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Full text of "Voyage dans les départemens du Midi de la France / 4,1"

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I 


m 


BCU   -   Lausanne 

llllliillii 


VOYAGE 


LES  DÉPVtftlïMBSS'DtJ  NHDI 

HE  EA>H6â3<fe^! 


TOME    III. 


HDAYOY 


Chez  l'Editeur  TOURNOSEN  fils,  Libraike, 


T  T  I     ïï  M.n  T 


VOYAGE 

DANS      i  ' 

LES  DÉPARTEMENS  pu  MIDI 

•DE  r A  FRANCE; 
Par    AvBlN-Lovis    MILtIN, 

Membre  Je  l'Institut  «c  île  la  Légion  J'honneuc,  CoMcivatpur  dei  incdaiilfs. 
Je)  pierrej  giivée}  et  dw  aniii]ue)  it  la  Bibtf<'((icq<iF  impéiialc ,  Pwleistur 
d'aDÙ<|uités ,  Membre  de  la  Société  royale  dei  idencei,  de  Goiilingue,  Je 
'l'Académie  italienne,  de  celle  dei  curieux  de  la  nature  à  Erlang.  dei  r^cicnces 
pbytiqiiei  de  Zurich ,  d'biiroire  naiurelle  et  de  nihécalogïe  d'léni,de  l'Aca- 
ilémie  royale  de  Dublin  ,de  la  Société  linn^nne  de  Londres,  de  l'Ai^diîmie 
impériale  tri  nafiitaliste)  de  Moscou ,  de  l'Académie  leyale  des  antii|uii*B  de 
Copentague;  det  Sociétés  d'histoire  naturelle,  philomathitiuc  .  i^lvanïque, 
celtii(iie .  médicale  d'émulation  .de  l'At^née  des  arts.4e  Paris  ;  des  AcaiUmiei 
CI  Sociétés  dex sciences  de  Tqrin.Lyon ,  Ro»en ,  AbbeifiV.  Bouiojne .  Poitiers , 
Niort.  Nimes,  Mar^ille.  Alenton,  Caen,  Grenoble  ,  Colmar.  Nanci,  Gip, 
Sttasbgui^,  Miyenee,  Beunjon,  Nantes,  Soisjons,  Lille  .  &c.  &c.  &c. 


TOME  m. 


A  PARIS; 
DE  L'IMPRIMERIE  IMPÉRIALE. 


M.DCCQVÎB. 


i  y3d 


VOYAGE 

DANS  LES  DÉPARTEMENS 
DU  MIDI  DE  LA  FRANCE. 

CHAPITRE  LXX. 

DiFART  dfc  Niée.  -^  SaIMt-Laurîënt.  —  Le  Var.  ^ 
L'Anguille  est  prise  par  les  Anglois.  -^  Nmisli.  — 
Gagnes.  —  Château.  —  Peintures.  —  Cérémonici 
des  fiinéraîHcs.  —  La  Colle.  —  Saint-Paul;  — 
Vence.  —  Inscriptions.  —  Taurobole.  — ■  Sarco- 
phage thrélien.  —  Coloiines  données  par  les  Aîaisilii, 
—  Fontaine.'  '—  Ihscripiion  provençale. — Ttmplicn. 
^<-  Commerce. 

JNiCE  devoil  être  le  point  le  plus  éloigné  de  noire 

voyage  ;  Gènes  ne  &isoit  pas  alors  parrie  de  l'Ëm* 

pire  français ,  d'où  il  n'entroit  pas  i 

sortir  :  nous  songeâmes  donc  au  n 

vbité  toute  la  côte  de  Marseille;  r 

nir  par  la  mont^ne  :  nous  nous 

Braves  matelots  (  i  ]  ;  et  l6  22    juin  nous  ptîtnes 


(1)  Nouï  n'avions  eu  qu'à  nous  loiier  de  leur  complaisance,  ds 
leuc  pRjbhé  «  de  leur  tfonnc  conduite  :  leur  chef,  M.  Roussel, 
lieutenant  des  cîouanes,  eit  un  jeune  homme  actif,  hrave  et  In- 
telligent, qui  probablement  a  reçu  auiouid'hui  ravanceraent  qu'il 

Tome  JII^  "       A 


a  CHAPITRE    LXt. 

des  mulets  pour  nous  rendre  à  Grasse.  II  y  a  une 
toute  plus  directe  et  beaucoup  plus  courte;  mats 
notre  intention  étoîi  dé  passer  par  Vence,  parce  que 
cette  ville  renferme  des  monumens  antiques. 

Le  chemin  jusqu'au  pont  du  Var  est  très-bien 
entretenu  ;  et  la  mer,  que  l'on  a  constamment  à  sa 
gauche  ,  forme  un  agréable  coupHTceil.  Après  une 
heure  et  demie  de  marche,  onarrive  à  Saint-Laurent, 
où  l'on  fait  un  excellent  vin  muscat  :  c'étoit  autrefois 
la  limite  du  comté  de  Nice;  c'est  aujourd'hui  celle 
du  département  des  Alpes-Maritimes. 

Le  Var  étoït  a]>pelé  par  les  Romains  Varus,  nom 
qurest  probablement  celtique.  On  regardoil  ce  fleuve 
comme  la  limite  entre  la  Gaule  et  Tltalie ,  en  con- 
fiindant  avec  cette  dernière  la  contrée  au-delà  des 
Alpes-Matitimes  qu'on  appeloit  Hespérîe,  Il  prend 
la  source  dans  le  département  des  Alpes-Maritimes: 


voy ois  à  Marseille,  par  cette  occasion ,  les  minéraux,  les  plantes, 
Ici  insecte*  ^u<  noiu  2vi«iu  recueillit  :  tout  a.  été  pris  par  let 


manière)  sans. être  dangen^use»  ay<Mt  qudque cfaosa 
d'eâfra^ant  ,à .  caute .  de  la  largeur  du  fleuve ,  qui^ 
en  cet  endroit,  a  huit  cents  mètres  (i),  et  de  la 
rapidité  de  s6n  cours  ^  On  fe  passe  aujourd'hui  sur  ua 
mauvais  pont  de  bois.  II  est  probable  cpi'apràs  avoic 
terminé  la  nc^yelle. iHXite  dltaliepar  Gènes,  on  en 
construira  un  en  pkrre  ;  ce  qui  âcBiteca  le  roulage  je£ 
augmentera  le  CQfiiméitie  de  Nice  :  mais,  tomme  il 
faut  toujours  qMù  le  .mal  se  mêle  au  bien^  ie  coâin 
mexi^  de  Gf tfssf  pcfurra  ^n  soufirin       . 

Après  avoir  travçi^é  le  ileuv-ç,  on  est  sur  le  terri- 
toire des  ^ncieiQ5\A^<r7:vw%,  cités  dsUis  l'inscription  du 
trophée  d'Augfiste  k  h  Turbie  (2).  Bientôt  on  arrive 
^  Cofftes,  vttfage  dom  le  sol  est  presque  entière- 
ment recouv^t  de  cailloux  roulés  g  ex  est  arrosé  par 
une  petite  rivière^  du  même  nom.  Qn  y  cultive  du 
blé  )  des  vigoies  et  d^  oliviers.  Lé^  chemins  qui  con- 
duisent k  ce  village /$oat  bordés  d'aloès  et  de  gre- 
nadiers :  les  rufô.sçnt.salé^  et . étroites,  et  les  mai^ 
sons  mai  bâties  ;  mais  on  doit  s'y  arrêter  pour  voir  le 
diâteau  qui  apparteQ<^t  autrefois  à  |a  famille  Gri- 
maldi.  La  cçur  de  ce  bfzarre  édifice  est  si  petite , 
qu'une  chaise  à  porteur  ne  pourroit  y  tourner  sans 
qu'on  en  ôtàt  les  bâtons;  et  cependant  elle  est  re* 
vêtue  de  marbre  :  l'escalier  lest  aussi  tout  de  marbre 


Il        ■!  i  imttmmmi*m»mmiimi9mmtmÊÊm9fmmmi0mammmmmmmmmimm 


(i)  Plus  de  2450  pieds, 
ti)  To«cH,pagej8i,      , 


->      <" 


4  CHOtPITftE    "LXX. 

aaipté  en  aiabèÈqae;  jla  rompe  est  sbattaïue  par  de 
gros  baUistres  lAe  tout  présente  un  ensemble  aussi 
massif  que  pourrait  l'être  un  esoilier  de  Versailliâ  ou 
de  qudque  aatn:  grande  maison  r&fBie.  Ces  <ïé- 
gsés  ne  ctmdais^'  ceptendant  qu'à  des  Mlles  d'une 
médiooe  gràndear  et  d'une  distnbuti(»l^  peti  com» 
mode.  On  vani«  k  cAare  de  PAoétin  qui  tii  peinte 
^ûr  le  plaËmd  du>  salon  :  f'histoim  oitière  du  fils 
d^ApoHoa  et  de  Clymène  eKt  r^résântée  àwM  <des 
médaillons  qui  entourent  le  ^SHJell  prihcipâl,  et  le 
tout  est  soutenu  .pu  des^tëltitii&ds."  On  ataibue 
cet  ouvrage  à  Carhne ,  auiear  du  plafond  de  l'église 
de  l'Ànnonciade  à  Cènes  ;  il  ne  nous  a  pas  pani 
mËric^  la  réputation  dont  il  "jouit.  t>es  arti^teurs 
t^étoient  emparés  de  ce  beau  salo»  pour  j  joi^r  la 
Comédie;  le  tfiéitre  étoit  dressé,  eltoi-né  de  décora* 
■rions  de  papier-:  i'eSpoir  dy  vw  exercer  les  taleiis 
déCagjitfes  rte  put  cepen- 
Xrgét  ùotre  s^our  dans  ce 

is  d'une'  cérémotiife  inté- 
resse, qui,  par  son  pei 
pHson  ou  d^  tombeau, 
aprfle.où  l'on  célébrdît  Ift 
messe,  i^usKUifs  en&ns  à  geïiOiiz  et  formant  uii 
cercle  ;  chacun  d'eux  tenoit  à  la  main  un  cieige. 
Nous  crûmes  d'abord  qu'on  étoit  à  l'élévalion  de 
l'hostie,  et  que  ces  cierges  avoîent  pour  objet  de 


r 

rendre  plu^  sçleniidi  çç  momeiiit  d]^  saiut  iaQ^i§çe  { 
iiou$.;i{>prQ€^âmes  ^  et  nçms,  vîmes  sur  |e  çafre^  ^9$ 
pçtite  bière .  garnie  de^  linge  Uanç  ,  ^ms  iaqu^ 
étoît  unjoli  en^nt  enveloppé  d'un  tinçeul  de  milme 
couleur ,  et  couronné  de  roses  çt.cte  fleprs  odorante^. 
La  simplicité  nslïve  de  cette  céréjp;)Qnie  fiin^rç  »  qiM 
contra^tQÎt  avec  l'obscurité  diji  li^  où  elle  se  «é|ér 
broit ,  nous  causa  une  vive  émotion.  Le  même  usag^ 
est  suivi  dans  presque  toutes  fer  viBes  de  la  Pro- 
vence. On  répand  des  feuilles  de  lierre  sur  les  corps 
des  jeunes  filles  ;  les  personnes  mariées  sont  ense- 
velies dans  des  draps  noirs. 

Le  chemin,  en  sortant  dé  Gagnes,  est  bordé 
de  petites  collines  agréablement  couvertes  de  bois  : 
on  nous  montra  à  gauche ,  dans  un  enfoncement , 
un  village  appelé  la  Coite,  dont  le  territoire  produit 
des  orangers  en  pleine  terre  dans  des  lieux  abrités  ; 
et  près  de  ià  Saint-Paul ,  petite  ville  entourée  de 
vieilles  foriificarions  ,dont  TefTet  est  pittoresque  :  non- 
seulement  les  orangers  y  prospèrent  aussi ,  mais  la 
canne  à  sucre  y  passe  Thiver  sans  précautions  ;  on  y 
récolte^  un  vin  justement  estimé  dans  tout  le  dépar- 
tement. On  distingue  Grasse  dans  le  lointain. 

A  neuf  hewes  nous  étiom  à  Venee ,  appelée 
par  les  Romains  Vmia  et  Vintium  Nirusiorum  (ij. 
Cette  ville,   bâtie  sur  un  banc  coquîHîer  où  fon 


(  I  )  Cette  viiie  conienoit  des  magasins  pour  rapprovisionnement 
lïcs  armées,  puis(|u  elle  est  encore  appcioc  Vifitim  Horreum  Citsaris, 


A  ^ 


.6  CHAPITRE    LXX. 

trouve  quebfues  fossiles  agatîsés ,  étoît  sous  '  Ie$ 
Romains  la  capitale  des  Nerusii ,  et  *elle  conserve 
encore  quelques  monumens  antiques  :  ce  sont,  en 
général ,  des  inscriptions^  qui  ont  été  scellées  dans 
les  murs  de  la  cour  de  Tévêché ,  où  nous  nous  ren- 
dîmes. Plusieurs  ont  été  publiée^ ,  mais  d'une  ma- 
nière inconecte.  La  première  (  i  ) ,  jdacée  près  d^ 
f  église ,  est  en  forme  d'aûtel. 


i: 


XT 


J 


) 


^m 


( 


P.    CpÇNEHO 

LICINip  .  VALE 

RIANO     NOBILIS 

SIMO  CAES. 

PRINCIPI  IVVEN 

TVTIS 

NEPOTI   ET  FII.IO 

D  D   NN   VALERIA 

J4I   ET    GALLENI 

AVGG    .    ORDO 

VINTIENSÎVJ^ 


V 


V 


J 


A  Puhîitts  [%)  CortifUus  Licinius  Valçrianus  {^) ,  trés-mofle  Càar, 


(i)  Papon,  Histoire  de  Provence,  t,  loi, 

il)  publia, 

(3)  ^^  prince  est  celui  ^ui  est  vulgairement  connu  sous  Iç 


CHAPITRE    lîCît.  7 

]^nce  de  la  jeunesse,  petit-fils  et  fis  de  nos  seigneurs  (i)  Vdérîeu 
tt  Cnllien  (a)  Augustes  (3),  Vordre  dfis  Vintienses  (4). 

La  suivante  est  inédite. 


IVLIVS  MARCIA 
NVS  AVRELIE  SABI 
NILLE  CONIVGI 
MERENTISSIME  FEC 
ET  MAXIMIA  QVIN 
TINAVIVIA  CORNE 
IIES  SAfilNELLES 
SVE  iPIENTISSIME 
F  E  CIT 


EN  NIA  FVSCINA 

VIVA  SIBI 

FECIT 


(7} 


.  Julius  Marcianus  à  Aurélia  Sahinilla,  i^nse  très-méritante;  eâ 
Maximia  Quintina,  de  son  vivant  {^),  à  Comelia  Sahinilla  (6)  sa 
file,  qui  la  ehérissoit, 

ir  II  r  T     — ^— — — — — ^^■~^— — ^.fa^— — ^— ^— i^MMi»^— — ^ 

nom  de  Valerianus  le  jeune,  et  plus  souvent  spus  celui  de  Saloninus. 
li  fut  nommé  César  i'an  de  Rome  100^,  253  de  J.  C,  par  son 
pcrc  ,  qui  étolt  aiors  dans  les  Gaules;  et  c'est  probablement 
à  l'époque  de  cette  nomination,  et  pour  ia  célébrer,  que  cette 
inscription  a  été  faite, 
(i)  Dominorum  Nostrorum, 

(2)  CALLENI ,  par  erreur,  pour  G  ALLIENT.     ' 

(3)  Cette  inscription  confirme  que  Saioninus  étoît  pctît-fiis 
dç  Valérien  et  fils  de  Gaiiicn  et  de  Salonine,  ainsi  que  GrUTER  , 
Jnscript.  CCLXXV ,  j ,  i'avoit  déjà  établi  d'après  une  autre  inscrip- 

1 

ticMi. 

(4)  ORDO  viNTlENSrUAf,Ondoi%so\iS'enteTïdrcdesd/curiont. 

Nous  avons  vu  que  ce  corps  étoit  chargé  de  l'administration  des 
villes.  Supra,  1. 1,  p.  430.  . 

(5)  VJVIA  pour  K/Kw4,  par  erreur. 

(6)  Probablement  çorNELIES  sa^IN^LLJ^S  est  là  pour  Cor* 

nelia  Sahinilla» 
(j)  Bouche,  Ch9r.  df  Provence,  1. 1 ,  p.  184. 

A  4 


L.  VE^iV?>IVS 
VALERIANVS 
DEC.  VINTMAG  f^ 
ET   SACERDQ 
TIO   FVNCTVS 
SIBI   ^E   VIBIAIÇ 
l   MVCI  FH 

PATERNAE 
VXORl 
VIVI  S    .    F 


W^m 


î  F     "    1 


Lucius  Vehdius  Valerianus ,  décurion  dt  Vence(i),  ayant  rempli 
l  es  fonctions  de  magistrat  ei  de  prêtre  (2)^  À  lutet  âscn^ouse  Vîhia  Pa- 
tema,  filk  de  Mudus  (3  ).  //&  ont  fait  ce  monument  de  leur  vivanti^4)* 


D.        M. 

IVCVNDILL 

A    ]yiAT.    FH.IO 

ONE   SI  PH  0  R 

0    FIENT   VIVA 

FEÇ  JT.  y.  A.  XX W 

• 

Ce  monument  (j)  a  donc  été  fait  pour  Onesî- 
phore,  âgé  de  xxv  ans,  par  sa  mère  Jucundilla^ 

pendant  qu'elle  vîvoît. 

■■  —  f   >  ■■ 

(i)  DECurio  VINTia, 

(a)  MAGistratu  ET  SACERDOTIO, 

(3)  MUCliFilia, 

(4)  VJVI  Sibi  Fecerunt. 

(5)  Bouche^  Chor.  de  Provence,  284» 


/ 


eHAflTUf   LJXXp 


9 


IDAEAE  MATRI 
YALERIA  MAR 
CIANA  VALE 
RIA     CARMO 

aNe  et  CASSI 

VS  PATERNVS 
SACERDOS    TAV 
RIPOLIVM    SVoSVH 
V  CELEBRAVERVNT. 


(0 


^ 


i4  la.  mkt  Uànnt-,  Valerui  MoHiaiui,  Vaima  CanmêMîé  efCu^ 
slus  Patenm ,  f^trc  ont  célébré  ce  tauroioh  à  leurs  fids  (2], 


^i"«p 


IVHO  EYGE 
.     NIjO 

IVLIVS  CLE 
MENS  ALVM 
NO  PIENTIS 
SIMO     FECtT 


(?)J 


^^^ 


D-    i^    M. 

MAECI.A 

MAECIANI  FIL 

VALERIA 

yiVA    SIBI.    FEC. 


n J(4) 


(i)  Bouche,. 1. 1 ,  p.  59. 

(a)  Les  corémonies  d'uivtaurobob  devant  exiger  dks  inkt  assai 
considérables,  il  y  a  encore,  beaucoup  d^auties)  «cempies  d*asso- 
ôatioB  de  plusieurs  personnos  pour  cet  «ac  de  retigîon. 

(5)  Bouche,  Ckcr,^ Provence,  ^84. 
\Â)ldem,  283. 


4 


%à 


CHAPITRE   LXX; 


l 


MARTI  VliTl» 

r 

M.RVFÏN1VSFELIX 
SALIiiiiI  VIRETIN 
COLA  CEMENEL 

ExVoToS 


] 


M 


'Au  Mars  Vintien  {i) ,  M,4lufinus  Félix  de  Saline  {i),  sévir  (4) 
et  habitant  de  Cemenelium ,  pour  l'accomplissement  d'un  vœu, 

A  la  suite  des  inscriptions  scellées  dans  le  mur 
de  la  cour  de  l'ancien  évêché,  est  une  pierre  de 


m^m» 


(i)GrùTER,  LVIII,  8,  incorrecte;  MURATORI,  XLV,  5,  de 
même^  SPON,  Aîiscell.  93;  id.  Ignot,  Deor.  Ara,  31  j  hlCZT.dt 
Ldpid,  ;  Maguriï,  DivinatJn  Miscel  Ital.  t. II ,  p.  228  ;  Keysler , 
Antîq,  Sept,  445,  incorrecte;  CLUVERi  ItaLant,  6j\  JOFREDI, 
Nicaa  civit,  10,  incorrecte;  BouCHE,  Chor,  de  Prav,  28?;  BOU- 
QUET, Script,  rer.  Gatt.  t.  I,  in  Exe.  G  RU  T.  136;  Maffei,  Ars 
crit,  lap,  280  ;  DONAT,  Suppl.  ad  Thesaur.  MURAT.  25,  2; 
PapON.,  *Hist.  de  Prov.  I ,  i  o. 

(2)  C'est-à-dire ,  des  habitons  de  Vinùum  [  Vence  ].  On  a  beau- 
coup d'exemples  des  surnoms  donnés  aux  dieux  d'après  les  lieux 
où  iis  étoient  adorés  :  ainsi  l'on  disoit  Junon  Argienne^  Apollon 
Sminthien,  &c, 

(3)  SALiniensis,  né  à  Saline,  Bouche  pense  que  le  lieu  appelé 
Salina,  dans  le  territoire  de  Suetri ,  étoit  Castellane;  mais  ies 
raisons  qu'il  rapporte  ne  sont  pas  concluantes.  D'AnvHIe  conjec- 
ture avec  plus  de  probabilité  que  c'étoitSeiiians» près  de  Faïence; 
mais  ii  n'y  a  là-dessus  rien  de  certain.  "' 

(4)  //////  VI R,  Augustalis  est  sous-entendu ,  ou  le  mot  sévir 
doit  seulement  s'entendre  de  l'un  des  six  magistrats  chargés  de 
l'administration  de  la  vilfe. 


/ 


/ 


CHAPITRE  LXX.  \é 

trente  -  cinq  pouces  de  haut  sur  quatre  pieds  dix 
pouces  de  large ,  ornée  d'enroulem^ns  qui  forment 
dix  -  Iiuit  cadres  remplis  de  rosaces ,  de  colombes , 
d'étoiles,  d'ancres,  &c.;  dans  les  interstices,  il  y  a 
des  grappes  de  raisin ,  des  feuilles ,  Slc.  :  au*dessus 
«st  une  pierre  <:arrée ,  de  vingt-deux  pouces ,  qui 
porte  la  figure  d'un  aigle  debout ,  ayant  les  ailes 
éployées.  Les  colonnes  qui,  dans  Pégibe,  entourent 
le  chœur,  sont  décorées  de  pareilles  sculptures. 

Le  devant  d'un  autd  de  cette  église  qui  est  dédié 
à  S.  Lambert,  offre,  sur  une  dalle  de  pierre  froide ,  ' 
les  vers  $uivans ,  gravés  en  lettres  à-peu-près  sem- 
blables à  celles  des  inscriptions  de  Sens  (  i  )  : 

DTSCAT  QUI  NESCIT,  QVOD  EPISCOPUS  HIC  REQUIESCIT 
I^OMINE  LAMBERTUS,  MULTA  BONITATE  REFERTUS, 
QUIQUE  QUATERDENIS  HUIC  SEDI  PRiCFUIT   ANNIS  : 
NON  HUNC  EREXIT  RES  BLANDA  NEC  ASPERA  FLEXIT. 
FARCAT  PECCATIS  ILLIUS  FONS  PIETATIS, 
ET  LUCESCAT  El  LUX  PERPETUEE  REQUIEI. 

Que  celui  qui  l'ignore  apprenne  qu'ici  rq^ose  un  fvêqne  nommi 
Lambert  t  recommandable  par  son  extrême  bonté,  qui  a  tenu  ce  si/ge 
pendant  quarante  ans  .-  //  ne  se  laissa  ni  enorgueillir  par  la  prospérité , 
ni  abattre  par  l'adversité.  Que  la  source  de  piété  lui  pardonne  ses 
péchés,  et  que  là  lumière  du  repos  étemel  brille  pour  lui. 

Le  devant  de  Tautel  de  S.  Veran,  qui  est  auprès, 


(jj  TomcL*%p.  87  €t  130. 


'     .jJT    • 


L-3>ii»fc.  » ...i.  .      .~     '"^,JS'**,^3^^.  -    I  '1  %fci 


Af  CHAPITRE  1.3{X. 

fit  composé  é0  h  pvtîe  aBiténeure  d'w  s^rcopîi^ge , 
dfvhée  en  trois  ci^F<é$.  Sur  celui  du  roUieu,  ron  voit 
cbns  ^ne  conque  i^  buste  d'un  homme  et  celui  d'une 
femme  ;  à  chacun  des  deu^  angles  $upérie\ir$  est  un 
triton  sonnaftt  du  buccin.  Au-dessous  de  la  conque, 
h  gaudie ,  il  y  a  deux  génies  :  l'un  ^Hent  dans  }a  main 
droite  un  masque  comique  ,  doU^t  il  se  couvre  le 
yisiige  ;  l'autre ,  placé  devant  çelui'ÇÎ ,  sur  un  plan 
moins  élevé  ,  a  son  masque  pa?ès  de  lui.  En  face , 
on  distingue  un  autie  génie  mutilé ,  en  qiû  n'a  plus 
de  mains  ;  derrière  ce  géjaie  est  i'entrée  d'une  grotte 
sur  laquelle  est  perché  un  oiaeaa  qui  bipcquète  une. 
grappe  de  raisin. 

Les  deux  petits  côtés  ont  été  ^ciés  et  placés  au 
bas  :  ils  offrent  chacun  ïa  figure  d'un  homme  barbu , 
enveloppé  dans  son  manteau,  et  représenté  jusqu'à 
mi-cuisses. 

On  trouve  encore  dans  l'église  ces  deux  fragmens 
€pxî  paioissent  avoir  appartenu  à  une  même  ins* 
cription  ;  l'un  d'eux  indique  qu'il  y  avoit  à  Vence  un 
aqueduc. 


°  ô  "^ 


|,v 

^F  A  V  E   NTI 

\  l 

jî  V  M  S  TR^; 


4  r  s    M     Ç^     CL 
I  AQVAEDV 


CHAPITRE    tXX;  I5 

Dans  h  bàsse-coùr  de  fâ  itaîsdn  commuïW ,  on 
fit  (i)  :  -  T 


IMP  •    CAES  . 
M.     ANTO  N  I  Ô 
GORDIANO   PIo  ^EL 
ATO,    pont.    MAX. 
TRIB.    POT.    lî.    PP.    GOS, 
CIVIXAS    VINT.      DEVO 
TA.    N  y^  INI  MAIES 
TATIQVÇ  EIVS 


' 


>" 

^ 


.i 


(i)  SpON,  Mise,  202;  MURATORI,  M^CiilV,  6\  Dictionn.  encycL 

tXVII,  p.  jfoj  IkK^^^^C^l.^Mii,  >9i  Bouche,  CA^tt.  ^< 

Provence,  5^9.  .î. 

Otte  mscription  h*à  pas  besoin  d^cMpitcatf on  :  Fhidîcation 
^u  second  consulat  apprend  qu*elfe  a  été  fartb  en  l'honneur  ée 
Cmiiett  III;  *on  père  n'a  régné  <ju'un  mois  et  demi.  Elle  doit 
(tre  de  Vtn  de  Rome  992 ,  et  2  39  die  J^  C.  Atiquei  sn  rapport*  itL 
seconde  année  du  règne  de  Gordien-Pie. 


^■feML^^W.'   "  -" 


"^'>*^>«»^--'>« 


.ikn.M 


ni  CHAPITRE    VXXé^ 

Dans  un  itwr  qui  ^oime  sur  la  rue»  près  de  la 
maison  commune ,  on  lit  l'inscription  suivante  : 


- 

QVIN 

T  F   PATR 

E 

M  ATRI 

PlISSIMAE 

G  R AE  C  I  N  K 

C     F 

MA  R  C  I 

N  A 

EXT  P 

D 

D          D 

Nous  vîmes  deux  colonnes  qui,  selon  la  ti^ditiôil  ^^ 
ont  été  apportées  de  Marseille.  Elles  étoient  autre- 
fois enclavées  dans  le  mur  près  du  principal  autel 
de  la  cathédrale.  L'une  de  ces  colonnes ,  qui  a  neuf 
pieds  deux  poi:fc:es  de  hauteur  et  dix-sept  pouces  de 
diamètre ,  est  posée  sur  une  base  de  pierre  dij  pays 
dans  la  place  dei'ancienr'cimetière.  A.  la  partie  supé- 
rieure ,  on  lit  (2)  : 

MASSILIEN 

s  I  y  M 

DEDICANTE 
PROC.    AVG.     EX  ' 

MARITIMARM  , 

L'autre  colonne^  qui  a  la  même  dimension ,  étôit 


>!■  M 


•tmtlmtm 


(i)  Cest  un  frAgtnçot:;ai|>si  terminé  :,QÇJNTi  Filio  pATRi 
Et  MATBI PIISSIMAE:  GRj^CINA  Cail  FiliaAiARCIl^A  EX  feSr- 
tamentopositum  Dedicavit  Décret 0  Decurionum ,  ou  ùedit  Dedicavîu 

(2)  JoFRÉDl,  Nîcaa\  cipltas.  Entre  ia  seconde  et  îa  troisième 
ligne»  H  y  a  une  dietance  è^peu*p'rès  suffisante  pour  pouVoir.y 
placer  une  ligne. 


CHAPITRE    tXX.  If 

à  nuMtîé  entarrée  dans  la  cour  delà  maison  commune, 
et  i'on  n'y  voyoh  pas  d'imoription  ;  nom  ia  fime$ 
jetourner,  et  nous  y  lûmes  : 

CVRANTE  AC 
IVL.   HONORATO 
PP.   PRAESID.   ALP. 

Ces  trois  lignés  paroissent  se  lier  aux  trois  der- 
nières de  la  colonne  précédente ,  en  les  plaçant  à 
gauche ,  de  cette  manière  : 


MtBtUfMM 


\ 


1 

1 

I 

t 

I 
« 

8 


CVRANTE  AC 
IVL.  HONORATO 
PP.  PRAESID.ALP 


MAvS^ILIEN 
ÇIVM 


•  •  •  • 


DEDICANTE 
PROC.  AVG.  EX 
MARITIMARVM. 


^ii  ^  r^B  1^  v'^  vsa  V 

Umitfs  da  territoire  (  i  )  iies  Marseiiiois ,  par  les  soins  de  Julius 
Honoratus,  procurator  d Auguste,  un  des  préposés  à  la  défense  des 
Alpes  maritimes  (i); 

(i)  Il  paroît  qu^on  a  coupé  une  portion  du  haut  de  ia  colonne 
"k  gauche.  Il  y  avoit  probablement ,  à  Tendroit  qui  répondoit  à  la 
ligne  où  on  Ut  Massiliensium ,  ces  mots  finis  agri  ou  terminus  agri^ 
fin  ou  limites  du  territoire  des  Marseiiiois  :  c'étoient  des  bornes 
posées  par  l'autorité  du  magistrat, 

{%)  kfs prapçsitis  PR^siDiç, . 


i^»^iM.£.-«—  L, 


\ 


1^  CHAPITRE   LXX. 

Depuis  notre  d^att,  on  a  encore  tnmvé  sur  la 
piaœ  devant  la  paroisse ,  rkiscription  suivante,  en 
forme  d'autel  :  elle  m*a  été  envoyée  par  M.  Bouyon, 
maire  de  la  ville ,  dont  nous  avons  reçu  Faccueil  le 
plus  obligeant. 

I.'  - .'        I 

■  '    I     M  . 1     ^  I        ,  ■  .    ,  ri 


Y 


^m^.^ 


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ïMPpCAESo 
DIVI  X?  ANTONINI 
FILtDIVI  T  SEVERI 

NEPOTI 

M  !  AVRELjpANTO 
NlKQtPIOrFEtT 

AVGt  TRIB'POT'-ÏÏÏ 
COSIIIPP 


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.<w**irt*MttM*a 


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wt^mtmt^mm^Êtimtt^ 


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mmmlmmÊm^mm0ÊÊm^tmmtm 


A  l'empereur 


CHAPiTttE  tXX.  17 

A  i'empereûr  Casar ,  fib  du  dii^in   Antonin  (t) ,  pttît-^b  dt, 
^ihnn  Sévère  (*),  Marcus  Aurelius  Antoninus ,  pieux  (3) ,  heureux  (4) , 
Auguste ,  jouissant  de  la  puissance  trièuni tienne  pour  Id  troisième  fois , 
tottsul  pour  la  troisième  fois  (5  )*,  père  de  la  patrie, 

La  vflle  d^  Vence  est  noire  et  mal  bâtie  :  cepén^ 
dam  ia  grande  rue ,  ombragée  par  quelques  grande 
ormes ,  et  arrosée  par  un  ruisseau  d^une  eau  daîre  et 
limpide ,  offre  un  lieu  assez  frais  et  assez  agréable  ; 
c'est  là  que  les  habitans  de  la  ville  se  rassemblent  pen** 
dant  une  grande  partie  du  jour.  Auprès  est  la  place , 
au  milieu  de  laquelle  est  une  fontaine  d'une  formé 
assez  pittoresque.  Le  grand  nombre  de  ces  fontaines 
répand  une  sorte  de  vie  dans  toutes  les  villes  de  la 
haute  Provence  :  elles  sont  ordinairement  formées 
cTun  grand  bassin  à  hauteur  d'appui ,  au  milieu  duquel 

\ 

(1)  DIVI  ANfONiNt  F 1140,  c'çst-^îrc;  iîl$  de  Caracalla. 
Ceiuî-ci,  fiïs  de  Scptitnc -Sévère  et  pctit-fils  de  Bassianus,  tvoit 
pris  ie  nom  ^Antùnin  pour  plaire  au  peuple. 

(2)  DÏVI  SEVERl  NKPOTI,Vw<{\JLtAzg3k^t'pcCtiO\t  \t  titre 
de  fils  de  Caracaliài  il  devoit  être  le  pedt-fih  de  Septime-Sévère , 
père  de  ce  prince.  Les  mots  divi  ont  rapport  à  ce  que  ces  deux 
princes  étoient  morts  et  déifies. 

(3)  P/a  Caracalla  etÉlagabale^  connus  par  leur  insigne  mé- 
clianceté>  prirent  ce  surnom  d*  Antonin,  quW  appeloit  le  pieux, 
comme  on  dit  le  bon  Henri, 

(4)  FELici.  Commode  est  fe  premier  qui  ait  ptis  le  surnom  de 
Ftiix  par  un  décret  du  sénat, 

(5)  Le  troisième  consulat  d^ÉIagabale  s*étend  à  fa  moitié  de  la 
troisième  et  de  ia  quatrième  année  d^  son  règne;  mats  lés  mots 
TRiBunitiâ  POTestate  II ï  annoncent  que  cette  inscription  a  éré  * 
faite  dans  la, troisième  aimée,  Tan  de  Romr  0731  et  220  de  notre 

Tome  IJl,  '  B 


I 

i 
t 

I 

l 


l8  CHAPITRE    LXX. 

s'élève  une  pyramide  contournée  d'une  manière  un 
peu  gothique,  d'où  jaillissent  quatre  ou  six  filets 
d'eau  qui  tombent  sans  cesse  dans  le  bassin  ;  cette 
eau  en  sort  par  un  trou,  et  forme  des  ruisseaux  qui 
lavent  les  rues,  les  rendent  plus  saines,  plus  propres, 
et  répandent  dans  Tair  une  douce  fraîcheur.  Cette 
fontaine  est  le  rendez- vous  de  toutes  les  femmes, 
comme  le  lieu  ombragé  est  celui  des  hommes  :  on  y 
va ,  à  tout  moment,  puiser  pour  les  besoins  journaliers 
une  eau  claire  et  toujours  fraîche ,  qu'on  boit  avec  dé- 
lices sous  ce  ciel  brûlant.  Le  bruit  régulier  et  étour- 
dissant du  battoir  s'y  fait  continuellement  entendre  ; 
pendant  que  l'une  lave  son  linge,  l'autre  nettoie  ses 
herbes  potagères  ;  le  muletier  qui  traverse  la  ville ,  y 
fait  désaltérer  ses  patiens  animaux.  C'est  1^  que  se 
débitent  toutes  les  nouvelles ,  qu'on  apprend  les  ma- 
riages ,  les  décès ,  les  querelles  de  ménage  et  les  rac- 
commodemens.  Autour  de  la  fontaine  de  Vence 
nous  lûmes  cette  inscription  provençale  : 

LA  PRESENTO  BASSINO.  ES  ESTADO.  FACHO  PER. 
MESTRE.  lANNON  f  AVCON.  1578  ET  LOVTERS  AOVST. 
feRON.  COSOS.  ANTON I.  ISNART.  LAMBERT  MARS. 
ÏT.   LOIS.   lOLlAN.  TRESAVRIER. 

Cette  fontaine  a  été  faîte  par  maître  Jean  Faucon ,  le  ^  août  i//S/ 
Antoine  Isnard  et  Lambert  Mars  étant  consuls ,  et  Louis   Julien 

» 

trésorier. 

Ces  eaux  pures,  fraîches  et  salutaires,  rendent  le 


f 


CHAPITRE    LXX.  19 

séjour  de  Vence  très-saîn.  L'é  vêché  de  cette  ville  étoit 
un  des  plus  anciens  de  la  Provence,  Les  figues ,  Phuîle 
et  le  vin  sont  les  principales  productions  de  son  ter- 
ritoire; on  n'y  cultive  les  orangers  que  dans  la  parrio 
basse.  II  s'y  faisoit  autrefois  un  commerce  de  cuirs 
assez  considérable;  mais  il  est  absolument  tombé. 

Sur  la  montagne  dite  des  Pénitens-Blancs,  il  existe 
des  vestiges  d'un  village  qui  se  nommoii  Saint- Lau- 
rent. Oa  trouve ,  dans  le  quartier  de  Saint-Martin ,  les 
ruines, d'un  château  qu'on  dit  avoir  appartenu  aux 
TempUers  :  une  partie  des  voûtes  et  des  murailles 
est  encore  dans  le  meilleur  état. 


B  2 


/ 


io 


CHAPITRE  I.XXI. 

Route dç  Vençe  à  Crasse. «-^Montagnes. — Terrasses.— 
Culture.  —•  GbA3S]|^.  r-^  Çpurs.  ^^  Parfumerie. 

IN  O  u  S  reprîmes  notre  routç  pour  aller  coucher  à 
Grasse.  A  peine  a-t-on  cpiitté  Yence,  que  le  che*'- 
min  devient  impraticable  ;  il  faut  sans  cesse  monter 
et  descendre  :  ia  route  a  été  taillée  en  rampe  avec 
des  degrés  comme  ceux  d'un  escalier  ;  ces  degrés 
sont  couverts  de  cailloux  roulés ,  de  pierres  angu* 
leuses ,  de  débris  de  rochers ,  sur  lesquels  les  mulets 
mêmes  ne  sauroient  marcher  avec  assurance.  C'est  là 
qu'on  pejut  admirer  l'instinct  de  ces  utiles  animaux  : 
ils  sondent ,  pour  ainsi  dire ,  le  terrain  avec  les  pieds 
de  devant  ;  ils  ne  les  posent  qu'après  avoir  écarté  les 
galets  j  et  trouvé  sur  les  autres  pierres  une  assiette 
solide  :  le  pied  de  derrière  prend  la  place  tracée  par 
celui  de  devant.  Malgré  ces  précautions,  ilieur  arrive 
quelquefois  de  s'abattre ,  et  l'on  est  toujours  en  dan- 
ger de  tomber  ;  il  faut  leur  abandonner  absolument 
le  5oin  de  sa  conservation.  Une  injuste  défiance 
tourne  à  leur  profit  ;  car  le  voyageur  effrayé  ne  peut 
guère  s'empêcher  de  descendre  dans  les  passages  les 
plus  difficiles  )  et  de  faire  une  partie  de  la  route  à 
pied. 


CHAPITRE    hXXr:  3kl 

On  65t  dédommagé  des  fatigues  du  voyage  par 
la  vue  d^  sites  extrêmement  pittoresques  ^  et  par 
Taspeet  d'uJie  cultufre  très-singuiidre  :  souvent  on 
a  d'un  c6té  Im  précipice,  de  l'autre  des  rochers  me- 
naçans  et  susp^dUs  ^  et  l'on  voit  serpçmer  un  ruis« 
seau  d^is  une  joUè  valiée.  Mais  ies  fruits  que  pro- 
duisent les  vallée» ,  ne  sUffir<^ent  pas  pour  nourrir 
la  miilième  partie  dés  habitans  ;  il  a  donc  fallu  con- 
quérir les  montagnes  à  ragriodture ,  et  empêcher  bt 
teire  végétale  d'être  entHaiméé  par  les  phiies  :  on  a 
construit  poiu:  cela^  de  dlstâifte  en  distance,  des 
terrasses  ^i  ia  re^Ment.  Cette  difficulté  dans  la- 
cultiu'e  eut  d^d>ord  ufte  heureuse  influence  sur  l'état 
dvil  des  habits^  de  la  Provence  ;  le»  cultivateurs  d^ 
cette  contrée  étoient  déjà  f^ôp^étaires  un  siècle  et 
demi  avant  l'édit  de  Loui^  le  Hutin  qui  àbcJit  li^ 
servitude  en  Fraâce^  Lé»  seigneurs  ne  retirant  point 
de  ieurs  bi^iis  ruraux  un  produit  qui  pût  les  indem* 
niser  de  l'entifetiend^s  serfs*,  affranchirent  ceuDc-ci  ^ 
leur  £stitt>uèrent  des^  teites  U  charge  de  cens ,  do 
lods ,  de  banfaUté»^  et  troutèi^tdans  ces  redevance» 
un  revenir  supérieur  kceluiqi^'ils  tétiroîenf  de$  champ» 
qu'ils  a  voient  concédés,  ^ors  leshâbitcinséetaircirent 
les  bruy'ères^,  défrichèrent  les  landes  ;  et  j*ompant  le» 
rochers ,  fls'  étayèreht  de  leurs  débrb  élevés  en  mur» 
les  terrains  indinés,  et  couvrirent  la  Provence  d€ 
riches  amphithéâtres.  On  vie  peut  s'empêcher  d'ad^ 
mirer  le  courage  et  la  longue  patience  qu'3  a  ftlhl 


"^ 


.^,  I  »>i«ti 


r 


22  CHAPITRfi     LXXÏ. 

pour  disposer  ainsi  ces  terres  déclives ,  et  y  répandre 
la  fertilité  ;  l'imagination  a  peine  k  concevoir  les  frais 
immenses  auxquels  on  pourroit  évaluer  ia  construc- 
tion de  èes  innombrables  gradins  ,  qui  tous  sont 
en  pierres  vives,  et  entre  lesquels  il  n'y  a  souvent 
que  six  pieds  d'intervalle.  Sans  doute  ces  étonnans 
ouvrages  n'ont  pu  être  faits  que  dans  un  temps  où 
les  moyens  de  subsistance  n'étoient  pas  en  rapport 
avec  la  population.  Ce  n'est  que  par  des  soins  et 
des  travaux  continuels  qu'on  parvient  à  les  entre- 
tenir :  l'agriculteur  n'obtient  rien  que  de  son  indus- 
trie. Sur  chaque  terrasse,  on  cultive  quelquefois  sépa- 
rément, mais  le  plus  communément  ensemble,  des 
oliviers,  de  la  vigne,  du  blé  et  des  fleurs. 

Après  une  route  pénible ,  on  arrive  enfin  à  Grasse. 
Cette  vif  le  est  bâtie  à  l'exposition  du  midi,  sur  le 
penchant  d'une  montagne  très-élevée;  les  rues  sont 
étroites  ,  irrégulières ,  sans  aucun  édifice  remar- 
quable: le  seul  endroit  agréable  est  le  Ci^i/rj,  qui  est 
bien  jïlanté.  Nul  site  dans  le  département  n'offre  une 
aussi  belle  vue  que  celle  dont  on  jouît  de  cette  pro- 
menade :  on  voit  s'élever  en  groupes  une  multitude 
d'habitations  rurales  plus  ou  moins  embellies  ;  Fceil 
s'étonne  à  l'aspect  de  ces  champs  créés  par  l'indus- 
trie et  entretenus  par  la  persévérance.  Lés  îles  de 
Lérîns  terminent  cette  perspective  vers  le  point  où 
les  regards  vont  se  perdre  dans  l'horizon  vaporeux 
de  la  Méditerranée. 


j 


CHAPITRE   tXXr.  2^ 

L'îndastrîe  des  h:d>itans  de  Grasse  est  aussi  remar- 
quable :  ils  savent  ajouter  au  luxe  d'une  végéta- 
tîoi^  vigoureuse,  favorisée  par  la  pureté  du  ciel  et 
la  douceur  du  climat,  celui  de  la  culture  la  mieux 
entendue  et  la  plus  rechcrcîiée.  Il  faut  observer  avec 
quel  art  on  tire  parti  des  sites  les  moins  favorables , 
comme  on  y  assortit  fes  plantes  au  terrain ,  comme 
on  y.  supplée ,  par   la   chaleur  des   engrais , .  aux 
rayons  affoîblîs  du  soleil  dliîver,  enfin  comme  on 
rend  titîle  une  source  abondante  qui,  naissant  au 
haut  de  la  ville  ,  arrose  de  chute  en  chute  <^  les  jar- 
dins, les  prairies,  et  met  les  moulins  en  mouve- 
ment. Les  terres  ,  soiitenues  en  terrasses  par  des 
murs  construits  à  grands  frais ,  forment  un  immense 
amphithéâtre  de  jardins  suspendus,  où  l'oranger,  le 
rosier  ^  la  cassie ,  le  jasmin ,  la  jonquille ,  la  tubéreuse, 
exhalent  ces  doux  parfums  qui ,  recueillis  avec  soin 
et  fixés  dans  diverses  substances ,  sont  exportés  et 
vendus  dans  tout  l'univers.  Outre  les  fleurs   que 
produit  son  territoire.  Grasse  en  tite  encore  pour 
cinquante  mille  francs  des  viflages  cîrconvoisins  :  la 
Napoufe  et  un  village  près  de  Gagnes  hii  fournissent» 
douze  à  quinze  cents  milliers  de  fleurs  d'orange.  Plu- 
sieurs habitais  distillent  chez  eux ,  et  font  des  eaux: 
comwiunes.  La  grande  floraison  des  orangers  offre 
un  coup-d'œil  enchanteur  :  tous  les*  habitans  sonp 
alors  occupés  à  en  recueillir  les  fleurs,  qu'ils  jettent 
sur  de  grandes  toiles  étendues  au  pied  des  arbres. 

b4 


\ 


t4  CHAPITRE    tXXU 

Depuis  long^tempsy  les  parfumeurs  de  Grasse 
excellent  à  tirer  l'arome  des  fleurs  pour  en  par* 
fuiper  des  esprits  et  faire  des  savons  odorans ,  de^ 
pommades  et  de$  eaux  de  senteur.  Ce  commerce 
est  encore  entrete^^  p;ir  une  douzaine  de  manu^ 
fàctiiriers  ^  dont  les  pius  actifs  et  les  {Jus  intelligens 
sont  MM<  Farge<>n  et  Laugier  ;  outre  les  par&ms^  ik 
fabricjuent  aqssi  avec  succès  des  liqueur^,  des  pâtes  ^ 
des  dragées ,  et  tout  ç^  qui  tient  ^  Tart  dw  confiseur 
et  du  distillateur.  Mais  ce  commerce ,  autrefois  si 
brillant ,  commence  beaucoup  à  décliner  :  Tusaga 
des  pommades  et  des  savonnettes  a,  été  tdiement 
réduit ,  et  la  fabrication  des  liqueurs  si  bien  imitée 
ailleurs ,  que  le  produit  de  cette  industrie  a  diminué 
de  plus  de  moitié* 

II  es,t  ^  craindre  que  Grosse  ne  perde  bientôt  entiè- 
leme^t  cette  ressource  i  Nice  absorbera  son  corn*» 
inerce  ;  aussi  les  b^bitaj^is  de  Grasse  opt-Us  vu  avec 
peine  la  réunion  de  celte  vil{^  ^  I^  Fiance.  On  a  déjk 
établi  ik  Nice  quelque^  parfumeries  ;  h  yoîsinage  4» 
la  mer^  celui  de  la  grande  route  d'Italie^  à  laquelia 
on  trayailie  >  rendant  les^  communications  plus  faciles 
et  les  ports  moins  chers ,  cette  ville  pourra  baissa  les 
prix  et  obtenir  ïa  préféreïice,  L^avantage  que  Nice 
doit  obtenir  sur  Grasse  >  sera  sur^tout  remarquable 
qua^d  le  pont  sur  le  Var  aura  été  bftti. 

Grasse  a  encore  d'autres  moy^is  d'industrie;  mai« 
ils  3(Hxi  bien  inférieurs  à  ses  parfumeries  ;  ce  $cm% 


CHAPITRE    LXXI.  ij 

cfes  teintureries ,  des  filatures  de  soie ,  des  chapel^ 
lerieS)  des  fabriques  de  bourras  et  de  sergette.  On 
sent  bien  que  l'abeille  doit  se  plaire  dans  un  lieu  oh 
Ton  cultive  les  fleurs  en  si  grande  abondance  :  aussi 
récolte-ton  encore^  beaucoup  de  cire  dans  cet  arron- 
dissement. On  tanne  les  cuirs ,  à  Grasse ,  avec  la 
poudre  de  Içntîsque ,  et  mieux  encore  avec  celle  de 
myrte  ;  c'est  ce  qui  les  rend  verts  :  on  assure  que 
ces  cuirs  sont  d'un  meilleur  usage  que  les  cuirs 
rouges. 

L'ancienne  cathédrale  est  remarquable  :  ce  sont 
trois  églises  élevées  l'une  sur  l'autre  ;  les  deux  infé- 
rieures ont  été  bâties  par  M.  de  Megrigni ,  évéque 
de  Grasse^  k  la  fin  du  dix-septième  siècle ^  sans 
ébnuiierré^iise  supérieure.  Cet  évèque  a  aussi  fondé 
Hôpital:  i'égiise  de  cette  maison  renlèrme  basses 
bons  tableaiuCy  qui  Un  ont  été  donnés  par  le  comte 
âeThorenCy  lieutenant  général  des  monnoîes» 


\ 


z6 


CHAPITRE   LXXII. 


DÉPART  de  Grasse.  —  Mulets.  —  Oliviers,  —  Marbre^ 
Albâtre.  —  Faïence.  —  DrAGUIgnan.  —  Feux 
de  la  Saint- Jean.  —  Dessins  des  curiosités  du  dépar- 
tement. —  Bibliothèque  publique.  —  Cabinet  d*his- 
toire  naturelle.  —  Médaille  cufique.  —  Prisons.  — 
Enfans  -  trouvés.  —  Industrie.  —  Manufactures.  — . 
Culture.  —  Salernes.  -^  Chute  de  Sillans.  — 
Grotte  de  ViUecroze. 

JNous  partîmes  dte  Grasse  à  trois  hêurèsv  du  matin  ^ 
montés  sur  des  mulets^,  qui  gardoîent  entre  eux 
ïin  ordre  de  marche  qu'on  eût  vainement  tenté  d'in- 
tervertir :  celui  que  leur  conducteur  appeloît  l' Amou- 
reux étoît  toujours  à  la  tête^,  venort  ensuite  le  Afeur- 
blanc ,  c'est-à-dire,  Museau-blanc ,  &c.  Le  mulet  est 
de  la  plus  grande  utilité  dans  ces  montagnes  ,  où  il 
y  a  très-peu  de  routes  praticables  pour  le  roulage  : 
cet  animal ,  fort  et  courageux j^  supporte  une  charge 
de  cinq  à  six  cents  livres;  on  le  nourrit  avec  une 
grande  facilité ,  et  il  peut  demeurer  près  d'un  jour 
sans  boire  ni  manger.  II  est  la  seule  monture  qui 
offre  quelque  sûreté  dans  les  passages  difficiles  ; 
jamais  il  ne  se  trompe  ;  et  quoiqu'il  aille  tou- 
jours sur  le  bord  des  j^récipices ,  et  qù'it  semble 


M^ 


CHAPITRE    LXXII.  27 

choisir  les  endroits  les  plus  périlleux  ,  on  peut- se 
confier  à  lui  sans  danger  :  d'ailleurs  on  réussîroît 
difficilement  à  vaincre  son  obstination  et  à  lui  fiiire^ 
quitter  la  route  qu'il  veut  suivre,  II  faut  avoir  soin^ 
de  ne  pas  le  mettre  dans  la  compagnie  des  chevaux  :* 
3  a  pour  eux  une  si  grande  aversion ,  qu'il  les  attaque 
avec  une  fureur  inconcevable  ;  ce  qui  devient  danr- 
gereux  pour  le  cavalier.  Oit  fait  sur  cette  monture 
à-peu-près  une  lieue  de  Provence  par  heure.  le 
conducteur  suit  à  pied  :  dès  qu'il  est  arrivé ,  il  fait 
reposer  ses  mulets  pendant  environ  (p:^atre  heures  ;> 
ii  se  couche  ensuite  sur  i'un  d'eux  ;  et  ces  animaux, 
reprennent  d'eux-mêmes  leur  route  sans  se  tromper, 
et  sans  qu'il  arrive  aucun  accident  à  celui  qui  leur 
confie  ainsi  chaque  jovir  le  soin  de  sa  vie. 

On  ne  peut  s'empêcher  d'admirer  ,  dans  les  cam- 
pagnes quî  environnent  Grasse,  l'espèce  des  oliviers: 
ils  poussent  des  tiges  semblables  à  celles  des  arbres 
des  forêts,  et  leurs  fruits  donnent  une  huile  excellente 
et  très-recherchée  ;  elle  n'a  cependant  pas  le  goût 
du  finît  comme  celle  d'Aix. 

On  traverse  d'abord  un  pays  calcaire ,  où. il  y  a* 
du  marbre  blanc  et  de  très^^bel  albâtre.  Nous  mar- 
châmes douze  heures  sans  nous  reposer  :  nous  eûmes 
beaucoup  à  souffrir  de  l'ardeur  du  $oIeîI..  Ori  ne 
trouve  pas  une  seule  auberge  où  l!on  puisse  s'arrêter  ;* 
le  seul  èndrcnt  qui  présente  un  groupe  de  maisons  , 
est  Fàience ,  où  ily  ji  une  verrerie,  une  teinturerie. 


iS  CHAPITRE   LXXir. 

quelques  chapdieries ,  et  de$  fabriqae$  de  potcrio 
grossière  y  qui  ont  peut-étie  fait  donner  à  ce  bourg 
le  nom  qu'il  porte*  Son  ^]ise  seroit  ^sse?  belle>  si 
dOte  n'étoit  déparée  par  le  sanctuiûre»  qm  est  |)iu9!  bas 
que  la  nef  « 

Nous  arrivâmes  enfin  ï  Dmguîgnan ,  exténués  dé 
£itigue.  Après  quelques  momens  de  repos  ^  faUai 
Yoir  M.  Faucbet  y  k  qui  l'administraticHl  du  départe^ 
ment  du  Var  értoit  alors  confiée. 

C'étoit  la  veitle  de  la  Saint'-Jean  :  cm  voyoit  dan» 
toutes  les  rues  des  feux  allumés ,  où  le  peuple  fài- 
soit  cuire  des  gousses  d'ail  pour  les  distribuer  ensuiter 
dans  chaque  famille.  Cet  usage  doit  peut-être  son 
origine  aux  ravages  que  la  peste  a  quelquefois  exer- 
ces  dans  ces  contrées*  Comme  je  m'amusois  à  écouter 
les  joyeux  propos  qiiî  se  tenoieitt  autour  de  ces  feux , 
|e  me  sentis  couvert  4'nn  déluge  d'eau  :  je  voulus 
prendre  la  route  de  mon  auberge  ;  mais  il  me  fut 
impossible  d'éviter  tes  potées  qui  pleuVoient  sur  moi 
de  chaque  maison.  Pendant  ce  temp^-*iii ,  fentendois 
faire  à  son  de  trompe  une  proclamation  portant! 
défense  ,  sous  des  peines  sévères ,  de  jeter  de  i'eau 
sur  tes  passansb  U  est  prc^bb  que  ies  habifans  de 
Draguignan  auront  Uen  de  la  peine  à  aban€lonnei; 
im  si  aimable  amiusement.  Je  conseille  aux  personnes 
qui  voyageront  en  Provence  de  rester  chez  elles  dansi 
la  nuit  qui  précède  la  Sain^iean, 

Cette  ville  est  située  dans  le  pays  calcaire ,  sw  les 


AmiA    ttÊm^t^Êkti^lÊÊM 


CHAPITRE   LXXII.  29 

bords  d'un  bas$in  tniversé  par  la  rivière  de  la  Pis , 
autrement  Nartuli,  II  n'y  a  aucnn  édifice  remar- 
quftbfe  ;  mais  les  rues  sont  plus  propres  et  plus 
larges  que  celles  de  Grasse. 

Le  cbef-Iîeu  de  Fadministration  départementale 
Vf  oh  d'abord  été  établi  à  Toulon  :  mais,  outre  que 
cette  viffe  n'étoit  pas  au  centre  du  département ,  les 
adminbtrateurs  de  la  marine  y  rivalisoient  sans  cesse 
avec  les  magistrats  revêtus  de  l'autorité  x^vile  ;  et  l'on 
ayoit  vu  les  habîtans  se  porter  envers  ces  derniers 
à  des  excès  impardonnables.  Ces  divers  moûh  dé- 
terminèrent le  Gouvernement  à  transférer  ailleurs 
le  siège  de  l'administration  :  Draguignan  obdm  la 
préférence  ;  et  cette  ville  ne  tarda  pas  k  en  ressentir 
d%eureux-  effets  pour  sa  prospérité.  La  maison  du 
préfet ,  les  personnes  attachées  à  la  j^réfècture  ,  la 
troupe  qui  y  est  en  garnison ,  l'état-major  de  la  gen- 
-darmçrie,  y  mettent  chaque  jour  douze  cents  livres 
de  pliis  en  circulation^ 

Af  •  Fauchet  s'appliquoit  avec  beaucoup  de  zèle  à 
tout  ce  qui  pouvoit  intéresser  le  département  confié 
k  ses  soins.  li  avoit  fiiit  une  étude  particulière  de  la 
Provence  ;  et  ses  adrainbtrés  hii  doivent  plusieui» 
institutions  utiles  :  il  a  créé  la  bibliothèque ,  le  cabî* 
nei  d'histoire  naturelle ,  et  fi>rmé  la  société  d'émula- 
tion; on  iui  doit  le  régime  actuel,  des  prisons;  il  a 
ftttt  faire  des  fouilles  à  Fréjus.  II  occupoit  un  artiste 
ï  faire  les  dessins  de  tout  ce  que  son  département 


30  CHAPITRE    LXXU. 

renferme  de  plus  remarquable  (i)  :  ces  dessins  sont 
exécutés  avec  soin. 

(  I  )  J*en  donne  ici  la  notice  : 

A  Frejus.  Ruine  antique  de  la  porte  romaine.  —  Ruine  antique 
de  deux  tours  et  d*une  arcade  isolée  des'  aqueducs,  côté  de  la 
porte  Romaine.  (  On  y  aperçoit  dans  le  lointain  le  séminaire.  ) 
-^  Ruine  antique  du  phare,  à  l'entrée  du  port,  —  Ruines  des 
grands  magasins ,  dans  la  propriété  de  ia  famille  Chaben. — Grand 
réservoir  enseveli  sous  la  piate-forme  des  magasins,  vis-à-vis  la 
porte  Romaine.  —  Vtfc  de  la  Baume ,  sur  les  bords  de  la  rivière 
deTrans,  prise  de  la. propriété  de  M.  Bernard,  ingénieur.  — 
Reste  du  Forum  des  Romains ,  dans  la  propriété  de  Grisole.  (  On 
y  aperçoit  d*un  côté  quelques  arcadcs^  de  l'aqueduc,  et  à  gauche 
la  maison  de  Grisole.  )  —  Temple  antique  servant  de  baptistère 
'à  la  paroisse.  •—  Ruitie  de  la  grande  masse  des  aqueducs  des 
Romains.  (  On  voit  à  la  partie  supérieure  de  Tune  ^es  arcades  » 
le  canal  où  couloit  Teau  et  qui  a  résisté  au  temps.  )  —  Ruine  de 
la  porte  Dorée.  —  Porte  dite  Paticière,  au  bas  de  laquelle  passe 
le  Reiran.  (  On  y  voit  la  dérivation  du  Reiran,  dont  les  eaur 
-viennent  alimenter  les  moulins  de  la  ville.  )  —  Ruine  de  la  porte 
des  Gaules  ou  de  Pompée ,  avec  la  vue  de  l'église  et  du  couvent 
des  ci-devant  Cordeliers.  —  Porte  moderne  de  France,  avec  les 
ruines  des  remparts  de  l'ancienne  ville.  —  Vue  de  la  porte  mo- 
derne d'Italie.  —  Vue  extérieure  de  la  porte  occidentale  du 
cirque.  (  Le  dessinateur  y  a  fait  apercevoir  le  Reiran,  l'écluse  et  le 
pont  de  cette  rivière,  la  maison  des  ci-devant  Dominicains ,  et 
la  porte  occidentale.  )  —  Vue  extérieure  de  la  partie  méridionale 
du  cirque.  —  Ruine  intérieure  de  ce  cirque.  —  Ruine  intérieure 
.de  la  partie  méridionale  du  même  édifice.  —  Porte  orientale  du 
^ême.  —  Ruine  d'un  temple  antique. —  Ruine  antique  des  bains 
d'un  particulier,  dans  la  campagne  de  la  famille  Barbe.  —  Plan 
des  inêmes  bains ,  avec  l'indication  des  difierens  détails  qui  les 
composent  ou  qui  en  dépendent.  —  Ruine  de  la  tour  de  la  plat^ 
forme  Saint-Antoine,  de  laquelle  on  descendoit  sur  le  quai  méri- 
dional.— Tour  antique  du  grand  bastion  Saint-Amoinc.— Ruine 


CHAPITRE    LXXII.  .31 

Le  bibliothécaire  vînt  nous,  prendre,  pour  nous 
faire  voir  rétablissement  qui  lui  est  confié.  Les  livres 

de  Ja  grande  voûte  du  bastion  Saint-Antoine ,  seryant  de  béai  « 
et  dont  les  eaux  se  distribuent  dans  les  mouiins  de  Fréjus.  — ^ 
Grande  masse  de  bâtisse  où  ëtoit  anciennement  la  douane  ma^ 
ritime.  ^7-  Ruine  du  pont  des  Romains,  dans  la  plaine  (  sur  ic 
chemin  qui  conduit  à  Amibes  ). —  Ruine  extérieure  d'un  tombeau 
antique ,  dans  la  campagne  de  la  famille  Sufïret.  —  Ruine  inté- 
rieure du  même  tombeau.  —  Ruine  des  aqueducs  dans  le  vallon 
de  la  Moule,  à  Test  du  vallon  de  Gargalon^à  une  lieue  de  Fréjus. 
^-  Ruine  des  mêmes  dans  le  vallon  de  Gargalon ,  à^  la  même  jdis-^ 
tance. 

Vue  de  la  cataracte  de  Trans ,  prise  du  bas  de  la  rivière.  — 
Vue  de  deux  ponts  sur  la  rivière  de  Trans. 

A  Antihes,  Vue  de  la  tour  dite  de  l'église,  (  Cette,  tour  a  vingt 
toises  de  hauteur;  elle  a  été  percée  en  1740.  Le  dessinateur  y 
a  fait  apercevoir  Thorloge  de  la  ville ,  la  paroisse  et  les  prisons.  ) 
—  Vue  de  la  tour  carrée  et  d'une  partie  des  anciens  remparts* 
(  On  y  aperçoit  dans  le  lointain  la  gorge  du  Var  et  les  côtes  de 
Nice.  )  —  Ruines  romaines  des .  tours  et  des  remparts.  —  Citerne 
antique  à  coté  de  Téglisc.  —  Restes  du  cirque  (  placé  à  la  rue 
Foumiguière,  et  qui  a  existé  jusqu'en  1691  ).  —  Vue  intérieure 
de  la  porte  antique  dite  du  Ravelin.  —  Vue  d'un  portique  atte- 
nant à  rhôpital  Saint-Jacques,  rue  du  Puits-neuf.  (  Il  offi'e  un 
ordre  d'architecture  mi-fustique  et  gothique , .  dont  la  forme  sin- 
gulière annonce  la  décadence  de  la  belle  architecture.)  Sur  la 
même  feuille  est  dessiné  un  lacrymatoire  trouvé  dans  la  pro- 
priété de  M.  Gautier,  -h-  Ruine  antique  des  aqueducs  pour  con- 
duire à  Amibes  des  eaux  venant  de  Bouillide.  (  On  aperçoit 
dans  ce  dessin  le  pont  de  Valaurie  et  la  chapelle  de  Notre-Dame 
de  Valaurie. }  —  Deuxième  vue  à^%  mêmes  aqueducs,  sur  le  pen- 
chant des  montagnes,  à  quelque  distance  du  pont  de  Vajaurie.  . 

A  BioL  Vue  du  tcmple.de  la  Chèvre  d'or,  dans  la  propriété  de 
Constant.  —  Vue  du  pont  et  de  la  fontaine,  sur  la  Braguç. 
•    A  Saint  -  Laurent  du  Var,  Vue  d'une  partie  de  ce  Jbqurg 


^2  tHAriTRE   L^XII. 

n'y  sont  pas  très-nombreux  ;  mais  if  est  bien  tentli 
M.  Fauchet  a  choisi  lui-même  dans  les  dépôts  les 
ouvrages  qui  en  font  aujourdliui  Fornement  (i)* 

prise  de  rentrée  du  port  au  bas  de  fa  chaussée,  (  On  distingue 
dans  ce  dessin  fa  porte  de  Saint-Laurent ,  fe  Var  à  sec  en  certaines 
parties,  des  montagnes  des  environs  d#Nîce,  et  quelques  mon^^ 
tagnes  du  Piémont.  )  -«  Fontaine  de  Pénas  ou  de  fa  Tour,  à  un 
quart  de  fieue  de  fa  mine  de  fer.  (  Cette  source ,  à  pf us  de  qua- 
rante pas  dans  fa  montagne,  est  très-abondante  et  d'une  excel«* 
iente  qualité  :  set  eaux  pourroient  être  conduites  facilement  et 
à  peu  de  frais  au  vifiage  de  Saint-Laurent  ;  ce  qui  procureront  un 
^and  avantage  aux  babîtans»  qui  sont  obligés  de  boire  fes  eaux 
bourbeuses  du  Var.  Ce  moyen  simple  et  salutaire  préviendroit  la 
t>f  upart  des  maladies  que  leur  cause  une  boisson  dangereuse ,  et 
qui  font  que  tous  ies  jours  ce  pays  se  dépeuple  davantage.) — ^Vue 
du  pont  et  du  corps-de-garde ,  prise  du  chemin  de  Saint-Laurent. 
(Ce  pont  a  été  construit  par  le  général  Ansefme,  lors  du  pas* 
sage  des  troupes  françaises  dans  f e  comté  de  Nice.  ) 

Vue  de  fa  cataracte  de  Silians.  —Vue  de  fa  tour  du  Muy.  -^ 
Vue  des  ifes  de  Lérins ,  prise  du  Pinchinat  à  Cannes*  (  Sur  fc 
premier  pian  on  voit  la  chapelle  de  Saint-Pierre;  sur  fes  deuxième 
et  troisième  plans,  ilfe  Sainte-Marguerite  et  l'ile  Saint-Honorat  • 
de  manière  à  apercevoir  fe  canal  qui  les  sépare.)  -^  Pont  moderne 
du  fleuve  d'Argent.  —  Vue  de  Tauberge  de  i'JEUteref ,  prise  du 
coté  de  f'est. 

(i)  Nous  remarquâmes  entre  auti^s. 

Un  manuscrit  des  Lettres  de  SÉt^QVE  à  Luciiius ,  écrit  vers  fl 
fin  du  XIII.®  bu  au  commencement  du  XIV.*  siècle;  format  ift-4.* 

Un  Spéculum  vita  humann ,  Paris ,  Gering ,  1 475 ,  în-4«** 

P/^i^t  jtf£T<i,Venet.  per  Leonardmn  Wild  de  Ratisbf>na>  1481  » 
gr.  in-4.^,  exemplaire  d*une  beffe  Conservation. 

Un  vof  ume  in-folio ,  grec,  Vcnet.  Afdus  Manucîus ,  1 497  >  co»^ 
tenant  :  Aristotelis  Vita,' ex  Laertio.  —  Ejusd,  Vita  per  Joaun, 
PhilwonUM.—  Theophrasti  Vita,  ex  Laertio,  —  Galbnci ^e 

Dans 


CHAPITRE   LXXII.  33 

Dans  une  chambre  voisine  de  la  bibliothèque ,  il  y  a 
lui  cabinet  d'histoire  naturelle  qui  contient  prindpa- 
ieraent  les  minéraux  du  département ,  parmi  lesquels 
on.  remarque  de  belles  incrustations.  Nous  vunes 
dans  ce  cabinet  quelques  essais  faits  pour  le  rouis- 
sage des  feuilles  de  Taloès  (  u}  :  M.  Fauchet  se  propo- 
soit  de  faire  cultiver  cette  plante  dans  les  lieux  arîdes 
voisins  de  la  mer.  Nous  trou vâmes  aussi  dans  un  mé- 
daillîer  qui  n'étoit  pas  en  ordre,  une  médaille  cu- 
fique,  que  j'ai  fait  gra\ex{pL  /,  n/  8J,  et  dont  mon 
ami  M.  de  Sacy  a  bien  voulu  me  donner  la  des- 
cription suivante. 

ct.Lecôté  tf  n'a  qu'une  seule  inscription  dans  un 
»  cercle;  elle  est  ainsi  conçue  :  v^^  *»f  Vf  *}\^  m\  m 
»  c'est-à-dire  :  Au  nom  de  Dieu.  Il  n'y  a  point  d'autre 
TU  dieu  que  Dieu  seuL 

»  L'autre  côté  ^.présente  deux,  inscriptions  ;  l*une 
»,dans  le  champ  ,i'autre  autour  du  cercle.  Dans  l'inté- 
wiijBur  du  cercle,  on  lit  :  *»t  Jj^j  o^  c'est-à-dire  : 
jo  Mahomet  est  l'4^otre  de  Dieu.  L'inscription  autour 
»  du.cerele  ne  peut^ pas  être  lue  en  entier,  parce  que 
»  le  flan  paroît  ne  s'être  pas  assez  étendu  sous  le 


philosophor.  historîa,  —  ÀRlSTOtELlSf  (bvatmç  aicfoaoîcfiç  P>tShtA 
,^^,  —  Ej.  decah]  de  genertutmte  et  corruptione,  Ateieoralogka , 
iemundo:^  PriliO  IiAieeus  demwidff.  -^  jHEO?HRASTUS^  igné. 
—  U,  deventif*  d€lapidilms,^c.  ^ 

Tome  JJL  C 


\ 


j4  CfirA:PÎTkE    L*3tl^. 

>>  màitéâtt  pcw  recevoir  toute  rèmpte&ne^  et  que  la 
»  ipiiècë  û  Souffert  âuàsr  quefijoe  fhtl  iiJtt  le  fcorrf  ;  oit 
»  tîl  séùreitiértt  bîett  dfiibtltittement  téi  dfefttc  mots  t 
»  mt  oywî*  Obeî^'dttah.  Ce  nom ,  dît  M.  de  Sûcy ,  pom^ 
>5  rôft  pàroîtré  Insuffisant  pour  déterrtiihèr  ît  queSé 
»  époque  celte  piêee  îi  été  frappée  rfe  stife  cepeiidaht 
»  très-porté  à  croîïë  que ,  ne  présentant  aucun  câi^te** 
»  tërè  qui  puisse  1â  fkire  amïbuer  ab  ^miifer  câlSfé 
y>  dfe  la  dynastie  des  Fâtémfres ,  lioriîhié  OMH-txtlah  , 
»  è#e  doit  ap)pârfèhlr  &  Oi^etd^alfaft  quf  ftt  go^ 
»  vèrneûr  d^Êgyptè  Vers  la  fin  du  premier  sîède  de 
»  Thégire ,  et  fut  ensuite  intendant  ^e$  tôntrilm- 
»  tioiis  dé  l'Mique ,  où  3  pérft  dàwj  une  **vblte 
D3  des  habîtans  occasionnée  par  sa  dtireté^,  dartr  Ie$ 
iî  premières  années  du  second  siècle,  JPar  parfé  iSé 
»  cepersonnage dans  le  Magasin  tttcyct.  ^fmét  iV , 
»  t.  Vt,  p.  1  î  3  et  suiv. ,  à  fbccasion  d'une  pâté  du 
»  cabinet  du  cbevâlfer  Nani ,  âattt  h  légende  avoîl 
>>  èïé  maf  expîftjuée  ^,  et  ce  qui  më-  oonfkmô^  AftB 
»  fôpîriîon  que  là  titonnôie  dtmt  H  ^ligit  M  ârppar^ 
»  tient  à  ce  même  OMd^aPtak^t^éstcfa'ûy  ab«ui^ 
i^  coup  de  ressemblance  entre  lesrcaracflènbs^  4k  Vfàm 
3»-e^  de  gautf»  légende^ 

9s>  Cette  méd&ille  n'est  pas  sans  intérêt,  puisque , 
».  si  eUe  apparûentyvCpmme  je  le  crois  ^  au  personnage 
»  doAt  fe^^ien»-^  parler.^  eKe  pcoiuye.q^e  les  califeç 
93  ont  quelquefois  délégué  aux  gouvémaitis  ou>  i»^ 
»  tendans  des  contributions  fe  droit  de  faire  fiapper 


i»dé^  tfiof»!éli^  éâ  l€fiir  nom,  et  cju'dîe  lètë  ainsi 
»Fobjectîon  qu'on  pourroit  fcke  contre  i'opinibil 
^  ^é  fat  étiomée  j^ëlativèHfiéiif  à  h  pâte  du  chevalier 
y^2ÈÊâ^  enr  h  fëgâtéàAt  côtniide  Hfté  itionnc^  ouune 

Ny^é  part  ïéS'  ptftiékis  né  sdût  soumises  à  un  rér 
gîme  ftAffvLJL  entetklu'qali  Draguîgnan.  Le^  détenue 
f  sdât  istreiât^  à  se'  Ir^reV  à  dijffëf'eÀs  travau:^  ;  on 
Y  ^fbmé  toi  élsiMssérMM  de  soupe»  à  la  Rumfbi^  ; 
et  Ton  est  ainsi  parvenu  k  obtenir  îe  dbuble  avàn«- 
txgs  dé*  pfésefV^  de^  fofeiv^té  leé  maiheureust  qui 
hs^Mtit  tH  tifisfes^  <leiheiirei$^  et  de  tes  feire  joùil* 
^ane  ÀdiaMftiîréf  ^ahié^  e«  abondante. 

On  compté  dimfs  là:  \ilfe  pkisieilrsî  Maisons  où  Vàû 
t^kte  câ^Ms  abàhckHinéd^  ^  oïdinatrement  ^ôttt 
des  énût^  i£^hoif^dii>itntriage.  II  esttuès-rare  ^ueSii 
pérsôtufes  n^ttti^es  exposertt  les  lèfurs  ;  et  les  payî^îfn^ 
fiôtttV  ^^èrtéraï,tit>p  aisés  eh  ProVeice  pour  avoîk 
rëèbttrs  à  cet  odieux  moyen  :  niais^  les  expositibhi 
<Fénfents  iHégi^es  sont  assez  fréquentes.  Les  mœurs^ 
en  Provence ,  sont  infiniment  plus  dissolues  qu^ 
^rîs  :  on  plëiit  eh  feîre  ia  remarque  dans  les  petites 
y^Se^ ,  et  même  dans  les  campagnes.  Une  jeune  per^ 
f^omie  qui  a  joUî  par  ahtidpatiôn  des  prérogative^ 
dé  la  maternité,  rfen  trouve  pas  tnôihs  un  bon  parti  : 
6n  9L  même  Vu»  tme  flfie  mère  recevoir  des  visites 
de  couches.  £n  général ,  la  pudeur  n'est  pas ,  dans 
ces  comréfes^,  une  vertu  dottiînâme.  Le  rapport  des 

c   2 


3(J  CHAPITRE   LXXHi 

^  aiaissances  non  légitimes  est  aux  nais^jaces  légitima 
comme  i  est  à  i4  ou  1 5.  ^ 

Le  gypse  abonde  autour  de  Draguignan.  La  yill0 
renferme  des  tanneries ,  des  chapelleries^  une  fiHi- 
ture  de  soie ,  plusieurs  fabriques  de  .bougies,  de  draps 
grossiers ,  de  poterie;  il  y  a  six  manu&ct^res  Sacétitc 
dt  plomb  ,  vulgairement  appelé  sel  de  Saturne.  :     1 

M.  Fauchet  vQulut  nous  conduire  à  la  grotte 
de  Yillecroze  et  à  la  chute  deSilIains  :  nous  partîmes 
à  cheval  vers  sept  heures  du  matin.        .: 

On  se  sert  à  Draguignan  et  dans  les  environs» 
pour  les  licous  des  chevaux  et  différensautresr  usages, 
de  cordes  faites.  ayf<ç4u  crin  de  cheval  et  4e  la  laine 
ou  du  chanvre  :  ces  cordes.^  sont  préférées  à  cdies 
de  chanvre  seul,  paxça  qu'elles^ont  moins  sensibles 
que  celles-çî  aux  impressions-de  ralr ,  et  qu'elles  ne  se 
raccourcissent  ou  ne  s'alangçnt  pas  comme  elles.  Le 
mélai^e  qui  leur  donne  cette  propriété,  est  encore, 
pour  les  gçns  de  la  campagne  ,  uii  objet  de  lucre , 
parce  qu'ils  trouvent  ^insi  un  emploi  avantageux  des 
crins  de  leurs  chevau?ç.  >      ^ 

Nous  nous  ^rjrêtâmes  à  Sûlernes^pqux  faire -rafrair 
cbir  nos  chevaux.  Ônry  recueille  beavic^ jp  de  pêche^ , 
et  des  poires  d'upe  grande  beauté  :  les  ^  sources  y 
sont  vives  et  nombreuses.  On  y  file  la  soie  ;  on  y  6- 
Ijo-jque  dès  diapeâ^ux ,  des  draps  grossiers  et  de  la 
faïence. 
-    Nous  arrivâmes  ensuite  k  SillanSyoh  la  rivîèrç 


CHAPITRE   LXXIi;  37 

de  Bresse ,  ijui ,  à  deux.  lieues  de  là ,  se  jette  dans 
l'Argent,fcmne  une  cataracte  très-pittoresque  de<:ent 
dix^huit  pieds  de  hauteur.  II  n'y  avoit  pas  alors  beau- 
coup d'eau; mais  nouspûmesfu^er  cpie^dansla  sai- 
son des  crues ,  cette  chute  doit  offirir  un  superbe 
coup-d'œil;  ,  î 

r  Nous  nous  rendîmes  de  là  à  Villecroze,  village 
près.duquel  il  y  a  une  taume ,  c'est-à-dire,  une  grotte 
de,  stalactites.  Elle  est  d'un  eSet  agréable,  mais  n'est 
pas  très-étendue.  On  a  brisé  depuis  peu  une  des 
cdonnes  d'albâtre  qui  sont  dans  sa  partie  princi- 
pale. Les  différentes  chambres  qui  composent  cette 
grotte,  sont  actuellement  beaucoup  plus  humides 
qu'elles  ne  l'étoient  autrefois  :  la  première  de  ces 
chambres  est  carrée  et  entièrement  tapissée  de  l'es- 
pèce de  fougère  appelée  asplenium  ou  ruta  muraria. 
Autrefois  un  hermite  habitoit  celle  qui  suit  ;  le  dernier 
qui  y  a  vécu  est  enterré  dans  la  grotte  du  fond  :  une 
autre  chambre  servoit  alors  de  chapelle.  Près  de  là 
est  un  torrent  moins  considérable  que  la  Bresse  ;  il 
se  précipite  d'une  assez  grande  élévation ,  et  produit 
dans  sa  chute  un  fort  bel  effet. 

Dans  le  département  du  Var  et  dans  ceux  des 
Alpes-Maritimes  et  des  Basses-Alpes,  on  ménage 
les  tenains  d'une  manière  particulière.  Chaque  pro- 
priétaire réunit  ordinairement  sur  le  même  sol ,  du 
blé ,  de  la  vigne  et  des  oliviers  :  les  terres  sont  divi- 
sées par  bandes  ;  il  y  en  a  une  de  vigne  entre  deux 

c  3 


30  CHàPÎTRB  XKXII. 

de  blé  ;  mais  chacui^e  des  deux  pièces  it  bié  ttstè 
ahemamement  une  année  ea  lachàne^  afiniqi^e  Is» 
v^ne  puisse  tirer  ses  sucs  de  ce  cété*  Les  dii'^ier^ 
et  les  figuiers  sont  jAiaanMès  par-tout  ok  Ms  peuvent 
erotoe  sans  nuire  aux  autres  culture^.  On  se  sert^ 
pour  le  labour ,  d'un  araire  sans  contre ,  qui  a  tpnv 
k  "  ftit  la  ferme  de  celui  ^  décrit  Viigîle  i  on 
teièrt  h  terre  cpii  en  surd^i^e  te  soc,  awc  mi 
bâton  armé  d'une  peme  pdle  de  &r;  opératioii 
maïutiense ,  qui  gène  ie  iaboureur  jet  le  distndt  deia 
conduite  des  (^e?auK  et  de  It  ditectton  de  sa  chamie. 


39 

CHAPITRE  LXXni 

DÉPART  de  Draguîgnan.  —  Tai^RTû^uiL  -*-  Lot^vf^ 
---  Ctthiit.  *^  Au«$.  ***  Troiçe  dit  CiïB*4dicusi.  — 
Urne  cfalbâiiRe.  ^^  I|ifcriptipD$.  -^  Baupve?^.  — 
fxmU^nfi4^Èvtqve,  —  Le  Verdçn.  —  Sainte-Croi^. 
—  Jiti,  Riez.  —  Colonnes.  —  Panthéon.  —  BoM- 
miens.  —  Inscriptions.  —  TaûrobDre. 

iM  Otf  s  iTôuIiom  partir  die  gi^Mi  matiii  poinr  tioi» 
rendre  "àt  feoniie  lieure  à  I^e\i  miôs  les  dbeyjmx  » 
firent  attendre ,  ^  nous  ne  pûiD^s  «ortîr  de  Dng^ 
gnan  qu'kimit  henres^  La  niantâgne  de  Tw»$êur^^\ 
domine  !a  ville ,  est  presque  inadte  ;  on  tiy  r^ 
que  quelques  diènes  verts  bi  àlancs ,  ^juelques  fim 
maritinnes  y  et  fe  pinu%  sitvMris ,  mais  en  très*petîte 
quantité  :  ces  ail>res  servait  k  prou^ver  que  ceÊtûmàr 
tare  pourroit)  avec  des  soim ,  devenir  {dus  dbôn^ 
dante.  Le  reste  du  territdre  de  Tourtour  (  i  )  pcsod«ît  i^ 
comme  sdKeurs ,  du  i>Ié  mêlé  dvec  Ja  vigne  et  f  pUh 
vier  ;  on  y  recueifle  beaucoup  ^  tuuicots  blancs  :  ee 
territoire  est  arrosé  par  de  feeUips  sources* 

Nou^^  passâmes  fe  peni  du  Temfd^ ,  près  d\ine 
ferme  dn  même  nom ,  ainsi  appdée  sans  doui;e  parce 


(i)  Le  nom  de  ce  viWage  dérive  du  mot  îarin  ièriura  ,,cc*t*M?  r 
}>»ce  <[uoti  y^  souffi^ir  là  mort  à  (d<  gn»d$  cnmififh^  ^nei  (i^c 
ciU  en  r^y^^f^^  ^B£  la  Vie  <|k  i'^b^é  I$»m/  écrite  en  1 040. 

c  4 


'4o  CHAPITRE    LXXIIT. 

que  ce  territoire  appartenoit  autrefois  aux  Templiers. 
Non  loin  de  là  est  la  fontaine  de  Longvay ,  qui  est 
regardée  comme  une  des  curiosités  du  pays ,  à  cause 
de  l'abondance  de  ses  eaux. 

"Le  terrain  est  ensuite  presque  entièrement  cultivé 
en  blé.  Mais,  quoique  nous  ne  fussions  qu'à  la  mcMtié 
de  messidpr ,  les  campagnes  étoiènt  déjà  dépouillées 
d'une  partie  dé  leurs  richesses  :  elles  présentoient 
l'aspect  de  celles  des  environs  de  Paris  au  commen- 
cement de  l'automne*  La  nomenclature  des  mois  du 
calendrier  républicain  étoit  vicieuse ,  puisqu'elle  ne 
pouvoit  convenir  qu'à  une  partie  de  la  France.  . 

A  notre  arrivée  k  Aups ,  nous  aperçûmes  à  la 
porte  de  l'auberge ,  qui  est  établie  dans  un  ancien 
couvent  de  religieuses,  deux  femmes  coiffées  avec 
dès  bandelettes  :  c'étoient  le^  actrices  d'une  mal- 
heureuse troupe  de  comédiens*  Un  plat  de  merluche 
qu'on  faisoit  cuîr^pour  eux  étoit  la  seule  prpvision 
que  possédât  cette  hôtellerie,  digne  de  figurer. dans 
ies  histoires  de  Dom.Quichote ,  de  CH-Blas et  AeCus- 
man  d'Alfarache;  heureusement  les  bâts  de  nos  mur 
lets  avoient  été  bien  garnis  de  vivres. 

Nous  questionnâmes  pendant  notre  dîner  ces  infor- 
tunés successeurs  de  Thespis  et  de  la  Rancune.  Leur 
troupe  n'étoit  composée  que  de  cinq  acteurs  ,  .dont 
deux  femmes  et  une  petite  fille.  La  plus  âgée  de 
ces  femmes ,  qui  étoit  Tépouse  du  directeur ,  jouoit 
^»ns  l'occasion  les /7^rfJ  nobles  et  les  jftnanciers  ;  et  fa 


CHAPITRE    LXXIII.  4» 

plus  jeune  étoit  ou  Colin  ou^  Cohttej  selon  les  df- 
"  constances.  On  donnoit  ce  soirJà  V Honnête  Criminetf 
drame  pathétique ,  et  qui  pouvoit  faire  inonder  de 
larmes  ies  mouchoirs  des  habitans  d'Aups  :  on  devoit 
jouer  ensuite  les  Fausses  InJidUHés;  certainement  le 
langage  de  cette  pièce^  toute  fondée  sur  les  usages 
et  le  jargon  de  la  société ,  dut  paroitre  absolument 
étranger  dans  ces  montagnes.  Mais  on  préparoit  lou 
Groulié  bel  esprit  [  le  Savetier  bel  esprit  ]  ,  pièce 
provençale ,  dont  la  représentation  étoit  attendue 
avec  une  vive  impatience. 

La  ville  d'Âups  n'offre  rien  de  curieux  ;  elle  est 
seulement  un  peu  moins  noire  et  moins  triste  que  la 
plupart  des  autres  villes  de  la  haute  Provence.  Ueau 
y  est  très-abondante.  Il  y  avoit  autrefois  un  chapitre 
ancien  et  très-célèbre  (i).  Le  maire  »  M.  Giniud,  à 

(i)  Ses  Statuts,  que  j'ai  fus  dans  un  cartulaîre  que  possède 
M.  de  Saûnt-Vmccns,n.**  loi ,  ont  été  faits  en  Tan  looo,  confir- 
més dans  le  XII.*  siècle  par  Eugène  III  et  Anastase  IV ,  et  rédigés 
en  1302. On  y  a  indiqué  Jes  heures  Ats  anciens  offices,  fes  distri- 
butions dont  étoient  privés  ceux  qui  xCy  assistoient  pas.  Les  cha- 
noines étoient  nobles  ;  ils  dévoient,  à  cause  de  cela,  porter  sur  la 
tête  un  morceau  de  fourrure,  veïlutum  qûîd ,  à  peine  d'être  excom- 
n)unié$.  Ils  pouvoient  avoir  un  chien ,  un  cheval ,  un  oiseau  de 
proie.  On  y  voit  aussi  l'usage  de  faire  brûler  une  lampe  devant 
le  sanctuaire ,  luminare  ante  corpus  Christi  ;  de  donner  l'hospitalité 
à  tous  pauvres  venant  y  la  quantité  de  pain ,.  de  \4ande ,  de  légumes , 
que  chaque  chanoine  avoif  par  jour.  Les  bénéficiers  dévoient 
respect  aux  chanoines,  à  cause  de  leur  noblesse,  &c.  L'évêque  de 
Fréjus  pouvoit  visiter  le  chapitre  j  miis  s'il  y  demeuroit ,  c'étpit 
à  se$  ïrm^ 


■■ri^ I 


4;t  çjfi^riTR»  fL^xHU 

ffà  M.  Fattchet  fkm$  sm^it  adres^é^  »  nws 
dicz  M.  Esparron,  qui  po6$è(te  vum  Jbdie  4uzie d*.^^ 
Mtœ  :  elle  a  été  trouva?  k  Puymwsm  •  Ueu  voisJQ 
de  Riez  ;  elle  r  diK-4imt  pouces  4e  hiUl  »  et  PP  1^94 
dans  son  grand  diamètre.  J'en  lu  fait  ilg^rar  U  &>aa# 
(  pi  XXIV,  n:  41).  On  tfouva  iwforè^  <»^  ttc^ 
fimgiBens  d'nœ  même  inscriptîoii  ; 


i.         '  t'  1 

"  T 

!!  ^ 

;.0LTIN;I  FESTÏ 


i        MTI 


t  LCOlj 
|AVGVt 


Les  lettres  AVGT  avaient  (ait  cnûre  ipie  ealte 
time  étoît  du  temps  <f  Auguste  ;  mais  on  sait  que  \c 
titre  iSntiguste  a  été  donné  à  tous  ies  empereurs  ro^ 
mains  et  à  leur  famille.  On  a  d'al^e^rs  trouvé  dans  le 
même  lieu  des  ntédcôUes  de  Marc-Aurèle;  etia  forme 
deTume^avec  ses  rudenturesen  spirale,  peut  la  faire 
attribuer  au  111/  siècle  de  notre  ère.  On  retira  encore 
de  ia  même  fouille  un  anneau  d'or  avec  une  tèt^ 
d'aigle. 

Nous  desirions  voir  la  fontaine  VEvêqut ,  et  pour 
cria  nous  ne  pouvioiiis  suivre  la  route  ordinaire.  Nous 
prhnes  à  Aups  un  second  guide  ,  pour  ne  pas  nou» 
égarer  :  il  nous  conduisit  d'abord  à  Bauduen ,  où  l'on 
trouve  d'assez  beau  marbre  ;  et  vers  huit  heures  ^ 
nous  étions  à  la  fontaine  VEvêque ,  nommée  ain^ 


parce  cpi^ÈHe  mt  jfpismt  da  iieti  0a  un  évéqoe  de 
Kbz  JtToit  êâthêiûrmie  raaÎBon  4e  plaisanoe.  Cette 
sùvgce  sort  ivec  un  grand  ûzdi  ^  causé  par  son  impé^ 
moshé  et  son  abondance  ;  mais  oh  peut  dire  ^'eSé 
€ât  beançcmp  de  farnit  pour  peu  de  diose.  Apvès  «votr 
donné  le  mouvement  à  <;udcpies  moulins,  eBe  va  s^ 
perdre  àdeux  cems  pas  dans  le  Verdon  :  les  eaux  de 
cette  rivière  f  mpièuent  chaque  jour  sur  ce  court  et^ 
paoe.  On  fabrkpiç  à  Baudbien  des  draps  giossiers. 
B  étcHt  près  de  neuf  heures  quand  nc^us  fèmes  sur 
ie  l>oid  du  Verdon,  et  le  gaifirur  ( i  )  avoit  quitté  son 
poste;  cmtitt^-temps  d'autant  pku  fâdieux ,  que  le 
Verdon  avoit  beaucoup  grossi.  Cette  rivière ,  qui 
pvead  sa  source  dans  les  montagnes  de  Barceion- 
nette,  roule  presque  toujours  parmi  des  buics  de 
locha^  dans  des  vattées  très^resserrées.  Entre  Bau- 
doen,  où  nom  étions,  et  Sain^-<Croèc ,  ^i  est  sur 
I^tre  live  ^  il  y  a  de  grands  aifia^  de  cailloux  rou<* 
lés;  et  cette  rivière,  ou  pktèt  ce  torrent,  grossit 
d'une  manière  étonnante  en  quelques  heures,  sur^ 
teut  vers  ie  soir.  A  cent  pas  de  Bauduen ,  ses  eaux 
se  sont  fait  fbur  à  travers  une  m<»Ttagne  calcaire,  par 
une  scissure  étroite  et  profonde  coupée  à  pic  sur 
ies  deux  bords  :  on  y  remarque  les  restes  d'un  pont 
romi^.  Le  V«*don  va  se  jeter  ensuite  dans  h.  Du- 
rance  au-dessous  de  Cadarache. 

(  i)  C'est  ainsi  que  i*on  appeiie  celui  qui  fait  passer  les  hommes 
et  les  chevaux  à  gue. 


44  CHAPITRE     LXXIII. 

Le  gaifreur  revint  enfin  nous  prendre  :  nous  pas- 
sâmes la  rivière  avec  une  assez  grande  difficulté; 
nos  chevaux  avoient  de  l'eau  jusqu'au  ventre.  Sur  la 
rive  opposée,  f  eau  s'éloit  répandue  dans  les  champs 
et  les  marais ,  et  nous  eûmes  bien  de  h  peine  à  nous 
retirer  de  ces  terres  bourbeuses. 

Enfin  nous  arrivâmes  à  la  montagne  Sainte-Crbk  ; 
mais,  parvenus  au  sommet,  nous  ne. pouvions  rien 
distinguer,  tant  l'obscurité  étoit  épaisse.  Nous  étions 
sur  les  limites  du  dép^xtemeni  des  BasseS" Alpes,  àzn% 
le  territoire  des  anciens  He'i ,  qui  dépendoient  des 
Salyes.  Il  étoit  onze  heures  quand  nous  arrivâmes  à 
JRiei ,  à  demi  morts  de  fetigue  et  de  faim. 
-  Cette  ville  est  une  des  plus  noires,  des  plus 
tristes  et  des  plus  maussades  de  l'ancienne  Provence; 
mais  elle  est  curieuse  pour  un  voyageur,  à  cause  des 
beaux  restes  d'antiquités  qu'elle  renferme  encore. 
Il  paroit  qu'elle  avoit  le  nom  d'Aleiece ,  avant  de  por- 
ter celui  du  peuple  jd<mt  elle  étoit'  la  capitale  :  on 
l'appela  ensuite  Alebece  Reiorum  ApoUinarium  (  i  )  ; 
peut-être  ses  habitans  prirent-ils  ce  surnom  à  cause 
du  culte  qu'ils  rendûient  à  Apollon.  Pline  dit  que 
c'é toit  seulement  un  oppidum,  qualification  donnée 
aux  villes  qui  jpuissoient  du  droit  latin  ;  mais  dans 
plusieurs  inscriptions  elle  prend  le  titre  de  colonie. 


(i)  Ptm.  m,  4. 


CHAPITRE    LXXIII.  4} 

Dgns  des  t^B{>$  moins  anëi^s  ,  die  a  reçu  les 
noms  de  Riffum  et  Rem$  d*oii  s'est  fonné  celui  de 

.Quoique  cette  Y^Iie  eût  ^  avant  la  révolution ,  un 
évéçhé  f  eUeiip  ren^rme  aucun  édifice  un  peu  remar* 
qUfd>Ie  :  personne  ne  paroi t  s'y  occuper  des  sciences  et 
des  lettres  ;  et  nous  n'aurions  pu  obtenir  les  moindres 
renseignemens ,  sans  la  complaisance  de  M.  Joseph 
Morenon,  orfèvre,  qui ,  sans  avoir  fait  d'études ,  a 
un  :g9Ùt  naturel  pour  l'bistoiFç  et  les  monumens  de 
s(H>  p^ys  :  c'^t  k  lui  que  je  dois  les  dessins  de  la 
pf^cke  LI/I,  où  ils  sopt  représentés. 

II  nous  mena  d'abord  voir  les  qus^tre  magiuifiques 
colonnes  qui.  soQt  à  une  portée  de  fiisil  de  la  ville , 
sur  le  grand  chemin  (pi,  LlUifig,  i  J  :h  bâtisse 
sur  laquelle  elles  posent  est  d^  pierre  fi-oide  ;  les  bases 
et  les  chapitea«pc  sont  de  marbre  ;  le  fût  est  de  granit 
de  Provence  (2)  ;  l'entablement  qu'elles  supportent 
est  décoré  de  différentes  moulures ,  et  l'on  remarque 
disons  des  omepiens  qui  variant  entre  chaculi  de$ 
trois  entrç-coIpnnemens/i^iVi;i/^2^.0nafait  sur  ccft 
édifice  bien  d^s  cpr^ectures  :  quelque^-ims  prétendent 
que  ces  colonnes  étoient  au  nombre  de  douze ,  et 

(i)  On  lit,  clans  le  Mercurt  de  juillet  1748,  une  lettre  sur  ie  nom 
de  Riez. 

(a)  Hauteur  du  fût; 5   «n^««  85  ««ntiméu*». 

Circonférence 2  3  ^, 

Entrc<olonnement^ *   ^  .  <  i* 


iC  ohaVitré  txxift: 

qu'on^HTok  ^cé  au  wS&éû  la  staetcte  toldssalé  é^Apd^ 
icsn  ^  ultm  l^inion^  de  Scikté  ,  eil^  dé(k)rôieMt 
l'entrée  tfun  mausolée;  et  le  P.  Miraillet  pert^é  que 
ccf  sont  i«s  ye^èé  iTmii  prét^h^.  Ces  ^gùi^  éon|ec- 
ti^c»  sont;  piédèémeia  ^  qui  désfbô^c^  h  iéeMè 
ée$  an^ké&;  p^  U  culti^^  âveé  siiR^è^,  fi^nit 
tavoôr  à'absfeniiTy  aimique  dans  tMtes  les  autr^, 
d'expliquer  ^6  qvt^mt'  ne  peut  déeidiivrir.  Côthme  c^ 
ne  possède  aucun  reftseignemeht  sut  Tédificé  àut^iël 
ces  be&fr^ddnnes^oiit  appanenu^  €<)^it«e^  opkiîi^ii  % 
cet  %aiiès«ikHt  hasardée  :  mais' on  peut  jvtgètA^'^ 
lement,  d'après  de  si  beaux  restés^,  dé  sli^  ntagfâfii^ 
cence  et  de  sa  majesté. 

A  (pielque  ^stance  de  h  est  iljtie  rbtidnde  déM 
iss  murs  modernes  sont  soutenus  pai*  huit -colôÂiié^ 
et  gtmnît ,  d'ordre  corinthien  f  iHd.  tt?  ^}  ûaxxMé 
les  précédentes  (i)  :  au  milieu  ifti-  ^dRfhie  qu'on  A 
cMsmiit  dessus  es^  uiïe  peme  fâilferile;  On  erdlt 
qup  cet  édtfke  a  iông- temps  stPà  de  bapti^è^ét 
C^toît  probablement  un  temple  ctttulalre  :  dn  ftrt 
èxxmà  k  nomade  Panthémi^  \  cause  de  Finscriptiôli 
suivjâstë^,  qui  a   été  trouvée  dan^  une  diapellë 


(i)  Hauteur  dé  îa^rcJtonde lametres  ^8  cendmétrèi 

Sa  crf conférence  extérieure i6  oo. 

Hauteur  ctu  fôt  des  colonnes 4  12. 

Circonférence i  6^, 

£ntre-coidntiement. .»..., t  5^9. 


vdsnie,  et  qtrbir  tok  âUjotiritlio)  dans^qn  «ngiecto 
Fétiific0  (t)  : 


W    hI   ,    IIIIIIIIM   Mil 


AVCVSTÔRVM 
CVR  A 


On  a  interprété  ainsi  cette  in^ption ,  'Aux 
DieiNC ,  par  les  soins,  des  Augustes  ;  mais  il  est  é vi- 
desnt  q^'iI  faut  lire ^  Aux  Divinités  des  Augustes,  par 

les  soins  de Le  vidfe  laissé  sur  la  pierre  devoit 

contenir  les  noms  de  celui  ou  de  ceux  qui  avoiênt 
fait  cette  inscription  votive,  laquelle  n'a  voit  proba- 
blement aucœ&e  rehitibn:  avec  le  tempte.  L'inscription 
à  la  mère  dô$  Atmt^  dont  ^  ferai  bientôt  mention , 
et  fa  forme  cjroilàil^  de^  i%difice,  qui  étoit  celle  des 
temples  con^cté^^  k  Gyt^  ,  ainsi  xjue  l'attestent 
plusieurs  médaillé» ,  M^  {>a^ssenf  devoir  faire  pré- 
sumer que  celui-ci  à  a{>|mtteii«f  au  culte  de  cette 
déesse. 
Cet  édifice  a  été  long-temps  sans  porte:  il  a  servi 


Segiofsis,  ai.  »  _ 


48  CHAPITRE   LXXIII. 

aux  réunions  des  pénitens  de  Riez  ;  depuis  la  révo^ 
lution,  il  étoit  abandcHiné  aux  gens  de  la  campagne , 
qui  y  trouvoient  \xn  abri  lors  de  la  moisson  :  c'étoit 
aussi,  pendant  toute  I'anné&,  la  retraite  des  bohé** 
miens  ou  diseurs  de  bonne  aventure  qui  parcourent 
la  Provence  ;  ils  en  ont  noirci  les  murs  en  y  faisant 
leur  sale  cuisine. 

Sur  la  place  ^  en  face  de  la  grande  porte  de  Té- 
•glise  y  il  y  a  une  fontaine  semblable  à  toutes  celles 
qui  sont  d'un  usage  si  commode  dans  les  villes  de 
Provence  :  la  pyramide  d'où  sortent  les  jets  est  sou- 
tenue par  une  pierre  carrée  fpL  LUI,  nJ^^J^dont 
la  face  vers  le  sud  et  celle  vers  le  nord  sont  chacune 
ornées  d'une  tête  de  taureau,  d'une  tête  de  belieret 
d'un  cône  de  pini  La  face  vers  Test  porte  cette  ins- 
cription (  ï  )  : 


■i  1 1 


MATRI     PEVM 

maq^Aeqve  idaeae 

l.  d^cimvs  pacatv6 

et  cqelia  secvnpina 

:  Eiys  op  saçrvm; 

TAVROROW  F 


A  la  mère  des  dieux ,  et  ponde  Idéennè ,  L.  Decitnus  Pacatus  et  Cœlia 


^•^*^" 


(i)  MuRATOR.xxxii,  5  j  Don.  ^; Bouche,  Çhçr.dt  PnweAce, 
59  5  Bartel  ,  Pr^nles  ecdesia  JRegiensh^  ao. 

S(cundina , 


• ,, 


CHAPITRE    LXXIIÎ.  4^ 

Stcundinût  son  Cotise  (i),  pour  un  saq^ifce  de  taureaux  qu'ils  ont 
fait  (2). 

Cette  inscription  votive  a  donc  été  tracée  en  com- 
mémoration dW  taurobole  à  la  mère  des  dieux  :  la 
tête  de  bélier  indique  que  ce  sacrifice  a  été  suivi  d'un 
criobole  en  rhohneur  d'Atys ,  son  prêtre  et  son  favori. 

Peut-être  l'édification  du  petit  temple  rond  que 
je  viens  de  décrire,  a-t-elle  été  aussi  l'effet  de  la  piété 
de  |L.  Decimus  Pacatus  et  de  Cœlia  Secundina  en- 
vers Cyfaèle.  Cette  conjecture  a  quelque  probabi- 
lité. Il  seroit  nécessaire  d'enlever  cette  curieuse  ins- 
cription ,  dont  les  lettres ,  rongées  par  l'action  des 
eaux  qui  coulent  continuellement  de  la  fontaine  , 
auront  bientôt  disparu. 

On  rencontre  encore  dans  Riez  quelques  autres 
inscriptions  antiques.  Nous  vîmes ,  dans  la  rue  de 
Paris,  ce  fragment  d'une  pierre  qui  a  été  sciée  pour 
être  employée  dans  des  constructions  : 

M  A  IN   J 

VENNI^ 

ET  -IVLirj 

TERSAC't 

HONOR!^ 

liSACEFT^ 

NIOIVLIO^ 


(1)  EJUS,  sous-entendu  conjux,  commt  cela  se  remarc^uc  dans^ 
plusieurs  inscriptions. 

(2)  Faaum, 

Tome  IJL   •  D 


/ 


JO  CHAPITRE    LXXIII. 

Dans  ia  makon  de  M.  Cc^ordan  ,  on  !h  cette 
inscription  (  i  ) ,  qui  a  été  trouvée  au  bas  de  la  colline 
Saint-Maxime ,  du  côté  du  nord  : 


C 


^. 


( 


mmrmmmummim 


VERV8 


VER  A    ..    SO 
M  ETI     ; 
SATVimiNAE 
VXSORI 


ï 


} 


D      M 

SATVRNINA]^ 
VER  I    FILIAE 


i**"— •■■^■-iw 


) 


^mm 


] 


(i)  MURATORI,  MCCXI,  B. 


CHAPITRE   LXXin.  51 

Cette  autre,  qui  est  aus^  dans  la  même  maison, 
se  lit  sur  une  pierre  qui  a  été  tirée  des  fondemens 
des  remparts  :  H  paroît  qu'il  y  est  mention  d'un  curator 
d'Avignon  (i). 


n         ^^1  > 

QVAESTV^ 

PRAEF^ 

CVRATORj 


AVE 


NI^ 


PATR^ 


A 


M.  Morenon  nous  conduisît  près  de  la  ville  dans 
une  maison  qui  appartient  kM.  de  Campagne.  Nous 
vîmes  dans  la  cour  une  pierre  en  forme  d'autel ,  avec 
cette  inscription,  qui  a  été  troiivée  en  1703  près  de 
Tédifice  circulaire  dont  j'ai  donné  la  description  ;  peut- 
être  est-ce  un  vœu  k  Sylvain  par  Diadumenus  (2)  : 


•^•Ê^m^ 


(r)  ¥tat'étTC  faut-ii  sons-cntciKlre  retpublîca  ou  publicce  pe^ 

amm, 

(a)  Ce  Diadumeniis  devoît  être  iefcrmicr  {pittUus}  de  Syrn- 
piioBtuSy  dont  le  nom  est  g^ec;  et  c'est-  pour  obtenir  ki  fertiiité 
i'i  k  terre  qu'il  offre  cet  autei  à  Sylva», 

D  a 


L 


5^ 


CHAPITRE   LXXIir, 


DIAOYW^ 

NVS 
SYMPHOEi* 


Nous  trouvâmes  encore  dans  la  même  cour  le 
fragment  suivant  : 


%;« 


VCiuk'^*^ 


i 


iMPCAESARETRA  L 

^HTADRIANOAVS         Pf 
^^AVIÀSSinCESTni^^ 

Le  sol  des  environs  de  Rfez  présente  ime  espèce 
de  poudingue  mêlé  d'un  gravier  fin,  de  beaucoup 


(l)  MURATORI,  LXVII  ,  lo. 

(a)  aVCTORE  ÎMP  CJESARE  TRAJatio  HADRUNO  AUGUStê' 
^. .  •  •  VIA  SILICE  STRucta, 


CHAPITRE  LXXIII*  55 

de  cailloiix  et  de  sable;  il  se  bris^  sous  les  doigts 
avec  une  extrême  facilité.  On  a  trouvé  à  une  liéue 
dé  la  ville ,  dans  du  sable  que.Fon  extrait  pour  faire! 
la  couverte  de  la  faïence  y  plusieurs  dents  d'éléphant  f 
de  neuf  à  dix  pouces  de  longueur. 

Sur  une  montagne  près  de  Riez ,  on  voit  une  cba- 
pelle  dédiée  à  S.  Maxime ,  patrpn  et  Fun  des  premiers^ 
évoques  de  cette  ville.  Six  colonnes  de  granit  en  dé- 
corent rintérieur ,  et  il  y  en  a  deux  autres  à  l'entrée  : 
elles  proviennent  sans  doute  des  édifices  somptiieuifr 
cjue  renfermoit  Tancieiuie  ville.  Le  bénitier ,.  d'une 
assez  belle  forme ,  est  de  marbre  du  pajrs.  Au-dessus 
de  l'autel  est  un  tableau  représentant  une  apparition 
de  la  Vierge  à  S.  Maxime ,  et  qui  se  fait  remarquer 
par  des  traces  assez  singulières  du  vandalisme  révo- 
lutionnaire :  pour  donner  à  ce  tableau  une  étendue 
proportionnée  à  la  place  quiî  occupe ,  on  Ta  entouré 
avec  un  autre  tableau  coupé  par  bandes  ;  de  sorte 
que  chacun  des  cAtés  de  cette  bizarre  bordure  offre 
le  coup-d'œil repoussant  de  têtes ,  de  bras,  de  mains 
et  de  jambes  séparés  du  tronc." 

La  plupart  des^  villes  de  la  Provence  ont  des  fêtes 
locales,  auxquelles  les  habitans  sont  très- attachés;, 
ils  les  célèbrent  avec  beaucoup  de  pompe,  et  pres- 
que toujours  d'une  manière  extrêmement  bruyante. 
A  Aix,  comme  on  l'a  vu,  c'est  celle  de  la  Fête- 
Dieu;  dans  plusieurs  villages  des  environs  de  cette 
ville,  c'est  celle  de  S.  Éloi;  à  Manosque,  celle  de 

.     ^  3 


* 


y4r  CHAiPiTBE   LXXÎH. 

S.  Pancrace  ^  8lc.  |je  guet  dt  S.  Maktme  a  fieu  à 
Riez  (  I  ) ,  durant  les  trois  joiirs^  de  là  Pentecôte  :  c'est 
une  bravade  entre  ies  Qirétîens  et  les  Sarrasins.  Les 
babîtans  aisés ,  vêtus  &  la  hussarde ,  composent  uil 
corps  de  cavalerie  bien  monté  (2)  :  les  artisans  se  réu- 
nissent en  compagnies  de  fantassins.  Les  Sarrasins  ont 
des  cocardes  vertes  et  des  étendards  de  même  couleur. 
On  élève  dan$  le  préau  de  là  foire ,  près  du  tçmple  rond 
et  des  quatre  colonnes,  un  fort  construit  en  planches 
et  orné  de  feuillages  verts.  Le  dimanche  et  le  lundi , 
fes  Chrétiens  attaquent  et  bloquent  ce  fort ,  qui  est 
occupé  par  les  Sarrasins  :  il  se  consommé  ,   dans 


t 

/ 


V 


(.<)  Qaelqu£6  anecdotes  attestant  îa  passion  mcroyâMe  que  Ton 
y  montre  po*ir  cette  c^pémpQi««  Un  pauvre  habitant  qui  ne  pos- 
^^doit  qu  une  truie  et  seS  douze  petits  ,  ies  vendit  pour  acheter 
de  la  poudre.  Sa  ftmme,  furieuse,  court  après  lui,  et,  au  milieu 
de  ia  bravade  >  Taccabie  des  plus  jtistes  reproches.  Le  iharî  se 
retoui^e  voyelle  en  riant,  ooi^tiniio  de  tirer  r  et  iui  dit  à  chaque 
coup  de  fusil  :  Tiens ,  voilà  encore  un  petit  cochon  fui  crie.  Un  autre» 
dont  la  femnie  étoit  morte  le  jour  de  ia  Pentecôte,  cacha  cette 
perte  pendant  les  trois  jours  de  fa  hravanc ,  pour  ne  pas  être 
obligé,  par  bienséance,  dé  5e  priver  du  plabir  d'y  prendre  part. 
On  çn  a  vu  un  troi^ièn^c  yasaister,quoiquesonpère  fût  mort  trois 
jours  auparavant. 

(2)  Lorsque  nous  allâmes  visiter  fe  temple  rond,  plusieurs  de  ces 
messieurs  nous  accompagnoient.  Leur  petit  uniforme  est  veste  et 
culotte  de  nankin,  avec  liséré  et  ornemens  k  ia  hussarde  en  petits 
rubans  de  velours  ,*  le  grand  unifoi^ne  est  beau  et  riche.  Si  quel^ 
que  personne  de  marque  vient  à  passer  par  leur  ville,  ils  lui  four- 
nissent une  garde  d*honneur. 


•^iM^m^^Am 


CHAPITRE    LXXIII.  5J 

cette  occBsioii ,  quioiie  à  vingt  quintaux  de  poudre. 
Enfm  on  s'empire  du  fort  h  tfoisième  four  ;  on  ie 
ssaccatge^  on  le  brâle,  et  Ton  emmène  les  Sarrasins 
prisoniueri  fissqu^uxx  poftes  de  la  viUe»  Le  tout  iimt 
fax  un  repat*  Le  iendemain ,  tout  ie  monde  va  & 
Samt*-Max3me  )  poipr  œiùerçiet  le  vénérable  patron 
âe  la  ville  de  ce  que  personne  n'a  été  blessé*  Là,  le 
commandant  de  ia  bravade  se  nomme  un^uccesseut 
pour  Tannée  suivanfe  :  fl  le  désigner  €n  plaçant  son 
chapeau  sur  la  t^e  de  celui  qu'il  f  uge  le  plus  digne  • 
de  rempKr  cette  place  ;  et  ce  dernier  y  en  signe  d'ac^ 
ceptatîcm,  lâde  son  fet,  c'«st-à-dire  qu'il  tire  un 
coup  de  iùfiil  dans  TégBse  (  i  )  • 

Qu(^|ue  Riez  soit  au  milieu  des  montagnes ,  ses 
habitans  n'iaim^it  point  à  être  appelés  mênûignards  ; 
ifs  donnent  ce  nom  k  ceux  de  Moustier,  qui  ha* 
bitent  un  pays  plus  élevé  que  le  leur  ;  et  ces  derniers 
prétendent  <^e  ce  nom  ne  convient  qu'à  ceux  qia 
som^kicc^^  plus  enfoncés  dans  la  r^on  monta-" 
gneuse. 

Riez  n'a  d'autres  fabriques  que  quelques  tanne- 
ries et  quelques  mégisseries  :  on  y  recueille  beaucoup 
d'amandes.  Ses  vins  sont  assez  estimés  (2),;  et  en 


(i)  Cette  fête  est  sans  doute  ancienne.  Elle  rappelle  les  ravages 
des  Sarrasins  dans  le  pays ,  et  la  terreur  qu'ils  y  inspirèrent. 

(2)   Vinum  Reiense  super  ottmia  vina  recense.  Cet  ancien  proverbe 
iatin  prouve  la  réputation  dont  ii  jouissoit. 

i>  4 


j6  CHAPITRE    LXXIII« 

elBfet,  quoique  peu  spiritueux ,  ils  donnent  unè'boîs- 
son  agréable  :  ils  perdent  cependant  aujourd'hui  de 
leur  bonté ,  parce  qu'on  réserve  pour  les  oliviers  les 
terrains  exposés  au  midi ,  et  qu'on  plante  la  vigne 
dans  ceux  qui  sont  au  nord.  En  général ,  le$  vins  de 
Provence  n'ont  pas  la  qualité  qu'ils  auroient  si  l'on 
youloit  choisir  les  plants ,  les  bien  exposer ,  ne  point 
les  placer  sous  i'ombrage  des  oKviers  et  des  figuiers , 
qui  leur  dérc^nt  les  rayons  du  soleil;  et  même, 
sans  ces  précautions,  on  y  feroit  encore  de  très-bon 
vin,  si  les  procédés  mis  en  usage  pour  exprimer 
cette  iiqueur  étoient  mieux  entendus  :  mais  on  la 
donne  à  si  bon  marché ,  que  le  débit  ne  pourroit  dé- 
dommager des  frais  d'une  bonne  maiiipuiation.  On 
se  hâte  de  mettre  le  raisin  dans  la  cuve,  on  le  presse 
à  l'air  libre  et  souvent  même  lorsqu'il  pleut.  On 
faîsoit  autrefois  un  excellent  vin  cuit ,  qui  n'étoît  pas 
jugé  indigne  d'être  servi  sur  la  table  du  Roi  ;  mais 
on  néglige  au|ourd'hui  ce,  genre  de  fabrication. 


y 


.f^A 


chapitIie  lxxiv. 

PUYMOISSON.  —  yioMSllEVi.'- Notre-Dame  de  Beau-, 
ve^er,  —  Le  sire  de  Blaccas.  —  Senez.  —  Digne. 

—  Bains.  — Dessins  de  M.  Constantin.  — Villages  des 
montagnes  subalpines. — FoNTENELLE. — MA  Li  GI ER. 
•^Rocher  coupé.  —^  Sisteron.  —  Histoire.  —  Ville. 

—  Excursion  à  Saint-Geniez.  —  Inscription  de  Dar- 
danus.  r—  Plantes.  -.—  Theopoljs,  — r  Notre-Dame 
de  Dromon,  —  Houille.  —  Retour  à  Sisteron.  — r  Ins- 
criptions  supposées. 

Il  étoh  à  peine  deux  heures  du  matin  lorsque  nous 
quittâmes  Riez ,  le  28  juin.  Nous  passâmes  près 
de  Campagne  (  i  ) ,  et  fûmes  bientôt  à  Puy  mois  son  (2) , 
dont  le  château  â,  été  détruit  par  les  gens  du  pays 
pendant  la  révolution.  II  auroit  falhi  prendre  sur  la 
droite  pour  aller  à  Aîoustier  et  à  Sene^^  ;  mais  ce 
détour  nous  auroh  empêchés  d'arriver  à  Marseille 
à  temps  pour  nous  rendre  ensuite  à  Beaucaire.  La 
situation  de  Moustier  sur  la  pente  d'une  montagne , 
au  bord  d'un  précipice ,  et  un  monument  singulier  qui 
y  existe ,  méritent  cependant  d'attirer  inattention  du 
voyageur.  Le  nçmde  AfoustUr  est  une  corruption  du 

—^1^  I   I  — — — — — H^— — .— — *i—i — ^— ^— — M»^— 

(i)  Supra,  page  51. 

[2)  Appelé  dans  les  actes  Podium  Mois^num  >  sans  doute  à 
caïue  de  la  fertilité  de  s(m  territdre* 


j 


58  CHAPITRE    LXXIV. 

mot  latin  manasteriûlum  :  H  vient  ^mi  monaslève  <gM 
les  religieux  de  Lérins  y  avoient  fondé  vers  ia  fin  du 
xi/  siècle.  On  remarque  h.  côté  de  cette  ^ille  la  cha- 
pelle de  Notre-Dame  de  Beauve^er  (  1  ) ,  qui  est  bâtie 
entre  deux  montagnes  très  -  escarpées.  Au  sommet 
de  chacune  de  ces  montagnes  on  a  fixé  une  diaîne , 
au  milieu  de  laquelle  est  une  étoile  à  cinq  pointes 
qui  est  suspendue  sur  Tabime  4  on  croit  que  c'est 
Faccompiissemcsit  d'un  vœu  fkit  à  la  Vierge  de 
Beauvezer  par  un  chevalier  que  quelques  personnes 
disent  être  Anne  de  JViquety ,  et  d*autres  le  sire  de 
Blaccas ,  qui  se  distingua  autant  par  les  agrémens  de 
son  esprit  que  par  sa  force  et  son  courage  ;,  et  dont 
le  nom  décore  la  liste  des  Jjraves  et  celle  des  trouba- 
dours provençaux  ;  mais  on  n'a  sur  ce  point  que  de^ 
conjectures  (2).  M.  Morenon  a  bien  voulu  medon;^ 
ner  un  plan  de  c^  site  singulier  f  pi,  LIV,  n!  t);  i| 
es(  aussi  représenté  dans  l'ancien  éci^son  de  Môusr 
tier.  On  couservoit  dans  l'église ,  dont  on  attrxy 
bue  la  fondation  à  Charlemagne,  àQ%  reliques  qu'dn 
disoit  avoir  été  domiées  par  ce  prince.  Il  y  a  dans  la 
ville  une  manufacture  de  faïence  :  les  villages  voi^ 
sins  sont  peuplés  de  tourneurs  qui  travaillent  le  buis  , 
qu'on  y  cultive  pour  ce  genre  de  Êbrication. 

Sene-;^ ,  à  quelques  lieues  plus  loin ,  est  une  ville 


{1)  Q^tstrV'à^^^^deBtlUmie. 

(3)  PaPON  ,  Histoire  d(^Pr$v€nce^  t.  Ï/S  î>îigc  ié^\. 


CHAPITRE    LXXiy.  59 

noîte ,  triste ,  et  qiri  ne  renferme  aucune  curiosité.  Le 
climat  y  est  tempéré  en  été ,  maïs  humide  en  hiver  :  la 
plupart  des  habitans  descendient  alors  dans  la  basse 
Provence  pour  y  feire  paître  leurs  troupeaux  ;  toute 
la  contrée  est  presque  déserte  pendant  cette  saison. 

A  cinq  heures ,  nous  descendîmes  une  montagne 
rapide  nommée  Tellon  ;  nous  traversâmes  le  village 
SEstoublon;  et  après  avoir  passé  l'Asse  surtm  pont 
très-long  ,  nous  remontâmes  fa  rive  droite  de  ce 
torrent ,  laissant  un  peu  à  droite  îe  village  de  Alezan , 
et  nous  arrivâmes  à  Dl^e  vers  neuf  heures,  sans  être 
descendus  de  cheval. 

Digne,  autrefois  Dinia  (i  ) ,  itoît  la  capitale  d'un 
petit  peuple  appelé  Bodiontiti,  On  regarde  son  siège 
épîscopal  comme  très-ancien.  Cette  ville  est  petite  , 
mal  bâtie ,  située  au  pied  de  hautes  montagnes ,  sur 
les  bords  de  la  Bléonne ,  torrent  qui  en  reçoit  plu- 
sieurs autres,  et  qui  rbule  comme  eux  d'immenses  amas 
de  cailloux.  Elle  n*a  rien  de  curieux  que  ses  bains. 

M.  Alexandre  de  Lameth ,  qui  étoit  alors  préfet 
du  département  ,  et  que  j'avois  eu  Thonneur  dé 
connoître  partiailièremeht  à  Paris  ,  nous  reçut  avec 
ces  manières  aimables  et  élégantes  qui  le  distinguent. 


(1)  C'est  une  opinion  accréditée  <ïans  la  ville,  que  César  a 
parle  de  Digne  en  ces  termes,  Dîgna,  urhs  indigna ,  îatronum 
spelunca  [  Dignes  ville  indigne,  repaire  de  voleurs  ]  \  mais  fan- 
cien  nom  de  Digne  est  Phila  ,  et  \\  ne  se  trouve  pas  dans  les 
Commentaires  de  César. 


Co  CHAPITRE   LXXIY. 

11  nous  condiûsît  ai*x  bains  :  on  y  arrive  par  k  grande 
route  d'Italie;  il  faut  traverser  plusieurs  fois  le  torrent. 
a^ Aiguës-Chaudes ,  qu'il  seroit  nécessaire  de  contenir 
dans  son  lit  ,  afin  de  réserver  un  passage  conve- 
nable pour  les  voyageurs.  On  percevoit  pourtant  le 
droit  de  passe  dans  cet  endroit ,  qui  est  souvent 
impraticable ,  même  pour  im  mulet. 

En  arrivant  vefs  la  maison  des  bains,  qui  est  éta- 
blie sur  les  bords  du  torrent,  le  chemin  n'est  qu'une 
rampe  très-étroite  pratiquée  sur  le  flanc  de  la  mon- 
tagne I  parvenu  à  la  porte  d'ime  masure ,  qu'on  pren- 
droît  pour  l'entrée  d'un  toit  à  porcs ,  on  se  trouve 
dans  une  prétendue  cour ,  qui  n'est  qu'un  long  et 
étroit  couloir  entre  le  bâtiment  et  une  montagne 
taillée  à  pic  et  d'une  hauteur  excessive  :  le  .soleil  n'y 
pénètre  que  pendant  les  courts  momens  où  il  est  à  sa 
plus  haute  élévation.  On  voit  souvent  des  reptiles  , 
sur-tout  aux  époques  de  l'accouplement ,  tomber 
deux  à  deux  de  ces  rochers -.heureusement  leur  mor- 
sure n'a  rien  de  redoutable.  Lorsqu'on  lève  les  yeux  , 
l'imagination  est  effrayée  de  la  hauteur  des  masses 
de  pierres  brunâtres,  qui  semblent  prêtes,  à  s'écrouler 
et  à  écraser  les  bâtimens.  On  est  surpris  ,  en  entrant 
dans  un  lieu  dont  les  abords  sont  si  sauvages,  d'y 
trouver  une  distribution  assez  commode  et  aussi 
agréable  que  l'âpreté  du  site  peut  le  permettre.  Le 
long  d'un  grand  corridor  sont  différentes  chambres 
pour  les  malades  \  à  l'extrémité  est  la  chapelle.  Les 


Chapitré  lxxîv.  6i 

bains  sont  alimentés  par  des  sources  dont  la  chaleur 
est  naturellement  graduée  :  on  y  distingue ,  i  .*  la 
source  d(S  Vertus  ^  qui  est  presque"  froide  ;  2.*  teUe 
de  Saint-Gilles ,  qui  est  consacrée  à  ce  saint ,  parcd 
qu'on  prétend  qu'il  a  habité  dans  les  cavernes  de  ces 
contrées  ;  3  .**  celle  de  Saint- Jean  ;  4***  l'étuve  (  1  )  , 
dont  l'eau  est  à  un  tel  degré  de  chaleur  ,  qu'oii  ne 
peut  y  demeurer  un  instant ,  la  porte  fermée ,  sans 
sentir  couler  de  tout  son  corps  une  sueur  abondante^ 
Le  mois  de  mai  est  le  temps  o^i^oil  vient  prendre 
ces  eaux,  qui,  étant  très-chaudes  et  fortement  impré- 
gnées de  vapeurs  minérales ,  ont  une  grande  effica-^ 
cité  pour  la  guérison  de&  blessures*  Quelques  géné- 
raux français  en  ont  dernièrement  éprouvé  les  plus 
heureux  effets.  La  proximité  du  théâtre  de  la  guerre 
en  Italie  rendroit  fort  utile  l'établissement  à  Digne 
d'un  hôpital  consacré  aux  militaires  blessés. 

Nous  passâmes  la  soirée  à  la  comédie,  où  une 

petite  réunion  d'acteurs  tirés  des  deux"  théâtres  de 

'  Marseille  jouoit  la  Alort  d'Abel;  l'orchestre  ,  com- 

posé  d'amateurs  ,    étoit  conduit  par  un  musiciea 


(i)  Consultez  Les  Bains  dt^CjjgHt  en  Provence ,  par  SÉBASTIEN 
Richard  ,  médecin  ;  Lyon,  1 6 1 9,  in-8.**  — Les  Merveilles  des  bains 
naturels  de  Digne  en  Provence  ^  avec  un  traité  de  leurs  serpens  sans^' 
venin,  par  D.  T.  DE  Lautaret,  mcdecin^Aix,  1620,  in-  8.**  — - 
Mémoire  sur  les  bains  de  Digne,  170a,  in-fol.  —  ChaMPORCIN  et 
RlCARY,  Analyse  des  eaux  de  Digne,  Voyez  aussi  ïfiistoire  de  la 
Smiti de  médecine,  tome  I.*' ,  page  336. 


6z  CHAPITRE     LXXIV* 

napolitain.  Nous  avions  pris,  avant  le  spectacle,  on 
grand  plaisir  à  voir  les  porte  -  feuilles  de  M.  Cons« 
tantin  :  cet  artiste  a  un  talent  très-distingué  pour  les 
paysages  à  la  gouache  ^T'à  la  sepia.  Après  âfvoir 
demeuré  vingt  ans  iT  Aix ,  il  s'est  fixé  depuis  trois 
années  à  Digne.  )Les  vues  des  environs  de  la  villa 
qu'il  a  exécutées  pour  M.  de  Iiameib ,  sont  très* 
belles.  Le  généreuac  propriétaire  de  ces  desHns  a 
bien  voulu  me  pernaettre  de  làire  réduire  celui  qui 
représente  les  bani^x)!»  le  placer  ici  {pi,  L  V }. 

Digne  acquiert  au^CMurd'bui  qudque  impoftance  ^ 
pa^rce  que  c'est  ie  chef-lieu  du  département  et  la  rési* 
dence  des  mepeibres  des  principiJes  autorités  :  elle 
sera  toufouis  célèl»^  poikr  avoir  été  la  patrie  de 
Gassendi,  qui  naquit  en  1)92  à  Qiamptercier  ^ 
village  à  une  demi  ^Keue  die  la  vîtte  ;  il  a  été  chanoine 
et  prévôt  de  la  cathédrde. 

Mon  projet  étoît  de  m'anrèter  à  Skniane..  M«  Bovis , 
ancien  membre  de  la  Convention  nationale,,  et  au^ 
^rd'hui  directeur  ^^  contributions  du  département 
des  Basses-^iUpes,  me  proposa  de  nouâ  accompagner 
pour  voir  M.  Pallier ,  notre  ami  commun»  La  con- 
noissance  qu'ii^voit  du  pays,  nous  fut  aussi  utile  que 
son  aimable  gaieté  nous  étoit  agréable.  En  quittant 
Digne ,  nous  longeâmes  le  torrent  de  Bléonne  y  et  tra- 
versâmes le  lit  de  |4usieurs  autres  torrens  qui  vœnnent 
s'y  jeter.  Le  chemin  est  assez  beau  jusqu'au  Rocher 
Cdupé,  appelé  ainsi ,  parce  qu'en  effet  la  route  y  a  été 


CHAPITRE    hXXlYk  6^ 

pratiquée  entre  deux  lochets  par  h  mam  des  Itômmes. 
Ngris  vibmb  it  droite,  sur  la  montagne,  ie châ^au  de 
FontintlU,  oorupé  paf  M»>^  de  Minbeauu 

Amvés  aa  irittage  de  Alaligrer,  nous  y  fômes 
reçus  aT6c  beaucoup  d'aâ&bilité  par  M.  de  Mal^ier, 
Biaitiv  dit  chiteau,  Api^  avoir  accepté  qudquei 
vafrsâctBSsemens,  nous  reprnnes  k  route  de  ^teron , 
où  nous  arrivâmes  vers  otnase  heures» 

La  contrée  que  ooiis  avions  tiaversée  est  dans  lei 
montagnes  subalpines  ,  qui  commencent  h  D^e  : 
les  viHages  sont  dans  de  peiâts  vaUons  ou  ^r  des 
coteaux  ;  ils  ont  un  air  de  misère  et  de  vétttsié  qui 
contraste  I)eaucoup  avec  le  riant  aspect  de  ceux  des 
cositrées  méridionales  de  la  Provence.  On  lencomre 
cq>endantde  vastes  prairies,  d^isiez  beaux  champs  de 
blé  ;  ie  revers  des  montagnes  est  couvert  die  ibrèls  : 
msûs  ce  paysage  n^est  point  animé  par  la  vigne  et 
Tolivier.  Le  département  est  borné  vers  I^e  par 
cefaû  des  Alpes-Atarithnes  ;  et  au«deik  de  Sisteron  , 
par  le  département  des  Hautes- Alpes^,  où  sont  les 
montagnes  du  Dauphiné* 

Envur^n  une  iieue  avant  d'être  à  Sisteron ,  on  suit 
les  bords  de  la  Durance  :  on  a  k  sa  droite  des  mon* 
^gnes  calcaû^es ,  dans  lesquelles  on  voit  de  temps 
en  temps  des  fiions  dfun  marbre  blanc  grossier  ,  mar- 
qué (fe  veines  grisâtres  :  on  distingue  dans  la  masse 
calcaire,  des  ammonites,  des  camites  etd'aufres  co* 
quilles  pétrifiées.  ' 


6i  CHAPITRE    LXXIV, 

Sisteron  est  nommé  Segustero  dans  Tltinéraîre 
(PAntonîn  et  dans.Ies  Tables  Théckldsiénnes  :  c'étolt 
probablement  son  nom  celtique.  On  l'appela  ensuite 
Civitas  Segesteriorum  ,  puis  Segestermm  ,  et  enfin , 
Sisterium,  d'où  il  a  été  facile  de  faire  Sisteron.  Cette 
ville  a  été ,  en  I  j  5  2 ,  le  théâtre  de  sanglans  combats 
entrei  les  protestans  qui  s'y  étoient  réfugiés  et  ies 
catholiques,  qui  parvinrent  enfin  à  les  en  chasser. 
Lé  ehâteau  a  servi  depuis ,  pendant  quelque  temps , 
de  prison  à  Casimir,  roi  de  Pologne,  lorsqu'il  fut 
àrVêté ,  à  son  retour  de  Gènes,  en  1658  ,  par  le 
comte  d'AIais. 

Pour  entrer  dans  Sisteron ,  on  traverse  la  Durance 
sui*  un  pont  d'une  seule  arche.  Rien  de  plus  affreux 
cjue  Paspect  de  la  ville  vue  de  la  rive  opposée  de 
cette  rivière  :  c'est  un  amas  de  hideuses  masures 
élevées  les  unes  sur  les  autres  en  amphithéâtre ,  et  qui 
paroîssent  ne  recevoir  le  jour  que  par  des  ouvertures 
longues  et  étroites  comme  les  fenêtres  des  prisons. 

II  étoit  trop  .tard  pour  aller  voir  Theopolis  et 
^'inscription  de  Dardanus  :  cette  partie  fut  remise  au 
lendemain  I  et  nous  employâmes  le  reste  de  la  soirée 
à  visiter  la  ville  et  à  prendre  un  repos  nécessaire^ 

L'intérieur  de  Sisteron  n'est  pais  aussi  désagréable 
que  ses  dehors  ;  il  y  a  plusieurs  maisons  bien  bâties , 
une  place  assez  spacieuse  ,  et  quelques  rues  qui  ne 
sorit  ni  aussi  laides  ni  aussi  étroites  que  celles  de 
Riez  et  de  Digne. 

Nous 


\ 


'  Noui  pibtîtiie&^cimra&ileJfendeitiafiaiI^ 
k^resï  dttinatia  :  nqos  éironsL  sans  gpide ,  celai  iqua 
iiousr0(vbfi5fettiinbla-vettliia]{i0t  manipié  depaiolep 
'mw  oit  pmis  mdiqujt  si  EitetL  DOdw  roàiÊe^  isfàé  nooi» 
ne  nèusr  égartm»  pokiL  li  ^ous.  iàlfot  tniverser  ui^ 
payçf  presque  inhabité ,  en  suivaBt  unichemiq  é^oât  y 
à  peine  fmy>^  ,  et  couvent  pratiqué  suri  le  horci  des 
pp^ipkes.  Ces  montagnes  >soilt  &rt  arides  ^'ettm 
produisent  que  de(  bui^soi»^  ;  cm  :^rçpit'  istule^ 
ment ,  ^espace  en  espace ,  ^qaelques  coins  dé  terve  ea 
culture  et  des  af bres  très^clalrsieinés.  Epfin  on  smve^  à 
VBà  lieu  nA  tes  moAtagnés  se^  resservent  ;  iet  cbemût 
passe  d^s  \e  fit  dVm  «orient  »  entre  deur  sochersi 
escarpés  :  c'est  au  point  où  te  termine  oécte  goi^e  y 
et  où  la  vallée  (^cKimience ,  i]ue  se  trouve  Ig  belle 
inscription  qui  attirolt  notre  curiosité  ,  et  qiics  Foa 
nomme  dans  le  pa^s  ptfra  9^s$rtUo  [  pierre  écritié  ]i  J'ai; 
ào&aéî (fl.  UV\n* :t )MXi<^  vue  de  ce  site  pitto-^ 
resque  ;  ^  la  dois  à  f  amîdè  de  M.  Ssmson ,  ingé» 
rieur  des  ponts  et  chaussé^,  dans  le  dépanement  des 
Hautes-^pesy  qui  a  eu  aussi  la  bonté  de  &ire  pour 
mon  adas^  plusieurs  autres  dessins  intéressa ns^ 

Cette  inscription  a  déjà  été  publiée  paj- plusiçuf^ 
aut^rs  (  I  ) ,  mais,  sans  être  figurée ,  et  toufours  d  ur^ 


\    T« 


(i  )  SpoN  ,  Misctll.  I  50  ;  SiRMQND ,  Antiotationesin  APOLLINAR. 
a  m  Thesauro  GROI^ortT,  toifn.  X,  pag.  nJ^-,  SlBONIJ  EpisL 
\.  V,  cp.  9  ;  GruTER  ,  CLI,  6;  BerGIER  ,  Grands  Cîtemms ,  i6f  j 
BoLDON.  Epigraphica,%t)j\  BoUCHE,  Chor,  de  Prov,  a44integr.^ 

Tome  IIL  E 


^6(6  •     CHAPITRE    JLXXIV. 

manière .  inexacte*  M.  Je .  SOUS -jpréfèt  de  Sisteron 
nous  eh  avoit  procuré  uiie  copie  plus  £dèle  que 
celles  qui  ont  été  imprimées  :  nous  employâtties 
deux  heures  à  la  confronter  avec  l'original ,  et  nous 
y  trpuvâmes  .encore  quelques  inexactitudes.  Celle 
que  je  publie  ici,  a  été  fait^  avec  la  plus  scrupu- 
leuse attention.  H^est  aisé  de  juger  qu'aucun  des 
auteurs  qui  ont  parlé  de  cette,  inscription  et  qui 
en-  ofit  imprimé  des  copies  ,  n'a  pris  la  peine  d'aller 
la  voir  dans  le  lieu  âpre  et  sauvage ,  mais  pourtant 
intéressant  et  pittoresque ,, où  elle  est  plî^cée ,  et 
èù  elle  pik>duit  un  effet  si.beau  et  si  singulier,  que 
ce  rocher  mériteroit .  d'être  imité  dans  quelques-uns 
de  nos  jardins  modernes. 

La  partie  supérieure  de  Tîflîscriptîon  est  sur  la 
Êice  verticale  du  rocher  ;  mais  comme  la  place  n'étoit 
pas  suffisante  pour  la  contenir  loute  entière ,  le  reste 
a  été  écrit  au  -  dessous ,  sur  une  portion  qui  saille 
horizontalement  au  bas  de;  l'autre  sous  un  angle  d'en- 
viron  soixante-quinze  degrés.  En  voici  le  texte  et  la 
traductioh  :      ^  ^^ 


a^o  mutil.;D'.BoÙ<iUET,  JVn/r.  ter.  GalLtomJ,  in  Exe,  GruT^ 
1 37  ;  De  la  GandarA  ,  NoMHaripy  armas  y  triumfos  di  Galicia  » 
35  ;  ChorIER,  Histoire  du  Dauphiné ,  187  ,  mutilée;  Papon  , 
Histoire  de,  Provence  ,  pag.  95  et  96  ;  Hagenbuch,  de  Diptycho 
Brixiensi,  p,  63  ;  Mevolhon,  sur  des  inscriptions  récemment  trouv/es 
à  Sisteron,  1804,  in''8,'*  .     •  > 


IMi— M— ■■Élfc  11'  ^*  i^É— 


n 


CHAPITRE    LXXiy.  6j 

CL  T^  P05TVMVS  DARDANVS~IN;^ETPA 
rrRICAE  DIGNITATIS  EX  CONSVLARIPRO 
VINCI AE  VIENNENSIS  EX  MAGISTROSCRL 

Nil  UB  f^EX  QVAESTj^EXPRAEF  f^PRET^  GALL  f^  ET 
NEVIA  CALLACLAR    f^  ETINL  J^  FEM    f^  MATERFAM 
EIV5  LOGOGVINOMEN  THEOPOLIS  EST 
VIARVM  VSVM  C AESIS  VTRIMQVEMON 
TIVM  LATERIB    C^  PRAESTITERVNT  MVRt)S 
ET  PORTAS  DEDERVNT  QVOD  IN  AGRO 
PROPRIO  CONSTITVM  TVETIONIOM 
NIVM  VOLVERVNT  ESSE  COMMVNE  ADNI 
TENTE  ETIANV    C^  INL    Ç^  COtA    Cy  ACFRATllEM  ^    E 
MORATÏ  ViRICL    C^  LEPIDO  EX  CONSVLA 
GERMANIAE  PRIMAE  EX  MAG  MEMOR 
EX  COM  (^  R£RVM  PRIVAT  J^  VTERGAOMNI 

JvM  SALVTEM  EORV 
^  «MT^M  stvdivme; 

Jt  DEVO 

.^11  II  u  OM  it  m 


TIONIS  PV// <r  <f  If  "i  mA  mAl 

TITVLVS  POSStm  »^<^ii  ••»  •■^  ■■■  »OSTENDI 

Qaudius^i)  Postumus  Dardams ,  homme  illustre  (a)  ,  Revêtu  dt 
U  dîgnilédi  patfice  (3) ,  ex-gouverneur  consulaire  (4)  de  la  prùvinc% 


(i)  CLaudiuS,  ( 

(1)  vif  INLustris, 

(3)  PATRICAE  DIGNITATIS.  Ces  mots  ne  signifient  pas  que 

Ciaudius  Dardanu^  ctoit  à' origine  •patricienne,  mais  qu  il  avoit  été 

«rvêtu  Awpatriciat.  Ce  titre  n  annonçoit  plus  dors  l'antiquité  on 

l'illustration  de  la  familie  ;  il  étoit  purement  personnel. 

'     (4)  EX  CONSULARI,  Les  consulares  étoicnt,  dans  l'origine ,  des 

fi  Z     ' 


/ 


6Î  CHAriTRJI    LJCXIV. 

Viennoise,  ex-mdttreJes  re fuites  (  i  ) ,  ex^qvesuur  [%),  epftéfitdtt'prét^ire 
des  Gaules  (i)  ;  et  Nevia  G^Oa,  femme  clarissime  et  illustre  (4) ,  som 
épouse  (j);  ont  procuré  à  la  ville  appeléeThcofoWs  l'usage  des  routes, 
en  faisant  tailkr  des  deux  cotés  les  flancs  de  ces  montagnes  (6) ,  et  lui 

gouverneurs  que  l'on  choisîs5oit  parmi  les  hommes  consulaires  ; 
c*est-à-<lire,  parmi  ceux  qui  avoient  été  consuls.  On  donna» 
dans  la  suite ,  le  même  nom  aux  gouverneurs  qui  n'avpîcnt  pas 
obtenu  cette  dignitç^  parce  qu  ils  avoient  les  ornemens  et  l'appa- 
reil consulaires.  Le  consularis  d'une  province  étoit  celui  qui  ia 
gouvemoit  avec  l'autorité  consulaire. 

(i)  EX  MAGISTRO  SCRINII  LiSellorum.  Cétoît  une  espèce  de 
secrétaire  d'état  qui  se  chargeoit  des  requêtes  adressées  à  l'em- 
pereur. Les  mots  scfininm  liàellorum  désignent  It  bcite  où  l'on 
plaçoit  ces  mémoires, 

(a)  EX  QVAESTore, 

(3)  EXPRAEFecto  PRETorii  GALÛœ,  Ces  officiers  furent  établis, 
^  39a ,  à  Arles ,  qui  étbît  devenue  la  métropole  àos  Gaules,  après 
que  la  ville  de  Trêves,  où  ils  résfdoient  auparavant ,  eût  été  prise 
par  Ib  Francs.  Ils  étoîent  chargés  du  gouvernement  de  la  province 
pour  ce  qui  coficernAii principalement  le  civil  et  les  finances,  et 
ils  y  faisoient  exécuter  les  ordres  de  l'empereur. 

(4)  Quelques  auteurs  avoient  lu  ainsi  ces  mots  :  PPAEFectus 
PRETorii  GALLiae  ET  NEMausi  GALLœcia,  préfet  d\\  prétoire 
des  Gaules ,  de  Nîmes  et  de  ia  Galice  :  c'est  pourquoi  LA  Gan- 
PARA  a  rapporté  .cette  inscription  page  75  de  son  Nobiliaire 
de  la  Galice,  déjà  cité  çi-dessus  ,  page  66  ,  note  j  mais  au  lioii' 
de  ces  mots  ,  dont  l'expliciation  seroit  impossible,  on  lit  évidem- 
ment NEVIA  G  ALLA  ÙLARissima  ET  INLustris  F E Mina,, 

{5)  MATERFAMilias  EJUS.  Cette  formule  peut  désigner  seu- 
lement son  épouse  \  elle  peut  aussi  indiquer  que  Dardanus  étoit 
mort  lorsque  U  reconnpi^sançe  des  Jiabitans  de  Theopolis  lui 
consacra  cette  inscription ,  et  que  sa  veuve,  Nwa'Çalla ,  vivoit 
encore.  II  y  a  des  exemples  que  le  mot  materfamiU^ns  estquclquçfo« 
pris  dans  Je  sens  de  veuve, 

1^6)  L'opinion  .communf  est  que  le  rocher  formoit  è  wie  de  ses 


CRAFITRB    LXXtrj  ^ 

mH  dmm/df$form  H  des  murailles,  Tâut  ah  a  S^fdikJtttlmrpHkfpre 
terrain;  mais  ii$  l'ont  vouh  rendre  commun  pour  la  sûreté  de  tous  (»}. 
Cette  inscription  a  et/ placée  pat  les  soins  de  [i]  Clnudius  {■^)Lépidus^ 
tomte  et  frère  de  P homme  d^k  cité ,  ex-Coniuldire  de  la  première  Ger- 
manie (JÇ) ,  ex^maifreducoÈseitdesménûbesL{^)^j»<omttJêgfeikkup 
pardcuiiers  {6)  de  Tétitpereur,  afin  de  pouvoir  mçmrer  kur  soJUtsttêde, 
pour  le  salut  de  tous ,  et  d'être  un  témoignage  écrit  {2)  delà  reeonnois- 
sance  publique* 


extrémités  une  espèce  de  cul-dcrsac,  et  que  Dardanus  Ta  faft 
ouvrir  :  maïs  îc  torrent  qui  y  couîe  dcpuîs'  un  temps  dont  on  ne 
peut  apprécier  la  àineét ,  cl  qui  a  sans  doute  ie\é  \t  #ol  en  ttt 
endroit ,  ett  «ne  preuve  p^ysiquis  du  contraire^  Ces  roots  M  i'msr 
,  cription ,  casis  utrimque  montium  laterHus  ,  attestent  encore  quç 
Dardanus  a  seulement  fait  élargir  ce  passage,  en  coupant  de 
cbaqoe  c^é  une  portion  da rpcher. 

(1)  TrETWMrpëiLYtmtUm.Spûn  zécàk  maU-prapo»  mmt^ 
téonit 

(*)  ADNITENTE  ET! AN  pour  etiatn, 

(3)  Claudio, 

f4)  PRtMAE  &EKMAmÀÈ,  Sa  métropbfe  étcwt  Moguntiutd 
\  May fnct  1» 

(5)  EX  MACistro  ArSMOSiœ.  Qn  afpefciit  scnuiét^'  memo^ 
ria,  ou  memorialet ,  des  o(Eciers  qui  étoient  changés  de  conserver 
,  ïcs  extraits  ies  décfsions*  rendues  par  le  prince ,  et  d'en  délivrer 
des  expéditions.  Le  ptcirfdent  de  ce  bureau  étoît  une  espèce  de 
icônlstFç;  il  3«  no«|niio?t  mpghier  scrifiii  memma.  Lqiû^Citrini 
a^cté  omis  îcu  et  nous  nr  lisons  qmtmagister  memoria.Ctto&ckr^ 
lors  de  sa  nomination ,  recevoit  de. ta  main  du  piriflco  ut»e  deilicurtf 
dorée.. 

(6)  BJÊ  COMitt  nÉRVM  PmVATarkm,  Cetvh  l'intendant 
des  revenus  du  prince  ,  dont  i!  ne  devoit  compte  qu'à  lui  :  cet 
•ffiee  rdrenoît%  celui  quepcRtplk  ^joord^huf  en  FVaneelVMtm- 
dant  dt  la  liste  civile, 

(7)  DEVOTIONIS  FVbUca  TiTVLVS  POSSH  OFTENDK 

E3 


l 


70  CHAPITRE    LXXIV. 

Uentîèrè  solitude  ,  le  bruit  du  torrent,  les  sottvei* 
ijîrs  que  cette  inscription  rappelle ,  les  beautés  que 
la  nature  déploie  dans  ce  lieu  sauvage ,  tout  concourt 
à  imprimer  à  i'ame  une  douce  teinte  de  mélancolies, 
on  aîmerôît  à  livrer  son  cœur  à  la  bienveillance  en- 
vers le  magistrat  ^qui  a  feit  un  usage  utile  de  sa 
fortune  et  de  son  crédit,  et  envers  ses  concitoyens, 
qui  ont  voulu  éterniser  sur  cette  roche  la  recon- 
noissance  du  bienfait  qu'ils  avoient  reçu.  Pourquoi 
faùt-ii  être  contraint  de  réviser  son  estime  à  celui 
à  qui  Ton  se  plairoit  tant  k  Taccorder  î  S.  Jérôme  (  1  ) 
et  S.  Augustin  (2)  font  un  grand  éloge  de  Darda- 
hus  ;  mais  ils  ne  l'ont  jugé  qwe  sur  ses  lettres.  Si- 
doine ApoHinaire ,  témoin  de  sa  conduite ,  a  pu  Je 
juger  d'après  ses  actions;  et  il  dit  en  propres  termes 
que  c'étoit  un  monstre  qui  réunissoit  tous  I^  vices 
des  divers  tyraps  qui  avoient  envahi  les  Gaules  sous 
l'empire  d'Honorius  ;  la  légèreté  de  Constantin  (3) , 
la  foiblesse  de  Jbvîil ,  et  la  perfidie  de  Géronce  (4). 
Souvent  des  hommes  injustes  et  criniinels  dans  leur 
cpnduite  publique  ont  des  vertus  domestiques  ^  des 
qualités  privées  :  ils  soignent  leur  «famille ,  ils  font 


m^U^ 


(i);HlERONYMI  £/;«/.  129. 

(2)8.  AUGUST.  Epist.  57. 
.    (3)  Cciui  qui  passa  d'Angleterre  dans  les  ^Gaules  ,  et  sctabiit  à 
Arle5. 

(4)  Cûm  in  Constaftdno  inconstanfiam ,  in  Jovînc  faciUtatem,  iV 
Gerontio  perfidiam ,  siuguïa  in  singuUs ,  omnia  tH  Dardano  Ctimiua 
sîmuî  cxuraroitur,  Si\>o^,  AvohLm.  Y ,  «^ 


du  hieri  kct  qui  les  entouré  ;  ces  i>onnes  actions  pari- 
ticulières  méritent  la  reconnobsance  des  personnes, 
qui  en  ont  •  été  f  objet.  Mais  les  magistrats  dhargés 
d'un  grand  pouvoir  et  auxqueb  le  prince  a  confié 
son  autorité,  sont  tou^otin^  responsables^  de  4^sage 
qu'ils  en  font;  et  ce  n^est  point  pour  avoir  répandu 
aiitour  Jd*^ux  quelc^ei  tiëiiâîts  ^  qu'ils  doivent  être 
absous  des  actes  d'oppression  et  d'injustice  dcmt  ils 
se  sont  rendus -coupoles. 

L'agreste  Apretédu^lku  où  est  la  pierre  «de  Dar^- 
danûs ,  est  adoucie  par  la  présence  de  nqml^neux 
végétaux  qm  tapissent  les  rochers .  0a  '  bof dent  les 
torcens.  Oit  y  distingue  i'opâirys^bifoli^  (  i  )'  '^  ^^^''^ 
Bîfiïfiée  (2)  :  il  ne  restoif  piôs  que  desi  débris  de  cette 
p^te ^y  afnsî  que  de  f asphodèieà  fleurs  blanches  (  3) , 
dé  ranttiàffc'k  fleurs  de:iis^(4r) ,  du  martagon  Manc 
piqué  de  pourpre  (5)  etde  l'orchis  caryopbyM^e  {6)  ; 
tnaîs  I»soIdaneIIedéipAI^(^)  ^  la  peti«e  cataire  (8)  ^ 
i'oseilkt/àifeuilles^ei^  bouclier  (9) ,' la  hiauve  cré- 

»l       ■  I  ■    I  I  I  I  (1^  ■     . 


%,  ■  -^  H. 


• . *  *     "- 


.    1 


(3)  Asphodelus  albus,    . 

(4)  Anthmcum  UHago, 

(5)  JJiikmmarmgo  pfft  fmÊCtato,' 
(6) .  Orchis  car^ophyllata, 

(7)  SjpUanella  Alpimroùuuiifolia 

(8)  Nepeta  nepeuUa, 

(9)  Rsmix  scKtatus» 

e4 


1  j  •■*     1  j  1      i 


L 


-<* 


|>eù  y}ve^  poéif  ae  f)as  tlefiôver.  de  voir  Iç  iiM  où  é^ 
cieti»  Thàopalis  dbnt  IeS|  h^ham  ise  sont  tnoiiùtrés 

pouflsâiines; do^c  lios > cheV.aax  jtsscju'À  Sa'a^^enit^ ^ 
petit  village  composé  cte.idht;  fm  sk  masunes,  est 
«tùi  d«Bs>iè(t6ifc'it09re4«  £)rotii0invaù  mi)iettd\ine 
xampagne  ateea  riaiiteTeticofuv|emè  d'arbres  iruimrk 
iNiQ^siiîi'y>ti:ou9àmes  inJecJuné.fil  ie  inidare  ;xet/^»oài5 
sië  savioiis  k  ic^î  ndus/advesser.^oiiriobtaoij^  desxei»- 

Jo^^qmé  ieiHds^rd  ilOûs>Biir^çoriti^  «a  fêurie  hfidnodf 
qin!l^ropo8atde  nôu^  ajctootpagoer  :fc'étfi)al:3lbiic)taÎM 
^e>ce  |)ién<  pays,  M.  Xabotd^:^  (Cf^e^aon  espiifc  et  sôifi 
«jn^^trttdtion  ^6^^  firçn^  pi^if  d^ne  'd'dihî^iBpct  ^vt% 
farareux,  iï  nbns  (forçai kiraedepter  ^lihidÉjeÊBèij^aék 
aussitôt  après  nous  partîmes  avec  lui.  Au  bout  d'un 
quart- d'heure  de  marcbe  sûr  lin  Terrain  aride  ,  dont 
les  coteaux  n'offrent  guère  que  des:  .iroche6^pt»)ûI-- 
iées  ,  et  où  les  endroits  susceptibles  de  ciïtÉtrirè  ^nt 
labourés  avec  la  charrue  sans  oreilles,  a^ppeîép  i^r^yre , 
nous  arrivâmes  au  pied  diir  ra^€«- de  DiH9»<m..  I^ 
Y  laissâmes  nos  chevaux. 


>•  \i\* 


(i)  Maha  crispa, 

(3)  Astragalus  aquikgia  folio. 


■ii»n»iito\rii',î, 


iMlt 


,  J     ,  J 


<    «I    »     '«■ 


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.!_,    «^ 


Sûri  et  fodier^  ()aî  "esit  arès^baiit  .^  et  Icpii  n'est 
accessible  que  du  côté  opposé  à  Sain^^enitir^r  oh 
Toh  aiccaé  qndcpi»  restes  de  maçonfaern  antique  ; 
on  yiBemaacqpe  aussi  tm  'cbeifain  et  un  ibassin  tanUét 
tbhs  leïbc  :  le  bassin  a  cinq  À  six  pie(k>  de  Imigueiir 
sur  foiffroi^  un  pied  et  demi  de  profbndmry  et  un  peu 
^plittr<de  detix  pieds  de  largetiir;  It  y  ^  fiai^s  ie.^iion^ 
dci  disiamce  œn  distance,  ?  quelques  restes  dercons^ 
vuctions  antiques  >  et  les  laboureurs  en  découvrent 
souvent^  Tout  ce  ;  vallon  et  les  rtiomagnes:  ^on 
aperçoit  au-delà,  sont  ^lionnes  pat  d^s  tontens  qui, 
claque  année ,  causent  des  éBoufemeni^  {^c»  ôttiiTioitH 
coiisidéraUes;  c^est  ll^ées  ébbuiemens  qu'en 'a^trïbne 
j'al«iifi6itteiit^suoc^f  lia  terrain  rà'atfxisfté  f^dn^ 
tim^Tkec^lis  ^  termin  que  fésf^^Ds^cta^pays 
pfétèndem  avoir  été^fifdfe^beaiicoitp^plur  âeif4;>Oh 
f-irçmvé  etfàoret^qi»^is/eh  b^oâbâtvlà  terre  ^, 
diÉ>2mmau«?/^^^mé^aîHes 'jet  dti^iti4$  HfOiteeauit 


!   ,   ,    .   .    '     ■>.* 


r:     ('i 


^  De  iDÉHè  ^«afe ,  qui  Ait  étrétiés^împdmnte  >  à  en 
îôgér  i*ies»sîmaiîôns^pttr  lè^'isotes  <pàt^tbîent  été 
^ris  {»Mf S^renÂre  acce^bte  ;  ^  lè^irbÀ^  <|u'on  iui 
hmk  itî^^'^t  ) ,  €t  fSifrl1mï^lànc0;dà  pférfchnagé 
xpki^rféiéMlétmj^siÈitty^  ne  teste  {){ô$  {{ne  quelques 
ruines,  son  nom  antique  conservé  dans  l'inscription 
qtiè)ë  viens  d'«xp6i^ét  ^  et  hkvSétneife  dé  ce  nom 


(T^)^^T)^f*p/«,'t*est4-ah^,t^///r/fe  Dieit. 


.1 


74  CHAPITRE    LXXiy. 

dans  cduî  de  Théou,  par  lequel  on  dé^ne>  aujciur- 
tf huî  son  emplacement. 

M^  Lafaorde  nous  conduisit  ensuite  k  ia  chapelle 
souterraine  de  Nptre-Dame  de  Dromon,  située  pnàs 
de  l*ancîertné  ville  dpnt  nous  venions  de  visiter 
les  foibiesi  restés.  II  y  a  environ  soixante  ahs.cpi'un 
berger,  en  frappant  la  terre  avec  son  bâton ^enten- 
dit  un  son  qui  indiquoit  une  cavité  ^:  il  communiqua 
sa  découverte  au  curé  de  Saint  -  Gêniez  ;  on  fit 
creuser^  et  cm  trouva  cette  chapelle,  où  l'on  voit 
encore  troiç  petites  (Colonnes  dont  les  chapiteaux 
sohi  décorés  de  têtes  d'aniiiiaux.  Ce  genre.d'oroe- 
meht  avoit  feit  penser  à  M.  Laborde  que  c'étdit;un 
ancien  tempie  de  Diane  ;  mais  ce  qui  détruit  abscSu^ 
ment  sa  conjecture ,  c'est  qUe  tie  style  de  ia  sculpture 
de  ce$  ic^iapi^aux  est  gothique,^  et  qu'ib.sont.tra- 
yaillés  dans  je  gdût  de^  chapiteaux  historiés  .qu'cm 
voit  dans  pli^ars  église^;  J^urdessus  de;  .cet^:  dm- 
pelle,  on  en  a  bâti  une  plus  moderne  en  J^oàisi^riSe 
Notrç-Dame^  de*  Dromon  y.^t  qui  partit  Ic^rjilme 
grande  réputation  d^w  fo  cpntréeHiNous-îjfjyime^ 
des  béq^iUes  ef  ^zxxtx^ytx-yoto.  Le^A;|uittef>  JI 
devoit  y  avoir. grande  affluence  de  fidèles  :<il^}f  Kieiit 
quelquefois  plusieurs  milliers  de  per!Sonrie^.]^;p^Ie-- 
yînage.     •- ,  _  .;-...  ^    . -i^.  .  '  •-  ,•:':'. 

L'ancien  vicaire  de  Saint  -  Genie35 ,  M#  Tabbc 
Comte  j  et  M.  Laborde,  de  concert  avec  quelques 
autres  habitans  aisés   du   canton ,  onf  sollicité   à 


l 


C  H  A  P I T  R  E    L  XX I V.  7  j' 

diverses  reprises  l'autorisation  d'explbiter  les  mines 
de  houille  dont  le  pays  abonde,  et  qui  jusqu'à  présent 
sont  demeurées  inutiles  :  ils  ne,  rédamôient  du  Goa* 
vemeitieni  ni  encouragemens  ni  secours.  Au  moment 
où  la  rareté  du.  bois  commence  à  se  faire  sentir  ,  il 
seroit  important  de  leur  accoider  l'objet  de  leur  de- 
mande :  ils  prétendent  quils  pourroient  vendre  la 
houille  à  un  prix  inférieur  de  moitié  à  celui  qu'elle 
vaut  dans  le  pays. 

11  existoit  si)r  le  territoire  de.  Dromon  une  mine 
de  plomb  assez  riche  ;  mais  elle  a  été  abandonnée 
ï  l'époque  de  la  révolution.  On  y  exploite  des  car- 
rières de  plâtre  5  il  est  probable  qu'on  y  trouveroit 
aussi  du  cuivre  et  du  fer.  On  a  découvert  dans  les 
environs  quelques  morceaux  de  succin  ou  ambre 
}3(une  (  I  ).  A  l'exception  de  lai  soude,  le  pays  possède 
tout  ce  qu'il  faut  pour  l'établissement  d'une  verrejm 
Le  marbre  n'y  est  point  r^t^  ;  m?is  jusqu'à  présent 
on  n'a  i^it  usage  que  de  celui  qui  se  montre  à  h 
surface  de  la  terre,  et  qui  ,  nécessairement  altéré 
par  l'action  des  pluies  et  de  l'air  atmosphérique , 
ne  sauroit  être  employé  à  des  ouvrages  de  quelque 
importance  :  il  ,est  à  pifésurner  qu'en  faisant  des 
fouilles  plus  profondes ,  on  en  extrairoit  d'une  qua- 
lité bien  supérieure. 

Depuis   mon  retour  du .  midi  ,   on  a  trouvé  à 

(1)  M^ùires  de  l'Académie  des  sciences ,  1745»  *    - 


f  -^ 


/ 


y^  4CHAl»ïTRE  LXXIV» 

Sisteron  quelques  inscriptions  qui  ont  été  publiées 
par  M.  Mevolhon  (i).  Dans  l'une,  il  est  question 
d'Un  certain  Héraphile,  qui^  étant  grand  prêtre ,  anit 
fait  un  vœu  à  Mercure  ;  l'autre  porte  qu'w/i  chevalier 
romain  attaché  h  Marius,  et  qui  avoit  servi  sous  ses 
ordres  contre  les  dm  très  et  les  Teutons,  a  fait  uni 
station  sur  le  tombeau  d'Hérophile ,  fis  de  Adarius, 
Je  ne  rapporte  pas  le  texte  et  ne  prends  pas  la  peine 
de  le  commenter,  parce  que  la  forme  des  lettres  , 
Forthographe  des  noms  ,  les  fautes  contre  l'histoire 
èr  la  chronologie,  tout  en  annonce  la  fausseté. 

On  a  demandé  par  qui  ces  inscriptions  poudroient 
avoir  été  fabriquées»:  la  réponse  ne  sera  pas  facile 
à  donner.  Cela  ne  prouve  cependant  rien  en  faveur 
de  leur  authenticité  :  car  dès  qu'une  inscription  a 
tous  {es  caractères  de  la  supposition,  eHe  doit  être 
réputée  fausse  ,  quoiqu'on  ne  puisse  itidiquer  le 
faussaire  ;  de  même  qu'une  chose  n*ea  est  pas  moins 
volée,  tpioiqu'on  n'en  puisse  pas  découvrir  le  voleur. 
Il  ne  paroît  pas  néanmoins  que  ces  inscriptions 
soîeiit  tout-îi-fait  récentes  :  je  pense  qu'elles  au^ 
Tont  été  composées  par  quelque  moine ,  dans  des 
tertips  d'ignorance.  Par  la  suite  ,  ces  pierres  ont 

•  L 

*MWfc— *i—  I     I       ■!      Il       PW— ifc<— ^^*1^M— ^  ^  — i— M— *— — — ^— W^— 1^— — — >^M^ii^— ^— — — — — 

» 

(  I  )  Inscriptions  grecques  et  latines  trouvées  en  thetmidor  an  Xtî , 
à  Sisteron,  département  des  Bastet-A^es ;  xn-S^  li.zctc  de  M.  Me- 
volhon ,  qui  a  bien  voulu  faire  imprimer  fe  texte  de  ces  inscrip- 
tions afin  que  ics  antiquaires  pussent  en  porter  leur  jugement  # 
mérite  toujours  icur  cfogc  et  leur  reconnoissancc. 


'^»*i**^ 


CHAPITRE    LXXIV.  ^J 

été  employées  dans  des  ccmstructions ,  comme  tant 
d'autres  qui  sont  également  chargées  d'inscriptions  ; 
et  le  hasard  les  fait  reparoitre  aujourd'hui  pour  donner 
un  vaste  champ  aux  conjectures  des  curieux  et  des 
antiquaires. 


'f 


L 


78 


CHAPITRE  LXXV. 

Peyruis.  — GiROPÉ.  —  Montagne  de  Lure.  —  Abîme 
de  Cruis.  — yWem/w/.-r-FoRCALQyiER.^»— Ses  Comtes. 
—  SiMiANE.  —Rotonde. 

Il  étoit  déjà  plus  de  trois  heures  quand  nous  ren- 
trâmes à  Sisteron  :  nous  repartîmes  à  cinq  ,  dans 
l'espoir  d'arriver  le  soir  à  Forcalquier  ;  mais  le  temps 
nous  manqua ,  et  nous  fumes  forcés  de  passer  la  nuit 
dans  un  mauvais  cabaret  de  Peyruis,  village  que 
Bouche  regarde  sans  aucune  autorité  comme  la  patrie 
de  Pétrone.  Ce  gîte  détestable  nous  parut  cepen- 
dant mériter  quelque  intérêt,  lorsque  nous  connûmes 
la*  bonne  conduite  des  braves  gens  qui  Fhabitoient 
et  la  résolution  qu'ils  avoient  montrée  quelques 
années  auparavant.  Viton  ,  c'est  le  nom  de  l'auber- 
giste, ayant  appris  que  des  brigands  qui  înfestoient 
ie  pays,  étoient  entrés  à  force  ouverte  dans  lâ  maison 
du  maire ,  réunit  chez  lui  les  hommes  les  plus  cou- 
rageux ;  et  ceux-ci ,  ayant  à  leur  tête  un  ancien  mili- 
taire, parvinrent ,  après  un  siège  assez  vif,  à  mettre 
en  fuite  les  brigands ,  qui  s'étoient  déjà  retranchés. 

Nous  reprîmes  notre  route  à  quatre  heures  du 
matin.  Depuis  Peyruis  jusqu'à  Giropé  ,  la  droite  du 
chemin  est  bordéepar  une  forêt  qui,  dans  les  temps 
de  brigandage,  étoit  un  des  principaux  repaires  des 


»  . 


CHAPITRE   LXXV.  7p 

Toleurs;  à  notre  gauche  nous  avions  toujours  eu 
k  Durance.  Depuis  Sisteron  jusqu'à  Forcalquier,  on 
Toit  de  loin ,  sur  la  droite ,  la  montagne  de  Lure  , 
dont  la  chaîne  s'étend  de  Test  à  l'ouest  ^  dans  un 
espajce  d'environ  neuf  lieues  ;  elle  se  lie  au  mont 
Ventoux ,  et  finit  à  Malaucène ,  dans  le  département 
de  Vaucluse.  Le  sol  de  ces  montagnes  est  calcaire  : 
il  est  en  grande  partie  infertile  ;  sur  quelques  endroits 
on  voit  végéter  des  chênes  blanci  et  des  hêtres  : 
mais  y  autour  des  lieux  habités ,  il  y  a  de  bons  pâtu- 
rages. A  peu  de  distance  du  village  de  Cruis,  on  trouve 
un  abîme  célèbre  ;  l'opinion  vulgaire  est  qu'il  n'a 
pas  de  fond  :  cependant  on  raconte  qu'un  prêtre 
s'y  fit  descendre ,  et  qu'il  crut  y  voir  des  spectres  si 
eflrayans ,  que  sa  raison  en  fut  égarée  pour  le  reste 
de  ses  jours.  D'après  les  expériences  de  M.  Verdet , 
il  résulte  que  cet  abîme  ,  qu'on  peut  comparer  k 
celui  de  la  fontaine  de  Vaucluse ,  a  deux  cents  pieds 
de  profondeur  (  i  ) . 

Forcalquier  est  situé  sur  les  bords  d'une  petite 
rivière  appelée  la  Laye.  Rien  de  plus  noir  et  de  plus 
triste  que  l'intérieur  de  cette  ville;  les  plus  belles 
maisons  sont  bâties  sur  l'esplanade,  hors  de  la  porte  : 
auQun  monument  ne  peut  y  fixer  la  curiosité.  Ce 
lieu  a  cependant  quelque  célébrité  dans  l'histoire  :  il 
paroît  que  c'étoit  la  capitale  d'un  petit  peuple  appelé 


(f)  Darluc  ,  Histoire  naturdU  de  la  Provence,  U ,  yu 


8o  CHAPITRE.  I.XXV.  ' 

Aîemini  pajr  {^  Romains  ;  que ,  sous  {a  domination 
de  ceux-d ,  on  le  nommoit  Fpnm  Neronis  /  que ,  daniSi 
des  temps  plus  modernes , .  il  a  reçu  le  non»  de  For 
mm  ^^Icarinm  $  à  cause  de  la  chaux  qu'on  y*  trou- 
voit  PU  dont  on  y  feîsoît  commerce ,  et  que.  c'est 
de  là  que  s'est  formé  celui 'de  Rrcûlq^krAj^^  la  villes 
porte  itiaintenant. . 

Dans  \b  moyen  âge ,  ce  pays  fprmoit  une  souve- 
wîneté  particulière,  appelée  d'abord  cçmté  d$  Sht9mn% 
et  qui  prit  ensuite  le  nom  de  comté  de  Fmalquip-.  Cet 
État,  assez  étendu,  renfermoit  tout  ce  qui  est  cpm- 
pris  entre  la  Duraiice ,  Ilsère  et  les  Alpes  :  c'étoit  la 
plus  grande  partie  de  la  haute  Provence  ou  Pro- 
vence occidentale.  II  fut  démembré  par  Godefrot  exv 
6veur  de  ses  neveux ,  Guillaume-Bertrand  II ,  qui  prit 
le  titre  de  comU  de  Nice,  et  de  Godefroi  II ,  qui  eut 
celui  de  comte  de Forcalquier.  Leur  héritière ,  Adélaïde, 
fille  de  Bertrand ,  épousa  Ermengaud  I V,  comte  d'Ur- 
gel.  Enfin  son  arrîère-petit-fils ,  Guillaume  IV ,  dît 
h  Jeune  (  i  ) ,  n'ayant  eu  qu'une  fille  appelée  Gar- 
sende,  la  maria  à  Raynier  de  Sabran.  La  fille  sanée  de 
celui-ci,  nommée  aussi  G^rrr^^f,  épousa,  en  i\^^  y 
Ildephonse  II ,  comte  de  Provence ,  et  son  aïeul  lui 
donna  en  dot  le  comté  de  Forcalquier  :  i'Embrunoîs 
et  le  Viennois  en  fiirent  détachés  en  faveur  de  Béatrix 


(  I  )  GuUtlmus  jutthr  eamef  Forcaîqumi,,.,,  Joatm,  COLUMBI 
Manuasc^sis  Qpuscula  varia  /  Lttgduni,  16^8 ,  ÎQ-foI. ,  pig.  76? 

de 


Boutgogne  ,  <tiu|)hfa  d0  Viinhob.  ÔtSHtttiiîië  àé 
repMfk  msuktf  ^  l'aigan^e  qa'it  avéii  &!(«  âvet  lé' 
«Mme  dé  I^*«ing0  5  II  s^ttHÎl  «t  tj^rmte  tfé^  T6ii4 
louse ,  et  promit  de  l'instituer  son  béifitiét  ;  tê  tHA 
cdWâ  de§  gfim^  qut  dufèmit  foi^  fa  motties 
«eût  pttec« ,  €ti  I  iop:  Alors  GâiHsitiftié  dé  Srftfttî , 
çOtiiiÉt  àë^fytynlèt  et  fifs  êAUx^  ^ù^t  dé  GvSflàmiite 
IV,  prétendit  avoir  seul  par  ^  irière  dé»  droit*  àù 
tXMttté  df»  Fc^calqujéf  :  Âaymoifel  4e  Sëféngèt  ût 
Tégier  la  chose ,  en  i  llù.pAt  tm  }ugétnenî  àrbitï^I , 
eî  gafda  ïés  dcnnainés  j  il  ôe  i^sla  k  Gttifeùme 

ap^^me  penie  qûissythê  é^  xètm  ^  et  h  titré  dé  comté 
âe  Forcaïqttiéf ,  qi»é  sa  dc^^ewdànèe  si  ttstiijWrij  à  I* 
inafisofi  de  Bfaiieàsf  (  f  )<  CépeâdoMl  lé  tùiùîê  d& 
TorcsikfEàer  fut  t^ti^^fs^  regardé  é€p^  côttithé\M 
dépendam»  dtt  comté  éé^PtùVetice  ;  et  léé  ^î^d^ 
Ffanec,  dails  fes  dédafatibit»  ^lelEititie»  à  té^^  pt<^^ 
yfiAté  y  pi«nofenl  fe»  tilfiei  àè  êèmm  ié  Pfàî^ettce  ti 

Dans  ée%  lanp»  iffoii^  i^eéâlés^  ,^  Idt^  <le^  gu^^^ 
de  religion  ,  cette  ville  a  été  le  théâtre  de  plusieurs 
combats.  On  y  &brique  aujourd'hui  des  étoffes  gros- 
sières ,  et  il  y  a  qjuelques  êkitures  de  soie:  liés 
coteaux  exposés  au  midi  sont  piaiités^  d'odiviefs  ^  la 


'         Il   I   n  I  n t     ■ 


(i)  RUFY,  Disstrtaiion  sur  l'arigint  dté  cmttïdt  FùTâé^^, 
Maneiile,  171a,  inr4,* 

Tonic  III,  ^       F 


^...^^_ 


»a  CJHAPITRE   LXXy. 

ville  est  entourée  de  campagnes  riantes  et  de  jardiiif 
assez  bien  cultivés.  Le  territoire  d'Aigles ,  village  à 
deux  lieues  de  là ,  contient  des  mines  de  fer  et  d^ar-- 
gent  ;  mais  jusqu'id  elles  n'ont  point  pgru  mériter 
d'être  exploitées. 

On  remarque  aussi  dans  l'arrondissement  de  Fpr- 
calquier  quelques  plantes  jcurieuses ,  parmi  iesquelle$ 
on  peut  principalement  citer  Fasphodèie  jaune  (  i  ) , 
l'oseille  digyne  (2) ,  fei  camphrée  de  Montpellier  {}} , 
le  giroflier  des  Alpes  (4) ,  la  gs^ridelle  (  5  ) ,  le  lis  rnskr- 
tagon  (6),  la  stéhélinç  douteuse  (7), 
.   Notre  ami  M-  Pallier  nous  avoit  envpyé  des  che- 
vaux; nous  partîmes  àci|iq  heures,  etjiousarrivâmesi, 
à  Simisme  à  la  nuit,  par  un  chemin  détestable.  Toute 
ce^te  contrée  paroît^très-^aride  :  la,  terre  çst  çouvei^te 
de  lavande  commune  ;  les^  bois  qui  fnvironnent  la^ 
ville ,  sont  plantés  de,  chênes  verts  et  blancs  qui  y 
prospèrent.  On  trouve  une  quantité  considérable 
de  mâchefer  répandue  ài§  tous  cÂtés  :  il  ne  faut  pas. 
croire  que  ce  soient  des  traces  de  volcans  ;  les  Sar-, 
i^nst  qui  habitQient  ces  contrées ,  y  ont  ouvert  des 


(i)  Asphodehs  luteus ,  L.  Pouïraquo  jauno. 
{1)  Rumex  dîgynïis ,  L.  Eigretto  rundo. 
.  (3:)  Camphorosmà  Mânspeliaea,  L, 

(4)  Cheirantkus  Alpinus,  L.  Lou  garamé  fer* 

(5)  Carîdelia  nigelîdstrum ,  iàk 

\6)  LsUum  martago ,  h,  ^  - 

(7)  StahflittaduiiafL» 


CHAPITRE    LXXV,  83  \ 

mines ,  construit  des  forges  ;  et  ces  scories  sont  les 
restes  des  préparations  qu'ils  fàisoient  subir  au  fer. 
.  .  AI.  Pallier  a  été  membre  du  Conseil  des  cinq- 
cents  ,  et  s*y  est  fait  estimer  par  la  sagesse  de  ses 
opinions  et  par  sa  conduite  courageuse  :  ii  s'est  retirée 
depuis  dans  la  petite  ville  de  Simiane,  où  ii  a  sa 
famille  et  ses  propriétés.,  II  nous  fit  Taccueil  ie  plus 
amical  ;  et  le  plaisir  de  ie  revoir  fût  aussi  un  des  plus 
grands  que  j'eusse  éprouvés  pendant  mon  voyage. 

La  vilie  de  Simiane ,  qu'on  devroit  appeler  un 
viUage ,  est  située  sur  une  colline  assez  élevée  et 
entourée  de  plusieurs  autres  collines  arides  ;  elle  est 
petite  et  mal  bâtie.  L'huile  que  produit  son  territoire 
est  aussi  bonne  que  l'huile  d'Aix  ;  mais  elle  suffit  à 
peine  aux  besoins  de  la  population  ,  qui  pourtant 
n'est  pas  nombreuse.  Le  blé  y  .est  plus  abondant.  . 

Deux  monumens  attirèrent  notre  attention.  L'un 
est  l'église ,  qui  est  assez  belle  et  bien  bâtie  ;  elle 
a  deux  petites  nefs  ^  et  ressemble  en  miniature  k 
,  celle  de  Saint-Maximin ,  dont  je  parlerai  bientôt. 
L'autre  monument  est  pius  important ,  et  il  est  indi- 
que  dans  les  différentes  descriptions  de  la  Provence  ; 
mais  ceux  qqi  en  ont  parlé  n'ont  pas  pris  la  peine  de  ^ 
le  visiter.  C'est  une  rotonde.  Le  mur  d'enceinte  est  nu 
dans  sa  partie  inférieure  jusqu'à  I21  hauteur  de  douze 
pieds  :  ïî  cette  élévation  il  y  avoit  autrefois  un  plancher 
soutenu  au  milieu  par  un  pilier  ;  quelques  per- 
sonnes ont  vu  la  moitié  de  ce  plancher.  A  ^la  partie 

F  2 


/ 


84  CHAPITRE    LXXV. 

supérieure ,  fl  y  a  douze  niches  à  plein  cintre ,  dont 
l'une  servoît  de  porte  d'entrée. ,  Les  intervalles  qui 
régnent  entre  elles  sont  occupés  chacun  par  trois 
petites  colonnes  :  çelie  du  milieu ,  qui  est  ia  plus 
grosse  y  déborde  les  deux  autres.  Chaque  faisceau 
de  colonnes  est  surmonté  d^une  tête  grotesque 
d'homme  ou  d'animal,  grossièrement  travaillée.  Plus 
haut  règne  une  corniche  en  boudin ,  sur  laquelle  leîj 
arêtes  forment  une  saillie.  La  porte  de  la  partie  infé- 
rieure est  sous  la  niche  à  droite  de  celle  qui  servoit 
d'entrée  k  ia  partie  d'en  haut  ;  elle  est  «l  ogive  à 
l'intérieur.  • 

Le  dôme  est  divisé  en  douze  cintres  séparés  par 
des  arêtes  :  la  clef  de  la  voûte  forme  une  ouverture 
circulaire.  Quatre  autres  ouvertures  avoient  été  pra- 
tiquées dans  le  dôme;  mais  elles  sont  bouchées,  en 
dehors  par  une  construction  en  massif.  Les  chapi- 
teaux soiit ,  en  général ,  composés  de  feuilles. 

La  forme  ronde  et  les  douze  niches  ont  fait  regar* 
der  cet  édifice  comme  un  panthéon  antique  :  ceperï- 
dant  Fogîve  que  ïa  porte  d'entrée  offre  dans  l'inié* 
rieur ,  les  chapiteaux  ornés  de  feuilles,  et  les  tète^ 
grotesques ,  qui  sont  ie  caractère  des  bâtimens  appe- 
lés gothiques ,  prouvent  jusque  l'évidence  que  eeluî^ 
ci  ne  peut  avoîi"  été  ccmstruît  sous  les  Romains  ;  ce 
n'est  donc  ni  un  panthéon ,  ni  un  ancien  tombeau. 
Le  plancher  qui  îe  partageoit  dans  sa  hauteur,  lii 
forme  anguleuse  de  l'intérieur,   hi  donnent  une 


t 


CHAPITRE    LXXV.  tj 

conformité  remarquable  avec  l'octogone  de  Mqntmo- 
rillon  (i).  II  se  peut  que  c'ait  été  un  lieu  destiné  à 
servir  à-Ia*fbis  de  chapelle  et  de  sépulture,  quoique 
rien  n'annonce  qu'il  ait  été  consacré  au  culte  chré- 
âen.  Peut-être  n'étoit-ce  aussi  qu'une  dépendance 
de  l'habitation  des  comtes  de.Simiane.  L'omc^ment 
de  la  portç  •  de  cette  rotolide  »  que  fai  &it  gmver 
f  pi.  I,  n*  jf  J  y  ressemble  à  d'autres  omemens* 
du  même  genre  qu'on  regarde  *  comme  particu- 
liers à  l'architecture  saxonne  ;  les  voûtes ,  qui  sont 
presque  toutes  à  plein  cmtre ,  portent  aussi  le  4caraç- 
tère  de  cette  architecture  (z)  ;  enfin  ce  petit  édifjcç 
a  beaucoup  de  rappcurt  avec  cel^i  qui  tient  à  Saint - 
^tienne  de  Caen ,  église  que  l!on  sait  avoir  été  bâti^ 
par  des  architectes  saxons  :  ces  divers  rapprochemens 
me  portent  à  croire  que  la  rotonde  de  Simiane  est 
do  xi/  siècle ,  et  qu'elle  appartient  à  ce  genre  de 
construction  cpi'on  appeloit  opus  ramanum  ,  parce  ^ 

que  c'étoit  Une  grossière  imitation  de  l'architeaurç 
romaine.       / 


■~nî 


(i  )  VoyoK  mes  JifoMMWfens  annçMes  inédits;  tomç  U,  pige  ^^ , 
et  h  4.*  voJmne  dç  ce  Voyage,  k  ï^xùde  de  Poitiers. 

(2)  Vù^riDlJCAïiLL,Anglo'norman  tf»//firi^»p!.  XIII;GrosE| 
Antijuity  of  England ,  ifc.  préface,  page  76. 


'  3 


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Î6 


»^M  W    ^  '   ^  "^^^^■■i^     ^     ^  I 


CHAPITRE    LXXVI. 

DÉPART  de  Simiane.  —*  Lavande.  —  Vul^ientes,  — 
Apt. —  Histoire.-»—  Pont.—  Situation.  —  Cathédrale. 

—  Tombes'  chrétiennes. — Inscriptions.  —  Ex-voto  sin- 
gulier. —  Vestiges  d'anciens  édifices.  — •  Pont  Julian; 

—  fabrique  de  faïence.  —  Cabinet  de  M.  de  Sigoïer, 

—  Aérolithe,  -*  Détonation  d'une  meule  à  aiguiser. 

—  Industrie.  —  Manosque.  —  Huile.  —  Durante. 

Après  avoir  donné  trois  jours  à  l'amitié,  ilfiiiïut 
quitter  M.  Pallrer.  Nous  partîmes  de  Simiane  le  3 
juillet,  à  sept  heures  du  matin.  Le  pays  que  nous 
traversâmes  est  absolument  pierreux  et  aride:  cepen- 
dant on  y  voit  quelques  arbres  ;  ce  qui  prouve  qu'avec 
un  peu  de  soin  ces  coteaux  seroient  propres  à  la 
végétation.  La  terre  est  couverte  de  lavande  com- 
mune (  I  )  :  on  obtenoit  autrefois  quelque  produit  de 
cette  plante  ;  mais  l'usage  de  l'eau  de  senteur  qu'on 
en  retire,  a  considérablement  diminué* 

En  arrivant  k  Apt  j  on  traverse ,  sur  un  pont  d'une 
seule  arche,  le,  torrent  de  Cavâlori»  Ce  pont  a  une 
assez  belle  apparence  ;  mais  il  n'est  pas  aussi  solide 
qu'il  le  paroît ,  car  Iç  passage  en  est  sévèrement 
interdit  aux  voitures. 


(i)  C'est  ia  lavande  à  larges  feuîHes  appelée  aspic,  lavanduia 
sjfUa, 


\ 


y 


/ 


CHAPITRE   IX XVI.  87 

Nous  arrivâmes  à  Apt  vers  dix  heures ,  et  nous 
commençâmes  aussitôt  nos  courses ,  accompagnés 
de  M*  Fagesy  à  qui  M.  PaUiér  nous  avoit  adressés. 

