédé  è  Rouen,  le.,  .jour  d'avril  mil  sept  cent  dix-neuf, 
»  en  présence  de  Messieurs  les  curés  et  prêtres  voisins  de  ce 
»  lieu  et  autres. 

»  Signé*:  J.  Régnier,  prêtre,  Guibert,  prêtre,  M.  Poitou, 
«  cnré  de  Tigné,  et  F.  le  Rayer,  cnré  de  Sanmur.  • 


ISO 

»  brique  nous  donnait  son  dévouement  de  toute 
»  manière.  M.  le  président,  avec  Tintelligence 
d  qui  le  distingue ,  employait  l'activité  de  sa 
»  bonne  volonté  à  Texëcution  des  travaux.  M. 
»  le  trésorier  a  recueilli  les  fonds  et  mesuré  les 
»  dépenses;  le  gouvernement  nous  est  venu  en 
»  aide,  et  nous  avons  la  promesse  qu'il  y  vien- 
»  dra  encore...  Les  terrains  nous  ont  été  don- 
»  nés  par  une  famille  respectable  qui,  de  plus, 
»  nous  fait  espérer  remplacement  du  presby- 
s)  tère  futur;  les  dons  de  la  veuve  et  des  pau- 
»  vres  n'ont  pas  fait  défaut.  Un  bomme  de 
»  l'art,  dont  les  rapports  sont  aussi  agréables 
»  que  les  études  sont  sûres,  a  conçu  le  projet, 
»  et  l'entrepreneur  avec  les  ouvriers  de  tout 
))  genre  l'ont  exécuté  avec  autant  d'énergie 
»  que  d'babileté...  Ici  sont  conservés  nos  plus 
»  beaux  titres,  ici  régnent  la  liberté,  la  frater- 
))  nité  et  l'égalité  des  enfants  de  Dieu... 

Monseigneur  prenant  ensuite  la  parole,  a  su, 
dans  une  délicate  improvisation,  manifester  la 
joie  de  son  cœur  en  venant,  après  avoir  il  y  a 
trois  ans  béni  la  première  pierre  de  cet  édi- 
fice, le  couronner  aujourd'hui  par  une  solen- 
nelle bénédiction  ;  Sa  Grandeur  a  conjuré  les 
habitants  d'aller  assiduement  dans  cette  nou- 
velle église  dédiée  à  l'apôtre  saint  Pierre, 
écouter  les  enseignements  de  leurs  prêtres, 
enseignements  qui ,  au  milieu  des  fluctuations 
de  toute  sorte  qui  agitent  nos  temps ,  sont  les 


m 

fondements  de  la  vérité  et  les  solides  bases  de 
leur  bonheur  présent  et  futur.  Elle  a  remercié 
les  habitants  de  Tigné  de  leur  chaleureux  con- 
cours ;  «  puis  »,  a-t-elle  ajouté  avec  un  bel  ac- 
cent, a  cette  nouvelle  maison  du  Seigneur  est 
»  magnifique,  mais  n'oubliez  point  Tancienne; 
»  qu'elle  ait  toujours  pour  vous  le  charme  du 
»  souvenir  !  Vos  pères  y  ont  prié;  des  générations 
D  entières,  pendant  plusieurs  siècles,  y  sont  nées 
»  à  la  grâce  par  le  baptême  ;  ses  vieux  murs 
»  ont  été  témoins  de  leurs  alliances,  témoins  de 
»  leurs  joies  et  aussi  de  leurs  douleurs,  car 
»  beaucoup  de  tombeaux  Tenvironnent.  Vous 
»  Tavouerai-je,  ce  n'est  pas  sans  une  profonde 
it>  émotion  que  j'ai  retiré  de  cette  ancienne 
»  église  les  saintes  espèces...» 

Durant  la  messe,  une  quête  a  été  faite  par 
Mme  Garreau  et  M.  Petoa  fils ,  ainsi  que  par 
Mlle  Marguerite  Poitou  et  le  jeune  M.  de  Fou- 
gerôUe. 

Après  la  cérémonie  religieuse,  il  y  eut  un 
banquet  de  plus  de  soixante  couverts ,  à  la  fin 
duquel  M.  l'abbé  Grolieau  lut  le  procès-verbal 
de  la  bénédiction  de  l'église,  procès-verbal  que 
tous  les  convives  signèrent  avec  empresse- 
ment. 

Le  lendemain  12,  Monseigneur  célébra  une 
messe  spéciale  aux  paroissiens  dans  la  nou- 
velle église,  et  ne  tarda  pas  à  prendre  congé 
de  l'excellente  population  de  Tigné.  Il  serait 


ti^op  long  de  dire  les  henreas  que  SaOrandenr 
a  faits  par  ses  visites.  Son  cœur  s'était  princî* 
paiement  ouvert  aux  vieillards  et  aux  petits 
enfants.  Un  vieux  soldat  des  anciennes  guer- 
res perdait  littéralement  la  tête  du  bonheur  d'a- 
voir eu  sa  main  dans  celle  duTénérable  évéque. 
Une  mère  ne  cessai!  de  répéter  :  //  a  voulu  me 
bénir  et  mon  enfant,  nous  qui  sommes  si  pauvres  I 
Ah/  qu'il  est  boni 

Je  gage  que  cette  excellente  mère  et  ce 
vieux  soldat,  tous  bien  indigente,  préféraient 
cette  bénédiction  aux  plus  abondantes  au- 
mônes. 

La  cbarité  d'une  sainte  parole  n'est  donc  pas 
un  vain  mot.  La  religion  seule  a  le  secret  de 
ce  genre  de  trésor^ 

Terminons  en  disant  que  ralk)cution  de 
Monseigneur  portera  ses  fruits.  £n  effet,  le 
vieuic  sanctuaire  pe  périra  pas  tout  entier^  Taile 
du  nord  ornée  de  belles  voûtes  du  quinxiéme 
siècle  et  la  tour  romane  du  clocher  seront 
conservées;  ce  lieu  deviendra  une  chapelle 
stationale  oit  .l'on  transportera  4e  cœur  de  Mgr 
d'Aubigné,  archevêque  de  Rouen;  puis  les 
tombes  du  cimetièpe  ne  demeureront  pas  cooft> 
plétement  veuves  des  affectueuses  prières  des 
vivants. 

V.    GODARD-FAUI/TEUSa. 


CONDITIONS  DE  L'ABONNEMENT. 


Le  Répertoire  Archéologique  de  P Anjou  parait  le  1^  de 
chaque  mois,  par  livraisons  chacune  de  deux  feuilles  d'im- 
pression. 

Le  prix  de  Tabonnement,  pour  les  personnes  ne  faisant  pas 
partie  de  la  Commission  Archéologique,  est  de  5  francs  par  an 
pour  Angers  et  de  6  francs  par  la  poste. 

Les  abonnements  sont  reçus  chez  tous  les  libraires  du 
département. 


"  oo 


SOCIÉTÉ    mPÉRIALE   D'AGRICULTURE,  8CIENCB8   ET  ARTS 

ANCIENNE  IGADÉIOK  IfANfiEBS. 


liC^       COIIISSIOI  ARCHÉOLOGIQUE 


DO  DEPARTEMENT 


DE  HAINE  ET  LOIRE 


RÉPERTOIRE  ARGHÉOLOGIQDE 


DE    I/ANJOU 


Anné«    i8CS.    —  AytU. 


ANGERS 

IMPRIMERIE    DE    GOSNIER    ET    LACHÈSE 
Cbansfiée  Saint-Pierre ,  13 

1863 


ACTES 


DE 


SAINT  MAXENTIOL 


PRÊTRE  ET  CONFESSEUR. 


«  Sicuti  per  suct^edentia  tempora 
ad  nostram  usque  memoriam^  Ghristo 
adjuvante,  pcrvenit,  pro  confirmandis 
catholic»  plebis  volis ,  veritatis  stu- 
dio, duximus  scribendum.  » 

(Acta  S.  Marcelii,  m,) 


A4 


Quand  je  jette  un  regard  en  arrière  sur  le  passé  si 
brillant  de  l'Église  d'Angers ,  que  ses  saints  et  ses  re- 
liques, ses  richesses  et  la  pompe  de  son  culte,  tout 
autant  que  ses  vertus  et  sa  foi  firent  qualifier  d'in- 
signe {l\  je  suis  tenté  de  gémir  et  d'être  triste,  comme 

(i)  Insigne  est  un  titre  que  le  Saint-Siège  accorde  à  certaines 
Eglises  pour  les  honorer  et  les  distinguer  des  autres  Eglises.  A  ce 
titre  sont  attachés  plusieurs  privilèges  qu*énumcre  un  bref  de  Gré- 
REP.  ARC.  11 


—  154  — 

saisi  d'un  malaise  indéfinissable.  Car  de  tout  cela  que 
nous  reste-t-il?  Des  ruines  qui  tombent,  des  chroni- 
ques capables,  par  leurs  récits  attachants,  d'augmenter 
nos  regrets  et  la  mémoire  d'un  titre^  dont  on  fut  autre- 
fois justement  fier,  mais  que  le  Concordat  n'a  même 
pas  daigné  laisser  (1),  pour  unir  les  générations  pré- 
sentes aux  générations  éteintes,  et  consoler  de  tant  de 
désastres  par  un  souvenir  et  un  honneur. 

Les  reliques,  on  les  comptait  en  si  grand  nombre, 
qu'au  xviie  siècle  un  pieux  et  savant  auteur,  qui  a 
beaucoup  écrit  et  trop  peu  fait  imprimer,  Joseph 
Grandet,  curé  de  Sainte-Croix  d'Angers,  y  trouvait  la 
matière  d'un  gros  et  curieux  ouvrage.  C'était  mer- 
veille, en  effet,  d'apprendre  que  nos  châsses  d^or  et 
d'argent  abritaient,  non-seulement  les  enfants  de  l'An- 
jou, mais  encore  ceux  qu'un  séjour  prolongé  dans 
notre  pays  ou  les  vicissitudes  des  choses  humaines 


goire  XVI,  comme  l*usage  de  la  coppa  violette  au  chœur  et,  dans  les 
processions,  Temploi  du  pavillon  et  de  la  clochette. 

Je  trouve  écrit  Inn§ni$  ecclesia  Andegavensis  dans  des  actes  datés 
de  1557,  i558.  1575,  1586  et  4607,  aux  Archives  de  la  préfecture 
et  dans  le  Missel  de  1523. 

Le  même  Missel  y  ijoute  Taugmentatif  perceZe^m,  que  n'admettait 
pas  le  Missel  de  i504,  où  on  lit  simplement  celebris. 

Enfin,  un  acte  de  1494  (Archives  de  la  préfecture)  qualifie  TÉglise 
d'Angers  vénérable,  venerahiîis. 

(1)  Pie  VII,  dans  la  bulle  Eccîesm  C%nsH  de  Tan  1801,  dit  ex* 
pressément  :  «  Nous  déda^ons  annuler,  supprimer  et  éteindre  â  per* 
pétuité  tout  rétat  présent  des  Eglises  archiépiscopales  et  épiscopales 
ci-après  désignées ,  avec  leurs  chapitres ,  droits ,  privilèges  et  préro- 
gatives de  quelque  nature  qu'ils  soient.  »  André,  Cours  de  droit  ca- 
non, t.  II,  p.  355. 


—  455  — 

avaient  fait  nôtres.  Aussi  le  peuple  enthousiasmé  avait- 
il  baptisé  ces  corps  précieur  du  nom  de  patronages  y 
patrocinia  (1)  et,  par  une  métaphore  des  plus  heu- 
reuses, indiqué  quelles  bénédictions  abondantes  décou- 
laient pour  lui  de  ces  sources  fécondes. 

Si  nous  faisions  Tappel  de  tous  ces  nobles  noms, 
qui  se  présenterait  pour  répondre  et  dire  :  Me  voilà  f 
Qu'il  est  douloureux  d'entendre  répéter  ce  mot  lu- 
gubre :  victime  de  la  révclutùmy  ou  de  trouver  la  tombe 
sans  écho! 

Pourtant  tout  est-il  donc  perdu?  Non,  heureusement. 
Mais  il  fallait,  pour  interroger  ce  silence  et  retrouver 
ces  débris,  la  voix  bien-aimée  d'un  prélat  qui,  du  sol 
qu'il  bém'ty  a  su  faire  sortir  à  la  fois  et  des  églises 
splendides  et  des  traditions  oubliées. 

Saint-Aubin  a  perdu  saint  Clair  et  saint  Gérard; 
avec  la  démolition  de  Saint-Pierre  ont  disparu  saint 
Gohard  et  saint  Edmond;  saint  Brieuc  n'est  plus  à 
Saint-Serge;  toutes  pertes  immenses,  irréparables.  Mais, 
au  moins,  il  nous  reste  encore ,  pour  notre  consolation 
et  édification  spirituelles^  saint  Florent,  saint  Fran- 
caire,  saint  Maxenliol  et  le  B.  Robert  d'Arbrissel.  J'ai 
tort  de  dire  :  il  nous  reste^  car  de  ces  quatre  corps  saints, 
dont  est  fier  le  diocèse  d'Angers,  deux  seulement  nous 
ont  été  transmis  par  les  pieuses  générations  de  TAn- 
jou.  Les  deux  autres  sont  des  conquêtes  heureuses  que 
nous  a  valu  la  nouvelle  délimitation  des  diocèses^  et 
c'est  Poitiers  qui,  en  nous  agrandissant  des  pays  de 
Vihiers  et  de  Fontevrault,  nous  a  légué,  à  regret,  j'en 

(i)  G.  d'Espinay,  Les  Formules  ant/eviMS,  p.  66. 


—  156  — 

suis  sûr,  rhéritage  précieux  des  corps  de  saint  Fran- 
caire  et  du  B.  Robert  d'Ari)rissel. 

Je  compte  certainement,  parmi  les  plus  agréables  et 
les  plus  utiles  de  ma  vie ,  les  quatre  années  que ,  de 
1858  à  1861,. j'ai  passées  en  Anjou,  car  la  bienveil- 
lante sympathie  de  Mit  Angebault,  en  me  ccmférant  le 
titre  et  les  fonctions  d'historiographe,  m'imposa  le  plus 
doux  des  devoirs,  qui  fut  de  remettre  en  lumi^e  et 
de  rendre  à  la  vénération  publique,  quantité  de.  saintes 
reliques,  souvent  oubliées,  méconnues,  délaissées  et 
privées,  faute  d'une  reconnaissance  canonique ,  du  culte 
qui  leur  est  légitimement  dû. 

Or,  un  des  saints  dont  je  me  suis  le  plus  occupé 
dans  cette  période  de  si. délicieux  souvenir,  a  été  saint 
Maxentiol.  Raconter  les  recherches  que  j*ai  faites  et  les 
résultats  que  j'ai  obtenus,  c'est  à  la  fois  rendre  témoi- 
gnage à  la  vérité,  et  ajouter  une  page  nouvelle  et  au- 
thentique aux  volumineuses  chroniques  du  diocèse 
d'Angers.  Peut-être  tout  cet  ensemble  .paraitra*t-il  as- 
sez complet  pour  former  ce  qui  n'existe  nulle  part 
ailleurs,  les  Actes ,  si  le  mot  n'est  pas  trop  ambitieux, 
du  saint  patron  de  Cunaud. 

En  écrivant  ce  travail  hagiographique ,  j'ai  eu  cons- 
tamment en  vue  ce  double  principe,  qui  en  fera,  j'es- 
père, toute  la  force  et  l'attrait  :  puiser  dans  le  droit 
ecclésiastique  les  éléments  de  mes  convictions  et  cor- 
roborer mes  observations  par  les  données  de  l'archéo- 
logie. La  science  de  nos  jours  a  besoin  de  ce  double 
appui  pour  se  faire  accepter,  et  surtout  pour  imposer 
ses  affirmations. 


—  157  — 


I. 


Tout  d^abord  je  me  préoccuperai  du  nom,  dont  il 
importe  de  connaître  l'origine  et  les  diverses  transfor- 
mations. 

Mdxentiolus  est  un  nom  évidemment  primitif,  qui 
appartient,  sans  conteste,  à  la  race  gallo-romaine. 
Il  a  son  équivalent  ou  plutôt  son  radical  dans  les  vo- 
cables que  fournit  le  Martyrologe  galKcan.  Du  Saussay 
cite  en  effet  quatre  saints  nommés  Maxetitius  et  une 
vierge  martyre  nommée  Maxentia.  Des  quatre  saints, 
deux  appartiennent  à  l'Aquitaine  et  au  Poitou,  contrées 
dont  saint  Maxentiol  peut  fort  bieti  être  originaire  : 
MaxeiitiuSy  Pict.  indm.  ;  Maxentius  inAquitaniu  conf.  (i), 
Ma^centiolus  dérive  directement  de  Maxmtius,  comme, 
à  la  même  époque,  Augttsîus  se  transformait  en  Au- 
gusiulus.  Toute  la  différence  consiste  dans  la  terminai- 
son qui  aflfecte  la  forme  du  diminutif.  Cette  fbwne  n'a 
d'autre  équivalent  dans  notre  langue  que  l'épithète 
petit/ajouté  au  nom,  et  c'est  elle  aussi  que  Chaslelain, 
peu  familier  sans  douté  avec  les  traditions  angevines, 
a  eniployéè,  au  dire  de  Grandet,  dans  ses  Observations 
hagiolùgUfues. 

Le  plus  ancien  document  que  nous  possédions  date 
de  l'an  844  ;  il  y  est  écrit?  MaxmtioltiSy  ainsi  qu'en  847 
et  H30.  Les  archives  de  la  préfecture  attestent  cette 


(i)  Du  Saussay,  Marlyrologium  Gaïlicanum.  Pairîs,  1637,  t.  II. 
n  n«  parle  pas  (!«  saint  Maxentiol. 


—  158  ~ 

orthographe,  qu'allèrent  légèrement  en  1181  et  1355, 
les  chartes  du  moyen  âge.  Par  une  de  ces  fantaisies 
communes  à  cette  époque,  le  G,  qui  a  un  son  dur,  est 
substitué  au  T,  dont  la  consonnance  habituelle  est  plu- 
tôt douce.  Cette  règle  est  générale.  Maxenciiolus  fut 
écrit  comme  on  écrivait  alors  preciosus^  fundacio,coiv- 
secraciOy  etc. 

En  Poitou ,  Maxentius  a  été  traduit  Maiœent^  Maxen- 
tiolus  conserve  en  passant  dans  notre  langue  sa,  ru- 
desse originelle.  On  ne  songe  pas,  en  Anjou,  à  adou- 
cir la  première  syllabe  par  l'addition  de  la  voyelle  i. 
On  n'en  est  pas  mieux  fixé,  pour  cela,  sur  la  traduc- 
tion de  la  terminaison  qui^  dans  l'espace  de  trois  siè- 
cles, varie  jusqu'à  cinq  fois.  Nous  écrivons  mainte- 
nant, en  se  conformant  littéralement  au  mot  Is^tin, 
Maxmiiolj  qui  est  l'équivalent  rigoureux  de  Maxen- 
tiolus. 

Voici,  suivant  l'oifdre  chronologique,  toutes  les  va- 
riantes du  mot  français  : 

Le  xvii®  siècle  écrit  d'abord  Maxenseul  (Arch.  préf . , 
ad  ann,  1608)  ;  Texier,  eH  4648,  imprime  Maœenceul^ 
qui  serait  plus  élégant,  mais  il  manque  une  cédille 
au  c,  ce  qui  en  fait  de  suite  un  mot  estropié  ;  puis  on 
peint  dans  l'église  de  Gunaud,  Uaxmcd^  en  suppri- 
mant la  voyelle  w. 

Au  xvni«  siècle,  môme  confusion  et  même  embar- 
ras. Un  autre  peintre  écrit,  à  la  même  paroisse,  Mao^ir- 
ciole,  et  franchement  c'est  lui  qui  fait  le  plus  preuve 
d'intelligence  et  de  bon  sens,  car  le  root  français  est 
calqué  lettre  pour  lettre  sur  le  mot  latin;  j'en  con- 
clurais même,   a  pari^  qu^au  xynie  siècle  on  écrivait 


—  159  — 

encore  MaxmdolUSj  comme  en  plein  moyen  âge.  Un 
acte  de  1723  (Arch.  préf.)  porte  Msxmiiol,  ssms  e  final 
et  avec  substitution  du  t,  qui  persévère  dans  le  PouiUé 
de  M9*  de  Lorry,  en  1783,  mais  avec  une  inqualifiable 
propension  par  ie  changement  de  Te  en  a,  à  une  écri- 
ture dé  patois,  MaxantioU 

Tels  sont  les  aperpup  philologiques  que  ce  nom  a 
foit  naître  soius  notre  {dume^et  qui  nous  amènent  k 
louer  l'orthographe  actuelle  que  nous  adoptons  comme 
suffisamment  exacte  et  naturelle. 


IL 


L'histoire  ecclésiastique,  tant  générale  que  diocé- 
saine, se  tait  sur  la  yieie  saint  Maxentiol.  Toutefois,  en 
résumant  des  traditions  éparses,  nous  pouvons,  sans 
crainte  d'errer ,  le  qualifier  disciple  de  saint  Martin 
et  prêtre. 

Saint  Martin,  le  grand  thaumaturge,  des  Gaules,  s'é- 
tait entouré  de  disciples  à  Ligugé  d'abord ,  au  diocèse 
de  Poitiers  (1),  puis  à  Marmoutîer,  au  diocèse  de 
Tours  (2).  Que  saint  Maxentiol  ait  été  un  de  ces  dis- 
ciples favorisés,  on  le  croit  à  Cunaud,  et  ce  qui  me 
confirmerait  dans  cette  opinion,  c'est  que,  lors  de  la 
restauration  de  la  châsse,  au  xv«  siècle;  on  ferma  un 

(i)  MéAioires  de  ta  Sociélédes  Antiquaires  de  V Ouest,  année  1839, 
p.  44  'et  séU. 

(2)  Âll).  Mnoir^  Arehileetute  monaifique,  t.  I,  p.  6*  ' 


—  460  — 

des  côtés  avec  un  panneau  sur  lequel  était  peint  saint 
Martin.  Il  aurait  alors  vécu  au  it^  siède. 

Un  attrait  plus  grand  pour  la  solitude  le  décida-t-il 
à  quitter  son  maître  pour  vivre  seul  dans  la  retraite? 
Je  ne  le  pense  pas.  J'aime  mieux  supposer  que  saint 
Martin,  qui  devait  connaître  par  état  les. obligations  de 
la  charge  pastorale  aussi  bien  que  les  besoins  des  po- 
pulations, l'envoya  sur  les  bords  de  la  Loire  fixer  sa 
résidence,  comme,  apré$  son  ordination,  il  avait  en* 
voyé  saint  Florent  au  Mont^filonne,  quelques  lieues 
plus  loin  que  Cunaud. 

Saint  Maxentiol  ne  dut  même  pas  y  vivre  en  solitaire, 
car,  à  en  juger  par  les  seuls  débris  romains  qui  jon- 
chent le  sol ,  Cunaud  et  toute  la  contrée  environnante 
étaient  habités. 

Il  y  vint  donc  çn  pasteur  qui  cherche  des  âmes  à 
sauver  et  à  paître  de  la  parole^évangélique.  Saint  Mar- 
tin l'avait  ordonné  prêtre.  Solitaire,  il  n'eût  pas  ou 
besoin  du  çacerdoce,  car,  pas  plus  alors  que  mainte- 
nant, l'on  n'est  prêtre  pour  sol,  mais  pour  le  Jîien 
spirituel  des  fidèles.  Je  ne  m'étonne  plus  que  la  tradi- 
tion, qui  peint  à  sa  manière  et  dans  un  langage  ex- 
pressif, l'ait  nompié  le,  preniier  curé  de  Cuitai^d,  car, 
fjuoîqu'au  lye  siècle,  les  cures  et  paroisses  ne  fussent 
pas  encore  canoniquemçnt  érigées,  saint  Maxentiol 
remplit  effectivement  auprès,  des  populations  païennes, 
^u  milieu  desquelles  il  vivait,  toqtes  les  fonctions  çu- 
riales,  ou,  pour  parler  plus  exactement,  toutes  celles 
qui  incombent  à  un  missionnaire,  à  un  apôtre.  Or,  il 
n'est  pas  douteux  qu'il  baptisa,  confessa,  administra  la 
sainte  Eucharistie;  célébra  le  saint  sacrifiée,  visita  les 


—  161  — 

mourants,  ensevelit  le^v  morts,  anncmça  la  parole  de 
Dieu,  toutes  fonctions  du  sacerdoce  catholique,  mais 
plus  spécialement  du  ministère  paroissial. 

Que  les  générations  subséquentes  se  soient  trompées 
sur  le  nom  à  lui  donner,  peu  importe  dans  l'espèce, 
puisqu'il  a  accompli  réellement  le  ministère  évangé^ 
lique  et  subi' les  fatigues  de  l'apostolat. 

Quoi  qu'il  en  soit,  sa  viô,  pleine  de  vertus  et  de  mé- 
FÎtes,  lui  valût  une  placé  au  diél,  et  sur  la  terre  les 
hommages  que  l'ÉgliÈe  n'attribue  qu'aux  saints. 

Sa  sainteté  a  été  proclamée  par  les  populations  qu'il 
avait  éclairées  et  maintenues  dans  la  foi,  puis  acceptée 
pai^  le  clergé  et  les  fidèles  db  diocèse  entier.  Ainsi 
agiss^ût-on  «dans  ces  temps  primitifs,  où  la  voix  du 
peuple  avait  l'infaillibilité  des  oracles  divins  :  vox  po- 
pviii,  vox  Dei. 


IlL 


Je  ne  crois  pas  inutile  de  rapporter  ici  in  extenso  les 
notes  que  Grandet  (1)  a  consacrées  à  S.  Maxentiol,  ne 
fût-ce  que  pour  montrer  mon  impartialité  dans  une 
étude  si  obscure,  car  il  fait  de  saint  Maxeiltiol  un  solitaire 
et  un  disciple  de  saint  Maur.  Mais  son  texte  est  rempli 
de  faits  curieux  et  j'aurais  regret,  alors  que  des  do- 
cuments de  premier  ordre  font  défaut ,  d'en  priver  le 
lecteur. 

(1)  Grandet  naquit  à  Angers  en  1647;  ses  nombreux  manuscrits 
sont  conservés  à  la  bibliothèque  de  la  viUe. 


—  162  — 

Voici  donc  ce  qoe  contient  le  manascrity  malben* 
reasement  encore  inédit,  que  possède  la  bibliothèque 
de  la  ville  d'Angers  : 

€  De  saint  MaxentioL 

1  Nous  n'avons  pas  (dus  de  connaissance  de  saint 
Maxentiol,  Uaxeniiolus,  que  de  saint  Doucelin  (1)*  Tan- 
tôt on  rappelle  Maxmseul^  tantôt  Maxensd,  quelquefois 
MaatemeaUf  mais  jamais  petit  saint  Jâessentj  ainsy  que 
Ta  prétendu  M.  Tabbé  Chastebin,  dumoine  de  Notre- 
Dame  de  Paris,  dans  son  vocabulaire  agiologique , 
comme  si  mnlMaxenUialus  était  un  diminutif  de  Maxen- 
Uu8^  Messent. 

>  Il  est  patron  de  deui  églises  paroissiales  en  An- 
jou, savoir,  de  Gunaut  (2)  et  de  Saugé-rHôpital,  toutes 
deux  dépendantes  et  en  la  présentation  du  prieur  de 
Gunaut,  dans  l'église  duquel  reposent  ses  reliques, 
dans  une  châsse  de  bois  de  cèdre,  attachée  à  un  pilier 
du  chœur,  proche  le  grand  autel,  assez  près  de  la 
voûte,  il  y  a  plus  de  huit  cents  ans,  car  nous  lisons 
dans  V Histoire  de  r abbaye  de  Toumm  (3),  faite  par  le 
P.  Ghifflet^  jésuite,  qu'en  l'an  844,  Gharles-lo-Ghauve, 


(1)  Saint  Doucelin  ea^  ainsi  pnentioaiié  par  Ta^hé  Chastelaia  dans 
son  Martyrologe,  au  8  juillet,  p.  337  : 

.  «  X«  siècle.  En  Anjou,  saint  Doucelin  (Dulcilinus)  ,.  confesseur, 
patron  d'Âlonne  (Alumna)  et  de  Vareins  :  mentionné  dans  une  lettre 
do  Jean  XVIII.  » 

(2)  «  Gunaud  vient  de  cunà,  ounarum,  bepceau,  parce  que  dans 
rëglise  de  Notre-Dame  on  y  révérait  dans  ses  couches,  U  sûnle 
Vierge  allaitant  Tenfant  Dieu  dans  le  berceau.  •  Grandet,  Notre- 
Dame  angevine,  p.  i67. 

(3)  Tournus  (Saône-el-Loire). 


—  163  — 

ûls  de  Charlemagne ,  donna  à  Vivien ,  comte  d'Anjou, 
plusieurs  terres  et  seigneuries  en  Anjou,  et  entr  autres 
monasteriolûm  y  dit  le  titre,  quod  vocaiur  Conaidus  ubi 
sancifis  Maxentiolus  corpme  requiescity  et  la  même  an- 
née 844,  le  même  Vivien  donna  à  Hilbodus,  abbé  de 
Saint-Philbert  et  à  ses  moines,  monasteriolûm  quod  vo-- 
catur  Cunaldus  ubi  beaim  eonfe&sor  Maûomtiohis  corpore 
requiescit.  Charles*le-Chau.ve  confirma  cette  même  an-^ 
née  la  donation  que  Vivien  avait  faite  à  Hilbode  ou 
Hilbaut,  abbé  de  Saint-Philbert,  du  monastère  de  Gu- 
naut,  où  le  corps  du  bienheureux  Maxentiol  repose  (1). 
Le  P.  Chifflet  dit  dans  soji  Histoire  de  V abbaye  de  Tour- 
fms,  chap-  XVI,  pag.  75,  où  il  examine  quels  furent 
les  saints  Vital,  Maxentiolus  et  Trogesius,  que  ces  trois 
saints  ne  se  trouvent  point  dans  le  Martyrologe  ro- 
main, qu'étant  néanmoins  qualifiés  saints  dans  les  pa- 
tentes de  nos  Roys  depuis  plus  de  800  ans  et  longtemps 
auparavant  que  le  Saint-Siège  se  fût  réservé  la  cano- 
nisation des  saints,  ce  seroit  une  témérité  impie  de 
vouloir  contester  ce  titre,  veu  partiqulièrement  qu'ils 
ont  receu,  des  honneurs  et  un  culte  public ,  qui  ne  se 


(1)  Juenin,  citant  ces  textes,  p.  34  de  sa  Nouvelle  histoire  de  Tour- 
nus,  dit  :  c  Le  roi  Charles-le-Chauve ,  par  une  charte  datée  de 
Rennes  ea  Bretagne,  le  19  d^octobre  845,  avait  aceitrdé  le  petit  mo- 
nastère de  Cunaud,  où  reposait  (et  où  repose  encore  aujourd^hni)  le 
corps  de  saint  Maxentiole  au  çoipte  Vivien ,  le  même  qui  quatre  ans 
après  fit  prisonnier  Charles,  fils  de  Pépin,  roi  d'Aquitaine.  Ce  comte, 
deux  mois  après,  céda  ce  monastère  à  Hilbod  et  à  sa  communauté, 
par  acte  daté  de  Tours,  le  27  de  décembre  ;  ce  qui  fut  confirmé  le 
même  jour  par  Charles-le-Chauve,  dans  le  monastère  de  Saint-Martin 
de  Tours,  dont  le  comte  était  abbé.  » 


—  164  — 

rôïid  qu'à  ceux  que  l'autorité  légitime  des  prélats  ou 
le  consentement  du  peuple  a  canonisés,  il  ajoute  :  Il 
y  a  apparence  que  les  longues  guerres  des  Normands 
et  des  Anglais,  surtout  Fimpiété  des  hérétiques  du 
siècle  passé,  nous  ont  enlevé  les  livres  qui  contenaient 
1-histoire  de  leur  vie  et  de  leurs  miracles. 

»  Quant  à  saint  Maxentiolus ,  ajoute  cet  autheur,  sa 
feste  se  célèbre  le  dix-huit  décembre,  â  Toumus  et  à 
Gunaut,  en  Anjou.  Toumus  le  dit  seulement  confes- 
seur, mais  Gunaut,  qui  garde  encore  à  présent  son 
sacré  corps  dans  une  châsse  de  cjprès,  le  qualifie 
prestre  et  confesseur.  Or,  il  y  a  une  paroisse  proche 
le  prieuré  de  Gunaut,  de  laquelle  il  est  patron,  où  il 
est  représenté  avec  une  mitre  en  teste,  comme  un 
évesque.  Néantmoins,  puisque  ny  Tournus  ny  Gunaut 
ne  le  qualifient  évesque,  il  faut  croire  que  cette 
mitre  soit  seulement  sacerdotale,  ou,  pour  te  plus,  ab- 
batiale. Son  office  en  toutes  ces  églises  n'a  rieii  que 
du  commun.  - 

»  On  l'a  peint  depuis  dans  un  tableau  de  l'église  de 
Gunaut  avec  un  surplis  et  une  étole  au  cou ,  el  dans  la 
paroisse  de  Gunaut  sa  figure  sur  l'autel  est  en  relief 
avec  un  chasuble.  Pictoribus  atque  poetis  quœlibet  au- 
dendi  faculias  (1). 

»  On  prétend  que  sur  la  fin  du  dernier  siècle,  les 
huguenots  ayant  pillé  l'églîse  de  Notre-Dame  de  Gu- 
naut, ainsi  qu'ils  firent  presque  toutes  les  églises  le 
long  de  la  rivière,  de  Loyre,  ils  prirent  la  châsse  de 
5aint  Maxencel  et  la  vouliirent  ouvrir  à  coups  de  hache, 

(1)  Horace,  Art.  poet. 


—  165  — 

qui  y  parâîssérit  encore,  mais  qu'en  ayant  clé  empê- 
chés par  quelque  accident  inopiné  ou  par  une  pro- 
tection toute  spéciale,  ils  la  jetlétent  dans  la  rivière  de 

« 

Loire,  et  qu'ayant  coulé  sur  les  eaux  jusques  à  Trêves , 
elle  s'y  arrêta,  où  on  la  fut  quérir  processionnellement 
pour  la  reporter  en  l'église  de  Cunaut.  Lé  fait  mérite 
conûrmation. 

1  Quoi  qu'il  en  soit,  il  est  certain  que  les  reliques 
de  saint  Maxencel  sont  à  Cunaut  avant  l'ab  844,  puisque 
le  roy  Charles-le-Chauve  en  fait  mention  en  cette  an- 
née, ce  qui  nous  obligeroit  de  croire  que  ce  saint  se- 
roit  un  des  religieux  qui  se  seroit  sanctifié  dans  le 
prieuré  de  Cunaut,  ou  l'un  des  disciples  qui  y  auroit 
vescu  et  y  seroit  mort  en  odeur  de  sainteté  (1).  On 
l'invoque  contre.....  (2).  » 

Grandet  n'est  pas  moins  explicite  dans  son  manus- 
crit de  Notre-Dame  Angevine ,  que  je  citerai  quoiqu'il 
ne  difTère  pas  substantiellement  du  texte  précédent  : 

f  La  troisième  relique  (3)  est  le  corps  de   saint 

(1)  Tresvaux,  au  tome  I^  p.  71,  de  V Histoire  de  V Église  et  du  dio^ 
cêse  d'Angers,  i858,  se  range  à  cette  opinion  :  •  Cette  ancienne  ab- 
baye (de  Gunaud),  dit-il,  dont  l'église  subsiste  encore  et  est  regardée 
comme  une  des  plus  belles  du  diocèse  d'Angers,  conservait  autrefois 
le  corps  de  saint  Màxéutiole,  confesseur^  touchant  la  vie  duquel  on 
n'a  aucun  détail.  C'était  peut-dtre  un  abbé  ou  un  religieux  de  cette 
maison.  » 

(2)  Grandet.  Traité  historique,  chronologique,  critique  et  moral  de 
la  translation  des  reliques  des  saints  d'Anjou,  p.  93. 

(3)  c  II  y  a  trois  reliques  considérables  dans  cette  église  :  la  pre- 
mière est  un  anneau  de  la  sainte  Vierge  avec  lequel  on  croit  qu'elle 
épousa  saint  Joseph ,  quoyque  bien  dss  églises  du  monde  se  vantent 
de  posséder  un  si  précieux  trésor.  Il  est  d'or  pur  et  si  grand  qu'on 


—  166  — 

Maxentioly  renfermé  dans  une  châsse  de  bois  de  cèdre 
attachée  aa  haut  d'un  pilier  de  l'élise  de  Gunaut, 
proche  le  ^and  autel,  entre  le  sanctuaire  et  le  chœur. 
Il  y  a  plus  de  huit  cents  ans  que  ce  corps  saint  est  ré- 
véré dans  cette  église  :  car  Vivien,  dans  l'acte  de  la 
donation  qu'il  fit  de  Cunaut  aux  religieux  de  SaintrPhil- 
bert  en  844,  dit  :  Monasteriolum  scilicet  quod  vocatur 
Cunaldw  ubi  b.  eonfessor  Maxenciolus  corpore  requies- 
cit.  On  ne  scait  point  quel  étoit  ce  saint,  ny  en  quel 
siècle  il  vivoit.  Les  peintres  dans  ses  tableaux  et  les 
sculpteurs  dans  ses  statues,  le  font  prêtre  séculier.  11 
y  a  plus  d'apparence  que  c'étoit  un  religieux  de  l'ordre 
de  Saint^Benoist  qui  s'est  sanctifié  dans  ce  monastère  ; 
peut-estre  que  c'étoit  aussi  quelque  disciple  de  saint 
Maur,  dont  l'abbaye  n'est  éloignée  de  deux  lieues  de 
Cunaut.  On  en  fait  la  fête  à  Cunaut,  le  17  décembre. 
Deux  églises  paroissiales,  Cunaut  et  Saugé-l'Hôpital,  le 
reconnaissent  pour  patron. 
»  Dans  les  grandes  sécheresses,  on  est  souvent  venu 

peut  le  mettre  au  pouce.  La  pierre  qui  y  est  enchâssée  est  une  amé- 
thiste  bleue  très^6ne.  Autour  de  cette  bague,  par  le  dedans,  sont 
gravées  les  quatre  lettres  de  la  manière  qui  suit  :  A.  G.  L.  A.  Il  est 
difficile  de  dire  ce  qu*elles  signifient,  si  ce  n^est  qu'on  veuille  dire 
que  quelque  dame  de  qualité  nommée  Aglaé,  à  qui  cette  sainte  re- 
lique appartenait,  en  a  fait  présent  â  Notre-Dame  de  Cunaut,  après  y 
avoir  fait  graver  son  nom.  Peut-être  aussi  veulent-elles  exprimer  ces 
quatre  mots  dont  elles  sont  les  initiales  :  Angélus  Gabriel  Loeuims 
Ave;  ou  bien  ce  distique  :  Ancilhm  Gabriel  Lœli/tcaml  Ave,  La 
seconde  est  du  lait  de  la  sainte  Vierge  dans  une  petite  phiole  de 
cristal  de  roche  enchâssée  dans  de  l'argent,  au  travers  de  laquelle  il 
parait  qu-il  y  a  une  autre  petite  phiole  renfermée  qui  contient  ee 
lait.  »  Grandet,  Notre-Dame  angevine,  p.  167. 


—  167  — 

invoquer  ce  saint  à  Cunaut.  On  descendoit  sa  châsse, 
le  clergé  des  paroisses  voisines  s'assembloit,  et  on  le 
portoit  processionnellement  avec  beaucoup  de  solen- 
nité pour  obtenir  la  pluye. 

>  Les  huguenots  qui,  en  1562,  pillèrent  et  ravagè- 
rent toutes  les  églises  le  long  de  la  rivière  de  Loire, 
entrèrent  dans  celle  de  Cunaut,  pcîrent  la  châsse  de 
saint  Maxentiol,  la  jellêrent  dans  la  rivière  de  Loire, 
après  y  avoir  donné  un  coup  de  hache  pour  la  rompre, 
dont  on  voit  encore  la  marque.  Elle  descendit  en  flot- 
tant jusques  au  village  de  Trêves.  Les  religieux  de 
Cunaut  furent  la  quérir  processionnellement  et  la  rap- 
portèrent avec  beaucoup  de  solennité  dans  l'église  de 
Cunaut.  j  (Pag.  167-168.) 

Dans  le  Trailé  déjà  cité,  Grandet  ajoute,  en  se  répé- 
tant : 

c  Saint  Maxentiol,  patron  des  deux  paroisses  de  Cu- 
naut et  de  Saugé-l'Hôpital ,  où  on  célèbre  sa  feste  le 
i8  décembre.  Son  corps  est  dans  Téglise  de  Notre- 
Dame  de  Cunaut,  de  laquelle  Charles-le-Chauve  parle 
en  ces  termes  :  Ecclesia  Beatœ  Mariœ  de  Cunaldo  in 
qua  corpus  beati  Maxmtioli  requiescit.  j  (Ibid.) 

€  Les  reliques  de  saint  Maxentiol  sont  à  Cunaut, 
avant  l'an  8M,  puisque  Charles-le-Chauve  dit  dans  une 
charte  donnée  cette  année  pour  l'église  de  Cunaut  in 
qua  requiescit  corpus  beati  Maxentioli.  Le  P.  Chifflel  en 
son  Histoire  de  fournies  en  parle  chap.  XVI,  pag.  75.  > 
(Ibid.) 

Enfin,  le  respectable  curé  de  Sainte-Croix,  dans  ses 
Notes  sur  les  Vies  des  Saints  ^  compte  saint  Maocenseul 
parmi  les  religieux  solitaires. 


—  168  — 


IV. 


Grandet  a  cité,  d'après  Chifflet,  des  textes  du  ixe  siè- 
cle que  je  considère  comme  étant  de  la  plus  haute 
importance,  relativement  à  la  possession,  de  temps  im- 
mémorial et  par  une  tradition  non  interrompue,  du 
corps  de  saint  Maxentiol.  Aussi  ai-je  voulu  en  vérifier 
l'exactitude  dans  Chifflet  même;  les  travaux  de  se- 
conde main  ne  m'inspirent  confiance  qu'à  défaut  des 
documents  originaux.  Or/,  le  jésuite  Chifflet,  dans  son 
Histoire  de  l'abbaye  royale  de  la  ville  de  Tournus^  Dijon, 
1664-,  pages  201  et  suiv.,  donne  textuellement  les  trois 
chartes,  dont  voici  les  seuls  extraits  qui  nous  intéres- 
sent : 

Charles-le-Chauve,  l'an  844-,  abandonne  au  comte 
Vivien,  monasteriolum  quod  vocatur  Conaldtis^  ubi 
sanctus  Maxentiolus  corpore  requiescit. 

La  même  année,  le  comte  Vivien  donne  à  Hilbode, 
abbé  de  Saint-Philbert,  in  pago  Andecavense,  secus  flu- 
vium  Ligeris,  monasteriolum  scilicet  quod  vocatur  Cu- 
naldus,  ubi  beatus  conf essor  Maxentiolus  corpore  re- 
quiescit. 

Puis  Charles-le-Chauve  ratifie  ce  don  :  monaslerium 
quod  vocatur  Cunaldus ,  ubi  beatus  conf  essor  Maxentio- 
lus corpore  requiescit  (1). 

Voulant  remonter  à  une  source  plus  certaine  encore, 

(1)  Ces  trois  chartes   ont  été   publiées   en  1738,  par  Juenin, 
p.  82,  83. 


—  169  — 

y  ai  parcoura  aux  archives  de  la  préfecture,  les  liasses 
fiombreirses  qui  proviennent  du  prieuré  de  Cunaud,  et 
j^ai  eu  la  chance  de  mettre  la  main  sûr  l'acte  même 
de  la  donation  faite  par  Vivien,  comte  de  Moulins,  à 
l'abbaye  de  Saint^-Philbert,  Hilbode  étant  abbé.  Or,  cet 
acte  porte  expressément  et  sans  variante  avec  les  textes 
déjà  cités  :  in  pago  Andegavemi  secus  fluvium  Ligeris 
moHOSleriûlum  y  sdlicet  quod  vocattir  Cunaldus^  ubi 
bealus  confesser  MaooeîUiolus  cor  pore  requîescil. 

Il  y  a  peu  de  mots  dans  ce  texte  décisif,  mais  comme 
chacun  a  sa  portée,  énumérons-en  de  suite  les  consé- 
quences qu'il  est  facile  de  déduire. 

Le  nom  du  patron  de  Cuiiaud  eàl  établi  d^une  ma- 
nière authentique  :  c^est  Maxenliolus. 

Les  populations  l'ont  canonisé;  aussi  le  qualiiie-t- 
on  smictus  ou  beatusy  ce  qui  est  tout  un. 

Son  titre  liturgique  lui  est  attribué  sous  sa  forme 
rigoureuse  :  c'est  un  confesseur,  confesser . 

Ses  ossements  reposent  à  Cunaud,  sur  le  bord  de  la 
Loire,  dans  le  pays  d'Anjou.  Peut-on  mieux  préciser, 
je  ne  dis  pas  sa  sépulture ,  mais  le  lieu  dé  son  repos 
et  de  sa  gloire? 

Un  moûtier,  un  petit  monastère,  qui  restera  toujours 
prieuré  et,  comme  une  abbaye  de  grand  renom  et  de 
grands  revenus,  aura  son  prieur  comméndaiaire ,  et 
dans  ce  moùtier  des  religieux  qui  prient  le  patron  de 
la  contrée  et  veillent  à  la  garde  du  sacré  dépôt. 

Le  texte  du  ix©  siècle  est  fécond,  mais  en  conclure 
autre  chose  que  ce  qui  précède,  serait  téméraire.  Il  y 
a  là  une  preuve  incontestable  de  possession  immémo* 
riale,  de  culte  public  et  de  tradition- positive  à  l'en'- 

REP.  ARC.  12 


—  170  — 

droit  de  saint  Maxentiol ,  mais  pas  un  mot  d'où  l'on 
puisse  légitimement  inférer  que  saint  Maxentiol  fat 
solitaire  ou  religieux. 


V. 


C'est  en  ce  même  moûlier  de  Ciunaud  qu'eut  lieu , 
le  29  août  1859,  la  récognition  canonique  du  corps 
de  saint  Maxentiol. 

Conformément  aux  prescriptions  du  concile  de  Trente, 
l'approbation  des  saintes  reliques  est  réservée  aux  seuls 
évêques  dans  leurs  diocèses  respectifs  (1).  Seulement, 
dans  les  cas  difficiles,  ils  doivent  s'entourer  des  lu- 
mières  de  plusieurs  ecclésiastiques  que  recommande 
ou  leur  science  théologique  ou  leur  piété. 

Lorsqu'il  fut  question  d'ouvrir  la  châsse  de  saint 
Maxentiol  et  de  constater  l'authenticité  des  reliques 
qu'elle  contenait,  une  commission  spéciale  et  ayant 
pleins  pouvoirs,  fut  formée  par  les  soins  de  Ms^  Ange- 
bault.  Elle  se  composait  de  quatre  membres,  à  savoir  : 

M.  Jacques  Pinson,  curé  de  Gennes  et  doyen  du 
canton; 

M.  Louis  Boyer,  curé  de  Cunaud; 

M.  Louis  Baugé,  curé  de  Candé  ; 

(i)  «  nec  novas  Reliquias  recipiendas,  nisi  eodem  recogoos- 

cente  et  approbante  Episcopo  :  qui  simnl  atque  iis  aliquid  eomper- 
tum  habuerit,  adhibitis  in  eonsilium  theologis  et  aliis  piis  viris,  ea 
ftetat  quœ  veritati  et  pietati  conseatanea  jndicaTerit.  •  Sacras.  Céncii. 
Trident.,  tess.  XXT. 


\ 


~  171  — 

M.  Xavier  Baii)i0r  de  MonUult^  hiptorîograpbe  du 
diocèse. 

Sur  ma  proposition,  et  pour  nous  cOfiformier  aux 
décrets  d'Urbain  VIII  (1),  nous  nous  adjoignimes 
M.  le  docteur  Bosi^rd,  de  Saumura  qui,  à  la  demande 
que  nous  lui  en  fîmes ,  voulut  bien  exjamîner  les  osse- 
ments trcavés  dâits  la  châsse^  et  donner  â  chacun  le 
nom  qui  lui  convenait. 

Or,  ces  ossements  furent  dénommés  et  qualifiés 
comme  il  suit.  J'emprunte  ce  docum^t  au  procés- 
verbal  que  je  rédigeai,  séance  tenante,  dans  la  sacris- 
tie de  l'église  paroissiale  de  Cunaud,  et  au  bas  duquel 
M.  Bossard  apposa  avec  nom  sa  signature. 

Les  ossements  sont  au  nombre  de  cinquante^trois. 
En  voici  le  détail  c  ^ 

1.  Deux  humérus. 

2.  Deux  cubitus. 

3.  Deux  radius. 

Ces  sk  ossements  foïment  deux  blras  entiers. 

4.  Omoplate  du  côté  droit. 

5.  Fraction  de  l'omoplate  du  côté  gauche. 

6.  7.  Os  des  îles,  droit  et  gauche. 
8.  9.  Deux  fémurs. 

Ils  n'appartiennent  pas  au  même  sujet  ou  sont  d'un 
sujet  maladif  et  infirme. 
10.  11.  Deux  tibias. 
Même  observation. 
12.  Un  péroné. 
Il  serait  d'an  second  au  troisième  sujet. 

(1)  Anakeiuf'uris  pontifieH,  4858,  col.  682. 


—  i72  — 

13.  14.  15.  Trois  vertèbres  cervicales. 
16.  17.  18.  19.  20.  21.  22.  Sept  vertèbres  dorsales, 
dont  une  malade. 

23.  ifleste  dé  câlcaneam. 

24.  25.  26.  27.  28.  Cinq  phalanges  de  la  main; 
29.  30.  31.  Trois  ossements  sans  nom. 

32.  33.  34.  35.  36.  37.  38.  39.  40.  41.  42.  43.  44. 
45.  46.  47.  48.  Dix-sept  côtes. 

49.  Os  maxillaire  supérieur  du  côté  droit. 

50.  Os  maxillaire  inférieur  du  côté  droit. 

Cet  os  appartient  à  un  sujet  différent,  qui  devait 
avoir  de  trente  à  trente*cinq  ans. 

51.  Fragment  sans  nom. 

52.  Boîte  osseuse  dii  crâne,  comprmant  un  reste  des 
fragments  des  deux  coronaux,  le  pariétsd  gauche,  l'ôs 
temporal  gauche,  l'os  occiputal  et  la  base  du  crâné. 

Sur  ces  cinquante-deux  ossements,  intacte  ou  frac- 
turés, il  en  fut  réservé  quatre,  pour  être  distribués  de 
la  manière  suivante  : 

Une  côte  à  la  cathédrale; 

l  ne  vertèbre  à  l'église  paroissiale  de  Sauge  ; 

Une  vertèbre  à  l'église  paroissiale  de  Candé; 

Une  vertèbre  à  l'abbaye  de  Solesmes,  au  diocèse  du 
Mans. 

Enfin ,  je  pris^  au  nom  de  l'évêché ,  pour  la  Custode 
des  Saintes  Reliques,  dix  fragments  sans  nom,  tant  gros 
que  petits. 

Quand  les  ossements  eurent  été  nettoyés  de  la  pous- 
sière et  de  la  crasse  qui  les  couvrait,  je  les  déposai 
respectueusement  dans  une  boite  de  bois,  faite  exprès 
et  doublée  de  soie  blanche  brochée  à  fleurs,  puis  j'y 


.i 

1  *'; 


—  178  - 

déposai  le  procès-tverbal,  signé  et  scellé  *  Je  toutç  l'opé-r 
ration,  et,  api*ès  l'avoir  liée  de  rubang  dans  tous  lesi 
sens ,  je  la  scellai  en  plusieurs  endroits  au  sceau  épis- 
copal.  Sur  le  couvercle  de  la  boîte  fut  peinte  cette  ins- 
cription :  Ossa  S.  MaxentioUy  presbyleri  et  confessa- 
ris  [\). 


VI, 


Uéglise.de  Quns^ud  possède-t-elle  et  la  châsse  con- 
tient-elle  tout  ce  qui  reste  du  corps  de  saint  Maxen- 
liol?  Non  assurément,  car  il  existe,  au  dire  de  M.  le 
chanoine  Tresvaux,  w  témoignage  historique  qui  at- 
teste  que  rabbaye  de.  Saint-Btenoist-sur-Loire  vénérait 
des  reliques  de  ^aint  Maxèntiol. 

De  qui  les  tenait-elle?  A  quelle  époque  les  avait-elle 
reçues?  Je  rigpaore- Toutefois,  pour  savoir  si  l'asser- 
tion du  chanoine.de  la. métropole  de  Paris  avait  laissé 
quelques  traces  dçips  le  présent,  j'écrivis  à  l'évêçhé 
d'Orléans,. qui,  sous  la  signature  de  M.  Rabotin,  vi- 
caire-général ,  me  répondajt  en  ces  termes,  à  la  date 
du  28  avril  1859  :  c  Le  cuUq  de  saint  MaxfintfQl  n'est^ 
point  établi  dans  le  diocèse  d'Orléans  :  ses  reliques^ 
si  elles  y  ont  existé,  n'y  existent  plus,  >  et  me  com- 
muniquait une  lettre  non  moins  négative  du  curé  même 
de  Saint-Benoi^t-sur-Lpire,  qui,  le  27  avril  1859,  écri- 
vait à  l'évéché  d'Orléans  :  f  Je  ne  sache  pas  que  saint 

(i)  Cette  bofte  a  été  combinée  île  telle  sorte  qu'elle's'âdapte  par- 
faitement â  la  châsse,  dans  laquelle,  vu  son  état  ^e  vétusté,  il  eût  été 
incomrenant  de  laisser  les  ossements.   ' 


—  174  - 

Maientiôl  ait  jamais  été  connu  on  invoqué  â  Saint* 
Benoist.  Je  ne  trouve  aucune  trace  de  son  culte.  » 


VIL 


Le  procès-verbal 9  dressé  par  moi,  pour  ainsi  dire 
sous  la  dictée  de  M.  le  docteur  Bossard,  souleva,  à 
notre  retour  à  Angers ,  des  difficultés  sérieuses  que  je 
mentionne  pour  les  discuter  et  montrer  leur  inanité, 
au  point  de  vue  de  la  critique  fcagiologiqtie. 

La  châsse  contient  les  ossem,ents  de  deux ,  peut-être 
de  trois  sujets  différents.  Ainsi  le  déclare  la  science 
ostéologique.,  et  il  n*y  a  pas  à  éluder  ses  conclusions. 

Au  principal  sujet  nous  attribuoiis  h  majeure  par- 
tie X  presque  la  totalité  des  ossements ,  car  ces  osse- 
ments ont  la  même  conformation  et  la  même  couleur*. 
Et  le  sujet  auquel,  ils  appartiennent,  nous  le  nommons 
saint  Maxentiol,  parce  que  la  châsse,  de  grande  di-* 
mension,  a  été  évidemment  faite  pour  recevoir  un  corps 
entier,  et  que  ce  corps  a  toujours  été  vénéré  comme 
celui  du  saint  confesseur  dont  la  châsse  a  toujours 
aussi  porté  le  nom. 

A  un  second  sujet  seraient  att^ibuables  un  fémur, 
lin  tibia  et  une  vertèbre  qui  indiquent  un  sujet  mala- 
dif et  infirme.  M.  Bossard  et  plusieurs  atitres  médecins 
consultés,  avouent  que  leur  état  peut,  par  prudence, 
les  faire  mettre  à  part,  mais  quç  si  Ton  juge  à  propos 
de  les  assigner  comme  partie  du  corps  de  saint  Maxen- 
tiol, on  ne  le  peut  qu'avec  cette  réserve,  qui  ne  nous 


-  175  — 

répugne  nuilemeat,  que  le  saint  confesseur,  fut,  anato^ 
miquement  parlant,,  mal  conformé*  La  supposition 
n'est  pas  improbable ,  soit  qu'on  réfère  cette  maladie , 
cette  infirmité  qui  vicia  plusieurs  os ,  à  un  défaut  de 
naissance,  soit  qu'on  capporte  cet  état  anormal  wtè 
austérités  de  sa  vie.  M.  DesbaroUes  me  prête,  en  con- 
firmation de  cette  dernière  hypothèse ,  le  grave  appui 
de  sa  docte  parole. 

c  Les  anachorètes,  qui  annihilent  à  l'aide  des  mor- 
tifications  les  .instincts  jnatériels,  appellent  en  eux,  par 
les  élans  d'un  pieux  enthousiasme,  une  surabondance 
de  lumière  asU*ale  épurée  qui  enivre  leur  mens, 
l'exalte  et  les  jette  dans  des  extases  délicieuses^  rem- 
phes  d'un  ineffable  bonheur;  mais  le  corps  s'étiole, 
devient  faible  et  maladif,  parce  qu'il  n'est  pas  fait 
pour  supporter  les  joies  du  ciel  et  qu'il  s'y  brise, 
comme  éclate  un  vase  d'argile  sous  l'effervescence 
d'une  trop  généreuse  liqueur  (l)«  > 

Restent  le  maxillaire  et  le  pércmé  d'un  troisième  ou, 
suivant  la  commission  épisoopale,  d'un  second  sujet. 

Ges^  deux  ossements  sont  anciens,  mais  leur  aspect 
dénoterait  peut-être  une  date  plus  récente  que  pour 
saint  Haxentiol.  A  quel  saint  les  reporterons-nous? 
Dom  Chamard,  cherchant  à  élucider  ce  point  délicat, 
m'écrivait  le  27  septe^ubre  1859  : 

c  Si  réellement  il  y  a  deux  corps  dans  la  châsse  de 
Gunaud,  ce  ne  peut  être  que  par  addition  des  osse- 
ments de  saint  Philbert,  dont  le  corps  reposa  plusieurs 


fl)  A.  I)Q»barpUea,:i^  mystèv^  ^  |b  nmn^  révélés  $$  expliqniSt. 
p.  192,  193. 


—  176  — 

années,  au  ix^  siècle^  à  Gnnaùd,  et  firécisément  à  côté 
de  saint  Maxentiol.  Vons  savea  qite  è'iuit  un  usage 
constant  à  cette  époque  de  laisser  dans  le  Ken  où  un 
saint  avait  reçu  Thospitalité,  une  portion  insigne  de 
ses  reliques.  C'est  grâce  à  cette  coutume  que  notre 
abbaye  a  le  bonheur  aujourd'hui  de  posséder  un  osse* 
ment  considérable  du  grand  saint  Maur,  qui  est  Tenu 
de  la  Franche-Comté. 

»  Les  peuples  des  environs  de  Gunaod  avaient  une 
singulière  vénération  pour  saint  Philbeii  et  venaient, 
dans  l'église  du  monastère^  en  pèlerinage  devant  une 
statue  de  l'abbé  liilbodus,  qu'ils  croyaient  être  celle 
du  saint  abbé  de  Nermoutier.  — r  Au  reste,  ce  que  je 
vous  dis  sur  ce  mélange  des  ossements  de  saint  Phili- 
bert (1)  et  de  saint  Maxentiol  n'est  appuyé  sur  aucun 
monument  historique,  du  moins  que  je  colnnaisse.  Mais 
il  n'est  pas  inouï  dans  l'histoire  des  saints,  car,  sans 
parler  des  ossements  de  saint  Benoit  et  de  sainte  Sco^ 
lastique,  retrouvés  péle-.méle  daiis  la  même  tombe, 
saint  Ménelé  et  saint  Savinieri,  do  Précigné,  deux  saints 
angevins,  ont  été  également  confhndus  dans  >là  même 
cbàsre,  i  •       '  ' 


(1)  «  Les  Normans  élanl  entrés  en  France  et  portant  la  terreur 
partout,  ces  religieux  (de  Nermoutier)  furent  encore  obligés  de  se 
retirer  à  Cunaud,  en  Anjou,  où  ils  apporlcrent  le  corps  du  saint  (Pfail- 
h6rl)^er4  TanSS?.  I^  là  ih'le  transpcrtèrént  à  Measayy  en  Poitovy 
en  862.  ))  Juenin«  p^  24. 

«  Le  chapitre  (de  Tournus,  en  1703)  a  mis  dans  la  châsse  de  saint 
Filibert^  la  relique  de  saint  Valérien,  qu'il  a  voulu  garder,  parce 
qu'il  n*y  en  a  plus  de  te  saini  Martyr,  aussi  assurées  qu'est  celle-là,  « 
Ibidy  p.  358. 


-  m  ~ 

Ce  fait  ii^efii  :  npUemefit  ksèKte  et,  sans  sortir  du 
diocèse,  j'alléguerai  encore  quelques  exemples  analo-* 
gués.  Ainsi,  à  la  catbéclnaié,  il  y  avait  dans  la  chflsse 
de  saint  Séréné,  outre  les  reliques  de  ce  saint,  celles 
de  saint  Sérénic  et  des  saints  Félix  et  Adaucte.  Tout 
récemment,  j^ai  trouvé  dans  la  châsse  de  saint  Florent, 
à  Saint-Fiorent4ès-Saumur,  le  corps  de  ce  saint,  ac- 
compagné de  partie  de  ceux  de  saint  Méen  et  de  saint 
Judicaël.  De  même  à  Candé,  piour  jia  châsse  de  saint 
Regnauld.  A  Ghemillé  encore,  la  capse,  dite  du  B.  Ro- 
bert d'Arbrissel,  renferme  ses  cendres,  mêlées  à  celles 
de  saint  Pierre  II,  évêque  de  Poitiers. 

De  tout  ceci,  on  est  en  dooit  de  conclure,  en  règle 
générale,  qu'avant  la  révolution  chaque  châsse  prenait 
le  nom  du  principal  saint  qui  y  était  déposé,  quoique 
la  châsse  contînt  d^utres  reliques. 

Je  vais  plus  loin.  J'af&rme  que,  pour  avoir  été  mis 
dans  la  châsse  de  s»int  Maxentiol,  le  péroné  et  le 
maxillaire,  qui  demeurent  sans  attribution  propre  main- 
tenant, ont  été,  à  l'époque  de  leur  déposition,  regar- 
dés  comme  dés  ossements  de  saints,  sans  quoi  pareil 
honneur  ne  leur  eât  pas  été  accordé. 

Qui  garantit,  a-t-on  dit,  que  ces  ossements,  qui 
peuvent  être  profanes,  n'ont  pas  été  introduits  dans  la 
châsse  frauduleusement,  de  manière  à  infirmer  l'au- 
thenticité  du  tout? 

A  cette  objection,  je  réponds,  avec  l'autorité  dont 
Benoît  XrV  nous  arme  contre  les  opposants,  par  cet  ir- 
résistible argument  : 

L'église  de  Cunaud  est  en  possession  depuis  des  siè- 


-  t78  — 

clés,  du  corps  de  salai  Maxentiol;  personne  ne  le  lui 
a  contesté.  Donc  nous  affirmons. 

Pour  la  déposséder  et  attaquer  la  tradition  cons- 
tante, il  ne  suffit  pas  d'une  allégation  vague,  d'une 
hypothèse  plus  ou  moins  fondée»  il  faut  un  fait  réel , 
authentique ,  confirmé  par  plusieurs  témoins  non  sus-- 
pects,  sous  la  foi  du  serment.  Si  l'on  soupçonne  la 
fraude,  qu'on  la  montre,  qu'on  la  fasse  toucher  au 
doigt.  Nier  n'est  pas  prouver.  Douter  n'est  pas  con- 
vaincre. 

Possession,  tradition  et  culte  sont  trois  conditions 
d'authenticité  et  d'identité  qui,  réunies,  forment  la 
certitude  morale^  la  seule  que  l'on  puisse  invoquer  dans 
cette  cause  (1). 

Dans  la  châsse,  îyoute-t-on,  vous  n'avez  trouvé  ni 
authentiques ,  ni  étiquettes,  ni  suaires  enveloppant  ces 
ossements. 

Outre  que  l'usage  d^s  stutbentiques  est  de  date  assez 
récente,  au  moins  d'une  manière  régulière  et  générale, 
il  n'est  pas  dit  que  oeç  authentiques  dussent  être  ri- 
goureusement dans  la  châsse.  Qui  sait  si  ell^  n'exis* 
taient  pas,  ne  fût-ce  qu'à  l'état  de  nptei  dan^  les  ar- 
chives du  prieuré?  Or,  ces  ^r^hives  sçnt  en  partie  à  la 
préfecture,  où  je  le^ai  inutilement  cqmpulséesi  et  en 
partie  chez  un  habitant  de  Gunaud,  de  qui  je  n*ai  pu 

,  (1)  Analecta  juris  poniificii,  t.  lII,.col.  675  el  suiy.  —  Benoît  XIV, 
à  roccasion  du  crâne  de  sainte  Anne,  conservé  chez  les  Chartreux  de 
Bologne ,  a  posé  en  principe  que  dans  les  questions  sur  l'aulhenti- 
cité  des  reliques ,  la  preuve  métaphysique  ou  physique  étant  impos- 
sible,  la  preuve  morale  doit  suffire. 


—  179  — 

en   avoir  communication.  Et  encore,  qui  garantit  que 
ces  archives  ont  traversé  intactes  la  révolution  ? 

Pour  ce  qui  est  des  étiquettes  et  des  suaires,  M.  le 
curé  de  Candé,  qui  a  une  grande  expérience  des  choses 
ecclésiastiques,  ne  s'en  embarrasse  pas.  Il  a  consigné 
ses  observations  dans  une  note  datée  du  21  septembre 
1 859 ,  et  que  je  ne  puis  mieux  faire  que  copier  :  c  N'ou* 
blions  pas  que  cette  châsse  était  asse?  souvent  mise 
dans  l'eau,  et  qu'il  ^  dû  en  résulter  une  humidité  suf- 
fisante pour  consumer  papier  et  étoffes.  S'il  vous  en 
souvient,  il  reste  un  morceau  de  linge  sous  la  porte 
que  nous  avons  enlevée,  st 

J'ajouterai  que  de  ces  immersions  réitérées  il  est  resté 
sur  les  ossements  un  sédiment  éi^ais  que  l'eau  seule  a 
pu  former,  puis  qu'à  une  époque  peu  éloignée  le  curé, 
de  son  propre  chef,  a  ouvert  la  châsse  pour  savoir  ce 
qu'elle  contenait,  et  que  le  pêle-^mêle  des  ossements 
que  nous  avons  constaté  lui  est  parfaitement  imputable, 
confusion  déjà  préparée,  peut-être^  par  la  déposition 
de  la  châsse  et  sa  translation  dans  la  sacristie,  lors  de 
la  restauration  de  l'église. 

H  fallait  prendre  un  parti  relativement  à  ces  deux 
ossements  sans  nom  ni  attribution  possibles.  Nous  les 
mîmes  donc  à  part  avec  cette  étiquette  :  Reliquiœ  sanor^ 
torum. 

Ainsi,  dans  un  cas  analogue,  avait  décidé  la  Sacrée 
Congrégation  des  Reliques,  dont,  pour  abriter  et  cou- 
vrir notre  insuffisance,  il  est  à  propos  de  citer  les 
propres  expressions  : 

€  Divionen.  —  Exlant  apud  Divionensem  Anlistitem 
quamplurimse  Sanctorum  Reliquiaa ,  quœ  tempore  Gai- 


—  480  — 

lies  perturbationis,  anno  praesertim  4793,  e  propriis 
tbecis  seu  capsulis  pretiosîs  avulsae  in  unnm  collectse 

fuerunt itemque  nonnulke  alise  quoque  tum  char- 

tulis  inclusse  sigilloque  munitse,  lum  aliae  denîque 
nuUo  roboralae  documento,  de  quarum  oranium  au- 
thenticitate,  etsi  ex  iesiium  deposiiione  idem  episcopus 
minime  dubitandi  locum  esse  putet,  ab  hac  sacra  ta- 
raen  Gongregalione  Indulgentiis  Sacrisque  Raliquiis 
prseposita,  ut  in  rébus  tanti  momenti  tuto  procedi 
possit,  quid  de  bis  Reliquiis  agendnm  enixis  precibus 
postulavit.  Propositis  ilaque  dubiis  in  generalibus  Emi- 
nentissiraorum  Patrum  C^rdinalium  Gomitiis  apud  Qui* 
rinales  sedes  habitis,  die  S2  februarii  1847 

>  3o  Quid  agendum  ab  Episcopo  circa  caeteras  Reli- 
quias  nullo  documenlo  roboratas? 

»  Ad  tertium  :  Quoties  constet  de  autbenticitate , 
audito  etiam  êapitulo  suse  Calhedralis  Ecclesiae,  poterit 
Episcopus,  vel  in  propria  Gatbedrali  Ecclesia  servare, 
vel  aliis  Ëccleâis  suae  diocesis  servandas  distribuere 
cum  solo  titulo  ReUqmœ  Sanctorum  (1)«  » 


VIII. 


Saint  Maxentiol  a  été  honoré  d'un  culte  public,  c'est- 
à-dire  qu'on  lui  a  rendu  les  honneurs  que  l'élise  at- 
tribue aux  saints. 

Dès  le  vuie  siècle,  plusieurs  chartes  authentiques  le 

(\)  Prinzivalli.  Décréta  autheniica  Sacrm  Congregationis  Indulgen- 
tiis Sacrisque  Reliquiis  prœpûsitœ,  Romœ^  186^2,  p.  486,  487, 


—  181  — 

>qualiiteHt  indistiiK^temént  bienheureux  ou  saint  y  ce  qui, 
pour  ces  époques  recuiées,  est  identique .  quant  à  la 
signification. 

Un  titre  lîtui^iqué  lui  est  également  attribué  dans 
ces  mêflies  chartes,  qui  n'établissent  pas  un  droit 
nouveau  ;  mais  constatent  seulement  un  £ait  ancien  et 
acquis.  Ce  litre  est  celui  de  Confesseur  ^  qu'admettent 
à  la  fois  le  prieuré  de  Guiiaud  et  l'abbaye  de  Toumus. 
Sa  fête  est  fixée  dans  ces  deux  localités  au  18  dé- 
cembre, son  jour  natal  ou  anniversaire  de  sa  mort. 

Grandet  et  Chifflet  (cbap.  xvi)  disent  que  son  ofSce 
se  prenait  au  commun^  ainsi  qu'il  fut  toujours  fait  par 
la  suite.  Mais  Juenin,  plus  explicite,  parle  d'un  office 
de  douze  leçons,  ce  qui  est  conforme  au  bréviaire  mo- 
nastique. Pierre -Juenin  était  un  cbanoine  de  Tournus 
qui,  en  1733,  publia  à  Dijon,  en  un  volume  in-4<>,  la 
Nouvelle  histoire  de  fabbaïe  royale  et  collégiale  de  saint 
Filibert  et  de  la  viUe  de  Toumus.  Dans  le  chapitre  vi, 
qui  traite  des  saints  qui  ont  été  révérés  particulièrement 
à  ToumuSj  l'historien  s'exprime  ainsi  : 

c  Saint  Maxentiole.  Son  corps  reposoit  dans  le  mo- 
nastère de  Cunaud,  quand  ce  Monastère  fut  donné  aux 
Moines  de  Saint-Pilibert  ;  et  on  l'y  conserve  encore 
aujourd'hui.  L'on  y  donne  la  qualité  de  Prêtre  au  saint, 
dont  on  y  fait  la  fêle  le  18  de  décembre,  jour  auquel 
on  en  faisoit  aussi  autrefois  un  office  à  douze  leçons , 
dans  l'Âbbaïe  de  Tournus.  i> 

Ce  mot  aufré/oi^  indique  suffisa  m  ment  qu'au  xviii^  siè- 
cle, saint  Maxentiol  était  oublié  à  Tournus,  et  que  les 
chanoines  en  succédant  aux  religieux  n'avaient  pas  en- 
tendu continuer  leurs  dévotions  particulières. 


—  188  — 

D'office  propre  je  n'en  connais  point  dans  la  liturgie 
angevine  y  tant  celle  ad  romani  formam  que  celle  qui 
imita  la  liturgie  parisienne.  Je  ne  m'expliquerais  pas 
cet  oubli  y  si  de  nos  jours  la  même  indifférence  pra- 
tique n'avait  atteint  le  pauvre  saint,  à  qui  on  a  ftéfété 
des  étrangers  sans  racines  dans  le  passé  de  l'Église 
d'Angers,  ni  sans  reliques  présentes  et  suffisantes  pour 
motiver  une  telle  adoption. 

Je  le  regrette,  car  avant  tout,  dans  le  propre  diocé- 
sain, la  place  devait  être  aux  sainU  locaux. 

Les  Martyrologes  ont  négligé  saint  Maxentiol.  Un 
seul ,  celui  de  l'abbé  Ghastelain ,  lui  donne  une  bien- 
veillante et  sympathique  hospitalité.  Ses  paroles  font 
du  bien  à  lire,  car  elles  contiennent  une  réparation  à 
l'endroit  d'une  des  gloires  de  l'Anjou.  Je  le  cite  tex- 
tuellement : 

c  Maxentiole,  le  même  que  Mazenceul.  «  (P.  1146.) 

c  Mézenceul  {Maxentiolu$)j  honoré  en  Anjou  :  17  dé- 
cembre. >  (P.  1148.) 

a  A  Cunaud,  en  Anjou,  saint  Mézenceul,  confesseur, 
patron  de  Sauge  au  même  pays,  —  Cunaldi.  —  Maxen- 
tiolus.  —  Salvtacum.  >  (P.  639.) 

Saint  Maxentiol  fut,  en  effet,  choisi  pour  être  le 
patron  de  deux  paroisses.  Et  suivant  cet  axiome  du 
droit  :  Patronus  semel  légitime  eleclus  nequit  in  alium 
dfmmutari  (1),  il  est  encore  en  possession  de  cet  hon- 
neur dans  les  paroisses  de  Gunaud  et  de  Saugé- 
THôpital,  au  diocèse  d'Angers.   Même  si  l'on  ajoute 


(1)  s.  Ritaum  Gongcegatio,  6  avril  1^8  et  13  juâl.  i658  m 
Fundana.  * 


—  183  — 

foi  à  VHistùire  de  l'Église  et  dm  diocèse  d*Angers\  par 
ll«  Tresvaux,  une  autre  église  aurait  été  dédiée  soUs 
son  vocable,  à  Saint  «Benoit -sur  «Loire,  au  diocèse 
d'Orléans. 

Ces  dédicaces  d'églises  paroissiales  sont  anciennes, 
car  il  en  est  fait  mention  dés  le  Xii»  siècle,  dans  deux 
textes  que  me  fournissent  les  archives  de  la  préfec- 
ture. 

Le  SO  juin  1130,  l'évéque  Ulger  confirme  à  Cunaud 
ses  possessions  :  Monasterium  B.  Mariœ  de  Ctwatido 

cum  ecdesià  S,  Maxentioli ecclesiam  Sancti  Maxen- 

ticli  de  Tarentiaco  (1). 

En  1181,  le  pape  Alexandre  IH  fait  une  confirmation 
analogue  en  des  termes  identiques  :  Ecclesiam  sancti 
Mûxendoli  de  Cunaldo...  ecclesiam  sancti  MaxendoU  de 
Tarenciaco. 

Quel  est  le  lieu  norùmé  ici  Tarentiacum  f  Aucun  do- 
cument n'a  encore  pu  nous  le  faire  déterminer  d'une 
manière  certaine,  mais  tout  nous  porte  à  croire  qu'il 


(i)  Une  bulle  de  Calixtc  II,  datée  de  1120,  eonfirme  à  Tabbaye  de 
Tournus ,  les  possessions  suivantes  :  «  In  Andegavensi  (episcopatu), 
cellam  Cunaldi  cum  appendiciis,  Ecclesias  de  Dcadi  castri,  sancti 
Dionysii,  S.  Petrî,  S.  Johannis»  S.  Leodegarii»  Ecclesiam  S.  Laurentii, 
ViTlam  Landrum,  Terenciacum,  Ecclesias  de  Varinas,  sanctœ  Marias 
d«  Tânays  cum  cappella.  »  Juenin,  p.  145,  146.  La  bulle  d'Alexan- 
dre Ili,  citée  par  Juenin,  p.  174  et  suit.,  est  datée  du  8  avril  1179, 
Le  pape  s'y  exprime  ainsi  :  a  In  Andegavensi  (episcopatu),  eellam 
S.  Mariœ  Cunaldi^  cum  appendiciis,  Ecclesias  de  Duadi-castris,  S.  Dio- 
nisii,  S.  Petri,  S.  Johannis,  S.  Leodegarii,  Ecclesiam  deLogne,  Eccle- 
siam S.  Laurentii,  ViUam  Landrum,  Terentiacum,  Ecclesias  de  Varin* 
nas,  S.  Mari»  de  Thanais^  cum  capella.  » 


—  184  — 

faut  y  voir  le  lieu  désigné,  depuis  sans  doute  >  sous  le 
nom  de  Saugé-rHôpiCal. 

En  1355  et  1358,  l'église  pài*oissiaIe  de  Sainl^Maxen- 
tiol  de  Cunaud  est  ainsi  désignée  :  <  Aimericus  de  Laça 
presbyter  curatus  seu  vicarius  ecclesie  parocbialis  sancti 
Maiencioli  de  Gunaldo.  9  (Arch.  préf.)  Il  s'agit  ici  d'un 
procès  qu'eut  le  monastère  de  Gunaud  avec  le  chapitre 
d'Angers,  au  sujet  de  la  forêt  de  Maleloi,  en  dallée. 

Si  Airaery  du  Lac  est  qualifié  vicaire  dans  cette 
pièce,  c'est  qu'il  n^avait  pas  la  cure  proprement  dite, 
que  s'étaient  réservée  les  religieux  Bénédictins,  curés 
primitifs. 

Les  mêmes  archives  nous  fournissent  encore  un  do- 
cument, daté  de  1608.  C'est  une  fondation  de  messe, 
avec  absolution,  chaque  vendredi  de  l'année ,  par  Syl- 
vestre Tallandeau ,  c  en  l'église  parrochiale  de  saint 
»  Maxenseul  de  Cunaud^  en  la  chapelle  de  Sainte-Jehan- 
»  Baptiste,  par  eux  restaurée  et  faii  repeindre  en  l'in- 
»  tention  di  faire  leur  sépulture.  » 

Si  Saugé-l'Hôpital  dédia  son  église  paroissiale  à 
saint  Maxentiol,  la  raison  en  est  bien  simple  et  le 
Fouillé  de  1648  (au  Musée  diocésain)  l'insinue  claire- 
ment quand  il  imprime  que  Sauge  a  pour  patron  de  ce 
bénéfice  ecclésiastique  le  prieur  de  Cunault  (1). 

(1)  «  Suinct  Mâxenceul,  aussi  confesseur,  patron  des  églises 

parrochialles  de  sàinct  Maxenceul,  de  Cunaud,  et  de  sainet  Maxenceul 
de  Saugé-rHôpilal.....  Ces  trois  confesseurs,  saint  Florent,  saint  Dou- 
celin  et  saint  Maxenceul,  mes  patrons.  y>  Texier,  prieur  d'Allonne, 
IHscmtrs  taueharU  la  fondation  de  la  diapelle  de  Noire-Dame  de  Gua^ 
risont  à  Rossé.  Saumur,  1648,  p.  48,  49. 


—  185  — 


IX. 


Nous  n'aurions  pas  de  documents  écrits  en  faveur  dé 
l'antiquité  du  culte  public  rendu  à  saint  Maxentiol,  que 
les  monuments  eux-mêmes  parleraient,  au  point  de 
faire  remonter,  au  moins  à  plusieurs  siècles,  rauthen- 
ticité  de  cette  vénération  populaire. 

Des  deux  églises  paroissiales  de  Cunaud  et  de  Sauge, 
Tune  est  en  ruines,  Fautre  vient  d'être  démolie  récem- 
ment. Toutes  les  deux  exigent  donc  par  leur  état  actuel 
ou  leur  disparition,  un  mot  de  souvenir. 

L'église  de  Saint-Maxentiol  de  Cunaud  est  située 
vers  le  haut  du  bourg,  à  mi-côte,  un  peu  au-dessus 
et  au  sud  de  l'église  conventuelle  de  Notre-Dame.  En 
plan,  elle  dessine  une  croix  latine,  dont  le  chevet,  au- 
jourd'hui détruit,  regarde  l'orient,  suivant  un  usap: 
symbolique  et  traditionnel. 

L'ensemble  accuse  nettement  le  style  lourd  et  simple 
du  xi®  siècle.  Cette  église  est  bien  celle  dont  parlent 
Ulger  ^t  Alexandre  111.  L'appareil  est  de  petite  dimen- 
sion; les  fenêtres  sont  étroites. 

Seule  l'abside  du  transsept  nord  est  intacte;  une  fe- 
nêtre l'éclairé,  et  cette  fenêtre  offre  cette  particularité 
que  le  cintre  qui  la  couronne^  est  formé  d'une  seule 
pierre  où  les  claveaux  qui  n'existent  pas  ont  été  si- 
mulés par  un  trait  large  et  profond. 

L'arc-doubleau,  qui  met  en  communication  la  nef 
avec  l'abside  centrale  est  égayé  par  une  fresque,  peinte 

REP.  ARC.  13 


—  486  — 

en  rouge,  où  le  monogramme  du  i\om  de  Jésus,  écrit 
en  gothique  carrée  avec  le  sigle  abréviatif,  Qui  coupant 
la  lettre  H  horizontalement  donne  à  la  hampe  l'aspect 
d'une  croix,  le  monogramme  IHS,  dis-je,  alterne  avec 
un  ornement  composé  d'un  point  central  cantonné  en 
croix  de  quatre  points  plus  gros. 

Un  rétable  du  x\iii<^  siècle  offre  une  niche  où  devait 
se  trouver  la  statue  du  saint  que  nomme  ainsi  une 
inscription  mutilée  : 

s.  mAxENCiOLE. 

En  1723,  un  procès  eut  lieu.  Le  dossier  en  a  été 
conservé  aux  archives  de  la  préfecture.  Il  y  est  dit  que 
le  curé  de  Saint-Maxentiol  doit  se  trouver  à  N.-D.,  en 
surplis  pu  camail,  aux  fêtes  solennelles,  pour  assister 
aux  premières  et  secondes  vêpres,  dire  la  messe  pa- 
roissiale, à  basse  voix,  à  un  des  petits  autels,  après 
matines,  et  prendre  part  aux  grandes  messes  ;  en  outre 
qu'il  ne  peut  entrer  dans  l'église  de  N.-D.,  bs^nniére 
et  croix  levée,  et  doit  marcher  en  procession  avant  les 
veligieux  et  siéger  après  eux  au  chœur. 

Tout  cela  constate  nettement  la  sujétion  de  l'église 
paroissiale  au  prieviré,  et  l'état  de  cette  église  qui,  au 
commencement  du  xviii®  siècle,  était  encore  propre  au 
service  ordinaire. 

Par  lettres  patentes  de  4737,  Tévêque  Jean  de  Vau- 
gîraud  créa,  à  la  Rossignolerie ,  le  séminaire  Saint- 
Charles  pour  les  prêtres  pauvres  et  infirmes;  en  1741, 
il  l'unit  au  prieuré  de  Cuna\ud,  dont  il  supprima  les 
religieux.  Ils  étaient  ai^  nombre  de  six,  dont  un  seul 
rest^  à  Cunaud  pour  desservir  l'église  et  acquitter  les 


—  187  — 

messes.  Les  pensions  qu'il  fallait  leur  payer  absorbèrent 
le  revenu.  Dans  cet  acte  d'union ,  l'évéque  expose  que 
sur  le  chœur  de  N.-D.  t  a  été  anciennement  construit 
)  une  espèce  de  forteresse  ou  château  »  qui  est  actuel* 
»  lement  tout  délabrée  et  occasionne  la  ruine  de  cette 
»  partie  de  l'église,  ruinée  par  l'hiver.  >  La  réparation 
est  estimée  quatre  mille  livres.  Le  Conseil  d'État»  le 
11  juillet  1749»  autorise  la  suppression  du  chœur  et 
du  sanctuaire»  que  l'on  sépare  de  la  nef  par  un  mur 
de  refend»  c  une  si  grande  église  étant  non-seulement 
>  inutile»  mais  même  nuisible  à  cause  de  l'entretien  et 
t  des  réparations  immenses  qui  y  seront  nécessaires 
»  et  qui  absorberaient  presque  tout  le  revenu  du 
i>  Prieuré.  > 

Sur  ces  entrefaites»  le  clocher  de  l'église  paroissiale 
croula  et  entraîna  dans  sa  chute  la  ruine  de  l'abside. 
Il  fallut  dé  suite  pourvoir  aux  besoins  du  ministère 
curial.  D'après  l'acte  d'union  au  séminaire»  l'église 
N.-D.  ne  pouvait  être  cédée  à  la  paroisse.  Il  fallut  dé- 
roger à  celte  clause»  au  moins  pour  quelque  temps. 

Aussi  la  messe  paroissiale  fut-elle  autorisée  au  grand 
autel,  afin  d'éviter  la  dépense  d'une  reconstruction. 
L'office  monastique  né  devait  pas  souffrir  de  cette  con- 
cession forcée»  qui  du  reste  n'était  que  temporaire  et 
qui  trouvait  sa  compensation  dans  l'abandon  des  ma- 
tériaux de  l'ancienne  église  demi-ruinée. 

f  II  est  certain,  m'écrit  M.  le  curé  de  CanJé»  à  la 
date  du  18  août  1860»  que  pendant  la  révolution»  quoique 
le  culte  eût  cessé  dans  la  plupart  des  églises  et  que 
celle  de  Cunaud  en  particulier  fût  devenue  comme  la 
grange  des  habitants  du  bourg»  il  est  certain  que  rien 


—  188  — 

n'y  fut  change.  Je  l'ai  vue  en  1804  ou  1805,  telle 
qu'elle  était  avant  la  révolution.  Il  y  avait  trois  autels, 
dans  le  meilleur  état  de  conservation.  Le  grand  autel 
était  adossé  au  mur  de  refend  que  Ton  avait  construit 
pour  séparer  le  chœur  de  la  nef.  Les  deux  autres  qui 
étaient  sous  le  vocable  de  la  sainte  Vierge  et  de  saint 
Maxentiol  —  à  ce  dernier  figurait  une  toila  actuelle- 
ment à  la  cure  —  avançaient  en  dehors  du  chœur  et 
servaient  de  base  à  une  arcade  en  forme  de  jubé,  sur 
laquelle  étaient  posés,  de  grandeur  naturelle,  un  cru- 
cifix ,  la  sainte  Vierge  et  saint  Jean.  » 

L'église  de  Notre-Dame  fut  donc,  à  partir  de  Mfi^r  de 
Vaugiraud,  l'église  paroissiale  du  bourg  ;  elle  l'est  en- 
core aujourd'hui.  Cette  translation  a  entraîné  à  sa  suite 
une  conséquence  liturgique  qu'il  n'est  pas  possible  d'é- 
luder, malgré  la  confusion  faite  par  le  Fouillé  de  1783 
qui,  à  la  page  86,  dit  à  tort  :  Cure  saint  Maxmliol  ou 
Notre-Dame  de  Cunaud. 

L'église  paroissiale  est  effectivement  sous  le  vocable 
de  Notre-Dame,  c'est-à-dire  que  la  sainte  Vierge  est 
fêtée  comme  titulaire. 

Le  titre  eurial,  toujours  attaché  à  l'église  paroissiale, 
est  également  de  Notre-Dame.  Aussi  les  actes  ofiiciels 
de  l'évêché  doivent- ils  inscrire  sous  cette  formule  : 
iV...,  curé  de  N.-D.  de  Cunaud. 

Mais  cette  translation  n'a  point  porté  préjudice  à 
saint  Maxentiol,  qui  n'en  demeure  pas  moins  patron  du 
lieu  ou  de  la  paroisse  et  doit  chaque  année  être  fêté 
comme  tel,  avec  octave. 

J'en  dirai  autant  de  Sauge ,  qui  vient  de  rebâtir  son 
église.  J'ignore  son  vocable,  qui  pouvait,  sans  difficulté 


—  189  — 

aucune,  différer  de  Tancien.  Mais,  si  Téglise  a  pour 
titulaire  rimmaculée  Conception ,  par  exemple ,  saint 
Maxentiol  reste  comme  patron  de  la  paroisse,  puisqu^cn 
France  le  patron  de  la  paroisse  et  le  titulaire  de  V église 
n'étaient  pas  distincts. 

Voici  mes  noies  sur  l'église  détruite  de  Saugé-rHôpital  r 
Rectangulaire  en  plan  et  orientée,  elle  a  à  Touest 
une  porte  romane  peu  sculptée  (Des  claveaux  en  ont 
été  réservés  pour  le  Musée  diocésain).  La  galerie,  qui 
précède  la  porte  du  sud ,  vient  de  la  commanderie  de 
Sauge  et  est  entourée  de  bancs  de  pierre  pour  les  dé- 
libérations de  la  fabrique.  La  charpente  et  le  lambris 
sont  datés  de  1614  et  signés  PIERRE  GVINAIS  C  (bar- 
pentier).  Le  bénitier,  de  forme  octogonale,  remonte  au 
xni®  siéele  :  il  est  sculpté  d'un  écu  faseé  de...  et  de...^ 
de  six  pièces  y  à  une  bande  de...  brochant  sur  le  tout. 
Dans  le  sanctuaire,  deux  arcades  ogivales,  posées  sur 
des  colonnes,  annoncent  le  xii^  siéele,  époque  de  la  cons- 
truction générale  de  l'église.  Une  cloche  de  1732,  un 
tronc  pour  les  pauvres  du  xviii©  siéele  et  une  pierre 
sacrée  en  ardoise,  avec  inscription  de  1768  et  armoi- 
ries (aujourd'hui  au  Musée  diocésain),  composent  le 
mobilier  archéologique  de  l'église. 

Elle  est  sous  le  vocable  de  saint  Maxentiol,  dont  elle 
célèbre  la  fête  le  19  décembre. 


X. 


Une  des  conséquences  inmiédiates  de  la  reconnais- 
sance officielle  de  la  sainteté  est  de  faire  exhumer, 


—  100  — 

lev^r  de  terre  le  corps  du  saint  personnage  à  qui  S6s 
vertus  ont  mérité  Thomniage  de  la  vénération  pu- 
))lique  (1). 

Ainsi  fut-il  fait  pour  saint  Maxentiol  à  une  époque 
qui  nous  est  inconnue.  S'il  est  permis  de  lui  appliquer 
ce  que  l'histoire  ecclésiastique  nous  apprend  des  autres 
corps  saints,  l'église  elle-même  fut  choisie  pour  le  Heu 
de  sa  nouvelle  sépulture.  Uni  sarcophage  de  pierre 
réunit  ses  ossements  desséchés  et  désormais  séparés  des 
chairs,  et  le  sarcophage  fut  placé  sous  l'autel  pi^ncipal 
où  s'offraient  chaque  jour  les  saints  mystères.  Peut- 
être  m^me  le  sarcophage  fut^l  l'autel  lui-même  dont 
rintérieur  sç  r^m{Ait  du.  pieux  trésor. 

Au  xui^  siècle,  l'église  prieurale  de  Cunaud  s'acheva, 
après  une  série  de  travaux  qui  occupèrent  plusieurs 
générations.  Quand  la  sculpture  et  la  peinture  à  fres- 
ques eurent  embelli  cet  incomparable  édifice»  où  l'o-^ 
give  succède  et  se  mêle  au  plein  cintre ,  saint  Maxen-^ 
tiol  fut  appelé  à  en  devenir  l'hôte  principal  et,  sortant 
des  profondeurs  obscures  de  l'autel  où  il  gisait,  appa- 
rut aux  yeux  de  tous  dans  une  châsse  splçndide  »  que, 
je  Q^hésite  pas  à  proclamer  la  plus  belle,  œuyre  d'art 
que  possède  le  diocèse  en  ce  genre. 

Trois  choses  concourent  à  donner  à  ce  petit  monu- 
ment, d'une  parfaite  élégance,  un  attrait  particulier  : 
l'époque  qui  le  sculpta,  son  iconographie  et  sa  conser- 
valion. 

Le  xiii^  siècle ,  qui  façonna  et  orna  cette  châsse,  l'a 

(1)  ff  Cette  cérémonie  de  lever  de  corps  de  terre  tenoit  encore 
alors  (en  1 131)  la  place  d'une  canonisation  légitime.  »  JueBÎn,  p.  1 16. 


ikii  âvec  tout  le  goût  et  la  perfection  qui  le  distinguent. 
Aussi  mérite-t-etle  non-seulement  d^étre  réproduite 
par  la  photographie,  mais  encore  par  le  moulage»  TeMe 
fat  longtemps  ma  pensée  et  mon  désir  le  plus  vif.  Fen 
laisse  la  réalisation  à  M.  Godard-Faullrier,  qui  foudra 
certainement  enrichir  le  musée  de  la  ville  d^Une  cô* 
pie  de  cette  châsse^  car  l'art,  autant  que  Tarchéologie , 
est  intéressé  i  étudier  un  semblable  et  aussi  gracieux 
modèle. 

La  châsse  se  divise  en  deux  parties  :  le  bas,  creusé 
dans  un  tronc  d'arbre;  le  haut,  en  forme  de  toit,  qui 
tibriie  ce  sépulcre,  presque  primitif  (1).  Elle  est  bien 
un  peu  disloquée,  fendillée,  maisr  ne  refuse  pas  encore 
service.  Sa  vétusté  n'est  pas  laideur,  et  ses  défauts,  in- 
bérentâ  à  l'âge,  ne  constituent  pas  impuissance.  Les 
peintures  à  fond, d'or  qui  la  rehaussaient  sont  plus  que 
ternies,  elles  ont  presque  disparu  et  il  faut  uii  œil  atten- 
tif et  exercé  pour  les  retrouver  sous  la  crasse  rongeante 
que  les  siècles  y  oiit  entassée. 

Il  serait  convenable  de  la  nettoyer  pour  hii  donner 
un  air  de  propreté  dont  elle  a  besoin,  mais  il  serait 
dangereux  de  la  restaurer,  encore  plus  de  vouloiir  la 
compléter.  Son  état  exige  des  soins,  de  la  sollicitude, 
du  respect;  tout  cela,  mais  rien  de  plus.  La  conserver 
telle  quelle  est  plus  sage,  plus  prudent  que  de  la  com- 
pléter, la  repeindre  9  car  à  tout  ce  remaniement  elle 
perdrait  sa  physionomie  antique,  son  intérêt  particu- 
lier, ce  cachet  vénérable  que  donnent  les  ans.  Qui  d'ail- 

(i)  Longtemps  les  Feancs  furent  ensevelis  dans*  des  Vroncs  d^arbrcs 


r 


TTCnses. 


—  192  ~ 

leurs  serait  assez  téméraire  pour  tenter  une  restauration 
qui ,  tout  considéré ,  mériterait  la  qualification  sévère , 
mais  exacte,  de  mutilation? 

Il  y  a  des  têtes  de  moins,  des  absences  regrettables, 
mais  qu'y  faire?  l'iconographie  dont  elle  est  parée, 
n'en  est  pas,  pour  cela,  moins  apparente  et  moins  sen- 
sible. 

La  châsse  de  saint  Maxentiol  à  la  forme  obloûgue 
d'une  grande  église  (1).  Comme  elle  aussi,  ses  parties 
regardent  les  quatre  points  cardinaux,  et  prennent, 
de  cette  orientation  calculée,  une  intention  symbolique, 
qui  est  d'autant  plus  naturelle  qu'elle  est  dans  l'es- 
sence même  des  choses. 

Trois  sortes  de  personnages  y  figurent,  sculptés  dans 
le  bois  en  fort  relief  par  une  main  magistrale  :  Dieu , 
la  Vierge,  les  Apôtres  et  saint  Martin. 

Au  nord,  le  Christ  juge  siège  dans  une  nuée  que 
soutiennent  deux  anges,  au-dessus  des  apôtres,  qui  par- 
tagent ses  travaux.  Saint  Jean  tient  en  main  la  palme 
des  élus,  saint  Pierre  les  clefs  qui  ouvrent  ou  ferment 
les  portes  du  ciel,  tandis  que  les  anges  présentent  aux 
vainqueurs  les  parfums  de  l'encens  et  les  joies  de  la 
couronne.  Tel  est  en  partie  le  thème  symbolique  de  la 

(1)  «  Il  n'existe  aujourd'hui  qu*un  bien  petit  nombre  de  ces  châs- 
ses en  bois  d'une  époque  ancienne  destinées  à  contenir  des  corps 
■saints.  Nous  en  connaissons  une  à  Guuault  (Maine-et-Loire),  sur  la- 
quelle on  voit  encore  des  traces  de  peintures  et  de  sculptures  repré- 
sentant les  douze  Apôtres,  le  Christ  accompagné  d'anges  thuriféraires  ; 
5J|  formé  est  d'ailleurs  d'une  extrême  simplicité  ;  une  arcature  ogi- 
vale sépare  les  Apôtres.  Cette  châsse  date  du  xiil«  siècle.  ■  Viollet- 
le-Duc,  Dietimnaire  raisonné  du  mobilier  français,  p.  70. 


—  193  — 

grande  verrière  qui  décore,  à  la  cathédrale  d'Angers, 
la  rose  du  transsept  septentrional. 

Le  nord  glacé  fait  allusion  au  froid  de  la  tombe  et 
aux  sévères  rigueurs  du  jugement  (1). 

Le  midi,  chaud  et  éclairé,  symbolise  là  grâce  et  la 
vie  (S).  A  la  rose  sud  de  la  cathédrale,  c'est  le  ciel  ;  à 
Gunaud,  c'est  Dieu,  encensé  par  ses  anges,  qui  répand 
à  pleines  mains  les  flammes  du  pur  amour,  de  son  es- 
prit de  charité  (3).  Des  anges,  par  leurs  chandeliers 
allumés,  proclament  que  Dieu  est  la  lumière  du 
monde  (4)  et  que  cette  lumière  céleste  se  communique 
aux  apôtres  qui,  eux  aussi,  deviennent  la  lumière  de 
la  terre  :  vos  estis  lux  mundi  (p).  Et  cette  lumière  luit 
dans  les  ténèbres,  dans  les  œuvres  des  apôtres,  qui 
sont  leurs  prédications,  leur  doctrine,  symbolisées  par 
les  tablettes,  les  livres  et  les  phylactères  qu'ils  ouvrent, 
tiennent  ou  déroulent. 

A  l'ouest,  où  le  soleil  se  couche,  mais  pour  repa- 
raître pl\is  brillant,  Marie  s'endort  d'un  court  som* 
meil  (6).  Les  apôtres  l'entourent,  tandis  que  saint  Jean 

(i)  «  Aquilo,  ^Itus  redarguentis  severitas.  »  Spidleg,  Solesmense, 
t.  m,  p.  i56. 

•  (2)  «  Auster ,  ventus  calidus  et  penetrativus ,  in  scripturis  sacris 
saepe  ponitur  in  designatione  Spiritus  Sancti.  >  Ibid,,  p.  455. 

(3)  Yiollet-'Ie-Duc  a  publié  dans  son  Dicticnnain  dumoMier,  p.  234, 
un  motif  analogue ,  d'après  le  rétable  def  Ceblentz ,  qui  date  aussi  du 
xuie  siècle. 

(i)  «  Ego  sum  lux  mundi.  »  S.  Joan.,  c.  viil,  j^.  12.  —  «  Ego  lux 
in  mundum  veni.  »  S.  Joann.,  c.  xii,  f,i6. 

(5)  Math.,  c.  v,  j^.  14. 

(6)  ■  Oriens  est  pueritia;  Occidens,  aetâs  decrepita.  >  Spieileg. 
Sokêni.,  t.  III,  p.  456. 


—  494  — 

reçoit  d'un  ange  là  palme  qu'il  portera  aux  funéralHea 
de  sa  mère  adoptive  (1).  Saint  Piei^re  se  tient  an  che-* 
tet  du  lit  :  où  le  reconnaît  à  ses  olefs  et  à  sa  tonsure 
traditionnelles  (3). 

Puis,  Marie  monte  au  ciel,  couronnée  comme  une 
reine,  dans  une  auréole  que  six  anges  soulèvent. 

Enfin,  à  Torient,  au  point  où  le  soleil  se  lève,  où  la 
lumière  éclate^  saint  Martin,  par  un  trait  de  sublime 
charité)  fait  son  entrée dansla  vie  chrétienne»  Aux  portes 
d'Amieiis,  il  coupe  la  itiôitié  de  son  manteau  pour  en 
vêtir  un  pauvre. 

Ce  panneau  est,  il  est  vrai,  rapporté  en  cet  endroit, 
puisqu'il  date  au  plus  tôt  du  xv<^  siècle,  et  est  peint  sur 
fond  d'or  quand  tout  le  reste  de  la  châsse  est  sculpté  p 
mais  qui  empêche  d'admettre  que  la  porte  étant  brisée 
comme  se  brisa  en  pai^tie  le  côté  opposé ,  ce  panrieau 
reproduise  le  sujet  sculpté  sur  la  porte  d'autrefois?  . 

Or,  saint  Martin,  n'a  pas  été  mis  là  au  hasard.  Ses 
rapports  avec  ^àint  Maxénticd  motivaient  sa  préseiieei 
Le  maître,  tiui  avait  initié  à  la  vie  chrétienno  et  sacer^ 
dotale  le  saint  confesseur,  méritait  de  figurer  près  de 
son  disciple.  Mort,  il  ne  Tabandonnait  pas  et  veillait  à 
la  porte  de  sa  châsse,  comme  une  sentinelle,  ou  plutôt 
un  ami  toujours  fidèle  ? 

Qui  sait  môme  si  de  ces  deux  ossements  dont  la  pré- 
sence inattendue  nous  a  quelque  peu  embarrassés,  Tun 
ne  serait  pas  du  saint  évêque  de  Tours,  père  spirituel' 
de  saint  Maxentiol?  Ainsi  se  vérifierait  cette  parole  des 

(1)  Légende  dorée,  traduction  de  Brunct,  t.  I,  p.  270  etsuiv. 

(2)  La  cathédrale  d'Anagni^  p.  38. 


—  195  — 

saints  Livres  :  r  Âmabiles  et  decori  ia  vita  sua,  in 
morte  quoque  non  sunt  divisî.  »  (Lib.  II  Regum^  c.  i^ 
y.  23.) 

Je  laisse  à  M.  le  curé  de  Candé,  que  sa  mémoire 
seri  toujours  si  bien,  le  soin  de  rapporter  quelle  place 
la  châsse  de  saint  Maxentiol  occupait  dans  Féglise  de 
Gunaud. 

c  La  châsse  de  saint  ManLentiol,  dit-il»  était  attachée 
à  un  pilier  du  chœur  nouveau  fait  sous  W^^  de  Vaugi- 
raud,  à  une  hauteur  qui  ne  permettait  pas  de  l'attein- 
dre. On  y  allumait  des  cierges  et  on  la  couvrait  de 
fleurs.  On  l'encensait  même.  M.  Béatrix^  nommé  curé 
au  Concordat,  et  qui  n'avait  jamais  quitté  le  pays,  ren- 
dit aux  saintes  reliques  les  mêmes  honneurs  que  ses 
devanciers.  On  a  continué  d'y  aller  en  procession  des 
paroisses  environnantes  :  celles  de  la  Levée  s'arrêtaient 
en  face  de  l'église  de  Gunaud,  pour  obtenir,  par  l'in- 
tercession de  saint  Maxentiol,  le  temps  favorable  aux 
bien^  de  la  t^rre. 

>  Quaiid  on  commença  les  travaux  de  restauration ^  les 
ouvriers,  qui  ignoraient  les  conséquences  de  leur  ac- 
tion, se  permirent,  en  l'absence  du  curé,  de  descendre 
la  châsse  et  de  la  mettre  à  terre.  G'est  alors  que  le 
curé,  trouvant  la  châsse  très-anciennemenl  ouverte,  et 
n'y  voyant  ni  cachet  ni  inscription,  demanda  à  l-évéché 
ce  qu'il  devait  en  faire.  On  lui  répondit  de  la  déposer 
dans  la  sacristie,  en  attendant.  Il  parait  même  qu'il  fut 
autorisé  à  en  faire  l'inspection ,  mais  il  ne  le  fit  que 
fort  superficiellement,  puisqu'il  nous  dit  que  la  tête 
du  saint  n'y  était  pas,  tandis  que  nous  l'avons  trouvée, 
mais  seulement  quand  nous  eûmes  retiré  tous  les  osse- 


—  196  — 

ments,  ce  qui  était  impossible  sans  ôter  les  planches 
qui  fermaient  un  des  bouts.  —  La  parfaite  conservation 
des  meubles  de  la  sacristie  et  surtout  du  fameux  coffre 
à  chasubles  (1),  déposé  au  bas  de  l'église,  prouve  que 
les  iconoclastes  de  93  n'y  avaient  pas  pénétré  :  ce  qui 
est  arrivé  presque  généralement  dans  les  églises  du 
Saumurois,  où  il  n'y  a  point  eu  de  guerre  et  qui 
presque  toujours  ont  été  pourvues  d'intinis.  —  Je  serais 
donc  porté  à  croire  que  la  châsse  n'a  pas  été  ouverte 
avant  M.  le  curé  actuel.  > 

La  châsse,  telle  que  nous  l'avons  actuellement,  est 
incomplète  et  mutilée.  Sa  crête ,  ainsi  que  nous  l'ap- 
prend Grandet,  porte  les  traces  de  la  violence  des  cal- 
vinistes, qui  lui  assénèrent,  mais  sans  la  briser,  un 
coup  de  hache,  qui  a  fait  éclater  le  bois  à  cet  endroit. 