Apt  étôit  autrefois  la  capitale  d'un  petit  peuple 
que  lés  auteurs  romains  appellent  Vutgientes.  Jutes 
César  i'embeifit  et  l'agrandît  ;  et  pour  témoigner  sa  re- 
connoissance  à  ce  prince ,  elle  prit  le  surnom  deJuIia. 
Pline  la  notnmeAptaJuIia  Vulgientium  { i  )  :  ilJa  rangei 
parmi  les  villes  latines;  mais  plusieurs  inscriptions 
prouvent  qu*elle  àvoit  le  titre  de  colonie  (2).  Cette 
yille ,  après  avoir  été  successivement  dévastée  par 
les  Lombards  et  par  les  Sarrasins ,  essaya  de  se  rendre 
indç{>endante  et  de  se  former  une  administration 
particulière.  L'évéque  recevoit  dans  le  x/  siècle  le 
titre  de  prince  >  quoiqu'il  n'eût  que,  la  seigneurie 
du  bourg:,  tandis  que  la  maisori  de  Simiane  avoit 
celle  de  la  ville  ;  mais  cette  maison  réunit  ensuite 
l'une  et  l'autre; ,  et  les  vendit  successivement  aux 
cointes  de  ia  maison  d'Anjou. 

Apt  est  située  dan$  une  large  vallée  entourée  de 
coteaux;  ce  qui  fait  qu'on  y  éprouve  les  rigueurs 
de  l'hiver  et  l'ardeur  brûfante  de  l'été  :  les  coteaux 
sont  couverts  de  vigne  et  d'oliviers;  le  terrain  yjest 
bien  cultivé.  . 
La  ville'  a  des  rues  assez  propres  et  asses^Jarges , 


>ii  11 


mmmm^^mam^ 


(1)  Hisu  îw/.ÏU,  4^'^ 
(j)  Spon,  Mél.  6i. 


I    I      'iii'^l^h 


/ 


JT^çe  :  IaL§Qur  e<rt  devenue  unft  pUca  pi»bljque  ^ 
4tar  laquelle  on  vient  tf^4^Ur  wi^  fwtaiwi  h  bâtî- 
ifi^m  fit  rhabitadon  dyi  tom^préf^t,  ^t  k  tn&uiu4 

Np^  AllÀmei  ^'a^rd  k  h  cathédrale ,  qui  «st  «ou^ 
i'iavo^^tÎQtt  dç  S,  Caator  «t  de  S.*^  A^w  ;  U^  cîipfe 
m  lef  relii|ues  qui  y  cmt  é\é  réniiréi.  par  Içs  pieai: 
Sénédictms  «rtwri  du  V^j^ge Httémir^  [\)fn^  ^^ 
I^Ms  dans  k  trésor  r  mai»  nous  visiitàmes  fe$  <;iYpte%, 
-qui  txistefit  enccM^e,  Ci?s  lehapeU^  «é,pukr^l^  r?afer^ 
«ent  des  caisses  de  marbre  en  forme  d^  ton^m^s  U\. 


i     t. 


■•^•^^•^^■"••^^^•■•■^^P^^F^WW^WiWiWlW*^ 


(i)  T<?m«  Lff ,  page  28f . 

S^ulcre  de  S."  Anne,  ou  Histoire  de  la  translation  de$  rçliquff  de 
cettesainte  à  Aft ,  avec  quelques  particularités  de  la  fondation  de  ladite 
i^lise  ifiscepale,  pai^  M.  Plem  VPi  GRAND,  ÇhiUi^onob ,  svwak 
et  procureur  du  roi  à  Apt  j  A»ft  I  ^Pj  p  iPr?»î;;  T  h^Mbfhfk  df 
jjl  A^spiçe^^vrtmjgp^i'eguç  d'Axtt^  avec  un  ^hrég^  chronologique  d'vne 
grande  partie  des  évêques  qui  lui  ont  succédé t  par  P/wr^DE  M  ARMET  ; 
î^aris ,  1 68  5y,in- 1 2  ;  —  />^  sancto  Caftore,  epis€op$  Apta  'Mia  ,  vkJt 
MoMsati^eriaatiçtoritfitfs,  etcofe^(iM(mu^Çqini\iiJi^tin\fuY4Çjfif:i(i^ 
^ietatifJesH,  4^s  Iç  ^^çi^l^P  So|:.LANÇU5r,  ai)  21  septeipbre^ 
— Vie  de  S,  Castor,  evêqued'Apt,  traduite  du  iatîn  dt  RaywondBOT , 
l'un  de  ses  successeurs  (  ou  Critique  de  cette  vie  ) ,  par  M.  DE  SÀprt^ 
Cï^ççiTiN.}  Apt,  1 6»a  j  et  d^m  hs  PSin  fiigitittes  4fi M*  tfAl* 
GLEMONT,  Paris,  1705 ,  tome  IV,  page  56,  in-ia  ;  —  Histoire  de 
la  vie  et  des  ouvrages  de  S,  Castor,  par  D,  Antoine  Ri  VET ,  Béné* 
dictln,  dans  l'Histoire  littéraire  delà  France ^pi^n^  Ij^,  ps^  f  ^Ce 
saint  viToît  au  V.*  siècle.  1  ) 


"   *    1    tu  iiMiii ^Km^     éI      H   r 


^f  sans  doute  avoient  été  destinées  k  irecevofr  des 
reliques;  car  elles  ne  sont  pas  assez  grandes  pour 
contenir  des  corps  entiers.  Près  de  là  est  une  crypte 
séparée,  où  l'on  prétend  avoir  trouvé  autrefois  le 
corps  de  vS.*^  Anne  et  celui  de  S.  Auspice,  preraiet 
éfècpxe  et  Api  et  martyr. 

L'autel  de  cette  crypte  est  soutemi  par  une  pîerrt 
en  forme  d'autel  avec  une  inscription  ainsi  conçue: 


t 


1 


T 


mt*»-mt 


'^■1     ' 


T:  CAMVLIIO 

T.   FIL.   VOLT.  ABMI 

LtAlIt).    FLAMINI 

liîl  VU^O»  COL.  I YL.  APT. 
OHPO  A»P//iJ^SlV^ 

\*'An  HONORÉ  CON 
t»».ry'4    IMPENDIV» 


î 


\ 


mm^m^itmÊm^mi^frmm 


J 


A  Titus  Camulîiusj^milianus,  fis  dtT'itut(i),éeèdtnhu  V§hittia{i)^ 


(a)  VOLTiniâ,  sous-tntendu  tribu. 


j- .  t> 


9<o  <   Chapitre  lxxvi. 

Jelafimtlk /Eîmilui , famine ,  quartumvhr  {i)  Jt  U^cohnie  Julitune 
d'Apt  (2),  l'ordre  des  Apunsiens  (3)  .......••••.. •  • 

satisfait  de  l  honneur ,  a  remis  la.  dépense  [\), 

,  *  ■  .  \ .     ' 

Ces  demîers  mots  font  voir  que  Camullhis  ^  ^tîs- 

fait  de  l'honneur  que  Focdre  des  décurions  lui  avpit 

fait  en  lui  décernant  une  statue^  s'est  conienté;,dç 

cette;  décision  et  n'a   pas  youiu  qu'on  en  ilïlles 

;ftais(5). 

L'église  est  sans  aucun  ornement.  Nous  remar- 
quâmes dans  la  chapelle  Sainte-Ânne  deux  tableaux 
votifs  qui  y  ont  été  placés  pour  la  cessation  de  la 
peste  de  1720.  Les  habitans  d'Apt  et  leurs  syn- 
dics ont  pris  f  dam  l'inscription  qui  accompagne  ces 
ex-voto,  les  titres  fastueux  de  senafuspopulusque  Ap- 
tensis  [  le  sénat  et  le  peupfe  d^Aîpt], 

Nous  avons  parlé  de  la  colère  du  mulet ,  dont  on 
ne  peut  éviter  les  effets  que  par  la  fuite  :  un  ex-voto 
de  la  même  chapelle  représente  un  muletier  près 
d'être  écrasé  pu-  un  de  ces  animaux  devenu  furieux. 

On  voit  dans  plusieurs  caves ,  notamment  chez 
MM.  Gofrédi  et  ^ontems ,  des  voûtes ,  des  niches , 

(i)  ffll  VlRO.La  quatuortfiri  étoicnt  des  magistrats  supérieur^ 
tirés  de  Tordre  des  décurions  ;  ils  étoient  spécialement  chargés  de 
Tadministration  municipale. 

(%)  COJjonia  IVûœ  APTensts, 

(j)  ORDO^pteNSIVM,  c'est-à-dirc ,  Vordre  des  décurions  d'Apt. 

(4)  HONORE  CONtentus  IMPENl>IVAî  reAfIsit, 

(5)  On  trouve  plusieurs  exemples  d'une  pareille  remise.  {^^ 
Gruteb,  ccccxi,  I.  r; 


CHAPITRE    LXXVt,  ^I 

des  portions  d'aqueduc,  qui  ont  évidemment  appar^^ 
tenu  à  d'anciens  édifices  ;  plusieurs  inscriptions  trou- 
vées à  Apt  ont  été  publiées  par  divers  auteurs ,  et 
sont  aujourd'hui  perdues  ;  enfin  on  y  découvre  jour- 
nellement, en  fouillant  la  terre,  des  ampliores,  des 
urnes  de  verre,  des  tuyaux  de  flûte,  et  beaucoup  de 
ces  petits  ustensiles  qui  ornent  les  cabinets  des  anti- 
quaires; un  grand  nombre  de  ceux  que  possède 
M.  Calvet ,  à  Avignon  { i  ) ,  viennent  de  cette  vîHe. 

M.  Fages  nous  fit  voir  ,  dans  une  cave  ,  «n 
reste  d'aqueduc ,  et  if  nous  assura  qu'on  en  trouve 
dans  plusieurs  caves  d'autres  vertiges  qui  prouvent 
que  sa  direction  étoit  de  l'est  à  l'ouest.  Le  peuple 
prétend  que  S.  Auspice  venoit  par  ces  conduits 
prêcher  les  fidèles  et  baptiser  les  énfans. 

Dans  la  cave  dç  M.  Poncet- Pontet ,  rue  Saint- 
Pierre,  passage  Guiminel ,  nous  vîmes  des  fragmens 
de  mosaïque  très-bien  conservés  ;  il  seroit  aisé  de  les 
enlever. 

Dans  la  n^atinée  du  4  juillet ,  nous  fîmes  une 
excursion  au  pont  JuUan ,  à  gauche  de  la  route  d'A- 
vignon,  à  une  lieue  et  demie  d'Apt.  Ce  pont  a  été 
nommé  ainsi ,  parce  qu'on  en  attribue  la  construction 
à  Jules  César.  Il  consiste  en  trois  arches ,  dont  celle 
du  milieu  est  plus  haute  et  plus  large  que  les  deux 
autres.  Il  est  fort  bien  conservé ,  à  l'exception  des 


*  I 


(i)  Suprà,  tome  II ,  page  169. 


^• 


9?i  CHAPITRE    LXXVI. 

parapets ,  qui  sont  un  peu  dégradés  :  chacune  des  piles 
qui  sont  à  côté  de  ia  grande  arche ,  a  une  ouverture 
d'une  extrémké  à  l'autre ,  en  forme  de  niche ,  comme 
on  en  voit  a\i  pont  du  Saint-Esprit.  Cette  confbr- 
mité  de  construction  me  fait  prjésumer  que  ce  pont  a 
:été  bâti  à-peu-près  dans  le  même  temp$  que  celui<:}. 

En  revenant ,  nous^  entrâmes  dans  la  manufiiçturç 
de  poterie  et  de  fa'tence  de  M.  Bonnet,  située  près 
du  chemin.  La  faïence  qu'on  fabrique  dans  cette 
maison  résiste  au  feu  :  elle  est  presque  toute  de  cou- 
leur jaune.  II  y  en  a  aussi  de  la  brune;  d^autre  qi|i 
imite  différentes  espèces  de  marbre  et  de  brocâtelle: 
itiais  la  jaune  est  la  meilleure.  Le  vernis  extrêmement 
vitreux  de  la  poterie  grossière  paroît  très- malfaisant. 

Le  chemin  qui  conduit  d'Apt  à  Avignpn ,  oifre 
encore  quelques  restes  d'une  voie  romaine;  on  J'ap- 
pelle lûu  camîne  rameau. 

De  retour  k  notre  auberge,  no\is  trouvâmes  nos 
amis  MM.  Pallier  et  Bovis  ,  avec  cpiî  nous  passâm^ 
la  journée;  et  notre  excellent  hôte,  M.  Gaire,  nous 
prouva  qu'il  avoit  résolu  le  problème  de  l'avare ,  d^ 
faire  bonne  chère  pour  peu  d'argent. 

Le  cabinet  de  M.  de  Sigmer  mérite  d'être  vjsitç;  tf 
ai  une  assez  bonne  bibliothèque ,  plusieurs  manusqrits 
arabes ,  un  armoriai  très-bien  peint ,  desporte-feuiil^ 
de  dessips  et  d'estampes ,  des  coquilles^  des  miné- 
î^x,  et  une  petite  collection  de  médailles  impériales. 

On  avoit  trouvé  à  Apt ,  peu  de  ternp^  ayant  nptre 


s 


tMAPÏTftE    LXXVI.  p3 

passage  ,  une  pierre  atmosphérique  ;  die  a  été 
envoyée  au  ministre  de  l'intérieur  par  M.  Joseph 
Briin  :  on  n'avoit  pas  même  songé  à  en  garder  un 
fiagment;  ainsi  nous  ne  potivons  dire  si  c'étoit  réel* 
lement  un  aér^litht.  Le  bruit  que  produisit  la  chute 
de  cette  pierre,  fut,  dit- on,  entendu  dans  tous  les 
environs ,  et  même  jusqu'à  Aix. 

Nous  apprîmes  un  événement  singulier.  Un  ha- 
bitant nomvsfk  CremouUn  arrondissoit  une  meule  d'un 
pied  environ  de  diamètre ,  pour  aiguiser  une  fàuciife  ; 
son  aide  faisoit  tourner  la  meule  avec  rapidité  i  tout- 
a-coup  elle  éclata  avec  une  détonation  semblable 
à  celiè  d'un  coup  de  pistolet  ;  quelques  morceauje 
forent  lancés  jusqu'au  toit  de  fa  grange,  et  Cremoulin 
fot  dangereusement  blessé  à  la  tête  ;  on  désespérôit 
encore  de  pouvoir  lui  sauver  la  vie.  On  nous  fit  voir 
le  lieu  où  l'accident  étoit  arrivé ,  la  pierre  qui  l'avoît 
causé  ;  et  chacun  nous  raconta  le  fait  'de  la  même 
manière.  Un  pareil  phénomène ,  selon  M  ;  Pallier , 
avoit  eu  lieu  dans  un  moulin  à  vent,  à  Vachère  près 
de  Simiane.  Il  paroît  qu'on  peut  l'attribuer  au  mou- 
vement de  rotation  trop  violent  donné  à  la  meule , 
qui  a  augmenté  l'action  de  la  force  centrifuge. 

Le  commerce  d' Apt  consiste  en  grains ,  en  vins , 
en  fruits  ;  on  y  fabrique  aussi  des  eaux  fortes  et  des 
bougies.  Les  confiseurs  sont  très-célèbres .  MM.  Pin 
et  Legîer  sont  les  pliis  renommés  j  ils  font  des  envois 
)usqu*à  Paris. 


Lft    -t^-± ■fïMbJ 


pi  CHAFITRjE    LXXVI. 

Les  cuirs  tannés,  le  vin  et  ia  soié,^  sont  les  objets 
que  ies  habitans  d'Apt  peuvent  exporter  ;  ils  ne  re- 
ciieillent  pas  assez  d'huile  ni  de  blé  pour  leur  propre  ^ 
consommation. 

Alanosque,  où  nous  fîmes  aussi  une  excursion, 
n*a  de  remarquable  que  l'agrément  de  sa  situation ,  à 
une  demi-lieue  de  la  rive  dt'oîte  de  la  Durançe.  On  a 
creusé  dans  la  jolie  plaine  qui  s'étend  entre  la  vill^ 
et  la  rivière,  plusieurs  canaux  qui  servent  à  l'arroser 
et  à  prévenir  les  inondations. 

Les  rues  de  la  viile  sont  couvertes  d'un  fumiei; 
limoneux  et  infect  ;  ce  qui  la  rend  désagréable,  tandis 
que  les  dehors  en  sont  charmans.  Les  principales  pro- 
ductions du  pays  sont  les  amandiers,  les  mûriers  ;  la 
graine  d'ognon  y  forme  une  petite  branche  de  corh- 
liîçrce  ;  les  melons  y  viennent  assez  bien  :  mais  les 
autres  fruits  ne  prospèrent  pas,  malgré  le  zèle  des 
paysans ,  qu'on  regarde  comme  les  plus  industrieux 
de  toute  la  Provence  ;  la  fréquence  des  arrosemens 
en  est  peut-être  la  cause.  .  .  ., 

Les  coteaux  éioient  autrefois  plantés  en  vignes; 
on  y  a  subiytitué  des  oliviers ,  parce  qu'ils  sont  d'un 
meilleur  produit.  Les  huiles  sont  très-estimées,  quoi* 
qu'on  les  trouve  un  peu  grasses;  on  les  fabrique  à 
merveille,  et  on  les  exporte  dans  l'intérieur  de  la 
France  et  chez  l'éttanger,  %o\xs\q  nom  â" huile  d' Aix. 
•  Il  y  a  autour  de  Mano$que  et  sous  les  collines  qui 
entourent  cette  cité ,  des  mines  de  charbon  et  de 


"^mm/t^ 


CHAPITRE   LXXVI.  py 

soufre ,  auxquelles,  on  attribue  les  fréquens  tremble- 
inens  de  terre  qu'on  y  a  ressentis.  Les  plus  fortes 
secousses  ont  eu  lieu  au  mois  d'août  170^;  il  en 
reste  encore  des  traces  sur  plusieurs  murs  et  plusieurs 
maisons ,  où  Ton  remarque  un  grand  nombre  de  cre- 
vasses. II  y  a  deux  sources  d'eaux  sulfureuses  au  nord , 
à  peu  de  distance  de  la  ville.  Elle  renferme  les  restes 
dé  l'ancien  palais  des  comtes  de  Forcalc^ier,  qui  y 
habitoient  l'hiver.  Guillaume  le  jeune,  le  dernier  de 
ces  comtes,  y  est  mort  en  1 209.  On  y  voit  les  frag- 
mens  d'un  buste  d'argent  du  bienheureux  Gérard 
Tenc,  fondateur  des  hospitaliers  dé  Saint- Jean  de 
Jén^alem ,  né  aux  Martigues ,  et  dont  le  corps  fut 
transporté  à  Manosque  après  la  prise  dé  Rhodes. 
Ce  buste  avoit  été  fait  par  Puget  :  il  n'en  existe 
plus  que  la  tète. 

Aianosque  étoit  un  bailliage  de  Tordre  de  Mahe  ,- 
et  le  premier  dé  la  langue  de  Provence. 

l^e  îours  de  la  Dunmce ,  qui  ba^ne  l'autre  moidé 
de  la  plaine,  est  extrêmement  rapide.  Cette  rivière 
y  forme  de  petites  îles,  qu'il  faut  ^traverser  à  pied; 
mais  quelquefois  elle  les  couvre  de  ses  flots  en  ^14 
de  minutes  :  les  voyageurs  et  les  bateliers  surpris  par 
cette  inondation  sont  exposés  aux  plus  grands  dangers. 


y. 

■     ■-■■■■    •  ■'     X 


r' 


^6 


CHAPITRE  LXXVII. 

* 

DÉPART  d'Apt.  —  Momagite  du  Leberon.  —  Rous- 
SILLON.  —  Histoire  de  Cabestaing,  —  Cadenet. — 
Troubadours.  — ■  Frédéric  Barberousse.  —  ^nlface  de 
Castella  ne.  <*«^  Bertrand  de  Carbone!.--^  Elias  deBar)oi5« 
^^  Blftcas*  '—  Blacanet*  «-  Le  moine  des  ties  d'Qr. 

Le  5  9  à  cinq  heures  du  matins  nousieprfmes  leche* 
min  d'Aix.  Au  iieu  de  suivre  la  grande  route  y  noiîi 
voulûmes  traverser  la  Montagne  xlu  Leberon  par  iL 
Tour-d'Afgue  ;  ce  qui  nous  fit  (aire  un  détour.  H: 
faut  passer,  en  ^ortajit  d'Apt»  par  des  chemins  dilSt-' 
ciles ,  et  descendre  dans  des  fondrières  oà  des  bri- 
gands pourroient  aisément  attaquer  les  voyageurs , 
ainsi  que  cela  est  arrivé  quelquefois.  Nous  viiiies 
plusieurs  cbâ»tçiux  bruies^  dont  notre  guide  ne  put 
nous  apprendre  les  noms. 

Nous  n'étions  pas  éloignés  de  JRsflSsillm,  viBage 
vtotsin  d' Apr ,  devemi  célèbre  parla  tragique  aveiituce 
du  niaiheureux  troubadoiu'  GœHaume  de  Cabestaing^ 
Ce  ^une  gentUhomme  avoit  été  élevé,,  en  ipiaiitécfe 
yarlety  auprès  de  Raymond  de  Seiihans  ,  comte  de 
Roussilion  ;  il  inspira  une  tendresse  innocente  à 
Tridine  Carbonelle  ,  épouse  ^  du  comte  :  le  cruel 
chevalier  fit  massacrer  Cabestaing  et  servir  son  cœur 

à 


^         K 


CHAPITRE    LXXVII.  ^7 

à  Tricïiiae  ;  il  mit  ensuite  ie  comble  à  cette  bar- 
barie  en  lui  apprenant  de  quel  horrible  mets  elle 
s'étoit  rassasiée^  Tridine  se  précipita  de  désespoir 
par  une  fenêtre.  Les  chevaliers  et  les  amans  s'assem-^ 
blèrent  et  détruisirent  le  château  de  Raymond.  Cette 
tragique  aventure ,  rapportée  par  Jean  Nostrada- 
mus  (  1 } ,  n'est  sans  doute  qu'un  roman  :  celle,  du 
sire  de  Couçy  et  de  la  dame  de  Faîel,  que  Eauchet 
nous  a  transmise,  et  qui  a  servi  de  sujet  à  des  ro- 
mans ,  des  chansons  et  des  pièces  dé  théâtre ,  paroît 
layoir  été  inventée  d'après  celle-ci. 

Un  peu. plus  loin  est  un  autre  lieu  également 
çéièt^e  dans  les  fastes  des  troubadours  ;  c'est  Cadenet. 
3Lç  seigne\;r  de  ce  nom,  ayant  vu  son  château  ravagé 
et  la  fortune  de  ses  pères  détruite ,  alla  courir  le 
)nor)de  sous  le  nom  ignoble  de  baguas  (2)  ;  aprè$ 
avoir  visité  plusieurs  cours  et  composé  différente^ 
poésies,  il  entra  dans  l'ordre  des  hospitaliers,  où  il 
mourut. 

C'est  au  temps  des  croisades  que  le  génie  poé- 
tique parut  se  ranimer ,  et  qu'il  fut  consacré  à  célé- 
brer un  nouvel  art  d'aiijier  et  de  plaire.  Quoiqu'on 
ait  voulu  ravir  à  la  Provence  la  gloire  d'avoir  donné 
la  naissance  aux  premiers  charftres  de  ce  singulier 
inélange  de  grâce,  d'hpnneur  et  dWour,  qu'on 


■^Mi 


(i)  Histoire  des  troubadours ,  p,  58, 
^»)  G?urçon. 

Tomt  IIL 


^8  CHAPITRE    LkXVII. 

zppelle  galanterie ,  on  s'accorde  généralement  à  regar- 
der cette  contrée  comme  leur  berceau.  Le  nom  dà 
troubadours  { i  )  caractérise  bien  ces  ûigénieux  inven- 
teurs  d'anecdotes  piquantes ,  de  vers  gais  et  baditis , 
de  leçons,  souvent  fortes  et  vranes ,  mais  revêtues  de 
form^  aimables  qui  laissent  un  trait  dans  Tame. 

Ce  fut  sur-tout  pendant  le  règne  des  princes  arra- 
gonois  que  la  poésie  se  perfectionna.  Raymond- 
Bérenger  II  s'étant  rendu  à  Milan  pour  recevoir  dé 
Frédéric  I/' ,  dît  Barbtrousse ,  i'invéstiture  des  terres 
d'Arles  ,  de  Marseille  et  de  Piémont ,  qu'il  àvoît 
acquises  par  les  armes ,  et  conclure  son  hyif^eA  avec 
Richilde  j  veuve  du  roi  de  Castille  et  proche  parenté 
de  cet  emi^éreur ,  celuî-cî  fut  tellement  charmé  dei 
poésies  que  lui  récitèrent  les  troubadours,  qu'il  Vofl-»- 
lut  en  prendre  le  titre.  Ces  vers  si  connus,  qu'on  Iiii 
attribue ,  prouveroient  qu'il  dn  étoit  digne  : 

Pfas  mi  cavalier  Françes , 
£t  la  donna  Cathaiana, 
Et  i*ourar  des  Gynpes , 
Et  ia  cour  de  Kastelfana, 
Lou  cantar  Proveiisaîes, 
Et  ià  dansa  Trcvîsaïia> 
/  Et  iou  ebr  Aragoncz , 

(i)  ^Trovatori ,  trobadores ,  troubadours,  de  trovare  [  trouver j. 
C*est  de  (à  (jûfe  \ts  pôëtes  cte  \l  langue  d'Oil,  ou  France  septctt* 
trionale  ,  ont  été  ^appelés  trouvères.  M.  LE  Grand  d^Aussy  » 
dans  ses  Fabliaux ,  a  voulu  réclamer  pour  ces  derniers  Fin  vent  ion 
de  fa  poésie  :  mais  M.  pAl*ON  a. vivement  défendu  ses  compa-- 
triotesi  et  ia  «question  paroû  décidée  en  faveur  des'PfoVénç^ux. 


♦  ■ 


CH^PITRl    LXXVII.  99 

Las  perlas  de  Giuiiana,. 
Las  mans  e  cara  d'Angics  ^ 
Et'Jou'domel  de  Toscana., 

faime  h  chtvalnr  français  et  la  dame  catalane,  ^industrie  dii  G/- 
mis  n  la  cour  castUlane,  le  chant  provençal ,  la  danse  irAfisane,  le  corps 
arragonois  et  la  perle  JuUant ,  Jet  mains  et  le  teint  de  l'Anglois,  et  le 
jeune  Toscan  (  i  ). 

Ces  poètes  jouirent  du  plus  grand  crédit  à  la 
cour  de  Rayinond-Bërenger  IV  [2)  et  de  sa  noble  et 
aimable  épouse  Réatrix  de  S?voie  (?)  :  beaucoup  de 
seigneurs ,  pour  plaire  à  leurs  souverains ,  devinrçi\t 
troubadours  et  leur  adressèrent  des  verll .  Sous  ce 
règne  et  le  suivant,  Bpniface  de  Casteli^ne,  poète 
ingénieux  et  caustique ,  fut  un  des  plus  célèbres  :  le 
fiel  répandu  da^is  Sies  vers ,  s^s  vJo|wtes  satires  contrp 
Charks  I/'  d'Apjpu  et  son  épouse  Béatrix,  furent 
peut-être  dus  aux  malheurs  qu'il  éprouva.  Le  yip 
plus  que  Tiodignation  aiguisoit  ^ouyent  sa  méchaf;- 
ceté  ;  il  se  reprochoit  quelquefois  lui-  ïP^^rne  «nsuite 
la  hardiesse  de  ses  expr^ions  :  Rocm^  Çi^'f^  ^^chfiAÀ 
est  le  refrain  assez  ordinaire  de.  sçs  chanson^. 

Bertrand  de  Çarbonel,  qui,  selon  Çipstradamws, 
étpit  vicomte  de  Marseille ,  se  plaint ,  d^n^  plusieurs 
(Jes  siennes ,  des  rigueurs  d'une  belle  qu'ij  aiiîje, 

(1)  Si  cette  ^iccccst  de  Frédéric  l.*^"",  il  faut  au  moins  convenir 
qu'dfc  a  été  considérablement  altérée  par  Jean  Nostradamus  , 
qui  l*a  fe  premier  rapportée.  i  ,  . 

{z)  Supra ,  tome  W ,  ^,  2$^, 

[}]  Ibid.  p.  a88.  /      \..\ 

(4)  Bouche ,  qu*as-tu  dit  î . 

G    2 


lOO  CHAPITRE    LXXVIl.      * 

Les  chansons  d'Elias  de  Barjols ,  fils  d'un  mar  - 
chand  d'Agen ,  ont  été  renommées  :  il  célébra  sur-tout 
le  mérite  et  la  beauté  de  Garsende ,  veuve  d*IIde- 
phonse  II.  II  surpassoit  par  son  talent  et  par  la  dou- 
ceur de  sa  voix  tous  les  autres  poètes. 

Nous  avons  déjà  parlé  du  sire  de  Blacas  (i)  , 
te  noble  ,  brave  et  magnifique  troubadour ,  qui 
aimoit  à  faire  l'amour  et  la  guerre ,  à  dépenser ,  à 
tenir  coiir  plénière ,  et  qui  partageoît  son  temps 
entre  les  /nuses ,  la  gloire  et  les  plaisirs.  Son  éloge 
a"  été  écrit  par  Sordel,  autre  troubadour.  Bliacasset 
son  fils  se  moritta  digne  d'un  tel  père. 

Des  religieux  cultivèrent  aussi  Fart  des  vers,  re- 
naissant soiis  le  beau  ciel  de  la  Provence;  le  moine 
de  Fassan ,  et  '  principalement  un  moine  de  Léfins 
appelé  lou  Moungê  des  îles  d*Or,  sont  dtés  pai*rnî  les 
troubadours:  des  femmes  même ,  telles  que  Garsende 
de  Forcatquîer  et  là  comtesse  de  Die ,  décorent  la 
liste  de' ces  gafains  poètes.  On -en  pouVroit  indiquer 
beaucoup  d'autres  ;  mais  il  seroit  impossible  de  citer 
ici  tous  ceux  qui  dans  cette  période  de  temps  se 
livrèrent  à  la  poésie  (2).  * 

La  plupart  dès  premiers  troubadours  menbieiît 


(i)  J'tfpri,  p.  58. 

(a)  Les  vies  des  poëtes  provençaux  ont  été  recueillies  et 
écrites  par  Hugues  de  Saint-Césaire,  par  le  Moine  des  îles  d*Or, 
et  par  ceiui  de  Montmayor,  SLppclé  ie  fl/au  lif s  troubadours,  Jeain 
NosTRADAMUSapubiJc  un  ouvrage  sur  ce  sujet  j  il  parut  en  j  57  j , 


CHAPITRE   LXXVII.  ioi 

une  vie  errante  :  ils  alloient  de  château  en  château. 
Ils  ne  se  bomoient  point  à  des  chants  d'autour ,  à  cé-^ 
lébrer  des  fait$  âe  chevalerie  :  ils  composoient  a,ussi 
des  légendes  en  vers  ;  ils  écrivpfent*  même  sur  ia 
théologie.  Oh  a  encor^  les  poésies  d'un  troubadour 
du  XIII.*  siècle,  dans  lesquelles  il  cherche  à  réfuter 
les  erreurs  des  Albigeois ,  qui  s'étoient  répandues  en 


in-8.<*,  sous  le  titre  de  Vits  des  plus  cÛibrn  ^t  anciens  poët^  proven- 
çaux ,  &c.  Gio  GlUDlCE  en  donna  une  traduction  itafienne  à  Lyon, 
dans  fa  mên^  année.  CrÈSCIMBENI  a  également  traduit  le  iîvre 
de  Nostradainus ,  datiS  la  première  partie  de  son  grand  ouvrage 
intitulé  Storia  dtlîa  volgar  potsia  :  les  savantes  notes  de  Crescîm* 
béni  ajoutent  un.  grandprix  à  cette  traduction  ^  et  I*abbé  Miiiot 
n'en  a  pas  profité.  Haïtze,  DE  Sade  et  d'autres  auteurs  ont  parfc 
des  troubadours  provttiçaux.  Nous  avons  vu  que  M.  LE  Grand^ 
d'Aussy  a  voulu»  dans  ses  Fabliaux,  ieor  ra^r  l'honneur  d'avoir 
été  les  pères  de  notre  poélie  ,  et  que  M,  Papon  l'a  réfuté 
dans  les  lettres  qui  font  suite  à  son  Voyage  de  Provence,  M.  BÉREN- 
GEK  l'a  réfuté  ausïsî  dans  ses  Soirées  provençales.  L'abbé  MiLLOT 
a  donné  une  Histoire  des  troubadours  en  3  volumes  ;  mais  il  n'a 
pas  fait  assez  de  recherches,  «t  cette  histoire  manque  de  critique. 
C'est  encore  un  ouvrage  à  entreprendre  :  on  pourrott  se  servir 
utilement  àts  cent  cinquante-deux  notices  manuscrites  que  le  sa- 
vant LA  CuRNE  É>E  Sainte-Palatte  avoit  faites,  et  qui  sont  dans 
le  dépôt  dçs  manuscrits  de  la  Bibliothèque  impériale.  Je  ne  cite  ici 
que  des  troubadours  provençaux.  On  comptoit  parmi  eux  tous 
les  poètes  du  Dauphiné^  de  la  Cuienne,  de  la  Champagne,  de 
f  Auvergne,  et  mêïhe  quelques  anciens  poètes  italiens.  Tous  ceux 
qui  étoient  au-delà  de  la  Loire  appartenoient  à  la  contrée  où  l'on 
padoitla  langue  d'Oc,  d'où  lui  est  venu  son  nom  :  les  autres  poètes 
qui  étoient  en  deçà  de  la  Loire  ^composoietit  dans  la  langue  d'Oil; 
on  les  nommoit  trouvères,  \ 

G    3 


^^^wiWiMihaair^      11  n'miiY   r  ■■■■■■nfc  ■  ^^.m^^A-''-^^   ^^-^^^  ^ 


% 


io±  CHAfiTRE  Lxxvrr: 

Provence^  il  expose  et  combat  d'une  manière  assez 
plaisante  leur  système  sur  la  métempsycose.  C'est 
à  tort  qu'on  a  voulu  leur  attribuer  des  ouvrages 
dramatiques  ;  fis  n'en  ont  jamais  composé. 

Nous  arrivâmes  à  dix  heiyes  à  la  Tour- d'Aiguë. 
Mon  ame  est  encore  pénétrée  de  douleur ,  quand  je 
songe  à  l'horrible  dévastation  de  ce  beau  lieu ,  con- 
sacré par  des  souvenirs  intéressans  et  par  de  granJs 
services  rendus  à  l'humanité. 

Cette  terre ,  une  des  plus  belles  de  la  Provence  ^ 
avoît  été  successivement  possédée  par  une  branche 
de  la  mîtison  de  Sabran  et  par  celle  d'Agout.  En 
1  j62  il  y  avoit  déjà,  selon  Pénissîs,  un  superbe, 
riche  et  fort  château,  dont  il  fait  la  description  (i). 
On  croit  que  René  de  Boulier ,  vicomte  de  Reillane , 
«1  avoit  jeté  les  fbndemens  au^  commencement  du 
XVI.*  siècle,  et  que  ce  bel  édifice  fut  continué  par 
Antoine  et  Jean-Louis  Nicolas  barons  de  Cental ,  son 
fils  et  son  petit-fils  ;  ce  dernier  a  sur-tout  contribué 
à  son  embellîssemenf.  On  prétend  qu'il  étoit  épris 
de  Marguerite  de  Valois  »  première  femme  de 
Henii  IV  :  il  espéroit  que  l'auguste  princesse,  qui 
aiifioit  les  voyages ,  attirée  par  la  beauté  du  lieu , 
lui  feroit  l'honneur  de  le  visiter  ,  et  il  voulut  le 
rendre  digne  de  la  recevoir.  Lefranc  de  Pompigna» 
raconte  ainsi  la  chose  : 


m,^^m,mmmfmmJammm^^,^i^^mmr^^^^l^mfim..,^mmmiÊ^^mmmmm'mmmm^mm>ma^^t 


(i)  Histoire  tks  guçrw  du  Comtat  V^rtnimn;  Avignon >  15^^^, 


CHAPITRE    LXXVIT.  ioj 

Or  ce  baron  de  Centjtf 
Fut  épriç  d'une  héroïne 
Qui  fui  donna  maint  rivaî; 
Voyageant  en  pèlerine. 
Tantôt  bien  et  tantôt  mal  j 
Villageoise  ou  citadine, 
Promenant  son  cœur  banal 
De  la  cour  de  Catherine 
A  quelque  endroit  moins  rc^af  r 
Cette  dame  de  mérite 
Fut  fa  reine  Marguerite; 
Non  celle  à  Tesprit  badin , 
Qui  de  tendres  amourettes 
Des  moines  et  à^%  nonettes 
^A  fait  un  recueil  malin; 
Mais  s.i  nièce  tant  prônée. 
Dont  notre  bon  roi  Henri 
Fut  pendant  plus  d'une  année 
Le  très-affligé  mari , 
Et  qui,  plus  qu'une  autre  femme. 
Porta  gravé  dans  fon  amc 
te  commandement  divin 
De  Tamour  pour  le  prochaiii. 

Le  b^ron  fut  txpmpé  dans  son  attente,» 

Au  demeurant ,  la  gentille  princesse 

Ne  yit  jamais  ce  lieu  si  beau  \ 
Et  ic  baron ,  qui  Tattendoit  sans  cesse. 

En  fut  pour  les  frais  du  château. 

On  n'est  pas  forcé  d'admettre  daps  Iliistoîre 
Tautorîté  des  poètes  :  il  n'est  guère  probable  que  le 
baron  de  Cental  eût  osé  concevoir  et  avouer  un  si 
chimérique  espoir.  On  sait  que  Catherine  de  Mé* 
dicis  s'arrêta  dans  ce  château  en  1579,  lorsqu'elle 

<ï  4 


w^  ^-ï-f 


yô4  CHAPITRE   LXXVII. 

parcourut  la  Provence  pour  en  pacifier  les  troubles  ; 
et  l'pn  doit  présumer  que  le  galant  seigneur  fit 
peindre  à  cette  occasion  les  M  et  les  C  entrela- 
cés qui  ont  été  le  sujet  d'une  erreur  que  le  goût 
du  merveilleux  a  accueillie  et  que  le  temps  a  accré- 
ditée. On  lisoit  autour  de  ce  chiffre  :  Satiabor  ciim 
apparuerît,  TJn  seigneur  a  pu  s'exprimer  ainsi  pour 
peindre  le  désir  qu'il  avoit  de  recevoir  sa  souveraine; 
mais  jamais  un  sujet  n'eût  osé  déclarer  si  publiquement 
l'amour  dont  il  brûloit  pour  l'épouse  de  ^n  maître. 

Cette  terre  avoit  p^ssé  aux  ducs  de  Villeroi ,  et 
enfin  à  Jean-Baptiste  Bruni,  seigneur  deSaint-Cannat. 
Le  château  avoit  toujours  été  embelli  par  ses  difFé- 
rens  propriétaires  :  le  dernier  qui  Tait  possédé  a  été 
le  vertueux  président  de  la  Tour-d'Aigue ,  qui  avoit 
conservé  et  augmenté  l'intérêt  de  ce  beau  lieu ,  en 
y  réunissant  toutes  les  richesses  de  la  nature,  et  en 
s'occupant  constammeht  d'y  acclimater  des  animaux  ^ 
et  des  végétaux  utiles.  Il  y  avoit  formé  un  riche  ca- 
binet d'histoire  naturelle >  principalement  pour  la' 
minéralogie  :  ses  bosquets  étoient  remplis  de  végé- 
taux exotiques  ;  enfin ,  pour  compléter  l'intéressant 
spectacle  de  la  nature,  au  milieu  des  plantes  rares 
ou  utiles  de  tous  les  pays  ,  on  trouvoit  une  ménagerie 
bien  fournie  d'animaux  curieux. 

Le  château  avoit  déjà  été  la  proie  des  flammes 
en  1782  ;  un  terrible  incendie  en  consuma  un^ 
partie  :  mais   c'est  pendant   la   révolution  qu'il  a 


M« ^llll 


CHAPITRE    LXXVII.  105 

éprouvé  la  dévastation  la  plus  cruelle.  Eq  1790, 
le  club  delà  Xour-d'Aîgue  envoya  une  députation 
au  club  d'Aix  :  la ,  destruction  de  cette  belle  ^e- 
meure  fût  résolue  et  promptement  achevée  ;  le 
marteau  et  la  hache  anéantirent  bientôt  ce  que  le 
premier  incendie  avoit  épargné  :  ii  n'en  reste  que 
des  parties ,  qui ,  n'étant  point  iiées  entre  elles , 
n'offient  aucun  ensemble.  On  peut  cependant  ju-^ 
ger,par  ce  qui  subsiste,  que  l'architecture  approchoit 
de  ç^IIe  du  palais  du  Luxembourg  à  Paris  :  on  y 
remarque  encore  des  C ,  des  D  et  des  M ,  entrelacés 
pour  consacrer  par- tout  le  nom  de  Médicis. 

Une  ancienne  tour  carrée ,  qu'on  regardoit  comme 
un  ouvrage  des  Romains ,  et  l'abondance  des  eaux, 
sont  probablement  ce  qui  a  fait  donner  à  ce  lieu 
le  nom  de  la  Tour-d' Aiguë:  en  effet,  le  chemin  est 
bordé  de  sources  fraîches  et  vives  ;  et  il  y  a  encore 
auprès  du  château  un  immense  bassin  qui  commence 
à  se  combler.  Le  parc  est  entièrement  dévasté. 

L'air  brutal  et  farouche  de  notre  aubergiste  cadroit 
assez  avecTaspect  afïreux  des  ruines  que  nous  avions 
sous  les  yeux  :  nous  croyions,  en  l'écoutant,  lui  et  sa 
famille,  être  au  milieu  des  brigands  qui  y  ont  porté 
le  fer  et  la  flamme.  Nous  quittâmes  avec  des  sou- 
venirs douloureux  ce  lieu  que  sa.  magnificence  et  la 
noble  bienfaisance  de  ses  maîtres  n'ont  pu  sauver  de 
la  rage  de  ces  furieux. 

De  la  Tour-d' Aiguë  nous  nous  rendîmes  à  une 


IO(î  CHAPITRE   LXXVII.    : 

petite  ville  appelée  Pertuis  (  i  )  •  En  sortant  de  s^  inurt , 
nous  passâmes  la  Ehirance  dans  un  bac.  Le  sol  est , 
dans  un  grand  espace*  de  terrain ,  couvert  de  cailloux 
qui  annoncent  les  ravages  que  cette  rivière  doit 
causer  dans  ses  crues  :  il  y  auroit  sans  doute  des  moyens 
pour  les  réprimer  (2). 

Nous  laissâmes  sur  la  gauche  Jouqu^s  (3),  d'oil 
viennent  les  eaux  que  Sextius  fit  conduire  à  Aix  ; 
cUes  passoient  par  un  aqueduc  dont  on  voit  encore 
des  traces  à  Meyrargues.  Ce  iieu  doit  son  nom  (4)  à 
Màrius  j^^  qui ,  en  attendant  l'arrivée  des  Cimbres  , 
occupa  ses  soldats  à  dériver  les  eaux  du  vallon  de 
Jouques,  et  à  les  conduire  à  Aix  à  travers  des  rochers 
qu'il  avoit  fait  couper.  Plus  près  de  la  route  est  Pei^ 
rolles.  Venelles  est  le  dernier  bourg  que  l'on  ren- 
contre^ Enfin  nous  revîmes  Aix  avec  d'autant  plus 
de  plaisir,  que  nous  avions  grand  besoin  de  nous 
délasser  de  nos  fatigues-,  et  que  nous  y  étions  atten^ 
dus  par  l'amitié. 


{ I  )  Voyct  Abrégi  historique  et  chronoîogiqut  de  la  ville  de  Pertuis  , 
T^  )eat%  MONÏER;  1706,  in-4.° 

(i)  M.  Barrai,  ingénieur  ^  a  fait  un  projet  d'encaissement  de  cette 
rivière.  Cette  opération  rendroit  dix  mille  hectares  de  terrain  à 
Fagriculturc  ;  ce  qui  en  couyriroit  bientôt  la  dépenie. 

(3)  Castrùm  de  J^as, 

(4)- Dérivé  de  Marii  ager ,  champ  de  Mari  us.  Ce  lieu  est 
appelé  Meiranicum,  dans  les  actes  du  moyen  âge. 


I07 


CHAPITRE  LXXVIII. 

Retour  à  Aix.  —  Grande-Peigière*  —  Tretz.  — 

Monument.  —  Défaite  des  Teutons.  —  Montagne 
Sainte-Victoire.  -^  Fête  commémorative  de  la  victoire 
de  Marias.  —  Rivière  de  TArc.  —  Saint-MAximin. 
—  Eglise. —  Architecture  dans  la  Provence, —  Sainte* 
.  Madeleine  en  Provence.  —  Inscriptions  du  chœur.  — • 
Crypte.  —  Reliques.  —  Sarcophages.  —  Sainte- 
Baume.  —  Poënie  sur  la  Madeleine.  —  Marbre  de 
Saint-Maximin.  —  ToURVES.  —  Château.  —  Cïbo^ 
rîum,  —  Lacs.  —  BriGNOLES.  — •  Prunes. 

JLa  tournée  que  nous  venions  de  faire  a  voit  été 
longue  et  pénible.  C'étoit  le  temps  le  plus  chaud  de 
l'année  :  il  auroit  fallu  voyager  la  nuit  ;  et  cependant 
nous  ne  pouvions  le  faire ,  puisque  notre  objet  étoit 
de  voir  et  d'observer.  La  barque  qui*  nous  avoît  con- 
duits le  long  de  la  côte,  n'étojt  point  couverte;  et 
les  rayons  d'un  soleil  brûlant,  réfléchis  par  la  mer 
et  renvoyés  par  les  moruagne$, ^voient  une  ardeur 
insupportable*  C'étoit  pourfant  avant  le  jour  que  sou- 
vent nous  nous  mettions  en  rout#,  et  nous  arrivions 
jM-écisément  à  l'heure  où  le  soleil  commence  à  se 
cacher  :  d'autres  fois  nous  ne  pcmvions  terminer  nos 
observations  que  vers  midi  ;  et  comme  nous  ne  vou- 
lions pas  perdre  un  seul  moment,  nous  partions 
aussitôt  après.  Une  partie  de  la  nuit  étoit  souvent 


■♦-"•""-  '"^t;        •' 


>o8  CHAPITRE    LXXVIII. 

employée  à  la  rédaction  de  notre  journal.  Notre  acti- 
vité étoît  continuelle  ;  aussi  nos  plabirs  étoient  tou- 
jours renaissans  :  le  nombre,  la  variété  des  objets , 
l'intérêt  dont  ils  étoient  à  nos  yeux ,  nous  empê- 
choient  de  songer  à  l'incommodité  de  la  saison ,  à 
la  difficulté  des  moyens  de  transport ,  enfin  k  toutes 
les  difficultés  qui  acconipagnent  ordinairement  les 
voyages. 

A  Aîx ,  une  journée  entière  fut  consacrée  à  mettre  ' 
en  ordre  les  matériaux  que  nous  avions  amassés  en 
parcourant  la  haute  et  la  basse  Provence  ;  et  nous 
nous  préparâmes  à  retourner  à  Marseille ,  que  nous 
n'avions  vue  qu'en  passant  :  mais  nous  voulions  au-' 
paravant  visiter  Saint-Maximin.  . 

Nous  partîmes  le  2 1  messidor ,  à  trois  heures  du 
matin  :  à  huit  heures ,  nous  arrivâmes  à  l'auberge 
de  la  Grande  -  Peigière ,  où  nous  fîmes  rafraîchir 
nos  chevaux.  Cette  auberge  jouit ,  depuis  plusieurs 
siècles,  d*une  grande  célébrité  :  c'est  le  seul  gîte 
où ,  de  temps  immémorial ,  on  sache  que  les  voya- 
geurs aient  pu  se  reposer.  On  présume ,  non  sans 
vraisemblance,  que  c'est  le  lieu  appelé  Tegolata  ou 
Tèctolata  dans  \ Itinéraire  d'Antonin  ;  mot  qui  peut- 
être  indiquoit  déjà  un  tugurium  ou  espèce  d'abri  pour 
les  voyageurs.  Ce  lieu ,  qui  n'est  aujourd'hui  qu'un 
des  plus  mauvais  cabarets  de  la  Provence ,  rappelle 
cependant  une  action  bien  mémorable.  Nous  étions 
dans  la  plaine  célèbre  où  Marius  vainquit  les  Teutons 


CHAPITRE   LXXVIH.  iCf^ 

et  les  Ambrons ,  peuples  du  Nord ,  qui ,  peu  de  temps 
après  la  fondation  d'Aix ,  êtoient  venus  fondre  sur 
la  Gaule  pour  pénétrer  ensuite  en  Italie.  Le  nombre 
des  barbares  étoit  immense.  Marins  arriva  dans  ia 
Provence  avec  son  armée  ;  mais  ik  s'étoient  dirigés 
vers  l'Espagne.  Ce  général  occupa  ses  soldats  \  des 
travaux  considérables  pour  conduire  à  Aix  les  eaux 
des  lieux  voisins*  Deux  ans  après ,  les  barbares 
rentrèrent  dans  la  Gauie ,  et  se  partagèrent  en  deux 
corps  d'armée  :  les  Cimbres  se  dirigèrent  vers  Lyon 
pour  traverser  les  Alpes  ;  Marins ,  secondé  des  Mar- 
seillois ,  défit  ies  Ambrons  et  les  Teutons. 

La  plaine  dans  laquelle  fut  livrée  cette  mémorable 
bataille  s'appelle  plaine  de  l'Arc ,  du  nom  de  la  rivière 
qui  la  traverse ,  pu  plaine  de  Trèt^ ,  de  celui  d'un 
bourg  qui  y  est  situé.  Eile  est  entre  deux  chaînes 
de  montagnes  :  l'une ,   appelée  chame  de  Sainte* 
Baume^  est  formée  des  monts  Olympe  et  Aurélien  ; 
l'autre  est  celle  de  Sainte-  Victoire  cm  Notre-Dame  des 
Victoires*  C'est  ik  que  Marins  prit  ses  positions  ;  et  il 
en  descendit  pour  tomber  sur  les  barbares ,  qui  avoient 
campé  dans  la  plaine  sur  ies  bords  de  la  rivière  de 
l'Arc.  Deux  cent  nulle  barbares  y  laissèrent  la  vie,  ou 
y  perdîrait  feur  liberté  :  ièu»  femmes  elles-mêmes  se 
précipitèrent  dans  les  rangs^  avec  leurs  enfans ,  four 
ne  pas  tomber  au  pouvoir  du  vainqueur. 

Marhis  fit  choisir  dans  le  butin  et  mettre  à  part 
tout  ce  qui  pouvoit  orner  son  trio.mphe  ;  il  offrit  le 


IIO  CHAPITRE    LXXVIII. 

reste  en  sacrifice  sur  un  immense  bûcher,  qu'entou* 
roiént  ses  soldats  couronnés  de  fleurs ,  et  auquel  il 
mît  lui-même  le  feu  (i)» 

Les  histpriens  modernes  ajoutent  cpie  ce  général, 
voulant  laisser  un  monument  de  sa  victoire,  bâtit 
un  swc  de  triomphe  ;  mais  les  édifices  de  ce  genre 
n'étoient  point  encore  en  usage  chez  les  Romains 
au  temps  de  Marius.  t)'autre$  historiens  ont  pr en- 
tendu que  ce  monument  étoit  une  pyramide ,  et 
qu'on  en  voit  encore  la  base  près  de  la  rivière  qui 
fut  teinte  du  sang  dcfis, barbares.  Cette  rivière  a  reçu 
le  nom  de  rivière  de  l'Arc ,  de  la  fausse  opinion  qui 
a  prévalu  que  M^^rius  avoit  élevé  dans  ce. lieu  un  arc 
de  triomphe.  On  croit  aussi  que  le  bourg  de  Pour- 
rieres,  qui  est  voisin^  a  été  appelé  ainsi  dut  mot 
putredo  [  corruption  ] ,  parce  que  c'est  dans  ce  lieu 
que  des  monceaux  de  cadavreê  furent  laissés  sans 
sépulture.  ♦ 

A  un  quart  de  lieue  plus  loin  qUe  Taubefge,  est 
un  pont  sur  la  petite  rivière  de  TArc  ;  et  à  quelques 
toises  au-delà',  on  remarque  sur  la  droite,  à  deux  ou 
trois  pas  du  chemin  ^  des  restes  d'une  ancienne 
rnaçonnçrie  qui  s'élèvent  environ  d'un:  jSied  au- 
dessus  du  sol  2  piu$ieur3  traces  peuvent^  fiûré  soup- 
çoJVier  que  le  monunlent  dont  celte  maçonnerie 
étoît  la  base,  avoiî  uiije  forme  carrée.  Papon  (2)  et 

■  '1       f    ■  <       Il  ■!;;'."" 

(t)  PlUTARCH.  tn  Mario. 

'A  (i)  Voydge  é»  Promener, 


CHAPITRE   LXXVIII.  m 

M.  Dulaure  (  i  )  disentque  c'étoit  un  arc  de  triomphe» 
M.  de  Saint- Vincens  possède  un  dessin  où  M.  de 
Gaillard  en  avoit  fài^  un  obélisque*  £n  effet ,  ce  qui 
reste  de  ces  fondemens  convient  assez  bien  à  la  base 
d'une  pyramide  ou  d'un  obélisque»  mais  ne  paroic 
pas  avoir  jamais  appartenu  à  un  arc  de  triomphe* 
Le  village  de  Fourrières ,  situé  à  l'extrémité  dç  cettd 
plaine  y  a  eu  long-temps  un  obélisque  dans  ses  ar- 
moiries ;  ce  qui  pourroit  indiquer  qu'il  y  en  avoit  un 
remarquable  dans  les  environs  :  enfin  M.  de  GaiUard 
possédoil  autrefois  une  tapisserie  du  xvi**  siècle,  où 
ce  lieu  étoil  représenté  avec  une  pyramide  qui  avoir 
à  sa  base  trois  esclaves  enchaînés. 

Ce  sont  les  seules  autorités  qui  puissent  faire 
penser  qu'il  y  avoit  là  un  monument  commémoratif 
de  la  victoire  de  Marias;  car  il  n'est  question  de  ce 
monument  dans  aucun  historien  ancien.  Les  fonde- 
mens  qui  subsistent  pourroient  aussi  bien  avoir 
appartenu  à  un  fort,  ou  à  un  édifice  qui  auroit  eu 
une  autre  destination  que  celle  qu'on  lui  suppose. 

Le  noqi  de  montagne  ^de  U  Victoire,  qui  s^est 
long- temps  conservé,  est  le  plus  beau  monument 
de  la  reconnoissance  des  Salyes  et  des  peuples  qui 
leur  ont  succédé.  Dans  le  moyen  âge  ,  l'antique 
tradition  s'est  altérée  :  on  croyoit  alors  que  tout  de- 
voît  être  mis  sous  la  protection  des  saints  ;  et  il  n'a 


^1 1  »i 


(i)  Description  des  principaux  lieux  de  la  France^ 


jrifcfc 


t\l  CHAPÎTftE    LXXVIIf. 

pas  été  difficile  de  placer  le  mot  sainte  avant  celui 
de.  Victoire.  Depuis  ce  temps  cette  montagne  a  coh'^ 
serve  le  nom  de  Sa  in  te- Victoire.  Quelques  auteurs 
l'appellent  aussi  iai  montagne  de  Sainte-  Ventûre ,  nom 
moins  noble ,  qui  doit  sans  doute  son  origine  ou  au 
bonheur  que  les  habitans'ont  eu  d'être  délivrés  des 
barbares  par  la  valeur  de  Aîarius ,  ou  au  vent  qui 
souffle  conçnueUement  sur  cette  montagne,  dont 
l'élévation  .  est  assez  considérable ,  quoiqu'elle  ne 
puidie  être  comparée  à  celle  des  montagnes  alpines. 
II  y  a,  à  son  sommet,  un  couvent ,  autrefois  habité 
par  les  Carmes ,  et  occupé  ensuite  par  un  hermite. 
Au  lever  du  soleil ,  on  y  jouit  d'une  vue  magnifique. 

Il  subsiste  encore  un  monument  d'un  autre  genre , 
et  qui  consacre  d'une  manière  pittoresque  et  siri- 
gulière  le  grand  exploit  de  Marius  ;  ce  sont  les  fêles 
que  célèbrent  les  habitans  de  quelques  villages  voî-^ 
sins,  et  plus  solennellement  encore  ceux  de  Per-* 
tuis ,  petite  ville  située  sur  les  bords  de  la  Durance , 
/  et  dont  j'ai  déjà  parlé. 

Les  raisons  que  Jean  Moniér  (  i  )  rapporte  pour 
prouver  que  cette  petite  ville  a  été  fondée  et  peu-^ 
plée  par  une  colonie  de  Marseillois ,  reconnoissans 
des  services  que  les  montagnards  de  cette  contrée 

(i)  Lfnre  4  MM.  les  prieurs  de  la  confrérie  de  Sainte-Victoire  ,    « 
érigée  en  V église  de  Permis,  sur  le  pèlerinage  qu'ils  font  le  2^  avril, 
pour  faire  un  feu  de  joie  sur  la  montagne  de  Sainte-Victoire;  Aix, 
1712,  in-4«* 

des 


•   ; 


CHAPITRE    LXXVIII*  113 

des  basses  Alpes  leur  avoîent  rendus  contre  les  bar- 
bares ,  ne  sont  ajppiiyées  sur  aucun  témoignage  his- 
torique :  il  est  également  impossible  de  remonter, 
comme  jl  prétend  le  faire ,  à  l'origine  de  la  solennité 
qu'on  y  célèbre;  mais  il  est  certain  qu'elle  a  quelque 
chose  de  remarquable,  et  qu'elle  paroît  être  corn- 
mémoradve  de  ia  grande  victoire  remportée  par 
Marius^ 

Dans  la  fournée  du  23  avril ,  lé  bruit  du  tambour 
se  fait  entendre  et  rassemble  les  hâbitans  :  les  en- 
fans,  les  garçons,  les  jeunes  jfilles,  et  même  des 
vieillards ,  se  réunissent  ;  ils  choisissent  pour  les  con- 
duîre  un  chef  qui  est  chaigé  de  pourvoir  à  la  sub- 
sistance de  cette  petite  troupe*  Tous  partent  le  soir 
au  son  d'une  marche  dont  fat  fait  graver  la  musique 
( pL  JV,  n!j)  :  arrivés  sur  la  montagne ,  au  lieu  de 
se  livrer  au  repos,  ils  s'occupent  à- ramasser  du  Ix)îs  , 
en  construisent  un  bûcher ,  et  y  mettent  le  feu , 
après  s'être  couvert  la  tête  de  fleurs.  Alors  le  roule- 
nient  du  tambour  redouble  :  on  forme  des  ronds 
joyeux  et  des  farandoles  bruyantes  autour  du  bûcher, 
qui  semble  consumer  encore  If  s  dépouilles  des  bar« 
bares  ;  la  hiontagrie  retentit  de  cris  de  joie ,  et  par- 
tout on  entend  répéter.  Victoire!  Victoire!  avec  v^ne 
espace  de  délire.  ' 

La  troupe ,  satisfaite  d'avoir  célébré  l'époque  mé^^ 
moràbte  de  la  délivrance  et  de  la  gloire  de  ses  jpères , 
se  remet  en  marches  Sï  rentrée  dam  Pertuis  est  une 
Tome  III.  H 


BL      Fi    « 


Il4  CHAPITRE  liXXYUK 

espèce  de  triomphe  :  chacun  tieoi  à  la.  main  uiè 
branche  tfarbue  et  des  bouquets ,  et  Ton  crie  à  l'envi , 
sancta  Victoria  l  sancta  Victoria  I  Les  habîtans  vont 
ensuite  au  temple  rendre  grâces  au:  Dku  des  armées , 
qai  n'a  pas  permis  que  ieur  antique  patrie  fût  sub- 
|uguée  par  les  barbares  du  Nord*      , 

On  célèbre  dans  Pertuis  même  une  autre  fète 
qu'on  peut  regarder  aussi  comme  une  seconde  com-^ 
mémoraiioijt  de.  ceiitç  délivrance.  On  construit  sur 
un  char  un  btkher,  qui  brûle  pendant  qu'on  le  pro-' 
mène  par  la  ville  :  le  char  ^  traîné  par  des  mulets 
attelés  deux  à  deux  jet  guidés  chacun  par  un  condtuc-^ 
leur,  est  précédé,d'appariteurs  vêtus,  de  blanc,  ayant 
Fépée  au  c6té.  et  un  bâton  blaioc  à  Ja  main  ;  il  est 
suivi  des  abîmés  de  la  Jeunesse  ;  às&  jmagmrzts  et  des 
iptf^onvm  les  phis  (quaKfiées.  Les/ rues  sont  éclairées 
paf  une  grande  quantité  de  tades,  ou  morceaux  de 
bois  d'irbres  conifères  aHuniés,  que  chaque  habitant 
ù§ï\t  ^  h  lîjaln  ;  il  y  en  a  à  toutes  les  fenêtres ,  à  toutes 
}es( fortes:  chacun  aime  à  entendre  pétiller  ce  bois, 
^  à.  respirer,  les  vapeurs  résîiieuses  qui  s'en  exhalent* 
Piar-tQut  ôùllechir  fiasse  ,^  l'air  reifientit  df acclama- 
tions. Cette  céréjiKMiie  a  Keu  le  jour  des  Rois,  e« 
§st  lappélée  pour  cèue  raison  la  Belle-EtotU ,  parce 
qu'on  croit  communément  qu'elle  a.  ^  instituée  e» 
mélH^ire  de  tétoile  qui  conduisit  lés  m^es^ 
>  Il  est  probable  qiie  ces  fêtes  sont  d'une  or^ime 
très-ancienne  I  et  qu'elles  ont  subi,. après  l'établis» 


CilA^lTRE    tlÇXyilU  115 

semant  4e  ia  rielig^pn  d^réyenne^  les  modifications 
qui  canv6nc^€ii:vi  4U  noHve^ucuJî^  que  Ja.  Prpyence 
avoîl  eoil^rft^^..  I41  fête  ,du  bilcber  sur  la  moa* 
tagne  Q!a\plii5  çu.,  pour. le  peuple,  <J>ujre .objet 
que  xfc  rwdre,  sur  un  lieu  saoctifié  par  la  re^ligion, 
un  pur  homiiiage  ^  l^emel  ;  et  celle  de  J^^  Bflle-^ 
^fçije^  a  jdûf  seulement  rappeler  Tadoratio^i  que  lef 
rois  de  TOrij^t  .viniîentjt>flrrix  au  §)s  dp  M^riç,  pour 
îodîquer  q^e  $<^n  cwUe  s'ét^ndroit  Jusqujq^cbe^iles 
pelions  ie^  plu^  lointaines*  '  : 

jLa  petite,  ^ille  de  Treti  étpît  ^i^i^e/pi.s,  i^n  chef- 
lici»,  Qn  a  dérivé  sou  noii>  ,4e  ^fiticitm,.  p^rçe  ijua 
son  tenritoke .  produit  beaucoup  de  ifprqçffif  :  ipyj 
Peiresç  y  défiWvrit  u*^  ios^^iptioiî  daris  I^qjieile  if 
t$x  ;parlé>  4Vni  vW^u  offJ^rt  à  Tr'tttia  ^ipzx^MarctiS 
XikiMS  LQngus  (  I  )  ;  ains;  jl  paraît,  gue^  la  viKe  d.QJ^ 
^oa  nom  à  .cett<?  divinité  topique,  c'est t.àrdire  ,  lo- 
cale.  II  y  avoit,  sur  une  montagne  aju  midi ,  un  inor 
nastère  fondé  par  SXa^sien  ^l'honneur  de  S^  Jçan- 
Q^ptiste.  Lç$  h^bitans  célèbrent  la  fête  du  Précurseur 
avec  une,  ;  grande  Mennilé  leHç.e^t  annoncée  huij 
îftipij^  d'avance* au  ^>(>a  des  tambpjirs,  et  il  y  ^  u^ 
rww^w^^  célèbre. , 

Le  terrain  exige ,  pour  produire ,  d^^slabpijrs  p^q- 
fonds ,  beaucoup  d'engrais  et  di^  soins.  On  y  réçplte 


*   m  m  II  I  I  I  I  Of   J  I    L    Ji  ■■■  t'     >  ■  ; 


-    1    I    .1 


H  2  - 


y 


\ 


ll6  CHAPITRE    LXXyilt. 

du  blé,  de  l'huile,  des  haricots  noirs ,  du  vin  et  dd 
la  garance.  On  trouve  à  Fuveau  des  mines  de  charbon 
de  terre  qui  pourroient  être  d'un  très-grartdt  avantage 
dans  ce  pays ,  où  le  bois  est  si  rare;  Saiht-Antonin , 
Beauncueil  et  Châttaune,uf -Je  '  Rouge  ^  qui  apparu 
tiennent  aussi  à  l'arrondissement  de  Tfetz,  ont  de3 
tarrières  qui  renfertnent  une  brèche  qui  approche  , 
pour  la  beauté ,  de  celle  du  Tholoriét. 

Pendant  que  nos  chevaux  se  reposoient ,  nous  nous 
promenâmes  sur  les  bords  de  la  rîvièrç  de  l'Arc  ^ 
.  dont  lés^  eaux  ont  été  teintes  de  tant  de  sang.  Un 
botaniste  peut  y  trouver  un  agréable  déiassementè 
Au*delS  du  pont  fêté  sur  l'Arc,,  on  est.  dans  le  dépar- 
tement dû  Var.  Le  chemin  devient  efïtoyable.  Nous 
vîmes  beaucoup  de  maisons  qui  ont  été  détruites 
pendant  la  révolution,  par  ordre  du  Gouvemeinenr, 
parce  qu'elles  sèrvoîènt  de  repaire  aux  brigands  qui 
îrifestoient  les  routes.  ' 

11  étbit  onze  heures  quand  nous  arrivâmes  à  Saint 
Maxlmin.  Cette  ville  doit  son  nom  à  un  des  prin- 
cipaux saints  de  la  Provence ,  sou3  l'invocation  duquel 
est  son  église  :  te  superbe  monument  de  l'arcM- 
tecture  dite  mal-à-propos  gothique  étoit  i'objet  de 
notre  excursion. 

De  tous  les  édifices  de  la  Provence  qui  ^  ont  été 
élevés  ou  perfectioiuiés  dans  le  xv.*'  siècle ,  les  plus 
remarquables  sont  le  clocher ,  la  nef  et  le  portail 
de  l'église  de  Saint-Sauveur  d'Aîx,  dont  il  a  dé;à  été 


r 


V 


CHAPITRE    LXXVIII,  I17 

qu^tîon  ( i)  ;  l'église  et  le  château  de  Tarascon ,  dont 
|e  parlerai  dans  un  autre  chapitre  ,  et  l'église  de 
Saînt-Maximîn.  Ce  magnifique  édifice  a  été  com- 
mencé dès  le  xiii/  siècle,  puisque  Charles  II,  dit 
le  Boiteux ,  en  fit  jeter  les  fbndemens  en  1 29  5  : 
il  fut  continué  pendant  le  cours  du  siècle  suivant  \ 
mais ,  quoiqu'il  ne  fut  pas  encore  achevé  ,  il  tom- 
bait déjà  en  ruine  dans  les  premières  années  du  xv/ 
siècle,  parce  que  les  troubles  et  les  guerres  de  ïs^ 
Provence  avoient  mis  les  souverains  dans  l'impossibi- 
lité de  le  terminer.  D'après  la  demande  de  Louis  III ,  ' 
roi  de  Sicile  et  comte  de  Provence,  le  pape  Mar- 
tfai  V  aVoît  permis  aux  frères  Prêcheurs  ,  qui.  des- 
servoient  cette  église,  de  s6  faire  délivrer,  pour  les 
réparations  les  plus  urgentes,  mille  florins  d'or  k 
prendre  sur  les  legs  pieux  qui  n'avoient  aucune  des- 
tination certaine,  dans  les  trois  provincesecdésias- 
tiques  d'Aîx,  d'Arles  et  d'Embrun,  Cette  collecte  nç 
répondit  pas  probablement  à  l'espérance  que  les 
religieux  en  avoient  conçue  ;  et  d'ailleurs  la  somme 
étoit  insuffisante.  Le  roi  René  .fit  achever  et  presque 

reconstruire  ce  monastère  :   il  doit  donc  en  être 

•  •'1- 

regardé  comme  le  second  fi^ndateur  ;  et  l'on  piçut 
dire  avec  vérité  qu'il  appartient  au  xv/  siècle.  Il  y 
établit  un  collège. 

Antérieurement  k  la  bulle  d(^  Martin  V,  dQHt  nous 

■I  I  "■—— 1— ■——  I  —— M1^— — — Ml 

(i)  Tome  II ,  page  2^5. 

H  3 


y 


1  t8  CHAPITRE    LXXVIII. 

avdrïs  fait  cohnoitre  les  disposîrîons ,  Jean  le  Maîhgi<è,- 
inàréchal  de  Boucicaut,  dont  la  Vaillance  a  si  bien 
servi  le  roi  Charles  V  et  son  fiîs  Charte^  VI ,  Marié 
de  Bfois  et  Louis  II  son  fiis,  avoil  fait  vœu  de  faire 
construire  deux  chapelles  i  Fune  dans  l'église  supé- 
rieure, l'autre  dans  Téglîse  souterraine  de  Saini- 
Maiimin.  D'après  un  acte  que  m'a  communiqué 
M.  cip  Saînt-Vincens,  on  voit  que  ces  travaux  ont 
coûté  onze  cent  cinquante  florins  d'or. 

Il  est  malheureux  qu'un  si  bel  édifice  n'ait  point 
une  façade  convénafalfe;  le  portail  (ï)  n'a  jamais  été 
commencé  ;  on  croit  entrer  dans  une  châp'eile  de  vit^ 
lage  :  rnai's  cette  difformité  même  prddui'e  Une' sur- 
prise agréable;  >tar  on  est  toul-à-tôùp  frappé  dé 
l'ordonnance  imposante  et  nfraj'estuéuse  qui  règiiè 
dam  Fintérfeur.         '  \  '         '        *     • 

> 

On  îgndre  qiiel  est  l'architecte-  que  !é  toi  René 
chai'gea  de  la  direction  des  tràtrâux  de  cette  magnî^ 
ifique  église  :  on  pfeut  prèsurner  qi!*!!  étant  Italien  ; 
elle'ésl  mile  dans  le  'goût  des^plus  beîles  élises  quf 
bmëfé! construites  en  Italie  dans  ïe  xïv/  siècle.  Elle 
a  tfofs  nefs  ;  là  i'oûte  est  souteriiie^r  des  piliers 
tîbilt  ôti  adriiiré  avec  raîsoh  la  hardiesse  et  h  hauteur. 


i-      ' 


''  '  (  1  )  UéiYéïigiéak^ii'mdnisthe demandèrent âii  cardinal  Mazvîn, 
qui  ie  visitoit ,  de  faire  bâtir  ce  portail  ;  ils  vantoient  la  munifi- 
cence du  roi  René,  à  qui  l'on  devoit  cet  admirable  édifice.  Ce  roi  Ta 

commencé,  répondit  le  cardinal  j  cherchei^  tàufbii  ijui  U  fasse  finir. 

^    -  * 
C 


f 


CHAPITRE   LXXVIIÎ.  Ilp 

II  jr  a  peu  €églis€%  en  France  qui  pf^ésentent  autant 
de  nobiesse  et  tftiégance.  ^ 

On  n'a  jamais  itabii  avec  certitude  que  fa  sainte 
qui  est  révérée  dam  l'église  catlioliqué  sous  le  nom 
de  Afarie-Afag^/ekine,  et  doni i'évahgéliste  S.  Luc 
a  décrit  la  rigoureuse  pénitence,  dût  être  distinguée 
de  Magdeieine ,  sœur  de  Lazai<e  et  de  Marthe ,  Tes 
hôtes  chéris  de  Jésus-Christ  à  Béthanie.  Les  saints 
Pères  ne  reconnoissent ,  en  général j,  qu'une  Mag- 
deleîne,  et  se  fondent  sur  le  récij  de  S.  Luc;  c'est 
celle  que  l'église  appelle  fa  Péiheresst  ;  les  plus  cé- 
lèbres hagiographes  s'accordent  à  dire  qu'elle  moufut 
iEphèse;  et  f  Opinion  des  anciens  légendaires,  qui 
la  font  venir  en  Provence ,  est  une  superstition  reçue 
seulement  parmi  le  peuple,  et  qucf  les  hommes  qui 
joignent  les  lumîênes  de  la  critique  à  fa  plus  austèie 
piété  ne  craignem  point  de  rejeter  (  i  )  • 

Il  ne  seroit  pas  sahs  intérêt  de  savoir  confiment 
a  pu  se  répandre  et  s'accréditer  une  ophiion  û  con*- 
traire  à  tout  ce  que  l'histoire  de  la  relfgron  nous 
enseigne.  D'aprèé  des  recheiches  curieuses  faites  au 
XV.*"  siècle  par  un  habitant  <le  Saint-Zacharje  (2) ,  fou 


•     t     •"•       .  '  r  '■ 


(i)  Thie^S ,' f.eitrt  fiur  la  précieiw  larnif  Je  Vendême.  GoDES- 
CARD,  Vies  des  Sdipif ,  &.C,  FLEURI,  Œuvres  posthumes. 

(  i  )  Les  notes  qui  contenoicnt  le  résuftat  de  ces  recherches 
ctoient  dans  la  bibfiothèquc  de  M.  Lebiahc-Duvaure ,  un  d^s 
«lesceiKlà^s  de  leur  autèiur. 

H   4 


/ 


120  CHAPITRE    LXXVIII. 

voisin  de  Saînt-Maximin  et  de  la  Sainter-Baume  ,  il 
paroît  qu'à  l'époque  où. les  Sarrasins  détruisirent 
le  monastère  des  religieuses  Cassianites,  près  de 
Saint-Zacharie ,  au  vili.*  siècle ^  une  de  ces  filles, 
nommée  Magdeleine  ,  échappa  au  massacre  que 
ceux-ci  firent  de  ses  compagnes.  Elle  alla  se  cachetr 
dans  une  des  grottes  de  la  montagne  voisine ,  où 
elle  se  nounissoît  de  fruits  sauvages ,  et  y  vécut  si 
pieusement ,  que  la  grotte,  sancti^ée  par  son  séjour 
et  ses  tonnes  œuvres ,  fut  appelée  Sainte- Baume, 
Cette  religieuse  mourut  ^  Saint  -  Maximin  ,  où 
étoit  un  monastère  de  l'ordre  de  S.  Benoit ,  et  y  fut 
enterrée,  D'abotd  on  honora  et  on  ne  voulut  honq^ 
rer ,  à  Sàint-Maximin  et  dans  les  diocèses  d*Aîx  €ît 
de  Marseille ,  que  la  religieuse  Cassîanite  nommée 
Aiagieleine:  mais ,  peu  de  temps  après ,  des  moiness 
grecs  vinrent  en  France ,  et  y  répandirent  des  opi- 
nions nouvelles  relativement  aux  fondateurs  des 
églises  de  ce  royaume ,  qu'ils  dirent  être  deS|  disciplç^s 
de  Jésus-Christ ,  ou  des  missionnaires  envoyés  par 
les  apôtres  ;  ils  prétendirent  avoir  lu  dans  leurs  chro- 
niques ,  que  S.  Denis  de  Paris  étoit  Denî^,  TAréppa- 
gite  ,  que  S.  Tifophime  d'Arles  étoit  un  disciple  de 
S.  Paul,  et  que  S.  Paul  lui-même  avoît  prêché  Fa 
foi  en  Espagne.  Le  goût  du  merveHIeux  fit  saisir 
sfvidement  ces  opinions  ,  et  en  fit  naître  d'autres 
qui  s'établirent  aussi.  On  assura  qite  X^zare ,  qui 
avoit  été  ressuscité  par  Jésus-ÇbriUt  ;.  JVl^ximîa ,  un 


CHAPITRE    tXXViq*  12^1 

des.  soixante -douze  disciples;  Sidoine  ^  Taveugle 
né  ;  Magdeleîne  et  Marthe,  étoîent  venus  en  Pro* 
vence  pour  y  prêcher  la  foi.  Alors  k  Magdeleme 
Cassianite  fut.  oubliée ,  et  son  culte  fut  remplacé  par 
celui  de  la  Magdeleîne  de  TEvarigile,  que  Ton  pré- 
tendit avoir  fait  pénitence  à  h  Sainte -Baume  et 
avoir  été  enterrée  à  Saint-Maxjmin.  ( i  )• 

Cette  tradition  a  cependant  été  le  motif  de  I*étà- 
blFssement  de  plusieurs  fêtes ,  de  l'exécution  de  plu- 
sieurs monumens  de  Tart  ;  et  la  croyance  que  l'église 
46  Saint-Maximin  renferme  les  précieux  restes  dé 
la  belle  pécheresse  ,  ajoute  encore  à  la  vénération 
que  cette  basilique  inspire.  Les  nombreux  tableaux  et 


i«" 


(i)  Je  ne  prétends  pas  regarder  cette  opinion  comme  absolu- 
ment démontrée  ;  elle  prouve  au  moins  ce  que  des  gens  ^éclairés 
pensèrent  alors  sur  çc^te  question.  M.  de  Valois  a  -juge  aussi  que 
les  traditions  des  églises ,  qui  font  remonter  aux  temps  des  apôtres 
Tépoque  de  leur  fondation,  doivent  icur  origine  aux  Grecs  venus 
en  France  sous  le  règne  de  Pépin  :  ces  Gr^ecs ,  pour  plaire  aux 
Français ,  établirent  l'opinion  que  S.  Dçnis ,  évêque  de  Paris , 
étoit  Denis  rAréopagite.M.deTilieipont,  cet  excellent  critique, 
croit  que  les  églises  de  Provence  ont  été  fondées  dans  le  iil.* 
siècle,  que  S,  Maxîmîn  a  pu  vivre  à  la  fin  de  ce  siècle  ,  et  que 
S.  Trophime,  premier  évêque  d*  Arles ,  a  été  envoyé  en  France  avec 
S.  Denis  de  Paris,  S.  Paul  de  Narboiine,  vers  l'an  240.  Il  ap- 
puie cette  dernière  opinion  sur  l'autorité  de  Grégoire  de  Tours  : 
il  en  conclut  que  les  evêchés  de  Marseille  et  d'Aix  ont  dû  avoir 
été»  établis  par  S.  Trophime  ",  et  que  les  noms  de  Lattre  et  de 
'Af/i3limin  ont  pu  être  ceux  des  premiers  pastçurs  de  ces  églises , 
sans  qu'il  soit  prouvé  que  ces  saints  aient  été  les  disciples  de 
Jésus-Christ ,  ni^u^iîs  aiènf  été  envoyés  par  les  apôtres. 


/     y 


122  CHAPITRE   LX?CVIII. 

4 

tous  les  ouvrages  d'ornement  qu'on  y  remar(|ûe ,  sont 
relatifs  à  l'histoire  de  cette  sainte  :  tel?  sont  des  bas* 
reliefs  scdptés  en  bois ,  dont  la  'diaire  est  décorée , 
et  où  les  diflférens  traits  racontés  par  les  Evangé- 
listes  sur  la  Magdeleine  Pécheresse ,  et  sur  S,**  Marie- 
Magdeleine,  qui  avoît  reçu  ce  nom  parce  qu'elle 
étoit  née  dans  la  petite  ville  de  Magdala  y  sont  évi- 
demment confondus.  Au-dessus  de  la  diaire ,  oh  voit , 
sur  un  bas-relief «1  marbre,  la  sainte.,  qui,  selon  la 
légende,  est  transportée  par  les  anges -sur  une  mon- 
tagne voisine  de  la  Sainte-Baume ,  pour  être  plus 
près  du  séjour  des  bienheureux  :  un  de  ces  anges 
Joue  du  violon  ;  l'autre  tient  une  lyre  ^semblable  à 
celle  d'Apollon.  On  lit  au  bas  cette  inscription  (i)  : 

D.  O.  M. 

HEGNAîlTE  SERENT.«>  DD.  VTRIVSQ;  «ICïLl^  REGE  ET  COJVWTE- 

PROVINCI^  . 

CAROLO  ï  SACRATISSIMVM  D.  M.  MAGDAL*  CORt>VS  V**  ÏDVS 

DECEMBRIS  AN. 
1279  AB£XC£L"opRrNClPESALERMl  CAROLO  EIYSPRIMOGEIVITO 

DIVINO  SPI 

RANTE   PNEAVMATE  (sic)  EIQ;   SEMEL  ET  JTERVM  SACRATIS- 

SIMA  PŒNITENTE  '         ' 


'  (i)  a  Au  Dieu  très-bon,  très-grand.  Sous  fe  règne  du  sérénis- 
»  sime  seigneur  Charles  I.*^'^,  roi  des  Deux-Sjciles  et  comte  de 
»  Provence ,  le  V  des  ides  [  le  1 8  du  mois  ]  de  décembre  de  l'année 
»  1 279 ,  Charles  son  fils  aîné ,  excelientissime  prince  de  Salellic , 
»  averti  par  une  inspiration  céleste  et  par  deux  révélations  de 
»  S.**^  Marie-Magdeieine,  a  fait  dans  cette  basilique  l'invention  du 

corps  vénérabie  de  i:ctte  bienheureuse  pénitfente,  en  présence 


» 


CHAPiTRE    LXXVni.  II5 

REVELANTE  PR^SENTIBVS  NARBONENSI  ARCEAT  EBREDVN  ET 

AQVEN.  AR 

CHIEPISCOPIS   SPECTANTIBVS    MAGALiONET^fil    AGAtHENSf   Et 

GLANDEN 

SI   EPISCOPÏS  m    MAC   BASILICA   INVENTVM    FVÏT  CVlVS    Vt 

SANCTITATI  ET 

MAIESTATI    CONSVLERETVR  SVCCESSV  tEMPORÏS    NONK   Vï* 

DËLÎCET  MAH 

AN.   iiSl  SEX  PONTinCVM  ETDECÉM  ABBfAtVivi  CONlTOCAtA 

smODO  (sic) 

NEMPE  GRIMERII  AQVENSISARCHJ.  RAYMVNDl  APTENSIS  PETRI 

'  SIStARI 

CENSIS  RAYMVNBI  CARPENTORATENSIS  ÈERTRANDl    FOROIV- 

•LIÉNSI8  ET 

€Vlli£LMrvt»)CI£N5]$  ÊPISCOPO"^*  HYVONIS  CLVNIACENSIS , 

.     >        .       ASTORGII 

SANCTI     ^GIDIl     PONTII    AQV^E    BELL-«    BERTRANDI    SILV^ 

'    •  CANENSIS 

GVILIELMI   FRANCARVM-VALLIVM   ARNAVDI  VALUS-MAGN^ 
ALPHONSE 

*■— — — — — ■^— — — —  f  — —  — ^— ■— — i— 

>»  des  archevêques  de  Narbonpe ,  d'Ariés  >  d'Eijnbrun  t%  d'Aîx ,  et 
»  ^t%  ëvtqucs  de  Magueïone,  d*Agde  et  de  Glandève.  Afin  de 
»  prendre  une  détermrnation  convenafcle  à  la  sainteté  et  à  îa  ma- 
»  jest^  de  ces  précieuses  reliques,  il  a  été  convoqué  quelque  temps 
»  après ,  c*est-à-dFre,  je  jojur  des  nqnes  [  fc  7]  de  mai  1 28 1 ,  un  sy- 
»  nodc  composé  de  six  prélats  et  dé  dix  a&bés ,  savoir,  Grimérius  , 
»  archevêque  d'Aix  ;  Raymond ,  évêque  d'Apt;  Pierre,  évêque  de 
^  Sîsteron  ;  Raymond,  éV'èqU^e  deCâi'peiitl'as;Bdrtrattd,  évêque <le 
yi  Fréjus ,  et  Goifl^umfe,  'éi^êqùfe  dt  Veiïcc  ;  Yves ,  abbé  de  Ciuni  ; 
>»  Astorge,  abbé  dt;  Sàîfit Cîtfcs  ;  'Pbtts,  àbi'é  tfAîgûcbelfe;  Ber-- 
»  trand,  abbé  itîe  Saùvecane;  GuHfaume,  -abbé  de  Franquevaux  ; 
»  Arnaud  ,  abb^  de  Valmagne  ;  Alphonse,  abb^  de  Thoronet; 
»  GuHfaUttie ,  afciWé  it  Sehk^aè  j  Bcttiaifd ,  abbé  de  Sauve-royafe , 


ni  CHAPITRE    LXXVIII» 

THORONETI    GVII.IEL*''  SINAMQV^  f  ^'(^  J   BERNARDI    SILVuC 

.  REGALIS(^T   JOAIWIS 

VALLIS    REGALIS    ABBAT.""    EORVMDE    OMNIVM    MINISTERIO 

SOLEMNIS»**»  RIT V  ET 

POMPA  IN  CAPSA  ARGÊTEA  IN  MA4ORI  IPSIVS  ECOLES'*  ALT  A  R 

« 

FVIT  REPOSITVM 
EIVSQVE  CAPVT  IN  AVREA  THECA   yARIIS  GEMMIS    PRETIOî- 

SISQ  circvmorna' 

TA  LAPJDIBVS  NONIS  MAII  ANNI   1283  RÊCONDITVM  AD  PER- 

PETVA  REI  MEMORIÂ. 

Au-dessous  de  la  table  <^u|. contient  cette  inscrip- 
tion ,  il  y  a  des  ornemens  en  arabesques  ;  on  y  lit  : 

JOA.  ANT.  LOMBARD  FECIT   1684. 

En  face  ,  il  y  a  une  table  de .  marbre  noir  v^veç 
cette  autre  inscription  en  caractères  dorés  (  i  )  : 

NOVERINT    UNIVERSI   TA    PRAESËTES    QUÂ    FUTURI   CHRIST"'» 

GALLI^  REGE 

LUDOVICO   MAGNO   XIV  BELLI  PACISQUE  ARBITRO  ANUENTE 

ETSPECTÂTE  ! 

»  et  Jean»  abbé  de  Vaîréas  ;  par  le  ministère  3ésquef s  le  corps 
»  a  été  déposé  solennellement  et  avec  pompe  dans  une  châsse  d*ar- 
»  gent ,  sous  le  principal  autel  de  l'église  ,  et  le  chef  a  été  placé 
»  dans  une  boîte  d'or,  enrichie  de  perles  et  de  pierres  préctëuses , 
»  aux  nones  [le  7]  de  mai  128^,  afin  de 'perpétuer  le  souvenir  de 
»  cet  événement.  » 

(i  )  «  Qu'il  soit  notoire  à  toutes  personnes  présentes  et  à  venir, 
»  que  le  jour  djcs  nones  [  le  5  ]  février  i66o ,  avec  rapprobation 
»  de  Louis  XIV,  roi  de  France -très-chrétien»  J'arbitre  delà  guerre 
»  et  de  la  paix,  en  sa  présence  et  en  celle  de  la  sérénissime  reine- 
»  mère  M.'"^  Anne  d' Autriche, et  de  son  altesse  le -prince Philippe 
»  de  Bourbon,  frère  unique  du  roi,  suivis  d'un  nombreux  cortège 


; 


CMÀMTRE  Lxxvtn:'  ,  iaj 

UNA  CV  SEREN»^  REGINÀ   MATRE   D.  ANNA    A4JSTRIACA.  AC 

ECCELL"o  PRÎCIPE  PHI- 

LIPPO  BORBONIO  GERMANO    UNICO  ,  MAGNA  PRTcIPÛ  DUCÏ/ 

ATQUE  NOBILlU  COMI- 

TANTE  CATERVA  SACRAS  ILL"**  PCENltÊTlS  MAGDALENiE  RÉLi- 

QÛÏÀS  EXt/RNA 

PLÏÏBEA   IN  PORPHYRÈTlCÏ  PRET'IOSAM  ALIAMPÉR5UM«*PONT 

ÛRBANÏÏ  VIIISOL^- 

Nl    RITU    ROMyE   BENEDICTA  PER  EXCELL""   D.  TOMINICÛ  DE 

MARINIS  ARCft.  AVENIO^       • 

NENSEEX  ORDINE  PRiEDlcÀTORÛ  ASSUMPTÏÏ  AC  DICTEE  URN^E 

LARGITOREM 
MUKinçÛ   PRIORE  AC  CjÇTERIS  BELIQIOSIS  HUJUSCE   REGl^ 

POM?  ASSISTENTIB?        / 

I  PSI  US  REGIME  M^JESTATIS  JUSSU  ET  APPLAUSU  FUISSE  NONIS 

"    FEBR"  AN.  1660        ' 

SOLEMNITER  TRANSLATAS,  CUJUS  REI  GRATIA  PRyEFATI  CCEKO* 

BIT^  ALTA- 
RE  LATERITILJINMARMOREÏÏVARIIS  FIGURIS  DEAURATIS  SÛMIS 

EXPEN- 

SIS  MAGNAQUE  CURA  ET  ARTIFICIO  ELABORATIS  ORNATU  AC 

URNA  .  ' 


n  de  princes,  cîe  ducs  et  de  seigneurs,  fe  prieur  et  fes  autres  reli- 
»  gîeux  de  cette  maison  royale  jr  assistant.  S,  Exe.  M.*" Dominique 
»  deMarinis,  archevêque  d'Aviron,  éJu  dans  l'ordre  des  frères 
y*  Prêcheurs,  a,  par  ordre e^tavec  i'assenlitnent  desa majesté  royale, 
»  retiré  d'une  urrie  de  plomb  les  saintes  reliques  de  Ja  très-iliustre 
»  péni tente  Magdefeiiiè ,  et  en  a  fait  la  translation  solennelle  dans 
»  une  autre  urne^dc  poi^hyre  d'un  travail  précicuk,  don  de  sa 
»  propre  munificence,  et  qui  avoit  été  bénie  à- Rome,  avec  les 
r>  cérémonies  d'usage, par  le  souverain  pontife  Urbain  VIIL  A  cette 
»  occasion,  les  susdits  cénobites  ont  remplacé,  le  i4dcs  ides[ie  17] 
»  d'avril  168 3 y  lautel  dt  briques  par  un  autel  en  marbre,. orné 


\ 


? 


126  CHAPITRE   I,3f?CVIII. 

^OaPHYJlETrCA.  DECQHATV  IMMUTABUNT  UT  LAtTEîUTl A  B£C- 

qA'TRjlCÊ 
^UA^  AD  PkDBS  U^I  PLURJMI  VIDERANT  IN  PŒNITENTÊ  ET 

POR- 

P^YRETICA    Î^UTATÂ    UNIYER5I    VJDERÊT    AC     ADMIRARET 

i4*»1P,AP.  AN.  i6§3.  '       ' 

fyN^E|;R^a  i,aci^jv|as  pœnitenti>e  qui^quis  sis  pcenitêtis 

EXE MPLO  ET  TE  TOTU  * 

—  -     ■  ' .     .       *  •  i  _ 

SENTIES  IW.RÇNU  LMMUTATU  AX^fJfE  TR^NSLATU  L.CTUSQUE 

AC  mLA.AUDlES     . 


<•  *    i 


.  VADE  IN  PAGE. 


A  l'ex t rémtté^  de  la  petîté*  nef;  à  êatiche  diï  chœw , 
y  y  a  yn.amel  dohtïe  devant  est  décoré  d'une  pein- 
ture  sur  bois  qui  représeriit^  Jésus- Christ  mis  iau 
tombeau  et  entoure  <)e$  saii^tes  fei^imes  ;  a,u-de$spu$ 
on  lit  en  caractères  gothiqiies-: 


^     .i-î.    .  A  .  ...  ;.;l.    .;.,  ,\  ;  ,,^,,^;:  ■  •,.,  :.: 


»CHANBERLAèï  DU    ROY,  SENG' 
^,.3?J)E  $,  blACbAKÎ^A  FAIT  FERE  CEST 
VAUSTI.ER    1520  ET  29   DE  MAU 


?*  àt  figures  dotées  #  :ex!Çfii»çée&  à  graiiçïjs  ftak'et  avec  beaucoi^p  ide 
»  soin  et  cl*ait,.et  y  otiî, placé  l'urne  deporpl^yre ,  a^  que  tout 
»  fe  mon^  ccBiteihpIât  set»  adnpjirât  ceti^  que  i'on  avok  vue  péche- 
^resse  et  de  brique  aux  pté4sduSei^p;uqur,,tpaiiitçpaDtcbaxigéeleQ 
*  pénitcnie  et  en  perphyre^  Qui  que  vous  sp^ez, reversez  ilonç,,  à 
3»  sonexem^fc,  des  larmes  de  repentir  ;e^vou&;^p^  ti^ouvere^  en- 
»  ttèremem^ansformé  en  bie^  ,.et  plein  de  pie  vous  -vous  enten- 
»  drez  dice  comme  die ,  Mk^  CB  p^^i  ^  .> 


3  ~,  tt;  1. 1  ( 


CHAPITRE    LXXVIII.  îlj 

On  lit  encore»  près. de  la  porte  du  (;hceur ,  cett^ 
autre  inscription  :        ^ 

D.  O.  M. 

Aï^NO    REPARAT*E  SALVTW  MDC€tXXVI  XM[E  XÏX  S£PT£MBRI$ 

B£GIAM  HAN<^  BJ^LpCA^  ^ 

SVR  INVOCATIONE  S.  M.  MAGDALEN^ 
SOLEMNI  RITV  CONSÊCRÀVIT 
ILLVST  AC   REVER  IN  X»  PATER 

'■:  D.  ©. 

3ACOU  FRANC  THOMAS  D'ASTESAN  ORP^  PR^D. 
^ISCOPVS  NICIENSIS 
HVlVSTlEGirCO>JVENTVS  ALVMTiVS.      ' 

Le  maître  ai^tel  est  enfermé  dans  le  chœur ,  qui 
est  sép«ré  de  la  grande  nef  par  des  grilles  de  f^r  ^  et 
de^  nefs  collatérales  par .  des  murs  peu  élevés  qui 
soutiennent  les  stalles.  Le  sançti^re  est  entouré  de 
cinq  piliers  ;  il  est  éclairé  par  de^  fenêtres  à  deux 
étages ,  qui  forment  ce  que  l'on  nornme  le  rond- 
point  de  l'église.  Lçs  murailles  du  sanctuaire  sont 
revêtues  d'une  scaïole  qui  figure  des  compartimens 
de  marbre  de  différentes  couleurs  :  on  y  lit  lenpm 
de  celui  qui  a  fait  cet  ouvrage  (i).  Les  mur^^epnt 
ornés  de  tableaux  assez  bons ,  de  statues  de  bois  doré 
et  de  b^s-relieli.  La  balustrade  est  dç  marbre  fa^pé  l 
l'autel  est  de  inarbrç  ejîrîchi  de  figures  et  de  médaU 
Ions  de  broiize  j  le  tabernacle ,  qui  est  aussi  de  marbre, 
•    est  surmonté  d'une  \xri\p  de  pprphyre ,  bien  travaillée  ^ 


(i)  JoA.  AnIp.  LoMBÀtoy^/r,  1^84. 


t  » 


V 


Il8  CrtAPlTRE    LXXVIII. 

ceinte  de  deux  chaînés  de  bronze  doré,  portées  par 
deux  chiens  aussi  de  bronze  y  tenant  un  flambeau  : 
c'est  l'emblème  de  S.  Dominique. 

Dans  une  chapelle  qui  est  derrière  la  chaire ,  il  y 
a  une  mauvaise  copie  de  la  Magdeleme  de  Lebrun. 
.  Nous*  visitâmes  ensuite  la  célèbre  crypte  où  Ton 
montre  les  chefs  de  S.  Maxhnin  et  de  la  Magde- 
leine.  Le  premier  a  été  refait  depuis  la  révolution  : 
le  visage  de,  la  Mâgdeleine  est  recouvert  d'une  corne 
transparente  ;  c'est  une  tête  de  momie ,  qpi  a  encore 
les  dents  bien  conservées.  Le  sacristain  voulut  nous 
faire  observer  l'endroit  où ,  selon  la  légende ,  Jésus- 
Christ  a  touché  la  pécheresse  :  pour  aider  à  distinguer 

cette  place,  un  mauvais  tableau  suspendu  à  la  muraille 

-  '  -. 

représente  Jésus-Christ  lui  posant  la  main  sur  le 
front.  Quelques  fioles  placées  auprès  contiennent , 
dit-on ,  des  poftioris  de  la  peau  et  des  chèveui  de  la 
même  samte.  Il  y  à  aussi  une  boîte  remplie  d'anneaux 
de  verre ,  que  l'on  fait  toucher  à  la  châsse ,  et  que  l'on 
distribue  à  six  sous  pièce. 

'Cette  cry|)te  renfermé  des  monuméns  plus  inté- 
féssâns  des  premiers  temps  du  christianisme  dans  les 
Gaules  :  ce  sont  quatre  sarcophages.  Sur  celui  qu'on 
dit  avoir  renfermé  le  corps  de  S.  Maximin,  il  y  a 
une  crèche  :  sur  celui  qu'on  attribue  à  S.  Sidoine, 
an  voit  aussi  là  crèche,  la  multiplication  des  pains  , 
l'hémorroïsse ,  l'aveugle  né ,  le  reniement  de  S.  Pierre 
et  la  résurrection  de  Lazare  ;  la  tessère  ou  tablette 

est 


BBDBJîi*    hi»iM 


est  icratenue  par  de$  anges  :  sur  le  tombeau  cle  S.^  Mar^ 
Ceïle,  il  y  a  des  mdentures  en  spirale ^  et  deux  figures, 
|>ro)>abIement  Celles  de  S.  Pierre  et  de  S.  Paul  :  enfin 
celui  de  S.*""  Magdeleine  oflfre  la  représentation  du 
sacrifice  d'Abraham  et  celle  de  Daniel  dans  la  fosse 
aux  lions*  Ces  divers  su;ets  de  l'Ecriture  sont  à-peu-, 
près  figurés  comme  on  ies  voit  sur  d'autres  tom- 
beaux du  même  genre ,  publiés  par  Ariaghi ,  Bosid 
et  Bottarï* 

'  I>e  Saint-Maxitnin ,  nous  serions  allés  autrefois  à 
la  SainU-Baume  (  i  ) ,  qui  n'en  est  qu'à  deux  lieues  : 
mais  cette  grotte ,  consacrée  par  une  antique  piété  ^ 
où  presque  tous  les  souverains  de  la  Provence  ont 
fait  dès  péletrinages  >  que  la  mère  et  l'épouse  de  Fran- 
çois I/'>  Aime  d'Autriche  ,  et  lé  grand  Louis  XIV 
lui-même  y  ont  visitée  avec  tant  de  fetveur  >  a  été 
dévastée  pendant  la  révolution  ;  la  statue  colossale  de 

■y 


t^mmmtim^'mmt 


(i)On  a  composé  plusieurs  ouvriges  suV  ia  Sainte-Baume*  Lé 
p^ui  curieux  est  cdui  de  Jean-Louis  Barthelemi,  né  à  Valréas  en 
Provence  en  1616,  li  perdit  à  dix-huit  ans«  au  bout  de  quelques 
semaines  de  mariage»  une  épouse  qui  lui  étoît  chère:  alors  îf  quitta 
it  monde ,  et  se  renferma  chtl  ies  Carmes  de  Vairéas'i  où  ii  charma 
sa  douleur  en  composant  un  poëme  sur  la  sainte  qui  étoit  fa  pa-* 
tronnc  de  celle  qu*i!  pleuroit  :  ce  poëme  est  intitulé  la  Magdeleine 
au  désert  de  la  Sdinte-Èaume  en  Provence,  poëme  spirituel  et  chrétien, 
tn  donxf  Hvres;  Lyon,  1 66\.  Rien  de  plus •  singulier  que  I!amour 
mystique  de  ce  religieux.:  les  yeux  de  la  sainte  sont, selon  iiii , des 
thanielles fonduei ;  %t%  cheveux  blonds,  dont  elfe' essuie  les  pieds 
du  iSauvcur ,  sopt  des  torchons  dorés;  %^  larmes  /  de  Veau  de  vie  ; 
llparlcd*HcrcuIe,  de  V<iui,  &C;  _'  -^ 

Tomt  JIL  1 


t3o  CHAPiTitE   txxviin 

h  sainte  a  été  brisée^  et  l'on  n'y  trouve  plus  rien  <It 
ce  qui  pouYoh .  la  rendre  digne  de  curiosité.  La 
dévotion  >de.  quelques  fidèles  »  excitée  par  le  zèle  de 
M.  l'archevêque  d^Âix ,  a  tentéde  rétablir  cet  oratoire  ; 
mais  on  parviendra  diiïicileinent  h  lui  rendre  son 
ancienne  réputation*  Du  reste,  on  peut  encore  visiter 
ce  lieu^  pour  ia  vue  étendue  dont  on  y  jouit,  et  les 
beautés  pittoresques  qu'il  présente. 

Après  sivoîr  vu  tout  ce  queSaînt-Maxîmin  pouvoir 
nou^  offrir  de  plus  curieux,  nous  suivîmes  la  grande 
route  de  Draguignon.  Les  coraux  que  l'on  aperçoit 
recèlent  une  grande  quantité  de  marbres  colorés  :  les 
moines  de  Saint-Maxiinin  connoissoient  très-bien  ces  ' 
marbres  ;  Louis  XIV  les  trouva  si  beaux ,  qu'il  ordonna 
de  les  exploiter,  et  qu'on  en  transporta  un  grand 
nombre  de  blocs  pour  servir  à  l'embellissement  de 
Versailles  et  de  Marly.  On  en  a  aussi  fait  usage  pour 
la  décoration  du  château  et  des  jardins  de  Tourves. 

Le  comte  de  Valbelle  n'avoît  rien  épargné  pour 
embellir  ce  lieu.  Il  y  avoît  rassemblé  une  riche  biblio- 
Ihèque,  des  ubieaux,  des  statues;  la  beauté  des 
arbres ,  la  longueur  des  allées ,  la  grandeur  du  châ- 
teau ,  tout  donnoit  à  cette  demeure  l'apparence  d'une 
maison  royale  :  cependant  la  richesse ,  plutôt  que  lé  * 
goût,  pavoft  en  avoir  dirigé  Tordonnance  ;  ou  du 
moins  on  a  pris  la  bizarrerie  pour  Toriginalité* 

Le  château  est  situé  à  l'une  des  extrémités  d'une 
colline  très-alongée  ;  il  n$  p^^nte  plus  que  des 


HA 


CHAPITRE   LXXYltî.  tjt 

minés  :  la  façli<|]e:  seule  dû  côté  de  BégndUes  est  un 
j>eu  conservée  $  c'e$t  un  pbrtîqife  de'  dix  cdoones 
doriques  accouplée^ ,  en  pîerw?  firoide ,  dont  les  fûts 
sont  d'une  swte  pièce.  A  Tautre  extrémité  dç  la  coi- 
lîne,  il  y  a  un^  pyramide  qui  îmîtë  grossièrement 
celle  de  Cestius  à  Rome ,  et  dans  Ilntériçur  de  ia- 
quelle  on  a  pratiqué  une  chambre.  Au  bas  de  cette' 
même  coIUne ,  le  ^^mte  de . Vafcelle  ivoît  établi  une- 
vacherie,  et^y  avoii;  adossé. un  ri^^mam  gothique, 
qui  avoit  seryî  autr^foi^  à  la  paroikse  de  Tourves  , 
encore  existante  fpt.  LI,jig,^).  On  appelle  ^/^^ 
rium  un  petit. éc^içe  en  forme  de  tour,  et  détadié  du 
maître  autel,  darl» lequel  on  gardoit  le S.*-Sacrement; 
II  a  feît  mettre  sur  Je  mur  l'inscriptbn  suivante  : 

A  grandeur  trop  souvent  succède  ignominie  : 
De  temple  quç  f  étois ,  égtise  )t  devins  ; 
J'en  conçus  tr<^  d'orgueil ,  on  m'a  fait  écurie. 
*       Passant ,  q6i  vois  i'afTrônt  dont  ma  g!oife  est  suivie/ 
Apprends] saiù  murmurer  à  céder  aux  destins. 

^  Les  eaux  sourdent  de  toutes  parts  dans  les  envi- 
rons de  Tourves;Ies  foriiaînes  y  paraissent  inépiiî^' 
sables  :  aussi  des  arrosemens  faciles  et  muIôpKés  y' 
rendent  ia  plaine  fertile.  Mais  ces  eaux  deviennent 
stagnantes  dans  quelques  ba^fonds  ;  elfes  y  forment 
de  petits  lacs ,  dont  les  émanations ,  à  certaines  épo* 
ques  de  Tannée ,  produisent  la  carie  deà  blés  et  sont 
très-nuisibles  à  la  santé  des  hgbitans;  Les  plus  grands 
iaj:s  de  Tourves  sont  du  côté,  de  Brignoiles  :  on  croit 
que  les  cavités  dans  lesquelles  leurs  eaux  se  sont 

I  a 


132  CHAPITRE    tXXVIlI. 

rassemblées,  ont  été  produites  par  raffaîs^ement  dct 
lieux  où  brûloieht  des  volcans.  Ces  eaux  sont  salées. 
On  trouve,  dans  quelques  endroits,  des  feves  com- 
pactes qui  renferment  du  quartz  peu  altéré. 

On  cultive  f olivier  sur  les  coteattîc;  mais  il  ny 
parvient  pas  à  une  hauteur  considérable.'  Les  prin- 
cipales productions  de  Tourves  sont  lès  Blés  ,  les 
foins  ,  les  haricots.  Ia  Carami  ^  le  Càtttànitz^ 
versent  soA  territoire.  -On  fabrique  à  Tourves  des 
draps  grossiers,  du  papier  et  du  sàvori;  il  y  a  aussi 
une  chapellerie*  *  *\     ''•    '  '* 

Nous  allâmes  coucher  à  Brignolfeà.  Cette  ville 
n'offre  rien  d'important  :  elle  jouissôil  autrefois  d'une 
grande  réputation  pour  sa  salubrité;  elle  est  appelée 
dans  des  tîties  Ville  des  enfans  (  i  ) ,  parce  que  les 
comtesses  de  Proverice  ^'y  faisoient  porter  à  l'époque 
de  leurs  couches.  S.  Louis ,  évèque  de  ;Toulouse,  fils 
de  Charles  II ,  dit  le.  Boit£ux,  y  est  né-  et  y  est  mort. 
Elle  a  été  ravagée,  pendant  les  guerres  civiles.  Le 
duc  d'Épernon  y  pensa  périr  par  i*efFet  d'une,  machine 
infçrnale.  1    .  ^    ,. 

J^jgnolles  est  l^âtîe*  dans  le ,  pays  calcaire  ,  sur 
If  penchant  «J'^nç' colline.;  Les  belles  fontaines  qui 
en  arrosent  les  rues,  ne  les  rendent  pas  plus  propres, 
à  cause  du  fu^nier  que  l'on  y  fait  pourrir. 

Les  terres ;Sont^  en  général,  imprégnées  de  sel 


(1  )  Vilia  puerorum. 


CHAPITRE    LXXVni.  133 

marin  \  ot\  f\e  doit  pas  leur  donnet  un  labour  pro- 
fond. Les  oliviiers  ont  prescpie  tous  pén.  On  fabrique, 
dans  la  ville,  du  savon,  des  draps ,  de  la  colle-forte, 
de  la  cire  ;  il  y  a  des  tanneries ,  des  teinturerie^  ^  des 
poteries ,  d^  moulins  à  huile  et  à  foulon.  I^  blé  et 
le  vin  sont  les  productions  principales  de  son  territoire. 
II  Êiut  mettre  aussi  les  prunes  parmi  ses  objets  de 
commerce  les  plus  intéressans.  Ces  prunes  appar- 
tiennent à  la  variété  appelée  perdrigon.  On  plan^ 
les  pruniers  dans  des  enclos ,  où  ils  sont  abrités  : 
leiu's  fruits  acquièrent  ainsi  plus  de  consistance  et 
de  beauté.  Quand  ces  fruits  sont  bien  mûrs,  on  les 
fait  tomber  en  secouant  Tarbre  légèrement  ;   des 
femmes  les  ramassent,  en  enlèvent  la  peau ,  et  les 
embrochent  avec  des  brins  d'osier  écorcés  ,  ou  les 
entrelacent  dans  de  la  paille  de  seigle,  pour  les  sus* 
pendre  à  des  perches  et  les  faire  sécher  au  soleil. 
Quand  ils  sont  parvenus  à  un  degré  suffisant  de  sic- 
cité,  on. en  fait  sortir  le  noyau  en  les  pressant  avec 
le  doigt.  La  priuie,  aplatie  et  arrondie  avec  précau- 
tion ,  est  ensuite  placée  sur  des  claies  garnies  de 
papier  ,  jusqu'à  ce  qu'elle  sôit  entièrement  sèche  : 
jamais  on  ne  l'expose  lorsque  le  soleil  est  couché  ou 
par  un  temps  couvert  ;  elle  perdroit  la  fraîcheur  et  la 
transparence  qui  en  font  le  principal  mérite. 

La  ville  qui  a  donné  son  nom  aux  prunes  de  Bri- 
gnolles ,  n'est  cependant  pas  la  seule  où  on  les  pré- 
pare;  car  la  plus  grande  partie  vient  du  département 


\ 


134  CHAPn-RE     tXÎVIII, 

4es  BasscsrAIpes  :  mais  c'est  celle  qui  en  fart  le  prin- 
,dpal  commerce.  On  y  met  une  enveloppe  marquée 
,au  chiffre  de  {a  vUIe. 

1!  seroit  intéressant  d'introduire  aussi  dans  ces 
contrées  le^x  damas  violet  que  Ton  Cultive  à  Tours: 
ce  seroif  ime  nouvelle  branche  dindes  trie* 

Les  montagnes  qui  Cornent  l'horizon  de  Bri- 
i^nolles,  forment  un  bassin  de  deux.  lieues  de  long 
sur  autant  de  large» 

Le  célèbre  ligueur  de  Vins,  dont  faî  fait  figurer 
ie  tombeiau  { i  ) ,  étoit  né  à  BrignoIIes.  On  y  montré 
encore  l'emplacement  de  son  jardin ,  qu'on  appelle 
h  petit  Paradis.  Cette  ville  a  aussi  vu  naître  Laurent 
Fauchier,  habile  peintre  de  portraits  ;  Joseph  de 
Paul,  très-versé  dans  l'histoire  ecclésiastique;  l'abbé 
Granet,  judicieux  critique;  Louis  Maille,  professeur 
et  théologien  célèbre,  et  son  neveu,  Joseph -Au- 
gustin Maille ,  antagoniste  du  P.  Berruyer. 

Nous  reprîmes  le  lendemain  la  route  d'Aix,  où 
nous  rentrâmes  sadsfaits  de  notre  excursion* 

(i)  Voj^xxaat  II,  page  397;  pi,  XLVÏ,  n.^  u 


«Wki 


i^kMi 


»3J 


'■i**X^-^ 


L^ 


CHAPITRE  LXXIX. 


I)  i  p  A  RT  d'Aix.-- M  A  RSE I LLC*--- Fondation.--.Hî»toîre-^ 
—  Musée,  —  Monumens  grecs.  —  Gnomon.  —  Autel; 
triangulaire  avec  une  inscription.  —  Autel  rond  avec 
une  inscription.  —  Tt)mbeau  sur  lequel  on  a  représenté 
les  derniers  adieux  d'un  guerrier.  —  Tombeau  de  deux 
époux,  avec  une  inscription. — Tombeau  de  Giauciat^ 
avec  une  inscription.  «-^  Monumens  romains, — Sarco- 
phage de  Flavius  Memoriusj — Combat  de  centaures  et 
de  lions.— Sarcophage  d'un  enfent ,  représentant  les  gc« 
nies  de  Vulcain  qui  forgent  les  armes  des  fondateurs- 
de  Rome.  —  Sarcophage  de  Julia  Quintina  ;  triomphe 
deBacchuset  tfAriadne.-*- Sarcophage  de  T»  Anno- 
nîus  :  images  du  Sommeil  et  de  la  Mort.  *^  Siège  de 
marbre.  —  Masque  tragique.  —  Colonnes.  -^  Chapi« 
teaux.  —  ïsis  de  basalte. 

Wous  partîmes  le  soir  pour  revcnr  enfin  Matseille^ 
où  nous  n'avions  feh  que  passer ,  et  nous  eûmes  h; 
plaisir  de  jouir  du  spectapcie  magnifique  qu'offie  ia 
Vis  ta  au  coucher  du  soleil  (i)* 

Narbonne^,  Autun,  Lyon  et  Marseille^  sont  les 
villes  les  plus  célèbres  de  l'ancienne  Gaule  ;  mab  cette 
dernière  se  dbtingue  entre  les  autres  par  une  ori- 
gine encore  plus  reculé^  et  une  civilisation  plus  an* 
cienne.  Tout  ie  monde  sait  qu'dle  a  été  fondée  par 
une  colonie  grecque  ;  mais  on  n^est  pas  d'accord  sur 


(i)  iW/f^4loiiitII»page5^8« 

J  4 


1^6  CHAPITRE    LXXIX. 

les  causes  qui  portèrent  à  cette  émigration  le  peuple 
qpî  s'y  établit. 

Arîstote  avoît  composé  un  Traité  de  la  république 
des  Marseillors  ;  il  ne  nous  en  reste  qu'un  fragment 
qui  nouis  a  été  conservé  par  Athénée  (  i  ).  Trpgue 
Pompée  avoit  donné  d'assez  grands  détails  sur  leur 
histoire ,  ainsi  qu'on  peut  en  juger  par  ce  que  Justin , 
son  abréviateur  ,  nous  en  raconte.  Son  récit  est 
à-peu*près  conforme  à  celui  d'Aristote  ^  et  il  prouve 
que  la  tradition  relative  à  la  fondation  fabuleuse  de 
Marseille  subsistoît  depuis  long-temps ,  et  s^étoit 
conservée  ,  mais  avec  quejque  altération  dans  les 
noms  des  personnages.  Nous  devons  aussi  k  Justin 
de  nous  avoir  fait  connoîtrè  l'époque  de  cette  fon- 
dation {i). 

Dans  la  quatorzième  année  du  règne  de  Tarquin 
l'Ancien  {3) ,  quelques  Phocéens  d'Asie  (4)  >  qui  fàî- 
soient  le  métier  de  marchands  ou  de  pirates,  et  peut- 


««*■ 


(i)  Deipnosoph,^W,  3^.  - 

(1)  Justin  ,  Hist  XUII,  3. 

{3)  Environ  600  ans  avant  J.  C. 

(4)  On  a  dit  que  ces  Phoeéens  fuyoicnt  la  cruauté  qu*Harpage 
exerça  au  nom  de  Cyrus.  Hérodote,  qui  a  raconté  l'histoire  de* 
^conquêtes  des  Perses  cn^onie,  ne  dit  rien  de  la  fondatioil  de 
'Marseille ,  et  elié  doit  être  bien  plus  ancienne  que  le  règne  de 
Cyrus  :  mais  il  paroît  qu'il  y  a  eu  plusieurs  émigrations  des  Pho« 
ccens  à  1^2^%t\\\€}lj>^^cWLK  ^  Essai. de  chronologie ,  dans  sa  Traâuc* 
tion  ^HÉRODOTE,  tome  VII ,  page  437.  Euscbe,  et  plusieurs 
auteurs  latins  >  confondent  mal-*-propos  les  Phocéiwis  d'Ionie^^ 
avec  les  habitans  de  k  Phocide  dans  la  Grèce  propre. 


mmà 


\ 


/      CHAPITRE    LXXIX.  '137 

être  l'un  et  I  autre  selon  Toccasion,  entrèrent  tians  la 
mer  des  Gaules  et  s'établirent  sur  la  côte.  II  leur 
fiillut  souvent  combattre  contre  les  Liguriens  et  divers 
peuples  de  ces  parages.  La  petite  quantité  et  le  peu 
de  fertilité  des^uitres  terres  qu'ils  possédoient 9. furent 
cause  qu'ils  tournèrent  toute  leur  attention  vers  la 
mer:  ils  se  livrèrent  principalement  à  la  pèche  et  au 
,  commerce ,  et  même  à  la  piraterie.  Ayant  pénétré 
jusqu'à  l'extrémité  du  golfe  des  Gaules  (i) ,  à  l'em- 
bouchure du  Rhône ,  ils  furent  charmés  de  la  beauté 
du  pays  ^  et ,  de  retour  auprès  de  leurs  compa^triotes  ^ 
ils  excitèrent  la  curiosité  de  plusieurs  d'entre  eux  par 
le  récit  de  ce  qu'ils  avoîent  vu.  Cinq  ans  après  (2.) , 
,ils  formèrent  une  nouvelle  expédition,  dont  Simoset 
Protis  (3)  étoient  les  chefs.  Ils  se  rendirent  auprès  de 
rNannus,  roi  des  Ségobrigiens,  pour  obtenir  de  lui  la 
permission  de  bâtir  une  ville  sur  les  confins  de  ses 
Etats.  Ce  prince  prépàroit  ce  four-là  les  noces  de  sa 
fille  f  qu'il  devoit  donner  ,  selon  l'usage  de  sa  nation , 
à  celui  qu'elle  choisiroit  pendant  le  festin.  Les  Grecs 
fwent  invités  à  cette  fête.  Nannus  ayant  dit  à  sa  fille 
de  présenter  de  l'eau  à  celui  de  l'assemblée  qu'elle 
préféroit  pour  époux  ,  elle  fixa  son  choix  sur  Protîs , 

(1)  SifiMS  Gallicuf ,  ie  goifc  de  Lyon. 

(a)  LaîICHBR,  Trad.À*HÉnoDOTE ,  tomel.^'  ,  page  ^6. 

(3)  Aristote  ,  dans  !e  passage  cité,  nomme  ce  second  chef 
Euxène,  PLUTARQUÈ,  in  SohMe,^,  79,  ne  nomme  que  Prçtis,  qu*if 
appcjie  Profoj,  ^ 


13^  CHAPITHE    LXXIX. 

qui  devint  ainsi  le  gendre  du  roi  ^  et  fonda  Mars^IIe» 
Aristotedit  quecetiejeune  fille  se  nommoii  Petta  ^  et 
qu'elle  changea  son  nom  en  cdmdLÀmtùxene  (  i  ),  peut- 
èlre  pour  indiquer  J^  bon  accueil  qu'elle  avoit  ait  k 
ces  étrangers*  Ils  eurent  un  fils  ncnnmé  Protis ,  dont 
les  descendans  furent  appelés  PrvtiaJes  (2)* 

Selon  Timée^  le  nom  de  Afâfsûlia  (3) ,  dont  on 
a  fait  celui  de  Marseille  ^  fut  impoi^é  à  cette  ville  , 
^rce  que  le  pilote  ayant  jeté  un  câble  \  un  pécheur 
qui  étoit  sur  la  côtç ,  lui  cria  Masai  alieu  (4)  ;  c'est- 
Jl-dii^  y  Attacht ,  pécheur.  Daléchamps  (  5  )  dérivoit  avec 
plus  de  raison  cette  étymologie  des  Salyes ,  qui  habi- 
toient  cette  contrée.  M.  de  Saint-Simon  Sandricourt 
avoit  renouvelé  cette  explication  ,  en  ajoutant  que  ^ 
dans  la  langue  celtique  y  mas  signifie  habitation  :  il 
reste  à  savoir  si  cette  signification  du  mot  mas  est 
démontrée  (6). 

»■■  ■       III  mil  tmi  ,,    ■■      Il ■       ^«1— — ^— — id^. 

(1)  Ce  mot  signifie  en  ^/rec  èote  txcellent. 

(1)  Outre  les  divers  historiens  de  la  Provence,  et  RuFFi  dans 
f  Histoire  de  Marseille ,  on  peut  consulter  Pétri  HElNDRiCH  Massiiia^ 
sive  de  antîqnd  Afassiliensium  repuhlica,  Argentorati ,  i(ff2,  tS^S  ^ 
în-i  6  ;  Gkmvius,  TkesoMr,  antiquité  Grœc,  ;  Jean-Pierre  DEsOuRfr 
DE  MandajoB^,  Dissertation  sur  la  fondation  de  Marseille,  la  se- 
conde de  (pelles  qui  sont  à  ia  fin  de  son  Histoire  critique  de  la  Gatiit 
itarbonnoiie ,  Paris ,  1733  ;  m-îi ,  page  jod  ;  et  fWwrCABT ,  Diàr 
sertation  sut  la  fondation  de  Marseille  ,  Paris  >  >744»  ûi'i^« 

(3)  Stephan.  Byiantt,  au«iot  HûummJl 

[4)HSoizi,  Jb^tiif 
(5) /jfP£/i\r.  111^,4. 

{6)  Le  même«  dans  les  Lettres  de  M.  GuTS  stir  la  Grkt,,  l , 


I 


r>  "..  -TV  -    —  ■    *■  —1  .        ■!    ■       n  r 


Les  Marseiiloîs ,  san^  cesse  occupés  à  repousser  les 
attaques  des  nations  voisines ,  et  principalement  celles 
des  Liguriens,  eurent  besoin  de  ta  bravoure  qui  Ie$ 
camctérisoit  pour  se  maintenir  dans  leur  nouvel  éta-*- 
biissement  ;  mais  toujours  ils  se  montrèrent  amh 
fidèles  des  Romains.  Us  donnèrent  des  marques  pu- 
bliques  de  deuil  lorsque  Rome  fut  prise  par. les  Gau- 
lois ,  et  contribu^ent  à  compléter  le  poids  de  Tor  et 
de  l'argent  que  ceux-ci  exîgeoient  poiu*  sa  délivrance  : 
en  témoignage  de  gratitude ,  les  Romains  leur  accor- 
dèrent l'exemption  de  toutes  les  charges  qui  étoîent 
imposées  aux  autres  villes  alliées ,  une  place  de  dis- 
tinction aux  jeux  du  cirque  parmi  les  sénateurs  ,  et 
conclurent  avec  eux  im  traité  qui  leur  étoit  hono* 
rable  { i).  Ceux-ci >  de  leur  côté  ,  furent  d'un  grand 
secours  aux  Romains  dnns  la  guerre  contre  Annibal  : 
ils  fournirent  des  galères  à  Scîpion  (2).  Ce  général 
fit  précéder  sa  flotte  de  deux  vaisseaux  marseillois, 
qui  fàisoient  l'office  d'éclaireurs,  et  qui  s'exposoient 
courageusement  à  tous  les  dangers  (3).  Nous  avons 
vu  (4)  combien  les  MarseîUois  aidèrent  Marins  à 


41 8  >  apporte  pour  preuve  qu'à  Arles  mas  signifie  haiitatitm  t 
mais  mas  n*est-il  pas  une  abréviation  provençale  du  rnoxmaisû», 
qui  dérive  lui-même  du  mot  latin  mattsiê» 

(i)  Justin,  XLIII,  5. 

(i)TïT.Liv.XXVI.  19. 

(3)  POLYB.UI,  95. 

(4)  JW/vi,  page  109,    , 


m.*^ 


(  ' 


i4q  chapitre  lxxix. 

triompher  des  Ambronsl  Ces  services  s^nalés  ïeur 
méritèrent  de  plus  en  plus  i'amitié  du  grand  peuple 
destiné  à  devenir  le  maître  du  monde.  Leur  recom* 
mandation  étoit  puissante  auprès  de  lui  :  Us  ob* 
tinrent  la  conservation  de  Phoçée ,  dont  le  sénat 
avoit  ordonné  la  ruine,  parce  que  ses  habitans 
avoient  porté  les  armes  contre  les  Romains  (i). 

Pompée  et  César  avoient  étendu  le  territoire  de 
Marseille  et  augmenté  sa  puissance.  Lorsque  la 
guerre  éclata  entre  leiirs  deux  bienfaiteurs  ,  ^en  vain 
les  Marseiliois  voulurent  conserver  la  neutralité  ;  ^i 
vain  ils  protestèrent  qu'il  étoit  de  leur  devoir  de  ne 
point  servir  l'un  des  deux  contre  l'autre  :  César,  à  qui 
il  importoit  d'occuper  leur  ville ,  la  fit  attaquer  par 
terre  et  par  mer  ;  il  traita  les  habitans  en  vainqueur , 
leur  enleva  leurs  armes ,  leurs  vaisseaux  et  tput  leur 
argent  y  et  ne  leiu:  laissa  que  le  vain  nom.d'une  chi- 
mérique liberté  {2).  On  vit  doi^  porter  en  triomphe 
la  représentation  de  cette  ville  célèbre,  sans  laquelle 
les  Romains  n'avoient  presque  jamais  triomphé  des 
nations  transalpines  (3). 

Dès  ce  moment ,  Marseille  fit  partie  de  l'empire 
Romain ,  en  conservant  cependant  le  droit  de  se 

(i)  Justin.  XXXVII ^  i. 

(a)  Dion  Cassius  ,  XLI,  19  et  2$.  Voyti  sur  ce  siège  ïe$ 
M/moires  militaires  de  Ch.  GuisCHARDT ,  ia  Haye^  »7Ji8#  in-4,^, 
|ome  II ,  pages  37  48. 

(5)  QCER.  1^  (?jf c.  II,  8. 


\ 


i^WHM 


\ 


CHAPIT>IE    LXXIX.  l4r 

gouverner  selon  ses  propres  lois  :  elle  garda  éga- 
lement, sa  suprématie  sur  quelques-*unes  de  ses  colo- 
nies, Athenopblis  Olim  (i)  et  Nice.     .  < 

Constantin  poursuivit  son  beau-père  Maxîmîen 
dans  les  murs  de  cette  ville,  fy  surprît  au  moment^ 
où  il  vouloît  le  trahir,  et  le  fit  poignarder.  Dans  les 
temps  suivans,  cette  ville  devint,  comme  le:re$te  des* 
Gaules ,  la  proie  des  barbares  t  elle  se  soumit  à  là' 
domination  des  Francs  sous  la  seconde  race.  Lorsque^ 
la  Provence  eut  des  comtes  héréditaires;  Marseille 
eut  ses  vicomtes  particuliers ,  qui  la  possédèrent  de- 
puis ^62  jusqu*au  milieu  du  xiil/ sièclel^  y 

Cettje  ville  ,  depuis  la  réunioii  de  là  Provence 
à  la  couronne  ,  a  été  regardée  comme  une  des  plus 
importantes  de  la  France.  Les. troupes  de  Charles- 
Quint,  commandées. par  le  connétable  de  Bourbon^ 
l'assiégèrent  inutilement.  Après  avoir  suivi  le  parti 
de  Ja  ligue,  elle  eutli  jH'étentionde  former  une  Vépu- 
blique  particulîère{;i) .  Enfin  elle  se  soumit  à  Henri  IV, 
qui  avoua  que  ce  n'étoit, que  de  ce  moment  qu'il 
se  regardoît  comme  Eoi  de  France  (3).  L'étendtie  et 
l'activité  de  son  commerce  l'ont  fait  parvenir  au  plus . 
haut  point  de  prospérité,^  ^  ,  ^ 


mm 


(i)  Suprà,  tomé  Iirpage  452. 

(1)  /«^4,chap.LXXXï.;' 
*(3)  V Histoire  de  'ÂJarseîlUlvL  pîus  complète  est  ccife  ^Antoine 
Dt  RUFFI ,  Mafscîiîe  ,  iiSçé  ,  a.  voï.  in-foT.  Elle  tii  enrichie  ic  * 
figures  de  moimoies ,  xle  sceaux  et  de  moimmexu. 


/ 


L^ 


V 


l4^  CHAPÎTItË   LXXIX. 

Notre  impatience  de  voir  les  cuifiosités  de  cette  ; 
vîHe  célèbrô  étoit  exttèine.  Dès  le  matin  ,  nous» 
fûmes  joints  par.  nos  amîs,  M.  Bràck,  et  M.  à&' 
Saiftt  -  Vîncens  ,  qtiî  étoh  venu  d'Aix  pour  nous 
^compagner:  nous  allâmes  au  musée» 
:  Ce  local  est  Taiiicien'  couvent  des  Bernanfines  :  le* 
<:orps  primiîpal  du  bâtimeht^  avec  de  bettes  courj^  et* 
dé  vastes  jardins,  est  affecté  au  lycée;  le  reste  est 
cx>nsacré  au  musée ,  à  l'école  de  dessin^  à  !a  biblio-^ 
thèque  pubjiquie,  au  cabinet  d'histoire  naturelle,^ et' 
aux  assemblées  de  Pà^ adémie  et  d'autres  sociétés  (|Ui 
s'occupent  de:  sciences  et  d'oeuvres  de  bienfaisance. 
G'^st  au3C  soins  de  M.  le  conseiller  d'état  Thibaadeau, 
préfet  de  ce  département ,  que  Marseille  doit  ces 
établissemens.  Dans  la  pièce  qui  précède  ie  musée, 
£{  qui  en  est  comme  le  vestibule ,  on  a  réuni  des 
sarcophages ,  dès  inscriptions,  et  dîifièrerts  marbres, 
dont  j'ai  fait  dessiner  et  graver  lès  principaux  (i). 

Je  commencerai  cette  d^cription  par  les  monu- 
mens  grecs;  On   croiroit ,  d'après?  l'antiquité  ,  ia  ' 
ridhesse  et  l'importance  de  cette  colonie  phocéenne , 


(i)  Pendant  le  temps  de  fa  terreur ,  fes  monurtnêns  àvoîent  été  " 
dispersés ,  et  la  plupart  brisés  ;  quelques-uns  itoient  entassés  dans-  « 
ia  cour  du  lycée  :  M.  Thibaudeau  a  fait  rechercher  et  rassembler 
da^s  cette  salie  tous  ceux  qui  n*étoient  pas  détruits.  M.  FauRJS- 
Saint-Vingens  en  a  rédigé  un  catjalogue  squs  ce  titre  :  Noiia 
des  monumens  antiques  consery/s  4ans  U  fiîu^^um  df  flUrifeilk,  M9X' 
seillc,  i8o5,in-8.^,.3i8  yages,  -      ^.  .    , 


/ 


\ 


CHAPITRE    LXXIX»  l4j 

tfevoîr  en  Rencontrer  un  plus  ^rand  nombre  ;  cq>en-^ 
dant ,  quoiqu'on  ait  trouvé ,  en  difFérens  ^emps  , 
beaucoup  de  monumens  dans  le  territoire  et  dans  le 
^ort  de  Marseille ,  la  plupart  des  marbres  gxec^. 
qui  décoretit  le  musée  ont  été  apportés  de  la  Grèce  / 
par  des  curieux;  ils  sont  étrangers  à  cette  ville/ 
et  ne  peuvent  servir  à  éclaircii^  son  histoire.  Com- 
mençons notre  examen. 

Nous  vîmes  d'abord  un  çadrm  solaire  de  marl:fre 
(pi»  XXVI t  n**  j  et  6 ).  Les  Grecs  donnoient  le; 
Qom  d! hetiotropium  à  ces  instrumens ,  destinés  à  mar- 
quer les  divisions  du  jour  par  l'ombre  projetée  d'un 
style  ou  gnomoi^  sur  une  surface  partagée  en  plusieurs^ 
sections.  Je  ne  ^reproduirai  pas  tout  ce  qui  a  été 
écrit  sur  l'antiquité  des  cadrans  solaires  (  i }  ;  je  me 
bornerai  à  décrire  celui-ci.  Ce&t ,  coxnmfi  la  plupart 
<}es  monumens  de  ce  genre ,  une  t^ble  carrée  >  sup% 
portée  perpendiculairement  par  (fes  griffes  de  lioa 
et  par  une.  dalle  ornée  d'une  rosace  :  on  a  tracé 
sur  cette  furàjce  «^  demi-cercle ,  )qui  est  jpartagé  en, 
douze  divisions i  »u  milienie^t  im  t«ou  carré  (n!  y)^ 
où  le  styj^  éloil  fixé.  II  reste  encore  d'autres  gnorr 
mons  du  n^me  genre ,  ^  peuvent  être  comparés 


mmtmmmÊmÊ0ÊÊm 


r 

(i)  J*ai  réuni  dans  le  Dictionnaire  des  heaux-arts ,  an^  niots 

Ô N oAf ON ,  Cadran  ,  Heuotropivm  et  Horlocë,  tdus 

les  détails  que  j*ai  pu  trouver  sur  ces  irfonamcns  :  j'y  hidi<(uc 
eeux  qui  existent  aujourd'hui  «  et  les  ôuvragel  dans  iesqueis  ils  ont 
i»é  décrits; 


t44  CHAPITRE    hXXlX/ 

avec  céluî-cî  ;  H  y  en  a  un  à  Athènes  sur  h  ntonu-* 
ment  érigé  à  Thrasillus  (  i  ). 

Nous  vîmes  ensuite  un  pttit  autei  triangulaire  ^ 
qui  paroît  avoir  été  la  base  d'uii  QBXiàé\â^xè^( planche 
XX\XVI,  n'  I  ).  Plusieurs  monuméris  prouvent  que 
l'on  plâçoit  le  feu  sur  cette  base  pour  y  faire  des  iîba- 
tions  ou  brûler  dés  parfums.  Chaqueface  est  décorée , 
selon  l'usage  ,  d'une  figure  imitée  'd'après-  le  plus 
ancien  style  grec  :  sur  I\ine  fn/^J,^st  Apollon  qui 
tient  sa  lyre  ;  sur  l'autre  ^w/  j  2lJ  ,  THane  nrmée  de. 
son  arc;  sur  la  trobîème  (n/  j  h)y  1» reine  des  dieux,* 
Tauguste  Junon,  qui  tient  la  haste  pure  ou  s^hs  fer. 
Sur  fe  bord  inférieur  d'Une  des  fecei  du  trépied 

^    SriSXMINoiSÊTAtOPÔY 

^    ,      JAPÀniISIANOrBÏETXHN  (t)  ;  '    ' 

■•  ■  *     - 

c^èst-ànflirè  V  Sositnihûs  %  fis  d^Evagprûs ,  a  accompli 
l-r  ww  (3)  à  Seràpis,  à  isis  et  à  ÀHuhls  f4);^': 

-Eà  iftahîèré  dont  cettè  irïscriptibrt  ésr  écrite  ,  les 
ricMsT  des  divinités  égyptiennes  âU^ueiies  elle  ■  esf 
consaèréô,  tout  doit fâîre^ rapporter  te  monument  à» 
une  époque  postérieure  au  ïègne  d^Hadrten. 

Nous  Tefftiarquâmes  encpre  un  beatt  tas  *-  relief , 

(i)  y  oyez  Galerie  p,ntique ,  pï.  XLVI  et  XLIX.  . 

-  (5)  ^^X?^  i^npaxrtv^vofum  solplt,  ... 

'  {A)'0^  trouve  spjivent  aussi,  dans  d'autres  inscriptions,  Isi  ,; 

Serapi,  AhuM,  pour  hidi ,  Serapidi,  AnubiM.  MuRAT.  LXXIII^ 

j,^jLXXIV,5. 

malheureusement 


CttAPirftE    LXXIX.  t4j 

ftîalheutîetisement  fragmenté  (  pL  LVI ,  n.'  ij;'û 
représente  trois  personnages  ;  un  hommb  debout 
devant  une  femme  assise  ,  à  laqueHe  il  donné  ia 
main  ;  dans  le  fond ,  une  troisième  figure  qui  tient 
dans  ses  bras  un  enfimt.  On  peut  ne  voir  ici  qu'un 
de  ces  adieux  si  souvent  figurés  sur  les  tombeaux  ' 
des  anciens;  on  trouve  un  grand  noînbre  dé  scûlp- 
tui-es  semblables  dans  le  Péloponnèse  (  i  )  :  niais 
quelques  détails  de  costume  qui  sul^sislent  encore , 
serviront  à  y  faire  distinguer  peut-être  une  action 
particulière.  La  partie  supérieure  manqi\ant  abso- 
lument ,  on  ne  peut  connoître  la  coifTarè  du  hérosi 
On  aperçoit  l'extrémité  recourbée  d*un  horniet: pointu 
dont  la  tête  de  lenfant  est  couverte  :  si  Ton  v<5uloit 
que  ce  fût  un  bonnet  phrygien,  on  se/oit.  porté 
à  croire  que  ce  marbre  représente  les  derniers  adieux 
d'Hector  et  d'Andrômaque.  Cependant  cette  scène 
sî  toufcHtfnte  est  décTite  par  Homère  d'une  Ui^nière 
ta  peu  différente  de  celle  dont  nous  la  voyons  id 
figurée. Dès  qu'Andrpmaqpe  apprend  que.le  Coitibat 
entré! le^'Grefcs  et  les  Trbyens  va  recommencer,  elle 
court  sur  lés  mursi  ;  Hécto^  la  cherche  vainement  dans 
h  palais,  et  sort  pour  aller  combattre.  Andromaque 
va  k  sa  rencontre ,  suivie  d'une  seule  esdav^ ,  qui 


.T-T..?,l 


(i)  PAClAUpi  t  AÎQnuijnenui  Peîpponnesia ,  11,  231,  ^33,  273. 
Stuaiit  ,  Autiq,  of  Athens,  l,  ji.  Marmora  Oxoniensia,  toitt»  l, 
146,  UIU 

Tome  IIL  K 


\  » 


._.*i^.  ' 


y 


1^6  CHAPITRE   LXXIX. 

porte  Astyanax  dans  ses  bras*  Hector  lui  prend  la 
hiain  :  c'est  alors  qu'elle  lui  adresse  ce  discours  si 
plein  de  doucetur ,  dé  noblesse  et  de  sentiment,  qu'il 
est  encore  reg^é  comme  un  modèle  de  la  manière 
^'exprimer  une  situation  qui  a  dû  tant  de  fois  se 
renouveler. 

Ici  l'épouse  du  fils  de  Priam ,  la  tète  couverte  d'un 
voile  comme  les  dames  grecques  ,  est  assise  sur  uiï 
trône  à  marchepied;  ce  gui  indique  sa  noble  ori- 
gine.  Hector,  vêtu,  comme  lés  héros,  d'une  simple 
chtamyde ,  prend  congé  d'elle  en  lui  serrant  la  main  ; 
îl  paroît  lui  adresser  le  tendre  et  consolant  discours 
qu'Homère  a  mis  dans  sa  bouche. 

L'artiste  auroit  donc  commis  une  erreur  en  repré- 
sentant Andromaque  assise.  On  pourroit  répondre 
qu'il  n'a  voulu  figurer  cette  histoire  que  comme  un 
symbole,  et  non  la  rendre  dans  toute  sa  vérité.  D'ail- 
leurs ,  fes  poètes  et  les  artistes  '^e  sont  couvent  permis 
de  grandes  innovations  dans  la  manière  de  retracer 
fes  événehiens  de  la  mydiolqgie  et  de  l'histoire  hé- 
to'ft^  :  on  peut  «n  citer  pt^mr  exemple  le  prmce 
ÂsiykmiXj  qu'ils  figutenk  tantôt;,  conformément  au 
récit  d'Homère,  comme  ùtal  enfant  au  berceau,  et 
teuitôt  cémme  im  enfant  de  dix  à  quatorze  ans  (i}. 


(i)  Vbjffi  un  bas-relîef  de  !a  vîila  Borghèsc.  WiNCKELMANé 
-^onum.  iiied.  n.***  135  et  137.  M.  Giraucl  possède  uh  très -beau 
camée,  que  j*ai  fait  graver^  Astyanax  y  est  représente  dam  Ttgo 
fie  quatorze, à  quinze  ans.  ' 


dK. 


CHAPITRE  LXXÏX.  î^j 

Il  seroit  donc  possible  que  ce  marbre  rappelât 
)a  sépai^tion  d'Hector  et  d'Androinaque  ;  allégorie 
heureusement  imaginée  pouF  peindre  la  situation  d'un 
jeune  ^errier  qui  part  pour  une  expécCtion  dans 
laquelle  il  doit  trouver  la  mort ,  et  qui  s'éloigne 
pour  jamais  de  sa  jeune  épouse  et  de  son  en&nt  en 
bas  âge^  porté  ici  par  sa  fidèle  nourrice. 

Près  de  ce  marbre  est  un  autre  tomb^u  grec  ; 
c'est  une  grande  pierre  carrée  fpL  //',  a/  joJ,  sur 
laquelle  on  voit  les  bustes  de  Télesphore  et  de  son 
épouse  :  le  premier  est  vêtu  d'une  tunique  et  d'un 
pallium  ;  la  femme  a  un  voilé  sur  la  tète.  Au-^dessous 
il  y  a  un  homme  couché  sur  un  lit  ;  à  côté  de  lui  est 
une  table  servie ,  dont  les  pieds ,  au  nombre  de  trois, 
sont  faits  en  forme  de  jambes  d'animaux ,  et  devant 
laquelle  est  assbe  une  femme  voilée.  C'est  sans  doute 
l'épouse  de  Télesphore,  qui  lui  a  fait  fiiire  ce  tom- 
beau ,  et  qui  y  a  elle-même  été  ensuite  renfermée. 
Le  repas  indique  l'admission  de  cet  époux  chéri  aux 
banquets  célestes. 

L'inscription  est  ainsi  conçue  : 

TnOMNHMA  TEAE2*OPOT  O  EHOIHSBN 

Arrn  h  itnh  xphsth  mnhmhs  xapin. 

Tombeau  de  Télesphore,  que  lui  a  élevé  son  épouse  chérie ,  pour 
honorer  sa  mémoire. 

Au  milieu  de  la  salle  est  un  autel  rond  ( pL  XXIV, 
n*  éfj ,  haut  de  quatre  pieds  et  demi ,  et  ayant  trois 

K  2 


l48  CHAPITRE   LXXIX. 

pieds  de  diamètre  :  il  est  orné  de  guirlandes  suspendues 
à  des  bucrânei ,  ou  tètes  de  taureau ,  dont  le .  front 
est  paré  de"^  larges  bandelettes.  A  ces  guirlandes 
pendent  des  tètes  dont  quelques-unes  sont  barbues  : 
•on  ne  peut  les  considérer  que  comme  des  masques 
dont  on  âisoit  usage  dans  les  fêtes  de  Cérès  et  de 
Bacchus.  On  voit  des  masques  ainsi  suspendus  à  des 
;arbres,  sur  la  magnifique  coupe  de  sardonyx  du 
Cabinet  impériaF.  Ces  masques ,  et  les  guirlandes 
composées  d'épis  et  de  pavots,  ainsi  que  la  tète  de 
bœuf  à  laquelle  elles  sont  attachées^  annoncent  que 
cet  autel  a  été  consacré  à  la  déesse  protectrice  des 
moissons. 
.     On  lit  cette  inscription  : 

^lATTni  MNHSIEnHS 

nPAHIKAEOTS  NEOMHAOT 

Sa  formule  est  singulière  :  il  faut  entendre  que 
ce  monument  a  été  consacré  par  MnésièpjB ,  fille  de 
Neomèdes ,  à  Philutos ,  fils  de  Praxiclès  (  i  ). . 

Mais  comment  cet  autel  peut-il  avoir  été  con- 
sacré  k  Philutos  \  on  ne  connoît  aucune  divinité  de 
ce  ,nom ,  et  on  ne  peut  penser  que  ce  soit  un  dieu 
topique  oxx  local;  le  nom  de  son  père  Praxiclès, 
qui  est  indiqué  dans  l'inscription,  prouve  que  c'est 
un   personnage    qui    a    réellement   existé.  Il   es^ 

—  ■■Il '  ■      '        ■  I     '      '       I     '  '        * 

(i  )  C'est  du  moins  ainsi  qu'on  peut  expliquer  pourquoi  le  nom 
<le  Philutos  est  au  datif,  et  celui  ^e  Mnésièpt  au  génitif. 


\ 


I j»..Mn^.^  ,.^  ^     ^ 


CHAPITRE    LXXIX.  li^i 

probable  que  Mnésîèpe  voulant  lui  consacrer  un  mo- 
nument, aura  trouvé  cet  autel  de  Cérès ,  qu'elle  aura  ^ 
feit  placer  sur  son  tombeau  en  y  feîsant  aussi  graver 
cette  inscription  :  peut-être  aussi  ce  Philutos  avoi^iI 
une  dévotion  particulière  à  Cérès ,  ou  remplissoît-il 
dans  son  culte  quelque  ministère  isacré  ;  peut-être 
aussi  est-ce  un  symbole  de  son  initiation  aux  ce- 
ièbres  mystères  de  la  déesse  d'Eleusis. 

Sur  la  tnhle  même  de  Tautel  on  voit  ce  mono- 
gramme y  J^  •  % ,  dont  la  forme  est  d'un  temps  bien 
postérieur  à  i  érection  du  monument.  En  le  comparant 
avec  d'autres  monogrammes  du  même  genre, il  paroît 
latin  :  peut-être  aura-t-il  été  apposé  par  l'ordre  de 
i'un  des  princes  latins  qui  ont  régné  si  long-temps 
en  Achaïe ,  dans  l'Archipel ,  et  dans  presque  toutes 

les  provinces  de  l'empire  d'Orient  (i). 

> 

Daiis  le  courant  du  mois  de  mai  1799,  on 
trouva,  sous  les  débris  de  l'abbaye  Saint- Victor,  un 
tombeau  de  pierre  d'environ  cinq  pieds  et  demi 
fpl.  L  VII)  ;  il  avoit  été  fait  pour  être  placé  debout , 
et  il  étoit  probablement  surmonté  d'un  buste.  On  le 
conserve  dans  le  musée  (2). 

■I  ■■ ■«  Il  ji  I  m 

(i)  On  voit  un  monogramme  latîn  sur  un  dîpfome  grec  du 
roi  Roger  de  Sicile,  dans  ia  Palaographia  graca  deMoNTFAUCON, 

page  409.  .  •' 

{2)  Qe  monunient  a  été  plus  amplement  expfîcjué  par  MM.  DE 
Saint-Vincens  et  Villoison,  dans  le  Magasin  encyclopédique, 
ann.  V,  tom.  III ,  page  5^9 ,  et  dans  la  Notice  de  M.  DE  Saint- 
VlNCENS  sur  son  père. 

K  5 


\ 


IJO  CHAPITRE    LXXIX. 

L'inscription  renferme  sept  vers ,  dont  le  troisième; 
et  le  sixième  sont  hexamètres  ',  et  les  cinq  autres 
pentamètres  ;  le  dialecte  ionien  domine  dans  cette 
petite  pièce  sentimentale  : 

• 

1.  ThaviûtL  '^  m^oc'  9ra/c  JC  oh^u  fioç, 

2.  Aeij^ûbç  âc  /udfi^i  nDt}ç  Tncti^  ivofSm, 

3»  OvK  t^vmç,  cù  i^njuoY,  tditv  ypYoY'  çtoç  eof  nr  m 

5.  li  ^^QYi^  ^i,  vfjfAç  TttLrr  eUlKiavL  Tvy^ 

7.   XfieACUt,  JlfÇl(Y}i  Ticuièç  CLfJi    ip^AYtn    (i). 

•Xjt  tombeau  est  celui  de  Giaucias.  Son  jeune  fUs  lui  a  consacré 
»>  ce  monument  de  sa  piété  filiale  ,  qu^îl  a  manifestée  dès  sa  plus 
V  tendre  enfance.  Infortuné  Giaucias ,  tu  n'as  pu  jouir  de  la  vue 
»  de  ton  fîls  :  un  jour,  au  lieu  de  t'ériger  un  tombeau,  il  t'eût 
»  nourri  dans  ta  vieillesse  I  La  Fortune  jalouse  vous  a  tous  traités 
»  d*une  manière  bien  injuste  :  elle  n'a  laissé  que  des  larmes  à 
»  une  mère  accablée  d'années ,  la  vîduité  à  une  épouse  désolée , 
»  la  perte  d'un  père  chéri  à  un  malheureux  orphelin.  » 

Au-dessous  sont  deux  cornes  d'abondance  sculp- 
tées en  relief  et  posées  en  sautoir;  sur  le  côté  opposé 


^r^ 


(i)  I.  Glaucia  tumulus  hic  est;  fiUus  autem  consecravit juvenis, 
a.  Declarans  à  teneris  unguiculis  suam  pietatem  erga  patrem, 

3 .  Non  tibi  contigit  illudtèmpusadtingere ,  ô  infelix  (  Glaucia  )^ 

qui  vidisses  jilium  ;  taîis  erat  ut  tibi 

4.  Stni  aîiquando  paravissetnon  tumutum,  sed  victunu 

5.  Ittvida  autem ,  vos  omnino  injuste  tractcms  Fortuna , 

i,  Matri  quidem  (  Glaucia  )  in  sentctute  lacrymas  posuik^ 

efusdem  vero  conjugi 
7,  Viduitatem ,  infelicis  filii  cum  orbiiate. 


am 


CHAPITRE   LXXIIC.  IJf 

à  rinso'îptlon ,  il  y  a  une  barque  tracée  par  des 
iîgneîi.  larges  et  profondes;  sur  le  troisième  côté  /ont 
voit ,  dans  un  petit  carré  en  relief^  une  guirlande , 
deux  bandelettes,  et  un  ornement  qui  rassemble  à 
un  bouclier. 

La  barque  est  ici  le  symbole,  non  des  navigations: 
lointaines  que  Glaucias  a  entreprises ,  mais  du  séjoui^ 
de  bonheur  dans  lequel  il  est  arrivé  t  c'est  pourquot 
on  voit  souvent ,  sur  les  tombeaux ,  à^s  dauphins  y 
des  tritons ,  c^es  néréides.  Les  cornes  d'abondance 
peuvent  aussi  indiquer  la  plénitude  dès  biens  dont 
il  jouit  aujourd'hui. 

On  voit ,  par  leur  style  ou  par  les  inscriptions 
dont  ils  sont  accompagnés ,  que  tous  ces  monument 
ont  été  exécutés  par  des  Grecs.  Le  musée  raiferipe 
aussi  plusieurs  bas-reliefs  provenant  de  sarcoplyrges 
qui  avoient  été  destinés  à  rçilfermer  les  cprps  de 
quelques  riches  Romains  appelés  à  Marseifte  par 
leur  état  ou  par  les  chaiges  qu'ils  exerçoient. 

Le  plus  remarquable  est  le  tombeau  de  Flavius 
Memorius  ^pL  L  VI,fg.  2,  /,  -^/  Il  est  sculpté  sur  «et 
quatre  faces ,  et  le  couvercle  est  lui-même  chargé 
d'ornemens  :  la  masse  est  formée  d'éçailles  imbti- 
quées  ,  et  les  extrémités  sont  décorées  de  pal- 
mettes.  .. 

Sur  la  face  principale  (  n,*  2),  on  voit  ui|  cpm- 
bat  animé  de  deux  centaures  contre  un  lion  :  Tun 
d'eux ,  attaqué  vivement  par  le  terrible  animal,  va 

K  4 


i 


1^1  CHAPITRE. LXXIXL 

lui  porter  un  coup  de  sa  pesante  massue;  ^alitne^ 
vient. au  secours  du  premier  ,  et  soulève. aVec  sa^ 
deux  mains  une  pierre  énorme  pour  en  écraser  feur 
adversaire.  Au  centre  du  lieu  de  ta  scène  est  un^aibre  , 
qui  indique  qu'elle  se  passe  dans  une  for.êt.  X^es  hK>- 
numens  qui  représentent  des  centaures  combattant 
contre  des  hommes,  sont  assez  communs  ;  ii  est  pluç 
rare  d'en  trouver  où  l'on  voie  comme  ici  (Jes  Cen- 
taures aux  pris.es  avec  des  bêtes  féroces.  Cepen-^ 
dant  ce  genre  de  représentation  convient  bien  aux 
mœurs  ^  aux  habitudes  que  les  poètes  ont  données 
à  ces  êtres  fabuleux  :  souvent  ils  I<esdépeigi>em  chas- 
sant lés  aniinabx  des  forêts  ;  et  Chiron ,  le  précepteur 
de  tant  dç  héros ,  et  du  grand  Achille  luirmêrae  , 
nourrissoit  ses  élèves  avec  la  moelle  des  ours  et  le 
cœur  des  lions  (  i  ). 

Le  revers  f  nJ"  ^  )  nous  représente  une  urne 
cinéraire  à  dçuic  anses ,  d'une  forme  élégame  :  elle 
est  entre  deux  griffons  qui  y  posent  chacun  une 
|>attéy  dans  la  même  attitude  où  nous  en  voyons 
souvent  qui  ont  entre  eux  un  candélabre  (2)  ou 
une  lyre.  Sur  chaque  petit  côté  (n,^  4  )  y'^  y  a  ua 
iiphinx. 

Les  centaures  ,  les  griffons  et  les  sphinx  se  ren- 


(i)  StAt.  AcMtUîd.  Il,  38 j. 

(2)  Comme  sur  une  beife  urne  de  M.  de  Hoom.  Voyri^  mes 
Monumeusi  xmtique&  inédit ^  tome  ly ,  pagç  305,  pi,  XXXU 


ir  1^ 


MMaBÉIM 


tÊÈm 


CHAPITRE   LXXIX.  155 

contrent  fréquemment  sur  lèa  sarcophages ,  et  nous 
les  voyons  ici  rassemblés  sui^  un  seul.  M.,  Herdet 
avoît  pensé  { i  )  qu'ils  étoîent  figurés  sur  les  tombeaux 
comme  des  symboles  die  la  destruction  :  M.d'Hancaiv 
ville  veut  que  cette  coutume  dérive  des  Hyperboréens 
ou  des  Scythes  (2)  ^  dans  les  tombeaux  desquels  on 
trouve  souvent  de  petites  figures  d*animaux  qui  y  ont 
été  renfermées  (3).  H  paroît  plutôt  que  ces  animaux, 
qui  font  partie  du  cortège  de  Bacchus ,  sont ,  sur  les 
tombeaux  des  anciens ,  un  emblème  de  l'initiation ,  et, 
par  conséquent,  du  bonheur  céleste  dont  jouit  celui 
qui  y  est  enfermé.  Le  sphinx  est  un  symbole  *de 
la  prudence;  et  les  griflfons,  qui  veillent  avec  tant 
de  soin  sur  l'or  dont  la  garde  leur  est  confiée ,  met- 
tront la  même  vigilance  à  protéger  un  trésor  encore 
plus  précieux ,  l'urne  sur  laquelle  ils  posent  la  patte 
pour  indiquer  qu'ils  sauront  la  défendre  contre  tous 
les  téméraires  qui  voudroient  y  porter  une  main  pro^ 
.fane.  Enfin  la  réunion  de  ces  monstres  '  peut  avoir 
"pour  objet  d'effrayer  les  violateurs  des  tombeaux, 
et  d'empêcher  un  genre  de  sacrilège  qui  étoii  le  plus 
aflFrèux  et  le  plus  redoutable  aux  yeux  de  toute  l'an- 
tiquité. 

'     »       I    I  I  I  '  I  I  II  I  Il  ■  ; 

(i)   Supplément  à  \2i  Dissertation  de  l^.hlJSS\^G  sur  la  ma-' 
nière  de  représenter  la  Mort;  Recueil  de  JanseN',  tome  IV,.p.  27  et 

(2)  Jiechenhes  sur  l'origine  de  la  religion  de  la  Grèce ,  II,  94»  9J« 
(j)    AUas  de  K Histoire  de  Rome,  de  Lecurc,  pi.  U-xi. 


Ij4  CHAPItRE    tXXIX. 

L'inscription  qui  est  aa-dessus  de  l'urne,  notts 
apprend  quelles  sont  les  cendres  confiées  à  ia  vigi- 
lance des  griffons  et  à  la  prudence  du  sphinx  ;  elle 
commence  au  petit  côté  à  gauche  (n*  4),  et  finît 
au  grand  côté  (nJ"  3).  On  /lit  : 

BENE  PAUSANTI  IN  FACE.  FL.  MEMORIO  V,  P 
QUI  MILIT  INTER  JOVIANOS  ANNOS  XXVIIl.  FRO 
DOM  ANN  VI  FRAELANCIARIS  SPE...  PIS  AN  III. 
COMES  RIPÉ  AN  I  COM  MAURET  TING  ANN  II.I  VIX 
AN  LXXV   PRAESIDIÀ  CON  DULCISSIMO. 

A  celui  qui  répose  ici  en  paix,  Flavius  { i  )  Memorius  ,  homme  très'- 
parfait  (2),  qui  a  fait  la  guerre  parmi  les  Joviens  [\)  pendant  vingt- 
huit  ans  ,  a  été  intendant  des  domestiques  (4)  pendant  six  ans  ;  pre^ 
mier  lancier  {^)  de  la  garde  de  Vempereur  (6) pendant  trois  ans;  cornu 

(i)  FLavio, 

(2)  Viro  Perfectissinw. 

(3)  Joyiens  et  HercuUens  étoîent  les  noms  de  deux  îé^ons  éta- 
blies par  Dioclétîen  et  par  Maximien,  dont  l'un  avoit  pris  fé 
nom  de  JupherfJovisJ ,  et  i*autre  cdui  d*HercuIe.  ZoziM.  Hist, 
m,  30. 

(4)  pROcurator  DOMestîcorum, 

(5)  Pralanciaris,  On  sait  que  lancea  ctoît  un  mot  gaulois, 
dont  nous  avons  fait  lance,  DiODOR.  SicuLV ,  30*  Les  écrivains 
de  !a  basse  latinité  se  servent  des  mots  lanceare  et  lanciare  [  lancer  ] , 
lancearius  et  lanciarius  [  lancier  ],  Le  sculpteur  de  l'inscription 
a  écrit  lanciaris ,  qui  ne  se  trouve  dans  aucun  lexique.  H  paroît 
toujours  qu*if  est  ici  question  d'un  corps  de  lanciers  qui  faisoit 
partie  de  la  garde  du  prince. 

(6)SPEculatorum  princiPIS,  Selon  TACITE  (HistA,  24,  25;  ïï> 
1 1  ),  et  Suétone  {in  Aug.  74),  les  speculatores  étoient  des  gardes 
attachés  à  la  personne  du  prince. 


vl 


CHAPITRE    IXXIX.  15J 

êe  hi  rhe  (  du  Tibre)  (i)  fendant  un  an ,  comte  de  la  Mauritanie 
Hn^tane {2) pendant  trois  ans,  lia  vécu  soixame-quin^ans.  Prasidia 
À  son  époux  chéri  (3). 

Ce  magnifique  sarcophage  avoit  été ,  comme 
beaucoup  d'autres,  enlevé  par  un  salpètrier  d'Abc 
pour  sa  manufacture  ;  et  le  trou  que  Ton  remarque 
sur  l'arbre,  atteste  le  sale  usage  auquel  il  a  servi. 
M,  Achard  le  découvrit,  et  le  préfet  le  fit  transpor- 
ter à  Marseille.  Si  les  habitans  d'Arles  n'avoient  pas 
mis  alors  tant  de  négligence  à  la  conservation  de 
leurs  monumens ,  ils  n'auroient  pas  été  privés  d'un 
de  ceux  qui  étoient  le  plus  Êdts  pour  être  l'orne- 
ment de  leur  ville. 

Le  titre  de  cornes ,  la  forme  de  plusieurs  lettres , 

'  Il  — — ^»       ■      I         II  ■> 

(i)  RIPE  pour  ripa.  Dans  la  Notifia  imperii  occidentalis ,  on 
trouve  y  parmi  les  magistrats  qui  relevoient  du  prafectus  urèis, 
un  cornes  riparum  et  alvei,  sous-entendu  Tiheris  ;  ï\  est  pro- 
bable que  Memorius  avoit  exercé  pendant  un  an  cette  magis- 
trature. 

(a)  CÇMes  MAURETaniœ  TINcitanœ.  On  appela  d*abord  co^ 
mites ,  du  verbe  comitare  [accompagner],  ceux  qui  composoient 
k  cour  de  l'empereur  et  Taccompagnoient  par-tout.  Auguste  avoit 
formé  dans  son  palab  une  espèce  de  sénat  privé  ;  on  appeloit 
comités  Augusti  ceux  qu'il  y  admettoit  :  c'étoit  seulement  une  dé- 
signation qui  servoit  à  indiquer  les  courtisans  que  le  prince  aâfec- 
tionnoit  Je  plus ,  et  non  le  titre  d'un  otHce.  C'en  fut  un  dans  i^ 
^uite;  et  les  comités  ne  reçurent  plus  ce  nom  de  la  faveur  du 
prince  qu'ils  accompagnoient,  mais  de  l'office  qu'ils  remplissoient , 
ou  de  la  province  qu'ils  dévoient  gouverner.  C'est  ainsi  que  Me- 
morius est  nommé  ici  comte  de  la  Mauritanie  Tingitane, 

(3)  CONjugi  BULCJSSJMO. 


If6  CHAPITRE     LXXir. 

ne  permettent  pas  d'assigner  à  ce  monument  uriè 
très-haute  antiquité;  cependant  le  style,  sans  être 
des  plus  beaux  temps  de  l'art ,  n'appartient  pas  au 
Bas-Empire.  Je  pense  qu'il  a  été  fait  à  uné^poque 
plus  reculée  que  celle  pu  l'on  y  a  déposé  le  corps  de 
Memorius  ;  que  celui-ci  est  mort  vers  le  temps  de 
Maximîen  ou  de  Constantin ,  et  que  ce  beau  sarco- 
phage, s'étant jtrouvé  libre,  aura  été  destiné  à  le 
recevoir.  C'est  encore  ainsi  qu'on  peut  expliquer 
pourquoi  l'inscription ,  qui ,  comme  nous  l'avonis  vu, 
commence  sur  uii^  des  petits  côtés,  a  été  placée  d'une 
manière  si  peu  commode  pour  son  développement. 
Un  autre  beai^  sarcophage  de  marbre  (  i  ) ,  figuré 
pf.  XXVI ,  fg.  4 ,  attira  notre  attention  (2^.  Il  est 
de  grandeur  à  pouvoir  contenir  un  enfant  de  dix  k 
douze  ans  :  la  face  postérieure  est  lisse  ;  sur  chacun 
des  petits  côtés ,  il  y  a  un  griffon  (  3  )  ;  sur  la  fece 
antérieure,  dix  génies  qui  forgent  une  armure  :  les 
trois  premiers  à  droite  sont  occupés  à  travailler  sur 
une  enclume  un  grand  casque  d'une  belle  forme, 
et  assez  semblable  à  celui  de  la  Minerve  de  Velietri  ; 
ïes  deux  suivans  soutiennent  un  bouclier  sur  leqyel 

' ; ~ ' ; ^ ; 

(  1  )  Ce  sarcophage  est  gravé  à  rebours  et  d*une  manière  exécrable 
dans  fés  Antiquités  de  Marseillt  de  Grosson,  pi.  XXII ,  n.**  i  ;  un  peu 
toieux,  mais  d'une  manière  peu  exacte»  dans  RuFFi,  t.  II  »  p.  132; 
{2)  n  étoit  autrefois  dans  Fcgfise  souterraine  de  Saint  Victor, 
et  les  os  de  ce  martyr  y  avoient  été  pfacés;  ils  en  furent  tirés  a.»* 
XI  v.*  siècle  pour  être  mis  dans  une  châsse  d'argent» 
.  (5)  Suprà,^.  15a. 


"V 


^^taÉaiMiMMte«^^tiEil 


iÊÀ 


CHAPITRE    LXXfX.  157 

on  a  figuré  la  louve  allaitant  les  deux  jumeaux  Ro- 
muius  et  Rémus,  et  qui  est  supporté  par  un  sphinx 
accroupi^  dont  les  ailes  éployées  et  levées  en  Tair 
embrassent  ie  disque  :  c'est  îe  symbole  de  la  pru*- 
dence ,  qui  soutient  le  signe"  commémoratif  de  la 
fondation  de  Rome.  Trois  autres  génies  forgent  une 
espèce  d'armure ,  qui  me  paroît  être  une  cnémide  qui 
servoit  à  couvrir  la  jambe  :  deux  de  ces  génies  sont 
debout  ;  le  iroii»ième  est  assis  près  d'une  cuirasse  déjà 
terminée.  Les  derniers  génies  ,  enfin  ,  paroissent 
tremper  un  bouclier  dans  le  feu  qui  brûle  sur  un 
autel,  pour  le  rendre  impénétrable. 

Les  génies  de  Vulcain ,  occupés  à  forger  des  armes 
pour  les  fondateurs  de  Rome ,  ou  à  tremper  le  bou- 
clier qui ,  la  rendant  invulnérable ,  la  fera  devenir  la 
dominatrice  de  l'univers ,  composent  donc  le  sujet 
de  ce  sarcophage ,  qui  a  renfermé  le  corps  de  quelque 
Romain  distingué.  Ce  sujet  et  le  style  du  monument 
concourent  pour  fiiire  reporter  l'époque  de  son  exé- 
cution au  règne  d'Antonin  Pie.  Ce  prince  regardoît 
comme  un  acte  de  religion  et  un  témoignage  de  sa 
piété  envers  Rome ,  de  rappeler  sur  ses  monnoies 
differens  traits  de  l'histoire  primitive  de  cette  cité: 
aussi  les  beaux  médaillons  qui  ont  été  frappés  sous  sort 
Tègne  en  retracent-ils  plusieurs.  A  son  exemple,  les 
Romains  qui  lui  étoient  attachés  ont  dû  rechercher 
ces  sujets  de  composition ,  qui  seront  devenus  alors 
un  objet  de  piété,- de. flatterie  et  de  mode.  Rien  ne 


Ijg  CHAPITRE   LXXIX:. 

parut  donc  être  mieux  choisi  pour  le  sarcophage  à*iitk 
jeune  enfant  d'un  rang  distingué ,  qu'un  sujet  qui 
rappeloit  l'enfance  des  héros  fondateurs  de  Rome: 
ce  choix  étoit  encore  plus  heureux ,  si  le  sarco- 
phage a  renfermé  deux  jumeaux. 

Un  autre  sarcophage  de  marbre ,  figuré  planche 
XXXVII,  n!  j,  est  aussi  digne  d'être  remarqué.  II 
étoit  dans  l'égiise  de  Saint-Victor ,  et  il  a  renfermé 
le  corps  de  S.  Mauront,  évêque  de  Marseille,  qui 
vivoit  sous  l'empire  de  Charlemagne.  C'étoit  alors 
l'usage  de  choisir,  pour  y  déposer  les  chrétiens,  dé» 
sarcophages  païens  décorés  de  belles  sculptures  : 
le  corps  de  Charlemagne  lui-même  fut  mis  dans  un 
tombeau  antique  qui  représente  l'enlèvement  de 
Proserpine  (i). 

Deux  Victoires ,  tenant  des  palmes  ,  soutiennent 
un  médaillon  qui  est  supporté  par  un  tronc  de  pal- 
mier :  s^ux  deux  côtés  sont  des  prisonniers  de  guerre 
qui  ont  les  mains  liées  derrière  le  dos  ;  comme  on 
voit ,  sur  les  médailles ,  la  Judée ,  la  Dacie  ou  la  Ger- 
manie captives.  Sur  chaque  côté  du  tombeau ,  il 
y  a  un  char  traîné  par  un  centaure  et  une  centau- 
resse.  Dans  le  groupe  à  gauche  du  médaillon ,  le 
centaure,  couronné  de  pin  comme  toutes  les  divi- 
nités champêtres ,  tient  d'une  main  une  lyre,  et  de 
l'autre  le  plectrum  :  la  centauresse  porte  une  corne 

{ I }  II  est  au  mtuée  ^e$  Augustîm»  n.^  4^8. 


-    —  -^ 


CHAPITRE    LXXIX.  159 

<I*abondance.  Le  premier  est  attaché  par  une  large 
bande ,  dont  un  petit  génie ,  qui  est  debout  sur  sa 
croupe,  tient  Pextrémité,  comme  pour  le  diriger. 
Bacdius  est  dans  le  char;  il  est  nu  et  s'appuie  sur  son 
thyrse  ;  il  est  embrassé  et  soutenu  par  un  de  ses  sui'- 
yans  ou  favoris ,  Ampelus  ou  Acratus,  comme  on  le 
remarque  dans  plusieurs  groupes  célèbres. 

L'autre  groupe  est  à-peu-près  semblable  :  mais  le 
centaure  porté  d'une  main  un  vase  à  boire ,  en  forme 
de  corne ,  appelé  rhyton ,  et  de  l'autre  im  pedum ,  dont 
on  ne  voit  plus  que  quelques  légers  vestiges  ;  la 
centauresse  tient  une  branche  de  lierre  chargée  de 
ses  baies.  Le  petit  génie  qui  est  sur  le  centaure  ne 
le  guide  pas ,  comme  l'autre ,  avec  des  rênes  ;  mais 
il  cherche  à  hâter  sa  marche  avec  un  fouet.  U  y  a 
dans  le  <:har  i^ne  femme  vêtue  d'une  longue  tunique 
avec  une  ceinture ,  et  coiffée  à  la  manière  des  bac* 
chantes  :  fe  ne  §ais  ce  qu'elle  tient  dans  la  main. 

Le  médaillon  soutenu  par  les  Victoires  porte  Fins* 
cription  suivante  : 

D.        M. 

IVLIAEQVINi* 
^  >IAEC0SSVTIA 

t  HYCIA.MAtBR 

FILIAÊ 
PlISSIMAE 

Aux  Mtu*  mânes. et  à  Julia  QuîHtina  :  Cçuuda  Hj^ia,  sa  mke, 
à  une  fille  très-tendre. 


Grossôn,  qui  a  donné  de  ce  mon^imem  (i)  uner 
figure  dans  laquelle  il' l'a  dénaturé  de  là  matiiêre  la 
plus  étrange  et  la  plus  dégoûtante ,  s'étonne  de  ce  que 
ces  simulacres  dé  guerre  se  trouvent  sur  le  tombeau 
d'une  jeune  fille,  et  paroît  penser  que  ce  sarcophage 
avoit  été  destiné  à  un  guerrier  triomphateur ,  et  que , 
pour  un  motif  qu'on  ignore,  on  y  renferma  la  dé- 
pouille mortelle  de  Julia  Quintina.  Mais  on  peut 
donner  de  toute  cette  représentation  une  explication 
bien  plus  naturelle.  Nous  avons  déjà  dit  que  les 
bacchanales  sont  figurées  sur  les  tombeaux  coitime 
un  symbole  de  Tinitiation  :  tout  ce  que  nous  voyons 
ici  a  rapport  à  Bacchus  considéré  comme  vainqueur 
de  rinde;  c'est  le  triomphe  de  ce  dieu  :  il  est  traîné 
par  un  centaure  qui  célèbre  ses  exploits  au  son.de 
la  lyre ,  et;  par  une  ceniauresse  qui  tient  le  syitibole 
de  la  fécondité  ;  il  est  soutenu  dans  son  char  par 
un  de  ses  suivans;  un  bouclier  votif  est  i  àelo» 
Fiîsagei  des  Romains  ,^  supporté  et  couronné  par 
des  Victoires,  et  soutenu  par  un  palmier,  qui  <est 
aussi  le  symbole  des  succès  guerriers  ;  les  captifs 
des  nations  qu'il  a  vaincues  y  sont  enchaînés.  J)ans 
l'autre  char  est  Ariadne  ou  Libéra,  qui  vient  partager 
la  gloire  de  son  divin  épouxv  Probablement ,  sous 

■  '  .  ■  ■■ 

(i)  Antiquités  dé  Marseille ,  pi.  XXII,  n.®  i.  La  figure  en  boîs' 
^ufest  dans  Vflistoire  dé  Marseille  de  RuFFI,  page  129,  cjt  pré- 
férabici  quoique  très-inexacte  aussi. 

cette 


màÊÊ^c.^^.^^^m 


CHAPITRE   LXXIX.  j6i 

cette  dernière  allégorie,  on  a  voulu  représenter 
HycKi  elle-même ,  dont  le  nom  est  inscrit  stxf  ce 
bouclier,  et  indiquer  son  initiation  aux  mystères. 

Le  tombeau  suivant  a  été  figuré  et  décrit  pat 
Grosson,  mais  à  sa  manière  (i).  La  face  prinrfpâle 
{pi.  LVIII,  n."  i  )  est  divisée  en  tïofe  parties  : 
sur  les  deux  latérales  on  voit  fe  Sortitiiéif  et  ta  Mort 
couchés  et  endormis  dans  un  bocage  ;  sur  célFe  dti 
milieu  est  l'inscription  suivante ,  que  lèmème  auteur 
a  rapportée  aussi  de  la  manière  la  plus  fautive  : 


t.   A     J.    ..    1    ■« 


rffb 


DVLCÏSSIMO  a:jNNOCÊ]SfTl3^. 
FILIOT.  ANNONIO  QVI  y  l^XT 
ANN.  VI.  M  VI.  D.  VI.  T.  ANNOïfv^ 
a?  VALERIANA.  PARENTES  FIUO 
CARISSIMO  ET  OMNI  TEMPORE 
VITAE    SVAE    I>ESIDERAiriSSIMC) 


A  Titus  Annonius ,  jils  tris-<her  et  très-innocent,  pti  a  vécu  six 
gMs  six  mois  et  six  jours  ;  Titus  Annonius  et  Valeriana,  s^sparens, 
à  un  fis  très-chéri ,  et  puisera  regretté  -pendant  tout  le  ttfnpsde  leur  vie. 

Les  deux  petits  càtés  sont  décorés  de  gjuiriandes 
très- élégantes.  Ce  beau  sarcophage  avoit  été  enlevé 
du  cimetière  public  de  Paradis  ,  et  placé  dans  une 
salle  du  palais.  II  avoit  été  transporté  ensuite. à  la 
fontaine  de  l* Aumône  ,  pour  y  servir  d'ornement. 
Malgré  les  dégradations  qu'il  a  subies,  il  mérite 

^yy^ryre^   1  *1  f  tian.tf ftlT.  i\^**    fMirTftlI'V' 


itit    tw 


!■■  rn^n» 


(i)  Antiquités  de  Marseille,  ^k'XlV* 

Tome  IIL 


1^2  CHAPITRE    LXXÎX, 

.  On  voit  encore  dans  ce  musée  quelques  monu» 
mens  qui  ne  portent  aucun  signe  de  christianisme: 
les  plus  remarquables  sont  un  beau  siège  de  marbre 
que  fai  fait  figurer  (pi.  XXXVIII ,  nr  6  et  7  )  ; 
un  manque  tragique  en  pierre ,  qui  a  été  trouvé 
sur  le  chemin  de  Toulon  en  1  803  ;  une  pierre  carrée 
chargée  d'armes  habilement  groupées  ;  une  colonne 
torse  ;  le  chapiteau  d'un  pilastre  corinthien  ;  deur 
autres  grands  chapiteaux,  deux  petits,  et  deux  pe- 
tites colonnes  accouplées. 

11  n'y  a  dans  ce  musée  qu'un  seul  monument 
égyptien  :  c'est  une  figure  de  basalte,  dont  les  jambes 
sont  brisées  ;  la  bande  sur  laquelle  elle  est  appuyée , 
est  chargée  d'hiéroglyphes.  Cette  statue  étoit  autre- 
fois à  l'arsenal. 

Nous  vîmes  encore  ces  deux  fragmens  de  pierres 
terminales  : 


IN-F-P-XXII 


(0 


X' 


i^^ 


4^^ 


IN  F 
PQXhl 


( 


(-) 


(  I  )  /J^  Fronte  Pedes  XXII. . 

(a)  IN  Fronte  Ped€S  (luoArtid.xm. 


4  ' 


iS} 


CHAPITRE  LXXX. 

Suite  de  !a  description  du  musée.  —  Mono  mens  cïiré- 
tiens.  —'Monogramme  du  Christ.  —  Divers  sarco- 

•  phàges.  -—  Tombeau  d'Eugénie:  Jésus- Christ  entre  sès^ 

•  apôtrçs,  colombes,  dauphins,  couronnes,  inscription, 

—  Tombeau  des  compagnons  de  S,  Maurice  :  légion 
thébéenne,  le  Sauveur  sur  la  montagne,  fleuves  du 
paradis,  palmier,  difîerens  événemens  de  la  Passion; 

•  Pilate,  comment  figuré  ;  moisson  et  vendange  allégo- 
riques. —  Tombeau  des  compagnes  de  S.**  Ursule: 
miracle  de  la  multiplication  des  pains,  cerfs  mystiques, 
grappe  mirac4ileuse.  —  Tombeau  de  S.  Cassien  :  agneaux 
mystiques.  —  Tombeau  d'Eusébie  ;  Jonas  rejeté  par 
le  monstre  marin ,  Moïse  frappe  le  rocher  avec  sa  ba- 
guette, inscription.  —  Tombeau  de  S.  Chrysanthe  et 
de  S.**  Darie  :  nid,  serpent^  limaçon  inystiques.— 
Tombeau  de  Tabbé  Isarn  :  crosse  grecque,  inscription. 

—  Inscription  de  Catherine  de  Médicis, 

Outre  les  marbres  grecs  et  roinains  dont  je  viens 
de  parler,  le  musée  renferme  encote  diverses  tombes 
des  premiers  chrétiens  :  elles  viennent  toutes  de 
l'église  de  Saint- Victor ,  qui  en  possédoit  plusieurs 
autres.  Ruffi  en  a  figuré  quelques-unes  ;  mais  ses 
gravures  ,  feites  en  bois  ,  manquent  d'exacjtitude , 
;  et  il  n'en  a  pas  donné  d'explication. 
.   J'ai  déjà  dit  un  mot  de  Tutilité  desmonumens 

^  L  2 


/ 


V 


|(Î4  CHAPITRE    LXXX. 

des  premiers  temps  du  christianisme  :  ils  sont  vérî« 
tablement  curieux  sous  plusieurs  rapports.  On  y 
suit  l'histoire  de  l'art  dans  sa  décadence;  on  y  re- 
connoit  les  costumes  du  Bas- Empire  ;  on  y  disthigue 
dips  usages ,  des  formules  des  païens ,  que  If  s  diré«* 
tiens  employ oient  encore  ;  on  y  voit  enfin  comment 
ceux-ci  ont  fait  servir  les  symboles  mythologiques 
pour  représenter  les  dogmes  et  les  mystères  de  leur 
religion ,  et  quelles  sont  les  nouvelles  allégories  qu'ils 
ont  imaginées.  Pausanias,  en.pj^rcourant  la  Grèce, 
a  donné  la  description  des  monume^ç  que  la  reli- 
gion avoit  consacrés  dans  les  temples  :  la  caisse  de 
Cypsélus  ,  dont  il  parle  avec  tant  de  détails ,  n'étoit 
probablement  pas  plus  belle  que  le  coffre  de  Sens , 
que  fai  décrit.  Ceux  qui  aiment  les  arts ,  ceux  qui 
étudient  l'histoire  ,  ceux  qui  se  plaisent  à  suivre  les 
traces  des  modifications  que  le  génie  a  été  contraint 
4'iidopter  dans  la  littérature  et  dans  les  arts  par 
Finfluence  du  christianisme ,  observeront  avec  plai* 
sir  les  premiers  bas-reliefs  chrétiens  :  ces  monumens 
:u:quièrent  aussi  un  grand  prix  aux  yeux  de  celui 
dont  la  foi  est  ardente  et  vive.  Ils  sont  aujourd'hui 
bien  peu  nombreux;  et  il  est  intéressant  d'en  em- 
pêcher la  destruction. 

Je  parlerai  d'abord  du  signe  révéré  du  christia- 
nisme ,  du  monogramme  par  lequel  les^  premiers 
chrétiens  ont  voulu  à-Ia-^fois  exprimer  le  nom  de- 
Dieu  et  représenter  allégoriquemem  son  éternité  s 


.  CHAPITRE   LXXX-  i6$ 

H  se  retrofuve  sur  presque  tous  les  autres  nK>im>- 
mens  ^  et  c'est  le  premier  que  fe  vais  décrire. 

C'est  une  dalle  de  pierre ^{^  pi.  LVI ,  n,^  y  )t 
chargée  d'omemens  percés  à  jour  :  du  milîea  d'un 
vase  à  deux  anses  sort  un  riche  cep  de  vigne ,  qui 
forme  de  larges  enroul^mens  ;  deux  colombes  sont 
perchées  sur  la  branche  la  pks  élevée ,  et  elles 
tournent  leur  bec  vers  le  monogramme  du  Christ  : 
cette  partie  est  séparée,  par  une  petite  bafKié,  d'une 
autre  partie  de  la  pierre  ornée  seulement  de  barreaujt 
croisés  y  avec  des  attaches  (  i  }* 

Le  corps  de  l'homme  est  souvent  désigné  ^  dans 
les  livres  saints,  par  les.  mots  de  vast  dt  Vmne  (a)  ^ 
yast  d'argile  (3}  :  le  divin  agriculteur  répand  dessus 
ses  bienfaits;  ii  féconde  et  fait  fructifier  le  germe 
des  bonnes  actions  qui  y  est  l'enfermé ,  et  qui  s'é^ 
taid  et  s'épanouit  comme  une  vigne  ridie  et  vigon^ 
feuse.;  lès  colombes  ,  symbole  d'une  smie  douce  et  ^ 

I>urc ,  se  jpfccent  dessus ,  et ,  tôuhiéés  vers  le  mo** 
nogramme ,  semblent  vouloir  becqueter  ce  signe  du 
salut. 

Le  monogramme  du  Christ  est  ufi  d«  plus 

{ I  )  RUFFI ,  H'tst,  de  Marseille ,  II ,  1 3 1 ,  a  publié  un  marbre  à- peu- 
près  semblable,  cl  çuî  est  égaleritcrit  rfàfis  te  musée  :  Il  drfrcre  de 
celui-ci  par  la  forme  des  enroulemens ,  l'absencfe  des  cofombes  et  - 
des  barreaux  croisés.  ïl  yenoit  aussi  de  Saifit«Victor. 

(a)  1  Thessal,  IV,  4. 

(})  a  C^rinA.  iv,  7.  ^ 

1-3 


l66  èHAPITRE    LXXX. 

anciens  symboles  de  la  religion  chrétienne  :  ceurjquî 
la  professèrent  les  premiers ,  imaginèrent  de  rappeter. 
i^  nom  de  Dieu  par  ies  initiales  enlacées  du  mot 
'Ckristos ,  enfermées  dans  un  cercle ,  symbole  de  Téter-, 
jiité ,  et  accompagnées  delà  première  et  delà  dernière 
lettre  de  l'alphabet  grec,  alpha  et  oméga  (i),  pour 
exprimer  qu'il  est  à-Ia-fois  le  commencement  et  la 
fin.  Ces  lettres  paroissent  indiquer  que  ce  signe  fut 
imaginé  dans  la  Grèce  :  mais  les  païens  n'en  fài- 
soient  point  usage ,  jiinsi  que  quelques  auteur^ 
Font  prétendu;  si  on  l'a  trcmvé  syr  des  monupiens 
profanes ,  c'est  qu'il  y  avoit  été  ajouté  postérieure- 
ment par  des  chrétiens  qui  étoien;:  devenus  posses-* 
seurs  de  ces  monumens.  Après  que  Constantin  Peut 
inscrit  sur  les  étendards  de  son  armée ,  il  fut  le 
symbole  du  triomphe  du  christianisme.  Selon  les 
historiens  chrétiens,  cet  empereur  reçut  en  songe 
Favis  deie  placer  sur  les  boucliers  de  ses  soldats;  et 
c'est,  disent-ils,  à  la  puissance  de  ce  signe,  qu'il 


(i)  Ces  vers,  écrits  sous  un  moiv^gramme  qui  étwt  à  Milan 
dans  iVglise  de  Sainte-Thècie,  donneront  une  juste  idée  de  ce 
caractère  mystique  : 

Circuîus  kic  summi  compte hetiiïît  nomina  Re^îs , 

Que  m  sine  principh  et  sine  fine  \ides  :       * 
Principium  cumfine  simul  tîbî  dénotât  A  0.\ 

X    ft  V  Christl  nomina  sancta  tenent, 

Allecï^ ANZA,  Monum.anticÂidi  Miiaaa,  1^ 


CHAPITRE     LX«X.  i6y 

dut  la  mémorable  victoire  qu'il  remporta  sur  le  pont 
Mîfvîus.  Depuis  ce  temps ^  le  symbole  du  Christ  a 
décoré  non-seulement  ies  étendards  ,  les  casques , 
les  cuirasses  et  les  boudiers ,  mais  les  vêtemens ,  ies 
vases  à  boire,  les  tombeaux ,  tout  ce  qui  servoit  k 
des  usages  sacrés  et  profanes  ;  et  on  le  remarque 
sur  les  médailles  des  Flavîens.  L'usage  en  a  duré 
jusqu'au  XI /  siècle  ;  et  il  paroît  avoir  été  souvent 
renouvelé  pendant  les  querelles  contre  les  héré- 
tiques ,  comme  un  signe  de  soumission  à  la  foi  :  c'est 
sur-tout  dans  le  temps  des  disputes  contre  l'arianisme  ^ 
qui  se  rallumèrent  au  vil/  siècle ,  qu'on  en  a  fait 
usage,  parce  que  les  Ariens,  qui  nioient  la  divi- 
nité de  Jésus-Christ ,  refusoient  de  placer  l'a  et  1'» 
auprès  de  ses  symboles, 

La  bonne  exécution  du  monogramme  que  je  dé- 
cris, sa  forme,  les  figures  qui  l'accompagnent  et  qur 
le  rendent  conforme  aux  autres  monumensdu  même 
geme  exécutés  dans  le  V.^et  le  vi/  siècle,  ne  per- 
mettent pas  de  le  placer  à  une  époque  moins  re-s 
culée,;  f  '  : 

'  Nous  vîmes  ensuite  un  sarcophage  d'environ  sept 
pieds  de  long  fpl.  L  VI II,  n'  j),  dont  la  face  anté- 
rieure représente,  comme  celui  d'Aix  (i),  Jésus- 
Christ'  au  milieu  des  .doiîzè  apôtres.  II  est  assis  sur 
\xù  siège  un-peu  étevé  et  ayant  im  marchepied,  près 


(  I  )  Tome  U ,  p.  a  68 ,  pi.  XXXVir. 

L  4 


r 


fé^  CHAPITRE   L?CXX, 

duquel  e$^  T^gneau ,  symbole  de  sa  douceur  et  de  sii 
patience.  Le  Sauveur  est  imberbe  ;  il  paroît  enseigner 
sa  doctrine  à  ses  disciples.  Son  siège  est  dans  une 
niche  moins  large  maïs  pj^s  élevée  que  les  six  autres 
niches ,  devant  chaame  desquelles  &ont  égaiemeni 
^sis  deux  de  ses  disciples ,  sur  un  banc  continu  » 
çouveift  4'une  draperie.  I!$  écoutent  tous  avec  ajtw 
tîon  et  recueillent  avec  respect  les  paroles  du  divii* 
maître ,  et  témoignent ,  par  des  attitudes  variées  ^ 
l'émotion  qu'ils  éprouvent. 

Les  nich.es  sont  séparées  Tui^e  de  l'autre  par  une 
cfolonnç  qvi  se  rapprpçhç  de  l'ordre  corinthien,  et 
çntre  chaque  cintre  il  y  a  un  ornement  :  ie  cintre  qui 
^rmç  I^  nîçhe  du  milice ,  esx  accompagné  de  deu% 
colombes ,  qui  caractérisent  ia  simplicité ,  la  pudf  ur  ^ 
l'innocence  ,  la  charité  >  I{^  douceur  et  l'attention 
i^éces^s^res  powr  éviter  les  embûches  du  démon.  Oa 
voit  insulte  d^  daMphins  ;.  ce  signe»  sur  le^  swcq^ 
phages,  est ,  dît^c^ ,  relatjlf  ait  iom  qu'ont  les  dau-» 
phjns  de  porter  à  terre  les  çprps  des,  hommes  qm 
la  nu»f  a  engloutis  ;  mais  n'a-t-on  pas  voulu  pkitôt 
donner  m  ?>^hoIe  de  ïa  fermeté  d^s  rxmtfïs, ,  quf  se 
montroieçt  calmes  çt  tr^nqij(Hps  au  ipS^m  ^s,  pe^r 
sécution^ ,  c^rpme  ces  cétaçees  jouent  s^r  les  flott 
pendant  les.  plus  afïre^ses j^mp^tf^  I  Le^  çwr«ftsç$ 
désignent  la  réçorapeiiisevqHi  att^ij^  ceim^^l,m 
demeuré  ferme  dans  la  foi. 

Ruffi  a  publié  încorrectenjent  ce  tombeau ,  qn'îl 


N 


CHAPITRE   LXXX.  I<f^ 

dit  être  celui  de  S.  Maurice  (  i^) ,  lequel  souffrit  le 
martyre  sous  Dioctétien  ^  avec  ia  légion  diébéenne , 
dont  il  étoit  commandant  :  maïs  rinscription  qui  est 
gravée  sur  le  couverde,  et  qu'on  n'avoit  point  aper- 
çue dans  le  souterrain  de  Saint- Victor ,  proirve  qu'il 
a  renfermé  les  restes  d'Ikigénie ,  dame  chrétienne 
adonnée  aux  œuvres  de  charité  ^  qui  mourut  sans 
enfàns ,  et  à  qui  son  aïeule  fit  faire  ce  sarcophage. 
Cette  inscription  est  en  vers  hexamètres  et  penta- 
mètres :  mais  ils  ne  sont  pas  séparés  ;  une  feuille  de 
lierre  indique  seulement  la  fin  de  chacun  :  il  y  en 
a  deux  sur  chaque  ligne.  Les  lettres  sont  grandes 
et  bien  gravées  :  la  forme  des  lettres  b  ,d,  g,  l'ortho- 
graphe de  quelques  mots  (2) ,  font  conjecturer 
qu'elle  est  du  vu.''  ou  di  viii/  siècle.  £Ue  est 
figurée  sur  ia  planche  L  VI JI,  n*  3. 

NOBIUS  EVGÇNIA  PRiECLARI  SANGVINIS  ORTV, 
QViE  MERETIS  VIVIT,  HIC  TOMOLATA  JACIT. 

EXVIT  OCCVMBENS  ONEROSO  CORPORE  VITAM  , 
QVO  MELIVS  SVPERAS  POSSIT  ADIRE  DOMOS. 

QViE  PRVDENS  ANEMIS  PERJVt  AN  SIT  PONDEREMORVM, 
PROVÎDA  LAVDANDVM  SEMPER  ELEGIT  OPVS. 


(i)  F^^plvs bas, page  170. 

(%)  Mareiis  pour  meritis ,  urniolata  pour  mwmlaia,  nétiU  po«it 
sphùlis  ,  laèsam  fOut  îapsam,  besstm  pour  HssmU,  cattdrdh  font 
€»ndidit,  lacrâmîs  foi»  Ucrymîsu 


i7^  CHAPITRE    LXXX. 

PASCERE  JEJVNOS  GAVDENS  FESTIN  A  CVCVRRIT  , 
I 
EXAVRIENS  EPVLAS,  O  PARADISE,  TVAS. 

CAPTIVOS  OPIBVS  VINCLIS  LAXAVIT  INIQVIS, 
ET  PVLSOS  TERRIS  REDDEDIT  ILLA  SVIS. 

MENS  INTENTA  BONIS  TOTO  CVI  TEMPORE  WTJE  ^ 
ACTJBVS  EGREGIIS.  VNICA  SANCTA  FVIT  , 

QVAM  SVBOLIS  LABSAM  BESSE'NIS  INCLITA  LVSTRIS 
CONDEDIT  HIC  LACREMIS  AVIA  MŒSTA  PUS. 

Lit  vohk Eugénie ,  issuf  d'un  sang  illustre,  (fui  vit  par  ses  bienfaits, 
repose  dans  ce  tombeau.  En  mourant,  elle  dépouilla  son  ame  d'une 
rttveloppe  incommode,  afin  qu'elle  pût  arriver  plus  facilement  aux  de- 
meures célestes.  Prudente  danà  ses  désirs  ,  elle  respecta  constamment 
l'autorité  des  mteurs.  Prévoyante,  elle  choisit  toujours  une  occupation, 
louable.  Joyeuse  et  empressée ,  elle  courut  au  secours  de  ceux  qui  avoient 
faim,  se  repaissant,  o  Paradis,  de  tes  festins.  Elle  employa  ses  richesses 
"À  retirer  Us  Captifs  d'un  inique  '  esclavage^  et  à  rendre  à  leur  patrie 
eeux  qui  en  avoient  été  éloignés.  Son  esprit  fut  sans  cesse  tendu  vers  If 
bien  durant  tout  le  temps  de  sa  vie  ;  par  ses  bonnes  œuvres,  elle  fut  une 
sainte  parfaite.  Comme  elle  est  morte  sans  lignée ,  son  a'teule  a^igée  , 
recofm/Mndftble  par  dou^e  lustres]  ta  renfermée  ici  en  versant  des  larmes 
de  tendresse,      /  .  ■/:.::'. 


c      *     •  ■•       -_-     * 


La  tombe  suivante  ( pi,  X'IX,  n/  i )  ne  doit  pas 
être  séparée  de  celle-ci ,  jpuisqu'on  prétend  i:ju'elle 
Tenfermoit  les  corps  des  compagnons  de  S.  Mau- 
rice (i).  Ce  sarcophage  est  partagé  en  cinq  arcades 


(r)  On  ne  sait  sur  quoi  cettcr^tVadition  peut  être  fondée.  Ce 
tonrhcau  n*a  jau  contenir  l?s*  c6rps><les  confipâgïiùns  de  S.  Mau- 
rice^ puî&que  ta  icgron'rthjébécnne,  qu'il  comltoandoit ,  etoit  com- 
posée de  dix  niiile  hommes.  On  pounroit  dire  que  c'est  ceiui 


.^^^^Hll^HM 


-    1 


CHAPITRE    LXXX.  ITI 

soutenues  par  des  colonnes  torses  ,  avec  des  chapi- 
teaux  corinthiens  :  dans  celle  du  milieu ,  le  Sauveur 
est  assis  sur  la  montagne  sainte ,  entre  deux  de  ses 
disciples.  Les  chrétiens  plaçoient  ainsi  le  Sauveur  sur 
une  montagne,  non- seulement  en  signe  de  puissance 
et  de  supériorité,  m^s  encore  pour  indiquer  la  subli- 
mité de  la  doctrine  céleste.  Les  quatre  fleuves  qui  éii 
découlent,  sont  ceux  qui,  selon  la  Genèse,  sortoient 
du  jardin  d'Eden ,  et  que  les  Pères  de  l'Eglise  re- 
gardent comme  désignant  les  quatre  évangiles ,  qui 
se  sont  répandus  par  toute  la  terre,  ou  bien  les  vertus 
cardinales ,  qui  sont  le  soutien  de  la  religion  et  qui  en 
constituent  la  sublime  morale.  Aux  pieds  de  Jésus- 
Christ  sont  S.  Joseph  et  la  Vierge  (  i  ) ,  qui  repré- 
sentent peut-être  allégoriquement  les  deux  époux 
pouf  qui  ce  tombeau  avoit  été  feit.  On  voit ,  dans  les 
quatre  autres  niches ,  différentes  actions  de  la  vie  du 
Seigneur.  Chaque  groupe  est  ombragé  par  un  pal- 
mier; ce  qui  fait  connoître  Ique  faction  se 'passe 
en  Falestine..  Dans  le  premier  à  gauche ,  on  voit 
peut-être  Jésus.- Christ  qui  annonce  it  S.  Pien^e -le 


II 


d'Exupère  et  cïe  Candide,  les  principaux  officiers  de  ce  corps 
après  Maurice;  mlis  la  tradition  géntfllement  rteçlie' est 'que  fa 
iégioif  ^thébç^nc:  /ut  martyrisée  à  •  Agmna ,  ville*  toisinc  du 
Valais,  nonomcc  aujourd'hui  Saint^-Moriti  en  mémoire  de  tîec 
événement  :  quçique^  comp?.gnons  du  saint,  qui  n'avoient  pas 
alors  rejoint  la  légion,  reçurent  le  mart)TC  àSoleure  et  à  Turin 

'  (i)  J'ff/r^,  t.  Il,  p.  268.  *  ^ 


IJl  CHAPITRE    LXXX:* 

reniement  dont  il  doit  se  rendre  toapable  ;  dfliti 
le  second  ,  il  est  saisi  par  ies  hotrimes  armés  dé 
pierres  ;  dans  le  troisième ,  il  est  entraîné  par  des» 
hommes  armés  de  bâtons  :  le  dernier  groupe  repré^ 
sente  Pilate,  vers  qui  Jésus-Christ  va  être  conduit. 
Ce  gouverneur  est  au  moment  de  le  condamner , 
et  de  se  laver  les  mains  pour  témoigner  que  c'est 
contre  son  vceu  qu'il  le  fait  ,  et  qu'il  se  croit 
absous  par  cette  vaine  pratique  d'avoir  ver^é  le  sang 
innocent.  II  est  assis  sur  son  tribunal ,  devant  lequel 
est  un  marchepied  ;  ce  qui ,  sur  les  ntcmumens 
chrétiens  comme  sur  les  monumeftis  pro&ies  ^  est  u» 
signede  supériorité  et  de  puissance  :  il  aime  tuHique 
et  une  espèce  de  paludammt  attaché  sur  l'épaule 
gauche  avec  une  agrafe  ;  sa  tète  est  ceinte  d'im  dia-^ 
4è|me  orné  de  pierreries.  Constantin  en  avoit  intro^ 
duit  l'usage^  et  les  artistes  croyoient  ne  pouvoir  aiieuie 
exprimer  k  puissance  des  gouverneurs  de  provinces  ^ 
qu'en  les  figurant  avec  les  décorations  impériales  t  c^esft 
pourquoi ,  sur  d'autres  monumens ,  Pilate  a  ia  tèitf 
ca^ime  de  lauriers.  L'esclave  qui  est  devant  lui  ^  est  VétU 
d'une  simple  tunique  retroussée';  ce  qui  désigne  sa 
condition.  Le  bon  Pasteur  est  ordinairement  ainsi 
représenté.  Tous  les  autres  personnages  de  notre  bas^ 
reli^  portent  la  toge.  Cet  esclave  présente  à  faver  k 
Pilate  dans  un  bassin  plat  ;  et  le  vase  d'où  3  Véi^e 
\  Feau ,  a  la  forme  de  ceux  que  les  antiquahres  appellent 

%  simpuyiumf  et  que  nous  nommons  communément 


V 
*■ 

i 


%; 
i 


^-J 


<:hapitre  lxxx.  17^ 

ûiguihe  :  devant  est  un  grand  diota ,  ou  vase  à  deux 
anses,  placé  sur  une  table  à  trois  pieds.  On  remarqua 
au-dessus  des  colonnes,  entre  le  cintre  de  cbaqu6 
arcade ,  un  serpent  qui ,  par  son  enroulement ,  forme 
une  espèce  de  couronne ,  et  à  chaque  extrémité  une 
colombe  qui  becqueté  des  fruits  dans  un  panier. 

II  y  avoit  autrefois  une  frise  ;  mais  elle  n'existe  plus  : 
|e  l'ai  fait  figurer  d'après  Ruffi.  Elle  représente  des 
génies  chrétiens  ou  des  anges  qui  moissonnent  le 
dhamp  et  vendangent  la  vigne  du  Seigneur  :  les 
uns  ont  achevé  de  couper  les  épis  ,  qui  sont  lié^ 
fn  gerbes ,  et  ils  s'apprêtent  à  les  emporter  ;  les 
autres  expriment  dans  un  vase  le  jus  d'une  grosse 
grappe  de  raisin ,  tandis  que  deux  d'entre  etue 
foulent  la  vendange  en  dansant  dans  une  cuve: 
nous  voyons  souvent  les  Faunes  ainsi  occupés  dans 
les  représentations  des  bacchanales  païennes. 

Le  tombeau  suivant  (pi.  LlX^n!  ^^étoît, selon 
la  tradition ,  celui  de  deux  vierges  qui  souffrirent  le 
martyre  avec  S.^^  Ursule  { i  ) .  La  face  est  partagée 
en  sept  arcades  :  celle  du  milieu  est  à  double  cintra 
avec  un  porte-à-faux;  Jésus-Christ  y  paroît  entre 
S.  Pierre  et  S.  Paul  sur  la  montagne  ,  d'où  coulent 
les  quatre  fleuves  (2);  les^  apôtres  sont  dans  les  autres 

'   (  I  )  S.*^  Ursule  et  %ti  compagnes  ont  souffert  le  martyre  près  cîc 
>€oiogiie. 

(a)  Sufrà,  p.  171, 


\ 


}yi  CHAPITRE    LXXX. 

arcades ,  deux  par  deux  ',  excepté  dans  chacune  des 
deux  dernières  où  il  n'y. en  a  qu'un  :  tous  expriment  par 
leur  geste  Talteniion  et  ie  dévouement.  Les  colonnes 
qui  soutiennent  les  arcades,  ont  des  chapiteaux  co- 
rinthiens. Ruffi ,  qui  a  fait  graver  ce  tombeau  (  i  ) , 
n'a  exprimé  aucune  des  beautés  de  l'original  :  les 
figures  sont  bien  sculptées ,  d'une  bonne  proportion  ; 
les  draperies  bien  jetées,  et  indiquant  ie  nu  :  il  doit 
avoir  été  exécuté  par  un  bon  artiste  ;  '  «et  il  peut  être 
lîiis  au  rang  des  meilleures  sculptures  du  temps  où 
ces  tombeaux  ont  été  faits. 

Des  génies  chrétiens  (2)  ,  placés  au  miliieu , 
dévoient  soutenir  la  tessère  ou  tablette  destinée  k 
recevoir  l'inscription ,  et  au-dessus  de  laquelle  est  le 
monogramme  du  Christ.  Des  deux  côtés  sont  des 
dauphins  qui  ont  chacun  quelque  chose  de  rond  dans 
la  gueule;  c'est  peut-être  le  denier  de  César,  qui 
fut  trouvé  dans  le  corps  d'un  poisson.  A  droite,  on 
voit  trois -vases  placés  les  uns  sur  les  autres  :  c'est  le 
signe  du  miracle  de  la  multiplication  des  pains  et 


[i)  Histoire  de  Marseille  f\\ ,  127.    . 

(2)  Cette  frise  étoit  séparée  lorsque  je  visitai  Marseille;  on  Ta- 
voit  remplacée  par  celle  d'un  autre  tombeau  brisé ,  sur  laquelle 
étoit  le  monogramme  du  Christ  entre  deux  colombes  ;  c*est  pour- 
quoi elle  a  été  gravée  séparément  dins  la  première  livraison  de 
mon  atlas,  pi.  XXXVIII ,  n,^  8 :  maisM.deSaint-Vincens  ayant 
reconnu,  d'après  la  figure  donnée  par  Ruffi,  quelle  appartient, à 
ce  monument,  je  me  suis  décidé  à  la  repi^oduire  ici. 


~\ 


jGHAÇITRE.LXXX-  17  j 

des  poissons  à  Beth^aïdé  { i  )  ;  Jésus-Christ  étend 
les  mains  sur  hs  vases ,  et  le  miracle  e^t  opéré.  • 
II  y  a  à  gauche  deux  cerfs  qui  se  désaltèrent  à 
Pun  des  quatre  fleuves  qui  coulent  de  la  montagne , 
et  sur  le  sommet  de  celle-ci  on  aperçoit  une  biche; 
Le  cerf  est  plusieurs  fois  cité  dans  les  livres,  saints, 
où  il  devient  le  sujejt  de  plusieurs  sentimens  moraux  : 
aussi  les  premiers  chrétiens  l'ônt-ils  fréquemmenjt 
figuré  sur  les  lampes ,  sur  les  meubles ,  dans  les  peiii- 
tures  et  les  mosaïques ,  et  sur  les  tombeaux.  Tantôt 
il  est  le  symbole  du  Christ  (2)  ou  des  apôtres  (3), 
tantôt  il  est  celui  des  fidèles  (4)  ou  des  saints  (j)  : 
s'il  cherche  à  se  désaltérer ,  c'est  le  néophyte  qui 
veut  apaber  la  soif  qu'il  a  du  salut ,  et  s'abre^i- 
yer  des  eaux  du  baptême  :  ici  ce  sont  les  chrétiens 
qui  boivent  aux  sources  qui  sortent  du  paradis vJ^ 
c'est  un  symbole  des  secours  que  le  chrétien  qui 
désire  son  salut  peut  trouver  dans  TEvangile.  La 
biche  qui  est  sur  la  montagne  figure  le  Sauveur.  .On 
voit  à  droite  deux  Israélites  qui  portent  sur  leurs 
épaules,  à  l'aide  d'un  bâton ,  l'éijprme  grappe  de 
raisin  qui  prouve  la  fertilité  de  la  terre  promise  (6)  ; 


i«> 


(1)  S.  Math,  xiy,  19;  S.  Luc.  ix,  13;$.  Johan.  vi,  11. 

(2)  S;  AmbROS.  Enarrat.  in  psalm,  XLl, 

(3)à.HlERONYM.//ï  îsaiam.  XXXIV;  BeDA,  in  psalm,  XXV II l. ^ 
(4)  CA5S10D0R.  in  psalm.  XLl. 
-(5)  OlîfGEN.'  lib.  III ,  in  canticum  cant,  a,  9. 
[6)  Numeri ,  XlU  ,  2^, 


Ij6  CHAPITRE   LXXX. 

c'est  ie  symbole  des  biens  infinis  qui  attendent  celui 
qui ,  par  sa  piété  et  ses  bonnes  actions ,  peut  mériteï 
d'être  admis  dans  ie  séjour  des  élus. 

Cette  fnse  est  moins  bien  travaillée  que  le  tom- 
beau même,  et  n'est  certainement  pas  du  même  ar- 
tiste ;  elle  avoit  été  faite  séparément.  On  a  placé  sur 
ce  tombeau ,  au  iieu  du  couvercle  qui  lui  appar- 
tient ,  une  autre  frise  ^pl»  L  VI,  n!  6),  qui  représen  toit 
douze  colombes ,  symbole  des  douze  apôtres  et  des 
premiers  fidèles  ;  il  n'y  en  a  plus  que  dix. 

Un  autre  tombeau  chrétien  (pLLVl,  nf  j)  étoît 
également  célèbre.  On  a  pensé  qu'il  renfërmoit  le 
corps  de  Cassîen ,  que  Marseille  révère  comme  un  de 
ses  saints  9  et  dont  Tabbaye  de  Saint- Victor,  qu'il  avoit 
fondée ,  xonservoit  les  reliques  dans  une  châsse  d'ar-^ 
gent.  La  fece  antérieure  est  partagée  «  cinq  arcades , 
séparées  jSar  des  pilastres  avec  des  chapiteaux  qui 
resseniblent  à  ceux  de  fordre  dorique.  Au  milieu 
est  le  Christ  :  ti'ois  autres  arcades  sont  occupées 
diacune  par  un  de  ses  disciples  ;  ils  écoutent  avec 
admiration  i'esprit  divin  qui  s'exprime  par  sa  bouche. 
Un  homme  vêtu  d^une  tunique  et  d'une  toge ,  et  une 
femme  voilée  ^  élèvent  en  l'air  un  enfant.  On  a  pensé 
que  la  figure  qui  est  à  l'autre  extrémité  est  celle  de 
Cassien,  et  que  cet  homme  et  cette  femme  lui  pré- 
sentent leur  enfant  et  le  mettent  sous  sa  protection  : 
mais  il  est  évident  que  cette  tombe  chrétienne  re- 
présente ,  comme  les  autres ,  un  trait  de  ia  sainte 

Ecriture  ; 


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^ 


CHAPITRE    LXXX.  !77 

Ëcriture  ;  c*est  la  Vierge  et  S.  Joseph  qui  ofirei^t  k 
Dieu  leur  fils  nouveau-né.  Celte  tombe  étoît  autrer 
fois  portée  par  quatre  piliers  (i)  ;  ii  ne  reste  aufourr 
d'hui  que  le  sarcophage. 

Sur  un  autre  tombezvt  (  pi,  LfX ,  n/  ^),  oh  voit 
cinq  apôtres  dans  dés  nid^es  plates,  à  *  peu  ^  près 
comme  sur  celui  de  S.  Mitre  (2}  :  ils  sont  tournés 
vers  le  Christ ,  qui  est  assis  au  milieu;  il  est  san$ 
barbe,  ef  a  la  tête  entourée  d'une  auréole.  Le  boni 
du  couvercle  forme  uAe. espèce  de  fti^e,  sur  laquelle 
il  y  a  douze  agneaux ,  symbole  des  doui%  apôtres ,  qui 
ireprésentent  la  réunion  des  fidèles.  On  remarque  le 
monogramme  du  Christ  sur  un  petit  côté.  J'ignore 
quel  est  le  saint  qu'on  prétend  avoir  occupé  cette 
tombe. 

Le  sarcophage^/?/.  L  VIII,  n^z)  n'est  pas  moins  ipté* 
ressant  :  c'est  celui  d'Eusébie,  abbesse  des  religieuses 
Cassianites.  Au  milieu  de  cannelures  en  spirale , 
semblables  à  celles,  qui  décorent  un  grand  nombre 
<Je  monumens  du  même  genre ,  est  un  médaillon 
qui  contient  un  personnage  vêtu  de  la  toge  :  c'est  sans^ 
doute  celui  à  qui  ce  tombeau  étoit  destiné.  Au* 
dessous  est  un  homme  couché  près  d'un  monstre  qut 
a  une  tète  de  dragon ,  et  dont  la  queue  forme  quel* 
ques  replis  :  c'est  Jonas ,  qui  vient  d'être  rejeté  par 


( I )  RUFFï ,  Hist,  de  Mârmlli ,  tome  H ,  page  126^ 
{2)  Tome  II,  p.  268. 

Tome  III.  M 


^'i-^.    ^ 


*  ^-r^^ 


178  CHA.PJTJIE    LXXX. 

le  poisson  qui  Tavoit  englouti.  Nous  né  voyons  pas 
le  pal  ma  christi  sous  lecjuel  le  prophète  reposa.  Sur 
les  monumens  nqnibreux  qui  retracent  cette  his- 
toire ,  la  figure  du  monstre  est  absolument  la  même. 
Tous  les  commentïiteurs  '  de  l'Ecriture  dissertent 
gravement  siu  l'espèce  du  poisson  qui  avala  Jouas: 
les  plus  fiabiles  décident  que  ce  n'a  pu  être  une 
baleine;  car  ce  cétacée.a  le  gosier  ,trop  étroit,  et 
il  ne  se  trouve  pomt  dans  la  mer  où  le  prophète  fut 
précipité.  Le  plus  grand  nombre  penche  à  croire  que 
c'^tpit  le  grand  requin  (1).  Mais  Jonas  n'auroit  pu 
passer  intact  dans  l'énorme  gueule  de  cet  animal  ^ 
tapissée  de  dents  en  forme  de  scie  ;  et  quand  cela 
seroit,  il  n'y  auroit  pas  vécu  un  moment  :  ce  pro- 
dige n'a  donc  pu  s'opérer  sans  la  volonté  de  Dieu. 
Cependant  les  artistes  chrétiens  ,  n'ayant  aucune 
idée  du  monstre  qui  fut  en  cettet  occasion  l'instru* 
ment  de  la  puissance  xlivîne ,  en  .ont,  à  l'exemple 
des  Grecs ,  composé  un  imaginaire  :  ils  lui  ont  donné 
une  tête  de  fantabie  avec  une  gueule  decrocodile  (2), 
et  la  queue  d'un  poisson. 

Au  côté  gauche  du  sarcophage,  on  voit  un 
homme  debout  qui  paroit  saisir  quelque  chose  qui 
tombe  du  ciel.  Je  présume .  que  c'est  la  nHume. 


(1)  Squalus  carckarias, 

(2)  Les  chrétiens  ont  lusi  donné  une  gueule  de  crocodifc  au 
dragon  des  Grecs.  *  . ,    . 


■^   w^-*. 


«MH^ÉÉib^MMi 


CHAPITRE   hX^X^  \J^    , 

envoyée  par  le  Seigneur  aux  Istaélîtes  pour  apaiser 
leur  faim.  Au  côté  droit,  un  autre  tient  une  baguette  ; 
et  devant  celui-ci ,  il  y  en  a  ^n  troisième  agenouillé, 
qui  est  coiffé  d'un  bonnet. 

Rufii  (  I  )  et  Grosson  {2) ,  qui  ont  fait  figurer  ce 
tombeau  de  la  manière  la  plus  inexacte  ,  n'ont  pas 
hésité  à  reconnoître  ici  les  cérémonies  de  i'affrah- 
chîssement.  La  comparaison  de  ce  bas  -  relief  avec 
beaucoup  d'autres  sur  lesquels  Li  même  action  est. 
représentée ,  suffit  pour  prouver  que  c'est  Moïse 
qui  frappe  le  rocher  avec  sa  baguette ,  et  qui  en  fait 
sortir  i'eau  rafraîchissante  que  les  Israélites  boivent 
avec  avidité.  Sur  beaucoup  de  monumens ,  les 
Hébreux ,  et  le  Sauveur  lui-même ,  sont  coiffés  du 
bonnet  que  nous  voyons  ici. 

Les  habits  du  personnage  placé  dans  le  mé- 
daillon indiquent  le  v.*  ou  le  vi.'  siècle  ;  sa  toge 
est  bordée  du  latus  clavus.  La  construction  de  ce 
tombeau  est  donc  antérieure  de  plus  de  deux  cents 

,      -  •  •  •       * 

ans  au  temps  où  S.*""  Eusébie,  religieuse  Cassianiie,' 

y  a  été  déposée.  Son  épitaphe  étoit  sur  une  pierre 

séparée ,  qui  est  aussi  conservée  dans  le  musée  ;  la 

voici  : 

Thicrequiescet  in  pa 
ce  evsebia  religiosa  c^ 
magna  ancella  c^l  qvi 


(  I  )  Histoire  de  Marseille ,  page  128. 
(a)  Antiquités  di  Marseille ,  pi.  XXI. 


M  X 


^8o  CHAPITRE   hXXX. 

IN  SECVLO  AB  HENEVNTE 
ETATE  SVA  VIXIT 
SECOLARE^ANNVS  XIIII 
ET  VBI  A  C^O  ELECTA  EST 


IN  MONASTERIO  ScS  CYRICI 
SERVIVET  ANNVS  QVINQVA  , 

GENTA  RECESSET  SVB  tsi^lE 
'^   .  PRlC^KAL»  OCTOBR*  INÈkl  SEST* 

Jci re}wse  {i)  en  paix  Eusébie ,  religieuse ,  grande  servante  du  Sei^ 
ffteur  (2)^  qui  a  passé  dans  le  siècje  les  quatorze  premières  années  (  j) 
de  sa  vie  comme  séculière ,  et ,  après  avoir  été  élue  par  le  Seigneur  p  I'a 
servi  cinquante  ans  dans  le  monastère  de  S,  Cyr  :  elle  est  morte  la 
veille  des  calendes  d'octobre ,  dans  la  sixième  indictton.  ^ 

Au  bas  de  cette  inscription ,  il  y  a  un  vase 
entre  deux  colombes  qui  vont  y  plonger  leur  bèc 
(pi.  LVIII,  n."  ^ )  :  ce  sont  les  fidèles  qui  s'a- 
breuvent de  Teau  pure,  symbole  deJa  foi  enseignée 
par  Jésus- Christ.  Ces  colombes  mystiques  ont  la 
queue  semblable  à  celle  du  paon. 

On  ne  sait  rien  de  positif  s^r  S***  Eusébie.  Son 
épitaphe  fait  voir  qu'elle  a  vécu  soixante-quatre  ans  ; 
mais  elle  ne  nous  apprend  pas  Tannée  de  sa  mort* 
L'incorrection  de  Torihographe  ait  placer  l'époque 
de  cette  inscription  dans  le  viil.*  ou  le  ix.*"  siècle. 


(  I  )  Requiescet  pour  requiesdt, 

(i)   Qui  pour  quœ  ,  ancella  pour  ancilla. 

{})  Ab  heneunte  pour  ab  ineunte,  secolares  fom  secul^es,  annus 
pour  annos. 


MÉ^h.«jÉMteiteMBMÉIriMift 


La  tfâdhîon  prètertd  que  cette  aamte  abbesse  ftit 
martyrisée  par  les  Sarrasins  :  qudques  légendes  rap-^ 
portent  qu'elle  et  ses  religieuses  se  coupèrent  le  tiet 
pour  échapper  «ux  violences  de  ces  barbares  ;  èl 
comme  ia  figure  du  médaillon  a  le  ne»  mutilé  ^  ou 
par  aceident,  ou  pour  être  conforme  à  la  tr^ition, 
ie  peû(Je  croyoit  y  vénérer  {'image  dt  4à-  pudique 
Vierge  du  Seigneur. 

Le  tombeau  qu'on  dit  être  celui  de  S*  Chrysanthè 
et  de  S.'*  Dôrïe  (pi.  L  VÏlI.fig,  4),  èsf  partage  en  sept 
arcades  :  celle  du  milieu  noua  fait  Voir^tine  montagne 
d'où  sortent  deux  sources  auxquelles  deux  cerfs  se 
désaltèrent  ;  sous  les  autres  arcades  sont  les  apôtres 
dans  différentes  attitudes  ;  dans  i'avânt- dernière  il  y 
a  un  coq,  qui  désigne  S.  Pierre.  Les  piliers  de  ces 
arcades  sont  formés  par  des  troncs  d'arbres ,  et  le 
feuillage  de  ces  arbres  en  fait  la  Vôâte.  Aux  deux 
extrémités  un  serpent  s'enroule  autour  de  l'arbre,  et 
menace  de  dévorer  de  petites  colombes  dans  leur 
nid  ;  c'est  le  symbole  dii  démon ,  cîontré  lés  embûches 
duquel  les  chrétiens  doivent  toujours  être  sn  garde. 
Le  limaçon  qui  monta  suç  un  autre  arbre  en  portant 
sur  son  dos  sa  fragile  maison,  indique  la  prudence 
que  le  chrétien  doit  mettre  dans  joutes  ses  actions. 

Le  tombeau  de  l'abbé  Isarn  (fl.  XXXVI,  w/,  4) 
n'est  pas  un  des  moins  curieux  :  il  éloît  plate  debout 
dans  la  crypte  de  S.  Victor.  L'abbé  est  vêtu  d^une  lu- 
nique,  ettiçnt  k  la  main  un  bâton  en  forme  de  béquile, 

M  3 


;i . 


ïgjl  CHAPITRE    LXXXy 

sur  la  traverse  duquel^  on  lit  le  mot  VIRGA;  c'est  fa 
crQsse  dçs  évéqijes  grecs ,  appelée  gamma  à  cause  de 
fa  ressemblance  avec  la  lettre  greçqiie  de  ce  nom  ;  ce 
ji|uî;6ih  penser-qu'un  côté,  de  la  poignéie  devoît  être 
pijus  long  que  TamtetiLa  forme  de  ç^ttejbéqiiUIè  proiive 
f^%:  cette^  éppque  l'abbaye  de  Saîiït-tV içtor  conser- 
voit  encore  qÇfcelques  ufeagesde;  Tégljise  grecque.  Au- 
tour de  la  tombe  ,i  et  sur  la  pierre  carrée  qui  couvre 
le, corps,  oïl  litj'inscriptîon  suivàntç,  que  j'ai  fait 
figurer  à  cause,  d^  sa  singulière  disposition  et.  de 
1^  forme  de  quelques  lettres  :         . 


SAtRA  VIRI  CLARI  SVNT  HIC  STTA  PATRIS  ÏSARNI 

MEMBRA,  SVIS  STVDIIS  GLORIFICATA  PtlS, 
QV^E  FELIX  VEGETAJ^S  ANIMA  PROYEXIT  AD  ALTA 

MORIBVS  EGREGIIS  PACIFICISQUE  ANIMIS  : 
NAM  REDIMITVS  ERAT  HIC  VIRTVTIS  SPECIEBVS 

VIR  DOMINI  CVNCTIS,  PRO  QVIBVS  EST  HILAJIIS,    • 
qyjE  FECIT  DOCyiT  ABBAS  PIVS  ATQVE  BEATVS, 

DISCIPVLOSQVE  SVOS  COMPVLIT  ES5E  PIOS. 
SIC  yiVENS  TENVÏT  REGIMEN  ;  SED  CLAVDERE  LIMEN 

COMPVLSV^VITE  EST  ACRITER  ET  MISERE, 
BEXIT  BI3  DENIS  SEPTEMQVE  ÏIDELITER  ANNIS, 

COMMtSSVMQVE  SIBI  DVLck  (  sic )  GREGEM  DOMÏN! 
RESPVIT  OCTOBRISTRÀNSACTO  OCTAVO^wV^CALENOAS, 

ET  CEPIT  RVTILI  REGNA  SVBlkÉ  POLI.  / 


V 


ici  reposent  les  vén/rahhs  memhres  du  père  Isarn ,  homme  célèbre,  qui 
les  glorifia  par  sa  fervente  prêté,  et  qui ,  lés  fortifiant  avec  succès  de 
toute  Ja  vigueur  de  son^ame,  les  éleva  ju^qu  aux  deux  par  ses  tmeurs 
exemplaires  et  la  douceur  de  son  esprit  :  car  cet  hotnme  du  Seigneur 
éto'd  doué  de  tous  les  genres  de  vertus,  et  c'est  par  elles  qu'il  jouit  au)  our- 
d'hti  de  la  félicité.  Ce  pieux  et  bienheureux  abbé  joignit  l'enseignement 
à  U  pratique  t  et  il  iut  persuader  À  ses  disciples  dedevenirpietot.  Telle' fut 


y 


■^^^^aj 


I 


Chapitre  lxxx:  i8î 

la  cenJuîte  qu^il  ttht  durant  sa  vit;  mais  il  a  été  contraint  de  terminetif 
fouragmstmftît  sa  carrière  au  milieu  des  misères  humaines.  Après  avoir^ 
gouverné  fidèlement  pendant  vingt-sçpt  années,  il  4^,,  le  8  des  calendes 
Moctohre  (i),  abandonné  avec  douceuf  le  troupeau  dié  Seigneur  tfUÎ  lut 
avoit  été  confié,  et  s* est  élancé  vers  les  royaumt  s  célestes  [%),  .  . 


i  ^  >j  '  t 


La  première  figne  de  finscriptîoh  est  séparée  ; 

w  -         -  • 

on  y  lit  : 


1 


OBIIT    ANNQ  MXLVIII    INDICT.  I,  ^PACTA  IH. 


^.  t 


//  est  mon  l'an  lo^  ^  le  premier  de  l'indiction{^) ,  et  le  troisième  d^ 

V^acte[^),    \     \  _     ^ 

On  lit  ensuite  dans  l'inscription  "qui  entoure  la 
tête  et  les  pieds  :      * 

CERNE,   MORS   QUE'  LÇX*  HOA|Îî1;NI  NOXA  PROTXÎPLASTLIN  Mit 
DEFUNCTO  INEST  MISEROî  SICQUE  GEMENS  CORDE,  DIC,  DlC: 

Dêus  ,  Huic  M15ERÉRE.  Amen. 

I  r 

Vq^'ei^  comme  ta  mort,  qui,  par  lé  péché  du  premier  homme ,  est 
'devenue  une  lot  ,•  à' exercé -son  empire  sur  moi,  malheureux  défunt;  et 
dites,  dites  donc  ai'ec  un  caur gémissant  :]  Dieu  ,jqye^pitié de  lui.  Ainsi 
soii-U.  ^     ,  ,         •    . 

'■    Isam  étoîjt  né  à  Toulouse;  il  fut  déterminé,  par 
ïes  prédications  de  fabbé  Gaiicelîn ,  à  prendre  l'habit 


*i^ 


(i)  Le  24  septembre.  RuFFXr  Hist.  de  Marseille,  II,  148,  al 
donc  tort  de  placer  la  date  de  sa  mort  au  2  septembre. 

(2}  Cette  inscription  a  été  copiée  de  la  manière  la  plus  fau- 
tive par  RUFFI,  Hist.  de  Marseille,  \l»  129  ;  et  H  n*en  a  pardonné 
la  figure.  ^      i 

(:))  Llndk^on  étoit  une  révc^utîon  de  quinze  années. 
,    (4)  L  epacte  est  fa  série  de  onze  jours  qu  on  a  été  obligé 
d'ajouter  à  ^l'ani^  iun«irc  ^   pour  1»  reudre  égale  à    Tannée 
solaire. 

M  4 


|84  CHAPITRE     hXXX^ 

monastique,  et  U  entra  dans  Tabbayè  de  Saint- Victor, 
dont  H  fut  nommé  abbé  après  ia  mort  de  Wifret.  H 
$e  distingua  tellement  par  sa  piété  et  sa  bienfiiîsance , 
qu'il  fut  regardé  comme  un  saint ,  et  qu'on  lui  attri- 
bua  des  guérisons  miraculeuses.  En  1476 ,  Louis  XI 
envoya  trente  écus  d'or  en  offrande  à  son  tombeau. 

Le  musée  possède  aussi  quelques  plâtres  moulés  , 
parmi  lesquels  on  distingue  TApoilon  du  Belvédère ,  la 
Vénus  de  Médicis ,  la  Vénus  Callipy^e ,  lés  Lutteurs, 
le  Torse,  la  copie  du  sarcophage  d'Aix  qui  représetite 
facçôuchement  de  Léda  (  1  ) ,  et  un  Amour  du  célèbre 
sculpteur  Canova.  Sur  un  marbre  qui  étoitauxCapu^ 
cins ,  on  voit  lès  armoiries  du  roi  de  France  mi- partiel 
avec  celles  de  Médicis,  et  les  armoiries  du  grand-prieur. 

Depuis  mon  départ  ]  les  tableaux  ont  été  placés 
dans  la  salle  qui  leur  étoit  destinée  :  ils  sont  aujour- 
tf hui ,  d'après  le  catalogue  qui  en  a  été  publié  (2}  ^ 
au  nombire  de  cent  soixante-dix.  Cette  collectiori 
è'est  formiée  de  la  réunion  de  ceux  qui  décoroîent 
ïes  églises  ;  elle  offre  les  noms  dfe  grands  ttiattres  du 
plusieurs  écoles. 

On  y  voit  une  sainte  FamiUe  et  un  Christ  r^ffî, 
xjui  sont  de  bons  ouvrages  du  Pérugin ,  très-impor- 
tans  pour  suivre  les  progrès  de  Tart  de  la  peintiirç 
et  remonter  aux  commencemens  de  Técoïe  italienne* 


■  •>  I  i  I  II" 


M     ■-  f     I  'J 


ru   ï    ifii  fil  M  iVi- 1  f  1 1    I 


(i)  St^àiVbmt  II,  page  244. 

(2)  CatalogKf  da  tMtaux  qui  comfim»f  le  misénie  Mantille  * 


\ 


iMi— 


CHAPITRE   LXXX.  l8y 

Dans  le  premier  tableau,  la  S.**"  Vierge  est  assise 
sur  un  trône  élevé  sous  un  portique;  elle  a  son  fils 
Qhéri  sur  ses  genoux;  S."  Anne,  sa  mère,  placée 
derrière  elle ,  posç  ses  mains  sur  ses  épaules  ;  S."  I^li*- 
sabeth  tient  le  petit  S.  Jean  dans  ses  bras,  et  près 
d'elle  sont  S.  Joseph  et  S,  Joacfiim.  Le  nom  de 
chaque  personnage  est  peint  sur  l'auréole  qui  en- 
toure sa  tête.  Le  dessin  de  ce  tableau  est  correct,  et 
il  est  utile  dans  Técole  pour  faire  connoître  aux  élèves 
la  première  manière  de  Pérugin  :  l'architecture  est 
d'un  bon  style. 

Le  second  tableau  est  de  {^  seconde  manière  de 
ce  peintre.  Le  Christ  mort  est  étendu  sur  les  genoux 
de  sa  mère,  dont  la  figure  a  une  expression  de  dou- 
ieqr  très-bien  sentie  ;  S.  Jean ,  à  genoux ,  soutient 
sa  tête  ;  Magdeieine  est  à  ses  pieds ,  qu'elle  mouille 
de  ses  larmes  ;  d'un  côté  est  S.  Nicodème ,  de  l'autre 
S.  Joseph  d'Ârimathie.  Le  fond  est  un  portique  d'un 
l)Ctfi  style ,  qui  laisse  apercevoir  un  paysage.  La  com- 
position de  ce  tableau  est  très-belle  :  le  coloris  est 
vigoureux  ;  il  a  malheureusement  soufFert ,  et  l'on  y 
remarque  un  grand  nombre  de  retouches.  Mais  si  Ton 
reconnoît  l'authenticité  des  tableaux  du  Pérugin  , 
celle  du  S.  Jean  camposant  VApQcalypst,  qu'on  attri» 
bue  à  Raphaël ,  a  été  contestée  ;  on  croit  cependant 
y  reconnoître  la  seconde  m^nièae  de  ce  maître  : 
it  faut  avouer  que  ce  tableau  a  été  très-maltraité  fet 
très-mal  réparé.  S.  Jean  est  assis  sur  l'aigle,  et  H 


/ 


l8^  CHAPITRE    LXXX. 

écrit  sur  une  tatlette  qu'il  tient  de  la  main  gaucfce  ; 
lés  formes  sont  régulières  et  bien  contre-posées ,  et  les 
draperie;^  majestueuses.  L'artiste  a  placé ,  au  bas  du 
tableau,  une  vue  de  la  ville  de  Castello.  On  ne  peut 
pas  assurer  non  plus  qu'une  Noce  de  village,  qu'on  dit 
être  d'Annibal  Carrache ,  soit  réellement  de  lui  :  il  en 
est  de  même  d'une  Magdeleine ,  qu'on  attribue.au 
Dominiquin.  Quelques  bons  tableaux  de  l'école  ita- 
lienne se  font  remarquer  dans  ce  musée  ;  tels  sont  les 
Suivons  :  un  Hermite  contemplant  une  tftc  de  mort,  par 
Saivator  Rosa  ;  un  Crucifix ,  par  Solimène;  un  Christ 
mort,  entre  deux  //w^fJ^parleCaravage;  la  Charité  ^  et 
trois  Cavaliers ,  par  Paul  Véronèse;  une  Construction 
dt  VArthe ,  de  Bassan  \  Hector  disant  adieu  aPriam , 
par  Guerchin.  Les  figures  de  ce  tableau  sont  plus 
grandes  que  nature  ;  c'est  une  scène  de  nuit  :  un  jeune 
homme  tenant  un  flambeau  allumé  éclaire  le  tableau  \ 
Hector  et  Priam  sont  richement  vêtus.  L'efFet  de  nuit 
est  bien  senti  ;  le  coloris  est  bon  :  mais  Je  tableau, 
pour  les  formes  et  les  costumes,  offre  les  mêmès^ 
défauts  que  tous  les  autres  ouvrages  de  ce  peintre. 

On  possède  de  Rubens  une  Flagellation ,  qui  est 
un  de  ses  bons  ouvrages ,  une  Adoration  des  bergers , 
une  Résurrection  j  et  une  Chasse  au  sanglier  ^cj^i  mérite 
d'être  décrite.  Le  principal  objet  du  tableau  est  un 
chasseur  nu ,  poursuivi  par  un  sanglier  :  sa  lance  est 
brisée,  et  if  n'en  peut  présenter  que  le  tronçon  à 
l'animal.  L'expression  de  terreur  de  cette  figure  est 


> 


CHAPITRE    LXXX,  187 

du  pitis  grand  effet.  Deux  chasseurs  arrêtent  ce  san- 
glier, avec  leurs  lances;  pn  iroisième,  à  cheyal ,  te 
perce  de  son  ép^  ;  deux  chiens  ont  saisi  i'aninlal^ 
d'autres  sont  morts,  Rubens  est  à  cheval  aii  mitied  de 
ses  deux  femmes.  Ces  figures  ne  prennent  aucune 
part  à  l'action ,  sans  doute  parce  que  ie  peintre  a  craint 
de  nuire  à  la  ressemblance  :  i'exf)ressionesttouteTéunie 
sur  le  premier  chasseur.  Le  piqueur  qui  ^onne  du  cor 
pour  appeler  le  reste  de  la  troupe,  a  été  également 
soigné;  ie  coloris  a^iimé,  l'action  des  veines  et  des 
muscles,  indiquant  bien  ses  efforts.  Au  premier  coup- 
d'œil,  la  composition  ne  surprend  pas;  mais ,  enl'exa4 
minant  >  on  trouve  que  tout  est  beau ,  que  tout  est  fini  : 
Je  coloris  est  admirable;  le  ton  local  est  argenté. 

Parmi  les  autres  tableaux  des  écoles  allemande  y 
flamande  et  hollandoise,  en  distingue  un  Paysage , 
par  Breugel;  un  Christ  mort  y  sur  :Us.  genoux  de  là 
Vierge, '^2LX  Van  Dyck;  la  PécAe  mira€uleuse,  une 
Sibylle,  par  Jprdaens  ;  rAss(imptim  ,  par  Philippe 
de  Champagne;  Enée  a  Carthage,  par Lairesse^  un 
Philosophe  lisant ,  pur  Skzlken. 
.  '  Les  tableaux  de  l'école  française  sont  en  plus  grand 
nombre  que  les  autres.  Plusieurs  sont  insignifians, 
et  ne  méritent  pas  l'honneur  d'être  iK)mmés  :  nous 
excepterons  une  Adoration  desiergers ,  par  Mignard; 
la  Présentation  au  temple  ;  par  le  Sueur.'  Les  figures 
de  ce  tableau  sont  plus  petites  ,que  nature.  La,  pose 
du  prêtre  q|t  grave  :  f  exprçs^on  de  >a  tête  ièst 


t88  CHAP.ITRE    LXXX. 

pleine  de  dignité  ;  elle  est  levée  vers  le  Père  étemrf^ 
qui  est  porté  sur  un  groupe  de  trois  anges  :  ia  Vierge 
et  S/*  Anne  sont  à  genoux  sur  le  même  plan  ;  S.  Jo-» 
seph  et  quelques  autres  personnages  sont  sur  le  second 
plan*  Ce  tableau  est  éclairé  par  les  rayons  de  Tén- 
fant  ;  ie  fond  Représente  l'intérieur  d'pn  temple.  La 
composition  est  facile,  l'effet  harmonieux.  Ce  tableau 
a  un  vrai  mérite*  Li  Ctnturion  dîmandûnt  a  Jésus^ 
Christ  la  guérison  desMJih ,  et  la  Ptsclne  miraculeuse^ 
sont  des  ouvrages  du  respectable  sénateur  Vien. 

Ce  musée  renferme,  en  outre,  une  smte  nom?' 
Breuse  de  productions  des  plus  célèbres  peintres 
marseiilois,  Puget ,  son  fils ,  et  Serres.  Les  plus  beauit 
tableaux  de  Puget  sont,  le  Baptême  de  Constantin ^ 
celui  de  Clovis^  et  le  Sauveur  du  mande,  qui  étoient 
à  la  Major.  Ce  dernier  tableau  est  regardé  comme 
le  chef-d'œuvre  de  ce  peintre  :  le  Sauveur  est  assit 
mafesmeusement  sur  un  trône  de  nuages;  de  la  main 
gauche  il  montre  le  ciel ,  et  ta  droite  est  appuyée 
sur  son  genou  ;  la  tête  est  d'une  forme  noble  et  d'une 
expression  touchante  ;  le  manteau  bleu ,  qui  sert  de 
draperie,  est  richement  dessiné;  la  tunique  est  d'un 
rouge  pâle  dans  les  clairs  [  pour  conserver  la  masse 
dans  le  centre  dû  tableau  ;  cinq  anges  sont  groupée 
avec  grâce  autour  du  Sauveur.  Ce  tableau  n'attire  pas 
seulement  les  regards  par  l'effet  du  coloris,  il  est  encore 
d'un  dessin  mâle  et  vigoureux  :  il  fait  voir  ce  qu'au* 
roit  été  Puget,  s'il  ne  s'étoit  adonné quîà la  peinture. 


J 


I 


CHAPITRE    LXXX.  l8^ 

^  II  y  a  de  Puget  Iç  fib  une  Présentation  et  deux 
Visitations.  Serres  est  celui  dont  on  a  le  plus  grand 
nombre  de  pemti;res ,  et  néanmoins  son  nom  est 
presque  ignoré  ;  il  n'étoit  pourtant  pas  tout-à-fait 
sans  mérite  :  il  est  vrai  que  sa  couleur. est  terne  et  peu  * 
agréable  ;  cependant  on  voit  avec  quelque  plaisir  son 
Martyre  de  S.  Pierre»  Le  dévcHiement  que  cet  artiste 
a  montré  pendant  la  peste  de  Marseille ,  l'effrayante 
peinture  qu'il  nous  en  a  laissée,  auroient  dû  suffire 
pour  arrachet  son  nom  à  cet  injuste  oubli  (i).  Le 
musée  possède  de  lui  vingt-un  tableaux  :  h  Martyre 
de  S.  Pierre,  que  je  viens  de  citer,  est  le  meilleur; 
quatorze  représentent  la  vie  de  S.  François. 

JI  y  a  aussi  dans  le  musée  quelques  portraits.  On 
remarque  ceux  de  M.  le  Bret,  président  au  parle- 
ment d'Aix ,  par  Daret  ;  de  M.  de  Saint' Fiorentin , 
par  Toque  ;  de  Ninon  de  l* Enclos ,  de.  Henri  duc  d^ 
Savoie,  de  Jean  Racine,  tx  du  Maréchal  de  Villars» 
Ce  musée  est  sous  la  direction  de  M.  Goubaud^ 
membre  de  l'académie ,  et  prc^esseur  de  dessin  dMS 
différentes  écoles.  C'est  à  la  complaisance  de  co 
jeune  et  habile  artiste  que  je  dois  des  notes  sur  fes 
meilleurs  tableaux  du  musée^  ^t  les  d^simis  de  pIu<-> 
sieur»  sarcophages  chrétiens.    •> 


^«■-«M 


^i)  Le  nom  <îe  Serres  ne  se  trouve  point  dans  les  Dkdonnatres  des 
artisus  de  FUESLY  ,  de  PlLKlNGTON  et  de  FuOA  ;  ^  n'est  pas. 
même  dans  le  Dictumnaire  des  illustres  Provençaux;  et  M.  ÇUYSl'a 
seulement  cixi  danvl'ouvrage  intitulé  Marseille  ancienne  et  moderne. 


CHAPITRE    LXXXI. 

Description  de  Marseille. — Quartier  neuf. — La  Cane- 
bière.  —  Rues.  —  Théâtre.  —  Abbaye  Saint-Victor. 
—  La  ville  vieille  ;  ses  habitans.  —  La  Major.  —  Eta- 
blissement du  christianisme  en  Provence.  —  Ancien 
temple  de  Diane.  —  Pilastres  prétendus  antiques.  — ; 
Reliques.  —  Tableaux.  —  Baptistère,  par  le  Puget.  — 
Sarcophage.  —  Crosse.  —  Histoire  de  S.  Lazare  en  bas- 
Telief.  —  Maison  de  T.  Anrjius  Milo  ;  son  bustèl — 
Hôtel-de-ville.  —  Ecusson  sculpté  par  le  Pùget.  — 
Statuçde  Pierre  Libertat  ;  son  histoire.  —  Tableau  de 
Serres  ;  Peste  de  Marseille.  —  La  Consigne.  —  Bas-^ 
relief  du  Puget.  —  Boutiques.  — Vaisseaux. — Tableau 
de  David, 

ijA  nouvelle  ville  de  Marseille,  car  on  peut  appeler 
ainsi  la  réunion  des  édifices  qui  ont  été  bâtis  vers  la 
fin  du  dernier  siècle,  a  beaucoup  de  noblesse  et  de 
magnificence.  Elle  commence  à  la  moitié  du  grand 
cours:  là  est  le  quartier  de  laCanebiere,  nommé  ainsi 
parce  quïl  a  été  bâti  sur  des  champs  qui  produîsoient 
du  chanvre  (  i).  La  grande  rue  de  ce  nom  est  bordée 
de  boutiques  richement  fournies  ;  les  maisons  y  sont 
très-élevées  ,  et  d'une  architecture  uniforme  :  à  son 
extrémité  ,  on  voit  flotter  les  vaisseaux  dans  le  port. 

(i)  Le  chanvre  s'appelle  en  Provence  canébé,  mot  évidemment 
dérivé  du  grec  xtu/vctStç^  cannabis. 


■!■■■ 


CHAPITRE     LXXXI.  ipi 

Lorsque  les  riches  négocîans  eurem  commencé  k 
bâtir  dans  ce  quartier  d'après  un  plan  régulier  ,  il 
acquit   erîcore  un  accroissement   considérable  par 
raddîtîon  de  l'arsenal  des  galères  ,  qui  occupoit , 
à  l'est  du  port,  autant  de  terrain  que  le  tiers  de  la 
ville.   Le   roi   céda  cet'  arsenal  à  une  compagnie 
pour  six  millions ,  et  on  envoya  les  galères  à  Tou- 
lonw    La  compagnie  combla  cette  partie   du  port 
avec  les  décombres  de  l'arsenal ,  et  vendit  le  ter* 
rain.  La  triste  demeure  des  forçats  fut  remplacée 
par  de  beaux  hôtels ,  et  le  luxe  règne  aujourd'hui 
où  habitoîent  autrefois  l'opprobre  et  la  misère.  Les 
rues  sont  bien  alignées  ,  bien  pavées  ,  bordées  de 
trottoirs;  il  y  en  a  trois  principales  dans  toute  la 
longueur  de  la  ville  :  elles  sont  traversées  par  un 
grand  nombre  d'autres  ;    ce  qui  forme  de  grands 
massifs  de  maisons,  qu'on  nomme  îles.  Ces  diffé- 
rentes îles  sont  numérotées  ,  et  les  maisons  qui  les 
composent  ont  aussi  un  numéro  particulier.  Cet  usage 
existe  dans  toute  la  Provence  :  peut-être  vient- il 
du  Comtat ,  où  les  papes  l'avoient  introduit  ;  car  on 
sait  que  la  ville  de  Rome  étoit  autrefois  ainsi  par- 
tagée. Quelques-unes  dé  ces  îles  sont  d'une  architec- 
ture uniforme  ;  il  est  fâcheux  qu'on  n'ait  pas  suivi  le 
même  plan  pour  toutes  les  autres.  On  craint  cepen-> 
dant  que,  dans  le  plan  de  ce  quartier,  la  salubrité* 
n'ait  été  sacrifiée  à  la  magnificence  :  pour  garantir  la 
ville  de  la  trop  grande  action  des  vents  et  du  soleil 


L 


tpl  CHAPITRE   LXXXI, 

levant ,  peut-être  auroit^on  dû  tracer  les  tues  dans 
la  direction  du  levant  au  couchant ,  et  non  dans 
celle  du  nord  au  sud. 

La.  principale  rue  est  celle  de  Beauvau ,  cjui  a 
pris  le  nom  du  gouverneur  de  Marseille  au  temps 
où  elle  a  été  ouverte,  Le  théâtre  est  à  son  extrémité, 
sur  une  grande  place ,  et  entièrement  isoi4:  la  façade , 
ornée  de  colonnes  et  surmontée  d'une  attique ,  est 
assez  belle  ;  mais  le  toit  qui  s'élève  au-dessus  fait  un 
mauvais  effet.  On  croiroit  voir  VOdéon  de  Parb  «t 
la  rue  qui  y  conduit.  Les  corridors  sont  trop  étroits  ; 
mais  rintérieur  delà  salle  est  très-^beau.  Le  spectacle 
est  toujours  fort  suivi  :  on  y  fome  le  grand  opéra, 
on  y  représente  des  ballets  d'action  ;  et,  de  même  que 
dans  toutes  les  ville^s  du  premier  ordre ,  le  goût  domi* 
nant  s'y  déclare  pour  ce  dernier  genre  de  représen- 
tation ,  qui  porte  un  coup  funeste  aux  progrès  de 
i'art  dramatique. 

C'é toit  dans  ce  quartier  qu'étoit  l'antique  abbaye  de 
Saint- Victor ,  dont  on  attribue  la  fondation  à  Cas- 
sien  vers  Tan  4o8 ,  et  qui  avoit  été  bâtie  au  milieu  de$ 
champs.  Les  religieux  qui  Thabitoient  étoient  au 
nombre  de  cinq  mille  :  c'étoît  de  ce  monastère* 
et  de  celui  des  Iles  d'Or  qu'on  tiroit  ceux  qui  étoient 
destinés  à  réformer  les  abbayes.  La  sainteté  de 
ce  cloître  avoit  fait  donner  à  tout  le  terrain  ^u'H 
occupoit,  le  nom  de  Paradisus  :  c'est  pourquoi  la 
plus  longue  rue  du  quartier  neuf  de  Marseille ,  qui 

passe 


CHAPITRE    I.X.XKÎ-  19} 

pqs^e&ur  cet  anpi^  §<)îi,  ?$^^ppe4éela  md^.Parndi^. 

Une  antique  relîgioaavoit  cQnsacifé  ,cq  monastère  t 
les  reliques  de  scm  riche  irésôr  éloient  célèbres.  Ses 
religieux,  siécul^isé§  ^n ri 7 39,  pQ»to|em  lè  titre  dé 
fomtes^.  U  a  été  «létruit.  ;  et  les  anciens  sai;çophageé 
qp'il  E^nferiiaoît ,.  et  qjai  som  les  moaumem  de  la  piété 
dps  pjfeintièrs  chrétiens  de  Marseille,  Moment  au  jour* 
d'hui ,  comiiie  an  \'a  vri  ^  h  wmée,  de  cette  ville  (  i  ).- 
Après  avoir  visité  \^  iK>uveauK  tfuartiers ,  nous 
patcQ^mm^Vannertfif^nlJjS.  Elle  est  bâtie  sur  une 
longue  coUhie  ,.à  iîouçst  <Jû  poHlyh  distribution 
en  est  la»  mêune  que  celle  de  h  viUe  neuve  :  elle  est 
aussi  divisée  par  trois  grandes  rues  ^  traversées  elles- 
mêities  par  d*aûtres  qui  forment  des  îles  ;  mais  les  rues 
se  dirigjent.de  J'est  h  fouest.  Presque  toutes  soiit 
noires,  iOjdes>  anguleuses,  ^e$  et  puantes..  Le  grand 
nombre  de  puits  empêche  d'établir  desegouts;.  ce-? 
pendaç^t  ç'e^l;  un préjugé  de  croire  que  >  quand  même 
€es*ëgoutS'  seroient  Bien  construits  ^  îes  pùîis^seroient 
corrompus  T  de  lâ  s'esf  èt2Lh]i  le  sale  et  insalubre  usagé 
de  pgfîçrs a  chaque  raatiii.eît;. chaque  spîr,  les  immiQïiT 
dices^dons  les  rui8B;eau)c-v  teplus  souvenVori  fes  jetoit 
par^s  fenêtres  1  ' çni^rïint pûsiare^  X\ht  H'^^ 
vant  de  :  près  la  pairolè,  on  enjç^;i4Qîfj,,par~lput  ré-: 
peler.  les:  rimprécations  de  D.i  J^apKèt'tfArménieî 
Lâvfeilàtfrë'cîu  ipréfet-dé  Sîbiicè;  M^dé-*Pérmoilt,  * 

-  ^\  P\  ni  .7:01  .    ".'.i    .^Wi-izYr''     '     v/-î^\v'\  c:j'  :    '{'^  ■   .   ■•.  . 

■M'     \j   ^hi — -'  '-'   jj  ^  i'î')''^i    f.i\    À'.'iiu.iii  'jVj '■l^^!'lU'.^^^.J\|J'JJ  i'^in 


'I    i.^[ 


(i)  Si^à\  p.  i7<$et^^NM  i^;>î>i  ,  Vwab^.r   -:V  vuo  VA 

Tome  IIL  N' 


\ 


1^4  CHAPITRE   LXXXI. 

a  empêché  ce  désordre ,  en  faisant  établir ,  sur  d!f« 
férens  points,  des  lieux  d'aisance ,  et  en  imposant 
aux  contrevenans  de  fortes  amendes.  On  peut  au- 
jourd'hui aller  le  soir  dans  les  rues  sans  craindre 
ies  cassates  ;  mai$  les  ordures  que  Ton  dépose  près 
des  ruisseaux ,  les  rendent  plus  dégoâtantes  ef  plus 
infectes  que  ies  étables  d'Augias.  Des  hommes , 
appelés^  escoubiers ,  vierment  chaque  jour  les  nettoyer  ; 
et  cette  entreprise  est  pour  eux  très-lucrative. 

A  l'extrémité  de  ce  quartier  (  i  ) ,  près  du  rivage, 
est  l'antique  cathédrale,  appelée  /'JE^//:r^  majeure , 
et  en  provençal  la  Major,  Si  l'on  s*en  rapporte  à  la 
tradition  adoptée  par  quelques  auteurs ,  cette  église 
a  été  construite  dès  Forigine  du  christianisme  (2)  ; 
c'est  la  plus  ancienne  des  Gaules.  5.  Lazare ,  dit- 
on  ,  en  fut  ie  fondateur  :  ii  avoit  été  chassé  de 


(  I  )  Pour  tien  connoître  la  vîHé  de  Marseille ,  on  doit  se  procu*^ 
rcr  ie  Plan  géométral  de  la  ville  et  de  ses  faubfputp  ^  leui pai(  crdrt  df$ 
Roi  en  lyS^ ,  sous  l'inspectton  de  M.  DE  PlERRON ,  lieutenant- 
colonel  du  corps  du  génie,  iXc.  par  RoULLET ,  en  deux  feuiUcs. 
Le  cadre  est  orné  de  gravures  ^ui  représentent  ies  prmcîpaHx»  édi- 
fices de  ia  ^iHe.  I|  a  p«r»  un  autre  plan  {çv^pai;  GuiMET'^enli  TÇttifB 
faut  y  joindre  le  Plan  de  Marseille  avçc  un  projet  d'agrandisse? 
ment  et  d^embeilissement ,  1 804  >  fn-fol.  La  ville  fait  travailler 
depub  i3o2'à  uii'tiôU^eau  pian  très-^étaillé ;  ce  grand  Ouvrage, 
c«itrpï«ispar:MM..'CA^iissEtletD£SMABETS,  sera;bient6t  tern>mé^ 

(a)  Massilia  chrisHana  ,-auctQre  X  Bapu  Gi/E$KAy,  è  Sf^i 
Jcsu.  Voyez  ht^  Annales  de  Afhrseille ,  Lugd.  1 657,  in-fdf.  His- 
toire ecdéiekstique- de  Marseille  par  RuFFt ,  xx  laseconde  édîdoit 
àc  %on  Histoire  de  Marseille,  i^9^,ûi-;ffti;j\       :  :  ,      v^?.  (:; 


CHAPITRE   LXXXI.  ipj 

Jérusalem  avec  S/^  Marthe  et  S.**  Maria-MagcJ^eîne 
ses  soeurs ,  Marcelle  leur  servante ,  S. .  Maximin  , 
5.  Joseph  d'Ârimathié  y  S.  Célidoine  ^  qu'on  croit  êtrf 
l'avei^ie  né ,  et  d'autres  disiciples  de  Jésus-  Christ , 
parce  qu'ils  prêcboient  hautement  que  le  Sauveur  du 
monde  étolt  i^ssu^cité;  ils  fut'ent  tû^s  exposés  d^ins 
un  vaisseau  sans  voiies ,  sans  avironsr  et.  sans  gouver*- 
nail  :  înab  pieu  vèiHoit  sur  ia  bar<|u^jqui.portoit  la 
saintb  troupe  ;  éile  aborda  heureusnmfot  dsms  le  port 
de  Marseille»  Cettexobnie  chrétienne  rép'^i^it  dans 
la  Provence  lé  culte  du  vrai  Di^u^-qi^l  remplaça  celui 
de  Diane  y  que  Ja  colonie  phocéerme  y  avçlt  établi  ; 
Je  temple  de  la  dées^  fut  transformé  ^n  j^rie  église^ 
qui  a  toujours  été  depuis  le  siège  des  .évêque$.  Lç^ 
saints  protecteurs  de  la  Provence^  S» 'c  M^g^lçleine  et 
S«  I.azare,  demeurérerlt  à  MarseiUe,  tandi^  qijiç 
S*  Maximin  et^S:  Célidoine  alière^.tjj>i^tpr,ib  JGm 
dans  ia  ville  d'Aix^  ainsi  que  S.'*.  Marthe  ef  S/f^Maç. 
ceUe  (bns celle  de Tarascon.        ^  -    _i  .,. 

LliistoiiCé  ne  confirme  pas  ces  vieilles  crpy^tnces^ 
et  nous  avons. déjà  vu  (i)  ce  qu'on  doit  en  penseï^ 
^lon  Sulpice  Sévère  »  le  contemporain  et  l'ami  <^ 
S.  Martin  de  Tours ,  ia  foi  a  péi)étré  assez  tard  dan; 
iès  Gâuleà  :  les  illustres  martyrs^  de  Lyon  et  de 
Vienne,  qui  s<mt  ^norts  en  1 77 ,  furent  les  premiers 

qui  donnèrent  leur  sang  pour  là  religion.  Grégoire 

•  ■  ■  t 

(i)  Supri,  p.  119.  o^ 


•     K    / 


.^ 


y 


|05  CHAPITRE    iXX^Xf; 

tie  Tours  fixe  au  îii.*  siède  TartRée  de  Su  Tïd- 
pbîme  à  Arles  ;  U  est  certain  que ,  verè  la  fin  de  cette 
t>éri6de,  il  jr ^voit  des  chrétiêûs.'en. Jfcoveaeeï^  tt 
que  la-'  p^rsi^ution  de  Dioclétieil'  et  de  Mkxirmeà 
y«^  d€?s  maitjrff*  Le  premier  côncUe  d'Arles;  leim 
^h  314:,  lie  préàèilte  fe$  noms  qtie  ïfc.fax)is  églisK 
fïu  évèchê^  dans  loiite  k  Provence ,  Arle^/  Mup- 
sïïHe  et  ApiV^t  de  quatre  égKs«iTimhr6phe's^Fi^/7«^, 
Yaisèn ,  'P/kè'-ét'Omnge,  Dairis  le  ¥/  ilècle,  le  thnstisp^ 
ni^me  étdit  trè^-répandu  dam  :la:Fr6Vence ,  et  pro- 
fessé fettr  dfe^  hommes  d'un  haut  rang  :  les  beaux  tdmt 
héVLUX  chrétieïis  coftservë^  i  Aix  (  1.)%  à-  Samt-^Maxi*- 
tnîn  (i}Vi^-^fe^  (3)  ^  ^  Maîseiile,  to  offircht  des 
témoignages.'  -  .   .\  ^  ,    .  -, 

On  présume  que  /^/ï^yV  a  Voit  remplacé  Fan- 
cîen  teniple-  éé-  Diane  ;  plusieurs  défari^L  d'édfficeft 
Wofinés^  avîôiènt  au  moins*  servi  à  sàconscnièdon. 
-Henri- IV  «n  fît  enlever  de  b^Hes  i^olônnes  j  le 
comte  de  Tende  en  fitenfev»  d^oxâUtres  pour  les 
donner  au  toilnélàbie  de  Montmorencr,  son  bëau- 
ftère.  Nous  avons  vu  (4)  que  le  niiausalée  de  Gaspar 
^e  Vins ,  ¥  Aix ,  fut  ausst  constt'uït  iiec  dés  itiafisirci 
iîtés  ie  cette  église;  r        ^  -  I     .. 

^*'  Cet'éifi^cé*,  qui*  tombe  èh  ruîrtè^,  n'a  rieA  ^k 

r  "  •  »       1 

{2)  Suprà,  "p^gc  iiB. 

""  (3)  ^^fi^'  ^  Tartide  rf*ArîC5.  

(4)  Suprà^  tome  11^  page  ^97» 


-\r^ 


Temarquable  dans  sa  construction  :  rintérieur  en  est 
étroit  et  irrégulier.  On  nous  fit  remarquer  des  pi-r 
iastres  de'raarbre  agréablement  ornés  dç  plantes  char- 
gées flMeurs  et  de  fruits  y  parmi  lesquelles  se  jouent 
de  petits  génies.  Grosson  ,  qui  les  a  publiés  (  i  )  > 
i^  regarde  comme  de  précieux  restes  de  l'ancien 
temple  de  Diane;  mais  le  sty{e  en  est  bien  supérieitf 
à  celui  de  la  sculpture  chez  les  anciens  ^  au  temps 
où  ils  surchargeoient  d'omemens  les  pilastires  et  les 
colonnjçs  :  qn  y  reconnoît ,  à  la  première  vue ,  la 
manière  qui  a  régné  depuk  François  I."  jusqu'il 
Henri  IIL  La  conformité  de  ces  omemens  arec  des 
sculptures  semblables  exécutées  à  Anet ,  à  Ecouen  ^ 
à  Gaillon,  &c.  rend  la  chose  indubitable. 

Les  chefs  de  S.  Lazare  et  de  S.  Cannât  étoient 
enfermés  dan^  des  reliquaires  trop  riches  pour  qu'ils 
échappassent  à  la  proscription  qu'ont  essuyée  les 
restes  de  tant  d'autres  saints. 

Les  tableaux  de  Puget  qui  décoraient  cette  église 
en  ont  été  enlevés;  ils  sont  placés  au  musée  (2). 
On  voit  encore  dans  la  sacristie  un  ancien  tableau^ 
dont  les  figures  ont  beaucoup  d'expression  ;  il  repré- 
sente Jésus-Christ  condamné  au  tribunal  des  pontifes. 
Si  le  baptistère  est ,  comme  on  le  dit ,  de  la  compo- 
sition de  Puget ,  cet  artiste  a  bien  manqué  de  goût 
dans  son  exécution. 


«Il  < 


(i)  Amiquitis  de  Alamilîe ,  pi.  XXHI  ct  XXI Y; 
(a)  Suprà,^i!L^  184.--  — 

N  3 


^  ^ 


I 


I 


I 

1 


'ip8  chapithe  ixxxr; 

Le  devant  d'autel  de  la  chapelle  iSLt%  fonts  est  un 
sarcophage  antique  (  pL  LIX,  fig.  4  ).  On  y  voit 
un  philosophe )  ou  plutôt  un  magistrat,  vêtu  à  la  ro- 
maine, ayant  près  de  lui  des  manuscrits  attacRR  avec 
une  courroie  :  aux  deux  extrémités,  il  y  a  aussi  de^ 
hommes ,  dont  l'un  tient  un  rouleau ,  et  en  a  éga- 
lement un  paquet  près  de  lui.  Le  bas  -  relief  du 
maître  autel  est  uiie  grande  dalle  de  pierre  sculptée 
à  la  manière  des  sarcophages ,  mais  d'une  dimension 
bien  jJus  considérable  (pi.  LIX,  Jig.  j  ),  II  est  par- 
tagé en  trois  arcades  soutenues  par  des  colonnes , 
dont  trois  ont  des  chapiteaux  corinthiens  ,  et  une 
a  un  chapiteau  ionique  :  toutes  ont  des  cannelures 
au-dessous  des  volutes.  Dans  i'arcade  du  milieu  est 
la  Vierge ,  vêtue  d'une  ample  robe  dont  les  manches 
sont  très -ouvertes ,  comme  celles  que  les  femmes 
avoient  vers  le  milieu  du  dernier  siècle.  Elle  porte 
une  couronne  basse  avec  de  larges  échancrures  ; 
elle  est  assise  sur  uii  siège  sans  dossier.  L'Eln&nt 
Jésus ,  qu'elle  tient  sur  ses  genoux ,  a  la  tête  en- 
tourée d'une  auréole  ;  dans  sa  main  est  un  rouleau 
déployé,  qui,  sans  doute,  contient  la  parole  de  Dieu» 
Les  deux  saints  qui  sont  sous  les  autres  arcades,  ont 
chacun  un  costume  différent.  L'un  porte  sur  une 
longue  tunique  une  autre  tunique  plus  courte ,  k 
franges,  qui  paroît  être  de  lin;  elle  est  attachée 
avec  une  ceinture  :  par-dessus  le  tout  est  une  grande 
chape  fixée  sur  la  poitrine  avec  une  fibule  ou  agraf<» 


CHAPITRE    LXXXr;  ïpf 

dont  h  tète  paroît  être  une  gemme.  L'autre  saint  a 
sur  sa  tunique  une  espèce  de  surplis  à  pointe ,  par- 
tagé dans  le  milieu  parcune  large  bande  qui  forme  ITf 
sur  la  p(;iitrine.  Tousies  deux  ont  Fétole,  et  sont  coiffés 
d'une  mitre  très*basse ,  assez  semblable  à  un  bonnet  ^ 
attachée  par  derrière  avec  une  bande  dont  les  bouts 
tombent  surPépauIe ,  et  teUe  que  les  évêques  en  por- 
toîent  dans  le  XI  /  siècle ,  ainsi  qu'on  ie  voit  principa- 
lement sur  leurs  sceaux.  Ils  tiennent  (kns  la  main  une 
grande  crosse  d'une  fonne  particulière  :  elle  est  recour- 
bée ,  selon  l'usage  (  i  )  ;  mais  son  extrémité  supérieure 
est  tenninée  par  une  tête  de  serpent.  Les.  chrétiens 
avoient  adopté  ce  dem|er  signe  »  qui ,  chezles  païens , 
recevoit  tant  de  significations  ;  et  ils  i'employoient  i 
ou  pour  désigner  le  démon ,  tantôt  cherchant  à  trom^ 
per  les  chrétiais ,  tantôt  abattu  par  le  triomphe  de 
Jésus-  Christ ,  ou  pour  caractériser  la  prudence , 
comme  chez  les  anciens  Grecs  et  les  Romains.  Jésus- 
Christ  recommande  à  ses  disciples  d'être  prudens 
comme  des  serpens  (2)  :  cette  vertu  doit  être  sur- 
tout celle  des  évêques  i  aussi  leur  bâton  pastoral 
est-il'souvent  décoré  du  signe  que  nous  remarquons 
ici  9  et  qui  se  voit  sur  un  grand  nombre  d'anciens 

(i)  L'usage  de  la,  crosse  des  évêques,  qui  est  le  symbole  di« 
Hton  des  pasteurs ,  est  tros-bien  exprimé  dans  ces  deux  vers  : 

Attrahe  per  prtmuin  ;  mtdio  rege,  punge  per  imum  ; 
'Attrahepeccant^f,regejustos,puvg€iag4intis^    ^ 

(a)  MattkX,  i6. 

n4 


Hcà  CHArîTKE    ;,1CXXÏ. 

mônumené.  D'après  la  foiine  des  vêtemens  et^elîè 
de  la  mitre ,  ce  devant  d'autd  peut  avoir  été  fait 
dans  le  X/  ou  le  xi/  siède  :  îi  aura  peut-être  été 
apporté  dltalie  ;  car  il  est  d'une  trop  bonne  exécution 
pour  avoir  été  sculpté  dans  la:  Gaule  à  cette  époque. 

Près  de  la  sacristie,  on  voit,  au-dessus  de  l'autel 
de  S.  Lazare ,  trois  statues  en  marbre ,  qui  sont 
peintes  et  dorées  :  S,  Lazare  est  au  milieu,  dans  le 
costume  épiscopàl  :  à  droite  est  S/'  Marthe;  elle 
tient  la  cruelle  Tarasque,  qui  dévore  un  homme  t  k 
gauche  est  S."  Magdeleine,  Plus  haut  il  y  a  une  6uiie 
de  sept  petits  bas  -  reliefs  ,  -qui  représentent  toute 
^histoire  de  S.  Lazare  :  i.**  Jésus -Christ  approcha 
du  tombeau  de  Lazare  pour  le  ressusciter;  2,**  aprè^ 
ce  miracle,  le  saint,  assis  sur  le  bord  de  sdn  tbm-r 
beau ,  parle  aux  assis  tans;  j.**  Jésus»Christ  est  à  table 
fivec  lui;  la  Magdeleine  vient  essuyer >  avec  3a  che^ 
Velure ,-  les  pieds  du  Sauveur,  qu'elfe  avoit  arrosés  de^ 
baume;  4»**  Lazare  arrive  dails  une  barque  iC  Mar* 
èeille;  j.**  il  prêche  en  chaire  devant  le  roi  du  pays; 
6.**  il  sacre  des  évêques;'7.''*  son  martyre. 

Nous  avions  amené  des  maçons  pour  découvrir 
une  inscription  arabe  qui  existoît  autrefois  dans  cette 
église ,  et  que  nous  espérions  trouver  encore  dans 
un  caveau  que  M.  Achard  nous  indiqua  ;  mais  ho$ 
recherches. furent  vaines.:  il  paroît.que  cette  insçrip-» 
tiona  été  brisée  et  perdue  coram^. 'a  plupart  de-célles 
qui  e3ç}itoiçnt  ^utrefoi?  4an§  h  Prpvençe,  J'en'  ai 


J 


CHAPITRE  liXXXI.  lOi 

t 

TP  plusieurs  copies  manuscrites^  mais ,  comme  elles  ne 
mejwoissént  pas  phts  fidèles  que  celle  que  Ruffien 
a  donnée  (  i  ) ,  J^  i^'^i  pas  cm  devoir  ia  faire  des^ner. 
Nosamisnous  oonduisfarent^  en,sortantd^ia'Mâfor^ 
dans  la  rue  des  Grandç^-Carmes ,  pour  y  voir  une 
masure  que  la  tradition  a  rendue  célèbre  :  on  pré- 
tend que  c'étoît  rhabitatîon  de  7T  Annius  Milo,  cet 
illustre  banni  que  Télotjuence  de  Cicéron  ne  put 
garantir  de  Texil ,  et  qui  demeura  Iong-t«nps  à  Mar* 
seiile.  On  nous  y  fit  remarquer  le  buste  grossière- 
ment £kil  d'un  homme  nu  ,  ayaùt  les  mains  drofeées 
sur  le  ventre  :  ce,  buste  est  supporté  par  une  console 
décorée  de  fa  figure  d'un  loup ,  et  a  au-dessus  de 
là  tète  une  couronne  en  forme  d'uii  simple  cercle, 
comme  celles  du  vi,*  siècle,  qui  est  soutenue  par 
trois  chaîner  /pi,  LJX,  n!  6).  Selon  la  nlêrtie  tra- 
dition ,  ce  buste  est  l'image  de  Mîlon ,  qui  a  été 
placée  là  par  ies  Marseiilois ,  dont  il  avoit  su  gagner 
raffeciion  pendant  son  exil.  Ruffi  et  Grosson  {2) 
soutiennent  vivement  cette  opinion  ;  elle  a  cepen- 
dant été  combattue  par  d'autres  auteurs ,  qui  n'ont 
voulu  voit  dans  cette  sculpture  grossière  qu'une 
image  de  S,  Victor.  Ceux-ci  ont  au  .moins  reconnu 
que  Mîlo ,  distingué  par  sa  naissance  et  par  ses 
richesses ,  n'avoît  pu  habiter  une  si  chétîve  demeure , 
et  que  les  Marseiilois  a\^roient  alors  employé  le  ciseau 

(i)  Histoire  ^e  Marseille ,  tome  II ,  f2Lge  316, 
,    (2)  Anti^uitfs  d(  Mmeilk,  pi,  XJ  et  xxxiv. 


/ 


i02  CHAPITRE    LXXXI> 

de  quelque  artiste  grec  à  reproduire  ses  traits  :  ils  ont 
bien  senti  que  cette  mauvaise  figure  ne  pouvoit  appar- 
tenir qu'au  moyen  âge.  Les  feuilles  qu)  suspendent 
la  couronne,  et  qui  ressemblent  absolument  aux 
omemens  du  même  genre  qu'on  voit  sur  les  mgnu- 
mens  de  cette  époque;  la  forme  ogive  des  ornemens 
de  cette  couronne  y  que  Grosson  appdk  mal-à-propos 
un  pendentif;  tout  enfin  atteste  que  cette  image  ne 
peut  avoir  été  faite  avant  le  xiv.^  ou  le  xv/  siècle  : 
mai$  ce  n'est  point  une  figure  de  S.  Victor,  qui, 
étant  soldat ,  n'auroit  pas  dû  être  représenté  nu.  II  est 
évident  que  c'est  celle  du  Christ  après  la  flagellation  ; 
la  nudité  du  corps  et  les  bras  croisés  le  démontrent 
d'une  manière  certaine.  La  couronne  qui  est  sur  sa 
tète ,  convient  au  roi  du  monde. 

Ce  quartier,  sur- tout  en  descendant  vers  la  mer, 
est  le  plus  mal  bâti  ;  il  n'est ,  en  général ,  composé 
que  de  misérables  masures ,  qui  servent  de  réduits  aux 
pêcheurs.  Ceux  qui  l'habitent  diffèrent  réellement 
des  autres  habitans.  de  Marseille  et  de  tous  les  Pro- 
vençaux, par  le  vêtement,  les  habitudes  et  le  lan- 
gage :  ils  ne  s'allient  guère  qu'entre  eux ,  et  leur  race 
demeure  ainsi  sans  mélange.  On  pense  que  c'étoit 
vers  ce  lieu  que  l'ancienne  Marsdile  étoît  située, 
et  que  ce  sont  les  descendans  directs  des  premiers 
Phocéens  qui  la  fondèrent.  Cette  idée  est  exagérée  : 
dans  tous  les  temps  ,  dans  tous  les  lieux ,  plus 
ï'homme  est  voisin  de  la  misère  ^  plus  il  est  loin 


CHAPITRE    LXXXÏ.  aoj 

icTune  compïète  civilisation  ;  et  ces  pauvres  pllcheurs 
ne  sont  pas  plus  d*anciens  Phocéens ,  que  les  déchi- 
reurs  de  bateaux  de  la  Râpée ,  à  Paris  ,  ne  sont 
d'anciens  Parisii. 

Nous  descendîmes  sur  Je  quai  pour  voir  l'hêtel-de-- 
yîlle ,  dont  la  façade  donne  sur  le  port.  C'est  là  qu'est 
la  bourse,  ou  ce  qu'on  appelle  la  loge  des  marchands. 
Cet  édifice,  qui  est  aujourd'hui  Y  hôtel  du  commis- 
sariat de  la  police  et  celui  de  la  mairie ,  n'est  pas  assez 
étendu  et  n'a  pas  assez  de  dépendances  pour  sa  desti- 
nation (i).  La  façade  est  composée  d'un  corps-de- 
logis  flanqué  de  trois  pavillons  :  ils  étoient  décorés  de 
bas-reliefs  allégoriques,  auxquels  on  avoit  substitué 
de  maussades  sculptures  dont  les  sujets  étoient  rela- 
tifs à  la  république  et  à  la  constitution  de  1 79  3 .  Nous 
remarquâmes  un  coq  dont  la  queue  étoît  tournée  vers 
lâ  tête,  parce  que  l'ovale  où  il  étoît  représenté  rie 
s'étoit  pas  trouvé  assez  grand  pour  lui  donner  !â  di- 
rection qui  lui  convient,  Uécusson  royal ,  sculpté  par 
Puget  (2),  n'avoit  pa$  été  tout-à-fait  détruit;  mais 
il  avoit  subi  d'étranges  métamorphoses  :  les  lis 
avoient  disparu  pour  faire  place  au  bonnet  roûge,  et 
ceïui-ci  figuroit  au  centre  du  cordon  de  l'ordre  du 

(i)  li  est  figuré  sur  (e  plan  de  Marseille. 

(2)  Puget  avoit  fait  prix  de  quinze  cents  livres  :  il  repré- 
Knta  que  le  marbre  lui  coûtoit  treize  cent  quatre-vingt-dix-huit 
livres ,  et  qu'il  ne  iuî  restoit  que  cent  deux  livres  pour  le  prix 
de  son  travail  ;  il  offrit  aux  échevins  six  mille  livres  pour  racheter 
ion  ouvrage  ;  mais  crux-ci  le  forcèrent  à  tenir  son  marche. 


J 


/ 


ao4  CHAPITRE     LXXXf, 

Saint-Esprit,  qui  avoit  été  conservé.  I>epurs  quelque 
temps  on  a  placé  sur  Técusson  les  armes  de  l'Empire^ 
^t  sur  la  façade  le  buste  colossal  de  l'Empereur^ 
exécuté  par  M.  Chardini.  L'ancien  écusson  avoît  été 
fait  avec  beaucoup  de  délicatesse  :  mais ,  comme  il 
demandoit  plus  de  soin  que  de  génie ,  il  auroit  dû 
être  confié  à  un  ouvrier  plutôt  qu'à  un  artiste  ;  et 
ce  travad  étoit  indigne  d'occuper  le  ciseau  du  Phidias 
marseiliois: 

Comme  cet  hôtel  étoit  trop  petit,  on  a  imaginé 
de  construire  l'escalier  dans  une  maison. voisine,  et 
de  faire  un-pont  pour  la  comnuinication. 

Cet  escalier  ,  d'une  exécution  très-hardie ,  est 
orné  d'une  statue  de  marbre  qui  représente  un 
guerrier  cuirassé  ;  c'est  celle  de  Pierre  Libcrtat,^ 
libérateur  de  Marseille  :  elle  lui  fut  décernée  pour 
avoir  arraché  cette  ville  à  la  tyrannie  des  chefs 
de  ligueurs  qui  la  gouvernoîent.  Quant  au  nom 
de  Libertati  on  en  ignore  l'origine  (i).  L'action  de 


(i)  On  a  prétendu  que  le  nom  de  sa  famiHe  étoit  Ba}oit;  qu'elfe 
étoit  originaire  de  Caivi  en  Corse ,  et  avoit  reçy ,  deux  cents  ans 
auparavantjenomde  Liber tat  ,^o^xr  avoir  affranchi  cette  ville  de  la 
tyrannie  des  magistrats ,  qui  voulqient  la  livrer  aux  Espagnols.  La 
conformité  de  cette  histoire  avec  celle  de  la  délivrance  de  Marseilie* 
en  prouvelasuppositton  :  eîiè  a  sans  doute  été  inventée  par  ies  pa- 
négyristes de  Libertat ,  pXHir  relever  son  origine  ;  et  elle  a  été  accré- 
ditée par  lui-même  et  par  sa  famille,  quand  ils  eurent  reçu  des 
lettres  de  noblesse.  Barthélemi ,  qui  vint  le  premier  s'établir  à 
Marseille,  ii'avoit  sur  sa  tombe  que  le  nom  de  discrète persQnn$ 


CHAPITRE.  LXXXl.  ;20y 

Pierre  Lîbertat  fut  utile  à  son  pays  :  maïs  rile  n'est 
accompagnée  (Faucuii  signe  d'héroïsme  ;  rien  ne  la 
rend  véritablement  noble  i  et  généreuse*-  Pierre  Li- 
ber tat  ^étoit  vendu  aux  terribles  duumvirs  de  Mar- 
seiile,  Charles  de  Càsautx  çt  Louis  Daîx  (  i  )  ;  ces  scé- 
lérats pay oient  ses  services ,  i'admettoient  dans  leurs 
secrets  ^  et  lui;  avoient  confié  la  garde  de  h  porte 
Royale.  II  cafcuia  adroitement  que  leur  puissance  ne 
pouvoit  sesoutenir ,  et  les  t^fahît  par  intérêt,  et  non  par 
amour  de  la  patrfe ,  puisqu'il  n'agît  qu'après  avoir  fait 
un  accommodement  par  lequd  on  lui  assuroit  des 
honneurs ,  des  dignités ,  'dés  terres  et  de  l'argent  (2), 
La  manière  même  dont  il  exécuta  son  projet  est 
artificieuse ,  et  elle  n'a  aucun!  caractère  de  bravoure 
et  de  grandeur.  Il  trahit  Loùb  Daix,  et  le  livra 
aux  assîégêans ,  en  faisant  fermer  la  porte  derrière 

\         ■  t  •  •  ■ 

BanhéhmiLièfrfat,  s^ns  aucune  memioii de  celui  <ie  B^ijon^Som, 
fib  Barthéleim,  îc  15  juiflct  1640  ,  neprenoit.d'*uire.ti|rç,<iuc 
celui  de  marinîtr.  Pierre,  le  libérateur  de  Marseille ,  estinort^ans 
enfans  :  les  LUtrtat  qui  ont  été  connus,  depuis,  dç$çftndc|içî\t 
d'Antoine  son  frète.  II  existoit  encore  en  1789  .wn  c<ieva,liçrv€lf 
libcrtat.  On  ôroit  cette  famille  icteinte. 

(i  )  Charles  de  Gasaiik ,  h<wtime  turbulent  cfccouvert  dp  .çrigo^ç*^ 
s'étoit  fait  wômmfer  consul  ;  et  Louis  Daix ,  que  les  triiwma^ix 
tvoicnt  flétri,  et  qui  avoi't^té  forçat  sur  la  galère  du  d,uç  d'Auçiâlç, 
^oit  parVe«ii  itfa  cbarge  de  vigùkr  par  rappui  des  siditieujLs    . 

{%)  Ces  ^ndîtions  sont  consignécy  rôàns  un  manuscrit  de  la 
Bibliothèque  >ri4pcrialc>  fonds  de  Dupuy  ,  n.**  155.  PAPO^f , 
Histoire  de  Pthvxkce , TV,  39  j  ;  les  a  rapportées.  Elles  coiitieim^ 
à-peu-près  tout  ce  qui  toi  fut  ânstiite  aecoidé  par  le  Roi,  :.     .    ^ 


J 


ao6  CHAPITRE  Lxxxr. 

lui ,  après  une  sortie.  li  avoit  conçu  le  dessein  de 
feire  tomber  la  herse  devant  Casaulx ,  et  de  Tas^as- 
siner  ^ntre  les  deux  guîdiets  ;  mais  il  abandoi^ina 
cette  idée  pour  une  autre r  aussi  lâche  :  il  attira .  ce 
dernier,  par  un  faux  aVis,  vers  la  pcn-te  qui  lui  étoit 
confiée,  et  près  de  laquelle  il  se  tenoit  Tépée  k  là 
main;  Casaulx,  qui  le  croyoit  armé  poiu:  repousser 
les  assiégeans ,  s'avança  sans  défiance  ;  Libertat  le 
jeta  à  terre  d'un  coup  d*épée ,  et  se  fit  aicfcr  par  son 
frère  Barthélemi  pour  le  tuer  (i),  L^  suite  de  cette 
action  fut  la  reddition  de.  la  yUie. et  la  délivrée 
de  Marseille  :  aussi  les  habitons  of$rirept-iis  à  ^on 
auteur  des  gages  éclatans  de  leur  reconnpîssancep 
Us  arrêtèrent  que  cet  heureux  évéttemcntseroit  cé- 
lébré par  une  procession  annuelle,  et  qu'on  éleveroit 

(i}On  peut  consulter^surla  reddition  de  Marseille,  les  ouvrages 
suivans  :  Histoire  véritable  de  la  prire^  de  Marseille  par  ceux  de  U 
ligue ,  et  la  repritv(e  par  ks  bons  serviteurs  du  Rm.,.  le  26  avril  rjSf. 
Voyez  tome  I.*^*"  de  V  Esprit  delà  Ligue,  page  83.  —  Lettres  écrites  dû 
Marseille^  contenant  au  vrai  les  choses  qui  s'y  sont  passées  les  8  ,p  et 
jo  du  mots  d'avril  ij8y ,  in-8.°  —  Discours  véritable  de  laprije  et 
réduction  de  Marseille:  Paris,  1596 ,  in-4.**  — Discours  véritable  des 
particularités  qui  se  sont  passées  en  la  réduction  de  la  ville  de  Mar-^ 
feille  en  VobéissMtce  du  Rai  ;  t^^6,  iiorS.^  -^Discours  de  ce  qui  s'est 
passé  en  la  prise  de  Marseille ,  pour  le  service  du  Roi,  par  monseigneur 
h  duc  de  Guiie,  son  lieutenant-génial  en  Provence,  selon  l'avis  donné 
par  un  de  la  ville  même,  du  i S  février  tjp(^*  Voyez  Journal  de 
Henri  IV,  tome  IV ,  la  Haye ,  1 741 ,  in-8.°  —  Histoire  véritable  dt 
Aa  réduction  de  Marseille  à  l'obûssance  du  roi  Henri  IV i  Anvers  , 
n^i6,  itf-S.**  —  Histoire  de  Marseille,  par  RuFF^ ,  t.  L*S  p.  4aoj 
et  ceUc  di  Provetice,  par  Papqn ,  t,  VI,  p,  388, 


~; 


CHAPItRE    LXXXI,  io/ 

dans  rhôtel-de- ville  un  monument  à  libertat,  dont 
le  nom  fournit  aux  poètes  le  texte  d'une  infinité  dé 
feux  de  mots  et  de  calembourgs,  qui  ne  contri- 
buèrent pas  peu  à  le  faire  placer  à  côté  de  celui  des 
héros  libérateurs  de  leur  patrie  (i). 

Henri  IV  donna  les  plus  grands  éloges  à  libertat; 
il  le  combla  de  biens ,  en  confirmant  presque  toutes 
les  promesses  qui  lui  avoient  été  faites  par  le  duc  de 
Guise.  II  lui  accorda  des  lettres  de  nd^Ieske  pour 
lui  et  ses  frères  ,  le  nomnxa  viguier ,  lui  fit  pajrer  une 
gratification  de  cent  mille  écus  y  l'exempta  des  tailles; 
et  lui  donna  le  commandement  de  deux  galères ,  de 
la  porte  Royale  et  du  fi>rt  de  Notre-Dame  de  la  Garde. 
Ce  grand  roi  devoit  ainsi  récompenser  magnifique- 
ment un  homme  qui  i'avoit  si  bien  servi  ;  il  ne  devoit 
voir  que  l'effet ,  sans  remonter  à  la  cause  ;  et  la  poli* 
tique  l'engageoit  encore  à  encourager  ainsi  tous  ceux 
qui  contribûpient ,  par  des  moyens  quelconques  ,  à 
ramener  les  villes  sous  son  obéissance  :  mais'  il  est 
constant  que  Libertat,  en  mettant  à  prix  ses  services^ 
a  avili  son  action  ;  il  devoit  en  retirer  de  grands 

I 

(i }  On  ferdit  un  volume  des  misérables  vers  remplis  de  maus^ 
•ades  équivoques  sur  ie  mot  Libertat;  je  ne  citerai  que  cç  distique; 

OccisusjustislÀhtxtxCdsalus.armis,       '.    ■        ,  > 

Laus  Christo,  urbs  Régi»  LUertas  sic  datur  urlU . 


<?n  fit  encore  ces  vers  français  : 


Digne  cœur  de  ton  nom  ,  puisque  tu  as  été 
Pans  Marseille  psetnier  auteur  de  iij}erté» 


"^ 


!•* 


iio8  CHAPITRE   tXXXU 

avantages  ,  et  elle  lui  prfeeiitoit  peu  de  risquea  à 
cpuriir^  enfin  elle  est  du  nombre  de  celles  qui  doivent 
être  payées  seulement  avec  de  l*argent.  J'avoue 
qu'entassant  devant  la  statue  de  Lîbertat,  jé  pensât 
à  la*)oïe  que  ies.MarseîHob  durent  ressentir  d'être 
délivrés  de  deux  scélérats  qui  les  tyratmisoiait , 
et  dfe  rentrer  sous  les  lois  de  leur  souverain  légîiinié  ; 
et  dç?  quel  souverain  !  du  bon  Henri  !  mais,  je  *n'é- 
prouvaî  pas  ce  sentiment  xi'admirationi  qui  élève 
Tame  et  procure  un  contentefment  si  parfeît,  i  la 
vue  des  images  de  ces  hommes  qui  ont  été  animés  du 
pur  désir  de  la  gtoire  et  du  véritable  amour  de  la 
patrie; 

Cette  stetue  est  d'une  assez  mauvaise  exécution. 
La  nlain  de  Libertat  est  armée  d'une  véritable  épée; 
peut-être  est-ce  celle  qu'il  trempa  dans  le  sang  du 
rebelle  Gasaulx. 

Deux  grands  tableacux  fixèrent  long-^témip^^fK^t^e 
atteatîdn  mon  qu'ils  se  recoHunandènt  pâroînè  -ia- 
vante  composition ,  par  t^i  dessin  correct,  pàriin 
brillant  xoloris  ;  mais  .^^  représentent  d^s  détalk  ^1 
variés  et 51  vrais  de  la  plus  grande  calamité  dont-ting 
population  nombreuse  puisse  être  affligée:^  que  <iOus 
lie  pouvions  nous  arracher  ail  triste  plaisir  de  f es 
contempler  ;  de  même  qu'on  s'attache  à  îîrè  un  ro- 
man  médiocre,  à  voir  un  drame  souvent  mai  dialo- 
gué et  mai  conçu ,  parce  qu'ils  nous  racontent  ou 
exposent  sous  nos  yeux  le.îjpeçtacle de  ijiisères  que 

nous 


# 


N 


CïîAPÎTftÈ    tXXXU  tôf 

ïious  pouvons  partager ,  de  malheurs  qui  peuvent 
aussi  nous  atteindre.  Ces  tableaux  retracent,  avec 
une  extrême  fidélité ,  les  horribles^ravages  de  la  pesta 
de  1720. 

De  célèbres  historiens,  de  grands  poètes,  ont  décrit 
ce  terrible  fléau ,  cette  maladie  d'une  ville  ,  d'une 
nadon  entière  :  on  cite  encore  comme  des  modèles 
l'éloquente  description  de  la  peste  d'Athènes  par 
Thucydide ,  et  les  beaux  vers  de  Lucrèce.  La  peste  de 
Marseille  a  été  le  sujet  de  plusieurs  ouvrages  (i)  ; 
et  il  y  a  peu  d'années  encore ,  elle  a  été  décrite  d'une 
manière  énergique  par  Marmontel  et  Papon  {i\ 

.  (  I  )  Relation  succincte  touchant  tes  acctJens  de  la  peste  de  Marseille  ^ 
sonprognostic,  &c.  par  MM.  ChIcoyneAU  ,  Verny  et  SoULLlERS^ 
médecins  de  Montpellier j  Paris,  1720,  m-^P  Ces  m«dedns  sont 
ceux  que  le  Roi  envoya  à  Marseille  pour  y  observer  la  nature  de 
la  contagion.  —  Relation  historique  de  la  peste  de  Marseille ,  paï 
Bertrand  ;  Colôgije  ,  \yzi  ,m-\i,  Cest  l'ouvrage  le  plus  exact 
et  le  plus  circonstancié.  -—  Relation  histoHque  de  tout  ce  qui  s'est 
passé  à  Marseille  pendant  la  dernière  peste  ;  Lyon,  Duplain,  in- 12. 
Cet  ouvrage  paroît  n'être  qu  une  contrefaçon  de  Vautre.  — - 
Observations  sur  la  peste  qui  règne  à  Marseille,  par  MM.  BERTRAND 
€t  Michel  ;  Lyon,  1721  ,  in-12.  —  Journal  abrégé  de  ce  qui  s'est 
passé  en  ia  ville  de  Marseille  pendant  la  dernière  peste  ^  tiré  du  Mémo* 
rial  de  ta  chambre  du  Conseil  de  l'hotel-de^ville ,  tenu  par  le  sieuf 
PiCHATTI  DB  CroISSAINTE  ;  Rouen  ,  1721  ,  in-4.*»  —  Avis  dt 
précaution  contre  la  maladie  contagieuse  de  Marseille ,  par  Jérofnt* 
Jean  PESTALOZZI  ;  Lyon  ,  1721 .  in-12.  —  Relation  touchant  les 
éicc(dens  de  la  peste  de  Marseille ,  son  prognostic  etson  caractère;  Paris  ^ 
1720,  in- 1*2.  —  Journal  de  ce  qui  s'est  passé  à  Marseille  pendant  lu 
#(7»û^/V«  ;  Paris ,  1 72 1 ,  in- 1 2 . 

(2)  Marmontel  a  fait,  dans  son  Histoire  de  la  régence^  t.  Il , 

ToîM  m.  .         o 


/ 


2IO  CHAPITRE  LXXXl. 

Je  n'en  rappelleraî  pas  les  diverses  particularités  :  il 
suffit  de  savoir  que  cette  maladie  fut  apportée  par 
un  navire  qui  renoit  de  Séide,  et  qui  entra  dans  la 
rade  le  25  mai  1720,  On  douta  d'abord  de  lanature 
du  mal,  mente  après  qu'U  eut  pénétré  du  port  dans 
la  ville  ;  et  il  y  exerça  des  ravages  qui  ne  cessèrent 
entièrement  qu'au  mois  de  juin  172 1  (x). 

Serres  (2) ,  élève  de  Puget  et  auteur  de  ces  ta- 
bleaux ,  exerça  pendant  là  contagion  HionoraMe  et 
périlleuse  fonction  de  commissaire  de  son  quartier  ; 
fet  il  fut  du  nombre  de  ce^  hommes  respectabies  qui 
se  distinguèrent  par  un  généreux  dévouement  :  il  a 
donc  bien  coimu  les  détails  que  son  pinceau  devoît 
retracer  ;  aussi  sont-ils  tous  variés  et  d'une  vérhé 
effrayante ,  malgré  le  défaut  de  persi>ectîve  et  ïa 
sécheresse  des  couleurs.  Ces  ,deux  tableaux  repré- 
sentent le  déplorable  aspect  qu'offroient  alors  les 
quais  et  le  cours  :  là  on  voit  des  moribonds  étendus , 

page  z6^,  un  tableau  assci  animé  de  la  peste  de  MarseiHe. 
pAPON  a  donné,  dans  son  Histoire  de  Provence,  t.  IV,  p.  654, 
des  détails  plus  étendus  :  raak  c'est  siir-tout  dam  son  ouvrage 
intitulé ,  de  la  Pesu,  eu  ÉpofUts  mémrMes  de  ce  fl/aâ.umt  I.", 
p.  zo6  et  siiiv. ,  qu  il  faut  lire  Thistoire  de  ce  grand  dé6a5tre  ;  il 
«n  a  vivement  retracfé  reffrayant  spectacle.  Au  surplus,  ces  deux 
autcui-s  ont  pris  pour  base  la  Reidféon  du  médccm  BERTRAND. 

(1)  Eiie  emporta,  dans  cet  ^pacc  de  temps,  4^,^ 6^  per- 
jonncs  à  Marseille,  10,148  dan*  les  ^iffegc^  voisins,  15.283  à 
Toulon  ,  6,900  à  Arles,  7,534  à  Aix)  en  toftt;;»,*  34-' 

(a)  Siq^rà,  p.  189. 


Mh^iÉfci^— —fc^**  *     I  I  1       II   .        ..^^^^^igi^utajgii^ 


CHAPITRE   LXXXn  '      lu 

dyant  près  d'eux  une  cruche  et  un  vase  que  quelques 
personnes  compatissantes  remplissent  avec"  terreur 
(TeauL  et  de  bouillon?  le  cours  est  jonché  des  ca* 
davres  de  ceux  qui  ont  cherché  l'ombragé  de  ses 
arbres  ou  celui  des  toiles  que  les  ofiiclers  munici- 
paux y  ont  ûit  tendre  :  pàr-tout  ce  sont  des  scènes 
déchirantes  d'enfans ,  de  femmes ,  de  vieillards  expi- 
rans.  Au  milieu  de  ce  spectacle  d'horreur ,  Toeil  s'at- 
tache avec  complaisance  sut  les  hommes  ^ju'îl  voit 
Voccuper  du  soin  de  secourir  les  malades  {i  )',  ou  se 
charger  du  ministère  le  plus  dangereux  et  le  plus 
utile ,  celui  de  faire  enterrer  les  morts  :  les  forçats , 
les  malfaiteurs  employés  à  ce  terrible  office ,  n'y 
peuvent  plus  suffire  ;  iW  précipitent  les  cadavres  par 
les  fenêtres ,  les  entassent  dans  des  tombereaux ,  ou 
ies  traînent  avec  des  crocs  (2),  L'intrépide  chevalier 
Rose  (3)  les  conduit.  On  reconnoît,  à  leur  costume^ 

les  médecins  qui  firent  dans  cette  occasion  le  noble 

> 

(i)  On  y  distingue  les  médècms  Bertrand»  Montagnrer,  Peys-» 
sqne! ,  Raymond ,  Audon ,  Audebert>  et  les  commissaires ,  parmi 
lesquels  Serres  s'est  représenté  lui-même. 

(2)  C'est  pourquoi  on  les  appeloit  des  corbeaux, 

(3)  II  y  a  au  château  Borelly,  àBonneveine»  un  tableau  de  dt 
Troy,  qui  représente  le  chevalier  Rose  faisant  jeter  par  les  galé- 
riens les  corps  pestiférés,  abandonnés  dans  les  souterrains  qu'il  a 
découverts  sous  l'espJanade  de  la  Tourette.  Ce  tableau  a  été  gravé 
par  Simon  Thomassîn,  en  1717.  On  peut  dire  que,  sans  Tins- 
criptioiT,  on  ne  devineroit  aucunement  ^intention  de  l'auteur  « 
tant  la  composition  est  confuse  et  peu  caractérisée. 

0  7. 


1 


aia  CHAPITRE    LXXXI. 

sacrifice  de.Ieiur  vie.  On  ne  peut  contempler  san* 
émotion  la  vénérable  image  de  Beizunce ,  ce  prélat 
qui  gouvernoit  alors  Féglise  de  Marseille.  On  le  voit 
portant  aux  mourans  les  dernières  consolations  de 
la  religion ,  et  prodiguant  pour  eux  ses  biens  et  ses 
jours  (  I  )..Dieu ,  qui  mit  dans  son  ame  tant  de  diarité 
et  de  vertus ,  veille  sur  lui  pour  qu'il  puisse  en  être 
encore  le  plus  parfiiit  modèle  (2). 

Notre  ame  étoit  trop  émue  pour  que  nous  pus- 
sîons^  songer  à  autre  chose  qu'à  la  terrible  catastrophe 
que  nous  avions  sous  les  yeux  :  nous  ne  regard4mes 
pas  quelques  maussades  peintures  qui  tapissent  aussi 
cette  salle  sans  la  décorer ,  et  nous  nous  rendîmes 
à  la  Consigne,  ou  Bureau  de  santé,  qui  est  à  l'entrée 
du  port  dans  la  fausse  baie  du  fort  Saint^ Jean ,  sur 
le  même  quai* 


(i  )  Toute  l'Europe  a  célébra  ce  vertueux  prélat,  dont  le  nom 
floît  vivre  à  jamais  dans  la  mémoire  des  hommes.  Pope  lui  a  coii« 
^cré  des  vers  qu'on  a  traduits,  ainsi  : 

Lorsqu'au  sein  de  Marseille  un  air  contagieux 
Portoit  l'affreuse  mort  sur  se^  rapides  ailes , 
Pourquoi .  toujours  en  butte  à  se%  flèches  mortelles» 
Ce  prélat,  s'exposant  pour  sauver  son  troupeau, 
Marche-t-îl  sur  les  morts  sans  descendre  au  tombeau  f 

Essai  sur  l'Homme,  ^p,  IV. 

(a)  Ces  deux  tableaux  ont  été  gravés  par  J.  Rigaud;  le  défaut 
de  la  couleur  disparoît  dans  la  gravure,  et  Timportance  du  sujet 
Suffit  pour  y  répandre  un  grand  intérêt.  Je  ne  sab  pourquoi  io 
graveur  a  omis  le  noxn  de  Serres* 


CHAPITRE    LXXXT.  413 

La  Consigne  est  le  lieu  dans  lequel  l'administra* 
tion  sanitaire  tient  ses  séances;  son  bureau  est  com- 
posé de  seize  conservateurs  de  la  santé  (  i  ).  L'édifice 
est  fcâti  sur  pilotis  ;  on  s'occupoit  à  l'augmenter  à 
fépoque  où  je  le  visitai  :  il  est  composé  d'un  vesti- 
bule ,  d'une  salle  k  manger ,  et  de  plusieurs  salles  pour 
les  membres  du  bureau ,  les  archives ,  et  deux  maga?* 
sins  destinés  à  serrer  des  marchandises  et  les  agrès 
des  bateaux  du  service  de  la  Consigne  :  autour  sont 
deux  balcons  ;  /l'un  pour  faire  passer  aux  vaisseaux 
qui  isont  en  quarantaine  les  provisions  nécessaires  ; 
l'autre  pour  interroger  les  capitaines.  Une  fontaine 
fiicilîte  aux  équipages  qui  sont  en  quarantaine  à  la 
chaîne  du  port ,  les  moyens  de  faire  leur  provision 
d'eau.  La  salle  où  les  membres  de  l'administration 
tiennent  leurs  s&inces,  est  décorée  d'un  bas-relief 

(f)  On  îcs  rcnouvelîc  tous  les  ans  par  quart;  iîs  sont  divisé» 
en  sept  comités  pour  sept  branches  de  l*adminlstration ,  qui  sont: 
1,**  Icf  ouvrages  de  serrurerie  et  de  menuiserie;  a.®  les  fontaines 
et  conduites  des  eaux;  j.®  les  bateaux  de  service;  4.®  les  gardes  ; 
j.**  les  parfums;  6.®  les  purges  des  marchandises;  7.*^  les  meubles 
et  ustensiles  du  bureau.  Un  des  conservateurs  préside  fe  bureait 
entier  pendant  une  semaine  ;  il  est  appelé  ad/ninistrateur  semât' 
nier.  Ils  sont  tous  nommés  par  le  ministre  de  Tîntérieur  sur  fa 
présentation  du  préfet;  ils  travaillent  directement  avec  le  mairc^ 
et  leurs  demandes  sont  transmises  au  ministre  par  fe  préfet.  Les 
administrateurs  sont  choisis  parmi  des  négocians  qui  ont  résidé 
dans  les  l:.c'helles  du  Levant ,  et  parmi  les  anciens  capitaines  qui 
ont  navigué  dans  ces  parages  :  ils  remplissent  leurs  fonctions  avec 
fo  plus  noble. zcle  et  le  plus  grand  désintéressement;  leurs- em- 
ployés seuls  reçoivent  des  appointemess» 


^ll  CHAPITRE    LXXXI«. 

dont  le  sujet  est  convenable  à  l'objet  de  cette  insti- 
tution :  il  étoit  alors,  soigneusement  enfermé  sous 
des  planches ,  à  cause  des  réparations  qu'on  faisoit 
ftu  bâtiment  ;  MM.  les  administrateurs  eurent  la  bonté 
de  le  f^ire  découvrir.  C'est  le  plus  bel  ouvrage  en  ce 
genre  qui  soit  sorti  du  ciseau  de  Puget  :  il  représente 
la  peste  de  Milan  (i  ). 

La  composition  de  ce  bas-relief  est  véritablement 
ndmirable.  Le  généreux  et  tendre  dévouement  du 
saint  évêque  de  Milan  y  est  bien  exprimé  :  il  adresse 
fivec  une  ferveur  touchante  ses  prières  au  del;  et 
des  anges,  en. lui  montrant  au  sein  des  nuages  la 
croix  qui  a  été  ritistrument  du  salut  des  hommes» 
semblent  lui  annoncer  que  ses  voeux  sont  exaucés , 
et  qufe  le  terrible  fléau  contre  lequel  il  implore  le 
secours  du  Tout- puissant,  ya  bientôt  cesser  :  deux 
prêtres  Paccompagnent  ;  l'un  porte  la  croix  épiscopale 
du  prélat ,  l'autre  un  ciboire  pour  donner  le  viatique 
aux  mourans.Ce  beau  groupe  est  pfein  d'intérêt  et 
d'expression.  D'autres  groupes  retracent  de  la  ma- 
nière la  plus  vive  les  scènes  d'horreur  dont  le  vertueux 
évêque  est  entouré  :  un  fossoyeur  trame  par  les pîeds , 
avec  un  croc  de  fer, le  corps  d'un  pestiféré;  il  dé- 
tourne ïa  vue  avec  effroi ,  et  craint  4e  respirer  l'odeur 


{i  )  CebasHfeiicf  avoit  été  commencé  pour  l'abbé  deîa  Cbamb^» 
çMrc  <k  Siaint'BarthéI«mî  à  Paris  :  if  ne  fut  pas  envoyé  à  sa  pre- 
'içicrc  destination,  et  depuis  il  a  été  acheté  dix  miHe  francs  par 
kl  administrateurs  du  bureau  de  la  Consigne. 


\      . 


CHAî^JTllE  LXXXn  I15 

fétide^  meurtrière  qtri  s'en  exhale.  Près  de  là,  une 

feune  femme ,  tenant  une  croi%  entre  ses  mains , 

expire  à  côté  de  son  père  et  de  ses  deux  enfans, 

dont  Tun  rend  le  dernier  soupir ,  et  Tautre ,  cherchant 

un  refuge  auprès  de  S.  Charies  BcH'romée ,  embrasse 

ses  genoux.  Plus  loin ,  une  belle  architecture ,  et  un 

lit  somptueux  dans  lequel  un   jeune  homme  est  /      \^ 

étendu  mort  près  de  son  épouse  dcsoiée^  attestent 

que  ce  mai  destructeur  n'épargne  pas  phis  le  riche 

que  l'indigait.  M.  de  Caylus  a  fait  graver  ce  bas- 

relief  par  Moreau,  d'après  le  dessin  d'un  artiste 

marseillois  appelé  David. 

Cette  belle  sculpture  n'est  pas  terminée  ;  la  mort 
surprit  Puget  avant  qu'il  eût  pu  y  mettre  la  dernière 
main  :  mais  tout  ce  qu'il  a  eu  le  temps  d'achever  est 
admirable.  . 

Puget  ejt  véritablement  le  Léonard  de  Vinci  de 
la  France.  On  lui  doit,  comme  architecte ,  les  pl^ns 
d'un  grand  nombre  d'édifices ,  teïs  que  la  halle  aux  - 

poissons ,  la  maison  de  charité ,  l'église  des  Char- 
treux; ingénieur,  il  a  construit  la  machine  à  mater 
les  vaisseaux;  peintre,  il  a  fait  le  Baptêmi  de  Cons^ 
tantin,  celui  de  Clovis,  et  beaucoup  d'autres  tableaux 
d'église  :  mais  c'est  sur-tout  dans  la  sculpture  que 
son  talent  est  admirable  pour  le  dessin  ,  i'énergiej 
et  le  sentiment  (i). 

(i)  On  peut  lire  ia  vie  de  Puget  dans  V  Histoire  des  sculpteurs ,  de 
D'ArGEN VILLE  j  —  Gmys  p  Marseille  ancienne  et  moderne;-^  les 

'   04 


Zï6  CHAPITHE   LXXXI* 

Le  bureau  de  la  Consigne  possède  encore  un 
autre  chef-d'œuvre;  c'est  le  tableau  de  David,  que 
Marseille  a  aussi  vu  naître  :  il  représente  X  Hoc  h.  L'ad- 
ministration de  la  Quarantaine  le  demanda  à  David 
pendant  son  séjour  à  Rome  en  1780  ;  mais  il  fût 
trouvé  trop  beau  pour  être  placé  dans  un  lieu  où 
les  amateurs  ne  pourroient  point  en  jouir  à  leur  gré , 
et  il  demeura  au  bureau  de  la  Consigne.  S.  Roch 
invoque  la  Vierge  pour  qu'elle  fasse  cesser  la  peste  ; 
il  élève  lès^nfiains  vers  elle  :  on  voit  dans  le  bas  un 
mourant  ;  plus  haut  sont  deux  jeunes  gens,  qui 
expirent.  On  admire  le  dessin  et  l'expression  de  la 
tête  de  S.  Roch  (i). 


«• 


dtMX  Antenors modernes ,tcm^  II;  le  Magasin  Encyclopédique,  juillet 
1807,  page  a  66.  Uacadëmie  de  Marseille  a  proposé  pour  sujet  de 
prix  V Éloge  du  Puget  /  il  a  été  remporté  par  M.  Émerîc  David  j 
l'accessit  a  été  donné  à  M.  Rabbe,  étudiant  en  droit,  à  Aix. 

(i)  Voyez  dans  fe  Magasin  encyclopédique,  ann.  i8o6  ,t«Iir* 
p.  34^ ,  h  descrjptîpn  que  M,  Brun^^Neehgaard  a  faite  de  ^c 


^ 


aBi^^Mttk^...^^AAgMMk 


il  7 


■-^•^^ 


CHAPITRE  ixXXII. 

Quarantaine.  —  Arrivée  des  vaisseaux  à  Pomègue  • 
—  à  la  Consigne.  —  Purification  des  lettres.  —  Examen 
delà  patente. — Différence  des  patentes  nette,  touchée^ 
soupçonnée,  brute.— Degrés  de  suspicion. —  Quaran- 
taines du  casco,  de  l'équipage,  des  passagers. —^  Des- 
cription du  lazaret.  —  Capitaine ,  lieutenant ,  garde- 
loges,  inscriptions,  maladie,  mort, sortie.  —  Quaran-. 
taines  des  marchandises  susceptibles ,  non  susceptibles. 
■—  Purge ,  grande  et  petite  sereine.  —  Transport  des 
marchandises  au  lazaret.  —  Porte-faix.  —  Frais.  — 
Contagion  déclarée.  -^Désinfection,  — »EtabIissemenf 
philanthropiques  de  Marseille. 

JN  ô  u  S  avions  encore  f  imagination  frappée  des 
idées  sombres  dont  les  tableaux  de  Serres  i'avoient 
remplie.  Pour  connoître  les  moyens  que  les  habitans 
de  Marseille  ont  pris  afin  de  se  préserver  du  retour 
d'une  semblable  calamité ,  il  nous  eût  fallu  voir  le 

I  k 

lazaret  :  mais  ii  est  impossibie  d'y  entrer  ;  oa  ne  peut  . 
arriver  que  jusqu'à  la  première  porte.  J'ai  cependant 
pensé  que  l'exposition  des  méthodes  adoptées  pour 
repousser  ce  fléau  pourroit  intéresser,  sur- tout  à 
cette  époque ,  où  la  fièvre  jaune  >  qui  s'est  manifes- 
tée en  Europe,  a  fixé  l'attention  sur  ce  point  impor- 
tant d'hygiène  publique.  Mais  pour  bien  connoître 
le  lazaret,  il  h\xx  l'avoir  habité.  J'ai  principalement 


V  ^ 


/ 


2i8  CHAPITRE   LXXXIU 

pviîsé  ce  que  j'écris  dan5  un  excellent  mémoire,  ma- 
nuscrit ,  qu'un  des  administrateurs  sanitaires  a  eu  la 
bonté  de  me  donner  (i). 

Tous  les  vaisseaux  levantins  doivent  d'abord 
s*anêter  à  Vîle  Pom}gue ,  à  environ  six  milles  de 
Marseille,  où  il  y  a  place  pour  soixante  bâtimens. 
Toute  cette  île  n'offre  à  la  vue  que  des  rochers  sté- 
riles  et  ajfFreux  :  quelques  soldats  invalides  du  château 
dlf  y  gardent  la  tour  appelée  Brame-pan.  Celte  garde 
est  renforcée  en  temps  de  guerre ,  et  augmentée  d'une 
compagnie  d'artilleurs.  Ces  soldats  ne  peuvent  entrer 
que  par  une  petite  anse,  appelée  la  PiagghUj  au 
nord  de  l'île  ;  ils  n'ont  pas  la  permission  de  pénétrer 
dans  le  port,  ni  de  descendre  sur  le  rivage,  où  ils 
ne  pourroîent  d'ailleurs  parvenir  que  par  des  sentiers 
escarpés  et  d'un  difficile  accès.  II  est  défendu  aux 
canots ,  aux  chaloupes  et  à  toute  espèce  de  bàtimens 
qui  ne  sont  pas  en  quarantaine ,  d'approcher  de  l'île 
à  plus  de  cent  toises.  H  y  a  seulement  cinq  postes , 


f  I  )  Le  célèbre  HowARD ,  dans  son  ouvrage  sur  1^  ïaiarets ,  n'a 
dit  qu'un  mot  de  celui  de  Marseille.  M.  Papon  est  entré  dam 
déplus  grands  détails,  Histoire  de  Pravençe ,  IV,  707,  Ils  ont  été 
copicis  par  M.  FiSCH ,  Briefe  uber  die  sudlichen  Provin^,  M.  Fis-  , 
CHER,  Reise  itàch  Hyeres,  239;  Briefeines  Sudlander,  40,  Leipsfgi» 
T805  ,  1*1-8.®  j  uher  die  quarantmne-anstalten  ^  Marstilîe ,  Lcipsig, 
1805 ,  in-8.®,  a  donné  àts^  renseignemens  plus  étendus  :  mais  ceux 
qui  m'ont  été  adressés  ,  d'après  l'invitation  de  M.  le  préfet ,  par 
un  Ats  membres  de  l'administration  sanitaire ,  sont  plus  circons* 
tanciés'et  plus  exacts. 


-^ 


CHAPITRE   LXXXII.  ^19  .- 

la  Câurei ,  San-Peire  et  r Estel lo ,  Barquo ,  Spassado  et 
Faoussado,  où  les  bateaux  pêcheurs  peuvent  aborder 
pour  tirer  leurs  filets.  Ceux  qui  gardent  Ule  ne 
doivent  y  recevoir  personne  :  il  y  a  une  petite  char 
pelle  ç^  un  aumônier  vient  dire  la  messe  quand  le 
temps  le  permet. 

En  arrivant  y  les  navires  déploient  leur  pavillon  ; 
^lors  I<B,  fort  en  hisse,  un  autres  qui  indique  de  quelle 
nation  est  le  navire  qui  est  dans  son  mouillage  :  ce 
signalât  sui^Ierchamp  répété  par  la  vigie  de'îMrfr^- 
Dame  d^  la  Garde, 

Aussitôt  après ,  Tofficier  de  santé  fait  raisênner 
/^  wvw ,  c'estrà-dire  qu'il  demande,  au  capitaine  , 
avec  uii  porte-Voix ,  d*où  il  vient ,  commçnt  il  s'ap- 
pelle ,  quel  est  son  chargement  ^  de  quelle  patente 
il  est  porteur.  II  lui  indique  ensuite  le  lieu  où  il  lui 
est  |>ennis,  d'après  la  nature  de  sa  patente,  de  ^tet 
l'ancre  (i),  et  il. lui  prescrit  d'aller  avec  son  canot 
devant  le  logement  du  commandant ,  qui  est  sur  le 
rivage  :  le  capitaine  s'en  approche  à  une  petite  dis- 
tance, et,  après  avoir  répondu  aux  mêmes  ques- 
tions ,  il  reçoit  l'ordre ,  s'il  n'a  qu'une  p^nte  soup-  | 
pmie  ou  brute,  de  retourner  à  bord  en  attendant 

(  I  ^  '  ^e  vfiîsseau  porteur  4* une  patente  neue  ou  touchée  peut 
demeurer  î,  Tancre  dans  le  petit  port  de  Tile  j  cçlur  <jui  a  une 
patente  soupçonnée,  doit  aller  au  nord  de  ce  port,  daps  un  lieu 
appelé  îa  Grande-Prise,  où  quinze^  bâti  mens  peuvent  mouiller 
séparés-  les  uns  des  autre».      ..... 


\ 


a20  CHAPITRE   LXXXIt. 

son  bîlfet  d'entrée  dans  le  lazaret  ;  si  sa  patente  est 
nette  ou  touchée^  il  doit  aller  k  la  Consigne. 

Il  y  a  toujours  k  Pomègue  des  bateaux  de  qua- 
rantaine; un  d'eux  prend  celui  du  capitaine  k  la 
remorque,  et  le  tire  ainsi  avec  une  longue  corde 

.  de  sparte  y  pour  n'avoir  avec  lui  aucune  communi- 
cation. 

Dès  que  le  canot  est  devant  la  Consigne  ,  le 
conservateur  semainier  paroît  sur  le  balcon  :  il  présente 
de  loin  un  des  évangiles  selon  S.  Jean  ^  placé  dans 
un  cadre  et  couvert  d'une  glace ,  au  capitaine ,  qui  le 
touche  avec  une  baguette ,  et  jure ,  en  présence  da 
crucifix,  de  dire  la  vérité.  Alors  le  commissaire  recom- 
mence à-peu-près  les  mêmes  questions,  et  lui  de- 
mande ,  en  outre ,  s'il  vient  directement  du  lieu  où  il^ 
a  pris  sa  cargaison,  en  quoi  elle  consiste ,  s'il  a  eu 
communication  avec  quelqu'un  en  mer ,  combien  3 
a  d'hommes  d'équipage ,  combien  il  amène  de  pas- 
sagers, qui  ils  sont. 

Le  capitaine  présente  sa  patente  au  bout  d'une 
perche  ;  des  servans  de  la  Consigne  la  prennent  avec 
des  pinc^  de  fer,  la  plongent  dans  le  vinaigre ,  et 
retendent  sur  une  planche  devant  le  commissaire^ 

'  celui-ci  l'examine,  et  dicte  la  déposition  du  capi- 
taine ou  du  patron  k  un  des  commis ,  qui  l'enre- 
gistre :  le  capitaine  reçoit  alors ,  selon  le  cas  où  il  se 
trouve,  la  permission  de  se  placer  k  la  chaîne  du  port, 
parmi  les  navires  en  quarantaine  ^  ou  l'injonction  de 


v 


CHAPITRE   LXXÎin  ait 

Tctournef  k  Pomègue  jusqu'à  ce  quli  ait  de  nou- 
veaux ordres. 

Celui-ci  demande  ensuite  sî  le  vaisseau  apporte 
<ies  lettres  p)our  l'administration  ou  pour  les  autorités 
supérieures  :  s'il  y  en  a ,  on  les  reçoit  au  Ixmt  d'un 
bâton,  et  on  les  met  dans  ia  machine  à  parfums  { i  ) , 
aiprès  les  avoir  coupées  sur  le  bord  en  plusieurs  en- 
droits; les  lettres  adressées  à  de  simples  particuliers 
sont  seulement  incisées  avec  un  fer  tranchant,  et 
plongées  dans  du  vinaigre ,  parce  que  ia  vapeur 
est  une  exception. 

Le  capitaine  retourne  ensuite  à  Pomègue ,  pour 
y  attendre  de  nouveaux  ordres  ;  son  vaisseau  demeure 
sous  la  surveillance  de  quelques  bateaux  qui  em- 
pêchent que  personne  ne  descende  k  terre ,  et  l'équi- 
page attend  quelquefois  huit  à  dix  jours  avant  de 
pouvoir  entrer  en  quarantaine.  Afin  que  le  temps 
d'épreuve  soit  abrégé ,  les  passagers  doivent  chercher 
à  quitter  le  vaisseau  avant  l'ouverture  des  écoutilles , 
parce  que  ce  temps  compte  de  leur  entrée  dans 
le  lazaret,  et  qu'autrement  il  ne  compteroit  que  de- 
puis le  déchargement.  Quoique  l'on  emploie  le  mot 
quarantaine,  la  durée  de  la  réclusion  n'est  pas  toujours 
fixée  à  quarante  jours  ;  elle  dépend  de  la  nature  de 
ia  patente  dont  on  est  porteur,  et  des  accidens  qui 
peuvent  survenir  pendant  le  cours  de  l'épreuve.  H 

m  I  .11.1  ,— — ■^M— 

(  I  )  Cest  une  boite  fermée ,  garnie  d'une  griik ,  sur  laquelle  oa 
fmt  la  lettre,  «t  ^i^i^  cylindre  qui  distribue  U  vapeur  ^gaiement. 


a22  CHAPITRE    LXXXIl. 

faut  aussi  avoir  soin  de  porter  avec  soi  le  moins 
d'effets  qu'il  est  [k>ssible. 

Les  patentes  ou  billets  de  santé  sont  délivrés  par 
les  consuis  et  leurs  délégués  ;  elles  doivent  énoncer 
l'état  de  la  santé  de  Téqùipage  et  celui  delà  salubrité 
de  la  cargaison.  Ces  patentes  ont  difFérens  noms.:  la 
patente  nette  indique  un  état  parfait  de  santé;  la 
patente  touehie  fait  connoitre  que  l'équipage  est  sain , 
mais  qu'il  vient  d'un  lieu  suspect  ;  la  patente  soup" 
f année ,  que  ie  vaisseau  arrive  d'un  pays  où  il  régnoit 
une  épidémie ,  ou  d'une  ville  qui  a  eu  communica- 
tion avec  des  caravanes  d'un  pays  où  elle  existoit  : 
la  patente  brute  est  la  plus  mauvaise  ;  elle  annonce 
décidément  que  la  peste  étoît  dans  le  pays  d'où  le 
vaisseau  a  fait  voile  et  où  il  a  pris  sa  cargaison ,  ou 
qu'elle  règnç  à  son  bord.  C'est  donc  la  patente  qui 
détermine  l'espèce  de  quarantaine  que  doit  subir 
le  vaisseau  :  la  moindre  supercherie  et  rrïéme  la  plus 
légère  négligence  dans  ceux  qui  doivent  s'en  pour- 
voir ou  la  délivrer ,  les  exposeroient  k  des  peines 
très-rigoureuses. 

Les  vaisseaux  sont  plus  ou  moins  suspectés ,  selon 
qu'ils  viennent ,  i.**  de  la  Dalmatie  orientale,  de 
FÉgypteou  de  Maroc;  i,""  de  Tripoli  ou  d'Alger; 
'3.°  de  Constantinople ,  des  Dardanelles,  de  Siuyrne 
et  de  la  mer  Noire  ;  4.**  enfin  de  l'Amérique  sep- 
tentrionale, et  des  côtes  de  l'Espagne  et  de  l'Ita- 
lie ,  quand  on  sait  que  la  fièvre  jaune  y  règhe.  Les 


CHAPITRE   t-XXXII*  22J 

premiers,  avec  des  marchandises  susceptibles,  patente 
nette ,  sont  soumis  à  mie  quarantaine  de  vkigt  jours  , 
et  de  dîx<4iuit  avec  des  marchandises  non  susceptibles; 
elle  est  de  vingt-cinq  si  ia  patente  est  soupçonnée:  tA 
faut  y  outre  cela  /neuf  ;ours  de  purge ,  si  la  patente  est 
touchée;  quatorze  de  purge  et  trente  de  quarantaine, 
û  ^  patente  est  brute, 

Xies  vabseaux  de  Tripoli  et  d'Âfger  sont  soumis  à 
vingt-hutt  jours  de  quarantaine  avec  patente  nette  et 
lnarchan£ses  susceptibles;  à  ving^cinq  seulement,* 
si  les  mal^chandises  ne  sont  pas  susceptibits  ;  à  trente 
jours  avec  patente  touchée  ;  k  trente-dnq ,  et  quinze 
jotirs  de  purge  à  bord ,  avec  patente  soupçonnée  ;  avec 
patente  brute ,  à  quarante  fours ,  et  trois  semaines  de 
po'ge  à  bord. 

Les  vaisseaux  de  Constantinople  et  de  ia  met 
Noire  sont  toujours  traités  comme  ayant  une  patente 
brute  et  des  marchandises  susceptibles,, 

On  distingue  plusieurs  espèces  de  quarantaines  : 
î.**  çelie  du  casco;  ^!*  celle  de  i'équipage  et  des 
passagers  ;  3  .^  celle  des  mardiandbes.  ( 

La  quarantaine  du  casco,  c'est-à-dire,  du  vaisseau, 
consiste  à  laisser  celui-ci  à  la  place  où  on  lui  a  fait  jeter 
i'ancre  (  ï  ) ,  sous  la  surveillance  de  deux  chaloupes 
montées  par  des  gardes  :  pendant  ce  temps ,  les 

(i)  C*est pourquoi  on  appelle  cette  espèce  de  purge  5^^/»^  j«r 
ftr ,  c'est-à-dire,  sur  ancre  :  fcs  Provençaux  donnent  le  nom  de 
fir  à  une  ancre  à  quatre  pattes^ 


a24  CHAPITRE   LXXXIL 

grandes  et  petites  lucarnes  du  vaisseau  sont  tou|ourf 
ouvertes  ;  on  le  lave  et  on  le  frotte  continuellement. 
Durant  la  quarantaine  de  l'équipage,  on  apporte  à 
ceux  qui  le  composent  leurs  provisions ,  qu'on  leur 
présente  au  bout  de  longues  perches.  Chaque  vais- 
seau peut  pêcher ,  pourvu  que  ce  soit  de  manière  à 
n'avoir  de  communication  avec  personne  :  on  le  vi^te 
régulièrement  tous  les  jours  ;  dès  qu'ii  y  a  un  malade , 
il  est  aussitôt  envoyé  au  lazaret  ;  si  un  homm^  meurt, 
*il  est  ouvert  à  i'instant ,  sur  les  bords  d'une  fosse ,  par 
le  chirurgien  du  vaisseau  ou  un  élève  en  chirurgie ,  en 
présence  du  chirurgien  du  lazaret  et  du  capitaine , 
pour  s'assurer  de  la  cause  de  sa  mort ,  et  il  est  enterré 
aussitôt;  on  tient  un  registre  exact,  que  Ton  envoie 
chaque  jour  au  conseil  de  santé.  La  quarantaine  de 
l'équipage  est  toujours  de  la  même  durée  que  celle 
du  casco  :  elle  commence  aussitôt  après  le  transport 
des  marchandises  ;  elle  est  toujours  de  dix  jours  plus 
courte  que  la  quarantaine  de  celles-ci.  Les  porteurs 
et  les  écrivains  du  vaisseau  sortent  les  derniers.  Une 
mort  dont  la  cause  n'est  pas  connue ,  sumt  pour 
faire  recommencer  la  quarantaine. 

Le  dernier  joiir  de  cette  séquestration ,  le  com- 
.  missaire  de  santé ,  accompagné  de  ses  commis  et  du 
chirurgien,  fait  une  visite  générale  :  on  fouille  scru- 
puleusement par- tout;  la  sonde  est  enfoncée  où  la 
main  ne  peut  pénétrer ,  pour  savoir  si  rîen  n'a  été 
caché ,  et  Ton  examine  encore  chaque  personne  de 

-    l'équipage. 


CHAPITRE   LXXXIU  ^ij 

réquîpage,  La  moindre  fraude  entraîile  des  pêînei 
.graves,  et  toujours  une  probngatron  de  quaran- 
taine. Ce  qu'il  y  a ,  en  effet ,  de  plus  k  cf aindre,  c'est  fa 
contrebande ,  parce  que  les  marchandises  que  I*bit 
veut  dérober  à  l'examen  peuvent  être  infeciées  j 
t'est  par  la  contrebande  que  la  peste  s'introduisît 
à  Arles  et  à  Toulon  ;  aussi  est-elle  punie  des  peines 
les  plus  sévères  >  et  celui  qui  en  est  convaincu  est 
fusillé  sur-le*champ. 

Cette  vhite  terminée,  on  lave  encore  le  vaisseau  ; 
on  y  feit  les  fumigations  d'usage,  après  avoir  fermé  les 
lucarnes  ;  on  trempe  toutes  les  coMes  dans  la  mer, 
etJ^  vaisseau  obtient  la  iitn  entrée^ 

Tous  les  vaisseaux ,  quelle  que  soit  leur  patente  , 
passent  les  dix  derniers  jours  de  lair  quarantaine 
dans  le  port ,  en  face  de  la  Consigne ,  sous  la  garde 
de  deux  chaloupes  ;  c'est  ce  qu'on  appelle  être  à 
tohervatioTtu 

Les  passagers  peuvent  demeurer  à  bord  ou  entret 
au  lazaret,  à  yolonté  ;  ce  n'est  que  par  avarîce  ou 
par  indigence  qu'on  peut  prendre  ce  dernier  parti* 
Le  passager  qui  préfère  d'entrer  au  lazaret ,  ne  doit 
pourtant  pas  quitter  son  bord  que  ses  effets  n'aient 
été  soigneusement  enregistrés  :  il  y  est  intfoduit  par 
le  quai  destiné  au  genre  de  patente  dont  il  est 
porteur. 

Le  lazaret  (planche  XL)  est  un  vaste  édifice  situé 
au  nord  de  Marseille  :  il  se  prolonge  depuis  la  pointe 
Tome  m.  P 


Z26  CHAPITRE    LXXXIi; 

du  nord  de  Tanse  de  la  Joliette,  appelée  anciennen- 
ment.  Porto-gallo ,  jusqu'à  k  pointe  de  Martin  d'A- 
renc  ;  ce  qui  comprend  un  espace  d'environ  six 
cents  toises  :  il  a  été  bâti  en  1666 ,  et  a  été  depuis 
successivement  agrandi.  Howard  en  a  donné  un  plan 
fort  inexact  (i).  II  est  placé  au  nord  de  la  ville ,  à 
environ  cinquante  toises  de  ses  murs.  C'esl  un  vaste 
assemblage  de  bâtimens  divers ,  divbé  en  sept  en-< 
dos ,  séparés  les  uns  des  autres  par  des  murailles  ^ 
dans  lesquelles  on  a  pratiqué  différentes  portes  , 
qui  sont  toujo^irs  fermées  pendant  la  nuit,  et  qui 
s'ouvrent  pendant  le  jour  lorsque  l'enclos  ne  présente 
rien  de  suspect  :  quatre  de  ces  enclos  soi^t  destinés 
aux  quarantenaires ,  et  les  trois  autres  aux  marchan- 
dises ;  on  nomme  ceux-ci ^^7ff^/  enclos, petit  enclos,  et 
enclos  neuf 

Le  grand  enclos  (nJ^  16)  est  divisé  en  deux  parties 
par  une  grancfe  barrière  de  fer.  La  partie  supirieun 
comprend,  dans  son  enceinte,  les  magasins  à  poudre 


(i)  Howard  avoue  lui-même  qu'il  a  obtenu  le  sien  à  Trîcste. 
Voyez  son  ouvrage  intitulé  :  An  account  of  the  principal  laiarettos 
in  Europe  ;  whh  various  papers  relative  to  theplague  ,  together  witk 
fwrther  observations  on-  some  foreign  prisons  and  hospitals,  and  addi- 
tioualremarks  on  the  présent  state  ofthose  in  GreatBritàin  and  Ireland; 
by  John  HowARD,  F.  R.  S.  the  second  édition,  with  additions; 
London,  1791 ,  în-4.'*  Le  plan  que  je  publie  m*a  été  donné  par 
M.  le  préfet  ;  il  est  calqué  sur  celui  qui  est  déposé  à  la  Consigne: 
on  peut  donc  compter  sur  sa  fidélité. 


CHAPITRE  LXXXII.  %vj 

(n!  àf.  )yAe  quaiantaine  et  du  commerce  (n.^.  j^, 
les  parionrs  (  nt  21  )  y  Je  logement  du  capitaine 
(n*  10) y  l'auberge  (n!  14) ^  les  avenues  du  petit 
endos,  celles  des  quatre  enclos  des  malades  et  de 
i'^idos  impérial,  celles  des  écuries,  les  greniers  à 
foin,  les  logemens  d^s  pdefi'eniers  et  la  chambre 
de  correction.  La  fartie  inférieure  est  disposée  pour 
recevoir  les  marchandises  avec  les  personnes  qui  les 
soignent. 

Le  logemait  du  capitaine  (  nj'  10  )  est  sur  une 
hauteur  d'où  il  domine  une  grande  partie  du  laza- 
ret* La  vue  de  la  mer  ,  le  jardin  «et  les  terrasses  qui 
l'entourent ,  en  rendent  hi  position  agréable. 

Le  ternûn  qui,  du  côté  du  nord ,  domine  ie  loge- 
ment du  capitaine ,  est  divisé  en  quatre  parties ,  qui 
forment  les  enclos  de  Saint-Roch  (  »/  //  ^ ,  où  on 
loge  les  pestiférés ,  du  Cassadou  (n!  12),  du  Puits  et 
du  Belvédère  (nJ"  i^)  9  destinés  à  recevoir  des  qua- 
rantenalres  ;  chacun  a  une  fontaine ,  un  lavoir ,  pour 
l'usage  seulement  de  ceux  qui  l'habitent ,  et  une  issue 
sur  le  dmetière.  Plusieurs  personnes  peuvent  se  prq- 
mener  isolément  et  sans  se  toucher  dans  la  grande 
avenue  qui  conduit  au  logement  du  capitaine,  et 
respirer  ie  thym  et  les  autres  plantes  aromatiques 
qui  y  croissent  naturellement. 

Quoique  fes  eaux  soient  abondantes,  on  a  cons- 
truit une  vaste  citerne  pour  en  prévenir  la  disette. 

Près  de  la  grande  avenue  est  une  prison  (n^ij) 


àlS  CHAPITRE   LXXXII; 

destinée  à  ienfètnièT  cèiisf  que  de  graves  contraven-* 
tiotis  ati*  lofis  sanitaires  obligent  d'y  renfermer. 
.  Ueti^erfiblë  des  bâtimeiis  est  ceint  de  deux  murs 
^  n.'  34)  hauts  dé  vingt-cinq,  jriéds,  et  éloignés 
rmi  de  Tautte  dé  sit  toîsfes,  entre  lesquels  des 
gardes  foht  de  fréquentes  patrouilles  pour  empê- 
chet  toUtfe  correspondance  avec  l'extérieur  (  i  ) .  On 
ne  peut  arriver  que  jusqu'à  la  porte'  principale 
^72.*  i  ) ,  qui  se  ferme  à  l'entrée  de  la  nuit  ,  et 
€ont  les  clefs  sont  rehiises  au  capitaine.  Outre  cette 
porte  priiicipde ,  il  y  en  a  encore  deui  autres  p!us 
petites. 

L'établissement  est  sous  I^autorîté  exclusive  de  l'ad^ 
ministratibtl  de  la  santé.  En  général ,  bn  choisit  pour 
capitaine  un  négociant  de  bbrtné  réputation ,  qui  ait 
Voyagé  tïans  le  Levant ,  âgé  de  quarante  à  cinquante 
ani,  veuf  ou  garçon.  Ses  appoîhlèmens  sbrit  considé- 
rables, J^arce  ^^^'il  ne  doit  jamais  rien  recevoir  de 
personne.  Il  doit  toujours  t:oucher  au  laxaret ,  et  ne 
peut  même  le  quitter  le  four  sans  periilission.  On  exige 
qu'il  soit  célibataîte  et  qu*ii  Vive  cdmnie  tel,  parce 
qu'on  rie  souiflFre  aucun  externe  dans  le  la2al^t,et 
iqu'on  craindrdit   qu*une  femme  et  des  enfarts  ne 


(i)Ce  second  mur  a  été  construit  en  1724;  il  n*y  àvoit  aupara- 
vant cju'un  seul  mur  avec  des  tours  dans  les  angles»  où  des  soidats 
ctoient  logés  pour  en  empêcher  l'approche  :  quatre  de  ces  tours 
subsistent  encore.  On  a  commencé  en  1786  une  troisième  en* 
ceinte;  niais  elle  n*a  pas  été  contir*'''^'^ 


CHAPITRE   LXXXII.  a.2  ^ 

pussent  le  distraire  cle  ses  deypîr^,  et  n'absorbassent 
une  partie  de  son  temp^,  aiji  doit  être  entièremjenj 
consacré    aux  soins  qu'ei^pîge  la  confer^ation  pu- 
blique. Ce  capitaine  a  exclu^îveflpent  la  police  4^ 
lazaret ,  en  i'absence  des  conseryatei^rs  :  il  règle  le 
prix  des  parfums ,  fait  acquitter  le  sa)a|fe  de^  gardes  ; 
^I  suit  les  offic^ef s  de  santjé  dans  leurs  visites ,  par- 
court les  enclos  et  les  hangars ,  surveijle  Jes  garc^es , 
rédige  les  testap^ns  des  ijial^(je$,  leçqueb  ont  autant 
de  valeur  que  ceux  qui^ont  passés  par-devanpîotâîre^ 
et  il  fait  inhumer  les  morts  ;  il  dénonce  Ijes  tr^psgresr 
siôns  des  réglemens  sursitaires ,  jpt  pMnjt  çjbmX  qui  y 
manquent.;  il  doit  jnforpjer  l'administration  de  lout^ 
et  il  est  responsable  desfawtes  qui  sp  cpjnmettent  par 
sa  négligence.  Soi)  lieutenant  doit  avo^jr  i^ussi  voyagé 
dans  le  Levant,  et  il  est  soumis  aux  menées  obliga- 
tions. Cette  place  a  été  çréép  pn  1738  ;  il  sppplée  le 
capitaine,  et  lui  est  suborcjonhé  :  il  a  la  surveillance 
particulière  de  l'endos  neuf;  il  s'occupe  prmdpaler 
ment  de  ce  qui  est  relatif  au  soin  des  marchandises. 
Les  gardes  du  lazaret  sopit  d'aneierfs  matefots  c^  At$> 
soldats  de  marine ,  à  qui  le  çpmi^erçe  dfi  Leyant 
n'est  pas  étranger.  II  y  en  a  qifarpnte  k  cinquante  y 
dont  une  partie  est  eipployée  à  faire  des  rpnf^ps  entra 
les  murs  ,  dans  les  enclos  et  sur  les  quais  ;  les  autres 
servent  les  quarantenaires ,  et  les  empêchent  de  comr 
m'uîiiquer  avec  personne.  Chaque  garde  ne  quitte 
.   celui  à  qui  il  est  attaché  que  dans  le  cas  où  1» 


A 


V* 


^3©  CHAPITRE   LX:XXIt. 

contagion  se  dédare  (i).  Us  doivent  faire  au  capi*» 
taine ,  deux  fois  par  jour ,  un  rapport ,  qui  est  envoyé 
à  l'administration  de  la  santé,  hes  portiers  de  chaque 
enclos  sont  de  vieux  pilotes  ;  leur  emploi  exige  beau- 
coup de  soin  et  de  surveillance. 

A  son  entrée  dans  le  lazaret ,  on  donne  au 
quarantenaire  une  loge ,  ou  petite  chambre ,  oîi  Von 
brûle  du  thym  et  des  herbes  aromatiques ,  et  qui 
n'est  garnie  que  d'un  lit  de  fer  et  de  meubles  de 
bois  et  de  paille  ,  qui  sont  les  moins  susceptibles 
de  contagion. 

La  plupart  des  toges  sont  exposées  au  sud*sud- 
est ,  et  ont  la  vue  sur  la  mer  et  sur  le  nord  de  la 
ville.  Il  y  a  au- dehors  une  gderie  où  les  quarante- 
naires  peuvent  se  prottiener ,  sans  cependa^it  commu- 
niquer entre  eux. 

L'auberge  {  nJ"  14)  est  à  peu  de  distance  du  lo- 
gement du  capitaine  ;  il  y  a  dans  la  cuisine  un  tour, 
où  chaque  garde  va  chercher  ce  que  son  quarante- 
naire a  demandé  :  les  prix  sont  fixés  d'après  le  taux 
courant  des  denrées.  Si  l'on  veut  quelque  chose  de 
dehors ,  on  dépose  sa  demande  chez  le  portier  ;  celui- 
ci  la  donne  à  un  pourvoyeur  qui  vient  deux  fois  par 
jour,  mais  qui  ne  pénètre  pas  plus  loin.  Le  linge 


(i)  On  peut  n*avoîr  qu'un  gardien  pour  deux  quarantenaîres , 
deux  pour  trois  ;  mais  si  I*un  des  quarantenaires  associés  tombe 
malade^  ^AxiX  aussitôt  sépàr««  et  Ton  donne  un  garde  à  chacun» 


•  / 


CHAPITRE   LXXXII.  ^     2}l 

itst  confié  à  des  blanchisseuses  qui  ne  sortent  pas 
du  lazaret.  Ce  sont  les  femmes  de  ceux  qui  y  sont 
attachés. 

Celui  qui  a  xme  patente  nette  peut  sortir  de  sa  loge  ; 
mais  tous  ceux  qui  en  ont  d'autres ,  ne  peuvent  la 
quitter  que  le  seizième  jour.  Lorsqu'on  se  promène 
dans  l'enclos ,  les  gardes  veillent  à  ce  qu'on  ne  puisse 
communiquer.  La  forme  des  parloirs^»/  :ti),  où  l'on 
peut  causer  avec  ses  connoissances  et  ses  amis  du 
dehors ,  s'oppose  eiie-mème  à  toute  communication  t 
c'est  une  galerie  longue  et  étroite  ^  qui  donne  sur  la 
campagne ,  près  de  la  gnmde  porte  ;  elle  est  garnie 
de  bancs  en  dedans ,  et  il  y  en  a  aussi  à  l'extérieur 
pour  les  étrangers ,  afin  que  l'on  puisse  causer  assis  à 
l'abri  de  ia  piuie;  mais  elle  est  garnie,  du  haut  en 
bas ,  de  grilles  et  d'un  treillis ,  et  il  y  a  extérieurement 
un  fossé  qui  empêche  d'en  approcher^  La  communi* 
cation  est  également  impraticable  du  côté  de  la  mer. 
Il  y  a  un  petit  port  ;  et  pour  entrer  au  lazaret ,  on 
descend  sur  celui  des  quais  qui  est  assigné  à  l'espèce 
de  patente  dont  on  est  porteur.  Tout  bateau  qui 
oseroit  aborder  sans  ordre ,  seroit  brûlé  à  l'instant. 

Cliaque  quarantenaire  a  un  numéto  ;  et  le  portier 
de  son  enclos  l'avertit  qu'on  le  demande  au  parloir , 
en  sonnant  le  nombre  de  coups  qui  correspond  à 
ce  numéro.  Le  soir ,  chacun  est  enfermé  avec  son 
gardien  ,  et  les  clefs  sont  remises  au  capitaine. 
On  sent  combien  un  pareil  genre  de  viç  doit  être 

p4 


1^    y   -.j^Sjtr* 


V 


%^î  CHAPITRE    tXXXII. 

insupportable:  aussi  les  murs  sont- ils  couverts  d'ins- 
criptions dans  toutes  les  langues ,  qui  expriment  le 
dégoût,  l'impatience  et  Tennui  ( I ) .  ,  , 

Lorsqu'un  quarantenaire  tombe  malade,  il  est 
encore  plus  soigneusement  séquestré  :  im  médecin 
vient  le  voir  avec  le  capiuipa  ;  il  l'examine ,  en  se 
tenant  à  la  porte ,  et  lui  prescrit  les  reipèdes  néces-» 
saires  à  son  état^  Si  cet  état,  est  alarmant ,  le  malade 
peut  trouver  un  chirurgien  qui  y  pour  de  l'argent , 
consent  à  s'enfèrmet  et  à  fiiire  quarantaine  avec  lui. 

Quand  il  ne  reste  enfin  aucun  espoir  de  guérison , 
on  redouble  de  surveillance  ;  mais  on  ^n  fait  un 
mystère  aux  autres  quarantenaires.  Lorsque  le  malade 
veut  faire  un  testament ,  oiî  appelle  le  capitaine , 
qui  se  tient  k  la  porte  de  la  loge ,  et  qixi  écrit  sous 
sa  dictée.  S'il  demande  un  prêtre,  cetui-cî  se  p^ace 
dans  un  coin  d'où  il  ep tend  sa  confession,  et  lui 
donne  l'absolution  et  k  bénédiction  ;  jamais  les 
malades  ne  reçoivent  Fextrêpie-onction  ni  le  viatique. 
Le  prêtre,  en  sortant,  doit  jurer  sur  le-crucifix  qu'il 
n'a  point  touché  ni  approché  le  malade. 

Si  celui-ci  meurt,  les  gardes  entraînent  son  corps 
hors  d^  lit,  avec  des  cordes  de  sparte  (2)  armées 

^  I  I     I  III  n  >i  ■  I  I  I      n.,|^>,|i|il     I  I    I  I      I  I  1  ■    Il     J     W  U    I     I   II   II    I      >    I  n    ■  n     I      ttmm^m^^fm 

(i)  Celle-ci, cCfitc  en  arabe,  est  rQp^^rqw^i^^  pour  la  tQurpurc 
4c  la  pensée  :  La  vie  est  une  quarantaine  pour  le  paradis. 

(a)  On  emploie  le  sparte  ,  stipa  tenacissima,  non  -  seulement  à 
cause  du  fréquent  usage  qu*on  en  fait  en  Provence,  mais  parce 
^^u'ii  est  regardé  comme  absoiumetU  non  susceptibU. 


CHAPITRE   LXXXII.  233 

de  crocheta  de  fer  ;  on  le  met  sur  une  cîvîère ^  et 
on  l'emporte  pendant  la  nuit  dans  le  cimetière  du 
{azaret  ;  on  jette  dans  la  même  fosse ,  remplie  de  chaux 
vive,  tout  ce  qui  a  appartenu  au  décédé ,  et  on  brûle 
tous  les  vête^nens  de  ceux  qui  ont  eu  avec  lui  la 
moindre  comiriunîcation.  Sa  mort  est  tenue  secrète , 
ou  attribuée  à  un  accident  ;  h  plus  souvent  on  pré- 
tend qu'il  est  mort  dHine  çhûte,  ou  d'un  coup  qu'il  y 
reçu.  On  parfume ,  toutes  les  semaines  ,  pendant 
quarante  jours,  la  chambre  qu'il  a  occupée  (1)^  et 
tous  les  meubles  qu?  I4  garnissent ,  sont  exposés  à 
Taîï-  pendant  tout  ce  temps. 

Il  est  d'usage  d'accorder  w  quarantenaire  un 
jour  de  grâce ,  lorsqu'il  ne  survient  aucun  accident 
pendant  sa  séquestration.  Enfin ,  le  moment  de  1% 

$ortie  arrive  :  on  le  mène  ^  h  chambre  des  parfums, 

.  '         ••  . 

*  "■     '     '. '     '■        '■  "   '  J       "lUii'    II.-'      -i     1.     ■'    I     I        '      t  "' 

(i  )  Voici  quelle  étoit  fa  compositîpn  de  Fancien  parfum  : 

Soufre  vif 6  liv,  «^Gingembre.  . . . . .     4 ''v* 

Poix  nésine. , , . . .  6.  Cumin,  .,..,...•     5* 

Myrrhe ^.^,  4.  Curcuma. . . . . . ..     .2^ 

Encens 4.  •              Cardomomuni. . . .     2, 

Laudanum.  .....  2,  Aristoloches  ioj^gues  2» 

Storax « .  4.  Euphorbe  ..•.«...     a« 

Poivre  noir. . , .  • ,  j.  Cubcbes ,....*.,.     2» 

Genièvre.  ^  . . . , .  ^.  Son. 49» 

En  tout  lep  livres. 

On  se  sert  aujourdliui  Ju  procédé  de  M.  GuYTON  DE  MoR- 
VEAU ,  pour  toutes  Ics^  opérations  de  la  purge  des  malade^-,  de 
leurs  vêtement  et  ip  tops  les  objets  susceptibles. 


/ 


I 


r 


^34  CHAPITRE    LXXllI. 

Les  murs  sont  garnis  de  crochets  de  fer  pour  donner 
ia  facilité  de  suspendre  et  d'étaler  les  effets  qu'on 
veut  pariîimer  ;  on  y  a  pratiqué  un  foyer  dans  lequel 
on  allume  une  quantité  considérable  d'herbes  sèches 
qui  produisent  une  fîimée  épaisse,  dont  l'apparte- 
ment se  remplit;  lorsque  les  flammes  commencent  à 
s'abattre ,  on  répand  sur  la  braise  une  dose  conve- 
nable du  parfum  dont  j'ai  indiqué  la  composition  :  tout 
cela  produit  une  fumée  qui  remplit  une  chambre  où 
il  faut  demeurer  cinq  à  six  minutes  ,  pendant  que  le 
gardien  reste  à  la  porte.  On  introduit  ensuite  le  qua- 
rantenaire  ainsi  purifié  dans  la  salle  d'administration 
du  lazaret ,  où  siègent  le  capitaine ,  son  lieutenant,  le 
médecin  et  le  chirurgien;  là,  on  le  déclare  sain,  et 
on  lui  délivre  sa  patente ,  en  lui  annonçant  qu'il 
peut  sortir  du  lazaret ,  et  qu'il  a  la  libre  entrée  de  la 
ville.  Quand  il  est  sorti ,  la  chambre  est  aérée  pen- 
dant plusieurs  jours ,  et  Ton  y  fait  des  fumigations. 

Pour  désinfecter  les  pap^rs  du  quarantenaire ,  on 
les  [Jace  dans  une  boîte  pyramidale  dans  laquelle  il 
y  a  un  réchaud ,  sur  lequel  on  jette  de  l'acide  mu- 
riatique  et  de  l'acide  sulfurique,  d'après  les  procédés 
de  M.  Guy  ton  de  Morveau  ;  ils  sont  roulés  en  cornets 
pour  que  la  fumée  les  pénètre  mieux  :  c'est  à  leur 
couleur  jaune  et  à  Fodeur  forte  qu'ils  ont  contractée 
qu'on  juge  s'ils  sont  suffisamment  purgés. 

Les  marchandises  dont  les  vaisseaux  sont  chargés 
sont  ûJtinguées  en  suseepîiblts  et  non  susceptibles. 


*ZÏ 


'  --^-^ 


^a^dKJM^b^. . .. hd 


CHAPITRE   LXXXII.  23Ç 

Celles  qu'on  regarde  comme  susceptibles  de  conta- 
^on  sont ,  les  étoupes ,  les  poils  de  chèvre ,  les  soies , 
le  linge ,  les  étoffes  de  toute  espète ,  les  éponges ,  les 
peUeteries ,  les  maroquins ,  les  livres,  le  parchemin, 
le  papier,  le  carton ,  les  plumes ,  les  coraux  enfilés , 
les  chapelets ,  la  verroterie,  les  rosaires  ,  la  quincail- 
lerie ;  tout  ce  qui  se  fabrique  avec  la  laine ,  le  coton, 
la  soie ,  le  chanvre  ou  le  lin  ;  enfin ,  les  meubles ,  les 
«rètemens  de  toute  espèce,  les  monnoies,  les  fleurs 
fi^îches ,  et  les  cordes  non  goudronnées. 

Les  marchandises  non  susceptibles  sont ,  les  racines , 
le  café ,  f  orpiment ,  le  tabac ,  les  coraux  bruts  ,  les 
peaux  qui  ont  encore  leur  suint ,  la  garance ,  la  po- 
tasse ,  le  salpêtre ,  le  natron ,  Kvoire ,  ia  noix  de 
galle,  les  minéraux ,  les  métaux  en  barre ,  les  plantes 
et  les  graines  colorantes  ,  les  cendres ,  la  soude  , 
la  potasse ,  le  salpêtre ,  l'huile ,  les  salaisons ,  les  fruits 
secs ,  les  vins  ,  les  liqueurs ,  et,  en  général ,  tous  les 
liquides  ;  les  cornes ,  la  sciure  de  corne ,  le  sparte , 
le  suif  et  les  cordes  goudronnées. 

Les  animaux  à  long  poil  sont  soumis  à  la  qua- 
rantaine du  casco  ;  ceux  à  poil  court  sont  obligés  de 
gagner  la  terre  à  la  nage  :  les  perroquets  et  les  autres 
oiseaux  sont  seulement  lavés  avec  du  vinaigre. 

La  quarantaine  des  n(iarchandises  dépend  aussi  de 
la  nature  delà  patente  :  c'est  la  patente  qui  décide  si, 
avant  leur  transport  au  lazaret ,  elles  doivent  éprou- 
ver à  bord  une  première  purification  qu'on  appelle 


Z26  CHAPITREE   LXXXII. 

^  sereine.  La  patente  touchée  n'oblige  qu'à  h  petite  sè^ 
reine,  qui  est  de  neuf  à  quatorze  jours;  h  patente 
hrute  nécessite  une  grande  sereine,  qui  est  de  quatorze 
à  vingt -un  jours.  La  considération  d^  lieu  d'où  vient 
le  navire,  et  dje  l'état  de  l'équipage,  apporte  à  tout 
cela  des  modification^. 

On  se  sert  aussi ,  pour  le  transport  des  marchan- 
dises ,  selon  la  nature  de  ia  patente ,  des  bateaux  dii 
navire  ou  de  ceux  de  quarantaine  ;  de  la  Saint-Mich/^ 
à  Pâque ,  ce  transport  se  fait  depuis  sept  heures  dn 
matin  jusqu'à  trois  heures  du  soir;  et  die  Pâque  à  la 
Saint-Michel,  depuis  cinq  heures  du  matin  jusqu'à 
>,  cinq  heures  du  soir,  II  faut  quje  tout  §e  pa$se  ai^ 

four,  afin  que  rien  ne  soij  çjétourné,  confondu,  et 
n'échappe  à  I^  surveiifançe  des  inspecteurs. 

Dès  que  ïe  jour  du  débarquement  est  fixé,  le 

consignateur  du  vaisseau  arrête  un  certain  nombre 

I  de  porte-faix,  en  faisant  prix  avec  leur  chef,  parce 

qu'à  Marseille  les  por^e-faix  forment  uriecqrporation  : 
^  ceux-ci  doivent  être  munis  d'un  certi^cat  de  ^nté , 

et  ils  sont  encore  examinés  avec  soin.  On  les  intro- 
duit  dans  i'enclçs  indiqué  sur  la  patentje ,  et  le  dèr 
chargement  commence.  C'est  le  plus  ordinairement 
dans  V enclos  neuf  (  n."  2^)  s  il  renferme  une  suite 
d'édifices  vastes  et  solides ,  qui  font  l'admiration  des 
étrangers.  Ce  n'a  été  qu'en  1757  qu'il  a  été  porté 
au  degré  d'agrandissement  qu'il  a  aujourd'hui.  G'est^là 
qu'est  le  logement  du  lieutenant  (n'  2j),  qui  en  a  la 


*.«^i-" 


^ 


CHAPITRE    LXXXII.  ^37 

<\ef;  le  capîtaînç  en  a  une  double ,  afin  qu'ils  puîssfînt , 
à  tous  les  momens,  se  concerter  sur  les  mesures  ur- 
gentes. On  y  voit  quatre  grandes  belles  halles ,  dont 
chacune  peut  contenir  trois  mille  <:olis  fn,"  j^)  (i); 
les  petites  en  contiennent  de  quinze  h  dix-huit  cents. 
II  est  prouvé  que  le  lazaret  peut  contenir  à-la-tbis 
J)lus  de  trente  mille  colis ,  et  jusqu'à  trente-six  car- 
gaisons en  purge,  dont  les  deux  tiers  sont  dans 
Tenclos  neuf.  Le  vent  souffle  de  tous  côtés  dans  ces 
halles,  et  souvent  avec  tant  d'impétuosité,  qu'on  est 
obligé  découvrir  les  balles  décousues,  avec  des  filets 
de  sparte,  [X)ur  empêcher  les  flocons  de  laine  d^être 
emportés  au  dehors.  Il  y  a,  pour  .cet  enclos ,  un  port 
particulier^;;/ ^^^.  Les  porteurs  habitent  tous  dans  le 
même  lieu;  et  si  l'un  d'eux  tombe  malade,  on  l'isole 
selon  l'usage  (2).  Toutes  les  marchandises  sont  mises 
sur  des  bancs  de  pierre  élevés  d'un  pied,  ou  sous* des 
hangars. si  elles  sont  de  nature  à  être  gâtées  par 
l'humidité  :  ces  hangars  sont  de  grandes  arcades  ou- 
vertes qui  peuvent  contenir  trente  mille  balles.  Tout 
est  rangé  dans  le  plus  grand  ordre;  la  manière  d'ex- 
poser les  marchandises  dépend  de  la  nature  de  la 
patente  (3). 


(  1  )  Colis  et  balles  sont  synonymes. 

(2)  Comme  ils  manient  sans  cesse  ces  marchandises,  sî  elles 
tonscrvoient  le  moindre  miasme  pestiientiel ,  un  d'eux  en  seroic 
ticntôt  atteint;  et  c*cst  ainsi  qu'on  juge  de  leur  salubrité. 

(3)  Là  purge  au  lazaret  de  MarseiM^  est  accompagnée  àe$ 


« 


( 


^38  CHAPITRE   LXXXIL 

Les  grains  sont  toujours  mis  dans  des  greniers  et 
souvent  remués;  les  tonnes  d'huile  sont  plongées 
dans  la  mer;  les  moindres  morceaux  de  soie,  de 
cotoh,  de  parchemin  ou  de  papier,  sont  regardés 
comme  suspects  ;  les  matières  d'or  et  d'argent  sonf 
dépaquetées  et  passées  dans  le  vinaigre  ;  toutes  Jes 
plantes  doivent  être  privées  de  leurs  fleurs  et  de 
leurs  boutons. 


modifications  suivantes ,  qui  dépendent  des  différences  de  la  pa* 
tente;  on  peut  classer  ainsi  ces  modifications  : 

L  Patente  nette  et  touchée,  i .°  Coton  cru ,  poil  de  cheval , 
maroquin»  pelleteries,  éponges,  cFianvre,  étoupe,  lin,  iîlosefle, 
draps,  cordouan.-— Dans  ia  première  moitié  de  la  quarantaine^ 
on  retourne  i*un  des  côtés  de  Tembailage  ;  et  pendant  l'autre,  on 
retourne  l'autre  côté^ 

2,^  Laine  de  mouton,  d'agneau  et  de  chèvre,  coton  fHé  d'A- 
lexandrie. —  Pendant  la  première  moitié  de  la  quarantaine ,  les 
Ballots  sont  ouverts  par  le  haut  ;  pendant  l'autre  moitié,  ils  le  sont 
par  le  bas,  et  les  Cordes  sont  enlevées. 

3.**  Coton  de  Smyitie,  poil  de  chèvre,  —  Comme  dans  le 
n,**  z ,  à  l'exception  que  les  cordes  peuvent  rester, 

4.**  Coton  filé  de  la  Syrie,  soie,  —  Les  deux  côtés  de  l'embal- 
lage sont  retournés  pendant  toute  la  quarantaine;  les  ballots  sont 
placés  à  de  grands  intervalles ,  et  l'on  n'en  met  tout  au  plus  que 
trois  les  uns  sur  les  autres. 

5,**  Peaux  sèches.  —  On  les  entasse  à  la  hauteur  de  six  pieds , 
et  on  les  retourne  deux  fois  pendant  la  quarantaine. 

6/*  Plumes,  livres,  draps  ,  cartons,  coraux  enfilés  et  chapelets, 
parchemin,  quincaillerie  et  effets  de  toute  espèce.  —  Les  caisses 
sont  ouvertes,  les  ballots  retournés  des  deux  côtés,  et  le  dedans 
<st  remué  deux  fois  pendant  la  quarantaine, 

7,**  Épiceries,  café,  cire,  cuivre  travaillé,  plantes  et  graines 


■■Hl 


Mrtnk.^M^^ÉflH 


CHAPITRE   LXXXII.  2J9 

A  la  fin  de  la  quarantaine ,  les  marchandbes  sont 
portées  sur  le  quai  destiné  à  leur  embarquement;  et 
tous  les  lieux  où  elles  ont  été  déposées ,  sont  aérés , 
et  purifiés  par  des  fumigations  et  dçs  lotions  de 
vinaigre. 

Les  firais  de  quarantaine  sont ,  pour  celle  du  casca, 
d'un  pour  cent  ;  pour  les  passagers ,  de  douze  à  dis- 
huit  francs  par  jour;  et  pour  les  marchandises^  de 
six  y  huit  et  dix  pour  cent.  On  ne  les  acquitte  qu'à 


colorantes  ,  dents  d*éléphant ,  orpiment,  potasse,  tabac.  —  Les 
ballots,  les  caisses,  les  sacs,  &c.  sont  ouverts  ei^  sondés. 

8.^  Seigle  et  noix  de  galle  en  sac.  —  Le  sacs  sont  ouverts  et 
sondés. 

U.  Patente  soupçonnée  et  Brute.  Les  marchandises  spécifiées  cr- 

dessus  sous  les  mêmes  numéros.-^  i.^  Les  ballots  sont  totalement 

11 

ouverts  ;  pendant  la  première  moitié  de  la  quarantaine,  6n  tourne 
vers  fc  levant  l'un  des  cotés;  pendant  l'autre  moitié,  fautre  côté. 
Le  tout  est  remué  quatre  fois  pendant  la  quarantaine»  afm  d'ad- 
mettre Taccès  de  Tair. 

a.^  On  les  déballe  entièreipent  et  on  les  pose  par  tas  sur  deé 
banquettes. 

3,**  On  enlevé  tout  remballage. 

4.*^  L'emballage  est  enlevé  ;  les  marchandises  sont  disposée» 
dans  de  plus  grands  intervalles,  et  ne  scHit  point  entassées. 

5.**  Elles  sont  entassées  à  quatre  pieds  de  haut,  et  retournées 
quatre  fois  pendant  la  quarantaine. 

•6.^  L'emballage  est  enlevé,  et  les  marchandises  sont  remuées" 
quatre  fois.  Si  ce  sont  des  plumes  ou  des  étoffes,  le  tout  est  déballé 
et  exposé  à  l'air. 

7.**  La  même  opération  est  répétée  plusieurs  fois  dans  des  in- 
tervalles de  quelques  jours. 

8,^  La  même  opération  est  encore  répétée  plusieurs  fois. 


1 

44o  CHAPITRE   LXXXÎI. 

Marseille,  entre  les  mains  du  consîgnateur ,  aubu-^  1 

reau  de  la  santé.  1 

H  y  a  des  lazarets  où  Ton  ne  reçoit  pas  les  navires 
atteints  d^  la  cofitagion  ;  ils  sont  admis  dans  celui 
de  Marseille.  On  a  vu  recevoir  des  vaisseaux  qui 
avoîent  la  peste  à  bord ,  et  qui  avoient  été  repoussés 
de  tous  les  ports  de  la  Méditerranée.  Alors  on  leur 
indique  la  piace  où  ils  doivent  jetet  Tancre  :  la  qua- 
rantaine du  casco  et  de  l'équipage  doit  durer  quatre- 
vingts  jours  ;  celle  des  marchandises ,  cent.  On  double 
les  gardes  ;  on  place  dès  ventilateurs  à  chaque  lu* 
came  ;  les  effets  de  Téquîpage  sont  plongés  dans 
la  mer  toutes  les  vingt-quatre  heures. 

Dès  que  la  contagion  se  manifeste  sur  un  individu  ^ 
il  est  aussitôt  débarqué  au  port  du  petit  enclos ,  et  ^^, 
introduit ,  par  le  tambour  des  portes  de  la  marine 
( n!"  j) y  dans  un  appart;pment  qui  n*a  pas, d'issue 
dans  Tenceinte  du  lazaret  :  il  y  attend  la  visite  de 
l'officier  de  santé ,  qui  y  procède  eii  présence  du 
conservateur  semainier  et  du  capitaine ,  qui  sont 
placés  dans  un  éloignement  convenable.  Si  le  pro- 
cès-verbal énonce  que  le  malade  %%i  atteint  de  la 
contagion  ,  le  capitaine  et  toutes  les  personnes 
qui  habitent  dans  ie  lazaret ,  (Sont  aussitôt  déclarés 
en  état  de  quarantaine ,  et  le  malade  est  aussitôt 
introduit  dans  V  enclos  de  Saint- Roc  h.  Pendant  cette 
translation,  les  barrières  sont  fermées;  l'appel  des 
quarantenaires  ^  aux  banières  de  la  grande  avenue , 


cessa;   jst  \^%  ni  remm<fan3  l^Hj9tAkïW^  quft 

pestiféré,  a^ Inftit  4^ iwg^^pfrcbfî^ ,  d^ de«r^r-ï 

lui  ie$i  péce^ç^r^.;  çelwi  cpji  te  itiJiiJBfcoire  dftn^  sfc 

^fs,gWt^  fit  im?  ftimfsftl^ideî  tQÎlf  wée  ;  H  qwttft 
^  v^lçmwit  en  somntî  « H-Iq  Jai^fc  tovlow^  cfo 

pp$^  ^  gmnd  ^în  Si  qu^qu|^();i^v$Iàt«ftmnpà>We9i 

«î 6^-«&t  ifiipraticabie,  eR'fQurnit  nu  chirurgien  lêé 

^èmëivmmùs' qyjfzn  gaïSé  ;^^Wi  Tuî  aoniie  des 

lan^/toaqhfii  ie^inaladfi  ayec^.i|3ijtpgia$;  il  sïh%P^ 
^tot  la  chambré  avec  de^grâSdllnèéhaùâiV^ï^*^^ 


■•_>- 


â4i  tofrA4^ïtftfc  Ljcxicn* 

il  se  frotte  alveé  dé  fori  vinaigre.  Enfin,  quand  le 
inraladi^îest  gctérf ,  ce  qui  sef  reconnoît  âièc  dcâtric^ 
des  tobohs  (4),  8  opmmencie  une  quarantaine  de 
quatre-vingts  jowiiv  *^ns  pouvoir  quitter  sa  chambre 
avant  le  cinquantième  ou  le  scnxantième.  S'fl  meurt, 
X  est  enterré  dans  la  chaîne  vive  avec  tout^^s  les  for- 
Bial&és  :  déjà  indiquées^  :  on  brûle  tout  ce  qui  lui  « 
sëfvi  t  î*on  grûtte'  ef  Vùn  «blanchit  les  murs  de  sa 
diambre  ;  en&i  on  pl'o^ède  à  la  désinfection  dé 
Feo(do^{)arIes^Hfoyens  quenofis  avons iiïâi^ués :  tout 
^\titr  qui  ont  toiùibé  ï  12e  ()ui  lui  a  zppSLt^na,  ét^t 
MssPsômtiH^^  une  ^atsâitaine  de  quatre-vingfs  |ûUrs4 
Cette  moirr  es€  ^i|^;»mèment  cachée  aux  autres  <{ua^ 
fântéftaife$>  quî>/*l  fô^le;  tteJ>€^vent  sonir^e  i^urà 
trfiambrèi  tant^i  y  ampestiffpé  dans  lélàzaret. 
Les  m^fctefidi!^  fS^ilt  mi^s  en  sereiilé  à  bdid, 

pul^  jportfts  lÊai^^mm^ 4é  ^te  ^  oà  l'otf  miouble 

ffâltèiitibtoL>E)arnte$  laéféi»,  lés  remuer,  et  Rassurer 
Ife^teur  dèsîiifé«M)rt.  Les  porte-fiîîx  reçoivent  cin-^ 
^ânteà'^«ïttité>iivréè  par  four  poiir  leur  'sih&fè.  • 
•    Toifté  la  l|«9raniaine  recommencé'  èèfe   qu^^ 

î,.    t  .,     -l-iri-iTr!.      i..f'.-t;>|r..rr.-.      ..r.  '.' '         ^...j      ,       ■.  .. 

tO  Pl««cj«  in^<lcji,onç  ^é  gu4ris  par  x^ttc  incision  ^ysuit 
Ja  maturlté^u  bwbon^.En  i784,7o2ichîm  Blanc,  élève  en  chî^» 
rutgié,  prit  la  contagion  en  soignant  les  ptstitcKi^s  du  cap/tainc 
Minrdi,  Raguslâ^^  ii  ^giérît  en  ouvrant  it  ÏMihétkqvtW  sivait  à 
Wi^c.  En  i^HiJj^^  Pont,  ëcve  en  chirurgie,  BaJthax^ 
Melllé^  matelot,  et  Joseph  Martin,  écrivain,  ont  ouvert  leurs 
Bubons  avant  la  parfaite  maturité ,  et  ils  ont  été  giiéiU  complet 
tttneht.  "■  '  ^  .1 


y 


V 


mâlaâld  S0  dédare  ou  qu'un  malade  meiirt  t  si  ceh 
arrive  trois  ibis ,  et  que  fa  cxxiis^ioiitie^p^roiage  pajj^ 
éteinte^  on  brûle  le  vaisseau  ahrec  toute*  ^-cugabon  t 
mais  ce  cas  est  extrêmement  rare.  Le  vaisseau  qui  a 
obtenu  sa  libre  entrée»  demeuré  encore  en  surveil^ 
bnce  pendant  dix  jours  entre  les  deux  forts* 

II  est  interdit  à  tout  passager  d'entrer  à  Marseiflô 
wnVâire  quarantaine;  et  nous  avons  vu  que  per-» 
sonnerie  peut  n^tre  pied  à  terre  sur  la  côte  y  s'if 
n'est  muni  d'un  certifient  de  santé  (i).  De  cette  ma^ 
«lière ,  on  a  lieu  d'espérer  que  les  maliieurs  de  i'annéa 
1720  ne  pourront  jamais  se  renouveler. 

L'établissement  des  lazarets  peut  être  regardé 
comme  une  des  plus  grandes  preuves  d'une  admi**- 
nîstration  éclairée  :  ce  sont  eux  qui  écartent  de 
l'Europe  ces  fléaux  qui  détruisent  encore  la  popu^ 
lation  des  contrées  où  il  n'existe  qu'une  demircivi^ 
tisation.  Le  lazaret  de  Marseilie)  par  sa. posiâon» 
son  étendue  ^  son  institution ,  et  par  ia  niamère  donk 
it  est  administré  y  est  très-  propre  M,  préserver  noi^* 
seulement  fa  ville,  nuûs  r£mpire entiei^^  du  fléau  de 
la  peste.  Plusieurs  navbes ,  repoussés  de  tous  les 
^rts,  refetés  de  tous  les  lazarets,  y  ont  été  reçus  *eC 
désinfectés.  L'armée  d'Orient,  à  son  retour  d'Egypte^ 
y  a  été  admise  toute  entière  ;  elle  étoit  de  neuf  mille 
hommes.  Pendant  Tanpée  1 805  ,  plusieurs  vaisseaux 


■NM 


■Mhi 


u 


(r)  Siffi,  loiM  B  /psge  43^* 


.«* 


'"       -^w^pac 


céiiainanent/intiodaita  dana  fnos  dki»^^  Lq  b^^ii^t 
4é  Tûulûn  ne  sert  cpie  fioi^fî  ia  ^arin^  mfàmh^ 
il  est  sous  la  suraeillaïuse  dedcebii  ileJVIwtieîttf  .^5^ 
jè  lazaret  qui  peut  seial  jQ(>n3f  rvier  à  JVlsrseiUé  iaickim^ 
ivefice  exclusif  sdes:  Echelles  fhil^eiiant^ipws^'aiir 
jcunp  i^ille  de  :I*£iBpire  &3xvçdis^.utig»ssèàq  e»c<9ur&:iM» 
pareil  étalJisisemâm  ;  et  les  détails  que  nous  airaiif 
donnés  ^  prouvercuat  aîsémesâ  qu'il  n'i^st  pds  fiiciki 
d'en  fonder,  xfe  semblables^  .  ^ 

MaTsetUe.,  outre  son  beau  latam  ^  fiossè^te  i^f ore 
d'autres  étabtissemei]is  {^iianthropiqiies  «t  jpbfêieiim 
éiistitudoDS  de  <:harkéu  U  y .  ayoit ,  j^  17  89  ^  .^a 
-grand  aouike  d'h^»ftaux  ;  mai^  ils  oftt  ^$  i^^i)^  % 
•trois.  .-  ■         ■    .■.    .;    ,  ■  '. 

,  L'àéuI-uiieUf  ppnr  ies.  malades ,  est  iBJl  tç^-fejç^» 
iDdtiraentySÎtué daqs  riptéxieurdeja vieilfe viU^>.i|^ 
-k  ani-côte,  .aéi;é  îet  s^lire  :  H  n'^â^  poi^J^l^^j 
cependant  il.  ipem  xonteihir  ^sîx .  ç^Ui^  ix]|a{ii^»,iÇ^ 
y  reçoit  les  fâfcsjenicçuolai&flrt  fe&«*ifWis.ftfg^é|i 
|»ur  Y  ôtBe;aflajtés  >ttaqufà3àe^ip3iîik,Ssg»^5fnyp(yi^ 
len  xiourrioe.'  •  "  •  <  >:jj.j,r.i'  ..  •as:;:';:* 
:    L'kâpitalJ&r pjaums  est ansshsÎAs»évdm$  ia, j^e^II^ 

iriUe;ddost.ttiii)édifipe  yà&te  ^âréguU^CfetttÂ^'  qxàqnm^i 
il  e&tde&imé  aux  vieillards  des  d^^y  ^^^s ,  aux  mcu-- 

rablesy  et  aux  enfans  tro^vfs^  j^r^qj^  %<tt{;igi^  vde 


a^tmi^t^  Mm  < 


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J 


iwArriee;  3  comiem  enViion  hait  cents  ihâéiidi»u  U 
y  a  une  très-belle  diopelle* 

L'hôpital  dis  insensés  est  dans  {efàdbonrg  Samtn 
I^azi^e  :  ii  a  été  fonné  de  la  rémiion  de  plusîecnrs^ 
maisons  données  par  la  charité  de  quelques  ha&itans^ 
i)ti  acquises  par  T^dministration  ;  il  est  donc  très^ 
irtégalier ,  ea  assez  maovah  état ,  et  peu  propre  ^ 
sa  destination  %  il  e^  difficile  d-y  pratiquer  les  pro-» 
({èdés  curatifs  <k  la  ncmie.  Le  local  est  cepeadm» 
bien  situé ,  et  ii  seroit  très-coQvenakle  pour  y  fovmtr 
un  nouvel  établissement  de  cette  espèce.  , 

II  y  avoit  autrefois  plusieurs  œuvres  de  bienfaisance, 
parmi  lesquelles  la  plus  importante  étoit  la  Grande 
Miséricorde ,  chargée  de  répartir  des  secours  à  des 
familles  qui,  par  des  malheurs ,  étoient  tombées  dans 
rindigence.  Cette  oeuvre  étoit  richement  dotée ,  et 
elle  recevoit  en  outre  annuellement  des  aumônes  con- 
sidérables. Les  débris  de  cette  belle  institution  avoient 
été  recueillis  par  l'administration  des  hospices.  Le 
bureau  de  bienfaisance ,  créé  par  fa  loi ,  une  société 
de  bienfaisance ,  calquée  en  tout  sftr  la  société  philan- 
thropique, de  Paris,  distribuoient  aussi  des  secours  ; 
mais  ces  diverses  institutions  se  contrarioient  :  M.  Thi- 
baudeau ,  préfet ,  les  a  toutes  réunies  sous  le  nom 
A^ administration  centrale  des  secours  publics.  Cette 
administration  a  établi  des  dispensaires ,  des  soupes  a 
la  Rumford ,  des  ateliers  de  travail,  des  secours  pour 
les  femmes  en  couche  ;  et  son  faut  est  de  parvenir 


^ 


.\ 


M^  CHAPITRE  LXXXIi; 

^  éteindra  la  mendichë.  Elle  e<5t  dfr%ée  ptr  4et 
citoyens  édaiiés  et  vertueux ,  parmi  lesquels  nous  ne 
pouvons  nous  refuser  au  plaisir  de  citer  MM.  Csi- 
simir  Rostaii  et  THuIk,  quîontété  les  premiers  fon- 
dateurs dé  la  société  de  bienfaisance.  Je  dois  associer 
jaunomdeM.  Thulis  celui  de  sa  respectable  épouse, 
qui  y  par  le  bien  «pi'edié  ne  cesse  de  faire ,  est  regardé^ 
comme  un  ange  de  bonté.  Le  préfet ,  M^  Thibau^ 
énUf  et  le  maire  y  M.  Andunne,  sémbleiil  donner  la 
.▼ie  it  tous  ces  étabUssemens. 