A  une  des  extrémités,  le  bois  a  cédé  également  et  le 
bas-relief  a  disparu  en  partie.  Est-ce  un  coup  porté 
encore  par  les  huguenots?  Est  ce  simplement  le  travail 
du  bois  qui,  au  cœur  du  tronc,  se  fend  facilement? 
L'une  et  l'autre  hypothèse  sont  admissibles,  mais  l'ins- 
pection même  de  la  large  déchirure  exclut  l'emploi  de 
tout  fer  tranchant. 

A  l'autre  extrémité  était  une  porte  mobile,  dont 
nous  avons  parfaitement  reconnu  l'existence.  Au  xV  siè- 
cle, cette  porte  fut  remplacée  par  un  panneau,  peint  et 
doré,  qui  y  fut  cloué  à  demeure.  Ainsi  l'exigeait  l'étal 
de  vétusté  de  la  châsse,  déjà  fendue  dans  toute  sa  hau- 


(1)  Ce  coffre,  unique  peut-être,  a  la  forme  des  larges  chasubles  du 
moyen-âge,  qui  devaient  y  être  étendues  non  pliées.  I!  me  paraît  da- 
ter du  xvi«  siècle. 


—  197  — 

leur  et  consolidée,  tant  bien  que  mal,  par  une  traverse 
assemblée  à  queue  d'aronde  et  des  liens  intérieurs  ansm 
en  bois. 

Or,  cette  châsse  devient,  par  les  honneurs  qu^elle 
reçoit,  une  preuve  palpable,  évidente,  du  culte  rendu 
aux  reliques  qu'elle  contient. 

Une  place  honorable  lui  est  assignée  dans  le  chœur, 
jusqu'à  nos  jours. 

On  l'encense,  à  la  messe  et  aux  vêpres,  comme  on 
encense  les  autels. 

On  l'entoure  et  on  la  pare  de  cierges  et  de  fleurs. 
Les  religieux  la  portent  en  procession  et  la  trempent 
dans  la  Loire  pour  obtenir  de  Dieu,  par  l'intercession 
de  saint  Maxentiol,  la  cessation  de  la  sécheresse  qui 
nuit  aux  biens  de  la  terre  (1).  Et  à  ces  processions  po- 
pulaires, accourent,  nombreuses  et  empressées,  toutes 
les  paroisses  voisines ,  qui  ont  confiance  dans  le  saint 
patron  de  Cunaud. 

La  conclusion  est  rigoureuse  : 

Tous  ces  honneurs  avaient  pour  but  direct,  non  la 
châsse,  mais  les  reliques  qu'elle  confenait.  Et  cette  dé- 
votion constante,  populaire,  n'élait-elle  pas  la  manifes- 
tation la  plus  saisissante  de  la  foi  de  toute  la  contrée? 
Ce  n'était  pas  à  des  reliques  vagues,  innommées,  que 
se  rapportaient  ces  prières  fen^entes,  c'était  au  corps 
de  saint  Maxentiol.  On  ne  le  voyait  pas,  mais  on  croyait 
à  sa  présence.  La  dévotion  eût  cessé  du  moment  où  le 


(i)  La  S.  Congrégation  des  Rites,  par  décret  da  11  septembre  1769, 
a  condamné  cet  usage.  Gardellini,  Décréta  authentica  Congregationis 
Saerorum  Bituimi  t.  II,  p.  480,  n»  4350. 


n 


—  498  — 

bruit  se  fût  répandu  que  la  châsse  était  vide,  vide  sur- 
tout des  ossements  précieux  du  saint  patron. 

Une  population,  qui  attache  un  tel  prix  à  des  reliques 
qu'elle  se  transmet  pieusement  de  génération  en  géné- 
ration, ne  peut  être  trompée  sur  Tauthenticité  et  l'iden- 
tité de  ces  reliques.  Aussi ,  quand  du  ix«  siècle  au  xix^^ 
nous  la  voyons  constante  dans  sa  foi  et  sa  vénération, 
nous  n'avons  qu'à  nous  incliner  devant  cet  irrécusable 
témoignage. 


XI. 


L'iconographie,  qui  est  une  des  manifestations  du 
culte  public,  a  pour  but  de  nous  faire  remonter  par 
l'étude  des  images  aux  causes  qui  ont  motivé  l'adop- 
tion de  certains  signes  caractéristiques. 

Or,  les  attributs  donnés  autrefois  ou  conservés  à 
saint  Maxentiol,  sont  ;  la  mitre,  la  chasuble  et  l'étole. 

La  mitre,  je  ne  l'ai  rencontrée  nulle  part,  mais  sur 
le  témoignage  de  Grandet,  qui  dit  l'avoir  vue  à  Cu- 
naud,  je  n'en  conteste  pas  l'existence.  Or,  la  mitre,  qui 
appartient  de  droit  aux  évéques,  devient  aussi  par  con- 
cession apostolique,  la  coiffure  solennelle  des  cardinaux, 
des  protonolaîres,  des  abbés  et  de  certains  chanoines 
privilégiés.  Mais  saint  Maxentiol  ne  fut  ni  cardinal,  ni 
prélat,  pas  plus  que  chanoine,  toutes  dignités  de  date 
plus  récente.  Fut-il  abbé  (1)?  Rien  n'autorise  à  le  croire 

(1)  ff  Les  abbés  étoicnt  souvenl  appelés  simplemest  Pfé^fiM  :  ceUe 


et  s'il  porte  la  mitre  abi)atiale^  il  faut  attribuer  cette 
erreur  aux  Béqédîçt^as,  Qers  de  faire  remonter  jusqu'à 
saint  MAxeqtiol  Torigiae  de  la  fondation  monastique 
de  Gunaud,  qu'aucun  témoignage  concluant  n'affirmé 
aussi  ancienne.  Les  Bépé^ictins  n'avaient-ils  pa$  fait 
de  même  à  l'égard  de  saint  Florent,  qu'ils  considér$iient 
comine  le  premier  abbé  f  t  fondateur  du  monastère, 
depuis  abbaye,,  érigé  ap  Moiit-Glpnne? 

Les  Bénédictins  de  Cunaud  pouvaient  avoir  <{uelque 
prétention  plus  ou  moin^  fondée  en  ooiilknt  saint 
Maxentipl  de  la  mitre  abbatiale ,  qu'une  critique  plus 
éclairée  et  plus  indépendante  lui  çiilève. 

La  chasuble  çopvient  parfaitement  au  prêtre ,  dont 
la  mission  principale  est  d'offrir  1^  saint  sacrifice  pour 
le  peuple  confié  à  sa  direction  spirituelle.  Ainsi  est  re- 
présenté saint  Maientiol  dans  utie  mauvaise  statue  du 
xviii«  siècle,  à  Saugé-rHôpital.  Il  est  prêt  à  monter  à 
Fautel,  il  va  célébrer. 

L'étole  mise  par-dessus  le  surplis  indique  également 
le  sacerdoce  catholique,  mais  surtout  les  fonctions  cu- 
riales  proprement  dites,  le  ministère  paroissial.  C'est 
ainsi  vêtu  que  le  prêtre  administre  et  dispense  aux 
fidèles  les  sacrements  de  baptême,  de  pénitence,  d'eu- 
charistie, d'extrêçfie-onclio^  et  de  mariage,  qu'il  bénit, 
inhume  en  terre  sainte^  etc. 

Voici  la  description  de  la  toile  qui  formait  le  rétable 
de  l'autel  de  Saint-Ma:(entiol  avant  les  répartitions  en- 
treprises par  l'État  dans  l'église  Noire -Dame.  Getjte 

q^2^té  est  8up^iie|u*Q  à  cfiHe  à* Abbé,  qui  n*est  qu^un  titre  d*offlce  et 
une  commia^oii»  »  Juenin,  p.  19. 


—  200  — 

« 

toile,  d'une  assez  bonne  exécution,  est  maintenant  dé- 
posée à  la  cure.  Je  la  date  du  xvii®  siècle,  dont  elle 
reproduit  scrupuleusement  le  costume  usité  alors  par 
les  ecclésiastiques. 

Saint  Maxentiol  porte  la  barbe  et  une  soutane  longue 
qui  lui  descend  jusqu'aux  pieds  ;  sa  chemise  est  rabat- 
tue sur  son  col  et  à  ses  manches  de  manière  à  former 
à  la  fois  rabat  et  manchettes.  A  son  surplis  long  pen- 
dent de  grandes  manches  :  des  dentelles  bordent  les 
extrémités,  ainsi  qu'il  a  toujours  été  d'usage  depuis  le 
XVI®  siècle;  par-dessus  est  une  étole  de  couleur  rouge. 
Le  livre  sur  lequel  il  appuie  la  main  est  posé  près  de 
lui  sur  une  table  ;  ce  livre,  c'est  l'Evangile  qu'il  est 
venu  prêcher  aux  habitants  de  Cunaud  ou  le  rituel 
avec  lequel  il  les  assista  en  priant. 

On  lit  au  bas  du  tableau,  en  capitales  romaines  : 

ST  MAXENCEL. 


Xll. 


Je  ne  puis  passer  sous  silence  deux  faits  qui  se  rap- 
portent au  culte  privé  dont  fut  honoré  saint  Maxentiol. 

L'un  m'est  fourni  par  les  archives  de  la  préfecture. 
Hugues  de  Milly,  par  acte  du  xi©  siècle,  offre  aux  reli- 
gieux de  Gunaud  les  dîmes  qu'il  perçoit  à  Milly  et  la 
part  qu'il  prélève  sur  les  sépultures  et  les  offrandes  de 
l'église  de  Saint-Pierre  et  cela,  par  amour  pour  saint 
Philbeitet  saint  Maxentiol  :  c  Ego  Ugo  de  Miliaco 


_  201  — 

ecclesiam  sancti  Pétri  que  Miliaco  sicut  habeo  et  possi- 

deo tam  in  decimis  quam  in  sepulluris  et  offerendis 

Domino  Deo  et  béate  Marie  et  sancto  Philiberto  alque 
beato  Maxenciolo  simulque  Domno  Petro  abbati  Trc- 

norcii  et  monachis  suis  locoque  Culnaldi  dono cum 

totâr  illa  terra  ad  eamdem  ecclesiam  pertinente.  » 

J'emprunte  le  second  trait  à  l'historien  Texier.  «  Ce 
dévot  prélat  et  abbé  (4)  avoit  aussi  une  grande  dévotion 
à  saint  Florent,  confesseur,  patron  de  son  abbaye,  et  à 
saint  Doucelin,  confesseur,  qu'on  dit  avoir  esté  pour- 
veus  à  Tordre  de  preslrise,  par  saint  Martin,  arche- 
vesque  de  Tours,  avec  saint  Maurille,  confesseur,  qui 
depuis  fut  évesque  d'Angers,  et  avec  saint  Maxenceul, 
nommé  en  latin  Maxenciolus,  aussi  confesseur,  patron 
des  églises  paroissiales  de  Cunaud  et  de  Saugé-l'Hospi- 
tal  (2).  > 


XIII. 


Arrivé  au  terme  de  cette  étude  hagiographique,  il  ne 
me  reste  plus  qu'à  former  ce  double  vœu  :  que  l'évê- 
ché,  quelque  temps  indécis,  se  prononce,  sur  cet  ex- 
posé complet,  en  faveur  de  l'authenticité  du  corps  de 
saint  Maxentiol,  et  le  remette  en  honneur,  en  replaçant 

(1)  Jean  duBelljiy,  abbé  de  Saint-Florent  (1431),  évêque  deFréjus 
(1451),  puis  de  Poitiers  (1462),  mort  enTabbaye  de  Saint-Florent,  le 
2  septembre  1479. 

(2)  Texier ,  prieur  d'Allonne,  Discours  fait  en  rhonneur  de  saint 
Francaire.  Saumur,  1648,  2«  édit.,  p.  73,  74. 

REF.  ARC.  '    14 


—  202  — 

la  châsse  qui  le  contient  dans  le  sanctuaire  de  l'église 
paroissiale  de  Cunaud;  puis  que  les  Bollandistes ,  qui 
ont  bien  voulu  m'honorer  de  leur  confiance  et  récla- 
mer le  concours  de  mes  recherches  personnelles,  trou- 
vent dans  ces  quelques  pages  les  éléments  d'une  disser- 
tation comme  ils  savent  en  écrire* 

Si  j'ai  atteint  ce  double  but,  la  vénération  qui  s'at- 
tache aux  reliques  de  saint  Maxentiol  sera  à  l'avenir 
sauvegardée  à  la  fois  contre  l'oubli  et  l'indifférence,  et 
je  ne  pouvais  ambitionner  plus  noble  récompense  de 
mes  efforts  persévérants,  ni  plus  utile  résultat  de  me» 
investigations  empressées. 

X.  chanoine  Barbier  de  Montault, 

Cumniandeur  de  TOrdre  du  Saint-Sépulore. 
Poitiers,  le  !•»  février  i868. 


CHRONIQUE. 


Dans  le  dernier  numéro  du  Répertoire  nous  disions, 
en  parlant  de  l'église  de  Tigné,  que  «  jamais  à  partir 
1  de  Foulques-Nerra,  surnommé  le  grand  bâtisseur, 
»  c'est-à-dire  depuis  le  xi^  siècle,  ne  s'était  vu  en  Anjou 
>  un  pareil  élan  de  constructions.  > 

Voici  en  effet  la  liste  des  églises  bâties,  reconstruites, 
ainsi  que  celles  arrêtées  en  projet  sous  Fépiscopat  de 
M^  Angebault  : 

Eglises  construites  : 

A  Angers  :  Saint-Joseph  ;  Sainte-Thérèse.  Chapelles 
de  la  Retraite;  des  Auguslines;  de  TEspérance;  de  la 
Miséricorde;  de  Saint-Charles;  de  TEsvières;  de  la 
Forêt;  du  Champ  des  Martyrs;  de  M""®  Bourde;  de 
Nazareth  ;  de  l'hôpital  général. 

Montreuil-Belfroy ;  Tiercé;  Saint-Germain-des-Prés; 
Saint-Léger-des*Bois  ;  LaPossonière;  Saint-Maurille  des 
Ponts-de-Cé  ;  Saint-Jean-de-la-Croix  ;  Saint-Jean-des- 
Mauvrets;  Mûrs;  chapelle  de  l'hospice  de  Sainte-Gemmes; 
Saint-Saturnin  ;  Le  Louroux  ;  Beaulieu  ;  Le  Champ  ;  Cha- 
vagnes-les*Eaux  ;  Gonnord;  Mâchelles;  Saulgé;  La  Rai- 
rie;  Longue;  Noyant;  Auverse;  Cholet,  Notre-Dame; 
Cerqueux-de-Maulévrier  ;  Saint-Christophe-du-Bois  ; 
Tout-le-Monde;  Trémentines;  Chapelles  du  collège  de 
Combrée,  de  la  communauté  de.Torfou;  Vezin&;  Beau- 
préau  ;  Andrezé  ;  La  Blouère  ;  Geste  ;  Jallais  ;  La  Jubeau- 
dière;  Cossé  ;  Les  Gardes;  La  Jumellière;  Cbamptoceaux  ; 
Saint-Laurent-des-Autcls;  Botz;  Bourgneuf;  Chapelle- 
Saint-Florent  ;  Saint-Laurent-du-Mottay  ;  Le  Marillais  ; 


—  204  — 

Montjean;  chapelle  de  la  communauté  de  La  Pomme- 
raye  ;  Saint-Germain-sur-Moyne  ;  Longeron  ;  Saint- 
Macaire;  La  Renaudière;  Roussay;  Torfou;  Montre, 
vault;  Chaudron;  Chacé;  Vivy;  St-Georges-Châtelaison; 
Saint-Glément-des-Levées ;  Coron;  Tigtié;  Louvaines; 
Freigné;  Juvardeil;  Chambellay;  Grez;  La  Pouèze; 
Carbay;  Chazé-Henri;  Pensionnat  de  Saumur;  Chapelle 
de  Saint-Joseph  à  Segré.  —  Total  85. 

Eglises  réparées. 

Par  réparations  on  entend  des  constructions  et  travaux  tels  que  bas- 
côtés,  clochers,  construction  du  chœur. 

A  Angers  :  Notre-Dame;  Saint-Serge;  chapelle  des 
Jésuites  ;  chapelle  du  Bon-Pasteur. 

Bouchemaine;  Pruniers;  Briollay;  Bourg;  Cheffes; 
Saint-MaurilledeChalonnes;  Notre-Dame  de  Chalonnes; 
Sainte-Gemmes-sur-Loire;  Juigné-sur-Loire  ;  La  Cor- 
nuaille;  Thouarcé;  Cheviré-le-Rouge  ;  Mazé;.  Breil; 
Méon  ;  Seiches  ;  Briollay  ;  Jarzé  ;  Nuaillé  ;  LaSéguinière  ; 
BégroUes;  Le  May;  Pin-en-Mauges ;  La  Poitevinière ; 
Chapelle-Rousselin  ;  Saint-Georges-des-Gardes  ;  Tour- 
Landry;  Bouzillé;  Saint-André-de-la-Marche;  Nantilly; 
Coutures  ;  Puy-Notre-Dame;  Visitation;  Nyoiseau;  Candé  ; 
Chazé-sur-Argos  ;  Querré  ;  Andigné  ;  Montreuil-sur-Maine; 
Pouancé  ;  La  Prévière,  Le  Tremblay  ;  Notre-Dame-des- 
Ardilliers.  —  Total  47. 

Eglises  en  constniction  ou  arrêtées  m  projet  : 

A  Angers,  Saint-Laud. 

Avrillé;  Mozé;  Bécon;  Saint-Clément-de-la-Place  ; 
Beauforl;  Corné;  Durtal;  Vernantes;  Parçay;  Saint- 
Léger-du-May  ;  Drain  ;  La  Pommeraye  ;  La  Breille  ; 
Douces;  Martigné-Briant ;  Cizay;   Chalain-la-Potherie. 

Eglises  construites,  85.  —  Eglises  réparées,  47.  — 
Eglises  en  projet,  18.  —  Total  450. 


0 

i 


CONDITIONS  DE  L'ABONNEMENT. 


Le  Répertoire  Archéologique  de  V Anjou  paratt  le  i«'  de 
chaque  mois,  par  livraisons  chacune  de  deux  feuilles  d'im- 
pression. 

Le  prix  de  l'abonnement,  pour  les  personnes  ne  faisant  pas 
partie  de  la  Commission  Archéologique,  est  de  5  francs  par  an 
pour  Angers  et  de  6  francs  par  la  poste. 

Les  abonnements  sont  reçus  chez  tous^  praires  du 
département. 


SOCIÉTÉ    IMPËRULE    D'AGaiCOLTintE ,  8CIENCB8  BT   ARTS 

ANCIENNE  ACADÉMIE  D'ANGERS. 


COIIISSIOI  ARCH£OLOGI0nE 

/  f  6  3 

7XX^  DU  DÉPARTEMENT 

DE  MAINE  ET  LOIRE 


RÉPERTOIRE  ARCOiOLOGIQIlË 


DE    L'ANJOU 


Année    i80S.    —  Mal. 


ANGERS 

IMPRIMERIE    DE    COSNIER    ET    LACHËSB 

Chansfiée  Saint-Pierre ,  13 

1863 


mmm  mm  m  iwoii      -^^^ 

(SUITB).  l  ô  W0  t 

Il  semble,  d'après  cela,  que  le  curé  Robin  place  '  '     i 

Grannona  à  Angers,  se  fondant  sur  l'analogie  ()ui  lui 
parait  exister  entre  Grannona  et  lé  nom  de  notre  am- 
phithéâtre :  Grohan^  qu'il  croit  avoir  été  dédié  à  Apol*- 
Ion  Graunus,  Apolloni  GrannOy  qualification  que  Ton 
rencontre  sur  plusieurs  inscriptions  antiques  en  diffé- 
rents pays. 

Quoi  qu'il  en  soit,  que  Grannona  ait  été  placé  à 
Ghamptoceaux  ou  à  Angers,  il  paraît  bien  probable  du 
moins  que  c'est  en  Anjou  qu'il  faut  l'aller  chercher. 

9.   COMMUNS  DE  LA  CHAI^ELLE-ROUSSELIN* 

Trace  de  voie  romaine  allant  du  nord-est  au  sud* 
ouest  vers  Jallais. 

10.  COMllUNE  DE  SAINTE^GHRISTINE. 

Trace  de  voie  romaine  allant  vers  Saint-Laurent-de- 
la-Plaine  < 

11.  GOMBfUNE  DE  NEUVT. 

Trace  de  voie  romaine  allant  vers  nord  dans  la  di- 
rection de  Saint-LaurenUde-la-Plaine  et  au  sud  vers 
Jallais. 

13.  COMMUNE  DE  LA  TOUR^LANDRV. 

Trace  de  la  voie  romaine  allant  de  V ouest  à  Yesty 
dans  la  direction  de  Trementines  à  Vibic^rs. 

REP*  ARG^  15 


—  206  — 

i^.  COMMUNE  DB  dHANTELOUP. 

Trace  de  voie  romaine  allant  du  nord-ouest  au  sud- 
0t$  dans  la  direction  de  Yezins  à  la  Plaine. 

14.  GOMUUNJS  lUBi  NUAILLA* 

Trace  de  voie  romaine  allant  dajas  la  direction  du 
May  â  Tout-le-Monde; 

15.  COMMUNE  DE  TOUT-LE-MONDE. 

i  ■  •  , 

Trace  romaine  allaat  d;in$  la  cUr^ctioa  de  NuaiUét  ài 
Yzemay, 

16.  COMMUNE  DE  TREMENTJNES. 

.  ■  •  •  '  • 

Traces  de  voies  romaines  allant  dans  la  direction, 
Tune  de  Tremenlines  â  la  Tour-Landry,  et  Tau tre  da 
Trementines  à  Vezins. 

17.  COMMUNE  DE  VEZINS. 

Trace  de  voie  romaine  allant  vers  Chanteloup.. 

19.  COJftMlTNE  B'TZERNAÎ. 

Trace  de  voie  romaine  allant  dans  la  direction  du 
bourg  de  Tout-le-Monde. 

19.  GOBI |iil^£«B/  9l!}  SàIN7-LibmBIi'F*DB-LA-PLAINE. 

Txace  d6  voie  romaibe  allant  dani^  la  dtrectlQn  du 
md  au  nord  vei^  Glialo»Bé&.. 


Trace  ie  voie  romaine  allant  dans  la'  dirët^tion  de 
TiUiere. 

21.   GOlilOfUNE  DU  LONGERON. 

Trace  de  voie  romaine,  direction  indéterminée. 

22.  COMMUNE  DE  LA  REliTAUDlÈRE. 

Tracé  de  voie  romaine  allant  dans  la  dtfcfélibtt  de 
Villedîeu  à'  Roassay,  du  nord  aa  sttct. 

23.  GOMHDNE  DE  ROUSSAY. 

Trace  de  voie  romaine  allant  dans  la  direction  de  la 
Renaudière  au  Longeron. 

24.  GOMMUSTE  DB  TILLIlSRS. 

Trace  de  voie  romaine  allant  dans  la  direction  de 
Geste  à  Saint-Crespin. 

25*  GOMMUNB  DE'  TORFt^Û. 

Trace  de  voie  romaine  allant  du  nord  au  sud. 

26.  COMMUNE  DB  CHAUDRON. 

Antiquités  romaines  découvertes  en  ce  lieu,  telles 
que  briques  à  rebords,  etc. 

27.  COMMUNE  DE  LA  GHAUSSAIRÉ. 

Trac^  de  voie  romaine  allant  de  Vesl  à  Vouesi  daiir 
la.  direction- de  la  GhapeUe^da^^jenet  à  Nantes. 


—  208  — 

28.  COMMUNE  DU  FIEF^SAUVIN. 

Il  convient  de  nous  arrêter  assez  longuement  sur  les 
nombreux  restes  gallo-romains  que  Ton  a  découverts 
sur  cette  commune,  en  un  lieu  nommé  La  Ségourie, 
que  Ton  croit  généralement  avoir  été  la  station  Se- 
gara. 

Entr'autres  mémoires  qui  ont  été  publiés  sur  cette 
localité,  nous  devons  signaler  celui  de  M.  Tristan- 
Martin  (Beaupreau,  1854,  imprimerie  de  Granger)et  ce- 
lui encore  de  M.LéonFaye(Poitiers,1854,chezLetang). 
Ce  dernier  mémoire  est  la  reproduction  plus  dévelop- 
pée d'un  travail  publié  en  1852  dans  les  Mémoires  de 
la  Société  d' agriculture  ^  sciences  et  art^  d' Angers ,  page 
305,  2e  série,  3«  voL 

Le  camp  de  la  Segourie  n'a  pas  de  forme  arrêtée. 
Il  est  limité  par  la  réunion  de  deux  cours  d'eau,  sa- 
voir :  au  sud  par  un  ruisseau,  à  Y  est  par  YEvrCy  à 
Yoiiest  par  un  ravin,  au  nord  par  une  haute  levée  de 
main  d'homme  établie  en  manière  de  chevron,  de  telle 
façon  que  l'angle  externe  se  trouve  vers  l'extérieur  du 
camp.  C'est  un  plateau  d'environ  2  liectares  de  super- 
ficie, fort  élevé,  qui  permet  à  la  vue  de  s'étendre  au 
loin  vers  stui^  est  et  ouest.  Au  nord-ouest^  en  dehors  du 
camp,  au  lieu  dit  le  Petit-Nombaulty  sont  des  vestiges 
de  vieilles  murailles  parmi  lesquelles  on  a  rencontré  : 

iodes  meules  à  bras;  —  2<>  un  terreau  très-noir; 

—  S^  des  briques  à  rebords  et  de  fines  poteries  rouges; 

—  4'  des  pierres  calcaires  de  Chauvigny,  propres  au 
carrelage  et  à  la  sculpture,  ce  qui  donne  lieu  de  pen- 
ser qu'il  y  avait  une  communication  entre  Segpra  et 


—  209  — 

Poitiers;  —  &*  des  peintures  murales  rouges  pareilles 
à  celles  que  nous  avons  vues  à  Pompeïes;  —  6®  des 
pièces  gauloises  avec  Fefligie  du  centaure  à  face  hu- 
maine; —  7<>  des  monnaies  d'arçent  des  ramilles  ro- 
maines Cassia  et  ServiHa;  —  80  des  pièces  d'Auguste, 
de  Vespasien,  de  Trajan,  d'Hadrien,  d'Antonin  le  Pieux, 
de  Marc-Aurèle ,  de  Caracalla  et  des  deux  Faustine  ; 

—  9^  une  fosse  profonde  autrefois  pleine  de  coquilles 
d'buitres  dont  l'écaillé  épaisse  indique,  d'après  M.  Tris- 
tan, qu'elles  provenaient  des  côtes  du  Poitou  ;  cette  dé- 
couverte prouve  qu'une  certaine  police  obligeait  à  dé- 
poser les  immondices  en  de  certains  lieux  déterminés  ; 

—  iQo  des  intailles  qu'il  nous  faut  décrire  :  c  La  pre- 

>  mière,  dit  M.  Tristan,  page  7,  représente  un  coq  et 

>  une  paule^  la  seconde  une  Bacchante^  la  troisième  un 

>  Uon  couché^  la  quatrième,  qui  n'est  qu'un  émail,  re- 

>  présente  deux  chevaux;  la.  cinquième  enfin  d'une  belle 

>  exécution,  porte  deux  amours  ou  génies  ailés  qui 

>  cueillent  des  olives.  On  voit  au  bas  un  cœur  percé 

>  de  plusieurs  glaives  et  au-dessus  ces  trois  lettres  : 
»  C.  A.  V;  —  Ho  une  enceinte  entourée  jadis  de  co- 
3  lonnes  :  quatre  briques,  dit  M.   Tristan,  page  3, 

>  épaisses  et  d'une  forme  triangulaire  composaient 
i  chaque  assise  de  ces  colonnes;  »  —  12o  trois  sta- 
tuettes, l'une  en  terre  cuite,  de  huit  pouces  de  haut, 
représentai!^  une  Vénus,  elle  fit  partie  du  cabinet  de 
défunt  M.  T.  Grille  (1);  une  autre  en  bronze,  vendue 
à  des  colporteurs  et  la  dernière  en  pierre.  Elle  fut 

(I)  Cette  Vénns  (/knadyomène  sortant  do  bain)  a  été  dessinée  par 
M.  Millet  d'Angers. 


—  sw  - 

plaoée  (teHS  les  mtirs  d'une  église  en  eosetnictton';  — 
lit»  plusieurs  traces  de  voie  romaine  allant  «n  diverse» 
directions. 

C'en  est  assez  pour  établir  sirffisanimenl  qu'il  y  avait 
là  un  camp  romain  et  en  dehors  i^ne  ville  de  la  même 
époque  y  le  tout  formant  une  istation  que  l'on  croit  être 
celle  de  Seg^ora,  marquée  sur  la  table  de  Peutinger. 

En  ieffel,  «voici  sisar  quoi  se  fonde  M.  Tristan  :  «  1<>  La 
»  table  Tbéodosienne  place  cette  station  à  18  lieues 
»  gauloises  de  Portas  Namneium,  Nantes  ;  2^  elle  dort 
t  être  située  sur  la  route  de  cette  ville  à  Limonum,  Poi- 
)  tiers  ;3o  dans  les  analogies  adoptées  par  les  différents 
»  écrivains,  en  est-il  de  phis  rapprochées  de  Segora  que 

>  Segoorie? Ette  est  à  18  lieues  gauloises  du  /%r- 

»  tîts  Namneium; «n  calculant  l'ancienne  lieu^  gauloise 
»  de  1,150  toises,  nous  avons  44,400  «iiètres,  un  peu 

>  plus  de  40  lieues  de  poste;  4^  il  est  bien  clair  que 
»  de  toutes  tes  ressemblances  de  noms  adoptées,  jus- 
»  qu'è  >ce  jouT,  on  n'en  a  jamais  trouvé  de  pftus  frap- 
I  panteB  que  Segoude^  enfifi  elle  est  sur  la  roule  de 

>  Poitiers.  » 

M*  iuéon  Paye,  à  la  notice  ^duquel  nous  avons  «etti- 
prunté  cette  citartion,  page  44,  corrobore  les 'conjectures 
de  M.  Tristan  par  de  nou^velles  vues. 

M.  ide  Catimo4|t  penche  au^si  de  ce  côlé^  et  depuis 
lars'de  bons  esprits  n'émettent  ptas  de  'doéie  à  ee  su^ 
jet.  duiant  àiious  qui  étions  longtemp:^  nleineitré  6eep^ 
tique,  nous  ne  le  sommes  plus  aujourdihuii,  A  notre 
sens,  la  station  Segora  ne  peut  se  rencontrer  autre 
part  tp'à  la  S^ig^^urie,  oommui^e  du  Fief^uvin, 


—  241  — 

S9.   COMMUNE   DE  SAINT*REMÏ*£J«*MAU6ES. 

On  l'emarque  une  vaste  enceitite  entourée  de  fossés. 
Ces  retranchements  se  combinaietit  sans  donte  pour  \n: 
défense,  avec  le  camp  de  la  Segourie. 

30.    COMMUNE  DE   SAINT-FLORENT-LE- VIEIL. 

Nous  n'avons  découvert  aucune  trace  gallo-romaine 
à  Saint-Florent- le-Vieil,  mais  il  n'est  pas  douteux  que 
œ  lieu  n'ait  été  habité  dès  la  fin  du  iiï©  siècle ,  puis- 
qu'à  cette  époque  nous  voyons  s'y  fixer  Florent,  soldat 
du  pays  de  Bavière. 

D'après  le  ttombre  de  points  gallo-romains  découverts 
dans  l'arrondissement  de  Cholet,  il  est  fiicile  de  voir 
que  la  tradition  qui  fait  dériver  le  nom  dés  Mauges  du 
latin  mala  gensy  mauvaise  nation^  parce  que  les  Romains 
n'auraient  pu  s'y  établir,  il  est,  dis-je,  facile  de  voir 
que  cette  tradition  est  une  pure  fable.  Le  nom  de  pays 
des  Mauges  est  exprimé  dans  quelques  chartes  par  pa- 
gus  metallicuSy  pays  métalliqu£;  et  en  effet  on  y  trouve 
des  traces  d'aùciennes  carrières  de  métaux. 


ÀRftONDISSEMÉlNT  DE  SAtfMUjR.        '  ! 

Des  tracés  gallo-^romaines  ont  été  constatées  savoir  . 

1.  Près  de  Saumur;  2.  sur  les  cômmuties  de  Bagneux  ; 
3^^  de  Distré  ;  4.  de  Saiht-Ploreni-Saiut-Hilaire  ;  5.  de 
Viry  ;  Ô.  d'Alloûiiès ;  7.  de  Doué;  8.  de  Douces;  9.  de 


^   212  — 

Forges;  10.  de  Gennes;  H.  de  Cunaull-Tréves ;  12.  de 
Chenehutte-les-Tufleaux  ;  13.  sur  Id  paroisse  du  Tou- 
reil-Bessé-Saint-Maur;  14.  sur  les  communes  de  Saint- 
George-des-Sept-voies  ;  15.  de  Sainl-Cyr- en -Bourg; 
16.  de  Sainl-Jusl-sur-Dive  ;  17.  de  Vihiers;  18.  de 
Souzay;  19.  de  Montsoreau;  20.  de  Brezé;  21.  d'Epieds; 
22.  des  Rosiers. 

1.  SAUMUR. 

Saumur  n'est  pas  une  ville,  à  proprement  parler, 
d'origine  gallo-romaine,  cependant  nous  ne  devons 
point  passer  sous  silence  la  découverte  faite  vers  1824 
ou  1825,  de  plus  de  cent  cinquante  pièces  d'or  ro- 
maines, à  la  Butte  des  Moulins,  [très  le  château,  en  un 
lieu  nommé  Champ  doré.  Parmi  ces  médailles  se  trou- 
vait un  Marc'-Anloine  fils  qui  d'abord  acheté  cinquante 
francs  et  revendu  ensuite  à  M.  Rollin  la  somme  de 
mille  francs,  est  passé  de  là  au  cabinet  de  M.  le  prince 
de  Talleyrand  où  il  manquait  et  où  il  a  été  payé  le 
triple  (Voir  Nouv.  arch.,  n»  25). 

D.  Jean  Huynes,  dans  son  histoire  inédite  de  Saint-< 
Florent,  page  136  de  notre  manuscrit,  nous  apprend 
ce  qui  suit  : 

c  Dés  les  siècles  anciens,  dit-il,  où  est  à  présent 
»  Saumur  était  un  château,  lequel  à  raison  de  sa  peti- 
»  tesse  s'appelait  tronc^  au  milieu  duquel  il  y  avait  un 
»  lac  rempli  de  quantité  d'eau  fangeuse,  où  jugeant 
»  que  le  monastère  (celui  de  Saint-Florent-du-rChâteau) 
)  serait  bien  situé  sinon  cette  incommodité,  ils  (les 
>  fondateurs  en  950)  le  choisirent  et  s'employèrent  à 
y  le  mettre  à  çec.  YirauvatU  beaucoup  (F argent  es. bords ^ 


—  248  ~ 

>  au  brait  duquel  plusieurs  accoururent  et  se  travail- 

>  lèrent  à  épuiser  le  lac.  » 

Ces  pièces  étaient  évidemment  des  sHpes  ou  offrandes 
faites  à  la  nymphe  du  lieu. 

Autre  pièce  consulaire  au  type  de  la  famille  iEmilia 
(argent);  tête  laurée  de  femme  ROM.  ^.  AEMILIO, 
statue  équestre  sur  un  pont  ;  dessous  on  lit  LEP  ; 
trouvée  sur  la  Butte  des  Moulins,  près  de  Saumur,  en 
1858.  M.  Bourdeille,  possesseur. 

Depuis  lorSy  des  débris  antiques  ont  été  constatés  au 
château  de  Saumur  et  dans  les  lieux  voisins,  par  M.  Joly, 
architecte  (Voir  Mémoires  de  la  Société  académique  de 
Maine-et-Loire^  t.  IX,  page  45). 

MM.  Joly  et  Boreau  placent  à  Saumur  la  station 
Robrica. 

2.  COMMUNE  DE  BÀGNEUX. 

Les  Mémoires  de  la  Société  d'agriculture,  sciences  et 
arts  d'Angers,  ifi  vol.,  page  234,  contiennent  sur  les 
ruines  de  Bagneux  un  rapport  de  M.  de  Beauregard; 
les  Nouvelles  archéologiques  leur  consacrent  aussi  quel- 
ques lignes,  et  le  Musée  des  Antiquités  d'Angers  possède 
plusieurs  fragments  qui  en  proviennent. 

Les  objets  que  l'on  y  a  découverts  sont  :  des  mor- 
ceaux de  marbre ,  des  amas  de  pierres  noyées  dans  un 
ciment  rouge  et  très-dur,  des  briques  à  rebords,  une 
meule  à  bras,  une  clef,  une  hache,  des  tuyaux  de 
plomb,  une  soupape,  des  tuyaux  d'argile,  une  statuette 
d'Hercule  en  bronze,  appartenant  à  M.  Bernard  de  la 
Frégeolière,  une  statue  de  Priape,  etc. 

La  statuette  d'Hercule  a  été  moulée  pour  le  musée , 


-  «a  — 

qui  possède  aossi  un  frafgment  de  tuyân  en  'plomb  de 
forme  cylindrique.  Ce  tuyau  allait  du  stid-est  au  nord- 
aue^,  il  alimentait  autrefois  un  bassin  carré  dont  il 
restait  en  4846  vers  sud-ouest,  un  wmr  de  3  mêlres 
â3  cenlimètres  de  long,  et  vters  sud-est  un  autre  mur  de 
1  métré  66  centimètres,  le  tout  sur  une  profondeur  de 
1  mètre  en  moyenne.  Ces  murs  étaient  façonnés  avec 
de  pelâts  tufe  cubiques  de  15  à  18  centimètreB  d'échan- 
tillon. A  la  base  du  mur  sud-'oueet  ^i  dans  loute  son 
étendue ,  on  voyait  encore  une  assise  de  grandes  bri- 
ques. Ce  bassin,  2a>tttrefois  revêtu  «de  ciment  &  Tinté- 
rieur,  en  présentait  encore  quelques  traces. 

Tous  ces  vestiges  sont  ceux  d'un  Balneam  ot  le  nom 
de  fiagneux,  ce  semble,  est  aBse2  Bignîficiatif. 

«  Quoi  qu'il  en  soit,  lisons -nous  dans  les  Nouvelles 
p  archéologiques  y  rien  de  plus  agréablement  pittoresque 
»  que  la  situation  de  ces  ruines  :  un  joli  plateau  en 
»  pente  vers  le  sud-est,  des  eaux  de  source  à  très-peu 
»  de  profondeur,  la  Loire  tou^e  voisine,  la  rivière  du 
»  Thouet  plus  voisine  encore;  enfin,  une  vue  magni- 
»  fiqiue  sur  de  jolis  coteaux.  C'est  bien  ici  l'un  de  -ces 
>  emplaceinents  qu'enviaient  par-dessus  toutj  les  Gallo- 
»  Romains,  fort  amis  des  belles  eau^,  du  beaii  soleil 
*  et  'des  beauK  sites.  » 

3.  COMMUNE  DE  DISTRÉ. 

^1  i^ésiilte  de  l'enquête  faite  en  4856,  sur  la  propo- 
sition de  la  Commission  archéologique  de  Maine-et-Loire, 
<jd'u'n  tronçon  de  voie  romaine  a  été  découvert  à  Distré 
dans  la  direction  de  Vest  à  V ouest.  De  gros  Mocs  de 
grés,  cubiques,  fortwâient  encore  sa  swmnmcnish. 


—  Îi5  — 

4.  COMMUNE  DE  SAlNT-HlLAIRE-SAINT-FLORfiNT. 

fy après  la  métne  enqoête  on  a  trouvé  sur  ce  iterri- 
terre  les  traces  d'une  voie  romaine  allant  de  Vest  à 
Vimest  dans  la  'direction  de  Gennes  i  Saint* Jaét. 

5.  C01tMUN£  DE  WfY. 

La  même  enquête  nous  apprend  que  des  vestiges  de 
v/}ie  romaine,  aujourd'hui  recouverts,  existent  sur  la 
commune  de  Vivy  (via  vêtus)  (1).  Cette  voie  allait  de 
Yest  à  Yoiiest.  On  «a  trouvé  su^r  la  métairie  de  la  Guene- 
rie  des  pièces  romaines,  l'une,  entr'autres,  ornée  d'un 
grand  M  couronné  par  deux  victoires  ailées.  Cette 
monnaie,  que  nous  n'avons  pas  vue,  est  sans  doute 
celle  de  quelqtf  empereur  tf Orient.  La  gfandë'lèltre  M 
est  l'indice  monétaire  en  nsage  sotts  Jitslîn  H,  en  565^- 
578;  sous  Maiariice,  S92-©02;  sous  Constance  H,  641- 
668;  sous  Justinien  M,  682-711  ;  sous  Léon  IIl,  mort 
en  744  ;  sous  Léon  IV,  775-780;  sous  Constantin  VI, 
780-797;  sous  Nicéphore  1er,  802-814  sous  Michel  l», 
êln  en  8H  et  sous  Michel  II,  820-829. 

On  a  également  découvert  à  Vivy  des  Iragraettt-s  de* 
vases  en  terre  rouge,  l'un  entr'autres,  orné  d*wA  itis; 
puis  des  débris  fle  verre,  des  briques  à  rebords,  des 
meules  à  bras  et  des  cercueils  en  auge  et  en  pierre  co- 
quillière. 

(i)  Un  lieu  d'Eure-et-Loir  se  nomme  Fi'evy-le-Rayé  ou  le  Rohé 
VETUS  VÎCUS  (Société  archéologique  d'Eure-et-Loir,  1861,  p.  292). 
bans  nn  pouillé  dn  ffiocèse  de  Chartres,  fialium  vis  honte,  Bahré  dir 
hion  dh6fniti  (Id.). 


—  216  — ' 

Sur  la  même  commune  existe  un  lieu  nommé  le  Gué 
d'Arcis.  Suivant  M.  de  Matty,  qui  place  en  cet  endroit 
la  station  Robrica,  ce  nom  d'ilrm  viendrait  de  Arcus, 
arche,  pont  ;  et  comme  cet  auteur  voit  dans  Télymolo- 
gie  de  Robrica,  l'alliance  hybride  du  mot  celtique 
BRIC  A  pont  y  et  du  mot  latin  RO^  pour  Romanorum^ 
c'est-à-dire  pont  des  Romains ,  il  en  conclut  que  la  sta- 
tion de  Robrica,  de  la  carte  de  Peutinger,  était  placée 
au  Gué  d'Arcis. 

Cependant  ce  nom  d'Arcis  ^  sur  lequel  il  fonde  en 
partie  son  système,  ne  semble  point  provenir  d'Arcus 
pœit,  mais  de  ArciSy  génitif  de  arx^  citadelle. 

6.   COMMUNE  D'ALLONNES. 

Ce  nom  d'Allonnes,  AllarmCy  se  rencontre  prés  du 
Mans  dans  un  lieu  couvert  de  ruines  gallo-romaines. 
L'abbé  Voisin,  dans  ses  Cenomans^  t.  !««',  page  60,  as- 
sure que  les  antiques  villas  de  ce  nom  ne  sont  pas 
rares.  Le  mot  celtique  4^/ownn,  ajoute-t-il,  signifie 
temple^  bois  sacré. 

Notre  bourg  d'AUonnes,  en  Anjou,  doit  être  de  même 
famille  gallo-romaine. 

M  Raimbault,  dans  l'une  de  ses  cartes,  constate 
que  des  pièces  romaines  ont  été  trouvées  à  Allonnes. 

7.    COMMUNE  DE  DOUÉ. 

Précédemment,  à  l'occasion  des  estampilles  de  potiers 
gallo-romains,  nous  avons  parlé  de  plusieurs  vases  en 
terre  rouge  trouvés  à  Doué  en  1784,  dans  le  verger  des 
Récollets,  à  2  mètres  au  fond  d'un  Bisomm  taillé  dans  le 


—  217  — 

roc;  nous  n'y  reviendrons  pas,  nous  bornant  à  dire  qu'en 
1832,  sur  la  place  de  la  Mairie,  on  découvrit  plusieurs 
cercueils  en  molasse  coquillière,  parmi  lesquels  il  en 
était  deux  qui  renfermaient  des  pendants  d'oreille  en 
or  (enquête  de  1846). 

Doué  fut  une  ville  gallo-romaine.  Son  nom  seul  de 
Theod  Wadum  formé  du  grec  Heoçy  Dieu  et  du  latin 
Vadttm,  gué  (gué  de  Dieu),  le  prouve  suffisamment. 
C'est  un  de  ces  noms  hybrides  de  la  classe  de  ceux  que 
Ton  retrouve  en  Gaule;  Ex.  :  Gratianopolis,  Grenoble, 
AntipoliSy  Antibes.  Quant  au  mot  grec  deoç,  il  ne  faut 
pas  s'étonner  de  sa  présence,  puisqu'il  est  aujourd'hui 
reconnu  en  numismatique,  que  l'influence  hellénique 
fut  grande  sur  les  monnaies  gauloises  (Voir  Numisma- 
tique ancienne;  Encyclopédie  Roret,  p.  87). 

Sans  quitter  l'Anjou,  ne  savons-nous  pas  qu'Apollon, 
ce  Dieu  particulièrement  honoré  en  lonie,  ensuite  à 
Marseille,  le  fut  aussi  en  Abjou  T  nos  plus  anciennes 
monnaies  portent  la  tête  d'Apollon^  un  cheval  libre  et 
une  enseigne  surmontée  d'un  sanglier ^  avec  la  légende 
ANDECOM  (Voir  Encyclopédie  Roret,  page  97). 

8.  COMMUNE  DE  DOUCES  OU  DOULCES. 

Douces  est  un  bourg  à  1'^^/  de  Doué.  On  y  voit  un 
amphithéâtre  creusé  dans  la  roche  coquillière.  Suivant 
les  uns  cet  amphithéâtre  serait  romain  ;  selon  d'autres 
il  appartiendrait  à  l'époque  mérovingienne.  Dans  ces 
derniers  temps  on  a  voulu  y  voir  un  amphithéâtre  de  la 
Renaissance ,  mais  cette  opinion  n'a  pas  prévalu .  A  nos 
yeux  ce  monument  doit  appartenir  aux  temps  méro- 


-m  - 

viopam^  Au  xviif  siède  on  y  représeoitait.  des  jeux  &L 
des  pièces. 

(  A  la  fin  du  Mi^  (lisonsHious  dans  les  Mémoires  de> 

>  la  Société  d* agriculture  y  sciences  et  arts  <f  Angers  ^ 
»  page  129,  2^  série,  6©  vol.,  article  de  M.  Port)  suh- 
»  sistalt  encore  au  milieu  de  Tarêne  ua  vaste  tumulus 
»  rond  en  pierre  coquillière,  à  la  surface  plane  légè*- 
»  reraeut  inclinée.  Kinlérieur,,  percé  d'ouvertures  cir- 
»  culaires  et  faciles  à  clore,  encadré  à  chaque  coin 
»  d'échelles  portant  13  degrés,  servait  sans  doute  à  la. 

>  fois  e;t  au  passaga  des  acteurs  et  aux  divers  jeux  da 
1  la  scène.  Sur  le  toit  même  de  cette  chambre  s'im- 
»  plantait  un  mât  d'où  partaient  des  cordes  qui,  rat- 
»  tachées  aux  giadins. supérieurs,  supportaient  un  sys- 
»  tèrae  de  tenture  pour  abriter  les  spectateurs.  » 

Voilà  bien  une  disposition  conforme  à  celle  des  sou- 
bassements qpe  l'on  retrouve  et  que  nous  avons  vus 
au-dessus  de  l'arène  ^es  amphithéâtres  de  Pou^zoles  et 
de  Capoue,  mais  disposition  mal  imitée  et  qui,  pour 
être  un  souvenir  de  l'antiquité,  n'en  prouve  pas  moins 
à  notre  sens,  que  l'amphithéâtre  de  Doué,  ou  plutôt  de 
Douces,  n'est  qu'un  monument  d'une  époque  barbare, 
taillé  dans  une  carrière.  Ce  n'est  pas  l'heure  de  nous 
étendre  davantage  sur  son  origine. 

9.  COMMUNE  DE  FORGES. 

Voici  ce  que  Bodin  écrit  dans  ses  notes,  page  524 
du  Bas-Anjou,  t.  I^r,  édit.  de  1821  : 

«  Nous  venons  de  découvrir  un  autre  camp  romain 
è  dans  la  commune  de  Forges  près  de  Doué,  au  can- 
•»  ton  de  la  Garde,  nom  qu'il  a  pris  sans  doute  de  cette 


-  319  — 

»  siatiaa  qù  ¥m  trouve  beau^^up  de  briqaea  ro- 
1  raaiaes.  r 

A  notre  to^p ,  nou»  écrivioaa  eaa  183Q  »  daast  /' An^aié 
et  si^s  imnummis,  L  l^^^  pagie  41  : 

c  U  ne  resta  pliis  de  ce  camp»  qu6  deux  levées  4 

>  Toue^^  près  du  maulin.  de  la  Garde^  et  noiis  avouons 
1  que  sam  les  cê^seignemeAts  de&  auteurs,  il  nûu»  eût 
»  été  impossible  dfy  vok  i^n  camp  ;  point  de  médaillesy 

>  de  murs^  ni  de  traditions,  r 

10.  G05IMUNE  DE  GENNES. 

Ce  bourg,  étage  sur  les  bonds  de  la  Loire,  fut  un 
li^a  ccMisidérablp  §ou$>  les  Gallo-Kooftiains ,  ainsi  que  de 
curieuses  tracesr  d'antiqqitéS'  l'attestent  encore.  Noua 
meationneron&  spécialement  les  resteSi  d'un  théâtre^ 
d'un  aqueduc  y  d'un  s^idatorium,  et  d'une  voie  romaine 
qjui  depuis  nQ(re  visite,  faite  en  1841,  a  été  détruite^ 

Les  églises  de  Saint-Yeterin  et  de  Saint-Eusèbe  (cette 
dernière  aujourd'hui  convertie  en  école)  conservent 
également  dans  quelques  parties  de  leurs  murailles 
des  vestiges  d'imbrications. 

Dans  l'église  de  Saint-Eucèbe  on  voit  une  porte  dont 
le  linteau  d'une  seule  pièce  e&t  surmonté  d'un  arc  plein*» 
cintre  et  de  décharge;  entre  le  linteau  et  l'arc  se  trouve, 
le  petit  appareil.  Deux  portes  semblables  existent  dans 
le  Maine  à  Saint-Pavin-des-Champs,  ainsi  qu'à  Evron,. 

Toutes  ces  ruines  sont  situées  de  la  sorte. 

Au  nord  de  Gennes  coule  la  Loire  de  Yest  à  VoueMf 
et  du  sud  au  nord  le  ruisseau  &AvorL  Au  sud  se  trouver 
la  fontaine  de  MazeroUes.  Sur  la  rive  droite  du  ruis^ 
seau  d' Avort  et  au  bas  du  coteau ,  se  voient  les  reste* 
de  l'aqueduc  dont  une  partie  limite  à  Vo^iest  le  pied 


du  théâtre.  Cet  aqueduc  passe  près  d'une  ruine  da 
moyen  âge  nommée  l'Ermitage,  et  se  perd  du  sud  an 
nord  dans  la  direction  du  stidatorium.  Plus  bas  que  le 
sudatorium  existaient  autrefois  des  baignoires  dont 
TeaUy  par  un  canal  de  décharge ,  tombait  à  Fembou- 
chure  du  ruisseau  d'Avort  dans  la  Loire. 

Toujours  sur  la  rive  droite  du  ruisseau  d'Avort,  en 
approchant  de  la  Loire,  se  voit  Téglise  de  Saint-Vete- 
rin;  plus  haut,  du  même  côté,  paraît  un  beau  dolmen, 
et  au-dessus  se  trouvait  la  voie  romaine  tout  à  fait  au 
sommet  du  coteau. 

Sur  la  rive  gauche  du  même  ruisseau,  tout  au  som- 
met d'une  haute  colline  qui  domine  la  Loire,  l'on  aper- 
çoit l'église  de  Saint-Eusèbe.  Ces  points  bien  détermi- 
nés, passons  à  Têxamen  particulier  de  chacun  des  ves- 
tiges que  nous  venons  d'énumérer. 

Théâtre.  Comme  la  plupart  de  ceux  que  l'on  connaît 
en  Gaule ,  en  Italie  et  en  Grèce ,  il  était  adossé  à  un 
coteau  dont  la  courbe  se  prêtait  naturellement  à  le  re* 
cevoir.  Les  gradins  de  celui  de  Gennes  étaient  étages 
en  éventail  du  bas  au  sommet  de  la  colline;  ils  regar- 
daient à  peu  près  le  soleil  couchant.  Au  pied  des  gra- 
dins se  dessine  encore  l'hémicycle  de  l'orchestre.  En 
avant  de  l'orchestre  était  la  scène  de  forme  sans  doute 
rectangulaire.  Son  mur  du  fond  devait  être  borné  par 
l'aqueduc  précité. 

Dans  cette  disposition  les  acteurs  avaient  le  visage 
vers  le  levant  ou  plutôt  vers  Yest  est-sud  tandis  que  les 
spectateurs  montés  sur  les  gradins  regardaient  le  cou- 
chant ou  plutôt  Vouest  ouest-nord. 

V.  GODÀRD-FAULTaiEA. 

{La  8uiU,am  prochain  numéro). 


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NOTICE  HISTORIQUE 


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ti£ XH4Ti1i:|f  L4  CÛMMUNË  DE  BRËZfi 


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Le  château  âa^Birëzé  ^  reconstruit  vers  1580  par  AN 
thus  de  Maillé,  devait  être  composé  de  quatre  corps  de 
bâtiments  renfermait  ufiè  cour  carrée  au  milieu,  et 
dont  les  angles  extérieurs  devaient  être  flslnqués  de  tours^ 
mais  il  est  resté  inachevé.'^ 

Le  principal  corps  de  bâtiment  est  décoré  d'un  ordre 
corinthien  en  pilastres,  et  la  porte  du  vestibule  est  or- 
née d'un  oédre  ionique  antique  avec  quatre  colonnes 
de  marbre  rouge.  On  voit  au'-dessus  de  l'entablement, 
une  niohe  dans  laquelle  était  une  statue  de  marbre 
blanc  repi^sentant  Vénus  couchée,  laquelle  a  été  enle^ 
vée;  sur  la  frise  de  l'entablement  on  lit  cette  inscrip- 
tion qui  se  rapporte  à  la  statue  t'   - 

•  •  •  f 

Non  Venus  illa  ego  quam  yani  finxere  poet»^ 
Sum  Venus  hanc  referens  quanl^i"^  ignis  alit. 
RfiPi  ARC.  16  [i^-. 


«  Je  ne  suis  pas  cette  Vénus  que  les  poètes  ont 
chantée,  mais  je  suis  Vénus ,  emblème  de  celle  qu*un 
pieux  amour  nourrit  de  ses  feux.  » 

Au-dessus  de  la  porte  du  pont-levis  on  voit  un  très- 
bel  écusson  aux  armes  de  Dreux-Brezé  :  d'azur  au  che- 
vron d'or,  accompagné  de  deux  roses  d'argent  en  chef 
et  d'un  soleil  d'or  en  pointe,  entouré  de  Tinscription  : 
MARQUISAT  DE  BREZÉ,  et  plus  bas  la  date  1682. 

Le  fossé  qui  entoure  le  château  est  creusé  dans  le 
tuf  et  a  dix  mètres  de  largeur  sur  douze  de  profondeur. 
On  y  a  pratiqué  des  logements  pour  cinq  à  six  cents 
hommes,  et  ils  servaient  autrefois  de  refuges  aux  habi- 
lanls  du  pays  dans  les  temps  de  troubles. 

En  dehors  de  cette  enceinte  se  trouve  un  vaste  bâti- 
ment situé  au  nord,  et  au-dessus  de  la  porte  d'une  re- 
mise on  voit  encore  l'écusson  de  Dreux-Brezé  encastré 
dans  une  pierre  plus  ancienne,  et  qui  porte  la  date 

SEPTEMBRE  1550. 

L'ancienne  chapelle  Sainte-Catherine,  qui  était  placée 
au  N.  0.  du  château,  a  été  démolie,  et  en  1855  on  a 
construit ,  à  deux  cents  mètres  au  sud ,  une  jolie  cha- 
pelle destinée  aux  sépultures  de  famille.. 
..  Entre  le  château  et  cette  chapelle  sont  les  jardins. 
Sur  la  colline  qui  se  trouve  au  nord  est  le  parc  en- 
touré de  murs,*  et  à  l'entrée,  qui  sert  aussi  d'avenue 
au  château,  on  a  élevé,  il  y  a  quelques  années,  un  bâ- 
timent orné  de  créneaux  et  qui  sert  de  logement  au 
portier.  Tout  cet  enclos  n'a  pas  moins  de  deux  kilo- 
mètres de  tour,  et  de  différents  points  on  jouit  d'une 
vue  magnifique,  surtout  vers  l'ouest  où  l'on  voit  le 
Goudray-Macouard  et  Montreuil-Bellay. 


ÉGLISE  ET  COMMUNE  DE  BREZÉ. 

L'église  de  Brezé,  située  à  un  kilomètre  au  sud  du 
château  et  du  bourg,  est  en  forme  de  rectangle  ter- 
miné par  une  abside  en  demi-cercle.  Le  chœur  voûté 
parait  de  construction  moderne.  Il  est  éclairé  par  deux 
fenêtres  plein  cintre,  et  communique  par  une  arcade  éga^ 
lement  plein  cintre  à  la  nef  qui  est  éclairée  par  quatre 
(enétres  sur  la  face  sud-est  et  trois  sur  celle  nord-ouest> 
Les  trois  qui  sont  les  plus  rapprochées  du  chœur  sont 
ogivales  et  peuvent  être  du  xiv©  siècle.  La  moitié  envi- 
ron de  cette  nef  du  côté  nord-ouest  a  été  reconstruite 
en  1829,  ayant  été  écrasée  par  le  clocher  qui  s'était 
écroulé  pendant  qu'on  reprenait  en  sous-œuvre  les  ar- 
ceaux qui  le  soutenaient  sur  le  milieu  de  l'église.  Ce 
clocher  avait  une  flèche  en  pierre.  Le  nouveau  clocher 
élevé  sur  le  côté  nord-est  du  chœur  forme  une  tour 
carrée  terminée  par  une  sorte  de  calotte  ou  petite  cou- 
pole en  pierre  surmontée  d'une  croix.  Il  a  été  construit 
en  1835.  Le  toit  de  l'église  est  très-aigu,  dans  le  style 
du  xiv^  siècle.  Au  bout  des  vieux  murs  de  la  nef,  du 
côté  nord-est,  en  dehors,  on  voit  encore  des  traces  de 
la  litre  seigneuriale.  Ce  sont  des  carrés  peints  en  jaune 
sur  lesquels  il  y  avait  des  écussons  aujourd'hui  presque 
e^tièrement  effacés.  Dans  régiise,  à  gauche  du  grand 
autel,  on  voit  un  très-bel  autel  de  la  Vierge  construit 
depuis  peu,  en  pierre  de  Tonnerre,  dans  le  style  du 
xiv«  siècle. 

L'église  de  Brezé,  sous  le  vocable  de  saint  Vincent, 
dépendait  autrefois  de  l'abbaye  de  Mauléon(îinjourd'hui 


Châtillon-sur-Sèvre)  et  elle  a  été  desservie  jusqu'à  la 
révolution  par  un  prieur-^curé. 

Cette  paroisse,  quoique  de  l'Anjou  pour  le  temporel, 
dépendait  pour  le  '  spirituel  dû  diocèse  de  Poitiers.  En 
1720  la  population  était  de  883  habitants,  et  en  1856 
elle  s'élevait  à  911. 

Eh  1790,  Brezé  était  le  chef-lieu  d'un  canton  dépen- 
dant du  district  de  Sauniur  et  qui  comprenait  les  com- 
munes de  Brezé,  Epieds,  Saint-Cyr-en-Bourg,  Siaifit^^ 
Just-sur-Dive,  Saint-HippolyteTet  le  village  de  Ghàmpî^ 
gny-le-Sec.  La  loi  du  27  brumaire  an  X  (19  novembre 
1801)  en  réduisant  à  trente-quatre  le  nombre»  des  can- 
tons du  département,  a  supprimé  celui  de  Brezé  qui  a 
été  réuni  au  canton  dé  Montreuil-Bellay. 

Autrefois  la  plupart  des  habitants  du  bourg  étaient 
logés  dans  dès  habitations  souterraines  creusées  dans 
la  roche  de  tuf  qui  forme  le  sous-sol  ;  cependant  parmi 
les  maisons  anciennes  on  rémarque  celle  de  M.  Vollând, 
située  dans  la  rue  du  Puits-Aubert  et  qui  est  ornée  de 
tourelles.  Maintenant  on  ne  creuse  plus  de  caves  d'ha- 
bitation, mais  on  construit  de  jolies  maisons  en  tuffeau  : 
parmi  les  modernes  on  remarque  celle  de  M""®  Thi- 
bault,  placée  vi«-à*-^is'du  château,  sur  le  bord  de  la 
grande  route.       * 

11  y  avait  autrefois  plusieurs  notaires  à  Brezé  et  un 
contrôleur  des  actes;  il  n'y  a  plus  qu'un  notaire  au- 
jourd'hui, et  on  y  a  établi  depuis  plusieurs  années  un 
bureau  de  distribution  des  lettres. 

Les  localités  les  plus  remarquables  de  la  commune 
de  Brezé  sont  :  Grandfond,  Lançon,  Meigné,  la  Ripaille 
et  la  Rivière-Marteau. 


-  225 


GRÂNDFOMD. 


Ce  village,  situé  à  deux  kilomètres  au  sud-est  de 
Brezé,  est  très-ancien.  J'ai  découvert  des  traces  de  cons- 
truction romaine  aux  environs. 

Un  Adalard  de  Grandfond  (Adalardus  de  Grandifonte) 
avec  son  frère  Giroir  (Girorms  frater  ejus)  sont  témoins 
dans  une  charte  de  Saint-Maur  du  24?  avril  1090  (1). 
Le  même  Adalard  est  encore  témoin  dans  une  charte 
du  25  avril  1090  (2)  et  dans  une  autre  du  12  décem- 
bre 1124  (3). 

En  1263  Simon  Chamaîllart,  chevalier,  baille  à  rente 
à  Geoffroy  de  Brezé  tout  ce  qu'il  peut  avoir  à  Granl- 
fonz  (Grandfond)  (4),  et  en  1302  ce  même  Geoffroy  de 
Brezé  donna  la  terre  de  Grandfond  à  Catherine  de 
Brezé,  èa  petite-frlle,  épouse  de  Macé  de  l'Etang  (5). 

Il  y  avait  dans  ce  village  plusieurs  seigneuries  ou 
fiefs  dont  les  principaux  étaient  le  fief  de  Fenou  ou  de 
Grandfond  proprement  dit ,  le  fief  Fouquet  et  celui  de 
Tîiloup. 

Jean  Bessonneau  était  seigneur  de  Grandfond  en 
1373. 

Hardouin  de  la  Touche  eii  1431-144'3. 

Guillaume  Sanglier ,  chevalier  seigneur  de  Bizay  (6) 

(i)  ArcilWea  d'Anjou,  par  P.  Marchegay,  4843,  p.  3G6.  Gartularium 
sancii  Mauri.  , 

(t)  Archives  d'Anjou,  p.  405. 

(3)  Archives  d'Anjou,  p.  412, 

(4)  Pièces  justificatives,  n**  II. 

(5)  Pièces  justificatives,  nMIL' 

(6)  Commune  d'Epieds  près  Brezé.  ; 


—  256  — 

fit  foy  et  hommage  le  3  août  1450  au  seigneur  de 
Brezé  pour  raison  de  son  hôtel,  terre  et  seigneurie  de 
<  Grantfons.  » 

Pierre  Prévost  ayant  hérité  de  la  terre  de  Grandfond 
par  le  décès  de  Jeanne  Eveillechien ,  épouse  de  Guil- 
laume Sanglier,  fit  foy  et  hommage  au  seigneur  de 
Brezé  le  17  mai  U64;  et  le  i  juillet  1491,  il  rendit  à 
messire  Hardouin  de  Maillé,  seigneur  de  Brezé,  son 
aveu  pour  raison  de  son  <  chastel  de  Grantfons  avec- 
^  ques  ses  appartenances  et  dépendances  comme  la 
»  court,  basse-court,  maisons,  masures,  clouaysons, 
f  caves,  caries,  jardrins,  fuye,  les  douves  tout  à  l'en- 
^      »  tour  dudict  chaslel,  etc.  (1).  » 

Le  3  juillet  1533,  Louis  Prévost  vendit  à  Pierre 
Foullon  le  château ,  terre  et  seigneurie  de  Grandfond , 
et  ce  dernier  rendit  son  aveu  au  seigneur  de  Brezé  le 
20  février  1539. 

François  Bourneau ,  lieutenant-général  à  Saumur  pour 
le  sénéchal  d'Anjou,  épousa  le  3  mai  1550,  Marthe 
Foullon,  fille  de  Pierre,  qui  lui  apporta  en  dot  la  terre 
et  seigneurie  de  Grandfond. 

Une  enquête  faite  an  1568  nous  apprend  que  le  seir 
gneur  de  Grandfond  venait  de  faire  construire,  avec  la 
permission  du  seigneur  de  Brezé,  une  fuie  de  forme 
ronde,  à  la  place  de  l'ancienne  qui  était  carrée;  mais 
qu'à  plusieurs  reprises  il  avait  voulu  faire  faire  un 
pont-levis  pour  entrer  dans» son  manoir,  et  que  le  sei- 
gneur de  Brezé  s'y  était  opposé,  de  sorte  que  pour 
passer  sur  les  douves  qui  entouraient  ledit  manoir,  il 
n'y  avait  qu'un  pont  dormant. 

(1)  Chartrier  du  château  de  Brezé,  cartons  de  Giandrofld. 


—  827  — 

Suivant  partage  du  9  décembre  1616,  la  terre  de 
Grandfond  échut  à  Isabelle  Boumeau,  veuTe  de  Jean 
Cànaye,  conseiller  au  parlement,  et  le  lendemain,  cette 
dame  fit  foy  et  hommage  au  seigneur  de  Brezé.  Le 
17  décembre  1638,  elle  rendit  son  aveu  de  Grandfond. 

En  1658,  le  7  décembre,  Pierre  Canaye,  sieur  de 
Palluau  eut  en  partage  la  terre  de  Grandrond.  Il  était 
conseiller  au  Parlement  de  Paris  et  eut  pour  succes- 
seur Etienne  Canaye ,  aussi  conseiller  au  Parlement  en 
1693,  puis  doyen  de  la  grand'cbambre  du  Parlement 
en  1725.  Le  12  mai  1721,  il  fit  foy  et  hommage  au 
seigneur  de  Brezé,  et  rendit  son  aveu  le  26  novembre 
1725. 

Par  lettres  patentes  données  à  Fontainebleau  au  mois 
de  juillet  1731,  le  roi  lui  accorda  la  permission  de 
faire  construire  dans  l'étendue  de  son  fief  de  Grand - 
fond  des  fourches  patibulaires  y  des  poteaux  et  autres 
signes  de  haute  justice;  et  un  procès- verbal  du  25  oc- 
tobre suivant  constate  que  leâ  fondements  ont  été  creu- 
sés et  les  premières  pierres  posées  pour  établir  deux 
piliers  à  liens  par  dedans  et  par  dehors  en  signe  de  la 
haute  justice  du  seigneur  de  Grandfond,  sur  une  pièce 
de  vigne,  non  loin  du  village,  et  dans  l'endroit  où 
étaient  précédemment  les  Justices  ou  fourches  patibu- 
laires tombées  en  ruine. 

Etienne  Canaye,  fils  unique  du  précédent  et  de  Ma- 
rie-Jeanne Garnier  de  Mentreau,  était  en  1743-1775, 
seigneur  de  Grandfond ,  les  Roches ,  Montreau ,  Malval 
et  Saint-Hean ,  prêtre  du  diocèse  de  Paris  et  membre 
de  l'Académie  royale  des  inscriptions  et  belles-lettres. 
Il  vendit  le  7'avril  1775  à  Joseph  Guillon  la  terre  et 


—  M8  — 

seigneurie  de  Grandfond,  consistant  dans  le  château  à 
pont-levis  renfermé  de  mars  en  pierre  de  taille,  haute 
et  basse-cour,  etc«  Droit  de  haute,  moyenne  et  basse 
justice,  etc.  Relevant  à  foy  et  ho4fnmage  simple  du 
marquisat  de  Brezé,  sous^la  redevance  d'un  cheval  de 
service  apprécié  à  quatre  livres  tournois. 

Le  7  juillet  1775,  M^^  Joachira  de  Dreux,  marquis  dé 
Brezé,  fit  devant  le  lieutenant  particulier  en  la  séné-* 
chaussée  de  Saumur  le  retrait  féodal  de  la  terre  de 
Grandfond  qui  depuis  cette  époque  a  continué  d'appar- 
tenir aux  marquis  de  Brezé. 

Le  château  a  été  démoli  et  il  n'en  reste  que  quelques 
murailles  y  ainsi  que  les  douves,  une  fuie  et  une  mai- 
son habitée  par  un  fermier.     /     . 

D'après  le  recensement  de  1856,  le  village  de  Grand- 
fond  était  peuplé  de  175  habitants. 

Fief  FouqueL  —  Il  parait  tirer  son  nom  de  Jean 
Fouquet,  époux  en  1448  de  Roberde  de  Brezé. 

Dans  un  aveu  du  15  janvier  1469,  Antoine  Fouquet 
reconnaît  tenir  son  fief  de  la  seigneuHe  de  Berne  et 
avQiie  qu'il  est  dû  u|i  chapeau  de  boutons  de  roses  à 
chaque  nouveau  seigneur.        .: 

Guion  Fouquet  rendit  soii  aveu  en  1494. 

Nicolas  Fournier  fit  foy  et  hommage  en  1599. 

Olivier  Fournier  rendit  son  aveu  en  1627. 

Jean  Prunier  en  1 654. 

En  1757,  une  demoiselle  llessier  était  dame  du  fief 

Fouquet,  et  payait  au  seigneur  de  Berrie  cinq  sous  de 

rente  ou  de  service  annuel  au  lieu  du  chapeau  de  roses 

mentionné  dans  les  anciens  aveux. 

;  Chapelles.  — r  Ily  avait  encore  à  Grandfond  les  cha- 


—  229  — 

pelles  de  Bonne-Nouvelle  et  de  Notre-Dame  de  rÉtoile. 
Cette  dernière,  située  dans  le  haut  du  village,  sur  le 
bord  '  de  Tancien  chemin  de  Saumur  à  Loudun,  avait 
été  fondée  en  1454  par  Maurice  Âiidrain,  prêtre,  chan- 
tre de  l'église  de  Senlis,  et  dotée  de  nouveau  en  1462. 
Dans  Torigine,  les  héritiers  du  fondateur  présentaient 
le  chapelain  à  Tévêque  de  Poitiers,  qui  accordait  les 
lettres  de  provision;  maie  en  1515,  ils  cédèrent  ce  droit 
à  Guy  de  Maillé,  seigneur  de  Brezé,  qui  le  transmit  à 
ses  descendants. 

LANÇON. 

Le  château  de  Lançon  est  situé  à  2  kilomètres  à 
Touest  de  Brezé.  Cette  terre  parait  avoir  été  donnée  à 
Tabbaye  du  Loroux  (1)  lors  de  sa  fondation  par  Foul- 
ques V,  comte  d'Anjou,  et  par  Aremburge  du  Maine, 
sa  femme,  en  1121. 

Ce  lieu  est  appelé  Lanceum,  Lanchuniy  Lanzon  dans 
les  chartes  des  xii«  et  xiii®  siècles;  Lenczon  au  xv« 
siècle. 

Vers  Tan  1160,  Barthélémy  de  Brezé  restitua  à  Za- 
charie,  abbé  du  Loroux,  les  dixmes  que  les  moines  per- 
cevaient à  leur  grange  de  Lançon,  et  qu'il  leur  avait 
enlevées  par  force  (2). 

Jean  de  la  Porte,  seigneur  de  Vezins,  donna  aux  moi- 
nes du  Loroux,  Van  121 7^  la  part  qu'il  avait  dans  les 
bois  de  Lançon.  En  1221 ,  le  même  Jean  de  la  Porte 

(1)  Commune  de  Yecoantes. 
(f)  Pièces  justificatives  n*  1. 


—  230  — 

leur  donna  tous  les  héritages  qu'il  possédait  près  dudit 
lieu. 

Philippe  de  Dampierre  (1),  chevalier,  leur  abandonna 
aussi  en  1233,  les  dixmes  qu'il  possédait  sur  des  terres 
et  des  vignes  situées  près  de  Lançon,  entre  la  rivière 
de  Dive,  le  bois  de  Saint-Aubin  et  le  chemin  royal  de 
Saumur  à  Montreuil- Bellay  :  viam  regiam  que  ducH  a 
Salmurio  apud  Mosteriolum  Bcrlnii,  Ce  qui  fut  fait 
avec  le  consentement  des  six  enfants  du  donateur, 
Guillaume,  Jean,  Geoffroy,  Gervais,  Raoul  et  Barthé- 
lémy (2). 

En  1236,  Hugues  de  la  Haye  donna  aux  religieux  du 
Loroux,  une  rente  de  trois  setiers  de  froment  à  lame- 
sure  de  Montreuil-Bellay,  que  lui  devait  Thibault  de  la 
Salle  (3). 

Adam,  vicomte  de  Melun  et  seigneur  de  Montreuil- 
Bellay,  confirme  au  mois  de  mars  1248,  la  possession 
de  tous  les  biens  que  les  religieux  du  Loroux  avaient 
en  son  fief;  et  au  mois  de  janvier  1265,  Guillaume  de 
Melun,  seigneur  de  Montreuil,  après  avoir  pris  con- 
naissance de  l'acte  de  son  père,  y  donna  toute  son  ap- 
probation. 

L'abbaje  du  Loroux  avait  à  Lançon  un  prieuré  dont 
la  chapelle  ayant  été  détruite  pendant  les  guerres,  fut 
reconstruite  au  milieu  du  xv^  siècle.  La  bénédiction  et 
reconsécration ,  sous  le  vocable  de  saint  Gaultier,  en 
fut  faite  le  16  mars  1448,  em  présence  d'Aimerio,  abbé 

r 

(1)  Dampierre  près  Saumur. 

(2)  Charlrier  du  château  de  Brezé,  titres  de  Lançon. 

(3)  La  Salle ,  château  situé  dans  la  commune  do  MontreuU-Bellay, 
;ippartenant  aujourd'hui  à  M.  de  Caqueray. 


—  231  — 

du  Loroux  et  de  plusieurs  religieux;  de  Pierre  Bouchard, 
curé  de  Saint-Cyr-en-Bourg,  frère  Guillaume  Robinet, 
prieur  de  Saint-Hippolyte,  et  Jean  Benoit,  curé  de  Sainl- 
Just-sur-Dive. 

Enfin,  par  acte  du  &  juin  1561,  les  religieux  du  Lo- 
roux cédèrent,  en  échange,  à  Ârthus  de  Maillé,  cheva- 
lier, seigneur  de  Brezé,  la  terre  et  seigneurie  de  Lan- 
çon, à  la  charge  de  la  tenir  en  plein  fief  du  roi  à  cause 
de  son  duché  d'Anjou. 

Lançon  continua  d'appartenir  aux  seigneurs  de  Brezé 
jusqu'au  22  novembre  1710,  que  Messire  Thomas  de 
Dreux,  marquis  de  Brezé ,  arrenta  cette  terre  à  Pierre 
Calou.  René  Baillergeau  en  était  propriétaire  en  1759. 
Elle  appartenait  en  1800-1813  à  la  famille  Thibault 
qui  la  vendit  à  M.  de  Laistre.  Ce  dernier  fit  reconstruire 
vers  1822  la  maison  de  Lançon,  et  elle  a  encore  été 
augmentée  vers  1847,  par  M.  Armand-Stanislas,  comte 
de  Laistre,  son  fils,  qm  y  est  mort  subitement  au  mois 
de  janvier  1855. 

Cette  habitation,  située  au  milieu  des  bosquets,  est 
simple  mais  charmante.  On  y  voit  encore  la  chapelle 
construile  au  xv®  siècle,  et  qui  sert  actuellement  de 
pressoir  et  de  cellier.  Elle  forme  un  rectangle  d'envi- 
ron dix  mètres  de  longueur  sûr  six  mètres  cinquante 
centimètres  de  largeur;  au-dessus  de  la  porte,  qui  est 
surmontée  d'un  tympan  ogival,  on  voit  un  écosson 
chargé  de  trois  fleurs  de  lys  qui  ont  été  grattées.  Quel- 
ques peintures  murateià  existent  encore  dans  l'intérieur, 
au-dessus  de  la  place  où  était  l'autel;  et  près  de  la 
porte  de  la  chapelle  se  trouvent  les  restes  d'une  statue 
en  pierre. 


—  232  — 


MEIGMÉ-SUR-DIVE. 


Le  village  de  Meigné  est  situé  à  environ  cinq  kilo- 
mètres au  S.  S.  0.  de  Brezé,  non  loin  du  canal  de  la 
Dive ,  situation  qui  lui  fait  donner  quelquefois  le  nom 
de  Meigné-sur-Dive. 

Le  titre  le  plus  ancien  où  nous  ayons  vu  figurer  cette 
localité  est  une  charte  d'environ  Tan  1125,  par  laquelle 
Airaeric  de  Curçay  {Aimericus  de  Curchaio)^  conduisant 
sa  ûlle  religieuse  à  Fontevrault,  donna  à  cette  abl^aye 
un  morceau  de  terre  situé  «^  Meigné  (u/ium  frustat/n 
terre  apud  Maigné)  (1). 

Foulques  et  Jean  de  la  Rochefoucauld^  frères,  étaient 
seigneurs  de  Meigné  en  1M5. 

Christophe  de  la  Rochefoucault,  fils  de  Foulques  et 
de  Marguerite  de  la  Roche,  était  chevalier  et  seignetir 
de  Meigné  vers  1460.  Il  épousa  Michelette  de  Vallée , 
fille  unique  de  Jean  et  d'isabeau  de  Brezé. 

Antoine  de  la  Rochefoucauld  était  seigneur  de  Mei- 
gné en  1484. 

Ârthus  de  Maillé,  seigneur  de  Brezé,  possédait  le  chft- 
teau  de  Meigné  en  1567,  et  le  !«>- juillet  1568  il  le 
vendit  aux  chanoines  du  Puy-^Notre-Dame ,  mais  il  le 
retira  par  acte  du  dernier  février  1588,  et  le  possédait 
encore  en  1594. 

Nous  trouvons  Eléonore  Lepauvre,  veuve  de  Louis  du 
Tronchay,  dame  de  Meigné  en  1685. 

Un  autre  Louis  du  Tronchay,  seigneur  de  Meigné, 

(i)  Clypeus  Fontebraldensis^  tom.  2,  p.  327. 


^  233  — 

épousa  y  te  2  avril  1696,  à  Saint-Pierre  de  Saumur, 
Marguerile-Jacob  de  Tigné. 

Enfin,  Louis-Joseph-Denis  du  Tronchay,  chevalier, 
était  seigneur  de  Meigné  en  1730-1760.  11  prenait  en 
outre  la  qualité  de  président-sénéchal-lieutenant-géné- 
ral de  la  sénéchaussée,  ville  et  ressort  de  Saumur,  et 
de  maire  perpétuel  de  la  même  ville;  mais  il  fut  dé- 
bouté de  cette  dernière  prétention  par  arrêt  du  Conseil 
d'État  du  roi  du  14  janvier  1749.  Du  Tronchay  mourut 
à  Saumur  et  fut  enterré  à  l'église  de  Nântilly  le  16  avril 
1760,  à  l'âge  de  60  ans.  Il  avait  épousé  Charlotte  Pou- 
lain de  Grée,  qui  vivait  encore  en  1764. 

Le  château  de  Méigné  appartenait  à  la  famille  de 
Charnacé  en  1797  et  1816. 

M.  Perrault,  qui  en  était  propriétairii  en  1850,  le 
possède  encore  aujourd'hui. 

Le  château  parait  avoir  été  reconstruit  dans  le  der- 
nier  siècle,  et  au-devant  se  trouve  une  vaste  cour  gar- 
nie d'arbres  et  flanquée  de  pavillons  carrés  aux  quatre 
angles. 

En  1856  le  village  de  Meigné  était  peuplé  de  60  ha- 
bitants. 

LA  RIPAILLE. 

C'est  un  hameau  situé  à  un  kilomètre  au  sud-est  du 
bourg  de  Brezé.  11  en  est  ïait  mention  dans  un  titre  du 
16  juin  1336. 

Etienne  Rondeau  rendit  en  1354,  au  seigneur  de 
Brezé,  son  aveu  pour  raison  du  fief  de  la  Ripaille. 
'  Arnoul  Augier  en  était  seigneur  en  1481. 


—  234  — 

Louis  de  Bonaerier  rendit  son  aveu  le  22  juin  1573, 
à  Arthus  de  Maillé,  seigneur  de  Brezé,  pour  raison  du 
fief  de  la  Ripaille. 

Le  26  janvier  1G56,  Louis  Moussault  en  rendit  aveu 
au  prince  de  Condé,  marquis  de  Brezé. 

Perrine  Delhommeau,  veuve  de  René-Pierre  Mous- 
sault, sieur  de  la  Cousinerie,  conseiller  du  roi,  pré- 
sident du  grenier  à  sel  de  Saumur,  habitait  la  Ripaille 
en  1693. 

D'après  le  recensement  de  1856,  il  y  avait  53  babi* 
tants,  dont  unç  partie  sont  logés  dans  des  appailements 
souterrains. 

La  maison  principale,  qui  appartient  à  M^e  Couscher, 
est  un  assez  gros  bâtiment  ayant  sur  la  fagade  princi- 
pale, touméQ^au  nord-ouest,  une  belle  tourelle  d'es- 
calier à  ouvertures  en  style  gothique  fleuri  du  xv®  siè- 
cle. Les  fenêtres  de  la  maison  ont  été  refaites  à  la 
moderne.  Autour  de  la  maison  se  trouvent  des  fossés 
qui  donnent  entrée  à  des  caves  et  ont  dû  servir  autre- 
fois de  défense.  Une  fuie  de  forme  ronde,  style  du 
XYi^  siècle,  se  voit  près  de  la  maison.  On  a  construit 
en  1860  une  charmante  chapelle  dans  le  genre  du 
xye  siècle,  sur  remplacement  de  l'ancienne. 

LÀ  RIVIÈRE- MARTEAU. 

Le  lieu  appelé  la  Rivière^Marteau  est  situé  non  loin 
de  l'église  de  Brezé,  sur  la  rive  droite  du  canal  de  la 
Oive.  C'est  dans  les  terrains  qui  en  dépendent  qu'on  a 
découvert  ep  1834,  des  vases  romains,  des  médailles, 
etc.  qui  sont  aujourd'hui  au  château  de  Brezé  :  ce  qui 


—  235  — 

prouve  Inexistence ,  dans  ce  lieu ,  de  constructions  dès 
le  temps  des  Romains. 

Cette  terre  appartenait,  au  commencement  du  xy©  siè- 
cle, à  la  famille  Sarrasin.  En  1422,  Jousselin  Sarrasin, 
chevalier,  seigneur  de  la  Rivière- Marteau,  obtint  de 
Charles,  fils  de  Charles  VI,  roi  de  France,  régent  du 
royaume,  des  lettres  qui  lui  permettaient  de  réparer 
l'ancienne  forteresse  dudit  lieu,  et  de  contraindre  à  y 
travailler  les  habitants  des  environs,  afin  qu'elle  puisse 
servir  de  refuge  dans  les  temps  de  guerre  (1). 

Frère  Etienne  Favereau,  prieur- curé  de  Brezé,  et 
frère  Guillaume  Martinet,  son  prédécesseur,  habitaient 
la  Rivière-Marteau  en  14â0. 

ê 

Robert  Sarrazin,  seigneur  de  la  Rivière,  rendit,  le 
7  novembre  1445,  son  aveu  au  seigneur  de  Berrie, 
probablement  Louis  d'Amboise. 

Louis  de  Bouman  rendit  son  aveu  de  la  Rivière- 
Marteau,  le  24  novembre  1501,  à  Philippe  de  Commi- 
nes,  prince  de  Talmont  et  seigneur  de  Berrie. 

Le  15  mai  1514,  Charles  de  Bournan,  écuyer  sei- 
gneur de  Sous-le-Puy,  vendit  la  Rivière -Marteau  à 
Guillaume  de  la  Grandière,  écuyer,  seigneur  de  Mont- 
geoffroy;  mais  eHe  fut  retirée  par  arrêt  du  Parlement 
le  3  juillet  1518,  au  profit  de  Guy  de  Bournan. 

Charles  de  Bournan  céda,  par  échange,  cette  terre  à 
Guy  de  Maillé,  seigneur  de  Brezé,  le  13  décembre 
1526;  et  le  32  mars  1527,  ce  dernier  fit  foy  et  hom- 
mage à  François  de  la  Tremoille,  seigneur  de  Berrie. 

Arthus  de  Maillé,  seigneur  de  Brezé  et  de  la  Rivière- 

(1)  Pièces  justificatives  no  IV. 


—  28é  -- 

Marteau,  fit  foy  et  hommage  le  ^novembre  Î55i.  Eil 
1562,  il  vendit  à  réméré,  la  terre  de  la  Rivière,  et  il 
la  retira  en  1571.  Ârthus  de  Maillé  fit  de  nouveau  foy 
et  hommage  au  seigneur  de  Berne  le  ^8  juillet  158i 
pour  raison  de  la  seigneurie  de  la  Rivière. 

Charles  de  Maillé,  seigneur  de  Brezé,  fil  foy  et  hom- 
mage-lige le  5  mai  1594.  Il  vendit  à  réméré  cette  sei- 
gneurie le  le»"  mai  1601,  et  la  retira  le  26  juin  1609. 
Il  avait  néanmoins  rendu  son  aveu  le  20  mars  1607  à 
Claude  de  la  Tremoille,  duc  de  Thouat*s  et  seigneur  de 
Berrie, 

La  Rivière-Marteau  continua  d'appartenir  aux  mar- 
quis de  Brezé  jusqu'au  20  octobre  1701,  que  ^Thomas 
de  Dreux  la  bailla  à  rente  à  Jacques  Màugard. 

Elle  appartenait  en  1759  à  René-François  Dut^rtre 
des  Roches,  et  en  1777-1788  à  François-Louis  Du-^ 
tertre. 

Enfin,  le  31  mai  1791,  François -Louis  Dutertre  et 
Marie-Céleste  Lehoux,  son  épouse,  la  vendirent  à  Henrf- 
Evrard  de  Dreux-Brezé,  qui  Ta  transmise  à  ses  descen- 
dants. 

La  Rivière-Marteau  n'est  aujourd'hui  qu'une  ferme 
dont  les  plus  vieux  bâtiments  ti'ont'  guère  que  deux 
cents  ans.  La  maison  d'habitation  porte  la  date  de 
1775  au-dessuà  de  l'entrée,  et  le  grand  corps  de  bâti- 
ment au  sud-ouest  de  la  cour  a'  été  reconstruit  pai* 
Henri-Evrard  de  Dreux,  marquis  de  Brezé. 


^  âS7  - 


PIÈCES  JUSTIFICATIVES. 


t. 


Acte  par  lequel  il  est  rappelé  que  Barthélémy  de  Brezé  resti* 
tua  à  Zacharie,  abbé  du  Leroux,  les  diœmes  qu^il  omit 
enlevées  par  force.  Sans  date,  mais  vers  Tan  1160. 

Sciant  qui  sunt  et  qui  futuri  sunt  quod  Bartholo^ 
meus  de  Breze  décimas  quas  de  nutriment] s  omnibus 
que  roonachi  de  Oratorio  in  grangia  sua  de  Lanchun) 
habebant  contra  divina  precepta  et  apostolica  décréta 
diu  violente  que  abstulerat  eisdem  monachis  in  elemo- 
sina  pro  sainte  suo  et  parentum  suorum  in  capitulo 
Oratorii  dimisit  et  in  manu  domni  Zacharie  tune  Ab- 
batis  ejusdem  loci  misil.  Teste  Gaufrido  Bevin,  Rai- 
naudo  de  Crele,  Rainaudo  de  Brese,  Chpichel,  Girardo, 
Johanne  Tegulariis,  Johanne  de  Brium,  et  mnltis  aliis, 
Ea  propter  idem  Bartholomeus  centum  et  X  Solidos  de 
caritate  ecclesie  habuit.  Quod  ut  ratum  haberetin  per- 
petuam,  hoc  ipsum  in  manu  Garnerii  Losdunensis  ar- 
cbipresbiteri  et  Rollandi  fratris  ejus  postmodum  fir- 
mavit,  coram  Bartholomeo  Petot  et  Johanne  de  Monte- 
cantorii  presbiteris.  Hoc  idem  concesserunt  Handinia 
uxor  ejusdem  Bartholomei,  Bartholomeus  filius  ipso- 
rum  jjrimogenitus ,  Petrus  et  Ricberius  fratres  Bar- 
tholomei. Testes  Nicolaus  de  Sanclo  Paer,  Aimericus 
Âcardi,  Simeon  de  Mairum,  Agnes  de  Castellone. 

(Chartrier  du  château  de  Brezé,  titres  de  Lançon.  Original  en  par- 
chemin avec  un  fragment  de  sceau  sur  double  queue.) 

REP.   ARC.  17 


288  — 


II. 


Bail  à  rente  par  Simon  Chamaillarl  à  Geoffroy  de  Brezé  de 
tout  ce  quHl  avait  à  Grandfond.  iSOS. 


Symon  Chamaillart,  che- 
valier bailla  et  ocireia  a 
loufrey  de  Brese,  cheva* 
lier  tôt  quanque  ledit  Sy- 
mon aveit  à  Grantfonz,  à 
Marcon  e  es  paroisses  de 
Chatigne,  de  Coudrei,  de 
Oumes  Saint-Florenz ,  de 
Ditre,  et  a  Saumur,  mou- 
vant dou  fei  de  Fenou 

por  vint  libr  de  servige  de 
rente  tos  les  ans  en  monee 
corant a  rendre  au  de- 
vant dit  Symon  Chamail- 
lart... a  Grantfonz. 


Simon  Chamaillart,  che- 
valier ,  baiHa  ei  oetroia  & 
Geoffroy  de  Brezé,  cheva- 
lier, tout  ce  ^ue  ledit  Si- 
mou  avait  à  Grandfond^  à 
Marson,  dans  les  paroisses 
de  Chétigné ,  du  Coudray- 
Macouard,  des  Ulmes  Saint- 
Florent  ,  de  Distré  et  à 
Saumur,  mouvant  du  fief 
de  Fenou,  pour  vingt  li- 
vres de  service  de  rentç 
tous  les  ans  en  monnaie 
courante,  à  rendre  au  sus- 
dit Simon  Chamaillart,  à 
Grandfond. 


(Gfaartrier  du  château  de  Brezé.  Original  en  parchemin  dout  le 
sceau  est  perdu.) 

m. 

Donation-partage  faite  par  Geoffroy  de  Brezé,  de  tous  ses 
biens,  entre  Catherine  de  Brezê,  femme  de'Mccéde  FEtang, 
Jean  de  Brezé  H  Marguerite  et  Agnès  sœurs  de  ce  dernier. 
Lundi  après  Pâques ,  1302. 

m 

Saichent  touz  presenz  et  avenir  que  comme  Mace  de 
Lestang,  vallet,  et  Cathiçrinç,  sa  femme,  fiUe  et  hère 


Monsour  johan  de  Brese,  fen  jadis  chevalier  et  fiz  ja- 
dis cellui  feu  de  noble  home  monsour  Jouffroy^  sei- 
gnour  de  Brese  chevalier,  ladite  Katherine  souffesam- 
ment  autorisée  doudit  Mace  son  seignour  quant  à  ce. 
aient  pieca  octrie  et  este  dassentement  de  lour  pure  et 
bonne  volente..*  que  ledit  Monsour  Jouffroy,  sire  de 
Brese,  père  doudit  feu  Johan  feust  et  peust  faire  tout 
a  sa  volente  parties,  divisions  ou  aumosnes  de  tous  ses 
héritages,  ses  conquestes  faites  ou  a  faire  queles  que 
elles  saient  ou  fusent  en  quelconque  manière  que  ledit 
Monsour  Jouffroy  vaudreit  et  a  lui  plerait.  C'est  assa- 
voir a  Johan  de  Brese  dicellui  Monsour  Jouffroy  fiz  et 
de  Madame  Aalizon  de  Boure,  feue  jadis  sa  femme  et 
axis  autres  frères  et  suers  dicellui  dit  Johan  nés  ou  a 
procréer  ou  a  procrer  desdits  Jouffroy  et  Aalizon.  Et 
aient  enquores  volu...  lesdits  Mace  et  Kalrine  en  ce 
fessant  que  telles  parties  devisions  ou  donneîsons  feroît 
ou  voudroit  faire  quant  il  voudroit,  ledit  Monsour 
Jouffroy  a  ses  ditz  enfaûs  de  lui  et  de  ladite  dame 
Aalizon,  sa  famé,  de  ses  ditz  héritages  et  conquestes  et 
quelque  manière  que  il  les  feroit  ou  voudroit  faire 
tant  au  profcit  diceux  Mace  et  Katherine,  sa  famé 
comme  au  domage...  saient  fermes  et  estables  a  tou2- 
jourz  mes  en  perdurable  fermeté  sanz  ce  que  iceux 
Mace  et  Katrine  ne  lours  heirs  ne  autres  qui  deux  aient 
cause  veinsessenl  ne  peussent  venir  encontre...  Et  aient 
enquores  volu  et  este  dassentement  lesdiz  Mace  et  Ka- 
trine que  des  choses  immobles  et  heritaux  qui  lour 
vendront  et  escharont  empres  la  mort...  dudit  Monsour 
Jouffroy  ils  ne  puissent  ensemble  ne  chacun  par  soy 
riens  donner  vendre  ûe  aliéner  que  celles  choses  et 


—  U6  — 

celle  succession  ne  retournassent  aus  diz  heirs  doudii 
Monsour  Jouffroy  et  de  ladite  feue  Aalizon  empres  la 
mort  de  ladite  Katrine  si  elle  moreit  sanz  hers  de  sa 
chair  et  procrer  en  mariage  ou  si  les  heirs  de  le  mo- 
raient  sanz  vivans  deux  en  mariage  volanz  enquores  se 
is  fessaient  riens  contraire  aus  çhouses  davant  dites 
que  tout  ce  qui  fait  en  seroit  sait  de  nulle  valour  et  de 
nulle  force...  Et  aient  este  ledit  Mace  et  Katrine  de 
toutes  lesdites  chouses  tenir  jugiez  et  coUdempner  a 
lour  requeste^  si  comme  ceste  chouses  davant  dites 
nous  veismes  contenues  plus  pleinement  entre  autres 
chouses  en  dous  pères  de  lestres  saines  et  entières  dont 
lune  estoit  dou  seau  le  comte  d'Anjou  données  a  San- 
mur  le  joedi  avant  lascension  lan  de  grâce  mil  dous 
cens  quatre-vinz  et  seize,  et  laulre  dou  seau  le  roy  de 
France  donnée  a  Louduij.  le  diemenche  empres  la  feste 
de  linvention  Sainte-Croix  en  lan  dessus  dit...  Et  le  da- 
vant dit  Monsour  Jouffroy  sires  de  Brese  establi  en 
bons  sens  et  en  bonne  santé...  désirant  et  volant  oster 
toutes  manières  de  dissensions...  qui  empres  son  de- 
ces...  pourraient  isser  et  venir...  entre  ses  heirs... 
icellui  dit  Monsour  Jouflroy  en  notre  cort  a  Sauraur 
personaument  en  drçit  establi  les  devisions  et  les  par- 
tages de  ses  biens. 

Premièrement  a  la  dite  Katherine,  fille  dudit  Mon- 
sour Johan,  feu  et  fiz  aisne  dudit  Monsour  Jouffroy 
pour  toute  telle  partiç  ou  portion  que  elle  a  et  puet 
aver  et  comme  il  li...  doit  advenir...  il  assigne  et  baille 
a  la  dite  Katherine,  femme  dudit  Mace...  le  herberge- 
ment  de  Brese  ensemble  o  les  mesons,  les  vergîers,  les 
roches,  les  çpurtilz,  les  terres,  les  vignes  et  les  autres 


—  24t  — 

appartenances  dicelluy  herbergement  si  comme  il  se 
poursuit  entre  les  murs.  Item  les  cens  et  sourcens... 
deuz  à  Brese...  Item  son  molin  de  Bafous  (1)...  Item 
toute  sa  terre  de  Granfons  o  ses  appartenances...  et 
toutes  les  choses  qu'il  achapta  de  feu  Symon  Ghamail- 
lart  jadis  chevalier...  et  toute  la  dixme  de  Brese  de 
ble,  devin  et  dautres  chouses...  et especiaument payant 
chacun  an  la  rente  que  ledit  sire  de  Brese  a  assigne... 
pour  une  chapellenye  qui  a  fonde  ou  manoir  de  Brese 
en  la  manière  qu'il  est  contenu  en  son  testament... 

Item  lessa  et  bailla...  toute  la  terre  et  Theritage 
qu'il  tenoit  pour  reson  dune  feue  famé  que  il  avoit, 
cest  assavoir  a  la  more  dudit  Monsour  Johan  de  Brese 
feu  et  a  icelle...  icelluy  Monsour  Jouffroy  veut  et  or- 
donne que  ilz  saient  a  touzjours  mes  a  Johan  de  Brese 
son  fiz  et  a  ses  autres  enfanz  de  lui  et  de  ladite  Âalizon 
sa  feue  famé...  en  la  manière  qui  empres  est  divisée... 
Cesl  assavoir  que  ledit  Monsour  Jouffroy  donne  et  as- 
signe audit  Johan  son  fiz  et  fiz  aisné  de  ladite  feue 
Aalizon  en  avantage...  le  herbergement  de  la  Varenne{^) 
veut...  que  celuy  Johan  en  l'héritage  a  ladite  feue 
Aalizon...  jouyra  comme  aisné...  cest  assavoir  les  douz 
parz  et  les  autres  la  tierce...  excepte  toutefois  telle  par- 
tie comme  Agnes  et  Marguerite  ses  suers  en  jouiront 
selon  la  manière  empres  divisée,  c'est  assavoir  ladite 
Agnes  cinquante  livres  de  rente  et  cinq  cens  livres  en 
deniers,  et  ladite  Marguerite  trente  livres  de  rente  et 
douz  cens  livres  en  deniers,  et  jouyront  cestes  chouses 

(1)  Le  moulin  de  Baffou  est  dans  la  commune  de  Brezé. 

(2)  Dans  la  commune  de  Gharcë,  canton  de  Thouarcé. 


ballées  a  chacune  si  comme  elle  sa  piustoât  mariée... 

Et  toutes  les  autres  cbouses  qui  ensuivent  après  cest 
assavoir  le  herbergement  de  Longueville^i)... 

Le  herbergement  de  Noient  (9)... 

Item  son  herbergement  de  Doé  et  quelconque  il  a  en 
cette  ville. 

Item  le  herbergement  de  la  Salé  (9)  et  les  molins  et 
les  rentes...  dicellui  leu  et  denviron. 

Hem  les  fromentages  et  les  cens,  les  rentes...  qne 
ledit  sire  a  a  Conldrey  (4)  et  les  molins  de  la  Mothe  (5) 
qu'il  achata  de  Henri  Gale... 

Item  son  herbergement  de  Saint-Hippolyte  (6). 

Item  son  herbergement  de  la  Bochardière  (7). 

Item  toutes  les  rentes  qu'il  a  a  Champaigne-le- 
Sec  (8)... 

Item  le  herbergement  et  les  vignes  de  Bai- 

gneux  (9)... 

Et  est  assavoir  que  ledit  Monsour  Jonffroy  retient  i 
^on  tour  ses  biens  desus  deviser  touz  le  tems  de  sa 
vie... 


(1)  LongueviUe,  dans  la  commune  de  Saint-Ellier,  canton  de 
Thouarcé» 

(2)  Noyant,  canton  de  Gennes. 

(3)  La  Salle,  château  dans  la  commune  de  Hontreuil-Bellaj. 
(i)  Le  Coudray-Maeooard. 

(5)  Les  moulins  dé  la  Motte,  commune  d^Artaanes,  prés  Saumur. 
(6j  Saint-Hippolyte,  commune  de  Saint-Just-sur-DWe. 

(7)  La  Bouchardière,  château  ruiné  dans  la  commune  de  Saint-Cyr- 
en- Bourg. 

(8)  Champigny-le-Sec,  commune  de  Souzay,  prés  Saumur. 

(9)  Bagneux,  prés  Saumur. 


—  24S  — 

Ce  fv^t  ce  £siit:çt  saelle  daM  sçap  de  celle  4Ue  cprt 
de  Saumur  a  s^  requeste  ensemble  a  son  propre  seau 
pour  autre  fermeté  en  tesmoins  desdiles  chouses  le 
lundy  empres  Pasques  la^  de  grâce  mil  trois  ceoz  et 

djQUZ. 

(Chartrier  du  château  de  Bresé.  Origiiial  en  parchemin  scelàè  9u* 
treibis  de  deu]^  sceajix  dont  il  ne  reste  que  ^s  fra^ipents,  s^r  Tun 
desquels  parait  une  petite  partie  d'un  écusso.n  chargé  de  trpis  çroi- 
seltes  en  Orle). 


IV. 


Lettre  de  Charles,  fils  de  Fraise  et  régeM  du  royatme,  par 
laquelle  il  est  prwvé  que  te  mgnmr delà  Bivjière'J^arMu 
a  droit  de  guet  et  garde  au  cHfeau  dudil  lieu*  91  ^oût 
U2g. 

Jean  Papînot,  lienlenaQtrgéncral  de  Monsieur  le  bailli 
des  ressorts  et  exemptions  de  Toura^ne,  d'Anjou  e,t  du 
Maine  et  du  Poitou,  commissaire  du  roy  nostre  sire  en 
ceste  partie,  au  premier  sçrgenj  royçil  dudict  baiUiage 
qui  sur  ce  sera  requis  sajkut  nous  avons  receu  les  lejt- 
tpes  royaulx  de  Monseigneur  le  regend  desquelles  la 
teneur  s'ensuit  :  Charles,  fîlz  du  roy  de  France,  régent 
le  roy^uipjç,  daulphin  de  Viejinoys,  duc  de  Berry>  de 
Tpuraine  et  cQmte  de  Poitou  au  bailli  des  ressorts  et 
exemptions  de  Towraine,  d'Anjou,  de  Poitou  et  du 
Maine  ou  a  son,  Ueuteiiant,  salut*  Pe  la  piirtie  de  nostre 
ame  et  féal  Jousselin  Sarrasin,  chevaliçjr  seigneur  de  h 
Rivière-Marteau,  noms  ^  été  expçtôé  comme  il  ail  audict 
lieu  de  la  Rivière-Marteau  une  ancienne  bonne  ,çt  po-* 


—  lU  ~ 

table  forieresâe  assise  en  irés-forte  place  sur  destroyz 
de  pons  et  passages  qui  de  tous  temps  a  esté  et  est 
gardée  en  et  soubz  la  vraye  obéissance  de  mondict  sei- 
gneur, de  ses  prédécesseurs  de  nous  telement  que  au- 
cun inconveniant  ne  sen  est  ensuy  a  mondict  seigneur, 
a  nous  ne  a  la  cbose  publique  dudit  pays  et  combien 
que  les  manans  et  habitants  en  ycellui  pais  qui  ont  et 
peuvent  avoir  leur  plus  prompt  et  seur  retrait  et  refuge 
en  icelle  forteresse  soyent  tenus  de  y  faire  guet  et 
garde  et  aussi  de  contribuer  a  la  reparacion  dicelle 
néantmoins,  aucun  desdits  manans  et  habitants  ont  esté 
et  sont  contredisans  et  refusans  de  y  faire  guet  et  garde 
et  aussy  de  contribuer  a  ladite  reparacion  pour  laquelle 
chose  ladicte  forteresse  serait  en  aventure  destre  prinse 
et  occupée  par  les  ennemis  de  ce  royaume  dont  incon- 
veniant irréparable  se  pourroit  ensuir  tant  a  mondit 
seigneur  et  a  nous  et  aussi  audit  exposant  que  aux 
manans  et  habitants  ou  dit  pais  se  par  nous  nestre  sur 
ce  pourveu  de  remède  de  justice  si,  comme  dit  ledit 
exposant  requérant  humblement  ycellui,  pourquoy  nous 
ces  choses  considères  vous  mandons  et  pour  ce  que  de 
la  garde  des  chasteaulx  et  forteresses  de  ce  royaume 
la  cognoissance  appartient  aux  juges  et  officiers  de 
mondit  seigneur  et  que  vous  estes  si  comme  len  dit  le 
plus  prochain  juge  royal  des  lieux...  que  appeler  ceuix 
qui  seront  a  appeler  vous  contraignez  ou  faictes  con- 
traindre a  faire  guet  et  garde  a  ladite  fortelresse  et  à 
contribuer  a  la  réparation  d'icelle  les  mannans  et  ha- 
bitants qui  ont  ou  peuvent  avoir  leur  plus  prompt  re- 
trait et  refuge...  Mandons  et  commandons  à  tous  les 
justiciers... 