•    * 


mtmmmmmm^nm 


■  i 


^ 


K.*^ 


CHAPITRE  LXXXIIIp 

Port  de  Marseille.  —  Quai  Saint-Jean.  —Place  Saint* 
Jean.  —  La  Tourrette.  —  Pavé  des  quais.  —  Opus 
spicatum,  —  Quai  Saint-Nicolas.  —  Fort,  —  Inscrip- 
tion. -^  JSastide  de  Louis  XIV.  —  Machine  à  cttrer  le 
port.  —  Commerce  de  Marseille.  — ^  Histoire.  — 
Vernet.  -7-  Robert  et  le  président  de  Montesquieu.  — 
Le  Bienfait  anonyme.  —  Nicolas  Compian.  —Le  che- 
valier Paul.  —  Roux  de  Corse.  —  Notre-Dame  de  U 
Garde. — Promenades. 

I)  E,  la  rue  .de  ïa  Canebière  on  v<»t  s^élever  ïe§ 
mâts  des  vaisseaux ,  qui ,  privés  de  leurs  voiles ,  pré- 
sentent l'image  d'une  forêt  de  pîns  dépouillés  de 
leurs  feuilles  ;  cette  rue  conduit  à- peu-près  au  milieu 
du  port.       * 

Le  quai  Saint^Jean  pu  de  la  vieille  ville,  qui  règiW 
à  droite,  est  celui  sur  lequel  il  y  a  le  {>lus  de  mar-* 
chands,  et,  par  conséquent ,  un  plus  grand  mouve*' 
ment, une  plus  grande  activité  :  Ie&  boutiques  y  sont 
étroites  et  pressées;  on  y  trouve  des  parfumeurs, 
des  orfèvres,  des  fàbricans  de  sparte,  des  horlogers^ 
des  marchands  de  cartes  de  géographie  ;  on  peut  y 
acheter  des  dattes ,  des  oranges  ,  des  dirons ,  des. 
raisins ,  des  crabes ,  des  sîtiges ,  des  perroquets ,  des 
images  :  c'est  aussi  la  partie  du  portoù  il  y  a  un  plus 
gfand  nombre  de  vaisseaux  ;  on  len  voit  de  tootea 

q4 


•^— * — —  "- 


«^a  CHAPITRE   LXXXIII. 

hs  formes;  A  f  nttrftnW  é5t  iz  pTm  SSÏhT-J?Si; 
où  l'on  trouve  à  droite  une  terrasse  zpotHée  la 
Tourreite  j  qiii  se  prok)ng;e  jifsqu'k  ta  Major  i  ce 
seroit ,  à  cause  de  la  vue  dont  on  y.ioBÎtsur  la 
mer,  la  plus  belle  promenade  de  Marseille,  «i  elle 
n'étoit  pas  aussi  expoiée  ali  mistral  ;  aucun  arbre  ne 
peut  y  prospère*-;  les  mijfûreï  dont  elte  est  bohïée, 
en  rendent  aassi  Tasp&ct  et  le  séjour  désàgrêiibles. 
■"■  Le  pâvè  dés  quais  a  quelque  chose  dé  remar- 
quable ;  il  est  entièrement; composé  de  briques  po- 
sées obliquement  sur  la  tranche. 


C'est  préàsëpiehe  éfet^  éspèfcé  db  rtiS^herie  ^tf 
les  ancsens  appeiéteAt  opus  spicahirh,  parce  qtié  lés 
matériaux  y  feoni  di^pcfeés  cofnme  !es  bailès  d*ùn  épi. 
Le  pavé  des  .trottoirs  de'  ftlilfaieiirs  rUes  'esï  de  ïa  mêrtïfe 
sorte.  Cette  manière  de  bâKt-  paroît  assei  sblîd*,  et 
pourroit  être  essayée  dâti$  les  lîfcùx  o^  rfiaiiique  le 
betm,  grès  k  paver. 

Le  fon  Saim-Jean  fértité  l'entré*  dii  piOrt  de  ce- 
câté  ;.  il  s  échappé  \  \û  destruction  ;  les  ouvrages  en 
sont  assCE  bien  conservés  :  il  est  iittiiè  de  câpoAs. 


ittiËiiBi 


GîiAfîTftE  t%ii^m.  S4^ 

*  îtétis  mVef^âftiés  ie  pôft  dans  une  bàrqtlé  puni 
en  vim(èt  iWtrè  rfi^  5  qu^oti  àp|>éHe  lé  qUai  Sâint^ 
NUolàS  ou  ïleAîn  ntU^t  t  céltti-d  est  jnôîrts  peuplé 
et  tnoifis  Imitant ,  n^afe  beaucoup  plus  large  que  \é 
premier  ;  ïéà  vottiirès  y  péttVènt  drculer.  Cest  lâ  que 
Sont  îês  ittagasifli  de  bois  de  conàtruttîôn ,  de  ré- 
sines ,  de  cordâgeis  $  pour  là  marine.  II  est  terminé 
par  le  fort  Sâint-NicoIàs ,  qui ,  avec  le  Yort  Saint- 
Jean^  contribue  à  défendre  Teiltrée  du  |iort.  Oh 
â  enlevé  pendant  lâ  révolutîoil  i'inscriptîoh  qui  étôît 
sur  la  porte,  et  qui  disoît  que  Louîs  XIV  Favoît  fait 
construire  en  1 6éo  ^  par  lés  conseils  du  cardinal  de 
Mazarin ,  pôu¥  ntettte  fin  aux  séditions  causées  par  la 
tuii>ttlence  des  Marsêilfois  (  i  ).  Le  féline  monarque  , 
en  faisant  bâtir  ce  fort ,  dît  qu'il  vouloit  aussi  avoir  iû: 
bastide  h  MaEtséîile.  Cet  édifice  est  détruit  eh  gtande 
partie. 

Le  port  a  quatre  cent  cinquante  toises  de  lon- 
gueur ;  sa  largèift"  il'est  que  de  cent  trente  :  îf  peut 
contenir  neuf  cents  vaisseaux.  ïl  est ,  en  tertps  de 
paix ,  comme  f e  rendez- vous  de  toutes  les  nations 
de  TEitt-ope  :  outm  iei  nàvités  qui  appartiennent  aux 


.^-4. 


(i)  rJe  fdelis  Massiîîa ,  nffàrus  àl/'guorbm  motibus  sœpius  conci^ 
iàta  ;  Hn  pr&priliiH  rè^  JitAaiuin,  ifd  aùdadorum  pftttlantiâ  ,  vet 
nimkt  Ubertatk  cupidine-,  ttindfpt  ritftrtt  LurhvtÇMs  XIV,  Galùfftnn 
Rex^  optîmatum  populique  s^curitati  hacarce  providit,  Rexjussit;  Juliu$. 
eardînnîh  Maiarînus,  pace  npud  Pyreneas  composltâ,  suasit;  Lndo* 
Pftâs  Sc'0tl6mt/prêt'1nCict guhr/tator fjxecutusest.  Aï.DCLX. 


*\ 


■  •   ^    - 


J 


2SO  CHAPITRE   LXX3CIII. 

peuples  de  fa  Méditerranée,  tek<]ue  les  bitimens 
génois  y  chargés  de  châtaignes  et  d^  pommes  \  leSk 
chétives  barques  de  Sân-Remo,  qui  apportent  des 
ognons  de  fleurs;  les  navires  de  Toulon,  de  Mâ« 
forque  et  de  Fréjus ,  cl^irgés  d'oranges  et  de  sardines  ; 
les  felouques  de  Nice ,  de  Livourne  et  de  Bastià  ; 
celles  d'H  y  ères  et  de  Porto  -  Ferra  jo ,  avec  leurs 
cargaîscms  de  bois  ;  enfin  les  gros  vaisseaux  levantins , 
dont  les  équipages  viennent  montrer  en  France  les 
mœurs  de  l'Afrique  et  de  l'Asie  ;  on  y  voit  alors  afHuèr 
aussi  des  vaisseaux  anglois,  hollandois,  suédois,  da- 
nois, russes;  et  bdiâférence  des  langues,  là  variété 
des  costumes,  celle  des  physionomies ,  rendent  la  pro- 
menade du  port  ravissante  pour  un  homme  curieux 
d'observer. 

Le  port  de  Marseille  est  Un  des  plus  sûrs  et  des 
plus  commodes  qu'il  y  ait  au  monde  ;  mais  il  est  tou- 
jours menacé  d'être  encombré  par  les  immondices 
qu'y  conduisent  les  égouts  de  la  ville ,  et  par  les 
terres  que  les  eaux  pluviale  entraînent.  Il  faut  saiis 
cesse  être  occupé  du  soin  dé  le  curer.  On  a  déj^ 
inventé  plusieurs  machines  destinées  à  ce  travai;  et 
dernièrement  encore  on  a  proposé ,  pour  leur  per- 
fectionnement ,  un  prix  qui  doit  étrê  décerné  à  celui 
qui  indiquera  les  procédés  les  plus  propres  à  prévenir 
i'encombremeht  du  port.  La  machine  dont  on  se  sert 
aujourdliui,  est  un -ponton  sur  lequel  il  y  a  une 
grande  roue  semblable  \  celles  d'une  igru^|h|ae  de& 


^ 


riiHMHit^kÉ^lAC^Aï 


CHÀPITRB   tXXXIII.  âjl 

hommes  foui  toHOi^r;  elle  met  en  mouvement  deux 
poutres  qui,  en  plongeant  alternativement  dans  la 
vase,  y  font  pénétrer  une  cuiller  de  fer  k  bords 
trancbans,  dont  elles  sont  armées,  et  enlèvent  la 
bpue,  qu'elles  dépcsent  dans  une  barque  appelée 
la  Salope,  que  Ton  Va  ensuite  vider  dans  une  anse  ' 
près  du  lazaret  :  il  y  a  actuellement  sept  pontons  en 
activité.  A  mesure  que  cette  boi^est  enlevée,  qud* 
ques  ouvriers  la  divisent  avec  les  mains  pour  en 
retirer  les  objets  qu'elle  pourroit  receler  :  outre  les 
morteàux  de  bois,  de  fer  et  de  cuivre  qu*on  en  re< 
tire ,  on  y  a  encore  trouvé  quelquefois  des  objets 
plus  précieux ,  et  même  des  mçoumens  antiques  ;  un 
buste  de  marbre,  dont  M.  de  Saint-Vincens  a  donii||| 
la  desaiption  (i),  et  une  petite  figure  qui  est  dans 
son  cabinet  (2) ,  proviennent  de  ce  curage* 

La  vue  du  port  de  Toulon  retrace  à  la  pensée  les 
^exploits  et  le  courage  de  nos  marins  :  celle  du  port 
de  Marseille  réveille  d'autres  souvenirs  ;  l'imagi*  ^ 
nation  se  reporte  jusqu'à  ces  hardis  Phéniciens  qui 
nous. ont  doiuié  l'alphabet,  les  premières  connob* 
sancés  géographiques,  et  qui  ont  portéia  civilisation 
diez  les  plus  antiques  nations.  On  cToit  retrouver 
encore  dans  Marseille  les  restes  de  ces  Phocéens 
à  qui  la  Gaule  doit  les  premières  notions  des  arts 
et  d\ine  active  industrie;  on  la  compare  à  ces  villes 

-  O— ^>1^»— —  I  I  II)  I  I      II      ■  I  I  >  I  !■  ^       . 

(i)  Magasin  encychféd,  ann.  VII,  tome  fV»  page  352. 
(»)  Svffi^i  tCMnc  II,  page  137  ;  et  atl^.,  pi,  XXXVÏ,  n.*  a. 


^  i^i^kiè»  jttdfs  si  pàîësâfiférs  ;  dti  ifXïgè  au  génkr 
dé^fiàr4is  ipét^Iâtêuts^  qt^  ôifc  âiit  de  1^  liéA  Veiw 
#e^df  âe5  rrchosses  dé  rOfiiât.  SI  iè^  ifégôciam 
ftatttçai)  ri'cMiS  pas  éti-,  édtmnë  tes  lllèikis ,  I1jobA6ui' 
èê  dcfhiièr  dé^  p£ip«s  fc  I*  étlrélfetfiité ,  d«&  sôtt^eTaî^ 
if  feai*  |>atri& ,  6t  lèvtf^  #)«9  à  dés  r^h  ,  ôt%  éomptô 
pîstmi  eux  de>s  hôtiMés  ^Ué  Tûtl  petit  ecHnpaFèr  aux 
F^ggéfetautStfétajirWi  jpeut  dte#  Ja(Cqtieâ  Cêsm: 
Mfir»èiHè  répète  èhcé^  ftV^c  ofgueîi  lé  nom  dé  J^m 
DavfHagé,  iiévaii  dô  ce  riche  négociant;  cduî  ^ 
£ti6valier  Paul^  dont  Je  parfeitoî  bientôf  ;  et  ceux  dé 
Borelty,  dé  Rémusat,  déSmn),  de  Gé^ge  ^ôùtL^ 
§lf  de  plusieurs  àmfiens  gentilshofftmes ,  tel^  ^ue  ied 
Candèlle  et  lés  Môiitolieu  y  qtii  ^hôâoi^tit  du  ûtte 
de  négociant* 

S  l'on  en  tr^  A^âthiiA  (i) ,  MôrSèîIfe  ti^toîr 
encore  rien  perdu  de  $ôh  ancietme^  ^lendèuf  au 
Tl/  siècle  ;  mais  lei  intisiùtis  dés  Sarra^tnii  lûi  por^ 
tèreht  des  coups  ^etisibiesv  Son  .coitiméf ce  sembla 
remtlfUô  a^  îX."  sièdé  :  se^  négodiati»  y  unis  à  ^mx 
dé  Lyèii  et  d'Avîghoh,  aifoient  alors  deâxfofepar 
érr  fit  Atekandrie ,  et  eti  rappbitdiem  tes  épiceries  d» 
nnde  et  les  parfuma  âe  l'Ai^bie  ;  ces  ifiafohandl^i» 
temontbient  te  Rhône  et  la  Saône  ;  6n  ïés  emban» 
fjuoit  ensuite  sui*  fe  Mosélte ,  qui  les  d&tiibww  fM 


^i)*  Page  13. 


CHAPITRE   hX^Xlllj  ;2yi 

le-Rhîn  >'Ie  Mein  et  leNecker,,  jifsqu'çwx.^xtréfï^JL^ 
de  FAHemagne.  .    .  .       .[ 

^  Jjes  Mar&eiilois  fG^x)j^<^nf.  m  ,^wd  WQmbje  de  / 
^abseau;^  pour  ie  parcage  d^s  pjinç^  croisés.  Lo«jr 
^ue  c^jK-ci  ejvreptpws  Coi^mniwopie,  lej  Vjéni?- 
^ns' V^pa^rèi^m  de  tpiji,^;^-cpUMîifii;ce  d^  lieya^^ 
•Après  Ip  irétabUssemçn;  4ps  -ç ojgpérçwr?  grcjpç  ,  \ff 
fiénois;,  qpiayoie^tlç  {ilfis  conuibyé  àJ'éXjH^^^ 
4ç5Xaûi^^  a^r^hèreru  awc  P^éplp^çs  deç  ffàvpç 
|égjBs  dçiiït  il$  jquirent  4Voe  manj^^f  rPypre^^, 
pnfin  la  pip«(e  ^  Constepljiv?pî?  par  Jp$  Tj^ 
jcntièrement  leiip:  ^OQUi^neQ  ;  ifc  pjîrdiï;ent  jné^' 
leurs  pos^sioçs  daos  la  ÇfWPyte  et  ^w  i*  ipisr  Nç«;ç^^ 
et  les  Vén^îç^s  rqpruieïxt  Jevr  prewiif^r  ^cçwto^t  içr 
fKxpiirpnt  d^  xicjiç^e^  i^iioen^  {i^. 
.  \j8s  Marseil^ois  jàvoiem  çetîré  dçs  J3yéiii^cç§  ^jpa- 
sidérables  du  transport  dfi:^  ^W^J'^»  a^jcji^ô^s  çi^j^^ 
foin  4e  psocm^er  ;i,ç^t  ce  ffi^y  pçtuyojk  é^r^  utj|j|e  ou 
Cûiruncvlej  y^f|^,tWi^t;pnjcpre  fiçs  priuj:e$  chf^iiçp^ 
des  privilèges  avantageux.  Les  p^Ier^iages^  <jpi  eoflr 
tj^^qsff^  ^lè^hfy^  4e^^wkfkie^,  %ent  pour  fux 
1^  açwppdp  nouveauit  pr^^fifô,  ^t  l'op  vit  jiwitre^g 
fortunes. Ijrjllantes.  JLes  épicerie?^  Ip  âuerje,  ^  50^, 
^iwem  Jf^spiinçip^ipc  ai»liçfce?  dif  p?P[iïpiecç^  4çs  jfi^arr 
seillois  :  cepen^^pt^îe.cQmm^ce  4if  J^  p^;i  ;^p§j^;  |[p-; 
ffe^nt  qi<iJ;^urQit  pu  i!ê^>  à4;^f 4^?  gJ^^F^  ^B^s 


t  ,  ^  , 

(i  )  Notice  sur  fauris  Sai^t-VJpcefff^,  p^gp  ji^^^    • 


-»••■■*  -►'^^ 


aj4  CHAPItRE   LXXXltt. 

pendant  un  siècle  et  demi ,  Ie$  comtes  de  Provence 
eurent  à  soutenir  contre  les  rob  de  Sîdie. 

Le  commerce  reprît  son  activité ,  lorsque  Mar- 
rie eût  été  réunie  à  la  France  avec  le  reste  de  k 
Provence.  Le  commerce  du  Levant  devint  pour 
elie  une  espèce  de  patrimoine.  Les  rois  accordèrent 
au  port  de  Marseille  de  grands  privilèges  ;  ça  haute 
fortune,  qui  n'a  été  interrompue  que  par  les  troubles 
de  laLigueet  par  lapestede  i720yfitdesprogrès|us^ 
qu'en  1 78p.  Depuis  que  Loub  XIV  eut  fait  respecter 
le  pavillon  français  dans  les  Échelles  du  Levant,  en 
Barbarie,  en  Grèce,  en  Syrie  et  en  Egypte,  le  com- 
merce de  cette  partie  du  monde  fut  concentré^dans 
MarseiHe,  déjà  si  bien  avantagée  par  la  beauté  et 
la  sûreté  de  son  port ,  et  par  sa  situation ,  qui  lui 
permet  de  recevoir  les  vaisseaux  qui  passent  de 
rOcéan  dans  la  Méditerranée. 

Les  gentilshommes  même'  purent  se  livrer  au 
commerce  sans  déroger;  ib  prénoient  le  titre  de 
nobles  marchands  { 1  )é 

Comparer  l'état  actuel  du  commerce  de  Marseille 
avec  Tancien ,  c'est  mettre  en  parallèle  la  mort  et  la 
vie.  Cinq  mille  vabseaux  sont  entrés  dans  le  port  en 
1 78  8 ,  et  il  n'en  a  pas  reçu  mille  en  1 805 .  Les  rapports 
qu'elle  avoit  avec  l'Amérique ,  ont  absolument  cessé  ; 
ceux  qui  existent  avec  l'Espagne  et  Tltafo,  sont 

(i)  Discours  iSMr  le  négoct  des  gmtilshmmes  de  Marstiîle ,  pur 


i 
4 


CiîAPltkM   LXXXîiU  15J 

peu  importans;  et  ceux  qu'elle  a  avec  le  Nord,  sont 
pres(|iie  nuls.  Les  produits  du  commerce  avec  les 
Écheltes  du  Levant  ne  s'élèvent  pas  au  tiers  de  ce  quTIs 
écoietit  autrefois  ;  ce  commerce  étoit  pourtant  une  des 
principales  sources  de  Ja  prospérité  de  Marseille  :  la 
dédMience-de  l'empire  turc  avoît  déjà  commencé  à, 
fafFc^btir  ;  les  malheurs  de  la  guerre  y  ont  porté  le 
dernier  coup  ;  et  il  est  à  craindre  que  jamais  il  ne 
se  relève  avec  les  mêmes  avantages  ,  parce  que  le 
pèîrt  lie  Cèti^  offire  E>éàttcoup  de  facilités  pour  son 
expldiCÀtioft.     *  ' 

Oétoit  ^our  lious  un  sujet  de  tristesse  que  de  voir 
ces  vai^eattié  rangés  près  du  rivage,  et  dont  la  pi^oue 
impatiente  iparoissoit  demander  d*aHer  fendre  encore 
les  ^è^';  nous  éprouvions  le  regret  de  ne  pas  nous 
trôtiv^tui  milieu  de  ce  concours  d'hommes  de  pays 
i^^iSël^iis ,  rassemblés  pour  un  même  motif,  celui 
d%dgnlenter  leui'  fortuite  par  une  active  et  honorable 
iÈkfttStHe;  noùÀ  pehsiohs  aux  événemens  singuliers 
dont*  4ce  port  a  été  témoin  aux  jodrs  dé  sa  prospé- 
rité. Cette  idée  réveflla  en  nous  d^intéressans  sou- 

Cest  dans^cètfe  mdè  que  Vemétâiroit  apprendre 
i^ttft^  piMtéëi^^  j^^^      Jés  terribles  effets  de 

■  €^  iëi  èëi  cplif»  <|u«>  le  présidait  de  Mont«- 
4{iiMit-«rottva  le  jeun»  Robert ,  -fik-  d'un  eourtier  , 
«pif  pour  payer  fa  ntt^  é^  son  pire ,  piisoniûar  à 


i 


A 


:jj6  CHAPIT^lE  i^ïMM^ 

yiçr$er  Iç  por^  ChaifUfi  ^  ccMpipem  le  g^éDtHS 
pa^igi&trat.fit  rache^r  secrèjpmem  rinfert|i#é-Rftfe(W# 
pt  riefidii:  un  pè^re  à  s^p  yftrm€|U3p.^  «  ^^«i^iBJBii 

(f  u|i  pj-pcéfjé  ri  généreuse  :  deux  a*??  ja^^s,  îj  «^{tcmY^ 
ie  pré^dçnt  sur  Je  port,  «e  précipitftà  $^  pierfs  ,iiiii 
l^rpdigue  les  témoignages  du  resp^cf  §t  4e  l^  jft^se 
poiss^nc^,  e)t  veut  fe  ç.qx^^m  W  ^î|i  4§-lM'J&il¥lilf 
dans  laquelle  il  a  ramené  le  ^)onheur;  maîçjje^jpf^^ 
4ent  s'ob^nç  au  sUeia^e,  %i  Is^m  «Ro^iB?t  4éf^4  de 
n'avoir  p4  forcer  son  bienfaiteur  à^yç^i^  ^ga  )^^%7 
fait  :  il  seroif  eoqorç  jgnoré,  si,  4an§  I^j .pipif ^-g. j(J^ 
la  succe^siçui  du  p^jésidepî,  Qj>  s^ut  tro^yé  uQ^^^uijr 
lance  de  M.  Main  »  banquier,  à  Ç^di^  ^  W^^'  .I^W 
j^ompie  ij^e  7  5  09  livr^  ,  dp^t  $QÇ>q  ^^<^fift|  ::élf 
poippté?^  ppur./f  .(^livrancf  #  J^&bpïhrj^r  î-fiffS 

jrejsantç  ^ujifç  .est  te  >u/ç|  4'wi%j^i|r}iw^t§:f (jujéi 

que  rien  n'est  plus  attrayant  que  ce  qui  nous  i^ç(i^y:^ 

L  ,  9^  9^  PÇÇf.iJf /aj^ier  saqsifttgfifte^^st»»»  J^ 
toire  de  Robert  ;  celle  de  Nicolas  Compiaij^jjji'eil 
^uerp  mgiçis  fçjuçbaçte^  y.  est-pi;^  ^  ^  vm^m 

marseilloîs 


.< 


CHAPITRE   hXXXm.  457 

marseiUois  par  un  cofSdire  de  Tripc^i^  et  vendu  à  uhi 
licbe  hahîtsMit  de  cette  yitte*  Le  MM5u)i|ian ,  •  voyant 
que  rien  ne  pouticis  t^bner  bdoulevr  de  squ  captif,, 
lui  permet  d^atier  revoir  sa  pallie  et  $^  famîUe }  il 
exige  seulemenit  sa.  parde  qu'il  reviendra  près  d^iii: 
moitié  dqnt  il  jest  l^ami  pfaitdt  que  Teacbve.  Com^ 
pim  retGKKne  à  Marseille  ;  més^  fidèle  à  sa  parole  ^ 
il  f 'arracbe  aux  embrassemens  de  $^  frère&  et  de  sea 
amis ,  pour  alfer  rempfir  son  eagaganem.  ^riv6 
à  Tr^xili,  il  troayeJfi  Miiâttiinau  xians  une  yiy# 
afflic&oa  :  son  épouse  y  cpj?A  €héris»ok.tendrei»eut , 
étoit  eiiptrantew   <€>  Cfaoétien  ^  lui  dit -il ,  |oins  tes 
»  prières  aux  miémxes  :  Dieu  est  boa  ;  et  celles  de; 
3>  fbamme  de  lai^a,  de  qudtque  religion  €px*û  mit  f 
jf  doirtent  fe  tèucbet*: »  Compian  se  mot  k  g^noxec^ 
prie  a!vec  ftrveur  à  'côté  4^  son  .maître  :  le  ciel 
exauce/  leurs  vœux ,  et  la  jeune  femme  aecouvce  h 
smté.  Le  Msfliométan  ^  transporté ,  emlvassa  Compian 
et  lui  rendit  la  liberté:  mais  il  ne  voulut  pas  renvoyer, 
dans  Tindigencs  cehiL  qu'il  ne  regardait  plus  que 
comn^  un  hôle  et  on  ami  ;  il  lui  donna  un  vais-i 
aesu^ctogé  de  Uéy  cpii  éeviatiaisouirce  die  $a  foii'-* 
tune»  Ce  vAituemc  négociant  étoit  digne  des  succès 
qutîl  avoât'  obtenus  :  c'est  im.  quia  reçut  une  car* 
^ison  de  blé  dans  un  temps  où  la  disette  affligçoit 
ia.  viilq ,  et  oà  le  peuple  :  murawrok  contre  Vm^ 
torilé  ;  lies  écbeviœ  lui  eai  offit^rent  ausâtôi  soixante 
fivres  du  setier..  !a  jfe .  ne  spécule  pa&  %\xr  h  misère 
Tome  TIl  R 


458  CHAPITRE   LXXXIII; 

publique  » ,  ré|)Ondit  ie  généreux  Compian  ;  et  il 
donna  son  blé  au  prix  de  trente  livres ,  comme  il 
auroit  fait  dans  un  moment  d'abondance* 

C'étoit  peut-être  près  du  lieu  où  nous  nous  étions 
arrêtés  pour  nous  livrer  à  ces  méditations ,  que  le 
dhevalier  Paul ,  devenu  vice-amiral ,  aperçut  un  pauvre 
matelot  avec  qui  il  avoit  été  mousse  :  ce  brave , 
digne  de  sa  gloire  et  de  sa  fortune ,  traverse  la  troupe 
dorée  des  généraux  et  des  officien  qui  l'environnent^ 
fà  prendre  par  b  main  son  ancien  camarade,  té- 
moigne la  joie  qu'il  éprouve  de  le  revoir. ,  s'entre- 
tient k  part  avec  lui,  s'infi>rme  de  son  état ,  et  lut 
procure  un  emploi  suffisant  pour  le  Ëiire  subsister 
tranquillement  lui  et  sa  famille.  On  parle  encore  avec 
surprise  de  cet  intrépide  marin,  né  dans  le  iyatéau 
d'une  pauvre  lavandière ,  qui ,  obligé  de  se  cacher  der- 
rière un  ballot  pour  obtenir  h  faveur  d'être  mousse, 
devint  un  des  plus  heureux  défenseurs  de  l'ordre  de 
Malte  et  la  terreur  du  Croissant  ;  se  fit  admirer  par 
son  courage ,  estimer  par  sa  conduite  ;  qui  unbsoft 
l'adresse  k  la  grâce  dans  les  exercices  du  corps ,  et 
s'attachoit  ^ïAn  par  sa  modestie. et  sa  bonté  >ceox 
qu'il  avoit  étonnés  par  sa  magnificence.  Les  soldats  et 
les  matelots  provençaux  commandés  par  lui  ne  con- 
noissoient  pomt  de  dangers  ;  ils  le  suivoient  à  tra^ 
vers  des  torrens  de  feu  :  ils  le  pleurèrent  après  sa 
mort.  Ces  vers  de  J'épîtaphe  qu'ils  Jui  consacrèrent , 
lie  sont  pas  )>om  ;  mais  ils  attestent,  d'une  manière 


*  « 


éiKsrgique  ^  ropinipn  qu'ils  av^ent  de  leur  bravô 
chef;  . 

Celui  qui  naquit  poiir  Cotùbattre» 
Et  qui  vivoit  dans  ït  ccmibat , 
Eau ,  feu ,  fer ,  ne  purent  t*abattré^ 
Une  âèvfe  lente  i*abat  0  h 

La  liârdiésse  du  fameux  négociant  Roux  de  Corsé 
étoit  d'une  Aaluré  diâférente  :  chaque  jour  il  paroîssoit 
hiettre  sa  fortune  eil  péril ,  et  chaque  jour  ses  impru* 
dences  ét(Meht  suivies  des  succès  les  plus  inattendus» 
Jamds  il  ne  &isoit  assurer  même  les  plus  petites  tar- 
tanes, auxquelles  il  conHoit  âes  chargemens  de  cent 
kniffe  écûs  ;  et  il  sèmbloit  que  ses  vaisseaux  dussent 
bràVeir  toutes  les  tempêtes  et  tromper  tous  les  cor-: 
saires.  Deux  (bis  il  paria  quW  navire  qu'il  attendoit 
ée  la  Martinique  arriveroit  à  un  jour  et  même  à  une 
heure  qull  avoit  Bxés ,  déuk  fois  it  gagiia  sa  gageure* 
Ses  ridiesses  devinrent  immenses,  et  sa  témérité  ne 
conhut  plus  de  bornes.  Eii  1 740 ,  il  équipa  à  ses 
frais  un  vaisseau  de  ligne  et  une  frégate  de  quarante 
canons,  qui  protégeoieiit  ses  onze  vaisseaux  mar- 
chands ,  et  il  déclara  personnellement  la  guerre  au 


■MtaB 


(i)  Ces  vers  recommandent  autant  Sa  mémoire ,  que  les  sui» 
vans,  qui  sont  ie  Bachaumont  ; 

C'est  ce  Ptul ,  ilont  rexpérieoc« 
Gourmande  It  mer  et  le  vent  ^ 
t>Ont  iè  bonhear  et  U  vaillanèè 
Kendent  formidable  ta  France 
A  tous  ies^upies  du  hevuHt^ 


K  X 


«<îa  CKA.PITHE    LXXXIII. 

lol  d'Afigletei r« ,  par  un  in^uiifeste  iptkuld ,  Giorge 
Roux  à  George  roi.  Sa  petite  flotte  obtint  d'abord 
quelques  succès.,  et  s'empaiq  de  piutieiir«  bâtiniens 
ennemis  :  mais  la  fbftune  abandonna  enfin  son  indis- 
cret favori;  le  vaisseaif  c)e  ligi^e  â^^  ^iql)|asé  par  la 
fbudrç,  la  fr^ate  périt  dans  une  tempête^  .etJes 
navires  marchands  furent  pris  pat  les  Ânglois. 

Leivers  deBachaumpnt  (1}  ont  rendu  lech^teau 
de  Notre-Dame  delà  £?<ir<:/(  trop  céièbfe^pçur  qu'uni 
voyageur  puisse  se  dispenser  de  le  visiter;  nous  en 
fîmes  donc  un  jout  un  point  de  promenade.  Nous  tra- 
traveraames  d'abord  le  quartier  qui  avpisine  le  q|U^î 
Saint-Nicolas ,  et  nous  vîmes  les  msgasins  de  inannç , 
la  suiferie ,  la  corderie  ;  mais  les  travaux  étpfent  ^an; 
activité.  Nous  entràiiies  dans  le  choix  (2)  q^i  avoi^  étf; 
construit  par  M.  Bergasçe,  e;quiestavfourd'hui  gban:^ 
donné.  C'étoit  le  plus  cpnsid^érable  j  mais  il  y  en  « 
encore  plusieurs  autres  :  ils  sont  destinés  \  donner; 
aux  vins  du  pays  une  préparation  q^ilesren.d  Proprefi 
aux  voyages  de  long  cours.,  pour  les(mel^,ils  ne,pQUr 
voient  pas  être  emplQyés.  auparavant.  p^;a|>lissaf|çpjt 
du  chaix ,  dû  à  M.  Bergasse ,  a  singulièrement  encou- 
ragé la  culture  de  la  vigne  ,  et  donné  de  gtiindes 


(')  Tome  ir,  page  )79. 

(ï)  Un  chaix  est  un  lieu  "où  l'on  mélange,  l^^  vins,  où  o 
leur  fait  subir  différentes  p^ré^iaraiJons.  U.cn  SCia ^escion  à  l'ai 
ticle  de  Bordeaux,  où'il  y  e^  a  fluùeitrs. 


âdlités  au  commenie  de  Marseilb  fow  $e$  amie* 
mens. 

Le  diemîn  tjui  condûh  à  Toratoiré  ^  ^t  roidfe  et 
dîi$c3e.  La  chapeUe  est  petite  et  étroite ,  mai^  ornée 
par-topt  des  tributs  de  {a  piété  des  navigateurs  ;  aïk 
pltndier  $oait  suspendus  de  petits  vaisseaùk  avec  leurk 
agrès  et:  ayajnt  leurs  nom$  écrits  ^ut  la  poupe  ;  ib 
figurenjt  ceux  que  la  prpiectÎQn  de  h  mère  du  Christ 
a  sauvés  d'uit  ciruel  naufrage>  bu  ehlevés  à  h>  fu* 
reur  des  pirates  et  d^s  corsatreau  Les  tableaux  vottâ 
représemeni  dès  Hai^ragés  ètendaBt  les  mains  vers 
la  Vierge  y  c^ui  leur  moiUm  un  viisséau  prêt  ii  les 
secourir  ;  d'autres  naufragés  sont  dérobés  à  la  mort  par 
quekfues  débris  dont  ils  se  salissent  i  cTautires  enfin 
fuient  dans  une  chaloupe  lèinjde,  leur  vaîssniu^  que 
lamervli  engkmtk^  oa^ràïeiifipujducieidéf^Biv  / 

Ce  ifortest  élevé  àibdes&us.de  la  mer  de  quatre^» 
vingt-cinq  toises  :  au  r^plè  >4I  nja  jien  de.remarqnable^ 
et  nous  n'y  vîmes  p^  un  seiH  canon.  C'est  là 
vtgîe  fa^pluâ  voisine  ;  elle  36igfiaie  tous  les^vabsçéuli 
qui  approchent  du  port..  O^  y .  découvre  A<Jdte  ik 
vifle  de  AUi^eitle  :  Tceil  |>eiitsbivie  [es.I^Itea.raa 
alignées  des  nouveaux  quartiers;  on  voit  pfesqaccea 
face  I^  amas  de  msusons'âe  ia  vieille  ville  ^  h'rffBsai 
bâpital»  la  place  des  Tourréttes^,  I» Ma|or  étleiiiza- 
fet«  Des  montagnes  semées  de  riantes  bastidbssv^M 
file  de  moulina  dont  le  vent  &it  tourner'  la^^i^as'^ 
fotméiïXh  Ibnd  dB'tahlea«u>A<i'«Didi^Ia  vue  'i'éaoatl 

R  3 


V     '^     - 


-C» 


atfa  CHAPITRE  txxjéiu: 

suria  vaste  mer,  après  s'être  agréablement  promenée 
sur  la  rade  et  sur  les  îles. 

Les  plus  belles  places  pt^bliqûes  de  Marseifie  sont  ^ 
la  place  Castelane ,  qui  termine  ta  rue  du  fàubourgnle 
Home  ;  la  place  Saint-Fertéol ,  sur  laquelle  étoît  bâtie 
la  belle  église  qui  a  été  démoKe  pendant  la  révolu- 
tion; la  place  de  ta  Comédie;  la  place  de  Afmtiers  s 
eHes  sont  plantées  d'arbres ,  ou  décorées  éê  fontaines* 

Les  allies  de  AleWàn,  en  face  de  la  Canebière^ 
sont  comme  un  second  cours  bordé  de  belles  mai* 
sons  et  planté  de  douze  rangs  d'arbres  :  c'est  une 
des  promenades  les  plus  fréquentées  ;  elle  conduit  au 
-jardin  de  botanique. 

La  ville  de  Marseille  étoit  entourée  de  remparts  ; 
ils  ont  été  détruits ,  et  à  leur  place  on  a  fait  des  bou- 
ievarts  magnifiques ,  qui  formait,  pour  tous  les  quar- 
li«rs/,  des  promenades  agréables ,  et  qui  le  seront 
encore  davantage  lorsque  les  plantations  qu'on  y  a 
£aites  donneront  de  l'ombrage.  Ces  boufevarts  ont 
léié,  en  grande  partie,  exécutés  par  les  soins  de 
M.  Delacroix,  préfet,  et  continués  par  son  suc- 
cesseur M.  Thibaudeau.  La  ville  de  Marseille  doit 
aussi  à  ces  deux  magistrats  plusieurs  monumens ,  dont 
les  uns  sont  exécutés ,  et  d'autres  en  exécution. 
..  La-  fontaine  du  Boulevan  dn  Fainians  doit  être 
ëécoréé  de  deux  bas-reliefs  en  marbre,  représentant 
IfLpkke  ei  la  ricoltt  des  alhes.  Sur  une  autre  fontaine 
dans,  hi  nu  df  JHoaa,  on  voit  le  buste  de  Puget^ 


CHAPITRE    LXXXIII.  ^6j 

€tï  jace  de  sa  maison.  A  ia  fontaine  de  la  ptace  de  U 
Douane,  on  doit  placer  un  Hern^s  géminé,  c'est-k--' 
dire ,  à  deux  faces ,  représaitant  deux  célèbres  Mar^ 
seilIois^Eutkymèneet  Pytbés^  (  i  ) ,  de  grandeui'colos- 
sale.  Deux  stames  en  marbre ,  celle  de  la  Paix  et  celle 
de  la  Victoire ,  ont  été  inaugurées  dans  tes  fètes  triom- 
phales consacrées  à  la  gloire  de  nos  armées..  Tous  ces 
ouvrages  sont  dus  aux  talens  de  trois  habites  sculp- 
teurs, MM.  Chardinî,  Chénard  et  d*Anthoine. 

Ce  n'est  vraiiibnt  que  depuis  Pan  vili  que  la  vfife 
de  Marseille  a  vu  s'élever  dans  son  sein  des.  monu- 
mens  dignes  de  son  antique  renommée  et  de  sa 
splendeur;  c'est  donc  un  bienfait  de  plus  qu^elte 
doit  au  Héros  du  siècte  et  aux  préfets  qu'il  a  envoyés 
dans  le  département  des  Bouches-du>  Rhône. 

Au  bout  du  cours  Bonaparte  ^  il  y  a  une  foiv- 
taine ,  au-dessus  de  laquelle  s'élève  une  colonne  dé 
granit  surmontée  du  buste  d^  ce  Héros  ( 2). Cecours 

(f)  Infirà,  page  %ju 

(2)  Le  piédestaf  pfïre  trois  bas-rdiefs  en  marbre  blanc  ;  du  côt^ 
Je  t'est  •  un  trc^bée  d'armes  avec  un,  boudicr  sur  lequel  on  % 
gravé  ces  mou  en  lettres  d'or  :  « 

A  BONAPARTE 
VAINQUEUR^  ET  PACIFICATEUR 
MARSEILLE   RECONNOISSANTE. 

Sur  les  côtés  sont  des  trophées  de  commerce  et  d'agriculture^ 
du  côté  du  cQuchant,  i'inâcrrption  suivante  : 

Ce  monument  a  àé  élevé  Van  X  de  la  République  française  une  et 
indwmbU ,  j^<^/  dt  Vke  vulgaire,  le  généra  ^ONATARTE  étant 

r4 


2^4  CHAPITRE  l.li:xXU% 

e&t  terminé  par  une  esplanade. |Mmtk{aée  sAr  «fi  ro*- 
tïher  d'où  l'on  dééptvre  la  mer^  iie  port  et  la  vïle.  A 
ih  fcnftaine  située  à  k  porie  de  Paradis^  s'eSète  une 
liutre  cûfoniïe  de  ^aiût  qui  ponte  tm  génie  (  i  )  ;  eUe 

ffremer  Censiii;  lès  àto^ens  Camiacér/s  et  Lebrun ,  second  et  troiâèmt 
Consuls;  Chaptat,  ministre  de  l'intérieur  ;  par  les  soins  du  citoyen 
Charles  Delacroix,  pr^et  au  département  des  Bouckes-dU'RhSne ,  d'à-- 
pris  te  pœu  du  conseil  muhicipàt, 

La  cmntmme  d'Aîie,  partageant  kssentàmétts  de  cdlejêe  Marseille  »  a 
donné  le  fit  de  la  colonne,  m. 

(i)  Cette  colonne  est  surmontée  à'une  figure  en  marbre  repré- 
sentant le  génie  4e  fa  ^nté  relevant  4*Hnfc  méiri  le  flambeau  de 
la  vie  pi^œ  éteint,  tandis  que  de  Fimire^i!  couronne  les  noms 
àt  ceux  qui  se  dévouèrent  à  une  mort  certaine  pour  secourir  ics 
victimes  de  ce  Héau.  Sur  le  piédestal  on  lit  quatre  însd*iptions  ; 

I.®  Ce  monument  a  été  élevé  Van  de  la  R^uhlitfue  française  âme  et 
indivisible,  1802  de  Vert  vulgakê,  le  gén^td  BONAPARTE  éant 
^entier  Consul,  les  àîtoyens  Cambacérés  et  Lebrun  étant  second  et  troi- 
sième Consuls;  le  citoyen  Chaptal  étant  ministre  de  V intérieur  ;  par  les 
soins  du  citoyen  Charles  Delacroix^  préfet  du  département  des  Bouches- 
idu'Rkone,  organe  de  la  nconHéissance  des  MaHé^lèis,  •    ' 

-3^^  A  Vétef'tttlle  mémoire  des  Âommes  coure^eutt  dont  les  noms 
suivent  :  Langeron,  commandant  de  Marseille;  de  pilles,  gom^emeur- 
viguiet;  de  Bel^pHce,  évéque;  Estelle,  premar^heuin;  Rose,  commis- 
salrt'gtnéftdpour  le  quartier  de  lUve-neuve;  MHkrs,  Jésuite,  commis- 
saire pour  la  rue  de  VEscalle ,  principal  foyer  de  la.  tont^on  ;  Serre , 
peintre  célèbre,  élève  du  Puget;  Rose  V aîné  et  Rolland,  intendans  de 
la  santé;  Chicoyneau,  Verny,  Peyssonel,  Montagnjer ,  Bertrand, 
Michel  et  Deidier,  médecins  :  ils  se  dévouèrent  pour  le  salut  des  Mar- 
seillois  dans  V horrible  pesu  de  lyzo, 

3.**  Hommage  à  plus  de  cent  cinquante  religieux,  à  un  ^and 
nombre  de  médecins,  de  chirurgiens ,  qui  moururent  victimes  de  leur 
"(èle  à  secourir  et  consùlèr  les  màurdns. 

ï,(m  noins  ont  péri  :  puisse  leur  exemple  n*itire  pas  peréi  ! 


li^^pi^ 


CHAPITRE    LXXXIII.  iSj 

est  dédiée  aux  mânes  dés  ViCtfrftés  de  fepejtè  dô 
1 720  y  et  aux  hommes  courageux  qui ,  à  oette 
époque  y  se  dévouèrent  pour  le  salut  commun. 


^m 


i&ii^^ 


^«Mirifa^kM^ahi 


fuîssent-ils  trouver  dn  ifiritateurs,  sitttjà^rs  de  caiamilé  vtnoUnt  i 
rendkre  / 

4.**  Hommagt  à  Cïémtnt  XI ,  qui  nourrit  Afaraiik  afiig/e,' 
Hommage  au  roi  Tunisien ,  ^i  respecta  et  don  qu^un  Paptfaisoit  au. 
malheur! 

Ahsi  la  morale  uniuerieHe  rallie  à  U  hienféÎHmu  Itt  fiommtk 
vertueux  que  divisent  les  opinions  religieuses. 


^,.7 


^«  '^. 


CHAPITRE    LXXXIV. 

Observatoire  de  la  Marine.  —.M.  Thulis.  — 

M.   Jean-Louis  Pons.  —  Température  de   Marseille. 

—  Mistral.  —  Climat.  — Instrumens.  —  Navigateur» 

marseilloîs;  Pythéas,  Euthymène.  —  Histoire  litté- 

■  faire.  —  Illustres.  —  Académie. 

J_iE  lendemain,  nous  allâmes  k  Yobseryatoire  de  la 
marine  :  il  est  sur  la  butte  des  moulins ,  qui  est  le 
Jieu  le  plus  élevé  de  la  ville.  Il  consbte  en  trois 
étages ,  qui  forment  le  logement  du  conderge ,  1^- 
bîiation  du  directeur,  et  le  lieu  destiné  aux  obser- 
vations. 

Le  troisième  étage  se  compose  (Tune  grande  salle 
carrée ,  accompagnée  de  deux  cabinets  :  U  y  a  encore 
trois  petites  tours  rondes ,  une  au  nord  et  deux  au 
midi ,  couvertes  chacune  d'une  coupole.  Le  toit  de 
l'observatoire  proprement  dit  est  plat,  et  fonne  une 
terrasse ,  sur  laquelle  est  une  girouette  qui ,  par  des 
roues  de  renvoi ,  marque  les  aires  de  vent  sur  le 
plafond  de  la  grande  salle. 

Jusqu'en  l'année  1764,  les  Jésuites  en  ont  eu 
i'administration ;  il. a  été  ensuite  dirigé  par  M.  de 
Saint-Jacques  Silvabelle ,  qui  a  eu  pour  successeur, 
en  1800  ,  M.  Thulis,  membre  distingué  de  l'aca- 
démie ,  et  très-zélé  pour  la  science  astronomique. 
M.  Jean-Lotib  Pons  le  seconde  parfaitement  bien. 


CHAPITRE  LXXXIV.  'n^f 

Cet  homme  intéressant,  né  à  Peyre,  dans  le  départe- 
ment des  Hautes* Alpes  y  est  entré  à  l'observatoire  de 
Marseille  en.  1789*  sa  bonne  conduite  et  son  intel- 
ligence lui  ont  fôcilement  gagné  la  bienveillance  de 
fhonnète  et  estimable  directeur  de  cet  établissement. 
Il  a  pris  un  goût  extraordinaire  pour  les  observa- 
tions, et  son  industrie  lui  a  procuré  des  instrumens 
utiles.  A  l'aide  d'une  lunette  qu'il  a  fabriquée  lui- 
même  en  entier ,  d'après  celle  qui  est  à  l'école  de 
navigation  de  Marseille,  il  aperçut  lé  premier,  le 
"  ï  I  juillet  1801,  une  petite  comète  près  de  la  tète 
de  la  grande  ourse  ;  et  le  Bureau  des  longitudes  lui 
décerna  le  prix  de  600  francs  que  M.  de  Lalandè 
avoît  déposé  chez  un  notaire  de  Paris  pour  celui 
qui  fêroit  une  découverte  de  ce  genre,  M.  Pons  ^ 
enflammé  par  ce  succès ,  est  devenu  ,  pour  ainsi 
dire,  i'amant  des  comètes;  il  les  guette  avec -une 
attention  et  une  persévérance  singulières  :  le  2  6  août 
iSoï  ^  il  observa  encore  le  premier  une  très-petitb 
x^omète  dans  le  Serpentaire. 

Une  inscription  placée  sur  la  porte ,  dans  i'inté- 
rieur  de  la  grande  salle ,  apprend  que  cet  observa- 
toire a  été  commencé  en  1699  ^^  achevé  en  1702; 
qu'il  a  été  réparé  dans  l'an  iv  [  1794-^795  ]•  % 
longitude  est  de  3**  2'  6"  à  l'orient  de  Paris  ;  sa 
latitude  septentrionale  est  de  45*  ^7'  A9"  >  l'éléva- 
tion de  cette  salie  au-dessus  de  la  mer  est  de  cent 
vingt-neuf  pied^  six  pouces. 


.^^ 


éi:69  CMAriTRE    SjXXXIV. 

M.  Tfiulfô  suit  avtc  un  saèle  soutenu  les  dbset  ^ 
'Valions  auronomi^es  et  météblroIogîquëSy  dont  il 
présente  les  résultats  à  f  académie  :  elles  ont  fkk  voir 
^Vn  été  ta  disilwr  se  soutient  ôi^n^iiremënt  entits 
£  i  et  2  f  *  du  thermomètre  di$  Réàumur ;  mds ,  depuis 
dix  heures  du  matin  fUsqu'à  six  heures  du  soir  ,  tl 
y  a  une  brise  de  mer  appelée  gartin  >  cpxi  procui^ 
jdu  firàisv.  £n  hiver ,  le  froid  est*  de  2  à  3^  :  très^ira^ 
Tement  de  5  à  tî;  et  k-peu«près  toutes  les  années^ 
une  fois  seulement ,  de  8  ^  9""  :  likis  ceià  ne  dure  qufe 
quelques  heures.  En  général  ^  il  règne  dans  cette  sai- 
son,une  agréable  tempéititute  de  é  à  ii^  dechaleuf. 
X.a  hauteur  moyenne  du  baromètre  est  de  ^8  )  1  L.  ) . 

Le  printemps ,  excepté  durant  i'équinox»  ,  ^ù  il 
y  a  quelques  fours  de  pluie ,  est  très-agréàble  ^  fâu^ 
toituie,  toujours  très-doux /se  prolonge  ftt»qù*en 
iîovembre,  et  même  jusqu'en  décembre  î  léstirois 
semaines  du  solstice  d'hiver  sont  froides  et  pluviôses  ; 
•mais  Thiver  n'existe  réellanent  qu'à  la  fin  de  jalivief. 
La  seule  incommodité  de  ce  beau  climat  est  te'X^wjr*- 
italf  vent  glacial  du  nord- ouest,  qui  soufBedails  sa 
plus  graïKle  force ,  trois ,  six ,  neuf,  quinze  jWits , 
inais  rarement  trois  semaines  de  suite*  Ce  vent  est  si 
redouté  des  Provençaux ,  qu'ils  ie  regâfdent  Comme 
une  ^de  leuiTs  fdus  grandes  èalamités ,  ainsi  qcie  l^\y 
test^  ce  Vieui  proverbe  : 

Le  pàrremént,  îe  mistral ,  !a  Durancc , 
Sont  ics  trois  fléaux  de  Provence. 


XI  souiBe  avec  pli^.  qk  mAns  de  feece,  pendant 
tpute  Tannée  y  :49^  ^  p^éei  tirasses  &  pi^^ ,  ainsft 

que  daps  Ip  Bâ^Lai^[iiMQ<?« 

^£^^^  Tail  en  cbif  ^  p»3f  rb  dîmat,  ^c  ep 
chaud  ^ .  ç§t  tcè&-&uoiahIe  à  la  sant4  ;  il  eon^îen^ 
pnncipd^nMfii  àrceuK^^  dm  des  mabdies  de  nerfs 
ou  de  ppitrine^ 

La  grande  ,saUe»  4^ ,  l'pb^iejv^l^i^jse  4i&t  décovée  du> 
por^t  p^nt  di^  P^  iFauiUée^  Jésuite ,  et  de  cehi? 
en  M.  de  Saiiïtr J^tques  ^RVabeHe,  connu  aussi  sous 

le  npm  de  M,  ^e  §auU-^3^f;qS^$i^<fe^;,fa*wl(eç  4eX5^- 
h^Gm/^aàiyV^vûMQ^  Cook,  et^  portpaios  grarés^ 
de  Saunderson^,  Màmsteéd ,  Çoôk,  JétàmèTusijaiXide  ^ 
Newton,  d'AIëmbërt  et  Diderou 

4.vec  vn  .t{i^O(99  pbeè  danft  cetee  saUe,  on 
êktaogae  très*bMn'i>»e  toui*  bitie  sur  une  petite 
fie  à  cinq  lîeups  dé  Màrseflié,  é t  qp^i  sert;  dç  pbai'e 
en  temps  de  paix;  pn,  l^^  ^^fq^eot  W  mofi  obstmi^ 
tsârtt.  sui  le  n[iur  de  Notre-Dame  de  fa  G^tâe  (  i  j . 

■■  ■  .iT!i'jmiaii>i  B  Miiwiii         > ■         ■  ,1. 

(i)  Voici  ia  note,  des' iijstirunieQ^;^yi,.?igp^l^cvqnfiRtiy^ 
vatoîre  de  Marseille  :  f 

^1,^  y.î?  t;;:^s-I;>ea44  tât^opftgr^rî^^^fiMmnStiOSfr^  de  dix- 
neuf  décimètres  de  foyer,  ponant  la  date  de  1756.  li  repose  sus. 
une  ip^hipep^a,^Ctiqu^  f;;^  hpf^^i'i^g^çl^le^f^^Èmki  o^ets 
de  deux  cents  à  do^^a  c^nx^ff»^.  l^f^^u^  fifitkà.  ni»oks  spnt 
tjçcs-oxi^éç  dcjmis  une  vjugit^^  âtj^ji^ém,. 

2.^  Un  autre  télescope  du  même  artiste,  ayant  sKMxaate-oîn^ 
'centimètceailftfipgur^  UjgBMmaÉkp  ^upsh^u  d^  ^ùavrC'VÎngt-dxx 


■iÊ^^':^^- 


37B  CHAfiTttE    LXJCTXIV. 

L'appartement  de  M.  Thulis  a  un«  vue  ttès- 
étendue  sur  là  ville  et  sur  le  golfe.  Près  de  son  cabî' 
net  est  une  terrasse  ordinairem«it  garnie  de  fleurs  ; 
c'est  là  que  ce  dtoyen  vertueux  et  modeste  omsacra 


oiitTCf  <d>f«c^  non 


i  Rob  cents  fmi  :  il  e 
achromatiques, 

}."  Une  lunau  achronuiii^weit  DoLLONp ,  de  onze  détimctro 
ie  foyer,  ayant  une  ouvBiture  de  solxantwtrol]  millimètres.  Cette 
lunette  est  pcts^e  «ur  une  ro&chinc  panllKtique  en  bob  d'acB)ou  ; 
lE  £tre  rendue 


/Vl1>.* 


CHAPITRE    LXXXIV*  I7I 

sa  vie  à  d'uâes  observations,  qui  lui  ont  mérité 
festime  des  savans. 

L'écob  de  marine  est  dirigée  par  M  «  Duhamel , 
faomme  d'ui^  mérite  distingué. 

Il  est  impossible  de  jeter  les  yeux  sur  les  rives  de 
Marseille ,  de  visiter  son  fcole  de  marine ,  sans  son- 
ger aux  iHustres  navigateurs  qu'die  a  produits  ;  et 
l'imagination  ^  toujours  exaltée  par  le  souvenir  de 
Tanriquité ,  se  reporte  aussitôt  vers  le  temps  de  Py- 
ftéas.  Ce  célèbre  astronome ,  contemporain  d'Aris* 
tote ,  s'il  n'est  pas  plus  ancien  que  lui ,  a  vécu  au 
moins  dans  le  milieu  du  |y.^PcIe  avant  l'ère  chré- 
tienne  (i).  Si  l'on  ajoute  foi  k  ce  que  les  auteurs 
nous  en  ont  appris ,  il  a  le  premier  déterminé  la 
latitude  de  Marseille ,  et  connu  les  rapports  con3tan$ 
entre  les  marées  et  les  mouvemens  de  la  lune»  Ses 
voyages  sont  encore  plus  étonnans  que  ses  découT 
vertes  astronomiques  :  allant  de  cap  en  cap ,  il  cô-^ 
loya  toute  la  partie  méridionale  de  l'Espagne ,  entra 
dans  le  bra$  de  la  Méditerranée  qui  se  joint  à. 
rOçéan  par  le  détroit  de  Cadix  ^  après  avoir  pa^s^; 
ce  détroit ,  il  fit  le  tour .  de  la  Lusitanie  et  de 


(i)  BOUOAINVILLE ,  Éclair^issmefts  sur  la  vie  et  les  voyagea  4e 
Pyth/as  ik  Marseille ,  dans  les  M/moires  de  l'Académie  dis  belles» 
lettres,  tome  XIX,  page  i4($.  M.  MuRRAT,  dans  sa  Dissertation 
de  Pythea.  Massiliensi ,  imprimée  dans  ies  Acta  Societatîs  litU" 
raria  Gà^ngeusis ,  177J ,  Xois^  VI  ^  a  troi^icn  développé  tOHÇ 
ce  ^A  c$x  rfia^  à  B/tbéas, 


lijx  CHAPITRE   tZXXIT. 

rEspa^ne,  gigoa  i^s  x:âtes  def  Aapûtiine  6t  defAiH 
morique ,  qu'il  doubla  pour  entrer  dcms\t  ctoai  ofien, 
appeSe  la  Aianchei  suivit  lei»  càtes'  oriafitak&  «te.f  île 
britannique  ;  et  lorsqu'il  fin  à  sa  partie  ia  plus  s^ten*^ 
trionale ,  poussant  tQu|oiirs  vers ie nord^ii s'arauça , 
en  six  fournées  de  navigafion  ^  fus^'à  ^axi  pays  cpie 
les  barbares  nommoie^t  TkuU,  et  que  nous  appelons 
aulourdlmi  Islandt. 

\  Dans  Hn  second  voyage,  ii  en<p^  ps- 1»  Mmdie 

dans  la  mer  du  Nord^  et  de  ceHe-ci^  par  ie  déi»^ 
du  Sund ,  dans  ia  l^tique ,  sur  iaqueHe  ii  vogua 

<  jusqu'à  f  embouchtiTé^Pk  fleuve  qull-  appe&  Tamh. 

Combien  il  est  fâcheux  que  les  à&xH  relatiofis-  q»^ 

*  avoit  publiées  de  se$  voyages  <^  aieni:  été  peidues  !' 

nous  n'en  avons  que  des  fragmens  épavs',  par  les- 
quels on  voit  qu'elles  centenoient  beau€ôt»p  dedétail? 
intéressans  sur  les  productions  ^es  pays^  quSI  avoit 
parcourus,  et  sUr  les  mœurs  dé  ienrshabitans. 

^  On  ne  peut  nier  que  Polybe  (î)  ,  et  sur-fout 

Strabon,  n'aient  traité  Pythéal  avec  le  mépris  du  au 
^  mensonge  ;  qu^ils  ne  l'sûeft t  regardé  com  me  un  impos-^ 

teur  j  que  Bayle  rfait  accueilli  leur  opinion  (  2  ),  et  que 
ce  navigateur  n'ait  tfouvé  encore  un  plus  redoutable 
oitique  dans  M.  Goftaellin^  (  j  ) ,  œ  s^va^t  dpnt 

(l)  POLYB. X?CXIV,  J.  '     . 

;  433)  Efkwmn^  artid«  PytUÉAJ^ 
(3)  Géographie  des  Grecs  analysée,  p/^^  et  iujyanws.    ^ 

l'autorité 


if  iriirTi'' 


FMtorhé  a  tsnt  de  poids  dans  les  matières  têlative^ 
à^fa  ^éogmjrfiiê' ancienne  :  îl  a  démontré  des  etreui%  * 
qui  doivent  faire  présumer  cpie  Pythéâs  n'a  fam^^fe 
fiât  fcsJwyiagi^P5û'*ôft  fei  dttttbôe  ç  mufe ,  bu  ttiôîtts ,  fefe 
MarscftitolS' a  ^asseuMé  tfaififcienries  «arïitîom  ^P, 
•sans  hifi  y  nou$'  [sêrOîeni  îiïceJrtmie^ ,-  ^tibfqti'fl  ^  -slh 
déôgurtes  pe«t-être  pour  en  ca^B^  ik^i^îné.  N'ést-'H 
pas  poskaâè  éiiéôite  tspé  dèuk-éfai  ont  sueeessîveinerit 
transcrit  sèsf  técîts  ^  les  aient  afeéréis  par^moùk'  pdi& 
Jfe  inenreiHftuxir  -,  '  -        ^^'« 

•fe  Wttditàîs  pouvoir  parler  -tfàsiî^  *£uthymèn^ 
•iiiitre>  Aavîgtitetir  marseîflois  :,  oti  prétertd  qùé  ,'  sii?- 
vaitt^a  mute  îdéfà  tt'àtée  par  Hahnoft  ,  il  poussa  ste 
découvertes  ati  wîdî ,  et  i^ù'a  pàitdurat  les  ctttfe  de 
¥A^pêciv^{i)  fsis^^^  thaïs  oh  ri^a  poiHt 

-d^auwels  détâili  sur  k)n  entreprise:  "'  *-   ;:; 

.  Dians  d^s  teitfps  plus  modèitteS ,  Mâï^illé^  -^éât 
dfer  aVfee  hdrtiÀeut  ie  dapiteinè-ftëfiaûa ,  qiii  Jle  pri*- 
TOÎaf,  ttvec'ûn^p^it  batH|em;  a^yittt -pris  pavfflPëi 
ifespagiïkrf',  t  osa  passer  le  détïôlt  '  décôuitett  ^at  ^- 
•gi^Janw  ïtile  tt'^ôdUii  «ifedrè' bëaticbup  de  ihzèàs 
Tcptti  156  ^nt  ^ît'  Uh  nom  o.ii  ^ar  !ieur  habileté  Ûaiife^îa 
^navigation/  bU'^jpaÉ-ilhïrèjiîdi*  qu'ils  ohi  Montre 
contre  les  ennemis  de  leur  |)attlè;  —  ^-«^ 

*  It  A*èst  pas  douteux  que   lès  .Phpceens'jn'aîent 
transporté  dans  cette  partie  dp/fa  G^MleJje^jïciçsnces 


■t  i  ^  \ 


,j   t.* 


(i)  Senec.  Quasunat.  W ,  %. 

Tome  JJL 


a^i  CHAPITRE  tXXXIÏ. 

et  les  arts  de  h  Grèce.  Q^îqu'il  tn^  tioui  reste  aucurt 
mpnument  de  rârç|iiteCti*r!e  çi  dç:,!»-  sculpture  ^des 
anciens  Marseillois,  on  peut  juger  de  leur  goût  par 
I9  s^le  de  leurs  médailles,  si  diffi^mt  de  cdui  des 
monpoies  qui  ont:ét^  frappées  dans  (eS:  aMtrefe  villes 
de  cette  contrép.  Ias  ridwçses  qiie  .{vocurç  te  com- 
merce, durent  iwe  fleurir  dans  MgrseUle  tout  c^qoi 
tient  au  luxe  et  aux  jouissances  de  la  vie.  Ce  iùt  c«tte 
ville  qui  adoucit  le$  mœuredes  barbares  :  après  s'être 
rendue  célèbre  par  ses  vîaoires,  çlI«.rtN:b«rcha  la 
^oire  des  lettres.;  ses  citoyens  les  plu$  distillés' s'a- 
donnèrent à  la  philosophie  et  à  l'éloquence ,  et  répao* 
dirent  dans  le  reste  def^ÇauIe  le  goûtides  beaux-an». 
■  Après  qu'elle, se  fi^tsoumise  à  César ^- Marseille 
j|»erdit.beaijcoppde.S|pri  importance  militaire  et  poli- 
tique; le  commeree  :et  les  spiences  i'eiFi^édommar- 
.gècentiS»  éfoles  devjnrQpt  célèbres ,  et  les  Romains 
.finirent  par  les  préifèxer  à  celles  d'Athènes  (1).  Aor 
gaste.,.qu^  vouloit  éloigner  de  sa  cour  son  itefeu 
^^ifi$,  saps  cependant  parokre  l'exiler,  Teavoya-À 
.  Marseille  comme  pour  y  achever  sps  éluder  (z)  ;  Agri- 
cola^y  fiit  éiey^  i[j),  La  désign^tipn  4'Atkènes  dft 
Cailles  que  Çicéron  (4).  donne  à  cette  ville^  n'éttnt 
doncjUfi  iin  titre  usurpé.  .  , 

'     (1)  Sthab.IV,i8[. 

(ji)TACiT.^BW.IV.44.  ■ 

(})  U.  VïM  ÀgricoLt ,  4. 

J4)  CicEH,  (>«./'« i"iif«,XXVi,  éj.      " 


.  C ttl PITRE   IXXXIV.  i^J 

Lirruptîofa  deà  Vandales ,  :qaî  s'emparèrent  dû 
Marseille  (lY^  y \ éteignit  teut-k^fait  ie  goût  dé^ 
lettres.  Lorsque. ié^  tscubadoi^rs  provençaux  rame'*-' 
nèrent  celui  de  la  poésie,  les  Muses  se  fixèrent  d^ 
pr éférenc^e  à  Aix  ;  et  y  comme  nous  l'avons  vu^  c'est 
à  la  cour  de  Raymond  ^  de  Béàtroc ,  et  sur«-tout  du  roi 
René  (2) ,  qu'on  vîç  retiaître  ieur  àdte» 

Marseille  se  livra  :plus  excHisivement>  au  côm^ 
-merce;  les  troubles  de  la  Ligue  en  bannirent  entière- 
ment les  lettres*  On  y  a  vu  paroître  depuk  plusieurs 
hommes  distingués  :  on  peut  citer^  entre  autres,  Ber- 
nard Carbonely  Rostang  fiérenguier,  poètes  estimés 
au  temps  du  roi  Robert  et  de  Philîppe-le^Bel  ;  Pierre 
Paul,  qu'on  :  regarde  comme  Ile  restaurateur  de  la 
poésie  provençale j  "roicent  Leblanc ,  célèbre  voya- 
geur; Honoré  d'Urfé,  auteur  de  VAstrée  ;  le  généa- 
ïoeiste  Pierre  d'Sozier;  fHistorien.de  Marseille 
Pierre  de  Rufii;  les  naturalisieSf Plumier,  Feuillée 
et  Peyssonel ,  le  poète  Bonnecorse,  l'éloquent  pré- 
dicateur Mascaton;  M.  Guys,  auteur  des  Lettres  sur 
la  Grèce  ^  et  beaucoup  d'autres  que  j'ai  déjà  eu 
occasion  de  faûre  conncitre  {))•:•' 


>  i 


(1)  En  414.  .      . 

(a)  Supra,  tome  II ,  page  340U 

(j)  On  pei^t  cQi^sulter  sur  tes  illustres  Marsei'fois  l^es  ouvrages 
suiva;ns  :  Réponse  de  l'auuur  dt  Marseille  savante,  iXc.  à  la  lettre  qui 
lui  a  été  écrite  de  Provence  le  j/f  février  lyip.  Mercure,  1730, 
\yùsi.^Dîfécrivaini  deMarstilU,^  par  D£  (^UfiSNÀY.  Yc^çLÀnnaly 

S   Z 


-^  ^» 


►•»- 


■fkj^  .CHAPITilE    LXXXIV. 

On  àvoit  eu  le  projet  Id'étàbKr  à  Maïseîile  une 
académie  (ij^iloràque  ies  suites  funestes  de  h  coii^ 
4agi0n  <fa  17^0  empêchèrent  deisVn  occuper.  '  de 
-ébt  ;pottrtant  presque  aulsebidesiboirréurs  lie  b  p^Vé 
3q[Yie  cette*  com'j^agnie  pnt  iiaissarvcei/Quelques  f>èt!- 
:$oniies  réfugiée^  ^ia /cahiftagiiie  sèl  rëumàsoiëi^ 
chaque  semaiinâ  dans  hn.|àniia  ^ipouf  sj^ .  èntrëf^ir 
4e  iûtéiatuTe  i.cèfiéau  ayaqt  totiilement  cessé'^  la 
même  société  r  s'issembla  encete  péndilit  dettic  an- 
fiées  9  k  Marseille ,  chez  un  de  ses  *  membres  ;  enfin  ^ 
^le  fut  érigée  :  en  académie  par  lett'resi  patentes  de 
17269  et  adoptée  par  rAcadémie'ïbinçaise^  bà^s€( 
fBeiiibrès  avdien^  le  droit  de  siéger  âansries  séances 
|)ubiiqueSy  et  à  qui  eiie  envbjroit   tous  ies  'atis^ 


de  Marseille,  çorotîaire  8  ,daliv.  IL  — filçges  de  juelfues  illastm 
Màrfeniois,  par  ct  ttuipVï.'^oyfei  fc'Xiy/iiWc  àc^^^^ 
^  Marseille,  16^6 ,  In^CFf.  ^  Éhgà  de  'ftuh\térs  ^ckénfntfaèks  ^  ' 
Marseille ,  couttSTAs  danf  les  Re€tuUsde<mt  aiaifimiet  p»  M,  D£ 
LA  VlsCLÊDE  —  A'fajrseille  ancienne  et  moderne ^^ux  M.  GuYSj 
Paris,  i78è,în-ô.**On  peut^cncorc  trouver  de  bonnes  notices  <ïai\s 
^  Mémoires  pttursMr'û  Histât're  des  héirikes  Wà'àrei  de  PMenh\ 
far  ic  P.  BoUGEREL,  175^^  fn>ia  vfitisur-tQistfaib  in  DitUo»- 
naire  des  hommes  illustres  de  la  Provence  et  du  Comté  Venaissin,  Mar- 
sêilTc,  17B6,  2  vof.  in-4.*^  "  "~   '^ 

(i)  Lettre  écriupar  M.  DE  LA  RoQUE  à  M,  DB'^tdàknl^sur  • 
le  projet  d'établir  à  Marseille  une  acddéàteldéf  s'àfhèes'et  des  Mes- 
îettres;  "où  il  est  parlé  de  î'/fncienhè  acaMtié  de  ^Mâfiefîk,  et  des 
MarseiHois  ^ul se  sont  distingués  dans  hs ^àèitch  èt'diûit In 'Miéi^ 
dfts;  de  Paris,  ic  i.'^ivril  171e.  'Sè^t  Â'^rti'dè  î>^i)h 
tJ^7>)wiTierj'ait.XlV;i{>'ag«ei>^.  -^       '^'    '       -^       t 


^QOmijM  ^ikui^  uoe  {vèceea  vers  ou.ea  prose  (^)«> 
Q[m]^(|i^  i'^jçadémie  de  Marseille  ait  perdu  totisses' 
zeyeni3|s,  ell^  ^  rfpri^  sies  travaux  et  cHe  s*y  livre  avec 
activité  :  plusieurs  de  ses  membres  «sont  avanidgeu- 
sein^  (;osm)^  dans  ia  iittéraita^.^  Elle  s'assemble 
aiijiQMrd'huii^aâ^  une  parffe  des  hâtimem^de  Tandea 
couvent  des  Bernardines  (a), 

4'as^i$tai,à  l'une,  des  séances  de  cettç  compagnie  ^ 
^Ht  .  )'j9i  j'hoDnour  d'êire  membse.  Vl.  Ca^mti^ 
i^s^n  y  \^\  mi  trjèsrîbon  mémoife  sur  lin  éksMéctiori 
4€s^  siiutBréiles ,  qui  d^soloient  aioi;^  la  campagne. 
Le  résultat  de  son  mémoire  étoit  de  donner  deuiE 
^Hs.paT:  livre  de  sauterelles  ^  et  quatre  sous  pai*  livre 
d'œufs.  Cela  prouve  combien  ce  fl^a^v  étoit  foneste 
p0ui  If^iodltMre.  Oa  assure  que,  dans  une  année ^ 
^U  leLterntbiie  d'Arles  fut  ^n  proie  aux  ravages 
^  ces  îsfif  ctes  ^  op  parvins  à  dét^tre  trois  miiSg 
qutnit^x  de  lei^rs^osuÊ  (jf^.  IVL  Casimir  Rostanestf  ua 
IfUne  homme  ptein  de  zèle  et  d'activité  :  il  a  voyagé 
^n$  fai  Grèce  avec  le  ptis  grand  fruit*,  il  est  très-^ 
x^sé  dans  la  lasigise  d'Homète*  et  de  Démosthènet 
I^  rapport  de  goûts  et  d'études  favoît  lié  ayecf  te 


•    (i)  Depuis  1727  jusqu'en  1790/ cette  société  a  putfié  trente 
HffmeHs^6s!&  oin^ages  iitf  ckns  m  séances. 

(  j)  M.  le  pi^éfet  a  adopté  depuis  ^ti  mesures  qui  ont  déliyjçe  b 
campagne  de  Marseifle  de  ces  insectes  j  ik  dévoroîcnt  toutes  ]e^ 
SéPÔice$.etjâs^Éux)4ïutits  arbres. 

S  3 


«74  CHÂPITÏIB  i.txitfr? 

Cétôbre^d'Ansse  de  Vinoison.-li  cufrive  avec  succSr 
Ijt  botanique;  Qt  l'entomologie,  et  il  if  des  coianois- 
sances  profondes  en  numismatique*  Ses  talens  se-^' 
TQÏent  bien  -plus,  utiles  aux  lettres ,  s'il-  n'en  étoit- 
((istrait  par  une  p^sionplus  noble'  encore,  c^le  de- 
servir  l'humanité  :  if  est  l'atne  deia  plupart  des  éia- 
blissemens  de  bienfaisance.        . 

M.  Girard  î  secrétaire  de  la  préfecture,  lut  ensuite 
un  raémcàre  sur  ta  Crau,  que  nous  ne  taideroits 
pas  à  visiter.:  c'est  un  extrait  d'une  statistique  du 
département;,  qy'on  doit  regreiiçr  qu'il  n'ait  paa 
encore  publiée;  elle  est  écrite  avec  le  goût,  la 
puret^et  l'élégance  qu'on  remarque  dans  les  autres 
ouvrages  échappés  de  sa  plume. 
.  L'académie  étoît  alors  présidée  par  le  pré&t  du 
département,  M.  le  conseiller  d'état' Thibaudeau  ; 
qui  montre  le  plus  grand  zèle  <pour' sa 'prospérité  ^ 
comme  pour  tout  ce  qui  tient  aux  progrès  dei  iù- 
piières.  plusieurs  ,de  ses  membres  s'occupent  prin- 
ciptdement  de  la  faûe  fleurir  :  M.  ThiJis  y-  présente  I« 
t«jbiit  de  ses  observations  astronpmiqties  ;  M.  <Jè 
£fnety,  le  résultat  de  ses  expériences  sur  i'agrîcùl- 
ture,  et  ses  calculs  statistiques;  M,  Deli&le- Saint- 
JAi^ïûn  y  mgntie  Içs  ingénieuses  machines  dont  il  «st 
l'inventeur  ;  M.  Barthet  y  expose  ses  beaux  instni- 
mens  de  Dhvsirrue   et  d'nniinuf>' ;  Itinhilp  nharinn. 


CHAPITRE   LXXXIV.  '279 

historiques  ;  M.  '  Gorse  ofïre  ses  calculs  mathéma- 
tiques et  le  résultat  de  ses  expériences  ;  M.  de  Saint- 
Vincens  y  f^  part  des  monumens  qui  ont  été 
découverts  ;  les  artistes  dont  fai  déjà  eu  l'occasion 
de  parler  [})  fY  exposent  leurs  ouvrages  ;  enfin  cha* 
cun  y  pçrte  successivement  le  tribut  de  ses  travaux 
et  de  se^iumières  (2). 

La  société  de  médecine  s'occupe  principalement 
de  Tétude  des  maladies  locales;  ce  qui  rend  cette 
in$.ti|utîôn.  tr^s^utile.  Elle*  a  beaucoup  c<»itribué  à 
xépandrè  les  procédés  4^  h  vaccination.  M.  Valen- 
tin  ,  <]ui  jtrint  l^eaucdup  d^autres  coQiulisfances  à 
celles  de  la  médedne ,  ett  ula  de  ses  principa^x^ 
membres. 


(1)  Su/H^â ,  page  165.  Je  «îois  faîiftf  îtj  mention  d*ini  ait^e  pro-* 
vençal  qae  l'ai  été  '  as^  heureux  poui;  attirier  à  Paria  >  où,  ii  s^ 
distingue  par  ses  talens  :  M.  Ange  Cfçncr,  né  à  Arles ,  a  été  élevé 
âf  Rome;  îl  a  demeuré  à  Naples  dix-neuf  ans  ,  pendant  ïesquefs  îr 
a  gr^vé  b^eaucbup  de  planches  pour  fa  coHectîon  ées  smi^mtés^ 
d'Herculanum.  C'est  lui  qui  a  exécuté  une  ^nde  partie  des  des- 
sins et  toutes  les  grav^qrcs  de  la  secjonde  collection-  des  vases  grecs 
d'Hamilton,  publiée  par  Tisch-Be£N.  Il  a  aussi  gravé  pHisieurs 
prianches  pour  le  recueil  des  Peinttïres  Homériques  de  ce  dernier.- 
Cest:  lui  qui  a  dessiné  .et  ^avé  an  grapd  xtomhic  de  moniH 
mens  repvésentés  dam  mon  ati^;^  il  se  propose  de  donjiçr  uji 
grand  et  beau  recueil  de  vases  grecs  inédits. 

(  a  )  Depuis  sou  rétablissemsnt  *  Tacadémic  a  publié  troî» 
Rteutih  de  ses  mémoires. 


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CHAPITRE  LXXXV. 

MANUFACtURES.— Histoire. — Etat  actiiel.  — Soieries. 
—  Pelleteries.  -^  SaVôntieries.  —  Bijoux  dia  coraiL' 
— Phelloplastique.  —  Bonnets  de  laîtto.  *^'Épiteriet,' 

JlFRÈs  avok  pris  dés  remeig4ictiteii9  àxf  h  com- 
merce de  Marseiâe  ,  fè  desircMs  cpmidttre  sei^ 
manu^ctures.  M.  de  Saint -Vilïcensf'iJ  le  père  , 
qui  ('étoit  livré  à  des  recherdies'  mt  ces  étaBIîs- 
semens ,  ne  les  fait  pas  remonter  au-delà  Ai  Xll«' 

Tf^rïf*       La&      I^Iu&      «ir*/**^riy>^e      ■faKytnilflg      ér\n¥     .^Allaft 

de  citfrs  ^  de  pçaux  préparées  et  <fe  salaisons.  On 
y  feçoniioît  aussi  des  dïaps  ;  mais  ils  n^'étoiènt  pas^^ 
^ssez  fins  pour  être  recherchés  par  les  étrangers, 
et  ceux  d'It^^ie  étoient  d'une  qualité  bioia  supé- 
rieure. 

La  soie  étoît  uii  objet  de  commercé  jpiour  Marseille  : 
dès  k  ?îil/  siècle ,  les^  femmes  y  ayoiqit  dcjs  robes 
de  soie  (2);  mais  9  dans  le  siècle  suivant^  l^usage^ 
en  fût  prohibé  dans  cette  ville  cpmmre   (îçins    ïa' 


(i)  Notice  sur  Jules  Faurls  SattJt'Vîncens ,  page  16. 
(2)  Suu,  de  Mars,  de  v^//,  liv.  fl,  châp.  38. 


pfuppft  4^  ^t;^^s  (fejp^luiope,  et  il  n^^^oit  penn^ 
:(us  ÎBtm^s  iWHf gS:  4^  PPÇteç  qu'aux  .g^ûturas. 

un  ne  cpnfioît  pf^  ,4'^^^  i^^î^^  uès-prédse 
L'épcH^  à  laquelle  on  a  commencé  à  fair^  dp  la  soie 
en.ProyeDce  ;  mais  il  paiK)ît  cp'il  y  en  ayolt  des  h-^ 
briquçs  avant  le  ¥V/  siàcie*  Le  sénéchal  de  Beaucairo 
fit  partir  un  exprès  4^  Nîmes  »  Iç  i  /'  juiilet  i  ^45  r 
pour  porter  à  Paris  douze  livres  de  soie  de  Pro* 
vençe ,  de  dcms^  couleur^  xlifierentes  ,  ^hetées  à 
Montpellier ,  pour  ila .reine,  ^u  {hîx  de  soixante-seize^ 
sous  .lournois  ia  iiyrçf^),.  Pendant  que  la  soie  étoit^ 
si  rare  en  France ,  eile  ^toit  très*^cpmmun^  en  Italie  : 
on  vit  k  Gènes ,  dai^  i^ne  procession,  vers  le  milieu  du 
xv/  siè^cle,  plus.de  mille  personnes  en  habât  de  soie*. 
Aujourd'hui  la  Proviej^^çe  fitft  lui  grand  cpmmercft 
de  cette  substance  ;  on  la  porte  presque  tout^  k  la. 
foire  de  Beaucaire. 

On  faisoit  encore  à  Marseille,  dans  le  xv«''  siècle  y 
im  commerce  considérable  de  pelleteries,  et  presque 
tous  les  habiilemens  étoient  fourrés  ;  c'étoit  alors  un, 
u$^«  général  en  France^ 

Les  manufactures  étoient  nom'brei^ses  ^ant  la  ré*- 
volut^w  ;  et  malgré  ce  fiiux  axiome ,  ^uun€  yillc  de 
commerce  ne  ehit  pas  être  une  ville  de  fabrication  (2) , 

(.1)  Histoire  de  UiMguedûe  A^ *  5»  9» 

(%)  Mémoire  des  fermiers  ^néraux  et  de  la  chambre  du  commerce  f , 

imprimé  en  lyCo. 


-  ,-i:'*  .  is^>-^  — ^-     **-i^'*>. 


toutes  prospéf oient  à  Marseille  :  quélqiies-unes  four- 
nissoient  ies  principaux  articles  destinés  aux  Échelles 
du  Levant.  Les  fabriques  de  velours  de  <k>toh,  de 
toiles  teintes  et  imprimées  \  %t ,  par  confséqùent  , 
les  blanchisseries  de  toiles  et  d'indiennes ,  n'existent 
plus;  les  mouiim  k  soie  ne 'sont  plus  en  activité 
depuis  dix  ans  :  mais  on^y  remarque  encore  d'autres 
genres  d'industrie  très-iniéressans  ;  des  papeteries > 
des  verreries  ,  '  des  tannerie^  ,  des  blanchisseries 
de  cire  du  Levant  /  des?  tuileries  ;  des  fabriqués  de 

•  •  • 

chandelles ,  de  liqueurs  /de  parfums  ,  de  soUfre » 
d'alun  9  de  tartre ,  de  tapisseries  imprimées  à  f  huile 
ou  à  la  détrempe  ,  de  iâïende  ,  de  porcelaine  »  de 
teinture  de  coton  en  rouge ,  de  plâtre  ;  des  tisserand^ 
en  toile  et  en  Coton ,  des  tailleurs  de  meules,  et  des 
moulins  à  blé  >  k  huile ,  à  ciment ,  et  pout  battre  ie 
sparte.  , 

Les  plus  anciennes  fabriques  de  Marseille  sont 
les  savonneries  :  on  ne  peut  cependant  pas  donner 
à  l'art  du  savannier  une  trèSrhaute  antiquité*  Il  est 
probable  qu'on  a  été  long-temps  avant  de  connoître 
cette  utile  combinaison  d'huile  et  d'alcali  que  nqus 
appelons  /avon  ;  on  a  dû  d'abord  faire  usagé  des 
plantes  savonneuses  (  i  ) ,  des  argiles  douces ,  des 

marnes  ,  des  magnésies ,  de  la  lessivé  de  cendres ,  et 

■^'~—  '  ,     ■  ■     -  

(i)  Telles  que  notre  saponaire,  oa  quelque  autre  pîantc  sa- 
vonneuse ,  que  les  Hébreux  appeloîcnt  n^^a  (  borith  ),  sefon 
SCH OETTGEN ,  Atitiquitaîes  artis  faîlonitz ,  1 44« 


CHAPITRE    LXXXV.  â8) 

même  de  quelques  matières  animales  y  tdies  que  la 
bile  et  les  éxcréméns  de  porc  (i). 

Cependant  le  savon  proprement  dit  patoît  aroir 
été,  depuis: un  temps  assez  reciiiè>  un  objet  de  com- 
merce pour  ]»%  Marseiiloîs ,  puisqu'on  regarde  les 
Gaulob  comme  les  premiers  qui  en  aient  ^briqué. 
On  i'employoit  dans  la  médecine  et  pour  changer 
la  couleur  des  cheveux  (2)  :  on  ne  le&isoit  d'abord 
qu'avec  de  la  cendre  et  du  suif  {3)  ;  mais  il  y  a 
long- temps  qu'on  a  subsdtué  l'huile  d'olive  à  cette 
dernière  substance.  Le  savon  n^est  devenu  un  artîcte 
important  de  commerce  qu'à  Pépocpie^où  IHisage  du 
linge  a  été  plus  commun. 

Les  savonneries  de  Marseille  ^ont  aujourdliuî 
les  plus  beaux  établissemens  de^ce  genre.  On  ny 
emploie  que  l'huile  commune ,  qui  est  moins  chère 
et  saponifie  mieux  :  on  la  ,tire  de  l'Italie,  de  la  ri- 
vière de  Gènes  et  dès  côtesde Barbarie.  Les  soudes 
jdont  on  se  sert  sont  la  soude  d'AIicante ,  le  salicor  de 
Narbonne^  les  cendres  de  Sicife  ou  du  Levant,  et 


(i)  Les  anciens  ont  encore  fait  u^age  de  Turine  et  du  nitre;  ils 
connoîssoient  l'emploi  du  soufre  pour  blanchir  ies  ctoflfcs.  JuL, 
PoLWX ,  Vil ,  41  y  Apuu  Metam!  \ ,  9. 

(1)   SapQ,  OalUarum  hoc  invenhtm  rutilandis  capillis.  Plin. 

XXVllI,  laj  Martial,  Epigr.  XIV,  17;  Boettiger,  Sabl- 

na,  62, 

(3)  C'est  pourquoi  on  le  nommoh  unguentum  cinerisn  Valer. 

MAXiM.il,  1^  TcRTULL,  <id  Uxor.  n ,  8. 


.    L^ 


V 


ïfii  nfttron  y  qv^  i'on .  cQml)în&  en&embi^  en»  diffirenteS' 
proportion?.  On  les  iTièfe  <^'abord  avec  de  la  diauX' 
^w^  pour  les  dépcmiUçc  d|e  i'adde  autbonique^  et 
d«3  ^efo  et  des/  teaos  qu'ailes  contienneat;  oa 
potte  ce  rmélangû  dax^s.de  grands,  oixieis  (|e  hoîs 
bknc  ou  de  brique,  appelés  Imgad'ànsi;.  sous  ces 
CM^ierSy  H  y;  a  des  xéservoirs  nommés  re^ibidotts , 
dQ&tihês  h  recevoir  eli  à  conserver  les  iessives-  :  oa 
ver^  Âucle  mélange  assez  d'eau  pour  Pen  couvrir» 
d'enyitx>n}ùa  pied  ;*on  ouvjre  ierobinet ,  et oaobtîenti 
là  premâre  lessive.  On  en  ^t  sdnsî  quelquefois  fus-* 
Kçùi  cinq  succes^v-ement  ;  les  dernières  servent  à 
lessiver  les  soudes  neuves.  .- 

.Quand les  soudes  sicMit  épuisées ,  on  vide  les isuga- 
4ières  ;  les  résidus,  peu  vent,  servir  d'engrais  pour  \ei 
lenes  humides.  Le  m^kre  détermine  ensuite  avec  ie 
p^e-Iiqueur  la  qualité  desl  lessives  ;  il.  les  coupe  et 
les  mélange  ^usquli  ce  qu'il  les  ait  amenées  au 
degré  convenable* 

•  (a  combinaison  de  l'huile  avec  la  sou4e:  caustique 
qui  constitue  le  savon  solide,  se  fait  dans  de  grandes 
chaudières ,  dont  la  partie  inférieure  est  en  cuivre  ; 
et  les  côtés  son|  en  mî^çonnfrie  ou  en  biques  posées 
à  plat.  Dès  que  les.  lessives  sont  préparées ,  on 
met  dans  la  chaudière  Thuile  qu'on  veut  employer; 
il  en  faut,  en  général,  six  parties  contre  cinq  de 
bonne  soude.  Pendant  la  cuisson,  on  commence 
par  verser  la  le^^ve  la,  plu3  (oihhL ,  et  sufice&ft&t 


CHATPIXKlî    LXXXt,  i»j 

.Tcment  ensuite  k  plus  forte  :  ort  facîHre  h  com- 
binaison avec  une  longue  spatule  de  bois  ;  h  ma- 
tière se  rapproche,  s'empâte  et  devient  bbiKjhe': 
on  ia|oute  alois  peu  à  peu  la  première  lessive  ;  bi 
^àte,  devenue  plus,  épaisse ^  surnage  ^.  on  fait  coufâr 
par  ïépirUjO^  tuyafu  pratiqué  au  bas  de  la  chaudière, 
la  liqueur  qui  len  occupe  le  fond  ;  on  rallumie  le  fêu , 
on  dissout  le  savon  à  l'aide  d'un  peu  d'eau  qu'on 
irerse  dans  la  chaudièk'e  ;  on  agité  lé  mélai^^  H, 
lorsqu'il  es^  parfaitement  liquéfié  et  bouiUant  f  on 
y  scoute  peu  à  peu  la  iderfiière  portîoa  de  la  pre- 
mière lessive.  .  .  !  . 

Dès  que  le  savon  est  cuit ,  on  éteint  le,  fm  v 
on  vide  la  lesrfve  par  l'épine ,  on  |>uxseJa  péte  avec 
des  sewt  de  cuivre  ou  de  bois ,  ^  oa.Ia  transporte 
<kns  les  mises  ;  ce  isont  des  former  de  bois  dont  les 
planches  se  défont  facilement  en  ôtânf  les'clefs  qui 
les  assUfettissent*  Lorsque  le  saVon  est  duk^i  ^  ùïiVéH 
des  mises ,  qui  en  contieniient  quelquefois  plus  <ft 
«feux  miiliears  pesant  ^  et  oii  le  cowpe  sça  jpains  plits  du 
raoms  larges ,  Ijt  I!a0e  d'un  fil-dejaliton  ç  enàuite^ôfi 
pose  ces  pains  sur  un  planche^,  pour  iqU'ils  prennent 
encore  plus  de  consistance.  Le  savon  ne  doit  êtj:ç 
mis  dans  le  commerce. que  quîind  les  doigts  ne  s'y 
impriment  plus,  .  ♦    ^ 

Pout  veiner  le'  iftVon  /  ftfVécîé  '({ti^ôn  âppelïe  "ad 
savon  marbré ,  on  y  mêle  du  sulfate  tîe  fer  :  ce  savon 
est  "plus  dur  et  meiUeur  pour  le  blanchissage. 


'U* 


•*■"•*. 


a8(>  CHAPITRE   LXXXV. 

Trois  livres  d'huile  doivent  dohnëK  iîhq  Rvres  <îe 
savon  ;  c'est  sur  ce  produit  que  l'honnête  fabricant 
fonde  ses  espérances.  Quelques  hommes  san^  probité 
savent  l'accroître  en  sophistiquant  leur  savon  par 
f incorporation  d'une  certaine  quantité  de  poudre 
de  chaux ,  de  plâtre  cuit ,  d'argile  blainche  tamisée , 
ou  en  iui  fabadt  absorber ,  après  ia  fabrication , 
une  très-grande  quantité  d'eau  :  mais  ces  fraudes 
Jnfames  sont  indignes  des  principaux  fabncans,  qui 
jouissent  k  Marseille  d'une  réputation  méritée  ;  et 
le  commerce  entier  se  réunit  pour  livrer  ceux 
qui  les  pratiquent  au  blâme  et  au  mépris  qu'ils  mé^ 
rîtent  (i).  -       .  ■  ■    ^. 

La  gi^erre  à  porté  un  coup  sensible'  atix  sâvon^ 
neries  de  Marseille  :  le  prix  des  huiles  a  beaucoup 
augmenté  par  la  cessation  de  la  conclirrence  dfans 
les  marchés  ,  de  celles  d'Espagne  et  d'Italie  ;  l'Itàlië 
emploie  elle-même  les  siennes,  et  partage  celles  du 
L.evant:  la  matière  première  deviteftt  pli^s  rare  et  plus 
chère ,  et  le  nombre  deà  savonneries'  do|t  diminuf^r  en 
raison  de  ce  qu'il  augmentera  àGènes  etdans l'Italie; 
lès  ports  de  Livourpe>  de  Gènes  et  d'Espagne,  né 
■Il  '. < : — '. — : — L—^ 

(i)  Pour  bien  connoître  tout  ce  qui  a  rapport  à  fa  fabrication 
lîu  savon  ,  il  faut  lire  l'article  SAVONNIER  A^LmXflncyciopédU^ 
dans  la  Collectienjdes  arts  et  métiers, ,ti  sur-tout  i'ejçcelleiH  tfaîté 
intitulé  Chimie  appliquée  aux  arts,  de  M.  le  sénateur  Chaptal.  If 
m'a  servi  de  guide  pour  rédiger  ces  détails  et  xnicux  expliquer  ce 
qucj'avoisLVu.      -  -'  ....,:;  J- 


•>    .*»»•»■'. 


\  .      '  \ 


iatssj^on^ pa$  poi:ter:  à  Marseille ie$  hciiles  que  Ion  y 
pourra  maniifficturei'. . 

Npiis^{âmes  voir  un  autre  genre  de  ftbrîcatîon 
plus  particulier  à  la  yiUe  de  Marseille  ;  c'est  celui 
des  bijoux  4^^  çoraii^  Je  ne  connpîs  aucune  autre 
ville  en  France  où  l'on  se  livre  ialis$i  en. grand  à  ce 
genre  de  travail.  Le$'  anciens  fàisoîent  xiilFérens 
usages  de  cette  substance ,  à  laquelle  ils  attachoient 
ijuelques  idées  superstitieuses  j  et  on  Teinployoît  au- 
trefois dans  les; Gaules  cQmme  objet , d'orniement. 
Pline  dit  que  Jes  Çauiois  en  paroient  leurs  boucliers  : 
il  v£ut  parlersans  doute  des  Çauiois  qui  étoient  voisins 
de  la  Méditerranée  ;  il  dit  mêm^  que  le  coraiji  quW 
,pèchoit  sur  les  côtes  des  îles  d'Hyères  et  sur  celles 
de  la  Sicile,  étoit  le  plus  recfa^içbé,  II  :paroît  que  ,cç 
genre  de  fabrication  s'est  conservé  h,  Marseille ,  ou 
qu'on  l'y  a  fait  reyivre  depuis  loug^  temps.  Les  pêr- 
cheurs  et  les  marchands  de  corail  ^avoient  dédié  ji 
$*  Eloi,  dan$  l'église  des  Dominicaiçs!,  .un  autel 
cjçné  des  produits  de  leur  in^ustrj^.     >  : 

Le  corail  brut  vient  de  l'île  de  Ççr^e ,  de  Majorque^ 
des  côtes  de  la  Catdogne ,  du  Languedoc  et  de  1^ 
Provence ,  mais  prinçîpalepient  du  fort  de  la  Çail^;|i 
Alger.  Il  se  forma  une  compagnie  exclusive  qui  fit 
d'abord  de^^grailds  profits*;  mafsTa~  négligence'  fi^t 
ensuite  tomber'  cette^manufàctur^e.  :  elle  &t  rétablie 
4ans  tout  son-éclat  eh-  1781.  Une  autre  compagnie 
atheta  la  pêche  d'Afrique  pour  un  aj^sez  long  espaça 


:288  CHAPiTllË  IXtKV. 

de  temps  >  et  réunit ,  pour  éa  illettré  en  oeuvre  tes 
produits ,  un  grand  nombre  d'ouvriers  très^tabilèàL 
Cette  fabrication  fut  !^iiiîvie^elisuitè  par  la  fidlÀilIe 
Hemusat  :  iors  de  ià  tertettr^  elle  cel^sa  toùt^i-fàit^ 
iTvais  elfe  a  repris  son  activité  :  elle  est  aux  klléé^ 
de  Meiilan.  M.  Carâmbois  en  possède  une'  àùbfe 
près^Ia  pbce  Monthion  :  ieile  s^est  éts^ie  en.iSbaju 
Ce  genre  d^iidustrîe  est  pr^ieiix,  sur-^out  par  ce 
t^ii  occupe  des  femmtts  et  dès  ëtliàns,  pour  Ibs^ 
<)ueis  ii  est  ^toujours  plus  difficile  de  trouver  du  traî- 
vail.  M.  Caràmboîs  eût  k  bonté  àè  nous '5&îre 
suivre  les  travaux  et.de  nous  ië%  expEquer  àvècline 
^trente  complaisance  (i). 

La  première  pièce  de  l'étabKssettient  èii  destilTéfe 
^m  corail  btut  :  les  morcèiauX  ies  plus  è'oSf  fe^jplui 
purs,  dont  les  branches  présentent  d'agréabléè  ra«- 
mifîcations  cta  fornïent  un  bel  éVe^tail;  ceux  qiu 
adhèrent  à-  dès  corps  étrangers ,  tels  (\\jte  dès  ihadr^ 
pores  ou  dés  tèstacés  de  différentes  fespèces  ;  tottt 
ceux  enfin  qui  offrent  des  accidens  ^singuliers  ,  sorit 
«nîs  à  part  pour  être  montés  sur  de  petits  socles , 
fet  orner  les  eabinèils  ;  les  autres  morceaux  sont  des- 
tinés k  être  travarBés.  Nous  vîmes  dans  fe  cabinet  db 


iiiir 


"^^ 


pAgc  1 17,  UDC  dcscriptionctrèfi-iiigréabie^de  c$tfeff9ani|^tuf!eiChi 
en  trouve'  encore  une  autre  très-détaiilée ,  dans  l'Almanach^  de 
tacé^îngl*  j  ^Coiiinger  Tàschcn'Kalenaîr  yom  Johr  j/S6^ 

la 


çffApiTR^  l:kxxv.  êSjl 

I»  matHi^li^fe  1U1  trèi-bfau  mch^  de  eOr^il  ^  qui 
ofB*^  tuijç  rÂunfoU  die  p Imîeukis  madrépores ,  et  que  Itf 
^^jt^MI ,À^i^  il  WpT^Vtktii^  ^maxà  cinquaate  Imib* 
On  enlève  d'abord  ^  awc.uoe  lime,  Ja  ccQÛie  qi^ 
cmytfi  le  ççK^ilrjsms  cette  pfé$:wtioa ,  il  (ciaietoit 
fn  inofi;cA\lif  feH;$^'oA  esâaîefioit  de  le  coiiper  :  toiitet 
Ifi^  brPQçhc»  en  sont  cAsuite. partais  avec  ide  groe 
ç^aq^^  qui  le«  dividem  kiissî  ii^temjeni,<]ue  le 
(jlianiBDt ço^pe: te vftre.  OnvcfettèiausIfisjnoEoeauli 
^  omdek  dtftttts;  <^ux^e  l'on  mamncat  sains  et 
sans .  cfii;ie  ,  90iit,iBéi>^selQirtIett^  grosseur/ Qtaqiaft 
cylindre  eit  ojianke  > pecizé  an  sàoyeii  d'uiie  miîàm 
d'ackr  tt:è(^iiBe  et  bien  trempée  ;  qui  est  mise  ea 
V^ouyenvtnt  par  mï  arcbet^  :  .on  polit  sur  ia  meûie  de 
gi;^  iQursanie^  .-ponr  >  les  dégnï^ ,  les  nionceaiak 
forés  d6'<»ttè  manière,  et  oç  liss.  atrondu  tm\*  le» 
iaîstni  fouier  sbr-one  plaque  de  fdQrimiuittéeft  cou» 
yerte  dlult  sal>ii  fin.  Pour  {es, tailler  à  &cettes,  oq 
emploie  les  mêmes  procédés  qne  eûvs.  des  bpidairesu 
\^  gr^s  i  eisortis  selon  I4  grosseur  Au  la.  jtouieur  ^ 
«etvem jà ibîte des  ooUiers , des  bracelets ^et d'antre| 
gbjets  de  peruféc  Lorsqu'on^ i^s. enfile  pour  éàbe  des 
«ottiers,  ctor^  soin  de  mett^  les  houles  rondes  ou 
milieu  ,  oà  eUès  sont  plus  en  évidence  y  et  de  piaoef 
les  boules  dpfanies  sur  les  côtés  ^  où  on  }es  voit  mohis. 
On  -estime  ie.décfiet  de  ia.  fabricaticm  à  envifou  % 
moitié  du  pqidsi  ^esorte  que r)en tJivies.de  coi^il  brut 
4oiuisiil;  nenvinul  cidqaaftie  Jvseslde  €Ôrail  façonné; 
Tome  m.  T 


Le  prit  du  corail  brut  varie  beaucoup  ^lôn  m 
beauté  et  sa  grosseur:  il  y  ^i  a  cpii  ne  ^ut  que  de 
quinze  à  vingt  fiatics  la  livre  ;  et  il  y  en  a  d'autre 
qui  en  vaut  cent  dnquante. 

Le  prix  du  corail  ouvragé  varie  aU9${  selon  sa  pu* 
leté,  son  poli  et  sa  couleur  :  tes  morceaux  poreux  n'ont 
aucun  mérite  ;  ceux  d'un  rouge  pâle  sont  les  moins 
chers.  On  distingue  encore  tes  nuances  d'après  les 
diffiirentes  teintes  du  sai^  ou  de  la  couleur  d<»s  mûres  : 
ainsi  il  y  a  l'écume  de  saiig ,  le  prunier >,  le  second  > 
le  troisième  sang  ;  les  mûres  pAles ,  rociges ,  rouge* 
noirâtre.  Le  talent  du  négociant  consiste  à  composer 
ses  assortimens  selon  le  goût  des  pays  où  il  fait  sej^ 
envois.  Il  doit  donc  savoir  que  les  Anglon  aiment 
ie  coiail  de  la  Caile^  qui  est  d'un  rouge  très-vif^ 
et  que  ies  Chinois  préfèrent  le  an-ail. couleur  de 
diair.  Le  cUrecteur  nous  en  fit  voir  des  grains  non 
percés  et  très-piles ,  qu'on  vend  à  la  Chine  cent 
cinquante  fianos  l'once. 

he  cboik ,  la  couleur ,  la  grosseur  et  la  taille  de» 
grains  ,  donnent  aux  colliers  une  valeur  plus  <m 
^moins considérable:  il  y  eo  a  depuis  six-francs  fusquli 
cinq  tàits  francs  ;  le  pàx  ordinaire  des*  colliers  à 
fiicettes  est  de  cinquante  à  soixante  fhmcs. 

On  fàisoit  peu  d'usage  autrefois  en  France  des 
parures  de  clorai!  ;  elles  ne  sont  guère  devenues  de 
mode  <pie  depuis  la  révoluticHi.  Leplul»  gmnd  corn* 
merce  s'en  fai^oit  dans  le  Levant  r  Constantinopie  y 


Mbstot^  èl  t^etei-sbou^g ,  tliofont  aUssi  t>eâi»îOiip  dé 
Cette  prédeU^  marchandise;  JLés  ifeitimes  gï^qtt^ 
techerchént  cé  genre  d'omemèi^t  i  et  aujoimf  hui  I0 
goût  sVn*  est  répatidu  dans  toute  TËttrope. 

On  travaille  aussi  des  morceaux  de  côrafi  pour  être 
sertis  et  nlontés ,  et  servir  à  orner  les  couroiméS 
des  rds  d'Aftiquè  et  d'Asie.  Les  Africains  sur^tout 
sbnt  passionnés  pour  ce  genre  de  parure  t  ii  est  vrai 
ipi'un  collier  et  des  bracelets  At  coràii:  siéent  à  âier^ 
teille  sur  une  gorge  et  des  bras  d'ébène.  Les  mor-^ 
ttsxkX  taillés  «npoire  >  en  ceuf  bu  en  périe, ou  siinplé« 
tti&Èt  «a^s  comme  des  bâtons  de  dre  d'Espagne  ^ 
sont  employéi^  comme  objets  d'échMge  pour  ta  traite 
des  nègres.  ~ 

Le  directeur  nbu^  montra  deuit  pièces  de  conift 
encore  brutes  )  et  fious  assura  que  la  plus  gr^fide;  ^ 
quand  elfe  se^a  travaillée,  Vaudra ,  si  fon  est  assei 
heureux  poUr-  ne  pas  l'endommager ,  dix-^huît  miUd 
fiancs ,  et  que  la  petite  sera  du  prix  de  cHit  loub. 

Nous  allAmes  ensuite  voir  l'atelier  de  M.  Stamatf  ; 
qui  a  un  talent  rare  pour  imiter  en  liège  les  monu- 
mens  antiques.  Cet  art  y  auquel  on  a  donné  le  nom 
dfe  phtUoptastlque^  a  été  inventé  à  Rome  par  Auguste 
Rosatquidjescendoit  du  célèbre  peintre  Satvator  Rosa. 
Cet  artiste  «  assez  habile  dans  le  dessin,  conçut  le 
projet  de  représenter  ainsi  tous  les  monumens  an- 
tiques :  il  commença  par  quelques  colonnes  des  ruines 
cht  temple  dtJupk»  Tanans*  Sea  succès  l'enhardirent 

T  a 


^t- 


45^1  ÇHAP1TR:E    LXXI515. 

49US.  $ofkmnn  wû  «(pp^  Cj|^£U,,dgnp^§8^  t^f i^m 

Goiha  et.4'fw»i9^,ySte$>  NoMSf.ifewm  îi  çtMft  rtoh 
iît^  lo  giiixvi  .nonsl^a^  4e  hnu%  ou^fuj^j  iqpjft  ce$ 

n^d^k^  ^QtA  e«éf  miés  4Maç  t^woiffi  d'ft^^^ae  ^et  <iGi 
gi^  Il  &'«st  prûiçîpalement  appliqué  à.  liiprétwuii 
le^  noiiuinec^  du  micii  de  bi  Fiance,  t^»;  qiwi  {2^  tow 

d'i^;,rarc  d^mngevIepontd^Q^di^kfnm&QMtio 
$•  Reml,  les  aiènos  de  Mîmes ,  &€«  Malbejtiygmyiatm. 
il  n'a.pds  Eût  dessîaer  ce^  nMwi»m»tiL  91  plu^^riî  4i| 

ses  modèles  sont  exécutés  d'après  ies  gi^yu^s  46 
lOoftffMCOn,  qui  tOQ6  tJsè^i^i9|C9<;t^.  U  ««''OJ;!  à  4^sî- 

fw  cpele  Gpuvérja^iniflOt  «n>pli)yâ*^9itigfeni^jrto 
tracttf  d'une  mixiiiètr^&iàhif^.mû^ 

musée  d'archUecmre  <:i9i)fi^  m»  $9m4^  M-,  X«éQft 
Pufourny .{ I  )* 

■'J    ■■    '       1    '      -J      J   'jw.ir  j.jm;  -JIM  ti."i."j   i,.t   ..  iu'T 

(1):  Voiçjja.  Wtq  4w  <^%yr9L^^  ^T^  !?4gF  H4Ç  .^  .Sx^^lîfTJ'^ 
d^éjà  exécutés  :  !afontame  en  ohéWsque.k  Rome,.rarç  Jc^^rîompl^ 
de  Scptimc  Sévère,  celui  Je  Constantin",  !e  temple  de  Vcsta,  fé 
tombeau  de  Néron ,  fc  tempie  de  h.  Tôax ,  fcp^^^^ik^^  tempi* 
de  »a  Concorde,  la.  pyrauïfa  d$  CaJils  ^-S^^^  i^,  Pflftte^  .^ 
tqmple  dç  J(upitçr  Torai^m ,  Ie:F^nt,héo^  la  fontaine  ^a^ric^lcs 
restes  du  tempie  de  ia  Paix,  ies  restes  du  temple  de  Minerve 
MeMca,  les  restes  du  tcnipiedc  JunUs,  le  çeni^e  db'Bacchus».di 
Fé^i^de  S.  Urkiia-^  ks*  jrestfis.  «Lu  .Fq«im\,  dciiUot«{p,fl».pob 


La  mani&cture  dé  bonaet^  de  tbtori  teints  êh 
Touge  iB^t  atièsi  digne  dé  i'attetitÎGilhi  àSxh  vtfjràgètir 
curîeux.'Ces  botlnets  sont  d'abord  tricoté!;;  lè  feu- 
trage en  rapproche  la  rààtièféet  la  lait  devefilf  k4â^ 
fds  souple  et  compacte  :  on  le$  teiht  en  rbUge  patfft 
procédai  déjà  connus ,  et  on  ié^  itiét  èfi  pi^^è.  Ces 
bonnets,  qu'on  peut  regarder  comme  dé  siftipléis 
icalottes ,  %<mt  ûSxn  usage  général  dans  le  Levahk ,  et 
Foti  en  ê}tpôfie  jusque  dans  les  Indé§. 

.11  y  a  aussi-  dans  Marseille  plusit^rs  tftfllnerië». 
Le  sucre  fût  d'abwd  uh  obfet  de  cbHimëi-cè  pour  ses 
habitans;'ils  fePtilDientd'AIexatuîrfè.  Cette  substance 
«ntroit,  au  xr/  siècle ,  dahs  les  ^metis  et  dims  lii^ 
remèdes  t  Hpârolt  qUe  toute  lâ  pi-épai-àtiéh  qu^bnldi 
fàik>Tt  subir  alors  >  Cotisistôit  à  eicprhtier  le  sue  dé  lli 
carme  et  à  le  iaf  sser  dans  de!^  vases  pour  lin  doûtiét  fe 
tenijprs  de  se  durcir.  On  sait  que  le^  Croisés  ttàfïipoi- 
térênt  la  cartne  à  sucre  de  Tripoli  et  rfAfèitandrîe  Ai 
Sidie  ;  qti'oïi  la  cultiva  ensuite  dans  les  parties  lëh  plUs 


1  •• 

Saïaro  â  Jeux  iniîfes  Se  Rbme  ;  îa  petite  maison  dé  fi  SiSylfe  ^h 
<TfTof},  îes  restes  ^tt  éempte  it  TivoR/Ii  èdmbeati  de  K  fafcîfte 
Pkitttii,  prèsL  d|er|a  mêitlç  yïM  ;  Turi  itA  troii  t<wipW  *  P<rf- 
uim,  une  fontaine  «Je  Neples,  le  temple  de  Sf  oletto  et  Fqii^ 
cfevc  à  Ciitumncj'ia  .tour,  de  Pise  inclinée,  l'arc  de  Pola  en 
fetrie  ;  W  cfôchér  des  Àc<anjlièi  à  MùÀéttc  ;  \t  docW  de  Skrnl- 
Jéan  et;  I«  inoçiûtieiit:  de  f^aeien  calais  de  fuiticei  Av(;  fàW'it 
ic  mausoJee  de  Sàînt-femi  ;  ia  tout  Magne  de  JNîmes  rcstaitfô^ , 
la  même  en  ruine,  la  maison  carrée,  le  pont  du  Gard  ;  1  arc  de 
trioAipné  érOturigé.  i 

T   3 


S/^i  CHAPITRE    LXJCXV. 

méridîotiales  de  l'Espagne,*  et  que  de  Ih'eBe'pusa  ^ 
Madère  et  enfin  en  Amérique.  Les  tentatives  que 
Ton  fit  au  xv/  siècle  pour  en  natur^iliser  la  culture 
en  Provence ,  n'eurent  point  de  succès  ;  mus  les  raffi- 
neries qui  se  sont  étaUlîes  à  Marseille ,  soutiennent 
la  concurrence  avec  cellef  d'Orléans ,  de  Bordeaux 
«t  de  Nantes. 

Les  Maueiflois  faisolent  presque  exclusivement  en 
France  ie  commerce  dès  aromates ,  des  épiceries  et 
des  drogues ,  avant  que  de  hardis  navigateurs  eussent 
doublé  le  cap  de  Bonne- Espérance.  Ce  cc»nmerce 
avoit  lieu  alor&  par  les  caravanes;  et  tous  les  articles 
qui  le  composent,  se  tiroient  d'Alexandrie.  Nos 
pères  faisoient  entrer  dans  leurs  mets  nne  grande 
quantité  d'épices  et  d'aromates ,  parce  qu'ils  croyoient 
par  ce  mc^en  faciliter  la  digeslîcm.  Ce  commerce  a 
beaucoup  déchu  depuis  que  les .  Hollandois  et  les 


Le  <^(^9iti^ce  des  poissoas  a  tonfours  été  producâf 
pour  les  Mars^ois  :  depuis  un  tonps  très-reculé ,  les 
Pro vénaux  savent  nHuiner  le  ibon  et  la  sanfine  (  i  ). 
On  fait  encore  ches  eux  un  grand  débit  de  saidines 
salées.    • 

La  manu^cture  de  soufre  sublimé  de  M.  Michel 
est-un  établissement  récent*  On  y  en^Ioie  le  soufre 
qu'on  appelle  dans  le  convnerce  soufre  brut  ou  soufre 
empierre;  c'est  celui  qu'on  obtient  par  distiitalion  des 
pierres  des  environs  de  FEtna  ou  du  Vésuve ,  et  de 
la  Soifatara  près  de  Pouzzol  en  Italie.  On  le  fait 
fondre  à  un  feu  doux  dans  des  chaudières  de  fey> 
dont  on  recouvre  la  surlace  pour  empêcher  rinflani>* 
mation  :  les  knfoiretés  se  séparent  et  tombent  au 
fond;  quand  elles  sont  bien  déposées ,  on  coûIe  la 
matière  dans  des  moules  de  bois  pour  en  former 
du  soufre  e»  canon^ 

Pour  avoir  le  soi^e  en  fleur  ^  on  pkce  en  dehors 
d'une  chambre ,  sur  un  fourneau ,  une  chaudière  qui 
est  recouverte,  de  deux  tuyaux  particuliers  ei^  maçoi^ 
nerie^dont  Fextrémité  donne  dans  cette  chambre: 
le  soufre  s'y  dépose  sur  les  mu|s  y  où  il  forme  une 
couche  as^z  épaisse  ;  c'est  ce  qu'on  appelle  fieur  de 
soufre  es  soufre  sublimé. 

Nous  vîmes  dans  la  rue  Sainte  une  m^mufàcture 
de  fer  battu  qui  mérite  Tattention  d'im  curieux;  elle 


(i)  SuprÀ^  tome  U|,p.  488* 

T  4 


\ 


appirtîqîtsu  sieur  Marin  ^  sefnu^' et  bOlAigBte  : 
cet  ouvrier  higénîeur  fabrique  ^  sur  <l«5  Unfîes  de  fèi^y 
Aei  baâ«>rdiefs  et  dts  omemend  st  bJ6ti  exécutés, 
•qu'on  les  crbirôit  fondus  et  réparés  i  l'outil^  faiidfs 
qu'ils  ne  sont  que  battus  et  repassés,  comme  dé 
torfévreriè. 

On  prépare  atisit  î  Marseille  du  sel  4è  Saturne, 
du  vitriol  bieù  et  de  la  crèm^  dé  tartre  ;  il  y  a  des 
filatures  de  coton ,  des  manufactures  dà  on  le  teint  », 
sinsi  que  le  chanvre  itlé  ^  èil  fouge  dU  tfd  bleu.  M.  Vé- 
rany  fabrique  des  toiles  avec  des  brins  tfef  sparte  seuls 
ou  mêlés  avec  de  la  laine  ou  du  cdtoh  ^  et  il  en  fait 
des  cordages  qui  reçoivent  le  go«dmtl.  Oît  fbit,  dam 
cette  vîHe,  des  creusets  aussi  bôtis^^  c^îc  d'Alle- 
magne',  on  y  prépare  très  bien  les  peaù«  d'agneau; 
on  y  fait  du  maroquin  qui  imite ,  mais  tônfours  impar- 
faitement,  celui  du  Levant.  II  y  a,  comme  dans 
toutes  ies  grandes  villes ,  des  fabritarts  de  cire ,  de 
poteries  et  de  diapeaux  i  ^activité  «ë  développe  de 
fDtite  manière  ;  et  l'industrie  manuftèturfèrè  tépare , 
autant  qu'il  est  possible,  les  pertes  qu'éprdUVe  en  ce 
moment  l'industrie  commerçante. 


• 


25,7 


CHAPITRE  LXXXVÎ. 


Rsi.IOTHi<rDE.  «<*  Calibtt  â'hf«t«ke  naturelle. -^  Cof- 
Ucûont  {MU'ticvlièrei.  -»^  Jairdiit  bôtaniqucé  -^  Envi- 
rons de  MarsdUe.  ««-  Eygaladfs.  ^.—  Tapiisc m  sing^ 
iière.  — -  Château  Borelly.  —  Jle». 

J'ayois  visité  tous  les  monumens  publier ^  fe§  màr 
iiu&ctul'es  et  les  atdiets  :  il  ne  me  restôit  plus  à  côn- 
nottre  que  ce  qui  pouvoît  être  rçtiFernlé  dans  là  bi- 
bliothèque et  dans  quelques  collections  jpàrtîçulièrès  ; 
et  mes  amis  voulurent  bien  me  servir  de  guidés. 

Labibliothèque  publique  renferme  plus  dequatréf 
vîngt-dix  mille  volumes.  On  y  tf  ôuve  les  grands  corps 
d'ouvragés  les  pïus  împortans  ;  oh  y  compte  plus 
de  deux  mille  manuscrits  (i). 

Le  Cabinet  dlîîstoîre  natureflé,  formé  en  1803  , 
par  les  soins  de  M.  Thibaudeau  ,  des  débris  des 
cabinets  de  FOratoirè  et  de  rAcadémie,  est  dan^ 

(i)  La  plupart  sont  fè  fruit  du  loisfi*  tks  môhns^  ièi  traitetik 
4e  Im  théologie^  il  y  en  i  près  dé  troii  cents  c(ui  traitent  dé  là 
iogique»  dé  là  piiileiophie  tt  de  là  thétàriqvit,  mais  à  fà'mâhSèrë 
det  écrivains  scofastrqiies  >  it  ifS  né  sbnt  d'àucuhé  iinportàiîcè. 
Lci  manuicrits  les  plut  curléw^  que  eet  Iftàblissement  pbisMeV 
sont  deux  belfes Bibles  latînét  èû  XiV.^  sfècle,  très^bfcH  éafitti, 
avec  des  variantes  et  del  Séoiîes  tn^ginafés;  une  béife  Bible 
bébraipie  ;  un  Dictionnaire  Irabé  et  latin  ;  kièuhiï  êe  S.  Ànséihte; 
psHes  de  S,Boâa^fniutt  :  les  Côrdellà^  /  qUî  éohservbîént  céHéSii- 
â,  les  regardoîent  comme  aDiogrqyilei.  E}k6%  sont»  en  éffo  «  dd 


r 


v 


2^  CHAPITRE    LXXXVI. 

un  assez  mauvais  état  :  ii  y  a  de  tottt  ;  mak  l«s 
suites  ne  sont  pas  assez  complètes  pour  qu'on  puisse 
dire  que  ce  soit  une  collection.  On  y  voit  le  cro- 
codile du  Nil,  celui  d'Amérique;  un  très^grand 
de^in /Boû  constrlctor  J ,  des  diodons,  des  tétrodons  ^ 
de^Gonmx,  des  madrépores,  comme  dans  tous  les 
cabinets  :  mais  ii  y  a  peu  de  pièces  qui  méritent 
d'être  citées. 

Depuis  S|X)n  [  i  ) ,  tous  les  voyageurs  qui  sont  venus 
à  Marseille  n'ont  pas  manqué  de  &ire  mention  d'un 
homme  attaqué  d'une  hydrocéphale ,  et  dont  on  con- 
servoit  le  crâne  chez  les  moines  de  l'Observance.  Ce 
crâne  a  trois  pieds  de  circonférence ,  en  mesurant  la 
ligne  horizontale  qui  embrasse  le  front  et  l'occiput. 
Cette  tète  devoit  paroitre  encore  plus  monstrueuse 
lorsqu'elle  étoit  charnue  et  cheyelue.  Cet  homme  ^ 
mort  à  quarante  pu  cinquante  ans,  se  nommoit 
SQrduni{z). 

Xin.*  siècle—  Le  roman  de  Giron  le  Courtois, — II  y  a  un  Tliucydi^e 
grecj^^i  paroiC  être  du  milieu  du  XV.*  sfècfc;  f^gnorc  s*it  a  été 
coilationli4  r-*On  voit  oicore  uiie  Motion  d*un  voyage  aux  Cana- 
ries, par  le  P.  Plumier;  (ix  volumes  in-MÀoà' Observatioris  astrono" 
MÎ^ues,  par  le  P«  FEuatÉ;  huit  à  di^^  veiQnH»  in-4.^  du  laborieux 
Fierre- Joseph  DE  Haitze  ;  une  assçx  bonne  Hisioire  littérasK  de  la 
ville  de  Marseille,  écrite  en  latin ,  sous  le  titre  d*Ashenaitm  Mms* 
silietue,  par  le  P.  ARTAUD ,   de  l'Oratoire. 

{ I  )  Voyage  d^  Levant,  tome  I ,  pagç  13. 

(a)  Cétoit  ime  espèce  d'imbécitie  qui  confîrmoît  le  proverbe^ 
grosse  tête,  peu  de  sens.  Le  peuple  de  Marseille  dit  géncraiement^ 
en  parlant  d*^un  idiot:  Ap<ifmat  di  sen  fuéBordunL     ■ 


L 


tf^^H&...Ji^ 


.  CHAPITRE  ,  LXXXVÏ.  1^ 

La  collection  des  coquilles  présente  peu  de  pièces 
nres;  on  y  voit  des  moules  vertes  (i),  dont  une 
colonie  étoit  venue  momentanément  habiter  nos 
mers  :  un  groupe  de  ces  moules  fut  tfouvé  adhé* 
rent  à  la .  carène  d'un  vaisseau  qui  avoit  séjourné 
long-temps  dans  les  mers  d'Afrique  ;  on  jeta  cei 
coquillages  sur  des  récifs  qui  bordent  la  citadelle  à 
l'entrée  du  porf ,  et  ils  s'y  multiplièrent  en  peu  de 
temps.  Les  curieux  les  âisoient  rechercher  avec  soin 
pour  en  orner  (eurs  collections ,  et  ils  en  ont  enrichi 
tous  les  cabinets  de  France*  L'un  de  ces  curieux 
marseiliois  ,  M.  Bçugon,  fut  jaloux  de  s'approprier 
exdusiveçient  ce  trésor  ;  il  fit  faire  plusieurs  pèches 
générales  de  toutes  les  moules  vertes ,  et  il  en  fil 
ainsi  disparoître  l'espèce ,  qui  n'avoit  pas  eu  le  temps 
de  se  répandre  hors  d'une  çer^taine  enceinte  de 
rochers  appelée  la  Réserve. 

La  cc^iection  des  minéraux  n'offire  rien  de  remaiv 
quable,  si  ce  n'est  une  collection  géologique  de  la 
Provence;  l'on  y  voit  un  assez  grand  nombre 
d'içhtbyolithes  des  carrières  d'Aix ,  qui  ont  beaucoup 
de  rapport  avec  les  pétrifications  du  même  genre 
des  montagnes  du,  Véronois  (a).  IJ  y  a  encore  un 
droguier  assez  complet  ;  mais  il  auront  besoin  d'être 
renouvelé. 


(;^)  Infri,  chap,  xc. 


Ll^^        j"  *-.  k/ 


b. 


^M>  .c«Ai*îtRt:  LXXt,1rh 

•  La  côIieqtrtM$  de^  mëâàflies  n^ésf  ct>Tht>d^éè  *que 
^e  médailles  latln^r  il  y  «i  a  peu  ^ui  (TiWtèni d*ècrfe 
i^tnarquées  :  la  cdHéction  d^s  médûillès  d'argent  à 
disparu  pendant  la  tit volution.  Il  reste  cependant  uiiè 
assez  jdiè  suite  de  médaiUe^  tnarseiikri^fes.  M.  FàUfXs 
de  Satnt-Vincens  le  pare  en  atoit  fait  hdmttiagë  k 
facadértiie  ^  et  son  fils  a  promiis  de  lâ  Cromplétet*. 

On  voit  aussi  quelques  bronzes  i  qqelqtié^  idoles 
•t  ustensiles  antiques  ;  la  plupart  ^ant  dès  ouvtàt^ 
égj^dens.  On  y  remarque  un  assez  beau  busle  de 
Sérapid,  un  Cânope^  une  Isîi  chargée  d'hiéro- 
glyphes ,  et  une  momie  d'enfant, 

Marseille  ne  possède  donc  poîht  de  collection^ 
littérahres  dignes  de  $a  gtandetli?  et  dé  ^a  richesse  ; 
il  n*y  a  pôut tàAt  pà^  de  viHe  qui  solt  iHîëùx  ^éè 
jK)uf  i'en  procurer.  H  ftudroit  ^ulértieftt  que'  e^^t'- 
ques  négocians ,  zélés  pour  ïa  gloiî^é  et  le  bîeh  de 
leur  p^rie,  fissent  dès  fohds  pour  rèntrétîèii  ^un 
teftdin  nombre  de  jeunes  voyâ^urt ,  àuiqdels  Ift 
ttrôgrtlânè  et  lès  tonsuls  |irocUrer6iént  toutes  lè^  fr- 
utilités  h^ceisaires  :  les  uns  îi'oîfenl  dans  le  LeVam 
titachér  à  Kgnôrance  des  Turcs  et  à  rînsoudkrtcè 
€és  Greci  feàl  inscriptions ,  les  ihédaiHeis  et'  tous 
les  nlôhumens  qtri  peuvent  îriitéres^f  les  arts  où 
éclaircir  l'histoire  ;  d'autres  en  rapporteroieiit  dés  ]f)rd- 
ductions  naturelless  L'immense  c^>n«»pendan€e  que 
la  paix  va  rouvrir  au  commerce  de  Marseille  >  luif prc- 
cureroit  les  productions  de  l'Asie,  delà  Syrie,  de  la. 


-"=^°"~°"~"'  ■        '        "T 


chapitre;     L3f5fXVl.  ^Qi 

iQarbariç ,  de  l'Egypte ,  de  la  Per^e ,  de  i'Aipéric|ue  ^  de 
rilspagpe,  de  i'^Ue,  et  du  nord  de  J' Jlurope.  lien- 
i^etien  de  ees  voyageurs  coAtefoit  p;eu  de  chpse  suif 
les  vaisseaux  que  le  commerce  expédie  tou$  les.  ai^^ 
Vqxxj  stimuler  sur  ce  point  i'aiîiQUr-propre  des  Mar- 
se^pis  ^  il  fau^dçpit  ppvt-êtte  ,p)iii4re  ^u  cours  d^ 
^gW^f^e  que  le-  QQ^ver^eipent;  vient  d'étal)ljuf 
^hez  e^y;.^  i\a€^  école  ^péci^Ie  QÙ  l'on  enseignât,  aus4 
le  grec  ancien  et  niQdernq  ^  ^  Thi^toirç  uatujjellej 
AI,  Ç9i%t„fsipJM^bine,quf^^^^^^ 

9».  espè>:e  de  mj^tt^,  ^^.e.  fSç9?.^9'^?J  plaçé^  mlr-^ 
à^- propos  p^rmi  Jçs,  mpwnisçnô  j^tjcjuçs'  de ,  iyj^ï;-^ 
^ille  (  I  )fa  II  a  ^ussi  ui?e  futie  t;êtç  ei>  m?jhïe ,  aui^ 
dessus  de  laquelle  on  Ut  le  vfXQX  ^^0fr/f  ;  ip^is.  if  eff 
iifipossi^Ie  d'jr  re^onnoftre,  coi|im#  Tqiit  6iit  qi:{el- 
quesj  antiquaires,  l'iin^ge  duipiî^datgu^  ^  M^ieil^a 

c'est  une  fig^^p^d»  ÇiffsfcWi^^W^^  ^^-  ' 

Chez  Mv  CwjppM,  ru«  des  Not^^^/.JfJHs^  VW^ 


*   .     1     / 


>  1  «•  I  ,f  j 


CVS     FILIO. 

D     ^  ^        M  (2  )     . 


.J 


'  i^  Anti^uhés  tk  MtmeHk,  ph  xrîtr,  Ti;*^2r; 

(i)  Cette  inscription  est  aujourd'hui  clans^^UJ^ofi|OSI^  ^^^ 
pagned€^dp,5iaii^^-JgflÇCi^iàj§?ii«,^Jlt^^  :      ,} 

V  .  l  • 


^ 


362  cnkPîriR.t  txxt'^h 

La  forme  des  h,  de  quelques-unes  des  M ,  Celte  dô 
quelques  T,  et  la  manière  dont  toute  cette  Inscrip-^ 
tion  est  figurée ,  prouvent  4^'eUe  est  du  lil.*  ou 
IV.*  siècle  de  notre  ère. 

M.  Rostan,  dont  fai  déjà  eu  occasion  de  pair'» 
1er  (i)y  nous  montra  ^a  collection  de  médaille^  ^ 
parmi  lesquelles  il  y  à  mille  à  douze  cents  HiédaîIIës 
grecques,  qui  ont  te  mérite  d'avoir  été  recueillies 
sur  les  lieut  mêmes  auxquels  elles  appartiennent. 
Nous  y  remarquâmes  une  belle  suite^  de  médailles 
d'Athènes,  parmi  lesquelles  celles  de  bronze  pré- 
sentent plus  de  soixante  différeiîces  j  noui  y  vîmes 
jj^Iusieurs  beaux  médaillons  grecs  et  la  curieuse  mé- 
daille du  roi  Brogitarus ,  dont  11  a  publié  loi-même 
ia  figure  et  la  description  (2). 

La  veuve  de  M.  Gautier  nous  fit  Voir  uil  médàtl- 
fier ,  dont  elle  a  traité  depuis  avec  5V1.  Millingen ,  et 
une  collection  de  coqutUéè  Itrès-bîén  choisie. 
'  Nous  trouvâmes  chez  M.  Roux  un  bas-relîef  grec 
que  j'ai  fiiit  copier  f  pi.  LXl,n/  ij.  Il  représente  une  ^ 
femme  vêtue  d'une  mnique  et  d'un  grand  manteau , 
€{u'eUe  retrousse  d'une  main  i  tandis*  qu'elle  élève 
l'autre  mahi  daiis  l'attimde  de  quêlqu^uh  qui  pro- 
nonce un  discours  :  cette  figure  paroît  colossale 
auprès  de  deux  petites  prétresses ,  dont  l'une  tient 


'W'" ]^'VT'       '■'  11*1   ni  |l^      l|i         |l||,      j Mlll      il.^lll, 


f 

<l)  Jj^lfi/ p.  277. 

{%)  JUagmin  enc/dûpétli^ie ,  «n.lV|  tome  V>  page  4^0* 


un  ibmheàxx^  et  l'autre  un  vase  de  parfurtls.  II  est 
aisé  de,  voir  y  par  la  grandeur  du  flambeau  ,  qu^il 
apfMurtiem  à  la  figure  principale ,  et  non  pas  h  la 
peéùt  fiUe  qui  le  lui  présente.  Nous  pouvons  donc 
feçonnoître  ici  mut  prêtresse  qui  parle  au  peuple  ^ 
pendant  que  deux  de  ses  jeunes  assistantes  tiennent 
le  flambeau  et  le  vase  de  parfums  dont  elle  doit  faire 
usige^  Il  ^t  probable  que  cette  pierre  ornoit  le 
tombeau  d'une  prêtresse  à  qui  la  reco^Missanoe 
4u  peuple  a  ofFéft  ce  monument.  Le  itiot^  dfmos  (ly 
[ peuple] ,  inscrit  au  milieu  d'une  couronne ,  semble 
siitoriser  cette  expUcadon,  La  nature  de  cette  cou* 
riwne ,  qui  est  de  laurier ,  pourroit  faire  présumer 
^ec'étoit  une  prêtresse  d'Apollon  ;  mais  on  ne 
peut  former^  sur  le  Dieu  qu'elle  servoit,  le  tempf 
wquçl  elle  a  vécu ,  et  le  peuple  par  qui  ce  mo^ 
nument  lui  a  été  consacré  ,  àtioiine  cmijecture 
lïûsonnable ,  sans  savoir  d'où  ce  monument  a  éfè 
apporté. 

Nous  vîmes  encore  ^  chez  M.  Barbe^ih ,  un  bas* 
relief  parfaitement  conservé ,  qu'on  r^lutioît  colijme 
antique  ;  il  représente  trois  hommes  armés,  debotlt^ 
ift  paroît  être  de  quelque  maître  italien  depub 
1^  restaucadon  des  aris.  H  possède  aussi  ^elques 
tableaux. 

M' Graitet,  dors  maire  du  Midi,  pbisède  un  E>eao 


(l)  AHMOS. 


lA  '.jW^Br. 


X"^'     ^.^'«?—  *-  -         '       *-'  v/ 


grpupe  rn  ^rl^ro^ge,  r^éiéhtfiif  un  combat 
<j['uA  taureaa  «  4'un  lion  (pirnshâ  LIJ(,  fig'j)* 

lypus^  ^f^giis  atMr$i  ^^ve  qndquès .  exciinhB»' 
4am  I^  envirops  4$  fo  viite*  Nous  alU^es  d'aiK»4 
au  farc(ln.l>otdnicp0,  II  e^t  litn^  au  bord  d'one  fsimcfr 
slvi^re,  \  }'e^uimit4  d^  {à  promenaife  h  plus  fré*- 
qvtçntéç  d®  ]iÏ9r$«Uk<  Son  ^poshkat  est  uài<>£iVo«' 
Yable,  ef  foi).4lfadie  proportièàûéeàia  desdiiaif^it»' 
Un  çan^Ji  d'^u  couranu  le  trimr^e  dans  sa  Ion»' 
gueur»  et  alinie^tie  ^ix  bassina  cfistribués  de  npon^èM* 
à  facmter  Ta^rpsage* 

,  \j^  Htim^t  réunit  ce .  cpic  est  néce^^e  potir  la 
i^ops^rvaiioi}.  d^^  plantes  çt  rétade  de:Ia  botanfqoe. 
Une  grandci  ^ire*  occupe  toute  ia:  partie  antérieuvf 
(^ujre^'de-Ghi^ussée  :  on  trouve,  au  premier  étage/ 
une  sa)|e  ^'^s^mblÉ^»  une  petite  bibliothèque,  un» 
$aUe  de  d^moniAralio^  ;  et  dans  le  surplus  de  Tédi*- 
%$  9  de$  i^Çigfinens  et  c&verses  pièces  appr<^iéai^ 
à  la  culture  du  jardin. 

.  .  yne;gai$rÎ9^  attSeioMit  au  mur  du  nord  de  la  serre , 
fpj^  )^s  4tui(  ailes  A\x  bàthneialy  ètabik  une  jcom- 
maEÛi^atîon  fn^^e  dei  bgemens  aitx  cadres  àtt  fpur-* 
9fî^MUC»  qvi.$olit  parfaitement  c$speiésy  ahisi  que(  lés 
induite  40  la  tannée;  >^t  Don  a  si  bien  cafcuié  foutéâf 
les  proportions  de  la  serre  d'après  l'inclinais^»  ^ 
ip)f^  ^  quci  ^aimo^iftièfe  y  est  toujours  %  on  de^i^é  de 

chaleur  CQnyenable. ^ -^-  - 

Il  règne  beaucoup  d'harmonie  dam  tmite  ^e)te 

composition , 


CUÂflTkE   LKXXYU  ^Cf 

éainpûsition ,  qui  porte  d'aiHbprs  uii  caractère  frap- 
pant d'élégance  é^  éô  simpliste.  On  tCj  voit  point 
d'ornemon^  superflus  ;  la  sculpture  a  été  réservée 
^iquemç^  poi^r  Je^  chapiteaux.  L'architecture. est 
d'un  style  pur  et  gracieux  :  son  auteur  >  M.  Peil^ 
chaud  ^  semble  avoir  prfe  pour  modèle  les  maison^ 
de  plaisance  d'Italie ,  qui  se  dessinent  d'une  manière 
si  pittorescpie  sur  le  paysagie. 

La  statue  de  maAre  de  Flmpératrice,  auguste 
protectrice  de  ce  jardin ^  ser^  placée  dans  la  serre, 
comme  dai)s.ua  temple  qui  lui  est  <;Qnsacré  ;  elle  sq^^. 
blera  y  veiller  à  la  conservation  d^s  plantes  précieuse» 
dont  elle  a  dessein  d'enrichir  la  France ,  et  garantir 
par  sa  puissaotf»  influence  le  succès  d'un  si  grand 
Men&it.  '  • 

Cet  établissement ,  qui  est  entiêtemênr  dû  aU3r 
^oins  de  M.  Thibaudeau ,  a  reçu,  à  juste  titre,  le  nom 
de  Jardin  de  natumiimtiMé  II  est  destiné ,  en  efièt , 
à  naturaliser  les  plantes  qui  pourront  s'acclimater  dans 
les  départemens  méridipnaux  ;  elles  seront  ensuitq 
distribuées  aux  personnes  les  plus  instruite^  «a 
agriculture  (  i  ) .  '      * 

(i)Pami!  celles  qtd  y  sont  naturalisées ,  on  remarque  VEfééèdni^ 
drum  drgdit,  joli  arbrrsseau  tmifouti  vert ,  et  qu?  ^rbAiFt  M  ff âîl 
^ane  saveur  addule  fômgréàWe  :  cette  plante  a  paisé  fcs  défi 
nîcrs  hivers  sans  éprouVcr  htVlmoîndre  altération.  Dtvei*s  âùtltlj 
végétaux  y  |ouissent  du  même  avantage ,  tels  que  \ti  Mijàèsd- 
àtborea,  —  hucocephâU,  ^tùphanthà*  Arbutûs  ortdrâcjie:  €inàontA 

,  Tome  m.  V 


•  *'.'»    •    ~i'  '     -t,'  %-/ 


^06  CHAPITRE   tXXXVIè 

La  botanique  est  la  science  des»  âmes  douces  et 
sensibles  i  Tbnpératrice  en  fait  «es  délices  ;  elle  a 


^■te 


siihua;  Artemisia  arèorescens^  Justifia  ddathoda;  Olea  fragransf 
Diospjros  htus ,  —  kakii  Phaseolus  caracdliai  Psidium  pjriferum  ; 
Cobea  scandens  ;  Yucca  gloriosa  /  Aîelaleuca  hypericifolia  ,  — 
Wjrtifolia;  Cassia  tomentosas  Fuchsia  coccinea;  Verbena  triphyllas 
flJespilus japonica :  Datutaarborea ;\ts  Meiianthusmajnr , — miuor; 
Anthyllis  Hermanni,  —  barba  Jwis,  Nous  remarquâmes  une  colicc* 
tion  assez  considérable  de  rosiers ,  parmi  lesquels  on  distingue  les 
Rosa  divtrsijolia ,  r-^  sinica;  plusieurs  belles  espèces  de  liliacéest 
telles  que  îes  Amaryllis  bella  dona,  -^  formosissima ,  —  lineata;  les 
Omithogalumcaudatum ,  — arabicum;  Mor€achiHensis;Sisyrittchium 
itrifitum;  Ferrariauttdulata,  &c 

Presque  toutes  ces  plantes  fructifient  déjà ,  et  offrent  Tespoîr  de 
pouvoir  être  naturalisées  dans  les  départemens  du  nord  de  l'Empire. 

Les  végétaux  renfermés  dans  des  serres  sotit  de  (a  plus  grande 
beauté  par  kur  taille  gigantesque.  On  y  voit  un  Euphorbia  tirucalii 
de  plus  de  trois  mètres  de  hauteur;  un  Aletris  Jragrans ,  aussi  haut» 
ainsi  que  plusieurs  Ficus,  tels  que  les  Ficus  religiosa,  —  benghalensis i 
Achrassapota  ;  Coffea  arabica  ;  Cesalpinia  sapan  ;  Brucea  ferruginea  ; 
Morînga  nuxben  ;  Eugenia  utiifinta  ;  Musa  sapientum ,  —  paradi- 
siaca;  Carica  papaya  ;  Solandra  grandi fiora;  Laurus  persea  ;  Ame 
mum  lerumhet,  —  jingibn;  divers  Mimosa  ;  un  Ficus  de  la  Nou- 
velle-Hollande,  en  fleur  à  présent;  Murraya  sinica;  Phytolacca 
dioica:  latropha  curcas,  —  muUifida  (ces  trois  plantes  fleurissent 
et  fructifient  annuellement  )  ;  Citharexylum  quadrangulare  ;,  Plu^ 
meria  rubra;  une  collection  de  plantes  grasses  des  plus  «omplctes  , 
et  dont  les  individus  qui  la  composent  se  font  sdititrer  par  leur 
volume.  Plusieurs  de  ces  végétaux,  qui  n'ont  encore  fleuri  i^e 
trçsf rarement  en  Europe,  donnent  annuellement  ét$  fieuit  : 
on.j  distingue  les  Crassula  portulacea ,  ;—  cotylédon;  Staptlim 
variegata,  —  hîrsuta;  Portulacaria  afra  ;  Cactus  monstruosus,  var. 
du  Cactus peruvianus ,  — grandi florus ,  — répandus,  —  spinosissimus , 
T^  çyUndriçus  ;  ce  dcr*^'  **  Heurit  pour  la  première  fois^  et  a  prêt 


CHAPITRE    LlCXXVI.  507 

imrichi  ce  jardin  d'une  collection  nombreuse  dé  vé-* 
gétaux  rares  et  curieux  de  la  Nouvelle -HoUandé* 
Ces  plantes  y  puissent  d'une  belle  végétation  ;  plu- 
sieurs s'y  multiplient  par  les  graines  qu'elles  pro- 
duisent (  I  )  ;  elles  promettent  aussi  de  réussir  en 
pleine  terre  (2).  Le  lin  de  la  Nouvelle -Hollande 
paraît  devoir  s'acclimater  facilement  dans  ce  terroir, 
et  pourra  fournir  un  fil  fin  et  tenace.  Il  faut  espérer 
que  les  Provençaux  le  cultiveront  mieux  que  l'aloès , 
<h>nt  ils  ne  font,  aucun  usage.  Du  reste,  toutes  le$ 
plantes  de  la  Nouvelle-Hollande  végètent  à  mer- 
veille ,  et  promettent  les  plus  heureux  succès. 

La  direction  de  ce  jardin  est  confiée  à  M.  Lacour ,  > 
qui  cultive  depuis  long-temps  la  botanique  par  goût , 
et  dont  les  serre»,  que  j'ai  aussi  visitées  à  une  lieue  de 
la  ville,  contiennent  une  coliecdon  très^précieuse. 

Nous  allâmes  voir  ensuite  Eygalades  ou  les  Eygar 
l-ades:  c'est  une  des  plus  agréables  bastides  des  envi- 
rons de  Marseille ,  ainsi  nommée  à  cause  des  eaux  du 
Biaud  dont  elle  est  arrosée.  Nous  y  vîmes  une  tar- 
pisseik  singulière  ;  c'est  un  tissu  de  soie ,  d'or  et 


irf^i 


lk  4cux  mètres  de  hauteur.  Toutes  ces  belles  plantes,  par  leur 
riche  végétation,  embellissent  ces  serres  r  et  nous  retracent  l'image 
du  printemps  au  milieu  de  Thiver. 

{1  )  Correa  alba  ;  les  Mimosa  longifolia ,  —  strtcta ,  -r-  suaveolens. 

(a  )  Antholoma  moHtana  ;  Ceanothus  africanus;  conchyum  rubescens, 
« —  ladfolium,  — pinifolium,  '^  fpiculosum ;  FabrUia  lapigata,^^. 
&c.  Malpighia  coccifira, 

va 


^b__aH. 


308  CHAPITRE    I;XXXVI. 

(Targent ,  travaillé  à  faiguilie.  Cette  tapisserie  est  haute 
de  dix  pieds  quatre  pouces;  sa  largeur  est  d'aiviroa 
douze  pieds  et  demi*  Le  maréchal  de  Villars  Tavoît 
achetée  à  la  vente  des  effets  du  duc  de  Mazaria  ^  qui 
la  tenoit  de  3on  oncle  le  cardinal  ;  et  il  ôst  probable 
que  celui  ci  l'avoit  apportée  d'Italie.  Leduc  de  Villars , 
gouverneur  de  Provence  comme  son  père ,  avoit 
acheté  à  vie  le  château  d'Eygalades  ;  il  y  est  mort ,  et 
^  laissé  cette  tapisserie  à  M.  Mestre  d'Eygalades ,  avec 
tous  les  meubles  qui  ornoient  le  château^  Elle  a  été 
acquise  depuis  par  M.*  de  Barras ,  propriétaire  actuel 
de  cette  bastide. 

Lçs  tapisseries  ont  servi  long^temps  à  conser- 
ver des  souvenirs  historiques.  Il  paroit  que  ce 
sont  les  tapbseries  médiqués  ,  persanes  et  baby-'^ 
Ioniennes,  qui  ont  suggéré  aux  Grecs  l'idée  dû 
plusieurs  animaux  imaginaires.  Les  pipli  qu'on 
exposoit  dans  les  grandes  cérémonies ,  étoient  àe$ 
tapisseries  sur  lesquelles  on  brodoit  des  mythes 
entiers ,  c'est-à-dire ,  des  histoires  complètes  de 
quelques  diaix  ou  de  quelques  h^&/ Tel  était  l'ou* 
vrage  auquel  Ar^chné  et  ses  smurs  étoient  occupées^ 
lorsqu'elles  furent  punies  d^àvoir  osé  comparer  leujf 
talent  à  celui  de  Minerve.  On  suspendott  de  riches 
tapisseries  ainsi  décorées  de  sujets  historiques  pu 
religieux,  4ans  les  grottes  sacrées,  dans  l'intérieur 
des  temples,  et  devant  les  ouvertures  des   portes^ 

Dans  le  moyen  âge  ,  l'usage  s'est  peipétué  de 


>Jï-    V 


conserver  de  la  sorte  h  iriémoir e  4^s  gnoids  évé^ 
pemçns.  Le  monument  le  plus  remaïqu^Ie  en  ce 
geitre  est  h  célèbre  tapbseiie  <jiie  Von  conserve  k 
Biiyetuc,  et  que  la  reitie  Mathîlde  exécuta  atec  ses 
^Qimes:)  pour  rappeler  la  conquête  de  l'Angleterre 
faite  par  son  époux  GuJHaume  de  Normandie  (  i  )• 
On  pourroit  citer  beaucoup  d'autres  tapisseries  histo* 
lîcjues  moins  importantes  »  mais  dont  les  sujets  né 
sont  pas  sans  intérêt,  et  qui  peuvent  servir  au  moins 
^  faire  connoître  1  état  de  Part  diK  dessin  à  fépoque 
eu  elles  ont  été  Êiites. 

Depuis  mon  départ  de  Marseille ,  M.  de  Saint*^ 
Vincens  a  fait  dessiner  la  tapiisserîe  tfEygalades  :  il 
a  cpnsulté  plusieurs  savans  dé  Fretice  et  dltalie  ;  il 
m'a  communiqué  ses  propres  idées  et  lès  leurs  ;  j'y  ai 
joint  If  s  rai^nnes^  et  l'explication  que  j'en  vais  donner 
est  {e  résultat  de  toutes  tes  observations  réunies. 

Cette  tapisserie  (plane/te  LXIIJ  n'est  formée  que 
d'un  ^seul  tîs^u  ;  mais  elle  est  partagée  en  pliisieui^ 
çottipartimens* 

-La  principale  scène  est  dans  le  tableau  du  miiiett. 
Sur  un  trône  formé  et  orné  à  la  manière  gotbi^pie  ^ 
iPiA  voit  le  Maître  du  monde  as^is ,  revêtu  d'urne 
chape  y  et  ioiffé  d'un  bonnet  m  forme  de  tiare, 


r 


I    ,       î     »     ■       '■ 


f   '  ' 


(i)  MONTFAUCON  ,  Afojiuftiefts  de  la,  Monarchît  française , 


MMkÉ 


lié  CHAPITRE    LXXtVTÎ 

jmb  entouré  d'une  seule  couronne.  DeUr  àngei 
sont  à  genoux  aux  côtés  dû  trône  :  f  un  tient  tui  ih  ;, 
l'autre  une  épée.  Deux  autres  anges  étendent  der.-» 
TÎère  le  trône  un  voile  qui  semble  lui  ^setvir  de 
£:>ml.  Le  Tout -puissant  bénit  de  la  main  di^ite  un 
ïîvre  ouvert  qa'il  tient  dans  ïk  gauche;  et  où  sont 
tracés  des  caractères  informes.  A  ses  pieds  on  voit 
h,  mer,  et  un  peu  plus  loin  I4  terre  avec  des 
arbres. 

-  Al}-  dessous  et  à  quelque  distance  du  trône ,  il 
y  a  un  grand  nombre  d'hommes  à  genoux.  Cette 
troupe  est  divisée  en  deux  bandes  :  à  la  tête  d# 
celle  qui  est  à  gauche  du  spectateur ,  on  voit  un 
pape  coiffé  de  la-  triple  tiare;  à  la  tète  dé  celle 
qui  est  à  droite,  est  un  empereur  vétu d'une  longue 
tunique  et  d'un  long  manteau  ^  et  qui  porte  une 
couronne  fermée.  Derrière  le  pape  sont  deux  car-? 
dinaux ,  un  évèque  en  mitre  ,  deux  prêtres  ëij 
chasuble  ou  en  chape,  des  religieux  ou  reîigî^ses. 
Derrière  l'empereur  sont  dix  personnages  dontjân  a 
la  couroime  ouverte  sur  {a  tète  ;  lut  seiil  a  une  {ongue 
barbe^'.         -     ^   '  ^  *.  " 

La  partie' de  la  tapisserie  qui  est  â  gauche  du 
specfâteur ,  est  divisée  en  trois  çompartimens  et  re-f 
présente  trois  actions. 

La  plus  basse ,  qui  est  la  plus  grande  des  trois ," 
paroit  représenter  le  mêmç  çmpereur  que  l'on  a  vu 
à  genoux  dans    ïç  t^JDjeau   d^  milieu  :  içt  il  eçf 


;  CHAPITRE  L^XXX VF.  311^ 

debout^  3  porte  fin  sceptre  dans  la  main  droite,  et 
îpose  la  main  gauche  sur  sa  poitrine  :  derrière  lui 
sont  plusieurs  personnages  ;  à  ^  c6té ,  un  peu  en 
arrière ,  un  homme  coiffé  d^iine  calotte  rouge  tient 
à  ia  main  un  bonnet  couvât  de  broderie.  Devant 
{'empereur  est  une  femme  à  genoux,  que  plusieurs 
autres  femmes'accompagnent.  Au-dessus ,  un  homme 
et  une  femme  se  prosternent  devant  une  image  de 
ia  Vierge ,  renfermée  dans  un  petit  cadre  rond ,  et 
qui  leur  apparaît  dans  dei  nuages.  Cette  petite  scène 
est  séparée  par  un  pilier  qui  porte  une  insi^ij^tion 
gothique.  î  ' 

La  scène  qui  occupe  la  partie  la  plus  élevée  du 
côté  gauche  y  réprésente  une  forèt  ou  un  bosquets 
Au  fond,  à  droite ,  entre  les  arbres  »  j^roît  un  per* 
ioiïnage  dont  le  corps  est  enveloppé  d'une  draperie 
Irouge;  il  a  sur  la  tète  un  bonnet  ou  chap^âU  qUa 
Pon  voit  soùv^it  répété  sur  cette  tapisserie ,  et  sem- 
blable à  celui  que  portoient  Loiûs  XI  et  le  roi  René  j 
il  a  Wn  de  parler  aux  personnes  qui  viennent.  En 
face  de  lui  est  un  jardinier ,  qui  a  lé  pied  appuyé 
sur  une  bêche  ^  et  qui  porte  pour  chaussure  des  bot* 
tines  de  couleur  noire*  Celui-ci  se  retourne,  et  sou- 
lève son  voile  ou  sa  capote  pour  voir  les  person- 
nages qui  arrivent  :  il  y  en  a  sept  derrière  lui ,  qui 
sont  vèttts  de  robes  longues  et  coiffés  de  diverses 
manières. 

La  punie  à  droite  de  la  ttpisserie  peut  être 

v4 


«ubdivîféiî  «n  ^ix  ^çtianf.  OUôf^tfwtiJtsï  qui  af  h 
pl^s  d'étendue ,  représei^te  p^.  f|rki(Çf  ^  f>oite  siur 
ja  tête  unç  couropi^f  puveifl0ci^t  qui  îi  a^tc^ui  di| 
cou. un  Jarga  ^snaailî^hertnine^  «wp^el  tient  ihi 
long  marn^au  s  il  qf&e  un  an^ew*  >  me  |>rioceM0 
qui  paroît  assis^^  Cette  princesse  naps^i  um  cou-t 
roRPei^lIea  $ur  Jefaira^  gwch^  ui^  ^ic^rwiil  qu'frfle 
tient  ewh^w^*  1^  ^uqv^  elle  d(mm  ^  hm^ 
droite  un  pf^t  ^Eruîtf.yert.  A  $e^  pieds  ioa*  uoM 
jeunes  enfkm ,  sans  .doute  des  piigfi»^  donl  les 
culottes,  \e^  bas  et  le^  soulic^f  ne  iiçtr|Tif|it  ^'une 
seule  .pièce  ;  sorte  de  vêtement  dont  on  fkisoit 
H$age  dans  Ï6  xV/  sii^Ie  et  ^\^  c^nlinei^e^ioent  ;  du 
jçYî/  Derrière  te  fJ^ersonnuge  cmmr\fm\  a»  voit 
troi$  bonlmes  qui  oftt  Vm  d^  s'pa^reltnir  îavec  iot 
térêt  :  le^  premier  porte  la  barbe;  te  «fjçdnd  a  f^it 
tonsure  teïle  qw  h  pottoient  fes  écdésiastiqiies  et 
,  les  religîeïix;  le  troîftième  a  leàicbe^eiix  pendani 
et  la  tête  couverte  d'un  bojtinet  p«iu?ché;  il  appiâé 
$a  main  sur  li  fomm&  du  ^ras.^  de  h  chaise  ùbx  dis 
trône  du  prince.  ,  .  *^  : 

.  Au  haut  de.  cette  scène ,  oii  ea  f ertiar<|u«  troii 
aiitres;  mais  on  <firoit  que  dans  celles^  les  p^xsmH 
nages  sont  placés  dans^  des  trifaunos  pratiquas:  ^ali 
haut  de  l'appartement  où  se  célèbrent  Jbes  fiançailles 
du  prince  et  de  la  princesse.   .  ; 

La  première  de  ces  tribunes,  à  gauche,  cobw 
tient  quatre  personnages  :  une  fanHie,  en  pc^àire 


4e  $uppfidi|te:«st  deyant  «n  pritice  tourotané,  qui 
^  un  sceptre  4ar)s  la  m^in  giwite  ;  un  des  dtux  autres 
p^sonnagje$  n  )ie$  ch^yeiit  hmg$  et  lè  hôimet  pelu- 
ché^ Daris  ia  tribune  du  milieu ,  trois  personnages 
ont  Tair  de  s'entretenir  de  ce  qui  se  pâise  en  bas  ; 
il  yz  uim  hmmt  parmi  eux  :  au-dessus  de  i«ùr  tète 
est  un  écusson  dont  ia  partie  supérieu^re  9e  terminé 
en  poinfe  ;  il  porte  une  inscription  gothique. 

Xja  troisième  tiitone  renferme  aussi  trois  person-f 
fiag^s  dont  h  codVersaûoii  paroit  animéec 

A  droite  ^^«au-rdessus  des  scènes  que  je  viens  dç 
décrire  y  ^oa  remîirque  deux  acdoas  séparées  par  un 
j^Iier. 

:Dan^  la.  pt0nlièr^ ,  une  femme  qui  occupé  le  de^ 
vani  de  la  s<èn0  ^  ai  les  bras  étesidusxemme  une  per«« 
^opi^  ^r  déclame;  derrière  elié  sont  des  femmes  f 
dont  Tuni^  a  Tair  d'écouter  avec  un  intérêt  plus  vif  ^ 
ce  groupe  est  composé  dé  huit  personnages ,  parmi 
|^<|u^s  ilit'y  t  qu'un  homme.  La  seconde  ^  action 
préisente  une  table  couverte  d'une  large  pappe  dont 
le  bs&  est  bïodé  i  cette  taUe  occupe  tout  le  devant 
du  t^Ueau  ^  ^i,esjt^beducoupTHoiaslai^ge  que  le  pré^ 
çédeiit  ;  eUe  est  chargée  de  deux  flacons ,  tfiui  vase^ 
de^ (juelquesi  fi^ixpes,  et  dst  plusieurs  mets.  Derrière 
19n^  assb  deux  personnages  ^  dont  un  est;  une  fëmtM 
ffii\(k  ra|r  de  tegardel:  la  scène  qoA  se  paise  à  e&ié , 
et  d'y*  prendre  part  ;  et  l'autre  tient  un  bras  étendu^ 
vers  le  coté  exposé.  "      . 


\ 


5l4  CHAPITRE   LXXXVI. 

Les  séparaticms  des  grands  tableaux  sont  formées 
paf  une  espèce  dfe  portique  soutenu  par  dès  pHiers 
gothiques  à  plusieurs  angles  :  ces  piliers  supportent 
des  statues  de  saints  qui  ont  sur  la  téte^es  dais  élé*^ 
^gamment  décpupés.         '  ^ 

'  Tel  est  le  monument  curieux  qui  avoiit  éfé  acheté 
fort  cher  par  ie  raajéchal  de  Villars,  que  le  duc  son 
fils  conservoit  avec  un  si  grand  soin,  et  auquel  il 
prenoit  tant  d'intérêt ,  qu'il  tfoii  fait  arranger  Je 
principal  appartement  de  son  château  d'Eygalades 
pour  l'y  placer^  Cette  tapisserie  dèvoit  avoir  un 
grand  éclat  dans  sa  nouveauté  ;  elle  paroit  encore 
très-riche  :  l'or  n'y  est  cependant  pas  prodigué  sans 
goût;  il  n'est  répandu  que  sur  tes  hat>its  et  sur  les 
ornemens.  Les  figures  sont  mal  dessinées  ;  mais 
l'ouvrier  a  cherché  à  en  varier  les  traits  et  à  saisir  les 
ressemblances.  Le  duc  de  ViHars ,  homme  d*esprit  et 
fort  instruit ,  n'avoît  probablement  pa's  pu  en.  deviner 
le  sujet ,  pui$qu'aucun  de  ceux  qu'à  admettoit  à  sa 
société  n'a  pu  l'expliquer. 

Celte  tapisserie  est  certainement  un  des  Ouvrages 
feits  à  Arras  dans  lé  xv.*'  ou  le  xVr/  âècle.  Ce  fut 
pour  cette  manufiicture  que  Rapbaôl  composa  ses 
cartons  :  mab  les  incorrections  du  dessin  d^  celte-ci 
annoncent  qu'elle  est  antérieure  au  tefr^psde  ce  grand 
peintre ,  et  que  les  ouvriers  n'ont  point  eu^  pour  la 
travailler,  les  beaux  modèles  que  firent  exécuter  le^ 
papes  Jules  II  et  Léon  X  ;  elle  doit  donc  être  rapportée 


CHAPITRE    IXXJCVr.  ixf 

un  milieu  ou  à  la  fin  du  XV. "  siède.'  Le  nom  du  fabri- 
cant  est  brodé  efi  bas,  où  on  lit  ce  mot  à  gauche: 

VCTAVIANUS. 

La  scène  dû  milieu  représente  une  invocation  à 
Dieu  y  et  en  même  temps  une  yrtion  de  grâces 
solennelle  faite  par  les  principaux  personnages  de 
l'Europe.  Uhistoirê  d'Esther  ôt  d'Assuérus,  figurée 
dans  dés  ccnnpartimens  qui  régnent  autour  ^  doit 
faire  présumer  que  cette  scène  du  milieu  a  rap^ 
port  à  quelque  grande  calamité  qui  a  menacé  les 
chrétiens^  de  même  que  fa  nation  .juive  avoit  été  i 
la  veille- d'une  destruction  totale  au  temps  d'Assuérus 
et  d'Esther,  et  que  c'est  pour  célébrer  une  délivrance 
inattendue 'qu\in  des  princes  <jui  y  ont  contribué  K 
fait  exécuter  cette  tapisserie.      -        n 

Peut-être  cM-çe  en  Mémoire  de  ^expulsion  deâ 
Maures ,  effectuée,  en  1492. ,  psff  Ferdintand  et  I^'i 
belle,  représentés  sous  les  traits  d'Assuérus  et  d'Esther  f 
peut-être  est-ce  à  l'bccaston  de  fa  grande  victoire 
remportée,  eh  1 4^5 6 ,  par  les  princes  chrétiens ,  sous 
les  murs  de  Belgrade.  Constantihopffe  avoit  ^té  prise 
quatre  ans  auparavantpar  Mahomet  II ,  qui  menaçoît 
d'enrahir  la  chrétienté.  Les  traits  de  Frédéric  lU  et 
ceux  de  Çallîxte  III,  qvii  régrioient  en  i4î^>  ^^^^ 
viennent  assez  ^  l'empereur  et  au  pape  qui  sontrépré-i- 
pentes  dans  le  tableau  du  milieu. 

Quoiqu'il  en  sdit,  voîci  Texplicatiôn  que  l'on 
peu^  dpnner  df$  diâférent^  scènes  qui  sont  figurées 


f-  \* 


d&iiis  let  compartînlens  qui  luî  setveAt  comme  d'en- 
tourage. 

Toutes  ont  rapport  à  l'histoire  d'jfcthfï;  les  deux 
hucrtptiens  gotiques  qui  sont  ^'imekdroite, l'autre 
à  gauche ,  l'indiquent  assez. 

A  la  drtâie  d«  spetiatear  ,  le,  grand  tijileau  le- 
pr^ehtç  le  mariage  d'Assuérus  et  dXstAer.  II  y  à 
au-dessus  trois.petites  scènes  :  dans  l'une,  Assuirus 
présente  son  sceptre  pour  déclarer  qu'il  a  fait  tAoi* 
d'£sther}  dacsjes  deux  autres,  ce  sont  les  Juifs  qui 
*e  moritrent  empressés  de  voir  fa  reine  »  sur  iaqueHo 
reposent  toutes  leurs  espérances.  Let  deuie  tableaux 
les  plus  élevéf  de  ce  cÀté  représentent,  l'un  ,i  Esthei 
priant  et  se  lamentbnt  avec  ses  femmes;  l'autre,  lé 
repas  qu'elle  donne  à  Assué'rus  et  à  Amaih.  C'est 
ce-  qu'indique, ikn«  dos  inScripdons  gothiques  placées 
ttu^un  des  écussiBw:  :  . - 

KZGl.BGyfrtgemregumJJi.DQKe.yiJ 
ATQ.  IVT  [imocavk]  Tji  ftum]  PArATV». 
.,;     .        £JCiB/"WiMj7  AT  ILIA  PBMO^A  AVT 
QVO  POTVIT  SATlAf  VA.  .  . 

■_       '  '.'■■■  ■..'■-"■■".■• 

Ellf  (Esther)  adcra  rtinfoqua  l(  Raiiiii.rois  :  aUrsan  Juiftépare 
2  man^;  maïs  eVt  ne  se  repaît  qâ<  de  gSltau  consacra  ou  de  ce  qu'elle 


CHAPITRE   LXXXVI.  317 

on  voit  Esther  devant  Assuérus  ^  à  qui  elle  est  venue 
découvrir  Tordre  qu'a  donné  Aman  de  massacrer 
tous  les  Juifs.  Le  tableau  le  plus  élevé  représente 
Assuérus  qui  est  sorti  de  chez  ia  reine ,  et  qui  se 
promène  dans  son  |ardin  pour,  méditer  sur  ce  qu'H 
doit  faire.  C'est  ce  que  rappelle  l'inscription  placée 
"adroite: 

CVM  OSCVLATA  FVERAT 

SCEPTRYM  ASSVERI 
HÊ^T^a  SCIPHO  VTITVR 

REGIS  PLEKQ  MERI. 

*  *         "  '  *  «A. 

I  1 

Comme  Esther  avait  haisé  le  sceptre  d' Assuérus ,  elle  se  servit  du  verre 
du  roi,  plein  de  vîtt  pur. 

Les  costumes  et  les  vraisemblances  ne  sont  point 
observés  dans  ces  tableaux.  Assuérus  est  tantôt  repré- 
senté sous  tes  traits  d'un  jeune  tiomme ,  et  vêtu 
comme  ï'étoient  les  princes  dans  les  xv.*"  et  xvi.* 
siècles  ;  tantôt  il  a  lUie  longue  t^arbe  et  des  v4te^ 
hiens  semblables  à  ceux  des  empereurs  d'Ocxidem 
dans  ces  mêmes  siècles.  Mais  on  sait  combien  peu 
on  étoit  exact  k  suivre  les  convenances  dans  le  temps 
où  cette  tapisserie  a  été  faite. 

La  scène  qui  représente  un  prince  et  une  princesse 
èr  genoux  devant  une  iii^age  de  i^  Vierge ,  doit  se 
rattacher  à  celle  qui  est  figurée  dans  le  milieu  :  cela 
paroît  d'autant  plus  vraisemblable,  que  la  figunp  de 


>  I 


\ 


5i8  CHAPITRE  txxxiri. 

l'empereur  est  la  même  sur  l'une  et  l'autre  de  c^ 
deux  représentations. 

Le  château  Borelly ,  dans  le  canton  de  Bonneveine 
nous  offi-oit  encore  un  autre  lieu'  important  à  visi«- 
ter.  C'est  une  habitation  qui  pourroit  passer  pour 
magnifique  même  dans  les  environs  de  Paris.  Nous  y 
remarquâmes  deux  canopes  accompagnés  d'hiéro- 
glyphes. II  renferme  aussi  de  bons  tableaux  :  on  voit^ 
dans  une  galerie  au  re^-de-chaussée ,  un  tableau  de 
de  Troy ,  qui  représente  le  chevalier  Rose  faisant  eil- 
terrer  les  pestifërés  (  i  )  ;  mais  il  étoit  trop  tard ,  et  la 
nuit  nous  empècla  de  rien  observer.  Les  jardins  sont 
bien  tenus  ;  ils  ont  de  l'ombrage  :  mais  leur  étendue 
n^est  pas  considérable.  Ce  château  appartient  aujour* 
d'hui  à  M.  de  Panisse.  On  doit  aussi  voir  la  belle 
&çade  de  l'église  dés  anciens  Chartreux* 

La  montagne  appelée  Ad^arseille^Beyré  est  très* 
remarquable;  ell^a  deux  cent  dix-sept  toises  de  hau- 
teur :  aussi  y  a-t-on  établi  xme  excellente  vigie,  qui, 
le  jour,  hisse  ses  pavillons,  et,  la  nuit,  ses  lanternes. 
Les  naturalistes  y  trouvent  des  plantes ,  des  coquilles  ; 
ils  peuvent  voir,  dans  la  baume  appelée  la  baume 
de  Rolland,  des  pétrifications  curieuses. 

Les  jours  de  fête ,  toutes  les  petites  chaloupes  sont 
nettoyées  ,  parées  de  leurs  avirons  ;  et  c'est  une 
partie  de  plaishr  pour  un  grand  nombre, d'babi tans, 


(i)  Suprà,  p.  aiu 


y 


i^a«wftfc 


CHAPITllE    LXXXri.  ^tf 

^pie  d'a&er  manger  des  coquillages  dans  ohe  des  îles 
€pû  précèdent  l'entrée  du  port, 

La  plus  voisine  est  celle  où  est  bâti  le  château  d* If  ^ 
<îqnrfe  nom  étoît  autrefois  formidable,  comme  ceux 
d^  Pierre-Endse ,  de  Vincennes  ,  et  des  autres  pri- 
sons d'état.  Plusieurs  prbonniers  célèbres  y  ont  f  té 
enfermés  :.  le, dernier  que  l'on  cite  est  le  comte  de 
Mirabeau.  C'est  aujourd'hui  un  <^épôt  pour  les  dé- 
portés de  la  Corse  «t  de  L'île  d'Elbe* 

L'iie  Pâmèguf  j^t  h  phis  éloignée;  sa  distance 
dfi  Marseille  est  d'environ  six  à  sept  milles  :  c'est  ià, 
conime  je  l'ai  dit  ^  que  les  vaisseaux  qui  viennent  des 
Échelles  du  Levant  demeurent  en  quarantaine,  . 

JL'iU  de  Ratonneau  est  aride ,  désçrte ,  et  absolu* 
ment  abandonnée.  Le  château  fut  cqnstniit  pai^Fran- 
çois  L",  pour  mettre  la  rade  de  Marseille  à  l'abri  des 
entreprbes  de  Charles -Quint.  Les  Marseillois  ont 
bâti,  en  1597,  un  autre  petit  fort  qui  n'est  gardé 
que  par  des  soldats  invalides.  On  raconte  une  his- 
toire singulière  d'un  de  ces  soldats.  En  qualité  de 
caporal ,  il  commandoit  quatre  hommes  qui  compo- 
soient  alors  toute  la  garnison  ;  sa  raison  s'égara  ,  et 
il  finit  par  croire  qu'il  étoit  le  roi  de  ille.  Comme 
ses  camarades  ne  vouloîent  point  reconnoître  sa 
souveraineté ,  il  profita  d'un  jour  qu'ils  étoient  allés 
chercher  des  provisions ,  et  à  leur  retour  il  fit  feu 
sur  eux ,  et  menaça  de  les  tuer  s'ils  approchoient.  On 
rit  pendant  ^quelque  temps  de  sa  folie  ;  mais  enfin  elle 


320  .CHAPITRE  i^xxâcyi; 

devint  à  ciiirge  auxpèchçir»  y  xpi'il  &nr çoit  &  kmértër ^ 
et  à  lui  porter  des  *provi9i4>ns;  Detit  kdmmes  vi^oi^ 
reux  s'approchèrent  de  rtie  avec  patiflon  Uanc  t  des 
mécontentemois  les  obligeoient ,  lui  dnmx-  ili  ^  Il 
quitter  Marseille  ef  à  se  réfugia  dans^^s  états.  Le 
nout«au  prince  ^  que  la  sditude  commençoh  peut^ti^ 
à  ennuyer  y^  et  que  les  reilles  continuelle^  feâguô^tif 
i)eauçôup  y  vit  avec  plaisir  de»  sujets  qui  pai^^gcî* 
roient  avec  lui  le  soin  pén&Ie  de  la  garde  de  iûti 
empire  ^  il  les  admit  avec  confiance  :  mais  ils  se  sai- 
sirent du  roi  de  Ratonneau ,  et  le  conduiisiretti  à  t\^ 
pitai  des  fou» ,  où  il  est  mort  se  croyant  un  souvehrai 
détrôné. 


"      r      ; 


CHAPITRE 


îik 


CHAPITRE  LXXXVIL 

Gouvernement  des  anciens  Marseilloîs..^  Conseil  des 
six  cents,  Tithvquès.  —  Mœurs  et  "usages.  —  Lois 
^oniptuàires.  — ^  Suicide.  —  iériothéniis  —  Les  mœurs 
se  corrompent  soùs  les  ethpere*tits  ronValns  et  dans  le 

.  tncy  en  âge.  fc^  M  œuifs  actuelles.  —^  Goût  imnfiodéré  pour 
le  plaisir.  -^Clubs»,  raaisoi>s  de  jeu,  b^ls ,  courtisanes.  ^— 
Manière  dé  vivre.  —  Denrées^  —  Usages. —  Ornemcns 
des  églises.  —  ÏFêtes.  -i—  La  Noël  :  aubaàes ,  crèches, 
'cigo|;neSy  repas,  calendeaii ,  caco  fiiech,  -^  Veille  dei 
Hôis.  — Fête  delà  Bdîe-ÉtoïIe.^Jôtodes  Rameatix>  ' 
Idu  ràtnpaâu  de  V'Cspkdoît,  Poîi  chiches.  ^— t  l>élivram:e 
Vlcscaptife. ^=«*  Fe»  9e  la ^aînt-Jean.  '^^  Ventte  de  fleurs^ 
^i— Fêtes  champêtres.  —  S.  Antoine.  —La  Hatnado^  -^ 
•  La  moisson^  la  vendange.  — t-  JioùjnaPagL  t—  Fêtet^ 
patronales. 

li/IES  'alùteu^è  anciens  Sdht  fous  à^àccorà  pour  louer 
là  sagesse  dû  gôuvériflémént  des  Marselliois.  La  fbnnè 
^irtétbh  aiistôcratr^e  ;  ràdmihistta'tiôné'toit  confiée  à 
sht  cents  sénatfeuts  appelés  tiftiuquei  (  i  ) ,  nom  qui 
felépritnoit  la  considération  attachiéie  à  îeurs  fonctions  : 
un  conseil  paYtîculîeï  <ie  quinze  sénateurs  e^édioit 
lei  afFaiVes  les  plùi  pi*eiséés;  et  parn^î  ces  quinze^ 
trois  avbîent  la  pirêséahee  et  utie  autorité  sotiverainew 
Pour  être  timuque(2),  il  failoit  avoir  eu  des  enfàns^ 


.^.,-11 -i  1 1 1  •■  fa  <* 


(t)  Cest-à-dire,  ^ui  est  hou^ré,  qui  jouit  d0$  hcnwurs^  de  rtfàii^ 
honneur,  et  d*€^f /r ,  avoir. 
(a)  StràB.  IV^ji 

TomtlIL     ^  X 


^    I    \\»M  ■*!   .*  lima 


aiS  CHAPITRE    LXXIjVII. 

ei  être  inscrit  sur  te  rôle  des  citoyens  depuis  ttok 
générations.  Le  prévaricateur  étoit  privé  de  ses  biens, 
et  voué  par  un  jugement  h  l'infamie.  Cette  adminis- 
tration étoît  si  prudente  et  si  sage ,  que  ,  Seîon  Cîcé- 
ron, il  étoit  plus  facile  de  la  louer  que  de  limiter  (  i  ) . 
Cette  forme  de  gouvernement ,  qui  ressemble  k-peu- 
près  à  cdie  qu'avoit  autrefois  le  canton  de  Berne , 
peut  offrir  de  grands  avantages  dans  de  petites  ré- 
publiques ;  mais  elle  ne  sauroit  convenir  à  un  grand 
État-  Le  gouvernement  marseilloîs  reçut  beaucoup 
d'altération  après,  ta  prise  dis  la  vîÛe  jpar  César  r  et 
depuis  il  a  éprouvé  les  changemens  qu'ont  dû  y 
apporter  les  diffièrentes  dominations  sou»  lesquelles 
îl  a  passé. 

LesT)onnes  lois  font  lès  tonnes  matù)^  :  Mâriêflle 
en  offroit  la  preuve  ;  car  les  auteurs  s'accordent  en- 
core à  louer  sa  disdpline  comme  s^  gouverBeoient 
Selon  TVdt^J  .(a),  Cetie  ville  aypil  fait  im  beureu* 
mélange  de  la  pOlitesie  grecque  avec  la  tempérance 
gauloise.  Çlaute ,  pour  désigner  des  nweurs  irrépro- 
chables, les  appelle  des  mmrs  mûrsiilloisfS  (î)*  L« 
mbdération.et  la  fustîce  y.étoient  tellement  d'obfiga- 
tion ,  qu'un  maître  pouvoit  casser  jusqu'à  trds  ftwS 
l'oflTrîinrhfftceniem  au'il  avoit  accordé  à  son  esclave. 


^^■*i^MMMa*W^M.Ma«M»*i 


liW^^^prfaMM**a*«ki^kta4M«^-MM«*-4l 


il)  Ut omnes  ijus  instliutd  Uudare fadlHis possint quàm  amulari, 
CiCÊK.  pfo  L  Flatcd,  a«. 
(i)  T KCVT>Agric.  4. 
(3)  Plaut.  in  Casin.  act.  V,  sccn.  iv^  v*  u 


lÉ  r    ÉiÉTi    Y  liîi 


CHA!>ïTitE  Lxncvïn  ^n 

ft  les  Magistrats  veconnoisibientqifft  atoit  été 
trompé  trois  foU  par  ce  tnèmeesciavC^;  ma»  le  qiia» 
crtème  affi-anchtssément  n^étoii  plus  susceptible  d'itre 
annùlié.  Les  femmes  ne  poii voient  boire  ^vîn'^lê» 
jeux  scéniques  étoient  défendus;  chaeiin  devoit-^so 
iivrer  à  une  occupation  ^^concpie  ^  sans  qu'sEiicaix 
modf  de  religion  pût  en  dispenser:  personne  nfawHt 
ie  droit  d'entrer  armé  dam  la  vlIIé;  les  ëtranj^eti 
jD^renoîMt  leurs  annes  à  la  so^rtte  {t).  Les  lois 
somptus^ires  deroîem  être  rigottreuseg  dans  une  Titt^ 
fi  attentive  à  la  conservation  dèr^së^-ind^uïs.  ha  pios 
grande  dot  étbit  de  cent  pièces  d'bt  (2)  t  il  n'étcii  pa< 
permis  d'en  employer  plus  de  cinq  en  faabiis^  et  lé 
prix  du  restef  de  la  parure  n<e  devoh  pas  nbn^^j^si 
excéder  cette  defhière  somme«  Il  y  avc4t>  devant  Ja 
potrte  de  la  tiUe^  deux  cafisses  sépulcrales ,  >ixné 
pour  les  hommes  libres,  l'autre  pour  les  esdstte^^ 
on  les  ptiitoit  stfns  pi^rs  et  un^bifAt^  dans"uii  èha- 
tjot,  au  lieu  de  kur  sépiïitare^  l'emenem^iit  :écoh 
terminé  par  un  s^KtHice  dom^fifo|ue  et  un  repas  entre 
les  parens^  le^  «tfeûM  ne  devôif  durer  qu^mr  %)oiai 
p*après  une^  diiscif^e  ausii  Sâstère^  tes  crimes  A& 
votent  èi#e  '  rates  vattssi  legkiiv^'qi»slV>ticonsieryGEi: 

— ■— —  I  I    uni      I  m«       '  \i      '     ,^u^l  i  >•  >  M 1. 1  1 

(1)  Valer.  Max.  II ,  vi  ,  7  et  suiv. 

(1)  On  n*a  cependant  encore  trouvé  aucune  monnbie  de  Mar- 
seille en  or  ;  la  seule  que  Ton  connei^^  est  dïns  h  Cabinet  irtipé- 
rial ,  et  die  est  fausse. 

X    X 


^|4  tHAMtïlÈ   LXXXVîtV 

depuis  la;  fondation  de  la  ville  «pour  la  punition  ^^ 
criminels ,  étok*-iI'i?o»gé.par  la  rouille. 

H  est  stnguKer  qu'une  manière  de  ^îvre  atissî  sage 
ieti  aussi  ^l'éguiière  n'ait  pu  empêcher  les  suiddes; 
tnaisv  au  moins  personne  fl^^pouvoit  disposer  de  sa 
^opre  ^e -sans  avoir  exposé  aux  magistrats  les  mo^ 
tifs  qui  ie.portoient  à  y  renoncer.  Cette  coutume 
étoit  didtéey  dit  V-alèïe-Maxirae^  i  ) ,  fwr.iin  noble 
"dorage  et  unte  doi>ce  Mènveiilance  ;  on  ne^vouloit  pas 
permettiTe  qu'un  citoyen  se  donnât  la  itiort  pour  un 
mômeiït  de  éégoAt  et  -une  cause  légère ,  mais  -on  né 
'vouJôit  4MIS  non  plus  Imposer  4e  fardeau  tie  la  vie; 
à^  celui  à  ][{ï(i  eUeétoit  devenue< justement  insuppor* 
table:  le  conseM  des  six-cents  -^oit  aiors  remettre 
ail  fnalheureux  qui  àvoit  des  causes  légitimes  pout 
^haïr  la  vie>  une^portion  delà  qguê  dont  la  garde  lui 
^toit  confiée. 

*  C?est  chez  les  Àlarseilloîs  que  Luciejli  >z  puisé .  uh 
lies  >plus  ibeaux  traits  d'amitié  qu^il  ait  dtés  dait$ 
^on  Tûxaris  |a).^Ménécrate,  privé  de  sesèienspat 
ïe-0<>nseîldes  six-cents  pour  avoic  proposé -un  décret 
contraire  aux  loisy  av. oit  une  fille  épileptique  et  si 
dégoûtante^  ^ue  c'étoit  -un  monstre  de  jai^^r  :  son 
père,  désolé,  croyoît  ne  pouvoir  jamais  la  marier, 
lorsque  son  ami  Zénothémîs,  dont  tout  le  monde 


•MMUb 


(t)  Valer.  Max.  II ,  vi^^. 

(1)  LUOAN.  éde  ÂmkU.  24. 


Tantoît  h  richesse  et  admifoîtiâ  befawté,  fa  prit 'pu-' 
IbKquement  dans  un  festin  pour  son  épouse ,  en  re-^ 
connoissant  qu!)f  avoit  reçu  d'^He  une- dot  de  vîn^t^ 
cinq  talem.  Sa  génémsité  ne  dèinéura  pas  sans: 
sécompense;  il  eut  de  sa  femlne-un  enfant -charmant^ 
dont-  les  grâces^  naïves  obtinrent  k  réhabilitation  ât 
son  grand-père^  qui  reprit  dans  le  tribuna^sa  pfe^ 
mîèse  oœisidératicMK 

€e  sont  les-  Marseiltoîs^  qui"  ortt  porté  fa  civîlîsa- 
tion  dans  toute  cette  partie  de  la  Gaufé,  et  qui  ont 
«iseîgné  successivement  aux  peuples  voisins  à  tailfér 
fa  vigne ,  à  cultiver  Tolivier ,  et  «ifin  à^vivre  âàns. 
des  villes  enceintes^  de  muKé. 

Il  faut;  que-  ia  prise  de*^cette  vîllè  par  César ,  '  erîà 
«ommumcatfon  habkueHe  avec  les  Romains  sous  lès; 
empereurs,  y  aient'  porté  aux-^mœnrs  un -coup  brén 
sensible  LÂiliénée,  qui  Vf  voit  soustè  règne  dé  Màrc^ 
Aurèle^,  parie-  de$  Marseillois  comme  d^hommés- 
sans  énergie  et^sans  mociâs  (i>)  ;  pour  désigner  alofs^ 
un  efféminé ,  on  disoit,  il  viétit  dt  Mkrstiît't  ;  et 
Suidas»,  qiHjrappof  te  ce  proverbe,  ajoute  qu^ls  pof- 
toient  alors  de  longs  vétemens  brodés,  qu'ils  étoiènr 
couverts-^  de-parfum« ,  efr  que  leurs  cheveux  étoîènt 
lelevésavec  mollesse  (2).        • 

X)aiis  id'  mo^a  âge ,  le  passage  -dès  Cik^fsés  et  lëst 
<  - 

(1)  Athen.  XII,  }. 

3CÎ 


X 


çomiiiuniç9|tioB$  avec  le  Levant  ont  dû  éncdrè  can-* 
tribuer  à  entretwir  cette  mollease  et  ce  relàdiemaii 
des  mœurs ,  et  Ie$  îi^memes  produhs  -du:  commerce 
^'étoîent  pa$  pFÇ|>rQs  ky  rappeler  la  simplicité  amicfixe* 
^  Aujourd'hiiâ  le  plaisir  paroit  être  Tunique  but  da 
toi^tç^  ies  actions  des  Marseillois  :  le  négociant  ne  se 
livre  à  des  opérations  commerciales ,  Touvrier  ne  tra- 
vaille une  partie  de  la  semaine ,  que  dans  i'espcMr  de 
s'amuser  le  reste  du  tanps.  Ils  sont  loyaux  et  fkcHes 
<|^s  les  affaires ,  et  connoissent  peu  f avarice^ravidhè 
qu'ils  montrent  pour  s'enrichir,  mât  seulement  du 
désir  de  dépei^ser.  L'effervescence  des  têtes  proven- 
çales est  cause  que  tous  les  arausemens  sont  tumul* 
tueux  et  brvyans  ;  il  semble  que  le  bruit  soit  néces- 
saire pour  donner  aux  Marseillois  la  certimde  qu'ils 
9nt  obtenu  Iç  délassement  qu'îk  cherchent*  Ces 
plaisirs  ne  peuvent  donc  pas  être  ceux  qu*on  trouve 
au  sein  d'une  vie  tranquille;  les  g^ûts  domestiques, 
les  charmes  d^  l'étude,  {eur  paroissent,  en  général, 
sa^s  attraits  ;  un  peu  de  désordre  semble  être  chez 
^S^  un  assaisonnement  pour  tous  les  genres  de  jouis- 
sfuices. 

II  y  a  peu  de  maisons  où  la  société  se  rasseanbie 
habituellement;  l'àveftion  naturelle  qu'on  épiouve 
popr  toute  esp^e  de  gêiie,  empécheroit  de  s'y 
plaire  :  les  hommes  préfèrent  les  lieux  où  ils  peuvent 

se  réunir  sans  être  assujettis  aux  devoirs  et  aux  égards 

« 

qu'exige  la  société  des  femmes,  les  plus  fiéquentés 


GHAI^ITRE   LJIXXVIL  ^ZJ 

sont  VlAiott  et  U  Cluh  sans  pritenîîon;  le  club  de 
rUnk>n  possède  une  petite  collection  de  livres  rela-^ 
ti6  an  commerce. 

Les  lieux  où  règneune  entière  liberté,  conviennent 
toufottrs  davantage  aux  hotnmes  qui  cherchent  le 
pkisir  saps  contrainte.  Les  maisons  de  jeu ,  oi^  la 
cupidité  âut  trouver  un  attrait  puissant ,  sont  encore 
plus  nombreuses  et  plus  fréquentées  à  Marseille  que 
les  clubs  :  elles  sont  tenues  par  des  femmes,  dont  plu« 
sieurs  sont  reçues  par*  tout  ;  on  voit  même  quelques^" 
unesdecellei  qui  ont  un  certain  rang  dans  la  société, 
hanter  habituellement  ces  maisons  :  on  s'entretient 
publiquement  de  ce  qui  s^  est  fait ,  de  ce  qui  s'y  est 
dit  ;  des  négocians  ne  craignent  pas  de  s'y  montrer  ;  et 
ce  qui  par-tout  ailleurs  nuiroit  à  leur  crédit»  estregardf 
à  Marseille  comme  une  action  indifférente. 

Diaprés  tout  cela,  il  est  aisé  de  penser  que  le 
nombre  des  femmes  qui  font  trafic  de  leurs  charmes 
est  considérable.  Il  y  en  a  pour  toutes  les  fortunes , 
pour  tous  les  états ,  et  de  toutes  les  classe^  :  si  l'on 
^ouloit  en  offrir  le  hideux  tableau ,  il  fàudroit  les 
ranger  dans  un  ordre  systématique ,  ainsi  que  le  baron 
de  Bom  a  classé  les  ordres  monastiques  à  la  manière 
deUnnéus.  L^es  rues  qui  conduisent  au  graqd  théâtre» 
sont  remplies  de  ces  femmes  perdues ,  qui ,  par  leurs 
mdécentes  avances,  font  un  outrage  continuel  à  la 
pudeur;  les  fenêtres  des  étages  inférieurs  en  sont 
garnie^  le  jour  et  h  nuit ,  et  présentent  par-tout  et  \ 

x4 


■JMAHflÉ. 


jaS  CMA.PÏTRE  txxmr. 

tout  moment  la  dégoûtante  image  du  ééterg 
dage  le  plus  ébonté  et  de  la  pi|is  vile  prostî^tion*. 

La  plupart  des  gens  riches  e;itretienneat  d^^ 
femmes^;  ce  qui  multiplie  k  i'excès.  le  no^Ke  des. 
courtisanes.  :  celless  qui  sont  le  plus,  à  la  modi^y, 
acquièrent  dans,  les  manièves  cette  aisance  qme  donnit^ 
^k  fortune  -^  elles  font  très-bien  les  hooneuis.de  ieuc 
.  maison.  Ces.  nuoeurs  rappellent  celles  d!Atbànes  ^  où 
ia  société  se  tenoitchez  les  coiurtisanes^  qjoi  doiv^ 
noient  le  ton  pour  les.  grâces  et  l'esprit ,  tandis  que 
les  mères  de , famille, ae  s'occupoient  que  des  spif^s. 
domestiques*. 

Les  spectacles  sont  r^empUs  de  ces  femmes;  «itre- 
tenues,  ou  qui  cherchent  fortune  ;  l'orchestre  .est  la 
place  qu'elles  ont  choisie;  et  Içs,  hoiiimes,  vont  s'y 
placer  »  et. causer  avec  eUes^  en  présence  ,de  leur 
Emilie  et  de  toqs  ceux  qui  les  coanoissent^  on  en 
voit  même  souvent .  laisser:  leur  épouse  et  les  per* 
sonnet  qui  sont  près  d'elle^  pour  aHer  faire  leur  courra 
ces.  nymphes.  Quelquefois.; un  homme  nouveUeipent 
marié  ne  rougit  point  de  se  montre!:,  dans  ui^e  loge 
avec  la  maîtresse  qu'il  entretient  :  souvent  aussi  sa 
femme  est  en,  faqe  de  bii  avec  l'amant  qui  la  con-^ 
sole^  et  qu'elle  avoue  presque  ai^ssi  publiquement 
que  sonc  mari  avoue  sa  maîtresse^ 

Il  n'est  pas  rare  non  plus  que  des.  hommes,  se 
laissent  captiver  au  point  d'épouser  celles  avec  qui 
&  ont  vécu  ïpng-tempj  dans  une  wipn  ilIégitiiRei 


â 


..j 


.1 


€t  fon  admet  sans  répugnance  dans  la*  société  les 
femmes  qui  se  dépouillent  par  ce  moyen  des  livrées 
de  leur  ancienne  profession. 

^Le  iil>ertînage  ^oit  être  une  suite  nécessaire  de 

,  cette  extrême  liberté  de  mœurs:  aussi  peut  on  dire 

qu'il  r^ffe  à  Marseille  plus  que  partout  ailleurs;  il 

y  paroît,  sous  toutes  les  formes  ,  sans  même  qu'on 

prenne  aucun  soin  pour  le  cacher. 

Lorsque  les  affaires  sont  finies, -chacun. cherche 
la  dissipation  qui  lui  r  plaît.  Les  concerts  et  les  ba]s 
^publics  et  particuliers  se  renouvellent  tous  les  jours 
pendant  l'hiver. 

Quoique  ces  traits  peignent,  en  général ,  les  mœucs 

.  des  Marseillois ,  le  noble  dévouement  qu'ils  ont  raon^ 

tré  pendant  l'affreuse  calamité  qui:  a  désolé  leur  ville, 

Jeur,  courage,  dans  les  combats,  leur  loyauté  dans  Içs 

affaires,  prouvent  que,. si  le  plaisir  les  captive^et  les 

, ^traîne ,  leur .  cœur  est  aussi,  susceptible  des  plus 

généreux  sentimens.  Ce  penchant  pour  la.dissipation 

,n!est.pas  même  lellement  général,  qu'on  n'y  puisse 

^jfiiire  de  nombreuses  exceptions:  nous .  avons  vu 

combien  il  y  a .  d'établissemens  de  bienfaisance ,  de 

, sociétés, établies  pour. secourir  ies  indigens  ;  ily.a 

aussi  une  société , de  jeunes  gens,  qui,,  principal 

Jement  les  jours  de  fêtes,  se  consacrent  à  la  visite  et 

à  la  consolation  des  malades. dans  les  hôpitaux. 

.    La  nourriture,  est  .chère  .à  Marseille.  Le  blé  y 

vtent  de  l'Afrique  et  .du  Languedoc,  et  ie  pain  est 


liMMiaiM iii 


OL 


-~-  -    '■    . 


ieore  est  celledea  f<int«mes  ^i  sont  derrière  It  vietUd 
ville  y  et  qui  arrivent  au  port.  Cotif me ,  dans  toute  la 
Provence  >  le  bœuf  est  rare  et  le  vem  eneore  plus , 
en  mange  principalement  du  mouU>n ,  de  Pagneau 
0t  du  chevreau  ;  îl  y  a  une  grande  quantité  d'ex** 
ceOens  poissons;  beaucoup  de  melluaques  et  df 
crustacées  servent  aussi  aux  délices  de  la  table  :  les 
légumes  sont  abpndans.  Outre  les  fruits  du  pays ,  tels 
que  les  figues,  les  amandes ,  les  prunes,  les  raisins, 
fl  y  en  a  encore  beaucoup  d'autres  qtii  viennent 
de  diverses  contrées.  L'Espagne  fournit  ses  orangef 
et  ses  grenades ,  moins  acerbes  que  celles  de  Nice 
et  d'Hyères  ;  l'Italie,  ses  châtaignes,  ses  pommes  et 
a^es  rafains  secs  ;  et  le  Levant ,  ses  dattes  et  ses  pis- 
taches. On  ne  consomme  guère  à  MarsdHe  que  du 
lait  de  chèvre  :  tous  le$  matins ,  )usqu1i  nf  uf  <^  dix 
heures ,  les  marchands  de  iait  eondiûsent  ieujrs  chèvres 
dam  la  place  de  la  Comédie ,  et  établissent  leur 
comptoir  sur  les  degrés  de  cet  édi&ce;  fls  lés  fraient 
k  mesure  que  les  pratiques  se  présentent.  Le  peuple 
mange  beaucoup  de  firuits  cuits  :  à  la  pointe  du  |our , 
dès  que  le  bruit  du  canon  a  annoncé  l'ouverture  du 
port,  on  entend  des  femmes  qui  les  débitent  en 
criant  :  perre  cuecka!  pouma  cuakâl  UMei  caudû!  Le 
soir ,  ce  sont  les  betteraves  tôutâ  caudo  qui  ont  du 
débit  ;  elles  font  le  souper  de  la  plus  grande  partie 
des  gens  de  peine  et  des  ouvriers. 


en Àf  tXRE  XXXXTIU^  JJ? 

Tihit^e  que  je  viens  da  dite  tknt  aux  {AflHirs  généh 
i6ilf&  1 3  me  leste  encore  it  fme  connoi^e  qiielqued 
usages  particuliers  à  Marseille  et  à  diverses  autm 
filles  de  la  Provetee. 

J'ai  dé^  parlédeqttdques  pratkpes  religieuses  (  i  )« 
ijrentnmt  dans  les  églbes^  on  est  âappé  de  h 
singularité  des  iwages  du  Christ  sur  la  croix  ;  il  ^t 
Tptésq^e  toufonks  vêtu  d'un  ample  caleçon*  Cet  usage 
appartient  ii  l'Eglise  grecque  ;  Cas^n  Tavoît  ap« 
portée  avec  beaucoup  d'autres,  de  Cotistantim^le^ 
On  appelle  ces  sortes  de  représentiâiom  4ies  aructfoc^ 
iJéi grecque^  On  en  vo^oit  autrefois  de  semblables, 
sur-toutàSaint-*Vîctor,  aux  Accoules^et  dans  d'autres 
axnennes  ^lises;  mais  il  y  en  a  encore  où  le  Chrbt , 
entre  fe  caleçon ,  a  tme  tuaicpe  blanche  et  une  cha^ 
iuUe  de  pouqire ,  qui  sont  les  marque^  du  sacerdoce 
et  de  la  royautés 

Beaucoup  de  maisons  ont  leurs  portes  marquées 
d'une  croix  y  qu^on  &it  le  four  de  la  Chandeleur  avec 
de.  la  cire  ou  de  la  fîimée  :  cette  pratkpie  a  pour 
ob^  d^dbigner  l'esprit  maljn.  Depuis  un  temjw 


•A. 


(i)  François  Marchetti  a  composé  sur  ce  sujet  un  volume 
«Ati^r ,  fncitufé  Explieation  dts  usages  tt  coutumes  des  Marseilhis ; 
Marseille,  1683,  iïi-8.** ,  tome  I.**',  contenant  ics  coutumet 
sacrées  (  le  second  volumfe  n'a  pas  été  publié  ).  La  plupart  des 
usages  que  l'auteur  décm  n'existent  plus  ;  plusieurs  se  retrouvent 
4ans  toutes  les  églises  f^thotiques  ;  et  le  tout  est  noyé  dans  ua 
insipide  et  ennuyeux  commentaire. 


3J3L  CHA^FÎTRE  LXXXyrR 

immémorial,  or  bénit  daûs-l'églbe  dè'Saint-YîiekMr^ 
ie  jour  delà  Chandeleui; y  dbs  cio'gcs  de  codeur 
verte* 

On  voit  sortir  de  lacharre  du^prédicateurungfand 
bras  sculpté  en  bois  y  -  cpxt  porte  un  crucifix  mobile  r 
dans  d'autres:  égUscs,  ce  bras  porte  ia>  deige  pow 
aider  à  lire  dans  les  soirées  d'kiveiu 

Dans  les  grandes  solennités,  Tin  teneur  dh»s^^Kses 
est  tendu  en  damas  cramoisi  encadré  dans  des  ga«^ 
Ions  d'or;  les  chapelles  sont  pavées  à:  ^extérieur  de 
franches  d'arbres ,  et  sur-h»it  de  lauriei^;  et  For 
dresse,  à  l'enti ée  du  chœur.,  ek  de¥ant  la  porte  prin-^ 
cipale,  des  arcs  de  triomphe  en  'verdure(r}. 

La  fête  de  Noél  est  unede  celles  queles  Provençauac 
célèbsent  avec  le  plus  de  plaisir  et  de  solennité.  Pen-» 
dam  un  mois ,  on  entend,  dans  la  rve,  des  concerts 
qu'on  appelle  aubades  de  calene  (2) ,  symbole  des 
concerts. angéliques  qui  annoncèrent  la  naissance  du 
Sauveur.  Les  enfans,  les  jeunes  gens,  attendent  ce 
jour  heureux  avec  une  rive  impatience;  et  toutes  les^ 
Êimilles .  aisées  se  préparent  à.  le  fêter  dignement 
en  faisant  d'amples  provisions.  Plusieurs  jours  avant  ^ 


(v)  On  ne  reti:oiive  guère  àMatseifb  de  tr^^ccs^  de  ces  divcrib 
«sages;  maïs  ils  existent  encone  à  Fréjus,  à  Antjbes.,  â  Nice,  ftc 

(1)  C'est  le  mot  caîtndt  corrompu.  L^  Françsûs  commen-^ 
f oient  autrefois  l'année  le  jour  de  la  Nativité»  qu^ils  appeloiqitt 
\tjour  des  cajendes  -^  c'e^t  le  nom  que  Itû  diimiueot  Froiss^xx  C| 
d'autres  anciens  auteurs  françai;!.. 


i 


MMflMiÉMHIHMiflMll 


iciiAtitiiE  txrxvit.  35 j 

les  lK>titiqu«s  de  comestibles  déploient  tout  le  Tu^e 
tie  la  fîjandise>;  les  q\iais  sont  encombrés  de  fruits  du. 
Midi;  les  boutiques  du  marché  aux  fleurs  sont  cou*- 
vertes  de  bra«cbe$,d't>ranger ,  chargées  de  leurs  fleul-s 
éblouissantes  et  de  leurs  fmits  dorés.  On  achète^ 
pour,  parer  la  table  du  )oyeux  bampiet  oà  ce  jo\ir  doit 
étre-c^ébré)  xle  petites  oranges  dans  d'élégantes 
corbdlles  y  d)es  r^insdans  de  joiis  pots.  On  donne 
aux  enfans  des  branches  de  iaulrier>  auxquelles  sont 
suspendus  des  fruits  nouveaux,  ou  de$  fruits  secs  ou 
iïonfits;  on  leur  d6nne  de  petites  ijrèches  garnies 
de  miroirs  et  plus  ou  moins  ornées ,  remplies  de  - 
JOUJOUX ,  parmi  lesqudk  iotit  des  figures  en  plâtre 
des  animaux  et  de  tous  les  personnages  qui  ont  figuré  . 
à  ia  naissance;  du  Sauveur  i  on  y  ajoute  des  figures 
de  prêtres  >  de  papes ,  d'évéques  ^t  de  saints  :  parmi 
les  animaux  on  place  des  ^rigognes  de  carton  ou  de 
cotofi,  qui  ont  un  grand  bec  de  kine  rouge.  D'où, 
vient  ce  dernier  usage  !  Probablement  de  ce  que  les 
Marseillob  ont  conservé  ce  symbole  antique  de  la 
piété  filiale ,  sans  songer  qu'ils  le  tiennent  des  Ro-. 
mains  { i  ) ,  et  qu'il  pourroit ,  dans  cette  occasion , , 
iR>umir  matière  à  d'utiles  leçons. 

La  veille  de  la  fête  est  sur-tout  remarquable.  Dans» 
nos  villes  du  nord  de  la  France ,  on  entend  seulement^ 
un  bourdonnem^it  sourd  de  personnes  qui  se  rendent 

m  ■ 

(i)  Sur  beaucoup  (fe  métUiiies  romaines,  on  voit  une  cigogne 
avec  le  root  pietas. 


Jj4  CMAMTHE   LXXXVII/ 

k  la  messé  de  tninuit  ;  les  bottiit^&  dés  diarcutieri  eti 
d&i  marchands  de  vin  sont  seules  éclairées  :  les  gêas^ 
ridies  et  de  la  haut»  société  ne  prennent  aucuhe  pÊêtt 
à  h  fête  $  il  n'y  a  que  le  peuple  qui  fas&e  cd  &fsM 
lepas  qu'on  appelle  févHiïon  >  et  qui  ddniiste  uniqûie-' 
iheht  à  manger  de&  ^aucis&^s  àciw,  des^boudinsiftidi^ 
gestes  y  du  jambon  dur  y  et  enfin  des  viandes  imp¥é^ 
gnées  de  séi  et  dt  poivm  »  ipii  excitent  à  boire  ^  et  qui 
fbnt  souvent  dégénét«ff  ces  pieuses  ftgapes  en  dé- 
goûtantes orgies  ^  déshonorées  par  l'ivresse  )  etquel^ 
quefois  ensangtamées  par  les  déiiats  qui^n  sont  l6t 
^te.  A  Marseille  ^  le  cours  est  éclairé  la  veille  d4 
Noël  comme  djins  la  nuit  delb  $abit-Jeân  ;  toutes  tei, 
bouquetières  ont  leur  habit  de  fête;  lesboudqpi^soâl 
parées  )  ie^  cafés  sotit  richement  ibuninés^  et  pa^-^ 
iKc^t  une  lumièire  brillante  annonce  la  joie  ^uséé 
par  la  nai^^ance  du  Sauveur  t  les  plus  p^vres  mar^ 
<^nds  de  marrons  rôtis  ont  leur  gril  enmuré  de 
plusieurs  lampôs.  Aucune  femme  n'oseroit  parottre 
susins  bouquet  i  les  ftlles  publiques  portent  de  grosses 
ofanges  et  d'énofmës  touffes  d'èeSIets.  Uéclat  des. 
représentations  théâtrales  est  augmenté;  on  y  eîé^ 
cute  les  plus  beaux  ballets  :  tes  maisons  de  |èu  donïient 
dés  bais  et  dès  soupers.  Pair- tout  le  son  du  violon 
se  méié  \k  celui  du  bruyant  tambourin  et  du  perçant 
galoubet  ;  par-tout  on  entend  chanter  les  noëls  pro*- 
vençaux  sur  les  airs  qui  leur  sont  consacrés  (i)é  Les 

(i)  11  en  sera  cfuestion  ailleurs,  à  1  article  des  Bohémiens. 


'■--t:U;j*s»-ir-..- 


\  . 


W&ci  %oh%  côtivei'tes  de  tfioade  ;  ctiftcuii  De  jprésse 
pour  Met  |>rendm  pait  au  banquet  qui  tkiit  lieu  de 
la  coHatidA  dii  Doih 

Dans  IH  familles  où  le^  itïos!ùH  ^tkfaè^  ^  sbhf 

iCQkis^rvéès ,  on  prépare  une  chëpèfllè  detattt  liqûeile 

on  «ires^ê  une  colfàlfon  t  c'«st  ôrffînaihemait  ie  chè^ 

de  la  famiiiëqui  pfé^iàe  à  cet  arrangement;  quelques 

fàk  4té  $ont  «es  enâns^  sur^éut  les  |eune$  fitté»^ 

qoi  lont  chaygéi  de  42e  ^in.  tùû^  Ié$  tfiembtet  de 

k  famitlè  ikMlt  invHéii ,  tàtisi  qtte  ie^  peitdtinèir  & 

qui  elfe  ddit  du  tesjf^i  -,  èil  à  qui  élte  ii  de§  ^i^^ 

gQitonè^lh  ^nt  encdHî  invités  àii  dther  du  jour  dé 

Noôl,  et  on  ôppdie  delà  pàsUr  fkt  eHseniUe.  Gèi 

f^^  0nt  réelIerMnt  quèkii^  chose  de  patHaitàl  i 

èft  cette  institution  est  des  plus  heureuses  pèu^ 

efiftretéiâr  runion  dans  les^  famlBes  :  ceux  qui  mi 

j^ssé  Une  année  entière  sans  se  Vôiir,  scmt  forcée  de 

se  rapproel^i*  ;  ^es  înîttiitiés  fbmemèeS  pendant  jik-* 

ëièurs  m^ ,  iièssent*  On  se  regarde  d^abôrd  avec  cOn- 

ttftJnte;  on  se  parle  peu,  puis  davantage;  la  liberté 

flu  festin  «tttièhe  I*abandon  et  la  cohfiâhcè  ;  ort  s'ex* 

pHquê ,  dn  finit  par  s'eatendre ,  et  Une  réconcilia* 

«on  sînt?ère  et  durable  nà!ï  du  sèirt  des  plaisirs.  Deà 

Iftarîages  ^dnt  souvent  aussi  la  suite  de  Ce  b&nqUet 

domestique  î  faraam  timide  s^enhardit  ;  ia  feune  fiiie, 

inalgrê  sa  retenue ,  laisse  apefàevohr  lâ  préfërettce 

que  son  cteur  accorde  ;  les  parens  s^entendeiit,  !e5 

arrangemens  sont  bientôt  faits ,  et  Timion  est  comduB» 


HHMMM«HMiM^MÉM^Hlî^Ba 


L'^égance  des  inets>  la  propreté  de  la  talbté  <rt 
de  la  salle;  ajoutent  encore -un  plus  grand  leharmé 
à  cette  fête  de  famille^  Ceux  q\ii  suivent  'scrupu«>^ 
leusement  les  usages  andens  ^  couv^c^nt  la  table  de 
tFob. nappes^  et  y  mettent  treîce  pains  ornés  de 
branches  de  myrte;  de  grandes  corbeilles  sont  diar-»-. 
gées  de  raisins  fiais  ou  secs  ^  de  figues ,  de  pommbs^ 
de  poires ,  de  cédrats  confits  ;  des  boîtes  feçouTertes 
de  papier  rose  ou  blanc  artistement  découpé  ren-^ 
fer;f9ent  des  fruits  secs  ;  des  raisins  de  Corinthe»  des' 
jmmes  deBrignpUes;  les  oranges  forment  des  pyra-n 
HHdes»  terminées  par  des  bouquets  de  ia  fi^iir  ôdo« 
iraii^e  du  bel ,  arbre  qui,  les  a  produites^  Âiitour  de 
ççs  mets  exquis  »  offerts  paria  nature;  sçnt  rangées 
des  pâtisseries  9  de^  friandises  de  xoute*espèce ,  parmi 
lesquelles  le  nougat  blanc  (i)  se  fait  surr^ut  remar*^ 
quejr.  Les  flaconf^ont, remplis  de  malvoisie,  de  viiV 
cuit  et  de  muscat  de  Tquioii  ou  de  Cassis» 

Pendant  ce  tçmps-ià)  le  ^aiignau  ou  ùalendeau^ 
ç'est-^-dire^  \2l  kuche  des  calendes  ^  brûle  dans  la  che* 
minée  :  c'est  une  gi;os5e  bûche  de  chêne  ^  qu'Qn  arroso 
de  vin  et  d'huile.  On  crioit  autrefois  3  en  la  plaçant  ^ 
(olene  yen  /  tout  ben  yen;  c'est-à-dire ,  eaUnde  vient,  tout 
va  tien.:  Peut-on  méconnoître  ici  l'usage  antique  des 


"  •  -1 


(1)  C'est  un  mélange.de  noisettes,  de  pignons  de  pîn^  et  (te 
pistaches,  confits  dans  du  miel  de  Narbonne  :  le  plus  souvent 
il  n'y  a  que  des  amandes  et  du  mieli  recouverts  d'un  pain  à 
«chântec^ 

libations  ; 


iJUMM 


^^^^^,^^^^m 


ii 


À 


fibaiâdns^  transporté^  ;comme  tant  d'autres  cérémo 
ïiîes  palenneSydsms  les  pratiques  des  chrétiens  !  C'e^ 
3e  chef  en  le  plus  4Lgé  de  la  famille  qui  doit  mettre 
le  feu  à  îa  bûche  r  ia  flamme  que  ce  bois  ainsi  arrose 
produit,  i'appGUefOjÇofufcA,  <:'e8t4-dire,  feu  d^amJs  ; 
«et  en  effet  la  fête  de  Noël  est  véritablement,  <:he« 
ies  Provençaux  ^  la  fète  de  l'amitié. 

Dans  la  campagne,  cette  fèie  €st  quelquefois 
raccompagnée, comme  la  fètepatronale^  de  luttesv,  de 
XQurses ,  ^e  combats  de  qoqs  ;  on  y  <iresse  aussi 
^es  mâts  de  cocagne. 

Je  ne  puis  passejr  .sous  sâence  un  usage  <pri  existe 

^ans  la  basse  Provence^  et  prmc^alejnem  dans  les 

territoires  d'Amibes,  de  Fréjus,  ^e  Dj-aguignan,  «l 

^e  quelques  autres  yifles  du  département  Ai  Van 

Pendant  les  ^uatrc|^  semaines  qui  précèdent  Noêl^ 

ïesjeunes  gens  domient  des  àul)ades  au:^  filïes  qu'ils 

TeçhejFchent  eii  mariage  ;  chaque  fiHe  prépare  pour  ta 

V^ile  de  la  fète  un  gâteau  qui  porte  son  nom  et  utt 

ïiumér-o^  et  le  remet  à  cdui  qui  est  regardé  comme 

fe  coq  du  vitl^Cy  et  qu'on  appelle  7  V^^^v  Deux  ;ours 

après  No^I ,  tous  les  feùnes  gens  se  rassemblent  sur 

«ne  place;  on  y  apporte  les  gâteaux  dans  une  grande 

corbeille,  et  ils  sont  tous  mis  à  l'enchère  ;  le  plus  jeune 

des  garçons  lire  successivement  untie  ces  gâteaux, 

€t  proclame  le  numéro  et  le  nom  de  celle  qui  V^ 

donné  ;  aïors  viennent  les  éloges  de^sa  beauté,  de  son 

économie ,  de  toutes-ses  qualités  ;  on  enchérit  à  l'envi 

Tome  III  X 


i 


5î8  CHAPITRE    LXXxVir. 

pour  avoir  son  gâteau.  Il  est  facHe  de  deviner  que  fei 
gâteaux  des  filles  jeunes  et  jolies  trouvent  plus  d'ac- 
quéreurs que  ceux  des  filles  vieilles  ou  maf  faites  : 
cependant  tout  a  du  débit,  et  le  produit  de  la  vente 
est  mis  en  commun  pour  payer  les  ménétriers  pen- 
'    dant  tout  le  reste  de  l'année. 

Les  Marseîlloîs  ont  encore  d'autré^s  fêtes  dans  les^ 
quelles  leur  gaieté  naturelle  trouve  à  5e  manifester  ; 
telles  sont  U  veille  des  Rois ,  la  fête  de  la  Belle  Etoile': 
on  promène ,  comme  à  Pertuis ,  cette  étoile  dans  ùii 
char. 

II  n'y  a  pas  fong-temps  que  Ton  a  aboli  à  Mar- 
seille In  coutume  de  porter  dans  les  rues ,  le  jôiir  dé 
Pâques- fleuries,  une  grosse  branche  d'olivier  qu'escor- 
toîent  plusieurs  enfans  trouvés  de  l'hôpital ,  en  criant 
de  toutes  leurs  forcés,  lou  rampaou  de  rÊspitaou; 
les  femmes  attachoîent  à  ce  rameau  des  gâteaux  et 
des  fruits  :  lés  enfans  présentoient  leur  tirelire  à  tous 
ceux  qu'ils  rencontroient .;  et  en  les  poursuivant 
pour  en  recevoir  quelques  pièces  de  monnoîe ,  ils 
les  appeloient  mon  pire  ou  ma  mère.  Quelques  per- 
sonnes portèrent  des  plaintes  contre  une  coutume 
qui  leur  paroissoit  scandaleuse ,  et  les  échevins  dé- 
fendirent cette  promenade,  dont  Tinstitution  étoif 
très-ancienne  :  aujourd'hui  on  suspend  ,  seulement 
aux  rameaux  de  laurier  ou  de  palmier  garnis  dé 
rubans  que  portent  les  enfahs,  des  gâteaux,  des 
fruits  et  des  confitures;  le  prêtre  les  bénh,  et  on 


^MMMi 


«■M 


CHAPITRE   LXXXVIÏ.  ^3'^ 

lès  sert  dans  les  collations  def  la  semaine.  Dans  toutes 
les  familles  des  artisans,  on  a  conservé  la  coutume  de^ 
manger  ce  jour-là  des  pois  chiches  { 1  ).  On  a.  voulu 
retrouver  dans  cette  pratique  la  fête  des  Pyanepsks, 
instituée  à  Athènes  par  Thésée ,  et  qui  étoit  appelée^ 
ainsi  parce  qu'on  y  mangeoit  des  fèves  /^nJcen)^, 
pyanon],  en  mémoire  de  ce  qu'au  retour  de  Crète  les 
jeimesgens  que  ce  "prince  avoit  délivrés  mangèrent  les' 
féy^s  qui  restoient  des  provisions  de  leur  voyage  [1)  : 
mais  M.  Grosson  prétend  qu'un  vaisseau  chargé  de 
pois  chiches  fut  jeté  sur  la  côte  de  Marseille  daiis 
un  temps  de  disette,  et  qu'en  commémoration- de; 
det  événement,  l'usage.s'introduisît  d'en  manger  tpus-^ 
Ifs  ans.  Cepetidant  cet  usage  n'existe  pas  seulement? 
à  Marseille  ;  il  se  retrouve  encore  en  Italie ,  en  Es- 
pagne ,  à  Gènes  et  à  Montpellier.  Le  peuple  de  cette 
dernière  ville  croit  que  lorsque  Jésus- Christ  entra- 
dans  Jérusalem ,  il  traversa  une  sesJeroit,  ou  champ. 
de  peîs  chiches,   et  qu'en  mémoire  de  ce  grand 
jour  Fusage  s'est  perpétué  de  manger  des  sesejr  ou 
des  pois  chiches  (3).  Il  me  paroît  plus  naturel  de 
penser  que  cet  usage  est  une  commémoration  de  la 
coutume  des  Hébreux  de  mettre  les  pois  chiches 
au  nombre  des  provisions  qu'ils  empdrtoient  dans  les 
voyages  :  c'étoît  aussi  la  coutume  des  philosophes 


* 
«■*■ 


(i)  Cîcer arietinum, 

(2)  Magasin  encyclopédique,  année  1805,  t.  IV,  p.  244. 

(3)  Magasin  encyclopédique,  année  180^  ;  t.  VI,  p.  2^9. 

Y    2, 


'^iô  ChÀ^ITHE  Ï.XXXVIT. 

içyniques»  que  Ton  nous  représeme  souvent  ayant 
leur  besace  remplie  de  pois  chiches^ 

J'ai  parié  du  goût  des  Provençaux  pour  las  proces- 
sions^ et  j'ai  décritcelles  qui  ont  lieu  à  Aix  et  kMar-- 
seille  le  jour  du  5aint-Sacrement  (  i },  La  procession 
xleJa  délivrance  <Ies  captifs  avoit  pour les  Marseiilois 
un  intérêt  vraiinentdfamatique  :  c'étoîent  les  religieux 
-de l'ordre  delà  Merci,  fondé  ert  Espagne  par  S.  Pierre 
Noiasque,  et  les  Trirâtaires,  établis  en  Pjovence  dans 
le  xiK^'siède  par  Jean  de  JVtatha et  Félix  de  Valois, 
qui  se  chargeoîent  du  noble  sewn  de  recueillir  les -dons 
des  chrétiens  compatîssans,  et  d'en  employer  le  pro- 
<Iuità  la  rédemption  des  captifs  ;4Isconsacroient  même 
àcette  œuvre  méritoire  le  tiers  de  leurs  propres  revej 
nus.  Ces  sacrifices  pécuniaires  n'étoient  que  les  pré- 
mices d'une  charité  plus  sublime  encore  >yd!un.  plus 
-généreux  dévouement-:  ils  alloient  ensuite  braver  les 
périls  de-toute  -espèce,  les  avanies  qui  les  attendoient 
<ians  la  Barbarie,  et  ramenoieut  avec  eux  un  notfibre 
plus  ou  moins  grand  d'infortunés  qu'ils  avoient  arra- 
chés k  l'esclavage.  La  procession  de  ces  captifs ,  mar- 
chant deux  à  deux  en  casaque  rouge  ou  br4xne^  les 
mains  encore  chargées  de  fers,  montrant  les  marques 
des  coups  qu'ils  avoient  reçus  ,  des  mutilations  qu'ils 
avoient  souffertes,  et  suivant  leurs  rédempteurs  pour 
aller  rendre  grâces  à  Dieu  de  leur  rachat,  avoit  un. 


CHAPITRE  LXXXtil.  J^i 

't:aractèrep!us  vénérable  et  plus  touchant  à  MarsèîBe 
qu*à  Paris,  où Fon  voyoit  aussi  d)e  tempç  en  temps  ie 
-même  spectacle  r  les- communications  fréquentes  ôt 
directes  des  Marseilloi&avec  le  Levant  pouvoient  faire 
craindte  à  chacun  d'eux  un  pareil  sort,  et  l'homme  est 
naturellement  plus  sensible  auxmaHieurs  qu'il  pour- 
roît  également  éprouver;  il  y  avoit  d'ailleurs  parmi 
ces  captifs  de»  hç>mmçs  qui  avoient  encore  des  amis 
•  letdès  relations  dans  la  ville.  Espérons  qu'une  société 
d'hommes,  bienfaisans  s'établira-  pour  remplacer  les 
'  généreux  Pères  de  fei  Merci  et  les^Trirritaires^,  et  que*, 
dirigée  par  un  esprit  philanthropique  plus  étendà 
et  plus  digne  encore  d-une  si  beBe  institution ,  elte 
ne  se  borrïera  pas  à  délivrer  des  chaînes  dé  Tunis  dt 
•d'Alger  lès  esclaves  catholiques*,  maïs  qu'elle  étendra 
ses^  soins  charltabhes  à  tous  ceux  qui  mériteront  ck 
Bienfait,;  quelle  que  soit  ki  religion  qu'ils-  pto^ 
fessent; 

La  veille  de  la  Saint- Je^i  est  égafementuiï  joxxt 
de  joie  pour  les  Provençaux,  Us  allument  de  grands 
feux^-  les  jeuneS'gens  sautent  pardessus*  A  Aâx,  oil 
accable  les  passans-de  fusées  et  de  serpenteaux  f  ce 
•qui  a  eu  souvetit  de  fâcheux  effets.  A  Marseille ,  oa 
s'iiK>nde  réciproquement  d'eau  de  senteur,  que  l'on 
Verse  des  fenêtres-,  ou  que  l'en  jette  avec  de  petites 
sMHiguesfi')  :  le  plus  grossier  badinage  est  de  couvrir 

1^1  a   _     j  I  __-,_^j ,  n-i  -^^^    -    ■— ITT  n|-  II  I m" ~-\ •^T ' "^~ 

> 

»3 


j4^  CHAPITRE    LXXXVIf. 

d'eau  pure  les  passatis  ;  ce  qui  donné  lieu  à  de 
grands  éclats  de  rire.  A  Marseille ,  la  vente  des  herbes 
et  des  fleui^s  donne  à  cette  fête  un  caractère  parti- 
culier. ' 

Le  commerce  des  fleurs  devroît  è^re  encouragé , 
par  des  considération^  morales  et  d'hygiène  publique. 
Le  parfum  qu'elles  exhalent ,  rend  l'air  plus  pur ,  du 
moins  pendant  le  jour.  Une  fleur  a  des  charmes  aux 
yeux  du  pauvre  ;  elle  n'est  pas  un  objet  de  dédain 
pour  le  riche.  L'humble  basilic  du  savetier,  la  vulgaire 
capucine  qui  grimpe  en  spirale  autour  des  fils  que 
l'artisan  lui  a  tendus  sur  sa  Fenêtre ,  leur  font  autant 
de- plaisir  qu'en  peuvent  causer  à  l'homme  opulent  le 
jare  metrosideros  et  le  superbe  datura ,  qui  s'élèvent 
dans  des  caisses  d'acajou  sur  son  balcon  dbré  :  une 
jeune  fille  arrose  avec  autant  d'intérêt  son  myrte  et 
4on  rosier,  qu'un  fleuriste  hollandois  en  met  k  soigner 
ses  orgueilleuses  jacinthes,  se^  riches  tulipes  et  ses 
magnifiques  ariémones.  La  vue  et  le  parfum  des  fleurs 
adoucissent  les  peines  de  l'ame ,  sans  l'arracher  à  la 
mélancolie  nécessaire  pour  user  sa  douleur.  Il  est  rare 
que  celui  qui  airtie  les  fleurs  soit  mécliant  :  elles 
peuvent,  en  procurant  une  douce  émotion,  distraire 
de  ridée  d'un  crime  un  homme  dont  la  raison  s'égare. 
La  fleur  est  la  parure  de  la  jolie  grisette  commet  la 
fière  courtisane ,  celîe  delà  simple  bergère  coiiîme 
de  f  auguste  reine.  Il  est  un  temps  dans  la  vie  où  une 
fleur  est  le  don  le  plus  gracieux  qu'q^i  puisse  offrir 


CHAPITRE   tXXXVXl.  34j 

^t  recevoir;  et  même,  quand  les  heureuses  illusions 
dûporoissent  avec  Tâge,  on  aime  toujours  les  fleurs 
qui  "viennent  des  personnes  que  l'on  chérît.  Avec 
quelle  douleur  on  voit  se  flétrir  et  dbparcwtre  ces 
gages  si  charmans  de  la  tendresse  d*un  frère,  d'un 
fils ,  d'an  ami  !  il  semble  que  ces  fleurs  soient  dépo^ 
fitsûres  de  leurs  sentiment  ;  on  croit  cuhive|'  en  elles 
)a  tendresse  fraternelle ,  l'amour  filial ,  et  le  charme  de 
^amitié.  Voilà  pourquoi  les  poètes  ont  tant  célébré 
les  fleurs ,  pourqupi  elles  sont  si  chères  aux  amans. 
I^es  Orientaux  ont  été  jusqu'à  leur  prêter  un  lan* 
gage;  ils  trouvent  dans  leurs  formes  et  éms  leurs 
çoideurs  une  manière  d'exprimer  toutes  les  nuances 
4^  r^espoir ,  de  l'amour  et  de  la  jalousie. 

Les  fleurs  ne  devroient  être  vendues  que  dans  des 
quartiers  spacieux,  dont  l'abord  fût  propre  et  facile^ 
par  des  femmes  agréables  et  élégamment  vêtues)  ; 
ces  Glycères  trouveroient  alors  des  Pausias.  A  Paris, 
la  vente  s^n  fait  dans  le  lieu  le  plus  sale  de  la  ville  ^ 
près  du  qiarché  au  poisson  (  i  )  :  on  y  arrive  par  des 
rues  nc«res,  étroites,  boueuses  et  infectes;  et  la 
inaîn  grossière  qui  les  présente ,  sent  encore  l'huître  ^ 
qu'elle  vient  d'ouvrir,  la  limande  ou  le  merlan  qu'elfe 
a  débité  la  veille.  A  Marseille ,  au  contraire ,  la  vente 


(i)  On  en  vend  aussi  sur  îc  ^uai  de  la  Ferraille;  mais  ce  Ircu 
est  étroit,  et  n*a  pas  Ta^ment  qui  convient  pour  im  march/aux 
fieurs, 

■  y  4 


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I'Vt- 


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j44  CMAWTRÊ  trxxTm 

«tes  ffeurs  se  fait  sur  le  cours ,  entre  la  me  <fe  Rbtn^ 
et  la  Canebière  ;  etfe  a  lieu  toute  Fannéev  et  ménM^ 
pendant  Phi  ver  :  c'est  là  que  <îe  jetines  filles,  agréa* 
blement  vêtues ,  dont  phisîèurs  sont  coiffées  cPunchai- 
peau  de  castor  rond  orné  de  rubans  et  de  gâtons 
d'argent,  se  rangent  sur  deuxfifes;  elfes  tiennent 
dans  les  mains  des  touffes  de  fleurs  ;  elles  ont  de& 
arbustes  dans  des  pots  ;  elles  présentent  des  plantes 
agrestes  commedes  plantes  cultivées ,. des  tubéreuses^ 
àes  narcisses ,  des  jacinthes,  enfin  des  KKacéés  de 
toute  espèce ,  des  cassies,  des  jasmins,  des  brandies 
d'oranger  et  de  nyctanthes.  Plus  ïoin  sont  entassa 
tes  melons,  tes  pastèques,  les  aubergines,  les  raisîns^^ 
tes  figues,  tes  pèches  :  par- tout  Pomonè  unit  tes 
richesses  au  luxe  de  Fibre. 

Le  goût  des  fleurs  est  sr  généraf ,  qu\ine  filîe ,  qiidtï, 
que  pauvre  qu'elfe  soit,  n^oseroil  sortir  fe  dimanche 
sans  en  parer  son  sein.  Outre  les  jardins  de  Mar- 
seîlte  ,  on  met  à  contribution,  pour  en  obtenir  une 
aussi  grande  abondance,  ceux  de  Toukm ,  de  Nîce> 
de  Sàiiit-Remy.  Tous  les  balcons,  toutes  les  t^^rasses,. 
en  sont  garnis.  La  veille  de  h  Sain  t- Jean ,  h  place  de 
Noailles  et  fe  cours  sont  nettoyés.  Dès  trois  heure* 
du  mîrtin,  les  gens  de  h  campagne  y  aflîuent  ,^  et  S 
si^  heures  tout  y  est  couvert  d'une  quantité  considé-» 
rabfe  de  fleurs  et  d'herbes  aromatiques  ou  autres  :.  le 
peuple  attache  à  ces  plante^  des  idées  superstitieuses  ^  ii 
se  persuade  que  si  elles  ont  été  cueillies  le  jour  mémo 


^  . 


■■;)» 


CHAPITRE    LXXXVII.  34) 

iVant  le  lever  du  soleil  (  i  ) ,  elles  sont  pi'opres  à  la 
guérison  de  beaucoup  de  maux.  On  s'empresse  à 
i'envî  d*en  acheter ,  pour  en  faire  des  présens ,  pour 
en  remplir  sa  maison.  Les  paysans  en  donnent  aux 
personnes  à  qui  ils  fournissent  habituellement  des 
légumes  et  des  fruits.  On  fait  encore  ce  jour-là,  dans 
quelques  villages ,  des  cavalcades  sur  des  mulets  oti 
des  ânes  ;  diacuri  y  porte  à  la  main  une  torche  de 
bois  résineux. 

Quelques  fêtes  sont  liées  aux  différentes  époques 
<ïes  travaux  champêtres.  Le  jour  de  Saint- Antoine, 
par  exemple,  des  moissonneurs ,  armés  de  faucilles  et 
portant  des  épis ,  passent  dans  les  rues ,  et  donnent 
à  ceux  qui  leur  jettent  quelque  inonnoie,  l'espoir 
d'une  bonne  moisson. 

Dans  plusieurs  villages,  et  principalement  dans 
celui  de  Tretz ,  le  second  jour  de  la  Pentecôte ,  on 
va  faucher  une  prairie  communale.  Cette  cérémonie , 
toujours  accompagnée  de  chants  et  de  danses ,  s'ap^ 
pelle  la  JRamaJo,  c'est-à-dire,  la  Ramée. 

Le  jour  de  la  inoisson ,  on  porte  en  triomphe  une 
colonne  d'épis  haute  de  dix  à  douze  pied^ ,  et  l'on 
forme  alentour  des  rondes  joyeuses.  A  l'époque  de  la 
vendange,  on  promène  sur  un  tonneau  pne  figure 
grotesque ,  chargée  de  pampres  et  de  grappes  de 
raisin. 

(  I  )  De  là  vient  le  proverbe  provençal,  Aco  soun  d'herùos  dt  San* 
Jtan  [Cela  ne  vaut  pa*  mieux  quelles  herbes  de  la  Saint- Jean]. 


34^  CHAPITRE  Lxxxyii. 

La  fête  patrpnaie  de  chaque  lieu  s'appeHe  Rouma-- 
wgi  y  et  par  corruption,  Romerage.  On  la  nomme 
ainsi  parce  qu'elle  précédoit  autrefois  un  voyage  à 
Rome ,  que  le  seigneur  faisoit  entreprendre ,  ou  qu'il 
faisoit  lui-même  par  piété  :  c'est  une  espèce  de  foire  > 
dont  les  amusemens  se  composent  (fes  jeux  dont  il  a 
4é|à  été  question. 

J'ai  parlé  ailleurs  d'autres  fêtes  et  d'autres  jeux 
que  l'ai  eu  occasion  de  décrire  (i). 

^i)  Vpjfei^k  Nice,  tome  H,  page  568,  Us  festins;  à  Aîx,  ihîd. 
page  305 ,  ^t  procession  ;  à  Marseille,  ièiJ.  page  372 ,  à  Riez,  suprà, 
page  54,  la  brapode;  au  chapitre  suivant,  différem  jeux;  à  Taiv 
tîcle  d'Arles,  U  ferraik. 


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CHAPITRE  LXXXVIII. 


Saint-Marcel.  —  Bas-reliefs  égyptiens.  —  Culture. 
— L'Huveaune.  —  Bastides.  —  La  Renarde.  —  Fête 
patronale.  —  Trin ,  courses  d'animaux ,  d'hommes  ; 
divers  exercices  ;  le  saut,  les  trois  sauts  ;  l'orbe  de  fer, 
le  palet ,  le  ballon ,  la  bravade  ;  jeux  de  hasard;  danses, 
la  provençale,  la  farandoulo  ,  la  moresque,  les  bergères, 
les  turques,  les  épées. 

Je  ne  voulois  pas  quitter  Marseille  sans  avoir  visité 
avec  attention  Tauroentum.  M.  Thifaaudeau  m'avok 
învttë ,  iors  de  mon  premier  passage ,  à  feire  avec 
lui  cette  excursion  (i).  Nous  nous  rendîmes  à  la 
Menante j  où  il  nous  attendoit. 

J'auroîs  désiré  voir  en  passant  la  maison  occupée 
yar  le  génial  Gardane  :  mais  ii  étoît  at>sent;  ce  qui 
aious  priva  du  plaisir  de  le  saluer,  et  d'examiner 
i{uelques  pierres  gravées  qu'il  possède. 

Nous  nous  arrêtâmes  à  Saint- Marcel  ^  hameau 
jvoisin  de  Marseille ,  près  'duquel  est  une  maison  de 
campagne  sur  les  bords  de  i'Huveaune ,  qui  appar- 
tient à  M.  de  Saint- Vincens  :  nous  voulions  y  voir 
.deux  ^s-reliefs  égyptiens.  Ils  ont  été  apportés  par 
Bonnecorse,  poëte  marseîHoîs,  que  les  satires  de 
Boileau  ont  rendu  P^^s  célèbre  que  ses  propres  écrits, 

(i)  Supra,  tome  II ,  page  38a. 


^48  ÉHAFitRE  Lxxxrnr. 

Boifean  ^  pfacé  un  de  ses  ouvrages  parmi  fes  Iîvt«ï 
qull  fait  servir  au  combat  des  chanoines  [i  )  »  et  Vst 
associé  à  Pradon  dans  ime  de  ses  épigrammes  {z)*, 
Bonnecorse  a  voit  été  consul  au  Csûre,  où  il  s'étott 
probablemerrî  procuré  ces  monumens^  dont  fal 
donné  la  gravure  ^pf,  XLV,  n^^  2  ^^  i)^  ^^  y  ^^ît 
-un  personnage  coiffe  d'une  cafotie ,  vêtu  d'une  peau  ^ 
et  tenant  à  la  main  une  arme  d'une  espèce  particu* 
lière  >  qw  est  terminée  par  un  gros  cylindre  l  à  côté 
sont  differens  signes  hiéroglyphiqvies.  Je  n'entrepren- 
drai point  de  déterminer  ce  que  ces  figures  lepré:* 
sentent  (j). 

On  croit ,  sans  fondement  >  qu'il  exbtc  une  rivière 
souterraine  auprès  de  Saint-Marcel.  Ce  lieu  est  bien 
planté  en  vignes.  En  générai  ^  le  terroir  de  JVlarseilfe 
produit  d'assez  bon  vin ,  mais  en  petite  quantité,  parce 
que  ies  bastides  couvrent  une  portion  considérable 
du  soi  ^  et  qu'on  mange  en  grande  partie  les-  raisins 
qu^on  y  cultive.  Les  oliviers  donneroient  une  huiie 
de  la  première  qualité;  mais  depuis  l'hiver  de  1789  > 
qui  a  fait  périr  ces  snrbres  précieux ,  leur  produit  est 
presque  nul.  L'agriculture  de  Marseiliese  réduit  donc 
à  très-peu  de  chose. 


■<n     u*t    ^i«t*»—*»*» 


(1)  La  Montre  df amour JWoytz  le  Lutrin,  chant  y. 

[x]  Eptgjr.  IV ^    Venez,  Pradon  et  Bonnecorse  , 

Grands  écrivains  de  même  force ,  &c. 

(5)  M.  de  Saint- Viticem  a  ptacé  depuit  un  de  ces  bas-rcKife 
dans  son  cabinet  d*Aix« 


CHAT^TT^K    lXXXVÏi!>  J% 

ÏJWuveaune ,  qui  passe  à  Saint-Marcel ,  est  k| 
^yièi:e  la  plus  considérable  du  teriitoire  de  Marseille; 
elie  prend  sa  source  au  pied  de  la  moitti^gne  où  est 
Ta  Sainte-Baume^  dans  le  département  du  Var,  entrer 
dans  celukdes  Bouches-du-Rhône  |>dr  Auriol ,  pa«sc^ 
à  Roquevaire ,  \  Aubagne^  traverse  ia  campagne  de 
JMarseiUe  jpar  la  Rei^rde ,  et  se  jette,  dans  la  iner^ 
au  quartier  de  Bonne  veine,  dans  le  golfe  <Ie  Mont- 
redoo.  Getterivière  reçoit  à  Saînt-Geniez  Je  Jjuet^ 
qui  con^mence  au  plan  de  Cuques,  dan?  rarrondîs- 
sèment  d'AlIaucb;  puis  elle  traverse  les  quartiers  dq 
Saîm-Just  et  des  Chartreux.  , 

C'est,  au  hameau  de  la  ^^nme  qu'est  la  .prise  dii^ 
•cai^I.de  dérivation  qui. passe  sur  les.  aqueducs,  au- 
dessus^  de  la  ppr^e  d'Ai3c,-où  l'on  reçoit  toujours 
quelques  gouttes  d'eau  qui  s'en  échappent.  -Cet  aque-, 
duc  se  termine  aux  Présentînes ,  dans  un  bassin  de 
division  qui  distribue  l'eau  à  toute  la  yille. 

Les  jiartîes  du  territoire  qui  sont  arrosées  par  le^ 
Biaud,  le  Jaret  et  l'Huveaune  ^  sont  plus  fertiles  que, 
les  parties  non arjosables,  et  fournissent  di|fourr^e^ 
des  légumes  verts  et  des  fruits  d'été,  mais  en  trop 
petite  quantité  pour  la  consommation  de  la  ville ji 
nous  avons  vu  d'où,  elle  tire  ses.  denrées.  On  a 
conçu  bien  des  projets  pour  l'arrosage  de  tout  le 
territoire  de  Marseille  (i)  ;  mais  leur  exécution  a 

(i)  Michel,  Statîstîqut  du  département  des  Bottehet-du-Rhêne 4 
<^m  k  Journal  de  statistique ,  page  34^» 


JjÔ  CHAPITRE    LXXXVIII. 

toujours  paru  impraticable  :  l'eau  contribueroit  ca-- 
pendant  beaucoup  à  rembeIKssement  des  bastides* 
Il  n'y  a  que  celles  qui  sont  le  long  de  THuveaune 
^ui  ont  de  l'ombrage  ;  ce  sont  aussi  celles  dont  1er 
terrain  occupe  une  plus  grande  étendue,  • 

C'est  par  le  défaut  de  verdure  et  d'ombrage  que 
la  plupart  de  ces  habitations ,  si  chéries  des  Marsçff- 
lois,  manquent  de  l'agrément  qu'on  estime  ie  plus 
dans  une  maison  de  campagne.  Les  bastides  ordi- 
naires ne  sont  que  de  très-petites  mabons ,  compo- 
sées d'un  salon ,  avec  deux  ou  trois  cabinets ,  et ,  dans 
un  étage  au-dessus ,  de  deux  petites  pièces  destinées 
à  y  passer  seulement  un#ou  deux  nuits  par  semaine 
pendant  l'été.  Chacune  de  ces  bastides  a  ses  petits 
produits.  Ce  qu'on  appelle  le  jardin  n'est  qu'un  petit 
champ  de  légumes ,  et  j  le  plus  souvent ,  dft  vignes ,  où 
s'élèventquelques  oliviers ,  des  amandiers,  dès  figuiers,' 
des  mûriers  :  tout  autour  régnent  des  murs  très-hauts , 
dont  la  blancheur  éblouissante  réfléchit  les  rayons 
d'un  soleil  brûlant ,  et  fatigue  la  vue.  Tout  cela  offre 
un  ensemble  ennuyeux ,  triste  et  maussade  :  jamais 
on  n'y  est  récréé  par  le  murmure  des  eaux  ;   ef 
le  ramage  des  oiseaux ,  qui  fuient  des  lieux  aussi 
arides ,  est  remplacé  par  le  bruit monotorfe  et  msuji- 
portabie  des  cigales. 

Aucun  Marseillois  un  peu  aisé  ne  sauroît  se  passer 
d'une  bastide  ;  et  quoique  les  capitaux  qu'on  emploie 
à  celte  acquisition  ne  produisent  aucun  intérêt  j  il  n'j^ 


>ryi 


CHAPITRE    LXXxV^IIIé  3JI 

à  pas  un^se^I  négociant  qui  n'ait  là  sienne  :  Tanisan 
même  a  une  masure  qu'il  appelle  sa  bastide.  Aussi, 
rnalgrêleur  grand  nombre,  en  trouve-t-on  rarement  à 
louer  ou  à  acheter ,  sur*  tout  en  temps  de  paix  ;  et  le 
prix  en  est  toujours  très-éievé.  On  s'y  rend  le  s^edî 
au  soir  ;  on  y  passe  ia  journée  du  dimanche  avec  lef 
amis  que  Ton  y  reçoit ,  et  J'on  revient  le  lundi  matin, 
La  table  et  le  jeu  remplissent  toute  la  journée  :  mais 
un  plaisir  plus  réel  se  mêle  à  ceux-ci  y  qu'on  trouve* 
foit  par- tout;  c'est  de  vivre  dans  un  autre  lieu  que 
celui  où  l'on  a  ses  occupations  ,  de  se  sentir  éloigné 
des  afFalrés ,  des  personnes  qui  pôurroient  en  parler , 
et  de  tout  ce  qui  peut  les  rappeler.  C'est  sans  doute 
cette  certitude  du  repos ,  du  dolce  far  mente ,.  qui  fait 
que  le  Marseillois  affectionne  tant  ces  demeures  châm» 
pêtresy  qui  lui  paroitroient  bien  tristes ,  si ,  comme  les 
habitans  des  contrées  moins  arides,  il  y  cherclxjit, 
par-dessus  tout,  les  agrémens  et  les  charmes  que  la 
nature  prodigue  dans  une  belle  campagne. 

La  ville  n'est  au:^  yeux  d'un  Marseillois  que  le 
séjour  qu'il  est  contraint  d'habiter  pour  gagner  de 
f argent;  c'est  sa  boutique,  son  comptoir,  son  ate- 
iîer  :-  îl  ne  travaille  donc  que  pour  aller  à  sa  bastide 
ié  dimanche.  Phis  de  cinquante  mille  âmes  sortent 
<^ jour-làde  la  ville  pour  se  répaildre  dans  la  cam- 
pagne ;  tous  les  thevaux  et  les  carrosses  de  louage 
sont  retenus  et  occupés. 
'   Le  nombre  des  bastides  s'^èv^  à  cinq  mSie.  En 


\ 


imÙÊ^mm  . 


\ 


3ja  tttAPtTRB    LXiXVÏïK 

Voyant  de  la  Vista  cette  încroyabict  quantilé  to 
petites  maisons  d'un  b{anc  éclatant)  réunies  dans  un 
espace  très- peu  étendu  >  qui  est  borné  par  la  mer  et 
par  une  montagne,  aride  et  grisâtre  »  au  niilieu  des 
plantations,  oncroit  être  dans  un  jardin  anglois  rem«: 
pli  de  petites  fabriqu^s% 

Il  ne  faut  cef)endant  pas  croire  que  toutes  les  bas- 
tides .soient  comme  celles  que  je  viens  de  décrire  : 
on  en  voit  sur  la  montagne  appelée  la  Vista  ^  cfA 
sont,  k  k  vérité,  sèches  et  poudreuses ,  maïs  qui 
Jouissent  d'une  vue>admirable  :  le  vent  frais  de  la  mer 
y  supplée  au  défaut  d ombrage;  on  peut  y  prendre 
Tair  sur  une  petite  galerie  couverte,  qui  est  ordinai- 
rement pratiquée  sur  fe  devant  de  la  maison.  Celles 
qui  sont  situées  sur  les  bords  du  Jaret  ou  du  Blaud, 
comme  les  Eygalades ,  et  même  encore  sur  ceux 
de  THuveaune  ,  comme  la  Renarde ,  sont  les  plus 
agréables.  Là ,  sous  le  beau  soleil  du  midi ,  avec  un 
air  toujours  pur  et  embaumé,  oii  retrouve,  pendant 
nieuf  mois  de  Tannée,  la  belle  végétation  et  le  riche 
ojnbrage  des  plus  riantes  cpntrées  septentriondes  : 
il  est  rare  que  les  propriétaires  de  ce^  charmantes 
habitations  n'ajoutent  encore',  par  la  culture  de  quel* 
ques  plantes  exotiques,  à  l'agrément  qu'y  procurent 
les  eaux  ,  les  bois  et  la  verdure  ;  ils  se  plaisent  à 
tes  acclimater  pour  en  admirer  l'éclat  et  en  respirer 
le  parfum ,  qui  se  mêle  à  celui  du  jasmin ,  de  la  tubé- 
reuse et  des  âeurs  les  plus  odorantes ,  qui  sont  semées 

par*  tout 


.«i^^^Mte 


J>«r-tôirt  avec  profusion;  Le  rossignol  et  tous  les 
«^seaux  chanteurs  y  trouvent  l'asile  qui  leur  con- 
sent ,  et  semblent  s'y  réunir  pour  répéler  ieurs  con* 
certs. 

La  Renarde  est  u«ie  des  (Jus  agréal)ies  bfastides  de$ 
«nvirons  dé  Marseille  :  elle  appartient  au  général 
Dumuy ,  qui  Tavoit  prêtée  à  M.  et  à  M*"*  Thibau- 
lieau.  La  maison  est  située  sur  une  petite  hauteur, 
«Atoutée  de  beaux  arbres  ;  il  y  a  des  prés^  des  vignes  ; 
h,  culture  est  variée;  le  site  est  pittoresque:  au  t^as 
de  la  colline  coule  f  Huveaune ,  qui  passe  dans  Ven^ 
freinte  de  cette  charmante  habitation ,  et  en  fertilise 
les  présv 

L'obtrgwnt  aceueili  de  M.  Thibaudemi  répond 
parl^ifement  à  la  beauté  du  lieu.  La  conduite  ferme 
et  courageuse  q|i11  a  tenue  dans  la  révcJutîon,  lui  a 
ac^|ub  Testime  des  bons  citoyens.  Il  a^  souvent  ha- 
sardé sa  vie  potir  combattre  les  désastreuses  opinions 
des  bommes^  qui  gotcnemoient  alors  la  France  i  son 
énergie  leur  a  arraché  plusieurs  victimes  ;  et  plus  d'uit 
proscrit  lui  doit  sa^  fortune  et  soii  existence.  Sa 
généreuse  éloquence  a  obtenu  la  révocation  de 
plttsf^i»^  lois  révolutionnaires.  II  a  fait  rendre  des 
décrets  importans  pour  les  bibliothèque3 ,  le  musée 
d'histoire  naturelle^  et  tous  les  établîssemens  d'instruc-» 
don.  L'Empereur  a  récompensé  ses  talens.et  son  zèle 
en  rappelant  à  soa  conseil ,  et  en  lui  confiant  l'admis 
nistration  d'un  des  plus  beaux  départemens  de  la 
Tome  III  7. 


'^^'-^^ — -^—^-      -*^  ~       .--c  .^ 


354  CHAPITRE  *tXXXVIII. 

France.  M.  Thibaudeau  a  un  grand  amour  pour  le  irar 
vail  et  une  faciihé  extrême  pour  le§  affaires  :  il  parle; 
avec  grâce.  II  s'occupe  beaucoup  des  établissement 
publics  ;  il  s'attache  particulièrement  à  ceux  qui.  sont 
consacrés  à  la  bienfaisance  et  à ,  rinstructiqn  :  le 
musée,  la  bibliothèque ^  le  jardin  bot^niquç,  l'aca- 
démie ,  lui  doivent  leur  institutioa  ou  leur  rétablisse- 
ment.  J'avois  eu  l'avantage  de  connoître  particulière- 
ment à  Paris  M..  Thibaudeau  ;  mais  l'accueil  que  j'eq  aï 
reçu  y  a  changé  cette  liaison  en  amitié,  11  m'a  procuré 
plusieurs  dessins  des  monumens  du  musée  »  et  beau-i 
coup  de  renseîgnemens  utiles  ;  et  les  services^  qu'il 
m'a  rendus,  méritent  toute  ma  reconnoissance» 

Je  passai  chez  lui  quelques  jours  ^  pendant  lesquels 
•n  vint  nous  inviter  à  aller  à  u(i  trin  :  c'est  ainsi 
qu'on  nomme  à  Marseille  Ja  iète  patronale  d'une 
commune.  Les  amis ,  les  parens  des  habitans ,  et  iioe 
foule  de  ctnrieux ,  s'y  rendent  de  dix  lieues  à  laronde* 
Nous  avons  vu  qu'on  la  nomme  aussi  Rournavagi  ou 
Romerûge[\). 

La  matinée,  jusqu'à  midi,  est  consacrée  à  la  célé* 
bration  de  l'office  divin  :  le  curé ,  accompagné  de  ses 
assistans ,  passe  au  son  des  cloches  sous  des  }>ortiques 
de  verdure ,  et  va  dire  la  messe  au  grand  autel,  qui 
est  paré  de  fleurs.  A  midi ,  le  tambourin  se  fait  en* 
tendre;  les  farandoules  commencent:  viennent  ensuite 


«•«*■ 


(i)  Snprà,  p.  34<». 


i^«k 


ies  osmrfes^,  4pà  soAt  le  principal  divertissetnent  de 
cette  fête  ;  elles  se  font  avec  des  chevaux ,  des  ânes  ^ 
et'jsiir^tout  ées  mulets. 

.  On  pfomène  dans  tes  jours  précédens,  pour  annon- 
cer la  fête,  un  caparaçon  de  mulet ,  orné  de  broderies 
en  laine,  souvent  plaqué  de  mcwfceaux'de  verre  de 
'  différentes  couleurs ,  et  entouré  d'argent  feux  :  c'est 
le  prix  d^s«iné*au  vainqueur  ;  cependant  ce  prix  se 
rachète  moyem^ant  une  somme,  et  le  caparaçon  est 
revendu  à  d'autres  villages  et  sert  dans  plusieurs 
occasions  semblables.  Ceux  qui  promènent  le  prix  ^ 
sont  accompagnés  de  tambourins  ;  Tun  d'eux  quête 
pour  ies  frais  de  la  i^te.  Ce  caparaçon  a  toutes  ses 
pièces ,  jusqu'à  la  muselière ,  en  sparterie.  On  porte 
aussi ,  suspendus  à^  titie  grande  perche  par  des  noeuds 
d€r rubans  ,4es  autres  objets  qui  doivent  être  le  prbt 
diss-difi^ens  j€^x» 

Ces  jeux  commencent  presque  toujours  deux 
oa  ^iV>îs  heures  *pte^  tard  qu'ils  nV)nt  été  annoncés. 
C($inme  dans  les  fêtes  du  pagaïusme  et  celles  du 
moyen  âge ,  ils .  sont  précédés  de  cérémonies  rdî-^ 
gieuses;  le  curé  bénit  solennellement  les  animaux 
qui  doivent  disputer  le  prix*^ 

II  y  a  aussi  des  courses  d'hommes,  et  même  de 
jeunes  filles  :  les  courses  de  ceHes  -cr  rappellent  à 
^Imagination  ceHes  des  jeunes  fiHes  de  la  Grèce  ;  mais 
ies  modernes  Atabntes  sont  chargées  de  lourds  ju* 
pons ,  dans  lesquels  le  vent  forme  des  plis  roides  et 

z  z 


MkMMAiH 


grossiers  ;  aucun  ^cul{>teaf  ne  les  dbôiskoit  poar^éei 
modèles  de  grâce  et  de  légèreté. 

Ces  courses  s^exécutent  d^  plusieurs  manières»: 
Outre  celle  qui  a  lieu  dans  vUi  champ  plat  et  laiî^ 
on  dispute  encore  le  prix  de  la  vitesse  sur  un  terrain 
indiné  qu'il  faut  monter  <ïu  descendre:  tjuelquefom 
la  course  a  lieu  dans  un  terrain  nouvellement  labouré  ; 
^elqueSiûs  aussi  les  coureurs  iiont'envebp^és. dans 
nwi  ^c  dontPouverture  est  attachée  autour  deleur<x>ui 
Jjes  prix  adjugés  aux  vainqueurs  soc^t  tine  échupe 
de  soie  avec  une  dentelle  d'argeht,  un  beau  plat 
d'étain^  tine  paire  de  bas  de  soie,  un  chapeau 'ga- 
lonné^ et  d'ai^tres  objets  dont  la  gloire  du  tnorapbd 
augmente  la  yaleur. 

De  nouveaux  c^am pSons  se  .présentent  pour  wé* 
liter  un  de  ç^s  ft^  dans  l'exercice  du  saut  :  il  faut 
franchir  un  fossé,  ou  passer  par-des^is  im  -tertre  de 
•gazon  9  une  h^ie^  une  palissade. 

UexeKÎce  des  trois  "sauts  a  lieu  prîncipalettiem:  dafts 
le  département  des  Bouches-du-Rhôtie^  et  s'eicéoite 
de  cette  manière  :  des  liommes  ayant  Iburrû  une 
course  de  huit  à  dix  mètres  pour.pren<&e  leur  âan^ 
partent  d'im  point  iixe,  ^t  font -à.<:loche-pied  trois 
3auts  en  avant  ;  Ms  parcourent^  ordiimiremem  dans 
çe%  trob  sauts  un  espace  de  s^pt  \  huit;Biètres.. . 

D^autres  fois  on  lie  les  jambes  des 'C<mtendâr4;, 
«t  les  efforts  qu'ils  font  pour  avança:  excitent  ifc 
irire  dt$  spectateurs  ;  il  augmente  ^-tout  iorsqu'uii 


'Û6$  champipus^  perdant  féquilibiçe  ;  trébuche  et 

Le  saut  n'est  pas  le  seul  amusement  qtiî  rappeUé 
h.  gymnastique  des  anciens  Grecs  et  ies  exercices 
dans.  lesquels  ies  Gaulois  montroient  tant  ^adresse 
«t  de  vigueur;,  ovt  voit  encore  des  concurrens  kijcef 
d'un,  bras  vigoureux  une  bouîe.senrf:)I'abïe  au  s^oj» 
[opÀoçJdont  parle  Homère,  ou  un  palet  de  fer.  Si4e9 
antagonistes  étoient  nus^  leur  attitude*  contrastées 
pouiuroit  enflammer  ie  génie  d'un  autre  Myron,  et 
nous  aurions  peut-être  une  statuerivafie  da  Discoboles 

Enfin  des  jeunes  gens  se  partagen-t  en  deu» 
bandes^  et  font  voler  en  i^ai»  un  énorme  balk>» 
iju'ils  reçoivent  et  Tenvoient  avec  de  fom  brassardiî.. 

Dans  quelques  communes  ,^  ceé  fèteis:  sont  plus 
tumultueuses  et  plus  bruyantes»  Nous  avons  vtt 
comment  à  Riez  f  i  )  et  à  Manosque  on  fait  le  siège 
d'une;  cjtadeHe  de  bois*  Mais,  dans  ces)by.eux  com-^ 
bats,  s'il  arrive  quelques  accidens  fâcheux,  e*esâ 
plus  souvent  par  la:  maladresse  des  assiégés  et  des 
assiégeans^  que  parla  résistance  des  îins  ôw  l'achar- 
nement des  autres  :.  des  fusils  ,,  des- |«stof ets  tropr 
chargés  crèvent  et  occasîonnentdes  raafiieurs  presqtjè^ 
înévi^ks ,  parce  qu'il  faut  toujouis  que  Sa  peii^e  set 
«lêle^u  plaisir,,  et  la  douleur  à  la  joie^    ».  '  i 

,  .Après  les  courses,  Ia.fète  devient  générale:  oa- 


mmmmmmmtÊmmmSâ^Ja 


55*  CITAMTRE  LXXXyJtU 

diante,  c^  boit^  on  danse;  celui  qma  été  ilammé 
roi  de  ia  fète ,  pose  une  couronne  de  fleurs*  sur  tt 
tête  de  là  reine  qu'il  s^est  choisie.  Ordînaiit^ment  un 
ou  deux  habitans  se  chargent  de  tous  les  frais  de  la 
danse  ;  et  au  moyen  de  la  rétribution  des  éjwngles  (  i  ), 
ils  y  font  contribuer  ceux  qui  ont  le  plus  de  part 
à  ce  divertissement.  On  paye  vingt  sous  par  paquet 
d'épingles  :  la  plus  fine  galanterie  consiste  à  offrir 
chaque  fois  à  sa  maîtresse  le  paquet  entier;  ceux 
^nt  la  libéralité  est  moins  stnmdéepar  fansour, 
ménagent  davantage  leur  argent,  et  ne  donnent  que 
k  moitié  du  paquet  pour  une  contre-danse.  II  y  a 
des  danseurs  à  qui  il  en  coûte  douze  à  quinze  francs , 
selon  le  nombre  des  contre-danses  auxquelles  ils 
prennent  part.  Pendant  tout  ce  temps ,  le  tambourin 
et  le  galoubet  se  font  entendre  :  on  appelle  Jiûiet 
WL  galoubet  une  petite  flûte  à  bec,  percée  de  trois 
trous  seulement,  à  laquelle  on  fait  rendre  tous  les 
torïs. 

Ces  divers  exercices  mènent  ordinairement  jus- 
qu'à la  nuit  :  alors  on  va  souper.  Par  malheur ,  un 
passe-temps  plus  fiineste  se  mêle  souvent  à  ces  plai^ 
sirs  innocens  et  en  altère  la  naïve  simplicité  :  c'est  le 
Jeu.  Les  défenses  les  plus  sévères  n'ont  pas  eftcote 
pu  réussir  à  l'empêcher  :  la  cupidité  s'alhime ,  et  ft 
sa  fait  quelquefois  des  pertes  considérables.  Nous 

(i)  JW/;r^i,  tomcll,  page  I9J, 


.AÉÉMx 


CHAPITRE   LXXXVIII.  JJp 

vîmes  un  valet  de  ferme  perdre  six  louîs  qu'il  avoît 
amassés  peut-être  par  plus  d'une  année  de  travail. 
Celui  qui  a  gagné ,  devient  plus  avide  ;  celui  qui  a 
perdu,  ^e  plaint  et  se  fâche  :  on  se  querelle,  on  s'in- 
jurie, on  se  bat  ;  et  le  théâtre  de  la  joie  devient 
une  arène  sanglante. 

Pannr  les  danses  particulières  au  pays ,  nous 
devons  d'abord  citer  la  provenç^tf  :  c'est  une  espèce 
de  holero  ou  de  danse  mimique,  par  laquelle  on 
cherche  k  exprimer  Tattrait  et  le  charme  del'anwurj 
mais  il  s'en  faut  de  beaucoup  que  cette  danse  ait  lâ 
inollesse ,  la  grâce  et  l'abandon  des  danses  portu-^ 
gaises  et  espagnoles  :  nous  n'en  devons  pas  juger 
|>ar  la  manière  dont  l'audacieux  V«stris  et  k  viv€ 
Cbevigné,  le  brillant  Duport  et  sa  piquante  soeur, 
dansent  la  provençale  à  l'Opéra  (i).  En  Provence, 
ie  danseur  et  la  danseuse,  sans  songer  aux  grâces 
du  corps  et  à  la  variété  des  attitudes,  ne  pensent 
qu'à  montrer  la  force  des  hanches  et  l'agilité  des 
pieds ,  et  souvent  ils  font  des  pas  surprenans. 

La  danse  vraiment  nationale  est  la  farandoulo  y  qui 
paroît  être  grecque  d'origine.  Dix,  vingt,  trente , 
et  même  cent  personnes,  se  tenant  par  la  maîn, 
forment  une  chaîne,  où  les  sexes  sont  quelquefois  con- 
fondus ;  cette  chaîne  alors  est  menée  par  un  homme 

(i)  Cette  danse  a  été  introduite  dans  les  anciens  fragmcns 
appelés  les  Fêtes  provençales;  on  la  danse  aujourd'hui  dans  la, 
Dansamanie,  Cûlhette  à  U  cour,  &c 

f  z  4 


3^0  CHAPITRE   hXXXriîU 

OU  par  une  femine:  d'autres  fois  la  chaîne  est  endère^ 
ment  composée  d'hommes  ou  de  femmes.  Lorsque 
ces  bandes  joyeuses  viennent  à  se  rencontrer ,  elles 
passent  rapidement  Tune  devant  Pautre  en  sens  con- 
traire. Tous  ceux  qui  les  composent^  sautent  au /son 
du  galoubet  et  du  tambourin  ^  ou  en  répétant  un  air 
qu'entonne  celui  qui  les  conduit  :  on  parcourt  ainsi 
les  rues,  et  l'on  vieMt  former  plusieurs  cercles  autour 
du  mai  ou  du  gros  noyer  sous  lequel  le  bai  est  étabfiw 
Souvent  il  arrive  que  l'impétuosité  de  la  course  fait 
rompre  en  plusieurs  points  cette  chaîne  mobile;  on 
diront  alors  un  ver  partagé  en  différentes  parties  » 
dont  toutes  remuent  et  paroissént  vouloir  se  re- 
joindre :  en  effet ,  chaque  portion  de  la  farandoule  se 
rapproche;  les  mains  désiuiies  s^unissem  de  nou- 
veau y  et  la  (iaqse  recommence. 

Le  beau  bas- relief  antique  qui  est  connu  sous  le 
nom  de  danse  Borghese  (i),  représente  réellement 
une  espèce  de  farandoule ,  dans  la  manière  dont 
on  l'exécute  aujourd'hui, 

La  moresque  se  danse  à  Istres;  M.  Fischer  (2}  en  a 
distingué  quatrç  espèces.  La  première  peut  être  re- 
gardée comme  un  balleÈ  économique;  elle  s'appelle  les 
Bergères:  les figurans  tiennent  une  faucille,  un  râteau^ 
un  fuseau,  un  fléau,  ou  quelque  autre  instrument 


(i)  Villa  Pinciana,  5tanza  I,  pi,  i^. 
(2)  Rmenach  Hjieres,  s,  i^8* 


i^^^^MM 


CHAPITRE    LXXXyiII.  3^1 

«d'agriculture  ou  de  ménage.  La  seconde ,  nommée 
les  Turques^  est  une  espèce  de  bal  la  politique  :  on 
se  range  sur  deux  files ,  qui  s'avancent  l'une  vers 
Tautre  avec  beaucoup  de  gravité  ;  la  pantomime 
semble  exprimer  que  tous  ces  hommes  réunis  se 
consultent  sur  de  grands  intérêts.  La  troisième  esr 
pèce  y  qui  est  celle  qu'on  appelle  plus  spécialement 
Jes  Moresques ,  est  un  ballet  sentimental  ^  dans  lequel 
les  femmes  sont  pâtées  de  fleurs,  et  les  hommes  ont 
au  genou  de  petites  sonnettes  ;  les  danseurs  se  cher- 
chent et  se  rencontrent  avec  un  plaisir  qui  annonce 
ia  volupté.  Enfin  la  dernière  espèce  est  un  ballet  guet' 
r/Vr>  qu'on  nomme  les  Epies  :  les  hommes  et  les  femmes 
se  mêlent  vivement  et  pfîrent  l'image  d'un  combat 
très-animé.  Ce  ballet  a  quelque  analogie  avec  le 
Bacchu^ber  ou  la  danse  armée ,  dont  je  parlerai  en  don- 
nant la  description  de  Gap.  Les  rapports  de  plusieurs 
de  ces  danses  avçc  le  boléro  ^  et  le  nom  de  quelques* 
unes ,  doivent  faire  présumer  que  ce  sont  les  Sarra^ns 
qui  en  ont  laissé  l'usage  en  Provence. 

Ces  réunions  durent  ordinairement  jusqu'au 
lever  du  soleil  :  elles  recon^mencent  assez  souvent 
le  lendemain,  mais  d'une  manière  moins  bruyante , 
parce  que  les  sauteurs ,  les  coureurs  et  les  danseurs 
sont  épuisés  de  fatigue.  Enfin  chacun  retourne  chez 
soi,  dans  l'espoir  de  se  retrouver  bientôt  à  la  fête 
d'un  autre  village. 

Pendant  notre  séjour  à  la  Renarde,  nous  fîmes 


5(Î2  CHAPITRE     LXXXVIII. 

quelques  excursions  dans  tes  commune:»  de&  en vircm^* 
Nous  allâmes  un  jour  k  Auriol  ^  où  se  fabriquent 
tous  les  carreaux  qu'on  emploie  à  Marseille  et  dans 
les  départemens  circonvoisins  pour  paver  lés  salons 
et  les  chambres  ;  on  les  nomme  malons  :  quoique 
ce  commerce  soit  asseiz  étendu  ^  il  est  peu  productif. 

Les  habitans  de  Roçuevûire  (  i  ) ,  où  nous  allâmes 
ensuite  ,  sont  très- laborieux  ;  c'est  cette  commune 
intéressante  qui  fournit  à  la  France  et  à  l'Europe  ces 
mélanges  de  fruits  secs  qu'on  appeUe/m/'/j  de  carême^ 
et  vulgairement  /es  quatre  mendians.  Les  fruits  du 
canton  sont  la  principale  base  de  ce  commerce  ; 
mais  il  y  a  aussi  à  Roquevaire  des  commissionnaires 
qui  réunissent  les  fruits  préparés  dans  d*autres  com- 
munes des  départemens  dés  Bouches-du-Rhône  et 
du  Var ,  pour  les  expédier  >  suivant  les  demaixles , 
dans  tout  l'Empire  et  cheîs  l'étranger. 

Nos  courses  nous  menèrent  une  autre  fois  à  Géme*- 
nos  y  maison  de  plaisance  qui  appartient  à  M.  d'AJber- 
tas  [z).  L'agrément  de  ce  beau  lieu  l'a  rendu  xxû  objet 
de  curiosité  et  de  promenade  pour  lès  Marseîllois  r 
il  est  à  quatre  lieues  de  Marseille  et  à  une  lieue 
d'Aubagne  ;  une  source  qui  sort  de  la  montagne  de 
■"— — '        ■        .        ■  .  .        -  ^ 

(i)  Rttpes  varia,  dans  fcs  chartes. 

(a)  A  une  Jieue  de  Gémaios.  est  fa  chapelk  de  S,  Gàrffiitr^ 
fameuse  par  les  pèlerinages  qu'on  y  faisoît  avant  la  révolution  ; 
elle  vient  d'être  rouverte  :  ce  lieu  est  connu  dans  les  anciennes 
inscriptions  sous  le  nom  de  Gargarkum, 


j 


CHAPITRE     LXXXVIII.  ^6$ 

S^fint^Pont,  fonniitdes^  eamx  aboiidafiies  quî  étoîéiît 
dirigées  avec  goût  dans  le  parc  de  Gémenos.  On  y 
voyoît  des  jets  d'eau ,  uhe* (Cascade,  qui  entretenoient 
une  délicieuse  fraîcheur  dans  de  rians  bosquets.  Avant 
d'arriver  dans  le  parc,  la  source  de  Saint- Pont  arrose 
dès  sa  naissance  des  ombrages  magiiiiiques ,  entou- 
rés de  rochers  sauvages  ^  fertilise  un  vaHon  d'une 
<iemi- lieue  ,  et  y  fait  mouvoir  un  grand  nombre 
d\isines ,  telles  que  dés  papeteries  ,  des  martinets , 
des  moulins  à  foulon  et  à  farine ,  qui  dépendent  de 
la  terre  de  Gémenos.  Cette  charmante  habitation , 
qui  pourroit  rivaliser  avec  les  plus  belles  maisons  de 
campagne  des  eïi virons  de  Paris ,  a  éprouvé  |)endant 
larévolutionde  grandes  dévastations  ;  ces  dégâts  a'oùt 
point  été  réparés.  Cependant  les  beautés  na^reifes  dit 
site  et  la  richesse  des  eaux  attirent  toujours  }es  étran^* 
gers  et  les  habitans  de  .Marseille  dans  k.parc  do 
Gémenos  et  dans  le  vallon  de  Saint-Pont,  qut  a  été 
dbanté  par  le  Virgile  français.  On  y  voit  les  laines 
d'un  ancien  monastèîe  des  teligieiises  de  l'oidre  do 
Che^ux ,  qui ,  dans  le  Xîv.*'  siècle ,  a  été  trzmfété 
à  Hyères  :  l'élise  subsiste  encore. 


«MriMfWkMMarii» 


3 


■3*54 

CHAPITRE  LXXXIX. 

AubAGNE»  —  Excursion  à  Tarenta  j  €rt  -  ce  Fàneîcit 
Tauroentum!  —Fouilles' faites  par  M* Marin.  —  Nou- 
velles fouilles  faîtes  pap  M.  Tbibaudea».  —  Mosaïquesi^ 
— Sarcophages. —  Résultat  de  ces  recherches^ — Sable 
mouvant. — Astragale. —  Scarabée  sacré. — LesLèqjues. 

—  La  Cadière.  —  La  Ciotat.  — Prud'hommes^ 

—  La  Bîguo,  — La  Targuo,  —  Pêcheurs.  —  Ile-Verte,. 
Cap  de  TAigle.  —  Grotte  de  corail.  —  Comédiens.  — 
Théâtre  provençal.  —  Vin  muscats 

xjE  24  messidor,  nous  partîmes  de  la  Renarde  pour 
aller  visiter  le  lieu  où  Ton  place  communément 
l'ancienne  ville  de  Tauroentum.  Le  préfet  étoit  ad- 
compagne  de  quelques  -  uns^  de  ses  secrétaires  j 
de  M.  Gervaise  y  directeur  des  contributions  ;  de 
M.  Maggi ,  chargé  de  la  levée  du  cadastre  y  et  (Je 
JA'  Brack,  dont  j'ai  déjà  parlé.  Nous  suivîmes  la 
route  de  Marseille  à  Toulon  jusqu'à  Aubagne^  où 
Ton  recueille  un  très-bon  vin  muscat',  et  où  il  se  fait 
des  poteries  de  terre,  Lar  culture  gagneroit  beaucoup 
à  la  suppression  de  deux  moulins  à  farine  qui  détour^ 
nent  les  eaux  de  l'Huveaune  y  dont  on  ne  peut  &ire 
usage  pendant  quatre  jours  consécutif  de  chaque 
semaine  ;  les  productions  de  la  terre  périssent  de 
sécheresse  au  milieu  des  eaux  qui  devroient  ies^ 
abreuver.  Les  maiscms  d'Aubagne  s'étendent^  dans. 


-■  ^ 


Wi  assez  ïong  'espace ,  sur  les  deux  bords  du  grand 
chemÎH,  CVst  dans  cette  vHIe  qu'est  né  le  PI  ^Sicard^' 
ce  vartufeux  missionnaire .  auquel  nous  devons  des^ 
notions  intéressantes  sur  TEgypte ,  et  qui ,  aprè$ 
avoir  déployé  le  zèle  ardent  d'un  apôtre  et  l'éru* 
dition  d'un  savant ,  mourut  au  Caire  en  servant  les 
pestifi^rés.  Mais  Aubagne  doit  sur-tout  se  glorifier 
d'avoir  vu  naître  l'illustre  Barthélémy ,  à  qui  f ai  eu 
i'honnei|]:  ^e  succéder  dans  Ja  garde  du  c^iiiet  des 
médailles^  sans  avoir  la  gloire  cte  ie  remplacer i. 

À  quelque  distance  de:  là ,  nous  traversâmes  un 
pays  sablonn^ipc.  Le  bois  qu'on  en  tire  est  très^utilef 
pour  le.^auâfage  de  Toulon  et  de  Marseille  ;  car 
il  y  apeUj^je  c^  combustibfe  icfons  le  département  des 
Bouchesrd^^hÔne ,  et  il  s^^iit  '  trop  coûteux  d'tm 
faire  arriver  psir  terre  du  <iéçactei»ent.duiyar  rnéan-* 
moins  les  parties,  jde  ç^  ^département  qui  avoisinent 
les  côtes ,  concourent  avec  la  Corse  et  la  Sardaigne 
à  compléter  l'approvisionnement  de  cette  grande 
até. 

L'âpreté  du  chemin  nous  força  bientôt  de  mefS^ 
pied  à  terre;  et  après  avoir  ainsi  fait  une  lieue,  nous 
entrâmes  dans /^z  C/(>^tf/. 

Le  bateau  de  la  douane  étoit  prêt  pour  nous  rece« 
vdr  ;  mais  les  prud'hommes  rinrjait  en  députatîôn  ré^ 
damer  l'honneur  de  conduire  eux-mêmes  leur  préfet, 
et  il  dut  leur  accorder  la  préférence.  Ces  braves; 
gens  avoient  leur  grand  coutume ,  c'est-k-dire  qu'ils 


j66  CHAPITRE   LXXXIX»' 

étoîent  vêtus  <Fun  habit  noir  complet  à  la  française  : 
ceux  qui  dévoient  ramer ,  s'en  dépouillèrent  poui? 
«'être  point  gênés  dans  cet  exercice  pénible  ;  te 
pilote  garda  le  sien ,  et  s*einpara  du  gouvernail,  qu'A 
étoit  'singulier  de  voir  entre  les  mains  d'un  homme 
en  costume  de  cérémonie. 

,  Après  avoir  traversé  le  golfe  des  Lèqufs ,  noul 
descendîmes  au  iieu  appelé  Tûrento,  où  Ton  pense 
qu'jétoît  située  autrefois  l'ancienne  Tauroeïs ,  qu'on 
nomme  vulgairement  Tauroentum  (*)*  H  s'est  élevé 
des  difficultés  sur  ce  pointa  géographie  ;  on  a  pré-^ 
tendu  que  ce  lieu  n'a  point  existé  où  la  tradition  le 
place.  Les  uns  veulent  que  Tauroeis  ait  été  au  cap 
Skies  (a),  les  autres  au  cap  Cepé  (3).  (^lelquieis  sa- 
Y^w  I!ont  i:herchée  dans  k  golfe  de  Toulon  {4)  T 
d'^AUnes  enfin  ont  pensé  quec'étoit  Toulon  même  (  5  ). 

-  (i)  Ilest  aisé <îc  voir  qu'on  a  prîs  pour  le  nom  du  ïicu  Paccusatif 
4^  ce  memje  nom;  Tampeis,  ça  grec  1  fait  Tauroetm  kV^ccasaXif', 
et  c'est  à  ce  cas  qu*f  !  a  été  employé  par  César.  En  le  mettant  aif 
nominatif,  on  en  aura  fait  Tauroentum ,  nom  qui  est  devenu  celui 
/^tt  casteHum;  on  a  dit  ensuite,  par  corruption ,  Taurentum;  et  les 
balritans  rappellent  aujourd'iiui  Tarento, 

(2)  Peut-être  à  l'île  Embiés.  M  ANNERT,  Gtographit  dn  Griechc^ 
und Rotmer;  2."'  theil,  i.**?*  heft,  s.  79. 

(3)  AcHAHD,  Mémohrt  sur  Tauroentum,  dans  les  Mémoires  de 
l'iicaéâme  de  ÂLvseiUe ,  tome  fil ,  page  1 84. 

(4)  Le  hras  de  Saint-George  et  TÉvescat.  Wesseling,  Ad 
itiner,  Antonit^i,  p.  506.  Oberlin^  /«  CjUSAR,  Comment,  de 
beîlà  civîîi ,  Il ,  4. 

'  {f^\  Samson  et  BoutHE. 


CHAFITRE   LXXXrX.  3(^7 

li  e$^  plus  at$é  de  combattre  le  sentiment;  qui  place 
Tancieiine  Tauroeis  à  Tarento ,  que  d'appuyer  par  des 
preuves  les  sentimens  opposés ,  puisqu'on  n'a  pour 
indices  quç  dç$  distances  et  des  mesures  incertaines, 
L'^nfiqu^  tradition ,  la  conformité  des  noms ,  la  déci- 
sion dp  célèbre  géographe  d'Anville ,  ont  formé  l'opi- 
nion la  ^s  généralement  reçue;  mais  on  ne  sauroit 
avoir,  sur  ce  point,  une  parâite  conviction. 

Jn^o^înç  ii^  Tauraeis  étoit  fort  ancienne.  -  Des 
PhpcéeJD$ ,  dont  le  navire  àvoit  été  séparé  de  leur 
flQtlç^  abordèrent  sur  cette  plage ,  et  y  fondèrent  cet 
établiss^inerii ,  qui  reçut  son  nom  de  la  figwre  de 
taureau  qui  leur  servoit  d'êmeîgne.  Ce  lieu  paroît 
n'avoir  jamais  été  bien  ilomsant  :  il  étoit  seulement 
destiné  à  la  défense  4e  la  côte  ;  et  la  dénomination 
4e  fûsullum  que  lui  idbnne  César ,  porte  à  croire 
que  de  soft  temps  ce  n'étoit  fJus  qu'une  forte- 
resse.       : 

-  .M.  JVbùiti  lut ,  en  178 1^  à  Facadémie  de  Mar- 
seille,  un  mémoire  qu'il  a  fait  imprimer  depuis  (i) , 
^  dans  lequel  il  affirme  «que  Fancien  Tauroentum 
occupoit  l'emplacement  que  la  tradition  lui  assigne  : 
TJL  prétend  même ,  en  suivalit  fes  découvertes  qui  y 
ont  été  Élites ,  retrouver  la  ville ,  la  citadelle ,  le 
théâtre  ^  les  bains  publics  ;  établissemens  que  ce  lieu 


n'a  jamais  possédés ,  et  dont  nous  n'avons  pu ,  mât^ 
gré  les  recherches  les  plus  attentives ,  apercevoir  la 
moindre  trace* 

La  lecmre  du  mémoire  de  M.  MaHn  engagea 
M.  Tiiibaudeau  à  visiter  ^  au  commencement  de 
Tan  1 804)  les  ruines  décrites  par  cet  académicien  ;  et 
la  découverte  d'une  mosaïque  donnant  de  noa* 
velles  espérances ,  il  fit  reprendre  les  fouilleis  à  ses 
frais  :  elles  furent  faites  avec  toute  Tactivîtè  et  I'in<^ 
telligence  possit>ies ,  sous  la  direction  de  M,  Magioird 
Olivier,  de  la  Ciotat ,  membre  du  conseil  du  dépar-* 
tement*  M.  Magloire  Olivier  a  fait  •  d'excellentes 
émdes  (  t  y;  ii  aime  les  recherches  historiques  ;  il  desi* 
roit  voir  confirmer  un^  ait  avancé  par  son  ancien 
ami  M.  Marin,  et  curieux  pour  sa  patrie.  Ces 
travaux ,  conduits  d'après  lés  plans  donhés  par 
M.  Marin /ont  ùh  découvrir  une  grande  quantité 
de  bâtimens  qui  n'avoient  point  encore  été  aperçus, 
et  qui  se  iient  à  présent  aux  pièces  qu^il  avoit  dé* 
crites. 

Nous  suivîmes  les  détails  de  ces  fbuifles  avec 
M.  Thibaudeau  ;  et  voici  ce  que  nous  avons  remar^ 
que  de  plus  intéressant.  Les  bâtimens  mis  à  décou- 
vert occupent  un  emplacement  d'environ  treize  mille 
cinq  cent  quatre-vingt-neuf  mètres  carrés  ;^  ils  se 
composent  d'environ  soixante  pièces  différentes ,  qui 

(i)  Pendant  le  séjour  qu'il  a  fait  à  Paris  comme  président  d'un 
conseil  électoral  »  il  a  harangué  sa  Sainteté  en  latin, 

se 


CHÂÎ>ÏTRE  LXXSCÏX.  ^6y 

«^€DWîiTmnîquent  ou  sont  attenantes,  et  forment  une 
seule  masse  (  i  )^ 

H  seroit  trop  ïong  et  superflu  de  décrire  chacune 
•de  ces  pièces  et  leurs  communications;  il  suffit  d*en 
donner  une  idée  générale.  La  principale  a  cent 
«quarante  pieds  de  long  et  quarante  de  large  ;  elle  est 
divisée ,  dans  toute  sa  longueur ,  en  deux  parties , 
far  une  assise  de  pierres  de  taille ,  de  niveau  avec  le 
pavé,  et  par  un  canal  d'un  pied  de  large,  séparé  de 
I^ssîse  de  piefres  de  taille  par  un  mur  de  cinq  pieds 
de  haut  et  de  sept  pouces  de  large ,  en  briques  posées 
de.  champ.  % 

La  partie  le  ïong  de  laquelle  îï  règne  plusieurs 
pièces,  a  dix  huit  pouces  de  largeur;  elle  est  pavée 
«n  mosaïque  :  toutes  les  pièces  ont  leur  entrée  sur 
cette  galerie*  Divers  canaux  eldes  aqueducs  traversent 
ces  bâtimens  ;  on  y  a  aussi  trouvé  des  tuyaux  de 
plomb  qui  àmérioîent  les  eaux  des  sources  qui  sont 
svr  la  montagne.  Ces  aqueducs  sont  bien  construits;' 
mais  on  ne  peut  les  suivre  que  quelques  pas ,  à  cause 
des  éboulemehs  qui  les  ont  encombrés*  Ces  ouvrages 
se  terminent  à  la  mer. 

Les  murs  des  différentes  pièces  sont  peints  ea 
couleur  rouge,  bleue,  jaune  ou  verte,  tantôt  unie, 


(i)  M,  ThibauJeau  en  a  fendu  compte  dans  son  A^emoire  sut 
Tawromtum ,  imptimé  dam  \t  tome  lU  des  MéMoirts  de  Vacddémh 
de  Marseille,  Ces  recherches  nous  ayant  été  communes,  f«n^ 
prunterai  quelquefois  ses  propres  expressions. 

Tome  III.  A  a 


370  CHAPITRE   LXXXIX. 

»  tantôt  avec  des  compartimens  ou  des  arabesques  :  ces 
couleurs  sont  encoj^e  très-vives ,  et  elles  sont  em- 
ployées avec  plus  de  goût  que  dans  ia  grande  gale- 
rie,  qui  est  pourtant  couverte  de  peintures  à  fresque 
représentant  des  arbres  et  des  animaux  plus  grands 
que  nature  ,  parmi  lesquels  nous  reconnûmes  un 
chien ,  un  lion ,  un  léopard  et  un  taureau  ;  ceT  qui 
peut  faire  croire  qu'on  y  avoit  figuré  une  chasse,  ou 
un  combat  d'animaux. 

Les  mosaïques  qu'on  y  a  trouvées ,  présentent , 
en  général ,  un  fond  blanc  et  une  bordure  bleue 
simple  ou  do^e  :  on  n'en  a  vu  que  deux  q^i 
eussent  des  dessins  ;  Tune,  découverte  par  M.  Ma- 
rin ,  a  été  détruite  depuis  ;  l'autre  est  menacée  du 
même  sort ,  si  M.  le  préfet  ne  la  fait  enlever ,  quoi- 
qu'on ait  eu  soin  de  la  recouvrir  de  plusieurs  pieds 
de  sable.  On  remarque  sur  cette  dernière  un  enca- 
drement formé  d'enrôulemens  gracieux  ;  à  chaque 
coin  il  y  a  un  calithare,  ou  vase  à  deux  anses,  d'une 
forme  élégante.  Les  ouvriers  prétendent  qu'on  y 
voyoit  autrefois  un  serpent  :  peut-être  y  avoit-il  aussi 
une  ciste  d'où  ii  sortoit  ;  ces  attributs  bachiques  au- 
roient  été  fort  convenables  pour  une  salle  à  manger. 
Cette  mosaïque  a  été  endommagée  ,  en  quelques 
endroits,  par  les  racines  de  Y  astragale  marseilloisi 
qui  s'y  sont  fait  jour. 

Tous  ces  édifices  n'avoîent  point  été  découverts 
au  temps  de  M.  Marin  :  ceux  qu'il  a  connus  sont 


CHAPITRE   LXXXIX.  «371 

sur  le  bord  de  la  mer.  On  y  voit  une  longue  suite 
de  bases  de  colonnes  alignées  ;  ce  qui  annonce 
assurément  l'ancienne  existence  d'un  portique.  On 
trouve  encore  une  salle  carrée  de  cette  forme  |  ^  ; 
là  niche  ronde  qui  la  termine ,  a  dû  être  destinée  à 
une  statue.  Le  pavé  est  formé  d'un  ciment  ferme 
et  grisâtre,  dans  lequel  on  a  implanté  symétrique- 
ment des  rhombes  de  pierre  d'une  couleur  plus 
foncée.  On  voit  encore  des  ruines  d'édifices  sur 
les  rochers  où  la  mer  vient  se  brber. 

Une  pièce  ouverte  dans  le  rocher  présente  deux 
sarcophages  ;  i'un  bien  conservé ,  et  l'autre  mutilé  ; 
ils  sont  placés  ainsi  : 

,  Sarcophage  mutité. 

I 


L. 


O 
U 

WD 


Entrée. 


Tous  deux  sont  en  pierres  communes,  et  dévoient 
être  à-peu-près  semblables.  La  face  de  celui  qui 
est  conservé,  a,  dans  son  milieu ,  une  rosace,  entre 
des  cannelures  sinueuses  nommées  strigiles,  comme 
on  en  voit  depuis  le  lll.*  siècle  ;  il  étoit  soutenu  par 
une  plinthe  en  marbre  décorée  d'une  rangée  de  ces 

Aa  a 


57^  t:nAï>ïtnK  ^xxxlx^ 

petits  l)6udîers  qu'on  appelle  parma  ;  elfe  avoît  Aè 
arradiée,  et  nous  ia  vîmes  sur  le  toit  d'tm  pècheur> 
Ce  tombeau  est  dans  la  prc^riété  de  M.  Darquier, 
t]ui  Ta  découvert. 

II  y  avoit  sur  -un  de  <es  tombeaux  une  ins^ttk 
•on  ilsoit  : 

PAT>ERNA  QVINtTlAïiïl  C05 

«Cettte  -frise  a  été  transportée  à  près  d'an  mffle,  k 
la  batterie;  et  li  rfen  existe  plus  que<:ette  portion 
de  mot,  viNCTiANï,  Comme  la  date  du  consulat 
imanque ,  oh  ne  peut  savoir  dans  que!  temps  a  vécu  ce 
Quînctianus  ;  mais  il  est  probable  que^ces  deux  tom- 
beaux sont  le  sien  et  celui  de  son  épouse  i>u  de  sa 
£lIePaterna. 

D'après  ces  détails  sur  les  édifices  qui  restent  à 
Tarento,  il  est  aisé  de  juger  que  rien  ne  favorise 
Topinion  que  c'ait  été  l'ancien  Tauroentum ,  si  l'on 
veut  que  cette  ville  ait  eu  quelque  importance  :  on 
n'y  voit  ni  théâtre ,  ni  cirque,  ni  gymnase  ^  ni  place 
publique  ;  et  l'on  ne  peut  supposer  qu'une  colonie 
marseilloîse  ait  vécu  dans  des  huttes ,  comme  les 
habitans  de  quelques  [Kirties  de  Tinlérieur  des  Gaules* 

Parmi  les  fragmens  d'antiquités  que  les  fouilles 
ont  fait  découvrir,  on  distingue  une  tète  de  femme, 
un  torse  de  Bacchus ,  que  M.  Marin  a  remis  à 
M.  Thibaudeau;  des  frises ,  des  moirfures  de  marbre, 
une  colonne ,  des  tronçons  et  des  bases  de  colonnes 
de  marbre  et  de  granit.  Il  est  à  reftiarquer  qu'à 


,  .CHAPITRE  XXXXfX*^  ^75 

Fréjùs,  â  Ant3>es,  à  Nice^  sur  toute  cette  côte  ,. 
tous  les  restes  de  monumens  sont  «n  pierre  du  pays^ 
appelée  pierre  froide  ;  on  n'y  trouve  presque  pas  de 
marbre  :  à  Tarento,  au  coiïtraîre  ,Je  marbre  est  très- 
abondant  ;  outre  des  colonnes  entières ,  on  rencontre  ^ 
une  grande  quantité  de  petits  morceaux  de  marbre 
blanc  très-minces  qui  ont  servi  pour  des  pavés ,  des 
revêtemens  de  murs  y  ou  pour  la  couverture  de  toitr 
et  de  terrasses  ;  ii  y  a  aussi  des  fragmens  de  granit,  et 
de  rouge  antique,  marbre (Ju'on  ne  trouve  employé 
que  depuis  ie  temps  cfes  empereurs  romains.  Cett* 
richesse  de  matériaux  fortifie  l'opinion  que  ce  lieu 
^étoit  une  maison  de  campagne  :  on  sait  avec  quelle 
profusion  tes  Romains  aimoient  à  embellir  lemsvil/a 
de  marLres  précieux  ;  et  le  voisinage  de  la  mer  avoit 
procuré  à  Quinctknus  la  possibilité  d'en  feire  venîi: 
à  peu  de  frais. 

J'ai  rapporté  un  ftagraent  de  ciment,,  dans  fequef 
H  y  a  une  grande  quantité  de  marbre  concassé  ; 
ies  reflets  spathiques  des  grains^  de  marbre  et  la 
couleur  rouge  du  ciment  donnent  à  ce  mélange 
d'une  dureté  coiîsidérabFe  ,  l'apparence  du  por- 
phyre  i  on  pourroit  l'employer  avec  succès  dans  nos^ 
édifices. 

On  trouve  dés  briques:  de  toutes  les  formes^ 
rondes ,  carrées ,  longues;  quelques-unes  avec  le 
nom  du  fabricant  :  nous  en  vîmes  où  on  lisoît  ces 
mots,  jMARl.  EVRAS.  F.  ;  nous  remarquâmes  sur- 

Aa  3 


'374  CHAPITRE  Lxxxix; 

tout  des  briques  triangulaires  arrondies  sur  une  de 

leur  faces  .^     "^^  ;  la  réunion  de  quatre  de  ces 


briques  iforme  un  disque 


Ces  briques  paroissent  avoir  été  destinées  à  faire  des 
colonnes ,  et  peuvent  être  utiles  pour  ce  genre  de 
construction. 

Le  nombre  considérable  de  fragment  de  cette  es- 
pèce de  poterie  rouge  si  commune  dans  les  Gaules, 
peut  faire  présumer  qu'il  y  en  avoit  une  &brique  dans 
les  environs  (  i  ) .  On  n'en  a  pas  trouvé  une  seule  pièce 
entière  ;  on  retire  seulement  de  terre ,  mais  en  petit 
nombre ,  des  lampes ,  des  morceaux  de  verre ,  des 
iacrymatoires,  des  amphores,  des  strigiles,  et  d'autres 

(i)  M.  GriVAUD,  dans  sa  Description  des  antiquités  trouvées 
dans  hs  jardins  du  Sénat,  a  très-bien  trahé  de  ces  sortes  de  vases ^ 
de  leur  forme^et  de  leur  fabrication. 


CHAPITRE     LXXXIX.  Î7Î 

testrumens  de  bronze  du  genre  de  ceux  qui  se  ren- 
contrent ordinairenaent  dans  ces  sortes  de  fouilles. 

La  distribution  de  ces  édifices ,  le  luxe  et  la  ri- 
chesse  des  ornemens  dont  on  rencontre  des  indices , 
tout  fait  croire  que  là  étoit,  non  pas  la  ville  de  Tau-- 
roentum ,  mais  une  de  ces  charmantes  habitations 
que  les  Romains  aimoient  passionnément ,  et  pour 
l'embellissement  desquelles  ils  faisoient  des  dépenses 
excessives.  Ces  habitations  étoîent,  comme  celle-  \ 
ci ,  bâties  sur  le  penchant  des  collines  ;  on  recher- 
choit  sur-tout  le  voisinage  et  la  vue  de  la  mer  :  elfes 
étoient  partagées  en  trois  corps;  la  villa  rustica^ 
qui  étoit  la  maison  destinée  aux  ouvriers  et  aux  détails 
de  la  culture  5  la  villa  fructuaria ,  où  étoient  les  gre- 
niers, les  celliers,  et  où  Ton  conservoit  les  liquides 
et  les  fiuits  ;  enfin  la  villa  urbana,  qui  étoit  l'habi- 
tation du  maître.  Les  colonnes,  les  marbres,  étoient 
destinés  à  prner  cet'te  partie  de  la  villa  de  Quinctianus , 
et  à  former  un  portique ,  une  galerie  couverte ,  d'où 
i'on  jouissoit  de  la  vue  de  la  mer.  On  sait  qu'à  la  villa 
rustica  on  joîgnoit  souvent  un  petit  temple ,  et  que  ces 
édifices  étoient ,  en  général ,  accompagnés  de  I;||au- 
coup  de  chambres  attenantes  à  une  grande  galerie. 

II  est  très-probable  que  le  propriétaire  de  cette 
belle  habitation  étoit  ce  Quinctianus  dont  nous 
avons  vu  le  tombeau  et  celui  de  sa  fille  ou  de  sa  femme 

Paterna.  La  forme  de  ces  tombeaux ,  l'usage  des  mo- 

».  •  ■ 

saïques,  les  médailles,  découvertes,  qui  ont  toutes 

A  a  4 


^7(5  CHAMTRE   LXXXIX^ 

des  têtes  depuis  Claude  jusqu'à  Décence  (  i  )  ^^oÎTcnt 
faire  présumer  que  ce  Romain  y  qui  peut-être  exer- 
çait une  magistrature  dans  ïe  pays  ,  a  vécu  dans  te 
iv/  siècle  de  notre  ère;  et  c'est  à  cette  époque,  je 
croîs  y  qu'il  faut  placer  la  construction  de  ces  bâtif- 
mens.  Je  seroîs  porté  à  croire  que  la  villa  urbana  de 
Quinctianus  étoit  sui  te  bord  de  laf  mer^  au.Ketf 
où  M.  Marin  a  trouvé  un  portique  ^  et  que  sa  villa 
rustka  étoit  plus  loin  y  àfendroit  où  M»  Tfaibaudeau 
a  découvert  une  suite  de  pièces  attenantes  à  une 
galerie  :  Quinctianus  aura  fait  crèusep  dans  te  rocher^ 
près  de  son  habitation  y  un  tombeau  pouv  recevoir 
son  sarcophage  et  ceki  de  son  épouse» 

Quant  au  temps  où  cette  villa  à  éxé  détruite  y  oit 
ne  peut  pas  même  hasarder  une  conjecture;  mais  on 
peut  deviner  plus  aisément  quelles  sont  tes  causes 
qui  en  ont  amené  ta  ruine  ;  abandonnée  dans  un 
temps  de  trouble,  cette  Ii^bitation  auiaété  pillée ^ 
comme  Tont  été  depuis  quelques  années  Tourves  et 
la  Tour-d" Aiguës,  dont  il  ne  restera  bientôt  plus  de 
vestiges  ;  te  sable  a  recouvert  ensuite  ce  que  tés 
spoliateurs  n'avoient  pas  emporté.  Tout  ce  qui  étoi^ 
entier,  jusqu'aux  cotonnes.de  l'édifice,  ayant  été 
entevé,  on  doit  en  conclure  que  cette  spoËation 
s'est  opérée  par  succession  de  temps  ;  car  ceux  qui 


(i)  Ôtt  na  trouvé  que  deux  monnoies  marseilioiscs  ;  et  ii  est 
probable  qu'on  en^  auroit  découvert  davantage^  si  ToB  eût  été  iur 
i/emp!acement  de  l'ancien  TauroentuM^ 


-^  -       ^-- -^-^-^.«^^-a^i-^ 


CHAPITRE    hXXXlX.  377 

^ent  une  catastrophe  quelconque ,  ne  songent  pas 
à  emporter  des  statues  et  des  colonnes. 

Lorsque  le  mistral  souffle  dans  toute  sa  force ,  H 
élève  avec  tant  d'impétuosité  les  flots  sur  cette  côte, 
qu'on  croiroit  que  c'est  l'effet  d'une  haute  marée  ;  et 
ils  ne  se  retirent  qu'en  déposant  sur  le  rivage  une 
grande  quantité  de  sable.  A  mesure  que  ce  sable 
s'amoncelle ,  il  sèche ,  et  n^est  plus  qu'une  poussière 
impalpable  que  le  vent  pousse  avec  une  extrême 
facilité  ;  le  mistral  en  fait  rçuler  des  couches  entières 
les  unes  sur  les  autres  ^  jusque  sut  le  sommet  de  la 
montagne ,  qui  est  pourtant  assez  élevé  :  ces  mon^ 
ce^ùx  de  poussière  ne  redescendent  que  lorsque  les 
pluies  les  entraînent,  ou  qu'ils  sont  pcHissés  pal^  le 
vent  contraire  ;  mais  ils  ne  retournent  point  jusqu'à 
la  mer.  Les  arbustes ,  les  arbres  même ,  sont  recou^ 
verts  de  ce  .sable  mouvant  ;  et  des  hommes  qui , 
lorsque  le  mistral  souffle ,  oseroient  rester  sur  le  pen- 
chant  de  cette  colline ,  risquerc^ent  d'être  bientôt 
engloutis.  C'est  le  mistral  qui  a  riecouvert  de  douze 
à  quinze  pieds  de  sable  les  ruii^es  dont  |e  viens  dt 
parler. 

Cette  plage  aride  est  tapissée  de  cette  espèce 
d'astragale  (  i  )  qui  forme  d'énormes  touffes  rondes 
dont  les  boules  sont  hérissées  d'épît>es  :  cette  plante 
est  appelée  dans  le  pays  asseti  di  capelan  [  chaise  de 

(  I  ]  Astragaîus  massiliensis. 


378  CHAPITRE    LXXXIX. 

^  prêtre  ]  ;  les  longues  épines  dont  elle  est  armée ,  ne 

doivent  cependant  pas  en  faire  un  siège  fort  com- 
mode. Nous  étions  assaillis  par  une  quantité  consi* 
dérablç  de  gros  insectes  noirs  :  c'est  ie  scarabée 
sacré  (  i  ) ,  auquel  les  Égyptiens  ofFroîent  un  culte  ; 
on  le  trouve  assez  communément  en  Provence  et  en 
Languedoc.  J^observai  deux  de  ces  insectes  occupés 
,  à  remonter  leur  boule  de  terre  :  l'un  rouloit  la  boule 
sur  une  élévation ,  et  l'autre  se  tenoit  derrière  lui ,  et 
paroissoit  vouloir  ie  soutenir ,  et ,  pour  ainsi  dire ,  le 
pousser  ;  mais  plusieurs  fois  la  boule  échappa ,  et 
entraîna  les  deux  scarabées  en  bas  de  la  petite  col- 
line de  sable. 

II  n'y  a  que  cette  portion  de  terrain  qui  reçoive  le 
sable  entraîné  par  la  mer  et  poussé  par  le  mistral  : 
tout  le  golfe  des  Lèques  est  bien  planté  en  vignes, 
et  un  joli  bois  couvre  le  cap  où  est  placée  la  bat- 
terie. Derrière  Tarento  est  un  grand  marais,  appelé 
la  Palu,  qui  conduit  à  la  Cadiere,  lieu  dont  le  nom 
rappelle  Tindécent  procès  du  P.  Girard,  accusé 
d'avoir  séduit  sa  belle  pénitente. 

Nous  retournâmes  à  la  Ciotat ,  et  nous  suivîmes 
M.  le  préfet  au  tribunal  des  prud'hommes ,  pour  les 
remercier  de  leur  bonne  réception  :  leur  salle  est  dé- 
corée d'un  portrait  en  pied  de  l'Empereur.  Cette  pein- 
ture atteste  plutôt  le  désir  qu'ont  ces  braves  gens  de 


f 


i 


V 


M 


M 


y» 


(  i)  Scarahaus  sacer. 


CHAPITRE    LXXXIX.  379 

posséder  Kmage  de  leur  souverain ,  qu'elle  ne  prouve 
le  talent  de  celui  qui  Fa  exécutée. 

C'est  une  curieuse  et  intéressante  institution  que 
celle  des  prud'hommes.  On  appelle  ainsi  une  cor- 
poration  formée  entre  les  pêcheurs ,  laquelle  exerce 
sur  toute  cette  caste  honnête  et  laborieuse  une  juri- 
diction dont  les  jugemens  sont  toujours  dictés  par  la 
pïus  stricte  équité  ,  et  exécutés  avec  la  plus  scrupu- 
leuse soumission.  Il  y  a  des  prud'hommes  à  Marseille , 
à  la  Ciotat  et  à  Martigues.  Les  quatre  prud'homales  et 
leurs  suppléans  sont  élus  tous  les  ans  le  jour  de  la 
Pentecôte,  en  présence  du  maire  :  on  les  choisît 
ordinairement  parmi  ceux  des  anciens  dont  le  sens 
droit  et  la  probité  sont  reconnus.  Leur  tribunal  a 
ie  nom  de  juridiction  des  prud'hommes  pêcheurs.  Ils 
portent  l'habit  français  noir  :  tous  ont  de  plus  une 
robe  de  palais  quand  ils  tiennent  leurs  assises.  Ils 
connoissent  de  toutes  les  contestations  i^elatives  à  la 
pêche.  Les  procès  ne  durent  pas  long-temps;  chacun 
explique  soi-même  naïvement  ses  raisons  :  les  friais 
ne  sont  pas  considérables  non  plus  ;  chaque  partie 
donne  une  pièce  de  deux  sous.  Les  juges  écoutent 
attentivement  :  leur  décision  est  toujours  sag«  ;  et  le 
président  l'exprime  en  disant  à  celui  dont  la  plainte 
n'est  pas  fondée ,  la  ley  vous  coundano  :  toute  la  sen- 
tence est  comprise  dans  ces  seuls  mots ,  et  personne 
ne  peut  appeler  de  c^t  arrêt;  jamais  on  n'en  attaqua 
la  justice.  Cette  belle  institution  date  du  x/  siècle  : 


\ 


^8o  CHAPITRE    LXXXIX. 

elTe  reçut  du  roi  René  y  en  1 4/ 1  »  son  organisation 
définitive;  elle  s^est  maintenue  pendant  la  révolution^ 
et  a  conservé  ses  archives.  Combien  il  seroit  à  désirer 
que  tous  les  procès  pussent  être  jugés  avec  la  même 
facilité  1 II  semble  que  la  raison  et  h  justice  se  soient 
réfugiées  parmi  les  pêcheurs. 

J  ai  déjà  dit  qu'on  regarde  ies  pécheurs  comme 
tm  reste  des  anciens  Phocéens  :  cette  idée  n'est  pas 
fus  te;  mais  ii  est  certain  qu'ils^  ont  une  droiture, 
un  sens,  une  énergie  y  un  kngage  ,  des  chanscxis^ 
des  moeurs  et  des  usages ,  qui  leur  sont  particuliers.. 
Ils.  s'allient  toujours  entre  eux. 

Leurs  jeux  ont  quelque  chose  de  vif  et  de  sin- 
gulier. Un  des  plus  communs  est  lajoûte,  espèce 
de  combat  qui  s'exécute  dans  le  port^  comme  nos 
joutes  sur  Teau  au  Gros- Caillou  et  à  la  RÂpée:  mais^ 
outre  sa  lance ,  le  jouteur  est  armé  d'un  petit  bou- 
clier sur  lequel  il  reçoit  le  coup  de  son  adversaire; 
ce  qui  le  jM-éserve  des  contusions  y  et  donne  à  cet 
amusement  un  caractère  plus  guerrier. 

Il  faut  voir  avec  quelle  adresse  les  jeunes  pécheurs 
montent  au  mat  de  cocagne ,  pour  se  saisir  du  prix 
qu'on  y  a  suspendu.  Cet  exercice  rend  leursmembres- 
plus  agiles,  et  les  dispose  à  grimper  aux  mâts  el  suip 
les  antennes  ;  peut  -  être  lui  devront-ils  leur  con- 
servation dans  ime  tempête.  Il  s'appelle  la  bigue^ 
Celui  qu'on  nomme  la  targm,  consiste  i  marcher 
sur  un  mât  incliné  vers  la  mer,  et  fortement  enduit 


CHAPITRE   LXXXIX.  3*1 

^e  siiîf  ;  îl  faut  aller  pieds  nus  sur  cette  perche 
^glis^nte,  et  saisk  le  prix  qui  est  suspendu  près 
<Ie  son  extrémité.  On  sent  combien  les  chutes  sont 
fréquentes  ,  «t  chacune  excite  ie  rire  des  specta- 
teurs. C^i  (pii  tombe  dans  la  mer,  nage  et  vient 
reprerjdre  une  place  derrière  les  autres ,  et  ainsi  suc^ 
cessivement..  Enfin  le  frottement  continuel  fait  dis*- 
paroitre  {a  graisse ,  et  le  prix  est  remporté  au  bruit 
des  acclamations. 

C'est  un  coupKTœil  plein  d'intérêt  que  de  voir  le 
départ  des  pécheurs ,  de  contempler  la  mer  couverte 
tie  ces  Ijardis  navigateurs  dans  leurs  frêles  barques  ; 
c'est  sur-tout  dans  un  beau  soir ,  c'est  au  clair  de 
la  lune,  que  ce  spectacle  est  ravissant.  II  n'est  pas 
moins  curieux  de  les  vcât  revenir  à  pleines  voiler  ou 
à  force  de  rames ,  et  se  presser  à  Tenvi  d'atteindre 
!e  rivage  avec  leurs  corbeilles  remplies  de  poisson  • 
Les  quais  sont  bordés  de  ceux  qui  veulent  en 
acheter  les  premiers.  Les  pêcheurs  débarquent  leurs 
filets,  et  les  étendent  pour  les  fiiire  sécher;  leurs 
femmes  ,  leurs  fîUes ,  les  attendent ,  et  les  con-^ 
duîsent  à  la  chaumière,  où  ils  trouvent  le  plus  grand 
des  biens  pour  l'homme  pauvre  et  laborieux,  ié 
sommeil  et  le  repos.  Ces  scènes  pittoresques  ont 
exercé  les  pinceaux  des  plus  grands  maîtres  ;  çlles 
font  le  charme  de  ces  jolis  tableaux  qu'on  appelle 
des  marines. 

La  Ciotat  est   une  ville   moderne  ;  on   a^t 


-I 


382  CHAPITRE    LXXXIX. 

qu'elle  doit  son  origine  U  quelques  pêcheurs  cata- 
lans :  elle  a  commencé  seulement  à  acquérir  quelque 
importance  dans  le  Xiv/  siècle;  son  nom  signifie 
y  il  le  (i).  Ses  habitans  se  livrent  au  commerce,  à  la 
pêche,  à  la  construction  des  navires;  <mais  le  voisi- 
nage de  Marseille  empêchera  que  cette  petite  viUe  ne 
prenne  jamais  un  grand  accroissement.  II  n'y  a  dans 
son  enceinte  que  deux  puits  d'une  eau  saumâtre  ;  mais 
Iz,  fontaine  du  Pré,  qui  coule  à  peu  de  distance ,  fournit 
uiie  eau  claire  et  limpide.  II  seroit  très- facile  de  la 
conduire  jusqu'à  la  ville  ;  mais  on  s'y  est  toujours  re- 
fusé, pour  ne  pas  ôterles  moyens  de  subsister  aux 
femmes  qui  sont  continuellement  occupées  au  trans- 
port de  cette  eau.  Ce  n'est  pas  là  une  preuve  d'une 
sage  administration  municipale  ;  il  seroit  plus  con- 
venable d'établir  des  fontaines  dans  les  rues ,  et  de 
procurer  aux  femmes  et  aux  enfàns  une  occupation 
qui  tournât  davantage  au  profit  de  la  commune. 

La  ville  est  bâtie  sur  le  roc  :  la  principale  forte- 
resse s'appele  lou  Berouard,  c'est-à-dire,  le  Boule- 
y  art  (a). 

L'abbé  Durand,  auteur  de  Cantiques  spirituels  ; 
le  pauvre  Pellegrin,  qui  dînoit  de  l'autel  et  soupoit 
du  théâtre  ;  Joseph  Seguin  ,  auteur  des  Antiquités 


(1]  On  a  dit  d'abord  Sieutat,  ensuite  Cieutat,  puis  Cioaiaf, 
enfin  Ciotat, 

(2)  Beloardus,  dont  on  a  fait  Beloard,  puis  Berouard, 


*« 


CHAPITRE   LXXXIX.  jSj 

d'Atles,  étoient  de  la  Ciotat.  Le  doyen  actuel' dçs 
gens  de  lettres,  M.  Marin,  qui  à  Tâge  de  quatre* 
vingt -dix  ans  conserve  encore  toute  la  vigueur 
et  la  gaieté  de  son  esprit  ,  a  écrit  l'histoire  de 
cei;te  ville ,  où  sa  famille  a  toujours  tenu  un  rang 
distingué. 

Pans  une  petite  promenade  sur  mer,  nous  pas- 
sâmes entre  le  cap  de  TAigle  et  une  île  peu  consi- 
dérable qu'on  appelle  très-improprement  l'île  Verte  y 
car  elle  est  nue  et  couverte  seulement  de  mousses  et 
d'algues  marines  :  on  y  va  quelquefois  manger  dit 
poisson.  Ce  lieu  paroît  avoir  été  détaché  du  cap 
appelé  aujourd'hui  le  JVr,  et  qui  est  cité  dans  les 
anciens  auteurs  sous  le  nom  de  Promontoire  de 
l* Aigle:  en  effet,  la  partie  qui  s'avance  dans  la  mer, 
a  encore  la  configuration  d'une  tête,  d'aigle.  Plus 
loin  est  un  autre  rocher  en  saillie  appelé  le  Capucin , 
où  Ton  prétend  qu'il  y  a  une  grotte  de  corail  ; 
quelques  personnes  crédules  ont  déjà  hasardé  leur 
fortune  et  leur  vie  pour  s'emparer  des  prétendus 
trésors  qu'elle  contient. 

II  y  avoit  des  comédiens  à  la  Ciotat ,  et  ils  jouoient 
quelquefois  des  pièces  marseilloises  :  nous  ne  pûmes 
y  assister  ;  mais  cela  me  donna  occasion  de  faire 
quelques  recherches  sur  le  théâtre  provençal.  Les 
anciens  troubadours  ont  composé  des  tessons,  espèces 
de  dialogues  qu'on  voudroit  inutilement  décorer  du 
titre  de  comédies,  puisqu'on  n'y  retrouve  rien  de  ce 


* 


384  CHAÏ>ITRÉ   LXXXtX. 

qui  constitue  un  drame  :  ce  sont  des  conversations 
en  vers  sur  des  sujets  d'amour  et  ^uelquefob  de 
^politique  ;  il  y  est  question  de  guerres  et  des  croi- 
sades (i).  '  ^ 
Les'  drames  pieux  que  ïe  roi  René  a  fait  repré- 
senter en  Provence  et  à  Avignon ,  ont  été  composés' 
en  français  >  et  le  plus  souvent  par  Michel  d'Angers , 
auteur  de  plusieurs  pièces  saintes  ;  l'Homme  mondain  ^ 
qu'il  fit  aussi  représenter,  étoit  également  écrit  en 
français;  On  n*a  ensuite  joué  que  des  pièces  du 
théâtre  français ,  et  ce  n*est  que  fort  tard  qu'on  a  fait* 
des  drames  en  provençal.  On  a  composé  à  Aix,  à 
Arles ,  à  Avignon ,  des  pièces  écrites  en  cette  langue, 
IBais  selon  le  dialecte  de  ces  contrées  ;  on  ne  conndît 


(r)  PaULET,  de  Marseille,  dont  ia  vie  n'a  pas  été  pubiiée,  et 
dont  les  poésies  n^en  sont  pas  moins  dignes  d'être  conservées , 
yîvoit  à  la  fin  du  XI II.*  siècle  ;  i!  étoit  contemporain  de  Charles  IJ* 
d'Anjou.  Accoutumé,  ainsi  que  Tétoient  tous  les  Provençaux,  à  fa 
domination  douce  et  patemelfe  des  anciens  comtes  de  la  maisoit 
de  Barcelone,  il  ne  pouvoit  souffrir  que  des  Français  fussent 
venus  leur  donner  des  lois  et  les  eussent  entrâmes  à  la  conquête 
lengue  et  périlleuse  du  royaume  de  Naples.  Lés  guerres  deNaples* 
les  impositions,  les  vexations  commises  en  Provence,  et  fa  prison 
de  Henri  de  Castille,  font  les  sujets  de  plusieurs  dialogues  en. 
vers  provençaux,  d^fis  lesquels  une  jeune  bergère  et  Paulet  lui- 
même  déclament  foHement,  mais  avec  esprit  et  adresse,  t:ontre 
Charles  L*^' ,  contre  fa  France ,  et  finissent  par  faire  dts  vœux^ 
pour  que  f*Espagne  dépouille  les  Français  de  la  Provence.  Le, 
tensoi^  ou  dialogue  étoit  la  tournure  la  plus  ordinaire  que  pre«^ 
noient  les  anciens  troubadours. 

point 


pùhA  de  tragédies  nî  d'opéras  provençaux  qui  mé- 
ritent d^tre  citée  { i  ). 

Nous  revînmes  par  Cassis.  C'est  ïe  port  que  les 
ilomains  appelorçnt  Carc'uL  II  a  peu  d'étendue; 
cependant  on  y  construit  des  barques ,  et  même 
'ée  petits  bâtfm«is  marchands,  connné  à  la  Ciotat^ 
4ont  les  t:JiaTp€ntiers  ont  cependant  pïus  de  repu- 
tation.  On  y  fait  un  commerce  de  cabotage^  et  l'oii 
y  récolte  vn  excellent  muscat  :  les  figues  et  sur- 
tout les  grenades  tJe  Cassis  ont  une  grande  répu- 
tation. Le  grenadier  est  originaire  de  l'Afrique ,  d'où 
8  a  passé  dans  k  Grèce;  il  y  étoit  recherché li cause 
tfe  fe  beauté  de  sa  fleur  et  de  la  bonté  de  son  fruit  ? 
on  prétendoit  que  sa  couïeur  étoit  due  au  sang  du  fa* 
ipouche  Acdestes  (2)^  La  superstition  l'avoit  consacré  x 


■!*• 


(1)  Les  pripcipalcs  pièces  proveirçales  toht ,  l<ftt  nàvi  Tarât  [f^ 
tiouveau  ^arîé  en  parure ,  ou  paré  pour  Jes  noces  ] ,  en  trors 
aictes,  par  yirfl)»  Co  YEN  A  NT ,  en  1771  ;  4n  F€sios  dé  ia.  pax  [les 
Fêtes  tic  la  piiix],<Ii«ioguc  entreinêfé  de  prose,  de.  vers  et  de 
ichaftt>  joue  en  178^  ;  la  Bienfaisaiïct  de  Louis  XVI,  par  BLmc 
Cilles;  Jean-Piort  Vtngut  de  ijrûfit  ou  qu!" Espéra  n^apds,  pouf 
ïe  même  é\étiextitwt\  Moussu  Aîaniclo,  pu  loH  Groulîé  M  esprit 
[M.  Minicle,  ou  ïe  Savetier  bel  esprit  ],  par  un  machiniste  d* 
Marseille,  M.  Just ;  kis  doues  Coumaires  [  les  deu^  Commères ] , 
par  iin  commissionnaire-chargeur  d«  Marseille.  On  mêle  quelque- 
fois des  scènes  provençales  dans  des  pièces  française?;  mai^  qu^nâ 
CCS  scènes  ne   sont  psis  jouées  par  des  actrice^  du  p*y«^   i» 
fsLïigut  provençale  n'est  plus  reconnoiisable^ 
(2  )  ArN  OB.  Adversàs  geHtes,  V» 

Tome  IIL  B  b 


)86  CHAPITRE   tXXXIX« 

dans  les  mains  de  Jupiter  (i)  et  de  Junoti  (2)  / 
c'étoit  un  symbole  mystique  de  l'abondance  ;  dans 
celles  de  Mercure  ( }) ,  c'étoit ,  à  cause  des  différentes 
loges  où  ses  graines  sont  cachées ,  un  emblème  de 
l'obscurité  du  discours  :  les  femmes  n'en  pouvoient 
manger  pendant  la  célébration  des  mystères  d'Eleu- 
sis (4)  >  parce  qu'on  croyoit  que  c'étoit  pour  ce  fruit 
que  Cérès  avoit  tralii  le  serment  qu'elle  avoit  fait 
de  ne  prendre  aucune  nourriture  avant  d'avoir  re- 
trouvé sa  fille ,  enlevée  par  Pluton.  Les  Rhodiens 
sur- tout  aimoient  à  cultiver  ce  bel  arbre;  sa  fleur  sert 
de  type  à  leurs  médailles  (5)  ;  on  prétend  qu'ils  sa- 
voient  en  extraire  une  couleur  d'un  pourpre  rosé  pour 
teindre  leur  laine;  ce  secret  n'a  pas  été  retrouvé.  Son 
fruit ,  appelé  en  Grèce  m/n  [sidê] ,  avoit  donné  son 
nom  à  la  ville  de  Side  en  Pamphylie  ;  il  en  est  du 
moins  le  type  parlant  sur  ses  médailles  (6)  :on  le  voit 
aussi  sur  celles  de  l'île  de  Mélos  (7).  C'est  à  la  forme 
de  la  fleux  du  grenadier  que  Ton  doit  un  ornement 
d'architecture  qui  en  a  pris  son  nom  (8).  Les  Romains 

(i)  AchillesTatius,  III, d. 

(2)  Pausan.  II,  17. 

(3)  Clemens  Afcxandr.  Strom^  p.  ^79. 

(4)  Clemens  Alcxandr.  Prom/^r.  p.  12. 

(j)'  Spanheim  ,  de  Prastantia  numismatum,  II ,  3 18. 

(6)  LiEBE,  Gotha  numaria,  p.  195. 

(7)  HUNTER,  C^m/.  pi.  XXXVI,  fig.  XXVI,  XXVII,  XXVIII. 

(8)  Ltbalustre,  du  mot  /èa^twçtoY  [èaiausdonj,  parlcqacHc$ 
Grecs  dcsignoicnt  la  Heur  du  grenadier. 


CHAPITRE    LXXXIX.  387 

donnèrent  à  ce  fruit  ie  nom  de  malum puniçum  [  pomme 
punique] ,  sans  doute  parce  qu'ils  Tavoîent  importé 
lors  de  leurs  guerres  contre  les  Carthaginois  :  dans  des 
temps  plus  modernes ,  ce  fruit  a  reçu  le  nom  de  gre- 
nade ,  à  cause  du  grand  nombre  de  grains  brillans  qu'il 
contient  dans  ses  loges.  Le  grenadier  se  répandit  dans 
l'Italie  et  dans  les  parties  méridionales  de  la  Gaule:  il 
se  peut  cependant  que  les  habitans  de  Carcici,  tribu- 
taires  des  Marseillois,  en  aient  dû  la  connoissance  aux 
Grecs ,  avec  lesquels  ils  faisoient  le  commerce.  Get 
arbre  croît  spontanément  dans  les  terrains  secs.  Le 
grenadier  sauvage  (i)  a  les  rameaux  épineux ,  et  la 
plupart  des  haies  en  sont  formées  ;  le  beau  pohceau 
de  sa  fleur  forme  un  agréable  contraste  avec  le  vert 
foncé  et  brillant  de  ses  feuilles  :  la  culture  lui  fait  pro- 
duîre  des  variétés  qui  donnent  un  fruit  doux  ou  un 
jGruit  acide ,  et  il  prend  alors  le  nom  de  balaustier  (2). 
Les  jardins  sont  ornés  d'une  variété  à  fleurs  doubles , 
qu'on  rentre  dans  l'orangerie  pendant  l'hiver,  comme 
ie  grenadier  que  l'on  cultive  pour  l'agrément  dans 
les  jardins  des  contrées  moins  méridionales. 

La  culture  du  câprier  est  aussi  très-productive  ;  elle 
»'étend  depuis  Cassis  jusqu'à  Toulon.  Cet  arbris- 
seau paroît  être  originaire  de  l'Asie,  d'où  il  aura  été 
importé   dans  la  Grèce,  et  de  là  dans  l'Italie  et 


(1)  Punîca  spinosa.  LamarCK,  Flore fiançoise ,  III,  483. 

(2)  Punica  sauva.  DUHAMEL,  Arb.  pi,  44. 

B  b  2 


la  Gaule  méridionale.  Les  Grecs  lui  donnoiem  le  nom 
^e  nous  lui  avons -conservé  (i).  Le  câprier  com- 
mun (i).estla  seule  espèce  de  ce  genre  qui  ne  soit  pas 
étrangère  k  l'Europe ,  et  encore  3  n'y  vient  qu'au 
moyen  de  la  ciduiye.  On  le  plante  en  quinconce,«t  on 
le  couîrre  de  terre  pendant  l'hiver  :  H  fleurit  au  com- 
mencement de  l'été.  Mab  pour  obtenir  la  càp«  ,  il 
£sat  préven'ff  la  floraison;  car  cVst  le  bouton  tpton 
appelte  ainsi.  Les  femmes  et  les  enfens  sont  occupés 
\  le  àwflfir,  et  jettent  leur  récohe  dans  des  tonneaux 
Remplis  de  vinaigre ,  où  l'on  ajoute  un  peu  de  seL 
On  laisse  amû  macérer  les  câpres  pendant  quarante 
jours,  après  lesquds  on  les  passe  dans  des  cribles  de 
^:uivre  :  on  léontt  celles  qui  sont  d'une  égale  gros- 
seur; ies  plus  petites  sont  les  plus  recherchées  ;  «n 
Renouvelle  le  vinaigre  et  le  sel ,  et  on  met  le  tout 
:dans  de  petits  barils.  Ce  commer<:e  est  très -lucratif, 
«arce  que  la  câpre  de  Provence  est  <>elle  qu'on  pré- 
fère :  on  la  legMde  comme  Wen  supérieure  à  la  câpre 
de  Tunis.  On  donne  le  nom  de  cornichons  de  câym 
;aux  fruits  que  4'on  a  laissé  rnûrh: ,  et  qui  ont  été 
<X)nfit8;  ik  sont  beaucoup  plus  gros  que  les  câpres. 
Ce  frmt  si  doux  que  nous  devons  à  la  Grèce  ; 
■ce  fruit  qïH  étoit  tellement  cher  aux  Athéniens  (3) , 


{^)  Capfarhtpinata. 

(j)  Ath£N.XIV^  ,«;P«;TARCH-Z>*«(n«-n,îa}. 


€  »  A  P I T  RE     EX  X  X  rX.-  J  Sp. 

t 

qn'îfs  avoient  prononcé  la  peine  de  mort  contre  cdûi 
qui  en  exporterait  dans  une  terre  étrangère  ;  ce  fruit 
dont  la  beauté  fit  nahre  au  roi  de  Perse  le  désir  de 
conquérir  Theureux  sol  qui  le  prodwisoit  (  i  )  ,  et 
qui  fournit  à  Caton  (x)  Ingénieuse  applicadoBrr 
qui  décida  ia  perte  de  Carthage ,  la  figue,  croît  spon- 
tanément dans  tout  cet  arrondissement.  On  en  fait 
$écher  une  grande  partie.  Si  h  datte  y  mûrissoit  ^ 
cette  heureuse  contrée  réuniroît  toutes  les  produc- 
lions  dont  Dieù^assara  la  possession  aux  Israélit6fr 
dans  la  terse  promise  (  j  )  ^ 

Un  clinsat  si  favorisé  de  la  nature  a  dû  teujourr 
kispirer  dbs  idées  riantes  et  aimabres  ^  aussi  étoit^ce 
à  peu  de  distance  de  Marseille ,  d^Aubagne  et  de 
Cassis,  aux  châteaux  de  Signes  et  de  Pierr^fiu yXÇXB 
se  tinrent  de  célèbres  cours  d'amour.  Ces  galans^^ 
tribunaux  dévoient  décider  les  questions  que  les 
^oubadours  proposoîent  dans  de$^  espèces  et  dis* 
putes  en  vers ,  appelées  jeux  dt  partis  t  des  princes^ 
renommés  par  leur   prudence  et  leur  valeur  (4). 

(i)  Athen.  XIV,  i^  ;  Plutarch.  Àpopfuk,  t.  lï,  p.  173. 
(a)  PlUTARCH.  «r  Catone,  t.  ï,.  p.  y$z. 

(3)  Let  cinq  fruits  que  Dieu  ppomit  aux  Israélites  dam  fe  pays- 
de  Canaan ,. sont  ie  raisin ,Ja  figue»  ia grenade,  ToKve  et  i^datu. 
Voyez  Deuter.  VIII,  8;  Num,  XIH ,  23.  Ce  dernier  manque  seul 
au  territoire  de  Marseille.  Le  iivve  -des  Rois  ajoute  que  diaquc 
braéiite  devoit  s'asseoir  sous  $on  propre  figiûcr.  J^^,  m^  25  ,. 
xvm,  yi  'y,Es,  xxxvr,.  6j  Alich.  iv,.4. 

(4)  Aiphonse,  roi  d'Arragon;  Richard,  roi  d^Angfeterre^  l'An» 
jeteur  Frédéric  Barbcrouss*. 


4 


39©  CHAPITRE    LXXXIX. 

ne  dédaîgnoîent  pas  de  les  présider.  Maïs  cet  hon- 
neur étoit  ordinairement  réservé  aux  dames  ;  et 
l'on  choisissoit  toujours  les  plus  distinguées  par 
l'éclat  du  rang  y  l'ancienneté  de  la  naissance  et  la 
délicatesse  de  l'esprit  :  l'histoire  nous  a  conservé 
les  novfïs  de  quelques-unes  d'entre  elles.  La  Pro- 
vence cite  d'abord  Rostagne,  dame  de  Pierrefeu, 
et  Bertrande,  dame  de  Signes.  Étiennelte,  femme 
du  comte  de  Baux,  et  fille  de  Gerberge,  comtesse 
de  Provence  ,  étoit  une  de  celles  qui  assistoient  à 
ces  graves  jugemens.  On  nomme  encore  Adélasie , 
iricomtesse  d'Avignon  ;  Alacre ,  dame  d'Ongle;  Her- 
mesinde  ,  dame  de  Posguières  ;  Bertrande ,  dame 
d'Orgonf;  Mabile,  dame  d'Hyère*;  les  comtesses  de 
Die  et  Jausserande  de  Claustral.  Ces  cours  ëtoiént 
florissantes  et  considérées  sous  les  Bérenger  ;  la  belle 
Laure  fut  ensuite  un  des  ornemens  de  la  cour  d'amour , 
dans  laquelle  Ganthelme  de  Romanil,  sa  tante  ^  tenoit 
un  rang  distingué.  On  y  avoit  compté  ,  parmi  les 
présidentes ,  Jeanne ,  dame  de  Baux  ;  Agnès  de  For- 
calquier,  dame  de  Tretz;  Briande  d'Agout,  com- 
tesse de  Lune  ;  Mabîle  de  Villeneuve ,  dame  de  Vence  ; 
Béatrix  d'Agout ,  dame  de  Sault  ;  Isoarde  de  Roque- 
feuil,  dame  d'Ansouis;  Anne ,  vicomtesse  deTalIard  ; 
Blanche  de  Flassans;  Douce  de  Mortier,  dame  de^ 
Clumang  ;  Antoinette  de  Cadçnet ,  dame  de  Lam- 
besc  ;  Magdeleine  de  Salon ,  dame  de  Salon  ;  Rixende 
dePuyvert,  dame  de  Trans.  Ces  galantes  juridictions 


CHAPITRE   LXXXIX.  39^ 

subsistèrent  long^tempsà  fa  cour  d*Avîgnon;  ce  fut 
«alors  lepoque  de  leur  résurrection;  et  les  pontifes 
eux  -  mêmes  les  protégèrent.  Innocent  VI  donna 
aux  comtes  de  Vintimille  et  de  Tende ,  qui  étoient 
venus  le  visiter ,  le  spectacle  d'une  de  ces  séances  , 
4ont  ils  furent  émerveillés  (i). 

Les  cours  d^amour  connoissoient  des  tracasseries 
des  amans ,  et  de  tout  ce  qui  concernoit  la  galan- 
terie. Les  chevaliers  les  plus  intrépides  étoient  pré- 
cisément ceux  qui  se  faisoient  le  plus  de  gloire 
de  respecter  Jes  décisions  d'un  tribunal  formé  par 
les  dames ,  auxquelles  ils  avoient  voué  ieuris  services 
et  consacré  leur  vie. 

Le  retour  des  papes  à  Rotne  ,  les  malheurs  de 
l'Etat,  diminuèrent  la  pompe  et  le  crédit  des  cours 
d'amour,  et  elles  disparurent  tout-à-fait  ;  mais  le  goût 
des  questions  subtiles  sur  une  métaphysique  galante 
dura  encore  long-temps.  Martial  d'Auvergne ,  pro- 
cureur et  notaire  à  Paris  vers  le  milieu  du  XV.''  siècle, 
composa ,  sous  le  titre  d'Arrêts  d'amour,  un  ouvragé 
channant,  dans  lequel  il  réunît  cinquante  -  une 
causes  :  toutes  sont  le.fruit  de  son  imagination;  mars. 
les  traditions  des  véritables  décisions  de  ces  singuliers 
tribunaux  s'étoient  encore  conservées;  et  ces  arrêts 

(  I  )  Discours  sur  Us  arcs  triomphaux  drtssis  en  la  ville  d'Aix ,  p.  i  ^. 
Consultez,  sur  les  cours  d'amour,  Touvrage  de  M.  RoLAND» 
intitulé  Recherches,  sur  les  prérogatives  des  dames  che^  les  Gaulois  et 
sur  ki  cours  d'amour  ;  Pairis,  1787 ,  in- 1  a. 

Bb  4 


Jpz  CHAPITRE  LXXXrX. 

fictifs  peuvent  en  faire  connoître  Tesprît  (i)^  iLt 
prince  d'Amour ,  son  Heutenant  et  ses  pages  ;  que- 
BOUS  avons  vus  figurer  dans  la  bizarre  procession 
d'Aix; ,  rappellent  encore  cette  cour  autrefois  si  chérie 
des  Provençaux. 

Après  cette  excursion  y  nous  revînmes  à  I2 
Renarde,  où  nous  attendoit  f aimable  épouse  du 
préfet  y  qui ,  dans  ie  temps  de  cette  galante  institu-^ 
tion^  aurait  été  jugée  digne  de  présider  la  cour 
d'amour;  mais  les  charmes  qui  b  distinguent  auroient 
mis  souvent  son  équité  à  de  rudes  épreuves»  en  k 
fendant  juge  et  partie. 


i*.   *i 


(1  )  Cet  ouvrage  est  réellement  singulier  par  la  forme  juridique 
^e  i*habJie  praticien  a  donnée  à  chaque  cause  :  tous  les  termes 
4e  ia  chicane  y  sont  employés  de  la  manière  fa  plus  piquante  et 
la  plus  ingénieuse;  ce  qui  prouve  bien  que  ce  n*est  qu*un  jeu  d'es-» 
prit.  11  a  eu  plusreursconmientateurs  :  ie  plus  célèbre  est  LECOURar 
DE  Sawt-Symphorïen  ,  savant  jurisconsulte,  qui  discute  avec 
une  plaisante  gravité  plusieurs  passages  du  galant  arrêtiste»  dont 
il  soutient  on  réfute  les  opinions  avec  une  érudition  aussi  éton«^ 
nante  par  soa étendue  que  par  son  emploi ,  en  s'appuyant  de  i  auto^ 
rite  des  lois  romaines ,  du  droit  canonique,  des  pères  de  i*Éjgiise,  et 
des  poètes  grecs  et  latins.  La  meilleure  édition  est  celle  qui  &  été 
dorâée  par  LeNGLET-DufIUSNOY.. 


m 


<^tm 


CHAPITRE  XC. 

DÉPART  de  Marseille.  —  Ichthyopètres.  •—  Clamim.^-» 
Mausolée —  Inscription,  —  Arc.  —Divers  monumens. 
—  Saint-Remy.  —  Inscriptions.  —  Culture. 

J  E  quittai  avec  regret  cette  belle  cité  ^  où  tout 
annonce  l'industrie  et  respire  le  plaisir  ;  mais  la  foire 
de  Beàucaire  alloit  commencer ,  et  je  ne  voulois  pas 
manquer  l'occasion  d'assister  à  son  ouverture. 

Nous  passâmes  rapidement  à  Âix  ;  M.  de  Saint- 
Vîncens  étoît  resté  à  Marseille  ;  et  séparé  peut-être 
pour  toufoufô  de  cet  ami  si  cher  ^  }é  me  hâtai  d^aban- 
donner  le  lieu  qu'3  habite ,  et  où  j'avois  eu  tant  de 
plaisir  à  le  voir. 

La  montagne  qu'il  faut  gravir  en  sortant  d'Aiît , 
fît  qu'on  appelle  AÎ&ntéeitAvign&n  ,€Sî  toute  de  gypse; 
elle  contient  une  gtande  quantité  d'ich&yt>pètres  t  là 
pierre  est  une  espèce  de  schfstë  bituhiineux  ;  iei 
empreintes  sont  noires;  le^  vertèblres  de  poissons  et 
les  ^étes  sont  marquées  en  noit  sur  un  fond  jau-^ 
nâtre.  Ces  pierres  font  effervescence  avec  les  acides  { 
la  couleur  noire  dîspiroît  d'abord  ;  il  s'exhale  lUié 
odeur  de  corne  brûlée  ,  et  elles  deviennent  enfin 
blanches.  On  y  reconnoît  des  poissons  qui  approchent 
du  genre  des  dorades  ^  des  poissons  barbus  ,  des 


35)4  CHAPITRE   XC. 

pleuronectes  ou  poissons  plats ,  mais  qui  appartiennent 
sans  doute  à  des  genres  et  à  des  espèces  dont  la 
plupart  ont  disparu. 

Comme  la  route  que  nous  avions  à  suivre  nous 
étoit  connue,  nous  courûmes  toute  la  nuit,  et  nous 
arrivâmes  à  Orgon  au  point  du  joun  Nous  ne  vou- 
lûmes point  en  partir  sans  revoir  encore  le  beau 
travail  fait  pour  le  canal  des  Alpines  (  i  ) .  J'en  donne 
( planche  LVi n/  2)  une  vue  d'après  un  dessin  que 
fe  me  suis  procuré. 

Ici  nous  quittâmes  la  route  qui  conduit  à  Avignon , 
pour  prendre  celle  par  laquelle  on  va  en  Languedoc 

A  quatre  heures  du  matin,  nous  étions  à  Saint" 
Remy  ;  c'étoit  l'heure  la  plus  favorable  pour  bien 
voir  les  curieux  inoifuméns  qui  rendent  ce  lieu  cé- 
lèbre, et  qui  sont  en  effet  si  dignes  de  l'attention 
des  voyageurs.  En  payant  une  demi-postè  de  plus, 
on  a  la  facilité  de  s'y  faire  conduire.  A  un  demi^ 
mille  de  Saint-Remy  s'élève  une  rangée  de  rochers 
calcaires ,  coupées  ^  pic  ;  au  bas  est  une  petite  colline  ^ 
sur  le  plateau  de  laquelle  sont  les  édifices.   . 

Il  est  certahi  qu'il  y  avoit  là  une  ville  du  pays 
des  Salyes  ,  qu'on  nommoit  probablement  Glant 
et  que  les  Romains  ont  appelée  Glanum ,  en  lui  don- 
nant le  surnom  de  Z/v/7,  qui  peut-être  étoit  celui  du 
fondateur  de  cette  colonie  (2}  :  mais  ce  Livius  nous 

(i)  Supra,  tome  II,  page  185. 

(a)  Comme  on  appdolt  Aix  À^utit  Suttia,  du  nom  de  StMtiu^ 


CHAPITRE    XC.  355 

«st  inconnu ,  et  le  lieu  lui-même  n'a  aucune  célébrité 
dans  l'histoire  ;  on  en.  ignoreront  peut-être  l'existence, 
si  l'Itinéraire  d'Ântonin ,  et  la  Tabïe  Théodosienne, 
publiée  par  Peutinger,  n'en  faisoient  pas  mention. 
Gianum  aura  été  renversé  pendant  l'invasion  des 
peuples  qui  ont  ravagé  Arles  ;  mais  les  deux  monu- 
mens  qui  y  existent  encore ,  en  perpétueront  à  jamais 
le  souvenir. 

Ces  monumens  ne  sont  pas  éloignés  l'un  de  l'autre 
de  plus  de  quinze  pieds  :  il  n'est  pas  probable  que 
cette  proximité  ait  existé  sans  intention  ;  sans  doute 
ils  étoient  consacrés  tous  les  deux  au  même  person- 
nage, dont  on  aura  placé  le  tombeau  près  de  l'arc 
destiné  à  rappeler  ses  victoires  et  les  services  que  sa 
prudence  et  sa  valeur  avoient  rendus  à  la  patrie. 

Le  mausolée  (pi.  LXIlI,fg.  z)  attira  notre  atten- 
tion ,  à  cause  de  l'inscription  qui  y  est  gravée  sur 
une  frise.  Sa  hauteur  est  d'environ  cinquante  pieds, 
et  il  est  composé  de  trois  parties  posées  l'une  sur 
l'autre.        > 

La  première  est  une  base  carrée,  ornée,  sur  ses 
quatre  faces ,  de  bas^eiiefs  à-peu-  près  grands  comme 
nature  et  d'un  assez  bon  dessin.  Du  côté  du  nord , 
on  voit,  selon  M.  l'abbé  Lamy,un  combatde cava- 
lerie :  au  couchant,  un  combat  d'intânterie  ;  sur  le 
premier  plan ,  des  soldats  se  disputent  le  corps  d'un 
guerrier  qui  a  été  tué  dans  l'action  :  au  midi ,  l'in- 
fanterie  et  la   cavalerie  se  retirent  pêle-mêle  ;  à 


y9<f  CHAMTltE  XC. 

gauche  ^  un  sanglier  semble  Touloir  pénétrer  dbw 
un  rang  de  soldats  ;  k  droite,  une  femme  nue  est^ 
étendue  aux  pieds  d'un  cheval  furieux ,  queqUelques^ 
soldats  ont  peine  à  retenhr  ;  un  vieillard  expire  au 
milieu  de  ceux  qui  l'entourent  :  au  levant  est  la  repré* 
sen talion  d'un  triomphe;  des  hommes  et  des  femmes^ 
se  Kvrent  aux  transports  de  la  foie  ;  et  sur  te  pre^ 
nûer  pian ,  il  jr  a  un  fleuve  appuyé  sur  son  urne  (  i  )». 
Aux  quatre  angles  sont  des  pilastres  sans  piédes* 
taux ,  et  dont  les  chapiteaux  ont  une  forme  bizarre.. 

0 

La  corniclie  est  ornée  de  guirlandes  grossières,  aux- 
quelles des  masques  sent  suspendus  ^  et  qui  soirt^ 
portées  par  des  génies  nus» 

La  seconde  partie  est  composée  d^un  bâtiment 
carré ,  percé  à  chacune  de  ses  Êices  ;  ce  qui  forme 
quatre  arcades ,,  dont  les  cintres  posent  sur  des  pi- 
lastres sans  bases  (2)  :  ces  cintres  sont  prnés  de^ 

(i)  Telle  est  k  description  de  M.  i*abbé  Lamy.  J'avoue  que  Im^ 
dessins  publiés  par  Breval  ,  Remarks  on  several  parti  of  Europe  ^^ 
t,  I ,  page  \^\,cx  ceux  qui  ont  été  levés  par  M.  de  Saint^Vincens ,. 
n'offrent  rien  de  semblable  :  je  n'entreprendrai  pas  d*en  donner 
une  explication  ;  cela  me  paroît  imposable.. 

(2)  On  a  plusieurs  figures  de  ce  tombeau  et  de  Tare.  Celle  qu'en* 
donne  BoucHE ,  Histoire  de  Propeike^  I,  t^j,  n'en  présente  qu'une 
foible  idée;  SPON  ,  au  frontispice  de  ses  Recherches  d* antiquités  » 
Fa  copiée  servilement  :  cdie  de  MoNTFAUCON  ,  Ant.  expL  t,  V  ^ 
.part.  I,  page  132,  est  plus  fidèle.  II  est  étonnant  que  MoREAtf 
DE  M  AUTOUR,  Acad,  des  belles-lettres,  t.  VH,  p.  2^2^  ait  fait 
graver  de  nouveau  ces  monumens  d'après  des  dessins  de  son- 
fils  ,  pour  en  donner  une  figure  moites  exacte  Celle  <{ue  M. 


frampres^  étla  def  est  une  tète  de  Méduse  avec  des 
ailes.  Les  quatre  angles  sont  supportés  par  des  co^ 
ionnes  cannelées  avec  des  <jiapiteaux  corinthiens. 
La  frise  est  ornée  d'un  arabesque  composé  dliippo"- 
-campes  <m  chevaux  marins  dlés  :  au  mSieu  $ont  deux 
sirènes  avec  de  grandes  ailes  d-oiseaux. 

La  troisième  partie  est  composée  de  dix  colonnes 
cannelées^  avec  des  chapiteaux  coriniliiens ,  rangés 
^n  cercle  ;  elles  supportent  un  petit  dôme  :  la  frise  est 
élégamment  décoréede  feuilles  dont  ies  enroulemens 
sont  pittoresques  et  d'une  bcmne  exécution.  Ce  petit 
édifice  a  fair  d'un  temple  roai.  Au  fnilieu  sont  demtt 
ifigures  debout  ;  Tune  dTiomme,  l'autre  de  femme: 
les  têtes  en  <mt  maffaeureusement  été  perdues.  La 
frise  de  la  coupole  est  entourée  d'un  fort  cercle  éê 
&r,  qui  la  rend  plus  sofide. 

Sur  îa  frise  du  petit  «édifice  carré  composé  d'ar- 
cades^ du  côté  du  nord-^est,  on  lit  : 

S£Xl-MIVl-iEICl?PAilENTIBUSSVElS. 

Souche  (t)  arapporté  les  onze  manières  peu  satb- 
faisantes  dont  cette  inscription  a  été  lue  par  des 


ClRARD  a  jointe  à  sa  carte  dt  la  Provence,  ne  vaut  fzs  tnieux« 
La  meilleure  gravure  est  celle  de  i*abbé  LamY,  en  1787  :  on  i« 
vend  à  la  poste»  avec  un  livret  qui  en  contient  l'explication. 
Bkeval  I  dans  Touvrage  dé|à  cité ,  a  fait  représenter  le  mausdée 
#t  ses  bas-reliefs  ;  mais  ie  dessin  de  ceux-oi  est  trcs-inexact. 

(i)  Histoire  de  Prwence,  1. 1,  p.  1 37. 


59$  CHAPITRE    XC. 

hommes  trèi-înstruils  (  i  )  ;  Moreau  de  Mautour  (2) 
n'a  pas  été  plus  heureux  :  mais  tous  ont  travaillé 
d'après  des  copies .  infidèles.  L'illustre  Barthélemi 
Fexplique  ainsi  (3)  :  Sextus ,  Lucius ,  Alarcus ,  tous 
trois  Jils  de  Cdius  Julius ,  a  leurs  parens  (4)-  Un 
savant  allemand  (5)  propose^de  lire  :  Les  Juliens , 
Sextus ,  Lucius  et  Marcus ,  fils  de  Caius  Julius  , 
à  leurs  parens.  La  tournure  seroit  différente,  mais 
le  sens  est  le  même  ;  et  là  première  interpréta- 
tion me  paroît  devoir  être  préférée  (6). 

L'arc  de  triomphe  (pL  LXXIII,fig.  2)  est  Hé  trop 
intimement  avec  cet  édifice ,  pour  que  je  n'en  donne 
pas  la  description  avant  de  hasarder  quelques  idées  sur 

■      I     ■  'I  I  II  ■■   ■  I  I     I     !!■   Il  I       ■       I  '■ 

(  I  )  Voyez  aussi  Rapport  de  l'inscription  du  mausolée  de  la  ville 
de  Saint- Remy ,  des  diverses  interprétations  de  ladite  inscription,  et  de 
la  fondation  et  appellation  de  la  ville  royale  de  Saint»Remy,  par  Jean 
DE  BOMY,  avocat  à  Grenoble;  Aix,  1^33 ,  in- 12.  —  Description 
des  antiquités  de  la  ville  de  Saint- Remy ,  par  Fr.  Peilhe,  d'Arles, 
antiquaire;  171 8,  inr4.*  — Description  de  deux  mon^mens  antiques 
qui  subsistent  dans  la  ville  ele  Saint- Remy,  par  M.  i'abbéLAMY*  1787. 

(a)  Académie  des  belles  lettres ,  t.  VII,  page  263. 

(3)  Académie  des  belles-lettres,  t.  XXVIII,  page  579;  Œuvres, 
t.  n ,  page  84  ;  Lettres  sur  l'Italie  ,  seconde  édition ,  1 802  , 
page  336. 

(4)  SEXtus  Lucius  Marcus  JULll  Caii  Filii  PARENTIBUS  SUIS, 
—  JVLIEI  :  cette  manière  d'écrire  El  pour  /  se  rencontre  dans 
plusieurs  inscriptions, et  notamment  dans  ceiIe-ci,où  nous  lisons 
SVEIS;  nous  la  retrouverons  bientôt  sur  i'arc  de  Saint-Chamas. 

(,5)  FISCH,  Brieff.  S.  363. 

(6)  Cette  inscription ,  trouvée  à  Gènes,  LM  MINUCEIS  QF 
RUFEIS,  et  citée  par  i'abbé  BARTHELEMI,  prouvcroit  en  favcar 
de  l'opinion  de  M.  Fisch. 


CHAPITRE    XC.  39^ 

le  mausolée.  II  est  placé  au  nord  de  ce  monument  :  il 
est  encore  entier  depuis  le  rez-de-chaussée  jusqu'au- 
dessus  de  Tarchivolte;  mais  la  partie  supérieure  a  été 
détruite  par  le  temps.  Afin  de  conserver  ces  restes 
précieux ,  on  a  élevé  un  massif  de  grosses  pierres , 
en  ménageant  des  pentes  de  chaque  côté  pour  l'é- 
coulement des  eaux.  Ce  monument  é toit  très-simple 
€t  très- petit;  il  n'avoit  qu'une  arcade  peu  élevée, 
mais  il  étoit  chargé  d'ornemens.  De  chaque  côté  il 
y  a  deux  colonnes  cannelées  :  les  pilastres  qui  sup- 
portent l'arc,  sont  doriques  ;  ils  retournent  carrément 
sous  l'arcade  et  en  forment  les  angles  :  les  chapiteaux 
servent  d'imposte  k  l'arc,  et  ils  ont  une  espèce  de 
fiise  décorée  de  patères ,  de  simpules ,  de  sécespites, 
de  flûtes ,  et  enfin  des  divers  instrumens  propres  aux 
sacrifices. 

Les  sculptures  de  l'archivolte  représentent  des 
pommes  de  pin ,  du  lierre ,  des  raisins ,  des  branches 
d'olivier ,  attachés  avec  des  bandelettes  ;  toute  la 
voûte  est  couverte  de  caissons  hexagones ,  dont  les 
moulures  sont  enrichies  d'oves ,  et  dont  le  fond  est 
rempli  de  différentes  espèces  de  rosaces. 

Entre  les  colonnes,  il  y  a  deux  figures  tenant  au 
mur.  Vers  le  levant,  ces  deux  figures  sont  un  homme 
et  une  femme  attachés  à  un  arbre,  ainsi  qu'on  a  cou- 
tume de  représenter  les  villes  et  les  provinces  con- 
quises :  du  côté  du  couchant ,  une  femme  pose  la 
main  sur  le  bras  d'un  guerrier  enchaîné.  De  l'autre 


4ôft  etirÀ»ktitfc  xe. 

tç6té  f  une  ésmme  est  assise  sur  des  trophées  ;  Hiomittt 
iqui  est  près  d'elle ,  a  les  nflains  liées  derrière  le  dos  ^ 
et  il  est  lui-même  attaché  à  un  arbre. 

he  monument  a  été  détruit  jusqu'à  ces  figures  t 
^&es  ne  sont  pas  entières  ;  il  n'y  en  a  que  deux  dont 
les  tètes  soient  conservées.  Dtùx  Victoires  tenant 
des  palmes  sont  couchées  le  long  des  voussoirs^  On 
len  vcMt  les  figures  entières  dans  un  dessin  levé  par 
Peiresc  (  i  )  »  lorsque  cet  arc  étoit  moins  dégradé  $ 
c'est  celui  qui  a  été  gravé  par  Montfàucon.  Il  est  pro* 
|>able  que  la  frise  ou  l'entablement  portoit  une  ins-** 
criptiou:  mw  cette  partie  est  à  présent  détruitîî  ;  on 
Ta  remplacée  par  un  toit  de  pierres  carrées  pour  empè« 
cher  le  dégât  des  eaux  pluviales  (2). 

II  est  impossible  de  former  aucune  conjecturé  rai*» 
sonnable  sur  le  temps  où  ces  monumens  ont  été 
faits ,  et  sur  le  général  h  qui  ils  fiirent  cônsacrésé 
Malgré  la  beauté  de  Taisembie  du  mausolée  et  ta  déli-» 
catesse  de  qu^ques  omemens ,  il  ofl^  des  défauts  i 
les  colonnes  cannelées ,  avec  des  chapiteaux  corin-» 
tbiens  et  des  bases  attiques ,   n'om  pas  de  justes 


^m^t 


,  (  I  )  la  BibIiothà|uç  hnpcriak  pocscde  deux  volumes  d'un  recueil 
de  dessins  de  monumens  et  d*objets  d^sut  qui  ont  appartenu  à 
Peiresc. 

(a)  Cet  arc  l  aussi  été  puBIîé  par  BoUCHE ,  ffistoin  dt  Pfo- 
vence  ,  I,  1 37  j  MONTFAUCÔN  ,  Antiquité  expliqnie  ,  Suppï. 
t  IV*  f>L  XXXIV^  d*^jrès  un  destin  de  Peinsc^  Moreau  m 

proportions 


CHAPITRE  X€.  4oi 

|m)pt)tlSo»ns  ;  la  comîdie  et  la  frise  ptirtent  du  milieu 
ifles  coioni^es,  qui  ne  les  supportent  pas  entière- 
ment ;  il  y  a  des  parties  d'ornement  très-grossière$ 
let  très^négligées  :  enfin  il  est  aisé  de  voir  que  cet 
édifice  n'a  pas  été  feit  dans  ie  bon  temps  de  Fart; 
if  est  sûrement  d'un  temps  postérieur  à  celui  des 
Ântonins.  Les  figures  qui  omènt  l'arc ,  ies  bas- 
teliefs  qui  décorent  le  mausolée,  ne  peuvent  rien 
nous  apprendre  sur  Toiigine  de  ces  monumens  ;  on 
ïie  peut  pas  même  déterminer  avec  précision  si  les 
sujets  de  ces  bas  -  reliefs  sont  tirés  de  la  mytholo- 
gie, ou  s'iîs  ont  rapport  à  l'histoire  des  personnages 
auxquels  ces  édifices  furent  consacrés^  Cette  der- 
nière opinion  paroît  cependant  plus  probable  ;  mais 
aucun  écrivain  lîe  nous  a  transmis  des  détails  qui 
puissent  servir  à  l'appuyer.  Le  guerrier  dont  de% 
armées  ennemies  se  disputent  la  dépouille,  comme 
les  Grecs  et  les  Troyens  combattant  pour  le  corps 
de  Patrocle,  est-if  celui  ^  qui  le  mausolée  a»  été 
élevé ,  ou  le  général  qu'il  a  vaincu  l  Le  fleuve  est-iï 
le  Rhône  î  Cette  femme  est-elle  celle  du  vainqueur 
ou  celle  du  vaincu  î  Que  signifie  le  sanglier  î  Tout 


m*m 


MKimovn ,  Academii  des  beUn-kttres,  Vïï,  265  j  M.  DE^IRARD^ 
sur  ia  carte  d'Aix  ;  BreVAl'j  Travels ,  I,  15  J  ;  Beaumont, 
SelfCt  Vi^s  êf  midi,  p.  1 1  (  trcs-infidclc  ).  Ce  que  j'ai  dit  des 
gravures  du  mausolée,  s'applique  également  à  celles  que  ces 
auteurs  ont  données  de  l'arc  ;  celle  de  M.  Tabbé  Lamy  doit 
être  préférée 

Tomt  m.  c  c 


-*-  *  I  *■  —  ■    ^ 


I 


r* 


\ 


402  CHAPITRE    XC. 

te  qu'on  peut  dire  de  plus  probable ,  c'est  que  ces 
bas-reliefs  rétracent  un  événement  locçil  ;  inab  aiicun 
auteur  ne  nous  en  a  conservé  le  souvenir. 

On  ne  sauroit  non  plus  rien  avancer  de  certain 
sur  le  personnage  à  qui  le  tombeau  a  été  élevé.  H 
s'appeloît  Julius  Caïus  :  mais  étoit-il  de  la  nobift 
femille  Juliaî  ou  n'étoit-ce  qu'un  Gaulois  qui  avoit 
pris  le  nom  de  cette  famille ,  dans  laquelle  il  avoit 
ses  protecteurs  et  ses  patrons  l  L'abbé  Barthélémy  { i  ) , 
d'après  quelques  médailles  attribuées  vulgairement 
à  César,  sur  lesquelles  il  y  a  des- armes  assez  sem- 
blables à  celles  que  Ton  voit  sur  les  arcs  d'Orange  ^ 
de  Saint-Remy  et  de  Garpentras,  et  d'après  un  rapr 
port  qu'il  croit  apercevoir  dans  le  goût  qui  a  dirigé 
ces  monumens,  pense  que  ces  médailles  et  ces  arcs, 
avec  lesquels  il  auroit  pu  citer  l'arc  de  Gavaillon ,  ont 
été  construits  par  un  des  ancêtres  de  César  :  mais  cette 
supposition  est  contredite  par  le  style  même  de  ces 
monumens  ;  et  nous  ne  connobsons  d'ailleurs  aucun 
personnage  de  la  famille  Julia  qui ,  avant  Cés^ir ,  ait 
vaincu  les  Gaulois. 

Glanum  ayant  été  détruit  de  fbnd  en  comble  sans 
doute  par  les  barbares  qui  dévastèrent  la  Provence, 
comment  ces  deux  monumens  ont  -  ils  été  seuls 


(i)  Voyage  en  /w/;V.  Voyez  ses  Œuvres,  t.  II,p.&4,  et  ses  Let^es, 
p,  2  24  de  la  première  édition,  et  239  de  ia  seconde. 


CMAPITHE   iC.  405 

épargnés  î  C'est  encore  une  question  qu'if  est  impos- 
sible de  résoudre.  ' 
Le  lieu  qui  nous  occupe  devoit  être  assez  consi- 
dérable. On  voit  encore  quelques  débris  de  ses  murs, 
et  une  branche  de  la  voie  aurélieiine  (1).  A  peu  de 
distance ,  près  des  montagnes ,,  un  aqueduc  souter- 
rain s'étend  depuis  la  place  qu'occupe  à  présent 
Saint-Remy,  jusqu'à  Arles  ;  on  Ta  découvert  en  plu- 
sieurs endroits  :  c'est  un  canal  voûté ,  de  cinq  pieds 
de  haut  sur  deux  de  large  (2).  On  trouve  souvent, 
dans  le  voisinage7  des  urnes,  des  médailles  d'or, 
d'argent ,  de  cuivré ,  et  diverses  antiquailles  ;•  nous 
avons  nous -inèmes   remarqué  plusieurs  fragmens 


*  (i)  Cette  branche  conduisoit  à  Glanutn;  la  voie  auréiienne 
traversoit  la  Crau  et  conduisoit  à  Arles  :  on  appelle  àujourc£hiji 
\t%  traces  de  cette  voie ,  Ion  Camin  aurignati. 

(1)  il   prenoit   Teau  dans  le   territoire  de  Molièges,  à  deux 

iieues  nord-est  de  Glanum,  et  recevoit  dans  son  cours  les  eaux  des 

montagnes  voisines  :  alors  sa  hauteur  moyenne  étoit  de  quatfe  pieds 

sept  pouces,  et  sa  largeur  de 'deux  pieds  onze  pouces.  M.  GuÉRiN, 

dans  sa  Description  de  Vaucluse,  dit  que  les  eaux  qui  arrîvoient 

à  Arles  par  Taqueduc,  dérivoient  de  cette  source;  mais  Pôpi- 

nion  de  M,  P.  Veran  paroît  devoir  être  préférée.  On  peut  suivre 

ce  canal  dam  l'excellente  carte  qu^il  en  a  tracée,  et  qui  est  au 

nombre  des  planches  que  le  P.  Dumont  seproposoit  de  publier; 

51  formoit  un  grand  nombre  de  sinuosités.  Nous  verrons ,  à  l'article 

de  la  ville  d* Arles,  que  M.  Veran  en  a  découvert  le  réservoir.  Il  y 

a  quelques  années ,  en  fouillant  auprès  de  ce  canal ,  on  a  trouvé, 

'dans  le  vallon  appelé  Armerait,  àt%  tuyaux  de  plomb  et  deux 

têtes  de  marbre  d'un  très-bon  goût. 

C   C   a 


K 


4o4  rHAl>ITRï:    XG. 

d'inscriptions  (i),  ainsi  que  c«$te  pierrfe  tumuÏMt 
entièrement  conservée  : 


M.  thirand,  qui  a  une  campagne  près  de  Saînt^ 
5Remy>  possède  un  beau  fragment  de  sarcophage  > 


jqui 


(i)  Pirmi  plttsicars  fragmens  3e  picmés ,  on  en  distingue  unfe 
i  est  SGuiptce  en  forme  de  coqailie,  telle  qiron  en  voit  quelques- 
fois  parmi  les  ornemens  dçs  frises. 

Sur  un  autre  fragment  de  pierre  cassée^ans  sa  kmgtteur,  oti 
lit,  d'un  côte,  QVI  PASSI ,  et,  de  l'autre,  on  distingue  les  lettres 
:suiVamc*,  disposées  ainsi  sur  quatre  lignes^ 

1 

* 

RIE 

Un  autre  fragment  de  pierre  n'ofir«  xjuc  ies  lettres  MD*  i* 
«litre  «st^nsi  formé  c 


JSER 


j 


Ces  trois  lettres  terminent  tm  mot,  pairoe  qu'à  la  droite  il  y  a  un 


^.A. 


•  - 


tJbntMwMeuinier  a  eu  la  bonté  dôme  commuhîquep 
fe  dessin  ^pl^  LIX,Ji^.  S)^  Le  eouverrfe  e^t  formé 
d'écailIes  imbriquées  comme  cdlesdap^Jmièr.  Ity  ar 
$ur  la  fcûe  deux  cdémbés  qiii  vont  boîre  dans  un  vase 
au  côté  gaucbe^  une  autre  colombe  va  se  désahé'- 
xer  de  m^me,,eton  lit  au-dessus^i  roPTÔNr  xaipb 
[Salut;  â  Gonoui.Adm  i^Gation]'.  Ces  4^1<»inbé& 
poujToient  &iT!e'regafd€tr  ce*monumeiitcomme  diré^ 
tiea;  mais  on  voit  ^  de  l'autre f:Ldsé^  un  petit  géiJie^li} 
tient  dsAs^  i^i^e  ioain  IWc^rm  ouiicpârre  à:  encens-,  et 
qui  ^  dq  l'aut]^^  j/Hte  de  celiencens  sur  un  brasier  :  il 
est  doi;r<;  glos;  probabie-cptejc'ion  Am  .tombeau  païerïi 
On.  ^t  cependant  q^e ,.  sw  tes  tombeaux  des  pre- 
miers, duitiens^.oa  trouve  des  symboles  relatîii^auife 


On  y  voit  aussi  un  fl'agment'tI*èntaHemem  ^uî  est  de  îa  mcn\é 
fonne  que  ceuxqa/oxtrèmanjuc  sur^usieun  pilastres.de  FâqucdliC 
^e^arbtegil ,  à  Arles^  : . 


'    1         '  '  '■"'  ->. 


>    . 


p>A: 


•  Jffef apporte  cw'fôtgbïcmi  parce  qu'on  peu!  un  jour  troavcp- 
^esr  inicnptionv  pii^c^ccendues  ,.  et;  qu'ils  contribueront  alors 
à, donner  des  ifidices  sur  Thistoire  des  monument,  de  Ghmum, 
SVO^  y  Recherches  (Tanti^ités ,  front ispilsce ,  n.°  »,  a  gravé  une 
i^tatue  ^u4  a  été  dccoarerxc  prèidu  mausolce  j  maïs  elle  est  d'uti 
tre^mauvAis  style.: 

^c  3 


I 


-       ^  T 


4o(f  CK-'APITRE    -gt'Jf 

Mi^s^u  paganisme.  Si  l'on  reconiïoî^i«o}t  ce  tombeau' 
pwr  chrétien ,  il  prouvêroît  que  Glanum  èxîstoît  en- 
core au  I  II/  sièdè ,  temps  où  ta  foi  a  été  portée  à  Arles.' 

Lorsque  Monsieur^  frère  de  Louis  XV!  ,  voyagea 
dans  la  PfovenoB,  qui  étott  son  «panage,  il  voulut 
VairétÇHà  Saint-Remfpdur  en  visiter  les  monumens  ; 
jiiisqu'alors  ils  avoient  été  extrêm€fff1é^flt  négligés ,  et 
l06.  ftgbttans  les  regardoiem  avec  indifférence  :  mats 
OA  se  h&ta  de  faire  le  chemin  commode  qliî  y  donduît"; 
on  consVnûsit  un  piint  sur  le- rui^seato  qui  coiilè  ptès 
de^  édifices;  on  nettoyff>là  place,  \>n  creiisàun  fossé 
tout  autour;  on  planta Juwe  allée circéfirrré  d'ormes, 
et  l'on  mîtdes  banc^  dé  pierre  pou^  qu\Dtt  put  se  repo- 
seret  considérer  k Taise  ces  rentes  élég'ans  et  curieui 
de  l'architecture  romaine.  De^  baibaxes  ont  coupé  une 
partie  des  arbres  et  renversé,  les  bancs.  Sans  doute  ces 
dégâts  auront  été  réparés  :  ceseroit  une  honte  jx)ur  la 
municipalité  de  Saint-Remy ,  que  délié  pas  rendre ï 
ce  lieu  tout  l'agrément  et  tout  riritérêtdont  il  est  sus- 
ceptible  ;  elle  se  montreroît  indigne  de  posséder  des 
monumens  auxquels  cette  petite  ville  doit  unique- 
ment sa  célébrité,  ei  qui  sont  les  seuls  objets  qui 
puissent  y  retenir  les  v(5yageùrs. 

Saint-Remy  a'est  pioprementrquVçb  gws  bouig  : 
il  reçut  le  nom  qull  porte,  en  yoi  ,'  vers  le  temple 
où  Clovis  alla  assiéger,  dans  Avignon ,  Gpridebaud^ 
roi  des  Bourguignons  :  S.  jSemy  TaçcQmpagna  dan^ 
c«tte  expédition.  Un  habitant  du   pays,   nomme 


CHAPITRE   XC.  407 

Sênoit,  dônl  îl  avôit  guéri  la  fille,  qui  étoit possédée 
du  démon ,  lui  avoit  donné  dès  biens  que  le  saint 
évêque  légua  à  J'église  de  Reims. 

On  conserve  dans  la  maison  commune  une  belle 
inscriprion ,  qui  est  très -précieuse^  parce  que  c'est  le 
seul  monument, (Je  ce  genre  où  Ton  trouve  le  nom 
>de  Glanum  (i);      . 


MORIE     AETERNA 
EB  VTI  ^AGATHON 


9 


VIROCJ  AVG  C 


1 

ORP     < 

\7X>  AT"  .tri* 


EB  ^ AREL^  CVRAT  El: 
.  CORP.  BIS.  ITEM.  IlH 
RO.  COL.  I VL.  APTAENA 
AE.  ARARICO  CVRATORI 

PECVLI     RP.     ÇLANICO     QVlî 

VIXIT    ANNOS    LXX 

AEBVTIA  EVTYCHI A  PATRO 

NO    erga   se    PIENTÏSSIMO 


r 


(i)  CAYLUS,  RtCKfiU  VII,  165. 


c  c  4 


^^Êm 


4o8  CHAPITRE    XC. 

A  U  mmohrt  itemtlU  (  t  )  d'yEbutius  Agathon  (i ),  Méifhrangàstal  f|J[ 
du  corps  de  la  colonie  Julia  Patenta  ArUsienne{^) ,  curateur  du  même 
corps  (5) ,  deux  fois  quinquennal  de  la  co  fonte  Julienne  d'^Apt  [6) ,  négo^ 
étant  de  la  Saône  [j),  curateur  des  repentis  des  haàkattr  de  Gianuin  (8)> 
'^ui  a  vécu  soixanttdix  ansi  /Ebutia  Eutychèa  i  smpatrott  bienfaisant» 

La  forme  des  M  et  des  G  dans  Poriginal  doit  êiire 
rapporter  au  i v.*  siècle  cette  inscription ,  qui  prouve 
que  la  ville  de  Glanum  étoît  alors  un  Wsxk  assez  con^ 
sidérable,  puisqu'il  y  avoit  des  sévirs  d'Ai^uste  et 
un  intendant  des  revenus  pubfics.  La  statue  d'iËbu- 
tius  étoit  probablement  placée  sûr  cette  pierre» 

M»  de  Lagoy,  qui  habite  Sain t-Remy  pendant  une 
grande  partie  de  Pannée,  vient  d'y  faire  transporter  de 
Paris  une  collection  précieuse  xle  dessins  originaux  ^ 
dont  ie  nombre  s'élève  à  plus  de  trois  mille.  Ces 
dessins  sont  du  plus  beau  choix  ^  et  proviennent  en 
grande  partie  des  collections  de  Va$ari,  de  Crozat,^ 
de  Mariette ,  de  Gianetti ,  et  de  celles  qui  sont  con- 
nues avantageusement  :  ils  sont  classés  par  école^ 
selon  Tordre  chronologique  des  maîtres,  au  nojubre 
de  huit  cent  soixante-dix,  et  forment  une  histoire 

(i)  meJUORlAE AETERNAe. 

(2)  AEBUTli AGATHONis. 

[l)  Jllllf  yiRO  AVGustali,  Supra,  tome  I,  page  ^^j. 

(4)  COBPorîs  colonia  Julia patERna  ARELatensb^ Nous  verrons» 
\  l'article  d'Arles ,  l'origine  des  surnoms  de  cette  colonie. 

(5)  CC/RATori  EJusdeM  CORPorîs, 

(6)  BIS  ITEM  IlUlviRO  COLonict  JUIÀa  APTAE. 

(7)  NAUtAE  ARARico,  Suprà,  tome I,  page  246, 

-  («)  eURATORI  PECC/lliMeiPubUeaClANlCOrutH, 


V 


X 


CHAPITRE     XC.  '        4op 

"^lïe  l'art  depuis  le  xiv.*  siècle  jusqu'à  nos  jours.  La 
partie  la  plus  curieuse  est  celle  des  anciens  maîtres 
de  l'école  florentine  ;  plusieurs  sont  inconnus.  Contre 
l'usage  ordinaire  des  amateurs,  M.  de  Lagoy  n'a 
'pas  cherché  à  leur  donner  des  îidms;  il. s'est  attaché, 
au  contraire,  à  rendre  à  leur  obscurité  ceux  qui 
'en  avoient  été  tirés  mal-k-propôs.  Dix-sept  dessins 
liîèn  authentiques  de  Raphaël,  et  un  pareil  nombre 
de  Michel- Ange ,  forment  à  eux  seuls  une  grande 
rîdiesise  dans  cette  collection;  ceux  des  autres  chefs 
d'école  sont  aussi  très-nombreux ,  tandis  qu'un  seul 
dessin  des  peintres  médiocres  suffit  pour  les  faire 
connoitre.  M.  de  Lagoy  a  gravé  une  partie  de  ces 
dessins  avec  la  plus  scrupuleuse  exactitude;  et  il  se 
•proposé  d'en  former  un  recueil  qui  sera  intéressant 
^  pour  les  artistes  et  les  véritables  amis  des  beaux 
arts. 

U  possède  aussi  une  collection  de  médailles 
grecques  et  romaines,  parmr  lesquelles  on  distingue 
une  suite  de  six  cents*  censulaires  en  argent  de  ia 
plu^  Wle  conservation.  Les  ^milles  les  plus  rares 
s'y  trouvent;  entre  autres,  deux  de  I9 faucille  Horatia, 
dont  l'une  restituée  par  Trajan* 

Les  environs  de  Saînt-Remy  peuvent  fournir  aux 
amateurs  de  Fantiquité  une  riche  mine  à  exploiter; 
et  M.  de  Lagoy  se  propose  bien  de  faire  faire  des 
fouilles  qui  doivent  enrichir  son  cabinet. 

Le  terroir  de  Saint-Remy  est  défendu  contre  le 


.  .    .A 


4ïO  CHAPITRE   XC.) 

vent  dtt  nord  par  la  petite  chaîne  des  Alpines  ^  qne 
la  Durance  sép|ire  de  la  grande  chaîne ,  appelée  dans 
le  pays  les  Aupiif;  elle  commence  à  Orgon ,  et  finit 
à  Saint-Cabriel ,  autrefois  £^a^^i/i2//ff^ ,  i)n 

Ce  pçtic  p^ys  est  très^gré^^te  par  la  douceur  de 
son  climat  et  la  t^auté'  de  sa  culture.  Les  flancs  de 
la'  montagne  sont  plantés  d  oliviers  ;  et  depuis  Saînt- 
Remy  jusc^'au  territoire  de  Mailiane ,  dans  un  espace 
de  plus  d'une  lieue,,  c'est  une  suite  comînueite  de 
jardins,  qiui  fournissent  des  légumes  verts  et  des 
plantes  potagères  à  plus  de  dix  lieues  à  la  ron^de  :  la 
marjolaine  (z)  y  vient  aussi  en  grandef  abondai^e,  et 
Ton  voit  des  champs  couverts  de  chardons  abonné* 
tier  ( }) ,  dont  on  trouve  le  débit;  pour  les  manufactures 
de  draf»  des  dépaf temens*  environnaas.  Ces-  terrains 
.précieux  sont  arrosés  par  un  canal  où  se  dédiargent 
les  eaux  des  marais  de  Molléges  et  de  Vilargèles.yqui 
sont  eux-mêmes  alimentés  par  lia  source  du  Loiiroun 
Pyron  :  ce  canal  fournit  toujours  la  même  quantité 
d'eau.  On  recueille  aussi  un  asser  bon  vin  ;  le  blé 
du  canton  de  Graveson  est  estimé ,  et  on?Ie  recherdia 
principalement  pour  les  semailles, 

(i)  Il  en  est  fait  mention  dans  îa  table  de  Peutinger;  cette  viHe 
avoit  un  corps  d'Utriculaircs ,  qui  est  cité  dam  une  inscn|>tion 
rapportée  par  DuMONT,  n.**  179. 

(2)  OriganuM  majorant, 

{3)  Dipsacus fullonum. 


'    î  ^ 


4ii 


CHAPITRE  XCI. 