—  245  — 

Donne  a  Poitiers  le  dernier  jour  daost  lan  de  ^ace 
mil  quatre  cens  vint-deux. 

Par  vertu  et  autorité  desquelles  lettres  royaulx  des- 
sus transcriptes  et  du  povoir  a  nous  donne  et  commis 
par  ycelles  et  à  la  requeste  de  noble  homme  messire 
Jousselin  Sarrasin,  chevalier  nomme  en  ycelles  nous 
vous  mandons...  que  vous  adjourniez  toutes  et  cha- 
cunes  les  personnes  qui  de  la  partie  dudit  chevalier 
vous  seront  a  certain  jour  et  compettant  par  devant 
Monsieur  le  bailli  ou  son  lieutenant  au  siège  de  Chinon 
pour  venir  veoir  exequer,  enterigner  et  accomplir  le 
contenu  es  lettres  royaulx  dessus  transcriptes,  leurs  cir- 
constances et  dépendances  et  en  outre  comme  de  raison 
sera.  Donné  à  Chinon  soubz  le  seel  ordonne  auxeauses 
dudit  bailliage  le  xx«  jour  doctobre  lan  mil  quatre  cens 
vingt  et  deux. 

(Ghartrier  du  château  deBrezé.  Titresrfhe^la  Rivièr&rMarteau.  Ori- 
ginal en  parchemin,  scellé  sur  queue  de  parchemin  d'un  sceau  en  cire 
roug«  mais  brisé.) 

Louis  Raimbault. 


ERRATA. 

Page  66^  ligne  3,  Brescum^  lisez  Broseum. 

—  66,    —  4,  Braiscium,  —  Braiseium. 

—  66,  ;  —  4,  Braysdum,  —  Brayseium. 

—  ^6,    —  8,  Leegat,  —  Leegart^ 

—  66,    —  a,  Milsende,  —  Mileseode. 

—  67,    —  6,  Molette?,  —  Meriettos. 

—  68,    —  2,  Auvray,  —  Quercy. 

—  68,   —  8,  Cbasseraye,  r—  Gbausseraye. 

—  69,    —  15,  Marguerite,  —  Marguise. 

—  09,    —  21,  Arlhur,  —  Arthus. 

—  71,    —  18,  Latr,  —  Latz. 

—  73,    -^  5,  MineroUe,  —  Mimerolle. 
^—    74,    —  8,  Saguié,  —  Saguier. 

—  76,    —  28,  Ruy aie-Marine,     —  Royal-Marine. 

—  80,    —  6,  D*fiy8;4art,  —  FËyssat. 

REP.   ARC.  18 


CHRONIQUE. 


IMm  faMs  mm  M— ég* 

Par  M.  Levesque,  négociant  à  Angers,  huit  lots  de 
pièces  françaises  et  étrangères,  quelques-unes  en  argent, 
les  autres  en  cuivre,  toutes  modernes. 

Par  M.  Galard,  agent- voyer,  et  par  Tentremise  de 
M.  Poisson,  inspecteur-voyer  d'Angers,  deux  fer$  de 
lance,  un  étrier,  un  fer  à  cheval,  trouvés  au  pont  de 
Porteau  dans  le  lit  de  TAuthion  (commune  des  Rosiers). 

Par  M.  Victorin  Larevellière,  ancien  député,  trois 
moules  en  piçrre  (années  1780-1781),  trouvés  à  la 
Durandière,  commune  de  Juigné-Béné.  Ce  sont  des 
moules  pour  agrafes  de  manteau  et  boucles  de  souliers 
de  paysans. 

Par  MM.  Lachèse,  plumet  donné  en  1799,  à  la  Mal- 
maison^  comme  souvenir,  à  M.  Grégoire  Lachèse,  chi- 
rurgien-major de  la  garde  des  consuls,  par  le  capitaine 
des  guides  Eugène  Beauharnais,  devenu  plus  tard  prince 
et  vice-roi  d'Italie. 

Par  M.  Guillory  aîné,  président  de  la  Société  indus- 
trielle, uqe  belle  médaille  en  bronze  de  Philippe  V,  roi 
d'Espagne  (auparavant  duc  d'Anjou). 


-  247  — 

Par  le  même,  uae  très-belle  médaille  (haui-*relief)  de 
Ruzé  Defflat,  «arintendant  des  finances. 

Ruzé  Deffial,  qui  fut  gouverneur  d'Anjou,  fit  cons- 
truire à  Saumur,  vers  1626,  le  grand  bâtiment  qui  joint 
l'église  de  Notre-Dame-des-Ardilliers  du  côté  de  la  ri- 
vière. Sa  fille,  première  femme  du  duc  de  la  Meilleraye, 
morte. à  Paris,  le  20  avril  4683,  âgée  de  vingt  ans,  re- 
pose dans  Tune  des  six  chapelles  du  dôme  de  cette 
église. 

V.  G.^F. 


Neus  apprenons  que  Son  Exe.  M.  le  Ministre  d'État, 
par  renlreroise  de  M.  de  Lon^enrier,  de  PInstitnt,  et 
sur  la  demande  de  M.  Godard,  vient  d'accorder  au  Mu- 
sée des  antiquités  d'Angers,  cinquante  vases,  dont  vingt- 
neuf  de  poterie  étrusque  et  les  autres  de  style  pbénico- 
corinthien,  tous  de  la  plus  haute  antiquité  et  provenant 
du  fonds  Campana. 


Au  mois  de  novembre  1490,  Jean  Falet,  maire  et 
prévôt  de  la  monnaie  d'Angers,  fonda  la  Chapelle  Falet 
dans  la  rue  de  la  Cloche,  près  de  la  Poissonnerie.  Elle 
prit  aussi  le  nom  de  Nolr^J)ame-de-Bon-Secours  ou 
Saint-Jacqueç-de-la-Petite-Boucberie. 

Lors  de  la  révolution  cette  chapelle  fut  à  moitié  dé- 
truite, et  fut  convertie  en  maison  particulière. 


—  248  — 

Par  suite  des  projets  d'agrandissement  de  la  place 
Gupif  ce  qui  reste  de  cet  oratoire  est  en  voie  de  démoli- 
tion (avril  1863). 

Tout  auprès  existe  encore  un  logis  de  chapelain  du 
xv®  siècle  qui  va  également  disparaître. 

Une  découverte  qui  peut  offrir  un  certain  intérêt  pour 
les  amateurs  de*  numismatique  a  été  faite  dans  la  forêt 
domaniale  de  Monnoie. 

Le  14  du  mois  de  novembre  1862,  sur  les  bords  du 
chemin  vicinal  de  Saint-Philbert  au  Loroux  et  sur  le 
territoire  de  la  commune  de  Vernantes,  des  ouvriers, 
employés  par  l'administration  des  forêts  à  faire  des  se- 
mis de  glands,  ont  trouvé  presque  à  fleur  de  terre,  deux 
pots  qu'ils  ont  brisés  et  qui  renfermaient  seize  cents 
pièces  de  cuivre  et  quatre  pièces  d'argent. 

Les  pièces  en  cuivre  portent  généralement  les  effigies 
de  Henri  IV  et  de  Louis  XUf, 

Quelques-unes  sont  d'un  module  plus  large  et  moins 
épais  que  les  premières,  sans  effigie  du  roi  régnant. 

Les  quatre  pièces  en  argent  sont  de  diamètres  iné- 
gaux. 


CONDITIONS  DE  L'ABONNEMENT. 


Le  Répertoire  Archéologique  de  VAnjmi  parait  le  le'  de 
chaque  mois ,  par  livraisons  chacune  de  deux  feuilles  d'im- 
pression* 

Le  prix  de  l'abonnement,  pour  les  personnes  ne  faisant  pas 
partie  de  la  Commission  Archéologique,  est  de  5  francs  par  an 
pour  Angers  et  de  6  francs  par  la  poste. 

Les  abonnements  sont  reçus  chez  tous  les  libraires  du 
département. 


co 


SOCIÉTÉ    IMPÉRULB    D'AGRICULTURE,  SCIENCES    ET    ARTS 

ANCIENNE  ACADÉMIE  IFAN6ERS. 


I    i^c^      COIIISSIOI  ARCIËOLOfilQUE 

1^— /^^ 


DU  DEPARTEMENT 


DE  MAINE  ET  LOIRE 


RÉPERTOIRE  ARCHÉOLOGIQUE 


DE    I/ANJOU 


Année  it»«S.    —  Juin -Juillet. 


ANGERS 

PRIMERIE    DE    GOSNIER    ET    LAGHÉSE 

Chansnéc  Saint-Pierre,  13 

1863 


"Tj^L-' 


'CQ 


ARMORIAL 


DES 


ÉVÊQUES  ET  ADMINISTRATEURS 


DE  L'INSIGNE  ÉGLISE  D'ANGERS. 


1. 


3iC 


L'on  est  accoutumé  à  Angers  à  nommer  Salle  syno- 
dale^ la  spacieuse  galerie  a  laquelle  conduit  le  bel  es- 
calier de  Rohan,  et  qui  joint,  d'une  part,  aux  apparte- 
ments épiscopaux,  et  de  l'autre,  à  la  cathédrale.  En 
effet,  les  synodes  tenus  par  les  évêques  des  trois  der- 
niers siècles,  une  ou  deux  fois  l'an;  n'eurent  pas  d'autre 
lieu  de  session.  C'est  donc,  aux  yeux  du  public,  la  salle 
proprement  dite  du  clergé  et  de  son  évéque,  du  pas- 
teur et  de  son  troupeau,  du  corps  ecclésiastique  et  de 
son  chef.  Je  ne  discute  pas  la  convenance  de  ce  terme 
de  Salle  synodale^  je  veux  seulement  constater  qu'ail- 
leurs, dans  d'autres  diocèses,  cette  salle  d'apparat, 
en  raison  de  ses  vastes  proportions,  du  siège  épisco- 
REP.  Ane.  19 


—  250  — 

pal  avec  dais  à  queue  ou  dossier,  qui  y  est  en  perma- 
nence (i),  des  prélats  qui  y  ont  passé,  cette  salle,  dis-je, 
est  populaire  sous  les  noms  de  Grande  salle^  Salle  du 
trône,  SaUe  des  Évêques. 

Et  réellement  cette  salle  est  celle  des  Évéques,  car  le 
trône  y  est  installé  pour  leur  Grandeur^  le  synode  n'y 
réside  qu'avec  eux,  sa  vastité,  comme  parlait  Montaigne, 
répond  autant  à  la  dignité  épiscopale  qu'aux  besoins 
d'une  réunion  extraordinaire. 

Vivant,  l'évêque  y  manifestait  sa  vie  publique,  sa  vie 
officielle,  de  représentation.  Au  moyen  âge,  il  y  tenait 
sa  court  y  exerçait  sa  juridiction  spirituelle  et  tempo- 
relle, fulminait  ses  monitoires,  recevait  le  chapitre  aux 
jours  de  fête  ;  jusque  dans  ces  dernières  années,  il  en 
sortait  paré  pour  l'office  pontifical,  alors  que  le  chœur 
venait  le  saluer  parles  acclamations  joyeuses  du  Salve 
de  l'évêque  Fortunat. 

Mort,  le  prélat  y  était  couché  «ur  un  lit  de  parade, 
qu'entouraient  les  pieux  fidèles,  jetant  un  dernier  re- 
gard, mêlé  de  larmes  et  de  prières,  sur  le  pasteur  qu'ils 
chérissaient. 

La  salle  n'était  donc  pas  exclusivement  faite  pour  le 
clergé,  mais  surtout  destinée  à  l'évêque;  l'un  n'y  ve- 
nait que  rarement,  accidentellement,  l'autre  s'y  mon- 
trait constamment,  toujours.  Aussi,  cette  épithète  de 
synodale  accolée  à  la  salle  épiscopale  par  excellence, 
me  choque  et  me  parait  un  non-sens,  une  regrettable 

(1)  L*étiquette,  usitée  à  Rome  et  dans  toute  Tltalie,  veut  que  Té- 
yêque  ait  toujours  deux  dais  de  drap  yert  dans  son  palais  ;  Tun,'  placé 
dans  Tantichambre,  abrite  les  arnïoines  épisbojiales,  peintes  ou 
bi^odées  ;  rsratre,  dams  la  sftlle  du  trône,  sert  aux  rée^ptimiSioflBcielles. 


—  251  — 

confasion  de  temeSy  sacrifiant  l'accessoire  au  fKriilcipal, 
le  transitoire  au  durable. 

Vivants  et  morts,!  les  évéques  ont  occupé  cette  salle. 
Mais  rien  ou  presque  rien  n'y  indiquait  Tépoque  et  \e^ 
durée  de  leur  passage.  Leur  souvenir  s'effaçait  avec  etix, 
et  leur  eiBgie  n'était  pas  là  pour  remémorer  leurs 
traits  oubliés. 

Restaurateur  en  Anjou  du  culte  du  passé,  M^  Ânge- 
bault  a  compris  cette  lacune  dans  les  annales  de  son 
Église,  et  avec  ce  zèle,  cette  intelligence  que  l'âge 
n'arrête  pas,  il  a  de  suite  songé  au  moyen  de  suppléer 
à  ce  qui  manquait  jusqu'alors. 

Il  se  rencontre  dans  toute  administration  de  ces  dif* 
Acuités  de  ressources,  d'hommes,  de  positions,  qui  en» 
travent  ou  empêchent  l'exécution  des  meilleurs  désirs. 
Aussi,  ce  n'est  que  de  ces  années  dernières  qu'a  pu  se 
réaliser  enfin,  encore  en  partie  seulement,  le  rêve 
dont  Sa  Grandeur  se  berçait  depuis  longtemps. 

L'.évêque  vit  dans  l'histoire  de  son  diocèse  par  son 
nom,  qui  caractérise  les  gestes  (i)  de  son  épiscopat, 
par  son  portrait  qui  transmet  sa  physionomie  aux  gé- 
nérations futures,  par  ses  armoiries  qui  sont  l'emblème 
de  convention  au  moyen  duquel  il  s'est  représenté  lui- 
même. 

Or,  k  salle  des  évêques  devait  perpétuer,  pour  s'ap- 
proprier à  sa  véritable  destination,  cette  triple  mani- 
festation historique. 


(1)  La  vie  de  Guillaume  Le  Maire  est  ainsi  intitulée  :  Gesta  Guil- 
klmi  MajorU  Andegavensis  Episcopi  ab  ipsomet  relata,  apud  d*Âehery 
SpicUegiumf  t.  X,  p.  247  et  suiv. 


—  258  — 

Le  long  des  iniirSy  aux  quatre  points  cardinaux,  se 
cramponneront  avec  la  pierre,  la  toile  et  le  bois,  les 
séries,  aussi  complètes  que  possible,  des  noms,  des 
portraits  et  des  écussons  épiscopaux. 

Sur  la  jMerre  sera  gravée  et  teinte  en  rouge,  comme 
les  rubriques  des  anciens  livres  et  les  inscriptions  de 
Rome  chrétienne,  la  liste  officielle  des  pasteurs  légi- 
times qui,  par  succession  et  de  droit,  non  de  fait,  ont 
gouverné  ou  administré  Vinsigne  église  d'Angers  (1)  ; 
et  avec  les  noms  et  prénoms,  le  numéro  d'ordre  selon 
la  succession  chronologique,  nous  énumérerons  les 
titres  et  dignités  de  chacun,  ajoutant  les  dates  ex- 
trêmes de  son  épiscopat.  Cette  liste  n'est  pas  encore 
terminée  ;  il  y  a  tant  de  doutes  à  lever,  de  difficultés  à 
éclaircir,  de  controverses  à  éliminer,  de  points  en  litige 
à  fixer,  qu'avant  de  se  prononcer,  il  faut  avoir  en 
faveur  de  son  opinion  le  témoignage  d'une  conviction 
affermie  par  l'étude. 

Nous  sommes  pauvres  en  portraits  et  à  ceux  de 
Charles  Miron,  Claude  de  Rueil,  Henri  Amauld,  Michel 
le  Pelletier,  Michel  Poncet  de  la  Rivière,  Jean  de  Vau- 
giraud,  Jacques  de  Grasse,  et  Michel  Couët  du  Viviers 
de  Lorry,  j'ai  été  assez  heureux  et  bien  secondé  pour 
•pouvoir  ajouter  ceux  de  Guillaume  cardinal  d'Estoute- 
vilie,  et  de  Jean  cardinal  Balue,  auxquels  s'ajouteront 

(1)  Il  est  dit  de  Jean  de  Beauyau,  dans  son  épitaphe  (1479)  : 
Domifius  Johannei  de  Beauvau^  hujus  insignis  ecclesie  quondam 
pastor  egregius.  —  Henri  Arnauld  termine  ainsi  son  Bréviaire  de 
Tan  1664:  «  Laus  Deo,  Virgini  matri  Mariœ,  necnon  beatissimis 
Martyribus  Mauricio,  ac  S.  S.  Maurilio  et  Renato  insignis  ccclesiae 
Andegay.  Episcopis  et  patronis.  » 


—  253  — 

promptementy  je  Fespère,  ceux  non  moins  désirés  de 
Rainaud  de  Martigné,  Jean  Michel,  Jean  de  Rely  et 
Jean  Olivier. 

Quand  j'eus  l'honneur  d'être  chargé  par  M«t  l'évêque 
d'Angers  de  préparer  Y  Armoriai  de  ses  prédécesseurs, 
au  profit  de  la  décoration  de  la  salle  épiscopale,  je  me 
trouvai  en  présence  de  difficultés  multiples,  que  je  ne 
puis  dissimuler,  parce  que  l'exposé  de  ce  qu'il  m'a 
fallu  vaincre  sera  la  meilleure  justification  de  mon 
œuvre. 

La  première  question  que  je  dus  me  poser,  fut  celle- 
ci  :  TArmorial  des  Évêques  existe-t-il  quelque  part? 

Après  des  recherches  réitérées  et  assidues,  j'acquis 
la  conviction  qu'il  était  entièrement  à  créer,  et  que 
Bruneau  de  Tartifume,  J.  Balain,  Lehoreau,  Gaignières, 
et  Pocquet  de  Livonnière,  avaient  plutôt  commeqcé  et 
ébauché  que  complété  et  achevé  cette  étude. 

Bruneau  de  Tartifume  donne,  à  l'occasion  des  mo- 
numents  qu'il  décrit,  surtout  en  parlant  d'Éventard, 
résidence  d'été  des  évêques,  de  mauvais  dessins  à  la 
plume  des  écussons  qu'il  y  rencontre.  Les  couleurs 
n'y  sont  point  indiquées,  et  le  caractère  archéologique 
de  chaque  blason  n'y  est  observé  qu'à  peu  près.  Somme 
toute,  on  note  dans  ses  deux  volumes  une  dizaine  d'é- 
cussons,  qui  ne  constituent  pas  un  traité  proprement 
dit. 

Au  xviii^  siècle,  se  présente  Jean  Balain  qui,  dans  le 
cours  de  ses  Annales^  insère  de  bons  dessins,  exacts 
ordinairement  pour  la  partie  héraldique,  mais  agencés 
dans  des  cartouches,  avec  des  supports,  attributs  et 
emblèmes,  le  tout  bien  évidemment  de  sa  composition. 


—  25A  — 

II  commence  assez  tôt,  termine  tard,  et  nous  offre  en 
tout  une  collection  d'une  quinzaine  d'écùssons. 

Le  chapelain  Lehoreau  est  de  nos  héraldistes  épis- 
copaux  un  des  plus  sérieux  et  des  plus  utiles  i  con- 
sulter. Ses  vingt-quatre  écussons  dessinés  et  coloriés 
avec  soin,  n'ont  généralement  d'autre  défaut,  à  part 
celui  de  Rohan  et  les  cinq  derniers,  que  d'être  unifor- 
mément représentés,  comme  s'ils  appartenaient,  crosse 
et  écu,  à  des  évoques  du  xvin*  siècle. 

C'est  ce  travail  que  M.  Godard  a  fait  reproduire, 
mais  avec  une  modification  de  crosse  et  d'écu,  sans 
toutefois  éviter  l'uniformité,  sur  la  litre  funèbre  qui 
entoure  la  partie  supérieure  du  Musée  de  la  ville  (1). 

L'Armoriai  de  Lehoreau  débute  par  Hubert  de  Ven- 
dôme et  s'arrête  à  Michel  Poncet  de  la  Rivière. 

Pocquel  de  Livonnière  embrasse  la  même  période 
de  temps,  et  justifie  le  texte  qu'il  blasonne  par  des 
dessins  réduits  en  couleur  :  texte  et  dessin  ne  valent 
guère  mieux  l'un  que  l'autre.  Quoiqu'il  compte  jusqu'à 
27  écussons,  trois  de  plus  que  Lehoreau,  son  autorité 
est  suspecte.  Ainsi  il  attribue  à  Michel  Villoiseau  les 
armes  connues  de  Mathieu  de  Loudun,  et,  mieux  en- 
core, cite  en  preuve  un  vitrail  de  Saint-Julien  du  Mans. 

Enfin,  le  marquis  de  Gaignières,  dans  son  riche  Por- 
ièfeuilley  soigneusement  conservé  ett  partie  à  la  Biblio- 
thèque impériale  de  Paris,  donne  sous  le  n®  164,  une 
série  fort  bien  dessinée,  d'après  les  monuments,  tom- 
beaux, vitraux,  autels,  sceaux,  etc.,  d'armoiries  épis- 
copales,  de  Raoul  de  Beaumont  à  Poncet  de  la  Rivière. 

(1*)  Godard-Faultrier,  Nouvelles  archéologiques ^  no  19,  p.  6  et  7. 


—  255  — 

Jfaurai  souvent  occa&ion  de  le  citer,  parce  cpft^.  eofi  tpa^ 
vail  est  à  la  fois  le  plus  complet,  le  plus  exact  et  le 
meilleur. 

Comparés  entr'eux,  ces  héraldtsCes  ne  se  trouvent  pas 
d'accord,  souvent  sur  des  points  assez  importants.  La 
confusion  est  encore  plus  grande,  si  j'appelle  à  mon 
secours  les  armoriaux,  écrits  ou  imprimés,  de  la  Biblio- 
thèque de  la  ville.  Pour  sortir  de  cet  inextricable  la- 
byrinthe, voici  la  marche  que  j'ai  suivie  :  c'était  à  la 
fois  la  plus  directe,  la  plus  sûre  et  la  plus  rationnelle. 

J'ai  rech^ché  sur  les  murs,  les  livres,  les  gravures, 
les  écussons  originaux  peints,  sculptés  ou  gravés,  afin 
de  posséder  la  forme,  les  meubles,  las  attributs,  sinon 
les  émaux  de  l'écu.  Il  s'agissait  d'une  restitution  inté- 
grale que  l'archéologie  seule  pouvait  donner.  Je  voulais 
en  effet  l'écusson  tel  que  l'évoque  l'avait  porté. 

Quand  les  originaux  me  manquaient,  je  faisais  appel 
aux  abbayes,  aux  évéchés  par  lesquels  passèrent  nos 
évéques,  aux  iamilles  dont  ils  furent  la  gloire,  au  pays 
qui  les  vit  naître  ou  les  adopta,  4ux  ouvrages  qui  acci- 
dentellement ou  à  cause  de  )ôur  nom,  de  leur  généalogie, 
jugèrent  à  propos  de  fournir  une  description  de  leurs 
mares. 

Je  dois  ici  des  remerciements  bien  sincères  à  tous 
ceux  qui ,  par  leur  correspondance  empressée ,  m'ont 
donné  tant  de  facilité  dans  la  déterminatiqn  exacte  des 
blasons  sur  lesquels  je  le$  consultais.  Leur  nom  figurera 
nécessairement  daos  la  liçte  des  sources  auxquelles  j'ai 
puisé  :  c'était  justice;  qu'ils  y  voient  ajussi  l'expression 
de  ma  gratitude. 

L'écu,  ainsi  déterminé  dans  sa  forme  archéologique, 


—  256  — 

ses  meubles  vrais,  ses  émaux,  sinon  certains,  au  moins 
les  plus  probables,  —  or,  j'entends  ici  par  probabilité, 
plusieurs  témoignages  qui  concordent,  —  le  doute  n*a 
pu  se  présenter  parfois  que  pour  quelques  accessoires, 
la  crosse  et  la  mitre  par  exemple.  Il  était  facile  par 
des  analogues  de  rétablir  l'écusson  dans  son  intégrité  : 
nous  avons  donc  copié  ces  modèles. 

Une  difficulté  nouvelle  surgit  pour  Texécution.  Deux 
systèmes  avaient  été  présentés,  et  ils  avaient  pour  eux 
la  sanction  du  passé  et  l'autorité  de  l'exemple.  L'un 
demandait  une  litre  funèbre,  l'autre,  des  verrières. 

Je  n'adoptai  aucune  de  ces  idées,  toute  réflexion  faite 
et  conseil  pris  d'hommes  compétents.  La  litre  funèbre 
ne  paraît  que  sur  les  murs  des  églises  et  aux  dernières 
années  du  xv^  siècle;  de  plus,  elle  implique  un  droit  ., 
de  patronage.  Son  apposition  sur  la  muraille  déjà  ^ 
peinte  entraînait  des  démarches  officielles,  puisque  la 
salle  épiscopale  dépend,  comme  monument,  du  minis- 
tère d'État.  Il  fallait  à  la  fois  être  libre  et  ne  pas 
s'emmailloter  dans  des  précédents  qui  étaient  justes 
et  acceptables  autrefois,  mais  qui  maintenant  sont  faux 
et  inutiles,  puisqu'ils  n'ont  plus  leur  raison  d'être. 

A  Tours,  les  armoiries  archiépiscopales  forment  la 
décoration  des  fenêtres.  A  Angers,  cette  même  mesure 
devenait  impraticable,  parce  que  les  éôussons  eussent 
été  trop  petits,  trop  à  portée  d'être  dégradés  et  surtout 
fixés  sur  une  matière  trop  fragile. 

Nous  avisâmes  alors  à  ornementer,  d'une  manière 
monumentale,  la  partie  supérieure  de  la  salle,  jusque  là 
restée  nue.  Des  panneaux  de  bois,  hauts  d'un  mètre, 
de  forme  ovale,  pour  mieux  s'assouplir  aux  contours 


—  257  — 

variés  des  écussons;  furent  donc  taillés,  et  sur  ces  plan- 
ches solides,  épaisses,  teintes  en  brun,  s'enlevèrent  en  or 
et  en  couleur,  nommées  par  une  rubrique  au  minium, 
les  armoiries  des  Évéques  de  l'insigne  Église  d'Angers, 

En  adoptant  l'ovale,  je  ne  prétends  point  blâmer 
l'ogive  qui  termine  les  panneaux  employés  au  Musée 
de  la  ville.  J'ai  seulement  tenu  à  choisir  pour  type 
général,  celui  qui,  tout  en  restant.en  parfaite  harmonie 
avec  l'ensemble  de  la  décoration,  pouvait  le  plus  favo- 
rablement accueillir  cette  multiplicité  de  détails,  qui, 
depuis  deux  siècles,  envahissent  et  surchargent  les  ar- 
moiries épiscopales. 

Nouvel  embarras,  au  sujet  de  la  chronologie,  qui  géné- 
ralement peu  sûre  d'elle-même,!!' offre  pas  constamment 
des  dates  certaines,  ni  une  succession  parfaitement  au- 
thentique. Aussi,  afin  de  pouvoir  donner  sur  chaque 
évêque  une  courte  notice,  j'ai  comparé  ensemble  les 
inscriptions  de  leurs  tombeaux,  les  listes  du  Rituel  du 
diocèse,  et  celles  du  Gallia  christiana,  de  Guy  Arthaud, 
de  Bodin,  et  du  chanoine  Tresvaux.  De  tout  cela  résulte 
une  chronologie  qui,  sur  certains  points,  est  entièrement 
nouvelle,  mais  infiniment  plus  probable  que  les  autres. 
Avec  le  Gallia  christiana,  je  n'ai  pas  craint  de  remettre 
Auger  de  Brie  sur  le  siège  qu'il  avait  administré  :  avec 
Rome,  j'ai  replacé  dans  la  liste  officielle  Guillaume 
d'Estouteville,  systématiquement  écarté  par  l'influence 
gallicane.  Donc,  deux  nouveaux  noms,  sur  la  liste  et 
les  écussops. 

L'on  a  blâmé,  bien  à  tort,  ce  me  semble,  la  répéti- 
tion des  écussons  de  Beauvau ,  de  Balue  et  de  Miron. 
En  les  mettant  autant  de  fois  qu'ils  ont  occupé  Je  siège 


-  258  — 

d^Angers^  nous  n'arons  été  que  conséquent  avec  notre 
principe  bien  arrêté  de  suivre  strictement  l'ordre  chro- 
nologique. Tout  comme  pour  les  évêques  dont  les  ar- 
moiries ne  nous  sont  p^s  connues,  nous  avons  laissé  le 
panneau  vide,  la  génération  qui  noiïs  succédera  sera 
peulrêtre  plus  heureuse  dans  ses  recherches  et  pourra 
terminer  ce  que  nous  n'avons  mé  hasarder.  Nous  sup- 
posons que  chaque  évêque,  à  sa  prise  de  possession, 
a  suspendu  ses  armes  aux  parois  delà  salle  épiscopale. 
Si  révêque  quitte,  puis  reparaît,  n'est-il  pas  naturel 
qu'une  seeonde  fois  il  attache  de  nouvelles  armoiries, 
qui  spécifient  sa  nouvelle  intronisation  ?  Sans  cela,  il  y 
a  doubles  lacunes  dans  la  succession,  au  point  de  vue 
de  l'art  héraldique  :  interruption  à  l'occasion  des  ar- 
moiries inconnues,  autre  interruption  si,  par  exemple, 
de  Fouquet  de  la  Yarenne  on  passe  subitement  à  Claude 
de  Rueil;  sans  tenir  compte  de  Charles  Miron,  sous 
prétexte  que  ce  dernier  a  déjà  figuré  une  première  fois, 
avant  son  neveu  de  la  Varenne. 

Une  objection  peut  être  faite  et  j'avoue  qu'elle  ne 
manque  pas  de  fondement.  Elle  me  vient  d'un  héral- 
diste  célèbre,  M.  de  Làmbron  de  Lignim,  de  Tours, 
qui  m'écrivait,  il  y  a  quelques  mois  :  c  Du  xi^  siècle  au 
»  commencement  du  xiv«,  les  armoiries  des  prélats 
»  sont  plutôt  fictives  que  réelles  ;  la  plupart  des  sceaux 
»  qui  nous  sont  parvenus  nous  en  ofirent  la  preuve 
»  évidente.  Le  prélat  est  habituellement  représenté  te- 
1»  nant  sa  crosse  de  la  main  gauche  et  bénissant  de  la 
»  droite;  ceux  qui  sont  issus  des  maisons  princières 
D  n'en  usent  pas  autrement.  On  peut  dire  que  les  ar- 
"»  Tttoiries  qui  leur  sont  attribuées  sont  des  armoiries 


—  «59  — 

>  rétrospectives,  puisqu^on  leur  a  donné  celles  qu'a- 
»  raient  adoptées  les  familles  auxquelles  ils  semblaient 
I  devoir  appartenir.  » 

Cet  argument  est  plus  spécieux  qu'absolu  et  sub- 
versif du  système  adopté.  Aussi,  il  ne  m'a  pas  arrêté. 
Voici  ce  que  je  lui  oppose  : 

Les  armoiries  datent  du  xi""  siècle,  sinon,  comme 
invention,  au  moins  comme  emploi  régulier,  déter- 
miné par  des  principes  arrêtés.  Tout  seigneur  y  avait 
droit  et  elles  étaient  héréditaires  (1). 

Or,  les  èvêques  furent,  à  en  juger  par  leurs  noms, 
pris  dans  le  corps  de  la  noblesse  bien  souvent,  par 
conséquent  ayant  droit,  comme  la  famille  dont  ils 
étaient  issus,  à  des  armoiries  propres,  personnelles. 

On  peut  discuter  sur  le  riom,  exprimer  un  doute  sur 
une  origine  nobiliaire,  là  où  peut-être  n'existe  qu*une 
origine  plébéienne,  dissimulée  par  un  nom  de  lieu,  qui 
est  en  même  temps  un  nom  de  ville  et  de  famille. 
Ainsi,  Hubert  de  Vendôme  et  Mathieu  de  Loudun  ap- 
partiennent-ils réellement  aux  puissantes  familles  de 
Vendôme  et  de  Loudun  ?  Je  le  crois  et  j'agis  en  consé- 
quence. Mais  l'opinion  n'en  reste  pas  moins  libre  de 
penser  qu'ils  ont  eu  simplement  pour  villes,  natales 
Vendôme  et  Loudun. 

J'avance  que  si  les  noms  sont  authentiques,  comme 
conséquence  naturelle  se  déduit  le  droit  d'armoiries. 

(i)  V.  GtiU.  christ ,  t.  V^  .p.  1036^  où  sont  décrites  les  armoiries 
de  Rég^inbold,  prévôt  de  l'abbaye  de  Mouri,  eu  Suisse,  de  1027  à 
1055.  —  Vredius,  SigiL  Çomit,  Flandr.^  p.  6.  —  Dom  Vaissette, 
Histoire  du  Languedoc,  t.  X,  p.  680.  —  Bourassé,  Dictionnaire  d'ar- 
chéologie sacrée,  t.  1,  coi.  368.  —  Cartulaire  de  Gormery,  p.  GXV. 


—  260  — 

Ce  droit  a-t-il  été  exercé?  Nous  répondrons  que  non, 
d'après  l'inspection  de  leurs  sceaux,  matrices  ou  em- 
preintes, qui  nous  restent.  Mais  les  armoiries  pouvaient 
exister  ailleurs  que  sur  les  sceaux,  et  de  ce  qu'on  ne  les 
trouve  pas  là,  il  ne  s'en  suit  pas  rigoureusement  par- 
lant, surtout  si  l'on  fait  appel  à  l'archéologie,  qu'elles 
n'aient  été  nulle. part  ailleurs.  Sans  sortir  d'Angers  et  de 
la  cathédrale,  ne  savons-nous  pas  que  les  armoiries 
de  Nicolas  Gellant  étaient  figurées  sur  sa  tombe,  super 
tumbam,  dit  Lehoreau  qui  les  y  a  relevées.  Ne  voyons- 
nous  pas  aussi  tous  les  jours,  dans  nos  belles  ver- 
rières absidales  du  xiii©  siècle,  des  armoiries  que 
la  crosse  posée  sur  l'écu,  en  face  d'un  évêque  donateur 
(Verrière  de  Saint^ulieii)^  ou  placée  en  pal  derrière 
l'écu  {Verrières  de  Saint-Éloi^  de  Saint-Pierre) ^  nous 
autorise  à  nommer  des  armoiries  épiscopales  ? 

Donc,  l'évêque  noble  a  joui,  comme  sa  famille,  du 
droit  d'armoiries.  11  n'en  a  pas  usé  sur  son  sceau,  c'est 
indubitable,  mais  il  en  a  usé  sur  des  objets  à  lui,  comme 
sa  tombe  ou  les  vitraux  qu'il  a  donnés.  Cela  sutBsait 
à  ma  thèse.  J'ai  donc  pu,  sans  trop  de  hardiesse, 
avec  Jean  Balain  et  Lehoreau,  faire  remonter  jusqu'au 
xie  siècle  les  premières  armoiries  de  nos  évêques,  et 
continuer  cette  série  jusqu'à  l'époque  où  l'écusson  en- 
vahit tout  ^sceaux,  vêtements,  vitraux,  ameublement. 

J'ai  parlé  seulement  d'évéques  nobles ^  par  leurs  an- 
cêtres. A  leur  imitation,  les  évêques  sans  nom  ni  fa- 
mille, se  créèrent-ils  un  blason?  Dans  le  principe,  c'est 
assez  probable,  car  l'évêque  était  seigneur  temporel  et 
à  ce  titre  il  devenait  nobky  jusqu'à  prendre  le  titre  de 
baron.  Dans  la  suite  et  de  nos  jours,  c'est  chose  certaine  : 


aussi  j'appellerai  ces  armoiries  de  convention  et  je  ne 
doute  pas  que  celles  de  Jean  Michel,  fils  d'un  marchand 
de  drap  de  Beauvais,  ne  soient  de  cette  sorte,  comme 
celles  plus  récentes,  de  Louis  Paysant. 

D'ailleurs,  il  est  deux  idées  que  Ton  confond  trop 
souvent  :  la  noblesse  emporte  de  soi  le  droit  d'armoi- 
ries, mais  toute  armoirie,  tolérée  ou  concédée,  n'en- 
traîne pas  de  soi  le  droit  de  noblesse.  Le  de  présuppose 
ordinairement  la  noblesse,  mais  la  noblesse  n'est  pas 
exclusivement  attachée  à  la  particule. 

J'avais  besoin  de  développer  ma  manière  de  voir  sur 
toutes  ces  questions,  pour  mjettre  à  couvert  la  respon- 
sabilité que  j'ai  assumée  en  exposant  publiquement  aux 
regards  des  savants  et  des  archéologues,  des  armoiries 
ou  des  panneaux  qui,  de  prime  abord,  provoqueraient 
des  observations,  justes  peut-être  à  un  certain  point  de 
vue,  mais  différentes  de  celui  auquel  j'ai  envisagé 
V Armoriai  desÉvêques. 

Je  passe  maintenant  à  quelques  réflexions  sur  l'ar- 
rangement même  des  écussons. 

Du  xi«  au  xiiie  siècle,  l'écu  est  triangulaire,  comme 
les  boucliers  antiques;  à  partir  du  xiii«  siècle,  il  s'ai- 
guise en  ogive  et  persévère  avec  cette  même  forme, 
surannée  pour  l'architecture,  jusqu'au  xvii^  siècle,  où  il 
s'amortit  en  accolade;  sur  la  fin  du  xvii®  siècle,  Henri 
Amauld  fait  pressentir  l'ovale  (1)  qui,  entouré  d'un 
cartouche  découpé,  régnera  seul  jusqu'à  la  révolution. 
Avec  l'Empire,  l'ogive,  mais  l'ogive  contrefaite,  repa- 

(4)  V.  sur  ce  changement.  Annales  archéologiques,  t.  III,  p.  27. 


—  268  — 

TBÎiy  pour  faire  place,  soua  la  Restauration,  à  Faccokde 
qu'ont  adoptée  les  dèrm4»rs  évêt[ues. 

L'écu  demeure  longtemps  sans  ornements;  au  xiii^ 
siècle  il  s'adosse  à  une  crosse  mise  en  pal  dont  la  vo- 
lute recourbée  en  dedans  (1)  suit,  pendant  toute  la 
durée  des  xiii^,  xiye,  xv®  et  partie  du  xvi©  siècle,  les 
modifications  du  temps,  tant  pour  ses  crochets,  que 
ses  fleurons  et  ses  perles.  Même,. à  la  Renaissance,  on 
l'attache  par  des  rubans,  enfantillage  qui  ne  se  re- 
produit qu'une  fois  sur  l'écusson  de  Guillaume  de 
Ruzé, 

Charles  Miron  établit  un  nouveau  système  ;  la  crosse^ 
emblème  de  la  juridiction,  ne  lui  suffit,  plus,  il  ajoute 
sur  le  coin  dextre  une  mitre  précieuse  qui  symbolise 
sa  haute  dignité. et  relègue  la  crosse  au  coin  senestre. 
Avec  Claude  de  Rueil  intervient  le  chapeau  vert,  me- 
sure à  laquelle  n'est  pas  étrangère  la  publication  ré- 
cente et  la  propagation  du  Cérémonial  des  Évêques  (2). 
On  attribuait  jadis  à  ce  chapeau  un  symbolisme  éleVé, 
celui  de  franchise  et  d'exemption  de  droits  (3).  Bref,  il 

(1)  On  ne  faisait  pas  attention  autrefois  si  la  crosse  était  tournée 
en  dedans  ou  en  dehors ^  h  dextre  ou  â  senestre.  Cette  distinction 
subtile,  qui  a  pour  but  de  différencier  la  crosse  épiscopale  de  la  crosse 
abbatiale,  n'est  pas  de  date  bien  ancienne. 

(2)  Utantur  (episcopi  electi),  cum  opus  erit,  galero  nigro  laneo> 
viridi  serico  ornato  cum  cordulis  ac  floccis  coloris  viridis  (oap.  I).  — 
Omnes  autem  tam  saeculares  quam  religiosi  episcopi  galero  utuntur  à 
parte  exteriori  nigro,  cui  ab  interiori  sericum  coloris  yiridis  sufful- 
ciatur,  cordulis  pariter  et  flbccis  sericis  viridibus  ab  eo  penden- 
tibus,  cap.  III). 

(3)  Ëysonbach,  B^stoire  duxblason^  p.  162. 


—  Î68  — 

supjf»lante  crosse  et  mitre,  et  prend,  place  dan$  les  régies 
de  l'art  héraldique  avec  ses  trois  rangs  de  houppes, 
qui  sont  spécialement  afTectés  aux  évoques  ^1). 

Henri  Âmauld,  tout  en  s'accommodant  du  chapeau, 
accepte  aussi  la  mitre  et  la  crosse,  et  admet;  w  f^it, 
ce  qui  commence  à  se  vulgariser  en  droit,  que  la 
crosse  tournée  en  dehors  appartient  aux  évéques.  Bien 
des  siècles  ne  s'étaient  pas  doutés  de  ce  privilège,  té- 
moins les  crosses  des  écussons  précédents,  tantôt  à 
dextre,  tantôt  à  senestre,  plus  souvent  du  premier  de 
ces  côtés.  Mais  enfin,  le  xvii»  siècle  introduisait  une 
nouvelle  modification,  en  forçant  les  abbés  à  tourner 
leur  crosse  en  dedans  pour  indiquer  que  leur  juridic- 
tion était  toute  intérieure  et  ne  s'étendait  pas  au  delà 
de  l'enceinte  de  leur  monastère  (2). 

Uturgiquement,  la  distinction  avait,  été  sanctionnée 
par  la  Congrégation  des  Rites  qui  ajouta  un  aruban  à 
la  crosse  abbatiale  ;  l'art  héraldique  en  fit  autant  et 
l'arbitraire  passa  len  règle. 

La  pompe  du  grand  siècle  se  refléta  sud,  les  ar- 
moiries que  Michel  le  Pelletier  trouva  beaucoup  trop 
simples.  Ses  successeurs  firent  comme  lui;  l'usurpation 
était  consommée  et  personne  ne  réclamait.  Le  silence 
des  héraults  d'armes  autorisa  la  vanité  des  délinquants. 
Il  fallut  un  cartouche  pour  porter  la  mitre  et  la 
crosse,  élégamment  reliées  par  une  couronne  d'or, 
rehaussée  de  feuilles  ou  de  perles,  suivant  qu'on  s'ap- 
préciait duc,  marquis  ou  comte.  Le  chapeau  était  as$ez 

(1)  Didron»  Anfiolés  arehèohgiqueê»  t.  III,  p.  28. 
(t)  AnnaUi  arckéologiqms^  t.  IIIv  piJ8. 


n 


—  264  — 

large,  mais  ses  houppes  ne  tombaient  pas  assez  bâs, 
puisque  Teritourage  avait  allongé  Técu.  On  ajouta  dé- 
finitivement un  rang  de  plus  :  de  marquis,  au  tem- 
porel, révêque  devint  archevêque,  au  spirituel.  C'était 
vraiment  joli  et  très-amusant. 

Les  traditions  ne  se  sont  pas  perdues  et,  à  part  l'é- 
cusson  de  l'Empire  sommé  de  la  toque  baronale,  tel  est 
encore  en  France  le  blason  épiscopal,  plus  par  habi- 
tude que  de  parti  pris.  Je  dis  en  France,  car  l'Italie, 
qui  connaît  et  observe  les  règles,  n'a  pour  ses  évêques 
qu'une  simple  croix  d'or  posée  en  pal,  et  un  chapeau 
de  sinople  à  trois  rangs  de  houppes  timbrant  Técu. 

Je  n'avais  point  à  procéder  contre  ces  tendances, 
qui  ne  sont  pas  de  mon  ressort;  j'ai  admis  le  fait  et 
me  suis  contenté  de  reproduire  le  blason  tel  que,  de- 
puis bientôt  deux  siècles,  les  évêques  ont  cru  devoir 
se  le  donner. 

Enfin,  quatre  évêques  ont  adopté  une  devise.  Fran- 
çois de  Rohan  l'a  choisie  italienne,  Jean  Olivier  en  a 
puisé  l'idée  dans  des  livres  saints,  et  Louis  Paysant, 
ainsi  que  M^  Angebault,  dans  les  meubles  mêmes  de 
l'écu,  qu'une  courte  et  pieuse  sentence  explique  et 
traduit.  Jadis  la  devise  était  une  exception;  de  nos 
jours,  elle  commence  à  s'introduire,  mais  on  peut  dire 
que  cet  usage  nouveau,  compliqué  aussi  de  branchages 
plus  ou  moins  symboliques,  n'a  que  peu  ou  point  de 
racines  dans  le  passé. 

Je  termine  ici  cette  introduction,  en  remerciant 
M«^  Angebault  d'avoir  mené  à  bonne  fin  l'œuvre  si 
désirée  de  Y  Armoriai  des  Évêques  d'Angers  ;  M.  Joyau, 
qui  a  dessiné  avec  la  fidélité  scrupuleuse  d'un  archéo- 


—  265  — 

lûgue,  sur  les  modèles  que  je  lui  proposais,  chacun 
des  écussons;  enfin,  M.  Poidevin  qui  a  jiorté  sur  bois 
les  armoiries  et  les  a  enrichies  et  rehaussées  de  vives 
couleurs.  .  . 


IL 


OUVRAGES  CONSULTÉS  «T  CITÉS. 

Marquis  de  Gaignières*  Portefeuille  historique  et  ar- 
chéologique. Eglise  d'Angers^  n*>  164,  ins,  du  xviii® 
siècle,  avec  de  nombreux  dessins  à  la  plume  et  en 
couleur,  à  la  Bibliothèque  Impériale,  à  Paris. 

Bruneau  de  Tartifume.  Angers  et  la  Trinité^  2  vol. 
in-fol.  avec  de  mauvais  dessins  au  trait  et  à  la  plume, 
ms.  à  la  Biblioth.  de  la  ville. 

Âudouys.  Armoriai  angevin^  ms.  à  la  Biblioth.  de  là 
ville. 

Jean  Balain.  Annales  et  Antiquités  cP Anjou ,  i  vol. 
in*i^,  1716,  ms.  à  la  Biblioth.  de  la  ville,  avec  dessins 
coloriés. 

R.  Lehoreau  du  Fresne,  prêtre,  maire-ëhapelain  en 
l'Église  d'Angers.  Cérémonial  de  l'Église  d'Angers^ 
3  vol.  in-.f>,  1692-1720.  Dans. le  3^  vol.,  liv.  V,  se 
trouvent  les  armoiries  coloriée^,  avec  ce  titre  :  Stentr 
mata  quorumdam  Episcoporum  Andegavensium. 

Gohorri.  Armoriai  d'Anjou,  1  vol.  in-f>,  1608,  sur 
parchemin,  avec  dessins  coloriés,  ms.  à  la  Biblioth^  de 
la  ville. 

De  la  Chesnaye  des  Bois.  Dictionnaire  de  la  noblesse ^ 
Paris,  1773.  . 

REP     ARC  20 


—  286  — 

Gauvin.  Essai  sur  l'Armoriai  du  diocèse  du  Mans^  le 
Mans,  1840,  i  vol.  in-18. 

Tardif.  Armoriai  d'Anjou  et  environs ^  ms.  du  xyiii^ 
siècle  appartenant  à  M.  le  chanoine  Tardif,  à  Angers. 

Pocquet  de  Livonnière.  Histoire  abrégée  des  évêques 
d^ Angers,  communiquée  à  Pierre-Michel  Bancelin,  curé 
de  Saint-Germain-des-Prés,  par  M.  de  Livonnière  Poc- 
quet, docteur  y  etc.,  professeur  en  droit  français^  ce  i6 
novembre  iTSi^  ms.  avec  blasons  coloriés  à  la  marge. 
Je  me  suis  servi  de  la  copie  qui  appartient  à  M.  Tabbé 
Grêlé,  curé  de  Marcé. 

Bondonnet  (Dom  Jean),  bénédictin  de  Saint-Vincent 
du  Mans,  et  Prieur  deSarcé.  Les  vies  des  évêques  du  ManSy 
restituées  et  corrigées  avec  plusi&irs  belles  remarques  sur 
la  chronologicy  Paris,  1651,  i  vol.  in-4o. 

Tresvaux.  Histoire  de  F  Église  et  du  diocèse  d'Angers  y 
Angers,  2  voL  in-S»,  1858. 

Hauréau.  Continuation  du  Gallia  christiana,  Ecclesia 
AndegavensiSy  in-P>. 

Sammarthani  fratres  (Scœvola  et  Ludovicus).  Gallia 
christiana.  Lutetiœ  Parisiorumy  1715.  13  vol.  ift^foL 

Gourdon  de  Genouillac^  Grammmre  héraldique^  Paris, 
in-12. 

Godard-Fauitrier«  Notes  swr  le  manuscrit  de  Lehoreau. 
Blasons  des  évêques  d'Angers.  Hubert  de  Vendôme^  Guil- 
laume  de  Beaumonty  Radulphede  Machecoulet  Guillaume 
Turpin.  Angers,  Cosnier  et  Lachèse.  Plaquette  in-S^ 
de  4  pages,  avec  une  planche  litbographiée. 

Ciaconius.  Vitœ  et  gesta  Romanorum  PontifUum 
et  S,  R.  E.  Cardinalium  (d^  initia  ecdesiœ.  RomsB,  1777, 
4  vol.  in-fo,  avec  planches,  portraits  et  figures. 


-  «67  - 

Bauchet  FûlèSiii.  Oietiùnnaire  âèi  pMHà  du  Poitou. 
2  vot.  în-S*,  Poitiers;  I'   /     r 

Yrmfii.'ViXUin  purptnràta  qna  tUin'^uiiifHùrum  P&H- 
tificûm  y  tum  ofnnium  Galliœ  Càrdinalium  rës  g&stàè 
coniin^tar.'  Lutet.  Paris.y  1638,  1  toi.  in-P,  blasons. 

m. 

Hubert  de  Vendôme.  —  Il  monta  sur  le  sié^ 
d'Angers,  en  lOlO,  mourut  le  2  mars  i04!7,  et  fut 
inhumé  dans  le  cloître  de  Tabbaye  de  Saint-Serge, 
dont  il  avait  été  le  bienfaiteur. 

Armoiries  :  d'argent  ;  au  chef  de  gueules ,  à  un  lion 
d'azur,  armé  et  lampassé  d'or  y  brochant  sur  le  tout,  qui 
est  de  Vbndôme-Segré  (1). 

L'écu  affecte  la  forme  triangulaire. 

EusÈBE  Brunon.  —  Installé  en  1047,  il  mourut  le  %1 
août  4081.  ! 

Armoiries  :  les  héraldistes  angevins  ne  lui  en  attri- 
buent point. 

GtOFFROT  1  DE  Tours  (2).  —  Doyen  de  l'Église  mé- 
tropolitaine de  Tours  (1059)  et  chantre  de  la  collégiale 

■ 

de  Saint-Martin  de  la  taème  ville  (iô80),  il  fut  sacré 
évéque  d'Angers,  en  ^082,  et  décéda  l'an  i09'3. 

# 

[i)  Lehoreau^  n©  1.  —  J,  Balain,  p.  18  ;  de  Livoimiére,  ii<'  1.  — 
4.  Gohorri. 

(2)  De  Tours  est  un  surnom  qu'il  doit,  sinon  au  lieu  de  sa  liais- 
aance,  au  moins  à  la  ville  qu^îl  habita  à^ànt  son  épiscopat.  11  est  issu 
des  seigneurs  de  Langeais. 


^  I  • 


—  ?6«  — 

Armoiri,e$  :  elle»  w  spnt  pas  connues  (t). 

Geoffroy  II  de  Mayenne.  —  Issu,  deq  sei^i;ieurs  de 
ce  nom,  il  fu^  <}'£ibo^d  trésorier  4e  l'église Sajipt-Maarîce, 
puis  évéque  d'Axiger^  (lQd^)>  qu'il  qpitta,  en  1101» 
pour  prendre  Thabit  monastiqin^  d^ans  \  Fabbàye^  de 
Cluny,  où  il  mourut,  le  19  février  1103. 

Armoiries  (2)  :  de  gueules,  à  six  écussons  d'or^  3^2  et  1  y 
qui  est  de  Mayenne.  Ecu  og^é. 

Rainaud  II  DE  Martigné  (3).  —  Sacré  à  Angers,  le 
12  janvier  1102,  il  fut  transféré  à  rarchevêché-.de 
Reims,  l'an  1125^ 

Armoiries  :  de  gueules,  à  trois  genouillères  dJarrr^es 
anciennes,  d'argent,  posées  deux  et  une,  qui  est  de  Mar- 
tigné (4).  Ecu  ogive, 

llLGER.-^Ecolâtre  de  Saint-Maurice,  puis  archidiaci^p 
d'Outre-Loire  (1113),  il  fut  sacré  évêque  d'Angerç,  le  2Ô 
septembre  1125;  décédé  en  1149,  il  reçut  les  honneurs 
de  la  sépulture  dans  sa  cathédrale,  près  la  porte  du 
cloître.  .  . 

Armoiries  :  inconnues. 


.  I 


<1)  Gommiinicatioa  de  M.  de  Lambron  dé  Ugnirn, /savant  héral- 
diste  de  Tours.  , . , 

(2)  Quoiqu*aucun  héraldiste  n'ait  fait  meiition  de  ses  armoiries, 
nous  croyons  pouvoir  lui  attribuer  celles  des  seigneurs  de  Mayenne. 
V.  Gauvin,  p.  152. 

(3)  De  Martigné  ou  des  Prés  (et  non  de  Martigné-Briand),  branche 
de  la  maison  de  Mayenne,  ^  tira  son  nom  d'une  terre  seigneuriale 
située  près  de  Lavsl.  D.  Piolin,  Histoire  de  l'Église  du  MaTis^  t.  (II, 
p.  528. 

(4)  V.  la  généalogie  de  cette  maison,  imprimée  â  la  Flèche.  — 
€auvin,  v<»  Martigné. 


—  269  — 

NohMAND  DB  Dot.  -^  lyarôbidiaère  d'Oatre^Loire,  ii 
fut  sacré  évêque  d'Angers,  le  6  malrs  ll50y  ôt  irtotTrut 
le  27  awiH153.  ?    '  "• 

Armoiries  •  inconnues. 

Mathieu  de  Lodun.  —  Né. à  Loudun  (Vieptie),  d«s 
seigneurs  de  ce  nom,  il  passa  d'abbé  de  Saint-Florent- 
lés-Sauraur,  évêque  d'Angers  (1155).  Mort  à  l'abbaye 
du  Loroux,  il  y  fut  inhumé,  le  \S  mars  116^. 

Armoiries  (1)  :  de  ^tieuks,  à  um  bande  d'or  (2),  qui 
est  de  LouDUN.  Ecu  ogive. 

Geoffrot  III  LA  MoûscHË.  «^  Chapelain  du  roi  d'An- 
gleterre, doyen  des  cathédrales  d'Angers  et  de  Séez, 
il  monta  sur  le  siège  de  cette  première  ville,  en  1163, 
et  mourut  le  18  janvier  1177. 

Armoiries:  inconnues. 

Raoul  I  de  Beaumont.  —  Elu  évêque  d'Angers,  en 
1177,  il  assista  au  xi«  concile  œcuménique,  tenu  au 
palais  apostolique  de  Latran,  à  Rome  (11 79),  et  mourut 
le  11  avril  1197.  '  . 

Armoiries  :  (ïazur  (3)^  au  lion  ravissant  d'ôr,  armé 

(1)  «  Nous  ne  connaissons  pas  les  armoiries  de  ce  prélat  d'une  ma- 
nière certaine  :  dans  THistoire  de  SaMé>  Ménage,  p.  !ii5âv  parlant  lie 
Goscelin  de  Sainte>Maure,  dit  qu'il  prenait  le  titre  de  Pietavinus, 
vers  1040;  L'âbbéle  Laboureur,  prétend  que*  Guillaume  de  IVessigny, 
qui  prit  le  nom  de  Sainte-Maure,  descendait  d'tm  seigneur  du  nom 
de  Loudun,  qui  portait  de  gueules,  à  k' bande  d*or;  allié  aux  seigneurs 
de  Montsoreau,  p.  256,  ^7,  323  etc.  »  Note  de  M,  Lambron  de 
Lignim. 

(2)  Âudôuys.  —  Vitraux  de  la  cathédrale  dta  Mati»,  xin®  siècle. — 
Cauyin,  p.  250.  —  D-.  Bondonnet»  Histoire  des  étfê^ès  dw  Maiis\ 
p.  579.  ' 

(3)  «  Les  anciens  vicomtes  de  Beaumont  environ  l'an  1200,  ne 


$1  kmpassé  dé  0ueule^^  qui  est  des  ancienfi  vieomtes'  de 
Beaumont  d^AiijOu  (1).  Ecu  ogivéi 

Guillaume  I  de  Chemillé.  —  Il  fut^  âneces^vement 
chanoine  de  la  cathédrale  d'Angers^  archidiacre  de  Ri- 
chemoaty  e&  Angleterre,  évéque  nommé  d'Ayranches 
et  enfin  évéqoe  d'Angers  (il97),  où  il  mourut  le  85 
mai  i202. 

Armoiries  :  d'argent  (S)»  ià  ^orle  de  sept  mûrlettes 
de  gueulesy  au  franc  quartier  de  même^  qui  est  de 
Chemillé  (3).  Ecu  ogive. 

'  Guillaume  II  be  Beaumok?  (4).  -r  Archidiacre  de 
réglise  d'Angers,  il  reçut  la  consécratioe  épiscopaie,  le 
23  septembre  4203,  et  mourut  le  34  août  1240-  Il  fut 
inhumé  dans  le  chœur  de  la  cathédrale. 

Armoiries:  semé  de  France,  au  lioth  ravissant  d^or y 
armé  et  htàpassé  de  gVtéules,  qui  est  des  vicomtes  de 
Beaumont  d'Anjou,  depuis  4200  (5);  brisé  m  chef  d'un 
lambd  à  trais  pendants  de  sable  (6).  Ecu  ogive. 

Michel  I  de  Villoiseau.  —  Créé  évêque  d'Angers, 
en  4240,  il  mourut  le  ,6  novem^ire  1260  et  fut  enseveli 
dans  l'église  conventuelle  des  Jacobins. 

r 

portoient  que  le  lion  seulement,  mais  depuis  le  mariage  de  Jean, 
nepueu  de  Saint^Lpûis  aueo  i'heritiere  <ie  Beaumont  le  vicomte,  il9 
portèrent  Técu  «emé  de  France,  o  Gohorri,  Atmorial  d'Anjw* 

(i)  De  Liyonniére ,  n*»  3.  —  Âudouys,  v*>  de  Beaumont.  • — 
J.  Balain,  p.  297,  ajoute  ttn  lambel  à  trois  pendants  de  saUe  en  chef- 

(2)  D'or,  selon  Audouys  et  de  Lhronnièpe. 

(3)  Lehoreau,  n*  5.  —  J.  Balain,  p.  299.  —  Gohorri. 

(4)  Une  inscription  datée  de  Tan  122^3 ,  et  copiée  par  Gaignières  à 
Tabbaye  de  €haloehé,  le  nomme  GuiUaumê  4e  iiainte^Sumnne, 

(5)  De  Livonnière,  n®  4. 
Lehoreau,  n<>  2. 


-  274  - 

Armoiries  :  incqnnues  (1). 

Nicolas  Gellant,  -r-  Ifatif  d'Angers,  il  remplit  au* 
près  de  Guillauiae  II  de  Beaumont^  les  fonction3  de 
chapelain^  Élu  évêque  en  1261»  il  mourut  en  son 
château  d'Eventard,  le  %Q  janvier  1290»  et  fut  inhumé 
dans  le  chceur  de  la. cathédrale. 

Armoiries  :  Ecartelé  (2)  ;  ow  /,  losange  d'argent  et  de 
gtieules^  qui  est  de  Tujipin;  m  2,  (f  argent  à  Vorle 
de  êept  merlettes  de  gueuler  (3),  au  fnmc  quartier  de 
mêmej  qui  est  de  Chemillé  ;  au  3,  de  gueules,  fretté 
émargent,  qui  eS|t  de  GE^UAiirr  ;  aV',  4,  d'or  à  la  croix 

cmcrée  de  gueules^  qui  est  de (4),  Ëcu  ogive,  adossé 

à  une  crosse  d'or  en  pal. 

Guillaume  III  le  MAWS.^Maire*chlapeIaxn  de  Saint- 
Maurice,  puis  pénitentier  de  la  même  église,  il  fut  sacré 
à  Angers,  le  9  juin  1891,  et  .mourut  le  5  mai  1314. 

Armoiries  :  d'azur^  au  lion  d'or,  accompagné  de  trois 
trèfles  de  même  y  deux  et  un,  qui  est  le  Maire.  Ecu 


(i)  Son  contre-sceau,  dont  il  eiE^ste  une  empreinte  au  Musée  dio- 
césain, portait  un  ange  agenouilléy  sujet  de  fantaisie  pieuse^  plutôt 
que  motif  héraldique. 

(2)  Lehoréau  représente  quatre  écnssons  distincts  :  Hœc  i  itemnuUa 
visuntur  super  tumbam  D,  Geslant  in  choro, 

(3)  De  Livonnière  pose  les  merlettes  deux,  deux  et  trois ,  et  les 
blasonne  de  sable, 

(i)  Balain  ajoute  comme  supports  ;  deux  maures,  au  froti$  bandé 
d'argent f  aux  reins  couverts  de  même,  le.  carquois  en  sautoir  sur  le 
dos  et  l'arc  en  main,  p,  317.  —  Lelioreau,  ii9  7.  —  De  Livonnière, 
n^"  6.  —  B.  Roger,  p.  277,  ait  qu^  Nicolas  Gellant  portait  pour 
arme  loxangé,  —  V.  le  dessin  du  tombeau  de  Nicolas  Gellaat,  dans 
le  portefeuille  de  Gaignières,  à  la  Bibliothèque  impériale. 


—  272  — 

ogive,  adossé  à  une  crosse  d'or  en  pal.  (Communicat. 
de  M.  le  comte  de  Quatrebarbes). 

Hugues  Odard.  —  Originaire  du  Loudunois  (1),  il 
devint  successivement  chanoine  de  Saint-Quentin  en 
Vermandois,  abbé  de  Bourgueil  et  chanoine  de  l'église 
d'Angers  (1297).  Nommé  à  ce  siège  en  1314,  il  fut 
sacré  le  2  octobre  1316.  Déôédé,  le  8  décembre  1323, 
on  l'enterra  dans  la  cathédrale. 

Armoiries  :  dCor^  à  la  croix  de  gueules  (2),  qui  est 
Odard.  Ecu  ogive  :  adossé  à  une  crosse  d'or  en  pal. 

Foulques  de  Hathefelobt.  —  Trésorier  de  Saint- 
Maurice,  il  fut  sacré,  dans  l'église  abbatiale  de  Saint- 
Aubin,  le  10  mars  1324,  et  mourut  au  mois  de  dé- 
cembre 1355.  Il  avait  son  tombeau  dans  la  cathédrale, 
derrière  le  maître-autel. 

Armoiries  :  de  gueules^  à  six  éctissons  (for,  trois,  deux 
et  un  (3),  qui  est  des  barons  de  Mathefelon.  Ecu  ogive, 
timbré  en  pal  d'une  crosse  tournée  à  dextre.  D'après 
un  dessin  copié  par  Bruneau  de  Tartifume,  sur  la 
tombe  du  prélat  (1^®  partie,  p.  102),  et  dans  la  salle 
des  Évêques  3u  château  d'Eventard  (p.  151). 

Raoul  II  de  Machecoul  — Doyen  de  Saint-Maurice, 
il  occupa  l'évêché  d'Angers,  du  2  mars  1356  au  11  dé- 
cembre 1358. 

(1)  Audouys,  vo  Odart. 

(2)  Lehoreau,  n?  9*  —  4.  balain,  p.  323.  —  De  Liyonnière,  n<>  8. 

(3)  Lehoreau,  n®  H.  —  J.  Balain.  —  De  Livonnière,  n*  9.  —  Go- 
horri.  —  Gauvin,  p.  150.  —  Bruneau  de  *  Tartifume,  p.  51-102.  — 
Mémoires  de  la  Société,  archéologique  de  Touraine,  t.  X»  p.  187.  — 
Gaigniéres,  diaprés  sa  tombe,  lui  attribue  Vém  en  bannière,  adossé  à 
une  crosse  en  pal  tournée  en  dedans. 


—  873  — 

Armoiries:  de  gueules  y  à  trois  chevrons  dP  argent  (1), 
qui  est  de  Mâghecoul.  Ecu  ogive,  adossé  à  une  crosse 
d'or  en  pal. 

Guillaume  IV  Turpin.  —  Docteur  èsJois,  chapelain 
du  pape  Innocent  VI,  doyen  de  Saint-Aignan,  d^Orléans, 
il  monta  sur  le  siège  d'Angers,  le  13  mars  1359,  et 
mourut  le  30  janvier  1371. 


(1)  Dont  le  premier  est  péri  en  chef,  de  Livonnière,  n^  10.  — 
Lehoreau,  n©  2.  —  J.  Balain,  p.  334.  --  Une  piferre  tombale  de  l'ab- 
baye  de  Notre-Dame  de  Villeveuve-lès-Nantes  et  datée  de  1280.  re- 
présente MON  SOUR  OLLIYIER  DE  MACHECÔL,  avec  un  écu  armorié  où 
le  chevron  supérieur  est  également  péri ,  tandis  que  sur  sa  cotte 
d'armes  les  trois  cfaeyrohs  sont  entiers.  Le  même  chevron  se  trouve 
péri  sur  un  sceau  apposé  à  ulie  charte  de  1276  (BuUetin  de  la  So- 
ciété ardiéohgique  de  Nantes,  t.  I^  p.  267  et  suiv.). 

Je  n'ignore  pas  que  Gabriel  Dumoulin  (Histoire  de  Normandie), 
deux  vitraux  du  XVl®  siècle. dans  Téglise  Saint-Pierre  de  Bouguenais, 
un  aveu  du  10  février  1580  (Archives  départ,  de  la  Loire-Inférieure); 
un  portrait  armorié  du  XYII^  sièéle,  et  la  salle  des  Croisades,  au 
Musée  de  Versailles^  blasonnent  comme  un  Armoriai  de  Fratice  de'  1» 
fin  du  xive  siècle  (  L.  Paris,  Cabinet  historique,  1860,  p.  37)  : 

"  Le  sire  de  Machecol,  d'argent  à  trois  quevrons  de  gueules.  » 
Toutefois,  j'opposerai  à  ces  témoignages,  non  seulement  la  tradition 
angevine,  mais  encore  la  nots  suivante  que  me  fournit  le  Bulletin 
cité  plus  haut^  p.  273  :  «  Dans  le  Recueil  armoriai  de  la  Bretagne,  im- 
primé à  la  suite  de  l'Histoire  de  Lebaud,  édité  par  d'Hozier,  en  1633, 
ainsi  que  dans  l'Armoriai  de  Guy  Leborgne  de  1681,  on  lit:  mâGhe- 

COUL,  BANNIÈRE,  DE  GUEULES  A  TROIS  CHEVRONS  D'ARGENT.  La  gé- 
néalogie manuscrite  des  Machecoul-Vieilievigne  (Bibliothèque  impé- 
riale, cabinet  des  Titres,  fonds  d^Hoxier)^  blasonne  de  la  même  ma- 
nière ces  armoiries,  en  faisant  observer  que  d'autres  disent  le  con- 
traire. Ogée,  dans  l'ancienne  édition  ^  dit  au  mot  Machecoul  :  Cette 
ville  porte  pour  armes  de  gueules  à  trois  ckewrons  d'argent,  » 


—  Î74- 

Armoiries:  losange  (Targent.et  de  gueules  (1),  qui  est 
de  TuRPiN.  Ecu  ogive,  adossé  à  une  crosse  d'or  en  paK 

MiLON  DE  DoRBiANS  (2).  —  Successivemeut  chanoine 
de  Saint*-Quentin  en  Yermandoîs  et  de  Reims,  il  fut 
nommé  évéque  d'Angers,  en  1371,  puis  transféré  sur 
le  si^  de  Bayeux,ran  1373,  qu'il,  quitta  pour  celui  de 
Beauvais,  en  1375.  II  mourut  &  Paris,  le  17  août  1377, 
et  fut  inhumé  dans  la  chapelle  de  Beauvais. 

Armoiries  :  (Tazur,  à  trois  têtes  de  léopard  d'or  y  lam- 
passées  de  gueules,  deux  et  une  (3),  qui  est  de  Dormans. 
Ecu  ogîvé,  adossé  à  une  crosse  d'or  en  pal. 

Hardoyn  de  Bueil.  —  Originaire  de  Touraine,  et 
chancelier  de  Louis,  roi  de  Sicile,  il  fut  élu.  en  1374, 
évéque  d'Angers,  et  reput  du  pape  Benoit  XII,  le  titre 
d'administrateur  du  diocèse  d'Arles.  Il  mourut  le  18 
janvier  1439  et  fut  inhumé  à  Saint-Maurice,  dans  la 
chapelle  des  Évêques. 

Armoiries  :  Eeartelé ,  aux  i  et  i,  d'azur^  au  croissant 
fnontant  d'argent^  accompagné  de  six  croix  recroisetées, 
au  pied  fiché  d'or ,  posées  3  et  3  y  qui  est  de  Bueil  ; 
au>x  2  et  3^  de  gueules  à  la  croix  nilée  d'or  qui  est 


(1)  Lehoreâv,  n^  4.  •—  J.  Balain^  p.  335.  •—  De  Liyonmère,  n»  il . 
-t*  Gohorri.  —  Audouys  dit  lutmgé  d'wr  et  de  fueules.  -^  Mé- 
moires  de  la  Société  archéologique  de  Touraine,  t.  X,  p.  191. 

(2)  Dormans  ^Marne).  —  Avdouys,  dit  que  la  maison  de  Dormans 
était  à  la  fois  angevine  et  poitevine. 

(3)  Lehoreau,  n^  6.  —  J.  Balain,  p.  335.  -*  De  Liyonnière,  n°  iS. 
-»-  Audouys.  -^  Communication  de  M.  le  chanoine  Barraud.  — 
Gallia  ehristiana,  Epiecopi  Belvacensee.  —  J.  Pillet,  Histûire  de 
Gerberay,  p.  125.  —  L'abbé  Delletre,  Biographie  de  Milan  des  Dor^ 
maM,  —  Missel  ms.  appaileiunt  i  M.  Ls  maréchal  de  Grasse. 


-  m  - 

d'A.vcm\('l);?urîl^'toiit  dev  Saiickiw^,  écarUU  :  auie  i 
et  4,  d'or,  au  dauphin  vif  d'azur,  Umpassé^  orçUU  et 
barbelé  de  gueule;^,  qui  est  de  DAUPmiîÉ  ;  au(c  2  et  S 
d'azur,  à  la  bande  d!  argent  y  mçompagnée  de  deux  doubles 
cotices  fotencées  et  çontr^^  potencées  d'or  de  treize  pièces ^ 
qui  est  de  C9Ampagn^  (2),  Ecu  ogive,  adossé  à  une 
crosse  en  pal  et  à  senestre.  D'après  le  sceau  de  Je^an, 
sire  de  Bqeil  (Co^leçt.  Hucher^  au  Mans),  et  les  armes 
sculptées  sur  la  cheiniftée,  dite  de  Bueil,  &  révêché  (3), 
Guii^LAUMB  V  D*EsT0UTEvUiLE(4).— Moine  bénédictin, 
prieur  de  Saint-Martin-des-Champs,  àParis,  de  Cunaud, 
en  Anjou,  de  Saintç-Gatherine  de  Grammont,  et  de 
Beauraont,  abbé  dç  Saint-Ouen  de  Rouen,  de  Saint- 
Pierrp  de  Juipièges,  du  Mont-Saint-Michel  et  de  Monte- 
bourg,  chanoine  :jde  Saint-Maurice  d'Angers,  archidiacre 
d'Outre-Loire,  Guillaume  d'Estouville  fut  canonique*- 
ipent  ifi^titué  évéqi^e  d'Aagers,,  par  bulle  dU{3Q  ipars 

(1)  Communication  de  M.  de  Lambron  de  Lignim. 

(2)  Jouffroy  4'£9ch*^?QA^s,.4ri'^^  unmrMl,  Paris,  1^4.  — 
De  liToipière,  n^  ^3,  7^  {.ehorejifi,  n<*  8.  •*—  MémwrM  de  ta  Société 
arehéohgiqne  4$  Touraim^  L  IV,  p,  317. 

,  (3)  QetécussoiL  taptçfois  m  donpe  pas  Técn  sur  le  tqiU,  que.re-> 
produit  Lehoreau,  no  8,  et  qu'omettent, aussi  Gaignières  et  Btunefiu 
de  Tartifume  dans  ses  dessins  du  château  d'Eyentard,  p<  i39.  — 
«  Je  ne  pense  pas  que  ce  prélat  ait  écartelé  ses  armos  de  familte  de 
9  reçu  à  la  croix  ancrée  qui  «e  trouve  $ur  quelques  sceaui^  ;  les  frères 
9  Sainte«Martbe»  dans  leur  Gallia  ekrktiana,  n'indiquent  que  ses  armes 
1  patecoelles.  Les  autres  armes  sont  celles  des  d'Avoir,  seigneurs  de 
»  Chiteaufromont.  Les  de  Bueil,  qui  ont  éeartelé  de  Champagne  et 
»  de  Dauphiné  (Auvergne)/  s'«taient  établis  dans  le  Berri.  j»  Note  de 
M.  ds  Ijiinbron  de  Lignim. 
(4)  Estouteville,  duché  et  château  en  Normandie. 


—  sVe  — 

^1439,  coricarrértimerit'àVec  Jéân  Michël'que  soutenait  le 
chapitre  de' là  fcatTiédraltf.  Il  occupa  là  mètoe  année  le 
siège  deTérouànhé,  puis  successivement  ceux  de  Béziers, 
de  Lodève  et  de  Rouen.  Il  fut  créé  cardinal-prêtre  du 
titre  de  Saint-Sylvestre  et  de  Saint-Màrtin-des-Monts,  à 
la  troisième  promotion  faite  par  Eilj^në  IV  (1). 

Armoiries  :  Ecàrtelè  :  aux  t  el'4y  burélé  (T argent  et 
dé  gueules  de  dix  pièces;  au  Itôn'de  sable ^  arméy  cou- 
tonné'  et  lampassé  d'or,  brochaàt  sur  le  toùty  qui  est 
d'EsTouTEViLLE  :  aux  2  et  3,  de  gueule^  à  deux  (^fasces 
d'or,  qui  est  d'HàRCOURT  (3) .  Sur  le  tout,  de  France  (4) 
brisé  d*une  bande  diminuée  d'or  (5).  Ecu  ogive,  adossé 
à  une  crosse  d'or  en  paL  iD'après  les  armoiries  en 
mosaïque  qui  existent  au  baptistère  de  Sainte-Marie- 
Majeure  et  les  sculptures  de  Téglîse  Saint-Augustin,  à 
Rome. 

Jean  I  MicBel.  —  Né  à  Beauvais,  vers  1387,  con- 
seiller de  Louis  II ,  roi  de  Sicile,  chanoine  de  Rouen, 

(1)  Dôm  Poinme!*ayei  Histoire ^ des  évêgues  de  Rouen.  — ^La  Roque, 
t.  I,  p.  545'el  sniv.  —  Frïzon,  -Gallia  purpurata.  —  Ciacdnius,  in 
vitâ  Eugenii  IV.  —  X.  Barfiièf  de  WonianU,  le  cardinal  â^Estoùle- 
vilîe,  àRùVàe,  Angfers,"1859;  •<>.  1,'=2,  3.  —  Communication  de  M.  le 
«hanMhe  Langîoièf,  de  Rouen.'        ... 

(effrois,  ëélon  Brûneâu  de  Tartifume.  '  ' 

(3)  A  cause  de  sa  mère,  qui  était  de  la  maison  d'Harcourt.  V.'-  la 
Roq!ie,  Généalogie  de  la  maison  d'Harcourl,  liS62    ' 

(4)  A  cause  de  Catherine  de  Boùrlïon,  sort  aïeule  maternelle. 

(5)  V.  Robert*  Ga2/t(i  christiana,  Arehiepistopi  riothomagen.  — 
Portrait  iinnorié  du  cardinal  dani  la  sacristie  de  Sainte-Marie-Majeure, 
à  Rome.  —  De  la  Cheânaye  des  Bois,  t.  VI,  p.  l9l.  -^  Audotrys, 
yo  Estouteville.  —  Mémoires  de  la  Société  archéologique  de  ToïtriUne, 
t.  IV,  p.  315.  >      . 


—  277  — 

d'Aix  et  d*Apg[ers(14^8),il  fut  r^con^iu  évêqpe  légitime 
de  ce  siège,  après  le  départ  de  Guillaume  d'Estouteyille. 
n  mourut  le  H  ^eptçmbre.1447  et  fvit  iqhupi^  à  Saint- 
Maurice,  dans  la  chapelle  des  Évoques.         . 

Armoiries  :  ^or.  à  trois  clous  de  /^  Passion  de  sablSj 
deux  et  un,  accoi^pagnés  en  cœur  d'jine  étoile  ^  }f(u,it 
rais  d'azur,  qui  e^t  de  J!icse;l,  anci^i[^. .  Ecu.  ogivé^ 
adossé  à  une  çrcj^sse  d'or  en  pal  .çtà  ^enestre  ,(1)^ 
D'après  les  armoiries  peiates  s]ar,up  vitrail  de,  lacalhéT 
drale  (transsept  nord,  xv®  siècle)  et  sur  vélin,  aux  bor- 
dures du  Missel,}  dit  de  Jean  Michel  (2). 

Jean  II  de  Bea-ùvau,  —  Abbé  de  Fontaine-Daniel, 
et  de  Montmajour,  administrateur  de  l'archevêché 
d'Arles,  chancelier  de  René,  roi  de  Sicile,  et  chanoine 
de  la  cathédrale  d'Angers,  il  j  fît  son  entrée  le  26  sep-: 
lembre  1451.  Le.. 5  juin  1467,  il  était  déposé  pan  Iq 
pape  Paul  III. 

Armoiries  :  d'argent,  à  quatte  liowceauâc  cantonnés  de 
gueules  j  couronnés,  armés  et  lampassés  d'or  ;  Técu  brisé 


l'.ii 

•••'•'      i    '••  •     i. 


(i)  Lehoreaù,  n*  10.  —  Bruneau  de  tartifume,  p.  i30,  omet 
Fétoile.  —  De  Livonnière,  n**  H,  la  dit  percée, — Communication  de 
M.  le  chanoine  Barraud,  qui  m'écrit  que  ces  armes  se  trouvent  au 
bas  de  deux  portraits  du  prélat  qui  existent  au  Musée  de  Beàuvais, 
et  que  la  famille  Michel,  existante  encore  à  Bsauvais,  porte  d'autres 
armes.  —  Revue  de  Vart  chrétien,  1863,  p.  109. 

(2)  Son  Missel  manuscrit,  conservé  à  la  Bibliothèque  de  Tévêché, 
reproduit  son  écusson  ou  seul  et  ogive,  ou  rond,  en  médailloâ,  sus- 
pendu au  cou  dW  ange  assis,  en  dalma tique,  qui  le  soutient  des 
deux  mains.  Le  vitrail  du  transsept  nord  de  la  cathédrale  lui  donne 
deux  anges  pour  supports. 


â 


—  5^8  — 

en  tceur  ctune  étoile  à  huit  raù  (tazuf  (1),  qui  est  de 
Beaûvau. 

L'écusson  en  ogive  eât  ddossé  à  une  crosse  en  pal 
tournée  en  dedans.  D^âprès  les  lucariies  des  cotnbles 
du  château  de  Villevêque  (2). 

Jean  111  cardinal  Baluè  (3).  ^  Vicaire  général  de 
Jean  de  Beauvau,  cîhkùoîne  d' Angers  (1463)  et  de 
Cibartres,  conseiller  au  paHen!)ent  de  Paris,  administra- 
teur du  collège  de  Navarre,  grand  aùrtiônier,  secrétaire 

(i)  Lehoreau,  n<>  iS.  -^  6r«neah  de  Tsmifnmë,*  d'tfpré»  lëB 
armoiries  du  château  d'Éventàrd,  pagj.lil.  «^  .Oe  livotuaidre, 
n°  15,  ajoute  :  accompagnés  d!um  ftoiU  (Taiur  férié  en  (Mme  pour 
brisure  de  cadet,  ^  Audouys,  v®  Beauyau.  —  âcévole  et  Louis  de 
Sainte  -  Marthe,  j^ix^otre  généalogique  de  ^  maison  de  Beauvau. 
Paris.  1626.  —  Mémoires  de  îa  Sotiété  ûrbhéologiqûe  de  Tourainé, 
t.  IT,  p.  3^.  ^  L'hermile  -SiSdlièrs.  Hisi^re  génédlègiqne  dé  h 
noblesse  de  Touraine^  p.  65,  75.  —  Histoire  gétiàâogiqûi  de  la 
maison  de  Fn^i^^i  io  4P.>  p-  i67«-**Gaigmèr6S5  d*9prè8  son  tombeau, 
lui  donne  yécussoB  ogive,  avec  )a  crosse  en  pal  tournée  en  dedans, 
et  d'après  son  sceau  (acte  de  1471),  l*écu  en  bannière  et  la  crosse 
également  en  pal  et  tournée  en  dedans. 

(2)  V.  Bépertoire  ar^^logique  de  P Anjou,  1861,  p.  20.  —  Ville- 
vêque était  un  fief  épiscopal.  Le  château  date  en  partie  de  l^épiscopat 
de  Jean  de  Beauvau. 

(3)  C'est  à  tort  que  plusieurs  écrivains  modernes  écrivent  La 
Balue.  Gommine,  qui  vivait  de  son  temps,  Mézeray  qui  s*en  approche, 
Moréry  et  plusieurs  autres  qu'a  suivis  la  Biographie  universelle^  sont 
d'accord  en  cela  avec  M.  dé  Barante,  qui  ayant  écrit  son  Histoire  des 
ducs  de  Bourgogne  d'après  les  pièces  de  l'époque  prises  aux  Archives 
nationales,  ne  nomme  jamais  ce  personnage  que  Maître  Jean  Balue 
ou  le  cardinal  Balue,  Une  bulle  de  Pie  II  ((463)»  citée  par  Gaignières, 
le  nomme  Joanni  Balue,  D^ailleurs,  les  représentants  actuels  de  son 
nom  écrivent  encore  simplement  Balue, 


—  279  — 

d'État  de  Louis  Xi,  évéque  d'E^rÀix  (1465),  cardinal-^ 
prêtre  du  titre  de  Sainte-Suzanne  (1467),  puis  ëvéquë 
d'Angers  de  1468  à  1476,  malgré  ^  disgrâèe  auprès 
du  Roi. 

Armoiries  :  (F argent ^  au  chevron  de  sable  (1)  accom^ 
pagné  de  trois  têtes  de  lion  arrachées,  de  gueulesy  Joln^ 
passées  d^azUr  (2),  qui  est  de  Balue.  Eou  ogive,  timbré 
d'un  chapeau  de  gueules. 

Jean  II  de  BBAUvAUi  —  Sixte  IV  lui  rendit  TéTêché 
d'Angers,  mais  seulement  avec. le  titre  d'administrateur. 
Il  mourut  le  23  avril  1479  et  fut  inhumé  dans  la  cha* 
pelle  de  Jean  I  Michel. 

Arinoiries  :  les  mêmes  que  précédemmetU^  mais  sans 
la  crosse  qui  est  l'emblème  de  la  juridiction  épiscopale 
qu'il  n'avait  plus. 

AuGBR  DE  Brie.  ^  Des  bulles  du  13  juin  1479,  lui 
conférèrent  le  titre  d'administrateur  (3)  qu'il  permuta, 
à  la  demande  du  cardinal  Balue,  pour  celui  d'abbé'  de 
Saint-Pierre  de  Lagny  (14^0)» 

Armoiries  :  (Targenty  à  quatre  (4)  .fasces  ^  sable^  om 


(1)  D'aawr,  selon  l'armoriai  de  M.  Tardif. 

(2)  J.  Balain,  p.  384.  —  Communication  de  M^r  d'Ëvrenx  «t  de 
M.  lo  chanoine  Auber.  -*  Bauchei-Filleau,  IHctionmirû  de4  fimiUes 
du  Poitou,  p.  516-&i8,  vo  Balue.  ^Mémoires  4e  la  Société  des 
antiquaires  de  V Ouest ^  t.  il.  —  DeLiyonnière,  n^  16.  •— Lehoreao, 
n®  13.  —  Gaignières^  qui  reproduit  son  sceau  d'après  un  acte  de 
1484,  lui  donne  un  écu  découpé  et  à  pans,  sommé  d'une  cmx  d'or 
et  d'un  chapeau  à  quatre  rangs  de  houppes  de  gueules. 

(3)  Son  élection  est  mentionnée  dans  •  le  Registre  des  conelusùms 
du  ChapUre,  i  la  date  du  1«r  juillet  U79  (Ma.  de  M.  VahU  Taidil). 

(4)  Ou  etflf. 


—  880  — 

lùm  de  gueules  brochant  sur  le  tout  (i),  qui  est  de 
Bbie.  Ecu  ogive,  sans  crosse. 

Jean  III  cardinal  Balue.  —  Evêque  suburbi- 
caire .  d'Albano,  puis  de  Palestrina,  légat  du  Saint- 
Siège  en  France,  il  reprit  possession  de  son  évéché 
d'Angers  en  1490,  et  mourut  Tannée  suivante  à  An- 
cône.  Il  fut  inhumé  à  Rome ,  dans  la  basilique  de 
Sainte-Praxède. 

Armoiries  :  les  mêmes  que  précédemment. 

Jean  IV  de  Rely  (2).  —  Natif  d'Arras,  docteur 
en  théologie  de  la  faculté  de  Paris,  confesseur  de 
Charles  VIII,  doyen  de  la  collégiale  de  Saint-Mai^tin  de. 
Tours,  grand  aumônier  de  France,  député  aux  États- 
généraux  de  1483,  il  fut  choisi  par  le  chapitre  pour 
occuper  le  siège  d'Angers,  le  l®r  décembre  1491.  II 
mourut  à  Saumur  le  27  mars  1498,  et  fut  inhumé  dans 
la  chapelle  des  Évoques,  à  la  cathédrale. 

Armoiries  (3)  :  d*or ,  au  chevron  d'azur  ;  au  chef 
d'azur^  chargé  de  trois  étoiles  à  huit  rais  du  pre- 
mier (4),  qui  est  de  Relt. 

(1)  Tardif,  ▼«  Brie. 

(2)  Rély  est  une  commune  de  T Artois,  canton  de  NorrentrFontes 
(Pas-de-GaLais). 

(3)  P.  Roger,  Catalogue  armoriai  des  maisons  nobles,  p.  357.  — 
J.  le  Garpentier,  Histoire  de  Cambrai  et  du  Cambrésis,  t.  II»  p.  937. 
—  Gommunication  de  M.  le  chanoine  Van-Drival  et  de  M.  de  Garde- 
Tacque. 

(4)  Lefaoreau,  n<*  44.  —  J.  Balain.  —  L'abbé  Vaa*Drival,  d'accord 
avec  le  Gallia  ehtistiana^  blaso/me  :  d'or  à  trois  chevrons  d^axur 
(lettre  du  30  avril  1859).^*  De  Livonnière  blasonne  :  d'or  au  chevron 
d^axur,  chargé  de  trois  étoiles  dor,  —  «  La  Morlière,  dans  son 
Becueil  des  illustres  maisons  de  Picardie,  explique  que  Jean  de  Rely, 


—  284  — 

Ecu  ogive,  adossé  à  une  crosse  en  pal,  tournée  à 
dei^tre.  D'après  les  armoiries  peintes  sur  un  vitrail  de 
la* chapelle  des  Évêques  et  celles  sculptées  autrefois  au 
château  d'Eventard  (1). 

François  de  Rohan  (2).  —  Abbé  commendataire  des 
abbayes  de  Saint-Aubin  d'Angers  et  de  Saint-Médard 
de  Soissons,  il  n'avait  que  dix-neuf  ans,  lorsqu'il  fut 
nommé  administrateur  de  l'évêché  d'Angers  (4499), 
par  le  pape  Alexandre  VI.  En  4504,  il  fut  élu  arche- 
vêque de  Lyon.  Le  5  juin  1504,  il  recevait,  dans  la 
chapelle  de  Sainte-Croix-du-Verger,  la  consécration 
épiscopale.  Il  retint  cependant  l'évêché  d'Angers,  jus- 
qu'en 4532,  époque  à  laquelle  il  permuta  pour  l'ab- 
baye de  Saint-Médard  de  Soissons.  Il  mourut  à  Lyon, 
où  il  fut  inhumé  en  4536. 

Armoiries  :  Ecartelé  :  aux  i  et  4,  contre-écartelé  de 
gueuleSy  au  rais  d' escar boucle  pommelé  d'or,  qui  est  de 
Navarre,  et  de  France,  au  bâton  componé  d* argent  et  de 
gueules,  qui. est  d'EvREUx;  aur  2  et  3,  de  gueules,  à  neuf 
macles  d'or,  trois,  trois  et  trois,  qui  est  de  Rohan 
GuÉMÉNÉ  ;  sur  le  tout  d'argent,  à  la  guivre  d'azur  issant 
de  gueules,  couronnée  c^or,  qui  est  de  Milan  :  Vécu  brisé 


évêque^  étant  issu  d*une  branche  puinée  de  ea-  maison,  dut  briser 
ses  armoiries,  qu'il  blasonne  ainsi  :  d'or  au  chevron  (Tazur,  au  chef 
ffazur,  chargé  de  trois  étoiles  d'or,  »  (Lettre  de  M'»'*  la  vicomtesse 
de  RoGourt,  du  H  février  f861).  —  V.  Répertoire  arehéeiogique  de 
r Anjou,  1861,  p.  98.  —  Son  tombeau,  reproduit  par  Gaignière», 
portait  Técu  ogive  et  la  crosse  tournée  en  dedans. 

(1)  Brunean  deTartifume;  p.  \Â/È, 

(2)  Rohan,  duché-pairie  en  Bretagne,  diocèse  de  Vannes.  La  Ches- 
nafye,  t.  XU,  p.  24. 

BIP.   ARC.  21 


—  ^i  — 

d^un  lambel  (ïar^t  de  troU  pièces  (1),  L'écu  en  ban- 
nière (2)  est  timbré  en  pal  d'une  croix  archiépiscopale. 
D'après  un^  miniature  sur  vélin  contemporaine  du 
prélat  (Biblioth.  de  la  ville),  et  les  armoiries  autrefois 
sculptées  dans  la  salle  des  Évêques  au.chllteau  d'Even- 
tard,  et  à  la  chapelle  (}u  Saint-Esprit. 

Jean  V  Qi^ivij^.  -^  Natif  de  Paris,  bénédictin,  puis 
abbé  de  Saint^lftédard  de  Soissons  (1510),  de  Saint- 
Crépin  de  la  mêrpe  ville  (1547),  il  devint  évoque  d'An- 
gers, en  1532»  rnourut  au  çjiâteau  d'Eventard,  le  1^ 
avril  1540  et  fut  inhumé,  dans  la  chapelle  des  Évêques., 
à  Saint^Maurice. 

Armoiries  ;  (f  azur,  à  six  besam  d^or^  posés  trois,  defox 
et  un;  au  chef  di  argent^  au  lion  issant  de  sable,  armé 
et  lampassé  de  gueules  (3),  qui  est  Olivier.   L'écu 

{\  )  Communication  de  rarchevêché  de  Lyon.  ^— Lehoreau,  n^  15.  — 
Bruneau  de  Tartifume,  p.  143-284,  supprime  lelambeL  —  J.  Balain^ 
p.  408.  —  De  Livonnière ,  n<*  18.  —  Gaignières  reproduit  l*écu  en 
bannière,  diaprés  un  autel  -de  la  nef  de  la  cathédrale,  avec  cette  de- 
vise :  SPSTE  L'HORE. 

(2)  a  Et  peut  le  seigneur  comte,  vicomte  ou  baron ,  porter 

bannière^  qui  est  h  dire  ^e  le  comte,  vicomte  ou  baron  peut,  en 
guerre  ou  armoirie  (tournois)  porter  ses  armes  en  quarré;  ce  que  ne 
peut  faire  le  seigneur  chastelam,  lequel  seulement  peut  les  porter  en 
forme  d'écuason  »  Coutume  du  Poitm^t  <»f*^  i*^  La  Gume  de  Sainte- 
Palaye.  Mémêife  sur  Vmciênne  ehevaUrie,  Paris,  1826,  t.  I.  Quel- 
ques familles  ont  conservé»  comme  un  pienx  souvenir  de  la  grandeur 
de  leurs  ancêtres,  Tusage  de  porter  leur  écu  en  bannière.  Mémotres 
de  la  Société  des  AMiquaires  dû  r Ouest,  année  1857,  p.  193-194. 

(3)  Lehoreau  n»  16.— J.  Balai»,  p.  4l2.-^Braneau  ê{e  Tartifume, 
3«  partie,  137,  144,  d'après  une  sculpture  du  château  d'Ëventard. — 
De  Livonnière,  n^  19.  — *  Selon  Gaignières,  Jean  Olivier  avait  une 
devise^  qui  était  également  répétée  sur  son  tombeau  :  spbsveà  devs 


—  28»  — 

ogive  est  timbré  dMne  crosse  en  pal  et' à  senestre. 
D'après  un  dessin  de  Bruneati  de  Tartifanie. 

Gabriel  Bouvery.  —  Né  à  Angers,  abbé  comment- 
'  dataire  de  Saint^Cyprien  de  Poitiers  et  de  Saint-Nicoïas- 
lès-Angers,  il  fut  promu  à  Fé^êché  de  cette  ville,  le 
14  avril  1540.  H  assista  au  concile  de  Trente,  pendant 
les  années  1561^  1562,  1563,  el  1564>  et  monrat  à 
Angers,  le  10  février  1572. 

Armoiries  :  Ecartelé  :  aux  4  et  4,  d'argent,  h  troiis 
bernées  de  sable,  qui  est  Rouvert;  am  2  et  3, 
d'azur  à  trois  poyets  ou  ôolonnes  d^argmt  rmgées  en 
pal  (1),  qui  est  Poyet  (2).  L'ècu  ogive  est  adossé  à  une 
crosse  d'or  en  pal  et  tournée  en  dehcîïs.  D'après  une 
sculpture  de  la  salle  des  Évéques,  au  chàftèau  d'Even*- 
tard  (3),  copiée  par  Bruneau  de  Tartiftmie,  «t  une  em- 
preinte de  son  sceau  sur  un  acte  de  1541»  au^  archives 
de  la  Préfecture  (4). 

GfriLtAUME  ¥1  DE  Rtzé*  —  Originaire  de  Paris,  doc- 
teur en  théologie  de  la  maison  de  Navarre,  confesseur 
des  Rois  Charles  IX  et  Henri  III,  il  ftit  sacré ,  à  Par^s, 

k  IWENTVTE  UBA,  et  figurait  au  bas  de  son  écusson^  découpé  à  pans- 
et  sommé  iet  la  oroase  en  pal  et  à  senestre* 

(1)  A  cause  de  Guillemetle  Po^et^  sa  mère.  V.  R^fentoire  arehéù^, 
hgique  de  l'Anjou,  1860,  p.  279-^0. 

(2)  Lehoreau,  n°  17.— ;J.Goliarri,v» Bouvery.  — J.  Balam,p.  429. 
—  Bruneau  de  Tartifume,  p.  145.  —  De  Livonnière,  n°  20,  dit  les 
colonnes  d'or.  ^  Armoriai  des  Maires  d'Angers,  1845^  ^1-^4^^ 
p.  il.  —  Son  sceau,  reproduit  par  Gaignières,  iporie  Vécu  <^vé  et 
la  crosse  en  pal,  toninée  en  ^dans. 

(3)  Ces  «rmoiries.  étaient  f^endiies  au  oou  de  cerfs  couchés. 

(4)  La  crosse  y  est  tournée  en  dedans. 


—  284  — 

le  24  août  1572,  et  y  mourut  le  28  septembre  1587.  Il 
fut  inhumé  dans  Téglise  Saint-Paul,  lieu  de  sépulture 
de  sa  famille  < 

Armoiries  :  de  gueules,  au  chevron  fascé  en  ondes 
d'argent  et  dCazur,  accompagné  de  trois  lionceaux  d^or» 
posés  deux  et  un,  les  deux  du  chef  affrontés  (I),  qui  est 
de  Rdzé.  Egu  ogive,  adossé  et  lié  à  une  crosse  d'or  en 
pal.  D'après  une  empreinte  de  son  sceau  aux  archives 
de  la  Préfectui*e. 

Charles  I  Miron.  —  Il  monta  sur  le  siège  d'Angers, 
âgé  de  dix-huit  ans,  en  4587,  et  permuta  cet  évêché 
avec  Guillaume  Fouquet  delaVarenne,  en  1646,  contre 
les  abbayes  de  Saint-Jean  en  Bourgogne  et  de  Saint- 
Léomer,  à  Blois. 

Armoiries:  Ecartdé:  aux  1  et  4,  de  gueules^  au 
miroir  à  V antique  d'argent,  cerclé  et  pommelé  d'or,  qui 
est  de  MiRON  :  aua^  2  et  3,  d! argent,  à  trois  fasces  vivrées 
de  gueules,  à  la  bande  semée  de  France  brâchant  sur  le 

(1)  Lehoreau,  n<»  18.  -^  Âudouys,  v«  Ruzé.  —  firuneau  de  Tarli- 
fume,  p.  146,  d'après  une  sculpture  de  la  chapelle  du  château  d'Even- 
tard.  «^  J.  Balain,  p.  447.  —  De  Livonnièrè,  n°  21.  —  Mémoires 
de  la  Société  archéologique  de  TourainCt  t.  X,  p.  109, 197.  —  Plaque 
de  cheminée,  au  Musée  de  Thôtel  de  Gluny,  à  Paris.  —  Son  sceau, 
reproduit  par  Gaignières,  et  identique  à  Tempreinte  conservée  à  la 
Préfecture,  porte  Técu  ogive  et  la  crosse  ei!  pal,  tournée  en  dehors.  — 
Dans  iine  vignette,  placée  en  tête  du  Breviarium  secundum  percek- 
hriseeclesiœ  Andegavensis  usum  (Andegavi,  1574),  son  écusson  est 
ogive  et  sommé  d*une  crosse  posée  en  pal,  et  tournée  en  dehors  :  il 
se  Llasonne  ainsi  :  écartelé  :  aux  i  et  4^  de  gueules ,  au  rais  d'escof" 
boucle  f  pommelé  et  fleurdelisé  tfor,  qui  est  de  l*insigne  église 
d*ângers  ;  aux  2  et  H,  de  ruzé. 


—  285  ~ 

tout  (i),  qui  est  de  Gentian  d'Erigné  (S).  L'écu  timbré 
à  dextre  d'une  mitre  précieuse,  et  à  gauche  d'une 
crosse  d'or.  D'après  la  cloche  du  château  d'Eventard, 
une  empreinte  de  son  sceau  sur  un  acte  de  1607,  aux 
Arch.  de  la  Préfecture,  et  la  gravure  placée  au  fron- 
tispice de  son  Missel. 

Guillaume  VU  Fouquet  de  la  Varenne.  —  Con- 
seiller au  parlement  de  Paris  et  maîti*e  des  requêtes, 
puis  abbé  commendataire  de  Sainl-Benoît-sur-Loire, 
de  Saint-Nicolas-lès-Ângers,  d'Ainay  à  Lyon  et  de  Saint- 
Loup  à  Troyes^  il  permuta  ces  abbayes  contre  l'évêché 
d'Angers  avec  Charles  Miron,  en  1616.  Il  mourut  à 
Angers,  le  10  janvier  1621,  et  fut  enterré  à  l'entrée  du 
chœur  de  la  cathédrale. 

Armoiries  •  (Pazur ,  à  une  levrette  passante  d'argent^ 
accolée  de  France  (3),  qui  est  de  Fouquet.  L'écu  ogive 


(i)  Cette  bande  fleurdelisée  fut  concédée  par  Philippe-le-Bel  à 
Jacques  Gentian,  qui  avait  vaillamment  combattu  â  la  bataille  de 
Mons-en-Puelle(1304). 

(2)  Communication  de  Tarchevêché  de  Lyon.  —  Cauvin,  p.  156. — 
Gohorri,  v*  Miron.^—  J.  Balain,  p.  477.  —  Bruneau  de  Tartifume, 
p.  152.  —  De  Livonnière,  n°  22.  —  Lehoreau^  n®  19.  —  Gaignières 
reproduit  son  sceau,  avec  la  mitre  précieuse  à  Tangle  dextre  et  la 
crosse  d'or  à  Tangle  senestrc  ;  deux  palmes  montent  le  long  de  Técu 
et  se  croisent  au  dessous.  —  En  tête  du  Breviarium  AndegavùMc 
(Parisiis,  1624),  est  apposé  son  écusson,  sommé  de  la  mitre  et  de  la 
crosse  tournée  en  dedans.  —  J*ai  rencontré  plusieurs  fois  des  em- 
preintes de  son  petit  sceau,  sur  lequel  Técusson  est  seulement  de 
Miron,  sans  écartelé.  —  Un  acte,  daté  de  1&99,  que  possède  M.  le 
chanoine  Joubert,  montre  sur  une  empreinte  de  sceau  son  blason^ 
sommé  d'une  crosse  tournée  en  dedans. 

(3)  Âudouys  rapporte  que  ce  collier  est  une  concession  d'Henri  IV 


—  986  — 

est  adossé  à  tine  crosse  d'or,  en  pal  et  en  dehora. 
D'après  une  sculpture  du  château  d'Eventard,  repro- 
duite par  Bruneau  de  Tartifume. 

Charles  1  Miron. — Il  revint  sur  le  siège  d'Angers, 
en  1624,  et  le  quitta  en  1626,  pour  occuper  celui  de 
Lyon,  où  il  mourut,  le  6  août  1628. 

Armoiries  :  comme  préeédemment. 

Claude  db  Rueil  (1).  —  Né  à  Paris,  il  fut  investi 
des  dignités  de  chanoine  de  Chartres,  syndic  du  clergé, 
aumônier  des  rois  Henri  IV  et  Louis  XIII,  grand  archi- 
diacre de  Tours,  prieur  du  Val  Saint-Eloi  et  évêque 
de  Bayonne.  Il  fiit  transféré  à  l'évêché  d'Angers,  en 
1628,  y  mourut  le  20  janvier  1649,  et  fut  inhumé  dans 
la  chapelle  des  Évoques,  où  l'on  voit  encore  sa  statue 
de  marbre  blanc,  sculptée  par  Buyster. 

Armoiries.:  cT^r,  à  trois  aigles  (mvoléployé  et  abaissé 
de  gueules,  au  franc  quartier  âazur  chargé  (Tun  lion 
passant  d'or,  qui  est  de  Rueil  (2).  L'écu  timbré  d'un 
chapeau  de  sinople  à  trois  rangs  de  houppes.  D'après 
la  gravure  placée  au  frontispice  du  MissaU  Andega^ 
vense^  édité  par  lui  en  1644,  et  l'empreinte  de  son 
sceau  sur  un  acte  de  1643,  aux  archives  de  la  Pré- 
fecture. 

à  Guillaume  Fonquet,  gouverneur  du  château  et  de  la  yille  d'Angers. 
—  J.  Balain,  p.  463.  —  Lehoreau,  no  20.  —  Bruneau  de  Tarti- 
fume, p.  153,  qui  donne  à  la  levrette  un  collier  de  guetUes,  —  De 
Livonnière,  n**  ^3,  dit  le  champ  de  gueuleSy  ainsi  qu'Audouys. 