Route  de  Saînt-Rèmy  à  Beaucaire.— Jardins.—  Origine 
-deBeaucaire, —  Ugermim,Belïum-<^adrum.  —  His- 
thire.  -,-  AucassT4?i  et.  Nicolette.  -**  Coiit  plén^ière.  — ^ 

,  ^Çi.OguIières  profusf  on^*  '-^^  Guerres  ;  religiojr.  -*-  Foirci-i^ 
JBpntiques;  enseignes.  ^-rPr^  de  Sainte-Magdelerne;ca.- 
ban  es  ;  barques  ;  chapelle  ;  arrivée ,  placemei\t.  — Voleur* 
de  grands  chemins,  filles  publiques,  jeux,  filoux,  mé- 
decins,  chirurgiens,  enterremens,  notaires,  huissiers, 
pôiîoé.   — 1  Ouverture.  —  Arrivée    dés   ctnriénx.  — 

,  .Aiïb^rgesijcfôtàiiratenxs,  cafés,  spec ta ctesr,  danses  suV 
le  pré.  —  I^^jéede  ja  franchise. —  Départ.  —  Débor^ 
dément  du  Rhône.  —  Solitude  ordinaire  de  la  ville. 
—  Porte  du  Rhône.  —  Château^  —  Voie  romaine, 
r—  Nçtre-Dame  de  Pbmier.  —  Bas-xeRefs  gothiques. 


JL/k  Saint-Remyà  Beaucaîre  ,  la  route  forme 
fl'qgféahles  sinuosités ^  à  travers  des  fardins  riches 
de  culture,  et  dont  la  douce  verdure  repose  foefl 
fttîgbé  par  l'éclat  du  èoièiî.  Ort  arrive  bientôt  \  Taras- 
con ,  dont  on  aperçoit  de  loin  ïe  célèbre  château» 
Tout  étoît  en  tumulte  dans  U  ville  :  la  place  éloit 
couverte  de  cafés  ,  de  cabarets,  établis^  sous  des 
tentés  ;  on  auroit  cru  qu*une  hoi'de  iiomade  étoît 
veiîue  s'y  établir.  Nous  eûmes  biei>  de  la  peine  à 
trouver  deux  chambres  pour  nous  loger;,  et  apiiès 


4ll  CHAPITRE    XCf. 

nous  être  assurés  ^un  gîte  ^   nous  nous  hâtâmesi 
de  nous  rendre  à  Beaucaire. 

Cette  ville  est  regardée ,  par  d'AnvîIIe  f  i  ),  comme 
YUgemum  des  anciens;  c'étoit  un  des  vingt-quatre 
vici  ou  bourgs  qui  dépendoîent  de  Nîmes.  Ce  lieu 
conserva  son  nom ,  quoiqu'avec  quelque  altératîonV 
jusqu'au  conMnencement  du  xi/  siècle;  on  l'appeloît 
sJors  Ugemo:ver$  ic;; o /iltcçttceluiàeBelti'Cadmm 
ou  Belcûdm;  on  croît  que  ce  fut  k  cause  de  la  forme 
carrée  des  tours  de  son  château  (2),  6u  de  fa  plaine 
qu'il  domînoit.(j). 

^  ^Bçaucaîre  est  célèbre  dans  les  écrits  des  trouba- 
dours et  des  romanciers.  La  douce  Nicolette  ^  dont 


(  I  )  Les  auteurs  de  V Histoire  du  Languedoc,  1 ,  197  et  1 98 ,  pensent 
^\xUgemum  n'est  pas  Êeaucaire ,  mais  Beîlegarde,  entre  Nîmes  et 
Arles.  La  position  que  donne  à  Ugernumiz.  Tahkde  Peutinger,  dont 
ils  s'appaîenty  est,  en  effets  plus  basse  que  la  position  de  Beau» 
Caire;  efic  est  en  droite  ligne  d'Arles  :  mais  fe  sentiment  de  D-Ai*- 
VILLE ,  Notice  sjit  Vanctenne  Gaule ^  ifie  semble  appuyé  sur  des 
témoignages  qui  prouvent  i^Ugemum  étoit  sur  ià^rive  du>Rh&hei 
et  me  paroit  devoir  êtt-e  préféré.  » 

(a)  Vo^e:^  une  note  sur  l'origine  de.  Beaucaire*  éa.ni.VHisfain 
du  Languedoc,  par  D.  Vaisse,TTE,  t.  U,  note  XXXVIII  j  Recherches 
historiques  et  chronologiques  sur  la  vitU  de  Beaucdire ,  Avignon  ^171^ 

in-8.°  :  .       .;:  f  •••'.' 

(.3  )  Cadrwn ,  pan  corruption  du  mcft  Qufidp^tm.  EnlanguedocîeA 
«t  en  provençal,  un  cadré  ou  catré  signifie  un  carré,  un  espace. 
Beaucaire  pourrait  encore  devoir  son  nom  à  sa  riame  situation» 
tes  Langi«docîèn$  Pappellent  Bel-Caire;:  (xs  deux  niots  ,  prti 
acptiément  4  «gnîfîem  ^AJii  ^/r«r/ârr^        • 


4  4 


«fj-: 


CHAPÏTRE    XCÏ.  4^5 

les  aventures  avec  l'aimable  ef  tendre  Àucassiixsont 
ie  sujet  d'un  fabtiau  ingénieux  et  touchant  (  i  ) ,  étoit 
^e  adoptive  du  vicomte  de  Beaucaire.  Pou  voit -on 
jplacer  mieux  que  sur  les  rives  du  Rhône ,  sôus  le 
beau  cîel  du  Languedoc,  ce  parfait  modèle  des 
amours  du  bon  vieux,  temps  ! 

Lors  de  la  division  du  royaume  d'Arles  en  grands 
fiefs  ,  Beaucaire  échut  aux  comtes  de  Provence  ;  îf 
fiit  cédé  en  1 1  a  j ,  par  Raymond  Bérenger  L*'' ,  à 
Alphonse  Jourdain  ,  comte  de  Toulouse  î  ce  liett 
xrhétif  a  été  regardé  comme  un  des  boulevarts  de  la 
France,  Jusqu'au  temps  t?ù  la  Provence  fut  réunie 
à  ce  royaume. 

Raymond  y  tint  à  Beaucaire ,  en  1 172 ,  une  cour 
plénière ,  dans  laquelle  chaque  chevalier  chercha  à 
surpasser  ses.,  rivaux  par  sa  magnificence.  Lorsque 
Fon  çut  déployé  toutes  les  ressources  du  iuxe ,  et 
qu'on  eut  usé  de  tous  les  moyens  de  faire  parade 
de ,  ses  richesses ,  on  eut  recours  aux  plus  bizarres 
extravagances  t  le  noble  comte  en  donna  lui-^méme 
l'exemple  ;  il  fit  présent  à  Raymond  d'Agoust  de 
cent  mille  sous  (2) ,  que  celui-ci  distribua  aussitôt 
à  dix  mille  chevaliers  qui  étoient  venus  à  cette  cour. 


amm 


(i  )  Ce  chartnant  conte  a  été  publié  par  M.  DeSainte-Palaye, 
€t  extrait  par  Legrand-d*Aussy,  II,  121.  SÉDAiNEa  pris  dan» 
.<^e  conte  ie  sujet  de  son  opéra. 

(»)  Gnquante  sous  valoient  alors  un  marc  dVgent  fin. 


L,  . 


4l4  .CHAPITRE    XCI. 

Bertrand  Raimbaud  voulut  imiter  cette  noble  libéra- 
lité ;  mais  ce  fut  par  une  ridicule  profusion  :  après 
avoir  fait  tracer ,  par  douze  paires  de  bœufs ,  de 
larges  sillons  dans  les  cours  et  les  environs  du  ehâ*- 
teau,  il  y  fit  semer  trente  mille  sous  en  deniers; 
comme  si  les  dons  de  Bacchus  et  de  Cérès,  le  fro- 
ment ,  la  vigne  et  Tolivier ,  n'étoient  pas  les  plus 
nobles  et  les  plus  utiles  que  L'on  put  demander  à  la 
terre!  Guillaume  Grosmartel,  ne  sachant  comment 
faire  pour  surpasser  Bertrand  Raimbaud ,  fitapprêter, 
à  la  flamme  de  flambeaux  de  cire .  tous  les  mets  des^ 
•tinés  à  sa  table  et  k  la  nourriture  de  trois  cents  che- 
valiers qu'il  a  voit  à  sa  suite  :  il  n'est  pas  à  présumer 
•que  le  rôti  fût  pour  cela  mieux  cuit ,  ni  que  les  sauces 
fussent  meilleures.  La  prodigalité  de  Raymond  de 
Venoux  dégénéra  en  cruauté  ;  il  fît  brûler  devant 

r 

toute  l'assemblée  trente  des  pkis  beaux  c;hevaux  qu'il 
«voit  amenés.  La  comtesse  d'Urgel  envoya  une  cou- 
ronne estimée  quarante  mille  sous  ^  et  qui  étoit  des- 
•tinée  à  Guillaume  Mite,  qu'on  devoit  prodamer  roi 
de  tous  les  bateleurs;  mais ,  par  malheur  pour  lui,  il 
étoit  absent. 

Beaucaire  fut  le  sujet  d'une  gtierre  sanglante  entre 
Simon  de  Montfort  et  Raymond  VI ,  à  qui  les  biens 
du  père  de  Simon  avoient  été  donnés  par  le  pape 
Honoré  III,  comme  ayant  été  confisqués  sur  un 
hérétique,  protecteur  des  Albigeois.  La  ville  et  le 
château  ont  souvent  aussi  été  ensanglantés,  au  nom 


cïîapitrî:  xci.  4ij 

de  là  religion,  par  les  catholiques  et  parles  réformés: 
cm  n'y  trouve  plus  aujourd'hui  aucune  trace  du 
calyimsme.  Pehdànt  cjue  le  comte  de  Montfort  fut 
investi  du  comté. de  Toulouse,  il  étabKt  à  Beaucaire 
un  sénéchal,  et  cette  dignité  s'est  conservée  jusqu'à 
la  révolution. 

I 

Le  château -fut  démoli  en  1632,  parce  que  les 
rebelles  qui  avoient  embrassé  le  parti  de  Monsieur, 
frère  de  Louis  XHI ,  s'en  étoient  rendus  maîtres;  le 
roi ,'  pour  récompenser  ia  fidélité  des  hahitans  de  la 
ville ,  confirma  leurs  privilèges ,  et ,  entre  autres  ^  la 
franchise  de  la  foire  qui  s'y  tient  tous  les  ans. 

On  prétend  que  cette  foiré  a  été  fondée  par  Ray- 
mond  VI,  comte  de  Toulouse,  en  reconnoissance 
du  zèle  que  cette  ville  montra  pour  ses  intérêts  (  1  ) 
pendant  la  guerre  des  Albigeois ,  et  que  les  franchises 
qu'il  lai  accorda  ,  ont  été  confirmées  par  son  fils. 
Cependant'  la  charte  des  concessions  faites  par  ce 
prince  aux  habitans  de  Beaucaire  n'en  parle  pas  ;  et 
l'acte  le  plus  ancien  où  il  soit  question  de  ces  fran- 
chises, a  été  donné  par  Louis  XI  en  1 46  3  :  mais  on  voit 
par  une  expression  de  cet  acte ,  que  cette  foire  étoit 
bien  plus  ancienne.  Charles  VIII  ajouta  aux  privi- 
lèges accordés  par  son  prédécesseur,  celui  de  ne 
point  regarder  les  fêtes  comme  jours  utiles  ;  ce  qui 


{0   TraîU  historique  dt  ki  foire  de  BeoMcaire;  Marseille,  1734* 


4i^  CHAPITRE    XCK 

prolongea  encore  la  durée  de  i'e^emptipn.  Midgraj 
les  réclamations  des  fermiers  généraux  ^  portées 
devant  les  tribunaux  et  le  souverain  iui«méme^  ces. 
privilèges  avoient  été  maintenus  (  i  ) . 

.  Nous  desirions. beaucoup  de  voir  cette  foire  si  ce* 
lèbre  dans  les  annales  du  coitimerce  et  dans  les  fastes 
du  plaisir.  Quoique  ^  par  les  suites  de  la  révolution 
et  de  la  guerre,  elle  eut  beaucoup  perdu  de  son 
éclat  et  de  sa  magnificence ,  c'étoit  véritablement 
un  spectacle  curieux  :  tout  y  annonçoit  une  féccmde 
industrie,  et  l'air  retentissoit  de  ois  et  de  chants 
joyeux. 

Long-temps  avant  la  foire ,  les  prkicqïaux  mir* 
chands  s'occupent  de  louer  une  maison ,  ou  du  moins 
un  appartement.  Toutes  les  chambres ,  dont  chacune^ 
réunit  ordinairement  une  famille  entière ,  sont  en^ 
combrées  de  lits  ;  et  pendant  ce  temps-là  le  pro*. 
priétaire  se  relègue  dans  son  grenier.  Souvent  ces 
maisons  et  ces  chambres  sont  louées  aux  mêmes 
personnes  pour  plusieurs  années  (2}» 

Les  marchands  de  laine  et  les  drapitfs  doivent 
loger  alternativement  dans  la  grande  rue  et  dans  la 


^•tm 


(1)  Louis  XIII  a  pourtant  établi  sur  toutes  fes  marchandises  un 
droit  appelé  de  réappréciation  :  ce  droit  étoit  réduit  à  un  abonne*, 
ment  de  quinze  cents  livres  par  an. 

{2)  Lettre  d'un  particulier  de  Beaucaire  à  un  Toulousain  de  ses 
éunis ,  au  sujet  de  la.  foire  qui  se  tient  dans  le  lieu  de  Beaucaire  It 
22  juillet  de  chaque  année;  Avignon,  1771  ,  in-8.* 

rue 


CHAPITRE    XCI.  417 

rue  haote  ;  les  baux  qu'on  leur  fait  sont  conformes^ 
à  cette  disposition  :  ainsi  la  même  maison  est  louée 
è  des  drapiers  pour  iSo},  1805  ^  1807,  et  à  à& 
marc^nds  de  laine  pour  i8o4)  1806  et  1808;  de 
cette  manière,  les  habitans  de  ces  deux  rues  ont 
Taivanuige  de  posséder  tour^à-toor  les  marchands 
Papiers ,  auxquels  on  ait  payer  les  loyers  plus  cher  ^ 
parce  qu'ils  ont  un  pins  grand  débit.  Les  lîngers  s'é«> 
tabHtôenty  tout  prds  de  la  porte  du  Rh&ne ,  dans  isn 
lieu  appelé  la  Phcette.  Les  Ju^  ne  quittent  poit>t 
la  rue  qui  porte  leinr  nom  pendant  la  foire ,  et  qtd 
reprend  ensuite  cdui  de  rue  des  Cordelicrs  :  ils  n'oc* 
envient  que  te  centre  de) cette  rue;  le  haut  et  le  bas 
$ont  remplis  de  .marchands  de  cuir ,  qui  se  cèdent 
tllieniatirement  la  partie  là  plus  &YorabIe  au  com* 


Les  boutiques  ne  sont  pas  seules  occupées  :  il  y  a , 
dfhram  {es  muis>  des  échoppes  couvertes  en  toile; 
et  Ton  thre  aussi  partf  de»  bancs  de  pierfe ,  qui  sont 
iou^  et  sur  lesquels  on  expose  difl^^rens  objets  de 
petite  mercerie.  Les  marchands  suspendent  à  dei 
cordes  qui  tratersent  les  rues ,  des  toties  carrées  qui 
portent  l'inc&ation  de  leur  nom ,  de  leur  domicile, 
et  du  genrede  leur  commerce.  La  bigarrure  des  cou- 
leurs ,  ia  difféeence  des  ibrmes  de  ces  écriteaux,  leur 
disposition,  et  la  variété  des  inscriptions^  font  un 
coup  d'ceil  vraiment  siiigulîen 
.  La  ville  ne  pourroit  contenir  tous  ceux  qui  s'^ 
Tome  IIL  P  d 


4l8  XTHAPITRE    XCi. 

rendent  à  cette  époque  :  on  bàth  en  peu  de  jours 
xLtie  seconde  ville  de  bois,  qui  a  aussi  ses  carrefours  p 
ses  rues  et  ses  faubourgs.  Sur  la  rive  du  fleuve ,  entre 
la  porte  Roquebrune  et  la  porte  Beaungard,  est  un 
.vaste  pré  bordé  de  grands  arbres  y  appelé  pré  dt 
Saintt'-Magdeleint  ;  c'est  ià  que  se  construisent  un 
^raiid  nombre  de  cabanes  faites  en  planches ,  et  que 
l'on  dresse  des  tentes  pour  b  foire.  Le  coup-d'odf 
seroit  bien  plus  agréable ,  si  l'on  doniKxt  plus  de  soin 
à  la  forme  extérieure  de  ces  cabanes,  et  si  la  déccMa-* 
tion  en  étCMt  umforme  comme  oeHé  des  loges  dé 
nos  anciennes  fcnres  de  Saint-Germain  et  de  Sai|it^ 
I^urent ,  et  des  boutiques  qui  servent  à  l'exposition 
publique  des  objets  de  l'industrie.  Cependant , 
quoique  chacune  de  ces  baraques  soit  constraite  sans 
goût  et  sans  propreté ,  leur  réunion  forme  un  en* 
^emble  qui  n'a  rien  de  choquant. 

Celui  qui  fait  l'entreprise  de  ces  cabsuies ,  en  retire 
un  produit  considérable ,  attendu  le  haut  prix  qu'il 
met  à  leur  location.  Chacun  prend  ordinainement 
jpour  enseigne  un  instrument  de  sa  profi^ssion.  En 
général,  les  marchands  d'un  même  pays  ou  d'une 
même  ville  se  réunissent  dans  la  même  rue;  ce  qui 
rassemble  aussi  ies  productions  du  même  genre  :  id 
l'on  trouve  les  bcHitiques  des  marchands  de  savoa  ^ 
d'épicerie  et  de  droguerie  de  Marseille  :  là ,  \t%. 
parfumeurs  de  Grasse  exposent  leurs  pommades 
^t  leurs  savontiiettes ;  ceux  de  Montpellier,  leurs 


\  •" 


/ 


CHAPITRE   XCI.  4i^ 

parfiims  et Jeurs  Hqueurs  :  ailteors  de  nombreuses? 
dbânes  sont  remplies  de  figues ,  de  prunes ,  de  raisins 
secs  et  d'amandes.  Mais  ce  qui  nous  étonna  le  plus  y 
ce:  fût  une  rue  dont  les  murs  fort  épais  et  fort  élovés 
A^toîent  composés  çie  d'ognons  et  de  gousses  d'ail  ; 
Ik^^^uantité  en  étoit  si  eonsidérable^  qu'on  eût  pu 
croire  qu'il  y  en  avoit  pour  toutes  les  sauces  d« 
IfEurope.  Les  cafês ,  les  billards ,  les  lieux  où  l'oti 
danse  vioiit,  en  général,  placés  dans  ià  grande  rue^ 
^nfôre  sont  les  loges  des  bateleurs ,  des  faiseurs 
4e  tours,  de  ceux  qui  monu:ent  des  animaux  :  il  y 
avoit  alors  im  jongleur  qui ,  après  avoir  usurpé  le 
nom^  du  fameux  escamoteur  Cornus ,  y  afoutoit  le 
tttre  modeste  de  physicien  de  l* Empire  français  ;  le 
célèbre  funambule  Fôrioso  occupoit  une  saile  tou- 
jorurs  remplie  de  spectateurs.  A  l'extrémité  de  la 
piaine  est  une  chapelle  où  l'on  dit'  la  messe  :  elle 
est .  consacrée  à  l'immaculée  Conception  ;  et  Ton  y 
débite  une  grande  quantité  de  rosaires.  Cette  cha* 
pelle  est  très*  petite  ;  mais  les  fidèles  qui  veulent 
prendre  part  au  saint  sacrifice,  s'pgenouiHent  dans 
ie  pré  9  en  dirigeant  leur  vue  vers  l'autel  et  leur 
idtention-  vers  le  ciel  :  c'est :aâ>si  que,  dans  les 
temples  des  andens ,  les  pràtf es  étoient  ordinaire- 
B&ent  dans  l'enceinte  sacrée,  tandis  que  les  assi^tanç 
demeuroiestt 'répandus  au*  debOrsJ  /  >  > 

:  iNon^^  seulement  les  mî^isons,  les  cabanes  et  les 
iâitps  dut  pré;  sont  r&nplits  d'une  imtnçnse  popu- 

Dd  2 


4l9  CRAPITHE   3tCD 

felion ,  mail  le  fleaw  même  est  fxuTvrt  dé  baeqntt; 
^r  lesquelles  un  grand  nombus  de  pcnoimcs  ontietic 
kâbitation  2  chticune  de  ces  faan]ats  a  une  place  déiopi 
minée  d'après  sa  forme ,  tes  itunTcftandisea  qu^eU» 
porte ,  et  ie  pays  d'où  eite  y nm.  La»  barque»  âan^r 
çafsés  96  rassemblent  k  Arlesi»  Le  patron  de  cette  qui 
arrive  la  première ,  sahie  k  ^iH^  de  B^aucafre  avec 
tè  mousquet  ou  ie  pistolet  qià'il  pôrte^  à  sott  bord;! 
et  ii  reçoit ,  pour  récoitipetide  69  sa  célérité  >  uA 
lilouloA  y  dFert  avec  solennité  c  la  peau  du  mottfofc 
èhipaiHée^  et  des  banderofas  a$ta<bées  i  $<m  mât^ 
:ftinon^eDt  au  hnn  f  facmneur  qu'M  a  obitoau.  Xi^iauiatt 
barques  font  aussi  >  à  mesure  qu'elles  aaritent,  mm 
sÀve  de  leur  mousqueterie.  Ce  sont  des  pinquec 
espagnoles  et  principalement  catalanes;  de»  ftloutspA^ 
génobesy  qui  tê  dhtingusnt  par  isttrs  biriies  €Q»w 
leurs  ;  de^  (Chaloupes  de  MaaMÎtte  :  (sa  bateaux  du 
t&L\xt  Languedoc,  de  fiordêaux ,.  de  k  fiieti^ne,  M 
de  plusieurs  pont  de  f Océan  y  anifsnt  par  ie  ramé 
êe  communicat^  des.  deux  mers  ;  ies  barques  du 
hyimmiiy  du  Daupèânè,  deJa-^Suisse.et  da.i'iye 
lemagne ,  descendent  par  ie  Rh&ne^  On  est,  obligé 
de  porter  su»*  des  dianiettes  lés  matchandises  de  là 
faaàfe  Pwyéme  ;  ce  €^  fah  semer  ioouiibÎBn  il  s^najt 
u^  de  lyt-e  «m  Oanal  de  iiavigatien  i|ut:tainmraie 
cette  contrée,  où  k  Duiance  ne  cai»eifiiè  ito  nia 
veges.  Outre  ces  barytes*,  Il  y  a  encore  des  ladÂux 
drargés  de  bois  sdé>  de  pèsnctiMy  da  ^^ott^ea^r.ilci 


r!«_'*,  : 


J 


CKAFÏTRE   XCl4  4^1 

pmantfttf  de  O^èàux.  Les  I>aiiques  tfiH  deseendent 
kr^Rhône^  ne  som  âhfs  que  de  plancbrs  légères  « 
qui  sont  aussitôt  désassemblées  et  vendues;  auprès 
sont. les  coche» xl\3fau  ^  et  enfin  kg  petites  p^nelia  ou 
is^rques  piates  qdi  servent  au  transport  des  grains^ 
4à  la  hptiiHe  etjksautres  mairehànd?ses..  Les  barques 
^Ftent  pooi^meigne^  les  unes  ùndiapeaù  de  feutre^ 
in  autres  une  grille  de  bois  ^  unefenjiisiexle  pallie,  ôlc 
C^i)  y  vient  actetev  des  mftrtfafiËncii&es  coBuHe  dans 
ies  cabaneft  ^da  pr£.  Là*  }nultif:)licicé  des  bgrques ,  la 
^ttfriété  de  l^r  coii^tuetion ,  leur  ^cshgement  symé*^ 
'mque ,  ie^n<^mbr^  d^  mât$ ,  fi^rment  un  tableau  pitr 
<oresque^ 

Le^ommii»  des  march^ids  arrivent  cHtiinaireraé(nt 
iqtiîiTSe  fouffe  atAm;rouvertttre  delaft^re,  pour 
JitUfimgaMoef  les  marchandises  ^  les  enregistrer  et 
kik  exposer  cc^veiiablement. 

On  sent  bien  cju'urie  si  ^odigîeuse  affiuence  de 
wqridii  doit  nécessairement  exdter  la  cupidité  des 
voleurs,  attirer  des  filoux,  des  jcftieurset  des  prosti- 
^tnées;  Autrefpisiei  c4i6mins^  ifeiieaucaire  étoieiit  «our 
'Vpit'pea  sûr&avapnt  ei  après  k^irefdes  brigands 
iv%mé%  gaetseic^t  r&rtiviée  èt^à  ^itiedes  rnavchan^ 
jdiises  :  oA  dte^encore  i>e«utou(i^d'ave«^iires  trag^ues 
*smvées  à  dei  négociant  <m'^  feun^.^otmnis.  Mais, 
3|^ce  k  lajvfgilsitce  du icomjmandÀnt  de  la  division, 
-un  ïi?«fitaïdit  pfflfi^  d^aucun  éventent  de  <se  genrè^: 
les  patrouilles  étoient  nombrettôiN  cX  fréquentes.  ËUes 

Dd  5 


V 


•%i 


M*  -■*,      ■ 


J 


422  CHAPITRE    XCI. 

reçoivent  et  «e  transme^ttent  Tune  à  Tautre  lin  morceau 
de  bois  rond  appelé  marron ,  pour  justifier  qu'elles  ont 
fait  leur  devoir.       f 

Les  fiiies  publiques  se  rendent  ordinairement  à 
Beaucaîre,  de  Nîmes,  de  Marseifle,  d'Avignon ,  et 
des  autres  villes  voisines  ;  il  y  en  a  pour  tous  les  goûts, 
pour  tous  les  états ,  à  tous  les  prix  :  les  unes  feignent 
de  vendre  de  la  petite  mercerie  ou  des  rafeîcUsse- 
mens;  les  autres ,  logées  4ans  les  quartiers  les  (As 
éloignés  ,  y  attirent  les  porte*Êiiz  et  les  matelots  : 
toutes  sont  secrètement  accompagnées  d'anciens  re^ 
cruteurs  réformés  et  de  tapageurs  qui^  sans  uniforme 
et  affectant  un  air  bénin,  passent  pour  les  pères,  les 
maris,  les  frères  ou  les  cousins  de  ces  créatures,  dont 
ils  protègent  les  désordres  et  partagent  les  (>rofits  ; 
aidées  de  leurs  infâmes  souteneurs,  elles  corrompent 
les  jeunes  gens  et  répandent  la  contagion  dans  les 
familles.  La  surveillance  du  préfet  empêcha  ce  dé- 
sordre ;  il  les  fit  toutes  arrêter  et  conduire  k  qudcpies 
lîeues  (^e  Beaucaire. 

Il  fit  aussi  fermer  les  maisons  de  jeu  et  même 
les  plus  petits  tripots.  Ges  repaires  de  brigandage 
étoient  ordinairement  tenus  par  de  mauvais  sujets  qui 
avoient  été  militaires  »  et  qui,  joignant  à  la  ruse  h 
force  et  faudace,.  arrat;hçieiit  souvent  à  la  foiblesse 
d'un  timide  marchund  qu'un  moment  de  délire  a  voit 
égaré ,  tous  les  profita  qu'une,  hofm^te  «t  heùreui^ 
industrie  lui  avokvprocjiréa.  :  .  :  ' 


CHAPITRÉ   XCU  42 Jv 

Les  filôux  sont  plus  difficiles  à  at^indre  que  les- 
iFoIeurs  de^  grands  chemins  ;  ik  font ,  pendant  la 
foire^  fessai  ou  l'application  de  toute  leur  adra^se;  ils^ 
s'introduisent  par-tout  :  on  composeioit  un  volume 
des  ruses  qu'ils  mettent  en  usage  et  des  tours  qu'on- 
en  raconte.  Le  prévôt  pouvoit  autrefois  les  juger  sur- 
le-champ  et  en  dernier  ressort ,  et  cette  justice  expé- 
ditive.  en  avoit  beaucoup  diminué ie  nombre;  mai», 
aujourd'hui  que  les  formes  judiciaires  entraînent  plu» 
de  lenteurs,  ils  s'enhardissent  et  devieilnent  plusr 
entreprenans. 

Beaucoup  de  gens  qui  exercent  des  professions 
nécessaires  et  utiles ,  se  rendent  à  Beaucaire  et  y  sont 
très-occupés  :  les  médecins  soignent  les  malades ,  les 
chiruigiens  pansent  les  blessés;  car  il  y  a  toujours 
des  gens  estropiés  dans  des  rixes  ou  par  quelque 
accident  :  l'apothicaire  débite  ses  drogues  avec  au- 
tant de  promptitude  et  de  ÊLcilité  que  le  limonadier 
yend  ses  liqueurs.  II  est  impossible  qu'il  n'arrive  quel- 
ques décès  pendant  les  huit  oa  dix  jours  qu'on  reste 
à  Beaucaire  ;  dors  c'est  un  spectacle  singulier  de 
voir  la  pompe  funéraire  traverser  ces*  flots  bruyans, 
passer  devant  les  jeux ,  lès  cafés ,  les  cabarets  y  et  les 
salles  debal  et  decomédie:  ilsemble  quele  ciel  veuille 
rappeler  à  cette  foule  en  délire,  que  la  mort  suit 
par-tout  sa  proie ,  et  qu'elle  h  saisit  souvent  au  milieu 
des  plaisirs  les  plus  vifs  et  les  plus  brayan§. 
,    Les  suivans  d'EscuIape  ne  sQUt  pas  les  seuls  homm^ 

•       Dd  4 


>4ik»i 


4i4-  CHAPITRE  xcr* 

krobe  ncnie  qni  &nt  iï  de  bonnes  afinres  ;  Tliénik  y 
oavoie  ausù  ses  suppôts  :  les  notaites  sont  indnpen-> 
sablement  nécessaires  pour  rédiger  lesstîputations 
des  paietnens  à  termes  fiortaiitintérftt  :  les  huissiers 
sont  ausii  1^  pour  soucenir  leur  déetse ,  et  C(M- 
fiaindre  le  débiteur  de  mauvaise  foi  k  s'acquitter; 
noasirîmes  dans  la  grande  ne  {^sieurs  enseignes  de 
ces  ofiiciera  ezploiiaiis;  nn  d'eux  vantoR  rar-tooc 
dans  ta  sienne  sa  diligence  et  son  habileté  pour  fa 
lédactton  des  protêts. 

Autrefois  c'étoit  l'intendant  de  la  pArvince  qot 
pré&idoit  au  commerce,  et  qui  veîitcnt  au  maintien 
du  bon  ordre  et  de  la  sûreté  de  la  foire  ;  c'est  SB|onr- 
d'hut  le  préfet  du  départemoit  qui  est  chargé  de  cv 
soin  :  il  s'y  rend  avec  iHie  escone  degendannaie,  b 
veiUe  du  jour  où  elle  commence.  Son  arrivée  e« 
annoncée  par  le  bruit  des  bt^es  et  de  la  mtwsqoe» 
terie;  il  y  occupe  le  plos  bel  hâtd,  et  les  dtffénens 
corps  viennent  te  comi^menter.  La  ville  lui  acoovd* 
six  mille  francs  en  dédommagement  des  dépenses 
qu'il  est  obligé  de  faire.. 

A  mesure  (}ue  l'époque  de  l'ouvertara  de  la  iûire 
■I^roche,  et  sur-tout  la  veille  et  le  jour,  le  pont  et 
les  avenues  sont  couverts  de  gens  à  pied ,  à  cheval 
ou  en  voiture  :  l'un ,  dans  une  élégante  calèchis,  fait 
voler  la  [xjussière  sur  l'hunible  piéton;  l'autre  perce 
la  foule  en  pressant  les  flancs  d'im  rapide  coursier i 
la  vue  s'arrête  avec.plaisit  sur  ce  tableau  ïnouvant  , 


CHAPITRE  XCÏ.  ilf 

imîmé  d*ûtte  wàuièr0  f^miresqm  par  fat  vmM  des 
figures  et  descoMimes  (i).  Le  Rhàne  est  ausii 
couvert  de  barques  chargées  de  voyageurs.  Chacun 
S0  hâte  pour  trouver  à  se  loger  ^  ce  (pu  est  toujours 
très- difficile  :  on  esdge  iti^e  un  prix  exorbitant 
pour  recetoir  seulement  ies  voitures  dans  des  cours 
où  elles  sotkt  eicposées  aux  injures  de  Fair.  Cepem 
dant  les  um  vont  prendre  ^te  dans  ies  grandes 
auberges  j  les  autres  dans  des  cabarets  ou  des  hottes  ; 
il  y  en  a  pour  toutes  les  classes^  Idce  sont  des  tentes 
où  l'on  trouve  des  viandes  rôt^s  ou  bouiUtes;  ces 
tentes  sont  disposées  autour  deâ  cabanes  du  pré  : 
aîlieturs,  des  espèce»  de  ti-aiteiises  préparent  seule* 
ment  les^inets ;  on  doit  ies  emporter,  et  Ton  ne 
peut'  manger  cbelt  eiles  :  ceHes^i  s'établissent  dauts  la 
]dace  pubiiqu^^  près  des  halles  ;  c'est  ta  que  se  nom% 
rident  en  générai  les  peûts  mardiands.  Sept  ou  huit 


(i )  Lou  IcxideroAin  vclà  la  fieiro, 
Velà  donc  la  franchiz*  cnticiro  ; 
Chacun  coumenço  son  travaî. 
L'un  d'amoun,  Tautré  d*aval  ; 
Vous  nou  vezés  rcn  que  coulados, 
Milo  baisats,  miîo  brassados, 
Sur- tout  parmi  las  bravos  gens; 
L*on  nou  veî  que  de  complîmens. 
Tout  lou  matin  nou  vezés  gaîrc 
Que  reverenças  djns  BeauCâîrt. 
L'on  dîi,  Sîas  k)u  bcn  an4vat; 
Un  autre  «  Slas  lou  ben  iroavat; 


J^lS  CHAPITRE     XCI; 

bohémiens ,  cantonnés  à  rèxtrémité.  du  pré  opposé  au 
Rhône,  près  de  la  montagne,  sous  un  abri  formé  de 
quelques  branches  d^arbres ,  font  une  ctMsine  de  Luci- 
fer: les  plus  pauvres  mendians  vont  y  chercher  pour 
quelques  sous  des  alimens  dignes  de  ceux  qui  les 
préparent  et  de  ceijx.qui  s'en  nourrissent;  Ces  bohé- 
miens viennent  de  contrées .  très-éloignées  exercer  à 
Beaucaire,  une  profession  pour  laquelle  on  les  croirait 
si  peu  propres^  Des .  aubergistes  des  viiies  environ- 
nantes  viennent  aussi  partager  les  profits  qu'on  y 
peut  faire  :  ils .  louent ,  dahs .  la  ville  même  ,  des 
maispns  spacieuses-^  où  l'on  est  servi  à.vdlonté;  il  y 
en  a, même  qui  prennent  le  tit][e  de  restaurateurs* 
La  maison  la  plus  fréquentée  est  cdile  de  Fahre 
et  André.:  on  y  présente,  comme  k Paris,  une  carte 
imprimée;  dans  la  longue  liste  des  mets.que  cèle- 
d  renferme,  oii  eh  distingue  dont  les  noms  sont, 
peut-être  inconnus  aux  gourmands  de  la  capitale; 
on  peut  demander  chez  M.  André,  non-seulement 
voie  polonaise  fricassée ,  mais  encore  Aes  pieds  ^  amour 

Diguas  que  fai  vostro  famiilo  î 
L'autre  dis.  Que  fai  vostro  fifloî 
Et  ^*autrc.  Que  fai  lou  garçon  î 
Après  tout*  aqueio  façon , 
Chacun  intro  dins  lous  affaires , 
Autant  vendeîres  qu'achetaîrcs. 

Jâan.iAïCHBt  de  Nîmes ,  l'Emiarras  Ji  lajîgiro  de 
£eaucairtf  poëme  ;  Ams^r^n ,   1700,    in-ia 


/     ' 


V  CHA^PITRI    XCI.  izf 

i  la crèm0  (i).  Le  |otur  que  je  dhiai  dhtz  hi,  favqis 
bien  envie  dé  coHnoitre  ces  me^  savoureux:  mais  tout 
JKVOÎt  été  consommé;  ce  qu'on  nous  servit,  d*aiileurs^ 
ne* nous  en  donna  pas  une  gnuide  idée.  Quokpi^ 
cette  maison  soit  très  -  vaste ,  toutes  les  salles  sont 
cominueilemeot  remplies;  on  se  presse  4ans  It^ 
cours  et  dans  les  escaliers. 

Tout  ce  train  commence  quelques  fours  avant  fat 
foixe  ;  elle  ne  s'ouvre  pourtant  réellement  que  le 
a 2  juillet  :  c'est  le  préfet,  accompagné  des  membres 
du  conseil  de.  dépsUrtement  et  du  corps  municipdl 
<k  Beaucaii^e,  et  escorté  par  des  gendarmes  ^t  1^ 
gardes  luitionales ,  qui  fait  cette  ouvarture.  Le  coirr 
tége,  édairé  par  de^  torcbçs ,  passe  à  cheval ,  le  2 1 
au  soir,  dans  les  principales  rues  4e  la  ville ,  sur  le 
pré  et  sur  (eport,  et  Je  préfet  anoonce,  au  son  d'une 
musique  militaire,  que  les:  marcbands  peuvent  jouir 
xlu  droit  de  franchise.  Chaque  fois  cpi'iL  fait  cette 
procbmatîon^  oïl  lui  répoi^d  par  de  vives  accIalna^ 
lions  qui  se  m^at  aux  faites;  et' au -bmitdtes 
boîtes.  Toute  marchandise  que  l'on  débarqueroit  avant 
cettefprmaïité ,  seroit  soumise  aux  droits  ordinaires. 

Le  lendemain,  jotirde  S."  Mûgdeleine,  on  célèbre 

une  grande  messe  en  musique  avec  le  j^Ius  de  pompe 

-  possible  :  cette  messe  est  suivie  d'une  procession  , 

dans  laquelle  on  portoit  autrefois  solennellement 


,1  ( 


(i)  Voya  sa  çtr^  imj^iupéir* 


._'.?A 


4a$  ciTâPiTni  xciy 

OQe  statua  dd  h  sftinte ,  en  irgent  massif;  on  s»  coi^ 
lente  «ofomid1)ttî  d*ime  image  de  bok  doré.  T^w 
les  corps  assTst^nrMaussi  à  cette  cérémonie,  et  k 
tendent  pius  impossine. 

On  ne  sauroitfiiitidre  fa  confusion  et  la  cohue  tpA 
régnent  pefida()t->tout  le  temps  de  cette  foire  (i)% 
La  foule  est  continuelle  ;  iin  &e  pnesse ,  on  se  porte) 
if  y  a  9  dam  toutes  les  fue&^un  mouvement  semblable 
^  celui  dei  iiots  de  ia^  mer  i  H  faut  se  prés^ver  4ea 
coups  de  coude  ^  se  favder  des  i^oÂt,  et  cependant 
«attsâire  sa  curiosités  id  on  se^b^uttef  là  on  se  bat 
Des^  inoskîehs  ch»9<ent  c|u  son  dés  instfultiens ,  des 
charlatans  débitent  inirs  drogues  ,  4e«  mendiant 
cherchent  à  exciter, U  pitié;  le  portée  itiix, semble 
prèfi  de  vous  écraser ,  en  laiss^n^  tomber  le  f»- 
^ftu  qu'il  porte  eir  écpttibie  sur  sa  t^te  ou  sur  se^ 
épaules  ;  les  .celpoyieuys  ^égocivHent  à  crier  de$  évé<- 
Yiemens  qui  ne  sont  potptdans  leurs  gaeettes.  lÀ  c'est 
une  cui^me  renversée  ;  ici  un  homme  évanoui; 
«iHeurs  un  convoi  qtn  passe;  On  vott  de^  cotâmes  d^ 


Qi#e  fai  merquat  de  son  m^njat , 
•     Que  pert  tout  d'un  cop  sa  compagno. 
Que  bravcj*  ou  t>cn  cfie  lavagno, 
Q^eccc^o  per se debaiKha, 
Qu'a  forso  bruch  per  se  coucha , 
Qu'a  rendes -vous  emb'  uno  puto , 
Que  fai  complimens,  ^^  députai  - 


• 


/ 


Idutu»  les  t^çofis^  6n  entend  .I0ia«i  ^rtn  d^cBome»' 
et  de  patois:  il  semble  que  ce  soient  la  réumoa  éà 
iMtes  h$  fïaiionè  et  la  eonfosioii  dSk  htugMs. 

Ce  tmti^lxt  a  princtpatement  iiçti  pendant  fcr 
|ràn  Le  soir  on  va  toir  les  ménageries  ^  les  faato^ 
leurs  y  hè  courses  de  cbevaust ,  }el  datmetif  s  de  corde  y 
oala  c^méife ,  ^  est  établie  dans  ie  |eii  de  pàame* 
La  bonn^  eompagnid  se  rend  ensuins  snr  le  pré  » 
<)è  pàMoat  on  trouve  la  jojrease  cantre^danae  oit 
b  ^v'aise  fe^ve  :  As  ii^tis  câ^  le  bnùt  des  însw 
tmmens  se  f^t  «¥itëndr«  ;  kt  <!^eat  le  bat  de  Niinesy 
ià^eltii  d*Ài%,  bitiêitfs  csèiut  <f  Av^qon  f  chacun  sa 
f^nt  {i  ^iui  di^-aëï  compftlri^tes.  ^Le  son  d»  gaiou** 
bet  provençal  est  toujours  mêlé  à  celui  des.  autiet 
i^4^t«tmen$.  Q^  abtie  t^ùt^ool  k  Vavfèkb.^  bat  Hes 
Ctattilans^  ^\A^  ^hantaM^ô^v^haiuroûprxi^  ieiir  pajFs 
étiA  htùh  des^tiscagn^tte^  dansent  ei;tne  eizz  sana 


^. .. 


r,  \- 


Qnt<j»jgiiîs,,j}à'^pcrc;r!ow^;p^là 
Qup  se  retiro  ^mbc  rçgrct, .        n 
Que  fai  f  amour  à  sa  vezino. 
Que  s<e  coucfJ*  rtnbé  sa  couzbid,  "* 
Qucper  lou  caur  «lostro  f<iu  ^îeoa» 
Qte  fa  ^ua  bon  ami  cqdçu^M.:' 
Tant  y  a  chacun  s'accomodo 
BItVarrengo  sùîvân  salnôd'ô 
Et  suivan  son  inclination^ 
Tacli'  à  contenta  sa  passion. 


ti- 


J^^é  CHAPITIIE   XCï. 

fimtnef ,  atic  beauooiip  de  i^èreté,  de  prédbkm  et 
ie  mesure. 

Oa  vend  à  Beaucaire  à-peu-près  tout  ce  qu'on 
peut  imaginer;  nous  y  trouvâmes  fusqu'à  des  an* 
tiques.  Un  marchand  étc^t  chargé  d'un  superbe 
camée  représentant  Qéopatre  et  Antiochus  de 
Syrie  (  I  ).  J'achetai  pour  M.  de  Saint- ViÉcens ,  chet 
une  espèce  de  bijoutier  qu'on  appelle  Vantiqualn, 
quelques  pierres  gravées ,  quelques  médailles ,  et  une 
très* petite  boîte  ronde  en  argent,  guittochée  en  de- 
hors y  contehailt  une  médaille  d'argent  de  l'empereur 
Léopold,  frappée  en  165 S,  époque  de  son  sacre, 
et  une  médaille  de  chacun  des  électeurs  qui  y  ont 
assbté. 

'  Lès  frandiîses  de  la  foire  ne  sont  réellement 
accordées  que  pour  tcois  fours;  miii»  9(1  a  tiouvé  le 
moyen  d'en  profonger  Je  tern^ ,  en  ne^ri^dant  pas 
les  fêtes  de  S.^*  MagdeMne  et  de  S.  Jacques  comme 
àts  fours  utiles,  quoique  te  commerce  ne  soit  pas 
pour  cela  interrompu.  En  1  ^6^ ,  à  la  suite  d'un  dé* 
bordement  du  Rhône ,  le  fermier  générai  refusa  de 
consentir  i,  accorder  un  four  de  plus;  Tîntendaitt 
trouva  moyen  de  l'obtenir  en  fiûsatit  solenniser 
la  fête  de  S.- *  Anne.  Depuis  ce  temps  ia  foire  dure 
six  jours,  du  22  au   28   juillet  au  soiir;  s'il  y  a 


(i)  H  sera  grave  dans  le  W  ouvrage  que  M.  Visconti  va  p*H 
blicr  sur  Tlconologic.. 


.^^^^^î-j"*  J 


CHAPITRE    XCI.  4ji 

un  dimanche  immédiatement  avant  ou  aprè$,  c'est 
un  jour  de  plus.  On  -annonce  alors  la  cessation  de 
la  franchise  y  comme  on  en  a  publié  l'ouverture  ; 
lîfiab  il  s^en  faut  bien  que  cette  cérémonie  ait  le 
même  caractère  de  gaieté. 

Biaitôt  après  commencent  les  préparatifs  du  dé- 
part ;  les  grandes  routes  sont  de  nouveau  couvertes 
de  voyageurs;  ies  barques  sduent  la  ville  en  la 
<pûttant  9  comme  elles  ont  fait  à  leur  arrivée.  II  y  a 
cependant  des  marchands  qui  demeurent  encore  plus 
de  qtimze  jours;  mais  il^  ïie  jouissent  plus  de  la 
fi'aïuiiise  :  les  Cataians  et  les  Juifs  s'en  vont  ordi- 
nairement les  derniers. 

La  foire  avoit  été  plus  nombreuse  cette  année 
que  les  précédentes  ;  les  Espagnols  sur-tout  y  firent 
beaucoup  d'af&ires  :  les  paîémens  s'effectuèrent  avec 
facilité.  Les  soies  et  les  laines  sont  les  deux  ar-- 
^les  qui  eurent  le  plus  de  faveur.  Nous  passâmes 
]k  trob  fourà  très-agréables  ^  et  nous  eûmes  beau- 
coup à  nous  louer  de  la  bonne  réception  que  M^  Dal- 
|ihonse ,  préfet  du  Gard  ,  voulut  bien  nous  faire. . 

Nous  avions  suivi  avec  le  plus  grand  soin  tous  les 
détails  de  cette  foire;  rien  ne  nous  étoit  échappé^ et 
nous  étions  réservés  à  être  les  témoins  d'iu(ie  C2^^-. 
mité  qui  heureusement  est  bien  rare.  II  commença  à 
pleuvoir  le  troisième  jour  de  la  foirç ,  et  en  peu, 
d'heures  le  RhÔhe  déborda  ;  ce  cm'on  n'ayoit  pas  vu 
depuis  plusieurs  années.  Non-seulement  plusieurs 


LakJB£k..j^   i.  .  '<.a    ^  t 


43^  CHAPITRE  XCt. 

ittftrchsaKli$6s  furent  g&tées  par  h  pluie ,  mais  le  Aèuve 
inonda  ia  prabie ,  emporta  les  cabanes  ;  les  çafëi , 
les  bals  <;hanipètres  »  disparurent  s  on  n»*engmdoit  par^ 
tput  que  des  cm  et  des  plaintes.  La  digue  qui  sépe«e 
les  ponts  de  bateaux  y  fut  entttreinent  couverte  ;  bL 
communication  p4r  Tarascon  devînt  smpossîUe ,  et 
beaucoup  de  marchand$  fùxent  ohligéi  de  faire  le 
tour  par  Arles ,  parce  que  d^ant  Beaujcaôre  le  fleuve 
est  trop  large  pour  qu'on  puisse  le  tr»rerser  en  ba- 
teau^ sur- tout  à  Tépoque  des  déhordemens, 

La  navigation  de  l'emboucharedu  Rhône  n'est  pas 
sans  danger;  la  variation  des  vents  en  rend  la  durée! 
incertaine  ,  et  dans  les  grands  débordemens  elie  est 
impraticable.  La  foire  de  Beaucake  ofirira  un  bien 
plus  grand  avantage,  lorsque  le  beau  canal  d'Aiguës-- 
mortes  sera  terminé  ;  et  il  y  a  liâu  de  axâre  qu'on  en 
fouira  }jient6t(i)* 

Nous  avions  pansuru  d'abord  tons  les  endroits  de 
la  ville  et  des  environs.  La  vîtte  est  petite;  se»  rues 
sont  anguleuses  et  étroites.  Le  nombre  des  maisons 
est  considérable  relativement  à  son  étendue  et  à 
^  population  :  mais  elles  ne  sont  habitées  que 
durant  ta  foire;  et,  ie  reste  de  l'année^  il  est  aisé  db 
voir  dam  quel  état  de  décadence  et  d'abandon  peut 
tomber  une  ville  dont  les  kabkai»  ont  un  mojren 

(  1}  Je  reviendrai  sur  Iq  avantages  de  ce  cs3(ia!^  quand  je  décrirai 
mon  vo^ge  inm  le  Languodoc 

facile 


, -_-_jj "j.  • 


à 


CHAPITRE    XCI.  43) 

Jâcile  de  se  procurer  sans  travail  ce  tpii  est  stric- 
^temetit  nécessaire  pouc  leur  subsistance.  Le  pfix 
excessif  de$  loyers  des  maisons,  des  ma^sins,  des 
hangars  et  des  cours ,  suffit  aux  Beaucairois  (  i  )  pour 
ies  faire  vivre  pelida^^une  année  :  aussi  ne  songent- 
ils  à  aucune  aune  industrie;  ils  n'établissent  aucune 
manu&cture ,  ils  ne  forment  aucune  entreprise  ;  ils 
cultivent  seulement  pour  l«ir  plaisir  ipelques  champs 
de  vignes,  Quelques  plantation^  d'oliviers  :  ils  ont 
une  si  grande  horreur  pour  tome,  espèce  de  travatl,- 
qu'on  trouveroit  à  peine  chez  eux  un  tailleur  ou  un. 
cordonnier  ;  il  leur  faut,  pour  se  âira  vêtir  ou  chausser, 
f  ttendre  le  retour  de  la  foire ,  ou  s'adresser  à  Taras-' 
coifi.  Ceux  qui  ont  vu  Beaucaire  pendant  ce  temps,  ne 
pojv«it  après  se  perstta<fer  que  ce  soit  la  même  ville  : 
la  plus  grande  partie  des  a^^rtemens  sont  fermés  j 
rien  n'égale  la  tristesse  de  ses  rues  désertes  et  de  ses 
maisons  sans  locataires 
aussi  affreuse  qu'iofttten 
tans.  11  est  cepeadant  n 
se  livrent  à 'quelque  k 
la  foire  diminuent  tous 
pourroit  finir  par  leui  manquer.  , 

La  porte  :qui. conduit  au  Rhône,  est  assfô. belle  » 
le.quaïestlà^nbftûj  eîle  port  est  Oinmode.,(,r ,  > 


Tome  m. 


4^4  CHAPITRE     XCfc 

Nous  vool^nEies  voir  cet  antique  chlçeau  de  Beau-^ 
cakf  f  SX  renommé  dans  les  histoires  de  chevalerie  :  ii 
n'en  xeaie'  que  des  ruines  ;  ii  a  été  afciattu  en  i6^2, 
par  mordre  deLouîi  Xlil. 

Nous  aliâmei  aussi  à  un  qiuurt  de  Kçue  de  h  ville  i 
à  l'endroit  appèié  &r  Cmf-^oinfp  demère  le  château 
dé  Gauj^c ,  vob  ia  voie  romaine  qui  c<mduboff 
d'îles  à  Nni«cf-  on  y  a:trouvé  phiMCwrs  plefrres  n* 
iiaireftk^iû  n'avaient  pciiit  ètéà^fhqée/i.  On  croit  que 
çé  chemin  fiiiscpt>  partie  de  la  voie  Aurëlienne ,  qui 
«omroençoit  à  la  vilte ^de  Romei,'  et  alkrft  àboutîjf 
^ox  ôxirémitte  de  f Espagne*  M/  P.  Véifarï  mé 
semblé  avoir  bien  établi ,  dansie  mémohie  ^ànuâ^îrrif 
qu'il  pi'a  commimiquéi  que  la  route  qni  pâs^oftl^ 
GUnum  et  peu^étreao^fi  k  deauca^e,  n^tpit  qu^cî 
petite  branche  de  cette  YQÎe ,  et  que  {a  branche  prii^ 
cipaiè  passoit  à  Aiies.  !  .      ' 

La  gfcinde  église  ^  appelée  No^^Dàmedt  f\>mer) 
fut  foiidée  €in  S^.ifi  par  Bernajfd,  coittte' de  Nar-* 
bontiOy  niircplîs^  4e  Gotbîe  et  duadf  Septimaiiieî 
feâ  Ifoïigf qis  fti  pHIèrefrt;  et  Rajîmoijd/*  éomle^  dé 
Ttttdbusô ,  eivfurfetrewaurateur:  Le  portail  est  orné 
de  figures  relatives  à  la  ttaïssanwdtttS4rfiît;aùmliiëtt 
esl1a  Vierge V-^vî  tîen^  ehtre  ^4  brklie-^îvfn  fté- 
dempieur;  ôftttt  itt-cfesious  éh  cartictêfè^  gothiques.* 

^^^ »4-  ^REMIQ   MAXW*  a«MafiT  SAPIENTIA   l>Ef; 

A  droite,  I*ange  presica^lt  2^  S^  Joseph  dVmmeîier 


CHAPITRE    XCI.  <!i,35 

4»  Viergd~«t«Mt  -ca&nt  en  Egypte;  on  lit-  aiiGSfe-t 

.  OUCIT   IN   4(ÏYFIUU  JOSEEH    CUM  VIltgiNE  CHR15TUM. 

Enfin ,  sous  l'adoration  des  mages  ^  qui  est  à 
^udi6{  Oit  a-^critï     ■       -         ■      .  ■' -^ 

NOSTBO  DIVJNO  DANT  TMSTRIA  MUMERA  TRINO.  . 

'  A  Fépôqiïe  des, guerres  CÎvHes,  plusieurs  issrin- 
bfées  de  ta  province  se  sont  tenues  k  Beaucaire  dans 
le  réfectoire  des  Cordeliers. 

.  „  5?  I^iiiérieur.  de  la  viUe  est.  tris^e,^es^enyirc>JÎ 
sont  cliannan^  :  U  semble  que  le^iS^igulie;  .cbâfefi^ 
de  TarascQfi||ait.  été  bâd.,^:^p;-^4,,çour.  lui  sei^^ 
de  perspeçriye  ;  la  vue  ^'étRpd  ag^éal^iemept  ,sHr  Iç 
Rhône,  <jj*f ,  dans  ce  Iie^^,«j  gna^ifique,,  ^«^  sup 
^s  belles  campagnes  gui  se  piou^f^g^ot  sur  ses  bords 
dai 

pa] 
ys 


Â^^ 


i^tm^*^m^^' 


CHAPITRÉ  XCli. 


I^ns  œrariusj  pont  sur  le  Rhône.  —  TAltA3C0N«^  -* 
Histoire.  —  Château.  —  Intérêt  que  présentent  les 
anciens  châteaux.  —  Pas  de  la  Bergerette.  —  Église 
de  S.**  A^artbe;  statue  «de  la  sainte. — La  Tarajqne.  — 
I  ndustrie ,  manufactures.  —  Hommes  célèbres. — Poésie 
provençale. 

1  AR  ASCÔN  est  Réparé  de  Beaucaire  parle  Rhône: 
iax  tiiiHeû  est  une  digue  de  pierre  ^  que  quelques 
aufeurs  ont  regardée  comme  le  resté  du  Pons  œrarîus 
des  Romams  ;  mais  d'Anvifle  (  i  )  prouve  le  contraire.. 
Lé  Pons  œrariùs ,  appelé  ainsi  à  cause  du  droit  de 
passage  qtfH  y  ^ioît  payer,  étoît  situé  sur  la  voie 
qui  conduboit  directement  d'Arles  à  Nirne^ ,  à  peu 
'é&  distance  de  Beflegarde ,  où  nous  avons  vu  que 
^ùché ,  CatèF,  les  auteurs  de  rHistoîre  du  Langue- 
doc; et  M.*  î*. 'Véranv  placent  Vgernûm^.île  pont 
qirf  est  placé  entteBeîtuèaîre  et  Tarascon^  quel  que 
soit  te  norn  qu*6n'dôîVe*  lui  donner,  fortnbit  une 
espèce  de  Z ,  afin  d'offrir  plus  de  résistance  à  Tim- 
pétuosîté  du  fleuve  :  malgré  cette  précaution ,  il  a 
été  renversé,  et  cette  digue  est  tout  ce  qui  en  sub- 
siste. Deux  pont$  de  bateaux  viennent  s'y  joindre  ; 

(i)  Nttice dt  l'ancienne  Cauk,  p.  J5o. 


CHAPITRE    XCIÏ.  457: 

ib  sont  sans  parapets  :  aussi ,  brsque  fe  mistral  ou  le 
irent  du  midi  souffle  avec  violence^  le  passage  n'est 
pas  sans  danger  ;  on  Ta  vu  renverser  dans  le  Rhôhet 
une  charrette  attelée  de  quatre  chevaux. 

Tarascon  étoit  connu  au  temps  de  Strabon  comme 
une  ville  du  pays  des  Salyes.  On  donne  à  son  nenv 
une  origine  grecque  (  1  )•  Les  uns  croient  qu'il  vient 
de  l'effroi  que  causoi^it  aux  navigateurs  arlésîens  et 
marseiiloîs  quelques  brigands  qui  infestoient  cette 
partie  du  Rhône  ;  d'autres  l'attribuent  à  la  crainte 
qu'inspiroit  le  drac  (2)  :  mais  ce  sont  les  légendaire!» 
qui  nous  ont  transmis  la  tradition  sur  cet  animai 
jàiitastique ,  et  le  nom  de  Tarasco  est  bien  pkis 
ahcien  ;  il  est  probable  qu'il  appartient  à  la  languo 
des  anciens  Salyes. 

Il  ne  paroît  pas  que  ce  lieu  itit  eu  y  dans  t'anti^ 
quité,  une  grande  importance ,  puisque  Strabon  et 
Ptolémée  se  sont  seulement  contentés  d'eh  citer  \^ 
nom  ;  .mais ,  après  le  démembrement  de  l'empire 
romain ,  l'expulsion  des  V îsigoths  et  des  Sarrasins  ^ 
et  l'extinctiendu  royaume  d'Arles,  lorsque  la  Pro- 
vence eut  des  comtes  héréditaires,  Tarascon  dut  être 
considéré  comme  un  point  important  pour  la  défense 
de  la  rive  gauche  de  ce  fleuve.  Il  y  exisloit  un 
dbâteau  oii  fut  signée  en  125 1,  en  ptfeeiice  de 
plusieurs  prélats,  du  sénédial  de  Provence,  et^un 

(1)  Du  mot  m^^iomt(tarau€iH  ) ,  troubler»  efètvftx. 

E  e  5 


4j8;  çïfAl^iTfiç  ïfqii;  1 

gfBnd  fiomt^re  <Ie  seig|iç4r$ ,  Jn  capîtndtiJQnt  par  is^l 
quelte  ia  rép^b|qu€^  4'ArMs  ^^  donna  à  CbarJe*  V\ 
4'Ap)QM»  cpmt^  de  VtQY^Wie.  Louis  H  ie  fit  abattie 
pour  construira  le  çhi^Hw  ^  est  aujourd'hui  rorne?. 
ment  de  la  tiUû;  il  (^t  commenàé  en  Tan  1 4oo  »  et 
qputi  deu^  cent  quarante  mille  Uv.  de  noirb  monnoie^ 
iictuelle  :  les  f^md^tioeis  en  sont  établies  sui*  le  roc  ;t 
l^  pierres  dont  ît  est  bâti  »  tirées  des  oarrières  de; 
Fofitvielle ,  prisi  d*ArIes  »  sont  tomes  d'une  dimei^ 
sion  parfaitement  égalç  ;  l'aplomb  des  murs  lie  iiisie 
rien  &  désirer  »  et  les  arêtes  sont  encore  aussi  vive» 
«lue  lorsqu'elles  ont  été  achevées.  Nous  mentàiiies 
sur  la  plate  -  forme ,  d'où  b  vue  s'étend  sur  h  beatt 
bassin  du  RhÀne  ;  le  fleuve  étoit  couvert  dé  barques^^ 
et  le  pont  encombré  de  gens  qui  se  rendoieitt  àBeam 
caire  ;  en  face  »  on  vptt  tes  luines  du  château  (fe  <Jette 
TÎUe  ;  et  sur  le  pré,  les  baraques  qui  renferment  un 
abrégé  des  productions  de  toutesles  parties  du  monde; 
à  gaudie ,  si'élàvent  les  clochers  de$  églises.  La  vue  sa 
prolonge  sur  la  Camargue  josquli  remEK)uchure  du 
Rhône ,  et  embrase  une  grande  piartie  des  riches 
plaities  du  Languedoc.  Nous  trouvâmes  sut  cette 
plate-fbrme  un  jeune  artiste  beaucairoîs  qui  s^est  fixé 
à  Marseille,  M^  PonEe,  ^ui  étoit  occupé  à  saisir  àvto 
ses  erajroBs  les  effeu  variés  de  ce  tableau  magicpi^ 
:  Si  f  des  murs  de  ce  ciiâteau ,  Ton  jouit  d'uit  aspecf 
ravissant ,  il  est  lui-même  un  des  phis  beaux  orne- 
mens  des  rives  pittoresques  du  Rbôiiie.  Qui  doiK  a 


J 


Ç5IAPITRE   XG^n  4ii^' 

pu  concevoir;  le  ptQj^t'de  fedèitfelîfr  'd*t>ù  Vîeht 
cette  rftge  qiiî  ilous  poi^e  encore  à  détruire  des 
antiques  demeitres  de  la  ràleor  et  dé  la  beautés  If 
fàm  avoir  une  ame  glacée,  pour  n'y  voir'^iiè  de^ 
Hiurs  tombant  en  mîne.  Les  crétieaux  qui  lêi;  ttm^ 
Tdnnani.  les  barbacânes,  les  meurtrières  et  les  n'crnl*^ 
peurs  mâchicoulis  qui  en  défendit  les  àpprôcfiie^ , 
i^ous  rî^peïent  les  sièges  qu'elles  om  iprôUVés,  !a 
çôble  et  courageuse  résistance  qu'oii'  y  a  faîte ,'  les 
marques  de  fidélité  que  leurs  goilverneurs  ont  dbiiii ée^ 
à  leurs  Souverains;  les  tours  qui  les  flanquent,  ont 
été  habitées  par  des  chevaliers  Ic^aux  et  braves ,  pai* 
des  portes,  des  amans,  des  belles  et  des  guerrierf* 
Quelle  vslriété  répand ,  sur  un  soi  aussi  heureux  que 
celui  de  la  Provence ,  le  luxe  des  constructions  an-î  ^ 
tiques^ les  ports  (i),  les  théâtres  (l),  les  amphî-^ 
théâtres  1 3  )  >  les  arcs  triomphaux  (4) ,  les  aqueducs  (  5  ) , 
les  portes  (6) ,  les  mausolées  (7)  >  les  tombeaux  (8)  y 
queleà  Romains  y  ont  laissés  pour  éterniser  le  souve- 
nir  de  leur  grandeur  et  de  leur  puissance  !  Mais,^i  ces 
ruines  nous  reti^cent  la  puissante  et  les  conc{u(6téS 

(i)   F^<^Frcjus,II,  477.        ^ 
{2)  Fôy^f^Orangc,  n,  148;  Arles. 

(3)  ^e>'^  Citnfee, II,  544  ;  Arles, Nîmes ,  pcjrdeaux,  Poitiers. 

(4)  K^^ Orange,  H»  133;  Carpehtràs,  Nîmes.  • 

(5)  Viiye^Lyon,  I,  485  ;  Fr4jus,  II,  477. 

(6)  Vojfi  Autun ,  1 ,  3 1 5  ;  SainL-Chama* ,  Saintes. 

(7)  Sifffra»  Fge  399)  Vienne,  II,  44. 

(8)  Pa^m.        .  ; 

£e  4 


4io  CHAPITRE  xcir; 

de  ces  maîtres  de  la  terre ,  les  vieux  châteaux  nou< 
rappellent  les  faits  mémorables  de  ndtre  histcHre, 
et  en  formeht  une  espèce  de  cours  pittoresque. 
Combien  c^ux  qui  ont  été  bâtis  sous  les  comtes  de 
Provence,  animent  encore  la  scène  que  je  décris 
par  r^et  des  oppositions  aussi  marquées  pdur  le 
souvenir  des  faits  passés  que  pour  les  formes  de  l'ar- 
chitecture !  Interrogeons  les  lecteurs  :  cet  ouvrage 
est  tout*à-fàit  vide  d'intérêt,  et  l'auteur  n'eut  jamais 
dû  l'écrire,  s'ib  n'ont  pas  éprouvé  les  mêmes  sensa- 
fions  que  lui ,  lorsqu'il  les  a  conduits  dans  l'antique 
château  de  Montbard ,  devenu  le  temfde  où  le 
grand-préure  de  la  nature  rendoit  en  prose  harmo- 
nieuse ses  oracles  immortek  (  i  )  ;  lorsqu'il  ieiir  a  fait 
passer  en  revue  cette  galerie  de  portraits  de  femmes 
charmantes,  rassemblée  par  Bussy  de  Rabutin  (2). 
N'ont-ils  pas  gravi  avec  lui  au  sommet  du  vieux 
château  de  Rochémaure  (3 ) ,  qui ,  assis  sur  le  noir 
basalte ,  semble  dominer  le  Rhône ,  et  où  tout 
retrace  les  grandes  révolutions  de  la  nature ,  tandis 
que  son  nom  rappelle  l'audace  intrépide  des  aven- 
tureux-Sarrasins !  n'ont- ils  pas  parcouru  les  vastes 
salles  du  palais  d'où  les  papes  avigrïonnois  fulminoient 
ces  t^nibles  excommimications  qu'un  trop  fréquent 
usage  rendit  moins  redoutaBles  (4)  *  Les  châteaux 
chevaleresques  de  Tarascon  et  de  Beaucaire ,  célébrés 

(i)  Supra,  1,222.  (3)  SupràT^l,  100. 

[i)  Suprà^lfioS.  (4)  J'wpr/i,  II,  ijOk 


*^. 1 1*  „-"*  • 


CHAPITRE    XCII.  44» 

par  les  poêles  proveliçaux,  ne  sont  pas  un  de$  moh^fres 
ornemens  de  ce  beau  fleuve,  que  ia  tour  de  Sahit-LoiiU 
teunme  si  bien  à  son  embouchure. 

Si  l'on  pénètre  plus  avant  dans  les  terres,  ne 
regrette -t- on  pas  que  la  fureur  des  troubles  civils 
ait  renversé  ia  Toor-d'Aîgues  et  effacé  ses  tendres 
devises  î  On  voudroit  recomtruire  ces  châteaux 
de  Signes  >et  de  Pîerrefèu ,  où  les  nobles  présî-' 
dentés  des  cours  d'amour  rendoient  leurs  arrêts 
galails.  Qui  osera  porter  la  hache  sur  le  château 
de  Grignan  î  toutes  les  femmes  ne  doivent-elles  pas 
protéger  ce  monument,  qui  rappelle  les  grâces  de 
Tesprit  et  les  douceurs  de  la  tendresse  maternelle  î 
Après  avoir  franchi  le  Rhône,  et  quitté  cette  terre 
classique,  où  tout  est  empreint  du  nom  romain , 
nous  entrerons  sur  celle  qui  fut  si  souvent  le  théâtre^ 
des  troubles  civils  :  là  nous,  sentirons  encore  davan* 
tage  tout  ce  que  la  vue  des  anciens  châteaux  peut 
dire  à  une  ame  élevée.  En  partant  de  Pau^  qui  vit 
naître  le  bon  Henri  IV,  nous  visiterons  le  lieu  oti  le 
loyal  François  I."  reçut  le  jour;  ceux  où  les  enne- 
mis de  Henri  ont  senti  les  effets  de  sa  vaillance  et 
éprouvé  sa  bonté  ;  ceux  qui  furent  témoins  des  lan- 
gueurs de  Charles  VII ,  des  cruautés  de  Louis  XI ,  de 
l'ambition  des  Guises ,  et  de  l'intrépide  héroïsme  de 
Jeanne  d'Arc.  N'anticipons  pas  sur  nos  jouissances, 
et  n'intervertissons  pas  l'ordre  des  faits;  revenons 
au  château  de  Tarascon  ;  mais,  avant  d'achever  ce 


fc— ^i_ 


4ia  CHAPITRE  XCIU 

qui  an  coiK:eme  h  description  et  rhistoire»  mettom 
les  vieux  châteaux  sous  la  garde  des  vrais  Françab , 
sous  la  protection  sur-tout  de  notre  invincible  Eilhpe-* 
teur^  si  digne  d'apprécier  tout  ce  qui  est  noble  et 
grand. 

Ce  diâteau^  si  bien  conservé  à  l'extérieur,  est 
intérieuremeiu  dans  un  délabrement  extrême  ;  mab 
ses  voûtes  hardies ,  ses  salles  immenses,  ses  profonds 
soutenaim ,  annoncent  la  grandeur  et  le  pouvoir 
de  ceux  qui  Pont  habité.  Louis  III  et  René  y  6nl 
fait  leur  séjour  k  plusieurs  reprises  :.  le  buste  de  ce 
dernier  prince  étoit  dans  la  seconde  cour  avec  celui 
de  Jeanne  de  Laval ,  sa  seconde  femme  (  i  )  ;  ils  ont 
été  renversés.  On. lit  encore  au-dessous  de  la  niche 
qui  les  contenoit  : 

-  DIVI   HEROES  FRANCIS  LILIIS*  CRU 

CEQUE  ILLUSTRES  INCEDUNT  lUGI 
TER   PARANTES  AD  SUPEROS  ITER. 

Plusieurs  édits  de  René  sont  datés  de  Tarascon  ; 
B  s'y  occupoit  de  joutes ,  de  vers  et  de  galanterie  ; 
et  ce  fût  sous  ses  yeux  qu'eut. lieu,  en  1449»  ^ 
des  plus  singuliers  tournois  doilt  les  fastes  de  la  che- 
valerie nous .  aient  conservé  le  souvenir  (2). 


É*i* 


*(i)  Suprâ,  tome  II,  page  ^48. 

(2)  L.  DE  Beauvau,  sénéchal  d*Anjou  et  ensuite  de  Pro- 
vence, qui  en  aVoit  été  témoin,  nous  en  a  laissé  ta  description 
dans  une  lettre  qu*il  adressa  à  Louis  de  Luxembourg,  son  ami.  J'en 
ai  trouvé  une  notice  trè»-étendue  dans  les  manuscrits  de  M.  de 


CH&7ITXB    X€U.>  4^3^ 

-.Philq^pe  dé  Lenoncovatt^  chevafief  *du  Ccw*-' 
Ant  (  I  ) ,  éoiyerdu  roi,  1^  Phflihflrt  de  Laigue ,  sôsl 
chiinbclian ,  aVoiem  £ût  inviter  tous  les  chtmlièrs 
dn  icuytrs  gentils  à  se  rendre  k  Tarascon  ie  i  /'  ^uin  y 
poui^  tompTQ  contre  eux  une  lance ,  en  présence 
d'une  gentè  fûstowrtïU.  Cette  berpnm ,  que  i*aûteurt 
ne  nomme  pas  1  étoh  une  dame  ou  demoiselle  de 
quafité»  placée  sous  un  arbre ,  gardant  sa  krtbimesy^ 
tt  ayanf  ses-ihosettes profits  etyUiettes  (  z)  ;  elle  réser-* 
voit  au  vainqueur  la  douce  récompense  d'un  baiser, 
éx  un  bouquet  de  fisurs  attaché  à  on  rameau  d'or. 
Dès  qve  les  dames  et  les  chevalie»  furent  réuni||. 
ies  hérauts  d'armes^  lés  trompettes  et  les  ménétriers 
oMrii^nt  la  marché  :  la  bergère  parut  ;  elle  avoit  un 
baoit  de  danias  gris ,  foxu'ré  et  bordé  de  vair  ;  elle 
étoit  coiffëe  d'un  petit  chapeau  couvert  de  fleurs ,  et 


S^fntrVincenft.  Cette  notice  a  acryi  à  \x  composition  du  mémonr^ 
que  le  P^Papon  a  joint»  comme,  suppicmcnt,  au  troisième  volume 
de  son  Histoire  de  Provence  :  mais  îl  ii*a  pas  connu  ie  manuscrit 
même  $  car  il  àh  qu'il  est  mêlé  de  prose  et  de  vers ,  et  if  est  tout  en 
vers.  Celui  d*aprcs  lequel  j*aî  rédigé  cette  notice»  est  à  la  Bil>Hoî> 
thique  knpcriale,J&«^  de  Colvert,  n.®  4365^,  79^7  nouveau  nu- 
méro. On  voit  en  tête  fa  bergère  à  la  porte  de  sa  cabane,  auprès 
de^  Tenceinte  où  ses  moutons  sont  parqués  ;  à  côté  est  un  arbiè 
aaqud  sont  sasponduei  «ne  cuirasse  blanche  et  une  cuirasse  noire: 
nlu^hast  est  Técusson  de  Seauvau;  il  y  a  au-dessus  deux  croc$ 
qui  tiennent  ensemble,  et  la  devise,  sans  départir^ 

(i)  Suprà,  II,  307. 
'    j[»}  Ce»t«à^re^  étant  élé|ammeai  vêtue. 


444  CHAPITRF  XCII; 

pcntCMt  une  houlette  garnie  d'argent;  D^uircâté  pen« 
dok  à  sa  ceinture  un  barill^  d'argent^  qui  coiitencHt 
f e&u  pour  la  désaltérer;  de  l'autre ^  étoit  sa  panetière», 
nie  étoit  montée  sur  une  haquenée  couverte  d^uii^ 
és»p  d'or,  avec  un  chanfi'ein  cramoisi,  et  ccmduic«r 
par  deux  jouvenceaux  qui  alloient  à  pied  ;  on  me*^ 
noit  devant  elle  un  troupeau  de  brebis.  Tous  ceux 
qui  dev(Hent  entrer  en  lice ,  étoient  sur  de  magm« 
fiques  chevaux ,  bien  équipés ,  armés  de  toutes  pièces  ^ 
mais  habillés  en  bergers.  On  remarquoit  sur^toul 
Philippe  de  Lenoncourt  et  Philibert  de  Laigue ,  qiu 
4|oîent  suivis  de  leurs  éoiyers ,  du  roi  cf  armes  et 
du  juge  d'armes.  II  devoit  être  singulier  de  voir  ces 
deux  braves  pastoureaux  portant  la  houlette,  b  J|ttp 
sette,  la  flûte,  le  briquet,  la  panetière,  le  banl^ 
enfin  tout  le  champêtre  attirail  du  dieu  Pan ,  sus«^ 
pendu  à  la  redoutable  armure  du  dieu  Mars;  car  ils 
avoient  aussi  la  cuirasse ,  et  leur  tète  étoit  couverte 
d^un  heaume  surmonté  de  plumes  d'autruche  de 
covieur  pourpre.  Uauteur  prétend  que  sans  doutance 
ils  étoient  moult  beaux.  Lauts  chevaux  avoient  une 
housse  grbe  brodée  d'or. 

Ce  bizarre  cortège  arriva  sur  la  place  où  le  tour- 
noi devoit  avoir  lieu,  et  où  l'on  avoit  dressée  tm 
écha&ud  pour  le  roi ,  la  reine  et  leur  suite ,  et  un 
autre  pour  les  juges  d'armes  :  au  bout  du  champ  ^ 
dans  un  lieu  bien  apparent ,  étoit  la  cabane  dp  la  ber- 
gère^ construite  avec  des  branchages  ;  près  de  cette 


J 


CHAPITRE   XCH.  ,  44f 

cabane  de  fleurs  ^et  de  verdure^  s'éleToH  ttn  aibie, 
auquel  les  deux  pastoureaux  ifuî  tencMent  le  loumfoi 
suspendirent  leurs  éctts«  Le  poursuivant  d'armes  p 
jappeH  RBuvarin^  étok  dms  une  tourelle  ^  d'où  H 
annooçoit  -aux  deux  pastoureaux  les  cfaampiom  ifM 
entroient  dans  la  fice^afia  qu'ils  «se  préparassent  à 
iesbien  receToir, 

Le  chevalier  qui  demandott  lexCombat,»4ev<Ht 
toucher  un  des  dbux  boucHers  :  c^i  cpà  étoit  tomtmi 
4*^mour  tt  dt  sa  dame,  devoit  ciiercher  à  abattre 
i'écu  noir ,  synitote  d^un  malheur  cpi'ii  craignoit  d'é- 
prouver; le  mal" content  deyoit  viser. k  réau  blanc, • 
comme  fû.  eu|  détesté  Je  signe  d'un  boohf  ur  qu'ai 
n'avok  point  goûté  : .  mais  soudain  un  des  deux  pa$- 
tour^ux  paroî^oît  pour  défendre  son  écu* 

Louis  de  fieauvau  décrit, les  armes  et  les  couleurs 
de.  tous  les  chevaliers  qui  parur^it  d»is  ce  tournoi^ 
qui  dura  deux  jours*  De  ce  nombre,  étoient. Pierre  de 
CiMffiy  Louis  de  Montheron,  Pbiiibert.de  la  Jaille, 
Guillaume  Dynye»  et  Louis  de  Beauvau,  qui,  après 
4111  combat  long,  opiniâtre»  et  souvent  douteux»  fit 
^^&^  voler  en  éclats  la  Jance  de  son  adversaire 
Pl^fibert  de .  Ls^ç  »  Cît  obtint  le  p^bc:  : .  il  eut  I? 
ve^;g6«t  le  bouquet  y  et,  sur* tout  //  baiser,  lequel  il 
tint  à  moult  chier*  _  : 

Tannegyy  du .  Çhâtel  succéda  à  Loui^  de  Beau- 
vau»  et  savançar  contre  Philippe  de  Lenoncourt.: 
du  Chàtel  pqrtoitMOult  gaiement  en  croupe  la  daima 


Il  f^ 


44^  CBJLPITRI   XCII. 

de  Pontevès  et  de  Cabane^  Les  deux  ccmBattam  « 
heurtèrent  a?ec  tantéç  vigiMir,  que  ieuis  lan^cQs  !^ 
jrcmipîient;  ie  fier  Lenotioovn  en  ûi  encore  brisa: 
deux  autres  à^on  ^Mhremire  y  et  ie  force  de  se  iétirar^ 
îemportSMit  avec  ht  sa  conisigsusse  datM^  ept  dk» 
€€SM  femtiie  foote  ^i'^^àk  pa^  pék^du  lei  éttietu    - 

Ferri  de  Lorraine,  gendre  du  rirà  René,  Mttitfi* 
iqfxùA&  par b  irfchessè  de  si(m'éfS|^)agé  ^h^  beauté 
de  son  arDtiuce  ^  poussa  droit  à  fétu  bism  :  a«i  idjlbftmè 
coup ,  ilTeniportviâ  victoiiti ,  et  obtint  dé  la  bei^ft 
le  prix  destiné  au  vainqueur  |  itiiiidôiuu  en  édiKâgè 
b housse d^ son civeval.   *  ..    >.n( 

Dans  les  intervalles  des  x^^dltibats  y  cdi  sëvoit  dut 
d»n«s  difi^reM  rc^ichissemeiss  ;  et  ils  éi6)eM  biai 
nécessaires ,  ear  ia  barrière  étoit  oisiVétltè  depuis 
midi  }us<}u*à  six  heinres^du  so& ,  ^'esi^Ihdire,  pendant 
la  plus  grande  diideur  du  ^Mâr* »    -  ;.!.> 

Le  pouTSuîvimt  d^armes  ec^iiisil  l?s  fuge^s-Hupr^ 
cte  la  bergère  t  fb  allèrent  avec  éSk  au^  pie<ist4â  it>?, 
i^i  leur  accorda  ia  permisskm^de  prononcer  le  juge- 
ment. La  bergère  ordonna  au'  pOut^iKVsfAt  d^iMi 
de  rendre  les  écus  aux  pastoureaiix  ;  eHe  fit  dédarâr 
par  les  hérauts  que  h  pas  tk  Iw^^t^rf'étoH  kèWiih 
pJl,  er  défendit  à  se*  paàtotfteaux, de  ie  cotaiteôef: 
enfin  elle  leur  fit  ôter  leur  heaume,  et  frjr  ààtM 
c$mm€  ses  ^s  serviteurs  tt  léyàùy^;  ils  reçui*eni!  cette 
douce  réconftpms^  en  présenceMiet  éôuie  ïa  oo«r', 
qui  l^apppç^ra  par  «es  appiaudîs^meris.  La  Ber^èté 


monta  alors  sur  saf^  hàc{uenée ,  et  0  Àeûx  fois  ie  tour 
de  la  iîce  au  milieu  de  ses  deux  pastoureaux,  au  soii 
des  instruméns ,  ayant  devant  elte  le^  hérauts  et'  les 
piges  d'afméâ,  qui  crioient,  Lenoncouri  et  Laigut ; 
eik  arriva  ainsi  chez  Louis  àt  Beauvau,  qui  fui 
donna  à  souper  :  de  ïâ  dïe  se  rendit  joyeUsemeiit  au 
château  y  où  elle  entra  à  pied;*  précédée  de  méné- 
triers et  d'un  héraut  d'armes  qui*  portoît  d'une  main 
une  verge  blanche,  et  de  l'autre  le  grand  prfx ,  qui 
consistoit  ent  une  vergé  d'oir  et  en  un  diamant  qui  valoir 
près  de  cent  écus;  mais,  pourlegagner,  il  fidioit  avoir 
rompu  trois  latïces.  Le  poursuivant  d'armes  demanda 
ait  roi  quel  étoSt  le  chevîdier  cfihl  jugeoit  digne  dti 
prix*  I/Mik  de  Beiauvïu  et  Guî  dé  Laval  avoient 
rd^pu  trois  fantes  ;  mais  Feni  deLbrfâine*  en  a  voit 
rompu  quatjp^  j  et  il leçut  le  pribt  i  le  brave  chevalier 
Wt  t'accepta  que  pour  en  parer  îa  téteddib  noble  ber- 
gère. '  Toute  f afssemWée  fit  reteitir  fes  cris ,  Lorraint 
preguy  [  Lorraine  a  le  pSi^J  !  If  disinsa  avec  fat  bergère, 
qui  s'en  retourna  *véé  ses  paktouTeàux^et  son  cortège 
à  l'appartement  dé'  Louis  die  Beaùvaii ,  où  f  on  servit 
des  viandes ,  du  vîri  et  des  épices.  Le  jour  parut, 
et  mit  fin  ^  cette  f*ètç. 

Chacun  refourna  cjfans  ses  domaines  ;  mais  le  bon 
roi  René  eut  soin  de  recommander  à  chaque  chevalier 
de  payer  exactement  la.  dépense  qu'il  avoit  faite  ('i|. 

La  tr^dtition  qiû  f^t  aborder -en  Provence  plusieurs 


^tamm^ 


(i)  Je  pubiierai  bientôt  textuellemem ,  avec  des  notes  ,  le  ma- 
liiftcrit  qui  contient  les  détails  de  cette  fête  singuficce. 


448  CHAPITRE   XCII. 

des  discipf es4e  Jé^-Christ ,  suppose  que  S.**  Minfie 
vint  porter  la  foi  à  Tarascon  (  i  )  ;  Té^be  principale 
de  cette  ville  lui  est  consacrée.  Nous  Toulùpijss  lit 
visiter.  II  y  a  devant  la  porte  d'entrée  un  siarcophagi; 
antique  renverié^  sur  lequel  on  voit  deux  génies  q\^ 
soutiennent  une  tablette  sans  inscription. 

Les  figures  du  portail  ont  été-  mutilées  avec  un 
soin  extrême.  Le  tombeau  de  Jean  Cossa,  grattai 
sénéchal  de  Provence,  a  été  détruit. 

La  châsse  de  ta  sainte  é  toit  un  présent  que  Louis  XI 
lui  avoit  fait  en  l475  :  le  métal  précieux  dont  elle 
étoit  formée  y  et  les  grenats  dont  elle  éfcôt. enrichie, 
ont  causé  sa  perte.  Je  ne  sais  çofnmeipt  une  figure  de 
marbre,  placée  dans  la  çhppelle  souterraine,  ^Hé 
conservée  ;  la  bonne  femme  qui  vend  ies  cierges 
xju'on  brûle  continuellement  devant. cette  image, 
nous  assi^r^ique  la  sainte  avoit  aveuglé  tous  <3ei^ 
qui  avoient  voulu  pénétfer  dans  cette  çrypte.pour 
y  porter  la  destruction*  Cette  /igure ,  qu'on  dit  être 
celle  dfi  S.'^  Marthe,  paroît  avoir  éfé  exécutée; au 
commencQinent  duxvi.*  sîèc{e;  on  Ut  au^essus  : 

SOLICITA 
NON    TVRBATVR. 

Cette  inscription  obscure  (a)  n*auroîl  sûrement 


'MMÉitB 


Ji)^«^ri,p,  119,  ',  :    j 

(a)  On  pourroît  entendre  par  ces  mots- que Ja  sainte»  entoi^rù 
Âe  tribulations ,  n'en  est  pas  troublée.  Peut-être  ce'mot  solicita  ^  mis 
ici  pour  solliciia,  éxpriitie-t-if  dette  crainte  religieuse  qu'éprouve 
U  juste  qui  va  comparoitre  devant  Dieu. 


1  *   ' 


y 


pas  êSê  CôiHJS^léiè  a&iM  pîrf^  ces  savantes  Béhédîcthtes 
cpii  ,iâ<»  ?tt^dln ,  ftfsofeht  ai  1 3  4ô  { i  ) ,  par  \é\xt 
émditfiih ,  p!ftfeîpaterti«nir  daifi^  fr  latîgàe^  iatîné^  K 
gloire  et  FdrtiéfttéHt  dé  Tàràscb». 

Le  lifibÉter  et  unie?  paWîe  dé  K  Aéf  «oht  décdrés 
de  bëlTeS  ta^îsseirfes,  qui*  éfoiént  autrefois  dans  le 
couVèH*  des  rt%teu^ï  dk  \%Ké  incarné ,  et  quî 
JîaKSfeiint  éhte  feur  ou^^a^è.- 

I^VièîBehiérôphaïkèqtti'iAiible  présider  aùi  mys^ 
tères  de  eet^  crypte  ^  venif  de  gitossîèrès  îttiages  où  là 
saîirteeit  répl^stht'éétôricfeîsanf  mimonstréënchaîné; 
DaiM  ïei?  tehi jp5  <^%hofrançe ,  âe^  ariîihaax  îné3nrilis , 
dètt^Hittagihation  des'hortiAiëë  exagérôît  sonVehtla 
forc^  ét'iat^ièféckë,  et' itiïikjàé^  fa  crédulité  prêtoit 
prtefe^ -tôùfours  éts^  fôhhfes  Biiiai¥èS ,  ont  porté  quél- 
queft>U'  l'épouvante  daWscèrtahies  contrées.:  ceùxî 
quî  p#veiM>ileht  à  les  éiV  cBHî^r ,  mérîtoient  ht 
recotiÉw&sancé  des  Kabkàl^ ,  qUî ,  pénétrés  d'admi- 
ratîbh'  pbur  le  côùrager  et  râdrèsse  dé  leuA  libéra- 
t€fui«i',  n'iiésîtbfetït  poîritf  ï ièù^^'d^cernet  les  Honneurs 
de  Fapothéôsë;  Cest  ainsi  qàé  fâfnrfqilité  plaçbît 
ley  services  de  ce*  genre*  au*  nombre  des^  phis  beaux! 
exploits  dé  ses  héros  et  de  ses  dieux  :  elle  a  celébrë , 
entre^aiitresy  ApoU<Hi^  vainqueur  du  serpent  Python  ; 
Henmlè ,  enchafeaiit  Cetfeère^,  assôhutiaiit  Phydre 
de  Lèrrié ,  perçant  de  ses  flèches  lés  oiseaux  deStvhi- 
phale,et  purgeant  la  terre  de  tant  d'autres  monstres 

(f)  Pauadin, 7/iA DI,  I. Bouche, 1, 3»^, 
Tome  m.  -  F  f 


/ 


« 


456  CflAPITRE  XCII. 

non  moins  redoutables;  Thésée,  domptant  le  taureau 
de  Marathon  et  tuant  le  Minotaure;  Méiéagre,  dé- 
truisant |e  sangfier  de  Caiydon«  UEgiise ,  dans  ses 
légendes ,  a  cm  devoir  relever  par  de  psyreiis  faits  h 
gloire  de  ses  anges  et  de  ses  saints:  S«  Michel  triomphe 
du  malin  esprit,  qui  est  figuré  sous  la  forme dW 
^ragon;  le  même  exploit  çst  attaché  au  nom  de 
S.  George  ;  S.  Marcel  délivre  Paris,  d'un  horrible 
serpent;  la  Normandie  doit  à 5.  Romain  la  destruc- 
tion d'un  monstre  appelé  la  gargouille  ;  et  l'on  donne 
le  nom  de  r^intj^z^^àceluîdontondit  queS/""  Marthe 
a  purgé  le  sol  de  Tarascon.  Le  [dus  ancien  auteur 
qui  parie  de  cette  dernière  tradition ,  est  Gervais  de 
Tifbuiy ,  gentilhomme  anglob ,  qui  prençit  b  5|ualité, 
«de  chancelier  du  royaume  d'Arles ,  et  qui  écrivoit  vers 
le  commencement  du  xiil/  siècle  ;  elle  est  aussi  con* 
sacrée  sur  les  sceaux  de  ce  temps-là  (  i  }•  Selon  Ger-, 
vais,  la  tarasque,  serpent  de  la  race  du  léyiathan ,  se 
tenoit  dans  le  Rhône  entre  Arles  et  Tarascon ,  pour 
dévorer  <ieux  qui  descen^pient  le  fleuve*  S/^  M^the 
la  dompta:et  l'enchaîna  avec  son  voile  (2), 

(i)  Recueil  de  sceaux  du  moyen  âge,  dits  gothiifues ,  pI.LXX,,u.®  5. 
'  (2)  Le  même  auteur  i^àdonte  aimi  i*histoîre  du  drac,  dont  ie 
nom,  sans  doute,  signifie  dragon.  Il  prétend  <|^e  cé^thonstre  en-' 
traîna  d^ns  sa  retraite  une  femme  ^e  Beaucaii*e«',quî  cherchoit 
im  vase  de  bois  qu'elle  avoit  laissé  tomber  dans  le  Rhône  :  il 
Vy  retint  sept  ans^  pour  quVile  eût  soin  de  son  fîis;  et  Ior5que 
celui-ci  n'eut  plus  besoin  des  services  d*une  femme,  on  la  laissa! 
aller.  Elle  raconta  à  ses  amis ,  qui  avoicnt  bien  de  la  pQÎi»e  à  la 


J 


CHAPXTil*    XQW^,;  4,51 

f  C^|^i*ôttiène:t<lus  les  vis  par ia. ville  >,Ie  àecQnd^^ 
jfQm  de  ja  Pentecôte  e\  le  jwr  deSa^ite-Marthe,^ 
i|ja^J|pttre,g«i^èrei  qui  représente  fe  /df;-4f^tf^,  UHÇij 
f^mi|]^y  qfui  e3t:a4joui:d'hui  chaînée  de  ce  précieux i 
dépôt,  .fit  bien  des  di0icultéS:  p<^r  nou$  {e  Ia($s^|^| 
voir ;j; elle, dou toit  de  la  feryeiii:  de  notre  zèle;. enfin, 
e)|e^ç^$entît  à  satisfaire  notre  curiosité;  Cette  figi^rei ^ 
est  en  ^i$,  et  représente^un  dragon ,  non  d'après  les 
]iq^Ie$  idées  des  artistes  grecs ,  maisf  d'après  cf^  formes . 
l^arfes  que,  lui  donnent  leslégendaires  ( i)  :Ja  corps^ 
e|st,fo|i^é  de  cerceaux  recouverts  d'une  toile  peinte,, 
et  il  a  sur  le  dos  une.  espèce  de  bpiiclier  hérissé  de. 
cornes  droites;  ce  bouclier,  qui  ressemble  assez  à  la 
carapace  d'qne^  tortue ,  a  fait  soupçonner  à  Bouche  (2) 
qi|e  l'idée.  4^}^  tarasque  est  venue  de  quelque  .grosse, 

Mcoimoître,  les  choses  étonmintes  demi  elle.  ïivoic  été:  témoin  t- 
eUe  leur  dit  que  ics  dracs  se  nourrissoient  de  çhair,(iumaiiie,  et 
qu'ils  pouvoient  se  changer  en  hommes.  Un  jour,  disoît-elle,  que 
le  dirac  lui  avoit  donné  une  portion  de  pâté  d*anguiHe,ene  frotta 
ifli  de  ses  yeux  avec  fa  graisse ,  et  aussitôt  cet  ceil  acquit  la  facultés 
4ê  voir  sous  ies  eaux.  Au  bout  de  trois  ans»  cette  femme  reçomiut- 
ie  drac  dans  ic  marché  de  Beaucairc;  elle  i'appeia  par  son  nom, 
«t  lui  demanda  des  nouvelles  de  sa  moitié  et  de  son  fils.  Le  drac 
paroissant  surpris  quelle  eût  pu  le  rtconnoîiré,  dleJuf  raconta 
ingénument  de  quelle  manière  un  de  ses  yeux,  avort  acquis  une^ 
vue  si  périmante;  aussitôt  le  drac  lui  mit  ie  doj^  dans  cet  œil,  et 
le  lui  creva,  pour  n'être  plus  exposé  à  être  recdnnu.  GERVAilUS 
TlLBERlENSlS,  Otia  imperii ,  85. 

(i)  Dictiomiaire  des  beaux-arts,  au  mot  DRAGON, 

(a)  HUtokcdc  ProHUce^l,  316. 

VtZ 


^m^^^ 


452  cnj^Mme  iCM. 

t^tii^  ftaMcfac'qtti  se  sMfa^MgKgée  âBm4HM&9|icKare 
dit  ÏKMncy  ev  aura  éti  ppké  à  Taïascoh  t  iiuUs  ces 
boociier  ne  se  j^ëmarque  pu  stir  leit  iotawr  <pi  MM' 
donneur  la^plils'atidaitie  figiuredefetslfasque;  ^«nY 
pftroit  que  cdmmé  un  dngtm.  K  y^  a  supies  îlaBcs  d(r 
cette  momimeuse  figure  des  poignées  phfcè^  à^iler 
^stances  égales  pour  la'  f<Mét  plus  commodéiMiitV- 

Cest  le  siecond  jour  de  ta'  PMl€(odtë' qo^oti  pté^ 
mène  là  tarasque  :  huit  jeunes  gtos  adnxts  et  v3g6tl« 
reuje  sont  chargés  de  ce  soih  ;  ihùnt  d^s-bavei  ê^ 
souliersi  blancs  ;  ieur  tète  est  éoiâié  cPim'  bo«iîne^  6e 
mousseOne ,  et  ils  pOf«em  sih*  h' poitrine  uni^ctis!K>i<' 
diaigé  d^uneftgâtre  de'ratûmal;  ifs  porteiit^la tarasque 
à  la  hauteur  de  leur  ceinture,  et  dirigent  ses  mouve*^ 
mens  de  manière  qu'ils  expriment  la  rage  etk  liire}iri 
tentât  ils  coufeii^  rapidement,  tantôt  ils  s'arrêtent  f- 
puis  ik  se  retoumem  brusquensait  enciiant:  lavavlm^ 
may  nostrou  tarascou  [  Nous  la  voirons  enooi^',  nptte 
tarasque]. Pour  augmenter  la  terreur  que  doit  ins^î- 
rer  le  monstre  cpii  figure  dans  cette  fête  commémofa^ 
thre,  Uil  homme  placé  dans  lé  corps  deranimaMuiiàit 
vomir  des  serpenteaux  par  Ifes  yeux  et  par  la  bouche; 

Ceux  que  la  curiosité  fait  approcher  de  trop  près^r 
t*eçoivent  souvent  de  fertes  contusions  :  alors  lea 
Tarascdiinoîs  paroîssent  enchantés  des  prouesses  de" 
leur  monstre  ;  loin  d'être  attendris  par  les  cris  de^ 
malheureux  déjà  meurtris  ;  les  suivans  de  la  tarasque 
les  font  sauter  de  force  ;  et  le  peuple,  remjJi  de  jde  ^ 


/ 


^it  retentir  J'air  de  <:es  acd^mations  ?.A  fua  iemfe!  a 
^pm  hmfi!  la  lUarascfUta îK^umn  irél^Qe^t  b^^fkhi 
jcHesit :bien  fait!  ^  W2^s>qg^e  lyi0,  rx>mp^  un  Inas  1  ] 
he$  mf^v^ms^  etj^  iétran^$  qui  igiK>rent  cette 
brutale  coutuo^^  .courent  j^siqu/e  4^  h  vie  t  plusieurs 
personnes  oi^  léti  tvàes;  ^t  oni^e  pMomèns  lamais 
ià.tarasqve  ftans^ll^^ve^ud^iaccâàeut*  , 

/Le  fourbe  la  fête  de  S.^""  Marthe^  la  larasque  joue 
im  ^ôljej^kn  diir^ent  :  on  k  &it  assister  à  ja  pro- 
cession ^  $t  ui^  jmfàe  (fiUe  vètiie  de  JbkiK:  la  con- 
duit attaçibéen^xec  un  Umg^fvbnn^  la  même  couleur  ^ 
comme  âutrofcâs  la  sainte  ^u'on  révère  la  mena  -en- 
4hsânée  dans  TarasCon»  Lorsque  Ja  procession  est 
entrée  dans  l'église ,  on  la  iMréaente  à  la  parte  du 
choeur  ;  ^n  prêtre  Tasperge  d'eau  rbénite  ;  f  animal  fait 
l^sieurs  mouvemens  <xHiviiIsi£s  et  tombe  sur  le  c6té« 

ffî  Beaucaire,  après  la  foire  ^  présente  l'image  de 
la  m(Ht ,  Tarascon^'âu  OGaitsaiie,  offie  en  tout  temps 
cdie  de  la  nie  :  la  ièrtifitié  des  ^fJaines  ^  l'entoureàt^ 
^ctîvsié  du  commet ce^  dont  les  grains  sont  la  prin- 
4ipale  branche,  y  répandent  l'aisance  dans  ^toias  bs 
états  4  par- tout  on  vjo^t  le  peupie  ^e  iivier  au  travail. 
On  file  du  coton ,  <m  fabri^iedes  schakos .  M  •  Etienne 
Paschal  a  établi  une  manufacture  d'eàu-devie  :  il 
assure  que^  par -des  moyens  particuliers ,  H  tire  du 
fésidu  qui  reste  dails  Tdambic  une  quantité  d'acide 
acétique,  ou  vinaigre"* épuré ,  aU  moins  égale  à  la 
quantité  d^e^t  de  vin  quela  distMIation  a  produite. 

Ff3 


-  4î4  tHAPlTHE  XCïT. 

Tout ,  dans  dette  folie  vHIe ,  respire  la  joie ,  Taisance 

'et  le  bonheur  y  qui  sont  la  juste  récompense  du  trai^ 

et  de  l'industrie  :  c^est  là  que  l'élégance  provençal 

se  montre  même  accompagnée  du  luxe.  Les  fenmies 

sont  à-peu-près  vêtues  comme  celles  d'Arles;  elles 

sont  proprement  cbau^isées;  leur  corset  marque  bien 

la  taille  :  elles  aiment  sur-tout  la  danse  ;  l'hiver ,  il 

'n'est  question  que  de  bals  et  de  fêtes;  on  les  voit 

-souvent  quitter  leurs  occupations  pour  se  mêler  à' ta 

'  vivcfirûndôuJe,  qui  grossit  en  passant  dans  dutque  rue. 

Tarascon  a  donné  naissance  à  Privât  de  Moiiêres , 

professeur  de  philosophie  au  Collège  Royal ,  et  aux 

:  deux  frères  Berthet^  dont  l'un ,  Capucin ,  obtint  qudl- 

ques  succès  dan^  la  chaire  apostolique  :  l'autre  »  Jean 

:Berthety  se  distingua  par  plusieurs  ouvrages  de  litté- 

. rature,  d'histoire  et  de  philosophie;  il  faisoit  aussi  dç 

vers  français ,  latins  et  provençaux.  Parmi  les  dîflfe- 

rentes  pièces  qu'il  composa  sur  les  campagnes  du 

"Roi  y  on  distingue  une  épigramme  qu'il  fît  à  l'occasion 

de  la  prise  de  Maestricht  :  il  fiiut  savoir  que  l'assaiit 

'  fut  livré  le  jour  de  S.  Pierre ,  et  que  la  ville  capitiîb 

et  fut  rendue  le  surlendemain ,  jour  de  S.  PauL 

SanPeyré,  eme  sa  testo  raso,  > 

Diguec  devant  Maestric  l'autre  jour  à  san  Pau: •  r 
Per  coumbattre  aujourd'hui  prestomî  toun  êspaso; 

Din  doues  joun,  per  mtrar ,  ti  prestarai  ma  clan  (  i).  * 

(i)  «  S.  Pierre,  avec  sa  tctc  rase,  disoit  l'autre  jour  à  S.  Paul, 
»>  devant  Maestricht  :  Aujourd'hui  prête-moi  ton  épée  pour  com- 
9»  battre;  dans  deux  jours  je  te  prêterai  ma  clef  pour  encrier;  •  ^ 


j 


<k  « 


cîHÀPit*E  xcn?  45  r 

"  Cette  citation  m'engage  à  dise  quelques  mots  des 
poètes  qui  ont  retrouvé  la  lyre  que  les  vieux  trou* 
badours  (  i  )  abandonnèrent  après  la  mort  de  la  reine 
Jeanne  de  Nâples,  et  sinr-tout  lorsque  la  Provence 
eut  cessé  d'avoir  ses  comtes  particuliers ,  et  que  la 
cour  de  ces  princes  ne  leur  offiît  phis  un  asile  et 
des  protecteurs.  Paul  Belaud,  Galaup  de  Chasteml^ 
François  d'Aix  et  Berthet ,  firent  renaître  la  poésie 
provençale;  Pierre  Paul  et  Louis  Galaup  en  sont 
sur-tout  regardés  comme  les  restaurateurs*  Le  prer 
taier  mérita  ie  titre  de  troubadour  modernt.  Louis 
Belaud  de  la  Belaudière  fut  un  des  premiers  qui  se 
firent  quelque  réputation  :  il  composa  des  vers  dès 
sa^plus  tendre  enfance,  et  se  rendit  digne  de  cette 
honorable  inscription  dont  on  décora  son  portrait  s 
Vertu  me  guide,  Honneur  me  suit.  Ses  oeuvres  (2)  ont 
été  recueillies  par  son  ami  Pierre  Paul.  Paul  et 
Belaud  ont  été  chantés  par  une  muse  marseiiloise , 
M."*  d'AItoviti ,  que  Ton  a  tort  cependant  de  compter 
parmi  les  poètes  provençaux ,  puisqu'elle  n'a  point 
laissé  de  vers  dans  l'idiome  de  sa  patrie. 


{%)  Voyez  svpràf  page  97,  Tartick  sur  Us  troubadours,  et, 
page  383  »  rarticle  sur  ie  théâtre  forovcnçaL 

(1)  Ohos  etfimosfrovinçaksdehom  DE  LA  BELAUDlÈRE^^r//- 
hommoprwençau ,  revioudadosper  Pierre  Pa  UL,  escuyerde  Matseillo  ; 
dedicados  at  vertueux  etgéninmx  seigneurs  Louis  d'Aix  et  Charles  de 
Casaulx,  premiers  consous,  capitanis  de  doues  galeros ,  guhematours 
eh  l'anti^uo  villo  de  Mârsiilh,  1 59$  »  111-4.^ 

rf4 


I 

i 


4S^  ÇKAFPTItf  fliCII» 

Robert  lie  Ruffi^  fpfrïd-pèr^4e  fH^mifiA  4e  Mai^ 
séUle,  a  composé  vuie^  cog^ffyfpffi  tii^orifue  .sur  la 

pest^<île  i58o.Usfûèçe^Jb$^e$ife«éep,46?»^ 
▲ntoîiçie  id'Agar  4e  Ç^fa^Ipa,  f^  nioy^it  de  i^ 

pesite  en  i^i  f$m'ffM¥  P^^^m^i^iff^^ 
l^t  ^assiloiu^  im  iÇl^m  Fanfirlfi.  <?I^e  Çn^fi 
^•Aix  ayok  hea^ça^p  clb  ^«çrye  et  de  6^^  i  ^î»^ 
«pn  .<ynî$nie  ?  d^  sc^^y^t  f^îce  rougir  |a  j»i^Nr  def 
^9â!tef  fopHr^.qiç  ^jgqoîapt  ji'jpspîrer-  f-e  recue^  de 
se^  jpQ^sîei  est  m#^é  ./^4C#  4^s  Mns^  fmm^ 
%aU${\).  Un  autre  ^eçiHHl  q«î  ppï'l«  i#  PÔiW  tw», 
imprimé  en  i686»  cç^nii^t  impi  pdéme  .de  J^yAÎer 
deBrijmçon ,  né^  ^v^^  i)9Mt^}é  VÀi  ^im\diPavii^% 
êU  lou €rebo-cauer  d'unp^j/sfifi  à  ta  m^ct d(  smm*\j^ 
pçédes  de  Barthéleuy  F çt^lou,  curé  de  Fla^ansdiuu 

(i)  Le  p.  BOUGEREL,  dans  son  Parnasse  provençal,  ouvrage 
manuscrit ,  dont  M.  de  Saint- Vincen^in'a  conomuniqué  une  copie, 
prétend  qu'il  y  ci^  a  e$i  de^K  é^ivms,  une  de  }^%% ,  i*ftu|Be  d« 
^666\TCkûi  i\  se  trompe.  L'éditipp  de  léiS  porte  le  tirade /iir/£rii 
Âey  Musos  provensalos ,  divisât  en  quatre partidos,  /^^r  Claude  BruEYS» 
escuyer  if^Aix;  elle  est  imprimée  chez  Estienne  David,  et  contrent 
des  comédies  et  toutes  les  auti^  pièces  de  Bruey^.  L'Autre  édition 
n'est  qu'un  recueil  de  poésies  de  divers  auteurs  provençaux,  ainsi 
que  le  prouve  son  titre  :  lou  Jardin  deys  Muios  prouvençalos ,  ou. 
Reeueil  de  plusieurs  pessos  en  veri  prauveuçaus,  thausidosdinfleyso^s 
deys  plus  doctes  poétos  d'aques  pays  de  Prâuvenp ,  aumentaf  de  prou* 
ueriis,  senfencis,  fimiUtudps  et  mauts  ppt  wm,  i<K^^  99^  4^$ 
figw^es  en  bois  ,  et  cette  jépigr^be  : 

Youtf  tu  faJrejigu'  à  l^  mouet, 
lÀinp  ^uts  libre  et  t'en  ris  fouet, 

\$&  principales  picci^  soQt  •  CoquaM,  ou  DiscêVJ  â  iasto» 


i  -T 


1#  âffifièsû  <^f  réj\^  ^  nîçjm  jpips  .été  WMt0fm  ;  4fc^ 
^^,çfjp^<^ftnt  qucjtqu?  ^rite ,  jws^'elfes  lui  9Ht 
fjèU4oKiJï^  Ifi  nom  J$0n4i  prÇivençAls  ^^^^'ts-w» 
ji^rçes  pièces  otot  4lé  imppipiées  dan^  le  ^em^  dl^ 
jJ4-  Jle  jwésMettt^e  V^bçlle^aÂnite-TuIle^  |i  Tourvei, 
^'il  ^  ;fotiu4é  ^««  So^sier.  Fpmjpu  wf^vjkpit  en 
▼ers  :  lorsque  ie  comte  d'AIais;  gouvernevir  dp  9^^^ 
mr\f;f^y^  4e  .^siter^  )e  jpyjtvx  (çw^  Iiu  adr^s^»^  en 
]le  .qp^taj^t  9  qoe^i^ies  yec(  çpv  fini$fsoien|  amsj  : 

I4^^o^yendrj^  de  yquestre  ^tesio^ 

]i.  cbantoit  souvent^  sur  Taîr  des  lammtatims  de  Jh^ 
^  y  UM  dMU>sen  i]ii*i{  mo\\  ^te  sur  iejs  laminia-^ 

Durand  de  Touloa  .est  auteur  Je  ^ttsîeurs  pièces 
«atkîques  { i  )  qui  n^oM  point  été  imprimées*  Les 

-  -T 

fomjmtf  — î-  rEmhflrquamait  9  his  Ç$nquesto$  et  l'htifous  Viggi  de 
Caramantran;  —  leis  Statuts  deStngPeyré ,  que  tous  leis  confi^airef 
depcn  garJar  eiohservar  selon  sa  formo  et  teneur  ;  —  [eîs  Amours  dou 
tergie  Florisco  et  de  ia  bergkro  Ôîtivo;  —  Comédie  de  Vïnterest  ou  de 
Ja  Ressemblance,  à  trois  personnages,  en  cinq  actes ,  par  Brueys  ; 
*--ià  Bugado propençato ,  ounte  cadun  ly  a  nnpanoucftmn,enliassadê 
difroverhis,  sentenços,  simiîliudos,  et  mots  fer  rire,, en^frovençau,  en^ 
finnado  tt  coulado  din  un  Httfou  de  dè^sons,  fer  la  lauar,  sabounar  et 
eyssttgar  comme  si  deou, 

(i)  Voici  les  tîtrei  de  ces'  pièces  ■:  i;*  la  Afarùtte ,  en  quinze 
allants,  où  ii  coiume  en  ridiqiie  ^in  Geikainr.rM«  Marot;  a.^  la 
Cmderenade,  au  6u|ec  d^iine  dbputequii^tiicuÀBngnoiies  enti« 
4is  Pénitens  noirs  «c  Lebrun,  frêne ^det  du  igrand  Augustin  dç 
ce  nom ,  fort  connu  à  Aix  ;  3  .**  l'Astre  dt^Gibroun ,  faisant  pou^uu 


ifcrf. 


4jli  ChAPîtRE^XCiî. 

comédies  âe  Gaspar  Zerbin ,  avocat  à  Abc ,  ont  été 
recueillies  (t).  Etienne  Fontaine,  maurais  peintre 
et  bon  chirurgien ,  ^isoit  des  vers  burlesques ,  dans 

iesquels  il  fi'ancisoit  les  mots  provençaux  et  pro- 

«  

vençâlisoit  ies  mots  fi'ançais.  François  de  B^ue  et 
Charles  Sceaux  (2}  ont  laissé  des  comédies  et  dès 
chansons  (3). 

L'exemple  des  autres  poètes  provençaux  ne  fuit 
pas  contagieux  pour  Natte ,  né  à  Cuairon ,  village 
situé  au-delà  dé  la  Durance,  à  cinq  iieues  d'Aix; 
les  religieux  même  qui  composoient  des  vers,  ne 
rougissoient  pas  non- seulement  d'y  présenter  les 
idées  les  pJus  triviales ,  mais  même  d'employer  des 

expressions  d'une  révoltante  obscénité  :  qpantà  liû, 

>  .  "      1  ■• 

à  fa  précédente;. 4.^  une  lettre  adressée  à  lui  Darand,  sur  le 
procès  du  Ballon,  à  Brîgnolies,  procès  qui  commença  en  17^0; 
$S*  ses  Adieux  à  M,  Bigaud,  pièce  d*environ  cent  vers ,  qu*ii  fît  au 
moment  que  Taubergîstç  régf oit  son  compte  ;  enfin  piusftfurs  autres 

|)îcces. 

{i)  La  Petîo  dey  Musos  et  cùumédies  ffouvensaks^  per  M.  Gas- 
par Zerbin, à Ays,  i655,in-ii. 

(2)  Sç&  principales  comédies  sont  Brûs^et  //'  et  Brusfuetll: 
Je  sujet  en  est  tiré  de  ia  vie  de  Strûczi»  prieur  de  Capoue,  par 
Brantôme  :  c'est  une  inaîtation  dU  Sosie  de  P^AUTE.  Ces  piccef 
ont  été  représentées  dans  les  collèges  :  ce  sont  pourtant  de  misé- 
rables farces^  où  il  ny>  rien  pour  éclairer  Teisprit  et  former  le  cœur. 

(3)  Les  chansons  et  les  petites  pièces  de  François  de  Bègue  ont 
été  recueillies  dans  icu  Jardin  deis  Aïusos  proifençalos ,  eu  Recueil  de 
plusieurs  pessos  en  vers  provençaux ,  recueillidos  deis  plus  doctes  pouéttt 
daquestpays,  li^^,  in-ia» 


:^» 


il  composa  des  cantiques  spirituels,  qui  n'ont  pa$  été 
imprimés.  Le  capitaine  Seguin,  de  Tarascon,  a  fût 
des  comédies,  qu'il  jouoit  hii-mème ,  et  assez  bien ^ 
quoiqu'il  eût  une  jambe  de  bois  :  il  n'a  pas  rigou* 
reusement  observé  les  règles  du  théâtre;  mais  il  y 
a  dans  ses  pièces  de  la  gaieté  ^  et  quelquefois  des 
traits  moraux  assez  heureusement  exprimés.  Voi^ 
comment  9  rend  cette  idée  devenue  si  commune, 
que  le  mal  se  mêle  toujours  au  Bieni 

Ldu  printen  douno  fa  vepdweo, 

L'estiou  *  remplis  Icîs  magasins , 

L*autoimo  prouduît  leis  rasirn , 

E  de  rhîvcr  naisse  la  glasso;  '*' 

De  iatempesto  faboukasso^i    - 

Et  dou  mau  se  tlro  lou  ben^. 

.  r  ■    ■  »  »  ' 

»  '  -  t 

Jean  de  Chazelles  a  composé  un  grand  nombre 
de  pièces  et  de  chansons  provençales  ;  son  sonnet 
sur  la  Pauvreté  est  une  de  ses  meilleures  produc- 
tions : 

su   LA  PAURETAT. 

^    Troupode^fumofasorguiUottsopaurillo'y 

Que  tan  fouert  d*aqueou  mau  monstras  de  vous  ^quar  ^! 
Pauretat  es  un  mau  que  noun  se  pou  liquar  ^^ 
Mai  non  oQcnço  pas  l*hounour  d'uno  famiilo.  * 

Au  contrarî»  leis  dens  que  mouestro  fa  roupiflo  ^ 
D*im  pauré  ^ue  partout  se  iaisso  puMicar, 

*  Vété,  •Pôurijuoiptroisjee-voiissiseiK 

*  L«  bontce;  c*«st4-<lire ,  le  calme»      sible s  à  ce  mal  ! 

*  Et  ;du  mai  se  tire  le  bien.  '  £st  ao  mal  qui  ne  peut  se  lécher. 

'  Pauvres  orguciOemb  'Les  dents  que  montreat  les  gne- 


4 


■S. 


4^o  CHknritE  xcii. 

Somn  (Targnôf  fqelou  f<m  fàlUtnen^  respectai*» 
iQn'es  iin|^a|i  cc^  d'hazar  si  qaaoga'un  iaa|oiifil^* 

JEqu  pqii  Açnso  j?^[ri|jt  rowtfa  itou  runhîow , 
£t  laissa  son  houstau^^t  %es  cofires  o^bers; 
'   Fau  bon  per  lou  voular  qu'un  larron  siège  ha1>He'^ 

Tan  ben  per  cadenau  n'a  beson  que  d'un  fiou  *, 
'    l^usque  lou  $cou*  doa  Rey  scrîé  même  inutile» 
jOmne^  (in  I^HTittC  a  «iépi  mes  lou  «km. 

Nicolas  Saboîy ,  né  à  Monteaux  dans  le  Cointat, 
étoît  maître  de  chapelle  à  Sàînt-Pierre  d'Avignon  :  3 
a  composé  un  grand  nombre  de  noêls  (i)  qui  ont 
été  recueillis  avec  ç^ux  de  Pueçh  (2^  ».|j{u'pn  préfère 
aux  siens* 

Franco»  Berthet  dorft  fai  parlé,  vîvoîtk  la  même 
époque,  Antoine  Geofroy  de  la  Tour^  né  k  Digne  ^ 
feibîlè  jurisconsulte  ;  Charles  du  Pey  rîer ,  Jean  Sicard 
^e  la  Tour-d'Aîgues  ,  Gaspar  Vend,  magistrat  à 
Aix,  et  le  P.  Cameron ,  se  sont  exercés  avec  succèfs 
à  composer  des  vers  provençaux.  Mab  Fraiiçois- 


I  uJi  II  libitum  w^t  piiw'iJW  *"     ** 


*  Le  moleste*  ^  te  jcen. 

•  Sa  maison.  P  4>  mM  ëm^^ 
f  Soit  iiabife. 

(i)  La  première  éii(i<Hi  a  pam  à  Avignon  «n  .i^9St;'^«« 
préférable  à  ia  seconde  de  1704. 

(2)  Cefui-çi  it,  composé  :ic  noël  des  Beh/miens,  dont  je  parlerai 
ailleurs.  Il  y  a  encore  d'exceHçps  caoïiqpçs  çampoi^  par  Reirol» 
jQienui&ier  à  Avïgnoii,  imprimés  sans  date;  et  ceuxdu  P.GACnlER 
4e^Oratofre».p0^r  les  Missions,  Avignon,  -^35*  '1^^*  •  ^^^*^ ^^ 
P«  RocH£»  lilécoUet,  Mavsetllc,  1805 ,  in-ia »  lont  nioins  boni. 


CH1:PIT]|£  xciu  4^ 

Toœsaînt  Gros  e«t  vérhablem<îtft  le'cïief  du  Par- 
nasse provençal  :  son  talent  précoce'  fiit  distingué 
par  M,"**  deSîmbne^  Tillastre  petke-fille  de  M,~*'  de 
Sévîgné.  II  est  mort  en  174*»  S6i  oeuvres  ont  été 
recueillies  en  i7346t  en  1765  fi).  Ses  poésies  sont 
d^im  naturel  et  d'une  naïveté  très-piquantes  ;  la  mo- 
rale en  est  saine  et  assaisonnée  d-une  f^santerîe 
fine ,  et  par- tout  on  y  trouve  de  l'esprit  et  de  la  gaieté. 
Je  citerai  sa  préface ,  dans  laquelle  il  s'excuse  d'une 
manière  très-ingénieusé  d'B»oit  composé  set*  vers  eu 
provençal  :  '      , 


Que  d'escrieoure  au  public  es  un  toribie  affalce! 

A  peno  ai  la  plutp*  à  la  man,^ 
Que  m'enfrcni  *,  tressussi  ** ,  et  preni  pcr  «lavsns^  . 

De-  soungea  qu*ai  à  satisfaire 

Tant  d'esprits  de  goûts  diffêrens  «Jtt 
Tant  de  patets  ^  et  d'espînpounejaii^^ 

Tant  de  letrus  ^  en  même  tcns, 
Qu*assetas  ou:  ben  drechs  ^,  eœ'  un  air  grave  et  sajî« 

En  badaiHan,  tout  à  troues  ^  iigiran  '    . 
Quauqu*un  de  meis  escrits ,  et  puis  sç'en  trufiaraii^'^^^   . 
,  Aurai  beiio  emprunta  lou  plus  pouir  izngagi,. 

Lei  fîata,  li  faire  ma  cpur, 
Lî  dire^  capeou  bas  :  Bénévo}«  iectaur>. 

■  I  Kl  .      I  11  I       I  I  I       II  I    iiiui— ■ytfi^^yi 


V  k 


(1  )  Rfcuildepwesies  provençalùs  de  M.  F»  T.  Gros  ,  de  AfarsHb; 
tonigeadoet  âkgmtntado  fer  Vautour  enu  uno  txpUcatieu  dei  mots  lei 
piMsdigkik»;MKtsMe,  i^dj  Jn-S."* 

•  Je  suis  agité*  '  Stvans, 

^  Je  sue  à  grosi^  gontteS,  «  Astis  ou  droits. 

•  Se  dépiter,  se  mettre  en  c©Jére,  *  S«ns  suite ,  sans  ixâhM; 

•  Indécis.  Mis  liront. 

?  VétiUctti:!,  *  flj  "S'en  moqueront; 


X 


4$S  CHtA>PXTI|£  XGII»' 

Ooun  caëun  quesio*  iou  suHragî , 

Fidcfe  et  sévère  inspectour 

De  la  sienço  et  de  rignourcncî, 
.    Ennemi  de  la  sufficeitci  ; 

.Vous  que  scnsojmcfquyiarie  ^ 

Boutas*^  toujours  (&  carestîc "^ 

A  toute  obro  charmante  et  beilo 

Que  ven  d'uno  boueno  cerveio  ;       '        '    *. 

V<kis  que  tratas  d'ai  cabanîc  ^«  '  f 

fit  coundanas  à  San-Laz^re  ^ , 

Tout  autour  fade,  impcrtincn. 

En  ii  laissan  pour  paBsoten  . 

'  Soun  libre  sec  »  dur  et  barbare 

Que  n'a  pas  caro  de  bouen  sen  S; 
Vous  préguî,  boiten  iectour,  de  m*c;tre  un  pau  proupid, 
De  pas  escalustra  ^  ni  trata  de  peoulllous 

De  ptureis  enfans  vargouignous, 

Que  ma  muso ,  cncaro  nouvici 

Dins  le  stiie  dei  troubadours , 

A  fa  naisjIMe  moun  caprici. 
Chagrin  despui Tong-tens  de  ies  veîre  estraiilas  ^  p 

Estrassas  ^  et  défiguras , 

Coumo  un  boueh  paire»  eme^  |usticî 
Leis  ai ,  taus  que  vesés ,  quasi  tous  assemblas , 
Per  leb  émancipa.  Puis  d*un  ton  pathétique..... 

«  Alte^ià  !  mi  dira  un  critique  ; 

»  Tu  n*es  qu'un  sot ,  qu'un  animal , 

»  De  t'escrimer  en  provençal  : 
»  Cest  un  |argon  qu'on  ne  veut  plus  entendre. 


'  ^ 


*  Dont  chacnn  quête. 

> 

•  Qui  n>  pas  rooibra  de  bêu  sent. . 

*  ians  li'sine. 

'  Effaroucher»^ 

•Mettez. 

•  Épari.  ,         t^              w       ' 

^'L'enchère. 

*  Déchirés. 

*  Sot.  ignorant. 

"Avec. 

'  Petites-maisons  4%  AJtrseiiit. 

,»■  -  -     '  '  ' 

Tome  Ut: 

E 

,v  -.  .  __:lv' 


»  Et  que  ie$  gens  de  gpût  affectent  d'ottbiîer;     ' 
«  Pour  toi  seul  aujoui^d'hui  doîs-je  m*étudier 

»  A  le  lire ,  et  même  à  Vs^pprenàre , 

»  Aiuc  dépens  de  ces.  beaux  écrits 
»  Qu'ont  produits  de  nos  jours  tant  de  rares  esprits , 
»  Et  les  laisser  moisir  au  fond  d'une  boutique  l 
»  Non ,  je  n'en  ferai  rien  ;  fe  trait  seroit  inique. 

»  D'aiifeurs,  tes  vers  ont-^iis  du  bonî    . 
a*  Es-tu  fécond  en  nouvelles  idées  l  /  ' 

»  Sais-tu  bien  assortir  ia  rime  et  la  raison  ; 
»  Au  son ,  à  rharmopie,  asservir  tes  pensées! 

»  Pour  être  un  poëte  fameux, 
»  Il  faut  avoir  du  feu^  de  la  délicatesse,   / 
»  L'esprit  sublime  et  le  génie  heureux; 
»  Manier  un  sujet  avec  art  et  noblesse,  » 

Alto-là!  cadun^  a  soun  tour. 
Moussu  lou  francillot;  caspî  ^!  que  motmùilâdo^! 
M'avés  estoufega**;  cependant  perhowiour 
Vau  répouendre  à  vpuestro  charrado^. 

Vous  mespresas  lou  prQuyf^ç4u« 

Et  même  mi  tratas  fouer  mau^  . 

De  ce  qu'auzi  n'en  faire  usa^  :  . 

Saches  que  parli  lou  lengagi 

Qu'au  brès  <  ma  maire  m'ensigna , 

Que  cade  lenguo  ^  a  sa  beouta  -, 

N'en  trobi  '  souvent  dins  la  mieouno 
Qu'un  autre,  pourrie  pas  exprima  dins  la  sieoui^oj. 
Ansin  tau  la  cres  pauro^  et  la  dis  un  jargqun. 

Que  sa  préventîen  '  es  ben  grando  ;, 

Et  soun  ourgueil  senso  resoun. 


i4i 


"•"Cftacun, 

*  Morbleu ,  peste. 

•  Verbiage ,  réprimand/?»   -, 
^  Vous  m'ave»  suffp<^ué. 

•Babil. 
'  Très-ma!» 


7     I 


'  Berceau. 

^  Chaque  iangiMw 

*  J'en  trouve. 

-4 

*  Tel  ia  croit  pMirre, 

*  Prévention, 


1 


4fii  cifAnf  Kf  tféir. 

Au  resto^  sii>0é'li  qb^tV  to  feU^o  rdtimaiidd^, 
Andeno ,  ret^tMb,  tit  tllairé  ^  itiêis^  tdis 

De  cous  [es  StSèr€tt$'khgai^ 

Deis  ourlentaû9(  Eàm^éns  ;' 
L'espaignsotr,  rifiitiéfi ,  H  (foVo W  ^ds^  suiUhtj^r , 
Tout  de  ftlkiie  <|^<à  fou  fhittcdr. 
Aqueou*  frances  dolfilt  ia^  doit^uh  VduS'  ftto , 
Qu'à  fouerso  d^4S^nnt4$!A  yéhf  beooxotimô  es  ^^ 

De  ma  lenguO  ét^Unb  sagktd'^"'; 
Lou  prou v<i%(atrsi  paHaVO féuti-c^  fèi 

Ei  coà»  d'Aïlgtetéh^  et  de^^çb'; 
En  Prouvenço  s'es  fach  l'afj^ihietb  siffîahçd 

Doou  grec>  doo»  iktSny  dbou*  gk^B» 
Es  a  qui  que ia  rimcKeti^stkdb  inVedtàéûr, 
Tanda  qu  tratar»  nta-1iétf|[ûo  de  patbB  ^ 

You  ii  farai  la  pcftkM4&: 

Mai  Mi*  ittrvs  qoë  faba  prouva 

Tout  cêifÊt  veni>  d'aVatiÇst  : 
De  provo  ivai  d«  booeriM^  et-fideHdi''r 
Sarqua  ieî ,  se  voulér;  i)>fM^ ,  estoifiasV 
Liges,  fés  coumo  aï  fktîiiV^â^^sés  dl^ ca^^dèflds , 

Et  saurés  ce  qae  sôtih^tïts. 

Quant  eis  écrits  qU^  léFphDUiia^» 
Préféra  îeis ,  es  Juste,  cfé*  fô  iî'  ùOré  artrasso**', 
S*aii  d*arno^  espoiisur-M':  càr^fau  pas  lou^  ifiar)iU!^^ 

Mi  regardi'cèmno^un  riiob!soun< 

Pmtii  tfautéûrtf  d*un^tiBfii  rtfiioun.       .  ^  ' 

Per  ce  quîrt^iftei  Vert?;  se  sbuht  d«  boucftb'il^çb; 
Vose  sont  d'aquo^fti*^,  \'dds  ri'cit'dchiandii  ttoôvà  * 

Cadun  face  que  poôUi 


*  La  langue  roimmee.  •  Tigne  qui  roil^litilivfés. 

*  Qu'on  n'a  rendu'béim'<îtfnhiie  ii  '  Fanfiinm. 
«t  qu'à  force  4Hè»p<«f;  «  MoucHwon. 

*  Rejeton.  ^  S'ils  soot  beaux, dëlicatt. 
'  Faites-leur  faire  place* 

CoaniQ 


«^ 


_  -* 


CHAPITRE   XCII.  4^j 

Coumo  vous ,  moTita  sur  d'escasso  * ,         v 

Fau  pas  loudoutour  doouPamasso; 
Ni  même  n'augi  pas  Vy  ana  cueilli  de  flous. 

Dins  mei  lezis  et  dins  meis  badinagis , . 
Ai  d'aquo  deis  enfans^  ,-aimi  proun  ieis  eimagîs; 
Tant  que  pouedi ,  ieî  fau  simple ,  risens ,  courous  ^^ 

£n  oubservant  que  ma  pinturo 

Tou)our  ressemble  à  la  naturo^ 
Anfîn  avés  proun  mangea ,  proun  bugu  ^  î 

Liges ,  si  noun  croumpa  vous  chu  *'. 

Je  Citerai  une  des  fables  de  Gros  pour  faire  con- 
noître  son  talent  dans  ce  genre ,  qui  fa  fait  appeler 
le  la  \Fontaine  marseillois  : 

FABLO. 

LEIS  DOUS   LOUPS. 

Un  jour  un  foup  vieil ,  descarna , 
Sarquavo  *  à  si  desparjuna  ^  : 
Lou  paure  diable  s'en  anavo 
Testo  souto  ^ ,  baiin  balan'. 
Et  sur  sa  vido ,  en  caminan , 
Per  enterin  mouralisavo. 
X         Qu'es  devengut ,  entr'  eou  dîsîe, 
Aqueou  ten  que  Marto  fieiavo'^î 
De  iloups  ères  iou  capoulie  * , 
Din  t'abouba  dou*"  si  gouenfïavoun  "  ; 
I  '  .      ■    i'  Il 

*  Échasses.  ,  *  Tête  baissée*  ,' 

*  J'ai  comme  les  enfans*  *  £a  se  balançant. 

*  Agréables,  ^  Ce  temps  au  Marthe  filoit ,  ce 
'  Avez  vous  assez  mangé,  assez       temps  de  prospérité, 

feu!  Ne  savez  vous  plusse  dire!  Le  chef,  caj>oraI, 

*  Ne  dites  plus  mot*  ■*  Dans  un  troupeau  de  bœoâè»    / 
'  Cherchoit.  Se  gorgeoient. 

*  A  rompre  son  jeûne* 

Tome  m,  G  g 


i66 


CHAPITRE   XCII; 

Davan  de  tu  cadan  fegie'  ; 
Avcs^ ,  t:an$*= ,  pastres ,  tous  crklaTOim: 
Vci'  àc\i  garo  lou  barban*'! 
Aro  lou  mendré  bfut  t'cstouno  ^  ; 
Uno  inoaico  Ves  un  taran^  : 
Parcns^  soch^ ,  tbut  t'abaiicbùnd» 
£t  n  as  pas  sant  aiimen  ren^i 
En  fen  a  queou  resoun&meh  ; 
Ves  ûTl  haliàn  '  de  soan  cspéço 
'  Qu*à  soun  aise  boutavo  en  péço 
Un  moutoun  gros  et  gras  à  lard. 
D'abord  la  joîo  i'cstoufeguo*' , 
Dc)s  utils  i'èmpàssoS  M  defeguo; 
Et  SI  penso  :  N'auras  ta  pdrt , 
Si  counoissen ,  sian  camarado , 
Même  autrcr  fés  i'y  ai  fa  pllsi. 
Adounc ,  em*  un  air  ioumbouri  "* 
Humbfamen  iî  fa  la  coulado. 
Et  lis  dis  :  Bouen  joui',  moun  amij» 
Fa  bouen  estre  vous  j  fés  l'ailpéri  "  i 
Quadenoun^,  lou  bel  anithaU! 
Permettes  que  n*eii  maiigi  on  paU: 
Moueri  de  fan  et, de  ntîseri^ 
Din  lou  besoun  lami  si  ve^» 
L*autre  d'un  ton  plein  de  mesprei» 
En  11  mountrah  sei  tHssaddiiiro  f^ ,        « 


fi  lÉi 


.*^)mm 


*  Chacun  fuyoit. 
1  roupcftttx* 

'  Chieas. 

*  Mot  dont  oïl  se  Ml rt  pou»  faire 
peur  aux  pctrtt  enfant  ;  coihitié  qui 
diroit  toup-garoa, 

*  A  présent  \é  tMMté  JRmk  t'é- 
tonné» 

'  Utfe  rooucfae  »tt  tm  taqn  font 
toi« 


«  AirtiS,  associes, 

^  Tli  as  niôîns  <^uê  nen, 

'  \Jn  glouton. 

^  L'étoilff*. 

'  H  le  dévore  des  y^îc, 

"  D'ort  «if  raWfjaht. 

'  Vtfutfaitwrèmpcrèùr. 

•  Diantre.  • 

'  Les  dents. 


_  »_ 


J 


CHAPITRE   XCII.  46.7 

Li  respouende  :  Que  tant  d'ami  î 
Qu  sies ,  vileno  rato-souiro  '  î 
Anen ,  sus,  parte',  crese  mi; 
Qu*hôrs  d*aqud  ti  iéVi  la  fédX)K 
'  Lou  misérable,  ben  surpres , 

Va  si  6êt  pas  di^e  doues  fe&i  v 

La  quoue  basso,  grate  pinedo^ 
En  rémoumian  ^  ;  Aquo  es  fini, 
La  pauvreta  n  a  ges  d'ami. 

.  Arles  a  encore  produit  quelques  bons  poètes,  tels 
que  Darlatan  ,  Jean -Baptiste  Coye ,  dont  je  ferai 
bientôt  mention  en  parlant  des  hommes  célèbres  qui 
lui  doivent  k  naissance. 


*  ViUine  chuute-seuris.  '  JI  gftgn%  le  bois. 

*  Sans  quoi  je  t'ôle  la  vie.  ^  En  marmblant. 


V 


Gg   »' 


»• 


46» 


CHAPITRE    XCIII. 


Navigation  deTarascon  à  Arles.  —  Provençalismes 
et  Gasconismes^  —  Langue  provençale,  —  Proverbes, 

JLj£  bateau  qui  nous  conduisoît  à  Arles  y  avoit  le  vent 
contraire;  ce  qui' retarda  beaucoup  notre  marche: 
nous  eûmes  tout  le  temps  d'examiner  le  magnifique 
effet  que  produisent  le  beau  château  de  Tarascon, 
Beaucaire,  et  fes  riches  campagnes  cultivées  en  blé 
qui  bordent  les  rives  du  Rhône 

La  barque  qui  nous  conduisoît ,  étoit  remplie  de 
passagers  q^i  venoient  comme  nous  de  Beaucaire,  ou 
des  diverses  parties  de  la  Provence ,  pour  se  rendre 
par  Arles  dans  les  différentes  villes  qui  bordent 
Tétang  de  Berre  ou  dans  ia  Camargue.  Bientôt  la 
conversation  s'établit  :  —  Combien  y  a-t-ii ,  dît  Tun 
d'eux  à  un  petit  homme  sec  qui  étoit  dans  un 
coin ,  que  vous  manque:^  de  Marseille  (  i  )  î  —  Trois 
semaines  ;  j'ai  été  en  Avignon^  du  depuis  à  Beaucaire  ^ 
et  )e  vas  à  Arles.  —  Comme  vous  voilà  fait  !  — 
On  m'a  marché  dessus ,  et  mon  habit  est  tout  péri  (2). 
—  Vous  étiez   indisposé  lorsque  je  vous   vis  à 


(1)  Que  vous  avez  quitté  Marseille, 


I 
\ 


I        1^»     m 


CHAPITRE   XCill.  ^6p 

Marseille.  —  J'ai  eu  en  effet  là  rhume  et  f  ai  mouché 
pendant  plus  de  trois  semaines  ;  outre  cela ,  f  avois  ïa 
joue  enfie.  —  Et  madame  votre  espouset — Elle  est 
^encore  malade;  tous  les  deux  jours  elle  espère  [i)  la 
jfièvre  :  mais  faî  fait  une  consulte  de  médecins ,  et  ils 
assurent  que  si  je  lui  donne  encore  le  quinquina  et 
trois  purges {2) ,  je  risque {'i)  qu'elle  guérisse  bientôt* 
Vous  avez  là  une  jolie  petite  fille,  dis- je  à  une 
grosse  femme  qui  étoit  près  tlu  patron;  elle  vous 
ressemble  beaucoup,  —  Oui,  monsieur,  chacun  dît 
îgu'elle  me  dorme  de  Vair  (4).  —  En  avez-^vous  d'autres  \ 
• —  Hélas  !  oui ,  j'ai  encore  deux  filles  et  un  enfant  (  5  f. 
—  Est-il  avancé  î  —  Vous  demandez  sans  doute  s'il 
a  d'esprit  (6)  !  —  Oui.  —  Quoiqu'il  n'ait  que  douze 
uns  d'âge,  il  sait  déjà  bien  lachiffire  (7)  :  mais  c'est  uh 
démon  ;  au  plus  on  lui  défend  une  chose ,  au  plus  (8) 
il  la  fait  :  cependant  je  l'aime ,  et  je  lui  rappdrtede 
beaux  images  (9).  —  Cette  jeune  personne  vêtue 
en  noir  n'est  probablement  pas  une  de  vos  filles  \  — 
Non ,  je  suis  sa  marâtre  (10);  elle  porte  le  deuil  d'un 

(  I  )  Attend.  (  5  )  Un  garçon* 

(1)  Médecines.  (6)  S'il  adercsprît. 

(3)  Je  puis  espérer,  (7)  L'arithmétique. 

(4)  Elle  a  de  mon  air.  (8)  Plus. 

(9)  Les  Provençaux  confondent  souvent  les  genres  ^  ifs  disent» 
V huile  est  bon;  voilà  de  beaux  oranges,  &c.  Cela  vient  peut-être  de 
ce  que  dans  leur  dialecte  les  mots  n*ont  point  une  terminaison 
distincte  pour  le  masculin  et  le  féminin. 

(10)  Sa  belle-mère»  > 

Gg3 


^yo  CHAPÏTRJÇ    XCïfl. 

oncle  qui  lui  a  laissé  un  bon  légat  (  i }  :  et  c'est  bien 
heureux  qu'elle  soit  riche  ;  car  de  i'humeur  qu'fllc 
est  (2) ,  eiie  ne  se  fera  pas  aimer...  Aussitôt  la  bonne 
femme  s'adressa  à  elle:  Rouseun  (3),  veux- tu  man^ 
ger  de  ce  gâteau  !  —  Au  contraire,  —  Et  pourquoi  l 
—  C'est  qu'il  n'est  pas  tentatif[i).  —  Et  toi,  Gou- 
thoun  { 5  )  î  (  Celle-ci  ne  se  fit  pas  prier  deux  fois.  )  — 
Pouvez  vous  me  dire,  ajoutai-je ,  quel  est  ce  monsieur 
qui  a  une  jambe  de  bois  !  —  C'est  un  ancien  roarin 
très^famé  (6)  ;  mais ,  quoiqu'il  manque  d'une  jamte, 
il  n'en  va  pas  moins  bien  :  on  n'aura  pas  plutôt  mi$ 
l'attache  (7),  que  vous  lui  verrez  monter  le/  degrés  (8) 
du  port  de  quatre  en  quatre  (9). 

Alors  celui *ci  s'approcha  de  moi;  il  me  demanda  si 
l'a  vois  souventefois  été  à  Arles.  — ^  Jamais,  moiisieun 
Et  vous  !  "-^  Je  ne  fais  qu'y  passer ,  mais  j!y  ai  resté 
autrefois  (10):  c'est  une  jolie  yille.  Il  me  paroît  quç 
vous  êtes  amateur  :  vous  y  verrez  beaucoup  de  belles 
tstatues  (11).  —  Je  serai  charmé  de.pouvoir  y  faire 
votre  connoissance.  —  Je  suis  désespéré  de  ne  pou- 
voir la  cultiver  ;  mais  demain  je  vais  de  de  là  dans 
la  Camargue,  —  C'est  un  beau  pays ,  et  je  compte 


(i)  Un  bon  legs. 

(2)  Donteife  est. 

(3)  Rose. 

(4)  Tentant. 

(5)  Gothon,  Marguerite, 

(6)  Renommé. 


(7]  Attaché  Id  eordt  du  bateau. 

(8)  Ucscaiier. 

(9)  Quatre  à  quatrcu 

(10)  J'y  ai  demeuré. 

(11)  Statues. 


\ 


CHAPITRE    xciii;  45^1^ 

1^  visiter  en  cpiittant  Arles,  r^-r  Vous  venez  comme 
moi  de  de  Va  de  Beaucaire  :  htfoîre  étoit  si  pleine ,  que 
tout  le  monde  n'y  pouvoit  contenir;  H  y  eh  âvbit 
juisque  sur.  le  couvert  fies  maisons.  La  pluie  a  été  si 
froide,  qu'on  aurait  cru  qu'il  ^lloit  glacer;  mais  dans 
ce  temps  nous  aurons  plutôt  de  pluie  que  de,  neige, 
et  cela  n'est  pas  fini.  ~  Peut-être.  —  Oui,  it 
chauffe  (i)  à  présent:  que  voulez- vous /ow^r  (2)  qu*il 
tombera  encore  de  Veauî  Pour  moi,  fétois  si  trempe  i 
qp'U  m* a  fallu  mt  changer  de  linge;  et  quoique  fa 
sois  bien  hourri  (3  ) ,  je  %»i\^  que  f  ai  b^esoin  de  trans- 
pirer :  aussi  je  me  ferai  mettre  cette  nuit  une  bonne 
couverte f  -rr  Nous  arrivons ,  ainsi  vous  serez  bientôt 
chez  VQijis.  — r  J'ycourirai  bien  fort.  Ciel!  —  Qu%- 
vez-YOUSÎ  ~-  J'ai  tomiém^.  canne.  —  Le  courant 
l'emporte,  -r-  C'est  un  petit  malheur.  Adieu ,  mon-* 
?ieur;  si  je  vous  retrouve  de  de  là,  j'en  serai  diarmé: 
on  m'attend  ^  et  je  sub  sûr  que  la  soupe  est  à  table. 
Ces  provençalismes  sont  extrj^memeât  fté^ens  \ 
même  parmi  des  gens  qui  ont  reçu  quelque  éducar 
tion  et  qui  ont  fait  des  études.  On  peut  également 
aus$i  leur  donner  le  nom  de  g4fconi)mes  ;  car  la  plur 
part  se  retrouvent  encore  dans  h  Iai?gage  habituel 
d'une  grande  partie  des  babitaiis  du  midi  (4).  Ces 


(i)  It  fait  chaud.       (i)  Parier.  {3)  Vêtu. 

(4)  Ainsi  qu'on  peut  le  voir  dans  Touvrage  très-utile  de  M.  PEsf- 
GBS)UAJ3,  imituI4  iêSJG^0Hismi^C£lirig/si  i^f^f,  in-^." 

Gg  4 


I  '     '  * 


ÎJ*S*» 


4?^  CHAPITRE    XCIIi; 

locutions  ne  sont  pas  une  suite  de  l'ignorance  des 
règles  de  la  langue  française;  elles  viennent  de  l'ha- 
bitude de  parler  la  langue  du  pays.  Le  peuple  de  la 
Provence  ou  du  Languedoc  sait  presque  généralement 
le  français  ;  mais  il  se  plaît  à  parler  le  provençal  ou 
le  languedocien  :  les  enfans  l'apprennent  dès  le  ber- 
ceau comme  leur  langue  maternelle;  ils  le  parient 
avec  tous  ceux  qui  les  entourent  ;  et  les  hommes  que 
les  circonstances  ont  conduits  dans  des  contrées  éloi- 
gnées ,  ahnent  à  employer  un  idiome  qui  leur  rappelle 
leurs  premiers  plaisirs  et  le  lieu  qui  les  a  vus  naître; 
souvenirs  qui  ne  s'effacent  jamais*  Qu'un  habitant 
du  midi  de  la  France  en  rencontre  un  autre  k  Paris, 
à  Londres ,  à  Pétersbourg ,  à  la  Chine ,  aussitôt  vous 
eii pendrez ,  qu'es  aqueou!  &c»  vous  les  verrez  se  cher- 
cher ,  et  se  livrer  au  plaisir  de  parler  la  langue  de  leur 
pays.  Les  expressions  incorrectes  ou  vicieuses  qui 
échappent  aux  Provençaux  lorsqu'ils  parient  fran- 
çais,  ne  sont  donc  que  des  traductions  littérales  d'ex- 
pressions analogues  consacrées  dans  leur  propre  dia- 
lecte; c'est  ainsi  quun  Angiois  et  un  Allemand  qui 
poSiSèdent  notre  langue,  ont  peine  à  la  parler  sans 
y  introduire  quelques  idiotismes  de  la  leur. 

Ceci  me  conduit  à  dire  quelques  mots  de  la  langue 

#  provençale.  L'ancienne  langue  française  reçut  le  nom 

de  romane^  parce  qu'elle  conservoit  beaucoup  d'ex* 

pressions  de  la  langue  des  Romains,  à  laquelle  elle 

avoit  succédé  4ans  l'usage  vulgaire  ;  elle  prit  des 


> 


_J 


CHAPITRE  XCIIÏ.  475 

caractères  difFérens ,  selon  les  conquérans  qui  vinrent 
y  mêler  la  leur  :  ce  furent  les  Francs  au  nord  ;  au 
midi,  les  Ostrogoths,  les  Visîgoths,  les  Sarrasins  et 
les  Alains.  II  se  forma  ainsi  deux  langues  nouvelles 
qui  se  partagèrent  la  France  :  on  se  servit ,  pour  les 
désigner,  de  la  manière  dont  les  uns  et  les  autres 
exprimoient  le  mot  oui  ;  toute  la  partie  en-deçà  de  la 
Loire  se  servoit  du  mot  o!l;  toute  la  partie  qui  étoît 
au-delà  employoît  le  mot  oc:  dès-lors  on  appela  Tune 
langue  d[oil ,  l'autre  langue  d'oc  (i).  Comme  Ray- 
mond IV  Bérenger  possédoit  en  outre  une  grande 
partie  de  la  Gothie  et  de  l'Aquitaine,  on  désigna 
tous  ses  états  par  le  nom  de  Provence ,  et  l'on  appela 
provençal  la  langue  commune  qu'on  y  piirloit.  C'est 
pourquoi  les  anciens  poètes  provençaux  ne  sont  pas 
seulement  ceux  qui  ont^vécu  dans  les  lieux  situés 
entre  le  Rhône  et  le  Var  ;  on  donne  encore  ce  nom 
\Sl  tous  ceux  de  nos  provinces  méridionales  :  on  y 
compte  même  des  Italiens,  des  Catalans,  des  Arra- 
gonois.  De  cent  poètes  provençaux ,  il  y  en  a  tout 
au  plus  un  tiers  qui  appartient  à  la  Provence  pro- 
prement dite. 


(i)  K^^^Lacurne  de  Sainte-Palaye  ,  Remarques  sur  U 
langue  française  des  XI 1/  et  X I II ,*  siècles ,  comparée  avec  les  îan^ 
gués  provençale ,  italienne  et  espagnole ,  dans  les  mêmes  siècles.  Acadé- 
mie des  bcHes-Iettres ,  XXIV,  6ji.  —  Dissertation  sur  l'origine 
et  les  progrès  de  la  langue  provençale»  Papon  ,  Hist.  de  Provence ,  If, 

45}- 


/ 


474  CHAPITRE   XCIU. 

La  langue  provençale  s'est  formée  des  difTérens 
idiomes  des  peuples  qui  ont  successivement  habité  ces 
contrées  { i  )  :  c'est  donc  un  mélange  de  mots  grecs , 


M    ■' 


(i)  Voici  quelques  morceaux»  tirc$  des  archives  d* Arles,  qui 
m'ont  été  communiqués  par  M,  Véran,  notaire,  et  qui  peuvent 
faire  voir  et  que  la  langue  provençale  a  été  à  différentes  époques. 
Le  premier  est  un  Hommage  (ie  Stéphanie  et  de  Bertrand  à  Rajam." 
baud,  archevêque  d'Arles  de  lop  à  1062  ; 

Austu ,  Raimbaf  jilius  astrebure  !  ego  i\on  vos  toirai  lo  castel 
d'Aibaron ,  lo  bastiment  que  factus  est  et  in  anten  foetus  erit,  per 
nomen  de  castel.  Ego  nec  homo  necftmina  per  meum  consilium ,  nec 
per  meum  consentement  in  nullo  ingenio ,  ad  istam  tuam  garJam,  Id 
ettmartii,  aprilis,  maii,junii,  julii ,  augusti.  Si  talem  forfactum 
nonfacias  de  toire  civitat  aut  castel;  que  usdir  non  pogues,  aut 
emendar  de  son  aver  non  voîgues  \ 

Le  sens  paroit  être  :  «  Entends-tu ,  Rajambaud  \  je  ne  t'cn- 
»  lèverai  jamais  le  château  d*Albaron  (  terroir  d'Arles  ) ,  ni  le 
«bâtiment  qui  y  est  construit  «  ni  celui  là  y  construire ,  sous  le 
»  nom  de  château.  Je  ne  consentirai  jamais  à  ce  qu'aucun  homme 
»  ou  femme  t'offense  d'aucune  manière,  à  moms  que  tu  ne  t'avi- 
»  sassesde  t*emparer  de  la  ville  ou  du  château.  Si  tu  commettoiîs  un 
»  pareil  forfait,  puisses-tu  perdre  l'ouïe  et  être  dans  l'impuissance 
»  d'amender  quelqu'un  dans  %€%  biens  ou  dans  son  avçîr  f  » 

Le  second  titre  est  de  1 1 90  : 

Coneguda  causa  sia  atrostots  aquels  que  ison  adavenir,  son  qu'eu 
Bertrans  Guillem  dom  a  Deu ,  et  dis  paupres  de  Jhrussalem ,  et  ah 
fraires  de  la  maison  de  Saint-Thomas t  et  ad  aquels  que  i  son  vi  son 
adavenir,  de  bon  cor  et  de  bonna  volontat,  tût  aquo  qu'eu  ai  vi  dei  aver 
al  tor  d'Ànsorie ,  en  la  man  deu  G.  Baisle,  maistre  de  la  maison^ 
Aquis  son  garautias ,  ire.  Arnauts  de  Trencatallas,  Aquest  don  fou 
faig  en  lagleisa  de  Sant-Thomas,  al  mes  de  mai,  amio  ab  incarna* 
tione  Domini  1 1 90  {  MCXC  ). 

«  Sachent  tous  présens  et  avenir  qu«  Bertrand  Guiflem  donrwe 


f 


CHAPITRE   XCIU.  4?) 

hitins /allemands y  arabes ,  espagnols,  italiens,  et 

»  à  Dieu,  aux  pauvres  de  Jérusalem  et  aux  frères  de  la  maîsoi^ 
»  de  Saint-Thomas, présens  et  à  venir,  de  bon  cœur  et  de  bonne 
»  volonté,  tout  ce  qu*i!  a  ou  doit  avoir  autour  d*Ansorîc,  entre 
»  les  mains  de  G.  Baîfe,  maître  de  cette  maison.  Les  garans 
n  sont,  ^c.  AmajLid  de  Trinquetailie.  Ce  don  fut  fait  en  l*égli$« 
»  de  Saint-Thomas ,  au  mois  de-mai  1 190.  » 

Le  morceau  suivant  est  extrait  des  notes  de  Bertrand  BoviSSET, 
écrivain  d'Arles  au  XIV.*^  siecie  ;  mémoires  dont  i'originai  s*est 
perdu  pendant  la  révolution. 

« 

Quant  Joan  deBetiiafou  cinat. 

L'an  i^8p ,  lojom  X  dtjonoyer^  lo  rtyt  de  Frnnsa  son  cos  propri 
fes  cremesar,  maistre  Jo,  de  Beti^c ,  à  Toîoia,  quar  disqueera  erege. 
Item  sapras  que  lo  rey  volîé que  Jo,  de  Bethac perdlfs  la  testa,  e  Jo»  de 
Betijac  ausi  que  la  testa  dévié  perdre,  respondet  al  rey  qu'el  avu  agut 
d*una  Ju^evados  enfans,  et  que  eyrege  era,  e  lajusticiapertenie  à 
l'enqveredor ,  et  non  al  rey.  Item  lo  rey,  ausi  aquestas paraulas  desohre^ 
dig  Jo,  de  Beti^ac,  e  comandet,  vistas  las  presens  qiiefos  arts  cremat: 
et  aysinsfou  fag  lo  rey  présens. 

Quand  Jean  de  Bétizat  fut  p^é. 

«  L'an  1389,  le  10  janvier,  le  roî  de  France  fit  brûler  son 
»  propre  cousin,  M.^  Jean  de  Bétizat,  à  Toulouse,  sur  ce  qu'il 
»  dit  qu'il  étoit  hérétique*  Le  roi  voufoit  qu'on  lui  tranchât  la 
»  tête  ;  ce  qu'entendu  par  Bétizat,  il  répondit  au  roi  qu'ayant  eu 

V  deux  enfans  d'une  Juive,  il  étoit  hérétique,  et  qu'en  consé- 
»  quence  il  étoit  justiciable  de  l'inquisiteur,  et  non  du  roi.  Ce  sou- 

V  verain,  ayant  «ntendu  les  paroles  dudit  Bétizat  «  ordonna  de 
»  suite  qu'il  fût  brûlé  sur-ie-cbaipp ;  ce  qui  fut  ainsi  fait,  le  roi 
»  présent.  » 

Ce  dernier  article  est  extrait  des  ^âpituts  de  \%  yilie  d'AH^s , 

annéci454: 

Toutes  femmes  publiques,  putan,  catoniere',  ou  tenen  tnalo  vido  e$ 


■M 


/ 


^j6  CHAPITRE    XCiri. 

de  français  moderne  (  i  ).  Elle  s'est  fort  altérée  depuis 
deux  siècles  par  l'admission  de  beaucoup  de  mots 
'  étrangers  :  c'est  dans  les  montagnes  qu  elle  a  con- 
servé le  plus  de  pureté.  Ces  variations  successives  de 
ridjome  provençal  ont  amené  de  grandes  différences 
dans  la  manière  de  le  parler  :  ces  différences  se  font 
sur- tout  sentira  Marseille,  à  Toulon ^et  dans  le  pays 
Venaissin.  Les  habitans  d'Arles  y  mêlent  beaucoup 
de  languedocien. 

On  peut  se  faire  une  idée  de  la  langue  écrite 
des  Provençaux  par  les  morceaux  que  j'ai  cités  (2)  ; 
l'ajouterai  ici  quelques  proverbes  pour  faire  connortre 
leur  langage  vulgaire  (  5  )  : 


inhoneste,  df  mourant  en  carrière  de  las  femmes  de  hen ,  que  porte  man- 
tel,  vel en  la  testa,  subre  son  col  ou  esf ailes ,  hoplecho ,  garlandes  ou 
aunel  d*or  ou  d* argent ,  ste  condamnade  per  chascune  cause  en  jo  sots 
toronas  et  en  perdamen  de  las  causas  susdicAes, 

«  Toute  femme  publique ,  de  mauvaises  mœurs ,  aifant  la  nuit  par 
»  les  rues  (  catonière  ) ,  ou  tenant  mauvaise  vie  et  malhonnête , 
3»  demeurant  dan5  une  rue  habitée  par  des  femmes  de  bien  >  qui  sera 
»  trouvée  portant  manteau,  voile  sur  la  tête,  sur  le  cou  ou  sur 
3»  les  épaules,  capuchon, guirlandes  ou  anneaux  d*or  ou  d'argent , 
»  sera  amendée  de  cinquante  sous  couronnés  pour  chacun  de  ces 
»  objets ,  et  la  perte  d'iceux.  » 

(î)  Dictionnaire  provençal ,  par  le  P.  Sauveur^ André  Vï.LLkS, 
religieux  minime,  Avignon,  17^  J ,  in-4.® —  Vocabulaire  provençal , 
Marseille^  "785  >  deux  vol.  in-4.® 

(2)  Suprà,  pages  459  J^uiv. 

(3)  J'ai  cité  plus  haut,  page  456,  un  recueil  trcs-ctcndu  de 
proverbes  provençaux* 


/ 


CHAPITRE   XCIII.  lijj 

Pan  fiesc ,  proun  Jiîlos  et  boutsc  vtrd,  meùoun  ieou 
Ihousteau  en  désert.  Du  pain  frais ,  beaucoup  de  filles 
et  du  bois  vert,  mettent  bientôt  ia  maison  au  dé- 
sert (i).  —  £r  inquiet  coumo  un  cristeri.  Il  tourmente 
comme,  tm  lavement.  —  De  chins ,  d* armes  et  d^a- 
mours , per  ounplésir  milledoulours.  De  chiens ,  d'armes 
et  d'amours  ,  pour  un  plaisir  mille  douleurs.  — 
Qua  ben  dinat,  creis  leis  autreis  sadouls.  Qui  a  bien 
dîné,  croit  les  autres  rassasiés,  —  Lauso  la  mar,  ten  ti 
a  terro.  Fais  Téloge  de  la  mer ,  et  tiens-toi  à  terre. —  . 
Quofiu  tro  tirou.fais  dous  bouts.  Qui  tire  trop  h\i  deux 
bouts.  —  Jouine  chivaou  vieil  maquignoun.  A  jeune 
cheval  vieux  maquignon  (2).  —  Es  plus  proche  la 
car  qut  la  camisou,  La  chair  est  plus  proche  que  la 
chemise  (3).  —  Quu  voou  en  tau  tas  peiros  soun  coùtéou 
dgw^ar,  en  tout  roumavagi  safremo  menar,  et  en  toutos 
aiguos  soun  chivau  abeourrar,  oau  bout  de  l'an  n'a 
qu'uno  coutelo ,  nno  putan ,  et  uno  haridello.  Celui  qui 
va  aiguiser  son  couteau  sur  toutes  les  pierres ,  qui 
cc^dult  sa  femme  à  toutes  les  foires,  et  fait  abreuver 
son  cheval  à  tous  les  ruisseaux,  n'a  au  bout  de  l'an 
qu'un  méchant  couteau ,  une  femme  de  m^iuvaise 
vie  et  une.haridelle. 

L'âne  est  le  sujet  d'une  foule  de  proverbes  :  Lavas 


«M 


(  I  ) .  Sont  la  ruine  d*une  maison. 
(a)  Pour  le  dresser. 

(3)  Cest-à-dire  qu'il  vaut  mieux  rendre  service  à  un  ])arent 
^u*à  un  indif^r^snt. 


478  CHAPITRE     XCIIl. 

la  testa  à  Vay ,  escampas  lou  Ussitou.  A  laver  la  tête 
d'dn  âne ,  on  perd  sa  lessive,  —  A  bouen  yarletaureillos 
d'a^e.  À  bon  valet,  oreilles  d'âne;  c'est-à-dire  qu'un 
bon  valet  doit  écouter  les  injures  patiemment.  — 
Es  coumd  ra-^e  de  capiton ,  suses  quand  vies  venir  lou  bastt 
II  est  comme  l'âne  du  chapitre  ^  il  sue  quand  il  voit 
venir  le  bât.  —  L*ay  qu'a  doues  mtstres  la  quBuelipeh. 
L'âne  qui  a  deux  maîtres ,  la  queue  lui  pèle  ;  c^est^ 
à-dire  qu'il  a  beaucoup  k  souffrir^  -^^  Fa  coumo  aqueou 
que  sercdvo  soun  ay  et  Veiro  dessus^  II  fait  comme 
celui  qui  cherchoit  son  âxie  pendant  qu'il  étôit 
dessus. 

Les  expressions  proverbiales  relatives  aux  fômmés 
ne  respirent  pas  toujours  cette  antique  galanterie 
dont  la  Provence  a  été  le  séjour  :  mais  les  hommes 
qui  se  plaignent  des  femmes ,  sont,  en  général ,  ceux 
qui  les  aiment  lë  plus.  Les  Provençaux  disent ,  il  est 
vrai^  que,  se  n'ero  pas  les  fremos ^  Itis  homes  strim 
d'ours  mau  lipais  [  s'il  n'y  avoit  pas  de  femmes,  les 
hommes  seroient  des  ours  mal  léchés]  ;  mais  ils  £sent 
aussi,  qui  perde  sa  fremo  eme  quinze  soùs,  es  grand 
doumagi  de  l'argent  [  qui  perd  sa  femme  et  quinze 
sous,  la  plus  grande  perte  c'est  l'argent  ].  Les  pro- 
verbes suivans  sur  les  femmes  et  les  filles  sont  tJ-ès- 
connus  :  Amour  de  courtisan  ,  ben  de  vielan  et  fé  de 
fumelo ,  noun  duroun  pas  passât  un  an.  Amour  dé  cour- 
tisan ,  générosité  de  vilain  et  fidélité  de  femme ,  ne 
durent  pas  plus  d'un  an,  —  Ombra  d'home  vau  cm 


CHAPITRE    XCIII.  47î> 

Jknfos.  L'ombre  cfun  horiimé  Vaut  tènt  femmes.  — 
Fdlio  que  pren ,  se  rende  vo  se  vende.  Fille  qui  prend ,  se 
rend  ou  se  vend. —  Fil/io  troutiero  et  fenestriero ,  rare- 
ment boueno  menagïero.  Fille  qu'on  voit  souvent  à  la 
promenade  ou  à  la  fenêtre,  est  rarement  bonne  ména- 
gère. —  Afouilhe  di  marinier,  ni  maridado  ni  muech. 
Femme  de  marin  ,  ni  mariée  ni  fille. 

Celui  qui  a  fait  le  proverbe  suivant  n'avoit  pias  à  se 
louer  du  mariage  :  Doues  bouens  jours  à  l'home  sur 
terro,  quand  prend  mouilhe  et  quand  Venterro  [L'homme 
a  deux  bons  jourô  sur  terre,  quand  îl  prend  une 
femme  et  quand  il  l'enterre  ].  ÏI  est  vrai  que  celui-ci 
ne  prouve  pas  que  les  femmes  aient  plus  à  se  louer 
de  leurs  maris  :  Se  unomarlusso  venie  veousop  série 
grasso  [  Si  une  merluche  devenoit  veuve ,  elle  en- 
graisseroit]  (i). 


X 


4So 


CHAPITRE  XCIV. 

Arles.  —  Histoire.  —  Place  du  Marché.  —  Obélisque. 
—  Placé  de  la  Cour.  —  Maison  commune.  —  Vesti- 
bule. —  Inscriptions.  —  Escalier.  —  Vénus,  Médée, 
Mithras.  —  Autel  de  la  bonne  déesse.  —  Colonne 
milliaire.  —  Inscriptions. 

C^ETTE  ville,  dont  les  rues  désertes  sont  si  tristes 
et  si  étroites,  est-elle  bien  l'antique  cité  d'Arles,  ri- 
vale de  Marseille ,  et  chef-lieu  d'un  royaume  étendu 
et  puissant  î  Son  état  actuel  annonce  une  extrême 
décadence  :  mais  les  Tnonumens  nombreux  qu'elle 
renferme  attestent  le  rôle  éminent  qu'elle  a  joué  ;  on 
voit  qu'elle  a  été  embellie  par  un  grand  peuple  et 
habitée  par  des  rois  (  i  ) . 

Si  l'on  admettoît  ces  origines  fabuleuses  dont  les 
villes  antiques  et  opulentes  ont  cherché  à  relever  leur 
histoire,  Arles  auroit  été  fondée  par  un  roi  celte 


(i)  On  peut  consulter,  pour  l'histoire  d*ArIcs ,  Discours  pané" 
gyrique  de  la  ville  d'Arles,  prononcé  le  2/  avril  z/^^,  avec  des  re- 
marques historiques  servant  à  V histoire  de  cette  ville  ,ipzx  \t  P.  Fabre, 
deTarascon  ;  —  Pontificat  de  F  église  d'Arles,  par  Saxi,  chanoine, 
imprimé  à  Aix  en  1 629  ,  m-4.°  j  —  Histoire  de  l'église  d'Arles,  par 
DUPORT ,  chanoine;  Paris ,  1 690 ,  in- 8.**  ;— :  Ro^ak  Couronne  des 
rois  d* Arles, \>2it  BoviS,  peintre;  Avignon,  1^48, in-8.";  —  l'An^ 
cienneté d'Arles  et  sa  république,  par  AnIBERT,  17791  in-8.®;  — 
plusieurs  ouvrages  manuscrits  <}ui  m'ont  été  utiles* 

nommé 


CHAPITRE    X<}JV.  4Bt 

pommé  Arulus ,  qpi  lui  .auroit  dominé  son  pom  :  mais 
rexîstence  de  cet  Arulus  est  chiitiériqae ,  et  Ton  n$ 
t^peut  rien  savoir  de  certain  sur  cette  ville  avant  Iç 
fçtnp^  de  César  (i.) ,.  qui  ep  a  je  premier  fait  men* 
jion,  en  parlant  des^g^fêrfes  qu'il  y  fit  construne  pour 
fpumettre  Marseille,  II  es^  probable  qu'à  cette  époque 
i^ç  voulut  humitîer  yne  vîUe  rivale,  et  que  lès  Ro- 
m^ps  profitèrent, habilement  de  cette  jalousie  pour 
les  soumettre  toutes  deux.  Arles  acquit  par  ses  ser- 
vices la  protection  des  Romains,  qui  relevèrent  au 
rang  de  colonie  :  elle  est  désignée  dans  les  inscrip- 
tions par  différens  surnoms.  Elle  devint  sur-tout  puis- 
sante au  III.*  siècle  :  il  y  avoit  un  trésor,  et  l'on  y 
fi'appoit  des  monnoies.  Constantin  lui  donna  son 
nom  ;  il  y  demeura  long-temps  ;  il  y  plaça  le  siégé 
de  la  préfecture  des  Ga^les  (2).  Cette  ville  fiit,  dans 
ie  V.^  siècle,  prise  par  Constantius  III  ;  assiégée 
plusieurs  fois  par  Théodoric  I.*',  roi  des  Visigoths, 
et  par  son  fils.  Les  Francs,  les  Goths  et  les  Sarrasins 
Font  successivement  ravagée  :  ceux-ci  la. détruisirent 
presque  entièrement.  Après  l'occupation  entière  de  la 

Gaule  par  la  nation  germanique ,  la  Provence  forma , 

——————  '         iiii  ■  ■  «i.^— — ■— ——    I  ——————i— —.—.—. 

(i)  DeBeliocipill,l,^6. 

(2)  SaxH  Pontif,  Arelat,  65,  lîgn.  7,  dans  la  dissertation  într- 
tuiée.  En  quel  temps  le  siège  du  préfet  des  Gaules  fut  transféré  de 
Trkves  à  Atllesr;  et  Hist,  du  Languedoc ,  par  DD.  DE-Vic  et  Va^is- 
SETTE,  1. 1.*^',  note  48.  On  établit  que  ce  siège  fut  transféré  de 
Trêves  à  Arles  par  Constantinîen  II,  en  391  ;  mais  ie  passage 
cite  par  Saxy  dément  cette  opinion.  * 

Tome  III .  H  h 


'V 


\ 


r 


482  CHAt>ITRE    XCiVé 

depuis  8  5  5 ,  un  royaume  particulier  ^  qui  fin  fèaxA 
en  93 3 >  p^  Rodolphe  II y  à  celui  de  I9  Bourgogne 
transjuiane  (  1  )  ;  M  s'étendoit  depuis  fembouchuxe 
du  Rhâne  -jusqu'au  mont  Jura.  Ce  prince ,  ^on  fils 
Conraa  II  et  Rodolphe  III ,  se  nommoient  dans 
les  titres  »  tantôt  rais  de  Bottrgogne ,  tantôt  r(HS  de 
Vienne  ou  d'Arles^  tantôt  rois  de  Provence  et  d'Ah^ 
mamie  (2).   Plusieurs  provinces  de  ce  r<^amne 

(i)  Voyez  Carte  Je  l'ancien  j^ ou  premier  J  royaume  de  Bourgognes 
—  Le  royaume  de  Bourgogne  et  d'Arles,  par  P.  Du  VAL;  Pans^ 
\6ji  t  ^6jj,  ^684,  m-fol.  —  Z^  royaume  d' Arles  t  par  Gérard 
Mercator  ;  Amsterdam ,  1609 ,  1^13,  în-foî,  —  Guyenne,  ou 
Aquitania  [  et  regnum  Arelaiense  ] ,  pcr  Gerardum  Merc ATOREM  ; 
Duysbargi,  hi-fol.  — -  Dis^rtation  sur  l'étendue  du  second  royaume 
de  Provence ,  dit  le  royaume  de  Boson  (ou  d'ArJesJ,  formé  des  dehis 
de  Vancien  royaume  de  Bourgogne;  par  D.  PLANCHER  ,  dans  son 
Histoire  de  Bourgogne ,  1. 1.*^',  p,  4^3-470 >  Dijon,  1739,  in-foï. 

(1)  Aiphonsi  Del-Bene  de  reg^o  Burgundiœ  Transjurana  et  Are' 
lotis;  I^ugd.  1602,  in-4.**  —  Histoire  du  troisième  et  quatrième^ 
royaume  de  Bourgogne  (  ou  d'Arles)  •  vcryci  Histoire  des  Séquaneis 
et  de  Franche-Comté,  par  DUNOD ,  t.  II ,  p.  83.  —  Chronologie  his- 
torique des  rois  de  Provence  et  d'Arles ,  par  D.  Clément  :  voyez 
i'Art  de  vérifier  les  dates;  Paris ,  1770,  p.  661.  —  KOCH ,  Taàleau 
chronologique  des  révolutions  de  l'Europe,  tableau  LXXX  VL  — L^  royale 
couronne  d  Arles,  eu  l'Histoire  de  l'ancien  royaume  d'Arles,  enrichie 
de  r  Histoire  des  empereurs  romains  ,  des  rois  des  Goths ,  des  rois  de 
France^  qui  ont  résidé  dans  sou  enclos  ,  par  Jean-Bapùste  BoYYS; 
Avignon,  1641,  in-4.®  —  Joh,  Strauchii  Tractatus  de  regno 
Arelatensi;  •Ie;iae,  1 674,  ^1-4.**  — Simonis  Fred,  Hahnii  Dissertati9 
historica  de  Justis  Burgundici  novi  vel  Arelatensis  regni  Umitibus,  et  de 
relictione  ejus  Rudulpho  I  HabsbUrglcû  perperàm  adscripta;  Halas 
iVlagdcb.  171 6 ,  iii-4,* 


CHAPITRE   XCIV*  483 

*  passèrent  successWement  à  la  France ,  et  la  Provence 
eut  des  comtes  pâyticttliérs.  Vers  le  xn/  siècle,'  les 
villes  qui  avo&eot  quelque  puissance  se  soulevèrent 
contre  le  joug  intolérable  de  leurs  comtes  ou  goit- 
vçriieurs  ,  qui  aVoient  cohv'ei'ti  leurs  fohctions  en 
dtoits ,  et  avoient  rendu  leur  pouvoir  héréditaire  : 
les  habitans  formèrent  des  confédérations  auxquelles 
ifs  donnèrent  lé  nom  de  communes;  celles-ci  se  mena* 
gèrent  un  gouvernement  qui  leur  assurât  la  liberté 
personnelle  et  la  propriété  de  leurs  biens  ,  fsous  ia 
protection  de  leurs  propres  magistrats.  Cette  ré vo- 
lution  prit  naissance  en  Italie;  et  les  villes  du  midi 
de  la  France ,  entre  autres  Arles ,  Marseille ,  Nice 
et  Avignon  ,  s'empressèrent  de  suivre  le  même 
exemple,  La  liberté  enfanta  des  factions  qui  causèrent 
des  troubles  çt  amenèrent  la  licence;  on  confia  à  un 
magistrat  zppelé  podestat  une  autorité  dictatoriale. 
Barrai  des  Baux ,  qui  fut  le  dernier  podestat  d'Arles , 
en  1 2  5  o ,  réussît  à  persuader  aux  habitans  de  se  sou- 
mettre,  Tannée  suivante,  à  Charles  d'Anjou ,  comte 
de  Provence  :  depuis  ce  temps  ,  Arles  s^ivit  le  sort 
du  comté  ;  elle  fut  réunie  avec  lui  ,  en  i48 1  ,  au 
domaine  de  la  couronne  des  rois  de  France  (i  J. 
^  Il  étoit  trop  tard  pour  que  nous  pussiçns  rien 
Voir  lorsque  nous  entrâmes  dans  Arles  ;  jnais ,  dès  la 
pointe  du  jour,  nous  commençâmes  nos  recherches: 


(i)  J'âfpri,  tome  II,  page  a 1 5. 

V  Hh  2 


484  CHAJPITRE   XCIV. 

elles  furent  dirigées  par  M.  Pierre  Véran,  empièyl 
à  la  préfecture  y  homme  très-versé  dans  Thistoire  de 
son  pays ,  et  dont  |'ai  eu  occasion  de  parier  (  i  )  ; 
et  par  un  de  ses  parens  du  même  nom  que  hir , 
notaire  dans  la  ville  d'Arles ,  grand  amateur  de  Tan^ 
tiquité ,  auteur  de  quelques  ouvrages  inédit ,  et  qui  a 
rassemblé  une  immense  collection  de  titres  relatifs  à 
sa  patrie.  La  grande  place ,  appelée  la  place  du  Aîar^ 
chi,  reçut  notre  première  visite.  Dès  qu'on  y  entre ,  U, 
vue  e^  frappée  par  la  noblesse  de  l'obélisque  de 
granit  égyptien  (  pL  LXIV,  ;i/  /  )  qui  la  décore, 
La  hauteur  de  cet  obélisque  est  de  quarante-sept 
pieds  >  et  son  diamètre  à  la  base  est  de  cinq  pieds 
trois  pouces  :  avecle  piédestal  ^  il  a  en  totit  soixante- 
un  pieds.  Il  pose  sur  quatre  lions,  qui  sont  de  pierre 
falunaire  de  Fontvielie ,  -ainsi  que  le  piédestal  :  cette 
substance  n'est  pas  assez  dure  pour  supporter  un 
poids  aussi  considérable  ;  ce  qui  peut  faire  craindra 
que  l'obélisque  ne  soit  de  nouveau  renversé.  Ce 
monument  est  le  seul  de  ce  genre  qui  existe  dans 
f  Empire  français.  On  ne  sait  si  l'on  doit  en  attrî* 
buer  l'érection  à  Constantin-le-Grand  ou  à  Cons- 
tance,  qui  fit  célébrer  des  jeux  à  Arles  en  3  j4«  II 
a  été  trouvé  dans  un  terrain  qui  appartenoit  aux 
Claristes,  et  où  l'on  prétend  qu'étoit  autrefois  lé 
cirque.  Après  avoir  été  renversé  et  mutilé  par  les 


(ij  Suprà  ^  P*4^5- 


i    ' 


«   I 


CHAPITRE     XCIV>  48j 

barbares  )  il  deme>ira  fort  fong-temps  értfouî  :  3  fut 
découvert  en  1 3  S9  ;  mais  il  r^tra  de  nouveau  soûs 
la  terre,  d'où  Charles  IX  et  sa  mère  Catherine  de 
Médicis  ie  firent  i;etïrer.  Hei^ri  lY  vouloit  le  faire 
placer  au  milieu  4es;  Arènes;  ce  rie  fut  qu'en  1676 
que  les  habitaiis  d'Arles  entreprirent  de  ïe  relever  ^ 
pour  ïe  consacrer  à  Louis  XIY.  Peytret,  architecte 
d'Arles ,  dirigea  les  travaux  flu  piédestal  ;  Claude 
Pugnon,  de  la  vilte  dç  Madttigviss^.fHt  chargé  dé 
son  transport  et  de  son  élévation  :  on  plaça  sur  la 
cime  un  globe  d'azur  semé  de  fleurs  de  lis  d'or ,  et 
couromié  d'un  soleil,  qui  étoit  la  devise  du  prince. 
Le  temps  avoit  effacé,  même  avant  la  révolution, 
les  fàsmeuses  imci^ptions  gravées  sur  les  quatre 
&cés  :  c'çtoient  des  comparaisons  assez  communes  de 
Louis  XIV  avec  le  soleil  (1).  On  n'y  reconnoissoit 
pas  le  bon  goût  et  rexcellent  esprit  de  leur  auteur 
l'ellisson  :  l'exagération  dans  laquelle  il  s'étoit  laissé  ^ 
^iti^aîner  en  les  <îomposant  y  venoit  sans  doute  dti 
désir  de  conserver  les  bontés  d*un  prince  qu'il  craî- 
gnoit  d'avoir  blessé  par  la  généreuse  défense  ^'il 
avoit  faîte  du  malheureux  Foucquet,  Les  mémoires 
ijM  Pellisson  composa  pour  lui,,  setont  toujours  un 
monument  précieux  de  l'éloquence  consacrée  asservir 

i'a^miîié. 

Le  bonnet  rouge,  qu'on  avoit  substitué  au  sym- 
fcole  âdiopté  par  Louis  XIV,  a  été  remplacé  par 

(1)  Terrin,  V ObéUsqià  et  là  V/nas^Artei,t  63 o,  in- ti. 

Hh   3 


( 


/ 


48tfr  CHAPITRE  XCIV* 

Faîgle  impérial,  et  robéBsque  a  été  consacré  à  ht 
gloire  de  l'Empereur .  La  ville  <f Arles  a  donné,  à 
cette  occasic»! ,  des  fêtes  qui  durèrent  trois  jours ,  et 
qui  furent  présidées  par  M.  Thîbaudeau.  Le  pre- 
mier jour ,  ce  magistrat  posa ,  au  nom  de  la  vilte ,  hk 
premièjce  pierre'  de  ïa  restauration  du  piédestal  de 
l'obélisque  ,  sur  lequel  furent  placées  les  quatre 
inscriptions  suivantes,  qui  ont  été  composées  j>ar 
M.  Blain ,  s^étaire  de  la  mairie. 

Première  face  ;  côté  dii  nord  (  i  )  : 

VIRO  IMMORTÀLI  NAPOLEONl, 

Primo  Fraricorum'  Imperatori ,  Imiaque  primo  Rtp , 

1    Btlh  et  pace  verè  magna,  • 

Qui ,  exuris  hostibus  ûUritts  t 

Fluctibus  cipHibus  comvositisy 

'    /  Hydrâ  anarchia  domitû , 

Vi  legibusredditâ , 


'  (  f  )  A  Ilmmortél  NAPOLÉON ,  premieV  Empereur  des  Français , 
premier  Roi  d'Italie,  véritablement  grand  dans  fa  paix  et  dans 
la  guerre,  qui,  ayant  terrassé  les  ennemis  du  dehors»  apaise 
îcs  discordes  civiles ,  détruit  Thydre  de  l'anarchie ,  rendu  aux  lois 
leur  vigueur,  a  rétabli  l'Empire  français  ébranlé  jusque  dans  ^es 
fonâemens;  augtnenté,  étendu  sa  puissa^ice,  son  conmierce  et 
ses  limites;  ramené  l'intégrité  de  la  foi  de  nos  pères;  redressé 
les  autels  renversçs  par  l'impiété  :  la  ville  d'Arles  consacre  dans 
cett^^ile  place,  sous  de  bien  plus  favorables  auspices,  comme 
un  monument  étemel  de  son  amour  et  de  sa  reconnoissance, 
cet  obélisque  autrefois  dédié  au  soleil.  Etant  préfet  du  départe- 
ment des  Bouches>du-Rhpne,  M.  Antoine-Claire  Thibaudeaji , 
conseiller  d'état,  commandant  de  la  légion  d'honneur;  maire  de 
ia  ville  d'Arles ,  M.  Henri  Duroure  ;  adjoints,  MM,  Claude  Val* 
Hère  et  Guillaume  Di^nard.  28  âon  i8.oj« 


y 


V- 


CHAPITRE   XCIV.  4*7. 

Cbnpdlsum^  suis  stdihus  Imperium  Gaïticum  erexit^       * 
JUiusque  vires,  commercia,  fines 
Auxit,  propagavit; 
Intégrant  majofum  fdem  revêcavit, 
Eversa  impietate  altaria  restituitt 
^       CI  VIT  AS  ARELATENSIS, 

In  hoc  magntfico  foro. 
Ut  mernum  amoris  gratitudinisque  monumeiOum ,. 
Hmnc  obeliscum ,  oHm  soH  dicatum , 
,  Nunc  felicioribus  auspiciit 

Devovet,  consecrat, 

Ostiorum  Rh04Îani  Frafitcto,  D.  Anmio  Clarû 

ThjBAUDEA  U  ,  Imperatorts  à  sanctioribus  eonsiliis-, 

Necnon  Legicnis  Honoris  Duce. 

Civilis  disciplina  Urbis  Arelatensis  Praposito 

Z>.  He^rico  IXUROURE; 

Adjutoribus  DD.  Claudio  VajlliÈRE  tt  GuUklmo  DiSNARIK 

Die  XXV il I  Fhr.  M.  D,  çcç,  K.     , 

s  \ 

Deuxième  face  ;  côté  du  midi  (  i  )  : 
NAPOlEONI  MAC  NO, 

Imper atori  invictissimo ,. 

Qui,  Italil,  yEg^to  r  necnon  GermanLt  parte ,. 

Vicissim  victoriis  peragraUs, 

Fœderatos  Germanos,  Roxolanos, 

Italos,  Brîtannos, 

Marengo  debellavit,. 

Bellum  patravit  s 

CIVITAS  ARELATENSIS.      ' 


(i)  A  NAPOLEON-LE-GRANn, Empereur  très-mvincîblé,  quf » 
après  avoir  rempli  successivement  de  ses  victoires  PÉgypte,  iltaiîe 
et  une  partie  de  f  Allemagne,  mit  en  déroute,  à  Marengo,  les 
AIieman4s,  les  Russes ,  les  Italiens,  ies  Angiois  confédérés ,  et  ter- 
mina la  guerre  ;  la  ville  d'Arles. 

Hb  4 


■   ,.^- 


'  *_ 


48B  ChAPITRÉ   XClt 

Troisième  face  ;  côté  du  levant  (  i  )  : 

NAPOLEONI  MAGNO, 
^  \   Patfi  eptimo , 

Benefactori  Uherdlissimo , 
Studiorum    nrtium ,  religionis , 
/  Uiftutum  omnium 

Patrono  : 

CIVITAS  ARELATENSIS. 

Quatrième  face  ;  côté  du  couchant  {2)  : 

NAPOLEON!  MAC  NO, 
Stti  imperio  fttûp)ri , 
Qui  iatissimâ  tttens  fèrtunû, 
Raro  moéleraiionis  exemple , 
Victor iarum  cursvm  compressit, 
•     '  ^^  Pacem  reconciîiâvit  r       •  ^ 

•  CIVITAS  ARELATENSIS.  ■ 

Les  autres  fours ,  il  y  eut  des  concerts ,  des  courses 
k  pied  et  à  cheval ,  et  des  combatç  de  taureaux.  On  y 
voyoit  une  grande  quantité  d'étrangers ,  qui  avoient 
été  attirés  par  les  spectacles  divers  qu'offroit  cette 
fête. 

L'obélisque  est  de  deux  morceaux ,  parce  qu'il 
avoit  été  brisé  dans  sa  chute  :  les  gerçures  que  l'on 

1^——  I  I  1     II   -   Il      I      I       I      ■  III    m ■■!    .    ■■  Il    I  III, 

(1  )  A  NapolÉOn-LE-Gband, pcrecxccilcnt,  bienfaiteur  très- 
libéral ,  protecteur  de«  arts ,  des  sciences ,  de  la  religion  et  Je 
'toutes  les  vertus  :  la  ville  d'Arles. 

(2)  A  Napoléon-lÉ-Grand  ,  plus  grariJ  par  Pcmpirc  qu'îî  i 
sur  lui-même,  qui,  jouissant  dé  la  fortune  la  bfus  heureuse,  pa^ 
iih  rare  exemple  de  modération,  arrêta  fc  cours  de  ses  victoires  , 
rétablit  ia  paix  :  la  ville  d* Arles. 


^^. 


jchapitre   x<:-iv\  489 

i^emarqûe  à  sa  base ,  nuisent  beaucoup  ait  bôtt  effet 
de  Tensemble  (i). 

La  place  qu'il  décoré  rfest  i>aft  régulière  (2)  j  oh 
y  voit  des  édifices  curieux.  VHotel-Je-'ViUt ,  où 
nous-  entrâmes  d'abord  ^  a  été  bâti  en  1675  ,  par 
Pey tret ,  isur  les  dessins  de  Jules-Hardouîn  Mansard. 
Cet  édifice ,  situé  entre  deux  places ,  ferôit  un  bel 
efFe^,  si  l'on  abattoit  quelques  masureis  qui  ie  masr 
quent  et  ie  déparent  du  côté  de  l'ouest  :  ses  deux 
façades  sont  ornées  de  trois  ordres  d'architecture  ;  on 
ayoit  sculpté  au-dessus  de  la  porte  les  armes  de  ia 
vilie^  Les  six  médaillons  des  anciens  rois  bourgui- 
gnons ,  qui  décoroient  ia  façade ,  ont  été  brisés ,  ainsi 
que  beaucoup  d'autrçs  ornemens  (j).  On  admire 
avec  toison  la  hardiesse  et  ia  beauté  de  la*  voûte  du 
vestibule  :  eile  est  cependant  plus  remarquable  par  sa 
savante  construction  que  par  l'élégance  de  la  coupe  ; 

(i)  H  faut  espérer  qu'on  va  l'entourer  d'une  grilïe  po^i"  em- 
pêcher les  enfans  d'en  appj:ocher*  ie  piédestal  et  la  base  sont 
dégradés  par  des  coups  de  marteau ,  et  par  les  pierres  quon  y 
jette.       ^         _;  ,..„_.. 