(1)  Rueil,  près  Paris  t 

(2)  J.  Balain,  p.  481.  —  Bruneau  de  Tartifume,  p.  154.  —  De 
Livonnière,  n°  24.  —  Lehoreau,  n^  21.  —  Dans  Gaignières,  Técu 
est  rond  et  timbré  d'un  chapeau  à  trois  rangs  de  houppes. 


—  487  — 

Henri  ArnauI/Jd.  —  Né  à  Paris,  e&  1597,  il  fui  «u- 
mônier  du  Roi,  eut  en  commende  Tabbaye  de  Saint- 
Nicolas-lès*Ang6rs  et  devint  doyen  de  la  cathédrale  de 
Toul.  Il  fut  sacré  évêque  d'ÂAgers,  le  29  juin  1650, 
et,  mort  le  8  juin  1692,  reçut  la  sépulture  dans  la 
chapelle  des  Évéques. 

Armoiries  :  d'azur,  au  chevron  d'vr,  accompagné  de 
deux  palmes  de  même^  m  bande  et  en  barre,  et  m  pointe 
d^tm  mont  aussi  d'or  (1),  qui  est  Arnauld.  L'écu 
sommé  d'une  mitre  précieuse  à  dextre  et  d'une  crosse 
d'or  à  senestre,  et  timbré  d'un  chapeau  de  sinople  à 
trois  rangs  de  houppes  (2).  D'après  une  gravure  sur 
bois,  imprimée  en  tète  de  son  Manuel. 

Michel  II  le  Pelletier.  -^  Il  devint  abbé  de  Jouy, 
à  l'âge  de  dix-huit  ans,  professeur  de  philosophie  au 
collège  de  Reims,  supérieur  du  séminaire  des  Trente^ 
Trois,  à  Paris;  il  fut  nommé  à  l'évêché  d'Angers,  le  15 
août  1692.  Il  venait  d'être  promu  à  l'évécbé  d'Orléans, 
lorsqu'il  mourut  à  Paris,  le  9  août  1706. 

Armoiries  :  d'azur  y  à  la  croix  pattée  d'arger^y  chargée 
en  coeur  d'un  chevron  de  gueules,  côtoyée  de  deux  mo- 


(i)  J.  Bâlain,  p.  5i8.  —  De  LiTonnière,  n»  25.  —  Lehoreau,  rx""  22. 

(2)  Sur  les  plats  du  Bulhire  qui  lui  a  appartenu  et  que  possède 
maintenant  M.  le  curé  de  Gandé,  l'éousson  est  sommé  de  la  mitre  et 
de  la  crosse,  et  accompagné  de  deux  branches  montantes,  Tune  de 
palmier,  Tautre  d'oliyier.  —  Un  de  ses  sceaux,  avec  légende  autour, 
reproduit  par  Gaignières,  lui  donne  un  chapeau  à  quatre  rangs  de 
houppes.  —  Son  petit  sceau,  dont  les  empreintes  sont  assez  fré- 
quentes, porte  également  les  quatre  rangs  de  houppe»  (1676),  «nsi 
que  H9rœdiumœ  Breviarii  Andegatfen.  (Paris.  1665),  qui  terminent 
son  écusBou  en  accolade* 


—  288  — 

lettes  d'éperon  de  sable  (1)  et  accompagnée  en  pointe  ^une 
rose  de  gueules  (2),  qui  est  le  Pelletier.  Écu  de  forme 
ovale,  appuyé  sur  un  cartouche,  sommé  d'une  cou- 
ronne de  comte  entre  une  mitre  précieuise  à  dextre  et 
une  crosse  d'or  à  senestre,  et  timbré  d'un  chapeau  à 
quatre  rangs  de  houppes  de  sinople.  D'après  le  Érr«- 
duale  AndegavensCy  édité  par  lui  en  1702  (Musée 
diocésain). 

Michel  III  Poncet  de  la  Rivière.  — Né  en  1672, 
Michel  Poncet  passa  du  vicariat  général  d'Uzès  à  l'é- 
vêché  d'Angers.  Il  se  fit  sacrer  à  Paris,  le  l«r  août  1706, 
prêcha  à  la  cour,  fut  reçu  membre  de  l'Académie 
française  (10  janvier  1729)  et  mourut  au  château 
d'Eventard,  le  2  août  1730. 

Armoiries  :  d'azur,  à  la  gerbe  liée^  chargée  de  deux 
tourterelles  affrontées^  ponçant  les  grains  de  froment,  et 
surmontée  d'une  étoile  à  cinq  rais,  le  tout  d'or,  qui  est 
Poncet  (8).  L'écu  de  forme  ovaie,  s'appuie  sur  uncar- 


(1)  Et  non  de  deux  étoiles ^  comme  l'indique  Audouys  dans  son 
Armoriai  ms.  de  TAnjou. 

(2)  Gauvin,  p.  136,  —  J.  Balain,  p,  530.  —  Lehoreau,  n»  23.  — 
Son  petit  sceau,  d'après  une  empreinte  datée  de  1694  (Archives  de 
1^  Hôtel  de  ville  de  Beau  fort),  ne  portait  que  trois  rangs  de  houppes. 
—  Dans  le  portefeuille  Gaignières,  à  la  Bibliothèque  impériale, 
figure  une  planche  gravée,  dans  laquelle  Tccu  en  accolade,  sans 
crosse  ni  mitre,  est  sonuné  d'une  couronne  de  comte  et  d'un  cha- 
peau à  trois  rangs  de  houppes. 

(3)  Oraison  funèbre  de  Messire  Michel  Poncet  de  la  Rivière, 
Angers,  1730,  p.  28.  —  Lehoreau,  n^  24  —  J.  Balain,  p.  567, 
ajoute  deux  cygnes  d* argent  pour  supports.  —  Gauvin,  p.  185.  — 
De  Uvonnière,  n°  27.  —  Une  gravure,  insérée  dans  Gaignières,  lui 


-  389  — 

touche,  timbré  d'une  couronne,  de  comte,  adextréé 
d'une  mitre  précieuse,  senestrée  d'une  crosse  tournée 
en  dehors  et  sommé  d'un  chapeau  à  quatre  rangs  de 
houppes  de  sinople.  D'après  les  armoiries  du  prélat 
(V.  ses  mandements,  1708^  1744,  4718,  1721),  son 
Missel,  son  Bréviaire  et  son  Ântiphonaire  (1719),  au 
Musée  ecclésiologique  du  diocèse.) 

Jean  VI  de  Vaugiradlt  (1). — Nélel  octobre  1673, 
à  Angers,  paroisse  de  la  Trinité  (2) ,  il  devint  succes- 
sivement prieur  de  Noems,  curé  de  Saint-Martin  de 
Beaupreau  (1705),  chanoine  de  Saint-Maurice,  grand 
archidiacre  d'Angers,-  vicaire- général  de  Poncet  de  la 
Rivière,  évêque  nommé  de  Montauban,  puis  évêque 
d'Angers.  Il  fut  sacré  à  Paris,  le  28  janvier  1731  et 
mourut,  le  21  juin  1758;  on  l'inhuma  dans  la  cathé- 
drale. 

Armoiries  :  d'argent^  à  Paigle  à  deux  têtes  éployée  de 
sable^  becquée  et  membrée^de  gueules,  qui  est  de  Yaugi^ 
RAULT(3).L'écu,  de  forme  ovale,  s'appuie  sur  un  large 

donne  une  écu  en  accolade,  sans  crosse  ni  mitre,  une  couronne  de 
comte  et  un  chapeau  à  trois  rangs  de  houppes. 

(1)  Vaugirault  est  une  terre  seigneuriale,  avec  château,  sise  sur  la 
paroisse  du  Mesnil>en- Vallée  (Maine-et-Loire),  à  environ  un  kilo- 
mètre du  bourg. 

(2)  Communication  de  M.  Raimbault,  qui  a  lu  sur  les  registres  de 
baptême  de  la  paroisse  de  Notre-Dame-d*Allençon,  que  f  Jean- 
»  Baptiste  de  Vaugirault,  fils  de  Gabriel  de  Vaugirault  et  de  Jeanne- 
»  Marie  de  la  Bouere,  né  à  Angers,  dans  la  paroisse  de  la  Trinité, 
»  premier  octobre  mil  six  cent  soixante-treize,,  a  été  ondoyé  le  deux, 
»  et  baptisé  le  vingt-deux  novembre  même  année ,  dans  Téglise  de 
»  Notre-Dame-d*Allençon.  » 

(3)  Armoriai  ms.  de  M.  Fabbé  Tardif.  —  Gauvin,  p.  237. 


—  290  — 

cartouche  :  il  est  sommé  d'une  couronne  de  marquis^ 
adexlrée  d'une  mitre  précieuse,  senestrée  d'une  crosse 
tournée  en  dehors  et  timbré  d'un  chapeau  à  quatre  rangs 
de  houppes  de  sinople.  D'après  les  mandements  (17^1, 
1734,  4748,  1750),  le  Miseel,  le  Bréviaire. (1737)  et  le 
Rituel  (1735)  du  prélat  (Musée  ecclésiologique  du  dio- 
cèse) ;  sculpture  de  la  cuisine  de  révêché. 

Jacques  de  Grasse  (1).  —  Né  au  château  de  Limer- 
mont  (Oise),  le.  24  septembre  17^0  (2),  il  fut  d'abord 
vicaire-général  du  diocèse  de  Beauvais,  abbé  commen- 
dataire  et  premier  évêque  de  Vencc  (1757),  puis  évê- 
que  d'Angers  (1758),  et  abbé  commendataire  de  Saint- 
Aubin.  Il  mourut  à  Paris,  le  24  juillet  1782,  et  fut 
inhumé  dans  le  chœur  de  Saint-Sulpice. 

Armoiries  :  écartelé  :  au  1 ,  contre  écartdé,  £or  à 
trois  pals  de  gueules^  qui  est  de  Foix,  et  d'or  à  deux 

« 

vaches  passantes  de  gueules ,  acconiées,  accolées  et  da- 
rinées  d'azur,  qui  est  de  Béarn  ;  au  2^,  de  gueules,  aux 
chaînes  d'or,  posées  en  croiXy  sautoir  et  orle^  qui  est  de 
Navarre;  au  3^,  contre-écarteU  en  sautoir,  d'or  à  quatre 
pals  de  gueules  et  d'argent  à  VaigWde  sable  couronnée 
d'or,  becquée  et  membrée  de  gueules,  qui  est  de  Sicile; 
au  4e,  de  France^  à  ta  cotice  componée  d'argent  et  de 
gueuleSy  qui  est  d'EvREUX  :  sur  le  tout,  d'or  au  Uon  de 


(i)  Grasse,  en  Provence. 

(2)  U  naquit  cUnsle  diocèse  de  Beauyais,  par  suite  du  mariage  de 
%0U  père  Etienne^  avec  Louise-Ëtiennette  d*Hallencourt  de  Bromesnil, 
qui  lui  apporta  en  dot  la  terre  de  Limermont  {Communication  de 
M.  le  chanoine  Barraud).  —  Il  existe  encore  plusieurs  membres  de 
la  famille  d<e  Grasse,  dans  le  Beauvaisis. 


—  291  — 

sable,-  courannéj,  armé,  lampassé  et  vilené  de  gueules^ 
qui  est  de  Grassb  (1)*  L'écu^  de  fônne  ovale,  appuyé 
sur  un  cartouche,  est  timbré  d'une  couronne  ducale 
adextrée  d'une  mitre  précieuse  et  sénestrée  d'une  crosse 
d'or  tournée  en  dehors,  et  sommé  d'un  chapeau  à  quatre 
rangs  de  houppes  de  sinople. 

D'après  plusieurs  empreintes  du  sceau  du  prélat  et 
les  armoiries  placées  en  tâte  de  ses  mandements  (1761, 
4765,  1770,  1778,  1776,  1781),  ou  de  son  Diumale 
Andegavense  (Musée  ecclésiologique  du  diocèse). 

Mi€HEL  IV  François  Couet  du  Viviers  de  Lorry  (2). 
—  Né  à  Metz  (Moselle),  en  1730,  il  fut  successivement 
vicaire-général  de  Rouen,  évêque  de  Vence  (1764-), 
de  Tarbes  (1769)  et  d'Angers  (1782),  époque  à  laquelle 
il  obtint  en  commënde  l'abbaye  de  Saint-Serge  de  la 
même  ville.  Démissionnaire  en  1802,  il  accepta  l'évéché 
de  la  Rochelle  et  mourut  à  Paris^  le  14  mars  .1803, 
âgé  de  73  ans. 

Armoiries  :  de  gueules,  à  trais  fers  de  flèche  renversés 
d'argent,  deux  et  un,  qui  est  du  Viviers  (3).  L'écu  en 
accolade  est  appuyé  sur  un  cartouche,  timbré  d'une 
couronne  de  marquis  (4),  adextrée  d'une  mitre  pré- 

(1)  Du  Buisson,  Armoriai  des  principales  familles  du  royaume, 
particulièrement  de  celles  de  Paris  et  de  flsle  de  France,  t.  I,  p.  173. 
—  Communications  de  M.  Barraud,  chanoine  de  Téglise  de  Beauvais, 
de  M.  César  de  Grasse  et  de  M.  le  Maréchal  de  Grasse. 

(^)  Le  Viviers  et  Lorry,  sont  deux  villages  du  département  de  la 
Moselle. 

(3)  Biographie  du  Parlement  de  Metz.  —  Communication  de 
M.  Lepage,  archiviste  du  département  de  la  Meurtbe. 

(4)  L'extrait  du  Rituel  de  1785,  porte  une  couronne  ducale. 


—  S592  — 

cieuse  et  senestrée  d'une  crosse  d'or,  tournée  en 
dehors,  et  sommé  d'un  chapeau  à  quatre  rangs  de 
houppes  de  sinople. 

D'après  les  armoiries  gravées  du  prélat,  ses  mande- 
ments (1782,  1784,  1786,  1787,  1789),  ses  sceaux  et 
ses  livres  liturgiques  (Musée  ecclésiologique  du  diocèse). 
Sur  une  authentique  du  7  janvier  1790  (1),  conservée 
à  la  cure  de  Sainte-Radégonde  de  Poitiers,  devançant 
en  cela  le  décret  de  TAssemblée  nationale  qui  ne  date 
que  du  mois  de  juin,  M«r  de  Lorry  avait  déjà  substitué 
ses  initiales  à  ses  armoiries  de  famille  sur  son  écussou 
épiscopal,  qui  dès  lors  se  blasonne  :  d'azur  aux  initiales 
M  F  D  L  d'argent  entrelacées  :  l'écu  timbré  d'une 
croix  entre  la  mitre  précieuse  à  dextre  et  la  crosse  à 
senestre,  et  sommé  du  chapeau  de  sinople  à  quatre 
rangs  de  houppes. 

Charles  II  baron  de  Montault  (2)  des  Isles  , 
chevalier  de  l'ordre  impérial  de  la  Légion  d'honneur. 
—  Né,  le  30  avril  1755,  il  fut  d'abord  vicaire  de  Saint- 
Pierre-du^Marché,  à  Loudun,  puis  évêque  de  Poitiers, 
1791.  Il  passa  à  l'évêché  d'Angers,  en  1802,  mourut 
le  29  juillet  1839  et  fut  inhumé  dans  la  nef  de  la  ca- 
thédrale. 

Armoiries  :  d'azur ^  à  deux  mortiers  d'argent,  allumés 
de  gueuleSy  posés  en  pal,  qui  est  des  barons  de  Mon- 


(1  )  Le  19  jajivier  \  790,  eut  lieu  l*abolition  à  toujours  de  la  no- 
blesse héréditaire,  qui  fut  cependant  rétablie,  le  2  mai  1814,  par  la 
déclaration  royale  de  Saint-Ouen. 

(2)  Montaull,  une  des  grandes  baronnies  du  Bigorre.  V.  Moréri, 
Dictionnaire  historique,  v»  Feizenzaç,  ^esensaguet,  Montesquiou» 


—  293  — 

tault(I);  au  franc-qnàrtier  de  gueules  à  la  croix  alésée 
(for,  à  senestre^  qui  est  une  concession  de  Napoléon  !«* 
aux  Évêques  barons  (2).  L'écu  timbré  d'une  toque  ba- 
ronale  de  velours  noir  retroussée  de  contrevair,  porte 
aigrette  en  argent,  trois  plumes,  deux  lambrequins  en 
argent,  en  signe  de.baronnie  (3);  d'une  mitre  précieuse 
à  dextre  et  d'une  crosse  tournée  en  dehors  à  senestre, 
sommé  d'un  chapeau  de  sinople,  à  quatre  rangs  de 
houppes;  accompagné  en  pointe  d'une  croix  de  cheva- 
lier de  la  Légion  d'honneur,  d'argent  couronnée  de 
sinople  et  attachée  de  gueules  (4). 

Louis-RoBERT  Paysant.  —  Originaire  du  diocèse  de 
Bayeux  (4787),  vicaire  de  Saint-Pierre  de  Caen  (1814), 
chapelain;  puis  directeur  de  Thèpital  Saint-Louis  de  la 
même  ville,  vicaire-général  de  Bayeux,  chanoine  titu- 


(1)  Promotion  de  chevaliers  des  ordres^  en  1662.  V.  Ph.  de 
Montault. — Jouffroy  à^EschdiW Aimes ^  Armoriai  universel,  v<*  Montault. 

(2)  Gourdon  de  Genouillac,  Gramfnaire  héraldiquey  p.  97. 

(3)  JWd.,p.  94. 

(4)  Tant  que  les  armoiries  nobiliaires  Itvent  prohibées  ba  Francïe, 
voici  celles  dont  se  servit  le  vénérable  prélat  ;  «  4'^zur,  aux  initiales 
G  M  entrelacées  d'or  ;  Técu  en  ogive  adossé  à  une  croix  en  pal, 
adextré  d*une  mitre,  senestre  d'une  crosse,  timbré  d*un  chapeau  de 
sinople  à  quatre  rangs  de  houppes,  et  accompagné  en  pointe  de  deux 
branches  croisées  d'olivier  an  naturel.  »  —  Sous  la  Restauration  et 
jusqu'à  sa  mort,  il  supprima  la  croix  de  la  Légion  d'honneur,  le 
firanc-quartier  et  la  toque  baronnale.  Ges  nouvelles  armoiries  se  bla- 
sonnent  :  d'azur,  à  deux  mortiers  d'argent,  posés  en  pal  ;  Vécu  en 
accolade  appuyé  sur  un  cartouche,  sommé  de  la  couronne  ducale 
entre  une  mitre  précieuse  à  dextre  et  une  crosse  d'or  à  senestre, 
timbré  d'un  chapeau  à  quatre  rangs  de  houppes  de  sinople  et  accom- 
pagné en  pointe  de  deux  branches  croisées  d'olivier  au  naturel* 


—  294  — 

laire  de  la  cathédrale  (1832),  il  fut  sacré  évèqae  d'An- 
gers, le  25  février  1840.  11  mounit  à  Bocé,  le  6  sep- 
tembre 1841 ,  et  fut  inhumé  dans  le  caiveau  des  ÉTéques, 
à  la  cathédrale. 

Armoiries  :  (Pazur,  à  une  crois  et  utu  ancre  d'argent 
m  sautoir.  Devise  :  SPE  NITIMVR.  L'écu  terminé  en 
accolade ,  est  timbré  d'une  couronne  ducale  entre  une 
mitre  précieuse  à  dextre  et  une  cros$e  d'or  à  senestre^ 
et  sommé  d'un  chapeau  de  sinople  à  quatre  rangs  de 
houppes. 

Guillaume  VIII  Laurent-Louis  Angëbault,  comte 
romain,  assistant  au  trône  pontifical,  chevalier  de 
l'Ordre  impérial  de  la  Légion  d'honneur.  -—  Né  à 
Rennes,  le  17  juin  1790,  il  était  chanoine  et  vicaire- 
général  du  diocèse  da  Nantes,  lorsqu'il  fut  élevé  au 
siège  d'Angers.  Il  reçut  la  consécration  épiscopale  dans 
sa  cathédrale,  le  10  août  1842  (1). 

Armoiries  :  d'azur  à  une  croix  d'argent,  et  une  ancre 
liée  de  même  en  sautoir ,  qui  est  de  la  communauté  de 
Saint-Gildas  (2).  Devise  :  IN  TE  CONFIDO.  L'écu,  ap- 
puyé sur  un  cartouche,  et  terminé  en  accolade,  6st 
sommé  d'une  couronne  ducale  entre  une  mitre  pré- 
cieuse à  dextre  et  une  crosse  d'or  en  dehors  à  senestre, 
timbré  d'un  chapeau  à  quatre  rangs  de  houppes  de 
sinople,  et  accompagné  en  pointe  d'une  croix  de  che- 


(1)  À  cette  occasion  a  été  frappée  une  double  médaille  d'argi&nt  et 
de  bronze,  dont  il  existe  deux  exemplaires  au  Musée  diocésain. 

(2)  Au  diocèse  de  Nantes.  —  ^fr  Ajigebault  fut  longtemps  supé- 
rieur et  directeur  de  cette  communauté,  qui  s'établit  sous  ses  ausr* 
pices. 


—  295  — 

valîer  de  la  Légion  d'hoûneur,  couronnée  de  sinople 
et  attachée  de  gueules  et  de  deux  branches  croisées 
d'olivier  au  naturel. 


X.  chanoine  Barbier  de  Montault, 


CominaDCleur  de  l*Ordre  du  Satnt-Sëpulcre. 


:     1     > 


LA  MAISON  DU  ROI 


A  SAUMUR. 


Le  dernier  inventaire  ou  classement  des  anciennes 
archives  de  la  Mairie  a  révélé  l'existence ,  à  Saumur, 
dans  la  rue  du  Paradis,  d*une  maison  connue,  jusqu'à 
la  fin  du  dernier  siècle,  sous  la  dénomination  ou  le 
vocable  de  Maison  du  Roi.  Elle  est  ainsi  désignée ,  à 
diverses  époques,  dans  les  rôles  des  impositions,  avant 
1789.  Cette  découverte  a  rendu  plus  certain  ce  qui 
n'était,  auparavant,  qu'une  conjecture,  appuyée,  il  est 
vrai,  sur  des  bases  sérieuses. 

Le  corps  de  bâtiment,  ainsi  qualifié  Logis  ou  Maison 
du  Roi,  existe  encore  en  entier,  ou  du  moins  en  sa 
partie  principale;  car,  il  va  sans  dire,  les  constructions 
accessoires,  les  cours,  jardins,  murs  d'enclos,  etc.,  ont 
disparu. 

Ce  vaste  hôtel  devait  se  composer  jadis  des  trois 
anciennes  maisons  ou  hôtels  de  MM.  Guérin,  Lieutaud, 
et  de  Brie,  seigneur  de  Fourneux.  Aujourd'hui,  malgré 


—  297  — 

cette  division,  suite  nécessaire  d'une  aliénation  par  par- 
ties, opérée  peut-être  en  l'année  4693,  les  finances  de 
l'État  étant  épuisées,  il  n'offre  encore  aux  regards 
qu'un  même  tout,  un  seul  corps,  même  régulier,  sur 
deux  ailes  latérales  unies  à  celle  du  milieu  que  coupe 
à  sa  moitié,  en  dehors,  suivant  la  mode  du  temps,  un 
svelte  et  haut  pavillon,  en  tour  à  cinq  pans  de  face, 
contenant  le  grand  escalier.  Tout  cet  édifice  semble,  en 
effet,  avoir  été  fait  ou  suivi ,  d'après  une  même  con- 
ception, sur  un  seul  plan.  L'architecture,  bien  que  de 
styles  variés  et  successifs,  ou  de  diverses  époques,  ne 
laisse  pas  d'être  appareillée,  autant  que  possible.  L'ac- 
cord des  parties,  celles,  si  l'on  veut,  rattachées  après 
coup  à  cet  hôtel  considérable,  est  sensible,  si  le  point 
d'observation  est  déterminé,  dans  la  rue,  du  pied  de 
celui  à  l'opposite  de  MM.  Lambert.  Toutefois,  cet  as- 
semblage de  bâtiments,  devenu  la  propriété  de  plu- 
sieurs, chacun  d'eux  en  tenant  encore  actuellement 
une  part,  n'était,  il  y  a  moins  de  deux  siècles,  qu'une 
partie  avons-nous  dit,  ce  qui  est  bien  à  croire ,  quoique 
la  plus  importante  et  la  plus  noble,  de  cet  ancien  do- 
maine royal. 

C'est  dans  cette  enceinte  que  maintes  fois,  pendant 
les  troubles  de  l'État  et  les  guerres  civiles ,  des  rois 
et  des  princesses  vinrent  prendre  quelque  repos. 

C'est  dans  ce  modeste  manoir,  fixé  au  centre  de 
notre  ville,  que  se  plurent  à  séjourner  les  rois  Henri  IV, 
notamment  en  1589  et  en  1595  pendant  plusieurs  jours, 
sa  sœur,  Catherine  de  Navarre,  demeurant  alors  à  Sau- 
mur:  Louis  XIII,  en  1614,  récemment  déclaré  majeur, 
et  en  1628,  victorieux  et  de  retour  de  la  Rochelle.  La 
BIP.  ARC.  ii 


-  »8  — 

reine  Marie  de  Médicis  en  1614,  la  même  en  4621,  et 
après  elle  Anne  d'Autriche  en  1638;  la  même  en  1652 
avec  8oa  fils  L^uis  XIY,  et  Mazarin ,  leur  dévoué  mi- 
nistre* 

A  cette  dernière  époque,  lors  des  guerres  des  Princes 
ou  de  la  Fronde^  Anne  d'Autriche  el  son  jeune  roi  sé- 
journèrent là  pendant  cinq  semaines.  La  cour  les  y 
suivit;  car  à  Sftomur»  la  majeure  partie  des  habitants 
et  les  magistrats  restaient  fidèles  à  la  cause  royale. 
Avec  de  tels  hôtes»  l'auguste  et  mince  palais  de  la  rue 
du  Paradis ,  fut  le  centre  un  moment  de  la  politique 
et  des  plus  hautes. affaires  du  temps.  On  y  vit  affluer 
de  tous  les  côtés  les  princes  et  les  seigneurs,  les  gens 
de  distinction  ou  de  marque  de  toute  espèce.  Le  vieux 
garderdes-^sceaui^  Châteauneuf,  disgracié  ou  supplanté, 
y  vint  préhdre  congé  du  roi  et  de  la  reine.  Le  vicomte 
de  Turenne ,  quelque  temps  infidèle ,  et  le  ministre  le 
Tellier,  erilés,  y  furent  reçus  avec  bienveillance  et  ren- 
trèrent dans  les  bonneS  grâces  de  Leurs  Majestés  et  de 
leur  ministre.  C'est  dans  l'une  des  salles  royales  de  ce 
petit  palais  que  Mfi^  Henri  Amauld,  chassé  indigne- 
ment d'Angers,  avec  le  Présidial  et  autres  suspects  d'at- 
tachement à  leurs  devoirs,  ensemble  proscrits  et  réfu- 
giés à  Saumur,  où  Us  trouvèrent  d'abondants  secours» 
vint  crier  merci  pour  la  ville  rebelle.  On  sait,  qu'il  fqt 
assez  heureux  pour  obtenir^  le  lendemain,  par  ses  der- 
nières paroles  en  communiant  la. reine,  le  pardon  que 
ses  entrailles  émues  avaient  sollicité  si  vivement  la  veille, 
sans  succès. 

Si  les  édifices  ont  comme  les  hommes  leur  joi)r.  d'é- 
clat et  de  prospérité^  selon  l'expressic^i  dC'M*  Bodin, 


-  9ÔÔ  — 

quel  airtrè,  dans  cettie  Tîlle,  est  côtiîpàiràbîë  â  Iceluî-cî, 
et  peut  offrir  àùx  regards  curieux  tin  côté  j^lus'blrîllaht? 
A  quel  huïre,  nlêrte  dans  toute  là  pWviùèé',  ée'ratta- 
cheroUt  des  souvenirs  plus  iritérfessaiits  et  plus  •  hono- 
rables, si  ces  récits  sont  exacts?  .    u        * 

Combien  donc  il  serait  regrettable  que  ce  triônuitient 
historique,  assez  ignoré  jusqti'ici',  ^is  aii  cœur  de  la 
ville,  seul  vestige  peut-être  et  dernier ^tëttioin  â'un 
passé  si  glorieux  pour  elle,  tombât  dans  tm  oublr  corn- 
plet  et  fût  délaissé  totalement  par  indîff6re!l(^e?Il  vient 
d'échoir  par  achat,  par  parties  encore,  à' de  nouveaux 
possesseurs;  il  court  risque  par  conséquent  à  toute 
heure  d'être  dénaturé  et  détruit  peut-être,  au  moins 
en  Tune  ou  Tautre  de  ses  parties  principales  ou  inté- 
grantes. Ne  conviendrait-il  pas  qu'avant  tout,  et  sans 
délai ,  pour  conserver  ce  monument  d'un  passé  dont 
bon  noriibre  de  villes  nous  envieraient  là  gloire ,  une 
main  habile  s'exerçât,  'pendant  qu'il  en  est  temps' en- 
core, à  en  faire,  sinon  un  dessin  fini,  au  moins  une 
esquisse  exacte,  qui  serait  toujours  bien  placée  dans 
les  cartons  de  la  Mairie  et  satisferait ,  au  besoiii ,  l'ar- 
chéologue, tout  autant,  au  moins,  que  les  dessins  d'autres 
maisons  pailiculiéres  de  la  ville,  dignes  elles-mêmes  de 
tels  soins ,  et  en  si  grand  nombre  qu'on  les  rencontre 
presqu'à  chaque  pas,  au  rapport  des  savants  tnelmfbres 
du  Congrès  de  1862. 

Oè  petit  '  Louvre ,  car  qtf  étaient  les  Louvres ,  dans 
Paris  même,  avant  les  reines 'florentines,  Catherine  left 
Marie  de  Médicis?  oflre  deux  entrées  :  l'une  au  nord,  et 
la  principale,  rue  du  Paradis;  Vautre,  moindre,  mais 
qui  ne  laisse  pas  d'avoir  son  importance,  au  sud,  rue 


—  800  — 

Pavée,  n  présente  par  conséquent  deux  façades  ;  la  se- 
conde est  sur  le  plan  à  peu  près  de  la  première,  à  sa- 
voir, sur  une  aile  avec  deux  en  retour,  et  pavillon  éga- 
lement au  centre ,  sauf  qqelques  inégalités  légèrement 
apparentes. 

Que  le  crayon,  essaie,  sans  retard ,  s'il  se  peut,  de 
rendre  par  des  traits  précis  l'élévation  de  ces  deux 
façades,  œuvre  soignée,  ni  d'une  même  époque,  ni 
du  même  style.  La  seconde  se  caractérise  surtout  par 
le  rapprochement  et  la  multiplicité  de  ses  fenêtres 
grandes  et  petites,  la  plupart  plein-ceintre ,  ornées 
toutes  à  plaisir,  de  figurines  en  saillie,  formant  clef^ 
et  d'un  large  chambranle  avec  fortes  moulures.  La 
porte  du  bâtiment  prise  ras  terre  au  milieu  du  pavil- 
lon, belle  de  simplicité,  n'a  pour  décor  qu'une  mou- 
lure rentrante,  légèrement  renflée  vers  le  milieu,  en- 
taillée au  nu  du  mur  sur  les  angles  de  dehors,  sur 
environ  30  centimètres  de  largeur  et  15  de  profon- 
deur. 

Nous  ajouterons  que  ces  constructions,  restaurations 
et  additions  des  xv®,  xvi«  et  xvii©  siècles ,  sont  entées, 
indubitablement,  quelques  restes  antiques  en  font  foi, 
sur  d'autres  antérieures  à  elles  de  beaucoup. 

On  comprend  aisément  qu'il  serait  besoin  ici  d'un 
archéologue  plus  expert  que  nous  pour  donner  conve- 
nablement ces  détails  architectoniques  et  faire  apprér 
cier  complètement  la  valeur  de  ce  petit  palais,  si  inté- 
ressant sous  tous  les  rapports.  J.  B. 

(Extrait  de  VÉcko  Saumurois), 


CHRONIQUE. 


■Ibliogriiplile* 

Essai  sur  les  monnaies  des  ^NamnèteSy  par  M.  F.  Paren* 

teau.  —  Nantes,  A.  Guéraud  1863. 

M.  Renault,  employé  de  la  poste  d'Angers,  a  eu  l'o- 
bligeance de  nous  communiquer  cette  curieuse  brochure 
renfermant  vingt-quatre  pages  très-substantielles  et 
trois  planches  de  monnaies  celtiques. 

Nous  l'avons  lue  avec  un  vif  intérêt  et  bien  que  nous 
ne  soyons  pas  toujours  du  niéme  avis  que  l'auteur, 
nous  n'en  rendons  pas  moins  justice  à  ses  solides  tra- 
vaux. Qu'il  nous  soit  permis  de  les  analyser,  ce  sera  la 
meilleure  preuve  du  grand  cas  que  nous  eh  taisons. 

Dans  l'œuvre  de  M.  Parenteau,  point  de  phrases  inu- 
tiles, il  va  droit  au  but,  ce  n'est  pas  son  moindre 
mérite. 

Il  dit  vrai ,  en  écrivant  que  la  numismatique  de  la 
Bretagne  armoricaine  est  la  plus  riche  de  la  Gaule  ; 
que  voisines  de  l'Océan,  les  peuplades  réuàies  par  le 
lien  de  la  Confédération  armoricaine,  n'avaient  pour 
limites  géographiques  que  la  Seine  et  la  Gironde. 

Mais  il  entend  ne  s'occuper  que  des  Namnètes 
(Nantais)  et  de  leurs  proches  voisins.  L'Anjou  y  trou- 
vera donc  quelque  peu  son  compte. 


—  302  — 

s 

Il  consacre  quelques  lignes  à  ces  objets  connus  sous 
le  nom  de  Rouelles  de  plomb.  On  appelle  ainsi  de  petits 
anneaux  striés  sur  leurs  bords  ou  losanges  qoi  se 
trouvent  généralement  parmi  des  débris  de  haute  an- 
tiquité. La  plupart  des  numismates  y  croient  recon- 
naître les  essais  rudimentaires  du  monnayage  gaulois. 

M.  Parenteau  proteste  contre  cette  attribution.  Pour 
lui  ces  rouelles  sont  dos.  pesom  de  fuseaux  :  c  De  nos 
x>  jours,  dit-il,  on  en  fabrique  d'identiques  à  Ploërmel, 
»  et  à  Josselin  (liorbîhan).  Elles  se  ¥endent  à  naisoa  de 
»  deux  pour  un  sou  aux  femmes  de  la  campagne,  qui 
»  s'en  servent  comme  dans  l'antiquité  pour  donner  du 
>  poids  à  leurs  fuseaux.  » 

Quant  aux  rouelles  de  bronze,  sortes  de  petites  roues 
évidées  ayant  une  croix  inscrite  dans  un  cercle  y  formée 
par  quatre  rations j  il  les  rejette  égalem^t  comme  mon- 
naies et  les  accepte  comme  des  amulettes  gauloises. 

Ge  qu'il  dit  de  ces  pesons  traditionnels  me  parait  con- 
cluant, \e&.amtdettes  ne  me  satisfont  pas  autant. 

De  même  que  tous  les  archéologues^  il  admet  l'invar- 
sion  du  type  grec  dans  le  monnayage  ceHique.  C'ëst^ 
dit-il^  surtout  après,  le  pillage  du  temple  de  Delphes 
(278  avant  J  -G.)  que  les  statères  d'or  de  Philippeide 
Macédoine  se  répandirent  dans  nos  cootrées  et  furent 
imites  d'abord  servilement  et  ensuite  d'une  façon 
grossière.  U  en  fut  de«  même  de  l'imitation  que  les  Gau- 
lois firent  sur  or,  des  drachmes  d'argent  d'Alexandre^ 
le-Grand. de  Macédoine.  . 

Plus  tafrd  les  demers  romains  desiamilles  consuJaires 
servirent  d^  type  àlaMmonnàieide-nos)  ayeuK^  tout;ce)a 
est  désormais  incontestable.  P;assons. 


—  383  — 

Dans  la  planche  l^^  no  4,  on  voit  sur  une  médaille 
une  branche  de  houe,  à  l'occasion  de  laqmeUe  iFattleur 
nous  apprend  que  cet  a^rbrisseau  était  cbee  nos  pares 
rembléme  de  l'hospitaliié.  Laissons  le  parler  :  c  De 
]»  nos  jours  on  s'en  sort  encore  pour  indiquer  les  aurr 
»  berges  dans  la  campagne  ;  eC  les  m^itatjioiis  aux  noces 
1»  dans  le  Bocage  du  Poftou*,  se  font  avec  une  branche 
»  couverte  de  livrées  au»  cQulemrs  é(^)alantes.  Quand 
»  c'est,  une  braiiche  dd  laurier,  le  ino«Dbre  des  feuilles 
i>  se  compte  :  atftant  de  feuiUet;,  autant  de  personnes 
»  invitées;  libi?e  au  maître  «du  logis,  «de  choisir  parmi 
]>  les  siens,  ce  qqi  e$t,$uÂyant  nous  d'ufte  délicatesse 
»  extrême.  Mais  avec  une  branobe  >de  houx  :  venez-y 
»  tous.  Je  ne  vois  aticnn  inconvénient  à  faire  remonter 
»  cette  coutume  à  l'époque  celtique  ;  puisse  l'extrême 
»  civilisation  qui  s'avance,  ne  pas  nous  rendre,  plus 
9  impolis  et  moins  hospitaliers  que.  nos  ayenx.  > 

Sur  une  médaille  planche  1  n<><5/M.  Parenteau  'feit 
remarquer  un  cavalier  nu,  sans  selle  ni  bride,  maia 
dont  le  pied  gauche  est  armé  d'un  éperonà  une  seule 
pointe  aigiie. 

11  cite  à  ce  sujet  divers  éperons  qu'il  a  trouvés  lui- 
méme  dans  les  tombes  gaulaisas  de  Poozauges  ;  puis  il 
£^oute  que  César  dit  positivement  que  le  chef  Atrebate 
Cominus  poussait  son  coursier  d&  l'éperon  lorsqu'il 
traversa  de  sa  lan^  la  cuisse  de  Quadratus  (Comm., 
liv.  VIII,  page  190). 

Passant  à  la  médaille  pi.  I,  n»  7,  trouvée  à  Segora, 
M.  Parenteau  nous  parle  du  cheval  à  tête  d'homme 
(androoéphale) ,  qu'il  rapproche  ing^eusement  des 
^hiox  de  l'Egypte  et  des  taureaux  de  Ninive,  tous  à 


—  304   - 

tête  bnmaine,  preuve  de  Tinfiltration  des  idées  asia- 
tiques dans  la  Gaule. 

La  médaille  pK  I,  v9  10,  également  découverte  à  Se- 
gora,  présente  deux  croix  à  branches  égales.  «  Dans  la 
»  croix,  j'ai  toujours  cru,  dit-il,  à  un  emblème  du 
»  mouvement;  c'est  la  roue  solaire  réduite  à  sa  plus 

>  simple  expression,  Taxe  ^t  quatre  rayons.  On  peut  y 
»  voir  l'alternance  des  saisons.  > 

A  l'occasion  de  la  roue  solaire ,  il  cite  et  publie  le 
disque  d'argent  de  la  découverte  de  N.  D.  d'Allençon 
prés'Brissac  (Haine  et  Loire),  passé  de  la  collection 
Grille  d'Angers,  au  musée  du  Louvre,  «  ce  disque  re- 
»  présente  Apollon-Moneta,  avec  une  roue  à  ses  pieds. 

>  On  la  retrouve  au  revers  des  oboles  émises  par  la 
»  colonie  grecque  de  Marseille,  enfin  elle  sert  de  contre- 
»  marque  aux  monnaies  romaines  trouvées  à  Rennes, 

>  dans  la  Vilaine.  > 

Un  slatère,  pi.  I,  n®  H,  a  cela  d'intcres$ant  qu'il  fut 
trouvé  dans  la  commune  de  Derval  (Loire-Inférieure), 
au  pied  d'un  menhir,  assois  profondément  en  terre. 
Cette  pièce  représente  au  droit  la  tète  d'Apollon  avec 
cordons  perlés  et  le  sus  gaUicus  placé  sur  la  tète. 

Sur  sa  planche  II,  M.  Parenteau  reproduit  un  type 
attribué  jusqu'à  lui  aux  Angevins,  mais  qu'il  croit  de- 
voir restituer  aux  Namnétes.  A  son  sens ,  les  cent  vingt 
statères  d'or  découverts  en  janvier  1860,  dans  un  champ 
de  choux  de  la  paroisse  de  Candé  (Maine  et  Loire),  se 
rattachent  à  la  numismatique  nantaise.  Ce  type  est 
celui-ci  : 

D.  Tête  radiée  d'Apollon,  profil  à  droite,  cordons 
perlés  ornés  de  quatre  petites  têtes,  sous  le  menton 
mors  de  bride  articulé. 


^  305  — 

B|.  Gbeval.galopant  à  droite;  aurdesaas  Tauriga,  la 
main  droite  élevée,  sous  le  cheval  génie  debout  les 
bras- étendus. 

Les  preuves  apportées  par  JM.  Parenteau  oe  me  pa- 
raissent pas  assez  concluantes  pour  déposséder  l'Anjou 
de  ce  type  primitif;  attendons. 

Il  publie,  planche  III,  n®  2,  un  statére  d'or  également 
trouvé  à  Candé  qu'il  qualifie  de  c  pièce  de  la  dernière 
9  époque  contemporaine  des  statères  bien  connus  au 
»  nom  et  à  la  tête  de  Yercingétorix,  et  circulant  au  mo- 
»  ment  de  la  conquête.  » 

Voici  la  description  qu'il  en  fait  : 

<  D.  Tête  à  cbeVeux  courts,  cordons  perlés  rattachant 
les  quatre  têtes  bien  indiquées, 

D  %  Cheval  en  course  à  droite,  dessous.  le  génie  aux 
bras  étendus.  > 

J'avoue  que  la  tête  de  Yercingétorix  me  parait  ici 
très  problématique. 

Si  M.  Parenteau  nous  enlève  le  type  du  mors  et  du 
génie  debout,  il  nous  en  donne  un  que  nous  ne  connais- 
sions pas,  planche  H,  n»  9.  Il  le  décrit  ainsi  :  «  Tête 
9  du  Dieu  soleil  tournée  à  droite,  ornements  en  S  à  la 
»  circonférence.  fi|.  Cheval  androcéphale  monté  par  un 
»  cavalier  barbare  galopant  à  droite  :  au-dessous  un 
9  hippocampe  (poisson  dit  cheval  marin).  >  Je  ne  refuse 
point  la  compensation,  mais  cet  hippocampe,  il  me 
semble ,  conviendrait  mieux  à  une  peuplade  celtique 
des  bords  de  la  mer. 

M.  Parenteau  termine  son  intéressante  brochure,  en 
citant  un  passage  de  Ptolémée  d'Alexandrie,  qui  nomme 
les  Andicavi  Çlvé'uixovcLi  et  qui  les  place  à  l'orient  des 


—  806  — 

Samnitm  ou  pltHôt  ces  derniers  ati  âud-one^t  des  Ande- 
gati. 

Catalogue  des  manuscrits  de  la  bibliothèque  d^ Angers. 

M.  Leinarchand,  bibliothécaire-adjoint,  vient  de  pu- 
blier sous  les  auspices  du  Conseil  municipal  le  catalogue 
des  manuscrits  de  la  bibliothèque  d'Angers;  nous  en- 
tretiendrons nos  lecteurs  de  cette  très-remarquable 
publication. 

Des  anciennes  constructions  militaires. 

Nous  annonçons  un  curieux  mémoire,  para  récem- 
ment à  Saumtrr  à  Timprinierie  de  Paul  Godet.  Cette 
brochure  de  47  pages,  traite  des  anciennes  constructions 
militaire^  connues  sous  le  nom  de  forts  vitrifiés.  M.  F^ 
Prévost,  capitaine  du  génie,  en  est  l'auteur;  prochai- 
nement nous  donnerons  l'amaiyse  de  cette  publication 
pleine  d'intérêt  par  ses  vues  nouvelles  sur  un  sujet  peu 
connu  et  jusqu'à  cette  heure  mal  étudié. 

IVimiisiiuitiqae^ 

Monnaie  celtique  (Commune  du  Pin-en^Mauges). 

M.  Trtstan'-Martin  s'est  récemment  procuré  un  quart 
de  statëre  en  or;  du  poids  de  deux  grammes  »  décou- 
vert sur  là  commune  du  Pin>-ett*Mauges.  Cette  pièce 
celtique  eet  fruste  au  droit,  mais  ^m  revers  se  trouve 
parfaitement  accusé.  Il  représente  un  personnage  de- 
bout se  dirigeant  à  gauche  et  tenant  dans  sa  main 
droite  un  lituus  ou  bâton  augurai,  dans  la  gauche  une 
masse  ou  marteau  (forme  d'ancre);  devant  lui  dane  le 
champ,  paraît  la  I^ttre  sX.  La  tête  semble  nue,  sauf  le 


-mi  — 

coté  de  Yocdtpui  d'où  sort  une' tongue  méèhe  de  ohe- 
veux  flottant  horizontalement,  msns  un  peu  relevée  en 
S  à  son  ettréttiité  :  peut-être  est-oe  aussi  un  ornement 
en  pl«mes  ou  en  étoffe.  Un  grenetis  orne  la  oirconfé* 
renée  de  cette  monnaie.  Ce  n'est  pas  la  première  mé- 
daille de  ce  type  ique  l'on  a  découverte  dans  l'ârcon- 
dissement  dé  Cholet,  nous  éerit  Ml  Tristan. 

M.  F.  Paorenteau  dans  son  eâsai  sur  la  monnaie  des 
Namnètesi  (])Cantes^  Ga<éraud,  1863)  n'hésite  pas  à  clas- 
ser ce  type  parmi  les  pièces  armoricaines.  Il  en  a  re- 
(MToduit  deux  exemplaires  sur  sa  planche  II  n^  6  et  7 
qui  ne  diffèrent  entr'eux  que  par  la  lettre  i  du  n9  6 
qui  se  change  en  1  (sigma)  dans  le  n<>  7.  Le  n®  6  pro- 
vient d'Ancenis,  le  n*  7  de  Cholet. 

M.  Parenteau  nous  apprend  encore  qu'une  pièce  du 
même  genre  a  été  trouvée  à  Candé.  Qu'il  me  permette 
de  lui  signaler  celle  de  M.  Tristan,  lequel  a  bien  voulu 
nous  en  adresiser  un  dessin  fait  par  notre  collègue, 
M.  Gaston  de  Cholet. 

Cinq  exemplaires  de  ce  type  ont  été  les  seuls  décou- 
verts depuis  dix  années,  assure  M,  Parenteau  ;  celui  de 
M.  Tristan  fera  le  sixième.  C'est  en  signaler  la  rareté. 

M.  Parenteau  se  livre  à  une  intéressante  dissertation 
historique  sur  l'origine  historique  de  ce  type.  «  Me 
D  sera-t-il  permis,  écrit-il,  de  l'attribuer  aux  Saranites 
»  des  bords  de  la  Loire ,  â  cette  colonie  italiote  fixée 
»  dans  nos  contrées,  mentionnée  par  Strabon  (1)  et 
^  par   Ptolémée;   aux   Samnites    qui  possédaient  les 

(i)  Strabon^  lih.  iv,  o.  iv. 


—  808  — 

1  îles  de  rOcéan ,  touchaient  d'un  côté  aux  Vénètes  et 
»  de  Fautre  aux  Andegavil 

»  Les  Samnites  italiotes  (1),  alliés  aux  Gaulois,  firent 
»  souvent  trembler  les  Romains.  Soumis  par  ceux-ci 
»  vers  l'an  37S  avant  J.-G. ,  leur  émigration  partielle 
»  en  Gaule,  peut  dater  de  leur  soumission.  > 

Puis  il  ajoute  :  c  Le  dieu  qui  est  représenté  sur  la 
»  médaille  doit  être  Hercule  ou  Vulcain,  peut-être  le 

>  DEO  VOLKANO  de  nos  inscriptions  de  Nantes  d'ori- 
9  gine  étrusque  ;  on  sait  qu'il  est  toujours  armé  de  son 

>  marteau.  Le^t^ma  est  l'initiale  des  Samnites  comme 
9  le  MA  sur  les  oboles  de  Marseille C'est  un  fait 

>  anormal  qu'un  essai  d'épigraphie  dans  nos  contrées 
»  plus  de  deux  siècles  avant  la  conquête  romaine  de 
»  l'Armorique,  et  chose  digne  d'être  remarquée.  » 

Tout  cela  est  fort  bien  dit  assurément,  et  sans  vouloir 
détruire  les  conjectures  de  M.  Parenteau,  une  seule 
chose  me  fait  encore  hésiter  à  les  accueillir ,  en  effet 
sur  la  monnaie  de  M.  Tristan-Martin  et  même  sur  celle 
publiée  par  l'auteur,  planche  II  n®  6,  j'aperçois  un  X 
parfaitement  accusé  et  non  pas  un  sigma.  Or  cette  lettre 
X  ne  peut  être  l'initiale  des  Samnites.  Ensuite  est-il 
bien  vrai  que  Segora  (Fief-Sauvin)  et  Ancenis  aient  été 
des  villes  l'une  ou  l'autre  capitale  des  Samnites  en  nos 
contrées?  Je  ne  vais  pas  assurément  jusqu'à  le  nier, 
mais  je  ne  vois  point  jusqu'ici  de  bonnes  raisons  pour 
prouver  l'affirmative. 

Adhuc  sub  judice  lis  est. 

V.  G.-F. 

(I)  Les  Samnites  habitaient  le  Samnium,  les  Abruzzes. 


COMPTÉ-RENDU 


DES  SÉANCES  DE   LÀ  COMMISSION  ARCHÉOLOGIQUE. 


Manee  do  4  Février  i86S. 

Pré&idence   de  M.   Godard- Faultrier, 

Des  travaux  d'un  réel  intérêt,  et  qui  n'ont  pas  trouvé 
place  dans  le  Répertoire,  ayant  été  lus  dans  cette  séance, 
nous  croyons  devoir  donner  à  cet  extrait  du  procès- 
verbal,  des  proportions  un  peu  plus  considérables  qu'à 
l'ordinaire. 

Le  premier  de  ces  travaux,  est  un  rapport  de  M.  Go- 
dard sur  la  découverte  de  cercueils  en  plomb  à  Saint- 
Jean-des-Mauvrets.  A  propos  de  Saint-Jean-des-Mau- 
vrets,  M.  le  docteur  Hunault  parle  des  craintes  qui  ont 
été  manifestées  sur  l'insuffisance  des  fonds  dont  on 
avait  à  disposer  pour  les  travaux  de  l'église.  M.  le  Pré- 
sident affirme  que  la  situation  de  cette  entreprise  a  été 
exposée  au  Ministre,  et  que  l'on  agira  suivant  la  réponse 
que  l'on  recevra. 

Quant  aux  cinq  cercueils,  objet  du  rapport  de 
M.  Godard,  leur  découverte  avait  d'abord  donné  lieu  à 
diverses  complications  que  l'on  avait  dû  soumettre  à  la 
haute  appréciation  de  M.  le  Préfet. 

M.  le  Président  donne  à  la  commission  la  description 


—  310  — 

de  l'église,  de  la  crypte  qui  recouvrait  ces  tombeaux, 
et  des  cercueils  eux-mêmes  dont  il  fait  circuler  un 
dessin  de  M.  Duvêtre,  Sauf  celui  désigné  au  n9  \  qui 
a  l'aspect  ordinaire,  ils  affectent  dans  leur  forme,  au- 
dessus  des  épaulées ,  une.  partie  sphéiique  pour  la  tête, 
et  d'après  un  assez  grand  nombre  de  rapprochements 
très-curieux,  recueillis  avec  beaucoup  de  soin  par 
M.  Godard,  ils  appartiendraient  à  la  famille  de  François 
de  ChâteaubrianU  doyen  de  la  .oatbédr^  d'Angers  au 
XVI6  siècle.  Un  fragment  de  blason  placé  dans  l'église 
de  Saint-Jean-des-Mauvrets ,  lui  donne  même  lieu  de 
penser  que  cette  famille  est  la  même  que  la  famille 
du  grand  homme  qui  a  tant  illustré  par  son  fgénie  le 
nom  de  Ghâteaubriant. 

M.  Godard  donne  dans  son  râfpport  de  nombreux 
détails  sur  les  objets  contenus  dans  ces  tombes,  sur 
l'époque  de  chacune  d'elles,  sur  leur  orientation,  sur 
la  discussion  dont  leur  emplacement  fut  de  nouveau 
l'objet,  et  dont  la  solution  est  subordonnée  au  consen- 
tement définitif  de  M.  du  Rou^ay  de  les  recevoir  dans 
sa  chapelle  de  N.  D.  de  Lorette,  enfin  sur  l'archéo- 
logie du  caveau  qui  les  renfermait. 

iOn  passe  au  rapport  de  MM.  Simon  et  Godard  sur 
les  peintures  murales  découvertes  dernièrement  dans 
l'église  de  Saint-Pieixe  de  Ghemillé,  représentées  dans 
un  dessin  de  M.  Gaston  de  Gholet  exposé  sur  le  bureau; 
Cette  découverte  dont  M.  Simon,  architecte,  avait  donné 
de  suite  avis  à  Mi  Godard»  fut  l'objet  d'une  correspond 
dance  entre  euxi  Ose  partie  de  ces  peiatqres  occupe  la 
seconde  travée  du  choeur*;  M.  Simont,  apr^s  <<rfoiri'fait 
tomber  une  couche  épaisse  de  badigeon  ^  aperçut  ces 


—  sa  — 

peintures  dont  le  sujet  est  tiré  de  rApcwalypsjç,  eft  elles 
remontent  suivant  sa  première  appréciation  au  xip  siècle. 
C'est  Fagneau,  les  quatre  animaux  et  les  vingt-quatre 
vieillards  couronnés,  barbus  et  revêtus  de  riches  orne- 
ments, avec  des  versets  tirés  de  T apocalypse;  ailleurs 
se  trouveraient  les  quatre  fleuves  du  paradis  terrestre. 
L'intention  du  peintre,  comme  le  dit  M^  Simon ,  aurait 
été  d'indiquer  que  l'Éden  perdu  par  le  péché ,  aurait 
été  racheté  par  l'Agneau  immolé  sur  la  croix.  Ces.  pein- 
tures ,  la  plupart  exécutées  à  la  chau;x,  ont  été:  bien 
ternies  et  par  le  temps  et  par  le  badigeon.  M.  Simon 
signale  encore  quelques  allégories  à  l'entrée  du  choeur. 

M.  Dainville  ayant  bien  voulu  se  transporter  sur  les 
lieux,  jugea  d'accord  avec  M.  le  curé  de  Saint-^Pierre 
de  Chemillé  et  MM.  Simon  et  Gaston,  que  ces  peintures 
avaient  un  grand  intérêt  et  qu'on  devrait  prendre  les 
mesures  nécessaires  pour  leur  conservation. 

M.  Leroarcband  est  prié  de  donner  lecture  d'un 
rapport  syr  une  brochure  de  M.  Jéban  (de  Saint-Cla- 
vien)  ayant  pour  titre  :  Carnac  :  fouilles  et  nouvelles  dé f 
couvertes  dans  la  butte  Saint-Michel  y  brochure  dont 
Tauteur  lui  a  fait  hommage.  La  brochure  ne  renferme 
pas  de  description.  L'auteur  ne  parle  que  du  tumulus. 
On  y  a  découvert  un  dolmen  renfermait  des  haches  et 
objets  divers.  Deux  opinions  étaient  en  présep,çe  sur 
l'origine  du  mot  Carnac.  Suivant  M,  clçMVillemar<ïtté, 
il  signifierait  monument  de  pierre;  d'autres  le  font 
venir  de  caro  carnis  ;  M»  Jehan  (de  Saint-Clavien)  ne 
partage  ni  l'une  ni  l'autre  de  ces  interprétations.  Dans 
la  langue  celtique  on  ne  trouve  pas  cette  expression, 
mais  dans  la  langue  galloise ,  on  la  rencontre  dans  le 


—  312  — 

sens  de  hauteur ,  éminence,  élévation  en  Phonneur  du 
soleiL  M.  Lemarchand  se  prononce  pour  Tétymologie 
gallique.  M.  Godard  appuie  cette  opinion  en  observant 
que  les  peulvans  sont  des  espèces  d'obélisques,  et  que 
les  obélisques  sont  des  monuments  élevés  en  l'honneur 
du  soleiL 

M.  le  docteur  Hunault,  également  à  l'appui  de  cette 
opinion,  cite  une  remarque  très-frappante  que  M.  Pari- 
set,  enfant  lui-même  de  la  Bretagne,  lui  faisait  un  jour 
à  propos  du  mot  Carnac.  M.  Pariset  a  constaté  dans  son 
voyage  en  Egypte  que  les  lieux  qui  portent  ce  nom 
sont  précisément  ceux  où  furent  ouvertes  les  carrières 
d'où  furent  tirés  les  obélisques.  M.  Hunault  propose 
de  communiquer  sur  ce  curieux  rapprochement  les 
notes  qu'il  possède,  ce  que  la  Commission  accepte  avec 
reconnaissance. 

L'ordre  du  jour  appelle  enfin  une  notice  sur  le  châ- 
teau et  la  commune  de  Brezé,  par  M.  Louis  Raimbault, 
notice  qui  a  été  reproduite  dans  le  Répertoire  archéo- 
logique. 

M.  le  Président  appelle  l'attention  de  la  réunion  gùr 
des  estampages  communiqués  par  M.  Chapeau,  sculp- 
teur, et  représentant  des  sculptures  de  meubles  des 
xve  et  xvie  siècles,  d'une  grande  finesse  et  d'une  grande 
élégance. 

Puis  la  séance  est  levée. 

Le  Secrétaire  de  la  Commission , 
Paul  Lachèse. 


c>a_-. 


CQJSDITIONS  DE  L'ABONNEMENT. 


II. 


Le  Répertoire  Archéologique  de  l'Anjou  parait  le  l*"'  de 
chaque  mois,  par  livraisons  chacune  de  deux  feuilles  d'im- 
pression. 

Le  prix  de  l'abonnement,  pour  les  personnes  ne  faisant  pas 
partie  de  la  Commission  Archéologique,  est  de  5  francs  par  an 
pour  Angers  et  de  6  francs  par  la  poste. 

Les  abonnements  sont  reçus  chez  tous  les  libraires  du 
département. 


.  t.S 


SOCIÉTÉ   IMPÉRIALE   D'AGRICDLTDRE  ,  SCIENCES   ET   ARTS 

ANCIENNE  ACADÉHIE  D'ANGERS. 


COIIISSIOI  iRGIËOLOGIQUE 


DU  DEPARTEMENT 


y  A4  3 

DE  MAINE  ET  LOIRE 


RÉPERTOIRE  iROHlOLOGlQIIE 


DE    I/ANJOU 


Année  t86S.  —  AoAt- Septembre. 


ANGERS 

IMPRIMERIE    DE    GOSNIER    ET    LACHÉSE 
Chaussée  Saint-Pierre ,  13 

1863 


•v>^« 


£TUDE  HiGIOGRAPHKIliE 


SUR 


ROBERT  D'ARBRISSEL 


FONDATEUR  DE  L»ORDRE  DE  FONTEVRAUD    * 


«  De  manifestis  nobis  judicare  permittitur; 
de  manifestis  ergo  jadicemus.  » 

(S.  Adgobtin.  Lib.  II,  cap.  x,  De  Serm.  Dom,  in  monte,) 


Je  n'écris  point  la  vie  de  Robert  d'Arbrissel ,  déjà 
tant  de  fois  traitée  et  trop  connue  pour  être  l'objet 
d'une  nouvelle  étude. 

Je  ne  veux  pas  davantage  rédiger  ses  Actes;  ce  serait 
un  travail  trop  long,  peut-être  même  au-dessus  de  mes 
forces ,  et  d'ailleurs  déjà  fait  en  partie  par  les  BoUan- 
distes. 

J'ai  seulement  Tintention  de  grouper  ici  quelques 
notes  hagiographiques^  qui  me  sont  personnelles  et  de 
dire,  parce  que  j'en  ai  été  chargé,  tout  ce  que  j'ai  vu 
et  recueilli  au  sujet  de  ce  saint  personnage. 

REP.   ARC. 


u>\\ 


—  314  — 

En  effet,  c'est  seulement  sur  les  instances  des  dames 
Fontevristes  de  Chemillé ,  et  avec  'l'autorisation  des 
Révérendissimes  Évêques  d'Angers  et  de  Poitiers,  qui 
daignèrent  m'honorer  d'un  mandat  spécial,  que  j'ai 
entrepris  de  poursuivre  auprès  du  Saint-Siège  la  cause 
depuis  longtemps  pendante  du  pieux  fondateur  de  l'ab- 
baye de  Fontevraud. 

Il  s'agissait,  pour  préparer  une  solution  et  amener 
un  décret  de  béatification  équipollente,  de  prouver  que, 
de  temps  immémorial,  Robert  d'Arbrissel  avait  été 
l'objet  d'un  culte  public,  tel  que  celui  dont  on  honore 
les  saints,  solennellement  canonisés  par  l'Eglise. 

Malheureusement,  toutes  mes  recherches  ont  abouti 
à  ce  résultat  inattendu,  que  la  cause  se  pose  d'elle- 
même  dans  une  situation  si  exceptionnelle  que,  pour 
en  éluder  les  conséquences,  il  serait  nécessaire  d'in- 
voquer la  faveur  du  Souverain  Pontife.  Car,  si  l'on  fait 
valoir  les  arguments  fournis  par  le  culte,  l'adversaire 
pourra  toujours  opposer  des  arguments  plus  forts  de 
non-culte,  et  le  non-culte  lui-même  devient  une  preuve 
insuffisante  et  inutile,  alors  qu'il  existe  des  faits  cer- 
tains de  culte. 

Arrivé  à  cette  impasse  sans  issue,  j'ai  reculé,  refu- 
sant désormais  tout  concours  à  une  cause  qui  me  sem- 
blait mal  engagée  et  pleine  4e5  plus  inextricables  diffi- 
cultés. L'ardeur  que  j'avais  mise  au  début  se  sentait 
tout  d'un  coup  paralysée,  non  par  des  obstacles  impré- 
vus, mais  par  des  impossibilités  qui  naissaient  du  sujet 
lui-même. 

La  question  en  est  actuellement  où  je  l'ai  laissée  et 
je  doute  que  personne  y  veuille  mettre  la  main. 


—  3t5  — 

J'ai  dit  que  je  cherchais  à  prouver  l'existence  du 
culte  public,  liturgique,  solennel,  et  cela,  puisqu'il 
s'agissait  d'un  fait  historique,  à  l'aide  des  documents 
ou  des  monuments  dont  nous  sommes  encore  en  pos- 
session. 

Ce  sont  ces  textes,  imprimés  et  manuscrits,  ces 
œuvres  de  l'art  ou  de  l'archéologie  que  je  vais  essayer 
de  mettre  en  relief,  non  plus  pour  en  tirer  une  con- 
clusion pratique ,  que  j'aurais  été  aussi  heureux  que 
fier  d'avoir  provoquée ,  mais  pour  enrichir  la  science 
hagiographique  et  les  archives  du  diocèse  d'observa- 
tions nouvelles  et  de  faits  curieux,  qu'il  importe  de 
consigner. 

Or,  pour  mettre  de  l'ordre  dans  cette  étude,  je  pas- 
serai successivement  en  reyue  tout  ce  qui  constitue  à 
proprement  parler  le  dossier  d'un  bienheureux,  écar- 
tant toutefois  du  procès  la  sainteté  de  la  vie  et  les  mi- 
racles qui,  dans  la  récognition  d'un  culte  déjà  ancien, 
sont  des  choses  admises  en  principe  et  sur  lesquelles 
ne  porte  pas  d'ordinaire  la  discussion. 

Je  déterminerai  d'abord  de  la  manière  la  plus  posi- 
tive et  par  des  témoignages  contemporains,  le  nom  du 
personnage  qui  iious  occupe.  Puis  j'énumérerai  les  re- 
liques qu'il  a  laissées ,  décrirai  les  monuments  qui  les 

< 

ont  contenues  ou  les  contiennent  encore,  indiquerai 
son  iconographie  et  les  diverses  formes  de  son  culte  pu- 
blic ou  privé.  Enfin  f  je  terminerai  par  l'examen  des 
tentatives,  faites  à  plusieurs  reprises,  auprès  du  Saint- 
Siège,  pour  une  reconnaissance  légale  et  canonique  du 
,  titre  de  bienheureux^  après  avoir  toutefois  condensé  le 


—  316  — 

passé  dans  un  article  bibliographique,  que  je  me  suis 
efiforcé  de  rendre  aussi  complet  que  possible. 

On  sera  peut-être  étonné  qu'au  début  de  cette  étude 
je  me  sois  abstenu  de  donner  à  Robert  d'Arbrissel  le 
titre  de  bienheureux,  que  lui  a  décerné  la  tradition  de 
l'Église  de  France.  Mais  j'avais  à  observer  une  règle 
canonique  qu'aucune  coutume,  même  immémoriale, 
ne  pouvait  m'autoriser  à  enfreindre  et  ce  n'est  que 
dans  le  cours  du  récit,  sans  préjudice  toutefois  des 
droits  réservés  au  Saint-Siège,  que  j'emploierai  une 
qualification  pour  ainsi  dire  historique  plutôt  que  ri- 
goureusement exacte  (1). 

I. 

A  l'exemple  des  BoUandistes,  mais  puisant  à  des 
sources  meilleures,  je  consacrerai  un  paragraphe  spé- 
cial au  nom  du  bienheureux. 

Ce  nom  a  singulièrement  varié ,  suivant  les  temps , 
les  lieux  et  les  personnes.  Beaucoup  d'auteurs  l'ont 
inexactement  reproduit;  plusieurs  Font  même  estropié, 
au  point  de  le  rendre  méconnaissable.  Ce  n'est  donc 
pas  à  ces  auteurs  mal  informés  que  je.  m'adresserai, 
mais  aux  contemporains,  tels  que  nous  les  connaissons 
par  les  manuscrits,  car  eux  surtout  doivent  être  incon- 

(1)  c(  Non  videtur  negandum  quin  eorum  vita  religiose  traiLs&cta 
GTulgetur^  et  in  narrationis  etiam  decursu  aliquando  veri  Beati  vel 
Sancti  appeUentur,  at  quod  inscribatur  opus  et  in  prima  pagina  im- 
primatur Vita  Beati  vel  Sancti  talis,  non  videtur  permittendum^ 
sine  liceniia  Sedis  Apostolicse.  »  Benedictus  XIV.  De  Servorum  Dei 
beatificatione  et  beatofum  canonitatione.  Bononise^  1735,  iib.  11^  cap. 

LXXIV. 


—  317  — 

testablement  en  position  de  renseigner  sur  la  forme 
primitive. 

Robert,  Robertus^  tel  est  le  nom,  nomen^  que  reçut 
au  baptême  le  petit  Breton  qui  naquit  en  1040. 

A  ce  nom,  pour  le  distinguer  de  tous  ceux  qui  en 
portaient  un  identique,  fut  ajouté  un  surnom,  cognomen, 
qui  n'était  ni  une  qualiiication  de  sa  famille ,  ni  une 
appellation  terrienne  et  féodale,  mais  simplement  un 
surnom  d'origine  et  de  lieu  de  naissance. 

En  effet  tous  les  historiens  sont  d'accord  sur  ce 
point  que  Robert  vint  au  monde  dans  le  village  d'Ar- 
brissel,  ou  d'Arbre  sec,  comme  on  dit  maintenant,  à 
quelques  lieues  de  Rennes  et  prés  de  la  petite  ville  de 
la  Guerche. 

Les  textes  que  je  vais  citer  à  l'appui  du  nomm  et  du 
cognomeny  sont  extraits  du  cartulaire  de  Fontevraud, 
que  possède  la  bibliothèque  impériale  (1)  à  Paris,  et 
des  chartes  conservées  aux  Archives  de  l'empire.  Or, 
dans  ces  documents  des  xi®  et  xii©  siècles ,  Robert  est 
écrit  en  latin,  de  trois  manières  différentes  :  en  abrégé 
sous  la  forme  rude  ou  adoucie,  et  enfin  avec  ou  sans 
cognomen- 

C'était  assez  l'usage,  au  moyen  âge,  de  n'indiquer 
le  nom  de  baptême  que  par  une  initiale  (2).  Aussi 
trouvons-nous  simplement  la  lettre  R  pour  signifier 
Roberius,  dans  les  textes  suivants  :  «  Deo  et  donmo  R. 
et  monacabus  in  xpisti  nomine  sibi  subpositis.  }>  — 


(i)  Fonds  latin^  n<*  5480.  Ce  cartulaire,  qui  date  de  1699,  a  été 
fait  par  les  soins  du  marquis  de  Gaignières. 
(2)  Re\ue  des  sociétés  sairantes,  1801^  pag.  498. 


-  318  — 

t 

<  Donavi  domno  R.  »  —  «  Dorano  R.  et  sanctim.  Fon- 
tisebraudi.  »  —  «  Donamus  Deo  et  B.  M.  in  perpe- 
tuum  et  domno  R.  »  —  c<  In  manu  domni  R.  :» 

RobertuSy  quand  il  est  écrit  en  entier,  est  bien  la 
forme  adoucie  du  nom ,  mais  l'orthographe  ancienne, 
basée  sur  une  tradition  originelle,  l'étymologie  et  une 
prononciation  dure,  nous  est  révélée  par  une  charte 
de  1114,  où  l'écrivain  répète  jusqu'à  quatre  fois  Rot- 
bertus,  Rotberto^  Rotberhim,  et  par  un  acte  de  donation 
qui  se  réfère  à  Tévêque  Pierre  II  (1072)  :  «  Vir  quidam 
magne  religionis  et  bone  opinionis  nomine  Rotbertus 
de  Arbruissello.  » 

Le  nom  seul  sans  le  cognomm  est  assez  rare ,  tandis 
que  les  exemples  des  deux  réunis  abondent. 

Arbrissely  si  nous  consultons  la  tradition,  qui  fait 
encore  loi  de  nos  jours,  serait  le  vrai  cognomm,  sans 
aucune  altération.  «  M.  Roberto  de  Arbrissello(1126)  » 
—  «  Deo  et  domno  R.  de  Arbrissello.  »  —  «  Présente 
domno  R.  de  Arbrissello.  »  —  c  Domno  R.  de  Arbris- 
sello. » 

Tout  en  maintenant  cette  forme,  on  la  modifie  par 
le  changement  de  la  seconde  S  en  C  :  c  Per  manum 
domni  Rotberti  de  Arbriscello.  » 

L'i  est  mouillé  et  par  conséquent  précédé  de  Vti  en 
plusieurs  endroits  :  «  Domno  R.  de  Arbruissello  ma- 
gne  religionis  et  honestatis  viro  clarissimo.  »  —  «  Dom- 
no R.  de  Arbruissello  et  ipsius  supradictis  monacha- 
bus.  »  —  «  Domno  R.  de  Arbruissello  et  ecclesie  Fon- 
tisevraudi  sanctimonialibus.  »  —  «  Domno  R.  de  Ar- 
bruissello, homini  scilicet  religiosissimo,  cujus  admi- 
rabilis  doctrina  verbo  sancte  predicationis  et  thonitruo 


-  319  — 

sancte  exhorlacionis  per  tolam  ecclesiam  et  sua  fulget 
eloquentia.  » 

I  et  R  sont  supprimés  ou  R  change  de  place  :  «  Dom- 
no  R.  de  Arbussello.  »  —  «  In  manu  magistri  Roberli 
de  Arbursello.  > 

Substituez  maintenant  YE  à  17,  et  vous  aurez,  avec 
une  ou  deux  S  :  «  In  manu  domni  Roberti  de  Arbres- 
sello.  »  —  «  Domni  Roberti  de  Arbresello.  »  —  «  Ego 
igitur  Robertus  de  Arbressello.  >  —  «  Domno  Roberto 
de  Arbressello.  »  —  «  Per  manura  Domni  R.  de  Ar- 
bressello. »  —  «  Domno  R.  de  Arbressello.  »  —  «  Dom- 
no R.  de  Arbresello.  »  —  «  R.  de  Arbressello  magne 
religionis  virum.  » 

Je  n'ai  plus  qu'à  signaler  quelques  singularités  pa- 
léographiques ,  du  genre  de  celles-ci  :  «  Dilectissimo 
fratre  nostro  R.  de  Erbressello,  viro  religioso.  »  — 
«  In  manu  Domni  Roberli  de  Arbreslo.  »  —  «  In  manu 
Domni  Roberti  de  Herbrissello.  »  —  «  Domno  R.  de 
Arbr.  î>  —  «  In  manu  Domni  R.  de  Arb.'  » 

J'arrive  enfin  à  la  traduction  française  qui,  au 
xiie  siècle,  nous  donne  :  «  Rotbertus  de  Arbreisel,  cla- 
rissimus  vir  ac  Deo  amantissimus.  »  —  «  Domnus  Rot- 
bertus de  Arbreissel.  cum  quibusdam  de  discipulis  suis 
ac  de  ancillis  Dei.  » 

Trois  titres  qualifient,  à  la  même  époque,  Robert 
d'Arbrissel;  ce  sont  ceux  de  vénéralfle^  venerabilis,  qui 
convient  à  la  sainteté  de  sa  vie,  de  maître ^  magister^ 
puisqu'il  fut  entouré  de  disciples,  et  de  dom,  qui  est 
propre  à  tout  l'ordre  monastique,  domnus. 

En  tète  du  dossier  formé  pour  la  Sacrée  Congréga- 
tion des  Rites,  j'ai  inscrit  selon  la  version  qui  m'a  paru 


—  320  — 

la  plus  accréditée  el  la  plus  exacte  :  c  Ande^ven.  et 
Piclaven.  (1)  Gonfirmationis  cullûs  ab  immemorabili 
tempore  praestiti  venerabili  servo  Dei  Roberto  de  Âr- 
brissellOy  ordinis  Fontebraldensis  institutori.  > 

II. 

Robert  d'Arbrissel  mourut  saintement  au  Prieuré 
d'Orsan,  dans  le  diocèse  de  Bourges,  le  25  février 
1117.  Son  corps  fut  rapporté  à  Fonlevraud,  où  il  fut 
inhumé  au  milieu  d'un  concours  extraordinaire  de 
peuple. 

J'emprunte  au  cartulaire  de  Fontevraud  deux  docu- 
ments inédits  qui  concernent  à  la  fois  sa  sépulture  et 
ses  œuvres,  chartes  précieuses  destinées  à  transmettre 
à  la  postérité  les  regrets  de  l'illustre  abbaye  et  chef 
d'ordre. 

«  Antiquorum  patrum  sancsivit  aucloritas  ut  quicquid 
ecclesiis  tribueretur  litterarum  memoriae  traderetur 
ne  oblivionis  caligine  deleretur.  Nolum  sit  omnibus 
tam  futuris  quam  praesentibus  quod  eadem  die  quo 
magistri  Roberti  de  Arbresello  corpus  Dei  gratia  de 
longinquo  allatum  in  loco  fontisebraudi  quem,  Dec 
auxiliante,  fundavit,  humatum  fuerat,  non  rninima 
multitudo  religiosarum  personarum  ad  tanti  viri  fune- 
ris  obsequium  illic  congregata  fuerat,  quarum  una 
fuit  Leodegarius  Bitur.  Ecclesiae  archiep.,  altéra  Radul- 
fus  Turonorum  archiep.  cum  Reginaudo  Andegav.  epo 
multisque  aliis  tam  abbatibus  quam  sacerdotibus,  quo- 

{{)  Fontevraud  était,  avant  la  révolution,  du  diocèse  de  Poitiers. 
Le  concordat  do  iSOl  Ta  fait  passer  dans  celui  d'Angers. 


—  821  — 

rum  non  erat  numerus.  Hic  fuit  Fulco  junior,  Fulconi 
comitis  Ândegavorum  filius,  cum  innumeris  populis. 
Ipso  die  peciit  Gaufridus  de  Blazone  (1),  utpote  valde 
desiderans  anime  sue  saluteni,  ut  Petronilla  abbatissa 
F.  E.  a  supradicto  Fulcone  comité  impetraret  quatinus 
omnia  que  antea  Ecclesie  Fonlis  E,  ipse  Gaufridus  pro 
salute  anime  sue  dederat,  scilicet  domos  suas,  census, 
vineas,  nec  non  et  filias  suas  et  omnia  quecumque  in 
hoc  seculo  habere  videbalur,  ipse  cornes  ilerum  in  pleno 
capitulo,  audientibus  cunctis,  concederet,  quam  peti- 
cionera  supradictus  cornes  libenter  exaudiens  et  volun- 
tati  abbatisse  et  supradicti  Gaufridi  desiderio  ilico  in 
capitulo  satisfecit.  Huic  concessioni  interfuerunt  :  Ber- 
laiîts  de  Monsterolo  (2)  et  Gauberius  de  Monteserello  (3) 
et  Robertus  de  Blado  et  Gislebertus  de  Losduno  (4) 
multique  alii  barones  cum  multitudine  populorum. 
An.  ab  inc.  dni.  1117,  regn^  Lod^  fr.  rege  et  Guil- 
lelmo  Aquit,  duce  (5).  » 

«  Eodera  dieinBiturica  patria  apud  Ursanura  precla- 
ra  dormitio  domni  Roberti  venerabilis  presbiteri  K™i(6) 
Patris  nostri.  Qui  vir  christianissimus  sancte  Catholice 
Ecclesie  Lucifer  splendidus  et  in  sancta  predicatione 
alter  quodam  modo  Paulus,  Redonensis  provincie  fuit 
oriundus  fonleque  celestis  doctrine  funditus  repletus 
et  in  omni  religione  probabiliter  fundatus.  A  primo 

(i)  Rkison  (Maine-et-Loire). 

(2)  Montre  uil-Bellay  {Ihid). 

(3)  Montsoreau  [Ihid), 

(4)  Loudun  (Vienne). 

(3)  Bibl.  imp.^  t.  1[^  pag.  145. 
(6)  Karissimi. 


—  S22  — 

lapide,  Deo  auctore,  Fontis  Ebraudi  Basilicam  et  ejus- 
dem  Basilice  complures  cellas  fundavit,  edificavit,  mul- 
tiplicavit  et  in  eisdem  locis,  Deo  inspirante,  viros  ac 
mulieres  ad  serviendum  Deo  omnipotenti  fideliter  co- 
adunavit,  .quos  etiam  dùm  adhuc  in  carne  viveret  sanc- 
torum  Patrum  exemplis,  regulis  omnique  sacra  doc- 
trinâ  ad  plénum  informavit  hic  fortis  athleta  verbi  Do- 
mini  fidelissimus  dispensator,  dùm  more  suo  ad  exteras 
nationes  predicalionis  sancte  gracia  procederet,  apud 
predictum  locum,  quem,  ipso  Deo  favente,  edificaverat, 
qui  Ursanus  dicitur  et  a  civitate  que  Bituricas  vocatur 
fere  duo  de  viginli  miliariis,  hoc  est  12  leugis,  disjun- 
gitur,  vocante  Deo,  scnex  et  plenus  dierum ,  viam  uni- 
verse  carnis  ingressus,  illo  gaudente,  terra  plorante, 
glorioso  fine  quiescens,  corpus  terre,  spiritumque  polo 
tradidit,  anno  ab  incarnat.  Domini  1117.  Sed  quoniam 
testante  scriptura  in  multis  omnes  offendimus  et  si 
dixeriraus  quia  peccata  non  habemus  nos  ipsos  sedu- 
ciraus,  etc.  (1)  » 

111. 

Pétronille  de  Cheraillé,  première  abbesse  de  Fonte- 
vraud  (2),  éleva  sur  la  tombe  de  Robert  d'Arbrissel, 
placée  devant  le  raaître*autel  de  Téglise  abbatiale,  un 
monument  en  pierre,  supporté  par  quatre  colonnes 
trapues.  Sur  la  dalle  tumulaire  dormait  couchée  l'effi- 
gie du  saint  fondateur,  paré  des  insignes  de  sa  double 

(1)  Bibl.  imp.,  t.  II,  pag.  109. 

(2)  Le  Martyrologe,  cité  par  Gaignières,  pag.  255,  s'exprime 
ainsi  :  «  Mater  nostra  (Petronilla)  a  Domno  nostro  magistro  Ro- 
berto  1^  constituta  abbatissa.  )> 


—  328  — 

dignité  de  prêtre  et  d'abbé,  la  chasuble,  les  gants, 
Tanneau  et  le  bâton  pastoral. 

Le  premier  historien  de  la  vie  du  bienheureux  a  dé- 
crit sommairement  cette  tombe  romane,  mais  dans  des 
termes  tellement  vagues,  qu'on  ne  saurait  pas,  sans  le 
témoignage  de  Pavillon ,  qui  affirme  que  Robert  était 
représenté  en  relief  (1),  si  l'effigie  avait  été  sculptée  dans 
un  bloc,  ou  simplement  gravée  sur  la  pierre. 

«  Cujus  mausoleum  anle  aram  majorem  quatuor 
columnis  innixum  erat:  superiori  saxo  insculpta  ejus 
effigies  :  habitus  ei  sacerdotalis,  pedum  pastorale,  ma- 
nus  chirothecis  tectae,  insertus  digito  annulus  (2).  » 

En  4624 ,  l'abbesse  Louise  de  Bourbon  de  Lavedan, 
faisant  reconstruire  le  grand  autel  par  l'architecte  de 
la  Barre,  ftit  obligée  de  déplacer  le  tombeau  du  bien- 
heureux, qu'elle  renouvela  et  posa  avec  ses  ossements, 
dans  une  arcade,  à  la  droite  de  l'autel. 

J'ai  rencontré  à  la  bibliothèque  impériale,  quelques 
notes  inédites  qui  donnent  des  détails  sur  ce  change- 
ment. Les  voici  : 

«  Elle  fit  chercher  l'un  des  plus  excellents  archi- 
tectes. Le  R.  P.  Richer,  abbé  de  Saint-Vincent  du  Mans, 
visiteur  de  Fontevrauld,  luy  enseigna  M.  de  la  Barre. 
Elle  passa  le  marché  avec  luy 

»  Plus  pour  la  cloison  des  2  costez  de  l'autel  et 
l'arcade  de  la  sépulture  de  Nostre  B.  Père  —  4350  liv. 

»  En  faisant  les  fondemens  de  l'autel,  les  ossements 
de  Nostre  B.  Père  furent  trouvez.  Mad^  les  fit  mettre 


(1)  Pavillon,  p.  286. 

(2)  Bollaûd.,pag.  598. 


—  su  — 

dans  un  coffret  de  plomb  soas  Tarcade,  à  la  partie 
dextre  du  grand  autel  et  de  l'autre  costé  les  ossemens 
de  Pierre,  évesque  de  Poitiers ,  grand  ami  et  contem- 
porain de  Noslre  B.  Père... 

»  Lad.  Dame  a  fait  faire  à  Paris  TefSgie  de  marbre 
blanc  de  Noslre  B.  Père ,  pour  le  prix  de  800  liv.  et 
fut  rendue  icy  le  10  juin  4624  (i).  » 

Ce  tombeau  réédifié  était  en  marbre  noir,  avec  une 
effigie  de  marbre  blanc,  représentant  Robert  d'Arbris- 
sel,  couché,  vêtu  d'une  chasuble,  la  tète  appuyée  sur 
un  coussin,  les  mains  croisées  sur  la  poitrine  et  les 
pieds  nus. 

L'aspect,  assez  peu  gracieux ,  de  cette  effigie  nous  a 
été  conservé  par  un  cuivre  gravé  qu'a  acquis  le  musée 
de  la  ville  d'Angers,  et  qui  a  été  tiré  pour  la  dernière 
fois,  en  4861,  pour  le  Répertoire  archéologique  de  V An- 
jou, n^  de  juillet  (2). 

Il  est  fort  possible  que  cette  statue  ait  été  vendue  en 
même  temps  que  tous  les  marbres  de  l'abbaye,  et  il 
serait  peut-être  difficile  d'en  suivre  la  trace. 

Cependant  une  partie  du  tombeau,  m'écrit  M.  Gays 
des  Touches,  existe  encore  chez  M.  du  Temple,  au  châ- 
teau de  Saint-Médard  (3),  ou  les  marbres  ont  été  sciés 
et  employés  à  faire  des  cheminées.  Les  inscriptions 
pourraient  se  lire,  si  elles  n'étaient  pas  tournées  contre 
les  murs,  mais  elles  n'offrent  point  tellement  d'intérêt 
que  nous  ayons  jugé  utile  d'en  demander  copie  au  pro- 
priétaire. 

(i)  Cart.  de  Fontei?raud,  t.  Il,  pag.  388. 

(2)  Les  anciennes  épreuves  sont  rares. 

(3)  Commune  de  Gbouzé  (Indre-et-Loire). 


—  325  — 

Ces  inscriptions,  gravées  sur  le  soubassement  du 
mausolée  y  sont  de  deux  sortes;  les  unes  allégoriques 
empruntent  leurs  sentences  à  TÉcriture  Sainte,  les 
autres  racontent  en  abrégé  la  vie  de  Robert  d'Arbris- 
sel  et  les  privilèges  de  son  ordre. 

Je  les  reproduis  toutes  d'après  le  marquis  de  Gai- 
gnières,  qui  les  a  insérées  dans  son  recueil  d'Épi- 
taphes  (1). 

«  Memoria  venerabilis  Robertj  in  omni  loco  quasi 
mel  indulcabitur  ipse,  est,  directus  divinitus  in  pœni- 
tentia  gentis  et  in  diebus  peccatorum  corroboravit  pie- 
tatem.  »  Eccli.  40  (2). 

Au  côté  droit  :  «  Et  vocaberis  sedificator  cepium 
avertens  semitas  iniquitatum ,  et  sustollam  te  super 
altitudines  terrae.  »  Esai.  58  (3). 

Au  côté  gauche  :  «  Et  eris  quasi  hortus  irriguus  et 
sicut  fons  aquarum  cuius  non  déficient  aquse  et  sedifi- 
cabuntur  in  se  déserta  saeculorum.  »       Ysai.  58  (4). 

(1)  Bibl.  imp.,  t.  XIV,  pag.  336  et  339. 

(2]  Le  texte  du  Livre  de  T Ecclésiastique  n'a  pas  été  ici  rigou- 
reusement cité.  Je  crois  donc  devoir  le  restituer  d'après  la  Vul- 
gâte  : 

a  2.  In  omni  ore  quasi  mel  indulcabitur  ejus  memoria.  . 

»  3.  Ipse  est  directus  divinitus  in  pœnitentiam  gentis... 

»  4  ...  et  in  diebus  peccatorum  corroboravit  pietatem.  » 

Lib,  Ecelesiastici^  cap.  xlix. 

(3)  Isaïe  a  dit  : 

«  12  ...  et  vocaberis  sediûcator  sepium,  evertens  semitas  in 
quietem... 
»  14.  ...  et  sustollam  te  super  altitudines  terrae.  »  Proph.  Isaiœ, 

cap.  LYIII. 

(4)  Le  texte  porte  :  a  Et  erit  quasi...  Et  œdificabuntur  in  te...  » 
Proph,  Isaïœ^  cap.  lviii,  f.  H,  12. 


—  336  — 

Plus  bas  :  c  Exultabunt  ossa  bamiliata.  t 

Psal.  50  (!)• 

Sur  la  face  principale  :  c  Adsta  viator  et  perlege 
qood  dia  salis  lacuit  bumana  vox  tibi  lapis  iste  ac  toti 
posteritati  inclamat.  Venerabilis  quondam  Robertus  de 
Arbriscello  vir  admodam  pins,  et  zelo  animaram 
aestaans,  divina  qua  plarimum  potcrat  eloquentiae,  ad 
Dei  obsequium  ac  sœculi  contemptum,  multos  ntriasque 
sexas  mortaleSy  qui  eom  ad  déserta  loca  sequebantur, 
induxit  ;  eaqoe  occasione  ordinem  Fontis  Ebraldi  pri- 
mus  instituit,  variaque  domicilia  devoto  praesertim 
foemineo  sexui,  extruenda  curavit,  quorum  omnium 
caput  esse  voluit  bocce  monasteriim  in  quo  abbatis- 
sam  non  solum  virginibus  aut  mulieribus  Deo  dicatis, 
sed  eiiam  religiosis  vins  prœposuit  qui  boc  vitae  se* 
quuntur  institutum  à  sancta  sede  apostolica  îaro  a  sui 
exordio  ad  haec  usque  tempora  approbatum  variisque 
privilegiis  regiisque  muneribus  auctum  obiit  anno  M. 
C.  XVII.  ejus  ossibus  ac  sacris  tegendis  cineribus  Lu- 
dovica  de  Borbonio  buiusce  cœnobii  atque  adeo  totius 
ordinis  antistia  hoc  mausoleum  novo  pegmate  adorna- 
tam  totius  ordinis  nomine  tanquam  parenti  optimo  P. 
C.  (2)  anno  M.  DC.  XXIII.  » 

IV. 

Le  24  novembre  1847,  M.  le  curé  de  Saint-Maurille 
de  Chalonne,  délégué  par  Mër  Tévêque  d'Angers,  ou- 
vrait en  présence  de  plusieurs  ecclésiastiques  ou  pro- 

(1)  Pialm.  L,  j^  10. 

(2)  Ponendum  curaVit. 


—  327  — 

priétaires  de  Chemillé,  et  d'un  médecin  de  la  même 
ville,  la  capse  de  plomb  (1)  que  les  religieuses  Fonte- 
vristes  venaient  de  recevoir,  en  vertu  d'une  autorisa- 
tion ministérielle,  de  l'administration  de  la  maison 
centrale  de  correction  établie  à  Fontevraud.  Or,  d'après 
la  tradition  et  l'inscription  du  couvercle,  la  capse  devait 
contenir  les  restes  du  B.  Robert  d'Arbrissel,  fondateur 
de  l'abbaye  de  Fontevraud. 

Voici  cette  inscription,  gravée,  sur  sept  lignes,  en  ma- 
juscules romaines  par  une  main  peu  exercée  : 

t 

t  En   .  GESTE  .  CAPSE  .  SONT  ,  LES  .  OS  ET  CENDRES  DV   DIGNE  CORPS  t 
DV  .  VE""*^  .  PERE  ROBERT  DABRISSELLE   InSTITVTEVR  ET  FONDATEVR 
DE  LORDRE  DE  FONTEVRAYLT  .  SCELON  QV'ON  LES  TROVVA  EN 
SON  TOMBEAV  QVAND  IL  FVT  LEVÉ  ET  ÉRIGÉ  EN  CE  LIEV  POVR 
FAIRE  LE  GRAND  AVTEL  PAR  LE  COMMENDEMENT  ET  BON  SOING  DE 
DIGNE  ABBESSE  ET  CHEF  DV  DICT  ORDRE  MADAME  LOYSE  DE 
BOVRBON  LE  5  DOCTOBRE  4622 

Le  procès-verbal  (2),  rédigé  à  cette  occasion,  raconte 
en  ces  termes  l'ouverture  de  la  capse  :  «  Nous  avons 
ensuite  fait  ouvrir  la  capse  et  nous  avons  trouvé  dans 
son  intérieur  une  étoffe  de  soie  damassée  enveloppant 
une  certaine  quantité  de  poussièyeeî  d'os,  parmi  les- 

(i)  Cette  «apse,  de  forme  ovoïde,  mestire  en  hauteur  0"H,  en 
longueur  0'"39,  en  largeur  0"28  et  de  pourtour  1^06.  Elle  a  été 
dessinée  dans  le  Répertoire  archéologique  de  V Anjou  ^  1860,  n^  de 
juillet. 

(2)  Ce  procès-verbal^  conservé  chez  les  Dames  Fontevristes  existe 
en  double  aux  archives  du  diocèse  < 


—  328  — 

quels  nous  avons  reconnu  deux  vertèbres  presqu'en- 
tiéres  et  plusieurs  fragments  de  côtes.  Nous  avons  re- 
marqué aussi  plusieurs  petites  pierres  et  divers  mor- 
ceaux de  tuf  qui  ont  sans  doute  été  recueillis  avec  les 
restes  du  B.  Robert  d'Arbrissel,  quand  on  les  retira  de 
son  tombeau  pour  les  renfermer  dans  cette  capse.  Mais 
ce  qui  nous  a  le  plus  frappé,  c'est  une  parcelle  d'or 
intimement  unie  et  faisant  corps  avec  un  tissu  gros- 
sier que  nous  avons  reconnu  être  de  laine  brune,  ce 
qui  nous  fait  supposer  que  c'était  une  portion  des  vêle- 
ments du  B.  Robert  d'Arbrissel ,  d'autant  plus  que  les 
Annales  de  Fontevraud  disent  qu'il  fut  enterré  avec  les 
vêtements  de  laine  brune  qu'il  avait  coutume  de  por- 
ter (1).  » 

V. 

L'Église  nomme  Saintes  Reliques  et  propose  comme 
telles  à  la  vénération  des  fidèles,  non-seulement  tout 
ce  qui  reste  sur  la  terre  de  la  dépouille  mortelle  d'un 
serviteur  de  Dieu ,  saint  ou  bienheureux ,  mais  encore 
les  objets  qui  furent  à  son  usage  ou  que  simplement 
son  corps  à  touchés. 

Or  les  reliques  du  B.  Robert  que  nous  possédons 
actuellement  proviennent  de  ses  ossements,  de  ses  vê- 
tements, de  son  suaire,  de  son  tombeau  et  de  son  cœur. 
Il  faut  y  ajouter  son  bâton  abbatial  en  entier.   • 

Lorsque  le  12  avril  1860,  au  nom  de  Mff^  l'évêque 

(1)  Deux  morceaux  de  soie  brune  furent  extraits  de  la  capse  et 
déposés  entre  les  mains  des  Fontevristes^  qui  les  vénèrent  à  tort 
comme  des  reliques  de  Robert  d'Ârbrissel. 


-  329  - 

d'Angers,  j'ouvris  la  capse  du  bienheureux  (1),  j'y 
trouvai  : 

1°  Une  assez  grande  quantité  de  cheveux  bien  con- 
servés, les  uns  blonds  ou  d'un  roux  ardent,  les  autres 
tirant  sur  le  noir,  plusieurs  tachés  et  agglutinés  par  la 
chaux.  Une  forte  mèche  de  cheveux  roux  adhérait  en- 
core à  un  fragment  de  crâne. 

2o  Des  cendres  mêlées  que  je  réunis  en  trois  pa- 
quets. 

3o  Des  morceaux  d'ossements,  en  grand  nombre,  tant 
gros  que  petits,  mais  friables,  sans  forme  distincte  et 
rouléSy  comme  un  objet  souvent  ballotté  et  transporté. 
Leur  conformation  ostéologique  et  leur  couleur  uni- 
forme, noire,  me  les  ont  fait  attribuer  à  un  seul  et 
même  corps.  Quelques-uns  portent  encore  des  traces 
de  chaux  et  semblent  calcinés. 

¥  Une  quantité  non  moins  considérable  d'ossements 
petits,  blancs,  couverts  d'un  sédiment  épais  que  le 
séjour  prolongé  dans  un  endroit  humide  ou  des  infil- 
trations y  ont  déposé,  comme  autant  de  paillettes  qui 
brillent  à  la  lumière.  J'attribue  ces  fragments  à  un 
second  personnage. 

Ici  se  présente  une  difiSculté  fort  grave  que  j'expo- 
serai franchement,  discuterai,  puis  essaierai  de  ré- 
soudre. 

L'inspection  de  la  capse  m'a  amené  à  la  constatation 
de  deux  corps  différents.  Le  B.  Robert  n'y  repose  donc 

(1)  V.  le  procès-verbal  dans  le  Répertoire  archéologique  de  V An- 
jou, 1860^  pag.  207-209. 

REP.   ARC.  24 


—  330  — 

pas  seul  y  malgré  Taffirmation  de  rinscription  du  cou- 
vercle qui  n'en  mentionne  pas  d'autre. 

Quel  est  donc  ce  personnage  qui  partage  les  honneurs 
d'une  tombe  commune,  et  lui  aussi  a-t-il  droit  à  nos 
hommages? 

VL 

L'objection  nous  est  offerte  dans  toute  sa  force  par 
le  P.  Nicquet,  qui  écrivait,  en  164S,  c'est-à-dire  dix- 
neuf  ans  après  l'exhumation ,  que  les  cendres  du  Rêvé- 
rendissime  Pierre^  évêque  de  Poitiers  {i)  furent  jointes 
aux  cendres  du  B.  Robert  dans  un  petit  coffret  de  plomb. 
Je  laisse  parler  l'auteur,  pour  ne  pas  affaiblir  son 
autorité. 

€  Le  tombeau  du  B.  Robert  fut  refait  en  1623, 
elabouré  d'un  exquis  et  très-agréable  artifice,  enrichy 
en  divers  endroits,  sur  des  pierres  de  marbre  noir,  de 
beaucoup  de  traicts  de  l'Ecriture  sainte  ,  gravés  en 
lettres  d'or.  On  y  voit  la  statue  du  B.  Père  en  marbre 
blanc,  avec  les  habits  sacerdotaux  et  le  baston  pastoral, 
gisant  sur  une  tombe  de  marbre  noir,  sous  la  cam- 
brure de  l'arcade.  Quand  on  ouvrit  l'ancien  tombeau 
on  trouva  des  os  entiers,  lesquels  on  recueillit  avec 
quantité  de  cendres,  dans  un  petit  coffret  de  plomb, 
on  y  joignit  aussi  les  cendres  que  l'on  trouva  dans  le 
sepulchre  du  Révérend issi me  Pierre,  évesque  de  Poi-. 
tiers,  lequel  pour  l'amour  qu'il  portoit  à  notre  sainct 
de  Fontevraud,  avoit  voulu  estre  enterré  auprès  de 

(i)  S.  Pierre  II  fut  éYêque  de  Poitiers  de  1087  à  1115.  Du  Temps. 
Le  clergé  de  France,  t.  II,  pag.  414. 


-  331  — 

luy,  le  tout  enfermé  ensemble  dans  ce  coffret,  fut  mis 
dans  le  tombeau  (1).  » 

11  est  vrai,  on  peut  opposer  à  ce  texte  formel,  le 
témoignage  de  Cosnier,  qui,  un  an  avant  le  P.  Nicquet, 
faisait  ainsi  le  récit  de  l'exhumation  du  6.  Robert. 

«  Corpus  igitur  B.  Roberti  (ut  loquitur  Baldricus) 
in  condigno  sepultum  est  mausoleo.et  jacuit  usque  ad 
annum  M.  DC.  XXII.  quo  Reverendissima  Domina  D. 
Ludovica  de  Borbonio  Lavedam  Àbbatissa,  statuens 
magnificum  altare  ac  splendidum  extruere  et  beatis* 
simi  Parentissepulcrum  exornare, jussit veterem  tumu- 
lum  recludi.  Inventa  sunt  autem  quœdam  ossa,  pars 
bucli  pastoralis  quœ  tacta  abiit  in  cineres,  annulus 
ot  quaedam  vetusta  Fulchonis  Andegaven.  moneta,  pars 
stolse  exserica,  quœsimiliter  dilapsa  est  in  cinerem  mul- 
iique  insuper  puiveres.  Orania  hœc  decenter  ac  reli- 
giose  collecta  sunt  in  lancem  argenteam,  deindè  trans- 
lata in  aliud  proximum  sepulchrum,  quod  fuerat  Wil- 
lelmi  Pictauorum  Episcopi  cujus  cineres  pariter  coUecti 
in  tumulum  B.  Roberti  depositse  sunt  (2).  j» 

Du  rapprochement  de  ces  deux  textes  de  Nicquet  et  de 
Cosnier,  pour  ainsi  dire  contemporains  du  fait  en  ques- 
tion, que  conclure?  D'une  part,  accord  sur  les  objets 
trouvés  dans  la  tombe  du  Bienheureux,  seulement 
Cosnier  plus  explicite  ajoute  à  son  énumération  un 
anneau,  une  monnaie  de  Foulques  d'Anjou  et  un  frag- 
ment d'étole. 
Cosnier  et  Nicquet  parlent  d'une  capse  qui  renferma 


(1)  Histoire  de  V ordre  de  FontevrauH,  p.  427. 

(2)  Fonds  Ebraldi  exordium,  pag.  12R. 


—  332  — 

les  ossements  trouvés.  L'un  la  dit  en  plomb,  l'autre  en 
.  argent  :  l'évidence  donne  raison  au  Jésuite.  Mais  ce  dé- 
tail est  peu  important,  parce  qu'une  erreur  sur  la 
matière,  sur  l'accessoire  par  conséquent,  est  facilement 
admissible. 

.Nicquet  mentionne  le  tombeau  de  Pierre  de  Poitiers 
comme  voisin  de  celui  de  Robert.  Cosnier  au  contraire 
nomme  cet  évêque  Guillaume  (4).  Il  y  a  certainement 
présomption  en  faveur  du  premier.  Cosnier  favorise  le 
sentiment  de  la  réunion  des  deux  corps  lorsqu'il  avance 
que  ce  fut  le  tombeau  du  bienheureux  qui  fut  chargé 
de  recueillir  ce  qui  restait  des  deux  amis. 

Cosnier  ne  donne  donc  pas  un  démenti  au  P.  Nic- 
quet, puisqu'au  fond  la  divergence  consiste  en  deux 
points,  l'un  où  Cosnier  se  trompe  en  nommant  Guil- 
laume l'évêque  Pierre,  l'autre  où  il  ne  précise  pas  si 
c'est  dans  la  même  capse  que  les  deux  corps  furent 
réunis.  En  écrivant  le  même  tombeaUy  il  ne  contredit 
pas  suffisamment  pour  affaiblir ,  pour  infirmer  le  té- 
moignage si  précis  du  P.  Nicquet.  D'ailleurs,  admettons 
deux  capses  dans  le  même  tombeau,  pourquoi  une 
seule  capse  nous  est-elle  présentée  aujourd'hui?  Si  l'on 
a  sauvé  l'une,  pourquoi  pas  l'autre,  puj^sque  toutes  les 
deux  renfermaient  des  reliques  que  la  dévotion  popu- 
laire aimait  à  vénérer?  D'où  vient  que  l'administration 
des  prisons,  si  soigneuse  à  restituer  à  l'Eglise  ce  qui 
appartenait  à  l'Eglise,  n'a  trouvé  et  rendu  qu'une 
seule  capse? 

(1)  Guillaume  Gilbert  de  Ragioles^  évêque  de  Poitiers  de  11  H 
à  ii23  et  inhumé  à  Fonterrault  comme  son  prédécesseur  saint 
Pierre  II.  Du  Temps^  Le  clergé  de  France,  t.  11^  pag.  4i4^  415. 


—  333  — 

Je  sais  bien  qu'on  peut  encore  m'objecter  une  noie 
manuscrite  que  j'ai  citée  plus  haut  et  qui  a  d'autant 
plus  de  force  qu'elle  provient  de  Fontevraud  même. 
Mais  à  ce  texte,  d^une  authenticité  contestable  en  droit, 
puisqu'il  ne  porte  ni  date,  ni  signature,  j'opposerai 
un  texte  non  moins  formel»  parce  que  les  Bollandistes 
l'ont  reçu  directement  de  Tabbesse  Louise  de  Bourbon, 
à  la  prière  de  qui  furent  insérés  dans  les  Acla  sancto-^ 
runiy  les  Actes  de  Robert  d'Arbrissel. 

Si  quelque  doute  pouvait  subsister  encore  sur  le  mé- 
lange des  ossements,  je  crois  qu'il  serait  dissipé  aussi- 
tôt par  cette  déclaration  péremptoire  :  a  Ob  hujus  arae 
fabricam  debuit  B.  Roberti  pauUo  longius  tumba  sub- 
moveri,  sub  novo  itidem  posita,  perquam  affabre  ela- 
borato,  mausoleo  :  cujus  ad  angulos  variée e  sacra  Scrip- 
tura  sententiae,  nigro  in  marmore  litteris  aureis  exorna- 
tae  :  eifigies  ejus  alboè  marmore,  cultu  sacerdolali,  in 
tumba  itidem  marmorea  recubans.  Priore  tumulo  aperto 
ossa  complura  intégra  reperta  sunt  :  quaB  in  arculaiti 
plombeam ,  cum  non  exiguâ-  copia  pulveris ,  in  quem 
cetera  erant  raembra  resoluta,  itemque  pulverihus  in 
sepulchro  Pétri  Pictavensis  Episcopi  repertis,  condita 
sunt.  D  Bollcmd,y  p  598. 


VII. 


Je  poursuis  l'examen  minutieux  des  reliques  du  bien- 
heureux. 

Vêtements.  Le  procès-verbal  que  je  rédigeai  lors  de 
l'ouverture  de  la  capse,  mentionne  expressément  : 

i^Des  fragments  d'une  étoffe  brune,  d'un  travail 


^  334  — 

grossier  et  qui  peut  avoir  été  le  vêtement  ordinaire  du 
bienheureux,  celui  avec  lequel  il  fut  enseveli* 

2®  Des  cordules  de  soie. 