(2)  El}e  seroît  pourtant  parfaitement  carrée,  si  Toà  abattoit 
l'arceau  6JtTirfv7rhevêihé;ccv^m  est  irès-fat'ife/ptrfsqnyfes  appar- 
temens  qu'il  supporte  tombent  «n  ^uine.  Cet  abattis  rendroit  la 
place  plus  spacieuse,  et  ia  façade  de  la  maison  archiépiscopale 
beaucoup  piti^  belle.  '^* 

(5)  Voici  les  noms  qu'on  lisoit  sur  les  médaillons  :  Arelatensis 
rex  Boson ,  Louis  Bôsvn ,  Hugues ,  Rodolphi  II ,  Gérard  dit  le  Paci- 
fique, " 


j 


__  r 


^^^^~^f_,_^^^    ^ 


490  CHAPITRE    XCIVJ 

elle  est  très-surbaissée  et  presque  plate  ;  vingt  co^ 
lonnes  accouplées  et  d'une  seule  pièce  la  supportent 
Oh  a  voit  placé  dans  les  entre- colonnemens,  sur  les 
|x>rtiques,  les  bustes  des  comtes  de  Provence  ;  au  fond^ 
en  hce  de  Tescalier,  étoit  ia  statue  de  Louis  XIV , 
exactement  conforme  à  celle  de  Thomassin  (  i  ). 

Autour,  de  ce  vestibule  sont  rangées  quelques 
pierres  accompagnées  «d'inscriptions: 

■s         , 

N.'  I.     ' 


S. 


J 


c 


D      M 

SEX    AEBVTI 
HERMETIS 

A£B.  CALLI 
OPE<:ONIVGl 
SANCTISSIMO 


1 


1 


'm 


(i)  Rtcutil  des  m<mumett$  de  VersaiUes ,  16^4,  pi.  8(i. 


^"■^m.^f        >ua 


-  -  ^  #. 


CHAI^ITRIE    XCIV. 


A9^ 


n*^rr#4yv 


-^  tNArvwvvwvwvvYW^ 


PRECLr 

pompeiaTÎ 
chrysothe 

MIS  J^  VXOR 


C 


N.»  3. 


D  M  ET 

y 

SECVRITATI 
AEMILIAE    EVCÀR 

rlAE 
c  paqvIvs  pardalas 

CONIVGI    CARISSImAE 
V.  A.  XXXI  M  yiii,  D.  X  f^ 


J 


f 


) 


) 


J 


(«) 


(i)  Saxii  Pontificium  Areïatense  ;  Aix,  1^29,  p.  ^9.  —  Pimt* 
VÉRAN,  //«/•  manusc.  d* Arles ,  t.  U,  p.  109,  année  1775. 


^*^ 


4j^i 


CHAPITHE    XCIT. 

N."  4. 


^Hita 


J. 


D      M 

AVIbLIAE 
«RATAE     ' 
ALJ^ITVS  AVG.  tb 
VXORI    OPTVMAE 


N.«J. 


3 


1 


( 


.._       i 


CHAPITRE    XCIV;  49 J 

« 

Ce$  inscriptions  sont  eq  miarbre;  elles  'n*bfRent 
point  de  difficultés.  :  j» 

N.**  I .  La  première  a  été  trouvée  dans  le  Rhône 
en  1 747 ,  près  de  la  Gardette  de  Fourques.  ^butia 
Callippe  l'a  consacrée  h  jEbutius  Hermès ,  son  époux, 
qui  étoit  probablement  un  afFr^inchi  ou  plutôt  un 
client  de  la  famille  i£butia. 

N.**  2.  ^Chrysothémis  à  son  époux  Pompéianus, 

N.**  3.  Aux  mânes  et  a  la  sécurité  d*j£miUa  Eu^ 
carpïa  :  C.  Paquius  Pardalas  a  son  épouse  chérie,  qui 
a  vécu  trente-un  ans  huit  mois  et  dix  jours  (ij. 

N.**  4*  Consacrée  à  AvilUa  Grata ,  épouse  excel- 
lente,  parAllitus,  affranchi  de  La  maison  d'Auguste  (2) . 

N.*"  5 .  A  Calphumia ^Jille de  Marius ,  vainqueur  (3) 
des  Cimbres.  Celle-ci  a  été  supposée  par  Jin  mai- 
adroit  faussaire  (4). 

La  suivante,  également  en  forme  d'autel,  et  qui 


(i)  Vixît  Annîs  XXXI  JHensibus  VI II  Diebus  X.  MURATORI, 
MCX,    5.  —  DUM0NT,XV,9;  Vi;44. 

(2)  MURATORI,  992,  7.  — LanceloT,  Hist,  de  l'acad.  VII , 
aji.  —  DUMONT,  pi.  VI,  n.***  43  et  45.  Eiic  étoh  autrefois  à 
farchçvêché.  Veran,  II»  104. 

(3)  VlC'tIllC4Sn 

(4)  DaMONT,  XXVlI,  184.  Elle  étoit  autrefois  dans  le  jardin 
des  demoiselles  Aulanler^  près  de  la  porte  de  HAure* 


-Il    ( .  ^ 


494  CHAPITRE    XCIV. 

étoh  autrefois  sous  le  portique  de  Tégfise  Saint- 
Césaire,  contient  des  détails  plus  intéressans  (i)  : 


' 


[ 


1 


D  M 

G.  PAQVl.  OPTATI 

LIB.  PARDALAE.  lîïïil 

AVG.  COL.  IVL.  PAT.  AR. 

PATRON.  EIVSDEM 

co.RPORi  Item,  patron 

FABRORNAVAL.  VTRICLAR 
ET  CENTONAR.  C.  PAQVIVS 
EPIGONVS.  CVM.   lIbERIs.   SVIS 

PATRONO.  OPTIME.  MERITO* 


] 


iw*ia« 


(i)  Selon  Pierre  VÉRAN,  Hist,  tnanuscr.  de  la  ville  d'Arlts^ 
t.  II  *  p.  1 08  »  eiie  étoit  dans  ie  jardin  du  mas  de  Cazeneuve , 
chez  M.  Dcviguier ,  frère  de  ï'abbessc  de  Saint-Césaire.  .Selon 
Saxy,  Pontificium'  Arelatense ^  Aix  ,  16^9,  p.  6<),  elie  étoit  dans 
ie  jardin  àts  demoiselles  Aulaiyer,  près  ia  porte  dite  de  l'Aure* 
Selon  Papon,  u  l,  p,  55 ,  cile  étoit  dans  le  monastère  de 
Saint-Césaire. 


/ 


^i^^if  -- 


^  / 


CHAPltRjE   XCIV.  49^ 

Aux  manei  dt  G.  Paquius  Parddas  (i),  étffroMchi.d'Optatut  (ij, 
zéifir  Atigustal  (3)  de  la  colonie  JuUa  (4)  Patenta  (5)  ArUstennt  (6), 
ffoiron  du  mime  corps,  et  encore  patron  des  constructeurs  de  vaisseaux  (7), 


/ 


(1)  Ce  Paquius  Pardaîas  est  celui  qui  a  consacré  à  son  épouse 
ifjAÎiiaEucarpia,  l'inscription  précédenunent  rapportée,/^,  ^r, 
Q.^  3.  Le  nom  de  là  famille  Paquia  se  rencontre  souvent  dans  les 
anciennes  insaiptions.  K^. Grut.  XXXI ,  4;  etFABRETTl,capJ, 
n.^  45.  PaqVIVS  est  une  abréviation  de  PACVVlVS;  le  Q  est. 
«nîs  pour  CV.  Voyei^  EcKHEL,  Doctrina  numor,  V,  famiile  Pa* 
cuvia*  Ceux  dont  il  est  question  icr«  étoient  af&anchis  de  Pa- 
quius Optatus. 

(1)  LIBertL 

(3)  SEVIRI  AUGttsti  ou  AUGustalis.  Snprà,  1. 1/^  p.  337. 

(^  iVlJa.  Elle  aVoit  été  fondée  par  César  :  ce  fut  Tibère 
Ciaude  Néron ^  pcre  de  i*empereur  Tibère,  alors  questeur  de 
C.  César,  qui  conduisit  à  Arks  cette  colonie.  Suet.  in  Tit,J^ 

(5)  PATerna,  On  ne  peut  déterminer  d'une  manière  précise 
Torigine  de  ce  surnom,  dérivé  àc  pater  :  peut-être  indique-t-i( 
que  cette  colonie  a  été  fondée  par  JuUus  le  père  ,  c'est-à-dire. 
César,  et  non  par  Julius  le  fiis ,  c*e^-àrdire,  Octavius,  Ce  qui  peut 
le  faire  présumer,  c'est  que  la  colonie  de  Narbonne,  également 
fondée  par  César,  est  aussi  surnommée  Par^frw/ï.  Le  même  surnom 
a  encore  été  donné  à  un  membre  de  la  famille  Fabricia  ;  et  je 
ferai  observer  à  cet  égard  que ,  sur  les  médailles  du  cabinet 
impérial  où  on  lit  le  nom  de  Lucius  Fabricius^  il  y  a  en  toutes 
lettres  PATERN us,  quoique  cette  leçon  ait  été  contestée  par  quel- 
ques antiquaires.  Vojf,  Ec¥.HtL,  Doctrina  numor,  vol.  V,  p.  a  10. 

(6)  ARelatensis. 

{7)  PATRONo  FABRORum  NAVALium.  Il  paroît  qu'Arles  avoit 
des  chantiers  célèbres.  Ce  fut  dans  cette  ville,  comme  nous  l'avons 
vu,  que  César  fît  construire  les  vaisseaux  avec^  lesquels  il  réduisit 
les  Marseillois. 


»  t 


h^ 


CHAPITRE    XCIV. 


-des  utricuïatres  (i)  W  des  centenaires  (a)  ;  €•  Paquius  Epigonus  et  ses 
tnfaus  à  un  patron  qui  a  bien  mérité  d'eux. 

Près  de  là  est  cet  autre  cîppe  (  5) ,  figuré  pi.  LXV, 
n.*  I,  avec  le  portrait  de  celle  à  qui  il  est  consa- 
cré. Selon  Muratori  ,  cette  inscription  avoit  une 
double  face  ;  la  seconde  est  aujourd'hui  effacée  : 


IVLIAE.   SERVATAE 

e  ANN.  XXVIII  M 

DIES.   VII. 

SEX.  IVLIVS.    DORVS. 
FILIAE.   pIiSSIM. 


) 


m 

(1)  VTRlCLARiôrum,  Plus  bas  au  chapitre  de  Cavaillon.  Vq^ei^ 
aussi  DUMONT,pl.  VI,n.°45  î  ^^^o^ ,  Hist.de Prov.  t.I,  p.  la, 
73  ;  CAtVET,  sur  les  Utriculaires ,  48;  SWARTZ,  de  UtricL  38. 

(a)  CENTONARiorum.  Espèce  de  charpentiers. 

f  (3)  GrUTER,.DCXC,  19;  MURAT.  MDCC,  5j  Hagenbuch, 
Epist,  epigr.  493;  DUMONT,  pi.  XV,  n.*>  ao,  page  XI,  n.**  80  ; 
ViRAN,  t.  n,  p.  97.  Elle  étoit,  en  1775  ^^lans  le  jardin  des 
demoiselles  Aulanier,  près  fa  porte  de  TAure. 

Sextus 


C  H  A  n  TR  B   X  C 1  Vv  4^7 

V.  Stxtus(i)JulîusrDbrm  a  JuttaServasa  sa  fille  trés-teudre,  mme{i] 
à  XXVll  am  .  • . . ,  moîs,  t%  VII  jvurs, 

.  Qn  y  tiQivve  encore  celle-ci  (  j)  ; 


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i5    D,    M.      JJ? 

lYLIAE.    AMABILIS. 

t.    V-ERATIVS.    PRO 

VOTECTVS.  vxôri 

CARISSIMAE,    ET 

I  Y  1^1  A.  U    F.    §a6i^A 

MfATRI      PlisSIÎffAE 


*  ,      ,»  j  ►  *k 


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(i)  Gruter  a  vouÎu  faire  rapporter  5^*  à  mens;  mais  cela  n'est 
pas  admissible.  SfxtU9  ^iM  .prénom  dçifellus  Dorus  :  peut-être 
Afens  signifie-t-ll  ici  mensern  unum;  ou  bien  le  sculpteur  a  oublié 
sur  la  pierre  ie  nombre  des  mois. 

(i)  0.  Cette  îsigle -grecque  se-  mel^  pe«f  ïè  mot  ^(UKOf  ou 
tuMwm,  mmuvrxmmefrttra,  dans  ferin&ciiptîoiis  farttnes.  GfttWElH 
1 146 ,  2.  On  ne  4a.  trouve  jamab»  dans  Jès^  insÇBÎî)dofts  ^cqaes^ 
JfclRPEï ,  de  $igh  p.  54  ;^LMÏCKT ,  #/if  i%/;  8$. 

(3)  DUMONT,  n.«  4d,  v 


^   .' j  *  ■*  ■• 


4 .  _. 


45^8  CHAPITRE   XCIV. 

Aux  mânes  de  Julia  Amaiilis  :  L,  Veratius  Protptectas  à  urne  épaust 
très-chère;  et  Julia  Sahina ,  file  de  Lucius ,  à  une  mère  très-tendre^ 

L'inscription  en  forme  d'autel  figurée/?/.  LXVIII, 
nf  I,  est  décorée  { i  )  d'un  encadrement  ;  et  sur  un  des 
côtés  est  ie  terrible  Cerbère,  impitoyable  gardien  des 
«nfêrs.  On  y  lit  qu'elle  a  été  consacrée  à  Sempronia  ^ 
fille  de  TertuUe. 

Le  beau  sarcophage  de  marbre  ûgarépL  LXI, 
n/  2,  est  aussi  sous  ce  vestibule  :  la  tablette  est 
accompagnée  de  tètes  de  béliers,  qui  portent  de 
riches  guirlandes  de  fleurs  et  de  fruits  élégamment 
attachées  par  des  bandekjttes.  Sur  la  partie  posté- 
rieure, il  y  a  une  tète  de  taureau  entre  les  deux  tètes 
de  béliers.  L'inscription  nous  apprend  que  Cornélia 
Jacaea  s'est  fait  iaire  Ce  tombeau  àe  soa  vivant,  et 
que  ses  héritiers  ont  pris  soin  de  l'y  déposer  : 


D.    ^ 

M. 

CORNEL.   lACM/E.      1 

SXAI,  VIVA, 

POSVIT.j 

HEREDES. 

CONDENDAM.  CV 

RAYER 

(i) 

(i)  DuMONT» pi.  XV,  %.ïOj  p.  VI, n.°.4â. 

{%)  CONDENMM  CUMyjSmMf^  DUMQNTi  fL.XIX^  aj 

^     ■ 

t         f  '  i        ,  .  ,        . 


J 


CHAPITRE     XCIV.  499 

Ma^é  la  prévoyance  de  Cornélia  Jacaca  et  les 
^ç^  de  ses  héritiers ,  son  corps  a  été  enlevé  de  sa 
sépulture  ;  et  ce ,  sarcopbage  servoit  de  réservoir 
d'huile  .aujp  Dcxipviiçains  (i). 

Ce  portique,  sous  lequel  il, y  a  encore  des  chapi- 
teaux et  des  coIo|ines  remarquables  par  leur  antiquité > 
nous  annonçoit  déjà  la  riche  moisson  d'observations 
que  pouvoit  nous  offrir  la  ville  d'Arles. 

L'escaliar  est,  orné  de  mpnumens  encore  plus 
précieu^f  On  y  distingue  le  plâtre  de  la  Vénus  de 
marbre  (pt.  LX^IX,  fg.i )  qui  fut  découverte,  en 
i6j  I ,  dans  l'emplacement  de  l'ancien  théâtre,  en 
creusant  pour  faire  un  puil^près  des  deux  magnifiques 
colonnes  qui  existent  encore.  On  trouva,  d'abord  la 
tête,  dont  la  beauté  fit  désirer  d'avoir  la  statue  en- 
tière ;  on  découvrît  enfin  le  corps  et  sa  base.  Mais  il 
s'éleva  alors  des  contestations  sur  le  nom  qu'on  devoit 
donner  à  cette  statue  :  Rebattu  avança  que  c'étoît 
une  Diane  (2);  Terrin,  que  c'étoît  urije  Vémis  :  le 

P.  JAugières  embrassa  Fopîniôn  de  Rebattu.  En 

>  , «-- '■.  ■  0 

(1)  li  fut  trouvé  en  1738,  près  de  la  châpclie  dite  du  Crucifix, 
sur  le  chemin  qui  mène  à  la  Crau.  VÉRAN,  Mss.  t.  Il,  p.  500.  ' 
'  [z]  Ld  Diane  et  le  Jupiter  d'Arles  se  donnant  à  connoUre  aux 
esprits  curieux,  p^r  François  DE  REBATTU  ;  Arles ,  16^6,  in-4.<*  — 
Le  portrait  de  la  Diane  d  Arles  retouché,  par  François  Dï.  REBATTU; 
Arles,  I  ^59 ,  in-4.?  —  Inscription  symbolique  sur  la  statue  de  Diant 
d'Arles;  à  Arles,  1  66ï  ,  une  feuille  in- fol.  —  La  Vénus  et  Vobé-- 
lisque  d'Arles,  par  TeRRIN;  Arles,  1670,  in-12.  —  Réflexions 
sur  Us  sentiment  de  Calisthènes  touchant  la  Vénus  d'Arles,  par  it 

•  ^     li  i 


^OO  CHAPITRE    XCIV.' 

1 684,  ïes  habîtans  d'Arles  firent  présent  à  Louis  XlV 
de  cette  statue  ;  et  la  question  controversée  fut  souràîse 
au  jugement  du  monarque ,  qui ,  d'après  les  avis  de 
Lebrun  et  de  Bouchardon,  décida  erifin  que  c'étoit 
une  Vénus  (  i  )•  Girardon  !a  restaura;  et  elle  fut  placée 
dans  la  galerie  de  Versailles ,  où  elle  demeura  jusqu'à  * 
f  époque  de  la  révolution.  Elle  est  actuellement  dans 
le  musée  Napoléon  (2)',  où  effe  est  connue  sous  le 
nom  de  Vénus  d* Arles  :  elle  est  nue  jasqu'ti  mr-corps , 
et  drapée  d^  la  ceinture  en  bas;  sei  cheveux  sont 
ceints  d'une  bandelette  qui  retombe  avec  élégance  sur 
les  épaules  ;  la  tète  est  un  modèle  de  grâce  et  de  beaaté. 
Gîràrdon,  en  restaurant  les  bras,  a  placé  dans  la 
main  gauche  un  miroir,  et  dans  la  droite  la  fetale 
pomme  qui  fut  le  prix  de  son  triomphe  sur  ies  déesses 
sts  rivales;  mais  il  est  plus  probable  qu'elle  tenoît 
d'une  main  lé  casque  de  Mars ,  et  de  Fautre  une  lafttce  : 


p  "  D* AuGiiRES ,  t  ^74 ,  m- 1  a .  —  Lettres  dt-Mu^  -à  CaUsAènei  ftm 
ks  Béûexiotts  d'un  censeur  :  réponse  de  M.  TerîUN  à  l'ouvrage  ci- 
dessus.—  iE^//^^''^"^^^^'"'^"'^'  tfttwr^SAlNT-ANDlOL,  archid. 
Arei  Ârclate ,  i  é8 1 ,  in.4.^  8  ^.—Dissertation  sur  la  statue  qui  étoit 
autrefois  à  Arles,  et  qui  est  à  présent  à  Versailles;  1685 ,  ra-4.<>  — 
Sur  la  dbputc  que  cette  statue  a  occasionnée,  voyei  Bougerel  ^ 
Histoire  des  grands  hommes  de  Provence,  p.  308. 

[i)Le  triomphe  de  Vénus  sur  la  décision  de  sa  Majtsté,  par  M.  Ma- 
ÔNIN  ;  pièce  de  170  vers. 

(2)  Voyez-en  la  gravure  d^s  les  ouvrages  cités.  Mellan  en  a 
fait  une  fort  belle  en  1 669,  n.o  1  j8.-Dumqnt,  pi.  \^.-' Notice 
éb  musée  Napoléon,  p.  l2  5.-PIRA^ESI,  Abusée  Napoléon,  t.  î. 
pf.  60.  Je  l'ai  fait  figurer  telle  qu  clic  étoit  avant  la  rwuuratioa. 


CHAPITRE    XCIV.  301 

c'est  aîn$î  que  l'on  a  représenté,  sur  les  médailles, 
Vénus  victorieuse  ;  el  l'on  peut  croire  que  les  Arlé- 
siens,  dont  la  coIoni«^  prenoit  le  nom  de  Julienne , 
auront  consacré  c^tte  image  k  la  déesse  qu'on  regar- 
doit  comme  la  soti^he  de  la  ianiille  Julta ,  dans  la- 
quelle Auguste  avoît  été  adopté,  et  qu'elle  a  été 
exécutée  au  temps  de  cet  empereur.  Cette  statue  est 
de  ce  marbre  grec  dur ,  d'une  couleur  un  peu  cendrée , 
.que  les  anciens  statuaires  tîroient ,  à  ce  qu'on  croit, 
du  mont  Hymetie  près  d'Athènes. 

Sur  le  palier  de  cet  escalier  est  un  groupe  dont 
le  sujet  est  unique  ;  je  ne  connois  du  moins  aucun 
^utre  monument  (pU  LXVIII^  n."  2)  qui  le  repré- 
sente. C'est  Médée  entre  ses  deux  enfans ,  qu'elle  va 
sacrifier  à  son  atroce  vengeance  (1).  Cette  statue 
est  d'un  style  qui  annonce  Tentière  décadence  de 
i'art.  Si  c'est  une  imitation  de  la  Médée  du  peintre 
Timomaque,  ou  dune  de  ces  statues  que  les  épi- 
grammes  de  l'Anthologie  ont  rendues  si  célèbres  (2), 
on  peut  dire  qu'elle  est  bien  grossière  :  fa  figure 
manque  absolument  d'expression. 

Cette  statue  de  Médée  est  placée  sur  un  cîppe  en 
forme  d'autel,  où  l'on  remarque  deux  colombes 
qui  becquètent  un  panier  de  rai^n ,  symbole  qui 
se  trouve  fréquemment  sur  les  mohumens  chrétiens. 

'    (1)  Eump.  >^f^.  1271  et  127a. 

(2}BRUNCic,^tfirt II,  117,174**^3,  ii6,  499; ÏH,  2i4, 


S02  CHAPITRE    XCIV. 

On  lit  au  bas   cette  inscription   métrique    (i)   : 

DEBITA.  CONJUGIO.   APELLES.  PIA.  CARMINA.  SCRÎBIT. 

QUAM.   RAPUIT (2)   MORS.   INIMICA.  VIRO. 

M.£C.  DEBENT.  MEMORES.  POSTREMA.  IN.  MORTE.  REFERRE. 

OB.  REQUIEM.  GRATAM.  QUAM.  PIA.  CURA.  DICAT. 
CONJUGIS.  OFFICIUM.  TESTATUR.   CARMINE.  PARVO. 

EXTREMUM.  QUE.  TIBI.  REFERO.  MUNUS (3) 

DULCIS.   CASTA.   VIRO.   REVERENS.   PIA.  CARA.  FIDEUS. 

TOT.  DAMNA.  AMISSA.   CONJUGE.  JURE.  FLEO. 
TE.   LAPIS.  OBTESTOR.  LEVITER.  SUPER.   OSSA.  QUIESCAS. 

ET.  MEDIiC.  vETATI.  NE.  GRAVIS.  ESSE.  VELIS. 

SEX.  POMPEIUS.  APELLES.  CONIVGNCOMP. 

Cette  inscription  ne  peut  souffrir  une  traduction 
littérale  ;  Sextus  Pompéîus  Apelles  ,  qui  probable- 
ment étoit  un  afïranchi  de  la  famille  Pompéia ,  a 
exprimé  d'une  manière  trop  obscure  ses  regrets  sur  la 
mort  de  son  épouse  (4)  :  les  qualités  de  cette  jeune 
femme  méritoient  sans  doute  d'être  chantées  plus 
dignement  ;  mais  l'amour  conjugal  n'avoit  pas  ins- 
piré à  Apélles  ie  talent  des  vers. 

Le  monument  qui  vient  ensuite  est  très-curieux  à 
Il  I      I         «  ——————— .———^ 

(i)  MuRATORi,  mccxcix,  8  ;  Maff.  Antiq.  Gall  70;  Bre- 
VAL'x  Remarh,  II,  A.  2,  177;  BoNADA,  Carmin,  ant.  U,  116. 
(a)  II  manque  ici  un  mot. 

(3)  Cet  hémistiche  est  altéré. 

(4)  Le  nom  de  cette  épouse  chérie  est  effacé  dans  Finscription: 
je  ne  sais  pourquoi  le  P.  DuMONTa  placéici  celui  de  Sempronia, 
qui  rend  le  vers  faux.  Ce  nom  se  retrouve  encore  dans  plusieurs 
manuscrits  conservés  à  Arles,  On  ne  remarque  plus  sur  le  monu* 
ment  que  la  trace  d'un  O. 


CHTÀPITRE    XCIV.  505 

cause  âê  sa  rareté  :  c'est  un  beau  torse  qui  repré- 
sente Aîithras  ;  i\  a  été  trouvé,  en  i  J98 ,  dans  les 
fondatîohs  d'un  moulin  à  eau,  près  de  la  porte  de 
ia  Roquette,  à  peu  (Je  distance  de  remplacement  oà 
étoit  autrefois  le  cirque  (i).  II  resta  dans  la  cuisine 
d'une  maison  (2)  près,  de  l'église  de  Sainte-Croix, 
|usque  vers  la  fin  de  i'avant-demier  sîècfe ,  que  M.  de 
Gravesop  en  fh  l'acquisition  :  après  sa  mort ,  les  con- 
suls achetèrent  ce  torse  pour  la  somme  de  vingt-sept 
ïivres  quatorze  sous  (5) ,  et  le  firent  placer  où  il  est, 
avec  une  inscription  sur  la  base ,  dans  laquelle  on  le 
désigne  comme  un  simulacre  égyptien  d'EscuIape  {4). 

■Wl— ■!    Il  ■'■         *  '■  '  <        '        I  "  ■  Il         ll>        »l  I,  I     — — — 

(i)  On  a  trouvé,  dans  le  même  lieu,  des  colonnes  de  granit  « 
des  marbrés ,  et  une  iampe  sur  iaquciie  on  voit  un  sacrificateur 
avec  des  anaxyrides  phrygiennes ,  qui  dépecé  une  victime  humaine. 
Cette  fampe,  qui  existe  encore  aujourd'hui  dans  ie  cabinet  de 
M.  Lyon  ,  est  gravée  pi,  LXIX ,  fg.  2,  Elle  peut  aussi  avoir  été 
employée  au  cuïte  de  Mithras, 

(2)  Rebattu,  Antiquités  d'Arles,  78. 

(3)  Annales  d'Arles ,  1723.. 

(4)  Celte  inscription  est  dans  un  encadrement  antique;  ce  qui 
fait  présumer  qu  on  en  a  gratté  une  autre  qui  occupoit  ie  champ 

.  de  ia  pierre  >  pour  y  substituer  ceiie-ci ,  qui  est  ainsi  tonçue  : 

HOC  -«GYPTIACVM 

^SCVLAPII 

SIMVLACRVM  VETVS 

ANTIQVISSIM^E   HVIVS 

VRBIS   MONVMENTVM 

EXTERIS   VISENDVM 

EREXERVNT 

CONSVLES.   ANNO. 

DOM.  M,J>CC.  XXIU. 

li  4 


\ 


-«*         <^j-  * 


^ 


^  Ce  Mithras  est  figuré  pi.  XXXVI,  n^  j  :  h 
tète  et  les  bras  ont  été  suppléés  d'après  d'autres 
représentations  semblables.  Nous  avons  défà  eu 
occasion  de  fixer  notre  attention  sur  son  cidte  (  i  )  :: 
c'est  le  sdeil  considéré  comme  le  <fieu  vivifiant  de 
la  nature  et  le  ministre  du  Créateur.  Dans  la  reKgioii 
de  Zoroastre ,  les  mages  avoient  donné  au  soleil  te 
nom  de  Afithras,  qui  signifie  aimable  et  èienfiii- 
sant  (2).  Les  chrétiens  avoient  ce  culte  en  horreur; 
ce  sont  eux  qui  nous  en  ont  transmis  les  détails  les 
plus  intéressans.  Tbemistius  nous  apprend  qu'outre 
les  images  communes,  qui  représentoient  cette  divi- 
nité en  habit  persan,  il  y  en  avoît  aussi  de  mysté- 
rieuses y  que  l'on  ne  montroit  qu'aux  initiés  :  celie 
de  notre  Mithras  est  du  nombre  de  ces  dernières. 
On  peut  expliquer  ainsi  ses  attributs  :  la  tète  de  lion 
désigne  la  force  du  soleil ,  parce  que  c'est  quand 
cet  astre  est  dans  le  signe  du  lion  qu'il  a  le  plus 
d'activité  ;  le  serpent ,  par  ses  ch*convolutîons ,  est 
lemblème  de  l'année  réglée  par  le  cours  du  soleil , 
qui  semble  s'avancer  en  serpentant  dans  l'écliptiqutf . 
On  pourroît  croire  que ,  comme  les  autres  figures  du 
même  genre ,  ce  Mithras  avoît  un  globe  sous  le^  pieds , 
pour  marquer  l'empire  que  cet  astre  exerce  sur  le 
monde,  dont  il  paroît  être  le  roi;  mais  on  n'en  voit* 

»■■■■■■■■       I  II  II  II,     Il I    .    Il     I, ■.      !■  Il    ■     I  I  ■ 

(  I  )  Suprà ,  tome  II ,  page  1 17. 

(2  )  Hyde  ,  iie  Religione  Ptnrnu» ,  IV. 


^ma^    '  -  *. 


jpas  <ie  traces.  Par^ii  les  signes  du  zodiaque,  les  sols*- 
ticiaux  indiquent  les  limites  du  cours  du  soleil  ;  les 
À}uinoxiaux  étoient,  selon  Porphyre,  le  séjour  de 
Mithras.  Nous  remarquons  que  le  signe  de  la  balance 
est  tenu  par  un  homme,  et  qu'un  des  deux  gémeaux 
porte  une  lyre. 

Les  images  de  Mithras  appartiennent ,  en  général , 
au  111/  siècle  ,  époque  à  laquelle  les  superstitions 
orientales  se  répandirent  à  Rome  et  dans  ses  co- 
lonies* 

L'autel  à  là  bonne  déesse  (i)  ûgaré pi.  XXVTIlj 
n,"  (f,  est  un  des  monumens  les  plus  curieux  de  cette 
collection  :  il  est  d'une  bonne  proportion  ;  sa  face 
est  décorée  d'une  couronne  de  chêne  élégamment 
attachée  avec  des  bandelettes ,  et  qui  renferme  deu^ 
oreilles  ornées  de  pendans.  Au  côté  gauche  de  l'autel, 
il  y  a  une  patère  décorée  d'oves  qui  se  réunissent  à 
un  centre  commun  ,  dans  lequel  on  voit  une  tête  d^ 
Jupiter  Ammoiv  :  à  droite  est  le  vase  que  les  anti- 
quaires appellent préféricule  (2) ,  et  qui  servoit  h  con- 
tenir l'eau  lustrale  ;  il  est  d'une  forme  élégante ,  orné 
d'oves ,  d'une  bordure  en  forme  de  vagues ,  et  d'une 

(i  )  Lettre  de  AI.  SÉGUIER  a  M.  le  président  d'Ôrbesran ,  5ï/r  ttn 

*^ft0tumait  trouvé  à  Arles  ài   iys^*  "~  Réponse  et  Disseriation  de 

M.  d'Orbessan,  membre, de  V académie  de  T^ttiôUse,  —Voyez, 

pour  ces  de«x  pièces.  Mélanges  de  M.  le  président  d'OrbE5^AW, 

tome  II ,  p.  180  et  suiv^ 

(2)  Supra,  p.  172» 


jotf  CHAPITRE  XCIV. 

branche  dToIîvîer.  Les  enroulemens  que  Pon  remarque 
ordinairement  sur  les  autels ,  sont  un  peu  dégradés 
sur  celui-ci.  Au-dessus  de  la  couronne  on  fit  cette 
inscription  : 

BONAE.    DEAE. 
CAIENA.   PRISCAE.   LIB.    ATTICE. 

MINISTRA. 

A  la  bonne  déesse,  Caiena  Attict,  afiranchie  de  Prisca,  et  ministre 
de  la  déesse. 

Les  nombreux  tauroboles  que  Ton  trouve  dans  la 
Gaule  (i),  prouvent  combien  le  culte  de  Cybèle, 
nommée  la  bonne  déesse ,  y  étoit  répandu.  Caïena , 
esclave  d'origine  grecque,  appelée  Attict  (2)  avant 
qu'elle  eût  été  affranchie  par  Prisca ,  a  reçu  le  nom 
de  femîHe  de  sa  patronne  (5) ,  et  c'est  pourquoi  elle 
s'appelle  Caiena  (4)  :  le,  titre  de  ministra  qu'elle 
prend  ici ,  prouve  que  l'on  rendoit  à  Arles  un 
culte  à  Cybèle  (5) ,  et  qu'elle  y  a  voit  une  prêtresse 


.«■ 


(1)  Jw/va:,  1,455,  J**;  11,73,  89,  i54i  Wï'48. 

(2)  Les  inscriptions  en  ofïrcnt  beaucoup  d[*exemples.  Voyie(^ 
GrUTER,  CMLXXXXIX,  la;  MCXXI,  6;  CCMLIX,  lO,  &C. 

(3)  On  trouve  aussi  fréquemment  des  exemples  sembfab!es« 

F^y^GRUTER,  CMLXXII,  li. 

(4)  Ce  nom  n'est  pas  commun  dans  ics  inscriptions.  Voyt^ 
MURATORI,  MDXXV,  la;  MDCIX,  l. 

(5)  Cet  autel  a  été  trouve,  au  mois  de  juillet  1758 ,  dans  rem- 
placement de  réglise  de  la  Major  ;  ce  qui  fait  présumer  que  c'est 
ià  qu'on  avoit  bâti  le  temgle  de  Cybèle. 


^, 


CHAPITRE    XCIV.  507 

que  des  ministrœ  aîdoîent  dans  ses  fonctions  (i). 
Les  deux  oreilles  ornées  de  pepdans  sont  ce  qui 
exerce  le  plus  Kmagination  des  antiquaires.  On  ne 
sauroit  donner  une  explication  certaine  de  cette  of- 
frande ,  puisqu'on  peut  lui  assigner  plusieurs  motifs. 
On  a  des  exemples  d'oreiiles  d'argent  offertes  à  Mi- 
nerve pour  la  remercier  de  quelque  guérîson  de  Tor- 
gane  de  l'ouïe  (  2)  :  d'autres  inscriptions  font  mention 
de  pendans  d'oreilles  donnés  à  des  divinités  (?)  ;  on 
en  paroit  principalement  les  statues  de  Vénus  :  notre 
inscription  peut  avoir  rapport  à  une  circonstance 
de  ce  genre  ;  mais ,  s'il  faut  émettre  une  opinion , 
je  crois  que  les  oreilles  placées  sur  cet  autel  signi- 
fient combien  la  bonne  déesse  est  accessible  aux 
prières  et  aux  vœux  des  mortels ,  et  combien  Caïena 
Prisca,  qui  dessert  son  temple  ,  désire  qu'elle  écoute 
les  siens.  Les  pendans  n'ont  d'autre  objet  que  d'ajou- 
ter à  l'élégance  de  ce  symbole ,  qui  est  d'ailleurs  ici 
d'une  parfaite  exécution.  Le  goût  pur  de  cet  autel 
et  de  ses  ornemens,  l'élégante  concision  de  l'ins- 
cription ,  la  belle  forme  des  lettres ,  peuvent  feire 
présumer  qu'il  a  été  fait  avant  le  lli.*  siècle. 


«« 


(  I  )  C'étoient  des  prêtresses  d'un  rang  inférieur. 
(a)  GrUTER,  MLXVII,  i. 

{^)  Orsato  ,  Monumeata  Patayina» 


i 


508  CHAPITRE    XCIV. 

Au*dessus  de  l'autel  à  la  bonne  déesse,  on  lit 
cette  autre  inscription  (  i  )  : 


III  *■ 


«■■MH 


c. 

FABIVS.  C.  LiBïfiRIVE» 

InTiL 

VI R. 

AVG.  C.   I.   P,  AREL 

Vives 

FECIT.   SIBI.   ET.   SV I  S.   eT 

c.   FABIO.    L. 

F.   SECVïDO.    PAR<>P^ 

ET,   L.   FABIO, 

L.   F.   PR'MO.   FRATR' 

EIVS 

R 

M. 

H.      M.      N.      S. 

C.  (i)  Fahtus  T-îermh,  affranchi  de  C. ,  sévir  augustal  de  la  colonie 
JuKa  Paterna  d' Arles  (i),  a  fût  faire  ce  momiment  de  son  vivant  (4)» 
â  lui  et  aux  siens,  et  â  C,  Fabius  Secundus ,  fils  de  Lucius(^^  ,  son 
patron ,  et  à  Lucius  Fabius  Primus  ,fils  de  Lucius  et  frère  de  6.  Fabius, 
Ce  monument  ne  suit  point  t héritier  (6). 

Le  dernier  monument  que  nous  vîmes  sur  Tesca- 


5. 


(i)  DuMONT,xxvn,  4.  Ma  copie  est  plus  correcte;. 

(a)  Caius. 

(})  Colonia  Zulix  Paterna  ARELatatsis. 

(4)  VI  VOS  pour  vivus.  Les  exemples  de  cette  orthographe  sont 
fréquens. 

(5)  Lucii  Fili9. 

(6)  Hoc  Aienumentum  HeredeM  Non  Sequitur. 


CHAPITRE     XCl^*  ^9r 

lier  est  cette  fcorne  miiliaire  (  i  ) ,  (jui  a  été  reprcfduhe 
un  grand  nombre  de  fois  : 


r 


\ 


SALVIS.DD.NN. 

THfiOPOSlO.    ÇT 

VALENTINIANO 

P.  F.  V.  AC.TRIVM 

semper^vg.  xv 
cons  v1r  inl 
aVxtliaris  PR 

îh'ltETO.    GALLIA 

ARELATE     MA 

MILIARIA.  PONI.S 

MPI 


UtiHBBMiliiiBMÊi 


'  (i)  Pont.  Ad  itm.  GalL  Narhou.  {>.  66.  RlINBS,  Varia  Ltfit, 
p.  6io.  Gruteh,  cLix,  8.  Spon  ,  MhcdL  i66,  Muratori^ 
Thés.  467,  5.  BergieR,  Grands  Chemins^  U,  37.  Maffei,  ÇW. 
anu  35.  Maus.  in  Annal,  BARON II,  t.  VU,  p.  474-  DONAT.  95. 
Journal  de  Trévoux,  1701,  septembre,  iid,  avec  des  notes  de 
COLONiA.  UPS.  Ana!.  30.  Monte.  Ant.  expl.  suppL  IV,  pi.  4?' 
UrsAT.  Lex.  219,  mit  Banduri,  /^Jumim.  U,  559.  CUPER^ 
Epist,  in  M'scell  Lips.  nov,  vôi.  I,  part.  I.  BREVAlV  Remarh, 
t.  II,  176.  J.  .J.  ScAUGER,  in  AUSON.  Lect.  Ub.II,  cap.  1^. 
■BoÛcuL,<  horogr,  de  Prou.  307.  Saxy,  Pontif.  Ard  sS.SÉGUm, 
Antia.it.  d'Arles ,  5  5.  BoUQUET ,  Script,  rer.  Gallic.  I,  «  «J^^r^- 
^r.  135.  Maffei,  Ars  cridca  lapidaria,  4S^.  V A?0^ .  HuL  de 
Prwence,  5a.  DUMONT ,  n.*»  i<5. 


îia  CHAPITRE    XCIY. 

Du  vwant  de  nos  seigneurs  (i)  Théodose  et  Valenmlen ,  pieux  ; 
heureux,  triomphateur  [i],  toujours  auguste  (3),  consul  (4)  pour 
la  quin^éme  fois ,  Auxiltaris  (5)*  homme  illustre  (6),  préfet  du  pré- 
toire (7)  des  Gaules  (8) ,  a  persuadé  (9)  défaire  placer  des  milles  entre 
Arles  et  Marseille  (  10),  Le  premier  mille  commence  ici  {ii). 

Cette  colonne  milliaire  est  placée  sur  une  base 
dont  rinscrîption  nous  apprend  qu'après  avoir  été 
tirée  des  décombres ,  elle  a  été  abandonnée  pendant 
cent  ans  à  la  porte  du  collège  ;  on  y  lit  le  noni  des 

consuls  qui  la  firent  relever  en  1769  (12). 

■■'  ■  ■  I      II     '  '   I  ■ ■        «Il       — — — 

(i  )  DD.  NN,  Dominis  nostris, 

Ql)  Pio,  Felici,  victori,  TRIVJHphatori, 

{3)  AVGusto, 

(4)  CONSuli. 

(5)  auxiLIAKiS,  C'est  le  nom  ou  le  surnom  de  ce  préfet  dvt 
prétoire. 

(6)  JNLUitris, 

(7)  PBafecto  praETOrii, 

(8)  GALUArum. 

(9)  PONI  Statuit, 

.  (10)  MAssilia  AitLLiABlA.  Pontanus  Usmî^mamillaria ,  et  îf 
i^egardoit  ce  mot  comme  ia  traduction  du  mot  theline,  dérivé  de 
%xii  [mamelle],  smhom  que  les  Grecs  avoîent  donné  à  Arles, 
à  cause  de  sa  fertilité.  Spon  rend  ce  mot  par  matre,  parce  que 
cette  colonne  peut  être  regardée  comme  ia  mère  de  toutes  celles 
qui  indiquent  ia  distance  d'Arles  à  d'autres  villes.  Reinesius  lit 
maritima  milliaria,  et  croit  que  cette  borne  marquoit  les  distances 
maritimes.  11  est  évident,  ainsi  que  plusieurs  antiquaires  Tont  re- 
connu, qu'il  est  ici  question  des  bornes  n^iliaires  qu  Auxiliarisu 
a  ,fait  placer  entre  Marseille  et  Arles. 

(if)  Aiille  Passuum  Unum» 

(12)  HOC  AllLLlAHE,  insignepropatria^onumentum,posts^cula 
multa  ê  ruderitus  erutum,  et  Jovi  improho,  attte  ades  sacras  collegii. 


«     I 


CHAPITRE   XCIV.  Jii 

La  tour  de  i'horloge  a  éié  consertée  dans  le  plan 
de  Mansard ,  à  cause  de  sa  beauté. 

Contré  le  mur  de  la  maison  commune ,  du  côté 
de  Féglîse  Sainte- Anne ,  on  voit  cette  pierre  qu'on 
appelfe  vulgairement  la  coianàe  Oonstantini  (i  )  : 


mm 


c 


«il         I  I»***— .^t» 


IMP.    CAES. 
FL.    VAL 

CONSTAN 
TINO 


P;   F.    AVG. 

DIVI 

CONSTAN 
TI    AVi£> 

PII 
FILIO 


[l^VwVWVA/AWWWi 


\ 


jper  annos  C  fxposftum,  restituendum  curavere  et  erexere  noh,  GuII.  de 
Nicoîay  eq,,  Ant,  Jos^  Yvan  in  sup.  Aqu,  cur,  causidicus,  Joan. 
Bapt,  Elsparvier  et  Ant,  Jos,  Fahre ,  Coss^  anno»  MDCCLXIX, 

(i)  MURATORI,  Thés.  258,  8;  260,  i.  SÉGVm ,  Antiq. d'Arles, 
t.  II,  2 d.  Màn,  de  Trévoux,  1701,  çcpt.  ao8,  avec  des  notes  de 

Çqlonu, 


ï  '    1  î 


^IZ  CHAPITRE   XCIV* 

A  l'mpmur.Césaç,  Flavius    VaUrius  (i)  Constantinus  ,  piéux^, 
heureux,  Auguste  (x),  fils  du  divin  Constance  Auguste,  pieux, 

C^te  colonne,  dont  il  nie  subabte  qu'un  frag- 
ment ,  étoit  probablenient  plus  longue  :  elle  repo-^ 
soit  sur  une  base .  et  elle  étpit  couconnée  d'un  cha•^ 
piteau  qui  portoit  une  corniche,  sur  laquelle  étoit 
peut-être  la  statue  de  l'empeE^UJC;^  ce  n'étoit  peut- 
être  aussi  qu'une •  colonne  votive,  qui  ne  portoit 
pas  de  statue. 


■^'^ 


(i)  IMPeratori  FLavio  YAMtiff, 
(i)  pio,  Felici,  AUÇusto, 


:^  .  ■:    ■  ■      •  :   -v. 


CHAPITRE    XCr, 


jf- 


Î'J 


CHAPltRE  XCV. 

^A  Tour  Roland.—  Aiiscamps,  ou  les  Champs- 
Elysées.  —  Chapelle  de  la  Genouillade.  —  Les 
PûTcelIets  ;  iear  ch^elle.  —  Inscriptk>as.  -^  .Canal  4e 
Ja  I>urance.  —  Agueduc.  ~  Eglise  Saiot-Honorat. 
—  Inscriptions.  —  Crypte.  —  Sarcoph^es. 

Messieurs  VinAN  nous  ^jrcygpsèrem  de  feîre  avec 
nous  la  visite  die  rauden  couvent  des  Minimes ,  qui 
lenferme  un.jgrand  nombre  de  mtinumens  antiques  ; 
et  ils  voulurent  bien  diriger  nos  recherches ,  qui 
durèrent  plusieurs  jours. 

En  sortant  d'Arles,  on  entre  sur  une  petite  «çpja- 
pade,  que  la  maison  de  M.  Pomme,  célèbre  mé- 
decin ,  domine  agréablement  ;  on  remarque  stw-tout 
un  petk  édifice  appelé  la  Towr  Roland  ou  la  Domi- 
ftante  (jft.  LXVIII,  fg^  3),  dom  la  façade  est 
formée  de  trois  arcs  placés  i'un  sur  fautre  :  eile  a 
appartenu  à  Tancîen  théâtre,  et  c'est  une  portion  du 
portique  qui  étoit  placé  derrière  fa  scène. 

A  pçine  a-t-on  passé  cetjte  ^pbnade ,  qu'op  se 
jrouve  dans  une  plaine  assez  étendue  ;  tout  y  porte 
Famé  à  h  méiancolie  et  k  la  réflexion.  Non  loin  du 
lieu  où  Tonfouoit  les  chefs-d'œuvre  de  Plaute  et  de 
Tërence  ,  et  sans  doute  aussî^de  grossières  atel- 
lanes ,  la  terre  est  jonchée  de  tpmbes  antiques  jetéip 
Tome  III,  X  Je 


5l4  CHAPITRE    XCV. 

l^éle-méle,  comme  si  le  terrain  avoit  éprouvé  quelqae 
catastrophe  physique  :  on  croiroit  que  ce  lieu  a 
été  soulevé  et  retourné  plusieurs  fobpar  un  trem- 
blement de  terre  ;  mais  ce  bouleversement  n'est  dû 
qu'à  l'avarice  des  hommes  ^  et  non  aux  ravages  des 
élémens.  I^  mahi  sacrilège  des  spoliateurs  a  brbé 
les  couvercles  d'un  grand  nombre  de  sarcophages; 
ou  en  a  rompu  les  extrémités ,  pour  dérober  les  bijoux 
précieux  qu'ils  y  croyoîent  renfermés  :  quelques 
urnes  de  terre  ou  de  verre,  qudques  lampes  (i)  , 
sont  ies  seuls  trésors  qu'ils  y  aient  découverts  ;  leur 
cupidité  trompée  s'est  changée  en  fureur ,  et  leur  rager 
est  encore  attestée  par  la  manière  dont  ces  tombes 
ont  été  jetées  sans  ordre  les  unes  sur  les  autres. 
Cependant  qudques  -  unes  sont  d'une  grandeur  et 
d'un  poids  si  énormes,  qu'on  n'a  pas  tenté  de  ies 
déplacer.  Beaucoup  de  sarcophages  consacrés  par 
l'amour  conjugal ,  la  tendresse  fraternelle  ou  la  piété 
filiale,  ont  été  emportés  entiers  pour  être  employés 
à  des  usages  domestiques,  et  contenir  le  vm,  l'eau  ou 
l'huile ,  servir  au  blanchissage  ou  à  la  préparation  dit 
brûlant  salpêtre,  qui  en  à  corrodé  les  ornemens  :  des 
amateurs  des  arts  eh  ont  retrouvé  plusieurs  dans  les 

(  i  )  Une  ancienne  tradition  veut  qu'on  y  ait  trouvé  des  iiunpe^ 
perpétuelles;  mais  on  rcconnoit  aujourd'hui; que  l'existence  de. 
ces  lampes  est  impossible^  et  l'on  sait  à  quel  phénomène  on  dcût 
attribuer  ce  qu'on  en  raconte.  Je  Tai  indiqué  dans  mon  DicdoMn 
$tétire  J^i  kaux-am,  ardcle  LAMPES, 


CHAPITRE    XCV.  515 

celliers  ,  les  cWsîriès  ou  les  ateliers^ ,  et  en  ont 
décoré  leurs  musées  ;  l'on  en  conserve  à  Lyon  ^ 
à  Aix,  à  MarseiBe(i)  ;  je  les  ai  décrits  précédem- 
ment. Malgré'  ces  spoKations^uccesèîves ,  il  en 
reste  encore  un  très-grand  nombre  que  Ton  voit 
hors  de  la  terre;  pilusieurs  y  sont  sûrement  encore 
,  enfouis  (i).  L'administration  municipale  devroît 
empêcher,  par-totis  tes  ttioyens  qui  sont  eh  soii 

.    (1)  Voyi^h  note  suivante»  ■ 

{1)  Charles  IX  et  Carficrme  de  Médicis  /étant  à  Arïes ,  dSoîi^ 
lièrent  plusieurs  tonïkeaux  au  duc  de  Savoie  et  au  princcrde 
Lorraine,  Le  monarque  français  et  sa  mère  firent  enlever  liuit 
tolonnes  de  porpTiyre  et  plusieurs  beaux  sarcophages  pour  les 
transporter  à  Paris  ;  niais  fe  bateau  fut  submergé  *au  pont  Ha 
Saint-Esprit,  et  Je  IVhâncb recèle  encore  ces  oijj^sîprécieux.  Lé 
cardinal  Barberin  a  aussi  obtenu  de  fa  viite  cJ^Airles  la  permissioa 
d^cnievcr  plusieurs  beaux  tpmbeaùx,quH  fît  transporter  en  Italie, 
En  1 635 ,  ie  marquis  de  Sairit-Chamont  en  reçut  treize  en  présent 
du  corps  municipal.On  en  donna  trois  autres ,  en  iC^o,  à  Aiphdnsè 
du  Pkssis,  cardinal  ardieveque  de  Lyonj.  ils  furent  placés  dans 
sa  maison  de  campagne  :  celui  où  l'on  a  sculpté  la  chasse  de 
Méléagre,  tt  qiie  fs.rdéctitytomeI:'r\  page  fjf,  était  peut-être 
de  ce  noinbre.  M*;  de.Pç^ussis  en  a  obtenu  un  pour  lui  servir  de 
tombeau;  supra, ^,  U^  p.  ^5^1  MM.  de  Pçiresç  de. Bon,  ^^leur 
de  Fpurqûes,  le  comte  de  Berton-Crillon,,  le  marquis  d*An(ani 
le  marquis  de  Caumont,,  M.  le  Bret,  intendant  de  Provence, 
M.  Seguin ,  ont  aussi  enlevé  des  tombeaux  et  plusieurs  curiosités 
tirées  des  Champs-Elysées.  Un  des  plus  curieux,  sarcophages 
d'Arles ,  consacré  à  Memprius ,  comte  de  la  Mauritanie ,  a  été 
emporté  par  les  ordres  de  M.Charles  Lacroix,  alors  préfet',  et  est 
aujourd'hui  un  des  principaux  ornemens  du  musée  de  Marseille  j 
^uprâ,  p,  151. 

z  k  z 


/• 


jj^  CHAPITRE    XCy. 

pouvoir  ,  qu'oa  «'enlève  îi  l'a¥ wff .  auorn  de  «i 

tombeaux  (i). 

Les  lettrçg  d  H  (2) ,  les  fc^mulas  dfô  iœ<;ripiîaps, 
Je$  histoires  qui  soot  représentées  sht  iés  sarcophages  ^ 
fout  prouve  que  c^,  cimetière  ^^  d'abord  été  coni- 
sacré  par  les  païens  ;  il  a  ensuite  servi  |i  recevoir  de$ 
tombes  chrétiennes.  C'est  pourquoi,  on  a  conservé 
^  ces  lieux  le  nom  SAliscamp^i^^xPl-iki^yChAmpt^ 
Éiysées  'x)  :  on  croit  y  voir  errer  autour  de  soi  le$ 
mâiies  des  premiers  habitans  de  la  colonie  arlésienne , 
çt  ks  âmes  des  fondateurs  du  Uiristiani^me  dans  cette 
partie  des  Gaules, 

Une  petite  chapelle  gothique,  ^  demi  ruinée^ 
placée  sur  le  chemin  de  la  Crau ,  afoute  encore  è 
i'efïet  pittoresque  de  cet  élysée  :  elle  est  déd^  à 
S.  Jacques  et  k  S.  Philippe.  La  CTOyance  vulgaire 
est  que  Jésus  -  Christ  parut  lui  -  miait  au  fniliea 
des  prélats  qui  b  oonsacièrent,  pour  bénir  ce  cîme^ 
tière,  et  qu'en  se  baissant  il  laissa  sur  une  pierre 


(1  )  M.  k  préfet  èa  département  dv  RhSiie  vrent  de  rendre  une 
ordonnance  pour  «npêcber  k  destruction  des  beaux  aqueducs  de 
Lyon.  Je  me  plais  à  penser  que  hion  article  relatif  à  cts  aqueducs 
^,  éveillé  Tattention  de  ce  magistrat  sur  cet  obfet,  et  proroqué 
cette  dédsion. 

(a)  Dits  Aîanthus, 

(3)  Il  y  a  un  endroit  particulier  où  \c$  tombes  «ont  plus  nonx^ 
breuses  et  les  unes  sur  les  autres^  et  qu'on  appelle  k  Champ  tUs 
Mânes. 


Teiripreinfte  de  son  genou  :  €^?st  pourquoi  cette 
diapelle  est  appdhée  la  Gencuiltade. 

L'intérêt ,  cfê^  exdté  par  les  souVenks  d'utie  hautef 
antîqnhé  et  tes  semknens  religieux ,  s'accroh  eti'- 
core  k  la  vue  d'un  autre  monument  ^  qui  est  sur  W 
diemin  é^Arles  aux  Môumes  ;  c^est  amsi  une  dia* 
pelle,  mais  si  petSte  et  d'une  si  bumble  apparence , 
qu'on*  la  croiroit  peu  digne  d'être  un  des  sanctuaires 
de  h  Divinité  :  combien  cep^dant  son  importance 
est  relevée  par  te  nom  de  ses  fondateurs ,  de  ce^ 
Porcellns ,  si  riches ,  si  valeureux ,  dont  on  raconté 
tant  d'actions  héroïques  !  On  se  rappdie  ce  bravé 
Guilfaume  des  Porcellets ,  seigneur  en  partie  de  h 
ville  d'Aria  et  baron  de  Provence,  qui  avoit  voué 
ses  services  à  Ric^aM ,  roi  d'Angleterre ,  si  bien 
nomtife  Cmr-àe-limf  et  qui  sauva  la  vie  à  son  illustré 
mahre.  Ridiard  éloit  tombé  dans  une  embuscade  : 
des  Porcellets  s^écria,  Je  suis  It  tri,  et  attira  ainsi  sur 
iai  toUs  les  dards  des  Sarras&)s.  Le  sultan  Salacfin, 
ami  de  la  vaillance  et  de  fhimlanfté ,  au  lieu  de  punit 
ce  vertueux  mensonge ,  fit  à  son  nobfe  prisonnier 
le  traitement  le  plus  distingué  ;  et  Richard ,  pour 
témoigner  f  estime  qu'if  lui  pôrtoît ,  donna  pouf  sa 
^nçon  dix  des  plus  riches  et  des  phis  puissant 
chefs  qui  étoient  en  sa  puissance.  Lé  nom  de  Por- 
cellets  étoit  devenu  si  célèbre  et  si  respecté  darm 
rOrient ,  que  les  sultans ,  pour  la  garantie  des  traitas, 
demandoient  la  remise  de.^ces  iiAportames ,. des 


jiS  Chapitre,  xcv; 

otages ,  ou  la  parole  d*un  Porceileu.  Enfin  ^  cfehs  f  hor- 
Tible  massacre  des  vêpres  siciliennes ,  Guillaume  III 
des  Porçeilets"  fm  le  seul  épargné ,  à  cause  de  i'kn- 
pression  singulière  que  sa  veiftu  avoît  faîte  sur  Tes- 
prit  du  peupie,  '   .  i    .      • 

On  voit  aussi  près  de  là  une  pdite,  reste  vénérable 
de  l'antique  monastère  qu'on  prétend  que  S.  Césaîre 
fonda  dans  le  yi/  siècle, 

Les  monumens  de  la  religion  sont  augustes  ;  ceux 
de  l'héroïsme  militaire  sont  brillans  :  mais  ceux  qui 
rappellent  le  dévouement  de  l'homme  compatissant 
et  sensible,  ont  un  charme  qui  ne  tient  ni  à  la 
durée  des  temps ,  ni  aux  opinions.  Celui  qui  visi- 
tera Arles  avec  mon  ouvrage,  me' saura  gré  sans 
doute  de  l'avertir  de  s'arrêter  devant  un  humble 
tombeau  de  forme  pyramidale ,  qui  est  peu  éloigné 
de  la  chapelle  de  la  Genouîllade.  Là  furent  ensevelis 
les  consuls  généreux ,  les  prêtres  dignes  de  leur  noble 
ministère,  les  hommes  charitables  et  vertueux,  qui 
ont  feit  le  sacrifice  de  leur  vie  pour  assister ,  con- 
soler ,  servir  leurs  concitoyens  pendant  la  peste  de 
J720  (i). 

Près  de  la  chapelle  des  Porcellets,  nous  lâmes 
cette  inscription  (2)  sur  une  tombe  que  Julîa  Zozime 
avoît  fait  faire  de  son  vivant  pour  elle  et  pour 
C.  Pomponius  Polycarpus  son  mari  : 

(i)  Infrà,  chap.  G. 

{%)  DVJAOiiT ,  SjKUcU ,  100. 


ilil         iMM"    Il 


-    ■«^ 


Chapitre  xcv. 


5»jr 


I 

» 
i 


lYLlA.    ZOZIME 


C.   TOMPONIO.    POLY 


CARPO.  MARITO.   PIEN 


TISSIMO 


ET^  SIBI.  VIVA.  POSVIT 


Le  canal  de  dérivation  de  la  Durance ,  qui  sert 
aux  arxosemens  d'une  partie  de  la  vaste  plaine  de 
la  Qrau  et  des  environs  de  ia  ville  d'Arles,  passe 
près  du  couvent  des  Minimes  :  ce  canal  est  entre- 
tenu ,  par  une  compagnie ,  avec  un  grand  soin.  A 
quelque  distance  de  là ,  du  côté  de  l'ouest ,  ce  même 
canal  coule  dans  une  espèce  d'aqueduc  soutenu  par 
une  rangée  de  quatre-vingt-quatorze  arcades ,  et 
qui  a  été  bâti  sur  un  ancien  aqueduc  romain.  Ce 
canal  est  une  suite  de  celui  de  Craponne. 

La  porte  du  couvent  des  Minimes  est  entière- 
ment dégradée.  L'église  étoit  consacrée  à  S.  Honorât , 
dont  on  venoit  y  révérer  le  tombeau.  On  attribue 
sa  fondation  à  S.  yirgile,  dans  le  vil.*  siècle.  Elle 

,    est  à  trois  nefs  :  sa  forme  est  très- irrégulière  ;   il 

* 

n'en  reste  plus  que  les  murs ,  sur  lesquels ,  malgré 
les  mutilations  opérées  par  le  sabre  des  soldats  de 
Farmée  révolutionnaire  et  les  dégâts  qu'y  font  les 
enfans ,  on  aperçoit  encore  beaucoup  de  monumens , 

Kk  4 


jlO  CHAPITRE  XCV. 

qui  presque  tous  rappellent  les  prmcipftuz  traits  de 
l'Ecriture  sainte.  On  pourroît  y  faire  un  cours  inté- 
ressant d'histoire  sacrée  y  en  observant  lés  idées  que 
les  premiers  chrétiens  avoient  sur  certaines  traditions 
aujourd'hui  contestées,  et  la  manière  dont  leurs  ar- 
tistes représentoient  les  événemens  qui  s'y  rapportent  ; 
on  y  puiseroit  aussi  beaucoup  de  détails  r'^Iatifs  aux 
mœurs 9  aux  usages  (i)  et  aux  costumes  du  temps. 

Le  monogramme  du  Christ  ^pl.  LXJV,  fg,  2) , 
renfermé  dans  une  belle  couronne  de  chêne  et  em- 
porté dans  les  airs  par  l'aigle  romaine ,  qui  le  tient 
dans  son  bec  et  dans  ses  serres,  est  une  nobfe  et 
belle  allégorie  du  triomphe  du  christianisme  ,  dont 
tout  rappelle  ici  les  premiers  temps.  Ce  fragment  dé 
bas-relief  est  au-dessus  du  bénitier. 

Sur  un  pilier  de  la  nef  on  lit  : 


VIII:    Kt  :     OCOBRIS:     OBI 

IL  î    PONCIA:    ^E:    AQVE 

RIAî     ANNO:    ^OrtlII/ICE: 

INCARNALIONIS:     Oî  :     G:    h 

XXIIil:     ORATE:     PRO:     EAÏ 


^ 


•♦r* 


w*m 


'^tmmmmmrm'm^ 


J 


ï£ 


(1)   Vqyei  ce  que  far  déjà  dit,  tome  /,  page  pB ,  et  tome  III, 
pa^e  16^,  sur  l\itHîté  et  fimérét  àti  monumews  eftretieiw. 


^ki 


i 


CHAPITRE     XCV.  J2r 

Ponce  d^Aigaières ,  qui  est  morte  le  8  des  fcalendes 
^octobre  de  Fan  de  Fîncarnatîon  1174»  devoit  être 
nièce  ou  peut-être  fille  de  Polis  d'Aiguières ,  consul 
de  fa  viife  en  1 1 78 ,  et  parente  d'Imbert  d'Aiguières, 
<|ui  fut  nommé  archevêque  d'Arles  en  1 190. 

La  première  chapelle,  à  l'entrée,  étoît  celle  de 
Renaud  d'AHein.  Nous  y  remarquâmes  un  beau  sar- 
cophage cfirétîen*en  marbre  (pi.  LXIV,fg,  ^},  sur 
kquei  on  voit ,  à  droite ,  Moïse  qui  fait  sortir  l'eau 
du  rocher  :  les  Hébreux,  q\ii  se  désaltèrent,  ont  un 
bonnet  pareil  à  cekiji  que  nous  avons  déjà  observé 
sur  un  sarcophage  du  musée  de  Marseille  (  i  )  ;  ce  qui 
confirmel'explîcation  que  j'en  ai  donnée.  II  paroît  que 
ce  bonnet  étoit  particulièrement  en  usage  panni  fes 
Juifs,  au  temps  où  ces  sarcophages  ont  été  sculptés. 
Le  second  groupe  nous  ofFre  Jésus-Christ  entre  ses 
£scipIeS)  et  tenant  le  livre  de  fa  loi  :  des  deux 
apôtres  qui  sont  à  ses  câtés  ,  celui  qui  est  imberbe 
est  probablement  S.  Jean  fils  de  Zébédée;  et  celuî 
dont  une  barbe  épaisse  omlA^age  le  menton,  doit  être 
S.  Pierre  :  tous  deux  étoient  les  disciples  les  plus 
chéris  de  Jésus-Christ.  Plus  bas  est  le  paralytique 
qui  emporte  son  lit  après  sa  guérison.  Plus  loin ,  le 
prince  des  apôtres  est  mieux  caractérisé  par  le  coq  qui 

'  (t)  On  le  remarque  encore  sur  d'autres  monumens.  BoTTARI^ 
pt  XXXII, .XXXVI  et  XLI,  et  BuONAROTTi,  Vetri  antichi,  p.  i- 
Jc8BS«>Clirist  »  sur  ies  sarcophages  chrétiens ,  est  quelquefois  faw 
même  i^ifFé  d'un  bonnet  semblaMe.  BottaW,  XXXI  et  CXXKV. 


522  CHAPITRE    XCr. 

raccompagne  :  il  proteste  à  Jésus- Christ  de  ne  pLtnaaf 
l'abandonner;  et  Jésus-Christ  hii  annonce  qu'avant 
le  chant  du  coq  il  Taura  renié  trois  fois.  II  est  pro- 
bable que  sur  la  partie  fragmentée,  à  gauche,  il  y 
avoit  un  corps  enveloppé  de  bandelettes  comme  les 
momies ,  et  que  le  groupe  qu'on  y  aperçoit ,  repré- 
sente la  résurrection  de  Lazare,  ainsi  que  nous  la 
verrons  figurée  ailleurs.  Plus  près  est  la  multiplica- 
tion des  pains  et  des  poissons  :  ordinairement  Jésus- 
Christ  touche  les  pains  avec  une  baguette  (  i  )  ;  -pour 
prouver  la  pubsance  de  Dieu,  l'artiste  a  figuré  le 
miracle  de  la  multiplication  déjà  consommé ,  et  a  fait 
voir  les  paniers  dans  lesquels  les  apôtres  recueillirent 
les  restes.  Le  nombre  des  paniers  est  de  sept,  con- 
formément au  récit  de  S.  Marc  (2)  ;  ce  qui  prouve 
qu'il  est  ici  question  de  la  seconde  multiplication , 
qu'on  regarde  comme  un  symbole  de  Feucharistic. 
'    Jésus- Christ  bénit  les  pains  et  les  deux  poissons , 
an  y  imposant  les  maiiïs  avant  de  les  distr9>uer  : 

(1)  BOTTARI,  pi.  LXIX. 

(2)  £r  sustulerunt  quod  superfuerat  de  fra^enth  f  septem  sportas 
(  Marc.  Vlll,  8  ).  S.  Mathieu  et  S.  Je*an  disent  qu'il  y  en  avoit 
douze.  Et  tulerunt  reliquias ,  duodecim  cophinos  fiagmentorum  pîenos 
(Math.  XIV  ,  20).  jEV  impleverunt  duodecim  cophinos fragmentorum 
ex  quinque  panibus  hordeaceis  qua  superfuerunt  his  qui  tnanducayerant 
(JOH.VI,  13  ).  —  Je  ne  sais  pourquoi  BOTTARI  sur  un  autre 
sarcophage,  S  culture  sacre  j  1 ,  169,  ne  voit,  que  six  pains  ;îi  7  en 

a  sept  comme  ici ,  six  à  terre  et  un  dans  ics  mains  d'un  dei  soi* 
vans  de  Jésus-Christ, 


J 


CHAPITR]^    XCV.  525 

ide  là  est  venu  Fusage ,  très-ancîen  dans  FEglise , 
de  présenter  le  pain  bénit*  Jésus-Christ  est  encore 
ici  sous  une  arcade  soutenue  par  deux  colonnes  ; 
il  étend  les  mains,  et  paroi t  recommander  à  celui 
qui  tient  un  rouleau,  et  qui  est  peut-être  eocore 
Tapôtre  S.  Jean ,  de  publier  la  loi  de  Dieu. 
.  Dans  l'escalier  des  catacombes  il  y  a  un  sarco- 
phage de  marbre,  où  les  histoires  sont  encore- plus 
nombreuses  ( pL  LXVIl ,  fg,  i)  :  il  est  partagé 
en  deux  bandes  ;  ce  qui  annonce  qu'il  étoit  destiné 
à  recevoir  deux  corps  (i).  Le  milieu  de  la  bancfe 
supérieure  est  occupé  par  une  coquille,  dans  laquelle 
on  voit  deux  personnages ,  sans  dcmte  celui  quÎNjr 
a  été  inhumé  et  son  épouse  :  celle-ci  porte  au  cou 
un  collier ,  et  au  bras  gauche  un  bracelet  ;  elle  pose 
la  main  sur  Tépaule  de  son  mari ,  qui  tient  un 
rouleau.  ^ 

Examinons  actuellement  la  série  des  histoires ,  en 
commençant  de  gauche  à  droite.  Le  premier  groupe 
est  composé  de  quatre  figures  :  un  vieillard  assis , 
vêtu  d'une  tunique  et  Swxipallium ,  drapé  à  la  ma- 
nière des  philosophes  grecs ,  reçoit  l'hommage  que  ' 
lui  présentent  deux  jeunes  gens  ;  l'un  est  Caïn ,  qui 
apporte  au  Seigneur  les  fruits  qu'il  a  fait  produire 


(  I  )  On  les  appeïoit  hisomum ,  trhomum  et  quadrisomum ,  seion 
qu'ils  étoient  destinés  à  contenir  deux,  trois  ou  quatre  corps. 
BoTTARI,  Sculture,  pi.  XXXIX. 


524  cmapitke  tcy. 

à  kl  teire ,  fécondée  par  ^n  (ra?aH  ;  YnntÉe  est  Abet , 
qui  se -livre  à  la  vie  pastorale,  et  qui  offre  un  des 
premiers  nés  de  son  tfoupeau  (i).  Dieu  semble  re- 
garder Abel  avec  plus  de  complaisance»  quoîquH 
soit  plus  éloigné  de  lui  que  Caïn  son  aîné ,  et  il  fève 
les  mains  pour  bénir  ses  dons (2}.  Caïn  et  Abeî,  l'un 
agriculteur  et  f autre  berger,  sont  vêtus  de  la  tu- 
nique retroussée  que  cène  classe  dTiommes  portoic 
ftu  temps  où  ce  sarcophage  a  été  sculpté.  Nous 
▼oyons  souvent  le  è^n  Pasteur  représenté  de  la  même 
manière.  On  ne  peut  bien  déterminer  quel  est  fe 
vieillard  que  le  ^cuIpteur  a  placé  derrière  Timage  de 
Dieu,  que,  selon  f  usage  ordinaire,  il  a  fiiit  plui 
grand  que  les  autres  hommes.  ;  ce  île  peut  être 
qu'Adam,  puisque  lui  et  ses  fils  étoient  alors  lei 
^euls  hommes  qui  fussent  au  monde. 

Ces  histoires  sont  placées  sans  ordre  ;  de  sotte  qui 
cette  première  §cène,  qui  nous  reporte  au  berceau 
du  monde,  succède  Tarrest^tion  de  Jésus- Christ  par 
les  Juifs  4ans  le  fardin  des  Oliviers  :  les  bonnets  dont 
sont  coiffés  ceux  qui  raccompagnent ,  caractérisent 
les  Hébreux ,  comme  nous  l'avons  déjk  vu,  et  servent 


(i )  FuU aueem  Abelpastor  opium,  et  Coin  agricola,  Factum  est  au- 
tem post muitos  dies  utofferret  Càin  dejructibus  terra  munera  Domino; 
Abel  quoque  obtulit  eU  yrtinogtnitis  gMgn  suu  Gènes.  IV  9  2*4. 

(a)  Respexit  Dominus  ad  Abel  et  ad  munera  ejus  ;  ad  Gûn  verè  a 
ari  munera  illius  non  respexit.  Ibid.  4,  j. 


■—    i 


GHAPITRC   XCV,  52J 

ici  à  Texplicatioa  àe  ce  groupe.  Lei  sarcophages 
chrétiens  nous  offrent  plusieurs  autres  exemples  des 
sujets  de  l'ancien  et  du  nouveau  Testament  ainsi 
inélangés. 

C*est  encore  au  nouveau  Testament  qu'appartient 
ja  scène  suivante  :  Jisus  guérit^  en  Im  touchant  les 
yeux  y  l'iay^ugle  ^e  Jéritho ,  appelé  Bartimée  (  i  )  ;  1» 
n^aîn  droite ,  dont  celui-ci  porte  ordinairement  son 
Mton,  est  cassée  ;  Jésus  tenoit  un  rouleau  dans  la 
inain  droite,  pour  prouver  que  ce  nûrade  ne  se  hir 
tsoit  qu'en  confirmation  de  l'évangile  ;  et  c'est  pour*^ 
iguoi  l'on  voit  un  de  ses  disciples  derrière  ^ave^g{e. 

Nous  aperçevons^nsuite  Moïse  vêtu  de  la  tunique 
et  du  manteau;  il  a  un  pied  sur  une  pierre  pour 
indiquer  qu'ii  est  sur  ie  mont  Sinaï  :  il  reçoit  de  Dieu 
même  les  tables  de  la  lot  L'Éteinel  est  figuré  par 
une  main  qui^  sort  de  la  nue  ;  usage  qui  s'est  con^ 
serve  jusque  dans  le  moyen  âge,  et  auquel  nou$ 
devons  le  symbole  impérial  qu'on  appelle  main 
de  justke  (z).  Quoique  les  premiers , chrétiens  figur 
rassent  très-fréquemment  les  anges  avec  des  fonit^ 
humaines^  ils  avoient  un  grand  éIoigneme;nt  potîir 
représenter  ainsi  Dieu  lui-même. 

C'est  encore  la  main  de  Dieu  qui  retient  le  glaive 
avec  lequel  Abraham,  soumis  à  la  volonté  céleste, 

(i)  Marc.  X,  4«. 

(s)  Dktmtmirif  daitm^Mm^  au  mot  MAt-if. 


^l6  CHAPITRE   XCV, 

va  sacrifier  son  propre* fils  sur  un  autel.  Ici  le 
sculpteur  s'est- éloigné  du  récit  de  l'Ecriture  :  Fautel 
est  une  pierre-  carrée ,  sculptée  selon  l'usage  des 
Romains  ;  le  feu  brûle  dessus ,  et  Isaac  est  au  pied  ; 
tandis  que  l'Ecriture  dit  positivement  qu' Abraham 
plaça  lui-même  son  fils  au  milieu  du  bois  qu'il 
aVôît-  rassemblé  sur  l'autel.  Les  pierres  qui  s'élèvent 
derrière,  indiquent  la  montagne  qui  avoit  été  dési- 
gnée par  l'Eternel  pour  ce  cruel  sacrifice;  Abraham 
est  accompftjgné  de  deux  serviteurs  ;  et  cependant  î£ 
les  lai^à  au  pied  dé  la  montagne  j  sur  laquelle  3 
monta  seul  avec  son  fils,  qui  portoit  lui-même  lé 
glaive  dont  il  devoir  être  firappé  et  le  bois  qui 
étoït  destiné  à  le  consumer.  Nous  rie  voyons  pas  rcî 
le  bélier  qui  fut  -immolé  à  sa  place.  Celle  histoire 
se  retrouve  sur  un  grand  nombre  de  sarcophages , 
mais  toujours  avec  des  circonstances  variées  selon  le 
goût  d^  chaque  sculpteur. 

Lesr~  groupes^  dont  se  composent  les  deux  scènes 
que  Reviens  de  décrire ,  nous  fi^nt  voir ,  des  deux  côtés 
de  la  coquille  qui  contient  les  bustes ,  deux  repré- 
sentations symétriques;  et  c'est  sans  doute  parce 
qu'elles  forment  ce  que  nous  appeloris  des  pendans  ', 
que  l'artiste  les  a  placées  ici. 

,  Nous  voyons  encore  le  miracle  de  !a  multipli- 
cation des  cinq  pains. d'orge  et  des  deux  poissons, 
avec  lesquels  Jésus-Christ  nourrit,  à  Qethsaïde.,  plus 
de  cinq  miilè  hommes,  sans  compter  les  femmts.  et 


CHAPITRE   XCV.  51/ 

ïes  enfîins{i).  II  impose  lesnîains,  ainsi  que  nous 
l'avons  vu,  pour  opérer  ce  prodige. 

La  figure  qui  est  assise  à  l'extrémité,  termine  cette 
suite  de  scènes  de  l'Ecriture ,  comm^  figure  de  Dieu 
recevant  les  dons  de  Caïn  et  d'AljflB^a  commencée. 
C'est  donc  encore  un  pendant  placé  là  pour  la  symé- 
trie :  mais  quel  est  le  sujet  qu'on  y  a  représenté  î  II 
paroîtque  c'est  le  malheureux  Job,  déjà  frappé  par 
la  main  de  Dieu ,  couvert  d'ulcères ,  et  assis  sur  uti 
monceau  de  cendres  :  près  de  lui  on  voit  deux  des 
trois  amis  qui  étoient  venus  le  visiter  ;  ils  sont  coiffés 
du  bonnet  qui  caractérise  les  Juifs  :  celui  dont  la 
main  est  étendue,  est  probablement  Éiiphaz  ou  Sor 
phar ,  qui  reproche  à  Job  son  impatience ,  et  hxi 
dit  que  nui  n'est  puni  de  Dieu  sans  avoir  péché  (2)  ^ 
ou  peut-être  Bîldad,  qui  lui  conseille  d'espérer  la  fin 
de  sesanaux  (3). 

Le  groupe  qui  commence  la  série  inférieure  en 
partant  de  gauche  k  droite,  nous  fait  voir  la  chaste 
Susanne;  elle  est  souvent  représentée,  comme  ici,  la 
tête  couverte  d'un  voile  (4)  :  les  arbres  indiquent  le 
verger  dans  lequel  cette  jeune  femme  fiit  surprise 
par  deux  vieillards  ;    on  n'en  voit  ici  qu'un.  Le 


*•-*■ 


(1)  S,  Math,  xiv,  19.  S.  Luc.  ix,  13.  S.  Johan.  vi,  6. 
{a)  JoB,  IV,  xr. 

(3)  Uem,  VIII. 

(4)  BuONARQTri  I   Vetri  antichi ,  page  i  ;  et  BOTTARI,  pï. 

%xxiu 


528  CHÂPITJl£   KCV. 

niiracle  de   Feau  changée  en   vin  aux   aoces  <fo 
Cana ,  vient  après  :  probablement  le  Christ  tenoît 
à  la  main  la  baguette  avec  laquelle  on  le  voit  tou- 
cher I^  vases  Mjt4'autres  sarcophages  ;  il  paroît  <|ue 
ces  vases  étouJp^'une  pierre  creusée.  Il  n'est  p^ 
aisé  de  détennuier  ce  que  signifie  le  serpeiu  entor^ 
liflé  autour  d'un  arbje ,  devant  Jequel  est  un  bomine 
vêtu  de  la  tunique  et  du  fmUmm,  Ce  serpent  n'est 
pas  asseK  élevé  pour  être  le  nehustan,  ou  serpent 
d'airain ,  que  Moïse  éleva  dans  le  désert,  Bottari,  en 
'expliquant  un  groupe  à-peu^près  jemblabte  (t^,  a 
pensé  que  ce  .pouvok  être  le  serpent  qui  étqît  a^oré 
par  les  Babyloniens,  et  que  Daniel  fit  mourir  en  lui 
donnant  un  gâteau  composé  de  poix,  de  graisse  et  <fc 
poils  (2).  Ce  seroit  donc  le^ophète  que  notts  ver- 
riiMis  m  au  moment  de  présenter  au  dieu  de  Baby-« 
lone  ce  fatal  mélange.    Cette  explicatbn  est ,  du 
reste,  très*conjecturale. 

L'histoire  de  Jonas,  si  connue  et  si  fréquemment 
répétée  sur  les  sarcophages  chrétiens  (  j) ,  vient  en-, 
suite.  La  barque  est  montée  par  trois  raatdots  ;  ils 
sont  nus,  afin  d'être  plus  en  eut  de  faire  les  manœuvres 
néce^res  pour  échapper  et  l'horrible  tempêie  qui 
menace  leur  vie  :  deux  font  mouvoir  la  rame;  celui 
qui  est  dvis  le  milieu  et  qui  paroît  s'arracher  les 


(i)  Sculture  Cfistiane,  pf.  XIX. 
(3)  Suprà,  page  177. 

'*^  cheveux  ^ 


CHAPITRE   XCr.  52^ 

rfieveux ,  est  celui  qui  a  été  chargé  d*exécuter  l'arrêt 
ifàtal ,  et  de  jeter  Jonas  à  la  mer  (  i  )  :  près  de  la 
barque  est  le  grand  poisson  que  Dieu  avoît  destiné 
pour  engloutir  le  malheureux  prophète  (2).  A  peiné 
le  corps  de  Jonas  sort- il  de  la  barque,  qu^il  est  déjk 
avalé  :  plus  loin  le  monstre  lève  la  tête  pour  fairô 
pénétrer  sa  proie  plus  avant.,  A  droite  de  la  barque, 
on  voit,  encore  ce  même  poisson  qui>  selon  Tordre  de 
Dieu,  rejette  de  son  sein  le  prophète,  après  Ty  avoir 
conservé  vivant  pendant  trois  jours  (3).  Ici  le  sculp- 
teur a  réuni  deux  circonstances  :  Jonas  est  représenté 
couché  sous  un  arbre  ;  le  prophète  nous  apprend  lui- 
même  que  Dieu.,  irrité  une  seconde  fois  de  ce  qu'il 
n'avoit  pas  trouvé  son  arrêt  contre  Ninive  assez  sévère^ 
fit  croîti'e  pendant  son  sommeil  un  arbre  (4)  qui  le 
couvroit  de  son  ombrage ,  et  qu'il  envoya  ensuite  iiil 
ver  qui  fit  périr  cet  arbrei  L'artiste  a  figuré  Jonas 
près  du  monstre  qui  l'a  vomi  et  sous  Tarbrr^  qui  le 
protège  >  sans  considérer  le  temps  qui  s'est  écoulé 
dans  cet  intervalle.  Quant  à  la  nature  de  la  plante 
itLpY>e\ùe>kikaion,  sous  laquelle  Jonas  s'endormit,  S.  Jé- 
rôme et  S.  Augustin  ne  sont  pas  d'accord  :  le  pre- 
mier  veut  que  ce  fût  uiie  eucurbîtacée,  et  le  second 
dit  que  c'étoit  un  lierre.  Les  Septante ,  partageant 
l'avis  de  S.  Jérôme  ,  prétendent  que  c'étoit  une 


(i)  Jonas,  î*  (3)  Um^  nu 

(1)  Idem,lU  (4)  Jdem,  IV* 

Tonti  nié  1*  I 


530  CHAPITRE   XCV. 

coloquinte  ;  et  plusieurs  bas-reiiefs  nous  rq>résentent 
Jonas  endormi  sous  un  arbuste  dont  les  fruits ,  sem« 
biables  à  des  coloquintes,  menacent  son  nez  de  leur 
chute.  Les  commentateurs  plus  modernes  pensent, 
avec  raison,  que  cette  plante  est  lepalma  Christi  (  i  ), 
qui  s'élève  très-haut  dans  iïgypte  et  dans  la  Pales* 
tine,  où,  du  temps  d'Hérodote ,  on  le  nommoit 
kiki  (2) ,  comme  on  le  fait  encore  à  présent.  II  pa- 
roît ,  par  la  forme  des  feuilles  ,  que  le  sculpteur 
s'est  ^conformé  à  la  tradition  qui  faisoit  regarder  cet 
arbrisseau  comme  un  lierre. 

Derrière  est  le  Seigneur,  qui  étend  la  main  sur 
Jouas  y  et  qui  ordonne  au  ver  de  Êiire  périr  le  végé- 
tal sous  les  feuilles  duquel  le  prophète  a  trouvé  un 
abri. 

Plus  loin  Adam  et  Eve  sont  punis  de  leur  déso<^ 
béissance;  le  serpent  qui  les  a  trompés,  rampe  autour 
de  l'arbre  de  la  sdence  du  bien  et  du  mai  ;  honteux 
de  leur  nudité ,  ils  se  couvrent  de  leurs  mains.  A 
côté  d'Adam  est  une  gerbe  de  blé,  pour  annoncer 
qu'il  ne  devra  plus  désormais  sa  subsistance  qu'à  soU''  • 
labeur. 

Daniel  dans  la  fosse  aux  lions  termine  cette  sculp^ 
ture  :  il  est  nu ,  et  étend  les  bras  pour  demander 
au  Seigneur  qu'il  le  préserve  de  la  fureur  de  ces 

(1)  Ricinus  communes. 
(jj  Herod.  h,  94. 


ftrlimaujc  (i).  L'Écriture  dit  que  les  lions  étoient  au 
nombre  de  sept;  maïs  les  peintres  et  les  sculpteurs 
n'en  représentent  ordinairement  que  deux  (2)»  L'un 
des  hommes  qu'on  voit  auprès  de  lui ,  est  probable- 
ment Habacuc,  qu'un  ange  avoit  transporté  dansBa^ 
bylone  pour  quil  doimât  à  manger  au  prophète  (3)  ; 
l'autre  doit  être  Darius  le  Mède ,  qui  vient  voir  si 
Daniel  a  été  dévoré ,  et  qui  s'étonne  de  le  trouvei" 
encore  vivante  Le  prophète  a  les  mains  étendues  pout 
prier  le  Seigneur.  Eusèbe  dit  (4)  en  effet  que  Darius 
le  trouva  dans  cette  attitude.  Cette  histoire ,  ainsi  que 
celle  des  trois  jeunes  hommes  dans  la  fournaise ,  est 
très-commune  sur  les  sarcophages  ;  on  les  regarde  (  j  ) 
comme  des  allégories  de  la  constance  avec  laquelle 
le  vrai  chrétien  supporte  les  plus  cruelles  persécu^ 
lions. 

Les  histoires  figurées  sur  ce  sarcophage  ne  sont 
}x>int9  comme  on  le  voit,  classées  dans  un  ordre 
chronologique  ;  le  sculpteur  a  plutôt  cherché  la 
symétrie  en  opposant  toujours  les  groupes  les  ims 
aux  autres  :  ainsi  la  barque  occupe  le  milieu;  de 
chaque  côté,  les  monstres,  les  arbres ^  les  person-* 
nages ,  sont  placés  en  opposition* 


un  t    ■       I     wn 


(1)  Daniel,  VI,  14. 

(a)  BOTTARï,  Piûurt  sactt,  II>  J  #  32 ,  CC»  104* 

(3)  Daniel,  XIV,  37 >  39. 

(4)  EUSEB.  Orat  in  SS.  Gret,  cap.  17. 
(5),  S.  Clem.  SfiiU  I  ad  Cmnth.  Xk."*  4J. 


t. 


532  CHAPITRE   XCV. 

L'inscription  suivante  est  dans  l'enceinte  de  Té- 
,glîse  :  le  marbre  qui  la  contient,  sert  de  rampe  à 
.  Tescalier  du  grand  autel  (  i  )  : 


OPTATINE  RETICI 
AE   SIVE   PASCASIE  ÇONI 
VGI    AMANTISSIMAE    EN 
NIVS    FILTERIVS  SIVE 
POMPEIVS  MARITVS 
POSVIT SEPVLCRV 
M    CVM  QVA    YIXIT 
ANNIS    OCTO  MEN 
SIBVS    NOVEM   ET 
DIBBVS   DYOBVS 


( 


A  Optdûna.  RtticicL  ou  {x)  Fascasia,  sa  tendre  épouse ,  Ennius 


(i)  Voycx  GrUTER,  DCCCXIH,  9,  peu  exacte;  Hist,  de 
VAcad.  des  inscript,  t.  VII,  249,  pius  exacte;  Maffei,  Gall. 
Antiq.;  BouCHE,  Chor.  de  Prov.  311;  DuMONT,  Inscript,  n.**  1 58. 

{2)  Sive.  Les  noms  des  Romains  étoient  quelquefois  doubles  ; 
alors  ic  second  est  mis  dans  les  inscriptions  avec  les  formules 
quiet,  quiet  vacitatur,  sive.Mnsi  on  WtPrastus  QUI  ET  Vespasianus 
{MaRINI,  Iscrix.  arval.  182);  C.  Maniius  Januarius  QUI  ET 
VOCITATUR  Asellus  (  id.  505  ).  De  thème  filterius est  aussi  appelé 
Fompeius,  et  Reticia  ai  aussi  nommée  Pascasia.  • 


FHterius  ôê  Pompdusa ^érigé  a  sépulcre^  après  avoir  vécu  nPtc  elle 
huit  ans  neuf  mois  et  deux  jours  (  i  ).  ^; 

Isfous  vîmes  en  face  un  sarcophage' de /marbre 
(pi.  LXlVfJig.  j^),  remarquable  par  ses  scùlpturesi 
Au  mflieu  est  Jésus-Christ  sous  un  portique  dont 
la  corniche  et  l'architrave  sont  chargées  d'ôrhemensi 
Cet  édifice  particulier  marque  sa  divinité.  Le  Sau^ 
veur,  dans  I^atûtude  d'annoncer  la  parole  de  son  père , 
est  sur  la  montagne  sainte,  d'où  coulent  les  quatre 
fleuves  auxqilels'Ies  chrétiens  ,  figurés  par  quatre 
agneaux,  se  désaltèrent;  derrière  lui  sont  des  pal* 
miers ,  symlx>Ie  du  triomphe  de  h^  foi,  II  remet  k 
S.  Paul  (2)révahgile,  pour  que  celui-ci  le  prêche  par 
toute  la  terre.  Le  reste  de  la  composition  est  partage 
en  quatre  arcades  :  sous  celles  cjui  sont  à  la  droite  du 
Christ,  on  voit  probablement  S.  Paul  et  S.  Jean  ; 
dont  Tun  porte  une  croix ,  l'autre  un  rouleau  ;  et  soû« 
celles  qui  sont  à  gauche,  S.  Pierre  et  S.  Jacques , 
qui  tiennent  également  un  rouleau.  ' 

Derrière  les  apôtres  on  voit  aussi  des  palrafeTs 
chargés  de  fruits;  au  milieu  d'un  de  ces  palmiersvii 
gauche ,  est  le  phénix.  Les  connôissances  eti^  histoire 
naturelle  étoiént  encore  si  peu  avancées ,  que  les  pre- 
miers chrétiens  àvdîent  adojrté  les  fables  accréditées 
par  une  antique  tradition  sur  cet  oiseau  imaginaire  : 

(i)  A  la  dernière  iignc ,  fc  sculpteur  a  mis  par  erreur  vrBBVX 
your  DIEBVS, 
(»)  Supm,  t.  M, p.  2^9,  note  t. 

1.1  5 


\ 


Jj4  CHAPITRE  XCY. 

elles  sont  même  répétées  par  plusieurs  Pères  de 
l'Église.  On  croyoit  qu'il  avoît  la  faculté  de  renaître 
de  ses  cendres ,  et  il  étoit  regardé  comme  un  sym- 
b^  de  h  résurrection* 

Dans  les  niches  des  extrémités  »  on  reconnoit 
deux  scènes  de  la  Passion.  A  gauche  »  c'est  la  der* 
Bière  cène  :  Jésus-Christ  va  laver  les  pieds  à  Simon 
Pierre.  Cette  action  est  très-bien  <;aractérisée  pat 
Festrade  sur  laquelle  est  S«  Pi^re ,  et  où  l'on  voit  une 
dts  sandales  qu'il  a  quittées  ;  il  a  les  pieds  nuds;  le 
vase  rempli  d'eau  est  au  bas  de  l'estrade ,  et  Jésus^ 
Cbrbt  se  baisse  pour  commencer  cet  acte  d'humilité. 
Dans  l'arcade  opposée ,  Jésus-Christ  est  condait  h 
Pilate  (  I  )  :  celm^ci  esc  vèfu  de  la  cuirasse,  du  pa/u-' 
dflmint ,  et  couronné  de  laurier  comme  les  empereurs 
romiains  (2)  ;  la  tour  qui  est  derrière  lui,  désigne  la 
ville  de  Jérusafem. 

Les  colonnes  qui  supportent  les  arcades ,  ont 
toutes  des  chapiteaux  ccnrinthiens  ;  mais  leurs  futi^ 
difi^rent  beaucoup  par  les  ornemens  ;  deux  de  ces 
colonnes  sont  cannelées  et  rudentées,  deux  son^ 
torses ,  et  deux  sont  couvertes  de  feuillages  qui  s'en* 
trelacent^  Les  arcades  sont  richement  décorées  de 
moulures.  Aux  deux  extrémités  sont  des  tritons  qui 
sondent  de  la  conque  ;  entre  les  autres  cintres  il  y  a 
des  coquilles  au  milieu  de  dauphins  :  ces  symboles 

• 

^W— ^ I    ■— — ii.1W— *— Il  I      il      II       l|li        I  I  ■    ■■ 


ÇHAP|TRB    X€V*  J}J 

inariiis  annoncent  que  la  parole  de  Di^  franchira  les 
mers  pour  étrefeçue  des  nations  les  plus  éloignées, 
£n  montant  les  cinq  marches  de  Tescalkr  qui 
conduit  au  tombeau  de  S.  Honorât ,  on  voit  à  gaucl^ 
et  à  droite  deux  moidés  d'uii ,  même  sarcophage. 
Ce  tombeau  {pi:  LXVII,  fg.  2),  d'une  forme  et 
d'une  distribution  élégantes ,  présente  cinq  arcades  t 
dans  le  mffieu  est  le  Sauveur  du  monde ,  qui  montre 
le  ciel  à  ceux  qui  recevront  la  loi  de  Dieu  ;  dans 
chacune  des  deux  arcades  qui  sont  à  ses  côtés ,  il  y  a 
un  groupe  de  tiois  personnages  ;  Tun  représente 
Jésus-Christ  arrêté  dans  le*  jardin  des  Oliviers ,  et 
l'autre  le  moment  oà  on  le  mène  à  Pilate.  Peut-être 
doit-on  plutôt  rec^inoître  ici  l'exécution  de  l'ordre 
d'incarcération  qu'Hérode ,  dans  la  vue  de  plaire  aux 
Juifs ,  avoit  décerné  contre  S-  Pieire  et  d'autres  dis- 
ciples de  Jésus-Christ  (  i }  :  ce  qui  peut  le  &ire  [N'ésur 
jmer,  c'est  que  les  deux  autres  histoires  sont  relatives, 
à  cet  apôtre.  Dans  la  dernière  arcade  à  gauche ,  on  a 
figuré  son  reniement  ;  et  dans  l'autre  arcade  à  droite , 
Dieu  qui  lui  remet  les  clefs  du  ciel.  Quoique  l'on  re- 
présentât autrefois  les  apôtres  sans  attributs  ^  et  qu'il 
ne  leur  en  ait  guère  été  donné  que  vers  la  fin  du  XI  v.* 
siècle,  ce  signe  distinctif  deS.  PÎCTre  est  très-ancien  : 
on  le  trouve  sauvent  sur  les  verres  peints  et  sûr  les 
mosaïques;  mais  il  est  rarement  sur  les  sarcophages. 


i^mm^t^mi^mÊmmammmmÊmmtmmmimmmmm^mi^mmmmmmmmm 


( i)  Acia  apostol  XII* 

xI4 


^^Ê^^m-,'       *----b^... -    fc  ^-„j^,^^g^^Jg^|^,^.^^^^,,,^|^J 


j3(J  CHAPITRE   XCV^. 

A  chacune  des  extrémités  de  la  partie  supérieure  dé 
celui-  ci ,  il  y  a  des  tritons  qui  sonnent  de  !a  conque  (  i  )  1 
etentrelesarcs^en  voit  des  colombes  quibecquètent 
des  rabins  dansxies  paniers  renversés  (2). 

Dans  la  chapelle  spécialement  consactëe  k  S.  Hono^ 
rat ,  on  voit  encore  un  sarcophage  {pi.  LXIV,fa.  j^. 
Ce  monument  avoît  un-  double  droit  à  la  vénéra- 
tion des  Artésiens  ;  it  servoit  d'autel  à  cette  chapeHe, 
et  j  d'après  une  ancienne  tradhion ,  c'étoit  le  tombeau 
de  S.  Honorât ,  qui,  après  avoir* peuplé  de  pieux 
solitaires  les  îles  de  Lérins  (3),  avoit  été  élevé  au 
siège  d'Arles  vers  4^28  (4).  L'histoire  des  premiers 
ternps  de  l'église  d'Arles  est  trop  obscure,  pour  que 
cette  tradition  puisse  être  confirmée  par  des  témoi- 
gnages authentiques  (  J  )  2  cependant  elle  semble 
ajouter  à  la  sainteté  du  lieu  et  en  rendre  le  sanc- 
tuaire plus  auguste  et  plus  vénérable.  Cette  tombe 
est  d'ailleurs  fort  simple  ;  elle  esi  ornée  de  cannelures 
en  spirale  :  au  milieu  on  voit  Jésus-Christ,  et  aux 

(1)  Suprà,  p.  534, 

(3)  Suprà,  p.  165  et  173.  "^ 

(3)  Histoire  d<  la  vie  tt  des  ouvragn^  dit  S.  Honàikti,  par  D.  An- 
toine  Rivet,  Voyez  Hist,  littér,  de  la  Fremct ,  t*  II ,  p.  1^7.  —  Vie 
de  S,  Honoré^  par  Gaspar,  AVGERI ,  prieur  de  Manos^ue  ;  Aix , 
i6^\ ,  in-8.**  —  Vie  du  même,  par  François  GlRY;*d[ans  son 
Recueil' des  vies  des  Saints ,  au  i6  janvier.  —  Vie  du  m^ne,  par 
Adrien  Baillet,  Voyci  son,  Recueil  des  vies  des  SaittU ,  si\x  mèpn^, 
jour. 

(4)  Suprâ ,  t,  ïl ,  p.  $q6. 

^^)  Saxii  Pûtitificium  AreUtenfe,^  p..  3<t#. 


CHAPITRE  XCV.  537 

extrémités  ^  deux  apôtres  ;  l'un  est  probablement 
S,  Pierre ,  et  l'autre ,  S.  Paul. 

X 

Dans  la  même  chapelle,  à  gauche  du  maître- autel 
oîi  est  le  tonibesiu  de  S,  Honorât,  est  une  portion  de 
jarcophage  en  marbre ,  gtzvée  pL  LXVI ,Jfg.  i.  On 
voit ,  en  suivant  de  gauche  à  droite ,  Moïse  qui  frappe 
le  rocher  (1)5  Jésus-Christ  sur  une  estrade  et  tenant 
le  livre  de  la  loi  :  à  ses  pieds  sont  deux  vieillards  qui 
embrassent  ses  genoux,  pendant  que  deux  autres 
personnages  couvrent  leur  visage  de  leurs  mains  en 
signe  de  douleur.  Le  vieillard ,  dont  la  main  touche 
les-pleds  du  Seigneur,  est  probablement  le  prince  qui 
M  démanda  de  ressusciter  sa  fille  que  la  mort  vênoît 
de  frapper  r  Jmposeï^  seulement  Us  mains  sur  elle,  lui 
dit-il ,  et  elle  vivra  {%) .  ' 

Jésus  le  suivît  avec  ses  disciples  ;  et  pendant  qu'il 
marchoit,  une  femme  qui  étoit  affligée  depuis  douze 
ansd'un  flux  de  sang ,  s'approcha  par  derrière  afin  de 
prendre  le  bord  de  son  habit  :  Que  je  touche  seule^ 
ment  son  vêtement ,-  Ai- eWe  y  et  je  serai  guérie.  C'est 
ce  que  nous  voyons  ici  ;  i'hémorroïsse ,  figurée  sur 
tant  de  sarcophages  comme  un  symbole  de  la  foi, 
est  aux  pieds  du  Seigneur ,  qui  semble  lui  dire  :  Aye-^ 
confiance,  ma  fille;  votre  foi  vous  a  sauvée  (3). 

Le  Seigneur  et  ses  disciples  entrèrent  dans  ïa 


mmi^Êmm 


(i)  Suprà,  p.  179.  (3)  Ibid.  10,  XX.. 

(2J  S..  Matw.  1X„  x'é,  19. 


■■■■■MÉ 


r 


558-  CHAFiTR£   XCV, 

maison  du  prince  ;  il  vit  les  apprêts  funéraires ,  et 
ordonna  aux  joueurs  de  flûte  de  se  retirer^  en  disant: 
Eloignii-vûus ;  cette  jiimi  JiUi  nUst  pas  morte,  elle  dort. 
Aussitôt  il  lui  prit  les  mains,  et^Ik  se  leva  (i)«  Ca 
moment  est  celui  que  l'artiste  t  saisi  ;  îl  a  réuni  en^ 
semble  toutes  ces  circonstances  sans  observer  la 
perspective ,  à  peu  près  de  la  même  manière  qu'on 
trouve  plusieurs  sujets  de  la  mythologie  figurés  sur  les 
vases  grecs  et  sur  les  bas*reliefs  du  style  anticpie, 
parce  que  les  monumens  exécutés  à  la  naissance  ou 
au  déclin  de  l'art  ont  entre  eux  une  grande  analogie. 

Après  la  chapelle  de  S.  Honorât ,  en  prenant  vers 
la  droite  ,  on  remarque  un  sarcophage  à-peu-ppoès 
semblable  à  celui  que  f  ai  décrit  à  Aix  (2).  Le  passage 
de  la  mer  Rouge  étoit  représenté  trois  fois  sur  les 
sarcophages  d'Arles  ;  et  c'est  sans  doute  ce  qui  aura 
engagé  à  céder  à  M.  de  Pérus«is  celui  qu'il  avok  désiré 
consacrer  à  sa  sépulmre.  Le  troisième  oifFre  qudqu^ 
différences  :  il  est  d'une  parfaite  conservation  ;  c'est 
poiu-quoi  je  l'ai  fait  graver  (pi.  LXVII,  fg.  3). 

On  y  voit ,  comme  dans  l'autre  bas-relief,  le  Vh^ 
raon  poursuivant  les  Israélites,  ses  chars  et  sts  che- 
vaux en^outis  par  la  mer  ;  Moiie  tenant  sa  baguette; 
les  Israélites  conduisant  leurs  enfans,  et  portant  au^ 
tour  de  leur  cou,  dans  leurs  vètemens  ,  la  farine 
non  fermentée  ;  enfin  Marie ,  sœtir  d'Aaron ,  jouant 

(i)  S.  Luc,  VU,  i^. 

(2)  Supra i  tome  II,  p.  353 ,  pf.  L 


CHAPITRE   XCV.  535^ 

êix  tambour.  La  différence  la  plus  remarquable  est 
dans  les  trois  personnages  couchés  au  bas  de  {a  re- 
présentation. 9ottari  f  en  expliquant  un  bas-relief 
i-peu*-prè$  semblable^  a  pensé  qu'ik  représentoient 
îes  difFérens  fleuves  qui  se  jettent  dans  la  mer  Rouge: 
Hcependant  on  y  distingue  deux  femmes  tenant  des 
paniers ,  et  non  des  urnes.  Je  croirois  plutôt  que  Tune 
est  l'Egypte,  Tautre  la  contrée  au-delà  de  la  mer 
Rouge,  et  qUe  cette  mer  est  figurée  elle-même  par 
le  vieillard  couché  qui  tient  deux  rames  ;  mais  peut* 
*tre  aussi  est-ce  le  Nil. 

Tout  auprès,  un  autre  sarcophage  fpl.  LXIV,fg,  6) 
représente  une  grande  chasse  au  sanglier  et  au  cerf  (  i  )• 
Le  sanglier  est  saisi  par  les  chiens,  et  un  chasseur  va 
le  percer  de  sa  lancé  :  Thomme  qui  arrête  le  cerf  par 
son  bob ,  pose  ie  geno^  dessus ,  et  son  attitude  est 
celle  dans  laquelle  on  représente  Hercule  arrêtant  la 
biche  aux  pieds  d'airain.  Plus  loin,  des  chasseurs 
prennent  une  biche  engagée  dans  leurs  filets.  L'espèce 
de  camail  appelé  cucullus ,  que  porte  un  chasseï» 
à  cheval ,  fst  remarquable  ;  il  ressemble  à  celui  de 
Télesphore  sur  les  médaillons  qui  le  représentent 
entre  Esculape  et  Hygie.  Ce  tombeau  n'est  probable- 
ment pas  chrétien.  Nous  avons  déjà  vu  pourquoi  lef 


^m 


(i)  MONTFAUCON,  Ant,  expUq.  suppl.  lïl,  LXXI,  a  fait  graver 
ce  sarcophage  d'après  un  dessin  tiré  dirbeau  recueil  de  Peircsc, 
que  fou  conserve  à  la  Bibilothè<}ue  impériale. 


^  "^  .i 


MMÉMHBMKi-    '-'^  ^--i.^^.=,»~mLm,^^^^ÊÊmÊÊ 


am^ÊmÊ^^âÊm^^m^^M:*^^:aSa^ 


j40  CHAPITRE    XCV. 

anciens  aimoient  k  faire  sculpter  des  chasses  sur  les 
sarcophages  (i). 

En  face  de  celoî  -  ci ,  il  y;  en  a  un  autre 
(pL  LXVII,fg.  4)  de  l'espèce  de  ceux  qui  étcHent 
destinés  à  renfermer  deux  corps  (2].  Sur  celui-ci ,  les 
deux  époux  sont  figurés  dans  un  médaillon.  On  voit, 
à  gauche ,  Jésus-Christ  conduit  à  Caïphe  et  le  sacrifice 
d -Abraham  ( }  )  ;  à  droite ,  Moïse  recevant  les  tables  de 
la-Ioi  (4) ,  Susanne  et  les  deux  vieiHards  (  5  ) ,  et  Pilate 
se  lavant  les  mains  ;  dans  la  rangée  inférieure ,  les 
trois  jeunes  hommes  dans  la  fournaise,  Daniel  dans  la 
fo63éaux  lions  [6]  et  le  passage  delà  mer  Rouge  [j). 
,  ^  On  a  posé  dessus  un  petit  câté  de  sarcophage  qui 
représente  Moïse  faisant  sortir  l'eau  du  rocher ,  et 
les  Israélites  qui' se  désaltèrent  { 8.J . 
^  Plus  haut  sont  deu;c  sarcophages -placés  Tun  sur 
l'autre.  Le  premier  (pi.  LXIV,  figu7 )  pffre  sept 
niclies  :  dans  celle  du  milieu  il  y  a  deux  person- 
nages, et  chacune  des  six  autres  n'en  contient  qu'un; 
peut-être  que  l'un  des  personnages  qui  occupent  la 
nîchçdu  milieu ,  est  celui  pour  qui  le  sarcophage  a  été 
fait,  et  que  les  autres  figures  représentent  des  apôtres. 
-  Au  milieu  du  second  sarcophage ,  il  y  a  une  ta- 
blette :  à  gauche  on  voit  un  berger  qui  trait  s^ 
————■^1——      —^—1  —  Il  ———»—— ——^— —————— ——■^——^— 

*  (i)  Svprà,  1. 1,  p.  53J.  (5)  Svjfrà,  p.  527. 

{\)  Supri,  p.-52^  (6)  Suprà,  p.  530, 

(3)  S/ii^râ,  p.  Pi-,  (7)  Supra,  p.  J3B.      , 

(4)  /^/V.  (S;  Suprà,f.  i79'«S}7* 


,^4 


■  •^* 


CHAPITRE     XCV.  ^/[\ 

chèvre;  son  chfen  est  en  face  de  lui  :  à  droite,  une 
syrînx  est  suspendue  k  un  arî^re ,  et  un  berger  qui 
garde  trois  chèvres  en  tient  une  par  la  barbe.  On 
ne  peut  assurer  que  ce  sarcophage  soit  chrétien  ; 
les  symboles  de  ia  vie  pastorale  semblent  l'indiquer, 
mais  ils  n'en  donnent  pas  la  certitude. 

Au-dessus  de  l'entrée  de  la  crypte  dans  laquelle 
on  prétend  conserver  encore  les  tombes  sacrées  des 
évêques  et  des  saints  personnages  qui  ont  planté 
la  foi  parmi  les  Artésiens ,  on  lit  : 

î>.         O.         M. 

Hîc  est  locus  în  ^uo  B.  Trophimus,  «x  Christi  discipulis,  pr» 
Areiate  ecclesiae  prsesul,  primusque  Gaillarum  aposto!u§^  prima  _ 
Christian»  reiigîonis  fundamenta  jecit.  Hic  fons  aquée  saiutiferse» 
ex  quo  tota  Gailia  iideî  rivulos  accepit.  Hîc  crypta  sacra  in  qua 
SS.  Honorati,  Hîlarîî,  Eonîî,  Aurelii,  Çoncordii,  Vîrgiliî;  Rot- 
landi,  et  afiorum  Arel.  pontificum,  necnon  sanctî  Gcnesii  mar- 
tyri5  ArcI.  et  Dorotheae  V,  M.,  bcatissiina  corpora  quicscunt.. 
Hanc  autem  anno  Christi  M..D.  cc.  X.  piissîma  ac  reiigiosissima 
Minorum  familia  fîdèiium  ocuiis  exhibere  censuit ,  ut  qui  vcna- 
l'abundi  ad  eam  accesserint ,  tantorum  patron.  auxiliôapudDeuni 
omnium  largitorem  sentiant  effectum. 

4  Dieu  très-bon  et  très-grand. 

C'est  ici  que  le  Bien  heureux  Tfophime,  un,  dts  disciples  de  Jùus-^ 
Christ,  premier  éveque  de  V église  d'Arlei  et  premier  apôtre  des:  Gaules, 
jeta  les  fondement  delà  religion  chrétienne,  Cest  ici  que. coula  cette 
source  dont  les  eaux  salutaires  se  répandirent  en  ruisseaux  sur  toute  la 
surface  de  la,  France,  et  y  portèrent  la  foi.  C'est  ici  cette  crypte  sacrée 
&u  reposent  lés  vénérables  reliques  des  saints  pontifes  d'Arles,  Honorât, 
Hilaire ,  Eonius^  Aurelius,  Concordius ,  Virgilius ,  Rotlandus  et 
autres ,  ainsi  que  celles  de  S.  Genès ,  martyr  de  la  même  ville ,  et 
de  Dorothée ,  vierge  et  martyre.  L'an  de  Jésus^Christ  lyio,  la  trés^ 
pieuse  et  très-religieuse  congrégation  des  frères  Mineurs  prit  la  résolution 


■M^M^^Ifa 


^a^^^m 


î4i  CHAPITRE    XCV. 

i'accarJtr  mut  fiJiiti  l'atcès  de  ce  saint  lieu,  d)£a  faf  aia  fri 


v'm^itnt  k  visiter  avec  des  sratimaii  Je  véaéraûon,  putftnt  rtfstmti^ 
/»  tffm  dt  la  paistoHtt  ÎMierceishit  de  cts  illtutra  pnucttMrt  miprèt 
du  soaverttin  iitfeiuaitii.t  dt  uuitt  eketet. 

Dans  le  mur  de  la  sacristie,  on  fit  cette  inscription  en 
lettres  qui  paroissent  f  tre  An.  x.*  ou  dn  xi.*  siècle  (  i }  : 


IGFFtoCOniMKEIATiSIESa/inrvS 
GALLMC^KIMV>SENSlTAK)SroiCU 
ENKBCXBROSlÇhOCEKESFVISREBrrOSE 
CLMGEKlFSEFErRVSEOTSErEGHiSVS 
(MNISDEPnVSSWCEPÏÏGAIlIAFONTE 
tiiWASfflmfïMDOGlMOT^ICEM 

ETMATRIDIiaïVMPREBVTrûpEqyÈ? 

iMsiGNcq;  CL^raEjiaMmÀ 

Gffi/DETM)ST(^S^sélEKVISSEÇTIS 


(i)  S^i,  X.  \",  p.  8i!  «  I )«. 


CHAPITRE    XCV.  543 

Trûphimus  hîc  coiimr,  Arelatii  prasul  avitus , 

GaïUa  quem  primum  sensit  apostolicum» 
En  hune  amhrosium  proceres  fudert  nitorem 

Claviger  ipse  Petrus,  Panlus  et  Egregius  r 
Omnis  de  cujus  suscepit  GalHa  fonte 

Clara  salutifèra  dogmata  tune  jideu 
Hinc  constanttr  ovans  cervicem  G  allia  jUctit, 

Et  matri  dignum  prebuit  ohsequium  / 
Insîgnisque  eluens  prestanti  gloria  semper , 

Gaudet  apostolicas  se  meruisse  vices  (i). 

Je  n'entreprendrai  pas  la  traduction  littérale  de  ce% 
vers  :  il  suffiyde  dire  qu'on  y  voit  que,  dans  les  X.*"  et 
Xl/  siècles  y  ia  tradition  qui  regardoit  S.  Tropbime 
comme  le  fondateur  de  l'église  d'Arles,  étoit  déjà 
accréditée;  qu'il  y  étoit  révéré  comme  son  patron, et 
honoré  comme  le  premier  apôtne  des  Gaules  ;  qu'on 
pensoit  qu'il  avoit  reçu  les  leçons  de  S.  Pierre  et 
de  S.  Paul  ;  que  c'étoit  lui  qui  avoit  répandu,  comme 
une  source  pure ,  les  dogmes  de  la  foi  ;  et  qu'enfin 
la  Gaulé  devoit  regarder  Arles  comme  sa  mère,  rela* 
ûvement  à  la  religion. 

On  descend  par  deux  escaliers  dans  la  crypte  ^ 
elle  est  toujours  remplie  d'un  pied  d'eau  (2)  ;  de  sorte 
qu'il  nous  fallut  faire  des  amas  de  pierres  pour  que 
nous  pussions  observer  à  notre  aise ,  à  l'aide  de  flam'* 
beaux ,  les  curieux  monumens  qui  y  sont  rassemblés. 

Dans  ce  sanctuaire  où  reposent,   dit -on,   Ie% 

■ 

(i)  Cette  inscription  est  rapportée  inexactement  par  Skxy  , 
Pontif.  Arel,  p.  30,  et  il  ne  Ta  pas  figurée. 

(%)  Le  peuple  croit  que  cette  eau  a  la  vertu  de  ^^uérir  U  fîcvre« 


m^tM 


■k 


544  CHA!>ITItE    XCV. 

dépouilles  mortelles  de  tant  d'illustres  fondateurs  du 
christianisme,  on  a  droit  de  s'étonner  que  le  pre- 
mier objet  qui  frappe  les  regards  (  pL  LXV,fg.  2  ) 
soit  empreint  de  toutes  les  superstitions  païennes  x 
il  représente  la  création  et  la  fin  de  Thomme,  selon 
les  idées  qu^on  en  avoit  au  temps  de  la  mythologie 
allégorique. 

Prométhée  vient  de  former  ÎTiomme  aVec  le  limon 

* 

de  la  texre  de  Sinope,  dont  il  a  des  masses  déttem- 
pées  près  de  lui  dans  un  panien  La  figure  modelée 
est  encore  placée  sur  le  petit  escabeau  qui  sert  aulc 
sculpteurs,  et  le  bras  fragmenté  tenoit  l'ébauchoir» 
Derrière  lui  est  Minerve,  qui  anime  f  ouvrage  du  fils 
de  Japet  ;  elle  est  casquée  et  couverte  de  la  redou-»- 
table  égide;  elle  avance  la  main  droite  vers  l'ou-^ 
vrage  de  Prométhée,  et  de  l'autre  elle  tient 'une 
haste ,  dont  on  n'aperçoit  plus  qu'un  fragment  2  la 
merveille  s'opère  par  la  seule  volonté  de  la  déesse;  sut 
d'autres  monumens ,  elle  pose  sur  la  tête  de  l'homme 
un  papillon,  symbole  de  i'ame.  Ordinairement  Pro- 
méthée n'a  que  Minerve    pour   témoin  de  cette 
opération  :  ici  on  voit  derrière  lui  deux  autres  per- 
sonnages, dont  un  a  la  tête  radiée;  c'est  peut-être 
Apollon ,  symbole  du  jour  qui  va  luire  pour  l'homme  ; 
peut-être  le  second  est-ilEros,  l'Amour,  qui  doit 
perpétuer  l'ouvrage  de  Prométhée.  * 

Au  bas  de  la  figure 'qu'achève  Prométhée ,  il  y  en 
a  d'autres  presque  terminée^ •  Plus  loin  encore ,  deux 

hommes 


CHAPI-TRE     XCV.  ji$ 

hommes  à  peine  nés  se  disputent  >  et  fun  d'tsux  est 
renversé;  iillégdrte  dés  guerres  fatales  q^^  se  fbnt 
sans<:esse  lés  aveugles  Irumakis^  comme  si  les  maux 
sans  nombre  qui  sont  attachés  à  leur  espèce  if  étoient 
p2LS  sufiisatts  pour  la  détruirez  Le  serpent  qui  se 
diesse  contre  deuk  hommes  nouvellement  créés ,  est 
jpeut-être  aussi  un  emMème  de  ces  maux.  Tous  ces 
êti-es  sont  d'une  stature  inférieure  à  cdie  des  autres 
)>ersonnages ,  pour  indiquer  la  dîâëiience.c^i  exista 
ientre  la  îlature  humaine  et  la  natuire  divine.  Celte 
différence  est  marquée  ausd  sur  les  <»arcophages  chré*^ 
tiens  ,  où  Jésus-Ghrist  et  ses  apôtres  sont  souvent 
représentés  plus  grands  qûte  ceux  qui  les  entourent. 

A  peine  Thomitte  est -9  formé,  que  son  ame 
f  abandonne.,  et  sia  fin  est  placée  près  de  sa  nais- 
■^ance.  Mercure  Psyc/topo^pe,  c'est-à-dîre,^conduc* 
teur  des  âmes,  coiffife  du  pétase  et  armé  du  caducée^ 
s'est  emparé  de  leelle-d,  c^i  est  représentée  avec 
tiés  ailes  ^è  papîlîon ,  sous  la  %ûre  de  la  |eune 
Psyché.  Les  Parqaes  ont  déjà  réglé  sa  destinée  ; 
Ladiésis  lui  montre  avec  ttne  baguette  ^  sur  une 
Sphère  coupée  par  la  bancfe  â;odiaade,  ie  signe  sous 
lequel  le  corps  fragile  qu*elïe  hafcite  a  pris  naissadcei^ 
signe  qui  décide  si  eHe  doij  être  heureuse  <îhi.  Jnïbr- 
tunée.  Clôtho,  qui  est  auprès,  ïile  le  cours  de  ses 
jours,  pour  en  marquer  la  durée*  Ces  déesses  ne 
sont  pas  vieilles  et  ridées  comme  les  dépeignent 
Lycophron ,  Catulle  et  d'autres  poètes  ;  les  artistes 
Tome  JIL  M  m 


54<5  CHAPITRE    XCV* 

les  ont  ordifuubrement  figurées  comme  des  vierges 
jeunes  et  belles ,  avec  des  ailes  sur  la  tête ,  pour 
montrer  la  rapidité  de  la  vie  :  souvent  aussi  elles 
ne  sont  qu'au  nombre  de  deux.  Derrière  sont  les 
Dioscures  Castor  et  PoIIux,  distingués  par  la  forme 
de  leurs  bonnets.  Plus  bas  est  la  Nécessité ,  ou 
pIutAt  Némésis ,  qui  tient  sur  ses  genoux  le  livre 
des  destins  et  semble  prononcer  ses  arrêts  irrévo- 
cables ;  auprès  d'elle  est  Turne  qui  contient  les  sorts 
que  personne  ne  peut  éviter.  Plus  loin,  le  fatal 
arrêt  des  Parques  a  reçu  son  exécution  ;  la  jeune 
personne  a  subi  le  trépas  :  l'inflexible  Atropos  ne 
l'a  pas  quittée,  et  elle  tient  encore  l'ample  vête- 
ment qui  couvre  la  jeune  fille ,  et  qui  prouve  qu'elle 
n'est  plus  qu'une  ombre.  Auprès  de  Psyché  est  une 
étoile  ,  pour  indiquer  qu'elle  va  devenir  immor- 
telle (  I  ) .  Dans  le  plan  inférieur ,  on  voit  la  Terre 
tenant  à  la  main  un  pedum.  Plus  haut,  Neptune 
est  armé  de  son  redoutable  trident  ;  près  de  lui  est 
Thalassé  [la  mer]  ou  Amphîtrite,  distinguée  par  les 
pinces  d'écrevîsse  qui  décorent  son  front;  Enfin  on 
voit  une  nymphe ,  et  un  mont  personnifié ,  peut- 
être  le  Caucase ,  caractérisé  par  le  pin  qui  est  près 
de  lui.  Je  soupçonnerois  que  cette  tombe  étoit  celle 


(i)  Cette  étoile  pourroit  aussi  appartenir  à  Atropos.  Sur  ie 
bas-relief  figuré  par  Bartoli  ,  Admiranda  Roma,  pi.  LXV ,  et  par 
MoNTFAUCON,  Attttq.  1. 1,  pi,  V,  chtque  Parque  a  aussi  près 
d'eUc  une  étoik. 


CHAPITRE    XCV»  54^ 

dWt  jeune  fille,  et  que  la  figure  de  FoMbre  nous 
en  reproduit  ies  traits  (i). 

Le  sarcophage  {pi.  LXV,  »/  ^)  est  îl  gauche , 
dans  la  même  crypte ,  en  face  du  précédent.  Le. 
monogramme  du  Ghmt  est  au  milieu  (2)  ;  il  est 
entouré  d'une  riche  couronne  >  et  placé  sur  une  crqi^ 
dont  les  barres  portent  deux  colombes  :  c'est  un 
symbole  du  bonheur  procuré  aux  chrétiens  (3)  par 
4a  glorieuse  passion  du  Christ,  Au  pied  de  la  croix 
sont  deux  soldats  armés ,  en  adoration  ;  ce  qui  exprime 
que  le  vrai  chréden  doit  braver  tous  les  dangers  pour 
la  défense  de  sa  religion.  Les  douze  apôtres  sont 
vêtus  de  la  tunique  et  du  pallium;  ib  ont  un  rouleau 
dans  la  main  gauche ,  et  lèvent  la  droite  vers  la  croix, 
ou  pour  prier ,  ou  pour  confesser  Dieu  en  attestant 
ce  signe  sacré.  Près  d'eux  il  y  a  alternativement  une 
Ou  deux  étoiles  :  cette  variation  symétrique  dans  leur 
nombre  pourroît  être  un  caprice  du  sculpteur,  et 
non  une  allégorie  ;  mais  Fétoile  est  ici  le  symbole  du 
bonheur  suprême  qui  doit  être  la  récoïnpense  de 

— — ^— ■  — —— .^— *—— ^  I         I I   I  — — i*M^— ^— ^— — g,^ 

(i)  On  peut  comparer  ce  marbre  avec  trois  autres  qui  repré* 
sentent  ie  même  sujet  ;  ma?s  tous  ont  des  détails  différens.  Voyex 
Mus»  Capitol,  IV,  pi.  25  ;  Villa  Pinciana,  stanïa  I,  n,*»  17;  Musk 
Napoléon,  gravé  par  PiROLl,  1,13. 

(2)  Suprà,  p.  520.  Le  monogranime  sur  ie  Lahàrum  étoît  dans 
une  couronne.  EcJSEB.  Vit,  Constant,  1,31.  Sur  ies  médailies 
de  Zenon ,  d*£udoxie  et  de  Puichérle,  on  voit  aussi  une  croix 
entourée  d*une  couronne. 

(3)  Suprà,  Y.  180. 

Mm   ^ 


idlMB^^h^^^ 


j48  CHAPITRE   XCVi 

ieuis  nobles  travau^t.  Ce^te  récbmpéhke  ^t  etiidore 
mieux  indiquée  par  la  couronne  cju'urie  main  célestl? 
tirât  au-dessus  de  h  tète  âe  chat:un  d'e^x, 

'.  Les  deux  petits  côtés  repit^sentent  tfeux  seènès 
et  la  Passion^  6gurëel  à-fMU-près  comme  nous  fe$ 
avons  déjà  vues  :  à  galichie>  c'est  h  dernière  ci^^y 
oû  le  lav^metlt  des  j^îéds  ;  à  dtt^té  ^  Pitâte  cfiA  se 
fâve  les  mafîis  (  î  )  • 

La  corniche  eSt  composée  d'ttïé  tt&isèW*  sans  ins- 
cription, supj^ortéé  par  des  àrtges  :tfàtt*es  angtes 
soutiennent  tteux  médaiHons  ornés  dé  j^eÉïme^  ;  l'un 
renferme  le  buste  d\in  fcomme^  I^autire  teîuî  d'une 
ifèmmé  :  oA  tfstîngtxe  celle ^cî  à  son  coMiei-.  H  j  a, 
.aù%  extrémités  du  satcophage,  des  tét^s^  c^ommé  Oh 
voit  des  masquas  sur  ceux  des  païens. 

13 ùe  ancienne  tradition  veut  que  lé  6k  dé  Gon$- 
>tahtin  et  dé  iFàusta  sa  seconde  ëpoUs^^  qaji  étoh  Wé 
dan^  Arles,  y  ait  été  inhumé  {i)  i  Mais  I^  bmtJés 
Mdes  deux  médaillons  Foht  voir  qUé  ia  loni&^  qù^ 
nous  décrivons  j  étoît  celle  de  deut  ^strèS  éjpoUk 
dont  «otts  ignorons  les  noms. 

Sui  Uri  âufre  sai-côphagé  fpl  LXVl,f^.  s),  on 
représente  Jésus-Christ  entre  ses  apôtres  :  il  est  sur 
un  siège  élevé  ,  et  a  sous  les  pieds  un  tabouret , 
ité  qui  en  le  signe  dé  la  puissatttë  ;  fes  apôeies  ^nt 

: : — ^ ' — '^ 

(i)  Supra,  p..  5  34  et  540. 

(2)  Saxy,  Pontif.  Arel  9J  DUPORT,  Hist.  dt  Végt.dl'Arkk,  23. 


/ 


-j»- 


sur 'ddi  pfian$;  Tous  les  personnage  tUnaem  un 
rouleau  dans  là  ihaîii  ;  Hs  oni  derrière  eux  des  fidètes^ 
qui  as^sistent  à  |a  ^îvine  asisembi^e.  |.ç  riche  por- 
tîqi^  sons  foc^«l  el^a  se  tknt,  ^st  soutenu  par  dasi 
colonnes  torses  ;  if  y  a  à  chaque  extrémité  un  froitton; 
A  droite  on  voit  un  homme ,  à  gauche  une  femme , 
tous  deux  en  posture  de  suppKans  :  ce  sont  peut- 
être  le  ftère-et  lâmère  de  celui  qui  est /renfermé 
dans  ce  tombeau.  •  ,  i 

La  frise  est  décorée  des  figures  àes  dou^e  apétres^ 
chacun  d'eux  a  près  die  sc^  un. paquet  de  vokitt^i 
symbole  des  évangiles  :  ils  en  ifennent  un ,  et  les'trois 
autres  sont  rouïés.  Au  mîtieu  est  tine  tablette  ômëé 
tfù  inonogramme  du  Christ  entre  deux  colombes' <|uî 
tienrient  dans  le  bec  une  branche  dbirvîer  (  i  ).  Uki^ 
eription  est  métriijue  et  ainsi  conçue  (2.)  s 


i**aia 


INTEGER  ADQVE  PIVS  VITA  ET  CORPORE  PVRVS 
AETERNQ  HIC  POSITVS  VIVIT  CONCORDIYS  AEVÔ 
UVI  TENERÏS  PRIMVM  MINISTRVM  FVLSJX  IN  ANNIS 
POST  ETIAM  LEÇT^S  COELESTÇ  ^EGE  SAÇE^DOS 
TRIGINTA  E-Ç  ÇEJV^JJ^O^  PI PfM  Vf 3^  RÇBJDIBKP  AlfNÎ^S, 
rfVNC  CITO  SïDEREÀm  RAPTVM  OMNIPOTENTIS  IN  AV]|^^ 
ET  ^fA-^ÇftBlAÎïR^fKF  F^A^%SIIJJ|JVf^|K  qV4|RY^^ 


"ï-fT^T'^P!"^ 


■P    jL  J  'i        '    J    U'J  M     iiJ'i 


Miiji  jfliy  lU  I    .1 


\  V  ''^  s; 


(i)  Jw/7ri,  p.  547. 

(2)  DuMONT,  Iman  \^\\  %K%li yPar^f^Ard.  24* 

Mm  j 


r"^^  -* 


/ 


5JO  CHAPITRE   XCV. 

.  Coneaaiius,  disûnpUfor  sa  probité  et  ta  piâé,  et  Jont  ht  wle  fui 
pieuse  et  le  corps  sans  tache,  repose  ici  pour  vivre  dans  les  siècles  àemels. 
Dans  ses  jeunes  années,  il  aidoit  le  pontife  dans  les  fonctions  de, son 
ministère;  il  obtint  dans  la  suite,  par  un  décret  céleste,  cette  dignité 
pour  lui-même,  A  peine  a-t-il  achevé  sa  cinquantième  année;  troMsporti 
f  toudain  dans  le  séjour  rayonnant  de  l'Ltre  tout-puissant,  c'est  dans  cet 
asile  céleste  qu'une  mère  tendre  et  un  frère  chéri  le  cherchent  en  lui 
survivant. 

On  regarde  cette  tombe  comme  celle  de  C(m* 
cordhis  f  qui ,  seloti  Tauteur  de  k  Chronok^e  des 
abbés  de  File  de  Lérins  ^  fut  appelé  à  Arfès  pour  en 
ravipUr  le  siège.  Cependant  nous  avons  déjà  vu  (i) 
que  ce  fut  S.  Honoré  qui  vint  du  monastère  de  Lérins 
au  iv/  siècle.  Les  Arlésiens  ont  placé  Concordius 
ku  nombre  de  leurs  saints,  et  Fon  croit  qu'il  est  mort 
vers  380  :  mais  la  tombe  qu'on  révère  dans  les  cata- 
combes, ne  peut  être  ia  sienne  ;  il  n'est  pas  dit  danj^ 
l'inscription  que  ce  Concordius  ait  été  abbé  du  ma- 
tiasière  de  Lérins.  Celui-ci  est  un  autre  Concordius, 
fpxiy  du  simple  grade  d'assistant,  s'étoit  élevé  au  sa- 
cerdoce ;  mais  rien  ne  prouve  que  l'église  d'Arles  ait 
été  sous  sa  direction. 

Les  petits  côtés  sont  ornés  de  la  figure  d'un  grif^ 
fon  {pi.  LXVy  fg,  4) ,  symbole  pris  des  monumens 
païens. 

Les  arcades  de  cet  autre  sarcophage  (pi,  LXV, 
J%*  jj  ^^^^  formées  par  des  arbres,  dont  4es  branches 


(i)  Tomclî,  p.  505,  et  supr/i,  p.  53^ 


"•^pi-w 


CHAPITRE    XCV.  55  l 

«'entrelacent  de  l'un  à  l'autre  :  de  tendres  colombes 
jouent  sur  chaque  tige.  ;  le  serpent ,  image  du  démon , 
rampe  autour  d'un  arbre  pour  dévorer  les  œufs  de 
ces  timides  animaux  (i).  Dans  le  milieu >  il  y  a  une 
femme  qui  prie*  :  elle  a  les  mains  ouvertes  ;  et  c'est 
ainsi  que  Faction  de  laprièire  est  marquée  sur  tous  les 
monumens  des  premiers  chrétiens.  Cette  coutume 
étoit  dérivép  des  païens  ;  chez  eux  les  images^  de  ïa 
piété  sont  figurées  dans  cette  attitude  (2)  :  ce  n'est 
que  plus  tard  qu'on  a  étabir  l'usage  de  prier  les  mains 
Jointes.  II  y  a  derrière  cette  femme  deux  person- 
nages;  ce  qui  pourroit  faire  croire  que  c'est  Susanne 
entre  les  deux  vieillards  :  mais  il  est  plus  naturel  de 
penser  que  cette  figure  est  celle  de  la  jeune  vierge 
renfermée  dans  ce  tombeau  ,^  et  que  nous  voyons 
derrière  elle  ses  parens  désolés. 

Six  miracles  de  Jésus-Christ  sont  représentés  dans 
les  six  autres  niches.  En  prenant  de  gauche  à  droite, 
nous  y  voyons  la  résurrection  de  Lazare ,  qui  est 
enveloppé  comme  les  momies  égyptiennes;  on  voit, 
par  un  passage  de  l'Ecriture ,  que  les  Juifs  entou- 
roîent  leurs  morts  de  bandelettes  remplies  d'aromates  ; 
coutume  qu'ils  avoient  sans  doute  empruntée  des 
Égyptiens  (3).. 

m  M»»^»»»— M— — n— iwt— ^— — — —  Il     I  II  — 

(i^  Suprâ,  p.  i8ï.        ' 

(2)  Musfo  Pi(hClemmt  W,  pî.  47-  • 

(3)  Accfperunt  ergo  eorpus  Jesu,  et  Ugavnunt  iîlttd  îinuis  cuîn 
aromntthus ,  sicutmos  est  Judais  Sepelire,  S.  JOHAN.  XïX,  40^ 

Mm  4 


;-«^ 


J5a  CHAPITRE    XCV. 

«  Le  second  miracle  est  celui  de  Tbéaiorroïsse  ^ 
qui  ,  après  avoir  dépensé  inutilement  toiu  son 
bien  pour  se  faire  guérir  d'uq  £[u3ç  ^  sang ,  vint 
se  Jefer  fvo^  pj^  ^9  Jéf us-Christ ,  tpucl^  sfHÏer 
m^nt  le  bas  de  sa,  robe  y  et  recouvra  la  santé  ppur 
prix  de  son  ardente  foi  (  i  )•  Ou  voit  îi  çf5té  le  mi*' 
facle  de  la  muhiplication  desp^ôns  et  de^pc^s^ons  (^}: 
Jésus-Christ  toi^içhe  les  paniar$  avec  une  bagu^tte^ 
comme  il  touche ,  dans  Tarcade  suçante ,  le^  vasef 
où  'A  cbinge  Teau  w  vin  aux  noces^  d^  Cana  (i)^ 
Vieiment  ensuite  la  giiérison  de  i'avfugle  de  Jérkbç,^ 
et  celle  de  i'aveugle  né  qui  mendioit  ^^  n^iiiw  dif 
didmin  (4)  i  aussi  ce  de^ff  ^V^^il  i^'upe  sioiplç 
tunique.  Ces  m^'âcles  ^nt  soifv^ait  figurés  ^ur  l^ 
sarcof^ges;  ik  indiquent  qt^  Di^Vt  9^  ^  gi^^^ 

du  baptême  ,  dissipe  l'aveuglement  ç^b  le  pécfa^ 

d'Adam  avôit  répiandu  parmi  Ui  hoimnes. 

L'inscription  (  5  )  placée  sm  un  autre  sarcqpbagf 
^//«  LXVIp  fg.  )  )  nous  apprend  d'une  mani^f 
positive  les  noms  de  cvx^%  q^'il  a  leiifimnés  : 


(i)  Suyrà,  page  ^yj, 
(a)  Suprà,  page  5ad, 
(3)  S.JOHAN.  Il,  3. 

(4)  S.  Marc,  x,  4(^;  S.  Luc.  xviii  ,35, 

(5)  Voyez  Gruter,  DCCl)fXX|X,-  ij;  /*>/r*  40' Académie 
Jf^Msa^oHs,  t. Vil,  p.  148  jSajcy,  PQutlfmm  Arel^unse ,  i :^i  ; 
DuMoiiT|/««fry^  Î5J. 


CHAPITRE    XCV. 


5ii 


HVDI^IA£    TERTVLtAE 

C.   F.'CONIVGI    AMANTI8SI 

MAE.  ET.   ÀXIAE  AELIANAE 

FILIAE  DVLCISSIMAE 

TERENTIVS  MVSEVS 

HOQ    SÇPVLÇHRVM 

BOSVIT 

Ge^e  m^çnpt&on  est  soutenue  paj^  ^m  g4^mt 
1m  4wx  bustf^  d^  f^m^ids  qu'oi^  y  voit  j^^u'à  in 
MÎntiire ,  «ont  ^ssRr^merit  q^^  4'Hydria  Ter^idia  ^ 
épOQse  de  Terentius  IVIuseus  (  i  ) ,  f  t  de  {eur  fille  Aw 
^iana ,  ^  qui  la  tendresse  d^  Tçrçnti^s  %  ^nsiicré 
ce  moiiuniienl.  Hydria  TertuIIa  doit  ^tre  ç^e  qui 
«ccupe  ia  droita  du  tombeau.  Outtç  sa  psmqw  k 
manche*  ïongufç  j  elle  a  p»f  -  4ç^$i|s  ^|i,e  ani{ile 
^T^A? ,  vêtement  qui  convient  davantage  à  une  femme 
mmie  :  elle  est  p^ ée  de  t>raçelfita  ei  dHin  edlbr  k 
deux  rangs  de  peries  ;  elle  tient  dans  s^s  mains  une 
colombe  qui  becqueté  une  jgrâppe  de  raisin.  Derrière 
e&tune  espèce  de  draperie  vers  I^qi^Ie  dei^  fô^nma^ 
tendent  les  mains  :  comme  ces  femmes  sont  ^ns 


hM**a 


554  CHAMTRÉ   XCV. 

attributs  9  on  ne  peut  dire  si  ce  sont  des  figures  allé^ 
goriques  des  vertus  de  TertuIIa. 

L'autre  figure,  que  je  croîs  être  celle  d'Aria 
iEUaHa  9  a  aussi  derrière  elle  une  draperie  vers 
laquelle  deux  hommes  tendent  les  mains  :  elle  a 
une  simple  tunique  à  manches  courtes  et  attachée 
avec  une  ceinture ,  sans  pal  la  ;  sa  coiffure  est  formée 
de  deux  rangs  de  tresses. 

Je  ne  sauroîs  dire  ce  que  signifie  le  groupe  de 
personnages  tenant  des  rouleaux  qu'on  voit  derrière 
TertuIIa;  le  groupe  correspondant  nous  Tappren- 
dr<Mt  peut-être ,  si  cette  portion  du  sarcophage  n'a- 
voît  pas  été  cassée  :  sont-ce  les  amis  ou  les  parens 
de  Terentiûs  Museus!  Les  symboles  que  ces  femmes 
tiennent  entre  leurs  mains ,  peuvent  feire  supposer 
qu'elles  étoient  chrétiennes  (i). 

Le  sarcophage  qui  suit  {'pi.  LXVI,  fg.  j)  offre 
une  disposition  singulière  :  il  est  orné  de  ces  can- 
nelures en  spirale  qu'on  appelle  des  strigiles,  parce 
qu'elles  ressemblent  à  l'instrument  dont  les  Romains 

(i)  Malgré  rinscriptîon ,  la  tradition  a  établi  que  cette  tombe 
tst  celle  de  S.  Genès,  né  à  Arles,  où  il  étoît  un  des  principaux 
officiers  de  Dioclétien.  Il  refusa  de  faire  exécuter  sur  les  chré- 
tiens les  ordres  sanguinaires  de  ce  prince,  et  il  paya  de  la  vit  sa 
désobéissance.  On  porta  sa  tête  au  lieu  appelé  aujourd'hui  Trinque»- 
taillt;  mais  le  Rhône  s'ouvrit»  et  la  tête  traversa  sur  Tarène  et 
vînt  reprendre  le  corps  dont  elle  avoit  été  séparée.  D'autres  pré- 
tendent que  S.  Genès  porta  sa  tête  jusqu'à  un  endroit  où  le  sang 
du  saint  martyr  fit  naître  un  mûrier.  Saxt,  Pont.  Areh  lo. 


CHAPITRE    XCV.  55^ 

se  servoîent  pour  ôter  la  sueur  qui  couvroît  leur  corps 
après  les  exercices  gymnastîques.  II  est  aussi  décoré 
de  plusieurs  histoires.  A  gauche ,  Moïse  reçoit  ia  ioî 
de  Dieu  (  i  )  :  ce  qu*il  y  a  de  singulier ,  c'est  que  Moïse 
n'est  pas  seul;  il  est  accompagné  d'un  autre 'person- 
nage tenant  un  rouleau  :  à  droite,  le  sacrifice  d'Abra- 
ham (2)  ;  la  main  de  Dieu  Tarrète,  et  lui  montre, 
dressé  contre  un  buisson ,  ie  chevreau  qu'il  doit  i.m- 
molér  à  la  place  de  son  fils.  Le  milieu  est  partagé  en 
deux.  Dans  la  partie  supérieure ,  on  voit  la  crèche  ; 
la  Vierge  Marie  est  auprès  du  berceau,  qui  est  un 
tissu  d'osier  :  un  berger ,  tenant  le  pedum  k  la  main , 
vient  adorer  l'enfant  Jésus;  le  bœuf  et  Fane  sont 
auprès.  Cela  !  s'observe  encore  sur  d'autres  sarco- 
jphages  des  premiers  temps  du  christianisme  (3)  ;  ce 
qui  prouve,  contre  l'opinion  du  P.  Sern  (4),  Fianti- 
quité  de  la  tradition  qui  dit  que  ces  animaux  assis- 
tèrent à  la  naissance  du  Sauveur  (5).  Les  trois  per- 
sonnages qui  sont  au-dessous  sont  les  mages  :  ils  sont 
àu  nombre  de  trois ,  selon  ia  tradition  de  l'Eglise  ro- 
maine; tradition  que' l'on  attribue  à  S.  Léon,  mais 

(i)  Suprà,  p.  5»j. 
(2)  Supra,  p.  ^%6, 
X    (3)  BOTTARI,  Scuîture  sacre ,  pï.  3cxil. 
\^)  Exercitat.TŒX,'^. 

15)  yoy^  S.  Gregor.  Nawaiw.  (Trtf/.xxxvm;  S.  Gregor. 

Ny.ssen.  in  Nativit.  Christl,  t.  III,  p.  349;  S.  HiERONTM.  Vita 
S.  Paula,Ul  ;  S.  PaULINI  Ejfist.  XI,  d^JVym^tt;  PRUDENT.  Ca- 
themerinon ,  bymn.  XI ,  8  kaî»  januarii ,  v.  8^. 


*p- 


•    • 


JJ^  CHAPITRE    3ÇG.V, 

jygW  psHP  Içs  ^r^pp^gesi,  I^s  Jaç(  pc^twt  p?s  ici  le| 

twn^^  pl^rygien,  pjrç^  qu'oa  pfB¥MlqW«Ç^  ^Mi 
éVffejfït  veflpsi  de  f^^tç  p?nje  4^  fe  Pôfse  apprfé« 

j^pmn^  d^s  la  fq^rn^e  et  {ei|  sg^s  m^^e^  ont  mq 
ço^tupiç  abspïun^ent  seraLfeUe^  pafçe'^SJfs  I»  tf^cfin 
lîan  {ôs  ^^o^  veçîi*  de^  pi6ff)f!^  çapt|éf$^  r 

Le  dernier  sarcophage  (gi  LXI,Jis*^  4)  p&\^  ç^v^m^ 
fe  précédent ,  wij^fVwifW ^  ç'eftr^-4ïre  qu'^I^toîi 
destiné  %  ço(>ta:iir  4eux  cprps  (  1  )  :  oi|  y  disiingufi  uq 
^quble  p^iifg  dliistpi/es  diflrérçnte%  s  afi^îs  Ie$  figufe^ 
dp  i[a  piMpaïÇ  des  grpwp?^  ^mi  trep  I9u|i)f  e^  ppwf 
qifpli  pHfg^p  t^ign  en  df  ^rpiipc^  fe^.  §¥ieî|.' 

#^te,  yepréjjBîitp  fe  p^WpliG*4i^  {2)  \  V^mx^^ 
d§fnier,  \^  guérison  ^^  T^Veiigle  #  1^^*^  (î); 
d»^  l'arc^îte  dv  njîlîw^  P»  vqH  JésHJ-Ghri^  q^ 

inontrff  Ifl  iri^rfinitifl  ^Ia  cou  xiàca*  il  tt^irt'  un  rruii^nii 

WïïT^mXT^   SV   IVrTClHIllO  UC   sVn    kFWV  j    11    lIVlfK  Un  l\/UtCuU  y 

et  a  près  de  lui  i*agneau  sans  taché  (4)« 

Dans  la  rangée  inférieure,  piiJ■tî^gé^  çorpme  {a 
précédente  en  sept  arcades ,  on  yqit  Moïse  frappant 


(j)  Stsffm*  t^i%y  {3)  Snprà,  p,  $%,$. 

(2)  J^ïz/^m,  p.  52^»  .  (4)  Jff^yrA%^s  i\$- 


CHAPITRE    xcy.  5jy 

-le  rodier  f i  ) ,  fhéniDTmîfeSB^t'^) ,  fe  ^angewenr  dfc 
Teau  en  vin  aux  noces  de  Cana  (;)  :  au  milieu  est 
la  figure  d'une  remmenai  aies  it^s  écartées,  dans 
l'attitude  de  ia  prière  (4).  A  la  naissance  des  arcades, 
II  y  a  àlterhlltiVéthént  des  couronnes  (  j  )  et  des  co- 
lombes qui  becquètent  des  raisins  dans  des  pa- 
niers (6). 


{2)  Suprà,  p.  5^a. 
(3)  Sttprd,^f.fi2. 


(4)  S$4n^à,f.SSu 

(5)  Ji^i,  p.  J47- 
{6)  Sifrâ,f.m. 


.  ^ 


558 


^fc^iji  n#fc>^>^K^^*^ii^»»ii^>M^^iii^irtw«^ii^r«i^'^ 


CHAPITRE  XCVI. 


Chapelle  découverte  appelée  le  Musée,  —  Statues.  — 
Bas-relieÊ,  —  Bustes.  —  Sarcophages.  —  Inscriptions. 

JCjN  sortant  de  cette  église ,  qui  paroît  être  plutôt  un 
gymnase  chrétien,  dont  les  murs  sont  couverts  de 
bas-reliefs  destinés  à  apprendre  aux  enfans  et  aux 
jeunes  néophytes  les  fiiîts  miraculeux  de  Jésus- Christ 
et  de  ses  apôtres ,  on  entre  dans  une  grande  cha- 
pelle, dont  le  toit  a  été  détruit  par  le  temps  (i).  Au 
milieu  sont  jetés  quelques  sarcophages  entourés  de 
ronces  et  de  plantes  agrestes ,  qui  sont  devenues  si 
fortes  et  si  toufiues,  que  ces  monumens  en  sont  pres- 
que entièrement  couverts.  Dans  le  fond  on  lit  (2)  , 

MUSEUM  ARELATENSE; 

et  plus  bas  : 

P£R  POMOS,  FER  AGROS,  PASSIM  DISPERSA 
C.  J.  P.  A.  (3)  MONUMENTA 

(i)  Uéglise  de  Sunt-Honorat  étoit  à  trois  nefs^  ce  qui  est 
aujourd'hui  découvert  >  en  formoit  la  majeure  partie, 

(2)  Dans  les  planches  de  la  collection  du  P.  DUMONT,  ce 
musée  a  un  aspect  très-pittoresque;  ie  désordre  qui   y  règne 
ajoute  même  à  i*efFet  qu'il  produit:  ce  désordre  a  encore  été  aug-' 
mente  par  les  ravages  que  ce  lieu  a  soufïèrts  depuis  la  révolutioiu 

(3)  Colonia  Juliéc  Patemtt  Artlatensis,  Suprà;  p.  495» 


CHAIU^TRE   XCYI-  ^J(^ 

IN   UNUM  COLLÇCERUNT  A^N.    1784,   178J, 

COSS.   DOMINI 
C.  DE  CHIAVABY    CABA5SOLE  EQUES.   B.   LAURENS 
D^  MEDICUS.  T.  B.   LIEUTAUD.  BRET  BURGENSES. 
A.  DE  BONIJOL   DUBRAU  EQUES.  J.  B.  FRANC.   GROSSY 

IN   A.   C.  CAUSID."* 

P.  GALOUTAIRE.  A.  L.  REYBAUD    BURGENSES. 

SUCCESSORES,  INCHOATA    PERFJCITEj 

ANTIQUITATIS  INVESTIGATOR,  \ 

BENEFICil  MEMOR  FRUERE. 


^  Nous  voyons,  par  cette  inscription,  que  c*est  en 
1784  et  178J  que  les  consuls  qui  y  sont  nommés 
ont  rassemblé  ces  monumens  épars;  que  les  reli- 
gieux chargent  leurs  successeurs  de  continuer  cette 
entreprise,  et  invitent  l'amateur  de  l'antiquité  à  la 
reconnoissance.  Ce  sentiment  est  dû  sans  doute  à 
la  bonne  intention  des  consuls  qui  ont  formé  cet 
établissement  :  on  ne  sait  cependant  comment  on 
a  pu  décorer  du  nom  de  rnusé^  cette  nef  en  ruine 
et  ces  monumens  amoncelés.  Voici  quelle  a  été 
l'origine  de  cette  collection  • 

II  y  avoit ,  en  1785,  dans  le  couvent  des  Minimes, 
un  religieux  appelé  le  P.  Dumont ,  qui  avoit  passé 
quelque  temps  à  Rome ,  où  il  avoit  pris  du  goût 
pour  les  monumens  et  acquis  quelques  connoissances 
pratiques.  II  annonça  le  dessein  de  publier  et  de  dé- 
crire les  antiquités  d'Arles  :  la  municipalité  favorisa 
son  entreprise;  on  permit  aux  Minimes  de  Rassembler 
des  monumens  dans  cettt  chapelle  découverte,  et 


j6o  <:!lAPITflE  icvi. 

Ton  donna  aH  F.  Dumoni  dès  fonds  pour  les  frais 
des  dessinS: ,  des  gravures  et  de  l'impression  de  son 
ouvrage.   li  panit  d'abord  un   certain  nombre  de 
planches  ;  mais  au  bout  dé  sik  ans  l'impression  étoit 
à  peine  commencée.  £n  i7<^8  ,  la  municipalité  , 
voyant  que  l'ouvrage  n'avançoit  point  >  arrêta  de 
faire  don  au  P.  Dumont  de  tout  ce  qui  étoit  fait ,  et 
de  lui  laisser  chercher  des  moyens  pour  terminer  son 
entreprise.  Le  rdigieux  proposa  des  souscriptions  ; 
H  toucha  le  prix  de  cinquante  :  cha^e  étranger 
riche  ou  distingué  qu'à,  hitroduisoic  dans  ce  pré- 
tendu musée  ^  f»  creyoh  obligé  dé  premfre  ime  scâs*- 
cription  y  sam  préjudfee  d'uite  aumône  pour  (e  ecm- 
vent;  î!  teur  rèmettoît  fes*  trente-^me  gravwes  €t 
les  soiiante^dix^huit  pages  de  texte  déjà  impi^ées. 
Macs  il  ne  parott  pas  qu'il  ait  ^  véritablement  fin- 
ténnon  de  terminer  ce  travail  «  il  comjposoit  à  me* 
sure  qu'on  impriiAoil ,  et  â  s'e^arra^oit  dati^  sa 
rédaction^  fes  soixante  ^X^mit  pages  qu'il  a  pu^ 
bliées,  ne  contiennent  que  d^s  choses  étrangères  à 
son  sufét ,  et  il  n'y  dohne  l^xpIicationF  que  de  quatre 
lïionuméns  (  i }  •    Hêut*eusemeti  t  il  atoit  déjà  fik 
graver  fc  recueil  des  inscriptions,  au  nombre  détient 
ijuatre-Vittgt-sÈc ,  maïs  sîuis  les  fnterp4*ét«lr  (i).  La 


-.   (i)  Le  dk^  Sylysân-,  i'^utd  de  la  J>onne  Déesse»  la  VéQus  , 
le  dieu  Mithras. 

(2)  On  croyoit  que   les   planches  de  cet  ouvrage  étoîent 

révolution 


CHAPITRE   XCVI.  jdl 

révolutÎQn  arrivée  en  1789  fttt  pour  le  P.  Dùmônt 
une  occasion  favorable  de  se  dégager  des  promesses 
qu'il  avoît  .^kes  j  il  se  fixa  à  Sakrt-Remy ,  où  il  avoit 
été  nommé  jugç  du  tribunal  de  xji^ct  ^  et  il  y  mou- 
rut en  i7^3-T  .   . 

£n  suivant  de  gauche  à  droite ,  quand  on  entre 
dans  te  prétendu  muisée ,  on  aperçoit  d'abord  deux 
sarcophages  de  marbre  incrustés  dans  le  mur.  L'un 
est  très-dégràdënl  représente  quelques  miracles  de  *  | 

Jésus-Christ.  L'autre  n'est  qu'un  fragment  (,pl.  LXV, 
Jig,  6 )  :  on  voit  probablement,  au  milieu  ,  sous  la 
figure  de  Susanne  entre  deilx'arbrés  (i)^  la  jeime 
fille  que  ce  tombeau  renfèrmoit  ;  à  gauche  on'  a  re- 
présenté l'ingénieuse  allégorie  du  bon  Pasteur  qui 
ramène  la  brebis  égarée ,  et  S.  Pierre  arrêté  par  les 

'Juifs  (2)  :  ïa  partie  qui  était  à  droite,  a  été  brisée. 

*  ■  '  »    ■  ■    '  ♦ 

On  trouve  ensuite  un  sarcophage  de  pierr(ç  do|it 
.chaque  petit  4ôté  est  décoré  d'une  guirlande  :  hi 

perdues  ;  Wiaîs'  elfes  bftt  été  retrouvées^  M.  de  la  Lauzière  avoit  eu 
ic  dessein  de  les  publier  ;  et  depuis  là  mort  de  ce  vieillard  respec- 
table, son  neveu,  M.  de  Lagoy,  amateur  zélé  des  arts {  supti; 
^'p.  4Ô9);  s'est'occùpé  de  ce  soin.  Cette  côftection  est  précieuse^  ^ 

en  ce  qu'elle  fait  connôître  plusieurs  monumens  aujourd'hui  dé- 
'truits  :  Je  n*ai  fait  figurer  et  je  n*ai  décrit  que  ceux  qui  existent 
encore.  J'ai  acquis»  à  Tàrascon,  tous  les  dessins  originaux  du' 
P.  Dumont,  d'une  femme  à  qui  il  les  avoit  laissés  en  mourant* 
et  j'en  ai  fait  exécuter  de  nouveaux;  sur  les  lieux,  par  M.  CIcncr, 
•que  j'ai  déjà  cité ,  suprà,  p.  ^79, 

(i)  Svprâ,p.  ^iy.  , 

(2)  Suprâ,  p.  535. 

Tome  III.  N  n 


5^?  C:Hiii^ITRE   XCYij. 

leasère  test  soaimue  par  des  géipes  »i&$  {pi. 
^  4)  (  'J  >  •U®  porte  cette  inscHpUon  ^a)  s 

<■! il  if  I  (   riJiSg 


,1 


>M«  IVNIO.  MC9SIA190 

VTRICL.    CORP.   ARELAT* 

1 

EJVSD,  CORP.  MAC.  IIIJ.  F. 
QVI.  VÏXIT.  ANN.  XXVIU 
M.V.P^X<iyNlA.yAll.£illA  1 


)  _ 


^mm 


Ju  corps  d'Arles,  ayant.  tx<rçé  quatre  fois  Ja  maîtrise  du  m^ 
corps {$),  et  qui  a  t^éou  XXVIII  ans  V  mois  et  X  jours  (6). . .  (7). 


fcM-*< 


(i)  Ke>'^GRUT.CCCCXXVI,d,çtCCCCLXXXIII,  ijMUR.DXXXI, 
5  ;  SVOH,  Antiq.de  Lyon,  loi  ;  S AXY , Pontif,  Arel.  99;  SegUIN, 
Afrtiq.d^ArieSflïyJUi'p*  Jj  VaiSsETTE,  Hist.  de  Ling.tA,preuv, 
ft** 7x;JteUQ.  JVrîipf.  '^'*'*  C^  *•  '  fex,Egc„Sr,ii^$-;  Calvet, 
XJtrîcul  53  ;  DUMONT ,  pi.  XV ,  n.**  11  ;id.  Inscript,  n.®  96. 

(3)  Le  nom  4c  Valerius  et  celui  4e  Valerla^^t  r^rouvent  dam 
JlÛ5Îe^w  ÎMcriptiom  4c  îa  ville  d*Arie$. 

(4)  UTRiCulario  CORPorJsAREi:,4Tet(sis,'VQyçiji^â,^.4^6, 
'GrUTER  (  CCCCX JCVl,  6  )  AVOjt  U  VEPECl  :.  U A,.i:cj^t»ié  OXHICi. 
à  jajp^  CCCCLXXXlll;  mais  Je  rfste«t,plMS,îqf;»¥iç^ 

(^)  EJUSDem  CORmis MAQimio  IIJ(I:FHHC0. M.  G\LyïXj, 
l//r/V«/.  <},  a  mis  ,un  K  auii^  4*«n  F. 

(6)  AN Nis  XXVIII  AfensHus  V  XfietufJC. 

{7)  Xa, dernière  ligne  est  effacéç.  JEilc  ^d&toit^.à  ce  qu'il  :pa- 
Voît,  au  temps  de  Scaiiger  :  eile  ,a  été  qqn^çryçe  par  Orutjer^ 
ccccxxvi,  6,  et  par  ceux  qui  i'ont  copié  ^  on  yjisoit  lAlUM^^ 
CARISSIMO,  à  son  nourrisson  trisHh&i. 


.l/'A. 


I 

i 


Le  fOfmï'^  4?  «e  ifrcpriuigf  »e  p«-^  pç;  lui 
avoir  appartenu;  le  petit  côté  gauche  <fat§  çffkj^ 
inscription  {\)  : 


\ 


'^■■■'■"'T'^TTrrTTTrTT^rïr  a       i 


Le  nom  |de  Tyrratif^  ^e  ^e^ouye  sur  f^usieurs  ins- 
criptions d*^rles. 

Dans  le  même  mur ,  près  de  ce  sarcophage ,  sont 
les  morceai^x  '^Uivans  :  :  _  >'-    \ 

Uncippe(2)  S^xr^eSxftp^ip^yi^ 
fig.  j  ),  avec  ces  mots  : 


AS;AtJ[.CJL 

co*fyL*Lo^Viyi. 


Ô.  H.  S.  S* 


« 


« 


\     v 


Les  os  d'Asiaûctts,  ajfranchi  des  ConfidAeMS  (3)9  simi  dh^ 


rt^ 


(l)  DUMONT,  1^5. 

(1)  Jd.  n.<»  31 ,  pî.  XV ,  n.*>  8. 

(3)  Asîaticus  étoit  afitanchi  d'une  famille  dé  ce  nom. 

(4)  çssa  ffîc  sitA  Sunu 

Nh  a 


j64  CHAPITRE  XCW. 

'^'  Un  bustb,  avec  Une  courte  Insaiption  presque 
effacée  (i)  : 


i  ^  I 


V-  J  •# 


I 
r 


I 

A  BABBI.  M.  F      ~  ^ 


{-  ^TERE-BENIGNA 

I 

On  lit  ensuite  cette  autre  (i)  : 


■i 


I  -     «    - 


l     » 


1         *•      ■    1 


LERIA   LVC. 
LYCILLA 


)r 


'  I 


N  CORNELIO   laVCIUAN 


Et  'prôtoté<;to"cont 

..•'il 


T 
I 


r       ■/*  *  - 


•  I  •  »         •* 


Valeria  (3)  tucUh,fiU  (4)  J^  Z«ci//Kj,  i  Ctt€ims{$)  Omlitts 
iMCiliauus,  et  t  Prototecm^ou  éj^oux\ii):^ 


Auprès  fest  une  petîte-ftgu^  {7)  .<Ie  Jupiter 
^  pi.  LXVi  fg.  7)1  a  est  caractérisé  j  par  Taigle 

■    j  " • — -..^— ^^ — . — — i^ 


-<i)DuMOi^,ii.*  77^ 
\%)  W.  n.»  36, 

(4)  LVCillijiUa. 

{^)  co^Juhetn^^i*  ;Le  mot  contuhernaUs^  sîgnîfîoît  un-  cpow^ 
esclave,  et  dont  i!  ne  pouvoit  naître  ^ue  des  esclaves. 
{7)  DUMONT^  pi.  XV,  n,^  5. 


'  "^  î 

>■  *  i 


f  >  f» 


CHAPITRE  XCVI^  ^6^, 

qu'on  voit  à  ses  pieds.  Cette  ôgwire  est  jplacée  mi- 
dessus  cfun  cîppe,  sur  lequel  on  Ht  (ij  : 


I    D  M  J- 

c'i  M  M  T  I   ^r    II  ]    i  il  ^ 


/=« 


t  • 


FLÀVIAE 
PO>P  FORTV 

TVS  COKr 

DVLCISSIJIl 

ET.   FL,    RE. 

AMICAE  C 

qyiNTi. 


I 


\  '» 


!.. 


L 


Plus  haut  esjt  c$  fiiagment  : 


'      c 


CUM.  QUO.  VIXI.  ANN.  XXXX. 

SriTE.  VLLO.  AEMvio  (;s). 


N»  } 


■<  »       I   Hiill«^ii.MWX 


Hta 


lÉHBMi 


^■^tti 


BCt>. 


^66  ck'Ai'ITRE  xcti.' 


FIDELJ. 

EAEw  tîB 

PRIMY 
.    SÊGV" 

dina.  cgminiâ 
gonTvbernaLs 

4 

D 

* 

I 

A  FUelis,  afiavehi  dt  PrivuU^  SuoêàkuL  Cminia,  sw  ^wae, 
âsesfeais{t). 

A  la  droite  esi  une  tessèfé  détachée  d^un  sarco- 
phage ;  on  voit  ehcore  des  fiâ^ens  des  génies  qui 
la  soutenoient  èdàn  îiisage ,  et  on  y  lit  (3)  : 


ri 


t.  rirrr-t  ffftfir   -"rr^rs^z 


£_*• 


D         j5         M 

ALFENIAÊ    AttAltDl 
M    COELIVS  ANTorfN 
CarVC.lNCOMFAKA  • 
.       ..BIU 


^mé^ 


^M,  Calhis  Antoninns  à  Aifenia  Attalîs,  ^use  iucomparahk» 


(i)  Vqyi  Menard,  Histoire  de  Nîmes,  x.  Vil,  |ief;  ^  iW- 
MONT,  n.*>  39. 

(a)  De  Suo,  sous-entehdu  dicayil,  consecrayiu 

(3)  DUMONT,ll.°Io8. 


CWAPITRE  revit  i^^j/t 

A  rextrémîèé  dt  cette  rangée  est»  cette  autre  îns- 
cription  (i): 


MMMH 


^, 


: 


imt^mm<mmimi»mmm* 


Jimm  Marina  it  Jindns  Junhiitar,  sm  ifoux  tris^etùfri  (2),  à 

Dans  la  titrîsîème  rangée  du  Rasr,  on  Ht  (4]r  - 


"i-r 


FI40RAÊ    CONtVBERN 


'  \ 


L 


PIENTtSSïiMAE 


ÉM^Kidri*Ma*MMMa*M*«MtMB«>ëMa*MaMMl# 


Lé  surnom  de  SeKtus  Mîus ,  qui  ai  consacré  cette 
pierre  à  sort  épouse  flora ,  me  paroît  être  CommissMs^ 
Sur  ia  même  I%ne  (  j  )  î,  ^  C  AN^Q  F  F>  %m 


'a^l^BMMi^MMNtataiBMMa*^ 


■ti|^M*iriMÉi*ii«p«hH^dMa*i 


iriiMrt 


(ï)  DUMONT,11.**  5^ 

(2)  ôarissimo. 

\l)  AKAm  Poni  cur&vh. 

f4)  K^j^BïMARD,  rtr  iWW.  èJjî  W'-AitCH,  Cbmm.  di  dtà 

Taran.  2 1 5  ;  DuMONT,  n.<>  j4.      • 
(5)  DUMONT,ir.**32. 

Nn  4 


^iMMitttaBHidi 


-■Jiii"   i  ip^^^N*^- 


^-"-^ 


568  QHAPITRE   XCVr. 

Plus  loin  est  la  pierre  figurée  pi.  LXVI,  fg.  S; 

on  y  iit  (  I  )  : 


EX  JMPERIO 

T.  ATTIVS  QVARTVS 

CAILARO   VSliM 


Kous  trouvons  encore  ici  ïe  nom  d'une  dîvîhîté 
locale  y  adorée  par  les  Arléôeh»  :  sans  doute  elle 
avoit  apparu  en  songe  à  T.  Attius  Quartus  ;  et  c'est 
d'après  %^%  ordres  [x)  qu'il  lui  a  consacré  ce  vœu  (5)* 
Cette  divinité  s'appeioit  Cailarus  (4)-  PI"*  ^^^  > 
onlit  (;}: 

T).      S^      M. 

SEX  DOMlTl 

BLASTI 

IN   FROITe 

P.  XX. 

Au»  mines  de  SeXûu  Domidus  BLtstus.  A  Ltteie,  vingr-pteds  [6], 

(i )  DUMON7,  n.**  5  #  et  pi.  XV ,  n.**  a. 

(2)  EXIMPERIO,  comme  nous  avons  vu  visu  nifluitus  [supra, 
t.  n ,  p.  117). 

(3)  Votum  €oMt  tuhttts  Merkâ. 

(4)  BiMARD,  îH  Murât,  63^  pen^e  que  ce  mot  vient  du  cdr 
ti<l\xt gdil  et  ar,  ard  [  terre];  que  les  anciens  Gaulois  ont  dit 
gail-ardovL  cail-ard,  pour  désigner  un  gras  pâturage;  que  c'est  pour 
cela  qu'il  y  a  dans  fa  Gaule  narbonnoise  plusieurs  endroits  ap- 
pelés h  Cmltutd;  et  qu'ainsi  Cailarus  étoit  le  dieu  des  pamragv!^ 

(5)  DvMom:,  Inscrtpt.  35.  - 

(6)  IN  FRONTE  Peda  XX  [supri,  p.  i Ci  ). 


CRAPItRE    XCVI. 

A  droite  (i)  : 


5^9 


Aux  mânes  de  Magusius  Martialis, 

Au  milieu  de  ces  différentes  îriscrîptîons ,  on 
remarque  une  niche  (2)  qui  contient  quatre  bustes 
(pl.LXI,fig6). 

L'inscription  précédente  séps^e  deux  fragmens  de 
bas-relief  :  Tun  représente  deux  personnages  liant 
un  ballot  ;•  l'autre ,  un  combat  oà  Ton  distingue  deux 
hommes  à  cheval ,  un  dans  un  char  y  et  plusieurs  à  pied. 

La  suite  du  même  mur  à  droite  contient  les  ins- 
criptions suivantes  (j)  : 


D  0         M 

me'Elliae  protidis 

MATRI     07 
BIRÉILITAN   LVCLNAE 


N 


Aux  mûnes  de  Metèllia.  Protis,  mère  de  Lùcine  Bilbilitane  (4). 

; 

> 

(i)  DUMONT,  n.**  37. 

(2)  A/,  pf.  XVII,  n.**  II. 

(3)  M  85, 

(4)  BlRBlUTANa^oyxr  Biiiilitana^  de  Bilhilis,  ville  d'Espagne. 


J70 


cnkPiTKZ  xcvi: 


G  VALERIY^ 

PHILOCRA'ES 

VIVVS  SIBI 

POSVIT 


mmm^ 


G.  Vakrius  fhilocrates  s'est  posé  cette  pierre  de  son  virant  (  i  ). 


NERO   VIBVS  SIBI  PO 

ET  SILVANi^PATRIClAE 

POMINAE  ET  VXORI  M 

LIAIRI   PIENTISSIHAE 

QVIVS  BENEFICIO  VIX 

I.POS  MISIONS  AI^OS  XXX 

SENE  BILE 


'« ;•  •  (i)  Nero  a  pos/ cette  pierre ,  de  son  vivant  ()),  â  lui  et  â 

Siîvana  Patricia  sa  maîtresse  et  son  ipousie  (4),  femme  (j)  très-fdèle , 
parla  tendreisede  laquelle  (6]  il d  vécu,  après  sûn  affranchissement  {j), 
trente  Itns  sans  (8)  amertume. 

■■  I      ifc Il  >  I  I    ■ 

(1)  DUMONT,   107. 

(2)  Jdem,  iio. 

(3)  vibUs  pour  viPus,  Nous  avons  déjà  vu  des  exemples  du 
B  mis  pour  v« 

^4)  $iIvaiiaavoît  af&anchi  son  esclave  Néron  et  i'ivoit  épousé, 
{^)  MULIAIPI^wcmuUeri. 

(6)  QVIVS  pout  cttius, 

(7)  VlXIt  POSt  MISsIONEm. 

(8)  SENE  pour  sine,  V\  a  souvent  été  mis  pour  f  S  dans  le» 
inscriptions. 


4 


<ÎHAI>ltftE    XCVl. 


J7« 


I \  ml 


<*>   «Mil 


TIT.    FL.    TITO     COR 

P.  FABROR.  7ie 

NARIOft.     GéRP/ 

AREL  tiT    if,L  H 

VÉ^fTS.   l^A 

TROI^O.  i^IE^T 


MMÉfeÉéÉÉMMiiÉMM 


«MMatt 


^  J  I*         1.  ,  A  A^  .*^  1^^  *  J  ^*    I 


Éi^ 


lA  *>».-   ■*        4    *    "w     - 


(0 

^   7y/»x  Flavius  Titus  (a),  membre  du  corps  dés  charptntietV. 
d'Arles  (3)  ;  T//VJ  Flavius  (4)  Inventus  a  un  patron  très-bienveillant  (5). 

Plifô  ioia  est  une  pierres  qui  contient  deux  bustes 

^iaps  un  encdâr^nent  d'areb^teeture  (pis  L  Vhfi§i7); 

€l9  sont  ceux  de  deujC  époux  :  is  femme  tient  tut 

.  V  miroir  ;  ^le  fronton  est  soutenu  par  des  colomles  ; 

le  tympan .  es%  orné  d'une  rosace  entre  deux  vases. 

On  fil  ^i  la  eomidie  ^ 

A*  A^Yid  SÉ0AT^  l»0M.  GRAPrtiWfï 
et  sur  la  base  , 

J5VLVS  IT  SÊeVftvS  fIlI  pArêntibus 

V  FECERVHt.  ^ 


■taoi 


ti)  firoFi4Pi(t 

(3)  cORPoratoFABRORumTIGNAnïànm  CÙkPoti ÀRElatenst, 

(4)  TITUS  Flavius. 

(5)  PJENTissitno, 


* 


J7t  CHAPITRE   XC VI. 

jLÀ*  JtmM^Sedaius  et  à  Pompeïa  ou  Pompouia  Grofiaiis,  Sedm^ 
1ms  {i)tt  Secums  lenrsfiU  ont  fait  faht  cette  tombe  à  leurs  (2)  pareiaj 

Le  pçtft  côté  à  gauche  a  pour  ornement  un  bou* 
dier  échancré  appelé  pelta  [i)é 

Le  saicophage  (4)  qu'on  voit  à  l'extrémUé  de  ce 
mur  (pi.  LXI ,  »/  ) )j  est  intéressant  par  le  sujet 
qu'il  représente  :  ce  n'est  pas  la  vendange  dts  raisins  j, 
telle  qu'on  la  voit^ur  quelques  tombeaux  (5) ,  mas 
la  cueillette  des  olives;  ce  qui  est  peut -être  une 
allusion  aux  douceurs  de  la  paix  qui  attend  l'homme 
juste  et  qui  sera  sa  récompense.  Treize  génies  de 
l'agriculture  sont  occupés  à  cette  récolte  :  trois  sont 
sur  dçs  échelles ,  qui  ne  sont  formées  que  d'un  bâtcm 
avec  de  petites  barres  saillantes  d'un  seul  côté  pour 
y  poser  le  pied  ;  d'autres  reçoivent  les  diives  dans  de 
petits  paniers ,  et  les  portent  dans*  de  plus  grands  y  où 
ils  les  rassemblent.  Au  milieu  est  le  pnessoir  y  que 
deux  génies  font  agir  ;  une  poutre  est  fixée  à  son 
9ctrémité ,  dans  un  pivot  ;  la  partie  in^|fjeure  est 
dans  la  cuve  :  cette  poutre  soutient  la  meule  ^  qui 
est  posée  de  champ ^  etnon  àjdat,  comme  dans 


(i)  seDVlVS. 
(i)  svh. 

(3)  Cette  pierre étoitatatrefoîs  dans  Ilié^Hal.  K^^^MURATORI, 
MCCXU,  10,  inexacte;  Gruter,  DCCXX>  i*  bien;  DUMONT, 
Jttscripf.  79,  pi.  XV,  n.*»  14* 

(4)  PUMONT,  pi  XX,  n.®  I. 

(j)  Stiprà,  p.   17^ 


^ 

¥ 


CHAFITRE   XCVJf.  573 

lés  mouUns  «îifbléi  une  barre  tr^^versale\  assi^efttie 
au  trente  jpàr  tin -fort  boulon ,  sert  à  faire  rtiôuvoîr 
cette"  meule  ;  elle  éci^e ,  en  tournant  ^  les  olives  ^e 
la  cuve  contient  y  sans  briser  les  noyaux  y  qui  donhe- 
roient  à  l'hiûie  im  mauviûs  goût  :  c'est  pour  éviter  cet 
inconvénient  cjueia  moule  est  à  cpelque  distance  des 
parois  de  la  cuve.  . 

Ce  torcularium ,  où  pressoir ,  est  d'une  extrême 
simplicité  :  il  diffère  beaucoup  d'une  machine  cU| 
n^ême  genre  qui  a  été  trouvée  à  -Stabîe  (  i  )  ;  celle-d 
est  composée  d'.un  cylindre  placé  au  centre  de  la  cuve^ 
et  de  deux  meulgs.-qui  éaas^ai  les  oli Vés  contre  les 
parois  et  contre  le  cyJindre  :  ie  néire  n'a  qu'une  seule 
meuIe.*Ce  pressoir  devroît  être  figuré  d^s  le  cdilier  à 
l'huile  [cella  oleariaj  ;msLis  le  sculpteur  a  voulu  réunir 
ensemble  l'opération  de  cueilfir  ies  oliyes  et:  celte 
d^exprimer  le  liquide  qu'elfes  contiennent. 

Sur  le  troisième  mur ,  on  trouve  d'aboard  une  ins- 
cription (2)  au-dessus  d'une  barque  qui  vogue  sut  une 
mer  où  nagent  quelques  poissons  fpl.  LXIyfg.  8): 
c'est  un  symbole,  du  voyage  que  l'homme  ftit  d^n3 

l 

tO  F^r^CUATTANl,  Monnmenti  inrditi,  mai  1786,  p.  39; 

HEYNE,  VIRGIL.  t.  V,  p.  26a  ;  GrimalDI  ,  AïtmorU  su  l'anticQ 

frantojo  d^oJh,  Ncapoli,  4785  ;  SCHNEIDER,  Scrîpwres ni  rus^ica, 

tome  I,  part,  a*»  page  61 5 ,  pi.  XI  ;  Beknabz)  r  Mémoires  pour  jic»^ 

à  l*histért  nAturclk  de  la  Provence ,  1788.    >         - 

(a)   Fby^MURATORI,    MDCUCVI,  8^  DUMONT,   pï,    XVÎ/ 
Xi.^  6f  Inscript.  2^,  •   •    i  *    «.; 


i^MH 


J74  CHAPITRE  xçyi, 

ia  vie,  #es  p>9tg9f  liV^'il  PWt  ï  f^pm^t  «t  ^  P<W 
assMré  qu'M  <roMve  enft>  d;^  |f  sfi^  #f  J?  W>rit 
L'BMWpsw  est  mm  çoffçai  it]i 

VIVOS    f^  FECiT  ^  SIBÏ  -ff  J^  SVIS 

Quhtus  Deiius  Nep,  fils  dt  Quintut^  a  fait  et  t^onument  de  ioi 
pivantpour  lui  et  Us  siens.  Ce  monument  ne  peut  appartenir  aux  héri- 
tiers maternels  {i). 


'    A  droite  est  cette  inscription  (  3  ) ,  que  Jufia  Par- 
ftéhope  s'est  &it  faire  de  son  vivant  : 


M   .1    U  1 .  i  J 


TT 


-W 


11,.       1         I! 


i 


« 

BPmSmBSS 


t 


On  trouve  au-dessus  quelques  fragmens  qui  ne 
présentent  aucun  sens. 

(i)  DuMONT^n.^  a^. 

(j)  NQC  AtanwoMtuM  AtMtentos  ff4trtidf^  Mm  Ae^idmr,  Çtm 
farmuie  ^est  iiuoiiie,  «c.ne  4jett. encore ^ouv^.qite. sur  liQs  mr 
criptîons  d*Aries.  C'est . mi^re  .alml.^iiloii.  doit  .o^l^Hcr'V^ 
fMyiations  de  h  pfge  jp^, 

(3)  DUMONT,  112. 


Pjii^Iotnj  dansune  mcht{jd*  ULVI^fig."/)^  9y  a 
àfs^x  [figures  un  peu  nHdtrakées^;  loe  sont  xieiks  dé 
Cornelia  Sedata  et  de  saâQeCprmeliaOptaca,  âgée 
^  wn)^  ans.  Geitte  tombe  a  éterfidtexie  iear  vivant^ 
wm  xpie  lé  db;  l'inscription  (i)  : 


mfmmt^m 


|>  ■■■■ 


CORNELIA    L    F.    SEDATA 

OPTaTAÇ     AjHNJ)*'yM.    XX 

Pli  AjB   VJVA    FîÇtCJT 

I  u     u   I   1      ;Jii  >  li  II  u  ■<   >i  ti  ■  rf  1 


Au-des$iis  estiuncippef^)  : 


s 


1         ^  I  I    I    [|         i    II    I     *    HW  I   u  M 


y  E4a  A  £  :F  r:li.T  A  SE 

AMJ^CA    BlO(«£NS 

J».OSVIT    IN  HONP 

REM     C     IVLI     FOR 

TVNATI    Illïîl  VIR 

AVGVSTALIS 

^   VXORI^ 


X^mi€,€cjlîgée  de  Vexid  Ftlt^ta  fiijrigé  «  cif(fK^  en  l'hûMUeur  d€ 
JÇ.^  Juliixif  Xoruu^tus ,  sévir  mguml,  à  fo»  ^use. 


<mmmmmmm^ 


(i)    DOMONT,    fï.  XV,    n.<»   20,   Inscript,   78;    GRUTER 
DCDX9CXVII,   la;    MURATORI,  ^ÇDLVI,  â. 

(2)  MURATORI,  DCCLV,   5i  DUA^QW, .».«  ^3. 


57^  CHAPITRE    XCVI. 

II  paroît  que  F(»rtunatus  ne  pouvoh  alors  rendre 
lui-même  à  Veria  Filtata  ce  dernier  devoir,  qu'une 
amie  a  bien  voulu  remplir. 

,  A  côté  est  un  sarcophage  dont  la  tablette ,  soti- 
tenue  par  des  génies  aiiés  qui  planent  en  l'air ,  con- 
tient une  inscription  (  i  )  dans  laquelle  la  tendresse 
maternelle  s'exprime  de  la  manière  la  plus  toudiante  : 


D 


o.  dolor.  qvantae 

/   lachrimae;.  fecere 

sepvlchrvm.  ivl.  lv 

cinae;   QVE.   VICXIT.  lA 
RISSIMA.   MATRI.   FLOS.   A£ 
TATIS,    HIC.    lACE't   NTVS. 
CONDITA.   SACXO.  O.   VTINAM 
POSSIT    REPARARL    SPIRITVS.    ItLE. 
VT.   SCIRET.  QUANTVS.  DOLOR  EST 
QVAE.  VIXIT.  ANN.  XXVII.  M.  X.  DIE  XIII 
IVL.  PARTKNOPE.  POSVIT.  11F ELIX. MATER 


À 


M 

K 


"  O  douleur  /  que  de  larmes  ont  arrosé  le  tombeau  df  Julta  Lucina , 
fui,  pendant  sa  vie ,  fut  si  chère  a  sa  mère  !  Alafieur  de  l^ge^  elh 
repose  sous  cette  pierre.  Oh  L^plut  au  ciel  quelle  pût  rengître  pour 
être  témoin  de  la  douleur  que  sa  peru  a  causée  !  Elle  a  vécu  vingt-sept 


(i)  DUMONT,  n.«  iij. 


etMS 


Chapitre  xcyi«  577 

mis  dix  mois  tt  trer^e  Jcurs,  Jnlia  Pmthàiapi,  sa  Mère  infortunée  i  lui 
d  cmsacr/câ  m^mmênt{i). 

Près  dfe  Jà  est  un  autre  sarcophage  de  même 
forme;  les  génies  qui  supportent  la  tablette  sont 
debout  (2). 


■*MMtl 


PAci.  ET*  Qvia:. 

£T.'M£MOE»  A£T£ 

Q.     ARXSTXO.    cHiES 

IVN.  QVI.  VIXIT.  AN,.. 

MENS.    III.    DIEBVS.  V 

ATERIA.    cIReSTE.     FRA 

TRI.    ET.    ARIST.    CHR£SIM 

ET     ARI8TIA.    lELPIS.    FIL 

DYLCISSiM.     ETHAOI 


N 


(i)  Une  jeune  Angioi&e,  M."*®  Lucie  Pamy ,  qui  réside  à  Mar^ 
seîliei  a  traduit  ainsi  en  vers  cette  touchante  Inscription  : 

Qde  de  pieu^  ont  couvert  ce  luneste  tombem  ! 
Lucine ,  de  sa  niÂre  et  ia  gioxre  et  l'amie, 
Lucine  y  descendit  au  printemps  de  sa  vie; 
Sous  un  marbré  glacé  s'édipsa  ce  flambeau. 
Ah!  si  ses  yenx  éteints  s*ouvroient  à  la  lumière. 
Us  jugeroient  combien  ma  douleur  est  amére. 
Cinq  (oiéres  et  deux  ans,  dix  mois  et  treize  jours, 
D'une  si  belle  vie  ont  achevé  le  cours. 
Parthénope  à  sa  fille  érigea  cette  pierre. 
Triste  tt  defnier  témoin  des  regrets  d'nne  nére» 

(a)  MURATORI,  MCDXXXVI^  i  ',  DUMONT,  Inscript.  n.<>  8^. 

Tome  ///,  o  o 


«■■MB 


lài 


57*  CHAPITRE    XCVi; 

j4u  repos,  à  la  paix  (i)  etâla  mémoire  étemelle  (2)  de  Q.Aristâb 

Chresimus  le  jeune  [■^),  qui  a  vécu ans,  trois  meis  5. . .  Jomrr, 

Ateria  Chresu  à  un  frère  chéri,  et  Aristius  Chresimus  (4)  et  Aristia 
Helpis  à  un  fis  tendrement  aimé.  Heureux  voyage  (5)  ! 

En  revenant  vers  la  porte  de  Féglise ,  on  voit  un 
fragment  (fun  sarcophage  (pi  LXV,  jig.  S)  très- 
maltraité  par  le  temps ,  et  dont  on  doit  regretter  la 
perte.  li  représente  Apollon  au  milieu  des  Muses, 
tel  qu'il  est  figuré  sur  d'autres  monumens  du  même 
genre  :  les  attributs  des  neuf  soeurs  sont  presque  tous 
détruits.  II  ne  reste  en  tout  que  cinq  figures  :  celle 
du  milieu  ^  qui  est  la  trobième ,  est  sans  doute  Apol- 
lon ;  ce  dieu  est  caractérisé^  par  le  griffon  qui  est  à  ses 
pieds  ;  on  voit  ^  par  la  position  de  ce  qui  reste  des  bras, 
qu'il  devoit  tenir  la  lyre  et  le  plectrum  ;  et  sa  longue 
robe  le  fait  reconnoître  pour  Apollon  Citharoede. 
If  est  probable  (^ue  sa  figure  représeittoit  les  traits 

(i)   QUlETi. 
'(2)  AETErnae. 

(3)  Quinto^RfSTIO  CHRESimo  IVNiorL 

(4)  ARlSTiuS  CHREStMus. 

(5)  ETnAQIn  ,  cVst-à-dire ,  bonne  navigation.   Les  anciens 
croyoient  que,  pour  entrer  dans  le  séjour  des  morts,  H  falfoît  passer 
TAchéron  dans  la  barque  de  i*infTexibIe  Charon.  G*étoit  aussi  une 
idée  philosophique  que  de  regarder  le  passage  de  la  mort  à  une 
vie  étcmeile  comme  un  voyage  :  de  là  vient  ce  souhait  qui  se 
trouve  dans  plusieurs  inscriptions  tumulaircs.  Nous  l'avons   vu 
indiqué  ci-dessus ,  p,  j^^f,  par  la  figure  d'une  barque.    Quant 
à  l'idiome  dans  lequel  ce  vcpu  est  écrit,  on  trouve  quelquefois 
Ats  vœux  semblables  c^^rimés  en  grec  à  la  >uite  des  mscriptioxu 
latines. 


tttAPlTRE     XCVl*  579 

I 

de  la  per^oi^n^çnfermée  <|aiis.ce  tombeau.  La  pre- 
mière Muse  est  Thalie  ;  elle  porte  le  masque  comique 
de  îhegemon  ott  conducteur  des  esclaves  ;  près  d'elle 
est  Mel^orinh^é  tenant  la  massue  et  le  masque  her- 
culéen ;  Clio  est  sufiîsammeht  cîàràctérisée  par  le 
s^le  qu'elle  a  dans  la  main  droite  :  les  deux  autres 
figures  sont  tellement  mutitéës^  qu'on  ne  sauroit 
r  déterttiineà:  ce  qrfeHes  sont;  On  vok ,  ^ans  l'autre 
raur^  des^fragmens  de  figures  sans  tête,  vêtues  de 
.longues^  robes  ;  elles;  parobsent  avoir  appartenu  à  ce 
.faas-relief.  'On  a  enchâssé  à  côié  quelques  ftagmisqs 
.de  tombeaux:  chrétiens.   On  en  remarquef  ,^  entrp 
autres,,  deux  qui  pourroîentse  rtunir  :  jq  le^ai  fait 
figurer /?/•  L^CV^fig.  j  et  lo  (i).  ^ 

Dans  le  milieu  de  i'ençeinte ,  il  y  a^  un  assez  gi?and 
^nombre  de  sarcophages;  on  en  â  brisé  plusieurs 
pour  en  enlever  la  face.  L'un  de.  ces  n)oi|umen$ 
paroit  avoir  été  très-beau  ;  sur  le  petit  côté  qui  en 
reste,  ori  Voit  un  griflfbn.  Un  autre  a  un  bu^te  au 
milieu;  de  cWquécôté,  des  moulures  en  foi'mfede 
<sti^gile  (z) ,  et  aux  deux  extrémités  une  figure  de- 
^bout.  Un  troisième  offre  des  figures  dans  des  niches» 
Ces  sarcophages  seront  bien  placés  dans  le  musée  ; 
.mais  ils  ne  m'ont  point  paru  mériter  d'être  dessinés* 
Aucun  des  trois  ne  porte  d'inscription. 


■ki*MiM 


^l)  DUMONT,  pL  XXV  ,  II.***  5  et  C. 

{%)  Supra,  p.  J54, 

o  o  a 


\ 
\ 


i8o  CHAPITRE  XCVI. 

Sur  un  quatrième ,  on  lit  celfe-fcî  (  i  )  : 


3f 


Njjj^  I  T    VALERI     DIONTSI   '  *        >^ 

D^       VAl'ERIA  CHARIS  V^Oli  ^T  U^£RI       "jK 

N 


i 


MARCELLVS     ET    PELICIO    PATRI    PllS 


Aux  mânes  [%)â€T,  VàUrUis  Dionjshts,  ValeriàCharisionipouni 
Vaietltts  Marcdlus  it  FfUda  (^)Â ieut  Wkktpin, 

Tels  sont  ies  précieux  restes  nosemUés  ohns  ce 
lieu  si  improprement  décoré  lia  nom  de  musée^  L'iih 
démence  des  élémens ,  les  insultes  de  ceux  qui  sV 
introduisent,  y  casent  continuellemeiit  des  ravages. 
Je  dirai  plus  bas  comment  on  pourroit  fermer,  pour 
les  recevoir  y  un  établissement  plus  (^gne  de  l'antape 
et  célèbre  cité  qui  a  l'avantage  de  les  posséder. 

On  trouve  encore  quelques  inscriptions  dans  f  an- 
cienne maison  des  Minimes  (4).  Près  du  léfectoîre, 
<m  voit  dans  le  mur  un  devant  de  saFco{diage  gnvé 

(l)  GKUTEB,  bcCXLV,  1 1  et  PCCCXX^VUi  li  MURATOW, 
MCDXVi,  4;  Hist,  de  VAcadémit  des  inscript,  tome  VIIi  148} 
Saxy,  Pontif.  Arel  99;  DuMONT,  n.*  97. 

(a)  D*apcs  fa  copie  donnée  par  Gruter,  DCGCXXXVH»!,  It 
première  ligne  qal  matK^ue  est  memma  atnmm.  Cette  mcription 
avoit  été  envoyée  à  Scaliger,  <|uî  se  trompai  eh  l'attribaant  à  U 
vilie  de  Nîmes;  il  i'avoit  rapportée  très-inexactement  à  fa  page 
DCCXLV,  I ,  où  il  dit  cependant  qu'etfe  est  à  Arfes ,  dans  PégVise 
Saint-Honorat*  La  cc^ie  envojrée  par  k  baron  de  ia  Baslie  à 
Muratori,  MCDXVI,  est  tout-à-fait  infidèle. 

(3)  PELICIO  pour  FELicio.  On  trouve  souvent  le  P  pour  ff 
dans  ies  inscriptions. 

(4)  DUPORT,  Histoire  de  V église  d'Arles,  p«ge  1  y. 


CHAPITRE    XCVI.  j8l 

fL  LXIXffy.  ^  :  c'est  une  espèce  cTarchitectpre , 
composée ,  sur  1^  côtés ,  de  deux  arcides  sout^iues 
par  des  colonnes  torses  ^  avec  des  palmettes  entre 
les  arceaiqc  ;  sous  chacune  de  ces  arcades  »  il  y  a  wm 
tête  de  Méduse  :  les  anciens  croyoient  que  ce  ngne 
ëloignoit  les  maléfices.  Au  milieu  est  une  tessère» 
ornée  de  chaque  côté  d'une  petite  fleur*  On  y  lit 
cette  inscription  (  i  )  : 


PAX.  AETERNA. 

SrtCiSSIMAB.    BT.    INNOCEN 

TISSIM.  FILIAE.  CHRYS0G<5nE.  IV 

NIOR.  SIRICIO.  QVAE.  VÏXIT.  ANN.  III. 

M.  II.  DIEB.  XXVII.  VALERIVS.  ET  CHRY 

SOGONE»  PARENTES.   FILIAE.   KARIS 

SIMAÇ.   ET.  OMNI.   TEMPORE.   VI 

TAE.  SVAE.   DESIDERATISSI 

MAE 


.  Paix  éurrulU.  A  unt  file  tendrement  aimée  et  trMnnocente ,  à 
Chrysogone Siricio  (i)  /<rx  cadetu,  quia  vécu  trois  ans  àmx  mois 


M  I   ■ 


^mttm 


^m»*m 


(i)  Voyei  MURATORt,  MDCCCU,  8  ;  BOUHIER,  Exfl.  17^ 
Hist.  de  VAcad,  des  inscript,  t.  VII,  249  i  DUMOOT,  pi.  XV,  fîg.  5 ,, 
Inscript,  n.*  86, 

{%)  SIRICIO,  datif  de  Sirîcitim,  comme  On  dit  en  grec  Cor-^ 
gonium ,  Melanium  ,  Clycerium  ,  atn  îîeu  4t'0M^ià,  Mëanik  ^ 

o  O  J 


582  CHAPITRE     XCVi; 

tt  vhrgt'Sept  jours.  Valtrius  et  Chryiogont ,  •  son  pirt  et  $a  mère,  à  leur 
fiiU  chérie,  qu'ils  ne  cesseront  de  regretter,  tant  ^' ils  vivTMt, 

Ce  sarcophage  a  été  trouvé,  en  \6\%\  dans  un 
tombeau,  en  creusant  les  fondemens  du  monastèrer 
des  Minimes  (i);  et  il  renfermoît  lui-même  un  cer- 
cueil de  plomb ,  dans  lequel  i!  y  avoit  une  étoffe  d'or 
et  de  soie  très-riche,  qui  enveloppoit  sans  doute  le 
corps  de  la' jeune  Chrysogone.  II  est  fâcheux  qu'on 
n'ait  pas  conservé  ce  précieux  tissu,  ou  du  moins 
qu'on  n'ait  pas  songé  k  le  faire  dessiner. 

Dans  l'escalier  qui  est  auprès ,  on  lit  cette  inscrip- 
tion, enchâssée  dans  le  mur  (2)  : 


l.  domit.  domitiani 

extrIerarGIi.  class.  gSIm 

pfcocceia,  valentina 

conivgi.  pientissim 


A  £.  Domitien,  fils  de  Domitien,  ex-triérarque  (3}  de  la  fiotu 


Gfyceria  :  ce  nom  n'est  pourtant  pas  grec  ;  aussi  !c  président 
BoUHlER  veut-il  que  Siricio  soit  pour  Syrtca,  et  que  ce  mot  in- 
dique que  la  jeune  Chrysogone  ctoît  d'origî#ie  syrienne. 

(i)^DuPORT,  Histoire  de  Véglise  d'Arles,  page  13. 

\%)  Mur.  DCCCXI,  i,  etDCCCLXXX,  5;CASTELL.  Hist.  de 
Palerme,  303  jMaffei,  Gall,  Ant.  6^,  ii^correcte;  Hist  de  l'Acad. 
des  inscript,  tome  Vil ,  2  50  ;  SEGUIN ,  Antiq.  d' Arles,  ^^  6  ;  BRCVÀL. 
^emarh,  tome  II,  174;  DuMONT,  n.*  98, 

(3)  Conunand^ni  de  trirème^ 


.ti 


CHAPITRE*  XCVI.  585 

germanique  [\),  pieuse  et  fdèle  (z)  ;  Cocceia  Valentinn  à  sou  tendre 
époux. 

On  voit  encore,  sur  ie  mur  antérieur  de  celte 
maison,  plusieurs  fragmens  de  sarcophages. 

Je  ne  me  rappelle  pfus  ia  place  qu^occupent  dans 
ce  monastère  deux  sarcophages  que  f'jai  fait  des- 
siner et  graver.  Le  premier  (pi,  LIX ,  n,^  p)  n'est 
qu'un  fragment  ;  il  est  brisé  près  de  îa  tabfette  des- 
tinée à  porter  l'inscription  r  on  y  remarque  Jonas 
dans  la  barque,  la  résurrection  d^  Lazare,  et  Daniel 
dans  la  fosse  aux  lions  (3).  L'autre  sarcophage 
(pL  LXVJ,  fg,  8  )  représente  ïa  résurrection  de 
Lazare  :  sa  sœur  Marthe  implore  fe  Seigneur;  on 
voit  ensuite  k  guérfson  de  l'aveugïe  de  Jéricho , 
Susanne  entre  les  vieillards ,  Feau  changée  en  vin , 
S.  Pierre,  et  Moïse  faisant  sortir  Feau  du  rodiei'. 
L'artiste,  suivîint  le  goût  de  son  siècle,  a  cherché  fe 
symétrie  et  l'opposition  des  groupes ,  et  ne  s'est  point 
•attaché  à  l'ordre  chronologique  des  faits. 


«■w*i 


(i)  Cette  inscription  est  fa  seule  où  il. soit  fait  mentioi)  de  k 
fïotte  germanique.  La  station  de  cette  Hotte  étoit  sur  ie  Rhin. 

TAcrr.  1. 1. 

(2)  P/dr  Fideîi.  Maffei  a  ïu  mal-à-propos  PÊCOCCÈJA, 

(3)  Le  comédien  Duménil^  qui  a  laîssédes  dessins  manuscvits 
de  plusieurs,  monumens  de  ia  France,  a  copié  ce  tombeau,  et 
ïi  a  fait  de  ce  groupe  un  Satyre  entre  deux  Priapfes  ;  cela  suffit 
pour  faire  voir,  queiie  confiance  on  doit  avoir  dans  cette  c6iIectioiï> 
qui  est  aujourd'hui  à  la  bibliothèque  de  l'institut..    . 


o  a  4 


5*4 


CHAPITRE    XCVIL 

Saint-Trophime.  —  Portail.  —  Sculptures. —  NefI 
—  Inscription  attribuée  à  S.  Virgile*  —  Tombeau  de 
Geminus. 

JNous  venons  4e  ^siter  un  lieu  qui,  par  l'effet 
pittoresque  de  ses  murs  en  ruine ,  et  la  variété  des 
monumens  qu'il  renferme ,  porte  l'esprit  à  la  médi* 
tation  et  au  recueillement ,  et  jette  dans  l'ame  i^ 
germe  d'une  foule  de  pensées.  L'édifice  auguste  que 
la  religion  des  Artésiens  a  consacré  au  culte  da 
premier  de  ses  apôtres  et  de  ses  évèques ,  n'a  pas 
moins  de  droit  à  notre  attention  :  c'est  un  des  plus 
curieux  monumens  de  l'art  ;  c'est  un  des  sanctuaires 
les  plus  saints  et  les  plus  révérés  de  l'antique  Gaule. 
Nous  avons  dé|à  parlé  des  différens  sentimens 
sur  l'établissement  du  christianisme  en  Provence  (  i  )• 
L'opinion  vulgaire  est  qu'il  fut  porté  à  Arles  par 
S.  Trophime,  que  l'on  croît  avoir  été  un  des  soixante- 
douze  disciples  de  Jésus-Christ,  et  dont  on  trouve  le 
nom  dans  iesÉpîtres  de  S.  Paul  (a).  On  prétend  qu'il 
étoît  d'Ephèse,  qu'après  la  mort  de  Jésus -Christ  il 
suivit  S.  Çîerre  h  Rome ,  que  le  prince  des  apôtres 
i'enyoya  prêcher  la  foi  dans  les  Gaules,  et  qu'il 


la  Mil 


(i)  Suprâ ,  p.  1 1 9  et  I ^jf. 

(»)  S*  Paul,  xx,  4j  xxi,  a^. 


CHAPITRE    XCVIÏ.  jSj 

$*znètz  à  Arks ,  où  H  abolit  ie  culte  des  idoles ,  les 
sacrifices  humains,  et  où  il  fit  un  grand  nombre  de 
prosélytes,  qui  reçurent  le  baptémeé  II  convertit  les 
Champs-Elysées  en  un  cimetière  :  ce  fut  à  lui  que 
J^us  *  Christ  apparut  pour  bénir  ce  lieu  destiné 
désormais  à  ia  sépulture  des  fidèles ,  et  il  laissa  su^ 
ime  pierre  l'empreinte  de  ^s  genouXr  S.  Trophimè 
y  bâtit  une  chapelle  à  h  Vierge,  encore  vivante.  II 
s'éloigna  quelque  temps  d'Arles ,  pour  répandre  aussi 
^  la  foi  dans  d'autres  villes  des  Gaules  ;  il  y  revint 
^  enfin ,  et  fut  inhumé  dans  le  cimetière  qu'il  avoit 
f        ^  quelque  sorte  cQn<|iûs  potur  les  chrétiens. 

Cependant  les  iâits  qui  constituGnt  cette" histoire, 
}        ne  sont  fondés  sur  aucune  iiutorité.  Grégoire  de 
'        Tours,  comme  nous  l'avons  déjà  dit,  fixe  au  llC 
■        siècle  l'arrivée  de  S.  Trophîme  à  Arles ,  au  même 
'        temps  où  l'on  vit  S.  Paul  évêque  à Narbonne,  S.  Satur- 
nin à  Toulouse  et  S.  Denis  k  Paris;  mais  on  doit 
penser  qu'il  y  avoit  déjà  des  -chrétiens  dans  Arles  à 
cette  époque.  Quel  que  soit  le  temps  où  S.  Trophimè 
a   vécu  ,  c'est  toujours  lui  qui  commence  la  liste 
révérée  des  évêques  d'Arles ,  et  qu^on  peut  regarder 
comme  ie  chef  de  cette  église.  EUe  reçut  de  grands 
privilèges  des  papes  ,  des  empereurs,  des  rok  de 
France  et  des  comtes  de  Provence  ;  Henri  VII  voulut 
i        qu'elle  jouit  de  ceux  de  l'église  de  Rome.  Conrad  lui 
céda  tous  ses  droits  impériaux ,  et  laissa  à  ses  évêques 
celui  de  battre  monnoie  et  de  donner  des  lettres  de 


58^  CHAPITRE.XCVIT. 

noblesse  :  ils  reçurent  le  titre  de  primats  des  Gaules  ; 
ce  qui  causa  des  dîfFérens  avec  l'église  de  Vienne  , 
cjui  enleva  enfin  la  primatie  à  celle  d'Arles  dans  le 
/viii/  siècle. 

On  fiiit  remonter  l'époque  de  la  construction  de 
l'église  de  Saint-Trophime  au  temps  de  S,  Virgile, 
ârdievéque  d'Arles  au  vi.'  siède.  Il  pouvoit  exister 
alors  un  édifice  pour  la  réunion  des  fidèles  ;  mais  ce 
n'étoît  assurément  pas  celui  que  nous  allons  visiter. 
On  sait  que  cette  église  étoît  dédiée  à  S.  Etienne, 
le  premier  de  nos  martyrs.  Ce  ftt  en  1 1 5  2  que 
Guillaume  de  Montrond,  archevêque  d'Arles,  y  fit 
porter  le  corps  de  S.  Trophime,  dont  elle  a  reçu  le 
nom.  On  composa ,  à  cette  occasion ,  un  poème , 
qui  existe  manuscrit,  et  dont  je  citerai  quelques 
fMusages  comme  un  ancien  monument  de  la  langue 
provençale  ^- 

Cairt  îos  papas  Sant  Pcîr,  Sant  Pauf, 
Kffoa  sagrat  Saut  Trofeme  cors  sant, 
£ls  !i  dcron  poder  que  fos  papa  segons 
Entotos  las  procnsas  que  son  desa  ios  mons. 

Tôt  aqucst  grand  poder  Sant  Trofcme  garder 
Aytant  que  fbn  evesques  é  visquet. 
£  pueys  devenc  que  la  sieutat  defalhi  > 
Entro  que  Temprador  G)5tantin  !a  basti  (i). 

(1)  Quand  les  papes  S.  Pierre  et  S,  Paul  eurent  sacré  S.  Trophime 
évcque  ,  ifs  l'établirent  second  pape  dan»  toutes  les  provinces  qui  sont  eir- 
deçà  Ae$  monts.  S.  Trophipie  conserva  ce  grand  pouvoir  tout  le  temps  de 
son  épiscopat  et  de  sa  vie.  Ensuite  la  ville  tomba  en  décadence  jusqulaf» 
temps  où  reropercur  Constantin  f»  Mlit. 


CHAPITRE   XCVII.  J87 

Pucys  nos  dkxmet  cura  d  pros  Theodotis  (i). 
•  • ^••. ••..•••• ••••;  • 

Cu  ad  ayso ,  senhos  ^  sera  obediens  « 
NI  non  î  mancara  ren  per  nuil  tems         ^ 
As  iettras ,  pcr  veritat  ben  Ven  venra; 
Et  de  Dieu  bon  guîderdon  resebra  (^); 

....;-T.......; ..,.] 

4- 

EpcaraS ,  si  deu  mot  alegrar  tôt  fisel 
Cant  sap  que  per>el  es  avocat  al  sel 
Sant  Trofcm  Tarcivesque  de  la  sîeutat 

D'Arle^  et  Sant  Esteve  premier  iapidat  (3]. 

t. 

Deven  aver  grand  fé  et  grand  dcvosîon 
Et  portar.reyercncia  et  grand  suppiîcîon 
Per  so  qu'efs  sans  an  Dieu  nos  acabon 
Tôt  so  que  nos  querem  ni  demandaren  {/^, 

(1)  . .  »  f . . .  Puis  le  preux  Théodoric  nous  iccorda  sus  soins  ou  sa  bien- 
veillance* 

(2)  Seigneurs ,  celui  qui  sera  obéissant  à  ceei  et  l'observera  toujours  à  fa 
lettre ,  certainement  bien  lui  en -prendra,  et  Dieu  lui  en  donnera  une  ampie 
iéc«nipense. 

^  (^J^'fy  plus,  tout  fidèle  doit  fort  se  réjouir  de  savoir  qu'il  a  pour  av<H 
cats  dans  le  ciel  S»  Trophime ,  archevêque  de  la  ville  d'Arles  ,  et  S.  Etienne» 
premier  martyr, 

(4)  Nous  devons  avoir  une  grande  foi,  beaucoup  de  dévotion  et  de  res- 
pect, faire  d'ardentes  prières,  pour  que  les  saints  nous  obtiennent  aupr«f 
de  0ieu  tout  ce  que  nous  leur  demanderons.  ^ 


iilh^ 


■■AaakM^^iMi 


j88         ^      CHAPITRE  xçyii». 

Et  tous  scias  gens  que  al  luoc  fés  aurati^ 
Et  oreiran  certâmen»  et  per  fui  ptegfxan 
A  Dieu  onnipotent  ios  sans , 
AI  cor  «t  a  i'arait  «ur«n  v«ra  sAluf  (  »)»   ' 

La  différence  des  constructkHis  pnmve  que  cette 
église  a  été  bâtie  à  diflTérenteâ  époques.  Le  pprtail  ^ 
quoique  très-ancien ,  est  certainement  d'une  date 
bien  pius  récente.  Sa  forme  (pi.  LXX,  fg.  i  J  est 

^  présente  d'abord  un  immense 

fronton ,  dont  la  corhkhe  est  soutenue  par  des  con- 
soles décorées  de  fleurons  et  d'animaux  qui  figurent 
symboliquement  les  évangéUoes  ;  à  la  partie  la  pius 
élevée  du  fronton ,  est  un  ange  avec  les  ailes  éten- 
dues. 

Le  tympan  est  occupé  par  unt  immense  arcade 
circulaire ,  et  non  de  forme  ogive  ;  elle  est  formée 
de  plusieurs  bandes ,  dont  diacime  a  un  ornement 
particulier  ;  la  dernière  est  couverte  d'une  foule 
d'anges  qui  paroissent  occupés  à  louer  le  Seigneur 
et  composent  sa  cour  :  à  la  partie  la  plus  élevée  du 
cercle ,  il  y  s  d'autres  anges  qui  sont  Ams  des  atti- 
tudes extrêmement  forcées  ;  ils  sonnent  de  la  trom- 
pette ^  comme  pour  appeler  les  nations  au  jugement 
dernier.  Dieu  lui-même  est  au  milieu  dans  un  mé- 
daillon ovale  ;  il  a  une  couronne  sur  la  tête ,  et  il 


(t)  T«i4  ceux  qm  auront  A>i  à  ce  Utu  (»  U  viH«  4'ArIe9)»  et  auront 
«oc  ferme  croyance»  cl  y  pricr^m  Dieu  et  iç$  $matt^  obtiendront  it  saint 
Àt  leur  corps  et  de  leur  «me*  . 


CHAPITRE    XCTtt.  \ît^ 

est  assis  sur  un  trône  j  H  lève  ïa  mam  comme  poàr 
rendre  ses  irrévocables  arrêts  :  antorur  de  lui  sont 
un  lion  et  un  bœuf  ^  tous  deux  aiiés ,  un  ^^e  et  ua 
ange  qui  tiennent  chacun  un  évangHe. 

Tout  i^édiftce  est  porté  par  des  cofomiei  /au 
nombre  de  six  de  chaque  côté;  fes  chapiteaux  en 
$ont  taries  :  ces  colonnes  soutiennent  une  farge  frise 
qui  forme  la  base  du^  fronton.  Cette  frise  est  chargée 
d^un  grand  nombre  de  figures,  dont  la  plupart,  selon 
l^usage  du  temps,  représentent  de^  scènes  du  Juge- 
ment dernier  i  au  mflliéu  sont  lès  douze  apôtres  assis; 
chacun  tient  un  livre  à  la  main  ;  ils  paroissent  former 
le  conseil  du  Tout-puissant. 

Les  côtés  rentrant  ne  sont  pas  moins  riches.  A 
gauche,  on  voit  ^w/  2J  deux  hommes  qui  ont  une 
barl>e  vénérable  :  ils  sont  assis  entre  des  arbres ,  et 
chacun  tient  deux  enfans  sur  tes  genoux  ;  un  angQ 
debout  devant  eux  leur  présente  une  autre  figure. 
Je  crois  que  ce  sont  des  âmes  qui  vont  paroître  au 
Jugement,  et  que  leurs  patrons  intercèdent  pour 
elles. 

Derrière  est  une  jeune  femme  entre  une  femme 
plus  âgée  et  un  vîeiHard  ;  effe  iest  suivie  de  jiiusieurs 
hommes  qui  som  vêtus ,  comme  les  apôtres ,  d*une 
tunique  et  de  la  toge  romaine  :  ils  élèvent  une  main 
comme  pour  rendre  grâces.  Derrière  eux  viennent 
des  femmes  voilées  ;  elles  sont  vêtues  d'une  tuniqut 
et  d^uiîe  espèce  de  péplum  à  pKs  droits ,  ainsi  qu'ort 


J90  CHAPITRE    XCVtlt 

le  remarque  aux  statues  de  l'aiicien  style  grec.  Je 
crois  que  ces  figures  sont  celles  des  hommes  et  des 
femmes  qui  ont  éprouvé  Teffet  de  la  miséricorde  de 
Dieu  ,  et  qui  vont  entrer  dans  le  paradis  ;  c'est  pour 
cela  qu'elles  sont  vêtues  comme  elles  l'étoient  dans 
le  monde  :  les. âmes  qu'un  ange  présente  au  juge- 
ment, et  pour  qui  leurs  patrons  intercèdent,  sont 
encore  nues  (i).  Les  élus  sont  précédés  de  plusieurs 
évéques. 

A  droite  des  douze  apôtres ,  on  voit  un  vieillard, 
qui  ne  tient  pas ,  comme  les  autres ,  des  âmes  sur 
ses  genoux  ;  mab  il*  est  assis  sur  un .  homme  qui 
s'appuie  sur  ses  quatre  extrémités  :  c'est  probable- 
jnent  un  signe  de  réprobation.  En  effet,  le  groupe 
qui  suit,  et  qui  fait  pendant  k  celui  des  élus  que  je 
viens  de  décrire,  n'offre  que  des. hommes  nus;  un 
vieillard,  peut-être  S.  Pierre,  paroît  leur  ordonner 
de  sortir  d'un  lieu  que  souille  leur  présence  :  tous 
sont  enchaînés  par  une  même  corde,  dont  un  démon 
tient  l'extrémité  ;  et  entre  leurs  jambes  on  voit  déjk 
s'élever  les  flammes  dans  lesquelles  commence  I^ur 
étemel  supplice. 

Au  retour  {nJ"  j),  il  y  a  un  groupe  de  damnéf 
au  milieu  des  fïammes  ;  au  retour  opposé  (n.''  jf),  on 


(i  )  Ceci  paroit  tenir  à  une  ancienne  tradition.  Dans  le  tableau 
du  Jugement  dernier àt  Breughel  d'Enfer,  toutes  les  âmes  mises 
«n  jugement  sont  nues  :  cdies  qui  vcrnt  en  enfer ,>  restent  ainsi} 
celles  qui  entrent  dans  ie  paradis ,  sont  revêtues  de  riches  habits. 


'^CHAPITjRE    XCVII>  Jpt 

a  figuré  Adam  et  Éve>  la  cause  du  pé<^hé  originel 
et  de  la  damnation  de  l'espèce  humaine. 

On  voit  ensuite  ^  dans  la  rentrée  (n!  ^),  un  ange 
qui  ferme  la  porte  du  paradis  y  et  des  hommes  qui 
expriment  leur  désespoir  en  mettant  leurs  mains  sur 
leur  front.  Comme  dans  toutqi  les  peintures  et  les 
sculptures  de  ce  temps,  la  forme  de  la  porte  dit 
paradis  est  celle  d'une  porte  d'église.  Les  person- 
nages ont  un  bonnet  qui  ressemble  assez  à  celui  qui 
caractérise  les  Juifs  sur  les  premiers  monumefis 
chrétiens  ;  c'est  cel^i  qui  étoit  en  usage  pour  les 
hommes,  dans  le  xiv/  siècle  :  on  voit  des  figures  da 
Charles  Y  ainsi  coiffées. 

Sous  cette  frise ,  règne  un  double  rang  d'orne- 
mens  imités  des  monumens  antiques;  ce  sont  ie 
méandre  et  les  vagues  (i). 

Le  milieu  de  la  porte  est  soutenu  par  une  colonne 
de  granit  qui  a  pour  chapiteau  un  ange  avec  les  ailes 
éployées  ;  quatre  hommes  agenouillas  sont  attachés 
par  le  dos  k  sa  base,  à-peu-près  comme  les  rois  captifs , 
sur  les  médailles  relatives  à  ia  soumission  des  pro- 
vinces :  c'est  probablement  un  symbole  du  triomphe 
de  la  foi  sur  les  nations  barbares. 

Les  jambages  de.  la  porte  sont  formés  par  un 
iàisceau  de  petites  colonnes ,  dont  les  chapiteaux 


(i)  Voyez  mon  Dictionnaire  da  htauK-arts,  aux  mots  BOR' 

f>UR£,  Méandre  et  Vagues. 


I  J^I^M^I 


592  CHAPITRE    xcvir. 

sont  historiés*  A  gauche  il  y  a  un  homma  as»[s  quf 
étend  une  main  :  à  droite  est  la  Viargé  cpû  tient 
i'en&nt  Jésus  sur  ses  genoux  ;  elle  est  entre  deux 
anges.  Dans  la  rentrée  y  on  voit  aussi  les  trois  magei 
qui  arrivent;  l'un  est  etKbre  k  cheval ,  les  deux  autres 
en  sont  descendus;  ik  vont  se  présenter  k  Hérode, 
qui  est  assis  sur  une  espèce  de  trône ,  et  accompa- 
gné d^un  garde  ;  ifs  se  remettent  ensuite  en  route 
pour  chercher  le  Sauveur  ;  ici  ^  au  lieu  de  chaperom 
ordinaires ,  ik  ont  de  longs  bonnets  coniques.  Oit 
voit  phis  loin  tut  baptême  par  immersion  :  un  enfant 
est  plongé  dans  une  cuve  par  son  père  et  sa  mère; 
le  Saint-Esprit,  sous  fa  forme  d^une  colombe ,  des^ 
cend  sur  cet  enfônt* 

Dans  la  rentrée  (n!^)^  on  a  figuré  Fenfant  Jésus 
suspendu  avec  son  berceau ,  la  Vierge  nouvellement 
accouchée ,  étendue  dans  son  lit ,  et  S.  Joseph  gar- 
dant son  épouse ,  qui  vient  de  lui  faire  un  don  si 
précieux.  Les  trois  rois  mages  ont  trouvé  le  fils  de 
Marie ,  qui  est  sur  les  genoux  de  sa  mère  ;  chacun 
est  placé  sous  une  arcade  ;  ils  l'adorent  :  derrière 
eux  s'avancent  les  trois  tètes  des  animaux  ^i  les  ont 
amenés  d'un  pays  si  éloigné. 

Dans  Tau tre  rentrée ,  il  y  a  un  vieillard  au  Rt ,  et  près 
de  lui  un  ange;  on  remarque  ensuite  des  troupeaux  ; 
au  retour  (n.^  8) ,\xa  cheval  et  deux  taureaux  gardés* 
par  un  berger  accompagné  d'un  chien  et  vêtu  de  la 
cape  pastorale,  d'où  les  prêtres  ont  ehiprunté  cette 

espèce 


tHÂPitRË   XCVtti  59J 

espèce  de  vêtement  qu'on  apjpelfe  chûpe  :  isiir  lè  > 
tetour  opposé,  nyp ,  îl  jr  a  des  plantes. 

Léi  côtés  s^ont  décorés  Ses  statues  de  quatre  per* 
sonnages  ;  on  y  distingue  S.  Pi^re ,  S.  Jacques  et 
S.  Philippe  :  le  nom  de  chacun  est  écrit  sur  le  livre 
qu'il  tient  à  la  main.  S.  Pierre  est  à  gauche  ;  il  tient 
les  clefi  du  paradis.  Entre  deujc  figures  s'élèVer  un 
jpllâstre  chargé  d'arabesques  (n^  lO  et  ïi). 

Les  colonnes  sont  sur  une  basé  fcontînue,  ornée 
iïe  bas-reliefs  :  ils  représentent  le  combat  d'un  taureau 
et  d'un  autre  animal  ;  un  mufle  de  lion  ;  au  retour  ûil 
tioitime  agenouillé,  sur  le  dos  duqUel  un  autre  homme 
pose  quelque  chose;  un  jeune  homme  conduisant  tin  ' 
lion  ^w.*  12),  et  à  droite  un  lion  qui  va  dévorer  irti 
serpent  ;  un  autre  homme  qui  conduit  aussi  un  lion  ; 
un  autre  assis  entre  des  lions  qui  vont  le  dévorei*  ;  dii 
tnufle;  un  combat  de  béliers  semblable  au  précédent  j 
et  un  lion  passant  (n."  ij).  Enfin  un  homme  nu  tient 
de  chaque  main  deux  autres  hommes  par  une  jambe  \ 
tls  saisissent  leur  tête  en  se  débattant  (n.^  14)  :  peut- 
être  est-ce  un  tourment  de  deux  damnéà*  Un  ceh* 
taure  (n^  i^)  lance  des  fléchés  à  (Éeûx  lions. 

Entre  deux  colonnes  cànhèlées  >  il  y  en  a  une 
simple  ;  les  chapiteaux  sont  trèà-vafiés  :  entre  chaque 
colonne  îl  y*à  une  figure  ;  à  gauche,  il  y  en  a  deui 
qui  tiennent  un  livré  et  pârôissént  être  des  dtscfples 
ffu  Chrîs t ,  ou  des  Pérès  drfÉgffee:  On  y  voit  tme 
figure  ti*évêqiré  pôttaftt  W  cfôs!?e>  accompagné  de 
Tome  III,  Pp 


*        !>■■  «J^Pm  -     ■  — ^■... >— ..^— ^.^^      ^ 


^  594  CHAPITRE    XCVU. 

deux  assistans  et  de  ^eux  anges  qui  soutiennent  sa 
mitre  :  cet  évêque  est  S.  Trophime.  On  lit  sur  son 
pallium  cette  inscription-  en  lettres  gothiques  : 

CERNITVR  EXIMIV5  VIR ,   CHRISTI  DISCIPVLORVM 

DE   NVMERO  TROPHIMVS  HIC  SEPTVAGINTA  DVORVM. 

De  l'autre  côté  ,  dans  le  premier  entre-colonne- 
ment ,  il  y  a  une  ame  que  deux  anges  élèvent  et 
vont  présenter  à  TEternel  :  c'est  celle  de  S.  Etienne, 
que  nous  voyons  au  bas  à  genoux  entre  deux  hommes 
armés  de  pierres  pour  le  lapider  ;  ce  saint  a  une  épée 
de  forme  antique  ,  une  espèce  de  parai^onium  (  i  ) , 
dont  le  fourreau  porte  des  caractères  indéchiffrables. 
L'artiste  ne  pouvoit  mieux  faire  que  de  mettre  ainsi 
en  opposition  les  deux  saints  à  qui  cette  église  a 
été  consacrée. 

Dans  le  haut  du  mur  qui  est  derrière  les  colonnes , 
il  y  a  xme  frise  qui  représente  différens  sujets.  Ce  sont 
principalement  des  faits  tirés  du  Nouveau-Testament. 
On  voit  à  gauche  un  ange  qui  prie  les  mains  éten- 
dues ;  un  arbre  le  sépare  du  reste ,  pour  indiquer 
qu'il  est  isolé.  C'est  ensuite  la  fuite  en  Egypte; 
S.  Joseph  conduit  par  la  bride  l'âne  sur  lequel  est 
la  Vierge  Marie ,  qui  tient  son  fils  sur  ses  genoux  : 
plus  loin  est  le  massacre  des  Innocens  ;  puis  viennent 
Içs  rois  mages  qui  arrivent  à  cheval. 

(i)  Voyei^  ce  mot  dans  le  Dkûênnmt  da  bcoMM-aru^ 


CHAPITRE   XCVÏI.  jpj 

Il  y  a  encore  au  retour  de  ce  côté  deux  bas-reiiefs 
que  fai  fait  figurer- à  part,  parce  qu'ifs  ne  peuvent- 
être  représentés  sur  cetle  planche.  L'un  ôffi-e  (n.\  i6) 
fange  Gabriel,  qui  pèse  des  âmes  dans  une  balance  : 
il^y  en  à  une'  qui  a  été  trouvée  de  bon  poids  ,  et 
^i  va  entrer  dafts  le  paradis  ;  les  deux  autres  sont 
encore  dans  les  .bassins;  Cette  idée  de  peser  les  âmes 
est  fort  ancienne  v  elle  se  trouve  d'abord  dans  les 
jjèëmes  d'Homère,  où  Jupiter  est  représenté  pesant 
les  destinées  [kérh]  d*AichiHe  et  d'Hector;  une  belle 
pàtère,  publiée  par  Wincfcelmann,  nous  fait  voir 
Mercure  tenant  la  balance  où  sont  placées  les  kêris 
^Achille et  de Mémnon  (i).  J'ai  découvert  le  même 
sujet  sur  un  magnifique  vase  de  la  collection  impé- 
riale [i)i  C'est  ce  que  les  anciens  appellent  la  psy- 
chostasie,  om  Id  pesée  des  âmes,  hss  chrétiens  ont 
exprimé  de  même  le  jugement  de  Dieu;  et  dans  le 
singulier  tableau  du  Jugement  dernier  attribué  à 
Van  Èyk ,  l'ange  Gabriel  pèse  aussi  les  âmes  comme 
-il  le  fait  ici. 

Au  «/  //,  le  démon,  assis  sur  un  monstre  à  quatre 
pattes  et  k  queue  de  poisson ,  tient  deux  hommes 
renversés  entre  ses  bras  ;  il  en  a  un  autre  entre  ses 
cuisses.  Un  satyre,  n'  i8,  tient  un  lion  par  une 
jpatte. 

(  I  )  Voyez  Monumrns  antiques  inédits,  11 ,  34. 
(2)  Je  vais  le  publier  sépatémcot,  accompagne  d'une  disser- 
tation, 

pp   a 


^^6  CHAPITRE    XCVÏJ. 

On  monté  à  cette  ^Iwe  par  un  perron  de  sept 
ou  huit  marches  qui  se  prolonge  sur  toute  |a  feçad^. 
Ce  portail  paroît  être  du  XHI.*  siècle;  les  tombeau» 
d'AljJhonse,  roi  tfArragén,  de  Raymond -Bérenh 
ger  (i)  et  de  Béatrix  (2),  <JUq  aous  avons  figvrfe 
et  décrits ,  prouvent  qif il  y  avOît  aîor^  en  Provence 
des  artistes  capable^  d'exécuter  un  pareil  édifice. 

Ce  qu'il  y  a  de  remarçiafale  ^  c'est  l'observatiop 
fidèle  et  constante  du  costume  romain  (feins  ia  re- 
présentation de  ia  plupart  dés  personnages.  On  peut 
présumer  que  le  grand  nombre  de  sarcophages  qui 
étoient  à  Arïes  dans  les  premiers  temps  du  chris- 
tianisme en  Provence,  auront  donné  a^  sculpteur 
l'occasion  d'étudier  ce  costume ,  et  qu'il  y  aura  copié 
pltisieufs  des  histoires  qu'il  a  figurées  silr  ce  portail  ; 
car,  à  l'exception  de  quelques  détails  qui  tiennent 
au  temps^  où  l'ouvrage  a  été  fait,  ces  bas-relîe& 
ont  assez  d*analogi€(  ayec  ceux  que  l'on  voit  sur  les 
plus  anciennes  toirtbes  chrétiennes.  Le  bas-relief  du 
milieu  de  la  porte  est  évidemment  une  copie  des 
sculptures  nombreuses  qui  représentent  Jésus-Christ 
entre  ses  apôtres  (3). 

L'intérieur  est  composé  d'ime  nef  avee  deux 
ailes  extrêmement  étroites.  On  lit  sur  la  muraitle 


(i)  TomcH,  pages  zS6,  288 ,  289  ;  et  Atlas,  pi.  XLi— XLIV. 

(2)  IbU  page  2S8  ;  Atlas,  pi.  XUV, 

(3)  Atlas,  pi.  LXVI^  n.«  2. 


CHAPITRE   XCVII.  597 

de  l'aîle  gauche ,  où  est  I^  tribune  des  orgues ,  les 
vers  suivans ,  qu*oii  prétend  que  S.  VârgUe  y  avoît 
fait  graver  (i)  : 

TEÏ«AB7M0MA<9EHINm 

1(0  JMISSVS  SEMTEEAPeiOiTVElVPINCOLMOSEP 

OLlMCOïniITOIOETEOCONirçiIORCkO 

C'e§t-à-dî|e  ; 

TERRARUM  ROMA  GEMINA  DE  LUCE  MAGI&TRA 
ROS  MISSU3  SEiyiPER  ADERIT  VELUT  INCOLA  JOSEPH 
OLIM   CONTRITO   LETHi£0   CONTULIT  ORCO. 

Ces  vers  paroissent  devoir  ^pfe  interprétés  de  jce^te 
raanière: 

',La  double  Rome  (2),  maîtresse  de  la  terre  (j),  sera  toujours  une 
rosée  (4)  em^yée  du  ciel  (5),  tdle  que  celle  que  le  colon  Joseph  (6)  a 

(  I  )  Franc.  Rebattu  în  très  versus  pervetustos  et  dl^cths  qui  Are- 

late  in  templo  dm  Tmphimi  sculptl  sunt,  Aqujs  Scxtiis ,  1 644 ,  in-4.* 

.  (a)  Rome  ctpu  appejéc  GHA^INA  à  cause  dç  !a  translation  de 

Tempire  à  Constantinople,  qui  étoit  devenue  une  seconde  Rome^ 

(3)  Les  anciens  auteurs,  et  les  poètes  sUï:-tout,  donnent  sou- 
vent à  Rome  l'épithcte  de  maîtresse  de  la  terre, 

(4)  ROS  signifie  l'instruction,  et  par  conséquent  fa  religion  ; 
%  plusieurs  auteurs  ont  donné  le  non>  de  rosée  à  la  doctrine  céleste. 

(5)  Aï  ISS  US  DE  LU  CE;  envoyée  du  séjour  delà  lumière,  c'est- 
à-dire,  du  ciel. 

(6)  INCOLA  JOSEPH.  M.  Rebattu  pense  que  ce  mot  désigne 
Jésus-Christ,  avec  qui  les  «uteurs  sacrés  comparent  souVent  le 
Christ  ;  il  est  appelé  incola,  parce  qd'il  est  colon  dons  ce  monde 
conunc  Joscpb  Tavoit  été  dàm  TÉgypte^ 


598  ÇEtAPITRE    XCVII.' 

p&rtée  dans  le  monde  (i)  après  avoir  vaincu  l'infernal  Orcus  (2). 

On  attribue  cette  inscription  à  S.  Virgile  :  mais 
la  forme  carrée  des  caractères  me  paroît  indiquer 
un  âge  postérieur;  et  je  croîroîs  plutôt  que  ces  vers 
ont  été  écrits  dans  le  x.*  •  ou  le  xi/  siècle. 

L'intérieur  de  i'église  est  massif  et  irrégulîer ,  et 
ne  rappelle  en  rien  ia  richessef  et  i*élégance  du  porr 
tail  :  cela  vient  peut-être  de  ce  que  l'architecte  a  été 
obligé  de  s'assujettir  au  plan  des  constructions  plus 
anciennes  ;  et  d'après  l'inscription  que  nous  venons 
de  lire ,  on  voit  que  cette  église  existoit  depuis  long- 
temps. Il  y  a  des  tombes  enchâssées  dans  les  murs, 
qui  $ont  extrêmement  épais. 

Le 'sanctuaire  a  été  construit  ou  plutôt  rebâti,  vers 
1 4î o ,  par  Louis  Aleman,  évêque  d'Arles ,  qui  a  été 
béatifié.  L'autel  est  décoré  d'un  tableau  qui  repré- 
sente r adoration  des  mages  ;  il  porte  \e  nom  de  son 
auteur;  on  y  lit  :  Ludovicus  Finsonius  BelgaBrugensis 
fecit,  anno  1614.  Il  y  a  sur  la  tribune,  à  la  porte  d'en- 
trée, un  autre  tableau  où  le  mèiBe  artiste  a  peint  la 
lapidation  de  S»  Etienne, 

Le  devant  d'autel  de  la  chapelle  du  Sépulcre  est 
formé  d'un  sarcophage  que  j'ai  fait  figurer  planche 
luXIX^nf  i^  On  voit  Jésus -Christ  entre  deux  de 


(i)   CONTULIT. 

(2)  LOETEO  pour  LETH^O  ORCO.  Ces  expressions  ,  em- 
pruntées en  partie  du  paganisme,  désignent  aussi,  dans  I« 
auteurs  sacrés  «  l'enfer  des  chrétien^. 


W. 


\ 


CHAPITRE  xdvir.  599 

ses  disciples,  dont  l'un  tient  une  croix  bouclée;  ce 
sont  probablement  S.  Pierre  et  S.  Paul.  Au-dessus  de 
Jésus-Christ  est  son  monogramme ,  maïs  d'une  forme 
particulière  et  extrêmement  rare  (  i  )  :  c'est  seulement 
un  P  traversé  d'une  barre  qui  forme  la  croix  ;  ce  qui 
fait  ainsi  une  croix  bouclée  à  sa  partie  supérieure, 
comme  ceiie  que  porte  ici  S.  Pierre. 

On  lîsoit  autrefois  sur  cette  tombe  une  épitaphe, 
que  Ton  a  sciée  pçur  accommoder  ce  bas- relief  au  lieu 
où  il  est  placé.  Elle  apprenoit  que  c'étoit  le  tombeau 
de  Geminus,  né  à  Cologne,  qui  a  été  gouverneur 
et  intendant  de  neuf  provinces  ,  et  est  mort  âgé  de 
trente  -  neuf  ans  deux  mois  et  six  jours  (2)  ;  mais 
rien  ne  pTouveque  ce  Geminus  soit  le  même  que 
Geminus  Paulus ,  qu'on  dit  avoir  été  évêque  d'Arles 
au  milieu  du  vill.*  siècle. 

(i)  On  ne  ïa  trouve  que  sur  unemoimoîe  de  Henri  I.*'*',  frap- 
pée àChâlon  en  Bourgogne  (  Leblanc,  Traité  des  monnoies  d^ 
France,  p.  148  ),  et  sur  le  sarcoph^e  qu  on  croit  être  celui  de 
Gaila  Placidia,  dans  i'église  Saint-Aquilin  à  Milan.  Voyej^  hLL%* 
CRANZA,  Sacri  Monutnenti  antichi  di  Afilano  ,  p.  37. 

(2)  Saxy,  Pogtif.  Arelatense,  161  ;  MaffEI  ,  90  ;DuMONT,  164. 


r 

...  k 


pp  4 


6oci 


CHAPITRE  XCVIII. 

Archevêché,  —  Tombeau.  —  Inscriptions.  —  Rester 
du  théâtre.  —  La  Miséricorde,  —  Colonnes  de  brèche 
africaine.  — Statues,  torse  de  Jupiter, Faune  endormi, 
tête  de  Bacchus.  —  Arènes.  —  Thermes.  —  Forum. 
—  Prétoire.  —  Palais  its  Empereurs.  —  Urne  de 
marbre.  —  Arc  de  triomphe,  —  Saint -Césaire.  — • 
Couvent  des  Donnnicains.  — -  Monumens  chez  divers 
.  particuliers.  —  Inscriptions.  ^^  Arniazones,  -^  Sarçc^ 
phage  de  Tyrrania. 

J-jA  maison  commune,  lès  Champs-Elysées  et 
régli$e  Saint  -  Honorât  ,  ne  sont  pas  à  Arles  les 
seuls  lieux  où  Ton  puisse  trouver  des  monumens 
et  des  inscriptions  :  nos  amis  MM.  Véran  nous  cont-: 
duisirent  îi  l'ancien  arc|ievêché,  où  l'antiquaire,  et 
l'historien  peuvent  encore  étudier  quelques  précieuaç 
restes.  Nous  remarquâmes  d'abord  cette  belle  ins- 
cription ,  cjuî  étoît  exposée  dans  la  cour  à  d^s  injure^ 
d^  toute  espèce ,  et  entièrement  couverte  de  boup> 
de  plâtre  et  d'eau  de  chaux.  Elle  a  été  copiée  par 
plusieurs  auteurs  (i)  ;  mais  ils  ne  l'ont  pas  figurée^ 
et  aucun  n'en  a  donné  la  traduction. 


*r 


(i)  MuRATORi,  Dxxvi,  5;  Maffej,  Gall,  Ant.6/^\  Papon» 

Himre  de  Prçvence.l,,  Jç  j  DUMONT»  A.*»  21, 


CHAPITRE    XCVIII. 


^O 


^■v 


*^n 

M 

y^""'^ 


'4 

^|COMINIO 
CLAVD.  BOI? 


I   "     ■! 


jV5*rAGR4COLAE.  AELIO 
APROPRAER    COHOR 

TERT.    BRACARAVGVSTANO 

TRIBYNO.  LEG....    ADIVT.    P^OCVR 

AVGVSTORVM.    AD.  ANNONAM 

PROVINCIAL.   NARBONENSIS 

ET.LIGVRIAE.  PRAEF.  A...    HARIAE 

IN,  MAVRETANIA.    CAÇSARIENSI 

N  A  Vie.  MARIN.   ARE  L. 

CORP.   QVINQ.    PATRO® 

OPTIMO.   ET.   INNOCENTIS 

SIMO 


■^.^■*r^— f 


p*i*-^"i"i"^ 


4  Cominm  Bolonius  4gricola  yElius  Jprr  (i),  de  la  triin 


(i)  O^  trouve  cbiiis  ks  Monumenti  Gahhi,  ouvrage  profond, 
pu)>iié  par  M,  VlSCQJ^TU  àf&  exempiei  ci^rieux  de  c^te  multi- 
plicité 4e  nom$, 


■■■ 


i^AiA^lkHitaiiriMi 


6oZ  CHAPITRE   XCVIII. 

Claudia,  commandant  de  la  troisième  cohorte  (i) ,  de  Bracara* 
Augusta  (2),  tribun  de  la  légion  stcourable  (3),  intendant  des  Au' 
gustes  (4)  pour  l'approinsionnement  de  la  province  Narbonnoise  et  de 
la  Ligurie,  commandant  de  l'aile  milliaire  {5)  dans  la  Maur/tanie 
Césarienne  (6) ,  quinquennal  du  corps  des  maîtres  de  vaisseau  de  la 
marine  d* Arles  (7) ,  pairàn  très-bon  et  très-vertueux. 

Les  inscriptions  suivantes  étoient  aussi  sous  le 


{i)  PRAEFecto  COHORtis  TERTia. 

(2)  Viiïe  de  TEspagne  tarraconnoise,  aujourd'hui  Braga,  citée 
dans  phisieurs  inscriptions  et  sur  plusieurs  médailles.  Vo^e^ 
Easche,  Lexicon  rei  num.  peterum,  voce  Bracara. 

(3)  Le  numéro  de  la  légion  manque  :  nous  n'avons  que  son 
surnom. 

(4)  PROCURatori  AUGUSTQRVM,  Ccs  Augustes  étoient  pro- 
I>ablement  Diocféticn  et  Maximien. 

(5)  PR^Fecto  Ala  milLlARlAE,  On  donnoit  îe  nom  Galles  à 
des  corps  de  cavalerie  qui  avoient  été  institués  pour  couvrir  les 
flancs  de  l'infanterie  :  ces  corps  étoient  ordinairement  cpmposés 
de  cinq  cent  douze  hommes  ;  mais  il  y  en  avoit  aussi  de  plus  con- 
sidérables, et  dont  le  nombre  alloit  jusqu'à  mille.  Plusieurs  autres 
inscriptions  font  mention  de  ces  ah  milliaria,  Marini  ,  gli  M 
de*  fratelli  arvali ,  I,  474»  ^• 

(6)  La  Maurétanie  étoit  partagée  en  deux  provinces  :  la  77»^/- 
tana,  qu^  avoit  pour  capitale  Tîngis ,  aujourd'hui  Tanger;  ctiar 
Mauretania  Ca^ariensis.  Auguste  y  plaça  une  colonie,  d'où  la 
ville  d'A?/,  aujourd'hui  Alger  ou  Tene?,  prit  le  nom  de  Casarea, 
et  toute  k  province  fut  appelée  Casariensis,  NlTSCH ,  Woerterbuck 
deralten  géographie ,  au  mot  Mauretania, 

(7)  NAVICulariorum  AfARINorum  ARELatensium  ÇORPoris 
QUINQttennali.  Les  hàvicularii  étoient ,  à  proprement  parler  ,  les 
patrons  é^  vaisseaux  ;  ils  difFéroient  des  gubernatores ,  en  ce  que 
ceux-ci  étoient  les  pilotes  et  tenoient  le  gouvernail. 


•«■^ 


j 


CHAPITRE    XCVIII*  6oi 

même  vestibule,  exposées  de  même  aux  injures  des 
maçons  et  des  chevaux  (  i  )  : 


■>         Il       ■    ■!» 


D  M 

M.   IVLI    FLORI 

IVLIA.     OLYMPIAS 

COIVGI.    PtENTIS 

SIMO.    PO  SV.IT 

QVI.   VIXIT.    ANNIS 

XXXVIIII.  MENS.XI.DIEB.  XVI 


1 


Juîia  Olympias  aux  mânes  Je  M.Julius  Florus,  époux  excellent , 
qui  a  vécu  trente-neuf  ans  on^e  mois  et  sei^e  jours. 


(i)  MtJRATORi,  MCCCLXI,  lo,  d'après  BiMARD.II  amis  maî- 
à-propos  OUmpiufi  pour  Olympias ,  et  carissimo  pour  pieutissimo,. 
Elle  étoit  bien  dans  GruT£^,DCCXCUj  Dumont,  VIII,  59.. 


'  "!>' 


6oi 


CHAPITRE    XCVIII. 


D  M 

r^  c  fn  ATisi 

SECVNDI 
Ç.  AT^IVS 
ET.   AFRO 

DI     A 

OPTIMd 

ET.  IN  TE  G. 

ERRIMO 
PATRÏ.  D.  p. 


'Aux  mânes  de  C.  Atisius  Secundus  :  C,  Attius  et  Afrodisia,  ont 

consacré  [i)  cette  pierre  a  leur  père  exceUent  et  îrriprocitabte  (z). 

*\       ■'  ....        "  '     ■ 

(i)  DeDicaverUnt, 

(2)  DUMONT,  IX,  61,  GRUTER,DCCCLIX,9,adifîgurc  c«te 

inscription  de  manière  à  îa  rendre  inintcHîgibfe. 


\ 


CHAPITRE     XCVIir 


(Î05 


U:-:. 


L 


(      i> 


ALFIA  PHILETE 


CONIVGI   •   CVM 


PHILIPPO   .    FIL 


FECKRVNT 


u 


Alfia  Philek  à  consojcté cette  itifcr^tim  à  son  époux,  conjointement 
évec  Philippe  leur  fils.  _ 


(i).DuMONT,  VIII,  57, 


V 


■hMMBM 


i.^M».^k^^*« 


^^tÊmÊÊÊÊmÊÊÊâ 


■taaMi^ 


lioS 


CHAÎ>ITRE   XCVIIÎ* 


*  ^ 


D 

M 

memoriAe              I 

liciniÂe. 

DËCWÏI 

nAe,    s  ex. 

LICiNiVS 

irenAevs.    VCori 

ET.      LICIN. 

TITV1.LVS 

MATRI                          1 

..„        ..,L.                     ' 

(•) 


Aux  mânes  et  â  la  m/moire  de  Licinia  Dâcumina  :  Sextus  Licinius 
Jrenaus  a  son  épouse,  et  Licinius  Titullus  à  sa  mère. 


[ 


y 


] 


{ 

, 

_i 

D                 M 

SEX.     AEBVTI 

HERMETIS    - 

• 

AEB.     C     ALLI 

OP*    CO  N I VGI 

♦ 

SXNCTISSIMO 

^ 


(^) 


(i)  Gruter,  Dccc,  },trcs-incorrccte;MuRATORi,MCCCLXv, 
1%  j  Menard,  Histoire  de  Nîmes,  tome  VU,  361  j  DuMONT, 
XXIV,  \j%, 

(a)  DUMONT,  Vill  ,6\.Ct  tombeau  a  été  trouvé,  en  1747 1 
dans  le  Rhône  ^  près  de  la  Cardette  de  Four<}ues« 


CHAPITRJE   XCVIII.  6of 

Aux  mSues  de  Sextus  ^butius  Hermès  :  ^buùa  CaUiope  à  son 
niari  irréprochable. 

Et  cette  autre  : 


^ 

—               -                                            > 

a?    MEMORIAE    .     AETERNE    . 

- 

CANDIDIAE    .    QVlNTlîC  .   Q\4kE 

. 

VIXIT  .  ANV  .  XXX  .  M.VIH.D.XV.IVL. 

QVINTINVS..  MATRI,a:.\lLERIA 

MAXIMINA    .   MASCR    .    FILIAE 

»                   * 

I^FELICISSl^B  .    POSVERVNT 

* 

L      N            »..              AD 

•,SKi4k'^>*»~  ■    «iV       ^»  mi   O    «^  «i^,  ar^  ai^  «tf  It^  aaïf  4    ,  «rfiaf  ^B^  •^•■^  oif  «^iW       mm^  mm^  4^  ^J  mit  ^  m^ 

Aun  mânes  \%)  et  k  la,  mémoire  éternelle  de  Candidia  Qtiinûna, 
fui  a  vécu  treutt  ans  huit  mois  et  quin^  jo^rs  •:  Julius  Qtiintinus 
à  sa  mèrt ,  et  Valeria  Maximina  à  sa  fille  très -malheureuse,  ont 
posé  cette  pierre  (3).' 


(î)  DUMONT,  pL  XVI,  n,**  1 17. 

(2)  La  conjonction  et  annonce  qu'il  y  avoit  au  commencement 
jdHs  Jtiajtîbus,  ' 

•     (3)  Je  n*ai  point  encore  trouvé  ctfs  abréviations  :  peut-être 
{sMl-W  ^t^  U€H(  Nobis  Assignatns ,  Dam.    . 


<J0ft  CHAPITRE    XCVltî. 

Le  P.  Dumont  n'a  pas  connu  celle-ci  (i)  î 


( 


) 


i 


>■     >  I  1 1 1 


\à     I  I     I    Wi 


Il       I       Kl* 


D       T       M 
ATVRIAÉ.CÀLLISIE 

TROPHIMVSÉTCmo 
SIATV    tIBER* 


i  * 


Cette  cour  est  remplie  de  débris  qui  rappellent  l'aii^ 
cienne  splendeur  de  la  ville  d'Arles.  Ce  sont  desf  trôti-^ 
çon$  de  colonnes  de  marbre ,  d*un  piedjet  demi  de  dîa* 
mètre  :  la  mardelle  du  puits  est  formée  de  la  base  d'une 
colonne ,  posée  en  sens  inverse  ;  elle  a  quatre  pieds 
de  diamètre  :  on  y  voit  auàsi  des  portions  de  colonnes, 
dont  les  fûts  ornés  de  rosaces  et  les  chapiteaux: 
{pL  LXVIJl,fg.  4  et  y  ;  LXIX,  4  et  j)  surchargés 
d'ornemens  annoncent  le  règne  de  CcMistantin* 

Nous  entrâmes  chez  M.  Constant,  curé  de  l'église 

mm^mm^mm^mmmmmi^,^^mmm,    ■  l  ^■^1*— — —  l    ■         l       i     l  I     |l      I      I     II        — *— ^— — — 

(i)  MURATORI,  MDXX,  lo;  MenARD,  Histoire  de  Nîmes, 
tome  VII,  4^7.  II  faut  lire  CalustE;  i'i ,  dans  les  inscriptions , 
est  souvent  pour  le  T. 

principale , 


.    J 


CHAPITRE  XCVÏII^  609 

principale^  dont  le  logi^ment  est  dans  cet  édifice  ; 
itious  copiâmes  dans  sa  qiisiné  l'inscription  suivante  t 


r- 

D 

m 

'  ■    M. 

i_ 

.    .1 

J 


L.  HOSTILI   .   "nR 
SILVANI 
itNN^XXIIII  .M  .  Il  :  D 
XV.  MATER.  FIL.  pIi  SSM 

MISERA.   ET  X^LVCTV 
AETERNALI.   BEIEFICI 
O.  NOVERCAE(i^ 


Aux  mânes  de  L.  Hostilius  Sllva^nus,  de  la  tribu  Teremina  (a), 
^géde  vingt-quatre  ans  deux  niois  et  ^uin'^e  jours ,  sa  mère  très-malheU" 
reuse,  et  plongée  dans  undeuil  éternel,  à  un  fils  irèsHendre ,  par  la 
bienveillance  de  sa  belle^mère  (3). 

Nous  allâmes  visiter  les  archives ,  qui  soijt  en  bon 


i^ 


(i)  SaxY ,  Pcntif.  Arel.  ia8;  DuM0NT,47A 
(a)  T£Rentina  SILVANI,  Jnjrâ,  p.  ^11.  > 

(3)  BENEFiciQ  NOVERCAE.  Cette  bcile-mère  est  celie  dt  la 
mire  de  L.  HostiiioSv  — *-  .  '    ' 

Tome  IIL  X2  q 


•    .'   !   > 


^lô  CHAPITRE  XCVIIÎ* 

oidre  9  et  qui  n'ont  éprouvé  aucun  dégit  pendant  la 
révolution.  On  en  doit  la  bpnne  tenue  et  la  conser- 
vation à  MM*  Véran,  successivement  archivbtes  de 
€e  précieux  dépôt.  Elles  contiennent  un  grand 
nombre  de  titres:  on  j  remarque  de  beaux  cartu- 
laires,  les  originaux  de  bulles  intéressantes ,  des  di« 
[dômes  de  plusieurs  empereurs.  Les  }Hèce$  les  plus 
nombreuses  sont  celles  qui  viennent  du  grand  prieuré 
de  Malte  de  la  langue  de  Provence;  les  plus  anciennes 
sont  celles  relatives  k  l'antique  abbaye  de  Montmajor. 
On  y  voitce  cippe  (i)  : 

1 


I 


I 


7 


r 


L   GRANIO    L    FILIO 

TERETINA  .  ROMANO 
M  TVL  OLTMPVS  N£GO 
TIATOR  FAMILIAE  GLA 
DIATORIAE     OB    HERIT 

L     GRANI     yiCTORIS 
AVI      EIVS      MERENTI 
POSVIT 


y 


I 


r 


( 


t 


wm^mmta^aÊii^gmrmgÊ^^mmmtmmmm''^'»''»''». 


J 


(i)  Gruter,  cccxxxiii,  5i  inexacte^  T^ulemar.  Not.  èm 


CHAPITRE    XCVIII.  6ll 

'A  Lactus  Grauius  Romanus,  fils  de  Ltfcius,  de  la  trihu  Teren- 
tina  (i),  Marcus  Tuîlius  Olympus ,  marchand  de  la  famille  des 
gladiateurs  {^),  a  élevé  ce  monument  à  la  mémoire  des  bienfaits  de  L, 
Cranius  Victor,  son  grand-père. 

En  sortant  de  rarchevéché ,  ^  nous  allâmes  à  un 
ancien  couvent  appelé  la  Miséricorde  (3),  situé 
rue  de  la  Calade;  on  passe,  pour  y  arriver,  sous 
une  arcade  extérieure  de  Tahcien  théâtre.  La  frise 
(pi.  LXVIII ,  fig.  y)  est  agréablement  décorée 
«  de  patères  et  de  bucrânes,  et  elle  continue  dans 
une  chambre  d'ime  maison  voisine,  occupée  par 
un  artisan  (4)  :  cette  partie  est  la  mieux  conservée. 

^— 1— —  Il     II  I     I  I  I  I      I  II  ■!  Il  II.  Il  I  1  ^1—^^^ 

Freher.  Cecropistromach,  23  ;  Breval,  Remarks ,  II,  i84i 
VvvkLZ,  in  binas  vet,  inscript,  Commod,  16 \  VkVQli,  Histoire  de 
Provence,  1,56;  DuMONT,  5^,  ^ 

(i)  TEREnTJNA*  Tribu  romaine  établie  Fan  de  Rome  454. 
Elle  a  reçu  son  nom  d'un  lieu  appelé  Terentus,  qui  ctoit  à  Tex*- 
trémité  du  Champ-de-Mars  près  du  Tibre,  et  qui  ctoit  consacré 
à  cause  du  prodige  dont  on  peut  lire  le  récit  dans  ValÈRE-* 
Maxime,  II,  4,  5. 

(2)  On  donnoit  le  nom  de  famille  à  une  association  de  giadia* 
teurs  réunie  sous  un  seul  chef,  appelé  lanista,  dont  ils  étoient  les 
esclaves. Suétone,  in  Julio  Casart,  10,  parle  de  la  famille,  c'est- 
à-dire;  delà  corporation  dti  gladiateurs,  et  H  en  est  souvent  ques- 
tion dans  lés  inscriptions. 

(3)  Histoire  de  la  fondation  du  monastère  de  la.  Miséricorde  de  la 
villed' Arles,  par  le  P.  ALEXANDRE  d*ArIes ,  Capucin  j  Aix,  1705, 
in-8.*> 

(4)  On  voit  sur  la  façade  de  la  maison  habitée  par  madame 
Barras  la  Penne,  et  appartenant  aux  héritiers' de  M.  Firmîn,  no-» 
taire,  une  frise  moderne,  imitée  de  ceHe  du  théâtre  :  il  y  a 
alternativement  des  patères,  des  bucrânes,  &c.;  mais  Texécutioa 
est  bien  loin  de  celle  de  la  fme  antl^«, 

Qq  X 


6l2  CHAPITRE    XCVIII. 

L'arcade  (pi,  LXVIII ,  fg.  6),  et  une  portion  de 
Tédifice  appelé  la  tour  de  Rolland,  et  par  corruption 
Rolland  (i),  prouvent  que  ce  théâtre  avoît  une 
grande  étendue;  qu'il  étoit  entouré  d'un  portique, 
composé  de  trob  rangées  d'arcades  l'une  sur  l'autre, 
et  orné  d'une  magnifique  corniche  et  d'une  attique. 
Les  tronçons  des  colonnes  de  marbre  et  de  granit 
qu'on  remarque  devant  plusieurs  maisons  de  la  ville, 
couchés  le  long  des  murs  ou  dressés  au  coin  des^ 
portes  et  des  rues  pour  servir  de  bornes,  lui  appar- 
tenoient  sans  doute  :  mais  rien  ne  peut  mieux  faire 
juger  de  sa  magnificence  que  les  deux  énormes  co- 
lonnes (pi,  LXIXtfg.  6)  qui  sont  encore  debout 
dans  cet  ancien  couvent  (2). 

Au  milieu  du  cloître  est  un  petit  jardin  :  Ik 
s'élèvent  ces  deux  colonnes ,  qui  conservent  encore 
ïeur  base ,  leur  superbe  chapiteau ,  et  une  partie  de 
la  corniche  et  de  l'architrave  qu'elles  supportoient  ; 
leur  hauteur  générale  est  de  26  pieds  1 1  pouces  , 
leur  diamètre  de  2  pieds  9  pouces  3  lignes  (^)  : 
leur  matière  est  une  brèche  africaine  extrêmement 

(i)  Suprà,  p,  513. 

(2)  Pcytret ,  architecte,  avoit  levé,  en  1684,  *^  p'^ui  de 
ce  théâtre,  d'après  ce  qui  en  restoit;  et  Terrin  en  a  publié 
une  description  où  ii  a  fait  graver  en  petit  les  deux  cofonnes , 
y  arc  et  les  arcades  qui  subsistent  encore.  Voyci  Nouvelle  Décou- 
perte  du  ihéâtre  dans  la  ville  d* Arles,  sa  description  et  sa  figure,  par 
Gdaude  Terrin,  dans  le  Journal  des  Savons,  du  28  août  1684* 

(3)  On  pense  qu'il  y  avoit  dans  l'intérieur  du  théâtre  plu$  de 


■•WW-TP^ —  --^^ 


^^^-^^w^^-w^^""^™ 


CHAPITRE    XCVÏII.  ^13 

rare.  On  avoît  résolu  de  les  transporter  à  Paris  ;  Tieii- 
reusement  un  ministre  ami  des  arts  (1  )  a  bien  voulu 
écouter  mes*  rétiâmatîons  et  s'y  oppôsfer.  On  re- 
rnarque,  sur  ces  colonnes,  les  traces, du  feu  qui  les 
a  fait  éclater  en  plusieurs  endroits  ;  Faction  dé  l'air  a 
rongé  feur  surface  :  elles  se  briseroîent  aussitôt  sous 
lés  efforts  de  Cîeux  qui  tenteroient  de  les  déplacer;  et 
fon  nepourroîties  employer  ddiis  un  édifice  moderne 
sans  les  repolir  et  sans  altérer  leurs  belles  propor- 
tions. Mais,  quand  bien  même  on  saùtoit  prévenir  ou 
farter  ces  inconvériiens ,  faudroit-îl  encore  priver 
les  Arlésiens  d'un  monument  qui  leur  offre  un  écla- 
tant témoignage  de  l'ancienne*  splendeur  de  leur 
ville  î  Hors  d'Arles  ,  ces  colonnes  seroient  isolées; 
là,  elles  ^narquent  la  place  qu'occupoit  son  théâtre, 
et  elles  rappellent  les  édifices  somptueux  qui  décô^ 
roiçnt  cette  superbe  ville.  Elles  étoient  accouplées  ; 
ce  qui  peut  faire  juger  de  la  grandeur  de  l'édifice 
auquel  elles  appartenoient  :  autour  sont  des  sculp- 
tures, qui  ont  été  trouvées  dans  ce  lieu  même,  ou  au 
moins  dans  les  environs.  Ces  colonnes^  ces  statues, 


cent  cinquante  colonnes  de  marbre  :  d'après.  les  mesures  prises , 
son  diamètre  pouvoit  être  de  cinquante-deux  toises  cinq  pieds  j 
celui  de  la  scène ,  de  trente- une  toises  quatre  pieds  :  autour 
régnoit  un  portique^  composé  dé  trois  rangées  d'arcades  l'une 
sur  l'autre, 

(i)  M,  de  Champagny, 

Qq  3 


I 

6\i  CHAPITRE  xcviir; 

r 
-** 

/ont  voir  la  richesse  qui  régnoit  dans  les  décorations 
de  ce  théâtre  (i). 

Ce  bel  édifice  a  été  pillé ,  ravagé,  incendié ,  par 
les  barbares  qui  ont  dévasté  Arles  ;  et  il  n'en  reste 
plus  que  quelques  arcades  (2) ,  ces  deux  colonnes , 
et  quelques  fragmens  de  statues,  dont  voici  les  prin- 
cipaux :  un  torse  d'un  vieux  Faune  couché  sur  une 
outre  faite  de  la  peau  d'une  panthère  (pL  LXIX^ 
fg'  7 )  ii)  >  ^  partie  inférieure  d'un  torse  dont 
le  corps  est  dans  la  maison  de  mon  ami  M.  dte 
Faucon ,  ancien  magistrat  et  chevalier  de  Tordre  de 
Malte ,  chez  qui  j'ai  logé  pendant  mon  séjour  à 
Arles;  si  ces  deux  morceaux  étoient  réunis,  comme 
ils  le  sont  dans  la  gravure ,  on  auroit  le  corps  d'un 
beau  Jupiter  colossal  (pi,  LXIX,  fig.  11  )  (4)  ;  une 
très- jolie  tête  de  Bacchus  (pL  LXIX,  f g.  8),  cou- 
ronnée de  lierre  et  parée  de  cette  espèce  de  ban- 
deau particulier  aux  divinités  bachiques,  et  qu'on 
appeloit  credemnotif  parce  qu'il  ceignoit  la  tète  sur 
le  front  (5)  ;  un  fragment  {pi.  LXIX,  f g.  p)  d'une 
belle  statue,  dont  la  poitrine  étoit  couverte,  et  dont 


(1)  La  Vénus  a  été  trouvée  au  pied  de  ces  colonnes. 
(a)  Suprà,  p.  611. 

(3)  Le  P.  DuMONT,  pî.  VII,  fig.  j,  Ta  fait  très-mal-hal)î- 
Icment  restaurer. 

^4)  Cette  figure  a  toujours  été  de  plusieurs  morceaux  :  îl  y  a, 
dans  la  partie  inférieure,  un  creux  pour  recevoir  le  tronc, 

(5)  Monumtns  antiques  inédits,  I,  8. 


■■      '■'  i 


Cff APITRl  XCVIH.  1^1) 

la  tunique  avpit  des  manchçs  a|ttadiée$  avec  des 
fibules  ou  agrafes.  Ce  torse  est  peut-être  celui  d'une 
.ipuse  ;  on  en  peut  dire  autant  des  deux  autres 
{pL  fjXIsJg.  S  et  g)  :  Jupiter,  Vénus,  ïes  Misses , 
Jes  Satyres  j  sont  des  divinités  très.- propres  àJa 
décoration  des  théâtres.  Nous  vîoies  encore  ump 
main  avec  un  anneau  au  second  doigt  {pi  LXIXi 

II  y  a  aussi  dans  ce  jardin  un  autel  semblable 
à  celui  de  la  bonne  déesse  [\)\  ja  face  est  >ornée 
d'une  couronne  de  feuill^  de  chêne ,  mais  sans 
oreilles  au  centre«  Autour  sont  semés  des  bras  •  des 
jambes ,  des  portions  de  frise  en  marbre  blanc* 

.Ce  jardin  a  été  réservé  pour  les  plaisirs  de  1^ - 
ville  j  et  le  propriétaire  est  obligé  d'ouvrir  la  porte  à 
tous  les  curieux  qui  se  présentent  pour  voir  Je^  ;ipqr 
numens  qu'il  contient.  N'est-il  pas  k  craindre  qll*uii 
jpur  un  de  ceux  à  qui  cette  maison  tombera  en  par«- 

taiie ,  ne  renverse  les  ccdonnes  et  n'anéantisse  les 
précieux  débris  que  le  temps  a  jrespectés  jusqu'ici^ 
pomr  s'affranchir  d'une  ennuyeuse  servitude»!  N'au- 
^roit-il  pas  été  plus  convenable  que  la  ville  achetât 

cette  maison ,  qu'elle  enlevât  les  monumens  qui  sont 

transportables,  et  qu'elle  n'y  laissât  que  les  deux 

colonnes! 

Les  arènes  d'Aiies  (2} ,  que  nous  visitâmes  après , 

■I  ■  ■     ■      1— *—  îi        I 

(\)  St^àt  p.  50J. 

(2}  Description  dts  arènes  9U  Fumphithéatre  d'Arles ,  pur.  Jmpk 

Qq  4 


i^)^  Chapitre  xctiiî; 

peuvent  à  peine  offrir  Pidée  de  ce  qu^elIes  étoient 
"Miïêfùîs  i  0tï  $e  plaçâm  sur  les  arcades  >  qui  les  en-^ 
toui^t  j  on  distinjgué  encore  l'encef nte  ^de  cet  am- 
phrAëâtré;  mais  les  gradins  ont  été  d^oKs;  i'arène 
'^pt.  I.XVIJI ,fig: p)  est  entièrement  remplie  de 
t:hétives  maisons  ;  lés  arcades  supérieures  servent  de 
•toitliune  sqite  de  taudis ,  auxquels  oh  arrive  par  des 
ruelles  bâties  sur  les  massifs  des  degrés;  et  les  caves 
«ont  pratic^ées  dans  ia  galerie  inférieure  qui  servoît  à 
là  dVcâiation ,  et  où  Ton  renfermoit  les  feêtes  féroces. 
II  y  â  dahs  cette  enîedntp  une  chapelle  et  beaucoup 
dliabitations  particulières.  Les  tours  qu'on  y  re- 
marque sôiit  modernes;  elles  auront  été  bâties  à  une 
époque  où  Pon  avoît  fait  des  arènes  une  fwteresse  (  i  ). 
TôM  Ice  qifon  peut  dire  d'après  Tétat  actuel  de  ce 
indnument',  c'est  que  sa  forme  ëtoît  ovifc  comme 
^ceBè'  de  tous  les  édifices  de  ce. genre;  qu'il  avoît 
deux  rangées  de  portiques  et  quatre  entrées  princî* 
pales  î  celle  du  côté  du  nord  est  la  mîetix  conservée; 
^Ile  ofïre  encore  de  belles  formes  :  clia^e  portique, 
conteiiôit  sôîiaftle  arcs  ;  les  chapiteaux  étoient  co- 
rîrtttîiéiisf  ;  h.  circonférence  étoit  de  cent  quatre-vingt- 


•  ■> 


-Ouiz,  prêtre  tfe  f'Oratoire;  Arîes,  i66$ ,  în-4.®;  Description  de 
Viimphithéâtre  d*ArUs,  par/r.  Peilhe,  1725  ,  une  fniiHc  in-fol,'; 
Desctifftiou  de  l'Amfhithfàtre  d* Arles,  par  SÉGUIN  \  Maffei  ,  GalU 

]Ant»,'i^'yiLA  LauziÈRE,  Annales  de  la  pille  d'Arles.  .    .. 

(i)  C'est  pourquoi  RoDERlC  appelle  les  arènes  de  Nîmes 
pm^isan  arenarum*  ... 


t.  ' 


1     «  I  ' 


CHAPITRE  XC vin.  617 

tqpatont  toisesir  la  hauteur  des  murs  extérieurs  à  son 
eutrée est  de  dix-^sept  toises  (  i  ).  Le  terrain  sur  lequel 
cet  édifice  est  assis,  est  fort  inégal;  ce  qui  a  du 
augmenter  beçiucoup  les  frais  de  ia  construction.  Cet 
amphithéâtre  est  phis  grand  que  celui  de  Nîmes  ;  mais 
«es  proportions  sont  moins  beUes ,  et  le  portique 
extérieiu"  n'a  pas  ^autant  de  magnificence, 
>.  Ce  magnifique  édifinpe  mériteroit  que  Ton.  prît 
.plus  de  soin  pour  ie  conserver.  Henri  IV  avoit  eu 
le  projette  le  feire  débarrasser  des  vibines  habitations 
:qui  ie  déshonorent ,  et  d'y  faire  placer  l'obélisque 
qui  décore  ^aujourd'IHli  la  grande  place  :  ce  projet 
n'a  jamais  eu  d'exécution  ;  il  est  réservé  au  grand 
Napoléon  de  l'accomplir.  . 

Sur  la  porte  d'une  écurie ,  il  y  a  une  ïarge  pierre 

sur  laquelle  on  lit  cette  inscription  (.2) , 

«•  -  ..  •* 

V.       s.      D.      D.       P.       A.       S. 

f 

que  l'on  traduit  ainsi  :  Vau  accompli  par  un.  décret 
des  décurions,  pour  le  salut  des  Artésiens  {3).  Peut- 
être  ce  vœu  a-t-il  été  fait  à  l'époque  de  quelque 
siège ,  ou  à  l'occasion  de  quelque  autre  calamité. 


■»««*■ 


(1)  Son^  plus  .grand  diamètre  est  de  soixante-onze  toises  trois 
pieds  dix  pouces;  et  le  plus  petit,  de  trente-deux  toises  cinq  pieds 
sept  pouces.  If  y  kvoit  quarante-trois  rangs  de  sièges  :  on  pense 
qu'il  pouvoit  contenir  vingt-quatre  mille  spectateurs. 

(2)  DuMONT,  n.°  î.  '      ' 

(3)  Votum  Solutum  Décréta  Decurionum  Pro  Arelatensium  Sainte, 


V 


6l%  CHAPITRE   XCVIII. 

En  visitant  toutes  iés  caves  du  lieu  où  étcnent  ies 
anciens  Thermes ,  au  midi  du  réservoir ,  M;  P.  Véran 
est  parvenu  k  pouvoir  en  lever  ie  plan  (i).  On  a 
trouvé»  dans  ce  quartier,  des  colonnes ,  des  tuyaux 
de  plomb  et  de  brique ,  et  des  fi>umeaux. 

M.  P.  Véran  a  observé  (a)  près  de  là  les  restes 
de  soixante-deux  pilastres ,  qui  dévoient  fcurmar  une 
longue  suite  de  portiques ,  sur  un  carré  de  quarante- 
deux  toises  de  longueur  et  de  vingt  de  largeur.  La 
position  de  ce  vaste  édifice ,  au  nord  des  Thermes , 
la  vase  durcie  qu'on  a  trouvée  au  fond ,  une  croûte 
de  ciment  qu'on  remarque  sur  le  mur  intérieur,  lui 
donnent  lieu  de  présumer  que  c'étoit  un  réservoir, 
et  peut-être  une  naumachie. 

Aries ,  comme  toutes  les  villes  riches  et  pubsantes, 
avoitun^r//m.  Sidonius  Apoliinaris  >  gendre  d'Aviti», 
dit  (  5  )  que  lorsqu'il  vhit  à  Arles  pour  se  rendre  à  la 
cour  de  Majorien ,  qui  y  faisoit  sa  résidence ,  il  des- 
cendit dans  le  forum  ,■  où  il  s'aperçut  que  ses  amis 
se  cachoient  derrière  les  statues  et  les  colonnes,  à 
cause  d'une  satire  qu'on  l'accusoit  d'avoir  faite  contre 

^■— ■— i— — *M  ■  ■  Il  I  II  ■   — — — — 

(i)  Voyez  la  planche  xu  de  fa  collection  du  P.  DuMONT. 

(t)  Mémoire  sur  quelques  édifices  romains  qui  existent  encore  or 
qui  ont  existé  à  Arles.  Ce  curieux  manuscrit ,  qu*!!  a  eu  la  bonté 
de  me  conununiquer,  est  accompagné  d'une  carte  où  il  a  fixé  la 
place  que  dévoient  occuper  ces  itionumens,  et  contient  plusieurs 
détails  intéressans. 

^3)  Epist.  XI,  p,  2  y. 


CITAPITRE  ICVIII.  <Sl9 

leïprincipauix  de  la  vill«.  Ce  jhmm  étohdonc  en- 
touré de  coloones  qui  fomioient  des  portiques,  sons 
lesquels  on  pouvoit  se  promenar  et  s'arrêter  aux 
boutiques  des  marchands.  M.  Véran  conjecture  qu'3 
étoit  placé  entre  le  ttiëfttre  et  la  naumachîe ,  où  est 
aujourd'hui  la  place  Saint  -  Lucien  ou  des  Pone~ 
faix.  La  statue  de  Miner^-e  (i) ,  celles  d'Auguste, 
d'Hadrien  {2)  et  de  Recilius  (j)  >  ^"î  °"*  ^'^  "'°"' 
vées  dans  cet  emplacement,  étoient  du  nombre  des 
statues  dont  ilétoit  décoré. 

On  voit  près  de  là  les  mines  d'un  édifice  qui  de- 
voit  être  remarquable  :  il  reste  encore  deux  colonnes 
de  granit;  et  en  1731  ,  on  en  a  enseveli  quinze  dans 
lesfbndemensdeiamaisonoù  setenoit,  avant  17851, 
le  tribunal  de  commerce.  Les  portions  de  la  frise  qui 
existent  aujourd'hui,  présentent,  dans  un  enroulement 
de  pampres  et  de  raisins ,  des  poules ,  des  coqs  et  des 
mo\ns*\xx(pl.LXVIlI,n.'  ^/LastaniedeMinerve, 
trouvée  à  peu  de  dislance  de  là  dans  l'emplacement 
que  M.  Véran  regarde  commele  forum ,  et  le  nom 
de  Notre-Dame  du  Temple  donné  autrefois  k  l'église 
Saint-Lucien  ,  ont  fait  penser  que  c'étoit  un  temple 
de  Minerve  ;  d'autres  ont  cru  qu'il  étoit  dédié  à  Bac- 
chus  :  enfin  l'opinion  que  c'éloit  le  Capitole ,  avoit 
prévalu  ;  et  on  lisoit  sur  ces  ruines ,  en  1 778  ,frustum 

(■]  Màmin  iii/Jit  4Ùi  chevalitr DE  ZOUIEV. 

(»}  Uid. 

(3)  /"><*.  P-  «Î'S. 


620  CHAPITRE  xcyiii; 

Caphotiî.  M.  Véran  a  pensé  que  c^étCMt  le  prétoire 
ou  une  basiKque  argentaire.  Enfin  Ha  trouvé  une 
portion  de  la  frise  où  Ton  remar^oît  les  trous  des 
cIôus  qui  y  retenoient  les  lettres  de  bronze  doré  qui 
composoient  l'inscription.  M.  Seguier,  de  Nîmes, 
a  ainsi  rempli  cette  inscription  y  en  suppléant  ce  qui 
inaiK}uoit  : 

t 

BIVO,  CONSTANTINO.  MAXIMO.  PRINCin.  D/V/.  Constantii  fïk 

'    divi  C/audir.  tjfpoti, 
DOMINO.  NOSTRO.  SEMPER  AUGUSTO.  FL.  CLAVUio.  Constanttn$^ 

,p.  f.  i,  d,  Cottstanthîi,  f. 
niSSlMiE.  AC.  VENERABILI.  HELENE,  aviœ.  Fausta.  aug.  matrL 

atavrsquf, 

Att  divin  Constantin,  très-grand prïncf ,  fis  du  divin  Constanr 
nvî^  petit  fils  du  divin  Claude,  notre  maître  toujours  auguste;  i 
'Flavius  Cïanditts  Constantimts ,  pieux,  fidèle,  invincible ,  fils  du  divin 
Constantin  ;  à  la  très-pieuse  et  vénérahU  Hélène^  leur  grcmd'mèrt; 
à  Fausta  leur  mère,  et  à  leurs  ancêtres, 

M,  SeguÎCT ,  d'après  cette  inscription ,  regardoitcet 
édifice  comme  un  monument  élevé  par  la  ville  d'Aiies 
à  la  gloire  de  Constantin  le  jeune,  de  son  père, 
de  sa  mère  et  de  ses  aïeux  :  cependant  nous  avons 
déjà  fait  voir  cgmbien  on  doit  peu  compter  sur  ia  ^ 
fidélité  des  inscriptions  ainsi  remplies  à  l'aide  des 
clous;  l'interprétation  de  celle-ci  est  tout-à-£ût 
arbitraire. 

Quelques  vieux  murs  qui  ont  servi  d'appui  à 
des  maisons  dégradées  elies  -  mêmes-,  et  qui  ne 
sont  aujourd'hui  habitées  que  par  les  plus  pauvres 


>.^r>. 


j 


CHAPITRE   XCVIII.  6lt 

kabttans ,  sont  toat  ce  qui  reste  du  palais  des  empe* 
reijrs ,  qui  devoit  s'étendre  depuis  le  forum  jusqu'à 
la  rive  du  Rhône,  On  y  remarque  encore  des  restes 
de  la  corniche  qui  régnoit  tout  autour  ;  on  trouve, 
daiis  l'épaisseur  des  murs^  dé  grands  tuyaux  de  brique 
destinés  peut-être  k  la  descente  des  eaux  pluviales* 
Les  fragmens  de  statues ,  de  colonnes  de  granit  et 
de  marbre^  de  corniches,  de  frises,  les  restes  de 
mosaïques ,  ies  portions  dé  tuyaux  de  plomb ,  la 
quantité  excessive  de  pierres  froides ,  bien  polies  et 
d'une  grosseur  prodigieuse ,  qui  ont  été  trouvées 
dans  cette  enceinte ,  sont  des  preuves,  évidentes  de 
la  magnificence  de  ce  palais ,  dont  Ifô  ravage^  d^ 
temps ,  la  superstition  ,  l'avarice  et  la  méchanceté 
des  hommes  ,  ont  causé  là  destruction  :  le  nom 
qu'on  lui  donne  aujourd'hui,  ne  convient  guère  à 
son  ancienne  splendeur;  on  l'appelle  le  palais  de 
la  Trouille  (i),  ' 

On  ne  peut  parcourir  les  restes  sales  et  les  esca- 
liers dégradés  qui  aident  à  circuler  dans  l'enceinte 
de  cet  édifice,  sans  éprouver  un  sentiment  d'intérêt 
qu'inspirent   toujours  les  âges  accumulés  :  on  se 


(  I  )  Ce  mot  paroit  dérivé  par  corruption  de  Trullum ,  nom  que 
Ton  donnoit  au  palais  des  empereurs  à  Constamiftople  ;  fcs 
conciles  qui  ont  été  tenus  dans'  ce  palais ,  s'appellent  concilia  irt 
Trulh.  Le  palais  de  Troilia  est  cité  dans  un  acte  du  8  des  Icalendes 
de  Juillet  125a,  qui  nous  apprend  que  Raymond-Bérenger,  comte 
de  Provence,  y  étoit  logé. 


1 


p 


622  CHAPITRE   XCVIII. 

replacé  à  l'époque  où  ces  lîèux  ont  été  enrkfais  par 
le  Ittxe  et  habités  par  des  empereurs  puissans. 
•  GalUen,  après  en  avoir  chassé  le  tyran  Crocus,  s'y 
arrêta  pendant  quelque  temps.  Constantin-Ie-Gcand 
y  établit  sa  cour  ;  l'impératrice  Minervine  lui  donna 
un  prince  appelé  Crispus  /  Fausta ,  sa  seconde 
femme  »  y  donna  aussi  à  l'empire  un  autre  prince  qui 
fut  surnommé  l'Arlisien  (i}«  Constantin  le  jeune , 
Honorius,  Constantin  le  tyran  ,  Majorien,  Avitus, 
les  rois  goths ,  visigoths ,  les  rois  de  France  de  ia 
première  race ,  les  rois  d'Arles  et  plusieurs  comtes 
de  Provence ,  l'ont  successivement  occupé  pendant 
leur  séjour  daiu  cette  ville  ;  et  ils  pouvoiént ,  de  ses 
murs,  promener  leurs  regards  sur  la  double  cité, 
admirer  les  superbes  édifices  dont  elle  étoit  décorée , 
suivre  le  cours  du  Rhône ,  voir  sortir  les  galères  du 
port,  et  contempler  les  rkhes  moissons  des  carn* 
pagnes  environnantes. 

Cet  antique  édifice  appanient  en  partie  k  M.  Dar- 
iatan-Lauris ,  qui  possède  dans  sa  cave  une  jarre  de 
marbre  blanc  antique ,  remarquable  par  ses  dimen- 
sions. J'en  ai  donné  la  figure/;/.  LIX,fg.  p.  Son 
grand  diamètre  est  de  trente*trois  pouces  et  demi; 
celui  du  pied  est  de  treize  ;  et  celui  de  l'ouverture , 
de  treizf  pouces  six  lignes. 


(1)  C7i?ww«tt«ff5i4r^Ztftt»wj.  Voy»SEXTU$AUREUUsVlCTOTl, 
4»  CottstanÙHo.  ZOSIM.  Hist.  II, 


"N 


CHAPITRE    XCVIII.  6z^ 

Les  habitons  d'Arles  avoient  consacré  à  Constan- 
tin ,  près  du  palais  impérial ,  un  trc  de  trio^nphe  qui 
exbtoit  encore  au  temps  de  Louis  XIII ,  puisque  le 
cardinal  de  Richelieu  en  avoit  fait  prendre  le  dessin» 
On  n'en  connoît  pas  même  aujourd'hui  posi^vement 
la  place  (i). 

Plusieurs  raonumens  iméressans  sont  encore  épars 
dans  difTérens  lieux  de  la  ville.  Le  vase  qui  sert 
pour  les  fonts  baptismaux  de  l'église  Saint- Julien , 
a  été  creusé  dans  un  très-beau  chapiteau;  Nous  en 
vîmes  aussi  un  très-remarquable  dans  l'hôpital  de  la 
Charité. 

On  trouve ,  dans  la  cave  du  collège,  deux  niches , 
une  colonne  à  moitié  encastrée  dans  le  mur ,  et  un 
pilastre.  Le  P.  Dumont,  d'après  ces  foibles  indices, 
a  prétendu  que  c'étoit  anciennement  un  Panthéon  ; 
mais  il  auroit  eu  de  la  peine  à  le  prouver. 

On  remarque  encore ,  dans  l'ancien  couvent  de^ 
Saint-Césaire ,  deux  chapiteaux  et  une  belle  colonne 
de  granit  sur  pied  :  on  y  trouvoit  autrefois  des  * 
mosaïques  ;  et  il  y  a  lieu  de  creÎFe  que  des  fouilles 
qui  seroient  âites  dans  cet  endroit  par  un  hommo 
intelligent ,  aurcnent  du  succès. 

(i)  VqyeiBoVCm,  Hist.  de  PfW,  I,  589}  Saxy,  Pont.AreL 
a5  ;  SÉGUIN ,  n,  25  ;  Dumont,  pi.  XVI.  Des  actes  du  xvi.*  siècle 
font  mention  d*un  autre  arc  de  triomplie  près  de  la  place  appelée 
mijourd'hui  du  Saint-Esprit,  Voye^  également  Papon,  Histpir^ 
littéraire  de  Frmuce,  tome  I,  page  185, 


1 


ClA  CHAPITRE   XCVIII. 

Nous  entrâmes  chez  M.  Paultrier,  ctururgieiiy 
pour  copier  une  inscription ,  qui  est  dans  le  vesti- 
bule de  sa  maison  :  elle  est  cassée  en  deux,  et  ies 
caractères  ont  été  presque  entièrement  usés'  par  le 
frottement  (  i  ).  : 


/ 


NIVS.... 

CAMARS... 

>• IVD.  TRIB*  MIL 

.  •...R.   EQ.   ROM   TVRM 
.  ..LEB.    PRAET.    PROCOS 

...PR.   PROV.    AFRICAE 
.•.S.    SIBI   ET-TANNIO 
.  .X.  ARG  LIBRISCODED 
.•..QVAR.    MANV    PRET 

VITITEM  Is  N   ce 

...IS    OMNIBUS   ANNiS 
T  METAR  AVT  CIRCENS 
..TVR 

.  ..ORIAE  AETERNITAT 

EXTRVXIT 


Au  coin  de  la  maison  de  madame  de  Barrème, 


(i)  MORATORI,  DCXXII,  6',  MâIÏU ,  Mus,  ViT.  CDXYHI,  i; 
DUMONT,  13. 

rue 


j 


CHAPITRE  XCVIII.  6^^ 

rae  VaudetaUe  /  on  lit  cette,  autre  inscription  (i): 


r 


1 


ARISI      DAMIS 

VVENIS    l'MVOCSX 

CARISI 

AmHioN      ALEX 

ANDER     HeRA©A 

COLLIBERT. 


r 


j    t 


3 


Aux  mânes  de  Carîsius  (i)  Damis  »  jeune  homme  très -par  {3) 
Amphion,  AlexanJer,  Heraclas ,  affranchis  avec  lui  par  Carisius  (4)  . 

Sur  une  petite  place,  près  et  derrière  la  maison 
commune ,  on  voit  des  gradins  en  pierre  assez  usés  : 
c'est  là  qu'anciennement  on  rendoit  la  justice;  et 


■■ I  iji  i-ii 


(1)  DUMpNT,  IX,  (J7. 

(2)  cARISîi.   ' 

(3)  INNOCENtissimi. 

(4)  collibeRTL  Tous  portoîentjo  nom  de  Carîsîus  leur 
maître.  Carisius  Damis  est  mort  le  premier,  et  Us  lui  eut  con- 
sacré cette  épitaphe.  On  a  mis  CarisH  au  pluriel  pour  ne  pas 

répéter  à  chacun  ie  nom  de  Carisius: 

Tome  III.  R  r 


6l6  CHAI'ITRE    XCVÏIÏ. 

l'on  conserre  dans  les  aRrchives  beaucoup  cTactes 
émanés  de  ce  tribunal.  Cette  place  s'appelle  encore 
♦  /e  Plan  de  la  Cour. 

Nous  vîmes ,  chez  M,  Cadet  Sauret ,  une  petite 
collection  de  monumens  antiques  ;  presque  tous 
ont  été  trouvés  à  Arles  ou  aux  environs  :  ce  sont 
des  amphores  ^  des  lampes  ,  quelques  urnes  en 
verre,  &c« 

Dans  une  cour  extrêmement  petite  de  la  maison 
de  M.  Gages  »  pharmacien  ^  il  y  a  un  assez  grand 
sarcophage ,  qui  a  servi  long-temps  à  couler  la  les- 
sive. Le  grand  côté  (pi.  LXlX,fg.  i^)  présente  au 
milieu  une  tablette  sans  inscription.  A  gauche ,  on 
voit  deux  génies  placés  devant  un  arbre ,  qui  paroît 
de  la  Emilie  des  tonifir^s,  peut-être  un  cyprès.  Un 
des  génies ,  qui  est  prob^Iement  celui  de  la  mort , 
est  assis  et  tient  le  fland>eau  renversé ,  son  symbole 
ordinaire  ;  il  paroît  regarder  avec  étonnement  i'étre 
qu'un  autre  génie  lui  amène,  et  que  celui  qui  est  placé 
derrière  son  siège  semble  appeler  :  x:ét  être  symbo- 
lique est  Psyché  [i'ame]  ;  eBe  porte  son  doigt  à  sa 
.bouche^  comme  signe  du  silence  que  Ton  garde 
éternellement  chez  les  morts.  Le  génie  qui  la  con- 
duit ,  tient  un  panier  de  fleurs ,  qui  annonce  peut- 
être  que  la  personne  qui  étoit  renfermée  dans  ce 
tombeau ,  et  qui  étoît  probablement  représentée  sous 
la  figure  de  Psyché  >  est  morte  à  la  fleur  de  ses  ans. 
Au-dessus  du  génie  de  la  mott^  il  y  a  une  guirlandç 


CHAPITRE     XCVIII.  (>27 

F 

de  plantes  somnifères.  Sur  la  ^ç^  de  derrière  sont 
deux  philosopher  assis» 

M.  Tinellis  a  dans  sa  maison,  près  des  Cordeiiers, 
un  sarcophage,  sur  lequel  on  lijt  l'inscription  qui 
suit  (i)  : 


y 


\ 


D.     CORNELIO.     VALERIANO 
TERETIN  .PEFVNCT.ANN. XVIII 


MENS.X.  DIER.  V  .CORNELIVS 
UCINIANVS  .  ET.  VAL  .  MATERJ^^A 
FILIO  .  PlISSIMO. 


1 1  »■ 


^^•^^••^m^^mi^mmfm^i^^'^^ 


A  D.  Cornélius  Vaîmanns,  de  îa.  tribu  Terentina  (2),  mort  âgé  de 
dix-huit  ans  dix  mois  et  cinq  jours  :  Cornélius  Licinianus  et  Valeria 
Àfatrma  à  m  fis  très-tendre» 

M  4  Esparvier  a  chez  lui  une  autre  inscription  , 
qui  a  été  détachée  d'un  tombeau  dans  ies  Champs- 
Elysées  (pi.  LXUl,ji^*  s)'  ^  v^^  ^*  traduction  : 
En  mémoire  di  ses  bons  ^ffi^es ,  à  m  marj  bien  méHr 
tant,  Victorinus,  qui  a  vécu  soixante  ans,  Projecta, 
son  ép$use,  a  pesé  cette  pierre  lorsqu'il  a  reposé  en  paix 
U  àf  des  noms  de  septembre;  il  a  vécu  avec  elle  quatre 
ans  et  deux  fours. 


mi^^t^m 


^m^emm^'m^^ 


(i)  GrutER,  pçuîfXiX.  6,  écrit  TMRMNTWiO;  MURATOW, 
MCLVI.  Vid.  BiM.  Obs,  ;o2  in  Don.  suppl.  Mur.  UUMOKT,  ^^. 

(z)  Suprà,  p.  611.  MuRATORi,  cxxvi^  écrit  comme  ici  :  il 
croit  ^ue  ce  mot  indique  la  patrie  de  Vaierianus. 

Rr  a 


6l6  CHAPITRE    XCVIII. 

II  y  a  aussi,  dans  le  couvent  des  anciens  Domi- 
nicains ,  deux  inscriptions  curieuses.  Voici  la  pre- 
mière (i)  : 


r 


1 


] 


D  M 

IVL.C.F.   TERTVLLj^i 

FLAM.COL    .APTA 

L  •  VALLIVS  .  ATTILIAN 

NE  PO  S, 


I 


i 


3 


'     Aux  mânes  de  JuUus  Tertullinus ,  fils  de  C  ,  qui  a  été  flamine 
de  la  colonie  (a)  d'Apt  (3)  /  X.  Vallius  Aùllianus  son  petit-fils. 

La  seconde  (4)  n'est  pas  moins  curieuse  : 


(i)  Gruter,  cccxxïii,  6\  Cellar.  Not.  orbis  ant.  I,  28^; 

Voyage  littér,  1. 1.  p.  i8é;  SlRMOND  in  SiDON  Ep.  i.  9 ,  cp.  9; 
Bouche,  Chorogr.  de  Provence,  2a i  ;  Saxy,  Pontifi  Arelat.  1161 
Marmora  Taurinensia,  t.  I,  a^j  j  DUMONTi  5jj. 

(a)  Suprà,  p.  44., 

(3)  Suprà,  p.  90. 

(4)  Gruxer,  dçlxiii,  7. 


ÇJÎAPITRE    XCVIII. 

A' 

f  RECILIO   .    M    .   F  i 

î  T  .  POMPEIAN    O  I 

I  N   Q    .    DECVRlIS  ï 
I        .  _,        I 

I   VÏERAR    .    FL  .  PoiTlF.  S 

|ni  JI^  arelatenses  I 

I    CIPES    .    OPTIME    .    DE  | 
RITO      .     PATRON  O.  1 

I  i 

l   TA  TVAE.HONOR3   I 

I  9 


62^ 


vs 


IMPENDIVAI 


F  .   REMISIT. 


î 


•««««-M1A4  «.iK«s«'<4M.«AA  t.>«v«iu  u«nH.trii«  f»ir«<u»T<w-«r 


i^^r  décret  des  dicttrions  (i),  i  ......  Preciliusr  T.  Pompeianus^,     ' 

-fils  de  M.,...  libéral  envers  Us  cinq  décuries  {2),  flamine  (3), 
ffon^ife  (4)  de  la  colonie  (5);.  les  habitans  du  municipe  (6)  d'Arles  à 
tin  patron  qui  a  très-bien  mérité  d'eux  (7)  ;  satisfait  de  l'honneur  de  la^ 
statue  (8) ,  //  a  dispensé  de  la  d^ense  (9). 


(i)  decreto  Dfcurionum  pRECILIO, 

(2)  quiNQtte  DEÇU  RUS  mUNERARio.  On  appeioit  munerarius 
celui  qui  donnoit  à  ses  frais  ie  spectacle  des  gladiateurs. 

(3)  FLamint. 

(4)  PONTIFici. 

(5)  coloNIa. 

(6)  municiPES. 

(7)  OPTIME  DE  se  meRTTa, 

(8)  sTATUAE  HONORE  contentUS. 

(9)  Publicum  REMISIT.  Voyez  supra,  p,  90. 

Rr  3 


/    / 


6^0  CHAPITRE    XCVIII. 

J'avois  vu  dans  les  gravures  âa  P.  Domont  celle 
(Tun  sarcophage  très-intéressant  par  les  objets  qui 
y  sont  représentés  et  par  l'inscription  qu'il  porte. 
Ce  monument  étoît  autrefois  dans  l'église  que  les 
Minimes  avoient  décorée  du  nom  de  musée,  et  il  ne 
s'y  trouvoit  plus  ;  enfin ,  après  bien  des  recherches , 
nous  le  découvrîmes  dans  l'atelier  d'un  fabricant  de 
salpêtre,  qui  l'avoit  enlevé  pour  en  faire  un  bachat  (  i  )  • 

Ce  sarcophage  a  été  d'abord  trouvé  dans  les 
Champs-Elysées  ;  l'inscription  nous  apprend  qu'il 
a  reçu  la  dépouille  d'une  femme  qui  se  consacroit 
entièrement  à  Texercice  des  arts ,  et  qui  étoit  dis- 
tinguée par  ses  vertus  domestiques  :  la  musique  étoit 
son  principal  amusement  ;  et  cette  noble  passion 
est  indiquée  par  les  *instrumens  divers  qui  sont  les 
seuls  ornemens  de  son  tombeau  (pi,  LXIX,fg.i^J. 
Quatre  pilastres  doriques  séparent  la  face  en  trois 
champs  :  ceux  des  extrémités  sont  égaux  entre  eux  ; 
celui  du  milieu  e$t  d'une  plus  grande  dimension: 
sur  le  champ  k  gauche  on  voit  une  syrinx  ou  flûte 
à  sept  tuyaux,  suspendue  au  mur  dans  son  étui, 
une  hydraule  ou  orgue  d'eau ,  un  pin  et  un  bélier  ; 
à  gauche ,  une  lyre  avec  le  plectrum  pour  la  tou- 
cher, un  instrument  qui  a  la  forme  de  celui  que 


(i  )  Le  beau  sarcophage  du  musée  de  Marieifle ,  suprà, ,  p.  1 5  r, 
pi.  LVI,  fig.  3,  3,  4,  a  également  été  retrouvé  chez  un  salpêtricr 
d'Arles. 


CHAJPITRB  XCVm.  631 

nous  appelons  un  tuorbe  (  i  )  ^  et  le  livre  de  musique 
suspendu  à  un  clou  comme  la  sjrrînx.  Peut-être  la 
chambre  de  Tyrrania  étoît-elle  ornée  de  ces  instru- 
mens,  dont  «Ile  se  plaîsoit  à  jouer.  On  Toit  souvent 
ainsi  aujourd'hui,  dans  le  salon  d'une  femme,  les 
castagnettes  et  lê  tambour  de  basque  suspendus  au- 
dessus  du  piano ,  près  duquel  sont  les  flûtes  dont  on 
l'accompagne,  la  harpe  et  la  lyre  qu'elle  fidt  résonner 
sous  ses  doigts  délicats. 

L^inscription  (2)  est  écrite  en  lettres  belles  et  régu- 
lières ;  elle  est  ainsi  conçue  : 

JVLIAE.   tVC  FIUAE.  TYRRANIAE. 

VIXIT.  ANN.  XX.  M.  VIII. 

QVAE.  MORIBVS.  PARITER.  ET. 

DISCIPLINA.  CETERIS.  FEMINIS. 

EXEMPLO.  FVIT*  AVTARCIVS^ 
NVRUI.   LAVRENTIVS.  VCXORI. 


^i)  On  voit»  parmi  les  peinèures  du  tombeaujc-des  roU 
i*Egfpte,  des  personnages  qui  jouent  d'une  espèce  de  tuorbe  abso- 
lument semblable  à  celui-ci.  Denon  ,  Atlas,  pi.  135  ,  n.^  3. 
Feu  M.  Townley  m*a  envoyé  la  gravure  d'un  bas-rdief  de  sa 
collection ,  sur  lequel  on  voit  les  noces  de  Cupidon  et  de  Psyché^ 
Près  du  lit  nuptial  est  un  génie  ailé  qui  joue  d'un  instrument 
qui  a  quelque  rapport  avec  le  nôtre  dans  sa  foriiae  générale , 
quoique  les  détails  soient  un  peu  dtfFérem. 
.  (2)  VqyeiMAFFU,  ^ôi^APOi^t  Histoin de  Protffttce,!,  Ji; 
DUMONT»  n.®  95,  J'ai  composé»  sur  ce  curieux  sarcophage» 
une  dissertation*  qui  tst  imprimée  dans  mon  ouvrage  intitula 
Monumens  antiques  inédits ,  tome  II  »  p.  »  9 1^ 

Rr  4' 


6^2  CHAPITRE    XCVlXï. 

C'est-à-dire  : 

A  Juîia  Tyrrunia  (i),  fille  de  Lucius,  laquelle  a  vécu.  vinpMS 
et  huit  mcis  ;  ellt  a  été,  par  ses  mœurs  et  son  éducation  {i),un  exmpk 
pour  les  autres  femmes.  Autarcius  à  sa  belle-filU ,  Lmrentius  à  m 
épouse  (3). 

Le  bélier  placé  auprès  d'un  pin  peut  avoir  rap- 
port à  un  criobolium,  sacrifice  qui  faisoit  souvent 
partie  du  taurobolium ,  dont  j*ai  déjà  eu  plus  d'une  fois 
occasion  de  faire  mention  (4)  :  quelquefois  on  n'offioit 

(  I  )  Le  nom  de  Tyrrania  n'est  pas  insolite  dans  ies  insaip- 
tions  :  on  le  trouve  sur  une  pierre  tumuiaire  de  la  villa  Bor- 

Îrhcse ,  publiée  dans  le  recueil  de  Grutcr  (  Tyrrania.  Anicia  Ju' 
iana,  CCCLIII,  2  ). 

(2)  Tyrrania  n'est  pas  la  seule  femme  qui  ait  mérite  quon 
rappelât ,  dans  son  inscription  tumuiaire ,  les  succès  qu'elle  avoit 
obtenus  dans  les  arts.  Plusieurs  épigrammes  de  V Anthologie  sont 
consacrées  à  des  femmes  qui  ont  cultivé  la  poésie  (  WoLFi 
Poetria  )  ;  et  nous  avons  encore  des  monumens  élevés  à  des 
femmes  qui  ont  cultivé  les  arts,  et  principalement  la  musique: 
i*épitaphe  d'Eucharis ,  affranchie  de  Licinia  ,  dit  que  quoiqu'elle 
n'eût  encore  que  quatorze  ans,  elle  étoit  versée  dans  tous  les 
arts  {  Gruter,  DCLVI);  celle  de  Clitalia,  épouse  d'HernàoSt 
qu'elle  étoit  savante  dans  toute  espèce  de  musique  (  WlNCKEI>- 
MANN,  Aîonum.  rned.  n.®  187,  p.  244;  Amaduzzi,  Utmt 
sopra  le  tragédie  di  Euripide  y  p.  24;  MoRCELLT,//f  stylo  iiiscrijt> 
p.  III  ;  M  ARINF ,  Iscriijoni  Alhan.  p.  78  ).  Une  autre  inscription 
parle  de  Flavia  Dionysia ,  qu'aucune  femme  n'aurdt  surpassée 
dans  les  arts ,  si  la  mort  ne  l'eût  moissonnée  dans  son  printemps 
(  Gruter,  dcliv,  3  ). 

(3)  UCXORI.  Nous  avons  déjà  vu  plusieurs  exemples  de  cet» 
orthographe.   Voyei  tomel.*^*^,  pages  Jo&  et  509. 

(4J  Supra,  p,  49  j  et  tome  II,  p.  88. 


CHAPITRE    XCVIII.  d}3 

que  le  crîololium.  On  sait  que  ces  sacrifices  étoient 
une  expiation  ou  baptême  de  sang  ;  les  femmes 
étoient  admises  comme  les  hommes  à  cette  régéné- 
ration :  ainsi  le  bélier  peut  signifier  que  Tyrrania  a 
été  ïavée  de  ses  fautes  par  un  criobolium  ,  et  qu'elle 
est  reçue  dans  le  séjour  de  la  félicité.  Cette  conjec- 
ture est  d'autant  plus  probable ,  que  la  ville  d'Arles 
honoroit  Cybèle ,  ainsi  que  le  prouve  le  bel  autel 
dont  j'ai  donné  la  description  (i).  D'après  le  signe 
de  ce  sacrifice,  on  peut  présumer  qu^  ce  monu- 
ment est  postérieur  aux  Antonins ,  puisque  le  règne 
de  ces  princes  est  l'époque  des  plus  anciens  monu- 
mens  relatifs  à  ces  sacrifices  expiatoires. 

Ce  monument  a  été  placé  à  la  maison  commune  : 
je  me  réjouis  d'avoir  arraché  à  l'action  corrosive  du 
muriate  de  potasse-Ie  tombeau  de  cette  jeune  femme, 
qui  mérita  les  regrets  si  nobles  et  si  touchans  de 
son  beau-père  et  de  son  époux.  C'eût  été  une  pro- 
fanation de  laisser  cette  intéressant  monument ,  cou-* 
sacré  au  talent  et  aux  vertus ,  dans  un  atelier  aussi 
sale  et  aussi  dégoûtant. 

(i)  Suprà,  p.  505, 


r 


6ii 


CHAPITRE  XCIX. 

Musée  à  former. — £tablis$cii|ens  divers.  —  Société,  — 
Divers  animaux  ;  oiseaux  ;  insectes.  —  Plantes.  — 
La  tarente.  —  Fontaine  de  la  Crau.  —  Climat.  — 
Maladies.  —  Costome.  —  Académie.  —  Hommes 
célèbres.  —  Troubadours  et  poètes  arlésiens.  —  Jèan- 
Baptiste  Coye.  —  Baléchou. 

Je  crois  avoir  décrit  et  expliqué  tous  les  monu- 
piens  qui  existent  encore  à  Arles.  On  a  pu  voir  qu'au- 
cune ville  n'en  renferme  un  aussi  gran<I  nombre ,  et 
qu'ils  ont  tous  un  intérêt  loc;({  ;  cependant  ils  sont 
dispersés,  toujours  exposés  à  une  destruction  pro- 
chaine :  il  seroit  intéressant  de  les  réunir  et  d'en  for- 
mer un  riche  musée.  Le  préfet  du  département  , 
M.  Thibaudeau ,  a  demandé  que  l'église  de  Sainte- 
Anne  fut  consacrée  à  un  si  utile  emploi  :  il  ne  pou- 
voit  choisir  un  local  plus  favorable  ;  et  l'on  a  lieu 
d'espérer  que  ce  projet  recevra  bientôt  son  entière 
exécution. 

L'établissement  de  ce  musée  donneroit  aux  habi- 
tans  une  plus  haute  idée  des  monumens  qu'ils  pos- 
sèdent :  ils  y  paroissent  déjà  très -attachés;  et  s'ils 
ne  font  pas  tout  ce  qui  est  nécessaire  pour  les  con- 
server, ce  n'est  pas  le  zèle  qui  leur  manque.  Les 
étrangers  auroient  alors  un  motif  pour  aller  visiter 


CHAPITRE   XCIX.  df^J 

Af  iei.  Personne  ne  seroit  pins  capable  que  M.  Pierre 
Véran  de  diriger  ce  musée  ;  personne  n'a  mieux 
approfondi  l'histoire  de  son  pays,  et  ne  s'est  mon- 
tré pius  ardent  pour  tout  ce  qui  tient  à  sa  prospérité 
et  à  sa  gloire. 

Arles  a  peu  d'établissemens  ;  il  y  a  très*peu  d'in- 
dustrie :  les  faabitans  vivent ,  en  général ,  du  pro- 
duit de  leurs  récoltes.  Le  territoire  est  si  riche  en 
blé  y  qu'on  l'appelle  /e  grenier  de  la  Provence  et  du 
Languedoc. 

La  société  étoit  dîspe«ée  pendant  le  temps  que 
f  ai  passé  dans  cette  ville*  Chaque  propriétaire  étoit 
dans  sa  maison  de  campagne,  occupé  à  suivre  les 
travaux  de  la  moisson  :  mais,  pendant  l'hiver,  on 
reçoit  les  étrangers  avec  beaucoup  d'aménité  et  de 
politesse.  Quoique  la  plupart  des  personnes  riches 
aient  quitté  la  ville  depuis  la  révolution,  il  y  a 
encore  quelques  bonnes  maisons. 

Si  l'amateur  des  antiquités  peut  trouver  à  passer 
plusieurs  jours  sans  ennui  dans  la  ville  d'Arles ,  celui 
qui  aime  l'histoire  naturelle  peut  aussi  satisfaire  ses 
goûts ,  et  rencontrer  de  nombreux  sufets  d'observa- 
tion :  il  remplira  son  herbier  de  plantes  rares  et 
curieuses ,  qui  croissent  dans  les  marais ,  les  canaux 
et  les  sables  limoneux  (i).  La  vallisneria  en  spirale, 
^ ^ 

(i)  M.  Artaud^  habife  botaniste,  s'occupe  constamment  cle 
k  Flore  d'Arles  :  on  ddt  desirar  que  cet  ouvrage  soit  publté. 


•«^■^waM 


6^6  CHAPITRE   XCîXi 

dont  la  fructification  est  si  singulière ,  y  est  assez 
abondante,  ainsi  que  Valdrovanda  vésiculeuse  (i). 

he  fenouil  (2)  y  vient  spontanément.  Les  Proven- 
çaux le  font  entrer  dans  la  préparation  qu'ils  donnent 
aux  olives  ;  ils  s'en  servent  aussi  pour  relever  le  goût 
des  alimens.  Il  est  étonnant  qu'on  ne  recueille  pas 
les  fleurs  du  carthame  ( }} ,  qui  est  très-commun  dans 
tous  les  environs  de  la  ville.  On  y  cultive  en  grande 
abondance  une  espèce  de  vesce  noire  appelée  bût- 
jalade^  qui  donne  un  excellent  fourrage. 

L'ornithologue  peut  encore  joindre  à  sa  collec- 
tion plusieurs  oiseaux  palmipèdes  ou  de  rivage ,  qui 
viennent  des  régions  du  nord  peupler  pendant 
iTiiver  les  marais  qui  bordent  cette  ville  (4)»  Les 


(i  )  On  y  trouve  encore  la  Fran KEN I A  pulvérulente,  h  giroflée 
d^-Mahon  [  Chei^ANTHUS  maritimus] ,  ic  kali,  le  umarix 
de  France  [  Ta  Aï AP IX  gallica  ]  ;  le  S  T ATI  CE  limonium; 
à  feuiiles  d'auricule;  VAtriplEX  haUme,  ranserinc  lignensc, 
CheNOPODIUAî  fruncosum,  ClSTUS  ledon,  AJonspeliensis ,  i*- 
canus,  albidus  (  fa  massugne  ) ,  le  genévrier  de  Phénicic  (cade) 
[JUNIPERUS  phœnicea] ,  PhYLLIREA  latifoUa,  dngustifolid  (le 
dafadel),  Artemisia  mâridma,  ROSMARINUS  ufcinalism' 
culœfolia.  Sic,  &c. 

(2)  Anethum  faniculum. 

(3)  CarthAMUS  tinctorius, 

(4)  On  y  remarque,  parmi  les  PALMIPÈDES,  fc  cygne ,  Al^^^ 
cycttus;  le  cormoran  [  cormarin] ,  Pelecanus  carbo;  ic  p^^'^^ 
[ganto],  Pélican  US  onocrotalus  (les  paysans  Tappeilent  aussi 
grand  gdfisier)\  plusieurs  oies  et  canards  sauvages,  tels  qu«  * 
macreuse  [  franche  ],  Art^^i  nigru;  la  sarcelle  [sarcclo],  ^^^ 


.  ^^     ^  - 


CHAPITRE    XCrX.  6}^ 

passereaux  sont  aussi  très-nombreux,  principalement 
les  étourneaux  ;  on  les  prend  à  la  pipée ,  ou  dans 
des  cabanes  de  ramée  que  l'on  construit  auprès 
des  mas ,  et  où  Ton  attire  ces  oiseaux  par  des 
appeaux  (i). 

On  trouve  fréquemment  à  Marseille,  à  Arles  , 
sur-tout  quand  le  temps  a  été  serein  pendant  plu- 
sieurs fours ,  et  que  le  soleil  est  dans  sa  plus  grande 
force  y  une  jolie  espèce  de  lézard  qui  est  originaire 


^utrcedula;  le  garot,  A  NAS  fera;  le  harle  [gabian],  M  ERG  US 
merganser:  parmi  les  OISEAUX  DE  RIVAGE,  fe  fïaman  [bcccarut], 
Ph(ENICOPTERUS  ruber !  \t  héron  [heroun],  ARDEA  cinertd; 
ie  butor  [  brutier  ] ,  ArvJBA  stellaris;  la  grue  [  gruo  ] ,  ArdbA 
grus;  ia  cigogne  [dgougno] ,  Ardea  alba;  la  béc^se,  SCOLOPAX 
Tusticola;  le  courlis,  ScOLOPAX  arcuata;  le  chevalier  aux  pieds 
rouges  [galejoun] ,  ScOLOPAX  totanus  ;  la  poufe  d'eau  [poulou 
d*aîguou  ] ,  F  U  Lie  A  chloropus;  le  vanneau  [  vaneou  ] ,  TringA 
t^anellus;  le  pluvier  doré,  Charadrius  plupialis ;  le  râle  de 
genêt  [  roufle] ,  Rallus  crex  :  parmi  les  GAXLINACÉS ,  ('ou- 
tarde [cstardou],  Otis  tarda;   la  canepetière,  OtJS  tetrax, 

(i)L*oriol  [l'auriou],  ORIOLUS  flavus;  le  gros-bec  [peco  au- 
\bio  ]  t  LOXIA  cocothràustes  ;  l'ortolan  [  ortoufan  ] ,  EmbéRIZA^ 
hortolanus;  le  bruant,  EaîBERIZA  citrineile;  le  proyer  [  tridou  ], 
EaîBERIZA  miliaria;  la  lavandière  [  Ipu  vaccerouno],  MoTA^ 
CILLA  alba;  la  bergeronnette  [guignoqiioue] ,  AJOTACILLAfiava; 
le  bec-figue  [  lo  becofiguo],  MOTACILLA  ficedula  ;  une  autre 
appelée  louenou  rousset,  MoTACILLApharticurus;  la  grosse  alouette 
[calandra] ,  Alauda  calendra;  l\louctte  huppée  [  la  bedonide ] , 
AlAUDA  crîstata;  le  tarin  [  lou  lucre],  FrINGILLA  spinus;  fa 
mésange  bleue  [  lou  guing  ],  PARUS  cœruleus;  la  mésange  du 
Languedoc  [lou  pcndulino  ^t  PARUS  Narbonensis. 


^38  CHAPITRE    XCtX. 

de  l'Afrique;  c'est  le  gech  de  Mauritanie  (i)  :  on 
l'appelle  tarente  par  toute  la  Provence.  Ce  reptile 
a  sûrement  été  importé  d'Afrique ,  mais  on  ne  sau- 
roit  dire  à  quelle  épo<^e.  On  croit  qu'ii  est  venimeax, 
et  on  l'écrase  impitoyablement  ;  mais  c'est  un  pré** 
jugé  :  cet  animal  n'eçt  pas  nuisible  ;  i!  est  même  udlC) 
parce  qu'il  détruit  les  insectes.  Les  plus  importuns 
de  tous  en  Provence ,  et  sur- tout  k  Arles,  à  Fréjus, 
et  dans  tous  {^s  lieux  qui  ont  des  marais  dans  leur 
voisinage,  sont  les  cousins  (2)  ;  il  y  en  a  des  my- 
riades qui  obscurcissent  lair  et  font  un  bourdonne- 
ment insupportable.  Les  gens  du  peuple,  les  paysans, 
sont  obligés ,  ppur  {es  éloigner ,  de  brûler  de  ia 
paille  mouillée  ;  les  enveloppes  de  gaze  dont  on 
entoure  les  !its,  et  même  quelquefois  les  tabte, 
sont  les  seuls  moyens  de  %^en  garantir. 

J'ai  déjà  parié  des  crustacées  et  des  arachnides 
de  la  Provence  (3).  Ou  y  peut  encore  enrichir  ses 
collections  d'un  grand  nombre  d'insectes  singuliers» 
Nous  n'avions  pu  voir  à  Aix  celle  qui  a  été  rassen^* 
|>Iée  par  M.  de  Fons-Colombe  ;  mais  M,  Amoreux 
nous  contra  celle  qu'il  est  occupé  à  former  depuis 
plusieurs  années  qu'il  réside  à  Arles  :  elle  est 
arrangée  avec  un  très-grand  soin ,  et  prouve  ^ 
celui  qui  l'a  faite  a  des  connoissances  profondes 


(  1  )  Gecko  maurit4tticus*  «-^  Lacerta  gfcÀo, 

{%)  II,  57a  et  57}.  (3)  II,454' 


CHAPITRE    XCÏX.  6^^ 

dans  Pentomologie  (  t  ) .  Les  marais  sont  peuplés  d'un 
si  grand  nombre  de  sangsues ,  que  ies  bœufs  et  les 


(i)  Voici  ia  liste  des  principaux  insectes  qui  se  trouvent  en 
Provence,  et,  en  générai,  sur  toute  ia  côte  de  la  Méditerranée  : 

ClCINDELAJUxuosa,  Fab.  —  stnuata ,  SCHNEIDER.  —  nemo- 
ralis,  Olivier,  Cymindis  humeralis,  Lat.  Odacantha  mtla- 
nura,  Fab.  Drypta  emarginata,  Latb.  QuPMIUAf  olens,  Latr» 
'^fasciolatum ,  L  ATR.  LiCIN  USagricola ,  Latr. — sUphoides ,  L  ATR. 
HarPALUS  megacephalus ,  J^ATR.  —  bucephalus ,  LatR.  ScA- 
RITES  gigas ,  Fab. —  sabulosùs ,  OlW ,  NebRIA  arenaria,  Latr, 
BUPRESTIS  taniata,  Fab.  —  cariosa,  Fab.  —  tenehrionis ,  Fab. 
'^  tenehricosa,  Fab.  — luguhis,  Fab.  —  octo-guttata ,  Fab.  — 
rutilanst  Fab.  —  acuminata,  Fab.  —  marginata,  Fab.  —  deçà- 
stigma,  TAB.'^mariana,  FaB,  — cyanicomis,  Fab. —  nîtidula, 
Fab.  —  umbellatarum ,  FaB.  —  discoidea,  Fab.  '^^cichorii,  OlIV. 
'' — novem-maculata,  Fab.  —  sînuata ,  FaB.  ElATER  bîguttatus,  FaB. 
—  himacuîatus ,  Fab.  —  atomarius,  Fab.  Cebrio  gigas,  FaB. 
LAMPYRîS  italica,  Fab.  DasITES  bipustulatus ,  Latr.  —  quà- 
drimaculatus f  Latr,  Tillus  unîfasciatus ,  Latr.  EnopliUM 
serratuorne ,  Latr.  —  trichodes  S-punctatus  ,  Fab.  Necrobia 

ruficoUis,  Latr.  Astrapaios  ulmi,  Graventiorst.  Hister 

major  t  Fab.  —  inaqualis,  Fab.  —  semipunaatus,  Fab.  De  RAt  ES- 
TES viginti'guttatus  ,  FaB.  —  trifasciatus.,  Fab.  NlTIDULA 
facuosa,  Fab.  Ateuchus  sacer,  Fab.  —  variolosus,  Fab.  — 
scmipunctatus ,  Fab.  —  laticonis,YA^.  supr.  — piîuïarius ,Vkb,  Co^ 
PRIS  emargittotus,  Fab.  —  hispanus,  Fab.  ONITIS  ciinias,¥AB, 

— pophus,  Fab.  —  ^«(?«, Fab.  —  5/;^/»;r,  Fab.  Onthophagus 

(Lmyntas ,  L  ATR.  Aphodi  US  fasciatus ,  F  A  B.  —  scrutator ,  F  AB.  — 
elevatus,  FaB.  Geotrupes  dispar,  LatR.    OryCTES  silenus , 

Latr.  Se  arable  us  punaatus ,  Latr.  —  j/ww,  Fab,  Melo- 

LONTHA  occideHtalîs ,  FaB.  —  /^/»/,  Fab.  — fusca^  Oliv.  — '- 
jloricola,  Fab.  —  anncoïa,  Fab.  ^^fructîcoU,  Fab.  — squamdsa^ 
Oliv. — farinosa,  Latr.  CeTONIA  metattica ,  VA^.—fastuosd, 
FAe.  TRICHIUS  succinctHs,  FaP.  ERQDIUS gib^s^  FaB.  P/vW^^ 


6io  CHAPITRE    XCIX. 

chevaux ,  qui  sont  affoiblis  par  quelque  ftialadie  , 
tombent  quelquefois  ,  et  périssent  épubés  par  les 
saignées  que  ces  vers  leur  ont  faites. 


LIA  bipunctata,  Fab.  —  muricata,  Fab.  AkiS  spinosa ,  Fab,  — 
aaiminata,  Fab.  — refiexa,  Fab.* — collaris,  Fab.  Tentyria 
glabra,  Latr.  TAGENIAfiliformîs,  LatR.  ScAURUS  striatus, 

fAB.BjLAPSgigas,  Fab.  Pedinus  gibbus,  Latr.  Opatrum 

serîceum,  Oliv.  PHALERlArufa,  Latr.  — chrysomelina ,  Latr. 
MelANDJYA  variegata,  Latr.  HelOPS  chaîybaus,  RoSSI.M?- 
TOXUS  Rodriguii,  Latr.  AJylabriS  iO'punctata,T AB. —  yaria- 
biiis,  Oliv. —  cichorii,  Fab.  VaR.  CerOCOMA  viridis,  Fab. 

—  Schreiberi,  Fab.  Meloe  îavigata ,  Fab.  —  tuccla,  Rossi.  — 
punctata,  Fab.  CaNTHARIS  erythrocqthala ,  Ouv  ^  Si  TARIS  api- 
calis,  Latr.  ZoNITIS  sfx-maculata ,  Latr.  —  prausta,  Fab. 
^-testacea ,  Fab. — friva,  Ross.  Rhipiphorus  subdlpterus ,  Fab. 

—  labellatus,  Fab.  —  bimaculatus,  Fab.  Œdemera  ruficolUs, 
Latr.  —  rostrata^hAT^,  RhINOMACFR  umbellatarum ,  Latr. 

—  curculiondides ,  Fab.  B  RU  CHUS  bimaculatus ,  Oliv.  —  vaHus, 
OuV.'^nebuîasus,  OUV.  BrACHYCERUS  barbants,  Ouv, — 
muricatus,  Oliv.  LlXUS  anguinus,  Latr.  —  mucronatus,  Latr. 
— ferrugatus,  Latr.  —  pUcatus,  Latr.  —  ophthalmicus ,  Latr. 

—  cynara, Latvl.  CURC U^LIO  maxillosus,  Fab  — varioïosus,  Fab. 

—  lusitanicus ,  Fab.  —  tamarisci ,  Oliv.  PhloioTRIBUS  olea, 

Latr.  Bostrychvs  îuctuosus,  Ouv.  —  2'mncuLitus,  Latr.  — 

muricatus,  Ouv.  —  é-dentatus ,  Oliv,    Trogossita  cœrulea, 

Oliv.  Spondylis  buprestoides ,  Fab.  Prionus  faber,  Fab.  — 
obscurus,  Oliv.  Lamia  trisùs,  Fab.  — frnesta ,  Fab. — pedesiris, 
Fab.  —  gallo-propinciaiis ,  Latr,  —  atomaria,  FaB.  SaPERDA 
suturalisp  Fab.  — punctata,  Fab.  —  bimaculata,  Oliv.  — aythro^ 
cephala,  Fab.  —  rufipes,  Oliv.  —  violacea,  Fab.  CerAAîbYX 
balteatus,  Fab.  Callidium  serictum,  Oliv.  — ruficolle,  OliV. 
"—fugax,  Oliv,  — abdominale ,  Oliv.  —  ruficorrie ,  Oliv.  — 
arvicoia,  Oliv. —  gibbosum,  Oliv. — florale,  Oliv.  —  trifascia^, 

tum, Oliv. —  unifa^ciatum ,  Ouv.  STENOCORUsstrepens, Oliv^ 

A  un 


CHAPltftÈ   XCIX.  6^1 

A  un  quart  de  lîme  de  la  vHIe ,  à  f  «itréé  de  la 
.Crau  y  il  y  a  une  fdittanie  mfaiéràle  appelée  in 
fontaine  tta  ia  Crau.  On  y  arrive  en  suivant  un 

^— — ■— — i^M^— ^^^^^Mli  I    II   I  ^i— ^— i^Mfcj  'II.  *  [  ^1  II  I   ni     I   I     ■    I     I   ^mmmmm^m^m^^mmmmmi^^^^m^Km 

Leptura  unipuntùitn,  Fab.  ^=^mirulenta,  Fab.  -^  ^maeulata, 
Fab.  CLYTHBAjfx-ma6ulatijk\  FA3^  -^  .€Ur/^axjniii ,  Fab.— jcr- 
panctatat  Ouv*. —  scopoUna,  Fab,  r-^forftlkt  Oliy*  — pamceit- 
shesis,FAB.  ÇrypTOÇSPHALVS  sHnttduhms ,Y kî^ — variegotui, 
Fab.  —  hisfriç,  JaM,  —  msfliatusj  OlIV.  —  signatus,  Olïy.  — 
crof^s,  J^ATR. 'T^  CffSYSOM£LA  rugosa,  ^KB.-^Banhsii^  FaB» 
-=-  ^mericûnAy  F^  ^^fatùfus ,  FAB.  .-^fUriosa,  Fab.  -^-t  a/ri, 
Oliv.  CAiERVcÂinm^nakt,  Iatr.  Hmp)Atést(icea\  Fab.  Fc>i?- 
FI  eu  1^4  glgam^»  Fab.  -«-  ^/ir/îw,  -Fab.  iPhasma  fiossU,  ¥am. 

MaNTIS  pmffetfflUiy  Fab*  T^QiejOMrigi,  UNN^EI.  —  spaihm^fHt, 
liossu-^  pt^at^,  Fab-  TRtiyACTJUH/S .  M.  Dufoar  vient  de 
découvrir,  dansis^  ProyçQce»  liiM  nom'etlc  espèce  de  ce  genre 
singulier^  et  q«i,  pmrobfôit  partiouiier  à  TAIJrrque.  LocvsTA 
tuberculata,  Kq^.  ^^.serrdtA ,  Fab.  Titc/XALIS  nasutus ,  Fab.  -^ 
grylloidts^  LatR.  J^R\J>lVM  UntoU ,  OLtv,  —  macuktum , 
OlïV.  -r  nigro^scinsuM  ;  Latr.  ^tï/TEt.LBRA  semi-pimctuta , 
Latr,  — fiav(hUn$aUii  Latr.  -.*-  nigefia.,  Latr.  —  pnedemontana , 
Latr.  Cors  us  paràdoxus,  LÀtR.  -r^  spinigeft,  Fab.  •—  vtnatw, 
Fab.  Ci  CAD  a  omhOLlV.  -^pkàaa^  OUV.  -^pkm ,  1.ATR.  — 
./i^/z ,  OjLiV.  -i-  «rgftttam^  Oia\,  -*  fygmoAt  Ouy.Fvâgora 
,dnerea,  OUY , -^  flavesctns  ,p\4V ,  TET^IGOMETRAsuturàHs, 

Latr.  —  hmuitrha ,  Latr.  Cqccus  faH<afkœ,  Ouv^^r-  d^^, 
Oliv.  —  characiàs,  Bosc.  Panorpa  tipularia,  Fab.  Ascala- 
JPHUS  italkui»  Fab.  —  â^<^^i«^  FAis.  -^  "maiutàtui,  Oliv. 
MyRMEUSQN  HbelMoides ,  ¥Aïi,-^pisaàtim,  UOSS» — fiavicorne, 
,Ross.  — formicalynx,  var  î  Fab.  KerMES  îucifiigum,  hATR^^fia- 
vicolU,  Latr.  Cimbex  Ima,  ¥a%.  HrLO'ro^tA  fiircma,  Lath. 
X^EPH us comitressùs.LATB..  EvANiA  apptHdlgasur ,  Fab.  Dipl0^ 
JLEPÎS  quercus  ioja.,  LaT*.  LeVCOSPTS  gifiis,  Fab.  CYNIPS 
xkrysis,  Latr.  Diaprja  comuta^  Latr.  PaRNOPES  €arkea, 

Latr.  Chrysis  calens,  Fab.  Formica  iadam,  Fab.  ^^sffufd^ 
Tome  UL  S  s 


6^2  CHAPITRE    XCIX. 

grand  aqueduc  de  pierre  /composé  de  quatre-vingt- 
quatorze  arcades  de  quinze  à  seize  pieds  de  hauteur. 
Une  dérivation  du  canal  de  Craponne,  qui  passe 
près  de  là  y  arrose  les  prairies ,  les  jardins  y  les  belles 

^— iT— *— —  I  II  — — — ^M^— — — — .^M» 1^— n^— — ^M 

iaris ,  Oli V.  AfUTiLLA  mattra ,  FÀB.  —  hungarica,  Fab.  —  italica, 
Fab.  —  pedemontana,  Fab.  —  calva,  Latr.  —  erythroctphala , 
LatR.  AIyfmoSA  mdanffcephala  ,  LaTR.  TIPHIA  tripunctata^ 
RO£S.  Eus  cylindrka,  Fab. —  interrupta,  FAB.  S  COU  A  insuhrica, 
Ross.—  d-macuLûà,  Y K&.^-'fiavifirons ,  Fab.  POMmLUS amm- 
latus,  Fab,  *^  ^^punetatus ,  LATft«  PEPSfS  fàyipennis ,  Fab.  — 
-argentata,  Y kh:  FeloPAIUS  spikifex ,  Latr.  LarRA  ickntttmonh 
fmniSf  Fab,  BemuEX  oHvacea,  Fab.  Stiius  bifasciatus^  LAtr. 
•»—  ruficornis,  Latr,  VeSpa  ocuhtd,  Fab*  *—  tripMoata,  Fab, 

—  coangustata ,  Koss,  CELaNITES  apifiiinis,  Latk.  Prosopis 
éMtpts,  Fab.  Hyueus  spirëlh,Ykh.ANDRENApUipes,  Fab» 

CeNTRIS  niduïans,  Fab. — comuta,  FaB,  ÂNTHlDlVMfiamû- 
num, TfiB,'-~pariegàtum, Fab.  AnthophùRA nmènsis,  IlligeA. 
Papiuo  jofius,  .¥A9.  —  triangulum,  Fab*  —  f^/flf>,  Fab.  — 
luciUa^  Fab.  —  cptara,  Fab.  —  ciVc€,  Fab.  —  fdia,  f  ab.  — 
iUsMEtf ,  Fab^  —  ttmla,'FAB,  —  tudofd ,  Fab.  —  salome,  Fab.  — 
lachesis,  HÛBNER.  —  psyché,  HuB.  *^adipu$,  Fab.  —  ^onu-, 
£SPER.  —  mekagtr ,  Fab. — amymas,  Fab.  —  mppus,  HÛBNER. 

—  hypsipyle ,  Fab.  —  rumma ,  FaB.  —  hdemta ,  HÛBNER»  —  ^/tf , 
Fab.  —  eupàeno  ;  Fas.  —  hélice,  HÛBNER.  —  phiccmme,  HÛBN. 
— cIeopatra,TAB.  Hesperia  lavtuhera,  Tab.^Sphinx  vtspertiUa» 
Fab.  -^  nerii,  Fab.  -i-  Hneata,  Fab.—  ^if//V,  Fab.  —  celerio, 
Fab.  ZYCAlNAfausta,  Fab.  .-^Uta  ( sphinx Ima,  HÛB.y/ —  <:£V»- 
jii/Ar ,  Fab.  —  lavandiUa,  Fab.  Boaîbyx  maculosa  ,HiJBfiEK.  — 
^/zr/o//z  ^HÛB. — pudica,hl\JB, — puichra,  WJBJNocTUAmaura, 
Fab.  —  spectrum,  HiJB.'  BombyuVS  crïïciams,.YAB.  Stra- 
TIOJfiYS  fiavissima,  Fab.  PangoNJA  macuiata,  Fab.  VoLU- 
CELLA  fiorea,  Fab.  Cytherea  oiscura  ,¥ab.  Anthrax yaria, 
fAB.-^titanus,  Fab.  AsiLC/s6arèarus;TA£.  O^C/NIS  p/û«,Fa1. 

AcJioCERA  gibkà,  Fa^;  &c.  âcc.  &c. 


CHAPITRE    XCIX.  tî43 

allées  où  les  habicins  d'Arles  aiment  à  se  réunir, 
feît  tourner  plusieurs  moulins ,  et  roule  ensuite 
tes  eaux  dans  cet  aqueduc,  où  elles  produisent  urj 
4oux  murmure,  Eji  i()8o,  les  consuls  avoient  fait 
creuserom  fcassin  pour  cette  fontaine ,  et  y  avoient 
fait  mettre  une  inscription ,  qui  a  été  détruite.  On 
prétend  que  les  vertus  de  ses  eaux  oiit  été  décpu- 
vertes  par  une  pauvre  bergère  qui  étoit  hydropîque 
depuis  trois  ans  ^  et  à  qui.  elles  avoient  rendu  la 
santé.  Chacun  voulut  essayer  leur  effet ,  et  ^Ues 
acquirent  une  grande  célébrité,  pour  la  guérison  de 
J'byxiropisie  et  de  la  gravelle  (  j  )  ;  mais  elles  n'ont 
phis  aujourd'hui  la  même  réputation. 

La  situation  de  la,  ville  sur  le  bord  d'un  grand 
fleuve ,  entouré  d»  prairies  productives ,  de  cam- 
pagnes couvertes  des  dons  de  Gérés ,  est  sans  doute 
agréable;  cependant,  si  l'on  considère  le  nombre  de 
canaux,  de  marais,  qu'elle  a  dans  son  voisinage,  on, 
croit  voir  une  ville  de  la  Zélande.  L'abaissement  du 
sol,  qui  est  tout  au  plus  élevé  de  sept  pieds  au- 
dessus  de  la  mer, les  attérissemens  des  rives,  la  proxi- 
mité de  l'embouchure  du  fleuve ,  celle  de  la  mer 
doivent  concourir  à  y  entretenir  l'insalubrité,  quoique 


(i)  Eaux  minérales ,  découvertes  auprès  d'Arles  ;  Mercure,  \6^6  , 
novembre^  page  123.   -^  La  fontaine  minérale  d'Arles,  nouvelle- 
ment découverte  ;  par  J.  S.  D.  E.  p.  [Joseph  SEGUIN,  docteur  ea 
.drcMt];  Arïes,    1681,  in-4.^  DarlUC,  Histoire' naturelle  de  la 
Provence ,  \,  277. 


<?44  CHAPITRE    XCIX. 

le  climat  soit  (TaiUeujrs  assez  doux  ;  car  le  froid  ii^f 
descend  guère  qu'k  )  degrés ,  et  la  chaleur  tie  s^élève 
qu'à  24degrés  dû  tlienhomètre.de  Réaumur  (  i  )  :  kmA 
la  fièyre  doubler  tierce  y  règniB-t--eIIe  une  partie  de 
Tannée  ;  et ,  dans  les  chaleurs  de  l'été ,  elle  dégénère 
en  fièvre  putride  très-dangereuse  (2). 

En  1720  et  1721 ,  la  peste  a  exercé  ses  ravagea 
dans  la  ville  d'Arles  (3)  ;  elle  enleva  neuf  inHIe  per- 
iionnes.  Ses  magistrat»  ont  montré  le  plus  géné- 
reux dévouement  ;  et  son  respectable  évêque,  M.  de 
Janson ,  en  donna  i'exempfe. 

Depuis  un  temps  très-reèulé ,  AHe^  communique 
avec  l'île  de  Camargue  par  un  pont  de  bkteaux.  H 


■^ 


(i)  D^uis  fe  commencement  de  |uîn  )usqu*au  15  sq>terai>re» 
Je  thermomètre  ^  à  deux  heures  après  nàdï ,  se  soutient  de  20  à 
24  degrés»  et  quelquefois  plus;  dans  les  hivers  très -froids,  fe 
thermomètre  descend  jusqu'à  7,  ^,  9  et  10  degrés  :  c^est  adors 
que  les  oliviers  pét-îssent. 

(1)  Les  aâections  c^tarrales,  avec  teintei  plus  souvent  biiieiises 
qu*inflammatoires ,  et  ies  fièvres  intermittentes  »  quelquefois  même 
rémittentes ,  sotit  les  maladies  dominantes  à  Ariès  ;  mais  cettes-* 
ci  sont  peu  nombreuses  et  constamment  bénignes  dans  le  prin- 
temps. 

(3)  Relation  ûhrêgét  de  et  qui  sUst  passé  en  la  ville  d*Àrles  en  /Vv- 
vence  pendant  la  contagion  de  ijii;  par  une  dame  de  la  même 
ville;  Mercure,  1722 ,  février,  pages  Sx  et  74.  —  État  de  la  vilh 
d* Arles  et  de  son  terroir,  par  rapport  à  la  contagion,  depuis  le  26  no* 
vembre  s  y 20 ,  jusqu'au  20  mars  1^21,  in-4.**  -J-  Relatif  véitaâh 
de  ce  qui  s'est  passé  de  remarquable  dans  la  ville  d* Arles  en  Frovenct, 
durant  le  fléau  de  la  peste  de  tyio;  par  un  citoycii^  témotii  ocu- 
laire [  Fr,  P£ILHE  ]  ;  Aries  ^  1724,  in-4.* 


y  en  i^ijY'oît  un  d^uis  ie  iv.*  sîècje  j^  et  saps  (ioutç 
ÏWgrtempi  av^it  ;  A^sone  ef  3?  Paulia  eo  fonf: 
p^mipfi,  (.e^  d^bâçle^  et  )e&  (|4bpr(^f^Ti#n^  dii  flwv9 
ont  ^i^y^nt  foicé  à  ie  recooftruire.  Q'çsf  au>si  q^i'il 
a  itjé  OTiporté  en  1 8ia j  par  une  crue  du  Rhône  ; 
il  a  été  Keb^tî  ^  ^  S^o  j  :  il  s^ouvre  api  milieu  poun'  , 
donner  passage  aux  t^rtapes  qui  46scendent  pu  re^ 
montent  I^  Rhône.  A  l'extrémité  d^  pont  est  le 
^MhQ^f g  de  TrinquçtaîHe.  Ce  faubourg  i>'a  rien  qui 
piérite  de  fixer  la  curiosité  ;  mais  sa  situaition  est 
riante  et  agréable.  On  voit  au  nqr^ ,  sur  fe  rivage , 
un  ancien  cimetière  des  Romains  ^  dont  h$  eaux  du 
fleuve  couvrent  une  grande  paf t^e  (  i  }* 

On  espère  que  le  second  pont  qui  doit  être 
jeté  isur  la  branche  du  fleuve  qu'on,  appelle  h  petit 
Rhône,'  entre  Trinquetaîile  et  Fpurques ,  pour  la. 
communication  des  départemens  du  Gard   et  des 
Bouches-du-Rhône ,  sera  bientôt  achevé. 

Si  l'on  considère  l'insalubrité  du  p^ys ,  on  doit 
s'étonner  de  la  beauté  des  femmes ,  qui  a ,  de  tout 

(i)  C'est  sans  doute  de  ce  cîmetièrc  et  de  celui  àes  Champs- 
Elysées,  que  i'Arioste  a  voulu  parler,  lorsqu'il  dit,  à  Toccasion 
4es  combats  livrés  aux  Sarrasins  : 

Délia  gran  muldtudine  ch*  accis», 
Fù  d'ogni  parte  in  questa  uftima  gaerra.. 
Se  ne  vede  ancor  segno  in  quella  terra 
Che  presso  ad  Arli,  o?c  il  Aodano  stagna, 
Picna  di  sepoltiire  è  la  campagna. 

Orlatiiio  furioso  f  cant.  XXXIX. 

S  S  3 


AU^ki^^MiÉM^HflHS^^rii^Ma 


6^6  CHAPITRE    XCIX. 

temps,  été  célèbre;  leur  teint  est  cTune'blancIieur 
éblouissante  ;  leurs  traits  sont  agréables  et  réguliers , 
leurs  cheveux  dun  noir  d'ébène  ;  ieur  sourire  est 
gracieux  ;  leur  regard  est  enchanteur ,  et  une  viva- 
cité piquante  anime  leur  visage.  Nulle  part  on  ne 
parle  mieux  la  langue  provençale  ;  et  elle  est ,  dans 
leur  bouche ,  d'une  douceur  infinie  :  les  termes 
qu'elles  emploient,  sont  aussi  séducteurs  que  leur 
expression  est  caressante  ;  les  charmans  diminutifs 
dont  elles  se  servent,  n'ont  d'analogie  que  dans  les 
langues  italienne  et  castillane. 

Autrefois  les  femmes  portoient  le  drolet  :  c'étoît 
une  petite  robe  très -courte,  partagée  en  quatre 
bandes,  qui  descendoient  juscju'au  mollet;  et  elles  se 
coîfFoîent  d'un  petit  chapeau  noir ,  bordé  en  rubans 
de  soie  ou  en  velours  (pLLII,Jîg.  ^,  ^et  j  J.  Ce 
costume  gracieux  a  été  abandonné  ;  il  n'y  a  plus 
que  quelques  vieilles  femmes  qui  s'en  parent  le 
dimanche  :  pourquoi  cet  abandon!  il  alloit  si  bien 
aux  jeunes  !  On  en  voit  aujourd'hui  des  imita- 
tions sur  nos  théâtres,  lorsque  l'on  joue  Aline  reine 
de  Golconde ,  le  Sourd,  Al»  Deschalumeaux ,  enfin 
toutes  les  pièces  dont  l'auteur  a  placé  la  scène  en 
Provence.  Ce  costume  régnoît  sur  toutes  les  rives 
du  Rhône  depuis  Arles  jusqu'à  Avignon.  Aujourd'hui 
les  femmes  d'Avignon,  de  Beaucàîre,  d'Arles  et  de 
Tarascon,  sont  vêtues ,  comme  dans  tout  le  reste  de 
la  France,  d'une  espèce  de  corset;  la  jupe  descend 


CHAPITRE  XCIX.  ^7 

jusqu'au  mollet  :  mus  ie  tout  est  mis  avec  plus  da 
grâce  et  de  goût;  elles  aiment  sur-tout  à  être  élé- 
gamment chaussées  avec  des  bas  de  soie  blancs  et 
des  souliers. sans  talons,  couverts  de  larges  boucles 
d'^igent.  Les  femmes  de  Beaucaire ,  de  Tarascon 
et  d'Arles,  se  distinguent  par  le  mouchoir  de  mous- 
seline ou  de  soie,  bariolé  de  vert  et  de  jaune,  dont 
elles  entourent  leurs  tètes  ;  leurs  coiffes  sont  garnies 
de  dentelles.  Elles  aiment  beaucoup  les  bijoux  ;  leurs 
bras  sont  entourés  de  bracelets ,  composés  de  fils 
d'or  pins  ou  moins  gros ,  et  auxquels  pend  un  orne- 
ment appelé  maltaise,  parce  que  c'est  une  espèce 
de  niédaillon  en  forme  de  croix  de  Malte;  et  une 
énorme  croix  de  même  forme  leur  couvre  presque 
toute  la  poitrine  :  les  plus  riches  portent  des  croix 
à  sept  diamans. 

Lorsque  je  décris  les  costumes  d'une  ville  ou 
d'une  province ,  je  n'entends  parler  que  des  gens 
qui  vivent  habituellement  dans  ie  pays,  et  dans  un 
état  un  peu  au-<Iessus  de  l'indigence  :  on  les  cher- 
cheroit  inutilement  chez'  les  gens  riches ,  chez  ceux 
qui  tiennent  un  rang  dans  la  société;  car  la  plupart 
ont  voyagé  à  Paris ,  ou  du  moins  dans  d'autres  ville» 
du  premier  ordre,  et  ils  en  ont  pris  le  ton  et  les 
mœurs  :  il  semble  que  ce  soit  une  honte  d'être 
vêtu  à  la  mode  de  son  pays,  La  manie  d'imiter  les 
costumes  parisiens  est  si  générale ,  que ,  sans  les 
paysans  y  les  ouvriers  et  les  petits  marchands,  onii& 

s  s  4 


d4*^  ÇHAPITI^fi  XCîXé 

trouveToit  aucune  tr^ce  des  costumes  de  cliaque 
puys  ;  çt  çncore  ceux-ci  ctœrcheiu^U  à  s'eri  Soigner 
autant  qu^Is  le  peiuvent,  pans  les  d^p^f^çraens  que 
j'aî  p^i;courus,  j^  n'ai  i;rpuYé  quei  les  pay^ia^ines  de 
iVlàçqn  e\  les  Béarnais  qui  aient  gzfàéf  leur  andenn[e 
manj^|:e  ^  se  yètir. 

Louis  XIV  avoit  éx;sih!^\  ^  Arles,  çq  166^^  une 
i^^^mie  rayali ,  cpmpofé^  d'ahpr^  4^  MÎngt  gen- 
ti^l^m^es,  et  successivement  d^  trefit^ ,  puis  de 
qijL^ra^te.  Le  duc  de  Sai^>Aigi>dn  ç|  le  Qi^rquis  de 
Dangeau  ont  été  ses  prefniers  protecteurs.  Un  pareil 
établissen^ent  parent  d'abord  singulier ,  pu'ce  qu^ 
le  Si^ voir  et  ie  talent  n'oçtpas  be^i^,  de  preuves  de 
noblesse  ;  mais  il  ^i^t  connpître  l'esprit  d§  cette  ins- 
titutipn  :  la  noblesse  étojt  alors  npii^reuse  dans 
Arles  ;  elle  y  donnoit  le  torf,  elle  élpit  l'Orne  de 
tput  ;  enfin  elle  ei^erçoit  l'iofluence  que  donnent 
i^écessairement  les  richesses.  N'étoit-ce  pas  un  act9 
politique,  que  de  touruer  Tatienrion  de  cette  classe, 
privilégiée  vers  les  sciences  et  les  lettres ,  en  excitant 
sop  amour-propre  î  N'étoit-ce  pas  un  moyen  de  les 
fiûre  fleurir ,  que  d'obliger  les  nobles  açadémidens 
\  leur  consacrer  quelques  heures  de  leur  temps  et 
quelques  portions  de  leur  revenu  î  La  guerre  de  la 
succession  fit  sortir  d'Arles  la  plupart  des  nobles  ; 
les  asswiblées  dç  l'académie  devinrent  moins  nom- 
breuses, et  cessèrent  enfin  entièrement.  Peu  de 
temp&.î\près  son  institution ,  les  autres  états  ne  furent 


CHAPITRE    XCIX.  6^9 

point  exclus  ;  elle,  pouvoit  s'adjoindre  quelques  asso-. 
ciés  étrangers  )  pour  lesquels  on  n'exigeoit  d'autre 
titre  que  le  mérite  :  la  différence  du  sexe  n'étoit  pas 
même  un  motif  d'exclusion  ;  madame  Deshoulières  (  i  ) 
et  sa  filfe  en  ont  été  membres. 

Arles  a  donné  la  naissance  à  beaucoup  d'hommes 
célèbres.  Outre  ceux  dont  j'ai  déjà  eu  occasion  de 
faire  mention  (2^ ,  je  citerai  principalement  le  phi- 
losophe Favorinus,  dont  parle  Aulu-Gelle;  Jean^ 
Antoine  Barras  de  la  Penne  ,  qui  étoit  à -{a -fois 
constructeur ,  pilote  et  général  de  galères  ;  ïe 
P.  Maure ,  qui  prêcha  devant  la  cour  de  Louis  XIV 
avec  un  grand  succès;  Grille,  fondateur  de  l'aca- 
démie ;  Hugues,  auteur  de  plusieurs  ouvrages  sur  la 
musique  ;  Vautier,  médecin  ;  Pierre  de  Quiçuer^n , 
auteur  du  traité  intitulé  VÉl&ge  de  la  Provence; 
Nicoldi,  célèbre  antiquaire  ,  auteur  de  plusieurs 
mémoires  imprimés  dans  le  recueil  de  l'académie 
des  belles-lettres,  dont  il  étoit  membre;  ie  chevalier 
4e  Romieu,  auteur  d'un  ouvrage  sur  les  antiquités 


(i)  Observations  sur  V académie  royale  d* Arles,  établie  en  16^8, 
Voyez  PiGANiOL,  Description  de  la  France ,  t.  V,  p.  102 ,  éditioa 
<ïc  1753. 

{2)  Tels  que  Saxy,  suprà,  ^.  480  etpassim;  Duport,  p.  4^0 
et  passittht    Terrîn,  p.  499»   ^^  P*  F^bre  ,  p.  480;   Sabatieri 
Seguin,  p.  509;  Anibert ,  p.  4^0»  ^ovis ,  p.  4^^  î   Rebattu^ 
?•  499  i  Pfjftrft»  p.  485  ;  La  Lau^lére ,  p.    ^61-,    Pomme  ^ 
p.  Jii. 


650  CHAPITRE    XCIX. 

d*Arles;  Saviritn,  ingénieur  de  la  marine^  dont  oit 
a  plusieurs  écrits  sur  l'histoire  littéraire,  &c. 

Les  Arlésiens  se  sont  aussi  fait  remarquer  parmi 
les  poètes  provençaux  :  Bertrand  Dallarnanon  étoit 
célèbre  à  la  cour  du  comte  Bérenger  ;  Pierre  de 
Châteauneuf  de  Mollégcs  est  placé  par  Raimond  de 
Souliers  au  nombre  des  meilleurs  troubadours  :  il 
a  composé  une  pièce  à  la  gloire  de  Béatrlx,  com- 
tesse de  Provence ,  et  plusieurs  autres  «ivrages  en 
l'honneur  de  Jeanne  de  Porcellets ,  dont  il  étoit  éper- 
dûment  amoureux.  On  cite  encore  le  monge  des  iUs 
d'Or,  dont  il  a  déjà  été  question  (  i  )  ;  Jacques  Afothes, 
dont  les  poésies  faisoient  les  délices  de  son  maître, 
le  comte  Robert  ;  Hugues  Pena ,  dont  la  reine  Béatrix 
faisoît  un  très-^rand  cas  ;  il  a  composé  un  livre  inti- 
tulé les  Enganaires  d* amour  (2)  ;  enfin  Jacques  Dar- 
latan  de  Beaumont,  assez  bon  poète;  et  Pierre  de 
Morand,  qui  a  obtenu  quelque  succès  sur  notre 
scène,  et  dont  on  a  recueilli  les  œuvres  en  trois 
volumes  ;  il  est  plus  connu  cependant  par  se%  étour- 
deries  que  par  son  talent  (3). 

Nous  ♦devons  sur-tout  faire  mention  de  Jean- 
Baptiste  Coye ,  qui  est  mort  en  1768  ;  il  a  composé 

(r)  Suprà,  p.  100. 

(2)  Les  ruses  <Ic  Tamour. 

(3)  li  avoit  fait  jouer  une  pièce  intitulée  V Esprit  du  divorctt 
le  public  trouva  un  peu  outré  le  caractère  d*une  madame  Argant 
gui  faisoit  débiter ,  par  ses  avocats,  des  satires  contre  son  gendre i 


•A. 


CHAPITRE    XCIX.  (Jj  I 

^plusieurs  ouvrages ,  entre  autres  lou  novy  Parât  (  i  ) , 
comédie  en  cinq  actes  ;  lou  Délire  ou  là  Descente  aux 
enfers  (2) ,  une  épitre  a  M,  de  Moran  (  J  )  ^  et  beaucoup 
de  poésies  encore  inédites.  Pour  faire  connoître  le 
genre  de  talent  de  ce  poète,  qui  avoît  réellement 
de  Tesprit  et  de  l'originalité ,  je  citerai  une  de  ses 
pièces.  Coye  avoit  chassé  dans  la  Crau  avec  ses 
amis  ;  ils  arrivèrent ,  excédés  de  faim  et  de  fatigue , 
à  une  masure  où  ib  ne  trouvèrent  rien  à  manger 
qu'un  vieux  coq ,  qu'ils  firent  mettre  à  la  broche ,  et 
à  qui  il  consacra  cette  épitaphe  : 

Eypi  Icissé  icys  os  fou  plus  fougous  d*eygaou  (4) 
Qu*aguc  jamais  pupla  d*Arlc  jusqu'à  Mcssinou(5), 
■    Un  masclè  espefouna  [6) ,  proun  robuste  et  prbun  caou  (7) 
Per  amourti  cinq  ans  lou  fio  dç  vingt  gaiinou  (8}; 

Morand  s'avança  sur  ie  bord  du  théâtre,  et  assura  que  ,  quoique 
le  caractère  ne  fût  pa5  vraisemblable,  il  ctoit  vrai  (  c'étoit  celui 
de  sa  belle-mère  ).  L^  pièce  réussit  :  on  l'annonça  pour  lé  lende- 
main; un  plaisant  cria  :  Avec  le  compliment  de  l'auteur  !  Morand , 
se  croyant  offensé,  jeta  son  chapeau  dans  ie  parterre,  en  disant  : 
Celui  qui  veut  voir  l'auteur ,  peut  lui  rapporter  son  chapeau.  Celui  qui 
le  ramassa,  l'emporta,  en  disant  :  L'auteur  a  perdu  la  tête;  il  n'a 
plus  besoin  dk  chapeau, 

[})  Le  Prétendu  rejeta ,  imprimé  en  1743- 

(2)  1749. 

(3)  Magasin  encyclopédique,  avril  1808,  t.  II,  p.  242. 

(4)  Des  coqs. 

(5)  Messine, 

(6)  Un  mâle  chaponhé. 

(7)  Chaud. 

(8)  Le  feu  de  vingt  poules. 


■^       -  '  — 


6fZ  CHAPITRE    XCrX* 

Kiiroux  s€  sa  vigour  y  avîé  toujou  dura  i 
Msij,  quan  loti  tetn  yagué  passj  la  cre5tou  (i). 
Un  pouiastre  encmî  yé  siegué  préféra  ; 
Tafott  es  ia  tristoii  fm  que  i*âge  nous  aprestotu 
D'aquou  paure  anfmau ,  paysan ,  pioure  iou  sor». 
Et  redoutou  à  toun  tour  une  même  avanturou  : 
Lou  traite  femelan  (2)  ris  de  nosteys  esfor. 
Qu'an  sian  abandouna  de  l'humaine  naturou. 

Les  arts  doivent  à  la  ville  d'Arles  le  célèbre  Nîcih 
tas  Baléchou ,  qui  s'est  sur  -  tout  distingué  p^r  une 
manière  particulière  de  graver  qui  umssoit  ïe,  mo^- 
ieux  à  une  finesse  de  burin  singulière.  Tout  le  monde 
connoit  sa  Sainte  Geneviève  ,  d'après  Vanloo  ;  la 
Tempête,^  h  Calme  et  les  Baigneuses,  d'après  Vernet. 
Son  magnifique  portrait  de  Stanislas ,  rai  de  Pologne, 
fut  la  cause  de  ses  malheurs  :  il  s'étoit  engagé  à 
n'en  tirer  aucune  épreuve  f  et  il  fut  convaincu  d'en 
avoir  gardé  plusieurs;  ce  qui  le  fit  exclure  dei'aca- 
demie  (3). 

II  semble  que  le  goût  des  Arlésiens  pour  !es  arts  les 
porte  plus  particulièrement  vers  la  gravure.  Outre 

^— — ^i.^— M^i»—         !■  Il  .1*1  — —  Il  ■— Kfc—  '  ■ 

(r)  JEn  Tieiilissant  il  perdit  ia  crête.  « 

(2)  La  femme  hautaine. 

(3)  Pour  s'assurer  de  la  fidélité  du  graveur,  î!  fut  convenu 
iju'on  ne  tireroit  aucune  épreuve  avant  la  lettre;  cependant  on 
répandit  qu'il  en  avoit  été  vendu  quelques-unes  :  Baiéch ou  tacha 
de  les  retirer,  et  nia  le  fait.  H  fut  pourtant  exclu  de  Tacadéniie; 
et  quelques  personnes  jugèrent  cet  ^rrêt  trop  sévère.  Cependant 
la  cjuestion  est  aujourd'hui  décidée  ;  le  cabinet  des  gravures  de 
la  Bibliothèque  impériale  possède^  depuis  peu  de  ta3(ips>  une 


»<- 


CHAPITRE    XCIX.  <f  J  J 

Balècïiou,  que  je  viens  de  citer,  efle  peut  encore 
nommer  avec  orgueil  Jean- Louis  Rouit  et,  dont  on 
a  d'excellentes  gravures,  M.  Cléner,  dont  faî  déjà 
fait  mention ,  est  né  à  Arles  ;  et  le  plus  feune  frère 
;  de  M.  Véran ,  qui  étoit  destiné  à  une  profession  bien 
f  dîfféreritè,  s'est  formé  sans  maître  à  l'exercice  dé  cet 
art  :  il  l'exerce  aujourd'hui  avec  quelque  succès  ;  et 
c*est  lui  qui  a  exécuté  plusieurs  planches  de  l'atlas 
que  j'ai  joint  à  cet  ouvrage. 


î 


î 

* 


m  11     ■>■ 


superbe  é^xeii^yp,^vdnt  la  katrt  ^  ^î  antèste  à-la-fok;ec  lé  tâlcmcc 
i*mfidé)ité  de  Jkiéchou  :  elie  a  été,  p^^g^  ^oqq  livres,  li  .)^«n 
a  une  autre  à  Nuremberg;  mais  elie  avoit  été  coupée,  et  on 
l*a  rétablie  en  rejoijgnant  les  morceaiix  :  elle  a  été  pavée 
2400  livres* 


FIN   DU    TOME    III. 


<Î54 


TABLE 


DES 


CHAPITRES   CONTENUS  DANS   CE  VOLUME, 


i^HAPiTRE  LXX.  Départ  de  Nice.  —  ^aint- 
Laurent.  —  Le  Var.  —  L^AnguilIe  est  prise  par 
les  Anglois.  —  Nerusii»  —  Gagnes,  —  Château. 

—  Peintures.  —  Cérémenies  des  fiinérailles.  -» 
La  Colle.  —  Saint -Paul.  —  Vence.  —  Ins- 
criptions.— Taurobole.  —  Sarcophage  chrétien. 

—  Colonnes  données  par  ks  AlassiliL  -^Fon- 
taine. —  Inscription  provençale.  —  Templiers. 

—  Commerce r. 

C^AP.  LXXI.  Route  de  Vence  à  Grasse.  — Mon- 
tagnes. —  Terrasses.  —  Culture.  —  Grasse.  — 
Cours.  —  Parfumerie 20, 

Chap.  LXXII.  Départ  de  Grasse.  —  Mulets.  — 
Oliviers.  —  Marbre ,  albâtre.  —  Faïence.  — 
Draguignan.  —  Feux  de  la  Saint  -  Jean.  — 
Dessins  des  curiosités  du  département. — Biblio- 
thèque publique.  —  Cabinet  d'histoire  naturelle. 

—  Médaille  cufique.  —  Prisons.  — £nfans-trou- 
vés.  ..—  Industrie.  —  Manufactures,  —  Cuhure. 

—  Salernes.  —  Chute  de  Sillans.  —  Grotte  de 
Villecroze 26. 

Chap.  LXXI II.  Départ  de  Draguignan.  — 
Tourtour.  —  Longvay.  —  Culture.  —  Aups.  — 
Troupe  de  comédiens,  —  Urne   d'albâtre,  — ^ 


\ 


TABLE   DES    CHAPITRES.  ^J  J 

Inscriptions.* —  Bâuduea»  —  Fontaine-l'Evêque, 
•»— Le  Verdon.  —  Sainte-Croix.  —  /?«,  Riez. 

—  Colonnes.  —  Panthéon.  —  Bohémiens.  — 
Inscriptions.  —  Taurobole t . . .  •     39. 

Chap.  LXXIV.  Puymoisson.  —  Moustier.  — 
Notre-Dame  de  Beauve^er^  -?-  Le  sire  de  Blaccas. 

—  Senez.  —  Digne.  —  Bains.  —  Dessins  de 
JV1*  Constantin.  —  Villages  des  montagnes 
subalpines  —  Fontenelle.  —  Maligier.  — 
Rocher  iqupé.  , —  Sisteron.  —  Histoire.  ■:— 
Ville.  —  Excursion  à  Saint*Geniez.  —  Inscrip- 
tion de  Dardanus.  —  Plantes.  —  Theopolis» 
-^  Notre-Dame  de  Dromon,  -*-  Houille.  —  Re- 
tour à  Sisteron.  —  Inscriptions  supposées. .....     jy. 

Chap.  LXXV.  Peyruis.  —  Giropé.  —  Mon- 
tagne de  Lure. — Abîme  de  Cruis.  — Aleminu — 
Forcalquier.  —  Ses  comtes.-  —  Simiane.  — 
Rotonde • 78. 

Chap.  LXXVL  Départ  Je  Simiane. — Lavande* 

—  Vulgientes,  —  Apt.  —  Histoire.  —  Pont.  — 
Situation.  ^-  Cathédrale.  — Tombes  chrétiennes. 
^-Inscriptions.  —  Ex-voto  singulier.  —  Vestiges 
d*anciens  édifices.  —  Pont  Julian.  —  Fabrique 
de  faïence.  —  Cabinet  de  M.  de  Sigoïer.  — 
Aérolithe.  —  Détonation  d*une  meule  à  aiguiser. 

—  Industrie.  —  Manosque.  —  Huile.  —  Du- 
rance , 86. 

Chap.  LXXVII.  Dépa^rt  d'Apt.  —  Montagne  du 
Leberon.  —  RjOussiilon.  — -  Histoire  de  Cabes- 
taing.  -r-  Cadenet.  —  Troubadours.  —  Fré- 
déric Barberousse.  —  Boniface  de  Castellanc. — 
Bertrand  de  Carbonel.  —  Elias  de  Barjols.  — . 
Blacas. — Blaçasçet,  — Le  iiioinç  des  ^les  4'Qr.  ? .     96, 


*    ta» 


6^6  TABLE 

Chap.  LXXVIII.  Retour  à  Aix.  —  Grande- 
Peigîère.  —  Tretz.  —  Monument.  —  Dé&ite 
des  Teutons,  —  Montagne  Sainte-Victoire.  — 
Fête  commémorative  de  la  victoire  de  Marins. — 
Rivière  de  l*Arc.  —  Saint^-Maicimin;  —  Église. 
—.Architecture  dans  ht  Provence.  — ^  S.*«  Made- 
leine, en  Provence.  —  Inscriptions  du  chœur.  -;— 
Crypte.  —  Reliques.  —  Sarcophages.  • —  Sainte- 
Baume.  —  Poëme  sur  la  Madeleine.  — *Marbre 
de  Saint-Maximîn.  *—  Toùrves,  — -  Château.  — 
Ciborium.  •-*•  Lâeé.  —  Brignoies.  —  Prunes 107. 

Chap.  LXXIX.  Départ  d'Aix.  —  Marseille.  — 
Fondation»  —  Histoire.  —  Musée.  —  Monumens 
grecs.  — Gnomon. —  Autel  triangulaire  avec  une 
intcription;  —  Autel  rond  avec  uhe  inscription. 
— Tombeau  sur  lequel  on  a  représenté  les  dér-  "^ 
niers  adieux  d'un  guerrier.  —  Tombeau  de  deux 
époux  9  avec  une  inscription.  ■•—Tombeau  de 
Glaucias^  avec  une  inscriprion.  —  Monument  ' 
romains.  —  Sarcophage  de  Flavius  Menlorius.  — 
Combat  de  centaures  et  de  Kons.  —  Sarcophage 
d'un  enfant)  représentant  les  génies  de  Vulcain  qui 
forgent  les  armes  des  fondateurs  de  Rome,  — : 
Sarcophage  de  Julia  Quintina;  triomphe  de  Bac- 
chus  et  d'Ariadne.  —  Sarcophage  de  T.  Annonius  : 
images  du  Sommeil  et  de  la  Mort.  —  Siège  de 
marbre,  —  Masque  tragique.  —  Colonries.  -^ 
Chapiteaux.  — ;  Isis  de  basalte 13;. 

Chap.  LXXX.  Suite  de  la  description  du  musée. 
—  Monumens  chrétiens.  —  Monogramme  du 
Christ.  —  Divers  sarcophages.  — -  Tombeau 
d'Eugénie:  Jésus-Christ  entre  ses  apôtres,  co- 
lombes ^  dauphins,  couronnes,  inscription.   — ^■ 

Tombeau 


.J 


DES    CHAPITRES.  (îjjr 

TQi3d»^Q«de$  compagnons  de  S.  -Maurice  :  légion 
thébéenne,  le  Sauveur  sqr  la  iBpntagQe^  fleuves 
du  p^r^dt^y^i^mier^  difféieps  éyé^^mens  de  ia 
Passion;  PiJate^coAment  il  est  figuté ;  moisson  et 
vendange  allégoriques.'— -Tombeau  dès  compagnes 
de  S.^^  Ubsule  :  miracle  4e  la  multiplication  des 
pains  )  csetÊ  jl^ysli^iief /grappe  miraculeuse.  — 
Tombeau  de>S.  Cassien  :  agneaux  mystiques.  -^ 
Tombeau  .4*EAsft)ie  ;  Jôpas  rçjetç  par  le  monstrcT 
marin,  Moi^e  iJc^pe  le  rocher  avec  sa  baguette^ 
inscription»  .-r-.Tpilibfiau  de  S.  Chrysanthe  et  de 
S.^*  Darie  inid»  serpeitt,  limaçon  rajraciques.  «^ 
Tombeau  de  J!abbe  Isarn  :^ciosse  grecque,  ins-  ' 
cr^tion.  —  Ifiscripliiosi^CAtberine  de  Médicis. .  163. 
GhA£«  LXXXJ.  Descnpiéoii  de  MarseUie. — Quar- 
tier neuf.  r^JU  C^i^ièç^»  -r-  Rues.  —  Théâtre. 

—  Abbaye  jSf^int-Victor.  —  La  ville  vi^e  ;  s^ 
habîcans.  -rr^.La  Ma)or«i — ^tabiisseipent  du  chris- 
tianjsipe  en  Provence.— Ancien  temple  de  Diane. 

—  Pilastres  prétendus  antiques,  -r  Reliques.  — - 
Tableauic.  «^  P^tistere,  par  le  Puget.  —  Sarco- 
phage.—  Crosse. -^Histoire4e  S.Xazare  en  bas- 
relief,  -r—  Mais0n  de  T.  Annius  Milo;  son  buste. 

—  Hôtel -r  de -ville.  —  ÉcUssoii  sculpté  par  le  " 
Pug<^t, -7-.St.atyed.c  PierreLibertat;  son  histoire.  . 
— •  Tableau  de  Serres^  Peste  de  Marseille.  —  ia 
Consîgjne.=^]Ba^-ielief  duPuget.  — ^  Boutiques.  -—  - 
Vaisseiaux.  -t- Tableau  de  Pavid. . . .  s .  .-^. . .  ;  •  119Q. 

Chap^  tXXiXU-  Quarantaine. — Arrivée  des  vais-  - 
.  jeaux  à  Pom.èguc;  —  à  la  Consigne.  —  Purifica- 
tion des  lettfres.-f^xamen  de  la  patente. — Difi^'* 
rence  des  patentes  nette  9  touchée ,  soupçonnée^ 
bmte.— P4«grés  de^usjHcion.—  Quarantaines  du 

Tome  m  T  t 


\ . 


^58  TABLE 

r^zsi:^^  deréquipage^despassagen.— Deser^tiert  • 
du  lazaret. — Capitaine,  iieutenant,  garde-loges, 
inicriptionsy  maladie ,  mort,  sortie* —  Quaran*. 
taines  des  marchandises  susceptibles,  non  suscep--  ^ 
tibles.  — «  Purge ,  grande  et  petite  sereine.  — 
Transport  des  marchandises  au  lazaret. — Porte- 
fittx.  —  Frais.  —  Contagion  déclarée.  ^—  Desiiw    . 
fection.  — *  Établissemens  philanthropiques  de 
Marseille 217. 

Chap.  LXXXIII.  Port  de  ManeîUe.— Quai  Saim-- 
Jean.  —  Place  Saint-Jean.  — -  La  Tomrrette,  — 
Pavé  des  quais. —  C7pi/j  j(;piV^tmz. -— Quai  Saint- 
Nicolas.  —  Fort.  —  Inscription.  *—  Bastide  de 
Louis  XIV.  —  Machine  à  curer  le  port,  -^  Com- 
merce de  Marseille.  ■—  Histoire.  — Vernet.  — 
Robert  et  le  président  de  Montesquieir.  •—  Le 
Bienfait  anonyme.  —  Nicolas  Complan.  —  Le 
chevalier  Paul.  —  Roux  de  Corse.* —  Notre-  • 
Dame  de  la  Qarde.  — :  Promenades.. .  ....-...•  a47* 

Chap.  LXXXIV.  Observatoire  de  la  Marine.  — 
M.  Thulis.  —  M.  Jean-Louis  Ponsv  —  Tempé- 
rature de  Marseille.  —  Mistral.  —  Climat.  —  , 
Instrumens.  —  Navigateurs  marseilloiâ;  P)rthéas, 
Euthymène.  *--  Histoire  littéraire.  —Illustres,  — 
Académie.. ...■•.  266. 

Chap.  LXXXV.  Manufactures.  —  Histoire.  —  - 
État  actuel.  —  Soieries.  —  Pelleteries»  —  Savon->  ' 
neries.  -^  Bi|oux  de  corail.  —  PheHopiastiquei  • 

—  Bonnets  de  laine.  —  Epiceries,  -^  Drogues. 

—  Poissons  marines  et  salés ^..  a8o, 

Chap.  LXXXVI.  BibKothèque.  —  Cabinet  d*hi$- 

toire  naturelle.  —  Collections  particulières ,  ^ 

Jardin  botanique.  —  Environs  de  Marseille.*: —  ^ 


>/i 


DES  CIîAPITRES.     .  6$^ 

ËygaladMf.  ^ —  Tapisserie  singulière.  —  Château 

Borelly.  —  IIçs.. ;•*..•••• •  •  ••  ^97* 

Chap.  LXXXyiI.  Gouvernement  des  anciens 
McM^seilIois.  —  Conseil  de»  six  cents,  Timmques,     . 

—  .Mopurs  çt  usages.  —  Lois  spmptuaires.  -^^ 
Suicide*  —  Zénothémis  —  Les  moeurs  se  cor- 
rompent sous  les  empereurs  romains  et  dans  le 
moyçn  âge,  —  Moeurs  actuelles.  —  Goût  immo- 
déré pour  Je  plaisir.  —  Clubs ^  maisons  de  jeû, 
bals,  courtisanes.  —  Manière  de  vivre,  —  Den- 
rées. —  Usages.  —  Ornemens  des  égUses.  — 
Fêtes.  —  La  Noël  .*•  aubades,  crèches,  cigognes, 
repas,  cajen^au,  caco  fueeh.  —  Veille  des  Rois. 
•—Fête  de  ia  Belle-Étoiie.  — *Jour  des  Rameaux, 
lou  rampaou  de  Vespitaou,  Pois  chiches.  —  Déli- 
vrance d^  captiÊ..  —  Feu  de  la  Saint-Jean.  — 
Vente  de  fleurs.  —  Fêtes  champêtres.  —  S.  An-. 
toine.  —  La  Ramado. — La  mdisson,  la  vendange. 

—  Roumûvûgi,  -<-  Fêles  patronales ^ . .  • . .  ^2r* 

Chap.  LXXXVIU.  Saint-Marcel.  —  Bas- 
reliefs  égyptiens.  —  Culture.  —  L*Huveaune.  — 
Bastides.  —  X^  Renarde,  —  Fête  patronale.  — 
Trin  ,  course»  d'animaux ,  d'hommes  ;  divers 
exercices  ;  le  saut,  les  trois  sauts;  l'orbe  de  fer^  . 

le  palet,  le  ballon,  la  bravade  $  jeux  de  hasard;, 
danses,  la  provençale,  lafàrandoulofiajîioresqoe., 

les  bergères,  le& turques,  les  épéeSé. 347* 

Chap.  LXXXIX.  ubagne.  —  JExcursion  à  Ta- 
rento  ;  est-ce  l'ancien  Tauroentum/  —  Fouilles 
faites  par  M.  Marin.  —  Nouvelles  fowlilles  faites 
par  M.  Thibaudeau.  —  Mosaïques,  -p-  Sarco- 
phages. —  Résultat  de  ces  recherches».  —  Sable 
mouvant.  —  Astragale.  —  Scarabée  sacré.  — 

T  t   2 


^ 


I 


66ù  TABXK 

Les  Lèques»  «^  La  Carfière.  -^  Là  €io^t»  — 

Prud'hommes. I^sl  Biguo,  —  La  Tdxga^.  — 

Pécheurs.  —  Ile- Verte.  Cap  de  fAigle.— Grotte 
At  corail»  —  Comédiens.  — ^  Théâtre  proveii^^ 

—  Vhî  muscat v •  4; 564. 

Chap.  XC.  Départ  de  Marseille.— Icbtlijropètres. 

—  Glanum.  —  Mausolée  —  Iiiscription.  —  Arc. 

—  Divers  monumens.  —  Saint-Remy.  — ^  Ins- 
criptions. —  Culture. 393- 

Chap.  XCI.  Route  dé  Saint-RemjF-  ^  Beaucaire. 
---  Jardins.  —  Origine  de  Beatrca^cu  —  6^i*- 
num ,  Bellum^Qttaàntm,  —  Histoire.  —  Aucassin 
et  Nicolette.  —  Cour  plénière;  -^  ^ngulicres 
profusions.  —  Guerres  ;  religion.  —  Foire.  — 
Boutiques  ;  enseignes.  -—  Pré  de  Siintè-Magde- 
leine;  cabanes;  barques;  chapeUe;  aorivéè,  pla- 
cenlent.  — -  Voleurs  de  grands  chemins ,  filles 
publiques,  jeux,  filoux,  médecins,  cHiAirgiens, 
entcrreaïens,  notaires,  huissiers,  police. — Ou-  * 
verture.  —  Arrivée  des  curieux.  —  Auberges , 
restaurateurs,  cafés,  spectacles,  danses  sur  le  pré. 

—  Durée  de  la  franchise.  —  Départ.  —  Débor- 
dement du  Rhône.  —  Solitude  ordinaire  de  la 

\  ville.  —  Porte  du  Rhône.  —  Château.  —  Voie 

romaine.  —  Notre-Dame  de  Pomier.  •^—  Bas- 
reliefs  gothiques. 4^  ^* 

Chap.  XCII.  Pons  œrarius,  pont  sur  le  Rhône. 

—  Tarascon.  —  Histoire..—  Châtesu.  —  Intérêt 
que  présentent  les  anciens  châteaux.  —  Pas  de 
la  Bergerette*  —  Église  de  S.**  Marthe;  statue 
de  la  sainte.  —  La  Tarasqne.  —  Industrie, 
manu&ctures.  -^  Hommes  célèbres.  —  Poésie 
provençale \ 43^* 


.    ,  DES   CHJiFITKES^  66l 

Ch AP.  XCIH.  Nayigatîon  de^  Tàrascon  à^  Ârlesw 
—  Provai^Iismes  et  Gasc<mii«nes.  —  hsmga& 
provençale;  ~  ProveAcs i^*«  4^8. 

Chap.  XCIV.  Arles.  —  Hlstodr^  ~  Place  do. 
Marché*  -^  Obélisque*  —Place  de  fct  Coi»»  -^ 
Maison  commune.  —  Vestibule.  —  Inscriptions, 
— Escalier.  —  Vénus, Médée,  Mithras.  —  Autel 
de  U  bonne  déessei.  —  Ci>k)nne  pjîllJMrev.  -^ 
Inscriptions .,... .  » . , , . .  *  v.  ^  .* 48o- 

Chap.  XCV.  La  Tour  Roland.  —  Alescamps,  ou 
les  Champs-Elysées.  -^  Tolérance.  —  Chapelle 
de  la  Genouillade.  -^  Les  Porcellets;  leur  cha- 
pelle. —  Inscriptions.  —  Canal  de  la  Durance. 
— Aqueduc. — Église  Saint- Honorât.  —  Inscrip- 
tions. —  Crypte.  —  Sarcophages 5*3* 

Chap.  XCVL  Chapelle  découverte  appelée  le 
Musée.  —  Statues.  —  Bas- reliefs.  —  Sarco- 
phages. —  Inscriptions J5^* 

Chap.  XCVII.  Saint  -  Trophime.  —  Portail.  — 
Sculptures.  —  Nef.  —  Inscription  attribuée  à 
S.  Virgile.  —  Tombeau  de  Geminus 584. 

Chap.  XCVIII.  Archevêché.  —  Tombeau. — Ins- 
criptions.— Restes  du  théâtre.  —  La  Miséricorde. 
— Colonnes  de  brèche  africaine. —  Statues,  torse 
de  Jupiter,  Faune  endormi,  tête  de  Bacchus.  — 
Arènes.  —  Thermes.  —  Forum,  —  Prétoire.  — 
Palais  des  Empereurs.  —  Urne  dç  marbre.  — 
Arc  de  trionqîhei  —  SaintrCéstire,  —  Ccwavent 
des  Dominicains.  —  Monumens  chez  divers  par- 
ticuliers, —  Inscriptions.  —  Amazones.  —  Sarco* 

.     phage  de  Tytranja , .....  • .  -  • 600. 

Chap.  XCIX.  Musée  à  former.  —  Etaibliss^nens 
divers.  —  Société.  —  Divers  animaux;  oiseaux;' 


662,  TABLE  0ES  CffÀPITRES. 

insectes.  —  Plantas*  —  La  tarente.  -i-  Fontaine 
de  la  Craii^ —  Ciimae.  —  NUhrdies.  -^  Costume. 
'—  Académie.  —  Hommes  îaélèbres.  —  Trou- 
badours et  poètes  arlésiens.  «^r-  Jean -Baptiste 
Coye*  — -  Baléchou 634. 


riN  J>£  LA  TABLE  DES   C^ÀPITRSS 
pu  TOME   TRCyiSI£MS;A 


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\ 


IMPRIMA     ' 

Par  les  soins  de  J.  J.  Marcel,  Directeur' général 
de  rimprimeric  impériale.  Membre  de- la  JLégion 
d'Iumnenr* 


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