S^  Des  lambeaux  d'un  tissu  de  soie,  que  la  dissolu- 
tion du  corps  a  teint  en  brun-marron.  Etait-ce  une 
chasuble,  un  vêtement  d'église,  ou  le  suaire  primitif? 

4p  Un  galon  qui  me  parut  destiné  à  border  ce  tissu 
de  soie. 

Si  le  mélange  des  cendres  et  ossements  des  deux 
amis  est  un  fait  certain ,  la  confusion  des  vêtements 
n'est  pas  moins  probable  et  il  serait  difficile,  impos- 
sible même,  d'assigner  d'une  manière  indubitable  à 
chacun  celui  qui  lui  appartint.  Toutefois,  l'attribution 
du  n^  1  est  fondée  sur  l'histoire  aussi  bien  que  sur  les 
arguments  les  plus  plausibles  de  convenance. 

Suaire,  En  1622,  l'abbesse  Louise  de  Bourbon  enve- 
loppa les  ossements  et  les  cendres  dans  un  suaire  de 
damas  de  soie  jaune,  dont  je  n'ai  plus  retrouvé  que 
des  lambeaux. 

Néanmoins,  pour  permettre  aux  archéologues  d'étu- 
dier à  fond  cette  question,  avant  de  faire  sceller  la 
oapse  par  un  plombier  et  d'y  apposer  le  sceau  épisco- 
pal,  j'eus  soin  d'extraire  quelques  échantillons  de  cha- 
cune des  étoffes  qu'elle  contenait,  suaire  et  vêtements, 
et  de  les  déposer  sous  verre  au  Musée  ecclésîologique 
du  diocèse. 

Tombeau,  Quand  le  corps  fut  levé  de  terre,  on  ra- 
massa, non-seulement  ce  qui  l'avait  composé,  mais 
encore  et  par  respect,  le  bois  dans  lequel  il  avait  été 
renfermé  et  les  pierres  auxquelles  il  avait  touché  im- 
médiatement. Aussi  le  procès-verbal  du  12  avril  con- 


—  .335  — 

tienl-il  cet  article,  sous  le  n^  10  :  «  Scories  noirâtres, 
mêlées  de  chaux.  —  Terre  noirâtre,  calcinée.  —  Eclats 
de  bois.  —  Morceaux  de  tuf  ou  de  craie,  réduits  à  l'é- 
tat de  globules.  »  Toutes  parcelles  dont  je  n'ai  pas  cru 
inutile  de  faire  profiter  en  partie  le  Musée  diocésain. 


VIII. 


Le  cœur  du  B.  Robert  fut  primitivement  déposé  dans 
l'église  d'Orsan  (1).  Ce  fait  est  établi  d'une  manière 
incontestable  par  le  P.  Nicquet  et  par  Cosnier,  dont 
voici  des  extraits,  car  je  me  tais  volontiers,  quand  je 
puis  laisser  la  parole  aux  auteurs  qui  ont  toute  auto- 
rité pour  être  crus. 

«  Cor  tanti  viri  obtinuit  conventus  de  Ursano,  et  ibi 
honorifica  inclusum  est  pyramide,  et  continua  pietate 
excultum;  ita  ut  ara  quae  proxima  esset,  appellata  fue- 
rit  usque  in  hodiernum  dîem  Ara  Sancti  Cordis,  mul- 
taque  patrata  fuerînt  miracula,  etiamnum  nostris  die- 
bus,  quorum  testimonia  quaedam  habemus,  caetera  vero 
neglîgentia  saeculorum  involvit  silentio  (2).  j8> 

€  Il  (l'archevêque  de  Bourges)  refini  à  Orsan,  avant 
que  de  partir,  le  cœur  de  ce  sien  amy,  et  serviteur  de 
Dieu;  cette  précieuse  relique  fut  mise  en  une  petite 

(1)  Suivant  M.  Félix  Audi  y,  «  la  ccutume  d'inhumer  le  cœur 
isolément  pour  honorer  d'un  culte  particulier  les  saints  et  les  hé- 
ros, ne  remonte  pas  au-delà  du  xii®  siècle,  et  ce  fut  le  B.  Robert 
d'ArbrJssel  qui  en  fut  le  premier  objet.  »  Revue  d'Anjou,  i858, 
n*  de  fétrier,  pag.  312. 

(2)  Cosnier,  pag.  427.  —  Les  Bollandistes  ont  consacré  tout  un 
paragraphe  aux  miracles  opérés  par  Robert  d'Arbrissel  pendant  sa 
yie  et  après  sa  mort. 


-  336  — 

pyramide  de  pierre  de  la  hauteur  de  trois  pieds  envi- 
ron^  que  l'on  voit  encore  à  présent  proche  du  grand 
autel,  contre  la  muraille  de  l'église,  du  costé  de  l'évan- 
gile... Or  cette  pyramide  n'est  pas  en  son  entier,  un 
grand  esclat  en  a  esté  osté  dès  l'an  mil  cinq  cens  soi- 
xante et  dix,  pendant  les  désordres  des  guerres  de  la 
Religion.  Le  soldat  de  Tarmée  du  duc  des  Deux-Ponts, 
qui  entreprit  de  la  rompre,  après  y  avoir  donné  quel- 
ques coups,  devint  aveugle,  quelques-uns  ajoutent,  que 
son  bras  demeura  immobile Le  soldat  aveugle  com- 
mence à  ouvrir  les  yeux  pour  reconnoistre  le  péché 

qui  l'avait  aveuglé voue  et  accomplit  au  mesme 

lieu  une  neufvaine ,  désireux  d'essuyer  l'outrage  qu'il 
avoit  fait  au  sainct.  11  eut,  au  recouvrement  de  sa 
veuë,  au  bout  des  neuf  jours,  un  effet  d'une  faveur 
du  ciel  (1).  » 

«  De  tout  temps  les  processions  se  font  à  la  Pente- 
côte à  l'autel  du  Saint-Cœur,  en  l'église  d'Orsan  et  ce 
cœur  du  serviteur  de  Dieu,  n'a  jamais  eu  autre  nom 
que  de  saint  Cœur  (2).  » 

A  ma  demande,  M?^  l'évêque. d'Angers  voulut  bien 
s'enquérir  du  sort  de  cette  précieuse  relique.  Sa  Gran- 
deur reçut  en  réponse  la  lettre  suivante  que  daigna  lui 
adresser  S.  E.  le  cardinal  du  Pont,  archevêque  de 
Bourges. 

«  Bourges,  le  26  février  <859. 

»  Monseigneur, 

>  Par  votre  lettre  du  7  janvier  dernier,  vous  m'avez 
fait  rhonneur  de  me  demander  des  renseignements 


{{)  P.  Nicquet,  pag.  139-130. 
(2)  Idem,  pag.  201. 


—  887  — 

ayant  pour  objet  de  savoir  ce  qu'était  devenu  le  cœur  du 
B.  Robert  d'Arbrissel,  qui  se  conservait  autrefois  à  Or- 
san,  et  tout  ce  qui  pouvait  se  rattacher  à  cette  précieuse 
relique.  Je  me  suis  empressé,  Moîiseigneur,  de  faire 
faire  des  recherches  à  ce  sujet.  Mais  malheureusement 
ces  recherches  ont  été  sans  résultat.  Il  est  même  fort 
douteux,  que  le  cœur  du  bienheureux  fût  encore  à 
Orsan  au  moment  de  la  révolution.  Un  digne  ecclésias- 
tique qui  a  beaucoup  connu  une  ancienne  religieuse 
de  ee  couvent ,  m'a  dit  qu'elle  lui  avait  souvent  parlé 
des  reliques  conservées  dans  la  maison,  sans  avoir 
jamais:  nommé  une  si  précieuse  relique,  ce  qu'elle  eût 
fait,  selon  toute  apparence,  si  Orsan  avait  toujours 
possédé  ce  trésor.  Je  regrette  vivement  de  ne  pouvoir 
vous  transmettre  une  réponse  plus  satisfaisante. 

»  Agréez,  je  vous  prie,  l'hommage  du  respect  et  du 
dévouement  avec  lesquels  je  suis, 
Monseignèfur, 

Votre  très-humble  et  très-dévoué  serviteur, 

f  CÉLESTIN,  GARD.  DU  PONT 

archevêque  de  Bourges  (1).  » 

Si  le  cœur  n'est  plus  à  Orsan,  n'y  était  même  pas  à 
l'époque  de  la  révolution ,  tout  n'est  pas  perdu  néan- 
moins, car  la  cassette  restituée  aux  Fontevristes  de 
ChemiUé  et  qui  porte  une  inscription  nommant  la  re- 
lique ,  contient  une  partie  du  vrai  cœur  du  bienheu- 
reux. 

Cette  cassette,  reproduite  en  dessin  par  le  Répertoire 

(i)  L'driginal  de  cette  lettre  est  conservé  aux  archives  du  dio- 
cèse. 


—  338  — 

archéologique  de  1^ Anjou,  1860,  n<>  de  juillet,  est  en 
cuivre  ai^entc,  travaillé  au  repoussé.  La  forme  ne 
manque  pas  d'élégance  et  rappelle  parfaitement  le  style 
du  xvii«  siècle.  La  boite  oblongne,  supportée  par  quatre 
pieds  en  boule,  est  surmontée  d'un  toit  aigu  que  cou- 
ronne une  croix  et  qu'accompagnent  à  sa  base  quatre 
vases  tournés.  Sur  chacune  des  quatre  pentes  de  ce 
toit  est  figuré  un  cœur  enflammé  qu'abrite  une  acco- 
lade armortie  en  fleur  de  lis. 

La  face  principale  de  la  boite  porte,  au  milieu  de 
rinceaux  fleurdelisés  et  sur  une  tablette  allongée ,  ces 
simples  mots  gravés  et  séparés  par  des  étoiles  : 

*  COR  *  B  *  ROBERTI 

Le  revers  est  égayé  par  des  rinceaux  et  des  fleurs  de  lis. 
Le  couvercle  adhère  par  des  charnières  à  la  boîte, 
qui  est  divisée  ou  plutôt  close  par  une  plaque  de  mé- 
tal, dans  laquelle  deux  trous  circulaires  ont  été  pra- 
tiqués pour  recevoir  deux  fioles  de  cristal  (1),  dont  le 
contenu  poussiéreux  est  dénommé  par  une  étiquette  en 
parchemin  ou  on  lit  en  lettres  noires,  précédées  d'ini- 
tiales rouges  : 

Cor  .  B  . 

RoBERTI  . 

D'autres  étiquettes,  également  en  parchemin,  authen- 
tiquent cette  relique,  dont  elles  fixent  la  translation  à 
Fontevraud,  au  premier  octobre  1646. 

(i)  L'une  de  ces  fioles  est  en  verk'e  mince,  tourné  en  trois  en- 
droits; le  goulot  a  été  cassé.  —  Les  religieuses  m'ont  affirmé  que 
dans  l'autre  fiole  était  un  morceau  d'iln  des  clous  de  la  Passion 
de  N.  S. 


—  339  — 

Tel  est  le  texte  de  ces  étiquettes,  qui  désignent  trois 
sortes  de  reliques  :  du  cœur  du  bienheureux,  des  boîtes 
qui  renfermaient  ce  cœur  et  du  doigt  de  rarchevêque 
Léger. 

«  De  la  boëte  de  bois  qui  renferraoit  lad,  boëte  d'y- 
voire  et  ledit  cœur,  —  De  la  boëte  d'yvoire  qui  renfer-- 
moit  immédiatement  le  cœur  du  B.  H.  (1)  ROBERT,  et 
qui  se  réduisit  en  morceaux.  > 

€  Du  cœur  du  B.  H.  ROBERT.  —  De  la  boëte  d'y- 
voire  où  estoit  ce  cœur.  —  De  la  boëte  de  bois  qui 
renfermoit  l'un  et  l'autre.  —  Du  doigt  de  Léger, 
arch.  de  Bourges,  » 

«  Le  cœur  du  B.  H.  Robert  fut  translaté  d'une  par- 
tie de  l'église  d'Orsan,  en  un  autre  lieu,  par  le  P.  Jean 
Lardier,  1«r  visiteur  de  la  province  d'Auvergne,  et  en 
a  réservé  la  portion  qui  est  en  cette  boëte  qui  est  un 
peu  meslée  de  la  poudre  de  la  boëte  de  bois  qui  y 
tomba.  Ledit  P.  Jean  Lardier  a  faicl  enchâsser  ce  cœur 
dans  ce  grand  vase  en  mémoire  d'une  griefve  maladie 
ou  il  fut  dix  jours  en  extrémité  et  pour  son  subject 
mad.  Jeanne  Baptiste  de  Bourbon  et  la  compagnie  de 
Font-Evraud  le  voua  au  B.  H.  Robert  et  receut  guari- 
son.  La  translation  dud,  cœur  fut  faicte  le  i«r  oct, 
.646.  B 

«  Dans  l'acte  est  escript  et  signé  dans  la  page  185, 
du  livre  de  la  visite  d'Auvergne  marqué  sut  le  dos  F. 
F.  F.  en  la  1 .  fenestre  des  Chartres  de  Font-Evr.  » 

(1)  Bien  Heureux. 


-  340  — 


IX. 


Les  religieuses  Fontevrisles  de  Cheraillé  possèdent 
un  bâton  abbatial  qu'elles  vénèrent  comme  relique  du 
bienheureux  Robert  (1). 

Ce  bâton,  haut  d'un  mètre  45  centimètres,  est  en  bois 
de  chêne  arrondi  et  diminué  vers  sa  pointe,  qu'arme 
une  garniture  en  cuivre  taillée  à  pans  et  divisée  par 
deux  boules  d'inégale  grosseur. 

La  partie  supérieure,  beaucoup  plus  ornementée,  se 
compose  de  trois  morceaux  de  cristal  de  roche  (2), 
retenus  par  des  viroles  de  cuivre  ciselé  et  enfilées  dans 
une  tige  également  en  cuivre,  serrée  au  sommet  par 
un  boulon  qu'orne  une  pierre  violette.  Or  ces  trois 
morceaux  se  superposent  ainsi  :  une  boule  formant 
nœud,  un  cristal  oblong  prolongeant  le  manche,  et  une 
traverse  en  olive  fixée  par  des  palmettes  de  cuivre  et 
dessinant  le  Tau  où  potence. 

Tel  était  à  celte  époque  le  bâton  abbatial,  qui  par 
sa  forme  différait  de  la  crosse  épiscopale  contournée 
en  volute. 

Je  n'ai  point  à  insister  sur  un  détail  archéologique, 
fort  connu  et  déjà  savamment  élucidé  par  les  Annales 
Archéologiques  de  M.  Didron  (3),  les  Mélanges  d'archéo- 

(1)  y.  un  dessin  de  oe  bâton  dans  h  Répertoire  ardUoloffique  de 
V Anjou,  1860,  n«  de  juillet. 

(2)  c(  Hic  baculus  ex  osse  et  ligne  efficitur,  cristallina  Tel  deau- 
rata  spherula  conjunguntur,  suprême  capite  insignitur,  in  extremo 
ferre  acuitur.  » 

Honorius  Augustodunen.  Gemtna  animœ,  lib.  I,  c  .p.  209. 

(3)  T.  X,  pag.  177-179. 


—  344  — 

logie  du  P.  Martin  (1),  et  le  Bulletin  du  Comité  de  la 
langue,  de  V histoire  et  des  arts  de  la  France  (2).  Je 
tiens  seulement  à  en  préciser  l'attribution. 

Le  style  est  conforme  de  tout  point  à  Tépoque  du 
bienheureux  et  accuse  la  fin  du  xi^  ou  le  commence- 
ment du  xiie  siècle. 

Mais  là  n'est  pas  la  difficulté.  Je  veux  seulement 
savoir  et  par  conséquent  rechercher  quand  Robert 
d'Arbrissel  se  servit  de  ce  bâton,  biéii  certainement 
bâton  abbatial. 

Ce  ne  dut  pas  et  ce  ne  put  pas  être  à  Fontevraud , 
puisqu'il  n'en  fut  jamais  abbé,^  la  juridiction  spirituelle 
ayant  été  dévolue  entièrement  et  sans  réserve,  par  le 
fondateur  lui-même,  à  la  seule  abbesse. 

Je  ne  m'arrête  point  à  discuter  si  ce  bâton  fut  celui 
de  Pétronille  de  Chemillé ,  parce  que  j'admets  la  tra- 
dition qui  n'est  sous  aucun  rapport  invraisemblable. 

Mais  je  crois  qu'il  faut  remonter  dans  l'histoire  plus 
haut  que  la  fondation  de  Fontevraud,  et  ne  pas  craindre 
d'affirmer  que  ce  bâton  servit  à  Robert  d'Arbrissel 
pendant  son  abbatiat  à  la  Roë. 

Or  Robert  fut  le  premier  abbé  de  la  Roë,  abbaye 
fondée  au  diocèse  d'Angers,  en  1093,  et  confirmée  en 
1096.  Une  charte  de  l'abbaye  le  nomme  :  «  Dorainus 
Robertus  de  Abrissel^  primus  Pater  congregatiouis  de 
Rota,  »  Cosnier^  page  21. 

Une  autre  charte,  d'une  date  postérieure,  n'est  pas 
moins  explicite  : 

(4)  T.  ni. 

(2)  Année  1857,  pag.  518  et  suiv. 


—  â42  — 

«  Nullus  hominum  derogare  audeal  operi  mîse- 

rîcordi»,  quod  fecit  olim  Dominus  Robertus  de  Arbrî- 
sel  primus  Frater  et  Pater  vestrae  congregationis  (1).  » 


X. 


J'aborde  maintenant  la  question  liturgique  et  je  vais 
essayer  de  produire  quelques  témoignages  en  faveur  du 
culte  public. 

Trois  documents  me  sont  fournis  par  les  manuscrits 
provenant  de  Tabbaye  de  Fontevraud  et  qui  sont  ac- 
tuellement entre  les  mains  des  Fontevristes  de  Che- 
mille. 

Le  premier  est  un  Conlumier  rédigé  sous  l'abbatial 
de  M^ûe  de  Roohechouart  (2)  et  remis  en  ordre  par 
Mme  d'Antin,  en  4775.  La  fête  du  bienheureux  y  est 
ainsi  réglée,  avec  un  cérémonial  particulier. 

<  VIGILE   DE   S^  MATHIAS. 

»  Le  jour  de  cette  vigile,  on  dit  la  messe  comme  il 
est  dit  aux  vigiles  d'apôtres.  Si  elle  se  rencontre  en 
carême^  on  n'en  fait  rien. 

»  Ce  jour  là,  on  commence  la  neuvaine  du  bienheu- 
reux S.  Robert  :  on  dit  une  messe ,  à  sjx  heures  du 
matin. 

>  Après  l'eau  bénite  de  vêpres,  on  commence  le  sa- 

(1)  Gosnier^  pag.  79. 

(2)  II  y  eut  deux  abbesses  de  ce  nom  :  Tune  de  1670  à  1704^ 
l'autre  de  1704  à  1742.  Le  Couiumier  de  M"**  de  Pardaillan  d'An- 
tin^  élue  abbesse  en  176S^  ne  précise  pas  à  laquelle  des  deux^  la 
lanteou  la  nièce,  le  premier  coutumier  doit  être  reporté. 


.-  343  — 

lut  par  le  Te  Deum  et  l'hymne  Cingebant  pariter,  et, 
s'il  y  a  tnandatUYifi  (1),  il  se  fait  avant  le  salut.  Toutes 
les  cloches  doivent  sonner. 

s»  Si  c'est  en  carême,  il  commence  à  quatre  heures 
et,  s'il  y  a  vigiles,  c'est  à  quatre  heures  trois  quarts^ 
et  quand  il  y  a  mandatumy  à  cinq  heures  un  quart, 
ensuite  on  fait  le  mandalum  et  de  là  on  va  à  la  colla- 
lion  qui^doit  sonner  à  l'ordinaire. 

»  Le  jour  de  la  fêle  du  bienheureux  Robert  (2),  on 
fait  l'exposition  du  S*.  Sacrement,  à  six  heures  du  ma- 
lin :  on  sonne  la  grosse  cloche  à  cinq  heures  et  demie. 

>  Après  la  bénédiction,  on  commence  la  messe  et 
l'exposition;  si  c'est  dans  le  carême,  on  dit  prime, 
sitôt  que  la  communion  est  donnée,  en  cas  qu'il  y  ait 
vêpres  le  matin.  Il  est  fête  ce  jour  là  et  le  père  sacris- 
tain ne  souffre  point  qu'on  travaille  dans  l'abbaye, 
non  plus  que  lé  jour  de  S.  Benoît  et  de  la  Visitation. 

r  II  y  a  migravii  à  prime  ;  il  faut  aclocher  (3)  aux 
versets  pour  faire  sonner  les  grosses  cloches.  C'est 
l'armoire  qui  doit  le  chanter.  La  Communauté  est  de- 
bout pendant  qu'il  se  chante.  Etant  fini  on  fait  une 
petite  pose.  La  supérieure  frappe,  puis  on  s'assied 
pendant  la  Calende  et  on  fait  cesser  la  grosse  cloche. 

»  En  carême ,  on  dit  prime ,  tierce ,  la  grand'messe 
de  S.  Mathias  et  sexte  ;  il  n'y  a  point  de  procession  du 
saint.  La  messe  de  prime  se  dit  pendant  les  offices. 

>  On  sonne  le  premier  coup  à  neuf  heures  et  un 

(1)  Le  mandatum  se  faisait  le  premier  samedi  de  chaque  mois. 

(2)  24  ou  25  février,  suivant  que  rannée  est  ou  n'est  pas  bis- 
sextile. 

(3)  Son  d'appel. 


—  344  — 

quart,  on  dit  none,  ensuite  on  fait  la  procession  dans 
les  cloîtres,  on  y  chante  Thyrane  et  le  répons  de  la 
Ste  Trinité,  à  la  fin  duquel  la  chantre  prend  le  répons 
Da  mihij  il  se  trouve  à  la  fin  du  processionnal,  à  l'ac- 
tion de  grâces. 

*  On  y  porte  le  bâton  miraculeux  de  notre  bien- 
heureux Père,  tout  le  petit  couvent  (1)  doit  s'y  trouver; 
au  retour,  madame  chante  l'oraison  et  elle  prend  la 
grand'messe  qui  est  de  la  Ste  Trinité. 

»  On  sonne  vêpres  à  l'évangile. 

}>  Si  c'est  en  carême ,  on  sonne  le  sermon  à  trois 
heures,  ensuite  le  salut,  on  y  chante  ce  que  madame 
a  ordonné  ;  après  le  Motistrate^  la  chantre  entonne 
Diidt  Dominus  tnatri  suœ  :  après  la  bénédiction ,  on 
chante  le  Te  Deum,  le  prêtre  dit  à  la  fin  le  verset  Be- 
nedicamus  patrem  et  l'oraison  de  la  Ste  Trinité. 

»  Hors  le  carême,  on  commence  à  sept  heures  prime, 
tierce,  la  grand'messe,  sexte  :  on  ne  fait  point  la  pro- 
cession du  saint. 

>  A  neuf  heures  et  demie,  on  sonne  la  procession; 
le  reste  se  fait  comme  ci-dessus. 

j>  Tous  les  jours  de  l'octave,  on  dit  une  messe  à  six 
heures  et  on  a  permission  d'y  communier. 

»  Le  jour  que  nos  pères  chantent  la  messe  du  S.  Es- 
prit (2),  si  c'est  en  carême,  l'office  se  dit  de  suite  ;  la 
messe  de  prime  se  dit  pendant  les  offices,  on  sonne 
vêpres  à  dix  heures  et  demie. 

»  Hors  le  carême,  on  prend  un  jour  de  jeûne,  afin 

(1)  S.  Lazare^  qui  serrait  aux  religieuses  infirmes  ou  faibles.. 

(2)  Le  lundi,  s'il  n'y  a  pas  de  saint. 


—  345  — 

d'avoir  assez  d'espace  pour  chanter  l'office  qui  ne  se 
dérange  point. 

]>  Si  S.  Robert  arrive  un  dimanche  de  carême,  il  est 
remis  avec  la  fête  de  S.  Mathias  au  lundi >  avec  les  in- 
dulgences. » 

Le  second  document  est  l'hymne  de  S.  Robert,  que 
mentionne  le  Coutumier.  Je  la  transcris  sur  un  ma- 
nuscrit du  xviiie  siècle,  contenant  les  prières  de  la 
Neuvaine  et  d'autres  prières  à  l'usage  des  religieuses  (1). 

HYMNE  DE  SAINT  ROBERT. 

I. 

Cingebant  pariter 
Purpuream  crucem 
Jésus  Virgo  parens 
Chorus  et  assecla 
Ambos  cum  moriens 
Spectat  et  alterum 
Commendat  pius  alteri 

II. 

Matri  discipulum 
Filius  obsequens 
Proie  substituit. 

(1)  Outre  ces  deux  manuscrits,  j'ai  yu  à  Chemillé  un  recueil  de 
Messes  in-4%  rouge  et  noir,  que  j'attribue  au  xviii*  siècle.  Chaque 
messe  est  désignée  par  un  nom  spécial.  Parmi  les  messes  dites  de 
saint  Martin,  de  saint  François^Xavier,  du  saint  Sacrement,  de  la 
sainte  Trinité,  etc.,  il  en  est  une  nommée  Mitu  de  iaint  Roberi, 
BIP.  ARC.  25 


—  346  — 

Mox  studio  pari 
Matrem  discipulo 
Vindidat  et  novo 
Firmat  fœdera  vinculo. 

m. 

Hoc,  Roberte  pater, 

Fœdus  in  ipsum 

Dum  quos  eximiis 

Legibus  erudis 

Hanc  utramque  jubés, 

Reddere  moribus 

Nec  non  obsequius  vicem 

IV. 

Nunc  ô  posce  tuis 
Posce  sequacibus, 
Duplex  ut  tuus  bis 
Spiritiis  haereat, 
Nunquam  dissocient 
Odia  quos  amor 
Tantus  copulat  invicem 

V. 

Fac  hostis  superént 
Tela  nequissimi. 
In  vitae  variis 
Sordibus  adjuva. 
SacrdB  fac  pretio 
Mortis  ad  ultimum 
Cœli  praemia  comparent. 


—  347  —  -    ^ 

VI. 

Francomm  super  bœc 
Lilia  protège, 
De  vota  quse  alias 
Gentis  heu  malam 
Sortem  commiserans 
Finibus  Ânglicis 
Fac  exors  redeat  fides 

VII.      . 

Jésus,  sit  tibi  laus 

In  cruce  virginuin 

Amborum  médius, 

Qui  médius  Patris 

Yerbum  cuncta  creans 

Atque  paracliti 

Regnans  ssBcla  per  omnia.  Amen. 

^  Ora  pro  nobis,  sancle  Roberle. 

^  Ut  digni  efficiamur  promissionibus  Chrisli. 

» 

OREMUS. 

Beati  Roberli  confessons  tui  quesumus,  Domine, 
salutaribus  institutis  eruditi  fac  nos  eodem  interve- 
niente  in  eam  filii  tui  Domini  nostri  Jesu  Christi  partem 
venire  cujus  nos  œmulatores  esse  prestitisti.  Per  eum- 
dem  Dominum. 

Le  troisième  document  est  une  consultation  de  la 
Sorbonne,  relative  à  Tindulgence   plénière   (1)  que 

(1)  Les  religieuses  de  Ghemiilé  possèdent  dans  leur  bibliothèque 
plusieurs  brefs  ou  directoires;  le  plus  ancien  date  de  4783  et  le 


garaient  les  religieuses,  le  jour  où  elles  fêtaient  saint 
Mathias.  Je  dis  saint  Mathias,  et  non  pas  saint  Robert^ 
parce  que  c'est  un  principe  de  droit  que  Ton  n'accorde 
pas  d'indulgences  à  l'occasion  de  saints  non  inscrits 
dans  le  martyrologe  romain  ou  non  canonisés  (1). 

«  Il  a  été  décidé  en  Sorbonne  par  Messieurs  du  con- 
seil de  conscience,  en  4782,  sur  le  vu  du  bref  d'in- 
dulgence plénière  accordé,  à  tout  l'Ordre  de  Fonte- 
vrault,  le  jour  de  saint  Mathias,  qui  arrive ,  suivant  le 
calendrier  romain,  le  24  février,  que  si  cette  fête  est 
transférée  au  jour  suivant  non  empêché,  soit  parce 
qu'elle  arrive  les  dimanches  de  la  Sexagésime ,  Quin- 
quagésime,  Quadragésime ,  ou  jour  des  Cendres,  les 
dites  indulgences,  suivant  les  termes  exprimés  dans  le 
dit  bref,  ne  sont  pas  attachées  au  jour  où  tombe ,  sui- 
vant le  calendrier,  la  fête  de  saint  Mathias,  mais  au 
jour  où  on  fête  et  fait  l'office  dudit  saint  en  l'honneur 
duquel  elles  ont  été  demandées  et  obtenues;  et  que 
c'est  aussi  en  ce  jour  qu'on  doit  exposer  le  Saint-Sacre- 
ment, si  on  est  dans  l'usage.  » 


dernier  de  1790.  Or  c'est  seulement  dans  ceux  de  1787  et  de  1790^ 
qui  ont  pour  titre  :  a  Bref  ou  Directoire  pour  réciter  l'office  divin 
selon  le  Bréviaire  Romain  h  l'usage  des  religieuses  de  l'ordre  de 
Fonteyraud  ;  »  Saumur,  De  Gouy^  que  je  lis  cette  note  :  a  Indul- 
gence plénière  en  tout  l'ordre,  »  le  jour  de  la  fête  de  saint  Ma- 
thias. 

(I)  «  Eminentissimi  Patres  eidem  S.  €.  praepositi  censuerunt  : 
Indulgentias  non  esse  concedendas  in  posterum^  nisi  sanctis  des- 
criptis  in  Martyrologio  et  Ganonisatis.  »  Gardellini,  Décréta  auther^ 
tiea  Cangregalioniê  Sacrortun  Rituum^  in  una  Urbis,  ad  ann.  1674, 
t.  l,  p.  467^  n«  2704. 


—  349  — 


XI. 


Le  Couiximier  vient  de  parler  du  Migravit  ou  nécro- 
loge  de  l'abbaye  de  Fontevraud,  qui  se  lisait  à  prime. 
J'ai  voulu  le  consulter  à  la  Bibliothèque  impériale, 
pour  pouvoir  le  citer. 

II  est  remarquable  que  le  nom  de  Robert  d'Arbrissel 
n'y  soit  pas  précédé  de  la  qualification  de  bienheureux 
ou  de  saint.  Or  ce  nécrologe  date  du  xiv®  siècle,  selon 
la  suscription  qui  est  en  tête  : 

«  L'an  de  grâce  1395  fist  Janne  Gautère  relig.  du 
Moustier  de  Fontebrauld,  escripre  ceste  kalende  ad 
loueur  de  Dieu  et  de  la  Vierge  Marie  à  l'usage  dudit 
moustier  et  couvent,  et  pour  faire  chacun  an  son  anni- 
versaire et  cousta  ladite  kalende  le  pris  de  seze  frans 
et  demy  (1  ) .  » 

Telle  est  la  note  du  Migravit  qui  concerne  Robert 
d'Arbrissel  : 

«  Février 

»  Le  23  Nostre  très  R^  P.  M^  Robert  de  Arbrincelles 
fondateur  de  l'Ordre  de  Fontevr.  vigiles  les  Répons 
comme  le  jour  des  Morts  et  2  jours  en  suiv*  vigiles  à 
3  leçons  (2).  » 

Gaignières  a  fait  copier  deux  autres  Migravit.  Le 
premier,  qui  est  celui  de  S.  Lazare,  quoique  très-long, 
n'a  même  pas  une  mention  pour  Robert  d'Arbrissel. 

Le  second,  qui  appartenait  à  l'abbaye  de  Fontaines, 
parle  du  père,  de  la  mère,  de  1^  nièce  du  fondateur, 

(1)  Gaignières,  t.  II,  p.  i09  et  suit. 

(2)  Page  142  verso-. 


—  350  — 

de  la  première  abbesse  instituée  par  lui,  mais  se  tait 
complètement  sur  Robert  lui-même. 

€  Februarius.  —  3^  nonas.  Orvendis  Mater  Domini 
nostri  Roberti  patris  nostri.  ]»  c  Januarius.  —  x\i.  Kal. 
febr.  Fulcodius  paler  Domini  Roberti  patris  nostri.  n 
€  Aprilis.  —  8  Kal.  maii.  Domina  PetronîUa  incorapa- 
rabilis  et  inrecuperabilis  mater  nostra  à  Domino  magis- 
tro  nostro  Roberto  Ecclesie  Fontisebraudi  prima  consti- 
tuta  abbatissa.  ]» 

<  Martius.  —  Rien  de  Robert.  ^^^.  nonas  Ennargaad 
monaca  nepta  Domini  Roberti  patris  nostri.  > 


XII. 


Les  calendriers  des  livres  liturgiques  de  Fontevraud 
sont  devenus  de  véritables  obituaires ,  depuis  qu'ils  se 
sont  enrichis,  au  jour  de  leur  décès,  de  la  nomencla- 
ture des  principaux  personnages,  fondateurs  ou  bien- 
faiteurs de  Tabbaye. 

En  1513  et  15%  (1),  la  mort  de  Robert  est  ainsi 
enregistrée  :  <  vi  Kal,  mart.  Matthie  Apostoli.  Duplex. 
Obitus  Reverendi  patris  magistri  Roberti  de  Abrynscello 
nostri  ordinis  institutoris.  )> 

En  1537,  1544,  1545  et  1595  (2),  cette  simple  roen- 

{{)  oc  Breviarium  Deo  dicatarum  virginum  ordinis  Fontisebraldi.  » 
Thielman  Kerver,  Parisiis,  1518  (Bibl.  Sainte-Geneviève,  BB ,  88i). 
—  2*^  édition  en  1526,  gothique,  rouge  et  noire,  en  deux  parties 
(Ibid.y  BB,  1440). 

(2)  ce  Psalterium  cum  cpmmuni  secundum  usum  reformationis 
ordinis  Foûtiebr&ldi.  »  Parisiis,  Thielman  Kerver,  4527,  petit  in-S® 
(Bibl.  Sainte-Geneviève,  BB,  1445).  —  «  Hore  beatissime  Virginis 


-  851  — 

tion  a  disparu  pour  ne  reparaître  qu'en  1606,  sous 
cette  forme  analogue,  au  jour  de  saint  Mathias  :  c  Obitus 
Reverendi  Patris  magistri  Roberti  de  Arbrynseello , 
nostri  ordinis  institutoris.  » 

En  1581,  même  silence  dans  le  beau  manuscrit, 
couvert  d'émaux,  que  possède  Téglise  de  Saint-Rémy 
à  Reims  (1). 

Le  P,  Sirmond,  qui  a  rapporté  la  Chronique  de  Saint- 
Aubin  j  ne  nous  apprend  rien  de  plus  quant  au  culte 
public,  dans  cette  phrase  purement  historique  : 

€  Anno  MCXVI.  Obiit  Robertus  de  Arbrissellis ,  V. 
Kal.  Martii.  Iste  fuit  fundator  monasterii  Fontis 
Ebraldi.  > 

Maris  secundum  usum  ordinis  Fontisebraldensîs.  »  Thielman 
Kerver,  Parisiis,  1544,  pet.  in-8**  (Bibl.  Sainte-Geneviève,  BB, 
1446).  —  «  Dévote  orationes  partim  sélecte  et  emendate^  partim 
recens  composite  pro  sancti  monialibus  et  femjnis  devotis.  »  Thiel- 
man Kerver,  Parisiis,  1544,  petit  in-8®  (Bibl.  Sainte-Geneviève). 
—  c(  Psalterium  ordinatum  per  ferias  secundum  usum  ordinis 
Fontisebraldi.  »  Thielman  Kerver,  Parisiis,  1545,  petit  in -8®  (Bibl. 
Sainte-Geneviève).  —  «  Divinum  ofûcium  ad  usum  sacri  ordinis 
Fontebraldensis ,  accurate  recognitum  et  emendatum.  p  Parisiis, 
H.  de  Marnef,  1595  (BibL  Sainte-Geneviève,  BB,  1446). 

(1)  «c  Textus  primus  Ëvangeliorum  de  tempore  quse  in  missis  a 
prima  dominica  advontus  ad  feriam  quintam  cœnae  Domini  usque 
in  ecclesia  monasterii  sancti  Pétri  Remensis,  ordinis  Fontisebraldi 
decantari  soient,  additis  evangeliis  quorumdam  festorum  que  eodem 
tempore  celebrantur  et  nonnulUs  que  in  communi  sanctorum  an- 
notantur,  cum  indice.  Expensis  lUrnse  Principis  et  Domin»  Do- 
miniB  Uenatœ  ex  Lotharingia  prsedicti  monasterii  abbatissse  absolu- 
tus.  Anno  Domini  M.D.LXXXI.  »  In-folio  de  233  pages  de  vélin. 


-  352  — 


XIII. 


Du  Saussay  a  donné  une  place  à  Robert  d'Arbrissel 
parmi  les  corollaires  de  son  Martyrologium  Gallicanum, 
ainsi  que  l'abbé  Chastelain  dans  son  Martyrologe  uni' 
versely  mais  ce  dernier  semble  le  considérer  simplement 
comme  un  pieux  personnage,  puisqu'il  n'ose  même 
pas  le  décorer  du  titre  de  bienheureux^  que  lui  accorde 
du  Saussay. 

Voici  ce  qu'il  en  dit,  au  tome  I,  page  97  (Paris, 
1709): 

«  4H6.  A  Orsan  en  Berry,  le  décès  du  vénérable 
Robert  d'Arbrisselles,  prêtre,  fondateur  de  l'abbaye 
de  la  Roë,  près  de  Craon  en  Anjou,  sous  la  règle  de 
saint  Augustin,  et  instituteur  de  Tordre  de  Fontevrauld^ 
sous  celle  de  saint  Benoist.  —  Ursani...  R.  de  Arbus- 
ticellis.  Mort  le  jour  de  saint  Mathias  en  bissexte.  Rota. 
Credo,  onis.  —  0.  Fontebraldensis,  > 


XIV. 


«  Es  anciennes  litanies  de  l'Ordre,  après  l'invocation 
de  saint  Benoist,  on  adjoustoit  Sancte  Roberie  magister 
bonej  ora  pro  nobiSy  et  cesle  mesme  prière  estoit  autre- 
fois commune  en  la  bouche  du  peuple,  es  quartiers  de 
Berry  et  de  Poictou ,  dépositaires  de  ses  sacrées  re- 
liques (1).  » 

c  Mais  l'on  rendit  bien  dans  la  suite  d'autres  hon- 

(i)  p.  Nicquet,  p.  200. 


—  353  — 

neurs  à  nostre  saint  (Robert  d'Arbrissel) ,  car  comme 
l'estime  de  sa  sainteté  s'accrut  toujours  de  plus  en 
plus,  Ton  mit  son  nom  dans  les  litanies  de  Tordre 
après  celuy  de  saint  Benoist,  et  dans  les  calendriers 
du  Missel  et  du  Bréviaire,  afin  qu'on  en  fist  mémoire 
tous  les  ans  au  jour  de  son  decez  (1).  » 

Nicquet,  qu'on  vient  d'entendre,  écrivait  en  1642. 
Or,  malgré  ses  affirmations,  je  puis  avec  plus  de  cer- 
titude, contester  son  autorité,  car,  dans  aucun  livre 
liturgique  des  xvi®  et  xvii«  siècles,  jusqu'à  la  fin  du 
siècle  dernier,  je  n'ai  vu  saint  Robert  figurer  ni  après 
saint  Benoit ,  ni  ailleurs ,  dans  les  litanies  de  l'Ordre, 
et  si  son  nom  est  inscrit  dans  les  calendriers  du  Missel 
et  du  Bréviaire,  ce  n'était  pas  afin  qu'on  en  fist  mémoire 
comme  d'un  saint  qu'on  glorifie  et  qu'on  intercède, 
mais  plutôt  comme  d'un  personnage  qui  peut  encore 
avoir  besoin  dé  prières  et  pour  l'âme  duquel  on  offre 
le  saint  sacrifice. 


XV. 


Dès  le  xiv«  siècle,  le  non-culte  est  incontestable,  ainsi 
qu'on  peut  s'en  convaincre  par  le  Migravit  de  1395 
qui  ordonnait  de  réciter,  pour  l'anniversaire  de  Robert 
d'Arbrissel,  les  vigiles  des  morts  pendant  trois  jours 
consécutifs,  la  veille,  le  jour  et  le  lendemain  du  décès. 

Le  Missel,  publié  par  les  soins  de  l'abbesse  Eléonore 
de  Bourbon,  en  1606,  est  plus  explicite  encore,  car  il 
contient  une  rubrique  qui  prescrit  que,  tous  les  mardis 


(1)  Nicquet,  p.  289. 


-  354  - 

de  Tannée,  une  messe  de  Requiem  soit  célébrée,  le 
matin 9  à  l'issue  de  Matines,  pour  le  Révérendissime  ins- 
tituteur de  F&ntevraud.  Je  cite  textuellement  la  ru- 
brique  : 

<  Singulis  diebus  super  bebdomadam,  si  non  sit 
missa  propria  alicujus  festivitatis,  aut  sicut  dictum  est 

supra missa  matutinalis  celebretur  pro  defunctis 

REQUIEM  ut  sequitur (1). 

»  Feria  tertia,  pro  Reverendissimo  institutore  noslro. 
Oratio.  Beati  Âpostoli.  Episto,  Ecce  mysterium  vobis 
dico.  Evangelium*  Ego  sum  panis  vivus.  i 

Voici  cette  oraison,  qui  est  celle  que  Ton  dit  pour 
un  prêtre  défunt,  pro  sacerdote  : 

€  Beati  Apostoli  tui  Pétri,  quœsumus.  Domine,  in- 
tercessione  nos  protège  et  animam  famuli  tui  sacerdotis 
sanctorum  tuorum  junge  consorliis.  » 

La  rubrique  de  Tépitre  s'exprime  ainsi  : 

<  Feria  iij.  Pro  reverendissimo  pâtre  institutore  nos- 
tro  seu  sacerdotibus  epistola  sequens  dicitur  ad  Corin- 
thios,  1.  15(2).  > 

(i)  Le  lundi,  la  messe  se  disait  pour  les  défunts  en  général^  le 
mardi  pour  Robert  d'Arbrissel,  le  mercredi  pour  les  défunts  de 
l'ordre,  le  jeudi  pour  les  parents  des  religieuses,  le  vendredi  pour 
les  bienfaiteurs,  le  samedi  pour  les  rois  et  reines  fondateurs  de 
l'abbaye. 

(2)  «  Missale  ad  usum  ordinis  Fontisebraldensis  accaratius  quam 
hacteuus  (repositis  quœ  ex  an  tiqua  observantiâ  desiderabantur), 
satagenti  reverendissima  et  illustrissima  D.  Ëleonora  de  Borbonio, 
totius  ordinis  antistita,  ac  christianissimi  Régis  Henrici  IIU  amita, 
editum.  »  Paris^  Joan,  Le  Bouc,  1606,  in-f^. 


j  —  355 


I 


XVI. 

Plusieurs  attributs  caractérisent,  en  iconographie, 
le  bienheureux  Robert.  Ce  sont  : 

L'Esprit-Saint,  qui,  sous  la  forme  d'une  colombe, 
l'inspire  dans  ses  prédications;  le  surplis,  couvert  du 
camail,  qu'il  porte  comme  missionnaire  apostolique  ;  la  I 

chasuble,  dont  il  est  revêtu,  parce  qu^il  fut  prêtre; 
l'anneau,  la  mître  et  le  bâton,  qui  symbolisent  la  di- 
gnité abbatiale. 

Nous  avons  du  bienheureux  quelques  représentations 
peintes  ou  gravées,  qu'il  importe  de  ne  pas  négliger 
dans  ce  travail  spécial. 

La  première  gravure  date  de  1667  et  accompagne 
l'ouvrage  de  Pavillon.  Elle  est  signée  :  Vallet  sculp,  La 
lettre  porte  :  «  Le  vénérable  serviteur  de  Dieu  Robert 
d'Arbrissel,  instituteur  de  l'ordre  de  Fontevrauld.  » 

Robert  est  agenouillé  devant  un  crucifix,  planté  sur 
un  rocher,  d'où  sort  une  fontaine ,  et  qui  lui  dit  : 
«  Inspice  et  fac  secundum  exemplar  quod  tibi  in  monte 
raonslratum  est  (1).  »  Le  Christ  s'adresse  également  à 
Marie  qu'il  confie  à  saint  Jean  :  «  Ecce  filius  tuus  (2),  » 
et  à  l'apôtre  qu'il  donne  pour  fils  à  la  Vierge  :  «  Ecce 
mater  tua  (3).  » 

Aucun  des  trois  personnages  n'est  nimbé  ;  le  Christ 
seul  a  la  tête  rayonnante.  Robert  se  distingue  par  ses 
cheveux  rasés  et  coupés  en  couronne,  le  costume  tno- 

(1)  Exod.,  c.  XXV,  f,  40. 

(2)  s.  Joann.»  c.  xix>  j^.  26. 

(3)  S.  Joann.,  c.  xix,  j^.  27, 


-  356  — 

nastique,  le  chapelet  (1)  au  côté  et  les  mains  étendues. 
Au  commencement  des  dissertations  du  P.  de  la 
Mainferme,  figure  la  même  gravure,  mais  réduite  et 
différenciée,  seulement  en  ce  que  l'artiste  y  a  ajouté  un 
scapulaire  court,  des  rayons  autour  de  la  tête,  une 
mitre  et  une  crosse  couchées  à  terre.  On  lit  à  la  lettre  : 

m 

«  B.  Robert  d'Arbrissel,  instituteur  de  Tordre  de  Font- 
Evrauld.  > 

Cette  gravure  date  de  1683,  et  la  suivante  de  1648, 
époque  à  laquelle  elle  fut  chargée  dHUustrer  le  livre  du 
Fr.  Sébastien  Ganot. 

Robert  prêche,  dans  la  forêt  de  Craon,  devant  une 
foule  considérable  d'hommes  et  de  femmes  qui  l'écoutent 
attentivement.  Il  est  vêtu  du  surplis  bordé  de  dentelles 
et  du  camail  auquel  pend  un  scapulaire  fort  court. 
Une  colombe  qui  voltige  à  ses  côtés,  lui  souffle  à  Toreille 
les  choses  qu'il  doit  dire. 

La  légende,  empruntée  à  Baldric,  explique  la  pré- 
sence de  cette  colombe,  qui  symbolise  son  éloquence 
persuasive  et  entraînante ,  ainsi  que  l'Esprit  de  Dieu 
dont  il  est  rempli.  «  Intellexit  Vrbanus  PP.  II  quod 
Spiritus  Sanctus  os  ejus  aperuerit.  Baldr.  in  vita  B.  Ro- 
bertj.  »  La  gravure  est  signée  :  t  L  Seguenot.  fecit.  > 
et  intitulée  :  «  S.  Robertus  de  Arbrissello  fvndator 
ordinis  fonlis-ebraldi  concionator  apostolicus.  > 

Les  deux  tableaux  sur  toile  qui  ornent  l'intérieur  du 
monastère  des  Fontevristes  de  Chemillé,  ne  remontent 
pas  au-delà  du  xvii^  siècle  et  proviennent  de  l'ancienne 
abbaye. 

(i)  Voir  dur  l'antiquité  du  chapelet,  qui  n'est  point  ici  un  ana- 
chronisme, Anakcia  juris  poniificii,  t.  IV,  col.  4381  et  suiT. 


—  857  — 

Le  premier,  d'un  style  remarquable,  représente  uiie 
crucifixion  (1).  La:  Madeleine  baise  les  pieds  du  Sauveur, 
qui  parle  à  sa  mère  et  lui  recommande  saint  Jean  : 
mvlier  filtvs  tws.  Marie  présente  à  son  Fils  Tabbesse 
Pétronille  — ce  doit  être  le  portrait  de  Tabbesse  qui  a 
fait  exécuter  le  tableau  —  agenouillée,  les  mains  jointes, 
Tanneau  à  Uannulaire  de  la  droite  et  la  crosse  tournée 
en  dedans  et  appuyée  sur  son  épaule.  Vis«à-vis,  saint 
Jean,  à  qui  Jésus  dit  :  Ecce  mater  tva^  sert  de  protecteur 
au  bienheureux  Robert,  agenouillé,  barbu,  âgé  d'envi-» 
ron  quarante  ans,  vêtu  de  noir  et  priant  les  mains 
jointes.  A  ses  pieds  est  un  bourdon  de  prieur,  que  sur- 
monte une  statuette  de  saint  Jean  abritée  par  un  dais. 

Aucun  des  personnages  figurés  sur  ce  tableau  n'est 
nimbé. 

Je  serais  porté  à  croire  que  le  deuxième  tableau  fut 
peint  pour  accompagner,  en  1646,  le  cœur  du  Bien- 
heureux qui,  sans  doute,  plus  d'une  fois  et  sur  un  autel 
particulier,  fut  exposé  à  la  vénération  publique. 

Au  ciel.  Dieu  le  père,  nimbé  d'un  nimbe  triangu- 
laire et  entouré  d'anges  qui  l'adorent,  regarde  avec 
amour  le  cœur  de  son  Fils  bien-aimé,  au-dessus  du- 
quel plane  la  colombe  divine.  De  ce  cœur  percé  et 
saignant,  jaillissent  des  flammes  que  domine  la  croix; 
il  est  ceint  d'une  couronne  d'épines  et  placé  sur  un 
autel  dont  le  parement  rouge  est  brodé  d'un  cœur. 
Sur  l'autel  y  garni  d'une  nappe  pendante,  sont  rangés 

(i)  Le  petit  sceau  de  l'abbaye,  dont  on  se  sert  encore  à  Chemillé, 
représente  J.-G.  sur  la  croix,  entre  la  sainte  Vierge  et  saint  Jean, 
auxquels  il  parle.  Robert  avait  puisé  dans  ce  sujet  l'idée  de  la 
soumission  de  Thomme  à  la  femme,  pour  la  vie  monastique. 


—  a58- 

une  croix,  deux  anges  adorateurs,  un  tabernacle  de 
bois  doré  et  sur  le  gradin  six  chandeliers  d'inégale  hau- 
teur. A  la  droite  de  l'autel  et  à  genoux,  mains  jointes, 
prie,  suivie  de  ses  religieuses,  Marie  Magdeleine  6a- 
brielle  de  Rochechouart ,  qui  fut  abbesse  de  1660  à 
1704  (1).  Près  d'elle  repose  sa  crosse  abbatiale  et  son 
écusson,  qui  se  blasonne  :  Fascé,  ondéy  endenté  d' ar- 
gent et  de  gueules  de  six  pièces  (2),  abaissé  sous  le  chef 
de  l'ordre ,  qui  est  de  gueules ,  à  deux  clefs  en  sautoir , 
l'une  (For y  l'autre  d'argent  et  une  Vierge^  également  d'or, 
sur  le  tout  (3).  Couronne  de  marquis. 

Au  côté  gauche,  et  suivi  de  ses  religieux,  Robert 
agenouillé  offre  à  Dieu  son  cœur  enflammé  de  l'amour 
céleste.  Il  est  nimbé,  habillé  en  robe  noire,  surplis  à 
dentelles,  camail  à  capuchon  terminé  en  pointe  sur  les 
épaules  et  en  manière  de  scapulaire  par  devant.  A  terre 
et  à  ses  pieds  est  un  bourdon  ou  bâton  prierai ,  sur- 
monté d'une  statuette  de  saint  Jean  (4*). 

(J)  Du  Tems,  Le  Clergé  de  France^U  \l,  p.  489. 

(2)  Recueil  des  travaux  de  la  Société  de  sphragistique,  t.  IV,  page 
327. 

(3)  Les  mêmes  armes  sont  gradées  en  téxe  de  VAntiphonarium 
imprimé  «n  1711,  ayec  cette  «double  Variante  que  la  Vierge  d'or 
est  remplacée  .par  un  clou  delà  Passion  de  sable,  et  que  la  cau*oane 
ducale  est  enfilée  dans  une  crosse  posée  en, pal  et  toùrAée  à  se- 
nestre. 

(4)  L'ordre  entier  et  Tabbaye  de  FouteTraud  étaient  gouvernés 
par  l'abbesse.  Le  prieur  de  Fontevraud  n'avait  juridiction  que  sur 
les  religieux.  L'abbesse  portait  en  conséquence  la  crosse  et  le  prieur 
se  contentait  du  bourdon» 


—  859  — 

XVII. 

Oettinger,  dans  sa  Bibliographie  biographique  univer- 
selle (Bruxelles,  4854),  consacre  un  article, en  treize 
numéros  aux  ouvrages  qui  parlent  de  Robert  d'Ar- 
brissel. 

Je  tâcherai  d'être  plus  complet,  car  pour  quiconque 
étudie  sérieusement,  il  importe  d'être  parfaitement 
renseigné  sur  tous  les  ouvrages  à  consulter  (1). 

4«  Pelletier  (Laurent).  «  Légende  de  Robert  d'Ar- 
brisselles,  avec  le  catalogue  des  abbesses  de  Fonte- 
vrault.  1  Angers,  4586,  in-4o.  (Bibl.  d'Oettinger.J 

•2o  «  Baston  de  déffence,  et  jnirover  des  professevrs 
de  la  vie  régvlière  de  l'abbaye  et  ordre  de  Fontevrault  » 
(par  le  F.  Yues  Magistri  de  Laual).  Angers,  1586,  pet, 
in-4,  vél.  Cet  opuscule  faisait  partie  de  la  bibliothèque 
de  Mcrr  Guillon,  évéque  du  Maroc. 

3o  <  Fontis  Ebraldi  exordium  complectens  opuscula 
duo  cum  nolationibus  de  vita  B.  Roberti  de  Arbresello, 
Fon4^braldensis  ordinis  institutoris  et  quaestionibus 
aUqiiot  de  poiestate  et  studio  abbatissaB,  studio  etoperâ 
Michaêlis  Cosnielr,  sacerdotis  Pictavensis,  in  eodem  loco 
parochi.  i  Flexiœ,  G.  Griveau,  4644,  petit  in-i^  de 
317  pages.  (Bibl.  de  Vévêchéd! Angers,) 

4*>  €  Histoire  de  l'Ordre  de  Fontevraud.  »  Paris, 

(i)  J'omets  à  dessein  dans  ce  catalogue  les  notices  insérées  soit 
dans  les  Dictionnaires ,  conime  Bayle,  Bouillet,  Feller^  etc.,  soit 
dans  les  Vies  des  Saints,  telles  que  Baillet,  Godescard^  etc*,  soit 
enfin  dans  les  Histoires  eedisiastiques  ou  monastiques  de  Baronius^ 
Longueyal,  Mabillon,  Hélyot,  Yepez,  etc. 


—  360  — 

Michel  Soly,  1642,  in-8o  de  547  pages,  avec  une  table. 
Signé  à  la  dédicace  :  €  Honorât  Nicquet,  de  la  Compa- 
gnie de  Jésus.  »  (Bibl.  des  Fontevr.  de  ChetniUé.) 

5®  Autre  édition  de  Nicquet,  Paris,  1646.  {Bibl. 
d' Oettinger .) 

6o  Traduction  en  français  de  l'ouvrage  de  Cosnier, 
par  Jean  Chevalier.  La  Flèche,  1647,  in-S©  {Bibl. 
d^Oeitinger.) 

7°  «  La  vie  du  Bien-heureux  Robert  d'Arbrissel, 
fondateur  de  Tordre  de  Fontevrauld.  »  La  Flèche, 
6.  Griveau,  1648,  petit  in-S^,  signé  à  la  dédicace  à  la 
Reine  régente  :  «  F.  Sebastien  Ganot,  de  Tordre  de  Fon- 
tevrauld, »  avec  une  planche  gravée.  Cet  ouvrage  con- 
tient en  384  pages  :  !<>  la  vie  du  B.  Robert  par  Baldric, 
évêque  de  Dol,  lat.  et  fr.  (1);  2o  les  dernières  années 
et  la  mort  du  Bienheureux ,  par  Fr.  André ,  de  Tordre 
de  Fontevraud,  latin  et  français;  S^  c  Les  Maximes  de 
la  vie  spirituelle  tirées  de  la  vie,  de  Tesprit  et  de  la 
conduite  du  B.  Robert.  »  19  pages.  (Bibl.  des  Foniev. 
de  Chemillé,) 

8o  <  La  gloire  ou  les  éminentes  vertus  du  bienheu* 
reux  Robert  d'Arbrissel,  fondateur  de  Tordre  de  Fon- 
tevrault.  »  La  Flèche,  G.  Griveau,  1648,  petit  in-8o  de 
176  pages.  Ouvrage  anonyme  de  Fr.  S.  Ganot.  (Rare.) 
(Bibl.  des  Fontevr.  de  Chemillé.) 

9»  Raynaudi,  S.  J.  —  <  Trias  fortium  David  :  Rob. 
de  Arbrissello;  S.  Bemardus;  Caesar  de  Bus.  t  Lugduni, 
1657,  in-4o. 

(4)  Il  existe  dans  la  bibliothèque  des  FonteTristes  de  Chemillé 
un  exemplaire  de  cette  même  ^ie,  aux  armes  et  au  chiffre  de  l'ab- 
besse  Jeanne  de  Bourbon  sur  les  plats  de  la  couverture. 


j 


—  361  — 

iO^  Bollandistes.  Acta  sanctorum,  Februar.  t.  III, 
1658,  p.  593-616  (1).  On  y  trouve  reproduites  les  vies 
de  Robert  par  Baldric,  d'après  les  deux  éditions  de  La 
Flèche  (1640  et  1647),  et  par  Fr.  André,  le  tout 
augmenté  d'une  introduction  et  de  notes. 

Il»  «  La  vie  du  bien-heureux  Robert  d'Arbrissel, 
patriarche  des  solitaires  de  la  France,  et  instituteur  de 
Tordre  de  Font-Evraud,  divisée  en  deux  parties  et  jus- 
tifiée par  titres  rares,  tirez  de  divers  monastères  de 
France,  d'Espagne  et  d'Angleterre.  »  Paris,  François 
Coustelier.  Saumur,  François  Ernou,  1666,  in-4o  de 
634  pages.  Signé  à  la  fin  de  l'épître  dédicatoire  €  B.  Pa- 
villon. »  (BibL  de  la  ville  de  Poitiers.) 

12o  Giry  (François).  €  Beati  Roberti  Arbrissellensis, 
ordinis  Fontebraldensis  conditoris,  vita,  transitus,  epi- 
tome  vitœ,  elogia  etmiracula.  »  Rotbomagi,  L.  Maurry, 
1668,  in-8o  de  224  pages.  (BibL  de  r Arsenal,  à  Paris.) 
13°  «  Disserlationes  in  epistolam  contra  B.  Rober- 
tumde  Arbrissello  ordinis  Font-Ebraldensis  fundatorem 
et  doctorem  theoiogum  Parisiensem,  scélérate confictam 
à  Roscelino  hœretico  sub  nomine  Goflfridi  Vindocinensis 
abbatis,  tomo  autem  decimo  quinto  magnae  Patrum 
Bibliothecae  inconsulte  relatam.  »  Salmurii,  F.  Ernou, 
1682,  in-8o  de  168  pages.  Ouvrage  du  P.  de  la  Main- 
ferme.  (BibL  des  Fontevr.  de  ChemilU.) 

14<>  c  Brevis  confutatio  epistolae  a  Roscelino  haeretico 
in  B.  Robertum  de  Arbrissello ,  nequiter  confectse  sub 


(i)  Voir  aussî,  t.  I,  p.  390;  t.  X,  p.  227,  233,  241;  t.  XVII, 
p.  252;  t.  XX,  p.  44;  t.  XLIV,  p.  628;  t.  L,  p.  564;  t.  VII  d'oc- 
tobre. 

RKP.   ARC.  26 


~  362  — 

nomine  Goffridi  Vindocineosis  abbatis.  Salmuri,  Ernou, 
1682,  m-8<>  de  23  pages,  avec  une  planche  gravée. 
(Bibl.  de  l'Arsenal,  à  Paris.) 

15^  De  laMainferme  (R.  P.)  :  «  Clypeus  nascentis  Fonte- 
braldensis  ordinis  contra  priscos  et  novos  ejus  calum- 
nia  tores,  »  Paris,  1684,  3  vol.  in-8<>.  {BibLde  la  ville  de 
Poitiers.) 

16o  Troisième  édition  de  Nicquet,  Angers,  1686. 
(Bibl.  d^Oetlinger.) 

17o  Nouvelle  édition  du  P.  de  la  Mainferme,  1692. 
(Bibl.  d'Oettinger.) 

18<>  €  Dissertation  apologétique  pour  le  bienheureux 
Robert  d'Arbrisselles ,  fondateur  de  Tordre  de  Font- 
Evraud,  sur  ce  qu'en  a  dit  Monsieur  Bayle  dans  son 
Dictionnaire  historique  et  critique.  »  Anvers,  H.  Des- 
bordes, 1701,  in-12  de  316  pages,  suivi  des  «  Eclair- 
cissements, notes,  critiques  ou  additions.  >  1702,  in-12 
de  94  pages.  Cet  ouvrage  est  du  P.  de  Soris.  (Bibl.  des 
Fontevr,  de  Chemillé.) 

19.  €  Le  Bienheureux  Robert  d'Arbrissel,  »  apùd 
Dom  Lobineau  :  Les  vies  dessairUs  de  Bretagne.  Rennes, 
1724,  p.  213-218,  au  25  février. 

20.  Rôusset  :  «  Panégyrique  du  bienheureux  Robert 
d'Arbrissel.  »  Paris,  1767,  in-S».  (BibL  d'Oettinger.) 

21.  «  Robert  d'Arbrissel,  ou  l'institut  de  Tordre  de 
Fontevraud,  poëme  en  douze  chants.  »  Paris,  1779, 
aux  armes  de  Tabbesse  Pardaillan  d'Antin,  in-S^  de 
412  pages.  {Bibl.  des  Fontevr.  de  ChemiUé.) 

22.  «  Essai  historique  sur  Robert  d'Arbrissel,  fon- 
dateur de  Tordre  de  Fontevraut,  par  M.  de  Feydel.  9 
London,  1788,  in-8o  de  45  pages.  {Bibl.  impériale  à 
Paris.) 


-  363  - 

23.  Talbot  (Eugène)  :  «  Etudes  historiques  sur  la  ré- 
vocation de  redit  de  Nantes  et  sur  Robert  d'Arbrissel, 
fondateur  de  Tordre  de  Fontevrault.  »  Angers,  1846, 
in-8o. 

24.  Note  de  M.  de  Petigny  sur  une  statue  de  Robert 
d'Arbrissel,  avec  une  planche,  apvd  Rulletin  du  comité 
historique,  1855-1856,  p.  243-247. 

25.  «  Attribution  à  Robert  d'Arbrissel  (ou  Arbris- 
selles)  d'une  statue  en  pierre  conservée  dans  l'église 
de  Méobec  (Indre),  par  M.  de  la  Villegille.  »  8  pages, 
apud  «  Le  compte-rendu  des  travaux  de  la  Société  du 
Berry,  à  Paris.  »  Paris,  1860,  in-8o. 

26.  Godard-Faultrier  :  «  Commune  de  Fontevrault. 
L'abbaye  et  Robert  d'Arbrissel,  »  apud  «  Répertoire 
archéologique  de  l'Anjou.  »  1861,  p.  193-223. 

XVIIL 

Robert  d'Arbrissel,  selon  l'usage  reçu,  fut  proclamé 
bienheureux  par  la  voix  publique ,  et  déjà  il  était  en 
possession  de  ce  titre  depuis  trente-six  ans,  lorsqu'eut 
lieu  en  France  la  canonisation  de  S.  Gauthier  de  Pon- 
toise ,  qui  fut  faite  par  l'archevêque  de  Rouen ,  et  que 
l'on  cite  comme  le  dernier  exemple  de  ces  sortes  de 
canonisations  locales  (1153)  (1). 

En  effet,  Alexandre  III  (1159-1181),  par  le  chapitre 
AvdivimuSy  de  Reliq.  et  venerat.  sanctorum ,  réserva  à 
l'avenir  au  Saint-Siège  le  droit  de  prononcer  sur  le 
titre  qu'il  convient  de  décerner  aux  serviteurs  de  Dieu 
qui  opèrent  des  miracles. 

(i)  André^  Coure  de  droit  cation^  t.  11^  p.  34-32. 


—  364  — 

Le  13  mars  1625  et  le  5  juiUet  1634,  Urbain  VIII 
promulgua  de  nouveaux  décrets,  qui  n'eurent  pas  d'ef- 
fet rétroactif  et  exceptèrent  les  saints  ou  bienheureux 
honorés  comme  tels  depuis  un  temps  immémorial. 

Robert  d'Ârbrissel ,  qui  fut  classé  dans  cette  catégo- 
rie^ avait  donc,  pour  une  récognition  authentique,  be- 
soin de  fournir  les  preuves  à  l'appui  de  la  tradition. 

Aussi,  voyons-nous,  dès  1645,  l'abbesse  Jeanne-Bap- 
tiste de  Bourbon,  unie  au  chapitre  de  Candes  (1),  sup- 
plier le  Saint-Père  de  daigner  accorder  à  son  ordre  la 
faveur  de  célébrer  la  messe  et  de  dire  l'office  propre 
du  saint  fondateur. (2). 

La  reine  d'Angleterre  intervient  également  dans 
cette  affaire  et  fait  présenter  une  supplique,  dont  les 

(4)  «  Excellentiss.  et  Reverendissima  domina  Joanna  Baptista  à 
Borbonio^  abbatissa  majoris  monasterii  et  caput  totius  ordinis  Fontis 
Ëbraldi.  Urget  ordo  universus^  cum  Condatensi  B.  Martini  aliisque 
adjacentibus  canonicorum  capitulis  ut  eumdem  Robertum  sancti  no- 
mine  conslanter  hactenus  insignitum^  utpote  yitœ  sanctitate  et  ma- 

gnis  in  sanctam  ecciesiam  meritis  celebrem Apostolicse  sedis 

nutu  atque  auctoritate  colère  ut  sanctum  yaleat.  )>  BoUand.y  p.  596. 

(2)  bolland,j  p.  596.  —  «  Sacrorum  Rituum  Gongregatio  decla- 
ravit  cultum  immemorabiiem  non  sufficere  pro  concessione  officii  et 
missœ^  sed  requiri  probationem  immemorabiiis  in  specie,  hoc  est, 
quod  à  tempore  immemorabili  tùm  missa,  tum  officium  fuerint 
celebrata  et  recitata.  r»  Bened.  XIV,  lib.  IV,  c.  3. 

«  Sed  et  semper  intactà  permanente  juris  dispositione,  si  débit» 
concurrant  circumstantiee,  poterit  Sacra  Rituum  Gongregatio,  non 
obslantibus  antea  insertis  decretis,  bénigne  indulgere,  accedente 
Summi  Pontîûcis  confirmatione  ut,  probato  cultu  immemorabili, 
fiant  recilatio  officii  et  celebratio  missse  in  honorem  beati,  quamyis 
à  tempore  immemorabili  nec  fuerit  officium  recitatum,  nec  missa 
celebrata  in  ejus  honorem.  »  (Ibid,,  lib.  IV,  pars  2,  c.  3.) 


—  365  ~ 

BoUandistes  ont  extrait  cette  phrase  qui  résume  la 
demande  : 

€  Quare  cum  omni  huniilitate  supplex  peto  ut  per 
Sanctitatem  Vestram  liceat  in  ordine  Fontis  Ebraldi  offi- 
ciutn  dicere  et  celebrare  missam  de  V.  P.  Roberto 
ejusdem  ordinis  fundatore  (1).  > 

Le  roi  de  France  lui-même  écrit  au  Pape  Innocent  X 
et  recommande  le  succès  de  la  négociation  à  son  am- 
bassadeur près  le  S.  Siège  (2). 

Tout  marchait  si  bien  que  la  solution  désirée  pa- 
raissait fort  prochaine,  et  qu'en  1648  Fr.  Sébastien 
Ganot,  de  l'ordre  de  Fontevraud,  n'hésitait  pas,  dans 
sa  dédicace  à  la  Reine  régente  de  son  livre  sur  Robert 
d'Arbrissel,  à  la  féliciter  de  sa  protection  puissante  et  à 
lai  annoncer  comme  une  des  gloires  de  son  règne,  la 
cérémonie  de  la  béatification. 

Je  cite  les  paroles  suivantes  pour  montrer  que  X assis- 
tance de  Marie  de  Médicis  ne  fit  pas  plus  défaut  que 
celle  de  Louis  XIII  et  de  Henriette  de  France. 

«  Surtout  le  grand  zèle  qu'elle  fait  paroistre  à  pro- 
curer la  gloire  de  nostre  sainct  fondateur  nous  fait 
espérer,  Madame,  la  protection  et  l'assistance  royale 
de  Votre  Majesté  pour  Fadvancement  des  honneurs 
deubs  à  un  saint  de  vostre  obéissance.  11  espère  ce 
grand  patriarche  qu'après  tant  d'autres  grâces  dont 
tout  son  ordre  est  obligé  à  la  maison  de  France,  il  luy 
sera  aussi  redevable  du  temps  de  son  apothéose,  que 

(1)  Bolîand.,  p.  596. 

(2)  ((  Rex  quoquie  Christianissimus  de  eâdem  causa  ad  Inno- 
centium  Pontif.  Max.  scripsit  negotiumque  urgeri  ab  oratore  suo 
mandavit.  »  BoUand,,  p.  596. 


—  366  — 

les  fastes  de  Yostre  Histoire  seront  chai^  de  la  céré- 
monie de  sa  Feste  et  que  sa  béatification  sera  mise  au 
nombre  des  autres  félicités  de  Tostre  Régne,  nous  obli- 
geant par  ce  moyen  à  redoubler  nos  vœux  et  nos 
prières  à  ce  Bienheureux  pour  la  prospérité  de  Yostre 
Majesté.  > 

Malgré  tant  de  zèle  et  de  protections,  l'affaire  resta 
en  suspens.  Jeanne  de  Bourbon  voulant  en  accélérer 
l'issue,  écrivit  une  seconde  supplique  au  pape  Clé- 
ment IX,  en  1668,  et  fit  imprimer  cette  supplique  avec 
des  preuves  à  l'appui. 

Or  ces  preuves  ou  instruments  produits  pour  l'intro- 
duction de  la  cause  et  qui  forment  le  volume  déjà  si- 
gnalé sous  le  numéro  li,  à  l'article  Bibliographiey  sont 
la  vie  de  Robert  par  Baldric ,  sa  mort  par  Fr.  André, 
un  abrégé  de  sa  vie  et  un  recueil  de  témoignages  en 
faveur  de  sa  sainteté. 

On  invoque  surtout  une  citation  du  Martyrologe  gal- 
lican de  du  Saussay,  qui  aU  25  février,  ne  parle  pas 
du  B.  Robert,  mais  le  rejette  au  30  août,  où  il  est  ins- 
crit sous  cette  formule  :  c  Beatus  Robertus  de  Ârbris- 
sellis,  sacerdos.  »  Puis  on  apporte  en  témoignage  le 
Martyrologe  de  Fontevraud  ,  que  j'ai  reproduit  précé- 
demment et  enfin,  page  iSO,  l'insertion  du  nom  de 
Robert  dans  les  Litanies  de  l'ordre  :  c  Ecclesiasticus 
ordinis  Fontisebraldi  ritus  in  solemnibus  Litaniis  : 
Sancte  Roberte,  magister  bone,  ora  pro  nobis.  » 

Les  Bollandistes  ne  nous  ont  transmis  que  des  frag- 
ments de  la  première  supplique  de  Jeanne  de  Bourbon. 
L'opuscule  de  1668  nous  donne  la  seconde  en  entier. 
Elle  est  trop  longue  pour  que  je  songe  à  l'insérer  ici, 


—  367  — 

mais  au  moins  en  ibrai-je  l'analyse  que  suivront  des 
extraits  des  principaux  passages. 

L'abbesse  de  Fontevraud,  après  avoir  indiqué  les 
scrupules  qui  l'agitent  au  sujet  d'un  culte  que  Rome 
n'a  jamais  reconnu  ni  approuvé  formellement,  demande 
pour  Robert  d'Arbrissel  les  honneurs  de  la  canonisation 
et  insinue  habilement  que  si  le  saint  fondateur  de  son 
ordre  est  élevé  sur  les  autels ,  ce  sera  le  premier  à 
qui  Clément  IX  décernera  une  telle  faveur  :  c  Nullus 
adhuc  cœlitum  per  te  vindicatus  est,  nullus  in  nume- 
ruoi  sanctorum  adscriptus.  »  Puis,  en  confirmation  de 
sa  demande,  elle  procède  par  voie  de  culte,  et  énumère 
les  miracles  opérés  par  l'intercession  de  Robert,  le  titre 
de  Bienheureux  que  d'éminents  personnages  lui  ont 
décerné,  la  vénération  qui  s'attache  à  son  corps  pieu- 
sement conservé  à  Fontevraud,  l'insertion  de  son  nom 
dans  les  litanies  de  suite  après  le  patriarche  de  l'ordre 
monastique,  la  qualification  de  Fontaine  de  S,  Robert, 
donnée  à  la  source  qui  jaillit  miraculeusement  à  sa 
prière,  l'hommage  incessant  rendu  à  son  saint  cœur. 
Elle  termine  en  invoquant  pour  ces  faits  une  posses- 
sion de  550  ans,  et  déclare  que  si  le  culte  du  bienheu- 
reux a  été  jusqu'alors  resserré  dans  d'étroites  limites, 
la  vie  cachée  du  cloître  et  l'éloignement  au  milieu  des 
forêts  peuvent  âeuls  être  la  cause  du  ,peu  d'extension 
de  ce  culte  local. 
Voici  maintenant  le  texte  même  de  la  supplique  : 
I  Restât  tertia  illa  pars  tuae  potestatis  (de  canoniser) 
ad  quam  nos  primi  supplices  accedimus,  dignamque 
tibi,  ubi  illam  primum  exprom^s,  causam;  dignum, 
undè  illam  auspiceris,  virum  offerimus. 


—  ses  — 

»  Hic  vir,  hic  est  ordinis  nostri  conditor,  venerabilis 
Robertus  Arbressellensis,  cnjas  sanctitatem  nniversa 
Gallia,  dum  ipse  vivereti  oculis  conspexit,  post  rnorlem 
religiosissime  colait  :  qaem  popalorum  consensus, 
pontificam^  laudes,  summorum  viroruni  elogia,  operum 
mirabilium  multitudo  jampridem  sanclorum  numéro 
YOtis  communibus  et  suffragiis  conspirantibus  ascrip- 
Bit 

»  Corpus  ad  dexfrum  altaris  cornu  in  mausoleo  mar- 
moreo  depositum  exinde  quotidiana  religione  colitur, 
mirandis  corascat  et  spiritum  sanctitatis  in  Domum 
Fontebraldensem  universumque  ordinem  copiosissime 
diffundit.  Jam  tum  Beatus  semper  audiit;  neque  eum 
aliter  scriptores  illius  temporis  ac  deinde  sancti  appel- 
larunt.  In  litanias  Fontebraldenses,  proxime  secundum 
divum  Benedictum,  Roberti  nomen  insertum  est,  bac 
precationis  formula:  Sancte  Roberte,  magister  bone^  ora 
fro  nobis.  Fons  ab  eo  e  terra  per  miraculum  precibus 
eductus,  Fans  SancM  Roberti  appellatus  est,  nec  unquam 
in  populo,  nisi  premisso  cognomine  Reati^  Roberti  no- 
men  auditur.  Cor  ejus  apud  Ursanum  conditum  cor 
sanctum  passim  appellatur,  et  publica  religione  cultu- 
que  divis  adhiberi  solito  celebratur. 

»  Et  sane  vix  uUus  est  setate  illa  in  sanctorum  nu- 
merum  populi  christiani  voce  conscriptus,  qui  pluri- 
bus  cerlioribusque  sanctimonise  notis  effulserit^  qui 
rerum  prseclare  gestarum  multitudine  et  gloria  Roberto, 
non  dicam  superior  sed  vix  par  esse  possit.  Ât  alii  dùm 
celebrantur  in  populo  eorumque  cultus  publica  clien- 
tium  suorum  devotione  promovetur;  nos  quae  in 
sylvis  desertisque  locis  degimus,  qusB  claustris  arctis- 


-  369  ~ 

simis  includimury  quae  pudore  virginali  ab  ornai  prope 
hominum  consortio  sejunctœ  latemus^  pietatem  nos- 
tram  conditorisque  nostri  gloriam  publicam  facere  non 
valuimus  neque  in  eo  splendore  retinere,  ad  quem  sua 
illum  virtus  insignis  evexerat,  dùm  actorum  ejus  recens 
erat  memoria.  Ita  factum  est  ut  Roberti  sanctitas  nos- 
tro  silentio  modestiaque  ac  teroporum  vetust'ate  penè 
sit  obruta  ;  nosque  unà  cum  parente  optimo  de  jure 
Dostro  et  antiquâ  gloriae  possessione  dejectœ  ingemis- 
camus,  fidem  hominum  superumque  implorare  cogaihur. 
»  Àd  tuum  ergo  tribunal  confugimus,  Pater  Sauctis- 
sime,  tuam  justitiam,  pietatem  tuam  imploramus,  ut 
nos  nostrique  ordinis  auctorem  in  jus  splendoremque 
pristinum  postliminio  restituas. 

>  Si  priscis  illis  temporibus  ageremus,  quibus  solius 
populi  vox  una  consentiens  satis  erat,  ut  alicujus  sancli 
nomen  fastis  christianis  insereretur,  in  nostra  pietate 
nostroque  jure  tacite  staremus,  nec  esset  quod  Aposto- 
lorum  limina  vel  tuse  Sanctitatis  aures  pulsaremus.  Si 
quis  nos  de  Roberti  gloriâ  de  jure  nostro  appellaret, 
possessionem  quingentorum  et  quinquaginta  annorum 
prsescriptione  firmatam  opponeremus.  Eodem  jure,  eo- 
dem  suffragio  Robertum  Beatum  esse  tueremur  quo 
Yvonem  Garnotensem,  quo  Brunonem  Carthusianorum 
parentem,  quo  reliquos  ejusdem  temporis,  quos  sola 
populi  vox  et  religio  tam  sublimi  nomine  decoravit. 

>  Ât  quoniam  ex  tuae  Sanctitatis  ore  pendamus,  et 
in  Summorum  Pontificum  arbitrio  nostra  omnis  vita,  ac 
religio  vertitur,  scrupulus  quidem  animum  nostrum, 
quamvis  diuturnissimi  temporis  possessione  immuni- 
tum,  conturbattamenacsoUicitatdonec  ad  populi  vocem, 


—  370  — 

ad  cornmunem  Ecclesiae  consensum,  ad  veterum  scripto- 
rum  de  sanctitate  Roberti  testimonia  tuœ  Sanctitatis  suf- 
fragium  accesserit.  » 

Enfin  Benoit  XIV,  dans  son  Traité  de  la  Canonisation 
des  Saints,  livre  II,  chapitre  xxxvi,  rapporte  que  le 
6  octobre  1669,  les  lettres  da  roi  n'avaient  pas  encore 
été  présentées  à  la  Sacrée  Congrégation  des  Rites,  pour 
la  cause  de  Robert  d'Ârbrissel,  et  au  chapitre  xii  du 
même  livre  il  parle  de  cette  cause  comme  abandonnée, 
parce  qu'on  n'avait  pas  rempli  les  formalités,  et  qu'on 
avait  cessé  de  la  presser.  Le  pontife  témoigne  ouverte- 
ment son  estime  pour  ce  saint  personnage,  et  déclare 
n'être  nullement  arrêté  par  les  calomnies  dont  il  a  été 
l'objet.  Il  reconnaît  les  vertus  et  les  miracles  attestés  par 
les  Bollandistes  et,  sans  mettre  en  doute  l'anthenticité 
de  la  lettre  de  Geoffroy  de  Vendôme,  en  infirme  la  va- 
leur historique  en  disant  que  Geoffroy  fut  trompé  en 
cette  circonstance.  Le  promoteur  de  la  foi,  Pierre  de 
Rossi,  en  avait  fait  à  tort  un  argument  contre  la  cause, 
qui  manquait  seulement  pour  pouvoir  être  introduite  de 
quelques  pièces  indispensables.  Malheureusement  Be- 
noît XIV  n'explique  pas  ce  qu'il  entend  par  m  defectu 
aliortim  recuisit orum y  car  il  n'est  pas  probable  que 
ces  mots  signifient  seulement  l'absence  des  lettres 
royales.  Peut-être  reconnaît-il  comme  nous  que  le 
culte  n'était  pas  suffisamment  prouvé  (1). 

(i)  «  Nec  prius  Sedes  Apostolica  mo^eri  solet,  quam  reges^ 
principes  et  aliae  personse  authenticaî  et  houestse  instanter  suppli- 
caTerint  Summo  Pontifici.  Ideoque  Sacra  Gon^regatio  in  causa  Pic- 
ta-vien.  Servi  Dei  Roberti  de  Ambrosello^  in  qua  petebatur  signa- 
tura  commissionts,  respondit  die  5  octobris  1669  quod  expecta- 


—  371  — 

Vers  1852,  la  eause,  si  lon^emps  assoupie  du  bien- 
heureux Robert,  reprit  faveur  et  il  fut  question  sérieu- 
seroent  de  reûouér  avec  Rome  les  négociations  pour  la 
mener  à  bonne  fin. 

En  conséquence,  un  dossier  fut  commencé  et  j'y 
trouve  trois  sortes  de  documents  qu'il  importe  d'ana- 
lyser ici. 

Sept  archevêques  ou  évoques  donnèrent  leur  adhésion 
au  projet  par  des  lettres  qui  peuvent  se  classer  ainsi 
selon  leurs  dates  respectives. 

M«r  de  Morlhon,  évêque  du  Puy  (1),  25  novembre 
1852. 

Mgr  Saint-Marc,  évêque  de  Rennes,  7  décembre  1852. 

Mgr  Pie,  évêque  de  Poitiers,  19  déoembre  1852. 

Mgr  Angebault,  évêque  d'Angers,  29  décembre  1852 
et  5  janvier  1853. 

S.  Em.  le  cardinal  Du  Pont,  archevêque  de  Bourges, 
3  janvier  1853. 

Mgr  Morlotj  archevêque  de  Tours,  19  août  1853. 

Mgr  de  la  Croix  d'Azolette,  archevêque  d'Auch,  28 
octobre  1853. 

Seul,  Mgr  Bouvier,  évêquei  du  Mans,  à  la  date  du  22 

rentur  littene  regiae.  »  {Benedict,  XIV,  lib.  11^  cap.  xxxvi,  u?  7.) 
«  Perlectisque  a  me  nonnulUs  scripturis  pro  introductione  causas 

canonisationis   hujus    Beati  Roberti,  Tel    nuUum^  Tel   modicum 

Tidi  constitui  fundamentum  à  Petro  Francisco  de  Hubeis^  promo- 

tore^  in  citata  epistola.  sed  in  defectu  aliorum  requisitorum.  d 

{Ibid.,  cap.  XLi,  n°  i%) 
(1)  Il  existe  actuellement  trois  maisons  de  FonteTristes  en  France  : 

elles  sont  à  Ghemillé^  diocèse  d'Angers;  à  Brioude^  diocèse  du 

Puy;  à  Boulaur,  archidiocèse  d'Aueh. 


-  372  — 

juin  1853,  fit  dilBculté  d'adhérer  comme  rayaient  déjà 
fait  ses  collègues  et  motiva  faiblement  son  refus* 

Le  16  octobre  de  la  même  année,  les  religieuses 
Fontevristes  adressaient  au  Saint-Siège  une  supplique 
respectueuse  pour  la  reprise  de  la  cause. 

Enfin,  le  9  janvier  1855,  la  communauté  de  Chemillé 
choisissait  Ms^  Estrade ,  camérier  d'honneur  de  Sa 
Sainteté  Pie  IX,  pour  postulateur. 

C'est  devant  ce  prélat  et  par  ses  soins  qu'ont  été 
faits  dans  l'archidiocèse  d'Âuch  et  dans  le  diocèse 
d'Angers,  les  Acteê»  d'information  sur  le  cuUe  public 
ecclésiastique  rendu  au  bienheureux  Robert. 

Voici  l'analyse  sommaire  de  ces  deux  pièces  qu'il 
serait  aussi  long  qu'inutile  de  reproduire. 

Je  commence  par  le  monastère  de  Chemillé. 

Les  religieuses  déclarent  continuer,  dans  le  culte 
rendu  à  leur  fondateur,  les  traditions  de  l'abbaye  de 
Fontevraud,  qui  leur  sont  connues  par  plusieurs  an- 
ciennes mères  avec  lesquelles  elles  ont  vécu. 

Chaque  année,  à  partir  du  23  février,  veille  de  l'an- 
niversaire de  la  mort  du  bienheureux,  elles  font  une 
neuvaine  en  son  honneur,  qui  consiste  dans  le  chant 
de  l'hymne  Cingebant,  de  l'oraison  Beati  Roberti  con- 
fessorisj  du  TeDeumei  de  l'invocation  trois  fo\f  répétée  : 
Sancte  Roberte,  Pater  noster^  magister  bone^  orapro  nobis. 

Le  24,  il  y  a  exposition  du  Saint-Sacrement,  toute  la 
journée ,  chant  de  la  messe  solennelle  de  la  Sainte- 
Trinité  et  bénédiction  le  soir. 

Les  reliques  sont  exposées  dans  le  chœur,  tout  le 
temps  de  la  neuvaine,  sur  un  autel  couvert  de  cierges 
que  l'on  allume  seulement  pendant  les  offices. 


—  373  — 

Dans  les  processions  que  la  communauté  est  en  usage 
de  faire,  lors  des  calamités  publiques,  on  porte  le 
bâton  du  bienheureux. 

Les  fidèles  déposent  souvent  des  linges  sur  la  capse 
pour  la  guérison  des  malades  et  demandent  aux  reli- 
gieuses des  neuvaines  de  prières.  Plusieurs  grâces  ont 
été  ainsi  obtenues. 

Tous  les  jours  après  matines^  le  chœur  récite  conjoin- 
tement avec  ro£Qciante,  l'invocation  susdite  :  Sancte 
Roberte.  On  la  répète  une  autre  fois  dans  le  cours  de 
la  journée. 

  Fontevraud,  des  cierges  et  des  lampes  étaient  cons- 
tamment allumés  devant  les  reliques  du  bienheureux, 
dont  la  capse  était  conservée  dans  le  tombeau  de  Tautel, 
appelé  communément  autel  de  saint  Robert, 

Le  24  février  était  jour  chômé  par  la  maison. 
Mme  Tabbesse  officiait  (1);  le  soir,  il  y  avait  procession, 
où  l'on  portait  le  bâton  miraculeux.  On  faisait  le  pané- 
gyrique du  bienheureux.  Au  salut  du  Saint-Sacrement, 
qui  terminait  la  fête,  on  chantait  l'hymne  Cingebant,  le 
Te  Deum  et  la  triple  invocation  Sancte  Roberte,  au  son 
de  toutes  les  cloches;  Madame  Tabbesse  récitait  l'orai- 
son Reati  Roberti. 

La  fête  du  bienheureux  portait  indulgence  plénière 
et  exposition  du  Saint-Sacrement. 

La  déclaration  précédente  est  du  10  janvier  1855. 
Celle  des  religieuses  de  Boulaur  du  12  février  de  la 
même  année,  renferme  ces  seules  additions,  le  reste 
étant  identique  :  dans  les  litanies  des  saints,  après  Tin- 

(t)  L'abbesse  n'assistait  au  ohœur  qu'aux  fétei  ùnnu^les. 


—  874  — 

vocation  de  saint  Benoit,  vient  celle  du  bienheureax, 
sous  cette  forme  :  BeiUe  Boberte,  paier  nostery  ora  pro 
nobis. 

Les  reliques  sont  portées,  aux  processions  de  saint 
Marc  et  des  Rogations,  dans  l'intérieur  du  monastère, 
où  Ton  a  fait  aussi,  au  moins  une  fois,  le  panégyrique 
du  bienheureux. 

L'usage  de  chanter  le  Te  Deum^  le  34  février  et  les 
jours  suivants,  a  été  pratiqué  de  tout  temps. 

Ces  enquêtes  terminées,  une  lettre  latine  rédigée, 
dit-on,  par  un  prélat  de  haute  science  et  résumant 
tous  les  témoignages  favorables  au  succès  de  la  cause, 
fui  annexée  aux  autres  pièces  du  dossier  et  adressée  à 
Rome  pour  obtenir  du  Saint-Siège  une  béatification 
équipollente. 

Malheureusement,  la  supplique  laissait  à  désirer  sur 
plus  d'un  point  essentiel.  Elle  débutait  ainsi  :  Nos 
Episcopi  GaUiarum  et  ne  portait  à  la  fin  aucune  signa- 
ture. On  alléguait  l'antiquité  du  culte  et  l'on  n'exhibait 
à  l'appui  aucun  monument.  Puis  un  lapsus  calamif 
fort  regrettable,  avait  mis  le  mot  siècles  partout  où  il 
aurait  fallu  le  mot  années. 

Le  consulteur,  chargé  de  l'examen  préalable  de  l'af- 
faire, fut  sévère  à  cet  endroit  et  franchement  il  y  avait 
lieu.  Aussi  son  rapport  n'est-il  qu'une  fine  et  spirituelle 
satire,  qui  montre  clairement  l'inexpérience  de  ceux 
qui  assumaient  la  responsabilité  de  la  démarche  et  des 
négociations.  Toutefois,  après  avoir  donné  cours  à  sa 
verve,  il  voulut  bien  tracer  quelques  règles  pour  la 
poursuite  régulière  de  l'affaire,  et  réclamer,  à  l'appui 
de  la  demande,  dçs  tableaux  avec  nimbe,  des  manus- 


—  375 .— 

crits  mentionnant  les  fêtes  et  les  reliques,  en  un  mot 
des  faits  qui  établissent  péremptoirement  que  le  culte 
allégué  a  actuellement  trois  cent  trente  ans  d'existence. 

Je  ne  citerai,  en  les  traduisant,  que  quelques  passages 
de  ce  rapport  écrit  en  italien. 

c( ....  11  faut  démontrer  en  jugement  et  par  des  mo- 
numents que  le  culte  public  rendu  au  bienhenreux 
Robert  a  trois  cent  trente  ans;  ce  qui  est  nécessaire... 
Il  parait  impossible  que,  traitant- d'un  culte  très-ancien, 
il  n'y  ait  pas  des  titres  ou  des  manuscrits  antérieurs  à 
1534  qui  en  parlent...  On  peut  dire  la  même  chose 
des  anciens  livres  du  monastère,  où  Ton  parle  des  fêtes 
et  des  authentiques  des  reliques.  En  somme,  nous  vou- 
lons des  monuments...  Je  vois  que  Ton  se  préoccupe 
beaucoup  plus  des  vertus  et  des  miracles  que  du  culte 
du  bienheureux.  Aussi  je  rappellerai  que  le  culte  est 
un  fait  et  les  faits  se  prouvent  à  l'aide  des  monu- 
ments (1).  » 

L'affaire  en  resta  là.  Rome  avait  accueilli  avec  froi- 
deur les  démarches  ;  la  susceptibilité  des  ayant  cause 
en  fut  froissée.  Bref,  on  ne  songeait  plus  à  rien,  quand, 
à  mon  arrivée  dans  le  diocèse,  Men^  l'évêque  d'Angers, 
de  concert  avec  M^  l'évêque  de  Poitiers  et  les  Fonte- 
vristes  de  Chemillé,  me  pria  de  poursuivre  le  procès 
d'enquête.  J'accédai  volontiers  à  leurs  vœux  et  de  1859 
à  1861,  je  donnai  tous  mes  soins  les  plus  empressés  à 
cette  affaire.  C'est  seulement  après  des  recherches  mul- 
tiples et  réitérées  que  j'ai  pu  poser  les  conclusions 
dont  tout  ce  travail  forme  les  prémisses. 

(1)  L'original  de  cette  pièce  est  déposé  aax  archives  du  monastère 
de  Chemillé. 


—  376  -- 
XX. 

J'ai  établi  une  série  de  £siits  assez  considérable.  Il  est 
de  mon  devoir  maintenant  d'en  discuter  la  valeur  et 
d'en  déduire  la  conséquence  pratique. 

Il  y  a,  en  matière  de  béatification  et  de  canonisation, 
deux  manières  de  procéder  :  par  voie  de  culUy  ou  par 
voie  de  nonrCuUe. 

Evidemment,  j'aurais  été  mal  inspiré  en  proposant 
la  voie  de  non-culte,  car  j'aurais  eu  contre  ma  thèse, 
impossible  d'ailleurs  à  soutenir,  la  suppb'que  de  Jeanne 
de  Bourbon  et  l'enquête  de  1855,  qui  s'appuient  exclu- 
sivement sur  le  culte  rendu  publiquement. 

Procéder  au  contraire  par  voie  de  culte,  c'est  rentrer 
forcément  dans  les  limites  du  cas  excepté  par  les  décrets 
d'Urbain  YIII  pour  obtenir  de  Sa  Sainteté  une  béaUfi- 
cation  équipollente  (1  ). 

Or,  dans  l'espèce,  deux  choses  sont  à  prouver  :  le 
culte  et  la  possession  immémoriale  du  culte. 

Benoit  XIV  (2)  a  déterminé  ce  qu'il  faut  entendre 
par  culte^  c'est-à-dire  les  honneurs  rendus  aux  saints 
et  indiqué  quels  monuments  attestent  ce  culte  (3). 

Ces  monuments  sont  : 

Les  histoires  écrites  avant  1534;  les  représentations 

(i)  tt  Declarans  quod  per  supradicta  praejudicare  in  aliquo  non 
Tult  neque  intendit  iis  qui  aut  per  communem  Ecclesise  consensum 
vel  immemorabiiem  temporis  cursum,  aut  per  Patrum,  TÎrorumqoe 
sanctorum  scripta,  vel  longissimi  temporis  scientia,  ae  tolerantîa 
Sedis  Àpostolicse  Tel  Ordinarii  coluntur.  » 

(2)  De  canonisât,,  cap.  xiv,  lib.  II. 

(3)  a  Deficientibus  testibus,  locus  est  probationi  per  authentica 
documenta,  i»  Const,  d'Urb(Un  VIIL 


—  377  — 

iconographiques  avec  nimbe  ou  rayonnement  à  la  tète; 
les  images  placées  sur  des  autels  ;  Jes  autels  érigés  et 
les  chapelles  ou  églises  dédiées  sous  le  vocable  du  bien- 
heureux ;  l'insertion  du  nom  dans  les  litanies  ou  le 
Martyrologe  ;  la  commémoraison  aux  olQSces  divins; 
l'office  propre  ou  du  commun  ;  le  titre  de  saint  ou  de 
bienheureux  publiquement  décerné;  les  donations  faites 
en  son  honneur  (1);  les  grâces  obtenues  par  son  inter- 
cession ;  le  corps  levé  de  terre  et  exposé,  ainsi  que  les 
autres  reliques,  à  la  vénération  des  fidèles  (2). 

Benoît  XIV  ajoute,  comme  conditions  expresses  de  ce 
culte  ecclésiastique,  qu'il  doit  être  public  et  non  privée 
continu  et  au  moins  toléré  par  l'Ordinaire. 

Urbain  VIII  avait  déjà  prescrit  la  possession  immé- 
moriale et  spécifié  que  cette  possession  devait  être  au 
moins  centenaire  (3).  Or  le  décret  d^Urbain  VIII  date 
de  1634;  il  devient  donc  indispensable  de  démontrer 
l'existence  du  culte  avant  Tannée  1534  pour  le  bien- 
heureux Robert  d'Àrbrissel. 

(1)  «  Histori»  conscriptse  h.  \iri8  fide  dignis,  qui  eas  composuerint 

centum  annis  ante  constitulionem  Urbanam Elationes  sepuU 

chri  auctoritate  episcopali...  legata  missaru  n  in  honorem  Dei  serTÎ... 
an  tiqua  breTiarta^  ubi  officium  iptius  aut  proprium  autde  communi 
ia  ejusdem  v«nerationem  contineatur....  ele^ato  sepulchro,  statuœ 
atque  imagines  oum  radiis  et  splendoribus  necnon  Totivœ  tabellœ^ 
dummodo^  accedente  judicio  peritorum  pateat  confecta  ea  fuisse 
centum  annis  ante  constitutionem  Urbanam.  p  Bened.  XW,  t.  II, 
p.  193-194. 

(2)  Analutajurii  jMmtifieiij  40*  liTraison,  col.  i30. 

(3)  «  Insuper  longissimum  tempus  illiusque  imdnemorabilem  ca- 
svLjn,  de  quo  in  praedicto  décrète,  inteUigi  declaraTimus  esse  tem* 
pus  centum  annorum  metam  excedens.  » 

REP.  ARC*  27 


—  378  — 

Là  est  TembaraS)  je  dirai  plus,  rimpossibilité  presque 
absolue,  puisque  toutes  les  pièces  déjà  produites  sont 
postérieures  à  cette  date,  même  les  imprimés. 

J'en  reprends  Ténumération,  pour  mieux  faire  saisir 
la  difficulté  de  prouver  canoniquement  le  calte  ecclé- 
siastique. 

Le  nimbe  ou  rayonnement  de  la  tête,  est  un  signe 
certain  de  sainteté.  Je  le  trouve  bien  sur  des  gravures 
et  des  tableaux,  autour  de  la  tête  de  Robert  d'Ârbris- 
sel,  mais  les  uns  et  les  autres  ne  remontent  pas  au-delà 
<j[u  xvii«  siècle  et  par  conséquent  sont  trop  jeunes  pour 
figurer  dans  le  débat. 

Bien  plus,  lors  même  que  ces  tableaux  auraient  été 
dressés  en  forme  de  rétables  sur  des  autels,  ils  heurtent 
cette  règle  tracée  par  Benoît  XIV,  qui  n'admet  pas  en 
jugement  la  position  humble  de  suppliant  affectée  au 
serviteur  de  Dieu. 

«  Imago  servi  Dei....  exhibens  cultum  Christo  Do- 
mino aut  Beatissimae  Virgini  non  poterit  haberi  pro  re 
^  ad  publicum  cultum  tendente  (1).  > 

Aucune  église,  chapelle  ou  oratoire  n'a  jamais  été 
dédié  sous  le  vocable  du  bienheureux,  même  dans  les 
abbayes  qui  le  vénéraient  davantage.  Tout  au  plus  y 
voyons-nous  deux  autels  (2),  l'un  dit  de  saint  Robert  à 
Fontevraud,  l'autre  du  sacré  Cœur,  àOrsan.  Mais  pas 
la  moindre  date  qui  nous  éclaire  sur  ce  fait  important 


(1)  Page  110,  t.  H. 

(2)  Les  FonteTristes  de  GhemiUé  ont  élevé  dans  lear  chœur  un 
su  tel  à  Robert  d'Ârbrissel,  et  ont  placé  dessus  les  reliques  de  leur 
fondateur. 


—  379  — 

et  qui  permette  d'arriver  jusqu'aux  premières  apnées 
du  xvp  siècle. 

Ou  a  souvent  parlé  des  litanies.  Je  ne  nie  pas  le  fait 
puisqu'il  m'est  attesté  par  la  supplique  de  J.  de  Bour- 
bon, et  parThéophile  Raynaud,  qui  reporte  jusqu'à  Piell 
(1458-1464'),  par  conséquent  jusqu'au  milieu  du  xv« 
siècle,  l'usage  de  placer  le  nom  de  saint  Robert  après 
celui  de  saint  Benoit,  c  Delegati  a  Pio  II  Romano  Pon- 
tifice,  ad  inspiciendum  componendumque  Fontebral- 
dense  caenobium,  Roberti  fundatoris  nomen,  inter  sanctos 
confessores,litaniisinseri  praescripsisse  referuntur(l).  > 

Certes  voilà  une  origine  clairement  assignée,  et  je  me 
plais  à  constater  que  la  tradition  a  persévéré  jusqu'à 
nos  jours,  car  on  en  trouve  par  ci  par  là  de«  traits 
épars.  Mais  j'ai  le  droit  à  mon  tour  de  demander  la 
preuve  matérielle  de  ces  affirmations  de  différents  au- 
teurs, et  j'ai  le  regret  de  dire  que  j'ai  feuilleté  en  vain 
tous  les  livres  liturgiques  de  Fontevraud,  même  ceux 
de  J.  de  Bourbon,  pour  y  noter  le  Sancte  Roberte^  que 
plusieurs  y  ont  vu  (2).  Je  ne  suspecte  pas  leur  sin- 
cérité, mais  ne  pourrait-on  pas  distinguer  entre  le  culte 
public^  qui  n'aurait  pas  admis  cet  usage,  et  le  culte 
privéy  qui  aurait  adopté  avec  empressement  la  prescrijh 
lion  des  délégués  de  Pie  II  ? 

{\)  Theoph.  Raynaudus,  t.  IX^  p.  i89. 

(2)  <(  Chant  des  offices  propres  de  Tordre  de  Font-Evrauld,  avec 
addition  pour  plus  grande  commodité  de  plusieurs  suffrages  à  dé» 
Totion^  du  mandatum  et  des  obsèques  des  trespassez.  Le  tout  im-o 
primé  par  le  commandement  de  très-illustre  et  religieuse  prin- 
cesse Madame  Jeanne-Baptiste  de  Bourbon,  fille  L.  de  France, 
abbesse  chef  et  générale  dudit  ordre.»  Paris,  1647.  —  «  Antipho- 
narium  ad  tisum  septimanariae  chori.  «  1711. 


—  380  — 

Inutile  d'insister  sur  les  calendriers  liturgiques,  car 
si  j'y  vois  le  nom  de  Robert  d'Arbrissel,  à  côté  ou  pas 
loin  j'y  constate  ceux  des  abbesses  Pétronille  de  Che- 
millé,  Marie  de  Bretagne,  Renée  de  Bourbon,  Louise 
de  Bourbon^  etc. 

Invoquera-t-on  le  Martyrologe?  Non,  assurément,  car 
ce  n'est  pas  seulement  Robert  d'Arbrissel  qui  y  est 
inscrit,  mais  encore  son  père,  sa  mère  et  sa  nièce, 
dont  rien  n'atteste  la  sainteté  ni  le  culte. 

Une  seule  cbose  me  fait  impression,  c'est  que,  le 
25  février,  le  Martyrologe  débute,  à  Prime,  très-solen- 
nellement et  au  son  des  cloches,  par  l'éloge  de  Robert 
d'Arbrissel,  qui  n'y  porte,  il  est  vrai,  ni  le  titre  de 
saint,  ni  celui  de  bienheureux.  Malheureusement  pour 
la  cause,  le  coutumier  qui  mentionne  cette  cérémonie, 
date  au  plus  tôt  du  xviie  siècle,  époque  du  Martyrologe 
de  du  Saussay,  qui,  plus  avancé,  plus  hardi,  ose  mettre 
le  Beatus  qui  manque  à  Fontevraud. 

D'office  propre  ou  même  de  commun,  je  n'en  connais 
pas  et  je  ne  m'en  préoccupe  guère,  car  Benoît  XIV  a 
déclaré  que  ce  n'était  pas  rigoureusement  nécessaire 
pour  le  succès  d'une  cause  (1)  et  qu'il  suffisait  que 
l'anniversaire  ait  été  solennellement  célébré,  de  anni- 
versaria  solemnitate  in  die  obitus. 

Une  solennité  anniversaire  est  mentionnée  dans  le 
coutumier^  mais  ce  coutumier  n'a  été  écrit  que  vers  le 
xvii®  siècle,  et  nous  ne  connaissons  Fhymne  de  saint 
Robert,  avec  verset  et  oraison  propres,  que  par  un  ma- 

(i)  ((  Plures  approbati  fuerunt  ca»us  ezcepti,  etiamsi  nequaqnam 
constiterit  de  celebratione  missœ  et  feâti,  deque  officii  recitatione 
per  annos  centum  ante  constitutionem  Urbauam.  »  Page  199. 


—  381  — 

nuscrit  du  xviiic;  bien  faibles  témoignages  pour  une 
cause  qui  réclame  au  moins  le  xyi©  siècle. 

Je  ne  pense  pas  que  Benoît  XIV  entende  par  solennité 
anniversaire  un  office  mortuaire,  mais  bien  plutôt  la 
messe  de  la  sainte  Trinité  qui  était,  comme  le  Te  Deum^ 
un  chant  d'action  de  grâces  pour  les  bienfaits  accordés 
par  Dieu  à  son  serviteur.  Cette  messe  se  dit  encore 
dans  les  maisons  de  Tordre.  Quand  a-t-on  commencé 
à  célébrer  ainsi  l'anniversaire  du  25  février?  Je  Tignore, 
toujours  est-il  que  sur  la  fin  du  xiv©  siècle,  cet  anni- 
versaire se  faisait,  non  point  par  une  messe,  mais  par 
roffice  des  morts,  et  qu'en  1606  encore  le  missel  n'in- 
dique aucune  messe  autre  que  celle  de  saint  Mathias, 
au  25  février,  et  ordonne  que  tous  les  mardis  non 
empêchés,  une  messe  de  requiem  soit  célébrée,  après 
matines,  pro  Reverendissimo  insiitulore  nostro. 

C'est  qu'en  effet  bienheureux  ou  saint  est  un  titre  si 
vaguement  donné  par  la  tradition,  qu'on  s'en  sert  bien 
sans  difficulté  dans  la  vie  habituelle,  mais  qu'on  ne 
l'emploie  dans  aucun  acte  officiel,  n'ayant  pour  ces 
circonstances  que  l'appellation  banale  deRévéreiidissime^ 
de  Père^  de  Vénérable  on  de  Maître,  toutes  qualifications 
sans  portée  aucune  dans  la  question  présente. 

Dom  Chamard  (1)  m'a  opposé  que  Charlemagne  était 
honoré  comme  saint  à  Aix-la-Chapelle,  Arras,  Reims, 
Rouen,  Paris,  etc.,  tandis  qu'à  Metz  on  faisait  un  ser- 
vice  solennel  le  jour  de  sa  mort  pour  le  repos  de  son 
âme.  A  cela,  je  répondrai  que  le  cas  n'est  pas  le  même, 
car  Frédéric  Barberousse  fit  canoniser  Charlemagne 

(4)  Lettre  du  47juiUet  1860. 


—  388  — 

par  Tanti-pape  Pascal  III  et^  comme  les  papes  légitimes 
n'ont  point  réclamé  contre  cette  canonisation,  plusieurs 
ont  prié  leur  silence  pour  une  approbation  (1).  Metz 
pouvait  fort  bien  se  ranger  du  côté  de  la  minorité  qui 
n'accueillait  pas  avec  faveur  le  fait  accompli. 

J'ai  énuméré  toutes  les  reliques  et  pas  une  ne  me 
paraît  en  possession  du  culte  immémorial  prescrit.  Le 
corps  n'est  même  pas  levé  de  terre  au  xvi©  siècle.  Or 
cetle  élévation  est,  dans  l'histoire  ecclésiastique,  un  des 
indices  les  plus  incontestables  d'une  sainteté  reconnue 
et  d'un  culte  avéré.  Il  faut  pour  en  venir  à  cette  exhu- 
mation, non  pas  la  volonté  bien  arrêtée  d'honorer 
davantage  Robert  d'Arbrissel,  mais  la  fantaisie  d'une 
riche  abbesse  qui  désire  renouveler  le  grand  autel,  et 
c'est  en  creusant  les  fondements  que  la  pioche  heurte 
la  tombe  du  pieux  fondateur. 

On  recueille  respectueusement,  il  est  vrai,  les  osse- 
ments et  les  cendres  de  Robert  d'Arbrissel,  mais  c'est 
pour  les  enfouir  de  nouveau  dans  le  tombeau  d'un 
autel ,  après  les  avoir  enfermés  dans  une  capse  en 
plomb,  indigne  de  la  princesse  qui  la  commande  et  de 
l'illustre  personnage  à  qui  elle  est  destinée. 

On  a  de  l'or,  de  l'argent,  des  pierreries  dans  cette 
abbaye  splendide,  où  s'étalent  toutes  les  grandeurs  et 
les  magnificences  de  la  cour,  et  pour  le  saint  que  de 
temps  immémorial  l'on  dit  vénérer  d'un  culte  public,  il 
n'y  a  rien  que  la  plus  vile  matière,  le  plomb  pour  ses 
ossements,  le  cuivre  pour  la  poussière  de  son  cœur  ! 

{\)  Gousseau.  Mémoire  sur  ^ancienne  liturgie  du  dioeèie  de  Poi- 
tiers, page  110. 


-  883- 

J'ai  honte  pour  rabbe&r^e  de  cette  îfiâulte  permanente, 
je  rougis  pour  Tordre  lui-même  de  cette  indifTérence 
signalée  qui  contraste  d'une  manière  révoltante  avec  la 
pompe  et  Fênthousiasme  de  la  supplique  adressée  à 
Clément  IK. 

Quelle  amère  dérision!  D'une  part  on  sollicitait  la 
faveur  du  pontife,  de  l'autre  on  négligeait  l'objet  même 
de  cette  faveur. 

Humble  dans  sa  vie,  Robert  le  fut  aussi  après  sa 
mort.  Sa  trop  modeste  capse  n'a  point  empêché  les 
fidèles  de  venir  lui  demander  des  grâces  spéciales^ 
aussi  les  Bollandisles  ont-ils  constaté  des  miracles  opé- 
rés par  son  intercession,  et  les  derniers  en  date  sont 
enregistrés  aux  millésimes  de  1634  et  1635. 

Mais  ces  miracles  prouvent,  tout  au  plus,  un  culte 
privé  et  personnel  ;  pour  la  thèse  du  culte  public,  qui 
doit  être  antérieur  à  l'année  1534,  c'est  à  la  fois  une 
preuve  incomplète,  insuilisante  et  superflue. 

D'où  je  conclus  rigoureusement,  de  tout  ce  qui  pré- 
cède, que  la  cause  de  Robert  d'Ârbrissel  manque  des 
éléments  constitutifs  pour  la  réussite  désirée,  et  je  ré- 
sume ainsi  la  discussion. 

La  lettre  des  décrets  pontificaux  ne  peut  même  pas 
être  élargie  par  Vesprit  de  ces  mêmes  décrets. 

On  constate  des  lambeaux  de  culte,  mais  non  un 
culte  régulier  et  surtout  antérieur  à  l'inflexible  date 
de  1534. 

Enfin,  les  preuves  manquent  pour  les  époques  re- 
culées et  viennent  trop  tard  dans  les  siècles  les  plus 
rapprochés  du  nôtre,  où  une  certaine  tradition  essaie 
de  se  rattacher  au  passé. 


—  884  — 

Mi^  Estrade,  dans  son  enquête  trop  sommaire  et  trop 
restreinte  de  1855,  n'avait  qu'entrevu  le  côté  favorable 
de  la  cause.  Il  m'a  été  pénible  d'envisager  le  côté  dé- 
favorable. Mais  je  n'avais  pas  le  choix.  J'ai  suivi  ma 
conscience  et  écouté  les  instructions  que  Rome  me 
donnait. 


XXI. 


II  est  fâcheux  que  la  déduction  que  j'ai  dû  faire  de 
toutes  les  pièces  du  débat  ne  réponde  ni  à  mon  at- 
tente ni  à  mes  vœux  les  plus  sincères.  Mais  enfin  j'aurai 
au  moins  servi  en  quelque  chose  une  si  belle  cause, 
en  consignant  mes  observations  personnelles.  C'est  un 
pas  de  plus  dans  la  question,  si  ce  n'est  pas  une  solution 
définitive.  Pour  moi,  il  m'est  désormais  impossible 
d'aller  plus  loin.  Si  l'évêché  d'Angers  désire  pousser 
outre  et  tenter  à  Rome  une  nouvelle  épreuve,  je  n'ai 
point  à  m'en  occuper.  Je  lui  devais  seulement,  à  titre 
d'historiographe  du  diocèse,  le  résultat  de  mes  investi- 
gations, comme  aussi  les  motifs  de  ma  conviction.  Je 
serai  heureux  si  d'autres  plus  persévérants  et  mieux 
renseignés  complètent  et  mènent  à  terme  une  question 
pendante  depuis  des  siècles.  Quod  potui  feci,  faciant 
meliara  potenles. 

X.  Bârbusr  de  Montault, 

Chanoine  de  la  basilique  d*Anagnl. 


1 


CONDITIONS  DE  L'ABONNEMENT. 


Le  Répertoire  Archéologique  de  V Anjou  paratt  le  i^  ûe 
chaque  mois,  par  livraisons  chacune  de  deux  feuilles  dlm- 
pression. 

Le  prix  de  l'abonnement,  pour  les  personnes  ne  faisant  pas 
partie  de  la  Commission  Archéologique,  est  de  5  francs  par  an 
pour  Angers  et  de  6  francs  par  la  poste. 

Les  abonnements  sont  reçus  chez  tous  les  libraires  du 
département. 


co 


SOCIÉTÉ    IMPÉRIALE    D'AGRICULTURE,  SCIENCES   ET  ARTS 

MaENNE  ACADÉUE  D'ANGERS. 


<;OlilSS10l  ARCIËOIOGIQUE 

/  '        ^  DO  DÉPARTEMENT 

BE  MAINE  ET  LOIRE 


RÉPERTOIRE  iBGHÊOLOGIQIIË 


DE    L'ANJOU 


Jfriinée  i  I^OS.  ■»  Octobre-Nov^mlire. 


I  B  — 


ANGERS 

IMPinMERÏE    DE    COSNIER    «T    LACHÈSE 

C'hausjïée  Saint-Pierre,  13 

1863 


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3 


i5«,™^,  /-,  S^y,7/,^,,i 


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wmm  mm  de  i'anjod 

(suite  et  fin). 

Le  sol  conserve  encore  passablement  la  forme  des 
trois  parties  du  théâtre.  On  y  voit  aussi  plusieurs  ves- 
tiges de  construction,  savoir  :  lo  au  sommet  le  plus 
central  de  l'endroit  où  étaient  les  gradins  supérieurs, 
une  masse  empledon  sans  briques;  2<>  au  bas  de  Tun 
des  points  où  étaient  établis  les  gradins  inférieurs  vers 
nord-est  y  trois  noyaux  emplecton  sous  briques  ;  S^  dans 
la  partie  la  plus  voisine  de  Thémicycle  de  Torcliestre, 
deux  restes  du  gradin  inférieur;  l'un  de  ces  vestiges 
vers  nord-est  se  compose  de  pierres  cimentées,  l'autre 
de  mêmes  pierres  cimentées  couvertes  d'une  assise  de 
grandes  briques;  chacune  de  ces  briques  porte  au-des- 
sous une  entaille  longitudinale  qui  permettait  aux  ou- 
vriers de  les  manier  plus  aisément  lors  de  l'emploi 
qu'ils  en  firent  en  ce  lieu.  Ces  briques  sont  semblables 
à  celles  que  l'on  a  découvertes  dans  les  ruines  de 
l'amphithéâtre  d'Angers;  A^  au  sud  de  l'orchestre  une 
masse  emplecton. 

Ce  théâtre  que  Bodin  n'a  pas  signalé,  est  situé  dans 
un  bois  taillis,  appartenant  à  M.  D'Achon.  C'est  à  tort 
que  l'imprimeur  de  V Anjou  et  ses  m^num^nts  a  cru 
devoir  au  tome  premier,  substituer  le  mot  amphithéâtre 
à  celui  de  théâtre;  déjà  nous  avons  rectifié  cette  erreur 
dans  les  Nouvelles  archéologiques,  n^  41 . 

Lors  de  la  session  du  congrès  à  Saumur  en  1862, 
Gennes  fut  visité  par  M.  de  Caumont  et  par  la  Société 
française  qui  séance  tenante  vota  des  fonds  pour  faire 

REP.  ARC.  28 


3)CL 
A4 

Ûdi.Mt 


_  38ë^^  - 

des  fouilles  à  ce  théâtre.  Voir  le  volume,  XXIX©  session, 
pages  128-129  et  264. 

Aqueduc.  —  L'aqueduc  de  Gennes  dont  Teau  coulait 
du  sud  au  nord,  se  voit  à  la  base  du  coteau  situé  rive 
droite  du  ruisseau  d'Avort.  En  quelques  endroits  il  est 
caché  sous  terre.  Sa  coupe  présente  une  forme  carrée. 
Le  Méandre  a  de  profondeur  33  centimètres,  sur  au- 
tant de  largeur;  le  radier  de  cet  aqueduc  est  composé 
de  moellons  en  tuf,  noyés  dans  le  ciment,  statumen. 
Les  parois  externes  sont  en  tuf  et  à  petit  appareil  ré- 
gulier. Les  internes  se  trouvent  revêtues  d'une  couche 
épaisse  de  ciment  rose.  Le  dessus  de  Faqueduc  est 
couvert  de  pierres  de  grès  et  d'ardoises  brutes. 

Sudatorium.  —  Le  sudatorium  ou  éluve  est  d'une 
forme  très-originale.  Par  ce  qui  en  reste,  ^  voit  qu'il 
était  bâti  sur  un  plan  circulaire  autour  duquel  étaient 
de  petites  niches  carrées  et  rayonnantes  les  unes  par 
rapport  aux  autres.  Entre  les  niches  sont  des  exedres 
qui  devaient  donner  à  ce  monument  beaucoup  d'élé- 
gance. Le  diamètre  présumé  de  ce  petit  édifice  était 
d'environ  3  mètres ,  52  centimètres.  Chaque  exedre  a 
de  largeur  66  centimètres;  et  quant  aux  niches  car- 
rées, elles  n'ont  pas  plus  de  66  centimètres  de  large 
sur  49  à  50  c.  de  profondeur. 

Ces  niches  servaient  aux  baigneurs  à  se  tenir  assis 
pendant  que  la  vapeur  les  enveloppait.  Elles  devaient 
être  au  nombre  de  huit;  en  1841,  il  en  existait  encore 
trois  avec  autant  d'exedres.  Une  voûte  semblable  à 
celles  que  l'on  voit  dans  les  étuves  d'Orient  où  ces 
bains  sont  encore  en  usage,  fermait  sans  doute  le  som- 
met de  ce  sudatorium.  On  remarque  dans  ce  qui  reste 
le  petit  appareil  en  pierres  de  tuf,  alterné  d'assises  de 


—  387  — 

briques.  Des  traces  noires  accusent  en  quelques  parties 
les  effets  du  feu. 

L'aqueduc  précité  amenait  l'eau  qui  servait  à  former 
la  vapeur.  Des  tuyaux  en  plomb  trouvés  plus  loin,  ver- 
saient l'eau  dans  des  baignoires  qui  ont  disparu ,  mais 
dont  le  souvenir  n'est  point  encore  altéré.  Il  y  avait  à 
Gennes  tout  un  système  de  bains  chauds,  tièdes,  froids 
et  de  vapeur. 

Voie  romaine.  —  Vers  1841,  on  en  distinguait  encore 
très-bien  la  summa  crusta;  cette  voie  allait  dans  la 
direction  de  Gennes  à  Ghenehutle,  c'est-à-dire  de  l'ouest 
à  l'est.  Elle  se  composait  de  longues  et  larges  pierres 
de  grès  polymorphes  qui  s'emboitaient  les  unes  dans 
les  autres ,  comme  à  la  Via  Sacra  de  Rome,  près  l'arc 
de  Titus. 

Rapprochement  assez  curieux,  le  département  de  la 
Sarthe  possède  sur  les  frontières  de  l'Anjou  un  hameau 
nommé  Gennes  et  qui  renferme  aussi  des  débris  gallo- 
romains.  Le  mot  de  Gennes  d'après  Ducange ,  peut  si- 
gnifier monticule]  et  en  effet,  les  deux  endroits  de  ce 
nom  dans  le  Maine  et  l'Anjou  sont  fort  élevés.  (Voir 
Bulletin  de  M.  de  Gaumont,  1858,  page  110.) 

11.  COMMUNE  DE  CUNAULT-TRÊVES . 

Sur  cette  commune,  en  un  lieu  nommé  Saint-Mâcé, 
extrêmement  pittoresque,  existent  les  ruines  d'une 
chapelle  et  d'un  prieuré  bâtis  au  xii©  siècle,  par  les 
soins  de  Fulcrade,  seigneur  de  Trêves,  au  retour  d'un 
pèlerinage  en  Terre-Sainte.  Les  murs  de  clôture  de  la 
cour  sont  de  diverses  époques  et  sur  l'un  on  dislingue 


—  388  — 

le  petit  appareil  avec  assises  de  briques.  Si  cette  mu- 
raille n'est  pas  gallo-romaine,  elle  en  est  du  moins  une 
imitation  fort  ancienne. 

13.  COMMUNE  DE  GHENEHUTTE-LES-TUFFEAUX . 

Cette  commune  qui  tire  son  nom  des  vastes  carrières 
de  tuf  que  Ton  y  exploite  depuis  plusieurs  siècles,  par 
galeries  creusées  horizontalement  au  pied  du  coteau, 
renferme  un  camp  romain  connu  sous  le  nom  de  Che- 
nehutte.  En  face  de  ce  camp,  sous  la  Loire,  existe  un 
radier  de  pont  qui  partant  de  Chenehutte  gagnait,  au 
rapport  des  mariniers,  l'Authion  au  point  nommé  Gué 
d'Arcis.  Ce  pont  romain  aura  sans  doute  donné  à  la 
station  Robrica  son  nom,  car  d'après  M.  de  Matty  on 
.trouve  dans  Robrica,  Talliance  hybride  de  Romanorum 
Brica^  pont  des  Romains  ^  le  mot  celtique  Brica  signi- 
fiant pont.  Cette  station  est  placée  par  M.  de  Matty  au 
gué  d'Arcis,  et  par  La  Sauvagère,  Robin  et  Bodin,  au 
camp  de  Chenehutte.  Ces  deux  opinions  nous  paraissent 
beaucoup  plus  vraisemblables  que  celles  qui  mettent 
cette  station  à  Longue,  à  Beaufort  et  à  Saint-Just-sur- 
Dive. 

Passons  à  la  description  du  camp  de  Chenehutte  ;  il 
est  situé  sur  la  cime  d'un  coteau  dont  la  base  est  bai- 
gnée par  la  Loire  (rive  gauche).  Il  domine  le  fleuve 
d'une  hauteur  d'au  moins  35  mètres  vers  nord.  Au 
sud-est,  un  ravin  profond  contourne  la  colline.  Dans 
ce  ravin  coule  un  ruisseau  qui  décharge  ses  eaux  dans 
la  Loire.  A  l'ouest  ce  camp  est  défendu  par  une  levée 
artificielle  et  polygonale.  La  hauteur  de  cette  levée 


—  389  — 

varie  entre  4  et  7  mètres  ;  sa  plus  grande  largeur  de 
base  peut  mesurer  de  28  à  30  mètres  et  sa  longueur 
est  d'environ  250  mètres.  Ce  camp,  à  part  les  angles 
de  sa  levée,  affecte  une  forme  ovale  dont  la  circonfé- 
rence a  plus  de  950  mètres.  Sa  largeur  est  de  240  et 
sa  longueur  de  370.  Bodin  en  a  donné  le  plan.  C'était 
là  un  camp  de  la  classe  des  stativa;  il  pouvait  renfer- 
mer une  demi-légion,  c'est-à-dire  près  de  trois  mille 
hommes  ;  les  habitants  du  lieu  le  nomment  Châtelier. 

On  y  trouve  des  briques  à  rebords,  des  fragments  de 
poteries  vernissées,  rouges,  avec  reliefs,  puis  des  mon- 
naies du  haut  empire  allant  d'Auguste  aux  Antonins. 
Sur  un  des  versants  de  celte  station  du  côté  sud^  nous 
vîmes  en  4854,  une  agglomération  de  détritus  d'osse- 
ments d'animaux  qui  provenaient  sans  doute  du  macel- 
lunif  lieu  où  l'on  abattait  et  distribuait  les  viandes. 

Nous  aperçûmes  aussi  dans  le  même  camp  une  ci- 
terne carrée  enduite  de  ciment  rose ,  qui  venait  d'être 
découverte. 

Au  mois  d'octobre  1856,  on  trouva  un  autre  bassin 
celui-ci  octogone^  ayant  1  m.  95  c.  de  diamètre.  Il  était 
encombré  de  tuiles  tégulaires,  d'une  couche  de  charbon 
qui  paraissait  provenir  de  charpentes  incendiées  et  enfin 
d'une  seconde  couche,  celle-ci  de  blé  carbonisé. 

«  A  une  profondeur  de  0  m.  65  c.  se  rencontrait  un 
j  plafond  en  maçonnerie,  au  milieu  duquel  on  voyait 

>  un  trou  circulaire  de  0  m,  08  de  diamètre  qui  for- 

>  mait  Vouverture  d!un  tuyau  vertical.  Cette  ouverture 

>  était  fermée  par  une  bonde  en  tuffeau...  Au-dessous 
»  du  plafond  se  trouvait  une  masse  de  terre  et  de  sable 
»  grossier  que  nous  enlevâmes  pour  parvenir  au  fond 


—  390  — 

»  du  bassin.  Nous  reconnûmes  que  le  tuyau  vertical 
»  était  en  communication  avec  un  second  tuyau  sortant 
è  du  bassin;  ce  second  tuyau  suivait  une  direction 
)  oblique  tendant  à  remonter  &  la  surface  du  sol...  il 
)  se  terminait  à  environ  0  m.  30  au-dessous  du  sol 
))  au  même  niveau  que  le  sommet  du  bassin.  Il  mesure 
»  une  longueur  de  4  m.  60;  son  calibre  est  de  0  m. 
)  10  de  diamètre;  il  est  creusé  dans  une  maçonnerie 
)  de  tuffeau.  Il  n'a  pas  d'ouverture  à  son  extrémité 
)  supérieure,  il  est  fermé  par  la  maçonnerie.  Un  troi- 

>  sième  tuyau  (terre  cuite),  ayant  son  ouverture  à  0  m. 
)  75  au-dessous  de  la  partie   supérieure  du  bassin, 

>  mais  au-dessus  de  son  plafond  intermédiaire,  se  pro- 

>  longe  en-dehors,  dans  une  longueur  de  4  m.  40;  il 
»  est  également  fermé  à  son  extrémité,  et  se  termine 
»  comme  le  culot  d'un  creuset.  Le  bassin  est  construit 
»  en  emplecton  et  revêtu  intérieurement  d*un  enduit 
»  en  mortier  rouge.  » 

(Voir  Note  de  M.  de  Beauregard,  Mém.  de  la  Soc. 
d'agr.,  sciences  et  arts  d'Anger^,  2©  série,  S^vol.,  1857, 
page  52). 

Ce  bassin  n'aurait-il  point  été  une  cuve  de  pressoir 
au-dessus  de  laquelle  aurait  existé  un  grenier  qui  par 
suite  d'incendie,  aura  laissé  tomber  son  grain  au  fond 
de  ce  bassin  ? 

Mais  ceci  n'explique  pas  l'usage  du  plafond  intermé- 
diaire, ni  du  tuyau  vertical,  et  encore  moins  des  tuyaux 
inférieur  et  supérieur  clos  à  leur  extrémité.  Il  y  a  en 
tout  cela  comme  un  appareil  distillatoire  que  nous  ne 
comprenons  pas,  mais  qui  mérite  d'attirer  l'attention 
des  savants. 


—  391  — 

Tout  près  de  ce  camp,  à  Fouest,  en  un  endroit 
nommé  les  Sables,  se  trouvait,  dit-on,  la  ville  à' Or- 
vanne  ou  à'Orval;  le  fait  est  qu'on  y  rencontre  beau- 
coup de  cercueils  monolithes,  en  pierre  coquillière  de 
Doué;  ils  ont  tous  Torient  chrétien,  et  se  rapportent 
sans  doute  à  Fexistence  d'une  vieille  église  en  ruine 
située  sur  le  coteau,  près  d'un  cimetière.  Dans  cette 
église  se  fait  remarquer  le  petit  appareil.  Ces  divers 
cercueils  en  pierre  coquillière  de  Doué,  nous  autorisent 
à  croire  que  dans  cette  ville,  en  existait  une  fabrique 
et  que  le  commerce  s'en  étendait  au  loin.  On  préférait 
sans  doute ,  cette  pierre  spongieuse  plus  propre  que 
toute  autre,  à  la  conservation  des  ossements. 

Mais  revenons  à  notre  camp  de  Chenehutte.  Au  sud- 
est,  Bodin  a  découvert  une  voie  romaine  sur  500  mètres 
de  longueur  qui  se  dirigeait  vers  Doué.  Sa  largeur  était 
de  4  à  5  mètres,  elle  formait  comme  un  chemin  cou- 
vert pratiqué  le  long  et  au-dessous  du  camp  sur  le 
versant  oriental  du  coteau.  Cette  voie  est  encore  appa- 
rente en  quelques  endroits  et  soutenue  çà  et  là  par  un 
mur  rustique  de  2  mètres  de  hauteur.  La  coupe  de 
cette  voie  présentait  de  haut  en  bas  :  4^  Des  pavés  non 
taillés  ;  2»  Une  couche  de  tessons  de  briques  ;  S»  De 
vieilles  ferrailles;  4°  Des  ossements  d'animaux;  5©  Des 
mâchefers. 

En  1862,  le  Congrès  visita  ce  lieu  si  plein  d'intérêt. 

13.  PAROISSE  DU  TOUREIL,  BESSÉ,  SAINT-MAUB. 

Ces  trois  lieux  ne  forment  plus  qu'une  paroisse  sur 
laquelle  on  remarque  au  Toureil ,  une  ancienne  tour 


—  892  -- 

dont  le  plan  est  un  parallélogramme  d'environ  17  mè- 
tres de  long  sur  14  de  large.  Les  murs  ont  encore  de 
hauteur  4  à  5  mètres.  Une  seule  ouverture  en  plein 
cintre  donne  accès  à  Tintérieur. 

Les  murs  avant  qu'ils  aient  été  dépouillés  de  leurs 
parements,  avaient  environ  2  m.  1/2  d'épaisseur.  Ces 
parements  étaient  en  tuf  blanc  et  encadraient  un  massif 
emplecton.  Cet  édifice  porte  le  nom  de  tour  de  Galles. 
Ce  nom  vient-il  de  Turris  GaUorum"!  Quoi  qu'il  en  soit 
sa  construction  est  très-ancienne,  mais  je  ne  la  crois 
pas  romaine.  Cette  tour  me  semble  être  de  la  famille 
des  tours  carrées  du  X®  siècle.  (Voir  page  281^  volume 
du  congrès  de  Saumur)  Au  rapport  de  l'enquête  de 
1856,  il  existait  jadiis  au  Toureil  quelques  traces  de  voie 
romaine,  allant  de  l'ouest  à  Test. 

Parmi  les  ruines  de  l'antique  abbaye  de  Saint-Maur, 
lieu  qui  avant  le  vp  siècle,  se  nommait  Glannafoliumy 
il  ne  reste  rien  de  cette  époque  de  la  fondation  du 
plus  ancien  couvent  bénédictin  de  France  et  rien  non 
plus  de  l'ère  gallo-romaine. 

14.  PAROISSE  DE  SAINT-GEORGES  DES  SEPT-VOIES.  DE 

SEPTEM  vus  (Huynes,  page  38). 

Sur  cette  paroisse,  en  un  lieu  nommé  la  Croix- 
rouge,  on  a  découvert  au  rapport  de  M.  Poidevin, 
maire  du  lieu,  un  certain  nombre  de  briques  à  rebord. 
Non  loin  de  là  à  l'endroit  appelé  VOrbière,  on  trouve 
des  squelettes  inhumés  dans  des  fosses  taillées  au  fond 
d'un  banc  horizontal  de  pierre  de  tuf.  Parmi  ces  fosses 
les  plus  nombreuses  ont  l'orient  chrétien,  les  autres 


—  398  — 

vont  du  nord  au  sud  la  tête  au  nord.  Des  ardoises  brutes 
d'une  pâte  fort  bleue  recouvrent  quelques  fosses  dont 
Tune  renfermait  deux  corps.  La  tête  des  cadavres 
(orientation  chrétienne)  se  dressait  comme  pour  regar- 
der l'orient. 

Près  de  ce  vieux  cimetière,  se  voit  une  cave  dont  la 
voûte  est  taillée  en  coupole  semi-sphérique  dans  le 
rocher  même;  on  y  remarque  un  puits.  Cette  cave  a 
4  m.  60  c.  de  diamètre  de  l'est  à  l'ouest,  et  4  m.  90 
du  nord  au  sud.  Ne  serait-ce  point  une  très  ancienne 
église  ou  chapelle?  Beaucoup  de  villageois  demeurent 
encore  dans  des  caves,  mais  aucune  ne  ressemble  à 
celle-ci;  du  reste,  toute  tradition  est  perdue  sur  cette 
chapelle  et  sur  le  cimetière  qui  pourraient  bien  dater 
du  v®  siècle  (1).  L'orientation  barbare  et  l'orientation 
chrétienne  se  mêlaient  souvent  à  cette  époque,  où 
plusieurs  cultes  étaient  en  présence;  exemple  :  les 
cercueils  de  plomb  trouvés  à  la  gare  d'Angers  et  les 

(1  )  Il  se  pourrait  que  ce  lieu  de  sépulture  en  pleine  campayne,  ait 
été  un  cimetière  central,  comme  il  en  existait  «  lorsque  la  propriété 
»  rurale  était  encore  organisée  à  la  romaine ,  c'est-à-dire  lorsque  le 
»  sol  était  divisé  en  domaines  sur  lesquels  étaient  disséminées  les 
»  habitations  des  cultivateurs.  Alors  qu'il  n'y  avait  pas  à  proprement 

•  parler  de  villages,  les  cimetières,  dit  M.  J.  Quicherat,  étaient  éta- 

»  blis  en  pleine  campagne pour  les  besoins  de  toute  une  circons- 

»  cription  de  pays...  Cet  état  de  choses  a  changé  dans  le  cours  des 

•  vm*'  et  ix«  siècles.  »  [Jievue  des  Sociétés  savantes  y  page  183,  août 
1859.)  Le  nom  de  TOrbière  que  porte  ce  lieu  de  sépulture  pouvant 
provenir  du  latin  Orbis,  semble  confirmer  nos  conjectures.  (Sepiem 
vium,  voir  sur  ce  mot,  page  87 ,  Congrès  arch.  de  France ,  xxvn^ 
session,  séances  tenues  à  Dunl^erque,  en  18Ç0.  —  Paris  1861.) 


—  894  — 

sépultures  découvertes   dans  la  commune  de  Saint- 
Mathurin  au  lieu  nommé  le  Chardonnef. 

Les  fosses  dé  rObrière  sont  généralement  moins 
larges  aux  pieds  qu'à  la  tête  ;  les  unes  sont  à  fleur  de 
sol  et  les  autres  à  1  m.  20  c.  de  profondeur. 

15.   COMMUNE  DE   SAINT-CYR-EN-BOURG. 

M.  Courtiller,  conseiller  à  la  Cour  impériale  d'An- 
gers, nous  a  assuré  que  sur  cette  commune,  avaient 
été  trouvés  depuis  4830,  en  transportant  les  terres  du 
cimetière,  des  médailles  romaines  et  des  fragments 
d'idoles,  notamment  une  statuette  de  Vénus  entière- 
ment nue.  Le  plus  curieux  en  tout  cela,  était  que  le 
cimetière  chrétien  recouvrait  tous  ces  restes  du  paga- 
nisme. D'après  l'enquête  de  4856  existeraient  sur  la 
butte  de  Saumoussay  les  traces  d'un  camp  romain. 
Quoi  qu'il  en  soit,  on  y  a  découvert  des  briques  à  re- 
bords, un  puits,  des  pièces  de  Constantin,  des  tombes 
en  auges.  Parmi  celles-ci,  les  unes  présentaient  à  l'in- 
térieur du  côté  de  la  tête,  un  creux  sphérique.  Quand 
elles  avaient  cette  sorte  d'oreiller  concave,  il  était  rare 
qu'on  ne  trouvât  pas  un  vase  de  terre  plein  de  char- 
bon. C'est  là  un  genre  d'inhumation  chrétienne. 

46.  COMMUNE  DE  SAINT-JUST-SUR-DIVE. 

Suivant  Bodin,  existait  dans  cette  commune,  à  l'angle 
formé  par  le  Thouet  et  la  Dive,  une  ville  nommée 
Lezon  ou  Lezan  qu'il  présume  avoir  été  détruite  ainsi 
que  la  ville  d'Orvanne  près  du  camp  de  Chenehutte, 


—  395  — 

soit  par  les  Francs  au  v*  siècle,  soit  par  les  Normands 
au  ixe.  Une  partie  du  terrain  que  Lezon  occupait  se 
nomme  la  Haute-voie.  Ce  lieu  est  fertile  en  objets 
gallo-romains  :  médailles  d'or,  d'argent  et  de  bronze 
allant  d'Auguste  à  Constantin.  On  y  a  trouvé  des  débris 
de  meules  à  bras  en  lave  d'Italie  ou  d'Auvergne,  des 
vases  de  terre  rouge,  une  amphore,  le  pied  d'un  vase 
en  fer  fondu,  deux  creusets  brisés,  des  matières  vitri- 
fiées, un  tronfon  de  colonne  en  pierre  silico-calcaire, 
orné  de  feuilles  d'eau,  sculptées  et  servant  aujourd'hui 
de  bénitier  dans  l'église  de  Saint-Just. 

J'ajoute  à  cette  énumération  celle  des  objets  suivants, 
classés  par  M.  A.  Courtiller,  dans  une  note,  page  347 
du  tome  2  des  Mémoijres  de  la  Société  d'agriculture, 
sdences  et  arts  d'Angers  :  un  phallus^  des  compas, 
pioches,  scies,  ciseaux,  gouges,  haches  en  fer,  des 
vases  en  bronze,  en  terre,  un  plat  eu  cuivre  renfermant 
80  pièces  de  bronze;  un  magnifique  tuba  en  cuivre, 
dont  une  partie  rentrait  dans  l'autre  à  volonté,  comme 
dans  le  trombonne  ;  une  clef  en  fer ,  un  tire-ligne,  un 
instrument  aratoire;  tous  objets  du  plus  haut  intérêt 
déposés  au  musée  de  Saumur,  qui  compte  encore  les 
suivants  trouvés  au  même  lieu  : 

Objets  en  verre.  —  Un  gobelet;  une  urne  cubique 
avec  large  orifice  rond;  une  bouteille;  un  biberon 
trouvé  au  fond  d'un  tombeau  et  semblable  à  celui  que 
Ton  voit  au  musée  des  antiquités  d'Angers,  lequel  a 
été  découvert  dans  notre  cimetière  gallo-romain  de  Ju- 
liomagus  ;  un  fragment  de  vase  orné  de  côtes  convexes. 

Lezon  a  fourni  plusieurs  échantillons  de  sépultures 
incinérées  comme  celle  que  je  vais  décrire  et  qui  se 


—  396  — 

compose  :  1®  d'un  phtean  rond  et  Icgërement  convexe 
en  argile  grossière  ;  9»  d'nne  orne  noire  et  yemissée. 
Le  plateau  crenx  à  l'intérieur  est  renversé  sens-dessus- 
dessous,  comme  pour  servir  de  base  à  Fume  cinéraire 
qui  repose  sur  le  milieu  de  sa  partie  convexe.  On  a 
eu  le  bon  esprit  de  conserver  cette  disposition  au 
musée  de  Saumur.  L'église  de  Saint-Just  a  dans  sa 
construction  quelques  murs  imbriqués  et  l'on  rencontre 
souvent  à  l'entour  des  cercueils  en  pierre  coquilliére. 

17.  COMMUNE  DE  VIHIERS. 

D'après  M.  Tristan-Martin,  il  y  aurait  sur  cette  com- 
mune trace  d'une  voie  romaine  allant  de  La  Tour- 
Landry  à  Doué,  dans  la  direction  de  l'ouest  à  l'est. 

18.  COMMUNE   DE   SOUZAY. 

On  y  a  trouvé  des  pièces  romaines.  (Voir  carte  de 
M.  Raimbault.) 

19.   COMMUNE  DE  MONTSOREAU. 

Pièces  romaines.  (Carte,  idem.) 

20.   COMMUNE  DE   BREZÉ. 

Vases  et  pièces  romaines  trouvées  au  lieu  appelé 
la  Rivière-Marteau.  Ces  objets  sont  présentement  au 
château  de  Brezé.  {Rép.  Arch.,  n^  de  mai  1863,  page 
324.) 

21.   COMMUNE  d'EPIEDS. 

Pièces  romaines.  (Carte,  idem.) 

22.    COMMUNE  DES   ROSIERS. 

Pièces  romaines.  (Carte,  idem) 


—  397  — 

ARRONDISSEMENT  DE  SE6RÉ. 

Des  traces  gallo-romaines  ont  été  constatées,  savoir  : 
1^  sur  la  commune  de  Châtelais;  2^  de  la  Ferriére; 
30  de  Louvaines;  ¥  de  Marigné;  5^  du  Lion-d'Angers; 
6<>  de  Chambellay;  ?<>  de  Candé;  8<>  de  Brissarthe. 

1.  COMMUNE  DE  CHATELAIS. 

U Anjou  et  ses  monuments  est  le  premier  ouvrage 
qui  ait  fait  connaître  les  ruines  gallo-romaines  et 
féodales  de  Châtelais.  On  trouve  dans  ce  bourg  une 
grande  quantité  de  briques  à  rebords  et  des  noyaux  de 
murailles  en  emplecton.  D'un  autre  côté,  M.  Béraud  a 
remarqué  au  nord  de  Châtelais  une  chaussée  étroite 
et  élevée  n'ayant  aucune  analogie  avec  nos  chemins 
modernes.  (Mém.  delà  Soc.  d'agr.,  sciences  et  arts  d'An- 
gers, 1853,  page  46.)  Le  dit  chemin  était  parsemé  de 
gros  blocs  de  pierre. 

D'Angers  à  Rennes  en  passant  par  le  Lion^  la  Jaillette, 
Louvaines  et  la  Perrière  ^  la  voie  romaine  était  assez 
directe;  Châtelais  se  trouve  sur  cette  route.  Aussi 
M.  Boreau  dans  un  article  faisant  partie  des  Mém.  de  la 
Soc.  d'agr.,  sciences  et  arts  d'Angers,  page  43,  année 
4853,  place- t-il  la  station  Combaristum^  à  Châtelais 
et  non  pas  à  Combrée  ;  il  se  fonde  d'abord  sur  le  calcul 
des  distances  que  donne  la  table  de  Peutinger  et  en- 
suite sur  le  nom  de  la  forêt  A' Ombrée  ^  diminutif  de 
Combrée  y  forêt  qui  avoisine  Châtelais.  Il  est  remar- 
quable d'ailleurs  que  l'on  n'a  jamais  remarqué  d'anti- 
quités romaines  à  Combrée. 


—  S98  — 

c  La  concordance ,  dit  M.  Boreau ,  des  disUmces  in- 

>  diquées  et  des  constructions  antiques,  nous  persuade 

>  que  Cbâtelais  a  pris  la  place  de  l'ancien  Combarisium. 

>  Rien  de  plus  ordinaire  que  ces  changements  de  nooi 
f  au  moyen-âge.    Lorsqu'une  forteresse  s'élevait  sur 

>  les  ruines  d'un  monument  antique,  elle  prenait  le 

>  nom  de  Castrum  novum,  CasteUum^  Châteauneuf^ 
h  ChâHUoriy  Chatellier,  Châtelais....  Mais  le  nom  de 
»  Combaristum  ne  s'eflFaça  pourtant  pas  entièrement. 
»  Il  resta  attaché  à  la  vaste  forêt  qui  avoisinait  la  sta- 
»  tion  et  qui  jusqu'ici  a  toujours  été  nommée  forêt,  de 

>  Cambrée  ou  par  corruption  forêt  d'Ombrée;  etlorsque 
»  plus  tard,  un  bourg  vint  s'établir  à  l'extrémité  mé- 
»  ridionale  de  celte  forêt,  il  emprunta  naturellement 
»  son  nom  aux  bois  à  l'ombre  desquels  il  avait  abrité 
»  son  clocher;  il  devint  le  bourg  de  Gombrée.  » 

Une  chose  nous  embarrasse  dans  ce  système,  c'est 
que  le  Conbaristum  de  la  carte  de  Peutinger  s'écrit 
par  une  n  ;  et  nous  ne  voyons  pas  bien ,  comment  le 
nom  de  forêt  de  Gombrée  ou  d'Ombrée  pourrait  en  dé- 
river. M.  de  Matty  fait  venir  Gombrée  de  Contra  ombrea, 
contre  la  forêt  d'Ombrée;  ce  qui  ne  l'empêche  pas  de 
placer  la  station  Conbamtum  à  Candé. 

2.    COMMUNE  DE  LA  PERRIÈRE. 

On  y  trouve,  au  rapport  de  l'enquête  de  1856,  des 
encaissements  de  gros  pavés  qui  ne  peuvent  avoir  ap- 
partenu qu'à  une  voie  antique. 

H.    COMMUNE  DE   LOU VAINES. 

De  semblables  traces  ont  été  rencontrées  sur  cette 
commune. 


—  399  — 

4.   COMMUNE  DE  MARIGMÉ. 

On  y  trouve  de  gros  tas  de  mâchefers,  résidus  de 
forges  gallo-romaines  (i).  Dans  le  Maine  de  pareilles 
découvertes  ont  eu  lieu.  €  De  toutes  parts  (dit  Tabbé 

>  Voisin  dans  son  premier  volume  des  Génomans, 
»  page  23)  et  plus  particulièrement  dans  le  voisinage 
»  des  routes  fréquentées,  on  remarque  des  vestiges  de 
]»  forges  à  bras,  et  toutes  les  anciennes  voies  elles- 

>  mêmes  paraissent  avoir  été  encaissées  en  scories  de 
»  fer.  j 

Et  ailleurs,  page  59  :  «  Les  mottes  formées  de  sco- 
»  ries,  laissent  découvrir  sur  la  paroisse  de  la  Bazoge, 
»  de  nombreux  fragments  de  poteries  romaines  et  de 
»  médailles  des  empereurs,  i^ 

5.    COMMUNE  DU  LION-d'aNGERS . 

L'étymologie  de  ce  nom  Legio  que  Ton  trouve  dans 
les  anciennes  chartes  et  notamment  dans  un  titre  im- 
primé par  Hiret,  page  240  de  ses  Antiquités  d'Anjou, 
prouve  que  ce  lieu  remonte  à  Tère  gallo-romaine. 

Le  Lion-d'Ângers  dans  la  dite  charte,  est  qualifié  de 
Viens  :  in  vico  qui  Legio  nuncupatur.  Page  214. 

J'ai  lu  quelque  part  (2) ,  que  jadis  avait  existé  au 

(i)  Ce  genre  de  forges  était  connu  des  Romains,  sous  le  nom  de 
magnœ  ferrnriœ^  v.  p.  136,  t.  V,  Mém.  de  la  Soc.  des  antiquaires 
de  l'Ouest. 

(2)  Robin  qui  écrivait  à  la  fin  du  KVUP  siècle,  dit  :  a  Les  Romains 
»  avaient  un  camp  au  confluent  de  la  Mayenne  avec  TOudon  ;  cette 

*  situation  ne  dut  pas  leur  paraître  indifférente  yis*à-yis  des  Bretons 
»  et  des  Cénomans  qu'ils  devaient  contenir  :  il  est  tout  vraisemblable 

*  que  c'est  ce  qui  a  donné  naissance  au  Lion  d'Angers,  d'abord 


—  400  — 

Bec  de  FOudan  à  la  pointe  formée  par  cette  rivière  et 
la  Mayenne  y  un  camp  romain.  Ce  camp  qui  n'a  laissé 
malheureusement  aucune  trace,  aura  sans  doute  donné 
le  nom  de  Lion^d' Angers,  Legio  Andinay  à  la  petite  ville 
qui  le  porte  encore  et  qui  possède  une  très-ancienne 
église  où  l'on  remarque  le  petit  appareil  dans  le  mur 
eiEtérieur  du  nord. 

Un  glaive  romain  aujourd'hui  déposé  au  musée  des 
antiquités  d'Angers,  fut  trouvé  au  fond  de  l'Oudon  entre 
deux  vieilles  piles,  lors  de  la  construction  du  pont  ac- 
tuel. 

6.    COMMUNE  DE  CHAMBELLÂY. 

Sur  deux  mamelons  situés  entre  le  bourg  de  Cham- 
bellay  et  le  château  des  Aillets,  Ton  rencontre  à  fleur 
de  terre,  beaucoup  de  briques  à  rebords,  des  fragments* 
de  marbres  étrangers ,  des  tessons  de  vases  en  terre 
rouge  et  noire.  Ces  restes  se  trouvent  sur  une  étendue 
d'environ  trois  hectares  ;  l'emplacement  qu'ils  occupent 
se  nomme  les  Hauts-Châteaux. 

7.  COMMUNE   DE   CANDÉ. 

Nous  lisons  dans  le  Dictionnaire  interprète  manuel, 
Paris,  Lacombe,  1777,  ce  qui  suit  : 

«  Condate  Andegavorum  ou  Condate  ad  Mandiam; 
»  Candé,  petite   ville   d'Anjou  sur  les  frontières  du 

»  appelé  Légion  d'Angers ,  Legio  Andina.  On  y  voit  encore  des 
i>  restes  de  fortifications  de  ce  côté-ci,  où  la  ville  est  située  ;  une 
•  tradition  constante  nous  assure  que  le  plus  considérable  de  la  ville 
»  était  autrefois  de  Tautre  côté  du  pont ,  au  confluent  des  deux  ri- 
»  vières  où  il  n*y  a  plus  que  des  masures.  »  (V.  Nos  origines,  t.  II, 
p.  97.)  —  En  1087,  incendie  du  Lion-d*Ângers«  Roger,  p.  120. 


—  401  — 

>  comté  nantais,  au  confluent  de  la  Mandie  dans  TEr- 
»  dre.  > 

Ce  nom  de  Candé  est  d'origine  latine;  d'après  Mé- 
nage il  vient  du  latin  condere  ;  €  c'est-à-dire  se  cacher, 
1^  à  cause  que  (l'un  des  deux  cours  d'eau)  se  cache 
»  dans  l'autre  et  qu'il  s'y  perd.  »  Voir  le  Sablé  de 
Ménage,  page  230. 

8.    COMMUNE   DE   BRISSARTHE. 

11  y  avait  une  voie  romaine  du  Mans  à  Nantes  en  pas- 
sant par  Brissarthe  et  allant  du  nord-est  au  sud-ouest. 
«  Les  Bretons  et  les  Scandinaves,  (dit  l'abbé  Voisin, 

>  page  49  de  ses  Génomans,  tome  l®'"),  qui  avaient  laissé 
]»  leurs  vaisseaux  dans  la  Loire,  viennent  en  836  assié- 

>  ger  et  piller  la  ville  du  Mans;  ils  prennent  en  se 
ï  retirant  le  chemin  de  Brissarthe,  lieu  qui  fut  témoin 
B  de  leur  défaite  et  de  la  mort  du  valeureux  Robert. 

>  Il  n'est  personne,  continue  le  même  auteur,  qui 

>  ne  connaisse  le  voyage  que  Charles  VI  faisait  sur 

>  cette  route  lorsqu'il  fut  pris  d'une  attaque  de  frénésie 

>  près  d'Alonne  (Maine).  Une  charte  de  Foulques, 
»  comte  d'Anjou^  vers  l'an  1098,  porte  ces  mots:  SiciU 

>  dividit  revulus  Mulgipit  usque  ad  viam  Cenomanen- 
)  sem.  » 

CONCLUSION. 

En  résumé,  nous  avons  constaté  dans  le  département 
de  Maine  et  Loire,  quatre-vingt  sept  lieux  gallo-romains. 
Assurément  d'autres  seront  découverts,  et- il  ne  faut 
pas  s'en  étonner,  car  s'il  est  une  vérité  aujourd'hui  re- 
connue, c'est  bien  ce  fait  'remarquable  que  les  Gaules 
ont  été  très-peuplées.  Déjà  les  numismates  s'en  étaient 

R£P.  ARC.  29 


—  40Î  — 

aperçus  au  moyen  du  grand  nombre  de  noms   d'an- 
ciennes villes  et  villas  que  les  triens  ont  révélés. 

Maintenant  que  nous  sommes  en  possession  de  ces 
quatre-vingt  sept  lieux  gallo-romains,  dûment  constatés, 
il  nous  reste  à  rechercher  les  voies  et  routes  qui  en 
facilitaient  la  cgmmunication,  car  elles  ont  nécessaire- 
ment existé.  Cette  méthode  a  posteriori  nous  semble  la 
meilleure.  Mais  établissons  d'abord  que  l'un  de  nos 
plus  anciens  documents  sur  la  topographie  des  Gaules 
est  la  carte  de  Peutinger. 

Elle  porte  le  nom  de  ce  savant,  parce  que  découverte 
à  Spire  vers  1500,  elle  lui  fut  léguée  pour  qu'il  la 
publiât,  ce  qui  pourtant  n'eut  lieu  qu'en  1598,  après 
sa  mort. 

Scheyb  l'a  réimprimée  à  Vienne  en  4753.  Bien  que 
M.  Fortia  d'Urban  en  4845  ait  donné  une  nouvelle 
édition  de  cette  table,  celle  de  Scheyb  n'en  reste  pas 
moins  remarquable. 

Elle  se  compose  de  douze  segments  détachés,  de 
manière  à  pouvoir  être  placés  les  uns  à  la  suite  des 
autres. 

Le  segment  n^  l^r  renferme  nos  quatre  positions 
gallo-romaines  angevines  les  plus  anciennes,  savoir  ; 
Juliomago,  puis  à  Test  Robrica,  à  l'ouest  Conbaristum, 
et  au  sud-ouest  Segora. 

Ces  positions  dans  la  table  de  Peutinger,  se  trouvent 
toutes  sur  la  rive  gauche  de  la  Loire,  tandis  que  s'il 
est  vrai  que  Juliomago  soit  Angers,  comme  nous  n'en 
doutons  pas,  et  que  Conbaristum  soit  Combrée,  ce 
qui  nous  paraît  fort  incertaid,  ces  deux  dernières  posi- 
tions devraient  être  placées  sur  la  rive  droite.  11  en  est 


—  408  — 

ainsi  de  beaucoup  d'autres  villes  et  villas^  ce  qui  prouve 
que  Tauteur  inconnu  de  cette  table,  a  moins  eu  le 
dessein  de  faire  un  travail  géographique  que  celui  de 
dresser  une  carte  routière  ou  postale  des  distances,  qui 
sont  toutes  partiellement  indiquées  en  chiffres  romains 
d'une  étape  à  l'autre .  Il  suffit  de  jeter  les  yeux  sur 
r  ensemble  de  cette  table  pour  voir  qu'elle  n'est  qu'un 
ruban  ou  plutôt'  qu'une  litre  allongée  d'orient  en  oc- 
cident et  qu'elle  ne  tient  compte  d'aucunes  proportions 
du  nord  au  sud  et  fort  peu  de  l'est  à  l'ouest.  Dans 
cette  table  également  appelée  Théodosienne  y  l'on  ne 
s'est  évidemment  préoccupé,  je  le  répète,  que  des  dis- 
tances en  chiffres  et  d'une  approximative  orientation , 
sans  prendre  beaucoup  garde,  autrement  que  pour 
mémoire,  à  la  distribution  des  mers,  fleuves  et  rivières. 
On  serait  tenté  de  croire  qu'elle  aurait  été  dressée 
comme  on  trace  un  plan  à  vue  d'œil  et  sur  lequel  on 
place  des  cotes  provisoires  qui,  plus  tard,  pourront 
servir  à  mettre  en  rapport  les  chiffres  avec  les  lignes. 

Malgré  ses  imperfections ,  cette  carte  de  l'Empire 
romain  est  le  monument  le  plus  précieux  sur  lequel 
nous  puissions  faire  quelques  fondements  pour  noire 
géographie  angevine.  On  croit  qu'elle  fut  exécutée  à 
Conslantinople  vers  l'an  393  sous  Théodose  le  Grand , 
ou  encore  vers  435  du  temps  de  Théodose  IL  Peut-être 
même  est-elle  plus  ancienne;  quelques  auteurs  sont 
disposés  à  le  croire. 

Indépendamment  de  nos  quatre  positions  gallo- 
romaines  précitées,  nous  remarquons  sur  cette  carte, 
pour  ce  qui  concerne  l'Anjou,  le  tracé  de  trois  voies 
principales^  ce  qui  n'implique  pas  qu'il  n'y  en  ait  point 


—  404  — 

eu  davantage;  l'une  part  de  Juliomago  et  se  dirige  au 
sud-ouest  vers  Segoray  pour  ensuite  gagner  de  Test  à 
Touest,  Portu  namnetu  (Nantes)  ;  l'autre  part  également 
de  Juliomago  et  va  se  dirigeant  de  l'est  à  l'ouest  à 
Conbaristum  pour  ensuite  par  Sipia  gagner  Cmidate 
(Rennes);  la  troisième  part  toujours  de  Juliomago  et 
va  se  dirigeant  vers  Robrica  de  l'ouest  à  l'est,  pour 
ensuite  gagner  Casaroduno  (Tours). 

Cette  carte  combinée  avec  l'Itinéraire  d'Antonin,  a 
servi  de  base  à  tous  les  systèmes  de  topographie  gallo- 
romaine  et  angevine  que  nous  allons  exposer. 

Station  Robrica. 

Danville,  Reicbard  et  Lapie  placent  cette  station  à 
Longué\  Walckenaer  et  de  Cauraont  à  Beaufort;  La 
Sauvagère  et  Bodin  à  Chenehutte;  M.  Boreau  à  Bagneux 
près  de  Saumur;  M.  Joly,  à  Saumur  même  et  M.  Bo- 
reau se  rend  à  cette  opinion  (Voir  Mém.  de  la  Soc. 
Acad.  de  Maine  et  Loire,  9®  vol.,  page  44.);  M.  de  Matty, 
au  Guéd'Arcis. 

Station  Conbaristum. 

MM.  Bodin  e1  de  Beaur égard  placent  cette  station  à 

Combrée;   M.  Boreau^  à  Chatelais;  M.   de  Matty,  à 

Candé. 

Station  Segora. 

Walckenaer  place  cette  station  à  Segré  ;  La  Sauva- 
gère, Robin  et  de  Caumont  à  Doué;  Bodin  successive- 
ment à  Montreuil-Bellay ,  à  Lezon  ou  Saint-Just-sur- 
Dive,  et  enfin  à  la  Segourie,  commune  du  Fief-Sauvin  ; 
MM.  Tristan-Martin,  Desvaux,  Chanlouineau ,  de  Beau- 
regard  et  Faye  à  la  Segourie;  MM.  Dupin  et  de  la  Fon- 


—  405  — 

tenelle  à  Secondigny;  M.  Aude,  à  Sigournai;  M.  Isidore 
Massé,  à  Mortagne;  D.  Fonteneau,  à  Airvault;  Sanson, 
Danville  et  l'abbé  Bellay,  à  Bressuire;  Mgr  Cousseau  et 
M.  Touchard,  à  Faye-l'Abbesse;  M.  de  Matty  voit  quel- 
que probabilité  de  la  placer  à  Breuil- Chaussée. 

Quant  aux  voies  romaines,  il  faut  constater  d'abord 
que  celles  d'Angers  à  Subdinnum  (le  Mans),  d'Angers  à 
Jùblains  et  d'Angers  à  Lemuno  (Poitiers),  ne  sont  point 
marquées  sur  la  carte  de  Peutinger. 

Passons  en  revue  les  diverses  opinions  qui  ont  été 
émises  sur  toutes  ces  voies. 

i .  Voie  d'Angers  à  Tùurs ,  ou  de  Juliomago  à  Casaro- 
duno.  (Casaroduno  est  pour  CœsarodunOy  dans  la 
table  de  Peutinger.) 

Suivant  La  Sauvagère,  la  voie  d'Angers  à  Tours  tra- 
versait la  Loire  aux  Ponts-de-Cé,  se  rendait  à  Juigné- 
sur-Loire,  à  Gennes,  puis  à  Chenehutte  où  elle  traver- 
sait de  nouveau  la  Loire  pour  gagner  Vivy ,  AUonnes, 
Bourgueil,  etc,  etc. 

Selon  Bodin,  la  même  vpie  allait  d'Angers  à  Saint- 
Barthélémy,  à  Andard,  à  Corné,  à  Mazé,  à  Beaufort, 
où  elle  se  bifurquait  pour  se  rendre  d'une  part  à  Lon- 
gue, à  Brain-sur-Allonnes,  à  Bourgueil;  et  d'au  ire  part, 
aux  lieux  dits  la  Grande-Boire,  la  Touche-Bruneau , 
Fourcelles,  Gué-d'Arcis,  Vivy,  AUonnes  et  Bourgueil  où 
cessait  la  bifurcation. 

D'après  M.  de  Matty,  qui  place  Juliomagus  (même 
que  Juliomago),  au  camp  de  Frémur,  la  voie  romaine 
de  Juliomagus  à  Casaroduno  passait  au-dessus  de  Sainte- 
Gemme-sur-Loire,  au-dessus  de  Sorges,  traversait  Tre- 


—  406  — 

lazé,  Andard,  Corné,  Mazé,  Beaufort,  le  Gué  d'Arcis, 
Vivy,  Allonnes,  Bourgueil,  etc.,  etc. 

2.  Voie  d'Angers  à  Rennes  oic  de  Juliomago  à  Condate. 

Bodin  trace  la  voie  romaine  d'Angers  à  Rennes  par 
lef  Lion-d'Angers  et  Corabrée. 

M.  de  Matty  dirige  la  voie  romaine  de  Juliomagus, 
c'est-à-dire  de  Frémur  à  Rennes,  par  Bouchemaine  et 
Candé  où  il  place  Conbaristum.  Il  admet  concurrem- 
ment une  voie  secondaire  d'Andecavi  à  Rennes  par  le 
Lion-d'Angers,  la  Jaillette,  Louvaines,  Saint-Aubin-du- 
Pavoil  et  Châtelais;  M.  Biseul  fait  passer  la  voie  d'An- 
gers à  Rennes  par  le  Lion-d'Angers,  la  Jaillette,  Châ- 
telais, la  Guerche,  Viseiches  et  Venefles. 

3.  Voie  d'Angers  à  Nantes  ou  de  Juliomago  à 

Portu  namnetu. 

M.  de  Matty  paraît  admettre  que  la  voie  romaine  de 
Juliomago  (pour  lui  Frémur)  à  Nantes,  passait  par 
Mûrs  et  le  Fief-Sau vin .  La  direction  de  cette  voie  laisse 
encore  beaucoup  à  désirer. 

Bien  que  la  carte  de  Peutinger  ait  oublié  les  voies 
romaines  qui  allaient  nécessairement  d'Angers  à  Poi- 
tiers; d'Angers  au  Mans  et  d'Angers  à  Jublains,  il  est 
bon  d'en  rechercher  les  traces. 

4.  Voie  d'Angers  à  Poitiers  ou  de  Juliomago  à  Lemuno. 

Selon  Bodin,  la  voie  romaine  d'Angers  à  Poitiers  tra- 
versait les  Ponts-de-Cé,  puis  Juigné-sur-Loire  où  elle 
se  bifurquait;  l'une  des  branches  (sa  principale),  se 
rendait  par  Brissac  à  Doué,  à  Montreuil-Bellay,  etc. 
L'autre  branche  voisine  de  la  Loire  (rive  gauche),  pas- 


-  407  ^ 

sait  au  dessus  du  coteau  par  Saint-Jean-des-Mauvrets, 
Saint-Saturnin,  puis  sur  les  hauteurs  du  Toureil  et  de 
Bessé,  gagnait  Gennes  et  Chenehutte,  d'où  elle  allait 
rejoindre  la  première  branche  à  Doué. 

M.  de  Matty,  toujours  en  partant  de  Juliomagus, 
pour  lui  Frëmur,  admet  une  voie  se  dirigeant  vers 
Poitiers,  par  Saint- Jean-de-la-Croix,  Mûrs,  N.-D.  d'A- 
lençon.  Doué,  etc. 

D'après  M.  Je  la  Fontenelle,  cette  voie  communiquait 
avec  le  Poitou  par  Doué,  les  Verchers,  Passavant  et 
Cléré;  d'après  M.  Gaillard  de  Neuville,  Guillaume  de 
Lisle  et  J.-B.  Nolin,  par  Doué,  Brossay,  Monlreuil- 
Bellay  et  Antoigné;  selon  d'autres,  par  Doué  et  le  Puy- 
Notre-Dame. 

5.  Yoie  d Angers  au  Mans  ou  de  Juliomago  à 

Suhdinnum. 

Selon  M.  l'abbé  Voisin,  dans  ses  Cénomans,  t.  l^r, 
page  50,  la  voie  d'Angers  au  Mans  passait  près  de 
Suette  et  Marcé,  traversait  la  forêt  de  Ghambiers,  allait 
au  château  de  Miré,  à  la  Rairie,  au  Gué-de-l' Arche , 
longeait  le  camp  romain  de  Gré,  etc. 

6.  Yoie  d'Angers  à  Jublains. 

Suivant  M.  l'abbé  Voisin  également,  une  voie  romaine 
conduisait  d'Angers  à  Jublains  en  traversant  le  pont 
des  Angevinières  sur  la  Vaige.  (Page  79.) 

Indépendamment  de  ces  six  voies  qui  partaient  d'An- 
gers, quelques  auteurs  en  présentent  d'autres  qui  pas- 
saient sur  notre  déparlement.  M.  de  Matty  admet  une 
voie  du  Mans  à  Poitiers,  qui  allant  du  nord  au  sud, 
traversait  le  Gué-d'Arcis   près  de  Vivy.  Mais  d'après 


—  408  — 

M.  Tabbé  Voisin,  page  50  de  ses  Cénomans,  t.  i®»',  la 
voie  du  Mans  à  Poitiers  passait  prés  de  Pontvallin, 
près  du  Lude,  et  gagnait  Candes-sur-Loire ,  Loudun  et 
Poitiers.  Cela  étant,  cette  voie  devait  traverser  dans  le 
département  de  Maine  et  Loire  les  communes  de  Chi- 
gné,  Denezé,  Auverse,  Linières-Bouton,  Vernoil-le-Fou- 
rier,  la  Breille,  Brain-sur-AUonnes,  et  Varennes-sous- 
Montsoreau,  dans  la  direction  du  nord  au  sud. 

M.  de  Matty  admet  le  tracé  d'une  voie  romaine  d' An- 
dard  (1)  à  Poitiers,  par  la  Bohalle,  Blaison,  Coutures, 
Chemellier,  Louerre,  Rochemenier,  Doué,  etc. 

A  son  sens  cette  voie  aurait  été  celle  que  suivit 
Dumnacus,  lors  de  sa  défaite  par  les  Romains,  défaite 
qui  se  serait  effectuée  vis-à-vis  et  au  sud  d'Andard.  La 
nouvelle  carte  des  Gaules  sous  le  proconsulat  de  César 
dressée  en  1860,  d'après  les  ordres  de  S.  M.  l'Empe- 
reur, rejette  cette  situation  de  la  bataille. 

M.  Faye  sur  sa  carte  concernant  Segora,  admet  une 
voie  romaine  de  Nantes  à  Poitiers,  en  passant  dans 
Maine  et  Loire,  par  le  Fief-Sauvin,  la  Chapelle-du- 
Genêt,  Andrezé,  Le  May,  Trémentines,  où  elle  se  bifur- 
quait; l'une  des  branches  allait  dans  le  Poitou  par 
Nuaillé,  Tout-le-Monde,  La  Crilloire,  Yzernay,  Les 
Eçhaubraignes ,  etc.,  etc.  ;  l'autre  branche  s'y  rendait 
par  Vezins,  Chanteloup,  La  Plaine  et  Somloire. 

Tel  est  l'inventaire  succinct  des  voies  romaines  plus 
ou  moins  bien  constatées,  jusqu'à  ce  jour,  sur  le 
département  de  Maine  et  Loire. 

Ceci  posé,  qu'à  notre  tour,  il  nous  soit  permis  de 

(1)  Andard  à  onze  kil.  d'Angers.  Pour  M.  de  Matty,  Andard  fut 
chef-lieu  des  Andes  au  temps  de  Jules  César. 


-  409  - 

nous  livrer  aux  diverses  conjectures  que  vont  susciter 
les  quatre-vingt  sept  points  gallo-romains  par  nous  éta- 
blis. Ils  sont  comme  autant  d'amorces  qui  nous  indi- 
queront le  passage  des  voies  par  tels  et  tels  lieux. 

1 .  Voie  d'Angers  à  fours. 

Au  moyen  de  nos  amorces,  il  est  pour  nous  incon- 
testable que  cette  voie,  suivant  la  rive  droite  de  la 
Loire,  traversait  de  Touest  à  Test  Saint-Barthélémy, 
Andard,  Corné,  Mazé,  Saint-Pierre-du-Lac,  Beaufort, 
les  Marais  de  Chape,  le  Gué-d'Arcis,  Vivy,  AUonnes. 
Puis  celte  voie  entrait  en  Touraine  par  Bourgueil. 

L'on  se  rendait  aussi  d'Angers  à  Tours,  sur  la  rive 
gauche  de  la  Loire  par  les  Ponts-de-Cé  et  Juigné ,  par 
les  hauteurs  de  Saint- Remy-la-Varenne  et  du  Toureil, 
par  Gennes,  Trêves  et  Chenehutte-les-Tuffeaux  où  se 
trouvent  les  restes  d'un  camp  en  face  duquel  l'on  re- 
tombait dans  la  voie  de  la  rive  droite,  au  moyen  d'un 
pont  entre  Chenehutte,  Saint-Martin-de-la-Place  et  le 
Gué-d'Arcis. 

Nos  amorces  nous  font  aussi  connaître  que  l'on  allait 
d'Angers  à  Tours  par  Andard ,  Mazé ,  Gée,  Brion ,  La 
Lande-Chasle,  Mouliherne,  Breil,  Rillé,  etc. 

2.  Voie  d'Angers  à  Rennes, 

Nos  amorces  nous  prouvent  que  l'on  se  rendait  d'An- 
gers à  Rennes,  par  le  Lion-d'Angers,  Louvaines,  La 
Ferriére  et  Châtelais.  Elles  nous  montrent  également 
que  l'on  s'y  rendait  par  le  camp  de  Frémur,  Bouche- 
'  roaine,  Saint-Jean-de-Linières ,  la  Pouèze,  Angrie  et 

Candé. 

3.  Voie  d^ Angers  à  Nantes. 

On  traversait  le  camp  de  Frémur,  l'ancien  pont  de 


—  410  — 

Boucbemaine,  puis  la  commune  d'Épiré,  Savennières, 
La  Possonnière  ei  Ingrandes,  plus  tard  limite  de  la 
Bretagne  et  de  TAnjou.  On  se  rendait  également  à 
Nantes  en  traversant  la  Loire  sur  l'un  ou  l'autre  des 
trois  radiers  dont  quelques  traces  existent  encore  sous 
le  fleuve ,  entre  Sainte-Gemmes  et  la  pointe  méridio- 
nale du  triangle  de  Frémur;  on  gagnait  ensuite  Mûrs, 
Chalonnes,  Saint-Laurent-de-la-Plaine,  Sainte-Christine, 
le  Fief-Sauvin  et  la  Chaussaire.  Une  troisième  voie  pou- 
vait y  conduire  aussi  en  côtoyant  la  rive  gauche  de 
la  Loire  par  Chalonnes,  Saint-Florent-le-Vie'il  et  Champ- 
toceaux. 

4.  Voie  d'Angers  à  Poitiers. 

On  s'y  rendait  par  les  Ponts-de-Cé,  Juigné-sur-Loire, 
N.-D.  d'AUençon,  Doué,  Douces,  etc.,  etc.  (1),  et  encore 
par  les  hauteurs  de  Saint-Rémy-la-Varenne  et  du  Tou- 
reil,  par  Gennes,  Trêves  et  Chenehutte.  De  là,  on  pou- 
vait y  allait  par  Forges  et  Doué ,  ou  encore  par  les 
hauteurs  de  Sainte-Hilaire,  par  Distré  et  Saint-Just- 
sur-Dive.  De  Saint-Just  on  pouvait  aussi  gagner  la  Tou- 
raine  par  Saint-Cyr-en-Bourg  et  Candes. 

5.  Voie  d'Angers  au  Mans. 

Nous  admettons  le  tracé  de  M.  Tabbé  Voisin,  pré- 
cédemment cité. 

6.  Voie  d'Angers  à  Jublains. 
Idem. 

(i)  Ces  lignes  étaient  écrites,  lorsqu'on  nous  signala  Texistence 
d'une  partie  de  cette  voie  à  un  kilom.  de  Douces,  près  du  moulin 
de  Fierbois.  De  là  elle  se  rend  vers  sud-ast  par  un  endroit  nommé 
la  Levée  et  se  perd  en  côtoyant  le  bois  de  Fosse-Sèche  du  côté  de 
la  Madeleine  et  de  Saint-Hilaire-le-Doyen,  vers  Montreuil-Bellay. 

(Renseignements  de  MM.  Thomas.) 


—  411  — 

Voies  partielles  dans  F  arrondissement  de  Cholet. 

La  voie  de  Nantes  à  Poitiers  passait  au  sud-ouest  de 
Maine  et  Loire,  arrondissement  de  Cholet,  par  la  Chaus- 
saire,  La  Segourie,  la  Chapelle-du-Genêt,  Andrezé,  Le 
May  ;  là  elle  se  bifurquait,  pour  sa  principale  branche 
aller  par  Nuaillé,  Tout-le-Monde,  Yzernay,  les  Échau- 
broignes  etc.,  etc.;  la  seconde  branche  se  rendait  à  Poi- 
tiers par  Trementines,  Vezins ,  Chanteloup,  la  Plaine 
et  Somloire;  ces  deux  branches  se  réunissaient  en 
dehors  de  Maine  et  Loire  à  Faye-rAbbesse. 

On  trouve  encore  dans  l'arrondissement  de  Cholet, 
traces  de  deux  voies  qui  de  la  Segourie  se  rendaient 
dans  le  département  de  la  Vendée,  Tune  vers  sud-ouest 
par  Geste ,  Tilliers  et  Saint-Crespin  ;  l'autre  du  nord 
au  sud,  par  la  Blouère,  Ville-Dieu,  la  Renaudière, 
Roussay  et  le  Longeron. 

Dans  le  même  arrondissement,  des  traces  d'une  voie 
se  remarquent  également  de  l'ouest  à  l'est,  par  Tre- 
mentines, Vezins,  Vihiers  et  Doué. 

Voies  partielles  dans  l'arrondissement  de  Baugé. 

Nos  amorces  nous  prouvent  qu'une  voie  dans  l'ar- 
rondissement de  Baugé  partait  de  Beauvau  et  traversait 
du  nord  au  sud,  Saint-Georges-des-Bois ,  pour  tomber 
sur  Saint-Pierre-du-Lac  près  de  Beaufort.  Cette  voie 
partielle  à  son  extrémité  nord  gagnait  la  voie  d'An- 
gers au  Mans  et  à  son  extrémité  sud,  la  voie  d'Angers 
à  Tours. 

Dans  le  même  arrondissement  de  Baugé,  une  voie 
partielle  descendait  du  nord  au  sud  par  Vaulandry, 
Saint-Martin  d'Arcé,  la  Lande-Chasle,  Vivy,  et  pouvait 


—  412  — 

mettre  en  communication  la  partie  méridionale  des 
Cénomans  avec  la  Loire. 

Voie  partielle  dans  F  arrondissement  de  Segré. 

Dans  l'arrondissement  de  Segré,  une  voie  partielle 
entrait  de  Maine  et  Loire  dans  la  Mayenne  par  le  Lion- 
d'Angers,  Charabellay  et  Marigné. 

Telles  sont  en  résumé  les  directions  que  l'on  peut 
déduire  de  la  position  de  nos  amorces.  Ces  directions 
ne  doivent  pas  être  les  seules;  lorsqu'il  s'en  décou- 
vrira de  nouvelles  >  nous  ne  manquerons  point  de  les 
enregistrer. 

Ayant  bien  déterminé,  à  notre  sens,  la  position  de 
Juliomagus  à  Angers  même,  et  non  pas  en  Frémur,  il 
ne  nous  reste  plus  qu'à  discuter  la  situation  des  trois 
stations  de  la  carte  de  Peutinger,  savoir  :  Segora^  Cofiba- 
ristum  et  Robrica. 

Ségora. 

En  jetant  les  yeux  sur  la  table  de  Peutinger,  nous 
trouvons  Segora  situé  dans  la  direction  du  sud-ouest, 
par  rapport  à  Juliomagus,  nous  trouvons  encore  que 
de  Segora  à  Portu  namnetu  y  la  direction  va  en  ligne 
droite  de  l'est  à  l'ouest;  or  si  nous  regardons  entr'elles 
les  positions  actuelles  d'Angers,  de  Nantes  et.  de  la 
Segourie,  nous  verrons  que  ce  dernier  point  coïncide 
très-bien  avec  celui  de  Segora;  ajoutons  que  l'analogie 
qui  existe  entre  le  nom  de  Segourie  et  celui  de  Segora 
est  évidente;  joignons  à  tout  ceci,  la  découverte  des 
ruines  romaines,  faites  à  la  Segourie,  puis  le  calcul 
des  distances  fait  par  MM.  Tristan-Martin  et  Faye,  et 
tout  le  monde  sera  contraint  d'avouer  qu'il  faut  aller 


—  413  — 

chercher  désormais  Tancienne  station  Segora  à  la  Sé- 

gourie. 

Conharistum. 

Nous  avons  vu  précédemment  que  Bodin  a  placé  la 
station  Conbaristum  à  Combrée  d'après  l'analogie  des 
deux  noms,  mais  comme  l'on  n'a  jamais  trouvé  de  trace 
d'occupation  romaine  en  cet  endroit,  il  s'ensuit  que  le 
doute  est  permis. 

M.  de  Matty  place  Conbaristum  à  Candé,  comme 
s'accordant  mieux  avec  les  distances  de  la  table  Théo- 
dosienne  et  les  restes  d'une  voie  romaine  allant  dans 
le  sens  de  l'est  à  l'ouest. 

Cette  voie  romaine  aurait  atteint  Candé,  en  traver- 
sant la  rivière  à  Bouchemaine,  puis  en  passant  par  un 
lieu  dit  la  Chaussée  et  par  Pontron. 

M.  de  Matty  ne  répugne  pas  à  rapprocher  l'étymo- 
logie  qu'il  donne  à  Candé,  Condaristum,  Cauderistum, 
Candaiiscum ,  de  celle  de  Conbaristum;  mais  est-il 
bien  assuré  de  la  valeur  de  son  étymologie?  On  peut 
en  douter  devant  le  vrai  nom  latin  de  Candé  qui  était 
Condate  Andegavorum^  comme  nous  l'avons  vu  plus 
haut. 

Quoi  qu'il  en  soit,  la  position  de  Conbaristum  à  Candé 
est  plus  conforme  aux  exigences  de  la  carte  de  Peutin- 
ger  que  la  situation  de  Conbaristum  à  Combrée  ou  à 
Châtelais^  ces  deux  points  étant  trop  au  nord  par  rap- 
port à  cette  carte  ;  il  est  vrai  qu'elle  est  si  erronée  sou- 
vent dans  son  orientation,  qu'il  me  semble  bon  d'y 
regarder  de  près.  D'un  autre  côté,  nous  avons  vu  qu'il 
y  avait  d'excellentes  raisons  pour  placer  Conbaristum  à 
Châtelais;  le  doute  n'est  donc  pas  encore  levé  pour 
nous. 


—  4U- 
Dobrica. 

Nous  ne  sommes  point  également  en  mesure  de  nous 
prononcer  péremptoirement  sur  la  position  de  Rohrica, 
toutefois  nous  n'admettons  ni  Longue,  ni  Beaufort; 
nous  hésitons  entre  le  Gué-d'Arcis  etChenehutte;  mais 
nous  penchons  plus  volontiers  vers  ce  dernier  lieu  à 
cause  de  son  camp  romain;  cependant  si  nous  tenions 
au  calcul  des  distances,  les  dix-sept  lieues  gauloises  de 
Juliomagus  à  Rohrica,  tomberaient  assez  bien  sur  Sau- 
rour,  ou  sur  Tendroit  nommé  Bagneux;  ajoutons  qu'en 
cette  commune  des  bains  gallo-romains  ont  été  décou- 
verts. 

Quoi  qu'il  en  soit,  c'est  à  18  lieues  gauloises  de  Julio- 
mago,  vers  sud-ouest,  qu'il  faut  aller  chercher  Segora; 
à  17  Rohrica  vers  l'est;  et  à  16  Conharistum  vers 
l'ouest.  La  lieue  gauloise  vaut  environ  2,300  mètres, 
je  dis  environ,  car  la  mesure  de  cette  lieue  laisse  en- 
core bien  à  désirer  pour  son  exactitude;  M.  Pistollet  de 
Saint-Fargeux  la  porte  à  2,415  mètres,  d'autres  à 
2,468  m.  33  c,  plusieurs  à  1,150  toises.  On  sait  que 
depuis  la  Seine  et  la  Marne,  au  nord,  jusqu'à  la  Garonne 
et  à  Lyon,  la  table  Théodosienne  indique  les  distances 
intermédiaires  en  lieues  gauloises,  surtout  dans  la 
partie  occidentale  de  la  Celtique. 

En  résumé,  si  le  scepticisme  a  quelquefois  sa  raison 
d'être,  c'est  bien  en  matière  de  stations  et  de  voies 
romaines.  On  y  marche  à  tâtons  le  plus  souvent.  Est-ce 
à  dire  qu'il  faille  renoncer  à  cette  étude?  Non,  il  faut 
au  contraire  redoubler  de  zèle,  mais  aussi  de  rései've. 
Il  est  entendu  que  cette  recommandation  ne  s'adresse 
qu'à  moi  seul  et  je  ne  la  fais  que  pour  me  bien  rendre 
compte  si  je  n'y  ai  pas  manqué. 


—  415  — 

SUPPLÉMENT. 

Depuis  lors  MM.  Paul  Loyer  et  Tristan  Martin  nous 
ont  fait  connaître  la  découverte  de  deux  camps  dans 
Farrondissement  de  Cholet.  On  en  trouvera  le  signale- 
ment à  la  page  56  du  Congrès  archéologique  de  France, 
XXIXe  session  (séance  générale  tenue  à  Saumur  en  1 862). 

Voici  la  note  que  nous  en  avons  donnée  à  cette 
séance. 

COMMUNE  DE  LA  ROMÀGME. 

Sur  cette  commune  existe  un  camp  de  forme  rec- 
tangulaire, au  lieu  dit  la  Boutriey  sur  la  limite  des  dé- 
partements de  Maine-et-Loire  et  de  la  Vendée.  Il  ne  se 
compose  que  de  retranchements  en  terre. 

Le  côté  nord  est  intact  et  n'a  pas  moins  de  135  mè- 
tres de  longueur.  Le  talus  a  pour  moyenne  de  hauteur 
5  mètres  ;  il  est  entre  deux  fossés  :  l'un  externe,  d'en- 
viron 12  mètres  de  large;  l'autre  interne  est  plus  pe- 
tit. Entrée  au  centre  de  la  ligne. 

Le  côté  ouest  est  également  intact,  il  a  de  125  à 
130  mètres  en  longueur.  Entrée  vers  le  centre  de  la 
ligne  mais  plus  près  de  l'angle  sud.  Fossés  externe  et 
interne. 

Le  côté  sud  n'est  qu'à  moitié  conservé  ;  ce  qui  reste 
de  ce  côté  se  trouve  entre  deux  fossés  comme  les  côtés 
précédents. 

Le  côté  est  a  disparu.  Aucuns  vestiges  de  construc- 
tions, point  de  médailles,  de  briques  ni  de  poteries. 

Ce  camp  de  la  Boutrie  contient  un  hectare  environ. 


—  416  — 

COMMUNE  DE  GHOLET. 

Sur  cette  commune,  voisine  de  celle  de  la  Romagne, 
au  lieu  dit  la  Bauge  du  château,  près  le  Chêne  Landry  y 
propriété  de  M.  Lavau,  il  existe  un  point  de  fortifié  en 
tout  semblable  à  celui  de  la  Boairie,  sauf  qu'il  est  plus 
petit. 

Chose  à  remarquer,  ce  camp  de  la  Bauge  du  châ- 
teau  n'a,  comme  celui  de  la  Boutrie,  que  deux  côtés 
et  un  demi  côté  conservés  ;  serait-ce  que  les  garnisons 
en  quittant  ces  lieux  fortifiés  les  auraient  ainsi  mutilés 
à  dessein  pour  qu'ils  ne  puissent  désormais  servir? 
C'est  d'autant  plus  probable  que  l'on  remarque  la 
même  mutilation  dans  un  troisième  camp  nommé 
camp  des  AnglaiSy  sans  doute  parce  qu'ils  s'en  seront 
servis  ;  il  est  situé  sur  la  commune  de  Saint-Aubin-de- 
Baubigné  (Deux-Sèvres)  et  chose  plus  notable  encore, 
dans  ces  trois  camps,  le  côté  oriental  et  le  demi  côté 
méridional  sont  les  seuls  mutilés. 

Le  camp  de  la  commune  de  Saint- Aubin-de-Baubigné 
porte  le  nom  de  Fief  des  houlleries  ;  il  est  en  quelque 
façon  sur  la  limite  de  Maine-et-Loire  et  des  Deux-Sè- 
vres, non  loin  des  communes  de  Maulevrier,  des  Cer- 
queux  et  d'Yzernay. 

Comme  les  camps  de  la  Boutrie  et  de  la  Bauge  du 
château,  celui-ci  est  également  de  forme  carrée  ;  il  a 
de  longueur  125  mètres  de  l'est  à  l'ouest,  sur  115  mè- 
tres du  nord  au  sud.  La  hauteur  des  retranchements 
varie  entre  3  et  5  mètres.  Vers  le  nord  le  fossé  a 
30  mètres  de  large. 

V.  Godard  Faultrier. 


AITIQUITËS  CABLOVmeiEnES 


NUMISMATIQUE  ANGEVINE 


Nous  avons  dit  précédemment  que  TAnjou  avait  eu 
sa  monnaie  propre  durant  Tère  celtique,  c'est-à-dire 
depuis  l'année  300  avant  Jésus-Christ,  jusqu'à  l'an  21 
de  Père  vulgaire;  que  depuis  lors,  jusqu'à  la  fm  du 
v«  siècle,  c'est-à-dire  durant  l'ère  romaine,  on  ne  voit 
pas  que  notre  contrée  ait  joui  de  cet  avantage,  si  ce 
n'est  du  temps  de  l'empereur  Anastase  dont  un  triens 
porte  le  monogramme  d'Angers  ;  que  ce  triens,  frappé 
entre  les  années  491  et  507,  sert  de  transition  du 
monnayage  angevin  sous  les  derniers  empereurs  qui 
avaient  encore  quelqu'apparence  de  pouvoir,  en  Occi- 
dent, sert  de  transition,  dis-je,  au  règne  des  rois  méro- 
vingiens  dans  notre  contrée. 

Nous  avons  vu  également  que  depuis  la  fm  du  v®  siècle 
jusque  vers  l'an  544,  beaucoup  de  monnaies  d'or  mé- 

REP.    ARC.  30 


—  448  — 

rovingiennes  portaient  le  nom  d'Angers.  Ceci  bien  établi, 
il  nous  faut  passer  au  monnayage  angevin  à  l'époque 
carlovingienne.  Disons  de  suite  que  durant  cette  période 
For  disparaît  dans  la  monnaie  pour  faire  place  à  l'ar- 
gent; que  Pépin  et  Charleraagne  bannissent  générale- 
ment les  noms  des  monnayers,  adoptant  un  type  à  la 
fois  national  et  chrétien;  que  sous  ces  deux  princes  la 
monnaie  s'unifie,  si  je  puis  ainsi  m'exprimer,  mais 
qu'après  eux,  par  suite  du  morcellement  de  l'empire 
d'Occident  entre  les  fils  de  Louis-le-Débonnaire,  le  pri- 
vilège souverain  de  battre  monnaie  se  divise. 

«  Les  évêques  et  les  monastères  se  faisaient  concé- 
j>  der  les  ateliers  établis  dans  leurs  villes;  les  barons 
»  s'en  emparaient  sans  s'astreindre  à  le  faire  réguliè- 
»  reraent.  »  (Barthélémy,  dans  Roret,  page  41.) 

L'édit  de  Pistes  (Pitres,  département  de  l'Eure)  de 
l'an  864,  qui  est  le  règlement  organique  de  la  seconde 
race,  n'y  peut  rien  ;  il  mentionne  une  dizaine  d'atelifers 
autorisés  sous  Charles  le  Chauve,  tandis  qu'en  fait  on 
en  compte  plus  de  cent  vingt  (Barth.,  dans  Ror.,  p.  43). 

L'édit  s'exprime  ainsi  : 

i  Sequentes  consuetudinem  praedecessorum  nostrùm 
»  sicut  in  illorum  capituUs  invenitur,  constituimus  uL 
»  in  nuUo  loco  alio  in  omni  regno  nostro  moneta  fiât 
^  nisi  in  palatio  nostro  et  în  Quiniovico  aç  Rotomago 
j  (quae  moneta  ad  Quintovicum  ex  antiqua  çonsuelu- 
»  dine  pertinet)  et  in  Rhemis  ^i  in  Senonis  et  in  Parisis 
»  et  in  Aurdianis  et  in  Cavillonno  et  in  MeluUo  et  in 
»  Narbonna.  »  (Capitul,  t.  XI,  fol.  177.) 

Ma:lgré  cette  défense  de  frapper  monnaie  ailleurs  que 
dans  le  palais  du  souverain,  à  Quentovic  et  Rouen^  à 


—  419  — 

Rheims,   à  Sens,  à  PaHs,  à  OrléanSy  à  ChâUms-sur- 
Sâone,  à  Melle  et  à  Narbonne,  beaucoup  de  villes  profi- 
tèrent de  la  faiblesse  de  l'autorité  pour  battre  monnaie, 
de  ce  nombre  fut  Angers.  On  ne  voit  pas  que  sous 
Pepiii  le  Bref  (752-768),  sous  Charlemagne  (768-814) 
et  sous  Louis  le  Débonnaire  (814-840),  riotrè  ville  ait 
joui  de  cet  avantage;  mais  nous  avons  plusieurs  de- 
niers d'argent  au  musée  des  antiquités  qui  prouvent 
que  sous  Charles  le  Chauve  (840-877),  Angers  frappa 
monnaie.  En  voici  la  description  :   dans  le  champ  : 
monogramme  de  Charles. 
Autour  :  +  gracia  d-i  rex. 
S|  croix  égale;  autour  :  -f-  andegavis  civitas. 
Diamètre  :  10   millimètres  ;  épaisseur  :  très-mince 
(Voir  la  planche  vfi  l^r). 

Le  Blanc,  dans  son  traité  historique  des  monnaies 
de  France,  Paris,  mdcxc,  page  126,  donne  la  gravure 
d'un  denier  d'Angers  en  tout  semblable  à  ceux  de  notre 
musée  des  aniiquités  avec  cette  différence  que  le  mot 
GRATiA  est  écrit  gracia  et  que  le  mot  civitas  est  abrégé 
de  cette  sorte  :  civiTs. 

Nos  deniers  dilGFèrent  quelque  peu  de  la  description 
qu'en  donne  l'édit  de  Pistes  ;  en  effet  cet  édit  porte  : 
<r  Dt  in  denariis  novœ  nostrae  monetae  ex  una  parte 
»  nomen  nostrum  habeatur  in  gyro,  et  in  medio  nostri 
j»  monogramma,  ex  altéra  vera  parte  rioraen  civitatîs 
»  et  in  medio  crux  habeatur.  »  (Leblanc,  page  112.) 

Or  sur  nos  deniers  angevins  on  voit  que  le  nom  du 
roi  est  remplacé  par  la  formule  gratia  d-i  rex.  Nou- 
velle preuve  de  l'arbitraire  que  les  villes  se  permet- 
taient malgré  les  édits. 


—  420  — 

Nous  lie  connaissons  aucune  pièce  frappée  à  Angers 
sous  Louis  II  dit  le  Bègue  (877-879)  ;  sous  Louis  111 
(879-882);  sous  Carloman  (879-884),  ni  sous  Charles  III 
dit  le  Gros  vl)  (884f^888).  Mais  notre  musée  des  anti- 
quités en  possède  plusieurs,  en  argent,  frappées  sous 
Eudes  (888-898). 

En  voici  la  description  :  dans  le  champ  :  mono- 
gramme d'Eudes. 

Autour  ;  +  gratia  d-i  rex. 

^  croix  égale;  autour  -H  andecavis  civitas  (Voir  la 
planche  n®  3). 

Leblanc  donne  deux  gravures  de  cette  pièce  pag.  45. 

Mais  il  en  est  une  autre  d'argent  et  du  même  prince 
infiniment  plus  rare  et  plus  curieuse.  Elle  a  été  pubhée 
dans  la  Revue  Numismatique^  nouvelle  série,  t.  II, 
p.  315, 1847,  par  M.  E.  Hucher,  sous  ce  titre  :  Note 
sur  un  denier  inédit  d'Eudes, 

Nous  ne  pouvons  mieux  faire  que  de  reproduire  ici 
cette  note  intéressante  : 

«  Eudes,  dit  M.  Hucher,  est  une  de  ces  nobles  figures 
»  historiques  qui  surgissent  à  un  moment  donné, 
>  comme  l'expression  d'une  volonté  providentielle.  Fils 
»  de  Robert  le  Fort,  duc  d'Anjou,  il  s'élève  sous  l'em- 
»  pire  d'événements  extraordinaires  jusqu'au  trône  de 
»  France,  bien  moins  pour  satisfaire  un  désir  secret 
»  de  puissance  que  pour  tenir  d'une  main  plus  ferme 

({)  Cependant  nous  lisons  dans  le  catalogue  de  la  collection 
Rousseau,  année  186i,  page  31,  qu'un  denier  de  Charles  le  Gros 
fut  frappé  à  Angers;  on  y  voit  :  grâtia  du  rex;  monogramme  par 
tin  k;  ^  ANDEGAVis  CIVITAS,  croix  égale  cantonnée  de  points  au  i*'^ 
et  au  4^ 


—  421  — 

»  les  rênes  de  l'État,  au  milieu  de  l'effroyable  cata- 
»  clysme  qui  menace  de  tout  engloutir. 

i>  La  numismatique  de  ce  règne  intéressant,  naguère 
»  très-restreinte,  s'est  singulièrement  complétée  depuis 
»  une  vingtaine  d'années,  et  tout  récemment  le  hasard 
»  vient  encore  de  nous  mettre  à  même  de  la  doter  d'un 
»  élément  extrêmement  important  :  nous  voulons  par- 
y  1er  d'une  monnaie  fort  extraordinaire,  et  dont  l'au- 
>  thenticité  est  à  l'abri  de  toute  critique. 

>  Cette  monnaie  avait  été  recueillie  avec  d'autres 
»  pièces  moins  importantes  par  M.  le  curé  de  Savigné- 
j>  sous-le-Lude.  A  sa  mort,  un  revendeur  du  Mans,  le 
»  sieur  Dron,  acheta  tout  le  bloc,  et  c'est  de  ce  dernier 
»  que  nous  tenons  cette  monnaie. 

»  En  voici  la  description  : 

>  Dans  le  champ  :  monogramme  de  Charles;  autour  : 
»  ODO  +  EST  RE  +  X. 

»  fil  Croix  égale  ;  autour  :  +  ANDEGAVIS  CIVITAS. 
»  Argent  pur,  poids  :  is^  60. 

»  On  connaît,  depuis  quelque  temps,  une  monnaie 
»  du  même  prince  qui  offre,  comme  celle-ci,  le  mono- 
»  gramme  carolin  entouré  d'une  légende  où  figure  le 
»  nom  d'Eudes. 

j  Différents  systèmes  s'étaient  produits  pour  expli- 
ï)  quer  l'apparente  anomalie  résultant  de  la  juxtapo- 
»  sition  des  noms  de  Charles  et  d*Eudes.  M.  de  Long- 
»  périer  a  élucidé  la  question  en  montrant  (1)  que 
»  cette  monnaie,  frappée  à  Orléans,  dans  la  capitale 
»  du  duché  de  France,  avait  pu  avoir  été  émise  par 

(i)  Notice  de  la  collection  Bousseau,  p.  260. 


~  422  — 

»  Eudes  en  sa  qualité  de  duc  de  France;  que  c'était  là 

>  une  de  ces  rares  monnaies  féodales  qu'on  voit  appa- 
»  raitre  sous  les  Carlovingiens,  plus  ou  moins  analogues 
]»  à  celles  sur  lesquelles  on  lit,  à  des  époques  anté- 
»  rieures,  les  noms  de  Gaddo,  de  Milon,  d'Odalricus,  etc. , 
»  en  compagnie  du  nom  royal  ou  au  revers  d'un  nom 
»  de  ville. 

»  La  monnaie  actuelle  est,  au  contraire,  une  monnaie 
j>  royale,  et  le  titre  de  roi  y  est  même  donné  à  Eudes 
»  avec  une  affirmation  dont  on  ne  trouve  pas  d'autre 

>  exemple  dans  l'histoire  monétaire  de  ces  époques  re- 
]>  culées;  en  effet,  le  plus  simple  examen  de  la  médaille 
Ji  ne  permet  pas  de  douter  qu'on  doive  lire  ainsi  la 

>  légende  de  l'avers  :  +  ODO  +  EST  REX,  en  réta- 
»  blissant  la  croix  à  sa  véritable  place.  Il  est  certain 
B  d'ailleurs  que  les  Carlovingiens  ne  se  sont  pas  fait 
»  faute  de  placer  des  croix  là  où  il  n'en  était  pas  besoin, 
»  et  que  le  signe  d'invocation  a  presque  toujours  été 
*  mis  à  gauche  du  monogramme,  vers  le  haut  de  la 

>  monnaie. 

»  Le  système  qui  consisterait  à  lire  KRLS  EST  REX 
»  -h  ODO  +  ne  me  paraîtrait  pas  admissible;  l'initiale 
»  du  mot  EST  est  placé  dans  un  endroit  où  il  est  inusité 
»  de  chercher  le  signe  d'invocation;  et  surtout  cette 
»  légende  n'offrirait  qu'un  non-sens  historique,  puisque 
T>  Eudes  n'a  pu  frapper  monnaie  à  Angers  que  comme 

>  roi  de  France,  et  que  cette  médaille  proclamerait 
)!>  justement  le  contraire  en  faisant  appuyer  du  nom 
»  d'Eudes  la  reconnaissance  à  Angers  d'un  roi  qui  n'y 

>  a  jamais  exercé,  avant  la  mort  de  ce  dernier,  les 
»  droits  régaliens. 


~  423  — 

d  Noire  monnaie,  en  donnant  à  Eudes  le  nom  de  roi 
1»  avec  affirmation,  ressemble,  comme  ^aeVa  fait  obser- 
]>  ver  avec  esprit  nn  de  mes  correspondants,  à  cette  mé* 
9  daille  d'une  époque  bien  postérieure,  mais  non  moins 

»  troublée,  où  l'on  lit  :  LE  PÈRE  DUCHÈNE  F 

»  BON  PATRIOTE  (1).  Il  y  manque ,  à  la  vérité ,  le 
:»  juron  ;  rnais  au  fond  l'idée  est  la  même. 

»  Les  Neustriens  avaient  acclamé  Eudes  avec  en- 
i>  thousiasme;  mais  ailleurs  il  n'en  était  pas  de  même. 
i>  Le  clergé,  du  reste,  en  qui  vivait  le  repect  du  droit, 
»  conservait  toutes  ses  sympathies  pour  le  fils  posthume 
:»  de  Louis  le  Bègue;  on  sait  que  Foulques,  évêque  de 
»  Rheims,  se  transporta  en  Germanie  tout  exprès  pour 
»  engager  le  roi  Arnoul  à  reconnaître  comme  roi  de 
»  France  le  jeune  Charles,  et  à  devenir  son  tuteur. 
»  Cette  tentative,  à  la  vérité,  n'eut  pas  de  succès  ;  mais 
»  toujours  est-il  que  Charles  conservait  des  partisans 
»  dans  l'Amiénois,  le  Laonnais,  le  Vermandois  et  sur- 
B  tout  le  Rhémois. 

»  Il  n'y  a  rien  d'étonnant  après  cela  à  voir  le  nom 
!►  royal  donné  à  Eudes  avec  une  affirmation  inaccou^ 
»  tumée,  à  Angers,  surtout,  dans  la  capitale  du  domaine 
»  de  sa  famille.  C^st  là  plus  que  partout  ailleurs  que 
»  son  élévation  au  trône  de  France  dut  trouver  d'éner» 
»  giques  partisans;  et  dès  le  principe,  j'ai  i^egardé 
»  celte  Monnaie  comme,  une  pièce  de  proclamation, 
»  inspirée  en  quelque  sorte  par  Pén thousiasme  local. 

»  Le  tyipe  est  absolument  le  même  que  celui  de  la 
»  monnaie  d'Orléans;  le  monogramme  carolin  qui,  du 

(1)  Voyez  Revue  numism.y  année  1843^  pi.  XX[. 


—  i24  — 

»  reste,  se  voit  sur  les  monnaies  de  presque  tous  les 
»  Carlovingiens,.  n'y  a  pas  plus  de  signification  que  sur 
»  les  pièces  de  Louis  le  Bègue  et  de  Carloman,  mais  il 
»  est  un  indice  de  plus  que  cette  monnaie  est  la  pre- 
»  mière  qu'Eudes  ait  frappée  en  qualité  de  roi  de 
»  France. 

»  Ce  rare  et  curieux  spécimen  est  peut-être  le  seul 
»  exemple,  au  moyen  âge,  d'une  monnaie  offrant,  en 
>  même  temps,  le  caractère  d'une  médaille  histori- 
»  que.  »  Voir  n^  2  à  la  planche. 

Qu'il  nous  soit  permis,  après  M.  Hucher,  de  cher- 
cher à  concilier  le  monogramme  carolin  de  ce  précieux 
denier  avec  sa  légende  odo  est  rex.  Ne  pourrait-on  pas 
y  voir  comme  une  sorte  de  compromis  entre  les  par- 
tisans d'Eudes  et  de  Charles  le  Simple?  On  sait  en  effet 
par  un  passage  d'Albéricus,  année  994  (1),  que  la  cou- 
ronne fut  déférée  à  Eudes,  fils  de  Robert  le  Fort,  duc  et 
marquis  de  France  jusqu'à  ce  que  Charles  le  Simple 
fut  en  âge  de  régner.  «  De  consensu  principum,  con- 
»  census  ad  regalis  coronae  gestamen  concessus  est 
»  Odoni ,  quousque  spatia  Regius  puer  nondum  ad 
B  regnum  idonea  percurrisset  aetatis.  » 

De  cette  façon,  rien  ne  semble  plus  naturel  que  de 
voir  le  monogramme  carolin  en  combinaison  avec  le 
nom  d'Eudes,  le  mo^nogramme  étant  là  comme  pour 
réserver  le  droit  futur  de  Charles  le  Simple  à  la  cou- 
ronne, et  le  nom  d'Eudes  s'y  trouvant  aussi  comme 
affirmation  de  la  royauté  temporaire  de  celui-ci.  On 
peut  objecter  que  le  monogramme  carolin  se  rencon- 

(I)  Leblanc,  p.  144. 


-  425  — 

tre  sar  des  deniers  de  Louis  III,  fils  de  Louis  le  fiégue» 
et  qu'au  même  titre  il  peut  bien  figurer  sur  certaines 
pièces  du  roi  Eudes.  Nous  dirons  que  le  cas  n'est  pas 
le  même;  en  effet  on  conçoit  que  Louis  III  ait  placé 
sur  ses  monnaies  le  monogramme  carolin  puisqu'il 
appartenait  à  la  race  carloYingiennC)  tandis  que  Eudes 
était  de  la  lignée  de  Robert  le  Fort,  d'origine  saxonne 
suivant  les  meilleurs  historiens. 

A  ce  propos,  il  ne  sera  pas  inutile  de  donner  ici  la 
généalogie  de  Eudes,  eu  égard  à  son  affinité  avec  l'An- 
jou* Il  était  fils  de  Robert  le  Fort,  dit  l'Angevin  ;  neveu 
de  Conrad  et  de  Hugues  dit  l'Abbé  ;  frère  de  Robert  II  ; 
oncle  d'Emma,  épouse  de  Raoul,  duc  de  Bourgogne  et 
de  Hugues  le  Grand  ou  le  Blanc  (1);  enfin  grand  oncle 
de  Hugues  Capet. 

De  tous  ces  personnages  qui  vécurent,  les  uns  au 
ix®  siècle  et  les  autres  au  x®,  et  qui  la  plupart  furent 
ducs  de  France ,  c'est-à-dire  gouverneurs  du  pays 
d'entre  la  Seine  et  la  Loire,  quatre  portèrent  la  cou- 
ronne de  France  plus  ou  moins  contestée,  savoir  : 
Eudes,  Robert  II,  Raoul  de  Bourgogne  et  Hugues  Ca- 
pet. Trois  sont  qualifiés  de  comtes  d'Anjou  tempo- 
raires :  Robert  le  Fort,  dit  l' Angevin,  Hugues  l'Abbé  et 
Eudes  (Voir  Art  de  vérifier  les  dates  et  Barthélémy,  dans 
Roret,  page  89). 

Revenons  ensuite  à  nos  médailles;  il  en  est  une  qui 
ne  laisse  pas  de  nous  intriguer;  on  la  trouve  indiquée 


(t)  D'après  la  Revue  de  Leleux,  15  mai  1859,  p.  123,  il  existe 
des  pièces  de  Hugues  le  Grand,  duc  de  France,  comte  de  Paris, 
père  de  Hugues  Capet,  mort  en  956. 


—  426  — 

page  49  de  la  Numismatique  de  Barthélémy,  dans  Ro- 
rel,  BOUS  cette  rubrîque  :  Catàlogi^  des  principales 
légendes  des  monnaies  carlovtngiennes.  Cette  pièce  porte 
Gix  AQVis  que  Ton  traduit  par  Seiches.  Quel  est  ce 
Heu? 

Si  Ton  ouvre  le  Dictionnaire  complet  des  communes 
de  France,  de  A.  Janin,  on  ne  trouve  qu'une  commune 
de  ce  nom,  chef-lieu  de  canton  et  située  dans  le  dé- 
partement de  Maine  et  Loire.  En  outre  cette  localité 
fut  célèbre  à  l'époque  carlovingienne,  ainsi  qu'il  ré- 
sulte d'une  charte  de  Charlemagne  de  l'an  809  dont 
l'original  est  au  musée  des  antiquités  de  notre  ville. 
Cette  charte  nous  apprend  en  effet  que  ce  souverain 
donna  Seiches,  son  église  et  ses  moulins  aux  religieux 
de  Saint' Aubin  d'Angers  qui,  au  rapport  de  Roger,  p.  119, 
en  furent  plus  tard  dépossédés  par  le  comte  d'Anjou, 
Foulques  Nerra,  lequel  à  son  tour  donna  ce  lieu  aux 
religieuses  du  Ronceray.  Toutefois  Seiches,  dans  notre 
charte,  n'est  point  nommé  cix  àqvis,  mais  bien  gipiâ  : 
«  Villam  nuncupante  Cipiam  qui  (sic)  est  sita  in  pago 
»  andecavo  supra  Liddo  flumine  (rivière  du  Loir).  )» 

Mais  comme  les  noms  de  lieux  se  sont  altérés  souvent 
dans  la  durée  des  siècles,  il  n'est  pas  impossible  que 
celui  de  Seiches  ait  subi  pareille  révolution;  donc 
jusqu'à  preuve  contraire,  nous  pouvons  vraisemblable- 
ment admettre  que  Seiches  d'Anjou  est  bien  le  même 
que  celui  où  l'on  battit  monnaie  durant  la  période 
carlovingienne. 

Il  existe,  il  est  vrai ,  un  autre  lieu  nommé  sipia. 
(mais  écrit  par  un  S)  placé  entre  Combrée  (arrondisse- 
ment de  Segré)  et  Rennes  (Ille-et-Vilaine);  ce  lieu  men- 


—  427  — 

tionné  sur  la  earte  de  Peutinger,  Test  aussi  dans  une 
carte  de  Sanson  qui  le  donne  comme  ayant  fait  partie 
de  l'Anjou  sous  les  Romains,  ce  qui  est  fort  douteux; 
mais  ce  lieu  que  Ton  croit  être  Yisseiches  étant  loin  du 
Loir,  ne  peut  être  celui  qui  nous  occupe;  d'ailleurs  il 
ne  s'écrit  pas  pareillement  et  son  nom  moderne  de 
Yisseiches  n'est  pas  le  même  que  Seiches. 

Déjà  nous  avons  vu  que  dans  la  période  mérovin- 
gienne l'église  d'Angers  avait  fait  battre  monnaie  (Con- 
sulter notre  série,  par  ordre  alphabétique  des  moné- 
taires,  au  nom  Alligisels);  maintenant  il  nous  faut 
signaler  une  pièce  de  la  même  église  (Saint-Maurice 
d'Angers).  Elle  nous  a  été  communiquée  par  M.  Boi- 
leau,  de  Tours,  qui  en  est  possesseur  ;  c'est  une  monnaie 
de  Charlemagne  sur  le  revers  de  laquelle  on  lit  :  sci. 
MAVR.  que  plusieurs  savants  traduisent  par  SancH  Mau- 
ricii.  On  sait  que  Charlemagne  n'avait  point  négligé 
les  intérêts  de  cette  église,  ainsi  qu'on  peut  s'en  con- 
vaincre en  consultant  une  charte  imprimée  dans  le  Gai- 
lia  cfem^tana  des  frères  Sainte -Marthe,  t.  II,  p.  115,  édi- 
tion de  1656.  Toutefois  cette  charte  ne  mentionne  point 
la  monnaie  d'Angers,  ce  qui  prouve  que  sans  la  numis- 
matique, beaucoup  de  faits  nous  seraient  inconnus. 

Puisque  nous  parlons  des  monnaies  ecclésiastiques 
de  l'Anjou,  signalons-en  de  suite  une  autre  qui  d'ail- 
leurs peut  aussi  bien  se  rapporter  à  la  fin  de  l'époque 
carlovingienne  qu'au  commencement  de  la  période  ca- 
pétienne. Sortie  du  cabinet  de  feu  M.  Lange,  de  Sau- 
raur,  cette  pièce  appartient  aujourd'hui  au  receveur  de 
l'enregistrement  de  Luçon,  qui  a  bien  voulu  nous  en 
communiquer  la  légende.  Elle  porte  d'un  côté:4-BEATi 


—  428  — 

FLOHENTn  et  au  revers  :  castrvm  salmvrv  (château  de 
Saumur).  Le  champ  est  orné  d'une  clef. 

E  videra  meut  ce  denier  appartient  à  Tabbayè  béné- 
dictine de  Saint-Flôrent  du  château  de  Saumur,  et  prouve 
que  ce  couvent  faisait  battre  monnaie.  L'époque  de  cette 
pièce  est  facile  à  déterminer.  Le  monastère  de  Saint- 
Florent  du  château  de  Saumur,  construit  vers  950,  fut 
incendié  par  Foulques  Nerra  vers  1025,  pour  être  en- 
suite rebâti  sur  les  bords  du  Thouet,  vers  103O,  à  2 
kilomètres  de  Saumur.  C'est  donc  entre  l'année  950  et 
1025  qu'il  faut  placer  la  date  de  cette  monnaie. 

Il  nous  reste  à  interpréter  la  présence  de  la  clef  qui 
se  trouve  dans  le  champ;  mais  ici  encore  {)oint  de  dif- 
ficultés, car  la  clef  fut  un  des  principaux  signes  du 
blason  de  l'abbaye.  Ce  blason  était  d'azur  à  une  crosse 
d'argent  posée  en  pal  et  tournée  à  dextrè,  accompagnée 
à  dextre  d'ufie  clef  renversée  de  mêméy  et  à  semestre  d'une 
fleur  de  lys  d!or.  L'écu,  appuyé  sur  une  cUf  et  sur  un 
glaive  en  sautoir,  est  sommé  entre  une  mitre  et  une 
crosse,  d'une  couronne  fleurdelysée,  de  laquelle  sort  un 
lys  fleuri  au  naturel  (Voir  le  sceau  de  l'abbaye  au  musée 
de  Saumur  et  l'entête  d'un  manuscrit  de  D»  Huynes). 

Sans  aucun  doute,  ce  blasoti  est  d'une  date  posté- 
rieure à  notre  monnaie,  mais  la  clef  traditionnelle  qui 
s'y  trouve,  explique  parfaitement  la  présence  de  celle 
que  l'on  voit  sur  la  pièce  en  question; 
.  Le  mot  de  beati  que  porte  la  légende^  au  lieu  de 
sanctiy  ne  doit  pas  étonner.  On  trouve  ces  deux  quali- 
ficatifs indifTéremment  employés  dans  les  manuscrits 
de  Saint-Florent. 

Il  est  une  autre  pièce  de  l'époque  carlovingienne 


—  429  — 

qu'il  ne  faut  point  passer  sous  silence  ;  mais  est-il  bien 
certain  que  le  nom  qu'elle  porte  ait  quelque  affinité 
avec  l'Anjou?  Le  lecteur  en  jugera.  En  lisant  un  très- 
bel  article  de  M.  Â.  Dauban,  dans  la  Revue  corUempo- 
raine j  année  1857,  je  fus  frappé  de  ce  passage,  page 
719  :  «  M.  de  Longperrier,  le  premier,  a  signalé  une 
»  monnaie  de  Narbonne,  frappée  par  le  comte  Milon, 

»  contemporain  de  Pépin  et  de  son  fils Ce  denier 

»  de  Milon,  continue  M.  Dauban,  s'est  payé  500  fr.  ^ 
Or  je  me  suis  demandé  quel  pouvait  être  ce  Milon? 
Bodin,  page  3,  t.  I,  Bas-Ânjou  et  t.  II,  page  540,  n'hé- 
site point  à  ranger  au  nombre  de  nos  comtes  tempo- 
raires un  Milon  d'Angers  qui  vivait  vers  le  milieu  du 
viiie  siècle.  Bour digne  le  place  également  dans  sa  liste, 
feuillet  10.  Mais  est-ce  bien  le  même  personnage?  Le 
Milon  qui  frappa  une  monnaie  k  Narbonne  était  con- 
temporain de  Pépin  et  de  son  fils  Charlemagné,  d'après 
M.  Dauban;  il  en  est  de  même  du  Milon  d'Angers  lequel, 
selon  Bodin,  avait  épousé  Berthe,  sœur  de  Charlemagné, 
et  qui  avait  probablement  reçu  son  nom  d'une  paroisse 
de  l'Anjou  (Fontaine-Milon,  arrondissement  de  Baugé), 
ou  le  lui  avait  donné.  D'un  autre  côté,  l'abbé  Voisin, 
dans  son  ouvrage  sur  les  Cenomans  anciens  et  modernes^ 
t.  I,  pages  258,  259,  parle  de  notre  Milon  d'Angers 
comme  étant,  d'après  des  chartes  de  l'an  752  relatives 
au  Maine,  comme  étant,  dis-je,  à  cette  époque  un  des 
principaux  personnages  de  la  cour  de  Pépin,  qui  lui 
accorda  le  duché  d'entre  Seine  et  Loire.  M.  Voisin  cite 
même  ce  passage  :  Abaciacum  in  pago  cenomannico.... 
proinde  nos  una  cum  proceribus  et  fiddibus  nostris  id 
est  Milone  Ratgario... 
En  outre  la  Revw  de  VAnjoUy  mai-juin  1854,  3®  li- 


—  480  — 

vraison,  pages  367,  368,  etc.,  nous  apprend  que  M.  P. 
Paris  a  déclaré  que  dans  un  très*ancien  roman  latin  le 
père  de  Roland  (notre  Milon)  est  désigné  par  le  titre 
A' Andegavensis  ou  quelquefois  de  Andegavis. 

Dans  le  roman  des  Quatre  fils  Aimon,  on  lit  :  <  Et  le 
>  buen  (bon)  duc  d'Angiers  qu'on  appelle  Milon  (1).  » 
Quelques  historiens  traitent  de  fable  ^histoire  de  Milon 
et  de  son  fils,  le  célèbre  Roland  ;  c'est  aller  trop  loin 
et  trancher  trop  au  vif.  Le  roman  s'est  sans  doute  em* 
paré  de  ces  deux  personnages,  mais  leur  existence 
nous  semble  incontestable  ;  et  s'il  est  vrai,  comme  tout 
porte  à  le  croire,  que  le  comte  Milon  qui  frappa  la 
monnaie  de  Narbonne,  soit  le  même  que  notre  Milon 
d'Angers,  le  doute  n'est  plus  possible. 

Parmi  les  vicomtes  de  Narbonne  on  n'en  trouve  aucun 
du  nom  de  Milon  y  ce  n'est  donc  point  en  qualité  de 
vicomte  ou  de  vidame  de  cette  contrée,  que  Milon  y  fit 
battre  monnaie.  Mais  peut-être  pourrait-on  expliquer 
ce  fait  en  disant  que  Milon  avait  assisté  à  Tune  de  ces 
expéditions  que  les  Carlovingiens  entreprirent  dans  le 
Midi  de  la  France  contre  les  Sarrasins.  Ce  qui  est  cer- 
tain, c'est  que  les  Sarrasins,  maîtres  de  Narbonne,  de 
Tan  719  à  l'an  759,  en  furent  chassés  par  Pépin  le 
Bref,  beau-père  de  Milon,  aprè$  sept  ans  de  siège  (2)  ; 
ce  qui  parait  également  certain  a  c'est  que  Milon  ac- 
s>  compagna  Charlemagnê,  son  beau-frère,  en  Espagne, 
j»  et  qu'il  y  fut  tué  dans  une  bataille  colitîe  les  Sarra- 
)  sins  (3).  j» 

(()  M.  t>.  Paris,  Histoire  littéraire  de  la  France^  t.  XXlt^  p.  68â. 

(2)  Art  de  Térifier  les  dates^  t<  IX,  p.  452. 

(3)  Bodin,  Ba0-Aijou,  1. 1>  p.  3. 


-  431  — 

Si  d'un  autre  côté  Ton  ne  perd  point  de  vue  que  la 
coutume  des  princes,  ducs  et  comtes  de  se  faire  suivre 
par  des  raonnayers  ambulants  n'était  pas  encore 
entièrement  bannie,  l'on  sera  fondé  à  en  conclure  que 
Milon  fit  battre  monnaie  en  son  nom  et  à  Narbonne, 
dans  l'une  de  ses  expéditions  méridionales. 

Du  reste  la  pièce  de  Milon  est  exceptionnelle,  ainsi 
que  l'a  fait  remarquer  M.  Dauban,  qui  la  considère 
comme  t  un  acte  d'usurpation  d'une  prérogative  du 
»  pouvoir  royal;  »  prérogative  fort  compromise  dès 
après  le  règne  de  Gharlemagne  et  surtout  après  celui 
du  roi  Eudes  (887-898). 

Sous  le  règne  de  Charles  le  Simple  (898-923),  cette 
révolution  est  complète  et  alors  commence  la  numis- 
matique des  comtes  d'Anjou  de  la  race  ingelgériennc. 
Sous  les  derniers  rois  de  la  période  carlovingienne, 
c'est-à-dire  de  Charles  le  Simple  (898),  à  Louis  V  (987) 
inclusivement,  on  ne  voit  pas  que  l'atelier  d'Angers  ait 
frappé  de  monnaies  royales. 

Le  système  monétaire  de  Charlemagne,  qui  eut  pour 
unité  le  denier,  fut  conservé  jusqu'à  saint  Louis  (Barthé- 
lémy, dans  Roret,  page  68).  Le  denier  carolin  valait  à 
peu  prés  7  sous  de  notre  monnaie  (Roret,  page  69). 

Le  dessin  de  trois  deniers  frappés  à  Angers  que  nous 
donnons  au  commencement  de  cette  notice,  savoir  :  un 
de  Charles  le  Chauve  et  deux  du  roi  Eudes,  est  dû  aux 
soins  de  M.  E.  Dainville.  Dans  une  prochaine  étude 
nous  traiterons  de  la  numismatique  des  comtes  d'An- 
jou^ Ingelgériens  et  Plantagenets. 

•         '      .      '      ■ 

V.  ûomrd-FàultIubr. 


AHTIQUITfS  FÉODALES 


COMTES    INQELGÉRIENS   ET   PLANTAGENETS 


NVNISMiTIQlJË  ANGEVINE 


Après  avoir  montré  dans  trois  précédents  articles, 
que  Ton  battit  monnaie  en  Anjou  aux  époques  celtique, 
mérovingienne  et  carlovingienne,  il  nous  faut  étudier  la 
numismatique  angevine  sous  nos  comtes  Ingelgériens 
et  Plantagenets  ;  mais  en  même  temps  il  est  utile,  je 
crois,  de  tracer,  d'une  manière  très-abrégée,  l'histoire 
de  ces  mêmes  comtes,  afin  de  rectifier  quelques  dates. 

INGELGËR. 

Vers  la  fin  du  ix^  siècle  commence  l'afFaiblissement 
de  la  puissance  carlovingienne  ;  l'institution  des  grands 
ducs  de  France  n'y  contribua  pas  peu.  Le  morcelle- 
ment féodal  et  l'hérédité  dans  les  fiefs,  s'ensuivirent. 


—  438  — 

L'Anjou  eut  part  à  cette  révolution,  d'autant  mieux 
que  les  ducs  de  France  jouirent  d'une  grande  auto- 
rité sur  notre  province;  aussi  nos  comtes  d'Anjou, 
selon  l'expression  de  M.  J.  B.  Â.  Barthélémy,  dans 
sa  Numismatique  moderne  (Encyclopédie  Roret,  page 
94),  n'étaient-ils,  jusqu'à  la  fin  du  x^  siècle,  que 
les  lieutenants  de  ces  mêmes  ducs,  et  ce  fut  sans 
doute  pour  reconnaître  cette  suprématie,  que  Geol- 
froi  I«r,  dit  Grisegonelle,  intitulait  ses  chartes  :  Gra- 
tta Dei  et  senioris  Hugonis  largitione  Andegavensis 
cornes;  c'est-à-dire  qu'il  se  déclarait  comte  d* Anjou  par 
la  grâce  de  Dieu  et  la  faveur  de  Hugues  le  Grand  son 
»  seigneur  (1).  Ajoutons  que  M.  Barthélémy  avoue  que 
les  ducs  de  France  étaient  parents  et  suzerains  de  nos 
comtes  (2). 

Ceci  nous  autorise  à  croire  qu'Ingelger,  notre  pre- 
mier comte  héréditaire,  dut  bien  plus  son  pouvoir  à 
la  race  des  ducs  de  France,  qu'à  celle  des  Garlovin- 
giens;  en  effet,  d'après  la  chronologie  que  nous  avons 
établie,  il  y  a  plus  de  vingt  ans,  dans  V Anjou  et  ses  Mo- 
numentSy  page  304,  t.  I,  et  qui  n'a  été  contestée  par 
personne,  nous  avons  démontré  qu'Ingelger  naquit  vers 
876,  qu'il  fit  ses  premières  armes  à  16  ans,  vers  892, 
qu'il  fut  comte  d'Anjou  d'en  deçà  Maine  après  892  ; 
qu'il  ramena  le  corps  de  saint  Martin  à  Tours  vers  912 
et  enfin  qu'il  mourut  vers  91 3.* 

Son  investissement  datant  de  l'année  892,  il  en  res- 
sort que  ce  fut  sous  le  règne  de  Eudes  qu'il  s'effectua  ; 

(1)  Art  de  yérifier  les  dates,  t.  XUI,  p.  47. 

(2)  Encyd.  Roret,  Numismatique  moderne^  p.  93. 

REP.   ARC.  31 


-  434  — 

or  Eudes,  qui  régna  de  l'an  888  à  898,  était  de  la 
race  des  ducs  de  France,  il  était  fils  de  Robert  le  Fort. 
Donc  il  est  probable  qu'Ingelger  reçut  plus  spéciale- 
ment de  lui  (i)  le  comté  d'Anjou  d'en  deçà  Maine^  qui 
avait  pour  capitale  Angers,  tandis  que  le  comté  d'outre 
Maine  reconnaissait  pour  cbef-lieu Seronne  (aujourd'hui 

Châteauneuf). 

Mais  qu'était  ce  dernier  comté?  un  très-pelit  point 
que  se  réserva  pour  la  défense  de  son  vaste  duché  de 
France,  la  race  issue  de  Robert  le  Fort  :  bref  il  s'agis- 
sait plutôt  d'une  frontière  que  d'un  comté  proprement 
dit  ;  aussi  ce  point  ne  tarda-t-il  pas  à  se  confondre  sous 
Foulques  le  Roux,  successeur  d'Ingelger,  avec  le  comté 
d'Anjou  d'en  deçà  Maine,  et  cette  fusion  s'opéra  par  la 
faveur  des  grands  ducs,  nouvelle  preuve  que  c'est  bien 
d'eux  que  nos  premiers  comtes  d'Anjou  tinrent  leur 
pouvoir  ;  c'est  pourquoi  il  ne  paraît  pas  qu'ils  battirent 
monnaie  sans  leur  consentement.  Quoi  qu'il  en  soit, 
on  ne  connaît  aucune  pièce  qui  puisse  se  rapporter  à 
notre  Ingelger,  et  nous  le  concevons  sans  peine,  puisque 

(\  )  Cependant  le  fragment  de  Thistoire  d'Anjou  par  Foulques  le 
Réchin  renferme  une  phrase  qui  contredit  les  intitulés  de  chartes 
de  son  prédécesseur,  Geoffroi  Grisegoneile.  D'après  cette  phrase 
Ingelger  aurait  tenu  son  pouvoir  non  de  la  race  de  l* impie  Philippe^ 
mais  de  la  lignée  de  Charles  le  Chauve.  A  cette  affirmation  on 
peut  répondre  que  Foulques  Rechin  vivait  près  d'un  siècle  après 
Grisegoneile  et  conséquemment  qu'il  devait  être  moins  bien  in- 
formé. En  outre  on  conçoit  qu'irrité  de  s'être  vu  enlever  sa  femme 
Bertrade  par  Philippe  P^  (1092),  il  ait  eu  à  cœur  de  profiter  des 
nuages  historiques  répandus  sur  le  berceau  des  Ingelgériens  pour 
avouer  que  ses  ancêtres  tinrent  leur  pouvoir  non  de  la  race  capé- 
tienne, mais  bien  de  la  race  de  Charles  le  Chauve. 


—  485  - 

Eudes,  duc  de  France,  comte  de  Paris,  devenu  roi,  fit 
lui-même  frapper  de  la  monnaie  à  Angers,  or  il  est 
peu  probable  que  le  suzerain  et  le  vassal  l'aient  fait 
en  même  temps.  Passons  donc  au  successeur  d'In- 
gelger. 

FOULQUES  ler  DIT  LE  ROUX. 

D'après  notre  système  chronologique,  il  devint  comte 
vers  913.  Nous  lui  faisons  perdre,  il  est  vrai,  vingt- 
cinq  ans  de  régne  sur  cinquante  que  lui  donne  TArt  de 
vérifier  les  dates,  mais  ainsi  l'exige  la  trame  des  faits 
historiques  bien  autrement  certaine  que  des  dates  plus 
ou  moins  contestables.  Foulques  I^r  mourut  en  938. 

Ce  comte  fit-il  battre  monnaie? 

Récemment  on  a  découvert  à  Angers,  rue  Gordelle, 
un  grand  denier  d'argent  dans  un  cerceuil  en  pierre 
coquillière  et  en  forme  d'auge  (1).  D'un  côté  on  voyait 
le  monogramme  de  Foulques  se  lisant  verticalement 
pour  les  lettres  F  V  L  et  horizontalement  pour  les  ca- 
ractères G.  0.  La  panse  du  G  y  est  droite  au  lieu  d'être 
convexe;  autour  on  voit  la  légende  gràtu  dt  (Dei) 
-COES  (cornes).  Gette  légende  est  une  imitation  de  la 
monnaie  du  roi  Eudes  qui  lui-même  l'avait  empruntée 
à  la  monnaie  de  Gharles  le  Chauve  ;  seulement  dans 
la  légende  de  Foulques  I^r,  le  mot  cornes  a  pris  la  place 
de  reœ.  Quelques  numismatistes  y  veulent  voir  l'inten- 
tion, chez  les  premiers  comtes  d'Anjou,  de  marquer 

(i)  Ce  cercueil  plus  large  vers  la  tète  que  vers  les  pieds^  avait 
un  couvercle  en  forme  de  toit,  orné,  dâins  toute  sa  longueur,  de 
rainures  gravées  à  -la  pointe  et  disposées  à  la  manière  des  barbes 
d'un  épi  de  froment  ou  d'une  arête  de  poisson. 


—  436  — 

qu'ils  étaient  les  égaux  des  rois  de  France;  mais  c'est 
là  une  conjecture  sans  fondement;  d'autres,  avec  plus 
de  raison,  croient  que  cette  formule  n'était  qu'un  reste 
de  la  légende  carlovingienne  précieuse  à  conserver  pour 
inspirer  plus  de  confiance  au  bon  aloi  des  pièces. 

Du  reste,  après  Foulques  I«r,  cette  formule  disparaît. 
De  l'autre  côté  de  notre  grand  denier  que  M.  Renault,  soit 
dit  en  passant,  nous  a  procuré  pour  le  musée  d'Angers 
en  mars  i86i ,  de  l'autre  côté,  dis-je,  de  notre  grand 
denier  on  lit  autour  d'une  croix  grecque,  c'est-à-dire 
à  branches  égales,  les  mots  :  andegavs  ca  pour  Ande- 
cavis  civitas.  L'abréviation  ca  est  suivie  d'un  carré 
flanqué  à  ses  angles  de  quatre  points  évidés,  c'est-à- 
dire  de  quatre  tours  vues  en  plan,  le  tout  formant  un 
emblème  de  notre  ville  murée. 

Ce  nom  de  civitas  que  nous  ne  retrouvons  plus  sur 
nos  monnaies  angevines  après  le  x«  siècle,  la  formule 
gratia  Dei  qui  en  disparaît  également  vers  la  même 
époque  et  l'aspect  général  de  la  pièce  qui  garde  encore 
sa  physionomie  carlovingienne ,  nous  autorisent  à 
croire  que  nous  ne  nous  trompons  pas  en  attribuant 
ce  grand  denier  à  Foulques  le  Roux,  comte  d'Anjou  et 
de  ce  nom  chronologiquement  le  plus  voisin  du  roi 
Eudes;  c'est  aussi. l'opinion  de  notre  collègue  M.  Re- 
nault ;  cependant  nous  devons  dire  que  dans  un  cata- 
logue imprimé  à  Fontenay-le-Comte  en  1854  sous  la 
direction  de  M.  Rollin,  ce  même  denier  est  donné  à 
Foulques  Nerra. 

Tobiesen  Duby,  plus  réservé,  déclare,  t.  2,  page  i4, 
année  mbggxg,  en  parlant  des  deniers  Je  nos  cinq 
comtes  qui  portèrent  le  nom  de  Foulques,  qu'il  t  n'est 


—  437  — 

»  pas  possible  d'assurer  auquel  d'entre  eux  appartient 
>  chaque  pièce.  :» 

C'est  aller  trop  loin,  et  jusqu'à  preuve  contraire 
nous  maintenons,  par  les  motifs  sus-indiqués,  que 
notre  grand  denier  est  bien  de  Foulques  l^r  dit  le  Roux. 

Après  ce  comte  vient  : 

FOULQUES  II  dit  LE  BON  (938-958). 

Nous  ne  connaissons  aucune  pièce  qui  puisse  lui 
être  attribuée  avec  certitude. 

GEOFFROI  ler  DIT  GRISEGONELLE  (958-987). 

Même  disette  sur  la  monnaie  que  ce  comte  a  pu  faire 
frapper.  Cependant  J.  B.  A.  A.  Barthélémy  cite  une 
pièce  qu'il  attribue  à  ce  comte  et  qu'il  décrit  de  la 
sorte  : 

No  309,  page  427,  de  sa  Numismatique  moderne,  dans 
Roret  :  gosfridvs  cois  ;  croix  aux  branches  de  laquelle 
sont  suspendus  alpha  et  oméga  (Voir  aussi  sa  planche 
VI  no  309).  Nous  parlerons  ci-après  de  cette  pièce. 

FOULQUES  m  dit  NERRA 

ou  Le  Noir,  Jerosolimitain  et  le  Palmier  (987-1040). 

Il  n'est  pas  douteux  que  Foulques  Nerra  ait  fait 
battre  monnaie;  tous  les  numismatistes  en  conviennent, 
seulement  ils  ne  s'accordent  pas  sur  les  pièces  qui  lui 
peuvent  être  attribuées.  Un  fait  certain  c'est  que  les 
premiers  comtes  d'Anjou  imitèrent  la  monnaie  de  la 
puissante  race  des  ducs  de  France  comtes  de  Paris  ; 
nouvelle  preuve  que  nos  comtes  tinrent  plus  spéciale- 


—  438  — 

ment  leur  pouvoir  de  cette  grande  race  qui  eut  pour 
chef  Robert  le  Fort,  bisaïeul  de  Hugues  Capet. 

Le  savant  Lelewel  dit  en  effet,  page  139,  t.  I,  de  sa 
Numismatique  du  moyen  âge  :  «  Que  le  comte  d'Anjou 

>  suivit  l'exemple  du  comte  de  Paris  et  l'imita  dans  le 

>  coin  et  les  titres.  > 

Il  dit  également  à  la  page  496  que  c  le  comte  d'Anjou 

>  fut  le  premier  qui  imita  les  ducs  de  France  et  mar- 

>  qua  sa  monnaie  du  monogramme.  > 

Mais  il  ne  fait  remonter  cet  usage  du  monogramme 
chez  nos  comtes  que  vers  Tan  1000  (1),  tandis  que 
nous  le  reportons  plus  en  arrière  entre  les  années  913 
et  938,  dates  extrêmes  du  règne  de  Foulques  le  Roux. 
Il  suit  de  là  que  le  grand  denier  d'argent  que  nous  avons 
cru  précédemment  devoir  restituer  au  dit  Foulques  le 
Roux,  est  attribué  par  Lelewel  à  Foulques  Nerra.  Cet 
auteur  rajeunit  donc  la  dite  pièce  d'au  moins  soixante 
ans,  et  voici  sur  quoi  il  se  fonde.  Il  prétend  que  notre 
grand  denier  en  question  est  une  imitation  d'un  denier 
de  Hugues  Capet  alors  qu'il  n'était  encore  que  duc  de 
France  et  comte  de  Paris  (2).  Assurément  on  voit  sur 
ces  deux  pièces,  principalement  sur  Y  avers  y  quelque 
ressemblance,  mais  infiniment  moins  grande  qu'entre 
le  denier  de  Eudes  et  celui  que  nous  attribuons  à  Foul- 
ques le  Roux,  tous  les  deux  frappés  à  Angers. 

Sur  le  revers  du  denier  de  Hugues  les  mots  parisi 


{\)  Joachim  Lelewel,  page  193,  t.  1,  Numismatique  du  moyen 
âge. 

(2)  Idem  p.  142  et  192;  planche  viii,  n°^  1  et  2  du  même  ou- 
vrage. 


—  4S9  — 

GiviTA  sont  placés  horizontalement  dans  le  champ, 
entre  deux  petites  croix  égales  et  pattées,  tandis  que 
sur  le  revers  de  la  pièce  de  Eudes,  la  légende  àndecayis 
civiTAs  est  circulaire  et  entoure  une  seule  grande  croix 
égale,  environnée  d'un  grenatis  circulaire  aussi.  Or  le 
revers  de  notre  grand  denier  en  question  est  sembla- 
blement disposé;  c'est  à  vrai  dire  la  même  physionomie. 

Nous  maintenons  donc,  sans  hésiter,  malgré  la  grande 
autorité  de  Lelewel,  nous  maintenons,  dis-je,  notre 
attribution,  et  nous  sommes  heureux  de  pouvoir 
l'étayer  en  partie  du  sentiment  de  M.  J.  B.  A.  A.  Bar^ 
thélemy  qui,  à  la  page  427,  Encyclopédie  Rorety  Numù'^ 
maligne  du  moyen  âgCy  range  notre  grand  denier  sous 
la  rubrique  de  Foulques  I^r  ou  de  Foulques  II,  dit  le 
Bon. 

Le  musée  d'Angers,  outre  ce  grand  denier,  possède 
encore  une  obole  du  même  Foulques  I^**,  donnée  par 
feu  M.  Langes  de  Saumur.  Cette  obole  porte  d'un  côté  : 
+  GRACIA  DT  (Dei)  coMES,  et  au  centre  le  mono- 
gramme FvLCO,  puis  de  l'autre  : 

R|  +  ANDECEAvis  CA  ::  (civitas);  au  centre  croix  égale. 

Mais  quelles  sont  donc  les  pièces  que  l'on  peut  attri- 
buer à  Foulques  III  dit  Nerra? 

Dans  le  dernier  tiers  du  x^  siècle,  suivant  la  Numis- 
matique moderne  de  M.  J.  B.  A  A.  Barthélémy,  Roret, 
page  427  (1),  vers  le  milieu  du  xi«,  suivant  Lelewel, 
pages  151  et  158,  t.  1  de  sa  Numismatique  du  moyen 
âge,  reparurent  sur  beaucoup  de  monnaies  (2),  les  deux 

(i)  Voir  pièce  attribuée  à  Geoffroi  GrisegoneUe,  n^  309. 

(2)  Au  nord  on  suspendait  Talpha  et  Tomega  aux  branches  dfe 


lettres  de  l'éternité,  à  savoir  Y  Alpha  et  VOmega^  que  les 
Mérovingiens  avaient  déjà  employées  mais  que  l'on  ne 
trouve  pas  dans  la  période  carlovingienne. 

Il  suit  de  là,  que  c'est  sur  la  limite  du  x^  au  xi  siècle 
qu'il  est  logique  de  placer  l'emploi  de  Y  Alpha  et  de 
Y  Oméga  dans  nos  pièces  angevines,  et  que  c'est  égale- 
ment vers  cette  époque  qu'il  est  convenable  de  rap- 
porter la  révolution  monétaire  qui  s'opéra  dans  notre 
monnayage  angevin,  révolution  par  suite  de  laquelle 
disparaissent,  i^  la  formule  gratia  dei,  2o  la  légende 
civiTAS,  qui  sont  remplacées,  la  première  par  le  nom 
entier  du  comte  et  par  les  deux  lettres  de  l'éternité  sus- 
pendues à  une  croix  égale,  la  seconde  par  le  mot  vrbs. 
Or  l'entreprenant  Foulques  Nerra  vivait  précisément 
sur  la  limite  du  xe  au  xi^  siècle  (987-1040),  et  plus 
qu'aucun  autre  il  dut  tenir  à  honneur  de  placer  sur  la 
monnaie,  son  nom  tout  entier  ainsi  que  les  deux  lettres 
éminemment  chrétiennes  et  grecques  A  o),  lui  qui  avait 
parcouru  plusieurs  fois  l'Orient  et  qu'on  appelait  le 
Palmier  et  Jérosolimitain  !  En  outre,  comme  il  avait 
l'esprit  novateur  et  remuant ,  pouvait-il  ne  pas  con- 
tribuer à  la  petite  révolution  monétaire  dont  nous 
venons  de  parler? 

Mais  comment  distinguer  ses  pièces  de  celles  de  ses 
successeurs  du  même  nom  etnotamment  de  Foulques  IV 
dit  le  Rechin  (1060-1109)?  Ici  est  la  difficulté,  et  je 
ne  trouve  pas  d'autre  moyen  pour  la  résoudre  que  celui 
de  scrupuleusement  étudier  le  monogramme  des  Foul- 

la  croix;  au  midi  on  ne  les  rencontre  guère.  Voir  Lelewel^  p.  15i, 
t .  I  de  sa  Numismatique  du  moyen  âge. 


—  4W  — 

ques.  Ce  monogramme  fiit  toujours  le  même  pour  nos 
comtes  d'Anjou  pendant  trois  siècles  à  peu  près, 
quel  que  fût  d'ailleurs  leur  nom.  En  effet,  ce  mono- 
gramme persiste  et  persistera  même  jusque  sous 
Charles  I^^  fait  comte  d'Anjou  en  1246,  mais  il  persiste 
en  s'altérant  de  siècle  en  siècle,  jusqu'à  ce  qu'il  soit 
remplacé  par  une  clef  dans  le  cours  du  xiii^  siècle. 

Ainsi  sous  Foulques  le  Roux  (913-938),  les  trois 
lettres  verticalement  posées  : 

F 


et  les  deux  lettres  horizontalement  placées  C  0  (le  C  à 
panse  droite)  sont  pariaitement  accusées,  tandis  que 
plus  tard  c'est  avec  peine  que  l'on  distingue  l'v  de  I'l. 

Il  suit  donc  de  ceci  que  plus  le  monogramme  est  bien 
fait,  plus  ses  lettres  enchevêtrées  se  distinguent  facile- 
ment et  plus  il  est  ancien. 

Point  de  difficulté  pour  les  prédécesseurs  de  Foulques 
Nerra  puisque  l'on  possède  d'autres  moyens  pour  les 
reconnaître,  tels  que  les  légendes  gratia  dei  et  civitas. 
La  difficulté,  comme  je  l'ai  déjà  fait  pressentir,  com- 
mence donc  surtout  à  Foulques  Nerra;  eh  bien,  lors- 
qu'on devra  se  décider  entre  ce  comte  d'Anjou  et 
Foulques  Rechin  par  exemple,  dont  les  monnaies,  à 
tous  les  deux  portent,  1^  leur  nom  tout  entier ^  2»  r Alpha 
et  r  Oméga  suspendues  aux  branches  d'une  croix  égale, 
3^  le  mot  urbsy  on  sera  à  peu  près  certain  que  celle  de 
ces  pièces  qui  aura  les  lettres  du  monogramme  les  plus 
distinctes,  se  rapportera  au  premier.  Point  de  con- 
fusion possible  avec  la  monnaie  de  Foulques  V  comte 


—  u%  — 

d'Anjou,  roi  de  Jérusalem  (1109-1129)  puisque  Ton  ne 
connaît  jusqu'ici  de  ce  prince  qu'une  seule  pièce  frappée 
en  Touraîne  et  sur  laquelle  on  voit  un  portail  ou 
cbâtel,  pièce  citée  par  Lelewel,  page  195,  t.  I  de  sa 
Numismatique  du  moyen  âge. 

Même  procédé  devra  s'appliquer  aux  pièces  des 
Geoffroî,  comtes  d'Anjou,  sans  même  en  excepter  celle 
attribuée  à  Geoffroi  Grisegonelle ,  par  M.  J.  B.  A.  A. 
Barthélémy,  pièce  déjà  citée  et  que  nous  croyons  pou- 
voir restituer  plutôt  à  Geoffroi  II  dit  Martel  (1040-1060). 

Quant  aux  monnaies  de  nos  comtes  Plantagenets, 
savoir  :  Henri  II,  Richard  Cœur  de  Lion  et  Jean  sans 
Terre,  l'on  ne  sait  pas  positivement  si  depuis  leur  élé- 
vation au  trône  d'Angleterre,  ils  conservèrent  intact  le 
monogramme  angevin  (1).  Cependant  tout  porte  à  le 
croire,  puisque  nous  voyons  après  eux  ce  monogramme, 
un  peu  défiguré  il  est  vrai ,  persister  jusque  sous 
Charles  I^r,  frère  de  saint  Louis,  vers  1246  (Voir  J.  B. 
A.  A.  Barthélémy,  dans  Roret,  Numismatique  du  moyen 
âge^  page  93). 

GEOFFROI  II  dit  MARTEL  (1040-1060). 

Geoffroi  II  fit  frapper  des  deniers  angevins  et  des 
oboles.  Le  musée  des  antiquités  en  possède  une  en 
billon,  trouvée  à  Bain  (Ille-et-Vilaine)  et  classée  sous 
le  no  42,  2©  catalogue. 

On  y  lit  :  gosfridvs  cos  entourant  Y  Alpha  et  Y  Oméga 
suspendus  à  une  croix  égale,  et  au  revers  vrbs  AioEGAv 
entourant  le  monogramme  des  Foulques.   L'v  et  Tl 

(1)  Lelewel^  t.  I,  paçe  161,  Numismatique  du  moyen  âge. 


—  443  — 

y  sont  parfaitement  accusés.  11  en  est  de  même  de 
trois  deniers  d'argent  déposés  au  dit  musée  et  trouvés 
aux  Augustines  près  d'Angers,  route  de  Saumur,  en 
d847;  mais  le  nom  d'Angers  y  est  écrit  :  aidccv,  et 
celui  du  comte  .  gosriidys. 

Faisons  remarquer  que  les  trois  lettres  cos  signifient 
consuly  titre  que  prirent  souvent  nos  comtes  au  lieu  de 
celui  de  cornes  (1).  Ceci  se  vérifie  par  le  titre  même  du 
plus  ancien  ouvrage  écrit  sur  nos  comtes  d'Anjou,  in- 
titulé :  GESTA  CONSVLVM  ANDEGAVORVM,  ouvragc  dédié  à 
Henri  II,  roi  d'Angleterre,  dans  la  seconde  moitié  du 
XII®  siècle  et  qui  fut  imprimé  dans  leSpicilége  d'Acheri, 
t.  X,  page  400,  puis  réimprimé  en  1856  par  M.  Mar- 
chegay,  sous  le  titre  de  Chroniques  d'Anjou,  Le  manus- 
crit primitivement  déposé  dans  les  archives  de  Saint- 
Laud  près  d'Angers,  fut  communiqué  à  d'Acheri  par 
d'Hérouval,  ainsi  qu'à  Hiret  (pages  128,  129),  par 
Jacques  Millet,  chanoine  et  archidiacre  de  Saint-Maurice. 

Mais  revenons  à  GeoflFroi  II,  pour  dire  qu'il  eut  éga- 
lement le  privilège  de  battre  monnaie  dans  l'étendue 
de  l'évêché  de  Saintes.  Deux  mots  d'explication  au  sujet 
de  la  possession  de  la  Saintonge  par  les  comtes  d'Anjou. 
L'Art  de  vérifier  les  dates,  t.  XIII,  page  50,  nous  apprend 
que  Foulques  Nerra  avait  acquis  de  Guillaume,  duc 
d'Aquitaine ,  la  ville  de  Saintes  dans  le  capitole  de 
laquelle,  soit  dit  en  passant,  il  fit  emprisonner  Herbert, 
comte  du  Maine.  Le  même  ouvrage,  page  54,  nous  ap- 
prend encore  que  GeofTroi  II,  et  Agnès  sa  femme,  au 

(i)  Néanmoins  c'est  seulement  sur  les  pièces  de  Geoffroi  II  que 
nous  aidons  troui^é  cos. 


—  444  — 

retour  d'un  voyage  en  Italie,  fondèrent  en  1047  Tabbaye 
de  Notre-Dame  à  Saintes  pour  des  filles^  et  ce  fut  à 
cette  occasion,  qu'afin  de  doter  ce  monastère,  ils  vou- 
lurent bien  céder  à  l'abbesse  le  droit  qu'ils  avaient  de 
battre  monnaie  dans  l'étendue  del'évêché  de  Saintes  (1). 
La  Saintonge  fut  perdue  pour  les  comtes  d'Anjou  en 
1066,  sous  Foulques  IV  dit  le  Rechin,  qui  s'en  laissa 
déposséder  par  Guillaume  VIU,  duc  d'Aquitaine.  Ils  ne 
furent  donc  pas  maîtres  de  cette  province  plus  d'un 
demi  siècle. 

GEOFFROI  III  DIT  LE  BARBU  (1060-1068). 

Ce  Geoflfroi  a-t-il  été  comte  d'Anjou?  A-t-il  frappé 
monnaie  en  cette  qualité?  A  la  première  question  on 
doit  répondre  qu'en  droite  Geoflfroi  le  Barbu  ne  fut  pas 
comte  d'Anjou.  En  eflfet,  notre  province,  en  vertu  d'un 
partage,  avait  été  dévolue,  avec  la  Saintonge,  à  Foulques 
le  Rechin  son  frère,  par  Geoffroi  II  dit  Martel,  leur 
oncle  maternel  décédé  sans  enfants  (2). 

Néanmoins  le  Barbu,  non  content  d'avoir  en  sa  pos- 
session le  Gatinais  qu'il  tenait  de  son  père  et  la  Tou- 
raine  de  son  oncle  Martel,  éleva  d'injustes  prétentions 
sur  l'Anjou  et  ne  craignit  point,  sur  plusieurs  charfes, 
de  prendre  le  titre  de  comte  de  notre  province  (3). 
Donc  en  fait  il  le  fut,  mais  mal  lui  en  prit,  car  son 
frère  le  Rechin  le  vainquit  en  deux  batailles,  l'une  à 

(1)  Gall.  christ.^  t.  II,  p.  480.  Revue  Numismatique  de  MM.  E. 
Cartier  et  De  la  Saussaye,  année  1843,  p.  379. 

Voir  aussi  Lelewel^  Numismatique  du  moyen  âge,  p.  i43. 

(2)  Art  de  vérifier  les  dates,  p.  57. 

(3)  L'Anjou  et  ses  monuments,  t.  II,  p.  148  et  149. 


—  445  — 

Angers  en  1067  et  l'autre  à  Brissac  en  1068.  Durant  ce 
laps  de  huit  années  le  Barbu,  qui  mourut  prisonnier  à 
Chinon,  fit-il  frapper  monnaie  en  qualité  de  comte 
d'Anjou?  je  l'ignore,  cependant  M.  J.  B.  A.  A.  Barthé- 
lémy dans  sa  Numismatique  du  moyen  âge  (Encyclo- 
pédie Roret,  page  94),  marque  d'un  astérique  le  nom 
de  ce  prince,  ce  qui  indique  qu'il  admet  l'existence  de 
monnaies  angevines  frappées  par  lui. 

J'avoue,  malgré  de  minutieuses  recherches,  ne  pas 
les  connaître  et  cela  vient  sans  doute  de  la  difficulté  qui 
existe  à  les  distinguer  de  celles  de  Geoffroi  II  dit  Martel . 

FOULQUES  IV  DIT  LE  REGHIN  OU  LE  QUERELLEUR 

(1060-1109). 

Nous  attribuons  à  Foulques  le  Rechin  deux  deniers 
en  billon  (1)  donnés  au  musée  des  antiquités  d'Angers 
par  M'"®  de  la  Frugelaye  et  classés  n»  110  2^  catalogue  ; 
ils  proviennent  d'un  trésor  pesant  9  kilogrammes  500  gr. 
découvert  en  rouleaux  dans  un  vase  de  terre,  au  lieu  dit 
la  Lande  des  Aunais ,  commune  du  Grand-Fougeray, 
département  d'IUe-et-Vilaine.  Chaque  denier  pèse  envi- 
ron un  gramme;  parmi  ces  pièces  se  trouvaient  des 
deniers  de  Saint-Martin  de  Tours,^  marqués  du  chàtel 
aux  quatre  points  évidés  en  usage  de  l'an  1100  à  1270  (2), 
puis  des  conans  Legros  avec  la  légende  dux  britannie 
(1112-1148  (3). 

(1)  Au  xii^  et  au  xiii"  siècle  les  barons  Ceibriquaieiit  plutôt  le 
biiloa  que  la  ivraie  monnaie  blanche.  Leiewel,  Numismatique  du 
moyen  àge^  1. 1^  p.  148. 

(2)  Lelewel^  planche  vu  de  la  monnaie  baronak. 

(3)  Idem  planche  xvii^  n^  10. 


—  446  — 

Nos  deux  deniers  angevins  portent  fvlco  comes  en- 
tourant une  croix  égale,  avec  l'alpha  et  Tomega  et  au 
revers  :  vrbs  aidccsv  entourant  le  monogramme. 

Une  autre  découverte  faite  dans  le  creux  d'un  morceau 
de  bois,  commune  de  Bécon,  en  un  champ  nommé  Bor- 
dure-des-LandeSy  département  de  Maine  et  Loire^  nous 
a  fourni  plusieurs  centaines  de  deniers  en  billon  parmi 
lesquels  sept  ont  été  donnés  au  dit  musée  par  M.  Joseph 
de  MieuUe  et  classés  sous  le  u^  88,  3^  catalogue  ;  deux 
sont  au  châtel  de  Tours  et  les  cinq  autres,  qui  sont 
angevins,  ressemblent  aux  précédents.  Cependant  deux 
portent  le  nom  d'Angers  andegavis  en  toutes  lettres  et 
par  un  6.  Le  nom  Pulco  y  est  écrit  tantôt  par  un  I  et 
tantôt  par  un  L.  Quant  au  monogramme,  on  y  voit  que 
l'V  et  l'L  se  permutent  en  un  point  d'où  sortent  comme 
trois  clous.  Aurait-on  voulu  figurer  les  clous  de  la 
Passion?  Un  seul  de  ces  deniers  porte  très -bien  ac- 
cusé rV  et  l'L  et  peut,  en  raison  de  cela,  être  attribué 
à  Foulques  Nerra. 

Une  troisième  découverte,  celle-ci  faite  à  Ai^ers, 
nous  a  fourni  trois  deniers  en  billon  donnés  par 
M.  Rondeau. 

Toutes  ces  variétés  sont  des  dégénérescences  du  mo- 
nogramme primitif. 

Foulques  le  Rechin  ne  fit  pas  seulement  battre 
monnaie  en  Anjou,  mais  encore  en  Touraine.  Voici 
comment  s'exprime  Lelewel  à  ce  sujet  (1)  : 

«  Le  portail  (ou  châtel)  fut  rétabli  sur  la  monnaie 
>  de  Saint-Martin  de  Tours  et  en  est  devenu  une  em- 

{i)  Numismatique  du  moyen  âge,  t.  I^  p.  ^15. 


—  447  — 

>  preinte  constante.  La  couronne  et  le  comte  d'Anjou 
»  le  reproduisirent  vers  Tan  1100.  >  Or  à  cette  époque 
régnait  précisément  notre  Foulques  le  Rechin. 

M.  Cartier  n'est  pas  moins  affirmatif,  mais  il  géné- 
ralise davantage. 

€  Versle  règne  de  Philippe  I^r,  dit-il  (1),  (1060-1108), 

>  la  monnaie  de  Saint-Martin  réduite  une  dernière  fois 

>  dans  sa  valeur,  par  suite  de  l'altération  des  monnaies 
yt  royales,  devint  la  règle  des  transactions  de  toutes  nos 
»  provinces.  On  s'y  attacha  parce  que  depuis  le  com- 

>  mencement  du  xi«  siècle  elle  demeura  stable  de  types 
»  et  de  valeurs,  et  parce  qu'elle  était  reconnue  par  les 

>  comtes  d'Anjou  avoués  de  Saint^Martin  et  maîtres 
»  d'une  grande  partie  de  la  France,  lorsqu'ils  furent 

>  devenus  rois  d'Angleterre,  ducs  d'Aquitaine,  de  Nor- 
»  mandie,  etc. 

i>  Il  existe,  continue-t-il,  des  oboles  (portant  le  châtel 
»  de  Tours  (2)  sur  lesquelles  on  remarque,  attachées 
»  à  la  croix,  l'alpha  et  l'oméga  qui  se  trouvent  sur  les 
»  monnaies  des  comtes  d'Anjou.  Cela  nous  confirme, 
»  ajoute-t-il,  dans  l'opinion  que  ces  puissants  seigneurs 
»  frappèrent  à  Saint-Martin  (de  Tours)  leurs  monnaies 
f  angevines  qui  couraient  comme  tournois.  Ils  eurent 

>  un  atelier  monétaire  à  Beaulieu,  près  de  Loches  où 

>  il  ne  se  fabriqua  sans  doute  que  des  monnaies  au  type 
ji  angevin  ou  des  tournois,  sans  que  rien  puisse  nous 
»  les  faire  reconnaître.  > 

(i)  Voir  dans  les  tableaux  chronologiques  de  Thistoire  de  ToU'* 
raine  son  article  «r  de  la  Monnaie  tournois  issue  de  celle  de  Saint- 
Martin.  » 

(2)  «  Ce  chàtel  peut  rappeler  l'enceinte  de  Ghâteauoeuf  (de 
y>  Tours)  qui  entourait  et  défendait  l'église.  »  Voir  Cartier. 


—  450  — 

Rechin,  il  fut  associé  par  lui  au  gouvernement  de  notre 
province.  Cette  association  n'eut  qu'une  très-courte 
durée;  commencée  en  i098,  elle  finit  en  li06  par  la 
mort  de  Geoflroi,  tué  devant  le  château  de  Candé. 

Fit-il  battre  monnaie?  c'est  chose  peu  probable.  Je 
ne  connais  aucune  pièce  qui  puisse  lui  être  attribuée. 

FOULQUES  V  ROI  DE  JÉRUSALEM  (1109-1129). 

Foulques  Y,  fils  du  Rechin  et  de  la  fameuse  Ber- 
trade,  fut  investi  en  droit  par  Philippe  I^'  roi  de 
France,  mais  non  en  fait,  du  comté  d'Anjou  dès  Tan 
1106,  sitôt  après  la  mort  de  Geoffroi  IV,  son  aîné. 

En  il 29  il  quitte  l'Anjou,  cède  ses  droits  à  son  fils 
(Geoffroi  V),  se  rend  pour  la  seconde  fois  à  la  terre 
sainte,  y  est  couronné  roi  de  Jérusalem  en  il 31  et 
meurt  en  ii42. 

Nous  avons  précédemment  cité,  page  20,  d'après 
Lelewel,  une  pièce  de  ce  prince,  frappée  au  type  tour- 
nois, c'est-à-dire  portant  c  le  petit  édifice  nommé 
*  cbâtel,  composé  de  deux  tourelles  réunies  par  un 
>  fronton  :  ce  signe  marquait  la  tnormaie  tournois.  > 
(Encyclopédie  Roret,  page  92). 

La  pièce  de  Foulques  Y  confirme  l'usage  qu'avaient 
les  comtes  d'Anjou  de  battre  monnaie  en  cette  province. 
Ce  fut  principalement  soub  leur  direction  que  l'Europe 
entière,  notamment  au  xii^  siècle,  adopta  le  type  tour- 
nois introduit  même  en  Orient  par  les  croisades  (1). 

Hais  en  ce  qui  concerne  le  monnayage  angevin  sous 
Foulques  Y,  je  ne  connais  aucmne  pièce  de  Ini  frappée 
à  Angers. 

(1)  A.  Daubnn^  p.  72i,  Revue  contemporaÎDe,  1857. 


—  451  — 

C*est  le  moment  ici  de  parler  des  deniers  de  Gien 
(Loiret)  :  <  ils  portent  le  monogramme  de  Foulques  qui 
»  n'était  plus  qu'une  marqué  convenue  de  la  monnaie.  > 
(Lelewel,  page  163.) 

Maïs  dans  ce  monogramme  l'v  et  I'l  sont  devenus 
une  petite  branche  (Voir  Lelewel,  planche  viii,  Numis- 
matique du  moyen  âge ,  n®  25).  Quant  à  l'alpha  et  à 
romega  suspendus  à  la  croix,  ils  ont  pris  la  forme  de 
deux  petits  v  obliquement  renversés.  Lelewel,  page  163, 
se  pose  cette  question  :  «  D'où  vient  donc  que  le  mo- 
»  nogramme  angevin  a  été  employé  à  la  monnaie 
1^  Giennoise  (Gienisca)  1  »  Il  paraît  s'en  étonner. 

Nous  croyons  pouvoir  y  répondre  ;  en  effet  Gien  était 
une  ville  du  Gatinais;  or  le  Gatinais  avait  appartenu  à 
Ingelger  et  plus  tard  à  Geoffroi  le  Barbu,  ainsi  qu'à 
Foulques  le  Rechin,  tous  comtes  d'Anjou.  Il  n'est  donc 
pas  surprenant  que  le  monogramme  angevin  ait  figuré 
sur  les  monnaies  de  Gien,  même  après  eux,  dans  le 
cours  du  xii®  siècle. 

GEOFFROI  V  DIT  LE  BEL  ET  PLANTAGENET  (11 29-1151). 

Nous  ne  connaissons  jusqu'ici  aucune  pièce  angevine 
qui  puisse  être  attribuée  à  cet  aïeul  des  Plantagenets, 
non  plus  qu'à  ses  successeurs  Henri  II,  Richard  Cœur- 
de-Lion,  Jean-sans- Terre  et  Arthur. 

En  attendant  qu'il  s'en  découvre  nous  disons,  avec 
la  Revue  numismatique  de  MM.  Cartier  et  De  la  Saussaye, 
pages  29  et  103,  année  184â,  qu'au  xii©  siècle,  sous  les 
Plantagenets,  la  monnaie  d'Anjou  avait  cours  en  Nor- 
mandie, dans  le  Maine,  dans  le  Perche,  etc.;  qu'elle  fut 
remplacée  par  les  deniers  tournois  surtout  après  la 


—  /t52  — 

confiscation  de  Tan  4204;  et  qu'enfin  les  espèces  an- 
gevines tombèrent  dans  un  tel  discrédit,  qu'en  1S26 
elles  n'avaient  plus  cours  à  Angers  même. 

Toutefois  la  monnaie  angevine  discréditée  vers  la  fia 
du  gouvernement  des  Plantagenets  dans  nos  provinces 
occidentales  de  France,  se  relèvera  sous  nos  premiers 
comtes  de  la  maison  d'Anjou-Sicile.  Nous  y  reviendrons 
dans  un  prochain  article. 


V.  Godard-Faultrier. 


i(i 


SOCIÉTÉ   IMPÉRIALE    D'AGRICULTURE,  SCIENCES  ET  ARTS 

ANCIENNE  AGAOÉIDE  D'ANGERS. 


COIIISSIOI  ÂRCHfOLOGIQUE 


DU  DEPARTEMENT 


OE  MAINE  ET  LOIRE 


ABGHiOLOGIQDE 


DE    I/ANJOU 


Année  1869.  —   Décembre* 


ANGERS 

IMPRIMERIE    DE    COSNIER    ET    LAGHÉSE 

Chaussée  Saint-Pierre ,  13 

1863 


■cQ 


ACTES  ^^^^ 


! 

DS 


SAINT  FRANCAIRE 


! 

CONFESSEUR. 


■  Nos  prsdicaiDiiit qtiod  scinraq,  ac 
certa  traditione  didicimns.  » 

(Gard.  BaroDins,  Mortyrologium  Bomanum.) 


Quelque  riche  que  soit  uile  église  en  ornements  et 
vases  sacrés,  quelque  haut  que  remonte  son  origine  ' 
dans  le  cours  des  siècles,  il  n'est  pas  pour  elle  de  tré* 
sor  plus  précieux  que  la  possession  d'un  corps  saint, 
pas  de  gloire  plus  éclatante  et  plus  vraie  que  celle  qui 
rejaillit  d'une  châsse  transmise  de  génération  en  géné- 
ration à  la  garde  et  à  la  vénération  des  pieux  fidèles. 
Aussi  de  ces  honneurs  assidus  dont  sont  entourées  les 
reliques,  de  ce  reflet  céleste  qui  illumine  un  pays,  dé* 
coulent  des  sources  abondantes  de  grâces  qui  témoi- 
gnent à  la  fois  et  d'une  protection  puissante  et  d'un 

REP.  ARC.  33 


—  454  ^ 

crédit  immense  que  Dieu  accorde  au  mérite  de  son 
saint  :  Contestante  Deo  meriti  documenta  beati  (1). 

Deux  époques  ont  été  particulièrement  funestes,  en 
Anjou,  au  culte  des  saints  et  de  leurs  reliques.  Au  xvi^ 
siècle,  la  rage  des  protestants,  au  xviiie,  la  fureur  de 
l'impiété  s'attaquèrent  aux  statues  les  plus  vénérées, 
non  moins  qu'aux  ossements  les  plus  sacrés.  Cependant 
dans  ce  cataclysme  épouvantable  et  de  si  lamentable 
souvenir,  tout  ne  fit  pas  naufrage.  La  foi  du  chrétien, 
qui  domine  les  épreuves,  parvint  à  triompher  des  obs- 
tacles, et  c'est  à  son  zèle  ardent  et  patient  tout  ensemble, 
que  nous  sommes  redevables  des  reliques  qui  font  au- 
jourd'hui notre  orgueil  et  notre  consolation. 

Nous  avons  beaucoup  perdu,  hélas!  et  jamais  de 
telles  pertes  ne  pourront  être  réparées,  non  que  l'or, 
les  pierreries,  les  étoffes  précieuses,  nous  fassent  défaut, 
que  l'art,  si  prodigue  de  beautés,  ait  tu  jusqu'à  pré- 
sent ses  secrets,  mais  qui  nous  rendra  ces  saints  pour 
lesquels  s'étalaient  ces  magnificences?  qui  remplira 
ces  châsses  vides  désormais?. 

Nous  ne  voulons  pas  compter  les  absents,  ils  sont 
trop  nombreux,  mai&  il  nous  sera  permis  de  ne  pas 
noug  attrister  d^piQsuréippnt,  en  pensant,  comptai^t, 
pondérant  ce  qui  poi^ç  restée  et  ce  que  nous  avons  gagné. 

Il  nous  est  resté  des  pnfants  de  l'Anjou,  saint  Flo- 
rent, saint  Regpauld,  saint  Maxenciol  ;  de  ceux  à  qui  le 
diocèse  offrit  une  généreuse  hospitalité,  saint  Méen  et 
saint  Judicaël,  et  lors  de  1^  nouvelle  délimitation  des 
diocèses,  nous  avons  hérité  de  saint  Pierre  II  de  Poi- 

(1)  s.  Paulin.  Potm,,  XXVII^  40. 


—  455  — 

tiers,  de  Robert    d'Arbrissel  et  de   saint  Francairô. 

C'est  de  ce  dernier  que  je  traiterai  dans  cette  étude 
hagiographique,  consacrée  spécialement  à  venger  sa 
mémoire  de  roùblî,  ses  ossements'  de  rindifféréncê,  son 
culte  de  la  tiédeur  inhérente  à  toute  œuvre  lion-en- 
tretenue.  Et,  pour  être  complet  sur  un  sujet  âe  cette 
importance  au  poîiit  de  vue  de  rhagiographiè  diocésaine, 
j'embrasserai  successivement  les  phases  "diverses  soûs 
lesquelles  cette  science  me  présente  saîni  Francàire, 
teHes  que  biographie,  reliques,  culte  pullib  et  prîvé, 
iconographie  et  bibliographie. 

Si  ce  fut  pour  moi  un  honneur,  que  f  a|iprécie  dans 
toute  son  étendue,  d'avoif'  levé  de  terre  le  corps  du 
saint  protecteur  de  Cléré,  c'en  est  un  non  moins  grand 
de  pouvoir  par  des  recherches  spéciales,  travailler  â 
une  réhabilitation  méritée.  Mais  ileât  juste'de  repor^ 
ter  l'initiative  des  démarches  officielles  îusqu*au  digne 
prélat  d^  qui  émanait  la  commission  reçue,  et  que  la 
cause  des  èaints,  qu'il  s'agisse  de  leurs  reliques  ou 
simplement  de  leur  culte,  trouve  toujours  pieusement 
dévoué.    '^  '  •  ♦  .    >i 

«  Qu8B  cum  ita  sint,  ajouterài-jé  avec  un  prince '*dë 
l'Église,  ignoscite  nobis,  omnes  ad  quos  pervenerit 
libellus  noster,  estote  benighi,  neque  nostram  temeri- 
tatem  acriter  i?epreb?mdatis.  S  eaim  vobiç^...,..  longe 
meliùs  instructif  et  doctrinâ  plenius  imbutis,  tenuis 
satis  et  imperfectus  videatur  noster  conatus,  gaudete 
illum  saltem  nobis  profuisse  ad  eruditionem  (1).  » 

(1)  N.  Gard.  Wisi^mao.  Lwtdes  S.  C^rolf  Borromœi,  Londini,  iS6i. 


—  456  - 


I. 


Il  importe,  dès  le  début,  de  bien  préciser  le  nom  de 
notre  saint. 

Or  ce  nom,  dont  le  radical  est  franc,  et  la  termi- 
naison gallo-romaine,  se  rencontre  invariablement  écrit, 
en  latin,  Francarius,  en  français  Fbàngaire,  à  quel- 
qu'époque  que  ce  soit  (1). 

Je  sais  bien  qu'on  peut  m'opposer  les  Martyrologes 
français  qui  écrivent  encore  Frâgaire.  Mais  à  cela  je 
répondrai  péremptoirement  que  cette  forme  vicieuse, 
altérée,  n'a  jamais  existé  en  Poitou  ni  en  Anjou,  et  qu'il 
n'est  nullement  démontré,  malgré  une  confusion  que  je 
combattrai  plus  loin,  que  saint  Frâgaire  soit  le  même 
que  saint  Francaire. 

Le  Père  de  Giry  et  le  chanoine  Bapaillon  ont  pu 
écrire  Franconius,  qui  en  français  ferait  Fraticon  ou 
Franconi;  Thibaudeau  a  même  imprimé  Francorius. 
Mais  cette  double  variante,  que  je  ne  constate  que  deux 
fois,  ne  tire  pas  à  conséquence  et  n'infirme  en  rien  l'usage 
général^  tant  aacien  que  moderne. 

IL 

Les  Bollandistes  distinguent  avec  raison  dans  les 
Actes  des  Saints,  les  acta  priora  et  les  acta  secunda. 

(1)  Texier ,  p.  8S ,  a  écrit  une  seule  fois  Franguaire ,  par  inadver- 
tance sans  doute,  de  même  que  dans  VEpigramma  ad  authorem,  par 
faute  d'impression  bien  probablement,  il  s*est  glissé  divi  Fracarii, 
deux  variantes  typographiques  contre  lesquelles  proteste  tout  le  reste 
du  volume. 


-  457  — 

Malheureusement  nous  ne  possédons  sur  saint  Fran- 
caire  ni  des  Actes  contemporains  ou  à  peu  près  et  par 
conséquent  d'une  autorité  irréprochable,  ni  même  des 
Actes  de  seconde  main,  d'une  date  postérieure,  mais 
néanmoins  d'une  grande  portée  hagiographique. 

Nous  sommes  donc  obligés  de  recourir  à  la  tradition 
locale,  telle  qu'elle  a  été  consignée  à  plusieurs  reprises 
différentes,  et  telle  que  î'ai  pu  la  constater  moi-même 
àCléré. 

Or  cette  tradition,  que  j'accepte  comme  elle  se  pré- 
sente, parce  que  rien  ne  m'autorise  à  en  dénier  la  va- 
leur, affirme  ces  trois  choses  :  qye  .saint  Francaire  était 
seigneur  du  Mureau;  qu'il  y  vé<5ut,  mourut  et  fut  en- 
terré; qu'il  fut  le  père  de  saint  Hilaire,  évêque  de 
Poitiers. 

.Le  Mureau  est  situé  dans:  la  paroisse  de  Cléré  (can- 
ton de  Vihiers),  à  trois  kilomètres  environ  du  bourg.  Il 
se  divise  en  deux  parties  :  le  Haut  et  le  Bas-Mureau.  Le 
Haut-Mureau,  indiqué  aujourd'hui  par  une  ferme,  oc- 
cupe le  plateau  d'une  colline,  au  pied  de  laquelle  coule, 
maigre  filet  d'eau,  le  Layon^  qui  plus  loin  devient  pe- 
tite rivière,  et  qui,  à  sa  source,  sort  de  l'étang  du  châ- 
teau de  Beaurepaire. 

Le  Bas-Mpreau  actuellement  inhabité,  n'est  autre  que 
le  prolongement  du  coteau  qui  avaDce  en  pointe  dans 
la  vallée  et  s'abaisse  graduellement.  Or  cette  pointe  a  la 
forme  d'une  motte,  aplatie  de  manière  à  tracer  l'en- 
ceinte, assez  étroite  et  restreinte,  d'une  habitation, 
dont  il  ne  reste  plus  de  traces  apparentes  sur  le  sol. 
Là,  dit  la  tradition,  était  le  château  de  S.. Francaire. 

Les  mots  importent  peu  dans  la  question  ;  c'est  au 


—  458  — 

fond  même  des  choses  qu'il  faut  aller,  et  voir  quelle 
signification  précise  le  peuple  leur  attache. 

S.  Francaire  était  noble  et  riche,  possédait  des 
terres,  des  troupeaux  et  des  hommes,  faisait  largement 
l'aumône,  avait  une  habitation  distincte  de  celle  de  ses 
colons  et  serviteurs,  vaquait  à  la  fois  aux  travaux  de 
l'esprit  et  à  ceux  de  l'agriculture,  en  un  mot,  occupait 
seul  le  pays  avec  les  siens  dans  une  étendue  de  terri- 
toire qu'il  serait  difficile  maintenant  de  déterminer. 

Qui  ne  voit  là,  dans  ces  vastes  possessions^  dans  l'au- 
torité qui  en  résulte,  dans  céiie' villa  gallo-romaine 
complète,  tout  ce  qui  a  frappé  le  peuple  et  les  choses, 
res,  que,  plus  tard,  la  tradition,  invariable  sur  le  fond, 
mais  mobile  sur  la  manière  de  l'exprimer,  a  désignées 
par  des  noms  modernes,  relativement  à  S.  Franôaire^ 
En  effet,  seigneur  signifie  simplement  homme  riche  et 
puissant,  comme  château  s'interprète  demeure  confor- 
table, et  proportionnée  au  rang  et  à  la  tortune  du  pro- 
priétaire. * 

Que  S.  Francaire  ait  vécu  exclusivement  au  Murean, 
je  le  crois  sans  peine,  d'autant  plus  volontiers  qu'on  se 
tait  partout  ailleurs  sur  le  lieu  présumé  de  sa  résidence 
fixe  ou  passagère. 

Qu'A  ait  donné  le  jour  â  S.  Hilaite,  depuis  évêque 
de  Poitiers,  je  le  crois  encore,  ave?c  toute  la  tradition, 
qui  ne  varie  que  sur  un  point,  à  savoir  où  naquit  ce 
saint  docteur.  Avec  la  tradition  locale,  j'inclinerais  pour 
le  Mureau.  Mais  je  sais  que  plusieurs  localités  reven- 
diquent le  même  honneur,  et  empêchent  par  là  même 
de  résoudre  la  question  qui,  après  tout,  n'est  sérieuse- 
ment discutable  qu'entre  Gléré  et  Poitiers.   Là  pour 


—  «59  - 

moi  n*est  pas  la  question  en  ce  moment  et  je  Pécarte. 

La  paternité  incontestée  de  S.  Hilaire  fixe  Tépoque 
précise  à  laquelle  vécut  S.  Francaire.  Le  fils  étant  mort 
Tan  368,  c'est  au*  iv«  siècle  qiae  nous  reporterons  la  vie 
de  S.  Francaire,  époque  féconde  qui' produisait  en  même 
temps  et  disséminait  sur  le  sol  Sbéili  de  rAflijqu,  S. 
Maxentiol,  S.  Doucelin,  S.  Piorentiî  " 

S.  Française  était^il  chrétien,  lors  de  la  naissance^  de 
S.  Hilaire?  Nous  l'ignorons,  tas  Bénédîciins  de  S.  Maur, 
qui,  en  1693,  »ont  publié  ies  œuviies  de  Tévêque  de 
Poitiers,  ont  essayé  de  nésouéfe  de  problème  historique 
dt  ils  hésitent  à  se^îpTonodder  entre  «un  texte  de  S.  Hi- 
laire lui-même  qui,  dans  son  Xvàiiéi'deia  Trinité,  insi-^ 
niue  la  négative,  tandis  ique  l'affitmative  se  trouve  po^ 
sée'par  Portunat  avec  plus  de  vraisemblance. 

En  présence  de  ces  deux  opinions,^  qui^'»ni  Tune  ni 
K&ulre,  n«e  produisent  une  certitude  complète,  le  choix 
est  iibre,  et  l'on  peut  croire  ou  qiie  S.  Fi^ancaiare,  déjà 
chrétien,  iiïonlqua  au  jeune  Hilaire  les  ^principes  du 
chrîs&inisme,  oii  que  païen  de  naissance  et  d'habitude, 
il  regut  du  docteur  des  Gaules,  lia  grâce  ert  le  bienfait 
de  la  foi. 

Je  n-insiete  pas  trop  stir  tous  ces  détails*,  parce  qu'il 
règiiesurcestemps  reculés  une  obscdrité  pre&que  impé- 
nétrable,» et  que,  dànsTespècé^  l'essentiel  est  de  constater 
la  sainteté  de  S.  Frahcàire  :  c'est  une  question  de  pure 
critique  biographique  que  de  rechercher  s'il -a  été  saint 
plus  tôt  èù  plus  tard;?  ^  i 


—  4flO  — 


III. 


S.  Francaire  fut  inhumé  dans  sa  proprié  té,  un  peu 
au-dessus  de  sa  maison,  sur  le  coteau  du  Mureau. 
L'emplacement  de  la  tombe,  qui,  suivant  l'usage  du 
temps,  devait  être  une  auge  de  pierre,  a  été  maintenu 
jusqu'à  nos  jours  par  un  autel  et  une  croix  de  bois  que 
la  piété  des  pèlerins  renouvelle  chaque  fois  qu'elle 
tombe  de  vétusté.  Je  ne  saurais  trop  féliciter  M.  Cesbron, 
curé  de  Cléré,  de  la  bonne  pensée  qui  lui  est  venue  de 
bâtir  en  cet  endroit  une  petite  chapelle  qui  portera  le 
vocable  de  S.  Francaire,  et  permettra  aux  nombreux 
visiteurs  qui  s'y  rendent  fréquemment,  d'entendre  là 
les  messes  qu'ils  ne  cessent  de  faire  dire  en  l'honneur 
du  saint  confesseur  (1). 

Or  cet  emplacement,  déterminé  seulement  par  la 
tradition  de  la  paroisse,  coïncide  parfaitement  avec  la 
fontaine  de  S.  Francaire  qui  coule,  un  peu  plus  bas, 
sur  les  flancs  du  coteau  et  a  toujours  été  de  la  part 
des  populations  l'objet  d'une  vénération  toute  parti- 
culière. 

A  quelle  époque  le  corps  fut-il  levé  de  terre  et  trans- 
porté du  Mureau  d'ans  l'église  paroissiale  de  Cléré? 

L'épilaphe  de  l'évêque  Jean  dji  Bellay  répond  que 
cette  élévation  et  première  translation  solennelle  eurent 
lieu  en  1470  : 

«  Magna  cum  devotione  coUuit  aanctum  Hillarium, 
Pictavensem  Ëpiscopum,  et  sanctum  Francarium,  ejus 

(1)  Grandet  dit  qu'il  y  avait  autrefois  une  chapelle  en  cet  endroit. 


—  m  ^ 

Patrera,  cujus  reliquiae  tempore  sni  Pontificaios,  anno 
miUesimo  quadringentesimo  septuagesimo  translataB 
sunt  e  pago  du  Mureau  dictae  parochiae  Sancti  Hillarii 
de  Claire,  in  eccle^iam  dicte  parochiaB,  ubi  plurima 
fiunt  miracula  (1).  » 

Le  prieur  Texier  qui  eut  en  main  la  généalogie  de 
la  maison  du  Bellay,  commente  en  plusieurs  endroits 
de  son  rarissime  opuscule,  ce  passage  si  précieux  et 
significatif  de  Tépitaphe  qu'il  rapporte.  Je  lui  laisse 
volontiers  la  parole. 

«  S.  Francaire,  dit-il, , estant  décédé,  son  corps  fut 
mis  dans  un  tombeau  de  pierre  dure,  au  lieu  du  bas 
Mureau,  en  ladite  paroisse  de  Claire....  où  le  corps  de 
S.  Francaire  a  esté  par  l'espace  de  plus  d'unze  cens 
ans,  et  d'où  il  fut  transporté^  il  y  a  environ  cent  soi* 
xante  et  dix  ans,  du  tems  de  Jean  du  Bellaiy,  évesque 
de  Poitiers,  et  abbé  de  S.  Florent,  par  la  diligence  et 
libéralité  de  Louis  de  la  Haye,  lors  seigneur  de  Passa- 
vant (2),  et  de  Jeanne  d'Orléans  sa  femme.....  sous  le 
règne  de  Louys  XI,  et  fut  ledit  corps  de  S.  Francaire 
mis  sur  le  haut  dii  grand  autel  de  l'église  parroissiale 
de  Claire...;.  On  ne  peut  rapporter  asseurément  le  jour 
de  cette  première  translation,  d'autant  qu'oa  n'a  pu 
trouver  le  procès-verbal  d'icelle  (3).  > 

;  .  1  .         .         . 

(i)  Texier,  p.  78.  —  Ce  texte  est  emprunté  â  une  généalogie  de 
la  maison  du  Bellay ,  que  Texier  avait  écrite  sur  les  manuscrits  que 
lui  avait  légués,  à  sa  mort,  Tabbé  deSavigny.  —  Trincant,  qui  a 
écrit  au  xvii^  siècle  «  THistoire  généalogique  de  la  maison  du  Bellay,  » 
ne  dit  rien  de  la  dévotion  des  seigneurs  de  ce  nom  envers  S.  Francaire. 

(2)  Passavant,  canton  de  Vihiers. 

(3)  Texier,  p.  i,  5.  Voir  aussi  p.  73. 


Le  même  chroniqueur  ajoute  que  le'gfand  nombre 
de  miracles  opérés  au  Murëâu  et  continués  à  Cîèré , 
décida  la  faiftille  du  Bellay  et  les  seigneui's  de  Passa- 
vant à  rendre  au  corps  de  S.  Francàire  lés  honneurs 
qu'il  méritait.  Voici  comment  il  s'exprime  aiix  pages 
80  et  81. 

a  Non-seutement  les  seigneurs  et  les  dames  du  Bel- 
lay ont  porté  une  grande  dévotion  à  saint  Hilaire  et  à 
saint  Francdire,  son  père,  et  ont  fort  honoré  le  lieu  de 
leur  naissance,  mais  aussi  les  seigneurs  et  damés  de 
Passavent,  sous  le  règne  de  Louys  VII^,  il  y  à  plus  de 
cinq  cens  cinquante  ans,  et  Ameline  du  Bellay,  sa 
femme,  sœur  de  Girault  du  Bellay,  troisiesme  du  nom, 
seigneur  de  Montreuil-Bellay,  grqnd  sénéchal  de  Poic- 
tou,  et.  favori  du  roy  Louis  Vil®,  lesquels,  pendant 
qu'ils  faisoîent  leur  demeure  à  Passavant^  alloient  sou'- 
ventavec  une  graqde  dévotion,  au  lieu  du  Bas-Mureau, 
pour  visiter  le  tombeau  de  saint  Francaire,  père  fle 
saint  Hillaire ,  à  cause  des  miracles  qui  s'y  faisoient 
ordinairement',  et  Louis  de  la  Haye,  ^m  étoil  aussi  sei- 
gneur de  Passavant,  nous  le  règne  de  Louys  XK  envi- 
ron'Tan  imil  quatre  ceils  soixante  et  dix,  et  Jeanne  d'Or- 
léans, sa  îèmrae,  sœur  de  François  d'Orléans,  comte 
du  Dunois  et  de  Loûguevilte,  et;  seigneur  de  Montreuii- 
Bellay  (1),  de  Tancarville  et  de  Mongoumery,  grand 
chambellan  et  gouverneur  de  Normandie,  lesquels  aydè- 
rent  de  leurs  moyens  à  faire  la  première  translation 
des  reliques  de  saint  Francaire.  » 

Il  m'est  difficile  d'accorder  avec  ces  textqs  si  formels 

(1)  Montreuil-Bellay,  chef-lieu  de  canton  (Maine-et-Loire). 


et  puisés  afix  sources  originales;  le  passage  tant  dé 
fois  cité  de  Jean  Bouchet,  Failnaliste^t' Aquitaine)  qui 
reporte  vers  l'année  4500  la  découverte  du  corps  da 
saint  Francaire.  Je  copie  ce  texte  important  dans  les 
deux  éditions  gothiques  qui  soiit  à  la  bibliothèque  de 
la  ville  de  Poitiers  et  qui  datent  de  1525  et  4591,  au 
verso  du  folio  ix  et  au  folio  x. 

a  Quoyqu'il  en  soit  puis  (vingt  ans  en  ça  en  l'église 
parrochialle  de  saiiiet  Hylasre  de  Glesse  près  Mortaigne 
en  Poictou  furent  trouvées  les  sépultures  de  son  père 
nommé  Francarias  et  aussi 'd«  sa  mère,  géâs  nobles 
et  moyennement  ricbes»  » 

De  deux  choses  l'une  :  ou  il  faut  accepter  ou  il  est 
sage  de  rejeter  ce  ténïoignage.  Si  je  l'accepte  j  j'ad- 
mets, non  plus  une  découverte,  mais  une  reconoais- 
sance  du  sépulcre,  faille  dans  Téglise  raéole  de  Glébé, 
en  4503,  vingt^deux  ans  avant  Fimpression  de  la  pre^ 
mière  édition  des  Annales.  Si  au  contraire  ce  témoi«^ 
gnage  me  parait  suspect ,  comme  tant  d'autres  rapt' 
portés  par  cet  historien  peu  scrupuleux,  j'ai  à  fournir 
les  preuves  de  ma  négatioA'  et  à  contrôler  les  alléga- 
tions de  mon  opposant. 

Bonchét  parle  d'une  sépulture^  comme  s'il  s'agissait 
non  pas  de  l'église  de  Cléré^  mais  du  Mureau.  Or.  ce 
sépulcre,  selon  lui,  devait  être  déposé  dans  la  terre  ; 
opinion  insoutenable,  puisqu'il  était  autdessùs  du  sol, 
derrière  le  grand  autel,  dit  Texier,  qui  l'y  a  vu  en 
4644. 

Bien  plus,  Bouchet  laisserait  entendre  que  saint  Fran- 
caire et  sa  femme  furent  en^ii&iii^&dans  l'église  de  Cléré, 
affirmation  contraire  à  la  tradition,  et  de  plus^  dans 


—  464  — 

l'élévation  de-terre  opérée  en  1470,  il  n'est  fait  mention 
que  d'un  seul  corps,  à  Texclusion  de  celui  de  la  mère 
de  saint  Hilaire,  qu'aucun  culte  spécial  n'a  jamais  ho- 
noré. 

Ce  n'est  que  dans  l'édition  de  4644  que  je  lis  Claire 
près  Passavant^  au  lieu  de  Classe  près  Mortaigne,  erreur 
qui  me  ferait  croire  que  la  phrase  tout  entière,  écrite 
sur  ouï-dire  et  comme  en  passant,  ne  mérite  pas  qu'on 
y  ajoute  foi,  ou  exige  tout  au  moins  qu'on  attende  les 
preuves  qui  doivent  la  corroborer. 

Je  le  dis  à  regret  :  e'est  cette  phrase  suspecte  qui 
seule  a  fait  fortune  et  a  rais  en  relief  le  nom  de  saint 
Francaire,  et  qu'à  l'envi  tous. les  historiens  et  hagio- 
grapbes  se  sont  plu  à  répéter  comme  mentionnant  un 
fait  certain.  ' 

La  légende  a  toujours  caché  en  elle-même  un  fonds 
de  vérité.  Ici,  sous  dès  termes  trompeurs,  paraît  un 
document  irrécusable,  qui  est  celui  de  la  translation, 
m^is  célébrée  trente-cinq  ans  plus  tôt. 


IV. 


Une  seconde  translation  du  corps  de  saint  Francaire 
ulans  uneichâsise  neuve  eut  lieu  le  28  avril  1641,  avec 
tant  de  pompe  et  d'éclat  que  la  population  de  Gleré 
crut  devoir  en  perpétuer  le  souvenir  par  une  fête  anni- 
versaire, qui,  chaque  année  encore,  attire  à  l'église 
les  pieux  fidèles  du  bourg  et  des  environs. 

Texier,  qui  a  pu  transcrire  les  pièces  officielles  sur 
les  originaux  mêmes,  nous  en  a  laissé  une  copie,  qu'il 
ne  sera  pas  inutile  de  irèproduire  ici,  car  la  rareté  de 


—  4b5  — 

son  opuscule  permet  de  les  considérer  presque  comme 
inédites^  et  de  plus  elles  attestent,  en  Êiveur  du  corps 
que  nous  possédons  actuellement,  tradition  certaine  et 
culte  continu  (1). 

Ces  trois  documents  sont  :  une  autorisation  accordée 
par  l'évéque  de  Poitiers  pour  la  bénédiction  de  la 
châsse  et  la  translation  des  reliques  (39:  août  16^);  un 
renouvellement  de  cette  autorisation  (26  mars  164*1) 
et  le  procès-verbal  de  la  cérémonie  de  la  translation 
(28  avril  1641). 

Permission  de  Monseigneur  de  Poictiers  pour  faire  la 
translation  des  Reliques  de  S.  Francaire  (2). 

«  Nous,  Henry-Louis  Chastaigner  de  la  Roche-Posay, 
par  la  misération  divine,  Evesque  de  Poictiers,  per- 
mettons à  vénérable  maistre  Louys  (3)  prestre,  prieur 
d'AlIonne,  de  faire  faire  une  châsse  pour  mettre  les 
Reliques  de  S.  Francaire,  qui  sont  en  la  Table  (4)  du 
Grand  Autel  de  l'Église  de  S.  Hillaire  de  Claire,  en 
nostre  diocèse,  et  de  bénir  ladite  châsse  (5),  ladite  bé-^ 

(1)  ff  De  sacrorum  ossium  identitate^  et  quidem  non  levis  sed 
solida,  non  interrupta  sed  continuata.  »  Bened.  XIV,  t.  IV,  p;  236. 

(2)  Texier,  p.  14,  15. 

(3)  Sic,  a^ec  le  seul  nom  de  baptême,  sans  le  nom  de  famille,  au 
moins  selon  la  2*  édition. 

(4)  L'évéque  veut  dire  retable  ou  cotUre-table ,  car  il  est  certain 
que  la  châsse  de  pierre  n*était  pas  enfermée  dans  le  tombeau  de 
l'autel.  Sur  la  disposition  de  ces  châsses,  voir  VioUet-le-Duc.  au  mot 
Autelf  dans  son  Dictionnaire  d'architecture. 

(5)  La  bénédiction  des  châsses  et  reliquaires  est  énumérée  parmi 
les  bénédictions  épiscopales,  c'ést-à-dire  qu'il  appartient  à  l'évéque 
seul  de  la  donner  :  il  ne  peut,  à  cet  effst,  déléguer  qui  que  cei  smt, 


l 


—  466  - 

nédiction  faite,  et  lesditea  re1iques>  incluses  en  icelle, 
de  la  posser  et  mettre  en  ladite  église  en  Keu'  à  ce 
propre,  et  convenable  pour  lesdîtes  Relîqups  y  estre 
vénérées  par  les  fidèles  chrestiens.  Donné  et  fait  à 
Dissay  (1),  le  vingt-nenfiesme  jour  d'aonst  mil  six  cens 
vingt  et  quatre.  Signé  :  Louys,  Evesque  de  Poigtiers. 
Et  plus  bas  :  Par  mondit  seigneur  Evesque,  Mighelet.  > 

Confirmation  de  ladite  permisHon, 

c  Nous  confirmons  ladite  permission.  A  Poictîers, 
le  vingt  sixiesme  mars  mil  six  cens  quarante  et  un. 
Signé  :  Henry  Louys,  E.  de  Poigtiers.  > 

Procès  verbal  de  la  Translation  des  ReHques  de 
S.  Franoaire^  pèr$  de  S,  JSHaire  (2). 

«  Aujourd'huy  dimanche  vingt-huictiesme  avril  mil 
six  cens  quarante  et  un,  nous  Louys  Texier,  prestre, 

sans  induit  apostolique.  —  Un  décret  de  la  sacrée  Congrégation  des 
Rites  »  en  date-  du  7  mars  i667  «  compte  patinî  les  fimetiêtu  épisco- 
pales  la  translation  des  saintes  Reliques  :  f  Functionem  in  transla- 
tione  Eeliquiarum  iMuyierari  intêr  functiones  episoopales.  »Ckirdel£ni. 
Décréta  S.  C.  Rituum,  t.  I .  p.  295. 

(\)  Les  évéques  de  Poitiers  avaient  leur  chétoau  à  Dissay,  entre 
Poitiers  et  Ghâtellerault.  ( 

(2)  Texier,  p.  16  et  suiv.  —  M.  Rédet.,  arobiviste  de  la  Viemie, 
mij^crit  à  la  date  du  6  juillet  1861  :  «  D'après  Tindication  que  tous 
m'avez  foumie,  j'ai  trouvé  dans  les  archives  du  cbapitre  de  S.  Hilaire 
)e  prQpèfi*<verbal  de  la  tfanslatioa  des  reliques  de  S.  Francaire^  en 
date  du  28  août  1641,  signé  :  Louys  Texier;  par  mon  dit  sieur  com- 
missaire :  Trahit.  Il  remplit  sept  pages  et  demie  de  papier,  de  29 
à  3^1  lignes  .chacune.  Toutefois,  ee  n*est  pas  la  minute,  les*  noms  des 
témoins  y.étant  seulement jebftés^  »«-  Dom  Fonteneau,  au  tome  LI, 


—  467  — 

prieur  d'AlloniDe;  (l),i  I^^encié  ^g.clroiieits,  co)9[imis8aire. 
en .  Q^tte  <  pai^tje .  d'Uluatri^sime .  ett  {lévérendiseicQ e  MoiVi 
sçigneuî?.  Çenry^Lovya  Chastaigner  de!  la  Rocbeposay^ 
Évesque  de  PodcUen^^  suivaEt  ssl  commission  et  mande^i* 
ment  du  vingt  et  neufiesra^  aonet,  mit  six  cens  vingts- 
quatre,  signé  Heîîb.'y  iQUYS,'  Evesque  de  Poictiers  :  et 
plus  haSf  par  comtnGmdemev^t  de  mondit  seigneur  Eves-* 
que,  Mxghelet,  et  de  1^  confirmation  d'icelle^  tâcrite 
de  1^  main  de  mondit  Seâgnaur  du  vingt-sixiasme  de 
migf3  mil  si^  ce9s  quari^ate^et  un,  damier  paasé^  dt 
sigiK^,  Heiv ny.  l^ouYS  Ev.pë  I?oiqT»»s.,;  nous  ^ommea  bpans- 
portes^  en  l'Église  parocbiale  de  S»  Hillaire  de  Glaire, 
psès  Passav2|nt,i  dudict  diooQSfe  dç  Poictiiers,  pouB  bénir 
p^r  la  pei;missioQ  de  ^autborit^  de  ;mdndit  seigoeur 
Eyesquft  de  Poicliers,  une  châsse,  neufve  donnée  par 
M,oi)i?ieur  de  iiezeau,  Cjonseiller  du  Roy- en  ses  conseils^ 
d'Eala,^  et  pflvé,  et  par  M.  Nicolas  le  Febvre  de  Lezeau,- 
son  filsi.  prieur  commeîidateire  du  prieuré  de  Glaire, 
et  pour  y  transÉÔT^r  eti  mettre  les  Reliques  de  sainct' 
Frajîcaire,  confee^eur,  père  d^  sainct. Hitaire  Evesque 
de  PQictiçTSj/^stapt  daji^  une  cllâsse  pu  tombeau  de 
pierre  dure,   sur  le  hault  du.: grand  Autel  .de  ladite^ 
Église  parochiale  de  ffairé,  oy.  estans,  auxions  prenaiè- 
remept  fait  une  t^riefve  exhortation  au  peuple  snr»  leô. 

p.  461-465,  de  sa  volumineuse  collection  manuscrite  de  Mémoires,,,, 
pour  servir  à  l'histoire  du  Poitou  (Bibl.  de  la  ville  de  Poitiers) ,  a 
inséré  une  copie  de  ce  procès-verbal,  sous  ce  titre  :  «  Procés-verbal 
de  la  translation  des  reliques  de  S.  Francaire,  père  de  S^  Hilaire, 
d'une  vieille  châsse  dans  une  nouvelle.  An  4^41, 28  avril.  »  Le  savant 
Bénédictin  a  ajouté  :  «  Nota.  L'original  de  cette  pièce  est  dans  les 
archives  de  Téglise  de  S.  Hilaire-le-Grabd  de  Poitiers  ». 
(i)  Allonne,  arrondissement  de  Saumur. 


-  468-^ 

louanges  de  S.  Francaire  et  sur  l'obligation  que  nous 
avons  d'imiter  ses  vertns,  sa  piété  et  sa  charité,  pour 
participer  à  sa  gloire,  et  sur  le  sujet  de  la  translation 
de  ses  sainctes  Reliques.  Après  la  prédication,  nous 
avons  pris  TAube,  FEstolle  et  le  Fanon  (i)  et  une 
Chappe  pour  procéder  à  la  bénédiction  de  ladite  châsse 
neufve,  que  nous  avons  fait  mettre  prés  le  grand  Au- 
tel)  sur  une  table  couverte  d'une  nappe  et  dëceminent 
ornée,  avec  des  cierges  que  nous  avons  fait  allumer  à 
chacun  costé  d'icelle,  en  présence  de  vénérable  et  dis- 
cret maistre  Michel  Benoist,  prestre,  curé  dudit  Glaire, 
de  noble  et  discret  M.  Artus  de  Bônchamps,  prestre; 
chanoine  en  VÉ^flise  d'Angers  et  prieur  de  Viers  (9),  dé 
M.  Jean  Blancheteau,  prestre,  curé  de  la  parroisse  de 
S.  Martin  des  Cercueils  (3)  sous  Passavant ,  maistre 
René  Rabin ,  prestre  habitué  audit  ^Uairé  ,  M.  Gille 
Ledra,  prestre  habitué  audit  Passavant,  M.  Jean  Rallier, 
vicaire  dudit  Claire,  frère  Pierre  du  Moulin,  prestre, 
religieux  au  cojuvent  des  frères  Prescheurs,  à  Touars, 
M.  Eustache  Boivin,  chapelain  de  la  Chapelle  S.  Nico- 
las, desservie  en  l'église  parrochiale  de  S.  Nicolas  de 
Viers,  de  Jacques  de  la  Beraudière,  escùyer,  sieur  de  la 
Coudre  et  de  Maumusson,  René  Favineâu,  sieur  de  la 
Coudfaye  et  de  Vie,  de  M.  Charles  Gaudays,  advocat  à 
Sauraur,  seneschal  du  sieur  prieur  de  Glaire,  d'Olivier 

(1  )  Dans  les  diocèses  de  Poitiers  et  d*Ângers  on  suivait,  â  cette  époque, 
une  liturgie  propre,  ])a9ée  sur  le  Romain  et  dite  pour  cela  ad  Romani 
formoffi.  Au  Romain,  le  famn,  qui  ne  se  prend  qu'avec  la  chasuble, 
serait  de  trop  pour  cette  bénédiction  faite  avec  une  chape. 

(2)  Vihiei'S  (Maine-et-Loire). 

(3)  Les  Cerqueux-sous-Passavaat,  canton  de  Vihiers. 


—  469  — 

Hùrtault,  advocat  à  Tours,  procureur  fiscal  de  Nicolas 
Trahit,  notaire  royal  audit  Saumur,  greffier ^  Jean 
Ângibaut,  procureur  spécial  dudit  sieur  prieur,  Antoine 
Georgeau,  Jean  Brunet,  advocats  audit  Passavant,  Louis 
Poirier,  fermier  dudit  Passavant,  Joseph  Voilage  et 
Pierre  Marteau ,  fermiers  dudit  prieuré  de  Claire,  et 
d'un  grand  nombre  d'habitants  de  ladite  paroisse  de 
Claire  et  des  paroisses  circonvoisines  sbubsignez,  qui 
ont  assisté  tant  à  la  bénédiction  de  ladite  nouvelle 
châsse  qu'à  la  translation  desdites  reliques  et  à  toutes 
les  cérémonies  déclarées  cy-après.  En  présence  desquels 
nous  avons,  de  l'authorité  de  mondit  seigneur  Évesque 
de  Poictiers,  bény  ladite  nouvelle  châsse,  selon  la 
forme  contenue  au  Pontifical  romain,  et  après  avoir 
dit  les  oraisons  et  bénédictions  contenues  audit  Ponti- 
fical, avons  aspergé  d'eau  béniste  ladite  châsse.  Ce 
fait,  estans  assistez  de  six  prestres,  avec  l'aube,  l'es- 
toUe  et  la  dalmatique,  sommes  allez,  en  forme  de  pro- 
cession, quérir  la  vieille  châsse  de  pierre,  où  sont 
les  reliques  dudit  sainct  Francaire,  que  nous  avons 
descendiies  dudit  lieu  où  estoit  ladite  châsse  et  fait 
mettre  près  ladite  châsse  neufve  par  nous  béniste,  près 
ledit  grand  Autel  et,  à  la  veiie  dudit  curé  de  Claire, 
desdits  prestres  et  autres  assistants  cy-dessus.  desnom- 
mez, avons  ouvert  ladite  vieille  châsse,  où  sont  les  Re- 
liques dudit  S.  Francaire^  lesquelles  Reliques,  après 
les  avoir  encensées  par  trois  fois,  nous  avons  fait  voir 
audit  curé,  prestres  et  autres  assistants,  pour  en  rendre 
tesmpignage  en  ce  présent  nostre  procès-verbal,  et  en 
leur  présence  avons  tiré  lesdites  Reliques  de  ladite 
vieille  châsse  de  pierre,  et  mises  et  posées  dans  ladite 

REP.   ARC.  34 


—  470  — 

châsse  neufre,  les  arrangeant  décemment  et  les  enve- 
loppant d'unvoile  de  taffetas  blanc»  et  avant  que  fermer 
ladite  châsse,  avons  mis  dans  icdle  un  escriteau  (i) 
contenant  l'éloge  et  la  translation,  comme  s'ensuit, 
signé  de  nous. 

c  Âd  Dei  optimi  maximi  gloriam.  Die  Dominica  vige- 
sima  octava  Aprillis,  anno  Domini  millesimo  sexcente- 
simo  quadragesimo  primo,  hsB  venerandad  reliquiae  cor- 
poris  sancti  Francarii,  confessons,  de  vetusto  loculo, 
solemni  ritu  translatée  sunt  in  banc  thecam  seu  capsam, 
solitis  EcclesiaB  precibus  benedictam,  per  me  indignum 
servum  Dei  Ludovicum  Texier,  praasbiterum,  in  utro- 
que  jure  licenciatumi  Priorem  commendatarium  de 
Alonna,  ex  mandato  lUustrissimi  ac  Reverendissimi  Do- 
mini D.  Henrici  Ludoviqi  Ghastaigner  de  la  Roche- 
Posay,  Episcopi  Pictavîensis,  Quam  quidem  capsam 
lUustrissiraus  Dominus  Nicolaus  le  Febvre  deLezeau(2), 
interiore  Régis  consilio  consiliarius,  et  Magister  Nice- 


(1)  Je  n'ai  point  retrouvé  cet  escriteau  ni  dans  la  châsse  ni  avec  les 
ossements. 

(2)  De  la  Chenaye-Desbois ,  dans  son  Dictionnaire  de  la  iwblesse, 
t.  I,  p.  292-293;  t.  V«I,  p.  695;  t.  X,  p.  530;  t.  Xni,  p.  381, 
dit  que  LexeaU  ou  \ii'Mctie*-Le»eau  est  mne  terre  seigneuriale  de 
Normandie ,  érigée  en  ms^quisat  par  lettres  du  m^is  de  jvilWt  4693. 
Il  ajoute  :  f  Nicolas  Le  Febvre ,  seigneur  de  Lezeau ,  'Conseiller  au 
grand  conseil ,  puis  au  parlement,  Président  des  Requêtes  du  Palais, 
ensuite  maître  des  Requêtes ,  mort  doyen  des  Conseillers  d'Etat 
le  1^  novembre  1680,  âgé  de  plus  de  ceut  ans.  Il  avait  épousé  Marie 
Hinselin,  morte  en  mars  1678...  dont  il  eut  (5  enfants)  :...  ?.  Nico- 
las t  Chanoine  de  Téglise  de  Paris,  abbé  de  Glaire-Footaiiie  (au  dioc. 
de  Chartres,  0«  S.  A.),  mort  en  décembre  1677.  » 


-^  m  — 

laas  le  Febvre  ée  Lezeau  (1),  ejus  filius»  prior  com- 
idendatariifô  prjioratvis  hujus  Eccleside,  dono  dfiderunt.  j> 
»  Avec  laquelle  inscriptiou  mus  avons  aussi  rois  daas 
ladite  abâs&e  nue  coppijB  en  parphemin/  d^umeni  col- 
lationnée  par  deux  notaires  apostoliques^  demevirant  à 
Saumur,  de  la  commission  de  mondit  seigoeuf?  de  Poic- 
tiers,  du  vingt-neufiesme  aoust  mil  six  qens  vint  et 
quatre  ^  sigtiée  Henry  Louys  ,  ^vesque  de  Poigtiers., 
et  plus  bas,  par  le  4xmmandement  de  mondit  seigneur, 
MiGHELET ,  e4  de  la  confirmation  d'icelle  »  du  vingt 
sixiesme  mars  mil  six  cens  quarante  et  un,  dernier 
passé.  Ce  fait,  nous  avons  fermé  ladite  cbâsse  neufVe, 
où  sont  lesdites  Reliques  et  avant  que  la  lever,  V^iuripns 
encensée  par  trois  fois  et  posée  sur  ladite  table,  su,r 
des  brancars  à  quatre  bras,  et  a  esté  ladite  châsse 
portée  en  procession,  à  Tentour  du  cimetière  de  ladite 
Église  (2),  par  deux  prestres,  les  quatre  autres  portant 
le  Poisle  (3)  sur  ladite  châsse^  ayant  l'Aube,  l'Estolle 
-et  la  Dalmatique,  avec  des  cierges  et  des  torches  allu-- 
mées,  nouSy  commissaire  susdit^  suivant  après  lesdits 
prestres,  avec  l'Aube,  l'Estolle  et  la  Chappe ,  cbantaps 
des  respôns  dudit  Sajuact,  et  la  procession  faite,  avons 

(i)  t  Nicolas  Le  Febvre  de  Leieatt,  <>omêft  consistorianus,  abbâs 
anno  im.  »  GaU.  Chrittiana,  P^siis,  1656,  t.  IV,  p.  265. 

(2)  1.6  cimetière  ^  qui  devait  être  plus  étendu  autrefois ,  est  main- 
.tenant  séparé  de  Ta^bside  de  Téslise  par  un  chemin. 

(3)  La  S.  Congrégation  des  Rites  a  plusieurs  fois  condamné  l'em- 
ploi du  dais,  pouf  les  processions  des  saintes  Reliques ,  entt^dutres 
le  23  mars  '1686',  par  ce  décret  :  «  An  Reliquiae  sanctorum ,  quiie 
deferuntur  in  processionibus  per  civitates  et  oppida,  debeant  deferri 
sub  baldachino?  —  Négative.  »  Gardellini,  t.  IfT^  p.  162. 


—  472  — 

chanté  TOraison  dudîct  Sainct,  et  avons  fait  mettre 
ladite  châsse  près  ledit  graïkl  Autel,  sur  ladite  table, 
décemment  ornée,  et  après  nous  avons  dit  la  Messe 
solennelle  de  l'Office  dudîct  Sainct,  encensé  l'Autel  et 
lesdictes  Reliques,  tant  au  commencement  de  la  messe 
qu'à  rOfibrtoire,  et  la  Messe   dite,  nous  avons   fait 
mettre  ladite  èhâsse  sur  ledit  grand  Autel,  avec  des 
cierges  allumez  de  èhàcun  costé,  jusqu'à  Vespres,  qui 
ont  esté  aussi  chantées  de  l'office  dudict  Sainct,  les- 
quelles estant  dites  et  tous  les  luminaires  estant  allu- 
mez, nous  avons  derechef  encensé  par  trois  fois  ladite 
châsse,  qui  a  esté  portée  solennellement  au  hault  du 
grand  Autel  de  ladite  Église,  où  nous  l'avons  posée  en 
présence  desdits  prestres  et  assistans,  dont  nous  avons 
dressé  nostre  procès-verbal,  que  nous  avons  signé  et 
fait  signer  auxdits  assistans  cj-dessus  desnommez,  du- 
quel |xrocès-verbal  nous  avons  donné  audit  sieur  Curé 
une  grosse  en  parchemin  pour  estre  mise  aux  archives 
de  ladite  Église,  signée  de  nous  et  dudit  Trahit,  cy- 
dessus  desnomraé,  que  nous  avons  commis  nostre  se- 
crétaire pour  signer  avec  nous  ladite  grosse,,  avec  les 
coppies  de  nostredit  procès-verbal,  fait  les  jour  et  an 
que   dessus.   Ont  signez  en  la  minutte   avec   nous, 
Mw  Benoist.  de  Bonchamps,  R.  Blancheteau,  Rabin, 
R.  Agaisse,  Ruillier,  F.  P.  Dumoulin,  G.  Boivin,  Jacques 
de  la  Beraudière,  J.   Angibault,   Bergeau,   J.  Brunet, 
Gaudais,  Hurtault,  Trahit,  Vigner,  F.  Gaillard,  G.  Lo- 
geais, Bouestault,  Panneau,  P.  Avoleau^  et  J.  Ballago. 
La  grosse  est  signée  Louis  Texier  et  N.  Trahit.  » 


~  478  — 


V. 


La  châsse  bénite  en  1 6Ai ,  par  le  prieur  d'Allonne  et 
offerte  à  S.  Francaire  par  les  deux  Nicolas  de  Lezeau, 
dont  un  était  prieur  de  Cléré,  existe  encore  à  la  cure 
de  ce  bourg. 

Son  style  concorde  parfaitement  avec  la  date  qui  lui 
est  assignée,  et  ses  vastes  dimensions  sont  proportion- 
nées aux  nombreux  ossements  qu'elle  contenait.  En  effet, 
elle  mesure  en. longueur  0,75  c. ,  en  hauteur  0,35  et 
0,43  c.  en  profondeur.  Le  toit,  qui  la  couvrait  et  lui 
donnait  la  forme  d'une  église,  a  disparu,  sans  qu'il  ait 
été  possible  de  le  retrouver. 

En  bois  menuisé,  ainsi  que  l'indique  le  procès-verbal, 
cette  châsse,  qui  porte  encore  des  traces  de  peinture 
et  de  dorure,  se. compose  de  deux  grands  côtés  et  de 
deux  petits. 

La  face  principale  se  divise  en  trois  parties  :  un  sou- 
bassement continu,  une  suirface  percée  de  trois  niches 
que  séparent  des  colonnettes  et  un  entablement  ar- 
morié, égayé  de  rinceaux  jaunes  sur  fond  bleu.  Des 
niches ,  une  seule  est  cintrée  à  son  sommet  ;  les  deux 
autres  ont  leur  linteau  horizontal  aâoiorti  en  fronton. 
Les  statuettes  d'anges  ou  de  saints  qui  les  ornaient  ont 
été  enlevées. 

L'écusson,  sommé  d'un  casque  à  lambrequins  flot- 
tants, se  blasonne  :  d!  azur  y  au  chevron  d'or  y  accompagné 
de  trois  iris  de  même  sur  une  tige  d'argent,  que  je  crois 
de  Lezeau,  quçique  je  lise  dans  le  Dictionnaire  de  la 
Chenaye,  t.  XIII,  p.  381,  387  : 


—  474  — 

c  Les  seigneurs  de  Lézeau  ont  pris  les  armes  et  li- 
vrées des  Le  Fevre  d'Eaubonne  et  d'Orraessou....  La  fa- 
mille de  MM.  Le  Fevre  d'Ormesson  porte  pour  armes  : 
à  trois  lys  d'argent,  feuilles  et  tiges  dé  sinople.  > 

La  face  postérieure  est  identique  à  la  précédente, 
sauf  une  légère  différence  au  soubassement,  peint  de 
cartoticbes  fleuris  et,  au  milieu,  de  deux  palmes  croi- 
sées. 

Un  des  petits  côtés  a  son  entablement  armorié  et  une 
tulipe  au  naturel  dans  une  niche  aveugle.  La  face,  qui 
lui  fait  vis-à-vis,  porte  une  branche  de  rose  et  au  sou- 
bassement une  guirlande  feuillagée  et  fleurie. 

Des  quatre  écussons  peints  sur  la  châsse  deux  sont 
sommés  du  casque  seigneurial  ,  les  deux  autres  sont 
adossés  à  un  bourdon  prieural  posé  en  pal,  pour  faire 
souvenir  de  ses  deux  donateurs,  Tun  conseiller  d'Etat  et 
seigneur  de  Lezeau,  l'autre  prieur  de  Cléré. 


VL 


Au  xviiie  siècle,  un  os  de  S.  Francaire  fut  extrait  de 
la  châsse  placée  au-dessus  du  grand  autel  et  fermée  de 
toutes  parts,  pour  être  mis  dans  un  reliquaire  en  bois 
sculpté  et  doré  d'un  style  élégant,  et  exposé  sans  cesse 
à  la  vénération  des  fidèles,  dans  la  chapelle  de  S.  Fran- 
caire. L'inscription  sur  parchemin  qui  authentiquait 
celte  relique,  porte  : 

Saint  Francaire,  cpnfesseur. 

L'inventaire  général  des  reliques  du  diocèse,  auquel 
je  donnai  tous  mes  soins  comme  custode  des  saintes  R6- 


—  475  — 

iiques,  m'amena  à  constater  la  présence  d'un  ossement 
de  S.  Francaire,  en  dehors  de  l'église  de  Gléré. 

Une  parcelle,  si^ns  authentique,  existait  au  presby- 
tère delà  Tourlandry.  Elle  provenait  d'un  ossement  con- 
servé à  Brigné,  et  avait  été  détachée,  sans  autorisation 
préalable  de  l'Ordinaire,  à  une  époque  assez  rapprochée 
de  nous. 

J'écrivis:  à  M-  le  curé  de  Brigné  pour  être  renseigné 
sur  la  nature  et  l'authenticité. de:  cet  ossement.  Voici 

» 

la  réponse  que  j'en  reçus,  à  la  date  du  12  juillet  1859  (1  ): 
.  «  Monsieur  l'abbé ,  j'ai  reçu,  hier^  votre  lettre  du 
10  épurant  relative  aut  reliques  des  SS.  Matburin  et 
Francaire.  C'est  moi,  sans  doute,  qui  ai  délivré  celles 
qu'on  vous  a  remises.  Mais  je  n'ai  pas  trouvé  ombre 
d'authentiques,  quand  je  suis  arrivé  à  Brigné,  il  y  aura 
26  ans,  le  25  août  prochain. 

j>  Le  reliquaire  où  elles  se  trouvaient  était  un  bras, 
avec  une  main,  coupé  au  coude.  Au  milieu  du  bras 
en  avant,  était  une  espèce  de  niche,  dans  laquelle  il  y 
avait  deux  os  assez  considérables  ;  sur  l'un  était  écrit  : 
saint  McUhurtn,  et  sur  l'autre  :  sairU  Francaire  ;  cette 
niche  était  ferraéepar  un  verre  collé.  Mes  paroissiens 
m'ont  dit  qu'ils  avaient  toujours  vu  ce  bras  sur  les  de- 
grés du  maître:  autel,  auprès  du  tabernacle. 

»  li&^  Pa^ysant  étant  venu  à  Brigné,  je  lui  montrai  ces 
reliques,  et  sur  mon  affirmation  qu'il  n'y  avait  pas  d'au- 
thentiques; il  m'ordonna  de  les  enterrer  dans  le  cime- 
tière. Je  ne  le  fis  pas,  mais  un  an  plus  tard,  ayant  con- 
struit l'autel  de  la  sainte  Vierge,  pJaqué  contre  un  raur^ 

{{)i  Tontes  les  lettres  que  je  dte  sont  déposées  au  Musée  diocésain* 


—  476  — 

à  droite  du  grand  autel,  je  fis  faire  par  le  maçon  une 
petite  niche  dans  le  vieux  mur,  et  j'y  plaçai,  debout,  ce 
bras-reliquaire  avec  un  écrit  portant  que  c'était  par  ordre 
de  Monseigneur,  qui  m'avait  défendu  de  laisser  ces  re- 
liques exposées  à  la  vénération  des  fidèles.  Aujourd'hui 
il  est  impossible  de  retirer  ce  reliquaire  de  la  place 
qu'il  occupe,  sans  défaire  le  devant  de  l'autel  de  la 
Vierge.  Les  reliques  se  trouvent  à  peu  près  vis-à-vis  de 
la  niche  où  est  la  statue.  » 

L'ordre  épiscopàl  était  sévère,  l'acte  qui  s'ensuivit 
singulier.  Je  voulus  revenir  sur  l'un  et  sur  l'autre,  mais 
on  m'objecta  toujours  la  grande  dépense  et  l'impossi- 
bilité de  démolir  l'autel  de  la  Vierge.  Que  de  reliques 
ont  été  ainsi  enfouies  en  terre  ou  sous  le  pavé  des  égli- 
ses !  Une  critique  plus  éclairée,  une  connaissance  plus 
parfaite  des  règles  canoniques  eût  indubitablement 
amené  un  résultat  diamétralement  apposé. 

J'aurais  vivement  désiré  voir  ce  bras^  pour  savoir  son 
âge  et  partant  de  là,  ainsi  que  dû  culte  public  avoué, 
de  temps  immémorial,  j'en  aurais  conclu,  même  en  l'ab- 
sence de  sceaux,  à  la  certitude  morale  de  l'authenticité. 
En  France,  l'apposition  du  sceau  épiscopàl  sur  les  re- 
liquaires anciens  est  fort  rare,  et  je  n'en  constate  l'u- 
sage régulier  que  dans  le  siècle  dernier.  Il  faut  donc 
rechercher  ailleurs  des  preuves  de  conviction  sur  l'i- 
dentité et  l'authenticité  des  reliques.  Benoît  XIV  fournit 
à  cet  égard  une  règle  fort  sage  qu'il  sera  utile  de  rap- 
peler ici,  puisqu'on  est  si  porté  naturellement  à  la  mé- 
connaître ou  à  l'oublier. 

c  Admittimus  et  enim  appositionem  sigillorum  esse 
cautelam,  quse  maximopere  confert  ad  probandam  iden- 


—  477  — 

titateiu  sacràrum  Reliquiarùm....  at  simul  et  semel 
contendîmus  quod,  etiamsi  dicta  cautela  defecerit  et 

potissimum  si  defecerit si  nihilominus  cœterae  ad- 

sunt  circumstantiae  identilatem  suadentes,  identitas  re- 
maneat  probata,  non  obslante  memoratae  cautete  de- 
fectu.  Idque  probatur  a  priori  et  a  posteriori  :  à  priori 
quidem,  quia  vis  stat  in  înorali  certitudine  et  moralis 
certitudo  aliunde  haberi  potest   qnàm  a  sigillis,  nec 
ulla  hucusque  lex  lata  est  quœ  pro  régula  statuât,  iden- 
titatem  Reliqniaruro  probari  non  posse,  nisi  fuerint  ap- 
posita  et  suis  loco  et  tempore  rénovata  sigilla  :  à  pos- 
teriori deinde  quia  in  litteris  Apostolicis  Clementis  VIII 
super  expositione  capitis  sancti  Guillelmi  ducis  Aqui- 
taniae  in  Ecclesia  Antuerpiensi  Societatis  Jesu.....  . 

nulla  fiât.....  mentio  existentise  sigillorum,  signum  evi* 

dens  boc  est,  quod  sigilla  non  aderant,  cùmque  non 
obstante  eorum  defectu,  Pontifex  permiserit,  ut  caput 
publicae  veneràtioni  exponeretur,  légitima  bine  deduci- 
tur  consequentia ,  quod  existentia  sigillorum  non  est 
de  forma,  et  quod,  câeteris  concurrentibus  circumstan- 
tiis,  identitas*  sine  illis  benè  probari  potest  (1).  i» 


VII. 


Lors  de  la  révolution,  Téglise  paroissiale  de  Cléré 
fut  transformée  en  écurie,  et  les  ossements  de  S.  Fran- 
caire,  extraits  de  sa  châsse,  jetés  sur  le  pavé  de  la  nef 
et  foulés,  aux  pieds. 

(1)  Bened.  XIV.  De  Cammiz.  Sanet,,  t.  IV,  p.  238,  239. 


—  478  — 

Cependant  de  pjenx  habitants,  indignés  de  cette  pro^ 
fanatiott,  parvinrent  à  soustraire  les  saintes  reliques 
au  mépris  de  quelques  impies  qui  faisaient  la  loi  à  la 
commune,  les  recueillirent  et  les  déposèrent,  en  atten- 
dant de  meilleurs  jours,  dans  un  coffre  de  bois  qui 
existe  encore  à  la  cure  de  Gléré. 

Ce  coffire,  fabriqué  avec  de  forts  madriers,  a  une  forme 
oblongue  :  il  est  bas,  porté  sur  des  pieds  sculptés  en 
accolade  et  fermé  par  une  serrure  en  fer  ouvragé,  carac- 
tères qui  indiquent  suIBSsamment  le  xv^  siècle. 

Quand  la  paix  eut  été  rendue  à  l'Église  catholique^ 
le  curé  de  Gléré  fit  une  information  en  règle  et  écouta 
les  dépositions  circonstanciées  de  plusieurs  témoins 
oculaires  ^ni  affirmèrent  juridiquement  que  les  osse- 
ments conservés  dans  le  coffre  étaient  ceux  mêioes  qui 
avaient  été  i^levés  de  la  châsse. 

L'ancienne  châsse  brisée  ne  pouvait  plus  servir;  une 
raison  d'économie  mal  entendue  conseillait  de  ne  pas 
en  QDmmander  une  autre  ;  bref,  on  avisa  \m  expédient 
inqualifiable  qui  fut  de  bloquer  les. ossements  dans  le 
grand  autel^  alors  en  construction,  sous  là  pierre  sacrée. 

Un  os  de  la  jambe  fut  détaché  et  placé  dans  le  re- 
liquaire en  bois  doré  qui  avait  survécu  aux  désastres 
de  la  révolution,  pour  être  exposé  publiquement  dans 
l'église.  On  eut  soin  de  le  mettre  comme  il  était  au- 
trefois, à  l'autel  de  S.  Francaire,  dans  '  une  niche  pra- 
tiquée au-dessous  de  sa  statue. 

L'authentique  decette  relique,  datée  du  24  avril  1826, 
mentionne  dans  le  même  reliquaire  un  os  de  S.  Parfait, 
S.  Perfecti.  C'était  l'usage,  basé  sur  une  opinion  erronée, 
de  mettr§  à  côté  d'une  relique  d'origine  discutable  une 


—  479  — 

autre  relique  incontestable,  comme  si  Fâdditiôn  de  cette 
relique  suffisait  à  sauvegaftler  la  responsabilité  de  TOr- 
dinaire. 

De  deux  choses  Tuiife  :  ou  la  relique  principale  était 
apocryphe  et  il  fallait  l'exclure,  ou  elle  était  authentique 
et  elle  n'avait  pas  besoin  d'une  addition  inutile.  Etait- 
elle  douteuse?  L'examen  qui  en  aurait  été  fait  sérieuse- 
ment l'aurait  de  suite  classée  parmi  les  reliques  apo- 
cryphes ou  les  reliques  authentiques  et,  pour  lever  ce 
doute,  il  suffisait  d'obtenir  une  certitude  morale^  la 
seule  requise  en  pareil  cas. 

J'insiste  sur  tout  ceci,  car  plus  que  jamais  il  importe 
de  remettre  sous  les  yeux  les  vrais  principes  qui  régis- 
sent la  récognition  des  saintes  reliques.  Benoît XIV,  que 
je  vais  encore  citer,  résume  dans  les  trois  paragraphes 
suivants,  les  règles  qui  m'ont  aidé  à  la  reconnaissance 
canonique  du  corps  de  saint  Francaire.  On  ne  peut  s'ef- 
facer derrière  une  autorité  plus  compétente  et  plus  im- 
posante. Voici  les  propres  paroles  du  savant  Pontife  : 
«  Non  possunt  ad  publicam  exponi  veneratioûem 
sancta  Corpora  sanctaeque  Reliquae,  nisi  de  ipsarura 
constat  identitate  (1).  » 

«  Quando  hodie,  sive  agatur  de  identitate  Gorporum 
et  Reliquiûrum  corara  Ordinarioy  sive  coram  sacrorum 
Rituum  Gongregatione,  constare  débet  de  Gorporum  et 
Reliquiarum  identitate  per  probationes  concludentes, 
et  si  non  certitudine  metaphysicâ  vel  physicâ,  saltem 
morali  certitudine  certas  (2).  » 

(1)  Bened.  XIV,  t.  IV,  p.  216. 
\^)  Id.,  p.  217. 


\ 


—  480  — 

t  Dicturo  est  autem,  sive  agatur  de  idmtitate  Corpo- 
rurn  et  Reliquiarum  coram  Ordinario^  siye  coram  sacra 
Congregatione,  cum  jùdiciura  Gorporum  et  Reliquia- 
rum ad  cultum  publicum  exponendarum  a  Sacro  Con- 
cilio  Tridentino  u tique  deferatur  episcopis  in  suis  diœ- 
cesibus,  uti  coliigitur  ex  sess.  25  de  Invocat.  vénérai,  et 
Reliq.  Sanctor.  (1).  » 

«  Sacrum  Concilium  Tridentinum  in  loco  citato  in- 
quit,  in  re  de  qua  iiunc  agimus,  ûeri  debere  ea  qiue 

veintati  et  pietati  consentanea  videbuntur Tandem 

scribentcs  communiter  censent,  in  re  et  ad  affectum  de 
quo  agimus,  sufficere  certitudinem  moralem...,  et  in 
certitudine  quidem  morali  esse  quiescendum,  monet 
Papebrochius  in  Respons.  ad  exhibiL  error,  ad  art.  i9, 
num.  iâ,  ubi  ait  :  «  In  bac  materia  Reliquiarum,  po- 
tiùs  quam  alibi  procedendum  magis  ex  pise  credulita- 
tis  affectu  quam. ex  notitia  certa  eorum  per  quorum 
manus  transierunt  illdB  :  et  Episcopi,  qui  ex  prudenti 
judicio  procedere  jubeutur  à  Tridentino  in  illis  recog- 
noscendis  et  publiée  exponendis,  acquiescere  debent, 
cum  scriptâ  vel  oculatâ  fide  eis  probatur,  Reliquiara 
aliquam  bonâ  fide  acceptam  a  loco,  ubi  fuerat  in  ho- 
nore, vel  cum  vero  similibus  antiqui  cultus  indiciis 
reperla  alicubi,  velut  talis  vel  talis  sancti,  licet  ejus- 
modi  probatio  et  fallere  possit  et  fallat  seape.  iEquum 
enim  est  ut  ibi  subsistât  humansB  inquisitionis  diligen- 
tia,  ubi  ulterior  labor  esset  fruslraneus  ;  et  a  supersti- 
tionis  periculo  tuta  sit  Reliquias  venerantium  Religio, 
quatenus  ea  tendit  in  primarium  suum  objectum,  id  est 

(1)  Bened.  XIV,  t.  ÏV,  p.  218. 


—  481  — 
Sanctorum  honorem  ,  etsi  fortassis  eorum  ipsœ  non 
essent,  qa»  at  taies  proponunlur  (i).  » 

VIII. 

Les  choses  en  étaient  là,  quand,  les  premières  en- 
quêtes terminées,  et  eu  vertu  d'une  commission  spéciale 
de  Mp"  l'évêque  d'Angers,  je  résolus  de  faire  ouvrir 
l'autel  et  de  remettre  en  honneur  le  corps  de  S.  Fran- 
caire.  En  conséquence,  le  jeudi  30  mai  de  l'année  1861, 
vers  les  dix  heures  du  matin,  sous  ma  direction,  l'autel 
de  pierre  fut  effondré  et  nous  rendit  les  précieux  restes 
qu'il  recelait.  Mais,  hélas  !  dans  quel  état  î  fracturés, 
brisés,  pulvérisés! 

On  ne  comprend  pas,  on  s'explique  diiBcileiDent  l'in- 
curie avec  laquelle  ces  ossements  vénérés  avaient  été, 
non  pas  renfermés  dai^  une  boite  quelconque,  mais 
bloqués  comme  des  moellons,  au  milieu  de  la  chaui, 
dans  le  massif  de  la  maçonnerie.  C'est  à  ces  matières 
étrangères,  qui  les  avaient  salis,  que  j'ai  dû  disputer 
les  moindres  fragments  afin  qu'aucun  ne  fût  perdu. 
Étaient  'présents,  comme  témoins  à  cette  exhumation, 
je  dirais  presque  à  oette  heureuse  ïnveruio»,  M.  Cesbron, 
curé  de  Cléré,  M.  Chicoleau,  maire  de  la  commune,  et 
René  Courant,  sacristain. 

IX. 

Je  transportai  le  corps  au  presbyii^e,  ûù  Qe  tardèrent 
pas  à  nous  rejoindre  M.  l'abbé  V-ualott  ^^  ^-  ^'*^^' 


—  482  — 

Lambert^  tous  les  <leux  directeurs  du  ccfllége  de  Yi- 
hiers,  ainsi  que  M.  Mondain,  docteur-médecin,  et 
M.  Ghicoteau,  juge  de  paix,  l'un  et  l'autre  demeurant 
également  à  Vihiers. 

J'étendis  tous  les  ossements  sur  une  table  couverte 
d'une  nappe  blancHe,  et»  pour  me  conformer  aux  pres- 
criptions d'Urbain  VUI,  de  sainte  mémoire,  j'invitai 
M.  Mondaiil  à  donner  à  chacun  des  ossements  sa  déno- 
mination propre. 

Le  corps  de  S.  Francaire  fut  ainsi  reconstitué  par 
l'habile  et  complaisant  doc^ur: 

1 .  Deux  os  coxaux ,  l'un  presque  entier,  l'autre  aux 
iieux  tiers  de  sa  longueur; 

2.  Astragale  ; 

3.  Tibia  gauche  (1),  —  quatre  fragments  du  tibia 
droit  ; 

4-  Deux  parties  inférieures  d'humérus  ; 

5.  Trois  parties  d'os  des  îles  ; 

6.  Os  pariétal,  —  temporal,  —  occipital; 

7.  Partie  antérieure  de  l'os  maxillaire  supérieur; 

8.  Partie  tte  Tos  frontal;  * 

9.  Trente-huit  fragments  d'os  du  crâne; 

10.  Seize  vertèbres  ou  parties  de  vertèbres  ; 
il.  Ddux  fragments  du  scapîUum  ou  omoplate; 

12.  Six  fragments  d'humérus; 

13.  Sept  fragments  de  fémurs,  gauche  et  droit; 

14.  Deux  calcaneum  presque  entiers; 

15.  Six  fragments  de  côtes; 

16.  Premier  os  du  métatarse.  —  Os  du  tarse. 

(\)  ("e  tibia  provient  du  reliqii»irQ.  .    . 


—  488  — 

17.  Fragments  de  radius;  '•'  i   , 

18w  E^ttérftité  inférieure  du  péroné  droîl; 

19.  Cent  sept  fragments  d'os; 

20.  Viûgt-sept  petits  fragments  d'os.  ' 
M.  Mondain  ia  cons^taté  que  tous  ces  ossements  étaient 

ceux  d'un  homme  de  petite  ststture  ou  mort  jieune  eiicore. 
Il  le  feradt  adulte  et  âgé  d'une'  trentaine  d'années. 


X. 


Outre  ces  ossements,  qui, -grâce  au;  tibia  isolent  à  la 
conformation  générale,  ont'étareoc^nus  pour  appartenir 
au  même  corps,  M.  Mondain  a  constaté  deux  autres 
ossements,  provenant  de  «sujets  diJOTépents*' 

Ces  ossements,  distincts  dé  ceux  de  S.  fVancaire,  ont 
été  ainsi  dénommés  : 

Humérus  d'un  enfant  d'une  dizaine  d'années; 

Fragment  d'os  des  îles  d'un  adulte.  ' 

Cette  confusion  d'ossements  peut  s^expliquer  de  deux 
manières  :  ou,  suivant  un  usage  aussi  ancien  que  gé* 
néral,  la  châsse  avait  contenu  d'autres  reliques  que 
celles  de  S.  Francaire,  ce  qui  ne  paraît  pas  pouvoir  se 
concilier  avec  le  procès-verbal  du  prieur  Texier;  ou, 
lorsque  les  ohâsses  furent  vidées,  les  ossements  se 
trouvèrent  mêlés  sur  le  sol  de  l'église,  ce  qui  est  înfi-' 
niment  plus  probable,  ^        . 

En  effet  les  archives  de  la  Préfecture  que  j'ai  con- 
sultées à  cet  effet,  m'ont  fourni  un  acte  du  6  mai  i6â9, 
qui  mentionne  expressément  unçj  reU^^^  ^^  S.^t^ico\as. 

Je  résume  cet  acte  prolixe  : 


X 


—  484  — 

Legs  fait  par  «  Colin  Drouaùlt,  demeurant  près  Tau- 
mônerie  de  Passavant,  en.  la  paroisse  de  S.  Hilaire  de 
Cléré  »  pour  «  que  le  dict  curé  et  ses  successeurs  curés 
soyent  tenus  doresnavanl  à  perpétuité  dire  ou  faire  dire 
deux  anniversaires  par  chascun  afi  au  jour,  terme  et 
feste.de  la  translation  saiact  Nycolas  de  May,  c'est  as- 
savoir vigiles,  messes,  l'une  de  Monseigneur  sainci 
Nycolas  et  l'aultre  de  Nostre-Dame,  vespres  et  Libéra 
des  morts  en  l'église  dudict  lieu  de  Cléré,  ou  en  la 
chapelle  de  Cléré,  ou  en  la  chapelle  de  Nostre-Dame  en 
laquelle  est  le  Reliquaire  de  monseigneur  sainct  Nycolas.  » 

Peut-être  Cléré  possédait-il  quelqu'autre  relique  que 
les  inventaires  de  l'église,  s'ils  existaient,  auraient  pu 
nous  nommer, 

Quoi  qu'il  en  soit,  je  déposai  le  corps  de  S.  Francaire 
dans  une  boite  en  bois,  faite  exprès  pour  la  circons- 
tance, et  mis  à  part  les  deux  autres  ossements  avec  le 
titre  Reliquiœ  Sanctorum^  ainsi  que  l'a  prescrit  la  Sacrée 
Congrégation  des  Reliques  par  son  décret  du  22  février 
1847  in  Dimonm  (1).     .      . 


XI. 


C'est  un  principe  de  :  droit  que  des  indulgences  ne 
peuvent  être  accordées  à  l'occasion  d'un  saint  dont  le 
nom  n'est  pas  inscrit  au  Martyrologe  Romain. 

«  Indulgentias  non  esse  concedendas  in  posterum, 

(i)  Prinzivalli.  Décréta  authentim  S.  C.  Indulgent.  Sacrarumque 
Reliquiar  ,  p.  486,  487. 


—  485  — 
nîsi  sanctis  descriptis  in  Martyrologio  et  cai 

Aussi  on  remarquera  que  dans  les  brefs 
Urbain  Vlll,  en  1623  el  1642,  il  n'est  nul 
tion  de  S.  Francaire,  quoique  les  indulgei 
accordées  pour  les  deux  jours  où  l'on  cél 
moire,  Rome  sauvegardait  le  principe  en 
sa  concession  portail,  non  sur  la  dévotioi 
culte  de  S.  Francaire,  mais  uniquement  si 
les  fidèles  pouvaient  être  le  mieux  prépi 
leur  nombre,  soit  par  leurs  dispositions 
soit  même  par  les  cérémonies  ecclésiastiqi 
les  saintes  indulgences. 

Je  cite  d'après  Texier,  les  deux  brefs 
qu'il  nomme  à  tort  Bulles  {%),  ainsi  quel 
la  Rocheposay,  regrettant  de  n'avoir  pas  1 
nal,  que  je  préférerais  publier  en  latin. 

Bulle  d'autres  indulgences  concédées  le  i 

4623  (3). 
f  Urbain  Pape  huictiesme.Atous  fidèles( 
ces  présentes  lettres  verront,  salut  et  béné 
tolique.  Estant  meuz  d'une  pieuse  charil 
les  tbrésors  de  l'Église  pour  l'augmentatio 
tion  des  fidèles  et  le  salut  des  âmes,  N 

(1)  Gardellini.  Deerttù  S.  C.  Rituum,  t.  I,  p.  të' 
in  una  Urbit. 

(â)  V.  sur  la  distinction  entre  les  bullet  Bt  ^bs 
La  PoToisie,  iSfil,  n°  1. —  Les  BuHgg  g^nl  ^* 
les  brefs  avec  l'anneau  du  pêcheur  ;  c^^,-  .  y.  e,v| 
quoiqu'il  y  en  ait  plusieurs  autres. 

(3)  Texier,  p.  12  et  suit. 
REP.   ARC. 


—  486  — 

miséricordieusement  en  nostre  Seigneur  à  tous  fidèles 
Chrestiens  de  l'un  et  Tautre  sexe,  vrayement  pénitens 
et  confessez,  et  ayant  receu  la  sainte  Communion,  qui 
visiteront  dévotement  l'église  du  prieuré  de  Saint- 
Hilaire  de  Claire,  de  l'ordre  de  Saint-Benoist,  du  dio- 
ceze  de  Poictiers,  au  Mardi  des  feriers  de  Pasques, 
depuis  les  vespres  du  jour  précédent  jusqu'au  soleil 
couché  dudit  four  et  prieront  Dieu  pour  la  concorde  des 
Princes  Chrestiens,'  l'extirpation  des  hérésies  et  exalta- 
tion de  nostre  mère  saincte  Église,  Indulgences,  et  ré- 
mission  de  leurs  péchés,  par  chacun  an,  pendant  sept 
années,  sçavoir  pour  la  première  et  la  dernière  desdites 
sept  années.  Indulgences  plénières  et  pour  les  autres 
cinq  années  intermédiaires,  Nous  leur  relaschons,  selon 
la  forme  pratiquée  en  TÉglise,  sept  ans  et  autant  de 
quarantaines  de  pénitences  à  eux  enjoinctes  ou  autrement 
deiies  pour  leurs  péchés.  Ces  présentes  vallables  seule- 
ment pour  lesdites  sept  années.  Nous  voulons  qu'en 
cas  que  Nous  ayons  donné  quelques  autres  Indul- 
gences à  perpétuité  ou  à  quelque  temps  non  encores 
expiré  ausdits  fidèles  Chrestiens  qiii  visiteront  ladite 
église',  ces  présentes  soient  nulles.  Donné  à  Rome  à 
Sainte-Marie-Majeure,  sous  l'anneau  du  Pêcheur,  le  dix- 
neufiésme  jour  d'octobre  1623,  la  première  année  de 
nostre  pontificat,  donné  gratuitement  pour  l'amour  de 
Dieu  et  mesme  l'escriture.  » 

Mandement  de  Monseigneur  de  Poictiers. 


■«  «1 


«  Nous  Henry-Louys,  par  la  grâce  de  Dieu,  Evesque 
de  Poictiers,  Ayant  veu  les  Bulles  des  Indulgences  ci- 
dessus,  avons  icelles  Indulgences  approuvées  et  avons 


—  487  — 

permis  et  permettons  par  ces  présentes  qu'elles  soient 
publiées  en  noslre  diocèze  de  Poictîers  (1)  et  qu'elles 
soient  exposées  aux  fidèles  Chrestiens  pour  icelles 
gaigner.  Donné  à  Poictiers  le  21  jour  de  février  mil 
six  cens  vingt-quatre. 

»  Sigm  '  Henricus-Ludovicus  Episcopus  Pictavensis. 
Et  plus  bas  :  De  mandato  praefati  Reverendissimi  Doftiini 

EpisCOpi,  ftïlÇHELET.    » 

Bulle  desdites  indulgences  cùnùédées  le  A  février 

1642  (8). 

«  Urbain  Pape  huictiesme ,  à  tous  fidèles  Chrestiens 
qui  ces  présentes  lettres  verront,  Salut  et  Bénédiction 
Apostolique.  Estans  meuz  par  une  pieuse  charité  à  dé- 
partir les  thrésors  de  l'Église,  pour  l'augmentation  de 
la  dévotion  des  fidèles  et  salut  des  âmes.  Nous  donnons 
miséricordieusement  en  nostre  Seigneur,  Indulgences 
plénières  et  rémission  de  tous  péchés  à  tous  fidèles 
Chrestiens  de  l'un  et  l'autre  Sexe,  qui  vrayement  peni- 
tens  et  confessez,  et  ayant  receu  la  sainte  Communion, 
visiteront  dévotement  l'église  du  prieuré  de  Sainct- 
Hillairé  de  Claire,  de  l'ordre  de  Sainct-Benoist  du  dio- 
cèze de  Poictiers,  le  28  jour  d'avril,  depuis  les  premières 
vespres  jusques  au  soleil  couché  dudit  jour;  et  là  feront 

(1}  L'Evêque  de  Poitiers  paraît  oublier  ici  la  règle  du  Concile  de 
Trente  qui  prescrit  à  rOrdinairè  de  s'adjoiùdre  deux  chanoines  dé 
son  chapitre  pour  la  promulgation  des  {ftdulgeiicés  :  c  indulgentias 
verô ,  aut  alias  spirituales  gratias ,  quibug  ^^  ^^^^  'Ghri&ii  fidèles 
decet  privari,  deineçps  per  Ordinarios  lototuïft^  adhibitis  dudbas  de 
capilulo ,  debitis  temporibus  populo  puk\»  ^^a*  ®**^  à^cferxùx  v^^^it . 
Synodus).  »  ConcU.  Trident.,  Sess".  xv       ►       9. 

($)  t«xier,  p.  9  et  suiv.     '  ^  P^?''.    * 


—  488  — 

des  prières  pour  la  concorde  des  Princes  Chrestiens, 
Textirpalion  des  hérésies  et  l'exaltation  de  nostre  Mère 
saincte  Église  ;  et  à  ceux  qui  visiteront  ladite  église,  le 
21  jour  de  septembre,  ainsi  qu'il  est  requis  et  feront 
lesdites  prières,  Nous  leur  relaschons,  selon  la  forme 
pratiquée  en  TÉglise,  sept  ans  et  autant  de  quarantaines 
de  pénitences  à  eux  enjoinct,  où  autrement  deùes  pour 
leurs  péchés.  Ces  présentes  vallables  seulement  pour  sept 
ans.  Nous  voulons  qu'en  cas  que  nous  ayons  donné  quel- 
ques autres  Indulgences  ausdits  fidèles  Chrestiens,  à  tous- 
jours,  ou  à  certain  temps  non  encores  expiré,  visitans 
ladite  église  audit  jour  ou  autres  jours.  Et  en  cas  que  pour 
l'obtention,  présentation,  admission  ou  publication  des 
présentes  il  soit  donné  quelque  chose  ou  receu  volontai- 
rement, ces  présentes  soient  nulles.  Donné  à  Rome  soubs 
l'Anneau  du  Pêcheur,  le  quatriesme  février  mil  six  cens 
quarante  etjèux,  l'année  neufiesme  de  nostre  Pontificat. 
Donné  gratuitement  pour  l'amour  de  Dieu  et  mesme 
récriture.  Signé  :  M. -A.  Maraldus.  » 

Mandement  de  Monseigneur  de  Poictiers. 

€  Nous,  Henry-Louys,  Évesque  de  Poictiers.  Ayant 
veu  les  Bulles  des  Indulgences  ci-dessus,  avons  icelles 
Indulgences  approuvées  et  avons  permis  et  permettons 
par  ces  présentes  qu'elles  soient  publiées  en  nostre 
diocèze  et  qu'elles  soient  exposées  aux  fidèles  Chres- 
tiens  pour  icelles  gaigner.  Donné  à  Poictiers,  le  vingt- 
deuxiesme  jour  de  may,  l'an  de  nostre  Seigneur  mil  six 
cens  quarante-deux. 

»  Signé  :  Henricus-Ludovigus  Episcopus  Pigtàvensis. 
Et  plus  bas  :  De  Mandato  praefati  lUustrissimi  et  Re- 
verendissimi  Domini  Episcopi.  Mighelet.  > 


—  489  — 

Les  premières  indulgences  furent  sollicitées,  dit  Te- 
xier  (page  6),  «  par  messire  Edme  de  Grezille,  abbé  de 
Flavigny,  chanoine  en  l'église  de  Saint-Honoré  à  Paris, 
conseiller  et  aumosnier  de  la  Reine  de  la  Grande-Bre- 
tagne, lors  prieur  commandataire  du  prieuré  de  S. 
Hillaire  de  Claire  »  ;  les  secondes  par  le  prieur  de 
Lezeau. 

Sur  mes  instances  et  sur  la  présentation  que  je  fis  à 
Rome,  en  1861,  des  deux  brefs  d'Urbain  VIII,  Sa  Sain- 
teté Pie  IX,  heureusement  régnant,  a  daigné  accorder 
par  bref  apostolique  de  nouvelles  indulgences  à  l'église 
paroissiale  de  Cléré. 

Henry  de  la  Rocheposay,  l'année  même  de  la  seconde 
translation,  accorda  une  indulgence  de  (juarante  jours. 
En  cela,  il  outrepassait  son  pouvoir,  puisqu'il  men- 
tionnait le  motif  de  cette  concession  qui  n'était  autre 
que  la  fête  anniversaire  de  S.  Francaire.  Je  reproduis, 
d'après  Texier,  cette  pièce  intéressante,  qui  prouve 
avant  tout,  et  c'est  principalement  ce  que  j'y  cherche, 
le  culte  public  décerné  à  S.  Francaire. 

«  Indulgences  concédées  par  Monseigneur  de  Poic- 
tiers  aux  habitants  de  Claire,  au  28  avril,  jour  de 
ladite  translation. 

»  Avec  permission  auxditS; habitants  de  Claire,  de  cé- 
lébrer ledit  jour  par  chacun  an,  en  leur  église  paro- 
chi^Ue,  la  ^^^^  de  la  Translation  ^  Relique^,  de  sa&ct 
Francaire  et  de  sainct  Hillaire.       i.  ,   . 

€,  Nous  Heury-Louys,  piar  la  misération  Divine,  Eves- 
que  de  Poictiers,  ayant  veu  le  procès-??erbal  de  la  trans^ 
lation  des  reliques  de  S.  Francaire,  père  de  S.  Hillaire, 
faicte  en  l'église  parochialle  de  S.  HiU^iï®  de  Claire, 


—  490  — 

près  Passavant,  de  nostre  Diocèze,  le  vingt-lmictièroe 
jour  d'avril  dernier,  par  messire  Louys  Texier,  prestre, 
prieur  d'Allonne,  en  vertu  de  nostre  permission  du  vingt 
et  troisième  mars  dernier,  dans  une  châsse  neufve, 
donnée  par  messire  Nicolas  Le  Febvre  de  Lezeau,  con- 
seiller du  Roy  en  ses  Conseils  d'Estat  et  privé,  et  pajf, 
maistre  Nicolas  Le  Febvre  de  Lezeau  son  fils,  prieur 
com mandataire  du  Prieuré  de  Saint-Hillaire  de  Claire, 
ayant  esgard  à  la  requeste  à  Nous  présentée,  par  les; 
habilans  dudit  Claire,  avons  permis  et  permettons, 
ausdits  habitans  de  Glaire,  de  célébrer  tous  les  ans  en 
leur  église  parochialle,  le  vingt-huictiesme  jour  d'avril, 
la  Feste  de  la  Translation  desdites  Reliques  de  sainct 
Francaire,  auquel  jour  nous  avons  concédé  quarante 
jours  d'indulgences,  à  tous  fidèles  Chrestiens  qui  visi- 
teront  ladite  église  de  Sainct-Hillaire  de  Claire,  ledit 
jour,  et  y  feront  prières  à  Dieu,  pour  le  Roy,  pour 
l'extirpation  des  hérésies,  et  pour  l'exaltation  de  nostre 
Mère  saincte  Église.  Ces  présentes  valables  seulement 
pour  sept  ans.  Donné  à  Poictiers,  le  quatorsiesme  jour 
de  May  mil  six  cens  quarante  et  un. 

»  Signé:  Henry-Louys,  Evesque  de  Poitiers  (1).  » 

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1       •  J        J      ,      .  ^  ...  ' ■  é  •     >  .  ■  ' 

L'%Hsé  ne  t^cdûnaît  tiû'uh  seul  martyrologe,  qui 
est  celui  que  répandit  le  Savant  cariiinal  Baronius,  au 
xvi«  siècle,  et  que,  au  ivii©,  Benoît  XIY  corrigea  et 
approuva  définitivement.  Néanmoins,  à  titre  de  rensei- 

(1)  Texier,  p.  25,  26.. 


~m  — 

gnement  hîâloriqne  ou  hagiographique,  on  peut  con- 
sulter les  martyrologes  particuliers,  comme  ceux  de 
l'Église  gallicane. 

Le  premier  en  date  est  celui  de  du  Saussay,  qui, 
au  13  janvier,  parle  de  Française,  père*  de  S.  Hilaire, 
mais  sans  faire  précéder  son  nom  de  la  qualification 
de  saint. 

«  Ipso  die  Pictavis,  sancti  Hilarii  Episcopi  et  Confes- 
sons illustrissimi,  qui  ex  pago  Claro,  non  procul  à 
Castro  Passavanliae,  ipso  in  Pictaviensi  agro,  nobili  fa- 
milia  cui  à  Mureto  nomen,  pâtre  Francario  natus(l).  » 

Le  second  martyrologe,  mieux  renseigné  que  le  pré- 
cédent, est  celui  de  l'abbé  Çhaslelain,  qui  trois  fois, 
dans  le  texte,  au  21  septembre,  et  à  la  table  alphabé- 
tique, mentionne  ainsi  S.  Francaire  : 

<r  A.  Clesse,  près  de  Mortagne  en  Pôictou,  S.  Fran- 
caire, confesseur.  —  Glissonii.  —  Francarius.  »  (Page 
477).         ^      . 

«  Francaire,  mort  en  Poitou,  le  même  que  Fragaire, 
21  septembre,  if  (Page  1121). 

«  Fragaire  (Fr anéantis) ^  patron  d'une  église  en 
Cotantin;  21  septembre.  »  (Page  1121)  (2). 

Evidemiftèût,  quand  Châstelain  a  écrit  CUssCy  près  de 
MôHaghe  m  Pôiàiou,  il  a  accepté,  sfatts  cohtfôle,  le  dire 
des  andi^iles  éditions  de  Bouche  t.  ^ 

(4)  Andr.  éa  >^vaiaf,  ¥artymlâ^um  Gatliemium.  Latet.  Parisioi- 
rum.  16a7,.in-f»,  p.  29^.  .  . 

(2)  Martyrologe  universel,  ^contenant  ]e  textç  du  .martyrologe 
romain  traduit  en  français,  et  deux  additions  à  chaque  jour  des  saints 
qui  ne  s'y  trouvent  point  :  Tun  des  saints  de  France,  Taulre  des  saints 
des  autres  nations;  avec  un  catalogua  des  saints  dont  on  ne  trouve 
point  le  jour.  —  Paris,  1709,  iiHi*. 


—  492  - 

Néanmoins,  comme  il  pouvait  fort  bien  exister  deux 
saints  du  même  nom,  l'un  en  Vendée,  l'autre  en  Poi- 
tou, j'ai  fait  à  Chastelain  l'honneur  de  vérifier  une  ci- 
tation trop  légèrement  admise. 

Clesse  est  un  nom  supposé,  altéré,  qui  n'existe  pas 
dans  les  dictionnaires  géographiques,  mais,  comme 
Chastelain  a  soin  de  donner  son  équivalent  latin,  j'ai 
conclu  que  Clissonii  devait  signifier  Clisson. 

J'ai  donc  écrit  à  Clisson,  petite  ville  de  la  Loire* 
Inférieure,  et  telle  fut  la  réponse  du  curé,  en  juin  1861  : 
<  La  tradition  locale  ne  confirme  pas  le  fait  avancé  par 
Chastelain  et  les  Bollandistes  ;  nous  n'avons  de  S. 
Francaire  aucune  relique;  il  n'est  l'objet  d'aucun  culte, 
ni  public,  ni  privé;  on  ne  célèbre  point  sa  fête;  en  un 
mot  je  ne  constate  aucun  souvenir  de  vénération  quel- 
conque. Je  regrette  d'être  dans  la  négative  sur  une 
matière  qui  m'intéresserait  fort,  si  elle  existait.  > 

Chastelain,  qui  n'était  pas  au  courant  de  la  géogra- 
phie locale,  parle  encore  de  Mortagne.  J'ai  donc  écrit 
au  curé  de  ce  chef-lieu  de  canton  du  département  de 
la  Vendée,  et  voici  la  réponse  qu'il  me  fit  adresser  par 
son  vicaire,  le  12  juin  1861  : 

c  Je  suis  chargé  par  M.  le  curé  de  Slortagne  de  ré^ 
pondre  à  la  lettre  que  vous  lui  avez  fait  l'honneur  de  lui 
adresser,  en  date  du  8  juin,  à  l'occasion  de  l'iqvention 
du  corps  de  S.  Francaire. 

>  Il  peut  se  faire  que.ce*«aint  ait  été  honoré  spécia- 
lement dans  notre  paroisse,  dans  un  temps  plus  ou 
moins  éloigné;  mais  il  ne  reste  de  cette  dévotion  aucune 
trace  et  aucun  souvenir.  C'est  vous  dire  assez  que  notre 
église  ne  possède  ni  reliques  de  S.  Francaire,  ni  autel, 
ni  tableau,  ni  statue  en  son  honneur.  » 


—  493  — 

En  1823,  M.  de  S.  Allais  publiant  une 
tîon  du  Martyrologe  de  Chastelain,  modiû 
mule  de  l'hagiographe  parisien  : 

f  21  septembre.  -^  S.  Francaire,  oonfe 
prés  de  Mortagne  en  Poitou  (1),  » 

S.  Francaire  conserve  son  titre  liturgie 
seur,  mais,  comme  H.  de  S.  Ailais  a  eu  d 
le  nom  de  lieu  Clesse,  qui  n'existe  pas,  il 
de  mettre  près  de  Mortagne.  Il  aurait  pu 
parenthèse  Vendée,  puisque  Mortagne,  d( 
tion  de  l'évêché  de  Luçon  par  Jean  XXII 
faisait  plus  partie  du  Poitou  ecclésiasliqu 

En  1858  la  société  de  l'Histoire  de  Frai 
troisième  édition  de  Chasletain  et  modifie 
le  teite  primitif  : 

«  21  septembre.  —  Clessé  en  Poitou. 
{Francarius,  Fragaire),  confesseur  (2).  » 

Clesse  est  devenu  Cléssé,  toujours  en 
entendu;  Francarius  est  traduit  indistinc 
caire  et  Fragaire. 

Chastelain  avait  déjà  fait  cette  confusio 
de  personnes.  J'ai  tenu  à  l'éclaircir  et  M.  ] 
par  sa  lettre  du  11  juillet  1861,  m'a  mis 

[Ij  Martjrologe  universel  traduit  «a  fraocais  du 
main...  avec  un  dictionnaire  universel  des  eainis.. 
chrétiens  sur  toute  la  snrface  de  la  terre,  rédigés 
H.  l'ablié  Chastelain  par  H.  de  EaiDt-Allais.  Pari 
page  358. 

(S)  P.  118,  liste  générale  des  saints  d'après  l^ 
versel  de  Chastelain,  apud  Annuaire  hîiitorirnie  V 
publié  par  la  Société  de  l'histoire  de  t^rai>.     _  -jg 


proposer  une  nouvelle  rectification.  «  AvanlM'àHër^  pltls 
loin  sur  S.  Fragaire,  je  dois  vous  dire  que  celui  qu'on' 
honore  en  Normandie  ne  me  paraît  pas  le  vôtre.  D'a- 
près nos  hagiographes,  celui-là  serait  né  en  Normandie, 
au  diocèse  de  Coutances,  aurait  été  évêque  d'Avranchès 
et  y  serait  mort  au  vu©  siècle  »  (1). 

Ainsi,  noms,  dates,  fonctions,  lieux  de  iiaissance,  de 
vie  et  de  mort,  tout  est  différent.  Avec  un  peu  de  ré- 
flexion et  d'observation,  l'erreur  s'évitait  facilemetil,' 
car  Fragaire  ou  Pégase  n'est  pas  Francaire,  ni  FègU- 
siuSy  Francarius. 

Quant  à  la  paroisse  du  Gotentin,  à  laquelle  S.  Frâri- ' 
Caire  aurait  donné  son  nom,  suivant  Chastelaïn,  le 
Fouillé  de  Coutances  (2)  la  nomme  paroisse  de  S.  Fré-  ' 
gaire,  patron  S.  Fegasius^  et  à  cause  de  sa  réunion' à' 
Beslon,  Eglise  de  S.  Frégaire  de  Beslon  (3). 

A  quoi  sert  uiie  réimpression,  si  elle  ne  corrige  rien? 
En  1860,  les  prêtres  de  S.  Dizier  copient  servilement 
Chastelain  et  voici  ce  qu'ils  disent  : 

«  Francaire,  mort  en  Poitou,  le  même  que  Fragaire, 
24  sept.  Fragaire  (Francarius) ,  patron  d'une  église  en 
Gotentin,  21  sept.  »  (4). 

(i)  Calendrier  Normand,  1860,  p.  86,  87.  —  L'abbé  Lecaou,  Hist. 
des  évêques  de  Coutances,  p.  iQ-Ô^^i.  — L'abbé  des  Roches,  HisL  du 
Mont  Saint^Miàhèl,  t.  I,  p.'88.  — 'Âdf.  Baillet,  Topographie  des  saints, 
p.  394.  '     : 

(i)  PmiHé  du  diocèse  de  Cmtànces,  p.  52-522. 

(3)  La  commune  de  Besloi^  est  dans  le  canton  de  Perles ,  arrbnd. 
de  S.-Lô  (Manche). 

(4)  P.  33  du  Dictionnaire  hagiographique  â  la  suite  du  t.  IV  de  la 
Vie  d^^  saints,  par  le  R.  P.  Giry.  Edition  des  prêtres  de  S.  Dizier. 
Paris,  1860,  in-^B». 


—  495^  — 

L'abbé  Boissonnet,  dans  son  Dictionnaire  desCété-^ 
monies  et  des  Rites  sacrés ^  publié  par  M.  Migne,  dans 
son  Encyclopédie  théologique  y  plus  concis  que  les  autres, 
dit  simplement,  t.  IH,  col.  909  : 

«  Francaire,  honoré  en  Poitou,  21  sept.  » 

Malheureusement,  en  Poitou^  S.  Francaire  ne  jouit 
d'aucun  culte,  et  en  Anjou,  sa  patrie  adoptive,  on 
l'ignore  si  bien  en  dehors  de  Cléré,  que  son  nom  est 
exclu  du  Propre  du  diocèse  et  même  du  tableau  de 
noms  de  saints  qui  figure  dans  le  Rittiel  de  1828  et 
sa  réimpression. 

Puisse  cette  notice  rétablir  enfin  les  choses  comme 
elles  doivent  être  et  faire  primer  par^dessus  tout  la 
stricte  vérité  historique  ! 


XIII. 


S.  Francaire  est  en  possession  de  deux  fêtes  dans  la 
paroisse  de  Cléré.  L'une  tombe  le  28  avril  et  nous 
avons  vu  plus  haut  qu'elle  correspond  à  l'anniversaire' 
de  la  seconde  translation  solennelle  des  Reliques  enl&M 
et  qu'elle  a  été  établie  avec  autorisation  de  l'Ordinaire^. 
De  plus,  Urbain  VIII  a  sanctionné  cette  pieuse  coutume 
par  son  bref  de  l'an  1642. 

Mais,  avant  qu'il  fût  question  de  cette  seconde  trans- 
lation, Urbain  VIII,  par  un  premier  bref  de  l'aïi  16S3, 
avait  privilégié  le  mardi  de  Pâques.  Pourquoi  une  de- 
mande pareille  et  semblable  concession  ?  On  me  per- 
mettra cette  hypothèse  :  parce  que  le  mardi  de  Pâques 
était,  selon  toute  probabilité,  le  jour  anniversaire  de. la 


—  496  — 

première  translation,  sous  Tépiscopat  de  Jean  du  Bel- 
lay, en  U70. 

La  fête  du  21  septembre  est  déterminée  par  la  tra- 
dition locale  et  les  martyrologes  déjà  cités  qui  font  de 
ce  jour  le  jour  natal  ou  l'époque  de  la  mort  de  S.  Fran- 
caire. 

Au  21  septembre  s'attachera  désormais  un  autre  fait, 
important  pour  la  paroisse  et  dont  le  souvenir  ne  peut 
s'effacer,  je  veux  dire,  la  troisième  translation  solen- 
nelle, en  1862,  du  corps  de  S.  Francaire  dans  une  riche 
châsse  de  métal  doré,  en  style  du  xiii®  siècle,  ciselée  et 
émaillée  par  M.  Poussielgue-Rusand,  orfèvre  de  Paris. 

Cette  châsse  que  l'on  m'a  prié  de  choisir  dans  les  ate- 
liers de  l'orfèvre-archéologue,  a  été  offerte  par  la  piété 
des  habitants  à  leur  saint  protecteur,  heureux  d'abriter 
désormais  dans  un  tabernacle  digne  de  lui  ses  ossements 
vénérés. 

Benoît  XIV  nous  autorisait  à  célébrer  avec  pompe 
cette  translation  (1)  :  nous  l'avons  fait  avec  empresse- 
ment et,  pour  mieux  en  perp<^tuer  le  souvenir,  nous 
avons  fait  frapper  une  médaille  et  graver  une  image  à 
l'effigie  de  S.  Francaire,  patron  de  Cléré. 

Je  dis  paifon  à  deissein,  car,  de  tout  temps  et  main- 

•  '  !     < 

(i)  «  Gausœ  denique,  propter  quas  fieri  possunt  translatiônes  cor- 
poFum  SanetoniiD...  dé  loco('ad'loG(Utn  iatrâ' eairidem  fiodêsiam,  ad 
sequentia  çapita  refârri  possunt,  ad  Ipei  yidelicet  indeeentiam...  ad 
populi  devotionem...  demum  ,  ad  locum.  venerabiliorem ,  puta  si 
noYuoi  sacellum  in  honorem  Sancti  confitructum  sit,  in  quo  novum 
sepulchrum  fuerit  aedificatum,  ubi  cum  majori  honore  corpus  Sancti 
collocari  possit...  »  Benedictus  XIV ,  De  Servorum  Dei  beatifkatione 
et  Bealorum  canmiiotùmi,  BononiXy  t738,  in-f^,  t.  IV,  p.  207. 


—  497  — 

tenant  encore,  quoique  S.  Hilaire  soit  seul  titulaire  de 
l'église  paroissiale  —  autrefois  prieurale  (1)  —  S.  Fran- 
caire  est  fêté,  selon  que  l'indique  la  liturgie,  même 
plus  qu'elle  ne  prescrit,  puisque  la  fête  se  double.  Or, 
chacune  des  deux  solennités  du  28  avril  et  du  21  sep- 
tembre est  chômée  par  tous  indistinctement  avec  ab- 
stention d'œuvres  servîtes  ;  le  matin  il  y  a  grand'  messe 
du  commun  d'un  confesseur  non  pontife,  et  le  soir, 
après  vêpres, .  procession  dans  l'intérieur  de  l'église  : 
la  relique  y  est  portée  solennement,  et  c'est  avec  elle 
qu'à  la  fin  de  la  cérémonie  le  prêtre  officiant  bénit  le 
peuple  pieusement  agenouillé. 


XIV. 


Le  culte  se  manifeste  sous  d'autres  formes  encore. 
Je  citerai  les  voyages^  les  ex-votos ,  les  neuvaineSy  les 
évangiles  et  les  invocations  spéciales. 

Faire  un  voyage,  c'est  aller  en  pèlerinage  au  tom- 
beau d'un  saint,  soit  pour  le  vénérer,  soit  pour  lui  de- 
mander assistance.  Ces  voyages  sont  fréquents  de  nos 
jours;. ils  ne  l'étaient  pas  moins  autrefois,  ainsi  que  l'at- 
teste Texier  :  c  Le  21  jour  de  septembre,  il  se  trouve 
une  grande  affluence  de  peuple,  qui  va  visiter  les  reli- 
ques de  ce  saint  confesseur,  »  (P.  73),  et  ailleurs  :  «  Le- 
dit corps  de  S.  Francaire  est  mis  sur  le  haut  du  grand 

(i)  L*ëgUse  S.-Jean,  qui  forme  maintenant  la  grange  du  presby- 
tère, était  autrefois  Téglise  du  Prieuré.  Mais,  bien  avant  la  révolution, 
son  état  de  délabrement  en  avait  fait  réunir  le  titre  monastique  à 
Téglise  paroissiale,  qu'une  boîte  aux  saintes  builes  (XVUP  siècle), 
nomme  s*,  hilaire  de  .  glaire. 


—  498  — 

autel  de  l'église  paroissiale  de  Claire,  où  se  font  plusieuiis 
•miracles  en  la  guérison  des  malades,  qui  n'ayant  peu 
recevoir  leur  santé  par  remèdes  bumains,  ont  recours 
aux  remèdes  divins  et  à  l'intercession  de  S.  Francaire, 
les  reliques  duquel  ils  envoient  visiter  en  ladite  église 
de  Claire.  »  (Pag.  i,  5)  (1). 

En  tète  de  ces  dévols  à  S.  Francaire,  je  dois  inscrire 
Renaud  du  Bellay,  archevêque  de  Reiras  (4424)  et  Jean 
du  Bellay,  évéque  de  Poitiers,  mort  en  4479.  Renaud 
avait  été  doyen  de  Saint-Maurice,  puis  nommé  évéque 
d'Angers,  et  c'est  à  ce  poste  qu'il  dut  puiser  les  senti- 
ments que  son  épitaphe  lui  prêle  à  l'égard  de  S.  Fran- 
caire. «  Sanctum  Hiliarium  Episcopum  Pictavensem  et 
S.  Francarium,  ejus  Patrem,  summa  cum  devotione 
colluit,  et  dicere  solebat  felicem  esse  parochiam  sancti 
Hillarii  de  Claire,  quod  in  ea  tan  tus  Ecclesiae  catho- 
licae  coulra  impietatem  Arianorum  propugnator  natus 
et  educatus  sit,  sed  feliciorem  esse  Urbem  Piôtaven- 
sem,  ubi  sanctus  Hillarius  fuit  Episcopus,  et  multornm 
sanctorum  Episcoporum  doctor  et  praeceptor,  in  qua 
féliciter  in  Domino  quievit^  et  quam  multis  in  vita  et 
post  mortemeditis  miraculis  illustrem  reddidit  (2().  » 

En  témoignage  de  reconnaissance  pour  les  grâces  re- 

(1)  ••  Je  pourrais  adjouster  à  toutes  ces  preuves  les  tesmoignages 
des  seigneurs  el  dames  de  Monfreuil-Belby ,  âe  Touars,  de  Brêzé, 
de  Brissao,  de  Monsoreau,  de  Doué,  de  Gonnor,  et  d'Argenton,  qui 
ont  anssi  esté  de  tout  temps  fort  affectionner  â  S.  Hiiaire  et  à 
S.  Francaire  et  sont  allez  souvent  à  l'église  -de  S.  Hiiaire  de  Claire 
visiter  les  Reliques  de  S.  Francaire,  ayant  receu  par  son  intercession 
du  soulagement  en  leurs  maladies.  »  Texier ,  p»  82. 

(2)  Texier,  p.  58.  59. 


—  499  — 
çues,  dans  ces  pieux  voyages ,  }es  fidèles  suspendaient 

f  m 

des. ex-voto  aux  murs  de  Téglise  ou  aux  parois  de  la 
châsse.  L'usage  en  est  passé  et  reviendra  peut-être> 
mais  il  existait  au  siècle  dernier,  et  j'en  ai  acquis  la 
certitude  daps  les  fragments  de  cire  souiQée  et  travaillée 
et  les  bandelettes  de  plomb  oxidc  que  j'^i  reiparquées 
mêlées  aux  ossements  dans  l'intérieur  de  l'autel,  où  ils 
gisaient,  tels  que  de  pieux  habitants  les  avaient  recueil- 
lis sur  le  sol  de  l'égUse  déjvasl^e. 

Les  neuvaines  consisteot  en  qeuf  ciprges  qui  bii*ûlent 
à  la  fois  ou  une  série  de  prières  pendant  nei;^  jours 
consécutifs.  Elles  sont  assez  communes^t  se  répètej^t  aussi 
fréqUjeauqaent.que  les  évan^les  qye  l'on  prie  le  cursé  de 
réciter  sur  la  tête  des  personnes  qui  en  font  la.  de- 
mande. 

Ces  voyages,  ces  neuvaines  et  les  évangiles  ont  pour 
but  principal  d'obtenir  la  guérison  de  la  fièvre.  C'est 
aussj  dans  cette  intention  que  grand  nombre  de  person- 
nes y(>f^\  à  la  fontaine  du  Mi^reau  puiser  de  l'eaju,  car, 
dit-on,  elle  est  plus  efficace  que  les  remèdes. 


XV. 


La  fontaine  de  S.  Francaire,  située  à  quelques  pas  de 
rtfaj^^tation  du  sai;xt  confesseur,  sur  le  coteau  du  Mu- 
re^p,  coule  du  nord  au  midi.  Fraîche  et  limpide,  elle 
est  abritée  par  un  rocher  et  ombragée  par  des  genêts  et 
des  fougères,  ce  qui  lui  donne  un  aspect  non  moins 
gracieux  que  pittoresque. 

Si  j'en  crois  la  tradition,  son  nom  lui  vient  d'une  dou- 
ble  cause,  d'abord  parce  qu'elle  servit  à  l'usage  de  S, 


—  500  — 

Francaire,  puis  parce  que  son  tombeau  en  était  proche. 

«  On  dit  que  l'eau  de  cette  fontaine,  m'écrivait  M.  le 
curé  de  Cleré,  le  5  octobre  1859,  ne  fait  jamais  de  mal 
à  ceux  qui  en  boivent  et  qu'elle  soulage  souvent  les  ma- 
lades, surtout  les  fiévreux.  On  a  beaucoup  de  confiance 
en  sa  vertu  et  on  vient  en  chercher  de  trois  et  quatre 
Heues  à  la  ronde  (1). 

>  Toutes  les  fois,  continue  le  vénérable  curé,  que 
Dieu  nous  envoie  des  sécheresses,  nous  allons  en  pro- 
cession à  la  fontaine  de  S.  Francaire  pour  obtenir  de 
la  pluie. 

»  Cet  usage  existe  à  Cléré  de  temps  immémorial  et 
Dieu  a  souvent  accordé  la  grâce  qu'on  lui  demandait 
par  l'intercession  de  S.  Francaire.  Nous  chantons  pen- 
dant la  procession  les  Litanies  des  Saints  et,  au  pied  de 
la  croix,  l'antienne  d'un  confesseur  non  pontife,  trois 
fois  sancte  Francari  ora  pro  nobis  avec  l'oraison  et  les 
prières  marquées  au  Rituel  pour  obtenir  de  l'eau.  Nous 
retournons  processionnellement  à  l'église  en  continuant 
les  Litanies  des  Saints.  > 

Cléré  n'est  pas  la  seule  paroisse  qui  aille  en  proces- 
sion à  la  fontaine  de  S.  Francaire,  pour  faire  cesser 
la  sécheresse.  J'ai  entendu  dire  que  sept  paroisses  s'y 
étaient  plus  d'une  fois  trouvées  réunies. 

Or  les  paroisses  qui  ont  cette  dévotion  sont  :  pour  le 
diocèse  d'Angers,  les  Cerqueux-sous-Passavant,  Passa- 
vant, Nueil-sous-Passavant  et  S.  Macaireen  Saumurois; 


(1)  On  respecte  tellement  cette  eau  qu^on  s*absticnt  de  laver  dans 
la  fontaine ,  sous  peine ,  pour  la  moindre  infraction ,  de  la  voir  tarir, 
croit-on  dans  le  pays. 


—  501  — 

pour  le  diocèse  de  Poitiers,  qui  est  limitrophe,  S.  Pierre 
à  Champ,  Gersay,  Genneton  et  S.  Maurice-la-Fouge- 
reuse. 

Ces  processions,  dont  la  plus  longue  fait  huit  lieues 
environ,  sont  toujours  fréquentées  par  un  grand  nombre 
de  fidèles.  Voici  Tordre  qu'elles  observent  invariable- 
ment :  elles  partent  de  grand  matin,  entre  4  et  5  heures, 
sp  chant  des  Litanies  des  Saints,  s'arrêtent  à  Téglise  de 
Gléré  où  elles  chantent  un  Salve  Regina  et  une  antienne 
à  S.  Hilaire  ou  bien  entendent  la  messe.  S'il  y  a  messe, 
quand  elle  est  achevée,  on  s'assied  sur  l'herbe  et  l'on 
déjeune;  sinon,  on  continue  la  procession  jusqu'à  la 
fontaine  et  on  ne  l'interrompt  pour  manger  qu'au  retour 
à  Cléré.  La  station  se  fait  au  pied  de  la  croix,  où  l'on 
chante  les  prières  pour  la  pluie  et  la  triple  invocation . 
Sancte  Francari^  ora  pro  nobis.  L'on  descend  à  la  fon- 
taine, dont  on  boit  ou  emporte  de  l'eau,  et  l'on  revient 
au  point  de  départ,  allongeant  les  Litanies  des  Saints, 
trop  courtes  pour  un  trajet  si  long,  des  Litanies  de  la 
sainte  Vierge  et  des  Psaumes  Graduels. 

Plusieurs  abus  signalent  ces  processions,  et  d'abord 
la  coutume  d'y  manger,  malgré  la  défense  expresse  du 
Rituel  qui  recommande  aux  curés  d'être  vigilants  sur 
ce  point,  puis  de  ne  pas  terminer  la  procession  par  la 
messe,  à  moins  de  cause  grave  qui  ici  n'est  pas  à  invo- 
quer, d*autarit  plus  que  la  procession  peut  se  terminer 
au  retour  à  Cléré,  où  il  h' est  pas  nécessaire  que  l'offi- 
ciani  célèbre  la  messe,  'pouvant  fort  bien  se  faire  rem- 
placer par  le  curé  du  lieu. 

c  Edendi  ac  bibendi  abusum,  secumve  esculenta  et 
poculenta  deferendi  in  sacris  processionibus,  agrisque 

REP.  ARC.  36 


—  508  - 

lustraadis,  et  suburbanis  Ecplesiiâ  visitandis,  toUer^ 
Parocbi  studeant,  ac  fidèles,  p^aBsertim  die  dominica, 
quae  proxime  Rogationes  antecedit,  quam  hsec  dedeceat 
corruplela,  saBpius  çidmoneant.  —  Processipnes  fieri 
debent,  deinde  rniss^  3Q}e(qniter  c^lebrari  :  nisi  aliter 
ob  gravera  causam  interdum  ordinario  vel  clero  videa- 
lur.  »  (Ritiial.  Roman,,  De  Vrocessionibus.) 

Mais  les  curés  devraient  s'efforcer  surtout  de  sup- 
primer, copime  superptilieux  et  malgré  les  réclama- 
tions des  populations,  Tusage  de  tremper  la  hampe 
de  la  croix  processionnelle  dans  Teau  de  la  fontaine, 
et  de  jeter  du  vin  à  la  so^rce  en  disant  :  Francaire, 
donne-nous  de  Veay, ,  je  le  donne  du  vin ,  deux  con- 
ditions essentielles,  dit-on,  pour  obtenir  infailliblement 
de  U  pluie. 


XVI. 


L'on  m'a  assuré  que  le  nom  de  Francaire^  sans  être 
commun  dans  la  paroisse,  était  parfois  donné  au  baptême 
à  des  enfants»  Il  serait  à  souhaiter  que  l'adoption  de 
ce  nom,  qui  prouverait  une  fois  de  plus  confiance  et 
dévotion  au  saint  .pfitroii,  reprit  dans  la  population  de 
Cléré. 

Quoi  qu'il  en  soit,  l'usage  n'est  pas  nouveau,. car  je 
le  constate  aux  archivas  de  la  préfçc^ur^  dans  un  acte 
du  15  juillet  1582,  où  je  lis  :  «  Messirç^Francaire^  Ya- 
chon,  presbtre,  habitant  et  demeura^t  ex^  l'église  pa- 
rochiale  de  Saint-Hilaire  de  Clérè,  » 


—  503  — 


XVII. 

Un  autel  fut  élevé  eu  l'honueur  de  S.  Francaire,  au 
côté  gauche  et  au  sud  de  l'église  de;Cléré,  peut-être 
dés  le  xyo  siècle,  époque  de  la  statue  qui  en  fait  le 
principal  ornement.  Dans  cette  hypothèse,  il  aurait  été 
renouvelé  au  xvme  siècle,  tel  qu'on  le  voit  encore. 

Cet  autel  est  surmonté  d'un  rétable  en  pierre  scul- 
ptée, où  des  palmes  croisées,  sans  doute  par  allusion  à 
ce  texte  de  son  office  :  Justm  ut  palma  florebii  (1)  en- 
tourent le  nom  du  titulaire.  Sous  sa  statue,  qui  en  oc* 
cupe  le  centre  et  repose  sur  une  console,  une  niche  çst 
creusée  pour  recevoir  le  reliquaire  de  bois  doré.  Elle 
est  fermée  par  une  grille,  à  travers  les  barreaux  de  la- 
quelle les  pèlerins  jettent  parfois  des  sous,  et  rehaus- 
sée tout  autour  de  feuillages  sculptés. 

La  statue  seule,  par  son  style  et  soii  antiquité,  oflfre, 
quoique  mutilée,  un  intérêt  incontestable.  Sculptée 
dans  un  bloc  dé  pierre,  à  mi-grandeur,  par  un  artiste 
d'un  médiocre  talent,  elle  annonce  par  les  traits  et  la 
taille,  un  homme  d'environ  quarante  ans.  Les  cbevèfux 
de  S.  Francafre  sont  droits  et  abondants  ;  il  n'a  paâ  de 
barbe  au  meriton.  Il  est  vêtu  d'une  tuitf que  courte  et 
ouverte,  par-dessus  d'iine  robe  à  revers  en  foufrure  et 
à  manches  étroites.  Cette  robe  eèt  serrée  â  la  taille  par 
une  ceinture  de  cuir,  dont  l' extrémité  retombe?  en  avant 
et  à  laquelle  pend,  au' côté  gauche,  une  aumônière  garnie 

(1)  Premiers  mots  de  llntroit  de  la  messe  d*un  confesseur  non 
pontife. 


—  504  -^ 

sur  les  bords  de  boutons  ou  de  perles.  Ses  deux  bras 
sont  tendus  en  avant  ;  Tun  s'appuie  sur  un  bâton,  mal- 
heureusement moderne;  Tautre  est  privé  de  l'objet 
qu'il  tenait,  en  sorte  que  cette  mutilation  nous  laisse 
dans  ^ignorance  complète  des  attributs  qui  auraient  pu 
caractériser  S.  Francaire. 

Je  n'hésite  pas  à  reporter  jusqu'à  l'épiscopat  de 
Jean  du  Bellay,  cette  curieuse  et  unique  statue.  La  la- 
cune est  grande  et  je  n'ai  pu  la  combler,  malgré  mes 
recherches,  de  1470  à  1759.  A  cette  dernière  date,  je 
vois,  dans  l'église  de  Cléré,  un  ex-voto  peint  sur  toile 
et  offert  par  un  fiévreux,  guéri  par  l'intercession  de 
S.  Francaire.  La  toile,  gâtée  par  une  restauration  ré- 
cente, est  signée  : 

Mai.lecot 

PiRxiT  .  a  doué  (1) 

4759 

Dans  un  lit  à  ciel  et  rideaux  verts,  bordés  de  blanc, 
est  couché  un  pauvre  malade,  affaibli  par  la  fièvre  ;  il 
se  soulève  péniblement  et  appuie  sa  tête  sur  un  oreil- 
ler. Ses  mains  sont  jointes,  comme  s'il  priait,  et  ses 
yeux  sont  fixés  sur  la  croix  qu'un-  prêtre  lui  présente. 
Ce  prêtre,  vêtu  d'une  soutane  noire  à  manchettes ,  du 
surplis  à  xnai^ches  larges  et  que  recouvre  autour  du 
col  un  rabat  brodé,  est  assisté  d'un  enfant  de  chœur, 
en  aube,  age|[iouillé  et  tenant  un  cierge,  Evidemment  il 
s'agit  ici  des  dernières  prières  et  des  consolations  su- 
prêmes adressées  par  la  religion  au  moprant. 

Mais  le  moribond  a  invoqué  S.  Francaire,  qui  est 

(1)  Doué,  chef-lieu  de  canton,  arrondiss.  de  Saumur. 


—  505  — 

peut-être  son  patron,  et  aussitôt  le  saint  confesseur  lui 
apparaît.  Semblable  aux  médecins  de  l'époque,  S.  Fran- 
Caire  porte  des  souliers  rouges,  une  houppelande  vio- 
lacée et  à  revers  rouges,  ouverte  en  avant  et  liée  à  l'aide 
d'une  ceinture  :  à  son  cou  pend  une  médaille  d'or 
que  retient  un  ruban  rouge  et  sa  tête  est  coiffée  d'une 
perruque.  Ses  yeux  levés  au  ciel  indiquent  son  interces- 
sion auprès  de  Dieu,  et  le  geste  de  ses  mains  signifie 
que  si  la  santé' revient  au  malade,  fe  vie  au  moribond, 
c'est  à  Dieu  seul  et  non  à  lui  qu'il  faut  en  rendre  grâces. 

Son  nom  écrit  en  toutes  lettres.  St.  FRANCAIRE,  ne 
laisse  pas  de  doute  sur  sa  qualification. 

Derrière  '  S.  Fraucaire  et  vaincu  par  lui,  fiiit  le  dé- 
mon, personnage  humain,  que  caractérisent  deux  cor- 
nes au  front  et  une  fourche  aux  mains. 

C'est  bien  peu  sans  doute  que  ces  deux  représenta- 
tions pour  l'iconographie  de  S.  Francaire.  Néanmoins 
leurs  dates  extrêmes  précisent  deux  époques,  l'une  où 
le  culte  s'affermit,  l'autre  où  il  va  commencer  à  dé- 
choir. 

XVIII. 

J'ai  dit  jusqu'à  présent  ce  que  j'avais  vu  ou  savais 
de  science  certaine.^  Pour  être  complet  et  ne  pas  m'i- 
soler  dans  une  question  aussi  grave,  je  laisserai  main- 
tenant parler  les  auteurs,  peu  nonibreux  et  peu  expli- 
cites, qui  ont  consacré  quelques  lignes  à  la  mémoire 
de  S.  Francaire. 

Mais,  avant  de  commencer  cette  revue  bibliogra- 
phique, qu'il  me  soit  permis  de  dire  que  S.  Francaire 


—  506  — 

e§(  dqcneuré  iaconnu  à  certains  hagiegraphes  anciens^ 
et  modernes,  comme  S.  Fortunat,  Tillemont,  Baillât, 
Surius,  Ribadeneira  et  Godescard. 

1.  Jean  Bouchel,  qui  écrivait  en  1523,  rapporte  les 
diverses  opinions  émises  au  sujet  du  lieu  de  naissance 
de  S.  Hilaire,  et  l'invention  des  corps  de  son  pare  et  de 
sa  mère  au  Mureau. 

c  Faut  dire  premièrement  d'où  estoîl  S.  Hilaire.  Au- 
cuns disent  qu'il  estoit  natif  de  Bourc  en  Xaintonge, 
les  autres  de  Naliers  au  bas  pals  de  Poictou,  les  autres 
d'Aquitaine,  à  quarante  deux  lieues  de  la  mer  Brita- 
nique,  sans  nommer  le  lieu  :  et  ajasi  l'a  écrit  S.  For- 
tuné en  la  légende  qu'il  a  faicte  dudict  SaincL  Quoy 
qu'il  en  soit,  puis  vingt  ans  en  ça,  en  l'Église  parro- 
chiale  de  S.  Hilaire  de  Claire ,  près  Passauant  en 
Poictou,  furent  trouvés  les  sepulchres  de  son  père, 
nommé  Francarius,  aussi  de  sa  mère,  gens  nobles  et 
moyennement  riches,  d'vne  maison  noble  appelée  le 
Mureau.  Et  cojmme  Hilaire  en  l'aage  de  quinze  à  seize 
ans  eut  l'entendement  rude,  et  ne  peust  facilement 
comprendre,  ainsi  qu'il  s'en  alloit  desespéré  des  lettres, 
reprint  son  espoir  en  la  marselle  d'un  puys  par  l'assi- 
duité des  cordes.  Et  après  auoir  recouuert  argent  de 
ses  parents,  comme  tesmoigne  Antonius,  s'en  alla  à 
Ronie  et  de  Rome  en  Grèce  estudier,  incontinent  après 
que  l'Empereur  Constantin  le  Grand  eust  este  baptizé, 
qui  fut  l'an  de  nostre  salut  trois  cens  dix->neuf  ou 
environ  (1).  » 

(1)  JeaiiBouchet.  Les  Annales  d*AguUûiné.  Poictiers,  édit.  de  1644^ 
in*4p,  p.  22,  23. 


-  507  — 

2.  L'Augewn  René  Benoist,  curé  de  S.  Eustache  de 
Paris,  vers  1575,  publia  en  un  volume  in-folio,  un 
<K  Opnscule  contenant  plusieurs  discours  de  méditation 
et  dévotion,  utiles  pour  bien  et  utilement  lire  les  vies, 
faits,  miracles,  histoires  et  légendes  des  saincts.  »  On 
y  voit,  à  la  page  57,  une  répétition  de  ce  qu'avait  écrit 
J.  Bouchet,  en  ces  termes  : 

«  Sainet  Hilkire  doncques évesque  de  Poictiers, 

fui  nalif  do  pays  d'Aquitaine,  61  quelques  quarante 
deux  lieue»  de  loing  de  la  mer  de  Bretagne.  Or  quoy- 
que  le  lieu  ne  soit  nommé  par  cet  aùtheur,  si  est-il 
qu'aucuns  ont  dit  qn'il  est  natif  de  Bourg  en  Xaintonge, 
et  les  autres  de  Naliers,  au  bas  pays  de  Poîctou.  Néant- 
moins  Bouchet  es  ànnates  d'Aqutlaine  (1),  dictqûe  de- 
puis trente  cinq  ans  etf  ça,  en  l'église  S.  Hilaire  de 
Claire,  près  Passavant  en  Poictoo,  on  trorfva  les  tom- 
beaux du  père  de  ce  saiftct  éfesque,  lequel  avoit'à  nom 
FraBcaire,  et  de  sa  mère  aussi,  gells  nobles  et  illustres, 
et  assez  riches,  sortis  d'une  maison  noble  appelée  le 
Mureau,  Aussi  Fortuné  dict  :  il  était  notf  incognii'  ou 
obscuï  entre  les  maisons  et  familles  nobles  de  la  Gaule, 
voir  entre  tous  autres'  recognu  à  cause  de  sa'  généro- 
sité, et  pUur  eStre  homm^f  rond,  d'une  bonne  ame, 
redisant  parmi  ceux  âe  son  aagè,  tout  ainsi  que  fait 
l'astre  avant' coureur  de  l'aube  entre  les  autres  eStoiles. 
-^  Aussi  presque  dés  le  berceau,  il  estoit  allaicté  d'un 
te!  rayon  de  sapience  céleste  qUe  des'  lors  on-  cognois- 
soit  facilement  que  notre  S.  J  -Christ  fals6it  croître  en 
lui  un  j,^eiidarnle  courageux  et  ValHàtit  V^^^  soutenir  ev 
défendre  sa  cause. 

(I)  Àan.  d  Aquit.,  p.  I. 


—  508  — 

iNéantinoins  tient-on  que  dès  le  commencement  irfot 
rude  et  mal  habile  pour  les  lettres,  mais  l'assiduité 
rompit  ce  que  nature  sembloit  luy  vouloir  denier  :  et 
pour  ce  ayant  eu  deniers  de  ses  parens  s'en  alla  à 
Rome  pour  estudier  et  de  là  passa  en  Grèce,  du  temps 
que  le  grand  Constantin  se  fit  chrétien  :  où  ayant  em- 
ployé dix  ans  à  Teslude,  se  retira  à  Poictiers.  » 

3.  Les  Bénédictins,  qui  ont  publié  les  œuvres  de 
S.  Hilaire,  citent  Bouchet  et  du  Saussay,  n'admettent 
pas  la  naissance  du  S.  docteur  à  Cléré,  ajoutent,  en 
mentionnant  la  découverte  de  son  tombeau,  que  le  nom 

« 

du  père  leur  importe  peu,  le  nomment  Francaire  tout 
court  et  disent  qu'il  ne  répugne  pas  d'admettre  qu'il 
éleva  S.  Hilaire  dans  le  christianisme. 

€  Saussaius  vero  in  pago  Claro  natum  (S.  Hilarium) 
affirmât  sed  recentioribus  scriptoribus  quis  non  ante- 
ponat  Hieronymi  atque  Venantii  auctoritatem? 

>  In  quodam  ms.  non  admodum  antiquo  cardinalis 
Ottoboni,  pater  Hilarii  Francarius  appellatur.  Tradit 
quoquc  Bouchetus  tumulumparentum  Hilarii  20  annis 
antequamopussuum  ederet,  hoc  estcirciteran.  1500,  in 
parochiali  aede  apud  Clissonium  Hilario  sacra  repertum 
esse,  in  quo  idem  nomen  ipsius  patri  attribuebatur.  Sed 
quidquid  sit  de  pareqtum  nominibus,  certè  in  dubium 
revocari  non  potest  generis  illius  claritudo,  qui,  Fortu- 
nato  teste,  <  apud  Gallicanas  familias  nobilitatis  lampade 
non  obscurus,  immo  magis  prae  cœteris  gratia  generosi- 
tatis  ornatus  fuit.  > 

»  Celebris  hic  oritur  qudastio  :  utrùm  Ghristianis 
parentibus  natus  sit.  Negant  plerique  et  opinionem 
suam  ipso  librorum  de  Trinitate  exordio  confirmant,  in 


—  509  — 

quo  narrare  videtnr  Hilarius,  quQ  pacto  ad  Christiange 
fidei  Dotitiam  pervenerit 

>  Verumtanaen  quod  Fortunatus  (lib.  I,  n  S)  de  ilto 
scribit  :  «  Amabilis  tantâ  sapientiâ  primîliva  ejus  lac- 
labatur  iofantia,  ut  jam  tune  potuisset  intelligi  Chris- 
tum  in  suis  causjs  pro  obtinendA  Victoria  necessarium 
sibi  mililem'jassisse  propagari  (i),  »  hoc  potius  sonat, 
Hilarium  videlicet  jam  ab  infantiâ  Christum  induisse, 
et  Christiaoam  doctrinam  cum  lacté  suxisse.  Neque  bis 
repHgnat  librorum  de  Trinilate  exordium  (2).  i 

4.  Les  Bollandistes  (Acla  sanctorunif  Anvers,  1643, 
1. 1  de  janvier)  citent  du  Saussay  et  Bouehei,  ne  donnent 
point  à  Francaîre  Ir  titre  de  saint  et,  après  avoir  bien 
déterminé  la  position  géographique  de  Gléré,  prennent 
le  cbange,  à  la  suite  de  l'annaliste  d'Aquitaine,  sur  le 
lieu  de  l'invention  du  corps,  qu'Us  placent  à  Clisson. 

<  Saussaius  asserit  <  in  pago  Claro,  non  procul  a 
Castro  Passavantise  ipso  in  Pictaviensi  agro,  nobili  fa- 
miliâ,  cui  à  Mureto  nomen,  pâtre  Francario  natum.  » 
Est  Clarus  vicus,  castrumque  Passavantia,  in  agro  non 
Pictaviensi,  sed  Andegavensi  ad  fluvium  Laionem,  qui 
in  Ligerim  influit.  Testatur  Bouchetus  (cap.  vi  Annal. 
Aquitaniœ)  i  aonnullis  existimari  oriundum  ex  Santo- 
num  oppido  Bui^o....  Addit  ipse  Boucbetus  in  sede 

(1)  •  Venim  diTersus  ne  ait  an  utriusqiie  libri  scriptor  (l'auteur  de 
la  Vie  de  S.  Hilaire),  hcia  censenduG  sit  Venantius  Fortuoalus  ,  an 
siter  paulo  suptrior  ;  parvi  refert.  Hic  certe  negari  nequit,  posterlo- 
rem  librum  saltem  medio  sebcuIo  sexto  egse  conscriptum.  ■  [S.  Hilar. 
oper.,  col.  CXXVII-CXXVIll) . 

(2)  Bénédictins  de  S.  Maur,  Snncti  hinri'  PWowomm  episMpi 
opéra,  Pirisiis,  1693,  in-P*.  roi   LXv>  «xï^' 


—  SIO  — 

fiarodiiali  S.  Hilariî  GUssonii  (Glecssé  Tocat,  juxta  Mor- 
tanium  Pictavorum),  parentom  ejos  repertiim  sepdU 
chrum  fuisse  — ,  Tigintî  annis  antequàm  opas  suam 
e^leret,  nimiram  circa  an.  Ch  1500.  Patrem  Francaritim 
appellat,  nomen  matris  non  exprimit  Distat  Çlissoninm 
quinque  leucis  ab  urbe  Namnetum,  sepCem  Mortanio, 
ad  fluviolum  Sebriin.  t 

5.  L'ouvrage  le  plus  important  est  celui  que  publia 
à  Saumuf,  en  1648,  pour  la  seconde  édition,  le  prieur 
d'ÂUonne,  Louis  Texier,  et  auquel,  on  l'a  déjà  remar- 
qué, j'ai  puisé  à  pleines  mains.  Ce  rarissime  opuscule, 
dont  M.  le  curé  de  Cunaud  possède  un  exemplaire,  a 
pour  titre  :  <  Discours  fait  en  l'honneur  de  S.  Fran- 
caire^  confesseur,  père  de  S.  Hillaire  évesque  de  Poic- 
tiers,  avec  un  recueil  et  extrait  des  autheurs  (1),  qui 
font  mention  que  S.  Hillaire  et  S.  Francaire  son  père 
sont  nez  en  la  paroisse  de  S.  Hillaire  de  Claire  prés 
Passavant  du  diocèse  de  Poictiers,  où  se  voit  aussi  l'an- 
tiquité de  la  maison  du  Bellay,  »  petit  in>4f<^  de  88 
pages  (2). 

6*.  Rapaillon  (Gilles),  conseiller  au  présidial  de  Poic- 
tiers et  ehanoine  de  S.  Hilaire,  est  auteur  de  Mémoires 
pour  servir  à  l'histoire  de  F  Église  de  S.  Hilaire  le  Gfand 
de  Poitiers\  manuscrit  in-4«>  de  la  fin  du  xvii^  siècle,  à 
la  Bibliothèque  de  cette  ville. 

Pages  1  et  2,  cet  écrivain  nomme  Francaire,  France- 
rius  et  aussi,  avec  d'autres  qu'il  ne  désigne  pas,  Fran- 


(i)  Ces  auteurs  sont  J.  Bouchet  et  R.  Benoist. 
(2)  L.  Texier  dit  dans  sa  préface  que  la  première  édition ,  dont  ii 
fut  imprimé  fort  peu  (k  Copies,  parut  en  16^2. 


—  512  — 

hors  de  la  ville  de  Poitiers.  Ce  qui  se  voit  par  une 
chartre  de  Louis  IV,  roy  de  France  de  l'an  942,  con- 
firmative  de  tous  les  biens  et  domaines  que  possédoit 
autrefois  ladite  église  de  S.  Hilaire,  dans  laquelle 
chartre  ledit  lieu  de  Vihers,  Vieracum^  est  énoncé  par- 
my  les  autres  seigneuries  qu'elle  possède  encor  aujour- 
d'huy.  » 

7.  J.  Grandet,  curé  de  Sainte-Croix  d'Angers  et  supé- 
rieur du  séminaire,  dans  une  de  ses  dissertations  ha- 
giographiques qu'a  éditée  le  chanoine  Tresvaux  (1), 
parle  de  S.  Francaire  de  visu  et  ex  auditu  pour  avoir 
sur  place  recueilli  lui-même  la  tradition  locale. 

Dom  Chamard  paraît  avoir  attaché  une  certaine  im- 
portance à  ses  paroles,  puisqu'il  s'en  sert.  Néanmoins, 
je  n'ai  pas  cru  devoir  en  faire  le  même  usage,  car 
Texier  se  tait  sur  la  grotte  où  le  corps  de  S.  Francaire 
aurait  été  soustrait  aux  pillages  des  Normands,  et  je 
n'ai  rien  vu  de  semblable  à  Cléré.  De  plus,  le  récit  du 
mouton  qui  lèche  toujours  la  même  pierre,  s'applique 
à  tant  ^'inventions  analogues  que  je  le  croirais  presque 
ici  légendaire  ;  enfin  il  serait  peut-être  difficile  de  pré- 
ciser l'époque  des  quatre  translations. 

On  va  en  juger  par  cet  extrait  : 

«  Que  Saint  Hilaire  soit  né  à  Cléré-sous-Passavant, 
je  ne  suis  pas  surpris  que  les  anciens  auteurs,  comme 
saint  Jérôme  (2)  et  Fortunat,  l'aient  ignoré  ;  cette  dé- 
couverte n'a  été  faite  que  depuis  deux  cents  ans  tout 

(1)  Histoire  de  l'église  et  du  diocèse  d'Angers^  t.  I,  p.  412-41 4. 

(2)  S.  Jérôme  dit  :  «  Hilarius,  latinae  eloquentisB  Rhodanus,  Gallus 
ipse  et  Pictavis  genitus.  »  In  Epist,  ad  Galat, 


—  513  — 

au  plus,  lors<|u'on  trouva  le  corps  de  saint  Francaire, 
père  de  saint  Hilaire,  l'an  1470,  sous  le  pontificat  de 
Jean  du  Bellay,  évêque  de  Poitiers,  lequel  corps  avait 
été  mis  dans  un  tombeau  de  pierre  dure,  dans  la  cha- 
pelle du  château  du  Hureau,  dont  la  tradition  du  pays 
est  que  saint  Francaire  était  seigneur  et  y  demeurait, 
lorsque  saint  Hilaire  vint  au  monde.  Je  fus  à  Gléré  le 
20  septembre  de  l'année  1710  pour  ro'inforroer  de  ce 
fait  qui  me  fut  certifié  parle  curé,  homme  d'esprit.  La 
fête  de  la  Translation  des  Reliques  de  saint  Francaire 
et  de  son  épouse,  qui  sont  posées  sur  le  grand  autel 
de  la  paroisse  dédiée  à  saint  Hilaire,  se  solennise  le 
ai  septembre  et  le  natal  le  28  avril.  11  nous  assura 
qu'il  y  en  avait  eu  quatre  translations  différentes  dans 
son  église  :  la  première  immédiate  après  sa  mort  qui 
arriva  au  commencement  du  quatrième  siècle,  saint 
Hilaire,  fils  de  saint  Francaire,  étant  mort  en  l'année 
369.  On  ne  sait  pas  en  quelle  année  arriva  la  seconde, 
mais  la  tradition  de  la  paroisse  de  Cléré  est  que  du 
temps  que  les  Danois  ou  les  peuples  du  Nord  rava- 
geaient la  France  et  emportaient  toutes  les  reliques  des 
Saints  qu'ils  trouvaient  dans  les  églises,  ce  qui  arriva 
dans  le  huitième  et  le  neuvième  siècle,  pour  éviter 
leur  fureur  sacrilège,  le  corps  de  saint  Francaire.  fui 
caché  dans  le  creux   d'un  rocher  ou  ftngle  de  teiTe 
assez  proche  du  château  du  Mureau,  ancienne  demeure 
de  saint  Francaire  en  sa  paroissej  qu'elles  y.  ont  de- 
meuré inconnues  pendant  plusieurs  âècles,  et  qu'enfin 
il  î  avait  un  peu  plus  de  deux  cents  »^*'  1^'^^  berçet 
gardant  ses  troupeaux  sur  ce  çq  i  -    wti  4es  mouvons 


—  5U  — 

jours  de  suite  à  lécher  une  pierre  qui  était  sur  ce  ro- 
cher sans  y  prendre  aucune  nourriture  parce  qu'il  n'y 
avait  pas  d'herbe  ;  que  le  berger,  s'étant  aperçu  qu'A 
ne  maigrissait  point  ei  qu'il  ne  laissait  pas  d'être  aussi 
gras  que  tous  ceux  de  son  troupeau,  surpris  de  cette 
merveille  et  de  l'assiduité  que  ce  mouton  avait  à  lèchet 
cette  pieiTe,  avertit  ses  voisins  de  ce  fait  qui  leur  parut 
merveilleux  aussi  bien  qu'à  lui  parce  qu'ils  en  furent 
témoins,  ce  qui  les  obligea  à  arracher  cette  pierre  sous 
laquelle  ils  trouvèrent  un  caveau  ou  angïe  de  terre 
creuse  qu'on  y  voit  encore,  dans  lequel  on  trouva  la 
châsse  de  saint  Francaire  avec  tous  les  ossements  de 
son  saint  corps,  que  l'on  porta  avec  beaucoup  de  so- 
lennité à  l'église  de  Cléré,  et  il  y  a  apparence  que  ce 
fut  la  seconde  translation,  qui  s'en  fit  comme  nous 
avons  déjà  dit,  ainsi  que  Ta  remarqué  M.  Texier,  l'an 
1470,  sous  le  pontificat  de  Jean  du  Bellay,  évêque  de 
Poitiers.  On  mit  le  corps  de  saint  Francaire  sur  le  grand 
autel  de  l'église  paroissiale  de  Cléré-sous-Passavant, 
dédiée  de  tout  temps  à  saint  Hilaire,  évêque  de  Poi- 
tiers, son  fils ,  et  on  bâtit  une  petite  chapelle  dans  le 
lieu  où  on  avait  trouvé  son  corps,  proche  une  fontaine 
qu'on  appelle  la  fontaine  de  saint  Francaire,  dont  les 
eaux  hués  avec  foi  par  ceux  qui  y  en  Viennent  puiser, 
les  ont  guéris  d'une  infinité  de  maladies  ;  la  chapelle 
est  tombée  de  vétusté.  > 

8.  Je  ne  cite  le  P.  '  de  Giry  que  pour  faire  voir  qu'il 
a  estropié,  com*me  les  aulres  allégués  par  Rapaillon, 
le  nom  de  Francaire,  qui  pour  lui  n'est  pas  saint. 

f  II  (S.  Hilaire)  naquit  selon  ^elques-uns  à  Poi- 
tiefs  ;  et  selon  d'autres,  aux  environs  de  cette  ville,  de 


-  515  — 

riUttstre  famille  des  Murets.  Son  père  appeUé  Fraûco- 
nius,  prit  un  grand  soin  de  son  éducation  dés  ses  plus 
faibles  années,  et  l'employa  de  bonne  heure  à  l'étude 
des  lettres  et  des  sciences  les  plus  nécessaires  :  mais  le 
voyant  d'un  naturel  tardif  à  comprendre  ce  qu'on  lui 
enseigaoit,  il  l'envoya  voyager  en  Grèce  en  Italie,  afin 
de  vaincre  par  le  travail  et  par  la  diversité  des  païs,  la 
rudesse  de  son  esprit  (1).  » 

9.  Thibaudeau,  avocat  à  Poitiers,  au  tome  I,  p.  33, 
de  son  Abrégé  de  V Histoire  du  Poitou  (Poitiers,  1782), 
compile  Rapaillon  ,  que  du  reste  il  cite  en  note  ,  et 
ajoute  maladroitement  la  variante  Francorius  à  celle 
déjà  connue  de  FrancorUu^. 

a  Saint  Hilaire  naquit  au  château  du  bas  Mureau,  en 
la  paroisse  de  Cléré,  près  Passavant,  sur  les  confins  de 
l'Anjou  et  du  Poitou.  Son  père  se  nommait  Francorius 
ou  Franconius  (2);  il  était  comte  de  Vihers,  Comei 
Viarensis  :  sa  mère  se  nommait  du  Mureau;  on  trouva 
leurs  corps  en  l'année  1500,  dans  l'église  de  Cléré;  ce 
qui  fait  juger  qu'ils  deraeuroient  dans  cet  endroit. 

»  L^  terre  de  Vihers,  qui  appartenoit  au  père  de 
saint  Hilaire,  lui  passa  sans  doute  à  titre  successif;  il 
la  donn^  à  son  église.  Cette  Jterre  de  Vihers,  Vieracum^ 
est  mi$e  «u  nombre  de  se$  domaines  dans  la:  charte  de 
Loui^  IV,  roi  de  France,  de  l'an  942.      -    . 

)vLes.parenlP  d'Hilaire  ne  négligèrent. rien *pour  son 
éducation.  » 

(t)  R.  P.  de  Giry,  Les  Vies  des  Saints.  Paris,  1719,  t.  î,  col.  298. 
(2)  Histoire  maiîusç,  de  l'é^^ise  de  S.  Hilaire  (^ar  Rapaillon. 


—  516  — 

iO.  Allard  de  la  Resnière,  av^at  à  Poitiers,  prit  à 
quartier  l'historien  Thibaudeau  et  consacra  à  relever 
ses  erreurs,  ainsi  qu'à  en  formuler  quelques  autres, 
les  pages  41-44  de  ses  Errata. 

<  Vous  dites  : 

Texte.  —  Page  33,  ligne  6.  c  Saint  Hilaire  na- 
quit au  château  du  Bas-Mureau  en  la  paroisse  de  Cléré 
près  Passavant,  sur  les  confins  de  l'Anjou  et  du  Poitou  : 
son  père  se  nommait  Francorius,  ou  Franconius  ;  il  était 
comte  de  Vilhiers ,  Cornes  ViarensiSy  sa  mère  se  nom- 
mait de  Mureau.  On  trouva  leurs  corps  en  1500  dans 
l'église  de  Cléré,  ce  qui  fait  juger  qu'ils  demeuraient 
dans  cet  endroit...  Cette  terre  de  Vilhiers,  Vieracum^ 
etc.  etc 

»  Commentaire.  —  Saint  Hilaire  naquit  au  château 
du  Bas^Mùreau.  Vous  n'avez  pas  lu  la  préface  que 
Dom  Constant,  religieux  bénédictin  de  la  Congrégation 
de  Saint*Maur  a  mise  à  la  tète  de  l'édition  qu'il  a  donnée 
au  public  des  Œuvres  de  saint  Hilaire,  ni  des  Œuvres 
de  saint  Jérôme,  ni  celles  de  Fortunat,  ni  les  écrivains 
ecclésiastiques,  car  vous  y  auriez  vu  que  saint  Hilaire 
était  né  à  Poitiers,  comme  le  dit  le  père  Longueval, 
Hist.  de  l'Egl.  Gai.,  tom.  /,  et  vous  seriez  convaincu 
qu'il  n'était  pas  né  au  château  du  Bas^Mureau,  car 
ce  château  n'existaii  certainement  pas  dans  le  quatrième 
siède;  vous  aveîS  donc  eu  tort  de  vous  fier  à  Bouchet 
et  à  Texier  :  il  fallait  vous  en  rapporter  avec  confiance 
aux  deux  vers  de  Fortunat  que  vous  copiez,  page  489. 

»  Son  père  sfi  nommait  Francorius  ou  Franconius. 
Bonchet  l'appelle  Francarius,  et,  après  lui,  Texier  le 


—  517  — 

QômUQe  Francâire,  le  nom  vous  a  paru  ti*ôp  moderne, 
vous  l'avez  nommé  Francorius  pour  dépaysei*  votre  lec-^ 
téur,  ()ni,  je  le  crois,  ne  prendra  pas  ce  que  Vôbs  dites 
à  la  lettre. 

>  jR  était  comte  de  Vilhîersy  Cornes  ViarensiSy  que 
Vous  dérivez  de  Vieracum.  D'abord  dans  quel  ciiction- 
ttâire  trouvez-vous,  Monsieur,  que  Vieracum  voulait 
dlt^  Vilhiers  f  Comment,  vous  êtes-votis  instruit  de  la 
généalogie  de  S.  Hilaire,  du  père  de  saint  Hilaire, 
eôttitô  de  Vilhiers?  Cela  n'a  pu  être  par  la  i-ai^on  que 
dans  le  troisième  et  quatrième  siècle,  la  dignité  dé 
comté  était  inconnue.  Ne  vous  avisez  doné  pltls  de  faite 
de!s  comtes  de  Vilhiers  dans  le  troisième  siècle,  tous 
donneriez  dés  impressions  contre  voua,  et  Ton  vous 
soupçonnerait  violemment  de  ne  pas  connaître  l'histoire 
de  France. 

9  5a  mère  se  nommait  de  Mureau.  Cette  découverte 
est  ihtéreàsante;  il  est  fâchent  que  vous  ignoriez  que 
ce  ne  flii  qu'au  douzième  siècle  que  les  noitls  devinrent 
noms  de  famille,  que  par  conséquent  on  ne  s'en  servait 
jamais  dans  lès  tt'oîsiémeet  quatrième  siècles.  Il  restera 
démontrè-que  la  mère  de  saint  Ûilaire  ne  s'appelait  point 
de  Mureau  ;  il  y  a  aussi  lieu  de  croire  qu^èllé  n'était  pas 
comtesse  de  Vilhiens  ;  qu'en  pensez-vôué ,  Monsieur  ? 

f)  On  iroum  leuri  corps  en  l'année  4300.  Bouchet  dit 
en  15S4  et  Texier  en  4470;  ce  dernier  ne  parle  qile 
du  corps  de  S.  Francaire,  confesseur,  il  n'a  point  parlé 
de  celui  de  Madame  de  Mureau  ;  c'est  une  obligation 
que  nous  vous  aurions,  si  nous  pouvions  ignorer  qu'au 
troiâièœe  et  quatrième  siède,  on  n'inhumait  point  dans 
les  égliées. 

REP.  ARC  37 


—  518  — 

)  De  Cléré.  Je  crois,  Monsieur,  que  cette  église 
n'existait  pas  dans  le  quatrième  siècle  >  (i). 

il.  Dreux-Duradier,  ou  plutôt  son  continuateur, 
M.  de  Lastic-S.-Jal  (t.  Il,  p.  133-124),  plaisante  sur 
le  compte  du  prieur  Texier,  qu'il  estime  peUy  ainsi  que 
la  tradition  recueillie  par  lui,  comme  si ,  à  défaut  de 
documents  historiques,  la  tradition  demeurait  sans 
valeur.  D'ailleurs  rien  de  nouveau  dans  ces  quelques 
lignes  : 

«  Louis  Texier,  prêtre,  prieur  d'Allone,  prèb  Saumur, 
a  prétendu  que  saint  Hilaire  était  né  chrétien  et  fils  de 
saint  Francaire,  confesseur,  dont  le  tombeau  fut  dé- 
couvert à  Claire,  près  Passavant,  en  Poitou,  sous  l'épis- 
copat  de  Jean  du  Bellay,  évêque  de  Poitiers,  en  1470; 
mais  il  n'accuse  pour  preuve  que  la  tradition  et  l'auto- 
rité de  Jean  Bouchet  et  de  René  Benoit  qui  l'a  copié, 
avec  un  extrait  de  la  généalogie  de  la  maison  du  Bel- 
lay, sans  pièces  justificatives,  qui  d'ailleurs  ne  remon- 
teraient, suivant  l'auteur,  qu'au  onzième  siècle.  Cet  écrit 
assez  rare  et  au  fond  très-peu  estimable,  est  intitulé  : 
Discours  fait  en  Chonneur  de  saint  Francaire^  père  de 
saint  Hilaire,  évêque  de  Poitiers.  Saumur,  in-S®,  1648, 
seconde  édition  (3).  » 

12.  Rapaillon  est  cité  une  seconde  fois,  mais  avec 
une  légère  variante,  par  M.  de  Longuemar,  dans  son 
€  Essai  historique  sur  l'église  collégiale  de  Saint-Hilaîre 

(1)  M***,  Poitevin.  Errata  de  V abrégé  de  V histoire  du  Poitoti,  ou 
lettres  à  M.  Thibaudeau ,  suivies  d*un  petit  Commentaire  i^  partie, 
1783,  in-42. 

(2)  Dreux-Duradier.  Histoire  littéraire  du  Poitou^  —  ooniinuée 
fusqu'en  i8i9  par  M.  de  Lastic-Saint-Jal.  Niort.  1849,  io-So. 


—  519  — 

le  Grand  de  Poitiers,  >  apud  c  Mémoires  de  la  Société 
des  Antiquaires  de  l'Ouest,  »  année  4856  (Poitiers, 
1857,  in-8o). 

€  S'il  faut  s'en  rapporter  à  G.  Rapaillou,  saint  Hilaire 
était  né  au  château  du  Bas-Mureau,  paroisse  de  Cléré, 
près  Passavant,  sur  les  confins  de  l'Anjou  et  du  Poitou, 
Au  xvi«  siècle,  les  ossements  de  son  père  Francorius, 
comte  de  Vihers,  furent  retrouvés  dans  l'église  de  Gléré, 
et  la  ten*e  de  Vihers  fut  une  des  premières  dotations 
de  saint  Hilaire.  Toutefois,  saint  Fortunat,  qui  vivait 
deux  siècles  après  saint  Hilaire,  affirme  au  contraire, 
dans  les  deux  vers  suivants,  cités  par  Thibaudeau,  qu'il 
est  né  à  Poitiers  même  : 

F 

Pictavis  residens,  qua  sanctus  Hilarius  oiim 
Natus  in  urbe  fuit,  notua  in  orbe  patet.  » 

43.  M.  de  Chergé  dans  Les  vies  des  Saints  du  Poitou 
(Poitiers,  1856,  in-12),  pages  34-35,  est  un  peu  trop 
laconique  sur  S.  Francaire. 

c  Son  père  (de  S.  Hilaire)  se  nommait  Francaire. 
Ses  restes  et  ceux  de  son  épouse  ont  été  retrouvés,  vers 
le  commencement  du  xvi®  siècle,  dans  l'église  parois- 
siale de  Saint-Hilaire  de  Cléré,  près  Passavant.  On  ignore 
le  nom  de  la  mère  de  notre  saint;  mais  ce  qu'on  sait, 
c'est  qu'elle  s'associa  aux  efforts  de  son  époux  afin  de 
rendre  leur  fils  digne  du  rôle  auquel  l'appelait  sa 
naissance.  » 

iA.  €  S.  Francaire  et  S.  Hilaire,  »  apud  dom  Cha- 
mard  :  «  Les  vies  des  saints  personnages  de  l'Anjou.  » 
(Angers,  1863,  p.  6  et  suiv.) 

L'auteur  y  suit  à  la  fois  la  tradition  locale,  Texier  et 


—  540  — 

Grandet;  seulement,  page  13,  il  avance  un  fait  qui  n'est 
rien  moins  que  prouvé  relativement  à  la  sépulture  de 
S.  Francaire. 

«  C'était  le  28  avril,  vers  le  milieu  du  iv«  siècle. 
S.  Francaire  fut  enterré  dans  le  cimetière  prés  du  châ- 
teau qui  porte  actuellement  le  nom  de  Bas-Mureau.  > 

Aucun  auteur  ne  parle  de  ce  cimetière  et  Grandet  af** 
firme  également  sans  preuves,  que  l'inhumation  se  fit 
dans  la  chapeUe  du  château. 


XIX. 


S'il  est  permis  d'augurer  de  l'avenir  par  le  présent, 
je  puis  dire  que  le  culte  de  S.  Francaire  est  affermi  à 
jamais  en  Anjou,  non  moins  que  dans  l'hagiographie 
gallicane. 

Le  corps  retrouvé,  la  châsse  restituée  à  son  ancienne 
place,  l'effigie  du  saint  propagée,  les  Actes  écrits  pouf 
entrer  dans  le  vaste  recueil  des  BoUandistes,  sont  au- 
tant de  faits  mémorables  qui  intéressent  non  moins 
l'histoire  générale  de  France  que  la  chronique  locale,  et 
qui  par  leur  simultanéité  et  leur  agglomératioii  formant 
comme  un  flambeau  lumineux  dont  la  clarté  atteindra 
jusqu'à  de  lointaines  générations. 

Ici  finit  ma  tâche,  car  d'autres  honneurs  ont  appelé 
d'autres  travaux.  Je  suis  heureux  d'avoir  clos  mes  fonc- 
tions d'historiographe  du  diocèse  par  la  récognition  du 
corps  de  S.  Francaire.  Poitevin  de  naissance,  Angevin 
d'adoption,  il  m'a  été  doux  et  agréable  de  £ïire  revivre 
ou  plutôt  d'aviver  la  dévotion  à  un  saint  qui  fut  et  est 


—  524  — 

resté  Poitevin  et  Angevin  tout  ensemble,  puisque  Cléré, 
au  spirituel,  relevait  de  Tévêché  de  Poitiers  et,  au 
temporel,  ressortissait  de  la  province  d'Anjou. 

Dieu  soit  loué  et  béni  de  ce  que  par  mes  mains, 
qu'il  n'a  pas  jugées  trop  indignes,  il  a  daigné  réhabi- 
liter les  gloires  impérissables  du  diocèse,  S.  Florent,  S. 
Maxentiol  et  S.  Francaire.  c  Non  nobis.  Domine,  non 
nobis,  sed  nomini  tuo  da  gloriam  n  (Pscdm.  cxiii) . 

X.  chanoine  Barbier  db  Montâult, 

Commandeur  de  TOrdre  du  Satot-Sépulcre. 


TABLE  DES  MATIÈRES. 


Armoriai  des  éyêques  et  administrateurs  de  Tinsigne  église 

d'Angers 249 

Amauld^  éyéque  d'Angers  (Sur  la  polémique  qui  s'est  élevée 

à  l'occasion  de) 81 

Benoist  (Décès  de  M.  l'abbé) 36 

Bibliographie 300 

Bordillon  (Lettre  de  M.  J.  Sorin  à  M.  G.) 37 

Brezé  (Notice  historique  sur  le  château  et  la  commune  de).  65-221 

Chapelle  Falet  (la)^  à  Angers 247 

Chapitre  d'Angers  (Croix  du) 34 

Eglises  bâties^  réparées  ou  arrêtées  en  projet  sous  l'épiscopat 

de  M»'  Angebault 203 

Francaire^  confesseur  (Actes  de  saint). . .    454 

Maison  du  roi  (La)  à  Saumur 296 

Maxentiol^  prêtre  et  confesseur  (Actes  de  saint) 153 

Monuments  antiques  de  l'Anjou 5-49-205-385 

Murs  (Bénédiction  de  l'église  de) 36 

Musée  archéologique  (Dons  faits  au) 246 

Numismatique  Angevine.  —  Antiquités  méroTingiennes 21 

—  Antiquités  carloyingiennes  .....  417 

—  Comtes  Ingelgériens  et  Plantage- 

*                                nels 432 


—  bU  — 

Numismatique  (DécouTertes) 248-306 

Puy-Notre-Dame  (Gayes  des  Saraudières  au) 35 

Robert  d'Arbrissel^  fondateur  de  Tordre  de  FonteTrauld  (Etude 

hagiographique  sur] 313 

Séances  de  la  Commission  archéologique  (compte-rendu): 

Séance  du  10  décembre  1862. 143 

Séance  du  4  février  1863 308 

Tigné  (Bénédiction  de  l'église  de) 145 


Angers,  imp.  Cosnier  et  Laobése.